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SOMMAIRE DU NUMÉRO DU 4 JUILLET :912
Tour du monde. — Le chanoine Mémain. Les suites possibles de la dernière éruption du Taal en janvier
1911. La plus grande profondeur de la mer. Une ile de soufre. Les poussières de Pair. L’ « impérialite »,
nouvel explosif de sûreté. Répétition de l’expérience du pendule de Foucault à Fourvière. L’automobi-
lisme en Amérique. Les écrasés. L'altitude en aéroplane, p. 3.
Les rayons X au service du sport, GRAnENwITz, p. 7. — La toilette et le truquage des fruits, BLAN-
CHON, p. 8. — Le chemin de fer maritime de Key-West, Boxnarré, p. 10. — Le nouveau laboratoire
aérodynamique de M. Eiffel, Fouanienr, p. 13. — La lumière cendrée de la Lune, Nobox, p. 15. —
Les frigorifiques agricoles, SANTOLYNE, p. 17. — Dés spéciaux pour le tirage des loteries, F. T.,
p. 18. — Un point d’histoire de la sismologie : Alexis Perrey, be Monressus DE BALLORE, p. 22. —
Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 24. — Bibliographie, p. 26.
TOUR DU MONDE
NÉCROLOGIE
Le chanoine Mémain. — Nous avons appris
avec un vif regret la mort du chanoine Mémain,
survenue au commencement de juin. Il avait
honoré, à différentes reprises, le Cosmos de sa
collaboration.
Cet excellent prêtre, dont la belle vie sacerdotale
est toute de surnaturel, ne se désintéressait pas
des sciences, auxquelles il consacrait les quelques
loisirs que lui laissaient les œuvres multiples dont
T. LXVII. N° 1432.
il avait pris la charge. On peut citer de lui les
ouvrages suivants :
Il avait publié, en 1879, un opuscule intitulé :
Notice sur l'ancien calendrier hébraïque. Il donna,
en 1886, son beau volume sur la Connaissance
des temps évangéliques; en 1895, son Mémoire
sur l'accession des Orientaux au calendrier gré-
gorien; en 1896, sa Notice sur le calendrier pascal;
en 1898, son Znterprétation de l'Apocalypse et de
Daniel ; en 1901, sa Réforme du calendrier julien
chez les Gréco-Russes; en 1902, la /’rophélie de
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Daniel; en 1907, le Calendrier hébraïque avant
la ruine de Jérusalem; en 1908, Darius le Mede.
Les notes qu'il a données dans le Cosmos se rap-
portent toutes à ses travaux sur les calendriers et
sur le comput, une de ses études favorites, comme
l'indiquent les titres des ouvrages ci-dessus cités.
Homme de tradition, ami d'études sérieuses et
développées, cœur d'apòtre inlassable, M. le cha-
noine Mémain a laissé dans le diocèse de Sens, où
il était aimé, et parmi tous ceux qui l'ont connu,
un souvenir qui ne périra pas.
PHYSIQUE DU GLOBE
Les suites possibles de la dernière éruption
du Taal (Philippines) en janvier 1911. —
L’éruption du Taal de 1911 a été l'occasion de nom-
breuses observalions et d'études très sérieuses.
Nous en donnions récemment un exemple dù aux
travaux du R. P. Saderra Maso (n° 1430, p. 673).
M. Dean Worcester, secrétaire de l'Intérieur aux
Philippines, vient à son tour de donner ses obser-
vations dans le Vational Geographic Mayazine
d'Avril.
Son étude est accompagnée d’une magnifique
collection de photographies, dont quelques-unes
ont été prises non sans quelque risque pour Îles
opérateurs, et qui donnent une idée très vive du
calaclysme. Aujourd'hui encore, il n'est pas sans
danger de s'aventurer dans le voisinage du volcan.
Depuis l’éruption, les eaux du lac Bombon se
sont écoulées dans le cratère, et il en résulte que
l'on peut regarder comme probable que dans un
délai plus ou moins long toute la région de la
province de Batanga subira une transformation
soudaine par suite d’une explosion terrible.
Alors, en Europe et en Amérique, on pourra
encore observer ces ciels rouges qui suivirent l'ex-
płosion du Krakatoa en 1883.
Le Cosmos a donné une note sur léruption du
Taal de la fin de janvier 49414, dans le tome LXIV,
n° 4366, p. 338, 1° avril 1911.
La plus grande profondeur de la mer. —
Le navire allemand Planet, qui fait une campagne
d'explorations océanographiques, aurait, au cours
de son dernier voyage à partir de l’Asie orientale,
dans la direction de l'océan Pacifique, trouvé, à une
distance de quarante lieues marines de la partie
septentrionale de l'ile Mindanao (Philippines), la
plus grande profondeur que l’on ait mesurée jus-
qu'ici, 9780 mètres.
Une 1le de soufre. — On annonce de Sydney
au Mining Journal, à la date du 23 avril, qu’un
Syndicat comprenant des capitaux australiens,
britanniques, canadiens et autres, vient d'acheter
l'ile White, dans la baie de Plenty (Nounvelle-
Zélande), dans le but d'y exploiter des gisements
COSMOS
A JUILLET 1912
de soufre. Celte ile constitue le sommet d’un volcan
éteint émergeant d’une grande profondeur. Elle se
trouve sur l'une des lignes de fracture qui coupent
transversalement l'ile Nord à travers le district
des Lacs Chauds et la zone des pierres ponces.
L'activité volcanique a trouvé un exutoire dans ce
qui est actuellement l'ile White. On y rencontre
un lac fortement minéralisé, alimenté par des
geysers et autres sources chaudes, et qui constitue
le cratère de l'ancien volcan. Les nouveaux pro-
priétaires ont certainement l'intention d'exploiter
sérieusement cette mine qu'on assure, pour la
majeure parlie, ètre composée de soufre pur, beau-
coup plus pur que celui que l’on peut rencontrer
dans n'importe quelle autre partie du monde, et
l'ancien propriétaire assure que l’on estime qu'il v
a là 750 000 tonnes de soufre, c'est-à-dire le plus
important dépot de ce genre qu'il y ait au sud de
l'Equateur. (Écho des Mines.)
MÉTÉOROLOGIE
Les poussières de L'air. — Elles ont les ori-
gines les plus variées. Ainsi, en 4901, il se pro-
duisit, du 8 au 10 mars, de violentes tempètes de
poussières dans le sud de l'Algérie qui, emportées
par les vents, retomtèrent, soit sèches, soit avec la
pluie, d'abord en Algérie et Tunisie, puis le 40 mars
en ftalie et en Sicile, mirent leur teinte sur les
neiges des Alpes orientales dans la nuit du 10 mars;
on les trouva le 11 dans l'Allemagne du Nord, et
leurs dernières traces tombèrent le 42 sur le
Danemark, la Russie et l'Angleterre. Certaines
poussières avaient donc parcouru un trajet de
4000 kilomètres. Les deux météorologistes alle-
mands, Hellmann et Meinardus, ont estimé que
l'Europe a reçu à celte occasion 4 800 000 tonnes
de poussières, dont les deux tiers se déposèrent
au sud des Alpes; si on compte tout ce qui a été
emporté depuis le sud de l'Algérie et qui a pu
tomber, soit sur l'Afrique du Nord, soit sur la
Méditerranée, on arrive à une estimation de
450 millions de tonnes. Le transport de pareilles
masses ne peut-il point avoir un retentissement
sur la position même de l'axe terrestre ? (Scientific
American, À° juin.)
Les poussières du Sahara retombent souvent en
brouillards secs sur l’Atlantique, entre les Canaries
et les iles du Cap Vert, surlout dans les quatre
premiers mois de l’année.
Les « pluies de sang » d'Homère, des Romains
et de notre époque, sont dues à des sables fins ei
colorés qui retombent avec la pluie. Les « pluies
de soufre » sont des chutes de pollen de diverses
plantes.
Signalons les poussières ferrugineuses d'origine
extra-terrestre qui se retrouvent sur la neige des
hauts sommets, sur les champs de glaces des
r mg Rte OU à en
N° 41432
régions polaires, et qui proviennent des météores
<aptés par la Terre (étoiles filantes). Faut-il rap-
peler les éruptions volcaniques qui lancent parfois
jusqu’à 80 kilomètres de hauteur des poussières?
Le brouillard sec de 1783, qui couvrit toute l’Eu-
rope durant trois mois, venait probablement des
volcans d'Islande; l’éruption formidable du Kra-
katoa, en 1883, a envoyé dans l'atmosphère des
poussières qui y demeurèrent en suspension durant
deux ans.
Laissons de côté les fumées industrielles. Mais
les fumées des grands incendies de forèts, de
marais tourbeux ou de villes ont parfois des con-
séquences extraordinaires; exemples : les journées
sombres, noires, jaunes, survenues en Amérique le
49 mai 1780 (incendies de forts du lac Champlain),
de 6 septembre 1881 (incendie des tourbières du
Labrador).
D'après Aitken, l'air, à la surface des océans et
sur les montagnes, contient des centaines de pous-
sières par centimètre cube; mais en certaines
villes industrielles, le chiffre dépasse 3 millions.
L'air d'une chambre, près du plafond, tient en
suspension 5 millions de particules par centimètre
cube. Un fumeur qui envoie les volutes de fumée
dans l'air y répand à chaque bouffée 4 milliards de
particules ultra-microscopiques.
CHIMIE
L’« Impérialite », nouvel explosif de sûreté.
— Le Scientific American du 4“ juin rapporte les
essais effectués avec un nouvel explosif sur l'empla-
tement du nouveau réservoir, près de Valhalla,
N.-Y. L'impérialite, ainsi dénommée du nom de
l'inventeur, le marquis Roberto Imperiali, consiste
essentiellement en un mélange de :
Nitrate d'ammonium..... 80 parties en poids
Nitrate de potassium .... 5 —
Poudre d’aluminium..... 15 —
avec un liant approprié, tel le mélange de mono-
nitrotoluol, glycérine et collodion, avec un peu de
permanganate de potassium.
L'impérialite ne craint aucunement les chocs ni
les hautes températures : chauffée à 480° C., elle
se sublime partiellement sans exploser. En outre,
elle est très bon marché.
Aux essais, on en a fait exploser 45 grammes
dans une cavité forée en un cylindre de plomb et
fermée par un tampon de métal; le volume de la
cavité, qui était originairement de 67 cm, a été
agrandi par l’explosion jusqu’à 780 cm, et 862 cm’
dans un autre essai. Dans les mêmes conditions,
l'acide picrique (mélinite) a seulement produit
une cavité de 620 cm?.
L'explosif a des propriétés brisantes remarquables
et mème excessives, qu’il n’est nullement question
d'employer en artillerie.
COSMOS 5
PHYSIQUE
Répétition de l’expérience du pendule de
Foucault à Fourvière. — Dimanche 46 juin, a
été répétée à Lyon, à l’Observatoire de Fourvière,
la célèbre expérience de Foucault pour montrer,
par le pendule, la rotation de la Terre.
On sait qu’un pendule oscillant librement à la
surface de la Terre se déplace graduellement, en
se transportant vers l'Ouest. En réalité, suivant
la remarque de L. Foucault, le pendule tend à
osciller dans un plan fixe; c'est la Terre qui, en
son mouvement diurne de rotation de l'Ouest vers
l'Est, se déplace graduellement par rapport au
plan d’oscillation du pendule. Au pôle, le plan
d'oscillation du pendule décrirait, par ses positions
successives, le tour entier de l'horizon en un jour
sidéral. A l’équateur, il resterait fixe indéfiniment.
À Paris, il fait un tour entier en 32 heures.
L'expérience de Foucault avait été reprise
en grand apparat en 4902, au Panthéon, par
M. C. Flammarion; c'est le mème pendule qui
servit alors qui a été aussi employé à Fourvière.
Ce pendule est historique. Il a été construit sur
les indications mêmes de Foucault, par son ami
Maumené, ancien rédacteur du Cosmos, ancien
professeur de chimie aux Facultés catholiques de
Lyon, qui le laissa à son élève et ami M. Limb, de
l'Observatoire de Fourvière. Lorsqu’en 1902, on
voulut répéter solennellement l'expérience de
Foucault au Panthéon, le gouvernement ne crut
pas devoir tirer du musée des Arts et Métiers le
pendule qui avait servi cinquante et un ans aupa-
ravant à Foucault. On songea alors à la copie faite
par Maumené, et M. Limb prèta à M. Flammarion
le pendule qu'il avait reçu en héritage et qu'il a
donné généreusement à l’Observatoire. La masse
sphérique, en plomb, est de 22 kilogrammes; le
fil de suspension mesure 27,5 m de longueur, d'où
une période d’oscillation complète (aller et retour)
de 40,5 secondes.
L'expérience, qui a été conduite par M. C. Limb
et M. l'abbé Nanty, a eu lieu dans la tour du ca-
rillon de la basilique de Fourvière. Au voisinage
des positions extrêmes occupées par le pendule,
on avait, comme dans la disposition classique,
disposé de petits tas de sable, que la pointe du
pendule échancrait de 0,75 mm à chaque oscil-
lation.
AUTOMOBILISME
L’automobilisme en Amérique. — Il est
curieux de constater le développement pris par
l'industrie automobile dans les États-Unis d'Amé-
rique. On s'en rend compte en voyant ce quelle
est devenue en peu d'années dans la région de
Détroit. On y compte plus de 100 usines fabri-
quant l’automobile. Dans la seule ville de Détroit, il
6 COSMOS
existe plus de 50 usines fabriquant des automobiles
ou des accessoires pour automobiles. Un grand
nombre de Sociétés nouvelles se sont constituées
ces dernières années ou sont en voie de formation.
Beaucoup de Sociétés ont augmenté leur capital.
On cite, par exemple, le cas d'une Société qui a
débuté en 1904 au capilal de 3 millions de francs,
qui agrandit chaque année ses usines et est établie
aujourd’hui au capital de 50 millions. Avant 1908,
le nombre d'employés et ouvriers au service de ces
Sociétés était de 8 430, pour une production de
48000 voitures d'une valeur de 118 millions de
francs; en 1909, il était de 14 000 ; la production
s'élève à 45 000 voitures évaluées à 270 millions.
On estime que, en 1910, les usines de Détroit ont
livré 120 000 voitures d’une valeur de 650 millions.
Ces usines ont un travail intensif; les neuf dixièmes
travaillent la nuit et quelques-unes même le
& JUILLET 1919
dimanche! La plupurt construisent de nouveaux
ateliers de fabrication pour faire face aux com-
mandes. Les ouvriers mécaniciens y sont fort
recherchés.
Détroit est le centre le plus important de l'indus-
trie automobile et dépasse de beaucoup Michigan,
qu il faut mettre au second rang. On estime qu’en
Amérique il y a actuellement en service 250 000 voi-
tures. Sur les 500000 habitants de la ville de
Détroit, il y en a 100 000 occupés à l'industrie
automobile. Les rues de Détroit sont constamment
parcourues par des chargements de marchandises
et matières premières qui manifestent leur évi-
dente destination.
Une promenade dans la ville montre l'importance
des usines. Voici une liste des principales Sociétés
indiquant la surface de leurs ateliers et le nombre
du personnel employé dans chacune d'elles.
Surface converte par Nombre Production.
les bâtiments. d'emploves.
Usines Packafd is iudisie nant se 8 hectares 5 600 hommes 2 900 voitures par an.
Moteur Chalimers....................... 12 — 1200 — 500 à 1 000 voilures par mais.
Moteurs d'automobiles Cadillac......... 4 — 4000 — 30 000 voitures par an.
Runabout Brush........................ 15 — 960 — 10 000 voitures par an.
Moteur d'automobile Metzger....,...... 1,5 — 750
Moléur-Repals is usées ess 830 — 6 000 voitures par an.
Moteur Forde ns diese ca 2000 — 22 000 voitures par an.
DOI EL Ps sun aus Plusieurs milliers 123 voitures par Jour.
Moteur Hudson: situent 8 — 4 200 — 10 000 voitures par an.
Automobiles Demot..................... i — 300 — 3 000 voitures par an.
Moteur KriIl usines as 4 250 voitures par an.
Wagon automobile Grabowsky.......... 4500 — 3 000 voitures par an.
Moteur Abbol essaia tie eti bi s00 — 4 000 voitures par an.
Moteur Hupp........................... 7 500 voitures par an.
Moteur Paige-Détroit.................... 150
Moteur Anhut............ Rd 400 4 500 voitures par an.
Les immenses usines de la Société Lozier, Buicke,
Van Dyck, Hudson, sont en construction et donne-
ront du travail à plus de 5 000 hommes.
Les quelques chiffres cités montrent avec quelle
ardeur les Américains se jettent dans l'industrie
nouvelle de l’autornobilisme, et font craindre une
concurrence acharnée et prochaine dès que la
clientèle américaine sera saturée. N. LALLIÉ.
_ Les écrasés. — Le Globe signale qu'en 1911,
dans les rues de Londres, il a été tué 410 personnes
et 14254 ont été blessées. Sur ce nombre de décès,
288 ont été causés par des automobiles, alors que
les victimes de ceux-ci n'étaient qu'au nombre de
161 en 1909.
Les autobus et tramways sont responsables de
133 morts et les autres automobiles de 155.
Dans toute la Grande-Bretagne, le nombre des
victimes des automobiles est passé de 672 en 1910
à 873 en 1911.
Cette belle progression ne peut que continuer.
Nous avons le regret de ne pas posséder les élé-
ments nécessaires pour établir semblable statis-
tique pour la France; mais nous ne devons avoir
rien à envier à nos voisins. o
AVIATION
L’altitude en aéroplane. — Pendant le con-
cours d'aviation qui vient de se tenir à Vienne, le
lieutenant aviateur autrichien Blas Ohke, qui pilo-
tait un monoplan Blériot avec passager, s’est élevé
à l'altitude de 4260 mètres. Le précédent record
appartenait à Garros, qui avait atteint 3910 mètres
de hauteur, mais seul à bord.
N° 1432
COSMOS 7
Les rayons X au service du sport.
Les opinions au sujet des effets des exercices
sportifs sur l'organisme, surtout le cœur, sont,
même parmi les spécialistes, des plus divergentes.
Tandis que certains médecins n’admettent qu’un
effet bienfaisant, d’autres prétendent que les exer-
cices un peu violents peuvent produire des affec-
tions fort fâcheuses, surtout des dilatalions du
cœur.
Or, tandis qu'on ne saurait nier l'existence d'un
certain énervement dù à la tension mentale qu'im-
nana De
CRUE ELU TOI |
L'APPAREIL ROTAX POUR LA RADIOSCOPIE DU CŒUR.
pliquent les exercices violents, il semble bien que,
sauf les cas extrêmes, ces appréhensions sont
peu fondées. C'est que l’emploi des rayons X a
permis d’observer le fonctionnement du cœur à des
intervalles très rapprochés, pendant les exercices
sportifs continus. Les récentes courses de six jours
qui ont eu lieu au Palais des Sports, à Berlin, ont
donné une excellente occasion de mettre cette
méthode à l'épreuve de la pratique.
Pendant que les cyclistes parcouraient à toute
vitesse la piste circulaire du vélodrome, les savants,
installés dans un laboratoire provisoire au sous-sol
du bâtiment, étaient occupés à résoudre un pro-
blème depuis si longtemps discuté. Un appareil
radiographique « Rotax » permettait, sous une
tension de 200 000 volts, d'obtenir une radiogra-
phie instantanée (pose, un centième de seconde).
Grâce à un nouveau procédé dù à MM, Strauss et
6 COSMOS
Vogt, la forme du cœur pouvait aussi être repro-
duite sur l’écran fluorescent et dessinée avec ses
dimensions exactes en dix à douze secondes.
En vue des résullats si intéressants et si précieux
qu'on attendait de ces expériences, les concurrents
acceptèrent volontiers de se rendre, après chaque
course, au laboratoire du sous-sol pour y faire
radiographier leur cœur.
& JUILLET 1912
Bien que les détails de ces expériences n'aient
pas encore été publiés, on peut, d'ores et déjà,
affirmer qu'on n'a pas observé d'effet préjudiciable
sur le cœur des sujets. |
D'autre part, cette nouvelle méthode rendra
d'excellents services, avec ou sans le concours du
stéthoscope, pour examiner le cœur des malades.
Dr A. GRADENWITZ.
La toilette et le truquage des fruits.
Lequel de nos lecteurs ne s'est-il point arrèlé
devant la vitrine de nos grands marchands de
comestibles, émerveillé par la splendeur des fruits
qui y étaient exposés? Pareilles productions sont
obtenues grâce aux soins incessants dont les horti-
culteurs savent entourer leurs espaliers, à la taille,
aux pincements savants, aux éclaircissements, aux
engrais et insecticides judicieusement employés.
Nous n'essayerons point de décrire ces pratiques,
il faudrait un véritable traité d'horticulture, qui,
d’ailleurs, ne pourrait suppléer à l’expérience indis-
pensable pour réussir; nous nous bornerons à
donner quelques détails sur la toilette des fruits
et leur truquage.
Indiquons pourtant un procédé assez facile d'ob-
tenir ces poires, ces pommes immenses, véritables
monstruosités qui étonnent toujours le grand
public. Lorsque les fruits commencent à être bien
formés, on en choisit sur une branche un, deux
ou trois au plus et on enlève les autres. Chaque
fruit est introduit dans un bocal en verre blanc,
maintenu à bonne hauteur, soit à l’aide d'un
piquet, soit par une ligature contre une des lattes
de l’espalier. On verse au fond du bocal une petite
quantité d'eau et on bouche l'entrée à l'aide d'un
tampon peu serré de mousse ou de papier. Durant
toute la croissance du fruit, il faut veiller à ce
qu'il reste toujours au fond du bocal une petite
couche d’eau ; lorsqu'elle est épuisée, on y verse à
nouveau une petite quantité. Le fruit, sous l'in-
fluence de la chaleur produite par cette sorte de
mise sous cloche, absorbant leau contenue dans le
bocal, grossit démesurément. Sa saveur laissera
fort à désirer, mais il fait si bien dans une corbeille!
L'aspect extérieur du fruit a une si grande
importance que l’horticulteur est obligé de soigner
son teint avec autant de précautions Jalouses que
la plus coquette des élégantes. Pour ètre digne de
paraitre sur les tables luxueuses, il faut surtout que
le fruit « ait del’œil»,comme on dit au marché, que la
finesse de sa peau, la transparence de sa pulpe le
rapprochent plutôt d'un fruit modelé à la cire que
d'un fruit naturel, mais il faut en mème temps
qu'un coloris frais vienne relever cette blancheur.
Autrefois, les horticulteurs s'évertuaient à ra-
mener durant la belle saison d'étéles feuilles voisines
pour couvrir le plus possible les pommes, jusqu’au
milieu de septembre, puis ils tournaient le fruit
sur lui-même et ramenaient en avant la face supé-
rieure et la soumeltaient à l’effeuillage; le soleil
alors provoque un ravissant incarnat sur le blanc
virginal de l'épiderme du fruit. Mais quels soins
incessants exigeaient chaque pomme et chaque
poire. On a bien simplifié actuellement cette
méthode en pratiquant l'ensachage, qui consiste à
placer le fruit dès qu'il atteint la grosseur d'une
noix dans un petit sac en papier glacé qui le proté-
gera contre la tavelure aux marques désastreuses,
qui le mettra à l'abri des choes, des piqûres de
guëpes, et qui conservera à son épiderme une frai-
cheur absolue. On évite ainsi les fruits roussis par
les coups de soleil de juillet et d’août, et leur épi-
derme reste d'une finesse exceptionnelle; il suffit,
vers la mi-septembre, ou mème une quinzaine de
jours avant la cueillette des fruits, de déchirer le fond
des sacs, puis, quelques jours après, quand l'épi-
derme s'est un peu endurci par le contact direct de
l'air, onle met ànuen déchirant les parties restantes
du sac et l'on exécute cette opération en plusieurs
fois si le temps l'exige, en finissant par découvrir
totalement le fruit. Mais tout ce travail est subor-
donné au temps; celui-ci est-il couvert, il facilitera
l'opération; est-il ensoleillé et les rayons solaires
sont-ils trop vifs, il faut agir avec la plus grande
circonspection, sans trop se presser de mettre le
fruit à jour, autrement l'insolation ne tarderait
pas à frapper le fruit avec une rapidité foudroyante
et à le perdre. Mais si l’horticulteur sait opérer
avec discernement, l'épiderme, jusqu'alors d'un
blanc verdâtre, prendra, soit une nuance rosée déli-
cale, soit une teinte dorée fondante.
Poussant plus loin l'art de tirer parti de cette
sorte de plaque sensible que devient, pour les rayons.
solaires, l'épiderme d'un fruit, les horticulteurs
arrivent à éllustrer les fruits. Ils prennent un
cliché photographique sur pellicule, et, au moment
où ils enlévent le sac de papier, ils collent ce cliché
sur la partie la plus lisse du fruit (4). Grâce à l'ac-
(1) La bave d’escargot est, paraît-il, la meilleure
colle pour fixer la pellicule sur le fruit, car il faut que
le produit employé n'ait pas d'action sur l'épiderme.
CP PP en ee ——
RP nn en a
er
N° 1432
tion de la lumière, on obtient sur les pommes, les
poires, une épreuve positive, la peau du fruit jouant
dans ce cas le rôle de papier sensible. Pour avoir
des fruits aux initiales du consommateur, il suffit
de remplacer la pellicule sensible par une vignette
en papier noir dans laquelle sont découpées (dans
une position renversée) lesdites initiales.
Le fruit dûment coloré ou illustré par le soleil, on
arrive encore à augmenter son brillant en lui don-
nant du poli par de rapides frictions avec un mor-
ceau de laine douce, ou mieux avec un foulard
usagé. Cet astiquage complète la toilette. Il ne
reste plus qu'à présenter le fruit moelleusement
couché sur un lit d'ouate et il fera certainement
bonne figure dans une vitrine luxueuse.
Ceci est loin d'être du truquage, c'est du luxe,
de la coquetterie, du savoir-faire; un simple moyen
de flatter œil du consommateur; le vrai truquage
est bien différent; il comporte une assez grosse
part de tromperie. Nous ne parlerons pas du tru-
quage qui se pratique couramment sur les fruits
desséchés, les pruneaux de Californie, en particu-
lier, et qui consiste à les immerger deux minutes
dans une solution chaude d'alun, de glycérine
et de glucose avec addition de matières colo-
rantes. Quand on retire le fruit de ce bain, on a
un joli pruneau très coloré, très gonflé. Cette petite
opéralion est d'autant plus avantageuse qu'on
vend les pruneaux au poids et que l'augmentation
de ce chef varie de 7 à 140 pour 100.
Nous laisserons de còté ces manipulations abso-
lument frauduleuses pour nous occuper d'un tru-
quage plus innocent qui consiste à modifier le goùt
et le parfum -de certains fruits, à donner un goùt
et un parfum à ceux qui n’en ont pas, et cela sans
changer leur chair, ni leur peau, ni leur aspect.
Certains essais sont entrepris dans ce but, mais
il est évident que les truqueurs conservent précieu-
sement leurs recelles, il ne nous est donc pas pos-
sible de les indiquer; nous nous bornerons à
résumer certaines expériences faites dans ce sens,
celles de M. Tricaud particulièrement, qui indique-
ront la voie à suivre par ceux de nos lecteurs qui
voudraient tenter des essais analogues.
On sait que le fruit ne meurt pas quand il est
cueilli; il continue de vivre, de respirer jusqu'au
jour où il entre en décomposition. La poire d'hiver,
détachée de l'arbre en octobre, est encore vivante
quand on la mange au mois de mars; comme une
plante dont les racines seraient encore en terre,
elle n’a pas cessé dans l'obscurité d'absorber de
l'oxygène et d'exhaler de acide carbonique et à
la lumière d'absorber de l'acide carbonique et de
rejeter de l'oxygène; elle a donc puisé dans Pair
ambiant l'élément indispensable à sa vie. Si l’on
répand dans cet air des parfums subtils, on com-
prend qu'ils n’atteindront pas seulement l’enve-
loppte extérieure du fruit mais qu'ils pénétreront
COSMOS 9
dans son intérieur, absorbés, assimilés comme
l'oxygène et l'acide carbonique; en outre, ce n’est
pas par la respiration seulement que le fruit peut
s'imprégner des essences volatiles, mais comme
tout être vivant il peut aussi les absorber par sa
peau.
Dans la pratique, le problème est plus complexe,
car il est évident que tous les fruits n'absorbent
pas de la même façon le parfum ambiant; le
grain de la chair, l'épaisseur de l'épiderme et son
coloris peuvent jouer un ròle important dans la
plus ou moins grande facilité d'absorption.
Les observations sur ce sujet sont peu nom-
breuses, ou du moins ne sont pas divulguées; la
plus intéressante est celle de M. Tricaud, que nous
reproduisons en entier :
« À l'automne dernier, j'ai cueilli dans mon
jardin quelques variétés de poires que j'ai dispo-
sées sur des rayons dans un très petit local ser-
vant de garde-robe. La pièce, bien close, est
éclairée par une fenċlre sans contrevent qui prend
le jour au Midi; en raison de sa destination, des
boules de naphtaline avaient été laissées dans
cette pièce. Après quelques semaines, un certain
nombre de fruits sont venus à maturité, notam-
ment les Duchesse d'Angouléme et les Beurre-
Bachelier. Le parfum et le gout des Duchesse
n'avaient rien de bien anormal et il aurait fallu
être un fin dégustateur pour distinguer une pointe
d'arome étrange. Les Beurre, au contraire, avaient
un parfum très caractérisé de mielet un goùt ana-
logue qui ne se rencontraient pas seulement dans
les parties voisines de la peau, mais jusqu’au cœur
mème du fruit. Revenant alors aux Duchesse, j'ai
pu constater un goùt identique, mais beaucoup
plus discret, à peine sensible. Les mois suivants,
les Bergamotte, les Suzette de Bavay, les Saint-
Germain d'hiver et les Belle de Noël étaient à
point. Je fus frappé de l'odeur qu’elles exhalaient;
cette fois, on ne pouvait s’y tromper, c'était
l'odeur de la naphtaline. Elles étaient restées plus
longtemps exposées aux vapeurs de naphte et s’en
étaient fortement imprégnées. Je les retirai du
local où elles avaient séjourné; je les frottai et les
mis au grand air. iles conservèrent jusqu'à la fin
le parfum acquis et leur puissance d'exhalaison. Je
remarquai que toutes ces espèces ne s'étaient pas
approprié l'odeur ambiante dans les mèmes pro-
portions et que le goùt des Beryamofte était plus
complètement modifié que celui des Susette.
» Ne croyez pas que mes poires d'hiver fussent
devenues meilleures et plus agréables. Elles rese
tèrent mangeables, voilà tout. Mais quel parfum
et quelle saveur bizarres! Les personnes qui en ont
goùüté n'ont pu les définir, ont été étonnées, ont
cru qu'on leur présentait une espèce nouvelle, ne
se sont pas doutées que cet arome inconnu avait
été contracté et était factice. »
10 COSMOS
Phocas conseillait autrefois, dans le Petit Jardin,
un procédé basé sur les mêmes propriétés d’ab-
sorption des fruits pour donner aux pommes le
goùt de l'ananas : Choisir des reinettes blanches,
très saines et à peau bien lisse, les essuyer avec
un linge fin en évitant de les froisser et les strati-
fier dans des boîtes en sapin avec des fleurs de
sureau, en formant le premier et le dernier lit avec
ces fleurs de sureau, dont on remplit également
les vides existant entre les pommes, qui ne
doivent pas se toucher. La boite remplie, on la
ferme et on colle du papier sur tous les joints
pour que l'air n'y puisse pénétrer. Au bout d'un
mois à peu près, les pommes ont le gout de
4 juizrer 4919
l'ananas et on peut les conserver très longtemps.
Ce sont là de simples faits, des ébauches d’expé-
riences, mais il y aurait intérêt à les poursuivre
plus complèlement. Nous avons, en effet, des
variétés de fruits qui se conservent longtemps,
mais plusieurs de ceux-ci, quoique beaux et juteux,
sont d'une fadeur telle qu’on les dédaigne. Si, en
les laissant séjourner dans des locaux contenant
des produits odorants bien appropriés, on parve-
nait à leur donner le parfum et le goût qui leur
manquent, ce serait une découverte aussi appré-
ciable que la création d'une espèce nouvelle.
H.-L.-ALPHONSE BLANCHON.
Le chemin de fer maritime de Key West.
Les lecteurs du Cosmos ont déjà entendu parler
de la ligne des Keys (1), que les Américains ont
entrepris de construire à travers les quarante-deux
iles qui forment comme un chapelet de récifs entre
la côte sud-orientale de la Floride et le Gibraltar
yankee, sentinelle avancée à plus de 200 kilomètres
en pleine mer, le grand arsenal de Key West.
Ce tour de force, dont nous avons relaté la pre-
mière étape, vient d'être réalisé. Depuis le 22 jan-
vier dernier, celte ligne unique au monde, et dont
les ingénieurs qui l’ont conçue ont bien le droit
d’être fiers, est ouverte au trafic. Sur une série de
ponts, de viaducs et d'ouvrages d'art, s’allongeant
à perte de vue les uns à la suite des autres, Îles
express franchissent maintenant toute l’enfilade
des cayos ou keys, entre lesquels n'avaient jusqu'à
présent passé que les flots impétueux du Gulf
Stream ou les terribles ouragans des tropiques.
C'est en 1883 que M. Henry Flagler, un busi-
nessman dans toute la force du terme, naguère
associé de M. Rockefeller, le roi du pétrole, eut l'idée
de développer les possibilités — comme l'on dit
aux États-Unis — de la Floride, dont il rêvait de
faire une sorte de Riviera américaine. La végétation
luxuriante, le merveilleux climat de ce pays justi-
fiaient, d'ailleurs, ses espérances. Après avoir
fondé différents hôtels le long de la côte atlantique,
à Saint-Augustine notamment, un des coins les
plus pittoresques du littoral, il se lança résolument
dans la construction d'une voie ferrée qui, partant
de Jacksonville, sur la rivière Saint-John, relia
bientôt toutes les plages, Ormond, Titusville, Palm
Beaeh et Miami, qui s'échelonnent du nord au sud
de la péninsule floridienne, en face des iles Bahama.
Miami, appelée là-bas la cité magique, se trouve
à 366 milles de Jacksonville. Pendant huit ans, de
1896 à 1904, elle demeura le terminus extrème de
(1) Voir le Cosmos;t. LVIIT, p. 199, du 22 février 1908.
la Florida East Coast Railway Companv. En peu de
temps, sa population tripla; un chenal fut établi
jusqu’à l'océan pour faciliter le trafic maritime
déjà très important avec les autres ports de la
région; autour de la ville se sont construites de
nombreuses fermes pour l'exploitation agricole
d'un sol particulièrement fertile; et, dans les ma-
gnifiques palaces, orgueil de la Nice nouvelle, près
de 150000 Américains viennent chaque année,
durant la belle saison, respirer la senteur balsa-
mique des palmiers avec l'air vivifiant de la mer.
En 1903, le 48 novembre, fut signée entre les
États-Unis et la République de Panama la fameuse
convention par laquelle le canal de Panama, ses
deux ports d’aboutissement et tout le territoire tra-
versé passaient aux mains des Yankees. Ce jour-là
mème, M. Flagler, alors président du Florida East
Coast Railway, manda son directeur général,
M. Joseph Parrott, et tous deux discutèrent longue-
ment la question de savoir s'il était possible de
pousser plus avant la ligne en exploitation, de
franchir les kilomètres de marécages et de jungles
séparant Miami de Everglade, et finalement de
s'engager sur la crête des récifs, en plein océan,
pour aboutir à Key West. De la conférence, qui se
renouvela d'ailleurs à quelque temps de là, en
janvier 1904, avec le concours, cette fois, de
M. J. Carroll Meredith, un ingénieur des plus qua-
lifiés, sortit cette triple conclusion: 40 que le
chemin de fer à construire présentait des difficultés
énormes d'exécution; 2° qwil était exécutable,
grâce aux progrès de la science et du génie civil
moderne; 3° qu’il y avait un intérêt capital à le
faire, à raison des relations chaque jour plus
étroites avec Cuba, et à raison de l'ouverture
prochaine du canal de Panama.
M. Meredith jeta les premiers plans de cette
entreprise colossale, qui fut commencée en juil-
let 1904, et qu'il n’eut pas la joie de voir achevée,
N° 1432
la mort l’ayant emporté, presque subitement, cinq
ans plus tard. A M. W.-J. Krome, son successeur,
et comme lui un technicien hors de pair, revient
l'honneur d'avoir terminé le premier chemin de fer
LE VIADUC DE LONG KEY : CINQ KILOMÈTRES EN PLEINE MER.
maritime du monde, lequel fut inauguré en jan-
vier 1942 par le président Taft, entouré des repré-
sentants des principales puissances du Nouveau et
de l’Ancien Continent, dont quelques-unes avaient
mème envoyé des navires de guerre dans le port
de Key West pour mieux marquer
l'importance qu’elles attachaient à
cet événement d'ordre international.
La nouvelle ligne, en effet, outre
la hardiesse de sa conception et de
sa réalisation — nous allons, du
reste, y revenir, — en plaçant défi-
nitivement la grande île cubaine
sous la main de l’oncle Sam, et en
la faisant servir comme de trait-
d'union entre le canal de Panama
et la grande République fédérale,
assure la prépondérance de celte
dernière à la fois dans la mer des
Antilles et sur toutes les républiques
qui s’échelonnent du Mexique au
Brésil. C’est le pan-américanisme
rèvé par Monroë, mais mis en œuvre
au seul profit des États-Unis.
Venons-en, à présent, aux difficultés inouies
qu'ont eu à surmonter les ingénieurs pour mener
à bonne fin l'exécution des 205 kilomètres de voies
qui relient aujourd'hui Miami à Key West.
COSMOS 11
De Miami à Homestead, une trentaine de kilo-
mètres, rien de particulier; mais à partir de ce
dernier point, la ligne s'engage à travers une
région de swamps, ou de marécages, plus ou moins
couvertsde broussailles, pour lesquels
il fallut construire des dragueuses
spéciales, à très faible tirant d'eau,
qui creusèrent, jusqu’au rocher sous-
jacent, un double chenal de 9 mètres
de large. C’est sur le roc que furent
établies les fondations de la voie dans
celle région, ainsi, d’ailleurs, que
sur toute la longueur de la ligne,
dont les assises portent directement
sur ce que les géologues appellent le
coral-rock.
28 kilomètres après avoir quitté
Homestead, le Florida East Coast
Railway abandonne le continent pour
pénétrer, au-dessus de la mer, sur le
premier viaduc en acier d’une dizaine
d’arches seulement, qui conduit la
ligne au centre à peu près de Key
Largo, la plus grande des iles flori-
diennes. Elle s’allonge, du Nord-Est
au Sud-Ouest, presque parallèlement
au littoral américain, sur une distance
de 43 kilomètres.
Puis, c’est la succession des récifs
et des îles, constituant la chaine
ininterrompue des keys: Long Island, Windly’s
Island, Upper Matecumbe Key, Indian Key, Lower
Matecumbe Key, Long Key, Grassy Key, Key Vaca,
Knight’s Key, Pigeon Key, Little Duck Key, Bahia
Honda Key, Summerland Key, Big Pine Key, Torch
LE GIGANTESQUE PONT TOURNANT DE MOSER CHANNEL.
Key, Cudjoe Key, Sugar Loaf Key, Rockland Key,
Boca Chica, et finalement Key West, le dernier
chainon, à 90 milles de La Havane.
Reliant chacun de ces ilots, c'est aussi toute une
12 COSMOS
série de ponts, de viaducs, de passerelles, où la
science de l'ingénieur semble avoir épuisé ses for-
mules les plus diverses: piles en maçonnerie,
pylônes métalliques, ponts suspendus, ponts tour-
nants, ponts en bow-string, ponts cantilever,
ponts basculants et maints autres encore.
Après Long Key, commencent les ouvrages d'art
les plus remarquables. Le viaduc de Long Key, lui-
mème, d’un développement de 5 kilomètres, est
considéré comme une merveille de hardiesse. Ici,
la voie, entièrement dégagée à droite et à gauche,
est à 10 mètres au-dessus du niveau des hautes
marées d’équinoxe. Les arches, de 25 mètres d'ou-
verture, sont en granit de Clinton et reposent sur
des massifs de béton armé. Il y a ainsi 480 arches,
qui, dans leur puissante structure, donnent l’appa-
rence d'un aqueduc romain. C'est l’ouvrage le plus
coûteux de toute la ligne maritime des Keys.
Le plus long est, sans contredit, le pont de Knight’s
Key, mettant en communication l'ile ainsi appelée
et sa voisine, Little Duck Key. Il n'a pas moins de
11,5 kilomètres. Sa longueur est telle qu’il a fallu
le couper de plusieurs ponts tournants, notamment
le Moser Channel Bridge, pour ne pas entraver la
navigation assez active en ce point, où la profon-
deur de l’eau atteint 10 mètres. Aussi les fonda-
tions, établies grâce à un système de caissons et de
cofferdams perfectionnés, ont-elles présenté sur
tout ce parcours des difficullés presque insurmon-
tables, compliquées encore qu’elles étaient par la
violence des courants locaux.
Un peu plus loin, voici le pont à claire-voie de
Bahia Honda, encore un tour de force au point de
vue technique. Il n’a que 1600 mètres de long,
mais l'écartement de ses piles — toujours en vue
de faciliter la navigation — et la disposition spé-
ciale adoptée pour la protection du tablier contre
les vagues des grandes marées font, parait-il, lad-
miration des ingénieurs du Nouveau Monde, peu
faciles à étonner, pourtant, dans cet ordre d'idées.
Enlin, franchissant l'ile de Boca Chica, le railway,
après un dernier viaduc de 3 kilomètres, pénètre
à Key West, terminus de la gigantesque voie ferrée
maritime.
Key West — en espagnol Cayo Hueso — fut
fondée en 1820 par les Espagnols. Le grand arsenal
des États-Unis, le Gibraltar américain, dont s’enor-
gueillit l'impérialisme yankee, compte à l'heure
qu'il est près de 25000 âmes. Outre le port de
guerre, on y trouve un port de commerce auquel
l'East Coast Florida Railway donne déjà une acti-
vité considérable. Une grande cale sèche, des docks,
dix bassins de 250 mètres de long sur 60 de large,
des jetées couvertes, des magasins sont parmi les
récentes améliorations apportées aux aménage-
ments maritimes de Key West. Actuellement, les
bassins peuvent recevoir quarante steamers de fort
tonnage, avec un tirant d’eau maximum de12 mètres.
& JUILLET 1919
Détail peu connu : après Tampa, Key West est
la ville du monde qui produit le plus de cigares.
C'est aussi, dans la mer des Antilles et le golfe du
Mexique, le centre de l'industrie des éponges.
Enfin, les pècheries s’y développent depuis peu
d'une façon remarquable, grâce à l’abondance du
poisson et à l'initiative des armateurs.
Le nouveau chemin de fer a mis Key West à
quarante-six heures seulement de Washington. La
capitale fédérale des États-Unis n’est plus, par cette
voie, qu'à 1350 milles de La Havane, capitale de
l'ile cubaine. Des ferry-boats sont en achèvement,
qui transporteront les trains entiers, voyageurs,
malériel et bagages, à travers le bras de mer qui
sépare Key West de La Havane. Ce voyage pitto-
resque, de 90 milles, s'effectuera en quatre heures.
Quelle cervelle américaine eùt osé, il y a dix ans,
concevoir le rêve d'aller en wagon, sans aucun
transbordement en cours de route, de New-York à
Cuba?
Pour terminer, nous voudrions ajouter quelques
détails inédits sur les conditions toutes particu-
lières dans lesquelles la ligne des Keys a été con-
struite.
Et d'abord, disons que, pendant la durée des
travaux, trois ouragans formidables — en 1906,
4909, 14910 — ont failli mettre en péril l’œuvre
gigantesque de M. Flagler. En 1909 notamment, de
nombreux ouvrages d'art avaient été emportés par
la tempète; le vent, à cerlains moments, attei-
gnait une vitesse de 200 kilomètres par heure, et
les vagues déchainées dépassaient la hauteur de
10 mètres. Les ingénieurs décidèrent donc de con-
solider les fondations des piles, et, pour cela, eurent
l'idée d'utiliser la marne maritime, très abondante
dans la région. Celte roche, qui contient 92 pour 100
de carbonate de chaux, a l'aspect d'une masse plas-
tique assez dense, d'un blanc éblouissant, qui non
seulement a l'avantage de durcir considérablement
à Pair, mais aussi de présenter une surface aussi
polie que celle du verre.
Tous les ouvrages de maçonnerie furent revètus
de ce cuirassement plastique, dont la courbe ma-
thématiquement calculée vint amortir l'élan furieux
des vagues. Celles-ci, d'ailleurs, ne dépassent pas,
en temps normal, la hauteur de 6 à 7 mètres. On
convint d'établir le tablier des ponts et viaducs à
une altitude moyenne de 10 mètres, ce qui permit,
contrairement au projet primitif, de laisser la
ligne se développer en plein air, sans avoir à la
protéger de chaque côté par un dispositif qui eût
beaucoup nui à l’élégance des ouvrages d’art et à
l'agrément du voyage au-dessus de la mer.
Néanmoins, comme il faut tout prévoir, et comme,
d'août à octobre, sous les tropiques, on n’est jamais
sûr de ne pas être surpris par quelque tornade, les
viaducs et ponts principaux ont été munis d'ané-
momètres enregistreurs de la vitesse du vent. Ces
N° 1432
appareils, reliés au poste de block-system de la
voie, ferment automatiquement les signaux de la
voie dès que le vent dépasse 65 kilomètres par heure.
En outre, comme mesure de précaution générale,
la traversée du Long Key Viaduct et du Knight’s
Key Bridge ne doit être faite, mème par les express,
qu’à l'allure réduite de 28 à 30 km par heure. Enfin,
la Compagnie est en communication constante avec
le Bureau central météorologique de Washinglon,
lequel télégraphie d'heure en heure, à chaque sec-
tion de ligne, les prévisions atmosphériques et
létat général du temps, aussi bien sur l’océan que
dans le golfe mexicain.
COSMOS 13
4 000 ouvriers, nègres, Américains du Nord,
Gubains et Espagnols, ont été presque constamment
occupés sur le railway des Keys. La plupart des
travaux ayant été effectués en mer, il a fallu mo-
biliser une vaste flotte à ce dessein, entre autres:
27 chaloupes à vapeur, 412 dragues, 6 grues flottantes,
10 excavateurs, 3 remorqueurs, 410 grands steamers
pour le transport des ouvriers et 150 chalands.
Le prix de revient ressort à 470 000 francs par
kilomètre, ce qui fait, pour l’ensemble de la ligne
maritime floridienne, le coquet total de 100 millions
de francs en chiffres ronds.
ÉvouaRD BONNAFFÉ.
Le nouveau laboratoire aérodynamique de M. Eiffel.
M. Eiffel, le grand ingénieur qui a émerveillė le
monde entier par la colossale tour métallique de
300 mètres qu'il construisit au Champ de Mars
pour l'Exposition de 41889, s’est donné ensuite à
l'aviation. Déjà, en 1903, alors que l'aviation était
encore une utopie pcur un grand nombre de
savants, M. Eifel avait établi à la tour un appa-
reil de chute destiné à mesurer la résistance que
des surfaces opposent à lair lorsque cet air les
frappe orthogonalement. Il a ainsi reconnu que
la valeur de cette résistance est de 80 g: m?
pour les surfaces usuelles d'au moins un mètre
carré animées d'une vitesse de un mètre par seconde.
Ce laboratoire à l'air libre (les surfaces tombaient
du haut de la seconde plate-forme de la tour) fonc-
tionna jusqu’en 1906.
A cette époque, l’avialion commençait à se déve-
lopper et l'appareil ne se prêtait plus aux recherches
que ce développement exigeait. Le savant ingénieur
résolut alors d'installer au Champ de Mars un
laboratoire d'aérodynamique dans lequel le prin-
cipe des essais était tout différent (1). Comme ce
principe doit se retrouver dans le nouveau labora-
toire d'Auteuil, nous allons en dire quelques mots.
Dans un hangar assez vaste avait été installé un
ventilateur aspirant, d'une puissance de 50 che-
vaux. Ce ventilateur permettait de faire passer
dans une chambre d'expériences parfaitement
close une colonne d'air de 1,3 m de diamètre avec
une vitesse que l’on pouvait faire varier entre
ö et 48 mètres par seconde. Dès que l'on voulait
expérimenter une surface, on la plaçait dans le
courant d'air et on la reliait à une balance spéciale
donnant l'effort en grandeur, en direction et son
point d'application. La vitesse de l’air était mesurée
par un tube spécial relié à un manomètre très sen-
sible. On déterminait également la répartition
des pressions sur la surface en perçant celle-ci de
(1) Cosmos, t. LXII, p. 685.
trous très fins reliés chacun à un micro-manomètre.
On étudiait donc les surfaces en utilisant deux
méthodes différentes, et toujours les résultats
obtenus avec l’une et l’autre méthode concordaient.
Pendant deux années (août 1909 à août 1941),
on a fait près de cinq mille expériences qui
touchent, non seulement aux données générales
qui forment le fondement de l'aérodynamique,
mais encore aux Connaissances pratiques qu’exige
actuellement l'aviation. C’est ainsi que la détermi-
nation de l'effort de l’air en grandeur, direction et
position, a été faite pour tous les angles d’attaque
sur plus de trente ailes de profils usuels et de
nombreux modèles d'appareils. M. Eiffel a éga-
lement commencé à étudier les hélices et il a
constaté que les résultats qu’il obtenait concordaient
avec ceux qu'avait obtenus le commandant Dorand,
à Chalais-Meudon, sur un chariot-laboratoire.
Le laboratoire du Champ de Mars est devenu
insuflisamment outillé dès que les progrès de l'avia-
tioneurent franchi une certaine limite.La vitesse des
appareils actuels, en effet, est bien supérieure à la
vitesse de 18 mètres par seconde, soit 63 kilo-
mètres par heure, que l’on ne pouvait dépasser.
C'est pourquoi M. Eilfel résolut, à la fin de l’année
dernière, de construire à Auteuil un nouveau
laboratoire aérodynamique répondant mieux aux
besoins de la nouvelle science.
Dans le hangar, qui mesure 30 mètres de lon-
gueur, 43 mètres de largeur et 10 mètres de hau-
teur, on a réservé une place à l’ancienne installa-
tion du Champ de Mars, mais la partie principale
est occupée par l'énorme tube qui permet d'aspirer
Pair à une vitesse de 40 mètres par seconde, soil
444 kilomètres par heure. Le rendement industriel
de l’ancienne installation a été également aug-
menté; avecunedynamo de 50 chevaux, le cylindre
d'air ayant un diamètre de 2 mètres, on peul
obtenir une vitesse maximum de 32 mètres par
seconde, soit 115 kilomètres par heure.
14 COSMOS
La construction de ce laboratoire est très origi-
nale, et l'une de nos figures en donne une idée
exacte. On voit que le hangar est occupé presque
sur toute sa longueur par un énorme tube conique
(le tube plus petit de l’ancienne installation est
placé à côté de celui que montre notre figure). A
l’une des extrémités se trouve un puissant ventila-
teur aspirant l'air du laboratoire par un énorme
entonnoir de 4 mètres d'ouverture. Ce tube est
interrompu pour la traversée de la chambre d'ex-
périences. L'air aspiré par l'entonnoir se rassemble
en une sorle de faisceau cylindrique, qui traverse
cette chambre comme une trombe et s’engouffre
dans la longue partie conique, appelé par le
ventilateur qui termine cette dernière. Cet air
est donc pris à l’intérieur du hangar; il y fait
retour par l'extrémité opposée à son entrée
et circule dans le hangar en sens inverse de la
direction qu'il prend dans le tube. |
Å JUILLET 1912
Lorsque les ventilateurs sont en marche, il se
produit à l’intérieur de la salle d'expériences une
dépression suffisante pour briser parfois les vitres
des fenêtres. C’est en mesurant cette dépression, à
l'aide d’un manomètre spécial, que l’on connait la
vitesse du courant d'air.
Dans la salle d'expériences est installé un bâti
mobile sur des galets. Ce bâti est agencé pour rece-
voir des surfaces dans une position quelconque et
les placer en plein dans la colonne d'air formée
par le tube. Au-dessus, et abritée de cette colonne
d'air, est placée une grande balance sensible au
décigramme. Cette balance est reliée avec la sur-
face en essai et « pèse » à chaque instant les pous-
sées de l’air sur cette surface.
Le cône collecteur du tube ou entonnoir qui
puise l'air à l'avant de la salle d'expériences a
4 mètres de diamètre à son extrémité libre et
2 mètres à son extrémité qui débouche dans la
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COUPE LONGITUDINALE DU NOUVEAU LABORATOIRE AÉRODYNAMIQUE DE M. EIFFEL.
chambre d'expériences; sa longueur est de 3,3 m.
La seconde partie du tube, que lon nomme le dif-
fuseur, a 9 mètres de longueur ; il aboutit à la cou-
ronne du ventilateur, qui a 4 mètres de diamètre.
La colonne d'air qui traverse la chambre d’expé-
riences a donc 2 mètres de diamètre.
Le second tube, semblable au précédent mais
plus petit, donne une colonne d'air de un mètre
de diamètre seulement, mais comme son ventila-
teur est actionné, comme le premier, par un mo-
teur électrique de 50 chevaux, la vitesse de la
colonne d’air y atteint 40 mètres par seconde.
L'effet utile obtenu au nouveau laboratoire d'Au-
teuil est cinq fois supérieur à celui du Champ de
Mars. Ajoutons enfin que le courant d'air artificiel
de cette installation est le plus puissant de tous
ceux utilisés jusqu'à ce jour dans tous les labora-
toires d’aérodynamique.
Le nouveau laboratoire d'Auteuil a déjà effectué
une série d'expériences remarquables en ce sens
qu’elles détruisent une légende qui s'était créée au
début de l'aviation. On n’admettait pas, en effet,
que les mesures obtenues dans un laboratoire, sur
des aéroplanes réduits, fussent aussi exactes que
celles que pouvait donner un de nos grands oiseaux
artificiels voyageant dans l'air calme.
Or, le commandant Dorand, du laboratoire aéro-
nautique militaire de Chalais-Meudon, a construit
un aéroplane avec lequel il a réalisé plusieurs vols
d'étude en ligne droite par vent nul. Cet aéroplane
était muni d'appareils de mesure enregistreurs
qui opéraient directement. Le pilote avait donc
simultanément tous les éléments du vol: la poussée
du propulseur, la vitesse de rotation de l'arbre de
l'hélice et du moteur, la vitesse relative de l’aéro-
plane par rapport à l'air supposé immobile, l'angle
d'attaque de l’appareil. Enfin, le poids de l’appa-
reil était déterminé au départ.
M. Eiffel fut vivement frappé de la précision des
résultats obtenus; il demanda au commandant
Ne 1432
Dorand de lui établir un modèle réduit de cet aéro-
plane pour le soumettre à des essais comparatifs
dans son laboratoire. Ce modèle fut construit à
l'échelle de 1 : 14,5. Les essais commencèrent aus-
sitôt en communiquant à la colonne d'air des
vitesses voisines de celle du vol du grand aéro-
plane. On reconnut que les résultats obtenus dans
le laboratoire étaient, à un centième près, sem-
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A
COSMOS 15
blables à ceux qu'avait recueillis le comman-
dant Dorand. La preuve expérimentale était faite
que les travaux de laboratoire sont aussi sérieux
que ceux que l’on peut effectuer dans l’atmo-
sphère.
M. Eiffel, qui a bien voulu nous faire les hon-
neurs de son beau laboratoire, va se mettre à
l'étude des conditions de stabilité des aéroplanes
VUE PRISE A L'INTÉRIEUR DE LA SALLE D'EXPÉRIENCES.
E, entrée du diffuseur; E’, extrémité du petit diffuseur; S, surface soumise aux essais; PP", portes pouvant fermer le diffuseur;
CC", portes pouvant fermer le collecteur; G, grillage régularisant l'entrée de l'air.
qui n'ont pas encore élé abordées par lui, et sur-
tout à l'étude des hélices, déjà commencée au
Champ de Mars, et au sujet desquelles on connait
encore très peu de chose.
LUCIEN FOURNIER.
La lumière cendrée de la Lune.
La surface du globe lunaire se trouve parfois
soustraite à l’action directe des radiations solaires,
par suite de la position qu'elle occupe par rapport
à la Terre, et l’on constate que cette surface con-
tinue à émettre une faible luminosité qu'on a dési-
gnée sous le nom de lumière cendrée.
La cause réelle de cette luminosité particulière
est encore hypothétique; les anciens l’attribuaient
à une émission lumineuse propre à la Lune elle-
même. Aujourd'hui, on admet généralement
qu'elle est due à la réflexion de la lumière solaire
sur la Terre, ou à la réfraction des radiations
solaires à travers l’atmosphère terrestre, lors des
éclipses lunaires.
On observe des variations assez inexplicables
dans l'éclat el la coloration de cette luminosité.
Parfois, la surface de la Lune reste absolument
invisible pendant la durée d'une éclipse, ou bien
lorsque notre satellite est dans sa nouvelle phase.
D’autres fois, aucontraire,cette luminosité devient
si intense que l’on pourrait presque douter que la
Lune soit éclipsée.
16 COSMOS
Il parait bien difficile d'admettre que de telles
variations dans l'intensité de la lumière cendrée
puissent être produites par des phénomènes de
réflexion ou de réfraction terrestre.
En effet, pendant la nouvelle Lune, les seules
causes qui puissent faire varier la quantité de
lumière réfléchie par la Terre sont l'étendue de
la surface continentale, de la surface nuageuse, et
la transparence variable de l’atmosphère.
Or, si l’état atmosphérique varie souvent d'un
point à un autre de la Terre, il ne saurait en
être de mème pour l’ensemble du globe, où la
quantité moyenne de nuages et l'état général de
l'atmosphère restent sensiblement constants.
Peut-on admettre que la lumière réfléchie soit
très faible quand la surface maritime du Pacifique
est tournée vers la Lune, tandis qu’elle devient très
grande lorsque c'est, au contraire, ia surface con-
tinentale qui réfléchit sa luminosité vers l’espace!
I est possible que les effets précédents entrent
pour une certaine part dans les variations de la
lumière cendrée, mais il parait bien improbable
qu'ils soient suflisants pour provoquer les énormes
variations que l’on constate dans l'éclat de celte
luminosité. Dans le cas des éclipses lunaires,
l'explication devient encore plus difficile.
Peut-on réellement admettre que la réfraction
de la lumiere solaire à travers le mince filet atmo-
sphérique entourant le globe terrestre, puisse
s'étendre assez loin dans l'espace pour atteindre
le globe lunaire et l'éclairer!
Est-il admissible que la transparence générale
de ce filet gazeux puisse varier dans de telles pro-
portions que la lumière réfractée devienne sensi-
blement nulle à certains moments, et qu'elle soit,
au contraire, considérable à d'autres époques? Il
suffit d'examiner les apparences présentées par
l'atmosphère qui entoure Vénus ou Mars, pour
comprendre combien une telle conjecture est
improbable!
En troisième licu, si la luminosité de la Lune
était réellement provoquée par la réflexion ou par
la réfraclion de la lumière solaire par la Terre,
cette luminosité devrait èlre plus intense dans la
partie centrale du disque lunaire que sur ses bords,
puisque, par suite de la forme sphérique de la
Lune, les bords ne peuvent recevoir qu'une partie
très faible de la lumière réfléchie par la Terre.
Tout au contraire, si la luminosité lunaire était
propre à cet astre et qu'elle ne fùt nullement
empruntée à la Terre, on devrait constater une
luminosité plus faible dans la partie centrale du
disque que sur les bords, puisque, sous une inci-
dence de plus en plus rasante, les radiations
lumineuses propres à l'astre lui-mème additionne-
raient leur action du centre vers la circonférence.
Or, c'est précisément ce dernier fait que l'obser-
valion confirme.
h JUILLET 4912
Pendant les éclipses totales ou partielles, pen-
dant la nouvelle Lune, pendant le premier ou le
dernier quartier, les bords lunaires sont toujours
beaucoup plus lumineux que le centre.
Comme c'est de la surface solide de l'astre et
non de son atmosphère absente, que cette luminosité
peut provenir, on doit logiquement en conclure
que la Lune possède une véritable lumière qui lui
est propre.
Nous voici doncrevenus aux hypothèses anciennes
par la logique mème des faits! Mais les récentes
découvertes sur la phosphorescence, la fluorescence,
la radio-activité et l'ionisation, vont toutefois
nous permettre de chercher une explication plau-
sible à ce phénomène.
La Lune nest, en définitive, qu’une sphère
rocheuse, hérissée d'aspérités.
Ces masses rocheuses doivent présenter une
composition fort semblable à celle de Ja Terre,
et tout ce que nous connaissons sur nos roches
terrestres doit vraisemblablement s'appliquer
aux roches lunaires.
Nos roches renferment le plus souvent des fluo-
rures et des phosphures alcalino-terreux; elles
contiennent également des quantités appréciables
de composés radio-actifs. Si l'on soumet un frag-
ment de roche à l'action suilisamment prolongée
d'un puissant arc électrique, riche par conséquent
en radiations ultra-violettes, puis, si on le plonge
dans l'obscurité complète, on constate qu'il continue
à briller d’un faible éclat, provenant d'une phos-
phorescence superlicielle qui se prolonge souvent
pendant un temps assez long.
Cetle phosphorescence est provoquée par une
action particulière des radiations ultra-violettes
de lare sur Îles fliorures, les phosphures de
calcium, de magnésium, d'aluminium, ainsi que
par les etfets de désagréuation moléculaire et d'io-
nisation de composés radio-actifs à base d'ura-
nium, de thorium, de radium, ete.
On peut donc concevoir que si les roches lunaires
restent soumises pendant un mois entier à l’action
des puissantes radiations ultra-violettes émises par
le Soleil, au sein mème du vide interplanétaire,
elles soient susceptibles d'émettre une phospho-
rescence extrêmement vive, qui apparait dès qu'elles
viennent à être soustrailes à l'action solaire.
La forte charge électrique qui parait également
exister sur la Lune est probablement d'origine so-
laire, et celtecharge peut aussi contribuer à des effets
d’ionisation et de radio-activilé, ainsi que nous avons
pu, du reste, le constater dans des recherches de
laboratoire, en soumelltant une substance quel-
conque à la double influence d'une charge négative
et des radiations ultra-violettes (1).
(L) Cosmos, 44 avril 1908, n° 12114. — Recherches sur
Ja radio-activité temporaire.
N° 4432
Il paraît également probable que, sous l’action
combinée de brusques variations de température, et
sous l’action ionisante des radiations ultra-violettes
solaires et des charges électriques, les masses
rocheuses de la Lune se désagrègent rapidement
et sont soumises à une pulvérisation à travers
l'espace (1).
Les variations importantes que parait subir
l'activité solaire à certaines époques pourraient
COSMOS 17
suffire pour expliquer des variations correspon-
dantes dans les effets de phosphorescence, de
radio-activité et de charge électrique de la surface
lunaire.
Une étude plus serrée des faits permettra, sans
doute, de déterminer avec plus de précision les
relations qui existent entre la luminosité propre
à la Lune et l’activité solaire.
A. NODON.
me
Les frigorifiques agricoles,
Le froid est l'agent idéal pour garder aux
denrées alimentaires toutes leurs qualités natu-
relles et faciliter leur écoulement sur les marchés.
Grâce à une conservation plus ou moins pro-
longée, le producteur n’est plus à la merci de Pin-
stabilité des cours qui résulte, le plus souvent, de
l'abondance ou de la rareté de la marchandise.
Les agriculteurs peuvent mème ainsi mieux
lutter contre des accaparements à bon marché que
cherchent à faire certains spéculateurs en s'aidant
aussi de la conservation par le froid. Par le simple
jeu des emmagasinements et des sorties des frigo-
rifiques, ces derniers créent des hausses et des
baisses fictives. Nous dirons à ce sujet qu'aux
États-Unis, où la conservation des denrées par le
froid est très développée, on a été forcé, parait-il,
de limiter la durée du séjour dans le frigorifique,
et on a obligé les négociants à déclarer aux con-
sommateurs la date de la mise en chambre froide
de certains produits.
En bonne règle, ces derniers ne devraient être
mis ainsi en réserve que pour y subir une attente
provisoire, une ou deux semaines par exemple,
pour empêcher l'effondrement des cours.
En régularisant les apports sur les lieux de vente,
la conservation par le froid peut contribuer égale-
ment à abaisser les prix trop élevés. En somme,
l'entrepôt frigorifique peut être considéré comme
le volant de la consommation.
Le froid peut permettre encore aux producteurs
de mieux traverser les périodes difficiles qui
résultent des grèves du personnel des entreprises
et transports. L'inverse est possible, et alors le
ravitaillement est assuré par les stocks des entre-
pòts.
Ce ne serait qu’exceptionnellement pour certains
produits comme les œufs, le beurre, par exemple,
que l’on pourrait chercher aux époques de grande
production à faire des réserves pour les périodes .
où ces denrées, étant plus rares, se vendent aussi
(1) Rapport du deuxième Congrès international de
chimie appliquée, à Paris, 1897. La photographie du
spectre infra-rouge et étude des rayons de Rœntgen,
par A. Nopox, p. 265.
bien plus cher. Il faut cependant remarquer que
dans ces longs mois d'attente le capital reste
improductif, et qu’il y a toujours des pertes et des
déchets de la denrée.
Malheureusement, l'achat, l'installation et le
fonctionnement d’une machine à froid ne sont pas
sans présenter à la ferme des difficultés d'ordre
pécuniaire ou matériel. En particulier, il n'est pas
toujours commode d'assurer le fonctionnement
des appareils pendant la nuit. Malgré tout, bien
que l’aménagement, l'isolation d’une chambre
quelconque soient assez faciles à réaliser une fois
pour toutes, on ne rencontre guère dans Îles grandes
exploitations agricoles que des installations som-
maires, ou plutòt des armoires frigorifiques pour
garder quelques kilogrammes de beurre, quelques
douzaines d'œufs, etc. Ce qu'il faudrait, ce sont
des chambres froides de grande capacité où l'on
pourrait emmagasiner à la fois de fortes quantités
de produits pour abaisser le plus possible les frais
de premier établissement et oblenir une juste
rémunéralion des sacrifices imposés.
Si les petits producteurs isolés ne peuvent songer
à faire une telle dépense, ils savent que, s'ils se
groupent en Syndicats et en Coopératives, ils sur-
monteront mieux les difficultés et ils jouiront des
facilités qui sont accordées (Caisse de crédit agri-
cole, part contributive de l'État, etc.). À défaut de
frigorifique coopératif comme celui de Condrieu,
le seul qui existe encore, croyons-nous, les cultiva-
teurs ont intérêt à recourir aux frigorifiques
privés quand ils le peuvent, comme ceux de Châ-
teaurenard, d'Avignon.
Une chose à remarquer, c'est que, s'il existe pas
mal de ces installations, soit publiques, soit privées,
dans les grandes villes, il n’y en a qu'exceptionnel-
lement dans leslieux de production agricole intense.
Nous avons cité Condrieu, Avignon et Château-
renard. Mais les régions d’Hvères, des Alpes-
Maritimes, des Mées et Oraison (Basses-Alpes), des
Pyrénées-Orientales, de la vallée de la Garonne,
etbien d'autres, réputées pour leurs primeurs, fruits
et légumes, leurs produits de basse-cour ou leurs
fleurs, ne devraient-elles pas avoir de ces entrepôts
18 COSMOS
frigorifiques au voisinage des gares ou ailleurs,
pour les raisons que nous avons énumérées au
début de cet article?
Le bel exemple donné par les agriculteurs de
Condrieu et Ampuis, dans le Rhône, et les résul-
tats obtenus dans leur frigorifique d'essai méritent
que lon étudie sérieusement celte question. (l
appartient aux Syndicats agricoles de provoquer
des groupements de producteurs et d’expéditeurs,
lorsqu'ils pourront bénéficier des prèts consentis
par l’État au moyen de Caisses mutuelles agricoles.
Par exemple, avec une somme de 415 000 francs
souscrite par les intéressés, la Société peut dis-
poser de 60 000 francs; la chose est à considérer.
Nous terminerons en disant que les producteurs
de Condrieu s'organisent pour la construction d'un
frigorifique dont le coût s'élèvera à environ 75 000
à 80 000 francs. D’après un devis prévu, chaque
chambre d’un établissement de ce prix peut con-
tenir 25 000 kilogrammes de produits, soit, pour
%k JUILLET 191%
les quatre chambres, 100 000 kilogrammes. Cette
quantité peut se renouveler dix fois pendant la
saison (il s’agit surtout ici de fruits). Au total, on
peut donc traiter un million de kilogrammes.
La redevance a été fixée, en principe, à 0,40 fr
par 100 kilogrammes et par jour, soit une recette de
40 000 francs pour le poids ci-dessus. C'est suffisant
pour assurer les frais d'exploitation du frigori-
fique et le service des intérêts (amortissement
compris).
A lusine centrale de Wiesbaden (Allemagne), de
la maison Linde, on est d’avis qu’en ce qui con-
cerne les fruits et légumes, il faut en emmagasiner
de grandes quantités pour que l’exploitation soit
rémunératrice. Cela semble expliquer pourquoi
jusqu'ici, en Europe, la conservation des fruits et
légumes n'est encore, pour ainsi dire, qu'un acces-
soire de la conservation des autres substances
alimentaires.
P. SANTOLYNE.
Dés spéciaux pour le tirage des loteries.
On utilise quelquefois les dés dans le tirage des
loteries, et c'est tout naturel: la loterie n'est-elle
pas aléatoire au premier chef?
Avouons pourlant que ces petits dieux d'ivoire,
reliques d’un autre âge, ne se prêlent à cette opé-
ration qu'avec une répugnance manifeste. Il faut
les mettre à la torture, les secouer, les renverser
une trentaine de fois pour leur arracher une ré-
ponse; et quelle réponse! Presque toujours, vous
constaterez, en y regardant de près, que les chances
de gagner ont été mal réparties et les porteurs de
billets volés comme au coin d'un bois.
Un de mes amis, professeur dans un collège ca-
nadien, a voulu mettre un terme à ce brigandage.
Interdire les dés était chose impossible, leur nom
arabe, azsahr, les sacrant pour toujours inter-
prètes officiels du hasard: mais les rajeunir, en
favorisant l’éclosion d'espèces nouvelles mieux
adaptées aux besoins de l’époque, n’était-ce pas
praticable? Le professeur, qui a sa manière à lui
de comprendre Lamarck, n'en doutait pas.
« Quelle est la transformation qu exige le mi-
lieu? » se demanda-t-il. Et tout un système s’éla-
bora dans son esprit. En voici le principe :
Pour tirer une loterie, il faut un dé, un seul,
muis fait expressement pour elle; car il doit
avoir autant de faces qu'on a émis de billets,
chaque face correspondant à un de ces billets et
portant son numéro.
Il est clair qu'une telle pièce ferait un tirage
Juste et rapide. En effet, ce dé, capable de montrer
tous et chacun des numéros vendus et n'ayant d'in-
clination particulière pour aucun, proclamerait
sans faiblesse les décisions du sort; et, d'autre
part, un seul renversement du cornet suffirait pour
disposer du gros lot. Mais qui fera cette merveille,
si la loterie est un peu considérable ?
Qui ?..... Vous-même, cher lecteur, si vous avez
la patience de me lire jusqu’au bout; car l’inven-
teur me permet de vider sous vos yeux le joli cof-
fret d’un décimètre cube qui contient tout son ou-
tillage, et cet outillage est si simple qu'un amateur
le reproduira en s'amusant, si perfectionné que le
premier venu, en moins d'une minute, combinera
le dé requis pour un tirage donné, füt-il d’un
milliard de numéros.
Quelques termes nouveaux m'aideront à dissiper
le mystère.
Un dé simple est un polyèdre qui peut s'arrêter
sur l’une ou l’autre de ses faces sans préférence
pour aucune. |
Les faces d'un dé sont les divers nombres de
points inscrits sur ses faces géométriques.
Un dé est régulier quand ses faces présentent
la suite des nombres naturels 0, 41, 2..... de sorte
que, s'il a n faces, sa plus grande est (n — 1).
Un dé composé est l'ensemble de plusieurs dés
simples destinés à former un tout et dont les indi-
calions s'additionnent.
Ses faces sont les divers nombres qu'il peut four-
nir d’un coup. Ainsi, quand deux dés simples joués
ensemble marquent respectivement 8 et 5 points,
on dit que le dé composé a montré sa face 13.
Le dé composé sera régulier si ses faces forment
la suile 0, 1, 2... ( n — 1), sans omission ni répé-
tition.
N° 1432
Maintenant, commençons l'inventaire.
Le plateau supérieur de l’écrin contient neuf dés
réguliers. Le premier n’a que deux faces, le
deuxième en a trois, le troisième quatre, et ainsi
de suite jusqu’au neuvième qui en a dix.
Chacun d’eux porte comme désignation le nombre
correspondant à sa plus grande face, écrit entre
parenthèses. Ainsi, quand vous lirez (6), il faudra
comprendre : le dé régulier à 7 faces dont la plus
grande est 6.
Ce premier plateau permettrait déjà à un homme
adroit de faire un dé régulier d'un nombre de
faces à peu près quelconque. Trois exemples feront
comprendre le procédé :
a) On veut un dé à 48 faces numérotées de
0 à 47.
Solution : 48 se décompose en facteurs plus
petits que 41; les facteurs 6 et 8 conviennent. Ils
indiquent les dés à choisir : un premier à 6 faces
(5), un second à 8 faces (7).
Ces dés peuvent tomber ensemble de quarante-
huit manières différentes; car chacune des 6 faces
du premier peut former 8 combinaisons distinctes
avec les faces du second. Mais le dé résultant
sera-t-il régulier ?
— Oui, si l’on sait compter ses points.
(š) fournira un premier chiffre, (7) un second,
et le nombre de deux chiffres ainsi formé sera lu
d’après le système de numération à base 8 (nombre
des faces du second dé).
Cela revient à dire : sur (5), chaque point en
vaut 8, et (7) marque des unités.
Cette convention enlève aux dés la possibilité de
fournir un même nombre de deux manières diffé-
rentes et les rend capables d'amener tout nombre
de 0 à 47 inclusivement. C’est bien là ce que nous
voulions.
Si les dés (5) et (7) marquaient respectivement
3 et 6 points, le coup vaudrait :
36 bas 8 = 3 X 8 + 6 = 30 base 10.
Le maximum possible est : 57 bass = 47 base 10.
b) Faire un dé régulier à 945 faces.
Solution : 945 = 9 X TX 5 X 3.
On jouera successivement les dés (8), (6), (4)
et (2).
Les points de (8) seront multipliés par 105
(= TX 5 X 3); ceux de (6) par 45 (= 5 X 3);
ceux de (4) par 3, et (2) marquera des unités.
La règle est facile à retenir : les points marqués
par un dé simple sont multipliés par le nombre
des faces du dé (simple ou composé) qui le suit
dans la combinaison, et par 4, s’il est le dernier.
La somme de tous les produits est la valeur du
coup.
c) Tirer une loterie de 5 000 billets.
Solution : 5000 = 5 X 10 X 10 X 10.
Nous voilà dans la numération vulgaire.
Jouons (4) une fois, (9) trois fois, et écrivons
COSMOS 19
les chiffres à mesure qu'ils arrivent. Si l’on sup-
pose que les dés tournent à la suite 0, 0, 5, 4, le
porteur du numéro 51 décroche la timbale.
Les calculs précédents sont laborieux, n'est-ce
pas? Aussi mon ami n’oblige personne à les répéter.
Ce que j'en ai dit n'avait qu'un but : faire com-
prendre le fonctionnement de la machine qu'il me
reste à décrire.
Elle est automatique, précise comme une balance
de laboratoire, et n'importe qui peut la mettre en
marche. Ses pièces se réduisent à une quarantaine
de dés dont chacun porte, gravée sur sa face
blanche, une lettre qui lui sert de nom. Cette lettre
est répétée sur le bord de la case qu'il occupe; de
sorte qu'il est aussi facile de retrouver dans l'écrin
un dé déterminé que la France sur une carte de
l'Europe.
Tous ont pour faces les termes d’une progression
arithmétique commençant par 0.
Une courte instruction est jointe à l’assortiment.
Elle se termine par un tableau qu'un enfant com-
prendrait. Il est à deux colonnes; la première est
formée de tous les nombres de 2 à 4 000, et la
seconde de lettres et de chiffres qui n'ont rien de
mystérieux.
Ilustrons par deux exemples le maniement de
l'appareil ainsi ajusté.
Je reviens au cas de la loterie de 48 billets nu-
mérotés de 0 à 47.
47, dernier numéro, est cherché dans le tableau.
À sa droite, je lis dans la seconde colonne : R, (7).
Cela veut dire de jouer sans commentaire le dë R
et le dé (7) décrit précédemment et de prendre
leurs points tels quels pour la valeur du coup.
Voici les faces des dés en question :
KR: 0, 8, 16, 24, 32, 40.
(7):0,4, 2, 3, 4, 5, 6, 7.
N suffit d’additionner chaque face du premier
avec toutes celles du second, prises successivement,
pour se convaincre que chacun des nombres natu-
rels de 0 à 47 a une chance, et une seule, d’appa-
railre.
Autre exemple. Le dernier numéro est 16 784;
que faire ?
Le tableau s’arrêtant à 4 000, cherchons-y 167
(trois premiers chiffres du nombre).
La solution prescrite est : Z, N, (6).
On jette ces dés en avertissant qu'on tire pour
les centaines du nombre heureux. Les dizaines et
unités seront trouvées ensuite au moyen de (9)
joué deux fois; car l'instruction exige qu'on prenne
le dé (9) et pas un autre pour compléter un nombre
dont le commencement est déjà tiré. Cette pres-
cription, l'opérateur novice s'y soumettra à l'aveu-
glette, le lecteur du Cosmos, lui, comprend tout de
suite qu’on n'a pas droit de dire qu'un dé marque
des dizaines, des centaines ou des mille si l’on n'a
20 COSMOS
pas l'intention de le faire suivre d'uu autre dé à
10, 100 ou 4 000 faces (1).
Voici les faces de Z, N, (6).
Z : 0, 42, 84, 120.
N:0, 7, 14, 21, 28, 35.
(6, : 0, 1, 2, 3, &, 5, ©.
Le maximum qu'ils peuvent marquer est 167, ct
9) peut donner jusqu'à 99; de sorte que le total
possible est 16 799.
Quelle différence y a-t-il entre ce dé composé et
un dé simple de 16 800 faces? — Une seule : n'im-
porte qui peut aisément faire le premier, et le
second ne sera jamais taillé par personne.
Le professeur — dont je reproduis les paroles
aussi fidèlement qu'il m'est possible — en était là
dans son exposé, quand une objection se présenta
à mon esprit.
— Si je comprends bien, lui dis-je, vous pouvez
faire un dé composé d’un nombre donné de faces,
pourvu que ce nombre soit décomposable en fac-
teurs plus petits que 11. Mais si ce n'est pas Île
cas? si une loterie avait émis 103 billets, par
exemple, comment pourriez-vous la tirer ?
— Je consulterais le tableau !...… Mais votre re-
marque est sensée et mérite une réponse plus civile.
Pour un tirage de 103 billets, on prend un dé à
105 faces (7 X 5 X 3). Cela introduit dans lurne
deux numéros qui n'appartiennent à personne,
mais n'empêche pas les numéros vendus d’avoir
tous chance égale de sortir. Donc, pas d’injustice.
Seulement, si l'un des surnuméraires avait l'im-
pudence d'émerger, il faudrait reprendre le tirage.
Vous verrez, en examinant le tableau, que la
probabilité de cet évènement est de 4/412 quand la
loterie a 41 ou 2? billets; dans tous les autres cas,
elle est intérieure à 1/13 et souvent nulle. D'ail-
leurs, le tirage est si rapide qu’une répétitionna
rien de fatigant.
Une objection qu'on m'a faite plus souvent est
celle-ci: « Les spectateurs, ne saisissant pas bien
le mécanisme du lirage, douteront de son équité. »
Mais quel est le tireur de loterie qui n'exige pas
comme un droit la confiance du public ?
Vous assislez, je suppose, au tirage d'une grande
loterie moderne, et, au moment où la roue de verre
commence à tourner, un assistant s'écrie; « Je
veux savoir si mon numéro a été mis dans la ma-
chine. — Mais oui, dirait le directeur, c’est abso-
lument sùr. Nos ofliciers lPaffirment sur leur hon-
neur. — Alors, qu’on me le montre! »
Entendez-vous d'ici l'immense éclat de rire qui
accueillerait sa naïveté?
Les choses se passeraient autrement chez moi.
(1) Le maladroit qui emploierait (8) et (4) pour ter-
miner son tirage dans le cas ci-dessus composerait
un dé à 7 560 (= 168 X 9 X ï) faces seulement, c'est-
à-dire qu'il ferait perdre à plus de ia moitié des nu-
méros toute chance de gagner.
4 JUILLET 1949
Supposons qu'il s'agisse du tirage des 16 785 nu-
méros dont vous parliez tantôt.
— Vous voulez savoir si votre numéro est là ?
dirais-je au scrupuleux. Très bien ! quel est-il?.....
4 001, dites-vous ?
Alors, il faut que les trois dés que nous jouerons
d'abord marquent 10; voyons s'ils le peuvent. (Je
tourne Z à 0; N à 7 et (6) à 3.) Est-ce bien 40?
Les dés ont-ils quelque répugnance à prendre cette
position?
Il faut de plus, pour votre bonheur, que le der-
nier dé, que nous jetterons deux fois, marque 0
d'abord et 4 ensuite. Examinez-le et assurez-vous
s'il peut tourner ces chiffres.
Il le constate. Il a vu son numéro dans la roue,
et sa confiance est basée sur quelque chose de
mieux qu'une simple affirmation.
Que les faveurs du hasard restent capricieuses,
il n'en peut ètre autrement; mais que le dé, com
posé d'après les indications précédentes, puisse
ètre un loyal interprète de ses fantaisies, le lecteur
doit, tout comme moi, en ètre persuadé.
Il me reste à décrire les formes géométriques
qui ont permis à l'inventeur de réaliser ses concep-
tions. L'amateur peut les copier sans crainte: l'in-
venteur ne prend pas de brevet,
Dé à 2? faces. — Une pièce de monnaie peut en
tenir lieu; celui que j'ai sous les yeux est une
petite tablette carrée à tranches arrondies.
Dé à 3 faces. — Cube dont les faces portent
respectivement 0, 0, 4, 4, 2 et 2 points. On a bien
là l'équivalent d’un dé à trois faces, puisque, pour
fı
2> s 4
F1G. 1. — DÉ A 5 FACES.
chacun des nombres, 0, 4 et 2, la probabilité d'ap-
paraitre est de 2/6 = 141/3.
Dé à 4 faces. — Prisme carré dont les bases
sont remplacées par des pyramides.
Dé à 5 faces. — Prisme pentagonal terminé par
deux pyramides. Ce solide montrera toujours
2 faces séparées par une arète. Il faut écrire sur
ses faces géométriques : 0, 0, 4, 2, 2, et on lira,
suivant l’arète qui formera sommet, les sommes :
0, 1,3, 4, 2 (fig. 1).
Dés à Get à 8 faces.— Cube et octaèdre réguliers.
Dé à 7 faces. — Ce dé a en réalité 44 faces.
C'est un cube qui a commencé sa transformation
en octaèdre régulier et qui s’est arrèté en chemin.
Ne 1532
Voici comment on peut le faire en partant d'un
cube de 25 millimètres d’arèête (fig. 2).
Sur toutes les artes, marquez des points c à
9,3 mm des sommets. Réunissez ces points deux à
deux par des droites, comme le montre la figure.
Enlevez les angles du cube suivant les lignes cc.
Le dé résultant aura 6 faces carrées et 8 faces
triangulaires à angles coupés (fig. 2 bis).
Avant de le numéroter, essayez-le en le faisant
rouler 140 fois. S'il montre 80 triangles et 60 carrés,
vous pourrez le terminer en toute confiance. Sinon,
FiG. 2 BIS.
faites une marque de crayon sur les faces trop
faibles, enlevez cette marque d’un coup de lime et
recommencez l'essai. Le numérotage est douhlé
comme sur le dé à 3 faces.
Dé à 9 faces. — Dé composé de 2 dés simples à
3 faces, ces faces portant les nombres: 0, 3, 6 sur
un dé et 0, 14, 2 sur l’autre.
Dé à 10 faces. — On pourrait composer ce dé
en donnant au dé régulier à 5 faces précédemment
décrit un compagnon à 2 faces (0 et 5); mais le dé
à 10 faces est si souvent requis qu’on a préféré le
faire d’une seule pièce. On peut le décrire : 2 pyra-
mides pentagonales juxtaposées par leurs bases et
dont l’une a tourné de 36 degrés autour de sa
hauteur.
Celui que j'ai sous les yeux a été taillé comme
suil: un prisme, ayant pour base un carré de 25 mil-
limètres de côté et une hauteur de 52 millimètres,
a reçu sur ses 4 faces A, B, C, D, les dessins repré-
sentés par la figure 3. Occupons-nous de la face A
dont les autres ne sont que la reproduction.
Sur l’arête supérieure, on marque les points a
et b à 20 millimètres des bouts. On mène la per-
pendiculaire ao, puis la droite oc sur laquelle on
marque le point Æ à 25 millimètres de o ; on trace
ensuite b k p.
Quand cette figure a été répétée sur les 3 autres
faces, on s'assure, au moyen d’un compas, si les
COSMOS 2t
distances /k et 1 sont égales; de même les distances
ak, lu, ri, bj. Si elles sont' plus petites, l’angle
aoc et ses égaux sont trop grands ; dans le cas con-
traire, ils sont trop petits. L'égalité de ces distances
étant obtenue, on sciera le prisme suivant les lignes.
pb-bm, lr-rm, iu-uo et ja-ao. Il ne reste plus qu'à
enlever au ciseau les deux coins compris entre les.
F1G. 4.
lignes ok et of d’un côté, #1 et my de l'autre, pour
finir le dé.
La figure 4 montre comment 4 faces du dé coin-
cident avec les pans du prisme.
Abbé F. T.,
Sainte-Anne-de-la-Pocatière (Canada).
©
bO
COSMOS
& JUILLET 1949
| ALEXIS PERREY
On point d'histoire de la sismoloëgie.
Quatre noms dominent toute l'histoire de la sis-
mologie au milieu du xix° siècle, et ce sont, dans
l'ordre de ce qu’on pourrait appeler le centre de
gravité chronologique de leurs travaux respectifs,
ceux de Perrey, Mallet, Suess et de Rossi. Alexis
Perrey a créé l’histoire sismologique, et les frères
Mallet ont introduit les méthodes de mesure dans
l’étude des tremblements de terre; Suess a mis en
intime relation les mouvements brusques du sol
de certains pays avec leur tectonique, et de Rossi
a fondé les méthodes d’observation des plus petites
vibrations du sol. Sans doute, les uns et les autres
ont eu des précurseurs, mais à des titres divers ils
sont les véritables fondateurs de la sismologie
actuelle dont tous les plus récents progrès ne sont
qu'un développement de leurs travaux.
Du rôle des deux derniers, nous ne dirons rien
ici; nous voulons seulement établir un parallèle
entre les mérites de Perrey et ceux des Mallet,
parce que ces derniers ne sont pas seulement con-
aus par leurs recherches de mécanique sismolo-
gique et leur description devenue classique du
grand tremblement de terre des Pouilles du 16 dé-
cembre 1857, mais aussi par leur catalogue général
des tremblements de terre publié de 1852 à 1858
par la célèbre Association britannique pour l'avan-
cement des sciences; tandis que Perrey, plus limité
dans ses travaux, n’a à son actif que ses nombreux
catalogues régionaux de tremblements de terre
embrassant le monde entier et ses listes annuelles
de 1843 à 1872. Son ròle apparait donc à première
vue comme très inférieur à celui des Mallet, au
moins quant à la diversité de ses recherches.
Perrey a passé toute sa vie professeur de mathé-
maliques à la Facullé des sciences de Dijon.
Comme tel, il était un peu astronome, et croyant,
ainsi que tout le monde de son temps, au feu cen-
tral, il voulut faire des tremblements de terre des
effets de marées de ce milieu terrestre interne
plus ou moins visqueux soumis à l'attraction de la
Lune et du Soleil. Sa tentative n’a point abouti,
mais il nous a laissé la base de ses calculs, ses
admirables catalogues régionaux et ses immenses
distes annuelles, continuées sans interruption pen-
dant trente années consécutives, un double travail
vraiment gigantesque dont quelques erreurs éparses
ne suffisent pas à déparer la grandeur.
Quel que soit le pays dont on veuille étudier
Thistoire ou la géographie sismologique, le pre-
mier fonds de recherches est obligatoirement
TPæuvre de Perrey. Il faut cependant faire quelques
exceptions. Les unes se rapportent à des pays où,
comme en Italie Baratta, les savants ont repris
son travail pour le compléter à laide des docu-
ments régionaux trouvés sur place. C’est qu’en
effet, surtout il y a quelques années, les grandes
bibliothèques publiques comprenaient partout un
même stock à peu près commun de chroniques,
d'histoires, de voyages et de mémoiresscientifiques.
Dans un quelconque des grands centres univer-
sitaires d'Europe, on pourrait donc entreprendre
de décrire les tremblements de terre d’un pays
donné sans que le résultat final en soit très diffé-
rent, qu'il soit exécuté à Rome ou à Londres, à Paris
ou à Berlin. Mais pour descendre dans le tréfonds
des sources originales et inédites qui permettent
d'entrer dans les détails, il faut vivre dans le pays
même. On peut dire que Perrey a épuisé le pre-
mier stade de ces catalogues sismiques régionaux,
et, depuis lui, peu de pays ont réussi à atteindre le
second. Les autres exceptions, plus haut indiquées,
sont relatives à la Chine et à l'Inde. Les raisons
qui leur ont donné lieu sont connues. En ce qui
-concerne la Chine, Perrey n'aurait pu que rééditer
purement et simplement le catalogue publié par
Biot en 1841, et qui a été complètement ignoré des
Mallet. Quant à l'Inde, il ne put accéder aux col-
lections de l'Agialic Society, ce qui fut bien facile à
ses rivaux d'Angleterre. L'histoire du catalogue sis-
mique moderne des tremblements de terre chinois
est trop touchante pour que nous n’ouvrions pas une
parenthèse en sa faveur. Le savant Jésuite Hoang,
bien connu des sinologues par l'immense labeur
que lui avait coûté sa Chronologie chinoise, avait
atteint soixante-dix-sept ans en 1906 quand ses
frères de l'Observatoire de Zi-Ka-Weï lui deman-
dèrent d'en extraire les tremblements de terre de
la Chine rencontrés par lui dans les immenses
chroniques qu’il avait scrutées toute sa vie. Sans
la moindre hésitation il se mit à l’œuvre, et le
8 octobre 1909, veille de sa mort, il en remettait
le manuscrit publié dans les Variétés sinologiques.
Il en résultait près de six mille faits authentiques
répartis sur trente-sept siècles.
Les catalogues de Perrey sont régionaux, par-
tant commodes à consulter; celui des Mallet, au
contraire, est chronologique pour le monde entier
et à peu près inutilisable, sauf en de très rares cir-
constances, défaut qui se retrouve dans les listes
annuelles de Perrey, mais y était inévitable. Il se
retrouve aussi dans les catalogues annuels de l’As-
sociation internationale de sismologie, malgré
qu'il ait été fait de vigoureuses objections à cette
forme de publication. C’est encore cette forme
chronologique générale qui a été adoptée par
Lersch, médecin d’Aix-la-Chapelle, dont le cata:
Ne 1432
logue manuscrit a été présenté en 1903 à la même
Association en vue de sa publication. Ce projet n’a
pas eu de suite faute de fonds, a-t-on dit, mais
plus vraisemblablement parce que ce meùût été que
rééditer en grande partie les catalogues de Perrey,
de Mallet et de Fuchs.
Quoi qu’il en soit de ce dernier point de détail,
le regretté savant que fut Lancaster nous écrivait
ce qui suit en date du 20 décembre 1907, c'est-
à-dire deux mois seulement avant sa mort:
Esri Et involontairement je pensais à mon
vieil ami Perrey — je devrais plutòt dire vénéré
maitre, — qui ne se doutait certes pas même dans
ses derniers jours de la révolution qui allait s’opé-
rer dans le domaine de ses études favorites. Le sou-
venir de Perrey me fait songer que dans une cir-
constance importante on fut bien injuste à son
égard. C’est à propos du fameux catalogue de Mallet,
qui n'est en réalité qu’une sorte de plagiat de
l’œuvre tout entière du savant français. Mallet
s'est borné à mettre en tableaux et à résumer
toutes les données que contenaient les nombreux
catalogues de Perrey. Il n’a absolument rien ajouté
de son cru, et sa liste s'arrête à 1843, alors qu'elle
a été publiée en 1855, par la bonne raison qu’à ce
moment Perrey n’était arrivé dans son travail qu'à
l'année 1843. Mallet avait bien d’autres cordes
à son arc, et Perrey souffrit beaucoup de voir le
savant anglais porté aux nues, alors qu'on faisait
le silence sur l’ensemble imposant des matériaux
qu'il avait si patiemment réunis. Perrey s’en plai-
gait à Mallet, et celui-ci répondit d’une façon très
embarrassée. J'eus un jour l’occasion de lire sa
réponse. »
Admirateur des Mallet aussi bien que de Perrey,
nous avons voulu nous rendre compte du plus ou
moins de bien fondé du sévère jugement de Lan-
caster et de sa nette affirmation. Seule, la statis-
tique comparée permettait de résoudre la question.
Ea voici les résultats.
Si l’on prend, par exemple, le catalogue de Per-
rey relatif à la France, à la Hollande et à la Bel-
gique et publié en 1844, on trouve par un pointage
minutieux que le catalogue général des Mallet
comprend un résumé de tous les tremblements de
terre que renferme celui-là et aucun autre: à
peine de-ci, de-là, quelques retouches aux réfé-
rences bibliographiques, et c'est tout. Les Mallet
ont donc simplement noyé le catalogue régional
de Perrey dans un catalogue chronologique général.
On pourrait à la rigueur penser que les sismo-
logues anglais ont supposé que, pour ces pays, il
leur serait impossible de glaner fructueusement
après Perrey, qui, habitant la France, était plus
à portée des sources qu'eux-mêmes. Cette excuse
ne lient pas; en effet, le résultat de la comparai-
son reste identiquement le même pour le catalogue
de Perrey relatif à la péninsule turco-hellénique
COSMOS 23
et à la Syrie, publié en 1848. Les Mallet n'ont donc
exécuté aucun travail personnel quant à ces der-
niers pays que n'habitaient ni eux ni leur rival.
On pouvait espérer que les tremblements de
terre des Iles Britanniques auraient été l’objet de
fructueuses récoltes personnelles de la part des
Mallet relativement au catalogue de Perrey publié
en 1849. Un pointage minutieux démontre que si
les Mallet ont inséré dans leur travail tous les.
234 tremblements de terre de Perrey, ils n'y ont.
ajouté qu'une cinquantaine de faits tirés soit dw
Gentleman's Magazine, soit surtout du catalogue-
de David Milne, le père, croyons-nous, du savant
et célèbre sismologue moderne. Il est très digne de
remarque que précisément Perrey, dans la pré-
face de son catalogue des tremblements de terre-
d'Angleterre, s’excuse de n’avoir pu se procurer le-
travail de D. Milne.
Nous avons reculé devant la tâche fastidieuse,
quoique instructive, d'étendre cette comparaison
à tous les catalogues de Perrey, bien certain d’ail-
leurs que le résultat en serait le même ; nous nous
sommes contenté de chercher ce qu’il en était
quant aux catalogues régionaux publiés par Per-
rey postérieurement à l'impression du catalogue
des Mallet. L'examen de ceux des Moluques et des-
Philippines démontre que pour ces pays les Mallet
n'ont connu que les tremblements de terre peu
nombreux relevés antérieurement par Von Hoff, et
dont le catalogue général avait été publié en 1840
par le fameux géographe allemand Berghaus. Là
encore le travail personnel des Mallet a été fon-
cièrement nul.
En terminant leur catalogue, les Mallet annoncent
que, projeté pour se conclure à l’année 4850, ils le-
limitent cependant à l’année 1842, Perrey ayant
commencé en 1843 ses listes annuelles; mais ils.
ajoutent qu'ils en étudieront les conséquences sta-
tistiques jusqu’à l’année 1850. Cette promesse n'a
pas été tenue, et ils ont préféré reproduire identi-
quement dans le mémoire explicatif publié en
4858 les tableaux de répartition mensuelle dont
Perrey faisait suivre chacun de ses catalogues.
régionaux. A la vérité, pour quelques-uns, les Mal-
let en font explicitement l’aveu; mais pour d'autres
ils disent, par exemple: nous allons procéder
maintenant....., donnant ainsi à entendre qu'il va
s'agir de leurs propres calculs étendus jusqu'a 1850,
alors qu'ils rééditent les chiffres de Perrey limités
à l'année 1843.
L’assertion de Lancaster ne saurait être plus
clairement et péremptoirement démontrée et les
catalogues des Mallet ne sont qu'un démarquage
de ceux de Perrey, démarquage déguisé par la
transformation en un catalogue chronologique
général. Combien différente a été l'attitude de
O'Reilly, un autre Anglais, qui, en 1885, publia un
catalogue sismique de l'ancien monde, alphabé-
2% COSMOS
tique celui-ci, dans le but d'appliquer aux tremble-
ments de terre la théorie du réseau pentagonal
d'Élie de Beaumont, tentative sans résultat d'ail-
Jeurs. O’Reilly n’hésite point à dire qu’il a pure-
ment et simplement utilisé les catalogues de Per-
rey, de Mallet et de Fuchs.
Au reste, on doit considérer comme close l'ère
des catalogues généraux tels que les ont exécutés
Perrey dans secs listes annuelles de 1843 à 1872 et
Fuchs dans les siennes jusqu’à 1885. Le dévelop-
pement des informations reçues de toute la surface
du globe en fait une œuvre actuellement impos-
sible, et l'Association internationale de sismologie
est déjà obligée de se limiter. Ce que l'on doit cher-
cher maintenant, c’est l'établissement des cata-
logues régionaux au moyen des documents locaux
jusqu’à l’époque où dans chacun d'eux s'est institué
un service permanent d'observations sismologiques.
C'est ce que nous avons actuellement entrepris
pour le Chili.
Si nous avons voulu fixer une fois pour toutes le
point d'histoire de la sismologie signalé par Lan-
caster, c'est que Perrey n’a vraiment pas été heu-
reux dans sa carrière scientifique et qu'il est mort
presque inconnu en dedans des frontières de son
propre pays. Il a eu beaucoup de diflicultés à
publier ses immenses et si utiles travaux, et si
trois institutions scientifiques françaises l'ont aidé
& JUILLET 1919
dans la mesure de leurs moyens limités, l’Acadé-
mie de Dijon, la Société d'émulation des Vosges
et la Société impériale d'agriculture et arts utiles
de Lyon, c'est grâce à l'Académie royale des
sciences de Belgique, sous l'impulsion intelligente
de Quételet, que nous pouvons utiliser — et on le
fera longtemps encore — la majeure partie de son
œuvre considérable. Nul n’est prophète dans son
pays, et c'est aussi à l'étranger, à Naples, qu'il faut
aller consulter sa précieuse bibliothèque sismolo-
gique dont le catalogue, publié en 1855 et en 1863,
contenait 3376 articles dont beaucoup sont à peu
près introuvables ailleurs. Nul doute qu'elle ne se
soit notablement augmentée jusqu’à 1875, époque,
croyons-nous, de sa mort.
Nos propres recherches de géographie sismolo-
gique n'auraient guère été possibles sans les tra-
vaux de Perrey, ou du moins elles auraient été
beaucoup plus incomplètes, aussi lui devions-nous
bien cette revendication posthume provoquée par
son ami Lancaster; mais si l’œuvre des frères Mal-
let apparait nulle quant à leur catalogue sism olo-
gique, ils restent, du moins, avec la gloire d'a voir
introduit les méthodes de mesure dans l'étude des
tremblements de terre, suffisant titre à n'être pas
oubliés de longtemps.
C DE MONTES<US DE BALLORE.
Santiago, 15 mars 1912.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 17 juin 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Nécrologie. — M. le Secrétaire perpétuel annonce
à l’Académie la perte qu’elle vient de faire en la
personne de M. Ferdinand Zirkel, Correspondant
pour la section de Minéralogie, Professeur à l'Univer-
sité de Bonn, décédé à l'âge de 7# ans.
Sur la longueur d’onde des radiations
actives dans la synthèse photochimique des
composés ternaires. — Parmi les processus de
restauration d'énergie chimique, le plus important
dans la nature est celui par lequel les plantes vertes
au soleil refont synthétiquement les hydrates de car-
bone aux dépens de la vapeur d'eau et du gaz carbo-
nique. L'insuccès répélé des tentatives faites pour
réaliser ce processus en dehors des êtres vivants avait
amené des savants tels que Joule, Lord Kelvin,
Helmholtz, à penser que le principe de Carnot n'était
pas applicable aux Ctres vivants et que ceux-ci pou-
vaient, non seulement ralentir la dégradation de
l'énergie, mais même la restaurer.
MM. D. Benrurcor et H. Gaupecuox ont cependant
réalisé, il y a deux ans, les réactions fondamentales
de la synthèse chlorophyllienne grâce aux rayons
ultra-violets. C'est donc bien la lumière qui est l'agent
de restauration de l'énergie chimique, et il n’y a pas
là une action propre à la vie, mais un simple proces-
sus physico-chimique.
Toute la différence, c'est que dans les plantes ce pro-
cessus a déjà lieu sous l'influence de vibrations
visibles jaune orangé, c'est-à-dire relativement lentes,
tandis que les auteurs ne le réalisent qu'avec les
vibrations ultra-violettes les plus rapides des lampes
à vapeur de mercure; l'ultra-violet solaire ne produit
pas la synthèse de l'aldéhyde formique à dose appré-
ciable, mûême en une année.
Sur le gaz des boues des fosses septiques.
— Les boues des fosses septiques, dans le traitement
biologique des eaux d'égout, sont embarrassantes, et
leur accumulation dans les usines d'épuration pré-
sente, au point de vue de l'hygiène, de sérieux incon-
vénients qu'on doit éviter.
En distillant des boues provenant des fosses sep-
tiques du Mont-Mesly, M. L. Cavez a obtenu un gaz
qui présente un certain intérèt.
Sa composition permet de prévoir qu’il est capable
de fournir 300 calories environ par mètre cube,
énergie calorilique qui lui ferait trouver un emploi
avantageux dans les usines d'épuration, en l’utilisant
comme force motrice.
ns
— — 1 [a Á c M mMm
N° 1432
Une usine d’une moyenne importance peut fournir
plusieurs tonnes de boues sèches par vingt-quatre
heures (300 grammes par mètre cube d'eau traitée).
100 grammes de boues sèches donnent 4,23 } de gaz,
soit 42,8 m° par tonne.
Le gaz des boues est peu éclairant, et il n’y aurait
pas avantage à le consommer directement pour l'éclai-
rage. Si l'on voulait l'utiliser dans ce but, il pourrait
servir à porter des manchons à l’incandescence.
Sur l’injection intra-veineuse du vibrion
cholérique vivant. -— L'inoculation de microbes
vivants confère une immunité comparable à celle qui
suit la maladie naturelle. La haute efficacité des
méthodes de vaccinations pasteuriennes (charbon,
rage, etc.) tient à ce que l’atténuation de la virulence
des microbes laisse intacte leur vitalité. MM. Cu. Ni-
cCoLLE, A. Coxor et E. CoxnseiL se sont proposé de traiter
préventivement le choléra par cette méthode.
Il est à remarquer que, dans le choléra, l'agent
pathogène reste localisé dans l'intestin, sans passer
dans le sang. En injectant les vibrions cholériques
dans les veines, les auteurs assurent très rapidement
leur destruction par les phagocytes présents dans le
sang. Au reste, ils ne déversent dans le torrent circu-
latoire qu'une émulsion très étendue de microbes, en
séparant ceux-ci à l'état d'individus isolés. Une goutte
(1: 35 cm) de cette émulsion représente environ
400 000 vibrions vivants. La méthode comporte deux
inoculations, à dix ou quinze jours d'intervalle : la pre-
mière d'une goutte, la seconde de six gouttes de cette
préparation, qu'on dilue chaque fois dans 50 centi-
mètres cubes d’eau salée à 8 pour 1 000.
La méthode a été essayée sur 36 sujets de bonne
volonté à Tunis; non seulement les personnes ainsi
traittes ne contractent pas le choléra, mais on ne
constate jamais le passage des vibrions dans leurs
selles. Trois sujets vaccinés ont, au bout de 10 à
12 jours, ingéré impunément des vibrions toxiques.
Elle a été aussi appliquée à la dysenterie.
Désinfection des mains par la teinture
d'iode et décoloration par le bisulfite en chi-
rurgie courante et d'urgence. — L'emploi de la
teinture d’iode pour la désinfection des mains du chi-
rurgien n'est guère répandu en raison de la coloration
de la peau, difficile à faire disparaître.
M. TaP#ANEL propose de décolorer les mains ainsi
traitées par une solution étendue de bisulfite de
soude.
Cette aclion da bisulfite est bien connue, mais elle
n’est guère utilisée jusqu'à présent en chirurgie. La
solution de bisulfite fait déjà partie de l'arsenal chi-
rurgical. Les résultats obtenus instantanément sont
parfails. 4° La peau est décolorée; 2’ l’action antisep-
tique du bisulfite s'ajoute à celle de l’iode; 3° la sécré-
tion sudorale (qui d'ordinaire nécessite des lavages
au cours de l'opération) est suspendue pendant un
temps variant de une heure à une heure et demie.
Influence des fortes chaleurs sur certains
insectes parasites de végétaux. — Les variations
atmosphériques peuvent avoir une grande influence
sur le développement des insectes; mais, parmi les
facteurs susceptibles d'exercer une action sur ces
êtres, un de ceux qui se font sentir k plus brusque-
COSMOS | 25
ment, et peut-être le plus radicalement, est certaine-
ment la chaleur.
Nombreux ont été les auteurs qui, en 41911, ont
signalé l'avortement de la génération d'été de la
Cochylis. On a discuté pour établir sur quelle généra-
tion les fortes chaleurs de 1911 avaient plus particu-
lièrement fait sentir leur action. Sans intervenir dans
łe débat, M. Caaixe, qui a fait d'importantes observa-
tions à ce sujet, retient ce fait que les fortes tempéra-
tures de juin et juillet 4911, concordant avec une
période prolongée de sécheresse, ont détruit un très
grand nombre de larves et de chrysalides de cochylis,
au point que la deuxième génération a été à peu près
complètement annihilée.
Sur la constance probable de l'activité sis-
mique mondiale. — Le catalogue général des trem-
blements de terre destructeurs, ou mégasismes, que
vient de publier J. Miine, et qui débute avec l'ère
chrétienne, permet d'aborder pour la première fois la
question de savoir si l'activité sismique mondiale est
constante ou non, en admettant qu'elle soit mesurée
par le nombre annuel des mégasismes.
M. F. DE MonTEssus ne BaLLore observe que depuis
1850 le nombre annuel des mégasismes apparait con-
stant : 31 en moyenne.
En a-t-il été de même antérieurement? À cet égard,
le catalogue de Milne ne permet pas une affirmation
catégorique, car dans les premiers siècles de notre
ère, les annales historiques n'ont vraisemblablement
enregistré qu'un très petit nombre des tremblements
de terre. Au Japon, depuis sept siċcles, la sismicité
est constante; il en est sans doute de même pour le
monde entier depuis de longs siècles, si l’on parle de
la fréquence des mégasismes.
Contrôle de la nouvelle méthode de dcsage du fluor.
Caractéristique des plus faibles traces de ce corps.
Note de MM. Ansanp Gautier et Paru CLAUSMANN. —
Inversions stéréoscopiques provoquées et subies par
les images rétiniennes de simples points dans l’espace.
Note de M. A. Cnauveau. — Étude de la raic D en
unités absolues et application à la physique solaire.
Note de M. Gouy. — Sur le cyclohexanol : Étude cryo-
scopique, chaleur de dissolution, de fusion, de volati-
lisation. Note de M. pe Forcrax»o. — Hydrogénation
directe des diphényléthanes : préparation des dicy-
clohexyléthanes. Note de MM. Pace SaBaTien et M. MURAT.
— Sur la résorption de glycose dans les tubuli du rein.
Note de MM. R. LÉPixE et Bouztb. — L’orbite du hui-
tième satellite de Jupiter. Note de M. J. TROUSSET. —
M. BeLoT expose une expérience qui reproduit les
spires des nébuleuses spirałes, et qui donne des résul-
tats conformes à sa propre théorie; dans l'expérience
présentée, M. Belot a reproduit la nébuleuse des Chiens
de chasse. — Sur les équations aux dérivées partielles
définissant des surfaces susceptibles de passer par un
contour fermé. Note de M. À. Buaz. — Sur certaines
équations aux dérivées partielles du type parabolique.
Note de M. Maurice GEvVREY. — Sur les plaques cireu-
laires épaisses. Note de M. Mexxactn. — Sur le mou-
vement des électrons dans un champ électromasné-
tique donné. Note de M. Tu. De Doxnen. — Sur les défor-
mations élastiques sans efforts tangentiels. Note de
M. U. Cisorri. — Inversion du phénomène de Hall dans
26 | COSMOS
le bismuth. Superposition de deux effets galvanoma-
unéliques de sens opposés. Note de M. JEAN BECQUEREL.
Sur la mesure de pelits étalons industriels à faces
planes par une méthode interférentielle. Note de
M. À. PÉRanv. — Sur l'existence de quatre acides tar-
triques inactifs et sur la loi de l'action de masse. Note
de M. ALBERT Corson. — Sur la stabilité des hypoio-
dites. Note de M. V. Arser. — Sur l'anhydride ura-
nique et ses hydrates. Note de M. PauL Lesrau. — Sur
les éthers glycidiques de la 3-naphtanone, l'aldéhyde
naphtanoïque et la méthvinaphtanylcétone. Note de
MM. G. Dauzexs et H. LEnoux. — Nouveaux colorants
azoïques de l'oxvde de dyphénylène-amine. Note de
M. A. Maite. — Sur la distribution des bases miné-
rales chez l'orge, au cours de l'évolution de ce végé-
tal. Note de M. G. ANbRÉ. — Sur la production d’urée
par hydrolyse des albuminoïdes. Note de M. R. Fosse,
— Les maladies des animaux préhistoriques. La spon-
k JUILLET 19412
dylite déformante chez l'ours des cavernes (Ursus
spelæus BI. J.). Note de M. Marcer, BaupouiN, qui, par
cette étude,démontre que la pathologie osseuse a désor-
mais une histoire qui atteint presque la fin de l’époque
tertiaire! — Sur quelques propriétés biochimiques du
Bacillus aminophilus intestinalis. Note de MM. ALBERT
BerTHELOT et D.-M. BERTRAND. — Immunisation anti-
typhique de l'homme par voie intestinale. Note de
MM. Juies Couruonr et A. Rocuaix. — Une source
abondante de virus agalaxique pur. Note de M. H. Carré.
— Hypotension externe et hypertension interne. Réper-
cussion de l'action hypotensive de la d'’Arsonvalisation
appliquée localement à l'hypertension interne. Note
de M. A. Mocrier, — Contribution à l'étude expérimen-
tale de la sexualité chez Dinophilus. Note de M. PauL
pe BEatrcusur. — Sur l'âge des schistes d'Athènes.
Note de M. Pu. NéGnris. — Les récentes découvertes
paléontologiques en Indo-Chine. Note de M. H. Maxsuy.
BIBLIOGRAPHIE
La pression osmotique et le mécanisme de
l’osmose, par PIERRE GiRARD. Format 24 X 15,
18 pages. Publication de la Société de chimie-
physique (4 fr). A. Hermann, 6, rue de la Sor-
bonne, Paris, 1912.
D'abord, un bref rappel des théories élaborées
successivement par Pfeffer, Hugo de Vries et Van’t
Hoff, aboutissant à l'assimilation étroite de la pres-
sion osmotique avec la pression gazeuse; théories
complétées par Arrhénius en ce qui concerne les
électrolvtes, L'auteur se hâte d’arriver au point
qui fait l’objet de ses études personnelles. Hei-
denhain et d’autres à sa suite ont montré que, dans
les organismes vivants, les seules différences de
pressions osmotiques ne suflisent pas à rendre
compile du sens et de la valeur des échanges;
ceux-ci se font parfois à l'encontre de ce qu'on
attendrait si losmose seule était en jeu. M. Girard
montre que celte anomalie ne tient pas « à une
activité propre des cellules ». On peut réaliser de
tels échanges in vitro, et ils sont condilionnés
dans ce cas par des forces électriques qui s'ajoutent
aux forces osimotiques proprement dites; il en est
vraisemblablement de même in vivo.
Encore un phénomène biologique qui est sous-
irait du domaine de la soi-disant « force vitale »
pour ètre soumis au déterminisme physico-chi-
mique. C'est du moins un postulat nécessaire à la
science que les phénomènes physiques et chimiques
ne s'accomplissent point autrement dans l'être
vivant que dans la nature inanimée. En ressort-il
que la vie soit la simple « résultante de milliers
de processus physiques et chimiques, qui se che-
vauchent, s'opposent et s’enchevètrent », comme
s'exprime M. Girard ? Nullement. La vie n'en n'est
point la résultante, mais bien la directrice. Elle
les fait converger visiblement vers un but, qui est
la conservation du vivant, individu et espèce. Cette
finalité qui caractérise la vie n’est du ressort ni de
la physique ni de la chimie; elle n'est pas de la
méme nature que l’osmose ou l'électricité. Qu'on
se redise bien : ce n'est pas expliquer la vie que
de nier la vie.
L'art d'être un homme. Traité de « Self-Éduca-
tion » à l'usage des jeunes gens à partir de
seise ans, par H. MocouiLzon. Un vol. in-8° écu
de 468 pages (5 fr). Bloud et Ci, éditeurs,
1, place Saint-Sulpice, Paris.
Voici la fin de l’année scolaire toute prochaine,
mais voici du même coup les préoccupations qui
hantent les foyers au sujet de l'avenir des jeunes
gens parvenus au terme de leurs études. Vers
quelles carrières les diriger, et comment les pré-
parer et les engager à s'y préparer eux-mêmes?
L'ouvrage de M. l'abbé Mocquillon répond aux
parents et aux enfants. Deux parties le constituent :
l'une consacrée à examiner les divers états ou
situations qui peuvent solliciter un jeune homme :
fonctionnarisme, commerce et industries en France,
aux colonies où à l'étranger, carrières militaire,
artistique, ecclésiastique. La seconde partie s'at-
tache à la formation du caractère et des qualités
qui permettent à celui qui veut ne pas se contenter
d'être quelque chose de devenir quelqu'un; les
vertus familiales, l'amour de la patrie, la foi et les
pratiques religieuses seront les leviers de cette
ascension morale.
Malheureusement, l'ouvrage ne porte nulle part
l'émprimatur exigé par la qualité de son auteur.
De plus, il contient, sur la vocation ecclésiastique,
un chapitre rempli d’articulations et d'insinuations
N° 1432
inexactes sur le droit canonique actuel et l’admi-
nistration ecclésiastique, chapitre qui semble avoir
pour but de détourner du sacerdoce. C'est plus que
fâcheux.
La théorie du point. Géométrie rectiligne et cur-
viligne, par le lieutenant-colonel MonræiL. Édi-
tion nouvelle considérablement simplifiée. In-4°
raisin de 442 pages, avec 80 figures et une
planche hors texte (6 fr). H. Dunod et E. Pinat,
éditeurs, quai des Grands-Augustins, Paris.
Cet ouvrage est le résumé des travaux et des
idées du colonel Monteil, l’exposé d'une méthode
nouvelle, ce qu’il nomme la géométrie naturelle,
qui, suivant ses affirmations, non seulement faci-
lite enseignement de cette science, mais permet
de résoudre certains problèmes regardés comme
insolubles jusqu’à présent: la quadrature du cercle,
la trisection de l'angle. Nous ne nous permettrons
pas de discuter les arguments du savant officier, et
il serait impossible, en une courte note bibliogra-
phique, d'en donner une idée exacte; nous ne pou-
vons qu'engager les géomèrres que ces questions
intéressent àse reporter à l’ouvrage que nous signa-
lons.
La Crise française. Faits, causes, solutions, par
ANDRÉ CHÉRADAME. Un fort volume de 700 pages.
(Prix, 3,50 fr.) Librairie Plon-Nourrit et Cte,
Le malaise qui règne en France se complique de
difficultés extérieures incessantes. La plupart des
Français ont bien le sentiment des dangers de
lheure actuelle; mais, absorbés par leurs occupa-
tions journalières, ils ne peuvent en posséder qu'une
intuition assez confuse, car ils manquent de temps
pour se livrer à une analyse méthodique et com-
plète de la situation présente.
M. A. Chéradame a réalisé cet effort considérable,
et son livre expose tous les éléments de la crise
française avec une netteté, une précision et une
documentation qui ne laissent rien à désirer. Grâce
à la disposition de la table et aux indications mar-
ginales, le lecteur se renseigne aisément sur le
point qui l’intéresse varticulièrement.
Toutes les questions essentielles sociales, mili-
taires, politiques intérieure et extérieure, les
diverses hypothèses de guerre sont envisagées avec
soin en se plaçant toujours au point de vue le plus
réaliste, et en faisant un constant appel aux con-
sidérations de bon sens.
Cet ouvrage, d’une forme toute nouvelle, à la
fois livre d'actualité et livre d'histoire, est absolu-
ment dégagé de tout esprit de parti; il nous ren-
COSMOS 27
seigne à la fois sur nos lacunes et sur nos res-
sources immenses qui forment les réserves des
forces nationales.
La publication de ce livre vient tout à fait à son
heure puisqu’elle coïncide exactement avec le réveil
évident des sentiments patriotiques en l'rance.
L. F.
Historia sismica de los Andes meridionales,
por el Conde FERNANDO DE MoNTEssUs DE BALLORE,
director del Servicio sismolojico de Chile. Pri-
mera parte. Un vol. in-8° de 346 pages. Imprenta
Cervantes, Santiago du Chili, 1941.
L'Association sismologique internationale a ex-
primé le vœu que toutes les observations anciennes
des tremblements de terre soient recueillies et
publiées : travail préliminaire indispensable pour
dresser la carte sismologique détaillée et utile de
chaque pays. M. de Montessus de Ballore a exécuté
ce travail pour le Chili et les régions voisines, et
il présente ici le relevé de 10940 tremblements de
terre, résultant de 441 462 observations effectuées
dans la période 1810-1905. Les secousses impor-
tantes sont soulignées et feront l'objet d’un travail
plus détaillé. D'ailleurs, le volume présent n'est
que le premier d’une série de six.
En fait, durant tout le xix° siècle, les observations
sismologiques, sur les deux versants des Andes
méridionales, ont été plus nombreuses et plus ré- `
gulières qu'on n’aurait pu croire au premier abord.
Sites et personnages, par Ebmoxb PiLox, préface
de ANDRÉ HaALLays. In-18, 3,50 fr. B. Grasset,
61, rue des Saints-Pères, Paris.
M. Edmond Pilon, qui est un des ciceroni les
plus fins du tourisme littéraire, nous promène à
travers des sites célèbres et y évoque, avec un art
séduisant, les personnages de l'histoire arlistique
et littéraire qui y séjournèrent: Poussin, aux
Andelys; Rousseau, à Ermenonville; Gérard de
Nerval, dans le Valois; Guérin, à Lunéville, etc.
M. Pilon a l’admiration trop libérale et trop
indulgente, et nous voudrions ajouter bien des
ombres à ses portraits; mais on ne saurait mettre
au service d'une érudition diverse et sùre une ima-
gination plus fraiche et plus tendre.
Contribution à la pratique de l’héliothérapie
laryngée, par le D" ALEXANDRE, du sanatorium
d'Hauteville (Ain).
Le docteur décrit le dispositif qu'il a imaginé
pour le traitement des tuberculeux par la cure
solaire.
28 COSMOS
& JUILLET 1919
FORMULAIRE
La conservation du beurre et de la marga-
rine. — On sait les nombreuses recherches dont
ce problème a été l'objet. On a préconisé pendant
quelque temps l'usage de certains produits chi-
miques. Des règlements en ont interdit l'emploi
en France, même dans les plus petites propor-
tions, et cette décision n’a pas élé sans causer
quelque émotion et des protestations dans le com-
merce.
Or, voici que de nombreuses expériences, pour-
suivies en Allemagne par MM. K. Fischer et O. Grue-
nert, tendent à démontrer quen somme le meil-
leur préservatif que l'on puisse employer pour la
conservation du beurre et de la margarine est, tout
simplement, le vulgaire sel de cuisine, le chlorure
de sodium.
Des échantillons contenant 3 pour 400 de ce sel
furent reconnus propres à la consommation après
un délai de trois mois, tandis que les échantillons
témoins, traités avec l'acide benzoïque, l'acide sali-
cylique, l'acide borique, etc., devenaient rances
très rapidement. Avec le sel, la décomposition de
la crème et de la caséine était à peu près empêchée,
tandis que les autres préservatifs ne donnaient pas
le résultat désiré, mème quand (dans le cas du
beurre tout au moins) on y ajoutait jusqu'à
4 pour 100 du produit. Ces constatations sont faites
pour consoler de l'interdiction qui frappe l'usage
de ces produits en France.
Contre les moustiques. — Nous avons dit ici
mème (n° 4337, 40 sept. 1910, p. 298) que le meil-
leur remède contre les piqüres de moustiques est
de les badigeonner avec de la teinture d'iode. Mais
il serait plus avantageux d'éviter les piqüres.
Notre confrère Omnia dit qu'un moyen très effi-
cace est de se couvrir le visage d'une couche de gou-
dron. Procédé héroïque qu'il conseille de remplacer
par une deécoction de bois de Quassia amara. On en
fait bouillir une petite poignée pendant dix minutes
dans un litre d'eau, on filtre et on met le liquide
dans une bouteille pour s'en servir, c'est-à-dire
pour se laver la figure, la nuque cet les mains, sans
s'essuyer. Le liquide, en séchant, dépose ses prin-
cipes amers sur la peau, de sorte que les insectes
et surtout les moustiques, en tàlant le terrain,
s'enfuient au plus vite sans piquer.
Destruction de l’herbe dans les allées — Le
Journal d Agriculture pratique recommande dans
ce but d'employer le crud ammoniac à la dose de
3000 à 4000 kilogrammes par hectare. Il faut
cependant agir avec précaution, s'il y a des arbres
en bordure des allées, car le crud peut corroder les
racines ct faire périr les arbres.
PETITE CORRESPONDANCE
F. G. E., à B. — Vous trouverez traité ce problème
(partage des acides et des bases dans les mélanges de
sels) dans la deuxième partie de l'Etude générale des
sels, par ALFRED DiTTE, leçons professćes à la Faculté
des sciences de Paris (2 volumes: prix, 10 francs et
42,50 fr), 1906, Dunod et Pinat, éditeurs, 49, quai des
Grands-Augustins. — Le Dictionnaire de chimie de
Wcurz a été édité par la librairie Hachette, 79, boule-
vard Saint-Germain. — Revues de chimie: Moniteur
scientifigue du D° Quesneville, 25 francs par an,
42, rue de Buci, Paris (haute chimie industrielle), et
Revue générale de Chimie pure et appliquée (30 fr),
librairie Gauthier-Villars, 55, quai des Grands-Augus-
tins, Paris.
M. H. C., à V. — Vous trouverez ces objets en
castine à la Compagnie internationale de la Galalith
(Hoff et C°), 31, rue Cavé, à Levallois-Perret (Seine).
M. E. L., 5}, P. — Métallisation du plåtre: Plastic-
métal, métallisation par l'électricité, 28, rue de Riche-
lieu. — Caussinus, 35 quater, rue des Saints-Pères.
M. l'abbé V., à A. — Nous vous remercions de votre
communication; la Maison de la Bonne Presse possède
un appareil semblable, le Duplicateur, qui donne toute
satisfaction ; d'ailleurs, ces appareils ne peuvent servir
pour les travaux auxquels vous faites allusion.
M. V. F., à la R. — Les livres à l'Index sont men-
tionnés dans l'Zndex librorum prohibitorum (5 fr) que
vous pourrez vous procurer à la librairie Lethielleux,
10, rue Cassette, à Paris.
M. P. H., à Q. — Volions générales sur la télégra-
phie sans fil et la téléphonie sans fil, par R. pe VAL-
BREUZE (12 fr), librairie de la Lumière électrique,
4142, rue de Rennes. Cet ouvrage vous donnera les
notions théoriques. Les renseignements pratiques se
trouvent dans le Précis de télégraphie sans fil, par
J. Zexxecx (12fr), librairie Gauthier-Villars, 55, quai des
Grands-Augustins, Paris. — À cette mème librairie,
vous trouverez un récent ouvrage de M°° Curie, sur le
traitement des substances radio-aclives. — Nous ne
pouvons vous renseigner pour la question pechblende;
mais adressez-vous à la maison Poulenc, 122, boule-
vard Saint-Germain, qui doit en posséder.
M, H. M., à M. — L'{t{/as général Vipaz-LABLACHE
(30 fr}, librairie Colin, 5, rue de Mézières, qui a beau-
coup de bonnes cartes, mais peu de texte. — Ou
mieux, le Cours complet de géographie de ScuraneR et.
GaLLocévec (6 fr), librairie Hachette, 79, boulevard
Saint-Germain.
D' M., à C. — Il a paru des notes à ce sujet de
divers côtés, mais nous ne croyons pas qu'il y ait
encore de compte rendu officiel sur les nouvelles
fouilles de Pompéi.
PE
Imprimerie P. F«roN-Vrau, 8 ot 6, roe Bayard. Paris, VII?
Le gérant: KE. PETITEENRT,
No 41433 — 11 JUILLET 1912
COSMOS | 29
SOMMAIRE
Tour du monde. — Une nouvelle unité. La trombe du 30 juin 1912, à Regina (Canada). La radio-activité et les
tumeurs. Influence des radiations ultra-violettes sur les animaux. La lutte contre les sauterelles dans
l'Amérique du Sud. La transparence des métaux aux hautes températures. Le rendement des lampes
à incandescence. Le secret des dépèches en télégraphie sans fil. Réceplion des radiotélégrammes par les
abonnés du téléphone. La téléphonie automatique. Emploi des piles par l'administration allemande des
télégraphes. La torpille-canon, système Davis. La sécurité à bord des paquebots. Encore un progrès!
Huile de foie de requin, p. 29.
Le filtre-presse continu Berrigan, Dani BELLET, p. 34. — Les quatre planètes transneptuniennes,
O, P,Q,R, F. vs Roy, p. 36. — Les grands réssaux de distribution d'électricité. Leur dévelop-
pement aux États-Unis, leurs avantages, H. Mancuaxn, p. 37. — Les pensées et leur culture,
À. AcLoQuE, p. 39. — Le forçage des plantes; les rosiers, J. Boyer, p. 42. — Le repeuplement des
chasses par le système de l’adoption, A. BLANcHoN, p. #4. — Un nouveau système de télégraphie
automatique, L. Fournier, p. #6. — Le cinématographe pour tous, H. C., p. #8. — L’océanographie
dans l’antiquité, J. Taourer, p. 49. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 52.— Bibliogra-
phie, p. 54.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Une nouvelle unité. — Cette unité, mesure de
distance en astronomie, est peu connue, et nous
n’hésitons pas à avouer que nous l'ignorions. C’est
le siriomètre, qui est, par définition, égal à un mil-
lion de fois la distance de la Terre au Soleil. Nous
ne savons ce qui a pu faire choisir ce terme. Il
semble qu’on a voulu prendre comme unité la
distance de Sirius au Soleil. Mais, d'après nos
connaissances actuelles, Sirius est à 92 trillions de
kilomètres de notre système et la Terre à 150 mil-
lions de kilomètres du Soleil; la distance de Sirius
au Soleil serait donc seulement de 643 300 fois la
distance de la Terre au Soleil, Il est vrai qu’en ces
mesures on peut arrondir les chiffres sans ihcon-
vénient, et le siriomètre étant fait égal à un mil-
lion de fois la distance de la Terre au Soleil, les
calculs en seront facilités.
Cette nouvelle mesure est due aux travaux du
professeur Charlier sur le nombre et la distance
des étoiles, travaux fort difficiles, car les éléments
font bien défaut encore. D’après lui, la distance
‘mite de notre système stellaire dans la direction
uu plan de la Voie lactée doit être estimée entre
600 et 1 400 siriomètres, ce qui ne laisse pas que
de présenter une certaine marge.
MÉTÉOROLOGIE
La trombe du 30 juin à Regina (Canada).
— Une trombe des plus violentes a passé le
dimanche 30 juin, à 5 heures de l'après-midi, sur la
ville de Regina, capitale de la province de Saskat-
chewan (Canada), y causant les plus grands dégâts
et faisant périr trente personnes. C’est l'orage le
plus formidable que l'on ait vu, de mémoire
d'homme, dans l’ouest du Canada. Le passage de
la trombe sur la ville, ne dura que trois minutes,
T. LXVII. N° 1433.
et elle y ouvrit une tranchée de 100 mètres de
large. Arrivant du Sud, elle détruisit nombre de
monuments, entra dans la cité, où plus de 100 mai-
sons furent ruinées; elle atteignit le Canadian
Pacific Railway, où elle renversa une demi-dou-
zaine de ces grands élévateurs de grains, si employés
dans celte région, et continuant sa route vers le
Nord, détruisit encore de nombreux édifices. C'est
un désastre épouvantable, car tous les habitants
furent surpris avant d'avoir pris la moindre pré-
caution. On croyait à un orage violent, mais rien
n’annoncait un pareil cataclysine.
SCIENCES MÉDICALES
La radio-activité et les tumeurs. — M. W. S.
Lazarus-Barlow (Proceedings of the Royal Su-
ciety, B. 578) pense que certaines tumeurs, ma-
lignes ou non, contiennent nalurellement une
petite quantité de substance radio-active. Ces tissus,
traités par l’acétone ou l'éther, puis par leau, et
ensuite introduits dans un électroscope chargé.
accélèrent la perte naturelle d'électricité de la
feuille d'or.
L'auteur s'est assuré que les réactifs employés
ne contenaient aucune substance radio-active et
que les tumeurs n'avaient pas été traitées par le
radium pendant la vie des malades.
Comme on avait émis l'objection que peut-ètre
l'effet mesuré, qui est ordinairement assez faible,
provenait simplement de variations dans la capa-
cité électrostatique de l'électromètre. l'auteur
a repris ses expériences en opérant sur des tissus
desséchés et pulvérisés, ainsi que sur les gaz
extraits par ébullition des substances aprés qu'elles
ont digéré quatre semaines dans l'aide chlor-
hydrique. Il a retrouvé constamment les mèmes
résultats.
30 COSMOS
PHYSIOLOGIE
Influence des radiations ultra-violettes sur
les animaux. — M. L. Raybaud a soumis à l'ac-
tion des radiations ultra-violettes des escargots,
des tètards de grenouille, des mouches, des saute-
relles, des scarabées, des araignées et des souris;
ces divers animaux étaient placés au-dessous d'un
arc à vapeur de mercure à enveloppe de quartz et
à 1,50 m de celui-ci.
Dans ces conditions, une courte irradiation des
escargots, le corps de ceux-ci hors de la coquille,
provoquait leur mort en moins de vingt-quatre
heures. Les tètards de grenouille tombaient dans
une sorte :le torpeur après trois heures d'exposition
et mouraient deux heures après (C. R. Soc. de
Biologie, 26 avril 1910).
Les mouches, malgré leur enveloppe chitineuse,
étaient tuées tout aussi rapidement que les tétards,
mais elles manifestaient de l'inquiétude dès qu’elles
subissaient l’action des radiations ultra-violettes.
Les jeunes sauterelles grises périssaient au bout de
deux ou trois jours d'irradiation, tandis que les
adultes supportaient celles-ci pendant une semaine
sans paraitre incommodées.
Les scarabées.sacrés, diverses araignées, parmi
esquelles l'£peira diadema, se mouvaient dans
les cages grillagées, sous le rayonnement de l'arc
au mercure, avec la même activité que des témoins
el cela pendant une quinzaine jours. Enfin, huit
jours d'irradiation déterminaient une forte inflam-
mation des paupières des souris blanches, mais ne
paraissaient pas altérer leur état général.
Alb. B. (Revue scientifique.)
BIOLOGIE — SCIENCES AGRICOLES
La lutte contre les sauterelles dans PAmé-
rique du Sud. — Les sauterelles sont un terrible
fléau pour les pays du Sud-Amérique lels que
l'Argentine, le Paraguay, la Bolivie, le Brésil et
Uruguay. Les espèces les plus communes sont
Schistocerea paranensis Burn et Schistocerca
australis Seud. L'abondance des insectes est telle
parfois que les Jocomotives patinent sur les rails
lubriiiés par leurs cadavres et les trains restent en
détresse.
Dans une note sur agriculture en Uruguay (Bull.
de la Soc. nat. d'agriculture, mai), M. Paul Serre
indique quelles armes on a essayé d'opposer aux
acridiens envahisseurs et destructeurs.
Les agriculteurs déroulent en pleine campagne
des griliages mélalliques qui offrent un obstacle
momentaneé à l’armée des locustes sauteurs; on va
aussi porter l'attaque dans leur patrie d'origine,
en lançant par l'air comprimé des jets d'huile de
uaphte enflammiée sur les jeunes insectes, qui sont
incinérés dans les lieux mèmes d'éclosion.
Le service argentin de défense agricole se fait
11 JuiLLET 19492
le propagateur d'un procédé scientifique nouveau
qui a donné des résultats dans le Yucatan (Mexique)
et dans l'Argentine : on infecte quelques saule-
relles au moyen d'une culture d'un coccobacille
fourni par l'Institut Pasteur; les insectes malades
contaminent leurs congénères par contagion natu-
relle, et les sauterelles atteintes par l'épizootie
meurent au bout d’un ou deux jours. (Cf. Cosmos,
t. LXIV, p. 613, ett. LXVI, p. 304.)
En Argentine, on va dans cinq stations ento-
mologiques convenablement situées élever une
mouche du genre Sarcophaga dont la larve est
un terrible parasite de la sauterelle; la mouche
est inoffensive pour les animaux domestiques et
les plantes. Des pupes de ces mouches ont été déjà
envoyées au Laboratoire agronomique de Mon-
tevideo.
PHYSIQUE
La transparence des métaux aux hautes tem-
pératures. — A froid, les feuilles d'or de 0,0001 mm
d'épaisseur laissent déjà passer la lumière verte,
complémentaire de celle qu'elles réfléchissent.
]l y a cinquante ans, Faraday avait montré que
les feuilles d'or ou d'argent chauffées deviennent
transparentes; la question a été reprise par
M. Beilby, puis par le professeur Turner (Cf. Cosmos,
t. LX, p. 28).
A la température de 550°, une feuille d'or de
4 : 12000 mm d'épaisseur laisse passer la lumière
blanche.
Une lame de verre recouverte d'une couche d'ar-
gent extrèmement mince devient presque complè-
tement transparente quand on la chauffe: la trans-
parence commence à se faire sentir à 240°, elle est
nettement appréciable à 355°, presque complète à
370° et tolale à 390°. Le professeur Turner a mon-
tré que ce phénomène ne se produit qu'en présence
d'oxygène; il n’a lieu ni dans le vide, ni dans l'hy-
drogéne, nidans toute autre atmosphère réductrice ;
comme il n'y a pas accroissement de poids, on a
supposé qu'il se produisait une combinaison tem-
poraire d'oxygène et d'argent qui était détruite
ensuite. Si, la couche métallique étant devenue
transparente par chauffage, on écrit dessus avec un
stylet d'ugate, les caractères sont dessinés en
argent brillant.
Des feuilles minces de cuivre chauffées en pré-
sence d'oxygène deviennent transparentes en émet-
tant une couleur vert émeraude qui devient de
plus en plus foncée au fur et à mesure de l'absorp-
tion d'oxygène.
L'aluminium ne devient transparent ni dans l'air
ni dans l'hydrogène.
Le rendement des lampes à incandescence.
— Le filament incandescent rayonne de l'énergie,
dont une parlie seulement est capable d'impres-
sionner l'œil. M. W. E. Forsythe (Physical Review,
N° 1433
mai) a évalué le rendement lumineux, c'est-à-dire
le rapport de l'énergie lumineuse utile L à
l'énergie totale rayonnée R; il a aussi déterminé
la température des filaments (lampes au tungstène,
au tantale et au carbone). Nous donnons ci-après
quelques-uns des chiffres obtenus.
Les ingénieurs électriciens préfèrent évaluer le
rendement lumineux des lampes, non d'après
l'énergie rayonnée par le filament, mais d'après
l'énergie électrique qui lui a été fournie, et ils
expriment ce rendement en « bougies par watt ».
Les deux évaluations peuvent différer légèrement,
puisque l’une des méthodes tient compte de
l'énergie qui se dissipe dans les attaches du fila-
ment, tandis que l’autre en fait abstraction. -
RENDEMENT LUNINEUX
LAMPE TEMPERATURE | mumm o uam
L: R Bougies par watt.
Tungstène 2032C 0,052 0,890
Tantale 1945°C 0,043 0,655
Carbone 1845°C 0,025 0,368
TÉLÉGRAPHIE, TÉLÉPHONIE
Pour lo secret des dépêches en télégraphie.
sans fil. — Aucune méthode de corréspondance
secrète n’est indéchiffrable : les experts-déchiffreurs
de profession, les cryptophotes, comme on les
appelle dans les ministères, ont bien la prétention
de percer le secret des dépèches dont ils ne pos-
sédent pas la clé. Si la clé choisie par les deux
correspondants n'est pas trop ingénieuse, et qu'il
ne s'agisse que d'une simple substitution de signes,
quand mème les mots ne seraient pas séparés, on
arrive à déchiffrer le cryplogramme, en s'aidant
de certaines remarques, et spécialement de celle
qui concerne l’ordre de fréquence des lettres : dans
la langue française, cet ordre est le suivant :
easintrulodcpmvaqfgbhjxyzk vw.
Mais, quoiqu'il ne soit jamais absolu, le secret
des dépèches peut être assez bien assuré par cer-
taines méthodes. Łe professeur docteur L. Zehnder
(Prometheus, 4 177) rappelle qu'il a indiqué, il y
a trente ans, une méthode qui est usitée en diplo-
matie et qui peut recevoir des applications pour les
radiotélégrammes dont on veut assurer le secret.
On écrit sur une bande de carton l'alphabet
ordinaire ; puis, sur un autre papier, on répète
plusieurs fois l'alphabet entier, mais en changeant
à chaque ligne l’ordre des caractères, cel ordre
étant d'ailleurs quelconque : |
abcdefqghijklm.....
xqzwvkj]jypflog.....
mdbcharienstu.....
bdmgolfputsne.
COSMOS 31
Pour traduire un texte clair en dépèche chiffrée,
on fait correspondre, lettre à lettre, à l'alphabet
normal l'un des aulres alphabets. Si tout au long de
la dépèche on n’a employé que l’un des alphabets
conventionnels, ce sera un jeu de percer le secret;
celui-ci sera mieux assuré si, à chaque ligne, on
a passé à un nouvel alphabet; mieux encore, si le
changement d'alphabet a élé fait à chaque mot:
dans ce cas, un déchiffreur trouvera en effet que,
dans la dépèche, les divers caractères de l'alphabet
se représentent à peu près avec la même fré-
quence.
Les machines à écrire où les caractères sont
portés par un cylindre tournant se prêtent com-
modément à la préparation des dépéches chiffrées.
Sans rien changer au clavier, on peut s'arranger
pour que, à chaque ligne, l'alphabet conventionnel
se trouve transposé d’une lettre, par exemple :
mdbcharien.....
db chariens.....
bcharïienst.....
Le changement d'alphabel peut tout aussi bien
se faire automatiquement à chaque mot, quand
l'opérateur appuie sur la touche des espaces.
Réception des radiotélégrammes par les
abonnés du téléphone. — M. E. Leimer, de
Nancy, a fait connaitre à la Société francaise de
physique que, se trouvant en communication télé-
phonique avec un autre abonné, il a nettement
entendu les signaux télégraphiques que le poste le
la tour Filfel transmet le matin à partir de 10 "40"
(signaux horaires el télégramime metéorologique).
Nul besoin d'antenne spéciale ni de détecteur; la
ligne et l'écouteur téléphoniques ont parfaitement
recueilli les signaux. M. Leimer percevait en méme
temps le son aigu du poste musical de Norddeich.
La ligne téléphonique qui servait à cetle obser-
valion inattendue est, dans sa partie aérienne,
longue de 4500 mètres et se prolonge jusqu'a
Central par un càäble souterrain de 4 000 mètres.
D'autre part, le poste de M. Leimer est relié au
mème Central par une ligne aérienne de 210 mètres
quise continue parun càble souterrain de 500 mètres.
La téléphonie automatique ( Electricien
22 juin). — Il existe actuellement, aux Etats-Unis,
1431 bureaux téléphoniques centraux automatiques,
dont 30 seulement desservent moins de 100 abon-,
nés. Le plus grand réseau automatique est celui de
Chicago, qui compte aujourd'hui 30 000 abonnés et
qui recrute chaque jour de 75 à 100 nouveaux abon-
nés: on pent prévoir que ce réseau, prévu pour
200000 abonnés, atteindra, dans un avenir peu élni-
gné, l'effectif qu'il est appelé à desservir, A noter
que les nombreux Chinois habitant Chicago se font
rattacher de préférence au réseau automaliqie,
étant donné qu'ils éprouvent, sur les réseaux à ser
32 COSMOS
vice manuel, de la difficullé à énoncer les numéros
des correspondants par eux demandés. On leur
donne des disques spéciaux, portant les chiffres
ordinaires et les chiffres chinois, pour former les
numéros de leurs correspondants, ainsi qu'un
annuaire particulier, imprimé spécialement pour
eux. Les plus grands réseaux automatiques des
Etats-Unis, après celui de Chicago, sont ceux de Los
Angeles (24000 abonnés), San Francisco (16 000),
Columbus (14000), Portland (12 000), Grand Rapids
(11 000) et Oakland (8 000).
Dans l'Europe continentale, on ne rencontre
encore qu’un nombre relativement minime de
bureaux centraux automatiques. Ces bureaux sont,
en Allemagne, ceux de Munich-Schwabing, Hil-
desheim. Altenburg, Dallgow, Kaeren, Dornap, Neu-
dietendorf et Dürrheim; on installe actuellement
le service automatique aux bureaux centraux de
Posen et Jde Dresde pour 40000 et 100000 abonnés
respectivement; toutefois, ces derniers bureaux
n'auront d'abord qu'un service semi-automatique
aménagé pour 4000 et 17000 abonnés respecti-
veiment.
En Autriche, on trouve des bureaux automa-
tiques à Graz el à Cracovie; à Vienne, on se pro-
pose d'aménager un bureau semi-automatique.
La Hollande possède un bureau semi-automa-
tique, celui d'Amsterdam.
L'Angleterre installe actuellement deux réseaux
automatiques à Epsom et à Caterham, à titre
d'essai,
Emploi des piles par l’adm'nistration alle-
mande des télégraphes (/ndustrie électrique,
29 juin). — L'administration allemande des télé-
graphes ulilise dé moins en moins les éléments
primaires; eile les remplace par des accumulateurs.
Les piles ne sont plus employees que dans les
petites stations et pour les circuits des microphones
des postes téléphoniques des abonnes.
Connie elémenis à liquide. on n'utilise plus que
cclui de Mecidinger au sulfate de cuivre; il y en
avait 122400 à la fin de 1910. Les éléments
Leclanché à liquide ont été remplacés par des éi-
ments secs (c'est-à-dire à liquide immobilisé). Qa
a essavé d'autres éléments à liquide, mais ils n’ont
pas donné de résultats satisfaisante,
Les piles sèches ont donné de bons résultats,
.particulitrement dans les circuits de microphones.
À la fin ‘de 1910, il y avait 4 453 600 éléments secs
en service, dont 1 206900 chez les abonnés et
08 200 dans ‘les circuits télégraphiques avec télé-
phonie simuitanie. Comine les éléments secs durent
en movenne 2, à 3,0 ans et ne coùtent pas plus
de 1,88 fr,ils sont très économiques. L'adininistra-
tion a essayé en tout 186 types d'éléments secs,
mais elle n'en a retenu qu'un très petit nombre
qui lui aient donné satisfaction.
11 JuiLcer 1919
MARINE
La torpille-canon, système Davis. — Jusqu'à
ces derniers temps, la puissance destructrice de la
torpille automobile a toujours été réalisée par
l'explosion d’une charge de fulmicoton située dans
l'avant de l’engin. Bien que le poidsde cette charge
ait subi de fortes augmentations depuis une dizaine
d'années, les torpilles ainsi comprises se sont
montrées relativement peu efficaces gontre les
navires munis d'un blindage dans les fonds, comme
l'a prouvé lexemple du Cesarevitch pendant la
guerre russo-japonaise.
C'est pourquoi le capitaine de frégate Davis, de
la marine des États-Unis, a étudié dans ces der-
nières années une torpille automobile dont la puis-
sance destructrice est assurée par un procédé dif-
férent.
La torpille automobile ordinaire, système Whi-
tehead, est essentiellement un sous-marin en
miniature dont la partie avant, remplie de fulmi-
coton, explose au contact extérieur de la coque du
navire attaqué.
La torpille Davis est un sous-marin en minia-
ture armé à l'avant d'un canon qui, au contact du
navire ennemi, fait feu et décharge à bout portant
un obus. Celui-ci, animé d'une grande vitesse ini-
tiale, perfore la coque et va exploser au milieu du
navire. (Génie civil, 8 juin.)
Les premiers essais ont été faits avec une tor-
pille Whitehead transformée en torpille-canon; on
en a porté la longueur de 3,55 m à 5 mètres pour lui
donner la flottabilité nécessaire. Le canon est en
acier au vanadium, et les parois ont une épaisseur
de 42,7 mm; une charge de 4 kilogrammes de
poudre sans fumée, enflammée au moment conve-
nable par le recul d’une tige, lance le projectile
avec une vitesse initiale de 265 mètres par seconde.
Le projectile pèse 97 kilogrammes et contient une
charge de 16 kilogrammes d’explosif brisant.
Aux essais, la Lorpille-canon a coulé un caisson
blindé à 7) millimètres d'acier spécial. Jusqu'ici,
sur les navires, l'épaisseur des cloisons blindées
situtes sous la flotlaison n'a jamais dépassé 44 mil-
limètres. |
La sécurité à bord des paquebots. — Le
frénie civil analyse des articles parus dans l'Engi-
neering Magazine et inspirés par la catastrophe
du Titanic.
Après avoir exposé dans un premier article que la
double coque de ces grands navires devrait exister
jusqu’à la flottaison, comme sur les navires de
guerre, sur le (reat Eastern et sur quelques
paquebots (Voir Cosmos n° 1425, p. 535), et ne pas
occuper seulement le fond de la carène, comme
sur le Zitanic, l'auteur, M. Hobson, ajoute :
« Il n'y a aucune raison pour cesser d’accroitre
les dimensions et la vitesse des paquebots, mais
No 1433
les différents gouvernements intéressés devraient
s'entendre pour organiser une police de l'océan,
afin que les paquebots suivent, par exemple, cer-
lains itinéraires, réduisent leur vitesse et fassent
certains signaux en cas de pluie, de neige, de
brouillard, emploient tous la télégraphie sans fil
en cas de danger, interdisent l'usage des boissons
alcooliques aux officiers et hommes d'équipage, et
enfin les obligent à faire des exercices réguliers
de sauvetage, de fermeture de portes étanches, de
mise à l’eau de canots de sauvetage, etc. »
Dans un deuxième article, M. A. Soper insiste
plus particulièrement sur la nécessité d'une orga-
nisation internationale de la navigation maritime.
Seule une conférence maritime internationale,
analogue à celle qui s’est réunie, en 1889, aux
Etats-Unis sans aboutir à des résultats bien tan-
gibles, pourrait résoudre, dit-il, les difficultés très
grandes que soulève la création d’une police inter-
pationale des mers.
Nous ne saurions dire combien nous sommes
heureux de voir enfin triompher les idées du vail-
lant commandant Riondel, soutenues avec tant
d'énergie, et dont le Cosmos a été l’organe pendant
nombre d'années. Nous ne pouvons que rappeler
cette héroïque campagne, trop longue [pour être
analysée ici, mais dont nos très anciens lecteurs
ont certainement gardé le souvenir. Elle a, en son
temps, soulevé des tempêtes; elle s'est heurtée
aux résistances, bien plus, aux colères administra-
tives, commerciales, aux arguments techniques.
Devant de si nombreux ennemis, nous dümes
battre en retraite, mais non sans honneur. Aujour-
d'hui, la campagne est reprise de tous cotés, et
c’est une bien légitime satisfaction pour les ouvriers
de la première heure. Z zaa. ES
W Rappelons que le programme du commandant
Riondel avait pour points principaux : Routes
maritimes à imposer, réglementation de la vitesse
dans certains cas, enfin organisation internationale
de la justice maritime et d’une police interna-
tionale des mers. N'est-ce pas dans les lignes prin-
cipales les desiderata de tous aujourd'hui, comme
l'indique la note citée plus haut?) s4
Encore un progrès! — Nous lisons dans le
Bulletin de l'Association amicale des anciens
nf ficiers de vaisseau l’intéressant entrefiletsuivant:
On va maintenant compter les heures de O à 24.
Dans le même ordre d'idées, la rose des vents ne
tardera pas à être modifiée. A limitation de nos
voisins de l'entente cordiale, nous compterons
bientot les relèvements de 0° à 360° dans le sens des
aiguilles d'une montre.
L'application 'de cette mesure en Angleterre a
commencé le 1°" janvier de cette année, et on espère
arriver à son usage général, non seulement dans la
marine anglaise, mais dans toutes les marines du
globe.
COSMOS 33
Certes, la nouvelle rose des vents offrira une
précision plus grande que l'ancienne division par
quadrants et par quarts, d'autant que le quart,
huitième de quadrant, élait bien mal nommé: avec
les vitesses actuelles des navires, plus d’exactitude
semble nécessaire. Mais on était fait aux anciennes
formules : elles parlaient à l'esprit, et la situation
se peignait dans l'esprit du navigateur: en sera-
t-il de même avec des formules en degrés? Il fau-
dra pour les interpréter un travail de l'esprit plus
ou moins compliqué, mais toujours trop long quand
il faut manœuvrer instantanément, par une sorte
d'opération réflexe.
Le Bulletin que nous avons cité ajoute :
« Quand l'adoption sera définitive, quand nous
en serons là, nous lirons avec ahurissement sur les
journaux de bord des phrases dans le genre de
celle-ci :
» À 2147", aperçu à 315° de la route le feu
d'un vapeur, venu de 335° pour sen rappro-
cher. »
Traduction: à 9"147" du soir, aperçu à # quarts
par bâbord ie feu d'un navire, venu de 2 quarts
sur båbord pour s'en rapprocher.
Par le fait, nous croyons que nos bons capitaines
au cabotage, excellents marins, n’y comprendront
rien ; quant aux officiers brevetés, nous supposons
qu'avec un crayon ils arriveront à une traduction
exacte, mais elle leur demandera du temps à des
moments où il faut agir subitement, sans le moindre
retard, par instinct.
O progrès! dit le Bulletin des anciens offers
de vaisseu. |
VARIA
Huile de foie de requin. — Un sait combien
l'huile de foie de morue est appréciée pour remonter
les constitutions affaiblies. Voici qu'on lui a trouvé
un succédané, l'huile de foie de requin, qui, se
vend sous le nom d'huile de foie de morue, sa véri-
table origine n’élant pas pour séduire les consom-
mateurs, en raison de la mauvaise réputation que
se sont faite les squales.
C'est la Malaisie qui envoie ce produit à l'Europe.
Au mois d'octobre, les requins se réunissent dans
les atolls, franchissent les récifs et s'établissent
dans les lagunes pour s'apparier. Emprisornés
dans ces eaux calmes, ils sont de capture facile et
les pècheurs en font un grand massacre. (es ani-
maux sont de différentes espèces et mesurent de
2,5 m à 4,5 m; le tour du corps est exactement
égal à sa longueur. Le foie d'un requin de la grosse
espèce donne environ 22 à 23 litres d'huile qui
vaut 325 francs la tonne. Extiraite sur place, cette
huile est envoyée en Europe, où elle est ratlinée et
où elle change d'état civil: c'est désormais de
l'huile de foie de morue.
Les requins, malgré leur mauvaise réputation,
34 COSMOS
donnent un bel exemple de leur esprit de famille;
dans les lagunes on les rencontre par paires, mâle
et femelle ensemble; les pêcheurs tAchent toujours
de harponner le mâle d’abord parce qu'après sa
prise ils sont sûrs de capturer la femelle, celle-ci
n'abandonnant jamais son compagnon; toujours
A1 suizzer 1919
l'admirable dévouement féminin! Il y a cependant
une ombre à ce tableau : à la naissance des enfants,
la mère, comme le père, font tout ce ‘qu'ils peuvent
pour les dévorer, sans doute pour leur épargner
les soucis de l'existence vagabonde et affamée, lot
de tous les squales.
a _- —
Le filtre-presse continu Berrigan.
Nous n’avons guère besoin de rappeler que les
filtres, en particulier les filtres-presses, sont
employés dans un très grand nombre d'industries.
lls rendent des services aussi bien dans la fabrica-
tion des vins et des boissons diverses, dans celle
des sirops, des huiles, que dans l’industrie minière,
particulièrement pour recueillir les précipités d'or
et d'argent là où l'on recourt au traitement par
thloruration ou par cyanuration. On en tire égale-
ment parti, dans certains cas au moins, pour
recueillir les graisses et les matières fertilisantes
dans les effluents résultant du traitement des
DIAGRAMME MONTRANT LE MODE D'ACTION
DES AUGETS DE LA PRESSE.
eaux d’égouts. Le principe du filtre-presse, c’est de
aire arriver le liquide à filtrer, c’est-à-dire dont on
veut isoler la partie liquide, en gardant comme
résidu les substances solides en suspension, sur un
issu épais, résistant, suffisamment serré pour
arrèler ces malières solides; une pression plus ou
moins énergique élant exercée pour exprimer tout
le liquide que l’on veut isoler.
D'une façon générale, le filtrage par pression est
une opération intermittente. On dispose des couches
successives de la malière à presser; ces couches
sont enfermées dans une éloffe de filtrage, et toute
la masse est alors soumise à la pression, grâce,
soit à un dispositif à vis, soit à une presse hydrau-
lique, ce qui vaut mieux. Le liquide à exprimer
doit donc, pour s'échapper, traverser la tranche,
pour ainsi dire, des couches successives de
matières à filtrer. Dans le fillre-presse continu
Berrigan, ce sont de minces couches de matière
qui sont pressées séparément. Comme conséquence,
il suffit d'une pression assez faible pour arriver au
résultat désiré. L'inventeur estime que l'avantage
de son dispositif est d'utiliser un poids beaucoup
plus faible d’étoffe à filtrer, puisque cette étoffe
est supportée partout par des plaques de métal
perforé.
La photographie d'ensemble que nous donnons
permet de se rendre compte de l'apparence géné-
rale, et même des dispositions essentielles du filtre-
presse Berrigan. Le filtrage et la pression se font
dans des augets de section demi- circulaire, formant
par suile comme un demi-cylindre creux; ces
augets sont montés sur une chaine sans fin qui
passe alternativement sur ou sous cinq paires de
roues, montées dans un châssis horizontal. Les
maillons de la chaine viennent porter à la péri-
phérie de ces roues par l'intermédiaire d’une sorte
de pivot métallique; parmi ces roues, celle qui est
motrice comporte de véritables dents rappelant
les dents de chaines des bicyclettes ou des automo-
biles; c'est entre ces dents que se logent les pivots
dont nous venons de parler. Les augets, quand
ils passent au sommet d’une roue (nous disons
sommet par rapport à la verticale), se trouvent
beaucoup plus loin les uns des autres que si la
chaine se déplaçait suivant une ligne droite, parce
qu'ils se disposent radialement sur la roue. Au con-
traire, quand ils passent au-dessous d’une roue,
ils se rapprochent autant qu'il est possible les uns
des autres.
Chaque chainon de la chaine porte, non pas
seulement un auget, mais aussi un bloc de pres-
sion: ce bloc peut venir s'adapter exactement
dans l’auget adjacent au moment où la chaine,
l’auget et le bloc passent au point le plus bas de
la roue; par conséquent, le bloc viendra presser
sur la matière contenue dans cet auget.
La substance dont il faut faire le filtrage par
pression est jetée dans les augets au moment où
ils passent au sommet de ia première roue, grâce
à une trémie et à un tambour. Ce tambour com-
porte, dans son fond, une ouverture longitudinale
à travers laquelle la matière peut couler ; la charge
est mesurée automatiquement, grâce à la révolu-
tion de l'arbre disposé longitudinalement à l'inté-
rieur du tambour. Au moment où cette charge se
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l'existence des cinq roues, la pression se renoivé@MlE OR
N° 1433 COSMOS
fait, les blocs de pression sont suffisamment
éloignés des augets pour que la matière à filtrer
ait accès facile dans ceux-ci. Comme de juste,
l'intérieur des augetsest garni d’un tissu de filtrage
qui court d’un auget à l’autre, ainsi qu'on le voit
très bien dans la photographie. Les augets sont
faits de tôle d'acier perforée; si bien que le liquide
s’écoulera à travers le tissu au moment où le bloc
de pression viendra jouer son rôle; ce liquide,
quand la chaine passe en-dessous de la roue sui-
vante, pourra s'échapper à travers les perforations
dans un récipient à bords très peu hauts. Grâce à
lorsque la chaine, avec ses augets, a passé sous la
seconde roue, puis monte sur la troisième pour
passer enfin sous la quatrième. Il faut remarquer
que, au moment du passage sur la troisième roue,
le Mouvement relatif des augets les uns par rapport
aux autres cause un déplacement de l'étoffe de
filtrage. Cela assure le retournement ou tout au
moins l’émiettement des gâteaux de matière solide,
et les met dans les meilleures conditions pour
qu'ils subissent la seconde pression. Comme la
chaine à augets estcontinue, quandelle a passé par-
gr
VUE D'ENSEMBLE D'UN FILTRE-PRESSE BERRIGAN.
dessus la cinquième roue, elle retourne par-dessous
la machine; les gâteaux de matière solide sont
renversés, projetés au dehors, et on peut les
recueillir pour les utiliser comme résidus. L’étoffe
mème servant au filtrage sort des augets, tout en
demeurant maintenue par des tôles; ce issu se
débarrasse automatiquement, pour ainsi dire, des
matières solides qui pourraient y rester adhé-
rentes. |
Ajoutons encore que, parmi les blocs de pression,
il n’y en a qu’un sur six qui soit massif; les autres
ont pu être faits en forme de coquille semi-cylin-
drique; mais les blocs massifs sont nécessaires
pour augmenter le poids de la chaine à augets et
assurer sa bonne adhérence. Le brin de retour
de la chaine passant en-dessous des roues et à la
partie inférieure du cadre de la machine comprend
30 augets et présente un poids d'environ trois
tonnes; ce poids sert à assurer la tension voulue
dans l'ensemble de la chaine. On remarquera, du
reste, que ce brin de retour offre du mou, ainsi
que cela se fait pour presque toutes les chaines
employées pour les cycles, les automobiles, etc.;
cette disposition a été particulièrement adoptee
pour que la machine ne puisse pas subir d’avarie
‘au cas où, accidentellement, un objet en métal et
36 COSMOS
particulièrement résistant se trouverait dans un
des augets; en pareil cas, la chaine perd un peu
de son mou dans sa partie inférieure, tandis qu'elle
est moins adhérente aux roues dans la partie supé-
rieure. ll est à remarquer que, quand Îles augets
sont pleins d'une matière relativement très dure,
le brin de retour s'élève très sensiblement; et du
fait que le mou diminue, la tension dans la chaine
augmente; si bien que la pression est réglée auto-
matiquement, suivant la compressibilité de la
matière mème qui se trouve dans les augets.
La machine peut ètre mise en marche à l’aide
d’une manivelle à bras. par la vapeur ou un moteur
électrique. D'une façon générale, cette machine ne
réclame pas une très grande puissance, quand elle
tourne à allure lente, on peut parfaitement la com-
manderà la main. Il va de soi que le rendement
11 suiLLer 1919
de l'appareil n’est limité que par la vitesse à
laquelle on peut le faire tourner sans imposer
à ses organes une trop grande fatigue. Un de nos
confrères de la presse américaine, qui a suivi son
fonctionnement pendant un certain temps, estime
qu'elle peut marcher dans de très bonnes condi-
ditions à raison de 12 augets par minute, étant
donné qu'il y a 54 augets en tout montés sur
la chaine. Chaque auget, avec une longueur de
90 centimètres, peut contenir un sixième d’hecto-
litre. Dans ces conditions, on traile à peu près
2 hectolitres par minute.
Il faut évidemment voir cette machine subir des
essais dansdiverses circonstances et diverses indus-
tries pour en juger pleinement; mais son principe
est tout à fait curieux et méritait d’être connu de
nos lecteurs. DANIEL BRLLET.
Les quatre planètes transneptuniennes, 0, P, Q et R.
M. W. H. Pickering. professeur d'astronomie à
la célèbre Université américaine d'Harvard (Massa-
chusetts), vient de publier dans les annales de
l'Observatoire rattaché à ce centre de hautes
études (vol. LXI, IHl partie) une statistique des
orbites cométaires qui constitue probablement
l’etude raisonnée la plus complète avant jamais
été publiée sur cetle intéressante question. Elle
comporte plus de deux cents pages in-4° et discute
tous les éléments de comètes connus avec quelque
certitude depuis l'époque chinoise jusqu à la fin de
4909. Le but de cette étude est principalement la
discussion de la répartition des aphélies des
comètes ‘en longitude comme en latitude) et leur
distance movenne du Soleil, discussion entreprise
dans l'espoir qu'elle conduirait à prouver l'existence
d'une planète transneplunienne à laquelle M. Pic-
kering 4x consacré déjà de nombrenx et intéressants
travaux,
Un parie communément en asironomie des co-
métes de la famille jovienne. c'est-à-dire des
astres de ce genre dont laphrlie. Je point de
eur orbite le plus éloigné du Soleil, à l'opposite du
perihelie, s2 trouve dans le voisinage de l'orbite
moyenne le 'a planète Jupiter. De mème, ilya
deux comtes saturniennes, ‘deux comètes ura-
ninnes et six comètes neptiniennes. On croit
conmmunenent que ces différentes cométes se mou-
vaieni auntrelois dans des orbites très peu sem-
blables à celles qu'elles décrivent effectivement,
ou mème quelles n'étaient pas associées au sort
de notre ‘Soleil, et que, passant à certain moment
assez près de Pune des planètes supérieures à partir
de Jupiter, elles ont élé iztrorduites par l'attraction
de celle-ci dans le système solaire. NSi lon indique
weintenant sur un graphique, dans Pordre de leur
distance moyenne, les aphélies des comètes pério-
diques, on trouve que lesdits aphélies seconcentrent,
non pas seulement aux environs des orbites des pla-
nèles principales, mais encore en d'autres points
qui marquent peut-être la distance moyenne de pla-
nètes disparues ou inconnues. C’est dans cet ordre
d'idées que, dès 1878, le professeur anglais Forbes
prédit l'existence et mème la position approxima-
tive d’une planète transneptunienne, c'est-à-dire
d'un corps situé au delà de l'orbite de la planète
de Leverrier, qui marque aujourd’hui la limite
de nolre système.
L étude de M. Pickering est toutefois infiniment
plus complète, car elle ne comprend pas seulement
toutes les comètes périodiques, mais encore toutes
celles pour lesquelles des orbites paraboliques (de
beaucoup les plus nombreuses) ou hyperboliques ont
eté calculées. Fabry et Fayet en France, Strömgren
en Suède, avaient déjà montré, en tenant compte
seulement des planèles connues, que toutes les
cometes connues décrivaient à l’origine des orbites
elliptiques. M. Pickering démontre maintenant
qu'une grosse planète transneptunienne pourrait
fort bien, par son attraction, convertir l'orbite
elliptique d’une comète en une orbite hyperbo-
lique au moment où elle s’apnrocherait du Soleil,
c'est-à-dire pendant l'intervalle ou on peut l’observer,
et transformer de nouveau sa course en une courbe
fermée lorsqu'elle se serait de nouveau éloignce
de lastre central.
Le savant américain conclut finalement qu'outre
la planète transneptunienne (inconnue) dont il a
cherché à démontrer l'existence par l'analyse des
mouvements d'Uranus et de Neptune, et qu'il a
appelée « planèle Q », il existe encore trois autres
planètes appartenant à notre svstème, situées
N° 1433
encore plus loin et qu'il dénomme « planètes P,
QetR ». '
Les éléments de ces planètes inconnues sont
véritablement « vertigineux ». C’est ainsi que la
planète Q, dont l'existence serait la mieux assurée,
aurait une masse égale à 6 centièmes de celle du
Soleil (Jupiter, la plus grosse des planètes connues,
a une masse mille fois plus petite que.le Soleil,
dont la masse vaut 333 000 fois celle de la
Terre!), soit 20000 fois celle de la Terre, une
distance moyenne égale à 875 rayons de l'orbite
terrestre et une période de 26 000 ans. Son
éclat, eu égard à son grand volume, serait de la
grandeur 15,4, et son diamètre angulaire de 1,6.
Théoriquement, il serait sans doute possible de
retrouver cette planète par la photographie, mais
une telle recherche présenterait d'énormes diffi-
cultés à cause du nombre fantastique d'étoiles de
45° grandeur et de la petitesse du mouvement
apparent de l'astre. |
La masse de la planète R ne serait que de
Pordre de la moitié de celle de Q, sa période de
500 000 années (!) et son éclat de la 26° grandeur.
Le télescope le plus puissant du monde, celui de
Observatoire du mont Wilson, dont le miroir
mesure 4,50 m de diamètre, ne donnant que de
faibles images des étoiles de la grandeur 21, et cela
COSMOS 37
avec quatre heures de pose encore, il est certaine-
ment impossible en ce moment de vérifier l'existence
de cet astre. Il faudrait pour le moins un télescope
de 3 mètres d’ouverlure, et encore la recherche
serait-elle fantastique!
Quant à la planète P, sa période de révolution
ne serait que de 1 400 ans, avec une distance de
423 unités astronomiques (4 fois la distance de
Neptune), mais sa masse et son éclat ne sont pas
indiqués. Sans doute sont-ils trop incertains.
Dans l’état actuel de la technique astronomique,
seul, croyons-nous, un heureux hasard pourrait
conduire à la découverte des planètes transneptu-
niennes, si elles existent. La meilleure preuve de
notre assertion, c’est qu'on a recherché photogra-
phiquement et tout à fait systématiquement la
planète O; or, quoique 300000 images d'étoiles
aient élé examinées, on ne l'a pas trouvée. Le
calcul ici est mis en défaut par la grandeur des
influences mises en jeu et l'incertitude qui s'attache
à leur évaluation.
Cet insuccès, qui résulte directement de l'énorme
difficulté du problème, n'enlève rien aux grands
mérites du professeur Pickering, qui, espérons-le,
sera peut-ètre récompensé quelque jour de sa per-
sévérance par la gloire qui s'attache à juste titre
au nom d'un Adams ou d’un Leverrier. F. pg R.
Les grands réseaux de distribution d'électricité.
Leur développement aux États-Unis. — Leurs avantages.
Des divers problèmes aujourd’hui posés à lin-
dustrie électrotechnique, l’un des plus intéressants
est celui relatif à l’alimentation en électricité des
régions peu ou modérément habitées et où les
débouchés pour la vente de l'énergie électrique
sont par conséquent disséminés sur une étendue
relativement grande.
Jl y a quelques années encore, on pouvait croire
que les usages de l'électricité pour l'éclairage et
pour la force resteraient confinés aux aggloméra-
tions et que l'on ne parviendrait point à en mettre
les avantages précieux à la portée des habitants
des districts ruraux ou même suburbains.
Cependant, on commence à se convaincre qu'il
est possible de desservir dans de bonnes conditions
les régions les moins habitées en organisant con-
venablement les systèmes de transmission et de
distribution et en unifiant les réseaux de façon à
englober un nombre plus ou moins considérable
de localités avec leurs faubourgs.
Il va de soi que la réalisation de ce système est
chose compliquée. On comprend facilement que si
l'organisation d’un réseau urbain dans une agglo-
nération homogène ou à peu près homogène est
-
relativement simple, il n'en est pas de mème pour
ce qui est d’un système s'étendant à toute une
région: une telle entreprise ne peut être fructueuse
qu'à la condition d'avoir été extrémement bien
étudiée et d'être entre les mains d'administrateurs
qui sachent lui donner une direction uniforme tout
en respectant les conditions locales propres à
chaque partie du territoire englobé.
Mais, cette difliculté mise à part, l'unification a
généralement un intérèt capital parce qu’elle
permet ordinairement de pousser la centralisation
plus loin qu'il ne serait possible de le faire à défaut
de cette fusion, et parce qu'elle substitue à des
installations isolées, incapables de se seconder, des
centrales pouvant s'assister mutuellement ct fournir
à moins de frais un service plus sur et plus ré-
gulier.
Examinons d’abord les résultats de la centralisa-
tion. D'une facon générale, la concentration de la
production dans une grande centrale, suhstituée à
des installations indépendantes, a des avantages
très sérieux qui peuvent se résumer briéverment
ainsi qu il suit :
4. Réduction de l’équipement générateur nsces-
2N COSMOS
saire. gràce à : aò l'amélioration du facteur de diver-
site: b) la diminution du matériel de réserve;
2. Economie des frais d'installation par kilowatt
de machine installé; `
3. Réduction des frais de production de l'énergie,
rapportés au kilowatt-heure, par suite: a) de
l'emploi de plus grosses machines, ayant un
meilleur rendement : b) de l’amélioration du fac-
teur de charge; c) de la réduction des frais géné-
raux.
La plupart de ces avantages peuvent être con-
sidérés comme résultant principalement de laug-
mentation de la diversité de la clientèle qui se
produit à mesure que la sphère de distribution de
l'usine génératrice devient plus grande.
C'est cette diversité qui se traduit par l'améliora-
tion du facteur de diversité, du facteur de charge
et du facteur d'utilisation et qui rend ainsi le fonc-
tionnement de l'usine plus lucratif.
On appelle facteur de diversité, dans le langage
électrotechnique, le rapport entre le total des
charges maxima de différentes installations et la
charge maximum totale simultanée de ces mêmes
installations.
Ainsi, considérons, par exemple, quatre installa-
tions fournissant des charges maxima de 2 000,
1500, 4 000 et 500 kilowatts; ces installations fonc-
iionnent séparément, dans des conditions distinctes;
les pointes de charge ne se produisent pas en
méme temps pour toutes; lorsque l'on totalise les
charges se produisant à chaque instant, d’un bout
à l'autre de l'année, on observe, par exemple,
que la charge globale maximum est de, disons
4000 kilowatts.
Dans ce cas, le facteur de diversité est de
5000 : 4000 = 1,25; plus le facteur est grand,
plus l'avantage de la centralisation est marqué: si
les installations sont distinctes, il leur faut à
chacune des équipements proportionnés à leur
maximum; si elles sont fusionnces, l'équipement
ne doit plus répondre quà la puissance totale
maximum.
Comme nous l'avons dit, l'amélioration du fac-
teur de diversité diminue donc le coùt des instal-
lations.
Quant au facteur de charge, c'est le rapport
entre la charge movenne et la charge maxima ou
pointe de charge.
Que l'accroissement de la variété de la clientèle
ait pour résultat de l'augmenter, cela est aisé
également à saisir. plus la clientèle est variċe,
plus il y a de chance que les demandes de puis-
sance se complètent et étalent la charge moyenne.
Si le facteur de charge est bon, si la pointe de
charge ne dépasse pas sensiblement la charge
moyenne, les conditions de fonctionnement sont
, favorables, un équipement minimum pouvant faire
lace à la demande.
11 suizzer 1942
Enfin, le facteur d'utilisation, qui est le rapport
entre la production annuelle réelle et la produc-
tion annuelle possible, se relève du moment que
le réseau embrasse une clientèle plus diverse, et
son relèvement contribue à la diminution des
dépenses de production.
Celles-ci comprennent, en effet, les frais de pro-
duction proprement dits, proportionnels à la pro-
duction, et des frais fixes portant sur la totalité de
l'énergie engendrée.
Ces derniers sont d'autant moindres, rapportés
à l'unité de puissance électrique, que la production
annuelle est plus grande. |
_ Pour ce qui est des frais d'installation respectifs
des grandes et des petites usines, il est à peine
besoin de faire voir combien ils sont, dans les
grandes centrales, plus bas que dans les installa-
tions de modeste importance : c'est un fait généra-
lement reconnu et admis.
La différence du coût par kilowatt installé pour
les deux sortes d'usines s’est particulièrement
marquée depuis que l’on emploie dans les grandes
centrales des turbines à vapeur.
Les installations américaines les plus récentes
ne couùtent pas plus de 450 francs par kilowatt
installé, tous frais de terrain, de bâtiment et de
matériel compris; des évaluations ont mème fait
voir que dans de très grandes centrales les dépenses
pourraient ètre réduiles à 350 francs, alors que les
anciennes usines revenaient à des prix variant
entre 550 et 850 francs.
La diminution des frais d'installation influe
nécessairement sur le prix de revient de l'énergie.
Celui-ci est encore influencé favorablement, dans
le cas des centrales, par augmentation de rende-
ment que l’on réalise couramment grâce à ce que
le materiel est utilisé plus complètement et fonc-
lionne plus souvent et plus longuement au voisi-
nage de la pleine charge.
Voilà pour la centralisation.
Quant à l'unification des réseaux, avec la con-
servation de centrales distinctes, elle permet une
centralisation plus grande et elle améliore beau-
coup la sécurité du fonctionnement possible avec
des équipements de puissance donnée.
Elle met en effet les différentes usines en situation
de se seconder mutuellement et d'intervenir dans
la production pour s'assister Pune lautre lorsque
l'une d'elles vient à faire défaut ou se trouve dans
l'impossibilité de fournir tout ce qui lui est
demandé.
En regard des avantages que nous venons de
voir, il y a lieu de mettre deux inconvénients
graves:
4. Nécessité de l'établissement de lignes de trans-
mission coùteuses;
2. Pertes d'ċnergie dans les transformateurs et
dans les lignes.
N° 1433
Un examen approfondi de chaque cas en parti-
culier peut seul permettre de reconnaitre si les
avantages prémentionnés l'emportent ou non sur
les inconvénients indiqués; mais l'expérience
acquise autorise à dire que, d'une façon générale,
ceux-ci sont négligeables comparativement à ceux-
là; il n'est pas douteux que la création des grands
réseaux puisse seul résoudre le problème de la dis-
tribution économique de l'énergie électrique.
` Au surplus, les grands réseaux de distribution
de l'électricité sont dès à présent très répandus
dans la plupart des pays, tant en Europe qu'en
Amérique. TE
C'est, néanmoins, en Amérique que les grands
réseaux unifiés sont le plus nombreux; sans parler
des réseaux hydro-électriques, il y a plusieurs Com-
pagnies de génération d'électricité alimentant avec
des usines à vapeur des réseaux d’une grande
étendue.
Pour les centrales hydro-électriques, il va de soi
que la création d’un vaste réseau de distribution
est, pour ainsi dire, obligatoire, bien qu’il y en ait
beaucoup qui n'aient d'autre rôle que d'alimenter
par une transmission unique le réseau d'une, de
deux ou de quelques grandes villes.
Parmi les réseaux les plus vastes, se place en
premier lieu celui qui dessert la région de Sacra-
mento et de San-Francisco et appartenant à la
Pacific Gas and Electric Company; il couvre un
territoire de plus de 31 000 kilomètres carrés, com-
prenant 1450 villes et villages et dont les points
extrêmes sont distants l’un de l’autre de 321 kilo-
mètres; la Southern California Edison Company
COSMOS 39
étend son action à un territoire de 2 500 kilomètres
carrés; dans le Michigan la Commonwealth Power
Company et la Grand Rapids Muskeyon Power
Company fournissent l'énergie électrique à 25 loca-
lités dont 42 ont moins de 1250 habitants; la
population variant pour l’ensemble entre 90 000 et
442 000; la Janesville Electric Company, de
Wisconsin, réunit quatre usines hydro-électriques
pour fournir lénergie à différentes localités ;
l’Hudson River Electric Power Company dessert
43 villes ou villages et un grand nombre de lignes
de traction.
Comme installations alimentées par des usines
à vapeur, un bel exemple est le système créé par
la North Electric Company, qui s'étend sur une
superficie de 3100 kilomètres carrés; il fournit du
courant à 60 villes voisines de Chicago et qui
comptent de 100 à 27 000 habitants; 19 de ces
localités ont moins de 1 000 habitants; il est pro-
bable que les deux tiers au moins de ces villes
seraient restées privées de distribution d'électricité
si elles avaient dù attendre la création d'usines
individuelles; l Eastern Michigan Edison Com-
pany, qui couvre un territoire de 2 334 kilomètres
carrés, à l'est et au nord-est de Détroit, dessert
49 localités ayant de 150 à 19 000 habitants; 8 seule-
ment de ces localités ont plus de 1 200 habitants;
l'Edison Electric IUluminatingCompany,de Boston,
dessert un territoire de plus de 1 600 kilomètres
carrés, dans lequel se trouvent, indépendamment de
Boston, avec 670 000 habitants, 35 localités ayant
de 800 à 77 000 habitants.
H. MARCHAND.
Les pensées et leur culture.
Le genre Violette (Viola) renferme un assez
grand nombre de plantes au feuillage élégant et
aux fleurs délicates, et qui à cause de leur mérite
décoratif ont été jugées dignes des soins horticul-
turaux; mais deux espèces surtout, en raison de
leur rusticité et de la facilité de leur culture, ont
depuis longtemps été accueillies dans les jardins
et continuent à jouir de l’estime des amateurs: la
violette odorante, dont le type sauvage s’est si
complaisamment prêté à l'amélioration, et la vio-
lette pensée, aux innombrables variétés.
La culture de la pensée est assez aisée pour
tenter quiconque possède un jardin ; cependant, si
l’on veut que cette gracieuse plante revête tout
Pattrait ornementa!l dont elle est susceptible, il faut
lui accorder certains soins dont on lira peut-être
avec intérêt l'indication rapide.
La pensée de nos jardins (vulgairement pensée
vivace, pensée anglaise, herbe de la Trinité) est
une espèce en quelque sorte domestiquée, dont
l'origine sauvage n'est pas connue avec précision.
Suivant une opinion qui n'est pas invraisemblable,
ses diverses races dériveraient par voie de variation
indéfinie de la petite Viola tricolor L. de nos
moissons, herbe annuelle qui produit spontané-
ment des fleurs tantôt jaunes, tantôt violettes, et
dont la racine devient vivace dans les dunes,
milieu où ses fleurs revêtent aussi les nuances les
plus variées du jaune et du violet.
Toutefois, une autre opinion voit dans la penste
cultivée le produit de plusieurs types sauvages,
croisés entre eux ou ayant donné chacun des séries
de variétés particulières. C’est là un problème très
intéressant au point de vue botanique, mais dont
la solution, d'ailleurs diflicile, importe peu au point
de vue horticultural.
L'élément sur lequel porte principalement Ia
variation dans la pensée est le coloris de la Ieur;
ce coloris dérive toujours de Pune ou de Fautre
des deux nuances spontanées de la petite pensée
40 COSMOS
sauvage, à savoir le jaune et le violet. La culture
la d'ailleurs modifié à linfini et en a tiré des
variétés unicolores, soit dans ła gamme du jaune
depuis le blanc pur, soit, dans la gamme du violet,
du rose au noir intense, en passant par le lilas, le
bleu de ciel, le bleu foncé, ou des variétés présen-
F1G. 1. — TOUFFE DE PENSÉE A GRANDES MACULES
(réduite).
tant sur un fond dérivant d'une des couleurs ini-
tiales des taches nettes ou fondues très diverse-
ment disposées panachées, flammées, zonées,
striées, ocellées. Les variétés roses et cuivrées
échappent ordinairement au reproche qui est fait
aux pensées d’être inodores, et répandent un
parfum agréable assez prononcé.
En raison du grand nombre des variétés de la
pensée, les amateurs ont dù peu à peu adopter une
sorte d'échelle pour mesurer leur mérite et établir
sur certains caractères la hiérarchie de leur dignité
esthétique. Les plus élevées dans cette hiérarchie
sont celles dont la fleur est très grande et possède
un contour aussi arrondi que possible, de telle
manière que la réunion des cinq pétales dessine
un cercle; en outre, chacun de ces pétales doit
porter une tache plus foncée que la bordure.
Les formes qui offrent cette disposition se
rangent dans la variété & grandes macules, qui
est celle dont le perfectionnement est plus parti-
culièrement l'objet des soins des horticulteurs. Il
est évident qu’à côté de cette hiérarchie officielle
tout amateur peut en admettre une autre d'après
son goût personnel et accorder sa faveur aux
variélés qui, sans être à grandes macules, lui
plaisent par l'originalité de leur forme ou de leur
coloris, l'aspect pittoresque de leur masque, lop-
position tranchée de leurs nuances.
Les catalogues des marchands comportent tou-
jours un assortiment de variétés fixées et de repro-
duction assez fidèle, suffisant pour satisfaire tous
les gouts, et dans lequel les amateurs peuvent faire
leur choix suivant le but qu’ils se proposent; il est
évident, en effet, que les mêmes formes ne con-
41 JUILLET 1912
viennent pas pour la décoration des plates-bandes,
pour l'ornement des fenêtres, et pour la culture
en vue de la vente de bouquets.
Normalement la pensée est une plante monocar-
pienne, c’est-à-dire annuelle ou bisannuelle, mais
mourant après une seule floraison: c’est ainsi
qu'elle se comporte généralement dans les cultures
en pleine terre et si l'on ne prend pas les soins
qui peuvent artificiellement prolonger sa durée.
Elle est très rustique et s'accommode de tous
les terrains et de toutes les expositions, à l’exclu-
sion cependant d’un excès d’ombrage ou d'humi-
dité. Toutefois elle ne végète dans toute sa beauté
que si on lui fournit un sol très meuble et riche
en aliments; les variétés les plus estimées pour
l'ampleur de leurs fleurs sont à ce point de vue les
plus exigeantes, et les types à grandes macules,
comme la Parisienne, réclament, en outre d'une
exposition bien aérée et bien éclairée, un sol formé
de terreau pur ou tout au moins d'une terre fertile
recouverte d'un terreautage ou d’un bon paillis.
On a noté que, dans une mème variété de pensée,
les fleurs les plus belles par leur développement,
la netteté du dessin et la vivacité du coloris sont
celles quif paraissent les premières et qui s'épa-
F1G. 2. — PENSÉE A GRANDES MACULES 4 LA PARISIENNE ».
nouissent au printemps avant les chaleurs sur de
jeunes pieds nés de semis, et ayant été mis en
place soit avant l’hiver, soit très tôt dans l’année,
vers la fin de la mauvaise saison,
C'est donc au printemps que l'amateur peut jouir
de la beauté des pensées. A mesure que la saison
Ne 1433
s'avance, les touffes prennent plus d'extension, et
sur le mème pied le nombre des fleurs s’accroit,
au détriment de leurs dimensions et de leurs cou-
leurs, qui peuvent devenir bien différentes de celles
des premières fleurs.
Aussi est-il indiqué, pour se conformer aux lois
de l'hérédité, de ne récolter les graines des variétés
dont on souhaite la perpétuation que sur les fruits
provenant des fleurs de printemps, à l'exclusion
des autres.
La diminution de la beauté des fleurs à mesure
que la saison s'avance peut être entravée dans une
large mesure par la pratique du pincement, en ne
laissant subsister à partir de la racine qu'un petit
nombre des tiges principales et en supprimant
l'extrémité des ramifications: la plante est ainsi
Dra
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F1G. 3. — PENSÉE STRIÉE-PANACHÉE.
ramenée artificiellement aux conditions de floraison
restreinte, et par conséquent plus énergique, que
réalise sa végétation normale au printemps.
Il est utile, en outre, d'entretenir sa vigueur en
fournissant de temps en temps au sol où elle croit
des aliments de rapide assimilation, par exemple
par des arrosages d'eau où du fumier aura été mis,
à macérer pendant quelques jours. Enfin, pour
permettre à la floraison de se prolonger sans trop
perdre de sa beauté, il est encore indiqué de sup-
primer toutes les fleurs qui commencent à se flétrir
afin d'empêcher la maturation des fruits, qui fa-
tigue la plante. En ce cas, les graines pour le semis
sont prélevées sur quelques pieds où on laisse
fructifier les fleurs de printemps sans se préoc-
cuper de la beauté de la floraison ultérieure.
COSMOS | nl
La multiplication de la pensée, comme en général
celle des plantes annuelles, se fait presque exclu-
sivement par le semis.
Cette opération peut s'exécuter à trois époques
différentes :
Ou bien au printemps, soit en place, soit en
pépinière; mais dans ce cas la floraison, hâtée par
les chaleurs survenant avant que les plants aient.
eu le temps de taller et de se consolider, se fait
avec une abondance qui nuit considérablement à
la beauté des fleurs ; ;
Ou bien de juillet à septembre, en pépinière, en
planche bien exposée et sur terre légère et sub-
stantielle; en ce cas, dès que le plant a quelques
feuilles, on repique encore en pépinière, à la même
exposition et sur le même sol, en espaçant conve-
nablement, et l'on met en place, suivant la force
des petites plantes, le climat et le terrain, soit à
l'automne, soit au printemps; l'espacement dans
cette mise en place doit être calculé (de 20 à 40 cm)
selon que l'effet de Ia plantation doit cesser au
printemps ou se prolonger dans la belle saison, et
par conséquent selon l'extension que l'on se pro-
pose de laisser prendre à chaque pied:
Ou bien en septembre, en place.
De ces trois modes, le deuxième est celui qui
donne les meilleurs résultats et les plus belles
fleurs de printemps. L'expérience a démontré que
si desgraines d'un mème pied de pensée sont semées
les unes en août, les autres au printemps, les pro-
duits des unes et des autres donnent une floraison
si différente que leur commune origine ne se soup-
connerait pas si l’on n’en était directement informé.
Parfois les plantes provenant des semis de juillet
el août commencent à fleurir avant l'hiver; pour
sauvegarder la végétation du printemps, il est utile
de supprimer cette floraison prématurée. Si l’on
désire obtenir en octobre des fleurs aussi belles
que celles du printemps, on sèmera en juin en
pépinière demi-ombragée.
La pensée peut être artificiellement rendue
vivace, soit en repiquant les drageons munis de
racines qui se forment à la base des gros pieds,
soit par le bouturage pratiqué au printemps ou à
l'automne, Mais ces modes de multiplication exigent
des soins spéciaux et ordinairement un abri en
hiver.
On réussit encore à conserver d'année en annee
les variétés exceptionnelles en les cullivant dans
des pots placés l'hiver sous chissis bien exposés
au soleil. Cette culture réclame comme sol un
terreau de fumier pur, quelques arrosages modérés,
beaucoup d'air et un judicieux pincement des
rameaux.
A ACLOUUE:
42 COSMOS
11 quizzer 19192
LE FORÇAGE DES PLANTES
Les rosiers.
Les Romains connaissaient déjà l’art de produire
les fleurs, les légumes et les fruits à contre-saison.
Certains jardiniers de la Ville ‘Éternelle savaient
aussi bien forcer la rose qu’alimenter de primeurs
les tables de leurs sybarites contemporains. Au
plus fort de l'hiver, l'empereur Tibère mangeait
quotidiennement des concombres qu'il aimait avec
passion, et son successeur, Gallien, servait égale-
ment à la même époque de l’année des melons et
des figues vertes à ses invités. Sénèque eut beau
stigmatiser le sensualisme de ceux qui, « par une
fomentation d’eau chaude et de chaleur artificielle,
faisaient éclore les fleurs du printemps au milieu
des frimas », lesriches patriciens nen continuèrent
pas moins à édifier des vergers ciliciens, sortes
d'orangeries chauffées au moyen d’un calorifère et
qui abritaient principalement des arbres exotiques
ou des couches portatives{(horti pensiles), destinées
à la culture des asperges, des melons, des arti-
chauts, des cardons ou autres primeurs appréciées
des Lucullus de la Péninsule. Autant qu’on en peut
juger par les descriptions incomplètes des auteurs
latins, ces dernières étaient des caisses montées
sur roues qu'on exposait au soleil pendant la
F1G. 1.
— MISE EN JAUGE
DES ROSIERS DESTINÉS AU FORÇAGE.
journée et qu'on rentrait la nuit dans un endroit
clos. Comme les vergers ciliciens, des vitrages en
mica, albâtre ou autres pierres transparentes pro-
tégeaient du froid ces châssis. Toutefois, de riches
amateurs pouvaient seuls s'offrir un tel luxe.
Au moyen âge, les méthodes de culture forcée
— APPAREIL DE CHAUFFAGE
D'UNE SERRE DE LA FORCERIE.
furent à peu près délaissées. On ne rencontre, en
effet, qu'un chroniqueur, Jean de Béka, chanoine
d'Utrecht, qui y fasse allusion. Dans un passage de
la vie d'Albert le Grand, cet auteur raconte que
l'illustre Dominicain donna à Cologne, le 6 janvier
1249, un grand banquet à Guillaume de Hollande,
et le biographe ajoute que, par un art véritable-
ment magique, on voyait dans la salle du festin
des arbres chargés de fruits et des rosiers fleuris.
Dès cette époque, les Arabes, plus avancés en
jardinage que les Occidentaux, avaient imaginé
les couches de fumier pour favoriser la croissance
de leurs cucurbitacées, tandis que les maraichers
N° 1433
français inventèrent seulement vers la Renaissance
ce procédé économique consistant à produire de
la chaleur grâce à la fermentation du fumier frais.
En 1600, Olivier de Serres indique l’emploi des
<loches de verre pour cultiver les melons; puis, un
demi-siècle plus tard, André Mollet préconisa le
premier celui des châssis vitrés qui conservent la
chaleur et abritent les plantes sans intercepter la
lumière indispensable à leur développement. Les
primeurs ne tardèrent pas alors à apparaitre à
Paris, et, si nous en croyons M. Georges Gibault,
elles coùûtaient des sommes exorbitantes. Les pre-
miers « litrons » (1) de petits pois arrivés sur le
marché de la capitale de la France se payaient
150 francs chacun, et, le 14 mai 1657, un plat de
COSMOS 43
fraises se vendit cent écus, soit plus de 600 francs
de notre monnaie actuelle!
Le célèbre jardinier de Louis XIV, La Quintinie,
avait mis le forçage à la mode. En décembre, il
envoyait à son maitre des asperges du potager de
Versailles que le Grand Roi savourait en fin gastro-
nome. Au mois de janvier, c'était le tour des
laitues et des radis; puis les choux-fleurs arrivaient
en mars; les fraises au commencement d'avril; les
pois en mai, les melons à la fin de juin, et Sa
Majesté aimait tant ces succulents végétaux que
ses pauvres médecins, Fagon et Daquin, ne comp-
taient plus les embarras gastriques de leur auguste
client!
Louis XIV ne dédaignait pas non plus de voir sa
F1G. 3. — CUEILLETTE DES ROSES FORCÉES.
salle à manger ou ses salons ornés de fleurs forcées,
tels les jacinthes, les anémones, les narcisses ou
les tulipes que les horticulteurs contemporains
faisaient pousser dès le commencement de l’année.
Au cours du xvin? siècle, les Anglais et les Fla-
mands apportent d'importants perfectionnements
à la culture intensive des arbres fruitiers. lls ima-
ginent les bâches à fourneaux et les couches de
tan, tandis qu’un peu partout en Europe s'élèvent
de nouvelles serres. Témoin celles construites sur
les indications de Frédéric le Grand en 1752 et
qu'on voit encore à Potsdam. De même, les tou-
(1) Le litron, ancienne mesure, valait environ 8 dé-
cilitres.
ristes visitant la Grande-Bretagne connaissent le
fameux cep de vigne qui, planté il y a plus de
cent ans, se développe maintenant sur 250 mètres
carrés dans son abri vitré de Hampton-Court.
Quelques maraichers français, Debille, Ebrard,
Fournier et Vallette entre autres, commencèrent
ensuite à vendre les primeurs sur une assez vaste
échelle vers 1780. Huit ans plus tard, Decouflé
forçait les haricots et les pois, Les frères Quentin
et Marie chauffaient les asperges vers 1800 ; Besnard,
de son côté, se faisait une spécialité des choux-
fleurs avant saison. Enfin, l'invention du thermo-
siphon par Bonnemain et son application au chauf-
fage des serres par Gautier donnèrent, dès 1830,
l'essor à cette curieuse industrie,
n4 COSMOS
Toutefois, l'exploitation commerciale des « for-
ceries», jardins féeriques où les tleurs s'épanouissent
en même temps que mùürissent les fruits, ne
remonte guère en France au delà d'une quin-
zaine d'années. Les établissements les plus impor-
tants de ce genre se fondèrent d'abord dans les dé-
partements de l’ Aisne et du Nord, et, beaucoup plus
récemment, on en a créé de nouveaux dans la
banlieue de Paris et ailleurs. Visitons d'abord l’une:
de ces « couveuses végélales » où l'on martyrise la
reine des fleurs.
Parmi les innombrables variélés de rosiers les
plus avantageuses pour cette destination, on cultive
entre autres le « Souvenir de la reine d'Angleterre»,
la « Baronne Prévot », « Madame de Diesbach »,
le « Charles Margottin » (rose clair), « Madame
Falcot » et « Madame Boll » (rouge carmin).
Le premier soin du rosiériste est de se procurer
des églantiers, dont la torture commence sans
tarder. [1 les met d'abord en jauge (tig.1) dans une
réserve située en plein air. Cette opération consiste
simplement à les enterrer, côte à côte, dans des
sillons et à les recouvrir de terre. Au bout d’une
quinzaine de jours, au fur et à mesure de ses besoins.
il les plante au milieu des champs, puis il les greffe.
Dès la deuxième année, il les taille presque au
ras du sol. I] les dispose ensuite à l'endroit voulu
pour le forçage.
Cela fait, il édifie des serres démontables sur
l'emplacement où se trouvent les rosiers. Il établit
à pronimité une chaufferie (fig. 2), pose les cana-
lisations d'eau chaude sur le sol, entre les pieds.
Ainsi se maintient nuit et jour, dans cette véritable
« usine » culturale, une température de 20° environ.
La distribution de leau est modérée en hiver. plus
Cupivuse en mars, aün de donner à la plante Pillu-
sion de recevoir une ondée naturelle.
Une fois plantés, les rosiers réclament des soins
assidus, il faut biner la terre atin de l'ameublir et
empêcher ies mauvaises herbes de pousser. Le
rosivristée doil également veiller à ce que les mala-
dies crvplogamiques ne se développent pas dans
ses cultures. Un champignon microscopique, proche
parent de l'oidium de la vigue, le Spherotheca
pannesa, attaque en particulier les rosiers. Cette
alfection se manifeste par la présence sur les
11 juiLLET 1942
feuilles d’un duvet cotonneux blanchâtre parsemé
de points grisâtres, puis les feuilles se recroque-.
villent, les jeunes pousses s'étiolent et la floraison
avorle. Les forceurs combattent le « blanc du
rosier » (ainsi nomment-ils cette maladie) par des
pulvérisatious de sulfate de cuivre ou des soufrages
préventifs. Quant aux pucerons et autres insectes
nuisibles qui vivent sur les tiges et épuisent la plante
par leurs piqüres muitipliées, ils les détruisent:
au moyen de lavages répétés au jus de tabac.
Dans cette atmosphère attiédie et humide, les
rosiers poussent rapidement et sont en pleine
végélation au bout d’un mois. Quelques jours plus
lard, on commence la cueillette (tig. 3), et, sitôt que
les derniers boutons sont éclos et récoltés, l'horti-
culteur démonte la serre qui les abrite pour la
transporter un peu plus loin. On abandonne les
rosiers qui ont fleuri jusqu'à l'hiver prochain. On
les taille à nouveau et on les force encore une fois.
Immédiatement après cette seconde récolte, les
pauvres rosiers n'ont plus qu’à mourir : leur vie
factice les a épuisés. Les forceurs les arrachent,
brisent leurs tiges et les brülent.
Les serres sont montées et démontées alternati-
vement depuis le mois de novembre jusqu’au mois
d'avril dans la région parisienne. A partir de la
fin d'avril ou du commencement de mai, on con-
tinue la culture en plein air. Quant à la cueillette
quotidienne des roses, elle s'effectue vers la
tombée de la nuit. Le jardinier tranche au sécateur
les tiges fleuries, et, sitôt qu'il en a une brassée,
il la porte dans des cuves d’eau disposées dans
une cave fraiche, en attendant que des femmes
s'en emparent pour les « parer » avant de les
expédier. Elles assortissent les roses par douzaine,
les lient avec du raphia et les entassent soigneu-
sement dans des paniers capilonnés. Quelques
heures plus lard, le chemin de fer ou des voi-
tures de livraison les emportent vers les halles de
Paris. Là, des cominissionnaires les achèteront
pour les expédier aux fleuristes des grandes villes.
Les roses forcées se vendent en gros 10 à
{2 franes la douzaine en plein hiver, et mème de
Jolies variétés, comme les « Niel » ou les « Néron »,
atteignent 30 francs au mois de février.
JaAcatEs BOYER.
—— —— -— a —
La repeuplement des chasses
On cilesouvent comme cxemple d'amourimaternel
la perdrix fuyant, trainant l'aile, comme grave-
ment blessée, pour attirer sur elle ct le détourner
de ses jeunes le chien qui vient de découvrir la
nichée : mais aucun des auteurs qui rapportent ce
fait ne nous dit si c'est la mère ou le père qui fait
preuve de pareil dévonement.
par le syslème de l'adoption.
Chez la perdrix grise, les sentiments de famille
sont peut-êtie plus développés chez le mâle que
chez la femelle. et les chasseurs — les sporismen
sont terribles — ont su mettre à profit ces senti-
ments intimes pour assurer le repeuplement de
leurs chasses et se préparer de nouvelles victimes.
Repeupler une chasse en perdrix parait la chose
N° 1:33
la plus simple du monde. En théorie, il suffit de se
procurer — et les dénicheurs abondent malheureu-
sement — des œufs de perdrix, de les mettre en
incubation sous une poule, de faire élever les jeunes
qui en éclosent par la même poule, en leur four-
nissant une nourriture convenable, œufs de four-
mis, pâtées aux œufs durs, etc., puis de les lâcher
dans la plaine lorsqu'ils sont en âge de se passer
de leur mère. Malheureusement, ces jeunes oiseaux
présentent un grand défaut; entourés de soins
assidus dès leur naissance, ils ne craignent ni
l’homme ni les autres ennemis qu’ils ne connaissent
point, aussi succombent-ils en masse, traqués par
les renards, les putois, les fouines et les oiseaux
de proie; ils ignorent les ruses et les moyens de
défense de leurs pères habitués à la vie libre, ils
ne savent se raser, se dissimuler, s’effacer derrière
une feuille, un brin d'herbe, et s'ils échappent
à tous ces dangers jusqu’au moment de l'ouverture,
la poursuite d’un chien les prend au dépourvu,
l'approche d'un chasseur leur suggère plutòt le désir
de se porter à son approche, de se percher sur son
épaule et même sur le canon de son fusil plutòt
que de fuir. Ils sont tout le contraire des oiseaux
de sport que le chasseur désirait.
Il leur manque cette éducation, cet apprentissage
de la vie libre que seuls peuvent leur donner des
oiseaux sauvages.
Les chasseurs ont d’abord essayé de faire couver
ia mère dans leurs parquets et de lui confier l’édu-
cation des jeunes, mais la mère, tant qu'elle est
dans une prison étroite, se dérobe à tous ses devoirs
de maternité.
On a tourné la difficulté en faisant adopter par
des sujets sauvages les jeunes perdreaux éclos sous
une poule, et, fait très curieux,c’est le mâle qui se
prête à cette combinaison.
Les sujets dont on veut faire des parents adoptifs
sont repris avec l’aide d’une mue avant la pariade
et conservés captifs jusqu’au moment où l’on veut
s'en servir.
Lorsqu'on donne des jeunes à une femelle,
celle-ci en fait peu de cas, et si on les lâche
ensemble, elle les abandonnera presque tout de
suite, pour rechercher un époux disponible et créer
encore, malgré la saison avancée, une famille véri-
tablement à elle. Le mâle, au contraire — peut-
ètre parce qu’il ignore les peines et les joies de
l'incubation, —une fois qu’il accepte les jeunes, ne
les abandonne point et les considère à tous les
points de vue comme ses propres enfants.
Nous disons: une fois qu'il a accepté les jeunes,
car l’affection paternelle ne s’éveille pas de suite
chez le mâle, ce n’est souvent qu'un jour ou deux
ou même trois après avoir vu, contemplé les jeunes
qu'on lui destine qu’il se décide à les appeler à lui;
jusqu’à ce moment il est intraitable, et de violents,
mortels même, coups de bec arrêteraient les impru-
COSMOS 45
dents qui viendraient auprès de lui; aussi doit-on
prendre quelques précautions dans les débuts.
Voici comment il convient d'opérer. Dès que les
jeunes, éclos sous une poule de la basse-cour, sont
séchés, on dispose la boite d'adoption; cette boite
se compose de trois compartiments ou plus exacte-
ment de trois petites caisses accolées, ayant un
couvercle à charnière, et les parois séparatives
des compartiments sont à claire-voie avec barreaux
assez rapprochés pour empècher la poule ou le
màle perdrix de sortir tout en laissant passer les
jeunes.
Dans le premier compartiment on introduit la
poule et ses petits, dans le troisième le måle per-
drix; le compartiment du milieu, dont le couvercle
reste ouvert afin qu’il y règne la pleine lumière,
servira de cour aux ébats et de réfectoire pour les
jeunes perdreaux. Le panneau à claire-voie du com-
partiment du måle perdrix est doublé momentané-
ment par un panneau grillagé qui empèche les
jeunes de le rejoindre.
Le måle, donc prisonnier dans cet étroit réduit
et dans une demi-obscurité, n’a pour toute distrac-
tion que la vue de ces petits perdreaux qui courent
et mangent dans le compartiment du milieu; que
se passe-t-il dans son cœur? nous ne le savons,
mais au bout de peu de temps il les rappelle. On
enlève le panneau grillagé, et bientôt les jeunes le
rejoignent, il saccoure, fait entendre des glousse-
ments, et les petits se glissent sous ses ailes.
L'adoption est faite, et la poule aura beau les
appeler à son tour, les ingrats, ils ne répondront
plus à ses appels. préférant un père de leur race; on
pourra donc supprimer la poule devenue inutile.
Il s'agit maintenant de lâcher le måle et sa
famille adoptive dans ja plaine, et cela le plus tòt
possible, car l'éleveur n’aura plus à s'occuper des
jeunes et le père commencera leur éducation de la
vie libre tout en leur faisant trouver dans les
champs leur nourriture; mais il faut, pour effectuer
ce lâcher, opérer avec prudence, car si à ce moment
le mâle était effrayé il prendrait son vol, laissant
les jeunes qui ne pourraient le suivre, et tout serait
perdu.
Voici comment on opère généralement. De bon
matin, le garde emporte la boite contenant le coq-
perdrix et les petits et l'installe auprès d’un bon
couvert, céréale ou prairie artificielle, situé loin
des routes et des chemins, en ayant soin d'orienter
le coté à ouvrir vers le couvert. Le panneau plein
de la boite a été remplacé par un cadre garni de
grillage métallique assez fin et glissant aussi dou-
cement que possible dans les rainures pratiquées
sur les cotés de la boite; à ce cadre est attaché un
long cordeau de 20 à 25 mètres qui permet de le
soulever à distance. Le garde se place aussi loin
que possible, el cela derrière un buisson, une haie,
de manière à se dissimuler autant que faire se
AG COSMOS
peut, et sans bruit il soulève doucement le panneau
grillagé: dès qu'il y existe une ouverture suffisante,
les jeunes, attirés par l'espoir de la liberté, sortent;
puis le coq, lorsque la trappe est suffisamment sou-
levée — souvent il aide lui-mème à la hausser, —
sort à son tour, et la famille disparait.
Si, par malheur, le coq aperçoit le garde mal dis-
simulé derrière son abri, il s’effraye et prend son
vol, laissant les jeunes, qu’on ne retrouve plus tard
qu'avec les plus grandes difficultés; pour éviter
pareil inconvénient, on a inventé un système de
déclanchement automatique permettant de soulever
graduellement et sans secousses la trappe gril-
lagée, conditions essentielles de succès. Ce système
employé par la plupart des gardes est, d'ailleurs,
d’une simplicité exceptionnelle : sur un pieu terminé
en forme de fourche on installe une branche hori-
zontale qui servira de bras de levier. A l'une des
extrémités de ce bras de levier se trouve suspendue
une pierre d'un poids suflisant pour soulever la
trappe, l’autre extrémité portera un seau plein d’eau
de capacité suffisante pour faire équilibre à la
pierre dont il est question, une ficelle, attachée vers
le milieu de la longueur de cette dernière moitié
du bras de levier et fixée à la porte-trappe de la
boite, soulèvera celle-ci lorsque ce bras de levier
s'élèvera, entrainé par le poids de la pierre. A cet
effet, le seau est percé au fond d'un très petit trou
par lequel l'eau peut s'échapper lentement. Le tout
ayant été mis en place, le garde débouche le petit
trou du fond du seau et s'éloigne; le seau se vide
peu à peu, et par suite de sa diminution de poids,
sous l’action de la pierre suspendue à l’autre extré-
A1 jquiccer 1919
mité, la trappe s'élève graduellement, lentement et
sans secousses, au bout d'un certain temps, les
jeunes sont libérés, puis le coq, et cela sans que
la présence du garde, capable de causer une panique
dans le troupeau, soit nécessaire. ,
Ce n'est évidemment qu'un résumé très succinct
de l'art de l'adoption et du lâcher des perdreaux
que nous venons de donner; les personnes qui dési-
reraient de plus amples détails sur la façon de pro-
céder trouveront des détails circonstanciés dans
les ouvrages spéciaux, et particulièrement dans
l'excellent volume de M. Leroy : {a Culture du
gibier à plume. Notre intention n’a pas élé de
faire aux lecteurs du Cosmos un cours de repeuple-
ment de chasse, mais de leur signaler le fait assez
bizarre du développement de l'amour paternel chez
le coq-perdrix plutôt que chez la femelle. Et, autre
point assez curieux, l'adoption ne réussit que très
rarement avec les coqs-perdrix au caractère doux
et familier, particulièrement avec ceux élevés en
volière ; il faut des mâles ayant vécu à l’état libre,
aussi sauvages que possible; le contact des hommes
affaiblirait-il l'instinct de famille même chez le
coq-perdrix où on ne croyait pas le trouver aussi
développé ? |
Ajoutons en terminant que l'adoption des faisan-
deaux peut aussi se pratiquer, mais avec la poule
faisane seulement — à l'inverse de la perdrix, la
faisane accepte fort bien les jeunes qu'on lui offre
dans des conditions identiques, tandis que le faisan
mâle n’en a cure, — il est vrai que celui-ci est
polygame tandis que les perdrix sont monogames.
H.-L. A. BLANCHON.
Un nouveau système de télégraphie automatique.
La transmission automatique des télégrammes
n'a jamais été en faveur en France. On lui préfère
les divers systèmes manuels, surtout ceux de
MM. Hughes el Bau-lot, dont l'usage se répand de
plus en plus. A l'étranger, particulièrement en
Angleterre, et surtout chez les Compagnies privées,
les systèmes automatiques sont, au contraire, trés
répandus, et on n'hésile pas & adopter toutes les
améliorations de materiel, quelque lég'ies qu'elles
soient.
Rappelons que la transmission autonialique des
dépèches nécessite la préparation préalable de la
bande transimeltrice (perforation) et la traduction,
à l'arrivée, des signaux Morse, lesquels se pré-
sentent soit sous l'aspect de groupes de points et
de traits on sous celui d'une ligne sinueuse, Le
type le plus répandu de ces appareils est le vieux
système Wheatstone auquel un inventeur, M. Creed,
vient d'apporter une importante moditication.
Dans tous les appareils de ce genre, la perfora-
tion de la bande transmettrice peut ètre effectuée
très rapidement par les machines à clavier, comme
celles employées dans les systèmes Pollak-Virag et
Siemens et Halske, que nous avons décrits ici même.
Maisles autres opérations télégraphiques demeurent
longues et pénibles. La principale réside dans la
traduction, à l'arrivée, pour l'envoi du télégramme
au destinataire ou pour la retransmission à un
poste correspondant. M. Creed est parvenu à con-
stituer un système récepteur imprimeur permet-
tant de coiler purement et simplement la bande
réceptrice sur la formule. De plus, pendant que
s'effectue cette impression, un perforateur auto-
matique, actionné par Îles courants de la ligne,
agit sur une autre bande de papier, la perfore sui-
vant une combinaison différente de celle qui est
utilisée pour la transmission. Cette seconde bande
constitue, d'ailleurs, toute l'originalité du système.
C'est par son intermédiaire, en effet, que s'effectue
l'impression des télégramines et qu'un organe
N° 1433
automatique perfore une nouvelle bande de trans-
mission destinée à réexpédier automatiquement la
dépêche à un autre poste si cette dépêche ne doit
que transiter par le bureau.
Nous allons expliquer sommairement comment
fonctionne l'organe principal, le récepteur-perfo-
rateur.
Les courants de réception, alternativement de i
l’un et l'autre sens, sont reçus dans un groupe
d'électro-aimants polarisés dont l’armature, arti-
culée en son milieu O, est prolongée par une tigeT,
laquelle par conséquent effectue un rapide mouve-
ment de va-et-vient, mouvement dont l'amplitude
atteint son maximum à l'extrémité libre de la tige.
Les oscillations sont ulilisées pour effectuer la
commande d'un petit tiroir distributeur C destiné
à diriger un courant d'air amené dans l'appareil
par la tuyauterie A sur l’une ou l’autre face d’un
piston P.
Le piston est muni, de part et d'autre, d’une
tige BB’ reliée à un système de leviers LL’ com-
mandant les tiges DD’ convenablement guidées et
frappant sur les perforateurs SS’. Un seul perfora-
teur peut être abaissé par la réception d’un courant.
Dans la position indiquée par notre schéma, le
piston P, étant chassé vers la gauche par l’entrée
de l’air sur sa face droite, a obligé le levier D’
à s'abaisser et à frapper sur la tige S’. Mais le
levier D tombe dans le vide à còté de S. Il sera
amené au-dessus de cette tige lorsqu'un second
courant, chassant la lame T vers la gauche, provo-
quera l'envoi d'un courant d'air sur fa face gauche
du piston P. Les leviers B et L agiront sur D pour
le pousser au-dessus de S. L et L’ sont des ressorts
ramenant D et D’ dans leur position de repos,
c'est-à-dire de non-utilisation. On remarque que
les leviers D et D’ se terminent en réalité par deux
branches. La branche supplémentaire appuie sur
une tige régulatrice HH’ dont l'extrémité libre s’en-
gage dans une roue dentée RR’ afin de régulariser
l'arrèt de la bande de papier pendant la perfora-
tion. Cette bande F est entrainée par une petite
roue montée sur le même axe que les roues RR’,
portant de légères pointes qui s'engagent dans le
pointillé central du papier. L'arrêt s'effectue par
l'intermédiaire des tiges régulatrices qui s'abaissent
en même temps que les perforateurs et immobi-
lisent l'axe et les roues. Un moteur électrique
entraine cet axe par l'intermédiaire d’un équipage
rectangulaire GG sollicité par un ressort. Les deux
extrémités du rectangle appuient sur un disque |
qui se trouve entrainé par friction; l'arrêt imprimé
au moment de la perforation n'a donc aucune
influence sur le moteur.
Ajoutons enfin que le système d’électro-récep-
teurs est commandé par un relais qui envoie le
courant d’une pile locale dans les électros, ce cou-
rant accomplissant le parcours dans un sens ou
COSMOS 47
dans l’autre, selon le sens du courant transmis sur
la ligne. |
Ce syslème est déjà employé depuis quelque
temps par l'administration anglaise et par plusieurs
Compagnies privées; son rendement est de 150 mots
par minute, soit, par heure, environ 500 télé-
grammes en simple et 800 en duplex.
Il nous reste à examiner brièvement le système
imprimeur.
Cette impression s'effectue par l'intermédiaire de
la bande réceptrice perforée qui est entrainée par
un disque à pointes actionné par une crémaillère. La
bande passe devant deux groupes de dix aiguilles
` soumises à l’action de légers ressorts qui les pressent
contre le papier et les obligent à pénétrer dans les
perforations. Les aiguilles sont commandées par
dix obturateurs, légères plaques minces percées de
trous et capables de glisser à l’intérieur d’un
SYSTÈME RÉCEPTEUR
ACTIONNÉ PAR L'INTERMÉDIAIRE D'UN RELAIS.
organe dit boite à cylindres. Chaque lame ou
plaque peut prendre deux positions différentes de
telle sorte que le déplacement des aiguilles, réglé
par les perforalions du papier, peut déterminer
une combinaison des lames. La boite à cylindres
recoit par deux entrées différentes de l’air sous
pression. Elle est percée de trous capables de cor-
respondre avec ceux des lames lorsqu'une combi-
naison a été effectuée. L'air suit alors ce chemin
et se précipile dans l’un des cylindres de la boite.
Là il rencontre un piston solidaire d'une tige ver-
ticale relié au mécanisme frappeur d'une lettre. Ce
mécanisme entre en action, et le caractère vient,
comme celui d'une machine à écrire, frapper sur
un ruban encreur sous lequel passe la banue du
papier récepteur. Cette bande est entrainée ensuile
entre deux cylindres actionnés par le mécanisme
général de l'appareil pourvu d'un moteur élec-
48 COSMOS
trique. Nous n'insisterons pas sur les particularités
relatives aux mouvements combinés des aiguilles
sélectrices et des lames-valves; cette technique est,
en effet, très compliquée. Ajoutons seulement, pour
compléter l'étude sommaire de ce système télé-
graphique, que la bande réceptrice perforée n'est
pas utilisée directement pour la retransmission des ,
télégrammes lorsque ceux-ci doivent seulement
transiter par le bureau. Elle permet seulement de
confectionner automatiquement une nouvelle bande
transmettrice semblable à celle qui a servi au
poste de départ. Ce travail s'effectue dans le trans-
lateur. On évite ainsi une nouvelle perforation
11 JuiLLET 1912
manuelle, toujours plus longue que la perforation
mécanique et qui, de plus, nécessite l’immobilisa-
tion d'un agent.
Ce système télégraphique, qui ne sera certaine-
ment jamais introduit sur les réseaux français,
rend de bons services dans les administrations
étrangères où le personnel est familiarisé avec la
transmission automatique. Cependant l'emploi de
l'air comprimé, qui est une nouveauté dans un
appareil télégraphique, pourrait donner lieu à des
mécomptes, cet agent étant d’une docilité relative.
LUCIEN FOURNIER,
Á © — © ——
Le cinématographe pour tous.
Les projections cinématographiques, toujours
plus goütées des spectateurs, présentent cependant
un grave inconvénient : les prises de vues sont des
opérations trop difficiles et trop coûteuses pour pou-
voir être effectuées par des amateurs; elles restent
centralisées dans quelques puissantes Sociétés,
qui ont les installations nécessaires : théâtres, ma-
tériel spécial pour la prise du négatif, son déve-
loppement, le tirage de la bande positive, etc. On
en est donc réduit à acheter les bandes positives
toutes prêtes.
Or, dans beaucoup de cas, on aimerait à pouvoir
F1G. 1. — L'APPAREIL OLIKOS.
enregistrer soi-même des scènes animées qui lais-
seraient d’agréables souvenirs ou fourniraient une
précieuse documentation; il faudrait un cinéma-
tographe transportable, qui puisse suivre l'amateur
dans tous ses déplacements.
L'appareil « Olikos » (fig. 4) a été construit spé-
cialement dans ce but. C'est, en somme, un appa-
reil photographique ordinaire, contenant un ma-
gasin de 18 plaques, 6,5 X 9 cm?, et muni d’un
dispositif spécial à manivelle.
Pour prendre une vue animée, on dispose l'appa-
reil sur un pied solide, et on tourne la manivelle
d’un mouvement régulier. Un mécanisme intérieur
met en marche, d'une part, l’obturateur quidécouvre
etmasquealternativement l'objectif, et, d'autre part,
déplace automatiquement la plaque négative après
chaque prise de vue. Au fur et à mesure que l'opé-
rateur actionne la manivelle, les vues s'inscrivent
d’abord au haut de la plaque sensible, se rangeant
à côté les unes des autres, sous la forme de petits
rectangles de 8 millimètres de large et 7 millimètres
de haut, au nombre de 7 pour la première rangée;
la plaque se déplace alors automatiquement de bas
en haut pour l'inscription d'une seconde rangée de
7 vues, la huitième vue immédiatement au-dessous
de la septième, et ainsi de suite jusqu'à la douzième
et dernière rangée de ladite plaque qui contient un
total de 84 petits rectangles reproduisant chacun
un instantané de la scène animée qui se déroule
dans le champ de l'objectif (fig. 2).
La première plaque complètement impressionnée
est alors escamotée et remplacée par une seconde
sans qu'il se produise la moindre interruption dans
la prise des vues. On peut ainsi employer sans
interruption les 18 plaques du magasin, ce qui
donnera une vue animée composée de 1512 petits
clichés; naturellement, rien n'empêche de s'arrêter
et de conserver pour un autre sujet les plaques
non impressionnées. Le photographe sait toujours
où il en est, grâce à un compteur qui lui indique
le nombre de plaques déjà utilisées.
Les sujets une fois pris, on passe au développe-
ment des clichés. Cette opération se fait comme
d'habitude, avec le matériel couramment employé
et que possède tout photographe. llestbon, toutefois,
Ne 1433
de développer en mème temps les plaques relatives
à un même sujet, pour éviter qu'elles aient des
intensités différentes. Au moment du développe-
ment, la seule précaution que devra prendre l’opé-
rateur sera de numéroter les plaques de 4 à 18,
dans l’ordre où il aura retiré celles-ci de l’appa-
reil, en inscrivant les numéros dans un des angles
de chaque plaque. Cette précaution prise, l’ama-
teur n'aura plus qu'à développer les dix-huit néga-
tifs, comme nous venons de le dire.
Le tirage des positifs deslinés à la projection ne
présente rien de particulier. Il s’opère au châssis-
presse, comme lorsqu'il s’agit d'obtenir une épreuve
ordinaire sur verre ou sur papier.
La projection animée des plaques positives est
très facile à réaliser, car l'appareil qui a servi à la
prise des négatifs sert également à projeter les
positifs. il suffit de placer ceux-ci dans le magasin,
dans l'ordre voulu, qui est indiqué par les numéros
inscrits sur chaque plaque. On met derrière l'appa-
reil une lanterne de projection, éclairée à l'alcool
ou à l'électricité.
La projection des vues s'opère sur un écran de
1,20 m environ de côté, placé contre le mur, à
4 mètres de l'appareil. Comme pour la prise de
vues, l'opérateur n'aura qu’à tourner la manivelle
de l’appareil du même mouvement régulier et con-
tinu pour voir se reproduire sur l'écran, en un
tableau lumineux, la scène animée qu'il aura pho-
tographiée.
Comme on le voit, toutes les manipulations sont
excessivement simples, et tout le monde peut
devenir un habile opérateur cinématographiste
avec |’ « Olikos ». Ce n'est pas le seul avantage de
cet appareil.
Non seulement les plaques, incombustibles par
leur nature même, donnent plus de sécurité que
les bandes de celluloid, si dangereuses; elles sont
de plus très économiques. Les 1512 vues que
donnent 18 plaques 6,5 X 9 cm° reviennent, tout
compte fait, à 4 francs; elles sont l'équivalent de
90 mètres de pellicule dont le prix (négatif et positif}
dépasse de beaucoup 50 francs, Une disproportion
semblable existe entre les prix des vues qu'on
trouve tout impressionnées dans le commerce.
COSMOS 19
Enfin les films, peu solides, se détériorent faci-
lement, alors que la durée des plaques, sans acci-
dent, est indéfinie.
Évidemment, cet appareil d’amateur n’a pas la
prétention de lutter contre les grands cinémaio-
graphes capables de dérouler des milliers de mètres
CAE RA
Kaa Lot E
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LE
F1G. 2, — UN POSITIF OBTENU AVEC L'APPAREIL OLIKOS
de bandes pour un même sujel. Tel qu'il est cepen-
dant, il peut intéresser les personnes désireuses de
conserver des souvenirs de famille « vivants », pour
ainsi dire: les voyageurs qui veulent rapporter
des documents intéressants, les conférenciers qui
peuvent ainsi accroitre l'intérêt de leur récit, les
professeurs, dont l’enseignement est plus profitable
lorsqu'il est accompagné par l’image. C'est bien le
cinématographe mis à la portée de tous, la diffu-
sion d’un appareil qui présente de multiples avan-
tages sur la photographie ordinaire. H. C.
L’océanographie pendant l'antiquité
Quand on se met en route, la première condition
est de bien savoir où l’on va. De même, lorsqu'on
se propose de traiter un sujet, ce que j'ai à faire
en ce moment, la première condition est encore
(4) Conférence faite à l’Institut maritime, le 25 no-
vembre 1911, par M. J. Thoulet, professeur à la Faculté
des sciences de Nancy (Ligue maritime, supplément
d'avril 1912).
de savoir exactement où l’on va soi-même et où
l'on prétend conduire l'auditoire qui vous fait
l'honneur de vous prêter son attention. Or, Je vais
entreprendre avec vous un grand voyage à travers
le temps, depuis l'antiquité la plus reculée jusqu'à
l'époque actuelle, et comme nous vivons en un
siècle où les choses se voient, se sentent, s'ap-
prennent et quelquefois même s'oublient vite, vite,
50 COSMOS
vite, sans cesse plus vite, il est indispensable de
condenser, de raconter beaucoup en peu de mots
et, s’il est possible, de tout résumer sous la forme
d’une sorte de thèse, d’une formule aisée à garder
dans la mémoire. |
Voici où je voudrais vous conduire.
D'abord, vous prouver que l'océanographie, que
l'on croit être une science nouvelle, est, en réalité,
très ancienne.
Ensuite, que les Français, que nos compatriotes
ont pris une part considérable — j'allais dire ont
pris la part la plus considérable — au développe-
ment des connaissances relatives à la mer; plus
qu'aucun autre peuple, ils ont contribué à en faire
une véritable science complètement digne de son
nom. Le P. Fournier, Marsigli, Buache, de Bory,
Lavoisier, Aimé, de Roujoux, Delesse, pour ne
citer que les principaux d’entre eux, ont exécuté
de magnifiques travaux, accompli d’admirables
découvertes. Malheureusement, trop parmi eux
sont morts à la tâche sans recevoir la récompense
à laquelle ils avaient droit, une humble parcelle,
je n'ose dire de gloire, mais seulement de cette
notoriété, de cetle reconnaissance publique qu'ils
avaient pourtant achetée assez cher. C'est avec un
sentiment de douloureuse émotion que nous
sommes forcés de constater la profonde ignorance
où nous sommes, nous Français, de ce qui a été
fait par des Français. Hélas! je l’avoue, moi qui
m'occupe d’océanographie depuis plus d'un quart
de siècle et qui ai dû apprendre seul le peu que je
sais, j'ai été trop souvent chercher les renseigne-
ments dont j'avais besoin chez les Anglais, les
Allemands, les Norvégiens ou les Américains, à
droite, à gauche, partout, et c'est seulement très
tard, petit à petit et comme par hasard, que j'ai
appris que les découvertes que j’admirais sous des
norus étrangers élaient en réalité françaises, bien
françaises, tout ce qu’il y a de plus françaises. Je
n'incrimine personne... que nous, car enfin Île
monde es! nn vasle champ de bataille, et plus on
ailirme le progrès, l'approche de l’âge d'or, plus la
bataille devient äâpre et féroce. Chacun pour soi,
et tant pis pour les timides, les faibles et les
indifférents. On a trouvé que ce qui était bon à
prendre pouvait et devait s’annexer, d'autant
mieux qu'on ne le défendait pas; alors on a
annexé. Le pis est que nous nous sommes rendus
complites de ce déni de justice dans l'ignorance où
nous resiions de ce qu'avaient accompli, au prix
de tant de misères et de labeurs, nos pauvres
grands hommes de compatriotes. Eh bien! dans
cette breve esquisse du développement de l'océa-
nographie à travers les âges, sujet que malgré
mes efforts il me sera impossible d'achever en
moins de trois ou quatre conférences, je vais
chercher à détruire en vous l'ignorance de ce qui
a été fait en France pour l’océanographie, En y
11 JuiILLET 1949
mettant toutes mes forces, toute ma bonne foi,
mon entière conviction, je veux vous conduire à
un acte d'équité, à la connaissance des œuvres de
nos compatriotes, à celle de leur histoire, quelque-
fois aussi triste qu'un martyrologe, au respect de
la mémoire de ceux qui trop souvent ont été à la
peine sans avoir été à l'honneur; en un mot, à la
glorification de nos océanographes de France.
Commençons par le commencement. Sans
remonter au déluge, ce qu’à la rigueur je pourrais
faire et peut-ètre mème, en y réfléchissant, vous
en dirai-je un mot, je serai bien obligé de vous
parler de ce qui, sans être de l’océanographie,
a conduit à l’océanographie, c'est-à-dire de navi-
gation et de géographie. Avant de vous citer des
Français, il me faudra, comme le Petit-Jean de
Racine, vous entretenir « des Serpents et des Babi-
boniens » qui vivaient avant les Français. Rassurez-
vous, je serai bref; seulement, laissez-moi en
appeler à votre bienveillance: il n'est pas très
facile, je vous assure, de raconter ce qu'était
l'océanographie à l'époque où locéanographie
n'existait pas. E a
N'existait pas..... Jai tort de me servir de ce
mot; le jour existe aussitôt que l'aurore commence
à poindre, et, dès l’antiquité, nous voyons se
lever l’aube de l’océanographie. Depuis le moment
où, sur son radeau de branches d'arbres liées
ensemble, le plus grossier des bateaux, l'homme a
réussi à flotter et àse diriger tant bien que malsur les
eaux, il a bien été forcé de regarder ce qui se pas-
sait surla mer autour de lui. Quand il avait besoin
d'aller de la terre à l'ile voisine pour y chercher des
coquillages plus abondants ou des œufs d'oiseaux
destinés à apaiser sa faim, ou bien afin d'y mettre
en sùreté sa famille et ses misérables richesses en
cas de danger, et qu'à leur hauteur, mesurée de
l'œil, À reconnaissait que les vagues étaient dan-
gereuses pour son frèle esquif, il remettait son
voyage au lendemain. Pour aborder au rivage et
choisir la plage la moins abrupte ou bien le coin
de rocher le plus accore, il enfonça dans la mer la
perche qui lui servait d'aviron, apprécia la profon-
deur de l’eau et fit son premicr sondage. Plus tard,
devenu plus audacieux, il s'éloigna davantage. et
quand, surpris par la nuit, il perdit sa route, il
regarda le ciel, s'orienta par les étoiles et fit de
l'astronomie nautique; lorsque la brume, l’envelop-
pant soudainement, le rendit incapable de se
diriger, s’il était près de terre, il hurla un appel à
ses compagnons restés sur le rivage et fit ainsi des
signaux phoniques; ou bien, se sachant trop loin
pour être entendu dans des parages inconnus, il
apprit à lâcher des oiseaux et à les suivre tandis
qu'ils fuyaient à tire d'aile vers la terre. Ainsi
naviguèrent les Scandinaves et, avant les Scandi-
naves, les Phéniciens, le vieux Noé — vous voyez
que j'en arrive au délnge. Je m'en tiens là et je me
No 1435
garderai de vous énumérer, d'après le P. Fournier,
les dimensions exactes de l’arche avec ses disposi-
tions intérieures et extérieures. D'ailleurs, ce serait
de l’architecture navale, qui n’entre pas dans mon
sujet. Au total, les hommes ont fait de l'océanogra-
phie de tout temps, par nécessité, sans s’en douter,
comme M. Jourdain faisait de la prose.
Cessant maintenant de considérer les hommes
isolés pour nous occuper des peuples, il est évident
que c’est parmi ceux qui, pour vivre, furent obligés
de naviguer que nous constaterons l'apparition
des premiers rudiments de l'océanographie. Les
naturels des iles du Pacifique, lorsque Cook décou-
vrit leur existence, étaient de hardis et habiles
marins. Nous n'irons pas évidemment chercher
chez les Helvètes les plus anciens océanographes.
Il s'agit d’autrefois, d'il y a très longtemps, car
aujourd'hui les conditions ont changé, et la preuve,
c’est que l’un des savants qui ont le plus rendu de
services à l’'océanographie, le D' A. Forel, l'auteur
de la belle monographie du lac Léman, est un
Suisse, un Helvète. Mais n’allons pas trop vite et
restons dans l’antiquité.
Les peuples des régions maritimes, consciemment
ou inconsciemment, ont été les premiers océano-
graphes : les Phéniciens, les Grecs; au moyen àge,
les Scandinaves, les Portugais; après eux, les
Espagnols, les Génois, les Vénitiens ; plus tard, les
Hollandais, les Anglais. Plus tard encore, la poli-
tique aidant, on voit s'occuper des choses de la
mer et s’y montrer mailresses des races habitant
des pays touchant à peine l'océan, comme l'Alle-
magne. On trouverait déjà, mème dans l'antiquité,
des exemples de cette anomalie apparente: les
Égyptiens, les Assyriens, les Juifs, peu ou beaucoup,
n'ont pas pu rester absolument indifférents à
locéanographie. L'histoire faite à coups d hommes,
lesquels restent toujours les mêmes tout ens’agitant
continuellement, demeure toujours aussi essentiel-
lement la même et suit des lois fatales aussi inexo-
rables que celles de la chimie, de la physique ou
de la mécanique. C’est pourquoi elle ne cesse de se
répéter avec de simples variantes, donnant souvent
lieu à des phénomènes en apparence diamétrale-
ment opposés et qui sont cependant la plus frap-
pante confirmation de la règle. Une pierre qui
tombe et un ballon qui monte verlicalement à
travers l’atmosphère n'obéissent-ils pas tous deux
aux lois de la pesanteur?
Dans une contrée découpée, où la mer pénètre
par mille passages, comme en Grèce ou en Norvège,
aux rivages hérissés de golľes, de caps, de fjords,
d'iles, serait-il possible que les habitants n'aient
pas été dans l'impérieuse nécessité de naviguer, et,
la navigation étant alors difficile, pénible, dange-
reuse, comment admettre qu'ils n'aient pas eu l'idée
de tenter, de vaincre ces diflicultés, sinon d'en
diminuer la gravité, en regardant attentivement
COSMOS 51
ce qui se passait autour du navire qui les portait :
le ciel au-dessus d'eux, les vagues et les courants
à la surface, la profondeur de la mer au-dessous
d’eux, c'est-à-dire en faisant de l’océanographie en
même temps que de la navigation?
Un mouvement n'est le plus souvent que la résul-
tante d'un ensemble de causes. Tout en ce monde
est une addition algébrique, un mélange de signes
additifs et soustractifs dont le fait final est la
somme. Îl se produisit un balancement, une com-
pensation des diverses causes. Les Grecs sont navi-
gateurs parce que leurs côtes sont découpées, et les
Phéniciens parce que les leurs sont rectilignes,
presque sans havres ni criques, et des ports qui
sont à peine des creux de rochers. La Grèce pos-
sède de vastes forêts pour la construction des
vaisseaux, et la Phénicie et le Liban, mais les
Égyptiens, les Assyriens, les Juifs n'ont rien, et
quand il leur faut aller sur les eaux, ils sont forcés
de se servir des Grecs et plus encore des Phéni-
ciens. Tout s'en mèle, jusqu’à la politique, que nous
ne parvenons pas à éviter, même en océanogra-
phie. Phéniciens, Grecs, Scandinaves ct d'autres
encore sont portés à courir les mers tantôt parce
que leur pays est trop pauvre ou trop petit pour
les nourtir, tantôt parce qu'il est gouverné par
une main puissante, tantôt parce que leur état
social est presque de l'anarchie. Luttes continuelles
de peuple à peuple, de clan à clan, d'homme à
homme, population toujours partagée en deux
camps, vainqueurs féroces auxquels tout est per-
mis, vaincus qui n'ont d'autre salut que la fuite
à travers les eaux. Elissa, sœur de Pyæmalion, est
forcée de s'éloigner de Tyr et va fonder Carthage
parce que son frère a assassiné son mari Sichée.
Les Grecs font de l’essaimage, de la colonisation
pour les mêmes motifs qui conduisent encore les
Norvégiens au delà des mers, les obligent à décou-
vrir tout le nord-ouest de l’Europe, l'Islande, le
Groenland, l'Amérique, 500 ans avant Christophe
Colomb. Une circonstance minéralogique vient
contribuer à ces exodes réitérés: la Norvège, qui
ne manque pas de bois pour construire ses navires,
n’a pas de pierres pour bâtir des forteresses, car
son sol n’est que roche compacte, dure, massive,
dont les misérables marteaux de bronze sont
impuissants à détacher des fragments ;
châteaux forts, n'ayant pour s'abriter que des
huttes petites ou grandes, mais rien que des huttes
de bois que quelques flèches enflatnmces sutlisent
à incendier; point de feodalité durable, personne
ne reste longtemps le maitre, et chacun à son tour
est obligé de prendre la « route des cygnes ». Au
contraire, les Portugais du moven àge seront
redevables de leurs conquêtes maritimes À ia dlirer-
tion unique, ferme et durable d'une volonté prin-
cière, celle d'Henri le Navigateur.
Sadiis
(.{ suivre). J. TuicULET.
52 | COSMOS
11 sunrrr 1919
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADEMIE DES SCIENCES
Séance du 1°" juillet 19172.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Sur le spectre continu des vapeurs métal-
liques et la photosphère solaire. — M. Gory a
montré que les flammes chargées de sodium produisent
un spectre continu assez intense, qui n'exige pas du
reste une densité de vapeur métallique considérable,
pourvu que la vapeur occupe une épaisseur suffisante.
Il estime que le spectre continu de la photosphère
peut s'expliquer bien aisément, et sans faire intervenir
de densités de vapeur considérables. Ainsi, une couche
de 1 000 kilomètres d'épaisseur. opaque à un millième
près pour tout le spectre, contiendrait, de chacun des
métaux qui fournissent le rayonnement, une quantité
qui serait de l'ordre de un kilogramme par kilomètre
eubc: c’est la densité de la matière dans des tubes de
Crookes.
Il est done vraisemblable que les parties du Soleil
qui nous envoient des radiations. et sont ainsi acces-
sibles à notre vue, ne contiennent des vapeurs métal-
liques qu’à un degré de raréfaction extrème.
Les mouvements verticaux de la tour Eiffel.
— Les oscillations de la tour Eiffel dans le sens hori-
zontal ont été déterminées avec grande exactitude par
le Service gtographique; sous leffort du vent, elles
atteignent un décimètre au sommet: sous l'action du
ravonnement solaire. ces déplacements atteignent le
double. |
M. GuiLrauuE a entrepris de déterminer les mouve-
ments verticaux de l'édifice. Ses observations ont eu
pour objet Ja distance de la seconde plate-forme au
sol (116 m). 11 ÿ à employé un fil invar, fixé en bas à
un piquet, et en haut à l'extrémité d’un levier dont
Vautre branche, chars te d’un poids tendeur, inscrivait
les moindres mouvements sur un tambour.
Avec une certaine tension, le coeficient de dilata-
tion du fil pent ètre considéré comme nul. Les résul-
tats sont done ceux dus aux déplacements de la
plate-forme par ła température; ils atirisnent de
2 à » centimeétres. Mais un autre élément intervient,
c'est la courbure du fil sous l'effort du vent, courbure
toujours notable, si faible que soit le déplaccment de
l'air. On constate que cette courbure varie continuelle-
ment et à intervalles très rapprochés. Un shuple caleul
permei de reconnaitre que le vent courbe le fil et
diminue la distance rectiligne de ses extrémités. pro-
poitionneiiement au carré de la fleche, laquelle est,
elle-imûme, proportionnelle au carré de la vitesse du
vent. Ces variations de la distance des extrémités
donnent le parametre de la parabole ainsi formée, ve
qui permet de calculer les éléments, flèche et vitesse
du vent. L'appareil est donc, en méme temps qu'un
thermographe, un anémographe d'une grande puis-
sance.
Influence des variations brusques de tem-
pérature sar la respiration des plantes. —
L'action des variations brusques de température sur
la respiration des plantes produirait, d'après Palla-
dine, une excitation de l'intensité respiratoire, et cette
conclusion, devenue classique, n'a soulevé, jusqu’à
présent, aucune contradiction. M. L. BLaxc estime que
l'étude critique des expériences du savant physiolo-
giste permet de faire à ses procédés expérimentaux
de graves objections; il à repris une série d'exp“-
riences qui l’ont conduit à la conclusion suivante!
Les variations brusques de température ne déter-
minent aucune excitation de la respiration. Entre
l'activité respiratoire correspondant à une tempéra-
ture donnée et celle correspondant à une température
différente, le passage se fait graduellement en com-
portant toutes les aclivités respiratoires intermédiaires
entre celles des températures extrèmes.
Effet électrolytique du courant électrique
continu sur les cellules des plantes vivantes.
— Les études de l'influence de l'électricité sur les
plantes continuent à se poursuivre activement.
M. Faaxçois Koœvessi leur apporte une nouvelle contri-
bution. Ses expériences ont décelé les faits suivants :
1° Le courant électrique continu a non seulement
une influence indirecte, mais aussi une influence
directe sur les plantes vivantes; 2? l'influence directe
de l'électricité sur les plantes vivantes se base sur les
phénomènes électrolvtiques; 3° la membrane proto-
plasmique, sous l'influence de l'électricité, perd sa
nature semi-perméable et laisse échapper les électro-
lytes des cellules; #° sous l'action de l’électricité, les
matières albuminoïdes de la cellule se comportent à
la facon des électrolytes; leurs ions s'échappent de la
cellule et se dirigent vers les électrodes positive ou
négative, conformément à leur nature électrolytique.
Sur un nouveau microscope stéréoscopique
à un seul objectif. — M. A. Quinor présente le
microscope binoculaire stéréoscopique que vient de
construire Ja maison Nachet. L'instrument donne un
relief saisissant des obiets avec un grossissement de
19 à #00 diumctres, alors que les loupes et micro-
scopes binoculaires à deux objectifs ne peuvent dé
passer 80 diamètres. Il a sur ces instruments le double
avantage de permettre l'emploi d'objectifs à distance
frontale très faible, et par conséquent puissants, et
d'utiliser les objectifs du mi:roscope ordinaire.
Le faisceau lumineux fourni par l'objectif est par-
tagé, par deux prismes, en deux parties symétriques
qui sont envoyées chacune à un des deux oculaires,
dont la distance s'ajuste à la distance des yeux de
l'observateur.
Immunisation vaccinale passive et séro-
thérapie. — Les propriétés immunisantes du sérum
des animaux guéris d'infection pouvant parfois donner
des résultats favorables dans le traitement des ma-
ladies humaines similaires, on a essayé depuis long-
temps d'instituer une thérapeutique de la variole, au
N° 1133
moyen du sérum des animaux vaccinés, mais les
résultats ont été négatifs ou peu encourageants.
M. L. Cauus ayant cherché, par des expériences
sur le lapin, à élucider la cause des insuccès, aboutit
à la conclusion que, employée préventivement, la
sérothérapie antivariolique peut se montrer efficace;
nais, après le début de l'infection, son influence de-
vient douteuse, et plus on avance dans la phase d'in-
cubation, plus faibles sont les chances de succès;
passé cette phase, elle devient sans effet sur l'éruption.
Sur la présence du manganèse dans la
série animale. — MM. Gasriez BErnTranD et F. Meur-
GRECEANU, qui ont déjà montré que le manganèse existe
normalement, au moins à l’état de traces, dans le sang
et les organes de l’homme et des animaux supérieurs:
mammifères, oiseaux et poissons, ont entrepris des
recherches pour savoir si la présence de ce corps est
générale chez tous les animaux, et ils l'ont recherché
et mème dosé dans une série d'espèces appartenant
aux divers groupes zoologiques, jusques et y compris
les échinodermes. Ils donnent les résultats de leurs
expériences qui sont affirmatives.
Ils ont observé, au milieu d’autres faits, que les
mollusques gastéropodes et lamellibranches sont parmi
les animaux les plus abondamment pourvus de man-
ganèse. Chez le vignot, la lymnée, le peigne Saint-
Jacques, ils ont dosé plusieurs milligrammes de métal
pour 100 grammes d'animal extrait de la coquille.
L’encéphale de l’homme fossile de La
Quina. — Il a été étudié par M. KR. Axruoxy. Il se
rattache étroitement au type de celui de l’homme de
La Chapelle-aux-Saints. Les ditlérences susceptibles
d’être relevées entre les moulages endocräniens de ces
néanderthaloïdes paraissent être ou purement indivi-
duelles ou en rapport avecla différence de sexe. Alors,
en elfet, que M. M. Boule considère le squelette de
La Chapelle comme étant de sexe masculin, M. Henri
Martin attribue, non sans beaucoup de vraisemblance,
celui de La Quina à une femme. Dans toutes ses
dimensions, l’encéphale de l'homme de La Quina est
sensiblement plus réduit que celui de l’homme de La
Chapelle.
Au point de vue du développement relatif du lobe
frontal, l’homme de La Quina est, comme celui de La
Chapelle, nettement intermédiaire aux hommes actuels
et aux anthropoides. Ce développement, exprimé en
centièmes du cerveau total, est représenté par les
chiffres suivants:
Homme actuel, moyenne............. 43,30
Crâne de La Chapelle................ 35.75
Cräne de La Quina................... 35,10
Anthropoides, moyenne.......,..,... 32,20
La moyenne, pour les anthropoides, a été prise sur
8 animaux: 2 gibbons, 3 gorilles, 2 chimpanzés,
i orang.
Chez le chimpanzé, les chiffres extrèmes sont :
35,90 et 30,50, Chez l’homme actuel, les chiffres extrèmes
sont: 45,40 (Allemand du Sud) et 41,10 (Australiens).
Fonds Bonaparte. — Le Comité chargé de pro-
poser la répartition du Fonds Bonaparte pour 1912,
fonds que le prince a généreusement élevé à 50 000 francs
COSMOS DJ
pour chaque annuité, donne ses conclusions et pro-
pose les attributions suivantes :
MISSION SCIENTIFIQUE DU MAROC
1. M. GENTIL ................. 3 000 francs.
2. M. PALLARY.......,... ..... 3000 —
de M PITAND erana reparera 3 000 —
t. M. Baceuiz................ 3000 —
öö. M. LE MARTONNE........... 3000 —
DIVERS
6. M. Dunoyen..,............. 3 000 —
7. M. HauET................. 3000 —
8. M. Boxzen...,..,.....,.... 2500 —
JMS BALDIT.204 55 menus 2500 —
10: M. PASCALE: uen 2500 —
11: M:-SCHÉEGÉL: Luis 2500 —
12. M. SauvaGEau ............. 2000 —
13. M. WezscH................ 2000 —
14. M. BiEnnv................. 2000 —
15. M. Mawas....,............ 2000 —
16. M. Gauvez......,....,... .. 2000 —
Pourquoi les équations différeutielles de la Méca-
nique sont du second ordre, plutôt que du premier,
ou, en d’autres termes, déterminent les accélérations
des points matériels et non leurs vitesses. Note de
M. J. BoussiNesc9. — Vitesse de décomposition de l’eau
oxygénée sous l'influence de la chaleur. Note de
M. Georges Lesoixe. — Restitution, aux points domi-
nés, de leurs propriétés stéréoscopiques naturelles
inverties sous l’action des points dominateurs, dans
les stéréogrammes de cages pyramidales. Conclusions
sur le déterminisme de l'inversion. Note de M. A. CHau-
VEAU. — Sur la généralisation du théorème de Parseval.
Note de M. W.-H. Youxc. — Sur la détente de la vapeur
d'eau saturante, Note de M. A. Levee. — Sur les
propriétés électriques des alliages Gu-5n. Note de
M. R. Lepoux. — Phénomènes photo-électriques et
absorption de la lumière. Note de M. G. ResouL. —
Synthèse de l'acide x-phényl-14-diméthylhydrocinna-
mique. Note de M°° Rauart-Lucas, — Hydrogénatiou
catalytique de la benzylidéne-acétophénone: diphi-
nylpropane et dicyclohexylpropane symétriques. Noto
de M. FrëzovLs. — Méthode de synthèse de nitriles
daus la série cyclanique. Note de MM. V. Gricnarn et
L, BELLET. — Synthèses au moyen des dérivés organo-
métalliques mixtes du zinc. Cétones halogénées a.
Note de M. E.-E. BLase. — Sur les éthers ortho- ei
para-méthoxybenzoyiglyoxyliques. Note de M. A. WauL
et M. Dol. — Action de l'hydrazine sur les amino-
cétones éthyléniques B-substituées. Note de M. Eure
Axveé. — Sur les roches éruptives basiques asso“irs
au granite de la Haya (pays basque). Note de
M. Jacoues DE Lapparent. — M. C. Gerger étuilic ie latex
du figuier, suc pancréatique vésétal à diastase pro-
téolytique prédominante: entre autres proportions, le
latex du figuier est cent fois plus présurant que le
latex du mürier à papier. Fait remarquable : aiors
qu'on serait porté à admettre, étant donnés les sacri-
lives auxquels se livraient les anciens, que la premiero
présure employée ait été celle de l'estomac des ani-
maux, c'est le latex du figuier, qui, à l'époque bien
lointaine de l’//iade et de Odyssee, ċtait seul utilisé
pour la préparation des fromages. — Sur un cas de
xénie chez le haricot. Note de M. Jeax Dassie. —
5" COSMOS
L'arcroissement inégal à l'époque de la puberté et les
états pathologiques qu'il peut déterminer. Note de
M. Pauz Gonix. — Excitabilité des nerfs itératifs, théo-
rie de leur fonctionnement. Note de M. Louis LaPique.
— L'arcade de Corti et ses connexions avec l’épithé-
lium sensoriel. Note de M. E. Vasricar. — De l'action
des sérums de primates sur les trypanosomes humains
11 quizLET 191%
d'Afrique. Note de MM. F. MEesxiz et J. RINGENBACH. —
Synthèse de gluosides d’alcools à l'aide de l'émul-
sine : méthylglucoside 4, éthylglucoside $ et propyl-
glucoside 8. Note de MM. E. BourqueLor et M. Brivez.
— Les Rhynchonelles portlandiennes, néocomiennes
et mésocrétaciques du sud-est de la France. Note de
MM. Cuanzes Jacos et Pau FaLLOT.
BIBLIOGRAPHIE
Réception des signaux horaires radiotélégra-
phiques transmis par la tour Eiffel. Brochure
in-8° (23 X 14) de iv-56 pages avec 21 figures,
rédigée par le BUREAU pes LoxXGiTubes (1,75 fr).
Librairie Gauthier-Villars. Paris, 1912.
Depuis deux ans, des signaux horaires sont
transmis deux fois par jour par la station radio-
télégraphique militaire de la tour Eiffel. Ces signaux,
destinés en principe à donner l’heure aux navires,
n'ont pas tardé à être utilisés par les services
publics et les particuliers qui ont besoin d'une
heure précise tant en France que dans les pays
voisins, et nombreuses sont déjà les installations
uniquement destinées à leur réception. Le Bureau
des longitudes, qui avait pris l'initiative de provo-
quer leur envoi, se devait à lui-même d'aider à aug-
menter encore leur diffusion en vulgarisant les
divers modes d'installation des appareils de récep-
tion à employer suivant les cas (grandeur et dispo-
sition de l'antenne, prise de terre, détecteur élec-
trolytique, détecteur à cristaux avec récepteur
téléphonique) ainsi que la contexture des signaux.
C'est L'objet des deux premiers chapitres de cette
notice, ei nous savons beaucoup de nos lecteurs
qui y trouveront un vii intéret.
Le troisième chapitre concerne surtout les géo-
désiens et les astronomes. Ils y trouveront exposée
en détail la méthode pour la comparaison à dis-
tance à moins de 0,0! seconde de pendules ou de
chronomvcires par Fobservalion des coincidences
de leurs battements avec les signaux rythmés émis
spécialement par le poste de la tour Eiffel, méthode
qui a élé mise au point sous les auspices du Bureau
des longitudes et expérimentée avec un succès
complet au cours des déterminations coniparatives
de la différence de longitude Paris-Bizerte.
Fortschritte der naturwissenschaftlich?n For-
sepunæ, heransgescben von Prof. D° EE, Auper-
HALON. Ink (25 XxX 18). Librairie Urban und
Sehwarzenberg, 1. Maximilianstrasse, Vienne.
Pewee [Y. Un vol. de 300 pages avec 440 figures.
Piix 17 marks = 20 corone 40 hellen. 1912.
Teme V. Un vol. de 320 pages avec [2 fizures, 1942.
Eyi <=
L'intéressante colle-lion des Progrés des sciences
nafureiles s'enrichit assez régulicremert de deux
volumes par an.
.
Voici les monographies que contiennent les deux
volumes de 1912 :
Tome IV. E. S. Loxvox, de Saint-Pétersbourg,
Évolution des méthodes chirurgicales (procédé
des fistules stomacales, etc.) pour l'étude de la
digestion et de l'absorption (44 pages). — Haxs
ZiCKENLRANT, de Basel, les Erpériences d'aérody-
namique (58 pages). — F. /scHokke, de Basel, la
Faune glaciaire ‘46 pages). — K. HEILBRONNER,
d'Utrecht, /a Question de l'aphasie, avec examen
des troubles des facultés intellectuelles et des
fonctions motrices (74 pages). — WoLFrGANG PAUL,
de Vienne, Chimie colloïdale des albuminoides
(50 pages). — (Guvsrav EichHonx, de Zurich, la
Téléphonie automatique (27 pages).
Tome V. Pauz KauwErer, de Vienne, Origine
des caractères sexuels, mémoire important de
240 pages où l'auteur, après avoir apporté les don-
nées des observations statistiques et autres, expose
les théories explicatives et les met en regard des
résultats obtenus par la castration chez les ani-
maux et les végétaux, par les expériences de régé-
nération des caractères sexuels et de transplanta-
tion des glandes. — G. Ficnnonx, le Télégraphone
de Poulsen (5 pages). — RoserT TIGERSTEDT, de
Helsingfors, le Iteyime alimentaire de Uhomme
adulte (54 pages). — G. AxnAUsEX, de Berlin, la
Greffe et la transplantation des tissus et des
organes (20 pages).
Le vol sans battement, ouvrage posthume inédit
de L.-P. MovriLann, reconstitué et précédé d'une
Etude sur œuvre tynorée de L.-P. Mouillard.
par ANDRÉ HENRY-COUANNIER. Un vol. de 480 pages
avec une planche hors texte. Prix (10 fr). Librai-
rie Aéronaulique, 40, rue de Seine, Paris. 1912.
Après quarante années d'`observalions patientes
du monde des oiseaux, Louis Mouillard, le plus
intuitif précurseur du vol mécanique, celui dont
l'influence est la plus profonde, est arrivé à expri-
mer les principes fondamentaux de la locomotion
rérienue. H lesdéveloppeen pages lyriqnes qu'éclaire
une vision géniale de lavenir et qu'emporte un
enthousiasme vibrant.
IH faut lire le récit captivant de l'enquête qui
permit à M. André Henrv-Couannier de reconsti-
tuer cette uvre magistrale du père de l'aviation,
N° 1433
oubliée après sa mort, pendant quatorze années,
dans les caves du consulat de France au Caire. Il
yest mis en lumière à la suite de quelles circon-
stances Louis Mouillard inventa, il y a plus de
vingt ans, le « gauchissement » des ailes et la com-
binaison du gauchissement et du gouvernail de
direction; comment il communiqua sa découverte
à l'ingénieur Octave Chanute, qui fut le maitre des
deux frères Wright.
L'auteur de l'Empire de l'air et du Vol sans
battement est mort pauvre et ignoré au Caire le
20 septembre 1897, mais ayant l'intuition que le
vol mécanique allait être tout prochainement
réalisé sur les bases qu'il avait imaginées et
décrites. |
La science des philosophes et l’art des thau-
maturges dans l’antiquité, par le colonel
À. DE Rocnas. Seconde édition augmentée de
documents inédits. Un vol. in-8& jésus de 252 pages
avec 24 planches hors texte (8 fr). Dorbon-Ainé,
49, boulevard Haussmann, Paris.
L'étude des sciences anciennes préoccupe aujour-
d'hui tous ceux qui ne se bornent plus à envisager
l'histoire comme une simple énumération de
batailles ou de changements de régimes politiques,
mais qui cherchent à déterminer la marche qu'a
suivie l'esprit humain dans son évolulion. Une
Société s’est même fondée dans ce but sous la pré-
sidence du comte Vincenti (Piobb).
Un de ceux qui ont apporté une très large contri-
bution à ce genre d'études est le colonel de Rochas,
qui, familier avec la langue technique des ingé-
nieurs grecs, a traduit pour la première fois en
français un grand nombre de leurs traités connus
seulement auparavant par de mauvaises traduc-
tions lalines dues à des érudits complètement
étrangers aux sujets dont il était question.
Il a débuté, en 41872, par la traduction, avec
commentaires, des traités relatifs à l’attaque et à
la défense des places, ouvrage qui fut honoré d'une
médaille d’or par la Société pour l’encouragement
des études grecques.
Quelques années plus tard, il traduisit les traités
de Héron et de Philon sur les Pneumatiques, c'est-
à-dire sur les machines mues par le ressort de
l'air comprimé. Il est à remarquer que les machines
données pour exemple sont, presque toutes, de
simples trucs employés dans les temples égypliens
pour frapper l'imagination des foules en simulant
des miracles. Telle est celle où il suffisait d'in-
troduire une pièce de monnaie pour faire fluer
l'eau lustrale, ou bien encore l'autel sur lequel, en
allumant le feu du sacrifice, on provoquait l’écou-
COSMOS DD
lement de lait et de vin versés par les statues d’Isis
et d’Osiris érigées de chaque côté de l'autel.
Cet ouvrage, les Pneumatiques de Héron et de
Philon, était devenu presque introuvable, et les
quelques exemplaires qui se trouvaient d'oc-
casion atteignaient 50 francs et même davan-
tage. Aussi la librairie Dorbon-Ainé crut-elle bon
de donner une nouvelle édition de ces traités pré-
cédés d’une très importante notice sur l'Origine
et le développement des sciences physiques dans
l'antiquité grecque et suivis des divers fragments
caractéristiques empruntés, soit à l'Optique et à la
Catoptrique d'Euclide, soil au traité peu connu des
Philosophoumena sur les pratiques employées par
les mages babyloniens.
Traitement mental et culture spirituelle (La
santé et l'harmonie dans la vie humaine), par
ALBERT L. CaiLier, ingénieur civil. Un vol. in-18
de 400 pages (4 fr). Vigot frères, éditeurs,
93, place de l'École de Médecine, Paris, 1912.
Le traitement mental préconisé relève du mes-
mérisme (dénommé, par une confusion très regret-
table de mots, magnélisme), de l'hypnotisme, de
la suggestion; l’auteur se réclame de la philoso-
phie hiadoue, celle spécialement du yogi Rama-
charaka, et de principes qui sont tout aux anti-
podes de nos doctrines chrétiennes. Si nous signa
lons ici un pareil livre, qu'on pourrait qualifier
« le code médical de lilluminisme », ce n'est qu'à
titre documentaire, à l'intention de ceux qui
veulent connaitre la psychologie des « guérisseurs »
et des sertes comme celles des Christian Scientists
qui imaginent de guérir leurs maux tout simple-
ment en niant Iès maux qu'ils éprouvent!
Annuaireastronomique del'Observatoireroyal
de Belgique, publié sous la direction de G. Ler-
COINTE, directeur scientifique du service astrono-
mique. Annee 1913. Un vol. de 516 pages avec
planches pholographiques hors texte. Hayez,
Bruxelles, 1912.
Parmi les notices d'intérêt général insérées dans
l'Annuaire, nous devons signaler la description d'un
abaque construit sur les indications de M. Van
Biesbroeck pour faciliter les calculs des posilions
apparentes des éloiles; puis le précieux travail de
M. Stroobant sur Les Progrés rerents de luxlrono-
mie (année 1910).
Cinéma. Annuaire de la projection fice et ani-
mée. Deuxième édition (3,75 fr). Charles Mendel,
J18, rue d'Assas, Paris, 1912.
56 COSMOS
A1 JUILLET 4912
FORMULAIRE
Conservation des bois. — M. E. Pinoy, ayant
élé amené à faire des recherches sur la préserva-
tion des bois contre les attaques du Merulius lacri-
mans, champignon qui envahit les bois et les
détruit rapidement, a fait connaitre à l'Académie
des sciences le résultat de ses recherches. Il a songé
à utiliser pour la conservation des bois les bichro-
mates et la propriété qu'ils ont d’insolubiliser les
gommes et la gélatine après exposition à la lumière.
Il lui a été facile de constater que des fragments de
bois, mis à tremper jusqu’à imprégnation complète
dans une solution contenant 2 pour 100 de bichro-
mate el 1 pour 100 de fluorure de sodium, deviennent,
après séchage et exposition à la lumière, complè-
tement indestruclibles par les moisissures. Si l’on
recouvre alors le bois d’une solution contenant :
gélatine S$ pour 100, bichromate de potasse 2 pour
100, fluorure de sodium 0,5 pour 100, et qu'on
l'expose de nouveau à la lumière, après séchage,
on lui communique, en même temps qu'un vernis
brillant très solide, une couleur brun acajou imi-
tant le vieux bois.
On sait les ravages que sont susceptibles de
causer les champignons qui envahissent le bois.
On peut aussi employer la gélatine bichromatée
pour rendre aux bois attaqués une dureté suffisante.
Dans ce cas, il est nécessaire, pour éviter la dissé-
mination du champignon, de désinfecter les bois
sur place avant tout traitement.
Le meilleur désinfectant est celui qui pénétrera
le mieux. Un mélange d’alcool dénaturé et de
xylol contenant 4 pour 100 de sublimé donne les
meilleurs résultats.
Ce procédé de traitement des bois aura également
son application contre leur envahissement par
des insectes quelconques, notamment contre les
yrillettes.
La Vature indique contre ces insectes un auire
procédé: on met les meubles attaqués dans une
pièce calfeutrée, on allume sur un plateau de zinc
un mélange du poids de 45 de soufre et 4 de sal-
pètre (4600 grammes pour une pièce de 50 mètres
cubes); on laisse ainsi pendant deux ou trois jours.
Ce procédé n’est applicable qu'aux meubles ordi-
naires, pour lesquels l'acide sulfureux n'a pas
d'inconvénient.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appareils décrits :
Le filtre-presse continu Berrigan est construit par la
Société The Berrigan Filtering processes, à Orange,
Etat de New-Jersey, États-Unis de l'Amérique du Nord.
Le cinématographe pour tous, appareil Olikos, Société
des cintuä-piaques, 34, rue de l'Échiquier, Paris.
M. B. G. S., à S. — Bascules : Chaweroy et Penot,
147,rue d'Allemagne,à l'aris.— Verres perforés etautres,
Apypert frères, 30, rue Notre-Dame de Nazareth, à Paris.
M. J. S., à P. — L'exposition des auiwaux reproduc-
tcurs cst fermée depuis plusieurs jours, et nous
serions emiuarrasoćs dé vous donner une adresse en
France; mais le tuicux nous parait de s'adresser au
pays d'origine, à Leeuwarden, capitale de la Frise, à
adresse Vereeniying het Friesch Rundvee Stambachk,
qui s'occupe de l'exportation du bétail de la Frise pour
la reproduction.
M. P, M., à S. — Nous sommes heureux yue les in-
dications antérivures aient été mises si his1icment à
profit. — Tous les signaux de T. S. F. sont bien transmis
en Morse. La lecture au son est abordabie aux « pro-
fanes », a moins que les opérateurs ne cherchentaàa éta-
blir des records de vitesse. Voici comment il cor vient de
débuter: sur un papier, inscrivez matériellement à la
suite, suivant une ligne horizontale, des points et des
traits d'aprèsies signaux brefs et longs entendus dans
le téléphone; après réception, vous ferez à loisir la
{traduction en lettres de l'alphabet. — Voyez ce qui a
êté dit (Cosmos, t. LXV, n? 1500, p. 40!) sur le radio-
télégramme météorologique quotidien de la tour
Liiel. À noter que l'opérateur débute tous les ruatins
à 10°40" par lrois appels, suivis de l'avertissement :
« Paris Observatoire et B © M — Voici signaux horaires
et télégrammes météorologiques F LF L».
M. J. C., à L. — Nous ne connaissons pas les nom-
breuses formules des marchands, toutes tenues
secrètes. Mais on emploie avec succès l'encre au noir
d'aniline: noir d’aniline, 4 g ; alcool, 24 g; acide
chlorhydrique, 60 gouttes. Après solution, on ajoute
100 g d'eau dans laquelle on a fait dissoudre 6 g de
gomme arabique; pour le stylographe, diminuerplutôt
qu'ajouter à la quantité de gomme.
M. J. R., à D. — Les postes de T. S. F. se sont tel-
lement multipliés qu'il est impossible de suivre leurs
évolutions; nous ne saurions vous dire tous ceux qui
signalent l'heure, ni leur mode d'action. Nous ne con-
naissons pas non plus les signes par lesquels chacun
se fait reconnaitre, Si un de nos amis peut nous ren-
seigner, nous nous empresserons de vous communi-
quer ce que l'on nous aura appris.
M. C., à H. de F. — La bauxite sert surtout indus-
triellement à la labrication de l'aluminium. Les dépôts
abondent en certaines parties de la France. Les usines
qui s'occupent de la fabrication de l'aluminium sont,
en France, dans les Alpes. On exporte aussi la bauxite
par t'es ports de Marseille, Toulon et Saint-Rapbail.
Mais 5a valeur a bien diminué depuis que les Améri-
cains ont découvert les gisements d'un autre minerai
d'aluminium, le corindon, mis en œuvre aux usines
du Niagara.
Imprimerie P,. F£RoN-VRaU, 8 et 6, rue Bayard, Paris, VIII®.
Le gérant: E. Parrrassar.
No 143% — 148 JUILLET 1912
COSMOS 5
a
`~}
SOMMAIRE
Tour du monde. — La température de la lave; les suites d'une éruption. Le vin, le cidre et la goutte.
A propos de l'organisation sanitaire du corps d'expédition italien en Tripolitaine. Perlurbation des lignes
électriques à courants faibles par les courants alternatifs industriels. Les grands travaux du port de
Londres. Réservoir d'eau d'incendie de l’Université Berkeley (Californie, E.-U). Scie à disque sans dents pour
le coupage des métaux. Le bois des crayons. Un curieux emploi du moteur à pétrole comme auxiliaire du
cheval. L'équilibre de l’aéroplane dans le vent, p. 57.
Correspondance. — Conservation du beurre, PIERRE ForTIx, p. 61.
Le goudronnage des routes et la nouvelle auto goudronneuse, L. Founnier, p. 62. — La flore du bord
de la mer, Henni Covurix, p. 64. — Puériculture électrique, Francis Manne, p. 65. — La pompe Pfeiffer
à mercure et la mesure des vides élevés, A. Benruier, p. 66. — Machines à fabriquer les bou-
teilles, H. BERGÈRE, p. 69. — La cure spécifique antituberculaire : VII‘ Congrès international de
la tuberculose, D' P. Goccia, p. 72. — La turbine Tesla à disques parallèles sans aubes, NonsEnT LALLié,
_p. 75. — L’océanographie pendant l’antiquité (suite), J. THouLET, p. 77. — Sociétés savantes : Aca-
démie des sciences, p. 80. — Bibliographie, p. 8i.
TOUR DU MONDE
PHYSIQUE DU GLOBE
La température de la lave; les suites d’une
éruption. — Les mesures de la température des
laves sont fort rares et laissent encore beaucoup
d'incertitudes. Il est d'autant plus intéressant de
signaler les études du professeur G. Platania, faites
en septembre dernier, lors de l'éruption de l'Etna.
Les observations furent faites avec un radio-py-
romètre de Fery, sur un courant de lave s’échap-
pant du cratère inférieur d’une ligne d’éruption,
et quelques jours avant que celte éruption n'ait
pris fin. Sur les points où la lave était encore rouge,
cette température était d’au moins 795° et s'élevait
en certains endroits jusqu'à un maximum de
940 C.
Au sujet de cette éruption qui commença le
40 septembre 1911, on constata ce fait peu ordi-
naire, quen dépit de la violence des premières
explosions, le calme devint subitement complet
treize jours après les premières manifestations.
Il] est bon ajouter cependant que l'activité sou-
terraine se poursuivit sous une autre forme. Le pro-
fesseur Rieco estime que le tremblement de terre
du 45 octobre 19141 à Fondo Macchia, celui de Malte
le 30 septembre, et que la série de mouvements
sismiques constatés à Mineo, du 17 octobre à la
fin de décembre, sont des suites de l’éruption.
Parmi ces manifestations sismiques, la plus
intéressante est celle de Fondo Macchia, à
Test de l'Etna. Quoique son aire ait été peu étendue,
#3 kilomètres de long sur 18 de large, il a produit
de sérieux dégâts sur une étroite bande de 6,5 km
de longueur et de seulement 500 mètres de lar-
geur. II y eut 12 personnes tuées.
Coincidence remarquable, ce district fut le théâtre
de faits analogues le 19 juillet 1865, tremblement
de terre qui coûta la vie à 74 habitants. Ce
T. LXVII. N° 1434.
sisme s'était produit quatre-vingt-huit jours après
la fin d'une violente éruption de l'Etna, tandis que
le dernier a eu lieu vingt-deux jours seulement
après la cessation de la dernière éruption du
volcan.
SCIENCES MÉDICALES
Le vin, le cidre et la goutte. — Le D" Motais,
d'Angers, a présenté à l'Académie de médecine
(2 juillet) une communication d'un grand intérèl
parce qu'elle met en cause une maladie fort com-
mune, la goutte, et deux de nos produits nationaux,
le vin et le cidre.
Il est de tradition médicale que, dans les contrées
cidricoies, la goutte est rare. A cette opinion un
peu vague, M. Motais apporte l'appui d'observations
précises.
La première, particulièrement intéressante, con-
cerne un médecin, membre de l'Académie. Très
gravement goutteux pendant dix ans, malgré une
alimentation rationnelle et l’exercice, mais avec
usage — modéré pourtant — de vin de Bordeaux,
il prend en 14907 comme boisson exclusive du cidre
léger. La goutte disparait rapidement. En cinq
ans, quatre voyages pendant lesquels il boit du vin
de Bordeaux ou de Bourgogne. Chacun des voyages
est suivi d’un accès. Dans les intervalles, pendant
l'usage exclusif du cidre, aucun soupron de gonfle.
Les autres observations sont aussi franpañtes et
confirment absolument l'action réelle et bienfai-
sante du cidre.
Conclusion : le vin, à dose modérée, ne donne
pas la goutte aux sujets sains; chez les prédisposés
à la goutte et, à plus forte raison, chez les malades,
il est nuisible.
Le cidre, fabriqué et conservé dans de bonnes
conditions, préserve de la goutte et diminne ou
même supprime les accès, On doit donc, avec Dieu-
05 COSMOS
lalov el Marcel Labbé, prescrire l'usage du cidre
aix goult{eux.
A propos de l’organisation sanitaire du
corps d'expédition italien en Tripolitaine. —
Le médecia-major Orticoni (Gasette des Hôpitaux,
11 juillet) loue les efforts prévoyants et habiles
que les Italiens ont déployés pour prévenir et pour
combattre le choléra parmi les troupes de Tripoli-
taine.
Au moment où l'expédition fut décidée, toute la
péninsule italique était ravagée par une épidémie
de choléra qui atteignit surtout certaines villes du
littoral, en particulier Gênes, Livourne, Naples,
Palerme, etc. Dans la seule ville de Palerme, il y
eut pendant l'été 1911, d'après les statistiques ofti-
cielles, 4 540 cas de choléra avec 536 décès. Pour
éviter que le corps expéditionnaire n'emportât avec
lui les germes du choiéra, soit par des malades
atteints de diarrhée en apparence banale, soit par
des porteurs sains, le service de santé italien orga-
nisa la prophylaxie anticholérique sur des bases
vraiment scientifiques, avec l’aide d’une équipe de
médecins exercés aux expertises bactériologiques.
Ces précaulions n’ont malheureusement pas em-
pêché le corps expéditionnaire d'être contaminé
peu après son arrivée. Mais il est à peu près cer-
tain que l'épidémie cholérique fut communiquée
aux troupes par les indigènes de Tripoli, qui vivaient
à ce moment dans un état de malpropreté impos-
sible à décrire.
L'épidémie sévit pendant près de deux mois, du
milieu d'octobre à la fin de décembre, ayant fait
1 0$8 atteintes sur lesquelles on compta 332 décès.
Les causes problables de contamination furent
les dattes souillées par les mouches qui passaient
des matières fécales des cholériques aux fruits
tombés à terre. Des expériences très intéressantes
furent faites sur place par les D'° d'Ormea et Riz-
zuti, qui étaient chargés du laboratoire de bactério-
logie dìde campagne installé dans l'oasis auprès de
l'hépitak-ambulance des cholériques. Ils trouvèrent
le vibrion choiérique sur jes dattes achetées dans
la ville de Tripoli et uémonirerent l'infection pos-
sible de ces dattes par des mouches caplurées dans
le lazaret militaire. Des mouches furent mises on
contact direct sous des cloches en verre avec des
fèces de cholériques, puis avec des dattes non infu::-
tées. La contamination fut obtenue avec une fari-
lité extrème.
La contamination des eaux des puits, dans les-
quelles on mit en évidence le vibrion cholérique,
contribua également à propager le fléau. On peut
dire que seuls furent atteints les hommes ayant bu
de l'eau infectée ou ayant mangé des dattes souil-
lées. Les officiers furent en général épargnés. Les
inesures prises pour arréter l'épidémie consistérent
dans la défense faite aux hommes de boire de l'eau
uon bouillie et de manger des dattes. Dès qu'elles
18 gjuiLcer 1912
furent appliquées, ces mesures amenèrent une
diminution très brusque du nombre des malades et
la cessation rapide de l'épidémie, un mois et demi
environ après l'apparition des premiers cas.
Quand le laboratoire eut montré que la presque
totalité des eaux de Tripoli étaient contaminées
par la présence du vibrion cholérique, on songea
immédiatement à prescrire l’ébullition des eaux
de boisson distribuées aux troupes. El en attendant
la construction et l'installation de grands appareils
pour l’ébullition de l'eau, on fit venir l'eau de
Naples par des bateaux qui apportaient chaque
jour 3000 à 4 000 tonnes d'eau.
ÉLECTRICITÉ
Perturbations des lignes électriques à cou-
rants faibles par les courants alternatifs in-
dustriels. — Les lignes à courant alternatif pro-
duisent par induction des courants ou des tensions
gènantes dans les lignes voisines servant au télé-
graphe, au téléphone ou à la transmission des
signaux.
Dans le cas des lignes télégraphiques, qui sont
ordinairement à un seul fil, les troubles sont dus
aux phénomènes d’'induction électro-magnétique.
Si l’on imagine une ligne de traction par courant
alternatif simple, à la fréquence de 25 périodes
par seconde, avec retour par la terre, l'intensité
en ligne étant de 400 ampères, une ligne télégra-
phique de 10 kilomètres de longueur, courant
parallèlement, et à une distance de 10 mètres de
l’autre ligne, sera, par induction, le siège d'une
force électromotrice de 47 volts, créant une gêne
considérable dans les communications télégra-
phiques. De tels troubles ont été constatés dans les
Alpes-Maritimes (ligne à 6 600 volts, fréquence 23,
des Chemins de fer du sud de la France) et dans
les Pyrénées-Orientales (ligne d'expérience de
traction à courant alternatif des Chemins de fer
du Midi, à 12 500 volts, fréquence 16,66, de Prades
à Villefranche).
Les circuits téléphoniques, qui sont à deux fils,
sont moins troublés, car les forces électromotrices
égales induites dans les deux fils se compensent
exactement. Cela est vrai en théorie; mais si ces
fils téléphoniques sont mal isolés, la force électro-
motrice induite engendre un courant entre l'un
des fils et la terre, l'équilibre est détruit; et les
courants anormaux qui prennent ainsi naissance
peuvent avoir une intensité de quelques milliam-
pères, mille fois plus grande que celle des courants
téléphoniques, qui est de l'ordre du microampère.
autres troubles sont dus à une dérivation
directe du courant à haute tension vers la ligne
à courant faible, si l’une et l’autre sont mal iso-
lées : c'est ce qui se produit quand il pleut sur la
ligne à 5 000 volts d’OUrlu à Toulouse.
N° 143%
Les secousses musculaires ressenties en touchant
les lignes télégraphiques et téléphoniques, voisines
de lignes à haute tension, sont dues à l'induction
électrostatique : M. Girousse a mesuré un potentiel
de 80 volts en temps normal sur une ligne télé-
graphique longeant à une distance moyenne de
4 mètres la ligne alternative (6600 volts, fré-
quence 25) de Nice à Saint-Martin-Vésubie; la ligne
téléphonique qui longe à 1 mètre de distance la
ligne à haute tension des Chemins de fer du sud de
la France (12 500 volts, fréquence 16,66), de Prades
à Villefranche, est même chargée par influence à
1 200 volts. Les secousses ressenties sont en général
plus désagréables que dangereuses, mais il peut
arriver que les ouvriers se tuent en tombant.
Lorsque les lignes sont mal isolées, par la pluie,
les charges statiques s'écoulent au sol et les ou-
vriers n’ont plus à craindre de secousses.
M. Girousse a indiqué à la Société internationale
des électriciens {séance du 5 juin) les dispositifs
qu'on peut adapter soit aux ligues, soit aux appa-
rei:s récepteurs pour remédier aux perturbations.
GÉNIE CIVIL
Les grands travaux du port de Londres. —
Une réforme complète a été apportée assez récem-
ment dans l’administralion du port de Londres, qui
ne se trouvait plus à la hauteur des besoins du
commerce moderne. Il fallait créer une nouvelle
autorité pour meltre à exécution des plans très
vastes devant répondre à ces besoins. Nous pou-
vons signaler les travaux les plus immédiats qui
vont être exécutés pour permettre aux grands
navires de remonter jusqu’à Londres mème, d'y
manœæuvrer et de s’y décharger dans les meilleures
conditions possibles; quoique ce port ne soit point
destiné à voir des bateaux comme les derniers
transatlantiques mis sur chantiers, il semble inté-
ressant de constater les dimensions énormes qu'on
va donner à ses bassins et à ses écluses.
C’est ainsi que l’on a décidé la construction d'un
bassin qui portera le nom de South Albert dock et
dont la dépense d'établissement approchera de
59 millions de francs. Ce dock aura 1400 mètres
de long sur 183 de large et une profondeur d’eau
de 11,58 m; on y pénétrera par une écluse de
243 mètres de longueur utile; la largeur de cette
écluse sera de 30,50 m, et sa profondeur d’eau de
43,74 m. On voit donc qu’une large part est faite
pour l'avenir et pour l'accroissement du tirant
d’eau des navires actuels. Cela va suffire très long-
temps sans doute aux besoins du port, bien qu’on
ait l'intention d'approfondir considérablement la
Tamise pour permeltre aux très grands bateaux
d'arriver aussi facilement que possible à Londres.
Du reste, une seconde partie du projet comportera
l'exécution d’un nouveau dock, North Albert dork.
COSMOS = D9
Il ne coùtera pas moins de 402 millions et aura
une longueur de 2255 mètres pour une largeur
variable de 283 à 305 mètres; la profondeur d’eau
que l’on y trouvera normalement sera de 13,74 m;
quant à l’écluse qui y donnera accès, elle aura
305 mètres de long pour 36,60 m de large et une
profondeur d'eau de 15,90 m sur le seuil. Un bassin
de carénage aux proportions énormes sera prévu
pour les bateaux fréquentant ce bassin. D. B.
Réservoir d’eau d'incendie, servant de pis-
cine, de l’Université de Berkeley (Californie,
É.-U.). — L'Université de Californie vient de con-
struire à Berkeley un réservoir de 2500 mètres
cubes de capacité, destiné à servir de piscine aux
étudiants et de réservoir de charge pour l’alimen-
tation des conduites d'incendie.
Ce réservoir a une profondeur variant de 1 à
3 mètres. Les parois sont en béton massif et sont
munies de joints de dilatation tous les 9 mètres.
Le radier a 7,5 cm d'épaisseur et est armé de
métal déployé, dans le but d'éviter les lissures. Il
vient s’encastrer dans les parois, et l'étanchéité du
joint est assurée par un enduit en asphalte appli-
qué sur le nu du mur et qui se raccorde à l’enduit
en ciment du radier.
L'eau d'alimentation du réservoir provient des
collines environnantes et est purifiée pur son pas-
sage à travers un filtre lent à sable. L'eau est dis-
tribuée à une extrémité du réservoir par un tuvau
perforé en fer galvanisé; l'écoulement se fait par
une série de huit déversoirs en fonte de 30 centi-
mètres de longueur, disposés à l'extrémité opposée.
On assure ainsi l'évacuation des impuretés qui se
rassemblent à la surface.
La conduite d'eau en charge part du point le
plus profond du réservoir; elle peut être utilisée
comme conduite de vidange. Le prix de ce réservoir
s'est élevé à 78 000 francs. (Génie civil.)
INDUSTRIE
Scie à disque sans dents pour le coupage
des métaux. — Le sciage des métaux par des
disques sans dents proprement dites et striés gros-
sièrement par des coups de burin, mais tournant
à de grandes vitesses périphériques — jusqu à
150 mètres par seconde, — est une vieille histoire,
car, dés le 3 février 1823, l'Américain Daggott
écrivait à l'American Journal of Science and Arts
qu'il était parvenu à couper des aciers el à aflüter
des scies en se servant d’un simple disque en tôle
découpé dans un tuyau de pole. (CF. Cosmos t. LV,
p. 30 et p. 226.)
C'est vers 1874 seulement que M. J. Reese, dẹ
Philadelphie, en rendit l'usage industricilement
pratique, par l'emploi de grands appareils de 1.4 m
de diamètre et 5 millimeétres d'épaisseur, animes
d'une vitesse périphérique de 70 mètres par seconde
60 | COSMOS
La scie de Reese se répandit aussilot dans les acié-
ries et les fabriques d'armes pour le coupage des
canons de fusils. Le type de machine livrée actuel-
lement par les ateliers de M. Ryerson, de Chicago,
comporte un moteur électrique de 52 chevaux,
actionnant un disque dont la périphérie est consti-
tuée par un bourrelet entaillé à coups de burin; le
disque, qui a de 1,40 m à 1,32 m de diamètre, tourne
dans une enveloppe à l'intérieur de laquelle il est
constamment arrosé d'eau. Les scies durent de
deux à trois mois, moyennant quelques retaillages
au burin qui se font en un quart d'heure. La scie
de 1,32 m, animée d'une vitesse angulaire de
2 000 tours par minute par un moteur de 100 che-
vaux, coupe un fer à T de 610 millimètres en
seize secondes.
Par quel effet cette scie parvient-elle à couperle
métal? On à imaginé des théories singulières; on
prétendait que la scie ne touchait mème pas le
métal, et que la coupe s’effecluait par la fusion de
l'acier sous la chaleur que dégageait la projection
du courant d'air centrifuge entrainé par la scie. La
vérité est que cette fusion de l'acier, accompagnée
d’arrachement, est produite par le travail intense
de frottement localisé au point de contact. Quant
au faible échauffement de la scie, il s'explique par
ce que chacun de ses points ne reste en contact
avec la coupe que pendant un instant, le reste de
la rotation s'effectuant dans l'air et sous un arro-
sage d'eau.
Le bois des crayons. — Le crayon est formé
d’une mine enfermée dans un bâtonnet de bois:
tout le monde sait cela; mais le bon crayon, le
crayon de luxe, doit ètre formé d’un bätonnet de
bois de cèdre rouge contenant de la plombagine.
Or, le bois de cèdre rouge d'Amérique, genévrier
rouge, a élé si bien exploité pour cette industrie
qu'il est devenu rare et qu'on ne peut s’en procurer
qu'à des prix fous. (Voir Cosmos, t. LAU, p. 6,
n° { 321.)
On a nalurellemeni cherché des succédanés à ce
bois devenu si précieux, mais on ne les a pas encore
trouvés, et on s'est livré à des recherches pour
découvrir de nouveaux gisements. Or, on en
exploite en ce moment de bien inattendus. On a
reconnu que dans le Tennessee nombre de vieilles
maisons ont leur charpente en cèdre rouge; les
fabricants de crayons n’hésitèrent pas: on acheta
ces maisons pour les démolir, quitte à les recon-
struire avec des matériaux moins précieux.
Nous avons vu un fait analogue en France, lors
de la découverte des phosphates dans le nord du
département de la Somme. Les prospecteurs ayant
reconnu que l'on avait jadis employé ‘ces phos-
phates comme mortier dans la construction des
maisons, on acheta des villages entiers pour les
démolir.
Aux Etats-Unis, après s'être emparé des char-
18 suizzer 191%
pentes des habitations, on s'est occupé d'exploiter
les barrières et les enclos formés jadis du bois pré-
cieux, et il parait que l’on en a trouvé en quantité:
on le paye un bon prix cependant, et on cite des
fermes où le prix du bois de clôture représente une
valeur plus grande que celle dela ferme elle-même
tout entière. L'année dernière, dans un seul district,
la section de Murfreesboro, la Compagnie améri-
caine de fabrication des crayons a acheté pour
les besoins de son industrie pour plus d’un million
de francs de ces vieilles clôtures en cèdre rouge.
Un curieux emploi du moteur à pétrole
comme auxiliaire du cheval. — En Amé-
rique, on trouve des applications particulièrement
curieuses du moteur à pétrole, par exemple à la
moissonneuse. Lorsque le temps de la moisson est
pluvieux, l'emploi de la moissonneuse devient
presque impossible à raison du trop grand effort
qu'elle réclame des animaux attelés. Ona imaginé
de placer un moteur à pétrole d'un type léger sur
le chässis de la moissonneuse de telle sorte que re
moteur fait mouvoir le mécanisme méme de lappa-
reil. Ainsi le travail des chevaux se trouve réduit
de moitié, il ne reste plus pour eux qu’à fournir le
travail de traction. Les constructeurs ont élé ainsi
amenés à construire ces moteurs qui, après avoir
servi à la moisson, sont facilement transportables
et peuvent être utilisés pour les autres opérations
de la ferme. N. LALLIÉ.
AVIATION
L'équilibre de l’aéroplane dans le vent. —
M. Robert Esnault-Pelterie, donnant à la Société
des ingénieurs civils (Bulletin d’avril) « quelques
renseignements pratiques sur l'aviation », a parlé
de la traitrise des vents et des remous qui sur-
prennent l’aviateur sans aucun avertissement.
Ceux qui n'ont jamais navigué dans l'air ne
peuvent se rendre compte de la violence de cer-
tains remous que l'on rencontre même dans des
régions d'assez grande altitude et en dehors de
toute cause visible.
I arrive fréquemment, lorsque l’on se trouve
planer en ballon au-dessus de la mer de nuage, de
voir subitement une colonne de brouillard surgir
d'un point quelconque de cette immensité blanche
qui parait si calme et s'élever en quelques secondes
à 50 ou 100 mètres au-dessus du niveau général,
crevant comme une immense bulle qui aurait été
souffiċe par-dessous.
Encore, dans ce cas, peut-on se douter facilement
qu’au voisinage du niveau de séparation de deux
couches d'air qui sont dans des états très différents,
puisque l’une est sursaturée de vapeur d'eau et
l'autre quelquefois très sèche, des actions réci-
proques peuvent avoir lieu qui, de la part d'aussi
grandes masses, sont loin d’être négligeables.
N° 4434
Mais l’un des phénomènes qui ont le plus surpris
les aviateurs, au début, est celui de s’être trouvés
horriblement secoués par un jour de calme plat,
généralement, il est vrai, dans le voisinage d'un
orage, mais quelquefois mème sans le moindre
nuage à l'horizon.
Ces perturbations, par temps calme, sont dues
à ce fait qu'aucun mouvement ne brassant les
masses d'air, il s'établit des courants verticaux
ascendants et descendants. Au-dessus d'une plaine
aride, par exemple, le sol, réverbérant la chaleur
solaire, provoque l’apparition d’un courant ascen-
dant au-dessus de lui, tandis que dans la région
voisine un bois provoque un courant descendant.
Du reste, tousles aéronautes savent parfaitement
combien un simple ballon libre est sensible au
passage au-dessus d'une plaine, qui dilate le gaz et
le fait monter, ou au-dessus d'un bois, qui le fait
contracter et descendre, et surtout à la traversée
de la vallée des rivières, qui, dans certains cas, et
si on se trouve les traverser un peu en longueur,
peuvent forcer le pilote, à son grand désespoir,
à dépenser beaucoup de lest.
Sans reparler de la sensibilité du moteur, par sa
carburation, à toutes ces influences, l'aéroplane en
lui-même n’y est point soustrait.
Observons, en effet, que les ailes qui le portent
se soutiennent en s'appuyant sur l'air à une inci-
dence très faible qui, en général, est voisine de
40 pour 400, mais que pourtant certains construc-
tenrs, surtout pour leurs appareils de course,
diminuent sensiblement.
Supposons donc que cette surface, se mouvant
à la vitesse de 25 mètres par seconde, ce qui est
une moyenne assez normale, vienne à rencontrer
brusquement sur son chemin un courant d'air des-
cendant à la vitesse de 2,5 mètres par seconde: les
ailes vontsubitement recevoir l'air par leur tranche,
et l’aviateur aura la sensation de tomber dans un
trou. C'est ce qu'ils expriment par l'expression un
peu spéciale : « Aujourd'hui, il ne fait pas bon
voler, il y a des trous dans l'air! »
Il est évident que l’empennage pénétrera dans la
colonne d’air descendante, un cinquième de seconde
environ après les ailes, et tendra immédiatement
à corriger ce défaut. Néanmoins, l’aviateur aura
éprouvé la sensation très désagréable de tomber
dans le vide pendant quelques instants.
Si même le courant descendant se meut à une
vitesse encore plus grande, ce qui est loin d’être
impossible, il peut, pendant un court instant,
prendre les ailes par-dessus et soumettre l'appareil
à une accélération verticale de haut en bas, le for-
çant ainsi à descendre plus vite que sous l’effet de
la pesanteur seule : le pilote a alors la désagréable
sensation que son appareil fuit sous lui, et il est
obligé de se cramponner pour ne pas être décollé
et rester en lair.
COSMOS 61
CORRESPONDANCE
Conservation du beurre.
Je lis la note sur la conservation du beurre et de
la margarine dans le numéro 1432 du 4 juillet,
p. 28.
Les expérimentateurs allemands ont probable-
ment opéré sur des beurres de laiterie, parfaite-
ment préparés, parfaitement lavés, parfaitement
emballés, salés avec un selde premier choix exempt
de magnésie, etc. Avec toutes ces précautions, les
Danois, Suédois, Finlandais, etc., arrivent couram-
ment aux résultats indiqués, mais il s’agit de beurre
salé, et la plus grande partie des consommateurs
veut du beurre exempt de goùt de sel.
Les expérimentateurs qui n'ont pas obtenu une
bonne conservation avec les antiseptiques feront
sourire tout homme ayant quelque expérience en
la matière.
Voici un fait qui m'a été rapporté, il y a quelques
jours, par Mr" Buguet, à La Chapelle-Montligcon.
Il l'avait entendu raconter quelques jours aupara-
vant par M!" Augouard.
Un jour, on découvre une caisse de beurre Fortin
dans le fond de la case du P. Mauger, mort depnis
près de trois ans. Cette caisse de beurre, envoyée
par moi à mon camarade, le P. Mauger, n'avait
pas été ouverte. Par acquis de conscience, on
l'ouvre, on prend une boite, on déguste le beurre,
et quelle n'est pas la stupéfaction des témoins de
constater que le beurre paraissait aussi frais que
du beurre pris à la ferme. Après trois années lc
séjour au Congo!
Or, ce beurre, parfait comme préparation, était
conservé avec un gramme de fluorure de sodium
par kilogramme de beurre.
Le fluorure de sodium est un sel qu'on retrouve
dans nos os, sel souvent administré pour combattre
les fermentations intestinales et notamment la fer-
mentation butyrique.
La prohibition des agents chimiques de conser-
vation peut se défendre; elle est à ordre du jour,
mais rien ne dit que dans quelques années la
science médicale ne préférera pas, aux fermenta-
tions butyriques ou autres, l’addition d'une dose
inoffensive de sels conservateurs autres que le sel
ordinaire. Depuis de longues années, l'Angleterre,
pays très avancé en fait d'hygiène, admet les con-
servateurs chimiques. PIERRE FORTIN,
ancien exportateur de beurre.
Neuville-Vire, juillet.
P.-S. — Pour nos troupes du Maroc et des colonies,
dans tous les pays chauds où l'alimentation est basée
sur les conserves, généralement très salécs, le beurre
frais fluoré semblerait plus avantageux que le bourre
fortement salé.
G2 COSMOS
18 JUILLET 1912
Le goudronnage des routes et la nouvelle auto goudronneuse.
Les chaleurs anormales que nous avons suppor-
tées au mois de mai, pendant quelques jours, ont
montré combien il est urgent de procéder au gou-
dronnage des grandes routes et des chaussées pari-
siennes dès que la belle saison s'annonce. Les pous-
sières s'étaient élevées ainsi qu'aux journées les
plus chaudes de l'été et, par l’arrosage, se trans-
formaient en une vilaine boue que les autos parais-
saient heureuses de projeter sur les passants.
Dès le printemps, les voies de communication
doivent prendre leur parure d'été. Malheureuse-
ment, cette parure est un cache-poussière dont la
teinte noire ne réjouit pas précisément la vue. Elle
ne tarde guère, cependant, à se mettre à la mode
else grisaille en quelques jours; on la devine alors
plus qu’on ne la voit. Les piétons, les riverains, sont
heureux de reconnaitre la présence de ce revite-
ment de goudron si discret et si efficace.
Le goudron, tel qu'il sort des usines à gaz, est
actuellement le seul produit qui soit capable de
supprimer économiquement la production de la
poussière sur Îles routes. Toutes les expériences
effectuées, il y a une dizaine d'années déjà, avec
des produits savants à base de goudron n'ont donné
que des résultats insuffisants et, de plus, trop couù-
teux. Le goudron, répandu à la température d'en-
viron 70° sur les routes préalablement balavées
avec soin, présente encore un autre avantage aussi
intéressant que le premier: il diminue les frais
d'entretien. M. Arnaud, ingénieur des ponts ct
chaussées, dans un rapport déjà ancien sur divers
essais, signalait, entre autres, l'avenue de la Tou-
relié, à Salil-Mandé, qui est livrée à une circula-
tion intense — 000 automobiles dans une journée.
Cette avenue, disait M. Arnaud, présente l'aspect
d'une chaussée nouvellement cylindrée alors qu'elle
n'a pas été rechargée pendant trois années consé-
eulives, mais seulement goudronnée tous les ans.
L'économie réaliste par le goudronnage est actuel-
lement évalute à 39 à 50 pour 100 sur le coùt de
l'entretien normal.
Nous insislons sur le fait que, pour ètre réelle-
mcnt efficace, le goudronnage doit ètre précédé
d'un balayage très complet, la poussivre s'opposant
à la pénétration des huiles et des essences conte-
nues dans le produit. Ces éléments inipregnent la
cnhrussée jusqu'à une profondeur de 3 à 5 centi-
mètres et agglomerent les matériaux. Le brai, qui
est la partie lourde, se solidifie ensuite en une mince
pellicule protectrice contre les infiltrations d’eau.
L'eau est, en citet, l'agent destructeur le plus actif
des chaussées parce que, lorsqu'elles sont détrem-
pées, elles perdent de leur consistance et cèdent
sous Île passage des véhicules qui creusent des
trous, voire même des ornières constituant d'excel-
lentes citernes pour les eaux de pluie. Le goudron-
nage est donc appelé à remettre petit à petit nos
routes en bon état, puisque l'on a constaté qu’au
bout de cinq. ans, à la suite de goudronnages
annuels, elles deviennent aussi dures que si elles
étaient faites en béton ou en ciment.
On peut répandre le goudron à la main ou à
laide de machines. Le premier procédé n’est pra-
ticable que pour les petites surfaces: les canton-
niers versent sur la chaussée, & l’aide d’arrosoirs,
le goudron préalablement chauffé et l'étendent
avec des balais. On a employé jusqu'ici les ma-
chines hippomobiles sur les routes aussi bien que
sur les chaussées parisiennes, et c’est grâce à elles
que d'importantes voies ont pu être débarrassées
de leurs poussières. Mais ces voitures nécessitaient
la présence de dépôts de goudron à proximité du
chantier, causant ainsi une gène pour la circula-
tion. C’est la raison pour laquelle la Ville de Paris
vient d'accepter les services d’une automobile spé-
ciale emportant sa réserve de liquide et circulant
à une vitesse telle qu'en peu de minutes l'opéralion
est terminée.
La machine est une automobile à vapeur. Dans
cette circonstance spéciale, il était préférable d'em-
ployer la vapeur comme force motrice parce qu'elle
peut être utilisée, après avoir joué son rôle d'agent
moteur, pour le chauffage du produit. Le gou-
dron doit, en elfet, être porté à la température
moyenne de 70° si l'on veut obtenir un excellent
résultat, D'ailleurs l'automobile, qui appartient au
système Purrey-l.-H. Exhaw et Ci, de Bordeaux,
fonctionne à la perfection. La partie motrice étant
connue, nous la passerons sous silence pour étudier
exclusivement les organes qui interviennent dans
le goudronnage. :
La tonne à goudron, d'une contenance de 5 mètres
cubes, est montec sur le châssis. À l’avant se trouve
le siège du conducteur, et à l'arrière une plate-
forme est occupée par l'ouvrier goudronneur qui dis-
pose de deux leviers pour embrayer les deux distri-
buteurs envoyant le goudron aux pulvérisateurs. Le
liquide est chauffé par un jet de vapeur détendue
dont la température, à sa source, est d'environ
200". La distribution s'effectue à l’aide de deux
pompes à alvéoles indépendantes l’une de l’autre
et actionnées chacune par une des roues du véhi-
cule: le débit est donc constant puisqu'il est fonc-
tion de la vitesse du véhicule. La rotation entraine
le goudron contenu dans les alvéoles à la partie
arrière des pompes et le refoule dans une conduite
alimentant les pulvérisateurs doubles.
Ces pulvérisateurs laissent échapper le goudron
en deux nappes divergentes. La première nappe a
pour fonction, au moment où elle atteint le sol, de
N° 143%
soulever toutes les matières non adhérentes à la
chaussée que le balayage préalable aurait respec-
tées; la nappe est dirigée obliquement vers l'avant
et chasse donc tous les éléments libres qu’elle ren-
contre. On dépose sur la chaussée la moitié de la
quantité du goudron nécessaire. La seconde nappe
prend une direction oblique inverse; elle atteint le
sol à 35 centimètres en arrière de la première et
y verse la seconde moitié de la quantité de liquide
déterminée. Il existe deux pulvérisateurs capables
de fonctionner séparément. Cette partie du méca-
nisme est enveloppée par une toile tombant jusque
sur le sol afin d'éviter les éclaboussures.
COSMOS | 6:3
Le débit des pulvérisateurs est variable et dépend
de létat de la chaussée; on projette en moyenne
1,5 kg de goudron par mètre carré. Le véhicule
marche généralement à la vilesse de 7 kilomètres
par heure en ordre de travail; à cette allure, on gou-
dronne, dans les conditions normales, 3 500 mètres
carrés eu dix-huit minutes. Ajoutons enfin que le
goudron subit une pression de 1,2 à 2,7 kg par cm?
au moment où il atteint le sol.
Dans ces conditions, le goudronnage des routes
revient à un prix extrêmement réduit: de 41 à 42 cen-
times par mètre carré, c’est-à-dire qu'il se trouve
abaissé de 30 pour 100 par l'emploi de la machine
Ge
m e sa 5
2
->
F
-
K
y
:
Gi
A
ž
A
LA NOUVELLE MACHINE A GOUDRONNER LES ROUTES, VUE DE L'ARRIÈRE.
automobile dont nous venons de parler et qui est
due à la collaboration de MM. Voisembert et Héde-
line. A Paris, cette dépense est entièrement sup-
portée par la municipalité; mais sur les routes
nationales, l'Etat, les communes et les riverains se
partagent les frais du goudronnage. L'Etat, consi-
dérant qu’il rend service à ses riverains, ne parti-
cipe généralement que pour un tiers dans la dépense
totale. Les communes et les habitants ont ensuite
conclu une sorte d'arrangement assez ingénieux
et, dans tous les cas, fort logique, aux termes duquel
chaque riverain s'engage à verser 0,50 fr par mètre
linéaire de façade pour le goudronnage. C'est assu-
rément peu de chose si l’on considère le bien-être
qui doit en résulter.
A côté de ce progrès économique donnant toute
satisfaction au public lésé par les conséquences de
la vitesse des nouveaux moyens de locomotion,
on procède encore à l'étude de différents procédés
imaginés dans le but d'augmenter la durée des
chaussées. Les recherches visent l'aggloméran!,
constitué actuellement par l’eau et le sable, que
l’on remplacerait par un liant chimique vraisem-
blablement à base de goudron ayant subi une dis-
tillation spéciale. D'autres chercheurs ont préconisé
l'emploi du bilume et de l’asphalte, mais le prix
64 COSMOS
de revient de ces malières esl assez élevé.
L'an prochain, les Anglais se proposent de mon-
trer, au Congrès de la route, un champ d'expé-
riences de 40 kilomètres de longueur sur lequel
ont été groupés tous les procédés préconisés par
les divers inventeurs. Cette route aura subi, à cette
époque, un essai de deux années, il sera donc pos-
sible d'apprécier exactement la valeur de chaque
procédé. En France, des expériences du même
genre ont élé faites dans les départements de
Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, et par la Ville de
Paris elle-même.
18 JUILLET 1919
En somme, les Etats, comme les municipalités
importantes, cherchent à établir leur balance d'in-
térėt, c'est-à-dire à déterminer s’il est plus écono-
mique d'adopter un procédé de rechargement coù-
teux, mais de longue durée, ou, au contraire, s'il
est préférable de s’astreindre à des rechargements
fréquents et d'un prix de revient assez faible. Nous
serons certainement fixés d'ici peu, et les routes
pourront alors être construites en vue de l'exploi-
tation intense qu'elles subissent et pour laquelle
elles n'étaient pas faites.
LUCIEN FOURNIER.
La flore du bord de la mer.
Le bord de la mer offre aux plantes des condi-
tions d'existence toutes particulières, autant par la
force du vent et la salure des embruns que par
la nature du sol, qui est tantòt rocheux, tantòt
sableux, tantòt argileux, mais toujours riche en
sel marin. Il n’est donc pas étonnant que la flore
n’y soit bien particulière, flore qui, d'ailleurs, ne
s'étend que sur une bande de terre généralement
assez peu large; le baigneur, en quelques jours
passés au bord de la mer, a tout le temps de l'étudier.
La flore la plus riche se montre dans ces vastes
espaces glaiseux que lon appelle des marais
salants, marais souvent modifiés par la main de
l'homme pour y faciliter l’évaporation de la mer et
la récolte du sel. La cueillette des plantes qui y
croissent n’y est même pas toujours facile : le ter-
rain est extrèmement mou, collant, humide, et l’on
s’y enlise vite. Il ne faut s’y aventurer qu'avec pré-
caution, et le plus simple est encore de n'en par-
courir le bord que là où le soleil a desséché la
croûte superficielle du limon. A la fin de l'herborisa-
tion, on n’est pas peu élonné de voir que toutes les
plantes ou presque présentent ce caractère commun
d'être grasses, c'est-à-dire gargies de sucs, et d'avoir
des tiges ef surlout des feuilles d'une épaisseur
inaccouluiméc. On a toutes les peines du monde à
les faire sérher pour les mettre en herbier, et là
elles font même assez triste mine.
Cest notamment dans les marais salants que
croissent les soudes (en lalin Suwda) et les sali-
cornes, ces dernières se présentant sous forme de
petils cierges verts, rarement ramiliés, un peu
noueux, où les fleurs sont tellement insignifiantes
qu'on ne les voit pas. Aulrelľois, on révoitait ces
plantes et on les incinérail pour obtenir la soude
(carbonate de sodium), mais aujourd'hui on pre-
pare industriellementcettesubstance. Lessalicornes
et aulres herbes marines nous servent néanmoins
indirectement: broutées par les moutons, elles
communiquent à la chair de ceux-ci une grande
finesse, que l’on apprécie surtout dans les got
de prés salrs.
Dans les mêmes parages, on trouve des asters
aux fleurs bleues, des stalicés aux fleurs violettes,
mélangés à de nombreux joncs et laiches, tandis
que des armoises, des plantains, des betteraves
sauvages, des inules se font remarquer par leurs
feuilles grasses.
Toutes ces plantes vivent dans un milieu très
humide; à haute mer, elles sont mème — surtout
aux grandes marées — largement humectées, mais
Jamais entièrement immergées. Il n’y a guère
qu'une espèce qui s'avance loin dans la mer, au
point d'y être presque constamment sous l'eau : ce
sont les zostères, qui forment de vertes prairies
sous-marines. À marée basse, cependant, en rele-
vant son pantalon ou sa jupe, on peut les parcourir
et mème y faire de larges récolles de crevettes ou
autres animaux intéressants. Tout le monde, d'ail-
leurs, connait les zostères pour les avoir vues rejetées
par les flols en paquels énormes de longues feuilles
vertes à surface brillante. Les jours où ces zostères
rejetées sont abondantes, on les récolte sous le nom
de goëmon pour en faire de l'engrais. Il est bon
de dire que, dans le goémon, avec les zostères, on
trouve généralement des Fucus, reconnaissables à
leurs extrémités grosses et gélatineuses. Souvent
même le goémon n'est formé que de Fucus. Mais
il ne faut pas les confondre : les zostères sont des
plantes voisines des graminées, c'est-à-dire des
plantes à fleurs, tandis que les Fucus sont des
algues, des plantes sans fleurs, des cryptogames,
comine le disent les botanistes dans leur langue
barbare. |
La tlore des sables n'est pas moins intéressante.
On x trouve en abondance des graminées dont
les pieds sont réunis à leur base par de longs
« rhizomes » qui courent dans le sol. Ces rhizomes,
par leur ensemble, forment de larges mailles qui
maintiennent le sable en place et l'empèchent d'être
entrainé par le vent. Autrefois, les dunes « mou-
vantes » étaient plus abondantes qu'aujourd'hui :
presque partout on y a semé les graminées dont je
viens de parler (/’samma, etc.), ainsi que des
N° 1434
laiches (carex des sables, etc.) qui les ont immobi-
lisées.
Au milieu des touffes de graminées, à l’aspect un
peu rébarbatif, on peut cueillir presque toujours
— la flore des sables est presque partout la même
— d'admirables liserons rampants (Convolrulus
soldanella) aux tleurs très grandes, des crucifères
roses (Cakile), des sortes de coquelicots jaunes
(Glaucium maritimum) aux fruits démesurément
longs, des papilionacées aux fleurs rouges (Ononis),
des linaires, plusieurs espèces d’euphorbes, des im-
mortelles et des diotis, tous couverts de poils blancs
laineux, et surtout une plante piquante, l Eryn-
gium maritimum, d'une teinte bleutée délicieuse
et d'un effet décoratif remarquable: admirez-la,
cueillez-la même, dessinez-la surtout.e..., mais ne
vous asseyez pas dessus!
Il n'est pas rare non plus d'y trouver un petit
arbrisseau, aux feuilles à peine distinctes (ce qui
lui donne l'air vaporeux et élégant) jet aux fleurs
petites, rosées, réunies en épis serrés. Très souvent
ces tamaris sont cultivés dans les villas où ils
servent à constituer des bosquets et des abris contre
le vent. Leur teinte verte est bien spéciale et les
fait reconnaitre de loin.
Quant à la flore des rochers et des falaises, le
nombre des espèces y est bien plus considérable,
parce qu'elle n’est pas exclusivement maritime et
GOSMOS 65
passe insensiblement à celle de l'intérieur des terres.
Elle varie, d’ailleurs, suivant les plantes. J'y cite-
rai cependant comme très fréquente une ombelli-
fère aux fleurs jaunâtres, presque vertes, aux
feuilles très grasses. C'est le Crithmum maritimum,
plus connu sous les noms vulgaires de perce-pierre,
de casse-pierre, de criste marine, noms qui font allu-
sion à son existence dans les anfractuosités des
rochers les plus abrupts. Les feuilles de cette plante
peuvent être conservées comme les cornichons
dans du vinaigre et, sous cette forme, constituent
un excellent condiment.
La criste marine est accompagnée de jolis œillets
(par exemple, à Granville et au Mont Saint-Michel),
de staticés si communs parfois que les miséreux
vont les chercher pour en faire des bouquets; de
lľarmerie maritime ou jonc marin, aux fleurs roses,
qui se trouve aussi dans les marais salants et les
jardins, où elle est très fréquemment cultivée; de
Composées aux fleurs jaunes et au feuillage blan-
châtre, cotonneux, et de bien d’autres plantes qui
tentent d'autant plus les botanistes qu'elles poussent
dans un endroit plus inaccessible.
On trouve encore au bord de la mer beaucoup
d'algues, mais nous n'y insislterons pas parce
qu'elles mériteraient à elles seules une étude par-
ticulière.
HENRI COUPIN.
Puériculture électrique.
Il y a de cela un peu plus d’un an, les journaux
ont fait grand bruit au sujet des intéressantes
expériences poursuivies par un savant suédois bien
connu, le professeur Swante Arrhenius, dans le but
de fixer jusqu’à quel degré l'électricité peut exercer
une influence quelconque sur la croissance des
enfants. Opérant sur cent écoliers de même âge,
de même sexe, de même poids, de mème taille,
tous en parfait état de santé et provenant tous des
mêmes milieux sociaux, il les avait divisés en deux
groupes égaux: tandis que les uns servaient de
a témoins », les autres furent soumis à un véri-
table bain électromagnétique permanent, grâce
à un agencement convenable des diverses salles
qui leur furent assignées comme résidence. Bien
entendu, tous reçurent mème alimentation, et leur
genre de vie à tous fut rigoureusement uniforme,
Après six mois d'expérience, les enfants du
groupe électrisé avaient accusé en moyenne une
augmentation de taille de 51 millimètres, alors
que ceux du groupe témoin n'avaient grandi que
de 32 millimètres. La différence était sensible et ne
pouvait être évidemment rapportée qu’à l'effet
bienfaisant des effluves électromagnétiques. C’est
ce que les journaux n’ont pas manqué de faire res-
sortir, en constatant les effets bienfaisants de cette
méthode et en réclamant, comme il convient, son
adoption systématique chez nous.
lnmédiatement, Swante Arrhenius se demanda
si les facultés intellectuelles ne subissent pas la
mème influence bienfaisante que subit l'organisme
chez les sujets soumis à l’effluvation permanente.
Une revue allemande, Zeitschrift für Schwach-
stromterhnik, rapporte à ce sujet que des expé-
riences analogues aux premières ont élé faites,
à la suite desquelles on a pris pour terme de com-
paraison les meilleurs travaux scolaires des élèves
les plus avancés: attribuant à ces travaux la
cote 20, on a coté ceux de tous les enfants, eitluvés
et non eflluvés. Dans la classe électrisée, 15 éco-.
liers sur 50 ont obtenu ce maximum, et la note
moyenne de l’ensemble a été 148,4. Dans la classe
témoin, au contraire, 9 élèves seulement ont mé-
rité la note 20, et la moyenne des 50 notes données
n'a pas dépassé 15. Par conséquent, l'écart consiaté
est sensible et nettement en faveur du régime élec-
tromagnétique.
Notre excellent confrère allemand ajoute que ces
66 COSMOS
recherches intéressantes sont appelées sans nul
doute à avoir, dans un avenir prochain, des consé-
quences inattendues, et que bien certainement
l'éminent physicien Swante Arrhenius n'a pas
encore dit son dernier mot sur ce sujet passionnant
qui contient en germe toute une science pédago-
gique nouvelle.
e
e a
Or, M. Swante Arrhenius vient de se prononcer,
et son opinion sur la matière est très intéressante
à connaitre. [l a écrit de Stockholm la lettre sui-
vante qui ouvre sur la question des horizons vrai-
ment nouveaux.
Je n'ai pas lu moi-même, écrit lillustre savant,
les articles dont vous me parlez, mais je crois
biencomprendre qu'il s'agit d'une communication
18 JuiLLET 1912
venue d'Amérique et d'après laquelle j'aurais
fait des expériences au sujet de l'influence de
courants ou de tensions électriques sur la santé
et l'intelligence des écoliers.
Rien de tout cela n'est vrai, et je n'ai pas écrit
une ligne sur cette question...
s
£ +
Nos lecteurs voudront certainement porter désor-
mais un intérèt très approximatif à ce qu'ils pour-
ront lire dans les journaux sur cette admirable
méthode suédoise de puériculture électrique qui
possède tous les avantages, mais est en même temps
inexistante. Ainsi, la fameuse jument de Roland
avait toutes les qualilés et un seul défaut, celui
d'ètre morte...
Francis MARRE.
La pompe Pfeiffer à mercure et la mesure des vides élevés.
1° Pompe Pfeiffer.
Les applications scientifiques et industrielles du
vide élevé ont incité de nombreux constructeurs
à élablir des pompes susceptibles de travailler
rapidement et de donner des raréfactions de plus
en plus complètes.
Le Cosmos a signalé récemment plusieurs modèles
qui semblent donner des résultats satisfaisants.
Constatons que les dispositifs adoptés ulilisent
exclusivement les pompes à mercure. Les seules
matières premières qui puissent être employées
dans la construction de ces appareils sont le fer ou
l'ucier, ou le verre et la porcelaine : les autres
matières sont, ou trop couteuses, ou attaquées par
le mercure.
On a tenté d'utiliser la fonte pour construire des
turbines de forme compliquée ; malheureusement,
la texture poreuse de cetle matière a obligé à
J'abandonner.
La substilution de la porcelaine à la fonte a
permis d'éviter le grave inconvénient de la poro-
sité; par contre, la fragilité de la per:elaine en
rend l'application industrielle très délicate, Aussi
M. Arthur Pfeiffer, de Wetzlar, a-t-il donné la pré-
férence à l'acier: sa pompe à mercure est toute en
acier, ce qui est une garantie de solidité et d'élan-
chéité. De plus, les parties qui se trouvent dans le
vide élevé sont émaillées.
L'intérieur de la pompe peut donc ètre nettoyé
avec des liquides corresifs, comme on Île fait pour
les pompes en porcelaine. IYailleurs, la pompe est
ètablie de manière à rejeter d'elle-même, hors de
la chambre à vide élevé, les impuretés qui auraient
pu s’y introduire.
Les figures 1 et 2 représentent la vue exttrieure
de la pompe Pfeiffer. Un tambour aspirateur en
tôle d'acier soudée à la soudure autogène chasse
Pair provenant, gràce au tube A, de la partie cylin-
drique —la chambre de vide élevé — de la pompe.
Cet air, pendant la rotation du tambour, est con-
duit dans une pompe auxiliaire, préparatoire pour
ainsi dire, qui l'aspire par le tube B. A chaque tour,
le tambour balaye la surfəce du mercure de la
chambre à vide élevé et enlève ainsi les impuretés
qu'il peut contenir : poussières, oxydes, etc.
L'appareil Pfeiffer se compose donc, en somme,
de deux pompes réunies sur un seul bâti: la pompe
à vide élevé (corps cylindrique) et la pompe prépa-
raloire (corps hémisphérique), En général, une troi-
sième pompe est encore nécessaire pour obtenir un
vide rapide. On associe donc à la pompe Pfeiffer
une trompe à eau ou une pompe rotative ordi-
naire. Dans ce cas, le tube 3 est fermé. Le réci-
pient 2 sert à recevoir de l'acide phosphorique
destiné à absorber l'humidité. La pompe Pfeiffer
se construit en deux grandeurs: pour 3,50 litres
de mercure et l'autre pour 4,75 litre.
2° Mesure des vides élevés.
Les applications du vide élevé étant assez nom-
breuses (lampes à incandescence, tube de Ræntgen,
de Moore, etc.), on a été conduit à créer des appa-
yeils permettant sa mesure d'une façon simple et
rapide.
Diverses méthodes ont été proposées à cet effet;
dans les unes, l'indicateur de vide est relié direc-
tement avec le récipient dans lequel existe le vide
élevé; dans les autres, c’est-à-dire lorsqu'il s'agit
de iubes, de vases hermétiquement clos, il est
nécessaire d'avoir recours à un procédé électrique.
Ne 143%
Les indicateurs de vide à compression appar-
tiennent à deux types principaux : le type vertical
(jauge Mac Leod), assez encombrant, et le type
réduit (système Reif).
La figure 3 donne le schéma de la jauge Mac
Leod ; la figure 4, celui d’une variante (indicateur
de Wol). Un tube vertical S, de 80 centimètres de
longueur environ, est en relation d’une part, à l’aide
d’un tube de caoutchouc, avec un vase de verre G,
et, d'autre part, avec le mesureur DC. Ce dernier
porte une tubulure qui permet de mettre l’appareil
ST sr"
Er ne i
F1G. 1. — POMPE A MERCURE PFEIFFER.
en communication avec la pompe à vide ou l’espace
dans lequel règne le vide que l’on veut mesurer. On
verse dans le vase G du mercure qui s'écoule à la
partie inférieure et remplit le bas du tube S et le
tuyau de caoutchouc. L'appareil étant mis en rela-
tion avec l’espace dans lequel on fait le vide, le
mercure monte dans le tube à une hauteur corres-
pondant à la hauteur barométrique au moment de
l'opération (dans S, jusqu'à une hauteur voisine du
point Z; en ce point, le tube se partage en trois
ramifications : 2 tubes D et un tube central C fermé
à sa partie supérieure et muni d’une boule K).
Pour effectuer une mesure, on soulève le vase G,
COSMOS 67
qui passe de la position B à la position A; le mercure
monte dans les tubes D et dans le renflement K
du tube C. Lorsque le mercure a franchi le point Z,
il enferme dans K et C l'air résiduel de volume
K + Cet à la pression x et le comprime dans le
tube C gradué de manière à indiquer la propor-
tion existant entre le volume actuel et le volume
primitif de l'air résiduel. La pression à laquelle
s'effectue cette compression est donnée par la dif-
férence des hauteurs des colonnes de mercure en
C et D. On connait donc ainsi le volume et la pres-
FıG. 2. — POMPE PFEIFFER.
sion de l’air résiduel. Le produit pv étant constant,
la pression cherchée est x fois plus petite que celle
que lon mesure en C et D, le second volume étant
æ fois plus petit que le premier.
On mesure ainsi des vides de 4 à 0,0001 mm ou
même 0,000001 mm. L'appareil qui vient d'être
décrit est évidemment peu commode, par suite de
ses dimensions exagérées (1,50 m environ); aussi
l'a-t-on modifié pour le rendre plus maniable.
L’'indicateur de vide de M. H. J. Reif, construit
par Arthur Pfeiffer, à Wetzlar, est de: dimensions
beaucoup pigs modestes.
La figure, 5 donne le schéma de Fappareil: le
68 COSMOS
vase B est fermé, ce qui permet de raccourcir le
tube S de près de moitié. Il ne mesure plus que
0,50 m.
Les figures 6 et 7 repré-
sentent l'instrument com-
plet.
Tout récemment, le con-
structeur Pfeiffer, de Wetz-
lar, a modifié indicateur de
Reiff de manière à en sup-
primer les inconvénients.
Dans cette nouvelle variante
18 JuIiLLET 1912
(fig. 8 et 9), ie mercure n'esi en contact qu'avec du
verre, tant pendant l'évacuation que pendant la
mesure. On supprime donc ainsi tout risque
de salir le mercure avec du caoutchouc et toutes
les difficultés que l’on rencontrait pour assurer
l'étanchéité, surtout avec les vieux tuyaux.
Le nouvel instrument n’a que 0,30 m environ de
hauteur et de largeur. Un appareil mesureur à
compression C communique par l'intermédiaire
d'un robinet H avec un tube B et un réservoir
à mercure A. La boule A et le tube B sont remplis
de mercure jusqu'au robinet H, et l'instrument, qui
peut tourner autour d’un axe S, est placé de ma-
nière que le dispositif mesureur CDF soit hori-
zontal. Cela fait, on expulse l'air en E, en même
temps que l'on ouvre H.
Pour mesurer le vide obtenu, on amène le dispo-
sitif mesureur de la position horizontale à la posi-
tion verticale.
Le mercure pénètre alors de A, par le tube B,
dans le mesureur CDF.
| -A La partie ABF agit alors exactement comme un
' baromètre tronqué, et on peut y lire des raréfac-
' tions de 41 à 180 millimètres de mercure. Le sys-
|
D K
!
L8 (Ea
| RI B
F1G.3.— INDICATEUR MAC LEOD. FIG. 4. — INDICATEUR WOHL. F16. 5.
2 m. 3 GTA TUR
Pl 357 MES
rt EEN
F1G. 6 ET 2. — TUBE DE REIFFe
tème C mesure les vides élevés. En effet, le mercure
qui pénètre à l'intérieur de ce système comprime
une certaine quantité d’air dont le volume peut
être lu sur un tube capillaire C, ainsi que la pres-
sion de l'air comprimé en C. Ces deux indications
donnent immédiatement le degré de vide obtenu.
F1G. 8 ET 9. — INDICATEUR REIFF-PFEIFFER.
N° 41434
Le robinet H sert à les contrôler lorsqu'i s'agit
de mesures très exactes. L'instrument permet de
mesurer tous les vides de 0,0001 mm jusqu’à
180 millimètres de mercure.
On voit donc que, pour mesurer les raréfactions
ordinaires, aimsi que les plus élevées, ïl suffit de
COSMOS 69
faire tourner l'appareil de %°. L'instrument étant
complèlement en verre, le mercure n’est exposé
à aucune perte ni à aucune impureté (lerobinet H
“est rendu étanche par du mercure). Ajoutons que
le prix de l’appareil est peu élevé.
A. BERTHIER.
Machines à fabriquer les bouteilles.
Le travail du verre demande une grande habi-
leté professionnelle, lorsqu'il est exécuté avec les
procédés qui ont été employés pendant tout le
siècle dernier et qui tendent seulement à dispa-
raitre.
L'apprentissage de l’ouvrier souffleur, qui était
un des plus pénibles entre tous ceux qu exigeaient
l'industrie, était aussi un des plus longs : il devait
être commencé de très bonne heure pour que Îe
gamin, devenu souffleur, pût rester à l'usine un
nombre d’années suffisant, avant d'ètre obligé de
s'arrêter, épuisé par la chaleur des fours, usé par
le travail de ses poumons, souvent sans avoir
dépassé la quarantaine. |
Et c'est cependant une des rares industries pour
lesquelles les législateurs, qui depuis une vingtaine
d'années s'efforcent d'assurer l'hygiène des ateliers
et de réglementer le travail des enfants, ont été
contraints d'admettre des exceptions, devant l'im-
possibilité de les supprimer sans provoquer une
faillite générale de la verrerie. Aussi l'opinion
publique réclamait-elle depuis longtemps pour le
travail du verre une transformation analogue à
tant d’autres déjà obtenues dans des industries
aussi dangereuses : la substitution du travail mé-
canique au travail humain, l'invention de ma-
chines puissantes, épargnant des milliers de vies.
Ces machines existent maintenant, et l'évolution
souhaitée se fait peu à peu : l’ancienne usine, avec
ses halles rouges de feu, avec son atmosphère
embrasée par le rayonnement des fours, avec ses
ouvriers demi-nus et haletants, agitant des blocs
incandescents au bout de longues cuillers, tend à
se transformer pour prendre l'aspect de l'atelier
moderne, bien aéré, très calme, où l'on n'entend
plus que les ronflements des moteurs, les respira-
tions régulières des pistons, où l'on ne voit plus
que des masses de fonte et d'acier travaillant sans
relâche dans la douce lumière du jour, avec des
gestes précis, formidables ou délicats tour à tour,
sous la surveillance de quelques mécaniciens qui,
circulant dans les allées, règlent un organe, serrent
un écrou, vident une burette d'huile.
Nous parlerons seulement aujourd'hui d'une des
branches les plus importantes de l'industrie du
verre, la fabrication des, bouteilles, et pour faire
voir à nos lecteurs l’évolution dont nous venons
de parler, nous allons leur présenter deux des
machines les plus employées actuellement : l'une
française, qui, perfectionnée plusieurs fois par son
inventeur lui-mème, caractérise l’évolution dont
nous avons parlé plus haut, et qui a permis de
réduire progressivement la main-d'œuvre; l’autre
américaine, qui a fourni brusquement, trop brus-
quement peut-être, le moyen de supprimer les diffi-
cultés du travail humain.
Le soufflage était l'opération qu'il fallait cher-
cher à rendre mécanique le plus vite possible : des
inventeurs résolurent le problème vers 1890 par
l'utilisation d'un courant d'air comprimé. Le prin-
cipe de la machine Boucher date de cette époque.
La figure 4 nous montre que les dimensions de
cette machine, comparées à celles de l’objet qu'elle
fabrique, sont très raisonnables. Elle porte deux
moules, l’un, ébaucheur A: l'autre, finisseur B :
chacun d'eux se compose de deux moitiés reliées
par une charnière et pouvant s'écarter ou se rap-
procher sous l’action des manettes que commande
l’ouvrier. Celui-ci peut aussi faire avancer succes-
sivement chacun des moules de manière à le
placer au-dessus de l'axe C. La photographie est
prise à l'instant où les deux moules se sont ouverts
et rapprochés de leurs supports pour dégager la
bouteille terminée.
La bagne qui termine le col de la bouteille est
faite par un petit moule D qui peut s'ouvrir aussi
en deux parties.
L'air comprimé est amené, soit à haute pression,
par la tige creuse E, portée par la console tour-
nante F, soit à basse pression, par l'arbre creux dn
volant G et par la tige creuse H. Le volant G per:act
de faire tourner tout ensemble A H D etle baian-
cier K qui le supporte autour de l'axe horizontal
porté par la console.
Les opérations se suecédeal dans l'ordre suivant
à partir do la position actuelle, une fois que la
bouteille précélente a été enlevée :
1° On fuit tourner le volant de 480° de manière
à renverser le moule d'ébauche et le mouic de
bague, ce dernier se trouvant ainsi à la partie
inférieure, et étant bouché par un mandrin qui
ménage la place du col.
70 COSMOS
90 Par le fond du moule ébaucheur, on verse le
verre fondu, et au moyen de la console tournante
F, on fait arriver un courant d'air à haute pres-
sion : le bloc de verre prend forme et commence
à se solidifier extérieurement.
3° On tourne alors le volant de 180° pour
FıG. 1. — MACHINE A BOUTEILLES BOUCHER.
ramener le tout dans la position initiale : ouvrier
ouvre le moule ébaucheur, le lire en arrière et
lui substitue le moule finisseur, pendant qu'il
soulient l’ébauche au moyen du fond mobile L.
En mème temps, le moule de bague est dégagé
de son mandrin, un courant d'air à basse pression
pénètre dans le col et souffle la bouteille.
4° On ouvre les moules, on fait descendre le
fond mobile, et la bouteille terminée est mise à
refroidir.
La machine que nous venons de décrire n'est
pas entièrement automatique, puisque la bouteille
qu’elle fabrique doit être suivie dans toutes ses
transformations par un ouvrier intelligent el
expérimenté, qui commande à la main tous les
organes à mettre en jeu au moment vouiu : il
mesure et coupe le verre fondu qu’on lui apporte,
manœuvre les manettes et le volant, agit sur les
pédales pour lancer ou arrêter le courant d'air
comprimé. La substance mème est fournie au
mouleur par un ouvrier cueilleur qui, au moyen
d'un foret, puise le verre en fusion dans le bassin
18 ouizzer 1912
d'un four, spécialement aménagé pour éviter le
rayonnement.
Les conditions d'hygiène se trouvent ainsi suffi-
samment remplies, le travail des ouvriers est rendu
beaucoup moins pénible, et ces machines sont
assez robustes et assez simples pour donner une
bonne production, avec peu de frais d'entretien :
un ouvrier exercé arrive à mouler par heure
120 bouteilles d'une forme quelconque, d'aspect
très régulier et de capacité constante.
La machine Owens, dont la figure 3 donne une
idée d'ensemble, supprime complètement l'inter-
vention de l’homme au cours de la fabrication; il
faut, pour la conduire, non plus des ouvriers verriers
de métier, mais des mécaniciens qui connaissent
à fond tous les organes de ce grand automate.
Elle se compose en réalité de six mécanismes
dentiques, répartis sur la circonférence d'un
immense barillet de revolver, tournant autour
d'un axe vertical : la photographie nous présente
de face le mécanisme n° 6, comme l'indique la
plaque de fonte qu'il porte. Faisant donc abstrac-
tion des cinq autres, nous allons décrire celui-là
seulement. .
Nous voyons qu'il porte trois moules, analogue,
à ceux de la machine Boucher :
L'un a, à la partie supérieure, qui sert à former
la bague et qui est actuellement fermé;
Le second bb", au-dessous, qui finit la bouteilles
el qui se trouve ouvert en deux moitiés ;
Le troisième cc', à parois très épaisses, qui
ébauche l'objet, et qui, entr'ouvert, est rabattu
vers le bas. |
Les divers mouvements de ces moules sont pro-
FıG. 2. — PHASES DE LA FABRICATION D'UNE BOUTEILLE
PAR LA MACHINE OWENS.
duits au moment el à l'endroit voulus, par l'inter-
médiaire de leviers articulés, commandés par des
cames immobiles, concentriques au grand axe
vertical de la machine; c'est aussi par des cames
que sont manœuvrées les soupapes mettant les
moules en communication, tantôt avec une con-
N° 143%
duite d’aspiration, tantôt avec une conduite d'air
comprimé. Ces canalisations partent toutes du
sommet de la machine, où arrivent les deux gros
tuyaux d'aspiration et de compression qui des-
cendent du plafond. |
Enfin, l’ouvrier cueilleur est supprimé parce que
le four de fusion, dont on aperçoit une partie sur
la droite de la photographie, se trouve placé tout
près de la machine, et que celle-ci cueille elle-
même le verre dans la cuve, en prenant juste la
quantité nécessaire. En effei, tout le bâli, chaque
fois qu’il a tourné d’un sixième de tour, s’abaisse,
puis se relève : à ce moment, le moule ébaucheur
COSMOS 71
du mécanisme qui passe devant le four se trouve
fermé et appliqué contre le moule de bague; sa
partie inférieure, sans fond, plonge dans la cuve
de fusion, tandis qu’une aspiration produite dans
la bague fait monter le verre (fig. 2, 4). Un
poinçon ménage le col de la bouteille, l’ébauche
se forme. Au moment où le båti remonte, un cou-
teau c (fig. 2, 2) vient raser le bas du moule, de
manière à séparer l’excès de matière.
La fabrication s'achève pendant que la machine
continue sa rotation. Le poinçon sort du col de la
bouteille, les deux moitiés du moule d'ébauche
s'écartent (fig. 2, 3), et la masse de verre reste
F1G. 3. — LA MACHINE OWENS A FABRIQUER LES BOUTEILLES.
suspendue par la bague, sous forme d’un bloc
allongé, incandescent. Le moule finisseur se sou-
lève aussitôt et l'enveloppe, tandis qu'un fond
mobile achève d’enfermer la masse (fig. 2, 4).
L'aspiration a cessé : elle fait place à un courant
d'air comprimé qui souffle la bouteille (fig. 2, 5).
Tous les moules s'ouvrent alors (fig. 2, 6) et
laissent tomber l’objet, la tête la première, dans
un entonnoir sous lequel tourne un réservoir por-
tant des logements où les bouteilles viennent se
placer. Une légère fusion fait disparaitre les irré-
gularités de l'embouchure. La bouteille terminée
passe dans un four à refroidissement rapide.
Pour diminuer l'usure et éviter la rupture du
verre, il faut réchauffer les organes du moulage
quand ils viennent en contact avec le verre fondu
et les refroidir progressivement aussitót qu'ils
l’abandonnent : toutes les parties soumises à des
variations de température sont munies de con-
duites et de robinets qui laissent circuler un cou-
rant d'air chaud ou froid suivant le besoin. Le
refroidissement doit être énergique surtout pour
le moule d'ébauche, qui, plongeant dans la cuve
de fusion, est soumise à une très haute température.
Par contre, pour éviter un empâtement dans le
bain de verre à l’endroit où les moules d'ébauche
72 COSMOS
froids viennent tremper successivement, le bassin
repose sur une plate-forme en fer, qui, montée sur
galets, tourne sous une voùte de four chauffée
par un mélange de gaz et d'air.
Le constructeur a prévu les bris de bouteilles
au cours de la fabrication, et pour éviter des acci-
dents aux mécanismes dus à la présence de verre
durci entre les parties mobiles, les liaisons des
organes de commande sont munies de ressorts qui
cèdent sous les résistances anormales.
Ainsi que dans la machine Boucher, les moules
peuvent ètre changès rapidement pour permettre
de fabriquer d’autres genres de bouteilles : comme
la hauteur des moules d'ébauche au-dessus de la
cuve de fusion change avec leur grandeur, il est
nécessaire de pouvoir régler cette distance : on le
fait au moyen du volant qui apparait au premier
plan sur la figure 2.
La machine Owens fabrique donc six bouteilles
par révolution sur elle-méine, ce qui lui permet
d'en produire 44 000 à 32000 en vingt-quatre heures,
suivant la grandeur et la forme. Sa masse propre
étant assez importante, elle consomme une certaine
puissance et coùte très cher. En outre, elle exige
un certain nombre d'appareils accessoires qui
élèvent considérablement les frais d'installation :
four à bassin rotatif, appareil à border, soufflerie,
pompes; et aux 7 chevaux de puissance que son
mouvement propre absorbe, il faut ajouter au
moins 50 chevaux pour faire marcher tous ces
18 JUILLET 1912
accessoires indispensables. Il faut adjoindre à
l'usine un atelier important de réparations. Le
personnel total des équipes pour exploiter une
machine pendant vingt-quatre heures s'élève à
15 ouvriers dont $ÿ mécaniciens.
C'est pourquoi l'installation Owens ne s’est
montrée avantageuse jusqu'ici que pour de grandes
entreprises, établies depuis cette invention. Les
anciennes verreries pour lesquelles le prix de la
main-d'œuvre n’est pas encore excessif refusent
de risquer une transformation très coùteuse et
peut-être dangereuse. car elle entrainerait une
surproduction à laquelle les débouchés actuels ne
suffiraient plus.
Une centaine de ces machines fonctionnent actuel-
lement en Amérique: il n’y en a encore qu'une
douzaine en Europe. L'Angleterre et l'Allemagne
les ont essayées, et une Société de Berlin a acca-
paré l'exploitation des brevets Owens en Europe.
C'est une des raisons pour lesquelles les industriels
français ont jusqu'ici refusé de s'en servir; mais
ils prétendent aussi qu'ils ne gagneraient peut-ètre
pas au changement : les machines Boucher
marchent bien, ne sont pas encombrantes et per-
mettent de faire varier la production proportion-
nellement à la vente en réduisant les frais au
minimum ; enfin, la machine Owens ne sait pas
fabriquer le type bouteille de champagne, à cause
de la haute piqüre du fond, et c’est un gros défaut
pour les usines françaises. HENRI BERGÈRE.
La cure spécifique antituberculaire.
VII Congrès international de la tuberculose.
La séance d'inauguration du VIIe Congrès inter-
national contre la tuberculose a été tenue à Rome,
dans la giande salle du Capitole, le 44 avril, et
Les travaux du Congrès ont été poursuivis jusqu'au
20 avril.
Etaient officiellement représentés : L'Allemagne.
par M. De Leuve; l'Angleterre, par M. Nathan
Raw; l'Autriche, par M. Wechselbaum; la Bel-
gique, par M. Putzevs: le Brésil, par M. De Rocha;
la Bulgarie. par M. Ivanoff: le Canada. par M. La-
chapelle; le Chili, par M. Sierra; ia Chine par
M. Syahi; la Colombie, par M. Arcangeli; le Dane-
mark, par M. Motzen; FEspagne, par M. Erpina;
les L'ats-Unis, par M. Stelia; la France, par
M. Landonzy; la Hongrie, par M. Te Toth; le
Japon, par M. 5iuga; le Luxembourg. par M. Ra-
jeth; le Mexique, par M. Prunédo: la principauté
de Monaro, par M. Pontremoli; le Portugal, par
M. D’Ahnida; la Suisse, par M. Carrière.
les questions relatives A la tuberculose, au triple
point de vue scientifique, thérapeutique et social,
ont acquis une si haute importance qu'elles ne pour-
raient être suffisamment discutées dans les grands
Congrès internalionaux de médecine générale. Si
l'on songe que la tuberculose est sans contredit la
plus meurtrière des maladies infectieuses, celle
dont les sources de contagion paraissent le plus
difficilement Cvitables, on ne peut que se féliciter
de Fardenr avec laquelle les nations civilisées
s'efforcent de se mettre d'accord sur les remèdes
à opposer au flean.
M. Iüiggs, de New-York, en homme pratique,
a traduit fort spirituellement en dollars les dom-
mages causés aux États-Unis par la tuberculose.
En évaluant à 1500 dollars la valeur moyenne de
la vie humaine, à l'âge où l’on meurt le plus
souvent de tuberculose, et en multipliant ce chiffre
par 450000, nombre annuel des décès causés par
la tuberculose aux États-Unis, on trouve que cette
maladie cause une perte annuelle de 225 millions
de dollars. En ajoutant la perte d'un dollar par
jour et par malade pour l'incapacité au travail, et
N° 14314
une dépense égale pour frais de maladie, c'est-à-dire
105 millions de dollars par an, on arrive au chiffre
total et bien significatif de 330 millions de dollars
que les États-Unis payent chaque année comme
impôt à la tuberculose ! s
Toutes les questions d'ordre scientifique, écono-
mique et social relatives à la terrible maladie, qui
fait encore en France 150 000 victimes par an, et
près de 100 000 en Italie, ont été approfondies au
Congrès de Rome. Il serait diflicile d’en donner ici
un court et intéressant résumé. Nous désirons sim-
plement attirer l'attention des lecteurs du Cosmos
sur trois sujets qui ont été particulièrement dis-
cutés par les congressistes : la question de la thé-
rapeutique spécifique de la tuberculose, celle de la
cure chirurgicale de la phtisie et celle de la vacci-
pation antituberculaire.
On sait que la thérapeutique spécifique de la
tuberculose, fondée sur les phénomènes biolo-
giques desquels dépend la guérison spontanée des
maladies infectieuses, utilise presque exclusive-
ment deux séries de remèdes organiques : les dif-
férentes tuberculines et les différents sérums anti-
tuberculaires, au moyen desquels on se propose le
mème but, c'est-à-dire la guérison par les moyens
naturels de défense de l'organisme.
Les tuberculines, solutions ou émulsions des
principes toxiques bacillaires, injectées à très
petites doses aux malades dont l'organisme est
encore capable de réagir contre les poisons tuber-
culaires, excitent la production d’antitoxines, d'an-
ticorps bacillaires, c'est-à-dire de substances pré-
servatrices et curatives élaborées par les cellules
et contenues dans le sang, en mème temps qu'elles
déterminent au niveau des foyers tuberculeux cer-
taines réactions locales, bienfaisantes tant quelles
ne sont pas trop accentuées.
Avec les sérums antituberculaires prélevés sur des
animaux vaccinés au moyen des susdites tubercu-
lines, on se propose d'introduire dans l'organisme
des malades une certaine quantité de substances
défensives antitoxiques, qui s'opposent aux perni-
cieux effets des produits toxiques fabriqués par les
bacilles, et agissant soit localement sur les pou-
mons, soit sur l'organisme en général.
Avec les sérums antibacillaires ou bactérioly-
sines, prélevés sur des animaux vaccinés avec des
cultures mortes ou atténuées de bacilles de Koch, on
se propose d'introduire dans l'organisme des ma-
lades les substances bactéricides que fabriquent
normalement les tissus lorsqu'ils sont envahis par
les bacilles : ces substances ne sont pas simplement
antitoxiques, car elles attaquent la vitalité même
du bacille, dont elles provoquent la mort, la dis-
solution, la bactériolyse.
Tout cela semble bien simple en théorie :
c'est tout le contraire en pratique. Ce qui ne doit
étonner personne, si l'on considère la complexité
COSNOS 73
du problème de la lutte de l'organisme contre les
bacilles et leurs poisons, les différentes manières
de réagir de l'organisme envers la tuberculose, la
difficulté d'employer des produits artificiels pareils
à ceux qui sont fabriqués dans l'organisme par les
bacilles, d'une part, et les cellules des tissus, de
l'autre. Vingt-deux ans de pratique de la tubercu-
linothérapie, dix-sept ans de pratique de la séro-
thérapie antituberculaire n'ont pas encore mis
d'accord les savants et les praticiens sur la valeur
réelle de ces deux méthodes curatives. Aucune propo-
sition énoncée dans les Congrès n'a réuni l’unani-
mité des suffrages. Doit-on pour cela proclamer la
faillite du traitement antituberculaire par les
tuberlines et les sérums?
Nous ne le croyons pas, car, s’il est certain,
aujourd’hui, qu'aucune tuberculine n’équivaut, pour
les effets, au vaccin antirabique; s'il est reconnu
qu'aucun sérum antituberculaire ne peut ètre mis
de pair avec les sérums antidiphtériques, d'autre
part, nous savons, et cela a été dit et redit au
Congrès de Rome comme dans les Congrès pré-
cédents, que la tuberculinothérapie et la sérothé-
rapie antituberculaire reposent sur des bases sé-
rieuses : la constatation expérimentale que cer-
tains nouveaux procédés de laboratoire — sur
lesquels nous reviendrons peut-être un jour — ont
permis de faire de la présence de substances anti-
tuberculaires dans le sang de l'homme et des ani-
maux atteints de tuberculose ou traités soit par
les tuberculines, soit par les sérums. Voici, du
reste, comment M. Maragliano a cru pourvoir ré-
summer nos connaissances à ce propos en quelques
simples propositions :
1° Les bacilles vivants de la tuberculose, les
cadavres des bacilles, les poisons bacillaires, ino-
cules expérimentalement aux animaux, provoquent
la formation dans leur organisme de substances
défensives spécifiques, c'est-à-dire de substances
antitoxiques, bactériolytiques, agglutinantes, qui
sont démontrables et mème approximativement
dosables par des procédés spéciaux de laboratoire.
2° Les substances antituberculaires qu'on obtient
expérimentalement avec les inoculations de diffé-
rents matériaux bacillaires dérivent toujours du
mème processus de défense, c'est-à-dire sont des
produits de la défense organique contre l'agression
bacillaire.
3° Pour produire dans l'animai des substances
antituberculaires applicables à la thérapeutique
humaine, il convient autant que possible d'éviter
l’usage de bacilles vivants, car, dans le cas con-
traire, les produits thérapeutiques pourraient être
à bon droit objet de méfiance.
4 Les substances antituberculaires se trouvent
dans les éléments cellulaires des issus. duns les
leucocytes, dans le sérum du gang, dans le lait des
animaux soumis au {traitement immunisant antitu-
7% COSMOS
berculaire au moyen d'inoculations de produits
tuberculeux. L’'aphorisme de Wassermann et
Citron, que « chaque cellule qui est en état
de fixer la matière infectieuse peut produire des
anticorps », est donc parfailement applicable à la
tuberculose.
ÿ° L'infection tuberculaire chez l’homme déter-
mine la production de substances spécifiques de
défense, analogues à celles qu'on obtient expéri-
mentalement chez les animaux.
6° Les tuberculines et les poisons tuberculaires
en général peuvent, chez l’homme atteint de tuber-
culose, déterminer la production de substances
spécifiques de défense, à condition, bien entendu,
que l'organisme du malade soit encore capable
de réagir convenablement à l'inoculation de ces
poisons. |
7° Les substances antituberculaires contenues
dans le milieu organique des animaux immunisés
peuvent être transportées dans l'organisme de
Phomme sain ou malade.
8° On peut pratiquer une thérapie spécifique de
la tuberculose soit avec les tuberculines et les poi-
sons tuberculaires en général, soit avec les sub-
stances antituberculaires produites dans lorga-
nisme des animaux.
% On peut donc affirmer aujourd’hui qu'il existe
véritablement une thérapeulique spécifique de la
tuberculose humaine; mais, d'autre part, il est
absurde d'attendre d'elle des résultats favorables
si l'on ne s'adresse pas à des malades qui se
trouvent encore en de bonnes conditions de dé-
fense : ce qui équivaut à dire qu'on ne peut forcer
la nature : on ne peut que l'aider.
10° IT est possible de créer dans l'organisme de
l'homme sain un état de particulière résistance
envers l'infection tuberculaire au moyen d'un trai-
tement analogue à celui qui sert à immuniser les
animaux producteurs du sérum antituberculaire.
M. Neumann, de Vienne, a exposé d'une façon
très claire au Congrès de Rome son opinion, qui
est celle généralement acceptée, sur la tuberculi-
nothérapie. Il faut retenir, a-t-il dit, comme règle
fondamentale, que les quantités de tuberculine à
eimplover doivent être d'autant plus faibles que le
processus tuberculeux est plus actif. Ce traitement
n’est praticable que sur des malades en de bonnes
conditions générales et sans fièvre. Il faut toujours
commencer à injecter des doses minimes de tuber-
culine. La dose initiale la plus favorable parait
étre celle un peu inférieure à la dose capable de
provoquer une réaction générale. Les résultats de
celie thérapeutique spécifique active sont souvent
éclatants, mais on irait trop loin en affirmant
que la tuberculine peut guérir définitivement les
tuberculeux. Lorsque les malades ont de la fièvre,
la tuberculinothérapie, au lieu d’être utile, peut
accélérer l’évolution de la maladie.
18 JUILLET 1912
La question de la sérothérapie antituberculaire,
ou cure spécifique passive de la tuberculose, a été
mise au point par MM. Teissier et Arloing, qui ont
rappelé les premiers essais de sérothérapie, exposés
au Congrès de Bordeaux en 189% par le professeur
Maragliano, de Gênes, qui avait obtenu du cheval
un sérum essentiellement antitoxique. Les sérums
de M. Marmorek, de M. S. Arloing, de MM. Lanne-
longue et Achard, de M. Rappin, de M. Vallée, de
M. Jousset, etc., sont, eux aussi, des sérums presque
exclusivement antitoxiques, qui exercent leur action
sur la fièvre, les sueurs, la dyspepsie, les troubles
de la circulation et de la nutrition, à condition
que ces symptòmes dépendent seulement de l'in-
toxication tuberculaire, et non pas des intoxica-
tions provoquées par les différents germes micro-
biens associés au bacille de Koch, qu'on rencontre
dans les cas avancés de phtisie. Mais nous disposons
aussi, maintenant, contre la tuberculose comme
pour la diphtérie, de sérums anticorps, de sérums
qui agissent sur le bacille, et qu’on prélève sur des
animaux inoculés prudemment, non pas seulement
avec les tuberculines, mais avec des bacilles morts
ou atténués. Les sérums antibacillaires ou « bacté-
riolysines », parmi lesquels il faut citer celui de
M. Maragliano, ont été étudiés par MM. Teissier et
Arloing. Ils produisent la mort et la dissolution
des bacilles, mais, par conséquent aussi, la mise en
liberté des endotoxines bacillaires et une plus forte
intoxication de l'organisme s'ils sont utilisés d'une
façon trop intensive. C'est là un phénomène que
nous avions mis nous-mêmes en évidence dans
notre thèse de 41903, et qui ne pouvait échapper
à l'attention des observateurs compétents. Les
sérums bactériolyliques produisent des modifica-
tions très manifestes el souvent rapides dans les
foyers tuberculeux. Ils permettent d'attaquer les
bacilles, soit directement, soit indirectement, au
moyen de la phagocytose.
Enfin le Congrès s’est occupé aussi de la possi-
bilité d'un traitement spécifique ne nécessitant pas
le recours aux injections de sérums ou de tubercu-
lines, qui sont suivies quelquefois par des accidents
d'anäphylaxie, c'est-à-dire par des perturbations
locales et générales témoignant d’une dangereuse
sensibilité des tissus, et particulièrement du sys-
tème nerveux, à l’action des poisons tuberculaires
et des sérums antituberculeux. I] parait que la voie
gastrique et intestinale permet l'introduction des
substances curatives spécifiques, sans présenter
les dangers des inoculations sous-cutanées. C'est
là une constatation importante, dont nous sommes
redevables à M. Calmette, d’une part, à M. Mara-
gliano, de l'autre, et qui relèvera la confiance des
malades et des médecins dans la médication spéci-
fique antiluberculaire.
Ainsi, le VIIe Congrès de la tuberculose a sou-
ligné de nouveau l'importance de la tuberculino-
N° 113%
thérapie et de la sérothérapie antituberculaire,
dont les bases scientifiques paraissent solidement
élablies, en même temps qu'il a mis en garde le
public contre certaines exagéralions sur l'efficacité
de ces traitements qui, comme l'ont fait observer
si judicieusement MM. Teissier et Arloing, doivent
être encore sérieusement étudiés dans le but de
COSMOS 75
déterminer exactement « à quelles catégories de
malades ils peuvent ètre appliqués utilement ».
Les recherches dirigées en ce sens nous expli-
queront sans doute les divergences d'opinion qui
existent encore sur la valeur pratique des médica-
tions spécifiques antituberculaires.
Dr P. GOGGIA.
La turbine Tesla à disques parallèles sans aubes.
La turbine à vapeur est aujourd’hui d'un usage
courant à bord des grands vapeurs, par suite de la
qualité qu’elle a de pouvoir produire une grande
puissance sous un faible encombrement. Elle est un
des plus intéressants producteurs d'énergie par la
façon dont elle agit. La vapeur comprimée, au
lieu de venir se détendre dans un cylindre ou
espace fermé par une cloison mobile, utilise sa
détente en communiquant une vitesse considérable
à sa propre masse. Ses molécules, avec des vitesses
comparables à celle des projectiles des armes à feu,
épuisent leur énergie cinétique en venant frapper
F1G. 1. — TURBINE TESLA, A DISQUES SANS AUBES.
et rebondir sur les aubes d'une roue mobile. La
turbine élémentaire, la turbine de Laval, par
exemple, collecte ainsi sur ses aubes la force vive
de la vapeur que la chaleur a préalablement
engendrée. Dans les turbines plus nouvelles et
capables de fournir un rendement beaucoup plus
élevé, la vapeur agit par une série de détentes ou
cascades successives sur une suite de turbines élé-
mentaires fixées sur un axe commun. Chemin fai-
sant, la vitesse de la vapeur diminue tandis que
son volume augmente, mais ce qui caractérise
surtout ce mode de fonctionnement, c'est la mul-
tiplicité des chocs des molécules contre des sur-
faces résistantes pour la production d’une force
motrice (4).
(1) Sur les turbines à vapeur, voir l’article de A. BEr-
THIER, Cosmos, t. LV, p. 597 et p. 6314.
Tesla, le savant électricien, bien connu pour ses
remarquables appareils à courants alternatifs de
grande fréquence et de haute tension, vient d'ima-
giner un autre mode d'emploi de la vapeur dans
une turbine d'un {ype fort original, absolument
différent de tous les types connus, que nous venons
de rappeler.
Les revues scientifiques américaines et anglaises,
telles que Scientific American et World's Work,
ont décrit la curicuse invention, qui mérite: d’être
signalée et donne à réfléchir à tous les construc-
teurs actuels de turbines à vapeur.
Tesla, dans sa turbine, met en jeu les proprié-
tés d’adhérence et de viscosité, communes à des
degrés divers à tous les fluides, eau, gaz, vapeur.
F1G. 2. — PRINCIPE DE LA TURBINE A AUBES
GENRE TURBINE DE LAVAL.
On sait, en effet, que l’eau a une tendance mar-
quée à adhérer à une surface solide. La goulte
d'eau, sous la forme sphérique, peut résister à la
force de la pesanteur, si agissante cependant, tan-
dis que la viscosité s'oppose à la séparation de ses
molécules (1). On retrouve l’adhérence et la visco-
silé, à un degré moindre, il est vrai, mais encore
très marquée dans la vapeur d’eau un peu aqueuse
et dans les gaz, l'air, par exemple.
Comment accroitre l'adhérence? Évidemment,
(1) L'adhérence de l’eau aux corps solides a été
ingénieusement mise en œuvre pour puiser dans un
puits avec un élévateur composé uniquement d'une
courroie sans fin qui est déplacée rapidement en
ligne verticale sur deux poulies, et dont la partie
inférieure, avant de s'élever, est constamment mouillée
au fond du puits.
16 COSMOS
en augmentant l'étendue des surfaces sur laquelle
le fluide doit déterminer un frottement. Tesla
fabrique sa turbine de la manière la plus simple
suivant ces principes. Il prend des disques circu-
laires constitués par des lames d'acier minces et
rigides, et les fixe parallèlement les uns contre les
autres. Ainsi, ils peuvent être supportés par un
arbre qui les traverse en leur centre. Un très
faible espace de quelques millimètres au plus les
sépare. Le fluide sous pression, vapeur ou gaz,
amené par un ajutage à la périphérie de la roue
formée de cette façon, est projeté suivant la direc-
tion tangentielle dans les espaces vides laissés
entre les disques. On conçoit, dès lors, que ce lami-
nage entre de larges surfaces planes a pour effet
d’accroitre considérablement l'effet de friction pro-
venant de l'adhérence. Les disques sont donc
entrainés par le courant gazeux.
Ces disques sont renfermés dans une enveloppe
el évidés au centre. La vapeur pénètre dans len-
veloppe, comme on le voit figure 1, et suit une
direction sensiblement tangentielle qui s’infléchit
en décrivant une spirale vers le centre, où elle
trouve des orifices de sortie à l'extérieur. Au com-
mencement du mouvement des disques, la vapeur
se rend bientôt au centre, d’où elle s'échappe; mais,
à mesure que la rotation s'accélère, le chemin que
parcourt la vapeur s’allonge de plus en plus avant
l'échsppement, si bien qu’à la plus grande vitesse,
il peut arriver que la vapeur fasse plusieurs tours
à l'intérieur de l'enveloppe, tout en restant cons-
tamment en contact avec les disques et en exer-
cant sur eux, d'une maniére continue, son effet
d'entrainement.
Av dire de l'inventeur Tesla, le nouveau moteur
aurait une grande supériorité sur tous les autres
moteurs à piston et à turbine. Le rendement
serait de beaucoup meilleur (1). Tesla donne
sur ce point des raisons qui sont sérieuses el
logiques : « Dans la turbine ordinaire, dit-il, la
vapeur agit uniquement sur la périphérie des
disques el la pariie centrale reste inactive. Dans
le moteur de mon invention, la vapeur agit sur la
surface entière du disque. Aucune portion de cette
surface ne reste inutilisée. En outre, tous les méca-
niciens savent que, quand un tluide est employé
comme vehicule d'énergie, pour obtenir le rende-
ment maximum il est nécessaire de réduire au
minimum les changements successifs dans la
vitesse et dans la direction du mouvement du
fluide. Dans les diverses espèces de turbines inven-
tées jusqu’à présent, la vapeur subit toujours des
variations pius ou moins brusques de vitesse et de
direction, inconvénient qui est évité dans mon
type. » On peut, en outre, remarquer qu'à mesure
(1) Engineeriny montre cependant que le rendement
théorique maximum est inférieur à 50 pour 100, en ap-
puyantcelte affirmation sur les lois de la mécanique.
A8 JUILLET 4912
que la vitesse de la vapeur diminue entre les
disques, elle décrit des courbes de plus faible
rayon; elle achève sa détente précisément dans les
régions centrales de la turbine où la vitesse linéaire
des surfaces est beaucoup moindre.
La turbine Tesla présente une simplicité de con-
struction tout à fait remarquable quand on la
compare à la turbine ordinaire, où il faut compter
avec la fixation de milliers d'aubes sur le stator et
le rotor, avec un ajustage qui fait penser aux tra-
vaux d’horlogerie, avec des accidents qui ont pour
conséquences de véritables « salades d’aubes »
extrêmement coûteuses à réparer. Ainsi les quatre
turbines Parsons, qui produisent 40 000 chevaux
dans le transatlantique France, ont un nombre
total d'ailettes qui dépasse 600 000. Le montage des
coussinets de l'arbre moteur de la turbine Tesla
réclame seul beaucoup de soins. Il n’y a, par contre,
aucun organe délicat et susceptible d'être endom-
magé dans cette machine. On y substitue aisé-
ment un disque nouveau à un disque usé. La roue
à disques tourne indifféremment dans un sens ou
dans l’autre; elle est réversible immédiatement
par le jeu d'un simple robinet à deux voies, qui
dirige la vapeur d'un côté ou de l’autre de l'enve-
loppe.
Une qualité qui a aussi son importance, ce sont
les petites dimensions et le faible poids. « Les
moteurs les plus parfaits, actuellement en usage,
pèsent environ un kilogramme par cheval-vapeur
produit. Dans les modèles très imparfaits de mon
moteur que j'ai fait construire, dit Tesla, pour les
essais, j'ai déjà réussi à obtenir le cheval-vapeur
avec un moindre poids. D'après mes calculs, je
pense pouvoir arriver à construire des moteurs ne
pesant que 50 grammes par cheval. »
M. Tesla en est venu à la période des expériences
vraiment intéressantes. Un type de 110 chevaux
est extérieurement de la grosseur d’un chapeau de
feutre. Il tourne à 7 000 tours par minute. Un
second type est en fonctionnement pour essai à la
Edison Waterside Station de New-York; il déve-
ioppe 200 chevaux et pèse une centaine de kilo-
gramimes. Le rotor est composé de 25 disques en
acier trempé d'un diamètre de 45 centimètres.
L'épaisseur totale du rotor est de 85 millimètres;
chaque disque a une épaisseur de 0,8 mm, Un espace
de 2,1 mm est laissé entre chaque disque. La vitesse
du rotor est de 9000 tours par minute. ME
Un troisième tvpe de 330 chevaux a un rotor de
60 centimètres de diamètre, formé de 23 disques
épais de un millimètre.
Le moteur Tesla peut fonctionner aussi bien au
gaz qu'à la vapeur. Avec de légères modifications,
on le transforme en pompe à eau ou à air. Un
petit modèle de pompe mi par un moteur élec-
trique d'un demi-cheval débite 18 litres d’eau par
minute. On peut se demander pourquoi M. Tesla ne
N° 143%
parait pas avoir encore essayé son appareil comme
turbine à eau sous forte pression. Cette applica-
tion semble ètre tout naturellement indiquée.
I] faut reprocher à la turbine Tesla le défaut
commun à toutes les turbines, la trop grande
vitesse de rotation. Il n’en saurait ètre autrement,
puisque la vitesse périphérique de la turbine pour
le meilleur rendement est approximativement la
moitié de celle du jet de vapeur, et que, d’ailleurs,
ce jet a déjà à la pression de 12 atmosphères une
vitesse d'échappement à air libre de près de
1 000 mètres par seconde. Il n’est pas impossible
de réduire les vitesses dans des proportions con-
venables. La turbine Tesla, moins que toute autre,
d'ailleurs, à raison de son mode de construction,
doit souffrir de ces grandes vitesses, et avec des dis-
positifs nouveaux rien nempèche de lui donner
un grand diamètre,
M. Tesla, en faisant l'application d'un système
moteur tout à fait nouveau, ouvre un vaste champ
aux recherches. La turbine à disques, née d'hier,
est susceptible, sans doute, de se transformer, de
progresser el, grâce à des dispositions spéciales,
d'affirmer peut-être sa supériorité sur la turbine à
aubes actuelle. Et si on veut bien y réfléchir, la
COSMOS
ne
17
turbine à aubes et la turbine à disques ne sont-
elles pas, malgré les apparences, de la même
famille? La surface plane des disques est rugueuse
en réalité par rapport aux petites dimensions des
molécules des divers fluides, et chacune des rugo-
silés est comparable à une aube minuscule. La
turbine Tesla ainsi considérée est une turbine
à aubes extrêmement multipliées.
Ceux qui trouvent la turbine Tesla curieuse
peuvent la construire eux-mêmes sans peine et
sans frais. Une épingle ou un mince bout de fil de
fer sert d’axe sur lequel on enfile une dizaine de
rondelles de carton mince (carte de visite, par
exemple), d’un diamètre de 3 à 4 centimètres,
entre lesquelles on intercale au centre des petits
morceaux de carton de façon à laisser à l'air,
entre les rondelles, un passage libre de un milli-
mètre environ. Une bande de carton ployée est le
soutien de l'axe. On soullle avec un tube à petit
orifice, et l'on est tout surpris de la vitesse que
prend aussilôt la turbine aussi bien que de la puis-
sance relative qu'elle développe. Nous serions fort
étonnés de ne pas voir sans tarder la turbine
Tesla accouplée à quelque machine-jouet à vapeur.
NORBERT LALLIÉ.
L’océanographie pendant l'antiquité"
Commençons par les Phéniciens. On sait qu'ils
découvrirent la manière de s'orienter par l'étoile
polaire, qui reçut le nom d'étoile phénicienne.
Avant eux, on se servait de la constellation
de la Grande-Ourse, moins fixe au firmament.
Mais ce peuple de navigateurs pouvait-il ne
pas avoir des connaissances très étendues sur
tout ce qui concernait la mer? Venus du golfe
Persique. ïls avaient suivi la côte d'Arabie.”
remonté la mer Rouge, franchi le désert, et ils
s'étaient élablis au pays de Chanaan sur cette
étroite bande de terrain qui s'étend entre la Médi-
terranée et les montagnes. Comme le pays était
incapable de nourrir son abondante population, ils
ne trouvaient de ressources qu’au dehors, par
l'industrie et le commerce. Dans leurs maisons à
sept ou huit étages, ils manufacturaient les
matières que leurs navires avaient été chercher au
loin. La Méditerranée était couverte de leurs colo-
nies, principalement dans les régions de mines, et
ils allaient se fournir de métaux partout où ils en
soupçonnaient l'existence, en Crète, à Samothrace,
en Sicile, en Sardaigne, en Espagne, aux iles Cas-
sitérides et, prétend-on, jusqu'au détroit de la
Sonde. Avec le cuivre et l'étain, ils fabriquaient
toutes sortes de choses fort laides. car ils n'étaient
(d) Suite, voir p. t9.
guère artistes, mais d'un bon débit. [ls tenaient
assortiments de bijoux, de marinites et surtout de
divinités, marchandises courantes. On a voulu m'en
vendre à Gibraltar, où ches sont assez fréquemment
rencontrées dans les vieilles exploitations puniques
de lAndalousie. Il est aussi possible qu’elles aient
élé tout simplement fabriquées en Angleterre, en
même temps que les innombrables bouddhas les-
tinés aux Indous. dont le commerce est prospère.
Les nombreuses colonies phéniciennes de la Médi-
terranée jalonnent l'ilinéraire fabuleux de Mel-
carth, l'Hercule tyrien, aussi féroce que son col-
lôgue. l'Hercule grec, est bon et humain. Ceiui-ci
dessèche des marais, extermine des géants malfai-
sanis, tue des oiseaux de proie, nettoie des écuries
malpropres, étouffe des serpents, massacre des
bètes sauvages; Melcarth s'installe au hord üe I
mer, fonde non pas une colonie, mais un simple
comptoir pour y vendre, y acheter, s’y livrer à la
troque comme le feront après lui les Fortugais, et
nulle part il ne sera aimé. En habiles et rusés
commerçants, Pnéniciens ou Carthaginois garde-
ront le silence ou ne parleront que pour épouvarter
la concurrence qni serait tentée de les épier: les
Sargasses seront transformés per eux en terribles
serpents de mer dont ils olfrent prrfais l'apprrence
lorsqu'on les voit de loin se balancer sur les
vagues: ils raconteront des histoires de sombres
78 COSMOS
vapeurs qui se dégagent d’océans boueux remplis
d'herbes et de monstres marins, de griffons, de
harpies; si, par hasard, ils rencontrent un bateau
étranger du côté des pays qu'ils fréquentent, s'ils
sont les plus forts, ils le coulent sans pitié; s'ils
sont les plus faibles, ils se coulent eux-mêmes
pour ne pas lui montrer la route.
Contre honnète bénéfice, ils acceptent tous les
métiers et servent bien qui les paye bien. A la
solde du roi Salomon dont leurs architectes et
leurs ouvriers construisent le temple, leurs marins
partant d’Hésiongaber, au fond du golfe Élani-
tique, sur la mer Rouge, s'en vont à Tharsis, à
Ophir chercher de l'or, des parfums, des pierres
précieuses, de riches étoffes, des paons, des singes
— sans compter la reine de Saba. En Égypte, le
pharaon Néchao les envoie faire le périple de
l'Afrique, qu'ils mettent trois ans à accomplir, de
la mer Rouge à la Méditerranée, bien avant Barthé-
lemy Diaz et Vasco de Gama, voyant, pendant la
seconde partie de leur voyage, se lever à leur
droite le Soleil qu’ils avaient vu d’abord se lever à
leur gauche. lls se battent même les uns contre les
autres lorsque les Assyriens envoient les Phéniciens
de Tyr chasser, des grandes iles de Rhodes et de
Crète, leurs compatriotes, les Phéniciens de Sidon,
qui s’y étaient installés. Les cupitaines de leurs
navires tiennent des livres de bord très soignés
qu'à l’arrivée ils remettent aux magistrats, lesquels
se gardent bien d'en donner connaissance, mais
les conservent jalousement pour leur propre usage
dans des édifices spéciaux. Mais lorsque, par la
guerre, ces édilices sont brülés, toute trace de
leurs voyages disparait. Ils exécutent de gigan-
tesques captditions commerciales. Leur amiral,
Hannon, à la tètc de GO vaisseaux portant chacun
DUD hommes et fenunes, pousse jusqu'à Pile
Gargades (Sierra Leone) sur la cote occidentale
d'Afrique pour y fonder une colonie, et pendant ce
temps, leur autre amiral, Hamilcon, commandant
une folie presque aussi considérable, va explorer,
dans les mers du Nord-Ouest, les Açores, la France,
lcs iles Cassitérides. Pour aller si loin, pour accom-
plir tant de voyages, à travers des mers sì diffé-
rentes, ces Sémites devaient posséder des connais-
sances extrémement étendues en navigation et
en océanographie.
Peu à dire des Assyriens. Leur situation géogra-
phique les empèchait d'ètre des navigateurs. Lors-
qu'als furent amenés par leurs conquèles à lutter
contre des peuples riverains de la mer, sur les
bords du golfe Persique où de la Méditerranée, ils
s assurcrent les services des Phéniciens, qui com-
battirent contre qui lon voulut — moyennant
rétribution, bien entendu. En revanche, par les
progrès qu'ils firent accomplir à l'astronomie, dont
l'atinosphère pure et le firmament de leur pays
leur facilitaient merveilleusement l'étude, ils appor-
18 suiLLeT 1912
tèrent une précieuse collaboration au perfectionne-
ment de l'art de la navigation.
Les Hébreux n'avaient pas de meilleurs motifs
géographiques pour devenir des marins. Ils ne le
furent jamais. Parvenus à l'apogée de leur puis-
sance, sous le règne de Salomon, ils prirent à leur
service des flottes phéniciennes bien plutôt des-
tinées au commerce qu'à la guerre. Mais leur puis-
sance diminua et s’éteignit aussi rapidement qu'elle
avait grandi, et les Phéniciens, probablement
impayés au moment du schisme qui survint immé-
diatement après la mort de Salomon, se hâtèrent
de rentrer chez eux. D'ailleurs, aucune science ne
fut cultivée par les Hébreux, et l’on ne trouve rien,
dans la Bible, qui touche de près ou de loin à
l'océanographie, sauf cependant dans le livre apo-
cryphe d'Esdras, l'affirmation que la mer recouvre
la septième partie de la terre. Cette phrase n'offre
aucun caractère scientifique; c’est de la poésie, de la
kabbale, une simple fleur de rhétorique orientale :
sept était le nombre sacré: les sept planètes, les
sept branches du chandelier d'or, les sept mer-
veilles du monde, les sept Sages, les sept cordes de
la lyre, et le reste.
En revanche, ce qui élait bien sincère chez les
Hébreux, c'est le terrible effroi qu'ils avaient de la
mer. Chaque fois qu’elle est citée dans la Bible —
et elle l’est souvent, — elle est accolte à une épi-
thète exacte, précise et en même temps pleine
d'une respectueuse épouvante, de celte mème ter-
reur sacrée qu éprouvaient les Romains et plus
encore nos ancêtres les Gaulois sous l'ombre épaisse
des vastes forûts. Les Juifs connaissaient la mer;
quoiqu'ils n'en fussent nulle part riverains, elle
n'était pas hors de la portée de leur vue. Puis,
duns leurs guerres continuelles et en général
malheureuses avec leurs voisins, surtout les Phi-
lisiins, c'est-à-dire les Phéniciens, beaucoup, sans
“doute, avaient dù être faits prisonniers, emmenés
en caplivité et embarqués pour servir de rameurs
sur les bâtiments. Plus d’un certainement, au
retour de ces expéditions faites dans des condi-
tions particulièrement pénibles, a réussi à s'enfuir
et à revenir parmi ses compatriotes. Que devaient
ètre alors les conversations de ces esclaves, navi-
gateurs forcés, de ces échappés redevenus pasteurs
lorsque le soir, gardant leurs troupeaux, couchés
sur le sol avec leurs compagnons autour d'un feu
d'herbes sèches envoyant sa fumée droite vers les
éloiles, au milieu du calme de la nuit, ils décri-
vaient les dangers qu'ils avaient courus, les spec-
tacles grandioses et terribles que leurs yeux avaient
vus, le mugissement des vents et des flots, le
fracas des tempètes que leurs oreilles avaient
entendu alors qu'enchainés à leur banc ils tiraient
sur l'aviron, baignés par l’eau des vagues, les
épaules ensanglantées par les coups de fouet du
comite, récits qu'exagérait encore leur imagina-
Ne 153%
tion de Sémites! Et combien devaient être crues
ces affirmations, lorsqu'au matin, du sommet de
leurs montagnes, ils apercevaient la mer loin-
taine, l’objet de tant d'effroi, étalant sur l'immense
horizon sa mince ligne bleue étincelante des pre-
miers feux du jour! |
Les Egyptiens, eux aussi, eurent peur de la mer,
et les rois, par politique, essayèrent, quoique vai-
nement, de lulter contre ce sentiment instinctif.
Quand, dans un but militaire, il fallut des marins
et des navires à ce pays qui n'avait pas même de
forêts pour en construire, les Phéniciens vendirent
encore leurs services jusqu’au moment où, sous le
pharaon Psammétique, les « hommes d'airain »,
les Grecs, vinrent leur faire concurrence. Néan-
moins, sous le roi Néchao II, fils de Psammétique,
ce furent des Phéniciens qui, envoyés par lui,
accomplirent en trois années le périple de l’Afrique.
Partis par la mer Rouge, ils revinrent par la Médi-
terranée, et, pendant leur voyage, ils avaient vu se
lever à leur droite le Soleil qui, au début de la tra-
versée, se levait à leur gauche, remarque qui,
aujourd'hui, est la garantie même de leur véracité.
Enfin, nous arrivons aux Grecs, essentiellement
navigateurs, par leurs qualités comme par leurs
défauts, par ce qu'ils étaient et ce qu'ils n'étaient
pas, par leur amour pour les aventures et leur
amour du lucre, par les nécessités de leur com-
merce, le besoin où ils étaient de vendre certains
de leurs produits et d’en acheter certains autres
qu'ils ne possédaient point chez eux, par la configu-
ration géographique de leur pays et par leur
misérable esprit politique, haineux, jaloux, mal-
faisant, ne connaissant dans leurs éternelles discus-
sions que deux alternatives: êlre au pouvoir et
faire subir aux autres une dure tyrannie, ou n’y
plus être et devenir victimes des mêmes violences
— plus encore, des mêmes taquineries — que celles
que la veille encore ils employaient à l'égard de
leurs vaincus. Un seul parli à prendre : celui de la
fuite ; une seule ronte vers le salut : la mer. Ainsi
s'explique la fondation de bien des colonies
grecques, essaims détachés de gré quelquefois,
plus souvent de force, de la métropole, et, ce qui
est très humain, une fois en süreté et en liberté,
les exilés oubliaient les torts de la terre natale,
se souvenaient d'elle avec douceur et, de loin,
renouaient souvent avec elle des liens que la vio-
lence avait autrefois brisés.
Au début, on naviguait pour exercer la piraterie,
comme les Touareg dans le Sahara, sur le dos de
leurs méharis — vaisseaux de mer et vaisseaux de
désert, — pour piller et faire des esclaves. La loi
du plus fort est depuis longtemps en usage et le
restera probablement encore pendant longtemps.
Les Grecs pillaient les Phéniciens, qui le leur ren-
daient bien. En Grèce, et même partout en Orient,
on retrouve les restes de cet état social dans ces
COSMOS 79
petites villes si pittoresques, aux maisons blanches,
groupées serrées autour de leur château construit
sur une éminence et toujours à une certaine di-
stance de la mer, sur les bords de laquelle était le
port, la marine. Là on habitait quand on était
tranquille; mais, à la première apparition de voiles
suspectes à l'horizon, chacun quittait Le Pirée et
courait se meltre à l'abri dans l'Acropole. Le
danger passé, on revenait. Aussi bien dans l'Hel-
lade qu'en Asie Mineure et dans les iles, sur tout
le littoral de la mer Egée et de la Méditerranée, le
pays était semé d’une multitude de petites thalas-
socraties, chacune faisant son métier, se battant
entre elles, parlant beaucoup, remplies de poètes,
d'artistes, de politiciens de haut et de bas étage,
discourant, écrivant, créant des chefs-d'œuvre,
menant une vie délicieuse pour ceux qui étaient du
bon côté du pouvoir, baignés par cette atmosphère
radieuse, près de cette mer d'azur, contemplant la
beauté de la terre, des flots et du ciel, des choses
de la nature, de l'intelligence, de l’art. Quand on
n'était pas le plus fort, on s'en allait l'être ailleurs
et y jouir de l'existence aux dépens d’autres
hommes. C'était la joie de vivre, car alors le
monde était vaste, la place ne manquait pas — la
place, la première condition du bonheur pour les
plantes, les bêtes, les hommes et les nations.
Quel voyage que celui des Argonautes au
x siècle! Cette troupe de voleurs de grandes
routes maritimes qui, à l'époque où Josué prenait
possession de la Terre Promise, mirent à la voile
d'Iolcos, en Thessalie, sous la conduite de Jason,
dans le dessein de s'emparer d'une toison d'or, en
Colchide, au bord du Phase, au fond du Pont-
Euxin. En termes plus simples, ils sen allaient
flibuster, cherchant de lor ou tout autre objet pré-
cieux, comme plus tard, en Amérique, Pizarre,
Cortès, de Soto et les autres conquistadores. Ils
sont en bande. Il y a Hercule, le Porthos de l'anti-
quité; Orphée, qui se chargera de la partie musi-
cale et qui joue de la lyre comme maintenant les
marins grecs, qui ont leur accordéon et qui
chantent toujours, à moins qu'ils ne s'insullent ou
se battent entre eux. Histoire d'hier, histoire d'au-
jourd’hui, histoire de demain, de ce qui se passait
il y a trois mille ans el se passera dans trois mille
ans. Tout sera changé : les aoms. les costumes, la
forme des bateaux, les lÿres et les accordéons,
tout, sauf l’histoire, qui reste éternellement ła
même.
Pour l'aller, on va tout droit. Là-bas, à défaut
de la toison d'or, qui a été mise en sureté, ils
enlèvent une femme, Médée, la fille du roi, et
alors les affaires se gåtent; il faut s'enfuir, et le
roman se change en tragédie. Médée tue ses
enfants, et les Argonautes suivent une roule tout
à fait fantastique. Le navire .{ry" vazne au milieu
des terres, ensuite dans la mer Meéntide, traverse
SO COSMOS
le Mare Cronium ou mer Hyperboréenne; on
aborde au pays des Macrobiens, qui vivent cent
tois mille ans dans nne félicité parfaite, Eldorado
et la fontaine de Jouvence qu'on a cherchée en
Floride et qu’on n’y a pas trouvée. Argo, le båti-
ment, se met, lui aussi, à parler et indique la
façon d'éviter les dangers de l'ile lernis; on par-
vient au détroit de Gibraltar, on entre en Mėditer-
ranée, peut-être passe-t-on par la mer Érythrée et
le lac Tritonis. L'océanographie, qui n'est encore
que de la géographie, débute par un joli roman.
il y en eut un autre, environ deux siècles plus
tard, celui du héros Ulysse qu'écrivit Homère. Un
auteur moderne, avec beaucoup de talent et beau-
coup d'imagination, a écrit à son tour, sur le
mème sujet, un livre extrêmement savant, extrè-
mement ingénieux et extrômement amusant.
D'après lui, l'Odyssée serait en réalité un livre de
bord ou une collection de livres de bord grecs et
phéniciens, mis en vers... et quels vers! Si les
capitaines de nos navires suivaient cet exemple,
quelles délices pour les âmes poétiques! Reste
cependant à savoir si les océanographes y auraient
autant leur compte. L'anteur a refait le voyage et
18 JUILLET 1919
il a tout retrouvé: rien n’a changé depuis Homère :
l'ile de Calypso, qui est située sur le détroit de
Gibraltar, près du Maroc. s’appelle Peregil: l'ile du
Persil, vilain nom pour cette terre de poésie, pour
ce paysage « créé pour le plaisir des yeux », aux
prairies « émaillées d'aches et de violettes » que
le divin Fénelon, notre divin Homère, faisait
fouler aux pieds du jeune Télémaque, du sage
Mentor et de l'adorable — trop adorable — nymphe
Eucharis. On a photographié l'ile, on a photogra-
phié la grotte de la déesse, et des clichés, dont Ja
véracité nest pas discutable, montrent — hélas!
— que, si la déesse elle-mème n’est pas morte,
puisque c'était une immortelle, elle a srirement
été s'installer ailleurs. Tout a été retrouvé: le pays
du cyclope Polyphème, l'ile de Circé, la ville et le
port des Phéaciens, le marais où l'iysse naufragé
s'est caché dans les roseaux, la fontaine où la
blanche Nausicaa lavait son linge, l'endroit mème
où elle jouait à la balle avec ses gracieuses com-
pagnes. Quels souvenirs charmants, si charmants
qu'ils n'ont pas besoin d’être vrais, el certes. de
cela, ils ne s’en font pas faute.
(A suivre.) J. THorLFT.
u c- ee — — — =-——
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 8 juillet 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Nserologie, — Le Président annonce à l’Académie
la perte quelle vient de faire en la personne de
M. Joannes Chalin, membre de la Section d'Anatomie
et Zoologie, décédé à l'age de 6+ ans et demi.
Élection. — M. Avozrx ENGLER, directeur de l'Ins-
titut botanique de l’Université de Berlin, est élu Cor-
respondant pour la Section de Botaniaue par 29 suf-
fraues sur 43 exprimés, en remplacement de M. Treub,
décédé.
Sur la vaccination contre la fièvre typhoïde.
— Après avoir démontré par des expériences sur des
chimypanzis que l'immunité certaine contre la fièvre
typhoiïide ne peut ètre obtenue qu'avec des virus
vivants, MM. E. Mercnxikorr et A. Besrepka ont mis
en évidence par la mème voie que les bacilles typhiques
sensibilisés vivants, injectés sous la peau en trés
grande quantité, ne passent pas dans la circulation
et ne se retrouvent point dans les excréla. Les ani-
manx ainsi vaccinés ne deviennent donc pas des por-
teurs de bacilies tvphiques.
lis ont alors appliqué la vaccination à l'homme,
ont fait ! 586 inoculalions réparties sur 745 personnes.
La méthode ne présente pas de danger.
La loi d'action de masse, — La ioi d'action de
macse est considérée comme rigoureuse par la plu-
part des auteurs de manuels de chimie physique.
Cependant, quelques savants ont discuté cette opinion,
et M. P.-A. Grye apporte aujourd'hui le résultat de ses
études sur la question; elles l'ont conduit aux con-
clusions suivantes : 1° la loi d'action de masse, sous
la forme usuelle, ne s'applique théoriquement, en
toute rigueur, qu'à des systèmes dont toutes les sub-
stances parlicipant à la réaction suivent les lois de
Mariotte et d'Avogadro; 2° les relations certainement
plus compliquées régissant les équilibres dont toutes
les substances ne satisfont pas à cette double condi-
lion, tels les systèmes condensés formés par des
liquides concentrés, doivent cependant conduire à des
résultats numériquement trés voisins de ceux donnés
par la formule usuelle de la loi d'action de masse,
ainsi que le prouve l'expérience.
Sur une nouvelle détermination du poids
atomique de l'uranium. — Par une méthode
spécialement sûre, M. P. Leprau retombe sgur la
valeur 238,5, déjà admise par la Commission interna-
tionale des poids atomiques.
Augmentation du nombre des globules
rouges du sang sous l'action de certains dé-
rivés de la cholestérine. — Divers auteurs ont
montré que l'introduction de petites quantités de
sang dans l'organisme d’un animal a pour elfet
d'élever la teneur en globules rouges du sang de cet
animal, que l'introduction ait lieu par voie sous-
cutanée ou intra-veineuse. M. P. Tuomas et M'™ MADE-
LEINE LERENT montrent que cet effet doit être attribué
aux éthers de la cholestérine, qui existent toujours en
N° 1434
une certaine quantité dans les hématies et qui restent
tellement adhérents à l'hémoglobine qu’il n’en peuvent
ètre séparés mème par des cristallisations répétées.
Chez un lapin, la richesse globulaire, évaluée nor-
malement à 3200 000 hématies par millimètre cube
de sang, s’est élevée, deux jours après injection
sous-cutanée d'oléate de cholestérine, à 3 808000.
Après une seconde injection, elle s’est maintenue sept
semaines à 3 800 000; c’est-à-dire que l'augmentation
a été de {7 pour 100. Chez un lapin témoin, soumis
au mème régime alimentaire, mais non injecté, la
richesse globulaire a varié, mais de 2,5 pour 100
seulement.
Des erreurs, parfois importantes au point de vue
théorique, qu'entraînent les notions particulitres
d'expériences, simplificatrices, adjointes aux lois
générales de la mécanique pour pouvoir arriver à des
résultats saisissables. Note de M. J. Bouxsixesg. — Sur
l'envoi de l'heure par signaux électriques, et sur un
moyen de faire donner ces signaux par une horloge.
Note de M. G. Bicourvax. — Sur la détermination des
poids atomiques par la méthode du D' Gustavus
Hiurichs. Note 'de M. HENRY LE CHATELIER. — Sur la
pression existant à la surface du Soleil. Note de
M. Gory. Les considérations cinétiques s'accordent
avec les données spectroscopiques pour nous
apprendre que les parties visibles du Soleil sont
formées de gaz et de vapeurs dans un état de raré-
faction extrême. — Sur le système : eau cyclohexanol.
Note de M. R. ve Forchanr. — Sur les extensions de
la formule de Stokes. Note de M. A. Buuz. — Sur les
facteurs de convergence dans les séries doubles et sur
la série double de Fourier. Note de M. Cu.-N. Moone.
— Sur le problème généralisé d’Abel el ses applica-
tions. Note de M. Paruicx Bnowne. — Sur la limitation
du degré des coefficients des équations différentielles
algébriques à points critiques fixes. Note de M. JEAN
Cuazy. — Sur l'absolue convergence des séries trigo-
nométriļues. Note de M. ArNacbo Dexjoy, — Sur la
représentation des intégrales des équations irréduc-
tibles du second ordre à points critiques fixes au
moyen de la théorie des équations linéaires, Note de
M. Rexé GARNIER. — Expression de la force qui s'exerce
entre deux conducteurs électrisés. Sphère et plan.
Note de MM. A. Guizer et M. Auserr. — Variations
COSMOS 81
du rayonnement de la lampe en quartz à vapeur de
mercure avec le régime et la durée de fonctionne-
ment. Note de M. À. Tiax. — Sur la conductibilité de
la vapeur de sodium. Note de M. L. Dixoyer. — Con-
tribution à l’étude des décharges osvcillantes. Note de
M. G. Mirocnau. — Densité et compressibilité du
chlorure de nitrosyle. Note de M. Euuëxe WocnrTzrr.
— Sur la viscosité des solutions. Note de M. C. Cné-
NEVEAU. — Sur les alliages du platine avec l'aluminium.
Note de M. CuocriGuiNe: la préparation de ces alliages
est bien dificile à cause du grand dégagement de
chaleur qui se produit en fondant simultanément
ces deux métaux ensemble, et de l'oxydation de lalu-
minium, lequel se couvre facilement d'une couche
Al0O3, ce qui empèche la réaction. M. Chouriguine dit
par quels artificesil a vaincu ces diflicultés et comment
il a étudié les alliages obtenus.
Sur l'acide chloreux. Note de M. LasÈGrEe. — Sur les
gaz de l'aluminium. Note de MM. Mancez Gricuanv et
PitruEe-RoGEr Jourbaix. — Sur le dosage électrolytique
du manganèse et sa séparation avec le fer. Note de
M. Hexn: Gouszuu et M'° HÉLÈNE GUNTHER. — Prépara-
tion catalytique par voie humide des éthérs-sels issus
des cyclanols et des acides organiques. Note de
MM. J.-B. SENDEuENS et J. AnouLENC. — Action de l'eau
oxygénée sur l'acétothiénone et l'acide a-thiophénique.
Note de M. Maurice LaxFay. — Sur la constitution des
aloïnes de l’aloès du Natal. Note de M. E. Lien. —
À propos du Diplopsalis lentivula Bergh. Note de
M. J. lP'avicrann. — Observations sur quelques moisis-
sures nouvelles provenant de la côte d'ivoire. Note
de M. A. EckLey LECHMERE, — Toxicité comparée de
quelques champignons vénéneux parmi les amanites
et les volvaires. Note de MM. M. Rapais et A. SARTORY.
— Variations expérimentales du foie et des reins chez
les canards en fonction du régime alimentaire. Note
de M. A. MAGNAN. — Sur une immense quantité de
Desoria glarialis à la surface d'un glacier. Note de
M. J. Valor. — [nfluence de la matière azotée sur la
production d'acétate d’éthyle dans la fermentation
alcoolique. Note de M. E. Kayser. — Intluence du zinc
sur la consommation par l’Aspergillus nigrr de ses
aliments hydrocarbonés, azotés et minéraux. Note de
M. M. Javier. — Sur l'action de divers sels acides sur
le développement de Ll'A{speryillus niyer. Note de
M. À. KiEsEL.
BIBLIOGRAPHIE
Leçons sur les hypothèses cosmogoniques
professeées à la Sorbonne, par M. H. PoixcaRé,
membre de l’Académie française et de l’Académie
des sciences, rédigées par HENRI VERGNE, ingé-
nieur des arts et manufactures, docteurès-sciences
mathématiques. Un vol. in-8° (25 X 16) de xxvi-
294 pages (12 fr). Librairie scientifique A. Her-
mann, 6, rue de la Sorbonne, Paris. 14941.
« Le problème de l’origine du Monde a, de tout
temps, préoccupé tous les hommes qui réfléchissent ;
il est impossible de contempler le spectacle de
l'Univers étoilé sans se demander comment il s'est
formé...
» On pourrait penser que l'Univers a toujours été
ce qu’il est aujourd'hui, que les tres minuscules
qui rampent à la surface des astres sont périssables.
mais que les aslres eux-mêmes ne changent pas,
et qu'ils poursuivent glorieusement leur vie éter-
nelle sans se soucier de leurs misérables et éphe-
mères parasites. Mais il y a deux raisons de rejeter
celte manière de voir.
» Le système solaire nous présente le spectacle
82 COSMOS
d'une parfaite harmonie; les orbites des planètes
sont toutes presque circulaires, toutes à peu près
dans un même plan, toutes parcourues dans le
mème sens. Ce ne peut être l'effet du hasard; on
pourrait supposer qu'une intelligence infinie a
établi cet ordre au début une fois pour toutes et
pour toujours, et tout le monde se serait contenté
autrefois de cette explication; aujourd'hui on ne
se satisfait plus à si bon marché; certes, il y a
encore bien des gens qui tiennent un Dieu créateur
pour une hvpothèse nécessaire, mais ils ne con-
çoivent plus l’intervention divine comme le faisaient
leurs devanciers; leur Dieu est moins architecte et
plus mécanicien, et il reste alors à expliquer par
quel mécanisme il a tiré l'ordre du chaos. Si
l'ordre que nous constatons n’est pas dù au hasard,
et si on renonce à l'attribuer à quelque décret
divin immédiatement exécutoire, il faut qu’il ait
succédé au chaos, il faut donc que les astres aient
changé. Et c'est bien ainsi qu'a raisonné Laplace.
» D'autre part, le second principe de la thermo-
dynamique, le principe de Carnot, nous apprend
que le Monde tend vers un état final: l'énergie «se
» dissipe », c’est-à-dire que le frottement tend con-
stamment à transformer le mouvement en chaleur
et que la température tend partout à s’uniformiser.
L'état final du Monde est donc un état d’unifor-
mité; cet état, qu'il doit atteindre, n’est pas atteint
encore: donc le Monde change et mème il a tou-
jours changé.
» Et voilà le champ ouvert aux hypothèses ».
Ces hypothèses cosmogoniques, M. Poincaré les
expose en abrégé, puis les discute à la lumière des
principes de la mécanique et de la thermodyna-
mique, depuis la Théorie du ciel de Kant (1755) en
passant par les hypothèses de Laplace, H. Faye,
du Ligondès, Sec, G.-H. Darwin, jusqu'au récent
Essai de cosmogonie tourbillonnaire de E. Belot,
dont le f'osmos a donné à plusieurs reprises une
ile sommaire.
Kant est le premier à avoir attribué une com-
mune origine au Soleil et à toutes les planètes; la
nébuleuse qu'il imagine eslun chaos primilivemer::
en repos qui, en dépit des lois de la mécanique, se
imet ensuite en rotation.
Laplace, lui, se borne à considérer la nébuleuse
d'ou est sorti le système solaire, ceile nébuleuse
de Laplace est une véritable atmosphòre gazeuse
animée dès l’origine d'une rotation d'ensemble uni-
forme; en se contractant, cette atmosphère, qui
est un Soleil en formation, abandonne à sa partic
extérieure une série d'anneaux successifs doù nai-
tront les piaučtes, L'hypothèse de Laplace a été
soumise au caleul par E. Roche. Elle a vieilli
aujourd'hui, et clle rencontre bien des contradic-
tions et se trouve en face de bien des difficultés :
pourtant M. Poincaré lui trouve une vieillesse vi-
goureuse : pour son àge, cile n'a pas trüp de rides.
18 JUILLET 191%
Dans la théorie de H. Faye, les anneaux généra-
teurs de planètes se sont formés, non à l'extérieur
de la nébuleuse, mais à l'intérieur. Son hypothèse,
au jugement de M. Poincaré, ne présente point
d'avantages bien sérieux, comparée à celle de
Laplace.
L'auteur s’arrète avec un visible intérèt à la
théorie de M. du Ligondès, fort originale et très
bien étudiée au point de vue mécanique. Celui-ci
ne fait point d'hypothèse particulière sur le chaos
primitif : à l'origine, l'Univers se réduisait à un
chaos général extrêmement rare, formé d'éléments
divers mus en tous sens et soumis à leurs attrac-
tions mutuelles. M. du Ligondès, précisément à
l’occasion du livre de M. Poincaré, a redit dans le
Cosmos (n° 4 446) pourquoi l'hypothèse de Laplace
lui parait décidément caduque et a de nouveau
justifié (n° 4 418) les points caractéristiques de sa
propre théorie.
D'Amérique nous est venue une théorie toute
différente de la formation des planètes. Pour
M. J. See, les planètes sont des corps tout à fait
étrangers qui, venant à passer dans le voisinage
du Soleil, ont été ralentis par le frottement de son
atmosphère et captés par lui. De mème, la Lune
a été captée par la Terre.
Par contre, pour Sir G.-H. Darwin, qui a patiem-
ment étudié l'influence des marées, la Lune, con-
fondue au début avec la Terre en un seul astre,
s’est séparée de la Terre, soit par l'effel des marées
dues au Soleil, soit à cause de la déformation pro-
gressive de l'astre primitivement ellipsoidal, qui
en est venu, par le refroidissement, à s'étrangler
et à se rompre: alors la Lune, détachée de la
Terre, aurait décrit autour d'elle une orbite de
rayon d'abord très petit qui s'est allongé graduel-
lement par suite du frottement des marées.
Sur l'origine de la chaleur solaire et de la cha-
leur terrestre et sur l'âge probable de la Terre, la
discussion reste ouverte : les évaluations de Helm-
holtz et de lord Kelvin n'ont pas satisfait les géo-
logues. Sir N. Lockyer, M. Nordmann et M. Schuster
ont élargi le problème et cherché à classer les
étoiles d'après leurs températures.
Très suggestives sont les vucs de Svante Arrhe-
nius qui fait, gràce à la pression de radiation,
voyager d'un astre à l'autre, non seulement l’éner-
gie, mais encore Ja matière et même la matière
vivante; mais, à notre avis, lui-même s'échappe
très facilement de la science positive dans la rèverie
quand il imagine un Univers infini dans l’espace,
Cternel dans le temps, et qui subit une éternelle
renaissance. Malgré ses efforts, Arrhenius ne par-
vient pas à échapper aux conséquences du principe
de Carnot, qui veut que dans toute transformation
réelle l'énerzie aille en se dégradant : de toutes
manières, dit M. Poincaré, nous devons renoncer
au ròve du « retour éternel »; le Monde tend vers
N° 1434
la Wærmetod de Clausius, la « mort calorifique ».
A la fin de son exposé, M. Poincaré s’abstient de
faire un choix entre ces théories. Chacune d'elles
est séduisante par certains côtés, mais aucune n'est
vraiment satisfaisante. Il lui faut terminer modes-
tement par un point d'interrogation.
Volcans et tremblements de terre, par A. DE
LAPPARENT, secrétaire perpétuel de l’Académie
des sciences. Un vol. in-8 de 377 pages avec
16 illustrations (5 fr). Bloud et Ci, 7, place
Saint-Sulpice, Paris. 4912.
Ces articles de l’éminent et regretté savant catho-
lique cnt paru de 1887 à 1906 dans diverses revues;
le talent d'exposition de l’auteur et sa compétence
scientifique ont assuré à ces pages de circonstance
un intérêt qui se maintient.
Ce n’est pas que le temps ne les ait marquées de
son empreinte; au début, A. de Lapparent en tient,
comme la plupart des hommes de science d’alors,
pour une étroite liaison entre les manifestations
des volcans et celles des tremblements de terre;
bientôt son opinion se modifie et il se fait le pro-
tagoniste en France de l'indépendance entre la
sismicité et le volcanisme, adoptant pleinement les
conclusions formulées sur ce point par M. de Mon-
tessus de Ballore. En parcourant ce recueil d’ar-
ticles, le lecteur revit donc une phase instructive
de l’histoire des sciences, et, pour avoir quelques
instants tâtonné sur le terrain des hypothèses, il
apprend à mieux connaitre la position actuellement
occupée par la vulcanologie et la sismologie.
Résumé du Catalogue des tremblements de
terre signalés en Chine. In-4°, 176 pages.
Appendice au bulletin de l'Observatoire de Zi-ka-
wei. Imprimerie de T’ou-sé-wè, près Changhaiï.
Le R. P. H. Gauthier, S. J., présente aux savants
cet ouvrage commencé sur sa demande en 1906
par le sinologue réputé, le P. Hoang. Les 3300 trem-
blements de terre, rapportés chacun à sa date et
à son lieu, s'étendent sur trente-sept siècles d’his-
toire chinoise, depuis l’année 1767 avant l'ère chré-
tienne jusqu’à l’année 1896 de notre ère.
L'exécution typographique d'une pareille œuvre
scientifique, en Chine, dans une période de troubles,
fait grand honneur à la persévérance de nos
missionnaires et à l’habileté des imprimeurs de
T'ou-sé-wè.
Le problème religieux et moral, par le chanoine
WiLagLM M8YERr, professeur de théologie, adapté
de l'allemand par M. l'abbé P. Douanico. Un vol.
in-16 de vir-140 pages (3 fr). Aubanel frères,
éditeurs, Avignon.
Cet opuscule s'adresse aux étudiants : il se pro-
pose de répondre aux objeclions qui trop souvent
mettent en péril la foi et les mœurs des jeunes
gens, dont les croyances sont décontenancées par
COSMOS 83
les aflirmations de la fausse science s'appuyant sur
les hypothèses évolutionnistes. L'auteur montre
à merveille le mal fondé de ces affirmations; mais
la démonstration de la foi n’estici que résumée, et
ce manuel ne saurait dispenser de recourir à des
ouvrages plus développés. L'adaptation de M. l'abbé
Douadicq aurait aussi gagné, selon nous, à se déga-
ger de comparaisons qui ne sont pas conformes au
gout français, telle celle-ci: « Le principe de cau-
salité, voilà le vapeur sur lequel le globe-trotter de
l'esprit — que dis-je ? — l'humanité entière voyage
dans le royaume du transcendant et de la méta-
physique. »
L'outillage technique et pratique du dessina-
teur industriel. Instruments et méthodes pour
l'exécution des dessins industriels, par JEAN
Escarbn, ingénieur civil. Un vol. in-4° de 168 pages,
avec 372 figures (8 fr). Librairie Dunod et Pinat,
éditeurs, quai des Grands-Augustins, Paris.
Le dessin linéaire est enseigné dans les écoles
primaires, dans les écoles commerciales, dans les
écoles préparatoires, les règles générales de cet art
sont donc connues; mais, ce qui l’est moins, c'est
la connaissance des instruments utiles ou même
indispensables aux dessinateurs qui leur permettent
de faire œuvre valable et de faciliter leur tâche; en
effet, dans les études élémentaires, on n’emploie
que les instruments primitifs et souvent rudimen-
taires.
Malheureusement, jusqu'à présent, aucun ensei-
gnement général sur l'outillage du dessinateur
n'a été donné dans nos écoles spéciales et bien peu
d'industriels possèdent une installation leur per-
mettant de rendre le travail du dessinateur à la
fois agréable et facile.
M. Escard a entrepris de combler cette lacune
en publiant le livre, nous allions dire l'album, que
nous signalons. Clairement écrit, enrichi de nom-
breuses gravures explicatives, il rendra les plus
grands services, non seulement aux néophytes,
mais aux ingénieurs et mème aux dessinateurs
professionnels, qui y trouveront la description
d'appareils que beaucoup ignorent, d'autant que
plusieurs de ces instruments, inventés à l'étranger,
ne sont pas connus en France. On ne saurait trop
recommander cet ouvrage aux jeunes gens qui se
destinent aux carrières où le dessin industriel est
nécessaire : dessinateurs industriels d'abord natu-
rellement, ingénieurs, gévinètres, architectes, elc.
Manuel de théologie mystique ou les yräces
extraordinaires de la vie surnaturelle expli-
quées. par le R. P. ARTHUR DEVINE. Ouvrage tra-
duit de l'anglais par l'abbé Ca. Maizzer. Un beau
vol. in-16 jésus de xxiv-734 pages (broché, 5 fr;
relié pleine percaline, tranche jaspie, 6,50 fr).
Aubanel frères, éditeurs, imprimeurs de Notre
Saint-Père le Pape. Avignon, 1912.
oo
Amn
COSMOS
18 suiLzer 194%
FORMULAIRE
L'acide sulfurique contreles crucifères para-
sites.— L'agriculture s’enhardit.Des produits salins,
elle passe à l'acide le plus fort : l'acide sulfurique.
Depuis 1896 au moins, les sels de cuivre et le sul-
fate de fer étaient employés en pulvérisation contre
les sanves el ravenelles dans les céréales d'automne.
Les feuilles velues de la crucifère retiennent le
liquide qui glisse sur la céréale.
Les solutions renfermaient, ou 4 pour 100 de sul-
fate de cuivre, ou 3 pour 100 de nitrate de cuivre,
ou bien encore 15 pour 100 de sulfate de fer.
L'acide sulfurique vient de conquérir droit de
cité en Lot-et-Garonne. L’acide sulfurique a permis
de détruire non seulement les crucifères, mais le
coquelicot, les vesces, la renoncule et le bleuet, si
appréciés pourtant... des artistes.
Le traitement a lieu en janvier-février.
Les doses varient de 6 à 10 litres d'acide à 66"B
versé lentement dans un hectolitre d'eau. Les légu-
mineuses sont les plus difficiles à détruire.
Le récipient du pulvérisateur est en plomb, en
verre ou en bois.
On emploie par hectare 40 hectolitres d’acide.
Avec un appareil à dos d'homme, la surface traitée
serait de un demi-hectare par jour et le prix de
revient de 25 francs par hectare. (Rer. scientif.)
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appareils signalés :
Scie à disque sans dents pour le coupage des métaux:
machines-oulils, A. Schutte, 20, rue des Petits-Hôtels,
Paris,
M. J. B. R., à St-D. de G. — Outillage pour la fabri-
cation des bois de galoches et sabots: Guilliet et fils, à
Auxerre (Yonne), et à Paris, 2, boulevard de Magenta.
M. A. R., à C. — Veuillez vous adresser directement
à M. le D" Repin, à l'Institut Pasteur, à Paris (rue Dutot).
M. E. M., à O. — Ce que nous connaissons de plus
complet comme représentation du Saint Suaire de
Turin sè trouve dans l'ouvrage du D' Vignon: « Le
linceul du Christ, étude scientifique »; un volume
avec 9 planches hors texte ct 38 figures dans le texte
(15 fr.) Librairie Masson, 120, boulevard Saint-Ger-
ain. En ce qui concerne la critique artistique des
diverses images, nous nous déclarons incompétents.
M.J.M., à D. — Nous ne connaissons pas la formule qui
vuus donnerait satisfaction, d'autant que nous ignorons
ce owon entend par le goùt anglais en ces matières.
Vous trouveriez sans doute ce renseignement dans le
Vinaiyrier des Manuels Roret (3,30 fr). Librairie Mulo,
12, rue Hautefeuille. Nous nous élonnons de l'emploi
des copeaux de fréne en cette occasion; dans les
manipulations qui ont pour objet le vinaigre, on utilise,
généralement, les copeaux de hitre.
M. P. M., à S. — Un de nos abonuëx nous signale
aimablement que lavertissément dé la tour Eiffel
« pour les signaux horaires et télegraimimes météorolo-
giques » n'est pas suivi par les lettres Ff, mais par
le signal attente donné quatre fois. Ces quatre signaux
sont émis en deux groupes de deux: le premier groupe
par le sapeur de service au poste de la tour, le second
groupe par un autre opérateur situé à l'Observatoire
astronomique, qui entre alors en fonction.
M.J. R., à D. — Voici, comme réponse à la demande
poste dans le dernier numéro, les détails fournis par
un de n°5 aLonaés, spécialeruent compétent en T.S.F.
— L'heure par T. S. F. est cnvovée ofliciellement par
le poste de la tour Eitfel et par le poste allemand de
Norddeich. En cutre, un poste inconnu à grande lon-
gueur d'onde envoie l'heure, mais sans exactitude
rigoureuse, toutes les demi-heures, jour et nuit, aux
heures et aux demies. — Le code d'envoi de l'heure
par la tour Eitfel est bien connu de nos lecteurs; inu-
tile de le répéter. Voici celui du poste allemand :
Norddeich signale par le commencement d'un trait
11*58*46° et chacune des quatre secondes suivantes.
De mème pour 11°58°56° et pour 11*59*6°. Trois nou-
velles séries de cinq traits commencent respectivement
à 1159736", à 11°59°46° el à 411"59"56”. Les mèmes
signaux sont envoyés aux heures correspondantes de
la nuit.
Le poste inconnu envoie à 23°30", par exemple, le
télégramme suivant: JOFUBOJOFUBO 23 30 ? 2330 ? 7».
— Ces trois envois d'heure sont faits d’après le temps
moven de Greenwich. — Rio de Janeiro enfin doit
prochainement envoyer un long signal de 15 secondes,
commencant à 57*+5" et finissant à 5870°; un second
signal de 58°50* à 00" 0°, et un troisième de 59755" à
070". — Les indicatifs où lettres caractéristiques des
différents postes de T. S.F. sont publiés par les soins
d'un Bureau international siégeant à Berne. Les plus
intéressants à connaître sont ceux des postes côtiers
qui correspondent tous les soirs, à partir de 20°, avec
la tour Eitfel. Les voici, dans l’ordre où ils sont ordi-
nairement appelés: Dunkerque TD, Cherbourg TC,
Brest TQ, Escadre du Nord HS, Lorient TL, Roche-
tort TK, Escadre de la Méditerranée HM, Ajaccio TA,
Toulon TN, Bizerte TZ, Fez FZ, Taourirt TRT, Oran TO.
— À noter aussi quelques postes puissants que l'on
peul entendre ayec une antenne suffisamment déve-
loppée (supportée par un cerf-volant, par exemple) :
Madrid MD, Gibraltar GIB, Coltano CTO, Norddeich KND,..
Poldhu ZZ, Clifden CDN... et son correspondant ordi-
naire au Canada: Glace-Bay GB. — Un autre de nos
rédacteurs pense que les renseignements demandés
au sujet des postes de T. 3. F. se trouvent dans les
Livres des phares édités par le service hydrographique,
13, rue de l'Université, a Paris; mais, étant en ce
moment absent de Paris, il ne peut vérifier immédia-
tement,
M. P. C., à V. — Remerciements. — Vous voyez
que vos indications précises et précieuses ont été les
bienvenues. oo
imprimerie P. Fenon-Vrau. 3 et 5, rue Bayard, Paris, VII.
Le gérant: K. PETTTRENRT.
No 1435 — 25 JUILLET 1919
COSMOS 85
SOMMAIRE
Tour du monde. — Le télescope de l'Observatoire de Cordoba. Les frémissements du sol.
L'érosion des
côtes anglaises. Les lacs comme régulateurs de la température. Importance économique des glaciers.
La propriété lilliputienne. La couronne des lignes électriques à hautes tensions. Télégramme faisant le
tour de la Terre. La marine de guerre au Japon. Propositions contre l’exagération dans les dimensions
des navires. Etude cinématographique des phénomènes balistiques. p. 85.
Henri Poincaré, p. 89. — Station radiotélégraphique et radiotéléphonique de Seattle, H. MarcnAxp,
p. 90. — Pendule entretenu électriquement, G. Dary, p. 92. — Les moteurs tonnants dans la
marine de guerre, D. B., p. 94. — Les peintures et la stratigraphie paléolithiques en Espagne,
À. STIEGELMANN, p. 95. — Le ciment armé dans la protection des côtes et rivages, D" A. GRADENWITZ,
p. 98. — La thérapeutique chirurgicale de la phtisie : VII Congrès international de la tuber-
culose, D" P. Goccia, p. 100. — Notes pratiques de chimie, Juces Gançon, p. 102. — Le relevage des
épaves et des sous-marins, Nonsent LaLLié, p. 104. '— L’océanographie dans l’antiquité (suite),
J. TuouLer, p. 107. — Sociétés savantes: Académie des sciences, p. 108. — Bibliographie, p. 109.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Le télescope de l’Observatoire de Cordoba
(République Argentine). — Le centre astrono-
mique de Cordoba va s'enrichir d’un télescope
muni d'un miroir de 1,725 m de diamètre. Les
fonds nécessaires ont été accordés par le Congrès,
à la demande du ministère de l'Instruction publique.
Ce puissant instrument sera établi dans les mon-
tagnes, à l'Ouest et près de Cordoba, en un lieu que
des observations météorologiques prolongées ont
fait reconnaitre parfaitement propice.
On se propose d'utiliser cette nouvelle installa-
tion astronomique à la photographie des nébuleuses
et des amas d'étoiles de l'hémisphère Sud, étude
menée déjà si loin pour l'hémisphère Nord. On
y poursuivra aussi l'observation photographique
des comètes, des petites planètes. puis la détermi-
nation des parallaxes d'étoiles, et les études spec-
trographiques sur le mouvement radial de ces
astres.
PHYSIQUE DU GLOBE
Les frémissements du sol. — A force d'étudier
les tremblements de terre proches ou éloignés avec
des appareils de plus en plus sensibles, les sismo-
logues en sont venus à trouver que le sol n’est
presque jamais au repos. Certains d’entre eux se
sont presque désintéressés des secousses désas-
treuses de tremblements de terre pour se cantonner
dans l'observation et l'explication des microsismes.
Ces frémissements minimes du sol, sensibles aux
seuls instruments, sont de diverses sortes. (Scien-
tific American, 22 juin.) |
L'un des types de microsismes est caractérisé par
une période d'une trentaine de secondes. On l’attri-
bue au frottement du vent contre la surface de la
T. LXVIL Ne 1435.
terre. En d’autres termes, tout comme le vent sus-
cite la houle dans l'océan, de même il crée de
longues vagues terrestres à la surface du continent
Mais celles-ci ne se voient pas à l'œil nu.
Un autre type de microsismes est caractérisé par
une période allant de cinq à dix secondes. Il parait
que ces vibrations du continent sont dues au choc
des vagues de la mer contre les côtes. Les grandes
tempèêtes de l'Atlantique s’enregistrent directement
sur les microsismogrammes de Hambourg, Stras-
bourg, Vienne ; l’amplitude des tracés est en raison
inverse de la distance de ces villes à l'océan.
Les Allemands ont, en plein Pacifique, à Apia
(iles Samoa), un Observatoire géophysique dont
nous avons eu l’occasion de parler déjà et qui est
dédié à des études de ce genre ; l’ancien directeur,
le D” Linke, a montré que là-bas les microsismo-
graphes enregistrent directement les chocs du
ressac.
L’érosion sur les côtes anglaises. — En 1904,
à la session de l'Association britannique pour l'avan-
cement des sciences tenue à York, M. Mathews éva-
luait à près de 2 millions de tonnes le poids des
matériaux enlevés chaque année par la mer au soł
de l'Angleterre et jetait un eri d'alarme. L’émotion
fut considérable. Pour beaucoup, les jours de lile
étaient comptés : l'Angleterre disparaissait, Vani-
shing England! Pour calmer l'opinion publique,
une ordonnance royale du 9 juillet 4906 chargeait
treize personnalités, ingénieurs ou officiers de
marine, de procéder à une vaste enquête. La Com-
mission se mit courageusement au travail et a élevé
un véritable monument scientifique.
Un premier volume, paru en 4908, montra l'ina-
pité de ces terreurs et comment l'Angleterre, malgré
l'érosion des falaises, augmentait superficiellement
au lieu de diminuer. Le second volume de la Com-
86 COSMOS
mission est venu depuis confirmer le fait (I. Assada,
la Géographie, 43 juillet):
Des gains importants de la terre sur la mer
s'effectuent dans les estuaires; les dépòts de galets
et de sable qui s’y forment proviennent presque
entièrement de la destruction de la côte.
Le colonel Hellard a établi la balance des gains
et des pertes le long des côtes par la comparaison
des cartes anciennes du service géodésique avec les
cartes actuelles. En trente-cinq ans, l'Angleterre
proprement dite aurait perdu 2656 hectares, mais
par contre en aurait gagné 19200. L’Ecosse aurait
perdu 326 hectares contre 4 882 gagnés. En Irlande,
453 hectares auraient été perdus, 2688 gagnés aux
dépens de la mer. Somme toute, les gains seraient
sensiblement supérieurs aux pertes, contrairement
à ce que croyait l'opinion publique, et, en défini-
tive, au cours des trente-cinq années, le territoire
anglais se serait accru de 20 000 hectares.
Il est malaisé d'établir une comparaison entre
la valeur d'utilisation des terrains gagnés et celle
des terrains perdus. Beaucoup des terres perdues
étaient cultivées et mème habitées. Les nouvelles
terres acquises sont ou du sable infertile, ou de
Ja vase qui ne pourra être utilisée avant longtemps.
MÉTÉOROLOGIE
Les lacs comme régulateurs de 1a tempéra-
ture. — Si l'évaluation de la quantité de chaleur
solaire absorbée par le sol présente quelque diffi-
culté, à raison de l'incertitude qui règne sur la
chaleur spécifique des divers terrains et sur la
distribution des températures, il n’en est pas de
mème pour les lacs fermés, puisqu'on peut admettre
qu'une élévation de température d'un degré cor-
respond à l'absorption d'une calorie parkilogramme
d'eau. Ainsi, la quantité de chaleur emmagasinée
par le lacs'obtiendra en addilionnant les produits
des températures moyennes de chaque couche à peu
près isothcrime par son volume, En faisant cette esti-
mation à deux dates différentes, on aura par diffé-
rence la quantité de chaleur absorbée ou perdue
dans l'intervalle.
Des observations faites de 1898 à 1905 (et dont
l'Annuaire de la Société météorologique de
France de mars nous fournit les résultats) ont
ainsi permis à M.F. Vercelli d'évaluer à 43 000 mil-
liards de calories la quantité de chaleur absorbée
par Îe lac de Côme entre l’époque du minimum de
température, vers le 20 février, et l’époque du
maximum, vers le 20 août. L'absorption journalière
s'élève à 259 milliards de calories : elle correspond
à la combustion de 34 000 tonnes de charbon.
Cette remarque souligne l'importance d'un lac
comme réservoir de chaleur et montre quel puis-
sant facteur de la régularisation du climat idimi-
nution de l'amplitude thermique) constitue un
95 JUILLET 41919
bassin fermé. Le lac de Côme a une superficie de
436 kilomètres carrés; sa profondeur moyenne est
de 190 mètres, et sa profondeur maximum de
410 mètres. La température ne varie d’ailleurs pas
au delà d'une profondeur de 100 mètres, c'est-
à-dire que la plus grande partie de la quantité de
chaleur reste dans les couches supérieures du lac.
Importance économique des glaciers. —
Longtemps les glaciers n'ont été considérés que
comme des objets de curiosité pour les savants ou
pour les amateurs des beautés de la nature; seule-
ment à une date toute récente, l'attention a été
attirée sur l’importance de leur role économique,
sans que toutefois les géographes se soient beau-
coup préoccupés de cette constatalion féconde.
Les glaciers sont des réservoirs d'eau, dont
les écoulements sont réglés par la température de
Pair ambiant. Aussi bien, est-ce en été que les
torrents qui en sont issus ont leur plus gros débit.
Plus la température s'élève, plus la fusion devient
active et plus les niveaux montent. Il est mème
parfois arrivé dans des vallées des Alpes que la
chaleur a eu cette conséquence paradoxale d'en-
gendrer des inondalions.
Donc, précisément pendant la saison où dans les
plaines et dans les régions dépourvues de glaciation
les rivières sont à l’étiage el même à sec, il ya
abondance, parfois mème surabondance d'eau dans
les massifs assez élevés pour porter des glaciers.
Par suite, dans ces districts privilégiés, l'irrigation
peut être pratiquée et l'industrie trouver les forces
hydrauliques nécessaires àla marche de nombreuses
usines.
ll y a quelques années déjà, l’'éminent hydrauli-
cien italien, l'ingénieur Gaudenzio Fantoli, a mis
en évidence le role économique des glaciers. Il a
montré notamment que dans le bassin du lac
Majeur, pendant les périodes de sécheresse, la part
de beaucoup la plus importante dans l’alimenta-
tion des cours d’eau revient à ces appareils. Dans
ce bassin hydrographique, lesglaciers, quin'occupent
que 40S kilomètres carrés, soit 1,74 pour 100 de la
surface totale (6 200 km’), fournissent en été plus
d’eau que le reste du bassin. Ainsi, du 15 au
25 aoùt 1393, alors que les sources n’ont débité que
10 litres par seconde et par kilomètre carré, les
glaciers en ont donné 657.
À ce sujet, M. Ch. Rabot (la Géographie,
45 juin) relate les nouvelles constatations faites
pendant l'été sec et chaud de l’année dernière, par
M. J. Maurer, directeur de l'Observatoire météo-
rologique central suisse.
Pendant les journées chaudes d'août 41911, un
glacier d é'endue movenne, tel que le Morterasch,
déversail 27 à 40 mètres cubes d’eau par seconde,
débit égal à celui du Neckar à l’époque de l’étiage
minimum minimorum. Ainsi, un massif glacé de
25 kilomètres carrés à peine déverse en été autant
Nc 1435
d'eau qu’un bassin hydrographique 560 fois plus
grand, comme celui du Neckar (14 000 km).
Et ce n’est pas là un cas exceptionnel. Par plu-
sieurs autres mesures de débits effectuées en
août 1911, M. Maurer montre bien que, pendant
les périodes de sécheresse persistante et de forte
insolation, alimentation des grands fleuves de l’Eu-
rope est sous l’étroite dépendance de la fusion des
glaciers.
AGRICULTURE
La propriété lilliputienne. — Des champs
minuscules, d'une superficie de quelques mètres
carrés! Cette forme extravagante de la propriété
se rencontre, sinon dans la France continentale,
du moins dans nos iles de l’océan. Le phénomène
relèverait plutôt de l’anecdote s’il n’avait un cer-
tain intérêt agricole par la façon curieuse dont les
populations sont parvenues à tirer parti de ces
infimes parcelles en leur appliquant, pour la cul-
ture, le régime de la communauté.
Cette situation de la propriété à l’état de pous-
sière se rencontre dans desiles de langue française
comme celle de Ré et dans celles de souche bre-
tonne comme Houat et Hoëdic.
Dans les iles de Ré et d'Oléron, une grande partie
de la surface est composée de marais salants dont
les réservoirs sont enclos de digues appelées bosses,
offrant d'étroits espaces d'une terre remarquable-
ment fertile, où les habitants, sauniers en grand
nombre, obtiennent des légumes, du blé, voire du
vin. L’'étendue d'ensemble de ces bosses est mé-
diocre; or, la population est extrèmement dense,
on se dispute donc le sol arable, on le garde avec
un soin jaloux; lors des partages entre parents,
chacun exige sa fraction. Ce régime remonte fort
loin; et, on est arrivé ainsi à l’émiettement actuel.
M. Ardouin-Dumazet affirme (dans le Journal
d'Agriculture pratique, 21 juin) avoir rencontré
dans l'ile de Ré des champs ayant au plus deux
mètres carrés. Pour mettre en culture ces domaines,
d'une si invraisemblable exiguité, on voit parfois
les propriétaires venir d’une partie très éloignée de
l'ile, 20 ou 25 kilomètres.
Et l’on ne se borne pas à planter quelques choux
ou quelques oignons, on fait bien réellement de la
culture proprement dite; voici du blé ou de l'avoine,
de la luzerne, du trèfle, de la vigne, des pommes
de terre. Et cela produit l'effet le plus extraordi-
naire, c'est une véritable marqueterie végétale.
L'ile entière est ainsi partagée; on ne s'en aper-
çoit guère que sur les bosses; dans les régions trop
élevées pour que l’on ait pu établir des marais
salants, et elles occupent les cinq sixièmes de l'ile,
la vigne domine; les rangées de pampres se pour-
suivent sans laisser deviner l’infinité des parcelles.
D'ailleurs, chaque famille a un nombre parfois
considérable de ces champs. |
COSMOS 87
En beaucoup de parties de l'ile de Ré, faute de
places libres, on établit l'aire à battre le blé sur
les routes macadamisées. Au nord de l'ile, dans la
région des marais salants, les transports sur les
bosses ne peuvent se faire qu à dos d'âne; il est
vrai qu'un seul suffit souvent à porter la récolte
d'un champ. Ils ont tous les jambes entourées de
vieux pantalons multicolores apportés du continent
par les fripiers et destinés à les préserver des
moustiques et des taons.
Dans les iles bretonnes : Houat, Hoëdic, les iles
du Morbihan, Groix, Ouessant, les parcelles sont
moins exiguës; la base de la propriété estle sillon,
bande de terre de 2 pieds (65 cm) de large et
40 mètres de long. Trop petites pour ètre cultivées
isolément avec avantage, elles forment souvent
une possession indivise entre plusieurs membres
d’une famille: chacun à son tour a droit à la
récolte d’une année.
Ou bien la mise en valeur est assurée par le
régime communautaire que les recteurs ou curés ont
imaginé pour réglementer la vie sur cesterres aux
ressources si faibles. Plusieurs familles participent
aux labours et aux semailles de leurs sillons, tous
réunis en un champ assez vaste; ensemble elles
récoltent, et le produit est partagé au prorata du
nombre des sillons. Les femmes seules travaillent
la terre. Dans l’ile de Groix, un seul homme ne se
livre pas à la pèche et se voue à la culture;
M. Ardouin-Dumazet dit : « On me le désigna avec
un accent de profond mépris comme le paysan. »
ÉLECTRICITÉ
La couronne des lignes électriques à haute
tension. — Il existe des transmissions d'énergie
électrique à 140 000 volts: c’est un retour aux ori-
gines de la science électrique, car les machines
statiques à frottement ou à influence produisaient
des différences de potentiel de cet ordre de gran-
deur. La pile de Volta a fait tomber les différences
de potentiel couramment usitées à un volt ou à
quelques volts; mais l’électrotechnique est en train
de gravir à nouveau toute l’échelle des tensions ct
elle compte maintenant par centaines de kilovolts.
L'écoulement de l'électricité par les pointes, le
« vent électrique », bien connus dès les premiers
temps de l'électricité, se retrouvent maintenant,
dans les transmissions à haute tension, sous la
forme de la « couronne » lumineuse qui auréole
parfois les lignes. Il est remarquable que les nou-
velles lignes, à leur mise en charge, présentent,
pendant la première demi-heure de service, une
déperdition plus forte que dans la suite, en vertu
de ce phénomène de couronne: vraisrmblablement
les poussières qui se sont déposées sur le fil forment
autant de pointes déperditrices. Mais le « vent
électrique » a assez vite fait de les détacher.
85 COSMOS
Voila en perspective un emploi nouveau de
l'électricité : le nettoyage à distance. Mais il ne
s’agit pas encore de concurrencer les systèmes de
nettoyage par le vide.
Télégrammes faisant le tour de la Terre. —
L'Elektrotechnisrher Anzeiger rapporte que le
Times de New-York s'est adressé à lui-même,
voilà quelque temps, un télégramme de neuf mots
qui devait revenir au point de départ après avoir
fait le tour du globe: ce télégramme a effectué le
parcours en seize minutes et demie, franchissant
seize étapes. Lors de l’ouverture du câble transpa-
cifique, voilà onze ans, on avait également lancé
autour de la Terre un télégramme qui avait accompli
le trajet en seulement neuf minutes et demie, mais
on avait eu soin de prendre d'avance toutes les
précautions nécessaires pour assurer une trans-
mission aussi rapide que possible: par contre, le
télégramme de 1912 a été traité, lui, comme une
dépèche ordinaire. Le même télégramme de 1912
a passé partout au nord de l'Équateur : par Hono-
lulu, Manille, Hongkong, Singapore, Bombay, Suez,
Gibraltar et Fayal. — G. (Électricien.)
MARINE
La marino de guerre au Japon. — En ce
temps d'armement à outrance et de navires de
guerre monstrueux, tandis que les Anglais et les
Allemands ont entrepris une lutte formidable pour
s'emparer de l’empire des mers, les Japonais, les
derniers venus dans la lice, encouragés par des
succès bien inattendus, aspirent aussi, sinon au
premier rang, du moins à une puissance maritime
capable de leur permettre, non seulement de
résister aux États-Unis, leur ennemi de l'avenir,
mais même à une époque plus ou moins lointaine,
de les attaquer chez eux; rêve sans issue, sans
doute, car les Etats-Unis ont une sauvegarde
invincible dans l'étendue de leur territoire. Mais quel
que soit l'espoir dont se flattent quelques esprits
au Japon, il faut reconnaitre les efforts miraculeux
ce ces néophytes dans ce que nous appelons le
progrès de la civilisation occidentale.
Par le fait, ce sont les Japonais qui vont posséder
le croiseur-cuirassé le plus puissant de toutes les
marines du monde. Il s'agit du Kongo, construit
pour eux et qui vient d'ètre lancé au chantier Vic-
kers, en Angleterre.
Ce croiseur est un véritable bâtiment de ligne
par la puissance de son armement et par ses
qualités de vitesse : il filera 28 nœuds (52 kilo-
mètres par heure); il est armé de huit canons de
343 mm et a en batterie seize canons de 147 mm.
Il a 214.75 m de longueur, 28 mètres de bau et
déplace 27 500 tonnes. Il embarquera 4 000 tonnes
de charbon et 1 000 de combustible liquide, ce qui
lui donnera un énorme rayon d'action.
25 JUILLET 1912
Propositions contre l’exagération dans les
dimensions des navires. — Au Congrès interna-
tional de navigation, M. Grunsby demande que
des restrictions soient imposées aux Compagnies
de navigation par une convention internationale,
de façon à empêcher l’exagération dans les dimen-
sions des bâtiments de mer. Comme sanction à la
décision demandée, il devrait être résolu qu'aucune
subvention gouvernementale ne serait accordée aux
navires ayant un tirant d'eau de plus de 9,8 m.
M. Grunsby propose de fixer les dimensions maxima
à admettre : longueur totale, 274,5 m; plus grande
largeur, 32 mètres; tirant d'eau, 9,8 m.
Nous sommes peu partisans des navires im-
menses; mais, dans le cas actuel, il s'agit évidem-
ment bien plus de l'intérèt des constructeurs de
canaux interocéaniques que de celui desnavigateurs.
VARIA
Étude cinématographique des phénomènes
balistiques. — Le cinématographe ordinaire ana-
lyse et découpe le mouvement en tranches à peu
près instantanées et successives, à raison d'une
quinzaine de vues par seconde. Mais certains phé-
nomènes rapides ne peuvent être utilement décom-
posés puis reconstitués qu’à la condition qu’on en
prenne des photographies beaucoup plus rappro-
chées dans le temps : des centaines ou des milliers
par seconde. C’est le cas du mouvement des balles
de fusil, du vol des insectes, de la chute d’une
goutte d'eau, etc.
C'est ainsi que, à l’Institut Marey, Lucien Bull
cinématographiait les objets en mouvement à rai-
son de 2000 vues par seconde en les éclairant au
moyen des étincelles d'une bobine de Ruhmkorff.
Un Allemand, M. C. Cranz, dansson cinématographe
balistique, était, par la suite, arrivé à prendre
800 vues en moins d'un cinquième de seconde, ce
qui correspondait à une fréquence de 5000 vues
par seconde.
Le même auteur, en collaboration avec M. B. Glat-
zel (Société allemande de physique, avril), a créé
un dispositif perfectionné qui permet d'atteindre
une fréquence de 100000 vues par seconde. Un
courant alternatif à haute fréquence, tel que ceux
qu'on emploie couramment en télégraphie sans fil,
se décharge entre les deux électrodes en cuivre
d'un éclateur soufflé par un fort courant d'air. A
chaque étincelle, l’objet éclairé se photographie
sur une pellicule qui est portée par un tambour de
89 centimètres de circonférence tournant à une
vitesse maximum de 9 000 tours par minute.
Signalons parmi les applications l'étude du fonc-
tionnement d'un pistolet à chargement automa-
tique faite à des fréquences variées allant de
6 400 à 92 000 vues par seconde; celle de l'entrée
d'une balle dans un tube de plomb rempli d'eau,
faite à une fréquence de 8 400 vues par seconde.
N° 1435
COSMOS 8y
HENRI POINCARE
L'illustre savant a été soudainement emporté
par une embolie, le 47 juillet, quelques jours après
avoir subi une opération chirurgicale. Ses obsèques
religieuses ont eu lieu le surlendemain, à Paris,
à l'église Saint-Jacques du Haut-Pas.
Fils de médecin, né à Nancy le 29 avril 4854, il fut
élève de l'École polytechnique (1873), puis de l’École
nationale supérieure des' mines (1875), docteur ès
sciences mathématiques
(Paris, 1879). D'abord
chargé du cours d'ana-
lyse mathématique à la
Faculté des sciences de
Caen, il inaugurait à
vingt-quatre ans la série
de ses innombrables pu-
blications sur les pro-
blèmes les plus difficiles
et les plus nouveaux des
mathématiques par ses
découvertes des fonc-
tions fuchsiennes. En
1881, il passa à la Sor-
bonne, qu’il n'a pas
quittée depuis, et où il
professa successivement
avec une égale aisance
inventive l'analyse, la
physique mathéma-
tique, le calcul des
probabilités et la méca-
nique céleste. Les hon-
neurs le poursuivirent,
sans émouvoir sa mo-
destie et sans le distraire
de la recherche unique
de la science: il fut élu
membre de l'Académie
des sciences, dans la sec-
tion de géométrie, à
32ans,eten 1908 membre
de l’Académie française, en remplacement du poète-
philosophe Sully-Prudhomme,et c’est à bon droit,car
Poincaré, mathématicien et physicien, fut en même
temps un philosophe de la science et un bel écrivain;
sa langueétait nerveuse, pittoresque, d'uneconcision
et d’une clarté bien françaises. Il était associé,
membre ou correspondant de plus de quarante
Académies et Sociétés savantes, docteur honoraire
de sept Universités, membre du Bureau des Longi-
tudes, etc., commandeur de la Légion d'honneur.
Le public l’a surtout connu par ses ouvrages de
critique des sciences: la Science et l'hypothèse,
la Valeur de La science, Science et méthode : les
idées qu'il y expose sur les principes de la science ne
sont d’ailleurs pas nouvelles. Poincaré ne fait que
renouer la saine tradition des savants de Tanti-
quité et du moyen âge, comme ile faisait remar-
quer ici, dans nos colonnes, M. Bouasse parlant
des travaux de cet autre éminent savant français,
M. Duhem. Mais ces idées saines avaient été
momentanément oubliées et éclipsées par les
déclamations et les discours d'hommes comme
Hæckel en Allemagne,
Berthelot en France,
pour qui la « certitude
scientifique » suffisait à
fonder la loi morale sur
les ruines de toute reli-
gion, de toute croyance,
de toute métaphysique.
Poincaré eut le mérite de
réagir contre celte naïve
prétention de quelques
savants, fourvoyés, sans
le savoir, dans la méta-
physique : il rappela que
ce que nous appelons
« la science » n’est qu'une
construction provisoire,
toujours soumise à des
remaniements et perfec-
tionnements incessants,
qu'elle est constamment
limitée en sesréalisations
et dans ses aspirations
vers la vérité, que les
enseignements de « la
science » n’épuisent pas
la capacité de connais-
sance de l’homme, et,
que par delà les pro-
blèmes qu’elle résout
victorieusement, il en
surgit encore et toujours
de nouveaux auxquels
l'esprit humain veut une réponse. Et quandil disait :
« La recherche de la vérité doit être le but de notre
activité; c'est la seule fin qui soit digne d'elle »,
il parlait d’une vérité belle et grande qui dépasse
immensément celle des savants myopes qui s'ar-
rêtent à la matière, à la chimie, à la mécanique et
qui se vantent d'arriver demain aux extrémités
du monde et de la connaissance humaine.
Présidant, le 26 février dernier, à la Société
astronomique de France, le jubilé scientifique de
M. C. Flammarion, il exposait finement quelle est
la vraie grandeur de la vocation et du labeur
scientifiques, et ce qu'il disait de l'astronomie, il
l'aurait volontiers appliqué aux autres sciences.
00 ` COSMOS
« Est-il vrai que l’astronomie soit une science
rébarbalive, hérissée d’intégrales terrifiantes, un
désert aride où l’œil ne peut se reposer sur aucune
verdure? Est-il vrai que le travail de l’astronome
soit ingrat et déprimant, qu'il consiste uniquement
à déplacer un fil en tournant une vis tout douce-
ment, tout doucement, à lire un chiffre sur une
échelle, à l'écrire sur son carnet, et puis à recom-
mencer la même mesure indéfiniment?
Le vrai savant sait que sa peine « sera payée
au centuple, et que devant le spectacle des cieux
immenses et radieux, harmonieux et vivants, nous
ne la regretterons pas plus que l’alpiniste, arrivé
25 JUILLET 1912
au sommet et contempiant le sublime panorama
des glaciers éternels, ne se souvient des fatigues
de l’ascension...….
» Certes, aucun astronome ne l'ignore tout à
fait; sans cela, pourquoi s’astreindrait-il à une
besogne fatigante et fastidieuse, à des veilles pro-
longées dans des conditions absolument dépourvues
de confort... Non, s’il travaille sans se plaindre,
c'est pour contribuer à une œuvre grandiose, qui
doit exalter l’âme humaine, la rendre plus voisine
de Dieu et en même temps plus fière d'elle-même,
et quoiqu'il ne doive souvent voir lui-même qu'un
coin des cieux, il se sent cependant grandi.» B.L.
Station radiotélégraphique et
Une grande station radiotélégraphique vient
d’être établie à Seattle, dans l'État de Washington
F1G. 1. — TOUR PORTE-ANTENNE
DE LA STATION DUBILIER A SEATTLE.
par la Commercial wireless telephone and tele-
graph C°; cette station, qui travaille par les pro-
radiotéléphonique de Seattle.
cédés d’un jeune inventeur, M. William Dubilier,
de Seattle, est destinée à des expériences de télé-
graphie et de téléphonie sans fil à grande distance
et a été tout spécialement étudiée au point de vue
des moyens d'action à mettre en œuvre.
Le choix de l’emplacement de la station a
notamment fait l’objet d’études préliminaires très
sérieuses; la station est située à 5 kilomètres à peu
près de Seattle, à 450 mètres environ d'altitude;
plusieurs autres stations radiotélégraphiques se
trouvent dans la même région; la plus proche est
celle du chantier naval de Bremerton, près de
Seattle; puis vient une station à Tacoma et deux
autres plus éloignées, à Victoria et Tatcoah ; toutes
ces stations reçoivent régulièrement les communi-
cations téléphoniques du nouveau poste, et un ser-
vice commercial doit même être établi entre
celui-ci et Tacoma; la distance de Tatcoah à la
station Dubilier de Seattle est de 140 milles, soit
224 kilomètres; mais entre les deux postes, le sol
est fortement accidenté et relevé par les monts
Olympiens, ce qui augmente beaucoup la difficulté
d'établir les relations; Tatcoah ne parvenait pas
autrefois à se maintenir en communication avec la
stalion navale de Bremerton, même en employant
une puissance de 25 chevaux. |
Après expérience des différentes formes d’an-
tenne, il fut décidé que la station d’essai serait
pourvue d’une antenne en ombrelle, cette disposi-
tion paraissant la mieux appropriée à surmonter
les obstacles résultant de ce que presque de tous
côtés existent autour de la station des montagnes
s'élevant à 4500 mètres de hauteur ou plus; le
Puget Sound, sur lequel se trouve la station —
comme celles de Bremerton, de Tacoma, de Vic-
toria el de Tatcoah, — et qui a jusqu’à 3 kilomètres
de largeur. est la seule voie d’eau existante.
L’antenne s'élève, comme le montre la figure 1,
au milieu de la forèt, où l’on a procédé à laba-
tage nécessaire. Son support est constitué par un
grand mât de 96 mètres de hauteur; ce mât a été
LL a Ce
N° 1435
conçu et construit de manière à posséder la plus
grande flexibilité possible, les vents auxquels il est
exposé étant généralement fréquents et violents;
il est établi sur un massif en béton de 2,4 m de
profondeur et 2,1 m de côté; dans ce massif sont
prises quatre tiges d'acier auxquelles sont boulon-
nées les poutres de bois qui forment le mât pro-
prement dit.
Il y a, dès la base, deux poutres de 20 X 23 cen-
timètres pour chaque face, et ces poutres sont de
longueur croissante, la première mesurant 1,5 m,
la seconde 3,0 m, la troisième 4,5 m, et ainsi de
7
y
COSMOS
OF IH
UNIVERSITY
: CALIFORNIA
suite; sur ces poutres sont fixées bout
à bout les poutres de hauteur qui ont uniformément
12 mètres de longueur; elles sont toutes réunies
par des poutrelles en fer I, renforcées par des
plaques d'angle; des armatures sont placées de
3 mètres en 3 mètres; à 24 mètres de hauteur,
puis à 21, 18, 15 et 12 mètres de distance succes-
sivement sont placées des armatures spécialesser-
vant à l'attache des haubans. Le montage s’est
effectué au moyen d’un petit treuil à vapeur; il n’a
pas rencontré de difficulté ; les poutres sont fixées
91
Tune à l’autre par des plaques de fer et des bou.
F1G. 2. — VUE DU POSTE RADIOTÉLÉPHONIQUE.
lons. Les ancrages des haubans sont constitués par
des fers I de 30 centimètres de côté et 3 mètres de
longueur, enfouis à 3 mètres de profondeur dans
des massifs de béton; dans des poutrelles sont
accrochées des tiges d'acier auxquelles sont fixés
les haubans; ceux-ci sont coupés de distance en
distance par des isolateurs; ils ont 2,5 cm de dia-
mètre à la base et 1,25 cm au sommet ; chacun des
haubans comprend six sections; ils sont placés à
90° l’un de l’autre.
La figure 1, qui donne une vue d'ensemble de
l’antenne, permet de se rendre compte de la dis-
position du support et de ses haubans. Elle montre
également la forme de l’antenne.
L'ombrelle est divisée en huit sections, compo-
sées chacune de huit fils et reliées à de petits mâts
de 36 mètres de hauteur placés à 150 mètres de
distance de la base de la tour principale; les fils
sont en bronze phosphoreux; ils sont connectés de
telle façon que l’on puisse employer à volonté et
à chaque moment soit l’ensemble des conducteurs,
soit une partie seulement.
Au pied de la tour se trouve, comme on le voit
à la figure 1, un petit bâtiment contenant les appa-
92 COSMOS
reils du poste; à còté de ce bâtiment, dans un
autre complètement distinct, est placée l’installa-
tion génératrice; le bâtiment des appareils est
divisé en deux parties occupées respectivement par
le poste de télégraphie et par celui de téléphonie.
Le poste téléphonique comprend un équipement
complet de réception et de transmission pour
l'application de la nouvelle méthode de travail
imaginée par M. Dubilier, et que celui-ci appelle la
méthode de l'arc étouffé parce qu’elle tient à la fois
de la méthode de l’arc Poulsen et de celle à étin-
celles étouffées, procédés qui sont à présent les
plus intéressants et les plus importants.
Elle comporte l'emploi d’un nouveau transmet-
teur; un interrupteur bipolaire permet de rendre
le couplage de l'oscillateur à l’antenne lâche ou
serré selon le cas; un second, placé sur la partie
supérieure de la boite contenant les instruments,
sert à passer de la transmission à la réception, et
réciproquement; enfin, un troisième interrupteur,
également monté sur la boite, permet de faire
fonctionner le système avec un transmetteur à
étincelle; l’organe essentiel de celui-ci est un
interrupteur actionné par un moteur électrique, et
la fréquence des étincelles est modifiée simplement
en agissant sur ce moteur.
Différents transmetteurs téléphoniques ont été
expérimentés : de hons résultats ont notamment
été obtenus au moyen de six appareils du type
Berliner bien connu, employés en parallèle et
montés sur la mème embouchure; ce transmetteur
est montré à la figure 2; mais, dans ces derniers
temps, les essais ont principalement porté sur un
nouveau type de répétiteur téléphonique, capable
d'amplifier les variations de courant produites
dans le circuit primaire par un transmetteur.
L'utilisation d'un répétiteur téléphonique pour
les transmissions radiotéléphoniques est certaine-
ment l’un des procédés les plus intéressants que
l'on puisse expérimenter, bien que cette méthode
ait rencontré jusqu'ici certains obstacles dus à
l'imperfection des appareils répétiteurs; M. Fes-
ne
25 jJuiLer 1912
senden avait signalé autrefois qu’il était arrivé à
de bons résultats avec ce procédé, mais il n’a plus
été question, depuis, de ses essais; M. Dubilier
m'écrit que, de son côté aussi, les essais n'ont pas
été infructueux, il a déposé pour son amplificateur
une demande de brevet qui est en instance. Cet
instrument est visible à la figure 2 sur la droite.
Le transmetteur avec lequel il s'emploie se eom-
pose de deux électro-aimants à enroulements de
2 ohms placés de part et d'autre du diaphragme
et de la coupelle à granules de charbon; le dia-
phragme a approximativement 42,5 cm de dia-
mètre et un millimètre d'épaisseur; il est fixé sur
un disque d’ébonite percé de trous; il est en outre
pourvu d’anneaux en platine, concentriques, et
dont la circonférence est percée de trous permet-
tant de produire une circulation d'air; les anneaux
servent à donner le contact avec les granules de
charbon; ceux-ci sont retenus dans la chambre
par un disque de mica.
Le poste de réception est caractérisé par l'emploi
de différents instruments de construction spéciale;
on travaille au moyen d'un récepteur à quatre
détecteurs de types différents (un perikon, un dé-
tecteur à silicium, un détecteur à pyrite de fer et
un détecteur à galène); ces dispositifs peuvent
être employés à volonté à tour de rôle par le seul
déplacement d’un commutateur rotatif.
D'après les essais effectués jusqu'ici, la disposi-
tion la plus avantageuse serait formée d'une
aiguille d'acier s'appuyant sur un morceau de car-
borundum flottant dans le mercure; ce dispositif
est stable et très durable, il a donné le maximum
de clarté dans l'articulation pour la téléphonie.
La puissance que peut fournir le poste généra-
teur est de 33 chevaux environ; elle est suffisante
pour permettre à la station de communiquer à
grande distance par la radiotélégraphie, et l’on
établit en ce moment dans l'Alaska un second
poste identique à celui de Seattle et avec lequel
l'on compte organiser un service régulier.
H. Marc&ano.
———
Pendule entretenu électriquement.
Longtemps on a cherché le moyen pratique d'ap-
pliquer l'électricité 4 l'horlogerie en faisant direc-
lement intervenir le courant comme agent moteur
du système de minuterie. C'est de ce cûté que se
sont portes les premiers efforts, et depuis l'essa
qu'en fit Steinheil en 1838, d’autres électriciens
tels que Verite. Froment, Hipp, Houdin, ete., ont
tenté de suivre la mème voie, mais sans résultats
bien réels. loutes ces horloges avaient de graves
delauts; leur égalité de mouvement était loin
detre assurte, Car les contacts se produisaient
toutes les secondes, les pièces s’oxydaient rapide-
ment par suite des étincelles de rupture, le circuit
se trouvait alors interrompu au bout de très peu de
temps et l'horloge s'arrètait. De plus, le mouvement
était en relation directe avec la source électrique
employée, et les contacts n'avaient pas toujours la
méme durée; il y avait donc nécessairement des
retards ou des avances qu'il était bien difficile de
corriger. Aussi a-t-on abandonné cette utopie pour
demander seulement à l'électricité les deux trans-
formations suivantes :
Ne 1435
4° Le courant agit sur le ressort moteur auto-
matiquement et à intervalles réguliers, tandis que
la mesure du temps s'effectue toujours à l’aide des
échappements ordinaires. Ce sont les horloges à
remontage électrique ; |
20 Une horloge-type, régulatrice, ou bien transmet
l'heure électriquement à des cadrans compteurs
ou bien règle, par avance ou retard, des distribu-
teurs, des centres horaires qui peuvent à leur tour
régler un nombre indéfini d’horloges. Cest la
remise à l'heure obtenue électriquement, c’est la
synchronisation électrique des horloges.
Sans nous attarder à cette question de la distri-
bution électrique de l'heure qui fonctionne dans la
plupart des grandes villes et qui est à peu près
accomplie, nous voulons parler aujourd'hui d'un sys-
tème qui résout, pour ainsi dire, les deux problèmes
énoncés ci-dessus d'une manière éminemment
simple et élégante et peut constituer le principe, soit
d’une horloge électrique indépendante, soit d’une
horloge-type régulatrice, et même devenir le point
de départ d'une foule de signaux périodiques lumi-
neux ou acoustiques. C’est encore à un Genevois,
M. H. Campiche, que nous devons ce perfectionne-
ment, car la Suisse, cette mère-patrie des horlo-
gers, a donné naissance aux Hipp, Favarger, Cuenot,
Thury, et à bien d’autres encore qui, tantôt mécani-
ciens, tantôt électriciens, ont su le mieux faire
accorder ces deux sciences et réaliser des merveilles.
Nous savons qu’entretenir un pendule, c’est lui
restituer, au fur et à mesure qu’il la perd, l'énergie
absorbée par les frottements dans l’air et les résis-
tances de la suspension, de manière à maintenir
constante l'amplitude des oscillations. Entretenir
électriquement un pendule, c’est donc demander à
une source électrique l'énergie complémentaire
qui est nécessaire à l’accomplissement de ce travail.
Il existe deux moyens principaux pour entretenir
électriquement le mouvement d’un pendule :
Ou bien le pendule lui-même est soumis directe-
ment à l'influence de l'énergie électrique, et alors
il est muni, soit d’une armature en fer doux, soit
d’une bobine de fil isolé qui, oscillant avec lui, est,
en certains points de sa course, soumise aux attrac-
tions ou aux répulsions d'organes magnétiques.
Dans ce cas, ce sont des horloges électriques dites
à réactions directes.
Ou bien l'énergie électrique a pour fonction de
soulever à intervalles réguliers, souvent à chaque
oscillation du pendule, de petits poids ou des res-
sorts, qu'elle abandonne ensuite à eux-mêmes, et
cela à un moment où ceux-ci, en s'appuyant sur
des bras fixés au pendule, peuvent restituer à ce
dernier la portion de force vive qu’il a perdue pen-
dant l’oscillation. Ces horloges sont dites à réactions
indirectes.
Le procédé employé par M. H. Campiche rentre
plutôt dans cette deuxième catégorie, mais en
COSMOS 93
comportant d’utiles modifications. En effet, pour
restituer à un pendule la force vive qu’il a perdue
dans le travail effectué, il importe d'adopter une
méthode qui ait le moins possible d'influence per-
turbatrice sur la loi de son mouvement et dont
l'action soit indépendante de l'intensité du courant
employé ainsi que de ses variations. Or, le système
à réactions indirectes a le grand avantage de
rendre la marche du pendule indépendante de ces
variations puisque les impulsions qui lui sont com-
muniquées sont dues à une force constamment
égale à elle-même. Mais comme, le plus souvent,
>”
F1G. 1, — RÉGULATEUR CAMPICHE.
les fermetures du circuit ont lieu à chaque oscilla-
tion du pendule, la consommation du courant est
très grande, sans compter tous les inconvénients
qui en dérivent. En outre, ces impulsions sont tou-
jours accompagnées de chocs brusques plus ou
moins accentués qui comprometltent au plus haut
degré la régularité de marche des organes et
rendent alors illusoire la constance de la force appli-
quée à l'entretien du pendule. M. Campiche a évité
soigneusement tous ces inconvénients, et, comme
on peut s’en convaincre en examinant la figure ci-
dessus, il a construit un régulateur d'une simplicilé
et d’une précision absolument remarquables.
94 COSMOS
Sur le bâti a sont fixées les trois pièces princi-
pales du régulateur : les rouages c, le pendule b et
l'organe électro-mécanique À x. Le pendule b qui
bat la seconde est muni d’une lamelle d’acier d
terminée par une ancre et dont la position est
déterminée à volonté et réglée par l'intermédiaire
d'un coulisseau et d'une vis de pression. À chaque
oscillation du pendule vers la roue c, cette tige à
ancre la fait avancer d'une dent, et comme il y en
a soixante, la révolution totale de la roue s'effectue
exactement en une minute.
Or, cette roue c porte à lextrémité d'un de ses
rayons une mince goupille en platine qui, une
fois par tour, vient toucher pendant 0,8 seconde
les deux contacts également en platine g disposés
de part et d'autre de la roue. Le circuit de la
source électrique affectée à l'entretien du pendule
se trouve alors fermé pendant cette courte période
sur l’électro-aimant A.
Une petite molette bien équilibrée et placée à la
partie inférieure de la roue dentée c remplit le
rôle desautoiret maintient cetterouesansla charger.
Quant aux deux autres contacts e et f, ils peuvent
être affectés à une distribution de l'héure à des
lignes de cadrans secondaires.
L’électro À attire et fait basculer son arma-
ture & m, et par l'intermédiaire de pièces mobiles
articulées o g, la lame flexible v r vient repousser
le balancier et accentuer, s'il en est besoin, son
mouvement pendant 0,8 seconde. La lame revient
25 JUILLET 419412
immédiatement dans sa première position sous
l'influence du ressort p dont la tension est réglée
à volonté. Le point où le poussoir flexible v x
vient donner une nouvelle impulsion au balancier
n'est pas indiqué sur la figure; d’ailleurs, il varie
à volonté, car, au moyen de la vis g, on peut faire
descendre ou monter la lame flexible. De mème, le
balancier est pourvu en un endroit convenable
d’un petit coulisseau carré tenu en place par une
vis de pression, et sa surface plane, du côté de la
lame flexible est garnie d'une matière lisse et bien
polie, de manière que l'impulsion s'effectue norma-
lement et sans chocs.
Voilà donc tout le mécanisme très simple, comme
on le voit, du régulateur électrique Campiche. Le
travail que l’on demande au pendule est extrême-
ment léger, et comme il est toujours constant et
que la poussée électro-mécanique de la lame
flexible est toujours de mème intensité malgré les
variations de courant qui peuvent survenir du fait
de la source d'énergie, il est évident que la plus
grande précision est nécessairement obtenue.
La synchronisation de plusieurs régulateurs ne
présente plus aucune difficulté, puisque l’on pourra
en brancher un nombre aussi grand que l'on
voudra sur le mème circuit. Tous les poussoirs
électro- mécaniques agiront exactement ensemble
et viendront donner leurs impulsions aux balan-
ciers qui battront rigoureusement lu seconde tous
ensemble. GEORGES DARY.
Les moteurs tonnants dans la marine de guerre.
On parle de plus en plus de recourir aux
moteurs tonnants pour les bateaux de guerre tout
comme pour les bateaux marchands. Il est bien
sûr, d'ailleurs, que les premières applications
de ce moteur tonnant, ou du moteur à combustion
interne, à la flotte de guerre, se feront sur de petites
unités et probablement à bord de contre-torpil-
leurs: les risques financiers et méme stratégiques
à courir avec un essai de ce genre sont autrement
moins graves que s'il s'agissait d'un cuirassé ou
d'un grand croiseur. Des renseignements intéres-
sants et qui semblent très exacts ont élé fournis
récemment devant la Société des Naval Architects
de New-York. L'auteur du mémoire lu devant cette
Société est M. G. T. Dalison. Il affirme que les
données sur lesqueiles il s'appuie correspondent
exactement à celles d'un moteur à combustion
interne qui est actuellement en construction pour
une grande puissance maritime. Il s'est servi de
ces données pour établir des comparaisons fort
intéressantes entre l'application de la puissance
motrice par moleur à combustion et la puissance
motrice classique fournie par une machine à
vapeur. Le bateau où les deux installations sont
supposées exister est un contre-torpilleur américain
réellement existant et construit en 1900, le Paul
Jones. Ce bateau n’est pas une toute petite unité :
il à 76,19 m de long pour 7,16 m de large, et son
tirant d’eau est de 2,13 m pour un déplacement de
410) tonnes en plein armement.
Ce torpilleur est actuellement doté de machines
à vapeur du type alternatif, bien entendu à triple
expansion et à quatre cylindres verticaux. Chacune
des machines peut développer environ 4 000 che-
vaux; elles sont alimentées de vapeur par quatre
chaudières Thornycroft à tubes d’eau. Dans la
combinaison avec moteurs tonnants, telle que l'a
étudiée M. Dalison, il sagirait de monter d'abord
deux moteurs à huit cylindres chacun, fonctionnant
suivant le cycle à deux temps du type Nuremberg.
Les moteurs, installés dans le compartiment actuel
avant des machines, comprendraient chacun un
arbre de couche latéral et une hélice latérale elle-
mème. Un troisième moteur commanderait l'arbre
N° 13435
central, si bien que le navire serait alors à trois
hélices. Les réservoirs de pétrole seraient placés le
long des flancs des chambres des machines. Chaque
cylindre aurait un diamètre de 467 millimètres et
490 millimètres d’alésage; on compte que chaque
engin développerait une puissance de 2 500 chevaux
au frein, à la vitesse de 350 tours par minute. Disons
tout de suite que cette machinerie à moteur tonnant
occuperait environ 42 mètres de moins, dans la
Jongueur du bateau, que ne le fait l'installation
à vapeur actuelle. On a d’ailleurs la possibilité de
n’employer que l’hélice centrale et le moteur cen-
tral quand on voudrait marcher à vitesse de croi-
sière, C'est-à-dire à une allure de 16 nœuds, ce qui
entrainerait des économies précieuses.
C'est un des principaux résultats de la compa-
raison qui a été faite par M. Dalison entre l’instal-
lation à vapeur et l'installation à moteur tonnant.
La machinerie à vapeur, qui correspond à une
puissance indiquée de 7 700 chevaux, représente un
poids de 203 100 kilogrammes; au contraire, avec
les 8300 chevaux indiqués et les 7200 chevaux à
l'arbre de l'installation motrice à moteur tonnant,
ce poids ne dépasserait guère 148 000 kilogrammes.
Cela correspond donc, dans ce dernier cas, à moins
de 20 kilogrammes par cheval au lieu de 29 kilo-
grammes quand on recourt à la machinerie à
vapeur. À une allure de croisière de 16 nœuds, la
COSMOS 95
consommation de combustible par cheval-vapeur-
heure est de 230 grammes de pétrole, tandis qu’elle
est de 14360 grammes de charbon, ce qui donne
dans le premier cas un rayon de croisière de
10 000 milles marins, au lieu de 1 700 avec la ma-
chinerie actuelle. Si l’on veut marcher à une
allure de 28 nœuds, comme les consommations sont
respectivement de 225 grammes et de 4 060 grammes,
toujours par cheval-vapeur-heure, on arrive à ce
que le rayon de croisière est de 2 950 milles dans
le premier cas et 630 seulement dans le second.
Nous pouvons ajouter à cela que, avec la machi-
nerie actuelle, il faut 54 hommes dans les chambres
de chauffe et de machines, tandis qu’il wen fau-
drait que 24 avec la machinerie à moteurs tonnants;
cela se traduit par une économie de plus de
30 pour 100 sur la dépense en personnel.
On devrait naturellement prévoir des installa-
tions auxiliaires pour le chauffage, l'éclairage, la
manœuvre desancres, lecharbonnage, la manœuvre
du gouvernail; on pourrait pour cela recourir à
une petite chaudière à vapeur, dite petit-cheval,
utilisant pour son chauffage du combustible liquide,
ou, au contraire, avoir des moteurs électriques
commandant ces machines auxiliaires, moteurs
électriques qui seraient actionnés par deux petits
moteurs tonnants de 100 chevaux chacun.
D. B.
Les peintures et la stratigraphie paléolithiques en Espagne.
Tout le monde connait les peintures paléoli-
thiques, c’est-à-dire de l’époque de la pierre taillée,
qui, pendant les dernières trente années, ont été
découvertes sur les parois intérieures des grottes
françaises, réparties dans deux régions: la Dor-
dogne et le versant septentrional des Pyrénées (1).
Sur le versant méridional et espagnol des Pyrénées,
la région de Santander a également livré quelques
grottes ornées, surtout celle d’Altamira (2), qui fut
la première connue et dont les peintures poly-
chromes représentent l'apogée de lart quater-
naire.
Les lecteurs de cette revue connaissent les mani-
festations artistiques d'Altamira. Cequi, par contre,
est très peu connu du public en général, ce sont
les peintures se trouvant, non à l'intérieur, mais à
ciel ouvert, qui ont été constatées ces dernières
années sur le sol de la péninsule ibérique, et qui,
jusqu’à présent, n’ont été trouvées dans aucun
autre pays. Cette nouvelle catégorie de peintures
(i) Voir mon article: l'Art pariétal des grottes
pyrénéennes (Cosmos, t. LXIV, p. 300, 1911).
(2, Les lecteurs au courant de l'allemand pourront
consulter mon opuscule : Altamira, avec 10 planches
dont 5 en couleurs. Godesberg, 1910 (1,25 fr).
est d'autant plus intéressante qu'elle nous fournit
les premières représentations humaines dignes de
ce nom — fait très remarquable, — car les dessins
figurant des hommes, relevés jusqu'ici dans les
grottes, ue sont que de grotesques et misérables
caricatures de la forme humaine.
I. — Ces peintures pariétales à ciel ouvert se ren-
contrent surtout dans l'Espagne orientale. Elles
sont exécutées sur des rochers situés au-dessus des
vallées et représentent, de même que l'art pariélal
des cavernes, des animaux ayant servi de nourri-
ture aux hommes primitifs. Ce sont principalement
des cerfs peints en couleur rouge, comme en a
livré Cogul dans le bassin inférieur de l'Ebre (fiz. 1,
cerf entouré de biches, 75 centimètres de longueur);
puis on a trouvé au mème endroit des bo'nfs sau-
vages et des bouquetins (fig. 2, 80 centimètres de
longueur), et un beau bouquetin peint en noir
(fig. 4, 20 centimètres de longueur). A Alpera, à
mi-chemin entre Valencia et Alicante, on a décou-
vert récemment 160 figures, dont 70 hommes,
30 chèvres et bouquetins, 26 cerfs, 7
4 bœufs, 4 élan et 4 cheval. Ces hommes d'Alpera
sont peints en couleur rouge foncé et représentent
des chasseurs nus portant quelquefois des orne-
cauides,
96 COSMOS
ments sur la tète et des espèces d'anneaux aux
jambes. 16 de ces hommes tirent de l'arc sur
des animaux (des cerfs) (fig. #4, 63 centimètres de
longueur), d’autres portent leurs arcs sous le bras
(fig. 5). Des peintures de Cogul (fig. 6) donnent
même une idée de ce que devait être le costume des
femmes de l’époque paléolithique, dont les seins
pendants, la tête (avec capuchon?) et les jambes
F1G. 1. — CERF ET BICHES PKINTS EN ROUGE.
Cogul, bassin inférieur de l'Ebre.
figurées détachées du tronc, sont caractéristiques.
Selon l'abbé Breuil, les peintures d’Alpera et de
Cogul remontent à l'époque magdalénienne et sont
probablement un peu plus récentes que les fresques
polychromes d’Altamira.
Appartiennent à l'époque azilienne qui forme la
transition du paléo- au néolithique les figures
schématiques découvertes dans les régions méri-
dionales de l'Espagne (Andalousie et Murcie)
F10.2. - BŒUrS SAUVAGES ET BOUQUETINS PEIN1S EN ROUGE
Cogul.
(fig. 7, de Fuencaliente, et fig. 8, de Cueva de Los
Letteros, peintes en rouge). Ces étranges stylisa-
tions du corps humain en forme de triangles et
de croix ont un certain rapport avec les figures
relevées sur les galets coloriés de la grotte du Mas
d'Azil (Ariège) qui a donné son nom à l'époque
azilienne. La schématisation et le symbolisme sont
caracléristiques de l'époque néolithique.
25 JUILLET 41942
II. — La stratigraphie, c'est-à-dire description
des niveaux quaternaires, a fait de grands progrès
en Espagne, dus surtout aux fouilles de l'Institut
de paléontologie humaine, opérées ces dernières
années dans trois grottes de la province de San-
tander dont il a déjà été question au début de cet
article.
Dans la grotte de Valle, on a découvert trois
couches archéologiques, dont la plus élevée conte-
F1G. 3. — BOUQUETIN PRINT EN NOIR.
Cogul.
nait beaucoup de cerfs, avec le cheval, le chamois,
le chevreuil, le bæuf et le sanglier, et de nombreux
vestiges de l’industrie azilienne, qui, jusqu'à pré-
sent, était entièrement inconnue en Espagne. Dans
ce niveau, on a trouvé huit beaux harpons plats en
bois de cerf, spéciaux à cette époque. En dessous de
CL EE CE me
QC A SKR 50
Les er. CAD
AR DS LRO A Er
CR) LA) fÀ Los f
F1G. #. — CHASSEURS TIRANT DE L’ARC SUR DES CERFS.
Alpera.
cette assise, on a relevé un niveau magdalénien
avec la même faune que la précédente, sauf le
sanglier, et avec des traces du renne.
Hornos de la Peña a fourni de bas en haut des
couches à industries moustérienne, aurignacienne,
solutréenne (silex taillés en feuille de laurier)
el magdalénienne ; dans la dernière, on a
recucilli des bois de cervidés décorés de motifs
N° 1435
analogues à ceux de Lourdes et Arudy (Basses-
Pyrénées). e
Enfin, la grotte de Castillo (Puente Viesgo),
fouillée par l'abbé Breuil et le D" Obermaier, a
donné de fort intéressants résullats, car on y
a constaté dix niveaux archéologiques, allant du
F1G. 5. — CHASSEURS A L’ARC.
Alpera.
moustérien au néolithique. Recouvert d’une épaisse
couche stalagmilique, un niveau azilien a livré des
harpons plats, pareils à ceux de Valle. L’assise
du magdalénien supérieur sous-jacente a fourni
de beaux harpons et vingt sagaies en bois de cerf.
Au-dessous de cetle couche venait une énorme
assise de magdalénien ancien, contenant des
quantités immenses d’ossements de cerf, cheval,
bison, chamois, et beaucoup d'os travaillés et des
Aa Aa
F1G. 6. — FEMMES
DE L'ÉPOQUE PALÉOLITHIQUE.
Cogul.
gravures sur os figurant des biches, pareilles
à celles d’Altamira.
En fouillant 5 mètres au-dessous de ce niveau,
COSMOS
97
on a traversé successivement un foyer solutréen
(outillage taillé en feuille de laurier); trois niveaux
aurignaciens et deux moustériens, séparés les uns
des autres par des couches d'argile. Dans les niveaux
les plus bas, on a trouvé plusieurs molaires de
rhinocéros avec beaucoup d'ossements de l'ours
des cavernes.
Quant au qualernaire ancien, il est également
fort bien représenté en Espagne dans la station de
Torralba, située sur la ligne de Madrid à Saragosse.
On y a mis à jour des ossements d’£/ephas meri-
dionalis, le plus ancien des éléphants, dont un
squelette presque complet et une douzaine de belles
défenses, longues de 3 mètres, ont été recueillis.
Dans le même niveau à Æ. meridionalis, on a
découvert des haches en silex, grossièrement
taillées, du type de celles de Chelles. Ces très
importantes trouvailles ont été déposées au Musée
de Madrid. |
Il est fort intéressant de remarquer combien la
stratigraphie quaternaire de l'Espagne, avec ses
faunes et industries caractéristiques, concorde
avec celle de la France et d'autres pays.
Ainsi que l’on voit, l'Espagne, aussi bien que la
France, a été habitée à une époque très ancienne
par les ancètres de notre race. Ils y ont laissé des
vestiges palpables de leur existence, sous la forme
non seulement de leurs industries, mais même de
leur art, qui présentent des ressemblances frap-
F16. 7. — PERSONNAGES HUMAINS STYLISÉS.
Fuencaliente.
F1G. 8. — PERSONNAGES HUMAINS STYLISÉS.
Cueva de los Letteros.
pantes avec les manifestations analogues de
Phomme paléolithique sur le sol de la Franee.
AD. STIEGELMANN.
98 COSMOS
25 JUILLET 1912
Le ciment armé dans la protection des côtes et rivages.
Les grands progrès des constructions en ciment
armé devaient engager les ingénieurs à tenter
l'emploi de ce matériau pour la protection des
rivages. Comme toutefois les revêtements en ciment
ne résistaient pas à l'action du froid ou d'une
grande chaleur, les tentatives jusqu’ici faites
n’avaient guère de lendemain.
Dans les pays qui, comme la Hollande, ont des
côtes étendues à défendre contre l’invasion de la
mer, ce problème prend évidemment une impor-
tance énorme. Aussi un ingénieur hollandais,
M. de Muralt, lui a-t-il donné une attention parti-
culière ; son nouveau procédé pour faire les revê-
tements et les digues en ciment, employé avec
d'excellents résultats dans son pays, vient d’être
adopté même à l'étranger.
Abstraction faite de leur grande simplicité et de
leur coût peu élevé, les revêtements de Muralt se
distinguent par une résistance mécanique remar-
quable. Etant subdivisés en un grand nombre de
TALUS À REVÊTEMENT EN BÉTON ARMÉ, A LANGENDJIK (ILE DE SCHOUWEN).
petites sections, ils ne sont aucunement affectés
par les déplacements du sol dus à la chaleur ou au
froid. Les plaques constituant les revêtements sont
maintenues en place par un cadre de bois. Le
pilonnage du ciment se fait sur ces fondations.
Les revétements de Muralt se font d'après le
procédé suivant : après avoir aplani le terrain, on
y installe un cadre en bois servant de moule au
ciment. L'armature des plaques est constituée par
du métal déployé.
Les poutres longitudinales du cadre servant de
moule sont dentelées de facon à former des marches
d'escalier. On remplit de béton successivement
chacune de ces marches, en commençant par le
bas, et, après l'avoir aplanie, on la recouvre d’une
planche.
Lorsqu'on travaille au sec, on peut retirer le
moule peu de minutes après le bétonnage. Lors-
qu'au contraire l'installation se trouve au bord de
la mer, où la marée haute risquerait d'inonder Îles
plaques, il convient d'attendre vingt-quatre heures
avant de dégager le moule. Chaque plaque de
ciment à 7,5 à 12,5 cm d'épaisseur.
Après avoir préparé et fait durcir plusieurs
plaques, on creuse autour d'elles des fosses de 15
à 20 centimètres de profondeur, où l’on insère des
barres de fer et quelquefois aussi du métal déployé
pour servir d’armature aux poutres en ciment.
No 1435
Comme l’armalure de toutes ces poutres se tient,
le cadre ainsi constitué forme un ensemble indépen-
dant des plaques. Ces dernières sont par conséquent
séparées l’une de l'autre et du cadre. Grâce à la
solidarité de l’armature des poutres, les plaques
conservent leur position, tandis qu’en relevant un
point du cadre, on peut déplacer toutes les poutres
du système. Ces poutres comportent du reste, à
environ 3 mètres d'intervalle, des joints de dilata-
tion pour le libre jeu des pièces sous l’action de la
chaleur et du froid.
Ce procédé a été employé avec succès pour le
COSMOS’ 99
reyètement des digues, dunes et talus de rivage,
ainsi que pour la construction des digues et des
mòles. Il s'applique aussi avec avantage à la suré-
lévation des digues.
Une digue au voisinage de Zierikzee, en Hollande,
ayant par exemple cédé à l'impulsion des flots,
qui avaient enlevé plusieurs parties du talus du
côté de la terre, il fallait la surélever. Or, comme
sa crête n'était que d'un mètre de largeur, il
s agissait d’abord de l’élargir du côté de la mer ou
de la terre. Cet élargissement, fait du côté de la
mer, eût été très coûteux, puisqu’après avoir enlevé
SURÉLÉVATION D’UNE DIGUE, PRÈS DE BROUWERSHAVEN (ILE DE SCHOUWEN), AU MOYEN DU CIMENT ARMÉ.
une couche de basalte on aurait dû changer de
place le sentier couvert de gravier et procéder
à l’expropriation des terrains. C’est pourquoi l’on
préféra une construction en ciment armé sur la
crête et à côté d'elle. Cette surélévation se compose
d’un système de plaques verticales entre lesquelles
se trouvent des poutres intermédiaires en ciment
armé. La partie verticale du barrage repose sur
une plaque en partie horizontale, mais qui, du côté
de la mer, épouse l’inclinaison du talus.
Cette construction en ciment présente sur les
autres projets l’avantage d'une économie d'environ
20 pour 100, mais qui, dans d’autres cas, pourra
même être plus considérable.
Cette mème méthode se prête à la construction
des mòles en ciment armé. Le premier projet d'un
môle pareil a été réalisé lors de la surélévation
d’un môle existant, le Ossenhoofd (Tête de bœuf),
à la côte septentrionale de lile de Schouwen, près
de Brouwershaven, dont une partie avait été
endommagée lors d'une tempête; comme le bar-
rage avait été abaissé par les travaux de réparation,
le mòle était de plus en plus compromis. Après
avoir voulu le surélever en basalte, on ne tarda pas
à se convaincre que l'emploi du ciment armé per-
meéttrait de réaliser une économie de 50 pour 100
et donnerait une plus grande résistance.
Dr A. GRADENWITZ,
100
COSMOS
25 JUILLET 1912
La thérapeutique chirurgicale de la phtisie.
VII Congrès international de la tuberculose.
La médecine et la chirurgie, jadis complètement
séparées l’une de l'autre, tendent aujourd’hui de
plus en plus à s'unir sur le terrain thérapeutique.
On ne peut désormais concevoir un bon chirurgien
qui ne soit, en même lemps qu'un habile opérateur,
un parfait clinicien, rompu aux subtils raisonne-
ments de la clinique des maladies internes; de
même, il est souvent impossible au médecin de ne
pas recourir au bistouri de son collègue, le chirur-
gien, lorsque l'indication pour une intervention
chirurgicale se présente au cours de nimporte quelle
maladie interne.
L'appendicite, par exemple, après avoir été dia-
gnostiquée par le médecin, ne peut être guérie
radicalement sans danger de rechute que par le
chirurgien. Il en est de mème pour le cancer de
l'estomac et de l'intestin, pour les tumeurs céré-
brales, pour nombre de péritonites et de pleurésies
purulentes, etc. |
La tuberculose du poumon, malgré les difficultés
qui s'opposent à une intervention sanglante sur les
organes thoraciques, n’est plus, depuis quelques
années, de compétence exclusivement médicale.
Nous dirons mûme que, malgré quelques échecs:
regrettables, la thérapeutique chirurgicale de la
phtisie, dont il a été parlé au dernier Congrès de
la tuberculose à Rome, est celle qui captive le plus,
avec la sérothérapie et la tuberculinothérapie,
l’attention du monde médical. Nous verrons dans
cette note comment la chirurgie du poumon tuber-
culeux a pu être simplifiée au moyen de la méthode
du pneumothorax artificiel, largement appliquée
par M. Forlanini. |
On sait que les bacilles de Koch, introduits dans
l'organisme, se localisent avec une singulière fré-
quence au sommet du poumon. C'est là que certains
poisons bacillaires, Îcs poisons à action locale,
agissent sur les tissus en provoquant le développe-
ment des tubercules, les processus de caséification,
de ramollissement et de sclérose dans une portion
généralement limitée du poumon, devenue le siège
d'un « foyer tuberculeux circonserit initial ». En
même temps, d'autres poisons tuberculaires, les
toxines diffusibles, se répandent du foyer initial
dans tout l'organisme, sur lequel ils exercent len-
tement, progressivement, fatalement leur influence
délétère.
Infection localisée, empoisonnement général: tel
est, synthéètiquement, l'aboutissant de toute infec-
tion tuberculaire chronique.
Il était donc logique de se deinander si l’on ne
pourrait essayer d'extirper complètement le foyer
tuberculeux initial, ce qui constituerait la cure la
plus radicale de la tuberculose pulmonaire, de
même que l'extirpation du rein malade représente
l'opération de choix pour la cure chirurgicale et
radicale de ja tuberculose rénale. Aussi, plusieurs
spécialistes ont-ils conseillé ou pratiqué eux-mêmes
sur des tuberculeux l'opération de la pneumectomie,
c'est-à-dire la résection, l’extirpation du foyer
tuberculeux, de la même façon qu'on extirpe une
tumeur maligne.
Les résultats cependant, hâtons-nous de le dire,
n'ont pas été encourageants. Quoique MM. Tuffier
et Martin se déclarent favorables à de plus fré-
quents essais, il est indéniable que l'opération de
la pneumectomie n’est pas chose simple et sans
danger. On ne saurait la conseiller sans hésitation
à des malades — les seuls vraiment bénéficiables du
traitement, — lesquels, à cause du peu d'étendue
de leurs lésions, sont susceptibles de guérison au
moyen d’une simple cure hygiénique et diététique.
En outre, malgré le secours de la radioscopie, qui
permet de scruter l'état des parties les plus pro-
fondes du poumon, on ne peut jamais être sûr
d’avoirextirpé tous les tissus contenant des bacilles.
C’est pourquoi, malgré certains courants optimistes,
nous hésitons à croire à l'avenir d’une méthode
curative qui, théoriquement rationnelle, offre, sur
le terrain pratique, trop de chances d'insuccès et
de dangers immédiats.
Il en est de même pour les interventions chirur-
gicales qui, sans exiger, comme la pneumectomie,
une véritable amputation de poumon, se proposent
la destruction in situ, soit par le fer, soit par le
feu, soit par les moyens chimiques, des foyers
tuberculeux. Ces opérations sont toujours dange-
reuses, soit à cause de la nature spéciale du tissu
pulmonaire, si riche en vaisseaux sanguins, soit
` à cause du danger de la dissémination des bacilles
tuberculeux dans le sang, durant les manœuvres
sanglantes indispensables pour atteindre les foyers
tuberculeux. On sait que les bacilles introduits en
grande quantité dans les vaisseaux sont transportés
par le courant sanguin, qui les dépose un peu par-
tout dans l'organisme: la tuberculose miliaire
aiguë, c'est-a-dire la tuberculose généralisée et
rapidement mortelle, est la fatale conséquence de
cette dissémination bacillaire.
On a essayé de traiter les cavernes du poumon
des phlisiques comme on traite n'importe quel
abcès, par l'incision, l'évacuation, le drainage. Les
résultats ont été tout à fait décourageants; ce qui
ne doit élonner personne, car les malades caver-
neux présentent loujours, en même temps que des
cavernes, des foyers tuberculeux en pleine activité,
N° 1435
que l'opération de la pneumotomie, c’est-à-dire l'in-
cision descavernes, ne peutmodifier en aucune façon.
Aussi, il n’y a pas lieu de s'étonner que de telles
interventions sanglantes sur le poumon tubercu-
leux n’aient guère intéressé les médecins réunis
à Rome pour le Congrès de la tuberculose; mais il
y a lieu de rappeler l'attention des lecteurs du
Cosmos sur le sympathique intérêt que ces mêmes
médecins ont témoigné à une nouvelle méthode de
traitement de la tuberculose qui, chirurgicale sous
certains rapports, respecte cependant l'intégrité du
tissu pulmonaire, pour n'agir sur lui que d’une
façon mécanique et continue au moyen de la com-
pression: la méthode du pneumothorax artificiel
de M. Forlanini, ou collapsothérapie.
Et d’abord, rappelons qu’en pathologie, onappelle
pneumothorax la pénétration accidentelle de l'air
atmosphérique dans l'espace virtuel existant nor-
malement entre la paroi thoracique et le poumon
et qui est tapissé dune membrane séreuse: la
plèvre. C’est un accident habituellement grave,
soit parce que le poumon, revenant à cause de son
élasticité sur lui-même, perd brusquement sa
capacité fonctionnelle, soit parce que la pénétra-
tion de germes microbiens dans la plèvre avec
l'air atmosphérique provoque facilement des com-
plications infectieuses.
Cependant, il y a des cas dans lesquels le pneu-
mothorax spontané, lorsqu'il se produit, par
exemple, à la suite d'une érosion pulmonaire met-
tant en communication une bronche avecla plèvre,
exerce, au contraire, une salutaire influence sur le
processus de tuberculose pulmonaire, à condition
que ce processus soit localisé du côté du pneumo-
thorax. Il s’agit là d’une observation déjà bien
ancienne. On cite, par exemple, le cas de certain
gentilhomme qui, frappé pendant un duel d’un
coup d'épée au côté, se trouva bientôt guéri, à la
suite du pneumothorax consécutif à la blessure, de
la phtisie dont il était atteint depuis longtemps.
C’est pourquoi l’idée est venue en 1882 au pro-
fesseur Forlanini (de Pavie) d'appliquer le pneu-
mothorax artificiel à la cure de la tuberculose
pulmonaire. Les travaux du savant italien n'ont
été cependant publiés qu'en 1894, lorsque déjà le
professeur Potain avait essayé de remplacer le
liquide pleural des pleurétiques tuberculeux par
de l’air stérilisé et de l'azote, pour laisser le pou-
mon malade dans le repos et l’inertie et favoriser
ensuite sa cicatrisation et sa guérison définitive.
Tel est aussi le but que s’est proposé M. Forla-
nini : obtenir le collapsus, c’est-à-dire la rétraction
élastique du poumon sur lui-même, et par consé-
quent faciliter la cicatrisation des cavernes pulmo-
naires, favoriser par le repos fonctionnel de l'or-
gane la guérison des foyers tuberculeux en acti-
vité, empêcher l’envahissement par les bacilles des
parties saines du poumon, prévenir les hémoptysies.
COSMOS
a 401
Le meilleur gaz à injecter dans la plèvre est
l'azote, gaz inerte, inoffensif, qui n’est résorbé que
lentement par la plèvre. M. Forlanini se sert pour
l'opération d’un tube en U dont les branches ver-
ticales sont dilatées et dont la branche horizontale
est mince et droite. Chacune des branches a une
capacité de 500 centimètres cubes. Une des branches
renferme de l’azote; l’autre contient de l’eau sté-
rilisée et est munie d’un manomètre. La branche
à azole est en communication par un tube de caout-
chouc avec l'aiguille à injection. La branche à eau
est reliée à une soufflerie, comme celle du thermo-
cautère.
Le D" Jeunet (d'Amiens) a réalisé un appareil
très simple pour pratiquer le pneumothorax artifi-
ciel. [] se sert de deux vieilles ampoules à sérum de
500 grammes qu'il réunit à leur parlie inférieure
par un tube de caoutchouc. Les extrémités supé-
rieures des ampoules s'adaptent lune à une souf-
flerie de thermocautère, lautre à un tube muni
d’une aiguille à injection.
Les détails de la technique du pneumothorax
artificiel intéresseraient médiocrement la plupart
des lecteurs du Cosmos. Quil nous suffise de dire
que la principale difficulté à surmonter est celle
de ne point blesser le poumon. C’est pourquoi
l'aiguille à injection doit être introduite avec pré-
caution dans un espace intercostal, pendant que le
gaz de l'appareil est maintenu sous une pression
faible, pour éviter qu'il ne sorte de l’aiguille, ne
s'infiltre dans les tissus et ne cause, en pénétrant
dans les veines, l’embolie gazeuse. Aussitôt que la
pointe de l'aiguille pénètre dans l’espace pleural,
où il y a, physiologiquement, une pression néga-
tive, la chute du manomètre indique le moment
d'augmenter la pression du gaz. Celui-ci pénètre
alors dans la plèvre, tandis que le poumon s’'affaisse,
se rétracte et cesse de fonctionner. On arrête
l'opération lorsqu'on a injecté 200-400 centimètres
cubes d'azote, sauf à la recommencer tous les deux
ou quatre jours, jusqu'à ce que l'écran radiosco-
pique révèle l’affaissement complet du poumon. Il
faut ensuite surveiller de très près le malade pour
éviter la disparition du gaz de la plèvre moyennant
le renouvellement plus ou moins fréquent de la
provision de gaz. La durée du traitement est tou-
jours longue. Il faut compter, dit M. Rénon, des
mois et même des années. Quelques-uns des opérés
de M. Forlanini gardent leur pneumothorax pen-
dant un temps presque indéfini.
Si le Congrès de la tuberculose à Rome s’est
vivement intéressé à la question de la thérapeu-
tique antituberculaire au moyen du pneumothorax
artificiel, c'est que la méthode de M. Forlanini
s'adresse non pas aux cas de tuberculose bénigne,
circonscrite, sans lésions destructives, qui gue-
rissent souvent sans aucune intervention médicale,
mais à des casde phtisie avancée, avec des cavernes
102...
pulmonaires et des foyers tuberculeux très étendus,
dont les produits toxiques ont déjà exercé une
action cachectisante sur l’organisme tout entier.
C'est aux malades habituellement voués à une fin
peu éloignée que M. Forlanini conseille particuliè-
rement le pneumothorax artificiel. Les résultats
sont des plus remarquables. Les signes physiques
des cavernes disparaissent complètement. La toux
augmente d’abord pour ne plus exister ou dimi-
nuer. L’expectoration se tarit d'une manière con-
sidérable. Les bacilles et les fibres élastiques ne
se voient plus dans les crachats. Ceux-ci sont mu-
queux et non purulents. L'hémoptysie disparait.
L'état général s'améliore. La fièvre tombe, les
forces reviennent, le poids augmente. Un grand
nombre de malades peuvent reprendre leur vie
ordinaire.
Une condition cependant s’impose pour le succès:
l’unilatéralité des lésions, car on conçoit facilement
que, lorsqu'il existe des cavernes bilatérales, au
repos fonctionnel d’un poumon correspond une
suractivité, un surmenage dangereux de l'autre
poumon. Cependant, en cas de lésions caverneuses
d'un còté avec des lésions limitées, légères et inac-
tives de l'autre, le traitement est encore possible.
Le pneumothorax artificiel dans la phtisie est
une des plus importantes nouveautés thérapeu-
tiques: elle a réconcilié les médecins spécialistes
de la tuberculose avec la cure chirurgicale de cette
maladie. Nous savions déjà qu'on est vivement
impressionné par la logique du traitement et par
les résultats notés de divers côtés dans l’applica-
tion de cette méthode, qui, selon M. Dumarest,
fait obtenir de véritables résurrections. Le Congrès
de la tuberculose a confirmé ces résultats surpre-
nants.
COSMOS
25 JUILLET 41912
M. Scharl a obtenu la guérison ou l'amélioration
de certains casde tuberculose trèsavancée.M.Franch
observe que la méthode est indiquée dans un
nombre limité de cas, mais il est persuadé de son
efficacité. M. Dumarest souhaite que le pneumo-
thorax artificiel soit plus largement appliqué dans
la thérapeutique de la tuberculose, malgré quelques
inconvénients signalés. M. Saugmann a montré
aux congressistes une fort intéressante collection
de radiographies, dont plusieurs témoignent de
l'efficacité de la cure Forlanini, même lorsqu'un
poumon est presque entièrement infiltré par le
processus tuberculeux. M. Oliveira de Botelho
a introduit en Espagne la méthode Forlanini, qu’il
définit, à la suite de ses expériences, une grande
conquête scientifique. M. Brauns est allé plus loin
dans son enthousiasme: il a crié bien fort en
pleine séance du Congrès: « Viva Forlanini! »
Nous n’avons qu’une expérience personnelle fort
limitée, quoique assez favorable, de la coflapsothé-
rapie de la tuberculose. Mais ce qui frappe parti-
culièrement notre attention, cest l'assentiment
presque unanime qu'a recueilli la méthode Forla-
nini au Congrès de Rome : l'importance du pneu-
mothorax artificiel avait échappé aux médecins
italiens — nemo propheta in patria — tandis
qu'elle a reçu un accueil chaleureux à l'étranger,
où il ne pouvait être question d’amour-propre
national.
Aussine peut-on qu'approuver la délibération prise
parle Vile Congrès international de la tuberculose,
d’après la proposition du professeur Saugmann,
de constituer un Comité international pour l’étude
scientifique du pneumothorax artificiel thérapeu-
tique.
D' P. Gocc1a.
NOTES PRATIQUES DE CHIMIE
par M. JULES GARÇON
A travers les applications de la chimie : LES FONCTIONS AZOTÉES; 4" LA FONCTION AZO. — LA CONDUITE
DE L'ÉCLAIRAGE AU GAZ. — SUR LES DENTIFRICES À L'EAU OXYGÉNÉE. — LA FABRICATION RATIONNELLE DES
CONFITURES ENVISAGÉE AU POINT DE VUE DU CHIMISTE. — LA LUTTE CONTRE LES MOUSTIQUES AU POINT DR VUE
DU CHIMISTE,
Les fonctions asotées: 41 fonction azo. — je
me bornerai à dire que la fonction azoïque, ou
abréviativement azo, est caractérisée par le grou-
pement fonctionnel — N — ou — N = N —. Les
composés azoiques ont pris une importance hors
ligne dans les industries tinctoriales. Un grand
nombre jouissent de la propriéié de teindre direc-
tement, en bain de sel, les fibres végétales. Un
grand nombre également peuvent être produits
directement sur la fibre, au grand avantage de
leur solidité. Un grand nombre, enfin, possèdent
la propriété de pouvoir être diazotés à nouveau et
de pouvoir s unir aux divers phénols, amines, etc.,
et à la variété innombrable de leurs dérivés, pour
donner à leur tour de nouveaux produits colorants,
dont plusieurs sont très précieux.
Quelques composes azoiques reçoivent une appli-
cation dans la fabrication des explosifs ou comme
agents thérapeutiques.
La conduite de l'éclairage au gaz. — On ne
peut trop insister sur les précautions à prendre,
N° 1535
dans l'éclairage au gaz, tant pour assurer l'hygiène
que pour maintenir l'économie. Voici les recom-
mandations que notre confrère, la Revue des Éclai-
rages, donne dans son numéro d’avril, pour le
réglage des becs à incandescence.
Un bec de gaz à incandescence ne fonctionne
bien et ne donne le maximum de lumière que
lorsque le manchon est bon comme forme et
comme qualité, et lorsque les verres sont clairs.
Il faut, d'autre part, que l’ajutage débite la quan-
tité de gaz juste — ni trop grande ni trop petite
— correspondant au manchon employé, que la
quantité d'air soit bien réglée, et que le bec soit
propre et en bon état.
Pour permettre de régler le débit du gaz, il est
bon de faire usage d’ajutages réglables, qui peuvent
toujours déterminer le débit du gaz, de telle sorte
que toute la masse du manchon soit incandes-
cente, sans que son sommet noircisse. Si ce der-
nier phénomène se produisait, ou si l’on consta-
tait une augmentation de la quantité de lumière
émise, lorsqu'on ferme le robinet en partie, cela
indiquerait que l'ajutage débite trop de gaz.
Lorsque le bec fait du bruit en brülant, lorsqu'il
a une tendance prononcée à refouler, ou lorsque
le manchon n'éclaire que par le bas, l'ajutage a,
au contraire, un débit trop faible.
L'ajutage et la toile métallique du bec doivent
être netltoyés par soufflage et par brossage, de
façon à les débarrasser de la poussière, des oxydes
et des insectes qui auraient pu y tomber.
Sur les dentifrices å l'eau oxygénée. — L'eau
oxygénée entre dans la composition de plusieurs
eaux dentifrices, par suite de son action blanchis-
sante sur les dents. Mais les dentifrices renferment
toujours une huile essentielle, et il y a lieu de se
demander quelles sont celles de ces essences qui
restent à l’abri de l’action oxydante de l'eau oxy-
génée. La maison Sachsse, de Leipzig, qui, avec la
maison Schimmel ou Fritzsche, tient pour l’Alle-
magne le premier rang dans la fabrication des par-
fums synthétiques, a fait cette étude, dont lApo-
theker Zeitung (p. 49 de 1912) nous offre l'exposé.
Les expériences ont été menées en opérant sur des
mélanges renfermant 40 grammes d’alcool à 900,
30 grammes d'eau, 25 grammes de peroxyde
d'hydrogène à 12 pour 100 et 5 centigrammes de
l'essence examinée, et d'autres mélanges iden-
tiques, sauf l’absence de peroxyde d'hydrogène. Ces
mélanges sont comparés au bout de deux mois.
Les expériences ont montré que l'eau oxygénée
altère, dans une mesure prononcée, le menthol,
le géraniol, l'essence de menthe poivrée, l’acétate
de menthyle et l’aldéhyde cinnamique, qu’elle
altèére dans une mesure restreinte l’eugénol, le
terpinéol, le carvacrol, les essences de géranium
et de girofle, enfin qu'elle est sans action sur l'eu-
COSMOS 103
calyptol, l'anéthol, le thymol, les essences d'euca-
lyptus, d'anis, de badiane, d'aiguilles de pin,
Pacétate de bornyle.
La fabrication rationnelle des confitures envi-
sagée au point de vue du chimiste. — Les con-
fitures se conserveront si l’on détruit tout germe
susceptible de causer quelque altération et si
l'on évite, au cours de leur fabrication et surtout
de leur mise en bocaux, d'introduire quelque
germe néfaste. Les personnes qui ne prennent
pas les précautions voulues arrivent à des résul-
tats plus ou moins satisfaisants en prolongeant la
cuisson et en forçant la dose de sucre. Mais si l’on
mène la préparation des confitures comme on pré-
pare des solutions aseptiques, par exemple celles
destinées aux injections hypodermiques, on obtient
des confitures qui se conservent indéfiniment,
même avec une dose limitée de sucre, même après
une cuisson relativement courte.
En prenant les précautions que je vais indiquer,
il suffit d'employer en sucre le quart du poids du
jus de fruits, et de donner un bouillon d'une
vingtaine de minutes.
La préparation des confitures aseptiques à con-
servation indéfinie nécessite la propreté la plus
minutieuse de la personne qui les prépare et des
vases qui les renferment. Tout objet mis en contact
avec le jus stérilisé par la cuisson doit étre éga-
lement stérilisé. En suivant ce principe, on est
assuré d’avoir des confitures à conservation indé-
finie; mais il faut pour cela que le principe soit
observé de la facon la plus absolue.
Voici les précautions à prendre dans la pratique
pour y arriver.
La personne qui prépare les confitures doit être
d'une propreté méticuleuse. Elle doit avoir les
mains nettes, savonnées et brossées sous les ongles
au moment mème; elle doit porter un long tablier
blanchi à neuf; e/le ne touchera ni aux pots ni au
papier; elle les maniera å laide d'une pince sté-
rilisée. Klle ne sera pas malade.
On disposera d'une bassine remplie d'eau tiède
et d'une bassine d’eau toujours bouillante. Les
vases, neltoyés de la façon la plus parfaite à l’eau
de cristaux, puis rincés à grande eau, sont mis
dans leau tiède, puis de là plongés dans l'eau
bouillante qui les stérilise. L'opérateur ne les reti-
rera pas directement, mais il se servira d'une
pince qui, entre chaque reprise de vase, sera de
son côté stérilisée dans l'eau bouillante.
Le vase stérilisé une fois retiré, on le remplit
aussitôt de la confiture. On prend celle-ci à l'aide
d’une louche stérilisée, elle aussi, à l'eau bouil-
lante. Le vase une fois rempli, on le recouvre
aussitôt d’une première feuille de papier, lui aussi
stérilisé. Pour cela, des feuilles de papier parche-
min, découpées à l'avance à la grandeur voulue,
10%
de façon à bien couvrir toute la confiture, sont
stérilisées dans une bassine d’eau toujours bouil-
lante, et. on les en retire au moyen de la pince sté-
rilisée, et on les dispose sur la confiture au moyen
de la même pince.
Ces précaulions prises pour mettre la confiture
à l’abri de toute contamination possible, on peut
recouvrir le vase d’une feuille de papier ordinaire
qu’il reste à ficeler.
La lutte contre les moustiques au point de vue
du chimiste. — L'an dernier, vers la mème époque,
ces notes de chimie ont préconisé contre les piqûres
de moustiques, pour calmer l'irritation causée par
la piqüre de ces mauvaises bestioles, l'emploi de la
teinture d'iode. Une étude développée des divers
moyens employés pour calmer cette irritation,
pour prévenir Ja piquüre, pour chasser les mous-
tiques, pour prévenir leur éclosion, a été publiée
par M. L.-0. Howard, chef du bureau d’entomo-
logie, à Washington; on en trouvera une traduc-
tion dans le Bulletin de l’Oflice de renseignements
agricoles de Paris.
Lun des moyens à employer pour calmer
les piqüres consisterait simplement à mouiller
l’extrémité d’un morceau de savon de toilette et
à frotter le siège de la piqüre avec ce morceau. On
sait qu'on a recommandé aussi, pour faire dispa-
raitre l’irritation, l’'ammoniaque, l'alcool, la tein-
ture d’iode ou l’application d'une surface chaude,
comme le verre d'une lampe.
COSMOS
95 JUILLET 1912
Pour éloignerles moustiques, l'odeur du camphre,
de l’essence de menthe, de l'essence de citronnelle,
les fumées de poudre de pyrèthre pure et fraiche
sont très efficaces.
Par exemple, on emploiera un mélange formé
de : essence de citronnelle 2, camphre 2, huile de
cèdre 4; avec un peu de vaseline ou de lanoline
qui retarde l’évaporation. On peut asperger les
moustiquaires de ce mélange.
Pour empêcher l’éclosion des moustiques, on ne
peut trop faire la guerre à tous les creux suscep-
tibles de conserver de l'eau. Une demi-bouteille
d'eau peut être le berceau de milliers de mous-
tiques.
Aussi surveillera-t-on avec grand soin, autour
des maisons, les pots, bouteilles, boites de
bois ou d’étain, les auges des basses-cours, l’auget
des meules à repasser; de mème, les urnes des
cimetières, les empreintes des pieds des animaux
sur la terre humide, les tessons de bouteilles pla-
cés sur les murailles, les pots à fleurs, les pots à
eau des chambres non occupées, les vieux puits,
les fosses d'aisances, les fontaines et bassins, etc.,
ainsi que les décharges publiques. Tous ces centres
possibles d'éclosion seront observés et recouverts
d'une couche légère de pétrole ordinaire. C'est
grâce à ce moyen facile et économique que les
Américains sont parvenus à restreindre et presque
à annihiler, à Cuba et à Panama, les ravages de la
fièvre jaune, qui, comme on le sait, est transmise
par la piqure d'un moustique.
Le relevage des épaves et des sous-marins.
Des catastrophes récentes ont montré quels sont
les dangers courus par les équipages des sous-
marins. La question du sauvetage est assurément
des plus difficiles à résoudre. Est-elle insoluble?
Récemment, le ministre de la Marine, par un
arrèté du 7 décembre 4910, ouvrait un concours
d’ « appareils de sauvetage d'équipages de sous-
marins ». Un prix de 100 000 francs, offert par un
généreux donateur, devait stimuler l'ingéniosité
des inventeurs. Plusieurs centaines de projets
répondirent à cel alléchant appel et furent soumis
à l'examen d'une Commission technique. Le prix,
cependant, n’a pas encore été décerné, N'y avait-il
donc point un seul projet intéressant dans la foule
des appareils imaginés? Il y en avait un au moins
qui méritait mieux que le simple rejet. et on verra
comment l'expérience l'a démontré de façon indis-
culable.
Posonsd'abordle problémet héorique aussisimple-
ment que possible, en le limitant au relevage d'une
épave. Pour arracher l'épave du fond, il faut
exercer sur elle une traction égale à son poids :
4° Cette traction peut être produite par des
chaines ou câbles, attachés à l'épave par des sca-
phandriers. Les chaines sont halées de l’extérieur
au moyen de treuils nécessairement établis sur
un navire, placé au-dessus de l’épave. Ce procédé,
simple en apparence, se heurte à des difficultés
pratiques insurmontables, quand on songe qu'il
s'agit, en relevant un sous-marin, de vaincre une
résistance supérieure à 300 tonnes. Il faut prévoir
des chaines extrèmement puissantes et par suite
extrèmement lourdes qui majorent de façon
fâcheuse les poids à soulever. Et comment égaliser
les tensions qu'il faut répartir entre plusieurs
points de l'épave? On doit remarquer, en outre,
que le navire chargé du relevage est soumis à des
oscillations brusques plus ou moins étendues pro-
venant des vagues de la mer, et qui déterminent
sur les chaines de relevage des efforts d'une telle
brutalité que souvent leur rupture s'ensuit.
2° En Allemagne et en France, on a construit
récemment des pontons ou docks flottants spéciale-
ment aménagés pour le relevage des épaves et
Ne 1435
des sous-marins. Ces appareils ont un très grand
volume et sont difficiles à déplacer et à remorquer,
avec une mer houleuse. Le dock peut être en partie
immergé en remplissant ses caisses à eau; on raidit
les amarres fixées sur l’épave, puis on vide les
caisses. On augmente les effets de soulèvement en
accomplissant l'opération à basse mer. Le ponton
fait fonction de flotteur et enlève avec lui l'épave.
Il est bon d'ajouter que le dock flottant, en raison
de son instabilité, sauf quand la mer est parfaite-
ment calme, n'est à l'abri d'aucune des critiques
que nous venons de formuler. Il laisse donc fort à
désirer, et on constate que, dans la pratique, il
donne lieu à bien des déboires.
3° On conçoit enfin la possibilité d'immerger un
flotteur ou des flotteurs multipliés autant que cela
estnécessaire, et de les attacher directement à l'épave
à soulever. Leur pouvoir ascensionnel total produit
le résultat attendu. On a proposé jadis dans cet
ordre d'idées d’immerger des cylindres creux
accompagnés chacun d’une masse pesante suffisante
pour produire l’enfoncement. Dès que le cylindre
est fixé à l'épave, on en détache ła masse pesante,
que l’on remonte pour s’en servir à nouveau. La
E
RARES
XP
og ) i G: i 4
e
Q
FIG. 1.
pression exercée par leau sur la surface du réci-
pient est ici un sérieux inconvénient, car elle oblige
à donner aux parois métalliques de l'appareil une
épaisseur qui l'alourdit inutilement.
Un système qui a le mérite d’une très grande
simplicité consiste à descendre au fond de la mer
un ballon formé d’une étoffe ou toile souple et
imperméable, très maniable, facile à attacher à
l'épave tandis qu’il est vide et que l'on gonfle alors
d’air ou de gaz. Ce système consiste donc à consti-
tuer le flotteur après sa mise en place.
Personne n'ignore l'expérience classique du
ludion, qui a une force ascensionnelle égale à la
différence entre son propre poids et le poids du
volume d’eau correspondant au volume de Pair
plus ou moins comprimé dans l’ampoule de verre.
C’est l'application directe du principe d’Archimède,
en vertu duquel tout corps plongé dans un liquide
est soumis à une poussée verticale de bas en haut
équivalente au poids du liquide déplacé. On voit
comment par cee moyen on peut aisément déve-
lopper des forces ascensionnelles considérables,
puisqu'un ballon rempli d'air est capable de sou-
lever dans l’eau environ 4000 kilogrammes par
mètre eube d’air contenu dans son enveloppe.
COSMOS
105
On trouve l'application de ces principes dans les
ingénieux dispositifs imaginés par MM. Amand
Viau et Louis Pouty de Nantes et qui ont fait
Pobjet de leur projet soumis (le 28 février 49414) au
concours ouvert par le ministère de la Marine (4).
Ces dispositifs représentés dans les figures ci-jointes
sont faciles à comprendre.
L'appareil fondamental (fig. 1) est constitué par
une enveloppe d’un tissu souple et imperméable,
qui, gonflée, prend la forme d’un sac allongé ou
ballon cylindrique. On conçoit immédiatement
l’avantage de la forme cylindrique sur la forme
sphérique, car elle permet de donner au ballon un
grand volume avec un faible diamètre vertical,
évidemment préférable pour le relèvement de
l'épave aussi près que possible de la surface de
l’eau.
L'enveloppe du ballon est maintenue par des
sangles ou des colliers sur une poutre longitudi-
nale, métallique ou non, qui assure la rigidité. Un
filet sert à conserver la forme et à consolider l’en-
veloppe. Cette enveloppe est, en effet, soumise à
des efforts qu'il est intéressant d'analyser. L'air
envoyé de l’extérieur pénètre dans le ballon par le
F16. 3.
tuyau T dès que sa pression égale celle de l'eau
ambiante. Il n’en faudrait cependant pas conclure
que toutes les parties de l'enveloppe sont en équi-
(1) Les dessins ou modèles des appareils avaient été
à une date antérieure régulièrement déposés au Con-
seil des prud'hommes par MM. Viau et Pouty, confor-
mément à la loi du 14 juillet 1909.
106
libre entre les poussées intérieure de l'air et exté-
rieure de l’eau.
Le ballon a une certaine hauteur verticale; il
s'ensuit que la pression exercée par l’eau est plus
forte sur la partie inférieure du ballon. L'accrois-
sement de pression est précisément égal au poids
d’une colonne d’eau qui a pour hauteur la hauteur
de ce ballon. Il est évident que le régime de pres-
sion est uniforme dans toute la masse d'air con-
tenue dans l'enveloppe. Il en résulte que la partie
supérieure de l'enveloppe du ballon subit une
poussée égale à celle du ballon supposé plein d’eau,
résultat que l’on peut d’ailleurs prévoir en obser-
vant tout simplement que le ballon, quelle que
soit la profondeur de l'immersion, a une force
ascensionnelle, en vertu du principe d’Archimède,
égale au poids de l’eau déplacée.
Une manche M assure la sortie du trop-plein
d'air. Elle empèche la compression de l'air dans le
ballon de s'élever au-dessus de la pression néces-
saire pour équilibrer la pression extérieure de l’eau,
B b
Pie | | y
F1G. 4.
compression qui pourrait déterminer l’éclatement.
Cet échappement d'air doit, d’ailleurs, être libre et
automatique, puisqu'à mesure que le relevage
s'opère, la pression de lair diminue dans le ballon
et par suite son volume augmente.
Pour l'application, on immerge le nombre néces-
saire d'appareils dégonflés, que des scaphandriers
atlachent à l'épave ou au sous-marin à retirer au
moyen de crochets et des anneaux A, C, etc. Des
pompes foulantes à air raccordées au tuyau T
remplissent de l'extérieur les ballons, qui soulèvent
l'épave. Ce soulèvement est immédiatement indiqué
au manomètre, qui marque un affaiblissement de
la pression de l’air refoulé. L’épave, soutenue entre
deux eaux, est remorquée jusqu’au port, sans que
l'on ait à craindre comme avec le dock flottant des
ruptures d'amarre, chaque ballon faisant fonction
d'une attache mobile.
Si l’on craint une déchirure de ballon, il est
facile de parer à ce danger en sectionnant le ballon
cylindrique par plusieurs cloisons verticales, cha-
COSMOS
25 JUILLET 1912
cune des sections étant remplie d'air par une déri
vation du tube T.
La figure 2 montre le mode d'emploi des ballons
gonflés d’air pour le soulèvement d’un navire échoué
sur une roche.
MM. Viau et Pouty ont adapté leur système au
sauvetage des sous-marins, qu’ils avaient particu-
lièrement en vue, en permettant au sous-marin de
FıG. 5.
remonter de lui-mème à la surface et de surnager
sans aucune aide extérieure.
Dans ce cas, des ballonnets sont fixés à demeure
dans toute leur longueur à des parties solides du
navire qui remplacent la quille rigide. Les ballon-
nets sont disposés symétriquement, plusieurs sur
chaque flanc, de façon à pouvoir en toutes circon-
. stances conserver ou rétablir l'équilibre. L’enve-
loppe de chaque ballonnet est pliée dans un
compartiment B (fig. 3) ménagé à l'intérieur de
chacun des bords du navire. Ce compartiment
fermé par un panneau se confond avec le pont ou
les plats-bords de façon à n'offrir aucune résistance
à la marche. Un levier L permet avec une seule
manœuvre de produire le dégagement du panneau
mobile et du ballonnet et en même temps l’admis-
sion d'air comprimé venant des réservoirs d'air
E
s i
—}
R
E
FIG. 6.
comprimé du sous-marin. Les ballonnets sont ainsi
très rapidement gonflés pour le renflouage. Une
fois gonflés, ils prennent les positions indiquées
fig. 4 et 5. Comme la remontée peut ne pas s’opérer
jusqu'à la surface, le sous-marin y aspire l'air
d'alimentation au moyen d’une bouée porte-tuyau
d'une construction spéciale (fig. 6). Le flotteur S
soulève le tuyau au-dessus de la surface tandis que
N° 1435
le contrepoids maintient la position verticale. Un
second flotteur D assure la fermeture de l’extré-
mité du tuyau en O tant que la bouée est immergée
et par contre l'ouverture de ce tuyau dès qu’elle
émerge.
Pour un sous-marin de 400 tonnes, l’effort de
relevage est d'environ 300 tonnes. Six ballonnets
sont suffisants; leur multiplicité a pour avantage
de diviser l’effort, de maintenir l'équilibre et la
stabilité, de donner une plus grande sécurité, tous
les appareils ne pouvant être mis en même temps
hors de service. Les six compartiments ont chacun
une longueur de 10 mètres sur 60 centimètres de
largeur et 15 centimètres de profondeur. Le volume
des appareils pliés serait de 5 mètres cubes environ,
du poids total de 3 tonnes, soit une surcharge de
moins d’un centième pour le navire.
On peut même se dispenser de l'emploi d’une
pompe de compression d'air. Au lieu de remplir
les ballons d’air comprimé, on peut les remplir
d’un gaz produit par une combinaison chimique de
matières appropriées mises en contact avec l’eau :
carbure de calcium, bicarbonate de soude et acide
tartrique. Les agents chimiques devant engendrer
le gaz sont contenus dans un récipient fermé, par
exemple, dans une boîte, munie intérieurement d'un
ressort tendu dont l'ouverture est déterminée
à volonté du dehors au moyen d'un électro-aimant
actionné par un courant électrique amené par un
câble à double fil. La pression du gaz par ce pro-
cédé s’élève automatiquement, ce qui rend possible
le relevage d’épaves accrochées avec des ancres
à des profondeurs très supérieures aux trente et
COSMOS
107
quelques mètres que les scaphandriers peuvent
atteindre. L’effort vertical exercé sur l’enveloppe
du ballonnet ne change pas avec l'augmentation
des pressions opposées de l’eau et du gaz.
Un nouvel appareil de M. Piatti dal Pozzo, récem-
ment expérimenté aux bassins de La Pallice, à La
Rochelle, et qui permet, avec l’aide de bras méca-
niques, de faire des accrochages à de grandes pro-
fondeurs, faciliterait l'emploi des appareils de
MM. Viau et Pouty.
Tout récemment, dans les premiers jours d’avril
de la présente année, une série d'essais officiels
(les derniers sous la direction de M. Simonot,
ingénieur en chef) pour le relevage des épaves ont
été effectués à Cherbourg, à la demande de M. Sur-
couf, directeur d'une Société de construction d'aé-
rostats. Grâce à l’emploi de ballons immergés et
ensuite gonflés d'air comprimé, des épaves figurées
par une vieille chaudière chargée de 25 tonnes de
gueuses ont été relevées sans peine à des profon-
deurs de 10 et 30 mètres et remorquées. Le ministre
de la Marine a été si favorablement impres-
sionné par les résultats obtenus, qu’il aurait décidé
d'acquérir au nom de l'Etat les droits au brevet
de M. Surcouf.
jusqu’à preuve du contraire, MM. Viau et Pouty
semblent avoir des droits incontestables à faire
valoir pour l'antériorité de leur invention par le
seul fait du dépòt de leur dossier au concours du
ministère de la Marine. Il est facile d'éclaircir
cette question avec des documents et des dates.
NORBERT LALLIÉ.
Locéapośraphie pendaņt ľantiquité
Vous savez que nous sommes censés parler océano-
graphie. Il y en a pourtant un peu dans Homère.
La terre est un large disque aux bords relevés
soulenant la voûte du xořoçs (creux), c'est-à-dire
du ciel; l’océan est un fleuve à courants rapides et
à limites inconnues, son nom vient de l’hébreu 0g,
qui exprime un cercle, une circonférence, d’où
wxsavés que, parait-il, les Grecs prononçaient
oghen: la mer Égée et ses îles sont au centre du
disque. On dirige alors les vaisseaux par les con-
stellations; on oriente la voilure pour profiter des
vents demi-favorables; Ménélas met cinq jours
pour se rendre de Crète en Égypte, ce qui prouve
qu’on n'était effrayé ni des longues traversées ni
de la haute mer.
Que n'ai-je plus de temps pour suivre avec vous
pas à pas le développement très lent, quoique très
réel, de la science des phénomènes de la mer. Petit
(1) Suite, voir p. 77.
à petit on les remarque, et, ce qui est spécial au
génie grec, on les explique par l’anthropomor-
phisme. Elle ouvre ses grandes outres et les vents
soufllent, Neptune en courroux frappe les vagues
de son trident et soulève ainsi les tempêtes, Vénus
nait de l'écume des flots, les troupeaux du vieux
Nérée paissent les prairies sous-marines, et, sur la
mer paisible, trainé par des dauphins, glisse le
char d’'Amphitrite escorté de tritons et de nymphes.
On devient ensuite plus difficile et l’on a besoin de
raisons plus sérieuses. Hérodote parle de profon-
deurs marines: il indique la facon de s'approcher de
la cote basse et peu visible de l'Égypte en s'aidant
de sondages combinés à un examen des échantil-
lons de sol ramenés par le plomb de sonde. Comnie
les voyages par mer se multiplient, que la piraterie
cesse forcément d'exister pour faire place an com-
merce, qu’on découvre de nouvelles contrées, on a
besoin de classer les connaissances géographiques
acquises et devenues plus nombreuses, et l'on s'ef-
108
force d'en figurer l’image. Le Grec Anaximandre
(entre 610 et 547 av. J.-C.) trace les premières
cartes qui devaient ressembler aux dessins qu'un
navigateur polaire anglais du siècle dernier fai-
sait exécuter par des Esquimaux, documents ap-
portant une idée beaucoup moins grossière qu'on
ne le croirait du contour de régions bien connues
de ceux qui les tracent, mais informes pour des
pays mal connus. Les perfectionnements de l’as-
tronomie viennent préciser ces premiers essais.
Hécatée de Milet, qui a beaucoup voyagé et beau-
coup vu, dresse une nouvelle carte de la terre.
Pythagore, l'inventeur de l'harmonie des nombres,
l'un des premiers philosophes-poètes, l'un des
Michelet de l'antiquité, aflirme que la terre, qu'on
supposait ronde depuis longtemps, l'est certaine-
ment, parce que la sphère est la forme la plus
parfaite des corps. Socrate et Platon, en 469, ne
doutent pas de cette rotondité. et le second imagine
l'histoire de l’Atlantide, dont certains géologues
admeltent encore l'antique existence à laquelle,
pour ma part, je ne crois pas, parce que rien
ne l'indique, pas plus le modelé du bassin de
l'Atlantique tel qu'il apparait sur les cartes bathy-
métriques qu'un examen auquel je me suis livré
moi-même aux iles du Cap-Vert, c’est-à-dire presque
sur place. Hérodote mesure les distances à la mer
par orgyes on brasses, cherche par une compa-
raison et une discussion critique des récits des
navigateurs ainsi que par ses propres observa-
tions à se rendre compte de la dimension relative
des diverses mers, parle du fleuve Océan, qualifi-
cation beaucoup plus exacte qu'on ne le croit,
rapporte le périple des Phéniciens autour de
l'Afrique qui doit, par conséquent, ètre considérée
comme une presqu ile et n'ignore pas l'existence de
marées dans le golfe Persique.
Entre 326 et 296, Dicéarque applique aux cartes
la géométrie et, par l'introduction dans leur con-
COSMOS
25 JUILLET 4912
struction de la mathématique, rend désormais
précise la représentation de la terre. Il a l’idée de
couper le monde habité par deux lignes droites,
l’une horizontale, le diaphragme, passant par l'ile
de Rhodes et les colonnes d'Hercule, l'autre per-
pendiculaire à la première et par conséquent ver-
ticale à l'ile de Rhodes, et il rapporte la position
des divers lieux à ces deux droites prises comme
axes de coordonnées. La précision augmente avec
Eratosthėne (276-496), qui évalue la dimension du
globe en mesurant directement l'arc de méridien
compris entre Alexandrie et Méroé et divise les
carles par des parallèles et des méridiens recti-
lignes qu'Hipparque (162-125) remplace par des
distances angulaires mesurées astronomiquement
dans les diverses localités terrestres. Viendront
ensuite Cratès de Malle (450 av. J.-C.), qui construit
le premier globe, les géographes Strabon et Pom-
ponius Mela (18 et 43 ap. J.-C.), et enfin (150 ap.
J.-C.) l'astronome Ptolémée, qui rédige un cata-
logue de 8000 localités dont la position est fixée
par une latitude et une longitude.
A l’époque d'Alexandre (300 av. J.-C.) environ
s'accomplit un grand événement intellectuel pro-
voqué par trois faits capitaux : en premier lieu, une
série de reconnaissances pratiques des côtes de
l'Inde et du golfe Persique, des bouches de l’Indus
et de la Méditerranée provoquées par les cam-
pagnes mèmes d'Alexandre et exécutées par Scylax
de Caryande, Néarque, amiral de la flotte macédo-
nienne, et Onésicrite, chef des pilotes d Alexandrie.
En second lieu, l'application par Aristote des
méthodes de la philosophie pure à l'étude des
sciences en général, et en particulier de l’océano-
graphie. En troisième lieu, les deux magnifiques
expéditions maritimes du Marseillais, c’est-à-dire
du Français Pythéas.
(4 suivre.) J. THOULET.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du mardi 16 juillet 1912.
PRÉSIDENCE DE M. ARMAND GAUTIER.
Sur quelques mélanges gazeux naturels
particulierement riches en hélium. Gise-
meuts d'hélium.— Lescinq gaz rares : hélium, néon.
argon, krypton, xénon, sont constamment presents
dans les mélanges gazeux qui se dégagent aur grif-
fons des sources thermales (gaz spontanés). Ce fait est
établi, dans toute sa généralité, par de nombreuses
expériences.
Examinant Îles quantités considérables de gaz et
notamment d'hélium données par certaines sources,
MM. Mouneu et Lerpape en concluent qu'il existe de
véritables gisements d'hélium. L’hélium étant l’un des
produits de la désintégration des substances radio-
actives uriversellement diffusées au sein de la terre,
il se produit de l’hélium d'une façon continue, et ve
gaz s accumule dans les roches ou s’en dégage depuis
l'époque de leur formation.
L'hélium des sources peut être de l’hélium jeune,
qui se dégage au fur et à mesure qu'il se produit, ou
de l'hélium fossile, qui n'est libéré qu'après une accu-
mulation très longue dans les minéraux.
Dans l'hypothèse de l’hélium jeune, il ne faudrait
pas moins de 91 tonnes de radiumet de 500 millions de
tonnes de pechblende ou de thorianite pour produire
N° 1435
chaque année la quantité d'hélium fournie par la
source Carnot, de Santenay, par exemple.
L'énormité du nombre suffit à exclure la première
hypothèse, l’hélium jeune. Quant à celle de l’hélium
fossile, si elle n'est pas entièrement vraie, on peut
affirmer qu’elle l’est au moins partiellement.
Sur la culture nouvelle, à partir de la
spore, de la léploteélevée («Leplota procera »
Scop.). — On sait combien jusqu’à ce jour est restée
courte la liste des espèces de basidiomycètes charnus
dont on ait pu obtenir le complet développement,
c'est-à-dire qu’on ait réussi à cultiver à partir de la
spore jusqu’à la production de nouveaux chapeaux
sporifères.
Il y a donc tout d'abord un réel intérêt théorique
à signaler les résultats positifs auxquels M. Lovis
MatrtcuoT est arrivé dans la culture de la grande
lépiote ou coulemelle.
Ces résultats acquiėrent un grand intérèt pratique
du fait qu'ils’agit d’une espèce comestible très recher-
chée, susceptible de pouvoir fructifier toute l'année.
M. Matruchot expose les procédés de culture qu'il
a employés, soit sur de la tannée, soit sur du fumier ;
ces essais ont surtout réussi dans la culture en cave.
De la valeur de l’immunité vaccinale pas-
sive. — M. L. Cauus a montré que l'injection de sérum
virulicide à la dose de 10 centimètres cubes par kilo-
gramme d'animal (lapin) produit du premier coup une
immunisation partielle, mais n'arrête point l'infection
déjà déclarée. Pour obtenir l’immunisation absolue, il
faudrait injecter des doses très fortes d’un coup,
37 centimètres cubes par kilogramme, c'est-à-dire qu'à
un homme adulte il faudrait injecter 2,5 litres de
sérum. Le sang total avec ses globules n’est pas plus
aclif que le sérum seul.
De toutes ses recherches, l’auteur estime qu’un fait
important ressort: à savoir qu’il ne faut compter que
sur la vaccination préventive pour combattre sûre-
ment la variole.
COSMOS
109
Sur l'indétermination des fonctions analytiques au
voisinage d’un point singulier essentiel. Note de
M. Énice Bone. — Sur la mesure des frottements.
Note de M. Juces ANDRADE. — Éclateur électrométrique.
Note de MM. À. Guizeer et M. Auserr. — Densités de
quelques gaz et vapeurs. Note de M. A. Leouc. — Sur
les radiations efficaces dans la synthèse photochimique
des composés quaternaires, dans la polymérisation de
divers gaz et dans la photolyse de l’acétone. Note de
MM. DaxıeL BenrueLor et HENRY GauoEecHoON. — Sur les
nitrates anhydres d’uranyle et de zinc. Note de
M. Marxkétos, — Sur le rendement de la réaction de
Grignard. Note de M. Pierne Jouisois. — Oxydation du
parathymol. Sur le déhydrodiparathymol. Note de
MM. H. Cousin et H. Hérissey. — Leucobases et colo-
rants du diphényléthylène; préparation de deux bases
cyclohexylidéniques. Note de P. Lewourr. — Sur les
taches de sel des peaux et des cuirs. Note de M. GEORGES
ABT; l'auteur a constaté que ces taches d'aspect divers
proviennent bien du sel employé quand celui-ci con -
tient du sulfate ou du phosphate de calcium, mais
l'action de ces sels reste inexpliquée. — Isomorphisme
des chlorosels alcalins de l'iridium et du rhodium.
Note de A. Durrour. — Une expérience sur la nature
du chromotropisme chez les Némertes. Note de
M. Ro{uarb Mixkiecwicz. — Excitation prolongée du
nerf sensitif et son influence sur le fonclionnement du
système nerveux central. Note de M. Wevexsk«y. —
Sur le mécanisme de l’hémolyse par l’arachnolysine.
Note de M. RoserT Lévy. — Sur le mécanisme de l'in-
version de la loi polaire de Pflüger. Note de MM. Hexny
Canvor et Henri Lauren. — Le magot animal réactif
du trachôme. Filtrabilité du virus. Pouvoir infectant
des larmes. Note de MM. Chances Nicocze, L. BLarsor
et A. Cuénor. — Pathogénie des hémarthroses du
genou. Note de MM. Pierre DELBET et PIERRE CARTIER. —
Influence des sels d’urane sur les ferments alcooliques.
Note de M. E. Kayser. — Sur la présence normale du
bore chez les animaux. Note de MM. Gasri&L BERTRAND
et H. AGULHON.
BIBLIOGRAPHIE
Forme, puissance et stabilité des poissons,
par Frépéric HoussAy, professeur à la Faculté des
sciences de l'Université de Paris. Un vol. gr. in-8°
de 372 pages avec 117 figures, de la Collection
de morphologie dynamique (12,50 fr). Paris.
A. Hermann, 6, rue de la Sorbonne. Janvier 1942.
Le corps et les organes des poissons sont admi-
rablement adaptés à la vie aquatique. Personne
n’en doute. Mais encore, combien d’esprits seraient
capables de raisonner et de justifier pareille con-
viction, dont la fermeté n’a d'égale, généralement,
que son imprécision? M. F. Houssay ne doutait
point non plus, mais il a tenu à examiner, à cri-
tiquer, à se rendre compte par le moyen des véri-
fications expérimentales. Chemin faisant, il a ren-
contré des faits inattendus.
Chez les poissons, le propulseur est constitué
par la queue, ou mieux par la masse même du
corps flexible. Les nageoires étaient autrefois con-
sidérées comme des rames propulsives; elles ne
jouent ce ròle qu'aux très petites vitesses; le ròle
primordial et essentiel de toutes les nageoires,
paires et impaires, est un ròle stabilisateur; aucun
zoologiste avant M. Houssay n'avait pensé que la
stabilisation füt un problème capital au sujet d'un
organisme se déplaçant à grande vitesse dans un
milieu résistant, 800 fois plus résistant que l'air
où nous nous mouvons et où se déplacent nos
aéronats artificiels, qui n'ont pu, eux aussi, glisser
avec sécurité au sein de l’atmosphtre qu'après
que Renard les eut dotés de l'empennage stabilisa-
teur. L'auteur a surabondamment vérifié ce rôle
au moyen de ses modèles munis de nageoires
110
artificielles et remorqués dans l’eau à des vitesses
variables.
Autre fait curieux : le poisson est lesté dorsale-
ment, son centre de gravité ‘est au-dessus de son
centre de poussée; livré aux seuls effets de sa flot-
tabilité, il tendrait à se retourner, le ventre en
l'air. Cette particularité joue un rôle important
dans la morphologie ainsi que dans la stabilisation
du poisson aux grandes vitesses.
Très attaché aux idées de Lamarck, M. Houssay
a choisi les êtres aquatiques pour montrer sur un
exemple net la façon dont le milieu extérieur a pu
modeler une forme animale donnée. Au surplus,
les cétacés, mammifères qui se sont adaptés à la
vie aquatique, ne se sont-ils point modelés à leur
tour à la ressemblance des poissons?
LEuvre de science pure et d'inspiration exclusi-
vement biologique, il se trouve que le travail de
M. Houssay est capable de suggérer des idées pour
certaines modifications à introduire dans la carène
des navires à grande vitesse, pour assurer la sta-
bilité encore précaire des ballons dirigeables et
des sous-marins, et plus généralement pour étudier
par des méthodes nouvelles les conditions aéro-
dynamiques du vol des engins aériens.
Calcul et construction des alternateurs mono-
et polyphasés, par HEeNRt Birven, ingénieur,
professeur à la Gewerbe Akademie de Berlin.
Traduit de l'allemand par P. Durorr, ingénieur-
électricien. Un vol. in-8° de 1v-179 pages avec
126 figures, de la Bibliothèque technologique
(cartonné, 6 fr). Gauthier-Villars, Paris, 1914.
Ce volume traite de la TAéorie des alternateurs
et de leur conduite dans les divers cas de leur
emploi. L'important chapitre sur les enroulements,
qui a recu un assez large développement, est
illustré par des schémas des enroulements usuels.
Le premier chapitre contient un exposé concis
des plus importantes notions sur la théorie des
courants allernatifs, exposé dans lequel on a évité
autant que possible l'emploi des hautes mathé-
matiques.
La deuxième partie du livre traite des details
de construclion et du montage des aliernaleurs.
Des croquis de détails et des figures d'ensemble
rendent cette description aussi claire que possible.
L'auteur a donné une grande valeur à la der-
nière parlie du volume. Cette parlie traite d'une
facon complète le calrul des machines d’aboïd en
général, puis en l'apjliquant à des eremyles. Les
débutants trouveront un sujet d'étude instructif
dans ces calculs de contròle de machines achevées.
L'ouvrage se termine par un certain nombre de
Tables de construction de générateurs existants.
Fruits des pays chauds., 7. 2e", Étude yénérale des
fruits, par PAUL HusEenr, ingénieur colonial. In-$°
COSMOS
25 JUILLET 419412
143 X 20 de 730 pages, avec 227 figures (cartonné,
45 fr). Librairie Dunod et Pinat, quai des Grands-
Augustins, Paris.
Voici un ouvrage instructif, utile, intéressant et,
ajoutons, en outre, amusant; il présente tout l'intérêt
d'un récit de voyages, et pour peu que l'on ait fré-
quenté les pays chauds, il rappelle aombre de sou-
venirs. Ceux qui n’y sont pas allés, mais qui auront
à les visiter, soit pour leur plaisir, soit par devoir,
ne devront pas sembarquer sans se munir et se
pénétrer de ce guide. La lecture de l'ouvrage est
rendue attrayante par les anecdotes vécues dont
M. P. Hubert émaille son sujet, et le lecteur suit
sans fatigue l’enchainement des faits qui tour à
tour appartiennent au voyage, à la botanique, au
commerce, à l'industrie; on y apprendra en mème
temps le parti que l’on peut tirer, dans la maison,
de ces productions si nombreuses et si peu con-
nues en France.
L'auteur, qui a déjà donné plusieurs ouvrages
très appréciés, termine sa préface par ces mots :
« Que ce volume écrit en Amérique centrale et aux
Antilles, parmi les plaines fleuries et ensoleillées,
…… les sols jonchés de fruits, ..…. dans le grand
silence des forêts, ..... le brouhaha des cités, .....
malgré les troubles sismiques et politiques! .....
soit accueilli avec la même faveur que les précé-
dents..... »
Nous ne doutons pas que ce væu ne soit large-
ment réalisé.
Pour avoir une marine de guerre, par HENRI
BERNAY (2 fr). Librairie Roger, 54, rue Jacob.
L'auteur est de ceux qui ont conservé cette belle
flamme de patriotisme qui a fait la France; dans
l'ouvrage que nous signalons, il démontre d'abord,
après beaucoup d'autres, qu’une nation ne peut
exister aujourd’hui si elle ne possède pas une ma-
rine puissante et bien organisée. Il ajoute que cela
ne peut s’obtenir que si le peuple tout entier se
rend compte, non seulement de cette nécessité,
mais aussi de ce que doit ètre une marine de
guerre. Dans ce métier si attachant, mais si pénible
aussi, où le dévouement doit être de tous les in-
stants, où les études doivent être continuelles, ceux
qui sy consacrent doivent trouver un encourage-
nent dans la confiance que leur inspirera l'esprit
publie, dans les moyens d'agir et dans la sympathie
qu ils méritent. Il faut reconnaitre qu'en France, et
hélas! en France seulement, on ignore la marine,
et si on s'en occupe quelquefois, c'est presque tou-
jours pour émettre des critiques qui font foi dans
ies masses, quoiqu'elles soient émises par les gens
les plus incompétents, fussent-ils députés, pour
jeter la pierre à ceux qui portent le fardeau qu'im-
posent ses multiples devoirs. On entoure, il est
vrai, ces critiques de quelques phrases creuses :
dévouement sublime, courage indomptable de
Ne 1435
nos marins, patriotisme ardent, etc. Mots qui
n’éblouissent personne et les marins moins que
tous autres.
M. Bernay entreprend, après bien d’autres, de
faire connaitre la marine : homme du métier et
aimant son métier, il en parle ex professo. Il exa-
mine tout ce qui constitue cette partie si complexe
de notre armée. Il traite successivement du maté-
riel, du personnel, de leur utilisation, de l'admi-
nistration et de l’organisation de cet ensemble.
M. Bernay est un penseur et il a naturellement
certaines idées personnelles; quelques-unes seront
discutées, sans doute, mais tous rendront justice
à la loyauté de l'auteur, à son patriotisme et à
l'excellent esprit qui a inspiré son ouvrage. Nous
lui soubailons beaucoup de lecteurs en France et
quelques imitateurs dans les rangs de nos officiers
de marine où l’on compte tant d'hommes distingués.
La Suisse au xx° siècle. Éfudes économique et
sociale, par P. CLERGET, professeur à l’École
supérieure de commerce de Lyon.
Deuxième édition, revue, mise à jour et augmentée.
Un vol. in-18 jésus de 306 pages, avec 6 cartes et
graphiques (3,50 fr). Armand Colin, 5, rue de
Mézières, Paris.
OEuvre très nourrie, très objective, très claire,
très instructive, qui forme.véritablement un tout.
La Suisse, ce laboratoire d’expériences politiques
et sociales sans cesse renouvelées, gagne à être
étudiée par nous de très près. L'auteur l’a com-
pris. C’est ainsi qu’il analyse tout spécialement les
lois récentes sur les assurances ouvrières, sur la
nouvelle organisation militaire, la rédaction du
Code civil, les conventions du Gothard et du Sim-
plon. il enregistre les résultats de la nationalisation
des chemins de fer et ceux de la Banque nationale
d'émission. Dans un chapitre très actuel, il insiste
sur les relations franr:o-suisses, au quadruple point
de vue intellectuel, économique, social et financier.
Voici un aperçu de la table des matières : Popula-
tion. — Organisation politique et impôts. — Mon-
naie, crédit et prévoyance. — Essor agricole et
industriel. — Conditions du travail. — Voies de
communication. — Développement du commerce
extérieur. — Rôle international de la Suisse. — Les
Français en Suisse.
Trois villes saintes : Ars-en-Dombes, Saint-
Jacques-de-Compostelle, le Mont-Saint-
Michel, par Émize BAUMANN. In-18 jésus, 3,50 fr.
Bernard Grasset, 61, rue des Saints-Pères, Paris.
Ces trois récits de pèlerinages effectués par un
arliste à la fois mystique et réaliste font songer,
comme écriture, à la manière de Huysmans; mais
M. Baumann est un disciple de forte personnalité
et qui garde un accent bien à lui. Son premier
COSMOS
111
récit met dans son jour exact la figure rustique et
sublime de l'abbé Vianney, associée au pays
d’Ars-en-Dombes qui porte encore son empreinte.
Le deuxième décrit une ville longtemps fameuse,
trop oubliée aujourd'hui, Saint-Jacques-de-C'om-
postelle, avec ses paysages singuliers, l’histoire
peu connue de ses pèlerinages et ses aspects actuels
restés tout monastiques. Le troisième expose les
impressions d’un lyrique chrétien devant l’abbaye
et les sites du Hont-Saint-Michel.
Ces trois chapitres forment comme les trois
panneaux d'une fresque pleine de vie et de pro-
fondeur.
La Société marocaine, par le D' Maurac. Un vol.
broché in-18 raisin, abondamment illustré (5 fr).
Paulin et Ci°, rue Hautefeuille, Paris.
La récente proclamation de notre protectorat
sur le Maroc, les événements qui s’y déroulent con-
fèrent à cet ouvrage un intérêt particulier. Par
lui-même, du reste, il possėde un vif attrait. Méde-
cin du gouvernement à Rabat, appelé à ce titre au
sein des grandes familles marocaines, spectateur
averti de l’existence quotidienne de l’indigène, le
D' Maurau a pu observer beaucoup de choses avec
profit. Les tableautins sont instructifs sans cesser
d'être pittoresques. Nous assistons avec lui à la vie
du marchand, de l'artisan, de l’esclave, du puissant
feudataire. Nous contemplons les cérémonies reli-
gieuses. À noter spécialement une foule de très
judicieuses réflexions, notamment celles qui ont
trait au péril israélite.
Il serait dommage que notre protectorat ne pro-
fitât qu'aux Juifs. M. Maurau nous met en garde
contre ce danger. R. T.
Observatoire de Madagascar: observations mé-
téorologiques faites à Tananarive, par le
R. P. Couix. 22° volume, année 1910. Imprimerie
de la mission catholique, Tananarive.
Résultats des observations météorologiques
faites à l'Observatoire central de l’Indo-
Chine: le climat du delta du Tonkin, par
G. Le Caper, directeur de l'Observatoire. Extrait
du Bulletin économique de UIndo-Ghine (sept.-
oct. 1941141). Imprimerie d'Extrème-Orient, Hanoi.
Vocabulaire de laviateur-constructeur. Un
vol. de 444 pages avec gravures (0,95 fr). Librai-
rie Vivien, 48, rue des Ecoles, Paris.
Cet ouvrage donne par ordre alphabétique les
termes employés le plus généralement en aéronau-
tique avec des explications détaillées; il comporte
en plus la description de nombreux appareils, mo-
teurs, aéroplanes. De nombreux schèmas facilitent
la lecture de cet ouvrage qui rendra service à ceux
qui s'intéressent à la locomotion aérienne,
112
GOSMOS
25 JUILLET 41912
FORMULAIRE
Procédé pour rendre stable l’eau oxygénée.
— Les agents employés pour rendre stable leau
oxygénée sans changement de titre sont extrême-
ment nombreux ; on cite lacide phosphorique, le
chlorure de sodium, l'empois d'amidon, la géla-
tine, le tannin, l'acide urique, la naphtaline, l’acide
oxalique, l’éther. L'alcool jouirait des mêmes pro-
priétés. On doitl’emplover à la dose de 100 grammes
par litre pour les cas courants, et porter cette
quantité à 200 et 400 grammes lorsque l’eau
oxygénée contient des substances favorisant la
décomposition. (Photo-Rerue.)
Destruction des blattes. — Pour détruire les
blattes dans les maisons d'habitation, on peut user
du procédé des pièges ou bien des gaz asphyxiants,
mais il est toujours utile d'examiner en même
temps s'il n'y a pas lieu de procéder à une réfec-
tion de murs dont les plâtres seraient en mauvais
état, ou bien à un meilleur jointoiement de plinthes,
qui, par suite du léger espace existant parfois entre
elles et le mur ou le parquet, offrent un excellent
refuge aux insectes. Examiner de même l'intérieur
des placards et le dos des meubles.
Les pièges dont on fera usage seront constitués
par des pots vernissés à l'intérieur. On versera
dedans de la bière, ou bien on y mettra de la farine,
puis on les entourera d’un chiffon affleurant aux
bords de manière à en faciliter l'accès aux insectes.
De vieux torchons humides, abandonnés sur le
carrelage ou le parquet, pourront également servir
de pièges et permettront de recueillir une certaine
quantité de cafards.
Si la disposition des lieux s’y prête et qu'une
obturation hermétique des ouvertures puisse être
obtenue, brûler du soufre dans les pièces infestées
et laisser les vapeurs de gaz sulfureux séjourner
dans ces pièces pendant vingt-quatre heures au
moins.
On se trouvera bien également de usage de la
poudre de pyrèthre et des lavages copieux à l’eau
alunée bien bouillante, que l'on projettera dans
les coins suspects.
(Journal d'Agriculture pratique.) P. L.
Pour régénérer les électrodes négatives des
accumulateurs en plomb, M. E.-H.Taylor (brevet
français 427 316) indique le procédé suivant :
On fait complètement sécher les électrodes
défectueuses, par exemple en les chauffant, et on
les brosse pour enlever la matière adhérente. Elles
sont alors plongées dans un bain liquide ou de
vapeur de protochlorure de soufre S'Cl?, qui est
énergiquement absorbé par la matière active avec
dégagement de chaleur. Les électrodes sont alors
soumises à la chaleur dans un four dont la tempé-
rature peut être réglée de manière à rester en
dessous du point de fusion des électrodes. La ma-
tière active est ensuite réduite électrolytiquement
dans un bain d'acide sulfurique dilué. Les plaques,
lavées à l’eau, peuvent ensuite être formées de la
facon ordinaire.
PETITE CORRESPONDANCE
M. À. F., à M. — Machines agricoles françaises :
« La France », 50-52, quai Jemmapes, Paris ; Puzenat,
à Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire). — Béliers hydrau-
liques : E. Bollée, au Mans (Sarthe); Beaume,
66, avenue de la Reine, à Boulogne (Seine).
M. P. M., à S. — C'est par une erreur typographique
qu'on a mis le numéro que vous signalez. ll faut lire
n° 4390 (t. LXV, p. 309). Si vous ne l'avez pas, veuillez
le demander directement à l'administration. — Le
signal attente est forimmé, dans le code Morse, de
4 point, À trait, 3 points.
M. A. D., au M. — Petits moteurs à huile lourde ou
a pétrole lampant: Dan, 10, rue de Laborde, Paris;
Brouhot, à Vicrzon (Cher); moteur Capitaine, Herlicq,
59, rue de Flandre, Paris.
F. U., à P. — 4° Existe-t-il des procédés particuliers
pour extraire l'or des boues qui se forment dans l'affi-
nage du cuivre? Les cuvrages généraux comme l'n-
dustrie aurifere, par D. LEVAT, 1905, librairie Dunod
et Pinat, fourniraicnt vrzieemblablement la réponse
pratique à votre question. — 2 Traité pratique elec-
trorhimie, par R. Lorr\7, refondu d'aprés l'allemand
par G. fosreser (9 fr}, 1905. Librairie Gauthier-Villars:
Traité théorique et pralique d'électrorhimie, par
A. Mixer (18 fr). Librairie IT. Desforges, 29, quai des
Grands-Augustins, Paris.
M°° G., au M. — Nous donnerons quelques receites
dans le prochain numéro. Ces formules seraient un
peu longues ici. :
R. P.J. H., à N. — Sous cette forme, le problème
ect insoluble : Une batterie d'accumulateurs de 10 kilo-
grammes ne donnerait qu'une puissance de 40 watts,
soit un vingtième de cheval, pendant une durée de
trois à cinq heures. Aucune bicyclette ne pourrait
accepter la surcharge nécessaire. Le seul procédé
serait l'emploi d'une motocyclette à essence si vous
pouvez vous procurer cet hydrocarbure. Les raisons
données ci-dessus disent pourquoi la motocyclette
électrique n'existe pas.
M. J. A., à M. — Il existe bien des systèmes de
reproduction de l’ecriture à distance, en commençant
par le plus ancien, le pendule Castelli. L’un, le Telau-
tographe d'Elisha Gray-Ritchie, est en usage aux
Etats-Unis, {Voir Cosmos, t. XXV, n° 436, p. 301, et
t. XLIV, n° $53, p. 679.)
Imprimerie P, Fenox-Vaau. 8 et 6, rue Bayard, Paris, VIII’.
Le gérant: E. Porirazxart.
No 4436 — 1° aour 1912
COSMOS
113
SOMMAIRE
Tour du monde. — Le radium dans la chromosphère du Soleil. Les masses des étoiles ‘doubles. La trajec-
toire rectiligne des trombes. Le mécanisme du mimétisme. Des mouches qui vivent dans le formol. Les
explosions du radium. La nouvelle station radiotélégraphique de Nauen. L'examen du charbon par les
rayons X. La conservation du charbon. Une nouvelle étoffe pour enveloppes de ballons. Suez et Panama.
Un jugement sur la baguette des sourciers. Un musée en plein air, p. 118.
Correspondance. — À propos du bois des crayons, C. DE KiRwaN, p. 417.
La filtration des eaux du Nil dans l’isthme de Suez, J. Boyer, p. 118. — Le transformisme, ses varia-
tions et l’eau de mer, C. be Kirwan, p. 120. — Les vermifuges dans la thérapeutique moderne,
ACLOQuE, p. 123. — Les difficultés de pose des conduites sous l’eau, BELLET, p. 126. — La vaccina-
tion antituberculaire, D' Goucta, p. 129. — Sur la forme probable de la partie immergée de
quelques icebergs, C. JAner, p. 131. — L'océanographie pendant l’antiquité (fin), J. THouLeT, p. 133.
— Sociétés savantes: Académie des sciences, p. 435. — Bibliographie, p. 136.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Le radium dans la chromosphère du Soleil.
— La présence probable du radium, de l'uranium
et de l'émanation dans le spectre de la nouvelle
étoile desGémeaux, découverte par l’astro-physicien
Küstner de Bonn et que nous avons signalée ici
mème (Cosmos, n° 4 428, p. 618), semble avoir
été accueillie avec quelque scepticisme par beau-
coup d’astronomes, notamment en Angleterre.
M. H. P. Hollis, par exemple, qui appartient à
l'état-major de l'Observatoire de Greenwich, a
exprimé à ce sujet (English Mechanic, n° 2 468,
p. X561) les doutes les plus sérieux.
Or, par une singulière ironie, M. F. W. Dyson,
le savant directeur de l'Observatoire de Greenwich
lui-même, s’est trouvé amené à comparer tout
dernièrement le spectre du radium et de l'émana-
tion avec des mesures de photographies du spectre
de la chromosphère obtenues par lui-même pour
les éclipses de 1900, 4901 et 1905, et par Lockyer
pour l'éclipse de 1898. Et, chose remarquable, il
trouve que six des lignes principales de ce spectre
peuvent être identifiées avec des raies du radium.
« Il] y a, dit-il, un accord général avec le spectre
du radium en ce qui concerne les intensités, et
l'accord pour les longueurs d’onde est tout à fait
satisfaisant. » Plusieurs raies chromosphériques
sont, en outre, voisines de celles de émanation.
Quant au spectre de l’uranium, il est d’un carac-
tère tel qu'on ne peut s'attendre à le retrouver
dans celui de la chromosphère.
Ces résultats nouveaux sont des pilus remar-
quables. Ils montrent que les corps radio-actifs, si
rares à la surface de notre globe, sont peut-être
beaucoup plus communs dans l'univers qu'on ne le
croit habituellement et qu'ils y jouent certaine-
ment un grand rôle. Il est fort probable maintenant
T. LXVII. N° 1436.
que lattention est attirée sur ce fait qu'on ne tar-
dera pas à retrouver leur spectre dans certaines
étoiles, particulièrement dans les plus jeunes.
Les masses des étoiles doubles. — Un très
grand nombre des étoiles qui, vues à l’œil nu ou
dans une faible lunette, paraissent se réduire à un
simple point lumineux sont, en réalité, des sys-
tèmes de deux étoiles et parfois davantage; leurs
composantes qui sont assez souvent de masses et
d'éclats comparables, gravitent l'une autour de
Pautre en une période de quelques jours (c'est le
cas de beaucoup d'étoiles doubles spectroscopiques),
de quelques années ou de quelques dizaines ou cen-
taines d'années.
Si Pon connait la dimension des orbites parcou-
rues par les composantes de l'étoile double et la
durće de la période de révolution, on peut mesurer
la masse du système. Le Dr Doberck (Astrono-
mische Nachrichten, n° 4583) a fait le calcul pour
un certain nombre d'étoiles doubles connues; la
masse de notre Soleil est prise comme unité.
Nom de l'étoile, Période de révolution. Nasse du système,
Annees, Masse solaire == 1,
r, Cassiopée 328 0,87
40 o Eridan 180 0,4.
Sirius 49 3,26
Castor 387 22419
2-3 121 J+ 311,9
y Vierge 19% 8,09
a Centaure Si 1,99
z Hercule 39 0,13
u Hercule 45 1,11
70 Ophiucus S8 2,5%
$5 Pégase 26 5,07
Laissons de cûté Castor, dont l'orbite est mal
connue, et l'étoile © 3121 à parallaxe très faible et
dont la distance est très grande et difficile à pré-
114
ciser à notre système. Pour les neuf autres étoiles
doubles, on trouve 2,46 comme masse moyenne du
système des deux composantes. Ainsi, en moyenne,
la masse de chacune des deux composantes des
éloiles doubles calculées se trouve être du même
ordre de grandeur que notre Soleil.
MÉTÉOROLOGIE
La trajectoire rectiligne des trombes. —
Dans le bulletin de juin de la Commission météo-
rologique du Calvados, rédigé par M. G. Guilbert,
M. Marie, professeur de sciences à Vire, signale les
particularités d'une trombe qui a étendu ses
ravages, le 4 juin 4912, sur une distance de 7 kilo-
mètres, entre Agneauxet Villiers-Fossard (Manche).
Le tourbillon tournait ensensinverse des aiguilles
d'une montre. La direction moyenne du parcours
va du Sud-Ouest au Nord-Est; la trajectoire se
décompose en deux lignes rigoureusement droites:
la première ligne est longue de 2,7 km; la seconde
partie de la trajectoire s’infléchit ensuite d’une
vingtaine de degrés. À ce point de vue, on peut rap-
procher la trombe du 4 juin de celle du 4 mars 1912
dans le Calvados (Cf. Cosmos, t. LXVI, n° 1426, p. 578).
Comme en d’autres cas, on remarque que la
trombe d'Agneaux a produit des ravages par inter-
mittences, le long de son parcours : elle procède
par bonds, n'atteint point le fond de la vallée où
coule la Vire, passe sans le toucher au-dessus du
bois de Montcoq, pour revenir au sol 600 mètres
plus loin. Des arbres sont coupés à 5 ou 6 mètres
de hauteur et leurs têtes transportées à une distance
de 350 mètres.
La trombe, large de 70 mètres pendant le pre-
mier tiers de son parcours, s'étale ensuite, et vers
la fin, la bande dévastée a 200-250 mètres de lar-
geur. Les dégâts sont plus forts sur les deux lisières
que dans la ligne médiane, où des arbres et des
toits ont été épargnés. Ces lisières sont, par
endroits, marquées avec une précision extraordi-
naire : Jes cimes d'arbres sont tranchées nettement
suivant un pian verlicai, une partie des branches
a été emportée, lautre partie restant intacte.
PHYSIOLOGIE
Le mécanisme du mimétisme. — Il y a
quelques mois, un auteur américain, Sumner, a
publié dans le Journal of experimental Zoology
un travail intéressant sur l'adaptation de certains
poissons plats au fond sur lequel ils vivent.
Ces faits d'Aomochromie sont connus depuis long-
temps: une sole, un turbot, sur un fond de sabie
ou de gravier, prennent exactement la coloration
du fond, au point qu'ii est difficile de les distinguer
aussi longtemps qu'ils restent immobiles. C'est
mme un des exemples classiques de l'adaptation
en vue de la conservation de l'espèce.
COSMOS
åer aouT 1912
Précisant les observations de ses devanciers,
Sumner a montré que non seulement la peau du
poisson reproduit fidèlement la teinte générale du
fond, mais qu'elle est susceptible mème de répéter
des dessins assez compliqués. Lorsqu'on a dessiné,
sur le fond de l’aquarium où se trouvent les tur-
bots, des ronds ou des carrés, ou des bandes alter-
nativement blanches et noires, on voit se dessiner
de mème, sur la peau du poisson, des ronds, des
carrés ou des bandes. Les dessins de la peau ne sont
évidemment pas, vu les dispositions anatomiques,
de forme absolument géométrique, mais l'aspect
général est une reproduction assez fidèle des des-
sins du fond. Ainsi les taches de la peau sont plus
petites quand les carrés du fond ont un millimètre
de côté, que quand ils ont un centimètre.
On doit à Pouchet d’avoir reconnu que l’adapta-
tion au fond disparait irrémédiablement quand on
détruit les yeux du poisson, ou quand on empèche
la formation des images rétiniennes en provoquant
des troubles dans les milieux réfringents de l'œil.
Elle disparait aussi quand, laissant intacts l'œil et
la rétine, on sectionne les nerfs qui relient les
yeux au cerveau. Il en est encore de même si, lais-
sant les impressions visuelles parvenir régulière-
ment jusqu’aux centres optiques du cerveau, on se
contente de sectionner les nerfs sympathiques, qui
se rendent aux cellules pigmentaires de la peau.
Loeb s'est intéressé à ses faits, qui permettront
sans doute d'élucider un peu le mécanisme du
mimétisme et celui de la vision (Rev. scient.,
43 juillet).
Ainsi, les réactions mimétiques, dans le cas du
turbot ou de la sole, ne proviennent point d'une
action immédiate que le fond coloré produirait
directement sur la peau du poisson à la façon d’une
photographie en couleurs; cette action ne se
transinet que par l'intermédiaire terriblement com-
pliqué de la vision rétinienne, puis des fibres ner-
veuses centripètes, et enfin des fibres nerveuses
centrifuges du système sympathique.
BIOLOGIE
Des mouches qui vivent dans le formol. —
M. Schultze avait reçu, de l'Afrique orientale alle-
mande, des bocaux renfermant des pièces d'ana-
tomie conservées dans du formol : des têtes de Hot-
tentots et de Herreros. Or, en dépit du formol, qui
tue rapidement les tissus vivants, les bocaux con-
tenaient un grand nombre d'individus vivants de
Drosophila rubrostriata à divers stades de déve-
loppement: larve, pupe, imago. Pour empècher
les insectes de détériorer les pièces anatomiques,
on versa du formol pur, mais les larves de Droso-
phila ne furent pas encore tuées. (Zoologischer
Anceiyer et Revue scientifique, 20 juillet.)
Outre les mouches du genre Drosophila, d'autres
N° 41436
insectes font preuve d'une vitalité extraordinaire.
Les vapeurs d'acide cyanhydrique tuent les papil-
lons : les zygènes pourtant vivent dans ce milieu.
Dans le suc que renferment les urnes des Yepen-
thès, suc qui attaque et digère les insectes, vivent
cependant impunément, d’après une récente com-
munication de Jensen, trois culicides qui seraient
protégés contre l’action digestive de ce ferment
par un antiferment qu'ils sécrètent. Le professeur
Korschelt a vu des larves de la mouche domes-
tique, conservées dans une solution d'acide chro-
mique à 2 pour 400, se transformer en pupes et
donner des insectes ailés.
CHIMIE
Les explosions de radium. — M. B. Jost rap-
porte (dans Chemiker-Zeilung, n° 15, 1912) la mé-
saventure qui lui est survenue à plusieurs reprises
en manipulant du bromure de radium.
L'auteur confectionne des spinthariscopes, c’est-
à-dire des appareils en forme de petites loupes
munies d’un écran fluorescent qu'on voits’illuminer
par places et par intermittences chaque fois qu’une
parcelle radio-active, logée à quelque distance
devant l'écran vient bombarder celui-ci par une
particule a. Le corps radio-actif dont il se sert est
du bromure de radium très pur, préparé depuis
assez longtemps; comme il suffit d’une très minime
quantité, il en prélève un granule à l’aide d’une fine
aiguille faiblement humectée à la pointe.
Or, plusieurs fois, au moment où M. Jost appro-
chait le granule du spinthariscope, celui-ci se désa-
grègea avec un crépitement sensible, envoyant de
tous côtes les poussières très fines de sel radio-
actif: durant un instant, l'écran fluorescent res-
semblait à un ciel parsemé d'étoiles faiblement
lumineuses. Le spectacle est joli; mais la première
fois que M. Jost en a été gratifié, quelques pous-
sières radio-actives lui entrèrent dans l'œil gauche
en y provoquant une inflammation assez violente
qui laissa après elle une diminution d’acuité visuelle.
M. Jost émet cette hypothèse: le sel solide de
radium, déjà ancien, s'est empli à l’intérieur d’une
certaine quantité d'émanation gazeuse (le niton
de W. Ramsay, gaz radio-actif issu de la désagré-
gation atomique du radium); au moment où la fine
gouttelette d'eau portée par la pointe de l'aiguille
vient en dissoudre partiellement les parois, ce
minuscule réservoir de gaz comprimé fait explosion.
Un accident analogue et d'importance plus grande
était survenu en 1906 à M. Precht : un tube scellé
en verre, de 2 millimètres de diamètre intérieur,
contenant 25 milligrammes de bromure de radium
pulvérisé, fit explosion (Cf. Cosmos, t. LIV, p. 224) :
l’émanation qui s'était dégagée du sel radio-actif
et amassée pendant l’espace de onze mois dans le
tube avait dù en soumettre les parois à une pres-
sion d’une vingtaine d’atmosphères.
COSMOS
115
TÉLÉGRAPHIE
La nouvelle station radiotélégraphique de
Nauen. — On a édifié une tour provisoire en bois
à Nauen, lisons-nous dans l'Electrotechnische
Zeitschrift, en attendant la reconstruction de la
Station radiotélégraphique de cette localité. La
nouvelle construction définitive en fer ne sera
pas achevée avant quelques mois; elle mesurera
250 mètres de hauteur et présentera une bien plus
grande solidité que la précédente. Une fois qu'elle
sera achevée, on y entreprendra des expériences
sur la transmission des ondes électriques au tra-
vers du sol: à cet effet, on fera pénétrer les fils
jusqu’à une profondeur de 100 mètres dans la
terre. — G. (Électricien.)
LA HOUILLE
_ L'examen du charbon par les rayons X. —
Suivant l'Écho des mines (24 juin), on a appliqué
la radiographie à mettre en lumière la loi de dis-
tribution des cendres dans le charbon, et, par
suite, à reconnaitre si un charbon à haute teneur
en cendres est convenable pour le lavage. De nom-
breux essais ont montré que, bien que la véritable
substance charbonneuse soit presque transparente
aux rayons X, il y a cependant des différences
notables entre les différentes houilles et même
entre les différentes parties d’un mème petit échan-
tillon; de sorte que cette méthode pourrait servir
à l'étude de la structure et de l'origine des ditfé-
rentes houilles.
Il y a deux ou trois espèces de cendres dans le
charbon; d’abord, la matière étrangère apporiée
par le vent ou la pluie sur les bois de forêts qui
donnèrent naissance à la houille: ceci peut être
appelé la variété « poussière » de la cendre. Ensuite
il y a la matière minérale qui formait partie des
plantes vivantes : la teneur et la nature de cette
matière varieraient suivant l’abondance relative
des différentes espèces de plantes, et cette matière
pourrait être appelée la cendre « native ». Enfin,
il y a généralement plus ou moins de matière miné-
rale due à la formation de nouveaux composés par
la décomposition et reconstitution des cendres,
« poussières » et « natives ». L'examen du charbon
aux rayons X conduira probableuwent à une distinc-
tion possible entre ces trois formes de cendres, et
contribuera ainsi à éclairer la formation des veines.
La conservation du charbon (Bull, Soc. Ing.
civils, mars). — Il est généralement admis que,
lorsqu'on met du charbon en tas à l'air, il perd
peu à peu de sa valeur calorifique sous l'intluence
de l'oxygène atmosphérique. C'est pour cetie rai-
son qu'on a essayé de le conserver sous l'eau, et
nous avons eu occasion de parler de ces essais
dans nos colonnes. Le charbon, placé dans ces
116
conditions, conserve ses propriétés, sa valeur calo-
rifique et sa richesse en gaz, mais la nécessité de
le sécher avant emploi amène une dépense qui
n’est quelquefois pas sans importance.
On a proposé récemment d'employer, au lieu
d'eau, une enveloppe de gaz inertes, c'est-à-dire
privés d'oxygène, tels qu’acide carbonique, acide
sulfureux ou gaz provenant de la combustion. Dans
ce but, on a placé des charbons de diverses natures
dans des vases de verre bien bouchéset contenant,
en outre, chacun un des trois gaz dont il vient
d'être question et on a analysé le charbon au bout
de différentes périodes, quinze jours, trois semaines
et six mois après la mise en vases.
On a constaté qu'avec les houilles maigres le
combustible contenait 2 pour 100 de plus de car-
bone que gardé à l'air et 1,0 à 0,5 pour 100 de plus
que conservé sous l’eau. Avec les charbons de
forges, il n'y avait pas de différence, et des expé-
riences ultérieures ont indiqué que ces houilles
pouvaient rester six mois à l'air libre ou sous l’eau
sans subir aucune détérioration.
Avec les houilles grasses, on a constaté que la
conservation, en présence de gaz inertes, faisait
perdre 4 pour 100 de carbone en six mois, tandis
qu'à l'air libre ou sous l’eau la perte était moindre.
Pour les houilles à gaz, la perte en carbone était
sensiblement la même et très faible avec le con-
tact de l’eau ou des gaz, tandis qu’elle atteignait
2,9 pour 100 au contact de l'air.
On peut conclure de ces expériences que, pour
les houilles grasses et de forges, il est inutile de
prendre des précautions spéciales pour les con-
server, parce qu'elles n'éprouvent pas de détério-
ration sensible au contact de l'air.
Quant aux houilles grasses et aux houilles à gaz,
il y a quelque intérèt à les conserver sous l’eau ou
en présence de gaz inertes, mais il semble que la
protection donnée par une toiture au-dessus du tas
aurait un cffet sulfisant et que, dès lors, la dépense
à faire pour la conservation du charbon sous l’eau
ou au contact des gaz inertes n’est pas justifiée.
Il faut dire que ce qui a donné lieu à l'idée géné-
ralement admise que le charbon exposé à l’air se
détériore est que les expériences dont on est parti
avaient été faites, d'une part, sur des charbons
sortant de la mine, et de l'autre, sur des houilles
longtemps exposées à lair. Or, le charbon frais
a une valeur calorifique supérieure à celle du char-
bon conservé, mais la perte a lieu, pour la plus
grande partie, dans la semaine qui suit l'extraction,
de sorte que les comparaisons faites entre les deux
échantillons de la mème houille n'ont aucune
valeur. I] fallait comparer deux charbons gardés,
l'un quelques jours, et l’autre plusieurs mois, on
n'aurait trouvé qu'une différence insignifiante. En
pratique, on n’emploie jamais le charbon au sortir
de la mine.
COSMOS
Aer aouT 1912
Il est bien certain qu’en conservant la houille
sous l’eau ou en présence de gaz inertes on évite
tout risque de combustion spontanée, mais cela ne
suffit pas à justifier les dépenses qu'entrainerait ce
mode de conservation. On pourrait, dans le cas de
charbons présentant des risques sérieux de ce
genre de combustion, le mettre dans des espèces
de silos, avec accès à différentes hauteurs, pour
pouvoir enlever le combustible si la température
venait à s'élever de manière dangereuse.
VARIA
Une nouvelle étoffe pour enveloppes de
ballons. — M. Wilhelm Ræder, de Senftenberg,
vient de breveter une étoffe pour ballons constituée
de manière, sinon à supprimer, du moins à ralentir
et à diminuer les variations de température du
gaz. On sait que les dilatations et contractions du
gaz du ballon obligent à des manœuvres fréquentes,
ouvertures de la soupape du gaz ou jets de lest,
qui, outre l'attention et l'ennui qu'elles imposent
au pilote, réduisent le parcours et la durée pendant
laquelle le ballon peut tenir en l'air.
L'inventeur a donc fabriqué une étoffe isolante,
grâce à une couche de poussière de liège collée à
l'intérieur de l'étoffe caoutchoutée et que la vulca-
nisation fixe solidement au tissu. Il revendique du
même coup, pour son étoffe spéciale, d'autres avan-
tages sérieux: imperméabilité plus parfaite au
gaz et susceptibilité moins grande vis-à-vis des
impuretés du gaz qui ont vite fait de détériorer les
étoffes ordinaires des ballons.
Suez et Panama. — Les recettes du canal de
Suez, pour l’année se terminant au 1°" juin dernier,
ont été de 138 810 000 francs en augmentation de
4 330 000 sur l’année précédente.
En conséquence, la Compagnie annonce une nou-
velle réduction sur les droits de passage à partir du
4er janvier 1913.
En Amérique, quelques journaux supposent que
cette réduction est inspirée par la crainte de la
concurrence du canal de Panama qui sera bientôt
ouvert. Cest une erreur; cette réduction est im-
posée par les traités qui lient la Compagnie de
Suez el doit avoir lieu dès que les recettes dépassent
un certain chiffre.
Un jugement sur la baguette des sourciers.
— Le Geological Survey des États-Unis publie une
série de notes très appréciées relatives à l'hydro-
logie. Dans une de ces notes (n° 225, intitulée :
Underground waters for farm use), M. L. Fuller
exprime en passant le jugement qu'il s’est fait sur la
baguette des sourciers à la suite de ses propres essais.
Il parle de la baguette fourchue en coudrier dont
on tient les deux branches en mains. Voici, d'après
Anouledye (avril),comment il s'exprime à ce sujet :
« Dans ses cssais avec une baguette de ce type,
l'auteur a trouvé qu’à certains endroits l’appareil
N° 1436
semblait s'abaisser indépendamment de sa volonté;
mais des expériences plus complètes ont montré
que cette rotation résultait d’une action musculaire
légère et, du moins avani un attentif examen,
inconsciente, dont l'effet se transmettait, par les
bras et les poignets, jusqu’à la baguette. On n’a pu
découvrir aucun mouvement de la baguette qui
serait attribuable à des causes étrangères au corps...
» L’inutilité de la baguette des sourciers ressort
des faits suivants : elle peut être mue à la volonté
de l'opérateur; elle est en défaut quand il s’agit
de découvrir les forts courants d’eau des tunnels
et autres conduites artificielles qui ne trahissent
l’eau par aucune indication superficielle; dans les
régions calcaires, où l’eau coule en veines bien
définies, les succès de la baguette ne dépassent pas
ceux de la simple conjecture. En fait, les « sour-
ciers » ne réussissent avec leur baguette que dans
les régions où leau git en nappe définie dans une
couche poreuse ou dans des dépòts plus ou moins
argileux..... On n’a encore trouvé aucun système
mécanique ou électrique pour découvrir l'eau en
des endroits où le simple sens commun n’en aurait
pas indiqué tout aussi bien la présence. Le seul avan-
tage qu'on a à recourir à la baguette des sourciers...
tient à ce qu'on se procure parfois de la sorte un
service habile, puisque les spécialistes auxquels on
s'adresse, pour peu qu'ils aient une perspicacité
native, arrivent forcément parleurexpérience même
à découvrir la présence et la direction des eaux
souterraines mieux que les gens non préparés. »
Un musée en plein air. — Un simple maitre
d'école d'une petite paroisse au nord de l'ile de
Gothland, dans la Baltique, a eu l’heureuse pensée
d'établir en plein air une sorte de musée rappelant
la vie et les coutumes des ancêtres, et il a eu la
persévérance de mener son œuvre à bonne fin.
Au milieu de la prairie, où il a organisé cette
exposition, se trouve une ferme du xvrre siècle qui
est le centre de la collection rassemblée en ce
lieu. Dans la cour, on a exposé les instruments
d'agriculture du passé, et dans des annexes tout
autour, l'outillage d'industries éleintes aujourd'hui.
Un terrain est consacré à la collection des tom-
beaux de différentes époques et aux formes d'inhu-
mation en usage dans la région depuis un siècle
avant Jésus-Christ. Une de ces tombes estun monu-
ment en pierre, représentant une barque de Wikings.
Ailleurs, des cercles de pierre, si nombreux dans
ce pays. L'un d’eux entoure un petit monticule,
tribune de l’orateur dans les assemblées du peuple.
Cette façon d'apprendre aux enfants et même
aux adultes l'histoire de leurs ancêtres mérite tous
les éloges; constituer une exposition de ce genre
vaut mieux, à coup sûr, que de faire de la politique,
etce magister suédois donne un excellent exemple
à nos instituteurs. Le malheur, c'est qu'ils n’en
profiteront pas.
GOSMOS
117
CORRESPONDANCE
A propos du bois à crayons.
L'insuffisance ou plutôt l’épuisement de l'essence
forestière appelée improprement cèdre rouge (car
c'est un genévrier), pour la fabrication des crayons
de luxe, aurait, parait-il, donné une valeur extraor-
dinaire aux vieilles charpentes faites de ce bois,
aux barrières des enclos. Si bien qu’aux États-Unis,
vieilles barrières et vieilles charpentes vaudraient
plus que les maisons et les propriétés nanties de
ce bois précieux; on les achèterait pour l’en extraire.
C'est ce que nous apprend M. N. Lallié dans le
Cosmos, n° 1 434, du 18 juillet.
Il s'agirait de savoir exactement à quelle variété
de genévrier (Juniperus Linn.) appartiendrait ce
fameux « cèdre rouge »; on pourrait alors songer
à le planter et à le multiplier.
Nombreuses sont les espèces de genre. Carrière,
dans son classique Traité général des Conifères,
n’en compte pas moins de quarante. On lit, dans
le Dictionnaire de la culture des arbres de Bosc
et Baudrillart, vieux d'une centaine d'années, que
le « cèdre (genévrier) rouge » fournit un bois léger
et tendre qui passe pour incorruptible. On en fait
des seaux, des baquets, du bardeau, de la charpente.
La couleur est rougeâtre et son odeur suave.....
Toutefois, il ne parait pas que ce genévrier ou
cèdre, qualifié de rouge par Bosc et Baudrillart,
soit le vrai « cèdre rouge » dont parle M. Lallié,
car les auteurs ajoutent aussilôt: « C’est lui qui
supplée au genévrier des Bermudes, aujourd'hui
très rare par la grande consommation qui en a été
faite pour le revêtissement des crayons de plomba-
gine ou mine de plomb. Aucun insecte ne l'attaque. »
Ainsi le vrai cèdre rouge des crayons de luxe,
celui dont le bois de charpente vaut plus que les
maisons mêmes où il entre comme charpente, ne
serait autre que le Juniperus bermudiana Linn.
Sur ce dernier, les données sont peu nombreuses.
Carrière ne lui consacre que quelques lignes. Il
note que cet arbre « habite les iles Bermudes, où
il est très rare, se trouve aussi, assure-t-on, dans
les Canories et les Burbades.
Mais il parait bien que ledit genévrier rouge a dù
être jadis abondant sur le continent new-américain,
sous les latitudes chaudes, puisqu'il y était employé
communément aux usages les plus vulgaires : char-
pente, barrières, enclos.
D'autre part, le genévrier de Virginie (Juniperus
virginiana Linn.), appelé improprement aussi
« cèdre rouge », possède, en un degré moindre
probablement, les qualités de celui des Burbades.
Indigène en Amérique à partir du golfe du Mexique
jusqu'au 50° parallèle (limite septenirionale des
Etats-Unis) et dans les Grandes Antilles, il est,
sinon très abondant, moins rare du moins que son
118
congénère. Il se rencontre fréquemment, en France,
dans les parcs et jardins paysagers, offre un tem-
pérament rustique, croit dans tous les sols, bien
qu’il préfère les terrains secs et siliceux, et à toutes
les expositions; il ne requiert pas, nécessairement,
comme le bermudiana, un climat chaud, puisque
COSMOS
4er AOUT 1949
la limite Nord de son indigénat est le 50° degré.
Il serait intéressant de rechercher et constater
dans quelle mesure son bois serait inférieur à
celui de son congénère des Bermudes, et d'examiner
s’il n'y aurait pas avantage à le propager en vue
de la fabrication des crayons. C. DE KIRWAN.
La filtration des eaux du Nil dans l'isthme de Suez.
Comme il pleut rarement en Égypte, le Nil
y pourvoit presque seul à l’arrosement du sol, et
depuis de longs siècles, ce coin privilégié de l'Afrique
lui doit sa richesse. Ce fleuve célèbre a permis
F1G. 1. — INSTALLATION FILTRANTE DU CANAL LE SUEZ A PORT-SAïb.
notamment à de Lesseps de percer l’isthme de
Suez. Sans le creusement du canal Ismailieh, qui
en dérive et qui vint apporter sur les chantiers
l'eau indispensable à l’alimentation des travailleurs,
le grand Français n'aurait pu mener à bien cette
colossale entreprise. Mais si le limon que charrient
les eaux du Nil fertilise les terres, il faut le sup-
primer par une filtration préalable pour quon
puisse les utiliser comme boisson.
Jadis, on construisit done au Caire, à Alexandrie
et dans quelques autres villes égypliennes, des
filtres à sable malheureusement trop primitifs
pour résoudre le problème. Aussi la ville d’Alexan-
drie décida, il y a quelques années, de s'adresser
aux méthodes de filtrage américaines. Plus récem-
ment, la Compagnie universelle du Canal maritime
de Suez, afin de lutler contre le paludisme, réalisa
des installations d'eaux potables système Puech-
Chabald’abord à Ismailia. Cette ville, anciennement
si insalubre, ne tarda pas à devenir indemne de la
fièvre. Devant de tels résultats, on appliqua le
même procédé d'épuration à Suez et à Port-Saïd,
l'alimentation en eau pure des villes situées sur le
canal et des navires qui transitent présentant une
importance capitale au point de vue de la protec-
tion sanitaire mondiale.
N° 1436
Parmi ces installations filtrantes édifiées sous la
direction de M. Perrier, ingénieur en chef de la
Compagnie du Canal, la plus importante est celle
de Port-Saiïd (fig. 4), mise en service au commence-
ment de 1910 et capable de filtrer quotidiennement
plus de 15000 mètres cubes d'eau nécessaires aux
besoins de la navigation ou de la population
urbaine.
L'eau douce du Nil arrive par une rigole, qui se
détache à Ismaiïilia du canal Ismailieh et, à son
entrée à Port-Saïd, passe, grâce à un tunnel-siphon
en ciment armé, au-dessus d'un chenal maritime
aboutissant à un bassin de commerce intérieur.
COSMOS 119
Cette conduite débouche à l'usine de filtrage, où
une série de pompes élévatoires permet de
relever les eaux brutes. Afin d’assurer un débit
aussi régulier que possible, on a établi un réservoir
régulateur d’une capacité de 200 mètres cubes, en
surélévation au-dessus des filtres.
L'installation de Port-Said comporte les trois
stades (dégrossissage, filtration rapide, filtration
lente) qui caractérisent le système Puech-Chabal.
Le dégrossissage consiste à faire passer l’eau à fil-
trer sur une succession de lits de graviers de plus
en plus fins avec des vitesses filtrantes de plus en
plus faibles. De la sorte, l'élimination des substances
rex
A f- gm 2 4 TRE
C oo ET
A ar e
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F1G. 2. — RÉSERVOIR SURÉLEVÉ DE 3% M DE L'INSTALLATION FILTRANTE DE PORT-SAÏD.
en suspension dans l'eau se poursuit méthodique-
ment. Les particules grossières s'arrêtent dans le
premier bassin, celles plus fines dans le second, et
ainsi de suite. À Port-Saïd, les filtres dégrossisseurs
comprennent quatre jeux semblables de deux com-
partiments chacun et offrent une surface utile
totale de 600 mètres carrés. Pour effectuer le net-
toyage d’un de ces bassins, il suflit de le vider
jusqu’à la surface des graviers et d'envoyer simul-
tanément de bas en haut un courant d’eau et d’air
sous pression à travers la masse limoneuse. Aussitôt,
une vive agitation se produit (fig. 3), la plus grosse
partie des boues en suspension s'écoule facilement
par l'orifice de vidange, tandis que des ouvriers
munis de pelles et de ringards facilitent et achèvent
l'opération.
La préfiltration succède au dégrossissage et le
complète. On amène l'eau dégrossie au-dessus
d'une couche de gros sable reposant sur un drai-
nage en briques spéciales perforées établi de
manière à ménager une circulation uniforme à tra-
vers la masse sablonneuse. L'installation de Port-
Saïd comporte seize préfiltres offrant une surface
totale de 4 000 mètres carrés; l’eau en sort limpide
et à un état d'épuration avancée. En mème temps
qu'une clarification parfaite, les deux opérations
120
précédentes réalisent une épuration bactériologique
susceptible de dépasser 95 pour 100.
La purification s'achève dans des filtres à sable
terminaux au fond desquels on a disposé une
Biel UN
LE. © cer
F EE Nt N S
Mar aF AN
pa an
F1G, 3. — NETTOYAGE D'UN BASSIN
PAR UN COURANT D'AIR SOUS PRESSION.
épaisseur de un mètre de sable (provenant des
dunes d'ismailia) qui repose elle-même sur une
couche drainante d’une construction spéciale. L'eau
préliltrée traverse verticalement et de haut en bas
COSMOS
Aer aouT 1912
la couche sablonneuse pour se rendre ensuite dans
un vaste réservoir d’eau filtrée.
D'autre part, un bassin découvert de 8 000 mètres
cubes de capacité, qui précède l'installation filtrante,
sert de réserve en cas d'accident ou de longues
réparations sur la conduite d'’amenée, C’est là que
s'effectue en outre la coagulation préliminaire
des argiles fines. L'eau du Nil renferme effective-
ment des particules argileuses très ténues qui s’y
trouvent en suspension à l’état colloïdal et qu’on
précipite complètement au moyen de permanga-
nate de potasse à la dose d’un millionième (4 kilo-
gramme pour {000 mètres cubes). L'’'addition s'opère
dans une petite bâche disposée à l'entrée du bassin
de réserve; l’eau arrive contre un voie vertical
qui brise le courant, et, à sa sortie, plusieurs appa-
reils de prise en surface la puisent pour la faire
écouler par gravité jusqu'aux dégrossisseurs.
Finalement, l’eau filtrée, dont le nombre de bac-
téries ne dépasse pas normalement 10 par centimètre
cube, est amenée à trois réservoirs qu'on aperçoit
sur la figure 2. La surélévation de ces réservoirs
à 34 mètres de hauteur donne la pression voulue
pour distribuer l’eau dans toute la ville de Port-
Saïd. De plus, la Compagnie a annexé à l’usine de
filtrage un laboratoire où un personnel spécial
exerce une surveillance bactériologique continue
sur le fonctionnement des installations. L'eau sor-
tant d’un filtre nouvellement nettoyé n'est livrée à
la consommation qu'après une analyse complète,
et, grâce à ces sages mesures, l’état sanitaire se
maintient excellent dans l’isthme de Suez. Les épi-
démies d’origine hydrique, si fréquentes autrefois,
ne s'y observent que rarement et proviennent
presque toujours des villes d'Égypte dépourvues
d’eau potable.
Jacques Boyer.
Le transformisme, ses variations et l’eau de mer.
En rendant compte d’un ouvrage de M. Étienne
Rabaud intitulé : Le transformisme et l'expérience,
le Cosmos du 6 juin dernier fait très judicieuse-
ment observer, à l’encontre du parti pris antifina-
liste de l'auteur, ceci : personne ne conteste que
les instincts des animaux, simples ou complexes,
ne soient conditionnés par les circonstances am-
biantes, par les phénomènes d'ordre physique ou
chimique dont ils subissent l'influence. Or, c'est
cela et cela seul que démontrent les DUREE
expériences décrites par M. Rabaud.
Mais ici se retrouve, au fond, l'éternelle con-
fusion sur quoi s'appuie l'école à laquelle il
appartient, et qui consiste à prendre les condi-
tions nécessaires à la formation des phénomènes
pour la cause elficiente de ces mêmes phénomènes,
De la segmentation de l'œuf protoplasmique en
plusieurs blastomères qui se subdivisent à leur
tour en préparation des différents organes de l'être
en formation, le savant maître de conférences à
la Sorbonne conclut que tout se passe comme si
leur cause intrinsèque résidait dans la matière
protoplasmique elle-même, et que, par conséquent,
ladite matière se segmente, se transforme et se
développe, évolue par sa propre vertu.
Le raisonnement ne laisse pas que d'être boi-
teux.
Newton disait aussi, en énonçant la grande loi
de la gravitation universelle, que « tout se passe
comme si les corps s’attiraient en raison directe
de leurs masses et inverse du carré de leurs dis-
lances »; mais il avait grand soin d'ajouter, avec
N° 1436
une sévérité d’ailleurs peut-être excessive, qu'il
regardait comme indigne d’un philosophe de con-
sidérer cette attraction apparente comme une
réalité. Pour lui, comme encore aujourd’hui pour
la plupart des astrophysiciens, le grand phénomène
de la gravitation universelle reste encore inexpli-
qué, bien que « tout se passe comme si, etc. » La
cause en serait ailleurs.
De même pour la segmentation protoplasmique:
tout peut bien se passer, quand d'un ovule fécondé
se forme et se développe peu à peu un organisme
plus ou moins compliqué, comme si ce développe-
ment et cette organisation avaient leur principe et
leur cause dans cet œuf lui-même. Mais cela ne
prouve rien et n'empêche point de constater,
comme le fait remarquer en toute évidence le
compte rendu du Cosmos, qu'il y a dans l'individu
vivant, dans l'espèce vivante, et surtout dans les
instincts de telle ou telle espèce animale, quelque
chose de transcendant à la matière, quelque chose
que n'atteignent point les expériences physico-
chimiques et à quoi se heurte vainement la com-
pétence de l’expérimentateur.
Comme l'indique le titre de son livre, M. Rabaud
en tient toujours pour l’évolution transformiste;
il semble ignorer que cette théorie, qui suscita
naguère de si ardentes polémiques, subit en ce
moment une crise dont on ignore quand elle sortira.
Lui-même, cependant, y joue un ròle en contestant
absolument les vues de Hugo de Vries sur les muta-
tions brusques, et soutenant exclusivement les
variations imperceptiblement lentes. M. Le Dantec
lui-même, l'un des plus violents champions de la
thèse antifinaliste, autrement dit des harmonies
sans plan préalable mais purement fortuites et,
par suite, de l’évolutionnisme absolu, a écrit tout
un livre sur la crise du transformisme (4). M. le pro-
fesseur Quinton, lui, ne nie pas, il est vrai, lévo-
lution; mais il refuse de lui accorder la portée
scientifique que ses partisans lui attribuent (2). La
Revue de Philosophie a, dans le courant de l’année
1910, publié toute une série d'articles sur les
diverses théories transformistes, les objections
qu'elles soulèvent, les faits et considérations plau-
sibles qu’elles peuvent invoquer (3). Et la conclu-
sion d'ensemble qui parait se dégager de ces
nombreux et si divers travaux, c’est que si quelques
(1) La crise du transformisme, 1909; Paris, Alcan.
(2) Cf. D’ Lavrano, Sur la crise du transformisme.
(3) Driescu, Biologie scientifique et transformisme.
A. GExeci, Dariwinisme et vitalisme.
A. Briot, le Problème de origine de la vie.
C. Towgnp, le Transformisme dans les derniers
échelons du règne végétal.
E. WasMaxn, la Vie psychique des animaurr.
H. Coun, la Mutation.
R. DE SinéTy, Mimélisme et darwinisme.
M. KozLuaxx, les Facteurs de l'évolution.
J. Manrraix, le Néovitalisme et le darwinisme.
COSMOS
121
faits en paléontologie requièrent certaines transfor-
mations d'espèces les unes dans les autres, il n'y
aurait pas là de loi générale dûment constatée et
applicable à tous les organismes sans distinction.
D'autre part, M. le D" Lavrand, professeur à la
Faculté libre de médecine de Lille, a publié plus
récemment un petit volume (1), dans lequel, pas-
sant en revue les divers systèmes transformistes,
il démontre avec une clarté parfaite l'illogisme et
l'inanité d’un évolutionnisme sans cause première
‚et sans finalité, tandis que l’évolutionnisme ration-
nel et vraiment philosophique est une hypothèse
scientifique plausible et vraisemblable si l’on veut
et tant que l’on voudra, mais rien de plus.
En présence d’un tel état de choses, sur un point
qui suscite des controverses si nombreuses et si
variées, il faut, reconnaissons-le, une certaine
outrecuidance pour affirmer sans sourciller que
« l'expérience apporte à l’évolution (telle que la
comprend M. Rabaud)une éclatante confirmation »:
qu'elle est « nécessairement le résultat des interac-
tions permanentes de l'organisme et du milieu »,
et qu'enfin « l'expérience ne laisse rien subsister
du créationnisme », lequel n'est, suivant l’au-
teur, qu'un ensemble d’affirmations peu fondées,
a cachant sous un verbalisme compliqué le renon-
cement à comprendre », attendu, prétend-il, que
« la recherche cesse au moment même où elle devrait
commencer. » (2)
Un aveu, utile à noter, node du reste ces
affirmations tranchées:
« Si nous renoncons à trouver dans le milieu la
source des transformations, nous sortons néces-
sairement (?) du transformisme pour entrer dans
le créationnisme et son cortège téléologique. »
Observons, d'abord, qu’on ne sort pas nécessai-
rement du transformisme en entrant dans le « créa-
tionnisme », attendu que la donnée d’une création
originaire, in fieri, est la seule qui rende logique-
ment et rationnellement admissible toute théorie
transformiste. Oui, du transformisme sans cause
première; des « variations préexistantes »; d'une
« substance vivante se ramenant à un agrégat de
caractères venant successivement au jour », le
tout par la seule force inhérente à une matière
existante par elle-même; de ce transformisme-là, il
est clair que l’on ne peut sortir que pour «entrer
dans le créationnisme et son cortège téléologique ».
Mais, en mème temps, l'on sort de l'illogisme et du
rationnellement absurde, pour rentrer dans le
domaine de la raison et du bon sens.
Il est vrai que, dès qu'on entre dans le « créa-
tionnisme » et le téléologisme, on ouvre la porte
toute grande à la providence d'un Dieu personnel,
infini, créateur..... Et c'est là, pour certaine école,
(1) Sur la crise du transformisme. Paris, Léthielleux,
(2) CF, le Transformisme et l'erpérience, par ÉTIENNE
Rasaup, p. 309 et s.
122 :
22 COSMOS
une extrémité qu'il faut éviter à tout prix.
Ce en quoi nos savants ne font plus de la science,
mais bien, quoiqu’ils en aient, de la métaphysique,
une métaphysique négative et ruineuse, mais enfin
une métaphysique étrangère à la science. Le rôle de
cette dernière est d'observer et de constater les phé-
nomènes, d'en dégager les lois, non d’en rechercher
la cause première. Cette recherche est du domaine
de la philosophie (laquelle est, elle aussi, une
science, d’un ordre différent, il est vrai, mais une
science dans l'acception plénière du terme qui
signifie Le savoir’), et de cette partie de la philosophie
qui a nom ontologie ou métaphysique générale.
Dire que l'expérience apporte à l’évolution (for-
tuite et sans cause) une éclatante confirmation,
c’est se payer de mots. Vous pouvez bien constater
l’enchainement des phénomènes, les transforma-
tions d'organes simples en organes plus compliqués,
ou mème (chose beaucoup plusdélicateet discutable)
d'espèces en d’autres espèces; vous ne pouvez pas
établir scientifiquement que ces phénomènes ou
séries de phénomènes ne dépendent pas à l’origine
d'une cause première et directrice qui préside à
leur marche. En le niant, vous faites, sous prétexte
et à propos de science, une mauvaise métaphysique;
vous ne faites plus de la science proprement dite.
Oser affirmer que ce qu’on appelle « le création-
nisme », c'est-à-dire l’œuvre de la création, « n'est
qu'un ensemble d’affirmations peu fondées, cachant
sous un verbalisme compliqué le renoncement à
comprendre », prouve qu'on est dans l'ignorance
absolue de ce dont on parle, et que, pour vouloir
passer du rôle de naturaliste émérite et d'observa-
teur sagace à celui d'ontologiste et de théologien,
on s'expose à prendre le Pirée pour un homme.
Le paralogisme constant, sur lequel se fondent
toutes les dissertations extrascientifiques ayant
pour but d'attribuer l’origine de la vie à un mou-
vement propre et inné de la matière évoluant
d'elle-même et par elle-mème, est toujours la con-
fusion, comme nous le disionsau commencement,
entre les conditions indispensables à l'exercice de
la vie organique et le principe, la cause originelle
de cette même vie.
Considérons celle-ci, par exemple, dans l'homme
et les animaux terrestres. Trois conditions, entre
autres, lui sont absolument nécessaires: une
atmosphère respirable, une certaine dose de cha-
leur comprise en des limites assez restreintes et
l'alimentation. La preuve que ces conditions sont
inéluctables, c'est que la suppression d’une seule
amène soit immédiatement, soit à bref délai,
l'extinction de la vie.
Dirons-nous pour cela que température modérée,
air respirable et saine alimentation sont les causes
de la vie? Non, assurément, car, si elles l'étaient,
der AOUT 1912
ni hommes ni animaux, ces conditions subsistant,
ne vieilliraient ni ne s’éteindraient de mort natu-
relle. La vie est donc conditionnée, mais non
causée par elles, ce qui est essentiellement diffé-
rent.
Il faut croire que cette nuance fondamentale est
difficile à saisir, car de bons esprits eux-mêmes se
laissent prendre à cette confusion.
Nous avons fait observer plus haut que M. Quin-
ton dénie à l’évolution une portée qu’elle ne saurait
revendiquer scientifiquement. Il nie notamment
les variations indéfinies dont Darwin, généralisant
à l'excès, avait fait, par l’évolution, la grande loi
de la biologie, le rythme universel de la vie. Il
établit, au contraire, la loi de la constance de la
vie; mais, à part cela, il n’en reste pas moins attaché
au principe du transformisme.
Par des analyses et une étude approfondies et
comparées du sang et de l’eau de mer puisée à une
profondeur et un éloignement suffisant du rivage
pour l'obtenir à son état de pureté normale, le
savant professeur est arrivé à établir qu'il y a
similitude parfaite entre cette eau et le « milieu
interne ou vital » de l’homme et des animaux: ce
milieu intérieur est à distinguer soigneusement du
milieu extérieur qui est celui dans lequel vient se
développer et agir l'être vivant, lequel change ou
a pu changer plus ou moins dans la suite des
âges, le milieu intérieur ou vital n'ayant jamais
varié.
Un grand nombre d'expériences, des plus signi-
ficatives, ont pleinement confirmé les conséquences
que le savant observateur avait déduites de ses
analvses. « L’eau de mer, à la concentration iso-
tonique, dit le D" Hellion, étant regardée comme
le milieu vital ou intérieur des organismes supé-
rieurs, il devait en résulter que ce liquide, injecté
dans ces organismes, devait s’y montrer inoffen-
sif. » (1) C'est ce qu'ont pleinement confirmé les
experiences suivantes.
Il fut injecté à des chiens un poids d’eau de mer
égal ou supérieur au poids du corps de chacun
d'eux, sans que les animaux en aient été sensible-
ment incommodés.
Mieux encore. Un chien est saigné à blanc et
reste étendu inerte sur la table d’expérience; le
D: Quinton lui injecte, en place, une quantité d'eau
de mer égale à celle du sang retiré. « Le chien se
ranime, sort vite de son abattement, trotte dès le
lendemain, se rétablit rapidement et présente
mème quelques jours plus tard une remarquable
vilalité. » Ainsi l'eau de mer substituée au sang
en avait exaclement rempli les fonctions.
D'autre part, des globules blancs du sang ont pu
étre conservés vivants dans l'eau de mer, in vitro,
durant un temps assez long, tandis qu’ils meurent
(1) D' HELLION, Revue pratique de biologie appliquée.
N° 1436
promptement dans tout autre milieu artificiel (4).
Nous n'avons pas à indiquer ici les ressources
nouvelles que peut procurer à la thérapeutique la
découverte géniale du D° Quinton. Notre but, ici,
est différent.
L'ingénieux observateur veut tirer, de cette iden-
tité par lui constatée entre le sang organique et
l'eau de mer, la conclusion à notre sens excessive
que la vie animale tout entière a pris naissance dans
la mer ; que toutes les cellules animales aujourd’hui
vivantes (et sans doute aussi celles des espèces
disparues), soit isolées, soit groupées en organismes
plus ou moins complexes, « ont eu pour ancêtres
des cellules qui ont vécu baignées directement
dans le milieu marin » (2). En sorte que tous les
animaux existant ou ayant existé sur la terre pro-
céderaient — par voie de modifications succes-
sives dans la disposition des organes et par adap-
tation graduelle à des milieux très différents,
d’accommodement à des conditions très diverses —
d'une souche primitive issue du milieu marin. Les
cellules, cependant, différemment groupées suivant
l’accroissement, le développement et la transfor-
mation des organes, se seraient conservées à leur
état primitif. De sorte que, en dépit des change-
ments de milieu extérieur subis par les organismes,
les cellules elles-mêmes n’ont pas cessé de vivre
dans un milieu marin.
De là toute une théorie évolutionniste appuyée
sur des considérations différentes de celles de
Darwin et de son école.
Mais la conclusion est contestable.
Il n’y a pas nécessairement relation de cause à
effet entre la composition de l'eau de mer et la
similitude de composition du sanganimal. Expliquer
cette similitude ou, si l’on veut, cette identité, par
la formation originelle de la vie animale au sein
des mers, est une hypothèse; mais ce n’est qu’une
hypothèse, ce n’est pas une preuve. On pourrait
trouver d’autres explications aussi probantes.
D'ailleurs, il y a longtemps que le fait de la pro-
COSMOS.
123
portion considérable de l’eau dans les tissus et
liquides organiques est connue. Ce qui est nouveau,
c'est la constatation de la composition saline, ou
plutôt marine, du sang. Il suffit donc que les
mêmes éléments chimiques que ceux de l'eau de
mer y aient été surajoutés pour réaliser la simili-
tude constatée par M. Quinton. Et cela a pu ètre
accompli sans immersion dansles mers des primitifs
germes vitaux.
Il y a läun fait acquis, parait-il, et pouvant avoir
en médecine et en chirurgie des applications pré-
cieuses, mais qui est encore inexpliqué. Ft il faut
bien qu’il y ait sur ce point, comme en tant d'autres
dans les arcanes de la science, quelque chose de
mystérieux, s’il est vrai qu'après concentration par
la chaleur et retour par dilution au titre primitif,
l'eau de mer perd ses propriétés régénératrices.
Des œufs d’oursins fécondés se développent déposés
dans un cristallisoir rempli d’eau de mer normale;
celle-ci, ayant été traitée comme il vient d’être dit,
devient impropre à l’éclosion des œufs. Pourtant,
rien n'indique que par un simple chauffage cette
eau n'ait rien perdu de sa composition et des élé-
ments chimiques qui la constituent... (1) Pourquoi
donc n'a-t-elle plus la même vertu qu'auparavant?
Concluons donc que plus on avance dans les
découvertes scientifiques, plus se révèlent de nou-
veaux faits précédemment insoupçonnés, mais dont
tout d'abord l'explication nous échappe. De nou-
veaux progrès, de nouvelles découvertes nous en
donneront sans doute, à nous ou à nos descendants,
l'explication certaine quelque jour. Mais à vouloir
trop promptement prendre pour une loi ou une
donnée acquise la première hypothèse qui se pré-
sente à l'esprit, on risque de se lancer dans l'arbi-
traire.
Saluons la merveilleuse découverte de M. Quin-
ton, mais ne nous hâtons pas d’en faire la base
d'une nouvelle théorie transformiste s'ajoutant à
tant d’autres, depuis celles de Lamarck et de
Darwin. C. DE KIRWAN.
Les vermifuges dans la thérapeutique moderne.
Les substances anthelminthiques, c'est-à-dire
propres à être employées comme médicaments
pour débarrasser le tube digestif des vers qui s’y
établissent en parasites, sont assez nombreuses.
On ne les utilise cependant pas indistinctement,
parce que chacune d'elles offre des avantages et
des inconvénients particuliers qui la rendent, sui-
vant les cas, efficace ou dangereuse.
L'étude de ces propriétés a conduit la thérapeu-
(1) Loc. cit.
(2) Loc. cit.
tique à faire parmi elles une sélection et à en
régler l'emploi suivant la nature du parasite à
éliminer et aussi suivant le degré de résistance de
l'organisme du patient. Il ne faut pas oublier, en
effet, que les anthelminthiques sont des poisons,
et que, si à ce titre ils tuent le ver ou le mettent
en infériorité vitale, ils ne sont pas sans danger
pour le tube digestif humain qui les reçoit mo-
mentanément.
Voici, pour chacune des principales espèces de
(1) Revue pratique de biologie appliquée.
121
vers intestinaux dont nous avons à appréhender
l'invasion, la liste des médicaments que prescrit
le plus volontiers la médecine actuelle, et qui sont
ceux dont l'emploi a paru comporter le maximum
d'efficacité avec le moins d’inconvénients.
Contre l’oxyure vermiculaire, petit ver assez
fréquent, et qui vit en familles dans le rectum, les
substances absorbées par la bouche restent inac-
tives, parce qu’elles sont digérées avant d'atteindre
le point où siège le parasite : il faut donc inter-
venir localement.
On a le choix entre l'introduction d’une mèche
de gaze imbibée d’onguent gris, ou les lavements
d'eau salée, d'eau sulfureuse, d'huile de foie de
morue et de glycérine, celles-ci soit séparément,
soit associées. Un traitement souvent couronné de
succès comporte l’administration en lavements du
mélange suivant, dont la formule est due au
RAMEAU FLEURI DE « BRAYERA ANTHELMINTHICA » (KOUSSO).
Dr Scheffer : teinture d’eucalyptus, 5 grammes;
teinture de myrrhe, 2 grammes; borate de soude,
3 grammes; eau, 500 grammes.
Contre ce mème parasite on a quelquefois con-
seillé la naphtaline à la dose de 4 à 5 grammes
par jour pour les adultes, et de 0,5 à 4 g pour les
enfants, avec adjonction d’huile de ricin.
Mais cette méthode est dangereuse, l'huile agis-
sant comme dissolvant de la naphtaline et favo-
risant son absorption par l'organisme; tout récem-
ment. les journaux médicaux ont eu à enregistrer
un cas d’empoisonnement mortel survenu dans ces
conditions chez un enfant de six ans.
Pour obtenir l'expulsion de l’ascaride lombri-
coide, deux médicaments surtout, parmi quatre
ou cinq, sont recommandés : le semen-contra (ou
son principe actif la santonine) et la mousse de
Corse (gigartina helminthochorton).
COSMOS
A" aout 1942
La santonine est de préférence administrée aux
adultes; elle s'emploie alors à la dose de 0,05 à
0,20 g. Ses propriétés sont plutôt vermifuges que
vermicides, c'est-à-dire qu’elle engourdit le para-
site sans le tuer: son action doit être par suite
corroborée par celle d’un purgatif, provoquant
l'expulsion du ver mis en état d’infériorité vitale.
C'est un médicament toxique, suffisamment
toléré en général à la dose utile, mais qui chez
certains individus particulièrement susceptibles
peut provoquer des accidents graves.
Elle agit sur le système nerveux central, et on
a constaté à la suite de son emploi une passagère
xanthopsie (c’est-à-dire la vision en jaune des
objets), causée probablement par une paralysie
des éléments nerveux de la rétine sensibles au
violet.
Au-dessus de 0,5 g la dose devient dangereuse
et peut occasionner la mort par inhibition des
centres respiratoires.
De plus, il ne faut pas oublier que, même à
petites doses espacées, la santonine s’élimine très
lentement de l'organisme, et laisse toujours sub-
sister la crainte d'une accumulation provoquant
l’empoisonnement comme le ferait une dose mas-
sive. D'où la nécessité de choisir avec soin le pur-
gatif qui doit lui être associé, et d'employer pour
ce but un sel à l’exclusion de l’huile de ricin, dans
laquelle elle est très soluble.
Chez l'enfant, plus sensible que l'adulte aux
médicaments, la santonine ne doit être que rare-
ment prescrite, et il est préférable d'employer la
poudre de semen-contra, à la dose de 1,5 g, bien
mèlée à de la confiture ou à du miel.
S'il y avait quelque raison d'employer la santo-
nine, il faudrait le faire avec prudence, et chez les
enfants de moins de trois ans ne pas dépasser la
dose de 0,05 g.
Enfin, il y a des enfants particulièrement faibles
(convalescents, anémiques) auxquels ne conviennent
ni la santonine ni le semen-contra. Dans ces cas
on pourra avoir recours, avec chances de succès,
au mélange d'algues connu sous le nom de mousse
de Corse (où domine le gigartina ou gracilaria
helminthochorton). On en fait une infusion dans
du lait bouillant, à la dose de 1 à 1,5 g par
annte d'âge de l'enfant; on administre le liquide
d'infusion après l'avoir passé et édulcoré,
Contre l’ankylostome duodénal, parasite qui
n'est fréquent que dans certaines conditions spé-
ciales de résidence ou de profession, et qui cause
la dangereuse affection connue sous le nom
d'anémie des mineurs, le vermifuge de choix, du
consentement unanime des médecins, est l'extrait
éthéré de fougère mâle, à la dose de 2 à 8 grammes
en plusieurs fois.
On peut remplacer l’extrait par la poudre, au
taux de 6 à 42 grammes dans 200 grammes d’eau.
N° 1436
Ce médicament exige le concours d’un purgatif,
de préférence drastique (calomel, scammonée) qui
se donne deux heures après l’administration de la
substance vermifuge.
Ces trois vers, oxyure, ascaride, ankylostome,
appartiennent au groupe des nématodes, ou vers
ronds. Ils sont encore justiciables, outre les
remèdes spécifiques qui viennent d'être indiqués,
du thymol, pris en cachets à la dose de 4 à
4 grammes, dose fragmentée de telle manière que
- le médicament soit absorbé par petites quantités
en plusieurs fois et que le traitement dure trois
jours.
L'emploi du thymol exige l'abstention absolue
de toute boisson alcoolique; s’il donnait lieu à des
douleurs gastriques, il faudrait donc se garder
d’avoir recours pour les calmer à l’eau chlorofor-
mée ou à l’éther, et prendre seulement de l’eau
pure, de l’eau de fleurs d'oranger ou de la glace.
Parmi les cestodes ou vers plats, trois espèces
surtout sont à redouter par l’homme : le bothrio-
céphale, le ténia inerme et le ténia solium ou ver
solitaire proprement dit. Leur expulsion exige des
substances très actives, dont l'action doit être
aidée d'un purgatif et préparée par une diète lactée
de la deuxième moitié du jour précédant le trai-
tement.
Le bothriocéphale est très sensible à l'extrait
éthéré de fougère måle, dont le mode d'emploi et
les proportions viennent d'être indiqués, et au
kamala, qui parait constituer contre le redou-
table cestode le remède le plus convenable.
Le kamala est une poudre rouge obtenue. en
brossant les capsules d'une euphorbiacée tincto-
riale des Indes orientales et de l’Australie tropi-
cale, le Rottlera tinctoria.
Cette poudre se prescrit à la dose de 10 à
12 grammes, à prendre en deux fois; le kamala
s’administre également en teinture. Cet anthelmin-
thique offre l'avantage de ne pas nécessiter la
coopération d’un purgatif, et suffit à lui seul à
provoquer la mort et l'expulsion du parasite.
Pour avoir raison du ténia inerme, il faut un
agent énergique. Celui qui donne les résultats les
plus satisfaisants est un alcaloide extrait de
l'écorce de la racine du grenadier, la pelletiérine,
qui s’administre sous forme de sulfate.
Les propriétés vermifuges et ténicides de l'écorce
du grenadier sont connues et utilisées depuis long-
temps; son emploi à ce titre était déjà vulgaire
du temps de Caton le Censeur. Cependant il semble
bien que l'écorce soit moins active que son alca-
loïde : d’après Béranger-Féraud, la proportion des
COSMOS
125
succès avec l'écorce ne serait que de 45 pour
400 et atteindrait 90 pour 100 avec la pelletiérine.
L'énergie du sulfate de pelletiérine se renforce
par l’addition de tannin, substance qui existe
spontanément dans l’écorce; on conseille la for-
mule suivante : sulfate de pelletiérine, 0,4 g;
tannin, 1,2 g; eau, 100 grammes; cette dose à
prendre en deux fois.
À la suite de l'absorption de la pelletiérine, un
purgatif s'impose; le meilleur est l’huile de ricin,
prise une demi-heure après le médicament. Celui-
ci occasionnant du vertige, le patient devra, après
l'avoir absorbé, demeurer étendu une demi-heure.
La pelletiérine est toxique et produit sur le sys-
tème nerveux des effets qui peuvent se rapprocher
de ceux du curare. De là l'obligation du purgatif
adjuvant et la nécessité de restreindre à la plus
courte durée possible la diète lactée préalable.
Quoique les enfants soient moins sensibles que
les adultes aux propriétés nuisibles de la pelletié-
rine, cependant une substance aussi énergique ne
convient guère à des organismes jeunes et fragiles;
il faudra en tout cas ne la leur administrer qu'avec
la plus extrême prudence, et ne pas dépasser la
dose de 0,2 g, c’est-à-dire la moitié de la quantité
convenable pour l'adulte.
Contre le ver solitaire proprement dit (Tænia
solium), la thérapeutique peut employer avec
toutes chances de succès le kousso, remède formé
des fleurs d'une rosacée indigène en Abyssinie, le
Brayera anthelminthica.
Le kousso est à la fois ténifuge et ténicide; par
suite, il ne nécessite l’adjonction d’un purgatif (en
ce cas, un sel) que s’il n’a pas provoqué l'expulsion
du parasite dans l'heure qui suit son absorption.
Il s'emploie à la dose de 15 à 30 grammes pour les
adultes, et de 45 grammes pour les enfants.
Tel est l’arsenal anthelminthique auquel la méde-
cine moderne a le plus volontiers recours, à raison
de la constatation qui a été faite de son efficacité.
Toutefois, l’indication qui vient d’être donnée ne
saurait être considérée comme limitative, parce
qu’il faut toujours tenir compte, en thérapeutique,
du tempérament propre du patient, qui peut le
rendre réfractaire aux médicaments d’une action
sûre et constante dans la généralité des cas. En
présence d'un insuccès dû à cette exceptionnelle
résistance de l’organisme, c’est au médecin à in-
stituer un autre traitement. Dans le cas particulier
des vermifuges, cette substitution peut se faire
aisément, car les remèdes ne manquent pas.
A. ACLOQUE.
126 COSMOS er aouT 1912
Les difficultés de pose des conduites sous l’eau.
Dans bien des circonstances, on se trouve dans tement sous l’eau et sans creuser de tunnels, en
la nécessité de poser au travers d’une rivière, direc- siphon le plus ordinairement, des conduites métal-
LA CONDUITE AU SEC SUR LA PLAGE:
liques d'un diamètre assez gros; c'est soit pour Nous pourrions citer d'assez nombreux exemples
donner passage à des eaux d'alimentation, soit,de de travaux de ce genre; on y trouve toujours des
plus souvent, pour faire circuler des eaux d’égout enseignements; d'autant que fréquemment les con- |
el les envoyer au loin, vers des champs d'épandage, duites placées de la sorte ont besoin de réparations,
des usines de traitement, etc. et que ces réparations sont particulièrement diffi-
N° 1436 COSMOS 127
ciles, plus difficiles même que la pose. Comme
conduite de très grosses dimensions, nous signale-
rons celle qui fait partie du réseau d'alimentation
de Jersey-City, dans la région de New-York. Cette
conduite, immergée au fond de la rivière Hacken-
sack, est en tôle d'acier rivé, de 17,5 mm d’épais-
seur, et son diamètre est de 141,83 m; elle est
immergée sous une profondeur d’eau de 9,75 m. Elle
a été fournie en bouts de 8,54 m environ de lon-
gueur; ces bouts étaient assemblés sur la berge de
la rivière et sur un échafaudage ; puis, l'assemblage
une fois fait, on enveloppait la conduite d’anneaux
de béton, façonnés préalablement dans des moules,
et constituant à cette conduite un revêtement con-
tinu. On avait dragué au préalable une tranchée
dans le lit de la rivière, et la conduite, formée
comme nous venons de le dire, était chargée sur
des bateaux, puis descendue lentement dans cette
LA CONDUITE FLOTTANT ET SA REMORQUE.
tranchée. Il a fallu immerger de la sorte une lon-
gueur de 256 mètres. Le tuyau pesait 200 kilo-
grammes par mètre courant, et la partie immergée
‘était rigide, sans joints articulés, avec des courbes
dans le plan vertical correspondant au profil du
lit. Comme d’ailleurs le revêtement en béton avait
un diamètre extérieur de 2,35 m, on arrivait à ce
que le poids total par mètre courant de conduite
revêtue était de 3 375 kilogrammes à peu près.
A la vérité, le procédé de mise en place employé
dans ces circonstances n'avait pas une originalité
très grande. On a procédé de façon nettement dif-
férente pour le siphon de Suresnes, qui a eu pour
objet de faire traverser la Seine aux eaux du col-
lecteur de la rive droite du fleuve, pour les réunir
à celles du collecteur de la rive gauche, et les con-
duire toutes à l’usine élévatoire de Suresnes. La
partie immergée dans le lit même du fleuve est
longue de 164 mètres; elle comporte un tronçon
horizontal de 130 mètres, placé au fond du fleuve
128
et raccordé par des coudes avec des branches
inclinées en forme d'S et disposées sous les berges.
Pour mettre en place ce siphon dans la traversée
de la Seine, on l’avait construit sur la berge même,
puis on l'a lancé d'une seule pièce dans le fleuve :
bien entendu, après avoir fermé ses extrémités
pour assurer sa flottaison. On l’a ensuite remorqué
jusqu’à l’aplomb de son emplacement définitif, et
on l’a descendu, en le surchargeant, dans une
tranchée qui avait été creusée au préalable à travers
le lit du fleuve. La conduite est formée de tuyaux
en tôle d'acier d'une épaisseur de 43 millimètres :
cette grande épaisseur avait été adoptée pour
répondre aux fatigues que subit le métal dans
l'opération même du lancement et de l’échouage,
et non pas lors du fonctionnement normal du
siphon. Le mode de lancement adopté était assez
curieux: on plaçait les tuyaux sur des longrines
transversales surplombant le fleuve, et que l'on
pouvait ensuite faire basculer en leur donnant une
inclinaison telle que le tuyau glissait naturelle-
ment à l’eau. Ces longrines, qui étaient en chêne,
avaient une longueur de 12 mètres, et oscillaient
sur des semelles en chène également, taillées de
façon convenable. Le siphon fut échoué sur toute
sa longueur, y compris même les tronçons en
forme d’S dont nous avons parlé, l’assemblage de
ces tronçons avec les extrémités de la partie flot-
tante du siphon se faisant gràce à des palées en
bois construites sur chaque rive. De la sorte, on
évitait l'établissement de bâtardeauxeton n'arrêtait
pas la navigation. Lorsque le siphon fut mis à l’eau,
on vint amarrer de chaque côté des bateaux, au
nombre de trois, jumelés par des poutres suppor-
tant les platcs-lormes de manœuvre. Pour la
dés-ente, on lesta le tuyau au moyen de paquets
de rails; une fois le tuyau rempli d’eau, on put
enlever ces paquets à l’aide d’une grue et d’un sca-
phandre. On coula ensuite du béton de manière à
noyer complètement ia conduite.
Get échoucment d'une seule pièce, mème pour
les conduites de grande longueur, semble bien
supérieur à l'échouement séparé de sections dont on
formerait ensuite les joints sous l'eau par l'inter-
médiaire de scaphandriers. Cela n'empèche du reste
que les onérations d'échouement ne soient chose
assez délicate; les joints des tuyauxsontexposés à des
efforts considérables, si l’on ne prend pas des pré-
cautions pour que l'entrée de leau se fasse égale-
inent et pour que la descente se produise aussi
horizontale que possible. Un accident retentissant
sest produit lors de léchouage d’un siphon à
COSMOS
Aer AOUT 1912
Dresde, une rupture brusque de joint s'étant faite
au milieu de la canalisation que l’on était en train
d'immerger. Dans certaines circonstances, par
exemple quand il s’agit de couler une de ces con-
duites dans une rivière à marée, le lancement de
la conduite est grandement facilité, sa mise à l’eau
s'effectuant presque automatiquement. Nous pou-
vons donner de ce cas deux photographies que
nous devons à une grande fabrique spéciale, la
British Welding Company, dont les ateliers de
. Motherwell se sont fait une spécialité de la con-
struction des grosses conduites en acier soudé. Il
n'y a pas très longtemps, cette maison a eu à
fournir à la petite ville anglaise de Dunoon toute
une série de canalisations métalliques, destinées à
faire passer les eaux d’égout sous des petites baies
dépendant de l’agglomération; certaines de ces cana-
lisations offraient une grande longueur etun très gros
diamètre. L'une avait 440 mètres de long, et l’autre
183 mètres; la première présentait un diamètre de
69 centimètres, tandis que l’autre, la plus longue,
n'avait comme diamètre que 38 centimètres. Ainsi
qu'on le voit très nettement sur les photographies
ici reproduites, les conduites avaient été montées
sur la plage, et furent descendues assez facilement
au moyen de rails et de rouleaux jusqu'à la portion
de la plage qui se trouvait émerger à marée basse,
mais qui devait être recouverte par l’eau à marée
haute. Si, d’ailleurs, on examine une de nos pho-
tographies, on s’apercevera facilement que la
grosse conduite notamment est munie de cornières
de place en place, lui permettant, une fois descen-
due sous l’eau, de prendre appui solidement sur
des massifs de maçonnerie constitués à l'avance,
où on l'a boulonnée de façon qu'elle ne puisse
se déplacer sous l'influence des vagues de fond. Un
détail assez intéressant à une époque où l'automo-
bilisme prend un tel développement : les nouvelles
conduites ont été amenées sur place, une fois
qu’elles ont été lancées et qu’elles ont flotté, par
des petits bateaux automobiles, qui n'ont pas eu
de peine à les trainer. Bien entendu, et comme
toujours, les extrémités des conduites avaient été
fermées par des parois provisoires assurant leur
flottabilité. On avait naturellement choisi un temps
particulièrement calme pour le remorquage de ces
conduites. L'opération s’est bien passée, et c'était
un spectacle peu ordinaire et très pittoresque, que
de voir un pelit bateau automobile attelé en avant
de cet énorme tuyau flottant semi-immergé.
DANIEL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques.
N° 1436
COSMOS
129
La vaccination antituberculaire.
VIle Congrès international de la tuberculose.
La prophylaxie, c'est-à-dire la partie de la méde-
cine qui a pour objet les précautions propres à con-
server la santé, s'efforce de combattre la diffusion
des maladies infectieuses, soit en isolant et en
réduisant à l’impuissance les sources de contagion,
soit en modifiant le terrain organique de l'homme,
de façon à le rendre plus ou moins réfractaire à
l’action des microbes pathogènes.
La vaccination antivariolique, empiriquement
appliquée depuis le xvin® siècle et devenue obliga-
toire dans les nations où l'hygiène publique est
bien organisée, a presque fait disparaître le fléau
de la variole dans les pays civilisés. Va-t-il en être
de même pour la vaccination antituberculaire,
destinée à mettre l'organisme humain à l'abri de
l’action pernicieuse des bacilles de Koch, dont la
dissémination dans le milieu où nous vivons ne
saurait être complètement empèchée? Cette ques-
tion a été posée de nouveau au VII* Congrès inter-
national de la tuberculose à Rome : le Congrès n’a
pu que prendre acte des essais effectués et des
résultats obtenus par les différents expérimenta-
teurs. Quoiqu'il ne se soit pas prononcé sur la valeur
prophylactique de la vaccination antituberculaire,
il est intéressant d'examiner l’état actuel de cette
question.
Existe-t-il une vaccination naturelle, une auto-
vaccination antituberculaire, créant dans l’orga-
nisme un état réfractaire à la tuberculose pareil
à celui qui, dans le cas, par exemple, de la
variole, se produit à la suite d'une première
attaque heureusement surmontée?
Ce que nous savons aujourd’hui de l'évolution de
la tuberculose, des propriétés pathogènes du bacille
tuberculeux et de ses poisons adhérents ou diffu-
sibles, semblerait indiquer que, contrairement à
nombre de processus infectieux, la tuberculose, loin
de vacciner, sensibilise, au contraire, pour d’autres
manifestations tuberculeuses. Cependant, il n'en
est pas toujours ainsi, et si quelques sujets, une fois
atteints par la tuberculose, demeurent ensuite,
même après guérison, particulièrement sensibles à
l’action infectante et toxique des bacilles et de
leurs poisons, il en est d’autres, au contraire, qui
paraissent doués d’une plus haute résistance après
avoir été touchés par la tuberculose. C’est le cas
particulièrement des malades guéris d'une tubercu-
lose de la peau, des articulations ou des os; c'est
le cas des sujets porteurs d’adénopathies cervicales
chroniques, de nature tuberculaire, qui, comme l'a
fait remarquer M. Marfan, ne contractent presque
jamais la tuberculose pulmonaire. En général,
l'étude du sang de ces sujets témoigne que leurs
tissussont largementimprégnés de substances défen-
sives spécifiques antituberculaires, dont quelques-
unes, les opsonines, paraisssent douées de la pro-
priété d'activer les processus de phagocytose, si
importants dans la lutte de l'organisme contre la
tuberculose. Il semblerait donc logique d'admettre
que la création de l’état d’anaphylaxie tuberculaire
à la suite d’une première infection n’est pas de
règle, surtout lorsque l'organisme est demeuré
vainqueur de la tuberculose par ses propres forces,
par une exaltation, conséquence d'une réaction
salutaire, des pouvoirs naturels antibacillaires et
antitoxiques des humeurs et des cellules des tissus.
Un foyer tuberculeux limité, bien guéri, sponta-
nément guéri, peut donc conférer à l’homme un
certain degré d'immunité antituberculaire. Ce degré
peut être plus ou moins élevé et durable: au reste,
il n’y a que des immunités relatives, il n'y en a
pas d’absolues.
D'autre part, expérimentation de laboratoire a
réussi à démontrer qu’il est possible de créer chez
les animaux un état particulier de résistance
envers les bacilles tuberculeux et leurs poisons,
moyennant traitement par les injections sous-
cutanées ou intra-veineuses de produits tubercu-
leux, en commençant par de petites doses pour
arriver progressivement à des doses très élevées.
En se servant, comme a fait M. Calmette, des
voies digestives pour l'introduction des substances
employées comme vaccin antituberculeux, on arrive
aux mêmes résultats. Les animaux ainsi traités
possèdent dans leurs humeurs et leurs tissus une
grande quantité de principes antituberculaires,
dont on démontre la présence dans le sérum
recucilli dans le but de l’employer pour le traite-
ment de la tuberculose humaine. Ces animaux
peuvent quelquefois résister à l'inoculation intra-
veineuse de cultures vivantes de bacilles tubercu-
leux, pourvu que les doses employées ne soient
pas trop élevées. C'est dire que, à côté de l'auto-
vaccination antituberculaire de l'homme, il existe
aussi une vaccination expérimentale des animaux,
au moyen des bacilles et de leurs produits toxiques.
Nous n'avons parlé, jusqu’à présent, que de la
vaccination active, celle qui est la conséquence de
la mise en suractivité des énergies délfensives de
l'organisme stimulées pur l'introduction dans les
tissus de substances actives de nature tuberculaire,
fonctionnant comme antigènes. Il existe aussi une
vaccination passive, celle qui est conférée par les
sérums antituberculeux. Tout animal sain, inoculé
avec le sérum antituberculaire, devient plus résis-
tant envers les poisons tuberculaires et mème
envers les bacilles vivants. Cependant, on est géné-
ralement d'accord sur ce point. Il pe peut y avoir
150
de vaccination antituberculaire de quelque durée
et de quelque efficacité sans le concours de la réac-
tion des cellules des tissus stimulées par les pro-
duits tuberculeux.
Serait-il possible d'appliquer à l’homme sain le
fruit des observations sur la vaccination spontanée
et celui des expériences de vaccination active et
passive entreprises sur les animaux?
L’auto-vaccination consécutive à la guérison
spontanée d'un foyer tuberculeux est une immunité
antituberculaire conférée par les bacilles vivants:
la vaccination expérimentale la plus efficace parait
celle — lorsqu'elle réussit, c’est-à-dire lorsqu'elle
n'est pas suivie d'infection générale et progressive
— conférée au moyen des injections dans les tissus
et dans les veines, ou bien de l'introduction,
par les voies digestives, d’un matériel vaccinant,
s’approchant le plus possible des bacilles vivants.
Ceux-ci, en petites quantités, donnent les immuni-
sations les plus solides lorsqu'ils sont tolérés.
Pareille immunisation, comme on voit, s'approche
beaucoup de l’immunisation naturelle par auto-
vaccination.
Malheureusement, nous ne possédons pas encore
ce vaccin idéal qui, tout en ayant les propriétés
vaccinantes des bacilles vivants, n’en présenterait
pas les dangers d'infection. M. Behring a cherché
des vaccins « jennériens », c’est-à-dire qu'il a
essayé de vacciner une espèce (bovidés) avec un
virus prélevé sur une autre espèce (homnre). On a
fait déjà une foule d'expériences sur la bovovacci-
nation, elles prouvent tout au moins — observe le
D" Burnet — qu'on peut créer un certain degré
d'inimunité contre la tuberculose. Mais, même
pour l'espèce bovine, la méthode n'est pas encore
apte à entrer dans la pratique. Il en est de mème
pour toutes les autres méthodes d’immunisation
au moyen de bacilles de la tuberculose des ani-
maux à sang froid, de bacilles de la tuberculose
aviaire, de baciles introduits par les voies diges-
tives, ete.
Ces résultats, en partie négatifs, en partie sim-
plement encourageants, témoignent qu'il est pour
le moment impossible de songer à une vaccination
aniituberculaire de l'homme au moyen des bacilles
vivants ou simplement atténués. Mais devons-nous
renoncer pour cela à l'étude des moyens propres à
élever, mème d'une faible quantité, le degré de
résistance de l'homme à l'infection tuberculaire!
M. Maragliano, qui s'occupe activement de toutes
les questions relatives à l’immunité antitubercu-
laire, s'est exprimé au Congrès de Rome en termes
favorables aux méthodes de vaccination humaine
fondées sur l'inoculation de produits tuberculeux
incapables de produire l'infection. Ge n'est point la
vaccination théorique, idéale, avec des bacilles
vivants, mais elle confère à l'homme un certain
degré de résistance, qui pourrait être suffisant.
COSMOS
Aer AOUT 191%
En effet, M. Maragliano, qui a donné au Congrès
de Rome une conférence sur la vaccination antitu-
berculaire, observe que l'infection bacillaire spon-
tanée de l’homme se produit en des conditions
bien différentes de celles qui se vérifient lors des
inoculations expérimentales de bacilles aux ani-
maux. L'homme devient habitueliement tubercu-
leux à la suite de la pénétration, soit récente, soit
ancienne, d'un nombre minime de bacilles dans
ses tissus. En outre, les bacilles que nous inhalons
si facilement avec les poussières sont en grande
partie des bacilles morts. Les infections tubercu-
laires de l’homme aboutissent dans la majorité
des cas à la guérison, comme le démontrent les
autopsies : c’est mème sur la fréquence des infec-
tions tuberculaires de l'enfance, victorieusement
surmontées, que M. Behring a fondé sa théorie de
l’immunité naturelle plus ou moins évidente de
certains sujets envers la tuberculose. Ainsi le pro-
blème de la vaccination humaine contre le terrible
fléau pourrait trouver sa solution dans une méthode
capable simplement d'élever quelque peu le taux
de la résistance organique antituberculaire. Il ne
s’agit pas de trouver une méthode d’immunisation
active absolue, car il ne viendrait à l'esprit de per-
sonne de vouloir soumettre les sujets vaccinés à
l'épreuve de contrôle de l’inoculation intra-veineuse
de bacilles tuberculeux vivants.
M. Maragliano a expérimenté deux sortes de
vaccin. L'un est composé de bacilles tués à la cha-
leur et émulsionnés dans la glycérine; l’autre est
obtenu en inoculant sous la peau des animaux une
certaine quantité de bacilles atténués, en recueil-
lant, après quelques jours, le pus qui s’est formé
au siège de l'inoculation, et en le réinoculant à un
autre animal; en procédant de la sorte plusieurs
fois de suite, on obtient un matériel vaccinant qui
ne contient plus de bacilles vivants, mais seulement
des fragments de bacilles plus ou moins modifiés
dans leurs propriétés biologiques par les humeurs
du sang, par les ferments cellulaires, par la pha-
gocytose.
Les vaccins du professeur Maragliano ont été
inoculés, selon la technique de la vaccination anti-
variolique, à un grand nombre de sujets sains et
de sujetsquiavaient déjà supporté quelques atteintes
du mal. Il a été essayé sur les enfants issus de
parents tuberculeux.A près soixante ou quatre-vingts
jours, en examinant le sang, on trouve qu'il est
riche en substances antituberculaires, comme le
sang des animaux séro-producteurs. Cette richesse
en substan:es défensives spécifiques témoigne d’un
certain degré d'immunisation. Nous ignorons la
durée exacte de cette période d’immunité relative.
M. Maragiiano s’est borné, dans sa conférence, à
nous informer qu'il a pu suivre de près, pendant
ces dernières annces, 465 enfants vaccinés, vivant
dans des condilions hygiéniques défavorables, qui
N° 1436
tous sont vivants et bien portants. Il faudrait,
a-t-il dit, poursuivre plus largement ces expériences,
ce qui parait être l'unique moyen pour nous rendre
compte de leur efficacité. |
Si l’on accepte le principe théorique de la vacci-
nalion antituberculaire, lequel, en somme, comme
nous l'avons vu, est d'une simplicité frappante, il
faut admettre la possibilité de trouver des moyens
propres à enrayer la marche de la tuberculose
COSMOS
131
autres que ceux d'ordre hygiénique. La vaccination
antituberculaire agirait malgré les sources si abon-
dantes de l'infection bacillaire. Ainsi peut-être le
Congrès de Rome a-t-il pu se persuader encore
une fois de l'importance que peut avoir dans la
lutte contre la tuberculose le fameux principe
énoncé par Trousseau : « Semez sur le roc, vous
n'aurez point de récolte; semez sur le terreau, et
vous en aurez une abondante. » D" P. Gocara.
SUR LA FORME PROBABLE
de la partie immergée de quelques icebergs.”
Sur tout le pourtour de la calotte de glace
antarctique, la glace s'écoule vers la mer et forme
une banquise qui se termine par une falaise ayant
généralement de 50 à 60 mètres de hauteur, et
parfois davantage. Cette banquise flotte sur la mer,
jusqu’à une grande distance, avant de se détacher.
Dans le cas où elle émerge de 60 mètres, elle doit
avoir plus de 500 mètres d'épaisseur totale. En se
disloquant, elle fournit des icebergs immenses. On
en cite un, qui a été vu et signalé par une vingtaine
de navires, qui avait 400 kilomètres de longueur
sur 64 kilomètres de largeur. Il émergeait d'une
centaine de mètres, c’est-à-dire d’une hauteur
égale à celle des plus hautes falaises des environs
de Dieppe, et avait, par conséquent, une épaisseur
totale d'environ 900 mètres.
Dans la région arctique, on ne trouve pas de
banquise ayant une importance comparable à celle
de la grande banquise qui entoure la région
antarctique.
Les grandes calottes de glace boréales, l’inlandsis
groenlandais, par exemple, au lieu d'arriver directe-
ment à la mer, s'y déversent surtout par la voie de
glaciers qui peuvent avoir une vingtaine de kilo-
mètres de largeur.
Le front de ces glaciers ne s'étale pas au loin,
sur la mer, comme le fait la banquise australe ;
mais il se disloque à très peu de distance du
rivage. La dislocation se fait par gradins relative-
ment petits lorsque la pente du glacier est assez
forte, et par morceaux beaucoup plus gros lorsque
le glacier est en pente très douce et livre à la mer
une glace compacte, très épaisse et peu fissurée.
(1) Cette note est la reproduction presque intégrale
d'une brochure de M. Janet, qu’il nous a gracieuse-
ment autorisée à reproduire. Son sujet sort un peu
du cadre des études ordinaires de l’auteur, qui onten
général pour objet la physiologie animale et végétale,
et qu'il a publiées, soit séparément, soit dans de
nombreuses communications à l’Académie des
sciences. On voit ici avec quel succès il sait aborder
des questions d'une toute autre nature.
D'après Helland, il y a, au Groenland, des gla-
ciers dont la vitesse d'écoulement atteint 49 mètres
par jour.
De l’autre còté de l'Amérique septentrionale, en
Alaska, le glacier de Muir, qui, d'après F. Wright,
a en certains points une vitesse d'écoulement de
21 mètres par vingt-quatre heures, déverse dans la
mer jusqu'à 6 millions de mètres cubes de glace
par jour.
La quantité totale de glaces flottantes livrées
annuellement à la mer par les glaciers boréaux est
évaluée à une trentaine de milliards de mètres
cubes.
Les icebergs du nord de l'océan Atlantique pro-
viennent, en majeure partie, des glaciers par
lesquels la calotte de glace qui recouvre le Groen-
land s’écoule vers la mer.
Ces icebergs, entrainés vers le Sud, soit par le
courant qui longe le Labrador, soit par des cou-
rants de retour du Gulf Stream, peuvent arriver
jusque dans les eaux de ce dernier et y achever
leur fusion.
Le volume de la partie émergée de certains de
ces icebergs est parfois très considérable, Comme,
parte de le me
„° pive da giace Badire i namos
Uaa aaa aa Saa
—
L'un mm. mm m mimi m me. ee = ne es mm + >:
FIG. 1. — COUPE LONGITUDINALE SCHÉMATIQUE DE L'EXTRÉ-
MITÉ INFÉRIEURE D'UN GLACIER GROENLANDAIS, À FAIBLE
PENTE, MONTRANT LA LIBÉRATION DE GROS PRISMES DE
GLACE QUI FORMERONT DES ICEBERGS.
d'autre part, le volume total dun iceberg est à peu
près égal à 9 fois le volume de sa partie tmergte,
et que la plupart des icebergs ont déjà atteint un
état de fusion plus ou moins avance au moment où
on les observe, on peut en conclure que parmi les
blocs livrés à la mer par les fronts de certains gla-
132
ciers boréaux, il y en a qui atteignent un volume
très considérable.
Ces blocs peuvent avoir une forme sensiblement
prismatique, comprise entre deux faces horizon-
tales (fig. 4). En effet, leur face supérieure est un
élément de la surface libre du glacier, face qui,
aux crevasses et rugosités près, est sensiblement
plane. Leur face inférieure est, elle aussi, sensible-
ment plane, parce qu'elle a glissé sur le fond raboté
du lit du glacier. Quant aux faces latérales, elles
résultent de cassures irrégulières qui sont généra-
lement perpendiculaires aux faces supérieure et
inférieure du bloc et sont, par conséquent, verti-
cales lorsque l'iceberg flotte librement.
L'iceberg qui vient de se libérer peut donc avoir,
approximativement, la forme d'un prisme vertical,
tabulaire, dont les deux faces supérieure et infé-
rieure sont horizontales et ont un contour irrégu-
lier qui provient des cassures de libération. Les
faces supérieureet inférieure présentent, en général,
une forme allongée, notablement plus grande dans
le sens parallèle au front du glacier que dans le
sens parallèle à la direction de l'écoulement de la
glace. Lorsqu'un iceberg présente cette forme pris-
matique, la hauteur de sa partie immergée est
d'environ 8 fois celle de sa partie émergée, c'est-
à-dire 4.9 de son épaisseur totale.
Le mouvement d'un iceberg est la résultante des
courants de diverses profondeurs de leau dans
laquelle il flotte et de l'action du vent sur sa partie
émergée.
Parmi les formes très variées qu'un tel iceberg,
primitivementprismatique et compact, peut prendre
sous l'action des causes destructrices auxquelles il
se trouve soumis. il en cst une qui se présente pro-
bablement assez fréquemment et sur laquelle il est
utile d'appeler l'attention.
La face supérieure de l'iceberg fond lentement
et asse7 nniformément sous l'action de Pair. IHl s’y
forme Je netites flaques ei des petits sillons d'écou-
lement d'eau. Une pertie de ses rugosités s’effacent
tandis que ses crevasses s’agrandissent.
Les parois verticales émergées fondent aussi sous
l'action de l'air. Les parties rentrantes de ces
parois verticales sont souvent moins attaquées que
les parties saillantes, parce qu'elles livrent passage
à l'air refroidi par la fusion de la surface supé-
rieure. Quant aux parties saillantes, elles sont
attaques plus rapidement, parce qu’elles se trouvent
dans l'air plus chaud. Elles tendent ainsi à s’eflacer,
et il peut en résulter une certaine régularisation
de la forme, primitivement très irrégulière, du con-
tour latéral.
Dès que l'eau qui l'entoure est à une tempéra-
ture suflisante, l'iceberg entre en fusion sur toute
sa surface immergée, c'est-à-dire sur sa face infé-
rieure et sur ses faces latérales,
Le résultat de la fusion de la glace est de diluer
COSMOS
Aer aAOUT 1919
l’eau de mer ambiante et de la refroidir. La dilu-
tion résulte de ce que la glace fournit 4 kilogramme
d'eau douce à 80 kilogrammes d’eau de mer pour
un abaissement de un degré de la température de
ces 80 kilogrammes.
Cette dilution produit une diminution, tandis
que le refroidissement produit une augmentation
de la densité de l’eau. Cette diminution et cette
augmentation ne marchent pas parallèlement l’une
à l’autre, la diminution de densité de 80 kilo-
grammes d’eau de mer étant sensiblement con-
stante pour la fusion de 4 kilogramme de glace,
tandis que l'accroissement de densité dů au refroi-
dissement correspondant de ces 80 kilogrammes
d’eau est très variable.
Cet accroissement de densité est, en effet, d’en-
virun :
0,00020 lorsque l’eau se refroidit de 20° à 19°;
0,00010 lorsque l'eau se refroidit de 420 à 11°;
0
0,00005 lorsque l’eau se refroidit de 8° à 7°;
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F1G. 2. — DÉBUT DE LA FUSION DE L'ICEBERG DANS LE CAS
OÙ C'EST SUR SON POURTOUR, IMMÉDIATEMENT AU-DESSOUS
DE LA SURFACE DE LA MER, QUE LA FUSION MARCHE LE
PLUS RAPIDEMENT.
et il devient à peu près nul lorsque l’eau passe de
5° à 4°.
Bien qu'il n’y ait jamais compensation exacte
entre ces deux actions contraires, le résultat de la
fusion de l'iceberg ne produit qu'une variation
assez faible de la densité de l’eau de mer. Il en
résulte que, cette dernière ne tendant ni à s'élever
ni à s'enfoncer rapidement, toute la partie immer-
gée de l'iccberg reste constamment entourée d'un
revêtement d'eau refroidie, et que sa fusion a lieu
assez régulièrement et assez lentement.
Mais cela n'est vrai que pour la face inférieure
et pour les parties des parois latérales qui sont
assez profondément immergées.
Les parties des parois latérales qui se trouvent
inimédiatement au-dessous de la surface de la mer
subissent, le plus souvent, une fusion plus intense
que les autres parties (fig. 2). Cela résulte d'un
renouvellement plus rapide de l’eau refroidie,
renouvellement qui est produit par l'agitation due
N° 1436
aux vagues et par le courant de surface de la mer,
courant qui peut être assez notablement différent
du mouvement de translation de l'iceberg.
Il y a, dans ce cas, creusage, sur le pourtour de
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F1G. 3. — ÉTAT PLUS AVANCÉ QUE CELUI REPRÉSENTÉ PAR
LA FIGURE 2 A MESURE QUE LES PARTIES SUPÉRIEURES
DISPARAISSENT, PAR FUSION ET DÉMOLITION, LA FACE
INFÉRLEURE DR L'ICBBERG SE RAPPROCHE DE LA SURFACE
DE LA MER.
l’iceberg, immédiatement au-dessous du niveau de
la mer, d'une gorge périphérique, et il en résulte
un surplomb des parties qui ne sont soumises qu’à
COSMOS
133
Enfin, la figure 5, qui représente un état où la
hauteur de la partie émergée est à peu près égale à
celle de la partie immergée, montre à quel point
certains icebergs peuvent devenir dangereux pour
la navigation.
Le simple frôlement contre la partie immergée
d'un tel iceberg peut, presque sans choc, produire
de longues déchirures sur les coques relatirement
si minces des grands navires. ,
La perte du Tilanic est peut-êlre due à un acci-
dent de cette catégorie.
Il est certain que dans un iceberg flottant libre-
ment, le volume de la partie émergée est à peu près
égal au huitième du volume de la partie immergée
l'action de la fusion aérienne. Ces parties étant mal
soutenues ne tardent pas à s'effondrer.
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-F1G. 4. — PAR SUITR DU PROGRÈS DE LA FUSION ET DE LA
DÉMOLITION DE LA PARTIE SUPÉRIEURE DR L'ICEBERG, SA
PARTIE INFÉRIEURE S'EST CONSIDÉRABLEMENT AMINCIE.
La continuation du processus qui vient d'être
exposé conduit à des états successifs tels que ceux
représentés par les figures 3 et 4 qui ne nécessitent
pas de plus amples explications.
F1G. 5. — LA PARTIE ÉMERGÉE DE L'ICEBERG A UNE HAU-
TEUR PRESQUE ÉGALE À CELLE DE LA PARTIE IMMERGÉE.
SA RUINE PROCHAINE SERA SUIVIE D'UNE ÉMERSION DE
PARTIES ACTUELLEMENT IMMERGÉES. L'ICEBERG PRÉSENTE,
A CET ÉTAT, UNE FORME TRÈS DANGEREUSE POUR LA NAVI-
GATION.
(Steenstrup). Mais cette partie immergée, n'a pas
toujours la forme d’un cylindre ayant à peu près
la même largeur que la partie émergée car, dans
le cas où cette dernière est haute et étroite, l’ice-
berg aurait nécessairement une forme très allongée
dans le sens vertical, et la situation de son centre
de gravité le ferait chavirer de manière à le cou-
cher à peu près horizontalement.
Il faut donc en conclure que la partie immergée
d'un iceberg peut présenter une forme plus ou
moins étalée, sous la surface de la mer, toutes les
fois que sa partie émergée est relativement haute
et étroite.
C. JANET.
L’océanoéraphie pendant l'antiquité
Deux mots seulement sur Aristote et sur l'in-
fluence néfaste exercée par lui sur le développe-
ment de la science. Que penser, en effet, de celui
qui espéra faire de la science non avec des faits,
mais avec des raisonnements, c'est-à-dire avec des
mots, qui pour découvrir la vérité matérielle ne
se servit que des élucubrations de son cerveau au
(1} Suite, voir p. 107.
lieu d'y employer ses yeux, ses oreilles, ses jambes,
ses mains, tout son corps avec son simple bon
sens. La science n'a besoin de rien de plus. Aris-
tote a parlé de tout, mème d'océanographie, el il
a accumulé les absurdités. En faut-il des exemples?
Dans sa météorologie, il prétend que la pluie
amenée par certains vents est pius salée que celle
amenée par certains autres. Que nest-il sorli de
sa chambre, au premier jour de mauvais temps,
132
et que n'a-t-il porté à sa bouche le coin de son
manteau mouillé, il aurait aisément reconnu
qu'aucune pluie n’était salée, et il s’en serait tenu
là. Ailleurs, il affirme qu'un vase vide bouché avec
de la cire, descendu dans la mer, ne tarde pas à
se remplir d'eau douce. Que n'est-il monté dans
une barque avec deux bateliers, un vase tel qu’il
le décrivait et une corde; que n’a-t-il fait l'expé-
rience, il aurait reconnu que rien n’était plus faux
que son affirmation, car, dans ces conditions, si
le vase est insuffisamment bouché, il se remplit
d’eau salée; s’il est trop bien bouché, il se brise.
L'expérience ne nécessitait pas les ressources d'un
riche laboratoire. Si quelque curieux de la nature,
cherchant l'explication d’un phénomène naturel
qui, dans l'état où se trouve la science à son époque,
échappe encore à toute vérification directe; si,
tenant absolument à en découvrir l’explication et
incapable de reconnaitre son impuissance, il
s’obstine, se contente de motifs philosophiques et
énonce une sottise, la postérité peut lui être clé-
mente. Mais si, n'ayant en quelque sorte qu'à
étendre la main pour constater avant toutes choses
l'existence même du fait, il se borne à affirmer et
à philosopher, s’il ose tirer des conséquences d'un
fait qu'il devait commencer par vérifier, qu'il pou-
vait vérifier et qu'il n’a pas vérifié, s'il n’a pas le
bon sens de comprendre que toute sa spéculation
bâtie sur du vent n’est elle-même que du vent, il
manque à la plus élémentaire probité, et la posté-
rité Jui doit être inexorable. On est excusable de
mal. regarder; on est coupable en ne regardant
pas. La philosophie d’Aristote, soutenue par l'im-
mense réputation du maitre, a comme empoisonné
toui le moyen âge et y a arrété tout progrès scien-
titique. Combien de bouches indépendantes, ingé-
nieuses, remplies de vérités n'ont-elles pas été
bäillonnées, combien d'yeux n'ont-ils pas été
aveuglés en son nom”? Cette histoire de la trans-
formation de leau salée en eau douce par filtra-
tion, qui est absolument fausse, est répétée par
Pline après quatre siècles, par Klien après six
siècles, par Solin, par le P. Fournier après dix-
neuf siècles, par Marsigli qui fut un homme de
génie et dont l'esprit fut écrasé par la majesté
d'Aristote, puis au xvm? siècle, après vingt et un
siècles, plus de 2000 ans, par Philippe d'Achery,
devant l'Académie des sciences de Paris où elle
donne lieu à de longues discussions auxquelles
prennent part M. de Cossigay et l'illustre Réaumur,
Elle n'est pas encore norte aujourd'hui. Aristote
mériie peut-être fous Jes respects comme grand
philosophe, grand littérateur, grand politique,
mais, nen déplaise à ses adniirateurs, il n’en
mérite aucun comme savant.
Nous en arrivons maintenant à Pythéas de Mas-
silia, un Marseillais et par conséquent un Grec qui
était un Français ou, si on le préfère, un Français
COSMOS
4er aouT 1912
qui était Grec et qui commence la série glorieuse
des océanographes de France. \
On se souvient de la poétique légende de la fon-
dation de Marseille par le Grec phocéen Euxène,
débarquant au moment même où la belle Gyptis,
la fille de Nann, chef des Celto-Ligures habitant
le pays, devait faire choix d’un époux en offrant
aux hôtes de son père, invités à un grand festin,
une coupe remplie de vin. Elle tendit la coupe à
l'étranger qui l'accepta, épousa la jeune fille et
reçut en dot l'emplacement même où il se trouvait.
Il s’y installa et fonda Marseille. La ville, après
bien des péripéties, se développa par le commerce
et devint une grande et riche cité recevant de tous
còtés, par terre, par le Rhòne et par la mer, des
marchandises qu’elle réexpédiait aussitôt. Or, à
l’époque mème d'Alexandre et d’Aristote, les négo-
ciants massaliotes eurent la pensée de chercher à
connaitre les véritables lieux d’origine d’un métal,
l’étain, encore plus précieux pendant l’antiquité
qu’à notre époque parce qu'alors on en fabriquait
le bronze, la matière première de toutes les armes
et de tous les outils, dont il se faisait, par consé-
quent, une énorme consommation. Il était apporté
du nord de la Gaule, à dos de bètes de somme, et
ensuite par le Rhône. On le tirait, disait-on, des
iles Cassitérides; mais où donc étaient ces iles?
Et même étaient-elles des iles ou seulement des
localités situées au bord de la mer? Dans ce cas,
ne serait-il pas plus simple et plus économique
d'aller chercher directement l’étain par mer au
lieu de recourir à des intermédiaires? Pour lac-
complissement de leurs projets, les marchands
s'adressèrent à l’un de leurs compatriotes, Pythéas.
On sait peu de chose sur Pythéas, sinon qu'il
était pauvre, à ce que dit Polybe. C'était certai-
nement un marin et un habile savant. A l'aide du
plus simple des instruments, le gnomon, tige
plantée verticalement et dont on mesurait l’ombre
ainsi que la longueur, il avait réussi à mesurer la
latitude de Marseille à quinze minutes près de sa
véritable valeur, telle qu’elle est aujourd'hui
obtenue par nos astronomes ayant à leur service
toutes les ressources théoriques et pratiques appor-
tées par plus de 3 000 ans de travail humain. Il
avait aussi établi que les marées, dont il connaissait
l'existence, étaient dues à l'influence de la Lune.
Ja tâche qu'on lui offrait était lourde, et néanmoins
il l’accepta. Non seulement il fallait se rendre
dans le Nord, dans des contrées lointaines dont on
ignorait tout, sauf leurs dangers réels ou imagi-
naires, tels que les décrivaient de terrifiants récits,
mais la route à suivre commençait par longer la
côte d'Espagne, jalonnée de comptoirs ennemis;
on devait franchir les colonnes d'Hercule, passer
devant Gadès, le grand emporium phénicien, et
ces Sémites n'étaient tendres pour personne, ni
pour eux ni pour les autres, ni surtout pour qui-
N° 1436
conque cherchait à leur faire concurrence, ce qui
était le cas de Pythéas. Au delà de Gadès s’éten-
dait l'inconnu. | |
Un navire fut équipé. A cette époque, les båti-
ments étaient beaucoup plus solides à la mer qu'on
ne l'aurait cru, et certainement plus marins que les
caravelles sur lesquelles Colomb devait découvrir
l'Amérique. Ils jaugeaient 400 à 500 tonneaux,
leur longueur était de 45 à 50 mètres, ils portaient
trois mâts, l’un gréé avec des veiles carrées et
triangulaires, les deux autres plus petits avec des
voiles latines. Leur manœuvre était facilitée par
l'emploi d’avirons ayant jusqu'à 43 pieds de long,
dont les rameurs, au nombre de 174 sur les grandes
trirèmes, avaient leurs mouvements réglés aux
sons des flütes qui marquaient le rythme. Deux
larges avirons indépendants l'un de l’autre fai-
saient fonction de gouvernail. Un pareil navire
devait, par jour, avoir une marche moyenne de
1 300 stades environ, c'est-à-dire 130 milles marins,
un peu plus de 5 nœuds.
On partit. Que ne puis-je raconter ce voyage
avec plus de détails, décrire les précautions que
prit Pythéas pour dresser son équipage et passer
sans être aperçu des Phéniciens! Après Gadès, on
n'avait plus à lutter que contre la nature; le chef
était plus tranquille. On suivit la côte du Portugal,
celle du nord de l'Espagne, le golfe de Gascogne
que nos navires à vapeur actuels ne traversent
qu’à demi rassurés; on doubla Ouessant, on entra
en Manche et l’on cotoya la Gaule sans la perdre
de vue, sur un navire à voiles, sans carte, dans
des parages criblés d’iles comme dans le golfe de
Saint-Malo, hérissés d’écueils, sillonnés de courants
formidables changeant avec la marée. Pythéas
passa, franchit le Cotentin, dépassa l'embouchure
de la Seine et alors aperçut vers le Nord, pour
la première fois, les blanches falaises du pays
d'Albion. L’'Angleterre était découverte. Il continua
néanmoins à suivre encore la terre du Sud jus-
qu'au Pas-de-Calais, et alors traversa le détroit et
s'arrêta en face, en un endroit qu'il appela Cantion,
au cap North-Foreland.
Comme l’on ignorait où l’on était, il devenait
indispensable de connaitre à quelle latitude l'on
s'était élevé. Or, avec le gnomon, dans l’état où
étaient encore les connaissances astronomiques,
l'opération ne pouvait s’effectuer qu’à l’époque du
solstice dont on était alors éloigné. Pythéas n'hésita
pas: il mit son navire en sûreté, chargea ses offi-
ciers de mesurer la latitude lorsque le moment en
serait venu, et pour lui, comme il avait tout lieu
de supposer que cette terre s'étendait vers l'Ouest,
il partit seul pour le vérifier, Il marcha longtemps
et péniblement à travers une contrée difficile
coupée de marécages dont les habitants le reçurent
amicalement et lui indiquèrent les gisements de
l'étain en Cornouailles, au pays de Bélérion, ainsi
COSMOS
133
que le grand entrepôt du métal, l'ile d’Ictis, où il
était transporté par des barques. Le but de l'expé-
dition était atteint. En outre, Pythéas avait observé
les mæurs des naturels : ils buvaient une certaine
boisson, la bière, dont ils lui apprirent la fabrica-
tion. Quant à lui, il enseigna à ses hôtes l'usage
de la monnaie.
Toutes ces informations prises, il retourna sur
ses pas, d'Ouest en Est, retrouva son navire à
Cantion, connut la latitude, et comme il voyait la
mer s'étendre vers le Nord, il voulut s’avancer
autant qu'il lui serait possible dans cette direction.
Il remonta ainsi jusqu'aux Shetland, qu'il dépassa
même quelque peu, mais là il fut arrêté en pleine
mer par le « poumon marin », ce quelque chose
qui n’est ni de la terre, ni de l’eau, ni de lair, et
qui est probablement ce mélange de glace molle et
d’eau qu’on nomme l’icebrei, recouvert d’un épais
brouillard. Il prit alors définitivement le chemin
du retour et, malgré tant de dangers, revint à Mar-
seille où il put raconter son voyage à ses compa-
triotes et leur fournir les renseignements qu'ils
avaient tant désirés.
Pythéas fit un second voyage : il allait étudier
les gisements de l’ambre, autre matière très
appréciée des anciens. De même que la première
fois, il arriva au Pas-de-Calais. Là, au lieu de
s'élever au Nord, il continua à suivre la côte méri-
dionale, longea la Belgique, la Hollande et s’avança
jusqu’au golfe de Mentonomon, à l'embouchure
d'un fleuve qu'il nomma le Tanais du Nord et
qu'on n'a pas identitié, car les uns le supposent
ètre l'Elbe, d'autres la Vistule et peut-ètre même
la Duna; à coup sur, il atteignit une région où
lon recueillait et où l'on recueille encore l'ambre
au milieu des sables du rivage. Sa nouvelle tâche
heureusement accomplie, ilrevint encore à Marseille.
Pythéas commence la série — noire — de
beaucoup de ceux qui, en France, se sont occupés
d'étudier la mer. Il écrivit le récit de ses deux
voyages, et son œuvre est maintenant perdue.
Comme il avait réussi, son succès lui suscita des
envieux qui s’efforcèrent de ternir sa glcire. Il fut
traité de « menteur grossier » par les géographes
littéraires, Strabon, Polybe et Dicéarque, l'élève
d'Aristote dont les ouvrages nous ont été conservés,
tandis qu’au contrâire il fut défendu par les mariss,
les découvreurs, les hommes pratiques, Eratos-
thène, Hipparque, Evhémère le Messinien, dont
il n'existe plus rivn. Son histoire ne nous est donc
connue que par ses ennemis seuls, et ces mêmes
preuves que ceux-ci prétendaient faire servir à
démontrer sa mauvaise foi sont précisement celles
qui nous prouvent aujourd'hui son talent, son
énergie et surtout sa véracité. Les Marseiliais ont
élevé une statue à leur concitoren ainsi qu'à un
autre d'entre eux, Euthymenés, qui evécuta au Sud,
sur la côte occidentale d'Afrique et du Sénégal, la
130
contre-partie du voyage de Pythéas vers le Nord, et
dont il ne subsiste plus aucun document. Ces deux
statues sont de chaque côté de la Bourse, en pleine
Cannebière. Elles sont tout près du port, de ce
vieux port de Lacydon d'où les vaillants explora-
teurs déployèrent leurs voiles. Je les voudrais voir
COSMOS
der aouT 1912
plus près encore de la mer, sur le port mème,
montrant la route à suivre, toujours plus loin, à
travers les dangers quels qu’ils soient, pour le
plus grande avantage et la plus grande gloire de
la France.
J. THOULET.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 22 juillet 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
La carte du Maroc occidental. — Le général
Bassor expose les travaux des officiers du service
géographique au Maroc. Ces travaux se divisent
en deux périodes: ceux du début qui n'ont été pour
ainsi dire qu’une reconnaissance militaire, et ceux
qui, venus après, ont été poursuivis avec grande pré-
cision.
La triangulation actuelle s'appuie sur une base de
8 663,15 m mesurée près de Casablanca avec deux fils
invar, et dont quatre mesures ont donné une erreur
moyenne de 15,8 mm.
La triangulation a un développement total de
280 kilomètres; l'erreur de fermeture n'est que de
0”,2 en latitude, 0”,6 en longitude et 1,70 m pour la dif-
férence d'altitude. Les opérations seront continuées
après les grandes chaleurs, en octobre.
La dégradation des engrais phosphatés au
cours d'un assolement. — Il résulte d'essais pour-
suivis par MM. Munrz el GAULECHON que, en trois ans,
le phosphore dans ic so! perd ses qualités fertilisantes.
[ne faut donc jamais donrer au sol les engrais phos-
phatés trés assimilables à doses massives, en pensant
qu'ils seront profitables pendant plusieurs années aux
récoltes successives que l’assolement comporte; mais,
au contraire, ces engrais doivent ètre fournis au
sol chaque année et à mesure des besoins, ainsi qu'on
a coutuine de le faire, en particulier pour les engrais
potassiques et azolts à action rapide.
Cinématographe à images très rapides. —
M. Buil a créé un appareil qui, au moyen de l'étin-
celle électrique, donne 2000 images cinématogra-
phiques par seconde; en ralentissant 300 fois le mou-
vement, il a pu, en projetant les images, arriver à la
synthèse du vol des insectes. |
Mais l'appareil n’est applicable qu'aux mouvements
de petite étendue.
M. Nostès à imaginé un appareil permettant des
applications plus générales.Cenouveaucinématographe
donne i59 images par seconde.
En projetant, au moyen d'un cinématographe norinal,
Jes vues prises avec cet appareil, il a pu faire la syn-
thèse ralentie de certains mouvements comme la
course, le saut, le yol du pigeon, ete., dont il est dif-
ficile de se faire une idée parfaite lorsqu'on les ana-
lyse dans les conditions ordinaires. On peut, sans
nuire à la continuité du mouvement, ralentir jusqu'à
vingt fois le phénomène photographié et l’observer
ainsi avec une grande facilité.
Un toximètre à gaz oxyde de carbone. —
La détermination d’une quantité quelconque de gaz
répandu dans l'air s'effectue rigoureusement par l'ana-
lyse chimique, procédé de laboratoire; mais ce pro-
cédé ne saurait prévenir les accidents dans les atmo-
sphères confinées, où l’oxyde de carbone se dégage
inopinément. Après beaucoup d'autres, M. Grasco a
cherché l'appareil avertisseur qui permettrait d'éviter
ce danger.
A cet effet, il a utilisé le dispositif du thermomètre
différentiel de Leslie, avec cette différence caractéris-
tique que ce dispositif ne doit, en aucun cas, con-
trairement au Leslie, accuser d'autres variations de
température que celles produites par la condensation
des gaz dans le platine.
Il est constitué par un tube en U surmonté de deux
ampoules dont une seule en platine. Le tube en U
reste visible, mais les deux ampoules sont herméti-
quement enfermées dans une enveloppe qui les isole
du contact de l’atmosphère, enveloppe dans laquelle
le gaz pénètre par endosmose au travers d’une cloison
poreuse.
Le tube en U extérieur à l'enveloppe; resté visible,
est garni, sur le tiers environ de sa hauteur, d'un
liquide coloré qui permet de constater la moindre
dénivellation des niveaux. í
La dénivellation des niveaux dans le tube en U de
l'appareil est de 6,5 mm par colonne, soit de 13 mil-
limètres avec la proportion de 1/1000 d'oxyde de
carbone. .
La sensibilité du toximètre à l’oxyde de carbone a
pour point de départ visible un mélange inférieur à
1 :10 000.
Si, dans le tube en U, on remplace le liquide coloré
par du mercure en fixant un contact en platine à hau-
teur déterminée, on a le modèle avertisseur qui fera
marcher toute sonnerie d'avertissement.
Sur la présence de l’arsenic dans quelques
plantes parasites et parasitées. — MM. RKF. Janin
et À. AsTruc, continuant leurs études sur l’arsenic
dans les divers végétaux, ont reconnu que:
4° Les plantes parasites, comme les végétaux crois-
sant directement dans le «ol, contiennent normalement
une certaine quantité d'arsenic;
2° Une méme espèce végétale (le gui}, quoique vivant
en des régions et sur des arbres très différents, con-
tient néanmoins une quantité d'arsenic à peu près
identique, bien que celle trouvée pour les supports
présente des variations très appréciables:
N° 1436
3° Il est impossible d'établir une proportion quel-
conque entre la teneur en arsenic du parasite et celle
du parasité;
4° Par analogie, il semble que la richesse du sol en
arsenic ne parait pas avoir une influence prépondé-
rante sur la teneur des végétaux en cet élément, et
que la plante doit prendre du métalloiïide dans les
proportions qui lui sont nécessaires, indépendamment
de la richesse du milieu. A ce point de vue, les résul-
tats obtenus pour le gui paraissent démonstratifs.
Assimilation de l’azote et du phosphore nu-
cléique par les algues inférieures. — Les études
de M. Teonoresco l’amènent à conclure que certaines
algues inférieures sont capables de désintégrer la
molécule de l'acide nucléique et de minéraliser le
phosphore organique de cet acide; il y a tout lieu de
penser que le dédoublement est dù à la nucléase,
ferment spécifique des nucléines. D'autre part, l'azote
et le phosphore nucléiques peuvent servir d’aliments
à ces algues: d’après ces expériences, il semble même
que l'azote et le phosphore nucléiques sont, pendant
les premiers temps, très favorables à un développe-
ment rapide et abondant, plus favorables même que
le phosphore et l’azote offerts directement sous forme
minérale.
Mécanisme de l’action fertilisante du soufre.
— MM. BouLLancer et DrcarniN ont montré que le
soufre en fleur, ajouté à très faible dose à la terre de
diverses cultures en pots, exerce une action très favo-
rable sur la végétation et augmente notablement les
rendements de ces cultures et que cette action devient
très faible si la terre est au préalable stérilisés.
Le soufre n’agirait donc qu'indirectement en acti-
vant, sans doute, le travail des microbes utiles: les
auteurs ont procédé à de nouvelles expériences pour
élucider la question.
Leurs observations ont établi qu’en effet le rôle
fertilisant du soufre en fleur est dù à l'influence acti-
vante qu'il exerce sur les bactéries qui dégradent les
matières azotées complexes à l'état d’ammoniaque et
aussi sur les ferments nitrificateurs. La plante trouve,
en présence du soufre, de plus grandes quantités de
sels ammoniacaux directement assimilables, et cette
modification favorable de l'alimentation azotée se tra-
duit par d'importantes augmentations de rendement,
analogues à celles qu'on obtient par l’emploi du sul-
fate d’ammoniaque. I] importe toutefois de remarquer
que l’ammoniaque ainsi formée par les bactéries am-
monisantes provient exclusivement de la matière
azotée du sol et que l'addition d'engrais organiques
azotés est nécessaire pour contre-balancer l'exportation
plus abondante d'azote par les plantes.
Évolution de la peste chez la marmotte
pendant l’hibernation. — On n’a pas oublié les
divers rapports, souvent inquiétants, signalant en
Transbaïkalie et en Mongolie un ancien et important
foyer pestilentiel toujours renaissant. Les marmottes
ou tarbagans (Arctomys bobac, Schreb.), qui vivent en
grand nombre dans ces régions montagneuses, trans-
mettent aux chasseurs qui les recherchent pour leur
chair et leur fourrure une affection spéciale dénommée
maladie des tarbagans et qui n’est autre que la peste.
De mème que le rat et d'autres rongeurs (spermo-
phile, groundsquirrel de Californie, etc.), la marmotte
COSMOS
437
semble donc constituer, dans ces foyers endémiques,
le réservoir du virus pesteux, virus fragile se conser-
vant mal dans la nature en dehors de l'organisme
vivant.
MM. Dusaron-Brauusrz et E. Mosxv ont cherché
pourquoi les marmottes ont ce privilège de conserver
le virus à l’état latent. Leurs premières expériences
montrent combien est lente l’évolution du virus pes-
teux chez la marmotte pendant le sommeil hivernal.
Une d'elles a survécu, en effet, pendant près de quatre
mois, malgré les conditions défavorables d’hibernation
qu'on peut reproduire dans un laboratoire.
Sur la préparation catalytique des oxydes phéno-
liques et diphényléniques: oxydes mixtes. Note de
MM. PauL SaBaTIER et ALPHA. MAILHE. — M.M. Ayanx donne
l'observation de l’éclipse de Soleil des 16 et 17 avril
1912 à l'Observatoire d'Aoste (Italie). — M. Ace
donne une note sur la photométrie de l’éclipse de
Soleil du 17 avril 1912, à l’aide du sélénium et d'un
galvanomètre photographique. — Sur la décharge
disruptive à travers la vapeur de sodium pure. Note
de M. Louis DuNoyer. — Sur les raies ultimes et de
grande sensibilité du chrome, du manganèse, du fer,
du nickel et du cobalt. Note de M. A. DE GRAMONT. —
Équilibre chimique du système :gaz ammoniac et
chlorhydrate d'éthylène-diamine. Note de M. FÉrix
Biver. — Sur la solubilité des résinates colorés soumis
à l’action de la lumière. Note de M. J. LARGUIER DES
Bancezs. — Sur les dérivés hydrogénés de l’apohar-
mine. Note de M. V. HASENFRATZ. — Hydrogénation
catalytique des cétones. Note de M. G. Vavox.— Action
de l’amidure de sodium sur le dibenzoylbutane-1.4.
Note de M. Épouarn Barer. — Variations de la pro-
portion de nicotine dans les divers organes de la
plante de tabac au cours de la végétation. Note de
MM. E. Cauanpet R. MeLLeT. — Possibilité et fréquence
de l’autofécondation chez la vigne cultivée. Note de
M. Garb.
M. Tovryors a établi que pour des conditions de tem-
pérature analogues, la floraison du chanvre et du
houblon japonais est d'autant plus précoce que lcs
plantes reçoivent une quantité de lumière plus faible
à partir de leur germination. — Sur la loi du mini-
mum. Note de M. I. Poucrr et D. CHoucaax. — Sur
l’ablation du pancréas chez l’aigle pygargue (Haliælus
albicilla). Note de M. J. Giasa. — Sur la charge élec-
trique des globules rouges du sang. Note de M. PIERRE
GıranD. — Toxicité des sels minéraux dans le liquide
. céphalo-rachidien. Note de M. JEAN Camus. — Sur la
non-existence des lécithines libres ou combinées dans
le jaune d'œuf et dans les structures biologiques.
Note de M. N.-A. Barbieri. — Variation du pouvoirs
abiotique des rayons ultraviolets avec leur icngucur
d'onde. Note de M°° et M. Vicron HexnI. — Mécinisme
de l’arrèt des diastases par filtration. Note de M. Mau-
RICE HoLDERER. — La réversibilité des actions fermen-
taires. Influence de la dilution de l'alcool éthylique
sur l'action synthétisante de l’émulsine dans ce véhi-
cule. Note de MM. Em. BourouELoT et Marc Bainer. —
Les échinodermes de la mission Charcet. Note de
M. KosuLen, qui constate que la collection d'échino-
dermes recueillis par le D° Gharcot au cours de la
campagne du Pourquoi-Pas? est certainement la plus
riche qui ait été rapportée des mers antarctiques. Le
138
total des espèces d’astéries, ophiures et échinides que
renferme cette collection s'élève à 54, parmi lesquelles
25 sont nouvelles. — Le fonctionnement de la glande
génitale chez l'Ostrea edulis (L.) et le Gryphæa angu-
data (Lam.). La protection des bancs naturels. Note de
M. J.-L. Daxran. Dans cette communication, l’auteur
nous fait ressortir l'incurie de nos pècheurs et de
COSMOS
ler aouT 1919
l'administration, qui conduit à la destruction des
bancs naturels, et qui a fait disparaître de nos côtes
des centres de production de telle sorte qu'aujour-
d'hui nous sommes tributaires de l'Angleterre. —
L'absorption comparée, entre le Mont Blanc et Cha-
monix, des radiations chimiques et calorifiques du
Soleil. Note de M. J. VaLcor.
BIBLIOGRAPHIE
La longévité à travers les âges, par M. le
D' M.-A. LEGRAND, lauréat de l’Académie de mé-
decine et de l'Institut. Un vol. in-18 de 307 pages
(3,50 fr). Flammarion, éditeur, 26, rue Racine,
Paris.
L'homme ne possède point toutes les supériorités.
S'il est, par sa raison, le roi de la nature, son exis-
tence, hélas! n'atteint point la durée de l'olivier
de Platon ou du platane d’Hippocrate qui déploient
encore aux environs d'Athènes ou dans l'ile du
Cos leur existence plus de deux fois millénaire;
il ne peut atteindre les trois cents ans que vivent
les crocodiles ou les carpes; sa vie est brève. Il
faut constater pourtant que, depuis une cinquan-
taine d’années, la moyenne s'en est accrue au delà
de ce que l’on pouvait attendre : elle n'était que de
trente-sept ans vers 1850, et voici qu'elle atteint, à
cette heure, quarante-six ans. Ne pourrait-on la
prolonger encore, et remédier ainsi, en quelque
chose tout au moins, à l’effrayante diminution de
la natalité? Pourquoi pas? puisque le passé est là
qui nous sollicite à l'espérance.
Pour atteindre ce but, le moyen est d'étudier les
longévitės, c'est-à-dire ceux qui ont atteint ou
dépassé les quatre-vingts ans, de se rendrecompte de
leur genre de vie, de leur profession. Ainsi parvien-
dra-t-on à dégager de ces enquêtes des conclusions
pratiques. M. le D' Legrand a mené ces enquîtes,
qrii résume à la fin de son livre fort intéressant,
en ncuf tableaux, qui nous révèlent, par exemple,
une Jongévilé plus accusée chez les savants, les
homes de letires ct d'église, que chez les souve-
rains. L'auteur, dans son ouvrage, fait assez fré-
quemment appel à la Bible, mais, s'il la traite avec
respect, il la considère comme un livre humain. A
noter encore que M. Legrand emprunte une for-
mule à Luther pour combattre et condamner le
célibat dans l'Église (p. 446).
Organisme économique et désordre social, par
C. CoLsax, membre de l’Institut. Un vol. broché
in-18, de la Bibliothique de philosophie seien-
Lifique {3,50 fr). Paris, Ernest Flammarion,
265, rue Racine.
Tout le monde le reconnäit : il y a quelque chose
de pourri dans notre socitté. Cet aveu ne sau-
rait être, pour les esprits sérieux, qu’un achemine-
ment vers les remèdes. Quels sont ces derniers,
d'après M. Colson? Après avoir exposé, dans un
premier livre, les traits essentiels des diverses
conceptions économiques, il décrit l'agencement
spontané des forces productrices par le mécanisme
des prix. Le livre III, consacré à la famille,
démontre quelles erreurs nos législateurs com-
mettent en ébranlant la solidarité naturelle fondée
sur les liens du foyer et de la parenté. De même,
le livre IV, qui traite des associations, s'attache à
prouver que ces dernières, et notamment la plus
puissante d’entre elles, l'État, souffrent de maux
profonds et de désorganisations essentielles : muti-
neries de fonctionnaires, pseudo-conscience sociale,
tyrannie des grèves et des Syndicats. L'ouvrage se
termine par un vigoureux coup de boutoir lancé
contre l'humanitarisme encore prédominant qui
favorise la pitié au détriment de la justice.
Les lampes électriques à arc, à incandescence
et à luminescence : applications à l'éclairage
industriel, essai et étalonnement, montage, con-
sommation spécifique, emplois spéciaux, par
J. EscaRD, ingénieur civil. In-8° de xvr1-426 pages
avec 307 figures (broché, 45 fr; cartonné 16,50 fr).
H. Dunod et E. Pinat, éditeurs, 47, 49, quai des
Grands-Augustins, Paris, VIe,
L'éclairage électrique a fait beaucoup de progrès
dans ces derniers temps. Les découvertes récentes
sur les propriétés des filaments metalliques incan-
descents ont refoulé dans l’ombre le vieux filament
de carbone qui, à son tour, a cherché à revivre
d'une nouvelle vie par une utilisation plus ration-
nelle de son rayonnement.
Les lampes å arc se sont aussi beaucoup perfec-
tionnċes. L'introduction, dans la påte des charbons,
de matières susceptibles d'augmenter à la fois le
rendement et l'éclat de la lumière a permis de
mieux les approprier à leur but, qui est avant tout
de fournir un éclairage intensif et puissant. Leur
empioi est ainsi devenu plus économique et par
cela même digne de plus larges applications.
Cependant, les lampes å luminescence (lampes
à vapeur de mercure, à gaz raréfiés, tubes Moore,
tubes au néon) tendent à se substituer à elles, sur-
N° 1436
tout dans les cas où on a besoin d’éclairement à la
fois intense et diffus. M. Escard traile aussi des
lampes en quartz à rayonnement ultra-violet.
ll semble que, plus que tout autre, l'éclairage
électrique peut surmonter toutes les difficultés
d'ordre théorique ou pratique et se plier à tous les
besoins, pourvu qu'on sache réserver à telle caté-
gorie d'industrie le genre d'illuminant qui parait
le plus en harmonie avec sa nature et avec son
importance.
Ainsi qu'on s'en rendra compte à la lecture de cet
ouvrage, le but principal de M. Escard est de faire
connaitre aux industriels les meilleures conditions
de fonctionnement, d'emploi et de rendement des
différentes sources de lumière électrique actuelle-
ment utilisées. Il pourra ainsi être utilement con-
sulté par les constructeurs d'appareils d'éclairage
et les entrepreneurs qui s'occupent de leur instal-
lation, de leur entretien ou de leur vérification. Il
rendra également service aux particuliers et à tous
les chefs d'industries, petites ou grandes, qui sont
limités quant à leur choix par la question du prix
de revient ou qui demeurent indécis sur la quantité
de lumière nécessaire pour assurer le fonctionne-
ment normal et la réussite de leur entreprise.
Étude critique du développement lent, par
E. Prrois. Une brochure de la Bibliothèque de
Photo-Revue, avec six planches hors texte en
similigravure (0,60 fr). Paris, Charles Mendel,
éditeur.
Le développement lent a été beaucoup critiqué,
mème par ceux qui s’en servent journellement, et
de nombreuses formules ont été données, qui ont
toutes leurs partisans.
M. Pitois, qui a sérieusement étudié la question,
propose à son tour, à ceux qui n'ont pas de parti
pris dans la question, une méthode de développe-
ment lent qui lui donne de bons résultats, et qui
s'appuie sur une base scientifique. D'abord, il
réclame, pour chaque photographie, un temps de
pose exact. Beaucoup se préoccupent peu de ce
point, pensant que le développement corrigera les
écarts de pose. C’est demander trop à cette opéra-
tion; c'est peut-être la raison de tant de demi-
succès. Avec un temps de pose exact et un bain
soigneusement préparé suivant ses indications,
l’auteur estime que chacun pourra obtenir les
meilleurs résultats avec le développement lent.
Pour devenir aviateur: considérations sur la
conduite des aéroplanes, par P. CLavENaAD, lieu-
tenant au 3° chasseurs à pied, officier aviateur.
Préface de M. H. Lavedan. Un vol. in-12 de
44 pages (1 fr). Librairie aéronautique, 40, rue
de Seine, Paris.
Ce livre n’a pas seulement le mérite de donner
des notions sur les aptitudes physiques nécessaires
COSMOS
139
pour être pilote d’aéroplane, sur l'utilité d'amé-
liorer les commandes actuelles des appareils, sur
l'éducation et les méthodes d'instruction qu'il serait
désirable de réaliser actuellement; c'est en plus et
surtout un plaidoyer émouvant pour le développe-
ment de l’aviation militaire en France. C'est lui
qui a été le point de départ du magnifique élan
patriotique d'où est sortie la souscription natio-
nale et qui va permettre de doter l’armée d'une
véritable flotte aérienne. Cette flotte, très nom-
breuse et montée par nos ofliciers pilotes sans
cesse entrainés, nous donnera pour longtemps la
suprématie de lair.
M. Clavenad peut être fier du splendide résultat
par lui obtenu.
Bulletin du Comité technique contre lincendie
et les accidents, 45, avenue Trudaine.
On connait les travaux persévérants de ce Comité
spécial pour arriver à prévenir les incendies, les
accidents et leurs conséquences.
Il publie aujourd’hui deux fascicules :
4° Code de la sécurité des expositions, par
MM. F. Micuorre et J.-M. Cazaza (1 fr), où sont
exposées les précautions indispensables à prendre
dans les constructions éphémères des expositions,
et où l'utilité en est démontrée par de nombreux
exemples d'accidents et de catastrophes dues
presque toujours à la négligence des organisateurs.
2 Code de la sécurité au village, par F. Mr
CHOTTE (1 fr). On y trouve ce que l’on doit faire
dans la construction des bâtiments de culture, ce
que les municipalités devraient exiger dans les
agglomérations qu’elles adininistrent, et après les
moyens préventifs à employer, ceux qui sont les
plus propres à arrèter tout commencement d'in-
cendie.
Malheureusement, ces conseils se heurteront
à des habitudes, à des coutumes et souvent à des
nécessités locales, dont l'auteur ne semble pas
soupçonner l'importance.
Quelques réflexions sur l'emploi de l’énergie
électrique pour la mise en action des en-
gins mécaniques dans les parcs, dépôts, les
ateliers, etc., par M. SarTiaux. (Extrait de la
Revue générale des chemins de fer, mai 1912.)
Librairie Dunod et Pinat.
Dans ce fascicule, l'ingénieur démontre les avan-
tages multiples de l'électricité comme force motrice
dans tous les travaux de manutention dans les
chemins de fer.
La graine au vent, par JEAN Nesmy (3,50 fr).
Librairie Bernard Grasset, 61, rue des Saints-
Pères.
Ce livre, recueil de récits charmants, et entre
autres de nombreux contes de Noel déiicats el tou-
chants, sera lu par tous avec bonheur et profit.
140
COSMOS
4er AOUT 19192
FORMULAIRE
Moulage de médaillons en plâtre. — On peut
les obtenir avec le plâtre; mais la matière étant
poreuse, il faut d'abord l’'imperméabiliser avec un
corps gras.
Le médaillon étant alors entouré d’une mince
feuille de carton, de facon à former une cuvette,
on prend, dit Keignart, du plâtre à modeler, fin et
bien tamisé; dans un vase contenant une suffisante
quantité d’eau, on projette assez de plâtre pour
former une bouillie claire. Pendant une bonne
minute, on laisse au plâtre le temps de s’imbiber,
puis on gâche avec une spatule pendant une autre
minute, et on l'emploie sans tarder. Avec un pin-
ceau, on en prend une petite quantité dont on bar-
bouille avec soin la pièce, pour éviter que des
bulles d'air ne restent emprisonnées à la surface,
et principalement dans les creux; puis on verse le
reste sur cette première couche, afin d’avoir une
épaisseur en rapport avec la grandeur du moule.
On laisse reposer pendant à peu près un quart
d'heure, pendant lequel le plâtre s’échauffe, se
durcit et se prend en masse.
Au bout de ce temps, on enlève la collerette de
carton, on gratte avec un couteau les bavures qui
ont pu couler sous la pièce, et on détache avec
précaulion le gâteau de plâtre qui ne doit pas
adhèrer au modèle.
On peut encore employer le moulage à l'alliage
Darcet, qui est fusible à 85°:
Plomb... 2e tireurs 5 parties.
Didi is misent anne 3 —
DiSUilt ses cnusess is 8 —
auquel on peut ajouter un peu de mercure, ce qui
abuisse encore le poiut de fusion. L’alliage étant
préparé, on en place quelques fragments sur
l'objet à mouler, entouré de la feuille de carton,
puis on chauffe en dessous, jusqu'à fusion de
l'ailiage.
Le moulage à la cire ou à la stéarine est plus
simple encore. La pièce doit être légèrement huilée;
sil s'agit de plâtre, on la trempe d'abord dans
l’eau de savon chaude. Cire ou stéarine ne doivent
être employées qu'au moment où elles vont se
figer. La première couche doit être étendue au
pinceau pour chasser les bulles d'air.
Le moulage à la gélatine est assez délicat. Celui
à la gutta-percha est relativement facile ; ramollie
dans un bain à 60° ou 700 et formée en boule, elle
est placée sur l’objet et soumise à l'action d'une
presse (presse à copier). Il est précieux dans le
cas où l’objet à mouler présente des creux con-
tournés qui empècheraient le démoulage d'une
malière non élastique.
Enlèvement de la rouille par un courant
électrique. — MM. Jacob et Kaesbohrer, chimistes
allemands, indiquent une nouvelle méthode pour
l'enlèvement de la rouille sur le fer ou l'acier. La
pièce de fer ou d'acier est placée à la cathode
d'une solution aqueuse de sulfate de soude, dans
la proportion de 0,25 à 5 pour 100. Une plaque de
charbon forme l’anode. L'hydrogène produit à la
cathode réduit la rouille, qui disparait complète-
ment ou peut être enlevée par un coup de brosse.
Un faible courant électrique suffit, mais il est bon
de prolonger son action pendant vingt-quatre heures
environ suivant le degré de rouille. N. L.
Bronzage d’objets en fonte. — Pour bronzer
de la fonte, il faut d’abord cuivrer l'objet, ce qui se
fait en le plongeant dans un mélange d'acide chlor-
hydrique, 40 parties; acide nitrique, 3 parties;
chlorhvdrate de cuivre, 6 parties; ensuite le frotter
avec la solution suivante: sel ammoniac, 4 par-
lies, acide oxalique, 4 partie; eau distillée, 25 par-
ties; une fois la solution achevée, frotter, avec un
vieux linge trempé dans cette solution, l'objet à
bronzer, et répéter cette opération jusqu’à la teinte
désirée. (Courrier du Livre.)
PETITE
M. J. V.,à E. — La Société zénérale d’études et de
travaux topographiques a son siċge 105, rue de Gre-
nelle, à Paris.
M. des P., à la C. — Le choix de cette petite émi-
nenee vst évidemment judicieux. Vous n'avez besoin
que d'un fil unique, partant du sommet de la colline
et aboutissant à votre habitation. Dans ces conditions,
votre antenne aura 250 mètres, ce qui semble très suf-
fisant. Le Gül de fer peut sufire, mais il vaudrait beau-
coup mieux emplaver du fil de cuivre. — Bien taire
attention à l'orientation de l'antenne qui deit ctre
dens la direction du lieu d'habitation à Paris, et non
perpendiculaire à cette direction.
M. H. H., à A. — Nous pensons que vous trouverez
CORRESPONDANCE
ce genre de compresseurs à la maison Wenger et Gan-
gloil, 27, ruc d'Enghien, Lyon. — Nous transmettons
votre demande de numéros à l'administration.
M. A. J. F. — Nou: ne connaissons pas de machine
à rentraire ou à stopper, ce travail est fait habituelle-
ment à la main par d'habiles artisans. — Le stoppage
ataétirain évite les difficultés de la tåche, mais n'est
guère parfait; if consiste à appliquer sur l’envers de
l'étotte au tissu collant que l'on y fixe par le fer chaud.
Ces tissus collants se trouvent chez M. Cosson, 3, rue
des Haudriettes, Paris.
lmprimerie P., Ferox-Yrau. 3 et 5, ruo Bayard, Paris, VII”,
Le gérant: E. Perrrunnar.
Ne 1437 — X aout 1919
COSMOS
141
SOMMAIRE
Tour du Monde. — Déplacement du Soleil dans l'espace. Uae explication des deux courants d'étoiles. Grandes
pluies en France. Le géo-coronium. L’Asama-Yama. Un pays instable. Le désert en marche. Migration
d'une algue méridionale sur łe littoral français et anglais. Le cinématographe à l'abattoir. Le danger des
mouches. Le chien parlant. Le chemin de fer pan-américain, p. 144.
Grillades et fourneaux monstres chauffés aux gaz, Boyer, p. 146. — Électricité industrielle : les
limiteurs de courant, Brrruieu, p. 148. — La combustion incandescente sans flamme, LaLLié,
p. 149. — L’humidité des beurres, Fnaxcis Mann, p. 153. — Le dragage électrique dans l'exploi-
tation des gisements aurifères, MARCHAND, p.
153. = Une contribution possible à l’industrie du
papier en France, Nuuize, p. 156. — Prévision des orages et dispositifs paragrôles, Manuon,
p. 159. — Les lois de la vapeur surchauffée, F. M., p. 153. — Sociétés savantes: Académie des
sciences, p. 164. — Bibliographie, p. 16:.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Déplacement du Soleil dans l’espace. —
Le professeur Boss, au cours d’une recherche pu-
bliée dans le numéro 614 de Astronomical Jour-
nal, indique pour la vitesse du Soleil dans l’espace
le chiffre de 24 kilomètres par seconde. Il estime que
la valeur de 49,9 km: sec trouvée précédemment
d'après des observations spectroscopiques est trop
faible, et sujette à une erreur systématique.
(Société astronomique.)
Une explication des deux courants d'étoiles.
— Le ciel est en perpétuelle transformation. Notre
Soleil court à travers les éloiles à une vitesse d’une
vingtaine de kilomètres par seconde. Les étoiles
paraissaient aux anciens « fixes » sur la voûte du
ciel; en réalité, toutes se déplacent en des direc-
tions variées; l'observation précise et prolongée
a permis de reconnaitre, pour beaucoup d'entre
elles, la direction apparente de leur mouvement.
Chose curieuse: les mouvements des étoiles
s'effectuent surtout dans deux directions privilé-
giées. Elles ont lair de converger vers deux points
déterminés de la voüte céleste, deux apex stel-
laires; ce fait a été parfaitement mis en évidence
par les astronomes, notamment par Kapteyn et
Eddington.
Ona expliqué tout d’abord celte convergence appa-
rente des mouvements d'étoiles par un phénomène
de perspective. Les étoiles suivraient dans l’espace
des routes parallèles : elles ont l'air de converger
vers un point de la sphère céleste, tout comme
les rails d'un chemin de fer rectiligne semblent se
rejoindre à Phorizon, ou — pour prendre une com-
+ paraison astronomique — tout comme les étoiles
filantes d'un même essaim semblent rayonner d’un
même point du ciel. I] existerait deux courants
T. LXVII. Ne 1437.
distincts d'étoiles. Ces deux courants se compéné-
treraient intimement. La distance moyenne des
étoiles à leurs voisines est tellement grande que
les deux courants d'étoiles peuvent s’'emmèler sans
qu'il se produise de collisions (la Dualité de notre
univers, Cosmos, t. LVILI, p. 378, et t. LIX, p. 1).
Le professeur Turner publie dans The Monthly
Notices de mars et d'avril une explication plus
naturelle de l'existence des deux courants d'étoiles :
nous en empruntons le résumé à M. Crommelin
(Knowledge, juillet).
M. Turner dit que la convergence des étoiles
vers deux points déterminés du ciel pent bien
n'être pas un pur effet de perspeclive, mais une
réalité physique : une partie des étoiles courrait
vers un point déterminé de l’espace et l’autre
partie s’en éloignerait. C’est ce que }’on doit con-
stater si les étoiles parcourent des orbites très
allongées autour du centre du système sidéral, car,
dans ce cas, on peut répartir à chaque instant les
étoiles grosso modo en deux groupes : le groupe
de celles qui se rapprochent du centre et le groupe
de celles qui s’en éloignent. Les comètes qui gra-
vitent autour du Soleil nous fournissent une ana-
logie de ce qui se passe pour Îles étoiles ; si nous
pouvions apercevoir constamment les comètes tout
au long de leurs trajectoires elliptiques, nous ver-
rions que, pratiquement, à chaque instani. les unes
s'approchent đu Soleil et les autres s'en éloignent;
au périhélie et à l’aphélie, elles restent quelque
temps à une distance constante du Soleil, mais
cette durée est relativement peu considérable.
Si les étoiles étaient distribuées uniformément
dans l'espace en formant un amas sphérique, elics
décriraient alors toutes, dans le mème teimns, ds
trajectoires elliptiques aulour du cen're de l'amas.
Il est probable que le système des étsiies n'est pas
sphérique, mais plutòt allongé en ellipsoïde et que
[42
la densité stellaire n’est pas parlout uniforme:
dans ce cas, les orbites décrites par les étoiles
autour du centre ne sont pas exactement ellip-
tiques, et leurs révolutions s'effectuent en des
périodes diverses; mais les conclusions susdites
de M. Turner peuvent néanmoins s'appliquer.
Ce savant fixe le centre du système sidéral en
une région de la sphère céleste dont les coorden-
nées sont approximativement : ascension droite,
94°; déclinaison, + 42°, c’est-à-dire dans la Voie
lactée, au centre des constellations des Gémeaux,
d'Orion et du Petit-Chien.
Notre Soleil aurait été voisin de ce centre du
monde il y a un million d’années, et il mettrait,
pour parcourir son orbite entière aulour de ce
centre, 400 millions d'années.
MÉTÉOROLOGIE
Grandes pluies en France. — On cite souvent
les formidables chutes de pluie que l'on relève
quelquefois dans les pays intertropicaux. Certaines
régions de notre pays n'ont rien à leur céder en
pareille matière, et atteignent souvent un record
peu enviable en ces phénomènes.
Nous lisons dans le Bulletin de la Société astro-
nomique que la Commission météorologique du
département de la Lozère publie, dans le Bulletin
de la Société d'ayriculture de ce département
(4° trimestre 1914), les observations de l’année
4940. L'ensemble des stations est de 37. On relève
dans ce travail des chutes de pluie (en 1940) qui
ne paraissent pas avoir encore été atleintes en
France, savoir : 3303 millimètres à la Baraque
(versant du Tarn à 141400 mètres d'altitude);
2151 millunètres à Villefort (597 mètres, versant
du Chassezac); 2610 millimètres à Pont-de-Mont-
vert (901 mètres, Tarn); 2741 millimètres à Cham-
plessy (1080 mètres, Tarn); 2538 millimètres à
Aire-de-Côte (1110 mètres, Tarn), 2501 millimètres,
è Vialas (022 mâtres, Cèze). Il v a eu 188 jours de
pluie à Mercoire (4 222 mètres, bassin de l'Allier).
Villefort a receu 707 millimètres en octobre et
160 millimètres en décembre: la Baraque, 669 mil-
limètres en octobre. La movenne pour le départe-
ment entier est de 4 796 millimètres. La compa-
raison avec la moyenne de la période 1871-1900
montre qu'au Mal’ieu il y eut, en 4919, 263 milli-
mètres en plus (39 pour 100), et à Villefort
1252 millimètres en plus ‘73 pour 100). Il ya
en 36 jours de chute de neige à Mercoire.
Rappeions qu'à Paris la movenne annuelle des
plues est de 57 millimelres fmovenne de la période
comprise entre {573 ei 1909).
Le géo-coronium. — Une intéressan'e confé-
rence a été donnée par le D'A. Wegener, de l'Uni-
versité de Marbourg, sur les couches ele la haute
atmosphère de la Terre.
COSMOS
8 AoUT 1912
Il rappelle les observations et les découvertes
faites depuis quelques années dans la haute
atmosphère au iuoyen de cerfs-volants et de
ballons libres, observations qui ont complètement
modifié les idées admises sur ka nature de ces mi-
lieux. Autrefois, on croyait que la décroissance de
la température avec l'altitude se continuait
jusqu'aux limites de l’atmosphère. Or, les nou-
velles observations ont démontré que cette chute
de la température cesse vers 44 kilomètres d'alti-
tude, et que des températures plus élevées se ren-
contrent à de plus grandes altitudes. Mais les
études du D" Wegener ne se bornent pas à ces
parlies de notre atmosphère proches encore relati-
vement de la surface de la terre; il s'occupe aussi
des régions dans lesquelles on observe souvent des
phénomènes lumineux, qui donnent la preuve qu'à
des altitudes de 200 et peut-être mème de 500 kilo-
mètres, il existe encore une atmosphère d'une
densité appréciable. {(L'atmosphère d'hydrogène de
la Terre, Cosmos, t. LXIV, h° 1376, p. 617.)
M. Wegener croit pouvoir conclure de ses études
que dans les régions les plus élevées de latmo-
sphère se trouve, joint à l'hydrogène, un gaz
encore plus léger, mais inconnu jusqu'à présent.
Il propose pour ce gaz hypothétique le nom de
geo-coronium, en raison de sa ressemblance pro-
bable avec le coronium, non moins inconnu, de
l'atmosphère solaire.
PHYSIQUE DU GLOBE
L’'Asama-Yama. — À la requête du gouverne-
ment japonais, le professeur Omori vient de faire
une étude très complète du volcan Asama-\Yama,
situé au centre de l'ile Nippon, et qui peut être
regardé comme l'un des plus actifs des volcans du
Japon.
La montagne s'élève à 2480 mètres au-dessus
du niveau de la mer, et à 1300 mètres au-dessus
des terres voisines. Le cratère actuel a environ
120 mètres de profondeur et 400 mètres de dia-
metre.
La première éruption dont on ait gardé le sou-
venir a eu lieu en l'année 685 de notre ère, la plus
grande en 1783. Depuis cette époque, le volcan
était reslé dans un calme relatif jusqu'il y a
quelques années. Depuis décembre 1909, les explo-
sions y out eté très fréquentes; plus de soixante
se sont produites depuis deux ans. Le fond du
cratère s'est considérablement élevé depuis vingt
ans, et 12 professeur Omori croit que ce phéno-
mône annonce l'approche d'une nouvelle grande
activité du volean, d'ici à une vingtaine d'années
probablement.
es stations sismographiques ont été établies à
des hauteurs différentes sur les pentes de la mon-
tagne, où les mouvements du sol sont fréquents.
N° 1437
Ceux-ci sont de deux sortes : les uns consistent en
chocs isolés et très courts: dans les seconds, le
phénomène s'accuse par de lents mouvements
oscillatoires suivis, après quelques secondes, par de
rapides vibralions. Les secousses du premier type
ne sont accompagnées d'aucune manifestation du
volcan; celles du second type sont invariablement
le résultat d’explosions de l’Asama-Yama.
Les détonations volcaniques sont entendus sou-
vent à 290 kilomètres de distance dans l'Est et le
Sud-Est, et, chose bizarre, à très peu de distance
vers l'Ouest. Il y a des exceptions cependant à
cette règle; les cendres, sauf de rares exceptions,
se dirigent dans le secteur entre l'Est-Nord-Est et
l’Est-Sud-Est; ellessont transportées avec une vitesse
de 60 à 125 kilomètres par heure, bien supérieure
à celle du vent à la surface du sol, mais corres-
pondant sans doule, d’après M. Omori, à la vitesse
duvent dans les hautes couches de l'atmosphère,
à 8000 ou 9700 mètres, hauteur atleinte générale-
ment par les colonnes de fumée issues du volcan.
Un pays instable. — L'ile de Zante est, suivant
toute apparence, le point du globe le plus cruelle-
ment éprouvé par les tremblements de terre.
M. Bonavia, agent de la Compagnie orientale des
télégraphes, qui réside daas l'ile, a relevé l’histo-
rique de ces phénomènes et l’a communiqué à la
Société sismologique italienne, qui a publié sa note
dans son Bulletin (vol. XVI, 4912, p. 59-67).
Depuis l'occupation de l'ile par les Vénitiens au
xve siècle, on y a constaté dix-neuf secousses désas-
treuses; les deux dernières se sont produites le
24 et le 25 janvier dernier.
L'épicentre de ces tremblements de terre, et
probablement de ceux qui les ont précédés, était
sous-marin entre Zante et Céphalonie, plus près
sans doute de celte dernière ile, si on en juge par
les désastres plus considérables qu'elle a éprouvés.
Jusqu’à la fin d'avril 4912, les deux terribles sc-
cousses de janvier ont élé suivies de nombreux
chocs d'importance moindre, que M. Bonavia
classe ainsi : douze fortes secousses, treize mo-
dérées et quarante-huil légères.
Zante a dù, dans ces conditions, conslituer une
station hivernale des plus pittoresques.
« Le désert en marche ». — Une dépêche du
général russe Mitschenko, qui se trouve à Novo-
Tcher-Kask, chef-lieu militaire du commandement
des Cosaques du Don, signale Île grand danger
causé par l'invasion des sables qui menace la région
où il exerce son commandement. Les autorités
locales ont déjà volé un crédit de 1200000 francs
pour arrêter la montagne envahissante. 600000 kilo-
mètres carrés auraient élé recouverts, depuis peu,
par l’inondation sablonneuse.
Dès 1892, Vladimir Solovief, le grand penseur
russe, écrivait:
COSMOS
143
« L'ennemi nous vient d'Orient. H est plus dange-
reux pour nous que les hordes dévastatrices des
Mongols, car c'est le désert d'Asie lui-même qui,
poussé par le vent d'Est, étend son linceul de sable
sur la terre d'où il a fait disparaitre les arbres. Il
marche vers nous, amenant sa poussière mortelle
jusqu'aux porles de Kiev. »
Il est, chez les Cosaques du Don, une peuplade
qui, par quatre fois déjà depuis un demi-siècle,
a dù reculer devant l'invasion des sables qui la
pourchassent : on l'appelle là-bas d'un nom triste-
ment significatif : la ferme errante. La dune con-
tinue sa marche impitoyable, amenant avec elle le
châtiment de ces populations inconsidérées qui
ont détruit leurs forêts sans songer que ces rideaux.
d'arbres étaient une digue contre la marée de
sable et une protection pour leurs sources d’eau.
Chaque année, ce sont des surfaces de terre fertile
de 1500 kilomètres carrés dans le gouvernement
du Don et de 4000 dans le gouvernement d’Astra-
kan qui disparaissent sous cette invasion jaune, la
plus menaçante de toutes. Près de 500000 kilo-
mètres carrés ont été ainsi à jamais perdus pour
l’agricullure en l’espace d'un demi-siècle. Cette
année, la surface de terres stérilisées par le fléau
est plus importante que jamais.
Les forestiers russes, MM. Kovalef et Krukof,
ont, il y a plus d'un an, poussé un premier cri
d'alarme. Ils estiment qu’un reboisement auquel
on consacrerait annuellement 25 francs par hec-
tare, établi en grand, arrêterait la marche du fléau.
Une dépense de 350 000 francs par an conjurerait,
disent-ils, une perte annuelle de 3 millions et demi
de francs. ~- | |
Pour la première fois ilsemble qu'on prète l'oreille
à leur appel. Il est grand temps qu’on se préoccupe
d'un problème dont l'Occident tout entier a le
devoir de ne pas se désintéresser. Josepx MoLcer.
BOTANIQUE
Migration d’une algue méridionale sur le
littoral français et anglais. — Les géologues ct
les géographes pensent que les migrations des ani-
maux et des végétaux ont joué un rôle prépondé-
rant, à la fois dans l’évolution des espèces vivantes
et dans le peuplement du globe tel que nous le
constatons aujourd'hui.
Aussi Mme Paul Lemoine a été bien inspirée de
noter (dans la Géographie, 45 juillet) un intéres-
sant phénomène de migration qui, depuis six ans,
a été étudié grâce aux efforts collectifs de plusieurs
observateurs.
L'espèce dont il s'agit est le Colpomenia sinuosa.
Cette algue marine est originaire des pays chauds
et tempérés; elle vivait dans la Meédilerrance, la
mer Rouge et l'océan Indien, en ce qui concerne
l'Atlantique, on l’y trouvait au Brésil et au Mexique,
114
mais en Europe, elle s’arrètait à la latitude de
Cadix. Or, elle a envahi dans les six dernières
années les côtes de l’Angleterre et de la France, et
son avancement de localité en localité a élé d’au-
tant plus remarqué qu’elle a causé dès le début des
dégâts importants dans les parcs d’huitres où elle
s’établissait : en effet, elle affecte la forme de
ballons de la grosseur d’un œuf de poule, gonflés
d'air, qui flottent à marée montante et qui entrainent
hors des pares les huitres auxquelles elles se sont
fixées (Cosmos, t. LIV, p. 666).
On se serait attendu à voir cette algue méridio-
niale gagner progressivement du Sud au Nord
depuis Cadix, en s’acclimatant d'abord sur les
côtes du Portugal, pour monter peu à peu jusqu'en
France. Et pourtant l'adaptation s’est faite tout
autrement : elle a débuté en plein dans la Manche
et en Bretagne vers 1905 ; au printemps 1906, l’algue
est signalée sur les côtes Sud d'Angleterre; en 1907,
à Wimereux et au Croisic; en 1909, on la signale
à Marennes (Charente-Inférieure), et c'est après
qu'elle redescend le long des côtes atlantiques de
France jusqu’au golfe de Gascogne, où elle est
observée en mars 1941 par M. Sauvageau.
Au sud de l'Angleterre, elle est actuellement
l'algue dominante. Chose curieuse pour une algue
venue du Midi: en Angleterre, sa fructification
s'opère non pas à la saison chaude, mais en hiver.
En quelques localités restreintes, par exemple
dans le golfe du Morbihan, l’algue, momentané-
ment très abondante, a, au bout de deux ans, com-
plètement disparu, étouffée par la multiplication
d’une conferve qui s’est abondamment développée
dans l’été de 1907. Ailleurs, elle continue de gagner
du terrain.
HYGIÈNE
Le cinématographe à l’abattoir. — A l'abat-
toir de Berlin, depuis quelque temps déjà, òn
emploie le cinématographe au lieu du microscope,
pour examen sanitaire des viandes. Le morceau
de viande soumis à l'examen est placé devant
l'objectif d’un appareil cinématographique et
l’image agrandie est projetée sur une toile. Si la
viande est malsaine, on voit les microorganismes
qui s’agitent et se montrent immédiatement aux
yeux des consommateurs. Cette application du
cinématographe à l'examen sanitaire des viandes
par les inspecteurs vétérinaires est fort curieuse
et pratiquement plus utile que les exhibitions
traquées généralement données en spectacle au
public. Ne: Le
Le danger des mouches. — La mouche femelle
ordinaire, qui envahit nos habitations, a trois occu-
pations principales: se nourrir, se nettoyer et
trouver un endroit opportun pour déposer ses
œufs. Sa vie est courte. En cinq semaines environ
elle doit remplir sa destinée. La femelle pond ses
COSMOS
8 aouT 1912
œufs de préférence dans quelque fissure d’un tas
de fumier ou d’erdures humides et chaudes, de
100 à 150 œufs à la fois. Si elle n’a pas été détruite
par un ennemi quelconque, elle répète cette opé-
ration cinq ou six fois au cours d'un été. Elle
devient ainsibientôtgrand'mère, arrière-grand mère
par les rapides éclosions. On estime que dans une
saison une mouche peut compter de deux à trois
millions de descendants.
En l’espace de vingt-quatre heures et mème de
huit heures, si l'œuf est dans un endroit chaud, la
chrysalide se forme et, au bout d’une semaine,
éclòt. La chrysalide se nourrit d’abord des ordures,
NOTRE ENNEMIE LA MOUCHE.
(Gravure du Scientific American.)
change de peau, prend une teinte brune et, trois
jours pius tard, est un insecte parfait prêt à jouer
son ròle dans le monde si l'œuf et la larve sont
placés dans de bonnes conditions; l'histoire de sa
vie jusqu'au complet développement ne dure que
huit jours; elle est alors un animal merveilleux,
admirable, mais qui porte sur les ailes et dans les
poils de ses pattes et sur sa petite personne abon-
dance de germes de maladies et de mort.
Onatrouvé,nousdit Pearsone's Magazine, jusqu'à
6 600 000 germes sur une seule mouche. L'examen
de 414 mouches a donné, comme nombre moyen
de germes par chaque mouche, le nombre formi-
Ne 1437
dable de 1 222 570 germes. Il a suffi qu’une mouche
vienne se poser sur de la gélatine pour y détermi-
ner une culture de germes typhiques; la mouche
avait laissé sur ses traces 30000 bactéries dont
quelques-unes auraient pu être une cause de
mort.
On comprend donc comment un grand nombre
de médecins sont si favorables à la croisade contre
les mouches.
Les enfants de Weir (Kansar) et d’autres villes
d’Amériques'emploient à la destruction desmouches.
À Weir, les enfants partagèrent la ville en districts
où chaque brigade devait opérer. On les vit, au
jour fixé et convenu avec les autorités, faire de
considérables hécatombes de mouches, systémati-
quement entreprises et bien dirigées. N. L.
Quand on détruit les mouches, on peut estimer
que pour chaque insecte-mis à mort on a débar-
rassé l'humanité d'un million de ces vermines. On
ne saurait donc trop encourager les personnes qui
leur tendent des pièges ou qui les empoisonnent.
Dans une cuisine, à la campagne, nous avons vu
retirer d'une de ces carafes employées pour prendre
les mouches jusqu'à 300 cadavres en quelques
heures. C’est un moyen bien simple pour entraver
la multiplication exagérée de l'espèce, et on devrait
accorder des primes aux ménagères qui lemploient
avec perséverance.
VARIA
Le chien parlant. — Après que les gazeites se
sont amusées tout à leur aise au sujet de Don, le
chien qui parle, les graves professeurs allemands
ont mis leurs lunettes pour examiner de plus près
le phénomène ; il n'est pas inutile d'avoir mainte-
nant les résultats de leurs constatations.
: Rappelonsque Don est un chien de sept ans, appar-
tenant au garde-chasse royal Ebers, à Theerhutte
(Gardelegen, Saxe). Il a un vocabulaire de huit
mots, qu’il prononce quand on lui donne à manger
et qu'on l’interroge :
Was heisst du? — Don.
Was hast du? — Hunger.
Was willst du? — Haben haben.
Was ist das? — Kuchen.
Was bittest du dir aus ? — Ruhe.
C'est-à-dire :
Comment t'appelles-tu? — Don.
Qu'est-ce que tu as? — Faim.
Que veux-tu? — Avoir avoir.
Qu'est ceci? — Gdteau.
Que réclames-tu? — La paix.
li répond, en outre, catégoriquement par Ja et
Nein (Dui et Non) et prononce aussi parfois le
nom Haberland.
M. Oskar Pfungst, de l’Institut psychologique de
l'Université de Berlin (qui a précédemment exa-
COSMOS,
115
miné le cas du cheval savant Der Kluge Hans), a
étudié Don et enregistré ses réponses au phono-
graphe (Science, 40 mai).
Il note, en premier lieu, que le chien n’a en
aucune manière l'intelligence des questions et des
réponses : celles-ci viennent dans un ordre inva-
riable, depuis Don jusqu'à Ruhe, et si on varie
l'ordre des questions, Don répond qu’il se nomme
Kuchen et qu'il veut Hunger, ete. Les trois réponses
supplémentaires viennent d’ailleurs absolument au
hasard. Il faut encore tenir compte de l'articula-
tion. Don n’a qu'une voyelle, dont le son, incertain
et variable, est intermédiaire entre o et ou français;
il n’a jamais prononcé ni a ni.é. Il émet une con-
sonne gutturale qui est à peu près le ch allemand,
qui lui sert de Æ et de A; la nasale qu'il prononce
et qui est intermédiaire entre n et ng lui tient lieu
de d quand elle est un peu allongée. Aussi le mot
Hunger n'est-il guère que l'interprétation accom-
modante, par les auditeurs allemands, d'un son
plutòt voisin de Kunguo.
Devant le phonographe, à la simple question,
uniformément répétée, Was? l'animal répondait
comme d'ordinaire par la série : Don, Hunger, etc.;
mais sur seize mots, il n’y en a guère que deux qui
fussent intelligibles. Des auditeurs absolument
désintéressés arrivaient bien rarement à distinguer
le Hunger du Haben, le Ruhe du Kuchen ;
quelques-uns entendaient parfois tout aussi bien
Engelhopf, Halleluia,'Huhn (poule), Honig (miel)!
Inutile d'insister.
Le chemin de fer pan-américain. — On a
beaucoup parlé d’une ligne dite pan-américaine
devant relier New-York et Buenos-Ayres. L’expres-
sion parait très exagérée en ce que cette ligne se
composerait d’une série de chemins de fer locaux,
n'ayant même pas le même écartement de voie et
ne présentant nullement les caractères d’une
grande artère commerciale de transit. E
Quoi qu’il en soit, il parait intéressant de donner,
d'après le South Pacific Mail, la liste des tronçons
qui composent ce chemin de fer, avec l'indication
des parties achevées.
New-York à Mexico (fait)................ 4 871 km
Mexico à la frontière du Guatemala (fait) 1 357
Guatemala à la gare dn canal de Panama
(81848)... disait 1 744
Zone du canal de Panama à Puno (Pérou,
(873 FAILS} esse eo > 413
Puno à Guaqui (Bolivie) par eau......... 164
Guaqui à Quiaca (Argentine) (584 faits et
269 en construvction)................., 853
Quiaca à Buenos-Aires (faits).....,....... 1 707
LOFALL uses ruine {5 {09
Partie faite............ 10 +3
Partie à faire.......... 5 466
(Société des Ingénieurs civils.)
116 COSMOS
8 aour 191412
Grillades et fourneaux monstres chauffés au gaz.
Le gaz tròne maintenant dans toutes les cuisines
urbaines. Les plus modestes ménagères s'en servent
aussi bien que les cuisinières de la bourgeoisie et
les Vatel des princes. Mais, jusqu’à présent, on ne
l’'employait qu'occasionnellement dans les hôtels,
collèges, hôpilaux et autres grands établissements
oùondoit nourrir quotidiennement un grand nombre
de personnes. Aujourd'hui, c'est chose faile, grâce à
d'ingénieux appareilsqui, tout ensimplifiant la main-
d'œuvre et en rendant moins pénible le dur labeur
des cuisiniers, constituent un progrès hygiénique
sans augmentation du prix de revient. Nous nous
contenterons de décrire aujourd'hui les remar-
quables grillades et fourneaux å friture installés
récemment par M. Ch. Pelletier dans les nouveaux
bâtiments de la Samaritaine.
La grillade-salamandre représentée ci-dessous
(fig. 1) mesure 5 mètres de largeur sur 0,9 m de
F1G. 1. — NOUVELLE GRILLADE MONSTRE CHAUFFÉE AU GAZ : 700 BEEFSTEAKS EN 6 MINUTES.
profondeur et 2 mèlres dẹ hauteur. Elle se divise
en deux comparliments symétriques munis de six
grils basculants en acier capables de cuire 650 à
700 biftecks ou côtelettes en six à sept minutes.
cbeque compartiment porte un plafond en terre
réfractaire et se chauffe au moyen d'une rampe de
rüleurs. Des becs veilleuses brûlant en perma-
nence permettent d'opérer l'allumage au moment
voulu.
Les grils supportant les viandes à cuire sont
doubles. Formés de deux parties que constituent
des barreaux encadrés sur les còlés et que réu-
nissent des charnières, ils s'ouvrent et se referment
l’un sur l'autre comme les feuillets d'un livre. Pour
garnir un gril de viande, le cuisinier le place sur
une table, louvre puis y dispose les morceaux et
le referme en sorte que les viandes se trouvent
maintenues par les deux faces. Après quoi, aidé
d'un de ses compagnons, il l’enfourne très aisé-
ment, les supports du gril pouvant être amenés en
avant à l’aide de ghssières. Quelques minutes plus
tard, la viande est cuite d’un côté, le cuisinier exé-
culte alors une manœuvre identique, retourne le
gril et le repousse à l’intérieur du four de façon
à cuire l’autre face.
L'opération se poursuit ainsi d’une manière
N° 1437
méthodique et peut se continuer sans interruption.
De plus, la consommalion du gaz est minime:
environ 6 à 7 mètres cubes par gril pour 140 à
120 côtelettes ou biflecks. La cuisson d’une pièce
n'atteint donc pas même un demi-centime! En
outre, l’expérience a permis de conslater que ce
système apporte une amélioration notable à la
préparation des mels. Les viandes sont saisies
entre la nappe de feu des brûleurs et le plafond
incandescent, une croûte se forme à la surface, et
les sucs nutritifs, portés à ébullition dans l'inté-
rieur, viennent perler en belles goutteleltes rouges,
une fois l'opération terminée. Enfin, les viandes
COSMOS
147
grillées au gaz perdent 20 pour 100 de moins
qu'avec un autre combustible.
Passons aux fourneaux à friture chauffés au
gaz. Celui des cuisines de la Samaritaine (fig. 2)
possède trois récipients dont on aperçoit les deux
premiers sur notre gravure. Chacune de ces vastes
« poêles à frire » peut contenir 300 kilogrammes
de graisse qu'une batterie de 102 brûleurs Bunsen
portent à lébullition en une demi-heure, et qui
suffisent pour assurer la cuisson de 100 kilogrammes
de pommes de terre en deux immersions d'une
durée totale de quinze minutes environ. La con-
sommalion de gaz pour une de ces opéralions ne
F1G. 2. — FOURNEAU MONSTRE SUR LEQUEL ON PEUT FRIRE 100 KG DE POMMES DE TERRE EN UN QUART D'’HEURE.
dépasse pas 18 mètres cubes, car le cuisinier peut
régler le débit une fois la température de 150°
(ébullition de lu graisse) atteinte, la batterie étant
sectionnée au tiers et aux deux liers.
Le fourneau, qui a une longueur totale de 5,5 m
et une profondeur de 1,3 m, se trouve placé sous
une hotte destinée à l'évacuation des buées et
vapeurs. Quant aux produits de la combustion, ils
circulent autour des bassines et une cheminée les
conduit au dehors. Comme le montre l'illustration
ci-jointe, on met les pommes de terre dans des
paniers métalliques qu’on plonge dans la graisse et
qu’on en relire au moyen de chaines passant sur
des palans. En détachant les chaines d’un côté, on
les fait basculer de manière à déverser leur con-
tenu dans des récipients que des tables à roulettes
emportent rapidement vers l'endroit où des ser-
veurs préparent les portions.
Grâce à ces grillales-salamandres et à ces four-
neaux à friture dignes de la cuisine de Gargantua,
on assure, en trois services, échelonnés de onze
heures à une heure de l'après-midi, la cuisson de
3 600 à 4000 biflecks ou côteleltes et des
4 200 kilogrammes de pommes de terre nécessaires
à certains jours pour le déjeuner du personnel de
la Samaritaine. JACQUES BOYER.
148
COSMOS
8 AOÛT 1949
ÉLECTRICITÉ INDUSTRIELLE
Les limiteurs de courant.
La distribution à forfait du courant électrique,
qui fut appliquée au début par toutes les entre-
prises produisant l'énergie électrique, présente cer-
tains inconvénients dans les cas des petits abonnés.
Aussi a-t-elle été remplacée par la distribution au
compteur. Malheureusement le prix de cet appa-
Fio. 1. — LINMITEUR DE COURANT OMLINGER.
reil est élevé, ce qui a incité à le remplacer
par un dispositif simple et peu coûteux: le limi-
teur de courant. Cet appareil permet d'appliquer
le tarif forfaitaire avec moins d2 risques pour
l'usine qui fournit le courant. L'usine productrice
convient avec le consommateur d’une intensité
CAOUT
T1G. 2. — SCHÉMA DU LIMITEUR POUR COURANT TRIPIHASÉ.
maximum de courant ou e'un nombre de lampes
déterminé en se basant sur un certain prix sans
qu'il soit peritais à l'abonrié de dépasser l'intensité
convenue. À cet effet. un limiteur de courant est
placé en série sur la canalisation, à la place du
compteur, pour empecher l'abonné de prélever
sur le réseau plus de courant qu'il n’a été convenu.
Cette combinaison présente l'avantage, pour
l'usine, de simplifier considérablement la compta-
bilité et de supprimer de la main-d'œuvre {écono-
mies dans l'administration); elle permet d'exiger
le payement à l'avance. Pour l'abonné, elle sup-
prime la lourde charge de la location du compteur
et l'inquiétude relative à son fonctionnement nor-
mal. Ajoutons que compteur et limiteur peuvent
d'ailleurs être utilisés simultanément, de manière
à empêcher l’abonné de dépasser un certain débit.
Cette combinaison permet d'employer un compteur
d’une intensité tout juste égale à celle que pourrait
absorber l'installation et le fait fonctionner dans
la partie supérieure de son échelle de mésure où
ses indications sont les plus exactes. On évite ainsi
en même temps les trop fortes charges à l'usine.
Fia. 3.
— APPAREIL SIMPLIFIÉ
POUR PETITES INSTALLATIONS.
Il existe déjà un assez grand nombre de limiteurs.
Parmi ceux qui paraissent le plus judicieusement
ctablis, on peut citer le limiteur Ohlinger dont,
parait-il, plus de 50 000 exemplaires fonctionnent
actuellement. H se fait en deux types différents: l’un
pour les faibles intensités de 1 à 3 ampères; l’autre
pour les intensités supérieures à 3 ampères. Sa
construction est représentée par la figure i. Le
courant de consommation parcourt le solénoide B
dont le novau de fer doux A produit un champ
magnétique intense. L’urmature C, mobile sur un
ressort feuillard K, est reliée rigidement à un tube
de verre possédant deux godets remplis de mercure.
Le courant circule dans le tube en passant par G
et H. Pour empèclier toute oxydation, on a rempli
ce tube avec un gaz inerte et on l’a fermé hermé-
tiquemoant à la lampe. Le solénoïde, le tube de
rupture el Îles appareils de consommation sont
No 1437
montés en série. Le nombre d’ampère-tours de la
bobine est fixé à un minimum et dimensionné de
sorte que l’armature est attirée lorsque l'intensité
du courant dépasse de 10 pour 406 l'intensité
maximum convenue. Quand l’armature est attirée,
le tube de rapture se trouve légèrement incliné et
le mercure se sépare en coupant le courant en H.
Le tlux de force magnétique disparait aussitôt et
l'armature retombe en rétablissant Île circuit.
L’armature se trouvera donc de nouveau attirée,
coupant encore le circuit. Cette manœuvre se pour-
suivra tant que l'intensité pour laquelle le limiteur
est réglé sera dépassée. L'abonné sera donc obligé
de rester dans les limites de consommation conve-
nue avec l'usine.
La consommation propre de ce limiteur n'est
que de un ou deux watts. Le réglage pour l'’inten-
sité ou le nombre de lampes demandé s'effectue
à l'aide du ressort K, solidaire de l'armature C
dont il modifie la distance au noyau magnétique A.
Pour les courants continu, monophasé et diphasé,
l'appareil est bipolaire pour le courant triphasé,
il est tripolaire (fig. 2). Ces derniers limiteurs pos-
sédent trois bobines d’excitation et deux tubes de
rupture : le circuit de l'installation est coupé dès
que la charge de l’une des phases dépasse l'intensité
prévue au contrat,
COSMOS
149
Pour les petits abonnés, le limiteur précédent est
remplacé par un petit appareil très simple et très
bon marché (il ne coùte qu'une dizaine de francs).
Comme l'indique le schéma (lig. 3), le limiteur de
courant de 1 à 3 ampères comprend une bobine
d'électro-aimant o parcourue par le courant de
consommation. Cette bobine agit sur une armature
légère, formée d'une petite tige de fer b qui, au
repos, appuie sur deux petits godets à mercure d
enfermés dans un tube hermétique c rempli d’un
gaz inerte. Dans cette posilion, la tige b ferme le
circuit. Dès que l'intensité du courant atieint la
valeur fixée d'avance, la tige est attirée et le cir-
cuit est coupé déterminant des interruptions dans
le fonctionnement des appareils : le consommateur,
privé de lumière fixe, doit donc éteindre les lampes
* qui sont de trop ou les remplacer par des lampes
d'intensité moindre.
L'appareil est réglable comme le précédent : il
suflit, en effet, de desserrer la vis f et de déplacer
l'électro-aimant, On conçoit que, selon les distances
qui séparent la tige de fer b du noyau o, l'attraction
s'exerce pour des intensités variables. Le réglage
s'effectue d’ailleurs par les soias de l'usine, et, pour
protéger les appareils contre les détériorations et
la fraude, ils sont munis d'un couvercle à plombage.
A. BERTHIER.
La combustion incandescente sans flamme.
On constate que la présence d’un corps chaud de
grande surface dans une enceinte renfermant un
mélange gazeux accélère la combinaison des gaz.
La combinaison s'opère d’une manière particuliè-
rement active dans les couches gazeuses immé-
diatement en contact avec la surface chaude. Depuis
longtemps, cependant, on considérait comme un
phénomène étrange la combustion de l’hydrogène
en présence du platine très divisé à l’état poreux.
Et, dans les applications industrielles, on ne jugeait
point avantageux pour la combustion le contact de
la flamme avec des surfaces solides. Suivant l'opi-
nion de Frédéric Siemens, les surfaces chaudes
déterminaient une dissociation des gaz qui contra-
riait la combustion. Or, la compétence et la haute
autorité dont jouissait Siemens ne permettaient
guère de contester ses jugements.
L'influence qu'ont les surfaces chaudes sur la
combustion à basse température a attiré latten-
tion de chimistes distingués: Dulong, Thenard,
Dobereiner, en France; Davy, Henry, Graham,
Faraday et de La Rive,en Angleterre. L'étude en a
été reprise d’une façon approfondie par M. W. Bone,
professeur à l’Université de Leeds, en Angleterre.
[i y fut amené en constatant l'influence exercée
par un grand nombre de surfaces chaudes sur la
combinaison de l'oxygène et de l'hydrogène au-
dessous de leur point d'inflaimmation. L'expérience
démontre que le pouvoir d'accélérer les combus-
tions gazeuses appartient à toutes les surfaces,
même à des températures au-dessous du point
d'inflammation, mais à des degrés variables dépen-
dant de leurs caractères chimiques et de leur con-
texture physique. L'activité d’une surface peut être
accrue ou diminuée dans certaines conditions. Dans
le cas de la combinaison de l’hydrogène ou de
l'oxyde de carbone avec l'oxygène à basse tempé-
rature en contact avec un métal non oxydable ou
un oxyde non réductible, l’activité de la surface
est exallée par le contact préalable avec l’oxygène.
La surface a donc une propriété spéciale de conden-
sation, d'absorption, peut-être d’ionisation, assez
difficile à définir, mais incontestable. Ainsi la pré-
sence de la vapeur d'eau, qui facilite la combustion
de l’oxyde de carbone dans les conditions usuelles,
la retarde, au contraire, par le contact avec une
surface de terre réfractaire. On peut citer encore
l'exemple du méthane qui, dans les flammes ordi-
naires, a une plus grande affinité pour loxygène
que l'hydrogène ou l'oxyde de carbone, el qui, en
contact avec une surface chaude, a des propriétés
opposées. Ce sont là des faits d'un véritable intérèt,
ne serait-ce qu'en montrant combien sont com-
plexes les phénomènes de la combustion,
150
Si des corps chauds accélèrent la combustion des
gaz à des températures au-dessous du degré d'in-
flammation, il est logique d'admettre que des corps
très chauds posséderont davantage la même pro-
priété. M. Bone considère que l'influence de sur-
face s’accroit rapidement avec la température selon
la nature des corps chauds, mais qu'elle est prali-
quement égale pour tous les corps portés à lin-
candescence. Si un mélange de gaz explosifs est
comprimé au travers d’une matière réfractaire
incandescente poreuse, la combustion est très
rapide et, par suite, extrêmement vive dans les
premières couches très voisines de la surface de
pénétration. M. Bone réalise ainsi une combustion
de surface incandescente sans flamme; l'énergie
du gaz est immédiatement transformée en chaleur
rayonnante.
Quels sont les avantages du nouveau procédé?
F1G. 1. — DIAPHRAGME CHAUFFEUR.
4® La combustion est rendue beaucoup plus rapide
par la surface incandescente et, par suite, peut
être concentrée à l’endroit précis où la chaleur est
nécessaire; 20 Ja combustion est complète avec une
quantité d'air comburant réduite au minimum;
3° la production de températures très élevées est
possible sans aucun système de récupération de
chaleur, et 4, à raison du grand dévelappement de
chaleur rayonnante, les échanges caloriliques sont
rapides avec l'objet à chauffer.
Divers dispositifs imaginés par M. Bone montrent
quelques applications de la combustion sans
flamme. Un mélange de gaz combustibles s'écoule
sousune légère pression au travers d'un diaphragme
de matière granuleuse réfractaire, dont la porosité
varie suivant la nature du gaz à brüler. Avec le
gaz d'éclairage et le gaz à l'eau carburé, une pres-
sion correspondant à une colonne d’eau de 5 à
COSMOS
8 aour 1912
1 centimètres est suffisante pour déterminer le
mouvement du courant gazeux. Le mélange com-
bustible est introduit dans une chambre ou espace
ménagé derrière le diaphragme. Le gaz et lair
sont fournis séparément sous pression pour se
réunir dans la branche d’un tube en V, ou bien le
gaz sous pression arrive par un injecteur qui pro-
duit un entrainement d'air en proportion conve-
nable pour une combustion complète. Au début, le
gaz est insufflé seul et enflammé à sa sortie sur la
surface extérieure; l’air est alors introduit gra-
duellement jusqu’à ce que la proportion désirable
soit atteinte. La flamme cesse bientôt d'être lumi-
neuse et diminue de volume, puis se retire dans
l'épaisseur du diaphragme, qui prend un aspect
bleuâtre et rougit enfin sur toute sa surface. Toute
trace de flamme disparait, et la chaleurrayonne vive-
ment au dehors. Cette combustion présente plusieurs
phénomènes curieux. La combustion se localise im-
médiatement au-dessous de la surface extérieure
formant une zone de faible épaisseur (3 à 6 mm),
et aucune chaleur ne se développe en arrière du
diaphragme, si bien que lon peut sans crainte
poser la main sur la chambre d'arrivée du mélange
gazeux. La combustion, bien que produite dans un
espace très limité, est complète, de telle sorte
qu'après le réglage du mélange, aucune partie de
gaz non brùlé ne s'échappe. En outre, la tempéra-
ture à la surface peut être instantanément modifiée
en agissant sur la quantité du mélange, ce qui
permet de régler très exactement la produclion de
chaleur utilisable.
Avec du gaz d'éclairage et de l'air, le diaphragme
peut être aisément maintenu à une température de
850°C. Ce système se prête parfaitement à l'emploi
des combustibles gazeux les plus variés: gaz
d'éclairage, gaz de four à coke (dilué ou non avec
du gaz à l’eau), gaz nalurel, gaz d'air carburé, gaz
à l’eau carburé, gaz Mond (gaz pauvre à 4 360 calo-
ries par mètre cube). On peut se servir de dia-
phragmes de 60 X 60 cm*, qui résistent à un long
usage sans altération de leur pouvoir rayonnant.
On songe aussitôt à leur emploi pour le rôlissage
ou le grillage. La facilité de donner au diaphragme
toute position désirable permet de l'utiliser hori-
zontalement à très faible distance de la surface
d'un liquide pour l'évaporer ou le concentrer. Ainsi
on évapore dans un plat une solution de silicate de
soude, opération difficile quand le chauffage a lieu
par-dessous. Avec le nouveau procédé, les couches
supérieures du liquide, immédiatement chauffées
par la chaleur radiante, sont vaporisées. Il se
forme bientot une croûte superficielle de silicate
de soude que l'on’enlève par intervalles.
Dans les applications industrielles, le diaphragme
est remplacé par un lit de matières réfractaires
granuleuses qui enveloppent le corps à chauffer.
Ces matières sont portées à l’incandescence par un
Ne 1437
courant de mélange explosif, formé d'une vapeur
combustible ou d'un gaz et d'air, qui viennent
brüler dans les interstices laissés dans la masse.
On voit dans la figure 2 l'application à un four
à creuset. Le dispositif serait le même dans un
four à moufle. Le mélange gazeux pénètre dans le
four par un étroit orifice avec une vitesse plus
grande que la vitesse avec laquelle se propage l'in-
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FıG. 2. — FOUR A CREUSET.
flammation. Ce mélange, en rencontrant les ma-
tières incandescentes à la base du foyer, y brûle
complètement sans flamme en y développant une
très haute température. Les gaz brülés sur leur
parcours entretiennent l'état incandescent.
Par ce moyen, qu'il est possible d'adapter aux
fourneaux de formés variées, on atteint sans récu-
pération des températures beaucoup plus élevées
que par la combustion avec flammes. En réalité,
avec des gaz d'une valeur calorifique élevée, tels
que le gaz d'éclairage, la température praticable
est limitée plutòt par la nature des réfractaires
composant le fourneau que par le degré de com-
bustion possible. Ainsi, au gaz de ville, M. Bone
a fondu complètement dans un creuset un còne de
Seger, n° 39, ce qui correspondait à une tempéra-
ture voisine de 2000°C. On pourrait de même
fondre le platine, ce qui montre la supériorité du
nouveau procédé par rapport au chauffage au gaz
ordinaire. Il faut évidemment choisir, pour bourrer
le fourneau, des matières réfractaires qui n’aient
pas d’action sur les parois. Jusqu'à 1 200, on peut
employer la brique réfractaire, broyée et tamisée,
à une grosseur convenable. A de plus hautes tem-
pératures, le lit est formé de fragments de'ma-
gnésite ou autres réfractaires tels que le carbo-
rundum broyé et tamisé. L'allumage du fourneau
se fait d'abord sur le gaz seul auquel on mélange
l'air en proportion voulue; la quantité du mélange
COSMOS
151
est réglée de façon que toute la région inférieure
du fourneau soit portée à l’incandescence.
Avec les gaz riches, tels que le gaz d'éclairage,
on atteint des températures de 2 000°C, et, avec du
gaz Mond ou gaz pauvre, 1 500° environ sans récu-
pération, et la récupération, généralement appli-
cable, élève dé beaucoup ces limites.
Voici les résultats d’essais faits dans un four à
moufle de 238 millimètres de longueur, 132 milli-
mètres de largeur, 81 millimètres de hauteur,
chauffé au gaz d'éciairage d'un pouvoir de 4 820 calo-
ries par mètre cube :
Temperature Consummation de gaz Temp `rature des #3
au centre du mouie. en Litres par heure. à la sortie.
815°C 592 540°C
1 424°C 2 221 1 085°C
Aux plus hautes .empératures, pas de trace de
flamme au sommet du fourneau. Ce qui est parti-
culièrement remarquable, c'est l’économie de con-
sommalion de gaz par comparaison avec un four
à flammes. Pour une température de 4 055°C, la con-
sommalion est, dans le premier cas, de 1212 litres
par heure et, dans le second, de 2961, soit dans la
proportion de 1 à 2,4.
Au nombre des applications tout indiquées, se
trouvent le chauffage des chaudières à vapeur et la
fusion des métaux. La chaudière de section cylin-
drique est traversée par une série de tubes d'acier
de 91 centimètres de longueur et 7,5 cm de dia-
mètre intérieur. Ces tubes sont remplis de frag-
ments réfractaires concassés. A l'entrée de chaque
HS
gi DS ef".
LA NIET
F1G. 3. — APPLICATION DE LA COMBUSTION SANS FLAMME
AU CHAUFFAGE D'UNE CHAUDIÈRE.
tube est enfoncé un tampon de terre réfractaire
percé d’un trou de 19 millimètres de diamètre, ser-
vant à la fois à empêcher l'échauffement du tube
en ce point et à déterminer une vitesse du courant!
gazeux plus grande que celle de la propagalion de
la flamme. Le mélange pénètre par compression
ou aspiration dans les tubes. La combustion qui
commence immédiatement est complète à 15 cen-
152
limètres de l'entrée du tube. Le noyau est main-
tenu à une température extrêmement élevée, tandis
que les parois du tube, rapidement refroidies par le
transport de la chaleur dans l’eau de la chaudière,
n’atlteignent jamais la température du rouge. Les
gaz brülés, en traversant les produits réfractaires
dans le reste du tube, y disséminent leur chaleur,
si bien que leur température, à la sortie des tubes,
n'est supérieure que de 70 degrés à celle de l’eau de la
chaudière, c'est-à-dire à une température beaucoup
plus basse que celles des produits de la combustion
à la sortie d’une chaudière multitubulaire du type
ordinaire. Du reste, pour recueillir mieux encore
la chaleur, les gaz traversent un réchauffeur tubu-
laire d'eau d’alimentation, qui est construit d’après
les mutmes principes que la nouvelle chaudière.
Dans chaque tube, l'alimentation de mélange
gazeux est, par heure, d'environ 4,5 m? de gaz
d'éclairage accompagnés de G volumes d'air, soit
au total 24,5 m°’ de mélange. Le passage du gaz
dans les tubes est donc très rapide.
Dans des expériences exécutées récemment à
Leeds avec une chaudière ayant dix tubes, vapori-
sant à une pression de 7 kg par cm*, les gaz brrilés
sortaient des tubes de la chaudière à une tempéra-
ture de 229°, puis finalement à 95°C après leur
passage dans un réchauffeur d’eau d'alimentation.
Le rendement calorifique, c'est-à-dire entre les
calories fournies par le gaz et celles absorbées par
la chaudière, était de 0,943.
Déjà on peut signaler une application industrielle
du système dans le Yorkshire, où des gaz, sous-
produits d'une usine métallurgique, chauffent une
chaudière de 110 tubes qui donnent un rendement
caluritique dé 90 pour 100.
Ces rendements tout à fait remarquables du
système de combustion sans flamme ne sont pas
inexplicables. On en découvre finalement la raison
d'être. La combustion s'opère avec une proportion
COSMOS
R AOUT 19192
d'air additionnel presque théorique, le volume des
gaz brülés est, par suite, aussi réduit que possible.
Grâce à la rapidité extrême des réactions chimiques
qui résultent de la combustion, avec le nouveau
dispositif, il devient possible d'accumuler une
quantité considérable de chaleur dans un petit
espace et d'obtenir une vaporisation tout à fait
intense. D'ailleurs, la vaporisation est graduelle :
10 pour 100 sont produits par le premier tiers de
la longueur du tube, 22 pour 400 dans le second
tiers, et 8 pour 100 seulement dans le troisième
liers. L’évaporation moyenne peut être évaluée à
97 kilogrammes d'eau par mètre carré de surface
tubulaire et par heure, soit deux fois plus que
‘dans une chaudière de locomotive où la combus-
tion est singulièrement poussée, comme on sail.
Avec un dispositif tubulaire du même genre, on
pourrait facilement chauffer des liquides à concen-
trer ou à distiller, chauffer de l'air, fondre des
alliages on des métaux tels que le plomb, l'étain,
le zinc, etc.
On entrevoit des applications nombreuses de la
combustion sans flammes, d'autres encore insoup-
çonnées se feront jour assurément.
Avec la combustion sans flamme, on aura une
utilisation beaucoup plus avantageuse et plus
étendue des gaz pauvres produits par les gazogènes,
des gaz de hauts fourneaux et de fours à coke ;
dans les pays où le pétrole est employé, comme
en Amérique, au chauffage des chaudières, on par-
viendra sans doute à appliquer le principe de la
combustion sans flamme à la combustion du gaz
d'huile. Les applications essayées par M. Bone
sont déjà fort intéressantes par elles-mêmes, tant
au point de vue théorique que pratique; elles ont
un caractère de nouveauté qui mérite d'attirer
l’attention de tous les esprits curieux de suivre le
pragrès scientifique et industriel.
NORRERT LALLÉ.
Lhumidité des beurres.
Quel que soit le soin apporté à sa fabrication,
le beurre garde toujours dans sa masse nne rer-
taine quantité d'eau : celle-ci varie, en général,
dans des limites assez étroites, de 14 à 18 pour 100
en moyenne, mais elle les dépasse quelquefois, au
dvtriment du consommateur qui se trouve, en der-
nière analyse, avoir acheté et payé de [lean au
prix du beurre.
(Cest là une pratique qui peut prèter à des
fraudes rémunératrices : aussi, depuis longtemps,
les spécialistes et les commerçants honnîtes ont-ils
demandé aux pouvoirs publics une sévère régle-
mentation du taux d'humidité qui caractérise les
beurres normaux (1). Sous le prétexte que les
petits producleurs, ignorants ou mal outillés,
peuvent laisser involontairement un excès d’eau
Le délaitage dans leurs produits, on a reculé jusqu'ici
devant la seule mesure raisonnable qui s'impose
à ce point de vue, et qui consiste à fixer une limite
(1) I v a dix ans, cette importante question fut sou-
levée en Angleterre; et à cette époque, nos grands
conimercants en beurre, M. P. Fortin par exemple,
profitant de l'émotion causée par les faits révélés,
réclamérent vivement contre les procédés de la juris-
prudence francaise, qui semblait favorisertousles abus.
{Voir Cosmos, t, XLV, p. t#8, n° 872.)
N° 1497
supérieure à la quantité d’eau pouvant être léga-
lement contenue dans les beurres, limite au-dessus
de laquelle commencerait, sinon la fraude carac-
térisée, du moins le délit de mise en vente d'un
produit « non marchand ». Forts de cette absence
de réglementation, quelques fabricants, admirable-
ment outillés et pourvus de malaxeursdontils savent
se servir avec habileté, incorporent de l’eau à leurs
beurres, les « mouillent » pour employer le terme
adopté par les juridictions répressives; trop sou-
vent, les tribunaux acquittent, à raison de l’impos-
sibilité matérielle qui existe de discerner où com-
mence la fraude, où finit la maladresse opératoire.
M. Collerd-Bovy, étudiant cette importante ques-
tion au dernier Congrès belge de l'alimentation
(Liége, 1941), a signalé que, dans un magasin de
vente, il a trouvé un beurre titrant 37,5 pour 100
d'eau, qui était affiché au prix de 3,15 fr le kilo-
gramme, au lieu de 3,40 fr et 3,50 fr le kilogramme,
qui étaient les cours normaux à cette époque.
Alléchée par l’économie qu'elle croit réaliser, la
clientèle de fortune modeste donne ses préférences
à de semblables beurres. En tenant compte de la
lactine, de la caséine et des matières minérales,
ce produit humide à 37 pour 100 ne renfermait en
réalité que 61 pour 100 de matière grasse, en
sorte que son prix exact ressortissait à 5,46 fr le
kilogramme ; au contraire, dans le beurre normal,
mis en vente au prix de 3,50 fr le kilogramme, et
contenant environ 84 pour 400 de matière grasse,
celle-ci ne coùtait que 4,26 fr le kilogramme. En
réalité, le beurre mouillé à 37 pour 100 aurait du
par conséquent ètre vendu 2,60 fr le kilogramme
COSMOS
153
seulement : les 55 centimes de différence avec le
beurre normal représentaient le prix de l’eau. Il
n'est évidemment possible d’opposer à de pareils
chiffres aucun raisonnement plausible. ls sont l'in-
dice patent d'une honteuse exploitation dont les
consommateurs, les commerçants de bonne foi et
les producteurs soigneux sont directement victimes.
Une réglementation s'impose donc; elle présente
même un caractère urgent, si on ne veut pas laisser
sans défense ceux qui s'efforcent à une production
impeccable. Si on s'en tient aux nombreuses ana-
lyses qui ont été faites, le chiffre de 48 pour 100
— avec une tolérance en plus de 2 pour 100 —
parait être suffisamment élevé pour ne jamais
motiver de condamnations injustes.
Dans la très grande majorité des cas, les beurres
bien fabriqués renferment entre 44 et 16 pour 100
d'eau, en sorte que les producteurs qui ne savent
obtenir que des beurres ayant uh taux d'humidité
supérieur doivent, ou apprendre leur métier; ce
qui sera excellent pour eux, ou renoncer à une
fabrication défectueuse, ce qui sera excellent pour
tout le monde.
ll serait, en effet, profondément illogique de
continuer à protéger les malfaçons au détriment
de la fabrication rationnelle et plus encore au
détriment du public.
On ne peut donc qu'applaudir au vœu émis par
le Congrès belge de l'alimentation, et aux termes
duquel devrait être désormais interdite la vente de
beurre, de margarine ou de graisse alimentaire ne
renfermant pas au moins 82 pour 100 de matière
grasse pure. Francis MARRE.
Le dragage électrique dans l'exploitation des gisements aurifères.
Le dragage doit ètre considéré comme étant
actuellement le procédé le plus avantageux pour
exploitation de beaucoup de gisements aurifères ;
l'épuisement des dépôts que l’on pouvait mettre
en valeur par des méthodes anciennes nécessite .
un système de travail nouveau; l'extraction des
sables et des: graviers dans les gisements submer-
gés, dans les eaux profondes, dans les courants
rapides, présentait de grandes difficultés; c’est
avec le dragage que l’on est parvenu à surmonter
les obstacles : le dragage retourne liltéralement
le sol de fond en comble, il ramène à la surface les
couches profondes jusqu'à 42 ou 415 mètres; Fin-
térèt de ce procédé est bien mis en évidence par le
développement qu’il a rapidement acquis; ainsi en
Californie, bien que la mise en service du premier
dragueur pour l'exploitation des gisements auri-
fères ne remonte pas à plus de dix ans, on peut
évaluer qu’à présent le quart au moins de l'or pro-
duit par cette région est extrait par voie de dra-
gage; le dragage constitue donc une phase très
importante de l’histoire des procédés miniers; il
fournit une solution très élégante d’un problème
que les méthodes antérieures ne résolvaient qu'in-
complètement; il a permis de remettre en exploi-
tatron des gisements abandonnés, des gisements
très riches cependant, que l’on avait attaqués jus-
qu’au niveau de l’eau, mais qu’il avait fallu dé-
laisser ensuite malgré tous les elforts faits pour
en poursuivre l’utilisation.
La méthode du dragage est originaire de la
Nouvelle-Zélande. Comme elle donna de bons
résultats, on chercha presque aussitôt à la mettre
en usage un peu partout; mais dans la hâte que
l'on eut à en tirer parti. on ne procéda pas avec
toute la prudence qu'il eùt fallu raisonnablement ;
l'exploitation d'un gisement ne peut ire prohitable
qu’à la condition que la teneur cn or y soil sufti-
sante, et pour le bon fonctionneinent uu dragage il
faut autant que possible que le métal précieux soit
154 COSMOS
distribué d’une façon uniforme; on ne s’en rendit
pas compte tout de suite, et des exploitants furent
déçus dans les espoirs inconsidérés qu'ils s'étaient
8 aouT 1912
forgés. Dans la suite, on a montré plus de sagesse;
on ne songe plus à entreprendre l'exploitation
d'un gisement qu'après avoir procédé à des son-
F1G, 1. — DRAGUE ÉLECTRIQUE ÉQUIPÉE PAR LA « GENERAL ELECTRIC COMPANY ».
dages convenables; on faisait autrefois ces son-
dages à la main; on les exécute maintet ant à
l’aide de perforatrices; avec ces machines, les
opérations préliminaires ne coùlent pas trop cher,
et l’on n'entreprend plus aucune exploitation de
gisement sans être certain des résultats; on tra-
vaille par le dragage non seulement dans les cours
d’eau, mais même dans les placers secs, en y
faisant arriver suffisamment d’eau pour assurer la
flottaison du dragueur, qui creuse le sol et y pro-
gresse à mesure que “elui-ci est désagrégé.
L'outillage du dragage a d’ailleurs été sensible-
inent aviċlioré, et les derniers types de dragueurs
F1G. 2. — VUE DE LA CHAINE À GODETS.
sont tous différents de ceux que l'on employait au
début: ils sont beaucoup plus dégagés que les
autres; ces derniers étaient lourds, massifs : les
nouveaux ne sont que robustes et, en joutre, leur
efficacité est sensiblement meilleure.
Les premiers dragueurs fonctionnaient avec des
godels de trois à quatre pieds cubes, soit d’une
centaine de litres de capacité, et ils étaient
alionnés par une machine à vapeur d'une cin-
quantaine de chevaux; ce mode d’actionnement a
FiG. 3. — MOTEUR ACTIONNANT LA CHAINE À GODETS.
été conservé pour la généralité des cas, mais la
construction du mécanisme, de même que la ma-
chinerie, cest beaucoup meilleure qu'auparavant.
N° 1437
Comme les quantités de matières que l'on doit
traiter sont énormes, les dépenses d'énergie pour
l’actionnement du dragueur ont rapidement une
importance considérable dans les frais d'exploita-
tion, on est amené à les réduire autant que pos-
sible; pour cela, il faut disposer de machines
ayant le maximum de rendement.
D'un autre côté, le charbon est généralement
rare dans les régions qui possèdent des gisements
aurifères, tandis que les forces hydrauliques sont
ordinairement nombreuses; on devait naturelle-
ment songer à recourir à l'emploi de l'électricité,
c'est ce que l'on a fait, et l'adoption de la com-
mande électrique a constitué une nouvelle amélio-
ration dans les procédés de travail, une améliora-
tion d’une grande utilité économique, bien qu'il
fallüt réaliser pour cet usage des moteurs spéciaux.
Le fontionnement n’a pas tardé à être apprécié de
Fr
COSMOS
155
tous ceux qu’il pouvait intéresser, et l’on en tire
déjà parti chaque fois que la chose est possible.
Le type de dragueur le plus employé aujour-
d'hui est le dragueur à chaine continue avec godets
aussi rapprochés que possible lun de l'autre ; ces
godets ont une contenance de 100 à 400 litres.
La construction ne diffère pas sensiblement de
celle des autres machines du même genre em-
ployées dans d’autres domaines, si ce n’est qu’elle
est généralement renforcée parce que les godets
ont souvent à attaquer des terrains très durs;
d’ailleurs, la machinerie comporte tout un ensemble
d'appareils spéciaux, el notamment les tables, les
tamis, les boites, les pompes, l’amalgamateur, etc.
Dans les installations électriques, la commande
s'effectue séparément pour les différentes parties ;
on emploie le plus souvent des moteurs à courant
alternatif triphasé du type à induction; on agit
F1G, 4, — VUE DES TREMBLEURS ET DES TRIEURS.
sur la vitesse à l’aide d’un rhéostat pour ceux de
ces appareils qui demandent ce genre de réglage.
Le moteur de la chaine à godets doit être parti-
culièrement robuste, car il fonctionne constam-
ment et la mise en marche est rude. On fait le
démarrage en trois ou quatre phases, le couple
normal doit être obtenu à demi-vitesse.
Un moteur du même genre est employé pour la
commande du treuil au moyen duquel on main-
tient le dragueur en place; le combinateur doit
permettre à ce moteur de marcher en permanence
à toutes vitesses comprises entre la demi-vitesse
et la vitesse normale; l’expérience a fait voir qu'il
est bon de munir cet appareil de freins à solénoïde,
permettant l'obtention d'un arrêt pour ainsi dire
instantané et combiné de manière que le moteur
arrêté puisse être remis directement en marche.
Les pompes employées sur le dragueur sont de
deux catégories : la pompe à sable, qui a pour but
de prévenir l’enlisement du dragueur, et les pompes
à eau, fournissant l’eau aux tables de lavage.
La pompe à sable doit faire face à une charge
relativement forte, mais elle n’est employée qu’en
cas d’absolue nécessité; les pompes à eau sont
ordinairement des pompes centrifuges à grande
vitesse.
Les tamis ont pour objet de séparer le gravier
de l'argile et de permettre aux fines particules
contenant l’or de passer aux tables et aux sluices,
où elles sont réunies; on en emploie de deux
catégories, les tamis rotatifs et les trembleurs; les
uns et les autres sont actionnés par un moieur à
vitesse constante.
Les fragments de rocher à rejeter après le triage
sont repris par un transporteur à courroie et
rejetés derrière le dragueur; ce convoyeur est
150
. également actionné par un moteur à vitesse con-
stiante.
Les installations de dragage en usage ont géné-
ralement une capacité d'un millier de tonnes par
jour; la plus grande qui ait été réalisée est vrai-
semblablement celle de la Natomas Consolidated
Company, sur le Mississipi, elle peut traiter
2 000 tonnes par jour; une telle installation coùte
800 000 francs, la puissance de l'équipement élec-
trique doit être de 1 500 à 2000 chevaux; l’équipe-
ment des dragueurs de 4 000 tonnes, comme celui
qu'emploie la Compagnie susnommée, correspond
à une puissance de 1 000 chevaux.
Les dragueurs reçoivent communément l'énergie
électrique d'une grande Compagnie hydro-élec-
rique, qui amène le courant jusqu'à une sous-
station spécialement établie sur les lieux; de
COSMOS
8 AOUT 1912
cette sous-station, l'énergie est transmise au
dragueur sous une tension variant entre 2000 et
6 000 volts, par l'intermédiaire d'un câble armé
placé sur des pontons; la canalisation aboutit à
un interrupteur principal et de là au tableau de
distribution, à l'aide duquel s'effectue la com-
mande des différents appareils.
Il est facile de comprendre que la commande
électrique est non seulement plus économique que
l'actionnement à la vapeur, mais encore qu’elle
permet de réaliser des appareils beaucoup plus
simples ; il va de soi qu'il n’y a pas de comparaison
possible à cet égard entre les dragueurs où les
mouvements sont fournis par des machines à
vapeur et ceux où il est fait usage dans ce but de
moteurs électriques.
H. MARCHAND.
—— mo MM
Une contribution possible à Pindustrie du papier en France.
Le papier estun objet que la civilisation a rendu
indispensable. Sa consommation est en progression
constante, cependant que, depuis longtemps déjà,
les matières premières servant à sa fabrication
tendent à se rarėfier. |
Le papier provient du feutrage de la cellulose
des plantes à issus fibreux, mise en état d'emploi
. par des préparations diverses, correspondant aux
différents usages auxquels on le destine.
Le papier brut, dans l’état précédant toute con-
fection, est désigné sous le nom de pâte à papier.
C'est l’objet de cette notice. |
La ceiluluse (C*H!°0:*)t3 est une substance for-
manl l'enveloppe des cellules végétales se présen-
tant sous l'aspect d'une membrane rigide, élastique
et perméable, qui empèche toute manifestation
extérieure du mouvement protoplasmique. Elle
forme un tissu sur lequel se trouvent déposés les
éérnents balsamiques et chimiques dont la nature
et la proporlion constituent les différentes espèces
de plantes. Un enduit maintient le tout sous l'aspect
caractéristique de chaque variété.
La cellulose se transforme par cutinisation, géli-
fication, subérification et lignilivalion. Elle subit
la minéralisalien par addition de substances étran-
gores.
Le vieux lunge, le coton, la pile å papier, sont
de ia cellulose presque pure.
Pour la pile à papier, origine végétale est directe
quand il £'agit de papier provenant de vésitaux
(bots, alja) traités speciulement. Elle est indirecte
quand il sag't de débris d'arlicles manufecturés
servant à cette fabricalion (chilfons, vieux papiers).
L'on sait que les Chinsis connaissaient le papier
depuis l'antiquité, car, en 723 avant Jésus-Christ,
Tsai-Lun définit la fabrication des papiers de mûrier
et de bambou. Ce n’est qu'au x° siècle de notre ère
que l'on commença à le substituer au parchemin et
au vélin (1). La découverte de l'imprimerie provo-
qua un grand besoin de papier et la consommation
en augmenta sans cesse pour subir un nouveau
bond à la fin du xvin* siècle, à cause de la diffusion
des gazettes. Depuis cette époque, le mouvement
ascensionnel ne cesse de se manifester. Les jour-
naux, les livres, la publicité, le commerce et l'ad-
ministration emploient des quantités fantastiques
de papier, et l’industrie l'utilise de plus en plus,
soit pour la fabrication d'articles nouveaux, soit
pour le substiluer à d’autres matières premières.
Mème à l’époque où le chiffon était seul employé
pour la fabrication du papier, on commença, voilà
plus de cent cinquante ans, à chercher s’il était
possible d'utiliser autre chose que cet article, déjà
difficile à réunir en quantité correspondant aux
demandes des fabriques. On essaya de traiter des
fucus, des algues, de la filasse, des orties, la partie
lizneuse des asperges, les résidus de canne à sucre,
le pavot, le tabac, les écorces. En 1772, on édita
un livre, dont un exemplaire se trouve au Museum
de Londres et qui fut imprimé sur 72 échantillons
de japiers provenant de 72 substances différentes.
En 1771, on avait essayé, pour la première fois,
à Bruxelles, d'obtenir de la pâte de bois. La paille
ne servit pendant longtemps qu'à confectionner
des papiers d'emballage. Récemment, la nécessité
amena les fournisseurs des grands quotidiens à
blanchir cette pâte au chlore et à l’employer à
Pimpression des journaux.
(D L'historien Acard dit que, jusqu’au xve siècle. on
écrivail en Scandinavie sur des copeaux et des écorces
de bouleau. La tradition a conservé, parmi les paysans,
le souvenir d'arrèts écrits sur dés écorces.
Ne 1437
La pâte de bois représente aujourd’hui la majeure
partie de la consommation. Elle provient surtout
de Scandinavie, des États-Unis, du Canada et
d'Allemagne. Or, il est patent que le déboisement
de ces pays diminuera leur production en pâte à
papier. En Scandinavie, on n’a pas replanté régu-
lièrement les espaces dénudés. Fn Amérique, on a
défriché d'immenses zones forestières pour installer
à leur place des cultures, des usines et des agglo-
mérations. Îl en résulte que l’industrie française
aurait le plus grand intérêt à rechercher le moyen
de ne plus payer à l'étranger un tribut que des
hausses immanquables augmenteront sans doute.
ici se place l'avis que M. Ribas, ingénieur,
ex-élève de l’École polytechnique, directeur de
papeteries, émet dans la préface de sa traduction
du livre de M. Max Schubert : Fabrication de la
cellulose. Parlant des pays précités il dit :
dits. la France, beaucoup moins riche en forèts
et en essences appropriées à ce genre de travail,
n’a pu prendre qu'une faible part à l'exploitation
de ces nouvelles découvertes (traitement du bois
par iessives chaudes) et a dù suppléer par une large
importation à l'insuffisance de sa production
propre. »
lì résulte de ces diverses raisons que :
4° La pâte de bois représente la plus grande
partie de la production générale du papier (de
70 à 75 pour 100);
2° Que la France ne peut, ar/uellement, tirer
d'elle-même les éléments de sa consommation de
papier;
3° Que le tribut payé de ce chef à l'étranger, se
chiffrant déjà par dizaines de millions, ne peut
qu'augmenter.
Or, cette pâte de bois, ne permettant que la con-
fection de papiers secondaires, peut ètre remplacée
par une pâte équivalant à celle des chiffons, et ce
produit, d’origine entièrement française, s'obtient
par un procédé à froid, faisant l’objet d'une com-
munication à l’Académie des sciences.
La fabrication de la pâte de bois nécessite un
ensemble d'opérations dont voici le détail simplifié :
1° Abattage et transport;
2° Ecorçage;
30 Tronçonnage;
4 Lessives chaudes à la soude pour dégager là
cellulose des matières incrustées:
d0 Passage à la pile :
6° Lavage;
7° Récupération de la soude des lessives noires,
plus, éventuellement, blanchiment de la pâte.
Ils’ensuit la nécessité d’uneinstallation mécanique
très coûteuse et la consommation d’une grande
quantité de combustible.
Le traitement à froid, avec, dans la plupart des
cas, blanchiment simultané, comportera les opéra-
tions suivantes :
COSMOS
1° Récolie et transport;
2 Défibrage mécanique :
3° Passage en pile au bain:
4 Lavage ;
5° Récupération d’un magma, en plus, préparation
d'un bain chimique à froid.
En traitant ainsi certains végétaux plus abon-
dants que le bois et dont le renouvellement n'exige
que quelques mois, au lieu des années indispen-
sables à la reconstitution d’une région forestière,
on obtiendra un papier de qualité très supérieure,
très bon marché et qui se conservera. On connait
l'inquiétude, très fondée, des archivistes et des
bibliophiles lorsqu'ils songent à la destruction cer-
taine et prompte de tant de livres et de journaux
. imprimés sur de mauvais papiers.
Enfin, au lieu de perdre les matières incrustées
dans la cellulose, comme c'est le cas dans le trai-
tement du bois, on les conservera sous forme d’un
magma pouvant servir d'engrais où de matière
première pour produits chimiques.
Nous prendrons comme types des végétaux à
employer à cet usage, les graminées, les joncacées,
les Musa et les algues.
Pratiquement, tous les végétaux se composent
de quatre parties :
La cellule et la cellulose:
Les matières incrustées et La chlorophylle :
L'eau;
L'enduit.
L'enduit, l'eau et la chlorophylle disparaissent
d'abord, soit par le traitement des végétaux, soit
par la dessiccation. La cellulose et les matières in-
crustées sont extraites ou absorbées, selon que le
végétal est employé ou qu'il est abandonné sur le
sol, où sa décomposition contribue principalement
à former l’humus.
Les plantes les plus intéressantes pour l'industrie
du papier sont les plantes à tissus longs, fibreux,
telles que les graminées, les joncacées, les Musa
et certaines algues.
Le tissu des plantes est l'ensemble des cellules
de mème forme. Elles se développent par cloison-
nement dans les conifères, dont les sujets sont le
plus employés pour l'extraction de la cellulose. Ce
tissu est formé, dans les graminées, par les fibres
libériennes, qui consistent en un tube plus ou
moins régulier dont la paroi forte et épaisse cst
faite de cellulose pure, ce qui lui donne la flexibi-
lité et la ténacité. Les propriétés physiques des
fibres libériennes en font des matières textiles de
premier ordre. Or, le plus beau papier étant le
papier de chiffon, il est conséquent de dire quete
papier provenant directement du feutrage des fibres
libériennes sera d'une qualité très appréciable.
Dans les Joncarres, l'envelcppe est riche en
tibres.
L'emploi actuel des ûbres de graminées et de
158
joncacées est précédé du rouissage et du battage,
opérations routinières équivalant aux lessives pour
la préparation des fibres de bois. Le tout a pour
but l'élimination des matières incrustées. Des
défibreuses mécaniques effectuent aujourd'hui une
opération analogue.
D’après Van Tieghem, les Musa offrent la carac-
téristique du tissu vasculaire, et leur cellulose,
d'un blanchiment extrèmement aisé, est de toute
première qualité. Elle vaut les pâtes de mürier.
L'alfa, qui rentre dans la catégorie des grami-
nées, est récolté en Algérie sur $ millions d'hec-
tares. Il sert de fourrage; on l'utilise à la fabri-
cation de sparleries et on l'exporte pour la pape-
terie. Récolté sur une terre française par des
Kabyles, pour le compte d'entrepreneurs espagnols,
il est exporté en Angleterre. On en fait là un
superbe papier.
Il existe, parfois en trop grande abondance, des
herbes présentant la même structure et les mèmes
propriétés de tissus que l'alfa: andropogon, sor-
gho, santeveria, gaolian, etc., qui croissent sur des
espaces immenses, y repoussant deux fois l'an, et
souvent sont incendiées, soit pour défricher le sol,
soit pour l’amender.
Parmi les algues, les phéosporées et les fucacées
(varechs, goémons, fucus, laminuires) sont à
employer. Il en existe d’inépuisables quantités sur
les littoraux accessibles.
A part l’alfa, l’on n'utilise guère les graminées
spontanées que comme fourrage (en très pelite
parlie) ou comme engrais par incinération. Beau-
coup de ces graminées sont des parasites, le fléau
des plantations coloniales. Leur incinération pro-
voque la perle de la cellulose pour obtenir les
engrais que peut contenir la plante. Ce même pro-
cédé est employé à l'égard des végétaux marins
dont les cendres sont traitées aussi pour l’extrac-
tion de la soude et de l’iode. Ft le besoin de ces
cendres pour notre industrie est si réel, que nos
tarifs donanisrs admettent l'entrée en franchise
des cendres végélales.
D'après Lowes et Gilbert, dont les études sur les
cendres végétales font si justement autorité, linci-
nération détruit une partie des matières incorpo-
rées dans les tissus végétaux. Donc, on perd une
partie du contenu exact des plantes ainsi gaspillées.
Les cendres contiennent de la potasse, de la
chaux, du manganèse, de l'oxyide de fer, de l'oxyde
de manganèse, etc., et, dans l’ordre marin, de la
soude et des iodures fbromures, etc.).
Si Fincinération est un procédé fâcheux, mème
au point de vue de la recherche des engrais ou des
produits chimiques qu'elle a pour objet de libérer,
elle provoque la perte de la cellulose utilisable.
L'algue, qui contient moins de cellulose que les
graminées, permet l'évaluation suivante: 100 kilo-
grammes d’algues incinérées donnent :
COSMOS
8 AOUT 1912
Cendres: 4,5 à 6,5 kg;
lode : 0,008 à 0,122 kg.
En déduisant le poids de l'eau et de la diloro:
phylle, on peut évaluer à 35 kilogrammes le poids
de la cellulose détruite. A un prix très modéré de
46 francs par 100 kilogrammes, c'est une somme
de 5,5 fr qui s'est dissipée en fumée, et qui cor-
respond à une somme égale de pâte à papier
achetée à l'étranger. De plus, le magma retiré
d’une opération de dissociation chimique est une
substance plus facile à recueillir et à travailler
que les cendres.
Et le procédé auquel nous faisons allusion a pour
objet cette dissociation de la cellulose et des ma-
tières qui forment avec elle le corps de la plante.
Résultat du plus grand intérêt pour l'industrie
nationale, car si les industries du papier sont tri-
butaires de l'étranger, nos fabriques de produits
chimiques el notre agriculture ne le sont pas moins.
Un végétal supérieurement intéressant pour
l’industrie papetière est le bananier. Cette précieuse
plante, se reproduisant par drageons: avec une
telle abondance qu'il est extrèmement difficile d'en
débarrasser les terrains que l’on veut affecter à un
autre usage, met de neuf à dix mois pour produire
son régime. Un hectare planté en bananiers peut
donner 200 tonnes métriques de substances alimen-
taires. Son fruit se prête à la distillation, et l'alcool
ainsi oblenu serait moins nocif que les affreux
alcools de traite avec lesquels on intoxique les
populations de nos colonies. Cet alcool, dénaturé,
pourrait être substitué au pétrole importé pour
l'éclairage local ou la production de force motrice.
Pour une même surface cultivée, le produit du
bananier est, en poids, de 433 à 1 relativement au
froment, et de 44 à 1 relativement à la pomme de
terre. Les troncs de bananiers, dépouillés des tron-
çons de feuilles, donnent une pâte à papier d’une
finesse extrême et dune blancheur irréprochable,
une pàle de tout premier ordre.
M. Schubert calcule que le produit annuel de
l'hectare de sapin en forèt replantée à coupes de
soixante ans est de 1166 kilogrammes de pâte.
Avec la production exubérante du bananier, la
produclion pourrait être évaluće à raison de
» tonnes de pâte par hectare.
On voit donc combien la substitution de ces
végétaux au bois est chose intéressante pour
l'industrie nationale. Nos vastes territoires colo-
niaux et nos mers nous permeltent de produire les
quantités requises par notre industrie dans des
qualités en plusieurs cas supérieures, et d'autres
industries peuvent bénéficier de cet emploi de nos
ressources, Quoi qu'il en soit, il est intéressant de
noter que si l'industrie du papier doit bénéficier
d'une innovation, elle en sera redevable à des
recherches françaises.
L. G. NUMILE.
N° 1437
COSMOS
159
Prévision des orages et dispositifs paragrêles.
Les progrès de la T. S. F. ont permis de solu-
tionner un..problème qui présente en agriculture,
en pariiculier, un très grand intérêt pratique ; c'est
celui de l'annonce des orages. On sait que les
orages sont souvent accompagnés de chute de grèle,
et que cette grêle produit fréquemment dans les
F1G. 1. — PRINCIPE DU DISPOSITIF ENREGISTREUR D'ORAGES
DE M. TURPAIN AVEC LE TUBE A LIMAILLE.
A, antenne; C, cohéreur à limailles; E, électro-aimant ;
F, frappeur; T, cylindre tournant enregistreur.
campagnes de‘ véritablés désastres. Il est alors
utile de chercher à prévoir la chute possible de la
grêle, précisément pour l'empêcher. M. Turpain,
professeur à la Faculté des sciences de Poitiers, a
été l'un des premiers à se préoccuper de celte
question; il a pu arriver à des résultats fort inté-
ressants, que nous nous proposons de résumer
brièvement ici.
M. Turpain a remarqué que les décharges élec-
triques qui se produisent dans notre atmosphère
par un temps orageux impressionnent les détec-
teurs d’ondes électriques et en parliculier le
cohéreur; il en résulte qu'avec un cohéreur on
pourra observer à distance les orages. Voici le
principe du dispositif employé par lui pour lob-
servation des orages :
A une antenne, long fil métallique isolé dressé
verlicalement, on relie Pune des extrémités du
cohéreur, l’autre extrémité étant mise en commu-
nication avec le sol. D'autre part, ce cohéreur est
disposé dans le circuit d'une pile, avec un électro-
aimant, dont l’armature est constituée par un
levier qui, à lune de ses extrémités, porte un
frappeur, susceptible de venir choquer le cohé-
reur, tandis que l'extrémité opposée porte une
plume d’enregistreur, qui appuie sur un cylindre
que fait tourner un mouvement d'horlogerie. Le
tout est disposé comme l'indique la figure 1. La
grande résistance qu'oppose la limaille du cohéreur
au passage du courant de la pile empêche, en temps
ordinaire, le frappeur d’entrer en action.
Si, maintenant, par l'antenne arrivent agir sur
le système précédent des ondes électriques ou si,
encore, il se produit, même au loin, une décharge
éleetrique orageuse dans l'atmosphère, la résis-
tance du cohéreur diminue, et alors le courant de
la pile vient passer à travers l’électro-aimant : on
dit alors que le cohéreur est cohéré. En même
temps, le courant met en action le frappeur, dont
le marteau, venant choquer brusquement le tube
à limaille, ramène celui-ci à sa résistance primitive.
Au moment du choc du tube à limaille par le
marteau, la plume d’enregistreur, située à l’extré-
milé du prolongement du levier frappeur, se
déplacera sur le papier, et la décharge orageuse
se trouvera ainsi enregistrée par l’appareil lui-
même.
Ce ne sont pas là seulement des vues théoriques,
car, dès 1902, M. Turpain avait pu installer, d'après
ces principes, au domaine de Pavie, à Saint-
Emilion, dans la Gironde, un poste qui permit
d'observer et de prévoir les orages. La figure 2
représente le schéma de ce poste. On voit que, dans
le circuit du tube à limaille, l’on a intercalé le
relais qui actionne le frappeur et en même temps un
second relais polarisé, qui commande une sonne-
rie électrique placée à 200 mètres. C'est que
éonnuue
F1G. 2. — SCHÉMA DES CONNEXIONS DU POSTE AVERTISSEUR
D'ORAGES DE M. TURPAIN A CHATEAU-PAVIE (SAINT-
EMILION).
L A, antenne ; C, cobhéreur à limaille;
F, frappeur; E, enregistreur; R, relais polarisé.
l'antenne était placée sur une hauteur qui domi-
nait le domaine, et la sonnerie, placée dans le
logement du régisseur, était destinée à avertir
celui-ci que la cohération du tube à limaille s'était
produite, c'est-à-dire qu'il y avait eu quelque part, à
une distance plus ou moins grande, une décharge ora-
160
geuse dans l'atmosphère. C'est ainsi, par exemple,
que le 19 juin 4902, alors que le ciel était pur et
ne présentait aucun nuage à l'horizon, à 4141*30™
du matin, la sonnerie du poste entrait en fonction,
indiquant la formation lointaine de l'orage; ce
n’est qu'à 13 heures environ que le premier coup
de tonnerre se fit entendre, et à 16 heures l'orage
IIL It
a
7?
F1G. 4 — COHÉREUR A AIGUILLES CROISÉES.
éclatait sur Pavie. La mise en marche de la
sonnerie, par lintermédiaire du tube à limaille,
avait ainsi annoncé l'arrivée de l'orage quatre
heures et demie d'avance.
Depuis cette époque, M. Turpain a considérable-
ment perfectionné ses premiers appareils. C'est
ainsi qu'après avoir remarqué que les cohéreurs
à limaille ne sont pas comparables entre eux et
mème que chaque cohéreur présente des irrégula-
rités de fonctionnementindividuelles, qui font qu'un
même cohéreur ne se trouve jamais semblable à.
lui-même, M. Turpain a remplacé le cohéreur à
limaille par le cohéreur à aiguilles à coudre dis-
posées en croix, comme l'a indiqué le P. Fényi.
Voici le dispositif qui a été adopté pour l'appareil
construit par la maison J. Richard, sur les indica-
lions du savant professeur :
On emploie sept aiguilles a, b (fig. 3), croisées de
facon à donner six contacts en série ; les trois
aiguilles æ, a, a, sont posées perpendiculairement
aux qualre autres b, b, b, b; elles sont garnies, à
leurs deux extrémités, de petites masses de cuivre mn,
qui servent à graduer la pression des aiguilles a
sur les aiguilles 4. De petits boutons auxiliaires,
fixés à la planchette horizontale qui porte lap-
pareil, servent à maintenir en place les aiguilles,
sans les immobiliser d'une façon absolue.
La figure 4 représente un dispositif de ce genre,
installé en vue de l'inscription graphique et associé
à un baromètre enregistreur Richard. On voit sur
la planchette horizontale les sept aiguilles croisées,
donnant six contacts, placés entre l'antenne et le
sol. Le circuit de la pile, composée d'un élément
Leclanché, comprend le cohéreur à aiguilles et un
frappeur, acltionné par un électro-aimant, comme
celui de la figure 4. L’extrémité opposée du levier
frappeur porle une plume qui enregistre les
décharges sur le cylindre tournant du baromètre,
de telle sorte que, sur la feuille d'inscription, on
a à la fois le tracé de la pression atmosphérique
et l'inscription des décharges orageuses.
COSMOS
8 AOUT 1912
Pour ce qui regarde l'enregistrement du phéno-
mène, si l’on a recours à troiscylindres interchan-
geables, dont l’un accomplit sa révolution complète
en une semaine, le second en un jour, le troisième
en une heure, on peut, à l'aide de ces trois cylindres,
observer commodément et enregistrer d’une façon
détaillée toutes les particularités intéressantes des
orages. En temps ordinaire, l’on emploie le cylindre
hebdomadaire; quand l'annonce d'un temps ora-
geux se produira, on le remplacera par le cylindre
journalier, et, enfin, quand l'orage approchera du
lieu même d'observation, on lui substituera le
cylindre horaire.
Ce dispositif a été réalisé pour servir dans les
petites stations météorologiques; il peut, d’ailleurs,
être suspendu à l’aide d’un fort bracelet de caout-
chouc, de façon à être soustrait complètement aux
perturbations dues aux vibrations mécaniques.
On a pu observer ainsi d'une façon complète un
très grand nombre d'orages. M. Turpain a remarqué
que les meilleures conditions dans lesquelles on
peut se servir des contacts d'aiguilles sur aiguilles,
utilisés comme cohéreurs, correspondent à une
différence de potentiel de 0,23 volt par contact. Un
élément Leclanché, une pile sèche Delafond, du
type des téléphones, conviennent parfaitement et
suffisent, tant pour produire la décohération que
pour assurer l'inscription.
L'appareil enregistreur d’orages, disposé de la
manière indiquée plus haut, ne nous donne d'indi-
cations qu'au moment de la décharge dans latmo-
sphère. Mais en associant au cohéreur à aiguilles
un milliampèremètre enregistreur, M. Turpain a pu
réaliser un dispositif qui permet d’être renseigné,
d'une façon précise et continue, sur l'approche des
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F1G. #. — COHÉREUR A AIGUILLES
ASSOCIÉ A UN BAROMÈTRE ENREGISTREUR.
orages. On a représenté dans la figure 5 l'un de
ces appareils. L'introduction dans le circuit du
cohéreur d’un milliampèremètre enregistreur per-
met de suivre fidèlement l’état de cohération des
aiguilles à coudre et de saisir d’une façon très
nette les mouvements des orages, car l'on juge de
l'approche ou de l'éloignement d'un orage par
No 1437
l'augmentation ou la diminution de l'intensité du
courant qui passe dans le cohéreur. C’est ainsi
qu'à la Faculté des sciences de Poitiers, à La
Rochelle, où ont été installés de ces nouveaux
appareils construits par M. Richard, M. Turpain
a pu journellement, avec eux, prévoir des orages
deux, trois et même quatre heures d'avance. Des
appareils de ce genre, installés à l'Observatoire
du puy de Dôme, ont aussi toujours donné d'excel-
lents résultats.
L'enregistreur d'orages, associé à un milliampè-
remètre, peut être placé tout entier dans la cage du
milliampèremètre, de telle sorte qu’il n'y ait que
la pile à se trouver en dehors de l'appareil. Un
petit voltmètre, gradué de 0 à 3 volts, indique, par
ailleurs, par la simple pression d’un bouton de
contact, si la pile n’est pas polarisée et donne bien
la tension (1, volt) nécessaire aux six contacts
des aiguilles. Comme précédemment, on suspendra
cet appareil à milliampèremètre enregistreur à
l’aide de gros bracelets de caoutchouc pour le
mettre ainsi complètement à l'abri des vibrations
mécaniques.
Il faut encore arrivèr à le soustraire à l'influence
des ondes électriques voisines. On parvient à an-
tiinducter tout l'appareil et même au besoin une
certaine partie de l'antenne, tout simplement en
garnissant d'étain toute la cage de l'appareil et en
constituant la partie de l'antenne que l’on veut
protéger par un fil sous plomb, dont l'armature
métallique extérieure communique avec la garni-
ture d'étain.
[l arrive aussi parfois que les ondes parasites
qui agissent sur le cohéreur ne proviennent pas de
la manœuvre d'interrupteurs ou d’autres appareils
électriques puissants placés dans le voisinage, mais
sont dus à un poste de télégraphie sans fil. C'est
ce qui se produit à Paris : les antennes des appa-
reils enregistreurs d'orages installés à Paris et en
particulier au poste d’observation de la Nation,
où fonctionnent les dispositifs avertisseurs de
M. Turpain, recueillent les ondes puissantes
émises par la station de la tour Eiffel. Dans ce cas
particulier, on arrive très bien à séparer l’inscrip-
tion des ondes d’origine atmosphérique des ondes
parasites de la télégraphie sans fil, par un simple
réglage de la pression des contacts. Ainsi, au
poste de Paris-la-Nation, les signaux de l'heure et
les autres émissions de la tour Eiffel sont caracté-
risés par 0,5 milliampère l'après-midi et le soir,
et par 1 milliampère le matin, au lever du Soleil;
c'est là un fait que l’on a pu constater journelle-
ment. Comme la décohération ne se produit qu'avec
40 milliampères, on peut très facilement séparer
les décharges de télégraphie sans fil des décharges
atmosphériques.
L'un des appareils de M. Turpain, installé depuis
le 15 mars 1911 à la Nation, a permis d'enregistrer
COSMOS
p: OF fr: \
UNIV RE y
Re \A
déjà un certain nombre d'o rec, um En particu-
lier, qui a éclaté à 50 kilomètres à l'ouest de
Paris, et un autre à Crépy-en-Valois.
La sensibilité du cohéreur à aiguilles se règle,
comme il a été dit plus haut, à l'aide des petites
masses m, qui produisent une pression plus ou
moins grande des aiguilles æ sur les aiguilles 4.
Pour empècher l’action de l'humidité d’altérer la
valeur cohérante des divers contacts, aiguille sur
aiguille, on a soin de placer un corps desséchant
FIG. 5.
AVEC MILLIAMPÈREMÈTRE ENREGISTREUR.
— DISPOSITIF D'OBSERVATION D'ORAGES
dans la cage de l'appareil: on dispose, dans ce but,
une petite nacelle contenant du chlorure de cal-
cium que l’on peut renouveler facilement.
Lorsque l'orage est lointain, si les inscriptions des
décharges se font trop nombreuses, il est facile de
réduire momentanément la sensibilité du cohé-
reur, en surchargeant de quelques petites masses
supplémentaires m les aiguilles & (lig. 3). On peut
employer dans ce but des bouts de til fusible de
plomb, que l’on disposera très facilement au moyen
d'une pince brucelle et qui réalisent très bien ce
162
réglage supplémentaire. On peut encore shunter
le milliampèremètre, afin de ne pas dépasser ses
limites d'intensité. Enfin, lorsque l'on est averli de
l'approche d’un orage que l’on veut observer, on
remplacera le cylindre journalier par un cylindre
horaire, comme il a été dit plus haut.
Ces dispositifs d'enregistreurs d’orages à mil-
liampèremètres conviennent parfaitement à toutes
les stations météorologiques, puisqu'il suffit, pour
s’en servir, desavoir disposer les feuilles d’inscrip-
tion sur les cylindres enregistreurs. Cependant,
M. Turpain ne s’en est pas contenté. C'est que,
malgré la supériorité des cohéreurs à aiguilles du
P. Fényi sur les cohéreurs à limaille, parce
qu'ils agissent par un nombre constant de contacts
bien définis, ces cohéreurs à aiguilles ne restent
pas, quand même, rigoureusement semblables
INSCRIPTEUR DB
DISPOSITIF BOLOMÉTRIQUE
M. TURPAIN ET ÉLECTRO-AIMANT WEISS PRÊTS A FONC-
TIONNER.
F1G. 6. —
à eux-mêmes, Or, le bolomètre, au contraire, qui
utilise l'échauffement d'un fil de platine pur,
demeure rigoureusement semblable à lui-même au
début de la réception de chacune des ondes qui
viennent successivement l’impressionner. M. Tur-
ors eu l'idée de substituer un dispositif
° 1
"11 `» E .
pain d 4!
bolomé!rique au cohéreur à aiguilles pour la pré-
vision des orages, parce qu'alors les carrés des
déviations du galvanomètre placé sur le pont du
dispositif bolométrique sont absolument propor-
tionneis aux intensités des décharges atmosphé-
riques perçues par l'antenne. Les indications
données par les décharges successives sont alors
comparables, et l’on peut, en toute certitude, par
l'observation de leurs valeurs respectives, en tirer
des renseignements exacts et précis sur la marche
même de chaque orage. Si l'on dispose plusieurs
de ces appareils en des stations différentes,
COSMOS
8 AOUT 19192
les indications de ces divers appareils, concernant
un même orage, seront comparables entre elles,
ce qui n’a pas lieu même avec les cohéreurs à
aiguilles. On a donc ainsi des appareils qui enre-
gistrent les orages avec une rigueur scientifique
absolue: leur seul inconvénient, c’est qu'ils ne
peuvent être utilisés que dans des Observatoires,
où se trouve un personnel rompu à la pratique
des mesures physiques délicates.
Sans entrer dans les détails de la description des
dispositifs bolométriques, qui sont d’un ordre scien-
tifique un peu élevé, nous pouvons donner une
idée des résultats qu’ils permettent d'atteindre. La
difficulté principale consistait à pouvoir réaliser
l'inscription graphique des courants bolométriques
d'origine atmosphérique, car l'intensité de ces
courants est rarement d’un milliampère ; elle varie,
le plus souvent, entre 10 et 100 micro-ampères.
M. Turpain a pu arriver à associer à ses dispositifs
bolométriques un micro-ampèremètre qui peut
enregistrer, au moyen d’une plume garnie d’encre,
un courant de 40 milliampères par un trait d'une
longueur de 1400 millimètres : un millimètre équi-
vaut ainsi à 100 micro-ampères, et si l’on admet
qu’un œil exercé puisse apprécier le cinquième de
millimètre, on voit que la plume peut inscrire une
variation de 20 micro-ampères. Le cadre du
système mobile ne comporte qu'un circuit d'une
résistance de 3 ohms; ce cadre est placé entre les
pièces polaires d’un électro Weiss, dans lequel il
suffit d'envoyer un courant de 3 ampères. La
figure 6 nous montre le dispositif bolométrique
enregistreur ainsi constitué,
Si nous insistons sur ces nouveaux appareils
bolométriques délicats de M. Turpain, c’est que leur
utilité dans l’étude méthodique et dans l’enregistre-
ment rigoureux des orages est considérable, parce
que ces appareils inscripteurs restent toujours
semblables à eux-mêmes. Dès que l’on aura pu
rassembler sur les orages un nombre suffisant de
documents aussi sûrs que sont les feuilles d’appa-
reils enregistreurs bien réglés, on pourra très cer-
tainement en déduire des conséquences impor-
lantes sur l'histoire de ces météores, conséquences
analogues, par exemple, à celles que l’enregistre-
ment de la pression atmosphérique a permis de
formuler pour la construction des lignes isobares.
Jusqu'ici, les observateurs d'orages notent sur
leurs feuilles les éclairs, les coups de tonnerre ; ces
observations sont tout à fait rudimentaires, et des
documents de celte nature, dus à des personnes
différentes, ne peuvent pas être comparables. Au
contraire, avec les appareils de M. Turpain, enre-
gistrant automatiquement en dehors de l’observa-
teur les coups de tonnerre, on a un graphique qui
permet de suivre l’évolution d’un orage et de
comparer l'énergie même des différentes décharges
qui se suivent.
N° 1437
Dès que ces appareils enregistreurs d’orages se
seront multipliés, l’étude des feuilles d'inscription,
obtenues soit avec l’inscripteur à milliampèremètre,
soit, de préférence, avec l’enregistreur à bolomètre,
permettra d'obtenir avec précision la carte des
orages de toute une région ; on aura, en tout cas,
sur chaque météore en particulier, sur sa marche,
des renseignemen{s précis qui seront avant tout
comparables.
Pour en indiquer, en passant, une application
pratique, ces appareils peuvent servir à se rendre
compte d’une façon scientifique si les dispositifs
paragrèles ont ou non une influence efficace. Or,
en 1902, lorsque fut installé le poste d'observation
de Château-Pavie, avec les dispositifs préviseurs
d'orages de M. Turpain, cette installation avait
pour but de prévenir les viticulteurs de Saint-
Emilion de l’approche des orages, la région se
trouvant, à cette époque, munie de canons para-
grèles. On a d’ailleurs remarqué, en se servant de
ces canons ou en employant les fusées paragrèles
qui sont venues à la suite, que l'efficacité du pro-
cédé semblait dépendre du moment de l'attaque
du nuage orageux, qui doit se produire assez tòt,
et aussi de la direction dans laquelle se fait cette
attaque.
Depuis cette époque, on a préconisé d’autres
dispositifs paragrêles automatiques qui ont pour
COSMOS
163
but de décharger les nuages orageux et de suppri-
mer la chute de la grêle en empêchant la forma-
tion même des nuages. Ces dispositifs sont d’ail-
leurs assez coûteux. Si l’on peut étudier au moyen
des appareils enregistreurs précédents les orages
qui se produisent dans une région avant l'intro-
duction des dispositifs paragrèles automatiques,
puis après leur usage, l’on pourra juger avec une
certitude toute scientifique si ces paragrèles ont
une efficacité réelle, alors que, dans l’état actuel
de nos connaissances, on n'en peut rien savoir; on
en est réduit à des conjectures où chacun peut se
fabriquer l'opinion qu’il voudra, puisque la base
d'appréciation fait défaut.
Il est donc à souhaiter, aussi bien au point de
vue des progrès de la science pure et de l'extension
de nos connaissances en météorologie électrique
qu'au point de vue pralique du contrôle des divers
appareils paragrèles, que les dispositifs de M. Tur-
pain se répandent dans nos Observatoires el dans
nos campagnes. Si ces dispositifs sont encore sus-
ceptibles d'ètre perfectionnés, on peut dire que
dans leur état acluel ils sont capables d'être appli-
qués avec succès dans la pratique des observations
pour nous renseigner sur le point de départ et la
progression des orages. C’est ce que nous avons
tenu à signaler ici.
MARMOR.
Les lois de la vapeur surchauffée.
ll est universellement admis aujourd’hui que
l'emploi de la vapeur surchauffée constitue un
grand progrès en physique industrielle. De plus en
plus son utilisation se généralise, encore que ses
propriétés soient mal connues et qu’on en soit
réduit, en ce qui concerne ses applications usuelles,
à des formules dans lesquelles l’empirisme l’em-
porte sur la rigueur scientifique, éminemment
souhaitable en pareille matière. Dans les investi-
galions susceptibles de conduire à l’établissement
des lois concernant la vapeur surchauffée, le point
le plus délicat à élucider consiste peut-être dans la
mesure exacte des températures, car les pressions,
même très élevées, peuvènt être déterminées avec
rigueur. Or, il est toujours à craindre que le ther-
momètre à mercure plongeant dans l’huile d’une
cavité et qui constitue l'appareil dont on se sert
communément pour prendre la température de la
vapeur surchauflée n'ait pas une précision suffi-
sante pour que ses indications puissent scientifi-
quement être prises en considération. Le fait vient
d'être établi par les recherches de M. A. Duchesne
qui a fait de ses travaux sur cette matière le sujet
d'une thèse pour le doctorat, récemment soutenue
à l'Université de Paris.
Il est parli de ce principe que, pour prendre avec
exactitude la température de la vapeur surchaulffée,
il faut disposer d’un thermomètre de masse négli-
geable et d’une sensibilité telle qu'à tous moments
et en tous points il s'équilibre instantanément à la
température du milieu qui l'entoure; dès lors, il
a imaginé un couple thermo-électrique platine-
argent qu’il appelle l’'hyperthermomètre et qui est
formé d’un réseau de fils dont le diamètre est un
peu inférieur à 3 centièmes de millimètre. L’ex-
trème finesse de ces fils leur vaut d'être portés
instantanément à la température du milieu qui les
baigne. L'ensemble est engainé dans un cylindre
pour lequel un espace mort a élé prévu en vue de
soumettre l'hyperthermomètre à la fois au rayon-
nement des parois métalliques du récipient où se
trouve la vapeur et aux pressions que celle-ci sup-
porte parfois pendant une assez longue durée.
Réunis à leur sortie du cylindre en un seul gros fil
par nature de mélal, c'est-à-dire tous les fils fins
d'argent en un gros fil d'argent et tous ceux de
platine en un gros fil de platine, on réalise ainsi
un véritable pyromètre qu'il suffit de relier à un
galvanomètre balistique tarè pour déduire, d'après
la déviation, la température du milieu durant le
10t
passage du courant. À leur sortie du cylindre, les
lils traversent des bourrages faits d'une matière
isolante et vont plonger par leurs extrémités dans
de la glace fondante, ce qui permet d'avoir tou-
jours des indications de température au-dessus du
zéro Celsius. Grâce à la chute d’un poids suspendu
à un électro-aimant et dont la hauteur de chute
a été soigneusement établie, de façon à corres-
pondre rigoureusement à un dixième de seconde,
la mise en circuit du galvanomètre n'existe que
durant des périodes d'un dixième de seconde; à
cet effet, une machine faisant trente tours par
minute et dont la crosse interrompt le courant
dans lélectro-aimant provoque la chute du poids
à chaque vingtième de tour; on obtient ainsi
20 prises de température pour une durée d’un
dixième de seconde, d'où l’on déduit la tempéra-
ture moyenne pour ce dixième de seconde.
M. Duchesne a pu ainsi établir par comparaison
que le thermomètre à mercure donne des indica-
tions erronées, parfois très inférieures à la tempé-
rature réelle, ce qui expliquerait qu'on ait pu
jusqu'ici constater la décomposition des lubrifiants
par la vapeur surchautflée, à des températures
inférieures à celles qui seules peuvent la prove-
quer. De même les calculs de rendements, basés
mn
COSMOS
8 aouT 1912
sur les indications de ce thermomètre, étaient
fatalement dénués de valeur.
L'emploi de l'hyperthermomètre thermo-élec-
trique a permis de faire quelques constatations
intéressantes sur Jes propriétés de la vapeur sur-
chauffée. Aux pressions élevées, la température de
surchauffe, d'abord très éloignée du point de satu-
ration, suit la loi de Gay-Lussac; mais, à mesure
que croit la pression, l'écart entre les températures
de surchauffe et de saturation tend à devenir con-
stant. A la condition que sa température soit sul-
fisamment éloignée du point de saluration, la
vapeur surchauffée se conduit comme un gaz par-
fait, et ceci d'autant mieux que la pression sera,
elle aussi, plus élevée. A pression constante, la
capacité calorifique croit avec la température,
mais moins vite que celle-ci, et tend vers une
constante.
A température constante, mais voisine de la
température de saturation, cette capacité calori-
fique diminue avec la pression, tandis qu’elle
devient indépendante de celle-ci aux hautes tem-
pératures de surchauffe.
Il est hors de doute que ces lois vont fournir
aux ingénieurs des notions utiles au point de vue
de la pratique industrielle. F. M.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 29 juillet 1912.
PRÉSIDENCE DE M. F. GUYON.
Contribution expérimentale à Pétude de la
formation des cratères lanaires. — Ce qui
caractérise la plupart des cratères de la Lune (que
l'on ne saurait, à aucun point de vue, comparer à
ceux des volcans terrestres actuels), c'est non seule-
ment leur grand développement en diamètre et en
profondeur et leurs parois généralement à pic, mais
aussi la présence de bourrelets de faible saillie, épais,
et que M. Puiseux considère comme formés aux
dépens de compartiments voisins par suite de l'exis-
tence d'un déversement peu rapide vers l'extérieur.
M. JEAN EscanD a reproduit expérimentalement l'aspect
de ces cratères au moyen de matières semi-fluides
vers leur point de fusion (bitume, etc.}), dans des con-
Jitions qui semblent conformes à celles qui ont pré-
sidé à leur formation sur notre satellite.
JT fait fondre une de ces matières avec un peu d’eau.
Après la fusion complète, on voit la vapeur d’eau se
faire jour à travers la masse päteuse sus-jacente, puis
donner naissance à des ouvertures cratériformes très
nettes. Les Lords de ces cratères s’affaissent presque
immédiatement pour former les bourrelets dont il
vient d’être question.
Conformément à ce qui parait démontré actuelle-
ment quant à la destinée du globe terrestre, la Lune
a dû absorber, en effet, peu à peu son eau superfi-
cielle. Et, avant mème que toute force éruptive ait
disparu de sa matière, cette eau occluse, poussée par
un dernier reste de chaleur interne, a cherché à se
faire jour à travers ses couches superficielles : elle a
ainsi donné naissance à ces nombreux cratères qui
sont sans doute les dernières manifestations et comme
les seuls témoins visibles de son ancienne activité.
Traitement de l’hypertension artérielle par
l’électrisation de l’abdomen et de la région
rénale, — Depuis 1906, M. E. DoumEr a remarqué
que la voltaïsation intense de l'abdomen faite par voie
percutanée exerce une action manifeste sur la circu-
lation périphérique.
Cette action se traduit objectivement par un abais-
sement de la tension artérielle (mesurée à la radiale)
chez les hypertendus et subjectivement par une diminu-
tion, voire une disparition complète des phénomènes
qui accompagent l'hypertension, tels que bourdonne-
ments, froid aux pieds et aux mains, vertiges, etc.
L'auteur pense que cette action est due à une ëlec-
tnisation des capsules surrénales.
Da rôle de la caféine dans l’action cardiaque
du café. — Les expériences de MM. Busquer et Tir-
FENEAU les ont conduits aux conclusions suivantes :
Sur le cœur isolé de lapin, la caféine et les divers
cafés exercent une action manifestement toxique. Ce
fait, énoncé simplement à titre documentaire, ne per-
N° 1337
met aucune conclusion sur l’action cardiaque de ces
produits dans les conditions où ils sont consommés
par l'homme.
In vivo, chez le chien, la caféine accélère notable-
ment les battements du cœur, et c’est là, d’ailleurs, la
seule particularité vraiment nette de l’action cardiaque
de cette substance. Cette influence accélératrice 8e
retrouve intégralement après l'injection de café ordi-
naire. Elle fait totalement défaut avec le café déca-
féiné.
Action de certains éthers de la giycérine
„sur le baciile de la tuberculose. — M. A.-T. Sa-
LIMBENI a trouvé que la trichlorhydrine dissout éner-
giquement et la matière grasse et la substance
cireuse des bacilles de la tuberculose. Sous son action,
les microbes perdent, en quelques minutes, leur
acido-résistance, deviennent granuleux et se laissent
facilement colorer par le bleu.
Les trois éthers de la glycérine formés par l'acide
chlorhydrique exercent une action bactéricide très
énergique vis-à-vis du bacille de la tubercalose, dont
on connaît la grande résistance aux antiseptiques les
plus actifs, aux bases et même aux solutions relati-
vement assez fortes des acides minéraux. Le temps
strictement nécessaire pour assurer le mélange glycé-
rides et microbes (quelques secondes, pourrait-on dire)
est suffisant pour les tuer.
Périodes de Brückner et tremblements de
terre destructeurs. — On persiste à croire, même
dans une partie, à la vérité restreinte, des milieux sis-
mologiques, que les tremblements de terre sont en
relation avec les saisons, et, le plus souvent, cette opi-
nion résulte de ce qu’on attribue des mouvements
sismiques à des éboulements intérieurs à l'écorce
terrestre que provoqueraient les précipitations atmo-
sphériques et, per suite, la circulation des eaux souter-
raines. Cependant, de nombreuses statistiques ont
montré qu’une telle relation n'existe pas et, d'autre
part, des sismes de cette origine ne sauraient ètre ni
nombreux ni violents.
COSMOS
165
Ces prétendues périodicités devraient se retrouver
plus commodément dans les statistiques roulant sur
les longues périodes pluvieuses et périodes sèches de
Brückner. Le Catalogue des mégasismes de Milne a
permis à M. ne MonrTessus pe Balone de faire cette
statistique depuis l’an 1020 : il semble bien, d’après
ces relevés, qu'il n'existe aucune relation entre les
périodes de Brückner et les nombres de sismes.
Sur la polarisation des électrodes. Note de M. Axpur.
BrocueT. — Démonstration élémentaire de la loi d'ac-
tion de masse. Note de M. A. BErraauD. — Synthèse
du gaz chlorure de nitrosyle et le poids atomique du
chlore. Note de M. EucÈxe WourrzeL ; l’auteur donne
35,460 comme poids atomique du chlore. — Équilibre
du sulfate de lithium et des sulfates alcalins en pré-
sence de leur solution mixte. Note de M'" Cécile
SPIELREIN, — Sur les propriétés électriques des.alliages
Cu-Zn. Note de M. Luier Nonsa. — La dilatation ther-
mique des alliages d'aluminium et de zinc. Note de
M. Wziaoimin SminNorr. — Sur la formule du dérivé
organo-magnésien et sur l'hydrure de magnésium.
Note de M. Pierre JoztBois. — Leucohases et colorants
du diphényléthylène; oxydation par le bioxyde de
plomb de la base cyclohexylidénique tétraméthylée.
Note de M. P. Lemourr. — Contribution à l'étude
de la toxicité de la B-imidazoléthylamine. Note de
MM. ALserr BerrtneLoT et D.-M. Bertrano. — Parthé-
nogenèse dégénérative chez l’Ascaris megalocephala.
Note de M. E. Fauré-FnémiET. — Sur la vaccination
anticlaveleuse par virus sensibilisé. Titrage du vaccin.
Mélanges virus-sérum titrés. Note de MM. J. Brioré et
A. Boquer. — Sur l’âge des formations cristallines du
Péloponèse. Note de M. PH. NéGris. — Sur la radio-
activité des eaux thermo-minérales d'Usson (Ariège).
Note de M. G. Massoz. — Détermination de la profon-
deur du foyer d'un tremblement de terre et de la
vitesse de propagation des ondes sismiques dans les
couches superficielles de l'écorce terrestre. Note de
M. le prince B. GALITZINE.
BIBLIOGRAPHIE
Traitement des neurasthéniques, par le
D' P. HartENserG6. In-16 de 346 pages (3,50 fr).
Félix Alcan, Paris, 1912.
Qu'est-ce qu’un neurasthénique? Pourquoi de-
vient-on neurasthénique ? Comment distinguer les
neurasthéniques des autres névropathes? Telles
sont les questions essentielles, souvent mal réso-
lues, auxquelles M. Hartenberg répond d'abord
avec son expérience de quinze années d'études de
ces maladies. La neurasthénie peut être considérée
comme l’exagération d’une propriété normale du
système nerveux : la fatigabilité. L'état neurasthé-
nique, exagérant à son tour toutes les tendances
morbides du caractère, peut s'accompagner de
troubles psychiques variés: phobies, obsessions,
autosuggestions.
Maïs, la neurasthénie étant connue, comment la
soigner ? Minutieusement, dans tous ses détails.
M. Hartenberg expose toutes les ressources théra-
peutiques dont nous disposons pour combattre les
causes, les symptômes, les complications de la
névrose, indique la meilleure ligne de conduite à
suivre pour atteindre la guérison. Et les résultats
obtenus démontrent l'excellence de la méthode.
Comme d'autres livres de médecine, celui-ci.
à raison de la crudité des descriptions. n'est pas
à mettre sous tous les yeux. Quand il touche les
questions connexes à la morale, l'auteur ‘lonne
bien souvent des solutions qui sont pour le moins
amorales. Ainsi, quand, pour consoler certain
neurasthénique accablé par la perie d'ètres chers.
il conseille de « faire appel aux sentiments reli-
166 COSMOS
gieux, aux espoirs de vie future, de réunion dans
l’au-delà, ou, s’il est capable de s’y intéresser, aux
doctrines du spiritisme. Qu'importent les illusions,
ajoute-t-il, pourvu qu'elles soient consolatrices et
aident à supporter la vie? »
L’acide formique ou méthanoïque, par ANDRÉ
Dusosc, ingénieur-chimiste, ancien ingénieur à
la Société Maletra, ingénieur à la Société « le
Camphre ». In-8° de 364 pages (broché, 45 fr;
cartonné, 16,50 fr). Dunod et Pinat, Paris, 1912.
Bien que la synthèse en ait été réalisée, il y a
près de cinquante ans, par Berthelot, l'acide for-
mique, dont l'importance va chaque jour grandis-
sant, n'a été l'objet d'aucun travail d'ensemble.
Les travaux à son propos sont fort nombreux, et
l'intérèt en est très grand, mais ils sont essaimés
au cours de cent publications scientifiques.
D'autre part, l'intérêt que présente l'acide for-
mique, aussi bien comme substitut de l'acide acé-
tique qu’à raison de ses propriétés particulières,
a attiré sur lui l'attention du monde industriel et
des milieux scientifiques.
Au cours d'une longue carrière industrielle, il
a été donné à M. Dubosc, non seulement d'étudier
les multiples propriétés de l'acide formique, mais
aussi d’en déterminer les applications à de très
diverses industries et d’en assurer la production
par les méthodes les plus variées.
Le présent ouvrage a pour but de réunir l'en-
semble des connaissances actuelles sur l’acide for-
mique, non seulement au point de vue purement
spéculatif, mais aussi et surtout au point de vue
technique, au point de vue industriel.
Après un bref exposé historique, l’auteur étudie
la formation naturelle du méthanoïque dans les
trois règnes et expose ses innombrables modes de
formation.
L'analyse des procédés de préparation (aussi
bien par voie chimique que par voie synthétique),
la description des divers procédés brevetés, leur
outillage, leurs rendements, a été très poussée, et
elle comprend tout ce qui a parn jusqu’à ce jour
sur le sujet.
La seconde partie est consacrée à l'étude des
propriétés physiques, chimiquesetthermochimiques
de l’acide formique, et elle comprend de nombreuses
tables et formules de calcul. ;
L'ouvrage est complété par l’examen des divers
anhydrides mixtes et des acides dérivés du métha-
noïque, et par un exposé complet des diverses
méthodes d'analyses qui ont été présentées.
Les merveilles de la vie végétale, par
A. ACLOQUE. Un vol. in-4° (0,76 X 0,17) de
104 pages (1 fr). Maison de la Bonne Presse,
Paris.
Pas n'est ici besoin de faire ressortir la clarté
d'exposition, la sobre élégance du style de cette
8 aouT 1912
publication. M. Acloque est assez connu des lec-
teurs du Cosmos pour que de telles indications
soient superflues. Nous avons ici, sous forme pitto-
resque et avec force gravures dans le texte ou hors
texte à l'appui, un véritable traité de physiologie
végétale.
L'ouvrage commence par un tableau d’ enseible
de la vie des plantes dans ses représentants infé-
rieurs (zoophyte, champignon, cuscute, éponge),
continue par la description et le ròle de la cellule,
le mode de nutrition et d'alimentation de la plante,
ses moyens de défense. La fleur, sa composition,
son évolution en fruits et graines pour la perpé-
tuation de l'espèce, font suite à la défense.
Sans pousser plus loin cette analyse, signalons,
dans la suite, deux chapitres plus particulièrement
dignes d'attention, l’un sur la « sensibilité végé-
tale », expliquée en donnant au mot sensibilité
une définition appropriée au règne végétal et ne
permettant pas de la confondre avec la sensibilité
animale. Un autre chapitre est à noter, par lequel
se termine le volume, sur la variabilité végétale;
laquelle s'étend, gràce à l’action de Phomme, dans
d’assez larges limites, sans qu'on puisse en inférer
la transformation des espèceschères aux Lamarck,
aux Darwin, aux Hugo de Vries. M. Acloque léta-
blit par une argumentation solide appuyée sur de
nombreux faits.
La Révolution française et la psychologie des
révolutions, par Gustave Le Bon (Bibliothèque
de philosophie positive). Un vol. broché (3,50 "A
E. Flammarion, 26, rue Racine, Paris.
Un ouvrage du D" Le Bon intéresse toujours,
même quand il est, comme celui-ci, écrit hâtive-
ment et pensé à la galopade. Personne ne s’éton-
nera de voir l’auteur aussi antirévolutionnaire que
possible. Aussi bien, qui donc s’aviserait à notre
époque de soutenir les principes de 1789 et les
hommes, surtout, qui tentèrent de les appliquer ?
En tout cas, le D" Le Bon a voulu vérifier in anima
vili et in concreto ses théories personnelles d'ordre
psychologique. Ce volume est un appendice en
quelque sorte expérimental à la Psychologie des
foules, à la Psychologie politique ainsi qu’au livre
Les opinions et les croyances. On y verra le faible
ròle joué par la « raison » dans la plus grave de
nos crises nationales et la prépondérance des élé-
ments affectifs chez ses principaux acteurs.
Les idées bien connues de l’auteur requièrent les
réserves d'usage. C'est ainsi qu’il considère avec
terreur l’imprévoyance du gouvernement actuel
qui laisse trop de liberté aux catholiques! D'autre
part, son point de vue positif, sinon positiviste,
l'induit à considérer les événements sous un angle
en somme strictement matérialiste. L'œuvre n’en
reste pas moins originale, souvent sensée, toujours
sérieuse.
Ne 1437
Dieu et science: Essai de psychologie des
sciences, par ELt& DE CYon. Un vol. in-8° de la
Bibliothèque de philosophie contemporaine avec
deux planches hors texte et le portrait de l'au-
teur par J. Chaplain. Deuxième édition revue et
augmentée (7,50 fr). Paris, Alcan, 108, boulevard
Saint-Germain.
Nous avons consacré à la première édition de
cet ouvrage un article dans le Cosmos où nous en
disions tout le bien qu'on en peut penser et aussi
les quelques réserves qu’il appelle. En dehors de
sa valeur scientifique particulière qui est considé-
rable, le travail de M. de Cyon fournira à l’apolo-
gétique de précieux renseignements. On y voit
notamment comment — et pourquoi — seuls des
savants « de second ordre » sacrifient à l’athéisme.,
Cette seconde édition contient d'assez importantes
additions sur la décadence présente du darwinisme,
voire de l'évolutionnisme. L'enquête sur les opi-
nions philosophiques et religieuses des grands
naturalistes s'augmente de plusieurs documents
de grande valeur, notamment de cinq lettres de
Berzélius. Enfin, le chapitre vi, consacré au positi-
visme, contient de nouveaux détails sur la folie et
l'absence de tout sens moral chez Auguste Comte.
L'Etat moderne et l’organisation internatio-
nale, par D.-J. Hilt, ancien ambassadeur des
Elats-Unis à Berlin. (Trad. franç. de M™° E. Bovu-
TROUX.) Un vol. in-48 broché de la Bibliothèque
de philosophie scientifique (3,30 fr). Flamma-
rion, 26, rue Racine, Paris.
Philosophe, historien, économiste et diplomate,
M. Hill est bien placé pour parler de l'Etat moderne.
Il en parle si bien et avec tant d'amour qu'il lui
accorde peut-être trop. En tout cas, le but principal
de M. Hill parait être de démontrer que le monde
politique international est constitué aujourd'hui
par une société d'Etats auxquels il serait désirable
de conférer des droits et des garanties analogues
à ceux dont jouissent les particuliers de chaque
nation civiligée.
Nous reconnaissons ici le délégué à la Conférence
de La Haye (1907)! Sans doute, M. Hill ne se dissi-
mule pas les difficultés de son idéal, mais il croit
que la conscience des nations parviendra à réaliser
d’une façon concrète la sanction internationale
sans laquelle son rêve s'écroule.
La Russie et ses richesses, par E. Taris, ancien
élève de l'Ecole polytechnique. Un vol. broché
in-8° écu avec 24 photogravures hors texte et
1 carte {4 fr). Paris, Pierre Roger et Ci, 54, rue
Jacob.
M. Taris parait être préoccupé du maigre résultat
économique atteint par l'alliance franco-russe. De
COSMOS-
167
fait, les échanges commerciaux des deux pays sont
faibles, trop faibles. C’est pourquoi tout volume
capable d'ouvrir les yeux à nos capitalistes, à nos
hommes d’affaires, à nos industriels sur le champ
immense d'activité que leur réserve la Russie sera
le bienvenu. Tel est le cas de celui-ci. En une suite
logique de tableaux évocateurs, M. Taris nous fait
visiter la Pologne, la Grande-Russie avec Péters-
bourg et Moscou; nous descendons ensuite le Volga
jusqu’à Astrakhan pour gagner la Petite-Russie et
cette côte d'Azur qui est la Crimée, après avoir
traversé les grandes plaines de céréales du Sud.
Puis c’est la Caspienne et ses pétroles. La Finlande
a son chapitre à part. L'auteur conclut par une
échappée sur l'avenir et les mystérieuses et gigan-
tesques ressources de l'Asie russe.
Le guide pratique de l’instituteur construc-
teur et collectionneur, par Léonce CARLIER,
instituteur. Un vol. in-46 de 140 pages avec gra-
vures (4 fr), chez l'auteur, 20, rue du Molinel,
Halluin, Nord.
On a constaté depuis longtemps que pour donner
aux'énfants des notions scientifiques durables, il
est nécessaire de les faire assister à des expériences.
D'ailleurs, cette manière de faire est recommandée
dans les programmes des écoles normales.
Mais les instituteurs n’ont pas souvent les res-
sources nécessaires pour donner cet enseignement
expérimental. Aussi faut-il leur signaler le curieux
ouvrage de M. Carlier, qui explique la façon de con-
struire soi-même, avec des outils usuels et des ma-
tériaux simples, faciles à se procurer partout, plus
de 300 appareils pour l’enseignement expérimental
de toutes les matières du programme et, en parti-
culier, des sciences physiques, du calcul et de la
lecture.
Il donne, en outre, une foule de précieux rensei-
gnements pour la décoration économique des
classes et la constitulion des musées scolaires
(récolte, arrangement en collections, conservation
d'échantillons des trois règnes, etc.).
Cet ouvrage, qui prouve une grande ingéniosilé
de la part de l’auteur, rendra beaucoup de services
aux instituteurs qui pourront ainsi instruire leurs
élèves tout en les intéressant vivement.
L'autre vio, par M8" ELIE Ménic, prélat de la mai-
son du Pape, docteur en philosophie et iettres,
docteur en théologie, professeur à la Sorbonne.
. Treisième édition. Deux vol. (18 X 12) de x-337
et 400 pages. (Chaque volume, 6 fr.) P. Téqui,
82, rue Bonaparte, Paris, 1912.
Cet ouvrage bien connu traite la question de
l'immortalité de l'âme, puis celle du lendemain de
la mort, d'abord à la lueur de la raison et ensuile
à la lumière des enseignements de la foi catholique.
168 COSMOS
R aont 194194
FORMULAIRE
Nettoyage des flacons et ustensiles de ver-
rerie. — Les flacons qui ont contenu des corps
gras peuvent étre aisément nettoyés à l'aide d’une
solution de permanganate de potasse à 10 pour 400;
il se forme un peroxyde de manganèse; on ajoute
une petite quantité d'acide chlorhydrique, et il se
produit un dégagement de chlore, qui décompose
les matières organiques. Il faut ensuite rincer plu-
sieurs fois à l'eau claire.
Pour netloyer les flacons ayant contenu des
matières résineuses, il faut les laver avec une les-
sive caustique, les rincer à l'alcool et plusieurs fois
à l'eau.
Pour les flacons ayant contenu des essences, on
emploie une solution de 10 à 25 pour 100 d'acide
sulfurique, puis on passe à leau claire.
On nettoie très rapidement les flacons ayant con-
tenu des révélateurs avec une solution diluée d'acide
sulfurique ou d'acide chlorhydrique et rinçages à
l’eau claire.
(Bulletin du Photo-Club du Haut-Jura.)
Pour la conservation des reliures de livres.
— Les bibliophiles ont intérèt à attacher une
attention exceptionnelle aux reliures. La Société
des arts de Londres vient de leur adresser à cet
égard un salutaire avertissement en les invitant à
veiller sur les dégâts que peuvent causer les insectes
qui attaquent les peaux. Celles-ci sont plus ou
moins sujettes à leurs ravages. Le maroquin, le
porc, le vrai parchemin sont encore ce qu'il y a de
moins sujet à leurs attaques. Le veau et le cuir de
Russie n’abritent pas sérieusement le livre. Quant
à la toile et au simple cartonnage, ils doivent être
bannis de toutes les bibliothèques.
(La hevue.)
PETITE CORRESPONDANCE
Erratum. — Daus l'article sur les Dés speciaux
pour le tirage des loteries (n` 1432), à la page 21, en
haut de la deuxième colonne, au Tieu de lire : « On
s'assure... si lés distances /k et ¿j sont égales: de
mème les distances ak, lu, ri, bj », il faut lire : « On
s'assure... si les distances /k et ¿j sont égales aux
distances af, lu, ri, bj. »
` Adresses des appareiłs décrits :
Les limiteurs de courarts Ohlinger se trouvent chez
M. Ohlinger, 65, rue du Faubourg-Saint-Denis, Paris.
M. F. P., à M. — Les moteurs fixes, ayant en général
un régime lent, ne donneraient pas aux magnétos
ordinaires une vitesse de rotation suffisante pour
fournir une bonne étincelle. On emploie en ce cas un
mécanisme qui fait osciller rapidement l'induit de la
magnéto. — Depuis quelques années, en etřet, on
soude les rails bout à bout, au lieu de mettre des
éclisses boulonnées. De cette facon, on n'a pas à res-
serrer les boulons, que les trépidations finissent par
dévisser. Il n’y à pas d'ailleurs utilité à conserver
l'espace entre les bouts des rails pour la dilatation,
car les rails de tramways étant enterrés subissent de
bien moins grandes variations de température que
ceux des chemins de fer, qui sont au-dessus du sol.
M. de B., à D. — Remerciements: nous avons un
certain nombre d'abonnés en Allemagne.
M. A. M..à H. — Un brevet francais qui n’a pas été
pris dans d'autres pays n'a aucune valeur à l'étranger.
L'achoteur possible peut exploiter l'objet de l’inven-
tion sens rien d‘hourser. — Nous ne saurions vous
dire combien il existe de métiers à tisser en France ni
où l'on peut trouver ce renseignement.
M. A. L., à G. — Il n'existe pas d'ouvrage traitant
spécialement de la fabrication du blanc d'Espagne, fa-
bricalion fort simple: la craie est débarrassée du sable
qu'elle contient; pour cela, on la pulvérise ct on la
délaye dans l'eau. où le sable se dépose. On décante
le liquide qui tient la craie en suspension; on le
laisse donner un dépot que l’on fait sécher et que l’on
moule sous forme de cylindres. Toutes les craies no
donnent pas le bon blanc d'Espagne, cependant les
dépôts en sont nombreux.
M. P. P., à P. — Il n'y a‘aucun doute : vous pouvez
tenir à la main une bicyclette, la nuit, sans avoir de
lanterne allumée. Cependant, il y a parfois des procès-
verbaux dans ce cas, et, quand il y a condamnation,
c'est que le juge suppose que le cycliste est descenda
à l'approche du gendarme. Il faudrait donc que celui-
ci fút contraint d'assurer que le cycliste a été vu sur
sa machine, pour qu'il y ait lieu à condamnation.
M. H. K.,à C. — Une bonne prise de terre d'un
paratonnerre peut également servir en T. S. F. —
Nous envoyons votre carte à la Compagnie générale
radiotélégraphique, 63, boulevard Haussmann, Paris.
M. M. D., à R. — Il est très difficile, avec les données
de votre lettre, de vous donner une réponse süre.
Vous pourriez consulter un ancien article du Cosmos
sur cette question, « Une lunette astronomique pour
5 francs » (t. XLVII, n° 934, p. 778, 20 décembre 1902).
En tous cas, il nous semble difficile que vous obteniez
une portée et un grossissement tels que vous les
désirez, et qu'on trouve rarement parmi tes instru.
ments construits chez les opticiens. Pour redresser
l'image, il faut un autre système de lentilles placé
près de l'oculaire de la lunette. Vous en trouverez la
description dans n'importe quel traité de physique.
M. l'abbé J.-H. V., à T. — Nous vous remercions
de votre communication. Nous restons convaincus
que l'infiltration des pluies a une part prépondérante
dans les éboulements du cap de la Hève.
Imprimerie P. FeroN-Vrau. $ et 6, rue Bayæerd, Peris, VIII‘.
Le gérant : E. PETITEENRT.
No 1438 — 15 aout 1919
COSMOS
169
SOMMAIRE
Tour du Monde. — Le tremblement de terre de la Marmara. Contre les morsures de vipères : un procédé
de garde-chasse. Fixation de l’azole aérien par catalyse. Horloge électrique sans fil. Le gaspiliage de
l'énergie dans la production de la lumière artificielle. Les navires de plus en plus grands et leurs installa-
tions. Propulsion électrique des navires. Une curiosité arboricole. Le bouvreuil, p. 169.
Les nouvelles automotrices électriques des chemins de fer de l'Etat, H. C., p. 174. — La synthèse
du caoutchouc, F. Charles, p. 176. — Les tigridies décoratives, AcLoque, p. 177. — Accumulateur
alcalin Paul Gouin, BERTHIER, p. 179.— La fabrication des grosses conduites d’acier, BELLET, p. 181.
— L’évolution des nébuleuses spirales, A. Ste, p. 184. — Les chemins de fer français aussitôt
après la guerre, A. ne SApoRTA, p. 439. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p.192. — Biblio-
graphie, p. 193.
TOUR DU MONDE
PHYSIQUE DU GLOBE
Le tremblement de terre de la Marmara. —
Un tremblement de terre est survenu en Turquie
d'Europe dans la nuit du jeudi 8 au vendredi
9 août. Les Observaloires sismiques européens l'ont
enregistré comme d'ordinaire et ont mème aussitôt
fixé, rien que d'après la forme et la longueur des
diagrammes, la position de l'aire épicentrale. A
Pola (Autriche), l'amplitude maximum, sur les dia-
grammes, a atteint 444 millimètres, correspondant
à une amplitude de 1 millimètre pour le mouve-
ment réel du sol. A l'Observatoire allemand de
Krietern, les ondes ont débuté à 2:32" et n'étaient
pas encore éteintes à 8 heures; les aiguilles du sis-
mographe se sont détachées sous la violence des
secousses. L'Observatoire royal de Belgique a enre-
gistré ie début à 1:33"4{6et, d’après le diagramme,
a pronostiqué « un violent tremblement de terre
dont le foyer paraissait se trouver à 2150 kilo-
mètres d'Uccle, dans la direction Est-Sud-Est, c’est-
à-dire en Turquie, aux environs de la mer de
Marmara ».
C’est bien cette région qui a été frappée. L'ile de
Marmara, la côte européenne de la mer de Mar-
mara et toute la région depuis Gallipoli jusqu’à
Andrinople, y compris ces deux villes, ont été
ravagées, mosquées, églises, écoles, magasins,
maisons écroulées, des centaines de personnes
tuées, des milliers de personnes blessées ou man-
quant d’abri; à Rodosto, sur la Marmara, il n’y a
pas une maison qui n'ait souffert. En bien des
endroits, l'incendie a achevé l’œuvre des secousses
sismiques. Deux sources d'eaux minérales se sont
taries à Dédéagatch. Le lendemain, sur la côte de
la Marmara, la mer rejetait un grand nombre de
poissons, sans doute écrasés par la brusque secousse
dans l'eau incompressible.
T. LXVII. N° 1438.
A Constanlinople, trois fortes secousses avaient
été ressenties au mème moment vers 330", heure
locale, occasionnant quelques dégâts.
M. de Montessus de Ballore note, dans sa Geogra-
phie séismologique, que les désastres causés par
les secousses à la ville d'Andrinople sont le plus
souvent associés à de graves tremblements de
terre des grandes villes du voisinage telles que
Constantinople et Gallipoli. I n’est d’ailleurs point
possible de fixer avec plus de précision les épi-
centres des secousses qui frappent cette région.
SCIENCES MÉDICALES
Contre les morsures de vipères. Un procédé
de garde-chasse. — Les morsures des vipères ne
sont heureusement pas toujours mortelles: cela
dépend de bien des circonstances telles que la race
de la vipère, l'endroit de la morsure, la plus ou
moins grande quantité de venin que le reptile se
trouvait avoir à ce moment dans ses glandes, etc.
Cependant, il ne faut pas oublier que Rollinger a
observé 50 morts sur 6410 cas de morsures, et Viaud
Grandmarais 62 sur 321 cas. On peut compter une
moyenne de 40 à 15 cas mortels sur 100, ce qui est
infiniment trop.
Nous allons très rapidement passer en revue les
divers moyens de neutraliser les effets dangereux
du venin et terminer en exposant un procede fort
curieux, très simple et, parait-il, dune eflicacité
absolue, emplové dans une région où les vipères se
montrent en très grand nombre.
Il faut laisser de coté tout d'abord les remèdes
en usage chez les anciens et même chez nos
ancètres, remèdes sortis sans doute de l'antre des
sorcières et qui font plus honneur à leur imagination
qu’à leurs connaissances médicales.
Est-on mordu par une vipère? Il importe tout
170
d'abord d'empècher l'introduction du venin dans le
torrent circulatoire. Pour cela, il faut pratiquer une
ligature aussi serrée que possible, avec un mouchoir
de poche ou tout autre objet propice, un peu au-
dessus de la blessure, entre celle-ci et le tronc du
corps, car le plus généralement Îles reptiles s’at-
laquent aux membres, surtout aux membres infé-
rieurs, les plus immédialement à leur portée. Il
faut ensuite débrider assez largement la plaie en
opérant une incision profonde de un centimètre,
longue de deux ou irois, passant par la blessure et
dans le sens de la longueur du membre atteint.
Puis faire saigner abondamment et, mieux encore,
sucer fortement la plaie pour aspirer le venin, à la
condition formelle de n'avoir dans la bouche aucune
lésion capable de permettre son introduction.
Ces opérations étant elfectuées aussi vile que
possible, car de leur rapidité dépend pour une
bonne part leur succès, on doit s'occuper d'atté-
nuer et de neutraliser les elfets du venin dont il
aura été impossible d'empêcher l'absorption.
A cet égard, les plus heureux résultats, mime
lorsqu'il s’agit de cas en apparence désesperés,
sont obtenus par les injections du sérum antiveni-
meux de M. le D? A. Calmette, directeur de lln-
stitut Pasteur de Lille, dont on connait les remar-
quables travaux sur les venins des serpents et le
traitement de leurs effets sur l'organisme humain.
Toutes les fois que la chose est possible, et dans
le plus bref délai, il ne faut donc pas hésiter à faire
des in ections de ce précieux sérum. Le malheur
est que l'on n’en a pas toujours à sa disposition en
cas de besoin. Il faut alors re’ourir à certains pro-
duits chimiques qui peuvent rendre de grands ser-
vives, el à l'action curative desquels, quoiqu'elle
ne soit pas aussi cerlaine que celle du sérum anti-
venimeux, on doil recourir si on a la chance de les
avoir sous la main. Les plus elticaces sont l'hypo-
chlorite de chaux, le chlorure d'or, le permanga-
nate de potasse, l'acide chromique.
D fant employer de préférence l'hypochlorile de
chaux où bien le chlorure d'or. L'hvpochlorite de
chaux s'utilise en solutions à 2 pour 100; les solu-
tions doivent ètre faites depuis peu. Les solutions
de chlorure d'or doivent ètre au titre de { pour { 000.
Soil avec les unes, soil avec les aulres, on com-
mence par laver très largement la plaie faite par
l'incision; il est bon de faire avec ces solntions des
injections hypodermiques ou bien des injections
intramusculaires profondes aulour de la plaie.
On a préconisé certains autres trailemenis : injec-
Gonsde morphine, d'anmmontaque.de strvehuine,ete.
Rien de sérieux ne Îles justifie, et il semble bien
qu'elles sont non sculement inutiles, mais mème
contre-indiquées. |
Il n'en est pas de même de l'absorption de café,
le the et mème d'alcool à doses modérées. L'orga-
nisiwe a besoin alors d'ètre stimulé, et lingestion
COSMOS `
15 aour 1912
de ces excitants peut produire les meilleurs résul-
tats par leur action sur létat général du patient.
Ainsi donc, voilà les meilleurs moyens que la
science met à notre disposilion pour remédier
aux funestes suites des morsures de serpents veni-
meux. La principale difficulté qui s'oppose à leur
application est que, le plus souvent, on ne les a pas
en temps utile à sa disposilion. Assez rares sont les
pharmaciens qui détiennent du sérum antiveni-
meux. D'autre part, on ne peut guère se promener,
à moins que l’on ne se trouve dans une région lit-
téralement infestée par des reptiles dangereux,
avant constamment dans sa poche une trousse avec
bistouri, seringue de Pravaz, solutions de chlorure
d'or ou d'hvpochlorite de chaux.
Il peut donc être intéressant de connaitre et
d'appliquer, à l'occasion et faute de mieux, un
procédé qui serait, parait-il, infaillible, mais que
nous ne donnons néanmoins qu'avec loules les
réserves possibles. [l nous a été donné par un de
nos amis dont les gardes-chasse s'en servent assez
couramment, car ils ont à circuler dans un centre
où les vipères sont excessivement communes,
quelque soin que l'on prenne de les détruire.
Ii suffit d'avoir, en cas de besoin, une petite ron-
delle d'amadou d'un diamètre un peu inférieur à
celui d’une pièce de cinquante centimes, et une allu-
mette. Le matériel n'est donc guère complique : il
se trouve en tout cas très portatif.
En cas de morsure par une vipère, on dégage
vivement la partie qui a élé mordue; sur les traces
laissées par les crochets du reptile, on place la ron-
delle d'amadou à laquelle on met le feu. La brù-
lure ainsi produite ne tarde pas à occasionner une
phlyctène dans laquelle viendrait, parait-il, saecu-
muler tout le venin inséré dans la blessure: On
n'a plus ensuile qu'à la percer et à la débarrasser
de tout le liquide qui s y trouve.
Sans doute, ce procédé curatif doit ètre fort
douloureux, et il faut ètre vraiment stoique pour
supporter paliemment la brülure de lamadou.
Mais enfin, quand il s'agit de vie ou de mort, on
peut, semble-t-il, supporter quelques moments de
souffrance.
Dans le pays en question, on a couramment sur
soi de petites rondelles d'amadou si l’on a l'occa-
sion de se promener dans les endroits rendus dan-
gereux par là présence des vipères.
Sans vouloir préconiser de façon absolue ce truc
de garde-chasse, il semble que les gens en excur-
sion dans des contrées à vipères pourraient avoir
sur eux un peu d'amadou en cas de besoin : ils ne
s ecncombreraient pas beaucoup et seraient peut-
èlre henreux de lui devoir la vie. Louis NERVE.
CHIMIE
Fixation de l’azote aérien par catalyse. —
D'une part la masse énorme d’azote combiné,
Nc 1438
employé dans les arts chimiques et pour la fertili-
sation agricole, d'autre part la quantité pratique-
ment illimitée d’azote libre contenu dans l’atmo-
sphère : ces raisons provoquèrent les efforts d’un
grand nombre de chercheurs dans le but de fixer
chimiquement l'azote aérien. On sait le brillant
succès des tentatives failes ainsi pour fabriquer le
nitrate de chaux et la cyanamide calcique. Or,
voici qu'à peine éclose, l'industrie nouvelle voit
poindre une concurrente qui sans doute sera
bientôt redoutable.
On a fait depuis quelques années en Allemagne
des essais fort intéressants pour fabriquer de
l'ammoniaque en faisant passer un mélange forte-
ment comprimé et chaud d'azote et d'hydrogène
sur des composés du rhodium ou de l'uranium.
Comme tous ces catalyseurs agissent sans perdre
de leur masse et peuvent ainsi transformer
d'énormes quantités de matière, le procédé est
fort économique. L’ammoniaque ne coite guère
que par le prix de l'azote, extrait maintenant de
l'air par les procédés Claude à un bon marché
dérisoire, et de l'hydrogène qu'on sait aussi produire
à bon compte depuis que les dirigeables en con-
somment d'énormes quantités.
Mais tous ces procédés catalytiques sont très
délicats. On sait que l'acide sulfurique au platine
ne put guère ètre préparé en grand qu'après
presque un siècle de tâtonnements et de recherches.
La matière active s’empoisonne peu à peu et perd
son pouvoir dès qu'elle est souillée d'un peu de
poussières; le rendement est inégal, la régénération
du catalyseur amène des pertes, et le prix du pro-
duit lui-même immobilise un certain capital. Ceci
explique la difficulté de mise au point de la syn-
thèse de l'ammoniaque en partant de l'azote aérien.
Le procédé semble toutefois maintenant très
pres de passer dans la phase pratique. M. Auziès,
qui l'étudie dans la /?evue yénérale de Chimie,
décrit, en effet, un ensemble de perfcclionnements
rendant la méthode tout à fait industrielle. Le
mélange azote-hydrogène est d'abord épuré physi-
quement par filtration, et chimiquement par bar-
botage dans un bain de sulfate chromeux, qui
retient toute trace nuisible d'oxygène. On procède
ensuite à la catalyse non plus avec un produit
rare et coûteux, mais avec un mélange de nickel
et de bore ou d'aluminium. Ji semble y avoir dans
ces conditions formation d’hydrure de nickel et
d'azotine de bore ou d'aluminium, puis finalement
la réaction produit l'ammoniaque. On fixe l'alcali
par lavage et on remet en circulation le mélange
des gaz non combinés.
D'après les calculs peut-être d'ailleurs trop opti-
mistes de l’auteur, l’azote ainsi fixé coùterait moins
de 0,5 fr par kilogramme. Si on compare ce prix à
celui Je l'azote des engrais nitrés ou amimonicaux,
on voit l'énorme profit que laisse espérer la nou-
COSMOS
velle fabrication aussi bien pour industriel que
pour l'agriculteur. I. R.
ÉLECTRICITÉ
Horloge électrique sans fil. — On connait
depuis longtemps les horloges électriques reliées
par un fil à une horloge centrale, et dont tout le
mécanisme consisle en un simple électro-aimant
placé en face d’une armature. Une nouvelle,
propre à révolutionner cette industrie, nous vient
de Munich. On esl parvenu à actionner, dans un
assez large rayon, des horloges électriques en
nombre indéfini au moyen des ondes herlziennes
sans fil.
L'indication de l'heure exacte se fait déjà assez
facilement à de très grandes distances toutes les
douze ou vingt-quatre heures. On peut citer des
fabriques d'horlogerie, en Suisse, qui reçoivent
chaque jour de la tour Eiffel l'heure exacte, mais
la communication minute par minute de lheure
à de nombreuses horloges par les ondes élec-
triques est un fait entièrement nouveau et inat-
tendu. [l s'agissait de donner à londe électrique
une puissance suffisante pour permettre une aclion
précise, de construire des horloges réceptrices de
manière que l'aiguille ne fasse quun mouvement
en avant dans un temps donné, d'empêcher l'in-
tervention disturbante de toute source étrangère
d'électricité, enfin de neutraliser l’action des ondes
hertziennes ne provenant pas de l'appareil expédi-
teur. Toutes ces difficultés sont surmontées dans
le système de M!" Cerebotani, de Munich, connu
par ses travaux électrotechniques (1). Une relation
des Wrinrhener Neueste Nachrichter, en date du
2 janvier 1912, en fait loi.
L'expérience parait fort simple. Sur une table
se monte une horloge .ordinaire à secondes, en
communication avec un relais et une batterie sèche
actionnant un appareil émetteur d'ondes élce-
triques hertziennes. Sur une table voisine se trouve
une antenne réceptrice reliée à une horloge qui,
au licu d'un mouvement d'horlogerie, contient un
électro-aimantet un relais de construction spéciale.
Aussitôt que l'aiguille des secondes de la première
horloge a fait un tour de cadran, l'antenne lance
une onde qui actionne l'aiguille des minutes de
l'horloge réceptrice ou de plusieurs de ces hor-
loges, la faisant avancer d’une unité. La seule dif-
férence avec les horloges électriques actuelles con-
siste en l'absence de lil.
Une horloge expéditrice plicée dans une position
centrale quelconque, au sommet d'une tour, par
exemple, et munie d'une antenne semblable à
celles de la télégraphie sans fil, peut donc exp-
dier l'heure exacte à un grand nombre d horloges
publiques placées sur les places, dans les restau-
rants, les bureaux, ete.
(1) Le Cosmos a eu souvent occasion de les signaler,
172 COSMOS
lait digne de remarque : les nouvelles horloges
réceptrices ne reviennent pas à plus de 45 francs,
d'après Mer Cerebotani. Celui-ci se propose de faire,
dans plusieurs villes d'Europe, des conférences
pour permettre aux spécialistes de juger de l'in-
vention. (Société des ingénieurs civils.)
Le gaspillage de l’énergie dans la produc-
duction de la lumière artificielle. — Le rende-
ment des meilleures sources lumineuses, malgré les
perfectionnements considérables de ces dernières
années, est encore déplorablement mauvais.
Voici quels sont les chiffres que donne Science
Progress : |
kenlement Iuminetr.
Proportion ie le GPL totaļe
Sonreet luminenses. irao farmee en emire.
Pétrole sont: M es .…. 0,25 p. 400
Gaz-manchonincandescentdroit. 0,46 —
Gaz-manchon incandescent ren-
0,51 —
Lampe électrique incandescente :
filament de carbone........., 2,01 —
Lampe électrique incandescente :
tantale...,...... PT tS —
Lampe électrique incandescente :
IUNCSIUNÉ er arms means ses a3 —
Lampe à arc: renfermcée..... 1,16 —
Lampe à arc: à air libre........ 96 —
Lampe à arc: à flamme jaune... 15,2 —
Quelques chiffres méritent d'être signalés. Il y
a un progrès considérable réalisé par la lampe à
incandescence à filaments métalliques et par la
lampe à arc à flamme colorée au moyen des char-
bons minéralisés. Dans la majorité des cas, le
rendement des sources lumineuses est inférieur à
pour 100. Et ce rendement devrait même ètre
évalué beaucoup plus faible si on faisait entrer
en ligne de compte toutes les pertes d'énergie pour
la transformation de la houille en gaz d'éclairage
ou en électricité. Le modeste ver luisant a un
rendement lumineux incomparablement supérieur
et qu'il faut donner en exemple, mais il est l’œuvre
du Créateur de toute lumière. N: l;
MARINE
Les navires de plus en plus grands et leurs
installations. — M. Richard a traité cette question
devant la Société d'encouragement, et nous crovons
intéressant de citer quelques lignes de sa commu-
nication:
« H v a quelques jours à peine, le plus grand
paquebot du monde était le célebre Titawic, perdu
dans le plus grand naufrage du mende: il ne res-
tait de cette taille que son compagnon TOlympie.
également de la Compagnie américaine WhiteStar,
qui, plus heureux que le Zitanic, ne subit, lors de
sa rencontre avec un croiseur anglais dans les
eaux de l'ile de Wight, qu'une blessure grave, mais
pas mortelle. Acluellement, ces deux monstrueux
navires sont dépassés.
15 aouT 1919
» Cest d'abord un paquebot allemand, l/mpe-
rator, de la ligne Hamburg-A merica, construit aux
chantiers Vulcan, de Stettin, et lancé le 23 mai
dernier. Il a 268,22 m de long, 29,87 m de largeur
maxima, 10,82 m de creux. Tonnage brut, 50 000 ton-
neaux. Poids au lancement, 26 500 tonnes. Vitesse,
22 nœuds. Nombre de passagers, 5 100, dont 700 de
première classe, 600 de seconde, 940 de troisième
el 4 750 de quatrième classe, sur lesquels 4 000 en
cabines et { 100 hommes d'équipage. Pour les pre-
mières classes : luxe extraordinaire des salons et
salles à manger, avec piscine de 20 m X 14 m,
jardin d'hiver, café, véranda, sans compter les
appartements comprenant chacun : salon, salle à
manger, deux chambres à coucher, deux salles de
bain, avec peut-être des meubles de la collection
Doucet, Antiroulis, Frahm. La coque est, d’un bout
à l'autre du navire, à double fond de 12 mètres de
haut, avec 11 étages de ponts divers, 35 comparti-
ments étanches à portes en nombre aussi réduit
que possible et commandées hydrauliquement.
L'état de fermeture ou d'ouverture de chacune de
ces portes est indiqué au poste du capitaine, et elles
peuvent, de ce poste, se commander séparément
ou simultanément. Il y a 400 canaux de sauvetage,
et chaque passager possède une ceinture et une
bouée de sauvetage, de sorte qu'ils ont, en cas d'une
immersion suflisammient lente du navire, quelque
chance d'échapper si le temps s’y prête et s'ils ne
perdent pas la tète. En cas d'incendie, des aver-
tisseurs automatiques signalent immédiatement le
compartiment du navire où le feu s’est déclaré, et
on peut l’y éteindre aussitôt par des jets de vapeur.
De nombreuses portes ignilugées empèchent la pro-
pasaltion du feu d'un compartiment à l'autre. La
ventilation est assurée par 80 ventilateurs d’une
capacité totale de 19 000 mètres cubes, et l'on fait,
de temps en temps, circuler de l'ozone pour revi-
vifier lair.
» L'installation électrique comporte 40000 lampes
alimentées par à turbo-dynamos d’une puissance
totale de S50 chevaux: en cas d'accident à cette
installation, une dynamo de secours installée sur
le pont supérieur fournirait l'éclairage nécessaire
aux parties principales du navire. Les quatre
ascenseurs pour passagers fonctionnent à l'électri-
cité, ainsi que de nombreux appareils de levage et
de manutention pour les bagages et les canots.
» La propulsion est faite par quatre hélices à
quatre ailes de 5 mètres de diamètre, à 125 L: min,
commandées par 6 turbines d’une puissance totale
de 70 000 chevaux, dont deux de basse pression sur
les arbres extérieurs et, sur chaque arbre intérieur,
une turbine de haute pression et une de moyenne
pression. Chacun des arbres de ces turbines peut
se commander indépendamment, et elles sont com-
plétées par des turbines de renversement ou de
changement de marche, dont deux de haute pres-
N° 1138
sion et deux de basse pression, ces dernières sur
les arbres extérieurs. L’enveloppe des turbines de
basse pression a 7,50 m de long et un diamètre
maximum de 5,50 m.
» Aussitôt en marche, ce gigantesque /mperator
sera dépassé par l'un des nouveaux navires de la
ligne « Cunard », l’ Aquitania. Longueur 270 mètres,
largeur maxima 29, tonnage 55 000. La force mo-
trice sera fournie par quatre turbines Parsons sur
quatre arbres d’hélices.
» On voit que l'ère de la construction des im-
menses navires est loin d'être close; quant aux
moyens de sécurité et de sauvetage, il faut espérer
qu'on s'efforcera de les perfectionner de plus en
plus, quitte à augmenter le prix de la construc-
tion du navire et à rogner un peu sur les installa-
tions purement somptueuses. On considérait le
Titanic comme insubmersible, et l'expérience a
surabondamment démontré sur le Titanic que le
double fond n'élait pas, comme sur les cuirassés et
même sur le vieux Great Eastern de 1858, pro-
longé, le long de la coque, jusqu'au niveau au
moins de la flottaison.
» En ce qui concerne les canots de sauvetage, ils
auront beau être en nombre suffisant pour con-
tenir tous les passagers, il est très probable qu'ils
n’en pourront jamais sauver qu’une faible partie
si le naufrage a lieu, non pas très lentement et en
beau temps, mais vite et en temps simplement
houleux, où la descente des canots,et surtout leur
accès, ne sont pas bien commodes. Aussi a-t-on
cherché autre chose, mais, jusqu'à présent, sans
grand succès. On peut signaler néanmoins, parmi
les solutions proposées, celle qui aurait, d’après le
Scientific American du 11 mai dernier, obtenu un
prix au concours Pollak, pour les appareils et
moyens de sauvetage, et dont le principe consiste
à disposer la partie supérieure du navire de ma-
nière que sa superstructure puisse s’en détacher
comme un immense radeau sur lequel on aurait
peut-être le temps de rassembler tous les passagers
de la ville flottante en perdition. Tout irait alors
pour le mieux si ce radeau, de construction assez
solide pour bien tenir la mer, voulait bien se déta-
cher à temps du navire, tout en y restant, en temps
normal suffisamment attaché, et filer en mer sans
ètre culbuté. Ce n’est pas très facile, mais peut-être
pas impossible, et il semble que, sous cette réserve,
le principe même de cet appareil mérite d'attirer
l'attention. »
Propulsion électrique des navires. — Sui-
vant le Times Engineering Supplement, on va
essayer aux États-Unis, à bord d'un navire char-
bonnier, le Jupiter, que fait actuellement con-
struire la marine de guerre, un système spécial de
propulsion électrique. On se propose d'installer
sur le navire en question une turbo-génératrice,
ayant une vitesse maximum d'environ 2 000 tours
COSMOS 173
par minute, qui produira du courant sous 2 300
volts, et deux moteurs à induction montés sur deux
arbres propulseurs. Dans le dispositif employé,
l'énergie sera transmise électriquement, de la tur-
bine aux arbres propulseurs, avec une réduction
de vitesse de 18 à 1. On espère oblenir, avec cette
combinaison, un rendement de transmission d’en-
viron 91 pour 100.
VARIA
Une curiosité arboricole. — M. le D' Vérou-
dart veut bien nous adresser la photographie d'une
curiosité arboricole.
C'est une vue, prise à 8 mètres, d'un platane âgé
d'environ soixante ans, et planté devant le nu-
méro 69 du boulevard Charmalin, à Noyon (Aisne):
UN PLATANE ENROBANT UNE BORNE.
Cet arbre a presque entièrement enveloppé une
borne de grès, de forme tronconique, mesurant
0,60 m de haut et 1,20 m de circonférence moyenne.
Il ne reste plus de visible que 0,23 m de cette cir
conférence.
Le reste est pris dans l’aubier de larbre, de
même qu'une barre de fer de trois centimètres
decôté, complètement recouverte sur0,20 m environ
de longueur.
Le bouvreuil. — Les utilitaires sont terribles;
peu à peu, ils condamnent tous les êtres de la
nature. Les créatures ont toutes quelques défauts;
ces savants ne voient que le mauvais côté, el sans
hésitation, ils condamnent à mort tous les êtres
animés; si on jugeait la race humaine avec cette
17%
sévérité, il ne resterait bientôt plus sur le globe
que l'exécuteur de la dernière viclime.
M. W. E. Collinge, ayant reçu de nombreux jar-
diniers, de propriétaires de vergers des plaintes
contre les bouvreuils, a voulu s'assurer de la valeur
de ces lamentations; sans hésiter, il a fait analyser le
contenu de l'estomac d'un certain nombre de ces
oiseaux. (Pleurez, àmes sensibles: cette investiga-
tion fit 308 victimes!) Hélas! on a trouvé des
preuves indiscutables de l'amour déréglé des bou-
COSMOS
15 aourt 4912
vreuils pour les fruits. Aussilôt on a déclaré nui-
sibles ces charmants oiseaux et on a proposé leur
extermination. Il faut dire que l’enquète a révélé
non seulement la déprédation des fruits, mais aussi
la destruction des jeunes bourgeons; évidemment,
les bouvreuils exagèrent; mais la mort pour de
tels méfaits n'est-clle pas aussi un peu exagérée ?
M. Collinge le reconnait implicitement : il se borne
à demander qu'il ne soit pas permis à l’espèce de
se multiplier sans contrôle.
Les nouvelles automotrices électriques
des chemins de fer de l'Etat.
Les Compagnies de chemins de fer se heurtent
de nos jours à une grosse difliculté: le transport
en temps utile des voyageurs de banlieue. En
effet, l'augmentation constante du prix des loyers,
la vie sans cesse plus chère poussent de plus en
plus les ouvriers et les employés qui ont leurs
occupations quotidiennes à Paris à demeurer
dans les environs imimédiats de la capitale. Les
trains du matin ct du soir sont continuellement
bondés de voyageurs, et il n'est pas possible, en
l'état actuel deschoses, d'augmenter, soit le nombre,
soit La longueur des trains.
Les Compagnies seront donc obligées, d'ici peu,
d'envisager un moyen pratique d'augmenter la
capacité de trafic de leurs lignes.
Les chemins de fer de l'État, qui desservent une
région particulièrement étendue et hahitée, ont
repris les études faites en ce sens par l'ancienne
Compagnie de l'Ouest. Il a semblé que la seule
solution acceptable était d'établir un service de
trains légers et rapides, à départs fréquents, se
rapprochant le plus possible d'un service de tram-
vaiys où du Mélropolitain. Ce dernier, en particu-
lier, devail servir de modèle, puisque ses lignes
permettent de {transporter journellement plus d'un
million de voyageurs, sur de petites distances,
il est vrai.
On a donc adopté le principe de la traction
électrique sur les lignes de banliene, c! les travaux
d'aménagement, quidemanderont plusi-urs années,
sout déjà décidés où en cours d'exécution sur les
voies partant de la gare Saint-Lazare ‘direction de
Versailles rive droite, Saint-Germain, ete.) et de la
gare Montparnasse {direction de Versailles rive
ganche) (f).
Mais la Compagnie de Etat na pas voulu
attendre la fin des travaux pour essayer le nouveau
(H Pour plus de détails sur ce point, se reporter à
l'article du Cosmos (t. LXV, n? 1396, 28 ovtobre 1911).
mode de transport. Des automotrices genre Métro-
politain ont été commandées à l'usine d'Ivrr, et
elles vont prochainement entrer en service sur la
ligne électrique des Invalides à Versailles rive
gauche (1).
Ces voitures, dont nous donnons une photogra-
phie, sont toutes automotrices. Elles ont 22,5 m
de longueur, sont montées sur bogies et pèsent
61 tonnes. Au milieu est placé le compartiment de
première classe; puis, de chaque côté, viennent un
compartiment de seconde classe, un emplacement
pour les bagages, et, à chaque extrémité, la cabine
du wattman avec les appareils de commande.
La partie motrice se compose de deux moteurs de
250 chevaux chacun pour courant continu de
600 volls. Dans le cas où plusieurs automotrices
sont couplées, tous les moteurs fonctionnent à la
fois sous le controle d’un seul watliman, comme cela
a lieu d'ailleurs sur le Métropolitain.
Dans toute la longueur de la parlie réservée aux
voyageurs, se trouve un couloir central; on y
accède par trois portes à glissières qui seront
manæuvrées par un employé se trouvant dans
chaque voilure. Le nombre des places est ainsi
réparti :
17 elasse 16 places assises 40 strapontins.
2- classe 48 — 26 —
soit 6£ places assises et 36 strapontlins. Il est pos-
sible, cnoutre, aux moments d’affluence, d'admettre
100 voyageurs debout, ce qui donne à chaque
automotrice une capacité de transport de 200 per-
sonnes au maximum.
Un grand perfectionnement apporté au nouveau
matériel a été l'adoption de l’attelage automatique.
Celle innovation aura un grand avantage au point
de vue de l'accélération du service. En effet, à
certaines heures de la journée, trois voitures
(i) Cette ligne a été décrite dans le Cosmos, t. XLV,
p. 401 et 485 (octobre 1901).
N° 1438
couplées seront nécessaires pour transporter les
voyageurs; à certaines autres, une seule suffira
amplement. Selon les besoins du service, on
pourra facilement, et sans manœuvres longues el
compliquées, ajouter ou retrancher le nombre
convenable de voitures. Il ne pourra d’ailleurs pas
y avoir plus de trois automotrices couplées, la
longueur des quais ne le permettant pas.
L'aménagement intérieur est très luxueux. Cela
changera les voyageurs qui étaient habilués à voir
rouler sur les lignes de banlieue les wagons du
plus ancien modèle.
Mais peut-être seront-ils amenés, par la suile,
COSMOS
175
à regretter leur vicux matériel. En effet, les auto-
motrices ne sont pas encore en service que déjà
les récriminations se font entendre. D'abord, cer-
lains trouvent inadmissibles les places debout; ils
considèrent, avec raison, que la Compagnie doit
les transporter assis et ne pas les entasser comme
il arrive trop souvent au Métropolitain. Ensuite, le
manque de séparation entre les classes fera sans
doute abandonner les premières, surtout si l’on
doit voyager debout. Mais une critique bien plus
importante a été faite par certains ingénieurs de
la Compagnie: le nouveau matériel ne remplirait
pas complètement le but pour lequel il a été créé.
LA NOUVELLE AUTOMOTRICE ÉLECTRIQUE DES CHEMINS DE FER DE L'TÉAT.
En effet, s’il est avantageux dans les moments
peu chargés de la journée, il est nettement infé-
rieur aux heures d'encombrement. Actuellement,
il est possible de mettre en marche tous les quarts
d'heure une rame de dix wagons où peuvent
prendre place, en se serrant, 800 voyageurs, ce
qui représente 3200 personnes transportées par
heure. En supposant même que les automotrices
partent toutes les cinq minutes, soit douze départs
par heure, le nombre des voyageurs transportés
pendant ce temps n’est que de 2 400. Or, il est peu
probable qu'on puisse arriver à une telle intensité
de trafic sur des voies où circulent normalement
des trains de grandes lignes et des convois de
marchandises. Il faudrait, en outre, renforcer
l'installation électrique qui n'a pas été prévue
pour ce genre d’exploitalion.
Quoi qu'il en soit, le service va être organisé
d'ici peu, à litre d'expérience, entre la gare des
Invalides et la station de Meudon-Vali-Fleury, où
une voie a été aménagée dans ce but. Les auto-
motrices desserviront toules les gares du parcours,
ce qui permettra aux trains de Paris à Versailles
d'aller sans arrét jusqu'à Meudon, soit à peu près
la moitié du parcours. Suivant que les résultats
constatés seront bons ou mauvais, de nouvelies
automotrices semblables seront commandées, ou
les ingénieurs se verront contrairts de modilier
leurs projets dans un autre sens.
H. C.
176 COSMOS
15 aouT 41912
La synthèse du caoutchouc.
Les nouvelles relatives à l'aboutissement des
efforts pour Pobtention du caoutchouc artificiel se
font plus aflirmatives.
On lit dans The Chemical trade journal and
Chemical Engineer du 29 juin 1912 :
« Nous avons assisté mardi passé à une démon-
stration dans les laboratoires de MM. Strange et
Graham Ltd, à Londres, promoteurs du groupe qui
fait les frais d’études des plus récents perfection-
nements de ce travail. Notre opinion est qu'ils ont
un procédé permettant réellement d'obtenir un
caoutchouc en tous points identique au caoutchouc
naturel sur une échelle industrielle.
» Les points importants que les inventeurs ont
dů établir pour arriver à fabriquer sont: la décou-
verte dun moyen économique de production des
huiles empyreumatiques (/usel oils), qui sont la
meilleure matière première de l’isoprène, et celle
d’un procédé de transformation prompt et efficace
de l’isoprène en caoutchouc.
» L'huile de fusel se produit en très petite quan-
tité dans la distillation de l’alcool éthylique obtenu
par fermentation de la fécule ou d’autres matières
amylacées, mais le rendement en est si faible que le
prix de cette huile (353,5 fr par 400 kilogrammes)
obligeait à chercher une source différente de ce pro-
duit. C’est là qu’ils firent leur principale découverte,
savoir celle d'une bactérie si récente, qu’elle n’a
mème point encore été dénommée, qui transforme
à 30° la pulpe de pomme de terre et permet d'en
relirer par distillation 43 pour 400 de son poids
sec, d'un mélange de deux parties de fusel oil et
une partie d’acétone. La séparation de ces sub-
stances par rectification est relativement facile, et
quoique la fusel oil soit le produit nécessaire à
l'obtention de l'isoprène et subséquemment du
caoutchouc, l'acétone devient un sous-produit très
avantageux, car elle est obtenue à si bas prix qu'il
en peut résulter une révolution dans l'industrie de
l’acétone.
» Les opérations ultérieures sont :
» a) Transformation à l’aide d'acide chlorhy-
drique gazeux des fusel oils en hydrocarbures
monochlorés ;
» b) Transformation de ces hydrocarbures mono-
chlorés en composés dichlorés par l'action du
chlore dans un appareil inventé par M. C. A. Pimm ;
» c) Transformation des composés dichlorés en
butanediène et isoprène; par le traitement sur la
chaux vive portée au rouge dans un tube métallique ;
» d) Polymérisation du butanediène et de liso-
prène par le contact d'un peu de sodium métallique.
» La température est un facteur important de
la durée de la polymérisation; celle-ci est accélérée
par une élévation modérée de la première. L'action
du sodium est considérée comme catalytique, en
ce sens qu’on ne constale aucune perte. Cette partie
du procédé appartient au D" F. E. Matthews, de
la Sociétė Strange et Graham Ltd. Le professeur
Carl Harries, de Kiel, a fait, indépendamment de
lui, la même découverte quelques mois plus tard.
» Quoique le groupe anglo-français qui a fait la
démonstration du procédé n'ait pas encore fait
plus de quelques kilogrammes de caoutchouc syn-
thétique, ses efforts se sont surtout portés sur
l'amélioration des rendements aux diverses phases
du procédé. Ces rendements sont actuellement :
100 parties de pulpe sèche de pomme de terre.
43 parties fusel oil et acéttone.
29 fusel oil. 14 acétone (sous-produit).
22,5 isoprène,
22 caoutchouc.
» Les essais les plus soigneux montrent que la
matière est réellement du caoutchouc, qu'elle sc
vulcanise par les procédés à chaud et à froid,
qu'elle se comporte comme le caoutchouc naturel
en présence des dissolvants, des précipitants et
des autres réactifs chimiques.
» La part que le sodium métallique, l'acide chlor-
hydrique et le chlore sont destinés à prendre dans
cette fabrication rend celle-ci très intéressante
pour l’industrie de la soude, et l’auteur exprime
l'espoir qu'il va en résulter une industrie nouvelle
pour l'Angleterre, permettant d'employer un très
grand nombre d'ouvriers pour une branche qui
n'en a point utilisé jusqu'ici. »
La fabrication du caoutchouc synthétique suivant
les principes énoncés plus haut n'est pas une nou-
veauté, Elle repose sur les propriétés de l'isoprène
exposées en premier lieu par Bouchardat et sur la
polymérisation de ce corps par le sodium. Carl
Harries en revendiquela prernière observation, Mat-
thews la lui conteste, et Kondakof prétend l'avoir
faite dix ans avant eux. Ce qui est nouveau et
d'importance capitale est la découverte de la
bactérie qui transforme en alcools supérieurs la
presque totalité de la fécule de la pomme de terre,
bactérie découverte par le D' Fernbach, de l'Institut
Pasteur.
Un procédé qui donne 22 kilogrammes de caout-
chou: en partant de 100 kilogrammes de pulpe
sèche est, me semble-t-il, un peu trop beau! La
pomme de terre renferme 26 pour 100 de matières
No 1438
sèches dont 20 de fécule, supposons 25 pour 100 ou
un quart en nombre rond: 400 kilogrammes de
pommes de terre fraiches suffiraient pour donner
ees 22 kilogrammes de caoutchouc parla transfor-
mation de 40 kilogrammes environ des alcools
supérieurs!
Le rapport sur cette invention n'était que
amorce d'une Société en formation. Il a précédé
de très peu l’émission des actions de la Synthetic
Products Company (Limited). Les prospectus
n'ayant pas été palronés par les Banques n'ont
COSMOS
i77
amené qu'un nombre insuffisant de souscriptions
et l’affaire est tombée dans l'eau. Mais toutes les
valeurs de plantations de caoutchouc ont subi une
dépréciation momentanée qui a permis aux initiés
de réaliser plus de bénéfices par la chute de la
Société en formation que celle-ci n'en euüt donné de
longtemps à ses actionnaires.
Néanmoins, je crois que la réalisation de la syn-
thèse du caoutchouc est prochaine, et j'ai pensé que
les lecteurs du Cosmos seraient intéressés par ces
renseignements. F. CHARLES.
Les tigridies décoratives.
La famille botanique des Iridées renferme en
général des espèces qui, par l'élégance sobre de
leur feuillage et la beauté de leurs fleurs, ont
mérité d'être admises dans les jardins et en font
l'ornement. Parmi celles qui présentent au plus
haut degré ce mérite décoratif, il faut citer en bon
rang les tigridies américaines, qui au point de
vue esthétique pourraient soutenir sans désavan-
tage la comparaison avec bien des orchidées de
bonne réputation.
Le genre Tigridia renferme des plantes her-
-bacées bulbeuses, dont les traits caractéristiques
peuvent s’énoncer ainsi: feuilles planes en forme
de glaive; fleurs très remarquables, mais aussi
— et malheureusement — très éphémères, à six
divisions, les trois extérieures plus grandes, les
trois internes plus petites, en forme de violon;
trois étamines à filaments soudés en un tube d'où
émerge le style, terminé par trois stigmates
bilides. Dans l'espèce type, les fleurs sont orangées
et abondamment marquées de taches très nettes,
d’où le nom de « fleur-tigre » donné à ces plantes.
Cette espèce type, qui est celle que l’on cultive
le plus communément dans les jardins, est le
Tigridia pavonia; elle est originaire d'Amérique,
et croit indigène dans les environs de Mexico.
Il est assez logique de penser que cette fleur
superbe atlira de bonne heure l'attention des
Européens venus dans ces régions en explorateurs
ou en colons. En 1576, le célèbre botaniste fla-
mand Mathias de Lobel (Lobelius) en publia une
vignette sur bois, d’après un dessin colorié exécuté
sur les lieux et envoyé de Mexico par un certain
Jean de Brancion.
Les horticulteurs, qui ne se piquent pas de pré-
cision scientifique, désignent volontiers la tigridie
par les termes vulgaires de « queue-de-paon »,
« œil-de-paon », qui font allusion aux taches dont
est parsemé le centre de la fleur.
La tigridie est une plante assez robuste, à végé-
lation énergique et résistante, dont le bulbe, qui
est difforme et roussâtre, muni à la fois de racines
fibreuses grèles et de cordons charnus, émet de
une à six tiges dressées, pouvant atteindre un
demi-mètre de hauteur.
Ces tiges sont entourées par les gaines de longues
feuilles en forme d'épée, pointues, régulièrement
plissées en long, et d'un beau vert clair. Elles se
terminent au sommet par une spathe d'où sortent
F1G. 1. — TIGRIDIA PAVONIA.
Port, très réduit.
successivement de une à quatre fleurs d'une somp-
tueuse élégance, mais qui ont le défaut de ne durer
chacune que quelques heures.
Ces fleurs atteignent en largeur jusqu'à 453 centi-
mètres; les six divisions qui composent leur
périanthe, alternativement plus grandes et plus
petites, sont réunies à la base et y dessinent la
concavité d'une coupe.
178
Les trois externes, plus grandes, ont la base
voiletle marquée de zones jaunes sur lesquelles se
détachent des mouchetures purpurines; toute leur
extrémité est d'un beau rouge éclatant, uniforme.
Les trois divisions internes, plus petites et étran-
F1G. 2. — TIGRIDIA PAVONIA.
Fleur, 1/3 grand. natur.
glées au milieu comme un violon, sont jaunes,
avec des macules purpurines. Du centre de la coupe
émerge un long tube, formé par les filets soudés
des élamines et couronné par les stigmates qui
sont d'un rouge purpurin.
Cette forme a donné dans les jardins quelques
variétés, plus belles que le type, mais un peu moins
rustiques et moins florifères: entre autres la
speciosa, race magnifique à fleurs plus amples et
d’un coloris plus éclatant, et lajWAheelerii, à fleurs
de 45 à 18 centimètres de diamètre, brillantes, et
où l'abondance du rouge tranche sur les parties
jaunes jusqu'à les effacer.
Sous le nom de Tiyridia conchiflora, on a séparé
une forme particulière qui, aux yeux de certains
botanistes, ne serait peut-ître qu'une variété de la
précédente. Originaire également du Mexique, elle
se caractérise par ses fleurs d'un jaune uniforme,
à coupe centrale plus profonde, tigrée de macules
purpurines. Elle a donné une race horticole grandi-
COSMOS
15 aour 41912
flora, qui n'en diffère que par les dimensions plus
grandes de ses fleurs, et qui tend à la supplanter
dans l'estime des amateurs. Cette race et son type
sont moins rusliques que la pavonia; leurs bulbes,
plus sensibles au froid, demandent à être relevés
chaque année, mème dans les régions où la pavo-
nia supporte impunément l'hiver.
Malgré leur valeur décorative, les tigridies ne
sont pas très fréquentes dans les jardins. Cela
tient d'abord au caractère éphémère de leurs
fleurs qui, épanouies dans la matinée, se ferment
après quelques heures pour ne plus se rouvrir, et,
en second lieu, à la réputation erronée de fragilité
qui leur est faile en général parmi les horticul-
teurs. Celle réputation inexacte provient peut-être
de ce que les espèces du Mexique se montrent
d'ordinaire peu rustiques sous notre climat.
F1G. 3. — TIGRIDIA VIOLACEA,.
Inflorescence, grand. natur.
Le reproche de ne durer que peu de temps fait
aux fleurs de la tigridie est réel; mais il est pos-
sible de le corriger en mettant à profit l'aptitude
accordée à la plante d’épanouir dans un court délai
ses fleurs successives.
N° 1438
Chacune ne dure qu'un jour, mais est remplacée
le lendemain par une autre sortant de la même
spathe. Pour tirer de cette succession de fleurs
différentes l'illusion d'une seule fleur de durée
plus longue, l’horticulteur ingénieux n'aura donc
qu'à cultiver les tigridies en touffes, en plaçant
dans un espace resireint un grand nombre de
bulbes.
En employant judicieusement ce moyen, il est
possible d'obtenir de ces belles plantes une florai-
son continue depuis juillet jusqu’en septembre.
Quant à leur rusticité, elle est assez grande pour
leur permettre de supporter l'hiver en plein air,
dans le Centre et dans l'Ouest, pourvu que leurs
bulbes soient assez profondément enterrés, en sol
très fertile ou en exposition convenablement abritée.
Plus au Nord et sous le climat de Paris, il est
recommandé de les protéger pendant les froids et
les grandes pluies, en recouvrant la terre d'une
couche de feuilles mortes ou de litière.
Toutefois, dans les régions où de fortes gelées
sont à craindre, une autre précaution, plus sûre,
s'impose : celle de relever les bulbes d'année en
année. Pour cela, deux méthodes peuvent être
employées.
Ou bien on arrache les bulbes aux premiers fri-
mas, on en enlève les feuilles, et après qu'ils ont
été ressuyés, on les place sur des tablettes dans un
local sain, abrité et obscur (cave, cellier), la
replantation devant être effectuée en février ou
mars.
Ou bien les bulbes, protégés contre les premières
gelées par une épaisse couche de feuilles ou de
terre, sont arrachés seulement en décembre (ce
plus long délai leur permettant de mürir) et placés
tels quels, après avoir été simplement débarrassés
de leurs feuilles, dans une caisse ou un panier que
COSMOS
179
l’on abrite dans une cave. Par cette méthode, les
bulbes ne se dessèchent pas et ne perdent pas de
leur volume.
Les Tigridia peuvent se contenter d'une expo-
silion semi-ombragée ; cependant, elles n'épa-
nouissent leurs magnifiques fleurs dans toute leur
beauté qu'en plein air et en plein soleil; leur végé-
tation réclame pour s'accomplir à l'aise que les
rayons solaires parviennent librement jusqu’à la
base de leurs tiges.
Le sol qui leur convient le mieux est un terrain
léger, sain et poreux: par exemple, une terre
argilo-sableuse, mélangée par moitié de terreau de
feuilles, de la terre de bruyère pure ou même,
tout simplement, du terreau de vieilles couches.
En cas d'humidité excessive, il faudrait drainer.
Les soins culturaux à fournir pendant Ia végéla-
tion sont peu importants : il suffira de recouvrir
le sol d'une couche de fumier frais pour entraver
l’action desséchante des chaleurs et d’arroser pen-
dant toute la période de la floraison.
La multiplication s'opère couramment par la
séparation des caïieux ou petits bulbes que l'on
plante en pépinière jusqu’à ce qu'ils soient de force
à fleurir et aptes à être mis en place.
A côté de la magnifique Tigridia pavonia,
reine du genre, je signalerai encore comme pou-
vant séduire les amateurs une autre espèce plus
petite, plus grèle, et qui est en quelque sorte par
l'aspect une miniature de sa brillante parente.
C'estla Tiyridia violacea Schiede, originaire aussi
du Mexique; ses fleurs sont d’un violet lilas, avec
la coupe d'un blanc jaunâtre, mouchetée de
macules d'un lilas foncé. Elle est assez délicate et
exige dans notre climat la culture sous châssis
froid.
A. ACLOQUE,
Accumulateur alcalin Paul Gouin.
C'est le 5 février 4901 qu'Edison fil breveter le
principe de son accumulateur alcalin. Le chimiste
suédois W. Jungner l'avait précédé de plusieurs
mois, puisqu’en mai 4900 son brevet fut acheté par
une maison suédoise qui fit des essais assez salis-
faisants avec des batteries légères destinées à la
traction. Depuis lors, un très grand nombre de
brevets ont été pris dans tous les pays, mais les
seuls éléments construits qui semblent avoir donné
des résultats intéressants sont ceux d’Edison. Tout
récemment, M. Paul Gouin, qui étudiait la question
depuis fort longtemps, a mis sur le marché un
accumulateur alcalin analogue à celui d'Edison
au fer-nickel. D’après les essais qui viennent d’être
faits, ce nouveau couple à électrolyte invariable
donnerait des résultats absolument remarquables.
Rappelons que les éléments des types Edison,
Jungner, Gouin sont caractérisés par ce fait qu'ils
ne renferment aucune électrode soluble. D'après la
théorie proposée par Edison, l'électrolvte demeure
invariable; il ne sert qu'au transport de l'oxygène.
Les électrodes étant le fer et l'oxyde de nickel,
ona: NiO? et Fe après la charge et
NiO et FeO après la décharge.
L’électrolyte (KOH + 12H70) ne prend pas part
à la réaction : il ne fait que servir d'intermédiaire
à l'ion O passant de NiO? à Fe (réduction de NiD?
en NiO ou peut-ċtre en un oxyde moins oxygėné
et oxydation de Fe en FeO ou peut-ètre en un
oxvde moins oxygéné).
Pour l'élément P. Gouin, l'électrolyte est une
dissolution de polasse à 22 pour 400 pour les élé-
180 COSMOS
ments de traction, et à 20 pour 4100 pour les élé-
ments à poste fixe.
L'électrode positive est formée de tubes perforés
en nickel pur, frettés par deux fils de même métal
préalablement torsadés et oxydés par un procédé
spécial. La matière active, composée d'un mélange
d'hvdroxydes de nickel et de graphite en poudre,
est comprimée dans ces tubes de manière à obte-
nir une porosité suflisante et un contact parfaits.
Le tube, ayant été rempli avec le mélange pré-
cédent, est fermé à chaque extrémilé par un
bouchon en ébonile. Les plaques positives sont
formées par la réunion de 33 tubes. Ces derniers
sont engagés horizontalement entre deux cornières
verticales en nickel, en forme d’U, et ils sont main-
tenus par des rivets en nickel pur. Les deux cor-
nières verticales sont en outre réunies à leur partie
supérieure par une traverse de nickel, munie d'une
lame permettant d'établir les connexions.
L'électrode négative est d'un type très différent
du précédent. Elle rappelle certaines électrodes
des accumulateurs au plomb (navette Blot, par
exemple). File est constituée, en effet, par une
tresse métallique plate en fil de fer, formant une
sorte de ruban plat de #4 millimètres d'épaisseur,
suspendu à une traverse horizontale par sa partie
supérieure. Cette électrode est à formation auto-
gène; elle ne contient pas de malire active rap-
portée : le protoxyde de fer étant formé direc-
tement à la surface du métal.
Le poidsde lélectrode positive est de 400 grammes
(300 grammes de matière active); celui de lélec-
trode négative de 345 grammes.
Un élément, type traclion, de 42 plaques posi-
tives et 11 plaques négatives pèse (vase, couvercle,
électrolyte, etc.) 13 kilogrammes environ. Ses
dimensions sont : 200 X 124 X 330 (bornes com-
prises), le volume total est : 8 184 cm.
Au régime de décharge le plus favorable
(25 ampéres), la différence de potentiel moyenne
étant de 1,24 volt, la capacité utile totale est de
330 ampères-heure el la puissance utile totale de
430 watts-heure, ce qui donne 26,7 ampères-heure
et 33 watts-heure par kilogramme de poids total,
Au regime de décharge de 130 a, la différence de
potentiel moyenne étant de 4,0) v, la capacité
tombe à 2K6 a-h, soit 22 a-h par kg de poids total,
La durée de la charge normale est de deux À
trois heures pour les batteries de traction, et de
trois à cinq heures pour les batteries fixes. La
difference de potentiel du courant de charge est
de 4,7 volt dans le premier cas et de 1,75 dans le
second. Celle de la décharge oscille entre 1,24 et
1,00 volt.
Le rendement en quantité des batteries est d'en-
viron 70 à 80 pour 100; le rendement en énergie
de 50 à 70 pour 100; celui des batteries station-
naires est plus élevé que celui des batteries de trac-
15 aouT 1912
tion (15 à 20 pour 100). Le prix des éléments
varie de 26 à 35 centimes par watt-heure de capa-
cité utile.
Les contacts et les bornes, en nickel, ne sont pas
exposés à se détériorer comme dans les accumula-
teurs au plomb. L'électrolvte étant invariable, il
ne se produit pas de dégagement gazeux; le foi-
sonnement, la déformation des électrodes, la chute
de matière active est pratiquement nulle. Les élé-
ments étant tous établis à l’aide de plaques uni-
formes d’un seul tvpe, le montage est des plus
faciles. Cette disposition présente encore lavan-
tage de permettre une fabrication économique.
Les bacs des éléments sont, soit en ébonite armée,
soit en acier nickelé; ils sont résistants et légers.
A còté des avantages déjà énumérés, rappelons
que les accumulateurs alcalins fer-nickel jouissent
de la propriété très spéciale de supporter sans
danger les décharges très rapides et même la
mise en court-circuit, et qu'ils peuvent demearer
déchargés sans risquer de se détériorer.
Les inconvénients de l’accumulateur Gouin sont
ceux de tous les couples secondaires et ceux des
couples fer-nickel en particulier: rendement en
énergie faible — inférieur méme à celui de l’accu-
mulateur au plomb, — carbonatation de la potasse
par le contact à l'air, ce qui oblige à un lavage
tous les trois ou six mois. Dans une variante ré-
cente, la carbonatation et les lavages sont évités.
Entin. détérioration lente des plaques, des élec-
trodes positives surtout. Celles des batteries de
traction ne peuvent guère supporter que 400 à
500 décharges. Ce résultat est déjà merveilleux si
on le compare à celui que donnent les batteries
au plomb, mais il est loin d’être parfait en soi.
Dans ces conditions, une voiture automobile élec-
trique, chargée tous les matins, devrait renou-
veler ses électrodes positives ou bout d’un an ou
d'un an et demi. Une batterie de 300 ampères-
heure environ doit coûter de 1000 à 1 500 francs
pour les faibles puissances et de 2 500 à 3 000 francs
pour les puissances plus élevées. On conçoit donc
que son remplacement puisse devenir onéreux.
D'une discussion assez vive qui vient d’avoir
lieu entre M. Montpellier, le rédacteur en chef de
V Electricien, et M. Sharp, ingénieur américain de
l'usine Edison (Edison Storage Battery C°), il
semble résulter que l'accumulateur Gouin est plus
robuste que l'accumulateur Edison, que sa capacité
est au moins égale, sinon un peu supérieure
(2S watts-heure contre 24 watts-heure). M. Mont-
pellier engageait la Société Edison à soumettre
aux essais les deux accumulateurs Edison et Gouin
dans un laboratoire indépendant {National Phy-
sical Laboratory anglais, Société internationale
les électriciens, etc.). C’est là évidemment le
moven le plus correct d'éviter toute discussion
oiseuse. A. BERTHIER.
N° 1438
COSMOS
181
La fabrication des grosses conduites d'acier.
Il ne s’agit pas de la fabrication des tuyaux sans
soudure, mais bien des grosses conduites servant
principalement au transport de l'eau ou des eaux
d'égout, faites de tôles d'acier soudées, qui se
substituent de plus en plus au vieux type classique
des conduites en fonte. Ces conduites d'acier sont
beaucoup plus légères que les autres, et le coût du
transport à pied d'œuvre en est diminué, ainsi que
la difficulté des manipulations. Cette légèreté
es
LS
permet d'employer des éléments beaucoup plus
longs, ce qui réduit d'autant le nombre des joints
nécessaires, les dépenses de confection de ces joints
et les fuites qui ont chance de se produire par là.
On peut ajouter encore en faveur de ces grosses
conduites que leur surface est beaucoup plus unie
et diminue considérablement les pertes par frotte-
ment, les pertes de charge, et aussi les dépôts que
les rugosités de la surface peuvent plus facilement
L D
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E EE E SE PRES
F1G. 1. — L'EMSEMBLE DE LA MACHINE A COURBER ET DRESSER LES TOLES.
entrainer dans les conduites de fonte. Enfin, ces
conduites d'acier sont certainement beaucoup plus
robustes, beaucoup moins fragiles, et elles ne sont
guère susceptibles de se rompre sous l'influence
des mouvements du sol, comme cela n'arrive que
trop souvent avec les conduites de fonte.
Pour fabriquer ces grosses conduites de tôle
d'acier, il faut un matériel absolument spécial, des
tours de main même; et c'est pour cela que nous
avons visité avec un grand intérêt une usine qui,
en Angleterre, s’est fait une spécialité de ces
tuyaux soudés. Ce sont les ateliers de la British
Welding Company, de Motherwell. Disons en pas-
sant que tout, dans ces usines, est commandé soit
électriquement, soit hydrauliquement. On y dis-
pose, en outre, d'une station de compression d'air.
Pour la soudure des tôles et des tuyaux, on emploie
le gaz à l’eau, fourni par une installation suscep-
tible den produire par heure 1 400 mètres cubes.
Au moyen de scrubbers spéciaux, on peut obtenir
un gaz très pur, servant à la soudure des tuyaux.
Un générateur de gaz spécial est installé près dès
fours de chauffage et de recuit des tôles, pour
fournir le gaz nécessaire comme calorique à ces
182
fours. Ces usines peuvent trailer des conduites
soudées en acier d’un diamètre compris entre
355 millimètres et 1,83 m, les bouts de tuyaux
ainsi fabriqués d’un seul morceau ayant une lon-
gueur courante de 7,92 m.
Les tôles sont d’abord passées sur une machine
spéciale qui en prépare les bords longitudinaux,
ceux qui vont servir à former la ligne de soudure;
cette machine taille sur ces rebords un biseau.
Cela assure une excellente soudure et un recouvre-
ment parfait. Il faut ensuite traiter les plaques
pour leur donner la courbure voulue, suivant le
rayon de la conduite à fabriquer. Cette courbure
COSMOS
15 aour 1912
s'exécute au moyen de rouleaux que l'on voit dans
une de nos photographies (fig. 1); jusqu'à 13 mil-
limètres d'épaisseur, les plaques peuvent èlre
courbées à froid; au-dessus, il faut les chauffer
dans un des fours à gaz dont nous avons parlé tout
à l'heure. Des transporteurs électriques permettent
la manutention facile de ces lèles, sans perte de
temps, soit avant le chauffage, soit après; des com-
binaisons fort ingénieuses et intéressantes de voies
sont installées dans ce but à travers lusine.
Ajoutons que c'est la machine servant à la cour-
bure des tòles qui les vérifie et dresse les conduites
après soudure. Cette machine, à commande élec-
F1G. 2. — LA MACH:NE A SOUDER LES TUBES.
trique directe, comporte quatre cylindres. Le con-
trôle de la pression sur ces cylindres est effectué
au moyen de l’eau comprimée. Le cylindre supé-
rieur peut se soulever à une des extrémités, ce qui
facilite la mise en place et l'enlèvement des con-
duites; la portée dans laquelle tourne cette extré-
mité est disposée dans un logement articulé. Ce
logement est commandé par un engrenage hydrau-
lique, de manière à pouvoir prendre une oscillation
de haut en bas, ce qui donne la possibilité de sou-
lever le cylindre et laisse un passage libre pour
mettre la conduite en position. A l'autre extrémité
du cylindre mobile se trouve un dispositif permet-
tant d'assurer son mouvement de levée. L’extré-
mité du cylindre se continue dans ce but par une
sorte de broche, terminée elle-même par une
partie sphérique, grâce à laquelle le cylindre, en
dépit de son mouvement de bas en haut ou de
haut en bas, demeure toujours pris dans sa portée
extrème. Toutes les opérations se font avec une
grande facilité, grâce à la commande hydraulique
et à une série de leviers que le contremaitre,
directeur de l’opération, a sous la main.
Lorsque le cintrage a été terminé, la conduite,
qui prend déjà forme, est retirée du cylindre; on
la fait glisser dans un chemin à rouleaux qui se
trouve dans le prolongement de la machine à cintrer
et le long mème d’un des fours de chauffage; de
N° 1438
la sorte, elle est transportée automaliquement,
pour ainsi dire, jusqu'à la machine à souder. Après
cette opération, elle sera ramenée par le même
chemin, d’abord au four pour y subir l'opération
du recuit, ensuite à la machine à cintrer, qui ser-
vira à la vérifier et à la rectifier au besoin.
Examinons maintenant une des machines à souder
employées dans ces ateliers. La conduite qui doit
ètre soudée est montée sur des rouleaux, sur un
COSMOS
183
chariot dont l'avancement est assuré à la main;
bien entendu, la hauteur de ce chariot est variable,
on la règle suivant le diamètre des tubes sur les-
quels on veut opérer. De toute manière, l'endroit
de ła soudure est amené à tre de niveau avec ce
qu'on peut appeler l'enclume, montée elle-même
sur un bras équilibré. Ce bras porte un chalumeau
à gaz et peut passer à l'intérieur du tuyau à souder.
A l'extérieur, un second chalumeau peut, à l’aide
F1G. 3. — LE TOUR A GROSSES CONDUITES.
d'un treuil, ètre élevé, abaissé et amené au point
voulu. Quand la température de soudure est
atteinte, on ferme l'arrivée du gaz, on éteint les
deux chalumeaux, le chalumeau extérieur est relevé
pour ne pas embarrasser le passage, et le tuyau
peut être alors ramené en arrière jusqu'à ce que
la portion de métal qui vient d'être chauffée se
trouve en dessous du marteau à souder. Celui-ci
est du type pneumatique à commande par courroie;
il court au-dessus du puits dans lequel le tuyau se
déplace sur son chariot. Quand Ja soudure est
complète, on examine soigneusement les joints,
on les essaye à l'huile. Les tuyaux sont alors
recuits, comme nous le disions, et portés à la
machine à rectifier. Il ne reste plus alors qu’à
former l'élargissement destiné à l’emboitement
des éléments successifs d'une conduite, ou encore
à souder une bride rapportée à l'extrémité de
chaque tuyau, si l'assemblage doit se faire par
brides.
Nous passerons très rapidement sur les tours
qui ont été imaginés par la maison Holroyd pour
cette fabrication spéciale, et qui peuvent travailler
les plus grosses conduites (fig. 3). Ces tours sont
employés particulièrement à dresser les extrémités
des éléments de conduites et à préparer le joint.
Mais il faut ensuite faire l'extension destinée
à l’emboitement dont nous parlions tout à l'heure:
nous donnons un dessin qui rend parfaitement
compte de la disposition adoptée pour assurer cet
184 COSMOS
emboitement. Vu en section, il présente une
double courbe assez compliquée en apparence,
mais dont le ròle est minutieusement étudié. On
peut voir que le tuyau qui pénètre dans un autre
trouve, dans la dernière courbe de la partie élargie,
un point d'appui qui le centre par rapport à cet
autre élément de conduite. De plus, le contact en
ce point des deux éléments empêche l’étoupe
bourrée dans l'emboitement de pouvoir pénétrer
dans la conduite mème. Enfin un logement très
bien étudié est ménagé pour le plomb que l'on
coule et chasse à l’entrée de l’emboitement, afin
d'assurer une élanchéité absolue. Une machine
toute particulière a été étudiée pour la formation
de cette expansion d’un des bouts de la conduite.
L'extrémité du tuyau métallique qui va ainsi être
élargie vient porter et tourner librement sur des
rouleaux, tandis que le bout mème du tuyau
subit l'action de quatre chalumeaux dont la posi-
tion peut ètre modifiée et réglée suivant le diamètre
des tuyaux à traiter. Pendant tout le chauffage,
la conduite est tournée régulièrement de manière
que l’effet caloritique soit uniforme. Et quand la
température voulue est ainsi obtenue, on pousse
brusquement la conduite en contact avec une série
de rouleaux faconneurs, qui donnent la courbe que
nous venons de voir pour l'emboitement. Il y a dans
tout cela un ensemble de dispositions mécaniques
des plus curieuses, sur lesquelles malheureusement
nous ne pouvons insister davantage.
Quand il s'agit de munir les bouts des conduites
de brides, tout se fait à la main. On commence
par chauffer les extrémités de chaque élément de
conduite avec les chalumeaux dont nous avons
parlé, puis on ouvre légèrement, on élargit les
15 AOUT 191%
extrémités de la conduite, et l'on vient y loger une
bride préparée à l’avance et présentant un biseau
à l'extrémité de sa partie horizontale, qui va se
loger dans le bout de la conduite. On chauffe de
nouveau avec un chalumeau et, à l’aide du marteau
mécanique, on termine une solide soudure. Nous
pourrions ajouter que les brides ainsi posées, une
fois la conduite terminée, et lors même que cette
conduite est un élément courbe pour jonction spé-
ciale, sont confiées à une machine automatique,
qui non seulement dresse les faces de ces brides
pour que le joint se fasse dans de bonnes condi-
F1G. b. — COUPE MONTRANT LA JONCTION DE DEUX TUBES.
tions, mais encore perce automatiquement, grâce
à un dispositif diviseur automatique lui-même, les
trous des boulons qui assureront la jonction entre
elles des brides de deux éléments de conduite
voisins.
Après achèvement, les conduites sont soumises
à une épreuve à la presse hydraulique, à une
inspection minutieuse; on les enduit ensuite de
coaltar; on les chauffe finalement, et on passe
à leur surface une composition préservatrice du
système Angus Smith. Quelquefois même on
entoure mécaniquement les éléments de conduite
de torons de chanvre serrés les uns contre les
autres el trempés dans le goudron.
DANIEL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques.
L'évolution des nébuleuses spirales.
Les nébuleuses spirales sont trop nombreuses
pour qu'on puisse y voir une disposilion fortuite
explicable par des causes accidentelles; on est
porté à penser qu'elles sont un stade logique de
l’évolution des mondes.
Le mécanisme de leur formation n'est pas élu-
cidé. Diverses explications en ont été proposées;
sans entrer dans leur détail, il est permis de remar-
quer qu'elles ont recours à l'hypothèse de ren-
contres, collisions, projections éruptives, et qu'elles
ont par là un caractère un peu accidentel qui les
fait rester isolées; elles ne trouvent pas leur place
logique dans les théories cosmogoniques générales,
el c'est là une lacune de ces théories. Comme l'a
fait remarquer I. Poincaré (1), « la forme spirale
se rencontre beaucoup trop souvent pour qu'on
(1) H. PoixcarE, Leçons sur les hypothèses cosmogo-
dtques, priface.
puisse penser qu'elle est due au hasard. On com-
prend combien est incomplète toute théorie cos-
mogonique qui en fait abstraction. Or, aucune
d'elles n'en rend compte d'une manière satisfai-
sante ».
Nous voyons dans le ciel des objets très divers
dont la photographie nous révèle les aspects avec
précision : nébuleuses sans forme définie, nébu-
leuses spirales, nébulcuses annulaires, étoiles nébu-
leuses, étoiles simples ou multiples, amas d'étoiles.
Quel que soit le mode d'évolution des systèmes
cosmiques, on peut penser que des exemples de ses
divers stades sont sous nos yeux dans le ciel, et
qu'il n'y a qu'à rechercher le lien logique qui les
rattache et les fait se déduire les uns des autres.
Toutefois, rien ne prouve qu'un seul et même mode
d'évolution engendre tous les aspects connus, et il
est, au contraire, probable que l'évolution se pour-
No 1438
suit, suivant les cas, daus des sens différents, pro-
duisant chacun une série de formes et d’aspects
caractéristiques.
Peut-on considérer les nébuleuses spirales comme
un stade de l'évolution? S'il en est ainsi, nous
devons trouver dans le ciel des exemples du stade
F1G. 1. — NÉBULEUSE DU SAGITTAIRE.
antérieur, à moins cependant que la nébuleuse
spirale ne soit elle-même l’état inilial, hypothèse
que nous examinerons ultérieurement.
Ce stade antérieur, s'il existe, ne semble pou-
voir être représenté que par les nébuleuses sans
forme définie qu'on pourrait appeler nébuleuses
amorphes. On sait, grâce au spectroscope, que les
nébuleuses amorphes sont composées de gaz raré-
fiés, tandis que les nébuleuses spirales ont un
spectre stellaire dénotant une condensation plus
avancée; on peut donc penser qu'elles sont plus
âgées, plus évoluées que les premières.
La photographie nous montre que les nébuleuses
amorphes comprennent généralement un groupe
de lambeaux séparés et très irréguliers de forme.
Telle est la belle nébuleuse du Sagittaire (fig. 1), où
on peut distinguer au moins cinq masses princi-
pales distinctes, séparées par des sillons vides très
nets; de même la grande nébuleuse d'Orion (fig. 2)
comprenant trois masses séparées; plusieurs autres
nébuleuses dans Orion, présentant un caractère
analogue, notamment celles cataloguées H.V 28,
H.V 30, M. 78; celle du Cygne, qui semble com-
posée de filaments épars; celle de l’Écu de Sobieski,
dont l’aspect déchiqueté est caractéristique; celle
du Sagittaire (M. 17), qu'on a comparée à la lettre
grecque oméga, et bien d'autres. C'est de ces formes
COSMOS
185
que nous allons partir. Qu'on nous permette d'in-
sister sur ce point : nous ne cherchons pas à ima-
giner hypothétiquement à priori un état initial,
comme l'ont fait notamment Laplace et Faye;
nous ne partons ni d’une lentille régulière, ni d’un
ellipsoïde, ni d'un chaos soumis aux lois du hasard ;
nous partons des nébuleuses existantes, connues,
photographiées. Pour fixer les idées, nous prendrons
comme exemple la nébuleuse du Sagittaire (fig. 1).
La déformation apparente de beaucoup de nébu-
leuses qui se présentent obliquement et même tout
à fait par la tranche nous permet de penser qu'elles
sont en général plates comme un disque.
Quel est leur mouvement? Ici nous ne pouvons
nous dispenser de recourir aux hypothèses. Nous
supposons, conformément à la plupart des hypo-
thèses existantes, conformément aussi à l'observa-
tion des systèmes cosmiques les mieux connus,
qu'elles ont un mouvement général de rotation
autour d'un axe perpendiculaire à leur plan, mou-
vement auquel peuvent se superposer des agita-
tions locales.
Rien ne nous permet de penser que ces nébu-
leuses soient le siège de mouvements centripètes
F1G. 2. — LA GRANDE NÉBULEUSE D'ORION.
ou centrifuges importants; nous les supposons sen-
siblement en équilibre; il en résulte que chaque
élément, dans son mouvement moyen de rotation,
doit avoir une vitesse déterminée par la loi de
Newton, de manière que la force centrifuge fasse
équilibre à l'attraction, cette vilesse pouvant, du
186 COSMOS
reste, varier légèrement si la trajectoire n’est pas
parfaitement circulaire.
Tel est notre point de départ. Nous devons faire
remarquer qu'il est beaucoup plus général que
celui de Laplace. La principale différence avec
celui de Laplace consiste en ce que nous suppo-
TEPOS
F1G. 3.
sons des vitesses de rolalion déterminées par la
loi de Newton, tandis que Laplace suppose les
vitesses uniformisées par le frottement, hypothèse
qui nous parait plus particulière que la nôtre.
Laplace admet comme nous que la nébuleuse est
aplatie et tourne autour d'un axe perpendiculaire
à son plan. Enfin, il admet qu'elle présente une
forme de révolution et une forte condensation cen-
trale, tandis que nous ne faisons aucune hypothèse
de ce genre et que nous nous bornons à observer
les diverses formes existantes en réalité.
Quelle évolution va suivre un pareil système?
Chaque lambeau est soumis à deux influences
principales : d’une part, à cause de son attraction
interne et à cause du rayonnement, il se contracte
et se condense en un ou plusieurs globes stellaires;
d'aulre part, les vitesses de rotation de ses divers
éléments peuvent engendrer des déformations,
FIG. 4. — NÉBULEUSE DES CHIENS DE CHASSE.
Deux cas peuvent se présenter, suivant que la
nébuleuse possédera ou non une prépondérance
centrale importante.
Supposons d'abord qu'il y ait une aggloméra-
tion centrale importante, autrement dit que la den-
sité aille, d’une manière générale, en décroissant
15 aour 1949
du centre à la périphérie. Tel est le cas de la nébu-
leuse du Sagittaire, où les parties centrales, visi-
blement plus nourries, sont entourées de lambeaux
de plus en plus ténus. Nous ne supposons pas qu'il
y ait au centire un véritable noyau, mais simple-
ment une densité moyenne plus forte dans les
régions voisines du centre.
Dans ces conditions, d'après
la loi de Newton, les vitesses
de rotation desdivers éléments
de la nébuleuse iront en dé-
croissant du centre à la péri-
phérie, et elles seront d'’au-
tant plus inégales que la
prépondérance centrale sera plus forte. Les lam-
beaux distincts dont se compose la nébuleuse
auront donc tendance à se déformer, la partie la
plus extérieure restant en retard, la partie la plus
voisine du centre tournant plus rapidement et pre-
nant de l'avance. Le lambeau ainsi tiraillé va
s'allonger, s'étirer, s’enrouler en quelque sorte
autour du centre en prenant une forme spiraloïde,
La figure 3 montre la déformation progressive
d'un lambeau soumis à une telle influence, sans
que la distance des divers points au centre varie.
Une masse de forme absolument quelconque prend
peu à peu, par suite de l'allongement, un aspect
spiraloïde plus ou moins net, la forme initiale du
lambeau finissant par disparaitre complètement.
On ne pourrait songer à calculer l'équation de la
spirale que si on savait exprimer par une formule
la loi d'attraction en chaque point. Comme exemple
F1G. 5. — NÉBULEUSE DU TRIANGLE.
schématique simple, on peut prendre le cas parti-
culier, envisagé par Faye, d'un point matériel
central entouré d’une sphère homogène; la loi
d'attraction en fonction du rayon serait de la
forme ar + a En écrivant qu'il y a équilibre entre
N: 1438
l'attraction el la force centrifuge, on trouve qu'une
droite radiale se déforme suivant la famille de
spirales w? r° = constante, Mais, encore une fois,
ce n'est là qu'un exemple schématique qui n’a pas
la prétention de correspondre à la réalité; les spi-
rales n'auront en général pas une équation simple.
Les branches de spirales, en nombre absolument
quelconque, produites par les différents lambeaux
F1G. 6. — CE QUE DEVIENDRA LA NÉBULEUSE DU SAGITTAIRE
de la nébuleuse, s'enroulent sans se croiser, mais
elles peuvent empiéter les unes sur les autres.
Telle est la nébuleuse des Chiens de Chasse (M.51),
la plus belle du ciel (fig. 4); mais toutes n’ont pas
celle netteté. Dans la nébuleuse M. 33 du Triangle,
reproduite figure 5, l enroulement est moins avancé;
on y assiste au commencement de la déformation
des fragments cosmiques.
La figure 6, rapprochée de la figure 4, fait bien
comprendre l'évolution. La figure 1 représente la
nébuleuse du Sagittaire d’après les photographies
actuelles. La figure 6 montre ce que deviendrait
cette nébuleuse suivant notre hypothèse; nous
avons appliqué la déformation résultant de Ja for-
mule précédente. On retrouve d'une façon frap-
pante l'aspect caractéristique des nébuleuses
spirales.
Nous supposons, au début, les nébuleuses for-
mées de fragments séparés, parce que l’observation
nous en montre beaucoup de ce genre. Une seule
masse très déchiquetée ou simplement très allongée
conviendrait aussi. Mais tous les degrés peuvent
exister, et il pourra arriver, comme cas particulier,
COSMOS
187
qu’une nébuleuse soit formée d’une seule masse
relativement régulière, rappelant la lentille de
Laplace; dans ce cas, les rotalions de vitesses
angulaires différentes ne changeront guère l'as-
pect de l’ensemble et il ne se formera pas de
branches spiraloïdes distinctes. Mais cette régula-
rité est rare; on ne peut pas dans une cosmogonie
négliger l’irrégularité, le morcellement des lam-
beaux, car c'est le point de départ et la clé des
aspects futurs.
L'enroulement en spirale continuant, vers quel
aspect évolue la nébuleuse? Les spires se multi-
plient, se resserrent et tendent vers la forme cir-
culaire; elles finissent par se confondre en un
anneau qui parait fermé. La belle nébuleuse d'An-
dromède, représentée immédiatement ci-dessous,
(fig. 7) nous montre de la façon la plus nette ce
stade de l'évolution ; peut-être la nébuleuse
F1G. 7. — LA GRANDE NÉBULEUSE D'ANDROMÉDE.
H. IV 27 de l'Hydre et la nébuleuse H. I 84 de la
Chevelure de Bérénice se rattachent-elles à ce type.
Les anneaux provenant des divers lambeaux
empiéteront souvent les uns sur les autres; ils
seront plus ou moins distincts suivant les condi-
tions initiales.
Voilà donc les ‘anneaux formés sans le secours
de l'hypothèse de Laplace; ils ne sont pas des
188
parties détachées de la lentille à la suite de la con-
traction: ils sont le résultat de la déformation des
lambeaux cosmiques précxistants par suite de l'iné-
galité des vitesses de rotation.
La question ne se pose pas de savoir si les an-
neaux formés les premiers sont ceux de l'extérieur
ou ceux du centre; ils se sont formés ensemble.
Sous le nom d'anneau, nous n'enlendons pas,
au sens de Laplace, une couronne gazeuse, mais
simplement le résultat d'une répartition matérielle
régulière dans toutes les dirertions du plan. res-
semblant plutôt, comme nous allons le voir, à un
collier d'astéroïdes qui finissent par s'affranchir de
toute nébulosité. L’anneau peut n'avoir pas de vide
central; les amas d'étoiles à répartition bien sy mé-
trique peuvent ètre considérés comme des anneaux.
Sous quel état est la matière dans les spirales et
dans les anneaux? En général, elle est déjà con-
densée en astéroides. Aucune nébuleuse spirale
n'est gazeuse; les lambeaux se résolvent dès le
début de leur évolution en trainées de petits astres,
trainees qui se déforment ensuite en spirales par-
semées de points brillants. Cet aspect est des plus
nels dans la nébuleuse M. 33 du Triangle (fig. 5),
dans celle des Chiens de Chasse ‘fig. 4, dans les
nébuleuses M. 74 des Poissons, HV. 44 du Droma-
daire, M. 99 de la Chevelure de Bérénice, M. 10!
de la Grande Ourse,
L'anneau, une fois formé, se compose de tous
ces astéroides, en nombre généralement très grand;
parfois ce sont des corpuscules infimes, une véri-
table poussière d'astres; tel est l'anneau de Saturne.
Les amas d'étoiles à répartition bien symétrique,
comme ceux du Centaure, du Toucan, d'Hercule,
qui paraissent contenir des milliers d’astres, ont
sans doule une origine de ce genre, et il est pro-
bable que c'est la l’état final des nébuleuses spi-
rales, état qui peut subsister un temps presque
indéfini avec tendance à un resserrement central
par suite des chocs, frottements ou marées.
Le mode d'évolution que nous venons d'étudier
n'est pas le scul qui puisse se produire, car il nous
reste à envisager le second cas, celui où la nébu-
leuse n’a pas d'agglomération centrale suffisante
pour différencier notablement les vitesses de rota-
tion des particules d'un lambeau. Celui-ci, qui tend
à se contracter et à se condenser en astres, n'est
pas sollicité à s'étirer en spirale; il reste groupé,
poursuit sen évolution à peu près comme s'il était
seul, el se résout en un système planétaire plus ou
moins complexe. ll peut former une planète unique
ou escorlée de satellites, et même cette planète
peut donner lieu en petit autour d'elle à des phé-
nomènes spiraloiïides secondaires. Le mécanisme
que nous avons decrit s'applique aussi bien à de
petitesagelomérations qu'à d'immenses nthuleuses.
Futre les deux cas que nous avons envisagés se
place un cas intermédiaire, celui d'une néhuleuse
COSMOS
15 aour 1919
où, parmi les différents lambeaux, les uns suivent
l'évolution spiraloïde, les autres l'évolution plané-
taire. Sollicités à se déformer par l’agglomération
centrale, mais aussi tendant à se contracter et à
rester groupés, chez les uns la première tendance
l'emportera, chez les autres la seconde; cela dépen-
dra de leurs dimensions, de leur forme, de leur
densité, de leur distance au centre, de la vitesse
de rotation de l'ensemble, de l'importance de
l'agglomération centrale.
Reprenons maintenant, d’un coup d'eil d'en-
semble, la genèse d’une nébuleuse et son évolution.
La nébuleuse, en l'état initial, ne saurait ètre,
sauf dans des cas très particuliers, la lentille
régulière de l'hypothèse de Laplace; l'observation
nous montre, au contraire, que c’est une masse
irrégulière et fragmentée. Rien n'autorise à sup-
poser qu'elle se régularise et que ses agitations
locales se calment pendant la période gazeuse,
sous l'influence des frottements intérieurs; on peut,
au contraire, calculer que le temps nécessaire pour
que les agitations locales se calment est d'un ordre
de grandeur immensément supérieur au temps
nécessaire pour que la nébuleuse perde sa chaleur
par ravonnement et se condense (f:.
Suivant la répartition initiale, la dimension des
lambeaux, les vitesses de rotation, les lambeaux
produiront soit des planètes escortées ou non de
satellites, soit des spirales engendrant des anneaux
d'astéroïdes ou des amas.
Il pourra mème arriver qu'un lambeau se décom-
pose à la fois en une planète principale et un
anneau.
Nous retrouvons tous ces cas dans le système
solaire. Dans le groupe de Saturne, la partie la
plus centrale a donné un anneau, les autres ont
donné des satellites. Il existe un autre anneau
dans le système solaire : ce sant les petites pla-
netes entre Mars et Jupiter; on en connait 800, il
y en a peut-être plusieurs milliers.
On connait quatre petites planètes, nommées
Achille, Patrocle, Nestor et Hector, qui circulent
à peu près à [a mème distance que Jupiter. Elles
sont si nettement séparées du groupe des autres,
quon peut se demander si elles ne sont pas les
vestiges d'un anneau distinct issu du lambeau de
Jupiter. Mais l'énorme masse de Jupiter ne va-t-elle
pas finir par les capter? Bornons-nous, sans con-
clure, à remarquer que les trois derniers satellites
de Jupiter pourraient peut-être provenir de sem-
blables captations. IHs se distinguent des cinq pre-
miers satellites par des inclinaisons tellement
grandes sur l'équateur de la planète (31°, 30° et
(o D'après H. Poincaré (Hypothèses rosmogoniques,
pe 29), le temps nécessaire pour réduire seulement
de moitié par le frottement les agitations locales,
dans une masse gazeuse grande comme l'orbite de
Neptune, est de 100 sextilions d'années.
N° 1438
446) qu'il est difficile de leur attribuer une origine
commune.
Peut-ètre en est-il de même pour les trois der-
niers satellites de Saturne, qui, eux aussi, se sin-
gularisent par des inclinaisons de 144°, 414° et 148°.
Nous n'’insistons du reste pas autrement sur cette
hypothèse.
Contraction en un système planétaire, ou disper-
sion en un anneau de corpuscules, tels sont donc
les deux grands modes d’évolution bien distincts
du lambeau cosmique primordial, modes d’évolu-
tion qui relient d'une façon satisfaisante la plu-
part des objets observés dans le ciel et peuvent
être considérés comme constiluant une hypothèse
cosmogonique générale. E
Faisons remarquer que notre explication des
spirales n’est ni centrifuge ni centripète; chaque
point reste à une distance sensiblement constante
du centre et il en résulte la possibilité d’un état
d'équilibre qui peut durer un temps trèslong pendant
lequel les spires se multiplient progressivement,
la déformation provenant, non pas des vilesses
absolues de rotation, mais seulement des différences
de ces vitesses. Dans les hypothèses centrifuges ou
centripètes, la forme doit, au contraire, se perdre
rapidement, chaque particule devant soit retomber
au centre, soit s’en éloigner indéfiniment. Or, étant
donné le nombre très considérable des nébuleuses
spirales, il est difficile de supposer une disposition
susceptible d'être rapidement détruite.
Il reste à se demander d'où provient la nébu-
leuse gazeuse morcelée qui nous sert de point de
départ, car on ne voit pas quels sont les objets
connus qu’on pourrait considérer comme un état
antérieur logique de cette nébuleuse. Provient-elle
d'une cause accidentelle, collision stellaire ou
explosion? Les Novæ acquièrent généralement,
après leur période de vif éclat, un spectre nébu-
laire. Ce sont elles, sans doute, qui nous donneront
la solution du problème.
COSMOS
189
La présente théorie des nébuleuses spirales
prête à une objection dont nous n’ignorons pas la
gravité : elle n'explique pas la présence fréquente
de deux branches principales symétriques, donnant
l'idée de deux jets éruptifs diamétralement opposés.
Il est certain qu'un grand nombre de spirales pré-
sentent cette particularité, les unes très nettement,
les autres moins. Mais il y a aussi des cas où il est
impossible de reconnaitre cette forme. Ainsi les
nébuleuses H. I 56 du Lion et H. IV 76 de Céphée
ont chacune au moins quatre branches. Quant aux
nébuleuses M. 66 du Lion, M. 88 de la Chevelure
de Bérénice et M. 63 des Chiens de Chasse, elles
ressemblent plutôt à de fines stratifications spira-
loïdes faisant penser à une chevelure.
Or, rien n'oblige à penser que toutes les nébu-
leuses spirales proviennent d’un mème processus
évolutif. Un certain nombre peuvent provenir de
nébuleuses amorphes fragmentées. D'autres, celles
qui présentent deux branches, peuvent se former
sans être précédées d'un autre stade nébulaire,
soit qu'elles proviennent de phénomènes éruptifs
dans un astre, suivant l hypothèse de M. Puiseux (1),
soit qu'elles résultent d'une collision non centrale
de deux astres, suivant l'hypothèse d’Arrhénius <2).
Il y aurait ainsi différents modes de genèse des
nébuleuses spirales.
Certains objets célestes ne peuvent s’apparenter
à aucun des modes mentionnés ci-dessus, par
exemple, les nébuleuses annulaires à condensation
centrale nulle ou très faible, comme M. 57 de la
Lyre et H. [V 13 du Cygne. Par leur spectre gazeux,
elles se séparent nettement des anneaux d'origine
spirale, et leur formation nécessiterait une autre
explication, que nous n'aborderons pas ici.
Telle qu'elle est, la théorie qui précède nous
parait relier d'une facon satisfaisante, avec un
minimum de part faite à l'hypothèse, la plupart
des formes cosmiques observées.
ALEXANDRE SÉE.
Les chemins de fer français aussitôt après la guerre.
Au moment où la troupe des excursionnistes
d'été s’ébranle déjà pour circuler à grande vitesse,
accomplissant pour des prix modiques des trajets
directs ou peu compliqués, dans des voitures con-
fortables, escortées de wagons-restaurants, il est
intéressant de jeter un coup d'œil en arrière, à
l'intervalle de quarante ans dans le passé, et
d'examiner dans quelles conditions les vieillards
contemporains se déplaçaient au temps de leur
jeunesse sur le réseau français, que la guerre de
4870 venait tout récemment de mutiler. Nous
insisterons peu sur les conditions actuelles connues
de tous : le contraste éclatera tout seul.
Ligne du Nord.
Ont seules des express les voies reliant Paris à
Lille, à Bruxelles, à Calais, plus lartère transver-
sale Lille-Iazcbrouck-Calais, et encore impose-
t-on au voyageur se rendant sur Londres des
arrèts à Creil, Abbeville, Montreuil, Boulogne, sans
parler d'Amiens, où aucun train ne perd moins de
dix à douze minutes. Nul des convois rapides n'a
de troisièmes ni même de secondes classes, sauf
(1) P, Puiseux, les Nébuleuses spirales (Recue scien-
tifique, 6 avril 1912).
(2) S. AnnuËnics, l'Evolution des mondes.
190 COSMOS
ceux se dirigeant vers l'Angleterre. De nos jours,
les trains sur Bruxelles volent d’une traile de
Paris à Saint-Quentin. A cette époque, ils station-
naient à Creil, Compiègne, Noyon et gaspillaient
dix minutes au moins à Tergnier.
Ligne de Est,
Le tronçon Paris-Avricourt, résidu de l'ampula-
tion de la belle ligne de Strasbourg, est sillonné
par quatre trains dans chaque sens qui, négligeant
quelques gares, sont qualifiés d’ « express », et le
moins lent dépense neuf heures pour épuiser les
410 kilomètres qui séparent de Paris la nouvelle
frontière en stoppant quinze fois! Les arrèts, il
convient de le dire, sont assez courts, sauf pour
les trains de jour, qui permettent aux voyageurs
de profiter au repas de l'excellent buffet d'Épernay.
Nous ne parlons pas du Paris-Belfort, réduit à une
voie unique sur la majeure section de son dévelop-
pement. La Compagnie de l'Est, à la suite des
épreuves qu'elle venait de subir, ne pouvait alors
en faire davantage.
Ligne de l'Ouest.
L'Oucst conserve ses heures traditionnelles:
ainsi les trains 11 et {5, dont lilinéraire, depuis
de longues années, n’a pas varié, quittent respecti-
vement la gare Saint-Lazare à 8 heures du matin
et à 6"30" du soir, pour parvenir au Havre, à des-
lination, non sans dix ou douze arrèts et une
attente assez longue à Rouen. Longueur approxi-
mative du trajet : 230 kilomètres.
Un seul express fonctionne et de jour, de Paris
à Cherbourg; il arrive péniblement à esquiver
quelques gares, mais il s'arrċte presque partout
de Mantes à Caen. Durée du trajet : huit heures et
demie pour 310 kilomètres; haltes prolongées à
Serquigny et à Caen.
Longue de 620 kilomètres, la ligne Paris-Brest
est très favorisée jusqu’au Mans, puis passable-
ment desservie jusqu'a Rennes. A la suite d’un
long stationnement dans cette gare, tous les trains,
pour les deux cinquièmes du parcours restant à
accomplir, se ralentissent et deviennent omnibus.
On quitte Paris-Montparnasse à 7"30" du malin;
on perd dix minutes à Chartres, trente à Rennes;
on déjeune au Mans vers midi et l'on soupe à
Saint-Brieuc vers 7 heures. Ce n'est que sur les
minuit, après un trajet de seize heures, que le
voyageur débarque au terminus.
Reseau d'Orléans,
La grande voie Paris-Bordcaux semble bien does-
servie avec bon nombre de convois express ct
directs, et ne prèle le flanc à la critique qu'à
raison des rebroussements d'Orléans et de Tours
dont les inconvénients, bien qu'imparfaitement
15 aoùT 19192
corrigés par les raccords, n'ont pas élé radicale-
ment supprimés à l’heure actuelle. Les arrèts obli-
gatoires se prolongent longuement dans les grandes
gares, sauf pour les express de nuit, mais s'ap-
pliquent aussi à quantité de stations infimes et dé-
pourvues d'embranchement, comme Sainte-Maure,
Luxé, Chalais, Montmoreau, La Roche-Chalais.
Quoi qu’il en soit, Pintervalle Paris-Austerlitz-Bor-
deaux-Saint-Jean se dévore en onze heures si on
part le soir en première classe, et en près de douze
heures si on utilise l’express du matin qui ne
marche pas moins vite en pleine voie, mais qui
stationne à Angoulême pour le souper et débouche
à Bordeaux-Bastide.
Paris-Limoges-Toulouse n'existe pas encore, et
celte ligne, la première du réseau Paris-Orléans
au point de vue du développement kilométrique,
est remplacée par Paris-Limoges-Périgueux-Agen,
dont les 650 kilomètres ne jouissent pas tous, à
beaucoup près, des avantages de la voie double.
Un train, uniquement composé de voilures de pre-
mière classe, quitte Paris tous les soirs, à 745" et
arrive à Agen le lendemain matin, à 40 heures et
demie, ce qui représente une vitesse moyenne de
43 kilomètres par heure, permettant au voyageur
d'admirer, de jour, bien à loisir, les jolis sites qui
s'offrent au midi de Périgueux.
Les 400 kilomètres de la ligne de Paris à Nantes
vid Chartres, Le Mans el Angers se divisent entre
l'Ouest et l'Orléans. Trajet se prolongeant, suivant
les trains, de huit heures et demie à neuf heures.
Réseau du Midi.
C'estle plus petit des six réseaux principaux; iln'a
ras eu directement à souffrir de la guerre comme
les autres lignes que nous avons énumérées, mais
il ne se présente pas à cette époque sous un jour
bien brillant. L’embarcadère de Bordeaux-Saint-
Jean, tète de ligne, se réduisait en 1872 à une
hideuse baraque en bois de laquelle s'échappaient
quotidiennement trois trains à destination de
Cette. Le premier, partant à 630™ du matin,
arrivait à destinalion en pleine nuit après arrèt à
toutes les gares de la ligne, moins cinq ou six.
L'express, moins matinal, mais réservé aux pre-
mières classes, s'ébranlait à 8"15", dépassait, il est
vrai, l'omnibus près d'Agen, mais ne conservaitune
allure un peu prompte que jusqu’à Narbonne; après
quoi il stationnait partout (trajet total: sept heures
quinze minutes). Un voyageur trop peu dégourdi
pour profiter du premier train, trop pauvre pour
adopter le second, devait passer toute la journée à
Bordeaux et attendre jusqu'à 9 heures du soir un
train direct aux trois classes qui, grâce à sa faible
vitesse, à ses stationnements nombreux et pro-
longés, n’arrivait pas à Cette avant 920" du matin.
Pas même 40 kilomètres par heure!
De Bordeaux à Bayonne et Irun circule un seul
No 1438
express, spécial aux premières classes et en cor-
respondance avec le train Paris-Bordeaux. Il
franchit les 200 kilomètres Bordeaux-Bayonne en
échange de quatre heures de trajet de 8 heures du
matin à 42:30", retardé, il est vrai, par le déjeuner
à Morcenx, dont le train de retour n'a pas à se
préoccuper. Une bonne partie de la ligne se réduit
à une voie unique, mais ce n’est pas l'encombrement
des convois qui gène la circulation, car beaucoup
de gares des Landes ne sont desservies que par
deux trains journaliers dans chaque sens et les
plus favorisées par trois.
La grande ligne Toulouse-Bayonne ne comporte
aucun train direct. Onze bonnes heures sont néces-
saires pour venir à bout du trajet; on a le temps
d'étudier bien à l'aise les étançonnages du légen-
daire tunnel de Sarrouilles, d'admirer la raideur
16" fe Pris
1 À
4
loè,
+ Modene
t 1n des fosse
 S Gerr nan des o A- e Ans
7,40 se Paris
Lyon
F1G. 1. — LIGNES DESSERVIES PAR DES TRAINS EXPRESS
EN 1822.
de la rampe de Capvern, de contempler les humbles
cabanes en bois qui servent de haltes, ou les
embarcadères provisoires en planches qui des-
servent les villes de Tarbes, Lourdes, Pau, de
noter labsence de buffet dans les stalions impor-
tantes de Puyoò et Bayonne. Heureusement que
si le voyageur n’est pas trop pressé, l’agrément du
paysage, pendant la belle saison du moins, le con-
sole un peu du temps gaspillé.
Réseau du P.-L.-M.
Le rapide Paris-Marseille, créé sous l’Empire,
d'abord dans le sens descendant seulement, puis
ultérieurement dans le sens montant, n'existe plus
depuis la guerre. Le trajet intégral, en express,
absorbe de dix-neuf à vingt heures, et, en direct,
pour ceux qui n’ont pas les moyens de s'offrir les
premières, consomme vingl-qualre heures précises.
COSMOS
191
Aujourd'hui, les convois les plus pratiques bon-
dissent d'une seule traleine de Paris à Laroche et
de Laroche à Dijon. À cette époque, le train 1
(14 heures du matin de Paris) et le train 5
-o
c
l
je
La Possonierg. k Tours
p ngers,
v. SfMzaire TNantes ii
dCholet.
..bPressuire
“La Roche sur lon
\
Les Sok 5 \ n
i Poitiers®
à
1 Nior
l; grehui /le
La Rochelle |
J Rochefort
Q
N
vezn
Ve
A Angoulême s
-~ Bordeaux
Réseau P.O
en 1872
Lignes principales
Lignes secondaires
Réseau des Charentes - — - — — —-—
Réseau de ha Vendée ......... abat
F1G. 2. — L'EMBRYON DU RÉSEAU ACTUEL DE L'ÉTAT EN 1872.
(8 heures du soir) stoppaient à Melun, Montereau,
Sens, Joigny, Tonnerre, Nuits ou Montbard, Dar-
cey, Blaisy-Bas. La gare de Tonnerre jouissait
alors d’une grande importance; son dépôt de ma-
chines, bâtiment à demi ruiné qu'on distingue
encore au passage, fonctionnait avec activité pour
le relayage des locomotives d'express: et, pour ne
parier que des trains impairs. les convois directs
25 et 27 y stationnaient pour ies repas du maltin
et du soir.
« Lyon-Perrache! trente minutes d'arrèt! »
Telle était la durée minimum de la halte imposée
aux voyageurs allant vers le Midi ou remontaut
vers le Nord. Elle semblerait interminable aujour-
d'hui. Mais, à cette perte de temps dont l'utilité
après tout se concevait, venait s'ajouter, au mo-
ment d'entrer en gare, un petit arrèt pour le con-
trole des billets, arrèl qui se répélait à Marseille
192 COSMOS
el au retour, pour les trains pairs avant l'arrivée
à Paris. Mais ce n'était pas suffisant pour calmer
l'ardeur du voyageur qui se voyait si près du but.
On ralentissait à 20 kilometres à l'heure aux
approches de Perrache (côté Sud), de Nimes vers
Tarascon, des gares terminus de Paris et Marseille.
A une époque où les trams à chevaux ou, pour
mieux dire, les omnibus ne circulaient guère dans
les grandes villes au delà des limites des octrois,
les habitants de ces villes devaient prendre le
chemin de fer pour passer le dimanche en ban- .
lieue. Au départ, tout allait bien; mais, au retour,
le dimanche soir, quand nos citadins se voyaient
immobilisés à quelques centaines de mètres de
leur point d'arrivée, sans pouvoir quitter le train,
quelles tempêtes de récriminations! Parmi les plus
ardents se signalaient ceux dont le domicile se
trouvait précisément en face des points de ralentis-
sement et de controle, en avant des gares terminus.
Pendant les années qui suivirent la guerre,
l'encombrement des voies ferrées fut tel (1) qu'on
pensa renoncer au système des réseaux régionaux
et rationnels pour essayer du système anglo-amé-
ricain de la concurrence illimitée. Les journaux de
l'époque et les archives parlementaires nous ont
conservé le souvenir de la demande en concession
d'une ligne de Calais à Marseille, par Paris et
Lyon, indépendante du Nord et du P.-L.-M.; elle
côtoyait l’ancien tracé dont elle ne s’écartait sensi-
blement que pour s'intléchir vers le Morvan en
négligeant Dijon. |
La future Compagnie promettait monts et mer-
veilles: voyages rapides dans des wagons ultra-
confortables, à des tarifs inouis de bon marché.
Cet argument ne toucha pas les membres de
l’Assemblée nationale chargés du rapport, et, de
fait, les amélirations invoquées ont été peu à peu
réalisées dans la suite, grâce au matériel en usage
aujourd’hui, grâce aux voies de dérivation et grâce
enfin à l'abaissement des anciens tarifs, sans
rompre pour cela avec les anciens errements en
matière de chemin de fer.
15 AOUT 1919
Il faut dire qu'au lendemain de nos désastres,
les transports à grande vitesse, grevés d'impôts,
cotitaient fort cher. On dépensait pour se rendre
de Paris à Marseille, chiffres ronds, 106 francs,
80 francs, 56 francs au lieu de 95, 65 et 42 francs,
taux actuels. Les billets d’aller et retour existaient
bien, mais avec une durée de validité très réduite,
une extension très limitée, contrariée encore par
une fréquente absence de réciprocité. Il est juste
d'ajouter que le taux de réduction, loin de s'uni-
formiser comme aujourd'hui, variait suivant les
zones et finissait par avantager beaucoup le public
dans cerlains cas spéciaux. Ainsi, au nord de
Montpellier, les jours de marché et à certaines
heures, il n’en cottait pas plus cher de prendre
un aller-retour pour la ville qu'un billet simple
ordinaire!
Le livret Chaix, dans lequel nous avons puisé la
meilleure partie des renseignements ci-dessus,
complétés par nos souvenirs personnels, énumère,
à la suite de l'Orléans et du Midi, deux bien mo-
destes embryons de réseaux : l’un, celui des Cha-
rentes, se réduit à trois lignes, dont deux non
soudées entre elles : La Roche-sur-Yon à La Ro-
chelle, Rochefort à \ngoulème avec embranche-
ment de Saintes à Montendre; l'autre, celui de la
Vendée, relie Bressuire aux Sables par La Roche-
sur-Yon. Ces petits tronçons, un peu développés, à
la vérité, plus tard, servirent d'amorce à ce gigan-
tesque réseau actuel de l'État qui, de Bordeaux à
Rouen, englobe à ce jour une grosse fraction de
nos voies ferrées nationales. L'infime rameau est
devenu un tronc immense à branches multiples,
et comme Îles grands effets proviennent souvent
des petiles causes, l’origine première de cette puis-
sante organisation se rattache à un défaut d'en-
tente concernant la base de rachat de quelques
titres dépréciés. A chacun, suivant ses opinions
économiques, d'en tirer les conclusions qu'il lui
plaira.
ANTOINE DE SAPORTA.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 5 août 1912.
PRÉSIDENCE DE M. F. GUYON.
Sur Fapplication de énergie lumineuse à
l'étude de quelques questions de l’analvse
chimique.— Les expériences faites par de nombreux
savants, au cours de ces dernières années, ont montré
que la lumiċre ultra-violette est capable de produire
la transformation profonde des différents corps chi-
il) Notamment «ur la ligne de Tarascon à Cette, à
ta suite d’une magnifrque récolte de vins en Lan-
guedoc.
miques. M. Marc Laxnavu a pensé qu'il serait important
de chercher si l’action chimique des rayons ultra-vio-
lets ne pouvait être appliquée à l'analyse chimique.
Deux propriétés connues de la lumière paraissent être
utilisables à ce point de vue: l'effet polymérisant et
l'action oxydante.
On sait que l'énergie lumineuse transforme les car-
bures d'hydrogène non saturés, comme l'éthylène et
l'acétylène, en polymères liquides et solides dont la
nature chimique exacte n’a pu ètre établie.
D'autre part, l'énergie lumineuse étant capable de
transformer, en présence d'oxygène, un corps conte-
nant le carbone et l'hydrogène en anhydride carbo-
uique et en eau, peut ċtre appliquée à l'analyse chi-
N° 1438
mique, du moins quelquefois, de la mème manière
que l’énergie de la chaleur est employée dans l'ana-
lyse organique ordinaire, et l'énergie de l'étincelle
électrique dans l'analyse eudiométrique.
Partant de ces considérations, M. Marc Landau a
institué une série d'expériences qui lont conduit aux
conclusions suivantes :
La lumière ultra-violette peut ètre appliquée à l'étude
de l'analyse chimique. On peut analyser, par exemple,
un mélange de CH‘, CH, H? sans employer une
autre forme d'énergie que celle des rayons ultra-vio-
lets: on commence par la photopolymérisation du
carbure non saturé, l’action de la lumière sur les
autres gaz étant nulle en l'absence d'oxygène. Cette
réaction très lente terminée, on mesure la contraction
de volume, on ajoute de l’oxygène et l'on procède à la
photocombustion. Il est curieux que la combustion
par l’étincelle ne peut pas résoudre ce cas fréquent de
l'analyse des gaz, le mélange C'H‘ + II? étant iso-
mère avec CH". L'auteur poursuit ces recherches et il
étudie actuellement, avec M. Victor Henri, les spectres
d'absorption des carbures d'hydrogène dans l'ultra-
violet. M. Landau a constaté que ces gaz, contraire-
ment à l’oxyde de carbone et à l'anhydride carbo-
nique, absorbent fortement les radiations ultra-vio-
lettes.
Le mode de formation du pigment dans la
racine de la carotte. — On sait, depuis les re-
cherches de W. Schimper, A. Meyer et Courchet
que les pigments rouges (carotine) ou jaune (xantho-
phylle) qui se forment dans les fleurs, les fruits et
certaines racines sont toujours le produit de l'activité
d'organites désignés sous le nom de chromoplastes.
Ces chromoplastes ont, comme origines, soit un leuco-
plaste qui élabore directement à son intérieur le
pigment, soit le plus souvent un chloroplaste dont la
chlorophylle se résorbe peu à peu et se trouve rem-
placée par de la carotine ou de la xanthophylle.
M. Guicuieamonxv s’est livré à des recherches sur le
pigment de la racine de la carotte: il est arrivé à
reconnaitre qu’il s’élabore en deux phases successives.
1° Dans une premitre, les mitochondries se ditié-
renvient en leucoplastes, qui élaborent chacun aux
dépens de leur substance un grain d'amidon composé:
2 Dans une seconde phase, la partie subsistante
de leuconlaste se régénère et forme bientôt en son
intérieur un élément pigmenté à forme plus ou moins
nettement cristalline, pendant que les grains d'amidon
composés se résorbent. Puis, plus tard, le chromo-
plaste semble disparaitre à peu près intégralement.
COSMOS
193
Quelques déterminations quantitatives du
manganèse dans le règne végétal, — Les
études de MM. F. Japin et A. Astruc les ont amenés
à conclure :
4° La présence du manganèse est constante dans le
règne végétal;
> La teneur en manganèse des aliments d'origine
végétale sert à expliquer, tout au moins en partie,
l'origine de ce corps dans l'organisine animal;
3’ La comparaison des quantités de manganèse con-
tenues dans les parties aériennes et souterraines d'un
mème végétal paraît montrer que les organes chloro-
phylliens sont les plus riches;
& Dans une même plante riche en chlorophylle,
comme le gui, la teneur en manganèse varie cepen-
dant dans des proportions notables.
Un nouveau genre de palmiers de Mada-
gascar. — Le nombre des espèces de palmiers mal-
gaches est assez grand, mais celui des genres est
relativement restreint. MM. H. Jiweke et H. PERRIER
DE LA Baruie en signalent un nouveau, auquel les
indigènes donnent le nom do lakamarefo et qu'ils
proposent d'appeler Louvelia madagyaseariensis. On le
trouve dans la forèt vers 800 mètres d'altitude. Son
bois est très dur et d'un brun noirätre uniforme.
Préparation des quatre dicyclohexylpropanes. Note
de MM. Pauk Sauatien et M. McnaT. — Sur les courbes
invariantes par une transformation réciproque, ponc-
tuelle ou par contact, mémoire de M. ParLz Sucnan. —
Réalisation du mouvement circulaire uniforme par
action périodique synchronisante. Note de M. À. Gur.LET.
— Sur les changements qu’éprouvent les tourbillons
cellulaires lorsque la température s'élève. Note de
M. C. Daczëre. — À propos de la note de M. P.-T. Muller
et M'° V. Guerdjikoit « Sur la réfraction et la rotation
magnétique des mélanges ». Note de M. F. SCHWER.
— Photolyse des sucres à fonction cétonique par la
lumicre solaire et par la lumicre ultra-violette. Note
de MM. Daxtez BEuTuELor et HENuY GAUDECHON. — La
présure du latex de Calotropis procera RBr. Ncte
de MM. C. Gerrek et P. FErocrexss. — Excitabilité des
organismes par les rayons ultra-violets. Temps de
latence. Loi de l'indépendance thermique. Phénomenes
de fatigue et de réparation. Note de Mme et M. VICTOR
Hexu. — Etude sur la coagulation de l'albumine par
la chaleur et sur sa précipitation par l'iodomercurate
de potassium. Conséquences au point de vue de son
dosage pondéral et de son dosage voluimétrique. Note
de M. LUCIEN VALLERY.
BIBLIOGRAPHIE
La genèse des instincts, par M. P. Hacuer-
SouPLET, directeur de l’Institut de Psychologie
zoologique. Un vol. in-18 de 324 pages (3,50 fr).
(Bibliothèque de Philosophie scientifique.)
Flammarion, 26, rue Racine, Paris.
La théorie en faveur chez les maitres ou les dis-
ciples de l'Ecole purement expérimentale est que
— la formule est de M. Ribot — « l'instinct est
une somme d'habitudes héréditaires ». Mais pour
ètre rendue acceptable, cette hypothèse doit ètre
vérifiée. C'est à cette vériticalion que ece volume
est consacré. M. Hachet-Souplet croit avoir tronvé,
à travers les expériences de l'Institut de Psy“ho-
logie zoologique, la loi qui préside à la genèse dv
l'instinct : ce serait la doi de recitrrence assor«t-
19% COSMOS
fire en verlu de laquelle, par exemple, « dans les
exhibitions d'animaux dressés, un sujet A devant
« travailler » après un sujet B, finit par ne plus
attendre l’ordre du maitre et descend de son esca-
beau, dès que B a terminé son « travail ». On ne
saurait contester l’existence de celle loi dans le
dressage et dans quantités d’habitudes des ani-
maux. Mais peut-on conclure des habitudes à l'ins-
tinct ? Non, si l'on veut appliquer une rigoureuse
logique qui ne permet de conclure que du même
au même. Et si lon assimile, à l'avance, habitudes
et instinct, on suppose la solulion qu'il s'agit de
prouver.
Au fond, le grand argument qui nous semble
ètre à la base de tous les autres, dans ce livre,
c'est celui de l'évolution, dont M. Hachet-Souplet
est un adeple convaincu. Et son explicalion est
apportée pour éliminer, avec d’autres théories,
lilée d’une intervention créatrice de Dieu, car
l'auteur n'admet qu'une « création naturelle ».
La philosophie de M. Henri Bergson, par
M. RENÉ GizLouix. Un vol. in-16 de 194 pages
(3,90 fr). Bernard Grasset, éditeur, 61, rue des
Saints-Pères, Paris.
La méthode de M. Bergson, les résultats obtenus
par l'application de ce procédé sur le triple terrain
de la liberté, des rapports de l'âme avec le corps
et de la vie, ce que lon peut augurer de celle
méthode et de ces solutions pour les problèmes
ultérieurs de l'esthétique et de Ia morale, tels sont
les points principaux abordés par M. Gillouin dans
son étude. Celle-ci est inspirée par une admiration
profonde pour M. Bergson, qu'il n'hésite pas à
placer parmi « les très grands philosophes de tous
les pays et de tous les temps. »
Lelte formule apparaitra bien exagérée à qui-
conque voudra se livrer à une critique faite de
calme et d'impartialité. La méthode de M. Bergson,
appuyée sur l'instinct, qu'il place au-dessus de
l'intelligence, indüment détrônée de sa supériorité
sur l'instinct, n'est pas encore près de supplanter
la vicille logique. D'antre part, la conception qui
est l'idée fondamentale de la doctrine bergso-
nienne, celle de l'universalité de la vie, n’est
qu'une hypothèse non vérifiée et contre laquelle
se dressent bien des objections. C'est une hypothèse
semblable à celle de l'universalité de la douleur
dans Bouddha ou de la volonté dans Schopenhauer.
Combien plus belle et plus conforme à la vérité
des faits la synthèse catholique, si souvent exposée
par les philosophes chrétiens, nous montrant Dieu,
unique source de vie et d'ètre, les répandant en
degrés successifs depuis l'ange et l'âme humaines,
jusqu'au minéral inorganique, en passant par
Panimal et la plante!
Dieu, l’âme immortelle et la religion natu-
relle, par Me" ALseRT Faroes. Un vol. in-8° de
15 aour 1912
272 pages (3 fr). Berche et Tralin, éditeurs,
69, rue de Rennes, Paris.
Le public instruit connait le grand ouvrage que,
sous le nom d'Études philosophiques, Më Farges
a publié en neuf volumes, dont plusieurs ont été,
ici mème, l’objet de comptes rendus élogienx,
comme il convenait. L'auteur de celte apologt-
tique a eu la bonne pensée de résumer dans un
volume de petites dimensions les parties les plus
importantes de son travail : Dieu, l'âme immor-
telle et la religion naturelle. Ge résumé constitue
un traité solide, dont un juge autorisé et des plus
compétents, M8f Douai, évèque de Beauvais, a fait
un éloge auquel il serait messéant de rien ajouter.
Géométrie rationnelle. 7raité élémentaire de
la science de l'espace, par GE0RGE Bruce HALSTEL.
Traduction française par PauL BARBARIN, agrégé
de l'Université, professeur au lycée Henri IV,
avec une préface de C.-A. Laisant. In-8° (23 N 14)
de 1v-29 pages, aves 184 figures (broché, 6,50 fr;
cartonné, 7,50 fr). Gauthier-Villars, Paris, 1911.
M. Halsted s'est altaché à propager les vues de
Hilbert, de manière à les rendre facilement saisis-
sables et à leur donner une forme pour ainsi dire
élémentaire. Abandonnant résolument l'exposé
classique de la géométrie, il met en évidence « Îles
axiomes qui sont nécessaires et suffisants pour
é lifer cette science sur une base solide ».
Par exemple, il expose la théorie des proportions
sans employer aucun axiome de continuité. I
écarte le compas comme instrument de résolution
des problèmes. Toutes les mesures de volume se
déduisent de la formule à deux termes du prisma-
toide. Parvenu à la « sphérique pure », il montre
qu'une grande partie de la géométrie plane est
valable en tant que géométrie sphérique, si l'on
remplace le plan et la droite par la surface de la
sphère et par la ligne géodésique ou recte. Crtte
sphérique pure se déduit d'une suite d'axiomes
d'où sont exclues les parallèles et les figures sem-
blables; on obtient ainsi une géométrie non eucli-
dienne à deux dimensions, dont les résultats font
d'ailleurs partie de la géométrie euclidienne à trois
dimensions.
Précis d’agriculture. Agriculture théorique et
pratique. Chimie et comptabilité agricoles, par
A. PETIT, ingénieur agronome, professeur à
l'École nationale d'horticulture de Versailles,
chef du Laboratoire des recherches horticoles.
Un vol. in-18, avec 256 figures dans le texte
(3 francs). Librairie Alcan, 108, boulevard Saint-
Germain, Paris.
L'agriculteur qui veut tirer de son exploitation
le maximum de rendement doil se tenir au cou-
rant des investigations méthodiques et des re-
cherches scientifiques.
No 1138
En consultant ce précis, le petit propriélaire,
l'agriculteur y trouveront ce qu'ils ne peuvent ni
ne doivent ignorer.
L'ouvrage est divisé en quatre parties : la pre-
mière traite de l’agriculture générale : le sol (sa
constitution, son amélioration par l’aménagement
des eaux, les engrais, elc.), les phénomènes météo-
rologiques.
Viennent ensuite les cultures spéciales, la viti-
culture, la cidrerie, la sylviculture, l’arboriculture.
Dans unce troisième partie sont étudiés le petit
et le gros bétail, les animaux de basse-cour, l'api-
culture, la sériciculture, la législation concernant
les animaux domestiques.
L'ouvrage se termine par des aperçus écono-
miques sur les lois, Sociétés de crédits, et une
comptabilité agricole.
Sur la route, par le D" Bommier. Un vol. in-8° de
270 pages, avec gravures {de la Bibliothèque du
chauffeur). Relié cuir souple (6 francs). Librairie
Dunod et Pinat, Paris, 1912.
Le D" Bommier n'est certes pas un inconnu pour
les lecteurs qui s'occupent d'automobilisme; un de
ses ouvrages antérieurs, le Bréviaire du chauf-
feur, a obtenu un très légitime succès.
Ce nouvel ouvrage est particulièrement pralique,
il a pour but d'enseigner aux automobilistes l'art
de bien conduire. Très complet et clairement écrit,
il rendra de réels services aux nouveaux venus à
la locomotion nouvelle; il peut apprendre aussi
pas mal de choses aux vieux routiers, qui auront
souvent profit à le consulter.
Nous avons eu plaisir à voir que l’auteur s'élève
contre la mode actuelle de l'avance fixe de Yallu-
mage, mème avec les magnélos. [l réclame l'avance
variable commandée ou automatique. Les con-
structeurs finiront-ils par se plier à ce désir,
absolument légitime ?
Ajoutons que le livre se termine par la repro-
duction des textes en vigueur, lois, ordonnances,
règlements de police, qui sont ignorés, des chauf-
feurs parfois, plus souvent encore des agents de la
force publique, chargés de leur exécution. Munis
de cet ouvrage, les automobilistes pourront ré-
soudre tous les problèmes qui pourraient se poser
à eux sur la roule.
Études techniques sur l'aviation (2 vol.)
(3,50 fr). Librairie des Sciences aéronautiques,
48, rue des Ecoles, Paris.
Cet ouvrage se compose des fascicules d'avril à
décembre 1910 de la revue Avia. On y trouve un
grand nombre d'articles techniques sur l'aviation,
dont voici quelques titres : Équilibres des aéro-
planes. Essais d’hélices. Deuxième concours de
COSMOS 195
moteurs d'aviation. La théorie de l'aviation. Vol
des oiseaux planeurs. Turbines à gaz, ete.
Vol de l’aéroplane en hauteur, par le Ct FAaRatD.
Une brochure in-8° avec figures (41 fr). Librairie
Vivien, 48, rue des Ecoles, Paris.
Détermination par le calcul des conditions neces-
saires pour qu'un aéroplane se soulève, prenne
une trajectoire ascendante; cas dans lesquels
l'aéroplane glisse sur l'air et se renverse (on dit
que l’appareil se cabre ou pique du nez); action du
gouvernail, etc. Ces calculs et les formules qui en
résultent ont été établis pour les appareils existant
en 1911.
Les épreuves au bichromate par teinture
directe, par le D' H. TnénaurT. Une brochure
de la Bibliothèque de Photo-Revue (0,60 fr).
Charles Mendel, éditeur, Paris.
La plupart des épreuves photographiques sur
papier peuvent se colorer en une infinilé de
nuances par des bains de teinture. Cette méthode
est particulièrement pratique pour les papiers au
sel de chrome qui, sans cet artitice, donnent des
épreuves beaucoup trop faibles.
L'auteur a rassemblé en une brochure tous les
documents relatifs à l'obtention d'épreuves au
bichromate par teinture directe; il y a ajouté ses
observations personnelles et l'indication des ré-
sultats qu’on est en droit d'attendre de ce procédé.
Ce petit livre est un guide irès complet, qui per-
mettra à tout amateur de réussir ce mode de
tirage, qui a pour lui une grande simplicité dans
les moyens, sans compter qu'il fournit des images
pratiquement inaltérables dont le caractère arlis-
tique est indéniable.
A l'étape, par PAuL-ApRIEN ScHAYÉ. Un vol. in-16
de 320 pages (3,50 fr). Librairie Omnia, 20, rue
Duret, Paris.
A l'étape, est un recueil de petits rérils se rap-
portant tous à l'’automobilisme. L'auteur avait
déjà donné précédemment : Un four de manivelle
et l'on part qui a obtenu un vif succès. On retrou-
vera dans ce nouveau volume le talent fantaisiste
et la philosophie spirituelle et parfois un peu inat-
tendue de M. Schayé.
Le photocycliste, par G. Laxuuesr. Un vol. de
78 pages (4 fr). Au journal le Hone, i, rue
Hégésippe Moreau, Paris.
Ce traité pratique et élémentaire de l'amateur
photographe en voyage comporte beaucoup de bons
conseils, soit pour le cycliste qui veut rapporter
des souvenirs des pays visités au cours de ses pro-
menades, soit pour le photographe en voyage qui
doit opérer avec des moyens très restreints.
196
COSMOS
45 aouT 1912
FORMULAIRE
Dostruction des herbes aquatiques par le
chlore électrolytique. — Hans les industries du
blanchiment, on produit sur place le chlore et les
hypochlorites en électrolÿsant une solution de sel
marin, Une intéressante applicalion industrielle
de ces produits d'électrolyse vient d'être faite en
Angleterre qui mérite d'être signalée, car bien des
industriels pourront en tirer parti (/adustrie
electrique, 20 jpuillet).
Une usine d'apprétage el de teinture désirait
utiliser un cours d'eau du voisinage, mais Îles
herbes el les algues aquatiques rendaient l'eau
impropre À la consommation. On essaya tout
d'abord de Ta filtrer au travers de grilles, mais les
végélaltions sv aceumulérent à (el point qu'il fallait
dégager les barreaux toutes les demi-heures. De
Fhypochlorite de chaux ajouté à l'eau fit quelque
temps disparaitre les végeélations, mais il durcissail
l'eau et donnait Heu à des dépôts dans les chau-
dicres. Le sullate de cuivre essavé ensuite agissail
sur la teinture, en sorte qu'il fallut chercher dans
une autre Voie.
Cest alors qu'on recourut au chlore et à lhypo-
chlorite de sodium électrolvtiques. En avant du
réservoir de l'usine, par-dessus le ruisseau, on a
placé un tonneau. formant réservoir, qui contient
une solution de chlorure de sodium à 4 pour 400:
par l'intermédiaire d'un bac à niveau constant, il
déverse la solution dans un récipient électrolyseur,
parcouru par un courant électrique continu de
8 ampères sous 410 volts. La solution électrolysée,
riche en chlore et en hypochlorite de sodium,
s écoule alors dans le ruisseau (débit, un litre par
minute; chlore actif, 3 gramines par litre).
Le résultat fut merveilleux. La réaction sur les
matières organiques se faisant dans le réservoir,
en quelques jours les algues vertes et les autres
végétations disparurent. En réglant le débit de la
solution d'hypochlorite, on put faire en sorte que
l'eau du réservoir, claire et limpide, ne contint ni
azote ni chlore: elle était assimilable à de leau de
source. En hiver, on voulut arrèter l'installation,
mais les algues et leurs ennuis reparurent aussitot.
Ce procédé parait très efficace pour combattre,
s'il est bien appliqué, les végétations des eaux sla-
guantes. Une installation vient d'ètre faite dans
une piscine de Londres, où il a donné d'excellents
résultats.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appreils décrits :
Pour les conduites en acier soude, s'adresser à The
Brush Welding Company, 9N, Victoria Street, West-
munmster, Londres, S. W.
decumulateur Gotan: Société frangaise des arcu-
mulateurs Panl Gouin, rue Bellevue, à Colombes
(St)
Anonyme., — Vous trouverez des bobines d'accord
toutes faites à la maison Dacretel, Th, rue Claude
Bernard: mais td serait plus économique pour vous
de les construire. D Suit en ettet, d'enrouler sur un
Molecau de bots une lingueur de 106 à {6 metres de
nl de euwe en Isele x dJe lathle dit tre ipar exemple.
Daa to ww de diametro, Oa denude les tils de metal
Sug nne pelite partie dé ia surface suivant une genc-
fant courir un curseur
le plus
tort o- Pour les cristaux de suture de plomb on ne
ratnice du evlimdre, et on v
molite Jusqu'au momint ou le son simile
peul savot ce aprilis vatent poren les essavant. Hs
K
sonf en on to de valenr variables Poor faire J'eseai.
1. sie 3 RAT x | ` ` n -
voest ouaa ar osor Jes enne elles d une sS-hheric
vepren melen marche et dont on entend les
ON rie on-
UE EREE
HR Re te Lee
` t, senada \ LL ts € ui tir t d' asie.
Lac anatia ons emolu dies maavais. et en piut
1 . 1 i: Ciana À yo US
ui t Si TOETEREN Pries decha pi stal.
i ss No Site MEUNIER ut 6
Nice A DRE RQ gete adst M LS Vs
Avea ea O eu G autres etades, Leros ies jen
Vos M e À vs + + ? t teese V a es ao * \ > S
3 Ş $ 4 Na À = a OU a ai à AR NE RE se € M L. Git-
\ - . i + ., -y -e + CC ` - an `
T o el a TO IFN SENS AC ape OR ES rats.
Librairie Alcan. Cet ouvrage a čte analysé dans le
Cosmos, ne 1402.
M. A. R.. à C. — Pour combattre la transpiration
des mains, Il faut les frotter quelques instants, trois
ou quatre fois par Jour, avec le melange suivant:
Acide salicvhique..... ane, 1ò grammes.
E h ae miseteues zi 19 —
Achile DOFUS LES ess ou D —
AIO ee as enr 30 —
Mais la disparition de cette transpiration peut avoir
pärlois de mauvais resultats au point de vue de letat
general.
A. R. S., Lima. — Bien que nous n'avons pas une
competence speciale en ces matières, nous erovons
que Vous trouverez ce que vous désirez à la maison Sal-
landrourefreres, 2L, rueCroix-edes-Petits-Champs, Paris.
M. E Q. à PE. — Nous avouons notre ignorance
sur ee punt, Cependant, à notre avis, ces voitures à
trors roues doivent étre consilérées comme de veri-
tables voitures automobiles, èt. par consequent, paver
les imipòts coimime telles, et nn comme des moto-
eveles, H faudrait vous renseigner aupres de lingė-
nieur des munes de votre arrondissement mineraio-
coque. — Pour le permis de condaire, les tormalites
acontes me mes, gual saaztsse d'une vorture ou d'un
Le Mde. Vous troavere, notre de renseignements
syatrs de vas itteresset dansle Cu 7e du han eur,
Se fre, Librairie Dans d et Pinat, Pans.
EE
Ixprzer.e F. Fsacs Vaat. Set $ mee Bayar, Paris, Vie.
Le persa: . B. Psrireisss.
var J. Iyosrg.
No 1439 — 99 aouT 1912 COSMOS 197
SOMMAIRE
Tour du monde. — Les héros de la météorologie. Importance de la phagocytose dans l'immunité de la
souris. Le chauffage électrique en Suède et en Norvège. Capacité de trafic d’un chemin de fer électrique
urbain. Destruction électrolytique des tarets. L'état actuel et l'avenir de la sidérurgie francaise. Notre
tlotte de commerce et de pêche. La marine marchande au Japon. Le rogart ou rogue artificielle. La nour-
riture des automobiles. À propos du concours d’hydro-aéroplanes de Saint-Malo. Le poids de la tour
Eiffel, p. 197.
Correspondance. — L'accès des Facultés de médecine, P' GnasseT, p. 201.
La voiture chirurgicale automobile Boulant, L. Fornnier, p. 202. — Procédés modernes de métal-
lurgie du fer, Rousser, p. 205. — La conservation des œufs par le froid, SANTOLYNE, p. 208. — Les
appareils de culture à vapeur, MarcHanp, p. 209. — Les nouvelles théories de la matière, Ber-
THIER, p. 212. — La flore des montagnes, Cocrix, p. 214. — L’óducation des Esquimaux d'Alaska,
GnabExwiTz, p. 217, — La nouvelle écriture chinoise, L. KuEenrz, p. 218. — Les ferments lactiques
dans ensilage, Marne, p. 220. — La grêle et le givre au Mont Blanc, J. Vaiuor, p. 221. — Sociétés
savantes : Académie des sciences, p. 222, — Bibliographie, p. 222.
TOUR DU MONDE
MÉTÉOROLOGIE
Les héros de la météorologie. — Toules les
branches des sciences ont des adeptes dont le
devouement à leur tâche approche souvent de
l'héroisme.
Tel a été le cas du général de Nansouty, s'exi-
lant sur le Pic du Midi pour y poursuivre d'utiles
observations et y fonder un Observatoire méléoro-
logique désormais célèbre.
Tel est aujourd'hui le cas des délégués du ser-
vice météorologique de la République Argentine
qui vont, à tour de rôle, s'établir pendant une
année tout entière aux Orcades du Sud, pour
y poursuivre et y coordonner des observations
météorologiques, au plus grand bénéfice de tous.
Chaque année, trois observateurs, assistés par
un simple cuisinier, quittent Buenos-Ayres pour
aller remplacer la mission précédente el passer un
an sur cette terre inhospitalière.
Quoi qu’elle soit située au nord du cercle antarc-
tique (60° 40’ de latitude Sud),elle reste généralement
bloquée par les glaces, et l’on peut dire qu'elle subit
un véritable climat polaire. Latempératuremoyenne
annuelle est de — 4,5 C.; les chutes de neige
sont excessives, on y voit rarement le soleil, et les
tempêtes violentes y sont continuelles. Les seules
plantes que l'on y rencontre sont des mousses ct
des lichens.
Il est inutile de dire combien une slation
météorologique sur les bords du continent anlarc-
tique a d'importance. Nous croyons devoir exprimer
le regret que le gouvernement argentin seul fasse
les sacrifices nécessaires pour entretenir celle des
Orcades du Sud ; il serait du plus haut intérêt que
ces stations soient multipliées.
Les régions antarctiques ont leurs héros dont les
noms sont dans toutes les bouches: mais nul ne
T. LXVH. Ne 1439.
parle de ces obscurs serviteurs de la science qui
s'exilent pendant un an dans une hutte primitive,
sous le climat le plus inclément, qui ne sont pas
mème sùrs d’un retour à époque fixe, car le navire
qui vient les relever peut être arrèté dans les
champs de glace. Cependant, leur tâche accomplie,
ils restent ignorés, n'ayant pas celte légitime
salisfaction d’amour-propre accordée aux explora-
teurs, dont Îles aventures défrayent toutes les
chroniques, N'est-il pas juste de donner un tribut
d'admiration à ces modestes héros?
BIOLOGIE
importance de la phagocytose dans l’immu-
nité de la souris. — \Metchnikoff a donné le
nom de phagocytes (cellules mangeuses) à des
cellules vivantes de l'organisme qui englobent,
dévorent et digèrent les microbes envahisseurs. La
fonction phagocytaire appartient à des degrés
variés à un grand nombre des cellules de l'orga-
nisme; elle se trouve développée au maximum
chez les leucocytes ou globules blancs du sang,
ou du moins chez la plupart d'entre eux, car il y
a cerlaines catégories de globules blancs qui ne
jouissent pas de cette propriété.
Une égratignure, une plaie vient-elle à èlre
infectée par la présente de certains mirrobes,
aussitôt les phagocytes du sang, altirés sans doute
par les substances chimiques que sécrètent les
microbes, saccumulent dans les vaisseaux capil-
jlaires de la récion infestée; ils se déforment et
introduisent leurs pseudopodes dans l'intervalle
des cellules qui constituent la paroi des capillaires.
s'y insinuent graduellement, puis sortent comple-
tement des vaisseaux pour venir an contact des
microbes, qu'ils englobent et digérent sur place:
généralement ils périssent, mais leur sacrifice a
198 COSMOS
contribué à sauvegarder l'organisme, et l'accumu-
lation de leurs cadavres dans la région primitive-
ment infectée constitue le pus.
La théorie phagocrvtaire de Metchnikoff n'a pas
rallié tous les suffrages. A la vérité, son allure
n'est point pour plaire aux savants qui veulent à
tout prix réduire tous les faits biologiques à de
simples phénomènes physiques et chimiques sans
aucune finalité. Certains auleurs pensent que la
destruction du parasite relève exclusivement de
l'action microbicide des humeurs, des substances
chimiques répandues dans l’organisme ou fabri-
quées par l'organisme, les leucocyles jouant seule-
ment le rôle de balayeurs de déchets. Il existe
aussi une opinion mixte: lesleucocytes produiraient
eux-mêmes celte substance microbicide, si bien
que les parasites pourraient ètre lués avant même
que l’englobement ne soit complet.
MM. Laveran et Mesnil et d'autres auteurs
tiennent pour la théorie de Metchnikoff; ils ont
montré que l'immunité naturelle du rat à l'égard
du Trypanosoma Lewisi est uniquement d'ordre
phagocylaire. Sur le conseil de M. Mesnil, M. De-
lanoë a repris la question et ena fail une étude
plus étendue, dont les résultats confirment la
thcorie phagocytaire (Annales de l'Institut Pas-
teur, mars).
La souris possède une immunilé naturelle très
forte vis-à-vis d'un certain nombre de protozoaires
flagellés (par exemple Leishmania tropica, agent
du bouton d'Orient, et L. infantum, du kala-azar
tunisien), ainsi que de divers trypanosomes.
M. Delanoë, pour explorer le mécanisme de
l'immunité, a injecté des cultures dans le péritoine
de souris blanches. Dans tous les cas, l’immunité
a toujours été d'ordre exclusivement phagocytaire,
c'est-à-dire due à l’action défensive des phagocytes.
Quand on les introduit, mème à haute dose, dans
la cavité péritonéale, les microorganismes ne
pénètrent jamais dans le sang; ils sont détruits
sur place en une demi-heure ou trois quarts d'heure
au plus, devenant, en pleine vilalité, la proie des
leucocyles mononucléaires.
ÉLECTRICITÉ
Le chauffage électrique en Suède et en Nor-
vège. — La question du chauffage des habitations
par l'électricité se présente sous un jour spéciale-
ment favorable en ces deux pays, à raison des
inpoilantes stations hydraulico-électriques qu'ils
possédent; l'£lectricien mentionne une série d'es-
sais qui aboutiront vraisemblablement à des appli-
cations industrielles. |
En Norvège, on songe à chauffer électriquement
les églises, alin de pouvoir utiliser la capacité des
stations centrales le dimanche, c’est-à-dire le jour
où la plupart des usines sont fermées.
22 aoUT 1919
En Suède, la station centrale de Gathenburg
a exécuté quelques essais de chauffage électrique
qui ont donné, assure-t-on, les meilleurs résuitats.
Le courant utilisé était de l'énergie en excédent,
qui ne revenait à la municipalité qu'à 0,7 centime
par kilowatt-heure. Les essais en question ont été
exécutés dans vingt-deux locaux industriels et rési-
dences privées, et ils ont duré de décembre 194114 au
4 avril 1912. Comme l'énergie employée ne se
trouvait disponible que durant la nuit, on devait
naturcilement emmagasiner la chaleur dans des
accumulateurs appropriés pour la distribuer durant
la journée. Presque toutes les personnes ayant fait
provisoirement usage du chauffage électrique se
sont déclarées satisfaites.
Le prix de revient semble varier considérable-
ment. Pour sept des vingt-deux installations ci-
dessus, le cotit de l'énergie employée a été évalué
à 1,83 centime par kilowatt-heure; dans cinq
autres, de 2,83 à 4,2, el dans les six dernières à
moins de 2,83. A la suile de ces essais, exécutés
durant l'hiver dernier qui a été exceptionnellement
rigoureux, on a reconnu que le chauffage élec-
trique, convenablement aménagé dans des locaux
appropriés, est économiquement possible au prix
de 4,2 centimes par kilowatt-heure. On doit étendre
considérablement le même système de chauffage à
Gothenburg au cours de l'hiver prochain.
Capacité de trafic d’un chemin de fer élec-
trique urbain. —.L'£lectricien résume une étude
de M. Lewis concernant le nombre de trains qu'il
est possible de faire circuler dans la journée sur
les chemins de fer électriques urbains.
Avec un écart moyen de 800 mètres entre les
stations, on peut atteindre sur les chemins de fer
de Londres une vitesse de 25 kilomètres par heure,
soit 7 mêlres par seconde. Si, comme à New-York,
on ne laisse qu’un intervalle minimum de 90 se-
condes entre deux trains, on arrive à transporter
dans un mème sens 12000 personnes par heure,
dans 40 trains de 6 wagons.
L'accélération au démarrage sera de 0,7 mètre
par seconde par seconde, c'est-à-dire que la vitesse
du train, à chaque seconde, s'accroit de 0,7 mètre
par seconde; au bout de la première seconde, la
vitesse est de 0,7 m : sec; au bout de la deuxième,
elle est de 1,4 m : sec; au bout de dix secondes, elle
atteint son régime, 7 m: sec, c'est-à-dire 25 km: h.
Cette accélération de 0,7 m : sec? est un maximum;
une valeur plus élevée exige des combinateurs
plus compliqués, une puissance plus considérable,
et par suite des voitures automotrices et des sta-
tions centrales plus coùteuses.
Lors du freinage, pour éviter d'incommoder les
voyageurs et de nuire au matériel, on ne doit pas
dépasser un retardement (une accélération néga-
tive) de 1,2 m : sec?. Le freinage à lui seul dissipe
une très grande partie de l'énergie fournie par la
N° 1139
station centrale, et celte perte est, bien entendu,
d'autant plus grande que la vitesse à annuler est
plus grande et que les arrêts sont plus fréquents.
A la vitesse de régime de 25 km : h, et pour des
écarts moyens soit de 4 600, soit 800 mètres entre
stations, l’énergie absorbée au freinage est respec-
livement 24 et 40 pour 100 de l'énergie amenée
par la ligne. Si la vilesse de régime était de
40 km : h, les pertes d'énergie au freinage attein-
draient même respeclivement 45 et 59 pour 100.
M. Lewis estime que, à Londres, si l'écart moyen
entre les stations s'abaissait à 400 mètres, le ser-
vice serait improductif; si l'écart moyen est de
800 mètres, les frais d'exploitation sont moindres
et le service se solde par un pelit excédent de
recettes.
Destruction électrolytique des tarets. —
Suivant le Times Engineering Supplement, une
installation génératrice d'énergie électrique, flot-
tante et pouvant se déplacer par ses propres
moyens, a été employée avec succès, sur la côte
américaine du Pacifique, pour détruire les diverses
espèces de Teredo qui attaquent les pilotis des quais.
Le courant est amené dans l'eau salée, et il arrive
que les produits de l’électrolyse qui s'ensuit tuent
les insectes destructeurs en quelques minutes.
Seule la tête, avec le corps vermiforme du Teredo,
pénètre dans le bois, la queue demeurant à la sur-
face en contact avec l’eau: or, le chlore produit
par l'électrolyse coagule la structure molle et géla-
tiveuse de cette partie de l'animal. Sans doute,
le traitement ci-dessus n’a pas pour effet de mettre
le pilolis à l'abri de nouvelles attaques des Teredo;
mais on prétend qu'un renouvellement occasionnel
de ce traitement empèche l’insecte destructeur de
s'enfoncer à une grande profondeur, en sorte que
le bois peut être préservé moyennant une dépense
relativement peu élevée. L'opération est des plus
simples. On garnit d’abord de fils le quai intéressé
et on suspend à ces fils des électrodes qui sont
immergées plus ou moins profondément, selon les
conditions locales. L'installation génératrice peut
fournir un courant de 20 000 à 40 000 ampères sous
une très faible tension. On lance le courant pendant
environ une heure en choisissant le moment où
l'état de la marée facilitera, au lieu de l’entraver,
la chloruration. — G. (Électricien.)
MÉTALLURGIE
L'état actuel et l’avenir de la sidérurgie
française. — La production de la fonte, en France,
était de 1 380 000 tonnes en 1869; elle est passée
à 4038000 en 1910; sur ce total de 1910, le
département de Meurthe-et-Moselle entre pour
2756000 tonnes et le district du Nord pour
911000 tonnes. La production du Nord est en
rapide croissance, si bien que M. Anglès d'Auriac
COSMOS
199
(Bull. Sor. ,ndustrie minérale, mai: Génie civil,
3 août) prévoit une production probable de
4 800 000 Lonnes dans le Nord, en 1920: les hauts
fourneaux y sont surtout alimentés par le minerai
de la Lorraine.
Le fourneau type actuel est de 450 à 525 mètres
cubes, produisant 160 à 210 tonnes de fonte Tha-
mas. Le gaz de haut fourneau est généralement
utilisé dans des moteurs à gaz.
De plus en plus, le fer est remplacé par l'acier.
La production totale d'acier brut a passé de
091 000 tonnes en 1888 à 3380000 en 1910: la
plus grande part de cet accroissement revient au
district de Meurthe-et-Moselle (qui a passé de
153 000 tonnes à 1 653 000) et ensuite au Nord (qui
a passé de 163 000 tonnes à 792 000).
La production tolale d'acier en 1920 dépassera
probablement 2 millions de tonnes dans le Nord,
2,6 millions en Meurthe-et-Moselle et 4,4 million
dans l'ensemble des autres départements.
MARINE
Notre flotte de commerce et de pêche com-
prend un total de 4077 navires.
D'après l'Annuaire de la marine marchande
pour 1912, on y compte :
VOEL Se eer e EO és bios 2381
Navires à vapeur.................,.... 1 656
Navires à autres moteurs.............. 40
Batcoux à voryageurs.................. 145
BAC DAS DONMDESS. ea des ina o
Bateaux renfloueurs..,.,,.............. 32
LE Fa ERA DE E n T 1x
Na ICS ETUMOPS 5 sens sm creme nes 3
Croiseurs auxiliaires. ................. 7
NaNIrOs Cols sisi ses 3
Navires frigorifiques....,.............. 10
Navires-hopilauzx................,...... 3
Navires DOLrOHerS. Luis ss deutes sn 3
PAGqUebOS iris memasmisee TEK REEE 204
ReÉMOrFQUÈURS. sans dons bise +14
Vapeurs de pâche.,....,..........,..... 236
Voiliers de grande prche.............. 300
Voiliers des autres péches.....,,.,...., 631
Les navires à propulsion mécanique se classent
comme suit :
Navires à aubes..,........ ........... aa
Navires à { hélice..................... i a20
Navires à 2 helices ....... RE 12i
Navires à % hélites. ss sucrées 3
Naviresà Folies ss ass si us detn 3
La marine marchande au Japon. — D'aprs
une statistique officielle que vient de publier le
ministère du Commerce japonais, la flotte mar-
chande, dans l'empire de Mikado, comprenait, en
4911, un ensemble de 31 580 navires, dont 2 545 ba-
teaux à vapeur, 6 392 voiliers et 22 643 jonques. Les
200 COSMOS
steamers représentent un total de 1 233909 tonnes
et les voiliers 413720 lonnes.
L'augmentation sur l’année précédente est de
179 navires à vapeur et de 455 navires à voiles.
Pendant les dix dernières années, le nombre des
jonques a passé de 18264 à 22643, ce qui indique
un développement considérable du trafic cotier et
du grand cabotage.
Sur les 6661 bâtiments à vapeur et à voiles ofli-
ciellement classés, c'est-à-dire inscrits sur les listes
du bureau de la marine marchande fonctionnant
à Tokio sous le contrôle de l'État, on compte
deux navires ayant plus de 10 000 tonnes. un ayant
9 500 tonnes, et six ayant entre 8000 et 9 000 tonnes.
Quant à la vitesse des steamers japonais, deux
dépassent 21 nœuds, deux dépassent 20 nruds et
deux atteignent 19 nœuds.
Au point de vue de la construction, il existe, au
pays nippon, 230 chantiers, qui. en 1911, ont
achevé et mis à flot 77 steamers (24479 tonnes) et
147 voiliers 11 097 tonnes. C'est un accroissement
de 19 steamers sur l'année 1910, mais une diminu-
tion de 8496 tonnes. De même, le tonnage des
voiliers construits se trouve ètre sensiblement
inférieur au chiffre de l'année précédente.
Comme la plupart des grandes nations euro-
peennes, le Japon pave des primes importantes
pour le développement desa marine decommerce.
Ces primes ont élé acquises à dix bâtiments en
construction, ainsi qu'à {9 navires actuellement à
Mot et assurant le tralic avec l'Europe, l'Amérique
du Nord, Hong-Kong, Singapour, Bombay et la
Chine.
Vingt-quatre lignes de paquebots sont subven-
tionnées par le gouvernement nippon; parmi elles,
il faut citer le Nisshin Kisen Kaisha, qui compte
12 steamers, Osaka Shosen Kaisha qui en a 108,
le Toyo Kisen Kaisha qui en a 9, et le Nippon Yusen
Kaisha qui en a 69. L'ensemble de la flotte de ces
quatre puissantes Compagnies maritimes repré-
sente 913994 tonnes. Toutes ont vu leur trafic
s augmenter très sensiblement au cours de l'année
qui vient de s'écouler. Les recettes du Toyo Kisen
Kaisha notamment se sont accrues de plus de
100 pour 100, Épouarn BONNAFFÉ.
PÊCHE
Le rogart ou rogue artificielle. — La rogue
naturelle est l'amorce qui sert à attirer les sar-
aines: elle provient de Norvège et presque toujours
alieint des prix extrèmement élevés.
Nous avons signalé autrefois l'initiative très
intéressante prise par M. Fabre-Domergue, inspec-
teur géneral des pèches maritimes, consistant
à remplacer la rogue naturelle d'œufs de morue
jar un mélange de diverses substances: farines,
poissons écrasés, crabes pilés, ete. Les premiers
cssais furent assez intéressants pour encourager
22 aOUT 19192
l'inventeur du produit nouveau. M. Nigg, directeur
de la pisciculture du Val-Saint-Germain, lui prèta
son concours, et pendant plusieurs années expéri-
menta toutes sortes de combinaisons.
C'est ainsi qu'a été récemment lrouvé le rogart,
mélange qui réalise le but poursuivi. Cette amorce
artificielle a l'aspect du sable mouillé ; additionnée
d'eau et jetée à la mer, elle forme un nuage, et les
parcelles de nourriture descendent avec une
extrème lenteur tandis qu'une vaste nappe huileuse
flotte à la surface.
Des essais ont élé tentés en 1911 dans le bassin
d'Arcachon (H. de France, Bull. Soc. centr. Aqui-
culture, juin); six bateaux avec la rogue naturelle
ont pèché 2003 000 sardines; huit bateaux avec le
rogart ont péché 3354000 sardines; de sorte que
le rogart a paru ètre de beaucoup l'amorce la
plus efficace; 1} faut ajouter à son avantage qu'elle
cotite seulement 40 francs par baril au lieu de 60.
Cette amorce semble convenir aussi au poisson
d'eau douce.
AUTO MOBILISME
La nourriture des automobiles. — Taniis
que les agriculteurs étudient et discutent la ration
à donner aux moteurs à avoine, les automobilistes
se préoccupent d'une question qui prend l'état
aisu, le prix de la ration des chevaux qui tra-
vaillent dans leurs machines. Notre confrère Omnia
nous révèle une partie de ces préoccupations.
Le prix de l'essence d'automobile s'élève sans
cesse; cette hausse est des plus inquiétantes pour
l'avenir de l'automobile.
En Angleterre, où elle se fait sentir plus vive-
ment encore que chez nous, les consommateurs
ont adressé leurs doléances aux marchands d'es-
sence, qui leur ont répondu : l'essence augmente
parce que le rapport de la consommation d’essence
à la consommation des autres dérivés du pétrole
n’est plus égal au rapport des quantités produites.
L'exploitation, s'équilibrant mal, devient plus
onéreuse en ce qui concerne l'essence (1).
Remède : user d’autres combustibles que l'es-
sence. |
Mais les autres combustibles, qui s'appellent
benzol en France et, en Angleterre, shell (huile de
schiste). crown, pratts et taxibus, ne jouissent pas
d'une grande estime, bien que leur prix soit bien
infėrieur à celui de l'essence.
Un grand constructeur anglais, Napier, qui fa-
brique lui-même ses carburateurs, a dernièrement
fait l’essai chronométré de ces divers produits sur
une de ses 15-chevaux de série.
(1) La quantité d'essence de pétrole importée en
Angleterre en 1911 a été de 235$ millions de litres, qui,
à 6,90 fr par gallon (4,54 litres), représentent 51 mil-
lions de francs.
N° 1439
En voici le résultat (vitesses en ki par heure) :
Shell, frown. Pratts. Taubns.
Vitesse sur le demi-
Mille asesore... 80,4 50,4 82,2 80.4
Sur còte de Brook- |
landS sise 20,6 22.7 23,9 20,6
Litres par kilomètre
a #8 km: h...... 8,89 8,95 8,82 8,52
Cesonl là des vitesses fort honorables, qui diffèrent
peu de celles obtenues avec l'essence ordinaire.
L'usage de ces divers produits entraine une éco-
nomie de 2 d. par gallon, soil à peu près cinq
centimes par litre.
AÉROSTATION
A propos du concours d’hydro-aéroplanes
de Saint-Malo. — Nolre excellent confrère
l'Aérophile publie, dans son numéro du 1°" août,
un résumé du règlement du concours d’hydro-aéro-
planes qui doit avoir lieu à la fin du mois d’août, à
Saint-Malo. Nous en détachons le passage suivant :
« Pour un passager en plus du pilote, diminution
de = du temps réel; pour un deuxième passager,
diminution supplémentaire de = pour un troi-
60”
Es 12 ; 43
sième, =: pour un quatrième, Gi Par exemple,
un appareil comportant quatre passagers, en plus
du pilote, aurait son temps diminué de
10 11 12 13 46
60 À 66 t T 60 — 60:
Il semble, en effet, assez juste de faire un cer-
tain avantage aux appareils capables d'emporter
des passagers. Mais un rédacteur du de Dion-
Bouton a eu la curiosité de pousser les choses plus
loin. Il a supposé un appareil susceptible d'emporter
cinq passagers, et il a voulu se rendre compte du
« boni » qu'on lui accorderait. Il a donc écrit:
10 11 12 13 14 60
a t taot öt T o
D'où il résulte que le temps effectif du parcours
d'un aéroplane emportant cinq passagers sera
diminué de a de sa valeur, autrement dit qu'il
sera réduit identiquement à 0.
Ce résultat est par lui-même un peu ahurissant,
et, ajoute le de Dion-Bouton, il est peu conforme
à l’égalité et à la justice; car un appareil effec-
tuant le concours avec quatre passagers sera,
quelles que soient ses prouesses, toujours sûrement
classé après l'hydro-aéroplane à cinq passagers,
mème si celui-ci marche comme une tortue, puis-
qu'il est arrivé avant que d’être parli.
Pour cette fois, il n’y a pas grand mal, car il
n'y aura pas d'appareil capable d'emporter cinq
passagers. Mais il semble que le règlement n'ait
pas été établi avec tout le soin désirable.
COSMOS
201
VARIA
Le poids de la tour Eiffel. — La tour de
300 mètres a atteint la vingt-cinquième année de
son existence. Symbolisant le siècle du fer, elle
dresse sa légère ossature bien au-dessus de tout
autre monument et atteste l’économie de maté-
riaux que réalise aujourd’hui l'art de l'ingénieur.
Dans la réunion que la Société astronomique de
France a tenue à la tour à loccasion du solstice
d'été, M. Ch.-Ed. Guillaume, en contant lhis-
toire de ce monument, a surpris l'auditoire quand
il a exposé que si l’on réduisait toutes les dimen-
sions au millième, c'est-à-dire que si, toutes pro-
portions gardées, on construisait une tour Eiffel de
30 centimètres de hauteur, ce modèle réduit ne
pèserait que 7 grammes, à peu près le poids d'une
feuille de papier à lettre.
Nous pouvons rappeler, à litre de comparaison
suggestive, que la tour en vraie grandeur, lors de
sa construction, exigea pour la peinture de ses
425 000 mètres carrés de métal trois couches de
minium, de peinture et de vernis représentant
chacune 410000 kilogrammes.
CORRESPONDANCE
L’accès des Facultés de médecine.
Le nouveau décret du 9 juillet 1912 règle l'accès
dansles Facultés de droit, dessciences et des lettres,
et il semble que cette nouvelle règle n’intéresse en
rien le recrutement des futurs médecins. Ceci n'est
pas lavis de M. le D" Grasset, de Montpellier; il
estime que ce décret ouvre la porte des Facultés
de médecine à une série de non bacheliers et con-
stitue un danger extrêmement grave.
Nous croyons utile de donner la circulaire qu'il
a écrite à celte occasion :
« Le décret du 24 juillet 1899 stipule que, pour
prendre la première inscription de médecine, il
faut produire : « soit... , Soit, avec la dispense du
» baccalauréat, les quatre certificats d'études supé-
» rieures ci-après désignés, délivrés par une Faculté
» des sciences: physique, chimie, botanique, zoo-
» logie ou physiologie générale, ou embryologie
» générale. »
» Les conditions d'accès dans les Facuilés des
sciences sont donc, par cette voie, les cendilions
d'accès dans les Facultés de mcédevine.
» Or, voici les titres qui permettent aux Français
non-bacheliers l'accès des Facultés des sciences :
a certificat d'aptitude à l'enseignement secondaire
» des jeunes filles (sciences): certificat d'aptilude
» au professorat des classes élémentaires de leu-
» seignement secondaire: certificat d'aptitude au
» professorat dans les écoles normales et dans les
» écoles primaires supérieures (sciences); le certi-
» ficat d'études physiques, chimiques et naturelles,
202 COSMOS
» obtenu avec 77 points, et le brevet supérieur de
» l'enseignement primaire ou le diplome de fin
» d'études de l'enseignement secondaire des jeunes
» filles; titre d’ancien élève de l'Ecole polytech-
» nique, de l'Ecole navale, de l'Ecole de Saint-Cyr,
» de l'Ecole centrale des aris et manufactures, de
» l'Ecole des mines de Paris, de l'Ecole des mines
» de Saint-Etienné, de l'Ecole des ponts et chaus-
» sées, de l'Ecole supérieure des postes et télé-
» graphes (2° section), de l’Institut agronomique;
» grade de contrôleur des mines, grade de conduc-
» teur des ponts et chaussées. »
» Il est facile de voir le danger pour les études
médicales et pour le recrutement de nos fulurs
médecins, de ces dispositions qui permettent de
devenir docteur en médecine, non seulement sans
grec, sans latin et sans philosophie, mais sans
aucun baccalauréat, avec le certificat d'aptitude
à l'enseignement secondaire des jeunes filles
(sciences), le brevet supérieur de l'enseignement
primaire ou le diplôme de fin d'études de l'ensei-
gnement secondaire des jeunes filles, le grade de
controleur des mines où de conducteur des ponts
el chaussées!
» Exprimant l'opinion souvent formulée de l'im-
mense majorité des médecins, la Commission
supérieure de l’enseignement médical a voté, à
l'unanimité des membres présents, le vœu qu'on
22 aoOUT 1912
exigedt, à l'entrée des études médicales, non un
baccalauréat quelconque, mais le baccalauréat
classique, c'est-à-dire série A, B ou Cde la première
partie et série philosophie de la seconde partie.
» Ce vœu, réglant la situation des bacheliers,
n'aurait aucune ulilité, si, en mème temps, les
non-bacheliers pouvaient envahir les Facultés de
médecine par la porte des Facultés des sciences,
largement ouverte par le décret, que je dénonce à
l'attention de mes confrères, des Sociétés médi-
cales et de la Presse, médicale et extramédicale.
» Il me parait nécessaire de faire campagne pour
que le ministre veuille bien accepter et appliquer,
non plus seulement le vœu (devenu insuffisant) de
la Commission supérieure, mais le vœu :
» Que l'article du décret du 24 juillet 1899, relatif
aux conditions à remplir pour obtenir le diplòme
de docteur en médecine, modifié par le décret du
22 juillet 1902, soit remplacé par celui-ci:
_« Les aspirants au doctorat en médecine doivent
» tous produire, pour prendre la première inscrip-
» tion, le baccalauréat de l'enseignement secondaire
» institué par le décret du 31 mai 1902 (série A, B
» ou C de la première parlie et série philosophie
» de la seconde partie) et le certificat d'études
» physiques, chimiques et naturelles. »
» D' GRASSET. »
» Montpellier, 10 juillet 1912.
on —_—_ oo ——
La Voiture chirurgicale automobile Boulant.
Les voitures de transport du petit matériel chi-
rurgical actuellement en usage sont totalement
impropres à rendre les services qu'exigent les
premiers soins à donner aux blessés, surtout
lorsque la blessure intéresse la cavité abdominale.
A la rigueur, on peut admettre que pour la plupart
des blessures des membres, l'évacuation du malade
est susceptible d'être opérée sans inconvénient, après
appareil provisoire; mais pour ce qui concerne les
blessés des grandes cavités, il y a certitude absolue
de voir apparaitre l'infection péritonéale qui rendra
l'intervention chirurgicale tardive, même si elle
est effectuée dans de bonnes conditions. On court
presque toujours à un insuccès certain.
Pour que ces blessés aient des chances de sur-
vivre, il faudrait donc pouvoir les opérer sur place,
en disposant d'une salle d'opérations aussi parfaite
que celles qui existent dans les hôpilaux. La voi-
ture chirurgicale Boulant, dont l'agencement opé-
raloire est di au D° Podevin, répond parfaitement
à cette nécessité. Plactes en réserve en un endroit
déterminé, ces voitures peuvent, en une heure,
se transporter sur les points qui leur sont désignés.
En arrivant, elles sont prètes à fonctionner, met-
tant à la disposition des opérateurs un organisme
complet et indépendant : salle d'opérations confor-
{able et rigoureusement aseplique, instrumenta-
tion à main et électrique, stérilisation de l'eau,
des instruments et des pansements, éclairage
électrique, chauffage, radiologie, stérilisation de
l'air par l'ozone, etc. Le problème du « secours
allant au blessé » se trouve ainsi résolu, au moins
pour ce qui concerne le traitement des blessures
graves, et rien n'empèche d'appliquer le principe,
par une simple augmentation du nombre des voi-
tures, à tous les blessés sans exception.
Nous allons maintenant décrire celte nouvelle
voiture.
Chassis. — Le châssis ne présente aucune parti-
cularité; il appartient au type commercial con-
struit par la Société Schneider pour la Compagnie
des omnibus de Paris. Ses caractéristiques sont les
suivantes : longueur totale 8 mètres, dont 6 mètres
sont utilisés pour recevoir la carrosserie; empat-
tement 4,45 m, largeur de la caisse 2,30 m, poids
3500 kilogrammes, et avec la carrosserie 5 500 ki-
logrammes, hauteur de la caisse 3,05 m. Le moleur,
d’une puissance de 35-45 chevaux, permet d'atteindre
une vitesse de 30 kilomètres par heure en palier; il
consomme environ 0,35 litre par cheval-heure. À jou-
Nc 1439
tons que ce type de châssis est déjà en service
dans l’armée comme voiture de transport ou d'ar-
tillerie, camion blindé, voiture d'ambulance, etc.
La carrosserie est sensiblement de mêmes
dimensions que celle des autobus; elle a été étudiée
VUE EXTÉRIEURE DE LA VOITURE AUTOMOBILE D'AMBULANCES,
spécialement en vue de l'emploi judicieux des
appareils pour l’usage desquels elle a été construite.
Elle comporte trois parties conslituant trois
chambres séparées par des cloisons; celle du
milieu est la salle d'opérations.
L'entrée de la voiture s'effectue
par l'arrière au moyen d'un mar-
chepied. La première cabine con-
stitue une sorte de vestibule com-
portant les vestiaires, l’un pour
les habits d'extérieur, l’autre pour
les blouses, tabliers, etc., et pour
la lingerie. Le plancher est recou-
vert d’un tapis brosse : au-dessous
se trouvent les caisses à linge
sale. Un réservoir à eau, un filtre,
complètent l'installation de celte
sorte d'antichambre.
La salle d'opérations occupe le
centre de la voiture; elle mesure
2,20 m de large et 3,20 m de lon-
gueur; elle est éclairée par des
châssis vitrés disposés sur la toiture;
pendant la nuit, des lampes élec-
triques suppléent à la lumière du
jour. Toutes les parois sont en bois
contreplaqué et laqué sans joint,
les angles sont arrondis et le sol
est parfaitement uni peur pouvoir être lavé.
Les instruments, classés dans des boites métal-
liques spécialement construites pour diminuer
l'encombrement, sont tous stérilisés en bloc, avec
leur boite, dans l’autoclave; normalement, les
COSMOS
203
boites prennent place dans des armoires vitrées
disséminées aulour de la salle.
La salle d'opérations constitue l’appareil le plus
utile; pour celte raison elle a été étudiée spécia-
lement et combinée de telle sorte qu'en dehors de
son afectalion spéciale elle est en-
core ulilisée pour la radiographie.
Les examens radiologiques rendent
à la chirurgie des services immenses.
Généralement, lorsque le temps ne
presse pas l'opérateur, on prend
un cliché photographique de la partie
malade; les corps étrangers appa-
raissent sur le cliché et le chirur-
gien peut effectuer l’opération à peu
près sans hésitation, bien que l’image
ne révèle nullement la profondeur
à laquelle se trouve le corps étran-
ger. Il est vrai que l’on peut prendre
plusieurs vues sous des angles dif-
férents, mais ces opérations sont
toujours longues, et dans la majeure
partie des cas, l'examen radiologique
est préférable, comme lorsqu'il s’agit
de | rechercher un projectile. En
tempside guerre, en effet, il est nécessaire de repérer
instantanément la position du projectile, afin de
l'extraire aussitôt ; l'opération doit être faite pour
ainsi dire en même temps que l'examen.
La table Boulant a été construite dans ce but;
UN COIN DE LA SALLE D OPÉRATIONS.
elle est combinée pour les opérations et pour la
radiologie. Elle peut prendre toutes les positions
et se laisse traverser par les rayons X. Sous la
table se trouve une glissière longitudinale qui la
suit dans toutes ses positions. Cette glissière porte
le support de l'ampoule Röntgen qui se déplace
dans le sens de la longueur, latéralement, et
prend également une position perpendiculaire au
plan de la table. Ce dernier mouvement est le
plus utile parce qu'il permet de déterminer la
profondeur à laquelle se trouve le projectile. Dans
ce dernier but, la table est accompagnée d'un
écran spécial] surmonté d’un capuchon qui recouvre
la tète du chirurgien; ce dernier peut donc faire
de la radioscopie dans une pièce largement éclairée.
L'écran est divisé par un quadrillage en carrés de
un centimètre de còté; au centre, il est percé d'un
trou occupé par un porte-mine mobile. Il suffit
donc de faire coincider ce porte-mine avec l'ombre
du projectile et d’appuyer légèrement la mine
pour repérer cette ombre sur l’épiderme du blessé.
Ce dispositif employé en médecine permet de
L
VISITE D'UN BLESSÉ AUX RAYONS X.
calquer, en déplaçant l’écran, la position ou le
contour des organes que l’on désire étudier.
En chirurgie, l'aide déplace l'ampoule en la
rapprochant de la table afin de produire un dépla-
cement de l'ombre; l'ampoule est encore déplacée
dans le sens vertical jusqu'à ce que l'ombre occupe
toujours la même position sur l'écran. On obtient
ainsi le point précis, marqué sur l’épiderme, de
la verticale par laquelle passe le projectile. Il
reste à déterminer la profondeur. Pour cela, on
déplace Pampoule sur la réglette jusqu’à ce que
son support alleigne une butée : ce déplacement
a donc toujours la même valeur. L'ombre se dé-
place également sur l'écran d’une quantité indiquée
par le quadrillage gradué, Connaissant alors la
hauteur à laquelle se trouve l'écran, il suffit de se
reporter à un barème établi à cet effet, pour lire
directement la profondeur cherchée.
COSMOS
29 aoUT 1912
Avec cette table, on évite donc une double mani-
pulation du blessé; le chirurgien peut opérer dès
qu’ila quitté son capuchon, sans perte de temps,
et avant que le projectile ait pu se déplacer. En cas
de besoin, il peut encore revoir le corps étranger
pendant l'opération.
La bobine de radiologie est encore utilisée pour
la stérilisation de la salle par production d'ozone;
elle fournit une étincelle de 30 centimètres don-
nant naissance à une forte quantité d'ozone. Les
chirurgiens ont encore à leur disposition deux robi-
nets, dont l’un donne de l'eau stérilisée par les
rayons ultra-violets, et l’autre de l’eau chaude ou
froide stlérilisée par un autoclave situé dans la
cabine avant de la voiture.
Un petit moteur électrique est dissimulé dans
un coin de la salle; il actionne une petite pompe
permettant de puiser l’eau pour les
besoins de la voiture; cette pompe
est pourvue d'un tuyau de caout-
chouc, roulé dans un coffre fixé sur
le châssis, que l'on déroule pour
aspirer leau d'un puits ou d'une
rivière; on remplit ainsi le réservoir
après avoir filtré cette eau. Enfin,
l'éclairage est assuré par des lampes
à incandescence alimentées, ainsi
que les phares et projecteurs, par
une batterie d’accumulateurs de
16 volts chargée automatiquement
par une dynamo. Quant au chauf-
l'age, il est simplement réalisé à l’aide
d'un radiateur parcouru par les gaz
d'échappement du moteur.
La cabine avant, qui communique
avec la salle d'opérations et avec
le dehors, a reçu l’appareil de
stérilisation de l’eau par les rayons
ultra-violets, qui peut débiter
600 litres par heure. Comme les
besoins n'atteignent jamais cette quantité, l'eau
s'écoule par un tuyau à l'extérieur, el les hommes
peuvent venir s'approvisionner. Non utilisée pour
son affectation spéciale, la voiture Boulant pourrait
donc assurer le ravitaillement en eau potable
d'une armée entière et en très peu de temps. Sous
le plancher de la cabine avant est encore installée
une dynamo actionnée par le moteur pendant les
arrêts de la voiture. Le courant fourni ainsi que
celui de la dynamo d'éclairage sont centralisés
sur un tableau de distribution placé dans la cabine
avant, et qui comporte les interrupteurs et appa-
reils de mesure nécessaires.
Dans cette même cabine, se trouve encore l'in-
stallation de stérilisation par la chaleur, compre-
nant un autoclave à vapeur pour stériliser les in-
struments, les pansements et l’eau. Cet autoclave
est chauffé à l'alcool, et l’eau est refoulée dans un
\° 1439
réservoir cylindrique placé au-dessus, pourvu d'un
brûleur à alcool permettant de maintenir cette
eau à une température déterminée.
L'installation générale de la voiture est com-
plétée par deux tentes fixées sur les côtés et que
l'on ouvre très rapidement en arrivant à destina-
tion; les blessés trouvent donc là un abri permet-
tant d'attendre leur passage dans la salle d'opéra-
tions et mème de recevoir les premiers soins.
En réalité, cette voiture est plus qu’une salle
d'opérations, c’est un petit hôpital ambulant dans
lequel les blessés, quelle que soit la gravité de leur
cas, trouveront immédiatement les secours que
réclame leur état. Nous ne pouvons que désirer en
COSMOS
205
voir augmenter le nombre, puisque des soinsqu’elle 7
permet de donner dépend le sort de nos soldats
tombés sur le champ de bataille. À un autre point
de vue, il serait désirable que les municipalités
importantes la considèrent comme un accessoire
indispensable du matériel communal pour venir
en aide le plus vite et le plus efficacement pos-
sible aux blessés de la route, aux victimes des
accidents de tous genres, qui, par la locomotion
automobile, sont de plus en plus nombreux. C'est
bien le moins que l'automobile humanitaire vienne
au secours des victimes de la « furie » automobile.
LUCIEN FOURNIER.
Procédés modernes de métallurgie du fer.
I. Du minerai jusqu’au métal.
« Fonte », « fer », « acier »: termes désuets qui
correspondent maintenant mal aux réalités du
moment. On pouvait baptiser ainsiautrefois lesrares
produits de l'industrie sidérurgique du temps, pro-
duits différant nettement les uns des autres et par
leurs propriétés et par leur mode de préparation.
Mais. aujourd'hui, il existe dans le commerce une
infinité de produits connus sous des noms iinpropres
divers avec des séries très doucement graduées de
substances intermédiaires. À vraidire,iln’y a plus de
fer ni d'acier au sens étroit attaché primitivement à
ces mots; il est plus rationnel de ne parler que de fer,
qui, plus ou moins carburé et associé à des petites
proporlions de quelques autres éléments, constitue
la gamme infiniment riche des métaux de toutes
sortes, présentant, de la fonte « malléable » aux
aciers « rapides », la réunion des plus diverses, des
pius étonnantes et des plus précieuses propriétés.
Quelles sont ces propriétés et à quelles contin-
gences de structure intime elles correspondent?
voilà qui fut plusieurs fois examiné ici (1). On con-
nait généralement moins les méthodes modernes
de préparation des divers aspects industriels du
fer, ou, du moins, on en connait mal l’état actuel
et l'importance comparative : c'est ainsi que les
jeunes lycéens perdent encore leur temps à étu-
dier nous ne savons quelles méthodes « catalanes »
trop rustiques, que les métallurgistes noirs du
Centre africain abandonnèrent eux-mêmes depuis
longtemps. Or, il importe de connaitre les procédés
modernes de préparation du fer, si incomparable-
ment le roi des métaux, tant par ses remarquables
propriétés que parce qu'on en utilise annuellement
dans le monde plus đe 60 milliards de kilogrammes
valant plus d’un milliard de francs.
(1) C£ J. Boyer, Cosmos du 26 sept. 1908, p. 347, et
H. Rocsser, Cosmos du 12 fév. 1910, p. 174.
Les minerais de fer employés industriellement
sont surtout les oxydes divers et parfois le carbo-
nate, le sulfure. Ce dernier, d'ailleurs, n’est em-
plové qu'à l’état d'oxyde, après avoir servi aux
fabricants d'acide sulfurique qui le grillent pour
en retirer le soufre : on agglomère la poudre ainsi
obtenue avec de la chaux pour l’emploi dans le
haut fourneau.
Dressant sa masse épaisse flanquée des colonnes
parallèles et métalliques de récupérateurs (fig. 1),
le haut fourneau est à la base de toute la métal-
lurgie du fer, qui transforme les minerais divers
en fontes ensuite ou non travaillées pour donner
le fer et l’acier. Tandis que la rustique forge cata-
lane des métallurgistes primilifs donnait 200 kilo-
grammes de métal par vingt-quatre heures, le haut
fourneau imaginé au xvin? siècle et produisant par
jour quelque 3000 kilogrammes donne maintenant
couramment 250 tonnes {il en est mème de 900 tonnes
en Amérique!) On emploie aujourd'hui des hauts
fourneaux de grande capacité (fig. 2), véritables
monstres entourés d'installations énormes, sur-
montés des ossatures de transporleurs mécaniques
déversant dans le gueulard les mélanges savamment
dosés de minerai, de coke, de fondant. (A noter
qu'il reste cependant en Francetroishauts fourneaux
marchant au bois et en Suède une grande quantité :
ils donnent des produits plus coûteux, mais plus
purs.) Les charges descendent peu à peu en
s’'échauffant, le carbone brülant sous l'action de
l'air injecté dans le bas en quantité, avec force (1):
ce charbon, toutefois, n’a pas encore suffisamment
(i) On fait, en Belgique, des essais pour substituer
à Pair de l'oxygène produit à très bon compte par dis-
tillation fractionnée d'air liquide: plus de chaleur
ainsi dépensée à échautfer inutilement l'azote de l'air.
C'est sans doute là le procédé de l'avenir: jusqu'à
présent, cependant, on en est encore à la phase
d'expérimentation.
206
“d'air pour brûler tout à fait et prend l'oxygène du
minerai. Le métal fond, la silice, la chaux de la
gangue et du fondant forment aussi des composés
fusibles, et le tout s’amasse au bas de la tour d'où,
périodiquement, on fait sortir le liquide incandes-
cent qui serpente dans des rigoles de sable où il
vient se figer en « gueuses » allongées.
Les scories, elles, non mélangées à la fonte,
forment, en se solidifiant, le laitier employé au
ballastage des voies ferrées. L'air carburé qui
s'échappe vers le gueulard, conduit en d'énormes
tuyaux métalliques, est épuré par passage en des
séries de canaux reposant sur une bâche pleine
d'eau, où se déposent les poussières entrainées.
F1G.1.— UNE INSTALLATION MODERNE DE HAUTS FOURNEAUX
(ACIÉRIES DE TRITH-V ALENCIENNES).
Une partie est conduite dans des moteurs à gaz,
où l'oxyde de carbone, se combinant à l'air avec
explosion, engendre l'énergie qui meut les puis-
santes machines soufflantes pour l'injection de l'air
comburant; une autre partie s’en va brûler après
addition d'air dans les faisceaux tubulaires des
récupérateurs Cowper, maintenant toujours pré-
férés aux Whitwell que s'obstinent à décrire les
auteurs des petits manuels de chimie.
Le Cowper est une haute tour, plus haute que le
haut fourneau lui-même, se composant d'un empi-
lage de briques réfractaires, percé d'une quantité
de petits canaux (fig. 3): les gaz chauds y circulant
portent la température de la masse jusque vers un
millier de degrés. Le chauffage terminé, on dirige
COS 10S
22 aour 19:92
les gaz vers le récupérateur d'à côlé, et c’est l'air
destiné à l'injeclion qui passe dès lois dans l’em-
pilage : il s'y échauffe et reporte dans le foyer une
parlie des calories qui, sans cela, eussent été
perdues. I] y a d'ordinaire près de chaque haut
fourneau trois récupérateurs fonctionnant alterna-
tivement pour emmagasiner, puis rendre la cha-
leur (fig. 4). |
La marche du haut fourneau, son « allure » est
soigneusement réglée, par un contremaitre capable,
selon la nature du minerai et la qualité des fontes
à obtenir. En faisant varier les charges, le choix
du fondant qui est le plus souvent du calcaire,
mais parfois aussi une pierre siliceuse, en réglant
l'injection du « vent », la fréquence des coulées, il
peut varier l'allure de bien des façons. Pratique-
ment, on peut marcher en allure pour fonte froide,
donnant des produits peu épurés, en allure chaude
pour fonte mi-fine, etc.
Une bonne marche doit donner des scories bien
fusibles, une fonte bien épurée, débarrassée du
soufre qui rend le fer cassant, un gaz brülant aux
récupérateurs avec une flamme violacée et non
bleuâtre, ce qui indiquerait un excès de carbone.
On ne doit jamais obtenir de collage, accident
parfois très grave produit par la formation de
« ponts » empêchant la circulation des charges: le
haut fourneau immobilisé doit ètre arrêté. Une fois
mis en route, l’appareil, en effet, marche nuit et
jour, fêtes et dimanches, sans repos ni trêve, pen-
dant une dizaine d’années, jusqu'à ce qu'il soit
indispensable de refaire sa chemise intérieure en
maçonnerie réfractaire.
Répétons-le : la conduite d’un haut fourneau est
très délicate. Les réactions qui se passent dans la
masse incandescente et qu'on a pu étudier en ana-
lysant les matières, les gaz prélevés à tous les
étages, varient selon les zones considérées, selon
les divers réglages de la marche, selon Ja nature
des matières premières. Aussi n'est-ce pas trop de
la collaboration d’un contremaitre praticien et du
chimiste qui analyse la fonte, le laitier, le mi-
nerai pour régler convenablement l'allure. On par-
vient ainsi à déterminer les habitudes, les besoins,
les caprices de chaque haut fourneau, qui a sa vie,
ses exigences, son appétit propre. Là où on fait des
fontes pour l'acier Martin, il faudra obtenir des
produits contenant bien moins de phosphore et de
soufre que si on fabrique des fontes pour moulage :
en conséquence, il faudra employer des minerais
contenant du manganèse (1), il faudra rejeter de
(1) A propos de manganèse, un mot des « ferros »
ou fontes spéciales à fortes teneurs en nickel, manga-
nèse, silicium et autres métaux plus ou moins rares
servant à fabriquer les aciers spéciaux. On prépare
ces produits, assez chers en général, au four électrique;
lequel four commence même à concurrencer le haut
fourneau pour préparer directement des aciers avec
N° 1:39
J'alimentation les pyrites grillées qui reliennent
toujours un peu de sulfure.
Tout haut fourneau nécessite, on le conçoit, avec
les bâtiments accessoires pour emmagasiner le mi-
nerai, le fondant, la houille, pour manipuler com-
modément les masses énormes que dévore jour-
nellement le haut fourneau, pour analyser les pro-
duits divers... des installations considérables. Et
comme, bien souvent, les appareils sont groupés
et situés près des aleliers d’une aciérie, ils
sont le centre d'usines énormes : la petite indus-
trie n'existe plus guère en métallurgie moderne
du fer. Telle récente installation, comme, par
exemple, les nouvelles usines de la Société des
F1G. 2. — COUPE D'UN HAUT FOURNEAU.
forges du Nord et de l'Est, près Valenciennes, qui
comporte trois hauts fourneaux et récupérateurs
(coût, 30 à 40 millions de francs !), reçoit chaque jour
un train complet de minerai (plus de 50 000 tonnes),
apporté de la mine possédée par la firme dans
l'Est sur wagons particuliers à vidange mécanique,
occupe, malgré la perfection de la machinerie, plus
d’une centaine d'ouvriers.
Actuellement, et depuis plusieurs années, l'indus-
trie du fer est partout très prospère, ce qui tient pour
le minerai. Jusqu'à présent, la cherté de l'énergie
électrique n’a guère permis à la nouvelle technique
de prendre encore beaucoup d'extension; mais il
s'agit là encore d'une méthode appelée, sans doute, à
un futur grand développement.
COSMOS
207
beaucoup au développement économique de pays
neufs, comme le Brésil, la Chine, qui achètent en
Europe leurs fers de construction, leurs rails, leurs
machines de toutes sortes. Aussi construit-on un peu
partoutde nouveaux hauts fourneaux. En général, les
usines métallurgiques sont cependant situées à
proximité, soit de la houillère (Denain, Anzin,Valen-
ciennes, Isbergues...), soit de la mine de fer (Miche-
ville, Homécourt, Jarville...), soit des ports, où
arrivent les matières premières (Trignac, Saint-
Nazaire, Bordeaux..….). Les grandes usines francaises
F1G. 3. — COUPES D'UN RÉCUPÉRATEUR COWPER.
sont alliées en Syndicat puissant fixant les prix de
vente et les contingents à fournir par chaque
usine; il existe de pareilles ententes internatio-
nales entre métallurgistes des divers grands pays
producteurs; il existe même des engagements
passés à long lerme entre les Sociétés francaises
de hauts fourneaux et les Sariétés houillères, pour
fixer plusieurs années à l'avance et selon le cours
des fontes le prix du coke métallurgique. On a
fort médit de ces trusts aux allures occultes ; nous
n'avons, en France, nullement à nous en plaindre,
les prix n'ayant pas ‘été exagérés, Au contraire,
techniciens et ouvriers ne sauraient qu'élre avan-
tagés par suite de la prospérité raisonnable de
l'industriel. H. Rouserr.
208 COSMOS
22 aour 1912
Conservation des œufs par le froid et les gaz inertes.
L'eau de chaur est cerlainement lingrédient le
plus employé pour conserver les œufs. Mais il
était naturel de penser que l'on essaierait de
mettre à contribution le froid pour garder l'aliment
en question, dont le prix est presque inabordable
pour les petites bourses pendant les périodes où
les poules pondent peu.
M. le D" Bordas, membre du Conseil d'hygiène
publique de France, constale que le procédé en
question se répand de plus en plus en France, el
{out fait prévoir qu'il remplacera un jour tous les
agents et modes de conservation, plus particuliè-
rement l’eau de chaux. De toute facon, cependant,
l'œuf ayant subi longtemps l’action des basses tem-
pératures doit être considéré comme œuf de con-
serve, quoique de qualité bien supérieure à l’œuf
conservé par l'eau de chaux.
Le froid au bout de cinq à sept mois n'’altère
pas sensiblement l'aspect ni l'odeur de l'œuf, alors
qu'au bout d'un laps de temps bien moindre l’eau
de chaux rend l’albumine jaunâtre, aqueuse el
communique à l'œuf l'odeur caractéristique de la
chaux. L'œ1f conservé par le froid peut ètre
mangé à la coque au bout de trois à quatre mois,
ce que l'on ne pourrait faire avec l'œuf sortant
de l'eau de chaux. Mais à partir du quatrième mois
l'évaporation agrandit la chambre à air. Dès lors,
son utilisation est plus indiquée pour d'autres usages
culinaires et pour la pâtisserie.
Il est désirable au point de vue hygiénique que
les œufs employés pour la patisserie soient ainsi
conservés, ce qui permettrait d'écarter les Jaunes
d'origine exotique.
L'industrie du froid artificiel soutenue par Îles
associations syndicales a développé d'une facon
extraordinaire le commerce des œufs. Ainsi la
Russie exporte plus de 2 830 millions d'œufs d'une
valeur de 161 488000 francs. Aux États-Unis on
entrepose pour plus de 105 millions de francs
d'ieufs et on en exporte 8 600 000 francs. Au Dane-
mark le chiffre d'exportation atteint annuellement
178 millions de francs. A ce que l’on dit, il y aurait
à Constantinople un entrepot frigoritique où l'on
emmagasine plus de 75 millions de caisses d'ufs,
chaque caisse contenant 100 œufs.
Malgré tout, des progrès restent encorc à réaliser
dans cette voie pour favoriser au maximum la
fabrication des biscuils, des pâles alimentaires, de
la pâtisserie, etc. Les entrepüts frigorifiques sonl
encore très peu nombreux, et, d'ailleurs, le pro-
cédé ne pourra ètre mis à la disposition de tout le
monde.
D'aucuns prétendent que l'application pure et
simple du froid n'est pas parfaite, car une basse
température, si celle s'oppose à un certain degré au
-. —
développement des germes nuisibles, n'empêche
pas les phénomènes d’oxydation de se produire
dans l'intérieur de la coquille, pas plus qu'elle
n'empêche intégralement l'évaporation.
M. Fernand Lescardé a donné un mode opéra-
toire qu'il aurait d'ailleurs fait appliquer notam-
ment à l'usine de Coindres, à Chåtellerault et au
frigorifère de Courtrai en Belgique.
Les œufs conservés par cette méthode, dit l’au-
teur, peuvent atteindre sur Îles marchés des prix
très élevés, car ils peuvent être mangés à la coque.
Leur chambre est très petite, el au mirage rien ne
les différencie des œufs fraichement pondus. Les
frais de traitement sont de 2 francs par mille, plus
0,65 fr pour la même quantilé et par mois de
séjour au frigorifique. Pour une conservation de
neuf mois le benéfice réalisé peut être évalué à
34,15 fr par mille, cela pour des œufs payés 68 francs
par mille.
La méthode consiste à tenir l'œuf dans une
atmosphère inerte de gaz carbonique et d'azote.
La voici dans ses grandes lignes, les précautions
d'usage de triage et autres étant les mêmes que
pour les procédés connus de conservation. Les
œufs sont mis dans des caisses en fer-blanc de
40 kilogrammes en contenant 500. Ces caisses sont
ensuite entourées de deux chapes en bois à claire-
voie, l'une, extérieure, qui permet l’arrimage dans
les chambres froides, l'autre, intérieure, qui facilite
la circulation de l’atmosphère gazeuse autour des
œufs. On met à l'intérieur un peu de chlorure de
calcium anhydre qui absorbe l'humidité, puis on
soude le couvercle en laissant un petit trou de
> millimètres. Les caisses sont alors introduites
dans un autoclave horizontal dans lequel on fait le
vide. On enlève ainsi l’air qui entoure les œufs et
les gaz en dissolution dans l’albumine. On intro-
duit ensuite du gaz carbonique préalablement
réchauffé. On opère ainsi lentement pour per-
mettre au gaz de pénétrer dans l'œuf, jusqu'à ce
que le manomètre reste stationnaire. On évite
l'excès de pression qui pourrait nuire à la qualité
de l'aliment. Avec une pompe à vide on enlève une
certaine quantité de gaz carbonique que lon rem-
place par de l’azote comprimé. On sort alors les
caisses de l’autoclave, on met un grain de soudure
sur l'ouverture du couvercle, et on entrepose en
chambre froide à + 2°. On n'a plus, ici, à se préoc-
cuper de la ventilation des locaux ni du degré
hygrométrique de l'air.
Les avantages de ce système, dit l’auteur, sont
les suivants: il n'y a plus d’évaporation à la sur-
face des œufs; pas de phénomène d’oxydation, par
conséquent, les œufs n’ont pas le goùt de vieux;
on peut les manger à la coque, même après dix
N° 1439
mois, et l’albumine conserve la belle couleur blan-
chatre qu'elle a dans les œufs fraichement pondus.
Les œufs peuvent attendre un certain temps à leur
sortie des chambres froides avant d’être livrés à la
consommation. l! nen est pas de mème des œufs
conservés par le froid seul. Les bacilles, bactéries
et moisissures sont anéantis par la basse tempé-
rature et le milieu gazeux antiseptique, done pas
d'œufs moisis ni pourris, pas de déchet. Le prix de
COSMOS
209
revient n’est pas très supérieur à celui de la con-
servation par le froid seul. La caisse en fer-blanc
contenant 500 œufs coûte 8 francs. Le logement
de 1000 œufs revient donc à 16 francs. Ces caisses
peuvent durer dix ans.
Nous avons dit que, tous frais compris, la dépense
supplémentaire se monte à 2 francs par mille œufs.
SANTOLYNE.
Les appareils de culture à vapeur.
Les applications du machinisme à l’agriculture
peuvent ètre classées en deux catégories bien dis-
linctes :
D'une part, les machines destinées à l'exécution
des travaux agricoles proprement dits, la prépara-
tion du sol et la distribution de l’engrais, l’ense-
mencement et la plantation, la moisson et la re-
colte; :
D'autre part, les machines pour l'exécution des
opérations ayant pour but de tirer parti des pro-
duits de l’agriculture, pour les transformer en pro-
duits commerciaux; le battage, la mouture, le net-
toyage, ainsi que les machines servant à l’exécution
des travaux de la ferme, la traite, la préparation
des aliments, la préparation du lait et la fabrica-
tion du beurre, etc.
Nous mettrons à part les appareils de manuten-
tion, qui constituent des applications d'un autre
ordre.
Dans la première catégorie ci-dessus se rangent
les machines fonctionnant en plein air et ayant à
desservir des étendues de terrain plus ou moins
considérables, des machines qui doivent autant
que possible être à mème d'assurer leur propre
propulsion.
On peut remarquer que le travail de la plupart
d'entre elles ne s’effectue pas sur place, et que s'il
demande une certaine puissance mécanique, celte
puissance est précisément absorbée par les mou-
vements de translation.
C'est parce que la charrue ne retourne pas con-
stamment la terre au même endroit, c’est parce
que la machine à distribuer les engrais se déplace
dans toute l’étendue du terrain à amender, c'est
varce que les moissonneuses ont à aller d'un bout
à l'autre du champ, etc., qu'il faut fournir à cha-
cune de ces machines une puissance relativement
considérable.
C'est, en outre, des déplacements que ces ma-
chines doivent effectuer que résultent les difficultés
que l'on éprouve à réaliser des appareils répondant
parfaitement aux exigences de la pratique, difi-
cultés d'autant plus grandes, on le conçoit facile-
ment, qu'en agriculture les conditions d’exploita-
lion sont ordinairement très défavorables sous le
rapport pécuniaire. E
Dun autre còté, à la similitude qui existe ainsi
entre leur mode d'action, les machines agricoles
de la première catégorie, les seules dont nous
nous occuperons ici, doivent l’un des facteurs les
plus importants de leur succès.
Supposons, en effet, que l'on ait réalisé un sys-
tème de propulsion convenable. un système de
lrarteur, de propulseur ou de tirage approprié,
pour l’une quelconque des machines envisagées;
ce même système conviendra pour les autres, toute
question de puissance à part.
Comme nous venons de le voir, au point de vue
mécanique, le travail à exécuter ne représente
lui-même qu'une parlie accessoire de la tache
imposée à la machine, et ce travail peut être aisé-
ment emprunté, sous quelque forme qu'il soit
effectué, au système de translation.
En d'autres termes, l'application du machinisme
aux travaux dont il s'agit n'est qu'une amélioration
de la traction animale: admettons que lon ait
installé un système capable d'assurer la translation
dela charrue: on pourra facilement l'employer pour
le deplacement des semoirs, des planteuses, etc.,
el le problème posé sera complètement résolu.
Les solutions possibles se divisent en trois caté-
garies, selon que l'on adopte l'un ou l'autre des
trois procédés déjà mentionnés plus haut : propul-
sion, traction ou tirage.
Le premier procédé consiste à pourvoir la ma-
chine à actionner d’un engin de propulsion qui la
rende automobile; le second emploie une marhine
locomotrice remorqnant jla machine agricole; le
troisième produit le déplacement de celle-ci en la
tirant alternativement dun coté et die l'autre.
Lon a fait des essais: nombreux des deux pre-
miers procédés en ‘recourant aux appareils pro-
pulseurs les plus perfectionnés. Mentionnons
notamment, pour rappel, les expériences effectuées
par la Perdue University au moyen d'une charrue
à cinquante socs tirée par trois tracteurs. (est
néanmoins le troisième système qui a ‘lonné jus-
qu'ici les meilleurs résullats el qti cst le plus
210 COSMOS
répandu; les deux autres souffrent de l'infériorité
où les met la nature des terrains de culture, géné-
ralement peu propre au fonctionnement d’appareils
automobiles, et qui se fait sentir désavantageuse-
ment, quelque remarquable que soit en lui-même
l'appareil de propulsion ou de traction.
Le troisième procédé a surtout été réalisé jus-
qu'ici au moyen de la vapeur. Dès le commence-
ment du siècle dernier, on avait songé à tirer
parti de la machine à vapeur pour l’actionnement
des appareils agricoles, et surtout on en avait
étudié pratiquement les applications. C'est en
Angleterre, pays des grands domaines terriens,
que cette question avait été approfondie, comme
22 aAOUT 1912
celle des machines agricoles d’ailleurs, et c’est à
un Anglais, M. John Fowler, que revint d'inventer,
en 1850, et d'introduire dans la pratique des
machines qui rendirent la culture à la vapeur
réellement pratique et économique; ces machines
n'ont cessé d’être utilisées depuis; elles étaient si
bien conçues qu'en dehors des modifications d’un
caractère général résultant de l’amélioration de
l’outillage mécanique, elles n'ont pour ainsi dire
point été transformées dans leurs principes.
Elles sont trop bien connues, depuis soixante
ans qu'elles sont en usage, pour que nous nous
supposions autorisés à en reprendre la description;
si nous y sommes revenus, ce n'est au surplus que
APPLICATION DU LABOURAGE A DEUX MACHINES AVEC UNE CHARRUE A 10 SOCS.
pour faire ressortir la différence caractéristique
qui existe entre les machines anciennes et d'autres
systèmes plus récemment apparus.
Le labourage à la vapeur s'applique suivant deux
systèmes :
1° Le système à deux machines;
2° Le système à une machine.
Dans le système à deux machines, les machines
aratoires sont tirées à travers le champ au moyen
de machines appropriées, munies d’un treuil action-
nant des câbles spécialement fabriqués, chaque
machine tirant alternativement.
Dans le second système, il n’y a qu’une machine,
à l’un des bouts du champ; si l’on veut travailler
dans les deux sens, la machine doit ètre munie de
deux treuils superposés et de deux longueurs de
câble allant se rattacher à l’autre bout à une ancre
automatique de fabrication spéciale, qui remplace
la deuxième machine du premier système; l’un
des câbles tire l'instrument vers la machine, l’autre
vers l'ancre; si l’on se contente de travailler dans
un sens, au lieu d’ancre on emploie une poulie de
renvoi que l'on déplace au fur et à mesure des
besoins le long d’une chaine ancrée en terre à
l'autre bout et faisant face à la machine.
Dans les trois cas, la machine est automotrice
et se déplace d’elle-même au bout ou sur le côté
du champ; elle peut effectuer des déplacements à
grande distance en transportant tous les appareils
nécessaires.
La distance entre les deux machines ou entre la
machine et l’ancre doit être aussi grande que pos-
N° 1439
sible, de manière à réduire au minimum les ma-
næuvres nécessaires; avec le système à deux
machines, on peut placer les appareils à 500, 600
et même 700 mètres de distance.
Dans le système à une seule machine, la dis-
tance est nécessairement un peu moindre. L’ancre
utilisée éventuellement dans ce système se meut
le long de la fourrière par le tirage direct du
càble; elle est munie de crocs qui l'empèêchent de
faire aucun mouvement en avant, jusqu’à ce qu'ils
soient relevés par le câble; le mouvement s'effectue
automatiquement au moment où la chaine arrive
près de l’ancre, laquelle se déplace jusqu'à ce que
la machine soit arrêtée.
RS
COSMOS
211
Dans certains pays, aux Antilles notamment, les
canaux de drainage et d'irrigation sont employés
pour la circulation du matériel de culture à la
vapeur, et les machines sont fixées dans des pon-
tons spéciaux.
L'installation molrice actuelle est formée d’une
machine compound à deux cylindres placés côte
à côte et entièrement entourés d'une chemise de
vapeur qui peut à volonté envelopper ou non les
boites des tiroirs.
Au début, les constructeurs employaient des
machines à double cylindre; comme la course du
piston est nécessairement courte et comme la pres-
sion de vapeur doit être élevée, ce type ne travail-
APPAREIL DE CULTURE A VAPEUR FOWLER, SUR UN PONTON, EMPLOYÉ AUX ANTILLES,
lait pas économiquement, et il fut reconnu préfé-
rable de le remplacer par une machine à un
cylindre; plus tard encore, vers 1880, ce dernier
système lui-même a été remplacé par la disposition
qui est aujourd'hui en usage ; celle-ci a un rende-
ment nettement supérieur et elle est d'une mise
en marche facile.
Le foyer est ordinairement alimenté au char-
bon; on peut toutefois y adapter des appareils spé-
ciaux pour chauffer au pétrole (pétrole brut, pétrole
rafliné, résidu de naphte, huile verte, créo-
sote, elc.), au bois, à la paille, etc.
La charrue peut être d’un type quelconque, et
choisie uniquement en tenant compte du travail
à effectuer; elle peut d’ailleurs être remplacée, en
vue de l'exécution d'opérations autres que le
labour, par un arrache-pierre, un extirpateur, un
scarificateur, une déchaumeuse, un cultivateur,
une billonneuse, une herse, un rouleau, une char-
rue-pelle, une draineuse, une niveleuse, une arra-
cheuse de betteraves, etc. g
Nous étudierons dans un prochain travail, spé-
cialement consacré à cette question, les consé-
quences économiques de l'application du machi-
nisme en agriculture et nous verrons, à cette occa-
sion, quels sont tous les avantages des procédés
de cullure mécaniques.
Qu'il nous soit permis cependant de rappeler
dès à présent les principales qualités techniques
du travail mécanique, en ce qui concerne particu-
lièrement le labourage à vapeur.
En premier lieu, le travail mécanique permet
212
d'exécuter des labours beaucoup plus eflicaces que
le labourage animal; avec des appareils trainés
par des animaux, on ne peut faire que des labours
peu profonds; avec des machines tirées par un
câble, le travail se fait pratiquement à telle pro-
fondeur que l'on veut.
Les terres travaillées à la machine et profondé-
ment remuées sont beaucoup plus productives:
elles sont soustraites dans une large mesure aux
effets désastreux que peuvent avoir pour les autres
les grandes sécheresses ou les grandes pluies.
Il arrive souvent, dans les terres labourées
depuis longtemps avec des animaux, qu'il se forme,
à quelques centimètres de profondeur, par suite
du piétinement des bêtes, au-dessous de la terre
meuble, une couche dure qui empèche les racines
de pénétrer dans le sous-sol, et fait aussi obstacle
à l'infiltration rapide des pluies, et lorsque le
mauvais temps se prolonge, le sol devient si
humide que les racines pourrissent et sont dé-
truites. Au contraire, si la couche meuble est pro-
fonde, en temps de pluie l’eau pénètre jusqu'aux
couches inférieures sans gèner la croissance de la
récolte, tandis qu'en temps de sécheresse le sol
profondément remué forme un réservoir naturel
et conserve l'eau emmagasinée comme dans une
éponge.
Ces remarques sont particulièrement importantes
pour les pays où les condilions climatiques ne
COSMOS
22 aouT 1912
comportent pas les variations fréquentes auxquelles
nous sommes accoutumés dans les régions tempé-
rées; lon cite le cas de cultures dans l'Afrique du
Sud, qui ne fournissaient absolument rien lorsque
les terres étaient labourées par des bœufs, mais
qui ont donné une bonne moyenne de récolte dés
que l'on a appliqué le labourage mécanique.
Ce n'est pas d'ailleurs pour cette seule raison
que le labourage mécanique est favorable au déve-
loppement des plantes.
Le travail à la machine a aussi pour conséquence,
étant plus rapide que le travail animal, de per-
mettre de déchaumer les champs très prompte-
ment après la récolte et de laisser ainsi les terres
plus longuement exposées aux actions atmosphé-
riques.
Au point de vue mécanique, il a un rendement
meilleur que le procédé ordinaire; l'expérience
démontre que plus la largeur de labour à chaque
passe est grande, plus les efforts à développer sont
uniformes: il y a toujours des obstacles dans le sol:
lorsque l'on n’exécute qu'un sillon à la fois, ces obs-
tacles donnent lieu à des à-coups préjudiciables et
qui occasionnent de grandes pertes; lorsque l'on
en fait plusieurs, ils deviennent moins sensibles.
Enfin, le procédé mécanique permet de défri-
cher économiquement des terres qu'il serait très
difficile, sinon impossible, de mettre en cullure
avec les procédés anciens. IH. Marcuaxn.
mn
LES NOUVELLES THÉORIES DE LA MATIÈRE
L'éther. — L'électricité. — Le magnétisme.
l. L'éther :
Je rôle de l'éther en physique.
Avant le xixe siècle, on admettait en physique,
outre la matière, un cerlain nombre d'agents doués
de propriétés caractéristiques : aux quatre éléments,
l’eau, la terre, l'air et le feu, avaient succédé les
six agents impondérables producteurs des phéno-
mènes : le calorique, la lumière, deux agents élec-
triques et deux agents magnétiques. À la fin du
xixe siècle, une seule substance — hypothétique.
evidemment — l'éther, remplaçait toutes les autres.
On sait combien admirable a été cette hypothèse et
quels merveilleux résultats elle a produits.
Aujourd'hui, depuis la découverte des ravons
calhodiques el de la radio-activité, les anciennes
théories ne paraissant plus suflisantes ont été mo-
difiées. Les paénomenes lumineux, électriques,
magnétiques... ne sont plus considérés comme
résultant seulement de déformations statiques et de
perturbations dynamiques de l'éther: certains phy-
siciens admettent que l'électricité — au moins
l'électricité négalive — est une substance particu-
hère, l'électron. On aurait donc actuellement
quatre agents « ofliciels »: lelectron, l'atome
d'électricité positive, l’éther et la matière.
Ce concept est d'ailleurs loin d'ètre universelle-
ment adopté. Pour certains savants, l'atome n'est
plus indivisible; dans certaines conditions, il se
décompose, et les électrons qui le constituent se
dispersent. Pour dautres, l'énergie rayonnante
elle-mème a une structure atomistique. Les quanta
seraient les quantités élémentaires d'énergie. Entin,
il en est qui suppriment complètement l'éther.
Dans une note parue en 41908 (Scientia), le physi-
cien suisse, mort prématurément, Walther Ritz,
exposait cette doctrine. Mettant en présence lune
de l'autre l'hypothèse atomique et l'hypothèse de
l'éther, il écrivait:
«a Nees toutes deux de conceptions métaphvsiques,
elles ont connu dans le cours des temps des vicis-
situdes nombreuses, et l'expérience aussi bien que
la critique leur ont fait, pendant ces dernières
No 1439
années, un sort très inégal. On sait combien a été
féconde, dans presque tous les domaines de la
physique et de la chimie, la conception atomique,
et le développement qu'a pris récemment la théorie
des ions et électrons a constilué un nouveau
triomphe de cette conceplion en nous faisant
presque toucher du doigt l'existence de charges
électriques atomiques. Cependant, la critique phi-
losophique semble encore à l'heure qu'il est ne pas
pouvoir pardonner entièrement à cette hypothèse
ses origines un peu douteuses. M. Ostwald, en par-
ticulier, la traite avec une sévérité qu'il est loin
d'appliquer à d’autres conceptions, et en particu-
lier à celle de l'éther. C'est à peine si la critique
a eflleuré cette dernière. Le succès de la théorie
ondulatoire de la lumière et, plus récemment,
celui de la théorie de Maxwell ont fait taire les
objections, et l’on ne s’est guère demandé dans
quelle mesure cette notion d'éther, essentielle, il
est vrai, dans la forme actuelle de ces théories, est
aussi exigée par l’expérience, indépendamment de
cette forme particulière. Et cependant, une brève
analyse historique suffira à nous montrer combien
peu, en vérité, l'hypothèse de l'éther mérite la
faveur universelle qui lui est accordée. »
En prenant comme point de départ le fait que
l'éther n’a acquis droit de cité en physique qu avec
Huyghens, créateur de la théorie ondulatoire de la
lumière, Ritz vient à examiner le motif qui a porté
Newton à rejeter les conceptions de Huyghens. Il
montre qu’à cause de la grande autorité de Newton,
l'éther ne joua, dès lors et pendant près d'un
siècle, qu'un rôle extrêmement modeste, jusqu’à
ce que les travaux de Fresnel le remirent en hon-
neur et donnèrent une immense supériorité aux
conceptions de Huyghens sur celles de Newton. Et
il ajoute, au sujet de Fresnel : « C’est au sans-gène
génial avec lequel le grand savant traila ce côté
de la théorie qu’il faut attribuer une partie de son
succès. Uniquement guidé par l’étude des phéno-
mènes, il en chercha et en trouva les lois mathé-
maliques, qu'on peut exprimer, sous leur forme la
plus générale, par une certaine équation aux déri-
vées partielles du second ordre, et par certaines
conditions auxquelles la lumière est assujettie lors-
qu’elle se trouve à la surface de séparation de
deux corps différents ou d'un corps et de l’éther.
La difficulté de faire mouvoir librement les corps
à travers un éther solide ne l'arrêta pas; il admit
mème, pour expliquer l’aberration, que l'éther ne
partage pas le mouvement de la Terre dans son
orbite, en sorte que tous les objets et l'air qui nous
entoure seraient parcourus par un vent d’éther à la
vitesse de 30 kilomètres par seconde, sans que
nous puissions nous en apercevoir, même par les
expériences les plus délicates. »
Ces idées sont également celles du physicien
genevois Th. Tommasina, qui, depuis dix ans, tra-
COSMOS
213
vaille à éliminer de la physique « l’ancien concept
mélaphysique de l'éther ainsi que toutes les défi-
nilions qu'on a cru pouvoir en donner ».
M. Tommasina ne croit pas que le concept d'un
éther solide existät à l'époque de Fresnel; ce der-
nier aurait eu au moins des doutes à ce sujet en
admeltant que l’éther ne partage pas le mouvc-
ment de la Terre dans son orbite; car on doit
admettre que l’éther, sans se déplacer lui-même,
possède des activités internes qui, par des pressions
résultant de modifications électro-magnétiques,
transportent la Terre dans son orbite, ainsi que le
Soleil et tous les astres de l'univers, aucune excep-
tion n'étant admissible.
Dans la note parue le 20 février 4908 dans les
Archives des sciences physiques et naturelles de
Genève, M. Tommasina exposait ainsi les argu-
ments qui militent en faveur de son opinion:
« La constatation expérimentale des pressions
mécaniques exercées par le rayonnement lumineux
sur les corps nous a révélé sa forme cinétique. Or,
celle-ci nous fournit le mécanisme vrai des radia-
tions électro-magnétiques, puisqu'elle nous donne
la trajectoire de l’énergie dans le rayon élémen-
aire d'un faisceau de radiation. L'élément qui
vibre transversalement, pour produire une poussée
longitudinale, c’est-à-dire dans le sens de propaga-
tion de la lumière, doit parcourir, non pas une
orbite elliptique fermée, comme on l’a cru jusqu'ici,
mais une orbite ouverte constituée par une ou
plusieurs spires de solénoïde. C’est le chemin que
doit suivre l'énergie radiante, représentée par la
vitesse de déplacement de la charge électrique été-
mentaire qui constitue un électron dont la marche
donne licu ainsi aux pressions Maxwell-Bartoli,
conslatées expérimentalement et mesurées par
M. Lebedetf en 1900, par MM. Nichols et Hull en
4901, et par M. Poynting en 1904.
» 11 n'existe donc pas, ce milieu sans résistance
ni activité propre, qui pénètre les corps, remplit
l'espace, et que les radiations ne font que traverser
en le modifiant momentanément, mais il y a, au
contraire, un milieu incessamment actif que ces
mêmes radiations constituent, puisque le rayonne-
ment des innombrables soleils ne saurait admettre
aucune discontinuité dans sa transmission par
rapport au temps et à l'espace. Ce milieu inter-
stellaire est homogène et isotrope à cause de
l’entre-croisement des radiations, tout en élant
constitué par un agglomérat de mécanismes énor-
mément condensés, soit par le nombre immense
d'éléments actifs en chaque millimètre cube que
l’on doit y reconnaitre, soit par les trillions de
vibrations par seconde qui s’y produisent. Or,
comme la masse de chacun de ces éléments est
électro-magnétique, et comme les résultats des
expériences de Kaufinann ont permis d'établir que
la masse électro-magnétique est foncliun de la
214
vitesse et que, pour une vitesse égale à celle de la
lumière, elle serait infinie, ce qui est précisément
le cas ici, il en résulte que la résistance de l'éther
est infinie au lieu d’être nulle, et que les astres,
de même que les atomes des corps, ne se déplacent
pas au travers de l’éther par leurs forces propres,
mais sont déplacés par l'éther, c'est-à-dire par ce
qui se passe dans l'éther et qui le constitue (4). »
Et, dans un article récent de la Revue polytech-
nique (10 mars 1912), M. Tommasina ajoute:
e Aucune hypothèse explicative physique ne doit
èlre envisagée comme une image simplement
abstraite, sans rapport avec la réalilé, mais tou-
jours comme une supposition d'un mécanisme réel
pouvant produire le phénomène, ce qui n’empèche
pas que cette hypothèse aussi ne puisse être écartée
et remplacée par une autre supposition, même très
différente, lorsque la découverte de faits nouveaux
ou d’autres lois obligera de le faire. Mais, tant
que l'hypothèse se maintient, on doit y voir Ja
réalité possible. En effet, ce n’est qu’en considérant
le vrai substratum mécanique du phénomène phy-
sique qu’on peut vérifier si les lois connues lui sont
applicables et si, en agissant d’après ces lois, il
peut produire toutes les modifications phénomé-
nales que l'expérience nous montre. Ce nest que
d'après cette manière d'envisager l'hypothèse phy-
sique qu’une discussion sur sa probabilité peut se
faire sérieusement et d’une facon claire et résolu-
tive, amenant un résultat net et décisif. »
Walther Ritz terminait son article de Scientia
par cette conclusion : « Concluons. L'expérience ne
nous a jamais révélé trace de quelque chose qui
subsisterait dans les espaces vides de matière au
COSMOS
22 aouT 1912
sens ordinaire. Il nous sera toujours loisible,
cependant, d'y supposer un intermédiaire servant
de véhicule aux actions des corps les uns sur les
autres, et cette conception pourra même être fort
utile, à la condition de ne pas trop la prendre au
sérieux, c'est-à-dire de ne pas oublier qu'il s'agit
d’une simple construction mentale et non d'une réa-
lité, construction qu'il faudra abandonner, pour la
remplacer par une autre, dès que l'expérience ou
l'économie de la pensée l'exigera. »
Et M. Tommasina paraphrase, à son tour, celte
conclusion de la manière suivante :
L'expérience ne nous a jamais révėlé trace quel-
conque de phénomènes qui subsisteraient dans les
espaces vides de subslance matérielle. Il nous faut
donc forcément supposer l'existence d’un intermé-
diaire matériel servant de véhicule aux actions
des corps les uns sur les autres, qu'ils soient des
corps terreslres ou des astres.
Le mécanisme intermédiaire qu'on supposera
pourra ne pas correspondre exactement au méca-
nisme réel qui existe sürement; aussi les hypo-
thèses sur sa nature spéciale devront-elles changer
au fur et à mesure que des faits nouveaux nous
l'imposeront. Dans l'état actuel de nos connais-
sances, ce mécanisme est le mécanisme électro-
magnétique de la propagation de la lumière et de
la chaleur rayonnante...…
Nous devons donc avoir toujours présent à l'esprit
que ce n'est pas là une conception utile ni une
simple construction mentale, mais une réalité dont
nous connaissons l'existence et dont nous établirons
peu à peu la forme vraie d'après les résultats suc-
cessifs de l'expérience. A. BERTHIFR.
La flore des montagnes.
Parmi les nombreux plaisirs que les montagnes
procurent aux touristes, l’un des moins à dédaigner
est certaincment la vue des fleurs qui garnissent
leurs pentes et Ja joie que l’on éprouve à les
récolter et à les conserver. (est qu’en effet, les
plantes des altitudes élevées diffèrent du tout au
tout de celles que nous avons habitude de voir
dans les plaines. Tandis que ces dernières sont géné-
ralement longues et souples, celles qui gazonnent
les prairies alpestres sont rabougries. chétives,
quoique d’un vert intense; leurs rameaux sont si
coriares que le vent le plus violent ne les fait
remuer qu'à peine, et leurs racines sont si longues
que l'on a toutes les peines du monde à les arracher.
En ontre — et c'est là lenr principale particularite,
— tandis que les plantes des champs et des bois
(1j Tu. Tomwasixs, Société de physique et d'histoire
Naturelle, séance du 206 février 1908; .{rrhives, mars
1908, p. 207-300,
ont généralement des fleurs aux teintes, sinon
päles, du moins délicates, celles des montagnes
ont des fleurs aux teintes éclalantes, crues, qui
étonnent..... et détonnent. Je comparerais volon-
tiers les fleurs de plaines au visage clair, souvent
anémique, des Parisiennes, et les fleurs de mon-
tagnes à la face rubiconde des villageoises. Leurs
fleurs sont d’ailleurs de grande taille et paraissent
d'autant plus volumineuses que les tiges qui les
supportent sont plus rabougries. Rien n'est plus
curieux que de voir des plantes pas plus grandes
que le doigt porter des fleurs deux fois grandes
comme elles, ou de petits buissons gros comme une
pomme disparaitre littéralement sous les fleurettes
qui s'y développent.
On rencontre là des teintes invraisemblables, le
jaune soufre chez l’anémone soufrée, l'adonide de
printemps, la boule d’or, l'aconit anthora, la vio-
lette à deux fleurs (des violettes jaunes!}, le
N° 1439
buplèvre étoilé, l'arnica des montagnes (dont on
fait le médicament du même nom); la gentiane
jaune (de laquelle on tire l’eau-de-vie de gentiane);
Ja renoncule thora (si vénéneuse, que les anciens
guerriers trempaient dans son suc le fer de leurs
flèches); le rose chez lu renoncule glaciale, les
silènes, l’immortelle des montagnes; le blanc chez
la renoncule des Alpes, le pavot des Alpes; le blanc
plus ou moins lavé de diverses teintes chez les
nombreuses saxifrages et bien d'autres espèces; du
bleu idéal se montre, avec une intensité remar-
quable, chez l’ancolie des Alpes, l’astragale des
Alpes, les raiponces, les admirables gentianes, les
troublants myosotis, les délicates véroniques, du
violet ou du lilas chez le tabouret lilas, lesi recherché
chardon bleu, l’adénostyle velue, l'aster des Alpes,
la vergeretle des Alpes, diverses campanules, la
gracieuse soldanelle des Alpes, les globulaires, du
rouge vif, allant même jusqu’au carmin, chez le
faux buis, l’œillet des Alpes, l'épilobe des graviers,
l’airelle des marai:, la bruyère incarnate, l'azalée
des Alpes, le rholodendron ferrugineux, la pédi-
culaire verticillée, l'androsace des glaciers; du
brun chez beaucoup d’orchidées, par exemple,
l'orchis vanille — ainsi nommée à cause de son
odeur suave — des pâturages alpins et le sabot
de Vénus, à la grande fleur fantastique, que l’on
peut récclter dans les lieux ombragés des mon-
tagnes calcaires, de 500 à 1 800 mètres.
Le « nanisme » des plantes alpines est si général
qu'il s'étend même à des familles qui ne renferment
que des arbres. C'est ainsi que, vers 2000 mètres
d'altitude, on rencontre des saules nains, rampant
et s'élevant à peine à quelques centimètres. A côté
d'eux se montrent des bouleaux nains, des azalées
minuscules, des arbousiers invraisemblablement
petits. Plus on s'élève, plus ce nanisme s'accentue,
et, dans les régions tout à fait élevées, on n'a plus
que de toutes petites plantes tassées frileusement
les unes contre les autres et formant, par leur
ensemble, un véritable tapis feutré. M. Gaston
Bonnier a fait voir que ce rabougrissement est du
au climat et non au terrain. En cultivant dans les
basses altitudes des plantes de montagnes enlevées
avec leur terre, il les a vues prendre les caractères
des plantes de plaines. L'expérience inverse a non
moins bien réussi.
Beaucoup de plantes alpines sont couvertes de
poils blancs, d’un véritable duvet, qui, semble-t-il,
est destiné à les protéger du froid des nuits. Le
cas le plus classique est celui de l'edelweis, le Leon-
topodium alpinum des botanistes, que tous les
touristes sont fiers d’avoir cueilli sur les Alpes,
parce qu'ils le considèrent comme caractéristique
de cette région (alors qu'il est, en réalité, des
plus cosmopolites), et parce que sa fleur ne se
flétrit pas et constitue une immortelle très
appréciée, il n’est pas non plus jusqu'à son nom
COSMOS
215
vulgaire d' « étoile du glacier » qui ne lui donne
des allures conquérantes bien faites pour séduire
les Tartarins qui sommeillent en nous. Certaines
plantes, au lieu de se vêtir entièrement de poils,
ne sen recouvrent qu'en parlie, c'est le cas des
rhododendrons — arbrisseaux bien connus égale-
ment des touristes sous le nom de roses des Alpes,
— dont les feuilles sont recouvertes à la face infé-
rieure d'un épais feutrage de poils roux, ferrugineux.
À ciler encore au mème point de vue la joubarbe
aranéenne, petile plante grasse semblable à un
artichaut, dont les sommets des feuilles sont réunis
entre eux par de longs filaments blancs, semblables
à de fins fils d'araignée.
La constitution géologique d'un sol aussi boule-
versé que celui des montagnes étant généralement
très différente d'un point à un autre, la flore en est
très variée.
Dans les lieux humides ou surtout frais, on peut
récolter la renoncule à feuilles d’aconit, la boule
d'or, l’arabette à feuilles de pâquerette, la méringie,
le sainfoin à fleurs sombres, la saxifrage en étoiles,
l'airelle des marais, la primevère farineuse, les
pédiculaires au feuillage élégamment découpé, des
fougères d’une délicatesse infinie, des myosotis
constellés de fleurs bleues, des primevères aux
corolles généralement roses.
Dans les pâturages des montagnes calcaires, on
trouve l’anémone à fleur de narcisse, l’anémone
des Alpes, la renoncule thora, la gypsophile ram-
pante, l’œillet des Alpes, la saponaire faux-basilic,
l'edelweis, la primevère de Clusius.
- Dans les terrains granitiques se rencontrent
anémone de printemps, l'anémone soufrée, le
silène des rochers, la sabline à deux fleurs, le
géranium à feuilles d'aconit, la benoite rampante,
l'orpin bleu, l'arnica, le rhododendron ferrugineux.
Dans les rochers calcaires il faut cueillir le
cranson, la drave des rochers, le silène découpé.
Dans les hautes régions, peu de personnes
peuvent dire avoir récolté la renoncule glaciaire,
le lychnis des Alpes, le myosolis nain, l'androsace
de Suisse, l’androsace des glaciers.
Dans les lieux ombragés, il faut citer l’ancolie
des Alpes, la violette à deux fleurs, et, sur la
lisière des bois rocailleux, l'astragale des Alpes.
Dans les pierrières et les fentes de rocher, on
extrait difficilement le pavot des Alpes, le siitne
d'Elisabeth, la potentille ascendante, ia saxilrage
des Pyrénées, la saxifrage bleuälre, la campanule
de Rainer, l'érine des Alpes.
Sur les pentes rocailleuses et les éboulis, régions
peu riches, on peut cependant trouver l'alysse des
montagnes, le vélar jaune, le tabouret lilas.
Les bois, taillis et clairières des régions monta-
gneuses sont à explorer pour récolter ræillet
superbe, la pyrole unilatérale, la pyrole à une
fleur.
216 COSMOS
Enfin. n'oubliez pas les moraines et les graviers
qui donnent l'épilobe des graviers, l'armoise en
épi et plusieurs autres espèces que l'on chercherait
vainement ailleurs.
Ce qui règle surtout la distribution géographique
des plantes alpines est la présence ou l'absence de
silice ou de calcaire dans le sol. Si celui-ci provient
de la désagrégation des granits et autres roches
analogues, la terre est siliceuse; si elle provient
de roches sédimentaires. elle est uniquement cal-
caire. Or, s'il est un certain nombre de plantes
indifférentes à cette constitution chimique, il en est
bon nombre d’autres pour lesquelles elle constitue
une question de vie et de mort: aux unes il faut
du calcaire, aux autres de la silice (ou, pour parler
plus exactement, pas de calcaire). Cette affinité
se montre mème chez des espèces très voisines :
c'est ainsi que, dans le vallon de Fully, sa gauche
— qui est calcaire — est recouverte d'anémones
blanches, tandis que sa droile — qui est siliceuse
— est recouverte d'anémones jaunes.
Les espèces aimant la silice sont surtout des
fougères, des éricacées, des vacciniées et quelques
campanules, silènes, œillets, gentianes, prime-
vères. Les espèces qui la fuient sont moins nom-
breuses; parmi elles, citons l'androsace laiteuse,
l’anémone des Alpes, l’œillet des Alpes, la gentiane
jaune, la primevère à oreilles, le rhododendron
poilu, la saxifrage à longues feuilles, le silène
alpestre, la véronique des rochers, la campanule
thvrsoïde.
Parfois on rencontre des espèces silicicoles au
beau milieu d'espèces silicifuges: en grattant le
terrain, on s'aperçoit alors qu'elles reposent en
réalité sur des amas isolés de roches sans chaux.
De telles oasis se rencontrent très fréquemment
dans le Jura où elles sont largement — trop large-
ment — mises à contribution par les botanistes et
les simples touristes.
A part les euphraises et quelques gentianes aux
corolles délicieusement bleues, la plupart des
plantes alpines sont vivaces, c’est-à-dire qu'elles
vivent plusieurs années. La première année, elles
ne poussent que des feuilles: les suivantes. elles
développent des fleurs. En hiver, c'est-à-dire pen-
dant la plus grande partie de l'année, leur souche
persiste seule dans le sol. Au printemps, ou mieux
en été, elles se hâtent de pousser des rameaux
aériens, mais elles les réduisent à leur plus simple
expression, d’abord parce que le temps leur
manque — lété est court — pour développer de
grandes tiges, ensuite parce qu'il convient de
donner ie moins de prise aux vents robustes et
à leur action dessèchante. C'est pour cette der-
nière raison aussi que beaucoup de plantes des
altitudes élevées forment des « touffes » où les
branches sont tasstes les unes contre les autres et
portent des feuilles non moins empilées. Au
29 AOUT 1919
moment de la floraison, ces boules se recouvrent
de charmantes fleurs de différentes teintes : quel
touriste n’a pas été séduit par les touffes aux fleurs
bleues du « roi des Alpes », les boules aux corolles
roses de l'androsace glaciale, le jaune de la saxi-
frage aphylle, lincarnal de la saxifrage aux
feuilles opposées, et tant d'autres qu'il serait fas-
tidieux d'énumérer ?
Les plantes alpines proprement dites ne se ren-
contrent guère qu’au dessus de altitude de
4 500 mètres. À ce niveau, les conditions météoro-
logiques sont fort différentes de ce qu’elles sont
dans la plaine. La lumière est intense et prolongée.
l'insolation forte, la chaleur vive dans le jour,
froide la nuit, l'humidité faible, mais constante
aussi bien dans le sol que dans l'air, le vent violent.
De plus, les hivers sont longs, passant brusquement
à un été intense, où sont accumulées les circon-
stances favorables à la végétation, c’est-à-dire la
lumière, la chaleur et l'humidité. Aussi, dès que
le fœhn et le srrocco se font sentir, la végétation
sort de terre comme sous l'action d'une baguette
magique : les soldanelles et les crocus jaillissent
mème de la neige non encore fondue, et, en
quelques jours, les rochers se constellent de fleurs.
Contrairement à ce que lona cru pendant long-
temps, la culture des plantes alpines est possible
en dehors des montagnes, et le moindre jardinet
parisien peut s’offrir, moyennant quelques sous,
une petite montagne en miniature. La transplan-
tation directe dans les jardins n’est pas à recom-
mander, parce quelle échoue généralement, à
moins de s'adresser à des plantes arrachées
à l'automne, c'est-à-dire au moment où la végé-
tation est très ralentie. Voici, à ce sujet, quel-
ques recommandations importantes données par
M. Henrv Correvon, directeur du Jardin alpin
d'acclimatation de Genève : « Arracher les plantes
à l'arrière-saison (de septembre en octobre pour
la haute montagne) et prendre, si possible, toutes
leurs racines principales, quon dépouille de la
terre qui les entoure. Enterrer les plantes dans du
sable pur, sous châssis froids, et les y laisser passer
l'hiver à l'abri de l'humidité et presque au sec. Au
printemps (mars), les placer chacune dans un godet
ou pot ou dans un sol composé d’un tiers de ter-
reau de feuilles (de terre de bruyère ou de tourbe
si l'on veut), un tiers de bonne terre fraiche à blé
(ou terre de gazon), un tiers de sable granitique
ou calcaire suivant la nature de l'espèce. Placer
ces pots sous couche froide et ombrager du soleil
dans les premiers jours, puis aérer petit à petit,
et quand le tout est en pleine végétation, sortir et
planter en rocailles ou en pleine terre. Des ouvrages
spéciaux, écrits sur la matière, renseigneront l'ama-
teur sur ce qu'il a à faire dans la suite. Ce système,
s’il offre quelques avantages, a, par contre, de
gros inconvénients; on ne l'utilise, au jardin alpin
Ne 1439
d'acclimatation, que pour certaines plantes trop
longues ou trop difficiles à élever de semis (vec-
ciniées, empétrées, pyroles). Le système du semis
est infiniment préférable; il permet à chacun
d'élever des plantes alpines chez lui, mais il est
souvent long, et pour quelques espèces offre des
difficultés. Règle générale, il faut procéder comme
pour les plantes vivaces : semer sous châssis froids,
en pots ou terrines, dans un sol très léger, sableux,
et encore avec précaution. Cerlaines espèces (les
gentianes, les primevères, les primulacées, etc.)
sont très lentes à germer alors que d'autres (hélian-
thèmes, ancolies, crucifères, violettes, etc.) lèvent de
suite. On repique, comme on le fait pour les autres
plantes, et on cultive en godets avant que de
.—— -a —
COSMOS
217
planter en rocailles ou en pleine terre. En somme,
la presque totalité des plantes alpines sont suscep-
libles d'être élevées de semis. Sans doute, ce pro-
cédé est long et difficile pour plusieurs d'entre
elles, mais il permet d’acclimater la plante plus
facilement et de l'obtenir plus robuste et plus flori-
fère que si on la transplante directement de sa
localité originelle. »
Dans les villes de montagnes fréquentées par les
touristes, on fabrique en grande quantité des
albums où sont collées les principales plantes
alpines, ou, plus exactement, celles qui se con-
servent le mieux. Les plantes rares sont souvent
tellement. recherchées des collectionneurs que l'es-
pèce en disparait. HENRI CouPix.
L'éducation des Esquimaux d’Alaska.
Les États-Unis ont, sur leur territoire, trois
populations de couleur qui posent des problèmes
assez embarrassants. Les nègres, descendants des
esclaves transférés de force sur le sol d'Amérique,
ne se sont encore qu'insuffisamment assimilé la
culture de leurs anciens maitres. Aussi existe-t-il
entre eux et les blancs un antagonisme d'autant
plus prononcé que la population nègre est plus
nombreuse, et, dans les États méridionaux, elle se
manifeste par une séparation presque absolue des
deux races.
Les Indiens, descendants des anciens maitres du
sol, décimés par les conquérants, l'envahissement
de leurs cultures, se sont vu reléguer dans des
« réserves », où un gouvernement paternel leur
permet de continuer, jusqu'au moment de leur
extinction complète, un semblant d'existence indé-
pendante. Empressons-nous d'ajouter qu'une partie
de ces aborigènes, ayant fréquenté les écoles amé-
ricaines, commence à s'accommoder des modes de
vie de leurs maitres.
La troisième population hétérogène est celle de
l'Alaska, territoire à l'extrème Nord, voisin de la
Sibérie. Ce pays, qui jusqu’au milieu du siècle der-
nier appartenait à la Russie, est peuplé par des
tribus d’Esquimaux ressemblant parfaitement à
celles de la Sibérie septentrionale. Or, tandis que
leurs frères à l’ouest du détroit de Behring mènent
encore la vie primitive de leurs pères, les infor-
tunés habitants de l'Alaska, au contact des cher-
cheurs, ont acquis les défauts d'une civilisation
supérieure, tout en se montrant incapables de
s'assimiler ses qualités. Aussi ces gens, déroutés
par ce contact de facteurs si hétérogènes, vivaient-
ils dans la misère la plus atroce. |
Or, le gouvernement américain, conscient de
son devoir d'éduquer cette population el pour en
faire des citoyens utiles au pays, c'est-à-dire pour
des motifs économiques aussi bien qu'humanitaires,
a voulu la ramener à une existence en rapport
avec ses capacités et les conditions physiques du
pays. En s'inspirant de l'exemple des Esquimaux
sibériens, on pensa à en faire surtout des éleveurs
du renne qui; dans certains pays seplentrionaux,
par son lait, sa chair et sa peau, fournit toutes les
TROUPEAU DE RENNES DE L'ALASKA.
ressources d'une vie simple et essentiellement
nomade. L'Office d'éducation (Bureau of Education)
ayant fait transporter sur le sol de l'Alaska un cer-
tain nombre de rennes achetés aux Esquimaux de
Sibérie, on commença la distribution parmi les
habitants du pays. La méthode, suivie au début,
consistait à prêter de petits troupeaux, comportant
le plus souvent 100 rennes (25 måles et 75 femelles),
aux stations des missions, pour un laps de lemps
en général de cinq ans. Chaque mission ayant
recu un troupeau pareil s'engageait à enseigner à
un certain nombre d'apprenlis esquimaux le soin
218 COSMOS
et le traitement des rennes et de pourvoir à leurs
besoins pendant la durée de l'apprentissage. Au
bout du temps spécifié, la station rendrait au
gouvernement un nombre égal de jeunes rennes,
dans la même proportion de mâles et de femelles,
tout en retenant l'excédent produit par la multi-
plication naturelle du troupeau.
Ce service ayant fonctionné avec de bons résul-
tats pendant une quinzaine ď’années, on établit un
code de règlements qui vient d'entrer en vigueur.
D’après ces règlements, la durée de l'apprentissage
est fixée à quatre ans. Au bout de la première
année, chaque apprenti dont le travail donne satis-
faction recevra six rennes (quatre femelles et deux
mâles); au bout de la seconde année, huit rennes
(cinq femelles et irois måles); au bout de la troi-
sième année, dix rennes (six femelles et quatre
mâles), et au bout de la quatrième année, égale-
ment dix rennes dans la mème proportion de
femelles et de mâles. Avec l’assentiment du chef
de station, les apprentis seront autorisés à tuer
l'excédent de leurs mâles et à vendre la viande et
22 aour 4912
les peaux; on leur conseillera surtout d'employer
une partie de leur troupeau pour la traction des
traineaux destinés aux transports de voyageurs,
de bagages et de courrier.
À l'expiration de son contrat d'apprentissage,
chaque apprenti deviendra à son tour un éleveur
de rennes indépendant, pouvant disposer de son
troupeau dans les conditions établies par le gou-
vernement. İl sera tenu à prendre à son tour des
apprentis et à les rétribuer d'après le mème code
de règlements, quitte à en faire de nouveaux prca
priétaires de troupeaux, et ainsi de suite.
Dans certains cas, le gouvernement américain
a fait venir des instructeurs lapons, chargés d'ini-
tier les premiers apprentis dans l'art de l'élevage
des rennes. Grâce à cette sage politique, il a réussi
à faire d'utiles citoyens d'une grande partie d'une
population naguère miséreuse. Loin de dépendrede
Paide d'autrui, ces Esquimaux sont d'ores et déjà
un facteur ulile dans la vie du pays, et qui com-
mence à rapporler aux caisses de l'Etat des impôts
relativement considérables. D' A. GRADENWITZ.
La nouvelle écriture chinoise.
Depuis plusieurs mois, un vent de transformation
souffle sur la Chine, sur ce pays des traditions par
excellence. Parmi ces transformations, la plus
intéressante et la plus sérieuse est assurément
celle de l'écriture, d’antique mémoire; elle date de
2 500 avant notre ère.
Cette réforme vient d'ètre accomplie par
M. Chow Hi Chu, secrétaire de la légation chinoise
à Rome, avec le concours de MM. Houang et Tchéou,
ses sous-secrélaires, et par signor Rivetta de la
Solonghella, l'un des plus grands polyglottes du
monde, professeur à l'Institut oriental de Naples.
Je dois à l’extrème obligeance de M. Rivetta les
quelques détails ci-dessous concernant la nouvelle
écriture chinoise.
Pour éviter tous les inconvénients que tout le
monde admet, et afin de pouvoir lancer leur langue
aussi sur le chemin du progrès — progrès jusqu’à
présent difficile, puisque ses caractères la retenaient
captive, — les réformateurs ont pensé qu'il était
nécessaire de remplacer, par un système de repré-
sentation graphique ayant pour base le son du mot,
les signes plus ou moins bizarres et compliqués
qui. Jusqu'ici, arrivaient à exprimer environ 80 000
non pas mots, mais idées.
Commie il y a dans la langue parlée des Célestes
des sons qu'on ne peut retrouver dans aucun lan-
gage europeen, les innovaleurs n’ont pu employer
aucune des graphics européennes, et ils se sont vus
obligés de créer un nouvel alphabet. Dans cet
alphabet nouveau, ils ont adopté les signes latins.
grecs ou russes qui indiquaient exactement les
sons, et ils ont formé d'autres signes lorsqu'ils
n’ont pas rencontré dans un alphabet européen un
signe correspondant au son à exprimer.
Le nouvel alphabet est composé de quarantle-
inaltér.
N
pad
m)
bel
fad
=
©
pr
FIG. 1. — TARLRAU DE LA DERIVATION.
deux caractères: vingt-trois voyelles et dix-neuf
consonnes. D'ailleurs, le voici en détail, forme
imprimée, forme écrite, avec la valeur française
de toutes les leltres. Voir le tableau de la ‘page
suivante (fig. 2).
Dans la dérivation de ces signes, les innovateurs
se sont servis :
Ne 1:39
Pour a, e, i, u, o, de lettres latines. Pour les
signes 2, 5, 7, de lettres grecques. Pour 10, 13, 15,
de lettres russes qui correspondent aux sons de
eu, ya, you; les signes 22,
17 et 16 sont des signes
NOUVEAUL.
Les signes 11, 14, 19, 20,
21 et 142 ne sont que les
signes 13, 3, 40, 15, 7 et 22
renversés.
Le signe 23 est le signe
12 dont on a prolongé un
trait pour indiquer la pré-
sence du son ĉ (i, a, o, iao),
et le signe {8 est le signe
19 un peu plus ouvert.
Pour les consonnes, le
mème système a été adopté :
Du latin on a dérivé:
k, h, jq, l, r, t, f, p, m,
n, S$, w, y, lesquelles con-
servent la même pronon-
ciation que dans les langues
latines, avec les seules
exceptions du A (très as-
piré)}, du g, du r (caracté-
ristiques chinois) et du «,
que lon doit prononcer
comme en anglais.
Du russe, 27, 30, 38, pour
indiquer, comme en russe,
les sons fc, ts, ch.
Du grec, on a dérivé seu-
lement les deux lettres 36
et 39, dont 39 exprime le
son que les auteurs euro-
péens écrivent As, et 36 la
« nasalisation » finale.
En résumé, cetle dériva-
tion se présente de la façon
indiquée dans le tableau
(fig. 1).
Avec ces lettres, il est
possible d'écrire exactement
tous les mots de la langue
chinoise parlée qui est com-
prise d'un bout à l’autre de
la nouvelle république.
Les protagonistes de la
nouvelle réforme sont en-
chantés de leur travail qui,
parait-il, est partout accueilli avec le plus grand
enthousiasme, principalement dans le sud de la
Chine. Ils affirment qu'avant la fin de l’année 1912
DRISLLEESONWEAINVOCLERAMA rm
COSMOS
geenavf
T P Em JU e T R mE OÙ 2 7 muse
GHWIIVLÈeR PUBS SUOFTE See 66@8
F1G. 2 — LE NOUVEL ALPHABET CHINOIS.
les nouveaux caractères seront adoptés officielle- mouvement moderne.
ment dans tout le pays.
ASE SEE O7 QE E
ae EN C SIT TS 8 Se 8 Ro
EN
<=
N
Q
COR 6
219
D'ailleurs, l'écriture nouveau style présente sur
celleancienstyle,entre autresavantages,un énorme,
celui de la rapidité. L'antique façon d'écrire au
VOYELLES |, CONSONNES
o ©%
Q © 9
© % © è son S g,
ES 3 S à forme écrite à g
Q ù S Q à
© S © ® L e
i %%
Se > æ & £ mejusc minus£. S
tres
aspiré
qtou
(pron angl.)
mers
<
t
r Q,
s S:
S®
frs ©
pinceau, exigeant à peu près trois fois plus de
temps, est désormais incompatible avec les mœurs
des Célestes qui, définitivement, entrent dans Je
L. AUENIZ.
220
COSMOS
22 AOUT 191%
Les ferments lactiques dans l’ensilage.
La nécessité qui, sous nos climats, s'impose aux
agriculteurs de mettre en réserve et de conserver
des aliments en vue de la nourriture du bétail, pen-
dant la période de l’année où la végétation est en
repos, a conduit depuis longtemps les spécialistes
à rechercher la technique la plus propre à assurer
celte conservation dans les conditions les meilleures,
c’est-à-dire avec le moins de pertes possible. S'in-
spirant des résultats obtenus avec les silos à grains
dont l'usage remonte à la plus haute antiquité, on
a successivement ensilé les fourrages, puis les
racines et les pulpes.
Mais, avec des éléments aussi aqueux et aussi
fermentescibles que ces dernières, l’ensilage donna
lieu, dans la pratique, à de nombreux déboires.
C'est ainsi qu'abandonnée à elle-mème la masse
subissait l'influence des fermentations lactique et
butyrique : elle se liquéfiait en partie, prenait un
aspect répugnant, dégageait une odeur infecte et,
souvent, donnait naissance à des principes nocifs
dont l'ingestion provoquait chez les animaux des
troubles parfois graves, connus sous le nom de
« maladie de la pulpe ».
On comprit dès lors tout l'intérêt qu'il peut v
avoir à se rendre maitre de ces fermentations com-
plexes; les recherches des agronomes et des chi-
mistes furent orientées dès lors dans ce sens.
Le premier, M. Mazé, indiqua en 1905, dans les
Annales de l'Institut Pasteur,que l’ensemencement
par des ferments lactiques de matières alimentaires
riches en hydrates de carbone a pour effet de pré-
venir l'action des ferments putréfiants.
Suivant les données précisées par lui, MM. Bouil-
lautet Crolbois ont recherché plus particulièrement
quelles espèces convenaient le mieux au traitement
des matières ensilées; ils sont parvenus, par des
sélections successives, à isoler parmi les ferments
lactiques une espèce remarquable par son accou-
tumance aux milieux acides. En raison de la faci-
lité avec laquelle elle prolifère sur les pulpes de
betterave, ils lui ont donné le nom de « lacto-
pulpe »; ils en ont fait d'ailleurs l’objet d’expé-
riences méthodiques, tant au laboratoire que dans
diverses usines sucrières.
MM. Malpeaux et Lefort, encouragés par les
excellents résultats que leur avait donnés, durant
la campagne 1909-1910, l'ensemencement au lac-
{opulpe dans l’ensilage des cossettes de sucrerie
épuisées, ont élargi le champ de leurs expériences
et renouvelé, en 1110, cet ensemencement à la fois
sur des pulpes de sucrerie obtenues par râpage et
pressurage, surdes betleraves fourragères découpées
en cossettes, sur des collets et des feuilles de bette-
raves, et enfin sur du maïis-fourrage passé au hache-
paille (1). En ce qui concerne les pulpes de sucrerie,
les pertes de matière sèche ont été, après 126 jours
d'ensilage : 27 pour 100 sur les pulpes non ense-
mencées, 16,5 pour 100 sur les pulpes ensemencées,
11,3 pour 100 sur les pulpes à la fois salées et
ensemencées. De même, sur les pulpes de distil-
lerie, ils ont constaté, après quatre mois d’ensilage.
que l'ensemencement avait réduit les pertes d’en-
viron 50 pour 100.
Il convient de noter que l’économie ainsi réalisée
porte surtout sur les principes nutritifs, tandis que
les pertes portent surtout sur l'élément aqueux.
Aussi, par leur aspect, leur odeur et leur composi-
tion chimique, les pulpes ensilées après ensemen-
cement montrent bien qu’elles ont subi un minimum
d'altération. Cependant, les milieux ensemencés
étaient fortement acides, ce qui, comme on voit,
n'a gèné en rien les bacilles, puisque leur action
bienfaisante ne s’est pas moins exercée d'une facon
très complète. Aussi ne doit-on pas hésiter à pré-
coniser leur emploi, et ceci d’autant plus que l'en-
silage est fait pour une durée plus longue.
Dans le but de s’en convaincre, MM. Malpeaux
et Lefort ont prélevé, lors de l’ouverture des silos,
des échantillons de pulpe qu'ils ont placés dans des
bocaux aussilôt bouchés et cachetés à la paraffine.
Vingt mois plus tard, alors que l'échantillon non
ensemencé avait élé ramené par des décompositions
progressives à n'être plus guère qu'une masse
piteuse nageant dans son exsudat, masse qui avait
subi une diminution d'au moins les deux tiers de
son volume initial et qui était par surcroit vraisem-
blablement très altérée, la pulpe ensemencée ne
présentait aucun caractère extérieur pouvant faire
croire à une modification quelconque : les cossettes
avaient une structure semblable à celle qui les
caractérisait au sortir de la batterie de diffuseurs.
La comparaison ne pouvait par suite se montrer
plus nettement en faveur de l’emploi systématisé
du lactopulpe.
Ces travaux ont une importance pratique qui ne
saurait échapper à aucun agriculteur obligé de
recourir à l'ensilage; à ce titre, il était utile de les
résumer ici ou plutôt de rapporter les conclusions
auxquelles ils ont conduit leurs auteurs.
Francis MARRE.
(1) CF. J. Agrie. prat., 19-10-x1, 488.
N° 1439
La grêle et le givre au Mont Blanc. `
Grèêle.
Les chutes de grèle ne sont pas rares au Mont
Blanc pendant les tempètes. Il est à remarquer
que le vent qui souffle furieusement s'arrête tout
d’un coup et que le calme le plus complet règne
pendant la chute de grèle, pour reprendre aussitôt
qu'elle est terminée.
Le diamètre des grélons est généralement de
ÿ à 6 millimètres. Une fois, jen ai vu d'une gros-
seur extraordinaire. C'était pendant l'été de 1892,
vers midi. Le vent ayant cessé tout d'un coup, on
entendit sur le toit un bruit formidable, comme si
l’on y avait déversé un tombereau de gravier.
C'étaient des grĉlons de 4 centimètre de diamètre.
Quelques minutes après, nouveau calme et bruit de
cailloux encore plus effrayant. Cette fois, les grè-
ions avaient un diamètre variant de 30 à 35 milli-
mètres et pesaient 15 grammes environ.
Une coupe pratiquée suivant un diamètre des
gros grèlons montra la structure rayonnante habi-
tuelle et des couches concentriques assez régu-
lières de 4 à 5 millimètres d'épaisseur. Les grélons
étaient régulièrement sphériques. et la surface légè-
rement mamelonnée comme celle des boules de
pyrile. La glace en était extraordinairement dure,
tenace el difficile à fondre.
Les petits grèlons de la première chute couvraient
le sol d'une couche continue, tandis que les gros
ayant formé la deuxième chute étaient plus clair-
semés, trois ou quatre seulement par décimétre
carré. Ils étaient répartis uniformément sur tout
le glacier, jusqu'au sommet du Mont Blanc et
Jusqu’au-dessous des Grands-Mulets, mais cette
chute parait s'être localisée au glacier. car on n’en
vil pas à Chamonix.
Il est à remarquer que les journaux scientifiques
signalèrent des grèlons exactement du mème volume
tombés le même jour sur divers points de la
France, notamment dans le Centre et aux environs
de Biarritz.
Givre des tempêtes.
Le givre se produit très fréquemment au Mont
Blanc pendant les tempêtes. Il s'attache surtout
aux angles des pièces de bois et de métal, aux
balustrades ou objets cylindriques de petit dia-
mètre, tels que fils métalliques, paratonnerres,
manches de pelles ou de piolets, etc.
Un fil métallique est entouré d'une gaine de
glace, mais il n’en est pas de même des cylindres
de 3 ou 4 centimètres de diamètre. Le long d'un
paratonnerre ou d'un manche de pelle, le givre ne
(1) Comptes rendus, 10 juin 1912.
-~
COSMOS
A
Y os À
UNIVERSITY j
C? L h _”
CaL OES AT
forme qu'une lame de 4 centimètre d'épaisseur,
suivant la génératrice médiane du coté du vent,
tandis qu'on n'en voit pas en arrière. Une fois
commencée, la lame de givre se nourrit rapide-
ment et peut atteindre une largeur de 10 centi-
mètres en quelques heures, toujours en avançant
vers le vent, l'épaisseur restant la même.
Le givre s'attache d'autant moins aux objets
métalliques que leur rayon de courbure est plus
grand. Ainsi, j'en ai vu sur un tuyau de 0,06 m de
diamètre, tandis qu'une sphère de 0,20 m n'en por-
tait pas.
Sur les pièces de bois, le givre s'attache d’abord
aux angles, et plus tard à la surface. Dans ce der-
nier cas, la lame peut atteindre ? ou 3 centimètres
d'épaisseur et devenir beaucoup plus large; en
4910, j'ai vu des lames atteindre jusqu'à 0,50 m de
large sur les supports de la balustrade de lFObser-
vatoire.
La structure de ce givre mérite d'ètre étudiée,
car elle peut servir à l'étude de la formation de la
grèle. Les lames sont formées par la juxtaposition
de petites masses de cristaux de glace allongés et
agylomérés, chaque masse ayant la mème struc-
ture qu'un secteur des gros grèlons cités plus haut.
Les rayons font face au vent. Comme chez les
grèlons, il y a des couches successives dans le sens
de la largeur, mais généralement pas en épaisseur.
En résumé, ce givre est un grélon en lame qui
s'accroit en s'avançant vers le vent violent.
Le givre a une grande soliaité et adhère au
métal avec une ténacité singuliere. Les tourbillons
de vent, appuvant sur les lames attachées aux
pointes des paralonnerres comme sur des girouettes
bloquées, réussissent à ébranler les vis; et, comme
les tourbillons tournent plutòt à gauche, ils finissent
parfois par dévisser ces pointes complètement,
bien que la vis ait une vingtaine de filets.
Je n'ai pas assisté à la formation du givre, car
il se forme toujours la nuit. Lorsqu'il y en a une
quantité exceptionnelle, il s'attache même aux
parois de cuivre et à la couverture de l'Observa-
toire, sous forme de petites masses qui arrivent à
se toucher. Il s'attache même à l'émail d'une
plaque d'inscription, mais surtout à l'émaii blane,
les lettres de l'inseription en émail noir se déta-
chant parfois en creux non givré (observation du
D” Bayeux).
Givre en trémies,
Outre ce givre de vent, on peut observer parfois
du givre de sublimation d'une autre nature, fermé
dans un air absolument (ranquilie.
J'ai signalé autrefois le giyre en frémies formé
dans le tunnel creusé par M. Paitiel an sommet du
222
Mont Blanc. Avant pénétré dans cette galerie plu-
sieurs années plus tard, j'ai constaté que les cris-
{aux s'étaient nourris de telle sorte qu'ils attei-
gnaient des proportions énormes. La galerie de
neige constituait alors une véritable géode de cris-
taux de glace qui brillaient au plafond d'une ma-
nière féerique. C'étaient des lames de glace en
forme de minces trémies, de 4 à 3 millimètres
d'épaisseur, atteignant jusqu'à 10 centimètres de
long sur X centimètres de large. Ces lames pen-
daient verticalement et étaient voisines à se
toucher.
Cette formalion, déjà observée en d'autres pays
COSMOS
22 aour 41912
froids dans des espaces fermés, se rencontre par-
fois à l'air libre, mais alors sous de moindres
dimensions. Au cours d'un bel élé, par une période
de beau temps, sans chute de neige, la surface des
glaciers du Mont Blanc au-dessus de 4000 mètres
s'était entièrement couverte d'une couche épaisse
de 4 centimètre, constituée par de petits cristaux
en trémie, de la dimension des cristaux de chlorate
de potasse du commerce. Ces petits cristaux parais-
saient s'être formés par sublimation, au cours de
nuits calmes, claires et humides. Ils étaient très
mobiles sous l'action du vent qui les transportait
avec un bruissement particulier, J. VALLOT.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 5 aoùt 1912.
PRÉSIDENCE DE M. A. GAUTIER.
Sur les transformations rationnelles entre deux
surfaces de genres un. Note de M. LUCIEN GODbEAUx.
— Propriétés des surfaces quasi-aplanétiques dans les
systèmes de dioptres spheériques centrés. Note de
M. R. Boccoccx. — Courbes de fusibilité des systèmes
volatils : mécanisme de la formation des éthers. Note
de MM. Georces Bavme et P. Pauriz. — Sur l'écrouis-
sage et le recuit du zinc. Note de M. G. Timoréer. —
Sur le Ficus Carica en Italie. Note de M. B. Lou:
l'auteur reprend l'ancienne querche sur le figuier et
annonce la publication d'un ouvrage qui, pense-t-il,
mettra la question au point. — Recherches sur la
chlorvse végélale provoquée par le carbonate de cal-
cium. Note de MM. P. Mazé, RuoT et LEMOIGNE. —
Nouvelles synthèses de glucosides d'alcool à l'aide de
l'émulsine : Butylglucoside #4, isobutylglucoside 3 et
allylglucoside #4. Note de MM. E. BornoteLoT et
M. BriveL.
BIBLIOGRAPHIE
Leçons sur les principes de l’analyse, par
R. d'ApHÉMAR, professeur à la Faculté libre des
sciences de Lille.
T. Ie : Séries. Délerminants. Integrales. Poten-
tiels. Équations intégrales. Équations diffe-
rentielles et fonctionnelles. In-8 (25 X 16) de
de vi-324 pages avec 27 figures (10 fr). Gauthier-
Villars, Paris, 1912.
Principes de l'analyse : M. d’Adhémar nous
avertit dès l’abord qu'il n'a point entendu appro-
fondir les premiers principes de la science mathé-
matique, mais bien exposer les questions prinri-
pales, fondamentales.
L'étudiant qui se propose de lire les travaux
modernes sur l'analyse, les livres des maitres, se
trouve arrèté par le grand nombre de mémoires
qu'il doit consulter pour acquérir les notions pré!i-
minaires indispensables. Le distingué professeur
de la Faculté catholique de Lille s’est proposé «le
lui épargner ce labeur en réunissant dans un
ouvrage les principales questions servant de base
aux recherches actuelles.
L'ouvrage comprendra deux volumes. Dans ce
premier tome, l'auteur ne s'occupe que des fonc-
tions de variables réelles. Parfois il néglige délibé-
rément l'ordre logique de l'exposition, comme
lorsque, dans la théorie des intégrales doubles et
des potentiels, il utilise des propositions qui ne
seront démontrées que plus loin. Après tout, il
n'est pas utile de fatiguer le débutant en lui impo-
sant une rigueur logique dont il n'est pas encore
capable de saisir la nécessité; il vaut mieux dès
abord lui fournir beaucoup de faits; dans la
suite, il reprendra par lui-mème les démonstrations
avec une précision parfaite, lorsqu'il sera arrivé à
éprouver le besoin de cette rigueur absolue, privi-
lège de la science mathématique, et qui procure
un ravissement esthétique aux adeptes de cette
science.
Les moteurs à deux temps, par L. VENrot-
Duczatx. Un vol. in-80 de 136 pages, avec gra-
vures (4,50 fr). Librairie Dunod et Pinat, Paris,
1912.
Il est assez curieux de constater que presque
tous les moleurs à explosion employés actuelile-
ment sont du type à quatre temps, alors que les
N° 1439
moteurs à deux temps sont reslés presque ignorés,
malgré les avantages qu'ils présentent. En effet, le
cycle à deux temps est beaucoup plus régulier,
demande un nombre moins considérable d'organes,
et présente une certaine économie de poids à éga-
lité de puissance.
Certains auteurs ont prédit un bel avenir aux
moteurs à deux temps, et on commence à y revenir;
au point de vue de l'aviation, de tels moteurs
seraient très désirables à cause de leur grande
régularité cyclique.
L'auteur, très connu par ses travaux précédents,
entre autres sur les turbines à gaz, a voulu mettre
au point cette question peu connue du moteur à
deux temps; après avoir exposé des considérations
générales sur ce type de moteurs, il examine la
façon dont les divers problèmes qui s’y rapportent
ont élé envisagés, étudiés et résolus: il décrit les
divers modèles qui ont été construits jusqu'ici, et
donne ensuite des résultats d'essais (puissance,
consommation, analyse de gaz d'échappement)
effectués par lui-même.
Hygiène pratique et physiologique de l’avia-
teur et de l’aéronaute, par H. DE GRAFFIGNY. Un
vol. in-8° de 140 pages (2,50 fr). Librairie
Maloine, 27, rue de l’École de Médecine, Paris.
1912.
Les deux dangers essentiels, dans l'ordre physio-
logique, que rencontrent les pilotes d'appareils
aériens sont le froid et la diminution de pression.
Ces dangers sont d'ailleurs plus à redouter pour les
aéronautes que pour les aviateurs, car ils se pro-
duisent à de hautes altitudes qu'il n'est jamais
nécessaire d'atteindre en aéroplane. Du moins,
doit-on s'efforcer de ne pas monter et descendre
en trop peu de temps, pour éviter les variations
brusques de pression.
L'ouvrage de M. de Grafligny contient les impres-
sions de voyage de nombreux pilotes et passagers
de ballons et d’aéroplanes; les unes sont parfois
curieuses, et nous reproduisons l'avis du D' Balencie,
qui trouve deux avantages à l’aéroplane : d’abord,
il permet de raccommoder les membres des
pilotes blessés, ce qui n'est pas à dédaigner;
ensuite, ce peut être un excellent agent thérapeu-
tique. « Une chute de quelque cent mètres en vol
plané conviendrait à tous les excités, à tous les
violents. Les constipés chroniques se trouveront
bien des vaporisations d'huile de ricin qui font le
désespoir des pilotes. » (P. 31.)
Les transports automobiles, par Yves Guébox,
ingénieur. Un vol. in-8 de 140 pages avec gra-
vures (3 fr). Librairie Dunod et Pinat, Paris.
Sans aucun doute, l’auteur est parfaitement
documenté sur la question qu'il traite, et les per-
sonnes qui désirent des renseignements sur les
COSMOS 223
automobiles industrielles trouveront ce qu'elles
recherchent dans cet ouvrage. Omnibus, voitures
de livraison, binards, arroseuses, auto-fiacres,
camions, sont décrits avec soin.
Il est seulement regrettable, à notre avis, que la
réclame tienne une place vraiment trop considé-
rable dans ce livre, et qu'elle ne soit pas séparée
du texte mème. Cela enlève à l'ouvrage un peu de
sa valeur.
La concentration nationale, par le capitaine
Pierre Féuix. Un vol. in-16 de 300 pages (3,50 fr).
Bernard Grasset, éditeur, 51, rue des Saints-
Pères, Paris.
Un pays, pour subsister et grandir, a besoin de
continuilé dans son gouvernement. L'’hérédité est
une forme de celte continuilé, mais insuflisante
selon le capitaine Félix, car elle peut amener au
pouvoir des incapables. C’est pourquoi l’auteur est
partisan d’une « dynastie sociocralique » dans
laquelle l'hérédité intellectuelle remplace l'hérédité
familiale. C’est fort bien, mais quels moyens sùrs
el permanents amèneront le règne durable de cette
aristocratie de l'esprit? L'auteur ne l'indique point
d'une façon précise et pratique; de plus, il fait du
libre examen la base de la société moderne. C'est
dire que cet ouvrage est imprégné d'idées protes-
tantes.
Petite Encyclopédieélectro-mécanique, publiée
sous la direction de HENRY DE GRAFFIGNY, ingénieur
civil. Vouvelle édition. Collection complète en
10 volumes, format 17 X 12, d'environ 160 pages
(chaque volume, 1,50 fr). Librairie des sciences
et de l'industrie L. Geisler, 1, rue de Médicis,
Paris, 1912.
1‘ volume: Manuel élémentaire d'électricité
industrielle.
2 volume: Les accumulateurs et les piles.
3° volume : Manuel du constructeur el conduc-
teur de dynamos et d'alternateurs.
4 volume: Canalisations et conduites élec-
triques.
o° volume: Le conducteur de moteurs de tous
systèmes : eau, vapeur, gaz d'éclairage, gaz pauvres,
petrole, etc. |
je volume: Manuel pratique décluiranye elec-
trique.
7° volume : Le conducteur de moteurs électriques.
8° volume: Manuel pratique de yalvanoplastie
et d'électrochtmnire.
9 volume: Applications thermiques de léler-
tricite.
10° volume : Applications industrielies de léner-
gie électrique ‘traction, telphérage, halage des
batcaux, travaux des mines).
224
COSMOS
92 aoUT 1912
FORMULAIRE
Ciment armé et rouille (Revue d'économie
industrielle). — Un des còtés les plus intéressants
et les plus graves de la question de la rouille est
celui qui concerne les armatures en fer contenues
dans le béton armé, car tout entretien de ce fer
est impossible. |
Peut-on compter sur le béton de ciment pour
protéger le métal enrobé contre l'oxydation?
C'est à cette intéressante question que répond
M. Alexandre Ste dans le Bulletin mensuel de la
Soriété industrielle du nord de la France de
février 1942.
Le béton de ciment constitue autour du fer une
masse légèrement poreuse, mais qui, lorsqu'elle
est bien exécutée. peut ètre considérée comme une
gaine isolant le fer des agents atmosphériques. Il
est méme reconnu que le ciment décape le fer
quand il est légèrement rouillé. L'oxyde n'est pas
réduit, la rouille se répand dans la masse, preuve
de la formation d'un sel soluble qui ne peut ètre
que du bicarbonate. Le mécanisme de cet auto-
décapage reste inexpliqué, car le béton a une réac-
tion alcaline due à un excès de chaux, et on ne
voit pas pourquoi il se formerait du bicarbonate
ferreux.
I est possible que re soil un phénomène pas-
sager associé aux réactions qui constituent la prise
du ciment; aussi n'est-il pasune garantie sullisante
pour Pavenir.
Peut-on comptersur la conservation du ferenrobé.,
dans le béton armé? |
Oui, toutes les fois que le béton n'est pas exposé
à être traversé par un courant d'eau. Il en est
ainsi pour le béton placé à l’intérieur des bati-
ments, à labri des pluies et des écoulements d'eau.
ou mème noyé dans une nappe aquifère dormante.
La chaux en excès dans le béton se carbonate
très lentement, et l'acide carbonique n'arrive pas
au contact du fer.
Mais si le béton est traversé par un courant
d’eau (réservoirs, barrages, béton exposé aux pluies,
planchers fréquemment mouillés), il subit un
lavage mécanique intérieur: la chaux en excès se
bicarbonate, devient soluble et est entrainée: Île
béton s'appauvrit, devient plus poreux et perd son
alcalinité; l’acide carbonique de l'eau finit. au bout
de quelques années, par arriver au métal et l'attaque
ensuite rapidement. Dans ce cas, il convient de
protéger le béton au moyen d’une chape en asphalte
ou en une des matières hydrofuges utilisées pour
imperméabiliser le ciment. Dans ce cas également,
il est de premiére nécessité d'éviter absolument
les fissures du béton, parce qu'elles constituent des
chemins par où les agents de la rouille peuvent
parvenir jusqu’au fer. Le béton de ciment est très
sujet à de petites fissures qui n'ont pas une influence
sensible sur la solidité: elles en ont davantage au
point de vue de la conservation, et il semble qu'on
ne s'en préoccupe pas assez dans la pratique.
Dissolvant de la rouille. — Il suffit d'inmerger
les objets rouillés dans une solution concentrée de
chlorure d'étain. La durée du traitement dépend
de Ja plus ou moins grande épaisseur de la couche
de rouille; elle est presque toujours complète an
bout de vingt-quatre heures. Pour éviter l'attaque
du métal non oxydé, on doit éviter tonte présence
d'un excès d'acide dans le bain. Les objets dérouilles
sont lavès finalement à l'eau, puis à lammoniaque:
après quoi on les sèche rapidement.
(J.-M. Rousset.)
PETITE CORRESPONDANCE
M. L. R.. à A. — Pour tout ce qui concerne les dia-
phragmes chautleurs pour combustion incandescente
Sans flamme, il faudrait vous adresser à M. W. Bone,
professeur à l'Université de Leeds, Angleterre.
M. H. M., à S. — Nous ne connaissons pas les revues
étrangeres, écrites en francais où en anglais, traitant
du lait et de ses dérivés.
M. J. T., à L. — Le poste anglais, à grande longueur
Tendes, qui donne des nouvelles à 23"30" sur une
note grave ef un peu ronflante est le poste de Poldhu.
Pour les autres questions, il vous sera répondu direc-
tement par « Puhonné trés compétent ».
M. F. M., à S. — Ce dépérissement de vos platanes
peut provenir de deux causes: d'abord, le terrain
peut èlre empoisonné, etil v aurait lieu de renouveler
a lerre on de choisir un autre endroit: ou bien il
st possible que des parasites se soient attaqués aux
racines, En tous cas, c'est une plantation à refaire.
M. H., le M. — Vous trouverez ces appareils acous-
Uüiques chez Valerv-Frank, 25, boulevard des Capu-
eines: Collin, 6, rue de l'École-de-Médecine. Nous
vous rappelons les nouveaux appareils, décrits dans
le Cosmos: celui du D' Soret, 11, rue Edmond-Morin
au Havre (Cosmos, n° 1#:3, 2 mai 1912), et celui du
D' Le Nourne, 87, boulevard Francois-1*, au Havre
également (Cosmos, n° 1517, 21 mars 1912).
D +S., à Laprairie (Canada). — Le Cosmos, dans son
t. XLII, p. 746-747, a donné une note sur les plantes
dites carnivores et a consacré plusieurs lignes aux
Sarracenia purpurea, plante localisée au Canada et à
la côte atlantique des Etats-Unis. Nous ne vous
remercions pas moins de votre excellente communi-
cation. Quant à la question des reflets verts du givre.
nous chercherons si cette observation est nouvelle.
Imprimerie P. Ferox-Vaau. 3 el B, rue Bayard, Paris, VIIP.
Le gérant: KE. Pesritrurnar.
COSMOS
SOMMAIRE
No 1410 — 99 AOÛT 1912
229
Tour du monde. — Un nouveau volcan sous-marin en Océanie. Les tremblements de terre au Brésil. Un
phénomène de décharge électrique. Une nouvelle formule pour évaluer les chutes de pluie. Stérilisation
des liquides par le courant électrique. Mortalité des jeunes enfants en Europe. Le lait hygiénisé. Lu
prétendue radio-activité des plantes. L'industrie de l'acide carbonique liquide. Longueur d'ondes des
antennes de télégraphie sans fil. Après la rnpture d’une ligne électrique à 100 000 volts. L'électricité an
canal de Panama. Cabines téléphoniques silencieuses. Découverte d’un dangereux écueil sous-marin
‘à l'entrée de Toulon. Canot de sauvetage à moteur, p. 225.
Lunettes grossissantes Zeiss, Boyen, p. 230. — Un camion-grue électromobile, GnavExwirz, p. 230. —
Procédé nouveau de pasteurisation du lait, Marre, p. 232. — Les piérides, Ac1000€, p. 233. — Les
beurres anormaux, Lanacne, p. 233. — Automotrices pétroléo-électriques, G. Dany, p. 237. — Les
nouvelles théories de la matière (suite), BERTHIER, p. 240. — Notes pratiques de chimie, Gançcox,
p. 242. — Le temps de pose exact en photographie, p. 25t. — La répartition des animaux sur le
globe terrestre, MEXNEVÉE, p. 246. — La Terre: sa forme et ses dimensions, CH. LALLEMAND, p. 247.
— Sociétés savantes: Académie des sciences, p. 219. — Bibliographie, p. 249.
TOUR DU MONDE
PHYSIQUE DU GLOBE
Un nouveau volcan sous-marin en Océanie.
— Un avis de Amirauté anglaise signale qu'un
volcan sous-marin ayant l'aspect d'un grand geyser,
projetant continuellement des vapeurs et de la
fumée, et par moments des colonnes d'eau, a été
aperçu le 29 avril 14912 par le capitaine du vapeur
Tofna à une distance d'environ 2 milles dans le
sud-est de l'ile Honga-Hapai, dans l'archipel des
iles Tonga.
Les tremblements de terre au Brésil. — Le
Bulletin de la Société sismologique américaine
a publié une conférence du professeur J.-C. Branner,
dans laquelle celui-ci expose que le Brésil n’est pas
aussi complètement exempt de tremblements de
terre qu'on le croit généralement. Il a donné une
liste de cinquante sismes bien constatés; le pre-
mier observé aurait eu lieu en 1560; cependant,
son authenticité est un peu douteuse. Presque tous
ces sismes ont présenté peu d'intensité; deux
cependant ont été assez violents pour causer des
dommages aux construclions. Le conférencier a
indiqué les six petits districts qui ont subi ces
secousses. Comme le Brésil couvre plus de 8 mil-
lions de kilomètres carrés, on peut estimer que
c'est une région privilégiée entre toutes, par la
rareté des tremblements de terre qui s'y pro-
duisent. Les statistiques relevées avec tant de
persévérance par M. de Montessus de Ballore nous
avaient déjà appris que le Brésil est un pays stable
entre tous.
MÉTÉOROLOGIE
Un phénomène de décharge électrique. —
Tout le monde a probablement remarqué la chute
soudaine de grosses gouttes de pluie qui se produit
quelquefois immédiatement après une série de
T. LXVII. Ne 1440.
coups de tonnerre au zénith. Je n'ai jamais vu une
explication satisfaisante de ce phénomène. Je me
permetsdonc d'en présenter une nouvelle, qui résalte
de mes recherches de cinq années sur les décharges
électriques. J'ai publié des reproductions d'effets
de décharge sur des films photographiques qui
paraissent justifier complètement les conclusions
formulées ci-après.
Chaque décharge disruptive qui se produit dans
l'air se termine par des strates lumineuses à une
extrémité et à lautre par des ramifications.
Dans la région stratiliée, les molécules d'air ont
moins que leur charge normale de corpuscules
négatifs. C'est la région dans laquelle l'air est à
l'état de conducteur. Le ruban de décharge disrup-
tive se termine par une décharge diffuse. De tels
effets sont aisément reproduits sur des plaques
photographiques.
L'extrémité où l'étincelle se partage en plusieurs
branches est une région dans laquelle les corpuscules
négatifs se trouvent en excès. Ce n’est pas une région
de conduction. Dans cette région, étincelle se
sépare en plusieurs branches qui pénètrent en divers
points de la région surchargée de corpuscules néga-
tifs. Ce sont comme les affluents d'une rivière: ils
ont cette apparence sur la plaque photographique
quand on fait éclater l’étincelle au voisinage inimé-
diat de celle-ci.
Avant que la décharge ne frappe les gouttes d’eau
qui tombent avec leurs charges négatives en excès,
ces gouttes se repoussent lune l'autre et ne peuvent
par conséquent se souder. Après létincelle, un
nombre important de gouttes ont perdu lenr charge
négative. Mais les décharges ramifiées n'ont pu
atteindre toutes les gouttes, et certaines d'entre
celles restent fortement chargées. Ces denx gronpes
de gouttes s'attirent et se réunissent en mème
temps que la chnte se poursuit.
226
L'extrémilé ramifiée de l'éclair est habituelle-
ment cachée dans le nuage, l'extrémité stralifiée se
trouvant au-dessus du nuage dans la plupart des cas.
F. E. Nipher. (Soc. météorologique.)
Unenouvelle formule pourévaluerles chutes
de pluie. — On indique généralement par la hau-
teur en millimètres la quantité d’eau tombée sur
une région en un temps donné. M. G.-A. Lindsay,
de Saint-Louis (E.-U.), propose de supputer autre-
ment cette valeur et d'indiquer la quantité de
pluie par le volume d'eau tombée sur une surface
déterminée, cette nouvelle métnode, d'après lui,
parlant beaucoup mieux à l'esprit.
Traitant des chutes de pluie aux États-Unis,
devant l’Académie des sciences de Saint-Louis, il
exposait que, d’après la méthode usuelle, la pluie
tombée en 1896 sur le seul État de Missouri repré-
sentait 101,5 mm, ce qui, d’après sa méthode per-
sonnelle, devrait être exprimé par un volume
de 184 kilomètres cubes d'eau! La même notalion
donnée pour la quantité d’eau tombée sur les
États-Unis en une année moyenne atteint un
volume de 6000 000 000 000 tonnes. On ne doit pas
supposer que toute cette eau retourne à la mer
par les rivières et les fleuves; la plus grande partie
est enlevée par l'évaporation. M. Lindsay le démontre
par ce fait que le débit du Mississipi, à Saint-Louis,
représente un volume d'eau à peine plus grand que
celui de la pluie tombée sur le seul Etat de Mis-
souri; or, c'est là une bien faible partie de l'énorme
bassin drainé par le fleuve au-dessus de ce point.
HYGIÈNE
Stérilisation des liquides par le courant
électrique. — Electrical World (3 août) signale
de remarquables résultats obtenus dans applica-
tion du courant alternatif à la destruction des mi-
croorganismes dansles liquides. Le D° C.-B. Morrey
et le professeur F.-C. Caldwell, de l'Université de
l'Ohio, à Columbus. ont fait couler du lait en
lames minces à travers une succession de vais-
seaux mċtalliques, qui constituaient autant d'élec-
trodes de polarités opposées, si bien que les lames
de liquides étaient, en de nombreux endroits, par-
courues par le courant électrique.
Un échantillon de lait contenant 19480 000 bac-
téries par centimètre cube fut soumis durant
quinze secondes à un courant alternatif de 2,5 am-
péres sous 2 000 volts; après quoi le nombre des
bactéries se trouva réduit à la fraction 0,000% de
sa valeur primitive. Dans un autre essai, le taux
final des bactéries fut 0,013. En troisième lieu, du
jail infecté expérimentalement par une très grande
quantité de microbes de la diphtérie (bacilles de
LæMer) fut stérilisé d'une façon pratiquement
complète par l'application du courant alternatif.
Le lait n'est pas moditié chimiquement. La sicri-
COSMOS
29 aouT 19192
jisation ne semble pas due à l'effet thermique du
courant.
Mortalité des jeunes enfants en Europe. —
La Gazette des Hôpitaux (13 août) emprunte les
chiffres ci-dessous à la Gazetta degli ospedali
e delle cliniche :
Le nombre des enfants morts avant d'avoir
accompli leur première année est, pour 1 000 enfants
nés vivants, dans les différents pays d'Europe :
RüSSIC Lada OEA 212
PAE E ere ar atssse riens 202
HORRRICS ee ns ets 198
Allemagne.............. RS 178
A rer Aer ee es cn 156
PrBNCR LL ss ds oann- she assise 143
AUTAA a a EE E E E STE 421
SUISSE last Tee ee ee e 108
Suëde....... TR a S R 17
NOPVCOCRE LEE esse ete 67
Voici maintenant la mortalité pour 1 000 enfants
de moins d'un an dans quelques villes d'Europe :
MOSCOU aana N aa a Sn ass 396
BOAT SAS DA dr sa eee 21%
Breslaun nus s heu dans 494
MUNICH es emo eme a 192
Marsenlen.i anus ie ns anses 186
Viennent ie ariue né elshees 183
Bruxelles......... Re 174
Boris nina ent 168
Copenhague uns ss on nee 156
Hambourg Hs nn esse 156
LoOnHPeS Lire Daniele 113
PARIS STE SE ee ue 105
Pure its Peso uses 93
AHSA rase anus Yo
SLOCKTIOlM. Susanne Les 91
Le lait hygiénisé. — Nous lisons dans la
Revue scientifique que on donne ce nom au lait
qui a été successivement :
41° Analysé et dégusté, pour le séparer des laits
mouillés, écrémés, fermentés ou de mauvais goùt;
2° Purifié, pour en extraire les impuretés (poils,
pellicules, excréments, poussières, etc.);
3° l’asteurisé à plus de 80° C, et refroidi immé-
diatement à 4° ou 6° C, pour détruire les microbes
pathogènes (tuberculose, fièvre typhoiïde, etc.);
4° Mis en pots ou en bouteilles stérilisés;
5° Conservé à basse température jusqu’au moment
de la vente.
La République Argentine est la première qui ait
établi ce traitement du lait (4890), imilé depuis
dans plusieurs pays de l’Europe. Dans l’Argentine,
l'hvgiénisation est devenue obligatoire, et on s’en
trouve fort bien, car, grâce à elle, la mortalité infan-
tile à Buenos-Ayres, qui était de 49 pour 100 en
4899, n'était plus que de 9,9 pour 4100 en 1909.
Les usines qui environnent Buenos-Ayres traitent
près de 600 000 litres de lait par jour.
N° 1410
PHYSIQUE
La prétendue radio-activité des plantes. —
Après la découverte des rayons Becquerel et de
la radio-activité, on s'est demandé si la matière
vivante, dont l’activité se manifeste par une conti-
nuelle production de chaleur, d'électricité et quel-
quefois même de lumière, n’émettrait pas sponta-
nément des rayons Becquerel.
À priori, l'idée d’une certaine radio-activité
végétale n'est pas invraisemblable. En effet, les
végétaux se fixent par leurs racines dans un sol
qui renferme ordinairement, en poids, quelques
trillionièmes de radium avec quelques cent-mil-
lionièmes d'uranium et quelques cent-millièmes
de thorium; en outre, leurs tiges et leurs feuilles
se développent dans une atmosphère qui contient,
par mètre cube, quelques trillionièmes de gramme
d’'émanation due au radium ou au thorium. De
plus, il faut tenir compte que, parmi les corps
simples qui entrent dans la constitution des végé-
taux, il y en a toujours un, le potassium, qui est,
quoique très faiblement, radio-actif.
Les premières recherches expérimentales ont
été faites par Tommasina, de Genève, en 1904.
Les végétaux dont il voulait apprécier la radio-
aclivilé étaient introduits dans une cage métal-
lique reposant sur un électroscope à feuilles d’or
préalablement chargé, el il mesurait la vitesse
avec laquelle les feuilles d'or se rapprochaient,
indiquant la perte de charge. L'auteur a pu con-
stater que des végétaux fraichement cueillis,
herbes, fruits, fleurs, feuilles, possédaient une radio-
activité assez appréciable, alors que les objets du
laboratoire,ainsi que les mêmes végélaux desséchés,
n’en présentaient que des traces minimes. Cette
radio-activité ne se manifestant que pendant la
vie des plantes en expériences, l'auteur l’a appelée
bio-radio-activité.
En janvier 1905, M. Paul Becquerel, reprenant
ces expériences, trouva les mêmes résultats : des
grains, des germinalions de pois, des tiges de mousse
et de buis déchargeaient l’électroscope avec une
assez grande rapidité; on pouvait croire que ces
végétaux ionisaient l'air en émettant des rayons
Becquerel. Cependant l’auteur trouva que des graines
mortes n'étaient pas moins actives que des graines
sèches en état de vie latente. De plus, il réfléchit
qu'il pouvait y avoir une grave cause d'erreur,
produite par l’émission de la vapeur d’eau dans
la transpiration de ces végétaux : la vapeur d’eau,
se condensant à la surface de la cage en verre de
l'électroscope, suffit peut-être à conduire l’électri-
cité et à décharger l’électroscope.
C'est ce que M. Becquerel a vérifié dans des
expériences de contrèle : un morceau de baryte
anhydre, placé pour absorber la vapeur dans la
cage de l’électroscope à côlé des végétaux essayés,
COSMOS
227
change complètement le phénomène et arrète la
décharge de l’électroscope. Les résultats obtenus
par Tommasina sur des herbes, des fruits et des
feuilles fraichement cueillis devaient donc être
dus, non à la radio-activité, mais à la vapeur
d'eau de transpiration, contre laquelle il n'avait
pris aucune précaulion.
Tout dernièrement, deux jeunes savants de
l’Institut Pasteur, Thomas et Lancien, ont contrôlé
minutieusement les expériences de Tommasina et
de Becquerel, et ils ont retrouvé les résultats de
ce dernier (P. Becquerez, la Radio-Activité et la
biologie végétale, Revue générale des Sciences,
45 août). Ainsi, avec les moyens les plus précis
dont nous disposons, aucun physicien n'a prouvé
jusqu'ici qu'il existe une bio-radio-activité vègé-
tale. Si les végétaux présentent une très faible
radio activité, fort difficile d’ailleurs à mettre en
évidence, cette radio-activité, qui ne fait nulle-
ment parlie de leurs propriétés vitales et qu'on ne
doit pas appeler bio-radio-activité, ne dépasse cer-
tainement pas celle que peut comporter leur teneur
en potassium, non plus que la radio-activité du
sol et de l'atmosphère où ils ont vécu.
' D’industrie de l'acide carbonique liquide.
— La Chronique des ingénieurs civils résume une
conférence faite à l'Ecole supérieure de commerce
de Berlin, où M. Ugo Baum a donné d'intéressantes
indications sur l'importance qu'a acquise la pro-
duction de l’acide carbonique liquide et le com-
merce qui s'en fait en bouteilles d'acier, depuisqu'en
1875 Barber a proposé l'emploi de cette substance
pour combattre les incendies à bord des navires et
pour actionner les torpilles marines.
La liquéfaction de l'acide carbonique pour les
usages industriels a débuté en 1878 avec emploi
de compresseurs à vapeur pour obtenir les pressions
nécessaires, ces pressions étant, comme on sait,
de 36 atmosphères à la température de 0° et de
50 à 60 à celle de 20° à 40° C. Une bouteille d'acier
de la capacité de 44 litres peut renfermer un
volume de gaz de 5 400 litres.
Des renseignements recueillis, il semble que la
première application pratique de l’acide carhonique
liquide ait été faite au port de Kiel, le 27 août
1879, pour soulever du fond de l'eau une pierre du
poids de 40 kilogrammes au moyen d'un procedé
imaginé par Raydt, qu'on pent considérer comme
l'initiateur de cette industrie. Les établissements
Krupp s'en servirent pour obtentr la coulée des
mélaux sous pression, mais le plus vaste champ
d'application que l'acide carbonique liquide a trouvé
est dans les brasseries, pour le montage de la biere,
et dans la préparation des eaux gazeuses.
Raydt céda ses brevets à la Société Kuünheim
et Cie, de Berlin, et en {SR4 fut fondée ia A/tren
freselischaft fr Kohlensirure Industrie. Ce ne
fut qu'après l’annulation de ces brevets, prononcée
238 COSMOS
à la demande de Rommeholler et Hammerschmidt,
que l'industrie de l’acide carbonique prit un déve-
loppement rapide.
Sur la quantité produite actuellement, 95 pour
100 sont employés à gazéifier les eaux minérales et
à maintenir sous pression les füts de bière destinés
à la consommation; on emploie aussi ce gaz à
soulever des objets submergés, à préparer des
bains médicaux, à la production des vins mousseux
et à l’alimentation d’extincteurs d'incendie.
La production va toujours en augmentant; ainsi
elle était de 122000 kilogrammes en 1884 et a
passé à 41 million de kilogrammes en 1889, pour
arriver à 45 millions en 1909 et à 34 en 1910, total
‘sur lequel 34,5 millions sont fournis par l’Alle-
magne. La valeur de ce produit est d'environ
8 750 000 francs. Les 45 centièmes de l’acide carbo-
nique produit sont préparés artificiellement dans
vingt-quatre fabriques, le reste provient de sources
naturelles qui alimentent trente autres fabriques.
Dans les conditions actuelles des prix de la
matière, la préparation de l'acide carbonique au
moyen de la calcinalion de la magnésite ne peut
être rémunératrice, et il faut avoir recours à d’autres
procédés, par exemple l’utilisation des gaz prove-
nant de la combustion du coke servant à produire
la force motrice pour la compression du gaz, en
absorbant l’acide carbonique par du carbonate de
soude facile à décomposer par la chaleur.
On ne doit pas se dissimuler que cette industrie
intéressante est lourdement grevée par le très
fort capital représenté par les bouteilles d'acier
qui se trouvent chez les consommateurs, et dont le
prix représente six à sept fois la valeur de la mar-
chandise vendue.
ÉLECTRICITÉ
Longueur d’ondes des antennes de télégra-
phie sans fil. — Nombreuses sont les formes
d'antennes : on en fait qui sont purement verti-
cales,simples ou composées de plusieurs fils. Parmi
celles qui se rapprochent de cette forme, on trouve
l'antenne prismatique, l'antenne en rideau, l'an-
tenne en parapluie, l'antenne pyramidale droite
ou renversée. D’autres antennes sont en pârtie
verticales et en partie horizontales (antennes de
navires tendues de mât à måt), ce sont les antennes
en T ou en V. Toutes ces formes sont utilisées
suivant les cas, c'est-à-dire suivant la hauteur
et le nombre des‘supports dont on dispose, suivant
Ja puissance de rayonnement du poste, et surtout
suivant la longueur d'ondes que l'on veut réaliser.
La longueur d'ondes fondamentale d’une antenne
filiforme simple est toujours très légèrement supè-
rieure à quatre fois la longueur de l'antenne ion
peut noter l'analogie des tuyaux d'orgue en acous-
lique : la longueur d’onde d’un tuyau d'orgue
fermé à son extrémité est sensiblement égaie à
29 aourT 1912
quatre fois la longueur du tuyau). Elle serait exac-
tement égale à quatre fois la longueur de l’antenne
si celle-ci était très longue et très fine.
Pour les antennes filiformes à branches mul-
tiples, la longueur d'ondes est plus grande; si les
fils sont très nombreux et très écartés, on peut
arriver facilement à tripler la longueur d'onde.
Ainsi une antenne verticale de 100 mètres de
haut peut avoir une longueur d'onde de 400 à
4 200 mètres, suivant le nombre, le diamètre et
l'écart des fils.
S'il s’agit d’une antenne de forme compliquée,
il n’est pas possible aujourd hui de déterminer par
le calcul quelle sera sa longueur d'onde fondamen-
tale. Cependant les techniciens ne sont pas pris au
dépourvu, ils peuvent résoudre le problème en
opérant sur des modèles réduits. En effet, comme
lexpose une note de M. P. Jégou (Revue scient.,
10 aoùt), l'expérience prouve que, si on reproduit
une antenne existante à une échelle donnée (mème
nombre de fils, forme identique, diamètre des fils
reproduit lui-même à l'échelle), la longueur d'ondes
varie dans le mème rapport.
Après la rupture d’une ligne électrique
à 100 000 volts. — Le 14 avril dernier, un des
câbles de la Central Colorado Power C°, qui trans-
met le courant à 100 000 volts entre lusine de
Boulder et la ville de Denver, vint à se rompre
dans une portée de 200 mètres, à une distance de
-3 kilomètres de la cité; les deux extrémités du
càble tombèrent sur le sol, dans un champ labouré.
Il était 4 heure du matin; la charge de la ligne,
à ce moment, était de 3 700 kilowatts.
Quelles furent les conséquences de l'accident? La
ligne fonctionna comme si rien n’était arrivé, le
circuit électrique se fermant par le sol, du moins
pendant un intervalle de sept heures; car, peu
à peu, l'un des fils se mit à brüler, et les arcs
électriques allumés entre ce fil et le sol occasion-
nèrent des variations sur le réseau et des oscilla-
tions aux appareils de mesure de la station, qui
attirèrent l'attention du surveillant.
A l'endroit de l'accident, tout le long du fil
brûlé, on retrouva des fulgurites en forme de cône,
dans le sol d'argile, formées par les masses sco-
rifiées par le courant. Quelques-unes de ces fulgu-
rites avaient 20 centimètres de diamètre; la pointe
du cône s’enfonçait à 45 centimètres dans le sol;
la surface était hérissée de nombreuses épines
s’enfonçant dans la terre avoisinante. Trois heures
après que le courant avait été coupé, le sol restait
encore brülant le long de la place occupée par les
conducteurs.
L’électricité au canal de Panama. — Il est
inutile de dire que l'électricité sera employée
presque exclusivement au canal de Panama pour
toutes les opérations de l'exploitation : éclairage,
N° 1440
manœuvre des écluses, halage des bätiments, etc.
Une usine hydraulique, établie au nord du barrage
de Gatun, fournira 6000 kilowatts et ne dépensera
que 7 pour 400 de l’eau en excès, après déduction
des quantités absorbées par l’évaporation, par les
infiltrations et par les éclusées. La chute de Gatun
aura en moyenne une hauteur de 23 mètres.
Cabines téléphoniques silencieuses. —
L'Elektrotechnische Zeitschrift rapporte que la
maison Otto, Scherell et Cie, de Nordhausen,
construit des cabines téléphoniques dans lesquelles
ne pénètre absolument aucun bruit du dehors. Les
parois de cette cabine sont formées de cinq lames
en bois superposées en forme de croix, collées
ensemble et incrustées d'un sextuple isolement.
Cette installation fait éviter l'emploi de coussins
de renbourrage. Les cabines en question se
démontent en six parlies; on peut donc les faire
pénétrer par toutes les portes et les transporter
facilement, mème dans des escaliers étroits. Les
mèmes cabines ont reçu des ouvertures isolées
laissant passer les conducteurs d'éclairage élec-
trique et les fils du téléphone; il devient donc
inutile de percer leurs parois. (Electricien)
HYDROGRAPHIE
Découverte d’un dangereux écueil sous-
marin à l’entrée de Toulon. — Il n’est pas
d'année où l’on ne découvre qirelque roche nou-
velle sur nos côtes — sans parler des côtes étran-
gères, — mème dans les parages les plus fréquentés
et qui paraissent les mieux connus, comme ceux
des environs de Brest ou de Quiberon. Le plus
souvent, ces dangereux écueils sous-marins ne sont
découverts que lorsque le hasard amène quelque
bateau malchanceux à les caresser avec leur quille,
quand ce n'est pas avec leur coque elle-même.
C'est ainsi qu'ont été découvertes, notamment, la
roche du Fulminant dans le passage pourtant si
fréquenté du Four, au nord de la pointe Saint-
Matthieu; celle du Charles-Martel dans l'Iroise, en
pleine entrée de Brest; celle du Hoche, à l'entrée
de la baie de Quiberon.
Jusqu'à présent, c'était la côte de Bretagne qui
paraissait particulièrement redoutable à ce point
de vue. La côle de Provence, qui semblait plus
saine ou mieux connue, n'a plus rien désormais à
lui envier. On signale, en effet, de Toulon qu'une
roche couverte seulement de 4 à 5 mètres d'eau
vient d’être découverte au milieu de fonds de 15
à 20 mètres, à 600 mètres dans le S. 34° O. du cap
Cépet, qui limite au Sud la grande rade de Toulon.
Quand on pense que, depuis plus de cent ans,
les plus grosses unités de nos flottes de combat
ont passé par là, on peut dire que c'est un miracle
qu’il ne s’y soit jamais produit quelque désastre.
Et ce qu'il y a de plus extraordinaire, c'est que
cette roche est parfaitement visible sous l'eau, et
COSMOS
224
reconnaissable, même à assez grande distance,
par une coloration verdätre qu'elle donne à la
surface de la mer et qu'on peut apercevoir dès
que l’on a doublé le cap Cépet.
On a déjà exposé, dans cette revue, combien la
reconnaissance des roches sous-marines était difli-
cile. Elle constitue un des problèmes les plus
importants — et les plus ardus — de la science
de l'hydrographie.
Les hydro-aéroplanes permettront sans doute de
résoudre à coup sûr cet important problème: car
on sait que lorsqu'on s'élève à une certaine hau-
teur au-dessus de l’eau, on aperçoit très bien —
du moins quand l’eau est calme — les objets faisant
saillie sur le fond, roches ou sous-marins. Il sera
donc possible désormais, quand l’hydrographie
d’une côte aura été terminée, de s'assurer qu’il ne
reste aucune roche dangereuse ayant échappé à la
sonde de l’hydrographe, el ce ne sera pas là un
des avantages les moins précieux de la nouvelle
invention. PIERRE GUIDEL.
MARINE
Canot de sauvetage à moteur. — Après bien
des hésitations, la Société centrale des naufragés
s'est décidée à mettre des moteurs sur les nouveaux
canots. Jadis, ces hésitations étaient largement jus-
tifiées en raison des terribles services que l'on
demande à ces embarcations et qui y rendaient
impossible l'usage des machines à vapeur; mais les
immenses progrès des moteurs à explosion faisant
disparaitre la plupart des objections, l'Angleterre
a adopté le canot automobile dans ses Sociétés de
sauvetage et s’en est bien trouvée. Notre Société
centrale ne pouvait plus hésiter, et le Yacht nous
a appris qu'elle a mis en service au mois de juin.
à Dieppe, après des essais très satisfaisants effec-
tués à Juvisy et à Dieppe, son premier canot de
sauvetage à moteur.
Ce canot, construit à Juvisy par les chantiers
Deperdussin, a été offert par M™° Guérin et porte
le nom de Raoul-Guérin; il est en acier, de type
dit inchavirable, et a 40 mètres sur 2,60 m; son
insubmersibilité est assurée par son compartimen-
tage et par 16 caisses à air placées et fixées sous
les bancs en abord. Le pont, élevė de cinq centi-
mètres au-dessus de la flottaison en charge; est
percé de huit puits garnis de soupapes qui per-
mettent l'évacuation de l'eau embarquée à raison
d’une tonne en vingt seconiles.
L'hélice tourne dans un tunnel protecteur con-
stitué par les formes spéciales de l'arrière: un mo-
teur à essence à 4 cylindres Aster, type marin, de
25 chevaux, renfermé dans un compartiment abso-
lument étanche, lui imprime, à 759 tours par
minule, une vitesse de 6.5 nœuds.
Un inverseur Panhard permet de renverser la
marche instantanément.
230
COSMOS
29 aouT 1912
Lunettes grossissantes Zeiss.
Les lunettes grossissantes que vient de construire
la maison Zeiss d'Iéna sont destinées aux personnes
très myopes, dont elies améliorent notablement la
vue en agrandissant l'image rétinienne. Les fabri-
cants vantent surtout les avantages qu'elles offrent
aux gens incapables de supporter longtemps les
verres correcteurs simples.
Chacun des systèmes optiques de ces nouveaux
besicles comprend deux parties encaslrées dans
une large monture métallique: en avant, une
assez grande lentille convergente et, au voisinage
de l'œil, une lentille divergente plus petite. On règle `
ces dernières lune par rapport à l'autre, de manière
qu'elles fournissent un champ exempt de distorsion,
d'astigmatisme des rayons obliques et d’aberra-
tions chromatiques, si gênantes pour la vision.
Toutefois, elles donnent un aspect lourd et peu
esthétique à ceux qui les portent, surtout s'il s'agit de
représentantes du beau sexe. Malgré leur monture
métallique en duraluminium, alliage très léger, ces
syslèmes optiques pèsent plus que de simples len-
tilles divergentes du modèle courant. Le poids
varie enlre 13 grammes pour celui de —18 dioptries
ct 20 grammes pour celui de —10 dioptries.
Aussi, afin que les sujels les supportent aisément,
les constructeurs ont adapté à la monture, en plus.
du pont en W ordinaire qui épouse la racine du
nez, deux supports s'appuyant sur ses ailes. Le
nez du patient se (rouve pris alors de trois côtés,
les luneltes parfaitement fixées, et leur poids,
(35 grammes en tout pour —16 dioptries), réparti
sur une assez grande surface, n'exerce aucune
pression gênante. Ces montures s'adaptent à toule
fcrme d’appendice nasal, füt-il de la taille de celui
de Cyrano! N'importe quel opticien modifie à
volonté la longueur, la distance respective et l'in-
clinaison des ponts latéraux pour les proportionner
aux yeux et au nez de ses clients. En outre, afin de
replier ces lunettes sous un petit volume et de les
renfermer dans un étui pas trop volumineux, on
munit leurs branches d'une seconde articulation.
D'après les observations du professeur E. Hertel,
directeur de la clinique ophtalmologique de l'Uni-
versilé de Strasbourg, on doit adopter des systèmes
optiques agrandissant seulement l'image rétinienne
de 30 pour 100. Pour ce grossissement, qui corres-
pond à peu près à celui que nécessite l'ablation du
cristallin, la maison Zeiss a pu réaliser des lunettes
corrigées d’une façon presque parfaite avec un
champ de vision considérable (43°). Pour des gros-
sissements plus considérables, les opticiens d’'Iéna
n'ont pu obtenir une correction aussi grande des
faisceaux obliques que pour un champ de vision
notablement plus restreint.
Avec des lunettes de faible grossissement, les
personnes jeunes peuvent lire également, mais les
vieillards ou les individus se servant de grossisse-
ments assez forls doivent prendre des dispositions
. particulières, soil en munissant ces besicles d'un
verre additionnel approprié, soit en employant des
lunettes grossissantes dites « de travail », qui per-
NOUXYELLES LUNETTES GROSSISSANTES ZEISS.
mettent la lecture à une distance d'environ 25 à
30 centimètres. En ce cas, bien entendu, l'image
rélinienne ne se (rouve pas aussi agrandie que quand
un sujet, fortement myope, met l'objet à son
punctum proximum. D'ailleurs, pour remplir leur
but et tenir les promesses théoriques, les lunettes
grossissantes exigent une adaptation soignée. II
faut que chacun des systèmes optiques soit centré
sur l'œil et que lu distance entre le sommet de la
lentille voisine de l'œil et la cornée égale 12 mil-
limètres. Il s’agit donc, en définitive, d’un instru-
ment précis mais délicat, qui rendra d’incontes-
tables services aux myopes peu coquets et assez
fortunés pour s'offrir des besicles de 60 marks!
JacouEs BOYER.
———_—_ a ———— —
Un camion-grue électromobile.
Les frais de manutention des matières en vrac
ont été considérablement réduits par les machines
spéciales — le plus souvent à commande élec-
trique — qu'on a adoptées ces dernières années.
Le camion-grue électromobile construit par une
Société américaine, la General Electric Company,
nous semble constituer un nouveau progrès dans
celte voie. C'est, en effet, un camion électromobile
de construction très compacte, portant à son extré-
mité antérieure une grue pivotante dont le crochet
my
N° 1440
est soulevé ou abaissé par un cabestan de une
tonne, actionné par la batterie d’accumulateurs du
véhicule. La nouveauté de cet engin réside moins
dans la construction de chacune de ses pièces que
dans leur combinaison en un ensemble parfaitement
étudié qui permet de commander le camion et la
grue alternativement ou simultanément. Ce véhi-
cule sert enfin de tracteur pour la propulsion de
remorques quelconques ou de construction spéciale.
A
Kag í
Do Da |
4 7» H.. € .
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COSMOS
231
La capacité de ce singulier véhicule, déterminée
par la puissance de la grue, est de 900 kilogrammes.
Une batterie d'accumulateurs de 44 éléments,
d'une capacité de 168 ampères-heure, qui alimente
un moteur de 85 volts, 28 ampères, 4 200 lours par
minute, lui donne une vitesse de 14,5 km : h sans
charge, de 11,2 km: h avec charge de 1 tonne
au crochet de la grue, et de 8,0 km: h avec 5 tonnes
en remorque. Le contrôleur permet du reste de
UN CAMION-GRUE TRANSPORTANT DEUX BARILS.
graduer cette vitesse en quatre degrés, avec deux
vitesses arrière. Le poids du véhicule complet avec
son cabestan et la grue est de 2 250 kilogrammes.
Lorsqu'il s’agit de déplacer à une distance verti-
cale de 3 mètres ou moins, et de déposer dans un
rayon de 1,8 à 2,5 m, des matières pouvant être
subdivisées en paquets de une tonne ou moins, on
amène le véhicule dans une position convenable,
et, après avoir mis en aclion les freins, on fait
fonclionner le cabestan. C’est alors que la grue
oscillera entre les points de chargement et de
déchargement, sans que le véhicule ait à se dé-
placer.
Pour déplacer de grandes ou de petites quantités
de matière à une distance inférieure à 420 mètres
ou de pelites quantités à une distance quelconque,
on ädopte le procédé suivant : après avoir soulevé
sa charge par le crochet de la grue, le véhicule
démarre et, en un temps incroyablement court, va
déposer les marchandises à l'endroit où on les
232
demande, sur le parquet, sur une pile verti-
cale, etc., suivant les cas. Grâce au faible empatte-
ment, ce véhicule peut virer sur des courbes de
rayons très courts, ce qui lui permet de se
déplacer avec une extrême facilité parmi les objets
de toute sorte encombrant les cours d'usines, etc.
Lorsqu'il s’agit enfin de transporter de grandes
quantités de marchandises à des distances supé-
rieures à 120 mètres, le meilleur procédé consiste
à atteler le camion à des trains d'environ quatre
—— Á
COSMOS
90 aour 1919
remorques. Pour assurer un rendement maximum,
on s'arrange pour charger un train et pour en
décharger un autre, pendant que le camion fait le
trajet entre les points de chargement et de déchar-
gement.
L'introduction de ce nouvel engin de transport
dans différentes usines américaines a permis de
réaliser des économies fort sérieuses, tout en faci-
litant et en simplifiant beaucoup le service de ma-
nutention. Dr A. GRADENWITZ.
Procédé nouveau pour la pasteurisation du lait.
Le problème de la pasteurisation du lait ne pré-
sente pas seulement un intérêt d'ordre technique,
encesensqu'il permet, dansla fabrication du beurre
et du fromage, la destruction des microgermes
nuisibles et le réensemencement au moyen de cul-
tures sélectionnées; il rend possible, par surcroit,
dans l’industrie laitière proprement dite, lobten-
tion de produits d’une qualité uniforme et d'une
conservation parfaite. Il revêt surtout une impor-
tance primordiale en hygiène sociale, puisqu ilparait
probable que le lait est un des véhicules les plus
communs du terrible bacille tuberculenux de Koch.
Cela est si vrai qu’à Liége, au dernier Congrès
de l'alimentation, M. le bourgmestre Klayers a pu
affirmer que 60 pour 100 des laits consommés dans
l'agglomération liégeoise contiennent le germe
redoutable de la tuberculose. Cette proportion
énorme n'est fort heureusement pas aussi élevée,
à beaucoup près, dans toutes les régions, mais il
n’en reste pas moins que certains laits crus consti-
tuent un grave danger pour les enfants, les malades
et les vieillards qui le consomment, c’est-à-dire
pour des organismesinsuflisamment aguerrisencore
ou débilités et, par suite, mal défendus contre les
possibilités d'infections morbides.
Or, la pasteurisation, trop rarement pratiquée,
l’est en général d'une façon défectueuse, et les
divers procédés industriels mis en œuvre pour
l’effectuer ne sont pas à l'abri de tout reproche.
Reprenant à son tour les critiques formultes
contre les méthodes couramment en usage — alté-
ration du gout, séparation de la crème rendant
nécessaire le passage à l'homogénéisateur, diminu-
lion de la valeur alimentaire absolue, élévation des
frais nécessaires, — M. C. Amege a décrit (yg. de
la riunde et du lait, 10-35-12, p. 129-136) un
système dont il est l'inventeur et qui repose sur un
principe absolument nouveau.
La pasteurisation, primitivement effectuée par
un chauffage à + 65°, + 70° ou + 75°, s'est révélée
à l'usage parfaitement incapable d'assurer la stéri-
lisation intégrale à laquelle elle tend. En ce qui
concerne nolamment le bacille de la tuberculose,
il a été décidé au Congrès de Liége qu’il y avait
lieu de réclamer des pouvoirs publics un chauffage
à + 85° pour tout le lait mis en vente; or, jusqu'ici,
on a presque toujours opéré le chauffage en vase
clos et sous pression, ce qui a conduit aux mul-
liples inconvénients signalés tout à Theure.
M. Amege, au contraire, préconise un système
contrôlé par lui depuis plus de quinze ans, et
dans lequel la pression est complètement sup-
primée pendant le chauffage, ce qui a pour résultat
de supprimer le « goùt de cuit » et de laisser la
crème parfaitement émulsionnée dans le lait. Il
faudrait, en effet, d'après ses observations, incri-
miner l'acide carbonique et l'ammoniaque gazeux,
résultat de la décomposition à une certaine tem-
pérature du carbonate d'ammoniaque préexistant
dans le lait et qui, dans les procédés pratiqués
jusqu'à nos jours, restent emprisonnés sous forte
pression au contact du liquide, donnant lieu à cer-
taines réactions assez complexes dont le résultat
tangible est l’altération du produit.
Avec le dispositif imaginé par M. Amege, et qui
consiste en une petite canalisation réalisée par une
aiguille double fixée entre le bouchon ou la ron-
delle de caoutchouc et le goulot du flacon, ces gaz
sont éliminés au fur et à mesure de leur produc-
tion. L'opération terminée, il n'y a plus qu'à
relirer l’aiguille.
On peut toutefois la laisser en place si on désire
aérer lentement le lait, de manière à le rendre plus
digestible, tout en le maintenant à l'abri des
poussières en suspension dans l'air. Mais cette
aération ne doit pas durer plus de cinq ou six jours,
car en raison de phénomènes encore mal connus,
les ferments peptonisants, non détruits, trans-
forment partiellement, au contact de lair, les
albuminoïdes en ammoniaque. Le point important
est donc de réaliser les températures exactement
nécessaires à la destruction des germes et de régler
la durée optimum de l’aération, de façon à obtenir
un lait stérilisé présentant le maximum possible
de digestibilité.
En aucun cas, les laits ainsi traités ne doivent
N° 1440
ètre homogénéisés. La seule opération annexe qu'il
soit nécessaire de leur faire subir est une filtration
préalable, et encore est-il logique de l'effectuer en
mème temps que le remplissage automatique des
bouteilles.
Il est prudent de laisser entre le bouchon et le
niveau supérieur du liquide un vide d'un demi-
décilitre environ, qui correspond à la dilatation
prévue, car il serait à la fois onéreux et inutile de
laisser le trop-plein se déverser à travers la cana-
lisation de l'aiguille.
Par l'emploi de ce procédé, ou plus exactement
de cet artifice très simple, il est, parait-il, possible
de réaliser une économie qui compense largement
les frais du. chauffage. Celui-ci est conduit en plu-
sieurs stades. Les bouteilles, disposées par 100 ou
200 sur des plateaux que commande un arbre
central, pénètrent successivement dans des bains-
marie respectivement chauffés à + 35°, + 60°,
+ 80°, + 100° et + 109°. Dans les deux derniers,
l'eau est additionnée jusqu’à saturation d’un sel
peu coûteux qui en retarde l'ébullition. Suivant la
dimension des plateaux, on arrrive à traiter de la
sorte 600 à 4 200 litres de lait pendant une journée
de dix heures.
COSMOS
233
Plus économiquement, si on estime suffisante
une pasteurisation à + 85°, on peut traiter directe-
ment en fuüts, grâce à l'appareil rotatif que
M. Amege a établi sur le mème principe. Le ren-
dement est d'environ 1 000 litres par heure. L'avan-
tage pratique de cette pasteurisation massive est
de permettre la livraison aux détaillants de lait en
füts avec bondes plaquées et robinets de süreté, ce
qui rend impossible tout mouillage frauduleux en
cours de transport, et supprime en mème temps
les frais élevés résultant du rinçage, de la casse
des bouteilles, de la perte des bouchons mécaniques,
de la comptabilité et du controle compliqués des
bouteilles livrées à la clientèle et retournées après
usage. On rendrait ainsi abordable à toutes les
bourses un lait pur, complet, propre et rigoureuse-
ment privé de tous germes pathogènes, en mème
temps qu exempt de toute chance d'altération.
C'est là, en effet, le but qu'il faut surtout
s'attacher à atteindre, car il ne suffit pas, en
matière d'hygiène laitière, d'obtenir un produit
parfait, il faut encore le rendre accessible à tous.
et le mettre en vente à des prix qui en permettent
l'achat à la clientèle la moins fortunée.
FRaxcis Mae.
Les piérides.
Les piérides représentent, dans le grand ordre
des Lépidoptères si peuplé de ravageurs, un des
genres des plus nuisibles aux intérèts de l’homme,
par le tort que font ses diverses espèces à des
plantes d’une grande importance horticole. Ce
sont des papillons diurnes, à antennes terminées
en massue, d'envergure assez ample, très actifs
par les jours ensoleillés, et qui offrent à un
examen superficiel le trait commun d'avoir des
ailes blanches non anguleuses.
Les piérides sont des ennemis redoutables; voici
celles qui, dans nos régions, causent le plus de
dégäts et méritent, par conséquent, d’une manière
plus spéciale l’aversion de l'horticulteur.
La piéride de l’aubépine (Aporia cratægi), vul-
gairement appelée le gazé à la suite de l'entomo-
logiste Geoffroy, a les ailes d'un blanc jaunatre
uniforme, sans taches, traversées seulement par
le réseau des nervures noires.
Son aire géographique est très étendue; elle est
commune dans toute l'Europe, et se trouve mème
au Japon. Elle vole chez nous de la fin de mai à
juillet, en grande abondance certaines années, et
d'autres années beaucoup plus rare, parfois presque
introuvable.
La femelle dépose ses œufs, qui sont jaunes et
en forme de poire, par tas sur les branches ou à
la face supérieure des feuilles des aubépines, des
pruniers, des cerisiers, des amandiers et d'autres
arbres fruitiers analogues. De ces œufs sortent à
l'automne de petites chenilles, qui, à peine écloses
et obéissant à leur instinct de sociabilité, filent en
commun une toile solidement adhérente à quelque
branche, et qui est destinée à leur servir d'abri
contre les intempéries hivernales.
Au printemps, cette toile est rompue, et les che-
nilles, douées d'un robuste appétit, commencent à
faire des excursions et à chercher des vivres aux
environs. Comme, à cette époque, elles ne trouvent
que des bourgeons, elles peuvent causer des dégâts
considérables, en anéantissant le germe des ra-
meaux et des fleurs.
Elles ne sortent pas pendant les pluies, et par
les jours de beau temps elles rentrent le soir au
domicile. Après une mue, se trouvant logées trop
à l'étroit, elles filent une nouvelle toile, plus
grande. Elles ne quittent définitivement leur abri
commun qu'après la dernière mue, et se répandent
alors sur toutes les branches.
Quand elles ont atteint toute leur taille, elles
sont d'un gris luisant, parsemées de quelques poils
blancs et fins, avec le dos brun, marqué de ligues
longitudinales d'un rouge orangé, assez larges, et
la tête noire. La chrysalide est d'un blane ver-
dâtre, avec deux lignes lalérales jaunes et de
nombreuses taches noires formant un dessin irré-
23%
gulier; elle donne son papillon au bout de quinze
jours.
Cette piéride est parfois un véritable fléau, par
l'abondance de ses chenilles, qui dévorent les
bourgeons et les feuilles des arbres fruitiers. Le
seul moyen pratique de s'opposer à ses ravages
F1G. 1. — PIÉRIDE DE L'AUBÉPINE.
est de recueillir ses nids au printemps et de les
détruire.
Une autre espèce, connue de tout le monde et
que l’on pent voir voler jusque dans les rues des
grandes villes, est la Piéride du chou (Pieris bras-
sicæ), vulgairement le grand papillon du chou.
Elle est à peu près de la {aille du gazé. Ses ailes
sont d'un blanc crème, les antérieures marquées
au sommet d'une tache d'un noir profond, sau-
poudrée de blanc grisâtre; une tache analogue,
mais plus petite, existe au bord antérieur des ailes
postérieures. En outre, la femelle, qui est plus
grande, se distingue du mâle par trois taches noires
sur chacune des ailes antérieures, deux rondes
superposées et une longitudinale au milieu du
bord interne.
Ce papillon est partout très commun pendant la
belle saison, avec deux maxima de fréquence,
Fun en mai et juin, l'autre à partir de la mi-
juillet.
La chenille vit, de juin à septembre, aux dépens
de certaines plantes de la famille des crucifères,
en particulier des diverses variétés de choux cul-
tivés. Elle est d'un vert grisâtre ou d’un jaune
verdâtre, avec trois lignes longitudinales jaunes,
séparées par de petits tubercules noirs dont chacun
supporte un poil blanchâtre; sa tête est d’un bleu
cendré ponctué de noir. Elle est très nuisible, et
tous les jardiniers connaissent et redoutent ses
ravages; d'une belle plantation de choux elle peut
ne laisser, en quelques jours, que les tiges et les
côtes.
La chrysalide, d'un vert jaunâtre avec de petites
taches noires et jaunes, se forme à Ja fin de la
belle saison, et passe l'hiver.
COSMOS
-
29 aouT 1912
Pour entraver la pullulalion de ce pernicieux
insecte, le jardinier peut intervenir utilement
en capturant au printemps, avec un filet à papil-
lons, les individus qui voltigent dans les jardins,
en quête des plantes nourricières des chenilles.
Chaque femelle pouvant pondre 200 à 300 œufs,
on voit combien la destruction systématique des
adultes peut être eflicace.
Il est recommandé aussi de saupoudrer de
poudre de pyrèthre les feuilles de choux attaquées
par les chenilles ou qui portent des œufs; ceux-ci
sont d'une couleur d’or brillante et déposés en
paquets sous les feuilles.
La nature, d’ailleurs, maintient elle-même dans
une juste limite la multiplication de cette espèce
par des ennemis spontanés : le Microgaster glo-
meratus, braconide dont les larves vivent à Pin-
térieur de ses chenilles, et le Pteromalus larva-
rum, chalcidite qui, à l'état larvaire, dévore inté-
rieurement ses chrysalides.
La piéride de la rave (Pieris rapæ), vulgaire-
ment dénommée le petit papillon du chou, est
analogue à la précédente par la physionomie et
la couleur générale. Mais sa taille est sensiblement
F1G. 2. — PIÉRIDE DU CHOU.,
(En haut le mäle, en bas la femelle.)
plus petite, la tache du sommet des ailes anté-
rieures descend moins loin le long du bord de l'aile
et est moins noire, surtout chez la femelle; celle-
ci a deux taches noires arrondies sur le milieu
des ailes antérieures, tandis que le mâle n'en a
qu'une, plus ou moins apparente.
N° 1440
C'est la plus commune des piérides; elle a deux
générations par an, dont les adultes se montrent
respectivement en mai-juin et en automne.
La chenille est d’un vert gai, couverte de très
petits poils qui lui donnent une apparence veloutée ;
elle est ornée de trois lignes jaunes longitudinales,
CS
F1G. 3. — PIÉRIDE DE LA RAVE.
(Mäle et femelle.)
une sur le dos, une de chaque côté, au-dessus
du point d’attache des pattes.
Elle vit aux dépens des diverses variétés de
choux, sur le navet, les raves, le réséda, les capu-
cines. Elle n’est pas moins nuisible, malgré sa taille
moindre, que la chenille de la piéride du chou.
La chrysalide qui lui succède est d’un gris verdâtre
cendré, striée de clair, parfois lavée d'incarnat et
parsemée de points noirs en petit nombre.
Les moyens de destruction à lui opposer sont
les mêmes que pour l’espèce précédente : poudre
de pyrèthre sur les feuilles envahies, et capture
des femelles aux saisons convenables.
COSMOS
235
Une quatrième espèce redoutable encore à lhor-
ticulture est la piéride du navet (Pieris napi), qui
porte le nom vulgaire de papillon blanc veiné de
vert. Elle est un peu moins fréquente dans les
jardins que les deux précédentes, mais on la ren-
contre communément dans les champs.
Elle est à peu près de la même taille que la pié-
ride du chou et lui ressemble, mais il est tou-
jours facile de l’en distinguer par les nervures de
ses ailes, qui sont plus saillantes et assez large-
ment ombrées en dessous de noir verdâtre. Les
taches du dessus des ailes sont grises dans la gé-
nération de printemps, noires dans la génération
d'été. Les premiers adultes commencent à voltiger
dès le mois de mars.
La chenille est d'un vert mat, parsemée de
petits tubercules noirs et avec une bordure jaune
autour de chaque stigmate; elle vit dans les jar-
dins, aux dépens de la capucine, de la rave, du
navet, des choux, du réséda, et dans les champs
sur les feuilles des diverses crucifères agrestes.
Elle peut se rendre très nuisible, et notamment
elle a causé plusieurs fois en Angleterre de grands
ravages dans des champs de turneps.
F1G. 4. — PIÉRIDE DU NAVET.
La chrysalide est verdâtre, celle de la généra-
tion estivale abondamment tachetée de noir. La
chasse aux individus adultes et leur destruction
représentent la meilleure sauvegarde contre la
pullulation de ce papillon nuisible.
À. ACLOQUE.
Les beurres anormaux.
Il ne suffisait pas que l’homme à la recherche de
sanourriture quotidienne soitexposé aux tromperies
des falsificateurs dont l'art se perfectionne au fur
et à mesure que la chimie fait des progrès.
Voilà que maintenant les animaux les plus sin-
cères et les plus inoffensifs se révèlent fraudeurs
émérites!
Aurait-on jamais soupçonné de trahison, autre-
fois, la vache laitière ?
En dehors de cas bien déterminés comme au
moment du vélage ou en fin de lactation, pouvait-on
se douter qu'elle était capable de dénaturer son
lait?
Et pourtant voici l’exacte vérité.
La vache adultère son lait, comme Île crémier
cupide et insatiable fraude à son tour le lait, la
crème, le beurre!
Non seulement la vache est le premier fraudeur
236
de l’industrie laitière, mais elle peut varier ses
procédés et a la ressource d'employer deux mé-
thodes de fraude.
Elle peut, avant de nous le livrer, margariner
son lait au point que le chimiste qui analysera le
beurre résultant de ce lait y découvrira parfois
jusqu'à 50 pour 100 de margarine, et, d'aulre part,
elle est capable de sécréter un lait dont le beurre
donnera à l'expert l'impression d'une fraude par
la graisse de coco pouvant atteindre 30 pour 100.
On se doutait depuis longtemps de l’irrégularité
de la composition du lait naturel dans certaines
régions, notamment en liollande, dans le nord de
la France, en Finlande, etc. Wanters l'avait
signalée, il y a une douzaine d'années, en Belgique,
accusant les vaches de se livrer en automne à la
fraude par margarination sans aucune retenue :-
Les Francais Condon et Kousseau, tout en recon.
naissant le fait, le ramenèrent à des proportions
plus modestes.
Tout récemment, un vétérinaire de Caudry
(Nord), M. Eloire, jetait le cri d'alarme et nous
avertissait que l'invasion des beurres anormaux
dans le Nord prenait de grandes proportions et
qu’il avait observé des vaches capables de pro-
duire à volonté en hiver des beurres naturels, mais
défigurés comme si on leur avait ajouté des quan-
tités d'oléo-margarine variant de 15 à 50 pour
400 (1).
La matière grasse du lait qui constitue la prin-
cipale richesse de cet aliment est le résultat d’un
équilibre admirable entre deux sortes de corps
gras ou glycérides: les glycérides à acides gras
fixes et les glycérides à acides gras volatils. Cet
équilibre a pour conséquence le maximum d’attrait
dans le parfum et la parfaile assimilation du
beurre.
Et cette harmonie entre la digestibilité et le goùt
est d'autant plus complète que les prairies offerte s
en pâturage aux troupeaux sont elles-mêmes plus
parfumées.
Aussi, les pâturages d'altitude moyenne, dans le
Jura suisse et le Jura français, dans les Vosges,
dansle Vivarais, embaumés par le serpolet, le thym,
la pensée sauvage, où croissent quelques petites
graminées (Festuca rubra, Nardus stricta, etc.),
où le gazon des pelouses et des chaumes est lait
d'herbes fines et délicates, donnent-ils le lait le
plus savoureux, la crème et le beurre les plus
parfumés!
Et celle constatation n’est point nouvelle, car en
1622 Marguerite de Gonzague, célébrant les gra-
cieux paysages des Vosges et les produits fabriqués
à l'ombre des noirs sapins, déclarait qu'elle les pré-
férait aux douces prairies de son pays {Mantoue) (2).
(1) Annales des falsificalions, janvier 1912.
(2) Les Hautes-Chaumes des Vosges, par Pirnag LGYÉ,
p. 244. Berger-Levrault, édit., Paris, 1903.
COSMOS
29 aout 1912
Les proportions des deux glycérides, en s’écartant
des limiles que la nature a fixées, constituent deux
anomalies opposées.
Si les glycérides à acides gras fixes augmentent,
ei si par conséquent les glycérides à acides volatils
diminuent, le beurre se margarine.
Si, au contraire, les glycérides à acides volatils
augmentent, le beurre se laurine. Ses quantités
alibiles ne sont point diminuées, mais il prend les
caractères, les constantes du beurre fraudé par la
graisse végétale, la graisse de coco, constituée sur-
tout par un glycéride appelé laurine.
Et il n’est pas indispensable qu'une main crimi-
nelle intervienne pour opérer ces mutations. La
vache toute seule est capable de les réaliser.
Voulons-nous dire qu'elle peut les produire à
volonté, qu’elles sont le fait de ses caprices ? Certes
non!
Si le commerçant, capable de dénaturer une
denrée alimentaire, ne mérite aucune pitié, la
vache qui commet le même délit est digne de toute
notre indulgence, car c'est à son insu que ses
glandes mammaires sécrètent un lait irrégulier,
margariné ou lauriné, et en fin de compte c'est
encore l’homme seul qui est coupable!
Une observation attentive des phénomènes a
permis d'établir que le lait naturel margarine a
pour causes :
4° Les longs voyages, les mauvais traitements,
le surmenage. Lorsqu'on impose aux laitières des
fatigues disproportionnées à l'effort qu'elles peuvent
fournir, elles margarinent leur lait ;
2° La mauvaise hygiène de l'habitation. Ainsi les
vaches qui restent trop longtemps au pâturage en
fin d'automne, exposées la nuit au vent, au froid,
à l'humidité, donnent un beurre anormal ;
3° La disette ou la mauvaise qualité de la nour-
riture.
En fin de compte, ces trois causes n'en font
qu'une, car toutes sont le fait de la méconnais-
sance des soins à donner aux troupeaux. Les bêtes
maltraitées, malsoignées,malnourries, maigrissent,
résorbent leur graisse. Elles se désuif/ent, et le lait
margariné qu'elles donnent n'est que la protesta-
tion de l’organisme contre les violences exercées
envers lui.
Toutes les causes qui provoquent l'augmentation
insolite des glycérides à acides volatils ne nous
sont peut-être pas connues !
Nous savons seulement de façon cerlaine que
l'abus des feuilles de betterave et des tourteaux de
coco dans l'alimentation des étables produisent
cette anomalie.
Autant l'emploi judicieux de ces deux substances
est favorable à la santé des laitières et à la lacta-
tion, lorsqu elles accompagnent une nourriture
variée (maïs, son, pomme de terre, etc.), autant,
employées scules ou en trop grande abondance,
NS 1440
elles constituent un régime détestable qui modifie
profondément la eomposition normale du lait et
altère la santé des vaches. L'une et l’autre, si elles
sont prodiguées sans mesure, provoquent des diar-
rhées, des troubles variés et finalement des mala-
dies graves.
Il est regrettable qu'un examen superficiel ne
puisse dénoncer la présence des beurres anormaux.
Nous dirions au public: Détournez-vous de ces
beurres! Ne les employez pas! Un beurre anormal
est l'indice de la misère physiologique d’un indi-
vidu ou d'un troupeau. Or, les bîles rendues ma-
lades par l'amaigrissement ou par une nourriture
non appropriée à leur organisme deviennent une
proie facile aux invasions microbiennes, et on sail
combien le lait et le beurre sont aptes à la trans-
mission des maladies infectieuses (1).
La question est assez importante pour qu'elle
mérite d’être précisée et limitée.
Une personne en bonne santé ne tombera pas
forcément malade parce qu’elle aura consommé du
beurre anormal; mais rappelons-nous que toutes
les vaches dont les produits (lait et beurre) sont
dangereux pour la santé donnent un lait et par
conséquent un beurre anormaux.
Les vaches tuberculeuses donnent un beurre
anormal.
Les vaches atteintes de fièvre aphteuse donnent
un beurre anormal (Eloire).
Le beurre normal est l'indice du bon état de
santé des vaches.
Malheureusement, l’anomalie du beurre ne se
reconnait pas simplement au seul aspect comme la
qualité d’une viande. I] faut recourir à un examen
een
COSMOS
237
chimique, délicat, coùteux cl pen pratique. — Que
faire, alors? Il nons semble qu'il my a quun
remède : la disparition des beurres anormaux.
Dans les contrées où les étables sont bien tennes
comme hygiène et comme nourriture, les vaches
ne fraudent pas leur lait. En Suisse, le beurre est
partout normal. Il est même des régions en France
où les anomalies du beurre sont inconnues.
L'usine lactée de Vevey, qui reçoit pour le con-
centrer le lait de plus de cent villages des cantons
de Fribourg et de Vaud, n’a jamais constaté d’ano-
malies dans les livraisons colossales qui lui sont
faites. Elle a imposé à tous ses correspondants
l'obligation de nourrir rationnellement leurs trou-
peaux et de les abriter comme il convient. L’exécu-
tion loyale des contrats suffit à assurer un lait con-
tinuellement normal et de composition invariable.
Il faudrait partout exiger des laitiers les mêmes
garanties. Il faut surveiller les étables, abolir les
praliques et les routines pernicieuses. Les laiteries
sont des établissements d'utilité publique. Nous
n'exagérons pas en disant que c'est là que se
décide le sort d'un peuple, car c'est là que se
décide la vie ou la mort de milliers de petits êtres
humains, que le lait seul fait vivre dans les pre-
mières années de l'enfance.
Le jour où le lait mouillé, le lait écrémé, le lait
et les beurres anormaux auront disparu de Fali-
mentation, la mortalité infantile ne présentera plus
le bilan funėbre qui tous les ans se dresse devant
nos yeux épouvantés.
D' LAHAGHE,
pharmacien major de 1" classe en retraite.
Automotrices pétroléc-électriques.
Depuis la fin de 4911, circulent dans les rues de
Londres un certain nombre d'autobus d'un nou-
veau système, qui donnent, parait-il, toute satis-
faction au public et à la Compagnie d'exploitation
comme service et comme fonctionnement écono-
mique. Ces autobus portent en eux toute une petite
station génératrice d'électricité : moteur à pétrole
actionnant une dynamo qui, à son tour, alimente
le moteur propulseur de la voiture. En dépit de
celte apparente complication, la commande est
extrémement simple, et des expériences, poursui-
vies depuis 1907, ont démontré qu'il était possible
de réaliser une économie de 9,3 centimes par kilo-
mètre, tous frais compris, par rapport aux omnibus
à-pétrote mis en circulation par la même entreprise
de transports. Vers la même époque, la Compagnie
(1) Revue internationale de médecine et de chirurgie,
D” Lorrty, n° 4, p. 68, et n° 6, p. 101.
anglaise Westinghouse a muni une petite ligne du
Great Central Railway d'une voiture automotrice
du même système, qui fait le service de voyageurs
entre Marylebone et South Harrow.
Le principe des voitures pétroléo-électriques
destinées aux transports sur routes ou sur rails
n'est pas nouveau, pas plus, d'ailleurs, que son
application: mais, jusqu'ici, la plupart des essais
de traction électrique avec moteur à pélrole ou à
essence comme source d'énergie n'a guère donné
de bons résultats pour les transports sur routes, et
on a plutôt adopté ces combinaisons pour desservir
de petites lignes locales, sur rails, pour lesquelles
des locomotives à vapeur auraient été trop oné-
reuses, et où l'installation d'une usine génératrice
fise n’était pas justifiée par un trafic intense.
Si nous examinons le cas des automotrices sur
routes, nous voyons d’abord que le groupe élec-
trogène avec moteur à pétrole a eu pour rule, tantôt
235
principal, tantôt secondaire, la charge d’une bat-
terie d’accumulateurs. On voulait délivrer les voi-
tures électriques du grosinconvénient de la recharge
périodique à une station fixe, et les rendre ainsi
plus indépendantes, mais l’accroissemement de
poids mort était trop considérable, et les voitures
mixtes à batterie, comme on les appelait, n'ob-
tinrent qu'un succès relatif. Puis celle batterie
étant supprimée, le groupe électrique resta seul
maitre de la propulsion : il était muni d'un régu-
lateur à solénoide qui empêchait le moteur de :
s’emballer et permettait d'obtenir une marche
régulière. Ce régulateur, en un mot, suivait de
COSMOS
29 aouT 1912
près toutes les variations de charges et maintenait
constante la tension du courant. Ce système a été
appliqué à des camions et a figuré dans Île stand
de Dion et Bouton au Salon de l'Automobile en
1902. Vers la même époque, des voitures analogues
ont été construites aux États-Unis par la « Fisher
Motor Vehicle » d'Hoboken. Les premiers taxi-
autos parisiens ont compté aussi dans leurs rangs
quelques voitures pétroléo-électriques. De 1902 à
1907, on semble avoir abandonné ou, tout au
moins, délaissé ce genre de traction pour adopter
plus spécialement la voiture avec moteur à pétrole
seul ou la voiture électrique à accumulateurs.
LT GAYSMATER R° MARBLE ARCH CHARING+ ELEPHANT CANBERELL C°]
VE. ; —
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10 TI LLIN G v’ |
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FiG. 1. — OMNIBUS AUTOMOBILE PÉTROLÉO-ÉLECTRIQUE DE LONDRES.
Le divorce entre le pétrole et l'électricité semble
être presque définitif, chacun des ex-associés
se perfectionnant séparément et s'’adjugeant tel '
champ d'application qui lui est le plus approprié.
Mais, justement, ces progrès ont fini par faciliter
un rapprochement, et comme nous le disions en
commencant, il en est résulté une nouvelle combi-
naison qui, depuis quelques mois, semble, à Londres,
donner toute satisfaction.
Ce nouvel autobus, construit dans les ateliers de :
MM. Th. Tilling, à Peckham (fig. 4), contient
34 voyageurs assis et pèse 3,5 tonnes. Le châssis
(fig. 2) mesure 2,07 m de large sur 4,40 m entre
essieux, avec une longueur totale de 5,80 m;
il porte un moteur à pétrole à quatre cylindres de
105 mm >» 125 mm avec allumage par magnéto
à haute tension et une circulation d'eau; ce moteur,
avec le volant, le carburateur et la magnéto, pèse
environ 237 kilogrammes. La dynamo est actionnée
par le volant du moteur, au moyen d’un accouple-
ment à ressort qui permet des irrégularités dans
l'alignement de l'arbre et de l’induit. Cette dynamo
alimente un moteur série accouplé par joint uni-
versel à un arbre propulseur, lequel actionne l’es-
sieu d’arrière au moyen d’une vis sans fin et d'un
pignon hélicoïdal à différentiel.
Le coupleur est monté sur le côté du véhicule;
il se compose d'un inverseur et d’une résistance
N° 1440
montée en dérivation sur l’inducteur; le premier
se manœuvre au moyen d'un levier latéral, et la
résistance à l’aide d’un petit levier horizontal dis-
posé en dessous du volant de direction.
La dynamo, qui peut débiter de 4 à 25 kilowatts
à une vilesse angulaire de 350 à 1 400 tours par
minute et sous une tension de 0 à 400 volts, est
construite de telle sorte que tout accroissement
dans la demande de courant se. trouve accompa-
gnée d'une diminulion correspondante de tension.
Le débit en kilowatts, à une vitesse quelconque,
est proportionnel à la puissance développée par le
moteur à pétrole, mais la tension et l'intensité
COSMOS
239
peuvent varier dans une large mesure, selon la
pente de la route, la vitesse ou le degré d’accéléra-
tion. L'intensité du courant absorbé par le moteur
série est presque proportionnelle à l'effort de trac-
tion exercé sur l’arbre propulseur, et sa vitesse
est également, mais à un degré moindre, propor-
tionnelle à la tension de l'alimentation. Par suite,
lorsque la voiture est en palier, l'alimentation en
courant est très faible; elle augmente sur les
rampes avec une diminution correspondante de la
tension, d’où une vitesse moindre avec un accrois-
sement dans l'effort du tracteur. Tous ces change-
menis de vitesse et d'efforts s’eflectuent automali-
F1G. 2. — CHASSIS DES AUTOBUS PÉTROLÉO-ÉLECTRIQUES DE LONDRES.
quement. La conduite de la voiture s'obtient donc
d’une manière fort simple. Sur les routes en palier
ou sur les pentes ordinaires, la commande s’effectue
uniquement au moyen d'une pédale que le méca-
nicien actionne de son pied droit et qui règle l'ad-
mission du gaz du moteur. Si les rampes deviennent
plus accentuées, on fait intervenir la résistance en
dérivation qui permet une augmentation de vitesse
de la machine. D'autre part, il faut remarquer
que la génératrice cesse d’être excitée pour une
vitesse minimum du moteur à pétrole de 300 tours
par minute. Il n’est donc pas besoin de couper le
circuit entre la dynamo et le moteur pour provo-
quer un arrêt; le seul ralentissement dans l'ad-
mission des gaz, au moyen de la pédale, empêche
la dynamo de transmettre du courant au moteur.
Le rendement total de l'ensemble est de 79 pour
100 en service normal; ce rendement est de 90
pour 100 sur le moteur, et de 88 pour 100 sur
la génératrice. On réalise par cette méthode et
cette combinaison des économies assez considé-
rables de pétrole, car, étant donnée la facilité avec
laquelle la commande s'obtient, la plus grande
partie de la route s'effectue avec admission presque
fermée. En outre, la souplesse du démarrage et du
fonctionnement de l’ensemble procurent de nou-
velles économies dans l'entretien des machines et
de la voiture.
210
Quant aux transports sur les voies ferrées, les
essais pétroléo-électriques ont été beaucoup plus
nombreux. Depuis l'apparition de la locomotive
Heilmann, ils n’ont, pour ainsi dire, pas cessé
et ont eu tout naturellement pour but de rem-
placer le moteur à vapeur de la locomotive Heil-
mann par des moteurs à pétrole ou à essence,
Fr
PE PR PE
RAS à
eaan a aE
D
=
F1G. 3. — VOITURE PÉTROLÉO-ÉLECTRIQUE
DU GREAT CENTRAL RAILWAY.
d’agencer le groupe électrogène et de distribuer la
commande d’une manière avantageuse. On obte-
nait ainsi les démarrages souples et doux propres
aux moleurs électriques, on simplifiait la trans-
mission et on réalisait une meilleure répartition
du couple tracteur tout en utilisant les avan-
tages économiques du moteur à explosion et
en supprimant justement ce qu’il présentait de
COSMOS
29 aouT 1919
brutal dans sa marche et dans son démarrage.
Parmi les principales applications pétroléo-
électriques aux chemins de fer, nous pouvons
signaler les automotrices de la General Electric C°,
construites à New-York en 14905; celles de la
maison Frese et Ci*, de Saint-Pétersbourg, mises
en service vers la même époque. Encore en 1905,
l'autocar du North Eastern Railway; puis c'est
l'équipement, en 1907, de nombreuses automo-
trices du même genre qui parcourent en Hongrie
460 kilomètres et relient les villes de Szegedins,
Arad et Brad après des essais de six ans. Ces auto-
motrices comportent des groupes de 70 chevaux
avec moteur électrique Westinghouse. Enfin, de
tous les còtés, on peut en citer des exemples qui se
multiplient comme preuve des services rendus, les
deux plus récents sont ceux réalisés, l’un en Alle-
magne par l’Algemeine Elektricitäts Gesellschaft,
sur une petite ligne, près de Kænigsberg; l’autre en
Angleterre, sur le Great Central Railway, est celui
que nous mentionnions au début de cet article.
La figure 3 nous montre la partie avant de cette
voiture avec la salle des machines; à l’autre extré-
mité se trouve également une cabine de commande
pour le mécanicien. La partie centrale est amé-
nagée pour 50 voyageurs assis et un certain
nombre debout. Le groupe électrogène a une puis-
sance de 90 chevaux, et les deux moteurs série
attelés sur les essieux peuvent donner à la voiture
une vitesse de 58 à 65 kilomètres par heure, Un
petit groupe électrogène distinct sert à l'éclairage
de la voiture. La principale caractéristique de
toutes ces automotrices est que le démarrage
s'opère très facilement avec une accélération rapide.
Dès le début, le moteur à pétrole peut développer
toute sa puissance, et l'ensemble exerce un effort
de traction considérable avec une faible vitesse qui
s'accélère très rapidement dès que le premier effort
de démarrage est vaincu. Cet effet s’obtient auto-
maliquement sans exiger aucune attention de la
part du mécanicien, GEORGES DARY.
LES NOUVELLES THEORIES DE LA MATIÈRE (|)
Léther. — L'électricité — Le magnétisme.
1].L’électricité: Nature de l électricité
et dynamique de l’électron.
Crookes ayant démontré, en 18914, que le courant
des rayons cathodiques, près du pôle négatif, était
toujours électrisé négativement, tandis que le
reste du contenu du tube était électrisé positive-
ment, fut conduit à admettre que la molécule était
(1) Suite, voir p. 212.
divisée en groupes d'atomes électro-positifs et
électro-négatifs. Stoney appela électron la charge
d'électricité associée ‘avec les ions de matière,
charge définie dont la loi de Faraday impliquait
l’existence.
Les électrons sont donc des émanations: les
électrons libres sont de véritables atomes d'élec-
tricité séparés de la matière et projetés dans l'es-
pace. Ceux qui proviennent du radium sont extrĉ-
mement pénétrants. Iis :se meuvent très rapide-
Ne 1440
ment. On sait que- l’on a pu mesurer la masse,
la vitesse, l'énergie cinétique des électrons.
De nombreuses hypothèses ont été faites sur la
nature elle-même et la forme de lélectron. Sir
O. Lodge, Abraham, J. Thomson et d’autres ont
essayé de découvrir sa structure intime.
Les uns admettent que l’électron est sphérique
et que sa matière est répartie en couches concen-
triques et uniformes; pour les autres, l'électron est
un ellipsoïde. Abraham admet que la masse de
l'électron est de nature purement électro-magné-
tique; pour Crookes, l'électron est une masse
apparente...
Quant à la dynamique des électrons, elle doit
ètre une électro-dynamique.
Suivant la théorie électronique de sir Oliver
Lodge, un atome chimique ou ion a quelques élec-
trons négatifs en plus que l’atome ordinaire, et, si
l'on sépare ces électrons négatifs, l'atome devient
par là chargé positivement. La partie libre élec-
tronique de l'atome est petite, si on la compare à
la masse principale. Pour l'hydrogène, elle est dans
Ja proportion de 4 à 700. La charge négative con-
siste en électrons surajoutés ou non équilibrés,
tandis que la partie principale de l’atome consiste
en groupes qui vont par paires, positifs et négatifs
en proportions égales. Dès que les électrons en
excès sont séparés, le reste de l'atome ou ion
agit comme un corps massif chargé d'électricité
positive.
D'après la théorie des deux fluides, les électrons
constituent l’électricité négative libre, et le reste
de l'atome chimique est chargé d'électricité posi-
tive, bien qu’on ne connaisse pas d’électron positif
libre. Aussi W. Crookes a-t-il cru plus simple
d’avoir recours à la théorie du fluide unique, c'est-
à-dire que l'électron est latome ou l'unité d'élec-
tricité ; les mots positif et negatif signifient
manque ou excès d'électrons.
L’électricité doit donc être considérée comme
étant de nature corpusculaire (les corpuscules qui
la constituent sont les électrons). Il en résulte que
dans chaque phénomène électrique on doit étudier
un mouvement de corpuscules ou électrons el
leurs chocs avec les molécules ou les atomes des
corps. On aura donc, non plus des vibrations d’un
milieu impondérable comme dans la théorie de
l'éther, mais des agglomérations ou séparations,
des émissions, des bombardements, des trajec-
toires, comme dans la théorie cinétique des gas.
On voit combien les nouvelles théories. sur la
nature de l'électricité doivent modifier les modes
de calcul et les résultats obtenus : après avoir
passé de la théorie de l'émission à celle. des ondu-
lations, la physique moderne évolue de nouveau
vers la première.
Or, de nombreuses objections ont été formulées
autrefois contre la théorie de l'émission de New-
COSMOS
24l
ton. Parmi les arguments invoqués, les uns ont été
réfutés victorieusement, les autres subsistent. De
nouveaux — non moins graves —sont apportés de
nos jours par certains physiciens. Qu'il suffise d'in-
diquer l’un des plus fondés: la nature est inerte
par définition; les corpuscules électriques ou élec-
trous doivent donc être inertes par eux-mèmes. ||
est doncabsolumentindispensable, pour qu'ils jouent
le rôle qu’on leur attribue, qu’ils se trouvent dans
un milieu où les champs et les forces électriques
interviennent pour les déplacer. Or, on n’a point
actuellement de théorie électronique de la force
électrique ct du champ électrique, c’est-à-dire que
champs et forces électriques restent en dehors de
l'explication électronique de l'électricité, et, ce qui
est plus grave encore, que cette nouvelle théorie
est forcée de les utiliser avec la mémesignification
qu'ils avaient dans la théorie ancienne.
Cette objection est sérieuse. Voici la solution que
propose M. Tommasine.
Si, pour expliquer une certaine catégorie de phé-
nomènes électriques, nous avons été amenés à for-
muler et à admettre, jusqu'à preuve du contraire,
l'hypothèse que les choses se passent comme si
existaient et intervenaient directement dans ces
phénomènes des charges électriques élémentaires,
très petites, mobiles, sans substratum pondérable
appréciabłe, les électrons, cela ne nous autorise
nullement à conclure qu'avec l'hypothèse corpus-
culaire nous établissons la nature de l'électricité.
En effet, prenons comme exemple le phénomène
des rayons cathodiques, qui a été le point de départ
de la nouvelle théorie ; nous y voyons immédiate-
ment que, même en supposant qu'un faisceau de
ces rayons ne soit constitué que par des électrons
en mouvement de translation avec une certaine
vitesse qu’on peut mesurer pour les caractériser,
nous ne pouvons nous illusionner d’avoir ainsi
expliqué le phénomène électrique qui intervient
pour les produire. On peut répéter la mème obser-
vation pour chacun des autres phénomènes élec-
triques.
Pour expliquer le rayonnement cathodique, il
ve suffit pas de considérer les projectiles, leurs
dimensions, leur forme déformable ou non et leur
vitesse, il faut tenir compte de la nature des forces
qui agissent pour provoquer l'explosion el de la
nature de cette dernière.
Nous savons que dans l'ampoule de Croukes
existe entre l’anode et la cathode une dilicrence
de potentiel périodique, produite par le travail de
la bobine d'induction, dont le courant seconduire
oscillatoire provoque l'expulsion posilive anodique
et l'expulsion négative cathodique. Mais nous
savons aussi que dans l'ampoule il y a encore des
molécules de l'air ọu de gaz rarċies, lesquelles
possèdent une vibration thermique propre et se
meuvent dans un milieu rempli d'autres vibrations
212
énormément plus rapides, celles de l’éther, dues à
la lumière du laboratoire, qui nous permet de voir
dans l'intérieur de l'ampoule.
Il faut donc tenir compte de cette complexité
expérimentale, d'autant plus que la nouvelle
théorie, en reconnaissant la nature électro-magné-
tique de la lumière, admet en outre que les parli-
cules qui vibrent pour la transmettre sont aussi
des charges élémentaires, des électrons comme
ceux qui constituent les rayons cathodiques. Or, si,
soit la lumière, soit les rayons cathodiques, sont
constitués par les mêmes corpuscules, cela montre
que ce qui les différencie est que, dans la lumière,
les électrons vibrent en se déplaçant seulement
pour transmettre de proche en proche leur vibra-
tion avec la vitesse connue, tandis que dans les
rayons cathodiques les électrons se déplacent
comme des projectiles, mais avec une vilesse tou-
jours plus faible que celle de la lumière.
On dit que tout déplacement électrique est
accompagné d’une modification électro-magné-
tique du milieu ; il faut renverser et dire que tout
déplacement électrique est toujours produit par
une modification électro-magnétique du milieu,
car ce qu'on croit être l'effet est au contraire la
cause, et vice versa.
La première affirmation n'est exacte que dans le
cas du déplacement artificiel et purement méca-
nique d'une charge électrique.
L'hypothèse électronique n’amène point la con-
clusion que l'électricité soit une substance corpus-
culaire constituée d'électrons; il n'y a pas de sub-
stance électricité comme il n’y a pas de substance
chaleur ou de substance lumière; ces noms n’indi-
quent que des catégories spéciales de phénomènes.
COSMOS
29 aour 1912
Aucun électron n'est en mouvement s’il n'existe
une modification du champ extérieur, modification
qui l'accompagne dans ses déplacements et qui le
transporte. L'électricité est ainsi une partie inhé-
rente, essentielle, mais une partie seulement de
chaque phénomène électrique.
L'électron n'est qu'un mobile, une inertie électro-
magnétique pendant son déplacement et propor-
tionnelle à sa vitesse, tandis que le moteur, ou
l'activité qui le déplace, est une fonction de
l'énergie électro-magnétique du champ extérieur,
donc du milieu. Ce milieu est le nouvel éther,
conçu tout autrement que l’ancien et dont les mo-
difications dynamiques internes, toujours actives
parce qu'il les reçoit incessamment de tous les
centres radiants de l'univers, constituent la source
de l'électricité, l’origine unique de la catégorie de
phénomènes qui porte ce nom.
D'autre part, la théorie nouvelle permet d'établir
l'existence réelle de deux substances électroniques.
L'une exclusivement électronique, invariable
comme constitution, répandue en tout l'univers
sans disconlinuité et égale partout, c’est le nouvel
éther, le milieu actif, électro-magnétique, qui sert
d'intermédiaire entre les astres de mème qu'entre
les atomes de tous les corps. L'autre substance est
également électronique, mais reçoit toutes sortes de
modifications complexes de structure, donnant lieu
à la formation des ions positifs et négatifs qui
sont les atomes avec leurs affinités chimiques, de
façon qu'on peut affirmer que la possibilité de va-
riabilité de cette deuxième substance n'a point de
limites; c'est la matière pondérable, dont tous les
corps inorganiques et organiques sont constitués.
(4A suivre.) A. BERTHIER.
NOTES PRATIQUES DE CHIMIE
par M. JULES GARÇON
A travers les applications de la chimlọe : LES APPLICATICNS DE LA POTASSE. — Å PROPOS DE LA PRÉPA-
RATION DE CONFITURES STÉRILISÉES. — REMÈDE CONTRE LES MORSURES DE VIPÈRES. — BEURRES ET MARGA-
RINES. — EXEMPLES DE FRAUDES : ESSENCE DE CAFÉ A FAIBLE PROPORTION DE CAFÉ. — DISSOLUTION DE L'EAU
DANS LES HUILES ESSENTIELLES, — CONSERVATION DE LA BIÈRE EN BOUTEILLES, — MOUSSEUX POUR BOISSONS.
— LES vixs DE 1911.
Les applications de la potasse. — Au cours
d'une série de rapports sur l'historique, l'exploita-
tion, l'importance et l'utilisation des mines de
potasse de la Haute-Alsace, nous croyons intéres-
sant de relever ce que dit M. Emilio Nelting,
directeur de l'École de chimie de Mulhouse, de
l'état actuel des applications de la potasse.
« La potasse caustique a eu, et elle a encore en
partie, des emplois très importants, bien que dans
la majenre partie des cas elle ait été remplasce
par la soude caustique, beaucoup plus économique.
Aussi l’on prépare aujourd’hui beaucoup moins de
savons de potasse ; toutefois ces derniers, les savons
mous, sont encore employés pour certains usages
domestiques et surtout le lavage des laines brutes,
pour lesquels ils sont préférables aux savons de
soude.
» La potasse, étant beaucoup plus soluble dans
l'alcool que la sonde, est toujours employée lors-
qu'on est obligé d'effectuer en solution alcoolique
N° 1440
des réactions comportant l'usage des alcalis.
» Une des réactions les plus importantes de la
chimie organique est la transformation des acides
sulfoniques du phénol par l'action des alcalis. Sur
cette réaction découverte simultanément par
Kékulé, Wurtz et Dusart, repose la fabrication de
l’alizarine, des naphtols, de la résorcine, de nom-
breux acides aminonaphtolsulfoniques, etc. Les in-
venteurs de la réaction avaient employé la potasse;
actuellement on ne travaille plus guère qu’à la
soude. Dans la fabrication de l'indigo artificiel, par
contre, et de certaines matières colorantes du
groupe du thioindigo ou de l'indanthrène, on em-
ploie un mélange de soude ou de potasse, ou même
la potasse seule.
» La potasse caustique était préparée autrefois
exclusivement au moyen du carbonate et de la
chaux; on la produit maintenant en grandes
quantités par électrolyse du chlorure. Cette décom-
position, inaugurée par la fabrique Griesheim-
Electron, est très nette et s'effectue plus facilement
que la préparation de la soude caustique au moyen
du sel marin.
» Dans la plupart de ses applications, le carbonate
de potasse a été supplanté par le carbonate de
soude, mais il garde toujours un emploi important
dans la verrerie. »
ll en est de même du chlorate de polasse, rem-
placé par le chlorate de soude, moins cher et plus
soluble. Mais l’emploi du premier s’est maintenu
dans la fabrication des explosifs chloratés et dans
celle des allumettes, pour lesquels lExtrême-
Orient en importe de grandes quantités.
A propos de la préparation des confitures sté-
rilisées. — Le savant praticien qui semble avoir
été le premier à appeler l'attention sur la prépara-
tion des confitures à l'instar des solutions stérili-
sées est M. le professeur P. Carlès de Bordeaux,
dont les études sur les vins sont si connues.
Remède contre les morsures de vipères. — Sont-
ce les chaleurs excessives de 1914 qui procurent
cette année, en certaines régions, une apparition
de serpents comme on en a rarement vu? Aux
remèdes que ces notes ont cités l’an dernier contre
les morsures de vipères, l’alcali volatil sur la
morsure et quelques gouttes prises en boisson, la
cautérisation au fer rouge, la ligature si possible
du membre au-dessus de la morsure, les piqüres
d'acide phénique, le sérum antivenimeux, on
semble préférer aujourd’hui l'emploi du perman-
ganate de potassium sur la plaie, en injections
tout autour et quelques gouttes en boisson.
Beurre et margarine. — C'est le pays qui pro-
duit le plus de beurre, proportionnellement à sa
population, qui consomme également la plus
grande quantité de margarine. Le Danemark est le
COSMOS
243
grand producteur de beurre; il consomme une
quantité de margarine supérieure à 40 millions de
kilogrammes pour 2500000 habitants, cela fait
plus de 416 kilogrammes de margarine par habi-
tant. Le cullivateur danois préfère, en effet,
vendre cher son beurre au consommateur anglais
et se contenter d'une graisse meilleur marché. En
France, pour une population de 40 millions d'ha-
bitants, la vente est de 12 millions de kilogrammes,
soit un tiers de kilogramme par habitant. On sait
que la loi française est sévère pour les commer-
çanis en margarine, et l'on peut regretter que,
tout en ménageant les intérêts très légitimes du
fabricant de beurre, l'on n'ait pas songé davan-
age aux intérêts du consommateur de margarine.
La consommation de la margarine est en Suède
de 2 kilogrammes un tiers par habitant (1$ mil-
lions de kilogrammes pour $ millions et demi
d'habilants); en Norvège, de 6 kilogrammes
(42 millions de kilogrammes pour 2 millions d’ha-
bitants); en Angleterre, de 3 kilogrammes par
habitant (120 millions de kilogrammes pour 40 mil-
lions d'habitants), et cela malgré la consommation
si grande de beurre en ce pays; en Allemagne, de
3 kilogrammes par habitant (200 millions de kilo-
grammes pour 65 millions d'habitants).
Exemples de fraudes: Essence de café à faible
proportion de café. — Un produit étiqueté :
essence fine de café, d’origine suisse, examiné par
le laboratoire central du ministère des Finances,
renfermait 50 parties de caramel, 25 de chicorée,
12 d'orge torréfié et 12 de café. Cette essence de
café n’en renfermait donc que un huitième.
Une essence de lavande renfermait un éther de
l'acide phtalique au lieu de l'acétate de linalvle
naturel.
Dissolution de l'eau dans les essences. — Les
huiles essentielles peuvent-elles dissoudre de l'eau?
D'après MM. J.-C. Umney et S.-W. Bunker, celles
qui consistent en hydrocarbures terpéniques n’en
dissolvent pas; il en est de même des huiles dont
les composants sont des lactones ou des cétones.
Si le composé principal est un corps oxygéné,
l'huile peut dissoudre par elle-même 0,5 pour 100
d'eau. Cependant, l'huile de géranium de Turquie
dissout 1,43; l'huile de citronnelle de Java, 0,75, et
l'huile de santal seulement 0,17.
Conservation de la bière en bouteilles, — La
bière se conserve mieux en bouteilles si elle ren-
ferme une très faible addition d'acide. En effet, ce
qui produit le commencement des louches, c’est la
petite quantité d'alcali que la bière dissout aux
parois de la bouteille. La nature du verre a donc
une grande importance, et il faut éliminer, pour
Jes bouteilles à bière, tout verre à alcali libre. Si
le verre est alralin, on peut combaltre linconvé-
21
nient en recouvrant l'intérieur de la bouteille d'un
vernis protecteur ou en ajoutant (comme M. L. von
Vetter le propose dans Woch. Brau) 6,03 pour 100
d'un acide afin de neutraliser l'alcalinité du verre.
La production du louche est ainsi reculée.
Mousseux pour boissons. — Les saponines ont
la propriété de communiquer aux liquides dans
lesquels on les dissout un pouvoir moussant consi-
dérable. Celte propriété a été mise à profit pour
fabriquer des produits spéciaux dits « mousseux
pour boissons ». Mais les saponines possèdent
aussi, malheureusement, un pouvoir toxique très
prononcé à l'égard du système nerveux. Aussi le
Conseil supérieur d'hygiène publique de France
a-t -il proscrit d'une façon absolue leur emploi dans
tous les produits alimentaires.
M. G. Loucheux, chimiste au laboratoire cen-
tral des douanes, remarque (numéro de juillet des
Annales des falsifications) que, malgré cette pres-
cription, certains mousseux, mème dits sans sapo-
nine, en renferment parfois.
La caractérisation des saponines, dit-il, est chose
encore délicate, parce que ces composés sont nom-
breux; elles semblent être des glucosides, tantòt
acides, tantòt neutres; leur étude est incomplète.
Les réactions colorées ne peuvent servir à leur
caractérisation, car e une réaction colorée n'est
fidèle qu'à la condition d'être essayée sur un corps
absolument pur et de composition chimique bien
définie ». Et il déduit de ses recherches la con-
clusion que le procédé Kobert est actuellement
celui qui convient le mieux pour la recherche des
saponines, et leurs seules réactions caractéristiques
sont celles indiquées par H. Suss dans le Journal
de pharmacie en 1903. Le procédé Kobert con-
siste en: précipitation par le sous-acétate de plomb,
centrifugation, reprise par l’eau du précipité plom-
bique et séparation du plomb par l'hydrogène sul-
furé, concentration au bain-marie de la solution
filtrée, reprise par l’éther dans lequel les saponines
sont insolubles pour enlever les dernières traces
d'acide acélique, filtration, lavage à l'éther, reprise
COSMOS
29 AOÛT 19149
par leau chaude, enfin évaporation à siccité.
Les réactions générales indiquées par H. Suss
sont l'aspect brillant de l'extrait ainsi obtenu, sa
saveur åcre, la mousse abondante et persistante qu'il
donne paragitationavec l’eau, l'obtention d’un sucre
réducteur par aclion de l'acide sulfurique étendu.
Les vins de 1911. — Quelle influence les cha-
leurs si fortes de l'année dernière ont-elles pu
exercer sur la composition des vins? Presque tous
les auteurs ont fait ressortir, pour les vins de 1944,
des anomalies dans l'acidité, qui est très faible,
dans le titre alcoolique, qui est relativement élevé,
pourvu que la vigne ait eu à sa disposition une
quantité d'eau suflisante, soit venant du sol, soit
venant de l’atmosphère.
Mais si la sécheresse a été exagérée, si la végé-
tation a été difficile, comme cela s'est produit, en
1911, dans nombre de vignobles du Midi, dont le
terrain est naturellement peu profond et sec, alors
le raisin s’est arrèté dans son évolution et n'a
fourni qu’un fruit mal mûr. Dans ce cas, comme
le remarque M. L. Roos, directeur de la station
Ͼnologique de Montpellier (Annales des falsifica-
tions de juillet), ce fruit acide et peu sucré donne
un vin acide et peu alcoolique.
M. E. Hugues a constaté également, pour‘ des
vins de l'Hérault, un extrait sec relativement élevé,
une acidité totale élevée, et la présence d'acide
tartrique non combiné en quantité importante de
À à 2 grammes par litre.
M. L. Quéron a vu les vins de Sologne — qui sont,
en temps ordinaires, des vins blancs frais, de degré
alcoolique faible (6° à 8°,5), d'acidité très élevée (5°
à 10°), d'extrait see moyen variant de 13 à 18 —
changer leur aspect pour l’année 1911 très chaude;
le degré alcoolique monta jusqu'à 11° et fut en
moyenne de 9% à 10°. Leur titre alcoolique élevé,
leur acidité moyenne, leur extrait normal furent
la cause que beaucoup furent retenus par le labo-
ratoire central des finances et que des récrimina-
tions véhémentes s'élevèrent contre ces prétendues
fraudes.
Le temps de pose exact en photographie.
LE CHRONOSCOPE P. A. P.
En photographie, et particulièrement en photo-
graphie des couleurs, la cause principale des
insuccès est l'erreur dans le temps de pose. Cela
est si vrai que beaucoup d'auteurs ont cherché un
moyen pratique de déterminer automatiquement
le temps exact de pose. et quil existe à l'heure
actuelle bon nombre de tables et d'appareils pré-
pares dans ce but.
Mais, jusqu'ici, la solution était imparfaite. En
effet, avec les tables, qui indiquent la pose néces-
saire suivant le jour, l'heure, l'intensité de la
lumière, l’amateur photographe devait évaluer
cette intensité sans aucun point de repère, d'où des
causes d'erreurs parfois importantes. Les photo-
mètres à noircissement direct enregistrent bien la
puissance actinique de la lumière du jour, mais ils
N° 1410
ne tiennent aucun compte de la nature et de la
couleur du sujet à photographier, ce qui a pourtant
la plus grande influence sur la valeur photogénique
du sujet. Quant aux photomètres à vision directe,
ils ont le tort de faire intervenir l'œil humain,
dont les impressions sont variables suivant les
moments. En effet, la pupille de l'œil a la faculté
de se dilater ou de se rétrécir suivant que la
lumière est faible ou grande. Quand on entre de
Pextérieur dans un endroit sombre, on ne distingue
d'abord rien, mais, peu à peu, l'œil s'accoutume
et perçoit des détails. Par suite, en se servant du
photomètre à vision dans un endroit peu éclairé,
l'opérateur aura tendance à faire une pose trop
courte, et au contraire, en pleine lumière, il fera
presque sûrement une pose trop longue, trompé
qu'il sera par la faculté d'adaptation de son œil.
Le constructeur du chronoscope P. À. P. (fig. 1)
| Chronoscope PAP
F1G. 1. — COUPE
DU CHRONOSCOPE P. A. P.
F1G. 2. — RÉGLETTR GRADUÉE.
avec celles qui sont données par une petite réglette
émaillée (fig. 2). Pour cela, on approche la réglette
divisée en quatre teintes (la teinte 0 étant celle du
papier non impressionné) de la partie la plus claire
du négatif. Le temps d'exposition et la teinte du
négatif donnent, grâce à une table fournie avec
l'appareil, le temps de pose exact pour la pholo-
graphie qu'on doit faire.
Supposons, par exemple, que le sujet photo-
graphié ait donné la teinte 4 au bout d'une minute
d'exposition et qu'on veuille faire une autochrome
avec un objectif ouvert à F: 9. On se reporte à la
table calculée spécialement pour ce genre de
plaques (fig. 3), et on trouve de suite le temps
indiqué : quatre secondes. En démasquant la plaque
pendant quatre secondes, on est assuré d'obtenir
une autochrome exactement posée.
Le chronoscope P. A. P. est donc un auxiliaire
utile du photographe, puisqu'il supprime le seul
aléa sérieux des diverses opérations. Il est, de plus,
COSMOS
Terte obtenve en:
D ET EE ETES NA rr
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He tenele nr Pete brel
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F1G. 3. — TABLEAU DE POSE POUR PLAQUES AUTOCHROMES.
245
a su éviter ces imperfections, d'où le nom de P. A. P.
(photomètre automatique parfait). Son indicateur
de pose est un véritable petit appareil photogra-
phique construit tout en cuivre; il est muni d'un
pied D, d'un objectif O, d’un magasin de papier
sensible Z. L'objectif travaille à grande ouverture
(F : 4) et a par suite une très grande rapidité.
Voicicomment on doit se servir de cechronoscope:
Au moment de faire une photographie, on place
l'appareil sur son pied, on vise le sujet à photo-
graphier et on enlève le bouchon qui masque l'ob-
jectif. On pose pendant un temps qui varie de trente
secondes à quatre minutes, suivant l'éclairage, puis
on rebouche l'objectif. Le papier au bromure con-
tenu dans le magasin a été impressionné et donne un
négatif du sujet photographié: négatif très impar-
fait, d’ailleurs, car on a surtout cherché ici la rapi-
dité. On compare alors la teinte prise par le papier
"ee eÁ
TABLEAU N°I
Temps de Pose pour chacun des diaphragmes m
ee nee
ff ele fee |se sr)
très avantageux, puisqu'il évite tout gaspillage de
plaques. Ceci est surtout appréciable en photo-
graphie des couleurs. Mais son emploi s'étend aussi
à toutes les plaques en noir qu’on trouve dans le
commerce, et des tableaux de temps de pose ont
été établis pour les marques des différents fabricants.
Et bien que maintenant les appareils plus soignés
permettent de faire de l'instantané par presque tous
les temps, il est encore bien des cas où les indica-
tions du chronoscope sont utiles: par exemple,
pour les sous-bois, les portraits d'intérieur, les
photographies de glaciers, de neige, les reprodus-
tions de tableaux, etc.
Évidemment, il y aura toujours des amateurs
qui se contenteront de presser le bouton de leur
appareil au petit bonheur ; mais les photographes
vraiment sérieux seront bien aises de posséder ce
pelit chronoscope simple et précis qui leur assu-
rera la réussite, quels que soient le temps et les
plaques utilisées.
eaaeo a
ro
wœ
€
COSMOS
29 aouT 1919
La répartition des animaux sur le globe terrestre.
Les animaux sont-ils répandus au hasard sur le
globe terrestre? La question est à peine posée
qu’on la résout par la négative; mais si, d'une part,
on admet le principe de distribution spéciale,
d'autre part, on n’en saisit pas de même les causes,
et l’ensemble des conditions intimement liées à
l'organisation et au genre de vie de l’animal, qui
expliquent la présence de chaque espèce dans un
endroit déterminé, est, en général, fort peu connu.
Il en est de mème de l’histoire des migrations
d'animaux, qu'à l’aide des fossiles et par une com-
paraison attentive des ordres passés el de l’ordre
présent les savants sont parvenus à retracer d'une
facon à peu près complète.
Tous les êtres sont dans une dépendance mar-
quée de la nature au sein de laquelle ils prennent
naissance et se développent, et cette dépendance
est d'autant plus grande que l'animal a plus de
besoins et que son organisme est plus susceptible
d’être influencé par le milieu ambiant.
C'est ce qui explique l’anomalie apparente qui
préside à la diversité des espèces. Quelques-unes
vivent sur une portion du terrain double, triple
ou quintuple de celle occupée par d’autres : les
premières ont des besoins, des conditions de vie
plus communs que les secondes.
Si l'animal est, de nature, un ètre errant, cher-
chant sans cesse sa nourriture, un abri plus con-
fortable, un endroit plus propice à la fécordation
ou à la ponte, la domestication, en lui assurant
celte nourriture et cet abri, l'attache dans les pays
où l'homme lui vient en aide.
D'un autre côté, des causes diverses peuvent
amener la disparition ou mieux le départ de cer-
taines espèces d'une contrée, qu'elles regagnent
lorsque ces causes n'existent plus. C’est ainsi que
la Motacilla alba disparut de Suède pendant une
trentaine d'années.
En résumé, laire quw°occupe chaque espèce dé-
pendant surtout des conditions climatologiques
auxquelles sont liés les moyens d'alimentation et
de propagation, elle s’agrandira ou se rétrécira
suivant les changements de Ja température et de
la végétalion, suivant l’aspect nouveau que prendra
le terrain.
Déjà, dès les temps préhistoriques, les masto-
dontes, le bæuf musqué, le renne, le glouton, le
lemming, avaient pénétré jusqu'au cœur de l'Eu-
rope; mais, la température s’adoucissant peu à
peu, ils durent regagner les hautes altitudes et
les régions boréales.
Plus on avance de l'équateur aux pòles, moins il.
y a de différence entre les faunes de chaque région
de la mème zone, si bien qu'au voisinage du cercle
arctique on ne retrouve plus qu'une faune com-
mune à toutes ces régions glacées; mais, d'autre
part, les espèces dont le type offre sous la zone
arctique un organisme supérieur s’abâtardissent
à mesure que l'on se rapproche des tropiques.
C'est qu'à la suite de croisements successifs il
en est résulté des espèces particulières qui ne
peuvent se développer normalement que dans les
régions intermédiaires.
Parfois aussi, on retrouve les mêmes animaux
dans des contrées différentes sous le rapport du
climat, mais alors à des altitudes diverses.
Ainsi le papillon Parnassius Apollo vit en Suède
dans les lieux plats et sur les pentes des collines;
au contraire, dans les Alpes, les Pyrénées, l’Hima-
laya, il se tient à de grandes hauteurs où il
retrouve la température des plaines de la Suède.
Les animaux qui émigrent, et en particulier
les oiseaux ont été obligés ď’aller plus avant dans
les régions septentrionales par suite de la péné-
tration incessante de l'homme dans les régions
inhabitées où ils se rendaient autrefois.
Quelques espèces peuvent subsister un peu par-
tout, comme le faucon pèlerin, le papillon Vanessa
cardui; d’autres ne peuvent quitter leurs contrées :
le condor et le lama restent constamment sur les
hauteurs des Andes, l’ornithorhynque est égale-
ment confiné en Australie.
Ceci tient à diverses causes dont les principales
sont dues aux obstacles que présentent le relief
du sol et, pour certaines familles, leur difficulté
de locomotion. Les animaux des pentes occiden-
tales des Cordillères n’existent pas sur le versant
oriental, la hauteur des cimes des Andes formant
un obstacle infranchissable; dans l'archipel lndien,
il y a une quantité innombrable de reptiles, alors
que dans les iles de l'océan Pacifique ils sont
presque inconnus, la mer empêchant toute sorte de
propagation.
Il faut, pour que des espèces envahissent des
contrées ainsi séparées de leur pays d'origine,
que des cas exceptionnels se produisent : par
exemple, qu'elles soient poussées par la faim.
Les sauterelles ont ainsi traversé par myriades le
canal de Mozambique pour fondre sur Madagascar,
et l’on a vu parfois des bandes de chenilles tenter
de franchir des rivières.
Presque toujours, le départ ou l’arrivée d’une
espèce dans une contrée entraine le départ ou
l’arrivée d’autres animaux, et principalement des
carnassiers qui en font leurs proies.
Les tlamanoirs périssent dès que les fourmis
viennent à manquer; lorsque Guillaume IT envahit
l Angleterre, il y importa le rat gris du Hanovre
qui détruisit complètement le rat noir indigène, et
les tigres, qui font de nombreux ravages parmi les
Ne 1410
populations de Ceylan et de l'Inde, durent détruire
aussi une quantité considérable d'animaux lors-
qu'ils foisonnaient dans ces pays.
Ces luttes intestines entre espèces diverses et
mème entre familles, la chasse continuelle que
leur fait l’homme, sont autant de causes d’extinc-
tion; quand une espèce est ainsi disparue, son
anéantissement est définitif; mème si les condi-
tions de vie qui lui sont nécessaires se reprodui-
saient, il semble qu'elle ne peut renaitre. Il faut
que l'espèce qui a disparu y soit ramenée de
quelque région où elle a persisté, mais alors elle
profite des conditions favorables que la contrée
lui offre et elle s’y développe à nouveau avec une
incroyable rapidité, comme cela s'est produit pour
le cheval dans le Nouveau Monde. Cet animal n'y.
existait plus, il n’y réapparut que lorsque les Por-
tugais l'y introduisirent beaucoup plus tard.
Si nous passons maintenant aux espèces marines,
nous leur trouvons une distribution un peu plus
simple, due à ce qu’elles sont soumises à moins
d'influences. Leur séjour presque continuel dans
l’eau les fait échapper à l’action hygrométrique de
l'air et aux mille modifications du climat.
Si la température est plus uniforme et, par con-
séquent, n’oblige pas les animaux marins à se
confiner dans de petits espaces, les poissons et
les coquillages n’en changent pas moins suivant
les latitudes et les profondeurs.
La froideur des eaux suffit à elle seule pour
expliquer la diversité des faunes maritimes en
apparence placées dans de mêmes conditions.
La côte occidentale d'Amérique n’a pas d'affinité
zoologique avec les iles de la mer Pacifique, parce
que la température des eaux y est tout à fait dif-
férente. |
De plus, la structure et les organes des êtres
marins se modifient suivant les profondeurs aux-
quelles ils vivent; ils s'adaptent pour pouvoir sup-
porter l'énorme pression qui les entoure et se
defendre contre leurs ennemis,
Les pèches extraordinaires faites par le prince
me
La Terre :
COSMOS
247
de Monaco à bord de son yacht, spécialement
aménagé pour lexploration des grandes profon-
deurs sous-marines, ont amené au jour des espèces
jusqu'alors inconnues, qui ont émerveillé les
témoins et qui n'ont aucune analogie entre elles
suivant les distances auxquelles elles ont été
pèchées : les Dorocidaris Blakei, sorte de gigan-
tesque étoile de mer vivant de 500 à 1 000 mètres ;
le Chirotenthis Grimaldii, poisson pêché à
1 445 mètres, semblable à une raie dont la queue
serait la tête, ornée de nombreux tentacules dont
deux beaucoup plus grands que les autres; le
Malaccsteus choristodactylus, aux crocs de cro-
codiles, le Saccopharynx ampullaceus, et com-
bien d’autres arrachés aux mystères des abysses
de plus de 5000 mètres. Et cependant, en général,
les lois des conditions de la vie dans les eaux et
sur les terres sont à peu près identiques.
La hauteur des montagnes et la profondeur des
mers reproduisent, en effet, les mêmes échelles
d'altitudes et de latitudes. De mème que certaines
montagnes terrestres s'opposent à l'émigration
d'espèces terrestres, de même certaines montagnes
marines arrêtent celle d'espèces marines.
Des animaux, amphibies ou poissons, peuvent
vivre dans toutes les mers; d'autres ne peuvent
quitter leurs régions spéciales, et plus une espèce
peut vivre facilement à des profondeurs diverses
sur le même littoral, plus aussi elle se propage
sur de grandes étendues en surface. Ainsi cerlains
poissons dont l'aire est considérable peuvent, en
s'élevant ou en s’abaissant au sein des eaux, choisir
sous chaque latitude la localité qui leur convient.
Aussi, bien qu'essentiellement variable, la carte
zoologique du globe n’en a pas moins des bases
immuables qu'il a été assez facile de connaitre et
de fier par une observation un peu attentive qui
permettait de formuler pour chaque espèce ou
chaque genre de véritables lois de distribution,
fournissant ainsi des principes certains à la géo-
graphie zoologique.
R. MENNEVÉE.
sa forme et ses dimensions.
Ses accidents superficiels et son relief.
Je vais, dans un tableau rapide, retracer l'évo-
lution, depuis son origine, de la branche de
recherches à laquelle j'ai voué le meilleur de mon
autivité : je veux dire la plus ancienne et la mère
des sciences, la géométrie, prise dans sa plus large
{1} Extraits du discours d'ouverture par M. Ch. Lal-
lemand, au Congrès de l'Association francaise pour
l'avancement des sciences de Nimes, 17 août 1912.
acception, qui est la « mesure de la Terre ».
Tout en m'exeusant par avance, surtout près des
dames, de l'aridité du sujet, je vais briévement
passer en revue, dans son histoire, dans son état
présent et ses applications, la détermination de la
forme et des dimensions du gisbe, la figuration
des accidents naturels et artificiels de sa surface,
enfin la mesure de son relief.
218
I. — La forme et les dimensions du globe.
A. — La Terre sphérique.
Pour les Grecs, au temps d'Homère, soit dix
siècles avant notre ère, la Terre étail un disque
plat sur les bords duquel reposait une immense
voùte — le firmament — supportant les étoiles.
La disparition successive de la coque d'abord,
puis des måts d'un navire qui s'éloigne, l'élargis-
sement progressif et la forme toujours circulaire
de l'horizon quand on s'élève au-dessus d'une
plaine ou de la mer, donnèrent ensuite à quelques
philosophes l'intuition que, dans sor ensemble, la
Terre avait la forme d'une calotte bombée.
Mais pour arriver à la notion d’un globe isolé
dans F espace, il fallut l’observation du cercle
d'ombre projeté par la Terre sur le disque de notre
satellite, dans les éclipses de Lune; il fallut sur-
tout le fait, qualifié d'invraisemblable par Hérodote,
que, contrairement à la règle invariable de nos
régions, où le Soleil, à midi, se montre toujours
å gauche quand on regarde l'Ouest, des Phéni-
ciens, dans un voyage de circumnavigation autour
de l Afrique, effectué six siècles avant Jésus-Christ,
avaient, au contraire, en doublant vers l'Ouest
l'actuel cap de Bonne-Espérance, observé à midi
le Soleil à leur droite.
La Terre étant reconnue ronde, pour en savoir
le tour, il suflisait de mesurer une fraction connue
de la circonférence.
Deux siècles avant notre ère, un astronome grec,
lratosthène, avait observé qu'à Syène, dans la
Haute-Egypte, lors du solstice d’élé, le Soleil
éclaire les puits jusqu'au fond, tandis qu’à Alexan-
drie, ville située au nord de la première, sa direc-
tion, à la même époque, forme à midi, avec le fil
à plomb, un angle égal à la cinquantième partie
du cercle. Multipliant dès lors par 50 la distince
des deux villes, connue d’après le cadastre, Eratos-
thène en déduisit une valeur remarquablement
approchée de la circonférence terrestre.
Entre cette méthode fort simple et celles em-
ployées depuis pour cette mème mesure, il n'y a
d'autres différences que la perfection des instru-
ments et la rigueur des observations.
Après la ruine de la civilisation gréco-romaine
et durant tout le moyen âge, la doctrine de la
sphéricilé de la Terre retombe dans l'oubli. Pour
faire accepter à nouveau l’idée d'une Terre ronde,
il ne fau! rien de moins que la découverte de
l'Amérique par Christophe Colomb.
En {52% seulement, soit dix-sept siècles après
Eratosthène, au moyen d'un compteur de tours —
précurseur du taximètre — adapté à la roue de sa
carriole, le médecin Fernel mesure la route, à peu
près droite et dirigée Nord-Sud, qui relie Paris à
Amiens. De la différence connue des latitudes de
ces deux villes, il conclut une nouvelle valeur de
COSMOS
29 aouT 1912
la circonférence terrestre, dont, par un heureux
hasard, l'erreur relative n’est que d’un millième.
Mais les mesures directes étant le plus souvent
impossibles à cause des accidents du terrain, le
Hollandais Snellius, un siècle plus tard, imagine
de jeter, entre les deux points extrèmes de l'arc
à mesurer, une sorte de poutre géométrique —
analogues aux poutres en treillis de nos modernes
ponts métalliques — formée de triangles jux{apo-
sés dont on observe les trois angles et dont, par
un autre enchainement de triangles, on rattache
l'un des còtés à une base rectiligne facile à mesurer.
De ła sorte, on a tous les éléments nécessaires
pour calculer ła longueur de la poutre entière.
Sous le nom de « triangulation », ce procédé,
connu très probablement déjà des anciens Egyp-
tiens, est universellement appliqué depuis Snellius.
B. — L'ellipsoïde terrestre.
Dès lors, les progrès se multiplient.
Vers la fin du xvn° siècle, ayant mesuré la France
dans toute sa hauteur, de Perpignan à Dunkerque,
Cassini trouve, pour le degré de latitude, une lon-
gueur décroissant vers le Nord; par suite, au lieu
d’être parfaitement ronde, la Terre aurait la forme
d'un œuf allongé vers les pôles.
Avec Newton et Clairaut, la théorie pourtant exi-
gerait un globe aplati aux pôles et renflé à l équateur.
Pour vider la querelle, l’Académie des sciences
fait mesurer deux nouveaux arcs, l’un en Laponie,
l’autre au Pérou.
Cette fois, la théorie triomphe.
Et depuis lors, les géodésiens couvrent de
triangles le globe et mesurent partout des arcs de
méridiens et de parallèles, à l’effet de délerminer,
avec une précision croissante, l'aplatissement et le
rayon équatorial de l'ellipsoide terrestre dont, en
particulier, dérive la valeur du mètre.
Parmi les plus importants de ces ares figurent
le grand arc méridien du Cap au Caire, dont les
géodésiens anglais et allemands viennent d’entre-
prendre la mesure, et dans l’Amérique du Sud,
amorce d’une grande chaine qui rejoindra plus
tard celle du Nord, le petit arc de l'Equateur,
récemment mesuré par une mission d'officiers
français du service géographique de l’armée, sous
le controle de l'Académie des sciences.
C. — Le géoïde.
Mais bientot — et ceci ne date pas d'un demi-
siècle — on constate avec surprise qu'en maints
endroits la verticale n’est pas perpendiculaire à la
surface de l'ellipsoide théorique. Cette surface,
désormais appelée le géoide, présenterait donc des
saillies et des dépressions ?
Ft aussitôt les géodésiens de se mettre à l’œuvre
pour mesurer ces bosses, dont plusieurs atteignent
jusqu’à 100 mètres d'élévation.
N° 1440
D'autre part, il y a une douzaine d'années, on
s'apercevait que les pòles terrestres eux-mêmes,
jusque-là regardés comme fixes, se déplacent à la
surface du sol et sabissent un mouvement oscilla-
toire de quelques mètres d'amplitude et d'environ
430 jours de période, faisant varier d'autant les
latitudes géographiques.
D. — Les déformations lentes et les marées
de l'écorce terrestre.
Et ce n’est pas tout.
Notre planète rayonnant dans l’espace, le noyau
central igné se refroidit et se contracte, et, dès lors,
COSMOS
249
le géoide, lui aussi, se déforme lentement dans le
cours des siècles.
Tout dernièrement même, j'ai pu montrer qu'à
l'instar des océans, et du fait de la rotation diurne
combinée avec l'attraction du Soleil et de la Lune,
l'écorce terrestre subit un soulèvement et un
affaissement journaliers, analogues au flux et au
reflux de la mer.
Mais ce mouvement périodique, dont l’amplitude,
à l’Equateur, atteint un demi-mètre, laisse intacte,
en moyenne, la forme générale de la surface.
(A suivre.) CH. LALLEMAND.
SOCIÉTES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 19 août 1912.
PRÉSIDENCE DE M. BASSOT.
Les pegmatites gemmifères de Madagascar.
— M. Lacroix a étudié un certain nombre de filons de
pegmatites gemmifères, remarquables par leur étendue
et par leur richesse; nous ne saurions suivre ici le
savant minéralogiste dans sa description des différentes
sortes, leur structure, etc.
Qu'il suffise de dire que toutes les pegmatites recon-
nues présentent certaines earactéristiques communes;
elles sont constituées essentiellement par du quartz
et du microcline {parfois vert (amazonite)|, auxquels
s'adjoignent des minéraux accessoires, dont quelques-
uns sont recherchés comme gemmes.
Les éléments de ces pegmatites sont en général de
grande taille ou même de taille colossale; les cristaux
de quartz, de microcline parfois même de béryl, (aigue
marine), de tourmaline ayant plus d'un mètre ne sont
pas exceptionnels.
Sur l'absorption des projections radio-
actives etsur l’ionisation qu’elles produisent.
— M. L. WEenTENSTEIN emploie un disque recouvert de
radium A (c'est-à-dire activé pendant peu de temps par
exposition à l'émanation du radium); le faisceau pro-
jeté par le disque actif est reçu sur des disques récep-
teurs électrisés positivement et placés à différentes
distances du disque actif. L'auteur 'a étudié comment
varie l’activité reçue par ces disques en fonction de
la pression du gaz interposé et de le distance au disque:
Pour l'air à la pression de 1 millimètre de mer-
cure et pour l'hydrogène à celle de 6 millimètres, les
pouvoirs absorbants sont sensiblement identiques. La
diminution du nombre de particules est très peu
importante, dans les deux cas, jusqu’à des distances
voisines de 5 centimètres, puis ce nombre diminue
rapidement et tombe, au voisinage de 10 centimètres,
à quelques centièmes de la valeur initiale. Le par-
cours atteint, pour les deux gaz, dans les condilions
indiquées, environ 10,5 cm; il en résulte que le par-
cours dans l'hydrogène est six fois plus grand que
dans l'air, les deux gaz étant pris à la mème pression.
Le radium B projeté par le disque actif produit
une ionisation intense de l'air et de l'hydrogène.
L'auteur trouve que l'ionisation produite par un
atome radio-actif projeté décroit lorsque sa vitesse
diminue, à l'inverse de ce qui a lieu pour les
rayons a, et que cette chute d’ionisation est plus
rapide dans l'hydrogène que dans l'air.
Sur la trajectoire d'une particule électrisée dans un
champ magnétique. Note de M. RicHarb BINKELAND. —
Sur les mobilités des atomes-ions radio-actifs dans les
gaz. Note de M. S. Rarwen. — Étude quantitative de
l'absorption des rayons ultra-violets par Îles alcools,
acides, éthers, aldéhydes et cétones de la série grasse.
Note de MM. Jean Bireckt et Vicron HENRI. — Sur le
poids atomique du chlore. Note de MM. Georges Baume
et F.-Lovis PenroTt. — Sur la présence d'une nucléase
chez les algues. Note de M. E.-C. TEopontEsco.
BIBLIOGRAPHIE
La grammaire de la scionce. La Physique, par
KaRL PEaRsoN, membre de la Royal Society, pro-
fesseur de mathématiques appliquées et de mé-
canique au collège de l'Université de Londres.
Traduit sur la troisième édition anglaise par
Ltrcrex Marc, directeur de la Statistique géné-
rale de la Franoe. Un vol. in-8° de xx-507 pages,
de da Bibliothèque scientifique internationale
(cartonné, 9 fr). Librairie Félix Alcan, Paris,
1942.
Rehieant en 1941, en vue d'une troisième éaition,
le livre qu'il avait publié pour la première fois
vingt ans auparavant et élaboré dans Son esprit
dès l’année 4880, l'auteur disait, en parlant des
250
théories sur la nature et les principes de la science :
« J'ai été surpris de voir combien l'hétérodoxie des
environs de 1880 était devenue le lieu commun et
la doctrine acceptée de nos jours. Personne ne
croit maintenant que la science explique quelque
chose; nous la considérons tous comme une de-
scription sténographique, comme une économie de
pensée. »
il y avait à réagir, en Angleterre comme dans
les autres pays, contre une conceplion simpliste
qui s’élait introduite dans la science : des savants
ne doutaient point qu’ils eussent trouvé le vrai
mécanisme des phénomènes et qu'ils eussent dévoilé
jusque dans ses profondeurs intimes la véritable
structure de lunivers. Il était nécessaire de leur
rappeler que leur science n’est qu'une description
simplifiée et artistique des phénomènes; ils choi-
sissent des principes et ils imaginent des hypo-
thèses avec lesquels ils construisent, à côté de la
réalité, en matériaux artificiels, un édifice qui
imite quelquefois d’assez près la nature; par des
relouchesincessantes, ils perfectionnent leur œuvre;
mais les principes, comme le mot lindique, ne
sont jamais susceptibles de démonstration logique,
et ils n'acquièrent de solidité que grâce à des véri-
fications de plus en plus approchées qui en font
des propositions de plus en plus probables, mais
jamais des vérités démontrées. Les hypothèses sont
et demeurent « hypothétiques », el les sciences
physiques sont, dans leur domaine, réduites à ne
jamais atteindre la vérité absolue et définitive. Ces
vérités sont classiques chez nous, surtout après la
Science et l'Hypothèse, de H. Poincaré; il est mieux
de dire qu'elles sont redevenues classiques, car les
savants du moyen âge étaient déjà pénétrés de ces
idées, les savants de la belle époque hellénique les
discutaienteux-mèmes couramment, et M.P.Duhem,
en ses pénétrantes études sur la notion de thécrie
physique de Platon à Galilée, a démontré que pour
les grands savants de tous les temps qui avaient su
réflechir, la science n'était pas capable de pénétrer
la réalité intime des choses, que son rôle, plus mo-
deste, consiste à « sauver les apparences des phé-
noinènes ».
Mais en son œuvre de critique de la science,
M. Karl Pearson en est resté à un stade que d’autres
ont heureusement dépassé. Forcant le caractère
relativiste de la science, il adopte volontiers cette
proposition d'un philosophe ancien: l'homme est
la mesure des choses. Il n'y a dans la science,
d'après lui, pas «autre chose que ce que le savant
y mel: rien n'existe derrière les phénomènes quil
voit et qu'il décrit suivant un mode qui lui cest
imposé par la nature de son esprit. Bien plus, il
confond par système le terme science (qui devrait
uniquement signifier dans son livre : science phy-
sique) avec le terme très général de connaissance,
et il émet cette prétention que, en dehors de la,
COSMOS
29 aourt 1912
science, il n'y a aucune véritable connaissance; il
aurait dit volontiers avec les « modernistes » des
dernières années que tout ce qu'on dit exister en
dehors et au delà du cercle de la science physique
expérimentale est, en réalité, 2npensable; c'est
seulement dans la sphère des impressions sensibles,
dit-il, que le mot connaissance a une signification.
Inutile d’ajouler que tout son ouvrage abonde en
déclamations contre les « tentatives philosophiques
ou théologiques » pour délimiter les problèmes
légitimes de la science. Après avoir répété tout au
long de ses pages que la science lui apprend à dire:
« Je ne sais pas », l’auleur sait, dit ou insiaue avec
insistance que « Dieu » n’est qu'un mot inventé
par quelque métaphysicien simpliste, qu’ « on a
prouvé qu'il ne faut pas croire aux miracles, que
la métaphysique tout entière est un amusement
d'ignorants, que la connaissance des « choses en
» soi » non seulement n'est pas le but de la science,
mais qu’elle n'est même possible en aucune ma-
nière; qu'il est impossible de connaitre ce qu’il yv a
au delà des impressions sensibles, si vraiment il
peut exister quelque chose ».
Les turbines à gaz, par L. VENTOU-DUCLAUx, ingé-
nieur au laboratoire de l’A. C. F. Un vol. in-8°
de 428 pages et 57 gravures (3,75 fr). Librairie
Dunod et Pinat, Paris. 1912.
L’automobilisme nous a donné le moteur à
explosions, l'aviation nous donnera peut-ètre la
turbine à gaz.
En effel, l'aéroplane exige, pour son bon fonc-
tionnement, un moteur léger et d'une grande
régularité. Actuellement déjà, on a fait des pro-
grès considérables à ces deux points de vue, mais
il n’en reste pas moins vrai que le moteur à explo-
sionest, suivant l'expression de M. Lumet, un moteur
à coups de poings; si l’un d'eux fait défaut, il
résulte un déséquilibre. La véritable solution
serait le moteur à impulsion continue; la turbine
à combustion semble donc être la véritable solution
du moteur aérien.
Il y a longtemps déjà que ces réflexions ont été
faites par les chercheurs, et il existe actuellement
de irès nombreux brevets de turbines à gaz. La
question n'est pourtant pas résolue, et les inventeurs
continuent leurs recherches. L'ouvrage de M. Ventou-
Duclaux a pour but de faire connaitre à ceux que
le problème intéresse les solutions déjà proposées
et les travaux faits dans cet ordre d'idées, cela
pour leur éviter souvent une grande perte de temps.
On y trouvera une description des différents mo-
dèles de turbines proposés, ainsi que la liste des
brevets pris depuis 1892.
Cours pratique d'électricité, à l’usage des
conducteurs et ouvriers électriciens, par
A. PopEvy\, ingénieur. Un vol. in-18 de 316 pages,
N° 1440
avec figures (4,50 fr). Librairie bDesforges,
29, quai des Grands-Augustins, Paris, 1912.
M. Podevyn, professeur d'électricité en Belgique,
a fixé les cours qu'il fait en différentes écoles, pour
servir soit à ses nombreux élèves, soit aux per-
sonnes étrangères qui veulent connaitre une science
de plus en plus utile et employée. L'auteur a spé-
cialement visé à être simple et clair, pour ne pas
augmenter les difficultés que pourraient éprouver
les lecteurs. Les chapitres sont courts, ornés de
figures exéculées spécialement pour le texte, et
chacun contient un certain nombre de problèmes-
exemples qui facilitent la compréhension du sujet
traité. Ce livre, très complet, ne manquera pas de
rendre service à tous ceux qui le consulteront.
Les démocraties latines de l'Amérique, par
F. Garcia CALDÉRON. Préface de M. R. Poincaré.
(Bibliothèque de philosophie scientifique),
‘3,50 fr). E. Flammarion, 25, rue Racine, Paris.
C'est, croyons-nous, la première étude d'en-
semble qui soit publiée sur l'Amérique latine, cet
ensemble disparate de démocraties tourmentées où
nous retrouvons tant de caractères qui nous sont
propres, déformés par une sauvage imitation.
L'ouvrage est élégant, « arliste » même, il vise
à l’objectivité, et son auteur possède le sujet à fond.
M. Garcia Caldéron a étudié la transformation du
conquérant espagnol en métis indien et nègre, ses
luttes pour l'indépendance traversées par tant de
réactions et de révolutions sanglantes. Il a foi dans
l'avenir de ces races complexes et émet l'espoir
qu'elles sauront repousser les divers périls qui les
menacent : immigration allemande et japonaise,
mainmise américaine sur les finances. Les mo-
nographies d'état, les catégories où il les range,
procèdent d'un point de vue très réaliste. C'est
ainsi que dans le Chili M. Garcia Caldéron voit
avec raison une république de type anglo-saxon et
qu'il analyse avec infiniment d'humour les traits
essentiellement anarchiques et la vie officielle en.
Colombie, à Saint-Domingue et en Equateur. Par
contre, il fait ressortir tout ce que doivent au
principe d'autorité le Mexique, le Chili, le Brésil et
le Paraguay.
Preuves de l'immortalité de l'âme, par
Mer W. Scaxziper, évèque de Paderborn. Ouvrage
adapté de l’allemand, par G. GAzaGxoz, du clergé
d'Albi. Un vol. in-16 de 72 pages, collection
Science et Religion, n° 634 (0,60 fr). Bloud et Cie,
éditeurs, 7, place Saint-Sulpice, Paris.
Ce qui caractérise, pour le lecteur francais,
cette excellente brochure, résumé d’une étude
plus étendue adaptée par le traducteur, ce sont
les citations empruntées pour la plupart aux
COSMOS
251
écrivains allemands. Nos compatriotes auront
ainsi le moyen de compléter leur documentation
et de comparer les adversaires ou défenseurs
français et étrangers de l'immortalité de l'âme.
Solutions anciennes et renaissantes de la
. question sociale, par M. FRaxco1IS ESCARD,
préface de M. Henri Jory, membre de l'Institut.
Un vol. in-8° de 1v-212 pages (4 fr). Arthur
Rousseau, éditeur, 44, rue Soufllot, Paris.
M. François Escard, dont la famille publie cet
écrit posthume, fut, en même temps que bibliothé-
caire du prince Roland Bonaparte, un des collabo-
rateurs de Le Play. Grâce à de nombreux voyages,
il put aider celui-ci dans la publication des Au-
vriers européens. Inspiré des principes dela Réforme
sociale, animé d’un esprit chrétien qui ne cherche
pas à se dissimuler, son ouvrage, consacré à l'or-
ganisalion de la vie de famille et de l'association,
méritait de voir le jour, car il est de ceux qui sont
destinés à faire du bien.
Formulaire de cosmétique, parfumerie sans
alcool, par M. K. Garrerossé. Un vol. in-16 de
400 pages (1,50 fr). Édité par la Parfumerie
moderne, 19, rue Camille, Lyon.
La plupart des produits vendus en parfumerie
sont à base d'alcool; or, les droits très lourds qui
pésent sur tous les produits alcooliques font
augmenter les prix et par suite diminuent la
vente.
. La parfumerie aurait donc tout avantage à se
passer d'alcool qui ne sert que de solvant, et à
n'employer que les parfums solubles dans l'eau.
L'auteur étudie ici les produits sans alcool, et les
envisage successivement, non seulement au point
de vue pratique et économique, en en donnant des
formules précises et éprouvées et les procédés de
fabrication, mais aussi au point de vue hygiénique,
trop souvent négligé.
Un important chapitre est consacré à la jurispru-
dence et précise les droits et les obligations des
préparateurs de produits hygiéniques.
Cet aide-mémoire est surtout destiné à ceux qui
ont déjà l'habitude des manipulations de parfu-
merie ou de pharmacie, il pourra ètre néanmoins
consulté avec profit par tous ceux qui s'occupent
plusspécialement de la vente des prodnits d hygiène.
Les ballons librəs : étude graphique et géo-
métrique de leur mouvement, par J. Rosex.
Un vol. in-8° de 48$ pages (3 fr). Librairie
Monroty, 30, rue Jacob, Paris.
Étude trés sérieuse et documentée sur la force
ascensionnelle des ballons, leurs mouvements ver-
ticaux et la résistance opposée par l'air aux ballons
sphériques.
252
COSMOS
29 aourt 1912
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appareils décrits :
Lunettes grossissantes Zeiss : Carl Zeiss, + bis, rue
aux Ours, Paris.
Le chronoscope P. A. P. est construit par M. P. Bou-
cher, 81, boulevard Sébastopol, Paris.
M. A. B., à E. — Les idées sont bien partagées,
beaucoup de personnes choisissent le vert. Nous, nous
préférons le blanc, qui laisse passer plus de rayons
lumineux. — L'éclairage à l'huile est le plus doux
pour la vue, mais il est loin d'ètre le plus intense; il
n'est guère employé aujourd’hui; cependant on trouve
encore de bonnes lampes modérateur: Honoré, #, rue
de Saintonge; Perrigault, 26, rue Sévigné.
M. P. de C. Z., à R. — Cette information a élé prise
dans le Srientific American du 1* juin 1912, et nous
n'avons pas d'autres renseignements. Vous les obtien-
driez sans doute en vous adressant à notre confrère
des Etats-Unis: Munn and C’, 361, Broadway, New-
York.
M. P. G., à M. — Il existe, en effet, des moteurs
Diesel de faible puissance, bien que ces moteurs ne
présentent tous leurs avantages que pour des puis-
sances plus élevées. La maison Sulzer, de Winterthur
Suisse), en a construit de 15 chevaux, et il n'est pas
douteux que d'autres constructeurs en établissent
également, En France, les moteurs Diesel sont con-
struits par la maison Normand, au Havre. Pour une
petite industrie, ce moteur aura surtout pour avantage
de réduire les frais de main-d'ruvre et de surveillance.
M. A. F., à M. — Nous ignorons absolument ce
qu'est la « Chanteclairine ». Un de nos lecteurs pourra
peut-être nous renseigner. — La seconde question
n'est pas de notre compétence. Toutefois, nous
crovons que plusieurs Sociétés de secours mutuels
ni décidé de ne plus accepter les femmes parmi leurs
membres.
A. R. S., Lima. — Objets artistiques en plifre:
Samuel Lucchesi, 9, rue de la Roquette, Paris. —
Fabrique de bijouterie : Société parisienne d'oi fèvrerie,
118, rue du Temple, Paris.
R. H. R., à C. — Cette exposition d'hygiène a eu
lieu à Dresde, au mois d'octobre 1941. Le Genie civil
en a rendu compte dans ses numéros # et 5 des 2: no-
vembre et 2 décembre 1911. Nous vous les faisons
envoyer.
M. E., à V. — l’ Pour ces antennes, la nature du
métal intlue sur la réception, mais pratiquement
d'une facon très faible. Le fil na pas besoin d'ètre
isolé, c'est-à-dire couvert de guipage isolant, il faut
simplement le fixer sur des isolateurs. On
vonise le cuivre ou le bronze d'aluminium, suflisaro-
ment ronductenr ei én mme temps léger et tenace;
mais le fer peut aussi convenir. Un grillage métallique
suspendu peut faire otlice d'antenne. On a parfois
employé des jets dau. — 2* Dans le cohéreur à
aiguilles décrit (Cosmos, n° 1457, p. 160), les masses
av cuivre ne Servent qu'à raison de leur poids et
pré-
peuvent étre remplacées par toute autre masse con-
venable.Cette masse doit être déterminée par lätonne-
ments. Vous pouvez associer un nombre croissant de
petites masses.
M. L. C., à B. — Le lait de chaux est préparé à
raison de 6 à 8 grammes de chaux vive par litre d'eau :
on brasse à plusieurs reprises pendant quelques
heures ou quelques jours; puis on ajoute du sel de
cuisine à l'eau (1 millième en poids), enfin on décante
et on verse sur les œufs entassés dans les récipients.
Les doses de chaux et de sel varient, chaque indus-
triel a sa manitre de procéder. Des auteurs réprouvent
l'usage du sel. — On signale que les œufs ainsi con-
servés, ayant la coquille amincie et les pores obstrués
par la chaux, se fendent fréquemment quand on les
plonge dans l'eau bouillante. — La chaux reste en
suspension dans l'eau, il ne s'en dissout qu'une mi-
nime quantité : 1,28 g par litre à 15°; 0,78 g par litre
fà 100°. La couche de carbonate qui se forme à la sur-
ace de votre solution est un indice que la chaux y est
à l’état et dans les proportions nécessaires. — Sur ce
point (conservation par leau de chaux) et sur les
autres procédés de conservation, vous avez avantage
à lire: F. Lrscanné, l'Œuf de poule, sa ronserralion
par le froid (3 fr). Dunod et Pinat, 49, quai des
Grands-Augustins, 1908.
F. B. de A., à L. — 1° Les ouvrages d'analyse chi-
mique sont innombrables, mais répondent générale-
ment peu aux conditions spécifiées. Voyez les cata-
logues de Dunod et Pinat, de Baillière, etc. Un ancien
ouvrage (de 1885): Tableaur d'analyse qualilatire,
dressés en vue de servir de guide aux débutants, par
L. Pauxier (25 tableaux, 6,25 fr), se vend encore chez
Dunod et Pinat, 47, quai des Grands-Augustins. —
> Analyse des malivres agricoles, par A. HURERT (2 fr):
Méthodes analytiques appliquées à l’industrie et à
l'agriculture, par A. Muxrz (25 fr), 1888. Ces deux
ouvrages sont édités par Dunod et Pinat. — Modeles
en rédaction de machines, pour l'enseignement :
Papault et Rouelle, 156, rue Oberkampf, Paris.
M. D., à F. — Observatoires de la Compagnie de
Jésus: Georgetown, Stonyhurst, Manille, Zi-ka-wei,
Kalocsa et Tananarive sont les plus importants. Nous
signalerons encore Jersey, Tortose {Observatoire de
l'Ebre}, collège de Saint-Ignace de Cleveland (Ohio),
Creighton,à Omaha, Valkemberg(Limbourg hollandais),
Cartuja (Grenade), Calcutta, Bulawayo (Rhodesia),
Feldkich (Autriche), Gozo (Malte), Louvain, Mondra-
gone (Italie), Ondenbosch (Hollande), Rome (Univer-
sité grégorienne), Saltillo (Mexique), Santa-Clara (E.-U.).
— Un peut ajouter à cette liste des Observatoires non
dirigés parles Pères de la Compagnie de Jésus, celui des
îcoles Pies à Florence, celui du Vatican et nombre
d’autres dont les noms nous échappent. Il nous est
impossible de donner une liste complète. (4 suivre.)
oo
Imprimerie P. Fsnox-Vaau. 3 et 5, rae Bayard, Paris, VIII.
Le gérant : E. PETITBENRT.
COSMOS 253
SOMMAIRE
No 1551 — 5 SEPTEMBRE 1912
Tour du monde. — La prévision du temps en mer par la télégraphie sans fil. Battements rythmiques des
cellules musculaires du cœur isolé et conservé in vitro. Vitalité des levures. La sidération par la douleur.
Le point d’ébullition des métaux. La pression déterminée par un choc. Lisibilité des affiches en couleurs.
Lampes à incandescence dans les mines. L’électricité au restaurant. Télégraphie sans fil à grande distance.
Les hautes routes carrossables de l’Europe. Essais des constructions en béton. Découverte de plusieurs
sépultures préhistoriques moustériennes et magdaléniennes. Concours d’hydroaéroplanes de Saint-Malo. Un
hydroplane. L'imprimerie en Chine. L’éclairage dans les atmosphères viciées. Les voitures à impériale.
Nettoyage des rues par le vide, p. 253.
Suppression des bruits parasites dans les communications téléphoniques, Marre, p. 258. — La plus
haute maison de l’univers, KuEexTz, p. 258. — La télégraphie moderne, Marchaxo, p. 260. — Nou-
velles méthodes de mesure des nuages à l’Observatoire de Montsouris, Boyer, p. 262. — Les
irrigations et les desséchements, en Égypte et au Soudan, C! JEANNEL, p. 264. — Le laboratoire
d’essais des substances radio-actives à Gif, LaLLté, p. 265. — Les nouvellés théories de la matière
(suite), BERTHIER, p. 269. — Pyrométrie stellaire, REVERCHON, p. 272. — La Terre, sa forme et ses
dimensions (suite), CH. LazLeuaxp, p. 275. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 278. —
Bibliographie, p. 278.
TOUR DU MONDE
MÉTÉOROLOGIE
La prévision du temps, en mer, par la télé-
graphie sans fil. — On attend les plus heureux
résultats, au point de vue de la prévision des orages,
des résolutions et des vœux émis à la dernière
Conférence internationale de la télégraphie sans
fil, à Londres. Cette réunion a décidé que les mes-
sages par télégraphie sans fil émis par les båti-
ments en mer devraient passer avant tous les
autres, exception faite pour les appels de secours
des navires en danger.
Chaque gouvernement devrait avoir ses observa-
teurs et faire les frais de ce service privilégiė.
M. Willis Moore, chef du service météorologique
aux États-Unis, estime que, dès qu’une convention
sera ratifiée par les différents gouvernements qui ont
pris part à la Conférence, l'échange international
des observations permettra d'établir une carte
météorologique quotidienne de l'Atlantique et du
Pacifique, et que les éléments signalés aux naviga-
teurs éviteront nombre de sinistres maritimes.
BIOLOGIE
Battements rythmiques des cellules muscu-
laires du cœur isolé et conservé « in vitro ».
— M. Montrose T. Burrows, du laboratoire ana-
tomique de Cornell University, à New-York, a
adressé à Science (19 juillet) une note sur les pro-
cédés nouveaux qu'il emploie et les résullats qu'il
obtient dans la cullure des tissus vivants séparés
de l'organisme.
li a établi, lan dernier, que le muscle cardiaque
dun embryon de poulet mis dans un milieu de
culture approprié est le siège de battements ryth-
miques durant quelques jours, en même temps que
ke tissu prolifère et produit de nouvelles cellules.
T. LXVII. N° 1441.
Braus a répété ces expériences sur des cœurs d’em-
bryons de grenouilles et de crapauds et établi de plus
que ces cœurs isolés répondent comme des cœurs
normaux aux excitations électriques et chimiques,
et, en outre, que les cellules nouvelles issues de
ces tissus d'animaux à sang froid vivaient encore
au bout de trois mois. Plus récemment, A. Carrel
a réussi à prolonger in vitro la vie et la fonction
du muscle cardiaque d'un poulet (persistance des
battements rythmiques, au moins par intermit-
tences, durant quatre-vingt-cinq jours) en appli-
quant la méthode imaginée par Carrel et Burrows,
et qui consiste à transporter périodiquement les
tissus cultivés dans un nouveau milieu nutritif, qui
n'est autre que le plasma extrait du sang (Cosmos,
n° 1407, t. LXVI, p. 29). Mais on pouvait croire que
ces battements étaient dus à l'excitation musculaire
produite par des ganglions nerveux.
M. Burrows a résolu la question cette année et
montré que les battements rythmiques du cœur ne
sont pas nécessairement sous la dépendance des
centres nerveux, mais sont bien une propriété du
muscle cardiaque lui-même.
Tout d'abord, il a perfectionné la méthode de
culture, et dans une modification de ses expériences,
le renouvellement du plasma nourricier s'effectue
non plus périodiquement, mais de façon continue,
detellesortequeles déchetsorganiques ne séjournent
plus au contact des tissus en croissance, mais sont
emportés au fur et à mesure de leur production.
Dans trois sur quinze des cultures ainsi conduites
(il s'agissait généralement de muscles cardiaques
d’embryons de poulet), les cellules musculaires
nouvelles qui avaient poussé ont montré des batte-
ments rythmiques : le cinquième jour de la culture
artificielle, pour l'échantillon le plus précoce; le
quatorzième jour, pour les autres échantillons. La
croissance active des tissus en question et les bat-
25%
tements caractéristiques des cellules musculaires
se maintinrent durant trente jours.
L'activité n'est pas la mème pour les tissus de
toutes les régions du cœur, et elle diffère aussi
suivant l’âge des embryons. Les battements se
manifestent aussitôt après la mise dans le plasma,
s’il s'agit de pièces prises aux oreillettes du cœur,
à l'entrée des veines, quel que soit l'âge de l'em-
bryon, et même s'il s'agit de poussins fraichement
éclos. Des pièces prises aux. ventricules d'embryons
vieux de plus de dix jours ne se mettent à battre
que moyennant des procédés spéciaux de prépara-
tion et de traitement.
Un morceau de ventricule pris à un embryon de
quatorze jours, et qui ne présentait pas de batte-
ments rythmiques, a poussé des cellules nouvelles,
observables en de très bonnes conditions, qui, elles,
étaient animées de délicats battements s'effec-
tuant avec le rythme normal, c'est-à-dire à une
fréquence comprise entre 50 et 420 contractions par
minute.
Ainsi on voit, dans ces conditions très spéciales,
les cellules musculaires naitre, se développer, se
différencier et prendre au bout de quelques jours
leur fonction caractéristique.
Vitalité des levures. — MM. U. Gayon et
E. Dubourg ont prélevé, avec toutes les précautions
aseptiques voulues, le dépôt qui s'était fait dans
des bouteilles de vin vieux et l'ont ensemencé sur
des milieux de culture appropriés, pour voir si ces
vins contenaient encore des levures vivantes. Les
bouteilles de Château-Lafitte dataient de 41798,
1803, 1806, 1810, 1819, 1826, 1832, 1844, 1846
et 1848. Quatre d’entre elles, datant de 1803, 1810,
1826 et 1832, fournirent des levures vivantes, qui,
ensemencées en cau sucrée, produisirent des liquides
alcoolisés à 9-44 pour 100. (Revue scient., 40 août.)
Ainsi, des vins vieux de plus d'un siècle peuvent
contenir deslevures vivantesetcapables de reprendre
toule leur vitalité. Les auteurs pensent que les
levures introduites à l’origine lors de la mise en
bouteille ont vécu et se sont multipliées, gràce à la
lente pénétration de l’air à travers le bouchon.
La sidération par la douleur. — La f’usette
des Hipitaux (29 août) cite, d'après M. Chatelain,
trois faits intéressants de sidération par la douleur
observés chez des animaux.
Un moineau recoit une pierre et tombe sur le
sol, il reste inerte plusieurs minutes: examiné
attentivement, il n'a d'autre blessure qu’un ongle
écrasé. Bientot il se redresse et s'envole.
Un geai a un ongle arraché par un gruin de
plomb, il tombe immobile et ne se réveille qu'après
quelques minutes; il ne fut tué que l’année suivante,
Une chienne recoit un grain de plomb près de la
commissure palpébrale, l'os n'est pas atteint; elle
tombe en syncope, les muqueuses décolorées.
COSMOS
D SEPTEMBRE 1912
Quelques heures après, elle est complètement réta-
blie, elle peut de nouveau chasser.
Une douleur intense et subite a donc, dans ces
trois cas, déterminé une syncope et sidéré l’ani-
mal. Ces faits sont d'autant plus intéressants,
à un point de vue très général, qu'ils ont été
observés chez des animaux, et que, par là même,
tout facteur psychique étant exclu, les conséquences
physiques de la douleur n'apparaissent que plus
claires,
PHYSIQUE
Le point d’ébullition des métaux. — Pour
les mélaux peu volatils, le point d'ébullition est
mal connu. M. C. Greenwood a effectué de nouvelles
déterminations plus précises : les métaux étaient
chauffés dans des fours électriques à résistance;
l'auteur admettait que l’ébullition se produisait
quand la surface du métal paraissait être le siège
d'une vive agitation. (Génie rivil, 24 août.)
Les valeurs trouvées différent quelquefois gran-
dement de celles qui ont été admises sur la foi
d'autres expérimentateurs. L'auteur a trouvé les
valeurs suivantes, exprimées en degrés centigrades.
Métal. Point d'ébullitiou.
ROC nee nu num e 2 450
GUIS O ir sie srbas 2310?
PSN LT need a ue 2 275°
CHrOMO: s52 aaea a TEk 2 200°
ACROSS Min domaree 4 955
Mangancse........,............... 4 900
Aluminium........................ 41 800°
PlOMO SES da Aa 1529
Antimoine..,..............,...... 1440"
aE E A O ESEE ES 1420
Magnésium .......... seit 1 120
La pression déterminée par un choc. — Le
choc d’un marteau sur un clou, de deux billes de
billard, d'une balle contre une plaque d'acier,
détermine des pressions de durée fort brève, mais
de très grande intensité.
D'après B. Hopkinson, pour le cas d'un marteau
frappant sur la tête d'un clou, la pression reste
sensiblement constante pendant toute la durée de
l'enfoncement du clou, durée évaluée à environ
0,0012 seconde.
Pour des billes de billard qui vont l'une vers
l'autre et se rencontrent suivant la ligne des centres,
la pression n'est pas constante pendant la durée
du choc, mais va en croissant depuis le premier
contact pendant tout le temps que l'ivoire se com-
prime, que les zones de contact s'élargissent et que
les centres se rapprochent. Avec une vitesse initiale
de 2,44 m par seconde, laplatissement des billes
atteint 0,36 mm, et la pression 41,5 kg par milli-
mètre carré.
Si l’on remplace les billes d'ivoire par des billes
d'acier de mème masse (billes creuses) et qu'on
donne aux billes d'acier la même vitesse qu'aux
No 4414
billes d'ivoire, la pression du choc sera différente,
elle sera plus grande à raison de la plus grande
rigidité de l'acier : la pression atteindra 440 kilo-
grammes par millimètre carré. Seul un acier très
dur pourra la supporter.
Les pressions et déformations causées par le choc
ne se mesurent que d'une manière indirecte. Ce
qu'on mesure, c’est la durée du contact des billes,
qui est d'environ 0,00023 seconde; on la détermine
par un procédé électrique, en leur faisant fermer
un circuit comprenant une pile et un galvano-
mètre. o
Lisibilité des affiches en couleurs. — Le
Courrier du Livre relate des essais variés et nom-
breux sur les combinaisons les plus favorables
d'encres et de papiers en couleurs, effectués par
des imprimeurs en vue de décider quelles sont les
affiches qui offrent le plus de lisibilité à distance.
C'est la maison Scheldons Limited, de Leeds, une
des plus réputées pour l'impression des affiches,
qui procéda à ces expériences, lesquelles démon-
trèrent que les affiches tirées en noir sur papier
jaune étaient celles que lon pouvait lire à la plus
grande distance.
Cette classification fut ainsi obtenue : sur un
grand panneau en bois, placé à l'extrémité d’un
champ et bien exposé à la lumière du soleil, on
fixa des affiches imprimées avec des encres et sur
des papiers de couleurs différentes. Sur chacune
de ces affiches figuraient deux lignes de teste, la
première ne renfermant que des caractères bien
distincts, la seconde des lettres plus difficiles à
distinguer de loin, telles que I, J, etc.
Des piquets, soigneusement repérés, étaient
placés de distance en distance dans la direction du
panneau pour servir à établir, d’après les observa-
tions faites par de nombreuses personnes, le degré
de lisibilité de chacune des affiches.
Après pointage, on trouva la classification sui-
vante :
1° Encre noire sur papier jaune;
2° Encre verte sur papier blanc;
3° Encre rouge sur papier blanc;
4 Encre bleue sur papier blanc;
5° Encre blanche sur papier bleu; r
6° Encre noire sur papier blanc;
1° Encre jaune sur papier noir:
8° Encre blanche sur papier rouge;
9° Encre blanche sur papier vert;
10° Encre blanche sur papier noir:
11° Encre rouge sur papier jaune;
12° Encre verte sur papier rouge:
13° Encre rouge sur papier vert.
Il est à remarquer qu’une affiche imprimée en
blanc sur papier bleu peut être lue à une plus
grande distance qu'une affiche imprimée en noir
sur papier blanc.
COSMOS
a
205
ÉLECTRICITÉ
Lampes à incandescence dans les mines, —
L'emploi des lampes à incandescence dans les
mines est tellement pratique que l’on est porté à
les employer de plus en plus; cependant, une ques-
tion de la plus haute gravité n’est pas encore
résolue; si, dans les conditions normales, le fila-
ment enfermé dans l’ampoule ne peut allumer
les gaz ambiants, en est-il de même quand l’am-
poule est brisée, quoique, en pareil cas, le filament
consumé instantanément s’éteigne à peu près subi-
tement? L'emploi des filaments de tungstène donne
un nouvel intérêt à cette question.
Le Bureau des mines des États-Unis a étudié la
question, et les expériences ont été faites dans des
milieux contenant de 5 pour 400 jusqu’à 12,4 pour
100 de gaz inflammable. On y employait de petites
lampes de 1,5 bougie, alimentées par un courant
de 3,5 volts et 3 dixièmes d’ampère. Ces lampes
allumées étaient brisées dans le mélange déto-
nant. Sur un {otal de 135 essais, 78 causèrent
l'inflammalion. Ainsi meurt l’ancienne tradition
qui affirmait qu'en cas de rupture de l'ampoule le
filament s'éteignait avant d’avoir pu communiquer
le feu aux gaz environnants.
L’électricité au restaurant. — Nous lisons
dans l’Elertricien que M. Hilary Quertier, de Wel-
lington (Nouvelle-Zélande), a inventé, à l'usage
des hôtels et restaurants, un appareil électrique
qui est manœuvré par le client lui-même et qui
met directement ce dernier en communication avec
la cuisine de l'établissement.
Sur chaque table se trouve un cadre en bois por-
tant le menu, et, en regard de chaque article de ce
menu, on voit un bouton. Après avoir choisi son
plat, le client abaisse le bouton correspondant;
aussitòt le numéro de la table et la commande
apparaissent sur un dispositif enregistreur dans la
cuisine, en mème temps qu’une sonnerie électrique
attire l'attention du chef cuisinier ou de son aide.
L'appareil installé dans la cuisine délivre automa-
tiquement un ticket portant le numéro de la table
du restaurant, la nature de la commande et le
montant de la somme à percevoir. Un duplicata du
ticket se trouve conservé sur une bande sans fin,
ce qui permet un contròle absolu. Lorsque le
ticket, établi par le dispositif électrique imprimeur
de la cuisine, tombe sur le plateau convenable, la
commande peut ĉtre préparée et servie immédia-
tement par le garçon, avec la note à payer. Partout
où on l'a essayé en Nouvelle-Zélande, explique
l'Electrical Review, l'appareil électrique de M. Quer-
lier a rencontré un grand succès.
Télégraphie sans fil à grande distance. —
La station radio-télégraphique de Nauen, près de
Berlin, qui remplacera, avec une tour de près de
275 mètres, celle qui a été délruite en mars par un
236
ouragan, pourra, d'après les ingénieurs allemands,
correspondre directement dans une zone compre-
nant la ville de New-York.
La Federal Telegraph Cy, qui dessert aux
États-Unis toute la côte du Pacifique, vient d'inau-
gurer un service régulier entre San-Francisco et
Honolulu (3 800 kilomètres).
La station de San-Francisco, située à la pointe
Saint-Bruno, à 46 kilomètres de la ville, a deux
tours porte-antennes distantes de 185 mètres et de
135 mètres de hauteur. La station réceptrice
d’Honolulu est à 20 kilomètres environ de la capi-
tale de l'ile.
La mise récente en service de la télégraphie
sans fil à travers le continent de l'Amérique du
Sud, reliant Lima au Pérou, et Para au Brésil,
mérite une mention spéciale, non à cause de la
distance de stations, qui ne dépasse pas 3 400 kilo-
mètres, mais parce que ses signaux franchissent
les hautes terres de la Cordillère (6 000 mètres). —
Les stations sont du système Telefunken.
GÉNIE CIVIL
Les hautes routes carrossables de l’Europe.
— La plus haute route d'Europe sur laquelle soit
établi actuellement un service régulier d’automo-
biles, en été, est probablement celle récemment
ouverte qui porte le nom de « grand'route des
Alpes », et qui réunit les bords de la Méditerranée
au lac de Genève. Partant de Nice, elle franchit,
par Barcelonnette et Briançon, les Alpes mari-
times et les Alpes du Dauphiné, atteignant Saint-
Michel de Maurienne, à l'altitude de 742 mètres;
de là, on gagne facilement Chambéry et Genève.
Voici l'altitude des principales passes traversées
par cette route.
Col Saint-Michel (B.-A.)....... 4505 mètres.
Col d'Allos .................. 2234 —
Col de Vars.................. 2415 —
Col d'Isoard.................. 2388 —
Col du Lautaret.,............ 2058 —
. Col du Galibier.............., 2058 —
Comparé aux cols qui donnent passage à des
routes connues et fréquentées, le col de Galibier,
entre le Dauphiné et la Savoie, est moins élevé que
le Stelvio qui est à 2793 mètres d'altitude, mais
plus élevé que ceux du Mont-Cenis (2 407 mètres),
du Saint-Gothard (241415 mètres), du Simplon
(2010 mètres) et du Splügen (2 118 mètres).
Essais des constructions en béton. — Les
accidents qui se sont produits dans quelques con-
structions en béton ont amené le Bureau des essais
aux États-Unis, qui étudie la valeur des matériaux
de construction, à poursuivre une enquite spéciale
sur les propriétés physiques du béton, si emplové
aujourd'hui, et notamment sur les fissures qui se
produisent dans les constructions faites avec ce
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1912
matériau, accidents dus aux contractions et aux
dilatations de la masse.
Des observations seront faites dans divers États
sur des constructions anciennes et sur des con-
structions nouvelles ; elles seront poursuivies en été
et en hiver pour constater les contractions et les
dilatations dues à la température et aussi les chan-
gements de volume qui se produisent pendant le
durcissement des mortiers; ces observations seront
faites très spécialement sur les murailles des
énormes écluses du canal de Panama, de mème
que sur les autres ouvrages importants dont on
aura connaissance.
PRÉHISTOIRE
Découverte de plusieurs sépultures préhis-
toriques moustériennes et magdaléniennes,
— Le D" Capitan, professeur au Collège de France,
et M. Peyrony, son collaborateur, continuant en
Dordogne leurs fouilles méthodiques, ont trouvé,
dans l'abri sous roche de la Ferrassie, deux sque-
lettes de petits enfants gisant sous cing mètres
d'éboulis et de couches préhistoriques, reliquats
de la vie de populations de divers âges, qui se
sont régulièrement succédé en ce point durant tout
le quaternaire moyen.
Ces enfants avaient été enterrés dans deux petites
fosses creusées intentionnellement par les « mous-
tériens » sous un de leurs foyers, foyer rempli de
beaux silex taillés par eux et caractéristiques de
celte époque.
Le rite sépulcral de l'enterrement durant la civi-
lisation paléolithique, naguère encore discuté, est
ici démontré irréfutablement. Ainsi, dès les pre-
mières périodes de son histoire authentique,
l'homme nous apparait préoccupé du mystère de
sa destinée future et croyant à une survie : le res-
pect dont il entoure ses morts a pour nous une
haute signification philosophique et religieuse.
MM. Capitan et Peyrony ont, d'autre part, mis
au jour, au lieu dit « le cap Blanc », près de
Lausselle et des Eyzies, le squelette d’un homme
enterré en ce lieu à l’époque magdalénienne.
AVIATION
Concours d’hydroaéroplanes de Saint-Malo.
— Ce concours, qui a eu lieu du 24 au 26 aoùt
dernier, comportait différentes épreuves, dont la
plus importante était la course Saint-Malo, iles
Chausey, Saint-Hélier (ile Jersey) avec escale d'une
demi-heure en ce point, puis retour à Saint-Malo.
Douze appareils étaient engagés; sept biplans et
cinq monoplans. On se rappelle (p. 201) que le
règlement accordait une bonification variable sui-
vant le nombre des passagers se trouvant à bord.
Le temps très mauvais a rendu particulièrement
difficiles les différentes épreuves, et surtout la der-
No quil
nière, Saint-Malo-Jersey et retour, qui comportait
un parcours de 445 kilomètres au-dessus de la mer.
Quatre appareils seulement ont fait cette traversée.
Voici le classement général pour les trois journées :
Biplan Astra, 8 points;
Biplan Sanchez-Besa, 15 points:
Monoplan Rep, 16 points;
Biplan M. Farman, 24 points;
Monoplan Nieuport, 25 points;
Biplan Paulhan, 36 points.
Sur ce nombre, trois appareils, les premiers
naturellement, ont accompli toutes les épreuves
du meeting.
VARIA
Un hydroplane. — Pour disputer la coupe
Hamsworth des canaux automobiles, actuellement
sur les possessions des États-Unis, on vient de con-
struire en Angleterre quatre hydroplanes, dont le
plus rapide, le Maple Leay IV, a fourni pendant
une course de près de cinq heures une vitesse de
74 kilomètres par heure. Cette longue randonnée
d'une simple embarcation (12 mètres de longueur)
à une pareille vitesse n’avait pas encore été atteinte.
L’imprimerie en Chine. — Une intéressante
exposition, organisée dans le but de faire connaltre
les différentes phases de l'évolution de l'imprimerie
en Chine, vient de se tenir au British Museum de
Londres, dans la King’s Gallery; les détails sui-
vants, empruntés au Courrier du Livre, jetteront
quelque jour nouveau sur les débuts des arts gra-
phiques dans le Céleste Empire.
Le plus ancien spécimen exposé remonte à la
dynastie des T'ang, entre 518 et 906; c’est une
simple bande de papier qui parait plutôt avoir été
grossièrement imprimée. Un volume portant la
date de Yuan-fu, c'est-à-dire de l’an 1099, est dans
un état étonnant de conservation; l'encre semble
n'avoir rien perdu de sa fraicheur, ce qui est du,
parait-il, à l’usage du camphre dans sa fabrication.
C'est le plus ancien livre imprimé que le British
Museum possède. Trois autres, datés 1167, 1248 et
1283, furent imprimés au Japon sous la dynastie
des Sung. De la dynastie des Mongols, un volume
particulièrement remarquable est celui qui ren-
ferme la collection des œuvres de Han Yii, grand
lettré et publiciste chinois. Sous la dynastie des
Ming, Part de l'imprimerie en Chine brilla de son
plus vif éclat. C'était à peu près vers l’époque où
Caxton l’introduisit en Angleterre. De cette fameuse
période, un volume est exposé, une Histoire de la
Chine, imprimée en 1476 pour le palais impérial.
Le papier semble un peu pelucheux, et l'artiste a
gravé deux caractères différents: l'un large pour
le rapport des faits, et l’autre, plus petit, reproduit
les commentaires de l’auteur. Parfois même, lim-
pression alterne sur blocs noirs où les caractères
ressortent en blanc.
COSMOS
257
Le premier livre chinois illustré est daté 1486;
chaque page contient une gravure sur bois relatant
un des épisodes de la vie de Sakyamuni Buddha.
Un autre volume illustré, traitant de la culture
du riz, fut édité par l’empereur Kang Hsi lui-
même.
Dès l’an 1 100, on se servait de caractères mobiles
en Chine.
L’éclairage dans les atmosphères viciées.
— Quand il s’agit de visiter ou de porter des
secours dans des milieux où l'atmosphère est
viciée par des gaz nocifs, les sauveteurs portent
un casque dans lequel on refoule l'air pur néces-
saire à leur respiration. S'il faut s'éclairer, dans
les grandes villes, on les munit d'une lampe élec-
trique à incandescence, dont les fils conducteurs
se déroulent derrière eux.
Mais si cette ressource manque, le problème
devient difficile; on peut cependant le résoudre
dans une certaine mesure en employant la
flamme la moins sensible à la condition de Pair
ambiant; l'acétylène semble répondre à ces besoins.
La Revue de l'Acétylène dit, en effet:
Une bougie s'éteint avec 2,95 pour 100 d'acide
carbonique et 16,24 pour 100 d'oxygène. Une
lampe acélylénique brüle jusqu’à 6,30 d'acide car-
bonique et 11,7 d'oxygène. Une flamme de gaz
naturel a comme limites 3,25 et 13,9. En conclu-
sion, on voit donc que l’acétylène résiste le mieux
dans les atmosphères viciées.
Les voitures à impériale. — Tandis qu’on sup-
prime chez nous les impériales des voitures,
omnibus, tramways et wagons, on les établit à
New-York sur des véhicules qui n’en avaient jamais
porté, et la mesure est accueillie avec enthou-
siasme; ainsi va le monde; la perfection, en beau-
coup de cas n’est qu’une question de longitude ou
de latitude.
Ajoutons qu'aux États-Unis, en souvenir sans
doute de l’ancienne marine militaire, les voitures
à impériale s'appellent des voitures à deux ponts.
Nettoyage des rues par le vide. — On lit
dans les journaux allemands que l’on emploie actuel-
l:ment, à Strasbourg, un appareil de nettoyase par
le vide pour balayer les voies de tramways de celte
ville. Le dispositif adopté a l'aspect d'une voiture-
caisse; en outre du moteur ordinaire de traction,
il a reçu un moteur électrique qui actionne l'appa-
reil de nettoyage logé dans la voiture. Les ordures
présentes sur la voie sont humectées d'eau, grattées
et attirées dans la voiture close au moyen de
l'appareil de succion.
Avec l'appareil en question, un senl ouvrier nel-
toie parfaitement chaque jour 40 kilomètres de
voies, accomplissant le travail de dix-sept hommes
qui ne disposeraient que des moyens ordinaires.
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1912
Suppression des bruits parasiles dans les communications téléphoniques.
Tout le monde connait la gêne résultant des
mille et un bruits parasites que le public englobe
sous la dénomination générale de « friture », et
qui survient trop souvent au cours des conversa-
tions téléphoniques. Certaines lignes sont à ce
point de vue profondément défectueuses, et la voix,
notablement altérée, ne se transmettant plus dis-
tinctement à l'oreille, toute communication un peu
sérieuse et prolongée devient impossible. Il en
résulte un préjudice grave dont souffrent les
abonnés. Les ingénieurs de l’État, il faut bien le
reconnaitre, se sont efforcés d’étudier les amélio-
rations qui s'imposent à ce sujet : un certain
nombre de dispositifs ont été imaginés par eux;
mais, jusqu'ici, il n’en est aucun qui leur ait donné
pleine satisfaction, soit que les divers amortisseurs
proposés n’annihilent qu'imparfaitement les per-
turbations, soit qu ils présentent des inconvénients
d'un ordre différent.
La difficullé consiste, en effet, à trouver une résis-
tance non inductive qui, intercalée sur le réseau,
puisse conduire à la terre les courants induits ou
les charges statiques parasites, qui sont préci-
sément les éléments perlurbateurs dans les com-
munications, puisqu'ils empruntent forcément le
circuit induclif de la ligne. i
Cette difficulté vient d'être tranchée de façon
élégante par un ingénieur suédois, M. Saxenberg,
grâce à l'emploi d'une résistance non inductive et
réglable à volonté, par une manœuvre très simple,
qui permet aux personnes en train de converser
d'obtenir elles-mêmes le maximum d’amortisse-
ment des bruits parasites. Schématiquement, cette
résistance consiste en deux colonnes d’eau reliées
l’une à l'autre, et dont l’une des extrémités est
à la terre, tandis que l’autre est reliée au réseau.
Chaque poste est muni d’un amortisseur semblable,
disposé à portée du correspondant qui, à son gré,
élève l'une ou l'autre des électrodes, ou, au con-
traire, l’abaisse, jusqu'à ce que les extra-courants —
empruntant tous, de préférence au circuit inductif
téléphonique, le circuit non inductif de la résis-
tance — soient dispersés dans le sol et ne troublent
plus la conversation. Cette simple manœuvre de
l'électrode fait varier la résistance et, par un tâlon-
nement de courte durée, l'amène aisément au
degré optimum.
Chaque correspondant opère donc pour son
propre compte, les deux dispositifs étant entiè-
rement indépendants lun de l'autre; il devient
ainsi possible, à laide des variations indépen-
dantes qui sont provoquées aux deux bouts de la
ligne, d’alténuer ou de compenser complètement
les pertes de charges dues à un isolement défec-
tueux.
L'amortisseur Saxenberg, mis en essai sur une
très mauvaise ligne, dont on pouvait à peine se
servir, s’est montré très supérieur au meilleur des
systèmes précédemment essayés sur la mêmeligne:
celui-ci consistait en une bobine d’inductance placée
entre les fils, et dont le centre était à la terre. Par
suite de sa résistance inductive et de l'impossibi-
lité de régler les deux parties de la bobine indé-
pendamment l'une de l'autre, cette bobine d'induc-
tance n'avait donné et ne pouvait donner qu'une
amélioration très inférieure à celle de l'amortisseur
non inductif de Saxenberg, lequel a rendu possibles
toutes les communications sur une ligne fonciè-
rement défeclueuse.
L'état de l'atmosphère influençant à la foisl’induc-
tion et les postes, il est évident que cet appareil
doit ètre l'objet de réglages fréquents, ce qui
implique qu'il doit toujours être à portée de la
main. Il mest pas sans intérèt de remarquer, en
outre, que sa propriété de dispersion lui vaut d’être
par surcroit un bon protecteur contre les décharges
atmosphériques.
FRaNcis MARRF.
La plus haute maison de l'univers.
Après tout ce qui a été dit à diverses reprises et
assez récemment encore, sur les fameux « gratte-
ciel» américains, ces immenses bâtisses au nombre
exorbitant d'étages superposés, il ne semblerait
pas utile de revenir si tòt sur ce sujet. Cependant,
la nouvelle maison, le « Woolworth Building »,
actuellement en construction à New-York, présente
des dimensions si colossales qu’elle nous a semblé
mériter d'ètre signalée tout spécialement.
D'ailleurs, oyez et jugez vous-mêmes.
Commencé en novembre 1910, le nouvel édifice, .
en janvier prochain, date de sa terminaison, n'aura
rien moins que cinquante-cinq étages. Son corps
principal en a vingt-neuf qui seront surmontés
d'une énorme tour comprenant les vingt-six autres.
Le sommet de la coupole de cette tour sera à
deux cent vingt buit mètres au-dessus de la chaus-
sée, alors que les fondations du monument mème
descendent à une profondeur de quarante mètres.
Une petite armée de 1 500 hommes, recevant un
salaire moyen de 25 000 francs par jour, travaille
à l'édification du futur mastodonte yankee.
N° 1441
pu
'
P LS biai
LA MAISON GÉANTE, DE 55 ÉTAGES, TELLE QU'ELLE SERA
5 UNE FOIS ACHEVÉE.
On a calculé qu'il faudra 130 millions de kilo-
grammes d'acier, de briques et de pierres pour
mener à bien cette construction monumentale qui
se compose essentiellement d’une carcasse de
poutres métalliques rivées les unes aux autres. Ce
COSMOS
259
squelette absorbera à lui seul 25 millions de kilo-
grammes d'acier, et pour « l’habiller » (c’est le
mot vrai), il faudra 50 millions de kilogrammes
de briques. D'ailleurs, ce géant moderne ne ren-
fermera pas un seul morceau de bois, les parquets
même étant en marbre ou en ciment, et les portes
en métal.
Pour porter, décharger et monter les madriers,
poutres et traverses métalliques, au lieu d'emploi,
on se sert de six grues électriques actionnées chacune
par un moteur de 80 chevaux. Quatre de ces grues
ont suivi la construction jusqu’à la plate-forme du
corps principal, deux d’entre elles iront jusqu’au
Phot. the Edison Montly.
PARTIE SUPÉRIEURE DU WOOLWORTH BUILDING.
ETAT AU 38°: ÉTAGE.
quarantième étage et, enfin, une seule montera
jusqu’à la coupole.
Ce remarquable bâtiment sera une maison d’af-
faires, occupée entièrement par des offices et des
bureaux. Ses flancs pourront donner asile à
10 000 personnes, la population d'une petite ville
entière.
€ On y placera soixante-cinq kilomètres de tuyaux
à vapeur et cent vingt kilomètres de fils électriques.
Quant à l'éclairage, il sera fourni par 126 000 lampes
électriques.
Enfin le « Woolworth Building », le roi des
« gratte-ciel », coûtera la bagatelle de 70 millions
de francs, somme dont, détail curieux, plus des
trois cinquièmes émanent du portefeuille parisien.
L. KUENTZ.
a
260
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1912
La télégraphie moderne.
I|. — Considérations
sur les conditions d'exécution du travail,
Plus d’un demi-siècle s’est écoulé depuis l’intro-
duction du système télégraphique Morse dans les
usages pratiques; durant l'intervalle, d’innom-
brables procédés nouveaux ont été proposés, essayés
ou réalisés ; des systèmes ingénieux ont été conçus,
depuis les appareils à transmission automatique
jusqu'aux appareils imprimeurs ou inscripteurs les
plus merveilleux, comme ceux de Murray, de
Rowland, de Siemens, de Pollak et Virag, etc.;
malgré cela, le système Morse continue d’être le
plus répandu et le demeurera vraisemblablement
longtemps encore.
C'est que la pratique télégraphique ne demande
pas autant des appareils extrêmement rapides ou
permettant d'arriver à une utilisation extraordi-
nairement efficace du matériel des lignes, que des
instruments d’un maniement facile et souple,
pouvant être indifféremment desservis par toutes
catégories d'agents et susceptibles de servir à l’éta-
blissement de reliements dans des bureaux inter-
médiaires. L'économie de l'exploitation dépend
généralement plus de la simplicité des manœuvres
que de la rapidité des transmissions; entre les
grands centres, peuvent être employés des sys-
tèmes spéciaux, mais pour les bureaux secondaires
il faut des instruments ne demandant que le mini-
mum de réglage, ayant une grande robustesse, et
dont la manœuvre ne soit pas trop difficile; avec
certains appareils, comme le Hughes, l'opérateur
apprenti ne peut débuter que lorsqu'il possède déjà
une certaine habileté, de sorte que les initiations
sont longues et coûteuses; avec d’autres, les opé-
rations de réglage sont délicates, et elles ne peuvent
être effectuées que par des télégraphistes experts;
avec d'autres encore, le rendement des lignes est
bon, mais la transmission comporte un travail
préalable, grand et dispendieux.
Voici en présence une demi-douzaine de bureaux
ayant entre eux des relations fréquentes, sans
cependant être chargés énormément; ils sont éche-
lonnés plus ou moins étroitement le long d'une
ligne. Faut-il que chacun d'eux ait une communi-
cation directe vers chacun des autres? Non, évi-
demment, ce serait inutilement coùteux. Peut-on
déterminer des heures pour l'établissement des
reliements intermédiaires à opérer et mettre les
fils à la disposition de chaque office à des heures
préalablement fixées? Cela n’est évidemment pas
possible ; le trafic ignore la réglementation à laquelle
il faudrait le soumettre. Va-t-on faire de bureau
à bureau l'échange de toutes les correspondances,
en procédant à des transmissions et retransmis-
sions successives pour chaque étape? C'est une
méthode compliquée, qui occasionne de grandes
dépenses de main-d'œuvre; il est naturellement
désirable de réduire autant que possible les opéra-
tions accessoires.
En présence des conditions qui se rencontrent
ainsi dans la pratique, le gain de temps réalisable
dans les transmissions proprement dites devient
généralement insignifiant.
Prenons le cas d’une dépèche ordinaire d’une
vingtaine de mots; évaluons le temps nécessaire
pour les différentes opérations; en comptant de la
façon la plus modérée, nous arrivons aux chiffres
suivants, qui peuvent être considérés comme cone
formes aux constatations de l'expérience :
i Minutes.
Acceptation du télégramme, lecture rapide par
l'employé, compte des mots, calcul, indica-
tion et encaissement de la taxe, inscriptions
éventuellement nécessaires .......... Sense UE
Transport de la correspondance des guichets
d'acceptation aux appareils de transmission;
triage et répartition des télégrammes entre
les groupes, puis entre les appareils...... E
Appel du bureau correspondant, soit directe-
ment, soit indirectement, réception des appels
dans les bureaux intermédiaires; établisse-
ment des reliements dans ces mêmes bureaux,
réglage succinct des appareils de communi-
cation, réception de l’appel par le bureau de
destination, mise sur appareil récepteur de la
ligne appelante..................... ss it 2
Transmission et réception du télégramme, sup-
posé d’une longueur moyenne de 20 mots,
adresse, texte, signature, indications supplé-
mentaires comprises... hsvosdias VD
Enlevage des correspondances reçues; envoi
aux employés chargés du pliage, du collage,
du timbrage, de la distribution aux porteurs
télégraphistes............,... LOE ETN 2
Non compris la transmission, nous arrivons donc
à un total de 7 minutes; or, avec le système Morse,
le temps nécessaire pour la transmission et la
réception d'une dépèche de 20 mots n’atteint pas
une minute. Si l’on substitue à ce système un autre
plus rapide, effectuant le mème travail de trans-
mission et de réception en un temps excessivement
court (mettons O0 seconde), on n'économise encore
au maximum que.un huitième du temps total.
Au point de vue de la célérité des opérations
dans leur ensemble, le bénéfice est insignifiant; en
effet, l'on peut constater que les pays où les
correspondances arrivent le plus rapidement à des-
tination sont ceux où l’on s’est occupé surtout
d'écourter les opérations préliminaires et acces-
soires.
N° 14H
En Belgique, notamment, on a supprimé dans ce
but, dans la plus large mesure possible, toutes les
écritures, les inscriptions, à l'acceptation, à la
réception et à la distribution; on a établi le sys-
tème d'acheminement direct, pour éviter les récep-
tions en passage dans les postes intermédiaires;
mais on continue à employer le plus ordinairement
le système Morse. Le travail se fait, il est vrai,
auditivement; toutefois, l’économie de cette mé-
thode provient, bien plus que de la célérité dans
la transmission mème, de l'obligation où se trouve
l'agent récepteur de suivre pas à pas, lettre à lettre,
son correspondant, ce qui évite toute nonchalance,
toute perte de temps.
Bref, et comme nous le disions plus haut, ce
n'est, en fait, que pour les relations directes des
centres principaux, entre lesquels s'effectue un
échange régulier et uniforme de correspondances,
qu’il convient d'avoir des appareils à grand rende-
ment, permeltant d’écouler avec un nombre de
fils donné le maximum de trafic. ;
Les frais d'amortissement des lignes représentent
alors la partie la plus importante des dépenses
à couvrir, et l'on doit accepter des systèmes télé-
graphiques à grande vitesse, même si ceux-ci
comportaient des opérations préliminaires plus ou
moins dispendieuses.
C'est ce qui justifie, par exemple, l'emploi du
système automatique Wheatstone et d’autres ana-
logues, comme le Delany, pour ne prendre qu'un
appareil d'invention récente, encore peu connu en
Europe, mais pour la mise en pratique duquel une
importante Société s’est constituée il y a deux ou
trois ans en Amérique.
Dans ces systèmes, on commence par préparer,
sous forme de bandes perforées de façon conve-
nable, une copie des télégrammes à transmettre;
ces bandes perforées sont introduites dans un
appareil de transmission automatique spécial con-
sistant, en principe, en un système de tiges ou de
balais de contact dont le fonctionnement, contròlé
par les trous de la bande, donne lieu à des émis-
sions de courant allant actionner le récepteur.
L'avantage de ces procédés est de rendre pos-
sible une grande vitesse de transmission, car les
transmetteurs automatiques peuvent naturellement
envoyer les signaux bien plus rapidement qu'on
ne saurait les former manuellement, soit à l’aide
du manipulateur Morse ou des manipulateurs
légers, de type américain, que l’on utilise dans la
télégraphie ordinaire, soit à l’aide de claviers, de
claviers Hughes simples (lettres dans l’ordre alpha-
bétique) ou modernisés (lettres dans l’ordre ration-
nel, répondant à la fréquence d'emploi des diffé-
rents caractères), ou de claviers de machine à
écrire, comme dans le Rowland ou le Murray.
Mais, de même qu’il a fallu, au départ, traduire
les correspondances en signaux perforés, il faut,
COSMOS
261
à l’arrivée, retraduire les signaux électriques reçus
en caractères d'écriture ou d'imprimerie, lisibles
par le destinataire. |
Pendant longtemps, cette traduction a consisté
tout simplement en un travail de copie manu-
scrite ; les bureaux bien outillés l’exécutent aujour-
d'hui par la dactylographie, et l’on dispose mème
d'appareils qui peuvent effectuer la traduction
directement.
Le système Creed, qui réalise cette condition,
doit être signalé tout spécialement à ce propos:
appliqué en Angleterre et, pour les relations exté-
rieures, par différentes Compagnies anglaises, il
semble avoir donné jusqu'ici de très bons résultats
etse rangera probablement parmi les appareils les
plus utiles.
D’autres méthodes de travail fournissent aussi
une utilisation fort efficace des lignes sans deman-
der d'opérations préliminaires : ce sont les pro-
cédés de télégraphie multiple, dont le Baudot, cet
excellent système des télégraphes français, doit être
considéré comme l'un des plus beaux exemples; le
Rowland, le Mercadier, etc., basés sur l’utilisation
de combinaisons spéciales, sont des adaptations
modernes du même principe.
Quoi qu'il en soit de ces différents systèmes, on
peut considérer que, dans les conditions actuelles,
il y aurait grand intérêt à pouvoir tirer du Morse
ordinaire le maximum de ce qu’il est à mème de
fournir.
_ Ce serait, par exemple, un grand progrès pour
beaucoup de cas d'applications, que de pouvoir
lemployer conjointement aux procédés de travail
automatique, sans que le passage de l’une à l’autre
méthode nécessitât d'opérations supplémentaires
importantes.
On aurait ainsi un système permettant de faire
les échanges dans les conditions ordinaires entre
les postes secondaires mis en relations l’un avec
l’autre, tout en laissant aussi entièrement libre le
recours à la transmission automatique sur les
lignes chargées. :
Pour arriver à ce résultat, il faudrait que les
signaux émis au moyen des appareils de télégraphie
couramment usités pussent être à volonté soit reçus
de la façon habituelle, soit convertis en bandes
perforées pour les retransmissions.
Avec un système mixte de ce genre, non seu-
lement pourrait-on appliquer aisément la transmis-
sion automatique dès que celle-ci devient utile,
mais encore on serait à mème de supprimer les
opérations de main-d'œuvre qui sont nécessaires
dans le cas de réception en passage.
Dès lors, le travail présenterait beaucoup plus
d’élasticité qu'il n'en offre aujourd hui, puisque
l’on pourrait sans contrainte et sans restriction
faire les transmissions directes aussi loin que le
permettraient dans chaque cas les circonstances
262
du moment, ou procéder aux réceptions intermé-
diaires sans souci des dépenses de main-d'œuvre
supplémentaire, celle-ci étant rendue inutile.
Ces résultats sont atteints, en grande partie,
pour les relations assurées exclusivement au moyen
du système automatique, avec les appareils Creed
mentionnés plus haut.
Ils sont réalisés plus complètement, et pour le
travail Morse en général, grâce à diverses innova-
tions mises au point en Allemagne, et qui sont
COSMOS
5 SEPTEMBRE 191412
d’une simplicité et d'une commodité remarquables.
Comme il s'agit d'instruments dont la descrip-
tion n'a guère été donnée jusqu'ici dans les publi-
cations françaises, nous croyons pouvoir en indiquer
aussi complètement que possible les dispositions
essentielles; les considérations qui précèdent per-
mettront à tous, d’ailleurs, d'en apprécier la raison
d’être, quelque spécial que ce sujet puisse paraitre
au premier abord.
(A suivre.) H. MARCHAND.
Nouvelles méthodes de mesure
des nuages
A DOBSERVATOIRE DE MONTSOURIS
Dans beaucoup d’Observatoires météorologiques,
le mouvement des nuages se mesure à l’aide du
F1G. 1. — HERSE NÉPHOSCOPIQUE BESSON
POUR LA MESURE DES NUAGES.
néphoscope de Fineman. Cet instrument se com-
pose d'une boussole de déclinaison dont une cou-
ronne mobile, sur laquelle se fixe un miroir noir,
recouvre la boite. Dans ce miroir, on a pratiqué
une fenètre en verre transparent qui permet d'ob-
server la pointe de l'aiguille aimantée. En outre,
on a gravé sur cetle surface réfléchissante un pre-
mier cercle de 8 millimètres de diamètre, puis
deux autres cercles équidistants de 26,8 mm; enn
quatre diamètres constiluant une rose des vents et
dont l'un passe par l'axe de l'ouverture vitrée. A
l'extrémité de ce dernier diamètre, se trouve fixée
la couronne mobile qui porte une échelle verticale
divisée en millimètres et qu’on peut déplacer nor-
malement au plan du miroir noir, grâce à une cré-
maillère et à un pignon actionné par un bouton.
Un pied triangulaire muni de vis calantes supporte
l’ensemble de l'appareil. Pour observer, après
avoir placé le néphoscope horizontalement, on
tourne la couronne mobile avec les manettes de
façon à faire coincider les diamètres du miroir
avec les quatre points cardinaux, en ayant soin
d'amener le diamètre passant par la fenêtre à verre
transparent dans la direction du méridien. En
tournant l’appareil tout entier avec le trépied, on
met ensuite l'aiguille aimantée dans un même
plan vertical avec la direction N.-S. Il suffit alors
de tourner la couronne mobile, de monter ou
abaisser l’échelle jusqu’à viser l’image du nuage,
qu'on suit sur le miroir en notant sa direction et
le temps qu'elle met à parcourir la distance com-
prise entre deux cercles.
Mais ce néphoscope, d’un emploi peu commode
donne, en outre, des mesures d'une médiocre pré-
cision. Aussi M. Louis Besson, le savant directeur
de l'Observatoire de Montsouris, imagina-t-il sa
herse néphoscopique (fig. 1), afin de rendre plus
exactes les déterminations concernant la direction
et la vitesse des nuages. Cet appareil comprend
une barre horizontale munie de sept pointes équi-
distantes et fixée à l'extrémité supérieure d'une
tige verticale pouvant tourner sur elle-mème.
Quand l'observateur veut procéder à une mesure,
il se met de facon à apercevoir la pointe centrale
se projeter sur l'amas nuageux. Puis, sans bouger
de sa place, il fait tourner de loin la herse à l’aide
de deux cordes de façon à amener la ligne des
pointes en coincidence avec la trajectoire du
nuage. D'autre part, un cercle gradué tournant
avec la tige verticale fournit la direction, qu'un
index fixe permet de repérer. En outre, on peut,
26#
un ciel sans nuage et 40 une voûte céleste couverte
entièrement. Faisant ensuite tourner le népho-
mètre de 180, il constate la nébulosité dans les
secteurs 7, à el 2 (représentant Jes régions du ciel
qui correspondaient aux sections 8, 9 et 40 de tout
COSMOS
D SEPTEMBRE 191%
à l'heure). Entre autres résultats intéressants, les
observations faites jusqu'ici montrent qu'un rap-
port étroit lie la nébulosité à la durée de l’insola-
lion enregistrée par les héliographes.
JACQUES BoYyER.
Les irrigations et les desséchements en Égypte et au Soudan.
Lord Kitchener, consul général au Caire, vient
de publier son rapport sur la situation économique
et agricole de l'Egypte en 1911 ; nous en extrayons
les détails suivant concernant les travaux d'irriga-
tion et de drainage en projet.
Dans ces dernières années les récoltes en Fgypte,
en particulier dans le Delta, ont sensiblement.
diminué. Plusieurs causes ont amené cette fâcheuse
situation, mais la principale, c'est l’inexpérience et
l'insouciance des cultivateurs. Tout le monde sait
qu'en Egypte, sansirrigation, il n’y a pas de récoltes
possibles. Les inondations du Nil doivent périodi-
quement fournir au sol l’eau dont il a besoin. Dans
aucun autre pays il n’y a de démarcation aussi
tranchée entre les terrains irrigués et ceux qui ne
le sont pas. Ces derniers cependant, malgré leur
aspect de déserts, sont d'excellents terrains d'allu-
vions qui n’ont besoin que d'être arrosés pour
devenir extrèmement fertiles.
_,: Autrefois l'irrigation n’était assurée que d’une
façon très incomplète. Les eaux du fleuve étaient
emmagasinées dans des fosses d'où elles s’écoulaient
vers les terrains environnants. Mais comme les
crues sont irrégulières, il arrivait parfois que cer-
taines fosses n'étaient pas remplies, et les cultiva-
teurs manquaient d'eau. Aujourd’hui, il n'en est
plus ainsi et l'arrivée de l’eau bienfaisante a lieu
d'une manière régulière. Mais cette abondance a
engendré un abus. Les cultivateurs, heureux d'avoir
de l’eau au delà de leurs besoins, ont agi comme
si la capacité productive du sol était sans limite.
{ls ont noyé la terre, et cet excès d'humidité a eu
le plus fàcheux effet sur les récoltes. En mème
temps, dans l'espoir d'augmenter leurs revenus, ils
ont abandonné le système si rationnel du change-
ment de culture pour se confiner dans la culture
seule du coton, plus rémunératrice que les autres.
Il en est résulté que la terre s'est fatiguée; le ren-
dement a baissé ainsi que la qualité des produits.
C'est à cette culture intensive que l’on attribue le
développement, dans ces dernières années, de la
maladie du coton. L'humidité du sol a favorisé
l’éclosion des insectes et surtout celle d'un ver
spécial qui dévaste les plantations de coton.
Des efforts très sérieux ont été faits pour remédier
à cetle situation déplorable. On a cherché à
apprendre aux fellahs à se préoccuper davantage
des soins à donner à la terre. Un tàche de leur
faire comprendre qu’un excès d’eau est au moins
aussi nuisible aux récoltes que l'insuffisance. Enfin
on essaye de les amener & alterner leurs cultures
pour ne pas épuiser le sol. i
Dans ce but, le ministère de l'Agriculture a orga-
nisé vingt-quatre fermes modèles où les méthodes
reconnues les meilleures sont appliquées. L’expé-
rience a montré avec évidence que le coton peut
fort bien pousser avec moins d’eau qu'on n'en
emploie généralement, et que la récolte augmente
quand les plantes sont plus espacées qu'elles ne le
sont d'habitude. Dans la majorité des cas, les plan-
tations de coton, de blé, de canne à sucre, de soja
ont rendu plus, dans les fermes modèles, que chez
les cultivateurs environnants. Ces résultats n’ont
pas été inutiles et ont convaincu un grand nombre
de fellahs. 11 ne faut pas croire cependant que les
idées nouvelles soient acceptées partout sans résis-
tance, mais on peut espérer toutefois que la rou-
tine finira par céder devant les résultats indiscu-
tables de l'expérience.
Mais si l'irrigation est indispensable en Egypte,
le desséchement dans certaines parties ne l'est pas
moins, car les terrains trop humides sont impro-
ductifs. Cette question, d’après lord Kitchener, a
élé trop négligée jusqu'ici. C'est dans le Delta sur-
tout que le drainage du sol est nécessaire, et en
particulier dans les deux provinces de Beharah et
de Garbieh, la première à l’occident, la seconde
au centre du Delta.
Dans le Beharah se trouve le lac Mariouth
(ancien lac Maréotis), séparé seulement de la haute
mer par une étroite bande de sable. Le lac Mariouth
était, au commencement du siècle, une simple
cuvette dans laquelle se rassemblaient les eaux de
pluies. Son étendue fut beaucoup augmentée par
les Anglais en 1801 pendant leur campagne contre
les Français. Les digues furent coupées en plusieurs
points et la surface immergée considérablement
agrandie. Depuis lors, cependant, une certaine
partie a été desséchée; on a installé des pompes à
Meks, mais la profondeur de l’eau est encore en
certains endroits de 2,4 m. Il ne sera pas facile de
récupérer pour l’agriculture ce territoire de
66 000 hectares, fortement imprégné d'eau salée.
On a projeté d'installer de nouvelles pompes plus
puissantes à Meks, puis d'approfondir les canaux
de desséchement de manière à abaisser le niveau
N° 141
de l’eau à 1,5 m au-dessous du sol. Le prix de ces
travaux, qui amèneraient la disparition complète du
lac, est évalué à 160 000 livres égyptiennes.
Daus le Delta central, entre les branches de
Rosette et de Damiette, se trouve le lac de Bourlos,
séparé de la mer par une bande de sable coupée
en un seul point, par lequel s'écoulent les eaux de
drainage de la province de Garbieh. Le desséche-
ment partiel de ce lac est aussi projeté par les
mèmes procédés que pour le lac Mariouth. La sur-
face à dessécher, étant un peu moins étendue, le
prix des travaux sera un peu moins élevé; on
estime que pour les deux lacs l'opération durera
quatre années.
Quant au lac Menzaleh, le plus grand de tous,
entre la branche de Damiette et le canal de Suez,
on ne songe pas, pour le moment, à le dessécher,
même partiellement. L'opération, du reste, serait
difficile et coûteuse,
Tandis qu’en Egypte des travaux importants ont
été exécutés pour augmenter la quantité d’eau
d'irrigation mise à la disposition des cultivateurs,
au Soudan il n’a encore été rien tenté. ll a été
démontré cependant que, dans la plaine de Gezira,
près de 60 000 hectares de terrain pourraient être
COSMOS
265
livrés à la culture. Un emplacement pour une digue
a été déterminé près de Senâr; la construction de
cette digue avec les canaux d'irrigation nécessaires
coûterait trois millions de livres sterling et durerait
dix à quinze ans. :
Un autre projet, quicoüteraitenviron 750000 livres
sterling, comprend un barrage entre Kartoum et
Ondurmaon, près du confluent du Nil Blanc et du
Nil Bleu. On restituerait ainsi à la basse Egypte
l'eau que lui ferait perdre l'irrigation de la plaine
de Gezira ; en outre, des portions de terrain dans
le Kordofan pourraient être irriguées.
Des travaux analogues sont encore envisagés sur
d’autres points du Soudan, par exemple entre le
Dinder et le Rahad, sur le Khor Banaka, sur ła
rivière Gash, et enfin dans le Dongola, mais il ne
faut pas oublier que pour le moment la première
question dont il faut se préoccuper pour le Soudan,
c'est le peuplement. Avant de songer sérieusement
à mettre le pays en culture, il faut y amener des
habitants. Or, la population est encore très clair-
semée dans toute cette région; elle augmente tou-
tefois d’une manière sensible. La tranquillité qui
y est assurée maintenant attire un courant con-
stant d'émigrants. Lt col. JEANNEL.
Le laboratoire d’essais des substances radio-actives
A GIF (SEINE-ET-OISE)
: Ily a seize ans, Henri Becquerel découvrait dans
les sels d'uranium des propriétés insoupçonnées,
extraordinaires : ils émettaient des rayons invi-
sibles capables de traverser des épaisseurs va-
riables de matière, d'impressionner dans l'obscu-
rité la plaque photographique et de décharger les
corps électrisés. C'était un monde nouveau, le
monde des corps radio-actifs, désormais ouvert aux
recherches des savants. M. P. Curie et Mw° Curie,
deux ans plus tard, commençaient à explorer, avec
le succès que l’on sait, une des provinces de la
radio-activité les plus fertiles en surprises. Depuis
lors, la radio-activité est passée à l'état de science
expérimentale, et elle jette des clartés nouvellessur
les autres branches de la science. Avec son aide,
la physique a pénétré plus profondément dans les
mystères de la constitution de la matière; la chimie
a augmenté la sûreté de ses moyens de contròle;
ja géologie à élargi ses méthodes d'investigation
dans le lointain passé, la médecine utilise de nou-
veaux moyens de guérir.
On s’est aperçu que les corps radio-actifs sont de
tous côtés répandus dans la nature; on les retrouve
dans les matières minérales, dans les roches, dans
les eaux, dans l’atmosphère même. A l'heure
actuelle, on a déjà dressé une liste renfermant plus
de trente substances radio-actives, que l’on peut dis-
tribueren cinq groupes : uranium, thorium, radium,
actinium, et matières peu actives, telles que le potas-
sium et le rubidium. Parmi ces substances, l’ura-
nium, le thorium, le mesothorium, le radium, l’ac-
tinium, l'ionium, le radium D et le polonium
peuvent être extraits de certains minéraux. Les
quatre premiers sont même devenus l'objet de
traitements industriels dans des usines installées
en différents pays, qui suffisent à peine à répondre
aux demandes occasionnées par des applications
importantes.
Les minéraux peuvent être partagés en trois
classes: 1° minéraux uranifères, 2 thorifères,
3° doués d’une radio-activité accidentelle et ne con-
tenant ni uranium, ni thorium. Bon nombre de
minéraux contiennent en mème temps de l'uranium
et du thorium. Ainsi la thorianite de Ceylan ren-
ferme 65 pour 100 de thorium, pour 45 pour 100 d'ura-
nium. La pechblende, minerai d'uranium, contient
souvent du thorium. Sur plus de 150 minéraux
contenant de l'uranium et du thorium, une dizaine
seulement se prètent à un traitement rémunérateur.
Dans les minéraux où l’on trouve l’uranium, on
trouve aussi le rhdium. Les minerais les plus riches
sont la thorianite de Ceylan, puis la pechblende de
266 COSMOS
Joachimsthal (Autriche), puis la carnotite (Colorado),
l’autunite (Tonkin), chalcotite (Saxe). Les produits
qui proviennent du thorium (mesothorium et radio-
thorium) sont extraits de minéraux thorifères tels
que les sables monazités.
La recherche des gisements uranifères est aujour-
d'hui de la plus grande importance, car, sans la
découverte de nouveaux gisements, les applications
de la radio-activité resteront nécessairement très
limitées. Mais pour découvrir les minerais dont
l'exploitation est intéressante, il faut pouvoir les
distinguer. La plupart d’entre eux, il est vrai,
s A TA CSC CLS
r A
21
+ ai
T 744 FR D.
ml Fa E
HT
ARTS
5 SEPTEMBRE 4919
peuvent ètre reconnus par leurs propriétés exté-
rieures de couleur, de densité. L’autunite, par
exemple, est jaune d’or; la chalcotite est verte; la
pechblende et la thorianite sont noires et ont une
forte densité.
Mais ce n’est pas assez. Un examen spécial est
indispensable. On y procède avec la plaque photo-
graphique et généralement avec l’électroscope. Rien
de plus curieux que la méthode appliquée. La ma-
tière pulvérisée est étendue sur le “plateau d’un
électroscope. On charge d'électricité la feuille d’or,
au moyen d'un morceau d'ambre frotté; puis on
pa
PNT TA 17]
= ne mm +
LEE LE
LE LABORATOIRE D'’ESSAIS DES APPAREILS ET DES PRODUITS FAIBLEMENT ACTIFS.
AU-DESSUS, SALLE DE MESURE ET TERRASSE POUR OBSERVATIONS ATMOSPHÉRIQUES.
observe le temps de la décharge de la feuille d'or.
L'électroscope est l'appareil d'usage courant pour
le prospecteur de minerais radio-actifs. Reste à
déterminer la valeur industrielle de ce minerai, la
teneur en thorium, en uranium, en radium et
autres produits radio-actifs. L'analyse chimique est
alors nécessaire. [Il faut enfin se livrer à une série
d'essais qualitatifs et quantitatifs sur la matière
radio-active : étude de la nature du rayonnement;
recherche des émanations plus ou moins décrois-
sanies, dans des espaces de temps des plus variables.
On constale aussi des émanations gazeuses de
certains corps radio-actifs. On en mesure la valeur
avec un appareil spécial, un condensateur à éma-
nation, qui estune sorte d’électroscope spécialement
disposé pour être influencé par les gaz radio-actifs.
Les périodes durant lesquelles le pouvoir radio-actif
disparaît sont plus ou moins longues. On donne le
chiffre de 2 000 ans pour le radium.
Les sels de radium et de mesothorium sont pré-
parés par l'industrie pour les applications médicales.
On les enferme dans des tubes de verre, de quartz
ou de métal. Il est alors intéressant de savoir quelle
est la valeur du rayonnement utilisable qui tra-
verse lampoule. On procède ensuite par compa-
raison avec des échantillons d’un pouvoir d'ionisa-
=».
N° 1441
tion connu. Le degré de pénétration du rayonne-
ment se constate en interposant des feuilles d’alu-
minium, puis des feuilles de plomb d'épaisseur
croissante.
Depuis quelque temps, dit M. Jacques Danne (1),
on met à profit en médecine l'énergie considérable
transportée par les émanations de radium et de
thorium. Un courant d'air, après avoir passé sur
un sel ou une substance radio-active, est employé
sous forme d'inhalation directe et individuelle ou
envoyé dans des salles spécialement disposées et
où séjournent les malades.
Les- résultats sont des plus encourageants.
COSMOS 267
La radio-activité parait jouer un rôle important
dans l’action exercée par les eaux minérales.
P. Curie et A. Laborde ont signalé les émanations
provenant des eaux minérales et des gaz recueillis
aux griffons des sources thermales. On s'explique
ainsi que cerlainés eaux minérales dont la miné-
ralisation est faible ont cependant une efficacité
remarquable. Les propriétés physiologiques des
corps radio-actifs sont assez marquées pour que de
petites doses d'eaux minérales puissent provoquer
dansl’organisme humain des réactions importantes.
Dans les stations thermales, la radio-activité produit
son effet par les boissons, par les bains, par Pair
LABORATOIRE DE CHIMIE AVEC TERRASSE.
mème de la station. Les quantités d’émanations
qui sont produites spontanément par l’eau et les
gaz qui s’en dégagent ont été déterminées pour
un certain nombre de sources. Ax, Bains-les-Bains,
Bourbon-Lancy,Eaux-Bonnes. La Chaldette, Luxeuil,
Maiïizières, Plombières, Colombières fournissent des
résultats tout à fait différents. Colombières donne
un chiffre particulièrement élevé pour la quantité
(1) M. Jacques Danne est directeur du laboratoire
d'essais des substances radio-actives à Gif. Nous lui
sommes redevable des élémentsdecetarticle, empruntés
à plusieurs de ses études sur la radio-activité et à la
notice illustrée sur le laboratoire d'essais de Gif.
d’'émanations en vingt-quatre heures. M. Jacques
Danne a pu concentrer à un très haut degré les
émanations auxquelles sont soumis les malades,
dans les chambres d’inhalation,
La radiumthérapie est une des branches dont on
désire d'autant mieux le succès, qu'il n’est personne
qui puisse se désintéresser d’un progrès dans l’art
de guérir, dont peut-être il retirera quelque jour les
bienfaits. Mais, comme on l’a vu, toutes les études
de radio-activité supposent des mesurestrès précises
et des appareils spéciaux.
En France et à l'étranger existent assurément
des laboratoires bien outillés pour ce genre de
268 COSMOS
recherches, mais seulement à l'usage des spécia-
listes, qui ne sauraient laisser ouverte la porte de
leur laboratoire sous peine d’être absolument trou-
blés dans leurs travaux. Le prospecteur, l'industriel,
le médecin, le géologue qui désire étudierun minerai,
un produit quelconque, ne sait où s'adresser pour
obtenir les renseignements qui lui sont nécessaires.
La création d’un laboratoire d'essais des substances
radio-aclives, qui sera un centre d'études tech-
niques, est donc une très heureuse idée. Le pro-
gramme qui a servi de base à cette organisation
est le suivant :
1° Offrir aux savants et aux industriels des
5 SEPTEMBRE 1912
moyens de contròle et d'essai des minerais, pro-
duits et appareils concernant la radio-activité pure
et appliquée dans des conditions de haute précision
et de complète impartialité; 2° mettre à la dispo-
sition des intéressés, chimistes, physiciens, biolo-
gistes, géologues, minéralogistes, hydrologues,
médecins, le moyen d'acquérir rapidement par la
pratique la connaissance et l'usage des substances
radio-actives et des instruments de mesure et
d'application ; 3° faciliter d’une facon très large les
recherches théoriques et pratiques tendant à l’aug-
mentation de nos connaissances sur les substances
radio-actives, au perfectionnement des méthodes
C]
SALLE DES MESURES PHYSIQUES ET D'ÉTALONNAGE DES PRODUITS RADIO-ACTIFS.
de mesure et au développement de leurs applica-
tions ; 4° centraliser pour leur étude et leur
diffusion les documents concernant les progrès de
la radio-activité en tant que science pure et
appliquée.
Le laboraloire d'essais des substances radio-
actives est silué à Gif (Seine-et-Oise), à vingt-six
kilomètres de Paris, sur la ligne de Paris à Limours,
dans la paisible vallée de Chevreuse, où il est à
l'abri des perturbations résullant des grandes
agglomérations et qui seraient néfastes pour les
délicates opérations effectuées.
Les divers services du laboratoire sont répartis
entre cinq corps de bâtiments élevés dans un parc:
laboratoires d'essais, de recherches et de travaux
pratiques, comprenant les salles de collections et
un poste avec terrasse de quatre-vingts mètres
carrés pour les observations atmosphériques et les
expériences à l’air libre (électricité et radio-activité
atmosphériques, étude des instruments météoro-
logiques); le laboratoire de produits actifs, distant
du premier de plus de 200 mètres, tandis que toutes
les précautions sont prises pour qu'aucune sub-
stance active ne soit apportée directement ou indi-
rectement au laboratoire d'essais; les ateliers de
mécanique et de menuiserie avec chambre des
—_—_————_—— „r +
N° 1441
machines; la bibliothèque renfermant tout ce qui a
été publié sur la radio-activité. Un groupe élec-
trogène sort à l'éclairage des locaux, à la charge
des accumulateurs qui débitent des courants à des
tensions variées; il fournit aussi la force motrice
nécessaire aux ateliers.
Le matériel du laboratoire permet d'effectuer les
recherches et les mesures désirables, avec les
appareils spéciaux et étalons indispensables.
Lorsque les essais sont terminés, un procès-verbal
relatant les conditions de l'essai, la méthode suivie
et les résultats obtenus, est remis à l'intéressé.
Les laboratoires sont ouverts à tous ceux qui
désirent poursuivre des recherches ou se mettre
rapidement au courant de la technique de la radio-
COSMOS
269
activité. Ils comprennent trois groupements : 4° le
groupe minéralogique (prospecteurs, géologues,
minéralogistes, hydrologues) ; 2 le groupe physique
et chimique (physiciens et chimistes de laboratoires
de recherches et de laboratoires industriels); 3° le
groupe médical (biologistes, médecins, radiologistes,
médecins de stations thermales).
Le laboratoire de Gif, sous la direction de
M. Jacques Danne, est destiné à rendre les plus
grands services; il développera les initiatives privées
et contribuera assurément au progrès de cette
science encore bien mystérieuse de la radio-activité,
qui, née d'hier, fait de si belles promesses d'avenir
et est encore TRE jeune pour avoir donné tous ses
fruits. NonsenT LALLIÉ.
amarena aeae
LES NOUVELLES THÉORIES DE LA MATIÈRE (1)
L’éther. — L'électricite.
111. Le magnétisme.
A mesure que s'élargit Phorizon de nos connais-
sances par la découverte progressive de nouveaux
faits et de nouvelles lois, les anciennes théories
deviennent souvent insuffisantes. Pour leur per-
mettre d'embrasser la totalité des phénomènes,
le physicien est obligé de les modifier, de les trans-
former et de les compléter. Nous avons vu que,
parfois, dans cette évolution de doctrines, on con-
statait des retours inattendus aux anciennes hypo-
thèses. Les tentatives faites en vue d'expliquer la
lumière, par exemple, ont présenté successivement
des phases alternées.
Pour Képler, la lumière était une émission à
grande vitesse de particules innombrables par le
corps lumineux; puis Fresnel admit l'existence
d'un milieu continu, l’éther, dans lequel se pro-
pagent les ondes, qui ne sont que des vibrations de
ce milieu; et Hertz admettait que « tous les phy-
siciens sont d’accord que la physique a pour tâche
de ramener les phénomènes naturels aux simples
lois de la mécanique ». Aujourd’hui, les lois de
l’électro-dynamique sont considérées comme fonda-
mentales et plus générales : les lois de la méca-
nique n’en constitueraient plutôt qu'un cas parti-
culier.
Les difficultés rencontrées dans l'interprétation
mécanique des phénomènes électro-magnétiques par
l'hypothèse de l’éther ont conduit de nouveau, ainsi
que nous l'avons dit, à revenir aux idées atomis-
tiques. La théorie des électrons, en prenant comme
point de départ l’idée de la structure discontinue
de la matière et de l'électricité, a pu faire une
synthèse théorique satisfaisante d’un grand nombre
(1) Suite, voir p. 240.
Le magnétisme.
de phénomènes. Comme l’a indiqué fort justement
le D' Schidlof dans une conférence à la Société
des arts de Genève, la théorie atomistique a pré-
valu à un tel degré qu’on attribue une structure
discontinue à l'énergie même. D'après les idées
dévelappées par M. Planck et par M. Einstein,
l'énergie est composée d'éléments ou de quanta
qui sant, en quelque sorte, les moléculesde l'énergie.
La structure discontinue des quantités physiques
est la cause de l'importance de plus en plus grande
des théories statistiques. Les mouvements molécu-
laires, électroniques, intraatomiques w'obéissent
qu'aux lois du hasard. Les considérations statis-
tiques s'introduisent ainsi dans tous les chapitres
de la physique, L'hypothèse du désordre élémen-
taire, due à Boltzmann, forme une des bases de la
thermodynamique moderne. Elle a été appliquée
avec grand succès à la théorie du rayonnement.
C'est elle qui, dans les idées actuelles, complète
l'ancienne conception de l'entropie, due à Clausius.
En résumé, la physique moderne est arrivée à
une plus grande netteté et uniformité dans la
représentation des phénomènes naturels, grâce à
son triple point de vue électro-magnétique, atouiis-
tique et statistique. On retrouve ces trois idées
fondamentales dans toute la physique théorique
moderne. Nous allons le voir pour le magnétisme.
Rappelons que le fer n'acquiert le magnétisme
que dans certaines conditions. Une barre de fer
daux ne s'aimante que temporairement, tandis
qu’une barre d'acier conserve lFaimantation. On
peut se rendre compte des propriétés magnétiques
du fer doux au moyen d’un dispositif imaginé par
M. de la Rive et le. professeur G. Guye.
On place sur une planehe horizontale, au centre
du champ de deux cadres de Helmholtz, un grand
270
nombre de petites boussoles dont les aiguilles
oscillent librement autour de leurs axes verticaux.
Ces aiguilles obéissent, d'une part, à leurs actions
magnétiques mutuelles; d'autre part, au champ
magnétique terrestre. On annule l’action du magné-
tisme terrestre au moyen d'un courant circulant
dans les spires des cadres de Helmholtz.
Dès que l’action extérieure est nulle, les aiguilles,
sous l'influence de leurs actions mutuelles, se
groupent irrégulièrement. Il y a un très grand
nombre de configurations d'équilibre intérieur pos-
sibles. Dans toutes ces configurations, l’action ma-
gnétique extérieure du système est nulle.
Un champ extérieur suffisamment intense, par
contre, orienté toutes les aiguilles dans le même
sens, et il est évident que les petits aimants ajoutent
alors leurs propres forces magnétiques à celle du
champ extérieur.
On obtient donc une image très salisfaisante de
la constitution intérieure du fer, en admettant que
la molécule du fer est un « élément magnétique »
pouvant s'orienter librement dans toutes les direc-
tions de l’espace.
On peut considérer l'élément magnétique comme
un petit aimant présentant deux pôles, mais on
peut également se représenter l’élément magnétique
sous forme d'un courant moléculaire.
En effet, l'expérience montre que le champ
magnétique d’un courant est identique au champ
d’un aimant infiniment court présentant la même
section que la spire et deux pôles étendus sur les
deux faces opposées de la spire. Il y a, cependant,
celte différence que le flux de force émis par le
courant se ferme en traversant la surface de la
spire.
Quelle que soit l'interprétation adoptée, à l'inté-
rieur d’un aimant permanent ou temporaire, les
lignes du flux extérieur sont continuées par les
chaines des éléments magnétiques, ou — selon la
théorie ‘d'Ampère — par le flux qui traverse les
circuits moléculaires.
Si toutes les chaines des éléments magnétiques
se ferment sur elles-mêmes, l’action magnétique
extérieure du système est rigoureusement nulle. :
On peut réaliser ce cas en enroulant sur un tore
de fer un fil de cuivre, et en faisant circuler dans
les spires du fil un courant électrique. Le tore
s'aimante alors suivant une direction parallèle à
ses contours circulaires, mais il ne présente pas de
pole ni d'action magnétique sur l'extérieur.
I est cependant possible de mettre le flux en évi-
dence par ses réactions électro-magnétiques très
énergiques, au moment de l'établissement et de la
rupture du courant magnélisant.
Ces réactions constituent les phénomènes de l'in-
duclion. Elles s'expliquent par une espèce d'inertie
du flux magnétique qui — pareil au liquide circu-
lant dans une canalisation — absorbe de l'énergie
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1919
au moment de l'établissement du courant ou la
restitue ensuite lorsqu'on l'arrête.
Si le courant qui circule dans les spires est un
courant alternatif, il y a continuellement absorp-
tion et restitution d'énergie. Il en résulte une
augmentation de la résistance apparente ou, comme
l’on dit, de l’impédance du circuit électrique.
Le noyau magnétique immobilise donc l'énergie
d’un courant variable. Si l’énergie de désaimanta-
tion était rigoureusement égale à celle de l'aiman-
tation, l'énergie moyenne absorbée par le noyau
serait nulle. De fait, la compensation n’est pas
absolue : à tout changement de l'état magnétique
du noyau correspond une petite dépense d'énergie
dissipée dans le noyau sous forme de chaleur. Ce
phénomène est celui de l’hystérésis magnétique.
Il existe un parallélisme frappant entre les pro-
priétés mécaniqueset les propriétés magnétiques des
corps. C'est ainsi que le fer doux, facile à travailler,
s'aimante facilement, tandis que l'acier trempé,
qui résiste à l’effort de la lime, ne s’aimante que
dans un champ magnétique puissant. L'expérience
montre qu'il existe des différences considérables
entre les courbes d’aimantation desdiverses variétés
de fer, fer doux, fonte, acier. Les recherches mé-
tallographiques récentes ont permis d'expliquer ces
divergences.
Un acier doux renfermant 0,004 partie en poids
de carbone, chauffé à 900°, puis refroidi très len-
tement, se compose de grains de fer pur, nommé
fer a ou ferrite, engagés dans un ciment nommé
perlite, qui est constitué par des lamelles entrela-
cées de ferrite et d’un carbure de fer (Fe°C)
qu'on nomme cémentite. La perlite se trouve en
proportion d'autant plus grande que le métal est
plus carburé; elle forme la partie principale dans
un acier renfermant 0,009 de carbone.
La ferrite est le corps le plus magnétique qui
existe; le carbure de fer, par contre, n’est pas
magnélique.
La trempe à 950° des aciers douf donne des
grains de ferrite extrèmement petits.
On peut donc envisager les aciers industriels
comme formés de grains très magnétiques, engagés
dans un ciment qui l’est très peu ou mème pas du
tout.
Quelle que soit, d’ailleurs, la constitution du
corps, tous les éléments magnétiques finissent par
sorienter, dans un champ suffisamment intense,
suivant la direction du champ extérieur. L’aiman-
tation tend vers une valeur limite appelée la satu-
ration. La saturation atteinte, on profite de moins
en moins de la présence du corps magnétique, et,
avec un nombre énorme d'ampère-tours, le flux sera
sensiblement le même que dans un corps non
magnétique.
Faraday a constaté le premier que l’action des
champs magnétiques intenses sur les corps est un
N° 41441
phénomène tout à fait universel. On nomme para-
magnétiques les corps qui se montrent aimantés
dans le sens des lignes de force du champ auquel
ils sont soumis, et diamagnétiques ceux qui
s’aimantent en sens contraire.
Les propriétés paramaganétiques des corps varient
avec la température suivant une loi simple décou-
verte par Wiedemann et Plessner pour les solu-
tions des sels paramagnétiques, et par Pierre Curie
pour l'oxygène.
Leur intensité d’aimantation est inversement
proportionnelle à la température absolue.
Le diamagnétisme, par contre, parait être indé-
pendant de la température.
M. Langevin a imaginé une théorie thermo-
dynamique du paramagnétisme, basée sur des
considérations statistiques : les molécules d’un gaz
paramagnélique sont des éléments magnétiques
indépendants les uns des autres.
Le champ extérieur tend à les orienter; l'agita-
tion thermique, par contre, par le mécanisme des
chocs entre les molécules, tend à détruire l'effet du
champ. Il en résulte un équilibre entre les deux
actions antagonistes, dont l’une rétablit constam-
ment une organisation déterminée, tandis que
l'autre cherche à maintenir le désordre élémentaire.
La loi de cet équilibre résulte de l'application du
calcul des probabilités. On trouve ainsi que l'inten-
sité d’aimantation du gaz ne dépend que du rap-
port entre l’intensité du champ et la température
absolue.
Pour des températures et pour des champs acces-
sibles à l'expérience, l'intensité d'aimantation croit
proportionnellement à ce rapport, conformément
à la loi de Curie, et à l’ensemble des expériences
faites avec les corps paramagnéliques.
Au zéro absolu, le corps serait aimanté à satu-
ration, même dans un champ infiniment faible.
Les considérations de cette théorie cinétique du
paramagnétisme des gaz s'appliquent sans change-
mentauxsolutionsdiluéesdes sels paramagnétiques.
M. Weiss a étendu la théorie aux corps ferro-
magnétiques. Il admet que les lois du hasard doivent
s'appliquer à la structure des corps solides, grâce
au mécanisme de la cristallisation. La théorie de
M. Langevin s'applique donc de mème aux corps
solides, mais elle exige, dans le cas des corps for-
tement magnétiques, une modification analogue à
celle qui permet d'étendre aux liquides les consi-
dérations de la théorie cinétique des gaz. Selon la
théorie de Van der Waals, il existe dans les liquides
et les gaz fortement comprimés une pression inté-
rieure ou force de cohésion, uniforme dans toute
la masse du corps, qui s'ajoute simplement à la pres-
sion extérieure.
D'une façon semblable, M. Weiss suppose que,
dans les corps ferromagnétiques, les actions mu-
tuelles des éléments magnétiques se superposent
COSMOS
271
au champ extérieur. Ces actions mutuelles pro-
duisent un champ intérieur dit champ molécu-
laire, qui — selon M. Weiss — est toujours dirigé
parallèlement à l'intensité d'aimantation du corps
et proportionnel à celte intensité.
Ce bref exposé montre le grand rôle que jouent
les considérations statistiques dans la théorie mo-
derne du paramagnétisme et du ferromagnétisme.
Quant au diamagnétisme, qui se distingue du
paramagnélisme et du ferromagnétisme par l'ab-
sence d'une variation thermique régulière, il doit
être attribué — selon M. Langevin — à une cause
différente. Le diamagnétisme parait être une pro-
priété commune à tous les atomes, quels qu'ils
soient.
Si nous avons, aujourd’hui, quelques idées pré-
cises sur la structure des atomes des corps simples,
nous les devons principalement aux recherches
spectroscopiques. On sait que Zeeman a constaté
en 1896 que les vapeurs qui émettent les spectres
en séries subissent, sous l'influence d'un fort champ
magnétique, une action qui se manifeste par une
décomposition des raies groupées en séries. Chaque
raie simple est dédoublée en un certain nombre de
raies excessivement rapprochées (phénomène de
Zeeman). Les lois de cette décomposition sont
assez compliquées ; elles font supposer que la struc-
ture des atomes présente une grande complexité.
On a admis que les raies de ces spectres sont
produites par les vibrations des électrons. Ce sont
des corpuscules identiques qui vibrent à l’intérieur
des différents atomes et qui produisent les ditfé-
rentes raies spectrales.
Selon M. Langevin ({), le diamagnétisme se rat-
tache au phénomène de Zeeman. Il s'explique par
la variation de la vitesse aréolaire des électrons
qui parcourent des orbites fermées. Sous l'influence
du champ magnétique, la durée de révolution se
trouve modifiée de la manière qui correspond au
phénomène de Zeeman et en mème temps au sens
de l’aimantation diamagnétique. Cet effet, accom-
pagné de changements de la période des vibra-
tions, se manifeste par la décomposition de raies
spectrales.
Une loi générale représentant la répartition des
séries spectrales a été découverte par Walther Ritz
en 4907 (2). Ce jeune physicien suisse avait admis
que les atomes de fous les corps renferment des
aimants de differentes longueurs dont les pòles
ont, dans tous les cas, la méme intensité. Rilz
pensait que les champs atomiques devaient ètre
encore beaucoup plus intenses que les champs mo-
(1) P. Laxsevis. Sur la théorie du magnétisine.
Journal de Physique, 1905, €. IV, p. 678. — Mugnetisme
et théorie des électrons. Annales de Chim, et de PRYS.
49005, € V, p. 70.
(2) W. Ritz. OEuvres publiées par la Soc. suisse de
physique. Paris, 1911.
272
léculaires dont ils sont la cause. Comme le fait
remarquer le D° Schidlof, certains faits peuvent
être cités en faveur de l'hypothèse de Ritz. Ainsi,
par exemple, le fer « se transforme entre 756° et
820° en une modification moins magnétique,
nommée fer 8, et à 9200 en une modification para-
magnétique, le fer +, que l’on rencontre dans
la composition de la martensite. Or, comment
expliquer cette transformation d’un atome magné-
tique en un atome non magnétique? Il faut évi-
demment supposer que l'atome très fortement
magnétique par lui-même peut perdre sa liberté
de rotation, se trouvant engagé dans des liaisons
rigides.
L'inverse a lieu pour les atomes de manganèse,
dans certains alliages magnétiques de ce corps. Le
manganèse pur est un métal faiblement parama-
gnétique, qui, avec d’autres métaux paramagné-
tiques ou diamagnétiques, et spécialement avec le
cuivre ou l'aluminium, donne des alliages ferro-
magnétiques. Le magnétisme de ces alliages, décou-
vert par Heusler, est tout à fait comparable à celui
du fer et plus intense que le magnétisme du nickel
et du cobalt.
On peut donc supposer, avec Ritz, que les élé-
ments magnétiques rentrent dans la constitution
de tous les atomes, même des atomes diamagné-
tiques.
En ce qui concerne Îles corps paramagnétiques,
l'hypothèse de Ritz a reçu une confirmation
inattendue par une découverte surprenante de
M. Weiss (1).
En discutant les résultats d’un très grand nombre
d’expériences faites par différents observateurs avec
des corps ferromagnétiques ou paramagnétiques,
M. Weiss trouva que les éléments magnétiques des
corps présentent des grandeurs très variables. Mais
ils sont, dans tous les cas, des multiples entiers
d'un élément magnétique unique.
Il faut considérer cet élément unique, qui est la
valeur aliquote commune à tous les éléments ma-
gnéliques possibles, comme atome du magnétisme.
M. Weiss l'a nommé le magnéton.
Cette découverte a certainement une importance
capitale, et elle donne un grand appui aux idées
COSMOS
D SEPTEMBRE 194%
de Ritz sur la constitution des atomes matériels.
Toutefois, il subsiste une difficulté.
Le magnéton est un élément magnétique uni-
versel — ou, selon l’expression consacrée, un 0-
ment magnétique universel. D’après Ritz, c’est
l'intensité du pôle qui est universelle, et il faut
attribuer aux bâtonnets magnétiques de Ritz toutes
les longueurs possibles pour déduire de sa théorie
Ja loi générale des spectres en série.
Il faudrait donc conclure que les magnétons ne
sont pas identiques aux aimants atomiques de
Ritz, si sa formule spectrale était vraie dans toute
sa généralité.
Dans un autre ordre d'idées, nous constatons
que la théorie électro-magnétique se trouve enrichie
el, en même temps, compliquée par la nouvelle
conception atomique. A la notion de l’électron, de
l'atome de l'électricité, s'ajoute celle de l’atome du
magnétisme. Or, quel est le rôle qu'il faut attri-
buer à ces deux atomes?
Les relations entre l'électricité et le magnétisme
sont des relations de cause à effet. Lequel des deux
est la cause et lequel l'effet?
De tout temps, les physiciens ont ineliné à voir
l'origine du magnétisme dans la rotation des charges
électriques... l'électron entrerait donc dans la
constilution du magnéton. Le magnéton serait
donc peut-être le bâtonnet magnétique de Ritz, ce
serait un élément constitutif de tous les atomes,
même des atomes diamagnétiques.
Quelle est la valeur de cette hypothèse? Il est
malaisé de répondre.
L’électron, tel qu'il est défini actuellement, est
absolument insuffisant pour expliquer les phéno-
mènes vibratoires accompagnés d’un rayonnement
d'énergie; il ne suffit pas non plus à expliquer les
séries spectrales ni le phénomène de Zeeman. La
théorie des électrons ne donne également aucune
réponse à la question de l'origine des bandes ni à
celle des quanta de l'énergie. L'intervention du
magnéton permettra-t-elle de résoudre tous ces
problèmes? On en vient presque à regretter l'admi-
rable simplicité de la théorie des oscillations de
l'éther.
A. BERTHIER.
Pyromètre stellaire.
M. Charles Féry, dont nous avons signalé dans
le Cosmos intéressant spectrographe, s'occupe
aussi depuis longtemps de pyrométrie.
(1) P. Weiss. L'hypothèse du champ moléculaire et
la propriété ferromagnétique. Journal de Phys., 4907,
t. VI, p. 661. — Sur la rationalité des rapports des
moments magnétiques moléculaires et le magnéton.
Arch. des sciences phys. et nat., mai 1911.
La Compagnie pour la fabrication des compteurs
construit plusieurs appareils industriels établis
d’après ses principes et susceptibles de déterminer
les températures entre 400° et 3500°. Ces appa-
reils sont de deux types : à thermocouple avec
télescope ou lunette, et à spiral.
Le pyromètre à télescope se compose essentiel-
tement d'un télescope et d’un galvanomètre. Sur
RE
N° 1431
l'axe optique du miroir M et fixées à deux lames de
laiton R et D reliées aux bornes b et b', sont dispo-
sées les soudures de deux fils fer-constantan for-
mant couple thermo-électrique. Les bornes & et %'
servent d'attache à deux fils en communication
avec le galvanomètre (fig. 4 et 2).
Par l’oculaire O, on vise le corps dont on veut
F1G. 1. — SCHÉMA DU PYROMÈTRE A TÉLESCOPE.
déterminer la température. La soudure apparait
comme une tache noire au milieu de l'image bril-
lante du corps qui doit la déborder légèrement.
La réflexion de l’image de l’oculaire O est obtenue
par un système de deux miroirs disposés près du
couple et réalisant une mise au point automatique.
Ces miroirs décomposent l'image du corps en deux
parties, comme l'indique la figure 3. Lorsque le
F1G. 2. — GALVYANOMÈTRE.
réglage et la mise au point sont parfaits, les deux
parties coincident exactement. H suffit, pour obtenir
cette coïncidence, de tourner la molette P qui
approche ou éloigne le miroir M.
Lorsque la mise au point est obtenue, les me-
sures sont indépendantes de la distance du téle-
scope au corps. La soudure s’échauffe sans s’altérer,
COSMOS | 273
et le courant qu'elle développe actionne l'aiguille
du galvanomètre, dont la graduation est établie
d'après la loi de Stefan : la quantité de chaleur
rayonnée est proportionnelle à la quatrième puis-
sance de la température absolue (14) du corps
rayonnant.
Dans les établissements où il y a beaucoup de
fumée et de poussière, pour éviter la détériora-
tion des pyromètres, M. Féry a remplacé le
télescope par une lunetté complètement fermée.
La mise au point s'opère comme dans une
lunette astronomique ordinaire. L'inconvénient
de cet appareil est d’être un peu moins sensible
que le précédent. Il ne donne d'indications qu’à
partir de 800°, alors que le pyromètre à téle-
scope en donne à partir de 400°.
Dans le pyromètre télescopique à spiral, le
couple thermo-électrique est remplacé par une
lame bimétallique extrêmement mince roulée
en spirale et portant une aiguille fort légère
qui se déplace sur un cadran disposé sur
l’appareil même.
Ces divers instruments ne comportent qu’une
seule graduation. La Compagnie des compteurs
peut en établir à plusieurs graduations embrassant
MAL RÈGLA BIEN RÊCLÉ
F1G. 3.
une échelle de températures bien plus étendue, en
disposant sur l'ouverture du télescope un dia-
phragme, comme celui de la figure 4. Les diverses
graduations correspondent à divers degrés d'ouver-
ture du diaphragme.
M. Féry a également réalisé d'autres appareils
basés sur la loi du rayonnement monochromatique
et qui permettent aussi de déterminer les tempé-
ratures des corps incandescents avec précision.
On conçoit qu'il doit ètre beaucoup plus difficile
d'appliquer la pyrométrie aux étoiles. Ces corps
nous envoient, en effet, une si faible quantité
d'énergie qu'il est à peu près impossible de leur
appliquer les principes des divers appareils dont il
vient d’être parlé. C'est ce qui a conduit M. Féry
à utiliser, pour la détermination de la température
des corps célestes, la troisième loi du rayonne-
ment, celle de Wien, connue aussi sous le nom de
loi de déplacement, et qui permel d'opérer sur
l'énergie lumineuse totale reçue de l'étoile.
C'est d’ailleurs cette loi qui a probablement été
(1) L'échelle des températures absolues débute à
— 273C, qui est le zéro thermique. Si la température
d'un corps est évaluée en degrés centigrades, il suffit
d'y ajouter le nombre constant 273 pour convertir
cette température en degrés absolus ou degrés Kelvin,
27%
utilisée la première pour la détermination de la
température des corps chauds et qui a donné nais-
sance à l'échelle de Pouillet, mesurant cette tem-
pérature par l'appréciation des couleurs de ces
corps : rouge sombre, cerise, rouge clair, orangé,
La teinte du corps
blanc, blanc éblouissant.....
FIG. 4. — PYRỌMÈTRE MUNI D'UN DIAPHRAGME.
dépend, en effet, de la position du maximum de
l'énergie lumineuse dans le spectre qu'il produit.
Le principe de la méthode Féry est celui-ci :
une étoile, observée dans une lunette ordinaire,
donne une image dont la couleur dépend de sa
température. Si l'on compare la teinte de cette
image avec celle d’une lampe étalon à teinte
variable, on pourra amener cette teinte à être la
même que celle de l'étoile. La mesure de légalité
de teinte donnera la température.
La coupe de l'appareil est donnée par la figure ï.
L' est la lampe étalon, F la fente d'un spectro-
scope, L la lentille du collimateur, P le prisme à
vision directe du spectroscope, L, la lentille de la
lunette. Le spectre, après avoir traversé le dia-
F1G. 5, — COUPE DU PYROMÈTRE STELLAIRE FÉRY.
phragme D, se recompose dans la lentille L, et
vient former sur la glace G une image blanche.
Cette image se réfléchit sur l’oculaire O de la
lunette T, qui permet la vision directe de l'étoile.
La glace G est parsemée de petites parcelles d'ar-
genture métallique qui en font une sorte de ciel
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1912
artificiel étoilé, dont toutes les étoiles ont la mème
teinte, ce qui facilite les comparaisons.
Pour amener les étoiles artificielles à posséder
la même teinte que l'étoile dont on cherche à
déterminer la température, on se sert du dia-
phragme D, dont le détail est donné par la figure 6.
Il se compose d’un volet fixe V et d’un
volet mobile V' demi-circulaire mobile autour
du port A. Le spectre de la lampe s'étale par
l’entre-bâillement des deux volets.
Si les deux bords de ces volets sont paral-
lèles, les rapports des intensités des radia-
lions élémentaires sont les mêmes que dans
la lumière de la lampe avant son passage
dans le prisme P, et la teinte des étoiles ar-
lificielles est la même que celle de la lampe.
Mais qu'on fasse tourner le volet mobile
à droite ou à gauche, on change à volonté
la proportion des radiations élémentaires.
D'un côté, on augmente le rouge en dimi-
nuant le bleu, ce qui donne la teinte d'un
corps moins chaud. De l’autre, on augmente,
au contraire, le bleu et on diminue le rouge,
ce qui donne la teinte d’un corps plus chaud.
L'élalonnage du pyromètre stellaire se
fait en pointant d'abord un four électrique, puis
l'arc électrique (3 500°), et enfin le Soleil, étoile de
[F1G. 6. — DIAPHRAGME DU PYROMÈTRE STELLA IRE.
deuxième grandeur (6500°). On extrapole ensuite
la courbe obtenue par ces trois points.
Grâce à l’ingénieuse disposition
de M. Charles Féry, exécutée par
le constructeur Beaudouin, c'est
un nouveau secret que la science
moderne arrache à ces globes de
feu quis’en vont vertigineusement
dans l’espace sans fin, tout en
paraissant immobiles à nos yeux,
et dont certains sont tellement
éloignés que 25000 ans ne suf-
fisent pas à nous apporter un de
leurs rayons.
Et chacun de ces secrets dévoilés à l'intelligence
humaine recule les limites de l'univers, nous
découvre de nouveaux abimes, augmente notre
soif de connaitre et nous rapproche de l'infini en
ajoutant un nouveau verset au Cæli enarrant
gloriam Dei. LÉoPoLD REVERCHON.
N° 1:11
La Terre
COSMOS
toO
SI
Qt
sa forme et ses dimensions.
Ses accidents superficiels et son relief.
Il. — Les accidents de la surface terrestre et
ses divisions territoriales. — Cadastres et
cartes topographiques.
A. — Cadastre.
La forme générale du globe étant connue avec
une suffisante approximation, il a fallu, dans tous
les pays et pour les besoins de la civilisation, se
préoccuper d’y situer à leur juste place les acci-
dents qui émaillent la surface terrestre : fleuves,
montagnes et cités, voies de communication, divi-
sions administratives et limites de propriétés.
En vue, notamment, d'une plus équitable répar-
tition de l'impôt foncier, comme aussi pour mieux
fixer les limites des héritages, tous les peuples cul-
tivés, à commencer par les anciens Égyptiens, se
sont efforcés de créer, sous la forme de plans
cadastraux, une sorte d'état civil de la propriété
foncière.
Pour atteindre ce but, le procédé le plus sůr et
le plus simple à la fois consiste à couvrir le terri-
toire d'un réseau de triangles, aux sommets des-
quels on rattache ensuite tous les points intéres-
sants du sol et jusqu'aux bornes des parcelles de
champs.
Pour que les plans parcellaires de communes
limitrophes puissent se raccorder entre eux, sans
lacunes ni duplicalures, il faut qu'ils aient été
ainsi rattachés à une triangulation générale préa-
lable du territoire. C'est là une nécessité primor-
diale universellement reconnue, une règle partout
observée, sauf, hélas! en France, où, dès 418417, une
Commission officielle, comptant parmi ses membres
les académiciens et les astronomes Laplace, Puis-
sant, Delambre, Poisson et Mathieu, signalait, chez
les agents du cadastre chargés de la triangulation,
une complète inaptitude à exécuter les plus
simples des opérations à eux confiées... et ligno-
rance absolue de toutes notions techniques ou
mathématiques (2).
Malgré les objurgations réitérées de toutes les
autorités en la matière et de tous les corps savants,
notre ancien cadastre, commencé en 1790 et non
encore achevé, n'a jamais été rattaché à la grande
triangulation de l'état-major.
A raison de cette lacune initiale, jointe à l'ab-
sence de tenue à jour des plans, cette œuvre
gigantesque, qut a coûté des centaines de millions,
doit être aujourd'hui complètement refaite.
(1) Suite, voir p. 247.
(2) La carte de France, par le général BERTHAUT
t. I", ch. HI.
Telle est la fâcheuse conclusion d'une enquite
à cet égard faite, il y a vingt ans, par la Commis-
sion extraparlementaire du cadastre, instituée à la
suite de vœux pressants des communes et des Con-
seils généraux.
Après des éludes et des essais Son rek un
programme de réfection avait élé dressé par celte
Commission.
Outre l'achèvement de la triangulation générale
par le service géographique de l’armée et le ratta-
chement des nouvelles opérations cadastrales à
cette triangulalion, l’on prévoyait dans ce projet,
avec un large emploi de machines pour les calculs,
l'intensive application du principe industriel de la
division du travail. Pour le rapport des plans, on
renonçait au papier, substance déformable et fra-
gile, se prétant mal aux opérations permanentes
de mise à jour et ne permettant les reproductions
que sous la forme infidèle et coûteuse de photogra-
phies ou de copies à la main. À ce système suranné,
l'on substituait la gravure sur zinc, directement
exécutée à l'envers, ainsi que les écritures, par des
spécialistes; au moyen d'un simple passage à la
presse, les planches ainsi obtenues et d’ailleurs
faciles à tenir constamment à jour devaient ensuite
fournir à peu de frais, pour le public et les admi-
nistrations intéressées, un nombre illimité d’exactes
reproductions des plans minutes.
A raison de 10 francs en moyenne par hectare,
soit 7 pour 1000 de la valeur vénale moyenne du
sol, 4 500 francs par hectare, l'exécution de ce pro-
gramme, pour la France entière, devait coûter un
demi-milliard environ.
En 1898, une loi provisoire avait été votée, per-
mettant aux communes d’obtenir, avec le concours
financier de l'État et des départements, la réfection
de leur cadastre d'après ces principes nouveaux;
plusieurs centaines d’entreellesavaient déjà réclamé
le bénéfice de cette loi; sur le dixième du terri-
toire, ła triangulation générale avait été revisée el
complétée par le service géographique de l’armée;
des méthodes et des instruments perfeclionnés
avaient été créés, et une centaine d'élèves formés
à leur emploi; de divers pays étrangers, des mis-
sions d'ingénieurs et d'officiers venaient successi-
vement s'initier à la pratique de ces nouveaux pro-
cédés, partout cités comme des modèles. Bref,
l’œuvre entrait dans l'ère de plein fonctionnement,
lorsque brusquement, en 1907, sous prétexte d'éco-
nomies, sans avoir consulté aucun des hommes
des Comités ou des services compélents, on arre-
tait la revision de la triangulation générale; puis,
devant la soi-disant indifférence du public à l'achat
276
des plans, on supprimait à son tour la gravure sur
zinc et l’on décapitait le service en nommant per-
cepteurs les plus habiles de ses agents, géomètres
ou graveurs, recrutés avec tant de peine et formés
à si grands frais; enfin l'on mettait à l'encan les
travaux désormais dépouillés des éléments qui en
doublaient la valeur.
L'une après l'autre, soucieuses du bon renom
scientifique de notre pays, comme aussi de la
marche logique et de l’économie des opérations, la
Commission centrale des travaux géographiques,
le Bureau des longitudes, la Commission géodé-
sique française et l’Académie des sciences elle-
même protestaient conire ces mutilations, qu'à la
tribune du Sénat M. Boudenoot, auteur de la loi
de 1898, dénonçait à son tour comme un véritable
« sabotage administratif ».
Mais ce fut en vain.
Malgré les prétendues « simplifications » appor-
tées au programme, un premier essai d'adjudica-
tion, en juillet 1911, échouait lamentablement.
Pour un tiers seulement des communes en cause,
les travaux offerts trouvaient preneurs.
Une année après, malgré une majoration de
40 pour 400 des tarifs — ce qui porterait à 700 mil-
lions le devis total, — une seconde tentative
n'avait guère plus de succès,
Si ces mesures néfastes ne sont pas rapportées,
peut-être, finalement, au lieu des 500 millions
qu'’eussent coûtés des plans finement gravés, faciles
à reproduire exactement et à conserver, nous
faudra-t-il payer le double pour de simples minutes
sur papier, pratiquement impossibles à tenir à
jour, et pour de mauvaises copies lithographiques
non cotées, n'offrant aucune garantie certaine de
conformité avec l'original.
B. — Cartes topographiques.
En assemblant leurs plans cadastraux sur un
canevas déduit d’une triangulation générale et en
prenant du tout une image réduite, la plupart des
États civilisés ont dressé une carte générale de
leur territoire.
C'est ainsi, par exemple, qu'a été obtenue chez
nous la belle carte d'état-major au 80 000°, gravée
de 1818 à 1882 et dont dérivent toutes nos autres
cartes nationales.
De même, l’établissement d’une nouvelle carte
plus détaillée, à l'échelle du 50 000e, était prévu
comme corollaire de la réfection de notre cadastre.
En assemblant de façon analogue et réduisant à
plus petite échelle les cartes nationales, on obtient
des cartes internationales ou mondiales.
La plus réceute est la carte du monde au mil-
lionième dont, en 1909, les principaux Etats civi-
lisés ont, d'un commun accord, arrêté les cadres
et ie type. L'exécution en est déjà commencée.
Une wuvre analogue est la carte internationale
COSMOS
5 SEPTEMBRE 1942
aéronautique à l'échelle du 200000°, dont les
principes directeurs, calqués sur ceux de la carte
au millionième, ont recueilli, en novembre 1914, à
Turin, l'approbation unanime du V° Congrès inter-
national d'aviation et, au mois de juin dernier, à
Vienne (Autriche), celle de la Fédération aéronau-
tique internationale.
Sur l'initiative du gouvernement français, une
Conférence officielle de délégués compétents des
divers pays se réunira prochainement, à Paris,
pour sanclionner ce projet.
lit. — Le relief de la surface terrestre.
L’écorce terrestre se trouve en partie recouverte
par l’eau des océans.
Lorsque, jetant les yeux sur une mappemonde,
on examine la distribution des terres, on est tout
d'abord frappé de la répartition de celles-ci en
trois grandes masses, effilées en pointes vers le
Sud, savoir : le groupe des deux Amériques, le con-
tinent européo-africain et le massif australo-asia-
tique, auxquels s'opposent respectivement l'océan
Indien, le Pacifique et l'Atlantique. Les récentes
expéditions de Shackleton et d’Amundsen au pôle
Sud y ont en outre démontré l'existence d'un
vaste continent, tandis qu'au pòle Nord Nansen a
trouvé une mer libre et profonde.
Pour expliquer ces faits, W. Green, vers 1882,
émit l'idée que le noyau central fluide se refroidis-
sant, par l'effet du rayonnement dans l'espace, et
se contractant plus que l'écorce, celle-ci, d’après
la loi du moindre effort, devait tendre vers une
forme dérivée du fétraèdre, ou pyramide à quatre
faces, qui est le solide régulier embrassant le plus
petit volume sous une surface extérieure donnée.
Dans ce solide, en effet, chaque pointe saillante a
pour antipode une face plane.
Par la différence des vitesses de rotation du
triple renflement boréal, d'une part, et de la pointe
australe de la toupie terrestre d'autre part, Green
a également expliqué la déviation systématique
vers l'Est des trois arêtes dirigées vers cette pointe
et la formation de cette suite de dépressions :
fosse de la Méditerranée, détroit de la Sonde et
mer des Antilles, qui entourent le globe et coupent
en deux parties chacune de ces mèmes arètes.
Mais ce n'est là qu'une très insuffisante définition
du relief terrestre.
Pour la plupart des travaux ayant le sol pour
théâtre, qu'il s'agisse d'établir une voie de com-
munication ou une conduite d'eau, de créer un
canal de drainage ou d'irrigation, d'apprécier le
rendement possible d'une chute d'eau ou de con-
struire un ouvrage de défense militaire, une con-
naissance plus précise et plus détaillée du relief
est indispensable.
Suivant le cas, en effet, il faut reconnaitre le
N° 1411
parcours le plus avantageux au point de vue des
dénivellations à franchir, calculer la profondeur
des tranchées à ouvrir et la hauteur des remblais
à élever, mesurer les pentes et les rampes de la
nouvelle voie, etc. |
Pour ces divers objets, on définit le relief, soit
au moyen d'alfitudes, qui sont respectivement les
hauteurs des points du sol au-dessus de la surface
de la mer, prise comme base de comparaison et
prolongée par la pensée sous les continents, soit au
moyen de courbes cotées, dites courbes de niveau,
qui sont les lignes étagées qu’occuperait succes-
sivement le rivage des mers si, brusquement, leur
niveau montait de 10, 20, 100 ou 1 000 mètres, par
exemple.
Reste à mesurer les altitudes et à fixer le tracé
des courbes de niveau.
_ Pour cela, au moyen d’une suite de visées hori-
zontales, faites sur des échelles ou mires dispo-
sées verticalement de distance en distance, on
constitue, le long d'itinéraires convenables, l'équi-
valent d'une sorte de canal dont on noterait suc-
cessivement, pour les cumuler ensuite depuis l'ori-
gine, les hauteurs des écluses montantes et descen-
dantes.
Vers 1855, un conducteur français des ponts et
chaussées, Bourdaloue, a, le premier, pensé que si
la planimétrie d’un vaste territoire doit avoir pour
base un réseau de grands triangles, sur les som-
mets desquels s'appuie le relevé des points de dé-
tail, de même l'hypsométrie générale d'un grand
pays doit reposer sur un réseau plus ou moins
dense de lignes de nivellement, ou plutòt sur une
série de réseaux à mailles de plus en plus étroites,
dont chacun s’appuie sur le précédent.
C'est ainsi qu'en France, de 1855 à 1863, a été
constitué le premier réseau général de nivellements.
Il avait 45 000 kilomètres de développement.
Cet exemple a été suivi. partout à l'étranger, si
bien qu’à cette heure, si l’on mettait bout à bout
les lignes de nivellement existant dans le monde,
elles feraient plus de huit fois le tour de la Terre.
Devant l'ampleur et la précision croissantes des
résultats obtenus autour de nous, l'administration
des travaux publics, dès 1884, prenait le parti
d'établir un nouveau réseau fondamental sur
lequel se grefferaient successivement plusieurs ré-
seaux secondaires.
Le réseau de base, à mailles de 400 à 600 kilo-
mètres de tour, mesurant au total 12000 kilo-
mètres de développement, était achevé en 1892.
Sa précision est telle qu’en revenant au point de
départ, après avoir parcouru le tour de la France,
soit 3 908 kilomètres, on a pu retrouver, à 6 centi-
mètres près, l'altitude initiale.
COSMOS
277
Le réseau de deuxième ordre, à peu près aussi
étendu que le réseau fondamental, mais à mailles
deux fois plus petites, est aussi terminé depuis
1898.
Le réseau de troisième ordre, dont les mailles
n'ont plus que 60 à 100 kilomètres de tour et dont
la longueur atteindra 47 000 kilomètres, est lui-
même aux neuf dixièmes achevé.
Enfin, près du quart du réseau de quatrième
ordre (mailles de 10 à 20 km) est déjà nivelé.
La longueur totale des nivellements qui sil-
lonnent à cette heure le territoire de la France est
d'environ 400 000 kilomètres.
En outre, depuis quelques années, dans les Alpes
et les Pyrénées, ces travaux sont complétés par le
relevé des profils en long de torrents dont, par
ailleurs, on a mesuré les débits, à l’effet de pou-
.voir ainsi dresser une statistique exacte des grandes
forces hydrauliques disponibles dans ces régions.
Cette rapide esquisse aura suffi, j'espère, à
montrer quelle part prépondérante notre pays, de
tout temps, a prise dans les études concernant la
forme de la Terre, les accidents de sa surface et la
mesure de son relief.
En matière de géodésie, de cadastre ou de nivel-
lement, comme en tant d’autres domaines, la
France a élé l'iniliatrice et l’ouvrière du progrès.
Au début du siècle dernier, la science lui était
redevable de ces mesures d'arcs méridiens d’où, à
proprement parler, la géodésie a pris naissance et
dont est sortie l’œuvre magistrale du système mé-
trique.
Tout récemment encore, à l'Equateur, ai-je dit,
nos officiers répétaient avec une précision jusque-
là inconnue la mesure d’un de ces arcs.
C'est en France qu'est né l’art des nivellements
généraux, et l'étranger, en adoptant nos méthodes
et nos instruments, n’a cessé de rendre hommage à
leur supériorité.
En matière de cadastre aussi, nous avons autre-
fois occupé une place d'élite.
Derrière les aigles victorieuses des armées impé-
riales, dans le Palatinat, les Flandres, la Toscane,
on voyait, il y a plus d’un siècle, les géomètres
français dresser le cadastre des territoires conquis;
les plans levés par eux, longlemps regardés comme
des modèles, sont encore, en maints endroits, les
seuls employés.
Puisse, à cet égard, l'éclipse actuelle n'être que
passagère et la France reprendre bientôt le poste
d'avant-garde qu'elle n'aurait jamais dü quitter.
Cu. LALLEMAND.
278
COSMOS
5 SEPTEMBRE 19192
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 26 août 1912.
PRÉSIDENCE DE M. BASSOT.
Sur la mutation gemmaire culturale du
Solanum tuberosum L. — M. Evovarn HECkEL a
de nouveau cette année, après être parti de tuber-
cules de Solanum Maglia et de S. tuberosum sau-
vages, obtenu des récoltes de pommes de terre de
culture (Solanum tuberosum L.).
Les tubercules sauvages dont il a disposé ont été
recueillis par le professeur Verne, de l’Université de
Grenoble, en Bolivie, aux enviions de Viacha, au-
dessus de La Paz, à 4 000 mètres d'altitude, le 24 juin
1911, dans un terrain sablonneux, nu et au voisinage
d'une mare d’eau, ainsi qu’au Pérou, en deux loca-
lités : 1° à Amancaës, et 2° aux environs de Chorillos,
au mont Morro-Solar, à 400 mètres d'altitude, le
7 juillet, dans des creux couverts d’'éboulis grani-
tiques.
La culture fut faite à partir du 29 septembre 14911,
d'après une technique qui se résume en une superfu-
mure avec mélange des fumiers de ferme et de pou-
lailler exclusivement, et donna, dès le mois de
juin, des plantes à fleurs bleues et des fruits ovoïdes
ct non sphériques, et au mois d’aoùt des tubercules
comestibles. Cependant, seuls les tubercules recueillis
à Viacha ont présenté une mutation complète.
Sur immunisation active de Phomme contre
la fièvre typhoïde. — M. H. VinxcexT emploie des
cultures tyÿphiques polyvalentes stérilisées par l’éther.
Il indique que cinq personnes vaccinées contre la
fièvre typhoïde ont pu accidentellement avaler du
bacille typhique: elles ont entièrement échappé à la
fièvre typhoïde. L'un de ces sujets avail même avalé
involontairement une quantité colossale de bacilles
typhiques en aspirant une culture à l’aide d'une pipette.
Il est connu que l'absorption de traces de culture est
présque toujours positive et souvent mortelle; en effet,
un centimetre cube de culture en bouillon renferme de
4,0 à 1,5 milliard de bacilles; une goutte de culture du
microbe pathogene renferme, en conséquence, une
quantité de bacilles infiniment plus grande que celle
qui serait contenue dans un verre d'eau de boisson
profondément souillée.
Le sujet en question s’est vacciné lui-même le len-
demain contre la fièvre typhoïde, et il a échappé
à l'infection.
Conditions de transmission de la fièvre
récurrente par le pou. — MM. CHances NicoLrer,
L. BLaizor et E. CoxseiL ont poursuivi de longues et
méthodiques expériences pour élucider cette question.
Les spirilles du sang des malades absorbés par le
pou subissent chez ce parasite des altérations immé-
diates aboutissant en quelques heures à leur dispe-
rition complète; cependant, cette disparition n'est
qu'apparente; les spirilles persistent sous une forme
invisible. Toutefois, la contamination par ces parasites
est rare, et les auteurs ont pu constater l'innocuité
des piqûres de poux infectés et celle de leurs crottes.
Une personne, au cours de ces expériences, a subi
6 515 piqüres de poux infectés et est restée indemne.
La vitalité du bacille tuberculeux éprouvée
par inoculation etparinhalation.— M.P. Cnarssé
a trouvé que la vitalité des bacilles desséchés dans les
conditions de l'appartement, à la température de 15°
à 20° et à la lumière diffuse, éprouvée par inoculation,
est égale à trente ou quarante jours au plus. Pendant
l'hiver, à 10°-15°, elle atteint le cinquantième jour.
Cette vitalité n’est que peu favorisée par l'obscurité
complète. Mais elle décroit rapidement quand la tem-
pérature augmente; dans l’étuve, à 37°, la virulence
est totalement perdue en quinze jours, à raison, sans
doute, de la dessiccation. :
Mais, remarque intéressante, par inhalation, la con-
tagion ne se réalise plus avec le virus de dix jours,
mème à dose considérable; la vitalité du virus par
inhalation est diminuée d'un tiers dès le premier jour.
C’est que le bacille inhalé, arrivant dans le poumon
par unités isolées, est assez aisément phagocyté.
Conclusion pratique: la désinfection domiciliaire
comme moyen prophylactique, laquelle soulève cer-
taines difficultés d'exécution, peui avantageusement
ètre remplacée par les prescriptions nécessaires à
l'égard des expectorations.
Sur la sommabilité d'une fonction dont la série de
Fourier est donnée. Note de M. W.-H. Youxc. — Sur
un rayonnement ionisant, attribuable au recul radio-
actif, émis par le polonium. Note de MM. B. Brunt et
L. WERTENSTEIN. — Sur l'acide benzylpyruvique. Note
de M. J. BovcavLT. — De l'action excitante des alcalis
et en particulier de l’ammoniaque, sur la peroxydase.
Note de M. J. Wozrr.
BIBLIOGRAPHIE
Esquisse d’une philosophie de la nature, par
M. ANDRÉ Joussaix. Un vol. in-16 de 200 pages
(2,50 fr). Librairie Alcan, 108, boulevard Saint-
Germain, Paris.
Cette esquisse s'appuie, en ses fondements, sur
les doctrines de Schopenhauer et de M. Bergson.
Au premier, l’auteur emprunte l'idée du monde
considéré comme volonté et représentation; au
second, son hypothèse de la vie universelle envi-
sagée sous la forme de la conscience. Et il fond les
deux conceptions en une seule: « Représentation
et volonté sont inséparables de la conscience. »
N° 1441
P. 18.) « La vie consciente de la plante n’est guère
beaucoup plus claire pour nous que celle du miné-
ral. » (P. 50.)
À cette double parenté de doctrine, il faut encore
ajouter une double alliance de la pensée de M. Jous-
sain, avec le spinosisme et l’évolutionnisme. Celui-
ci est nettement avoué par l’auteur; celui-là ne
parait pas niable: « Eternel dans sa substance,
toujours changeant dans ses phénomènes, l'univers
évolue sans fin. » — « Tandis que tout organisme
existe dans un milieu qui le limite, la nature, étant
le tout, n'a rien en dehors d'elle qui la puisse
limiter. » (P. 1492.) De ces indications ou citations,
le lecteur conclura sans peine que l Esquisse d'une
philosophie de la nature laisse beaucoup à désirer
au point de vue de l’orthodoxie.
Lamennais et ses correspondants inconnus,
par M. An. RousseL. Un vol. in-16 de vui-456 pages
(4 fr). Téqui, éditeur, 82, rue Bonaparte, Paris.
M. Roussel continue son incessant labeur sur
Lamennais et nous donne un nouveau volume qui
contient quantité de lettres inédites ou publiées
par lui en diverses revues, mais par séries. Ces
lettres sont précédées, accompagnées ou suivies de
notes instructives sur le contenu, les auteurs ou
les destinataires de ces correspondances. Celles-ci
sont celles échangées entre Lamennais d'une part
et, d’autre part, son oncle des Saudrais, l’abbé
Querret, principal du collège de Saint-Malo; l'abbé
Caron, du diocèse d'Amiens; Dom Guéranger; l'abbé
Marin, curé à Genève, et un laïque, M. de la Villéon.
Le livre de M. Roussel ouvre des horizons incon-
nus, croyons-nous, sur un certain nombre de points,
. spécialement sur les rapports de Lamennais avec
son oncle des Saudrais. Nous aurions voulu y trouver
des appréciations plus impartiales sur l'abbé Rohr-
bacher et sur Dom Guéranger et leur ultramonta-
nisme.
Les champignons d’après nature, parle D'Lava,
préface du professeur ManGin. In-4° orné de
6 planches en trichromie et de 40 planches en
noir. (Broché, 15 francs; relié toile, 20 francs.)
Ch. Delagrave, 15, rue Soufflot, Paris.
Il est toujours assez dangereux de se nourrir de
champignons cueillis dans les bois et dans les
champs; même en ne ramassant que ceux qu’on
croit connaître, une distraction peul avoir de graves
conséquences.
Toutefois, il ne manque pas de personnes qui
aiment à faire leur cueillette de champignons;
aussi leur indiquons-nous ce livre, qui leur per-
mettra de reconnaitre avec süreté les espèces
comestibles des plantes vénéneuses. Non seulement
les espèces sont décrites avec le plus grand soin
COSMOS
279
par un mycologue éprouvé, mais des reproductions
photographiques très réussies et trois remarquables
planches en couleurs ne laisseront planer aucun
doute, chez ceux qui voudront consulter ce livre,
sur les champignons qu’on peut consommer sans
crainte et ceux qu’il est prudent d'éliminer.
Le pilotage d’un aéroplane, par P. BANNET-RIVET
et P. Leroux. Un vol. in-8° de 440 pages avec
gravures (3,75 fr). Librairie Gauthier-Villars,
Paris, 1912.
Voici enfin un ouvrage sur l'aviation qui ne se
contente pas de donner la théorie de l’aéroplane
et la description d'appareils plus ou moins sem-
blables les uns aux autres. Ici, les auteurs, laissant
toute théorie de côté, ne s'occupent que de la pra-
tique, et c'est ce qui fait l'intérêt très vif qu’on
prend à la lecture de cet ouvrage. Comment sont
disposées les commandes? Comment apprend-on
à voler? Quelles sont les conditions indispensables
qu'on doit exiger et de l’appareil et du futur pilote?
Comment se dirige-t-on en l'air ? Comment doit-on se
comporter au départ, pendant le vol, à l’atterris-
sage? Autant de questions que peuvent se poser tous
ceux qui s'intéressent à l'aviation, et qu'ils trou-
veront exposées très clairement dans cet ouvrage.
Les droits de l'enfant, par le D° Pauz Gonin. Un
vol. in-16 de 280 pages (3,50 fr). A. Maloine,
éditeur, 25, rue de l'Icole-de-Médecine, Paris.
Ce sont les droits de l'enfant à une santé robuste
que M. le D" Godin s'attache à défendre, en mon-
trant aux familles quels sont les devoirs qu'elles
ont à remplir. Son livre s'occupe donc avant tout
de l’hygiène, et c’est de ce point de vue que l’auteur
fait la critique de l'internat français et l'éloge des
collèges anglais. Ce dernier éloge amène celui du
peuple anglais qui serait, en matière d’énergie,
bien au-dessus de nous : Cette appréciation est-elle
juste? Le Maroc, le Centre africain, les airs sil-
Jonnés par nos aviateurs ne nous montrent-ils pas
des énergies qui n'ont rien à envier aux autres?
Le Précurseur, ouvrage posthume, par PauLix
Teste, conservateur-adjoint à la Bibliothèque
nationale. Un vol. grand in-8° de 274 pages ({fr).
Martinus Nijhoff, La Haye.
Il y a trois tyrannies : celle des rois, celle des
capitalistes, celle des prètres; le christianisme est
mort; le socialisme universel, c'est l'ordre uni-
versel; un être infini en tout n'est infini en rien:
il n’y a pas d'être supérieur à l'homme : telles sont
quelques-unes des nombreuses propositions du
même genre, soutenues dans ce volume; elles en
disent assez l'inspiration athée et antiscientifique
pour qu'il soit inutile d'insister,
280
COSMOS
A SEPTEMBRE 1912
FORMULAIRE
Le nettoyage du crêpe. — On croit générale-
ment que le nettoyage du crèpe demande les soins
d'un spécialiste, c'est une erreur; on peut très bien
faire cette petite opération soi-même, etil en résulte
une économie sensible.
Enlevez d’abord la poussière avec une brosse
douce, puis étendez le crèpe sur une table garnie,
fixez-le avec des épingles, mais en prenant garde
de ne pas trop le tendre. Vous trempez un vieux
foulard de soie dans un mélange fait de moitié
alcool et moitié eau. Vous tordez le foulard, puis
l'étendez sur le crêpe. Vous prenez alors un fer
à repasser très chaud et vous le promenez à un
centimètre au-dessus dn foulard.
Surtout prenez garde de ne pas le toucher. Sous
l'action de la chaleur, le liquide s'évapore; quand
le foulard est complètement sec, vous l’enlevez et
finissez de sécher le crèpe au fer, mais toujours en
le tenant à distance d’un centimètre au-dessus.
(Inventions illustrées.)
Les ustensiles de cave. — Le Moniteur vini-
cole signale combien il peut être dangereux d'em-
ployer sans discernement des vases métalliques
dans la manipulation du vin, qu'il s'agisse de le
mesurer, de le présenter sur les tables ou de l'em-
magasiner. Le cuivre, le cuivre argenté ou l'argent
devraient être seuls admis dans le matériel des
caves; cependant le cuivre étamé peut être utilisé
avec les précautions convenables. Le zinc doit être
absolument exclu, car il forme avec la plupart des
vins des sels solubles, qui, non seulement donnent
un goùt métallique désagréable à cette boisson,
mais de plus sont nettement toxiques même en
petite quantité.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses:
Le pyromètre Féry pour l'indu:trie est construit par
la Compagnie pour la fabrication des compteurs et
matérield'usines à gaz, 16 et 18, boulevard de Vaugirard.
Le pyromôtre stellaire Féry est construit par
M. Beaudouin, 31, rue Lhomond, Paris.
M. G. de L., à H. — Le prix d’un poste de télégra-
phie sans til pour yacht dépend de la puissance qu'on
désire; il est donc impossible de vous fixer, même
approximativement. 11 faudrait vous adresser à la
Société française radioélectrique, 198, rue de la Boïtie,
à la Compagnie générale radiotélégraphique, 63, bou-
levard Haussmann, ou chez Ducretet et Roger, 75, rue
Claude Bernard, tous à Paris. — Le pas géométrique
était une mesure de longueur équivalant à 1,62 m. —
Le Bureau Véritas, registre international de £lassifica-
tion des navires, 8, place de la Bourse, Paris. Il sert
à controler la construetion des navires et à vérilier si
les règlements relatifs à cette construction sont
observés.
M. P. M. C., à J. de V. — Les deux groupes de six
chiffres transmis par la tour Eille! (télégraphie sans
fil) entre les signaux horaires et le télégramme métto-
rologique sont des signes conventionnels et qu’on ne
pourrait comprendre qu'à l’aide d’un code spécial.
M.J. P., à P. — Ces béliers hydrauliques existent
et donnent de bons résultats, surtout quand il s'agit
d'élever une quantité d'eau pas trop considérable.
Vous pourriez vous adresser à la maison Vidal-Beaume,
56, avenue de la Reine, à Boulogne (Seine), oa chez
Ernest Rcollie, Le Mans.
M. P. de C. Z., à R. — Pour compléter notre réponse
du dernier numéro, l'impérialite est l'invention du
marquis fmpérioli, dont l'usine était à Montechiari,
province de Brescia, en Italie. Cette usine vient d'rtre
détruite par une explosion dans laquelle l'inventeur
a trouvé la mort.
M. le C“ de M., à L. — Fers à repasser, cuisine et
chauffage électriques: établissements Parvillċe frères,
56, rue de la Victoire; Goisot, 10, rue Bélidor; fers à
souder électriques: Frédéric-Fouché, 38, rue des
Écluses-Saint-Martin, tous à Paris.
M. J. D., à F. — Nous ne connaissons, en fait de
musées des missions, que le musée Kircher, à Rome,
fondé, croyons-nous, au début du zvin’ siècle par les
Pères Jésuites, et un autre à Turin, ouvert, il y a
quatre ans environ, à la suite d'un Congrès de mics-
sionnaires. — Pour le P. Beauchesne, nous n'avons
aucun renscignement et ne savons où on pourrait en
trouver. Il est d'ailleurs probable que vous auriez
plus de chances d'être documenté utilement en vous :
adressant à la procure des missions des Pères Jésuites.
au collège Notre-Dame, Mouscron (Belgique).
M. A. D.,à F. — Nous ne croyons pas qu'il existe
en France d'ouvrage répondant à votre désir. Ce qui
s'en rapproche le plus est: l'Aorticulture en Bel-
gique, par C. Bazrer (6 fr). Librairie Horticole, 84 bis,
rue de Grenelle, Paris.
M. A. G.,h A. — Vous trouverez les indications
utiles pour comprendre les dépèches météorologiques
envoyées par la tour Eiffel dans le numéro 1390
(16 sept. 1911), p. 309. À corriger une petite erreur
de cette note : les observalions manquantes sont rem-
placées par des lettres X et non par des chiffres 9.
' M.J. L., à H. — Les tableaux sont de genres diffé-
rents suivant les constructeurs; il faut vous adresser
au vôtre pour avoir le schéma des connexions que
vous demandez. Ou bien reportez-vous à un ouvrage
d'électricité comme celui de RoseNserG : l'Electririlté
industrielle (8,50 fr). Librairie Dunod et Pinat, 49, quai
des Grands-Augustins, Paris. — Pour la lampe témoin,
prendre une lampe de la plus faible intensité lumi-
neuse, pour économiser le plus possible l'énergie
électrique.
Imprimerie P. Fenox-Vrau. 8 et B, rae Bayard, Paris, VIIe.
Le gérant : R. PETITEENRT.
No 1442 — 19 SEPTEMBRE 1919 COSMOS 281
SOMMAIRE
Tour du monde. Le minimum d'activité solaire. Augmentation séculaire de la pluie à Paris. Phénomènes
électriques dans la région du Tchad. La catastrophe des mines de la Clarence. Le prix du radium. La géla-
tine dans l'alimentation des prédisposés à la tuberculose et des phtisiques. Le ròle des huitres dans la
propagation du choléra, Tabac et choléra. L’effeuillage de la vigne. Le Spitzberg, terre réservée. La lon-
gueur des routes nationales. Nouvelle dénomination géographique. Relevé des plans par la photographie.
Le tir contre les ballons dirigeables. Le record de l'altitude en aéroplane. Le gibier s’habitue aux aéro-
planes. Bateau à fond de verre. Omnibus amphidromes. Le plus gros canon du monde, p. 281.
Cent mille photographies par seconde, GnanExwirz, p. 286. — Résistance des filaments métalliques
dans les ampoules à incandescence, Fnaxcis Mannr, p. 288. — Les éléments figurés du sang,
AcLoque, p. 289. — Ce qu’on voit dans un escargot: une leçon d’observation, Coupix, p. 212. —
Les grands travaux d'irrigation aux États-Unis, Beer, p. 293. — Le comportement des êtres
vivants aux très basses températures, B. Larocun, p. 296. — La moutarde, G. LoucuErx, p. 299. —
Les marrons d’Inde, Rousser, p. 302. — Sociétés savantes: Académie des sciences, p. 305. — Biblio-
graphie, p. 306.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Le minimum d’activité solaire. — Le Soleil
est encore dans un état de calme remarquable,
mais il est probable que peu à peu son activité,
marquée par une périodicité d'environ onze ans,
va se réveiller et que nous ne tarderons plus à
observer quelques belles taches et brillantes
facules.
Cependant, hémisphère austral vient de pré-
senter, dans une région bien définie, une activité
qui a ceci de spécial qu’elle s’est exercée dans
la mème région pendant la longue durée de huit
rotations solaires. (Bulletin de la Société astro-
nomique de France, septembre.)
Cette très remarquable région du Soleil est située
entre les latitudes australes de 80 et 16°.
La tache apparut la première fois sur le disque
solaire le 24 novembre 1914, et, emportée par la
rotation du globe solaire, elle disparut à l’autre
bord du disque le 2 décembre 1941. En janvier et
février 1912, calme complet. Mais, le 7 mars, au
bord oriental du disque, apparut une assez belle
tache que le Cosmos (n° 1420, t. LXVI, p. 393)
signala à cette époque, et qui se présenta sensible-
ment à la même latitude que la tache du mois de .
novembre précédent. Cette mème tache est revenue
au début du mois d'avril, et ensuite en mai; à
chaque retour, elle se rapprochait un peu de l’équa-
teur solaire. Elle était entourée de brillantes
facules.
MÉTÉOROLOGIE
Augmentation séculaire de la pluie à Paris.
— M. Camille Flammarion, dans l’Astronomie (sep-
tembre), met sous nos yeux cette évidente con-
statalion que la pluie à Paris va en augmentant
depuis un ou deux siècles.
T. LXVII. N° 1542.
Voici la série abrégée des relevés pluviomé-
triques: i
HAUTEUR D'EAU
ANNÉES Movenns :nnu-lle
en millimètres.
FOOT IL re nue, cotes dress 459,1
RO ITR ES EET AEEA 415,2
OL St E E E A des 494,1
BOr sin EER EA 502,9
INZA oai n Ea EAS kokas 007,0
Bpa san aiey atei 923,2
ATE E ee E E E 153,0
BIP nr em ere NE,
L'accroissement est manifeste. Peut-être sous
Louis XIV et au xvut siècle, comme l'on ne mesu-
rait l’eau que dans une cuvette située à 21 mètres
au-dessous de la terrasse de l'Observatoire, duquel
elle descendait par un long tuyau, les petites pluies
ont pu passer inaperçues. Mais depuis 1804, et
surtout sous l’attentive direction d’Arago, les
observations ont été précises. Il ne parait donc
pas douteux que la quantité d’eau de pluie tombée
à Paris annuellement n’aille, irrégulièrement, en
augmentant; elle a augmenté presque d’un sixième
depuis 222 ans qu’on la mesure.
A quelle cause attribuer cette augmentation de
la pluie à Paris? On a invoqué les poussières, les
fumées d'usines, dont le nombre s'acceroit ehaque
année, ces poussières servant de novaux pour con-
denser la vapeur d’eau. Comme ce cas devrait ètre
encore plus manifeste à Londres, où il y a plus
d'usines, plus de poussières, plus de brumes,
M. Flammarion a demandé le mème relevé à
l'Observatoire de Sreenwich. Eh bien! Londres ne
confirme pas Paris; la pluie n'y va pas en aigmen-
tant. Il faut donc chercher une autre explication.
Phénomènes électriques dans la région
du Tchad. — Le D° Gaillard, medecin major
des troupes coloniales, membre de la mission
282
Niger-Tchad (novembre 1907 à juin 1908), a rendu
compte, comme il suit, des constatations qu'il a
faites, entre le Niger et le Tchad, au cours des
années 4903, 1904, 1907 et 1908 :
« Le 27 octobre 1908, vers 5"30" du soir, dans
une obscurité appréciable, je quittai, dit-il, le
campement de Guidimouni, me rendant à Kissam-
bana, lorsque je constalai que le cheval qui précé-
dait celui sur lequel j'étais monté, et que son
palefrenier tenait en main, faisait jaillir de ses
flancs, en les fouettant avec l'extrémité de sa queue,
des aigreltes lumineuses.
» J'ai constaté à N’Guigmi, en février 1908, la
production de véritables élincelles électriques de
quelques centimètres de longueur, suffisamment
fortes pour donner une sensation désagréable au
bout du doigt, en frottant d’un rapide passage,
avec la pulpe des doigts, l’intérieur de la mousti-
quaire tendue sur les montants du lit de campe-
ment, l'observateur se trouvant lui-mème sur la
literie-laine. On pouvait ainsi obtenir des étincelles
crépitantes, sonores, deux, trois et même quatre
fois sur la mème surface frottée, surtout si, au
lieu de se servir des doigts, on frottait le tissu de
la moustiquaire avec le cuir chevelu (cheveux ton-
dus), en relevant le front d'un mouvement rapide,
par exemple.
» Ce phéncmène ma paru s'observer plus faci-
lement dans les cases (de terre ou de paille) qu'en
plein air. La lueur produite par ces élincelles mul-
tiples était très appréciable et semblait éclairer
tout le haut de la moustiquaire. »
Le ‘7 septembre 1907, vers 930" du soir, se
trouvant à Dungass, au sud de Zinder, M. Audoin
a pu faire, en compagnie du capitaine Tilho et du
capitaine Lauzanne, une observation très nette
d'un phénomène lumineux consécutif à un coup
de tonnerre.
« Vers 9 heures, une tornade venant du Nord-
Est s'était manifestée avec des caracteristiques
habituelles : vent, pluie, éclairs, tonnerre. Nous
étions d‘jà sortis de sa zone d'action et les coups
de tonnerre étaient moins forts quand, subitement,
presque aussitot après un éclair, j'entendis une
véritable explosion constituée par une seule déto-
nation assimilable à un coup de canon.
» Je vis, en mème temps que je percevais la dé-
tonation, une boule de feu paraissant descendre
du ciel suivant une trajectoire verticale : une trai-
née lumineuse, telle une corde qui eut soutenu la
boule, apparaissait au-dessus de celle-ci. Celte
trainee était dne, peut-èlre, à la persistance sur la
rétine de l'impression produite par le globe de
feu: cependant, la chute était relativement lente. »
`
(Astronomie.)
MINES
La catastrophe des mines de la Clarence. —
Ce nous est une douloureuse tâche d'avoir à en-
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1912
registrer ici la terrible catastrophe qui, le 3 de ce
mois, a fait soixante-quinze victimes aux mines de la
Clarence. On a lu, dans les journaux quotidiens, les
cruelles péripéties qui ont causé tant de deuils,
mais qui ont aussi suscité d'admirables actes de
courage et de dévouement. Parmi les victimes, on
compte, en effet, plusicurs des sauveteurs qui
s'étaient précipités au secours de leurs camarades,
et parmi eux M. Dupont, un des ingénieurs de
l'exploitation.
Les mines de la Clarence, près de Béthune, sont
grisouteuses, et ce n’est pas le premier accident dont
on a eu à souffrir; mais le dernier dépasse en hor-
reur tous ceux qui l'ont précédé.
La catastrophe s’est produite dans l'étage qui
est à près de 1000 mètres de profondeur, élage où
déjà nombre de galeries avaient été murées par pré-
caution. La première explosion produisit des ébou-
lements qui suspendirent la ventilation, et alors
d’autres explosions se succédèrent rapidement,
entravant les efforts des sauveteurs cet faisant,
parmi eux, de nouvelles victimes. Nos lecteurs
auront un souvenir dans leurs prières pour lous ces
braves gens, aussi bien pour ceux qui sont morts
en remplissant leur tâche que pour ceux qui ont
péri victimes de leur dévouement.
PHYSIQUE
Le prix du radium. — Les usines se sont mul-
tipliées où l’on traite la pechblende, qui est, on le
sait, le principal minerai de radium; on en extrait
le radium à l'état de bromure, mais, depuis les
expériences de M€ Curie, on est parvenu à isoler
le radium métallique.
Si l’on prend la radio-activité de urane comme
unité, on peut obtenir, en arrètant lopéralion à
un stade déterminé, toute une gamme de produits
d'activités différentes; celle des résidus de pech-
blende vaut 4 à ï; le gros traitement la fait monter
à 60; le gros fractionnement l'amène à 4 000, et
au laboratoire on arrive à obtenir des produits
ayant une activité de 4 000 000.
On opère sur une tonne de pechblende dont on
a retiré l’urane; il faut pour ce traitement cinq
tonnes de produits chimiques divers et cinquante
tonnes d'eau.
Ces résidus contiennent des sulfates de presque
tous les métaux, y compris le radium; le traite-
ment est basé sur la solubilité moindre du sulfate
de radium.
Toutes ces opérations sont faites à lusine. On
continue le traitement au. laboratoire par une
méthode analogue; on obtient finalement un bro-
mure de radium, où le baryum ne figure plus qu'à
l'état de traces.
Une tonne de résidu donne finalement de { à
2 décigrammes de bromure, dont l'activité est
égale à 1 000 000.
N° 1442
Une tonne de résidu provient du traitement de
trois tonnes de pechblende par six tonnes de pro-
duits chimiques et cinquante tonnes d’eau de
lavage. |
Voici le prix de divers échantillons de radium,
prix qui varie avec l’activité du produit, quoiqu'il
ne Jui soit pas rigoureusement proportionnel.
ACTIVITE Prix.
Francs par gramme.
OOO een ne Ma anse 2 500
ADO enr nn na 5 000
AD OO en ut at 10 000
TOO O0 sn este ice 20 000
DMO 000z sirae e R 100 000
400 000
MÉDECINE — HYGIÈNE
La gélatine dans l’alimentation des prédis-
posés à la tuberculose et des phtisiques. — Le
professeur Albert Robin, dans un volume sur le
traitement de la tuberculose qui vient de paraitre,
insiste beaucoup sur l'emploi de la gélatine dans
le traitement des prédisposés à la tuberculose et
des phtisiques.
La valeur alimentaire de la gélatine a été forte-
ment discutée, et l’on s’accorde à reconnaitre
qu'elle ne remplace pas les albuminoïdes dans
alimentation, et qu'étant en majeure partie brûlée
dans l'organisme, elle n’aide en rien à la reconsti-
tution des tissus. Or, c'est précisément sur cette
donnée biologique que M. Albert Robin base l’em-
ploi thérapeutique de la gélatine. Puisque la géla-
tine est détruite, elle protège les albuminoides
constituants des tissus, diminue les pertes en corps
gras et agit comme un véritable aliment d'épargne.
Mais pour que le rôle d'épargne de la gélatine se
produise, il faut qu'elle soit prise régulièrement,
qu'elle soit bien tolérée et ne provoque pas de
troubles digestifs. Or, malheureusement, la gélatine
en nature est désagréable à ingérer et gåte le goùt
des aliments auxquels on l’incorpore ; si bien puri-
fiées qu’elles soient, les gélatines du commerce
sont assez mal tolérées par l'estomac des tubercu-
Jeux. Il faut donc user d'artifice. Aux malades
peu fortunés, on peut recommander de faire du
bouillon avec des parties de la viande ordinairement
rejetées comme tendineuses, avec des os en quan-
tité aussi grande que possible et beaucoup de
légumes. On fait alors dissoudre la gélatine pen-
dant la cuisson, et une partie du bouillon ainsi
préparé pourra être ingérée à l’état chaud, tandis
que le reste se prendra en masse au moment du
refroidissement et formera une gelée savoureuse
que le malade prendra facilement lors du repas
suivant. Pour les malades de la classe aisée, on
n'est pas embarrassé puisqu'il suffit de remplacer
la gélatine commerciale par des aliments gelati-
neux, tels que la tête de veau, les pieds de mou-
COSMOS
283
ton ou de porc, le bouillon de pied de veau, les
gelées de viande, les bavaroises, la gelée de fruits
et de pommes en particulier, etc. On pourra donc
faire ingérer facilement sous une forme agréable
les 20 à 30 grammes de gélatine qui constituent la
dose quotidienne d'épargne nécessaire.
(Gazette des hôpitaux, 22 août.)
Le rôle des huîtres dans la propagation du
choléra (Gazette des hôpitaux, sept.).— M. Pin-
zani, à la suite de recherches nombreuses prati-
quées au laboratoire de bactériologie annexé à
l'Office sanitaire du port de Naples, est arrivé aux
conclusions suivantes :
L'huitre, cultivée dans un vivier infecté par du
vibrion cholérigène, conserve les vibrions spéci-
fiques vivants dans ses tissus longtemps après
qu'ils ont disparu de l’eau du vivier. D'après les
expériences du N° Pinzani, les vibrions résisteraient
plus de seize jours dans des huitres mises au sec,
et douze jours si elles sont placées dans un vivier
non infecté. Les mollusques ne semblent d'ailleurs
éprouver aucun mal de la présence des vibrions
spécifiques.
Le pouvoir infectant des huitres cholérigènes
réside en partie dans les vibrions qui souillent
l’eau contenue entre les valves, mais il est dù sur-
tout à ceux que les huitres conservent vivants
dans certaines parties de leur corps.
Si on enlève les huitres du vivier infecté et
qu’on les place dans de l'eau pure, elles peuvent
infecter celle-ci pour plusieurs jours, créant ainsi
un nouveau véhicule pour le contage.
li n’est pas démontré qu’à l'intérieur de lhuitre
les vibrions subissent un processus de multiplica-
tion ou une exaltation de leur virulence.
&
Tabacet choléra (Gasettedes hipitaux,Tsept.).
— Le D" Wenck, professeur à l'Institut impérial de
Berlin, vient de publier récemment un rapport sur
les observations qu'il a faites au cours de l'épidé-
mie cholérique de Hambourg, et ses conclusions
seraient tout à fait favorables à l'action préserva-
trice du tabac.
C'est ainsi que dans l'épaisseur de cigares mani-
pulés avec de l’eau contenant 1 500 000 bacilles
virgules par centimètre cube, tous les microbes
périrent en vingt-quatre heures, et l'examen de
cigares fabriqués à Hambourg pendant l'épidémie
montra qu'ils élaient absolument exempts de
bacilles.
Le D° Wenck put constater aussi que les mi-
crobes du choléra meurent une demi-heure, une
‘heure et deux heures après avoir été mis en contact
avec de la lumée de tabacs provenant du Brésii, de
Sumatra, de la Havane. La fumée de tabac tuerait
d'ailleurs en cinq minutes les microbes cholèriques
de la salive. Enfin, pas un ouvrier de la fabrique
decigaresde Hambourgnefutatteint par l'épidémie.
VITICULTURE
L’effeuillage de la vigne. — L'’effeuillage de
la vigne pour donner de l'air, de la lumière et sur-
tout du soleil aux grappes est généralement pra-
tiqué, non seulement dans les jardins, mais aussi
dans les vignobles. Pour beaucoup de personnes,
il est article de foi que l’on obtient ainsi une plus
prompte maturité, une plus grande grosseur des
grains et aussi des grappes plus sucrées.
La question a paru douteuse à certains savants,
et ils ont institué des expériences pour se rendre
compte des résultats de la méthode. MM. Muntz
et Trichereau ont établi que ce procédé diminuait
la richesse alcoolique du vin et ne semblait pas
présenter d'avantages d’un autre côté.
M. Ravaz vient de reprendre ces expériences, et
il n’est pas aussi pessimiste. Cette opération, con-
duite avec la modération qu'on y met d’habitude,
a été nuisible pour certaines espèces, indifférentes
pour d’autres et utile pour quelques-unes; mais,
en somme, l'effeuillage est plutôt utile à la qualité
des produits.
D'ailleurs, ses effets sont très différents, suivant
la nature des cépages, et aussi suivant leur mode
de culture ; les expériences de M.Ravaz ont démon-
tré, en effet, que l'efficacité de l’effeuillage est liée
intimement à la direction des rameaux et à la
durée de la croissance.
GÉOGRAPHIE
Le Spitzberg, terre réservée. — Dans les
négociations auxquelles donnent lieu en ce moment
les compétitions sur les droits des différentes
nations au Spitzberg, — discussions qui durent
d’ailleurs depuis trois siècles — on parle d'établir
en principe que cette terre sera un lieu privilégié
pour les recherches scientifiques. Désormais,
aucune terre ne pourrait être acquise dans l'ar-
chipel que dans un but absolument scientifique ou
humanitaire.
Les établissements déjà existants pour l'exploita-
lion des mines, des pècheries, etc., seraient soumis
à une réglementation sévère assurant la conserva-
lion de la flore et de la faune de ces régions. La
chasse des renaids, des ours polaires, des morses,
des rennes, serait interdite du 4° mai au 15 sep-
tembre, ce qui, laissant à ces animaux le temps
de se reproduire, aurait encore cet avantage d’éloi-
gner les chasseurs amateurs, dont bien peu iraient
affronter un hivernage dans les glaces pour satis-
faire leurs gouts cynégétiques.
Inutile de dire que la chasse de l’eider serait
interdite en toute saison, et que l'emploi des poi-
sons et des explosifs pour la pêche serait sévère-
ment prohbibė.
La longueur des routes nationales. — Les
routes nalionales, en France, avaient, au {°° jan-
COSMOS
{2 SEPTEMBRE 1912
vier 1910, une longueur de 38 311 464 mètres, soit
environ {4 mètre par habitant. Pour l'Algérie, elles
ont seulement 4497657 mètres, chiffre très supé-
rieur à celui de l’année précédente. Enfin le dépar-
tement où il y a la plus grande longueur de routes
est la Corse, où le chiffre s'élève, à la même date,
à 1132458 mètres.
Nouvelle dénomination géographique. —
Le cap Oriental, extrémité N.-E. de l'Asie, qui
forme le côté N.-0. du détroit de Behring, une
péninsule plutôt qu'un cap, mais qui était univer-
‘ sellement connu sous ce nom depuis les travaux
des premiers navigateurs, a changé de nom en
1898. Par ordre de l'empereur de Russie, il a reçu
le nom de cap Deshnef, en souvenir de l’explora-
teur russe qui a parcouru ces terres. Depuis que la
Russie s’est emparée des régions orientales de
l'Asie, elle a rebaptisé une foule de points qui
avaient déjà reçu d'autres noms donnés par les
premiers explorateurs. La baie d’Anville, par
exemple, et bien d'autres lieux, ont aussi perdu
leur nom.
Relevés des plans par la photographie. —
Nous lisons dans le Scientific American que le
premier emploi de la photographie panoramique,
remplaçant la planchette pour le lever des plans,
a été fait en 1911 par M. J.-W. Bagley, du Service
géologique des États-Unis, en relevant un terri-
toire de 160 milles carrés (410 kilomètres carrés)
autour de Valdez (Alaska). Nous nous permettrons
de faire remarquer que la méthode est quelque peu
plus ancienne. Due aux travaux du colonel Lausse-
dat, elle a été mise en usage de ce côté du monde
il y a certainement plus de vingt ans.
AÉRONAUTIQUE — AVIATION
Le tir contre les ballons dirigeables. — Dans
les prochaines manœuvres allemandes, on attachera
une grande importance aux exercices de tir du canon
spécial contre les dirigeables. Ce type de canon
est monté sur une automobile blindée et permet
un pointage rapide dans toutes directions.
Il ne s’agit, jusqu'à présent, que de l’entraine-
ment des pointeurs. Mais des lirs à balle ont été
effectués dernièrement, sur la côte poméranienne,
contre un ballon sphérique remorqué par un bateau
à vapeur. Un canon du calibre de 65 millimètres
a tiré à une hauteur de 7 500 mètres et à une dis-
tance horizontale de 8 500 mètres. Un autre canon
de 75 millimètres a lancé un obus à 6500 mètres
de hauteur et à une distance de 9 000 mètres. Enfin
un troisième canon, de 405 millimètres, envoya
son projectile à 11 400 mètres de hauteur et
143 700 mètres de portée horizontale.
Le record de l’altitude en aéroplane. —
L'année dernière, le 5 septembre 1911, à Dinard,
N° 1442
l’avialeur Roland Garros avait atteint l'altitude de
4 250 mètres. Depuis lors, au meeting d'aviation de
Vienne, l'aviateur Blaschte, emmenant un passa-
ger, a atteint dans les airs l'altitude de 4260 mètres.
Dans le but de ravir ce record à son confrère
étranger, Garros s’élait, en ces derniers temps,
entrainé aux grandes altitudes, en montant en
ballon sphérique jusqu'à 6 000 mètres, avec, comme
pilote, Alfred Leblanc, aussi bon aéronaute
qu'excellent aviateur. $
Ainsi préparé, Garros a pris son essor de la plage
d'Houlgate, le 6 septembre après midi, malgré un
vent de tempète et un ciel chargé de nuages, pilo-
tant un aéroplane monoplan muni d'un moteur
Gnome de 100 chevaux; il avait à bord une bou-
teille d'oxygène, pour respirer aux grandes alti-
tudes.
Après une heure de montée, il était à environ
5 000 mètres (altitude non encore contrôlée par
l’Aéro-Club); l'appareil était alors plongé dans un
courant d’air très régulier et très rapide, plus
rapide même que l’aéroplane, dont la vitesse dé-
passe 100 kilomètres par heure, de sorte que l’avia-
teur, qui pouvait apercevoir le sol à travers les
nuages, se voyait dériver et perdait du terrain. La
montée devenait d’ailleurs très lente, à raison de
la perte de puissance du moteur dans l'air raréfié.
La rupture d’une bielle du moteur vint interrompre
l'essai, et l’aviateur, après une durée totale de vol
d’une heure et un quart atterrissait en vol plané
à Biéville-en-Auge, près de Crèvecœur, à 20 kilo-
mètres au sud de son point de départ.
Le gibier s’habitue aux aéroplanes, le
gibier à plumes tout au moins, ce qui mettra fin,
sans doute, aux conflits entre chasseurs et avia-
teurs, conflits dont certains furent portés devant
les tribunaux par des propriétaires ou usagers de
chasses avoisinant des aérodromes.
Depuis quelques années, en certaines régions,
les chasseurs déploraient la rareté des cailles et
des perdreaux; un inspecteur forestier en rechercha
les causes et les indiqua dans un curieux rapport
transmis au ministère de l'Agriculture; ces causes
sont multiples, mais l'une d'elles mérite une men-
tion spéciale. L'inspecteur constata, en effet, que
cailles et perdreaux avaient déserté surtout les
régions où se trouvent les aérodromes, mais que,
d’ailleurs, après les premiers vols d’aéroplanes, ce
gibier avait peu à peu repris ses quartiers.
« Prudemment, dit l Eleveur, les perdreaux et
les cailles avaient d’abord émigré, en présence des
biplans et des monoplans qui pouvaient bien être
de formidables oiseaux de proie. Et puis, les com-
pagnies de perdreaux, le fait a été vérifié, avaient
envoyé des éclaireurs aux aérodromes, et ces
éclaireurs avaient parfaitement compris que les
grands oiseaux de nos aviateurs n'étaient nulle-
ment inquiétants. »
COSMOS
285
Au dire de l’Aérophile, à Buc comme en Cham-
pagne, le gibier est revenu, et il est aujourd’hui
aussi abondant que partout ailleurs.
VARIA
Bateau à fond de verre. — La San Pedro
Marine Construction C°, de Los Angeles (Californie),
est en train de construire, au prix de 55 000 francs
environ, pour la Meteor Boat C°, d'Avalon, un
bateau à fond de verre de 32 mètres de long muni
de deux moteurs de 100 chevaux. Ce bateau est le
plus grand des bateaux de ce genre, dunt nous
avons déjà jadis signalé l’ingéniosité. On sait que la
disposition de ces bateaux permet aux excursion-
nistes d'examiner, pendant leur promenade, toutes
les richesses de la flore et de la faune marines des
fonds merveilleux de la côte de Californie. Depuis
plusieurs années, les Compagnies d'exploitation
des bateaux à fond de verre employés notamment
à Avalon, dans l'ile Santa-Calalina (cf. Cosmos.
t. L, p. 225), et depuis en Floride, ont obtenu des
résultats financiers excellents, et leur exemple ne
tardera pas à être suivi dans tous les endroits où
les eaux sont suffisamment claires.
La construction de ces bateaux est extrèmement
simple. Extérieurement, le bateau a l'aspect d’un
bateau ordinaire d'excursion. A l’intérieur, dans
l'axe du bateau, à l'avant et à l’arrière de la
machine (à roues, dans l'espèce), règne une sorte
de large puits rectangulaire dont les parois sont
recouvertes de peinture noire pour absorber les
réflexions lumineuses de l’eau. Le fond de ce puits
est tout simplement fermé par une lame de verre
d'environ 2 centimètres et demi d'épaisseur. On
n'a jamais mentionné, jusqu’à présent, d'accident
dù à la rupture de cette glace. La construction des
parois de cette sorte de puits, analogue à celle
d’un puits de dérive, donne toute la sécurité dési-
rable. Un système de panneaux étanches, que l’on
peut fixer rapidement sur le puits, augmente encore
le coefficient de sécurité en cas de rupture.
Omnibus amphidromes. — Certains quartiers
de Londres sont, par l’étroitesse de leurs rues,
interdits aux autobus qui, à leurs terminus, ne
peuvent trouver l'espace suffisant pour tourner ct
revenir sur leurs pas. On imagine de faire pour ces
lignes des voitures marchant indifféremment dans
les deux sens, comme certains tramways. La seule
manœuvre à faire avec ces nouveaux véhicules se
borne au transport du mécanicien d’un bout de la
voiture à l’autre extrémité.
Le plus gros canon du monde. — L'A{rmyy
and Navy Journal annonce qu'on est en train de
fondre des canons de 406 millimètres capabies de
tirer, avec une charge d’explosifs de63 kilogrammes,
des projectiles pesant 1080 kilogrammes à une
distance de 26 kilomètres!
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1912
Cent mille photographies par seconde.
La remarquable sensibilité des plaques photo-
graphiques a permis de fixer des phénomènes d'une
durée extrèmement courte, surtout en employant
F1G. 1. — CINÉMATOGRAPHE BALISTIQUE.
des étincelles électriques comme éclairage instan-
tané à grande intensité, Comme ces étincelles ne
durent qu'un temps excessivement court, elles
donnent une image parfaitement nette des corps
se déplaçant aux vitesses les plus grandes.
M. Lucien Bull, à l'Institut Marey, a été le pre-
mier à mettre au point une méthode cinématogra-
phique permettant de décomposer les mouvements
rapides en leurs phases et de les reconstituer sur
un écran : 2000 étincelles par seconde produites par
une bobine d'induction enregistrent le phénomène
en une série d'images cinématographiques sur un
film entourant un tambour. Un perfectionnement fut
réalisé par M. Cranz, professeur à l’École militaire
de Charloltenbourg, dont le cinématographe balis-
tique permet de prendre 800 vues du même phéno-
mène à la fréquence de 5 000 vues par seconde. Cet
appareil est actionné par un alternateur à haute
fréquence et une bobine d’induction à résonance.
Le film entourant deux tambours se déplace à la
vitesse maximum d'environ 420 mètres par seconde.
. La fréquence des images n'est variable qu'entre
certaines limites, l'appareil étant astreint à réa-
liser la fréquence qui correspond à la résonance
électrique.
Le dernier progrès dans celte même voie est con-
stitué par un appareil récemment soumis à la
Société allemande de physique par MM. C. Cranz
et B. Glatzel. A peu près indépendant de tout
réglage de résonance, cet appareil permet de faire
varier entre des limites bien plus larges la fré-
quence des images, depuis des fréquences relative-
ment lentes (de 200 vues par seconde) jusqu'à des
fréquences de plus en plus élevées, pouvant aller
jusqu'à 100 000 vues par seconde. Rien ne s'oppose
du reste, si cela est utile, à ce qu'on dépasse cette
limite supérieure actuelle.
En consiruisant ce nouvel appareil, MM. Cravz
et Glatzel ont voulu éliminer les inconvénients des
méthodes antérieures (difficultés de variations de
fréquence, insuffisance de l'énergie disponible et
défauls d'isolement). Ils emploient, pour produire
les étincelles électriques, des oscillations à haute
fréquence engendrées, comme à l'ordinaire, par un
éclateur amorti et un circuit oscillaloire relié à un
circuit à courant conlinu.
C, (fig. 1) est une capacité constituée par des
condensateurs en mica, dont la capaciléest variable
entre 25 000 et 600 000 centimètres. La self-
|
Sa
Eg
mena kaa
D 2 Ea
Er mg
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|
F1G. 2. — PISTOLET A CHARGEMENT AUTOMATIQUE.
induction L,, très petite, fournit une impulsion de
courant aussi approximativement apériodique que
possible, dans le circuit primaire couplé au secon-
daire, qui comporte la self-induction L, et la petite
capacité C, (1800 centimètres). Des bobines plates,
appliquées immédiatement l’une sur l’autre, servent
à constituer les circuits primaire et secondaire, ce
N° 1442
qui assure un couplage aussi serré que possible.
L'éclateur F, qui fournit les étincelles d'éclairage,
est relié en parallèle à la capacilé: un miroir con-
cave à faible distance focale projette une image de
l'éclateur sur l'objectif photographique O, qui, à
son tour, reproduit le mouvement ayant lieu en P,
sur un film tournant enroulé sur un tambour de
89 centimètres de diamètre, actionné à la vitesse
maximum de 9000 tours par minule. La vitesse
angulaire est déterminée par un tachymètre.
La fréquence des impulsions traversant le pri-
maire dépend de la capacité (à laquelle elle est
directement proportionnelle), de l'intensité de cou-
rant continu et de la distance explosive de l’écla-
teur amorti qui se règle au moyen d'un micro-
mètre. La tension du courant continu étant d'en-
viron 700 volts, la fréquence des impulsions pri-
mairesestfacilementréglée à une valeur quelconque.
En disposant le secondaire, on s'est attaché à
ZA
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:
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F1G. 3. — LA BALLE TRAVERSE ET ÉCRASE LE BOIS.
réduire suffisamment l’inertie de l’éclateur pour
produire des instantanés bien nets sur le film
tournant, même aux fréquences les plus élevées
(100 000 vues par seconde). MM. Cranz et Glatzel
se servent d'un éclateur à air soufflé par un fort
courant d'air. Les électrodes de magnésium, qui, à
raison de leurs effets photographiques si intenses,
COSMOS
287
auraient présenté des avantages, ont dû, à cause
de leur amortissement insuffisant, être remplacées
par des électrodes en cuivre.
Cetle méthode a été appliquée à l’enregistre-
ment de toutes sortes de processus balistiques aussi
bien que physiques. C’est ainsi qu'on a fixé les phé-
m
d (40000).
Ca (66600) = b (72000)
FIG. 4. — GAZ ET BALLE VONT CHACUN A SA VITESSE,
nomènes balistiques d’un pistolet à chargement
automatique pour une vitesse initiale d'environ
280 mètres par seconde, la détente étant déclan-
chée fpar un dispositif électro-magnétique. Les
figures 2, a, b, c, reproduisent des inscriptions
pareilles, faites à la fréquence d'environ 10000 étin-
celles par seconde; elles représentent le fonction-
nement de la fermeture du pistolet et surtout
Pévacuatión des douilles. A la figure 3 (prise à la
fréquence de 6400 étincelles par seconde), un
morceau de bois disposé à l'embouchure du pis-
tolet a été écrasé progressivement pendant le tir.
L'écrasement, chose remarquable, procède bien
plus lentement et se continue longtemps après que
le projectile a quitté le bois.
La figure 4 représente les inscriptions balistiques
faites à différentes fréquences (56 600, 72 000 et
92 200 étincelles par seconde). Sous la pression
énorme, une partie des gaz de poudre quittent le
canon avant le projectile, suivi par la grande
masse de ces gaz et qui ne sort qu'après un certain
temps. On reconnait distinctement les différences
de vitesse de propagation des gaz de poudre et du
projectile.
288 COSMOS 12 SEPTEMBRE 1912
la fréquence de 8 400 étincelles par seconde.
Les figures 6, a, b, c, représentent enfin, par
voie cinématographique, un processus comparûti-
vement lent, à savoir la chute d'une goutte, à la
Cette méthode servira à élucider de nombreux
problèmes concernant le fonctionnement des armes
à feu portatives, détermination du recul, perce-
ment des plaques de blindage, etc.
La figure 5 représente le percement d’un tube
de plomb rempli d'eau qui comporte à son côté
Lil
|
CR | f 1144
:
|
Lg
DEU CTER
F1G. 5. — LA BALLE FAIT JAILLIR L'EAU DU TUBE.
supérieur un nombre très grand de trous à travers
lesquels l’eau s'échappe; ses extrémités sont fer-
mées par des membranes de caoutchouc. Les jets
d'eau qui en sortent représentent d'une façon sai-
sissante la propagation des pressions à l'entrée du
projectile dans l’eau. Ces images ont été prises à
FETES
ka CAR a
FG. 6. — LA CHUTE D'UNE GOUTTE DE LIQUIDE,
fréquence bien plus faible d'environ 250 vues par
seconde. Ce n’est qu’un exemple destiné à montrer
avec quelle facilité les processus physiques se repro-
duisent, grâce à cette méthode,dans leurs différentes
phases.
D° ALFRED GRADENWITZ.
Résistance des filaments métalliques dans les ampoules à incandescence.
L'expérience est faite désormais de l’économie
considérable que permet de réaliser l’emploi des
tilaments métalliques dans les ampoules à incan-
descence : cette économie résulte de la diminution
d'énergie consommée qui est, dans certains cas
très favorables, inférieure de 75 pour 100 à celle
que consomment les lampes à charbon pour pro-
duire un éclairement d’égale intensité.
Toutefois, l'emploi de ces ampoules à filament
de métal s'est trouvé grandement entravé par leur
fragilité même qui, trop souvent, ne leur permet
pas de supporter des trépidations du genre de celles
qui se produisent continuellement dans certaines
usines, à bord des navires à vapeur, dans les tram-
ways et dans les wagons des trains en marche.
Des ruptures se produisent fréquemment aux points
de soudure, car la difficulté technique d'obtenir
des fils suffisamment longs avec les mélaux peu
No 1122
malléables qui sont couramment employés oblige
à fixer bout à bout un certain nombre de brins
solidarisés par une soudure ou une brasure aussi
soignée que possible. Mais il est rare que les jonc-
tions ainsi réalisées soient parfaites, et les rupturés
fréquentes à leur niveau indiquent bien que
l'homogénéité désirable n’est pas toujours réalisée
dans les zones de liaison. Cependant, grâce aux
progrès réalisés dans le pressage et l'étirage des
filaments — de ceux de tungstène notamment, —
on a vu récemment s’accroitre dans une proportion
notable la résistance au choc qui caractérise les
lampes modernes à incandescence. :
Il n’en reste pas moins qu'il est très important
de pouvoir mesurer de façon précise cette résis-
tance par des essais effectués préalablement à la
mise en service des lampes, car ces essais per-
mettent, non seulement de suivre les progrès réa-
lisés dans la fabrication, mais surtout de dégager
par comparaison ce qu'on pourrait appeler les
influences pernicieuses et les conditions favorables.
Jusqu'ici, la méthode communément employée
pour ces essais consistait à suspendre la lampe au
ras du bord inférieur d’un plan incliné et à faire
arriver sur elle une petite bille de plomb revêtue
de caoutchouc. Connaissant l'inclinaison du plan
(80 pour 400), le poids de la bille (12 grammes) et
la distance que celle-ci avait parcourue avant de
heurter la lampe, distance qu’on augmentait pro-
gressivement jusqu'à obtention de la rupture du
filament, on calculait la force vive nécessaire pour
produire cette rupture. Néanmoins, si, les condi-
tions de l'essai restant les mêmes, ce système don-
naitd’excellentes indications sur la valeur comparée
des résistances des diverses lampes, il ne permet-
trait pas d’avoir la mesure exacte de ces résistances.
Aussi divers chercheurs se sont-ils ingéniés
à combiner un dispositif capable de donner des
indications plus conformes au but poursuivi. C'est
ainsi que M. E. Legrand a imaginé un appareil qui
constitue une solution élégante du problème. Il
comprend essentiellement une table de chocs, faite
d'une planchette très faiblement inclinée et fixée
COSMOS
289
par l’un des côtés à un axe, tandis que l'extrémité
opposée porte sur une came qu’un minuscule mo-
teur électrique anime d’un mouvement de rotation.
Dans son mouvement, la came soulève la plan-
chette, qu'un ressort en spirale, réglable, fait choir
ensuite d'une hauteur constante en soumettant la
lampe à un choc de puissance connue. Dans l'ap-
pareil en action, la lampe est ainsi soumise à un
certain nombre de chocs correspondant à une force
donnée, puis, automatiquement, cette force est
subitement augmentée et s'exerce le même nombre
de fois sur la lampe, et ainsi de suite jusqu’au
moment où se produit la rupture du filament mé-
tallique. Or, par l'intermédiaire d’un relais et de
frotteurs spécialement aménagés, la lampe est,
à chaque tour, mise une fois en circuit sur le cou-
rant qui alimente le moteur, en sorte que la rup-
ture du filament entraine automatiquement le
déclanchement du relaiset l’arrét du moteur. Il n’y
a plus qu’à lire sur le compteur le nombre de tours
effectués à ce moment. On en déduit facilement la
mesure de la résistance de la lampe, car on con-
nait le nombre n de chaque série de chocs supportés
avec des forces dont l'accroissement est constant;
l'appareil est, en effet, réglé pour que
F — F = FE" — EF = FKF” — F”, etc.
Le compteur ayant indiqué N tours, N :n
donne le nombre de forces qui se sont exercées
n fois sur la lampe, 3, par exemple ; il reste
un nombre de tours n'<n, qui est donné dans
l'exemple choisi par N = 3 n + n', équation qui
indique combien de fois s’est exercée la quatrième
force avant de provoquer la rupture, en sorte que
la mesure de la résistance de la lampe est
R=n(EF 4E +E) +F”,
équation dans laquelle, étant connus n, n', F d'une
part, et, de l’autre, la raison de la progression des
forces a = F' — F = F” — F', etc., rien nest plus
simple que d'avoir la mesure exacte cherchée.
Cet appareil a déjà permis de faire des constata-
tions intéressantes dont profiteront certainement
les constructeurs pour améliorer leur fabrication.
Francis MARRE.
Les éléments figurés du sang.
I. — Les
On a pu, sans s'éloigner sensiblement de la
réalité, considérer le sang comme un véritable
tissu formé de cellules isolées et libres, laissant
entre elles des interstices remplis par une substance
liquide. Cette substance liquide constitue le plasma
sanguin; les cellules qu'elle relie et véhicule sont
des éléments figurés de deux sortes, les hématies
ou globules rouges, et les leucocytes ou globules
blancs.
hématies.
Les histologistes modernes tendent à considérer
les hématies comme des cellules âgées et ayant
presque achevé leur évolution: cette opinion s’ap-
puie sur le fait que les globules rouges ne ren-
ferment pas de noyau, ce qui implique l'inaptitude
à la division, et contiennent une matière colorante,
particularité qui caractérise fréquemment les
vieilles cellules.
Toutefois, ce fait n’est rigoureusement exact que
290
pour les mammifères déjà sortis de l'enfance. Dans
cette catégorie zoologique, en effet, l'existence d’un
noyau à l’intérieur de chaque hématie est constante
durant la vie embryonnaire et aussi parfois pen-
dant le jeune âge. Dans tous les autres vertébrés,
les globules rouges renferment toujours un noyau
aux différentes périodes de l'existence.
Les hématies sont formées d’une fine membrane
d’enveloppe, très élastique, contenant un proto-
plasma que l’on appelle quelquefois du nom spé-
cial de globuline; celte globuline est imprégnée
d'une matière colorante parliculière, l’Aémoglo-
bine, qui en constitue la partie active par le rôle
important qu’elle doit jouer dans l’acte chimique
de la revivification du sang. La globuline ren-
ferme, en outre, à l’état de dissolution, des sels de
potasse.
Vues en masse, les hématies offrent une couleur
rouge; isolées sous le microscope, elles sont d'un
vert grisätre. Elles ont chez l’homme la forme de
disques renflés au bord, déprimés au centre : ce
sont des globules biconcaves; de face, leur silhouette
est circulaire.
Cette forme des globules rouges humains se
retrouve dans les éléments analogues de tous les
mammifères, à l'exception des camélidés (chameau,
dromadaire, lama), où ils sont elliptiques et renflés
au milieu, c'est-à-dire biconveres. Les dimensions
des globules rouges varient sensiblement suivant
les espèces. Les plus petits ont été constates chez
le chevrotin porte-musc, où ils ne mesurent que
2 y (2 millièmes de millimètre); ceux du cheval et
du bœuf ont 5 4 de diamètre, ceux de l’homme 7 y
(avec une épaisseur au milieu d'environ 2 u), ceux
de l'éléphant 9 u. En règle générale, ils sont d'au-
tant plus petits et par suite plus nombreux que le
mammifère possède une aptitude à la course plus
développée, et est doué, par conséquent, d’une
activité respiratoire plus intense.
Chez les oiseaux, les poissons, les batraciens, les
reptiles, les hématies sont elliptiques et biconvexes
comme celles des camélidés, avec la différence
qu’elles ont un noyau et sont ainsi des cellules
complètes. Les globules rouges des oiseaux sont
environ deux ou trois fois plus volumineux que
ceux des mammifères. C’est chez les batraciens
qu’on observe les plus gros : ceux de la grenouille
atteignent 50 u, ceux d'une espèce des lacs souter-
rains de la Dalmatie, le protée, mesurent 75 u et
sont, par conséquent, isolément visibles à l’œil nu.
L'élasticité de la membrane d’enveloppe des
hématies a pour but de leur permettre de se.
déformer, de s’élirer lorsqu'elles ont à franchir
des vaisseaux d’un calibre très étroit; rendues à
la liberté dans un vaisseau plus large, elles
reprennent instantanément leur forme normale.
On en compte chez l'homme environ 5 millions
par millimètre cube de sang; cette proportion
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1912
diminue dans les maladies qui engendrent l’anémie ;
elle peut s’'accroitre notablement dans certaines
conditions physiologiques, par exemple par le fait
d’un séjour prolongé sur les hautes montagnes. Sur
les plateaux du Pérou, à 4 000 mètres d'altitude,
leur nombre s'élève à 8 millions par millimètre
cube de sang.
La couleur rouge que revêtent les hémauties vues
en masse est due à la présence de l’hémoglobine,
substance colorante de composition chimique très
complexe, de nature albuminoïde, et qui imprègne
uniformément, à l’état de solution, le protoplasma
de l'hématie. L’hémoglobine des globules rouges
du chien a été analysée; sa composition répond
approximativement à la formule :
C'°8H12034z195S3Fe0?18,
Un litre de sang humain renferme environ
430 grammes d’hémoglobine, soit 650 grammes de
cette substance pour la totalité du sang d'un
homme normal. L'analyse spectrale décèle dans
l'hémoglobine des traces de la plupart des métaux,
le fer y étant d’ailleurs de beaucoup en plus forte
proportion (0,5 g par 150 grammes d'hémoglobine,
soit 3 grammes pour tout le corps). Dans l'eau
pure, les hématies cèdent presque instantanément
leur hémoglobine au liquide et perdent leur cou-
leur; mais dans l’eau salée à 7 pour 4 000 (sérum
artificiel, solution de chlorure de sodium approxi-
mativement isotonique à l'eau de mer ou au
F1G. 1. — HÉMATIES HUMAINES
(de face et de profil).
plasma sanguin), elles ne subissent pas d’altéra-
tion.
Le rôle biologique de l’hémoglobine est sous la
dépendance de ses affinités chimiques, dont la prin-
cipale, et celle qui lui permet de remplir sa desti-
nation essentielle, est son avidité à l'égard de
l'oxygène. C'est cette avidité qui entre en jeu pour
la revivification du sang dans l'acte respiratoire ;
N° 1%%2
il y a tout lieu de supposer qu'elle s'exerce par le
fer dont l’hémoglobine contient une forte propor-
tion.
Au contact de l’air pénétrant dans les poumons
lors de l'inspiration, ce fer fixe l’oxygène, d'où la
production d'oxyde ferrique (Fe?9*). Le composé
organique, très instable, réalisé par la combinai-
son de l'oxygène avec l’hémoglobine a reçu le
nom d'oxyhémoglobine; c'est lui qui est chargé de
fournir aux tissus du corps l’oxygène nécessaire à
leurs oxydations, et il est charrié jusque dans léürs
plus intimes profondeurs par le cours du sang.
Ces tissus renferment des substances carbonées,
comme les graisses, les sucres, ayant une grande
affinité pour l'oxygène, dont elles ont besoin pour
leur combustion; l’oxyhémoglobine, circulant dans
les capillaires à l’intérieur des globules rouges qui
la contiennent, cède progressivement son oxygène
F1G. 2. — HÉMATIES ANIMALES
(a, de chameau ; b, de pigeon; c, de grenouille).
à ces substances et s'empare d'une partie de
l’'anhydride carbonique résultant de leur oxyda-
tion, c’est-à-dire de la combinaison de leur carbone
avec l'oxygène. L'hémoglobine désoxygénée, et
plus ou moins chargée d’anhydride carbonique
(carbo-hémoglobine), est renvoyée aux poumons,
où elle renouvelle, aux dépens de l’air atmosphé-
rique, sa provision d'oxygène.
Les globules rouges, par leur hémoglobine, ont
donc pour mission de véhiculer l’oxygène en tous
les points du corps. L’hémoglobine, si avide de ce
gaz vivifiant, témoigne d’une plus grande affinité
encore pour l’oxyde de carbone ; lorsque les poumons
absorbent de ce gaz, il forme, avec l'hémoglobine
des hématies, un composé, l’hémoglobine oxycar-
bonée, non plus instable comme l’oxyhémoglobine,
mais éminemment fixe. L’hémoglobine, ainsi asso-
ciée avec l'oxyde de carbone, n’est plus propre à
absorber l'oxygène, et 12 sang ne peut plus être
COSMOS
291
régénéré à son passage dans les poumons : la con-
séquence est l'asphyxie.
Isolée du sang, l'hémoglobine précipite sous
forme de cristaux de configuration variée, mais
sensiblement constante pour chaque espèce. Chez
l'homme, ces cristaux d'hémoglobine revêtent
l'aspect de petits prismes à section rectangulaire,
en aiguilles étroites ou en tablettes plus larges.
FıG. 3. — CRISTAUX D'HÉMOGLOBINE HUMAINE.
Pour les obtenir, on centrifuge le sang, afin de
séparer les hématies du plasma; puis ces hématies
sont traitées par l’éther, qui s'empare de l’hémoglo-
bine ; les cristaux se déposent par évaporation de
la solution. On peut encore traiter le sang par la
moitié de son volume d’alcool à 95°; dans les deux
cas, il faut opérer dans la glace, l'hémoglobine se
décomposant très rapidement dans l’air dès que la
température s'élève au-dessus de 0°. L'hémoglo-
bine cristallise spontanément dans le sang frais
conservé en récipient stérilisé.
L'hémoglobine offre, au point de vue physiolo-
gique, des analogies avec la chlorophylle des
plantes : dans les deux cas, on se trouve en pré-
sence d’une substance pigmentaire dont les pro-
priétés chimiques jouent un rôle essentiel dans la
nutrition de l'être vivant. De même qu'il y a des
chlorophylles diverses, il y a aussi sans doute un
grand nombre d'hémoglobines. Elles diffèrent
entre elles par la forme des cristaux ; cependant,
leur unité biologique est décelée par l'identité de
leur spectre d'absorption.
Chez les invertébrés, on ne trouve pas d’héma-
ties, et on peut se demander comment ces animaux
fixent l'oxygène nécessaire à leur respiration; le
problème trouve sa solution dans le fait que leur
sang contient toujours, non plus combinés avec le
protoplasma de globules particuliers, mais en dise
solution, des pigments aptes à absorber l’oxygène
et remplissant le rôle de l'hémoglobine.
292
Dans certaines espèces, comme le lombric, la
sangsue, le pigment dissous est une véritable hémo-.
globine, et le sang est rouge. Ailleurs, le pigment
fixateur est vert ou brun; ailleurs encore (chez les
mollusques, les arthropodes), il est incolore, mais
il devient bleuâtre en s’oxydant : c'est, en ce cas,
une hémoglobine renfermant du cuivre au lieu de
fer, et on lui a donné le nom spécial d’hémocrya-
nine.
Dans le sang extrait des vaisseaux et exposé à
lair libre, l’hémoglobine s’altère en s'oxydant,
perd son fer et laisse déposer des cristaux orangés
COSMOS
12 SEPTEMBRE 19192
d'hkématoidine, substance chimiquement identique
avec la matière colorante de la bile. On a constaté
que le sang contient toujours moins de globules
rouges quand il sort de la rate ou du foie que
lorsqu'il y entre; les hématies sont donc détruites,
par phagocytose, dans les capillaires de ces deux
organes. L'hémoglobine des hématies détruites cède
son fer, sous forme de dépôt ocre, au foie et à la
rate; quant à l’hématoidine qui résulte de sa
décomposition, elle entrerait dans la composition
de Ta bile.
A. ACLOQUE.
Ce qu'on voit dans un escargot : une leçon d'observation.
Les escargots abondent dans les campagnes, où
l'on n’a pour ainsi dire qu'à se baisser pour en
trouver. Lorsqu'il vient de pleuvoir, ils se mettent
en marche et rampent soit sur la terre, soit dans
les buissons. Quand il fait sec, au contraire, ils
restent immobiles, enfermés dans leur coquille et
collés contre les murs, sous les pierres, dansdivers
creux, généralement dans des endroits plus ou
moins abrités. I] y en a de plusieurs espèces, mais
toutes sont bonnes pour l'étude et ne diffèrent que
pur la couleur de Ja coquille. Les espèces les plus
communes sont: 1° l'escargot des cignes, à coquille
très brune avec de larges taches noires mal limi-
tées: cest de beaucoup le plus commun, celui
que l’on mange souvent; 2 l'escargot de Bour-
gogne, plus rare et plus clair que le précédent,
remarquable par sa grande taille; de mème que le
précédent, on le vend dans les marchés, mais il
est sensiblement plus cher et plus estimé; 3° l'es-
cargot des bois, plus petit que les précédents et
facilement reconnaissable à sa coquille, tantôt
rose, tantôt jaune, parcourue par des lignes noires
quien suivent les tours de spires; il est très commun
dans les polagers. Dans ce qui va suivre, nous
aurons plutot en vue l'escargot des vignes; mais,
nous le répétons, la constitution des autres est
exactement la mème.
Si l’on a récolté les escargots par un temps
humide, ils rampent sans cesse; s'ils ont été récoltés
par un temps sec, ils restent souvent enfermés
dans leur coquille : pour les obliger à en sortir et
à ramper, il sullit de les mettre sur une table, de
maniere que l'orifice de la coquille soit en haut, et
de les laïsser en repos. On ne tarde pas à voir
l'animal se déployer pour sortir de cette position
qui lui esi déplaisante. On peut, d’ailleurs, activer
cette sortie en déposant sur son corps contraclé
une ou deux gouttes d'eau qui lui font croire
à l'arrivée de la pluie, ce dont il tressaille de joie.
Examinons un escargot en train de ramper.
On voit de suite que l’animal se compose de
trois parties, d’ailleurs réunies, mais dont nous
parlerons successivement pour faciliter les de-
scriptions :
4° Une partie située en dehors de la coquille,
c'est-à-dire la partie la plus visible du corps pro-
prement dit de l'animal;
2° La coquille;
30 Une partie située en dedans de la coquille
(vulgairement appelée fortillon).
Examinons successivement ces trois parties.
La première, examinée sur le dos, se montre
recouverte d’une peau molle de couleur noire ou
grisâtre, très « chagrinée », c’est-à-dire toute par-
semée de sortes de petites verrues irrégulières,
un peu allongées dans le même sens que le corps.
Juste au milieu du dos, dans toute sa longueur,
une série de verrues placées à la file les unes des
autres forment une ligne médiane.
Sur le ventre, l'aspect est tout différent: c’est
une large lame, de couleur plus claire que le dos,
à surface très mamelonnée, mais sans verrues et
de forme changeante; elle est également très
humide.
Le dos et le ventre, quoique étroitement unis,
représentent deux parties très différentes : le dos
contient les organes utiles à la vie de l'animal:
c'est le corps proprement dit. Le ventre, au con-
traire, est une lame musculaire qui ne sert qu'à la
locomotion; les naturalistes lui ont donné le nom
de pied.
Dans presque toute sa longueur, comme nous
venons de le dire, le pied est étroitement uni au
corps. Ce n'est qu’en arrière que les deux parties
se séparent; cela est très visible quand l'animal
rampe; le corps proprement dit pénètre dans la
coquille, pour former le tortillon, tandis que le
pied se termine en pointe.
De la série d'observations que nous venons de
consigner, on peut déjà appeler l'attention sur les
suivantes :
40 Le corps de l’escargot est mou;
No 41142
2 Il n'est pas recouvert d'une carapace comme
les insectes, les écrevisses, les homards, etc. ;
3° Il n'a pas de pattes analogues à celles des
insectes ;
4° Il possède une coquille.
Tous ces caractères définissent, en grande partie,
l’'embranchement des mollusques (c’est-à-dire
« animaux mous ») auquel appartient l’escargot.
De plus, nous avons constaté que le pied était
attaché par presque toute sa surface au ventre de
l'animal ; l’escargot semble donc réellement ramper
sur son ventre: c'est, comme l'on dit, un gastéro-
pode, mot provenant de deux mots grecs, yastńp,
ventre; moÿc, : où6s, pied.
Avant de quitter cette partie de l'animal, il faut
un peu insister sur le liquide qui l'imbibe, liquide
que les zoologistes appellent du mucus. Tout l'es-
cargot en est imbibé et en a une grande quantité
à sa disposition. Pour le constater, on l'oblige
à se contracter et à rentrer dans sa coquille, ce qui
est facile en le touchant. Quand il y est rentré, on
continue à l’agacer avec un petit bout de bois. Il
continue alors à se contracter, ce qui ne semble pas
lui plaire : comme disent les enfants, il «se met en
colère »; on le voit expulser une grande quantité
de mucus, d’abord clair, puis jaune verdâtre, for-
mant des bulles; l’air de celles-ci provient de l’air
du poumon que l'animal cherche également à
expulser pour diminuer son volume : il espère de
la sorte rentrer plus profondément dans sa coquille
et se mettre à l’abri de son ennemi.
Quand l'animal rampe, il laisse derrière lui une
trainée claire, très brillante, que tout le monde
a remarquée; cetle trainée est produite par du
mucus, sa « bave », comme l'on dit vulgairement,
que l'animal abandonne au fur et à mesure sur
son chemin. Cette bave ne tarde pas à se dessécher
en une mince lame qui, en raison de sa faible
épaisseur, se colore souvent, prend des tons irisés
par le même phénomène que les bulles de savon
acquièrent desteintes d'autant plus colorées qu'elles
sont plus grosses et que, par suite, l'épaisseur de
leur paroi est plus faible.
COSMOS
293
Ce mucus est certainement très utile à l’escargot
pour lui permettre d'adhérer fortement à la sur-
face sur laquelle il glisse; on sait, par exemple,
que, dans le jeu connu sous le nom de «tire-pavé »,
la lame de cuir n'adhère au pavé que si elle est
humide, bien humide même.
Quelle que soit la petile quantité de mucus que
l’escargot abandonne sur son chemin, elle finit, au
bout d’une journée, par représenter un poids
notable d'eau. L'animal ne tarderait pas à se des-
sécher s’il ne récupérait le liquide en mangeant
des plantes succulentes ou en buvant la rosée ou
les gouttes de pluie. C’est sans doute pour cela qu'il
ne sort pas par les temps secs. Quand il fait humide,
il est bien plus certain de régénérer rapidement le
mucus qu'il doit perdre sans cesse pour ramper.
Le mucus sert encore à un autre usage. Quand
l'animal, par suite de la sécheresse, est obligé de
rester au repos sur un mur, il ne s'y attache pas
par son pied, ce qui finirait par le fatiguer; il se
contente de sécréter du mucus qui colle la coquille
au support. Aussi, quand on examine un escargot
ainsi placé, on ne voit jamais le corps en contact
avec ce dernier, mais rétracté à une certaine dis-
tance à l’intérieur de la coquille.
Si l’on veut bien voir comment se fait le dépla-
cement de l'escargot, il suffit de le faire marcher
soit dans un flacon de verre (par exemple un bocal
à cornichons), soit, ce qui vaut encore mieux, sur une
vitre. On voit alors très bien que le pied n’est pas
aussi inutile qu’on le croyait : on voit comme des
ondes qui les parcourent, ondes semblables comme
aspect à celles qui se propagent dans les blés quand
la brise les oblige à se coucher. Ces ondes sont
produites par des contractions musculaires qui se
font successivement d'un point à un autre. Il est
facile de voir qu'elles se propagent d'’arrière en
avant et ont ainsi pour effet de pousser l'animal
en avant. Quand on regarde par-dessus l'escargot
rampant, on ne voit pas ces ondes musculaires et
on a l'impression qu'il glisse sans faire le moindre
mouvement : ce n'est qu'une illusion.
(A suivre.) HENRI COUPIN.
a
Les grands travaux d'irrigation aux États-Unis.
Les Américains du Nord commencent à s’aperce-
voir qu'ils ont à faire beaucoup avant de savoir,
aussi habilement que les gens du Vieux Monde,
mettre en œuvre les territoires qu'ils occupent.
Jusqu'à présent, ils ont tiré parti de conditions
naturelles particulièrement avantageuses et excep-
tionnelles; ils ont dilapidé bien des richesses,
ou tout au moins profité abondamment et sans
grand’peine de ce que leur donnait la nature. Ils
constatent maintenant qu'il est nécessaire de fumer
les champs quand on veut qu'ils produisent des
récoltes abondantes, dès qu’ils ont été mis en cul-
ture pendant un certain nombre d'années; ils
s'aperçoivent que les errements suivis par ce Vieux
Monde, qu'ils méprisent volontiers, ont le plus sou-
vent leur raison d'être. Et comme leur population
augmente considérablement, comme leurs récoltes
vontètre bientôt insuffisantes pour cette population,
ils s'essayent à réclamer, comme dit la langue an-
glaise, en employant ce verbe reclaim qui s'est
N° 1472
demandés à l'impôt, mais obtenus par la réalisation
des terres réclamées. Les fonds en résullant sont
portés à un compte spécial sur lequel le ministère
de l'Intérieur ouvre des crédits au Service des
réclamations.
Ce service s'est trouvé en présence de difficultés
très grandes, parce que les moyens de transport
manquaient généralement partout où il voulait
entreprendre des travavx. De toutes parts naturel-
lement, dans les régions arides de l’Ouest, on péli-
tionnait pour que les travaux fussent entrepris ici
> 7
pr
GOSMOS 295
plutôt que là; on supportait fort impatiemrnent
les délais qui s’imposaient pourtant dans les études
préliminaires à faire sur le terrain, au point de
vue du régime météorologique, etc. Le service s’est
d’ailleurs mis très rapidement à la besogne, avec
un zèle des plus louables, ce qui ne correspond pas
toujours, il est vrai, à une économie très marquée
sur les frais d'exécution des travaux divers. Dès
maintenant, le service a distribué de l’eau sur une
surface d’un million d’acres, et on a pu installer,
sur les terres ainsi reconquises, 14000 familles,
LE CANON DE SHOSHONE, AVEC LA DIGUE AU FOND.
Sous réserve des besoins variés des différentes
contrées où l'on s’est mis à la besogne, on peut
dire que le principe appliqué par le Service des
réclamations a élé de construire des réservoirs au
moyen de digues barrant des vallées : ces réser-
voirs servent à mettre en réserve les eaux qui se
perdent sous forme torrentueuse dans ces régions
montagneuses. Il faut ensuite distribuer cette eau
aux terres; et, dans ce but, on a déjà construit
environ 560 kilomètres de canaux de grande sec-
lion, pouvant distribuer un volume de 22 mètres
cubes par seconde. Quant aux canaux secondaires,
ils ont plusieurs milliers de kilomètres. On a dù
creuser à (travers les masses monlagneuses ou
rocheuses plus de 70 tunnels pour livrer passage
aux canaux les plus importants, ces tunnels repré-
sentant un développement de 30 kilomètres envi-
ron. Bien entendu, sur ces canaux, tant principaux
que secondaires, il y a toute une série de déver-
soirs, de ponts, petils et grands, de portes et
d’écluses, etc. Les travaux de terrassement des
réseaux de canaux ont porté sur bien près de
45 millions de mètres cubes de terre et sur quelque
3,5 millions de mètres cubes de rochers. La
construction des digues et barrages a nécessité
l'emploi d’un million de barriques de ciment.
Nous devons dire qu'avant cette entreprise gou-
vernementale spéciale, une série de particuliers ou
296
de Compagnies s'étaient attaqués à une besogne
analogue, et avaient obtenu des résultats déjà fort
intéressants. Mais les capitaux privés n’auraient
pas été suffisants pour mener à bien l'énorme
entreprise à laquelle s'est appliqué le gouverne-
nement, d'autant que les profitsà en retirer étaient
quelque peu aléatoires, ou du moins devaient se
faire attendre très longtemps. Des travaux de pre-
mier ordre ont élé exécutés par le service des
irrigations, dit Service des « réclamations », comme
notamment la fameuse digue qu'on a élevée dans
l'Arizona du Sud et à laquelle on a donné le nom
de digue Roosevelt, en souvenir du brillant prési-
dent qui fait tant parler de lui à l'heure actuelle
mème. Cette digue, dans la construction de laquelle
on a employé près de 230 000 mètres cubes de ma-
connerie, forme un des réservoirs artificiels les
plus grands qu'il y ait au monde. Citons également
le barrage-digue fort élevé qui a été établi sur la
rivière Shoshone, dans l'Etat de Wyoming, barrage
qui porte, lui aussi, le nom de Shoshone. Dans le
bassin de la rivière North Platte, on a terminé assez
récemment un réservoir artificiel qui pourra em-
magasiner toutes les crues, mème exceptionnelles,
de cette rivière, et les mettre en réserve pour des
besoins ultérieurs. Cette région, en mai et en juin,
est particulièrement exposée aux résultats brusques
COSMOS
12 SEPTEMBRE 19142
et souvent dangereux de la fonte des neiges, alors
que, dans le courant de l'été et à l'automne, la
sécheresse se fait sentir de façon très regrettable.
Bien souvent, les Américains continuent d’em-
ployer dans ces travaux les méthodes primitives et
rapides qui leur ont réussi en maintes circon-
stances. C'est ainsi que, sur la rivière Colorado,
dont il fallait détourner le cours pour construire
en un certain endroit une digue devant permettre
de ménager un vaste réservoir, ils ont créé des
barrages artificiels et provisoires au moyen de
masses de terre, grâce à des estacades sur les-
quelles couraient des wagons de déblais, le déver-
sement se faisant à pierre perdue. On dilapidait
ainsi une bonne parlie des terres ainsi déversées,
mais le barrage s’exécutait à peu de frais. Quant
aux résultats des irrigations sous le climat où se
trouvent les territoires arides, ils sont particuliè-
ment encourageants. La végétation prend une
activité rare par suite de la chaleur naturelle dont
elle jouit et grâce à l'eau qu'on peut largement
lui distribuer. C’est ainsi que les Américains ont
développé de façon tout à fait remarquable les
cultures fruitières, mème dans les terrains qui
paraissaient le plus ingrats.
DANIEL BELLET,
prof. à l'École des srienres politiques.
Le comportement des êtres vivants aux très basses températures.
M. Raoul Pictet a exécuté, en son laboratoire de
Berlin, des expériences nombreuses et étendues
sur les basses températures, depuis la température
de la glace fondante jusqu'aux températures voi-
sines du zéro absolu, qui se rencontre, comme on
sait, aux environs de — 273" C. I s'agissait d'étudier
l'action du froid, dune part sur la marche des
combinaisons chimiques, d'autre part sur les êtres
vivants (1).
Est-il nécessaire de rappeler que c'est l’industrie
de la liquéfaction et de la solidification des gaz qni
a permis d'obtenir et de maintenir d'une manière
continue ces températures très basses? En évapo-
rant un mélange d'acide sulfureux et d’anhydride
carbonique préalablement liquéfiés, M. Pictetobtient
une première gamme de froid, allant jusqu'à
— 100". Pour descendre plus bas dans l’échelle des
températures, il s'adresse ensuite au proloxyde
d'azote, liquéfié au préalable sous la double action
du froid et de la pression; en évaporant ce liquide,
l'auteur abaisse la température jusqu à — 150°.
Enfin, l'évaporation de Pair liquide lui fournit une
troisième gamme de températures encore plus
(D) Jaurnal of the royal Society of Arts, 11. —
Moniteur scientifique du D Quesneville, nt Kits, août
1912, p. 235.
basses, allant jusqu'à — 213°, limite à laquelle il
s'est arrêté dans ses essais.
Du groupe d'expériences qui avaient trait à l'allure
des combinaisons chimiques aux basses tempéra-
tures, nous ne dirons ici que peu de chose. Un ou
deux exemples seulement. L’acide sulfurique et la
soude caustique se combinent violemment aux
températures courantes; il n’en est pas de même
aux températures que M. Pictet réalise en son labo-
ratoire. L'acide sulfurique congelé à — 125° est
agité fortement avec de la poussière de soude éga-
lement refroidie; ces deux corps se mélangent
mécaniquement et se compénètrent, mais sans
qu'aucune réaction chimique ne s'amorce. Ensuite,
durant un quart d'heure, l'opérateur fait jaillir une
étincelle électrique de trois centimètres de longueur
au sein du mélange; la réaction chimique s'opère,
mais uniquement au point exact où l’étincelle
échauffe les substances en présence. Quand l'éprou-
vette est sortie du réfrigérant et exposée à Pair
ambiant, la température remonte assez vite; mais
avant que l'acide sulfurique soit fondu, la réaction
se déclare dans toute la masse (vers —80°) et l'éléva-
tion brusque de la température casse l'éprouvette
en verre.
D'autres exemples nombreux montrent qu'aux
N° 1412
basses températures il n'y a pas de réaction entre
les corps chimiques, à moins qu'intervienne une
énergie étrangère comme, par exemple, une éléva-
tion locale de la température par l’étincelle élec-
trique ; et même alors la réaction reste localisée et
ne se propage pas à la masse. En somme, l’expé-
rience vérifie ce que la thermodynamique avait
déjà fait prévoir: à savoir que, à mesure quon
s'approche du zéro absolu des températures, les
réactions sont de moins en moins explosives, de
moins en moins exothermiques. En refroidissant
les explosifs les plus violents que l’industrie ou le
laboratoire ait inventés, on peut arriver à les
modérer à volonté et à ralentir la combinaison des
éléments qui les constituent.
L’inertie de l'acide sulfurique mis à — 125° en
présence de la soude ne tient d’ailleurs pas à l'état
solide des réactifs. L’acide sulfurique à sept molécules
d’eau SO‘H?+7 H'0 reste liquide jusqu'à des tem-
pératures très basses; en y jetant du marbre pilé
(carbonate de calcium) ou du carbonate de sodium
en cristaux et en remuant avec une baguette de
verre refroidie, on ne constate aucune réaction
tant que la température reste inférieure à — 52° et
— 56° respectivement; à ce moment, des bulles
d’anhydride carbonique commencent à se dégager
graduellement; la réaction ne devient turbulente
et générale qu'à — 15° pour le marbre (mousse
abondante), et — 23° pour le carbonate de sodium.
En fait, aux températures comprises entre
— 455° et — 125°, M. R. Pictet n’a pu constater
aucune réaction chimique, quelle que füt la nature
des corps mis en présence. Les réactions qui
débutent le plus bas (vers — 115°) sont celles qui
font virer du bleu au violet d'abord, puis au rouge,
la teinture de tournesol, sous l’action des acides
sulfurique et chlorhydrique.
Eu chimie synthétique, on peut envisager dès à
présent l’application des très basses températures,
soit à l'effet de produire des combinaisons qui sont
pratiquement impossibles aux températures ordi-
naires, soit pour accroitre le rendement de cer-
taines opérations de synthèse.
Passons aux très curieux essais effectués par
M. Raoul Pictet sur les animaux supérieurs et infé-
rieurs et sur les végétaux inférieurs.
Mammifères : Ces expériences ont porté sur des
chiens et des cobayes, plongés entièrement dans
un puits frigorifique maintenu à une température
constante comprise entre — 90° et — 100°.
Un de ces chiens, de taille moyenne, à poils ras,
pèse environ 8,8 kg. Il est placé sur un fond de
bois garni d'un sac de toile. Sa queue et son
museau ne touchent pas les parois métalliques
du puits, tendues à l’intérieur d’un cylindre de toile
formé par les parois d’un grand sac relevées tout
autour de l'animal. Un thermomètre est fixé dans
COSMOS
297
l'aine du chien, dont la patte de derrière est soli-
dement fixée contre l'abdomen avec plusieurs
doubles de flanelle. La tige du thermomètre esi
assez longue pour permettre des lectures continues
à 35 centimètres au-dessus du chien.
Voici maintenant les observations générales
recueillies.
La température du chien étant normale et l'ani-
mal ayant mangé deux heures avant le début de
l'expérience, on introduit le chien dans le puits
refroidi à — 92°.
Dès la première minute, on observe une augmen-
tation progressive de la rapidité de la respiration
et de la fréquence du pouls.
Ces accélérations vont en s'accusant pendant
42 à 13 minutes ; à son étonnement, l'opérateur
constate d’abord au thermomètre une augmentation
de température d'environ un demi-degré.
L'animal donne des signes d'agitation.
Après 25 minutes, la température du corps est
lentement redescendue à son point de départ.
Le chien mange avec avidité du pain qu'il refusait
péremptoirement avant le début de l’expérience.
La respiration est toujours très active, fréquente
et profonde.
Après 40 minutes, les extrémités des pattes sont
très froides, mais la température s'est maintenue
à peu près constante, oscillant de deux à trois
dixièmes de degré autour de + 37°.
Après 4 heure 10 minutes, le chien ne marque
pas d'agitation sensible, mais respire fort et tend
à faire quelques mouvements avec les pattes main-
tenues par les cordes, efforts suivis de calmes com-
plets, sauf la respiration. La circulation est un peu
plus rapide que précédemment, on sent les pulsa-
ions du cœur bien nettes à l'artère carotide. Les
extrémilés se refroidissent encore plus.
Pendant la demi-heure suivante, la bète a mangé
environ 100 grammes de pain, et les conditions géné-
rales indiquées plus haut ont peu varié. La tempé-
rature s’est abaissée d’un demi-degré tout au plus.
Tout à coup, en quelques instants, la respiration
se ralentit, le pouls devient fuyant et la tempéra-
ture s'abaisse avec rapidité.
Vers 22°, on retire l’animal sans connaissance du
puits, et tous les soins pour le rappeler à la vie
sont inutiles. L'extrémité des pattes est déjà gelée.
Le chien est mort en moins de deux heures par
rayonnement de sa chaleur et par les effets per-
turbateurs causés par ce refroidissement excessif.
D'autres animaux, chiens et cochons d'Inde, ont
toujours manifesté, dès leur entrée dans le puits
frigorifique, cette augmentation dans la fréquenre
de la respiration et des battements du cœur; dans
les cas observables, une légère élévationtie la Lem-
pérature intérieure s’est toujours produite.
Nous pouvons conclure de là que l'équilibre stable
des mammifères vivants suscite dans l'organisme
293
normal, en face de ce facteur subit, une réaction
formidable. Lorsque l'individu menacé perd sa
chaleur par rayonnement avec une telle énergie,
il semble que la conservation automatique de l'ani-
mal provoque une absorption d'oxygène plus que
normale; les fonctions de la digestion repartent
avec vigueur, et, à la menace des effets du froid,
les organes répondent par un travail intense, une
surproduction de chaleur et d'énergie. Il est pro-
bable que les tissus connectifs, graisses, elc., se
résorbent rapidement pour donner au sang les
principes hydrocarbonés atlaqués par l'oxygène;
l'apparition de la faim a toujours été signalée he
un quart d'heure d'expérience.
A mesure que la déperdition de chaleur augmente,
l'individu organisé fait le sacrifice des membres
périphériques. La circulation s'arrête dans toutes
les extrémités, elles sont mortes les premières.
Puis, presque tout d'un coup, la circulation cen-
trale s'arrête elle-même, lorsque l’abaissement de
la température au-dessous de la normale a atteint
10 degrés.
Refroidissement d'un organe. — M. Pictet a
essayé sur lui-même l'effet du refroidissement de
la main par rayonnement. Il a plongé le bras nu
jusqu’au-dessus du coude dans le puits frigorifique
maintenu à — 105’ sans toucher les parois métal-
liques.
On sent sur toute la peau et dans toute l'épais-
seur des muscles une impression tout à fait caracté:.
ristique et spéciale qu'aucune description ne peut
faire saisir. On éprouve une sensation qui n’est pas
désagréable d'abord, mais le devient peu à peu, et
dont le siège a l'air d'être los central ou le périoste.
L'expression « avoir froid jusqu'aux moelles »
semble prendre une signification nouvelle et vécue.
Au bout de trois à quatre minutes la peau du bras est
un peu violacée, mais la douleur devient forle et
gagne surtout les parties profondes. Au bout de dix
juinules, après avoir sorti le bras du puits frigo-
ritique, onéprouve en général une forteréactionavec
cuisson süperlicielle de la peau.
Fn maniant longtemps de la neige avec les bras
nus, la réaction cutanée subséquente ressemble,
en petit, à cetle cuisson qui apparait à la fin de
l'expérience décrite.
Poissons. — Les poissons rouges, les tanches et
généralement les poissons d’élangs d’eau douce
peuvent ètre complètement gelés, puis dégelés sans
mourir. L'expérience demande cependant à ètre
faite avec ménagement.
Si l'on congèle lentement, dans une atmosphère
de — 8° à — 15”, des poissons de cette categorie,
en ayant eu la précaution de laisser ces poissons
quelque vingt-quatre heures dans de l’eau à 0°, on
peut former un seul bloc compact de cette eau et
des poissons qu'elle contient.
COSMOS
12 SEPTEMBRE 4912
En brisant une partie de la glace et mettant à
nu un de ces animaux, on constate qu’on peut le
casser en pelits morceaux comme s'il était lui-
mème fait de glace.
On peut donc admettre que tous les poissons du
même bloc ont la même apparence intérieure et
qu'ils sont tous gelés au mème degré.
En laissant lentement fondre cette glace et les
poissons qu'elle renferme, on voit ceux-ci nager
après comme avant, sans aucun signe de malaise
apparent.
Au-dessous de — 20°, l'expérience ne réussit plus
avec les poissons rouges et les {anches.
Batraciens. — Les grenouilles subissent un
refroidissement et une congélalion de — 28° sans
périr.
A — 30° et — 35°, la plupart cessent de vivre.
Ophidiens. — Un serpent commun des champs,
appelé vulgairement lanwoui, refroidi à — 25°, a
survécu; mais, refroidi à — 35°, il est mort.
Scolopendres. — Refroidis à — 40°, trois scolo-
pendres ont parfaitement résisté au traitement et
ont vécu une fois dégelés.
Soumis à — 50°, ils ont aussi résisté.
Refroidis une troisième fois à — 90°, ils sont
morts tous les trois.
Escargots. — Trois escargots, fournis par M. le
professeur E. Yung, de l’Université de Genève, dont
deux présentaient quelques fissures à l’opercule
fermant leur coquille, ont été refroidis à — 110°,
à — 120° pendant bien des jours.
Les deux escargots légèrement fendus sont morts,
celui qui était intact a survécu au traitement et a
échappé à la mort, grâce probablement à son
opercule intact.
Œufs d'oiseaux. — Tous les œufs d'oiseaux
refroidis au-dessous de — 2° à — 3° meurent et ne
peuvent être couvés; si on ne les refroidit que jus-
qu'à — 4°, ils survivent.
Œufs de grenouilles. — Ces œufs, refroidis
lentement à — 60°, peuvent revivre et donner
éclosion aux têtards. Si le refroidissement est
brusque, ils meurent. Il est essentiel de mettre
au minimum plusieurs heures pour obtenir l’abais-
sement complet de la température.
(Eufs de fourmis. — Ces œufs, pris pendant la
saison chaude, sont très sensibles au froid.
Suivant l'état d'avancement de la larve de l'in-
secte dans l'œuf, le refroidissement peut ètre plus
ou moins grand.
Entre 0° et — 5°, tous les œufs ont été tués. Des
œufs avancés ont été tués par une température de
+ 5° maintenue quelques heures.
Œufs de ver à soie. — L'auteur a fait un très
grand nombre d'expériences, grâce à une installa-
tion industrielle qu’il a déjà organisée en Italie
N° 1442
septentrionale pour la conservation des graines de
ver à soie.
Ces œufs sont assez résistants, surtout si dès la
ponte ils n’ont jamais eu de commencement de
développement. Lorsque ces œufs pondus sont
placés immédiatement dans la chambre froide, on
peut les refroidir à — 40° sans leur faire perdre
leur pouvoir de développement. Il se passe même
dans ce cas un phénomène intéressant: les œufs
refroidis, puis soumis aux conditions de tempéra-
ture normale pour leur éclosion, dès que le prin-
temps a garni les müriers de leurs feuilles, ne
présentent presque jamais les maladies si fré-
quentes chez les œufs de vers à soie abandonnés
à eux-mêmes et subissant plusieurs mois durant les
fluctuations des températures ambiantes.
Les parasites de toutes espèces, vrais microbes
des œufs du ver, ne trouvent pas, dans ces condi-
tions, un terrain favorable à leur développement,
et la chenille sort indemne de tous ces accidents
si redoutables pour elle et si redoutés par toute
l’industrie de la soie.
Le refroidissement artificiel des œufs de ver à
soie est entré dans la grande industrie, vu ces
avantages bien positifs.
Du reste, tout ce travail découle directement des
belles recherches de Pasteur sur les vers à soie.
Infusoires. — Des rotifères, et toute la série
ordinaire des infusoires qui se développent nor-
malement par le séjour de quelque durée de végé-
taux dans l’eau stagnante, ont été gelés dans l'eau
où ils pullulaient, puis abaissés à — 80° et — 90°.
A cette température, maintenue pendant près de
vingt-quatre heures, une grande partie des habi-
tants sont morts.
A — 60°, au contraire, ils ont tous vécu, autant
que leur dénombrement était possible.
Une dernière expérience faite à — 130°, — 160
n’a plus laissé dans l’eau dégelée que des cadavres.
Protosoaires, microbes el spores, diatomées,
graines,etc.— Une trentaine d'espèces de microbes,
un grand nombre de diatomées el de graines ont été
exposées à des températures très basses. Sur tous
ces êtres vivants, sans exception aucune, les froids
les plus excessifs et les plus prolongés ont donné
des résultats négatifs, c’est-à-dire que les microbes
se sont ensuite développés tout comme à l'état
normal, les spores ont donné naissance chacune
à leur bacille, lés diatomées ont émis leurs fila-
ments protoplasmiques ou pseudopodes, les graines
végétales ont germé et poussé des bourgeons et des
plantes vigoureuses.
COSMOS
299
Dans une dernière série d'expériences, des
graines et des bacilles plongés dans l'air liquide à
— 190° wont nullement souffert et ont gardé tout
leur pouvoir de germination ou de développement.
Par contre, les vaccins et les ptomaines semblent
beaucoup souffrir des grands froids, tout comme
de la chaleur; bien qu’ils ne soient pas organisés ni
vivants, ils se montrent plus fragiles que certains
êtres organisés élémentaires.
De ses expériences, assurément très curieuses,
M. R. Pictet prétend tirer, au sujet de la nature
et des conditions de la vie, des conclusions étranges
et inacceptables.
Voici, en quelques mots, son hypothèse. Partant
de cette constatation que, au-dessous de — 128°,
aucune combinaison chimique n’a pu s'effectuer
dans son laboratoire, il imagine que, chez les êtres
vivants refroidis à — 190°, toute combinaison chi-
mique a donc été arrêtée dans la profondeur des
tissus et que, par conséquent, la vie y a aussi été
supprimée ipso facto; ainsi les microbes et les
graines ne se développeraient, après ce traitement,
que grâce à une nouvelle vie succédant à la mort;
la vie serait une propriété générale et universelle,
qui naîtrait spontanément aussitôt qu’un tissu
organisé, quoique tué par le froid, serait mis dans
des conditions convenables de température.
M. Pictet na jamais réussi à créer de toutes
pièces une cellule organisée ayant la vie; mais à
présent, il prétend avoir pu, grâce au froid, enlever
la vie à un être organisé sans toucher à son orga-
nisation, et, cette cellule morte, faire le miracle
de la ressusciter sous nos yeux, rien qu'en la
ramenant à la température normale!
On voit combien cette interprétation de la vie
est artificielle! Rien ne prouve que les réactions
chimiques soient toutes arrètées absolument, dans
les tissus organisés, par les froids de — 125.
D'ailleurs, rien ne prouve non plus, à la rigueur,
que la persistance de la vie et la faculté de revenir
à la vie dépendent de la persistance ininterrompue
des réactions chimiques; prétendre que la vie d'un
microbe cesse au moment mème où le froid a
arrêté les réactions chimiques internes, c'est
émettre une hypothèse, mais une hypothèse mau-
vaise au point de vue de la méthode scientifique,
puisque cette hypothèse n’est pas susceptible de
vérification expérimentale.
Nous préférons dire que les microbes plongés
dans l’air liquide se remettent à vivre parce qu'ils
n’ont jamais cessé un seul instant de vivre.
B. LATOUR.
300
COSMOS
42 SEPTEMBRE 194%
La moutarde.
Sanve et sénevé; mauvaise herbe et plante utile. — Difficulté de les distinguer entre
elles. — Sinigrine, sinalbine et myrosine. — Rigollot et Bornibus. — Louis XI et
Jean XXII — Divers usages des huiles de moutardes.
Tout le monde connaît, sinon de nom, du moins
pour l'avoir vue, la sanve, cette mauvaise herbe,
qui envahit les cultures, au grand désespoir des
cultivateurs.
Comme toutes les mauvaises herbes, la sanve
a un pouvoir envahissant considérable. On lap-
pelle, selon les régions, sangle, jotte, raveluche,
moutarde des champs, où moutarde bätarde.
On ne peut même pas l'employer comme fourrage,
car elle irrite la bouche des bestiaux. Le mieux,
lorsqu'elle a gagné un terrain, est de l'en arracher
et de la brüler. Les amateurs de coloris s’en plain-
dront, peut-être, car c’est elle qui, depuis le mois
d'avril jusqu'aux mois d'octobre, novembre, donne
ces beaux champs jaunes qui alternent si harmo-
1. GRAINE DE LA MOUTARDE NOIRE. — 2. GRAINE DZ LA
MOUTARDE BLANCHE. — 3 GRAINE DE LA MOUTARDE DES
CHAMPS.
(Grossissement : 10 fois en diamètre.)
nieusement, avec le violet des luzernes et le rouge
des trèfles.
Chose curieuse, la moutarde des champs, qui
n’est bonne à rien, sinon à égayer l'œil, a, comme
voisines botaniques immédiates, deux plantes,
appartenant, comme elle, à l’importante famille
des Crucifères et qui possèdent des propriétés culi-
naires et médicales très aflirmées : la moutarde
blanche et la moutarde noire. Botaniquement, le
profane peut confondre très aisément ces trois
plantes (fig. 1).
Il faut déjà une certaine habitude pour les
distinguer; à titre de renseignement très élémen-
taire, nous dirons que la moutarde des champs
a généralement des feuilles sans pétiole, tandis
que les deux autres espèces sont pétiolées. Enfin,
la graine, qui a un millimètre de diamètre chez
la moutarde noire, et 2 millimètres environ chez
la moutarde blanche, est brun foncé presque noire
(1) La sanve a des graines un peu plus grosses que
celles de la moutarde noire et le réseau de points qui
la recouvre est beaucoup plus fin.
chez la première, tandis qu'elle est jaune rougeâtre
chez la seconde. L'aspect extérieur des graines
donne aussi un utile renseignement : la moutarde
noire a des graines finement chagrinées, elles
présentent un fin réseau très visible à la loupe; la
moutarde blanche a des graines lisses.
Ces plantes appartiennent au genre Sinapis,
certains les rangent dans le genre Brassica, ce qui
les rapproche du chou, du colza et de la navette.
Leur nom commun est sénevé, ce qui les distingue
— dans le langage — de la sanve.
La moutarde noire ou sénevé noir (Sinapis
nigra de Linné, Brassica nigra de Koch) est cul-
tivée dans toute l’Europe centrale. Sa connaissance
remonte à une lointaine antiquité. Théophraste,
Dioscoride, Pline, Scribonius, Largus, en font men-
tion comme d’une plante usitée en médecine; c'est
Columelle qui, le premier, l'indique comme condi-
ment. Charlemagne, dans ses Capitulaires, en
réglemente la culture aux environs de Paris. Ce
n’est qu’au xvur* siècle que Porta (1) isole, par di-
stillation des graines, l'essence de moutarde.
En 41823, Glaser (2) reconnait que l'eau est indis-
pensable à la formation de cette essence. En 1840,
Boutron et Frémy (3) constatent que cetle même
essence se produit sous l'influence d'un ferment,
en même temps que Robiquet et Bussy isolaient ce
ferment auquel ils donnaient le nom de myrosine.
Enfin, ce n’est qu’en 41844 que Will (4) annonçait
que l'essence de moutarde était formée de sulfo-
cyanure d’allyle.
On sait, depuis longtemps déjà, que l’essence de
moutarde n'existe pas toute formée dans la farine
de moutarde.
La farine de moutarde noire contient de la
sinigrine (5), glucoside découvert par Bussy,
en 1840, et de la myrosine (6), et c’est par action
de la myrosine sur la sinigrine, agissant en pré-
sence d’eau, aux environs de 40° C., que l’essence
de moutarde, c'est-à-dire le sulfocyanate d’allyle,
prend naissance. La myrosine n'entre pas dans la
combinaison, elle agit à la façon d’un ferment, en
(1) Magie naturalis libri viginti. Rome, 1608.
(2) Repert. Pharm., 1825, p. 102.
(3) Journ. de Pharm., 1840, p. 112.
(4) Liebig's Annalen, 1844.
(5) La sinigrine se rencontre aussi dans la racine de
raifort et dans les semences de thlaspis.
(6) La myrosine est très répandue dans les Cruci-
fères, elle existe aussi dans les Résédacées, Tropéo-
les, Capparidées, etc.
N° 1442
fixant l’eau sur la sinigrine; il se forme, en même
temps, du sulfate acide de potasse et du glucose.
C'H'6AZS'KO® + H20 = CSAZC'HS +
= D. e Ce
Sinigrine Isosulfocyanate
d'allyle
(ess. de moutarde noire
+ C'H05 + SO'KH
Glucose Sulfate acide
de potasse.
Cette nécessité, de ne faire agir la myrosine
qu'aux environs de 40°, de manière à ne pas la
MOUTARDE NOIRE.
(Sinapis nigra.)
tion des semences de moutarde. Cela ne gêne pas
l’action de la myrosine et tue les bactéries qui
déterminent ces fermentations parasites.
Les graines contiennent, en outre de la sinigrine
et de la myrosine, une huile fixe, laquelle fait
rancir la farine et diminue ses propriétés rubé-
fiantes. Cette huile fixe est soluble dans l'huile de
pétrole. Rigollot est le premier qui songea à con-
server à la farine de moutarde ses propriétés
médicales en la débarrassant, par épuisement
dans l'huile de pétrole, de cette huile fixe, en même
temps qu'il imaginait ses sinapismes portatifs et de
conservation presque illimitée, en saupoudrant,
COSMOS
MOUTARDE BLANCHE.
(Sinapis alba.)
301
détruire, explique les mécomptes auxquels on s'’ex-
pose lorsqu'on veut préparer un pédiluve à la mou-
tarde, en employant de l’eau dont la température
dépasse 40°. On détruit le ferment myrosine, et
l’isosulfocyanate d'allyle ne prend pas naissance.
En même temps que se forme l'essence de mou-
tarde, on observe, pendant la réaction, la forma-
tion de produits secondaires: cyanure d’allyle,
sulfure de carbone, qui nuisent à sa bonne qualité.
C'est pourobvier à cetinconvénient que M. Brioux(1)
a conseillé l'addition de fluorure de sodium dans
la proportion de 0,4 pour 100 lors de la fermenta-
MOUTARDE DES CHAMPS.
(Sinapis arvensis.)
avec cette farine purifiée, des bandes de papier
imprégnées d’une solution de caoutchouc. Ce fut une
petite idée presque géniale qui fit le tour du monde.
L'essence de moutarde se prépare aussi, par voie
de synthèse, en faisant réagir de l’iodure d’allyle
sur une solution alcoolique de sulfocyanate de
potassium.
CHI + CAZSK = CSAzCH + KI
lodure d'allyle Sulfocyanate de Essence Iodure de
potassium de moutarde potassium.
Ce produit, absolument identique au produit
(1) Ann. Ch. anal. 17. 1912. — Schimmel, avril 1912.
302
naturel, peut remplacer celui-ci dans toutes ses
applications, et on comprend que, d'ici quelque
temps, l'essence de moutarde naturelle et, consé-
quemment, la culture de la moutarde noire aient
à subir un coup peut-être mortel, comparable à
celui que subit dans le passé la culture de la ga-
rance rendue inutile par la découverte de l'aliza-
rine de synthèse.
L’essence de moutarde est l’objet d'un certain
nombre de falsificalions. Quelquefois on lui ajoute
du pétrole, du chloroforme, du sulfure de carbone.
Le moyen de déceler cette fraude est simple. Il
suffit d'ajouter à l'huile à examiner un peu d'acide
sulfurique concentré. L’essence pure donne une
huile jaune, limpide ; l’essence adultérée se trouble
en mème temps qu'elle se divise en deux couches.
Certains fraudeurs ajoutent de l'essence de
girofle (signalée par Hager) (1). Dans ce cas, le
perchlorure de fer sera un utile réactif: l'essence
pure dissoute dans l’alcoo! ne donne rien; l'essence
contenant de l’essence de girofles se colore en vert.
La moutarde blanche (Sinapis alba de Linné,
Brassica alba de Koch), connue vulgairement sous
le nom de sénevé blanc, ouvre ses corolles jaunes
de mai en aoùt. Ses graines, plus claires que celles
du Sinapis nigra, lui ont valu son nom. Elle est
plus riche en myrosine que la moutarde noire,
aussi sa farine est-elle incorporée quelquefois à
celle-ci lorsqu'on veut en augmenter l'âcreté. En
outre, elle ne contient pas de sinigrine. C’est la
sinalbine, glucoside découvert par Robiquet et
Boutron-Charlard en 1831 (2), qui, soumise à lac-
tion de la myrosine, donne une essence de mou-
tarde, différente de celle obtenue avec la mou-
tarde noire.
CHHUAZISIOS + HO — C'HOAZES + CHAOS +
de pe CAER
Sinalbine zssence de
moutarde blanche
+ CHA ZO"SOiH
Sulfate
acide de sinapine.
e, n
Glucose
L'essence de moutarde blanche, très altérable,
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1949
peut se préparer synthéliquement, en faisant
agir le sulfure de carbone sur la p-oxybenzylamine
et en traitant le produit obtenu par le chlorure
mercureux.
Le sénevé blanc sert surtout à fabriquer la mou-
tarde de table. Et nous ne pouvons citer celle-ci
sans mentionner Dijon qui, dès le xui siècle, s'était
déjà fait un nom dans ce genre d'industrie. Pen-
dant très longtemps, la moutarde de Dijon fut pré-
parée par le mème procédé devenu trop moyenâgeux
pour soutenir avec succès une concurrence active
et intéressée. Ce fut Bornibus — aussi universelle-
ment connu que Rigollot pour ses sinapismes —
qui, perfectionnant la méthode ancienne en opé-
rant plus scientifiquement, conserva à Dijon son
antique renommée culinaire.
La moutarde de table compte, dans ses tablettes
hisloriques, des faits intéressants ; c’est ainsi qu’en
les consultant, nous apprenons que Louis XI en
était grand amateur et qu'il ne dinait jamais en
ville sans emporter son pot de moutarde. Le pape
avignonnais Jean XXII avait, pour ce condiment,
un faible tout particulier : il en mangeait, parait-il,
avec tout; et sa consommation était telle, qu’elle
avait nécessité la création d’une nouvelle fonction,
celle de rnoutardier du Pape, fonction qu'occupa
un de ses neveux. F. Hoefer, dans son dictionnaire
de botanique pralique, nous raconte que les an-
ciens mangeaient les feuilles de moutarde, cuites
ou crues, comme herbes potagères.
Aujourd'hui, la moutarde est restée un condi-
ment justement apprécié. En outre, l’huile extraite
du Sinapis juncea des indes, variété du Sinapis
nigra, est consommable. On en fait grand usage
en Russie. C'est un liquide jaune, insipide, ino-
dore, pouvant, jusqu’à un certain point, remplacer
l'huile d'olive.
L'huile de moutarde blanche sert à l’éclairage
et au graissage; celle fournie par la moutarde
noire est employée dans la fabrication des savons.
G. LOUCHEUX,
chimiste du ministère des Finances.
—— — — —
Les marrons d'Inde.
Nous eûmes déjà l’occasion d'appeler l'attention
sur la valeur des résidus industriels et le profit
qu'il ÿ avait à en tirer parti (3). C'est par millions
de francs que se chiffre, par exemple, la valeur des
scories de déphosphoration, autrefois absolument
perdues et que Îles aciéries vendent maintenant
aux agriculteurs pour la fumure des terres. De
(1) Jahresler. für Pharm,, 1RK69,
(2) Journal de Pharmacie, 1831.
(5) Cosmos, 1910.
même, cerlains débris, rejetés autrefois dans les
mines d’or à cause de la trop faible teneur en
métal précieux, sont maintenant traités à nouveau
avec avantage. Une source non moins importante
de profits éventuels peut ètre trouvée dans l’utili-
sation de certaines matières naturelles dont il fut,
jusqu'ici, pratiquement impossible de tirer parti.
C'est ainsi qu'un grand nombre de nos roults sont
ombragées par des lignes de marronniers dont Îles
jolies fleurs et le feuillage décoratif font très bel
N° 1412
effet. Or, les marrons produits ainsi en quantité ne
furent guère, jusqu'à présent, utilisés que par les
enfants qui s’en font de jolis colliers dorés en les
enfilant sur une ficelle, ou par les amateurs qui y
sculptent des chefs-d'œuvre plus ou moins réussis!
Ces applications sont évidemment insuffisantes
à donner aux marrons d'Inde une valeur quel-
conque. Aussi s’est-on efforcé de chercher à mieux
les utiliser. Empressons-nous d'ajouter que jus-
qu'à présent le succès n’a guère récompensé les
chercheurs, aucune méthode d'emploi n'ayant pu
être utilisée avec profit. Mais ceci ne retire rien
à l'intérêt des procédés successivement imaginés
pour tirer parti des marrons d’Inde, procédés qui,
modifiés et perfectionnés convenablement, seront
sürement mis au point un jour ou l'autre.
Le marron-aliment. — Le marron d'inde, en
efet, et cest sans doute justement la cause des
difficultés de son utilisation, contient diverses
matières de valeur. Mais, malheureusement, les
unes nuisent aux autres. Ainsi, malgré sa forte
teneur en fécule, le marron ne peut servir à l’ali-
mentation; il contient des principes amers qui lui
donnent un fort mauvais goût. La seule tentative
faite en ce sens paraît être le broyage suivi d'une
incorporation à de la mélasse, le tout devant être
ensuite mis en galette et servir de substitut aux
tourteaux employés à l'alimentation du bétail.
On a aussi proposé, sans grand succès, l'emploi
direct des marrons, surtout pour la nourriture des
vaches. Elles en acceptent difficilement au début,
à cause de la saveur amère; mais on les y
habitue en persistant. On peut d'ailleurs diminuer
l’amertume par la dessiccation, la macération ou
la cuisson à l’eau. Le marron est plus hygiénique
et plus nutritif cuit que cru. A l’état sec, on l’admi-
nistre, après l'avoir broyé, mélangé surtout avec
dautres aliments (grains, tourteaux, farines,
racines, etc.); il est alors beaucoup plus facilement
consommé.
41 kilogramme de marrons d'inde, à l'état nor-
mal, équivaut à 3 kilogrammes de betteraves, et à
6 kilogrammes à l’état sec. Étant astringent, il doit
être mélangé avec des aliments aqueux. Éviter
d'en donner aux vaches laitières et aux volailles.
Ce marron est très favorable aux moutons atteints
de cachexie aqueuse et aux chevaux poussifs. Le
porc ne le consomme que difficilement.
On peut cependant en donner aux porcs après
l'avoir fait cuire dens l’eau et en le mêlant avec
du son, de la farine ou des pommes de terre. Com-
mencer par en donner 500 grammes par jour
(250 grammes à chaque repas), et augmenter pro-
gressivement pour arriver à la dose de 1,0 à
à 1,5 kilogramme par jour et par porc. Jeter
l’eau dans laquelle les marrons ont cuit.
500 grammes par jour conviennent pour les
moutons; 2,0 à 2,5 kilogrammes aux bêtes bo-
COSMOS
303
vines, surtout à celles qui sont à l'engrais; 0,4 à
0,3 kilogramme par jour, à l'état sec, en farine, aux
chevaux poussifs, en mélange avec la ration. Pour
conserver les marrons d'Inde, on les dépose dans
un local sain, en couches peu épaisses, souvent
remuées
La féculerie de marrons d'Inde. — La plupart
des traitements qu'on a proposé de faire subir aux
marrons d'Inde sont à la fois plus compliqués et
plus rationnels que ceux précédemment décrits.
Les divers principes recelés par la graine se
nuisant les uns aux autres, le mieux est de les
séparer. On parvient ainsi, au laboratoire, à
retirer de 4 000 parties en poids de marrons séchés :
280 parties de malière amylacée, 30 parties de sapo-
noides analogues à ceux du bois de Panama,
60 parties d'une huile jaunâtre, quelques parties
de tannin. Comme un arbre de vingt années donne
normalement chaque été un hectolitre de marrons,
pesant 15 kilogrammes, et qu’un arbre adulte peut
fournir deux ou trois fois plus, on voit quelle
énorme quantité de matériaux uliles sont perdus
chaque année.
De tous les principes du marron d'Inde, c’est la
matière amylacée qu'on cherche d'abord à utiliser,
chose toute naturelle, étant donnée la richesse des
fruits en amidon et les débouchés faciles à trouver
pour le produit fabriqué.
Dès 1720, un magistrat de Montpellier, Bon,
imagioait un procédé d'épuration de la fécule du
marron d'Inde, le fruit pouvant servir alors à
l'engraissement des bestiaux (4). Il opérait en
lavant les marrons coupés avec une lessive de
cendres de bois et de chaux (caustifiant les carbo-
nates alcalins de la solution).
Toutefois, il ne s'agissait pas encore là, comme
on le voit, d’un véritable procédé pour l'extraction
de la matière amylacée. Aussi les chercheurs con-
tinuèrent-ils à tenter des perfectionnements de
cette trop rustique méthode. L'illustre vulgarisa-
teur de la pomme de terre, lequel, comme on
sait, s’occupait surtout de panification et voulait
faire avec la pomme de terre une farine pour sup-
pléer à la rareté du blé dans les mauvaises années,
Parmentier lui-même, s’occupa tout spécialement
du marron d'Inde dont il parvint à retirer une
fécule panifiable, sans, d'ailleurs, se faire illusion
sur les difficultés de mise au point pratique d'une
telle fabrication. La fécule de marron était ajoutée
à la farine de froment dans la proportion de
30 pour 100.
Le célèbre pharmacien PBaumé (2) décrivit une
méthode permettant de préparer, avec le marron
d'Inde, une farine panifiable ou une poudre pour
la toilelte (on faisait alors une énorme consomma-
(i) Mémoires de l'Académie royale des sriences, 1720.
(2) Mémoire sur le marron d'Inde. Paris, 1797.
304
tion de poudre de riz). Il obtint jusqu’à 417 pour
100 de fécule blanche. Vergnaud Romagnesi (1)
préconise le procédé suivant pour l'extraction de
la fécule du marron. Les fruits décortiqués sont
parfaitement broyés, après quoi on leur fait subir
un délayage dans l’eau contenant 2 à 5 pour 100
d'acide sulfurique. La fécule qui- se dépose très
vite est lavée à l'eau ordinaire jusqu’à neutralité
des dernières eaux de lavage; on la fait ensuite
sécher.
Peu à peu, et grâce aux efforts de tous ces
chercheurs, il s’établissait en France une véritable
industrie pour l'extraction de la fécule du marron
d'Inde. Et plusieurs petites usines prospéraient
dans diverses régions.
Voici, d'après Chevalier (2), comment on opé-
rait pratiquement, dans l'Eure et dans l'Isère,
l'extraction de la fécule de marron, vers le milieu
du siècle précédent. « On enlève l'écorce des mar-
rons et on les lave à leau fraiche pour les net-
toyer complètement ; on les réduit, par l’action de
la râpe, en une pulpe fine qu'on lave à grande
eau sur un tamis de crin serré. On poursuit le
lavage tant que l’eau entraine de la fécule, laquelle
est recueillie dans un vase conique placé sous le
tamis. Quand la fécule s'est déposée au fond de ce
vase, on décante l’eau surnageante, on délaye la
fécule dans une nouvelle eau et on passe à travers
un tamis de soie très fine. Après nouveau repos
de cinq à six heures, on délaye le dépôt dans cin-
quante fois son volume d’eau, on laisse reposer, on
décante et on place la fécule sur des cadres égout-
teurs garnis de coutil tendu. On fait finalement
sécher au soleil jusqu'à parfaite friabilité des
mottes de fécule. »
La mise au point définitive de la féculerie indus-
trielle du marron d'Inde fut faite surtout par
M. de Callias dans son usine de Nanterre (3). Ce
fabricant réussit à supprimer le long épluchage
préparatoire, les marrons étant directement ràpés
et l'écorce restant avec les pulpes et résidus habi-
tuels des tamisages. Au reste, la fabrication se
faisait, comme en féculerie usuelle, par traitements
successifs de broyage, arrosages sur tamis, dépôt,
lavages et décantations en cuves. Les rendements
moyens atteignirent {15 kilogrammes de fécule
pour 100 de marrons mis en œuvre (ce qui fait
encore 40 pour 100 de perte, d'ailleurs).
Vers 1860, la fécule de pomme de terre étant
cotée en moyenne 6% francs le quintal, M. de
Callias vendait la fécule de marron à 52 francs, et
(1) Annales de la Société royale des sciences...
d'Orléans, 1826.
(2) Bulletin de la Société d'encouragement, 1850.
(3) Ses procédés furent décrits par Jacquelain
(Société d'encouragement à l'industrie, 1862); Robinet
(Sociétéimpérialed'agriculture, 1857), Payenet d'autres
techniciens de l’époque.
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1912
malgré l'infériorité du prix, nécessaire pour
vaincre les préventions des acheteurs, mais nulle-
ment justifiée par une différence de qualité, réali-
sait des bénéfices appréciables.
L'usine de Callias, qui produisit 5 000 kilo-
grammes de fécule dans la première année d'ex-
ploitation (4856), fit ensuite 20 000 (1857) et jus-
qu'à 25000 kilogrammes (1860) sans prendre
jamais beaucoup plus d'extension par suite de la
difficulté d’approvisionnement. Si le prix d'achat
des marrons d'Inde (1,5 à 2,5 francs les 100 kilo-
grammes) était faible, il fut grevé lourdement par
la nécessité, au fur et à mesure que se dévelop-
paient les besoins de l'usine, d'en faire venir de très
loin.
De fait, la féculerie de Nanterre dut bientôt
fermer ses portes. Les quelques autres féculeries
de marrons firent de mème. Si bien que les belles
noix couleur d’acajou continuèrent à ne plus
Servir qu'aux enfants, heureux de s’en confection-
ner de jolis colliers. Cette déchéance est-elle donc
définitive? À comparer les féculeries de pommes
de terre et de marrons d'Inde, il semble que oui.
Mais n’y aurait-il pas changement si, au lieu de
retirer seulement du marron les 25 ou 30 pour 100
de fécule qu'il contient, on pouvait aussi en extraire
la saponine, la matière grasse, le tannin. Cette pos-
sibilité n’échappa qu’à certains chercheurs; il en
est d’autres, nous l’allons voir, qui s’en préoccu-
pèrent.
L'huile, le tannin, la saponine, les principes
amers du marron d'Inde. — Les procédés de fécu-
lerie que nous venons de décrire présentent l'in-
convénient de laisser se perdre toutes les matières
autres que la fécule. Or, certains de ces produits
sont parfaitement utilisables. Nous allons voir de
quelle façon on s'efforcera de les utiliser.
C'est à l’abbaye d’Auchin, en Flandre, qu’on uti-
lisa pour la première fois les marrons d'inde
comme graine oléagineuse. On opérait en portant
à l’ébullition un mélange d’eau et de marrons
réduits en pâte : l’huile surnageait, et l’'empois de
fécule obtenu servait aux tisserands pour l'encol-
lage des chaines. Étant donné la faible quantité
de matières grasses contenues dans le marron
d'Inde, on semble s’ètre ensuite totalement désin-
téressé de son extraction. Des récents essais de
Morten Stillesen, il résulte que cette huile, surtout
composée d'oléine, est analogue à l'huile d'amande.
Nul doute qu’on ne puisse complètement l’extraire
par l’action d'un solvant volatil et qu’on ne trouve
à l'utiliser; mais ceci ne serait bien pratique que
si le marron était utilisé aussi à d’autres destina-
tions.
En pharmacie, les essais d'utilisation plus nom-
breux et plus suivis semblent avoir amené à des
résultats définitifs fort intéressants.
Dès 1709, un sieur Tablet recommandait l’em-
N° 1442
ploi, comme fébrifuge, de poudre de marrons d'Inde
desséchés au four. Depuis, un grand nombre de
médecins préconisèrent l'emploi des teintures
d'écorces de marrons d'inde, toujours comme
fébrifuge : certains glucosides contenus là, et en
particulier l’esculine, la fraxine, possèdent certai-
nement de telles propriétés. Mais la vogue de sub-
stances beaucoup plus énergiques fit doucement
tomber le marron dans l’oubli jusqu’à ces dernières
années, où le D' Artault fit les plus intéressantes
constatationssur de nouvelles propriétés du marron
d'Inde. En prenant soin de prendre un « intrait » ou
extrait de la plante fraiche stérilisée de façon que
les principes divers cellulaires ne se modifient pas
au cours d’une conservation ou d’une dessiccation,
on remarque, à la suite d’ingestions en quantités
très faibles, la guérison des varices, des hémor-
roides. Actuellement, l'intrait de marron d'Inde
est un médicament à la mode. Reste à savoir s'il
guérira encore quand il n’y sera plus.....
Du tannin de marron d'Inde, aucun essai d'utilisa-
tion ne fut guère fait : ce qui se comprend, tous les
végétaux tannifères pratiquement utilisés étant
notablement plus riches. Mais en ce qui cuncerne
les saponines, nous connaissons, au contraire, de
nombreuses tentatives non pas d'extraction, mais
d'utilisation directe. C'est ainsi qu'en 1757 un
collaborateur anonyme du Journal économique
décrit tout au long les avantages de l'emploi du
COSMOS | 305
suc de marrons d’Inde pour laver le linge. Il eut
de nombreux émules, mais ce n’est que bien plus
tard (1888) que nous voyons éclore un procédé
bien plus pratique. Roulleaux des Houx, avant
d'extraire la fécule des marrons, les fait macérer
dans l’eau servant ensuite à dissoudre de la soude
avec laquelle on saponifiera des huiles par empi-
tage; toutes les saponines du marron restent dans
le savon, doué ainsi d’incomparables propriétés
détersives!
Se Ce savon, il est vrai, ne fut jamais dans le
commerce. N’en concluons pas qu'il s’agit d’un
procédé sans valeur, comme de l’insuccès des an-
ciennes féculeries de marrons, à l'impossibilité de
cette industrie. Bien souvent, presque toujours
même, l'invention de valeur fut des années sans
se développer parce que tel détail-technique n'était
pas bien mis au point, parce que les capitaux ou
la capacité manquaient à l'inventeur pour « lancer »
le produit fabriqué à grand renfort de réclame et
de bluff. Le succès dépend d'un ensemble complexe
de circonstances difficiles à réunir. Peut-être
couronnera-t-il les efforts de l'ingénieux chercheur
qui, profitant des travaux de ses devanciers et de ce
qui actuellement est tout à fait délaissé, réalisera
pratiquement l’utilisation de cette précieuse mine
de produits de valeur qu'est le marron d'Inde.
H. ROUSSET.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 2 septembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. APPELL.
L'origine du quartz transparent de Mada-
gascar. — M. Lacrorx a étudié à Madagascar lori-
gine du quartz byalin (cristal de roche), qui depuis le
xvu° siècle, est exporté de la Grande Ile pour les
besoins de l’ornementation et de l'optique et qui, par
sa limpidité, peut rivaliser avec celui du Brésil. Les
grandes collections publiques possèdent des cristaux
nets de ce quartz pesant plus de 100 kilogrammes, ainsi
que des blocs énormes dépourvus de forme géomé-
trique, tout en présentant une limpidité et une blan-
cheur comparables à celles du verre le plus pur.
Tous ces cristaux, gros ou petits, se trouvent dans la
partie orientale de l'île. M. Lacroix estime qu'ils
peuvent avoir trois origines différentes, et il expose
les recherches qui l'ont conduit à ces déductions.
Filaments, alignements et protubérances
solaires. — M. Ricco rappelle que l'observation spec-
troscopique des protubérances solaires, prolongée
pendant ]a journée et faite plusieurs jours de suite au
mème point du bord solaire, prouve que souvent ces
phénomènes persistent pendant de longues périodes
de temps, quoiqu'on ne puisse pas les suivre d’une
manière continuelle, puisque l’observation spectrosco-
pique ordinaire ne révèle les protubérances que sur
les bords mêmes du Soleil.
Mais le spectrohéliographe donne non seulement les
images des protubérances au bord solaire, il donne
aussi des marques de la présence des protubérances
sur le disque même, sous la forme de ces objets inté-
ressants et nouveaux qui ont été étudiés systémati-
querment par M. Deslandres et ses élèves à l'Observa-
toire de Meudon, et appelés par lui filaments et
alignements. Ces objets dérivent de l'absorption
exercée par les parties moins chaudes et plus élevées
des protubérances sur la lumière de la photosphère.
L'étude de cette question conduit M. Ricco à établir
qu’il y a une relation entre les protubérances et les
filaments et les alignements, de sorte que les fila-
ments et les alignements peuvent servir à reconnaître
l'existence et la disposition des protubérances sur le
disque solaire et à en étudier la rotation, ce que jus-
qu’à présent on ne pouvait pas faire.
Sur les Solanum Maglia et tuberosum et
sur les résultats d'expériences de mutations
gemmaires culturales entreprises sur ces
espèces sauvages. — Après la récente communi-
306
cation de M. EÈ. Heckel sur cette question, M. CLAUDE
VERNE expose les essais qu'il a poursuivis avec de
nombreux tubercules sauvages recueillis par lui, en
1911, au Chili, en Bolivie et au Pérou, pendant un
voyage effectué en 1911.
Ces tubercules, tous petits et amers, ont été cultivés
d'aprés la technique indiquée par M. Heckel, c'est-
à-dire avec divers composts de fumier de ferme et sans
engrais chimique.
Les meilleurs résultats ont été obtenus avec des
tubercules venant du Pérou; cependant, si une amé-
lioralion a été obtenue pour les récoltes de 1912, on
est encore loin de la mutation complète désirable, que
l'on ne peut exposer qu'après une nouvelle campagne
en 1913. Dans ces essais, on a obtenu les meilleurs
résultats avec les fumures complexes dans lesquelles
le fumier de gallinacés n’avait pas été exclu. Dans la
prochaine campagne culturale, on accordera la pré-
dominance au fumier de poulailler dans la composi-
tion des fumures.
COSMOS
12 SEPTEMBRE 1912
Sur les charges électriques transportées par les
rayons a et 8. Note de MM. Jean Danvysz et WiLLiau
Duaxe. — Etude de la loi d'absorption photochimique
pour les réactions produites par les rayons ultra-
violets. Note de MM. Vicror HENRI et RENÉ WuRuSER;
les auteurs établissent qu'il existe un parallélisme
tout à fait frappant entre la courbe d'absorption de
l’acétone dans l’ultra-violet et l’activité chimique des
différents rayons. — Action cardiaque comparée de
l'extrait physiologique de digitale et des autres prépa-
ralions digitaliques. Note de M. H. BrsoueT. — Ciliata
chromatophora, nouvel ordre d'infusoires à morpho-
logie et reproduction bizarres. Note de M. RoĮmvrarn
Mixkiewicz. — M. MaLtÉézos signale de bizarres effets
de l'électricité pendant un violent orage qui a éclaté
sur Athènes et sur le Pirée les 3 et # mai dernier. En
dehors de certains coups de foudre meurtriers ou
non, il s’est produit un vent électrique ou courant
d'air fortement ionisé qui n’a pas été sans causer des
désagrémentsäceuxquisesonttrouvés surson passage.
BIBLIOGRAPHIE
Les défenses vitales : les fonctions protec-
trices, par les D" Lovis et Pavut Murar. Un vol.
(19 X 12) de 200 pages (3 fr). A. Maloine, édi-
teur, 25, rue de lEcole-de-Médecine, Paris. 419412.
Les D's Murat nous ont donné déjà plusieurs
volumes intéressants, bien pensés, où de nombreux
faits sincèrement exposés suggèrent au lecteur une
saine interprétation spiritualiste. Leur nouvel
ouvrage est aussi d'un intérêt bien soutenu; mieux
que cela, d'un intérëét palpitant, surtout quand il
décrit la lutte des phagocytes (globules blancs du
sang et de la lymphe) contre les microbes qui
envahissent l'organisme : lutte longue, incessante,
aux phases diverses, aux péripéties animées.
La phagocytose n’est que l'une des fonctions
défensives de l'organisme. Celui-ci est protégé
contre l'action nocive des agents externes ou in-
ternes par les sens, par les instincts, par la dou-
leur monitrice, par nombre de dispositifs anato-
miques, par des organes protecteurs spéciaux,
comme Île foie, le rein, les glandes à sécrétion
interne. Il acquiert l’immunité, grâce à une variété
extraordinaire d'agents chimiques (antitoxines ou
antiferments) qui s'élaborent dans le sérum sanguin.
L'introduction de n’importe quel albuminoïdeétran-
ger, n'importe quelle toxine, qu'il s'agisse de venin
de vipère, de scorpion, d'abeille, d'araignée ou de
scolopendre, ou simplement de sérum d’anguille,
détermine la formation du remède, de l'anticorps
spécifique, substance qui mexistait pas jusque-là
dans le sang et qui doit rendre la toxine inoffen-
sive à l'avenir. N'est-il pas étonnant que l'organisme
soit armé pour résister à des causes de destruction
aussi peu probables, aussi exceptionnelles que
l'inoculation du venin d’un serpent habitant à deux
mille lieues d’ici ou l'injection expérimentale du
sang d’un animal étranger dans ses propres vais-
seaux? Tous les cas sont, pour ainsi dire, prévus
à l'avance.
Ainsi, pour conclure avec Richet: « En voyant
les moyens à la fois minutieux et puissants que la
nature a mis en œuvre pour assurer la perpétuité
de l'espèce, on ne peut supposer que ces extraor-
dinaires et compliqués mécanismes d’une harmonie
prodigieuse soient l'effet du hasard. »
Le sous-titre de l'œuvre montre bien la variété
des questions traitées :
Défenses anatomiques et physiologiques, géné-
rales et locales; précis des découvertes nouvelles
relatives aux fonctions antixéniques et anti-
toxiques; la phagocytose; cytases et agressines;
l’immunité; antigènes et anticorps, antiferments,
lysines, coagulines, agglultiniaes, opsonines, com-
plément; anaphylaxie; séro-diagnostic; sérums
thérapeutiques; catalases;, glandes à sécrétion
interne; hormones.
Histoire des légumes, par M. GERGrS GIBAULT,
bibliothécaire de la Société nationale d’horticul-
ture de France. Un vol. in-8 de 410 pages avec
gravures (5 fr). Librairie Horticole, 84 bts, rue
de Grenelle, Paris.
C'est un ouvrage original et curieux que celui
de M. Gibault, et dont l'intérêt se maintient d'un
bout à l’autre. De prime abord, les légumes ne
semblent intéressants que pour ceux qui les font
pousser et pour ceux qui s'en nourrissent. Mais
c'est à un tout autre point de vue que se place
N° 1442
l'auteur. Il recherche les origines des diverses
plantes de nos potagers, nous les montre à l'élat
sauvage, étudie leurs transformations successives
sous l'influence du changement de milieu et de la
sélection opérée par l’homme. Il est alors très inté-
ressant de parcourir à sa suite l'histoire des
légumes, d’autant qu'il n’a négligé aucune source
de documentation, précise beaucoup de faits et
rappelle, en les mettant au point, loutesles légendes
qu'il a pu relever au cours de ses laborieuses
recherches. Nous avons signalé ici même (n° 1418)
ce qu'il faut penser, d'après l'érudit écrivain, de
Parmentier comme inventeur de la pomme de
terre.
L'ouvrage est limité à la description des plantes
polagères cultivées sous les climats tempérés euro-
péens; il intéressera vivement le monde agricole
et horticole, aussi bien que le grand public, qui
lira avec intérèt le côté archéologique, historique
et anecdotique de l'histoire des légumes.
Ajoutons que cet ouvrage a été honoré d'une
médaille d’or de la Sociélé nationale d'horticulture
de France.
Les Alpes de Provence: Guide du touriste, du
naturaliste et de archéologue, par G. TARDIEU.
Un vol. in-46 de la collection des guides Boule,
avec gravures et carte (cartonné toile, 4,50 fr).
Librairie Masson, 120, boulevard Saint-Germain,
Paris.
Les guides Boule ne sont pas conçus sur le plan
habituel de ces sortes d'ouvrages; ils contiennent
naturellement une partie qui indique les itinéraires
en chemins de fer, les routes, les centres d’excur-
sions, et mentionnent toutes les curiosités qui
doivent mériter l'attention des touristes. Celte
partie, qui se retrouve dans tous les ouvrages du
mème genre, est ici très sérieusement étudiée et
mise au point.
Mais ce qui fait l'originalité et la valeur de cette
collection est la première parlie du volume, consa-
crée à une monographie très complète de la région.
Les voyageurs plus éclairés, qui cherchent à s'in-
struire tout en parcourant un pays à eux encore
inconnu, y trouveront nombre de renseignements
utiles sur la géologie, l'orographie, l'agriculture,
la faune et la flore, les coutumes.
Par ce moyen, les touristes apprennent à mieux
connaitre les diverses contrées dans lesquelles ils
se rendent.
Ce nouveau guide comprend les Basses-Alpes
avec, du Vaucluse, la région montagneuse qui se
rallache étroitement aux massifs bas-alpins. Si
elles n’ont pas l'aspect aussi imposant que les
Alpes de Savoie et du Dauphiné, les Alpes de Pro-
vence offrent cependant aux touristes de superbes
belvédères, des crêtes accidentées, de capricieuses
successions de vallées.
COSMOS 307
L'auteur a su s'adresser aux meilleures sources
pour y puiser les renseignements qui lui étaient
nécessaires, son guide est excellent et des plus
complets.
Le Maroc physique, par Louis GENTIL. Un vol.
in-16 broché de la Nouvelle collection scienti-
fique (3,50 fr). Alcan, 108, boulevard Saint-Ger-
main, Paris.
L'auteur débute par résumer létat des connais-
sances anciennes sur le Maroc : depuis les premières
notions rapportées par les Phéniciens, en passant
par les Romains, les Portugais et les Espagnols,
jusqu’à la récente occupation française, nous sui-
vons les progrès de la géographie dans cette région.
L'œuvre proprement personnelle de M. Gentil con-
siste dans l'étude géologique du Maroc. Il rattache
étroitement les grandes chaines du Maghreb au
système orographique du Nord africain. Il étudie
d’abord le prolongement sous l'Atlantique de l'Atlas
effondré à une époque récente, et il met au point
les données scientifiques qui peuvent éclairer la
question de l’Aflantide, à l'existence de laquelle
il ne croit guère. Du côté du continent, l'Atlas
dépend des chaines algériennes, tandis que le Rif
parait plus indépendant. Le relief du sol et l'évolu-
lion du réseau hydrographique forment un cha-
pitre spécial, Restent les questions de climat, de
flore, d'hydrologie souterraine, de terrain, qui sont
envisagées {our à tour avec clarté. M. B.
Livres parus récemment :
Les bles nuirissent, par I. BORDER.
A l'ombre du clocher, par L. Gros.
La meilleure part, par E. PoITEAU.
Chaque vol. in-18 (3,50 fr). Librairie Grasset,
61, rue des Saints-Pères, Paris.
Nous ne rendons pas habituellement compte des
romans; mais nous signalons volontiers ces trois
ouvrages d'agréable lecture qui peuvent ètre mis
entre toutes les mains.
Le chauffage par Uacétylène, considéré dans
ses applicalions domestiques et industrielles, par
P.-V. Lioranb. Une brochure de 36 pages (0,50 fr).
L'acétylène et les Compagnies d'assuranres.
Une brochure de 16 pages (0,25 fr).
Office central de Facélylène, 104, bonlevard de
Clichy, Paris.
Observatoire central de Ulnido-Chine: bulletin
pluviométrique année 1911, publié par G. LE CAUET.
Observatoire ventral Phu Lien ({ndo-Chine:.
Annual report of the director of the Weather
Bureau, for the year 1907 : Meteorological obser-
vations made at the secondary stations during the
calendar year 1907. Bureau of printing, Manille
(Philippines).
308
COSMOS
19 SEPTEMBRE 19149
FORMULAIRE
Le contrôle du lavage des épreuves photo-
graphiques. — Le journal américain Camera
Craft signale un procédé commode pour suivre
graduellement l'élimination de l'hyposulfite au
cours du lavage des épreuves sur papier. La mé-
thode consiste à additionner le bain de fixage
d’une solution d’éosine à 1 pour 100, à raison d’une
partie de cette solution pour 50 parties de bain de
fixage. Les épreuves y prennent une légère teinte
rouge qui ne disparait que lorsque la totalité du
fixateur est éliminée. Cet artifice permet souvent
de se rendre compte, par la persistance de taches
rouges locales, d’un contact fortuit entre deux
épreuves au cours du lavage, contact qui a entravé
l’élimination de l'hyposulfite. (Photo-Gasette.)
Fixage provisoire des négatifs photogra-
phiques. — Le fixage provisoire a pour but de
rendre un cliché, après développement, insensible
à l’action de la lumière pendant un temps plus ou
moins long ; il ne dispense pas du fixage définitif
à l’hyposulfite de soude, mais permet de retarder
celui-ci ainsi que le lavage. Cette manière d'opérer
est très utile en voyage, où on n’a ni le temps ni
l'installation nécessaire pour de semblables opéra-
tions, et où cependant il est parfois utile de déve-
lopper une vue à laquelle on tient, pour pouvoir
la recommencer en cas d'insuccès.
Voici une méthode de fixage provisoire indiquée
par la Revue internationale de photographie :
Au sortir du bain développateur, plonger le
cliché, après Pavoir égoutté un instant (inutile de
le laver), dans une solution de 2 pour 100 d'acide
tartrique et l’y laisser de une demi-minute à une
minute au plus en balançant doucement la cuvette ;
l'opération est alors terminée et le cliché peut, à
partir de ce moment, être impunément exposé à la
lumière diffuse. Il n'y a plus qu’à le laver sommai-
rement et à le sécher, la dessiccation pouvant
d’ailleurs être activée par une immersion d'un
quart d'heure dans l'alcool dénaturé.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appareils décrits:
Le cinématographe de M. Cranz, pour prise de vues
très rapides, est construit par M. Hans Boas, à Berlin.
O, 27 (Allemagne).
M. R.D.,à N. — Les Études : 25 francs par an pour
la France. Bureau d'édition des Études, 50, rue de
Babylone, Paris. — Vous trouverez ce que vous cher-
chez au sujet des Pyramides et de la région avoisi-
nante dans l'ouvrage de Goperroip Kurth : Mfisraim,
souvenir d'Égypte. Bruxelles, librairie Albert Dewit,
53, rue Royale. L'auteur est un historien et un litté-
rateur belge catholique de grand renom. — Nous
n'avons pas été à mème de vérifier si P. Loti a décrit
cette région.
M. F. M., à Q. — Vaturr, publié par Macmillan et
C“, St-Martin’s Street, Londres, W. C.; abonnement
annuel, 4 livre 10 shilling 6 pence.
M. D.,à H. — La revue Field est publiée à Londres,
Bream’s buildings, Chancery Lane, W. C. — Nous ne
saurions vous dire dans quel numéro a paru l’article
sur la coloration des œufs.
M. N. G., à T. — Nous ne connaissons pas la for-
mule de cetle encre à décalquer au moyen du fer
chaud; mais on a signalé un produit qui peut rem-
placer ce procédé, On mélange trois parties d'encre
noire ordinaire avec une partie de glycérine. On écrit
avec ce mélange; les traits se reproduisent sur l'élotfe
par la simple pression de la main,
M.T. 5.,à F. — Nous vous remercions; nous serons
heureux de connaitre le systéme simple qui permet
de saisir avec cette précision les signaux horaires;
jusqu'à présent, on n'obtenait quelque précision que
par des moyens assez compliqués, employés pour la
détermination des longitudes. Nous envoyons votre
adresse à un de nos correspondants, puisque vous le
permettez.
M. J. de R. — Il n’existe pas de bibliothèque rou-
lante de ce genre, à rause du prix élevé des ouvrages
qui la composeraient. — Le Cosmos a dit tout ce que
nous savons sur ce sujet dans la correspondance du
n° 1434, p. 84. Vous y trouverez aussi des indications
sur les répertoires que l’on peut consulter.
M. P. E., à N. — Nous n'avons pas expérimenté, en
effet, le système Castaing. Nous avons eu occasion
d'en signaler un autre, que d'ailleurs nous n’avons pas
essayé non plus: celui du D' Bonnette. Voir Cosmos,
n° 1315, p. 395 (9 avril 1910). — En dehors des appa-
reils mécaniques, nous ne saurions vous donner
d'autres indications.
M. L,. C., à B.-le-R. — Les praticiens tiennent, en
effet, à mettre la pointe en bas. Il est indispensable
de ne mettre en conserve que des œufs non félés ; ils
doivent ètre examinés avec soin à ce point de vue; il est
à supposer que l’on n’avait pas pris cette précaution.
M..C. de St-M., à A. — 1° Pour la destruction des
herbes dans des cours ou dans les rues pavées, vous
trouverez une excellente recette dans ce volume du
Cosmos, n° 1432, p. 28 (4 juillet 1912). — 2° Les taches de
sang sur les étotfes sont assez difficiles à enlever, et
c'estimpossiblesion a employé l’eau bouillante pour les
faire disparaître; si cette erreur n’a pas été commise,
il faut laver l’étoffe souillée, sans employer de savon,
dans une cuvette d'eau tiède dans laquelle on à fait
dissoudre une cuillerée à café d'acide tartrique;
exprimerensuitesoigneusement l’acide tartrique avant
de rincer.
Imprimerie P. Ferox-Vrau. 8 et 6, rue Bayard, Paris, VIII*.
Le gérant : R. PETITBERAT.
No 1413 — 19 sepreMBre 1919
COSMOS
309
SOMMAIRE
Tour du monde. Essai de production artificielle de la pluie. Les victimes de la foudre. Transfusion du
sang de veine à veine. Développement des tétards de grenouilles dans l’eau de mer. Le travail de fermen-
tation accompli par une bactérie. La lente croissance des arbrisseaux polaires. Les vipères dans le nord
de la France. La France a possédé de grandes richesses houillères. Un poste domestique de télégraphie
sans fil. Le nouveau campanile de Venise. Au canal de Panama. Fours crématoires automobiles, p. 309.
Le ponton dérocheur du canal de Suez, Jacores Boyer, p.314. — Procédés modernes de métallurgie:
II, De la fonts à l’acier, H. Rousser, p. 316. — L’avoine dans l'alimentation humaine, PLUcHET,
p. 320. — La gorge de la Tamina et les sources de Pfeffers. D’ P. GoGcra, p. 321. — Aviation:
une idée nouvelle, LuciEex FourNier, p. 325. — Ce qu'on voit dans un escargot; une lecon d’obser-
vation (suite), HENRI CovriN p. 328. — L’acide carbonique en œnologie, Francis Manae, p. 331. —
Sociétés savantes; Académie des sciences, p. 333. — Bibliographie, p. 334.
TOUR DU MONDE
MÉTÉOROLOGIE
E:sai de production artificielle de pluie. —
La ville de Battle Creek (Michigan) s'est signalée,
le 23 juillet, par un grandiose essai de production
artificielle de la pluie au moyen de décharges de
dynamite. L’exhibition, dit le Scientific American
(10 août), a merveilleusement réussi, à supposer
que les organisateurs de l'affaire aient surtout tenu
à créer un énorme afflux de visiteurs, ou bien à
favoriser en grand le commerce des explosifs.
En effet, on a brûlé, dans cette après-midi,
2000 kilogrammes de dynamite.
Une aire de pluie d'environ 230000 kilomètres
carrés, qui passait la veille au matin sur le Dakota
septentrional et le Dakota méridional, avait dérivé
vers l'Est et atteignit Battle Creek le jour des
explosions. En fait, il bruina à l’endroit même
quelques heures avant le début des expériences,
tandis que sur tout le sud de l'Etat de Michigan, au
cours de la journée, il tomba de fortes averses.
En dépit de ces faits, les fabricants de pluie arti-
ficielle ont prétendu que la petite pluie qui est sur-
venue dans leur voisinage était bien le résultat de
leurs explosions de dynamite. Notre confrère le
Scientific American dit qu’il est inutile de vouloir
leur enlever cette persuasion. Mais, ajoute-t-il, tout
‘homme initié tant soit peu à la science de la météo-
rologie et muni de la carte quotidienne du temps
publiée par le service météorologique aurait pu,
sans dynamite, « faire » de la pluie ce jour-là à Battle
Creek, tout comme un voyageur en pays sauvage,
pourvu qu’il ait à sa disposition l’almanach, peut
« faire » une éclipse de Soleil ou de Lune à jour
dit de manière à en imposer aux indigènes.
D’autres essais de pluie artificielle, quoique moins
éclatants, ont été exécutés autrefois au Texas et
plus récemment, en 1907, en Nouvelle-Zélande :
T. LXVII. No 1443.
tous ont été négatifs (Cosmos, t.
p. 1412).
LX, n° 1253
Les victimes de la foudre. — Plusieurs
seront étonnés d'apprendre que la foudre cause
plus d’accidents mortels que les chemins de fer.
Le Bureau météorologique des États-Unis a établi
que, de 1890 à 1900, il y eut un total de 4 107 per-
sonnes tuées par la foudre aux États-Unis: soit en
moyenne 373 par an.
Les annés 1899 et 1900 furent privilégiées, si on
peut dire:
502 tués,
713 tués,
en 1899,
en 1900,
S20 blessés ;
973 blessés.
Proportionnellement, sur {00 victimes, en 1890
il yen eut:
Frappées à l'air libre.................. 45
— dans les maisons............. +3
— sous les arbres.....,.......... Hi
en 1900:
Tuées à l'air libre.......,.............. 70
— dans les maisons................. 22
— sous les arbres.......,............. 8
Blessees à Pair libre. .................. 63
— dans les maisons.......,...... 34
— sous les arbres..,............. 3
SCIENCES MÉDICALES
Transfusion du sang de veine à veine.
— La Gazette des hiüpilaur (3 sept.) décrit
sommairement une méthode nouvelle de trans-
fusion du sang que deux docteurs américains,
MM. A.-H. Curtis et V.-C. David, ont mise au point
en pratiquant, pendant un an, une moyenne de
deux transfusions expérimentales par semaine jn
animà vili, et, en plus, quatre transfusions chez
l'homme. Ils estiment leur méthode de transfusion
310
de veine à veine bien préférable à la transfusion
d’artère à veine. Oy,
L'appareil employé se compose d'une grande
ampoule allongée munie de deux pointes perforées
destinées à être introduites, l’une dans le bout péri-
phérique de la veine du donneur, l’autre dans le
bout central de la veine du receveur. D'autre part,
à son autre extrémité, l’ampoule porte un troi-
sième orifice muni d’un tube de caoutchouc qui la
met en relation avec une seringue de 4100 centi-
mètres cubes qui sert à faire varier à volonté le
degré de pression ou de vide relatifs dans l'am-
poule, suivant que l’on veut faire venir le sang de
la veine du donneur ou le faire entrer dans la veine
du transfusé. L'appareil est stérilisé à sec et tout
l’intérieur est enduit d'une légère couche uniforme
de paraffine (au moyen d’une immersion dans la
paraffine fondue).
Le bras du donnenr est préparé comme pour
une saignée, la veine la plus saillante mise à nu
et coupée; une pince à mors élastique est mise sur
le bout périphérique, une ligature permanente sur
le bout central. La même chose est répétée sur le
bras du receveur, sauf que la pince élastique est
mise sur le bout central et la ligature sur le bout
périphérique de la veine. Alors, les deux pointes
de l'ampoule sont introduites comme il a été
dit plus haut, on relâche la pince du bout péri-
phérique du donneur; le sang monte dans l'am-
poule; s’il vient trop lentement, on fait un vide
relatif à l’aide de la seringue, mais cela n’est géné-
ralement pas nécessaire. Alors, on comprime la
veine du donneur avec les doigts, puis on ouvre la
veine du receveur, et, à l’aide de la seringue, l'on
y fait entrer le sang à la vitesse voulue. Puis l’on
recommence. Les ampoules ont de 400 à 400 centi-
mètres cubes de capacité. |
Il faut en avoir plusieurs dont les pointes sont
plus ou moins grosses, à cause des variations que
l'on rencontre dans le calibre des veines.
BIOLOGIE
Développement des têtards de grenouilles
dans l’eau de mer. — Le professeur Pearse a eu
l'occasion d'observer aux iles Philippines, à plu-
sieurs reprises, des grenouilles vivant dans les
estuaires dont l’eau était presque aussi salée que
celle de l’océan. Comme d'habitude les grenouilles
sont incapables de résister à l’eau de mer, M. Pearse
a capturé plusieurs exemplaires decelles qui offraient
un mode de vie aussi parliculier, mais il n'a pas
élé possible de les délerminer; il s’agit donc de
Hana d'une espèce inconnue. Dans des flaques
abandonnées par l’eau et souvent recouvertes à
chaque marée montante, l’auteur a vu une mulli-
tude grouillante de tètards nouvellement éclos et
de tèlards plus âgés; il en a vu également dans des
trous creusts par les crabes, Sesarma bidens, et
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1919
remplis d’eau; les tètards ainsi que les grenouilles
adultes semblaient parfaitement bien supporter
l’eau salée de leurs habitats. Une analyse précise
a montré que l’eau est très légèrement diluée par
rapport à l’eau de mer.
La Revue scientifique (1 septembre) rappelle à
ce sujet que, dans un travail paru en 1906, M. Bohn
et Mile Drzewina ont montré que l’eau de mer
diluée exerce une action excitatrice sur l’éclosion
des œufs et sur la croissance des embryons et des
tétards de Rana temporaria et R. fusca. Chose
curieuse, cette action n’est pas directement pro-
portionnelle à la concentration de l’eau. Il y a un
certain optimum, qui correspond à 6 grammes de
sel marin par litre; au-dessus et au-dessous de
cet optimum, par conséquent dans de l’eau plus
salée ou moins salée, les résultats sont moins
bons et même franchement mauvais. Alors que les
têtards placés dans la solution à concentration
optimum éclosent plus tôt et s’accroissent plus rapi-
dement que les témoins, ceux placés dans diverses
autres solutions accusent un retard de croissance.
Les auteurs ont mème constaté qu’au-dessus et au-
dessous de la solution optimum on obtient assez
souvent des têtards monstrueux. Dans les deux cas,
d’ailleurs, les monstres se présentent avec des
caractères différents : minces, à queue allongée et
élroile, avec une courbure à concavité dorsale
très accentue, dans le premier cas; courts, à corps
gros et large, à queue très courte et large, dans le
second cas.
Lə travail de fermentation accompli par une
bactérie (Prometheus, 41 aoùt). — M. Otto Rahn
a évalué la quantité de substance qu’une seule
cellule vivante, un ferment figuré, est capable de
transformer en un temps donné. Il s’est adressé à
la bactérie qui acidifie le lait, Bacterium lactis
acidi, etil a effectué un total de 57 déterminations
sur huit races différentes de ce ferment.
En admettant que les bactéries se multiplient en
progression géométrique (suivant la série, 4, 2,
4, 8, 16, 32...) et que toutes les cellules d’une cul-
ture jeune aient la même activité individuelle, il
arrive à cette conclusion qu'un individu du Bacte-
rium lactis acidi produit par heure 48 X 10-!° mil-
ligramme d’acide lactique. Pour le rappeler à ceux
qui ne sont pas familiarisés avec celte notation,
10-° indique une fraction ayant pour numérateur
l’unité et pour dénominateur ‘unité uivie de
40 zéros; ou encore :
10-19 — 0,000 000 000 1
et 18 x 10-12 — 0,000 000 001 8.
La quantilé d'acide lactique que produit en une
heure une bactérie est justement du mème ordre
que le poids même de cette bactérie.
Suivant les races qui furent soumises aux essais,
la production moyenne d'un individu varia de
7,4 x 10-19 à 32,5 Xx 40-1° milligramme par heure.
N° 1433
Les cultures Agées ont une moindre activité de fer-
mentation el de multiplication. L'influence de la
température est aussi très claire : à 30° ou 35°, la
fermentation est plus intense qu’à la température
du laboratoire.
La lente croissance des arbrisseaux polaires.
— Le D' Fr. Kanngiesser, qui s’est intéressé à la
détermination de la longévité des arbrisseaux de
l'Europe, a eu aussi l'occasion d'examiner des
échantillons d’arbrisseaux polaires recueillis au
Spitzberg par M" Hanna Resvoll-Holmsen. A la
question de l'âge maximum que ces arbrisseaux
peuvent atteindre sous le climat du pôle, il est
malaisé de répondre dès maintenant; on peut dire
pourtant que la longévité de toutes ces espèces
végélales dépasse la longévité de nos espèces
d'arbrisseaux indigènes.
Par contre, sur un autre point la réponse est
très claire : l’épaisseur des couches de croissance
annuelle des arbrisseaux polaires n’est que le quart
de l’épaisseur constatée sur les mêmes arbrisseaux
poussant en nos régions tempérées. Un arbrisseau
polaire d'environ vingt ans a une tige épaisse comme
un tuyau de plume.
Ainsi, un exemplaire du Dryas octopetala de
vingt ans, de la baie de la Croix, mesurait 1,9 mm
de diamètre, avec des anneaux de croissance de
0,06 mm seulement, tandis qu’un exemplaire de la
même espèce recueilli à Scharnitz, dans le Tyrol,
bien qu'âgé seulement de dix-huit ans, avait 145,0 mm
de diamètre, avec des couches annuelles de 0,32 mm
en moyenne.
Un bouleau nain, Betula nana, de douze ans, de
la baie de Col, au Spitzberg, mesurait 4 millimètres
de diamètre, avec descouches annuelles de 0,15 mm,
tandis qu'un exemplaire semblable et de mème âge
cueilli à Schongau avait une tige de 14 millimètres
et des couronnes de croissance de 0,58 mm.
ZOOLOGIE
Les vipères dans le nord de la France. —
L'enquête faite par la Société d’acclimatation en
1863 ne signale aucune espèce de serpents venimeux
dans le département de l'Aisne.
M. Gaillot, ingénieur agronome, nousapprend dans
une lettre au Journal d'Agriculture pratique que
l'on aurait tort de se fier trop complètement aux
résultats des enquêtes de ce genre :
« Des trois espèces de vipères que nous possédons
en France, deux seulement peuvent être rencon-
trées dans la région du Nord; ce sont: Vipera
aspis ou «l’aspic» et Vipera berus ou la «péliade».
La troisième, qui est Vipera ammodytes, ne se
trouve que dans la région méditerranéenne.
» L'aspic, très commune dans le midi et le
centre de la France, ne dépasse guère, vers le
Nord, les environs de Paris; cependant, sa pré-
COSMOS
311
sence esl signalée par l'enquête précitée dans
l'Oise et dans Seine-et-Marne. On pourrait donc
vraisemblablement la rencontrer aussi dans l'Aisne.
Toutefois, nous n'en possédons jusqu'alors aucun
exemple.
» La péliade remonte beaucoup plus vers le
Nord; elle est très commune dans l’est de la
France, et l'enquête signale sa présence dans l'Oise,
la Somme et le Pas-de-Calais.
» [l convient d'y ajouter le département de
l'Aisne. Depuis quelques années, nous avons pu
recueillir dans ce département un assez grand
nombre d'échantillons de ce serpent venimeux.
» La plupart ont été rencontrés dans la région
Sud du département. Ils abondent en certains
endroits du Laonnais et du Soissonnais.
» Quelques morsures de ces reptiles occasion-
nèrent des accidents très graves chez les personnes
qui en furent victimes.
» Des renseignements que nous avons recueillis,
il résulle que le nombre de ces animaux augmente
sensiblement.
» [i est donc bon de savoir qu'il n'existe pas seu-
lement des couleuvres dans le département de
l'Aisne. C’est une croyance malheureusement très
répandue dans ce pays, et qui est souvent cause
des accidents qui se produisent,
» Maurice Gaillot. »
MINES
La France a possédé de grandes richesses
houillères! comme le rappelle Echo des Mines
du $ septembre; mais, hélas! les cessions faites
par Napoléon à l'Amérique nous ont enlevé ces
bassins houillers formidables découverts par des
Français.
On connait peu ce point de notre histoire colo-
niale: dans la vallée du Haut-Mississipi, la pre-
mière mention positive de l'existence de combustible
minéral sous forme de houille semble ètre celle
qu’en firent les missionnaires Jésuiles français de
l'Assiniboine (Minnesota). En 1659, au sujet de la
tribu Poualak d'Assiniboine, ils faisaient la remarque
suivanle: « Comme chez eux le bois est rare el
petit, la nature leur a enseigné à lui substituer du
charbon de terre comme aussi à couvrir leurs
wigwams avec des peaux. » Il est tout à fait pos-
sible aussi que les Indiens de l'lowa, des prairies
du Nord aient antérieurement fait usage des gise-
ments de lignite de la région tels qu'ilssetrouvent,
par exemple, dans le comte de Browa, près des
sources chaudes de la rivière des Moines,
Lorsque La Salle, un francais, établit en 16N0
le Fort Crève-t‘æur sur la rivière d'Ilinois, dans
les environs où se trouve actuellement Peoria, on
trouva et utilisa de grands gisements houillers. Le
P. Hennepin, un Français, qui élait associé avec
La Salle, mentionne dans le journal de ses voyages
312
l'existence de charbon en ce lieu. Dans une édition
anglaise de sa carte de la région du Haut-Missis-
sipi, emplacement de ces gisements est clairement
représenté. Il ne s'était nullement trompé, c'est ce
qu'ont amplement démontré les développements
ultérieurs.
Dans ses lettres relatives aux productions natu-
relles se trouvant le long de la rivière de l'Illinois,
écrites quelques années plus tard, La Salle aussi
rapporte le fait de l’existence du charhon à Crève-
Cœur. Ges lettres ont été récemment réimprimées
à Paris, par Margry.
Une autre mention très précoce du charbon dans
le Haut-Mississipi est celle de Le Gardeur de l'Isle,
un Français toujours, qui, en 1722, écrivait du
Fort de Chartres, près de Kaskastria, qu'il avait
accompagné un M. Renault à la rivière de l'Illinois
pour y chercher des mines de cuivre et de charbon.
Les Français connurent donc de bonne heure
l'existence du charbon qui affleure près de l’em-
bouchure du Missouri à un point nommé La Char-
bonnière. Environ un siècle plus tard, en 1805,
Pike, quand il commença sa fameuse tournée aux
sources de l’Arkansas, passa par cet endroit. Il
dit: « Six milles en dessous de Saint-Charles, du
coté Sud, en face d’un village appelé Florissant,
est une colline de charbon nommée par les Fran-
cais « La Charbonnière ». C’est un gisement solide
qui pourra probablement fournir assez de charbon
pour la population entière de la Louisiane. »
Enfin, pour ètre complet, en Pensylvanie, vers
1704, vingt ans après que le privilège de colonisa-
tion avait été accordé par Charles IT à William
Penn, l’anthracite se fit connaitre dans le district
de Wyoming. En 1729, vingt-cinq ans plus tard,
on le découvrait dans la vallée de Lehigh. Les
charbons de Virginie paraissent avoir été exploités
pour la première fois près de Richmond en 1750.
De là ils étaient expédiés sur Philadelphie, New-
York et Boston.
En résumé, n'est-il pas curieux de penser que
nous avons possédé tous ces grands bassins du
Haut-Mississipi? Bonaparte rèva de créer là un
grand empire colonial, mais l'échec de l'expédition
de Saint-Domingue changea ses idées, et il liquida
en vendant la Louisiane aux Etats-Unis pour
60 millions de francs (1803). Le territoire ainsi
cédé est celui du Mississipi au Pacifique, compre-
nant les États et territoires actuels de Louisiane,
Arkansas, Oklahoma, Territoire indien, Kansas,
Missouri, lowa, Minnesota, Nebraska, Oregon,
Colorado, Dakotah, Idaho, Utah, Montana, Wa-
shington, Wyoming. Cela vaut tous les Congo,
tous les Maroc, tous les Tonkin du monde.
On ne pouvait pas se douter à cette époque de
l'immense importance que prendrait un jour la
question du charbon minéral dans un pays surtout
où le bais était surabondant.
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
ÉLECTRICITÉ
Un poste domestique de télégraphie sans
fil. — S'il est interdit d'établir un poste complet
de télégraphie sans fil pour la réception et la trans-
mission des dépêches, rien ne peut empêcher les
particuliers de recueillir au passage les ondes pro-
duites par les postes autorisés, ondes qui par-
courent l’atmosphère, et qu'on peut assimiler au
son des cloches qu’on ne saurait interdire d'en-
tendre.
Or, depuis que la tour Eiffel signale l'heure
exacte et les éléments météorologiques, nombre
de personnes, même en dehors des marins et des
fabricants de chronomètres — auxquels une telle
communication journalière est si précieuse pour
régler leurs montres, — désirent bénéficier de ces
indications, qui, en somme, sont données aux frais
des contribuables.
Quelques-unes un peu versées dans la question
de télégraphie sans fil, des lecteurs du Cosmos,
par exemple, ont établi chez elles un poste récepteur
de fortune; un fil de métal plus ou moins long,
une petite pile, un détecteur de construction facile
et un téléphone y suffisent.
Mais bien des gens reculent devant les difficultés
d'une installation si simple. Un de nos amis, grand
amateur de ces questions, après s’ètre créé un de
ces postes avec des moyens sommaires, a eu l'heu-
reuse idée d'en réunir les éléments principaux dans
une caissette : détecteur, pile, téléphone, bobines
d'accord pour régler l'appareil suivant les lon-
gueurs d'ondes des postes transmetteurs.
Cette boite porte deux bornes, l'une pour établir
une communication avec la terre (conduites d’eau
ou de gaz, par exemple, chaine de paratonnerres),
l'autre pour recevoir l'extrémité du fil qui con-
stitue l’antenne. C’est très commode, et tout le
monde peut utiliser l’appareil.
La maison Ducretet a fait établir des postes de
ce genre pour ceux qui ne peuvent ou ne savent
établir un pareil ensemble, et désormais rien de
plus facile que d'avoir chez soi, chaque jour, les
pronostics du temps et heure exacte. A la cam-
pagne, pour ce dernier objet, on utilisait jusqu'à
présent un cadran solaire plus ou moins perfec-
tionné; mais, outre que les indications de ces ca-
drans n’ont qu’une approximation relative, elles
exigent des corrections pour l'équation du temps
et la longitude, tandis que le signal de la tour
Eiffel donne sans calcul l'heure de Greenwich
exacte à la seconde.
GÉNIE CIVIL
Le nouveau campanile de Venise (Revue
srientifique, août 1912). — Quand on eut décidé
de reconstruire le campanile écroulé, la grave
question se posa d’établir un édifice qui ne füt pas
exposé à pareille catastrophe. On sait que Venise,
N° 1443
construite sur Ja lagune, offre un sol de fondations
fort médiocre, et que c’est à la surcharge du sol
qu'on a attribué la chute du campanile détruit.
Ce beffroi, dont la hauleur atteignait 90 mètres,
pesait environ 12000 tonnes et exerçait sur ses
fondations une poussée égale à 120000 kilo-
grammes environ par mètre carré; sur le sol, la
pression atteignait encore 100 000 kilogrammes par
mètre carré!
La Commission chargée de la réfection de l’édi-
fice s'est donné pour but d'améliorer ces condi-
tions en renforçant la fondation, en diminuant la
masse de la tour, enfin en solidarisant entre elles
les diverses parties de celle-ci, afin d'éviter qu'elle
périsse par dislocation. Pour tout cela, la meil-
leure solution a été offerte par le béton armé :
sans modifier le moins du monde l'aspect extérieur
du campanile, on en a élargi l'intérieur : un esca-
lier hélicoidal en béton armé donne aujourd'hui
aux murs une rigidité et une commune solidarité
qw'ils n'avaient pas autrefois; aussi a-t-on pu
réduire lépaisseur et ramener le poids de l'édifice
aux trois quarts de son poids antérieur. Comme,
d'autre part, les fondations ont été renforcées par
le battage d'une couronne nouvelle de pilotis, com-
portant plus de 3 000 pieux et soutenant une cein-
ture maçonnée en pierre dure, la charge sur le
sol s’est réduite à 43 000 kilogrammes par mètre
carré, ce qui. parait fort admissible. Le nouveau
beffroiatteintcependant,comme l'ancien, 90 mètres,
et il est comme lui surmonté d'un ange de 10,5 m
de hauteur.
La flèche qui termine le campanile et qui a
20 mètres de haut est complètement armaturée par
des poutres en béton armé; elle est limitée à sa
base par un plancher de mème nature qui assure
l'entréloisement; seule la charpente de support
des cloches est métallique. On compte sur l’élasti-
cité de cette charpente comme sur la plus grande
flexibilité de tout l'édifice pour réduire l’action
oscillante exercée sur les fondations, par l'effort
du vent, et la vibration des cloches. Et cela parait
tout à fait rationnel. Ces effets alternatifs sont, en
effet, éminemment défavorables à la stabilité de
l'édifice, et on peut leur attribuer pour une bonne
part l’accident aujourd’hui réparé.
Aussi, malgré qu'on ait habilement caché le
béton armé sous des matériaux identiques à ceux
du campanile ancien, pour effacer tout souvenir de
désastre, peut-on prédire au nouveau clocher, main-
tenant terminé, une plus longue vie qu’à celui qui
l’a précédé. Il nous a paru intéressant de citer cette
application bien caractéristique de béton armé, en
ce qu'elle montre à la fois la confiance qu'il a
maintenant suscitée et la variété des partis qu’on
en peut tirer. A. D.
Au canal de Panama. — On sait qu'à diffé-
rentes reprises il s’est produit dans les tranchées
COSMOS
313
du canal de Panama des glissements du sol, inté-
ressant d'énormes volumes de matériaux qui sont
venus combler les travaux déjà faits. Ils sont dus
à des couches d'argile qui portent les masses des
terrains supérieurs; quand les travaux libèrent
ces masses, elles glissent sur l'argile et, avec elle,
pour chercher un nouvel équilibre. A còté de rai-
sens d'un autre ordre et qu'on se rappelle trop
bien, ces glissements ont été l’un des écueils qui
ont entrainé la ruine de l’ancienne Compagnie de
Panama.
Les Américains ont retrouvé ces difficultés, et
voici plusieurs fois que des glissements viennent
ajouter quelques millions de mètres cubes à enlever
dans les travaux déjà achevés. L'événement s’est
encore produit à la fin du mois dernier, en deux
points: l’un dans la traversée de la Culebra, l'autre
sur la rive du Pacifique où, l'argile ayunt cédé, les
quais du port de Balboa, à l'embouchure du canal,
se sont écroulés entrainant la perte d'un navire.
Les ingénieurs se déclarent incapables de lutter
contre ces phénomènes; on ne peut, en effet,
tenter de lutter avec le poids d'une montagne qui
se met en marche, Ce qui est plus grave, c’est que,
étant donnée la nature du terrain, on ne sait si de
telsaccidents ne viendront pasculbuterles immenses
ouvrages des écluses et du grand barrage de
Gatun. Ce serait la ruine de l’œuvre.
Puisque nous parlons du canal de Panama, disons
que les excavations, en certaines parties, y sont
faites par la méthode des déblais hydrauliques,
notamment à l'aval du Miraflorès, où Pon enlève
6233000 mètres cubes d’alluvions recouvrant les
roches; c'est la méthode employée depuis des
années pour l'exploitation de certaines mines d’or,
et ajoutons celle proposée à l'ancienne Compa-
gnie de Panama par le regretté Duponchel, dont les
idées furent d’ailleurs reçues par une fin de
non-recevoir. (Voir Cosmos, 4°" février 1890.) Dans
celte méthode, les terres sont désagrégées par de
violents jets d’eau, et les troubles minéraux ainsi
constitués sont écoulés par des canaux torrentiels
ou repris ‘par des pompes puissantes; dans les
deux cas, l’ensemble est conduit à une distance
suffisante du chantier.
VARIA
Fours crématoires automobiles, — La
Gazette des hôpitaux du 5 septembre écrit:
« Un médecin militaire allemand, le D' Blau,
vient de préconiser dans le Militer Wochenblatt
l'adoption de fours crématoires automobiles. C'est
là une solution nouvelle de la question des inhu-
mations qui, dans la prochaine guerre, sera une
des préoccupations les plus graves des hygiénistes.
» Le Dr Blau rappelle qu'à la fin de 18370 les
commissaires de police allemands constatèrent
autour de Metz la présence d'environ 30 U00 ca-
31% COSMOS
davres militaires insuffisamment recouverts de
terre, et, dans le seul canton de Gorze, il y avait
14 000 cadavres dans le même cas. Dans nombre
de villages, on ne pouvait plus se servir de l’eau
des puits, et la mortalité augmenta dans des pro-
portions effrayantes. Le seul moyen d'éviter de
19 SEPTEMBRE 1912
telles calamités accessoires, c'est d'incinérer les
cadavres sur le champ de bataille. Il fut d'ailleurs
pratiqué au moment de la retraite de Russie, et
plus récemment par les Japonais en Mandchourie. »
Dieu nous préserve d’avoir à utiliser des inven-
tions de ce genre!
Le ponton dérocheur du canal de Suez.
Le canal de Suez traverse des terrains divers.
Aux environs de Port-Said, on rencontre du sable
argileux et quelques bancs importants d'argile
`
plus ou moins compacte. Le fond du lac Timsah se
compose d’une agglomération sablonneuse calcaire
et dure; du lac Timsah aux lacs Amers, on trouve
E “ - SA M, de
D-ren 2% OT TE
F1G. 1. — DÉROCHEUR DU CANAL DE SUEZ AU TRAVAIL.
du sable vaseux, argileux, parfois pierreux et
gypseux surmonté d'une couche de sel et autres
résidůs des évaporations anciennes; ensuile de
l'argile compacte, de la marne et des agglomérés
sableux se succèdent jusqu'à la mer Rouge. Mais
on n'a encore signalé la présence des rochers qu’au
sud du canal entre le kilomètre 85 et Suez. Ces
bancs rocheux affleurent presque horizontalement.
D'après les reconnaissances effectuées, ils occupent
une superficie de 300 000 mètres carrés sur le pla-
fond du canal. Les uns sont des calcaires plus ou
moins durs, les aulres des agglomérés calcaires
ou siliceux généralement coquilliers, ou bien des
tufs calcaires colorés en rouge, du gypse et de
l’albâtre. En général, leur dureté est moyenne,
sauf en certains points formés soit de calcaires
compacts, soit d'agglomérats siliceux.
Durant le percement du canal de Suez, on en-
leva ces parties rocheuses à sec; mais quand, en
1884, la Compagnie entreprit des travaux d'’élar-
gissement et d’approfondissement, il fallut exa-
miner le problème de l'extraction sous l'eau. On
désagrégea les roches les plus dures à l’aide de
mines sous-marines, et, pour celles d’une dureté
moyenne, les entrepreneurs spécialistes, MM. Lob-
nitz et Cie, de Renfrew (Écosse), imaginèrent un
appareil dérocheur composé d'une batterie de
10 pilons en acier pesant 3,5 tonnes chacun,
No 1443
disposés sur une drague à godets qui enlevait les
blocs au fur et à mesure de leur concassage.
L'expérience ne tarda pas à montrer qu'au point
de vue du rendement il y avait intérêt à séparer
les pilons concasseurs de la drague et à les établir
sur des pontons spéciaux. Ce dispositif, tout en
constituant une amélioration sensible, donnait
encore de médiocres résultats, vu le poids insuffi-
sant de ces broyeurs. Le concassage d'une roche
de moyenne dureté sur 0,5 m exigeait effectivement
14 à 16 coups de pilon par mètre carré. En 1897,
quand on arrêta le programme des travaux pour
COSMOS
315
l'approfondissement du canal à 9,50 m, les ingé-
nieurs de la Compagnie étudièrent la question de
façon complète. Ils se rendirent compte que l'en-
lèvement du rocher sous l’eau par perforation mé-
canique et explosion n’est pas si économique que
le pilonnage. En outre, l’usage des explosifs offre
<ertains inconvénients pour la navigation; en par-
ticulier, après chaque explosion, on doit envoyer
des scaphandriers s'assurer que des blocs de rochers
n'éncombrent pas le fond du canal. Sans compter
que les pilons arasent ce dernier suivant un plan
régulier, tandis qu'avec le système des explosifs
F1G. 2. — MISE EN PLACE D'UNE POINTE DE PILON DÉROCHEUR.
il faut enlever un gran1 volume en contre-bas pour
obtenir sûrement un profil déterminé, Aussi,
depuis quelques années, les ingénieurs adoptèrent
définitivement un appareil concasseur muni de
deux pilons fusiformes en acier coulé de 13,50 m
de longueur et pesant chacun 13 tonnes.
Ces pilons se terminent par des pointes rempla-
çables en acier très dur (fig. 2). Disposés à { mètre
de distance, ils sont soulevés par de puissants
treuils à vapeur, à embrayages et débrayages,
agissant presque instantanément au moyen de
câbles en acier très flexibles, fixés à demeure sur
la tête de chacun d'eux; cette disposition permet
un relevage très rapide et un réglage facile de ła
hauteur de chute des pilons, ordinairement com-
prise entre 1,5 et 3,0 m. Les deux treuils peuvent
s'accoupler pour exercer un effort exceptionnel
sur un seul pilon, au cas où ce dernier resterait
engagé dans le rocher.
On monte les pilons sur un ponton flottant de
30,50 m de longueur sur 10,67 m de largeur et de
2,44 m de creux, construit entièrement en acier
Martin-Siemens (fig. 1).
Une charpente spéciale supporte les poulies de
suspension des câbles des pilons; cette charpente
sert aussi pour le guidage des pilons.
Tous les mouvements d'avance, de recul et de
papillonnage de l'embarcation s'effectuent rapide-
316
ment à l’aide d’un treuil à vapeur combiné, à deux
vitesses et à poupées indépendantes.
Une chaudière, timbrée à 5,6 kg : cm‘ et d'une
surface de chauffe de 72,5 m*, fournit la vapeur.
Cet appareil, très bien étudié, fut mis en service
en 1902 et, après quelques améliorations de détail,
il fonctionne parfaitement et concasse sans peine
toutes espèces de roches.
En 1908, on a installé deux pilons d’un nouveau
type, plus grands et plus lourds que les anciens,
pesant 44 à 15 tonnes et ayant une longueur de
15 mètres, ce qui leur permet de battre normale-
ment jusqu’à 12 et 13 mètres.
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1919
On arrive à donner en moyenne 132 coups de
pilon par heure de pilonnage effectif. L’épaisseur
moyenne de la couche pilonnée atteint 0,80 m;
dans ces conditions, le nombre de coups de pilon
nécessaires pour le concassage d’un mètre cube
varie, suivant la dureté et aussi la fragilité de la
roche, de i à 40; ce dernier chiffre est un maxi-
mum rarement atteint, et la moyenne est d’en-
viron 7 coups par minute. Le rendement oscille
ainsi de 432 à 3,5 mètres cubes par heure avec
une moyenne de 49 mètres cubes par heure.
JACQUES BoYEn.
Procédés modernes de métallurgie ®.
II. De la fonte à l’acier.
C'est en décarburant la fonte que sont fabriqués
les divers fers et aciers du commerce, ceux-là ne
différant de ceux-ci que par une décarburation
moins complète. Au moins ceci est vrai dans la
plupart des cas, mais on fabrique aussi du fer en
chauffant et forgeant des ferrailles ; on fait aussi
de l'acier en recarburant le fer.
Nombreux sont les procédés permettant d'en-
lever des fontes leur excès nuisible de carbone;
tous se rattachent étroitement à trois modes géné-
raux d'opérer. On peut chauffer le métal påteux
et remuer au ringard, pour que l'oxygène aérien
brüle bien le carbone : c’est le puddlage. On peut
injecter l'air décarburant dans la masse du métal
fondu : c’est le convertissage Bessemer ou Thomas.
On peut enfin opérer en ajoutant à la fonte liquide
des débris de fer pour diluer le carbone, de l’oxyde
de fer pour le brûler: cest la méthode Martin.
Le puddlage ne sert guère que pour préparer le
fer; il est encore fort employé (production annuelle
de la France, 500 000 tonnes dans plus de 400 fours),
mais tend à l’ètre de moins en moins. Le conver-
tissage, qui, dès son apparition, bouleversa la
métallurgie du fer et fit son inventeur multimil-
lionnaire, est actuellement très employé, mais la
première place est au procédé Martin, qui depuis
quelques années seulement a pris plus d'importance
que les méthodes Bessemer et Thomas. Dans chaque
procédé, les contingences accessoires tiennent une
grande place.
En particulier, ce qui caractérise de nombreuses
méthodes, c'est le garnissage du four ou de la
cornue contenant le métal fondu. Point ne sufñit,
en effet, d'enlever de la fonte l'excès de carbone
pour la transformer en fer de bonne qualité, il
faut Ja débarrasser, au moins partiellement, du
silicium, du phosphore, du soufre et autres impu-
(1) Voir Cosmos, n° L439, p. 205.
retés nuisibles qu'elle contient. Or, ces impuretés,
on pourra les séparer du métal sous forme de
scories, grâce à la présence dans la sole d'éléments
divers pour lesquels elles auront une affinité. Ainsi
le garnissage joue un grand role dans l’épuration,
il doit être combiné selon le genre de fontes à
épurer. Donc, selon la composition des fontes, an
devra employer tel ou tel procédé : l'influence est
telle que les richissimes gisements ferreux ‘du
bassin de Briey ne furent exploités intensivemenat
que du jour où l’on mit au point une méthode
pour épurer les fontes phosphoreuses de ce minerai.
Puddlage. — Il se fait dans un four « à réver-
bère », ainsi nommé parce que la chaleur est réflé-
chie sur la sole par une voûte surbaissée ffig. 1).
Cette sole, garnie d’un revêtement de ferrailles
oxydées et de scories refait chaque semaine, est
chauffée par un foyer adjacent. On utilise les gaz
sortants, encore très chauds, pour chauffer une
chaudière à vapeur.
Quand le four est chaud, on y introduit environ
200 kilogrammes de fontes en lingots, en « gueu-
sets » (de préférence une fonte siliceuse), et on
pousse le feu pendant une demi-heure pour ra-
mollir le métal. On brasse alors avec des ringards,
travail extrêmement pénible auquel on n’a jusqu'à
présent pas réussi à substituer un mode d'agitation
mécanique. Il faut changer d'outil toutes les cinq
minutes, sans quoi le ringard fondrait.
Il se forme d’abord, dans la masse remucée, des
scories à base de silicates, de phosphates de fer et
de manganèse, après quoi le carbone commence
à s'oxyder : on voit de longues flammes bleuâtres
d'oxyde de carbone sortir de la masse pâteuse.
L'oxydation achevée, de son ringard, le puddleur
divise rapidement la masse en cinq ou six loupes,
tandis que l'appel d'air de la cheminée est sup-
primé pour éviter l'oxydation du fer. Saisie par
N° 1443
les mâchoires de fortes tenailles, la loupe, sortie
du four, est alors cinglée, c’est-à-dire fortement
martelée; les molécules du métal s’agglomèrent,
se soudent, tandis que la scorie fluide est chassée
au dehors. Après rechauffage, on lamine pour
obtenir les « ébauchés » de forme régulière, les-
quels sont réunis ensuite en « paquets », chauffés
à blane, puis martelés et laminés. Ce fer, « corroyé »
ainsi, peut l'être à nouveau une ou plusieurs fois
pour augmenter son homogénéité. C'est par de tels
corroyages que les débris divers de fer et d'acier
sont transformés en fers marchands.
Convertissage. — Bessemer, un inventeur pro-
fessionnel, fut amené, après avoir trouvé un nou-
veau système d'obus, à étudier la fabrication des
canons en fonte coulée. Il pensa durcir la fonte en
faisant barboter un jet d'air dans le métal fondu ;
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317
il réussit ainsi à la décarburer, l’air brûlant le
carbone en excès. Après bien des peines, des
insuccès, Bessemer vit son procédé partout adopté,
ce qui lui valut un joli total d'une cinquantaine de
millions, rien que pour les droits de brevets!
Actuellement, on emploie encore, presque pas
modifié, leconvertisseur de Bessemer, gigantesque
cornue de métal garnie intérieurement de briques
silico-alumineuses et montée sur deux pivots laté-
raux (fig. 3). Sur l’un est calée une roue dentée
servant à culbuter la cornue; l'autre est creux et
sert à l’arrivée d'air comprimé qui sortira dans le
fond par une vingtaine de « luyères » venant
d’une boite à vent. Le convertisseur, étant chauffé
à blanc (il est facile d'y brüler un combustible en
injectant de l'air), est incliné, bec en dessus pour
recevoir la fonte venant habituellement du haut
ANN” AAN
Chaudière x vapeur mu Muhu
dd) DD CT 7 ‘4
EVE DGA s TWN A fy AT- MS Rh DD) f
F1G. 1. — FOUR A PUDDLER.
fourneau (c’est la marche « première fusion »
naturellement plus économique et substituée pour
cela à la marche après « seconde fusion » dans un
cubilot).
Ceci fait, on redresse le convertisseur et on
« donne le vent » : il sort aussitôt du bec tourné
vers le haut un brillant panache d’étincelles que
produit la combustion du silicium et du manganèse
de la fonte. Après une dizaine de minutes (plus eu
moins selon composition des fontes), les étincelles
font place aux flammes : c’est le carbone qui brûle.
Au bout de quinze à vingt minutes, pendant les-
quelles le bruit du vent devient sourd, tout le car-
bone est brùlé; on incline la cornue, on ajoute suf-
fisamment de ferro-manganèse pour transformer
le fer en acier, et on coule.
Pour: qui vit jamais une « opération » au
convertisseur, le spectacle est inoubliable. Nous
n’essayerons pas de décrire sa magnificence : il y
faudrait l'ampleur de verbe et le luxe d’épithètes
propres seulement à quelques écrivains. Voici d'ail-
leurs la description donnée par lun d’eux (1):
« OEufs de métal grands comme des maisons,
ces cornues dardent vers le firmament dix mètres
de flammes éblouissantes et des bouquets d’étin-
celles innombrables, tandis que hurle la matière
épurée par le formidable essor du vent. Deux ou
trois de ces cratères mobiles sont suspendus dans
un même atelier entre des pilastres de maçonnerie.
Le bruit d’un ouragan siffle dans leurs flancs noirs.
De temps en temps, lorsque se termine ja transmu-
tation de la fonte en acier, le cratère est incliné
par la force hydraulique au-dessus d'une vaste
cuve qu'amènent des poutres de fer virant autour
d’une colonne. Alors la cascade de lumière se pré-
cipite en grésillant, en hurlant, se transvase. Une
pluie de feu crible l'espace, vient s'éteindre sur
les vestes en cuir de quelques minuscules cyclopes
occupés à la direction des poutres. Dix minutes, la
cascade s'écoule et la pluie de feu s'éparpille dans
(1) Pauz Apam, Visions d'Amérique.
318
F1G, 2. — ASPECT D’UNE BATTERIE DE FOURS A PUDDLER.
le hall fantasliquement clair. Les sifflets des con-
tremaitres, les cris d'ouvriers invisibles règlent ce
cataclysme. Quand le sirop incandescent a rempli
la cuve, le cratère ovoide
lentement se redresse vers
le ciel, y baye. La potence
hydraulique emporte le ré-
cipient où tremblent et s'en-
croûtent déjà 100 000 kilo-
grammes d'acier liquide
rose et mauve. Elle le dépose
contre un échafaud par-
dessus un convoi de moules
épais. Un homme dévisse
un robinet extérieur au
fond de ce récipient. Le
sirop de lumière coule dans
ces gaines de fontes... »
Le procédé Bessemer est
inapplicable aux fontes phos-
phoreuses; au contraire,
celui de Thomas permet de
déphosphorer parfaitement
la fonte : ceci tout simple-
ment grâce à l'emploi d’un
garnissage basique du con-
vertisseur. Par l'emploi des
briques en dolomie calcinée (mélange de chaux et
de magnésie), on peut obtenir des scories conte-
nant moins de 20 pour 100 de silice et retenant le
phosphore. Les opérations se font de la manière
habituelle, en sursoufflant après décarburation
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
pour bien oxyder tout le phosphore; on cesse dès
qu'une prise d'essai donne un métal ne cassant
pas au premier coup de pilon.
L'acier Martin. — Le procédé Martin, actuelle-
ment le plus employé et qui tend encore à l’être
davantage, consiste à chauffer le métal très forte-
ment sur une sole garnie de brique en silice
(Martin acide) ou en dolomie (Martin basique),
l'épuration par le lailier se faisant comme dans
les méthodes Bessemer et Thomas. Mais la décar-
buration s'effectue tout autrement. A la fonte,
employée maintenant le plus souvent dès sa sortie
du haut fourneau (Martin en marche liquide), pour
éviter les frais de rechauffage, on ajoute : 1° des
riblons de fer et d'acier qui abaissent la teneur en
carbone du mélange par simple dilution; 2 du
minerai, et des ferrailles oxydées dont l’oxygène
brûle le carbone de la fonte. En pratique, et selon
les circonstances économiques, on peut ajouter
l'un et l’autre de ces produits ou s’en tirer surtout
tantôt à la marche par dilution (France, Allemagne),
tantôt à la marche oxydante (Angleterre, Russie).
Quel que soit le procédé employé, on opère tou-
jours avec des installations de même genre, com-
prenant en principe un gazogène et un four à sole
surmontant des récupérateurs genre Siemens.
Les gazogènes à vent soufflé, les plus employés,
sont assemblés en batteries de plusieurs éléments
composés chacun d'un massif de briques réfrac-
nn,
I D a E TT
Face. Profil.
F1G. 3. — COUPE D'UN DES CONVERTISSEURS BESSEMER DU CREUSOT.
taires à cavité en forme de trémie, à la partie infé-
rieure de laquelle se trouve une grille (fig. 4). L'air
est insufflé par le bas dans des « buses », le com-
bustible (houilles, briquettes, etc.) introduit par le
haut, de façon qu'il y ait toujours dans le gazo-
N° 1443
gène une couche très épaisse de charbon cokifié
incandescent qui transforme en oxyde de carbone
le gaz carbonique formé dans le bas, où il y a excès
d'air. La conduite des gazogènes est très délicate.
Le gaz combustible produit là est dirigé vers le
four; il y arrive dans le bas et doit parcourir
d'abord un des récupérateurs de droite par exemple
(fig. 4), simples cavités garnies de briques réfrac-
taires régulièrement empilées. Ces briques, venant
d'être chauffées par le passage des gaz brülés,
portent le gaz à haute température, de même que
l'air comburant circulant dans la chambre d’à
côté.
Air et combustible débouchent dans le four par
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COSMOS
Ps UU
319
les brûleurs inclinés de manière à envoyer le jet
dans la direction du laboratoire contenant le métal.
Ce dernier repose sur une sole formée en gar-
nissant des plaques supports en fonte d’une mince
couche de terre réfractaire ensuite chauffée de
façon à faire fondre, à « glacer » la surface, puis
"recouvertes d'autant de couches glacées qu’il faut
pour arriver à une épaisseur d'environ 30 centi-
mètres. Le mélange gazeux brûlé sort à gauche
et réchauffe les deux récupérateurs en non-activité :
cette marche est périodiquement inversée après un
temps suffisant au réchauffage des piles de briques.
L'opération commence par le chargement des
gueuses de fonte, ou mieux par l'introduction du
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FIG. 4. — FOUR A ACIER MARTIN.
métal fondu venant des hauts fourneaux (marche
liquide). On ajoute au métal fondu des riblons
par une centaine de kilogrammes à la fois, jusqu’à
ce qu'une prise d'essai donne une éprouvette bien
décarburée : la durée d’une opération est telle
qu’on peut non seulement faire les essais méca-
niques, mais doser chimiquement le carbone, en
employant des méthodes approchées rapides. Après
avoir poussé la décarburation jusqu'à des teneurs
en carbone variant de 0,1 à 0,25 pour 100, on
ajoute du ferro-manganèse comme dans le procédé
au convertisseur,
Quand on substitue le minerai aux riblons, on
doit n’ajouter l’oxydant que par petites quantités,
en pelits morceaux, pour éviter de refroidir la
masse. Comme il y a ainsi tendance à formation de
beaucoup de scories, on emploie un garnissage
t
très soigné, des fontes et des minerais contenant
le moins possible de silicium.
En Martin basique, on opère comme dans l’épu-
ralion acide, à cette différence près que les gazo-
gènes, les récupérateurs ont plus de puissance, les
scories basiques étant particulièrement difficiles à
fondre. Le laboratoire est garni de dolomie. On
obtient exclusivement de la sorte des aciers très
doux, presque des fers, l’affinage devant être poussé
très loin pour brüler complètement le phosphore.
.: Aciers Bessemer et aciers Martin constituent la
presque totalité de la production actuelle. Quoique
le métal obtenu au convertisseur ou au four
ait été fondu, on réserve cependant le nom d'acier
fondu à d’autres produits préparés par des procédés
très différents, vendus bien plus cher et réservés à
la confection des outils. H. ROUSSET,
320
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
L’avoine dans l’allmentation humaine ‘|.
- Je viens entretenir la Société d'agriculture d’une
question qui n’est pas nouvelle, mais qui présente,
me semble-t-il, un caractère d'actualité : je veux
parler de l'emploi de l'avoine dans l'alimentation
humaine.
Dès le début du xviu siècle, Duchesne, en 1714,
Pomé en 1735, Lémeri et Lieutaud, tous deux
doyens de la Faculté de Paris, en 1748 et en 17717,
firent des tentatives pour en répandre l'usage et
vantèrent les propriétés nutritives de l’avoine.
De nos jours, c’est surtout Payen qui, par ses
travaux spéciaux, s'est efforcé de généraliser l'usage
de cet aliment.
Pius récemment, des communications sur ce
sujet furent faites à la Société médicale des hòpi-
taux de Paris, par les savants professeurs Dujar-
din-Beaumetz et Hardy.
Je vous demande la permission de vous présenter
aujourd’hui un très intéressant travail sur cette
question de M. le capitaine Moreau, qui en a fait
une étude toute spéciale, très approfondie, et ap-
puyée de nombreuses expériences dont les résultats
m'ont paru des plus suggestifs.
Il constate d'abord ce que nous savons tous:
lorsqu'on veut hâter le développement d'un poulain,
préparer un cheval en vue d’un effort extraordi-
naire, on l’avoine généreusement.
L'avoine serait-elle pour l’homme ce qu'elle est
vour les chevaux? Et pourquoi pas? :
{Il y a quelque quarante-cinq ans, dans ma jeu-
nesse, je voyais venir chez mon père, à Trappes,
pour suppléer à la main-d'œuvre locale déjà insuf-
fisante à cette époque, au moment des grands
travaux de binages, fauchaisons, moissonnage,
quelques équipes de Bretons.
[ls n'étaient pas, alors, empoisonnés par l'alcool,
comme ils le sont, hélas! aujourd'hui; c'était, au
contraire, une race superbe de solides gars qui ne
boudaient pas à l'ouvrage; c'étaient des mangeurs
d'avoine; la galette de sarrazin et la bouillie
d'avoine constituaient la base de leur alimentation.
Les Écossais, belle race aussi, sont également des
mangeurs d'avoine; les Anglais le sont devenus.
Les Australiens, de sang français ou anglais,
qui passent leur vie à cheval pour garder des ani-
maux épars sur des domaines grands comme nos
départements, prennent, à 5 heures du matin, un
plat d'avoine sucrée au lait. Votre chocolat et vos
croissants, disent-ils, nous laisseraient à jeun; nous
ne pourrions jamais attendre le repas de midi.
Fort de ces observations, le capitaine Moreau
s'est dit: Rien n'empêche d'en faire l'essai avec nos
soldats; et si l'essai donne des résultats favorables
. (1) Communication de M. Pluchet à la Socicité
nationale d'agriculture de France (3 juillet 1912).
ne pourra-t-on-pas en tirer des conséquences pra-
tiques heureuses pour l'armée, pour les populations
ouvrières et pour l'agriculture?
Le goût de l’avoine à l’état naturel est mauvais;
ce goùt tient à la présence d’une huile qui rancit
rapidement. Mais si on élimine l'huile, le goût
devient et reste fort agréable. Cette huile est éli-
minée très facilement par la chaleur; l'avoine,
après torréfaction, est rendue agréable au palais
et comestibile.
Dans ce nouvel état, M. Moreau la baptise du
joli nom ancien d’ « aveine », estimant, peut-ètre
avec raison, que cet aliment sera plus facilement
accepté par un public délicat, non encore initié,
sous celte dénomination.
Cette aveine, sous forme de farines, de gruaux
ou même de petites galettes comme celles que je
vous présente, se prête à une foule de préparations
culinaires, bouillies, soupes plus ou moins épaisses,
gâteaux, etc. Pour les potages, on y ajoute simple-
ment du sel, ou n'importe quel condiment, pour en
varier le goùt.
Le capitaine Moreau énumère, dans son rapport,
une série d'expériences qui me paraissent très con-
cluantes, auxquelles il s’est livré depuis quelques
années.
Je n’en cilerai qu'une, faite avec l’autorisation
de M. l’intendant général Burguet.
C'est sur la 44 compagnie du 128° régiment
d'infanterie que porta cette expérience. Ladite
compagnie reçut une soupe d'avoine pendant trente
jours consécutifs d’étapes el de manœuvres au
camp de Sissonne.
La distance parcourue pendant les quinze pre-
miers jours a élé de 340 kilomètres, par une très
grande chaleur.
Les quinze autres jours ont été consacrés aux
manœuvres du camp. C'est la période la plus ac-
tive de l’année.
La résistance des hommes de cette compagnie a
été évaluée par comparaison avec celle des trois
autres compagaies du mème bataillon, soumises
pendant ces trente jours à une existence identique
à celle de la 14°.
Ces trois dernières compagnies ont présenté à la
visite médicale une moyenne de douze éclopés et
malades par jour.
La 14°, qui prenait une soupe d’aveine, n’a pas
présenté un seul homme à la visite médicale du
premier au trentième jour, et son entrain ne s’est
pas démenti.
La soupe d'aveine fut admirablement accueillie
par les soldats; un léger roux d'oignons donnait
au potage son parfum.
Beaucoup d'expériences de détail, d’autres faites
sur des colonies scolaires envoyées dans les Alpes
N° 1443
en 1911, ont donné des résultats analogues.
Ces résultats pratiques sont d’ailleurs, ajoute le
capitaine Moreau, corroborés par la science. A
l'appui, il nous donne le tableau des analyses com-
paratives des farines d'avoine, de froment, de
mais et de riz, faites par les chimistes Degrez et
Jacquet à la Sorbonne.
H cite le rapport présenté par le D" Vallin, de
l'Académie de médecine, au directeur du Service
de santé de l’armée; les communications à la
Société médicale des hôpitaux de Paris, par MM. les
professeurs Dujardin-Beaumetz et Hardy; le traité
de l'hygiène alimentaire du Dr Dujardin-Beaumetz.
Toutes ces sommités scientifiques concluent à la
supériorité de la farine d'avoine, par suile de sa
plus grande teneur en acide phosphorique, en ma-
tières azotées et en matières grasses.
Il reste la question du prix. Il ne peut être défi-
nitivement élabli et variera avec les cours de
l’avoine. Mais il y a des éléments qui ne varient
pas. Le décorticage de l’avoine lui fait perdre en-
viron 30 pour 100 de son poids; l'élimination de
l’eau par la torréfaction lui en fait perdre environ
10 pour 100; 100 kilogrammes d'avoine repré-
sentent donc 60 kilogrammes d’aveine. Celte tor-
réfaction coûte aussi un certain prix. On peut
compter qu'au cours actuel de l’avoine (22 francs
les 100 kilogrammes), tous déchets et tous frais
COSMOS
321
comptés, la ration forte pour un potage, soit
33 grammes d’aveine, revient à peine à 2 centimes.
Les meilleurs rendements, en farines de qualité
supérieure, sont obtenus avec les avoines grises
d'hiver des départements du Centre ‘Indre, Vienne,
Greuse, Haute-Vienne, etc.). Le poids de l’amande
décortiquée représente, en effet, pour ces variétés,
74 à 78 pour 100 du poids de l'avoine non décor-
tiquée.
"On expérimente, en ce moment, les avoines
grises de Beauce, il n'est pas encore possible de
se prononcer sur la qualité de la farine comparée
à celle dont il vient d'être question, mais on est
déjà fixé sur le rendement; le poids de l’amande
décortiquée est inférieur à celui de l’avoine grise
d'hiver du Centre; il ne dépasse pas 73 pour 100.
Quant aux avoines de Ligowo et aux blanches de
La Plata, leur rendement atteint à peine67 pour 100,
et elles manquent de finesse de goût.
Telles sont, brièvement résumées, les observa-
tions très intéressantes que j'ai lues dans le rap-
port du capitaine Moreau. Je n'ai aucune compé-
tence pour me prononcer sur le fond de la question,
mais il m'a semblé qu'au point de vue social
comme au point de vue de l'alimentation générale
et des intérèts de notre agriculture elle-mème, il
était bon de mettre ces observations au grand jour.
PLUCHET.
La gorge de la Tamina et les sources de Pfeffers.
‘Parmi les curiosités naturelles que nous offre la
Suisse et qui attirent particulièrement l'attention
du voyageur géologue, on ne devra pas oublier la
partie du territoire de la Confédération qui s'etend
entre les montagnes de Saentis et de Churfirslen
au Nord, la vallée du Rhin au Sud et à l’Est, celle
de la Linth à l'Ouest. Cest dans cette région que
s'élève majestueusement le géant de la Suisse du
Nord-Est, le Tædi (3623 mètres), accessible seule-
ment aux alpinistes les plus expérimentés. Plus au
Nord, entre deux parois de roches escarpées, la
nappe vert clair des eaux du Wallensee, ou lac de
Wallenstadt, retient longuement l'attention du
simple touriste en quète des saines jouissances
que lui offre la contemplation des grands tableaux
de la nature. Au Sud et à l'Est, c'est la vallée du
Rhin, dont les beaux paysages intéressent aussi
bien l'artiste que le savant.
Le Rhin, formé par la jonction à Reichenau, à
la sortie du célèbre défilé de la via Mala, du Rhin
antérieur (Vorder Rhein) avec le Rhin postérieur
(Hinter Rhein), décrit d'abord une courbe régulière
à concavilé occidentale, puis, aux approches de
Sargans, dessine un brusque crochet qui le ramène
franchement au Nord, vers le lac de Constance. Il
s’agit là d’une des nombreuses anomalies que le
cours de ce fleuve nous présente entre ses sources
et Bâle, et qui ont toujours attiré l'attention des
observateurs.
En effet, on s'est demandé depuis longtemps par
quels chemins, par quelles vallées le Rhin, dans
les périodes préhistoriques et antléhistoriques,
charriait ses eaux jusqu’à la sortie de létroite
impasse formée par les montagnes de la Forèt
Noire et celles du Jura. Tout semble indiquer que
le cours du fleuve était alors bien différent de celui
d'aujourd'hui. Par exemple, on sait que le célèbre
Saut du lihin, près de Schalfhouse (la plus tmipor-
tante cascade d'Europe), n'est mentionne par aucun
auteur, géographe ou historien, antérieur à l'année
960 de notre ère, ce qui porteralt à croire qu'il est
d'origine récente, car, dans le cas contraire, les
Romains l'auraient certainement remarqué et leurs
historiens en auraient parlé.
Le voyageur qui, provenant de Zurich, parcourr
pour la première fois, soit à pied, soit confortable-
ment installé dans les voitures de Engarlin-Express,
la route pittoresque còtovant d'abord les rives
vertes et mollement ondulées du lac de Zurich, et
ensuite presque suspendue aux rochers sauvages
322 ; COSMOS
du lac de Wallenstadt, est facilement victime d’une
illusion lorsqu'il s'approche de Ragatz, près de l’en-
droit où le Rhin décrit vers le Nord le crochet que
nous avons signalé. Il lui semble, en effet, que la
vallée du Rhin, au lieu de tourner brusquement
vers le Nord, se prolonge tout naturellement et en
ligne droite vers le lac de Wallenstadt, entre là
chaine de Churfirsten au Nord-Est et les derniers
contreforts de Graue Hærner au Sud-Ouest. L'illu-
sion est d’autant plus facile que la vallée du Rhin,
au nord de Sargans, semble barrée par le massif
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-Aro
19 SEPTEMBRE 1912
escarpé de Flæscherberg, s'élevant à 300 mètres
au-dessus du niveau du fleuve, et marquant la
limite entre le territoire suisse et celui du Lich-
tenstein.
L'illusion d'aujourd'hui correspond, très proba-
blement, à la réalité de l’époque reculée antérieure
à celle où le Rhin se fraya un passage vers le Nord,
pour aller remplir le vaste bassin du lac de Con-
stance. Le Rhin, dans l’état actuel des choses, ne
parvient plus au lac de Wallenstadt, et par consé-
quent ne traverse plus la vaste et longue dépres-
Fr ne
#
>
Phot. J. Fetzer, Ragatz.
F1G. 1. — RAGATZ AVEC L'ENTRÉE DE LA GORGE DE LA TAMINA.
sion du lac de Zurich. Arrivé à quelques lieues du lac
de Wallenstadt, il trouve, sur sa droile, une plaine
et se détourne tout à coup pour s’y jeter et gagner
ensuite le lac de Constance. Mais il y a toute appa-
rence qu'à une certaine époque il suivait le chemin
\Vallenstadt-Zurich. La plaine de Sargans était
alors occupée par un terrain marécageux. Les
alluvions ont dù fréquemment changer l'aspect du
paysage et le régime des eaux. A l'époque glaciaire,
durant laquelle une grande partie de la Suisse fut
envahie par les glaciers, un barrage s'est formé
qui a empèché les eaux du fleuve de continuer à
couler vers les lacs de Wallenstadt et de Zurich.
Le Rhin, depuis lors, a abandonné son ancien lit,
séparé de l'actuel par une bien faible différence
de niveau. Les lacs de Wallenstadt et de Zurich,
qui probablement n’en formaient qu’un lorsqu'ils
avaient pour tributaire le Rhin, se sont retirés
entre les limites qu'ils occupent actuellement. En
même temps les eaux du Rhin, se répandant dans
la vaste dépression au nord-est de Saint-Gall, et
y trouvant difficilement une issue qui leur permit
de poursuivre leur cours vers le Nord, ont formé
le lac de Constance, le plus important, comme cir-
cuit, de la Suisse (284,5 km).
Ainsi, par l'effet d’une simple variation de niveau
de la ligne de partage des eaux, s’est accompli,
dans une époque relativement peu éloignée de l'his-
Ne 1143
toire géologique de l'Europe, un changement subit
dans la distribution des eaux courantes de la Suisse.
C'est vraisemblablement à ce cataclysme, qui a
fermé, à Sargans, au cours du Rhin, l'issue vers le
COSMOS
323
Wallensee et lui en a offert une autre vers le
Bodensee, que les cascades du Rhin à Schaffhouse
doivent leur opulente et majestueuse beauté.
Mais la déviation du Rhin n’est pas l'unique
Phot. J. Fetzer, Ragatz.
F1G. 2 — INTÉRIEUR DE LA GORGE DE LA TAMINA, PRÈS_DES SOURCES.
curiosité naturelle que nous offrent les environs de
Sargans el de Faga!z. On y observe les traces lais-
sées par l‘s arciens glaciers qui ont puissamment
travaillé la surface du sol. On y trouve réunies des
formations géclogiques appartenant à différentes
époques, qui témoignent, ainsi que l'étrange stra-
tigraphie des roches,'de l’activité des agents dyna-
miques terrestres en cette région. C'est probable-
ment à quelque grand cataclysme, à quelque
mouvement formidable de l'écorce terrestre qu'est
324
due l’origine des célèbres gorges de la Tamina,
près de Ragatz. |
« Tandis que la plupait des fleuves, issus d’une
source principale, deviennent très vite de grands
potentats qui reçoivent dédaigneusement l’humble
tribut de leurs vassaux les affluents, il men est pas
de même du Rhin. De nombreux cours d'eau —
observe M. Waldburger, — tous à peu près d’égale
grandeur, s’élancent des vallées alpines du canton
des Grisons, se réunissent dans la vallée principale
avant de parvenir à Coire, la vieille capitale du
caaton, et forment ainsi le Rhin. Puis, après avoir
reçu les eaux tumultueuses de quelques torrents
des Alpes, le jeune fleuve cherche à s'échapper des
montagnes el à gagner le large dans la rase cam-
pagne. Le dernier de ces torrents impétueux, la
Tamina aux flots gris et courroucés, se jette dans
le Rhin après s'être frayé un chemin à travers des
gorges formidables. »
Ces gorges, d'une renommée universelle, repré-
sentent un exemple typique entre tous les phéno-
mènes naturels de .ce genre qui, comme par
exemple les gorges de l’Aar dans l’Oberland ber-
nois, ou les gorges du Trient, en Valais, nous
montrent un torrent impétueux se frayant un pas-
sage dans la roche vive, et dont les flots écumeux
sont encaissés entre deux parois hautes comme des
clochers de cathédrale. Une route offrant toute
sécurité longe le torrent une bonne heure dans les
gorges sauvages jusqu’à lhòtel des bains de Pfef-
fers. De ià, on pénètre sans aucun danger dans les
profondeurs ténébreuses de la partie la plus inté-
ressante des gorges, par un chemin taillé dans le
roc, pour arriver enfin à la grotte des sources
thermales toujours remplie de vapeurs.
M..Édouard Charton, dont :nous avons trouvé
d’intéressantes notes de voyage publiées dans le
journal le Tour du monde en 1864, après une visite
à Ragatz et aux hains de Pfelfers, s'exprimait en
termes admiratifs à propos de cette partie — la
plus remarquable — des gorges de la Tamina.
Des deux rives de celle-ci, large au plus de qua-
rante picds, jaillissent des roches formidables qui
paraissent en mouvement. L'espèce de voùte iné-
gale, crénelée, déchiquetée que forment leurs rudes
arêtes est d'une hauteur prodigieuse. De distance
en distance, quelques échancrures y laissent aper-
cevoir le bleu du ciel. La Tamina se dévat avec
raye entre les fragments écroulés; ses cascades
furibondes, ses flots tour à tour blanchissants ou
sombres s'élancent en tumulte hors de l'abime.
A traversce désordre el ce vacarme. on fait quelques
centaines de pas sur un plancher étroit et humide,
échafaudé le long des roches de gauche, el on
arrive à un point où l’on aperçoit au-dessus de soi
dans la voùte un plus grand espace à découvert.
On est devant un mur percé de deux portes basses
d'où sort une vapeur épaisse: l'une de ces portes
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
introduit à la source principale, la Chaudière, le
Kessel. Le couloir est très étroit. À cinquante pas,
en s'arrête au seuil d'une grotte à stalactites d'un
diamètre de six à huit pieds et pleine de l'eau de
la source, dont la chaleur est de 37°, L'autre porte
mène à une petite niche où l’on peut vérifier sur
les chiffres d’une échelle la hauteur variable du
niveau des sources. |
Quelle est la provenance de ces sources de
Pfeffers, jaillissant à la température de 37° en
plein massif des Alpes neigeuses, au fond d'une
gorge parcourue par les eaux fraiches de la Tamina?
Un trait caractéristique de la vallée ou gorge de
la Tamina consiste en ce que la fissure à laquelle
elle doit naissance est encore apparente dans toute
sa fraicheur. Cette fente, comprise entre deux mu-
railles à pic d’une centaine de mètres de hauteur,
est remplie, jusqu'au niveau de la plaine du Rhin,
par des blocs éboulés sur lesquels se précipitent en
bouillonnant les eaux de la Tamina. Creusée, polie
par le travail incessant des eaux violentes, la roche
schisteuse de Pfeffers n’a pu résister aux attaques
du torrent. Ainsi, petit à petit, dans le courant des
siècles passés, s’est formé l’abime du Pfeffers. Dans
la commotion qui a produit initialement la fissure
où coule la Tamina, les formations minérales qui
- composent l'enveloppe du globe ont dù se crevasser
jusqu'à une certaine profondeur; d’où la formation
de canaux et de grottes se ramifiant jusqu’à une
grande profondeur dans les entrailles de la terre,
et dont une partie remonte à la surface du sol
qu’elles rejoignent au niveau de la Tamina. D'sprès
les observations faites, les sources chaudes de
Pfeffers proviendraient des montagnes nomméés
«<‘Graue Iœrner », où il y a de petits laes ali-
‘mentés par des averses fréquentes en celte région.
Ces eaux s'infiltrent profondément dans la terre,
‘probablement jusqu'aux couches quartzeuses au-
dessus desquelles s'étagent les formations plus
récentes calcaires. Là, à une profondeur d'environ
1000 mètres (si nous admettons la théorie du
degré gtothermique), elles acquièrent la tempéra-
ture élevée qu'elles conservent jusqu’à leur retour
à la surface du sol dans la grotte des sources.
Après de nombreux efforts, on a réussi, par des
travaux gigantesques, à recueillir et à canaliser les
différentes veines du cours d’eau chaude, dont une
partie débouchait au-dessous du niveau normal de
la Tamina. Une conduite de bois, suspendue ax
parois perpendiculaires des gorges, fut destinée ù
recevoir les eaux du torrent, lequel, rehaussé par
une écluse, s’engouffra dans ce lit improvisé. On
put ainsi pénétrer le mystère des sources sou-
terraines et les recueillir à tout jamais pour les
malades. L'opération faite, on rendit à la Tamina
son ancien Cours.
Le débit des sources de l'feffers, grâce aux travaux
que nous avons signalés, varie maintenant entre
N° 1443
4 000 et 10 500 litres par minute. Elles sont donc
capables de fournir par vingt-quatre heures le
chiffre énorme de 5 760 000 à 15 120 000 litres d’eau
à la température invariable de 37° C. Cette abon-
dance d’eau chaude permet de réaliser facilement
l'application des bains à circulation continue, soit
dans des vastes baignoires, soit dans des piscines.
Le bain ne se refroidit jamais, et les rhumatisants,
lesgoutteux, les sciatiques ont le sentiment agréable
de se baigner dans de l’eau courante, ce qui con-
tribue essentiellement — ainsi affirment les méde-
cins — à l’efficacité de la cure.
Les bains de Pfeffers sont installés depuis des
siècles dans un ancien couvent. Mais une conduite
passant sous la route des gorges amène, depuis
l'année 1840, une partie des eaux thermales à
Ragatz, jolie petite ville située dans la plaine où
coule le Rhin. On trouve à Ragatz tout le confort
et tous les agréments que peut offrir, même aux
~ plus exigeants, une station thermale moderne. On
y rencontre, surtout de la mi-mai à la mi-octobre,
une foule cosmopolite qu’attire, soit l’ancienne
renommée des sources de Pfeffers, soit la douceur
du climat, soit la beauté des environs.
Nous ne voulons pas cependant terminer cet
article sans dire un mot, à titre de curiosité, sur
les dures épreuves que devaient subir dans les
siècles passés les infirmes venant chercher, dans
les ténèbres et l’atmosphère étouffante de la grotte
de Pfeffers, un remède à leurs maux.
A la fin du xiv° siècle, l'établissement des bains,
nous dit M. Jean Raymond, était situé au fond
même du gouffre de Pfeffers installé sur des ma-
driers passés en travers de la Tamina et encastrés
à droite et à gauche dans le rocher. Il consistait
en plusieurs cellules et trois grandes piscines où
l'on se baignaïit en commun. On se figure l’horreur
COSMOS
329
d'un pareil séjour. La descente dans ce gouffre
était effrayante. Il n'y avait d’autres moyens d'y
accéder que par des échelles pour les plus hardis,
et un siège suspendu à l'extrémité d'une longue
corde pour les plus timides et les plus faibles. Beau-
coup ne consentaient à se laisser glisser dans
l'abime qu'après s'être fait bander les yeux;
quelques-uns reculaïent épouvantés et renonçaient
à la guérison plutôt que d'en surmonter les préli-
minaires. On demeurait dans le bain toute la
journée pour en finir plus vite, et mème quelque-
fois toute la nuit. Il résultait d'une immersion si
prolongée de fréquents accidents morbides, de la
fièvre, des éruptions, et même des ulcérations de la
peau. On pouvait dire en toute rigueur que les
malades rajeunissaient en faisant peau neuve!
Ce singulier établissement, unique au monde, dura
assurément jusqu'au commencement du xvir siècle.
Enlevé en 1627 par un éboulement, on eut enfin
l'idée bien simple d'amener les eaux vers les ma-
lades, au lieu d'envoyer ceux-ci chercher les eaux
avec tant de peine, de tristesse et de danger dans
le fond de cet abime. Ce fut là l'origine du monas-
tère de Pfeffers, sécularisé en 1838, et dont les
longs et étroits bâtiments obstruent presque entiè-
rement la gorge de la Tamina. Plus tard, comme
nous l'avons dit, une partie du débit des sources
fut dirigée vers Ragatz, où s’élevèrent bientôt des
établissements de bains et des hôtels modernes.
La déviation du Rhin, les gorges de la Tamina,
les sources de Pfeffers : telles sont les principales
curiosités naturelles qu'offre au géologue amateur
la visite d’un pays où les douceurs apportées par le
progrès et la civilisation ont effacé le souvenir de
tout ce qu'avait autrefois de triste et d’effrayant la
renommée du gouffre ténébreux de Pfefters (1).
D' P. Gocura.
æ
AVIATION
Une idée nouvelle.
Il est admis, « en principe », que l'aviation est
encore dans l’enfance, malgré les étourdissantes
prouesses auxquelles nous avons assisté. Cepen-
dant, il faut bien admettre qu'en règle générale
l'oiseau mécanique vole parfaitement, mais il n’est
pas stable. La grande vitesse lui donne assurément
une qualité sustentatrice, et plus on ira vite, mieux
l'aéroplane se tiendra dans l'air. Malheureusement,
nos besoins mililaires actuels nécessitent non pas
des randonnées rapides d’un point du territoire à
un autre, mais, au contraire, des « stations » plus
ou moins prolongées en un point déterminé. Les
observations sérieuses, utiles, ne pourront jamais
se faire. qu'en planant lentement à une grande
hauteur au-dessus du territoire à explorer. C'est
d’ailleurs le système adopté par les grands oiscaux
qui réservent leur puissance musculaire pour
s'élever et fuir après avoir enlevé leur proie. En
aviation militaire, le problème se présente exacte-
ment de la mème facon: planer lentement au-
dessus du champ de bataille à observer, noter tous
les mouvements, toutes les positions, et fuir ensuite
à tire d’aile. Aucun des appareils modernes n’est
capable de remplir ce double but.
(1) Nous remercions vivement M. J. Fetzer, le dis-
tingué photographe qui a bién voulu mettre à notre
disposition les photographies qui ornent cel article.
326
Celui dont nous allons parler, et dont un modèle
d’essai seulement a été construit, ne peut non plus
remplir ce programme entièrement. Incapable de
réaliser de grandes vitesses, il parait se prêter,
non au stationnement sur place, mais à un ralen-
tissement suffisant pour faciliter l'exploration d'une
étendue de terrain. De plus, et c'est ici le point
culminant de l'invention, il est parfaitement
stable.
L'inventeur nous a demandé de le présenter aux
lecteurs du Cosmos, nous allons donc exposer le
principe sur lequel il base sa construction.
« Le point de départ de mon travail, nous dit-il,
a été la poche en papier ci-jointe. En faisant voler
cette poche, je remarquai que, lancée dans n’im-
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
porte quelle position, elle descendait invariablement
la partie creuse opposée au sol. »
De là à imaginer un aéroplane dont les ailes
fussent des surfaces concaves, il n’y avait qu'un
pas. La construction de ces plans donna parfaite-
ment raison à l’inventeur, qui eut la satisfaction de
voir ses surfaces, à grande ou à petite courbure,
tomber bien tangentiellement au sol. Et mon cor-
respondant ajoute, en manière de conclusion : « Si
les plans à courbure concave tombent ainsi, c'est
qu’ils sont naturellement admis par les réactions
de l'air, alors que la forme convexe employée
aujourd'hui est d’une instabilité notoire; pourquoi
ne pas admeltre ce que les réactions de l'air
admettent elles-mêmes? »
PLAN.
Cependant, les courbures concaves semblent,
à priori, constituer un obstacle à l'avancement. Il
fallait donc étudier ces courbures expérimentale-
ment. Un monoplan d'un modèle courant fut con-
struit à l'échelle de 4:3; la surface portante était
de 7 mètres carrés; le moteur, de 4,25 cheval, pesait
41 kilogrammes, et le poids total de l'appareil attei-
gnait 22 kilogrammes. L’aéroplane s'est enlevé
plusieurs fois à { mètre du sol; l’hélice, mal con-
struite, se brisait chaque fois que le moteur don-
nait tonte sa vitesse, et le monoplan tombait bien
à plat. Ajoutons enfin, et ceci fera ouvrir les yeux
aux techniciens, que l'aéroplane décollait après
moins de 30 mètres de parcours sur le sol.
Je m'empresse d'ajouter que je n’ai pas assisté à
ces expériences; mais si cette affirmation est
exacte — et je ne ferai pas l'injure à mon corres-
pondant de mettre en doute sa parole, — voilà un
moteur de 1,23 cheval qui enlève hardiment ses
22 kilogrammes. La motocyclette aérienne est
trouvée!
L'étude de ces surfaces mérite donc d’être entre-
prise d’une manière méthodique, et nous serions
heureux de voir un constructeur, voire même un
théoricien comme M. Eiffel, s’y livrer résolument.
Mon correspondant, M. Léon Voisin (un nom pré-
destiné), a déjà fait d’ailleurs quelques constatations
intéressantes.
C'est ainsi qu'il associe à une surface plane, très
instable, mais présentant de sérieuses qualités de
sustentation, deux surfaces concaves l’encadrant à
lavant et à l'arrière. En somme, ses ailes se pré-
sentent presque sous l'aspect des ailes de nos mo-
noplans actuels, mais renversées. La surface est
donc à double courbure concave, et le centre de
pression s'avance toujours vers la partie antérieure
du plan pour assurer la stabilité longitudinale. Et
loin de constituer, comme on pourrait le croire,
N° 1443
un obstacle à l'avancement, elle pourrait parfaite-
ment le favoriser, les réactions de l’air ayant une
tendance naturelle à maintenir la stabilité. D’au-
tant plus que les surfaces sont à grand rayon de
courbure afin de supprimer le plus possible la résis-
tance à l'avancement et aussi pour mieux utiliser
COSMOS
327
les filets d'air au point le plus utile de concen-
tration de la masse portante.
Avec l'emploi des surfaces concaves, le fuselage
peut être considérablement réduit et l’empennage
n'est plus forcément nécessaire, car les plans
assurent l'équilibre longitudinal comme l'équilibre
FACE.
transversal. Cependant, M. Voisin a cru devoir
ajouter à la rigidité des ailes une partie souple
obéissant aux moindres mouvements des courants
aériens, remplissant pour ainsi dire les mêmes
fonctions que lextrémité des rémiges des grands
voiliers. Cette partie souple constitue l’aileron,
dont la surface est proportionnelle à celle du plan
protégé; chaque aileron fonctionne indépendam-
ment de son voisin : cependant, ils s’aident mutuel-
lement pour assurer l'équilibre latéral. Ils sont
placés à droite et à gauche des plans sustentate urs
et rappelés par un système de ressorts obéissant
PROFIL,
aux moindres influences des courants aériens.
Lorsque le vent exerce une poussée sur les ailerons,
le ressort intérieur s’allonge en raison directe de
la force éprouvée, et l’aileron reste appuyé sur cette
force contraire. Si le ressort intérieur est insuffi-
sant, il reçoit le secours du ressort extérieur, lequel
unit sa force propre à celle du premier. Dès que
les courants perdent de leur puissance, les ressorts
reprennent immédiatement leur place normale.
Chaque plan stabilisateur est également pourvu,
au-dessus et au-dessous, de ressorts agissant par
traction, de sorte que les courants aériens trouvent
toujours et dans tous les sens une force contraire
ayant pour effet de maintenir l'appareil dans sa
position normale de stabilité.
Un plan stabilisateur est placé à l'arrière du
fuselage, en commande directe avec le gouvernail
de profondeur, placé en avant du fuselage et sous
328
les plans sustentateurs. Lorsqu'un courant d'air
vient frapper l'arrière du monoplan, le plan mo-
bile se déplace, par exemple, dans le sens de la
montée; en se soulevant, la queue imprime à tout.
appareil une légère inclinaison vers lavant qui est
immédiatement corrigée par la forme même.: des
plans porteurs et par le gouvernail de profondeur qui
prend aussitôt la position de montée commandée par
le plan mobile arrière : les deux mouvements con-
traires s’annulent et l'appareil conserve sa stabilité.
COSMOS
19 SEPTEMBRE 191%
En résumé, la conception nouvelle, qui nemanque
ni d'originalité ni d'intérêt, pourrait bien apporter
une exeellente solution au problème de la stabilité
automatique des aéroplanes. Il est bien évident que
ce problème sera résolu, non par l'emploi d'appa-
reils compliqués, mais très simplement par la
forme des plans ou par l’adjonction d'organes nou-
veaux que la dynamique de l’air fera connaitre.
Luces FOURNIER.
Ce qu'on voit dans un escargot: une leçon d'observation ©.
Nous avons examiné le corps de l’escargot dans
sa région moyenne., Il faut maintenant l'étudier
plus en avant, là où se trouve la féte. Celle-ci se
continue directement avec lui, ce qui revient à
dire qu'il n'y a pas de cou.
La têle, un peu arrondie en avant, ne serait
pour ainsi dire pas distincte, si elle ne possédait
pas des antennes — ce que les enfants appellent
des « cornes » — qui lui donnent un aspect bien
caractéristique. Il y a quatre de ces antennes (ou
entacules), deux grandes et deux petites.
Les deux grandes antennes sont situées sur le
dos de la tête et se dirigent à la fois en haut et en
avant : elles s’écartent l'une de l’autre en faisant
un angle très large. Chacune est très molle, large
à la base, elle s’amincit un peu et de plus en plus
jusqu’au bout où elle se termine par une petite
boule plus large et pas.très régulière. À la surface
de cette boule, mais pas exactement à l'extrémité,
on voit très nettement un petit point noir: c’est
l'œil. Tous les enfants savent que quand on touche
ces antennes, elles rentrent, en quelque sorte,
d'abord en elles-mêmes, puis dans la tèle, pour
ressortir un instant après.
Quand on se livre à des observations sur un
escargot en train de ramper, il ne se préoccupe
nullement de l'observateur: il ne le voit pas. Il
n’aperçoit pas non plus les obstacles les plus gros-
siers qu'il vient à rencontrer; ce n'est que lorsqu'il
les touche avec ses longues antennes, toujours
dirigées en avant, qu'il se rend compte de leur
présence. Autrement dit, ces grandes antennes ne
sont que des organes de tact; malgré leurs yeux,
elles ne servent pas à la vision distincte des objets.
Néanmoins, les organes visuels sont capables de
percevoir la clarte du jour; pour s'en convaincre,
on fait ramper un escargot à une certaine distance
d'une fenêtre, puis, brusquement, on place la main
ou un cahier entre celle-ci et l'animal. Générale
ment, on voit ce dernier tressaillir et contracter
soit ses antennes, soit même tout son corps. Mais
(1) Suite, voir page 292.
cest là un ròle bien accessoire pour la vie de l'es-
cargot. Comme organes de tact, les grandes
antennes leur sont très utiles en les prévenant des
obstacles et les engageant à les éviter ou à les
escalader.
Les petites antennes sont situées plus bas
que les grandes et sont environ de deux tiers
plus petites. Elles sont dirigées vers le bas et
touchent presque le sol quand l'animal glisse.
Elles sont également terminées par un petit ren:
flement, mais il n'y a pas d'œil à la surface; ce
sont aussi des organes du toucher qui servent
à l'animal à explorer le chemin et surtout à pal-
per sa nourriture. Quand on les touche, elles se
contractent et rentrent en dedans de la tète où
elles ne restent qu'un instant.
Les grandes et les petites antennes servent beau-
coup à l'odorat. i
Il arrive souvent que, dans les jardins, l'on voit
toute une famille d'escargots occupée à dévorer
une belle poire ou un beau chou, alors que les
poires ou les choux voisins sont négligés. Et l’on
est tenté de croire que c'est le fumet spécial
des parties attaquées qui a attiré les désagréables
mollusques, ou, autrement dit, que ceux-ci sont
doués d'un sens olfactif suffisamment fin pour per-
cevoir de loin les « bons morceaux ». À vrai dire,
il n’en est rien; c'est le hasard à peu près seul qui
mène les escargots alors que, la nuit surtout, ils
déambulent un peu n'importe où, se fiant plus, pour
trouver des victuailles, sur la longueur de leurs
méandres que sur la sensibilité olfactive, laquelle,
ainsi que M. Emile Yung l’a montré, est assez
émoussée.
Le savant professeur de l’Université de Genève
que je viens de citer a fait des expériences bien
conduites que je vais résumer.
Dans une grande salle dont le sol est cimenté et
maintenu humide par de fréquents arrosages,
M. Yung disposait douze escargots, affamés par
une semaine de jeùüne, à la périphérie de cercles
tracés à la craie, en ayant soin d’orienter leur tète
vers le centre du cercle. Puis il plagait en. ce der-
N° 1453
nier point une substance alimentaire qui semblait
à priori devoir exercer sur les escargots un effet
attractif.
M. Yung a d'abord expérimenté avec divers fro-
mages. Mais cette matière alimentaire, cependant
très odorante, ne séduit nullement les mollusques.
A 30 centimètres de distance, les résultats sont
négatifs. Bien plus, le gruyère fort est évité à
partir d'une distance maximum de 2 centimètres,
et l'on peut admettre qu’à cette distance les escar-
gots le sentent, puisque c'est à partir d'elle qu'ils
s'en écartent.
Pour le chou, l’odeur n'est perçue qu'à une très
courte distance qui ne va pas au delà de 15 à
20 centimètres: par conséquent, ceux qui dévorent
les choux dans les jardins ne sont pas guidés par
leur sens olfactif.
La laitue n'est perçue de certains escargots qu’à
la distance maximum de 5 à 6 centimètres. La
majorité de ces animaux souvent s’en rapprochent
jusqu’à 4 ou 2 centimètres pour s'apercevoir de sa
présence, et encore s’en rencontre-t-il quelques-
uns qui ne semblent pas ètre impressionnés par
cette plante, cependant l'un de leurs aliments pré-
férés, surtout quand ils sont jeunes.
Ayant haché un oignon et l'ayant offert à douze
escargots disposés autour de lui à une distance de
10 centimètres, la plupart s’en écartèrent dès le
début. Cinq d'entre eux rampèrent vers lui et deux
en approchèrent jusqu'à un centimètre et demi,
puis s’en détournèrent.
Il est fréquent de rencontrer dans les vergers
des escargots rongeant des pommes tombées. Il
s’agit là de rencontres fortuites. Une pomme très
mince coupée en tranches fut placée au centre d'un
cercle de 20 centimètres. Les individus trouvés sur
la pomme, après une heure d'attente, furent tou-
jours ceux que le hasard avait fait passer à plus
de 2 centimètres du fruit. I] en est de même pour
les fraises.
De toutes les substances végétales mises en expé-
rience par M. Yung, c'est le melon dont l'attraction
a été la plus manifeste : douze escargots sont dis-
posés sur la périphérie d'un cercle de un mètre
de diamètre, au centre duquel est placée la moitié
d'un melon mesurant 145 centimètres de diamètre
et répandant un fort parfum. Un quart d'heure
plus tard, neuf escargots sont dans le cercle, trois
n'ont pas bougé. Une heure après, sept individus
sur les neuf qui ont exécuté un mouvement centri-
pète ont atteint le melon et en mangent. Il ne
peut être ici question de hasard, d’autant moins
que, dans la moitié de la journée, les trois indivi-
dus demeurés d'abord immobiles se sont mis à
ramper tous trois dans la direction du melon et
deux d'entre eux ont réussi à l'atteindre, cinq
heures environ après le début de l'expérience.
Quant aux.trois autres individus, ils s’en sont déti-
COSMOS 329
nitivement éloignés après s’en être rapprochés
l’un de 30 centimètres, le second de 23 centimètres
et le troisième de 15 centimètres : ces trois escar-
gots n'avaient sans doute pas l'odorat aussi fin que
celui de leurs camarades.
La tète, examinée de face ou un peu sur le ventre,
montre encore deux sortes de lèvres charnues,
situées juste au-dessous des petites antennes et se
touchant au milieu. C’est entre ces deux lèvres et
le bord du pied que se trouve la bouche de l'es-
cargot. Pour la mieux voir, on laisse des escargots
jeùner pendant quelques jours, puis on les met
sur une feuille de, laitue qu'ils s'empressent de
dévorer. En examinant ceux qui sont sur le bord
de la feuille, on aperçoit les deux lèvres charnues
très écartées et la bouche plus ou moins largement
ouverte, et, en tous cas, montrant, d'une manière
malheureusement un peu vague, une pièce brune,
dure, qui rentre et sort successivement : c'est la
mâchoire qui, à chaque « lampée », écorche un
morceau de laitue que l'animal engloutit. Les
escargots ne vivent, d'ailleurs, que de matières végé-
tales, soit fraiches (fruits, légumes, feuilles, etc.),
soit plus ou moins en décomposition. A chacune
de ces « bouchées », la feuille qu'ils mangent pré-
sente une petite secousse, et, dans la tèle elle-même,
on voit généralement par transparence le mouve-
ment de va-et-vient des pièces qui s'y trouvent.
Sur un animal en train de ramper, on voit que
le bord de la coquille est séparé du corps de
l'animal par un bourrelet charnu et humide, de
couleur grisåtre: c'est le bord du manteau. Sur
tout son pourtour, il est lisse et ne présente aucune
particularité digne d'être signalée, sauf du côté
droit où on remarque un assez large orifice qui se
ferme de lui-même de temps à autre et s'ouvre
de mème, mais sans régularité aucune : c'est par
là que l'animal respire, car il représente l'orifice du
poumon, le pneumostome comme on l’a appelé.
C’est aussi dans le poumon qu'aboutit l'extrémité
ultime du tube digestif (l'anus), de sorte que les
déjections, qui se présentent sous forme de tor-
tellus irréguliers, sortent aussi par le pneumostome.
Ceux qui examinent pour la première fois celui-
ci s'imaginent que la cavité dans laquelle il donne
accès est limitée en haut par la coquille. Il n'en
est rien, et, pour s’en convaincre, on prend un
escargot jeune, c'est-à-dire à coquille peurésistante,
et on brise celle-ci petit à petit et avec précaution,
à l'aide des ongles. dans le voisinage du pneumo-
stome. On apercait de la sorte — on devine plutôt:
— la cavité où aboutit le pneumostome. Cette
eavité, le poumon, est limitée en haut par une
mince membrane parcourue par des veines blanches
et très anastomosées : ce sont mème ces vaisseaux
sanguins qui constituent le poumon proprement
dit.
Nous connaissons maintenant suflisamiment la
330
partie de l'animal extérieure à la coquille. Il nous
faut maintenant étudier celle-ci et son contenu.
Il est facile d’avoir des coquilles vides dans les
champs; si l’on n’en a pas, on fait cuire des escar-
gots vivants et on en relire l'animal avec une
épingle.
La coquille est formée d'une seule pièce (tandis
que dans les moules et les huitres, qui appartiennent
aussi à l’embranchement des mollusques, elle est
formée de deux parties). Elle est enroulée sur ellé-
même en hélice. Tout l'intérieur en est creux ou
du moins la cavité suit les tours de l'hélice, de
telle sorte que, très large à l’orilice extérieur, elle
diminue progressivement de diamètre au fur et à
mesure qu’elle monte jusqu’au sommet de la
coquille, c’est-à-dire du point d'où partent les tours
de la spire.
En prenant quelques précautions et en se servant
d'assez forts ciseaux, on arrive à ouvrir des brèches
dans la paroi externe des tours de spire. Par les
fenètres ainsi ouvertes, on se rend compte que ces
derniers pivotent autour d'un axe central qui va
du sommet de la coquille au bord de son entrée.
C'est, nous le verrons tout à heure, sur cette
colonne centrale qu'est attaché l'escargot.
Remarquons encore que le bord de l'ouverture
de la coquille est épais: il est surtout large au
point où aboutit la colonne dont nous venons de
parler.
Quand l'animal rampe, la coquille est comme
repliée sur le côté droit et un peu en arrière. Par
suite de cette disposition, l'escargot ne peut pas,
comme la plupart des autres animaux (par exemple,
l'abeille, l'écrevisse, la sangsue, la grenouille), être
divisé en deux parties semblables par un plan
médian, ce qui est la caractéristique des animaux
symétriques: lui est asymétrique, c'est-à-dire
sons symétrie, Un plan qui passerait par le milieu
du dos le couperait en deux parties dissemblables :
à gauche, une portion du plus grand tour de spire;
à droite, le reste de celui-ci et les petits tours de
spire. Tous les animaux à coquilles spiralées, les
gastéropodes, sont aussi asymélriques.
À la surface extérieure de la coquille, il y a une
série de petites lignes à peu près parallèles au
bord: ce sont les zones accroissement de la
coquille. Celle-ci grandit, en effet, sans cesse par
une sécrétion du manteau, sécrétion qui se dépose
au fur et à mesure de sa production sur son bord.
Il arrive souvent que l'on rencontre des escar-
gols dont la coquille a été brisée accidentellement
et dont les pièces sant ressoudées solidement par
une sécrélion du manteau, sécrétion qui apparait
entre celles comme du ciment entre les moel-
lons d'un mur. On peut d'ailleurs casser à dessein
une parlie de la coquille d'un escargot vivant et
assister chaque jour à cette ressoudure naturelle.
Pour se rendre compte de la nature de la coquille,
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1919
on en plonge une, soit dans du vinaigre qui, on le
sait, est constitué pur de l'acide acétique, soit
dansde l'acide chlorhydrique (étendu de son volume
d'eau): au bout d'un instant, on voit se dégager
des bulles de gaz carbonique. La coquille est, en
effet, constituée en grande partie par du calcaire,
du carbonate de chaux, dont le gaz carbonique se
dégage sous l'influence de l'acide, lequel s'unit à la
chaux pour former soit de l'acétate de chaux, soit
du chlorure de chaux. Les bulles sont même telle-
ment abondantes qu’elles entrainent la coquille
avec elles à la surface du liquide.
Au bout de quelques heures, l’altaque par l'acide
cesse, ce qui se reconnait à ce qu’il ne se dégage
plus de bulles, mais il reste une matière légère,
une pellicule assez semblable à de la baudruche :
les chimistes l’ont appelée conchyoline.
La coquille est donc constiluée par deux sub-
slances intriquées l’une dans l’autre, l’une miné-
rale, le carbonate de chaux, l'autre organique, la
conchyoline.
Pour avoir terminé ce qui a trait à la constitu-
tion du corps de l'escargot, il ne nous reste plus
qu'à nous rendre compte de la partie du corps qui
se (rouve cachée dans la coquille. Pour cela, voici
comment il faut procéder: on remplit un large
bocal ou une large bouteille d’eau préalablement
bouillie (cela n'est pas indispensable, on peut
prendre de l'eau ordinaire) et, dans cette eau, on
met deux ou {rois escargots vivants. On bouche
ensuite le flacon hermétiquement, de manière qu'il
ne reste pas de bulles d'air à l'intérieur, et on ne
s'en occupe plus pendant un ou deux jours. Au
bout de ce temps, on en retire les escargots qui
sont morts asphyxiés et, ce qui est avantageux
pour l'étude, sont largement étendus, comme gon-
flés d’eau. On peut dès lors y toucher sans les voir
se contracter, ce qui aurait lieu s'ils étaient
vivants.
Avec de forts ciseaux, on coupe petit à petit la
coquille en suivant le milieu des tours de spire.
Pour enlever le mucus qui se forme et les débris
de la coquille qui y restent collés et gènent beau-
coup l'opérateur, on procède à celte opération,
soit en se mettant au-dessus d'une cuvette d’eau
où on lave de temps à autre l'animal, soit, ce qui
est encore préférable, en se plaçant au-dessous
d’un filet d'eau; le courant entraine le mucus et
les débris de coquille. Bien entendu, il faut glisser
la pointe des ciseaux entre la coquille et l'animal
pour ne pas détériorer celui-ci, ce qui, d’ailleurs,
est assez difficile.
Pendant cette opération, on peut se rendre
compte que l'animal est étroitement uni à la
coquille à laquelle il est fixé par un large muscle
blanc qui, comme je le disais plus haut, s'attache
sur la colonne médiane de la coquille. Dans beau-
coup de campagnes on trouve cette croyance, que
N° 4543
l’on a toutes les peines du monde à déraciner, que
l’escargot a la faculté de quitter sa coquille et de
devenir ainsi une limace. Cette idée est absurde, car
la limace est un animal tout a fait différent de l'es-
cargot, et, de plus, celui-ci est uni à sa coquille :
jamais il ne peut la quitter.
En lavant sous un filet d’eau, on arrive cepen-
dant à détacher entièrement la coquille et, si
l'opération a été faite soigneusement, l'animal est
intact.
On y voit fort bien le poumon avec ses veines,
poumon qui ne s'étend pas très loin: c’est une
simple cavité en forme de gousset; sa mince paroi
supérieure est le manteau.
Le reste du corps est enroulé sur lui-même de
la même façon que la coquille, dans lequel ce tor-
tillon — c’est ainsi qu’on le nomme — est logé (1).
Il est constitué surtout par une masse brune, le
foie. Tout le bord intérieur du tortillon est blanc et
un peu résistant : c’est une sorte de muscle qui, en
un point, se soulève pour s'attacher à la coquille.
C'est par la contraction de ce muscle et du corps
lui-même que l'escargot rentre dans sa coquille.
Tout le monde sait, en effet, que lorsqu'on tra-
casse tant soit peu un escargot, il rentre entière-
ment dans sa coquille qui, de la sorte, lui constitue
une véritable maison. Il est intéressant de voir
comment se fait cette rentrée. C’est d’abord le
museau qui commence à se rétracter, ainsi que les
petits tentacules. Puis c'est le tour des grands
né
COSMOS
331
tentacules, puis de la partie antérieure du corps
qui se contracte vers le haut. Ensuite c’est le pied
qui rentre d'avant en arrière.
Finalement, tout l’orifice de la coquille n'est
plus occupé que par le bord lisse du manteau.
Souvent, au milieu de la masse contractée, on voit
encore le bout postérieur du pied et sur le côté un
orifice, le pneumostome.
Quand l'animal se déploie, il opère en sens con-
traire, c'est-à-dire que l’on voit s'épandre succes-
sivement le pied, la partie antérieure du corps, les
grands tentacules, les petits tentacules et, finale-
ment, le museau.
Ce que nous avons dit jusqu'ici est relatif à
l'animal considéré en été ou au printemps. En
hiver, il présente une particularité digne d’être
signalée: il s'enfonce dans la terre et bouche
l’orifice de sa coquille par une véritable muraille
calcaire. De cette façon, il est clos de toute part et
peut passer la mauvaise saison à dormir sans
craindre que des ennemis l’attaquent. Dans les
marchés en hiver, on vend souvent de ces escar-
gots operculés. Au printemps, l'animal perce son
« opercule » — ou plutôt le dissout — et recom-
mence une vie active.
Il pond ses œufs dans la terre sous forme de
grains blancs de la grosseur du millet, réunis en
paquets sous les pierres, qui ne tardent pas à se
changer en petits escargots vagabonds.
Henni CouPIN.
L’acide carbonique en œnologie.
La faveur toujours croissante dont jouissent
auprès du public les diverses boissons gazeuses est
due pour une large part à l’acide carbonique
qu'elles contiennent. Libérées aussitôt que la pres-
sion s'abaisse, les bulles de gaz, engainées pour
ainsi dire dans une mince pellicule de liquide,
« bombarbent » en tous sens le palais, la langue
et les joues, augmentant ainsi dans des propor-
tions énormes les surfaces de contact entre la
boisson et la muqueuse buccale, ou plus exacte-
ment les terminaisons nerveuses épanouies à la
surface de la muqueuse : les propriétés. désalté-
rantes que possède en propre le liquide sont d'ail-
leurs largement accrues par la fraicheur naturelle
et par la saveur piquante qui caractérise lacide
carbonique.
(1) On peut aussi bien voir ce tortillon sans employer
le procédé d’asphyxie que nous venons d'indiquer et
qui a l'inconvénient d’être un peu long; il suffit de
plonger l'escargot pendant une minute ou deux dans
de l’eau bouillante. Il meurt aussitôt, et, en tirant le
corps avec une aiguille, celui-ci se détache facilement
de la coquille.
C’est à ce gaz que nos vins mousseux sont rede-
vables de presque toute la gaieté qu'ils versent
- généreusement à leurs fidèles; aussi le rêve d’un
grand nombre de techniciens est-il de pouvoir
gazéifier de façon économique les vins ordinaires
à bas titre alcoolique, pour faire d'eux une boisson
de demi-luxe, agréable, saine, hygiénique et nutri-
tive, à l’usage des classes peu fortunées. Le but
poursuivi est évidemment louable, puisqu'il per-
mettrait en somme de bonifier des vins plats ou
médiocres, seulement utilisables dans leur état
normal à des coupages dont l'honnêteté commer-
ciale n’est pas toujours absolue. Par surcroit,
donner au vin, boisson de table, la fraicheur et
l'agrément que l’on recherche volontiers dans les
boissons prises en dehors des repas, ce serait lui
assurer de larges débouchés nouveaux, puisque ce
serait lui permettre de remplacer sans peine la
plupart des liqueurs apéritives dont les méfaits
hygiéniques ne sont niés par personne; ce serait
par suite combattre avec eflicacité l'alcoolisme,
en même temps que la tuberculose, dont les épou-
vantables ravages s'exercent de préférence sur les
Ba COSMOS
organismes débilités et intoxiqués par l'alcool.
A ces considérations, d'une importance sociale
certaine, qui militent en faveur des emplois œnolo-
giques de l'acide carbonique, s’en ajoutent d’autres
qui sont d'ordre purement technique. Nombre de
vins à complexion délicate doivent être maintenus
à l'abri de Pair, dont l'oxygène atténue leurs qua-
lités, quand il ne leur inflige pas des altérations
graves; lors des soutirages, on est tenu, en ce qui
les concerne, à prendre tout un ensemble de pré-
cautions spéciales qui n’ont, d’ailleurs, d’autre but
que soustraire en cours d'opération les particules
liquides au contact de l'oxygène. Par suite, on se
trouve parfois conduit à n'opérer que dans une
atmosphère inerte, azote ou acide carbonique. Or,
ce dernier gaz existe normalement en quantités
appréciables dans les vins nouveaux; il suffirait
dès lors de maintenir ceux-ci à température assez
basse pour prévenir son départ et retarder consi-
dérablement les oxydations complexes qui jouent
le rèle principal dans le phénomène du vieillisse-
ment. Le fait a son importance, car s’il est certains
vins qui éprouvent en vieillissant une amélioration
notable de leurs qualités guslatives, il en est
d’autres, au contraire, auxquels l’âge confère une
décrépitude rapide qui peut aller, dans certains
cas, jusqu’à réduire sensiblement leur valeur mar-
chande. Pour ces vins, qui sont da reste de qua-
lité ordinaire ou médiocre, la saturation par
l'acide carbonique serait une précieuse garantie de
durée : elle aiderait à maintenir en certains cas
l'équilibre du marché, par ce fait qu’elle rendrait
possible, pendant les années d’abondance, la con-
stitution de stocks dont l'écoulement se ferait sans.
difficulté au cours des années de disette.
D'autre part, le pouvoir antiseptique de l'acide
carbonique peut être un précieux auxiliaire pour
prévenir l'action nocive des multiples microorga-.
nismes du vin; plus particulièrement, son action
peut être mise à profit contre les diverses « casses »,
eu substituant du gaz inerte à l'air mécaniquement
retenu entre les particules de liquide, et qui con-
tient oxygène indispensable à la vie des micro-
germes déterminant ces maladies.
Enfin, il n'est pas jusqu'aux vins soumis à la
pasteurisation dans le but de garantir leur sta-
bilité biochimique, qui ne puissent retirer grand
profit d’une saturation convenable par l'acide car-
bonique. On sait, en effet, combien l’action de
49 SEPTEMBRE 194%
l'air est plus sensible sur eux que sur les vins
n'ayant subi aucun chauffage: c’est même là un
des graves inconvénients de la pasteurisation, qui
laisse pour ainsi dire le vin « désarmé » contre les
attaques venues de l'extérieur, à tel point que cer-
tains æœænologues n'hésitent pas à contester l’oppor-
tunité pratique d’un traitement d’ailleurs utile en
soi à de nombreux points de vue. L'emploi de
l'acide carbonique est, en pareil cas, d'autant plus
recommandable qu'il restitue aux vins pasteurisés
cette fraicheur de goût dont ils sont généralement
privés. Au reste, certains crûs naturellement très
frais, le Chianti, par exemple, ne doivent leur
qualité spéciale qu’à l’habitude prise dans les pays
d'origine d'ajouter au vin fait, déjà en tonneaux,
une quantité rationnelle de raisins à demi passe-
rillés, et dont le sucre engendre une fermentation
secondaire qui a pour résultat de saturer la liqueur
de gaz carbonique dissous.
L'addition de sucre est, en effet, le moyen natu-
rel de charger les vins d'acide carbonique, et celui-
ci, résultat de manifestations biochimiques com-
plexes, présente alors le maximum de pureté dési-
rable. Il est souvent loin d'en ètre ainsi pour le
gaz qui provient de la cuisson des calcaires, mais,
par contre, celui-ci est devenu d'un emploi extrè-
mement commode depuis que l’industrie le livre
à bas prix, liquéfié par compression dans des bou-
teilles d'acier robuste munies de détendeurs. Il est
facile dans ces conditions d'opérer de façon précise,
c'est-à-dire d introduire exactement dans le liquide
les doses voulues. L'opération ne comporte aucune
difficulté matérielle, puisqu'il suffit d’amener le
gaz à la partie inférieure des vaisseaux pour que,
remontant et barbotant à travers la masse liquide
par le fait seul de sa plus faible densité, il.s'y dis-
solve jusqu’à saturation. On peut imaginer. à cet
effet des dispositifs multiples.
e
+ +
En somme, un fait se dégage nettement quand
on examine les applications possibles de l'acide
carbonique à la vinification, c'est que ces applica-
tions seront de plus en plus importantes dans
l'avenir. Tout permet, d'ailleurs, de formuler cette
appréciation optimiste : les services rendus, la faci-
lité de la technique et le prix de revient peu élevé
d'une méthode qui présente dans la pratique les
plus sérieux avantages.
Francis MARRE.
COSMOS
333
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 9 septembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. APPELL.
L’évaporation du sol et des végétanx comme
facteur de la persistance des temps pluvieux
et froids. — M. A. Munrz donne l'intéressante note
suivante :
Il semble que, lorsqu'une période humide et froide
s'est établie, elle ait une tendance à persister. Les étés
des années 1910 et 1912 nous en donnent des exemples
récents.
Certes, les courants atmosphériques jouent le prin-
cipal rôle dans cet état climatérique, mais d’autres
facteurs interviennent, qu'il est utile de mettre en relief
et dont l'influence est considérable; ce sont l’évapora-
tion du sol et surtout celle de la végétation.
Lorsque, à la suite de pluies d’une certaine durée,
le sol reste mouillé, il évapore constamment de l’eau
qui, se condensant dans les couches supérieures de
l'atmosphère, produit des nébulosités. Celles-ci main-
tiennent le ciel couvert et retombent sous forme de
pluie, pour continuer ce cycle indéfiniment.
Chaque jour de pluie lègue donc au jour suivant la
cause originelle de Phumidité persistante, et l’on com-
prend que cet état ait une tendance à s'éterniser.
Tout se passe comme si la même masse d’eau allait
alternativement du sol à l'atmosphère, par évapora-
tion, et retombait ensuite sur le sol sous forme de
pluie. `
L'évaporation d'un sol mouillé est considérable:
pendant le mois de juillet si pluvieux de 1910, la quan-
tité d’eau déversée par hectare de terre nue a été, à la
station de chimie végétale à Bellevue, de 218 mètres
cubes.
Pendant le mois d’août de 1912, encore plus pluvieux,
elle a été de 217,6 mi.
On comprend que de pareilles quantités d'eau suf-
fisent pour entretenir la nébulosité.
Mais ce n’est pas seulement le sol nu qui évapore;
celui qui est couvert de végétation évapore beaucoup
plus. Or, c’est précisément pendant les années humides
que le développement végétal est le plus abondant et
se continue le plus longtemps. De là une cause d’éva-
poration énorme, qui persiste également par un renou-
vellement incessant de la cause déterminante.
Dans mes essais, le déversement dans l'atmosphère
de l’eau évaporée par 1 hectare de luzerne a été, pen-
dant le mois de juillet de 1910, de 803 mètres cubes.
Cette quantité est un peu supérieure à celle de l'eau
tombée sous forme de pluie pendant la même période,
et qui a été de 697 mètres cubes. Tout s'est passé
comme si la même eau avait fait la navette entre la
surface de la terre et les hautes régions de l’atmosphère,
maintenant constamment la nébulosité et la cause
première de cette nébulosité. Pendant le mois d'août
da 1912, l'évaporation de l’hectare de luzerne a été de
900 mètres cubes, la pluie tombée ayant été de
894 mètres cubes, ce qui confirme les indications
recueillies en 1910.
Il résulte de ces observations que l'évaporation pro-
duite à la surface du sol, surtout par le développe-
ment végétal, est un facteur important, peut-ĉtre pré-
dominant, de la nébulosité persistante du ciel et des
chutes d'eau fréquentes, et que ce régime, une fois
établi, a une tendance à se continuer par une sorte de
cycle qui ramène alternativement l’eau du sol vers
l'atmosphère par l’évaporation, et celle de l'atmosphère
vers le sol par les pluies. C’est un cycle fermé, qui
peut se continuer jusqu'à ce que des phénomènes
météorologiques puissants viennent le rompre.
Quant à l’abaissement de la température pendant
ces périodes, il est occasionné par les mêmes causes.
D'abord par l'absence de soleil, dont les radiations
sont empèchées par les nuages d'échauffer la terre;
mais aussi par l'évaporation de l’eau à la surface du
sol et des organes végétaux. Ainsi, mes observations
de 1910 et 1912 montrent que le sol mouillé, qui éva-
pore abondamment, a une température inférieure de
2 à 3 degrés à celle du mème sol, qui est à un état
d'humectation normal et qui n’évapore que faiblement.
Quant aux végétaux, ils sont également une cause de
- refroidissement par l'évaporation abondante qui se
produit à la surface de leurs organes. Ainsi, lair qui
circule entre les feuilles d’une luzernière a générale-
ment 3 degrés de moins que celui qui circule au-dessus,
Il est à remarquer que ces abaissements corres-
pondent sensiblement à l’abaissement moyen de la
température signalé par les Observatoires météorolo-
giques.
Cette chaleur enlevée à la surface de la terre par
l'évaporation n’est pas restituée par la pluie, car elle
est perdue dans les hautes régions de l'atmosphère, et
les eaur de pluies retombent froides, ayant 3 à 4 degrés
de moins que l'air ambiant.
Cette évaporation à la surface de la terre et des
plantes entraîne donc une soustraction de calorique
qui cause un abaissement notable de. la température.
Action des rayons ultra-violets sur les carbures
d'hydrogène gazeux. Note de MM. Daie BFRTHELOT
et HENRY GAUDECHON. — Nouvelle synthese de glucoside
d'alcool à l'aide de l'émulsine: benzylglucoside 8.
Note de MM. E{. Bovrgoreror et M. BrhiveL. — Les
caractères histologiques spécifiques des «cellules lumi-
neuses » de Pyrosoma qgiganteum et de Cyclosaipa
pinnata. Note de M. Cu. JUIN.
334
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1912
BIBLIOGRAPHIE
Cours d’analyse quantitative des produits des
industries chimiques, professé à l’Institut pra-
tique de chimie de Bruxelles, par ALBERT MRu-
RICE, directeur, ingénieur chimiste. In-8o de
vui-480 pages, avec 53 figures (relié, 12 fr).
H. Dunod et E. Pinat, éditeurs, 47-49, quai des
Grands-Augustins, Paris. 4912.
En 1908, M. Meurice publiait la première partie
du Cours de chimie quantitative industrielle qu'il
professe depuis de nombreuses années à son Institut
de chimie de Bruxelles.
Cette partie se rapportait à l'analyse quantitative
des matières minérales.
La description des procédés et méthodes ayant
trait au contròle des industries chimiques fait
l'objet de l'ouvrage qu'il publie aujourd'hui.
On y trouve successivement l'étude des industries
de la verrerie, de la céramique, de l’acide sulfu-
rique, de l'acide nitrique, de l'acide chlorhydrique,
de l’alumine, de l’acide borique, des sels métal-
liques, du gaz, de l'ammoniaque. du goudron, des
huiles, de la savonnerie, etc.
Toutes les méthodes d'analvses enseignées dans
ce cours onl été choisies avec soin parmi celles
ayant fait leurs preuves et dont l'exactitude a été
controlée,
Lorsque plusieurs procédés sont indiqués pour
un mème dosage, l'auteur a spécifié chaque fois
qu'il y avait avantage, dans un cas donné, à
employer telle méthode plutòt que telle autre.
Cet ouvrage pourra êlre consulté avec fruit par
tous les chimistes s’occupant d'analyses indus-
trielles; il sera un guide sûr pour le commençant
ou pour le pratiquant n’effectuant que de temps à
autre l'analyse de tel ou tel produit spécial. On a
cru utile de donner un très grand nombre d'exemp'es
de calculs et de compositions, les bases d’apprécia-
tion, lorsque l'on a affaire à un produit que l'on
n'analyse pasrégulièrement, faisant souvent défaut.
Encyclopédie scientifique des aide-mémoire,
publiée sous la direction de M. Leauté, de
l'Institut (chaque volume, 2,50 fr). Librairies
Gauthier-Villars et Masson.
Les encres, par F. MarGiva, licencié ès sciences.
Les formulaires fourmillent de recettes d’encres
de toutes couleurs; il est rare, cependant, qu'on
obtienne de bons résultats en les essayant. Cest
que, le plus souvent, ces recettes sont prises de
cèté et d'autre sans avoir jamais été vérifiées.
L'auteur de ce recueil ne donne qu'un petit
nombre de recettes, mais dont il a reconnu la
valeur. De plus, il s’est efforcé d'étudier les phé-
nomcvnes scientifiques de la fabrication des encres.
De cette façon, le préparateur sait d'avance le role
joué par chaque constituant et peut, par suite,
prévoir le résultat qu'il obtiendra en faisant varier
les doses indiquées.
Chaque chapitre, composé d’un exposé scienti-
fique suivi d'une série de formules soigneusement
choisies, est consacré à une catégorie d’encres :
encres au fer, au campèche, au carbone, aux cou-
leurs synthétiques; encres sèches, à copier, à tam-
pons; encres hectographiques; encres pour le
linge, les métaux, le celluloiïd, etc.
Aide-mémoire du cinématographiste. Recueil
de recettes, procédés, formules et conseils utiles
aux cinématographistes, par C. DE MIiREAUNEL
(0,75 fr). Comptoir d'édition de Cinéma-Revue,
118, rue d'Assas, Paris.
Cet ouvrage est plus particulièrement destiné
aux exploitants d'entreprises cinématographiques.
Il contient d'abord les recettes et procédés utiles
dans cette branche d'industrie, puis les règlements
de police relatifs à l'exploitation des spectacles
cinématographiques et au transport des tubes
d'oxygène, enfin un résumé des formalités à
remplir pour la demande des brevets d'invention.
La photographie par cerfs-volants, par
H. QuenTix. Une brochure de la bibliothèque de
Photo-lRievue (0,60 fr). Paris, Charles Mendel,
éditeur.”
Le cerf-volant est redevenu à la mode en ces
dernières années, ce n'est plus seulement un jeu
pour les enfants; les grandes personnes s'en
occupent et lui cherchent un but utile. De là sont
venus les cerfs-volants montés, les cerfs-volants
porte-antennes de télégraphie sans fil, les cerfs-
volants météorologiques, etc.
Les premiers essais de photographie aérienne
par cerfs-volants remontent déjà à quelques années.
Depuis, on a beaucoup perfectionné et les appa-
reils porteurs, et les dispositifs de prise de vue.
Les résultats obtenus sont d’ailleurs des plus inté-
ressants, les clichés pris à une certaine hauteur
pouvant avoir une grande valeur au point de vue
topographique.
Or, tous les amateurs photographes peuvent
assez aisément prendre des vues aériennes.
L'auteur de cet intéressant opuscule montre que
sans installation spéciale, avec les éléments que
tout amateur a sous la main : bois, ficelle, étoffe,
il est facile de construire d'après ses indications
un dispositif parfaitement capable de tenir lair
tout en remorquant un appareil photographique
avec les dispositifs de suspension et de déclanche-
ment.
N° 1443
Essais d'automobiles (moteur - transmission),
effectués au laboratoire de l'École polytechnique
de Berlin, par le D" A. Renter. Traduit de Palle-
mand par F. CanLës, ingénieur civil, secrétaire
de rédaction de la Vie automobile. Un vol. in-8°
(19 X 28) de 1v-155 pages avec 99 figures. (Bro-
ché, 9 fr.) Librairie Dunod et Pinat, 49, quai
des Grands-Augustins, Paris.
Jusqu'ici, les automobiles n'ont été et ne sont
encore estimées, quant à leur valeur, qu'au moyen
des courses. La maison victorieuse acquiert immé-
diatement la vogue, sans qu'on connaisse rien de
ses procédés de construction ni des qualités et des
défauts des différentes parlies de la voiture.
Cette base d'appréciation n’a aucune valeur dans
la plupart des cas. Il serait bien plus intéressant,
pour pouvoir juger avec fruit, de connaitre le ren-
dement des différents organes d'une voiture auto-
mobile et de pouvoir les comparer avec ceux des
marques différentes.
Le D' Riedler a combiné toute une série d'essais
qui peuvent être effectués dans un laboratoire et
portent sur tous les organes des voitures étudiées.
Les résultats obtenus sont résumés sous forme de
diagrammes, comparables facilement entre eux,
et d'où les conclusions découlent d'elles-mêmes.
Cet ouvrage ne manquera pas d'intéresser les
ingénieurs et constructeurs d'automobiles. Des
essais semblables leur permettront de voir par
quel côté pèchent leurs voitures et leur permettront
d'y remédier.
Guide pratique du prospecteur à Madagascar,
par D. Levar, ingénicur civil des mines. Un vol.
in-8° de 1432 pages, avec 38 figures et une carte hors
texte (broché, 6 fr, cartonné; 7,25 fr). Librairie
Dunod et Pinat. Paris, 1912.
Cet ouvrage est l’œuvre d’un technicien doublé
d'un géologue. Il est, en effet, à peu près impos-
sible d'être bon prospecteur si l'on n’a pas une con-
naissance suffisante des phénomènes qui régissent
la stratigraphie, la tectonique et l’allure des gites
minéraux et métallifères.
M. Levat met en relief certaines particularités
des gites aurifères de Madagascar qüi auraient
certainement échappé à beaucoup de bons — mais
uniquement — techniciens.
L’allure lenticulaire, « en chapelet », des roches
aurifères interstratifiées dans les formations cris-
tallines; la teneur en or des diverses roches: gneiss,
quartz, quartzites ; les latérites à métal précieux
sont autant de points qui ont élé traités avec
clarté et précision.
L'auteur développe d’une façon toute particulière
la partie relative à la mise en valeur des gites
aurifères. À ce point de vue, son livre sera ulile
non seulement aux prospecteurs ayant à opérer
à Madagascar, mais aussi à tous ceux en action
COSMOS
330
dans les autres régions du globe, les mêmes mé-
thodes de traitement s'appliquant à chaque caté-
gorie de gisement, en quelque lieu que ce soit.
t
Au Maroc, par les camps et par les villes, par
GusTavE BAgix. Un vol. broché (3,50 fr). Grasset,
61, rue des Saints-Pères, Paris.
Publiciste de métier, excursionniste de profes-
sion, écrivain non sans talent, M. Babin nous livre
ici les résultats d'une vhsle enquète menée par lui
au Maroc. Les impressions politiques concordent
avec celles de la plupart des voyageurs, en ce sens
qu'il estime fort ardue la tâche qui nous incombe.
Ce qui est particulièrement intéressant à lire chez
lui, ce sont les chapitres qu'il consacre à la zone
espagnole. M. Babin n'aime pas les Espagnols. Il
les considère comme jaloux, arriérés, arbitraires,
amis de la saleté, ennemis de Ja France. Ah! il
n'est pas tendre pour eux. A Fez, il s'est entretenu,
comme tout Français qui se respecte, avec le sul-
tan. IHi donne de lui une description des plus
vivantes. Pour conclure, signalons que son ouvrage
comporte des renseignements historiques assez
peu connus du grand public, et pitloresquement
présentés.
Manuəls Roret. Librairie Mulo, 12, rue Haute-
feuille, Paris.
Prestidigitation, tours de cartes : 2° série; tours
avec appareils, par Rocer Bargan. Un vol. in-18
avec 98 figures (2,50 fr).
Nous avonsrendu compte précédemment (Cosmos,
n° 4323 du 4 juin 4910) de la première partie de
cet ouvrage. L'auleur y décrivait tous les tours
qu'il est possible de faire par simple habileté
manuelle et, disons-le, après un long et patient
travail. Faire sauter la coupe, forcer une carte, elc.,
ne sont pas des exercices qui s’apprennent en peu
de temps.
Dans ce second volume, l’auteur s'occupe des
tours de cartes exigeant l'emploi d'appareils
truqués. Cet ouvrage est divisé en deux parties.
La première donne des détails fort utiles sur les
moyens d'exéculion des tours et les ustensiles et
objets nécessaires. La seconde comporte quatre
chapitres: l'un est consacré aux tours de carles que
nous pouvons appeler rlaxsiques.
Le chapitre suivant comprend les expériences
d'invention plus récente.
Un autre, intitulé: Tours inédits et nouvelles
créations, ne contient que des expériences abso-
lument inédites ou des tours exécutés au moyen
de procédés nouveaux.
Enlin, sous cette rubrique : La télé:raphte sans
fil, le dernier chapitre est consacré à des expé-
riences connues sous le nom de phénomènes de
seconde vue où de transmission de la pensee.
330
COSMOS
19 SEPTEMBRE 1942
FORMULAIRE
Moyen pour rendre les chaussures imper-
méables. — Mélangez et faites bouillir dans un
pot de terre 125 grammes de cire jaune et autant
de suif de mouton, 5 grammes de résine et un
demi-litre d'huile d’œiliette ou autre.
La chaussure bien brossée, bien séchée et légè-
rement chauffée au feu doit ètre recouverte, se-
melles et empeigne, de ce mélange que l'on étend
jusqu’à parfaite saturation du cuir, avec une
brosse, un pinceau ou un simple tampon de linge.
(/nventions illustrées.)
Conservation des cuivreries des appareils
à acétylène. — Certaines personnes qui tiennent
beaucoup à la propreté de leur appareil à acétylène
se plaignent de la difficulté de conservation des
cuivreries qui noircissent rapidement.
Le moyen le plus simple, employé du reste par
un certain nombre de consommateurs, consiste,
après un parfait nettoyage des cuivres, à les cou-
vrir avec un pinceau d’une légère couche de vernis
blanc transparent. De la sorte, ils ne seront plus
atteints par les émanations gazeuzes, et, pour leur
nettoyage, il suffira de passer une simple éponge
mouillée.
Ce procédé est naturellement applicable à tout
objet en cuivre capable de se ternir.
(Rev. gén. de l'Acétylène.)
PETITE CORRESPONDANCE
M. F. R., au V. d'A. — On ne peut différencier ces
farines que par le microscope, après leur avoir fait
subir un traitement. (Voyez Cosmos, n° 1116, 16 juin
1996.) Il faut donc tout d'abord savoir se servir du
microscope, ce qui demande un certain entrainement,
puis posséder des images des diverses farines pour
établir des comparaisons. — Vous trouverez tous les
renseignements utiles dans l'ouvrage: Traité pratique
d'analyse des denrées alimentaires de GÉRarD et BONN
(13 fr). Librairie Vigot, 23, place de l'École-de-Méde-
cine. Comme conclusion, ilest plus simple de s'adresser
à un laboratoire officiel.
M. J. J., à T. — Nous avons puisé cette information,
comme vous avez pu le voir, dans les colonnes de
notre confrère américain lElectrical World (239 West
39 th Street, à New-York), et nous n'avons pas d'autres
détails. |
M. M., à V. — Un tel relais est possible, mais c'est
un appareil de précision qui coûte fort cher. — Quant
à votre question, il est impossible d'y répondre: il y
a tant de ces postes!
M. Eula. — Le meilleur ouvrage à consulter sur
cette méthode est certainement le livre de M. Guil-
bert: Nouvelle methode de prevision du temps, par
G. Guisket. Un vol. in-K’, 43 fr. Librairie Gauthier-
Villars, à Paris. Cet ouvrage a été Ctudié et analysé
longuement dans Je Cosmos, n° 1310, 1311, 1312 et
| 314 (mars 1910). — S'il s’agit de projections lumi-
neuses, les tuyaux ordinaires de caoutchouc suflisent :
les forts sont à conseiller, on les trouve partout.
M. J. C., à P. — Ce détecteur a été décrit dans le
numéro 4417, p. 332, et plus complètement dans le
numéro 1419, p. 372. — Le Cosmos (n° 874, p. 514,
26 octobre 1901} a décrit un calendrier perpétuel por-
tatif, forme breloque. A l'époque, l'inventeur, M. S. Mai-
trugue, habitait 52, rue de la Garenne, à Courbevoie
(Suine). — Ce calendrier donne les quantimes, mais
non les phases de la Lune.
M. P, L. M. — 1° On considére que, sur toute
l'étendue du territoire français, une longueur d'an-
lenne de 105 mètres est suffisante pour percevoir les
signaux radiotélégraphiques de la tour Eitřel, par le
procédé usuel, c’est-à-dire au moyen d’un détecteur
joint à un récepteur téléphonique approprié. — 2° Il
n'est pas possible de fixer le rapport de portée exis-
tant entre le détecteur électrolytique et le détecteur
à contacts imparfaits; avec ce dernier genre de détec-
teur, plus on accroît la sensibilité et plus on compromet
la sûreté de fonctionnement; ce défaut n'existe pas
pour les détecteurs électrolytiques. — 3° L’enregistre-
ment des radiotélégrammes est peu usité, mais il a été
expérimenté par bien des auteurs. Voyez l’article du
Cosmos, n° 1437, p. 159. On arrive fort bien à faire
actionner directement par certains genres de détecteurs,
soit un galvanomètre enregistreur à bobine tournante
portant un style inscripteur, soit un galvanomètre à
corde dont les écarts s'inscrivent photographiquement.
Si on veut actionner un appareil Morse, ce qui est
impossible directement (car le courant qui circule dans
le détecteur est trop faible), il faut employer un relais
sensible. En fait, les détecteurs téléphoniques sont
de beaucoup plus simples et meilleur marché.
C" de M., à L. — 4° L'ouvrage Leçons sur l'Électri-
cilé, par Eric Gérard (8° édition, 4910; 2 volumes,
42 francs chacun; Gauthier-Villars, éditeur}, est celui
qui répond le mieux à un pareil programme; il fait
quelquefois appel au calcul différentiel et intégral; il
est à la fois théorique, descriptif et technique. —
2° Fabrication du gas, par E. Bontas (25 fr), librairie
Béranger, 15, rue des Saints-Pères, Paris. — L'/ndus-
trie élertrique, paraissant deux fois par mois (un an.
24 francs), 9, rue de Fleurus, Paris. — 3° L'engrais est
surtout déterminé par la nature du sol, auquel il
faut restituer ce qui lui manque; il est donc difficile
de répondre à votre question. Nous vous engageons à
consulter quelques ouvrages spéciaux, par exemple:
Les engrais de la vigne, de Micuaut (3,50 fr), ou la
brochure publiée sous le même titre par Ricaux
(0,60 fr), qui vous diront les engrais préférables pour
la vigne. Ces ouvrages se trouvent à la Librairie hor-
ticole, 84 bis, rue de Grenelle. — Envoi fait.
Imprimerie P. Fanon-Vrau. 8 et 6, rue Bayard, Paris, VII”.
Le gérañt : E. PETITBENAT.
No 144% — 96 SEPTEMBRE 1912
COSMOS
337
SOMMAIRE
Tour du monde. — La première comète de l’année (19 12 a) Gale. Survie du cœur de grenouille isolé du corps.
Une maladie professionnelle des confiseurs. Injections de sérum-rhum comme tonique du erur. Le benzé-
nisme professionnel. L’approvisionnement de Paris en 1911. Le thé. Comment on crée une capitale. Pour
faciliter la circulation des voitures. Exploits aériens. Un beau voyage en hyÿdro-aéroplane. Un coffre-
fort géant, p. 337.
Les manipulations du miel utiles à sa conservation, Rozert, p. 342. — La nature artiste, GnanENwirz,
p. 343. — Les éléments figurés du sang : les leucocytes, AcLoovE, p. 3+4+. — Le touage électrique
sur le canal de Saint-Quentin, Mancuaxo, p. 346. — Les aciers à outils, Rors<et, p. 348. — La
transformation du port de la Havane, Beierr, p. 349. — Les arbres à gutta-percha de l’Afrique
tropicale, Nouiis, p. 352. — Deux localités géologiques célèbres : Uchaux et les Baux, l. Courrs
p. 355. — La semoule et sa fabrication, ne ManeT, p. 357. — Sociétés savantes : Académie des
sciences, p 360. — Bibliographie, p. 361.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
La première comète de l’année (1912 a)
(Gale).— Le Bureau central des télégrammes astro-
nomiques de Kiel a reçu le 10 septembre au soir le
« cäble » suivant de M. le professeur P. Baracchi,
directeur de l'Observatoire de Melbourne :
« Une comète a été découverte, par Gale, à
Sydney, le 8 septembre. Elle a été observée le
8,8889 septembre, temps moyen de Greenwich,
dans la position apparente suivante :
R = 1337140 (D = —36°31'2" »
Ce moment correspond à 9"20" du 9 septembre
(au matin), temps de Greenwich, et à 7°25® du
9 septembre (au soir) en temps local de Sydney
qui avance de {0 heures 5 minutes sur notre nota-
tion horaire. `
L'annonce de cette découverte fut télégraphiée
comme d'habitude aux Observatoires, et uneseconde
observation fut communiquée bientôt au Bureau
central. Elle provenait de l'Observatoire astrono-
mique national de Santiago du Chili et était rédi-
gée comme suit :
« Sept. 11, 749,2 Santiago, position appa-
rente (1912.0) :
» R = 1354"14,7 O = —3310 35"
» Comète ronde, diamètre 2’, éclat entre 3° et
6° grandeur, noyau, pas de queue. — Prager. x»
Le temps de Santiago retarde de 4 heures 42,8 mi-
putes sur celui de Greenwich; ainsi 2,6333 jours
se sont écoulés entre les deux observations; la
comète s’est dirigée vers l’Est à raison de 6"28:, et
vers le Nord à raison de 1°16°7” par jour. Elle tra-
verse en ce moment la constellation australe du
Centaure et n’est donc pas observable en Europe,
mais comme son mouvement propre l’entraine
vers le ciel boréal, il n’est pas impossible qu’elle
T. LXVII. N° 41444.
devienne visible en France. Plusieurs comètes,
visibles d'abord dans l'hémisphère Sud, ont fait
ensuite dans nos cieux de brillantes apparitions.
M. Walter Frederick J. P. Gale est un astronome
amaleur australien bien connu. Ila longtemps habité
Newcastle, N. S. W., et est membre de la Société
royale astronomique anglaise. La comète qu'il a
découverte est la première qu'on observe cette
année. On se rappelle que l'an dernier on n'en
catalogua pas moins de huit.
BIOLOGIE
Survie du cœur de grenouille isolé du
corps. — L'étude des organes et des tissus isolés
du corps a pris en ces derniers temps une exten-
sion très grande, grâce aux perfectionnements de
la technique. Naguère encore (Cosmos, n° 1441,
5 septembre), nous rappelions ici la méthode
employée par MM. T. Burrows et A. Carrel pour
cultiver les tissus en dehors de l’organisme dans
le plasma sanguin, ainsi que les derniers résultats
obtenus par Burrows, qui a vu les cellules muscu-
laires extirpées d'un cœur de poulet proliférer, et
les cellules nouvelles acquérir, en peu de jours,
le rythme caractéristique du muscle cardiaque.
Deux physiologistes roumains, MM. Athanasiu et
Gradinesco, viennent d'étudier un autre còté de la
question, à savoir la survie des organes isolés du
corps et en l'absence de matières protċiques (albu-
minoïdes) gràce auxquelles ces organes seraient
à mème de reconstituer leur propre substance.
Leurs recherches ont porté sur le cœur entier et
les muscles stris de grenouille, extraits avec
l'asepsie la plus rigoureuse el soumis À ia vireula-
tion artificielle (destinée à remplacer la fonction
circulatoire du sang) avec le sérum de Lorke
stérilisé.
338
Dans une expérience, le cœur a été enlevé le
8 avril, et la fréquence de ses battements était
alors de 20 pulsations par minule; le 9 avril, elle
était de 22; du 10 au 19 avril, la fréquence est
devenue irrégulière, et il y a mème eu des arrèts
d'assez longue durée. Le 20, le cœur a repris un.
rythme régulier de 5 pulsations par minute; puis,
par périodes, la fréquence est remontée à 15, et le
cœur s'est arrêté définitivement trente-trois jours
après le commencement de l'expérience.
Les cellules vivantes du cœur, durant ce travail
d'environ 360 000 pulsations, ont certainement
subi une usure en vertu mème de leur fonctionne-
ment; or, pour réparer cette usure, le cœur de
grenouille n'avait à sa disposition aucun aliment
de nature albuminoïde; il n'avait, pour subvenir
à ses perles, que le glucose présent dans la solu-
tion, aliment de choix pour le muscle qui travaille,
mais substance incapable de reconstituer la sub-
stance azotée des cellules. Il faut en conclure que
usure protoplasmique a été très faible.
Les résultats qui se dégagent de ces recherches
viennent à l'appui de nos connaissances touchant
la part minime qui revient aux substances albu-
minoides comme source d'énergie dans le travail
musculaire.
SCIENCES MÉDICALES
Une maladie professionnelle des confiseurs.
(Gasette des hiüpitau.x, 19 sept.). — Cette affection
spéciale des ongles de la main, l’onyxis des confi-
seurs, a élé décrite pour la première fois en France,
en 41879, par Poncet. C'est une maladie surtout
connue dans les grandes confiseries du midi de la
France, spécialisées dans la préparation des fruits
confits. Les auteurs français font intervenir dans
l'étiologie de cette affection, qui frappe exclusive-
ment les ouvriers occupés pendant plusieurs mois
consécutifs à préparer les fruits confits, des fac-
teurs thermiques (immersion des doigts dans le
sucre chaud), mécaniques (chocs des doigts contre
les récipients) et chimiques (action directe du sucre
et des sucs de fruits). lls en donnent pour preuve
l'atteinte plus fréquente du pouce et du médius,
plus exposés à ces différents traumatismes.
M. Max Strauss (Deutsche medizinische Wochen-
schrift, 2 mai), se fondant sur trois cas récemment
observés par lui, pense que d'autres facteurs ont
certainement une importance. Un seul de ses ma-
lades était confiseur et ne s'occupait pas particuliè-
rement de la préparation des fruits confits. Les
deux aulres observations concernent une cuisinière
et une fiile de cuisine dans un grand restaurant.
La maladie débute par de petites érosions au
niveau du pourtour de l'ongle, où s'accumule la
poussière de sucre ou de débris alimentaires divers
qui jouent pour Strauss le rôle capital dans la
genèse de la maladie. Ils fermentent et provoquent
COSMOS
926 SEPTEMBRE 1912
une inflammation qui s'accuse par de la rougeur,
un peu de tuméfaction et un peu de douleur au
pourtour de l’ongle. L’ongle se décolle latéralement
et à son extrémité antérieure en mème temps qu'il
noircit et perd son éclat. Les patients accusent à
ce stade un prurit s'exagérant la nuit.
Si le malade ne suspend pas son travail, l’inflam-
mation progresse : de petites collections purulentes
se forment sous l'ongle et de petites excroissances
granuleuses au niveau de la matrice de l’ongle, qui
sont très douloureuses et donnent un exsudat séro-
purulent. L'ongle se décolle de plus en plus.
Si la guérison survient spontanément, l'ongle se
détache par morceaux; à la place de granulations
persiste une tuméfaction isolée, et la phalange
unguéale prend la forme d’une massue aplatie.
La maladie est essentiellement chronique et peut
durer des années, si la cessation du travail pendant
plusieurs semaines n’amène pas la guérison rapide.
Lorsque la maladie est à un stade avancé, la con-
servation de l'ongle est impossible et sa régénéra-
tion problématique.
Le traitement est avant tout prophylactique. Les
personnes qui, par leur profession, sont obligées
de manier les substances alimentaires, sucre ou
autre, doivent fréquemment se laver les mains à
l'eau chaude, à la brosse et au savon; se les sécher
complètement avec des serviettes propres et les
oindre fréquemment de glycérine.
Si la maladie se montre, le travail doit être arrêté.
Dès que l'ongle noircit, il doit ètre enlevé et la
région unguéale soigneusement désinfectée. Les
bourgeons granuleux qui se forment à la base de
l’ongle doivent être également enlevés. Fréquem-
ment l’ongle régénéré esl cassant, épais et déformé;
il ne reprend que lentement un aspect normal.
Injections de sérum-rhum comme tonique
du cœur. — Depuis le mois de juillet 1911,
M. Robert Engel a employé plus de cinq cents fois,
chez les malades atteints de faiblesse du cœur con-
sécutive à une opération chirurgicale, les injec-
tions hypodermiques ou intraveineuses de sérum-
rhum (Gazette des hôpitaux, 19 septembre).
À du sérum stérilisé (sérum de Hayem ou, de
préférence, sérum glycosé à 47 pour 1 000) et alca-
linisé, on ajoute, au moment de l'injection, du
rhum vieux: la dose habituelle est de 15 centimètres
cubes de rhum dans 250 centimètres cubes de
sérum. Le rhum litre 50° à 55°; il faut éviter l’usage
des rhums dits de fantaisie, trop chargés en alcools
méthylique et éthylique et en furfurol. L'alcool
éthylique pur ramené à 50°, essayé sur des ani-
maux à la place du rhum, n’a aucunement donné
les résullats avantageux que produit le rhum.
L'auteur publie plusieurscas détaillés où l'asthénie
cardiaque, qui n'avait pas cédé aux injections
d'huile camphrée, de sérum-champagne, de caféine,
de spartéine, disparut après une ou quelques injec-
N° 1444
tions de sérum-rhum : l'angoisse extrème du
malade fait immédiatement place à une sensation
de bien-être, et un sommeil calme suit presque
toujours l'injection.
Aucun accident n’est survenu du fait de ces injec-
tions de sérum-rhum; les opérés avaient été
endormis soit à l’éther, soit au chloroforme.
En dehors de l’asthénie cardiaque postopératoire,
M. R. Crépin a le premier employé les injections
de sérum-rhum avec un plein succès dans un cas
d'asthénie cardiaque chez un vieillard de quatre-
vingt-deux ans ayant eu une pneumonie double.
Le benzénisme professionnel (Technique mo-
derne, 15 sept.). — La benzine esl employée dans
les industries du dégraissage des étoffes, des
gants, de la fabrication des plumes, chapeaux et
casques en liège, toiles, étoffes, chaussures caout-
choutées, des pneus-cuirs, etc. Ces industries,
ainsi que celles de la fabrication et de la rectifi-
cation de la benzine, exposent les ouvriers qui s'y
adonnent à une intoxication qui s'exerce sur le
système nerveux et sur les éléments figurés du
sang.
Les D'° Agasse-Lafont et F. Heim ont exa-
miné un grand nombre d'ouvriers au point de vue
des réactions hématiques du benzénisme profes-
sionnel. Leur conclusion est que lintoxication
chronique par la vapeur de benzine, même pro-
jongée pendant plusieurs années, n'imprime au
sang que des modifications légères et de peu de
durée.
Les globules rouges et la quantité d’hémoglo-
bine ne sont pas touchés; la quantité de globules
blancs et la formule leucocytaire restent normales,
sauf une éosinophilie presque constante (Les éosino-
philes sont une catégorie de globules blancs rem-
plis de granulations que l’éosine est capable de
colorer d'une façon intense; on les appelle cel-
lules dEhrlich; ils présentent peu les déformalions
amiboïdes et ne jouissent pas de la faculté phago-
cytaire; il existe une proportion normale de 7 éosi-
nophiles sur 100 globules blancs). Lorsque l'ouvrier
est mis à l'abri de l'influence nocive des vapeurs
de benzine, son sang revient à l’état normal en
quelques semaines. |
Il semble que la benzine et le xylène surtout
sont toxiques, et que si l’on y substituait le toluène,
dont la toxicité parait nulle, on arriverait à un
excellent résultat prophylactique.
ALIMENTATION
L’approvisionnement de Paris en 1911. —
La direction générale des affaires municipales à
Paris (bureau de l'approvisionnement) a publié
récemment son rapport annuel sur les services de
l'approvisionnement de la capitale pour l'année
1911. Les renseignements complets qu’il renferme
COSMOS
339
sur les allures des halles et marchés, ainsi que sur
la consommation dans la capitale des denrées de
diverse nature, montrent une restriction dans la
consommation qui a été la conséquence du relè-
vement des prix provoqué par des causes diverses,
surtout par des saisons défavorables.
Voici, pour ce qui concerne les denrées soumises
à l'octroi, et dont les quantités sont ainsi rigoureu-
sement contrôlées, la comparaison pour les deux
dernières années:
1911 1910
kilogrammes. ki'ogrammes.
Viande de boucherie ....... 4152 079506 160 054 292
Viande de porc............. 35 062 406 36 758 962
Charcuterie................ 3 837 100 3 855 748
Volailles et gibier.......... 29 617387 30 811 266
Pâtés et viandes préparées... 2 951 379 2 847 641
Beurres de toutes espèces... 26 104 264 20 +67 066
CÉUIS red one due 39 338 841 38 307 796
Fromages secs.............. 9 001 713 9 053 801
Tandis qu'en 1910 on avait signalé pour toutes
ces denrées, par rapport aux années précédentes,
un accroissement dans la consommation, il y a eu
en 4911 une diminution, sauf pour les viandes pré-
parées et pour les œufs.
La consommation de la viande de boucherie a
été inférieure de 8,5 millions de kilogrammes à la
moyenne des onze dernières années. On ne saurait
attribuer ce fait qu’au relèvement des prix résul-
tant d'une diminution des arrivages, soit d'ani-
maux vivants au marché de La Villette et aux abat-
toirs, soit de viandes abattues aux Halles centrales.
Par contre, la consommation de la viande de
cheval a subi un accroissement assez sensible pour
être signalé. Il a été amené à l’abattoir hippopha-
gique 62 391 animaux (60 917 chevaux, 938 Anes et
536 mulets) contre 49403 en 1910. Le rendement
en viande a été de 15 430250 kilogrammes contre
12 197 1400 en 1910. C’est le chiffre le plus élevé qui
ait été enregistré jusqu'ici.
Le tableau suivant résume les introductions de
boissons dans Paris pendant les deux dernières
années :
1911 1910
hectolitres. heutolitres.
NINS issu sin nr 5 100 745 6673 105
Cidres, poirés et hydromels. L91 575 97 611
Bières (introduites ou fabri- |
quées)................,.. 1 097 376 741 125
La réduction dans la consommation du vin a été
la conséquence du relèvement des prix de vente;
quant à l’augmentation dans eelle des cidres et des
bières, elle tient à la mème cause, et pour les
bières aux chaleurs persistantes de l'été,
Le thé. — Nous avons le regret de constater, une
fois de plus, que la consommation du thé va sans
cesse croissant en France. C'est doublement fàcheux,
310
car le thé n’est pas pour faire les races fortes, et,
en plus, c’est un produit pour lequel nous sommes
tributaires de l'étranger.
Voici, d’après une dernière statistique, quelle
est la consommation de divers pays.
Angleterre.... 125000 € soit 2850 g par habitant.
Russie.....,.. 80 000 — 450 —
Etats-Unis.... 40000 — 500 —
Pays-Bas ..... 5 500 — 900 —
Allemagne.... 834100 — 53 —
France ....... 1200 — 32 —
On constate qu'il y a augmentation dans tous
les pays, mais que la progression est surtout ma-
nifeste en France. — O snobisme!
Voici les pays qui fournissent cette immense
quantité de thé. (Cette statistique est de 1908.)
Indes britanniues........ 112 000 tonnes métriques.
Chine sais. 400 000 —
Ceylan... seu 81 000 —
Japos crni inertea 28 000 —
JAVA ste essor see 15 000 —
FOrTIMOSCze sue Meet 6 500 —
NAEA lente 4 500 —
344 000
Constatons qu'aucune colonie française n’a place
dans cette liste.
EDILITÉ
Comment on crée une capitale. — Le gouver-
nement australien, en 19114, a institué un concours
international en vue de la création, dans un
site désigné d'avance — le district de Canberra
(Nouvelle-Galles du Sud), — de la nouvelle capi-
tale du Commonwealth.
Le premier prix vient d'être décerné à M. Walter
Burley Griffin, architecte de Chicago, dont les plans
ont été jugés les meilleurs et les plus artistiques.
Nous avons la bonne fortune de pouvoir donner
ici la primeur d'une description sommaire, mais
très précise, de ce que sera, dans une dizaine
d'années, la plus grande ville de l'Australie.
Confornemeut aux données du problème,
M. Grillin a tracé sa capitale dans un carré de
Yÿ kilomètres de coté, sur les bords du fleuve
Molonglo, à une altitude de 600 mètres et à une
distance de 270 kilomètres de Sydney, 480 de
Melbourne et 290 de la mer. Elle est protégée, au
Sud et à l'Ouest, par de vastes forèls et par une
chaine de montagnes dont les principaux sommets,
Bimberi Peak et Coree Peak, ne dépassent pas
4 800 mètres. D'autres collines avoisinantes seraient
utilisées pour la création de parcs ou de jardins,
et pour l'érection de grands hôtels, de châteaux ou
de sanatoria.
Les édifices publies, palais du gouvernement
fédéral, ministères, Parlement, administrations
d’État, ont été groupés au centre de la ville et sur
la rive Sud du fleuve, qui, en ce point, forme une
courbe très pittoresque.
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1942
De l’autre côté de la rivière, relié au « quartier
gouvernemental », comme l'appelle M. Griflin,
est situé le « quartier municipal », comprenant
l'hôtel de ville, le Post office, les tribunaux et les
services financiers de la cité fédérale. Ces deux
centres sont reliés, au-dessus du Molonglo, par
deux ponts monumentaux de 50 à 70 mètresde large.
Plus loin, en remontant toujours vers le Nord,
on rencontre le marché, les banques, un parc cen-
tral autour duquel s'érigeront théâtres, museums
et galeries d’art; puis on atteint le quartier indu-
striel, desservi par une vaste gare aux marchan-
dises. Ce quartier comporte une place centrale
où sera édifiée l'église catholique et d’où par-
tiront, en rayonnement, huit avenues plantées
d'arbres. Audelà doit s'étendre le « village district »,
auquel les Australiens ont déjà donné le nom de
banlieue agricole, parce qu'on y construira des
fermes, des serres, un haras, et qu’on y établira
un champ de courses dont les premiers contreforts
du mont Ainsiice, au nord-est de la ville, serviront
d'assises naturelles à un stand de 10 000 places.
[I nous faut encore signaler le quartier des
Halles, desservi par une gare centrale et séparé
de l'hôtel de ville par une succession de jardins
publics tracés en bordure de la rivière. Enfin,
sur l’autre rive, du côté des ministères, du Capi-
tole et des administrations d'Etat, M. Walter Bur-
ley Griffin a dessiné tout un quartier élégant, le
West-End du nouveau Londres en réduction, où
les voies, de 40 à 50 mètres de largeur, pourront
recevoir les hòtels, les villas et les belles maisons
particulières des millionnaires australiens.
D'une façon générale, et même dans les quar-
tiers du centre, les rues sont partout spacieuses,
bien alignées; les blocs d'immeubles, comme on
dit là-bas, n’ont jamais plus de 300 mètres de lon-
gueur, sur les voies les plus larges. Inutile
d'ajouter qu’au point de vue de l'hygiène, du con-
fort, la science moderne de la « sanitation » a
tout prévu : éclairage électrique, égouts perfec-
tionnés, suppression totale de la fumée, enlève-
ment automatique et en vase clos des ordures
ménagères, pavage aseplique en bois de karri.
L'auteur du plan de la nouvelle ville, M. Griffin,
est un spécialiste en la matière. C'est lui, en effet,
qui a créé, en Floride, la cité d’Idalia, dont les
travaux sont en voie d'achèvement, et qui a, sur la
demande des autorités chinoises, dessiné une
Shanghaï moderne, destinée à remplacer quelque
jour la vieille ville actuelle. Né en 1876, M. Griffin
est diplomé de l’Université d'Illinois, et membre
du Comité de l'American Institute of Architects.
ÉDOUARD BONNAFFÉ.
Pour faciliter la circulation des voitures.
— Dans les villes à circulation intense, un des pro-
blèmes les plus difficiles à résoudre est celui du
passage des voitures aux points de croisement des
N° 1444
rues tracées à angle droit. Le cas se présente
fréquemment dans les grandes agglomérations
urbaines, non seulement aux Etats-Unis, où la plu-
part des rues forment un réseau géométrique,
mais aussi chez nous.
Pour éviter les collisions, plus nombreuses en ces
points de croisement que partout ailleurs, ainsi
que le démontrent les statistiques, certaines muni-
cipalités anglaises viennent d’avoir l’idée de placer
en ces « tournants dangereux » de grands miroirs
disposés de telle facon que les conducteurs de
véhicules quelconques peuvent très bien voir, de
leur siège, la rue dans laquelle ils vont s'engager,
à droite ou à gauche.
D'après le Municipal and County Engineer,
revue technique à laquelle nous empruntons les
renseignements qui suivent, un miroir de ce genre
a été installé, il y a quelques mois déjà, à Mal-
mesbury, dans le Wiltshire. Il se trouve à 4,5 m
du sol et occupe le sommet de l’angle droit formé
par deux alignements de maisons dans le centre
même de la ville. Son entretien est presque nul,
assure le fonctionnaire municipal chargé de sa
conservation. Un lavage à l’eau de savon, pratiqué
tous les trimestres, suffit à l’entretien du miroir,
qui a déjà empêché, de l'avis des intéressés eux-
mèmes, nombre de collisions ficheuses.
A Folkestone, ville progressive par excellence,
et dont les rues, souvent mal tracées, surtout dans
la partie basse avoisinant le port, sont constam-
ment sillonnées par les voitures automobiles, on
a également essayé avec succès le système des mi-
roirs en un point où deux voies très passantes se
coupent à angle aigu et où, de plus, le trottoir est
fort étroit.
Entre deux pylônes métalliques, on a disposé
à la hauteur convenable — 4 mètres environ — un
miroir de 0,80 m sur 0,80 m, orienté de telle sorte
que les cochers, wattmen, chauffeurs et conduc-
teurs de tous véhicules puissent voir d'un coup
d'œil d’enfilade, de quelque côté qu'ils viennent, la
rue qu'ils vont dépasser ou dans laquelle ils s'ap-
prêtent à s'engager. Ils peuvent ainsi diminuer
leur vitesse et se diriger à coup sûr sans avoir
à craindre de se trouver nez à nez avec une autre
voilure venant en sens inverse.
Depuis l'installation de ce miroir, qui remonte
au début de la saison d'été, il ne s'est pas produit
un seul accident à ce tournant. Aussi la municipa-
lité de Folkestone a-t-elle le projet de multiplier
un dispositif à la fois si peu dispendieux et si pra-
tique. EpovaRrD BONNAFFÉ.
AVIATION
Exploits aériens. — En moins d'une semaine,
les aviateurs ont réussi à dépasser tout ce qui avait
été fait jusqu’à présent au point de vue distanre,
hauteur et durée.
COSMOS
341
Le 11 septembre, l’aviateur Fourny, sur un
biplan Maurice Farman, a pris l'air à 5:57" du
matin, pour s'arrèter à 7*43® du soir, sans faire
une seule escale.
Il a parcouru pendant ces 13 heures 18 minutes
de vol la distance de 1 010 kilomètres. Il bat ainsi
de 2 heures 15 minutes son‘propre record de durée
sans escale et celui de distance de 740 kilomètres
‘appartenant à l’aviateur Gobé.
C'est un véritable tour de force que d'avoir pu
emporter à bord la provision d'huile et d’essence
nécessaires à un tel parcours.
e
e o
Le 17 septembre, laviateur Legagneux., sur
monoplan Morane-Saulnier, est parvenu à s'élever
à la hauteur de 5720 mètres, dépassant ainsi de
plus de 700 mètres l’allitude atteinte par Garros le
5 septembre dernier. La montée s'est effectuée de
la façon suivante :
1 000 mètres en 2 minutes 30 secondes.
2 000 mètres en 7 minutes 30 secondes,
3 000 mètres en 12 minutes 30 secondes.
4 000 mètres en 20 minutes.
5 000 mètres en 35 minutes.
5 120 mètres en 45 minutes 20 secondes.
L'aviateur avait emporté un tube d’oxvrgène,
dont il s'est servi à partir de 4 800 mètres.
Un beau voyage en hydro-aéroplane. —
Weyman, un des concurrents du meeting d'hydro-
aéroplanes de Tamise-sur-Escaut, avait formé le
projet de rentrer par air à Paris. Ses flotteurs ne
lui permettant pas d'atterrir sur le sol, il résolut
de voler constamment au-dessus de l'eau. Voici le
tracé qu'il a suivi :
Le 16 septembre, à 6"35", départ d'Anvers sur
monoplan Nieuport, avec un mécanicien. À 8"35",
Boulogne; à 414 heures, Dieppe; à 143"30", Le Havre.
Puis laviateur a suivi la Seine jusqu’à Vernon,
où il arriva à 16"25", Il comptait arriver à Paris
dans la soirée; mais, en sortant de Vernon, l'avia-
teur s'engagea sur le petit bras de la Seine où
son appareil fut abimé par des piquets. Il a dù
s'arrêter pour réparer.
Malgré ce contretemps, le voyage, représentant
plus de 400 kilomètres, est ce qui a été fait de
mieux jusqu'ici en hydro-aéroplane.
VARIA
Coffre-fort géant. — Le secrétaire d'Etat aux
finances aux Etats-Unis, M. Mae Veagh, projette la
construction, sous l'imineuble de la Monnaie, d'un
coffre indestructible en acier, de cinq élages, pou-
vant contenir 2 000 000 000 francs en or. Ce projet
exige la sanction du Congrès, et il a été dej favo-
rablement accueilli par la Commission chargée de
l'étudier. Si le projet est approuvé, ce cotfre con-
tera 322 000 dollars, alors que l'immeuble où il
sera construit ne coûtera que 225 000 dollars.
COSMOS
96 SEPTEMBRE 1942
Les manipulations du miel utiles à sa conservation.
Les producteurs comme les consommateurs de
miel éprouvent parfois des difficultés pour le con-
server en bon état. D'autre part, les uns tiennent à
le garder fluide, forme plus appétissante, disent-ils,
alors que certains préfèrent le voir se solidifier,
état sous lequel il est plus maniable et plus facile
à expédier. Le miel liquide, prétend-on encore, est
moins sujet à la fraude. Dans tous les cas, il
n’agace pas les dents et il n'irrite pas la gorge
comme le granulé. Il est de la nature mème du
miel de se solidifier, mais il n’est pas rare de le
trouver encore liquide dans les rayons plus d’un
an après sa fabrication par les abeilles. Mais pro-
cédons par ordre.
Avant de mettre le miel en pot, il faut tout
d’abord le débarrasser de ses impuretés. L’extrac-
tion des gâteaux par centrifugation est naturelle-
ment recommandable. Dans les deux cas, il est pré-
férable de le laisser au repos quelques jours dans
un maturateur, vase en fer-blanc (le zinc est at-
taqué)ou encore en bois, par exemple un tonneau
en hêtre défoncé d'un còté et pourvu d'un robinet
à la base. On écume toutes les parlies légères qui
montent à la surface, puis soutire par le robinet.
Au besoin, on sépare par qualités, suivant le degré
de concentration.
Thénard a proposé de traiter de la façon suivante
les miels qui ont un mauvais goût, procédé qui
nous parait assez étrange. Mettre dans une bassine
en cuivre 3 kilogrammes de miel, 860 grammes
d'eau et 76 grammes de craie; faire bouillir durant
deux minutes; jeter dans la bassine 152 grammes
de charbon pulvérisé, lavé et séché ; faire bouillir
de nouveau deux minutes; ajouter trois blancs
d'œufs baltus dans 90 grammes d'eau. Après une
troisième ébullition de deux minutes, laisser refroi-
dir et filtrer. Le même remède serait applicable
au miel qui commence à fermenter. On a encore
conseillé de faire fondre le miel au bain-marie,
puis d'y plonger un fer rouge.
Les meilleurs pots pour emmagasiner le produit
sont ceux en grès ou en terre cuite vernie. Les
boites en fer-blanc, à fermeture hermétique, ne
peuvent guère servir que pour les expéditions par
chemin de fer. Dans tous les cas, les récipients
doivent ĉtre parfaitement propres et exempts de
mauvaise odeur. On ne les ferme que lorsque le
miel sort suffisainment épaissi et a perdu son humi-
dité, sinon il fermenterait facilement.
Il est bon de rappeler, à ce propos, qu'il ne faut
récolter le miel que lorsqu'il est entièrement oper-
culé, on tout au moins quand la grande majorité
des rayons sont cachetés; avant, il est trop riche en
eau.
Les pols seront tenus dans une chambre sèche,
un grenier, par exemple, où circule constamment
un courant d’air. À l'humidité, le miel pourrait en
absorber jusqu’à 40 pour 100 de son poids.
Quand l'évaporation est suffisante, on met un
papier parcheminé imbibé d’alcool et, par-dessus,
du papier ordinaire, puis l’on ferme.
On remarque parfois de l'écume sur les miels
blancs de sainfoin; c'est la marque d'origine, pour-
rait-on dire. On doit la laisser, car elle granule en
même temps que le miel. Toutefois, à Paris, les
marchands en gros enlèvent cette mousse à l’aide
d'une spatule en bois avant de le livrer aux ache-
teurs qui, pour la plupart, ne sont pas connaisseurs,
et cette partie plus blanche leur parait suspecte.
D'aucuns prétendent, cependant, qu'elle a un goût
exquis. |
Pour activer la granulation, on soumet le miel
à des alternatives de chaud et de froid; on le
remue; on y ajoute quelques fragments de miel
granulé.
Pour le conserver fluide, il faut lui faire subir un
traitement approprié, comme nous l'avons dit, car
il est de la nature mème du miel de se solidifier.
Ille fait plus ou moins rapidement, en devenant
d'abord opalescent, puis opaque, suivant les
plantes. S'il est déjà sous cet état, la liquéfaction
ne s'obtient parfois qu'au détriment de sa qualité.
On fait intervenir la chaleur, mais si elle est
trop élevée, l’aliment peut contracter un mauvais
goût et se colorer en brun. La simple chaleur
solaire a l'inconvénient de ne pas pénétrer unifor-
mément dans toute la masse. Certains auteurs
recommandent cependant l’exposition au soleil dès
la sortie de l’extracteur. Le plus souvent, on chauffe
le miel, mais jamais à feu nu, car il tournerait en
sirop et son goùt serait altéré. Il faut éviter aussi
d'atteindre l’ébullition.
M. A.-L. Clément cite une série de procédés qui
lui ont été fournis par des apiculteurs. Ainsi,
M. Fenouillet, président de la Société d’apiculture
de la Haute-Savoie, chauffe au bain-marie jusqu'à
ce que la fusion soit presque complète, mais sans
faire bouillir ni brasser ou agiter. Il laisse ensuite
refroidir lentement. C'est ainsi que procéderaient,
parait-il, les hòteliers suisses pour la clientèle
anglaise, qui ne veut que du miel liquide en toute
saison.
M. Pierre, apiculteur à Epernay, se trouve bien
de la pasteurisation à 90° durant quinze minutes.
Maisil est généralement admis qu'il vaut mieux s’en
tenir à une température moindre, 50° à 55°, par
exemple, qu'on laisse agir plus longtemps. On
court moins le risque ainsi d’altérer l'arome.
En Belgique, on ne traite qu'au moment de con-
sommer. Les pots ou flacons sont mis dans un bain
pourvu d’un double fond, pour éviter le contact
direct du verre avec la surface chauffée.
‘En Amérique, on emploie des appareils spéciaux
pour chauffer le miel granulé. Comme combustible,
on préfère le gaz ou le pétrole, d'une conduite
plus facile, plus régulière que le charbon ou le
bois.
L'appareil Chalon-Fowls comprend un foyer à
pétrole et une cuve à eau dans laquelle on met le
bidon de miel vers 72° ou 83°. On soutire le miel
tout chaud à l’aide d’un siphon pour remplir les
pots destinés à la vente.
L'appareil Pouder a une chaudière à gaz en fer-
blanc d'une douzaine de litres. La vapeur qui se
dégage se rend dans un serpentin placé dans le
réservoir supérieur cylindrique où est le miel. Enfin,
on soutire ce dernier liquéfié par un robinet de
vidange.
COSMOS
343
Pour éviter, à ce moment, l'entrainement de
bulles d'air dans la masse, où elles resteraient
emprisonnées et nuiraient à la conservation, on
donne au vase à miel une grande hauteur, au moins
triple de son diamètre.
M. A.-L. Clément rappelle encore qu'en Amé-
rique le miel granulé, surtout celui qui devient très
dur, est aisément transporté dans des sacs en
papier paraffiné. On doit l'y introduire quand il
commence à granuler. On obtient comme des
briques ou pavés de miel faciles à empaqueter. Si
on le fait prendre dans des bidons en fer-blanc,
on obtient des blocs volumineux. Ou bien on
découpe avec le fil des plaques, des cubes, que l’on
enveloppe dans du papier paraffiné. Les bidons,
d'une valeur insignifiante, sont coupés en morceaux
quand on veut libérer le contenu,
ROLET.
La nature artiste.
On admet en général qu'il existe entre l’Art et
la Nature un certain antagonisme, que la Nature
est incapable de produire des formes artistiques.
La Nature et l'Art seraient, en effet, deux notions
absolument distinctes, aux aspirations nettement
différentes. Ce n’est que la transformation d’une
forme naturelle en élément d'œuvre d'art faisant
partie d’un système de lois purement humaines et
destinées à n’impressionner que l’homme qui en
ferait une forme artistique.
Les partisans de cette théorie ne nient pas tou-
tefois que l'Art ne soit basé sur la Nature et que,
d'autre part, la Nature elle-même, en créant ces
formes, ne fasse preuve d’une puissance d’imagi-
nalion supérieure à celle de l'artiste le plus
éminent, en sorte que la ligne de démarcation
séparant les deux domaines n’est pas si distincte
qu'on serait tenté de le croire.
On connait les formes si variées des cristaux de
neige. Le microscope révèle pendant leur formation
et pendant d'autres phénomènes de cristallisation
une variété de formes inouie, et l’élincelle élec-
trique s'est trouvée produire en abondance les plus
beaux modèles décoratifs.
344
Un album récemment paru (t) contient une col-
lection de modèles qui, par leur variété, ont Fair
d'ètre créés par l'imagination la plus fantasque du
génie artistique, tandis qu’en vérité ce ne sont que
des productions mécaniques obtenues par des pro-
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cessus physiques absolument automatiques. Ces
formes cristallines microscopiques si variées nais-
sent, en effet, de la combinaison de sels organiques
et inorganiques entre eux ou avec des matières
colorantes par la précipitation, la conversion, la
sublimation, la diffusion, etc. En variant la com-
binaison de ces sels et matières colorantes ainsi
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
que le processus lui-même, on obtient facilement
des formes. et variétés toujours nouvelles, imita-
tions de fleurs, d'insectes et d'autres organismes
ou modèles immédiatement appropriés à la fabri-
cation de tapis et d’autres tissus. Par la grâce de
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leurs formes et la splendeur de leurs effets de cou-
leur, ces productions de la Nature observées sous
le microscope rivalisent avec les chefs-d'œuvre de
l'art décoratif. Elles offrent évidemment au génie
créateur de. l'artiste une abondance de thèmes
nouveaux.
D' ALFRED GRADENWITZ.
Les éléments figurés du sang.
IL — Les leucocytes.
Outre les hématies ou globules rouges, chargés,
grâce à l’affinité de leur hémoglobine pour l'oxy-
gène, de porter ce gaz vivifiant à tous les tissus de
l'organisme, le plasma sanguin véhicule encore
des globules blancs, dont les types divers sont
groupés scientifiquement sous la dénomination de
leucocytes. Ce terme fait allusion à la couleur
blanche et argentée des éléments auxquels il s’ap-
plique (de 2:vx65, blanc).
La couleur propre des leucocytesn'influe en rien
sur la coloration en masse du sang, du moins chez
(1) H. Scuenk, Naturformen, Stuttgard, librairie
Frankh, 1912.
(2) Pour la première partie de cet article, les héma-
ties, voir Cosmos n° 1412, du 12 sept. 1912.
les animaux supérieurs où l'hémoglobine est con-
tenue dans des hématies: cela tient à ce qu’ils
sont beaucoup moins nombreux que ces dernières.
Chez l’homme, on compte environ un leucocyte
pour six à huit cents globules rouges; cette dispro-
portion peut cependant sensiblement diminuer
dans certaines affections qui nécessitent une inter-
vention plus vaste du ròle particulier des leuco-
cytes et, par suite, une plus intense multiplication
de ces cellules.
Les leucocytes des vertébrés sont des cellules
complètes, c’est-à-dire pourvues d’un noyau. Leur
protoplasma, tantôt est limité par une membrane
d’enveloppe d’une extrême finesse; tantôt, et plus
souvent, ils sont dépourvus d'enveloppe et, par
suite, analogues à des amibes, avec lesquels ils
N° 1444
offrent aussi des ressemblances physiologiques.
ls entrent pour une part dans la composition du
sang et forment la totalité des éléments organisés
de la lymphe, liquide qui se sépare par filtration
du torrent sanguin et qui se compose exclusive-
ment de plasma et de leucocytes.
Lorsqu'ils ont une forme définie, ils sont arrondis
et orbiculaires; mais ils présentent rarement cet
aspect régulier, et le plus souvent leur protoplasma
nu pousse en tous sens des prolongements variés,
comme celui des amibes. Ces prolongements, ou
pseudopodes, ne sont pas durables; ils peuvent se
dilater et se rétracter successivement dans la masse
du leucocyte, qui les produit d'ailleurs en des
points divers de sa surface : d’où une reptation
amiboïde, qui permet aux globules blancs un
déplacement le long de la paroi du vaisseau qui
les contient. De là aussi le nom d'amibocytes sous
lequel on les a quelquefois désignés.
Ceux qui sortent du sang et émigrent dans les
mailles du tissu conjonctif pour prendre part à la
formation de la lymphe doivent percer la paroi
des vaisseaux capillaires, paroi d'ailleurs très
mince; cette émigration des leucocytes du sang
dans la lymphe constitue le phénomène de la dia-
pédèse.
Les leucocytes revêtent divers aspects, qui
peuvent se grouper en trois catégories principales,
auxquelles on a donné respectivement un nom par-
ticulier :
Les lymphocytes; iis sont arrondis, et leur noyau
remplit presque toute leur capacité, nageant au
sein d’une couche périphérique très mince de pro-
toplasma; ce sont les plus petits, leur diamètre
variant entre 3 et į u;
Les leucocytes mononucleaires, dont le noyau
est orbiculaire ou ovale, sans étranglement, et
nage dans un protoplasma abondant et dépourvu
de granulations. Leur diamètre normal dans le
sang est de 15 à 17 u; ils passent fréquemment
dans les tissus, où on les trouve avec des dimen-
sions bien plus considérables (jusqu'à 40 y de dia-
mètre);
Les leucocytes polynucléaires, ou plus exacte-
ment leucocytes granuleux. Ils sont plus petits
que les précédents, ne mesurant que de 8 à 42 p;
ils offrent en propre deux caractères qui les font
reconnaitre aisément. Leur noyau, irrégulier, est
partagé par des étranglements en deux, trois ou
quatre masses reliées entre elles par une trainée
de substance nucléaire; on avait considéré ces
masses, par erreur, comme autant de noyaux dis-
tincts : d'où la qualification inexacte de polynu-
cléaires. D'autre part, le protoplasma de ces leu-
cocytes renferme en très grand nombre des granu-
lations très fines, de nature albuminoïde.
Les rapports d’origine et de filiation de ces trois
catégories de leucocytes n’ont pas encore été déter-
COSMOS
3145
minés avec précision. Une opinion veut que les
lymphocytes soient le point de départ des autres
globules blancs, qui en dériveraient par voie d'ac-
croissement et de transformation du noyau et du
protoplasma. Une autre opinion tendrait à ne
w —
Te
—.
m eee a
LEUCOCYTES HUMAINS.
reconnaitre que deux catégories de leucocytes;
d'une part, les hyalins, dont le protoplasma ne
renferme pas de granulations, et d'autre part les
granuleux. La différence caractéristique dans la
structure du protoplasma des uns et des autres
s'explique en effet assez difticilement par voie de
dérivation. `
Le rôle physiologique essentiel des leucocytes
est d'assurer la protection et la défense de lorga-
nisme contre toute invasion toxique, et spéciale-
ment lorsque cette invasion s'opère par la voie de
la circulation sanguine. On a justement comparé
les leucocytes à des sentinelles vigilantes et à des
soldats actifs, toujours sur leurs gardes et toujours
en armes contre les ennemis vénéneux qui tentent
la conquête de l'organisme vivant et sa ruine.
Ce rôle de défense s’accomplit par des moyens
variés, soit que le leucocyte ait à intervenir direc-
tement et mécaniquement {tel le soldat combattant
à l’arme blanche), soit qu'il se borne à diriger
contre l’ennemi les produits efficaces de son acti-
vité (tel l’artilleur lançant au loin des projectiles
meurtriers).
Tout corpuscule microscopique qui pénetre dans
l'organisme est immédiatement arrèté par les leu-
cocytes, qui l’englobent et l'enserrent dans leurs
pseudopodes, et qui le digèrent s’il n'est pas (le
nature exclusivement minérale. On conçoit que
cette protection directe ct immédiate s'exerce plus
spécialement contre les bactéries pathogènes, qui
sont précisément les éléments microscopiques dont
l'organisme a le plus fréquemment à combattre
l'intrusion,
340
Au cours des infections microbiennes, les leuco-
cytes se portent en masse aux points envahis par
le micro-organisme étranger, et la lutte s'engage.
Tandis que les bactéries sécrètent activement leur
toxine et hâtent leur multiplication, les leucocytes
les enserrent dans leurs pseudopodes, les englobent
dans leur protoplasma et les détruisent en les dis-
solvant par une véritable digestion.
C’est le phénomène éminemment utile de la pha-
gocytose; de là le nom de phagocytes qui est
encore assez communément donné aux leucocytes.
Si les microbes sont plus nombreux et plus puis-
sants, les leucocytes vaincus laissent la toxine
microbienne envahir l’organisme et y produire
ses effets funestes; si, au contraire, l énergie des
leucocytes l'emporte, les microbes sont anéantis
et le malade guérit. Une première victoire des leu-
cocytes sur un microbe confère assez généralement
Pimmunité à l'égard de ce microbe et met, par
conséquent, l’homme — ou l'animal — à l'abri de
ses atteintes ultérieures. Ce fait de l’immunité
acquise par une première inoculation — fait qui a
permis l'application prophylactique des vaccins —
n'est pas cependant constant.
La phagocytose s'accompagne ordinairement de
manifestations locales ou générales caractéris-
tiques : tuméfaction, congestion aux points en-
vahis, écoulement de pus, gonflement des ganglions
lymphatiques par lafflux des leucocytes sur les
routes suivies à l'intérieur des tissus par les
microbes qui en tentent la conquċte; comme symp-
tòme général, la fièvre, c'est-à-dire la surexcitation
défensive de l'activité circulatoire et respiratoire,
avec l’élévation de température qui en est le corol-
laire. La défense de l'organisme par les leucocytes
provoque une plus intense multiplication de ces
globules, dont le nombre peut alors être quintuple
de leur proportion normale.
La phagocytose ne s'exerce pas seulement contre
les microbes; les leucocytes sont des nettoyeurs
bien slylės, qui ne tolèrent aucune impureté dans
l'organisme : cellules mortes des tissus nécrosés,
hématies hors de service et même autres leuco-
cytes vieux et ayant perdu leur énergie, tous ces
déchets sont saisis par les pseudopodes, digérés,
divisés, entrainés dans la circulation pour ètre éli-
minés. Le pus n'est pas autre chose qu'une agglo-
mération de bactéries détruites et de leucocytes
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
moris au combat, et que leurs frères valides
chassent pêle-mêle hors de l'organisme : le champ
de bataille se trouve ainsi débarrassé à la fois des
ennemis vaincus et des cadavres des victimes. Les
leucocytes séjournant dans les poumons arrêtent
au passage les bactéries qui tentent de s’introduire
par les voies respiratoires; ils englobent souvent
de petits corps étrangers ayant pénétré avec l'air
dans les vésicules pulmonaires, par exemple des
poussières de charbon.
C'est encore par phagocytose que disparaissent
des tissus qui cessent d’être utiles à un moment
donné de l’évolution de l'organisme : ainsi la sub-
stance cartilagineuse cédant la place à la matière
osseuse dans la période d'ossification, et qui est
détruite par les cellules mêmes de l'os, momenta-
nément appelées à la fonction de leucocytes; ainsi
encore, selon toute vraisemblance, la régression
des racines des dents de lait, qui se manifeste
préalablement à leur chute. Cette phagocytose
normale et non pathologique se constate encore
dans quelques cas remarquables de la bio-
logie animale : elle intervient pour la résorption
de la queue des tètards des batraciens, ainsi que
des appendices charnus des chenilles au moment
de la métamorphose. <
La digestion des bactéries et autrés corps étran-
gers par les leucocytes s'opère à l'aide de ferments
sécrétés par ces cellules, ferments adaptés respec-
tivement à la nature de la substance sur laquelle
doit se porter leur action. Les leucocytes des villo-
sités intestinales sécrètent un ferment capable de
digérer les graisses, au moins partiellement; ceux
du sang fabriquent un ferment {dit glycolylique)
apte à décomposer le sucre.
Quant aux produits défensifs sécrétés par les leu-
cocytes pour être employés à la lutte chimique
contre les produits offensifs correspondants des
microorganismes envahisseurs, ce sont d'une
part des antitorines chargées de neutraliser les
toxines microbiennes (antitoxine dont la présence
explique l’action immunisante ou curative des
sérums), et d'autre part des alexines, substances
toxiques renfermées dans le plasma sanguin et
exerçant une action élective de destruction sur les
globules rouges du sang des espèces étrangères,
A. ACLOQUE.
LE TOUAGE ÉLECTRIQUE SUR LE CANAL DE SAINT-QUENTIN
Depuis quelques années, d'intéressantes et impor-
tantes expériences d’applicalion de la traction
électrique à l'exploilation des voies de navigation
ont élé entreprises dans tous les grands pays
industriels
Nous avons déjà parlé de l'importance de cette
question et de l'intérêt capital que présente
l'adaptation des procédés électriques au touage,
et nous avons signalé précédemment les princi-
paux systèmes électriques de halage et de touage
N° 1414
mis à l'essai ou introduits dans la pratique (4).
L'industrie électrique française a récemment
établi un nouveau type de toueur électrique qui,
par la puissance et la perfection de son outillage,
peut tre considéré comme l'une des plus belles
machines de cette espèce réalisées jusqu'ici : c'est
le toueair de 100 chevaux à chaine en service sur
le canal de Saint-Quentin.
Conformément aux prescriptions du cahier des
charges, ce toueur est amphidrome (forme de
l'avant et celle de l'arrière absolument semblables),
et il est muni à chaque extrémité d'un gouvernail
COSMOS
347
et d'une hélice lui permettant de se déplacer dans
les deux sens ; la coque a 25 mètres de longueur
sur le pont, 4,750 m de largeur hors membrures
et 4,980 m de largeur hors défenses, 2,850 m de
creux sur quille au livet et 1,200 m de tirant
d'eau; elle est entièrement en acier; elle est
divisée en sept compartiments par des cloisons
étanches.
L'équipement électrique se compose de deux
treuils électriques, de 50 chevaux, à tambours pour
le touage, de deux moteurs d’hélice de 50 chevaux
également, d'une batterie d'accumulateurs pou-
TOUEUR ÉLECTRIQUE DE 100 CHEVAUX DU CANAL DE SAINT-QUENTIN.
vant débiter 36 ampères pendant quinze à vingt
minutes sous 360 volts, et d’une prise de courant
aérienne. |
Les deux moteurs électriques de touage sont
placés dans la salle des machines du treuil; à côté
se trouve le contrôleur de mise en marche et,
dans la même salle, le tableau de distribution
muni des appareils nécessaires pour les différents
services du bord; les moteurs du treuil sont des
moteurs du type blindé, à 500 tours par minute;
ils peuvent être connectés en série ou en parallèle,
(1) H. Manc#ano, la Traction électrique des bateaux.
Cosmos, t. LXIII, n* 4351, p. 683.
de façon à permettre une variation de vitesse de
3 à 10; le contrôle des liaisons s’effectue au moyen
d’un manipulateur dutypeordinaire série-parallèle.
Les deux moteurs des hélices de propulsion ont
la même puissance que les moteurs des treuils,
mais ils marchent à S00 tours par minute et ils ne
sont pas blindés; ils agissent sur les hélices par
transmission à engrenages; ils sont commandés
à l’aide de deux rhéostats de démarrage.
L'énergie électrique est prise à une ligne exté-
rieure à deux conducteurs sous une tension de
500 volts; les appareils de prise de courant con-
sistent en deux perches en fer creux portant à
leurs extrémités une monture sur laquelle se
318
trouvent les roulettes; ces perches sont agencées
pour pouvoir ètre retournées en un point quel-
conque du souterrain et pour permettre de prendre
Je courant soit exactement au-dessus de l'axe du
toueur, soit à droite, soit à gauche.
La batterie d'accumulateurs a pour but d'assurer
la continuation du service en cas de rupture du
courant de ligne; elle entre alors automatiquement
en circuit; elle est chargée, soit à la station cen-
trale, soit en route sur le parcours, de la prise de
COSMOS
26 SEPTEMBRE 41912
courant ; elle se compose de 210 éléments Tudor,
avec récipients en ébonite.
L’outillage du remorqueur comprend encore,
outre les tableaux pour le service des moteurs et
de la batterie, avec les appareils de commutation
et les instruments de mesure y relatifs, 40 lampes
à incandescence de 16 bougies et un moteur élec-
trique pour l'actionnement d’une lampe.
H. MARCHAND.
—- -m 7 —
Les aciers à outils.
Evidemment, les aciers Bessemer, Thomas, Mar-
tin, peuvent servir à la confection d'outils tran-
chants divers après forge et trempe convenable.
Mais on n'obtient guère de la sorte que des pro- `
duits de médiocre qualité, d'usure assez rapide.
Si bien que les aciers « à outils » sont encore
généralement fabriqués par le vieux procédé de la
fusion au creuset, en attendant que se généralise
tout à fait le procédé ultra-moderne de la fonte
au four électrique. Ceci, toutefois, ne signifie pas
qu on travaille routinièrement dans cette spécia-
lité de la métallurgie du fer. Bien au contraire.
L'étude analytique des phénomènes se passant
dans les masses métalliques de composition diverse
soumises aux divers traitements, permit de préparer
par le vieux procédé, de modifier des aciers « spé-
eiaux » de toutes sortes, et en particulier le fameux
métal à coupe rapide qui bouleversa les conditions
du travail aux machines-outils.
L'acier &« fondu » au creuset, — On désigne
sous le nom d'acier « fondu » l'acier fondu au
creuset, à l'exclusion de celui résultant de la fusion
dans un dispositif décarburant des fontes. Les
aciers fondus de premier choix sont faits avec des
fers eux-mêmes choisis : fers puddlés avec des
fontes de bois de Suède ou des Pyrénées. Les barres
dc fer sont d'abord cémentées, c’est-à-dire aciérées
par chaullage en présence de charbon de bois qui
se combine partiellement au métal. Cette cémen-
ation se fait dans des fours ordinairement groupés
les uns près des autres et contenant des « caisses »
en blocs réfractaires formés de dalles silico-
alumineuses bien jointes. Les caisses sont emplies
de barres plates en fer alternées par couches avec
du poussier de charbon de bois, le tout étant
recouvert d'une couche de sable pour que ia défor-
mation éventuelle au cours du chauffage ne puisse
amener le métal à nu.
On chauffe peu à peu, jusqu'à ce que les barres
soient amenées au rouge clair. Celte température
est alors régulièrement maintenue pendant dix
à quinze jours, l'opération, très délicate, étant
réclée d’après les essais faits sur des éprouvettes
cémentécs. Le métal à point, on laisse lentement
refroidir, ce qui peut amener la durée d’une opé-
ration à un mois et plus.
On retire des caisses l’acier « poule » recouvert
de soufflures dues à la formation de cémentite Fe“,
cassant, à structure cristalline. Quoique cet acier
soit encore employé directement après quelques
corroyages, son manque d’homogénéité est tel
qu'on le fond toujours avant utilisation. En mème
temps, on ajoute presque toujours des fers de
Suède, des déchets de barres d'acier, de facon
à réduire un peu la teneur en carbone des aciers
poules, souvent fort élevée (jusque 1,75 pour 100).
Les creusets pour fusion de l’acier sont faits avec
une pâte à base de terre de Mussidan, fort riche
en alumine, de débris de creusets pulvérisés et de
coke pilé. Chaque récipient, contenant à peu près
30 kilogrammes de métal, est placé dans un four
Siemens où on chauffe jusqu’à fusion. À ce moment,
les ouvriers « arracheurs », armés de tenailles,
enlèvent les creusets, presque toujours en sous-
sol, et les placent par terre. On retire le couvercle,
on enlève la scorie surnageante, et on coule rapi-
dement dans des lingotières recevant chacune le
contenu de plusieurs creusets, ce qui permet d'ob-
tenir d'assez gros lingots, bien que soit très faible
la charge d'un creuset.
L’acier fondu ainsi obtenu, bien que contenant
à peu près les mêmes éléments que les aciers Bes-
semer ou Martin, est de bien meilleure qualité, au
moins quant à l'usage pour la confection des outils.
On attribue généralement la médiocre résistance
des aciers de décarburation à leur teneur en traces
d'oxydes. Aussi, bien que le travail au creuset soit
très coûteux, l'acier à outil est-il presque toujours
produit par cette méthode.
Les aciers « speciaux ». — En outre, on prépare
au creuset la plupart des alliages complexes où le
fer carburé « est associé » au chrome, au manga-
nèse, au nickel: ce sont les aciers dits « spéciaux »,
dont il existe une infinie variété aux propriétés les
plus diverses. Nombre de ces aciers conviennent
à la confection des outils; il en est même, sous
ce point de vue, qui sont bien supérieurs à l'acier
« fondu » de meilleure qualité.
N° 1444
Ces aciers sont préparés par fusion, au creuset,
de mélanges contenant les doses convenables d'acier
et de métaux divers, souvent sous forme écono-
mique de ferro-alliages. On concoit que la fusion
au creuset se faisant en milieu parfaitement neutre,
il ne puisse y avoir modification de composition.
On fait de la sorte des aciers cAromés, extrème-
ment durs, pour outils coupant à grande vitesse;
des aciers au {ungstène convenant à la confection
d'outils coupant, sans chocs, à grande vitesse. (Ils
sont d'ailleurs pratiquement peu employés, parce
que très chers et difficiles à travailler à chaud.)
Les aciers au vanadium, au molybdène, très durs,
sont inusités à raison de leur prix élevé; les aciers
au nickel, dont on connait l'étonnante propriété
de ne se dilater que très peu par chauffage, ne
peuvent servir à la confection d'outils: ils sont
trop mous. Quant aux aciers riches en manganèse
(de 10 à 20 pour 100), qui présentent la non moins
étonnante propriété de durcir par recuit et de
s'adoucir par trempe, on en fit des outils, d'ailleurs
peu répandus à raison de la difficulté de leur
façonnage, le métal ne pcuvant être travaillé
qu'à la meule d'émeri.
Mais le plus remarquable de tous les aciers spé-
ciaux est l’acier dit « à coupe rapide », ainsi nommé
parce que donnant des outils qui peuvent marcher
à vitesse double ou triple de la normale; tandis
que dans cesconditions, par suite de l'échauffement,
l'acier ordinaire se détrempe et perd toute dureté,
l'acier « rapide » demeure inaltéré.
L'acier rapide normal — il en existe en effet de
plusieurs sortes et de plusieurs marques — contient
environ, outre le fer, 0,6 pour 100 de carbone,
18 pour 100 de tungstène, 5 pour 100 de chrome
et 0,3 pour 100 de vanadium. Il doit y avoir aussi
peu de soufre (rend fragile à chaud) et de phos-
phore (fragilité à froid) que possible, et moins de
0,1 pour 100 de manganèse qui facilite la forma-
tion des criques. L'emploi de ces aciers, simple-
ment refroidis, trempés à l'air après forge, pour
la confection d'outils de tour, permet d'enlever
par exemple 3 kilogrammes en une minute, un
outil en acier fondu ordinaire ne donnant que
300 grammes de copeaux! Le travailest donc, toutes
choses égales, réellement décuplé.
Les aciers fondus au four électrique. — Depuis
quelques années, nombreuses sont les installations
de fours électriques destinés à la métallurgie de
COSMOS
349
l'acier. En principe, ce mode de chauffage convient
pour la fabrication des aciers Martin, par exemple
mais jusqu’à présent, à raison du prix élevé des
calories électriques, on ne s’en sert guère que pour
les aciers soignés.
Voici comment on prépare l’acier fondu au four
électrique dans les aciéries d'Ugine, actuellement
parmi les plus importantes. On emploie le four
Girod, à sole rendue conductrice par noyage dans
le mortier réfractaire de rondins d'acier amenant
le courant : la partie supérieure de ces pièces fond
assez vite, mais une circulation d'eau à leur partie
inférieure restreint l'usure. Au-dessus du four, la
brique de silice laisse passer les autres électrodes.
On charge le four d'un mélange complexe de
« riblons » d'acier, de « chutes » de lingots et
autres sous-produits d'aciéries, avec un peu de
minerai el de laitier, le dosage étant réglé pour
quon obtienne un acier bien affiné contenant
moins de 0,1 de carbone, 0,1 de manganèse et
0,05 de silice pour 400.
On le voit : l'opération est bien plus commode
qu'au creuset, de sorte qu'on peut varier le régime
des charges pour obtenir une marche économique,
un véritable aflinage se rapprochant de celui qu'on
fait au four Martin. De fait, après fusion du mé-
lange, formant un bain métallique épais de 20 à
30 centimètres, on procède à toute une série d'opé-
rations de raflinage chimique : désoxydation par
apport d’un laitier silico-calcaire, recarburation
avec du graphite, addition des quantités conve-
nables de manganèse, chrome, nickel, etc.
On obtient ainsi, selon capacité des fours, de 4
à 12 tonnes d'acier, qu'on moule en faisant bas-
culer le four sur ses tourillons. Ces aciers, selon la
méthode suivie pour leur préparation, conviennent
tantôt pour outils courants, tantôt pour outils à
coupe rapide. Malgré le cout de l'énergie électrique,
ils reviennent à prix avantageux à raison de la
possibilité d'employer des matiéres premières quel-
conques, purifiées au cours de l'opération, et de la
suppression du gaspillage des calories. ll faut, en
effet, au four électrique, une température moins
élevée que dans les fours à creusets : 1 800 degrés
suffisent; et on perd par rayonnement très peu de
chaleur, tandis que le chauffage à la houille pro-
duit toujours une perte énorme causée par lèva-
cuation des gaz mal refroidis.
H. R.
La transformation du port de La Havane.
Bien qu’il soit fort difficile de prévoir l’avenir en
matière de commerce maritime, et plus particuliè-
rement de pressentir l'influence que l'ouverture du
canal de Panama pourra avoir sur les ports de
commerce de la mer des Antilles, il semble pour-
tant assez rationnel de supposer que Cuba tirera
un réel protit de cette voie nouvelle. Au surplus, la
grande ile se développe rapidement, il faut bien le
reconnaitre, en partie sous l'influence de la « paix
américaine » que les Yankees ont à peu près
350
réussi à lui donner: sans doute en la transformant
quelque peu en une de leurs possessions, mais
aussi en calmant les esprits surexcités qui ont trop
de tendances à faire de cet admirable pays une
sorte de république démagogique sud-américaine.
Il y a déjà longtemps que Cuba fait un commerce
important, comme nous l'avons montré dans un
livre consacré aux Grandes Antilles (1); et quand
nous disons Cuba, nous devrions presque dire La
Havane, car La Havane a toujours été le port par
excellence de la Perle des Antilles. Le fait est que,
si nous considérons tout le trafic de l'ile durant
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COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
. l'année 1900, nous voyons qu'il atteint 264 millions
de francs aux exportations et 361 millions aux
importations. Sur cet ensemble, La Havane à elle
seule compte plus de 157 millions aux exportations
et 253 environ aux importalions. Si nous envisa-
geons d'autre part l’année 1910, la dernière pour
laquelle nous ayons des relevés complets, le com-
merce d'ensemble du pays est de 779 millions de
francs aux exportalions et de 556 aux importations;
or, sur ce total, la part de La Havane est de 292 mil-
lions pour les exportations et de 347 aux importa-
tions. Si, du reste, nous suivions simplement les
ANCIENS QUAIS D'EMBARQUEMENT DE LA HAVANE.
progrès du commerce et du port de La Havane,
nous verrions qu'ils s'accusent avec une continuité
remarquable, les importations dépassant toujours
les exportalions, mais celles-ci progressant bien
plus rapidement: ce qui n'a rien d'étonnant pour
un pays neuf. Si, de plus, nous considérions le
tonnage du port, nous le verrions passer de 168 000
à 325 000 tonneaux de jauge pour les exportations,
les deux chiffres correspondant aux importations
étant de 992 000 et { 200 000 tonnes.
On pourrait se dire que le besoin de travaux ne
se faisait pas sentir à La Havane, si le port pouvait
suflire à pareil accroissement ; mais il faut prendre
les choses en sens inverse, et se dire que cet éta-
1} Guilmo!‘o, éditeur, Paris.
blissement maritime est absolument congestionné
par un semblable volume d’expéditions ou de
réceptions, et qu’il faut porter remède bien vite
à cet état d'encombrement, si l’on ne veut pas voir
le commerce en souffrir et les échanges se déplacer;
si l’on ne veut pas que Cuba soit mise hors d'état
de profiler, comme on espère qu'elle le fera, de
louverture à l'exploitation du canal de Panama.
Il faut songer que La Havane en particulier sert
actuellement de terminus à toute une série de
lignes de navigation, qui pourront continuer plus
loin et traverser le canal pour prolonger et perfec-
tionner les relations déjà établies. Ces services
divers réunissent Cuba à Anvers, à Barcelone,
à Bilbao, à Bordeaux, à Brême; d'autres lignes
à périodicité variable relient le port de Cuba
Ne 1:44
à ceux de Copenhague, Hambourg, La Corogne, La
Rochelle, Le Havre, Liverpool, Londres, Saint-
Nazaire, Santander. Bien entendu, les lignes sont
nombreuses qui mettent en relation les Etats-Unis
avec cette quasi-possession yankee, lignes qui se
dirigent de Cuba sur Key West, Mobile, la Nou-
velle-Orléans, Tampa. Elles seront sans doute plus
nombreuses après ouverture à l'exploitation du
canal de Panama, au moins sous la forme de
lignes faisant escale en ce point.
Tout naturellement, pour étudier les conditions
dans lesquelles devaient se faire les aménagements
COSMOS
354
nouveaux du port, il a fallu se rendre compte de
la nature des marchandises qui le fréquentent ou le
doivent fréquenter, et du poids ou du volume qu’elles
doivent représenter. Parmi les 1200 000 tonnes
d'importations en poids, il y a à peu près le tiers
en matières pondéreuses, le charbon notamment,
pour lesquelles les nouvelles installations ne sont
pas en réalité faites. Mais on a songé aux marchan-
dises de haute valeur spécifique, comme les ma-
tières alimentaires, céréales, etc. Quand les docks
et appontements seront établis, ils auront à répondre
à un mouvement de près de { 100 000 tonnes. Pour
LA CONSTRUCTION DES NOUVEAUX QUAIS.
les exportations, elles comprennent des mélasses
de cannes à sucre, qui sont envoyées directement
par pompage dans les cales des bateaux réservoirs;
ce sont ensuite des sucres, des rhums, des tabacs,
des fruits, des primeurs. Tout naturellement, ces
appontements fournissant des moyens d’embar-
quement ou de débarquement direct, les passagers
et leurs bagages trouveront grand profit à ces
installations. Aujourd’hui, la plupart des manuten-
tions se font par allèges, ce qui est lent, coûteux
et mème dangereux. Les frais de déchargement
par allèges sont actuellement en moyenne de
1,9 dollar (autrement dit 9,5 fr à 10 fr) par tonne.
Avec ces installations nouvelles, les taxes réclamées
au commerce ne dépasseront pas en moyenne
0,95 dollar, la moitié à peu près. Et quel temps
gagné, que de désagréments et de détérioralions,
de retards évités pour les services maritimes!
La concession qui a étéaccordée à la Compagnie
du port de La Havane, comprenant des Anglais,
des Américains et des Cubains, comporte l'élablis-
sement, à l’intérieur du port naturel de La Havane
(bordé de quais qui n’ont qu'une faible profondeur
d’eau à leur pied), de quatre appontements, darses,
comme on voudra les appeler. Ce sont des terre-
pleins établis perpendiculairement aux quais déjà
existants, de manière à gagner facilement de bonnes
profondeurs d’eau; les terre-pleins sont bordés de
quais maçonnés et construits par ces profondeurs.
Bien entendu, sur ces terre-pleins, sont prévus des
entrepôts et des magasins pour recevoir les mar-
chandises; tout un outillage perfectionné doit per-
352
mettre déchargement ou chargement ainsi qu’em-
magasinage. La première jetée-darse est construite,
on s’est atlaqué à la seconde; comme de juste, un
certain délai a été donné à la Compagnie pour la
troisième et la quatrième. Les deux premières
suffiront un certain temps au commerce. Toutes
seront fort bien situées, elles sont dans la portion
la plus accessible du port, le long du quartier réel-
lement commerçant de La Havane. Les travaux
sont d'ailleurs exécutés par la maison anglaise
Mac Arthur, Perks and C°, qui, directement ou
indirectement, a exécutė déjà des entreprises con-
sidérables un peu en tous pays.
Grâce à ces transformations, il va être curieux
de voir passer brusquement La Havane d’un état
absolument primitif comme port de commerce,
à la situation d’un grand port aménagé avec les
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
derniers perfectionnements possibles. Les quelques
quais existants ne présentaient ni profondeur à
leur pied, ni longueur pour l’accostage des bateaux,
ni appareillage pour les manutentions. À eux seuls
les nouveaux terre-pleins-darses vont augmenter
de plus de 700 mètres la longueur des quais de La
Havane, mais sous forme de quais accostables par
les grands bateaux. Et la navigation n'aura pas
l'ennui et les pertes de temps qu’entraine la fré-
quentation de bassins à flot.
Ces travaux et transformations sont particuliè-
rement à connaitre à une époque où, en France,
l'on perd son temps à étudier théoriquement la
question de la création de ports de grande naviga-
tion dans nos colonies des Antilles.
DANIEL BELLET, professeur
à l'École des hautes études commerciales.
Les arbres à gutta-percha de l’Afrique tropicale.
L'on voit au Museum Tradescantium, à South-
Lambeth, près de Londres, le premier morceau de
gutta-percha apporté en Europe, en 1636, par le
voyageur John Tradescant, qui l'appela Macer-
Wood (bois inconnu).
Ce mazer-wood, gueutta-pertcha des Malais,
fGummicum plasticum des savants, gutta-percha
de l’industrie contemporaine, était utilisé de temps
immémorial par les indigènes des contrées dont
Singapour est l’emporium actuel. On en faisait
notamment des manches de cognées. Le médecin
anglais Montgommery eut, en 1832, la curiosité
de s’en occuper et de signaler à l'attention des
manufacturiers une substance nouvelle dont l'uti-
lité est aujourd’hui de premier ordre.
Comme le caoutchouc, la gutta-percha est un
carbure d'hydrogène se présentant sous la forme
de coagulats du latex de certains végétaux. Mais là
s'arréte la ressemblance entre eux: le caoutchouc
est élastique tandis que la gutta-percha est plastique.
Les arbres à gutta appartiennent à la famille des
Sapotacées. Quelques Asclépiadées, des Apocynees
et des Euphorbiacées donnent des gommesque l'on
peut ranger dans la catégorie des caoutchoues
gutteux. Le plus intéressant de ceux-ci est la balata,
produit des S$. Mimusops, dont notre Guyane (si
l'on y travaillait) pourrait alimenter toutes les
fabriques qui emploient ce produit.
La gutta-percha, adoptée comme le meilleur
isolant des càbles électriques, est récoltée en
quantitės à peine suflisantes pour la consommation,
ct elle est presque toujours sophistiquée par les
intermédiaires asiatiques. On recherche depuis
longtemps les moyens d'augmenter les quantités
expédiées presque exclusivement de lInsulinde.
On a essayé, trop tard et sans grand effet, de faire
cesser l'absurde saccage des forèts, qui fut l’unique
mode de récolte pratiqué par les indigènes. On a
cherché scientifiquement l’utilisation pratique des
déchets végétaux (feuilles fraiches ou sèches,
écorces). Les savants travaux de M. le professeur
Jungfeish, les expériences sur place du D” Serrulaz,
d’autres études plus modestes, avaient établi que
le rendement en gutta d'une qualité reconnue
excellente par les consommateurs et tirée de ces
déchets oscillait entre 9,0 et 10,5 pour 100. C'eùt été
d'un haut intérêt si la destruction intensive des
végétaux guttifères n'eùt conséquemment réduit
la quantité de leurs déchets.
Enfin, on a fait des plantations. Mais sont-elles
d'une importance proportionnée aux besoins d’une
industrie en plein développement? Ces plantations
sont situées en Malaisie, à Bornéo et dans la partie
conslitutivement asiatique des Indes néerlandaises.
Car les Célèbes et les autres iles situées en face de
Bornéo et de Java font géologiquement partie du
continent australien et n'offrent ni la même flore
ni la même faune que leurs voisines. Leurs forêts
ne recèlent aucune variété guttifère (1).
D'après M. Seligmann-Lui et d’autres auteurs, la
patrie véritable de la gutta-percha se trouve située
entre les longitudes 102° et 142 Est et les latitudes
3° Nord et 3° Sud. Dans les splendides forêts des
merveilleuses iles asiatiques poussent ou plutôt
poussaient les divers Palaquium (Jsonandra ou
Dichopeis), le Payena, etc. Certaines sortes, comme
l’/sonandra gutta, Yarbre-type, très commun il
y a soixante-dix ans à Bouket-Timah, en plein
(1) Disons que notre Indo-Chine possède un arbre
à gutta, le Palaquium Kranciana, dont le produit
fut trouvé défectueux. Est-il perfectible ?
N° 41444
centre de Singapour, ont complètement disparu, et
« les insuffisantes plantations entreprises dans les
Indes néerlandaises ont fourni surtout non des
meilleures espèces, mais celles dont le latex est le
plus abondant, c'est-à-dire les moins bonnes ».
Donc, il serait intéressant de trouver ailleurs des
arbres guttifères. La culture en est possible là ou
l'espèce croit spontanément.
N'en existe-t-il vraiment que dans la région pré-
citée ? | |
C'est avec ces idées qu’au retour d’un voyage en
Extrème-Orient, effectué de 1900 à 1902, avec
haltes studieuses au Botanical-Garden de Singa-
FAMILLE TRIBU VARIETE
Sapotacées Bassia Bassia
Parkii
— Chrysophyllum Diverses
D'après Heckel, les variétés de Sapotacées crois-
sant en Afrique pourraient un jour lutter avec le
Palaquium des iles de la Sonde. On voit, par le
tableau que nous venons d'indiquer, combien nos
#
À Gaucuig : feuille du Palaquium oblongifolium des régions
asiatiques continentales et insulaires.
A DROITE : feuille du simili Palaquium trouvé en Afrique par
23° de longitude Est et 1° de latitude Sud et dans tous les
environs.
colonies d'Afrique sont heureusement dotées sous
ce rapport, et que l’étude de bons moyens de cul-
ture ou de récolte donnerait lieu à la création d'une
nouvelle source de richesses.
Mais il me fut donné de rencontrer fréquemment,
dans les forêts équatoriales du bassin du Ruki,
affluent du Congo, une véritable réplique du Pała-
COSMOS
353
pour et à Buitenzorg, je parcourus, de 4903 à 1905,
les régions congolaises situées sous l’Equateur. Des
données sérieuses me faisaient penser que des
végétaux guttifères existaient. En 18814, M. le
Dr Beauvisage s’exprimait en ces termes :
dis Les savants ont découvert... dans l'Afrique
tropicale... des arbres dont le suc pouvait donner
de la gutta bonne, médiocre ou mauvaise. »
On avait importé d’Abyssinie une gutta mal ré-
coltée et de basse qualité, issue d’un Mimusops (S).
En 1895, l’admirable ouvrage de MM. Seligmann-
Lui, Lamy-Thorrilhon et Falconet désignait les
arbres suivants reconnus en Afrique comme
propres à fournir de la gutta-percha.
NOM LOCAL PAYS D'ORIGINE
Arbre de Karité Guinée supérieure
Arbre de Pays Bambara
Ghi Haut-Niger
Saga Baoulé, etc.
Divers Madagascar
Maurice
Australie
quium oblongifolium que l'on m'avait fait admirer
en Asie. Le sol de la région équatoriale et afri-
caine et celui des environs de Straits Settlements
sont des dépòts alluvionnaires très arrosés par des
pluies tièdes et chauffées par un soleil ardent.
Dans les deux zònes, on trouve de puissantes
lianes, des rotins et des orchidées. Les espèces
différent et la jungle asiatique est plus touffue.
Quoi qu'il en soit, le soi-disant Palaquium africain
ressemble à celui de la Sonde : même port, même
feuillage, même latex. Il mesure de 1,5 m à
3 mètres de circonférence à hauteur d'homme. Le
fût est droit; les premières branches sont placées
à 10 ou 15 mètres du sol. L'arbre atteint et dépasse
20 mètres de hauteur. Il croit sur des terrains non
susceptibles de submersion.
Les feuilles moyennes ont environ 22 centi-
mètres de long, 9 centimètres de large, et affectent
une forme oblongue arrondie à l’extrémité et sou-
vent terminée par une petite pointe. La couleur
est d’un beau vert moyen, plus clair en dessous.
Le pétiole mesure de 2 à 3 centimètres.
Le fruit est rond, d’un diamètre de 5 à 6 centi-
mètres. Assez semblable à une orange verte, il
contient quatre amandes, comestibles au dire des
indigènes. La peau contient beaucoup de lalex. A
ce propos, notons, en passant, qu'un des obstacles
à la réalisation des plantations de caoutchouc dans
certaines régions africaines tient au goût prononcé
des Noirs pour les fruits des plantes que l'on
cherche à cultiver. La récolte de ces fruits est sur-
tout consommée par eux, et c'est À regret qu’ils en
abandonnent une partie aux planteurs. I! en serait
de même pour tout fruit comestible recherché par
les Européens.
354
L'écorce de l’arbre est assez rugueuse à la nais-
sance du tronc; la teinte extérieure est gris vert
foncé avec des plaques brun clair et gris blanc. La
teinte intérieure est rougeûtre. Le bois est un beau
bois d'œuvre.
Cet arbre croit en forèt, sans groupement. Il est
assez disséminé pour que sa densité ne dépasse
pas 12 par hectare. Ce n’est donc point la fréquence
des /sonandra en Malaisie ni les véritables forèts
du Bassia Parkii dans ses pays d'origine.
Le latex coule d'autant moins abondamment que
les incisions sont pratiquées plus près du sol. C’est
une ressemblance de plus avec les Sapotacées
d'Asie. Cette cause, jointe à la paresse des récol-
teurs malais, a déterminé cet abatage systéma-
tique qui ruina les forêts au point de faire totale-
ment disparaitre certaines espèces.
Malheureusement, le coagulat du simili-Pala-
quium africain, très beau lors de sa formation et
présentant toutes les qualités apparentes et les
propriétés de la parfaite Gutta Pahang, se rési-
nifie (1), donc se déprécie d'une façon si complète
que celte intéressante trouvaille restera sans
grande valeur si l'on ne sait pas y remédier lors-
qu'on s’en occupera effectivement comme élément
de plantations. La substance produite devient cas-
sante et friable comme la résine. Miller et Hoffmann
attribuent ce changement — déjà remarqué sur des
échantillons de gutta-percha d’autres origines —
à une oxydation. Néanmoins, Miller admet qu'en
cet état même elle peut ètre régénérée.
Lorsque je préparais sur place des échantillons.
dont les apparences étaient aussi satisfaisantes,
j'étais loin de prévoir cette disgrâce. L'eussé-je
prévue que j'eusse compté sur mes correspondants
européens pour étudier à fond l'objet de mon
envoi. Il n'en fut rien. En 1905, à mon retour, je
retrouvais mes échantillons dans un état tel, deux
ans après leur confection, qu'il eût fallu les traiter
d'une facon coûteuse s'il s'était agi d'une quantité
offrant vn intérêt industriel.
Les circonstances dans lesquelles ce produit était
arrivé en Europe furentcellesdes guttas-perchas dela
Nouvelle-Guinée, envoyées par KR. Schlecher (gutta
du P. Suplanum), lesquelles diminuaïient de qualité
par suite du long transport et de l'oxydation (rési-
nification à l'air).
Mes échantillons semblaient envahis par la flua-
vile et l'albane. Voici quelle est la teneur en résine
de la gutta commerciale :
GUNA CPUT Osou sa aiana environ $80
Résine arana a nr — 19
Eau et déchets divers....,..... — j
(1) La résinification est à la gutta-percha ce que la
poisse ou tournage au gras est au caoutchouc. C'est
une transformation due ou à des vices de récolte ou
simplement ct simultanément à l'action de l'air et de
la lumiere. Ces causes de dépréciation sont d'autant
COSMOS
26 SEPTEMBRE 41919
D'après Oudemas, la fluavile, l’albane et la gutta
ont la composition brute suivante :
FLUAVYILE ALBANE GUTTA
Carbone...... 83,52 78,95 88
Hydrogène... 11,42 40,31 12
Oxygène... 5,06 10,74
D'après Baumhauer et Oudemas, la gutta com-
merciale pure se composerait d'un hydrocarbure
C?°H*? et de plusieurs produits d'oxydation.
On connait déjà ou l’on pourrait employer
divers moyens grâce auxquels il serait possible et
d'extraire la gutta pure de ces guttas résinifiées et,
mieux encore, d'empêcher la résinification dès la
formation du coagulat.
Dans le premier cas, la digestion par le toluène
restitue la guita pure contenue dans le bloc rési-
nifié. Le sulfure de carbone peut aussi servir.
Dans le second, le traitement cyanuré du latex
ou l'intervention de l'anhydride carbonique au
moment de la coagulation sont de nature à s'op-
poser à l’oxydalion. Le cyanure est souvent employé
comme agent de réduction des oxydes. et le gaz
carbonique — ghoast, esprit, gaz, de van Helmont —
est également contraire à l’oxydation d'une matière
si utile. En les employant, on peut espérer tirer
un parti sérieux de l'arbre reconnu dans les forèts
du Congo belge et qui doit se trouver dans ce qui
reste de notre colonie du Congo.
Nos vastes colonies du littoral guinéen seraient
indiquées pour la plantation en grand du Bassia
Parkii décrit par M. le professeur Heckel. Le
Butyrospermum Bassia Parkii est un bel arbre
d'environ 10 mètres de hauteur, mesurant 41,8 m
de diamètre à la base du tronc, et donnant un latex
abondant. Il est commun dans les vallées du Haut-
Niger et du Baoulè. Son produit imite véritable-
ment celui du Palaquium.
Voici, d’après les procédés d'analyse de Payen,
la comparaison entre :
LA GUTTA PERCHA LA GUTTA
COMMERCIALE DU BASSIA
Gutta pure.. 92 91
Albane...... G 5,5
Fluavile..... 2 3
L'analyse spectrale confirme cetteidentité presque
complète. Si, dans les plantations qui manquent
tant à notre Afrique équatoriale, on donnait à cet
arbre la place qu’il mérite, on reconnaitrait qu’il
est peut-ètre le premier à cultiver. Selon Selig-
mann-Lui, ingénieur des télégraphes, c’est le guttier
de l'avenir.
L'on ne doit pas oublier que l'industrie française
de la gutla-percha et du caoutchouc est très impor-
plus regrettables que ces produits sont d'un prix
élevé.
Ne {444
tante. Malheureusement, elle importe de l’étranger
des quantités considérables de matière première.
Or, notre empire colonial se prête à des récoltes,
et bien plus encore à des plantations qui pourraient
devenir sans rivales. En Guyane, le Mimusops
balata croit spontanément, ainsi que l'Hevea quya-
nensis, qui, mieux que Hevea brasiliensis, est
l'arbre-type du caoutchouc.
En Asie, nous avons vu qu'il existe un Palaquium
et les plantes caoutchouquifères poussent sponta-
nément. À Madagascar exislent des Sapotacées
encore mal étudiées, et l’on y récolte du caout-
COSMOS
399
chouc. En Afrique, la Côte d'Ivoire, la Guinée, le:
Soudan possèdent le Bassia et, depuis longtemps,
exportent du caoutchouc. De plus, je crois ferme-
ment qu'il existe dans notre équateur congolais
une sorte de Palaquium dont la recherche et
l'étude ne seraient peut-être pas dénuées d'intérêt.
On voit combien la nature nous a généreusement
donné les plus riches éléments de travail. Dans
ces conditions, l'effort des gens énergiques peut
conduire, sans redouter des déceptions, à un
résultat que les études résumées ici montrent bien
digne de leur attention. L.-S. NUMILE.
Deux localités géologiques célèbres
Uchaux et les Baux
Un récent voyage en Provence m'a permis de
visiter deux gisements fossilifères renommés, celui
d'Uchaux (Vaucluse) et celui des Baux (Bouches-
du-Rhône).
Uchaux est une petite paroisse située à une
dizaine de kilomètres au nord de la ville d'Orange,
au milieu d'une région présentant une suite de
Nord
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petits vallons séparés par des chaines de collines
parallèles entre elles, que l’on observe dans tout
le pays compris entre Bollène, Uchaux et Mornas.
La direction moyenne de ces chaines de collines.
est, à très peu près, de l'Est 10° Nord à l'Ouest
10° Sud.
On voit, par la coupe que nous donnons (fig. 1),
Sul
e_n
€ s
ua
Prolin: Ura nge È La mpovrdier
A
34 24 hilom
F1G. 1. — COUPR GÉNÉRALE DU BASSIN D'UCHAUX, D'APRÈS Ep. HÉBERT.
{ Echelles : longueurs, 1 mm pour 40 m; hauteurs. t mm pour 30 m.|
N, Néocomien. — G, Gault. — 1, Craie glauconieuse. = 2, Grès d'Uchaux. — 3, Grès de Mornas.
4, Lignites de Piolenc. — T, Terrain tertiaire miocene.
que cette région forme un bassin dont Uchaux est
le centre, bassin limité au Sud et au Nord par les
couches relevées du Néocomien. Un pli saillant
orienté Est-Ouest, à la latitude de Montdragon, et
amenant au jour des couches appartenant au Céno-
manien moyen, partage ce bassin en deux dépres-
sions, l’une dont Piolenc occupe le centre, et l’autre
correspondant à la vallée de Noyères.
Un des traits stratigraphiques les plus remar-
quables du bassin d’Uchaux, c’est la superposition
complètement discordante et transgressive du ter-
raia tertiaire moyen sur le terrain crétacé. En
effet, à Bédouin, à Orange et à Clansayes, c'est
sur la craie glauconieuse que le terrain tertiaire
repose; à Saint-Paul-Trois-Châteaux, sur les grès
d'Uchaux; à Noyères, sur les grès de Mornas, et
enfin à Piolenc, sur les lignites du Beausset et du
Pian d'Aups. Cette discordance si considérable,
quand on considère le bassin dans son ensemble,
n'est pour ainsi dire nullement accusée en chaque
point particulier, car les couches tertiaires et Îles
couches crétacées paraissent toujours sensible-
ment parallèles entre elles. Ce parallélisme local
des couches et l'absence de toute trace de dénuda-
tion entre la surface du terrain crétacé et le ter-
rain tertiaire montrent que les différents étages
du terrain crétacé supérieur se sont déposés en
retrait les uns des autres, ce qui accuse un mou-
vement d'affaissement progressif dans Île centre
du bassio, ou un relèvement des bords. Concur-
remment avec ces mouvements s'est produit, par
compression latérale, le bombement Est-Ouest du
centre du bassin.
La roche formant la base du terrain des envi-
rons d'Uchaux est un grès quarlzeux et ferrugi-
neux, à ciment calcaire ou argilo-calcaire: il peut,
suivant la grosseur des grains empätés, la propor-
tion du ciment et celle du fer, prèsenter un nombre
presque infini de variétés. Les grains sont tantot
très fins et presque indiscernables, tantôt de la
grosseur d'un sable grossier mtlé de gravier. Quel-
quefois la roche est blanche, cela est rare; presque
300
toujours elle est plus ou moins ocreuse, et même,
dans certains lieux, elle devient un véritable
minerai de fer. Quant au ciment, il peut être com-
plètement nul : le grès se change, dans ce cas, en
un sable quartzeux pur, sans consistance. D'autres
fois, au contraire, la proportion de carbonate de
chaux est très forte : on a alors un calcaire plus
ou moins arénacé, qui passe par transitions insen-
sibles à un calcaire sublamellaire ou compact,
F1G. 2.
1, Cyclolites discoidea Blaiïinv. —
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
à cassure inégale, où l’on n’aperçoit aucun mélange
de grains quartzeux. Le ciment, au lieu d’être
marneux, peut devenir purement siliceux. Quand
cela arrive, le grès ne fait aucune effervescence
avec les acides, il se transforme même en un véri-
table quartzite à texture grenue ou compacte. La
variélé de roche la plus commune est le grès
quartzeux à grains moyens et à ciment calcaire,
où l'on remarque quelquefois de petits fragments
To
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A KS vi
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-T D
— FOSSILES DU TURONIEN D'UCHAUX (VAUCLUSE).
2, Stephanocæenia excavata d'Orb. — 3, Synastrea cistela Edw. et H.
h, Pinces de Callianassa Archiaci M.-Edw. — 5, Trochosmilia compressa Edw. et H, — Irigonia scabra Lmk.
arrondis de calcaire et des paillettes de mica d'une
grande ténuité.
Voici la coupe des couc'ies turoniennes d’Uchaux :
6. Grès et sables à Sphærulites Sauvagesi, S. Des-
moulinsi, Ostrea mornasiensis.
5. Grès grossiers et sables quartzeux.
4. Gres calcarifères, très ferrugineux, à faune dite
d'Uchaux.
3. Grès calcarifères, un peu ferrugineux,avec Parhyd.
peramplus.
2. Grès calcarifères, sableux ou marneux, avec Prio-
notropts papalis.
1. Caicaire marneux et grès à Æpiaster, Inoceramus
labiatus.
Les assises 3 et 4 forment le grès d'Uchaux,
dont la faune comprend les espèces que nous
reproduisons (fig. 2). L'un des gisements les plus
riches est entre la hauteur de Lamberthe et la
grange de Boncavail. Le même groupe de couches
forme une petite chaine continue dont font partie
la hauteur de Boncavail et celle qui, un peu au
sud du château de Maxillan et non loin du hameau
de Hauteville, porte le nom du Mont-des-Coquilles.
Ces deux monticules sont extrêmement riches en
corps organisés ; Cest de là que viennent presque
tous les fossiles dits d'Uchaux, qui sont devenus
communs dans les collections.
No 144
Situés sur un sommet des Alpilles, d’où la vue
s'étend jusqu’à la mer, Les Baux, ancienne capitale
de la principauté de ce nom et, de nos jours, simple
petit village, sont certainement une des curiosités
les plus remarquables de la Provence. Eorsque
l'on s’en approche, on ne voit tout d'abord qu'un
chaos où l'œil a quelque peine à distinguer les
ruines des anciennes habitations seigneariales et
les masures actuelles, d'avec les bancs de mollasse,
dans lesquels elles ont été en partie taillées ou avec
lesquels elles ont été construites. Le géologue,
eomme l’archéologue, peat faire dans cette localité
d'intéressantes recherches.
Le village des Baux est, si je peux m’exprimer
ainsi, à cheval sur un anticlinal d'une parfaite
netteté.
La mollasse blanche à Pecten preæscabriusculus,
F1G. 3. — Lychnus Matheroni DES BAUX.
P. restilutensis, Evchinolampas hemispheæericus
(Burdigalien supérieur) est exploitée dans de nom-
breuses carrières. Si aucun obstacle n'arrête ce
vandalisme, les ruines si pittoresques des Baux ne
seront plus bientôt qu'un souvenir.
Sous la mollasse blanche, un conglomérat à gros
galets veris, avee Pecten Davidi, représente la
mollasse sableuse (Burdigalien moyen).
Ce conglomérat, surmonté de la mollasse blanche,
repose presque horizontalement tantôt sur une
couche, tantôt sur une autre couche du crétacé
supérieur fluvio-lacustre, plongeant au Nord jus-
qu’à la grande faille qui traverse les Alpilles de
l'Est à l'Ouest.
Le système fluvio-lacustre a été divisé en onze
assises que l’on étudie facilement en se dirigeant
du Nord au Sud-Ouest, suivant une ligne courbe
COSMOS 357
passant tout contre l'escarpement qui supporte Les
Baux.
En voici la coupe :
s
Rognacien. — A. Calcaires blancs ou rosätres,
presque saccharoïdes, identiques à ceux de Rognac,
très fossilifères : Lychnus Matheroni (fig. 3), etc. —
B. Calcaires grisätres peu fossilifères. — C. Calcaires
gris, remplis de fossiles écrasés. — D. Calcaires blancs,
compacts, à silex, sans fossiles. — E. Sables argileux
et grès blanchätres, lie de vin, jaunätres.
Bégudien. — F. Calcaires gris à Anosmopsis rotel-
laris, très fossilifères. — G. Calcaires gris, très fossi-
lifères également, à Lychnus ellipticus. — H. Calcaires
g'isätres à odeur bitumineuse, remplis de fossiles
déformés.
Fuvélien. — T1. Calcaires à Melania nerineiformis et
à Corbicules. — J. Calcaires à Unio et à végétaux.
Valdonien. — K. Calcaires de couleur sombre à
Cyclophorus Heberti. Ces calcaires renferment, vers
leur base, de nombreuses concrétions formées de
couches concentriques.
La bauxite, au contact avec cette assise, est
exploitée de nouveau dans des carrières où l’on
peut recueillir de beaux échantillons de toutes les
variétés. C’est aux Baux, d’où il a tiré son nom,
que cet hydrate d’alumine ferrifère a été observé
pour la première fois; l'âge et le mode de forma-
tion de la bauxite ont donné lieu à bien des dis-
cussions. [1 semblerait que l’on soit là en présence
d'une véritable latérite fossile comme il s'en pro-
duit aux dépens des roches dans tous les pays
intertropicaux. |
La coupe des Baux se termine à l’Hauterivien,
rempli de Toxaster retusus, dont on voit de gros
blocs au fond dela principale exploitation de bauxite.
L'intérêt qui s'attache aux deux localités dont
nous venons de décrire les caractéristiques géolo-
giques pourrait s'étendre à une multitude d'autres
points de la Provence, qui est la terre bénie du
naturaliste.
Ludovic Legré en a décrit les richesses bota-
niques, Fabre les merveilles entomologiques, de
Saporta et toute une pléiade de chercheurs les par-
ticularités géologiques. Il reste encore beaucoup
à faire, ce sera l'œuvre de l'avenir.
Part Couses fils.
La semoule et
Parmi nos industries les moins connues, il faut
citer la semoulerie, localisée pour ainsi dire dans
une seule ville, Marseille, qui reçoit par son port
la plupart des blés spéciaux servant à cette fabri-
cation.
Le produit lui-même, la semoule, est infiniment
plus connu, et cependant il parait indispensable
sa fabrication.
de le bien définir, car nous avons trop souvent
entendu dire, et mème lu dans de sérieux diction-
naires et des ouvrages d'éducation, qu'elle étuit
une pâte faite de farine de blé réduite en grains
plus ou moins menus.
Rien n'est moins exact : la semoule n’est point
un produit composé; elle est tout simplement le
358
gruau du blé dur, l’amande farineuse du grain
concassée — et non point écrasée comme la farine
— par une première opération de mouture quisuit
immédiatement le nettoyage et le décorticage.
` La semoule se présente sous l’aspect de granules
d'irrégulières grosseurs et de couleur légèrement
citrine. Un sassage ou calibrage classe ensuite les
diverses grenaisons, ainsi que nous Île verrons plus
loin.
C'est à la fabrication des pâtes alimentaires qu'est
principalement employée la semoule ; les pâtes de
qualité supérieure ne doivent mème contenir aucun
autre élément.
On se sert aussi de la semoule pour la confection
-de potages, bouillies, gâteaux et entremets.
Seuls les blés d'essence dure peuvent être em-
ployés pour la production de la semoule. Ces blés,
d'origine étrangère, plus riches en gluten et en
matières azotées, renferment aussi moins d'amidon
que les essences tendres. Ils se distinguent par la
forme plus allongée du grain qui est compact,
d'aspect corné, vitreux ou translucide; ils offrent
une résistance plus grande à l’action des broyeurs
— jadis des meules, — d’où leur nom de blés durs.
‘On les appelle aussi « blés glacés ».
La semoulerie française tire les blés dont elle
fait usage de Russie (meilleures provenances:
Taganrog et Berdianska), d'Algérie (Bône et Con-
stantine), de Tunisie (Tunis), de Turquie et des
‘principautés danubiennes (Salonique et Bessara-
bie), des Indes (Bombay et Calcutta) et de la
République Argentine (La Plata).
Au point de vue du rendement en semoules, et
surtout de la belle qualité de celles-ci, les blés
durs peuvent se classer dans cet ordre: Taganrog,
Constantine, Bòne, Tunis, Bombay, Calcutta.
L'Italie récolte aussi des blés durs de très belle
qualité en Sardaigne, dans la Pouille et en Sicile;
mais ils ne sont pas exportés et servent à l'indus-
trie indigène.
La France ne produit pas de blé dur proprement
dit: nous trouvons cependant en Vaucluse, dans le
Gard, dans la Gironde, mais surtout en Auvergne,
une variété de blé demi-dur où « mitadin » qui,
sur place, dans quelques usines, est converti en
semoules dites « mitadines », dans d’autres en
farines rondes ou de « force » destinées à la pani-
fication.
Au reste, la production de ce blé appelé « go-
delle » en Auvergne, « aubaine » en Vaucluse, est
fort limitée; on fui donne encore le nom de « blé
rouge glacé où demi-glacé »; il sert à faire des
semoules inférieures.
L'emploi exclusif de blés étrangers, entrant
presque toujours en admission temporaire, explique
le monopole que détient Marseille de la fabrication
semoulière. C'est, en effet, non seulement par ce
port que débarque en France la presque totalité
COSMOS
26 SEPTEMBRE 191%
des blés durs, mais aussi que sont réexpédiés les
produits fabriqués : semoules ou pâtes alimentaires.
Primitivement, l'Italie seule fabriquait, avec les
produits de son propre sol, des semoules de blé
dur, et ses pâtes alimentaires jouissaient d’une uni-
verselle renommée, grâce aussi au climat chaud
très favorable à la fabrication ; de nos Jours encore,
le nom de « pâtes d'Italie » s’est conservé pour
désigner certaines qualités supérieures de pâtes,
même d’origine française, suisse, etc.
La France, pendant plusieurs siècles, essaya en
vain de faire concurrence à l'Italie; Naples et
Gênes, notamment, restaient maitresses de cette
fabrication, pour laquelle nous manquions de blés
durs.
Jusqu'en 1815, les minoteries de Marseille ne
produisaient que des gruaux de blé pour des pâtes
alimentaires secondaires; à cette date, un minotier
marseillais, J.-B. Brunet, eut l'idée d'employer des
blés durs de la mer Noire. Son essai réussit, mais
il ne put toutefois produire que des semoules
à potages; l'Italie, seule encore, fabriquait les
belles semoules destinées aux påtes de choix.
Vingt ans plus tard, en 1833, grâce à l'initiative
de Joseph Brunet, fils du précédent, les blés durs
d'Afrique furent employés à Marseille, et, la fabri-
calion se perfectionnant, l’industrie marseillaise
commença à établir sa réputation. Nous trouvons
qu'en 1830 la semoulerie du département des
Bouches-du-Rhône occupait 80 ouvriers pour tri-
turer 25 000 hectolitres de blés durs: les chiffres
s'élèvent, en 1863, à 1200 ouvriers et 200 000 hec-
tolitres. À Marseille même existaient, en 1865,
10 semouleries consommant .480 000 -hectolitres de
blés durs (presque tous d'Algérie) et produisant
de 8 à 9 millions de kilogrammes de semoules.
A ceite époque, les procédés de fabrication étaient
encore primitifs; le sassage des gruaux se faisait
à la main au moyen de tamis ou sas séparant la
grosse semoule de la semoulette. Il nous faut
arriver à 1868 pour voir se créer des procédés
mécaniques.
Ces nouveaux et ingénieux appareils, dus au
constructeur Cabannes, de Bordeaux, qui furent
par la suite progressivement perfectionnés, ame-
nérent une véritable révolution dans l’industrie
semoulière.
On pourra juger de l'importance de cette inven-
tion, au point de vue de la main-d'œuvre seulement,
si nous rappelons qu’un moulin de 8 tournants,
qui exigeait 39 ouvriers pour le criblage par tamis
(à la main), n'en employait plus que 8 à la surveil-
lance des opérations mécaniques de sassage.
Enfin, en présence des merveilleux résultats
obtenus, la transformation s'imposa rapidement
à toutes les semouleries. Celles-ci, qui comptaient,
en 1867, 600 paires de meules, en avaient 984
en 1877, triturant 158 600 quintaux de blé dur.
N° 1444
A partir de 1881, nous avons à signaler une nou-
velle et fort importante transformation de l'outil-
lage des semouleries, comme d’ailleurs de celui de
toute la minoterie en France : le remplacement
des meules séculaires par des appareils à cylindres
dits broyeurs.
Quelques minoteries françaises, surtout des
semouleries, les essayèrent timidement d'abord, et
ce ne fut qu’en 41889 que la plupart des minoteries
les plus importantes adoptèrent la mouture à
cylindres. Quelques moulins seulement conser-
vèrent des meules, employées exclusivement au tra-
vail de fin de mouture.
Les mesures douanières éxercèrent aussi une
grande influence sur notre industrie semoulière.
C'est ainsi que, par suite d'une modification des
tarifs de douane, en 41880, admettant les semoules
françaises en Italie au même tarif que les farines,
lexportation par Marseille se releva fortement,
puis retomba par suite du régime protectionniste.
Il faut aussi mentionner une autre cause de
prospérité pour la semoulerie française, l’admis-
sion, en 1882, des semoules ou gruaux à la décharge
des acquits à caution dans le fonctionnement de
admission temporaire des blés. Un mouvement
ascensionnel énorme se produisit alors dans l’ex-
portation générale des semoules.
On ne peut songer ici à entrer dans les détails
des multiples opérations que demande la fabrica-
tion de la semoule. Nous nous contenterons donc
d'en indiquer à grands traits les phases princi-
pales qui sont au nombre de cinq: le nettoyage,
le broyage, la désagrégation ou désagrégeage, le
sassage et le convertissage.
Les deux premières opérations, communes à la
semoulerie et à la minoterie, ont été décrites déjà
dans le Cosmos (11 et 25 mars 1911), nous n’y
reviendrons donc pas. Le nombre des passages aux
broyeurs est cependant plus considérable en semou-
lerie; il en faut compter de huit à dix.
On procède ensuite à la désagrégation des gruaux
obtenus par le broyage; ici encore, six à douze
passages, selon les usines, sont nécessaires.
La farine dite de premier jet, résultant de cet
écrasement, et la première semoule brute sont
extraites à la fin de ces opérations : l'extraction de
chaque bluterie est rejetée sur le passage suivant.
Les désagrégeurs sont alimentés par les rejets des
sasseurs de ces diverses opérations; ils donnent de
la farine de premier jet et des semoules; ces der-
nières, après avoir subi un complément de sassage,
vont se mélanger à celles obtenues déjà par les
broyeurs.
Le résidu des désagrégeurs passe au convertis-
sage, dont les produits donnent les gruaux D, c'est-
à-dire la farine de blé dur dont on compte deux
qualités. |
Le déchet des convertisseurs, qui est générale-
COSMOS
399
ment repris encore par des meules, fournit des
farines basses servant surtout à l’engraissement
des bestiaux.
Revenons aux semoules brutes qui, après leur
sorlie des broyeurs ou des désagrégeurs, sont réu:
nies; elles passent alors par les diviseurs, appa-
reils les isolant de la farine de premier jet qui
y est encore mélangée. Des sasseurs spéciaux
classent par grenaisons les semoules qui doivent
encore subir plusieurs passages — trois à cinq
selon la qualité — avant d’être épurées et livrées
au commerce.
De ces opérations résultent les diverses semoules
et farines de blé dur qui sont désignées par des
marques ou abréviations d’un usage fort ancien
qui se continue de nos jours. C’est ainsi, pour en
donner un exemple, que les premières sont les
S. S. S. E. (semoule double supérieure extra),
S. S. S. (pour l'exportation) ou S.S. (pour la con-
sommation intérieure) (semoule double supé-
rieure), etc.
Les qualités supérieures de grosses semoules
destinées aux potages exigent une fabrication
extrêmement délicate; les meules sont substituées.
aux cylindres pour le broyage; ces semoules sont
d’un grain fort gros. Leur prix est sensiblement
plus élevé que celui des autres semoules; deux ou
trois usines, spécialement outillées, en produisent,
mais en petite quantité.
Les sasseurs, dont on a pu voir le rôle important:
dans la production de la semoule, remplacent,
depuis bientôt quarante-cinq ans, comme nous
l'avons dit précédemment, les anciens sas ou tamis
à la main et assurent une fabrication rapide et
régulière. Ces appareils ont la forme de parallélo-
grammes, se composant de bâtis en bois et fer
garnis de châssis recouverts de peau d’âne perfo-
rée; ils sont mus par un excentrique leur impri-
mant un mouvement de sas, d’où leur nom; ces
chässis sont généralement découverts, et la semoule.
est ainsi sassée à l'air libre.
Les autres appareils, moins spéciaux, sont à peur
près semblables à ceux employés dans la minoterie.
Les usines de semoulerie sont des plus curieuses
à visiter, avec leurs luxueux appareils en acajou.
ou bois verni auxquels aboutissent d'innombrables
conduits recevant ou distribuant les produits au
fur et à mesure de leur transformation et les pro-
menant de haut en bas ou de has en haut du mou-
lin; puis ce sont les nombreux sasseurs sur lesqueis.
circule, doucement secouée, la fine nappe d'or
pâle des semoules.
Aujourd’hui, dans un grand nombre de semou-
leries, tout le travail se fait automatiquement,
depuis le nettoyage du blé jusqu'à l'ensachement
des produits fabriqués. D'où une production. plus
rapide, plus considérable et plus régulière, une
réduction importante de la main-d'œuvre, au point
900
qu’un seul conducteur de cylindres, de bluteries ou
de sasseurs suffit à chaque étage ou plancher, son
rôle se bornant, une fois la mouture réglée, à sur-
veiller la marche des appareils et à prévenir les
engorgements.
Les procédés de mouture étaient jadis divisés en
deux catégories: celui produisant des gruaux por-
tait le nom de « mouture haute », celui donnant
immédiatement la farine s'appelait « mouture
basse ». Ces deux appellations tirent leur origine
de l’emploi des meules, dont l'écartement était
plus ou moins grand selon qu'on voulait seulement
effleurer le blé pour le convertir en gruaux ou
semoules, ou bien l'écraser en farines dès le début
des opérations. Les broyeurs remplacent aujour-
d'hui les meules, mais la distinction demeure.
L'industrie semoulière est fort importante à Mar-
seille, son centre principal et presque unique; le
nombre des usines y était de 40 en 1865, de 14 en
4884, de 26 en 1902: il est de 17 actuellement.
Ces 17 usines, toutes actionnées par l'eau ou la
vapeur, ont une puissance globale de production
quotidienne de 4950 quintaux; mais, ne faisant
pas leur « plein », elles ne produisent en ce mo-
ment que 3 350 quintaux environ par jour.
ll existe encore en France quelques autres
centres semouliers, mais infiniment moins impor-
tants : Clermont-Ferrand, Valence et Lyon, par
exemple, dont la fabrication quotidienne totale
s élève à un millier de quintaux.
On arrive donc, pour la totalité de la production
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
française, à 4 550 quintaux par jour, soit annuelle-
ment, pour onze mois de travail effectif, à un chiffre
de 4 500000 quintaux de semoules de toutes qua-
lités, l’extraction moyenne en semoules étant de
55 à 60 pour 100 du blé dur trituré; la partie res-
tante représente les farines de diverses qualités, le
son et le déchet.
L'importation des blés durs par Marseille, qui
était en 4902 de 4575497 quintaux (la majeure
partie provenant d'Algérie), s'est élevée en 1914
à 2 100 498 quintaux.
Enfin, pour donner une idée de l'importance
commerciale de la semoulerie française, nous indi-
querons les prix de vente actuels des trois qualités
supérieures de semoules par 100 kilogrammes pris
à l'entrepôt, c'est-à-dire aux usines et rendus
franco aux gares ou à quai: les S.S. S.E., 30 francs;
les S. S.S. ou S. S., 29; les S. S.S. F., 28; il suffit
d'ajouter à ces prix le montant du droit d'entrée
en France, soit 7 francs par 400 kilogrammes, pour
avoir le prix de vente à la consommation.
La plus grande partie des semoules de fabrica-
tion marseillaise passe à l'exportation sous le
régime de l’admission temporaire. L'Italie mème
en achète pour la fabrication de ses plus belles
pâtes alimentaires.
En 1909, la France expédiait en Suisse 16 146 tonnes
de semoule contre 7393 fournies par l'Italie et
1 326 seulement par l'Allemagne.
A.-G. DE MANET
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 16 septembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. GRANDIDIER.
Sur Ia constitution minéralogique des vol-
cans de l'ile de la Réunion. — M. A. Lacroix
a montré dans une communication précédente que
sous la monotonie de la couverture de ses laves
superficielles, très analogues à celles du volcan actuel,
le massif plus ancien du Piton des Neiges cache une
grande complexité minéralogique: il est constitué par
l'accumulation de plus de 3000 mètres de coultes de
laves et de briches que traversent des dykes, des
sills de roches de composition et de structure varices.
Malheureusement, M. Lacroix n’a pu consacrer qu'un
mois à une tâche aussi considérable et aussi difficile.
Cependant, il est arrivé à la conclusion que ce qui
caractérise essentiellement la minéralogie de la Réu-
nion,c'est la production dans un même volcan et aux
dépens d'un même magma de types bien caractérisés
de roches subalcalines et de roches alcalines que pen-
dant si longtemps on a été porté à considérer comme
ayant nécessairement une origine indépendante, et
que, plus récemment encore, plusieurs éminents
pétrographes ont considérées comme localisées dans
des régions distinctes du monde suivant des règles
géographiques bien définies.
Remarques sur la forme de la Lune et du
Soleil. — Dans une note récente relative à l'étude
cinématographique de la dernière éclipse solaire,
M. Costa-Lobo a conclu, de certains détails de la
répartition des grains de Baily sur son film, à un
faible aplalissement de la Lune dans le sens perpen-
diculaire à sa trajectoire.
M. Fnen V£ës a recherché par des mesures sur un
film pris par lui-même à Cacabelos (Espagne) s'il ne
pourrait pas obtenir un certain nombre de notions
d'un ordre correspondant, corroborant ou complétant
la conclusion de M. Costa-Lobo. Après de nombreuses
mesures sur ces clichés et un examen expérimental
du problème, en faisant circuler les uns devant les
autres, dans des conditions de dimensions et de posi-
lions comparables à celles de l'éclipse, différentes
N° 1444
figures géométriques (cercle devant cercle, cercle
devant ellipse, ellipse devant cercle, ellipse devant
ellipse), il établit que pour reproduire le phénomène
il est nécessaire que l’une des figures au moins ne
soit pas un cercle, et, par suite, qu'il y a des proba-
bilités pour la forme non circulaire d'au moins un
des astres en présence.
Tremblements de terre et taches solaires.
— On ne voit guère comment les taches solaires pour-
raient influer sur la production des tremblements de
terre, et cependant une telle relation a été énoncée
bien des fois. Généralement, on se contente de dire
que tel sisme important a coincidé avec l'existence
d’une tache remarquable ou a eu lieu en une année
de maximum ou de minimum de taches. A raison
d'une trentaine de sismes plus ou moins destructeurs
par an, on voit ce que vaut une telle constatation.
Seul Oddone s’est donné la peine de faire une re-
cherche statistique raisonnée sur le sujet. Elle roule
sur les plus notables tremblements de terre catalogués
pour 1904 par l'Association internationale de sismo-
logie. L'auteur a bien trouvé une certaine prédomi-
pance d'activité sismique au voisinage du passage des
grandes taches ou des groupes de taches par le méri-
dien central, mais elle est si peu accusée qu'il consi-
dère lui-mème le résultat comme très peu probant.
M. DE MonTessus DE BALLORE a repris le problème sur
d’autres bases en utilisant le catalogue publié par
COSMOS
361
Milne des tremblements de terre destructeurs jusqu'à
l'année 1900.
De 1800 à 1849, le nombre décennal de mégasismes
croit légèrement, tandis que de 1850 à 1900 il reste
sensiblement constant. Pendant l'une et l’autre
période, les nombres annuels subissent des variations
de faible amplitude de part et d'autre de la moyenne
décennale, mais sans loi apparente aucune. Cela suffit
à faire nier toute relation, puisque les taches solaires
obéissent à une loi périodique bien connue de maxima
et de minima régulièrement espacés.
Relations des protubérances avec les filaments et
alignements des couches supérieures de l'atmosphère
solaire. Note de M. H. DEsLANDRes, qui, après avoir rap-
pelé la note récente de M. Ricco surles protubérances
solaires, donne un résumé de ses propres travaux sur
la question et les conclusions qu'il a tirées de ses
observations. — De l'influence de la vitesse d'attaque
de la calcite par les acides sur la forme des figures de
corrosion de ce minéral. Note de M. Pauz GAUBERT. —
Maturation artificielle lente de la datte Deglet-nour.
Note de M. WALTER T. SwixGze. — MM. Foëx et
P. BerrauLT signalent une maladie du maïs de Cochin-
chine due à un champignon d'une espèce qui semble
nouvelle. — Influence de la température sur la nucléase.
Note de M. E.-C. Teoporesco. — Sur un dispositif d'ap-
pareils destiné à la mesure relative de la gravité. Note
de M. ALPHONSE BERGET.
BIBLIOGRAPHIE
Oscillations et vibrations. Etude générale des
mouvements vibratoires, par A. BOUTARIC,
agrégé de l’Université, chargé d’un cours com-
plémentaire de physique à l'Université de Mont-
pellier. Un vol. gr. in-18 jésus de 403 pages avec
439 figures, de l'Encyclopédie scientifique publiée
sous la direction du D' Toulouse. (Cartonné
toile, 5 fr.) O. Doin, éditeur, 8, place de l'Odéon,
Paris. 1912.
La considération des mouvements vibratoires
établit un lien entre des phénomènes a priori tout
différents, phénomènes acoustiques, phénomènes
optiques, phénomènes calorifiques et phénomènes
lumineux. Une étude générale des mouvements
vibratoires peut donc être intéressante et simplifier
l'exposé d'un grand nombre de questions. L'auteur
a tâché de faire cette étude en empruntant, bien
entendu, les ressources de l’analyse mathématique,
et il montre ensuite comment les résultats obtenus
s appliquent aux divers chapitres de la physique :
acoustique, optique, électricité (courants alternatifs
industriels et oscillations électriques à haute fré-
quence). Il note avec raison que la théorie électro-
magnétique de la lumière n’a nullement renversé,
comme on le prétend quelquefois, la théorie ondu-
latoire; Fresnel avait dit : la lumière est due à une
perturbation périodique transversale qui se propage
dans l'éther; Maxwell n'a fait que compléter en
disant : cette perturbation est de nature électroma-
gnétique. En un dernier chapitre, l'auteur précise
quelle est la position actuelle des physiciens vis-
à-vis de l'hypothèse de l’éther.
M. Boutaric n'a point songé à faire une étude
complète de tous les phénomènes périodiques. C’est
un très gros traité qu'il eùt fallu écrire. Et des
lacunes que peut présenter l'ouvrage, quelques-unes
sont certainement volontaires. L’auteur n’a eu
d'autre but que d'exposer, aussi simplement que
possible, les connaissances qui sont nécessaires pour
aborder l’étude des plus importantes questions de
Ja physique.
Notions fondamentales d'analyse qualitative,
par V. Taowas, professeur adjoint à la Faculté
des sciences de Clermont-Ferrand, et D. GAU-
THIER, chef des travaux de chimie à la mème
Faculté. In-8° (23 XC 14) de vur-326 pages avec
91 figures et { planche (10 fr). Gauthier-Villars,
Paris. 1912.
La première partie est l'exposé des méthodes
générales d'analyse chimique: par voie humide,
par voie sèche, par le microscope et le spectro-
362
scope. La seconde partie est tout employée à dif-
férencier les acides et les bases, et elle est la meil-
leure préparation à l'analyse proprement dite: la
marche méthodique à suivre en celle-ci fait l'objet
de la troisième partie.
Par les extraits suivants de la préface, on saisira
le caractère que les auteurs ont voulu donner à leur
œuvre : |
« Les livres d'analyse et en particulier les livres
d'analyse qualitative sont très nombreux. Si l'on
„excepte le traité classique de Fresenius, on peut
dire que tous les autres ont été écrits en vue de la
préparation d’un examen.
» Ce livre, à l'encontre des autres, est écrit pour
ceux qui veulent apprendre et non pour ceux qui
recherchent des diplômes. Il y a là une différence
bien marquée, car, à de très rares exceptions près,
les diplômes s’obtiennent à la suite d’études théo-
riques, et l'étude de l'analyse nécessite une présence
continuelle de plusieurs années au laboratoire. Il
s'adresse aux débutants, et, pour leur rendre la
tâche plus facile, nous n’avons pas hésité à lui
donner tous les développements jugés nécessaires.
» On s'étonnera peut-être ici que, pour des débu-
tants, nous ne nous soyons pas bornés à l'exposé
d’une seule méthode judicieusement choisie. Pour
nous, il n’y a pas de bonne méthode d'analyse au
sens absolu. L'habileté de l’expérimentateur est,
dans tous les cas, un des facteurs les plus importants
pour la réussite. Or, cette habileté est essentielle-
ment variable et s’exerce souvent dans les direc-
tions opposées. I] faut laisser à chacun le mode de
travail qui lui convient le mieux; il faut lui laisser
surtout, dans les cas particuliers, le libre choix de
la route qu'il doit suivre.
» En général, dans les traités d'analyse, on
trouve une marche systématique’pour la recherche
des métaux suivant qu’on a affaire à une substance
ne renfermant qu'un élément métallique ou, au
contraire, renfermant plusieurs éléments. Cette
facon de procéder n'a aucune valeur au point de
vue pratique, puisque, une substance étant donnée
pour l'analyse, on ne sait absolument rien sur le
nombre des éléments qu'elle renferme. Au point
de vue de l’enseignement, cette recherche d’un seul
métal présente de graves inconvénients. En effet,
toutesles parties délicates del’analyse, précipitation,
filtration, lavage, épuisement, etc., se trouvent ici
virtuellement supprimées.
» Le débutant s'habilue à travailler sans se
préoccuper de ces différentes opérations, d'autant
plus facilement que dans ce cas très particulier il
arrive presque toujours à des résultats. Lorsqu'il
aborde l'étude des mélanges, il se trouve tout d'un
coup en présence de difticultés telles que l’analyse
Jui apparait comme une science presque inextri-
cable. C'est ce qui nous a déterminés à rompre
sans arricre-pensée avec celte tradition ancienne. »
COSMOS
26 SEPTEMBRE 191%
Les formes élémentaires de la vie religieuse
(le système totémique en Australie), par Émice
Durkseix, professeur de la Faculté des lettres
de l'Université de Paris. Un vol. in-8 de
648 pages (Bibliothèque de philosophie con-
temporaine) (10 fr). Librairie Félix Alcan, Paris.
Ce volume fait partie des travaux de l’année
sociologique, publiés sous la direction de M. Dur-
kheim lui-même. L'auteur y aborde le problème de
l'origine des religions, en s'atlachant comme à un
moyen efficace de le résoudre à l'étude de reli-
gions très élémentaires, telles que les pratiquent
les tribus australiennes dans le culte totémique.
Les croyances et les rites se partagent l'ouvrage,
au cours duquel M. Durkheim émet une théorie
relative à l'origine des catégories de l'esprit qui,
selon lui, ne seraient ni «a priori ni acquises par
l'expérience individuelle, maistireraient leur genèse
de la collectivité: ainsi, l’idée générale d'espace
serait due à la notion que le clan se fait du terri-
toire qu'il occupe. N'est-ce pas là, au demeurant,
une explication d'ordre empirique qui rentre d'au-
tant mieux dans l'une des deux grandes théories
connues que la notion tribale de l’espace — pour
employer, afin de le signaler, un barbare néolo-
gisme de l'écrivain — est, à coup sûr, individuelle
à son début ?
Ce qui est plus grave, c'est que, pour M. Dur-
kheim, la religion a évolué du plus informe au
moins informe des cultes; elle aurait même com-
mencé par une absence de croyance en quelque
chose de divin. Ceci montre comment des esprits
qui visent à la direction de la pensée contempo-
raine s'en laissent encore imposer par l'hypothèse
de l’évolution, bien réduite à l’état d’hypothèse, et
que d'aucuns s'acharnent à considérer comme la
synthèse de l’histoire réelle. On voit aussi que les
origines juives de M. Durkheim ne l'ont poini
empèché de jeter la Bible par-dessus bord.
La France au travail. En suivant les côtes de
Dunkerque à Saint-Nazaire, par M. A. HÉRUBEL
docteur ès sciences, professeur à l'Institut mari-
time. Un vol. in-8° écu avec 20 photogravures
hors texte (broché, 4 fr). Paris, Pierre Roger
et Cie, 54, rue Jacob.
Volume précis qui continue fort heureusement
une série qui débuta par une étude consacrée à la
région de Lyon et du Sud-Est. C'est une idée ingé-
nieuse que de faire dépendre l'activité d’une région
de la côte qui la borde. En tout cas, elle nous vaut,
de la part de l’auteur qui est un spécialiste des
questions maritimes, un ensemble de monogra-
phies instructives, celles du Havre et de Dunkerque
notamment. M. Hérubel est d'avis que les Français
travaillent beaucoup, qu'ils travaillent bien et
qu'ils savent tenir leur place à côté de jeurs con-
currents. Il excelle à nous le montrer. L'ouvrage
N° 1444
est documenté, net, écrit dans une langue vigou-
reuse et directe. R.J.
Pour réussir au Maroc, par MM. A. TERRIER et
J. LADREIT DE LACHARRIÈRE, secrétaires généraux
du Comité du Maroc. Un vol. in-16 broché de
190 pages avec 10 gravures et une carte (2 fr).
Paris, Pierre Roger et Ci°, 54, rue Jacob.
Le titre est parlant. Il intéresse aujourd’hui de
nombreuses personnes désireuses d'aller au Maroc
« faire des affaires » et, cela va de soi, y gagner
de l'argent. Ce pays, si rapproché du nôtre, est
très mal connu. Les races qui l’habitent et leurs
besoins, sources de notre commerce, sont encore
à « explorer », de même que l’agriculture, et l’in-
dustrie du reste rudimentaire. Le volume contient
de nombreux renseignements pratiques: moyens
et prix de transport, cultes, coùt de la vie, organi-
sation postale et télégraphique, monnaie et me-
sures, enseignement, justice et impôts, nature des
importations et exportations, douanes, fret, mar-
chés, mines, élevage, réglementation de la pro-
priété immobilière, travaux publics, chemins de
fer, hòtels, tourisme, crédit, siluations à trou-
ver, etc. Un chapitre fort suggestif sur le passé du
Maroc sert d'introduction, et la conclusion est
consacrée à son avenir probable sous l’hégémonie
civilisatrice de la France. : R. T.
L’électricité domestique, guide élémentaire et
pratique permettant à tous d'établir, sans diffi-
cultés, les canalisations intérieures alimentées
par une batterie de piles, ainsi que l'installation
des appareils, par GrorGes Mis, électricien. [n-8°
de xvi-18£ pages, avec 151 figures (2,50 fr).
Dunod et Pinat, éditeurs, 47 et 49, quai des
Grands-Augustins, Paris, 1912.
M. Georges Mis est un modeste amateur qui, en
publiant cet utile guide, a voulu éviter à tous les
débutants les difficultés qu'ils ont à surmonter
pour bien comprendre les phénomènes électriques
et en tirer une explication immédiate pour réaliser
certaines installations domestiques.
Se mettre à la portée de toutes les intelligences
et faire œuvre de bonne vulgarisation n’est pas
chose facile, il faut déployer beaucoup de volonté,
de patience et d'études pour arriver à présenter un
travail aussi instructif et aussi agréable à lire que
celui qu’a écrit M. Mis.
« Nous sommes heureux de constater, dit M. Mont-
pellier dans la préface de ce livre, que l’auteur
a su réellement éviter l’écueil que n’ont pas aperçu
nombre de pseudo-vulgarisateurs, qui empruntent
leur science aux livres et revues techniques, à l’aide
de coupures plus ou moins heureuses; en effet,
l’écueil que nous signalons est beaucoup plus fré-
quent que l'on ne pourrait le supposer, et beau-
coup d'ouvrages, qui ont cependant des lecteurs,
COSMOS
363
ne donnent à ces derniers que des idées fausses et
ne leur permettent pas de réaliser les installations
qu'ils ont voulu entreprendre.
» L'expérience est le meilleur des maitres, et
l'amateur devra ètre reconnaissant à M. Mis de
lui avoir permis de l'initier sans efforts à l'intelli-
gence des multiples applications domestiques de
l'énergie électrique. Avec les premières notions
acquises par la lecture de ce guide, l'amateur
pourra ensuite aborder utilement des études plus
complexes. »
Le cinématographe, son passé, son avenir,
par J. Rosex. Un vol. in-8° de 150 pages (2,50 fr).
Librairie Monroty, 30, rue Jacob, Paris.
Trop longtemps, le cinématographe a été consi-
déré comme une invention destinée à l’amusement
des foules. C’est aussi un excellent moyen d'étude
pour les enfants, et un merveilleux instrument de
travail dans certaines branches des sciences.
A ce titre, il est intéressant de connaitre son
histoire. L'auteur retrace toutes les recherches
faites depuis l'apparition de la lanterne magique,
jusqu’à la découverte des frères Lumière qui, les
premiers, inventèrent la bande perforée. Puis il
décrit le cinématographe actuel; indique comment
sont construits les appareils, quelle lumière il faut
employer, comment sont prises les vues „etc. Il ter-
mine en montrant les services futurs qu'on pourra
demander à ce merveilleux appareil, et s'élève
avec juste raison contre les spectacles immoraux
qui. sont trop souvent donnés, en particulier dans
notre pays.
Le développement-fixage combinés, par
V. CRÉMIER. Une brochure de la Bibliothèque de
Photo-lievue (0,60 fr). Paris, Charles Mendel,
éditeur. |
La mode est à la simplification, et on parle beau-
coup depuis quelque temps d'opérer à la fois le
développement et le fixage des négatifs photogra-
phiques. N’avail-on pas déjà le virage-fixage com-
binés pour les positifs sur papier ? etcette question,
déjà ancienne, tend à prendre aujourd'hui de
l'importance, bien qu'il ne s’agisse pas de rem-
placer, dans tous les cas, les méthodes habituelles
par de nouvelles.
L'auteur, ayant fait des essais qui lui ont paru
intéressants, a eu l'idée de classer et de véritier les
formules qu'il a trouvées éparses dans dit'érentes
publications, et les a fait suivre de celles qu'ii a
composées lui-mème ou qui lui ont paru tout par-
ticulièrement recommandables.
Les amateurs trouveront donc dans cet an
toutes les données de la question, et ils pourront,
si bon leur semble, se livrer à des essais compara-
tifs au moyen des formules contenues dans cet
intéressant travail.
36%
COSMOS
26 SEPTEMBRE 1912
FORMULAIRE
Pour faire tenir les clous dans le plâtre. —
Voici un moyen bien simple pour faire tenir dans
le plâtre les clous qui ont tendance à sortir en
effritant le plâtre du trou où ils sont enfoncés. On
prend un peu de colle forte, de ces colles de
poisson qu'on vend maintenant en tubes, et au
moyen d'un bout de chiffon on en enduit bien le
clou qu'on a retiré de son trou. On le remet alors
en place, et si un peu de colle s'extravase au dehors,
on l'enlève au moyen d’un petit linge mouillé. La
colle sèche rapidement, son humidité étant absorbée
par le plâtre, et le clou fait absolument corps avec
celui-ci. (Inventions illustrées.)
Suppression des incrustations des chau-
dières à vapeur par le passage de l’eau sur
des plaques d'aluminium. — Le Cosmos n° 1416
du 44 mars dernier a déjà donné une note à ce
sujet. Voici quelques indications complémentaires,
que nous trouvons dans la Revue des matériaux
de construction et de travaux publics :
Ce nouveau traitement consiste simplement à
permettre à l’eau destinée à l'alimentation des
générateurs de s'écouler sur une plaque d’alumi-
nium dont la surface est plissée, gaufrée ou autre-
ment ondulte et maintenue dans un état de pro-
PETITE
Adresses :
Le toueur électrique du canal de Saint-Quentin a
été construit par la Société alsacienne de constructions
mécaniques, à Belfort.
M. A. T., de M. F. — L’aleuromètre de Boland,
appareil pour mesurer les qualités de la farine au
point de vue de la panification, est construit par les
maisons Adnet, 26, rue Vauquelin; Poulenc, 92, rue
Vicille-du-Temple; Fontaine, 16-20, rue Monsieur-le-
Prince, tuns à Paris. — Il y a tout avantage à acheter
lappareileomplet, avee son bain-marie.
V. W.A. R.— Il v a nombre de constructeurs de
ces appareils automatiques à jetons: par exemple,
la Compagnie générale des appareils automatiques,
57, boulevard de Strasbourg, Paris.
M. G. de la R., à la L. — Nous croyons que vous
trouverez ces joncs à la Société francaise des produits
du rotin, 14, rue des Pyramides, à Paris. — La maison
Sécretan existe toujours; mais elle a changé d'adresse;
elleest maintenant, 11,rue dela Chaussée d'Antin, Paris.
M. P. C., à V. — Il s'agit bien des battements
envoyés à 10 heures du matin; les chiffres indiqués
sont donnés en temps astronomique, qui est compté
de midi ä midi.
M. A. D., à F. — Nous avons déjà répondu à votre
question dans le numéro 1441 du + septembre dernier.
Venillez vous y reporter.
T. S. F. — Plusieurs correspondants nous cnt
demandé la signification des deux groupes de six
chiffres transmis par la tour Eiffel entre les signaux
preté parfait au moyen de brossages qui; enlèvent
tout dépòt.
Voici ce qui se passe lors de l'écoulement de
l’eau sur la surface d'aluminium : un courant élec-
trique est produit, l’eau constituant le pôle négatif
et l'aluminium le pôle positif; ce courant produit
l'ionisation des sels formant les incrustations, il
détruit leur forme cristalline et les rend amorphes.
En mème temps, par suite de la friction de l’eau
et l’action électrique, l’aluminium est enlevé de la
surface sous forme colloidale qui se modifie après
un certain temps dans leau.
Des recherches faites à l’Université de Liverpool
montrent que l’hydroxyde d'aluminium n'est pas
présent à un haut degré dans l'eau traitée par
l'appareil, mais que l'aluminium se trouvait dans
l'eau sous la forme colloïidale mélangé avec
l'hydroxyde et restait en cet état pendant plusieurs
jours.
L'appareil doit être exposé à lair et à la lumière
et préférablement à l'éclairage Nord ou Sud pour
obtenir les meilleurs résultats; si l'appareil est
entièrement abrité de l'air et de la lumière, il
devient sans effet.
L'eau traitée par ce procédé doit ètre utilisée
dans les sept jours.
CORRESPONDANCE
horaires et le télégramme météorologique. Un de nos
lecteurs nous en donne l'explication:
Avant l'envoi de l’heure, pendant environ trois mi-
nutes, la tour Eiffel envoie, pour les astronomes, les
battements de la seconde diminuée de 1 cinquantitme,
c'est-à-dire des battements espacés de 98 centièmes
de seconde. Les chiffres en question indiquent l'heure
exacte à laquelle les battements ont commencé et
celle où ils ont fini. Par exemple, le 21 septembre, la
toura transmis: 34 5% 26. 37 52 75. Cela veut dire que
les battements ont été envoyés de 10*34"57°,26 jusqu'à
10°37*52°,75. Les astronomes peuvent ainsi comparer
l'heure envoyée avec celle de leur pendule astrono-
mique avec une approximation de 0,01 seconde.
M. A. L., à P. — Tous nos remerciements. Vous
voyez que vos indications ont été les bienvenues. —
Nous répondrons bien volontiers dans la petite corres-
pondance aux questions que vous voudrez nous poser.
M. A. P., à R. — Réception des signaux radiotélé-
graphiques transmis par la tour Eifel (1,75 fr).
Librairie Gauthier-Villars, Paris, et Notions générales
sur la télégraphie sans fil par R. DE VaLsreuze (12 fr).
Librairie de la Lumière électrique, 142, rue de Rennes.
— Nous avons fait connaître un grand nombre de ces
indicatifs d'appel. Veuillez vous reporter au Cosmos
n° {334 du 18 juillet 1912 (Petite correspondance).
M. R. D.,à C. — Le Sicoid, celluloïd ininflammable,
326, rue Saint-Martin (impasse de la Planchette), Paris.
Imprimerie P, Fsnon-Vaau, 3 ot 5, rue Bayard, Paris, VIII°,
Le gérant : B. PETITRERRY.
No 1145 — 3 OCTOBRE 19192
COSMOS
SOMMAIRE
Tour du monde. — La comète (1912 a) (Gale). L'éclipse de Soleil du 10 octobre 1912. Une étoile double
spectroscopique à très longue période. Les campagnols. Le domaine forestier colonial de la France.
Dénombrement des espèces de vertébrés. Le gaspillage des combustibes employés à la production de
l'énergie. Le pompage de la houille. L'industrie du papier en France. La coloration du caoutchouc. Cause
d’éclatements des canons utilisant la poudre sans fumée. Le force des rails. Les bateaux-phares du Havre.
Le chasse à la baleine sur les côtes de l'Afrique du Sud. Emize Periruenry, p. 307.
La télégraphie moderne, Mancuano, p. 371. — Le port de Colombo (île de Ceylan), C* JEANNEL, p. 373.
— Indicateurs de vitesse et compteurs kilométriques, BerTuier, p. 373. — Cigarettes turques-
d’Aden, BeLLer, p. 376. — Une église ambulante, Graoenwirz, p. 377. — Notes pratiques de chimie,
Garçon, p. 880, — Le chronographe moderne, Revencuow, p. 383. — Les jouets au concours Lépine,
FourNi£r, p. 387. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 389. — Bibliographie, p. 390.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
La Comète (1912 a) (Gale). — La première
comète de l’année a encore été observée à l’Obser-
vatoire du Cap, par Woodgate, les 13, 14 et 15 sep-
tembre, et à l'Observatoire de La Plata, par Hussey,
le 47. M. Marlin Ebell, de Kiel, a tiré des observa-
tions effectuées à Melbourne le 8, à Santiago le 11
et au Cap le 15, les éléments paraboliques provi-
soires suivants :
T = 1912, oct. 4,70878 T. M. Berlin.
v = 2417,65
Q — 293 18,27 Ÿ 1912,0
i 82 6,58
q = 0,7269 — 108 672 000 km.
Avec ces éléments, M. Ebell a calculé l’éphémé-
ride suivante :
eSEE E drame
| DATE 1912 DISTANCE
ASCENSION
DROITE DECLINAISON
|
f invit de Berlin Aa Soleil {A la Terre
Sept. 15 | 14"16°4
19 | 44 36 31
23 | 14 53 16
27 | 45 7 19
1 | 15 18 59
15 24 2
15 26 22
15 28 36
15 30 43
15 32 45
15 34 41
15 36
15 38 17
45 39 58
15 H 34
45483 6
0,822
0,788
0,761
0,741
0,730
0,937
0,951
0,972
1,004
1,035
1,072
|
|
|
|
|
HH++H+HHITITETI
T. LXVII. N° 41445.
Les distances au Soleil et à la Terre sont données
comme d'habitude en unités astronomiques (rayon
moyen de l'orbite terrestre — 149 501 000 kilo-
mètres).
On voit que, comme nous l'avons prévu, la
cemète remonte rapidement vers le Nord et qu’elle
traverse l'équateur céleste le 7 octobre, trois jours
après son passage au périhélie. Elle a parcouru
les constellations de l'Hydre, du Solitaire, de la
Balance, qu’elle quittera le 6 octobre pour passer
dans celle du Serpent. Même à son périhélie, elle
reste à une distance angulaire assez grande du
Soleil (plus de 35°), ce qui facilitera son observation
à l’aide d'une jumelle ou d’une petite lunette. Il
faudra la rechercher le soir, peu après le coucher
du Soleil.
L'éphéméride montre que, depuis sa découverte,
l'astre s'éloigne graduellement de la Terre, mais
son rapprochement du Soleil contre-balance cet
effet, et son éclat, voisin de la 6° grandeur, dimi-
nuera peu avant la mi-octobre.
L’éclipse de Soleil du 10 octobre 4912. —
Une éclipse de Soleil, intéressante par sa durée
et par le fait qu'elle est observable en de bonnes
conditions dans des lieux facilement accessibles,
se produira le 40 octobre prochain. La ligne de
totalité prend naissance dans l'océan Pacifique,
traverse l’Équateur, la Colombie et tout le Brésil,
el se termine dans l’Atlantique Sud. Sous sa forme
partielle, le phénomène sera observable dans toute
l'Amérique centrale et méridionale, dans lesg
Grandes et Petites Antilles, à Bahama, en Floride,
dans l'Afrique du Sud et la pointe Sud de Mada-
gascar et dans les régions polaires antarctiques.
La plus grande durée de l’éclipse totale, voisine de
deux minutes, sera atteinte sur la côte brésilienne,
entre Rio-de-Janeiro et Santos.
306
Comme ces deux villes importantes sont à
quinze jours de l'Europe et qu’elles sont reliées
par une bonne ligne de chemin de fer au long de
laquelle il sera facile de s'établir, plusieurs expé-
ditions, française, anglaise, américaine, se ren-
dront au Brésil pour observer le phénomène.
L’éclipse générale commencera à 10"57" et finira
à 41615m; léclipse centrale commencera à 1159
et finira à 1343m, Un riche amateur anglais, le
D" J.-H. Worthington, accompagné de M. Rossi, de
l'Université de Manchester, et du D" Willis, de
Rio-de-Janeiro, s’établira assez loin de la côte, dans
une station voisine de la petite ville d'Uberaba, à
800 mètres d'altitude. La totalité cependant n'y
durera que 1"165, mais les conditions météoro-
dogiques y seront probablement plus favorables.
L'expédition de Greenwich comprendra MM. Ed-
dington et Davidson.
On a prétendu que l’Observatoire de Quito
{Equateur) se trouverait dans la zone totale :
M. Pio Emanuelli montre dans la Rivista di Astro-
nomia que cette affirmation est erronée. Quito est
tout à fait en dehors et au sud de la zone.
Une étoile double spectroscopique à très
longue période. — On sait que l’application du
spectroscope aux observations stellaires a révélé
qu'un très grand nombre d'étoiles, qui paraissent
simples dans les plus puissants télescopes, se com-
posent en réalité de deux corps très rapprochés
qui tournent autour de leur centre de gravité
commun en des laps de temps qui se comptent
généralement en jours. Ces étoiles ont reçu le nom
de doubles spectroscopiques, pour les distinguer
des doubles visuelles dont les périodes sont en
général incomparablement plus longues.
. Un récent mémoire d'un astronome de l'Observa-
toire d'Ottawa, M. W. E. Harper, publié dans le
Journal de la Société Royale astronomique du
Canada, montre cependant une fois de plus que
cette division est tout arbitraire et que les étoiles
doubles présentent toutes les périodes qu’on peut
imaginer sans qu'aucune solution de continuité
permette de les diviser en catégories nettement
différenciées; bien mieux, que les deux groupes,
spectroscopiques et visuels, se compénètrent mu-
4ucllement.
M. Harper a déterminé, en effet, les éléments
de l'étoile spectroscopique à plus longue période
qu'on connaisse actuellement, et qui n’est autre
que y des Gémeaux. La vitesse radicale de cet
astre fut déjà déterminée par Vogel à Potsdam,
en 1888, et même très bien déterminée, puisque
ces mesures, quoique remontant à un quart de
siècle, s'accordent avec les résultats modernes à
1.5 km par seconde près. En 1904, on reconnut à
l'Observatoire de Lick que la vitesse radiale de
l’éloile était variable et que lastre devait ètre
COSMOS
3 OCTOBRE 191412
double; peu après, M. Slipher, de l'Observatoire
Lowell, se basant sur ses observations et sur celles
de ses prédécesseurs, suggéra une période de trois
ans et demi. M. Harper a repris à son tour le pro-
blème, après avoir, par ses observations person-
.nelles, porté de 14 à 30 le nombre de bonnes déter-
minations de vitesse radiale de étoile, grâce à
46 spectrogrammes utilisables obtenus à Ottawa
en 1907, 1908, 1909, 1911 et 1912, sur lesquels on
a mesuré un grand nombre de lignes appartenant
surtout au fer, au titane, au manganèse, au chrome
et à l'hydrogène (Hy).
C'est en discutant l’ensemble de toutes ces obser-
vations que l’astronome américain est arrivé à une
détermination fort satisfaisante de la courbe de
vitesse radiale et des éléments orbitaux de y des
Gémeaux. Il a trouvé notamment que la vitesse
radiale de l'étoile varie entre — 4,4 et — 16,7 km :
sec, et que l’excentricité de l'orbite atteint 0,298.
Mais le résultat le plus remarquable de ce calcul,
c'est la valeur élevée de la période de l'astre, qui
est de 2175 jours (avec une approximation de
23 jours) soit près de six ans.
Cette période est la plus longue que l’on ait
déterminée jusqu'à présent avec quelque certi-
tude pour une étoile double spectroscopique.
M. C. F. Bottlinger, de l'Observatoire de Munich,
a montré à la fin de 1910 que l'étoile a d'Orion
(Bételgeuse) possédait une période voisine de six
années, mais cette détermination est encore très
peu sûre, et cet astre ne figure pas même dans le
deuxième catalogue de doubles spectroscopiques
dressé par Campbell. D'autre part, « Orion appar-
tient au type solaire, alors que y Gémeaux est du
type de Sirius, et toutes les autres doubles spec-
troscopiques de celte catégorie effectuent leur révo-
lution en des périodes qui varient entre quelques
heures et une centaine de jours au plus. Il est
curieux de constater qu’il existe des étoiles doubles
visuelles à périodes voisines ou plus courtes que
y Gémeaux. Telles sont par exemple :
x Pégase. 41,37 ans.
143 Baleine. 1,42 ans.
è Petit cheval. 5,70 ans.
y Gémeaux constitue donc la transition entre
les étoiles doubles visuelles à périodes les plus
courtes et les doubles spectroscopiques à périodes
les plus longues. Si Pon arrivait, par emploi de
spectroscopes à forte dispersion, à observer la
vitesse relative des deux composantes de cette
remarquable étoile, et si un des télescopes les
. plus puissants pouvait « résoudre » l’astre visuel-
lement, la combinaison de ces mesures fournirait
une détermination élégante de la parallaxe de
y Gémeaux, c'est-à-dire de sa distance, sur laquelle
on ne possède encore aucune espèce de rensei-
gnement.
N° 1445
AGRICULTURE
Les campagnols se sont montrés, cette année,
en quantité alarmante pour les cultures, surtout
dans les régions Est et Nord-Est de la France. Le
préfet du Doubs a pris un arrêté rendant obliga-
toire la destruction de ces rongeurs dans toutes
les communes où leur présence aura été constatée.
On peut avoir recours, à cet effet, au virus Danysz,
préparé par l'Institut Pasteur de Paris; mais pour
que le traitement soit efficace, il doit être fait
d’une façon générale sur toutes les parties envahies
par les mulots, car s'il n'est que partiel, les ron-
geurs restés sur les parcelles non traitées envahiront
de nouveau celles où le traitement a été exécuté.
M. Pams, ministre de l'Agriculture, a demandé
au ministre des Finances un crédit de près de
300 000 francs, destinés à venir en aide aux culti-
vateurs des départements de l'Est, Haute-Savoie,
Doubs, Jura, Vosges, Meuse, Meurthe-et-Moselle,
Haute-Marne, Côte-d'Or, régions où les souris des
champs s'attaquent à toutes les cultures, et parti-
culièrement aux luzernes. Le traitement au virus
Danysz revient à 6,2 fr par hectare. Les cultiva-
teurs des départements infestés ont demandé que le
virus soit fourni gratuitement, les frais d’applica-
tion, qui sont de 2 francs par hectare, devant
rester à leur charge.
SYLVICULTURE
Le domaine forestier colonial de la France
(Bull. Soc. Géogr. de l'Est). — Nul n'ignore que la
France se déboise très rapidement, et que, dans un
avenir relativement prochain, elle devra importer
la majeure partie du matériel ligneux qui lui est
nécessaire — elle achète déjà actuellement pour
475 millions de bois de construction et 40 millions
de bois exotiques par an; — mais ce que l’on sait
peut-être moins, c'est qu’elle possède dans son
domaine colonial d'importantes réserves auxquelles
elle n’a pas encore fait appel. La surface forestière
de la France est actuellement de 7 millions d'hec-
tares environ; or, pour les quatre colonies les plus
boisées, le domaine forestier est huit fois et demie
plus étendu, à savoir: l’Indo-Chine, 25 millions
d'hectares de forêts; Madagascar, 12 millions d’hec-
tares ; Côte d'Ivoire, 12 millions, et Guyane,
10 millions.
L'ensemble du domaine forestier colonial est
encore peu exploité en raison de la difficulté ou du
manque complet des communications; mais déjà
le mouvement d'affaires sur les bois en Indo-Chine
représente environ 45 millions de francs pour
4 million de mètres cubes exploités et presque
entièrement consommés sur place. Les exportations
s'élèvent à environ 800 000 francs, toutes dirigées
d’ailleurs vers les entrepôts de Hong-Kong et de
COSMOS
307
Singapore. Mais à la Côte d'Ivoire, le commerce d’ex-
portation s'est élevé en 1910 à près de 44 millions
de francs dont 470 294 francs seulement sur la
France. De même, les exportations du Gabon vont
en majeure partie à Hambourg, qui a recu en 4910
plus de 40 000 tonnes de bois de cette provenance,
tandis que la France en recevait seulement
11 096 tonnes.
C'est en Indo-Chine que l'exploitation forestière
est la plus rationnelle, grâce à la vigilance du ser-
vice créé il y a quelques années et qui a su réfréner
la rage destructrice des indigènes. Le service
forestier possède d’ailleurs un champ d'essai ou
arboretum pour l'étude du repeuplement des
meilleures essences. Si le jonc et le bambou sont
les espèces les plus communes et qui prêtent aux
utilisations les plus diverses, l’Indo-Chine est riche
également en essences de prix et bois de fer. Mal-
heureusement, le manque de routes, surtout au
Tonkin, arrète encore l’exploitation.
A Madagascar, où l'exploitation est encore très
réduite, les forêts sont peuplées de 400 espèces
diverses parmi lesquelles on compte l’ébène et le
bois de rose.
Nous avons vu que la Côte d'Ivoire vient au pre-
mier rang pour l’exportation des bois, c'est que la
forêt couvre les deux tiers de la colonie et c’est
dans ce pays que l’on trouve le plus bel acajou.
Enfin, la Guyane est la plus boisée des colonies
françaises, puisque sur 12 millions d'hectares, plus
de 140 millions sont couverts de forûts riches des
essences les plus recherchées, mais le défaut de
communications n'en permet pas encore l'exploi-
tation.
ZOOLOGIE
Dénombrement des espèces de vertébrés. —
M. H. W. Henshaw adresse à Science (6 sept.)
le relevé approximatif des espèces actuellement
vivantes appartenant à l’'embranchement des ver
tébrés.
Nombre d'e pèces.
I. Mammifères 7o00
IHI. Oiseaux 20 00V
Crocodiles o
Tortues l cp
III. Reptiles Éérarda à 300
Serpents 2 #00
| { Grenouilles 2 600
IV. Batraciens | Salamandres 200
V. Poissons 12 000
TOTAL : #7 200
HOUILLE
Le gaspillage des combustibles employés à
Ja production de l'énergie. — M. Ch.-L. Parsons,
le directeur du laboratoire de Chimie minéralo-
308
gique aux Ftats-Unis, vient de publier dans le Bul-
letin du Bureau minéraloyique une étude sur les
pertes invraisemblables de combustible dans
l'industrie moderne. Il estime qu'environ 90 pour
100 de l'énergie du charbon extrait des mines est
complètement perdue, tandis que, grâce aux sys-
tèmes d'exploitation, 250 millions de tonnes sont
abandonnées dans les profondeurs, sans laisser
aucun espoir de les récupérer dans l’avenir. D’après
ses études, les anciens modes de fabrication du
coke encore en usage représentent une perte de
200 millions de francs en sous-produits non utilisés.
Comme corollaire à cette appréciation, on peut
ajouter que les études du Bureau géologique démon-
trent que dans Îles mines excessivement riches
du comté de Musselschell, dans l'Etat de Montana,
on güche environ 60 pour 100 du charbon extrait
de la mine; le Bureau demande que les exploitants
soient astreints à une exploitation mieux raisonnée
et plus économique.
Le pompage de la houille. — Les dangers du
travail souterrain dans les mines de houille sont
connus de tout le monde; la récente catastrophe
des mines de la Clarence et bien d’autres arrivées
depuis quelques mois en ont apporté en ces der-
niers temps de nouvelles et cruelles preuves.
On s'emploie de tous côtés pour diminuer ces
dangers et pour parer aux accidents qui résultent
du grisou, de l'inflammation des poussiers, des
éboulements, des envahissements les galeries par
l'eau et par les gaz délétères.
Il semble que l’on soit loin d'‘tre arrivé à des
résullats satisfaisants, et cette situation donne un
puissant intérêt à uneidée originale de MM. Hoadley
et H. Knight, qui a pour objet de réduire au mi-
nimum la main-d'œuvre du fond et de diminuer
dans une grande mesure le nombre des travailleurs
exposés aux terribles aléas de ces profondeurs.
Ces ingénieurs constatent dabord qu'une grande
partie de la houille extraite des mines est destinée
à être transformée en coke dans des fours établis
à l'orée des puits. Or, cette houille na nul besoin
d'ètre en gros morceaux; on y emploie les menus,
les poussiers résidus du triage, et ces produits sont
mème plus avantageux pour cet emploi que les
gros morceaux, si on utilise pour sa combustion
une soulllerie suflisante; ils ont donc pensé, qu’au
moins pour le charbon destiné à ètre transformé
en coke, on pourrait employer un autre mode
d'exploitation.
lis proposent de réduire la houille en grains
menus aun front d'exploitation; une machine spé-
ciale se charge de cette besogne; elle est actionnce,
soit par l'air comprimé, soit par l'électricité, soit
plutot par l'eau sous pression qui, en tous cas, est
projetée en abondance sur le front de taille, sup-
primant les poussières et refroilissant les outils
qui attaquent le minerai; ia manœuvre des organes
COSMOS
3 OCTOBRE 4912
moteurs permettrait non seulement de faire agir
la machine, mais de la déplacer dans tous les sens,
en avant, à droite et à gauche. Un ou deux hommes
suffisent à la conduite de l'engin, soit pour le faire
progresser, soit pour le faire évoluer. La houille
ainsi broyée tombe dans l'eau fournieenabondance,
et ce mélange de liquide et de charbon est aspiré
par des pompes analogues à celles des dragues
suceuses. Le tout est ramené à la surface, dirigé
dans des bassins de décantage où le charbon se
dépose; l’eau retourne à la mine, et le charbon
qui reste dans les bacs est acheminé vers les fours
à coke.
Non seulement le système éviterait la présence
de nombreuses équipes dans le fond, soit pour
l'abatage, soit pour le roulement des wagonnets
vers les puits d'extraction, mais, d'après les auteurs,
il serait beaucoup plus économique pour ramener
le charbon à la surface que les méthodes actuelles
d'extraction.
Nous ne savons si le système a fait ses preuves,
mais l'idée est au moins curieuse et, ajoutons, des
plus ingénieuses.
INDUSTRIE
L'industrie du papier en France (Courrier
du Livre, 46 septembre, et Moniteur de la pape-
terie française). — La fabrication du papier est
très ancienne en France; elle ne s'est pas déve-
Joppée aussi promptement qu'en Allemagne et en
Angleterre, et ce n’est qu'en ces dernières années
qu'elle a réalisé des progrès marqués. En 1886, la
production annuelle n’était que de 180 497 tonnes;
en 4890, elle atteignait 365 000 tonnes ; en 190%,
450 000 tonnes; en 1910, 867 000 tonnes.
Le nombre des machines à papier, qui était de
3588 en 1900, ne dépassait pas, en 1910, 619; on en
doit conclure que beaucoup de ces machines ont
été perfectionnées ou remplacées par des machines
modernes.
La France compte 70 départements possédant
des fabriques de papier, et ces usines sont répandues
sur tout le territoire. Les centres principaux de
fabrication sont les suivants :
Machines. Produstinn journalière
en tonnes.
Seine-ut Oise, ........ Das ose à Ses 374
Isere......... are Dhs es 314
I A E IOa ea aa 260
Pas-de-Calais... ......, Das stress 203
NOSOUS aaeoa ana BAe S . 416!
Haute-Vienne... ....... SP S . LS
Nord sn ss bison 125
Dons sursis; ISsrnceinsuaese 120
Charente ......,,..... 20 Meet 60
Haute-Garonne ....... 1e et es 55
Le département de Seine-et-Oise tient la tète, de
par sa proximité de Paris, qui est le plus fort
N° 1445
consommateur en France de papier de journal et
d'impression.
Au cours de ces dix dernières années, la fabri-
cation y a pris un essor considérable, et le dépar-
tement de l'Isère, qui pendant longtemps était
resté, grâce à ses ressources hydrauliques, le centre
principal de la production, a été relégué au second
rang.
On fabrique en France quotidiennement :
1276 tonnes de papier d'impression et d'écriture
avec 218 machines.
894 tonnes de papier d'emballage avec 227 machines.
447 lonnes de carton avec 112 machines.
212 tonnes de papier de paille avec 62 machines.
Au total : 2 890 tonnes avec 619 machines.
L'importation du papier et du carton est en
constante augmentation. Voici les chiffres des der-
nières années :
TOUS ee an aa 143 795 000 francs.
OS ete 23 535 000 —
OMR remous 28 81% 000 —
DIS ur ed hunnnn 36 062 000 —
TIl arme En due 38 035 000 —
La coloration du caoutchouc. — M. Seidl,
qui vient d'étudier dans le Gummi-Kalender de
celte année cette intéressante question peu con-
nue, divise les procédés de coloration du caout-
chouc en trois genres: teinture, avec des solutions
de couleurs synthétiques organiques; vernissage,
avec des solutions teintées de caoutchouc; enro-
bage, intimé dans la masse de pigments minéraux.
La teinture se fait à froid avec des sels d'acides
gras et de bases chromogènes, en solutions benzé-
niques : les objets ne tachent pas ainsi quand ils
sont mouillés, ce qui se produirait si on employait
des colorants solubles dans l’eau. On ne peut
teindre que le caoutchouc vulcanisé à froid (dans
une solution de chlorure de soufre), car les matières
colorantes dérivées du goudron supportent mal la
haute température de la vulcanisation par le
soufre.
Pour le vernissage, on fait usage de solulions
caoutchoutées additionnées de couleurs laquées.
Ces couleurs sont obtenues en précipitant des solu-
tions de sels minéraux teintées par des dérivés de
l'aniline : le précipité, d'ordinaire blanc, entraine
le pigment. Le vernissage du caoutchouc donne
des teintes vives peu solides, employées surtout
pour les jouets.
L'enrobage de poudres colorées se fait pour les
tubes de caoutchouc, les enveloppes rouges de
pneus, etc. C’est au moment de la confection des
« mélanges » contenant, outre la gomme épurée,
des « faclices », du soufre, des « charges » diverses
telles que magnésie, talc, etc., qu’on ajoute les pig-
ments. Le rouge est obtenu avec du cinabre (sul-
fure de mercure); les bruns, avec des ocres; les
gris, avec du noir de fumée; les blancs, avec de
COSMOS
369
l'oxyde de zinc et du lithopone. Ön ne peut em-
ployer n'importe quel colorant, parce que nom-
breux sont les produits qui facilitent ou empêchent
la vulcanisation. On obtient des teintes peu vives,
mais très solides. H. R,
Cause d’éclatements des canons utilisant la
poudre sans fumée. — L'Engineering, du 27 jan-
vier, recherche les raisons pour lesquelles peu de
canons, employant de la poudre sans fumée, ont
éclaté en Europe, tandis qu'en Amérique, dans les
dix dernières années, quinze canons ont éclaté par
l'emploi de poudre sans fumée et trois par l'emploi
de la poudre prismatique brune.
Ce fait est attribué par de nombreux ofliciers
américains à la mauvaise qualité de l’acier ou au
manque d'épaisseur de l’âme des canons; cette
dernière raison semble ètre contredite par l'écla-
tement d'un mortier de forteresse. D'autres voient
la raison dans la forme des grains de poudre: la
poudre sans fumée en grains perforés se brise en
écailles et se transforme en poudre à grains fins,
qui devient brisante et produit instantanément de
très hautes pressions.
Sir Andrew et d'autres officiers anglais sont d'ac-
cord pour dire que la poudre sans fumée en grains
perforés est une poudre excellente, mais qui, sans
raison apparente, peut donner lieu à des pressions
excessivement élevées, pouvant dépasser celles pour
lesquelles le canon a été établi. (Génie civil.)
La force des rails. — Les Américains des
États-Unis, qui cependant ne passent pas pour
timides, s’émeuvent d'un certain nombre d'acci-
dents de chemin de fer dus à la rupture des rails;
la Commission des travaux publics estime que ces
ruptures sont dues à des vitesses exagérées pour
lesquelles les voies n'ont pas été construites; on ne
voit que deux remèdes au mal : ou renoncer à ces
vitesses excessives, ou refaire les voies avec des
matériaux plus résistants. On arrivera certaine-
ment à cette seconde solution, si onéreuse qu’elle
soit, car on ne renoncera pas volontiers aux trains
rapides. Mais une telle transformation des voies
demandera du temps, et on se demande si, en
attendant, on aura le courage d’avoir recours à la
diminution de vitesse conseillée.
MARINE
Les bateaux-phares du Havre. — On vient de
lancer au Havre un second bateau-phare; le pre-
mier entrera en service à la fin de 1912. Ces
bateaux sont destinés à indiquer l'atterrissage sur
Le Havre et la baie de Seine. De plus en plus, Îles
navigateurs demandent que les signaux soient
établis, non sur les obstacles mêmes, mais en
avant de ces obstacles, et que les phares soient
remplacés dans certains cas par des bateaux-phares,
370
de sorte qu'en se dirigeant sur eux les navires soient
assurés d'éviter les dangers.
Le phare, éclairé par une lampe électrique for-
mée de douze bâtonnets Nernst disposés de façon
à illuminer tout le tour d'horizon, est muni d'une
lampe de secours à l’acétylène. L’optique est pen-
dulaire, montée, comme dans tous les phares
modernes, sur bain de mercure et, de plus, sus-
pendue à la Cardan. Grâce à ces dispositifs, on
espère que l’oscillation absolue du feu par rapport
à l’horizon ne dépassera pas une amplitude de 4 à
5 degrés.
La chasse à la baleine sur les côtes de
l'Afrique du Sud. — Uu établissement de chasse
à la baleine est installé sur la côte du Natal (la
Géographie, 15 fév.). En 1909, les deux navires
attachés à cette station ont capturé 155 cétacés
dont 449 mégaptères. (En 1908, 106 cétacés, dont
404 mégaptères.)
Le produit total de l'industrie baleinière au Natal,
en 1909, a été de 1 070 tonnes d'huile, 42 de fanons.
548 de guano, 148 d'os. L'huile de baleine trouve
un emploi dans la fabrication de la glycérine en
Afrique australe.
ÉMILE PETITHENRY
C'est avec une vive douleur que nous avons à
annoncer la mort de notre très sympathique
gérant, Émile-Yves Petithenry, appelé à l’autre vie
le 29 septembre, en la fête de saint Michel, à
l’âge de quarante-sept ans.
COSMOS
3 OCTOBRE 19192
Gérant du Cosmos depuis 1908, il a encore droit
à nos regrets à hien d'autres titres : on le comptait
parmi les vétérans de cette Maison de la Bonne
Presse, à laquelle il s’est attaché dès ses débuts,
à une époque où il était encore enfant; il ne l’a
plus jamais quittée. Il a subi avec nous, et plus
que nous peut-être, à raison des responsabilités
qui lui incombaient, toutes les angoisses des persé-
cutions, et ajoutons des pillages imaginés en cette
époque sans scrupule. Il aurait pu fuir ces ennuis,
il a voulu rester fidèle à l'œuvre qu’il avait vue
naitre et au développement de laquelle il a gran-
dement contribué.
A ces qualités de persévérance et de volonté, notre
ami regretté joignait les plus heureux dons de
bienveillance, de courtoisie, d’amabilité; il n'avait
que des amis dans cette grande maison et parmi
tous ceux qui la fréquentent.
Longtemps président du cercle du Gros-Caillou,
il avait su lui donner un développement et une vie
intense. Les dons de la parole qu'il possédait à un
haut degré lui ont permis de concourir utilement
à une foule d'œuvres.
Il y a un an, S. S. Pie X voulut récompenser
ce bon serviteur, et il lui accorda la décoration
de Saint-Grégoire le Grand; les fêtes qui accompa-
gnèrent cette nomination auraient prouvé, s’il en
avait été besoin, l'estime et la sympathie en
lesquelles chefs et camarades tenaient leur vaillant
collaborateur.
Que Mme Petithenry et sa famille acceptent la
respectueuse expression de nos cordiales sympa-
thies.
pau
La télégraphie moderne.
2. — Perfectionnements
à la télégraphie Morse.
Dans le procédé de transmission automatique
Wheatstone, les bandes qui servent à la transmis-
sion sont généralement préparées à la main; on
utilise, dans ce but, de petits perforateurs pneu-
matiques, et l'opérateur chargé de la traduction
du télégramme en signaux perforés forme séparé-
ment les trouets représentant respectivement les
points et les barres, les émissions courtes et les
émissions longues, des signaux conventionnels; on
comprend facilement que ce mode de travail est
lent, et l'on a naturellement cherché à substituer
aux perforateurs simples des instruments à clavier
formant directement et en un seul mouvement len-
semble des trouets caractérisant chaque signal;
tel est l'objel, peur n'en citer que deux systemes,
(l) Suite, voir p. 280.
dont la valeur pratique a pu être appréciée déjà,
des machines à perforer de Kotyra, en France, et
de Creed, en Angleterre ; des appareils de ce genre
sont également employés dans d’autres procédés,
comme le Delany, par exemple.
Le but que l’on doit poursuivre lorsqu'on se pro-
pose de combiner les procédés de travail ordinaire
aux procédés du travail automatique est de mettre
un appareil perforateur sous la dépendance des
émissions électriques servant à l'envoi des signaux;
ce résultat atteint, il devient possible, soit de
recevoir un télégramme transmis d'une façon
quelconque, en signaux Morse, sous forme de
bande perforée, convenant pour la transmission
automatique ou pour la traduction, soit de préparer
une bande, pour le travail automatique, en for-
mant simplement les signaux avec un manipula-
teur ordinaire.
Au premier abord, on pourrait s'imaginer que
la solution de ce problème est simple, et, à la
N° 1445
vérité, la disposition employée à présent est si
ingénieuse qu'elle parait presque élémentaire; en
pratique, cependant, on éprouve des difficultés
sérieuses à réaliser un appareil qui, ayant à effec-
tuer un travail mécanique relativement important
< N. t TT
EAS T
IRIE EE E
RUN. Jde en AN a a
F1G. 1. — NOUVEAU RÉCEPTEUR PERFORATEUR SIEMENS.
— comme c’est le cas pour la perforation des bandes,
— puisse être placé sous le contrôle direct ou indi-
rect des émissions du courant, à la fois peu intenses
ettrèsrapides, quientrent en jeu dans la télégraphie.
Aussi, quoique le principe du système puisse en
lui-même n'être pas nou-
veau, c’est dans les derniers
temps seulement que l'on est
parvenu à établir des instru-
ments répondant aux condi-
tions de la pratique,et le bre-
vet couvrant les dispositions
essentielles du nouveau sys-
tème ne remonte qu'à 1909.
L'appareil traducteur, qui
joue simultanément le rôle
de récepteur et de perfora-
teur, se compôse en principe
de deux électro-aimants ac-
tionnant chacun un perfo-
rateur ; ce système n’est pas
commandé directement par
les courants de travail ou
courants de ligne; ceux-ci
n'arrivent que dans un re-
lais, et c'est ce relais qui con-
trôle, en local, l’appareil
perforateur.
La particularité originale du système est que les
électro-aimants ne sont pas excités par des émis-
sions continues, mais par les courants de charge
et de décharge d’un condensateur de capacité con-
venable; dans une position, le relais relie ce con-
COSMOS
371
densateur à la source électrique, et le courant qui
se produit de celle-ci sur celui-là excite l'un des
électro-aimants; dans l’autre position, il fait cesser
ce reliement et permet au condensateur de se
décharger; le courant de décharge se fait sur le
second électro-aimant, qui
fonctionne ainsi à son tour;
pour les deux électro-aimants,
la durée de l'excitation est
très brève, et il en est de
même du mouvement des per-
forateurs.
Ces organes travaillent sur
une bande étroite de papier
qu'un mécanisme d'’entraine-
ment déplace à une allure
uniforme plus ou moins ra-
pide ; comme leur mouvement
est très vite, ils n’arrêtent pas
le déroulement de la bande et
ils n’y pratiquent qu’un petit
trouet circulaire.
Le premier des perfora-
teurs fait le trou dans l’un
des côtés de la bande; le se-
cond, de l’autre côté ; les trous marquent respec-
tivement le commencement et la fin de l'émission
originale, et ils se succèdent à un intervalle plus
ou moins grand selon la durée de celle-ci.
La figure 1 reproduit le récepteur perforateur, et
F1G. 2. — NOUVEAU TRANSMETTEUR AUTOMATIQUE SIEMENS.
la figure 2 montre la forme des bandes perforées
produites par cet appareil; on voit en W'W*, à la
figure 1, les électro-aimantis agissant sur les per-
forateurs, ceux-ci glissent dans le båti P, où passe
la bande de papier; Æ est le moteur de com-
72 COSMOS
mande; D, un interrupteur de mise en marche, et
RW, un rhéostat pour le réglage du moteur.
Comme nous l'avons dit, la bande peut être
employée, soit pour une traduction en caractères
ordinaires, soit pour une retransmission; dans le
premier cas, c'est-à-dire lorsque le télégramme
recu doit être remis au destinataire par le bureau
qui l’a enregistré, un employé l’enlève, puis le lit,
signe par signe, et écrit le télégramme, soit à la
main, soit à la machine.
La seconde application est nécessairement la
plus intéressante et la plus importante puisqu'elle
a précisément pour but d'éviter les manipulations,
enregistrement, transmission, requises, dans les
conditions ordinaires, pour tout télégramme reçu
en passage dans un bureau intermédiaire et immo-
bilisant un employé.
Avec le nouveau système, ces manipulations
s'effectuent automatiquement, sans comporter au-
cune dépense appréciable de main-d'œuvre, de
sorte que l’on est beaucoup mieux à l'aise pour
faire face aux exigences du travail.
L'utilisation des bandes pour la retransmission
comporte l'emploi d'un appareil de transmission
spécial; comme l’appareil perforateur, le trans-
metteur utilisé est simple, et sans doute les frais
d'acquisition en seraient-ils sensiblement moins
élevés que ceux d'autres appareils du même genre.
Ce transmetteur se compose, en principe, d'un
mécanisme d'entrainement du papier et d’un sys-
tème de deux ressorts souples, servant à la forma-
lion des signaux.
Entrainée par le mécanisme, qui est lui-même
actionné par un pelit moteur électrique, la bande
de papier passe au-dessus des balais qui s'appuient
légèrement contre sa surface inférieure par l'inter-
médiaire de petites saillies obliques.
Dès qu'un trouet arrive au-dessus d’une saillie,
celle-ci v pénètre et laisse basculer le ressort,
dont Pextrémité libre va toucher une pièce de
contact fixe.
Il en résulte la fermeture d’un circuit élec-
trique et, parle jeu d'un dispositif à condensateur
analogue à celui employé dans le traducteur per-
forateur, cetle émission est reportée sur la ligne.
Le fonctionnement d’un balai correspond au
commencement de l'émission et celui de l'autre
balai à la fin de l'émission. |
Les courants envoyés sur la ligne concordent
done avec ceux qui ont servi, à l'origine, à la pré-
paration de la bande, et ils en reproduisent exac-
tement les signaux. |
Ils peuvent ètre reçus, dans le bureau où ils
arrivent, à volonté, au moyen des appareils enre-
3 OCTOBRE 1912
gistreurs ou traducteurs ordinaires ou au moyen
d'un appareil traducteur-perforateur reconstituant
uneseconde bande pour une nouvelle transmission.
Un procédé de travail intéressant consiste à
employer l’appareil transmetteur automatique en
local, c’est-à-dire pour l’actionnement d'un appa-
reil récepteur auditif ordinaire, de façon à per-
mettre la traduction des bandes et l'inscription du
télégramme en caractères d'écriture ou d’impri-
merie.
Nous reproduisons à la figure 2 une photogra-
phie du transmetteur automatique : # est le
moteur actionnant le mécanisme d'entrainement
du papier; X est un disque de contaci et a, b, z
des balais frottant sur ce disque constituant un
dispositif de distribution spécial ayant pour but
de donner à ce fonctionnement du système la
cadence nécessaire lorsque l'appareil travaille
avec une bande Wheatstone; c'est une bande
Wheatstone qui est montrée sur la figure; sur le
còté de l'appareil, à droite du moteur, se trouve
le rhéostat de réglage de celui-ci : en N est placé
un levier de contact permettant de mettre en jeu
ou d'éliminer le dispositif distributeur déjà men-
tionné; on voit, sur la gauche, une vis de réglage,
ainsi qu'un interrupteur, à l’aide duquel on met
en ligne, soit l’appareil transmetteur, soit une
clé ordinaire, pour la formation manuelle des
signaux.
L'appareil récepteur-perforateur peut fonction-
ner à une vitesse de cent mots par minute; lap-
pareil transmetteur à une vitesse correspondante
lorsqu'il emploie les bandes du récepteur-perfora-
teur et à une vitesse supérieure avec les bandes du
Wheatstone; la célérité est donc bonne; quant à
la manipulation, elle est simple pour tous deux
et ne demande pas une habileté professionnelle
particulière.
On voit que le nouveau système peut ètre con-
sidéré comme répondant aux conditions fonda-
mentales à remplir pour permettre l'application
aussi élastique que possible des procédés de tra-
vail couramment en usage dans la télégraphie
Morse et des procédés de transmission automa-
tique.
Il comble donc une lacune, et si, malgré cela, il
ne se généralise pas ultérieurement autant qu'on
pourrait l’espérer, c'est que les conditions d’exé-
culion du service télégraphique sont extrêmement
variées dans les différents pays et qu’une tendance
marquée se manifeste dans les grandes exploila-
tions vers la mise en usage d'appareils imprimeurs
à clavier.
H. Marchan.
N° 1445
COSMOS
Le port de Colombo (île de Ceylan).
Le 4° mai dernier, Son Excellence le colonel
Mac Callum, gouverneur de l'ile de Ceylan, a posé
la pierre commémorative de achèvement du port
de Colombo. Ce port, complètement artificiel, n’est
protégé contre la haute mer que par des jetées qu'il
a fallu construire de toutes pièces et quine mesurent
pas moins de 3 kilomèires de développement. La
superficie du port alteint 660 acres, soit 50 acres
de plus que le port de Douvres, de sorte que
Colombo occupe actuellement comme importance
le troisième rang parmi tous les ports de l'empire
britannique. Il n'est dépassé que par Londres et
Hong-Kong.
Les Anglais ont fait de cette ville une base com-
merciale et navale de première importance. Dock
de réparation, ateliers, magasins d'approvisionne-
ments, dépôt de charbon, rien n’y manque; les
navires de commerce y trouveront toute facilité
pour charger et décharger leurs cargaisons; quant
aux navires de guerre, ils tireront de là tout ce qui
leur sera nécessaire pour se réapprovisionner et
réparer leurs avaries.
La construction du port de Colombo n'a pas duré
moins de trente-sept ans. Cette durée paraitra bien
longue à première vue, mais il ne faut pas oublier
que les travaux à la mer sont particulièrement dif-
ficiles dans cette région. La mousson qui souffle
avec violence pendant la moitié de l’année oblige
non seulement à interrompre les travaux, mais
encore à protéger la maconnerie et les empierre-
ments en cours de construction.
C'est en 1871 que sir Hercule Robinson, alors
gouverneur de l'ile, choisit Colombo pour être le
principal port de Ceylan. A cette époque, le com-
merce de la ville étail presque nul, mais dès 177
les aménagements du port étaient déjà assez avancés
pour assurer un transit de 606 000 tonnes de mar-
chandises. L'année dernière, le total des importa-
tions et des exportations a atteint 8 919 148 tonnes.
Les recettes, qui en 1877 s'élevaient à 62 290 rou-
pies, ont atteint 259 949 roupies en 1911; le nombre
des colis de toutes sortes reçus ou expédiés chaque
jour est de 400 000 en moyenne.
Ceylan, par sa position même, était destinée à
devenir un point d’arrèt pour les navires se diri-
geant vers l'Extrême-Orient, et après l'augimenta-
tion considérable du trafic qui a suivi l’ouverture
du canal de Suez, il était indispensable de pourvoir
l'ile d’un port qui lui permit de jouer le rôle que
la nature semblait lui réserver. Sir Robinson fut
chargé de faire les premières études à ce sujet,
mais ce ne fut qu'en 1871 qu'un projet définitif fut
adopté.
D'après ce premier projet, le port devait avoir
une superficie de 502 acres (204 hectares environ)
et une profondeur maximum de 8 mètres à marée
basse ; mais en 1884, alors que les travaux étaient
à peine commencés, ces dimensions parurent insuf-
fisantes. La navigation à vapeur se dévelonpait de
jour en jour, le tonnage des navires mis à flot
croissait également, il était à craindre que le port
tel qu’on l'avait conçu ne fût bientòt encombré. On
résolut en conséquence de porter la superficie à
660 acres (267 hectares environ) et la profondeur
maximum à 41 mètres; on décida en même temps,
sur les conseils de l’Amirauté, la construction d’un
grand bassin de réparation de 210 mètres de lon-
gueur. À coté de ce bassin se trouve un dépôt de
250 000 tonnes de charbon avec les installations
nécessaires pour le prompt ravitaillement des
navires en combustible.
D'après l Engineering, auquel nous empruntons
ces détails, les travaux du port de Colombo n'au-
raient coùté que 3 millions de livres sterling, soit
75 millions de francs.
L'-CI JEANNEL.
Indicateurs de vitesse et compteurs kilométriques.
Il est extrêmement intéressant, lorsqu'on fait
du tourisme en automobile, de pouvoir connaitre
à chaque instant un certain nombre de facteurs
tels que la vitesse de marche, le chemin parcouru,
la consommation d'essence... Divers appareils
ont été imaginés à cet effet : les uns utilisent l’élec-
tricité comme agent de transmission, les autres se
servent de l'air comprimé.....; enfin il en est qui
sont purement mécaniques. Nous ne nous occupe-
rons que de ces derniers, et nous nous contenterons
de décrire un seul modèle parmi les nombreux
appareils qui sont proposés actuellement aux
chauffeurs.
4° L'indicateur de vitesse permet de suivre à
tout instant la vitesse de marche et de régler faci-
lement l'allure de la voiture: on évite ainsi la
« griserie de la vitesse », l'aiguille de Pindicateur
rappelant au conducteur qu'il marche trop vite.
La figure 1 représente le méranisme de Findica-
teur de vitesse Kirby Beard and C*, qu repose
comme la plupart des appareils analogues sur une
utilisation de la force centrifuge. Le mécanisme
374 COSMOS
cemprend essentiellement un train d’engrenages Bet
C, commandé par câble souple, sur lequel est monté
un régulateur centrifuge, dont les masses FF
sont montées oscillantes sur les bras articulés /f.
Lorsque l'arbre D tourne, les masses FF tendent
à s'éloigner de l'arbre, sous l’action de la force
centrifuge. Les bras ff sont fixés d’un côté (à
o
iaj D i í
JNA =
1
se
$>
LL
|
ŒIL
FIG. 1. — INDICATEUR DE VITESSE KIRBY-SMITH.
droite) directement sur l’arbre D, de l’autre à une
douille E portant une crémaillère circulaire.
Entre le point fixe D’ et la douille E’ sont inter-
calés trois ressorts à boudin 1,2, 3, montés chacun
sur une douille en bronze portant une collerette dd".
Ces ressorts sont de résistance progressive : le res-
sort { est, ainsi qu'on le voit sur la figure, moins
long et de fil plus fin que les autres. C’est lui qui
le premier s'oppose à l'effort du régulateur qui
F1G. 2. — COMMANDE PAR FRICTION SUR LA ROUE AVANT.
tend à le comprimer. Les trois ressorts 'du régula-
teur entrent en action successivement, suivant
laugmentation de la vitesse ; le plus faible élant
comprimé le premier, ainsi qu’on vient de le dire,
Quand la vitesse atteint une certaine valeur, la
douille D préserve le ressort 4 d'une compression
trop grande, le deuxième ressort entre alors en
3 OCTOBRE 1919
action, puis, si la vitesse augmente encore, les
douilles D et E continuant à se rapprocher, le troi-
sième ressort agit à son tour.
La marche du régulateur centrifuge est trans-
mise à l'aiguille indicatrice I’ du cadran par la
douille E au moyen du pignon E' fixé de même que
l’aiguille indicatrice sur la tige I. Tout mouvement
F1G. 3. — COMMANDE PAR ARBRE DE CARDAN.
de l'aiguille en arrière est absorbé par un ressort
spécial à qui tend toujours à ramener l'aiguille
indicatrice à zéro. Ce dispositif assure à l'aiguille
indicatrice une fixité très satisfaisante.
Chaque appareil est spécialement calibré pour la
force de ses propres ressorts d’après un appareil
étalon. Le cadran est alors divisé à la main pour
chaque appareil, ce qui permet d'obtenir des indi-
cations très exactes.
-
DA
KS
NT
at
où
ko
ah
Cet
dt
de
i
#
F1G. 4. — COMMANDE PAR ENGRENAGE.
L'instrument peut être muni d'une aiguille sup-
plémentaire, dite maxima, enregistrant la plus
haute vitesse atteinte par la voiture et pouvant
être ramenée à volonté à zéro. Une serrure spé-
ciale fixée au poussoir de remise à zéro empêche
de ramener l'aiguille maxima en arrière.
Les indicateurs « Ever Ready », Chauvin et
Ne 1:45
Arnoux, etc., les Speedometer Jones, etc,, l’odota-
chymètre 0O. S., etc., sont analogues à l'appareil
précédent : les uns utilisent la force centrifuge, les
autres le magnétisme; un aimant permanent, dont
la vitesse de rotation est fonction de celle du véhi-
cule, agit sur un disque de cuivre ou un cylindre
d'aluminium — oscillant ou tournant — dans le
champ magnétique. Un ressort compense l'entrai-
nement. Le champ magnétique restant toujours
fermé, le degré d'aimentation de l’aimant demeure
pratiquement invariable. Comme dans le cas pré-
cédent, les indications sont instantanées et l’aiguille
est absolument stable.
La commande d’un indicateur de vitesse est
assez délicate. On peut employer diverses méthodes
d’inégale valeur : commande par friction sur la
roue avant, commande sur arbre de cardan et
commande par engrenage. Le dispositif le plus
employé est peut-être le premier (fig. 2); la poulie
à gorge P, munie d’un anneau de caoutchouc,
Auto_ Kilometlreur
F1G. 5. — AUTO-KILOMÉTREUR.
montée sur double roulement à billes, est serrée
dans la mâchoire du support S qui a été fixé sur
la fusée X. Cette poulie est maintenue en contact
avec le cercle d'aluminium Q, que l’on visse sur la
roue intérieurement, par un ressort R en forme de S,
qui assure une adhérence parfaite de l’anneau de
caoutchouc sur le cercle d'aluminium. Le câble
flexible d'acier, goupillé à la poulie et roulant dans
sa gaine F, transmet le mouvement de rotation de
la poulie P au mécanisme de l'indicateur.
La commande sur arbre de cardan est plus
simple encore que la précédente, mais elle exige
évidemment que cet arbre soit à découvert (fig. 3).
Quant à la commande par engrenage, elle est cer-
tainement moins silencieuse, mais plus robuste que
les précédentes (fig. 4).
Le compteur kilométrique permet non seule-
ment de connaitre exactement le chemin parcouru,
mais encore d'exercer un contròle constant sur la
durée des fournitures employées sur l'automobile :
pneumatiques, pièces de rechange, litres d'huile et
COSMOS 375
d'essence par kilomètre, etc. En général, l’auto-
kilométreur, autodomètre, autocompteur..... se
monte sur le chapeau au moyeu d’une des roues
avant. Etant ainsi installé, il participe au mouve-
FıG. 6. — AUTODOMÈTRE.
ment de rotation de cette roue, mais l’axe qui
commande la minuterie intérieure du compteur
porte sur son extrémité soit un petit champignon
en acier, soit une étoile, qui viennent reposer sur
une rondelle d'acier tournant avec le compteur.
||
o
|
N
atea
(Eu il LL ju Qt 1 l j
í
ne EET k — J :
rl
F1G. 7. — AUTODOMÈTRE.
Vue extérieure.
Dans l’auto-kilométreur Chauvin et Arnoux, le
champignon est placé à l'extrémité d’un ressort à
boudin de forme appropriée (fig. 5) portant à son
autre bout une molette taillée qui, sous la pression
376
de ce ressort, vient simplement appuyer sur lex-
trémité de la fusée d'essieu, où elle reste immobi-
lisée par la rugosité du métal.
Dans l'autodomètre, l'entrainement du système
compteur est assuré par le doigt coudé C (fig. 6)
fixé à carré sur l'arbre J. Une goupille B est alors
placée sur lécrou A pour servir de butée à ce doigt.
S SMITH & SON
Ê) KIRBY BEAROCO, LO
260-5647
FIG. 8. — INDICATEUR DE VITESSE ET COMPTEUR COMBINÉS.
G représente la vis sans fin qui transmet le mou-
vement à la minuterie H. L est le boitier ou carter,
F la vis de serrage du couvercle du compteur fixé
au chapeau D par les vis E.
Lorsqu'on préfère avoir constamment sous les
COSMOS
3 ocronne 4912
yeux les indications du eompteur kilométrique, on
peut utiliser les appareils à transmission mécanique
(tige flexible ou électrique). Dans ce cas, on réunit,
F1G. 9. — INDICATEUR DE VITESSE ET COMPTEUR COMBINÉS,
en général, le compteur à l'indicateur de vitesse
comme le représentent les figures 8 et 9; dans le
premier cas, un seul cadran suffit pour les deux
appareils; dans le second, les deux cadrans sont
Juxtaposés. A. BERTHIER.
Cigarettes turques d’Aden.
Les cigarettes turques tiennent une place fort
importante dans la consommation du tabac,
même en des pays comme la France, où elles se
heurtent à un monopole, et où le consommateur est
obligé de les payer démesurément cher. Mais ce
qu'on ne sait généralement pas, c’est que les meil-
leures peut-être de toutes les cigarettes turques
ou égyptiennes (la cigarette dite égyptienne étant
faite, elle aussi, de tabac turc), ce sont les ciga-
rettes fabriquées à Aden. On se demandera pour-
quoi; nous allons l'expliquer. En tout cas, ce qui
est assuré, cest qu'Aden possède des manufactures
de cigarettes considérables et nombreuses.
C'est en 1886 qu'une maison du Caire, fabriquant
beaucoup pour l'exportation avec des tabacs turcs
(puisque l'Egypte ne produit pas de tabac), constata
les avantages du climat d'Aden pour cette indus-
trie spéciale. Depuis lors, son exemple a été suivi
par six autres grandes maisons qui produisent pour
l'exportation en tout pays, et il existe également
à Aden au moins une centaine de pelites manufac-
tures travaillant pour le consommateur indigène,
Les connaisseurs, particulièrement en Orient, pré-
lèvent de beaucoup les cigarettes faites à Aden
à celles faites au Caire, parce que le climat parti-
culièrement sec d’Aden conserve bien mieux l’arome
délicat du tabac, et que, avec même qualité de ma-
tière première, la cigarette est bien plus parfumée.
Ce n’est pas, du reste, la seule raison pour laquelle
les maisons du Caire ont établi des succursales
à l'extrémité de l’Arabie. C’est aussi que le tabac
entre en franchise à Aden, que les constructions
coûtent peu cher, que le prix de la main-d'œuvre
est faible, et que les frets sur l'Inde sont plus bas,
sans être plus élevés, au contraire, sur l’Angle-
terre. Tout naturellement, le climat sec assure la
conservation proprement dite du tabac en magasin
tout aussi bien que celle de son arome. |
Le meilleur tabac qui soit importé à Aden pour
la préparation des cigarettes provient de Cavalla,
et il est connu sous le nom de Basma; la qualité
suivante est nommée Samsoun, mais elle ne vient
point exactement de ce point; il s'agit de tabac
d'Asie Mineure présentant une certaine force. Et
c’est pour cela que, dans les cigarettes de luxe, on
donne la prédominance au tabac de Cavalla, mais
en lui adjoignant du tabac dit de Samsoun, pour
relever un peu la saveur, et énfin en additionnant
N° 1415
d’un peu de tabac de Smyrne, qui a un arome si
prononcé. Tout au contraire, dans les cigarettes
bon marché fabriquées à Aden, on emploiera du
tabac fort et un peu grossier de Bulgarie à la place
du Samsoun, et du tabac grec pour remplacer le
Smyrne. D'ailleurs, comme la demande n'a fait
qu'augmenter continuellement depuis une vingtaine
d'années, le prix de tous ces tabacs a monté de
quelque 60 pour 100.
Les six grandes manufactures de cigarettes
d'Aden n'emploient guère plus de 300 hommes, et
pourtant on peut dire que tout le travail est fait
à la main. Quand des balles de tabac arrivent au
rez-de-chaussée de l'usine, elles sont amenées
devant le « coupeur en chef », d'ordinaire un Grec
fort expert, qui fait procéder à l’assortiment par
une série d'ouvriers arabes ou Juifs arabes tra-
vaillant sous ses ordres immédiats. Tous s’accrou-
pissent en cercle et sur le plancher autour d’un
grand panier, et en ayant à côlé d’eux un petit
panier et la portion de la balle que chacun doit
trier. Ils sortent une à une les feuilles contenues
dans ce panier, et ils ne jettent dansle grand panier
que les plus belles et les plus fines. Ce qui reste
est trié de nouveau et de façon analogue, de ma-
nière à constituer des qualités décroissantes, pla-
cées dans des récipients spéciaux; l’on met de côté
le résidu final.
Ce sont les paniers de choix qui sont alors portés
au « hacheur principal », qui mélange les feuilles
une à une suivant son appréciation personnelle, et
naturellement aussi la qualité désirée; il place
l'espèce de bouquet formé dans une sorte de gout-
tière métallique au bout de laquelle un couteau
COSMOS
377
peut ètre abattu, et c'est à l’aide de ce couteau qu'il
hache, grâce à son habileté professionnelle, le mé-
lange de tabac exactement aux dimensions voulues,
et pour en tirer la matière de cigarettes excep-
tionnelles. Ce hacheur en chef est un grand per-
_ sonnage dont la réputation de la maison peut
dépendre; aussi lui distribue-t-on ce qu'on consi-
dère là-bas comme un traitement royal, 375 francs
par mois et six mois de congé par an. Quant aux
tabacs qui ne sont pas réellement de choix, ils sont
coupés à l’aide d'une machine actionnée par une
manivelle. Il faut deux hommes pour tourner cette
manivelle et deux autres pour alimenter la machine
de feuilles; il suffit d’une de ces machines même
dans une grande usine. Etil n’y a guère de chances
pour que des appareils perfectionnés s'’intro-
duisent de si tòt dans un pays où le capital est
rare, et la main-d'œuvre encore bien bon marché.
Le tabac coupé est porté aux ouvriers fabriquant
les cigarettes par des enfants qui sont en réalité
des apprentis. Tout ce ‘personnel est composé
d’Arabes, de Juifs ou de Grecs. Les cigarettes sont
empaquetées dans dés boites en carton qui se
fabriquent en Allemagne; mais ces boites en carton
de 400 cigarettes sont enfermées à leur tour dans
des boites en fer-blanc qui, elles, sont failes à la
fabrique et peuvent contenir de 100 à 1000 ciga-
rettes: Les emballages et étiquetages complémen-
taires sont exécutés sur place, et à la main natu-
rellement.
A noter que la plupart des cigarettes turques ou
égyptiennes d’Aden sont expédiées sur l'Europe
par la voie de Hambourg.
D. BELLET.
UNE ÉGLISE AMBULANTE
Si les chemins de fer européens, avec leurs
wagons-restaurants et leurs wagons-lits, augmentent
le confort des voyageurs, ceux de l’Amérique vont
beaucoup plus loin dans cette voie: les grands
VUE EXTÉRIEURE DU WAGON-CHAPELLE.
express traversant le Continent n'ont, en effet, que
peu à envier à un hôtel moderne, et sans les trépi-
dations inévitables, la poussière et l'impossibilité
de se mouvoir librement, on s’y sentirait, même
pendant une course de plusieurs jours, aussi par-
faitement à l’aise qu'à la maison. Les « wagons-
églises », récemment adoptés par les chemins de
fer américains, ne sont cependant pas destinés à
N° 1445
COSMOS
379
L'AUTEL, LE CONFESSIONNAL ET LA TABLE DE COMMUNION.
tures de chemin de fer les plus grandes qui existent;
la chapelle proprement dite, longue de 13,5 m,
renferme 74 places; les sièges, au nombre de 30,
sont fixés rigidement au plancher de la voiture et
comportent des prie-Dieu très confortables. Rien n’y
manque de ce qui fait partie des installations ordi-
naires d'une église catholique à demeure; le service
peut donc se faire avec la solennité accoutumée;
l'aute] et le confessionnal sont d'une disposition
très artistique, et l'orgue est d’une construction
spéciale. La voiture, éclairée à l'acétylène, est
chauffée par des calorifères Baker.
Le reste de la voiture, destiné à l'habitation du
prêtre et de ses aides, renferme les compartiments
280
suivants : un cabinet de travail, servant en même
temps de salle à manger, une bibliothèque, un
bureau, la chambre à coucher des aides et celle du
chapelain, les cabinets de toilette et la cuisine;
des meubles de sacristie et des armoires à provi-
sions.
Cette voilure-église, de concert avec une voiture
analogue construite il y a plusieurs années, par-
COSMOS
3 OCTOBRE 191%
court les différents districts des États-Unis, en
s’arrétant là où ses services sont nécessaires. Les
séjours varient de trois jours à une semaine, et
comme la voiture en fait trente à quarante par an
et que le service, en dehors de la messe quoti-
dienne, comporte l'instruction religieuse tous les
jours, il est aussi chargé que dans une église per-
manente. D" A. GRADENWITZ.
NOTES PRATIQUES DE CHIMIE
par M. JULES GARÇON.
A travers les applications de la chimie : Les FONCTIONS AZOTÉES (suite) : LA FCNCTION ALCALOÏDE. —
LES PRINCIPAUX ALCALOÏDES ET LEURS APPLICATIONS. — CURIEUX CAS D'EMPOISONNEMENT PAR LE MERCURE. —
COMPOSITION DES CACHETS FAIVRE. — ASPIRINE ET ERVASINE. — DEFENSE DE PAR LA LOI DE PRENDRE DE
L'UROTROPINE. — LE MARASQUIN FRANCAIS. — APPLICATIONS DE LA PARAFFINE.
Les fonrtions asotées (suite) : La fonction alca-
loide. — Il nous reste deux fonctions azotées à
exposer, la fonction alcaloïde et la fonction albu-
minoïde. Voyons aujourd’hui la première.
On désigne sous le nom d’alcaloïdes naturels des
composés basiques qui se trouvent dans les végé-
taux. Tous les alcaloides renferment de azote.
Certains d'entre eux dérivent très nettement de la
pyridine et de la quinoléine, du phénanthrène, de
la purine. Quelques-uns ont pu être reproduits syn-
thétiquement.
Tous les alcaloides sont des poisons d'une vio-
lence redoutable; mais, employés à dose très
faible, ils produisent des effets qui sont utilisables
en thérapeutique comme narcotiques, tétaniques,
paralysants, régulateurs ou toniques. On emploie
les alcaloïides ou leurs sels solubles, ou les poudres,
les extraits et les teintures des substances végé-
tales.
L'action toxique des alcaloides peut s'exercer
d'une façon sournoise. Telle l'aventure qui vient
d'arriver aux tisseurs d'une région de la Grande-
Bretagne; ils éprouvaient des malaises très graves
et l’on ne savait à quelle cause les attribuer. Un
examen approfondi a pu découvrir cette cause
dans les alcaloïdes volatils qui se dégageaient du
bois exotique des navettes de leurs métiers à tisser.
Les principaux alcaloides sont ceux tirés de
l'opium, des tabacs, de la belladone, des strrvchnées,
des ombellifères, des quinquinas. Disons quelques
mots de chacune de ces classes.
Les alcaloïdes de l'opium, ou suc épaissi du pavot
blanc, sont la codéine, la narcéine, la morphine,
la narcotine, la thébaïne, la papavérine. La codéine,
Ja narcéine, la morphine sont des soporifiques ino-
dérateurs des réflexes, les autres sont de plus con-
vulsivants. Ces alcaloides sont employés comme
calmants dans les diverses affections aiguës, soit
à l'état de préparations opiacées, soit à l’état d’al-
caloïdes purs ou de sels. Les principales prépara-
tions opiacées sont l'extrait d’opium, le sirop dia-
code, les gouttes noires-des quakers, l’élixir paré-
gorique, le laudanum, le pantopon, le pantopon
démorphiné. La morphine (C'*H'°NO*,H:0) à l’état
de chlorhydrate est le plus employé de ces alca-
loïides pour calmer les douleurs; mais l’on sait à
quelle dégénérescence de l'organisme son abus
peut conduire. La codéine (C'*H?:NO*,H:0), qui est
son éther méthylique, est moins actif; c’est le cal-
mant des potions enfantines. La papavérine a vu
sa synthèse réalisée il y a quelques années. Le
pantopon démorphiné convient tout spécialement
pour calmer les douleurs des gastralgies. L'élixir
parégorique à la dose journalière de dix à vingt
gouttes est souverain contre les diarrhées, de
même que le diascordium contre les dysenteries.
La morphine, la codéine se ratlachent au phénan-
thrène.
La hachischine est le principe actif du chanvre
indien. Elle produit des hallucinations agréables;
le « Vieux de la Montagne » en utilisait l’influence
pour envoyer ses adeptes souriants à la mort.
Le principal des alcaloïdes des tabacs est la nico-
tine (se rattache à la pyridine), d'un usage telle-
ment répandu aujourd'hui, en agriculture, comme
insecticide, et également pour combattre les mala-
dies parasitaires des bestiaux, que la production
est très insuffisante pour répondre aux demandes.
Les solanées vireuses fournissent quatre alca-
loïdes principaux, qui sont, par ordre d'action
croissante : la jusquiame, l’hyoscyamine, l’atropine
de la belladone, la daturine; ils sont employés
comme calmants. Le baume tranquille est à base
de belladone. L'atropine semble se rattacher à la
glyoxaline, isomère du pyrazol.
L’alcaloïde des strychnées, autrement dit stry-
N° 1449
chnine (C?!H?3N20?), est le type des poisons téta-
niques, et Pun des poisons les plus terribles que
Pon connaisse. C'est le poison de l’ U pas tieute dont
les Indiens de Bornéo munissaient la pointe de
leurs flèches. La strychnine est employée pour
tuer les fauves dans les colonies et les bètes
puantes dans nos pays. Il semble étonnant qu'un
produit aussi dangereux ait pu trouver des appli-
cations courantes en médecine; on utilise cepen-
dant les gouttes amères de Baumé dans les para-
lysies, dans les gastralgies par atonie, et l’arséniate
de strychnine pour relever les forces; mais on se
doute que les doses doivent ètre infiniment
réduites. Le contrepoison de la strychnine est
l'adrénaline.
Plus intéressant est le groupe des alcaloiïdes du
quinquina (se rattachent à la quinoléine) dont le
principal, la quinine, est le spécifique des fièvres
pernicieuses. L’extrait mou de quinquina jaune
est un excellent tonique. La quinine est aussi
excellente contre la migraine, et à petites doses
répèlées contre la grippe. Comme le sulfate de
quinine est difficilement soluble dans l’eau froide,
on ordonne souvent le chlorhydrate ou le bromhy-
drale qui sont plus solubles, et pour les enfants
l’euquinine, ou éther éthylcarbonique, qui est
moins actif.
La cinchonine, alcaloïde des quinquinas un peu
moins actif comme fébribuge que la quinine, a
l'avantage de ne pas déterminer les mêmes bour-
donnements d'oreilles.
Nous ne pouvons passer sous silence, dans cette
courte revue, la caféine et la cocaine.
La caféine ou théine (C*H!°N°02,H°0) est un
excitant. Nous en avons parlé à propos du café
décaféiné. Cet alcaloïde se rattache à l'acide
urique; c'est une triméthyldioxypurine. C'est le
principe actif du café, du thé, de la noix de kola,
des feuilles de coca, du mathé ou thé du Paraguay.
On peut la préparer synthétiquement.
La cocaine (CY H!!NO*) est un calmant très
employé. Au point de vue chimique, c'est une
méthyl-benzoyl-ecgonine. Le choix de l'acide éthé-
rifiant la fonction alcoolique a une grande influence
sur les propriétés physiologiques, tandis que le
choix de l'alcool éthérifiant n'en a pas; l'acide
benzoïque parait le meilleur, et si on le remplace
par un acide gras, la propriété anesthésique dis-
parait.
Enfin, la colchicine, principe du colchique d’au-
tomne, est un poison drastique violent; la cicu-
tine, alcaloide de la grande ciguë (au point de vue
chimique: a-propylpipéridine), est un poison paraly-
sant; c'est celui de la mort de Socrate; l'aconitine
est un narcotique; la curarine est un poison sagit-
taire redoutable employé par les naturels de
l'Amazone; l'ergotinine est le principe de l’ergot
de seigle; la solanine existe dans les pommes de
COSMOS
381
terre non cuites; la spartéine, retirée du genût,
est un cardiaque moins actif que la digitaline;
enfin la muscarine est l’alcaloïde des champignons,
découvert en 1826 et reproduit synthétiquement
en 14870 à partir de la choline.
Les doses maxima pour adultes des principaux
aicaloïdes, telles que ces doses sont inscrites à la
pharmacopée française, sont (pour une dose) :
aconitine, 0,0002 g (2); apomorphine et son chlor-
hydrate, 0,043 g (41); atropine, 0,0005 g (2):
sulfate d'atropine, 0,004 g (2); caféine, 0,5 g (4);
cocaine (chlorhydrate), 0,05 g (3); codéine,
0,05 g (4); phosphate de codéine, 0,075 g (4); col-
chicine, 0,002 g (2); bromhydrate de conine,
0,03 g (5); digitaline (glucoside) cristallisėe.
0,0003 g (3); ergotinine, 0,004 g (2); hydrastine,
0,10 g (3); hydrastinine et chlorhydrate, 0,05 g (3):
laudanum, 2 grammes (3); morphine ‘{chlorhv-
drate), 0,02 g (4): pilocarpine (azotate),0,02 g (2,3: :
sulfate de spartéine, 0,05 g (5): strophantine,
0,0003 g (3); strychnine, 0,003 g (3); sulfate de
strychnine, 0,006 g (3); théobronine, 4 gramme (4);
vératrine, 0,002 g (5). Les chiffres entre paren-
thèses indiquent le nombre de doses maxima
pour vingt-quatre heures.
Curieux cas d'empoisonnement par le mercure.
— Un journal de médecine bavarois rapporte un
curieux cas d'intoxication mercurielle. {1 s’est pro-
duit à la suite d'exercices de tir en chambre qui
avaient duré quelques jours, et les personnes que
leur service maintenait dans la salle présen-
tèrent tous les symptomes de l'empoisonneinent
par le mercure; nausées, vomissements, coliques
et même stomatite. La ventilation était insuflisante
pour enlever la fumée provenant de l'explosion
des capsules au fulminate de mercure.
Composition des cachets Fairre. — Les cachets
Faivre, très utilisés contre Îles névralgies, les
migraines, les maux de dents, sont à base d’oxy-
quinothéine (Basset). Mais cette substance n'est
pas un produit défini, et sa composition est incon-
nue. Une analyse relatée dans lApoth. Zeitunry
(1912, p. 343) donne la composition suivante (par
cachet pesant 0,725 g): phénacétine, 0.30 g ;
pyramidon, 0,15 g; sulfate de quinine, 0,135 g;
caféine, 0,10 g; magnésie calcinée, 0,04 g. Cest
donc un mélange complexe.
Aspirine et ervasine. — Pendant que nous par-
lons de médicaments, notons que laspirine ou
acide acétylsalicvlique, ordonnancėé souvent par
les médecins pour combattre la diathèse rhumatis-
male, a l'inconvénient de provoquer parfois des
douleurs stomucales et mme de linflammation
des reins. On propose, à sa place, un homologue
supérieur, l'acide acétylerésotinique, sous le nom
d'ervasine, qui ne présente pas ces inconvénients,
même aux doses de 10 grammes.
302
Defense de par la loi de prendre de l'urotro-
pine. — La loi de germinal prohibe la vente et
l'annonce des remèdes secrets, mème si la vente
se fait par ordonnance du médecin. Or, la Cour
d'appel de Caen (7 mars 1907), siégeant comme
Cour de renvoi sur une décision de la Cour de
cassation du 8 décembre 1906, a qualifié remède
secret l'urotropine, qui est aujourd’hui d’un emploi
constant, et a condamné un pharmacien qui l'avait
délivrée sur ordonnance de médecin, parce que
ce médicament n'est pas formulé au Codex et que
le médecin n'avait pas « prescrit les substances
qui entrent dans sa composition et les proportions
dans lesquelles elles doivent être employées ».
Voilà ce qu’on peut appeler une belle chinoiserie,
à rapprocher de la décision judiciaire qui vient
d'interdire aux Normands de faire de la « boisson »
avec du pur jus de cidre.
Le marasquin français. — Le marasquin est
une espèce de kirsch sucré ou de tafia de cerises
sauvages fait avec les cerises marasques. Le centre
de sa produclion est Zara, en Dalmatie. Après
avoir écrasé les cerises très müres, on ajoute
10 grammes de miel blanc par kilogramme de
cerises écrasées, on laisse se produire la fermen-
tation alcoolique, puis on distille. Après un repos
de six mois à un an, on rectilie la liqueur.
Fabrique-t-on du marasquin en France? Très
peu; il y a un fabricant dans l'Isère, et un centre
de fabrication autour de Grasse. D'une enquète
faite par le ministère de l'Agriculture sur la pro-
duction des cerises marasques et celles du maras-
quin, nous extrayons quelques données, la plupart
négatives.
Dans les Alpes-Maritimes, une centaine de mil-
liers de kilogrammes de cerises sauvages, dites
marasques, sont récoltées autour de Grasse, et
fournissent 42 000 à 14000 litres de marasquin.
On commence aussi à produire un peu de kirsch.
Les départements des Bouches-du-Rhône, de la
Drome, du Gard, de la Lozère, du Var, de Vaucluse
ne produisent ni marasques, ni marasquin, ni
kirsch.
Quelques cerises sauvages du département du
Var sont envoyées sur le marché de Grasse. Dans
le département des Basses-Alpes, une quantité de
cerises douces, guignes et bigarreaux, sont con-
sommées en nature ou vendues à la confiserie.
Dans celui des Hautes-Alpes, il y a peu de cerises;
celles de Sainte-Lucie servent à faire des cerises
à l'eau-de-vie.
En Ardèche, on distille les cerises ordinaires
lorsqu'elles se vendent mal; le kirsch produit est
consommé dans la région.
La Savoie ne produit pas de marasques, mais on
v distille les cerises sauvages. De même, en Haute-
Savoie, on obtient du kirsch avec une petite cerise
COSMOS
3 OCTOBRE 1912
noire non greffée; ce kirsch se vend de 3 à 5 francs
le litre.
La fabrication du marasquin n'existe que dans
deux départements, l'Isère et les Alpes-Maritimes.
Dans l'Isère, on fait, avec les cerises, du ratafia
et du kirsch. On se sert surtout de la merise ou
mouronne, rouge ou noire, la noire surtout à jus
très coloré et sucré. La production du ratafia était
estimée, en 1904, à 1 000 hectolitres, dont 600 à
Grenoble; ce ratafia est du jus de cerises alcoolisé
et sucré. Quant au kirsch, quelques communes du
canton d’Allevard produisent une dizaine d'hecto-
litres d’un kirsch très estimé, pardistillation au bain-
marie. Les liquoristes de Grenoble en produisent
une cinquantaine d’hectolitres. Enfin, les proprié-
taires en produisent aussi, les années d’abondance.
On obtient, comme rendement, avec 100 kilo-
grammes de cerises, 66 kilogrammes de jus et
6 à 8 kilogrammes de kirsch à 50°-55° d'alcool.
Applications de la paraffine. — Une applica-
tion inaltendue de la paraffine est l’enrobage des
fromages. Lorsque le caillé, ou résultat de la coa-
gulation du lait par la présure, a été égoutté,
salé, puis séché au halage pour former une croûte
demi-ferme, on le descend en cave où il mürit
sous l’action de divers microbes. Le développement
de ceux-ci assure, comme Duclaux l’a mis le pre-
mier en lumière, la transformation de la pâte
opaque et porcelanée en une pâte transparente et
coulante. Dans cette transformation, la caséine
est d'abord solubilisée, puis la caséine soluble
est dégradée el fournit des produits odorants. Ces
actions sont le fait de plusieurs espèces de microbes
qui, tous, produisent un ferment soluble, la
caséase, analogue à la diastase.
« Chacun d'eux, explique Duclaux, prend la
caséine à un certain point de son échelle de de-
struction et la fait descendre de quelques degrés;
après quoi, son action s'arrête..... A la surface du
caillé, pullullent les êtres aérobies, empruntant à
l'air son oxygène et l’employant à brüler les ma-
tières organiques en contact. Quelques-uns qui
passent pour s'accommoder d'une privation plus ou
moins complète d'oxygène s'enfoncent plus ou
moins loin dans les profondeurs de la masse et s’y
mélangent avec des anaérobies purs. Une fois déve-
loppés, tous ces êtres forment en quelque sorte
une société de secours mutuels; ceux de la surface
préparent des diastases pour ceux de la profondeur
et les préservent de l'action de l'oxygène; ceux de
la profondenr produisent des gaz qui brassent le
liquide, favorisent la volatilisation du carbonate
d'ammoniaque et rendent la vie plus facile aux
aérobies. Quelques-uns de ces êtres prennent
comme point de départ les matériaux élaborés par
d'autres et respectés ensuite, parce qu'ils sont deve-
nus impropres ou mème nuisibles. Ils les détruisent,
No 1445
les décomposent, les amènent à une forme plus
simplifiée sous laquelle ces aliments sont repris
par une espèce moins difficile. »
On voit que les microbes de la surface ont une
action certaine. En outre, les moisissures jouent
aussi leur rôle dans la formation de la croûte et
dans la production du goùt à la maturation. On
peut se demander si l’enrobage à la paraffine n’est
pas nuisible. Sans doute, il est utile de soustraire
le fromage à l’action des ferments de la putréfac-
tion, mais il ne faut pas en même temps nuire à
l'action des ferments utiles. Cet enrobage se fait
COSMOS
383
sur des fromages qui ont subi un cavage de quelques
jours; il s'effectue en plongeant le fromage, au
moyen d'une écumoire, dans la paraffine fondue
(104°), et en le retirant aussitôt. Il ne semble pas
pouvoir convenir à toutes les espèces de fromages.
Une application plus certaine de la paraffine est
le‘vernissage de planchers en sapin. On sait com-
bien les planchers en sapin sont ennuyeux par les
éclats qu'ils produisent. Pour éviter cet inconvé-
nient et assurer leur vernissage, on peut mettre
un léger enduit de paraffine à leur surface et le
faire pénétrer en passant un fer chaud.
Le chronośéraphe moderne.
Au xvm siècle, le terme de chronographe était
absolument inconnu en horlogerie. En fait de chro-
nographe, lescontemporains de Ferdinand Berthoud
et de Pierre Le Roy ne connaissaient pas autre
chose que l'amusement consistant dans l'assemblage
de plusieurs mots qui ont un sens et sont choisis
de manière que les lettres numérales qui s'y ren-
contrent marquent l'année ou le millésime de
quelque événement.
Le vers :
franCorVM tVrbls sICVLVs fert fVnera Vesper,
dont les lettres numérales, écrites en majus-
cules, forment la date des Vèpres siciliennes,
M CC L VVVVVV II = 1282, était un chronographe
ou chronogramme.
C’est en 1821 seulement que le terme de chro-
nographe parait être entré dans le domaine de la
chronométrie. C'est à cette époque, en effet, que
Rieussec jeune, horloger du roi, fit connaitre sous
ce titre un petit appareil horaire servant à indi-
quer sur un cadran mobile, par des signes visibles
et permanents, la durée de plusieurs phénomènes
successifs. Approuvé par l’Académie à la suite
d'un rapport de Prony et Bréguet, le chronographe
de Rieussec recut du second de ces académiciens
un premier perfectionnement. Bréguet rendit la
fixité au cadran et la mobilité à l'aiguille.
En 1831, le célèbre Winnerl imagina la première
forme de l'organe capital du chronographe mo-
derne, le cœur, et le mécanisme du dédoublement
de l’aiguille.
Enfin, en 1862, le brevet anglais de Nicole fut
comme la charte constitutive et définitive du nouvel
instrument. Disons en passant que ce brevet a été
formellement contesté par H. F. Piguet, ouvrier
de Nicole, qui s’est toujours prétendu l'inventeur
‘de l’ensemble breveté par son patron. Il est de
fait que Piguet, malgré le brevet de Nicole, con-
struisit toujours des chronographes sans jamais
être inquiété par celui-ci.
Quoi qu'il en soit, on sait que, depuis le commen-
cement du xx° siècle, le chronographe, dont le nom
est à peine prononcé dans la dernière édition du
Traité classique d'horlogerie, de Claudius Sau-
nier, est devenu un instrument indispensable à
quiconque s'occupe d’expériences scientifiques ou
de sport, c’est-à-dire à peu près à tout le monde!
Il faut reconnaitre que nos grands constructeurs
sont parvenus à faire de cet instrument, le plus
F1G. 1. — LE CHRONOGRAPHE LE PLUS SIMPLE.
délicat de tous les appareils horaires, un véritable
chef-d'œuvre.
Sous sa forme la plus simple, le chronographe
nous apparait comme une montre ordinaire avec,
au centre, une très fine aiguille supplémentaire
faisant en une minute le tour du cadran, sautillant
à chaque vibration du balancier et marquant ainsi
le cinquième de seconde sur la graduation qui lui
est réservée, concentriquement à celle des heures
et minutes (fig. 1). En appuyant sur le même
bouton, vous obtenez consécutivement la mise en
marche, l’arrèt et la remise à zéro de l'aiguille.
Vous pouvez déjà contrôler pas mal d'expériences
avec ce chronographe élémentaire. Toutefois, à
38%
condition que ces expériences ne durent pas plus
d'une minute, deux au maximum.
Aussitôt que vous dépassez ce dernier chiffre,
vous avez besoin d’un compteur auxiliaire de
minutes. Le chronographe prend alors l'aspect de
la figure 2. Le compteur, dont l’aiguille opère sur
midi, peut compter jusqu’à 30 ou 60 minutes sui-
vant vos besoins. Sur la figure 2, il compte 30.
Dans ces deux modèles, le chronographe est
simplement additionneur.
Mais dans nombre de eas, spécialement lorsqu'il
sagit de vitesse, additionner ne suffit pas. Le pos-
sesseur d’un chronographe demande à son instru-
ment de faire lui-même {es opérations que com-
porte la réduction de ses indications à l'unité fon-
damentale. Il lui demande d'ètre une véritable
machine à calculer (4) et d'effectuer des règles de
F1G. 2, — CHRONOGRAPHE AVEC COMPTEUR DE MINUTES.
trois. Le chronographe à cadrans tachymétriques
se prèle volontiers à celte exigence et évite ainsi
toute erreur à son propriétaire.
La figure 3 représente un cadran tachymétrique
du modèle le plus simple indiquant les vitesses de
12 à 120 km par heure.
Mais ces limites sont trop rapprochées, la plupart
du temps; la vitesse de 120 km par heure, en par-
ticulier, nous apparait comme quelque chose de
très ordinaire depuis que les aéroplanes nous ont
(i) Il est intéressant de rappeler à ce propos que
l'une des plus intéressantes machines à calculer, celle
qui, au dire des personnalités compétentes les plus
autorisées, comme M. Maurice d'Ocagne, est peut-être
arrivée le plus près de la perfection, l'Arithmaurel,
a été construite par le chronométrier Winnerl. C'est
la seule délicatesse de ses nombreux organes qui a
empèché son usage de se répandre.
COSMOS
OCTOBRE 1912
fait entrevoir celle de 200 comme devant être lal-
lure courante des avions légers de lavenir. Le
chronographe, pour vous satisfaire, allongera donc
ses graduations. Pour la base kilométrique, il ira de
F1G. 3. — CHRONOGRAPHE TACHYMÈTRE
INDIQUANT LES VITESSES DE 12 A 120 KM PAR HEURE.
12 à 240 km par heure. Pour la base hectométrique,
de 2 à 24. Mais comme il lui faudra disposer de
plusieurs tours pour ses graduations, il les écrira
3
A m
gr LL
FiG. 4. — CHRONOGRAPHE AVEC DEUX GRADUATIONS TA“
CHYMÉTRIQUES, UNE DE 2 A 2%, L'AUTRE DE 12 A 240,
COMPTEUR DE MINUTES ET INDICATION DE LA SPIRE SUR
LAQUELLE DOIT SE LIRE LA VITESSE.
N° 1445
en spirale. Et pour éviter des confusions dans les
lectures, les spires successives seront de couleurs
différentes, et un petit indicateur spécifiera par la
position de son index la couleur de la spire sur
laquelle il conviendra de faire la lecture dans
chaque cas.
Ici, par exemple, cela devient compliqué. Vous
avez un cadran du type de la figure 4, avec six
aiguilles : heures, demies, chronographe, trotteuse
de secondes, compteurs de minutes, indicateur de
spires! Si vous voulez ménager vos yeux, vous
ferez bien de recourir à l’artifice que vous offre la
figure 5. Vous prendrez un chronographe à double
cadran. L'un de ces cadrans sera exclusivement
tachymétrique comme l'indique la figure 5. Le
cadran de l’autre face sera celui de la figure 2.
Le chronographe peut également fonctionner
F1G. 5. — DÉDOUBLEMENT DE CADRAN DU CHRONOGRAPHE
DE LA FIGURE #. LES AIGUILLES D'HEURES, MINUTES, TROT-
TEUSE ET COMPTEUR DE MINUTES SONT REPORTÉS SUR UN
SECOND CADRAN.
comme télémètre ou comme pulsomètre. Comme
télémètre, il donnera automatiquement la distance
du point d’où sont partis simultanément un signal
lumineux et un signal sonore. Comme pulsomètre,
il indiquera la fréquence des battements du pouls
après le comptage de 20 ou 30 pulsations (fig. 6).
D'une façon générale, le chronographe peut se
plier à solutionner toutes les questions dans les-
quelles la réponse est fonction à la fois de l’espace
et du temps.
Mais c'est surtout dans le chronométrage que
son utilité et sa souplesse sont vraiment merveil-
leuses.
Il utilise alors le dédoublement de l'aiguille chro-
nographique.
Supposons une piste sur laquelle un certain
GOSMOS 385
nombre de coureurs vont exécuter chacun un
nombre de tours devant un chronométreur. S'il a
entre les mains un chronographe ordinaire, il
+ PULSA
Pi Se.
rs |
F1G. 6, — PULSOMÈTRE OU SPHYGMOMÈTRE
GRADUËÉ POUR 30 PULSATIONS OU BATTEMENTS.
pourra bien, à chaque passage, arrêter son aiguille
et noter l'heure. Mais, obligé de revenir à zéro et
d'en repartir à chaque opération, il n’aura pas de
liaison avec le point de départ de la course. C’est
la dédoublante rattrapante qui va lui donner
celte indispensable liaison.
F1G. 7. — CHRONOGRAPHE
AVEC AIGUILLES DÉDOUBLANTE ET RATTRAPANTE.
Au signal donné par le starter, notre chronomé-
treur appuie sur le bouton de son appareil. Les
deux aiguilles de chronographe s’élancent sur la
386
piste du cadran, collées l’une à l’autre. Au premier
passage, seconde pression sur le bouton. L'une
des aiguilles s'arrête, l’autre continue sa : course
comme si rien n'était arrivé. Le chronométreur
note l'heure, la minute, la seconde et le cinquième
pointé par l'aiguille immobilisée. Cela fait, une
troisième pression libère cette aiguille qui s’en va
d’un bond reprendre sa place sur sa sœur qui a
continué de marcher. La même série d'opérations
se renouvelle à chaque passage de coureur.
La figure 7 représente un chronographe avec
aiguille dédoublée.
Dans la figure 8, la commande du chronographe
se fait électriquement par la pression de la main
sur le bouton de la poire. Cette commande peut
aussi se faire d’une façon absolument automatique.
J'ai dit que l'aiguille chronographique marquait
COSMOS
3 OCTOBRE 1912
généralement le cinquième de seconde. Elle peut
aussi marquer le dixième. De même le chrono-
graphe peut comporter la graduation des heures
dans le système décimal, duodécimal ou biduodé-
cimal.
J'ai indiqué que, dans le chronographe, le cœur
était l'organe capital. C’est, en effet, lui qui est
chargé de ramener à zéro les aiguilles et de recon-
duire d'un bond la rattrapante sous sa compagne,
La figure 9 empruntée à uneétude de M. Le Coultre,
et que le Journal suisse d'horlogerie a bien voulu
m'autoriser à reproduire fera saisir le fonction-
nement de cet organe.
Le cœur sert dans le chronographe pour re-
mettre à zéro l'aiguille chronographique, simple
ou dédoublée, et pour faire rattraper à la dédou-
blante sa compagne, après chaque opération.
F1G. 8. — DEUX CHRONOGRAPHES AVEC DÉDOUBLANTE ET RATTRAPANTE ACCOUPLÉS FONCTIONNANT PAR PRESSION DE LA
POIRE OU AUTOMATIQUEMENT. PEUVENT SE CONTROLER MUTUELLEMENT OU FONCTIONNER ALTERNATIVEMENT POUR
CHRONOGRA^APHIER DES PHÉNOMĖNES TRÈS RAPPROCHĖS.
Pour la remise à zéro, voici sommairement
comment les choses se passent. L'aiguille chrono-
graphique est montée sur la roue R,et son axe
porte, outre cette roue, une pièce C taillée de
manière à présenter deux portions symétriques de
spirale d'Archimède allongée, ou plutôt, comme
l’a démontré M. Le Coultre, de spirale logarith-
mique. La roue R’ fait parlie du mouvement de la
montre et engrène naturellement avec la roue R”
montée sur un levier B pivotant en O. Lorsque le
chronographe est au repos, cette roue R” tourne
à vide. La première pression du bouton du chrono-
graphe a pour effet de faire basculer le levier B
autour de son axe O et de faire engrener presque
instantanément R" avec R. L’aiguille chronogra-
phique part. La seconde pression du bouton fait
basculer en arrière le levier B, dégrener la roue R"
et provoque par freinage ou pincement l'arrêt de
la roue R et de son aiguille. Dans cette posilion
d'arrêt, la troisième pression du bouton fait tomber
le levier LH sur la courbe du cœur, et déplace
cette courbe dans un sens ou dans l’autre jusqu'à
ce que H se trouve logé dans l’encoche. Dans cette
position, l'aiguille chronographique doit se trouver
exactement sur zéro.
Lorsqu'on fait agir le mécanisme de dédoublante
rattrapante les choses se passent de la façon sui-
vante :
L’aiguille normale du chronographe est en N, la
rattrapante en M. L’aiguille de rattrapante et la
roue RT sont fixées sur l'axe intérieur qui tourne
librement dans le canon K, lequel porte l'aiguille N,
la roue R et les deux cœurs c et c'. Lorsqu'on veut
arrèter la rattrapante, une pince vient saisir par
sa circonférence la roue RT et l’immobilise ainsi
que l'aiguille M; maisle cœur c’ continue de tourner
N° 1445
avec l'autre aiguille N et son canon K, en soulevant
le levier L’ toujours maintenu appuyé contre lui
par le ressort D.
. Aussitòt qu'une pression aura desserré la pince
calant la roue RT, celle-ci se trouvera entrainée
par l’action du levier L’ qui glissera sur la courbe
du cœur c’ jusqu’à ce qu’il soit revenu à la position
normale indiquée sur la figure, |
et qui correspond à la superposi-
tion des deux aiguilles N et M.
On voit que pour que ces divers
effets se produisent avec toute la
précision voulue, toutes les
pièces de chronographe doivent
être faites avec un soin extrême,
d'une légèreté extraordinaire,
avec des dentures de roues très
fines en vue d'éviter les jeux, et
des cœurs taillés mathématique-
ment afin que les leviers L et L’
ne rencontrent pas de résistance
en parcourant avec rapidité la
courbe jusqu’à l'encoche.
La quasi instantanéité de tous
les mouvements augmente encore
les difficultés de l'exécution.
Malgré l'extrême délicatesse
des systèmes chronographiques
dont la figure 9 nous donne
idée, les constructeurs sont arrivés à établir de
ces appareils dont la marche ne laisse rien
à désirer (1).
Au dernier concours de chronomètres de Besan-
con, des. chronographes à rattrapante ont figuré
aux premières places avec des chronomètres ordi-
naires sans complications. Au concours spécial de
1912, organisé à Besançon pour l'Auto sous les
auspices de l'Automobile Club de France, 43 pièces
ont amplement satisfait aux exigences imposées.
La première aurait occupé le deuxième rang dans
le classement général des chronomètres.
Les chronographes se fabriquent aujourd’hui par
des procédés mécaniques absolument comme les
bonnes montres.
Les grandes usines, comme celle des Longines,
qui a bien voulu nous communiquer les illustra-
tions accompagnant cette note, sont arrivées à des
(1) La rattrapante moderne qui date d’une trentaine
d'années est, on le pense bien, fort loin de celle origi-
nale de Winnerl pour la construction et la précision
des effets.
COSMOS
387
résultats vraiment extraordinaires par cette fabri-
cation.
Il faut toutefois remarquer qu'elles ne con-
struisent pas l’article ca melote.
Le chronographe bon marché est un chrono-
graphe trompeur et, par suite, toujours trop cher,
si bon marché soit-il.
Fia. 9. — SCHÉMA
DES MÉCANISMES DE CHRONOGRAPH£& ET DE RATTRAPANTE.
On peut dire, en effet, de cet instrument ce que
Boileau disait de la poésie : . |
Chez lui,
Il n’est pas de degrés du médiocre au pire
LéoroLp REVERCHON.
383
Les jouets au 12°
L'exposition annuelle des petits fabricants et
inventeurs français s’est tenue au Grand Palais.
Les premières manifestations de ces braves gens
eussent été noyées dans la grande nef, aussi ne
songeaient-ils pas à venir s’y loger. Mais le succès
grandissant du concours Lépine les a obligés à
chercher un local de plus en plus vaste, et, après
avoir habité en dernier lieu la salle du Jeu de
Paume, puis la cour de la caserne du Château-
d'Eau, ils sont parvenus à « enlever » le local qui
leur convient. Cependant, l'Administration ne leur
en a attribué que la moitié, de sorte que les comp-
loirs de vente ont dù émigrer à l'étage supérieur
sur les galeries. Réellement, le hall en entier leur
est indispensable pour faire valoir les produits de
leur industrie ; j'espère que l’an prochain on ne le
leur refusera pas.
Ce demi-hall a été utilisé d'une manière parfaile.
Des tables triangulaires rayonnant autour de points
centraux étaient couvertes de jouets, d'inventions,
d'œuvres d'art. Cette distribution a permis d'effec-
tuer un classement méthodique par séries, en grou-
pant les jouets sur les tables qui leur étaient dési-
gnées, les inventions sur d'autres, etc. De sorte
que le visiteur, armé de son catalogue, trouvait de
suite l'emplacement des objets qui pouvaient l'in-
téresser. C’est bien, mais il reste encore à effectuer
la distribution de chaque exposant, sur les tables,
par numéro d'ordre : ce sera parfait.
Ainsi que nous le faisons chaque année, nous
allons décrire, des quatre cents et quelques créations
exposées, les plus pittoresques, les plus intéres-
santes d'entre elles. Cest avecune grande satisfac-
tion que l’on s'arrête devant ces choses, souvent
informes encore, d'un fonctionnement douteux,
mais qui représentent une idée neuve, un appel au
sourire de l'enfant. Quel noble idéal que celui qui
s'élève jusqu'aux tout petits pour solliciter leur
joie, pour mendier leurs caresses! Que de tels
hommes doivent être bons!
De plus en plus le jouet électrique disparait de
ces concours; les seuls représentants ne sont que
des transformations plus ou moins heureuses de
ceux que nous connaissons. Mais nous verrons que
l'électricité se présente sous une autre forme et
que les inventeurs n'hésitent pas à travailler ferme
certains problèmes qu'ils se posent depuis plusieurs
années, comme, par exemple, l’enseignement élec-
trique de la musique. En règle générale, le con-
cours de jouets a plutôt brillé par le nombre des
objets exposés que par la puissance créatrice.
Beaucoup d'idées vieilles revivent sous des formes
déjà connues par ailleurs, et très peu de jouets
sortent de la vulgarité. On dirait que les inven-
teurs, hypnotisés par le jouet bon marché, s’éver-
COSMOS
3 OCTOBRE 1912
concours Lépine.
tuent à simplifier ceux qui leur ont paru propres
à souffrir une amputation. Il est donc bien difficile
de faire quelque chose avec deux bouts de bois et
un ressort ?
Un inventeur a pris le problème tel que nous
venons de le poser et a construit un pistolet
lance-disques tout aussi amusant que ceux à cap-
sules de fulminate. L’une des planchettes est
arrondie pour être tenue en main; l'autre, plus
courte, en est solidaire, prèsde l'extrémité «canon»,
par une pointe autour de laquelle elle peut tourner,
sollicitée par un ressort assez puissant fixé, d'une
part, à l'extrémité de cette deuxième planchette
et, d'autre part, sous la première. Le pistolet au
repos prend assez la forme d’une croix dont les bras
sont inégaux. Pour armer, on abaisse la petite
réglette sur la grande et on la maintient par un
crochet-gâchette. Le disque se fixe dans une rainure
pratiquée sur l’arrière de la petite planchette. On
Im
PISTOLET LANCE-DISQUES.
tourne le crochet-gàchette avec l'index, et le ressort,
se détendant violemment, chasse la planchette
mobile avec une telle force que le disque est pro-
jeté à 20 mètres au loin.
Dans un autre ordre d'idées, mais toujours dans
le jouet à bas prix, nous avons la sauterelle-acro-
bate. Une légère boite de carton est pourvue d'un
portique tendu de fils de fer horizontaux. Ce por-
tique s'élève au-dessus d’un paysage constitué
essentiellement par une mare habitée par quelques
grenouilles, un chemin et un puits. Le puits est
ouvert (un trou dans le carton) et la bouche de la
grenouille également de la mème manière: ce
sont les deux obstacles qui font perdre le joueur.
La sauterelle, indépendante, comme toute saute-
relle qui se respecte, est armée de quatre crochets.
Il s'agit de la faire sauter sur les fils du portique.
Rien n'est plus simple. Avec un petit maillet on
frappe sous le fonds de la boite à l'endroit occupé
Ne 1415
par la sauterelle. Celle-ci s'élève et retombe dans
le paysage, dans le puits ou la bouche de la gre-
nouille, à moins qu’elle s’accroche à un fil. En
attribuant une valeur différente à chaque fil et en
limitant le nombre de coups de chaque joueur, on
arrive à s’amuser.
On s'amuse également bien avec le jeu qui porte
le joli nom 7 love you. C’est le jeu de la pâque-
rette : il — ou elle — m'aime un peu, beaucoup, ete.,
que nous avons tous joué... autrefois. Je l’ai revu
avec plaisir! Les pétales sont en bois blanc: ils
portent, chacun, sur une de leurs faces, les mots
cabalistiques connus, mais on les retourne sur le
fond de la boite au moment de jouer. Au centre,
une demi-sphère jaune représente la masse des
étamines. Sur cette masse, on pose un joli petit
papillon rose si léger que le moindre mouvement
d’une raquette le chasse au hasard sur le jeu. Il
va, vient et finit par se reposer sur un pétale.
L'intéressé le retourne et lit: « Pas du tout »!
Evidemment, il n’a rien gagné! D’autres seront
plus heureux.
Aux amateurs de plaisirs gastronomiques, nous
offrirons Le repas des carnivores. Imaginez deux
bêtes n'ayant de bête que la tète; le reste appar-
tient à une époque antérieure ou future. L’inven-
teur prétend qu’il a construit deux pélicans en bois.
C’est fort possible. Quoi qu’il en soit, les deux dits
pélicans sont dressés l’un en face de l’autre, prêts
à s'entre-dévorer. Heureusement, un poisson, éga-
COSMOS 389
lement en bois, se trouve, comme par hasard, sus-
pendu à proximité des deux becs. Il deviendra la
proie du plus habile. Chaque joueur manœuvre un
pélican avec ses deux mains. L'une est occupée
à faire avancer le corps et l’autre à fermer le bec
au moment où le poisson, très étourdi, s'y est
engouffré. Ce jeu est parfaitement inepte; eh bien,
2. I LOVE YOU. — 1. LE REPAS DES CARNIVORES,
on s’y amuse en assistant aux efforts des deux
pélicans pour attraper le poisson, très agile malgré
tout, à l'extrémité de son fil. Si l’un des deux l'a
saisi par la queue, l'autre le prend par la tête, et
ils se disputent la proie en tirant jusqu'à ce que la
victime ait échappé, par traction, à l’un des deux
voraces.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 23 septembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. GRANDIDIER.
Sur le tremblement de terre survenu dans
la nuit du 14 au 15 septembre 1912. —
M. l'abbé’ VerscuarreL donne d'intéressants détails sur
le tremblement de terre ressenti à l'Observatoire
d'Abbadia dans la nuit du 14 au 15 septembre 1912
vers 2 heures (temps légal).
Le phénomène s'est étendu dans toute la région du
Sud-Ouest; à Abbadia,le mouvement était horizontal;
à 2 kilomètres dans le Sud, vertical.
Le phénomène de l'agitation était accompagné d'un
bruit très ressemblant à celui d’un grand vent; dans
certaines localités, un peu plus dans les montagnes,
il y a eu deux secousses sensibles, celle de 2 heures
étant la plus forte. Dans quelques localités les cloches
ont Llinté, la vaisselle s'est choquée et s'est brisée.
Jusqu'à cette année, l'Observatoire semblait inacces-
sible aux tremblements de terre, mais cette année on
en a observé deux.
Sur le Caridinopsis Chevalieri Bouv. et les genres
d'Atyidés propres à l'Afrique tropicale, Note de
M. E.-L. Bouvier; l’auteur démontre que la faune
atyienne propre au Tanganyika ne fut point, à l'ori-
gine, particulière à ce lac; aujourd’hui encore, elle
présente des affinités remarquables avec les Caridi-
nopsis du Haut-Niger, — Les Orbitolines et leurs
enchaîinements. Note de M. Henri DouviLré. — L'or-
thostathméscope ou instrument pour observer le pas-
sage par le zénith de l'alignement de deux étoiles sur
la sphère céleste. Note de MM. CLAUDE et DRIENCOURT.
— Sur les invariants du calcul des variations. Note de
M. Tu. DE Donner. — Sur l’absolue convergence des
séries trigonométriques. Note de M. N. Lusix. — Con-
ditions de formation des acides nitreux el nilrique
à partir des oxydes d'azote et de l’eau; application de
la loi d'action des masses. Note de MM. E. Brixen et
E.-L. Durano. — Cristallisation par recuit des métaux
écrouis, Note de M. Férıx Rosin. — MM. JUMELLE et
H. Pernin pe LA BarTuiE étudient les différents choux-
palmistes de Madagascar, où la plupart des palmiers
fournissent un bourgeon terminal comestible. — Sur
la biologie et l'anatomie des Lhbiées à stolons sou-
terrains. Note de M. M. CHaiLzoT. — L'antigène dans
la réaction de Wassermann. Note de M. A. Desmou-
LIÈRE. — Influence de quelques composés chimiques
sur les mélanines artificielles. Note de M. Maurice
PIETTRE.
390
COSMOS
3 OCTOBRE 1912
BIBLIOGRAPHIE
Le calcul des probabilités et ses applications,
par E. CarvaLLo, directeur des études à l'École
poly technique. In-8° (25 X 16 de 1x-169 pages avec
45 figures (6,50 fr).Gauthier-Villars, Paris, 1912.
Les livres sur le calcul des probabilités ne
manquent pas. En voici un de plus. Pourquoi ?
Parce qu’il répond à un besoin.
Ce besoin était très clairement et exactement
traduit, naguère, dans l’énoncé suivant, qui n'est
autre que le sujet d’un concours proposé en 1910
par l’Académie royale des sciences de Madrid :
« Exposé clair et simple du calcul des probabi-
lités: le livre... doit comprendre les principes
fondamentaux du calcul des probabilités, avec ses
multiples applications, exposés de manière à être
compris et utilisés par des personnes qui ne con-
naissent que les mathématiques élémentaires...
On veut, en somme, mettre à la portée des per-
sonnes ayant seulement une instruction générale,
ou n'ayant pas fait d'étude spéciale des mathéma-
tiques, cet instrument précieux de recherche et
d'analyse créé par les mathématiciens; bien plus
qu'au mathématicien, il est nécessaire au juriscon-
sulte, au médecin, à l'archéologue, à l'historien,
au politicien et au statisticien. »
C'est le programme même que l’auteur s’est
imposé.
Dans le calcul des probabilités, les difficultés
mathématiques abondent. Pour les éviter, il fallait
les bien connaitre.
Il y a d'abord celles qu’on rencontre dans l'énu-
mération des chances de divers problèmes qu'on
peut se proposer. De ces problèmes, la théorie des
jeux en fournit tant qu'on veut; mais pour le but
que l’auteur se proposait, la théorie des jeux est
inutile, et en la supprimant on évite tout une classe
de difficultés.
L'auteur a surtout en vue les applications à la
méthode statistique. Ici, est-il possible d’éluder les
difficultés? Il n'est pas possible d'aborder la mé-
thode statistique sans le théorème de Bernouilli
(loi des probabilités des écarts, ou loi des grands
nombres), car ce théorème est le fondement de la
méthode. Impossible de démontrer le théorème de
Bernouilli sans les combinaisons, la fonction ex'po-
nentielle et les logarithmes, le calcul différentiel
et intégral. Et il ne suffit pas de connaitre ces
théories : il faut encore être d’une certaine force
pour suivre la démonstration du théorème de Ber-
nouilli, Tout cela exige qu'on soit, en un mot, ma-
thématicien. « Que nul n'entre ici s’il n’est géo-
mcétre » pourrait servir d’épigraphe aux traités sur
le calcul des probabilités,
Et cependant le calcul des probabilités n’est
pas inabordable aux non-mathématiciens. Car, à
côté des démonstrations abstraites, il y a les faits
mathématiques, les formules que l'on accepte
a priori sans démonstration, que l'on utilise dans
les applications et dont on arrive, par l'usage
même, à avoir une sorte de démonstration expéri-
mentale, tout comme en physique on accorde une
confiance grandissante à une hypothèse au fur et
à mesure qu'elle coïncide plus fréquemment et
plus exactement avec les faits qu’elle est destinée
à représenter.
Comme nouveautés de détail, l'ouvrage renferme
notamment : la courbe de l’intégrale de Bernouilli
substituée à la courbe en chapeau de gendarme
qui représente sa dérivée ; l'écart étalon substitué
à l'écart probable; une méthode pour apprécier la
valeur d'une série statistique; une étude appro-
fondie sur la masculinité dans les naissances
humaines, avec des observations nouvelles et con-
cluantes; un exposé assez complet de l'état actuel
des tables de mortalité; des observations curieuses
sur la statistique des tailles des conscrits (la statis-
tique décèle la fraude des sujets de petite taille qui
se rapetissent de deux ou trois centimètres pour
bénéficier de la réforme), sur les erreurs dans les
mesures expérimentales, sur la recherche des
causes. Signalons enfin un exposé des méthodes
d'ajustement. Dans cette question seulement l'au-
teur a cru devoir donner les démonstrations mathé-
matiques, parce qu'elles sont faciles et peu répan-
dues dans les traités classiques. Le lecteur pourra
les passer si elles lui paraissent alourdir la marche
de son étude.
Couleurs et colorants dans l’industrie textile,
par l'abbé Vassarr, fondateur de l’Institut
technique roubaisien. Un vol. in-8° de 168 pages,
avec figures (6 fr). Librairie Dunod et Pinat,
49, quai des Grands-Augustins, Paris.
Les couleurs jouent un grand rôle dans 1a nature
et sont pour nous une source perpétuelle d’agré-
ment. On se figure difficilement ce que seraient la
campagne, les maisons, les objets, sans les couleurs
qui leur sont propres. Et cependant, cette question
des couleurs est restée longtemps obscure; chacun
employant le même mot, dans des sens très diffé-
renis, confondant ainsi à tout instant les couleurs
avec les colorants et les sensations de couleurs.
C'est Choiseul qui, le premier, donna une classi-
fication rationnelle des couleurs, et permit de
distinguer 44400 nuances différentes. De cette
façon, on peut définir chaque nuance avec deux ou
trois indications, et reproduire, en Amérique, avec
fidélité et sans les voir, des étoffes ou un tableau
créés en Europe.
De même, en déterminant d'avance les diffé-
N° 1445
rentes acceptions du mot « couleurs », il devient
facile de s'entendre et d'étudier avec clarté ce
sujet réputé si difficile. M. l’abbé Vassart a voulu
surtout rendre service à ceux qui s'occupent de
la fabrication et du négoce des tissus, aux élèves
des écoles professionnelles se rattachant à l’indus-
trie textile et à tous ceux qui s'intéressent aux
beaux-arts. Ils y trouveront des notions très claires
sur les couleurs complémentaires, les contrastes
des couleurs, leur harmonisation, la solidité des
nuances, etc.
La métallurgie du fer, par Pauz DouMER, aidé
de collaborateurs : P. IwEIxs, FRITZ THYSSEN,
J.-0. ArNozp, L. Bacré, P. Nicovu, E. pe Lossy,
W'ILHELM KESTRANEK, BARON DE LAVRLEYE, FERNAND
Mever. Un vol. in-8° de 250 pages (broché,
10 fr). Librairie Vuibert, 63, boulevard Saint-
Germain, Paris.
Depuis quelques dizaines d'années, on pourrait
mesurer la vitalité et le développement des
diverses nations par la quantité de fer qu'elles
mettent en œuvre. C’est que la métallurgie a pris
une importance considérable, importance qui ne
fera qu’aller en augmentant.
Le livre publié par M. Doumer a donc un gros
intérêt, puisqu'il nous fait connaitre l’état de la
_ métallurgie du fer dans le monde. Différentes
notabilités dont il a su s’entourer y parlent succes-
sivement de chacun des grands pays producteurs
qu'ils connaissent, dans des monographies reliées
par une idée et un plan communs.
Après un exposé d'ensemble où M. Doumer a
mis en lumière les idées générales qui ressortent
de l’étude de l’activité sidérurgique internationale,
on étudie successivement l'histoire de la métal-
lurgie belge, la situation actuelle de l'Allemagne,
de l’Angleterre et de l’Autriche-Hongrie au point
de vue métallurgique; vient ensuite un aperçu net
et concis des organismes très vastes et très résis-
tants dans lesquels s’est concentrée l’industrie du
fer, de la fonte et de l'acier aux Etats-Unis, puis
un exposé de la situation de la France et de la
Russie; enfin, nous sommes initiés à l’ensemble
des méthodes employées par l’électro-métallurgie.
Ce tableau complet de la production du fer dans
le monde, et dans chacun des grands pays produc-
teursen particulier, mérite assurément d’être connu
du grand public, auquel ce livre s'adresse.
Organisation et direction des usines, par
À. Mayer, ingénieur. D’après l'ouvrage allemand:
Der Fabrikbetried, de A.Bazrexski. Un vol. in-8°
de 220 pages (7,50 fr). Librairie Gauthiers-
Villars, 55, quai des Grands-Augustins, Paris.
La concurrence devient de plus en plus acharnée
entre les différentes Sociétés de construction méca-
COSMOS
391
nique; il est donc nécessaire d’avoir recours à une
organisation méthodique des usines, afin de réduire
au minimum le temps employé pour chaque tra-
vail, tout en l’exécutant d'une manière exacte et
complète.
À ce point de vue, les Allemands sont parfaite-
ment organisés, ce qui leur permet parfois de
pouvoir tenir en échec les industriels français dans
leur propre pays. Aussi l’auteur a-t-il pensé qu'il
serait intéressant de faire connaitre aux chefs
d'usine et aux ingénieurs français les méthodes et
les procédés de nos voisins. Cela leur permettra
peut-être de lutter viclorieusement contre l’inva-
sion des produits étrangers.
L'ouvrage est très complet. Il s'étend à tous les
services d'une grande usine, mème aux plus
infimes : service des achats, courrier, devis, dessins,
publicité, concierge, calcul des prix de revient,
salaires, feuilles de travail, contrôle des heures
d'entrée et de sortie des ouvriers, outillage. Rien
n'est laissé de côté. Et si ces méthodes allemandes
ne peuvent toutes être appliquées chez nous, sur-
tout sous leur forme originelle, du moins
peuvent-elles fournir le principe d'améliorations
dans nos manières d’agir actuelles. Les industriels
français peuvent tirer grand profit de ce livre : en
se basant sur les renseignements qu’il donne, ils
pourront organiser leurs établissements de manière
à obtenir le maximum de rendement avec le mini-
mum de frais.
Nicolas Flamel, par RENÉ ScuWaEBLé. In-8° de
96 pages (2 fr). Librairie Daragon, 96, rue
Blanche, Paris. 1911.
Flamel, qui vécut de 1330 à 1417 à Paris, exer-
çait le métier d'écrivain et de libraire juré; par
occasion, il devint alchimiste, etil raconte qu'avec
sa femme Perrenelle il réussit par trois fois la
transmutation des métaux. Le fait est qu'il pos-
séda des richesses extraordinaires pour son temps,
richesses qu'il distribua largement aux bonnes
œuvres : fondations et dotalions d’églises, d'hôpi-
taux et de cimetières.
Les documents publiés un peu pêle-mêle dans
cette brochure sont fort curieux; mais je doute
qu'ils permettent au lecteur de retrouver le
secret de Ja pierre philosophale, bien que
M. Schwaeblé reproduise une bonne partie du Livre
des figures hiéroglyphiques traitant de l'art
occulte et de la transmutation métallique.
Il n'est pas exact que la formule maranatha,
que les alchimistes inscrivaient en tête de leurs
traités, ait la signification anathème, que lui
attribue M. Schwaeblé ; c’est une expression
araméenne qui veut dire: Notre-Seigneur, venez.
Elle était en usage parmi les premiers chrétiens,
et saint Paul l’a inscrite comme conclusion de sa
première Epitre aux Corinthiens.
392
COSMOS
3 OCTOBRE 419192
FORMULAIRE
Entretien des lanternes de projection. —
Quand les lanternes de projection commencent à
se ternir, il faut les frotter avec du chlorure d'an-
timoine et polir au moyen d'un chiffon sec. On
peut encore employer la formule suivante :
Sulfate de fer............... Voie 10 g
Arseñic blanc... 10 g
Acide chlorhydrique...... .......... 120 cmi.
OU dcr ii dire i 120 cm“.
Étendre cette solution sur le métal. Quand la
teinte désirée est obtenue, sécher à la sciure de
bois et frotter avec un chiffon imbibé d'huile de
lin. (Photo-Revue.)
Pour préparer de la toile goudronnée. —
On commence par faire bouillir ensemble assez
longtemps 4,5 l d'huile de lin avec 400 grammes
de cire jaune. Le vase doit être assez grand; veiller
à ce que le liquide ne s'emporte pas, et faire d’ail-
leurs cette préparation à l'air libre. On donne
alors sur la toile une première couche de ce mé-
lange, on laisse sécher, on ajoute du goudron au
surplus de cette préparation et on applique une
seconde couche. (Inventions illustrées.)
PETITE
Adresses des appareils décrits :
Compteur kilométrique : Kirby Beard et Ci° 5, rue
Auber,Paris. — Auto-kilométreur : Chauvin et Arnoux,
185, rue Championnet, Paris. — Compteur kilométrique-
indicateur de vitesse combinés Daclin : Lambrechts,
boulevard de Belleville, 47.
M. A. B., à IL. — Manuel théorique et pratique de la
mélallurgie du fer,par AÀ.Levrcur (2 vol.,50 fr). Librai-
rie Dunod et Pinat, 49, quai des Grands-Augustins,
Paris; et, pour l'élecitro-métallurgie Traité théo-
rique et pratique d'électro-mélallurgie, par A. MINET
(20 fr). Librairie Hermann, 6, rue de la Sorbonne,
Paris. — L'électricité industrielle, I partie, par
C. Lesors (4 fr). Librairie Delagrave, 15, rue Soutllot.
Paris.
= M. C. S., à B., au B. — Nous ne savons si la conser-
vation des œufs par le froid dans une atmosphere
d'acide carbonique est entrée dans la pratique indus-
trielle. Le système a été indiquéil y a quelques anntes
(en 1908) par M. Lescardé. Vous trouverez des rensei-
gnements techniques sur ce sujet dans l'ouvrage :
L'wuf de poule, par LEscanvé (3 fr). Librairie Dunod
ct Pinat, 4, quai des Grands-Augustins, Paris.
M. dela R, à la L. —- Nous isnorions la fermeture
de cette maison. Vous pourrez sans doute faire répa-
rer votre barometre chez Tonnelat, fabricant d'instru-
ments de précision, 25, rue du Sommerard, Paris.
M. M.F., à B. — Le Cosmos a donné une note sur
la lampe Dussaud (voir n° 14414 du 29 février dernier).
Ces lampes se trouvent à la maison Ducretet, 75, rue
Claude Bernard, ou à la Compagnie internationale de
la lumière froide, 27, rue Mogador, à Paris; nous en
ignorons les prix. Yous pouvez vous en servir sur une
distribution électrique à 130 volts, à la condition que
votre transformateur réduise la tension à celle indi-
quée par le constructeur. — Vous ne pouviez pas,
pour ce bas prix, compteravoir une excellente lunette.
Il est évident que l'objectif a toutes sortes de défauts
qui influent sur la netteté. Il faudrait, pour mieux
voir, adapter un objectif à plusieurs verres, correcte-
inent taillés.
M. F. F., à C. — La Gaselle astronomique est l'or-
“ane de la Société astronomique d'Anvers. Adminis-
tration, 19, rue Thisius, Deurne-Anvers (Belgique).
CORRESPONDANCE
Abonnement : 3 francs par an; le numéro, 0,60 fr. C'est
une revue sérieusement faite et très au courent des
choses astronomiques.
M. G. L., à D. — Nous n'avons pas reçu ce livre et
ne le connaissons pas. Nous ne pouvons donc vous
renseigner au point de vue rédaction et illustrations.
Mais les auteurs sont connus comme savants et comme
chrétiens, et leur nom est une sûre garantie de la
valeur de l'ouvrage.
M. V. G. — Au point de vue théorique, les rende-
ments thermique et mécanique sont moins bons dans
un moteur polycylindrique que dans un monocylin-
drique, à puissance égale; mais la différence est assez
faible, et on préfère en général les 4-cylindres et
mème les 6-cylindres, qui sont bien mieux équilibrés.
Le mélange détonant air-essence doit varier suivant
l'allure du moteur: à faible vitesse de rotation, il faut
augmenter la proportion d'essence; à grande vitesse,
augmenter celle de l'air. Dans le carburateur com-
mandé, le conducteur règle la proportion d'air et
d'essence; dans le carburateur automatique, c'est le
moteur qui proportionne les deux éléments suivant
ses besoins. Pour les chauffeurs très habiles, la com-
mande réglable est sans doute préférable; dans la
majorité des cas, le carburateur automatique évite de
fausses manœuvres de la part du conducteur, et ces
appareils sont les plus communs et se répandent de
plus en plus.
M. L. P., au M. — Les pierres « qui grossissent »
sont des stalagmites. En ce qui touche la grotte de
Saulges, il n'y a pas de doute qu’on se trouve en pré-
sence d'un phénomène stalagmitique.
M. H. de la H., à F. — Horloges électriques Magnėéta
et Brillié, 80, boulevard Sébastopol.
M. P. M., à V.— Le Cosmos a donné l'explication de
la dépèche météorologique de la tour Eiffel dans le nu-
méro 1390, du 16 septembre 1911. Veuillez vous y repor-
ter. Si vous voulez appliquer les renseignements ainsi
fournis à la prévision du temps, vous pourrez vous
procurer le livre de M. Bergert : Le lemps qu'il fait, le
temps qu'il fera (10 fr). Librairie Delagrave, 15, rue
Soufilot, Paris. -
imprimerie P. Fsron-Vaau, 8 et 5, rue Bayard, Paris. VIII°.
Le gérant : Faicit.
No 1446 — 10 ocroBre 1919
COSMOS
393
SOMMAIRE
Tour du monde. — La comte 1912 a (Gale). L'Observatoire de N.-D. de Montserrat à Cuba. Puits de nuit
La pénétration de la gelée dans le sol. Nouveaux laboratoires de la Société Krupp à Essen. L'énergie élec-
trique fournie par les forces hydrauliques. Le téléphone à Pékin. Féminisme. La cuisson des routes. Les
réflexions nuisibles sur les surfaces des lentilles optiques. Un objectif photographique de t mètres de foyer.
Pellicules cinématographiques voilées par les décharges électriques. Les automobiles au Japon. Nouvel
exploit aéronautique. Les victimes de l'aviation. L'état civil en ballon et en atroplane. Adolphe Stiegelmann.
La montagne de fer de Durango, p. 393.
Une bibliothèque unique au monde, L. KUENTZ, p. 398. — Un scaphandre d’un nouveau genre, Gra-
DENWITZ, p. 398. — L’actinomycose, AcLopur, p. +00. — La fixation des vers parasites dans l’intes-
tin, Boyer, p. 402. — L’industrie des foies gras, Rocer, p. 40+. — Le grand bassin en eau profonde
de Southampton, BeeT, p. 05. — Les ressources mondiales d'énergie, Mancnaxn, p. #09. — Les
jouets au Concours Lépine (suite), Founnier, p. +12. — Sociétés savantes : Académic des sciences,
p. #15. Société astronomique de France, B. Larorn, p. #16. Association franaise pour l'avancement des
sciences, Hénicnanb, p. #17. — Bibliographie, p. #18.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
La Comète 1/12 a (Gale). — Grâce au temps
superbe de la première semaine d'octobre et au
mouvement propre de la nouvelle comète qui
DISTANCE | feat
ee 1012 | ASCENSION R
DÉCLINAISON
Ce ^ n T |
Miauit de Berlin DROITE Au Soleil! A la Terre | stellaire
15"43°24° | + N27,110,:37| 1,110! 6,3
|
| Oct. 13
|
14 15 86 50 | + 928 :
15 | 15 4617 | + 1028 3
| I6 | 15 47 28 | + 1126 7 :
I7 1548 42 | + 1239 910,760 1,760 6,8
| 13 | 1549 53 | + 1320 0 |
| 19 [1551 0 | +41414 6
| 20 [15352 5 | Li 82
| 2| 1553 8 | +16 06 610,790 1,177) 6,6
= 2 |153 97 PE 65 à
23 (14555 S | LIT: à
24 [1556 5 | +18: 0
25 [14557 0 | + 1920 510,826! 1,205! 6,7.
26 | 1557 54 | + 20 8 1
27 1558 87 | + 2053 0
2N | 1559 38 | + 21H 14
29 | 16 O0 29 22 26 51 0,8G8T 1,233 6,9
30 | 146 149 | HBU
| 31 [16 2 9 |2355 2
Nov. 4 |46 238 |4 22387
2 |16 347 | + 2521 610,918! 1,26! 7,0.
| 3 [16 536 | + 26 3 9
| 5 [16 5 24 | + 26045 8
: 5 [16 612 | + 2727 2
R 6 ti 7 1 | +H92s 8 310,26! 1,274| 7,2
l'entraine assez rapidement vers le Nord, l'astre
a pu ètre observé un peu partout en Europe à partir
du 3 M. Gonnessiat l'avait vu à Alger dès le
T. LXVH. N° 4446.
26 septembre. Le 4 octobre, la comète était bien
visible dans le Serpent peu après la fin du crépus-
cule. Nous l'avons trouvée sans peine avec des
jumelles, mais nous avons ensuite reconnu sa pré-
sence à l'œil nu, son éclat étant voisin de la gran-
deur 5,7. L'astre présente maintenant une queue
très faiblement visible sur un demi-degré environ,
mais qui se développera peut-être encore par la
suite. Il est assez rare qu’on puisse observer ainsi
une comète au moment mème où elle passe à son
périhélie. L'astre se trouvait assez près de la posi-
tion que lui assignait le calcul. L’ascension droite
correspondait, à très peu de chose près, à celle de
l'éphéméride, mais la déclinaison était plus forte
d'environ trois quarts de degré.
M. fbell a calculé, d’après des éléments corrigés,
une nouvelle éphéméride dont nous donnons un
extrait à l’usage des observateurs (voir le tableau):
On pourra suivre facilement la comète avec une
bonne jumelle ou la moindre petite lunette. Elle
va traverser la tète du Serpent et entrer ensuite
dansla Couronne boréale, mais, comme elle s'éloigne
à la fois du Soleil et de la Terre, son éclat dirmi-
nuera progressivement.
MM. H.-F. Wood, à Johannesburg, d'après des
observations des 11, 43 et 15 septembre; C. J. Mer-
field, à Melbourne, d'après des observations des
10, 43 et 16 septembre, ont calculé les éléments
suivants de l'astre :
Wood Merfield
T = 1912 oct. 1S0 1912 oet, 4,96 T. M. G.
w = Isu 25 30 |
Q = nr 206 6 - 1912,0
= nf 54 T9 54 \
g = U,TOK4 0,104
Ces éléments paraissent moins certains que ceux
que nous avons déjà publiés,
39% COSMOS
MÉTÉOROLOGIE
L’Observatoire de Notre-Dame de Mont-
serrat à Cuba. — Les RR. PP. Jésuites de
l'Observatoire du collège de Notre-Dame de Mont-
serrat, à Cienfuegos (Cuba), viennent de publier,
sous la direction du P. Simon Sarasola, un pre-
mier rapport des travaux de leur Observaloire
météorologique, avec des notes rappelant les obser-
vations faites depuis 1886; elles comprennent une
étude sur les cyclones et les pronostics qui con-
cernent les prévisions de ces météores.
Cet Observatoire prend une grande importance
par suite de l'ouverture prochaine du canal de
Panama.
Ce volume débute par un historique de l’établis-
sement et une descriplion de ses moyens d’action.
Son organisation est d'ailleurs parfaite; il possède
tous les instruments désirables, dont neuf enregis-
treurs. Les observations s’y poursuivent avec une
régularité admirable et y sont très mullipliées,
quoique les l’ères n'aient pas cru devoir s'astreindre
aux règles adoptées dans le système international.
PHYSIQUE DU GLOBE
Puits de nuit. — Il existe, dans les déserts de
l'Australie occidentale, de singuliers puits qui,
à sec pendant toute la journée, fournissent de l'eau
en abondance pendant la nuit. L'arrivée de l'eau
est annoncée par un sifflement de l'air quis'échappe
du terrain formant le fond des réservoirs. Le
D° Malcolm Maclaren, qui a étudié un de ces
curieux phénomėnes géologiques, a constaté que
l'eau arrive dans ces puits par un long et étroit
boyau partant d'une cavité formée par une fine lame
de gneiss, cavilé séparće de la roche qui se trouve
en dessous; il pense qu'à la chaleur du jour cette
lame se dilate et, descendant dans la cavité, forme
une dépression dans laquelle l’eau s'emmagasine;
à la fraicheur, la lame se contracte et chasse l'air
et Peau dans le boyau communiquant avec le puits.
Cette explication n’est qu'à moitié satisfaisante.
La pénétration de la gelée dans le 801. — La
profondeur à laquelle la gelée pénètre dans le sol
est une donnée qui intéresse l'agriculture et l'hor-
ticulture. M. W. Naegler (Das Wetter; Prome-
theus, 1904) publie les chiffres obtenus dans un
certain nombre de stations météorologiques alle-
mandes.
Pendant l'hiver rigoureux 1900-1901, la gelée
pénélra dans le sol, à Potsdam, à une profondeur
de 1 mètre. À Bonn-Poppelsdorf, Witzenhausen,
Helimstedt et Breslau-Rosenthal, elle ne dépassa
pas la profondeur de 6 ou 7 décimètlres; à Aix-la-
Gaapelle, Brème et Jéna, 5 décimétres. Strasbourg
est dans des conditions remarquables; de 11402
10 OCTOBRE 1919
à 1909, il n'a pas gelé à plus de 3 décimètres.
À Kænigsberg, par contre, le sol gèle parfois jus-
quà 1,2 m.
La nature du sol joue un ròle dans la vitesse de
propagation de la gelée, qui est très grande dans
le sable, moins grande dans l'argile et faible dans
l’humus. L'humidité du sol aussi intervient, quoique
faiblement. Un sol couvert (de cultures, de fumier,
de paille, de neige) est évidemment moins sensible
à la gelée.
CHIMIE
Nouveaux laboratoires de la Société Krupp,
à Essen. — Ces laboratoires, complètement réin-
stallés depuis l'an dernier, sont décrits par
M. V. Bernard dans la Revue de Métallurgie,
d'après qui nous reproduisons les quelques chiffres
suivants. À défaut d’une descriplion détaillée, qui
demanderait un énorme volume, ces renseigne-
ments témoigneront de l'extrème imporlance prise
par le laboratoire dans la métallurgie comme dans
Ja plupart des autres industries.
L'espace occupé par les diverses salles atteint
11000 mètres carrés. Le sous-sol et les quatre
étages comprenant celle superficie se composent
de plus de 450 pièces, chacune de destination spé-
ciale. Outre les laboratoires de chirnie, il existe
des laboratoires d'essais mécaniques comparables
à de véritables usines pour les dimensions et la
puissance des appareils: on trouve là un pont roulant
supportant 3 000 kilogrammes, une machine pour
essais de traction, flexion, torsion, elc., exerçant
un effort de 100 000 kilogrammes; une presse pour
essais d'écrasement fournissant un elfort de
300 000 kilogrammes. Une véritable armée de chi-
mistes, de physiciens, d'essayeurs el de manœuvres
travaillent dans le nouvel Institut, qui ne le cède en
rien aux plus importants laboratoires. H. R.
ÉLECTRICITÉ
L’énergio électrique fournie par les forces
hydrauliques. — En 1911, on a établi en Suède
des usines hydrauliques destinées à donner de l’élec-
tricilé, représentant une puissance de 40 000 che-
vaux, si on y ajoute les augmentations réalisées
par les usines précédemment créées, cette augmen-
lation, pour une seule année, monte à 67 667 che-
vaux. La hauteur des chutes utilisées va jusqu'à
712 mèlres, mais en général ne dépasse pas
25 mètres.
Au Brésil, une Compagnie se propose d'utiliser
les chutes Alphonso sur la rivière San-Francisco.
Au début, on captera 200 000 chevaux, mais plus
tard on compte arriver à obtenir une puissance
de 1 300 000 chevaux.
Le téléphone à Pékin. — Ceux qui ont connu
la Chine il y a vingt ans et, à fortiori, ceux qui y
-_-——
No 1416
ont voyagé il y a un demi-siècle, n’apprendront
pas sans quelque étonnement que le téléphone
sévit sérieusement à Pékin. Le gouvernement fait
construire des hôtels du téléphone, et l'on a déjà
6 400 abonnés. Or, dans ces abonnés, on en compte
3 000 dans la ville chinoise et dans la ville tartare.
Les légations communiquaient déjà entre elles;
mais, aujourd’hui, elles sont reliées avec les bureaux
centraux.
Féminisme. — La Western Union Telegraph C°
se propose de remplacer à Pittsburg les petits télé-
graphistes porteurs de dépêches par des jeunes
filles. Espérons que ce sera un progrès sans revers.
GÉNIE CIVIL
La ouisson des routes. — Les terres basses
du Mississipi sont formées d'alluvions, argiles
chargées de nombreux débris organiques. Un tel
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PRÉPARATION DE LA CUISSON.
terrain est essentiellement défavorable à l'établis-
sement des routes, que la moindre pluie fait
boueuses et sans consistance. Les matériaux solides
dont on pourrait couvrir les chaussées ne se
trouvent pas dans le pays. On y a remédié en fai-
sant cuire sur place ces argiles.
LA CUISSON.
La route étant tracée, on y creuse des tranchées
que l’on remplit de matières inflammables, le plus
souvent de bois qui abonde dans ces terrains; on
recouvre ce combustible d’une nouvelle couche
d'argile; on conserve les évents nécessaires à la
combustion, et on y met le feu. Celui-ci est entre-
COSMOS
99
tenu plusieurs jours, sous une surveillance con-
tinue, comme celle exercée par nos charbonniers
sur leurs meules dans les bois: on bouche les fis-
surés qui peuvent se produire, on ajoute du com-
bustible Jà où il fait défaut. Les matières orga-
niques contenues en quantité dans ces dépôts brü-
lent en même temps et s'ajoutent ainsi au com-
bustible fourni à l'opération.
Quand la combustion est complète, il ne reste
qu'à unir la surface, à la rouler, et on possède un
chemin qui, insensible aux pluies et à l'humidité,
résiste au roulement des plus lourdes charges,
même pendant le mauvais temps de l'hiver,
époque où jadis tout charriage était impossible.
L'établissement d’une route de ce genre revient à
600 ou 1 000 francs le kilomètre, suivant sa largeur.
PHOTOGRAPHIE
Les réflexions nuisibles sur les surfaces des
lentilles optiques. — Dans un appareil d'optique,
à chaque passage du milieu verre dans le milieu
air ou inversement, les rayons lumineux sont par-
tiellement réfléchis; l'intensité lumineuse de l’image
est, pour autant, diminuée. Certains objectifs pho-
tographiques, formés d'un grand nombre de len-
tilles non collées, peuvent, du fait de ces réflexions
nuisibles ainsi que de l'épaisseur totale du verre,
qui n'est jamais parfaitement transparent, perdre
une bonne part de leur luminosité.
La Photographie des couleurs analyse un travail
de M. R.-W. Cheshire, d'où il résulte que la quan-
lité de lumière (on ma tenu compte que de la
lumière visible, et on a fait abstraction des radia-
tions invisibles du spectre) transmise par les objec-
tifs photographiques se répartirait comme suit,
pour les types d'objectifs différents comportant de
deux à dix surfaces réfléchissantes, l'épaisseur de
c iacune des lentilles composantes étant de 5 mil-
limètres.
Nombre de Proportion de Ouvertures
sarfaces. lumière transmise. équivalentes,
2 0,888 fr 11,0
4 0,786 f: 10,4
6 0,692 f -9,9
8 0,603 FT 8529
10 0,525 FE TRS
Ainsi, un objectif composé de cinq lentilles non
collées, soit dix surfaces de séparation verre-air,
ne transmet guère plus de la moitié de la lumière
bu’il a reçue.
La dernière colonne indique les ouvertures de
diaphragme pour lesquelles les divers types d'objec-
tifs admettent une même durée de pose. Un objectif
simple travaillant avec une ouverture f: 44 trans-
met autant de lumière qu'un objectif composé de
quatre lentilles non collées travaillant avec une
ouverture voisine de f: 8.
396
Ces indications concernant la luminosité des
objectifs à surfaces réfléchissantes multiples n’ont
rien d'absolu, car la luminosité de l'objectif dépend
encore de bien d'autres facteurs, qui peuvent jouer
un role important: par exemple, l'épaisseur des
verres et leur manque de netteté et de transparence,
surtout vis-à-vis des lumières violette et ultra-vio-
lette qui, en photographie, sont les plus photo-
géniques.
Un objectif photographique de 4 mètres de
foyer. — Il a été construit par P. Zschokke dans
les ateliers C. P. Goerz. A pleine ouverture, 16 cen-
timètres de diamètre, ce qui correspond à une
ouverture relative de f : 25, l'objectif couvre une
plaque du format 18 X 24.
L'établissement d’une pareille pièce d'optique
n'était pas un travail facile: il s'agissait d'abord
d'obtenir une coulée de verre bien homogène, et,
en second lieu, de tailler et de polir suivant des
surfaces rigoureusement sphériques.
Avec une longueur focale de 4 mètres, un tel
objectif donne directement de magnifiques agran-
dissements; sur l’épreuve d’un clocher photographié
à une distance de 4 kilomètres, on aperçoit très
bien la graduation des minutes du cadran d'horloge.
Pellicules cinématographiques voilées par
les décharges électriques. — Le capitaine
F.-E. Kleinschmidt, de l'expédition du musée Car-
negie, a rapporté de l’Alaska et de la Sibérie des
vues cinématographiques. Un certain nombre de
celles-ci étaient voilées comme si elles eussent été
enregistrées par temps de brouillard, et on ne
trouva pas tout de suite l'explication. La cause en
était les décharges électriques produites à la faveur
du froid sec de ces régions, soit entre les divers
points de la pellicule de celluloïd, soit entre la
pellicule et les pièces métalliques de l'appareil
cinématographique.
L'accident est déjà connu et se produit tout aussi
bien par les temps secs et chauds (Cosmos, t. LX,
p. 502). Pour v parer, on a proposé de recouvrir la
bande de celluloïd d'une couche de gélatine trans-
parente sur le côté opposé à la couche sensible.
AUTOMOBILISME
Les automobiles au Japon. — Trop heureux
les piétons japonais s'ils connaissent leur bonheur!
En effet, les statistiques révèlent qu’on ne compte
qu'environ troiscentsautomobilesen usage pourtout
le pays. Ce nombre peut paraitre très restreint pour
un État dont la superficie équivaut à peu près aux
quatre cinquièmes de celle de la France et dont
les habitants se piquent de plus en plus de rivaliser
avec les nations d'Europe, et mème de les surpasser
dns la voie des progrès industriels. Il y a, à cette
infériorité, deux raisons : en premier lieu, il con-
COSMOS
10 ocTOBRE 1912
vient de remarquer que les prix des automobiles
sont, au Japon, trop élevés, pour que l’emploi de
ces voitures s’y généralise rapidement; en second
lieu, l’état des routes laisse fort à désirer dans la
plupart des provinces. Assez incertain actuellement,
l'avenir de l'industrie automobile y demeure tou-
tefois susceptible de développement, si quelque
jour les Japonais s’avisent, à l'instar des Euro-
péens, de prendre goùt au tourisme et s'il devient
plus aisé de rouler sur les chemins dans toutes les
parties de l'empire.
Pour les raisons que nous venoms d'indiquer, les
voitures à bas prix semblent ètre les plus recher-
chées, quel qu’en soit le genre. Au premier rang
des pays fournisseurs, viennent les États-Unis.
C'est ainsi que sur cent voitures automobiles im-
portées au Japon au cours de l’année 1914, soixante-
sept véhicules proviennent des États-Unis; à la
suite, se classent l'Allemagne et l'Angleterre; la
première, avec quatorze voitures, et la seconde,
avec treize: quant aux six autres voitures, elles
ont été fournies par la France.
Il est évident que notre pays, où la locomotion
mécanique a vu le jour et a pris le développement
que l’on sait, ne tient pas dans cette lutte écano-
mique la place dont il est digne. Il est donc à sou-
haiter que nos constructeurs cherchent à assurer
sur ce marché nouveau un débouché plus considé-
rable à leurs produits. L.G.
AVIATION
Nouvel exploit aéronautique. — Le 6 octobre,
l'aviateur Daucourt, concourant pour la coupe
Pommery (la plus grande distance en ligne droite
accomplie entre le lever et le coucher du Soleil), a
réussi à voler de Valenciennes à Biarritz, soit une
distance de 850 kilomètres environ.
Parti de Valenciennes à 5"59" du malin, il a
fait escale à Buc, Poitiers, Bordeaux, et est arrivé
à Biarritz à 5"30® du soir. Son intention était
d’aller à Saint-Sébastien, mais il en a été empêché
par la nuit.
Plus la saison avance et plus les jours raccour-
cissent. C’est donc un très bel exploit que d’avoir
dépassé de 50 kilomètres la distance parcourue par
l'aviateur Bathiat quelques jours plus tt; et il est
probable que cette prouesse ne sera pas renouvelée
cette année.
Les victimes de l’aviation. — Depuis l'année
1908, époque des premiers vols mécaniques,
jusqu’au 21 septembre dernier, jour où se tua le
célèbre pilote anglais Astley, l'aviation a causé la
mort de 202 personnes, soit en moyenne 50 par
an. La première victime a été, on s'en souvient, le
lieutenant américain Selfridge, passager d’Orville
Wright(47septembre 1908). Voicicomment serépar-
tissent, par nationalité, les 202 personnes tuées :
N° 1:46
France : 57, dont 31 civils, 26 officiers (2 avia-
trices, à passagers).
{lemagne : 42, dont 28 civils et 14 officiers
(5 passagers).
nerique : 30, dont 27 civils et 3 officiers (4 avia-
trice, 3 passagers).
Angleterre : 22, dont 15 civils et 7 officiers (4 avia-
trice, 3 passagers).
Italie : 45, dont 9 civils et 6 officiers ({ passager).
Russie : 43, dont Ycivils et 4 officiers (1 aviatrice,
3 passagers).
Belgique : 5 civils (1 passager).
Expagne:4, dont3 civils et 1 officier (2 passagers.)
Autriche : 3 civils (1 passager).
Suisse: 3 civils (4 passager).
lyumanie : 3, dont ? civils et 1 officier.
(irèce, Hollande, Monténégro, Pérou, Brésil et
lustralie, chacun avec un pilote civil. |
Depuis, il y a eu au moins cinq accidents mortels.
Cette liste funèbre est vraiment longue, et fait
considérer à première vue l'aviation comme un
sport extrêmement dangereux. Cependant, les
paroles prononcées à la Chambre par le colonel
Hirschauer, au mois de juin dernier, doivent modi-
fier cette opinion.
En effet, voici ‘a statistique qui a été établie au
sujet des pilotes mililaires, qui volent par tous les
temps, et ont fourni une large part de victimes.
Dans le deuxième semestre de 1911, il s’est pro-
duit 9 accidents mortels. Les aviateurs militaires
étaient au nombre de 420, et ils ont parcouru
300 000 kilomètres en aéroplane (proportion : un
tué pour 33000 kilomètres environ, et un sur
43 pilotes).
Dans le premier semestre de 1912, même nombre
d'accidents mortels, pour 250 aviateurs et 650000 ki-
Jomètres parcourus (proportion: un tué pour
72 000 kilomètres, et un sur 28 pilotes).
On voit que, proportionnellement aux distances
parcourues, le nombre des victimes, qui sera tou-
jours trop grand, est cependant moins considérable
qu'on serait tenté de le croire de prime abord.
L'état civil en ballon et en aéroplane. — On
sait que jusqu'à présent chaque nation a désigné
une ville où sont enregistrés les actes de l'état
civil que l’on a pu avoir à établir à bord de ses
navires. Chez quelques-unes, c’est le port d'attache
du navire ou lune de ses relàches; en France,
cest Paris qui a ce privilège. Un petit Français qui
voit le jour dans le Pacifique est un petit Parisien!
Les progrès de la navigation aérienne obligent
à prendre quelques mesures analogues pour ceux
qui s’y livrent; jusqu’à présent, on ne compte
guère de mariage ni de naissance en aéroplane,
mais les morts y sont moins rares. Le Comité
international d'aérostation demande que l’acte
mentionnant un de ces événements de la vie civile
soit enregistré à la première escale de l’aérostat
COSMOS
—— —
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14
UNIVERSITY
OF f
ou de l'aéroplane. Il y aura là un ef Ati OP EM.
cultés pour ceux qui auront eu la mauvaise idée
de naïitre en l'air ou pour les héritiers de ceux qui
seront morts dans les nuages.
VARIA
Adolphe Stiegelmann. — Nous avons le
regret d'annoncer la mort d'Adolphe Stiegelmann,
qui était depuis quelques années notre collabora-
teur très apprécié. Nos lecteurs ont souvenir des
arlicles qu'il a écrits dans notre revue sur les inci-
sions rupestres des Alpes-Maritimes, sur l'art parié-
tal des grottes pyrénéennes, sur les peintures et la
stratigraphie paléolithiques en Espagne.
Né à Strasbourg, il vécut longtemps à l'étranger,
aux Indes anglaises et à Madagascar. Homme de
grande érudition, il parlait six langues orientales.
Depuis six ans qu'il était revenu en Europe, il s'est
dévoué plus spécialement à la science de la
préhistoire, etila collaboré à maintes revues fran-
çaises, allemandes et anglaises.
ll est mort à quarante-trois ans, au sanatorium
Theodosianum de Zurich, laissant aux siens et à
ceux qui l'ont connu l'impression d'un généreux chré-
tien et d'un homme plein de bonté el de modestie.
La montagne de fer de Durango. — Tout le
sol aux environs de Durango (Mexique) contient
du fer en abondance et tout fait supposer que les
filons métallifères s'étendent sous la ville mème.
Il ne s'agit pas ici cependant des nombreuses
météorites qui couvrent le pays et dont la plus
célèbre, que de Humboldt considérait comme la
huitième merveille du monde ne doit pas peser
moins de 46 000 à 19 000 kilogrammes.
Dans cet immense gisement de fer, le point le
plus remarquable est le Cerro de Mercado. qui a
reçu le nom de l'aventurier qui la découvert
en 1562; il cherchait de lor, et n'ayant trouvé
que du fer il se vit désabusé, ne se doutant guère
qu'une telle mine de fer était aussi précieuse
qu'un riche gisement d’or. En effet, cette montagne
qui sort du sol comme un dyke est formée d’un
minerai de fer d'une richesse de 70 à 80 pour 100;
elle a 196 mètres de hauteur, et couvre une sur-
face de 2415 mètres de longueur sur 500 à
800 mètres de largeur : elle est située à 2 kilo-
mètres au nord de Durango.
Malgré quelques tentatives, cette richesse n'a pu
être exploitée jusqu'à présent, ce qu'il faut attribuer
au défaut de moyens de transport el à l'absence de
combustible. Il parait que les choses vont changer
grâce à la prochaine ouverture d'une ligne de
chemindefer.le Duranyo-Llano-Grande-Raïleay,
qui, à défant de charbon trop éloignė, apportera
le bois des forèts traversées par la voie. C'est une
solution, fâvheuse d'ailleurs, puisque c'est un nou-
veau procédé de déboisement.
be
`
9
COSMOS
10 ocToBRE 1919
Une bibliothèque unique au monde.
C'est seulement depuis la proclamation de la
nouvelle constitution que les étrangers sont admis
à visiter, à Constantinople, la bibliothèque Sainte-
Sophie, dont l'existence était jusqu'alors, pour ainsi
dire, ignorée même des habitants de la capilale
ottomane.
Commencée ailleurs par le sultan Mahmoud
(1142-1158), celle bibliothèque est certes la plus
originale actuellement connue. Elle ne contient
que 2 000 volumes, mais pas un seul imprimé, rien
que des manuscrits.
Embpilés comme des marchandises, ces manuscrits
gisent sur de larges étagères protégées par un
épais treillage en fil de fer, dans une petite salle
altenante à la mosquée Sainte-Sophie, ancienne
basilique chrétienne.
L'établissement possède des murs revèlus, en
dehors, dune couche d'argile blanche, et ornés,
en dedans, de belle mosaïque persane. Il est
surmonté d’un dôme écrasé et aplati en brique
émaillėe. Les fenêtres, pelites et étroites, sont
gardėes par de lourds barreaux de fer.
Le catalogue est chose inconnue à Sainte-Sophie.
D'ailleurs, peu de personnes peuvent se vanter de
savoir lire ces vieux manuscrits qui, depuis des
s'ècles, dorment tranquilles dans la poussière de
leurs élagères.
. Une dizaine des plus rares sont enfermés dans
un bahut ancien, ayant la forme d’une mosquée.
Entièrement plaqué de nacre, ce meuble antique
— il a plus de deux mille ans — constitue à lui
seul une merveille d'une valeur inestimable.
Chacun de ces volumes, dont le plus grand
nombre compte lrois mille ans passés, vaut au
moins 40 000 à 50000 francs.
Plusieurs d’entre eux sont écrits de la main
mème de leurs auteurs, dans la langue classique
que parlaient les Turcs primitifs du Turkestan.
Personne ne connait plus cette langue, à part
quelques savants célèbres de Khiva (Turkestan) qui
sont encore familiers avec le texte deces ouvrages.
Il ya, entre autres, un spécimen magnifique de
calligraphie relié en or (2, m X 3,5 m) qui est,
dit-on, un ancien poème tarlare appelé Divan,
écrit en l’an 911 par Hussein Biscara, un des plus
fameux poètes tartares. Ce volume a été donné en
cadeau à un sultan de Turquie, il y a quelques
siècles, par un shah de Perse. Le texte est en langue
persane et chaque page est enluminée de bordures
de 50 centimètres, de dessins géométriques formés
de mosaïque découpée dans des feuilles d'or et du
papier de couleurs voyantes. Le volume contient
52 feuilles et 104 pages toutes enluminées. La
reliure est très riche et très luxueuse.
ll y a, en outre, deux volumes en sanscrit,
cadeau d'un shah de Perse à Mahomet le Grand.
Le meuble de la bibliothèque renferme égale-
ment un autre volume magnifique, appelé Nargaï.
Il contient les observations de Mahomet le Cham-
pion, premier sultan turc de ce nom, sous le
règne duquel (1403-1421) le goùt des lettres com-
mença à prévaloir parmi les Osmanlis ou Turcs
d'Europe. Chaque feuille de parchemin est d’une
teinte différente. Les coins, le haut et le bas des
pages sont ornés de réseaux d'or, et la plupart
d’entre elles portent de larges bordures formant des
dessins d’une netteté remarquable.
Un autre beau volume écrit en persan traite des
étoiles. La couverture, en cuir orné d’émail et
incrusté de perles fines, est un vérilable chef-
d'œuvre.
Le plus remarquable de tous ces volumes est un
immense in-folio ayant 3,75 m sur 5 mètres, formé
de vélin, couvert de la plus belle écriture que l'on
puisse imaginer. C'est une copie d'un ouvrage
connu sous le nom de Canon de la médecine,
traité de botanique et de médecine d'Avicenne
(980-1037), célèbre médecin arabe surnommé le
prince des médecins. L'ouvrage contient 300 pages
dont chacune est ornée d'un croquis à l'encre,
d’une plante, d'un pôisson, d'un insecte ou d'un
autre animal. Ces illustrations sont toutes dans les
couleurs naturelles de l’animal ou de la plante
qu'elles représentent, avec des délails d'une préci-
sion et d'une finesse merveilleuses. Les grandes
bibliothèques de l'Europe possèdent presque toutes
une copie de ce célèbre traité, mais aucune n'est
aussi ancienne que celle de la bibliothèque de
Sainte-Sophie — elle date de 4 229 environ — ni
surtout aussi soignée et aussi somptueuse.
L. KUENTZ.
Un scaphandre d’un nouveau genre.
Le nouveau scaphandre construit par l’usine
Driegerwerk, à Lübeck, assure au plongeur une
indépendance absolue vis-à-vis de l'air atmosphé-
rique, en lui fournissant de l'oxygène et en régé-
nérant l'air qu'il expire,
Ce scaphandre comporte un dispositif porté sur
le dos à la facon d’un havresac et où l'air circulant
dans le casque et le costume du plongeur, débar-
rassé automatiquement des gaz délétères produits
par la respiration, est régénéré par un apport
N° 1446
d'oxygène. Le plongeur dispose ainsi de 60 à
70 litres d’air par minute, c’est-à-dire de 3 600 à
4 200 litres par heure, ce qui suffit même pour les
travaux les plus exigeants.
Le dispositif régénérateur comporte des cylindres
d'acier remplis d'oxygène comprimé, une cartouche
de potasse et le mécanisme circulatoire, à savoir
LE SCAPHANDRIER VU DE DOS.
une tuyère d'aspiration et de pression et une sou-
pape réduisant la pression. Il est relié au casque
par deux courts tuyaux de caoutchouc, dont l’un
sert à évacuer l'air usé, tandis que l’autre fournit
un apport d'air frais.
Cet appareil est mis en marche en ouvrant une
soupape d'un maniement très facile ; il fonctionne
peadant deux à {rois heures, suivant l’adresse du
plongeur et la quantité d'acide carbonique dégagée
par ses poumons.
Au lieu du lest de plomb usuel, le plongeur porte
sur sa poitrine un poids constitué par des réci-
pients en acier renfermant de l'air ou de l'oxygène
comprimé. Toutes les fois qu'il désire atteindre la
surface sans assistance extérieure, il n’a qu'à
ouvrir la soupape de ces récipients, de façon à
faire entrer dans son costume de scaphandrier
l'air nécessaire pour lui donner la poussée ascen-
dante voulue. C'est ainsi qu’en cas de danger, il
montée en quelques instants à la surface de l’eau.
Une soupape de süreté qu'actionne tout excès de
pression empêche le costume du scaphandre
d’éclater sous l'influence de la surpression due à
une montée brusque et imprévue. Si, d'autre part,
le plongeur faisait une chute, même à une profon-
deur peu considérable, sa vie courrait des dangers
COSMOS
399
fort sérieux, si son costume ne comportait aucun
dispositif de sûreté. Tout accroissement imprévu
de pression enfoncerait en effet son corps dans le
casque, comme le piston d'une machine, en même
temps que la congestion concomitante risquerait
de produire un évanouissement empêchant le plon-
geur de faire le nécessaire pour prévenir un acci-
dent. Afin d'éliminer ce danger, le casque du nou-
veau scaphandre a été fait en un tissu caoutchouté
souple et fort, protégé contre les endommagements
mécaniques par une enveloppe métallique. Dans
le cas où le plongeur ferait une chute, la. pression
de l'eau comprimerait non seulement l'air contenu
dans le costume, mais l’air du casque dont le tissu
caoutchouté céderait parfaitement. C’est ainsi que
le plongeur sentirait l'accroissement soudain de
pression uniformément de tous côtés, ce qui
empèêcherait surtout toute congestion de se pro-
duire. Le plongeur pourrait ainsi, sans perdre con-
naissance, faire entrer dans son scaphandre l'air
du lest porté sur sa poitrine, de façon à rétablir
immédiatement des conditions normales. Le casque
est, le cas échéant, muni d'un téléphone à fonc-
lionnement sür. Le câble téléphonique pourrait
ètre combiné avec le cordon de signaleraent en un
LA DESCENTE DU SCAPHANDRIER.
câble de sûreté permettant en cas de danger de
ramener le plongeur à la surface.
L'appareil construit par l'usine allemande est
destiné à des profondeurs maxima de 20 mètres;
des appareils permettant au plongeur de travailler
à des profondeurs plus grandes sont à l’étude.
L'acide carbonique expiré par le plongeur est
400
absorbé dans la cartouche de potasse faisant partie
du régénérateur, et où l’air traverse une série de
plateaux garnis de grains de potasse et de soude.
L'air ainsi débarrassé des gaz délétères de la respi-
ration arrive à la soupape d'aspiration et de pres-
sion, où il est régénéré par un apport de 2 litres
d'oxygène par minute. La conduite à air fournis-
sant de Pair frais à la bouche et au nez du plon-
geur ferme le cycle de circulation. Le costume du
plongeur fonctionne comme sac respiratoire aussi
bien que comme réservoir d'air au moment critique.
COSMOS
10 OCTOBRE 1912
Le principal avantage de cet appareil, c'est qu'il
permet au plongeur de travailler pendant des
heures au-dessous de la surface, sans aucune eon-
nexion avec la terre ou le bateau, quand le c.: don
de sûreté ou le câble téléphonique a été co“pé. Il
se passe parfaitement de toute pompe, le plt. geur
portant sur lui la quantité d’air requise porr en-
tretenir la respiration. Les frais de l'appa:eil en
service sont extrêmement bas.
Dr ALFRED GRADENWITZ.
——— m mma —— c L lM
L'actinomycose.
On désigne sous le nom d’actinomycose une
affection commune au bœuf et à l’homme, et
qui est due à la végétation dans les tissus d'un
champignon inférieur nommé Actinomyces bovis,
ou plus légitimement Discəmyres bovis. Ce cham-
pignon forme dans les organismes où il s’introduit
des granulations variables pour les dimensions, et
dont la grosseur moyenne est celle d’un fin grain
de sable; ces granulations sont de petites masses
irrégulières, d'abord grisâtres et un peu transpa-
rentes, puis passant au blanc opaque, au jaune,
au verdätre et même au noirâtre lorsqu'elles sont
âgées et imprégnées de sulfure de fer.
Examinées sous un fort grossissement, les gra-
nulations actinomycosiques montrent au centre un
enchevêtrement de filaments mycéliens ramifiés et
dichotomes, fragmentés en tronçons allongés ou
globuleux; ce paquet de filaments est entouré d'un
très grand nombre de petites massues rayonnantes
autour du centre de la granulation. Ces massues
sont des épaississements formés sur les extrémités
périphériques et libres des filaments mycéliens;
elles n'existent pas dans les cultures artificielles
du champignon.
L'actinomycose humaine et bovine se caractérise
par la formation dans les tissus de multiples
« clapiers » dont le contenu renferme en suspen-
sion les concrétions du Discomyces bavis. Ce cham-
pignon a été observé pour la première fois en
France à l'état parasite en 1850, par Davaine,
dans des tumeurs de nature indéterminée du
maxillaire du bœuf.
Il fut revu ensuite chez l'homme par Robin et
Laboulbène sur des individus atteints de produc-
tions morbides encore inconnues jusque-là: ces
auteurs toutefois considérèrent ses granulations
comme des concrétions cristalloides du pus. Von
Langenbeck, en Allemagne, et Lebert, en France,
cn publièrent des descriptions respectivement en
1845 et en 1857; cependant, sa nature parasi-
taire et végétale, soupçonnée en 1868 par Rivolta,
ne fut établie qu'en 1877 par Bollinger et Ilarz,
qui lui imposérent le nom assez impropre d'Ar/i-
nomyces boris, et désignèrent par le terme d’ac/i-
nomycose l'affection à laquelle il donne lieu.
L'appellation actuelle de Discomyces est due à
Rivolta, qui la créa en 41878; cette même année,
Israël observa sur l'homme deux cas de pyėmie
avec granulations jaunes, et Ponfick établit l’iden-
tité de ces cas avec l’actinomycose bovine. Depuis
cette époque, les observations de la maladie et de
son parasite se sont multipliées en France et à
l'étranger et ont porté la lumière sur bien des
points de son histoire.
Cependant un de ces points reste encore très
obscur: à savoir l’étiologie de l'affection, c’est-à-dire
son mode de. transmission et les conditions biolo-
giques dont le concours est indispensable ou utile
à l'infection. Il semble acquis que l’actinomycose
ne peut pas se communiquer directement de
l'homme ou de l'animal à l'homme, ni inverse-
ment, ou du moins que ce mode de contamination
est exceptionnel et. très rare. Les tentatives expé-
rimentales pour reproduire la maladie par inocu-
lation des granulations prises sur les malades ou
des produits de la culture artificielle du champi-
gnon ne donnent ordinairement aucun résultat.
L'infection spontanée suit donc vraisemblable-
ment une autre marche et emprunte pour s’opérer
le concours d’un agent intermédiaire, d’un véhicule
étranger. Des faits très nombreux, notés par divers
auteurs, semblent permettre d’incriminer les débris
durs de végétaux, particulièrement de graminées
(arêtes d'épis, glumes et glumelles dentées et
scabres), qui, en pénétrant accidentellement dans
les tissus, y introduisent les spores dont ils sont
chargés.
Les Discomyces végètent très aisément à l’état
libre sur les grains des céréales; leurs spores pos-
sèdent une résistance très grande contre les causes
extérieures de destruction, notamment contre la
chaleur, et peuvent par suite conserver pendant
longtemps leur vitalité, ces spores, répandues sur
les épis des graminées, ont donc de fréquentes
N° 1446
chances de pénétrer soit sous l’épiderme des bètes
bovines auxquelles la paille est donnée en litière
ou en nourriture, soit sous la peau des personnes
qui par leur profession doivent quotidiennement
manier celte paille ou toucher les épis infestés.
Les barbes et arêtes, par leurs denticules, font
oflice d'appareil d’inoculation : cette étiologie de
l’actinomycose emprunte une grande vraisemblance
au fait qu'elle sévit avec une plus notable fréquence
chez les laboureurs, les moissonneurs, les valets de
ferme, les jardiniers, les cochers.
Les lésions tégumentaires ou buccales peuvent
également, et sans inoculation par les barbes de
graminées, servir de porte d'entrée aux spores
répandues sur la paille; ce mode de contamination
par simple contact est sans doute plus à redouter
pour le bœuf que pour l’homme. Quelques obser-
vations permettent encore de conclure à la possi-
bili d’une transmission éventuelle, surtout chez
COSMOS
401
tion serait moins forte en Angleterre, en Italie, en
Suisse, en Turquie, en Hollande, en Roumanie, en
Suède, en Grèce, ces pays étant rangés dans l’ordre
décroissant du nombre des cas. Toutefois il faut
noter que cette relativité dans la fréquence est
probablement plus apparente que réelle, les obser-
vations étant précisément plus nombreuses dans
les pays plus éclairés, où la science médicale est plus
avancée et permet par conséquent des constata-
tions plus précises. Dans un même pays, la maladie
parait aussi posséder des foyers, mais ces foyers
correspondent aux centres médicaux, qui possèdent
des spécialistes instruits et des ressources de labo-
ratoire étendues, conditions permettant un dia-
gnostic exact de l'affection.
C'est ainsi qu'en 1904 on a reconnu, à Paris seu-
lement, une ‘cinquantaine de cas d'actinomycose
humaine, soit environ la moitié des cas pour la
France entière. Il est assez invraisemblable que la
F1G. 1. — ASPECT D’'UNE GRANULATION ACTINOMYCOSIQUE.
l'homme. directement par les aliments ingérés:
chair ou lait de bœufs ou de vaches actinomy-
cosiques.
L'actinomycose peut apparaitre chez des indi-
vidus de tout âge, mais elle est plus fréquente chez
l’homme que chez la femme, peut-être simplement
parce que l’homme se trouve plus exposé aux
chances de contamination. Comme la tuberculose,
qui en serait, par certaines analogies microbiennes,
une proche parente, elle rentre dans la catégorie
des « maladies de misère », dont l'invasion est
favorisée par des défectuosités dans l'alimentation
et l'hygiène: ainsi s'explique sa fréquence plus
grande dans une classe sociale où les soins de pro-
prelé, la nourriture, le repos sont insuflisants.
Différents auteurs se sont occupés de la réparti-
tion géographique de l’actinomycose. Parmi les
pays où cette affection compte le plus grand
nombre de cas figurent la France, la Russie, l’Alle-
magne, l'Autriche, l'Amérique du Nord. La propor-
F1G. 2. — MASSUES PÉRIPHÉRIQUES TRÈS GROSSIES,
capilale possède à ce degré la spécialité de cette
contagion, el il est logique de penser que l’actino-
mycose sévit en provigce, surtout à la campagne,
sous des erreurs de diagnostic qui la confondent
avec d'autres affections. D'une manière générale,
l'étude de la répartition géographique du Disco-
myces, à l’état parasite, a permis de conclure que
sa végélalion est favorisée par le séjour dans les
régions humides et marécageuses, les terrains
d’alluvion.
Il reste maintenant à dire quelques mots des
symplèmes cliniques qui décèlent chez l'homme la
marche de la maladie. L'actinomycose humaine
aboutil normalement à une suppuration présentant
tous les caractères d'une pyémie chronique. L'in-
vasion du parasite par inoculation en un point
quelconque de l'organisme provoque d'abord une
nécrose locale des tissus, probablement attaqués
et digérés par une diaslase spéciale sécrétée par
le champignon pour servir à sa nutrition.
102
Autour de cette première colonie, l'organisme
établit bientôt sa défense par une tentative de pha-
gocytose, accompagnée de l'inflammation locale
caractéristique. La granulation actinomycosique
se trouve ainsi isolée des tissus où elle végète par
un assemblage de leucocytes mononucléaires, de
cellules épithélioïdes et de cellules géantes, for-
mant avec une couche de tissu conjonctif une véri-
table barrière. A mesure que la végétation du
champignon s'étend à l'intérieur, la barrière défen-
sive recule et s’épaissil, en même temps que lin-
flammation s’accentue. Ainsi se forme un petit
abcès, qui peut resler isolé ou devenir confluent
avec des abcès voisins.
Cette fusion des nodules produit des clapiers
plus ou moins étendus, irréguliers, contenant un
pus dans lequel nagent librement leg granulations
du Discomyces. Ces clapiers ont une cavité très an-
fractueuse; ils peuvent s’ouvrir au dehors par une
fistule, permettant l'issue du pus avec les grains
actinomycosiques qu'il renferme. La présence dans
le pus de granulations montrant au microscope
les massues périphériques permet de diagnostiquer
l'actinomycose.
L'invasion du parasite peut se faire en tous les
points du corps et provoquer dans tous les tissus
les lésions caracléristiques. Cependant il parait
affecter dans sa localisation des préférences qui
ont permis d'établir des divisions cliniques, à cha-
cune desquelles correspond ordinairement un pro-
nostic spécial. De ces formes, l’actinomycose cer-
vico-faciale est la plus fréquente (6 cas sur 10);
a
COSMOS
0 OCTOBRE 1912
elle débute ordinairement au niveau d’une dent
gâtée ou par la plaie d’une dent arrachée, parfois
aussi par le larynx, les glandes salivaires; les cla-
piers se creusent au voisinage du maxillaire,
laissant échapper par des conduits fistuleux un pus
séreux ou visqueux contenant les granulations
spécifiques. Celte forme est peu grave, et la guéri-
son y est normale.
On observe encore, mais moins fréquemment,
l'aclinomycose pleuro-pulmonaire, simulant une
bronchite ou la tuberculose; une actinomycose
viscérale, attaquant le cœur, le foie ou certaines
régions de l'intestin; une actinomycose cutanée,
frappant les membres superficiellement sous la
forme de faux anthrax à évolulion aiguë on d'ul-
cères chroniques, et pouvant gagner les muscles
sous-jacents; une actinomycose cérébrale.
Jl faut noter que ces formes (sauf la cutanée,
toujours primitive) peuvent ètre ou primitives par
inoculation direcle, ou secondaires et consécutives
à l'actinomycose cervico-faciale. Le parasite, en
effel, ofre une tendance à l'extension et gagne
facilement les parties profondes, soit en emprun-
tant le cours du sang ou de la lymphe, soit par
propagation directe, en creusant progressivement
ses clapiers à iravers tous-les organes; les os et les
aponévroses ne suffisent pas à l'arrêter. L’aclino-
mycose des viscères thoraciques ou abdominaux
est une affection très grave; celle du cerveau est
toujours mortelle. Dans les cas curables, l’iodure
de potassium donne de bons résultats.
A. ACLOQUE.
La fixation des vers parasites dans l'intestin."
Les travaux de Weinberg, de Metchnikoff, du pro-
fesseur Guiart et de son élève, le D" C. Garin, de
Lyon, ont démontré que les vers parasites se firent
à la paroi intestinale et n'errent pas en liberté à
l'intérieur de notre tube digestif, comme les phy-
siologistes et les médecins le croyaient jadis. Dès
4860 cependant, Vixavait admisque letrichocéphale
— le plus commun des vers intestinaux, — en s'atta-
chant à la muqueuse par sa partie antérieure rigide
et très effilée, pouvait créer des ulcérations intes-
tinales. Mais il fallut les efforts récents de nom-
breux observateurs pour voir le fait mis hors de
doute.
Le phénomène de la fixation resta longtemps
ignoré, car, les parasites se détachant rapidement
de Ja paroi après la mort de leur hôte, on les ren-
contrail libres dans l'intestin des cadavres dont on
pratiquait l'autopsie dans les délais réglementaires
(vingt-quatre heures après le décès en France et
dans presque tous les autres pays d'Iurope). Tou-
(1) V. Cosmos, 61° année, n° 1#36 ({" août 1912), p. 123
tefois, chez les animaux, on trouve le parasite fixé.
Askanazy expliqua cette contradiclion apparente
en constatant la présence de quarante trichocéphales
fixés dans une autopsie qu'il fit quatre heures après
la mort, tandis qu'il observa cent quatorze para-
siles libres dans l'intestin d'un sujet décédé depuis
une quarantaine d'heures. On peut donc conclure
que si l'on ne rencontre pas les vers fixés chez
l'homme, cela tient à ce qu’on autopsie les cadavres
seulement de longues heures après le décès, tandis
qu'on ouvre les bètes immédiatement après leur
mort.
Le D' Garin vérifia récemment l'exactitude de
celte interprétation, ct il relate plusieurs observa-
tions intéressantes à cet égard dans son mémoire
sur l'£ntérite trichocéphalienne (1911). Ainsi, dans
toutes les nécropsies qu'il effectua à Lyon dans les
vingt-quatre heures réglementaires, il ne vit jamais
de trichocéphales fixés. Mais au cours d'une mission
en Tunisie,comme la législation autorise l’aulopsie
immédiate, il put la pratiquer sur quinze sujets
N° 14460
moins de deux heures après leur décès. Quatre
d’entre eux renfermaient des trichocéphales tous
fixés. La photographie ci-jointe (fig. 1), que nous
devons à l'obligeance du savant lyonnais, établit
la fixation d'une manière absolue; elle représente
avec un grossissement de 7 diamètres une partie
FıG. 1. — TRICHOCÉPHALE
FIXÉ SUR LA MUQUEUSE CÆCALE DE L'HOMME.
Grossiss:ment: 7 diamètres.
de muqueuse cæcale humaine sur laquelle l’inser-
tion du trichocéphale s'observe très nettement. L’ex-
trémité antérieure du ver a pénétré sous la paroi
intestinale, laissant seulement émerger sa parlie
renflée.
Cetle question de parasitologie offre, indépen-
damment de son intérêt scientifique, une grande
utilité pratique.
Lorsque les physiologistes supposaient que les
vers vivent dans l'intestin comme des « chemi-
neaux » ne demandant à leur hòte que quelques
minimes reliefs de leurs repas pour s'alimenter,
ils considéraient ces parasites comme peu. dange-
reux. Maintenant que la fixation de ces bestioles
est unanimement admise, leur ròle pathogène
apparait très important. Que de méfaits ne leur
met-on pas aujourd’hui sur le dos!
L'homme doit, en effet, aux vers intestinaux
de multiples affections. Selon Metchnikoff, ils
déterminent certaines catégories d’appendicite.
Guiart les considère comme des inoculateurs de
fièvre typhoïde, de choléra et peut-être de tubercu-
lose intestinale. D’après Perroncito, ils causent
fréquemment l’anémie des mineurs, et le D" Garin
a montré que certaines formes d’entérite chronique
provenaient du trichocéphale.
Le microscope a permis de reconnaitre que la
COSMOS
403
plupart des vers s'enfoncent dans la muqueuse
pour percer les vaisseaux sanguins. D'ailleurs, s'ils
se contentaient de sucer le sang de leur hôte et de
lui en ravir une faible quantité, ils ne lui cause-
raient pas grand dommage, vu l’exguité de leur
taille et la petitesse des vaisseaux capillaires per-
forés. Mais étant donnée la solidité de la fixation
de certains vers — témoin ce fragment de muqueuse
de l’estomac de porc dans laquelle sont profondé-
mentenfoncéstroisGnathostomum hispidum(fig.2),
— on comprend l'importance des lésions qu'ils
déterminent. Or, la moindre érosion de la paroi
intestinale facilite l’inoculation des microbes qui
pullulent loujours dans le tube digestif. Ainsi donc
ces parasites sont extrêmement dangereux par les
maladies intestinales qu'ils provoquent et par les
infections qu'ils peuvent également porter jusque
dans le sang de leur hôte.
Comment diagnostiquer la présence des vers dans
l'intestin des malades? On examine soigneusement
au microscope les matières fécales, afin d’y déceler
la présence des œufs de vers, et d’après leur forme
les techniciens savent déterminer à quelles espèces
ils appartiennent.
Le médecin devra effectivement varier sa médi-
cation selon qu'il s'agira de combattre l’ascaris ou
l'oxyure, les tænias ou le trichocéphale comme un
récent article du Cosmos nous l'a appris (4).
Nous compléterons cette étude relativement au
thymol, vermifuge énergique du trichocéphale.Pour
débarrasser le patient de ce parasite aussi résistant
— FRAGMENT DE MUQUEUSE DE L'ESTOMAC D'UN
PORC OU SONT FIXÉS TROIS VERS PARASITES APPARTE-
NANT A L'ESPÈCE € GNATHOSTOMUM HISPIDUM ».
FE 2.
que long à expulser, il faut administrer quotidienne-
ment trois à cinq cachets d'un gramme de thymol
pendant quatre jours. Ensuite, on prescrit une pur-
gation saline le dernier jour. D'ordinaire, cette
(1) Les vermifuges dans la thérapeutique moderne.
Cosmos, loc. cit. (1 août 1912), 123 à 125.
10%
« cure thymolée », comme l'appelle le D° Guiart,
ne suffil pas pour tuer tous les trichocéphales, on
doit pratiquer huit ou dix jours plus tard un second
examen microscopique, puis, le cas échéant, recom-
mencer un nouveau traitement similaire qu'il faut
faire suivre souvent d'une troisième ou d'une qua-
trième cure.
Grâce à ces acquisitions récentes concernant la
COSMOS
10 ocrogre 1912
biologie des vers intestinaux et aux moyens théra-
peutiques qui en découlent, les médecins pourront
désormais guérir cerlaines entérites rebelles et
éviter les interventions chirurgicales dans nombre
de crises appendiculaires en prescrivant simplement
à leurs malades quelques substances anthelmin-
thiques.
JACOUES BOYER.
L'industrie des foies gras.
Cesl de temps immémorial, parait-il, que les
oies et les canards du bassin de la Garonneont été
sélectionnés; probablement depuis les Romains.
Ces derniers, en effet, étaient de grands amateurs
d'oies engraissées avec des figues et ils recher-
chaient particulièrement les foies gras.
On prétend encore qu’un prince de l'Église, passé
de Gascogne au siège archiépiscopal de Stras-
bourg, il y a deux cents ans, introduisit dans les
menses d'Alsace la race d'oies de Toulouse. Cette
race estencorc aujourd'hui la plus intéressante pour
l’engraissement et la production du foie. De toutes
les variétés d'oies communes, c'est la plus pré-
coce et celle qui donne la chair la plus fine. On
recherche le type à fanon et à bavette, né de la
sélection et d'un engraissement intensifenchambre.
Cette oie, beaucoup plus grosse que l'oie sans
bavette et sans fanon, donne les foies les plus
volumineux pouvant atteindre 2 et mème 3 kilo-
grammes, dit-on. On prétend que les oiseaux dont
le sac (peau du ventre) est peu développé s en-
graissent plus tôt.
Les foies de Strasbourg seraient encore plus
appréciés. [ls sont produits par les grandes oies
cygnes. En décembre, janvier, les marchés de cette
ville reçoivent près de 300 000 oies grasses, et
plus de 250 personnes de la cité se livrent au com-
merce des oies grasses et des foies. On estime que
la quantité de ces derniers, qui sont mis en œuvre
dans lesseules fabriques de conserves de Strasbourg,
esl de 100000 à 125 000 kilogrammies.
Quant au canard, cest la variété mulet ou
mulard qui convient le mieux. Le foie de canard
vaut trois fois plus, prélend-on, que le foie d’oie,
poids pour poids. Ce n’est qu’à défaut du premier
qu'en Gascogne on confectionne les terrines avec
des foies d'oie. A Périgueux, Cahors, Nérac, Auch,
Toulouse, le foie de canard cuit dans sa graisse cl
convenablement truffé est couché dans un lit de
farce confectionné avec un foie d'oie pilé au mor-
tier.
Le påàté de Strasbourg, lui, esl fait d'un foie d'oie
couché aussi dans un lit de farce, mais faile avec
de la charcuterie passée au pilon.
Ajoutons que les autres parties du corps de
l'animal, oie ou canard, servent à faire des con-
fits (avec les abatis surtout) ou des rilleltes. On
les sale aussi et les fume. On utilise encore la peau
pour fourrure sous le nom de peau de cygne.
:. Pour encourager dans les campagnes cette petite
industrie agricole qu'est la production des foies
gras, on est allé jusqu’à instituer des concours
dans lesquels on récompense le poids du foie sans
cœur ni graisse et la blancheur et l'absence des
taches et des rougeurs.
C'est par un engraissement intensif approprié
que l'on entraine l'hypertrophie de l'organe en
question, qui, à ce régime, s'infiltre de graisse et
devient ainsi très apte à la confection des pâtés.
Si cette préparation spéciale du volatile peut ne
faire que doubler le poids de l'animal, celui du
foie peut tripler et quadrupler.
Les engraisseurs d'oies sont de vrais industriels
qui ont en vue soil la vente de l'oie grasse, soit
celle de l’oie fumée, soit encore la vente du foie
gras. Mais, en général, ils s’approvisionnent de
jeunes volaliles âgés de trois mois, ou mieux de
six à huit, alors que, bien en chair, ceux-ci sont
plus aptes à ètre engraissés. Suivant les races et
les croisements, ils pèsent à cet âge de 4 à 6 kilo-
grammes. Ces jeunes oies sont fournies par des
éleveurs possesseurs de prairies, qui font l'élevage
en grand des oisons, achetés eux-mêmes à l’âge
de dix jours à des producteurs spéciaux. Rarement,
sauf pour la reproduclion, on garde les oiseaux
d'une année à l'autre.
En Alsace, on fait naitre généralement vers le
mois d'avril et on commence à engraisser en
aoùt. Dans le S.-0., on se livre à l’engraissement
des jeunes oies dès qu`arrivent les froids, d'octobre
à janvier.
L'engraissement proprement dit est précédé
ordinairement, dans cetle région, d'une période
d'une quinzaine de jours, pendant laquelle on
augmente la ration. On laisse les volatiles aller
librement dans la cour de la ferme. On leur donne
des pommes de terre, du petit son, du maïs et du
sarrasin à volonté. Pour obtenir le maximum
N° 1416
d'effet du maïs, qui est l'aliment par excellence,
on doit choisir ta graine de deux ans, que l'on
fait gonfler dans de l’eau salée ou cuire légèrement.
On peut aussi la concasser grossièrement, puis
l'humecter fortement avec de l’eau légèrement
salée, de façon à lui en faire absorber quatre fois
son poids. Quand la chose est possible, on remplace
l'eau par du lait écrémé, du pelit-lait, du babeurre.
Le maïs colore la chair en jaune. Si on la veut
blanche, couleur plus appréciée, on emploie du
maïs blanc ou des farines blanches. Les pommes
de terre et autres féculents auraient donné de moins
bons résultats. Cependant, par raison d'économie,
il est possible de faire des mélanges. De même,
le tourteau de maïs, plus riche en matières azotées
et en matières grasses, est à conseiller, comme
d'ailleurs tous autres aliments riches en ces prin-
cipes. A Strasbourg, on emploie concurremment les
fèves et le maïs, les premières d’abord.
Rappelons que M. Magnan a remarqué que les
canards qui mangent des poissons ou des insectes
donnent un foie plus gros que ceux qui sont ali-
mentés avec de la viande ou des matières végé-
tales.
Certains éleveurs, pour rendre l’engraissement
plus complet ou pour en abréger la durée, font
avaler à l'oie une cuillerée d'huile d'olive à chaque
repas. On ajoute aussi aux pâtées du charbon en
poudre. D'autres mettent dans l’eau un peu d’anti-
moine, du gravier ou, les derniers jours, font boire
de l'eau salée pour activer la digestion.
On vend, parait-il, dans certaines régions, une
poudre à base d'arsenic qui favorise la dégéné-
rescence graisseuse du foie, dans lequel il se
localise en partie, rendant malheureusement l'ali-
ment toxique pour les consommateurs.
Quand les oies sont demi-grasses, on les gave.
A cet effet, on peut les tenir dans une épinette,
comme on le fait dans la région de Strasbourg,
ou toul au moins les laisser dans une chambre
obscure garnie de paille. Pour alimenter les bêtes,
on s'aide d'un petit entonnoir en fer-blanc construit
spécialement pour cet usage : son extrémité est
taillée en sifflet et bien émoussée et arrondie.
Avec cet appareil, on introduit dans le jabot, et cela
deux ou trois fois par jour, en se servant d'un bâton,
au total 0,50 à 0,75 kilogramme de mais en grains.
On s'assure, avant chaque opération, que le repas
précédent a été complètement digéré. On augmente
progressivement la ralion en la proportionnant à
l'appétit et à l'accroissement de l'oiseau.
On gave aussi aux pâtons faits d'olives de
farine de mais préparées la veille et trempées
légèrement au moment de l'emploi dans du lait
ou du petit-lait. On doit tenir de l'eau à discrétion
COSMOS
405
à la porlée des animaux, eau souvent renouvelée.
Les avis sont cependant partagés; certains pré-
tendent, en effet, que les canards qui s’abreuvent
lrop s’engraissent mal. Dans tous les cas, on ne
doit négliger aucun soin de propreté.
Dans les premiers temps de l’engraissement.
quand l’oie touche au maximum de poids, elle se
trouve fort affaiblie, au point que des accidents
sont à craindre. La respiration peut être diflicile,
embarrassée. Le bec a généralement perdu sa cou-
leur jaune vif; il est de teinte plus pâle, plus
terne. Une pelote de graisse doit alors se trouver
sous chaque aile. Comme dans cet état, qui fait
dire dans la région de Toulouse que « les oies
sont morfondues », l'animal peut perdre de son
poids, il ne faut pas tarder de le sacrifier.
Pendant les derniers jours de l’engraissement,
la chair et la graisse gagnent plutôt en finesse
qu'en poids.
Il faut une certaine habitude, un doigté particu-
lier, pour apprécier, en palpant la bête, qu’elle
est à point, cela ne s’acquiert que par une longue
pratique. On estime que la durée moyenne du
gavage est de quatre à six semaines: qu’il faut,
cn moyenne, 0 litres de maïs pour engraisser une
oie. Celles qui sont de grosse race pèsent jusqu’à
quatre fois plus qu'avant l’engraissement; elles
valent alors de 15 à 20 francs. Le canard mulard
demande une quinzaine de jours, et il consomme
de 15 à 18 litres de maïs. Arrivé à son maximum
d'engraissement, il reste accroupi, les ailes presque
tombantes, les plumes de la queue écartées.
Avant de tuer les animaux, que l’on a, au préa-
lable, séparés dans un local sombre ou dans une
caisse, on leur fait avaler de l'eau salée addi-
lionnée de lait. Quand ils ont jeùné une demi-
journée, on les saigne.
Un éleveur distingué, M. Dirat, de Faudoas
(Tarn-et-Garonne), a établi le compte suivant pour
l'élevage de 300 oisons:
Achat de 8 oies pour la ponte (à 6 francs),
48 francs; leur nourriture (12 hectolitres de mais
à 9 francs), 108 francs; 6 dindes couveuses,
36 francs; leur nourriture (140 litres d'avoine),
42 francs; nourriture des 300 oisons pendant vingt-
cinq jours (son, farine de maïs, blé et avoine),
16 francs. Total : 280 francs.
Recette : 300 oisons à 14,5 fr, 450 francs: vente
des 6 dindes à 3 franes, 18 francs; valeur des oies
après la ponte à 3 francs, 24 francs. Total:
492 francs. Bénéfice : #92 — 20 — 212 francs.
L'expérimentateur fait remarquer que les oisons
peuvent se vendre jusqu'à 3 francs.
ROLET.
406
COSMOS
10 ocrogre 1912
Le grand bassin en eau profonde de Southampton.
Les efforts de la Grande-Bretagne pour se tenir,
au point de vue maritime, à la hauteur des besoins
du commerce et de tous les progrès de la naviga-
tion, sont une des manifestations de cette initia-
tive dont on fait si continuellement montre en
Angleterre. Il faut dire aussi que l'administration
et l'exploitation des ports ne sont point confiées à
des fonctionnaires de l'Etat, mais à des entreprises
commerciales particulières. Pour ce qui est de
Southampton, les docks, c'est-à-dire les bassins et
les divers établissements du port, ont été repris
en 1892 par la Compagnie de chemins de fer
London and South Western Railway.
Ce qui montre bien l’activité que met la Compa-
gnie en question, et que d'ordinaire meltent les
exploitants des ports anglais, à les perfectionner
constamment au fur et à mesure que les navires
demandent des aménagements plus importants,
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L'EXÉCUTION DES MURAILLES DES QUAIS EN TRANCHÉE BLINDÉE.
c'est que le dock de carénage le plus perfectionné
que possédait Southampton n'ayant été terminé
qu'en 1905, dès maintenant, au bout de six années
à peine par conséquent, on est en train de refaire
ce dock pour répondre aux dimensions croissantes
des navires à vapeur. Rappelons d’un mot que ce
bassin de carénage, dit de Trafalgar, était, en
1905, bien supérieur aux besoins immédiats: sa
longueur était de 270,50 m pour une largeur, à
l'entrée, de 27,43 m; la largeur maximum du bassin
proprement dit, au sommet des murs, était de
J8 mètres, et la largeur au point le plus bas de
27,43 m également; aux hautes mers ordinaires
de vives eaux, on trouvait une profondeur d'eau
de 10,05 m sur le seuil de la porte et de 10,20 m
au-dessus des tins. Dès que l’on a eu décidé la con-
struction de l’'Olympic, le bateau dont nous avons
parlé ici à plusieurs reprises, la Compagnie songea
aussitôt à augmenter le bassin de 6,70 m sur sa
longueur et de 3,04 m sur sa largeur, et même
de 3,65 m sur sa largeur intérieure entre le sommet
des murailles, la profondeur d’eau sur le seuil de
la porte devant être augmentée de 60 centimètres.
Pour aller au plus vite, on a agrandi le dock pri-
N° 1446
mitif au lieu d’en construire un nouveau; on a
démoli les maçonneries et on les a reportées au
point convenable.
Ce sont là des dépenses considérables, mais très
inférieures certainement à celles auxquelles se
livre la Compagnie, à l'heure présente, pour doler
Southampton d’un grand bassin à flot, répondant
aux besoins de la navigation et pouvant recevoir
notamment des bateaux tels que Olympic. Il
faut noter, pour expliquer de pareilles dépenses,
COSMOS
407
que Southampton est véritablement un port
unique : il jouit par sa situation géographique de
cet avantage précieux de quatre marées quoti-
diennes. Une première marée remonte le Solent,
et deux heures plus tard c'est celle qui arrive par
le canal de l'Est séparant lile de Wight de la
grande terre. On comprend que, dans ces conditions,
il y ait un intérêt tout particulier à mettre le port
en état de recevoir les plus grands bateaux à flot.
Ce n’est point pourtant que le port de Southamp-
LA CONSTRUCTION DES MURS DK QUAI EN BLOCS DE BÉTON.
ton manque actuellement de bassins. Nous pour-
rions signaler notamment le grand bassin appelé
Empress Dock, puis les deux bassins qui commu-
niquent entre eux et qui portent l’un le nom de
Outer dock, et l’autre celui de Inner dock. Le pre-
mier représente une superficie de près de 9 hec-
tares, avec une profondeur d’eau de 7,80 m à
basse mer. Nous ne parlons pas des deux ports
d’échouage, qui ne servent qu’à la petite naviga-
lion. C’est précisément entre les anciens docks
dont nous venons de parler et le port d’échouage
principal que l’on est en train d’exécuter un bassin
à flot à grand tirant d'eau. Ce nouveau bassin, qui
ne sera point muni d'une porte, par suite des
approfondissements et dragages, a une longueur
de 518 mètres sur une largeur de 122 mètres. Ce
n’est pas énorme sans doute comme largeur, mais
c’est très suffisant pour permettre la manœuvre
directe des plus grands bateaux entrant en couple,
au besoin, dans le bassin. Celui-ci aura définitive-
ment une profondeur de 12,20 m à basse mer de
vives eaux ordinaires; à haute mer, la profondeur
correspondante atteindra partout, quand les tra-
vaux seront absolument terminés, 16,15 m. En
108
fait, grâce aux particularités de marée que nous
signalions tout à l’heure, le bassin jouira à chaque
marée de quatre heures de haute mer. Aussi bien,
cette considération n’est importante que pour le
chenal d'entrée du bassin, puisque, dans le bassin
même, les profondeurs dépassent les besoinsactuels.
Ce chenal venant de la rivière et de la mer est
d'une profondeur de 9,75 m à basse mer; les dra-
gages qui s'effectuent à l'heure présente porteront
cette profondeur à 10,67 m. Mais on compte dra-
guer à une profondeur bien supérieure sur une
surface assez vaste, un peu avant l'entrée du
bassin, de manière à permettre aux plus grands
navires d'y faire toutes les manœuvres nécessaires
pour prendre la position voulue au moment de
l'entrée. De larges quais entoureront partout le
bassin; ces quais sont terminés vers l'entrée et
pour la moitié Nord des quais latéraux, avec appon-
tements, magasins, constructions diverses; déjà
Olympic a pu s'amarrer à quai le long de cette
partie du bassin et y procéder aux diverses opéra-
tions habituelles dans les ports. Il va sans dire
que ces quais seront équipés de façon remar-
quable, avec des grues électriques de puissance
variable. La largeur utilisable des quais sera de
10,67 m; deux lignes de rails s’y étendront qui
permettront aux wagons de venir charger ou
décharger. On a prévu également deux ponts rou-
lants, ou plus exactement deux débarcadères rou-
lants qui donneront un passage facile aux voya-
geurs débarquant ou embarquant, jusqu'à la galerie
ouverte dépendant des constructions destinées à
former gare maritime. Nous n'avons pas à insister
sur les aménagements de cette gare, pas plus que
sur les installations subsidiaires du bassin, qui
seront à la hauteur de tous les progrès modernes.
Ce bassin sera naturellement réservé à la grande
navigation; les autres répondront aux besoins des
navires moins importants; ceux-ci auront d’ailleurs
à leur disposition les quais représentant une lon-
gueur énorme, qui bordent les deux rivières con-
stituant le port de Southampton.
La construction même du bassin a été fort intt-
ressante. Elle a été confiée à des entrepreneurs
anglais, MM. Cophan, Jones and Railton. Les diffi-
cultés ont été ačcrues de ce fait que les travaux
s'effectuent à un emplacement qui était formé
principalement de marécages le long de la rivière
Tent, marécages que l'on avait remblayés en partie
en y déversant les cendres et escarbilles des stea-
mers fréquentant le port. Ces marécages n'étaient
séparés de la rivière que par une sorte de banquette
poreuse de grès, à travers laquelle, à chaque haute
mer, l'eau passait et arrivait dans le marais. On
a pu utiliser cette banquette de grès pour faire une
espece de cofferdam, de bitardeau destiné à isoler
complètement de fa rivière le terrain où l’on allait
creuser ct continuer le bassin. Tout naturellement,
COSMOS
10 OCTOBRE 1419142
on a renforcé cette banquette avec une série de
palplanches en bois, puis avec des terres jetées au
bas de la banquette et maconnées grossièrement
au moyen de ciment. On a pu alors procéder à
l’'excavation des terrains, jusqu’à une profondeur
de 9 mètres environ plus has que le niveau des
futurs quais, au moyen de pelles et excavateurs à
vapeur, quienlevaient quotidiennement 3 500 mètres
cubes de déblais. On avait monté des pompes élec-
triques centrifuges pour remédier à l’envahisse-
ment possible des eaux. La plus grande partie de
ces déblais ont été évacués sur la mer, à assez
grande distance au delà de l'ile de Wight, là où
ils seront emmenés par les courants.
Quand l'excavalion eut été descendue jusqu’à
9 mètres environ, il a fallu penser à faire des tran-
chées soutenues par des palplanches pour établir
les fondations des murs de quais. (Ces tranchées
n'avaient pas moins de 143 mètres de large, pour
un peu plus de 13,70 m de profondeur; si bien
que leur partie la plus basse descendait à près de
23 mètres au-dessous du niveau futur des quais.
On se heurta à des difficultés considérables dans
celte partie du travail; il fallait notamment lutter
contre l’afflux des eaux. Les fondations des mu-
railles ont été construites en béton au ciment de
Portland; on disposait d’une installation pour le
mélange du béton, installation qui était capable
de fabriquer quotidiennement plus de 700 mètres
cubes de ce béton. Quand les murailles ont été
terminées, on a comblé l’excavation qui se trou-
vait entre elles et le massif de terre au moyen
de matériaux bien secs. Sur certains points, paiti-
culièrement vers l'extrémité extérieure du dock,
il fallut creuser directement les tranchées où
devaient se faire les fondations des murailles,
jusqu'à une profondeur de près de 23 mètres, sans
déblai préalable. Quand toutes ces murailles ont
été terminées, on a pu rompre le bätardeau qui
isolait l'emplacement du bassin de la rivière Tent,
et alors on a achevé le travail au moyen de dragues,
l’eau ayant envahi complètement l'emplacement
du futur bassin.
Pour les murailles extérieures limitant l’entrée
même du bassin, les quais ont élé construits en
pleine eau pour ainsi dire, après dragage prélimi-
naire ; à la suite de ce dragage, on avait foncé
deux rangées de palplanches bien étanches for-
mant bâtardeau. Et c’est à l'intérieur de cette
double muraille de bois que la tranchée a été fina-
lement excavée au moyen de ces dragues à cuiller
à fermeture automatique que les Anglais appellent
des grabs. Le travail était surveillé, dirigé et com-
plété par des scaphandriers. Les fondations pro-
prement diles ont été formées au moyen d'une
masse de béton descendue dans leau même au
moyen de boites à renversement. Dans leur partie
supérieure, les murs étaient constitués de blocs de
N° 1446
béton de huit tonnes, descendus à l’aide d’une
grande grue à bras horizontal, l’opération ici aussi
étant surveillée et dirigée par des scaphandriers.
C'est cetle opération que montre une des photo-
graphies ci-jointes. Les blocs de béton étaient dis-
posés en deux murailles parallèles, laissant un
intervalle vide qui a été rempli avec une masse de
béton. La solidité de la construction est absolument
à l'épreuve de tout.
Les travaux ne sont pas complètement terminés;
mais, pour donner une idée de leur importance,
COSMOS
109
disons que les lerrassements faits à ciel ouvert
pour l'établissement du grand bassin n’ont pas
représenté moins de 660000 mètres cubes; les
excavations en tranchée ont formé un volume de
200 000 mètres cubes; les dragages ont représenté
613 000 mètres cubes; et enfin la masse de béton
employée correspond à peu près à 210 000 mètres
cubes. C'est un ensemble de. travaux tout à fait
remarquable. DANIEL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques
et à l'École des hautes études commerciales.
Les ressources mondiales d'énergie.
La question de l’utilisation des forces naturelles
se rattache d'une façon étroite à toutes les ques-
tions économiques qui préoccupent le monde et
elle doit donc être considérée comme l'un des pro-
blèmes fondamentaux posés aux économistes con-
temporains.
Plus sa vie s’afline et ses besoins se mulliplient,
plus l’homme devient incapable de faire face aux
charges qu'il se crée et doit davantage chercher
à tirer profit, dans ce but, des forces que la nature
met à sa disposition.
Chaque amélioration réalisée dans celle voie
marque une étape nouvelle du développement des
civilisations du globe, et si l’on voulait substituer
à la phraséologie classique, caractérisant par la
matière employée pour la fabrication des outils ou
des armes les périodes successives de avancement
du monde, une terminologie plus significalive et
plus conforme aux conceptions modernes, on pour-
rait baser la différenciation des âges de humanité
sur les formes d'énergie dont l’utilisation est propre
à chacun d'eux.
Plus qu'aucune autre victoire de l'intelligence
humaine, la mise en œuvre des forces de la nature
a élargi les moyens de production de l’homme, el
c'est en elle qu'i! a trouvé les ressources qui lui
ont permis de satisfaire ses besoins sans cesse
croissants.
Ainsi, tout le progrès des temps présents sur les
temps anciens est fait de la supériorité de la force
mécanique sur la force animale : c’est parce que
nous avons su tirer parti de cette supériorité, parce
que nous avons su corriger notre faiblesse en
asservissant les puissances extérieures que nous
pouvons, de mieux en mieux, nous consacrer à
l'amélioration intellectuelle et morale de notre
race, malgré la multiplication extraordinaire de
nos appétits matériels.
La première innovation réalisée dans cel ordre
d'idées a élé l’utilisation par l'homme de la force
des animaux.
Nos ancêtres les plus reculés n'avaient d'abord
possédé pour exécuter les travaux quolidiens que
leurs forces musculaires, mais ils songèrent rapi-
dement à s'emparer de la force animale. De telle
sorte que l’on peut dire que le cheval fut, sinon la
plus noble conquête que l’homme ait jamais faite,
du moins sa première conquète.
C'est par elle que, suppléant à l'insuffisance de
ses propres moyens, l'homme a pu entreprendre
des chasses plus fructueuses, entamer des travaux
de culture plus productifs, aborder l'exécution
d'ouvrages plus sérieux.
Plus tard, l'énergie des vents, gonflant la voile
de ses navires ou faisant tourner les ailes de ses
moulins; puis l'énergie des chutes et des cours
d'eau, actionnant des roues hydrauliques, et enfin
l'énergie calorifique dans les machines motrices
thermiques, lui ont apporté d'autres moyens d’aug-
menter son pouvoir producteur.
Dès l’apparition de ces procédés, toutes les indus-
tries commencent à se développer et elles prennent
un essor prodigieux lorsque, au commencement du
siècle dernier, avec l'introduction des machines
à vapeur d'un emploi plus facile que les autres
moteurs utilisés jusqu’à ce moment, le machinisme
entre définitivement dans les usages.
Or, lorsque l’on examine l’ensemble des domaines
d'activité offerts à la population actuelle du globe,
on s'aperçoit que plusicurs d'entre eux ne font
qu'un usage très restreint de la force mécanique.
ll en est ainsi, par exemple, de toutes les petites
industries, des industries du bâtiment, des indus-
tries agricoles, etc.
Dans beaucoup d'autres, les applications de la
force mécanique sont encore limitées à quelques
cas spéciaux; mème celles qui utilisent le plus
complètement les machines, comme les industries
mécaniques, métallurgiques, elc., comportent en-
core de mulliples travaux manuels.
La tendance générale est cependant d'accentuer
les usages du machinisme.
De plus en plus, en effet, des professions libé-
rales, des occupations intellectuelles sollicitent les
410
activités et, de plus en plus aussi, les populations
deviennent avides de jouissances de toute espèce.
Notre organisation sociale, d’ailleurs, est telle:
la vie de tous les individus, depuis la naissance
jusqu'à la mort, est entourée de tant de sécurité;
tant de commodités ou de garanties enveloppent
toutes les existences; si coùteuses sont toutes les
mesures prises pour sauvegarder ou protéger les
intérèts particuliers et généraux, que chaque indi-
vidu, dans les pays civilisés, doit faire face à des
charges très lourdes avant mème que de pouvoir
songer à sa substance proprement dite.
Chaque vie humaine est ainsi grevée de frais
élevés: c’est ce qui explique l’augmentation des
salaires et le renchérissement de l’existence; vou-
loir chercher l’origine de ces phénomènes dans des
facteurs aussi éloignés du problème que ne l'est,
par exemple, l’élévation du prix de l'or — souvent
invoqué dans ces questions, — c'est s'obstiner
à confondre les effets et les causes.
Chaque individu doit donc être mis à même de
produire davantage — en qualité et en quantité —
par un développement systématique de ses apli-
tudes qui lui permette de s'aider plus largement
de la force mécanique.
On peut estimer que, dans les conditions actuelles,
la puissance absorbée par tête dans tous les tra-
vaux est une dizaine de fois plus grande que celle
dont disposent les sociétés anciennes.
Il est indispensable que la proportion soit aug-
mentée encore, que l’on s’efforce d'introduire et de
multiplier les applications du machinisme dans
tous les domaines.
Leurdéveloppement est une nécessité inéluctable;
aucun pays ne pourra 8 y soustraire, mais celui-là
aura la suprématie mondiale qui, l’activant le plus
énergiquement, pourra devancer les autres nations.
Déjà, parce qu'elle a gagné du terrain sous ce
rapport, l'Allemagne se trouve aujourd'hui en tête
des pays industriels, et c’est en grande partie
grâce à ce qu'elle a pu suppléer à l'insuffisance de
la main-d'œuvre par l’utilisation rationnelle des
forces naturelles que l'Amérique du Nord a pu se
créer dans beaucoup d'industries une situation
prépondérante et envahir le marché étranger.
Dans des problèmes aussi complexes que celui
dont nous nous occupons et qui, lout en prenant
leurs racines dans les époques reculées, peuvent
affecter des périodes futures indéfinies, il serait
bien téméraire d'essayer d'entrevoir ce que sera
Pavenir en ne tenant compte que des données
nalurelles de la question.
Peut-être, demain, une découverte dont nous
n'avons aujourd'hui nulle idée, faisant sorlir du
chaos de nos connaissances ou de l'obscurité des
choses que nous ignorons, une vérité soudainement
devenue lumineuse, viendra-t-elle fournir aux habi-
tants du globe des armes inattendues.
COSMOS
10 OCTOBRE 41912
La sagesse ne permet point toutefois d'escompter
ces ressources toutes problématiques et il est donc
intéressant d'établir le relevé aussi complet que
possible des forces naturelles qui sont à présent
à la portée de l’homme.
Ces forces sont de plusieurs catégories; les deux
principales sont les combustibles et les chutes ou
cours d'eau; d’autres, comme la chaleur solaire,
les vents, le flux et le reflux, les vagues, n’ont
encore qu'un intérêt pratique médiocre; il existe
bien, il est vrai, des moyens d'en tirer parti, mais
leur utilisation reste limitée à des cas exception-
nels (1).
On est généralement porté à croire que la mise
à profit des forces hydrauliques est pour le moment
la solution la plus efficace et la plus générale du
problème de la force motrice. Cependant, lorsque,
chiffres en mains, l’on compare la puissance des
forces hydrauliques disponibles à celle qui corres-
pond à la consommation mondiale actuelle du
charbon, houille, anthracite, lignite, tourbe. on
doit reconnaitre qu'il est loin d’en être ainsi (2).
D'après les documents statistiquesles plus récents,
on peut évaluer que les quantités de combustible
solide consommées dans le monde représentent
une puissance de 150 millions de chevaux approxi-
mativement, et l'augmentation de production et de
consommation annuelle constatée correspond à
une puissance de 3,5 millions de chevaux.
Nous nous ferons une idée plus complète de l'im-
portance économique de cet agent en comparant
la valeur pécuniaire de sa production à celle du
fer, le métal qui a le plus de valeur industrielle, et
à celle de l'or, qui est le plus précieux.
La valeur commerciale de la quantité de charbon
extraite par an est de plus de 40 milliards de francs;
celle du fer est de 5 milliards et celle de l’or de
2,5 milliards. Aussi le charbon est-il le facteur
principal du développement de l'industrie moderne.
En regard des 450 millions de chevaux qu'il pour-
rait fournir à présent, la puissance que l'on pour-
railemprunter aux autres sources d'énergie actuelles
est presque jinsignifiante.
Pour le moment, la puissance empruntée aux
forces hydrauliques, par exemple, ne dépasse vrai-
semblablement pas 3,5 à 4 millions de chevaux.
Il est vrai que la mise en valeur de cette source
(1) Giesex, Die Verwendung der naturlichen Hulfs-
quellen in den Vereinigten Staaten Nordamerikas
und die Zukunftigen Quellen der Kraft. Technik und
Wirtschaft, 1910, n 2 et 3.
British Science Guild, Natural Sources of Energy.
Rapport, 1912.
(2) Nous déduisons les principaux chiffres de cette
petite note d’un remarquable travail de M. A. Schwe-
mann: Verfügbare Energiemengen der Weltkraft-
wirtschaft. Technik und Wirtschaft, 49114, ne 8. Voir,
pour la France, la Statistique des forces motrices,
publiée par le ministère du Travail.
N° 1446
d'énergie n’a été organisée sur des bases ration-
nelles que depuis très peu de temps: en 1904, la
puissance empruntée aux sources et cours d’eau
dépassait à peine un million de chevaux, et les
réserves dépassent de beaucoup ce qui est utilisé
aujourd'hui. Sans tenir compte de la Russie, l’Eu-
rope dispose de 40 millions de chevaux au moins;
l'Amérique du Nord est très richement dotée; quant
aux forces hydrauliques de l'Amérique du Sud, de
l'Asie, de l’Afrique et de l’Australic, qui échappent
encore à toute évaluation, elles sont incontestable-
ment énormes.
Cependant, si rapide que le développement puisse
être, en l'espèce, longtemps encore il existera un
écart considérable entre les chiffres relalifs aux
deux sources de force motrice envisagées.
Est-ce à dire que l'intérêt de l'utilisation des
forces hydrauliques soit moindre que n’essayent de
le faire comprendre des propagandistes enthou-
siastes ?
Loin de là, au contraire; puisque, quoique l'on
puisse faire, les combustibles resteront d'une uti-
lité primordiale dans la vie future de nos Sociétés,
la nécessité n’est que plus urgente de hâter la cap-
tation des autres forces mises à notre portée.
D'ailleurs, tout le combustible extrait n'est pas
et ne pourra jamais être consacré à la production
de la force exclusivement, et, de plus, l’utilisation
des forces hydrauliques présente certaines catégo-
ries d'avantages spéciaux qui peuvent lui donner
des conséquences d’une importance considérable.
Les forces hydrauliques constituent une source
de puissance plus stable que la plupart des autres,
et elles ne s'épuisent pas.
On leur reprochera de n'être pas toujours éco-
nomiquement distribuables; elles ne se débitent
pas en détail, pourrait-on dire, comme il est pos-
sible de le faire avec le charbon, et leur puissance
de pénétration dans les usages des différentes
classes de la population est donc moindre.
Mais{à cela nous sommes en droit de répondre
que, dans la plupart des cas, elles viennent satis-
faire les besoins d'industries existantes qui ne pros-
pèrent que difficilement sans elles; qu'elles per-
mettent souvent de créer des exploitations dont la
réalisation serait impossible à défaut d'elles; qu’elles
offrent de même le moyen de tirer parti de richesses
minérales qui devraient autrement rester impro-
ductives, etc.
Et nous pourrions ajouter aussi qu'elles inter-
viennent avec grand profit dans la fabrication de
produits chimiques qui s'échangent au kilogramme
tout comme le charbon, et qu'enfin rien n'interdit
d'espérer qu’un jour viendra où, par la mise au
point d'un accumulateur extraléger, l’énergie
électrique mème sera susceptible d’être placée sur
le marché dans des conditions identiques à celles
des autres produits commerciaux.
COSMOS
411
Pourquoi n’arriverions-nous pas au besoin à con-
vertir la houille blanche, en passant par l’intermé-
diaire de l'énergie électrique, en un combustible
artificiel représentant, sous un poids donné, un
maximum d'énergie?
De ces remarques. il y a lieu de tenir compte
surtout de ce que les forces hydrauliques sont pour
ła plupart nombreuses dans les régions qui sont le
moins bien partagées au point de vue des com-
bustibles.
: En Europe, par exemple, la Norvège à elle seule
dispose de 8 millions de chevaux environ ; la Suède,
qui vient ensuite, de 7 millions environ; la pénin-
sule scandinave a donc une réserve de 15 millions
de chevaux; la France peut se féliciter d’être lar-
gement partagée, et cette circonstance lui sera des
plus favorables si elle ne constitue un nouveau sti-
mulant pour les appétits de l'étranger.
Parmi les combustibles eux-mêmes, tous n’ont
pas une égale importance, et des considérations
analogues à celles qui précèdent peuvent être
émises à propos de quelques sources d'énergie que
nous avons comprises dans cette catégorie de res-
sources, à propos des huiles minérales et des gaz
naturels, par exemple.
Si l’on se place au point de vue commercial, en
rapprochant simplement les chiffres de la produc-
tion des différentes catégories de combustibles,
ceux que nous venons de citer n'ont qu'une valeur
secondaire; en réalité, pourtant, de par les qualités
spéciales qu'ils possèdent ou les conditions de leur
production, ils atteignent un intérêt considérable
pour quelques applications.
Voyez, par exemple, le grand avantage que la
Californie et la Pensylvanie, la Galicie et la Rou-
manie, le Caucase, les Indes néerlandaises, peuvent
tirer de l'emploi de leur pétrole pour l'éclairage et
le chauffage, et surtout pour la production de la
force dans l'industrie, dans ja traction, dans la
navigation.
Voyez aussi l'extraordinaire supériorité des com-
bustibles liquides pour la marine commerciale ou
de guerre, considérez encore les qualités précieuses
des installations à combustibles liquides, fixes ou
mobiles, pour l’agriculture ; dans beaucoup de cas,
elles résolvent d'une façon parfaite des problèmes
d'une importance capilale pour les exploitations
agricoles: réalisation d'installations centrales de
génération d'électricité employant un combustible
facilement et économiquement transportable; de
machines automobiles de toutes puissances pour
l'exécution des travaux de culture, de tracteurs,
d'automobiles, ete., pour les entreprises de trans-
port des produils agricoles, etc.
En somme, l'utilisation des combustibles liquides
a une portée bien plus grande que l'on ne pourrait
le croire en se rapportant purement etsimplement
aux chiffres de la production.
Celle-ci est faible, en effet, à côté de la produc-
tion en charbon; elle atteint approximativement
45 millions de tonnes, ce qui correspond à une
puissance de 12 millions de chevaux si toute la
production était utilisée pour la génération de la
force; or, il nen est pas ainsi; une grande partie
des huiles minérales — 50 pour 100 au moins —
est employée sous forme de pétrole et de benzine
pour l'éclairage; une partie non négligeable sert
au graissage.
C'est le tiers, tout au plus, qui sert à la produc-
tion de la force, sous forme de gazoline, de ben-
zine ou de benzol, dans les moteurs à combustion
interne, ou de pétrole brut et de résidus, pour Île
chauffage de chaudières.
Sans doute, la production croit d'année en année
d'une façon marquée : elle a doublé depuis dix ans;
dans le mème intervalle, pour les États-Unis seuls,
qui fournissent aujourd'hui 25 millions de tonnes,
elle s’est accrue du simple au triple; au Canada,
à Madagascar, à la Trinité, il y a d'importants
gisements dont l'exploitation est à peine amorcée;
il est à présumer aussi que de nombreux et riches
gisements existent dans les régions centrales de
l'Asie et de l'Afrique, de l'Australie, du Sud afri-
eain: d'autre part, les procédés d'extraction et
d'exploitation s’améliorent partout.
Néanmoins, c'est à raison de leurs propriétés
particulières plus que de la quantité de la produc-
tion que les huiles minérales sont intéressantes.
On doil en dire autant des huiles végétales.
Quant aux gaz naturels, outre que leur utilisa-
lion est localisée aux lieux de dégagement, leur
production semble devoir rester stationnaire.
Ils jouent aujourd hui un rôle important aux
États-Unis, dont les gisements, de formation géolu-
gique plus reculée que ceux des autres pays, four-
nissent les gaz dans des conditions de régularité
favorables à Fa captation; la production annuelle
est de 14 milliards de mètres cubes approximati-
vement, dont les deux tiers, correspondant à une
puissance de 2,5 millions de chevaux, sont utilisés
pour la production de la force.
Mais on constate dans tous les gisements que les
débits et les pressions faiblissent, et il faut toute
l'amélioration des méthodes de captation pour
compenser la diminution de production qui tend
à se produire.
En résumé, les différentes sources de force mo-
trice sont très intéressantes, mais ce sont les com-
bustibles solides sous leurs différentes formes qui
ont le plus d'importance générale, et il est indis-
pensable que lon s'occupe, dans tous les milieux et
par tous les moyens, den améliorer les procédés
d'utilisation.
Dans ce but, il faut, en premier lieu, que par la
substitution progressive aux petites installations
isolées de grandes installations centrales, distri-
COSMOS
40 OCTOBRE 1912
buant la force par l'intermédiaire de l'électricité,
on supprime les gaspillages de combustible.
ll faut que l'on poursuive la mise à profit des
gaz de fours à coke, employés dans la fabrication
du coke métallurgique; près de 120 millions de
tonnes de charbon sont annuellement employées
dans cette industrie, et l'on évalue à près de 3 mil-
lions de chevaux la puissance que pourraient
donner les gaz; actuellement, on n'utilise que le
quart de celte puissance; c’est en Allemagne que
l’on réalise dans cette voie les progrès les plus
rapides, et l’on y récupère presque la totalité des
gaz dégagés, soit pour la production de la force,
soit pour la production de la lumière.
Il faut aussi que l’on tire parti le plus complète-
ment possible des gaz des hauts fourneaux qui
pourraient, dans les conditions présentes, donner
approximativement {40 millions de chevaux; sept
dixièmes de cette puissance sont nécessaires pour
le fonctionnement des hauts fourneaux eux-mêmes:
il convient d'utiliser au mieux le restant.
Il est indispensable aussi de poursuivre l'étude
de la gazéification des combustibles secondaires :
des charbons lavés, des résidus, des schistes bitu-
mineux, des houilles menues, des cendres de coke :
constatons que la France est résolument entrée
dans cette voie; on y utilise déjà des déchets con-
tenant jusqu'à 65 pour 100 de cendres; en Angle-
terre, il y a une soixantaine d'usines traitant des
schistes; en Allemagne, on procède en ce moment
à des expériences approfondies sur l’utilisation de
combustibles inférieurs; plusieurs grandes usines
électriques fonctionnent avec des lignites pauvres.
Il faut encore que l’on n’abandonne pas le pro-
blème de l’utilisation de la tourbe, plus près d’être
résolu convenablement qu'il ne le fut jamais.
Nous ne parlerons pas du ròle que l'électricité
doit avoir dans tous ces domaines; il nous suflira,
pour le moment, d’avoir essayé de donner une
idée de l'importance que présente chacun deceux-ci,
en nous limitant aux questions d'un intérèt pra-
tique immédiat.
Nous laissons pour un travail ultérieur l'examen
des perspectives d'avenir qui s'offrent à d'autres
méthodes — comme l’utilisation de la chaleur
solaire, celle du grisou, etc., — et l'étude du détail
de l’outillage nécessaire pour la réalisation des
perfectionnements signalés dans les lignes qui
précédent, comme l'utilisation des combustibles
liquides, la gazéification des combustibles secon-
daires, l'exploitation des tourbières, elc.
Nous n'avons voulu envisager ici que les pro-
blèmes qui nous paraissent se rattacher d’une facon
étroite à l'amélioration immédiate des procédés
industriels, à augmentation de la puissance pro-
ductrice de l'homme et ainsi, par des liens peut-
ètre insoupconnés ou inattendus, à la question si
troublante de la vie chère. H. MARCHAND.
N° 1446
COSMOS
413
Les jouets au concours Lépine. ©”
Dans un autre ordre d'idées, voici un intéressant
jeu familial qui ne manque pas d’inédit, c'est Île
Foot-ball de salon (fig. 1, 2), qui se présente sous
‘aspect d’une boite en bois, de forme carrée, dont le
fond est constitué par quatre plans inclinés se ter-
minant au centre qui est la partie basse. Ce centre
est occupé par une toupie dentée en bois assez
massive pour pouvoir être mise en route à la main
et conserver pendant un certain temps l'impulsion
reçue. Elle tourné simplement sur son pivot. La
partie haute de chaque plan incliné est occupée
d’abord par deux alvéoles dans lesquelles on place
deux billes, puis, tout autour du jeu, une bande
plane est divisée en cases numérotées 5, 10, 15.
Les cases d'angles portent les numéros 30 et les
billes n’y ont pas accès. En face de chacun de ces
angles, une petite spirale de fil de fer sert de sup-
port à une balle de caoutchouc. Enfin, des tringles
métalliques interdisent aux balles l’entrée des
F1G. 1. — 2. FOOT-BALL DE SALON. — 1. LE NAUTILUS.
cases réservées aux billes. On met en place les
balles et les billes, puis une cinquième balle de
caoutchouc sur la toupie qu’on lance ensuite. La
force centrifuge projette la balle dans le jeu; elle
gravit les plans inclinés et vient frapper contre
les tringles ; elle rebondit, revient vers la toupie en
rotation dont les dents la chassent de nouveau, et
ainsi de suite. Au cours de ces pérégrinations, elle
a atteint des billes, des balles qu'elle a chassées,
soit dans des alvéoles (dans ce cas, elles demeurent
en place), soit contre la toupie qui les chasse éga-
lement. Ces nouveaux projectiles frappent au hasard
les balles et les billes non encore atteintes, et, la
rotation de la toupie aidant, tout cela se case pêle-
mèle, au hasard des projections. Beaucoup, parfois,
se sont heurtées sans cesse aux tringles et aux
autres obstacles disséminés sur tout le pourtour de
la boile, et en fin de compte viennent lamentable-
ment échouer dans le fond, près de la toupie au
repos. On fait le total des points, et le joueur passe
la main au suivant. En fin de compte, le total des
points le plus élevé est le gagnant.
(1) Suite, voir p. 388.
Un jouet qui n’a certainement pas été jugé à sa
valeur, le Vautilus (fig.1,1), mérite d’être signalé.
C'est un aquarium avec poisson rouge artificiel.
L'aquarium est une sphère entièrement remplie
d’eau ; à la base. elle est fermée par une membrane
sur laquelle on peut exercer une pression en ap-
F1G. 2. — BOOMERANG-BALL.
puyant sur un petit levier extérieur. Le poisson, fait
en celluloïd, est entièrement creux. Il porte sous le
ventre un petit disque métallique surmonté d'une
membrane élastique; le disque est traversé par un
léger tube recourbé vers l'arrière. La membrane
est donc susceptible de se soulever sous l'action de
l’eau pénétrant dans le tube ou de s’abaisser sous
la pression de lair contenu dans le corps du
F1G. 3. — AUTOMOBILE POUR ENFANT,
poisson. Dès que l'on agit sur le levier extérieur,
la membrane placée à la base de l'aquarium tend
à comprimer l'eau en se soulevant; l'eau étant
incompressible, pénètre dans le tube sous-ventral
du poisson et ensuite dans la petite poche inté-
rieure constituée par le disque et la membrane
qui le recouvre. Le poids de cette eau entraine le
414
poisson, qui descend vers le fond de l'aquarium.
Si on laisse les choses revenir à leur état normal
en cessant d'appuyer sur le levier, l’air comprimé
à l’intérieur du poisson chasse l’eau, et le petit
animal reprend sa montée. Mais comme l’eau
s'échappe par un tube recourbé vers l'arrière, ce
courant détermine la progression vers l'avant et
le poisson nage. En combinant les pressions, on
arrive à diriger le poisson à sa volonté, et il effectue
|
k
8 |A
Lo
Å Pr
<Ñ à À j Z A
BA S j
A i f ~ >. O
À e
=
À A
\ €
F1G. 4. — LE MULTIPLE.
des évolutions comme un vrai poisson rouge dans
un aquarium.
Du salon, passons au jardin, pour nous exercer aù
Boomerang-ball (fg. 2). Quatre montants de 41,2 m
environ de hauteur soutiennent deux cordelettes
horizontales, parallèles et éloignées l'une de l’autre
d'une vingtaine de centimètres. La distance entre
les deux groupes de deux piquets est de 3 mètres.
Enfin, les ficelles supportent trois, quatre ou cinq
filets rapprochés ou non les uns des autres, au gré
des joueurs.
Entre les montants d'arrière est dressé un che-
min de roulement en bois cintré vers l’intérieur du
COSMOS
10 ocTOBRE 1912
Jeu. Le joueur se place à 2 ou 3 mètres en avant
du jeu et lance une boule aussi adroitement qu’il
lui est possible pour qu’elle suive le chemin de
roulement vertical. La boule est alors ramenée,
par le cintre, vers le joueur, et elle tombe dans
l'un des filets. La partie se joue à cinq boules, par
exemple, et on attribue une valeur numérique dif-
férente à chaque filet, le nombre le plus élevé
étant donné au filet le plus éloigné du cintre.
On doit acquérir à ce
jeu, et assez rapidement,
une habileté suffisante
pour caser toutes ses
boules; mais il est tou-
jours permisd’augmenter
la difficulté en changeant
la place des filets. Ce jeu
nous a paru supérieur
aux antiques jeux de pa-
lets dont on trouve encore
quelques rares spécimens
dans les établissements
de la banlieue parisienne.
Il sera tout à fait à sa
place dans un parc, au
milieu d’une allée om-
bragée, et les dames y
trouveront autant de
charmes que leurs maris
et leurs enfants.
US
Pour l'enfant bien
sage, et qui dispose d’un
parc, voici le jouet idéal
et bien moderne (fig. 3):
l’auto véritable avec
moteur à essence, pé-
dales, leviers, une car-
rosserie soignée et des
P pneus si on le désire.
Cest un vrai petit bijou
de construction méca-
Ç | nique qu'un enfant de
huit ans peut aisément
conduire, toutes les
pièces, les commandes,
ayant été réduites à leur plus simple expression.
La voiture a deux mètres de longueur; elle est
à deux places très confortables. Le moteur, mono-
cylindrique à ailettes, donne trois quarts de cheval.
Le carburateur, automatique, à gicleur, est installé
au-dessus de la chambre d'explosion; il aspire
directement dans le réservoir, qui contient une
provision d’essence suffisante pour trois heures de
marche. L'allumage a lieu par piles sèches et
bobine d'induction et sa distribution est assurée
par le poussoir de la soupape qui ne provoque le
contact que pendant un instant afin d'augmenter
la durée de la pile. La voiture ne comporte pas de
N° 1410
changement de vitesse ni de différentiel ; le pont
arrière est à vis sans fin irréversible commandant
une roue hélicoïdale. L’essieu porte deux tambours
de frein: l’un au pied, l'autre commandé par un
levier à main. La roue arrière droite seule est
motrice.
La voiture ne comporte pas de marche arrière;
elle ne peut donc circuler sur les routes. Sa vitesse
est de 4 kilomètres par heure, c'est-à-dire que les
parents peuvent la suivre au pas pour surveiller
l'enfant. L'inventeur s’est inspiré de cette considé-
ration, pour élablir ses pédales, que si l'enfant
prend peur, il fait un geste et instinctivement lève
un pied. Alors la voiture s’arrète. L'embrayage ne
s'effectue que lorsque l'enfant appuie sur la pédale:
dès qu'il lève le pied, il débraye. De même l’autre
pédale freine tant qu’elle n’est pas abaissée. Aucun
accident n’est donc à redouter.
Cetle voiture a été construite pour être vendue
900 francs avec des roues en bois cerclées de fer.
Nous la verrons certainement remplacer les
antiques voitures de chèvres qui ont fait les délices
de nos jeunes années.
En général, le jouet mécanique tient une
place prépondérante au concours Lépine : cette
année, il n’a fourni que peu de modèles. Nous
COSMOS
415
signalerons seulement ceux que M. Gasselin a
exposés.
Le multiple (fig. 4) est constitué par un levier
tournant autour d’un axe horizontal porté par deux
montants F fixés sur un socle G. Ce levier est pourvu
dans toute sa longueur d’une coulisse À parcourue
par un coulisseau H; une crémaillère double
interrompue engrène avec un pignon denté B
maintenu à l’intérieur de A par deux galets Il’.
Le sujet mobile C est monté sur une douille J, et
vient s'ajuster, serré, sur laxe du pignon B. Un
ressort K maintient verticalement la coulisse A en
se logeant dans l'une des deux échancrures prati-
quées sur les bords du disque L auquel est fixé un
doigt de renversement. Dès que le sujet se trouve
au bas de la coulisse, on fait faire, à la main, un
demi-tour au doigt, et la coulisse, tournant sur son
axe, ramène le sujet en haut qui tombe lentement
en basculant vers la droite et vers la gauche alter-
nativement, le pignon denté qui le commande
engrenant tantôt avec l'une ou avec l’autre frac-
tion de crémaillère. Le pignon B s’arrète à la der-
nière crémaillère et fait ensuite quelques tours sur
lui-même,
(À suivre.) L. FOURNIER.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 30 septembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. ÉMILR PICARD.
Le crâne de Descartes.— M. E. PERRIER expose
que le crâne de Descartes, ou du moins celui que
l'on suppose avoir appartenu au grand philosophe, et
que l’on disait perdu, n'a jamais été égaré depuis
1821, époque où il parvint au Muséum. Il a changé
souvent de place dans les collections, mais il est
facile de suivre ses pérégrinations.
M. Perrier donne à cette occasion l’histoire de cette
relique depuis la mort de Descartes jusqu'à son
entrée dans les collections du Muséum: il faut bien
avouer que cette histoire n’a rien d’absolument
probant pour l'authenticité de la relique.
M. Perrier profite de cette occasion pour signaler
une fois de plus l'insuffisance des galeries du
Muséum qui ne peuvent plus loger les collections
qu’elles reçoivent, d'autant que nombre de båtiments
sont dans un état déplorable, même parmi les plus
nouveaux, depuis l'inondation de 1910. Leur réfection
s'impose et doit être entreprise et continuée sans
interruption, sous peine de voir disparaître, faute de
pouvoir y maintenir l’ordre, des collections dont la
valeur approcherait du milliard, si elle n’était inesti-
mable.
Sur une nouvelle forme d’amidon soluble.
— M. G. Malfitano et M™ Moschkoff ont montré récem-
ment que de l'amidon déminéralisé, préparé par leur
méthode de congélations successives, se dextrinise en
devenant peu à peu soluble lorsqu'on le soumet à la
dessiccation. Ce résultat a suggéré à M. A. FERNDACH
l'idée de transformer de l’amidon en sa forme soluble
par l’action de déshydratants, parmi lesquels il a
essayé tout d'abord l'alcool absolu et l’acétone pure.
Si l'on verse, dans un grand excès d’acétone pure, de
l’empois d'amidon à 1 ou 2 pour 100, préparé avec de
la fécule de pommes de terre du commerce, c'est-
à-dire n’ayant subi aucun traitement préalable pour
sa déminéralisation, on obtient un précipité flocon-
neux, qui se forme au fur et à mesure que l’empois
tombe en mince filet dans l’acétone fortement agitée.
Le précipité est broyé dans un mortier avec de
l'acétone pure, essoré et séché dans le vide sec. On
obtient ainsi une masse parfaitement blanche, pulvé-
rulente et très légère, qui présente cette particularité
très intéressante d’être soluble, non seulement dans
l’eau chaude, mais aussi dans l'eau froide.
Observations sismologziques faites à l'ile
de Pâques. — Au commencement de 1911, le gou-
vernement chilien a bien voulu installer pour une
année une station méttorologique et sismologique
à l’île de Pàques, point isolé au milieu du Pacitique
sud-oriental et situé à 2600 kilomètres des terres les
plus rapprochées, l'archipel Gambier.
T
Une composante de pendule Bosch-Omori de 4100 kilo-
grammes fonctionna du 25 avril 1911 au 5 mai 1912
à Mataveri, petit port de l'extrémité sud-ouest de l'ile,
au pied du volcan Rana Kao.
Il ne s'est produit aucun tremblement de terre sen-
sible pendant la période indiquée de 376 jours. M. de
Montessus de Ballore note que le fait, pour tre
négatif, n’en est pas moins intéressant, puisqu'il con-
firme une fois de plus l'indépendance des phénomenes
sismiques et volcaniques.
Des mouvements microsismiques d'une période
extréimement constante de quatre secondes semblent
dues aux agitations de la mer qui se précipite dans
les grottes de la falaise.
L'auteur souhaite que la France apporte une contri-
bution analogue et plus importante encore à la science
sismologique en installant à Tahiti une station per-
manente.
Sur les courants aériens en Afrique occi-
dentale. — Au cours d'une premiere mission en
Alľrique occidentale. M. H. HroentT a été amené à con-
sidérer que les seuls courants aériens au Dahomey
ċtaicntla mousson, soufllant de mars-avrilà novembre,
et l'Aarmattan, se manifestant de novembre à mars-
avril. Ce dernier est caractérisé par: 1° sa direction
Est à Nord-Est; 2’ son extrüime sécheresse; 3° sa grande
révularité. 1 a cru devoir identifier l'harmattan avec
la branche de retour du circuit Atlantique.
Cette interprétation est en désaccord avec celle des
diflérents auteurs qui 8e sont occupés de la question.
Cependant, de nouvelles études portent M. Hubert
à maintenir sa manicre de voir, et ilexpose les raisons
qui lui sembient militer en sa faveur.
Les faits qu'il a relevés lui paraissent établir nette-
ment :
1° Que l'alizé et l'harmattan sont deux courants dis-
tincts et nettement diflérents:
2" Que, tandis que la mousson est un vent saison-
nier, tandis que l'alizé est un vent océanique et, en
quelque sorte, local, l’harmattan est, en Afrique occi-
dentale, le long des 3 000 kilometres où des observa-
tions ont pu étre faites, un courant constant de vaste
amplitude dont tous les caractères sont précisément
ceux de Ja branche de retour du circuit Atlantique,
telle que la theorie avait amené MM. de Tastes et
Berget à la considérer.
Résultats scientifiques de l'excursion alpine de la
Geologische Vereinigung; \es nappes lépontines à
l'ouest d'Innsbruck. Note de M. PiEnre TEnMIER. —
Sur un genre particulier de courants électriques. Note
de M. Gory. — Sur la réfraction astronomique au voi-
sinage de lhorizin. Note de M. Arxaub. — Présence
de la québrachite dans les feuilles de Grevillea
robusta A. Cunn. Note de M. Em. BounotELorT et
MU A. FicnurexnoLzz. — Sur quelques propriélés nou-
veiles dus peroxvdases et sur leur fonctionnement en
l'absence de peroxyde. Note de M. J. Wocrr., —
Recherches sur la toxicité des champignons. Leur
pouvoir hémolvlique, Note de MM. Jacoves Pausor et
VERNER — Sur la tectonique de la nappe de Morcles
ut ses conséquences. Note de M. MauRicE LUGEoN.
210 COSMOS
10 OCTOBRE 191%
SOCIÉTÉ ASTRONOMIQUE DE FRANCE
Séance du mercredi 2 octobre.
PRÉSIDENCE DE M. MAURICE FOUCHÉ.
M. Maurice Fouché fait l'éloge du regretté Henri
Poincaré, mathématicien, physicien el astronome,
qu'il a pu connaitre dans l'intimité. Comme mathéma-
ticien, Poincaré a tenu une place éminente, d'aucuns
diront la premicre place; physicien, il a, àla Sorbonne,
parcouru toutle cycle de la physique mathématique:
astronome, il a rénové les méthodes de la mécanique
céleste et repris le probleme de la stabilité du système
solaire ébauché par Laplace: naguère, il s'excusait
modestement de publier ce dernier travail incomplet.
ajoutant qu’à son àge on n'est sùr de rien et qu'il
ne lui serait sans doute pas permis de reprendre une
autre fois ce labeur long et ardu pour le conduire à
son achèvement.
il a été aussi un philosophe de la science. Modeste
autant que génial, il s'est interdit de parler des
sujets sur lesquels il n’avait rien de sérieux à dire; il
s'est contenté de faire la critique de la science, sans
accepter le titre de philosophe proprement dit. Non
point qu'il écarte de la réflexion humaine les grands
problèmes de l'au-delà, de notre destinée, de l'exis-
tence d'un absolu; il ne prétend pas que ces pro-
blémes sont sans intérèt, il ne les supprime nullement
comme les positivistes. S'il ne les traite pas, c'est
qu'il s’est restreint personnellement aux questions
philosophiques qui ont un rapport immédiat avec la
srience.
On aimerait que l'orateur nous apprenne quelque
chose de la pensée intime de Poincaré sur les grands
problèmes de la destinée humaine, de la morale, de
Dieu et de la religion. Mais M. Fouché se défend de
soulever le voile de discrétion et de silence — exagtré
à notre sens — dont le grand savant a couvert sa vie
morale et religieuse intérieure.
Parlant de la méthode inductive de la science,
Poincaré dit que l'induction postule la croyance
à un ordre, à un déterminisme, à des lois. Cette har-
monie existe-t-elle dans l'univers, ou bien est-elle
créée par notre esprit? À ce dilemme, il ne donne pas
de . réponse: il constate sculement que l'harmonie
existe dans les phénomènes, et il ajoute: « Il n'est
pas possible que cette harmonie soit le fruit du
hasard. »
Il constate aussi que toutes les connaissances scien-
tifiques nous viennent par les sens; du fait de cette
origine, la science reste faible et imparfaite. Elle est
d'abord nécessairement très incomplète : le savant sait
qu'il ignore beaucoup et qu'il existe sans doute des
catégories entières de phénomènes qui échappent et
échapperont probablement toujours à l'emprise de
nos sens (comme autrefois nous échappait tout ce
que le télescope et le microscope nous ont plus
tard révélé). La science aussi reste toute supert-
ciclle: nous ne connaissons que les relations de
l'univers avec nous-mêmes; les causes nous échappent.
A défaut des causes profondes qu’il est incapable
de saisir, le savant imagine des hypothèses: c'est
par l'hypothèse que la science vit, qu'elle s'enrichit:
bien plus, qu'elle réussit à prévoir. Certains esprits
N° 12:10
trop simples croient que les hypothèses peuvent
ètre vérifiées par l'expérience, qu'elles peuvent perdre
leur caractère hypothétique pour devenir des vérités
démontrées. Voilà l'attitude du dogmatisme scien-
tifique, qui est la première attitude de lesprit qui
réfléchit sur da science; mais ce dogmatisme ne tarde
pas à recevoir de cruels démentis: l'hypothèse que l'on
croyait si bien véritiée est bientôt insuffisante et ca-
duque. Alors le vulgaire proclame la faillite dela science.
ll y a bien faillite de quelque chose: c’est la faillite du
dogmatisme scientifique, erreur de quelques esprits
aventureux ou simplistes. Car l’hypothèse choisie par
les savants pour rendre compte des faits et des lois
n'était pas la seule hypothèse possible; naturelle-
ment, les savants avaient, parmi toutes les hypothèses
possibles, choisi d’abord la plus simple, qui était
momentanément suffisante; et c'est pourquoi l'hypo-
thèse se condamne elle-même par les progrès aux-
quels elle mène la science : il arrive un moment où
elle est insuffisante à rendre compte de certains phé-
nomènes inattendus, et elle doit faire place à une autre
hypothèse qui, moyennant une plus grande complica-
tion, explique les nouveaux phénomènes en mème
temps que les phénomènes anciennement connus.
Voilà en quoi consiste ce qu'on a appelé parfois le
scepticisme de Poincaré.
Il a aussi examiné les idées fondamentales des
mathématiques. Ainsi la géométrie est-elle une science
a priori ou une science expérimentale? Ni l’une ni
l’autre définition ne conviennent, répond Poincaré,
qui tranche le nœud gordien. La géométrie n'est
qu’un ensemble de raisonnements : il n’y a pas de
vérités géométriques, mais seulement des théorèmes
et des conséquences logiques de ces théorèmes. Par
exemple, le postulat d'Euclide n’est ni vrai ni faux;
c'est une simple convention, c'est une proposition qui
sert à définir les parallèles en géométrie.
Ainsi Poincaré a fait la critique des bases de la
science; mais il croit à l'harmonie dans les phéno-
mènes; il a une foi, el une foi enthousiaste, à une
vérité qui est cachée par derrière les phénomènes.
Pour emprunter à peu près ses propres expressions :
« On peut, dit-il, discuter à perte de vue sur les bases
de la science; mais quand on a, par exemple, achevé
le traité de l'électricité, les lampes s’allument; et cela
ne peut pas ètre un pur hasard. »
M. E. Drouer indique ensuite le procédé qu'il a
imaginé pour la formation instantanée de miroirs
paraboliques. Une glace bien plane et bien unie est
logée par ses bords dans une monture circulaire creuse
et étanche; au moyen d'une pompe, on peut faire un
vide partiel au-dessous de la glace : la pression atmo-
sphérique agissant sur l’autre face incurve la glace.
La section suivant un diamètre affecte la forme d’une
chainette, qui se confond pratiquementavec une para-
bole quand la flèche ne dépasse pas un centième du
diamètre. Un miroir de 2,5 mètres de diamètre et de
= mètres de distance focale pourrait être logé dans
un tube rigide que l’on rendrait maniable en l’immer-
geant dans un réservoir d’eau ou dans un lac naturel
assez profond, comme les lacs qui ont pris la place
des anciens cratères volcaniques. Cette dernière idte
est assez originale.
B. Latour.
COSMOS 117
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES
Congrès de Nimes.
Ce Congrès, qui avait été préparé, il y a plusieurs
années, par le regretté D° Reboul, chirurgien de
Nimes, a été amené à réalisation par un Comité local
d'organisation présidé par M. le D° Vauriot, assisté de
M. Henri Astruc, directeur de la station œnologique
du département: de M. Louis Boyer, président du
Syndicat d'initiative de Nîmes ; de M. Gabriel Carriere,
ancien président de la Société d'Études naturelles;
de M. le D' Marignan, directeur scientifique du Museum
Arlaten; de M. Georges Maurin, directeur de la Revue
du Midi; de M. Gabier Mingaud, conservateur du
Museum d'Histoire naturelle de Nimes; Paul Villaret,
vice-président du Comité d'initiative, etc. La cheville
ouvrière du Congrès, le secrétaire général, était
M. Félix Mazauric, conservateur des musées archéo-
logiques.
Cette réunion scientifique a eu un grand succés;
nous donnons ci-après une analyse d’un certain nombre
de travaux qui lui ont été présentés.
Mathématique, Astronomie et Mécanique.
Cette Section était présidée par M. EnxEsr Lr8o\,
professeur honoraire de l'Université, qui présenta
divers travaux personnels, parmi lesquels il faut citer
l'étude sur la fable de base 510 510 donnant les
facteurs premiers des nombres depuis 1 jusqu'ù
100 millions. Gelte table occuperait environ cinq fois
moins de place que celles construites par les procédés
employés jusqu'ici. Dans cette table de base B de
diviseurs premiers, il y a un nombre de tableaux égal
à la moitié du nombre des indicateurs I. L'auteur
a trouvé une méthode qui permet de n'employer que
deux tableaux se rapportant aux indicateurs _ 1. Pour
cons{ruire ces tableaux, il résout d’abord les deux
équations indéterminées
pour construire un tableau où sont les valeurs des
premières solutions y = K, et y = K — 1 rela-
; 1
lives aux [| < ; B. Ce tableau permet de résoudre
presque immédiatement les deux équations :
Ir +<By—= 1
À l’aide du système de solutions .r, y, on trouve des
valeurs de la caractéristique K qui se trouvent dansles
deux tableaux d'indicateurs + 1. M. Lebon explique
dans son mémoire comment, à laide de res deux
tableaux d'indicateurs :: 1, on peut reconnaitre si un
nombre donné est premier où composé.
M. Lebon rend un hommage ému à l'illustre maie
maticien Poincaré, enlevé prématurément à la science.
M. A. Augav (Dijon) est Fauteur d'un rapport sur
les Erreurs de mathématiciens. Elles peuvent provenir
surtout :
{° D'une mauvaise interprétation ou d'une connais-
sance insuftisante de la théorie, que lon remplace par
des observations ou des mensurations directes (ua-
drature du eérele, mouvement perpétuel, trisection
de l'angle, duplivation du cube, mesure de certaines
figures);
AIB
% Du respect exagéré des idées reçues et des auto-
rités suivies aveuglément (fétichisme dont a bénéficié
Aristote pendant tout le moyen âge, vogue des élé-
ments d'Euclide...….);
3’ D'un examen trop précipité des conditions de la
question, soit par prévention, soit qu’on ne les ait
pas énumérées complètement ou envisagées sous toutes
les faces (Laplace, Newton, Leibniz...) ;
4° D'inductions non vérifiées à posteriori, générali-
sations ou assimilations hasardées de choses nouvelles
à d'autres connues; assimilation qu’on sait valable
dans une certaine région, et qu’on étend à d'autres
régions sans preuve de la légitimité de cette exten-
sion (Descartes avançant que touté équation du degré
pair se ramène à une autre d’un degré inférieur d'une
unité, conclusion qu'il tire de ce que la résolution de
l'équation du quatrième degré se ramène à celle du
troisième degré; Wallis, quadrature de l'hyperbole);
5° De conclusions qui paraissent évidentes à priori
parce qu’on s'est buté à cette idée qu’un raisonnement
fait sur des choses simples doit aboutir à des consé-
quences simples, idée souvent fausse: une chose
exprimée par des mots simples est souvent, en réa-
lité, très complexe (courbe de Watt et, en général,
les courbes obtenues par des considérations optiques,
dynamiques, etc.) ;
6° De l'idée de système dont les meilleurs esprits ne
sont pas toujours exempts (Guldin, Leibniz).
M. GÉRaRDIN {Nancv). Nouvelle machine algébrique.
— Son principe est simple: il faudra d'abord ramener
les problèmes donnés à des équations de la forme :
a+bér+cx+dr<+e.r.... = y.
Comme exemple, l'auteur prend un problème d'Her-
mite à propos des surfaces osculatrices qui se ramène
à trouver les nombres m et n tels que la somme des
m + i premiers triangulaires doit égaler l'unité plus
un triangulaire de base n + 41. Hermite a donné
m = 5; E. de Jonquières, en 1884, a cilé m =1et
m = 20. Hermite ajoute: « Il y aurait lieu ainsi de
rechercher toutes les solutions en nombres entiers et
positifs pour » et n, mais l'arilhmétique supérieure
ne donne, à cet égard, aucune méthode. »
Le procédé de M. Gérardin, qui donne foutes Îles
solutions, fournit en quelques minutes m = 425 776;
n = 160 403 631 par solution en uombres entiers de
30 4 + 108 E +104 ? = 25 = 7
avec
t — 141 925.
La décomposition des grands nombres, l'analyse
indéterminée, certains problèmes de géométrie et
quantité d’autres questions serent le champ d'in-
COSMOS
40 OCTOBRE 1912
vestigations de ce nouveau moyen de calcul.
M. GérarDIN présente également son rapport sur la
décomposition des grands nombres. Sans faire l’histo-
rique de cette intéressante question, l’auteur cite la
voie indiquée par Landry en 1859 et 1880 et l'article de
Seelhof: Zur Analyse sehr grosser Zahlen, paru en
1885.
Les procédés actuels se ramènent à la méthode de
Lawrence; la méthode d’Euler a été utilisée en 1903
par Coole. Comme recherches originales, on peut
citer le mémoire de M. C.-S. Laisant et une commu-
nication faite au Congrès de Nimes reposant sur la
représentation graphique des nombres.
- M. Ernest Lebon a publié d'intéressants mémoires
sur ce sujet; il vient de présenter la première page
imprimée de la table qu’il se propose de publier et
qui permettra de trouver très rapidement et très faci-
lement les facteurs premiers des nombres inférieurs
à 100 millions. M. Gaston Tarry a présenté au Congrès
de Nimes ses tables à triple entrée des diviseurs des
nombres de diàn.
Nombres de Mersenne, de la forme N — 27 —1 où rest
un nombre premier inférieur à 257. Ces nombres ont
été étudiés depuis 16#4 par Fermat, Euler, Lagrange,
Legendre, Gauss, Jacobi et tant d’autres, mais le plus
difficile reste à faire. Jusqu'ici, sept méthodes ont été
proposées, l'auleur en a trouvé de nouvelles permet-
tant d'étudier les nombres de 30 à 78 chiffres, de dire
s'ils sont premiers, sinon de les décomposer.
L'une de ces méthodes est l'application des machines
à décomposer les nombres : le précurseur est Édouard
Lucas (1876); sa machine n’a pas été construite, elle
aurait indiqué ou que le nombre était premier ou
bien qu'il était composé, mais sans donner ses fac-
teurs. M. Kraïtchik doit construire une machine de ce
genre (Sphynx-Œdipe, avril 14912. p. 61-64).
M. Gérardin est lui-même auteur d’une telle machine,
il indique le moyen simple de la remplacer par la
juxtaposition de bandes de papier, variables avec
chaque nombre, mais dont le prix de revient est pour
ainsi dire nul.
Dans la machine automatique ou à main, à volonté,
un simple tour de manivelle opère le décochement
à l’aide du système de va-et-vient, par exemple. D'après
les calculs de l’auteur, on pourrait examiner 8 millions
de nombres par jour et arriver à décomposer ainsi de
très grands nombres: le dernier mot, d’ailleurs, est
loin d’être dit.
(A suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
Étude raisonnée de l’Aéroplaneet description
critique des modèles actuels, par J. FoRDEAUXx,
ancien élève de l'École polytechnique, avec une
préface de LAURENT SÉGUIN. In-8° (25 X 16) de
v1-497 pages avec 26 planches, dont 18 en deux
couleurs (15 fr). Gauthier-Villars, Paris. 1912.
L'œuvre de M. Bordeaux est à la fois neuve, ce
qui semble extraordinaire après la publication de
tant d'ouvrages sur l'aviation, technique, comme
doit l'être l’œuvre d'un homme à qui les questions
d'ordre purement scientifique et surtout mécanique
sont familières, et descriptive, ce qui nous faisait
totalement défaut, à l'exception de quelques ou-
vrages dénommés à juste titre vulgarisateurs.
N° 1446
L'œuvre de M. Bordeaux est technique, sans
doute, mais dans la mesure où doit l'être un
ouvrage qui prétend s'adresser à tous ; M. Bordeaux
invoque à l’occasion les ressources puissantes de
clarté et de brièveté du calcul différentiel et inté-
gral, mais en évitant les formules compliquées, de
sorte qu’un lecteur simplement initié aux principes
de l’analyse mathématique suivra sans peine les
démonstrations; d’ailleurs, les formules impor-
tantes sont rendues claires et familières au lecteur,
grâce à de fréquentes applications numériques
dont les données sont empruntées à des appareils
aériens existants.
Largement descriptive, l'œuvre expose l’état
actuel de la question de la résistance de l’air sur
les surfaces qui s’y déplacent; cet exposé comprend
plus de 100 pages qui ne varieront pas de long-
temps, puisqu'ellesrésument les doctrinesdéfinitives
de M. Liffel, dont la réputation en la matière est
universelle. Elle montre aussi comment les con-
structeurs ont prétendu résoudre le problème du
vol aérien. Les 200 pages qui constituent cet
exposé descriptif forment un véritable réquisitoire
contre la construction actuelle, qui ne répond en
rien aux définitions mèmes de la résistance des
matériaux auxquelss’attaquent desefforts variables;
M. Bordeaux s’est appuyé dans toute cette partie
sur l'œuvre puissante de M. Resal. En cela, l’auteur
a fait une œuvre utile, et l'on ne peut que souhaiter
de voir les constructeurs profiter des multiples et
précieuses indications qui sont contenues dans le
livre IV. 7
Enfin, et c’est un charme de plus, ce livre est
écrit « dans une langue cluire, imagée, concise,
et d’une correction tout atavique », comme le
dit M. Laurent Séguin dans la préface consacrée
à cet ouvrage; M. Bordeaux est le frère de
M. Henry Bordeaux, l'écrivain catholique bien
connu.
La photographie artistique par l’agrandisse-
ment, par J. CaRTERON. Une brochure de la
. bibliothèque de Photo-Revue (0,60 fr). Paris,
Charles Mendel, éditeur.
Les photographes amateurs renoncent de plus
en plus aux anciens appareils à pied, lourds et
encombrants; ils préfèrent les chambres pliantes,
plus rapides à installer et d’un transport beaucoup
plus commode. Le mieux est encore d’avoir un
appareil de petit format, qui peut se meltre dans
la poche, et ne gène pas le touriste dans ses dépla-
cements. Il faut avoir recours à l'agrandissement,
en ce cas, puisqu'un lirage direct ne donnerait que
de trop petites épreuves.
Or, l'agrandissement n’est pas une opération
COSMOS
419
qui doive épouvanter les amateurs; de nos jours,
on trouve tout un matériel très précis qui permet
de faire des agrandissements plus facilement que
des tirages directs. Et les épreuves qu'on obtient
sont autrement artistiques. L'auteur, après avoir
démontré ce point, expose dans leurs grandes
lignes les différentes méthodes d'amplification à la
lumière du jour et à la lumière artificielle et décrit
les principaux types d’appareils dont l'usage est
courant. fl termine par un chapitre sur les épreuves
à la gomme bichromatée, au charhon et aux encres
grasses.
Comment il faut faire de la publicité, par
J. ARREN. Un vol. de 320 pages (4 fr). Pierre
Lafitte et C'° éditeurs, Paris.
La publicité s’introduit partout, déshonore les
campagnes par ses immenses affiches, salit les
rues par ses prospectus, se rend insupportable
par l'obsession d'un nom ou d'un produit qui
pénètre et s'implante dans l'esprit... cest le pro-
grès. Un commerçant ne ferait pas d'affaires s'il
n'avait recours à la publicité, laquelle est plus et
mieux que la simple réclame. Elle force la vente
d'une foule de produits souvent inutiles, crée des
besoins nouveaux dans le public et revèt les mèmes
formes, qu'il s’agisse d’un objet réellement bon ou
d'une parfaile tromperie.
Puisque le commerçant est obligé d’avoir recours
à ce moyen indispensable et cotiteux, il trouvera
dans ce petit « guide » de précieux conseils. On
sent que l’auteur est très au courant de la question
qu’il traite, et il la présente sous une forme per-
sonnelle et vraiment originale. Ce livre, d'une lec-
ture instructive, même pour ceux qui ne sont que
les victimes de la publicité, donne les indications
théoriques et pratiques qui permettent à un indus-
triel ou à un commerçant, etc., de se rendre
compte du genre de publicité qui lui convient, de
ce qu'elle lui coùtera, de ce qu'elle lui rapportera,
de la façon de l'organiser et de la contrôler.
A la Venvole, poèmes par JEAN STRapior. In-18
(3,50 fr). B. Grasset, 61, rue des Saints-Pîres,
Paris.
Ces poèmes furent écrits par un jeune oflicier,
le lieutenant aviateur Jean Stradiot (Edmond
Bæœrner), qui périt le 27 janvier de cette année,
à Senlis, brûlé sous les débris de l'avion militaire
qu'il pilotait. Sans être un écrivain de métier,
l’auteur a le sentiment du rythme, de la force et
de l’éclat dans l'expression. On regrette que la foi
Chrétienne n'ait pas éclairé, purifié et pacifié cette
Ame qui avait une si haute conception du devoir
militaire.
420
COSMOS
10 ocTOBRF 141912
FORMULAIRE
Savon phéniqué. — On donne une odeur phé-
niquée stable et pas exagérément désagréable aux
savons, poudres de savons, savons dentifrices, etc.,
au moyen du l’aracrésol employé à la dose de 1
à 3 grammes par kilogramme. Ce produit résiste
PETITE
Adresses :
Les jouets décrits dans le dernier numéro se
trouvent: Pistolet lance-disques: MM. Dreyfus et Pres-
berg, 19, faubourg Saint-Denis, à Paris. La sauterelle
acrobale : M. Denis, 18, rue de la Justice, à Paris.
Î love you et le Repas des carnivores: M. Petitjean,
38 bis, rue du Ruisseau, à Paris; ceux décrits dans
-ce numéro : Foot-ball de salon : M. Vallé,8, rue Thiers,
à Boulogne-sur-Seine. Le Boomerang-ball: M. Renoir,
5,rue de l'Amiral-Courbet, à Alfort.L'Au/o pour enfants:
M.Kaufmann, 69, rue des Campans, à Paris. Le multiple:
M. Gosselin, 42, rue Victor-Hug, à Puteaux.
M. G. de L., à R: — L' « aveine » est un nom donné
par le capitaine Morceau et qui ne correspond pas à
uné marque spéciale. Vous trouverez de la farine
d'avoine torréfiée à la Société franco-italienne, 2 et
#, place des Vosges, Paris.
M. A. L., à C. — Pour construire cette bobine d'ac-
cord, il n’y a qu'à enrouler un fil fin et isolé sur un
bâton de bois; il est difficile de vous indiquer la lon-
gueur de ce fil, ne connaissant pas votre poste. Pa-
tientez encore quelques semaines, nous allons publier
un article sur ce sujet. — Vos condensateurs sont trop
forts. Essayez avec quelques feuilles seulement.
M. G. P., au Gua. — 1° Le petit moteur en question
est théoriquement réversible. Cependant, emplové
comine dynamo, il s’amorcera très difficilement, car
l'amorcage est d'autant plus malaisé que les généra-
trices sont plus petites. Il convient d'établir l’excita-
tion indépendante : reliez le circuit des bobines
inductives à une source constante d'électricité ayant
a peu près la tension indiquée, # volts. — % Le maté-
riel indiqué, aves en plus un tube à limaille ou bien
un cohéreur à aiguilles croisées (Cf. Cosmos, n° 1437,
p. 159%), est sulfisant pour des expériences à courte
portée. Pour le montage du poste récepteur, voir l'ar-
ticle en question ou bien encore les notes du Cosmos,
n? 1183, t LVI, p. 351, et n° 1191, € LYI p. 687.
Au poste transmetteur, une bobine de Ruhmkorft de
quelques centimètres d'étincelle avec sa pile. Pour plus
de détails, voir {a Téléqgraphie sans fil, par E. MouEr
(2.50 fr), Dunod et Pinat, #7, quai des Grands-Augustins.
M.H. D., à L. — Nous ne connaissons pas l'ouvrage
de M. Maralt qui évidemment a inspiré l'article do
M. Gradenwitz. 1 faudrait vous adresser à ce dernier
«20, Gosslerstrasse, Bérlin-Friedenau, Allemagne) pour
avoir de plus amples renseignements.
M. J. R, è M. — Comme vous avez pu le voir
aprés l'article publié, cet appareil ne peut évidem-
ment pas remplacer ceux d'usage courant. Ha été
construit surtout dans le but de reproduire de petites
senes rapides, la durée de reproduclion ne dépassant
à l'action des alcalins, alors que l'acide phénique
forme des sels peu odorants. Pour fabriquer les
poudres de savons il est bon de mélanger ce pro-
duit légèrement pâleux aux copeaux secs avant de
les broyer au moulin. (/nrPentions illustrées.)
CORRESPONDANCE
pas deux minutes. Pour Ce genre de vues, c'est un
appareil sérieux qui donne de bons résultats.
M. A. B., à C. — L'école libre d'agriculture d'Hen-
nebont {[Morbihan) a fait sa rentrée le 1° octobre der-
nier. La durée des études y est de trois ans. La for-
mation pratique y êst donnée sur trois exploitations
d'une étendue de 85 hectares. Les prix de pension
sont abordables aux bourses les plua modestes. Les
jeunes gens peu fortunés, intelligents et énergiques.
désireux d'apprendre la culture maraïîchére, pourraient
ètre admis gratuitement. Le prospectus-programme
est envoyé à toutes les personnes qui en font la
demande à M. l'abbé Planté, directeur.
M. J. C., à P. — Broteria, revue portugaise et bré-
silienne, se compose de trois séries : botanique, z00-
logique et vulgarisation scientifique. Chaque série
vaut 12,50 fr par an, les trois séries coùtent 31 francs
par an. La rédaction est à Salamanque (Espasune),
Serranos, 2.
M. L. C., à S. — Pour dépolir le verre, on se sert
de poudre d'émeri, qu’on frotte sur le verre à l'aide
d'un bouchon. Il y faut beaucoup de patience (Cosmos,
n° 1248, 26 déc. 1908), — Pour rendre les vitres
opaques, on peut employer le procédé indiqué dans
le Cosmos (n° 1366, l’a vril 1911) ou simplement passer
à la surface du verre une couche de collodion.
R. P.G. T., à P, — 1° On peut signaler dans ce genre
le 7raité de Chimie appliquée, par C. Cnanrié (2 vol.
4905 et 1908, å 22 fr chacun), librairie Masson,120, bou-
levard Saint-Germain; {a Chimie industrielle moderne,
par F. Bectzen (t. 1°, prix ?; t. II, 1944, 20 fr), Socitté
d'éditions techniques, 16, rue du Pont-Neuf. — > Le
traité de physique en question est bien tenu au cou-
rant. — 3 La technique des enyrais, par J. Duuoxr
(4,50 fr}, librairie Ch. Amat, 11, rue de Mézitres, Paris.
— #° Nous ne connaissons pas d’ouvrage sur ce sujet:
peut-être pourriez-vous avoir des renseignements en
vous adressant à l'Institut Pasteur, 35, rue Dutot, qui
vend les ferments. — 5° Merci pour les recettes dont
nous tirerons parti; nous vous enverrons la table
demandée, si elle existe encore. — 6° Le manuel Roret
est ce que nous connaissons de mieux sur la question
du moulage du plitre.
D' T., à C. — Pour ces travaux d'amateurs, il fau-
drait demander le catalogue des manuels Roret, à la
librairie Mulo, 12, rue Hautefeuille, Paris. — Cet
ouvrage n'existe pas, à notre connaissance. La houille
fournit toutes sortes de produits différents. Vous
trouverez des traités spéciaux sur les matières colo-
rantes, d'autres sur les médicaments, d'autres encore
sur les huiles et goudrons, sur les gaz, etc.
lmprimerie P. Firon-Yrau. 3 et 5, rue Bayard, Paris. Ville.
Le gérant : Farc,
No 4447 — 17 ocroBre 1912 COSMOS 421
SOMMAIRE
Tour du Monde. — L’'éclipse totale de Soleil du 10 octobre 1912. Ancienne éclipse de Soleil observée en
Babylonie. Soulèvement de nature volcanique au Japon. Le typhon du Japon de septembre 1912. Le trans-
port des poussières par le vent. Une nouvelle pompe à vide. La vaccination antityphique lors de
l'épidémie d'Avignon. L'effet du soleil tropical sur Phomme et quelques animaux. La télégraphie sans
fil dans l'océan Pacifique. La radiotélégraphie dans l’Amérique du Sud. Le service radiotélégraphique
transatlantique. Nouveaux obus. Les nouveaux canons. La consommation du pétrole dans la marine.
L'épilogue métallurgique des guerres. D'Italie en Corse en aéroplane, p. 421.
Un nouveau funiculaire aérien au Tyrol, p. 426. — Télégraphie sans fil : réception à domicile des
signaux horaires, P. Conner, p. 427. — L’origine des eaux de Pougues, Couses, p. 429. —
Deuxième Congrès national du froid, Carnala, p. 431. — Le nouveau dock flottant de
32 000 tonnes de l’Amirauté anglaise, Mancuaxv, p. 435. — Le vol des projectiles, B. Laroun,
p. 436. — La culture du chrysanthèôme au Japon, Nuwi, p. #39. — Les jouets au concours
Lépine (suite), FounniEen, p. #41. — Sociétés savantes : Académie des sciences; p. #43. Association
française pour l'avancement des sciences (suite), HérichAno, p. 444. — Bibliographie, p. 446.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
L’éclipse totale de Soleil du 10 octobre 1912.
— Échec des observations. — Plusieurs télé-
grammes de Rio-deaneiro donnent quelques détails
sur les résultats, plutôt négatifs, des observations
eftectuées par les expéditions envoyées par Îles
Observatoires de Paris, de Greenwich et de Rio-de-
Janeiro.
Ces trois expéditions s'étaient établies à Passa-
Quatro, toute petite localité de l'Etat de Minas-
Geraes, à une assez grande altitude. Malheureuse-
ment, il ne cessa de pleuvoir pendant toute la
durée de l’éclipse, et aucune observation ne put
être effectuée. Tout ce qu'on put noter, c'est qu'il
fit très noir pendant la totalité. Le président de la
République du Brésil, le ministre des Affaires
étrangères et l'ambassadeur des États-Unis ne
purent donc constater que... la déconvenue des
astronomes, qui eurent certainement le tort grave
de ne pas se disperser pour multiplier les chances
de beau temps.
On est encore sans nouvelles de l'expédition
anglaise Worthington, qui opérait dans l’intérieur.
Disons encore à ce propos que l'expédition de
l'Observatoire de Greenwich était composée de
MM. A. S. Eddington et C. Davidson, avec quelques
aides. Ils avaient pour objectif : 4° de photogra-
phier directement la couronne; 2° de photogra-
phier le spectre-éclair et le spectre de la chromo-
sphère en lumière ultra-violette; 3° d'essayer de
photographier la couronne dans la seule lumière
du coronium, c’est-à-dire de la raie verte 5303. A
cet effet, les observateurs avaient emporté le coro-
nographe de Thompson de neuf pouces (229 milli-
mètres), le spectroscope Hills à quatre prismes en
quartz, prêté par le professeur Newalil, de Cam-
bridge, une lunette visuelle et un doublet photo-
T. LXVII. Ne 1447.
graphique, chacun de six pouces (152 millimètres)
avec un filtre vert spécial.
Nous avons encore appris que les Observatoires
nationaux de l’Argentine et du Chili avaient éga-
lement envoyé des expéditions sur la ligne centrale
de l’éclipse, et ce serait vraiment un hasard malen-
contreux si aucune d'elles n'avait été favorisée
par le temps. Nous ignorons sur quelles localités
ces expéditions ont porté leur choix, mais il se
pourrait fort bien que ce fussent des villages éloi-
gnés de tout centre de communication, ce qui
expliquerait l’absence de nouvelles.
Ancienne éclipse de Soleil observée en
Babylonie. — Une éclipse de Soleilest mentionnée
sur la tablette n° 35968 de la collection du British
Museum. Le D° Cowell a cru pouvoir l'identifier
avec celle du 31 juillet 1062 avant l’ère chrétienne.
M. Nevill (Trans. of the R.Soc.of South Africa)
discute cette date. Il pense qu'il s’agit plutôt d'une
éclipse plus ancienne, du xu° siècle avant Jésus-
Christ ou même antérieure au xu° siècle. Après
avoir examiné toutes les éclipses arrivées entre Îles
années 1250 et 920, il trouve que, si l’on n’attribue
aucune accélération séculaire au mouvement du
Soleil, les éclipses qui s’accorderaient le mieux
avec les conditions d'époque, de date, de lieu, etc.,
sont celles du 3 juin 1247, du 148 mai 1123 et du
31 mai 956; la première de ces trois dales est
celle qui mérite le plus de créance.
PHYSIQUE DU GLOBE
Soulèvement de nature volcanique au Japon
(Géographie, 15 sept. 1912). — Si, même dans les
pays soumis à de violentes et passagères crises sis-
miques, il est assez rare de voir la croiite terrestre
subir brusquement des dénivellations appréciables,
il est plus rare encore d'enregistrer des phénomènes
122
de ce genre dus à des paroxysmes volcaniques, sans
rapport direct avec les dislocations verticales.
C'est ce qui fait le principal intérêt des observa-
tions récemment communiquées par M. Simotomai
à la Société de géographie de Berlin (4).
Le volcan Ousou se trouve dans l'ile de Yéso,
entre un lac d'effondrement de forme circulaire de
42 kilomètres de diamètre (dans lequel il faut pro-
bablement voir une caldeira immergée) et une
baie circulaire, elle aussi, de 50 kilomètres de
diamètre, dont l'origine est également volcanique.
Ce volcan a déjà eu trois éruptions à l’époque his-
torique; la quatrième s'est produite en juillet 4910,
après une période de repos de cinquante ans. Cette
dernière phase d'activité, précédée de tremble-
ments de terre, a duré de juillet à novembre et
s’est notamment signalée par l'apparition de qua-
rante-cinq pelits cratères adventifs. Mais le fait le
plus digne de remarque est le soulèvement en
masse, au pied Nord du volcan, jusqu'à une hauteur
de 150 mètres, de toute une portion de terrain
longue de 2 kilomètres environ sur 4 kilomètre de
largeur. Pendant la période active du mouvement,
le soulèvement s'opérait avec une vitesse de 4 à
5 mètres par jour. M. Simotomai émet l'hypothèse
que ce phénomène est dù à l'intrusion entre les
couches du sous-sol d’une masse de matières érup-
tives qui n’a pas trouvé de fissure pour s'épancher
à la surface, en d'autres termes, à la mise en
place d’un laccolithe. La partie surélevée ayant
maintenant atteint la mème hauteur que les anciens
cratères, l’auteur en conclut que l'équilibre de
pression est établi et que, par conséquent, le mou-
vement est arrivé à son terme. A. Allix.
MÉTÉOROLOGIE
Le typhon du Japon de septembre 1912.
— L'équinoxe ne nous a pas apporté le coup de
vent traditionnel; cependant, il faut reconnaitre
que, depuis la terrible date, les épreuves, au point
de vue méléorologique, ne nous ont pas manqué.
Le Japon, moins heureux, a subi à cette date du
22 septembre un terrible typhon, le plus violent,
dit-on, que l'on ail éprouvé depuis cinquante ans.
C'est la côte sud qui a été atteinte, et les victimes
et les ruines y sont innombrables.
Les typhons, comme on le sait, sont des coups
de vent tournants, destourbillons d'origine tropicale
qui sévissent dans les mers de l'£xtrème-Orient,
dans le nord du Pacifique et dans les mers de
Chine pendant certains mois de l’année.
Au Japon et dans les environs, ils apparaissent
généralement de juin à septembre, et plus fréquem-
(1) Siuoromaï, Nachrichten uber den Ausbruch des
Vudisans Usu im Japan im Jahre 1910, in Zeit. der
Ges. fir Erdkunde su Berlin, 1911, p. 705-710, avec
une carte au 50 000°.
COSMOS
17 ocToBRE 191%
ment à cette dernière date; ces météores suivent
généralement une route parabolique. Les typhons
du Japon de septembre ont ordinairement leur ori-
gine dans le Pacifique, au sud-est de Formose;
leur roule se dirige vers le Ouest-Nord-Ouest et
s’incurve devant l'ile pour entrer dans les mers du
Japon.
Le R. P. Algué, de Manille, établit deux classes
de typhons : ceux du Pacifique, qui ne dépassent
pas le méridien de 122° Est, et ceux des mers de
Chine. On dit qu’un typhon est rapide quand la
vitesse de translation dépasse 22 km: h; il est
lent, au contraire, quand cette vitesse n'atteint pas
414 km: h. Le typhon de septembre dernier au
Japon appartenait à la première catégorie.
Le transport des poussières par le vent
(Revue scientifique, 14 sept.). — L'étude des pous-
sières éoliennes importe à l'océanographie aussi
bien qu'à la géographie et à la géologie. Il y a là
un mode de transport des matériaux auquel on
n’a peut-être pas prêté assez d'attention.
M. Thoulet a fourni récemment d intéressantes
données à ce sujet. Il rappelle, par exemple, le
travail de Rollier mentionnant dans le canton de
Vaud (Suisse), le 20 février 1907, une chute de
pierres pesant jusqu’à 2,62 g, ayant jusqu'à
1,55 cm de diamètre, constituées par des quartz
laiteux et provenant probablement de la région
des Maures et de l'Esterel, sinon de la Meseta
ibérique.
On connait également une pluie de petites pierres
calcaires ayant jusqu’à 3 centimètres de diamètre,
provenant du calcaire de Château-Landon (S.-et-M.)
et transportée à 130 kilomètres de leur lieu d'ori-
gine. On peut citer aussi une chute en Suède, en 1883,
de pierres enveloppées dans de gros grilonsovoides
atteignant 5,8 g comme poids et la grosseur d’une
noisette comme dimensions. Elles avaient été trans-
portées à plus de 60 kilomètres.
Le transport de ces matériaux soulève un pro-
blème curieux. Les expériences montrent, en effet,
qu'un vent dit «grand frais», ayant une vitesse de
23 mètres par seconde, peut transporter des grains
ayant 2,05 mm de diamètre. On est donc loin de
la possibilité de transport de pierres ayant une
taille plus notable.
M. Thoulet se demande s'il ne serait pas possible
d'expliquer ce transport en admettant qu'il se pro-
duit dans l’air un phénomène analogue à celui qui
se passe quand on envisage, dans une solution
liquide, ‘une matière inerte, solide; celle-ci fixe à
sa surface une certaine quantité du corps dissous.
Dans l’atmosphère, un solide condenserait autour
de lui une enveloppe d'air ou de vapeur d’eau. La
densité du caillou ne serait pas sa densité appa-
rente, mais la densité moindre résultant d'un
volume complexe, composé du volume réel du cail-
lou et de sa gaine condensée.
N° 1447
Le phénomène parait être, en réalité, très com-
plexe. Il a été récemment étudié par Sudry.
Quelle qu’en soit l'explication, le phénomène en
lui-même est intéressant et mérite d’être étudié de
plus près à cause de l'importance qu’il peut avoir
pour expliquer certains faits géographiques. P. L.
PHYSIQUE
Une nouvelle pompe à vide. — M. W. Gaede
l'a présentée à la Société allemande de physique
(juillet 1912), elle est basée sur ce fait qu'à une pres-
sion supérieure à 0,001 millimètre de mercure, il se
forme sur le verre une membrane gazeuse, grâce
à laquelle les molécules se réfléchissent de préfé-
rence suivant la direction d'incidence. M. Gra-
denwitz expose dans la Revue générale des Sciences
(30 septembre) comment M. Gaede a tiré parti de
cette donnée.
«M. Gaede calcule le frottement gazeux entre des
surfaces en mouvement: il
observe la production de pres-
sions qui se prètent parfaite-
ment à la construction d'un
nouveau type de pompe à vide
élevé. A est un cylindre tour-
nant autour de l'axe a et qui
est entouré par la boite B
comportant une rainure de
largeur A allant de n à m. Lorsque A tourne
dans le sens des aiguilles d’une montre, l’air dans
la rainure est entrainé de n à m par le frottement
gazeux. En reliant les ouvertures n et m à un mano-
mètre, on observe entre ces deux points une diffé-
rence de pression proportionnelle au nombre de
tours de A et au frottement intérieur du gaz. En
faisant le vide dans la boite, on voit, malgré la
dilution du gaz, la différence de pression entre m
et n se maintenir constante, le frottement intérieur
étant indépendant de la pression. C’est ainsi qu’on
obtient, par exemple au point m, une pression de
200 millimètres et au point n 190 millimètres, ou
au point m 50 millimètres et au point n 40 milli-
mètres. En réduisant la pression au point m
à 10 millimètres, cette même règle donnerait au
point z la pression de 0 millimètre, c'est-à-dire
que ce dispositif serait capable de donner un vide
absolu. Il est vrai que cela n'est pas rigoureusement
exact, la réflexion diffuse des molécules sur la paroi
se manifestant aux pressions les plus basses comme
glissement des gaz. Tandis qu'aux pressions élevées
la différence des pressions se maintenait constante,
c’est aux pressions les plus basses le rapport des
pressions aux points m et n qui reste indépendant
du degré de dilution. Aussi ce dispositif, inefficace
comme machine pneumatique à la pression atmo-
sphérique, doit-il, aux basses pressions, donner de
très bons résultats. » Alfred Gradeniwitz. »
COSMOS
123
SCIENCES MÉDICALES
La vaccination antityphique lors de l’épi-
démie d'Avignon. — M. H. Vincent a proposé,
il y a plusieurs années, et expérimenté un vaccin
contre la fièvre typhoïde, vaccin préparé par auto-
lyse de bacilles vivants et que l'auteur appelle
polyvalent parce que le vaccin est formé du mé-
lange de bacilles d'origines diverses (Cf. Cosmos,
t. LXII, p. 276, et t. LIV, p. 2641). Déjà au Maroc,
en 1911, les soldats vaccinés par le vaccin polyva-
lent stérilisé à l’éther ont été entièrement protégés
contre la fièvre typhoide.
M. Vincent a signalé à l’Académie de médecine
(séance du 8 octobre) l'efficacité remarquable de son
vaccin pendant l’épidémie qui a sévi à Avignon
(juin-aoùt 1912).
Cette épidémie, d’origine hydrique, s’est montrée
d'une sévérité exceptionnelle. Elle a frappé un très
grand nombre d'habitants : 4 500 et plus d’après
certains médecins; ce qui, pour Paris, équivaudrait
à 87 000 cas de fièvre typhoiïde.
L'effectif présent de la garnison étant d’environ
2 053 hommes, le nombre des vaccinés, avant l’ap-
parition de l'épidémie, a été de 525; dès que l'épi-
démie. est survenue, 8441 autres militaires ont
demandé à être immunisés. Par ce chiffre élevé de
vaccinés volontaires, on peut juger du caractère
inoffensif du vaccin et de la bénignité des symp-
tômes qu'il détermine.
Le bilan de l'épidémie militaire est de 155 cas
de fièvre typhoide avec 21 décès. La proportion
respective des cas chez les vaccinés et chez les non-
vaccinés a été la suivante:
4° Non vaccinés: 155 cas, soit 101,4 pour
4000 hommes; 21 décès, soit 13,75 pour 4 000
hommes;
20 Vaccinés : 0 cas; 0 décès.
Aucun des vaccinés, soit avant l'épidémie, soit au
cours de celle-ci, au total 4 366 vaccinés, n’a don:
contracté la fièvre typhoiïde. Aucun d’entre eux
n'a offert le plus léger embarras gastrique. Leur
immunité a donc été absolue.
Cependant, la proportion des cas, dans cette épi-
démie d'Avignon, chez les non-vaccinés (101,4 pour
4000), a été beaucoup plus élevée qu’à l’occasion de
l'épidémie marocaine de 4911 (64.87 pour 1 000).
Remarque intéressante: la fièvre typhoide a
épargné même les sujets {plus de 200) qui n'avaient
reçu que deux ou mème une seule injection d'an-
tigène.
L'effet du soleil tropical sur l’homme et
quelques animaux (Revue générale des sciences,
30 sept.). — Un savant américain, M. H.-D. Gibbs,
professeur adjoint à l'Université des Philippines,
vient de se livrer à Manille à d’intéressantes expé-
riences sur ce sujet. Il a déterminé la température
de la peau, exposée au soleil tropical, d'un certain
424
nombre d'hommes de races différentes, et de la
peau protégée par les poils ou diverses sortes de
vėtements, puis la température sous-cutanée de
singes et de lapins. .
A l'ombre, la température de la peau de l’homme
reste constamment au-dessous de celle du sang.
Au soleil, la température des peaux les moins colo-
rées s'élève parfois plus rapidement que celle des
peaux colorées; mais, après cette élévation initiale,
les peaux colorées présentent un maximum plus
élevé que les autres, pourvu que l'exposition ne
soit pas trop longue. Dans le cas d’une exposition
trop prolongée, une irritation des extrémités ner-
veuses sensitives ou des parois des vaisseaux elles-
mêmes provoque une inflammation de la peau, due
à une plus grande quantité de sang et à une circu-
lation plus rapide. Cet effet est absent dans les
peaux colorées, dont la pigmentation constitue
certainement une protection.
Tandis que les peaux colorées absorbent la cha-
leur plus rapidement, leur radiation est aussi plus
rapide que celle des peaux peu colorées, et comme,
en plein soleil, la proportion du corps exposée est
moindre que celle qui est à l'ombre, les races colo-
rées sont probablement, pour cette raison, mieux
préparées à résister au soleil.
Les singes à poils gris ont une température sous-
cutanée normale à l’ombre et paraissent dispos,
tandis qu'au soleil la température s'élève au-dessus
de 48° et la mort s'ensuit en moins d’une heure,
quelquefois en trente minutes. Les lapins blancs,
gris et noirs meurent tous par exposition au soleil :
les noirs les premiers, les blancs les derniers.
D'après M. Gibbs, le vêtement pour homme des-
tiné à la protection contre le soleil doit produire
la plus grande ombre sans obstruer les courants
d’air emportant l'humidité évaporée. La supériorité
des matières blanches sur les colorées comme
réflecteur des rayons solaires est démontrée par
les expériences sur les lapios et quelques mesures
sous vêtement. La condition idéale est donnée par
l'ombre d'une ombrelle blanche bordée d’étoffe
verte et un vètement aussi léger que possible. Un
casque blanc léger à large bord, dont l'intérieur
est disposé de telle sorte que la monture du casque
ne touche pas la tête et permette le passage libre
des courants d'air, est le meilleur substitut de
l'ombrelle. Rien ne semble justifier l'emploi des
casques lourds.
RADIOTÉLÉGRAPHIE
La télégraphie sans fil dans l’océan Paci-
fique. — La Compagnie fédérale télégraphique,
qui détient et exploite les brevets Poulsen aux
Etats-Unis, vient d'installer deux stations radio-
télégraphiques, l'une à San-Francisco et l'autre
dans les iles Sandwich, à Honolulu. Chacune de
ces stations comporte deux mâts de 130 mètres de
COSMOS
17 OCTOBRE 1942
hauteur, avec une antenne de forme spéciale et
des générateurs à arc Poulsen de 36 kilowatts,
pour engendrer les ondes électriques eniretenues.
Ces stations vont être incessamment mises à la
disposition du public pour la transmission des cor-
respondances privées.
La distance de San-Francisco à Honolulu est de
3 800 kilomètres, plus grande donc que la distance
qui sépare les deux stations Marconi pour commu-
nications transatlantiques, car la còte Ouest d'Ir-
lande et la Nouvelle-Ecosse ne sont éloignées l'une
de l'autre que de 3 200 kilomètres.
La radiotélégraphie dans l'Amérique du
Sud. — La Compagnie Telefunken, de Berlin, a
installé trois stations de télégraphie sans fil qui
mettent en communication Lima (Pérou), sur la
côte du Pacifique, avec Para (Brésil), sur la côte de
l'Atlantique. La station de Manaos (Brésil), située
sur l'Amazone, en plein continent, sert de relais.
De Lima les ondes électriques franchissent les
hauteurs de 5000 à 6 000 mètres des Andes, puis les
vastes forèts vierges du bassin de l'Amazone. La
portée Lima-Manaos est de 2200 kilomètres. De
Manaos les télégrammes sont retransmis à Para:
ici, la portée est de 1 200 kilomètres.
Le service radiotélégraphique transatlan-
tique. — Le Times, de New-York, se fait mainte-
nant transmettre par télégraphie sans fil, de la sta-
tion Marconi de Clifden jusqu'à celle de Glace-Bay,
toute sa correspondance d'Europe, soit 3000 mots
par jour: il n’a plus recours aux câbles sous-marins
transatlantiques.
La transmission de cette correspondance quoti-
dienne, de Londres à New-York, dure environ une
heure cinquante-six minutes; elle est plus rapide
que par la voie des lignes sous-marines, de plus,
elle est sensiblement moins onéreuse.
MARINE MILITAIRE
Nouveaux obus. — On sait toutes les recherches
faites pour trouver les fusées qui ne produiraient
l'éclatement des projectiles explosifs qu'après leur
pénétration à l’intérieur des navires. On a fait, à ce
point de vue, de sérieux progrès, comme l'indiquent
les tirs d'expérience qui viennent d’avoir lieu sur le
Neptune, à Cherbourg. Le Yacht du 5 octobre en
rend le compte suivant :
Ces expériences ont eu lieu le 27 septembre.
Sur le vieux cuirassé, on avait fixé des plaques
d'acier de l’épaisseur des cuirasses de flanc des
croiseurs-cuirassés en service. Le Neptune avait
été embossé dans l’est de la rade, dans l’anse des
Flamands, entre l'ile Pelée et la digue Collignon.
Une pièce de 46 centimètres, mise en batterie
aux Grèves, a lancé sur ces plaques le nouvel obus
perforant muni de la fusée à double effet. Distance
de tir : 400 mètres.
No 1447
L’obus a bien perforé la plaque avant d’éclater,
et l'on a constaté en arrière l’épaisse fumée noire
due à la charge. Les gaz et les éclats auraient pro-
duit des dégâts considérables à l'intérieur d’un
bâtiment cuirassé avec cette plaque.
Le 28, les tirs ont repris avec du 16 centimes
et du 24 centimètres sur les cibles cuirassées placées
sur le pont. L'obus de 24 centimètres, après avoir
percé la plaque, a éclaté et envoyé des éclats dans
toutes les directions et jusqu'à lile Pelée, à 4 kilo-
mètre de distance.
Les tirs ont continué sur la coque même du navire.
Constatons que, grâce au bon fonctionnement de
nos fusées, nous semblons avoir résolu le problème
de l'éclatement de l’obus de semi-rupture à la
mélinite, en dedans des cuirasses minces des croi-
seurs-cuirassés, aux distances moyennes de combat,
car il ne faut pas tenir compte de la distance de
400 mètres adoptée pour les expériences; en fai-
sant varier la charge, on obtient à 400 mètres la
vitesse initiale correspondant à des distances plus
grandes, et l’on se met à volonté duns les condi-
tions du combat. Mais, dans les expériences, on
prend ces faibles distances pour être certain de
frapper la cible au point voulu.
L.63 nouveaux canons. — Jadis, on construisit
des canons de calibres formidables: mais, étant
donné l’état de la métallurgie en ces temps reculés,
ces énormes pièces faisaient souvent plus de mal
à ceux qui les servaient qu’à l'ennemi auquel
s'adressaient leurs projectiles. Tout le monde
a entendu parler des canons du Bosphore et de
leurs boulets de marbre.
On était revenu de ces errements: le canon de
16 centimètres (on l'appelait canon de 30 en raison
du poids de son boulet), puis le canon de 50 (calibre
de 19 centimètres environ) étaient d'usage général.
Mais, depuis un demi-siècle, on revient à des
calibres plus élevés, et la pièce de 24 centimètres
a été employée dans toutes les armées navales
et pour l'armement des côtes. Les nouvelles
cuirasses l'ont fait paraitre faible, on est passé
au calibre de 30 centimètres, puis, pour les
nouveaux dreadnought, à celui de 34,6 cm. On ne
s'arrête pas dans cette voie. L'Allemagne construit
en ce moment des canons de 38,1 cm, longs de :
45 calibres (17,145 m), lançant un projectile de
750 kilogrammes.
On sait que la vie utile des grosses pièces est
fort courte ; or, diverses considérations font espérer
que cette nouvelle artillerie aura plus de durée.
Le Japon et l'Italie ont déjà adopté ces énormes
calibres.
La consommation du pétrole dans la marine.
— Les marines de guerre ont toutes plus ou moins
COSMOS
125
sacrifié au pétrole, source d'énergie certainement
des plus commodes. Malheureusement, beaucoup
de pays, et la France entre autres, n’ont pas cet
hydrocarbure et sont obligés de l’importer; aussi
on se demande ce qui arriverait en cas de guerre,
quand la mer serait fermée, si grandes que soient
les provisions accamulées en vue d’une pareille
éventualité; n’aurait-on pas à craindre de voir toute
une partie de la flotte militaire immobilisée ?
On peut se faire une idée de la quantité de
pétrole jugée nécessaire aux besoins de la marine
par cet entrefilet :
« L'Amirauté britannique s’est entendue avec des
Compagnies écossaises en vue de la livraison de
200 000jtonnes de pétrole pour l'usage de la marine
de guerre.
» Les lords de l’Amirauté, qui désirent se procurer
200 000 tonnes de plus, ont invité d’autres Compa-
gnies à soumissionner. »
ART MILITAIRE
L'épilogue métallurgique des guerres. —
Un officier supérieur de l'armée allemande,
M. Reinhard Wagner, publie une étude sur l’impor-
tance des travaux à faire en Italie après la guerre,
en se basant sur ce qu'ont dù accomplir les autres
nations : l'Angleterre après la guerre du Transvaal,
la Russie et le Japon après la guerre de 1904. I
conclut : pour le renouvellement du matériel en
munitions, canons, fusils, navires de guerre, chau-
dières, réparations, l'Italie devra après la guerre
— suivant les techniciens les plus autorisés —
demander à son industrie nationale des com-
mandes pour au moins un milliard de francs.
AVIATION
D’Italie en Corse en aéroplane. — Depuis
quelques jours, l’aviateur italien Cagliani se pré-
parait à effectuer la traversée de la mer Tyrrhé-
nienne en aéroplane. Le gouvernement italien
avait mis à sa disposition trois torpilleurs qui
devaient jalonner la route à suivre.
Le 9 octobre, par un temps propice, l’aviateur
s'est élevé de Pise, à 3 heures après midi, s'est
dirigé vers Bocca d’Arno, puis vers Livourne, et
s’est ensuite avancé sur la mer pour effectuer la
traversée projetée. Guidé par les torpilleurs, il est
arrivé à Bastia vers 430" de l’après-midi et a atterri
sur la place Rinalla, dans la ville mème.
La distance parcourue au-dessus de la mer est
de 125 kilomètres environ. L'appareil que montait
l'aviateur est de construction italienne, mais
rappelle par bien des points les monoplans fran-
çais.
So rm see
426 COSMOS
17 ocToBRE 1912
Un nouveau funiculaire aérien au Tyrol.
Un des premiers funiculaires aériens qui aient
été établis pour le transport des voyageurs est celui
du Wetterhorn, à Grindelwald (Suisse). Il fonctionne
depuis 1909. Cette ligne, particulièrement hardie,
a sa station de départ à la cote 1 253 mètres ; celle
d'arrivée atteint 1678 mètres. La différence de
niveau est donc de 425 mètres pour une longueur,
en plan, de 365 mètres, ce qui donne une pente
moyenne de 1,16 m par mètre.
D'autres installations ont été établies depuis
lors; nous nous contenterons de rappeler le funi-
culaire de l’Aiguille du Midi, que nous avons
décrit ici mème (Cosmos, n° 1382 du 22 juillet 1911).
On vient d'achever, près de Bozen (Tyrol), une nou-
velleligne suspendue, celle du mont Kohlern, où fonc-
tionnait déjà, en 1908, une voie suspendue primitive
avec pylônes en bois et de simples câbles porteurs.
Le nouveau funiculaire a sa station de départ
LE FUNICULAIRE AÉRIEN DU MONT KOHLERN AU TYRoOL.
au bord de Ja rivière Eisack; on monte dans
de confortables wagonnets qui circulent sur des
câbles métalliques et s'élèvent lentement, laissant
derrière eux la station de départ et l’Eisack.
Mais bientòt la vue s'élargit et s'étend de plus
en plus: le Rittner, toute la vallée de Bozen,
la région de l'Ortler et enfin l'imposante chaine de
montagnes du massif de Schlern se découvrent
à l'œil étonné, tandis que le wagonnet franchit
doucement et sans le moindre choc la différence
de hauteur de 840 mètres en 13 minutes.
Le système choisi pour le chemin aérien peut
être considéré comme le plus perfectionné qui
existe actuellement. Il fut construit par la fabrique
de voies à câbles Ad. Bleichert et Cie, à Paris-
Leipzig, qui établit cette ligne dans le court délai
d'un peu plus d’une année. La voie de roulement
de chaque wagonnet se compose de deux cäbles
métalliques d’un diamètre d'environ 45 millimètres,
qui sont supportés par douze solides pylônes en
fer. Chaque wagonnet est entrainé par deux câbles
tracteurs robustes en acier qui sont actionnés méca-
niquement de la station supérieure. Le wagonnet
peut contenir seize personnes et est aménagé de
telle façon qu'il conserve sa position horizontale,
quelle que soit l’inclinaison de la voie, de sorte que
ee æ
N° 1447
les sièges ne sont pas surélevés. Outre les installa-
tions de freinage et de signaux existant dans les
stations terminus, chaque wagonnet est équipé de
quatre disposilifs d'arrêt et d'un frein de réglage
de vitesse. Le système offre au public la plus grande
sécurité, car toutes les parties importantes pour
la circulation sont prévues au moins en double, de
COSMOS
427
sorte que si l’une venait à ne pas fonctionner,
l’autre entrerait en service.
Les voyages d'essais et les expériences de freinage
et d'arrêt ont donné les meilleurs résultats. La
ligne, achevée et prète à fonctionner, a été livrée
à son propriétaire, M. Joseph Staffler, à Bozen, et
elle doit entrer en service très prochainement.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes méléorologiques de la tour Eiffel.
On sait que la station radiotélégraphique de la
tour Eiffel émet deux fois par jour, à 10"45m du
matin et à 1145" du soir, des signaux horaires,
suivis, le matin seulement, de télégrammes
météorologiques.
La portée de ces signaux, qui dépasse actuelle-
ment 5000 kilomètres, sera prochainement plus
grande encore, la puissance du poste principal de
la station devant être bientôt considérablement
augmentée. On conçoit que, grâce à cette puis-
sance d'émission, la réception soit facile, dans un
rayon assez élendu, avec un matériel très simple
et très restreint, — d'autant plus simple et d'au-
tant plus restreint que l’on se trouve plus près de
Paris.
I. Réception à Paris et dans sa banlieue.
A Paris mème et dans ses environs immédiats,
ce matériel se réduit à un détecteur électrolytique
que l’on peut facilement construire soi-même, une
pile et un récepteur téléphonique.
Le détecteur électrolytique.
Ce détecteur n'est autre chose qu'un petit volta-
mètre à eau acidulée dont une électrode, en
platine ou en plomb, est de forme et de dimen-
sions quelconques, et dont l’autre est constituée
par la section d'un fil de platine de 2 centièmes
de millimètre de diamètre.
La réalisation de cette électrode, dite « à la
Wollaston », est la seule partie un peu délicate
dans la construction du détecteur électrolytique.
Si l’on ne peut la faire soi-même, on en trouvera
de toutes préparées dans le commerce, à des prix
peu élevés (1).
Pour constituer notre détecteur, nous prendrons
un petit flacon à large ouverture, muni d'un bou-
chon à deux trous, en caoutchouc ou en liège
rendu inattaquable aux acides par immersion pen-
(1) Voir Petite Correspondance, p. 448.
dant un quart d'heure dans un bain de paraffine
fondue (fig. 1).
Nous y verserons de l’eau acidulée (eau, 400 cm";
acide sulfurique, 10 à 15 cm’) jusqu'aux trois
quarts de la hauteur environ.
Par un des trous du bouchon, nous ferons
plonger dans le liquide un bâton de plomb, de
diamètre suffisant pour qu'il soit serré dans ce
trou, afin d’obtenir une
fermeture bien hermé-
tique. Nous munirons
d'une pince-borne
l'extrémité supérieure
libre du bâton.
Un moyen commode
d'obtenir le bâton de
plomb nécessaire con-
siste à couler du plomb
dans un moule préparé
en roulant, en deux ou
trois couches serrées,
une feuille de papier
autour d’un crayon ou
d'un tube de verre. Après
refroidissement, on
mouille abondamment
le moule de papier,
qui est un peu roussi
et adhérent au plomb, et on le détache par mor-
ceaux.
Par le second trou du bouchon, nons introdui-
rons l’électrode à la Wollaston. Pour la pré-
parer, on effile à la manière ordinaire un tube de
verre dans la flamme d'un bec Bunsen (4). On
introduit, à l’aide de pinces fines, dans la partie
effilée un morceau de 2 centimètres environ de
fil de platine de 2 centièmes de millimètre de dia-
F1G. 1. — DÉTECTEUR
ÉLECTROLYTIQUE.
(1) Un tube de compte-gouttes, acheté chez le phar-
macien, pourra dispenser de cette opération. La
flamme d'une lampe à alcool suffira pour le fermer,
498
mètre, de façon que son extrémité libre sorte du
tube de 1 à 2 millimètres (fig. 2). On porte à nou-
veau dans la flamme l'extrémité effilée contenant
le fil de platine. Le verre, en se ramollissant, ferme
le tube et emprisonne le fil, dont les deux extré-
G D
L
——..—
Fica. 2. — PRÉPARATION DE L'ÉLECTRODE A LA WOLLASTON.
mités doivent rester libres, l’une à l’intérieur,
l’autre à l'extérieur du tube; il ne reste plus qu'à
user sur du papier émeri
fin (quadruple zéro) la
pointe de l’électrodeainsi
obtenue, de facon que
le fil de platine ne fasse
plus aucune saillie à
l'extérieur, mais affleure
exactement la surface du
verre, tout comme la
mine d'un crayon non
taillé se montre à cha-
cune de ses extrémités.
Si, dans la suite, le
fonctionnement de l’élec-
trode devenait défec-
tueux, il suffirait de frot-
ter de nouveau légère-
ment son extrémité sur
le mème papier pour lui
4
à]
---- fil de
SAN n a a a CI N i s NE
Cuture rendre toutes ses qua-
lités.
Pour relier le fil de
--amMercure platine au circuit que
nous établirons, versons
un peu de mercure dans
le tube et faisons-y plon-
ger un morceau de gros
fil de cuivre rouge. Son
extrémité supérieure
libre sera aplatie au
marteau et garnie d'une
pince-borne semblable à
celle que porte déjà le bâton de plomb (fig. 3).
Afin d'éviter de répandre le mercure, au cas où,
dans l’ardeur des essais, on renverserait le détec-
teur, il est bon d'introduire un peu d'ouate au-
dessus de lui et de couler par-dessus quelques
PCR ST RES RON LES SERV UE ne 3 SRE
F1G. 3, — ELECTRODS
A LA WOLLASTON TERMINÉE.
COSMOS
17 ocroBne 191%
gouttes de cire à cacheter. On obtient ainsi un
détecteur absolument hermétique et pouvant fonc-
tionner dans toutes les positions.
La pile.
Elle peut être queleongue, pourvu que sa force
électromotrice soit de 2,5 volts environ. Une ten-
sion trop élevée cause un bruit de friture dans le
récepteur téléphonique; une tension trop faible
ne donne au détecteur qu’une sensibilité médiocre.
Il est d’ailleurs possible, au moyen d'une combi-
naison de résistances nommée potentiomètre ou
réducteur de potentiel, d'obtenir la tension opti-
mum avec une pile à tension trop élevée. Mais eet
Téléphone
FIG. 4. — MONTAGE DES APPAREILS.
appareil n’est pas indispensable, si la pile est con-
venablement choisie. On pourra employer, par
exemple, sans dispositif spécial, deux éléments
Leclanché usagés. Nous avons obtenu de très bons
résultats, soit avec un élément de pile « Azeden »,
soit surtout avec une petite pile sèche de deux
éléments pour lampe de poche de 3 volts, mesu-
rant 52 X 33 X 16 mm. Le plus petit modèle est
le meilleur pour cet usage, et une pile épuisée
pour la lumière est encore excellente pour fournir
la tension nécessaire aux bornes du détecteur.
Le récepteur téléphonique.
Comme la pile, il peut être quelconque, de
réseau ou d'appartement, mais il sera d'autant
Ne 1447
plus sensible et donnera un son d'autant plus
intense que les bobines de ses aimants porteront
un plus grand nombre de tours de fil La résis-
tance du récepteur augmentant proportionnelle-
ment au nombre de tours, c’est par la valeur de
cette résistance qu'est ordinairement désignée la
sensibilité. La résistance des récepteurs dits « de
réseau » est de 200 à 250 ohms environ.
Montage des appareils.
En possession du détecteur, de lu pile conve-
nadle et du récepteur téléphonique, eomment
allons-nous grouper ces appareils?
Nous réunirons Fune des bornes da détecteur
(celle correspondant à l’électrode à la Wollaston
de préférence) à une masse conductrice quelconque
non rehée au sol : toiture métallique, balustrade
de baleon, poële mobile, lit métallique, baignoire,
ou même simplement corps de l'opérateur. Cette
masse conductrice pourra être remplacée par un
fil de cuivre de quelques mètres, développé à Tin-
térieur de l'appartement et jouant le ròle de Fan-
COSMOS
429
tenne qui sera nécessaire pour la réception à de
plus grandes distances. Les résultats seront d’au-
tant meiHeurs que le fil sera plus long (fig. 4).
L'autre borne du détecteur sera reliée à lá cana-
lisation d’eau ou de gaz, ou å un morceau de gril-
lage métallique dé un demi-mètre carré à un
mètre carré de surface enterré dans un sol humide.
Cela fait, lé récepteur téléphonique ét la pile
seront montés en dérivation à ces mémes bornes,
le pôle posttif élant relié à l'électrode à la Wol-
laston. On reconnait ce pôle, dans lés piles sèches
de lampes de poche, å ce que fa lame flexible qui
y est fixée est plus éloignée de l'enveloppe que fa
négative. Si, d'ailleurs, on se trompait dé sens, on
en serait immédiatement averti par un bruit de
friture intense dans le téléphone.
Un interrupteur, placé dans le circuit, permettra
de ne laisser débiter la pile qu’en temps utile.
C'est tout : il ne reste plus qu’à écouter les télé-
grammes et à les interpréter, comme nous allons
l'indiquer.
. (A suivre.) D" PIERRE CORRET.
L'origine des eaux de Pougues.
Pougues-les-Eaux est une localité du départe-
ment de la Nièvre, possédant des eaux chargées
d'acide carbonique, bicarbonatées caleiques. Con-
nues depuis le xv° siècle, elles sont employées
avec un certain succès pour le traitement des
maladies de l’estomae.
La question de leur origine n'a jamais été
traitée — à notre connaissanee — à l'aide des
méthodes modernes d'investigations géologiques.
Un récent séjour dans la région nous a permis de
serrer d’un peu plus près le problème.
Il est nécessaire, avant d'aborder ce qui est
spécial à la région de Pougues, de reproduire ce
qu'écrivait, il y a dix-huit ans, M. G.-F. Dollfus
sur les eaux minérales en général (4) (p. 3):
« L'examen des eaux minérales constitue un des
problèmes les plus intéressants, relevant du do-
maine de la géologie, et il ne nous parait pas
qu’elles aient été étudiées jusqu'ici à ce point de
vue comme elles méritent de l'être. Longtemps on
a considéré l'origine des eaux minéralisées comme
un problème insoluble, hors de notre portée, et on
a fait intervenir pour les expliquer une foule de
phénomènes souterrains incertains et compliqués.
On s’est plu à reléguer leur point de formation
dans des régions inaccessibles.
» Nous sommes portés, au contraire, à consi-
(1) G.-F. Douzrus, Recherches géologiques sur les
environs de Vichy (Allier). In-8, 189$, 5 planches,
68 pages.
dérer, en général, la minéralisation des eaux sou-
lerraines comme un phénomène relativement
simple et facile à résoudre en empruntant à la
chimie, à la stratigraphie et à l’hydrostatique leurs
données les plus élémentaires.
» On arrivera à trouver quelles sont les roches
YD
: 289 Zi
ei,
y” Parier g
N Varenmes
F1QG. 1. — CART2 DES ENVFRONS DE POUGaURrS.
plus où moins profondes qui, par une décomposi-
tion chimique normale, ont pu eéder aux eaux
souterraines les éléments que nous y retrouvons en
dissolution. »
M. Dollfus, après une étude approfondie du bas-
sin de Vichy, arrivait, pour l’origine de ses eaux,
à cette conclusion logique :
Certaines sources froides: Célestins, Lardy,
430 COSMOS 17 OCTOBRE 1912
Dubois, Mesdames, sont presque superficielles; en
tout cas, pas assez profondes pour être chaudes.
Celles dont la température est élevée: Chomel,
Grande-Grille, Lucas, Hôpital, sont le résultat
d'eaux superficielles qui s’infiltrent assez profondé-
ment pour atteindre des zones uniformément
chaudes et qui rejaillissent ensuite à la surface,
dans certaines conditions hydrostatiques, ou par
suite de la poussée de l’acide carbonique.
Les minéraux de ces eaux sont empruntés aux
couches géologiques qu’elles traversent; dans
l'espèce elles émanent d’un tuf porphyrique à élé-
ments très sodiques, ce qui explique leur forte
teneur en bicarbonate de soude.
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PAN 'S °P ‘A
Partant des mêmes principes, il est aisé de con-
naître l’origine exacte des minéraux de l’eau de
Pougues, par l’étude des terrains qu'elle traverse
avant de réapparaitre à la surface.
La plus vaste coupe que nous ayons pu examiner
dans la région est celle de la carrière exploitée
pour marnes à ciment, dite de « La Maure », à
5,4 km au N.-E. du clocher de Pougues, sur la
route de Chaulgnes à Bizy.
Elle présente, de bas en haut, les assises sui-
vantes :
A. Une masse visible sur 14 mètres de marnes
bleues à ciment ;
B. Un banc de 2 mètres de calcaire gris, dur,
‘LN4GI1990
FıG. 2. — ANCIENNE GRAVURE MONTRANT LA DISPOSITION DES SOURCES DE POUGUES.
présentant à sa surface supérieure laspect d'un
véritable fond de mer exondé, couvert de fos-
siles;
C. Un banc supérieur de marnes bleues, avec
niveaux calcaro-marneux plus durs, 6 mètres;
D. Une masse de calcaire jaune à térébratules et
ammonites, visible sur 8 mètres. i
Le sommet de la colline boisée qu’entame cette
carrière présente des blocs de grès chailleux à
nombreux oursins.
L'ensemble appartient à la période jurassique,
et ce qui est visible dans la carrière est d'âge
batbonien. Lia
On est ici à la cote 270, et les sources de Pougues
n'émergent que vers la cote 197. De plus, Pougues
est immédiatement dominé par le Mont-Givre, de
même constitution géologique, dont le sommet est
à la cote 298.
Il semble donc que les eaux pluviales déjà char-
gées d'acide carbonique et tombant sur les sommets
environnants (alt. 284, 273, 298, etc.) traversent
les calcaires bathoniens, dissolvent une partie du
carbonate de chaux de ces roches et entrainent
les minéraux accidentels qui s’y trouvent (carbo-
nate de magnésie, phosphate et sulfate de
chaux, etc.). Elles rencontrent bientòt, en s'infil-
trant, les marnes bleues à ciment qui forment un
niveau relativement imperméable, puis elles
suivent la pente de cette couche qui s'abaisse vers
la vallée de la Loire.
C’est alors que, trouvant sans doute à la hauteur
de Pougues une faille favorable comme il y en a
N° 1447
tant dans la région (1), les eaux tendent à regagner
leur niveau primitif et jaillissent à la surface,
aidées en cela par l'excès d'acide carbonique
qu'elles ont emprunté au calcaire bathonien.
Comme leur température moyenne est de
42 degrés, point n’est besoin de faire intervenir
la proximité du foyer interne d'oxydation de la
barysphère, comme on a été tenté de le faire trop
souvent pour les sources chaudes.
Afin de faciliter la compréhension de ce qui pré-
COSMOS
431
cède, nous donnons (fig. 1) une carte simplifiée de
la région de Pougues où sont indiquées quelques
altitudes. |
Nous reproduisons également un .très curieux
dessin extrait d’un ouvrage du xvie siècle (i)
(fig. 2) qui a le double mérite de montrer ce
qu'étaient les sources à cette époque et leur
situation en contre-bas des collines environnantes.
Pauz Couses fils.
— c lM
Deuxième Congrès national du froid.
Le deuxième Congrès national du froid qui vient
de se terminer à Toulouse a eu un plein succès, et
ses résultats favorables ne tarderont pas à se faire
sentir, autant dans le domaine de la science que
dars celui de l'industrie et du commerce. Un grand
nombre de communications et de rapports ont fait
l'objet des séances de ses six sections s'occupant
respectivement des gaz liquéfiés et matériel frigo-.
rifique, des applications du froid à l'alimentation
et l’agriculture, des applications à l’industrie, des
transports, de la législation, et enfin des applica-
tions à la médecine et l’hygiène.
Les vœux les plus importants émis par la pre-
mière section (gaz liquéfiés et matériel frigorifique)
ont trait à une création systématique des mesures
et des méthodes d'essais dérivant directement du
système C. G. S. et tendant à l'adoption, pour les
termes électriques, de ceux déjà adoptés par le
Comité électro-technique français. D'autres væux
demandent que les travaux de savants spécialistes
soient continués activement pour arriver à des don-
nées certaines sur les gaz rares de l'atmosphère et
certains agents frigorifiques.
À côté des communications tendant à l'adoption
de ces væux, d'autres rapports ont été présentés
` par M. Maurice Leblanc sur l'emploi de l'air et de
la vapeur d’eau comme agents frigorifiques, par
MM. Lepeu et Leroux sur de nouveaux perfection-
nements aux compresseurs des machines frigori-
fiques. M. Waurees décrit un compresseur à effets
multiples des plus intéressants. M. Le Roy signale
Temploi des permanganates et des sulfites pour
désinfecter et désodoriser les salles frigorifiques.
Pour le mème usage, M. Saint-Père emploie le
formol ou, préférablement, l'ozone. Nous signale-
rons en particulier une communication de M. Saba-
lier, doyen de la Faculté des sciences de Toulouse,
sur la fabrication par catalyse da méthane et les
applications du froid à celte méthode. Le gaz à
(1) Sur la feuille Vevers (n° 123) de la Carte géolc- à:
gique de la France, le nombre des failles est peut-ètre
exagéré.
l'eau dont on se sert est ainsi séparé en ses élé-
ments, hydrogène, gaz carbonique et oxyde de car-
bone, qui, réagissant sur le nickel dans des condi-
tions spéciales, donnent du méthane. L'intérêt de
cette communication est considérable, de l’avis de
M. Versepuy, directeur de la Compagnie du gaz à
Toulouse, car les mines françaises ont presque
épuisé la houille à gaz, et les houillères anglaises
ne peuvent suffire à la consommation. La produc-
tion de l'hydrogène à bon marché, à partir du gaz
à l'eau, est déjà réalisée pratiquement en Alle-
magne par le professeur Linde.
- La deuxième section s'occupait spécialement des
applications du froid à l'alimentation et à l'agri-
culture. Aussi a-t-elle été suivie particulièrement
par les délégués des ministères de la Guerre et de
la Marine. Plusieurs intendants militaires, parmi
lesquels l'intendant général Défait, directeur des
services de l'intendance au ministère de la Guerre,
et plusieurs commissaires de la marine ont pris
une part active aux discussions. La question des
abattoirs régionaux a longuement occupé l’assem-
blée, qui émet un vœu concernant la création de
ces abattoirs dans chaque région d'élevage, de
façon à créer des approvisionnements destinés non
seulement à la défense nationale, mais à l’alimen-
tation privée: les fluctuations des cours seront
ainsi régularisées, et les congressistes y ont vu un
moyen efficace de lutter contre la vie chère. La
question de la conservation des denrées périssubles,
œufs, beurre, fromages, fruits, qui intéresse à un
si haut degré l'agriculture, a passionné les agri-
culteurs venus en grand nombre à cette section.
Les divers rapporteurs ont clairement montré que
l'application du froid ouvrait des débouchés consi-
dérables à l’agriculture en lni permettant l'expor-
tation de ses denrées. La brasserie, qui a été une
des premières branches de l'industrie à utiliser le
froid, n'a pas été oubliée. Un rapport de M. Kar-
cher est venu expliquer les progrès réalisés. D'ail-
(1) La vertu e! usage des fontaines de Pouques en
Nyvernotis, par [. Pivoux, médecin du Roy. 1598.
432
leurs, par une visite à l’une des grosses brasseries
de Toulouse, les congressistes ont pu se rendre
compte de visu de l’avantage du froid.
Enfin, la viticulture, qui jusqu'ici ne s'était
guère occupée de la question, y est entrée résolu-
ment. Le froid est appliqué aujourd’hui en grand
dans le travail des moûts. M. Marsais explique dans
son rapport les applications que l’on a pu faire,
pour la conservation et l’expédition des moûts non
fermentés. M. Cabanne apporte les résultats obte-
nus dans le Tyrol pour suspendre la fermentation
et permettre l'expédition des mots en Suisse prin-
cipalement. Le froid permet aussi d'obtenir, dans
ke vide, une concentration parfaite. On a pu ainsi
obtenir des sortes de miels ayant gardé tout l’arome
du raisin, du muscat entre autres. Ces [miels sont
consommés tels quels dans une grande partie de
la Suisse et de l'Allemagne. |Enfin, le froid peut
être employé dans certains cas pour obtenir avec
avantage un vieillissement artificiel des vins. Ces
eommunications ont vivement intéressé les viticul-
teurs présents, très nombreux à ces séances, et ils
ont émis le vœu que les essais soient continués
dans celte voie et rapidement menés à bonne fin.
La troisième section, s’occupant des industries
chimiques, a eu ses séances moins chargées. Plu-
sieurs rapports du plus haut intérêt y ont été dis-
eutés par les ingénieurs les plus compétents. Le
froid est appliqué aujourd’hui avec grand avantage
dans la grande métallurgie, comme il ressort du
rapport du D" Perret. On dessèche ainsi parfaite-
ment l'air destiné à être insufilé dans les hauts
fourneaux, ce qui permet d’obtenir des fontes beau-
eoup plus chaudes. L’on condense la vapeur d’eau
sur des serpentins fortement refroidis situés dans
les chambres des récupérateurs. La production de
ka fonte, d'après les résultats de M. Gayley, auteur
du procédé, obtenus à Isabella Furnaces (près Pitts-
burg), est ainsi augmentée de 25 pour 400 environ.
La diminution du charbon employé se fait dans la
mème proportion, ce qui compense amplement le
supplément d'énergie employé par les machines
frigorifiques. Dans la même branche de l’industrie,
V'oxygène, fourni à très bas prix par la distillation
de l'air liquide, semble devoir révolutionner les
méthodes en cours. Une augmentation très faible
de la teneur en oxygène de l'air insufflé permet
d'obtenir des résultats fort intéressants, comme il
résulte des essais effectués à Ougrée Marihaye (Bel-
gique) par M. Georges Claude, administrateur de
ja Société l'Air liquide. Ces essais ont été pleine-
ment concluants. La mise au point est une chose
délicate, mais M. Claude espère réussir en grand
avant deux ans.
Dans le domaine des industries organiques, des
applications très intéressantes ont été réalisées
pour la récupération des dissolvants. M. de Chessin
présente un rapport de M. Lefebvre, appliquant le
COSMOS
17 ocToBre 1912
froid à l’industrie des poudres. Il s’agit de récu-
pérer le dissolvant entrainé par la poudre B à sa
sortie des filières. Les rubans de poudre sont portés
dans un tunnel T où circule de l’air. A la sortie du
tunnel, l’air est pris par un compresseur C refroidi
par de l’eau. Il est ensuite détendu dans un déten-
deur spécial D où le froid produit par la détente
suffit à faire condenser les vapeurs du dissolvant,
L'air est ensuite réchauffé par l’eau de refroidisse-
ment du compresseur et repasse sur la poudre
à l’intérieur du tunnel. M. Hérisson-Laparre, direc-
teur de la poudrerie de Toulouse, objecte que ce
procédé, un peu brutal, a dû être remplacé par un
autre qui respecte mieux la dessiccation lente de
la poudre B, indispensable pour sa conservation.
Dans le même ordre d'idées, M. Janet présente un
appareil, imaginé par M. Georges Claude, pour récu-
pérer les vapeurs de camphre, d'alcool, d’éther, etc.,
répandues dans lJ’atmosphère des salles où l'on
travaille ces substances. On peut en récupérer des
R
RÉCUPÉRATION DU DISSOLVANT ENTRAINÉ PAR LA POUDRE B.
T, tunael ; C, compresseur; D, détendeur; KR, réchauffeur.
quantités importantes par ce procédé qui emploie
essentiellement le refroidissement produit par une
détente. A sa sortie des ateliers, l'air est comprimé
à cinq ou six atmosphères et envoyé dans un ser-
pentin refroidi par de l’eau. Par suite de ce refroi-
dissement, toute la vapeur d’eau, la majeure partie
du camphre et quelques quantités d’alcools sont
condensées. On les recueille et l’on sépare par dis-
tillation les produits intéressants. L'air, toujours
comprimé, mais privé de sa vapeur d’eau (qui ne
pourra plus donner de glaçons par refroidissement),
est envoyé dans un réfrigérant où circule une sau-
mure refroidie aux environs de 0°. L’air passe dans
un faisceau de tube, de 7 à 8 millimètres de dia-
mètre, présentant une grande surface de réfrigé-
ration. On recueille là un mélange d'alcool, de
camphre et de traces d’eau, titrant 80° à l’alcoo-
mètre centésimal. L'air contient encore de l'éther
qu’il faut recueillir. L'on a recours à la détente.
La température s'abaisse énormément, car la dé-
tente a lieu à l’intérieur de ce mème appareil.
L’air détendu se refroidit jusqu'à — 80°, — 100°.
On peut mème atteindre — 420°. Dans un appareil
construit et utilisé à Oyonnax, et traitant 200 mètres
cubes d'air par heure, on a recueilli par cheval-
heure 500 grammes d'éther, 7 à 8 litres d'alcool et
No 4447
tout le camphre perdu. L'on voit, par ces chiffres,
tout l'intérêt de ce procédé, puisque, dans cer-
taines industries, soie artificielle, viscose, explosifs
nitrés, etc., c'est par millions que se chiffrent
chaque année les pertes en liquides volatils.
La cinquième section s’occupait des transports
frigorifiques. Elle a eu à traiter des questions
fort importantes. Des rapports très intéressants
ont été présentés sur le transport en France des
diverses marchandises frigorifiées. Des vœux ont
été émis, tendant à une union entre les Com-
pagnies de navigation et les Compagnies de che-
min de fer, pour le passage de l’une à l’autre des
marchandises frigorifiées. Le matériel de transport
a été spécialement étudié, et les congressistes ont
reconnu la nécessilé de l'emploi de wagons con-
ei
g
APPAREIL G. CLAUDE
POUR LA RÉCUPÉRATION DES LIQUIDES VOLATILS.
A, arrivée de l'air; C, compresseur; D, détendeur ; S, réfrigé-
rant à 15°; R, réfrigérant à -- 80°-100°; d, circulation de l'air
détendu ; s, circulation de la saumure.
struits spécialement pour cet usage. Le transport
des poissons a fait l’objet d’une intéressante com-
munication de MM. Mir et Audigé. Le poisson est
enfermé dans un bloc de glace et peut être ainsi
transporté vivant, à l'état de vie ralentie.
La question de la taxation de la glace a été vive-
ment discutée à la cinquième section. Considérant
la glace comme une matière première indispen-
sable, la section n’a pas admis le système de pro-
tection réclamé par quelques fabricants de glace.
Elle a émis, au contraire, le vœu que le ministre
des Finances supprime les taxes déjà existantes,
de façon à obtenir la glace au meilleur marché
possible. Considérant l’enseignement des procédés
frigorifiques comme indispensable pour la vulgari-
sation de ces industries, elle a émis le vœu que cet
enseignement soit inscrit au programme de toutes
les écoles professionnelles et pratiques, mais aussi
COSMOS
433
que le Conseil supérieur de l'instruction publique
fasse appel à l'Association française du froid chaque
fois qu'il s'agira d'adopter des notices, manuels,
livres, etc., traitant de cette question.
Les avantages que la médecine et l'hygiène
peuvent retirer de l’emploi du froid ont été exa-
minés à la sixième section. Ses applications à
l'asthme, à la maladie du sommeil, aux rhuma-
tismes et névralgies, ont élé longuement discutées.
En chirurgie, le froid s'impose comme moyen de
destruction rapide des tissus, dans les cas de lupus,
cancer, nœævus, etc. La conservation des tissus à l’état
de vie ralentie a fait l’objet d’une très intéressante
communication du D° Magitot. Il a pu conserver
des fragments de cornée qui ont été greffés avec
succès sur une cornée opaque pour rendre la
vue à un individu, qui peut actuellement se diriger
à l’aide de l'œil ainsi traité. Les tissus à conserver
sont placés dans une étuve à température comprise
entre + 2° et + 4. Cette étuve était refroidie par
de la glace, et les échanges de température sont
produits régulièrement par du pétrole, dont la den-
sité augmente régulièrement par le refroidissement.
Cette étuve, construite par MM. Grouvelle, Arquen-
bourg et C!°, avait été décrite à la première section.
Congrès s’est clôturé par une très intéressante
conférence de M. Georges Claude sur l'air liquide
et ses applications. Le conférencier a indiqué quels
étaient ses procédés pour la fabrication rapide de
lair liquide, et pour la séparation de l’oxygène et
l’azote à l’état pur. Cet oxygène est employé à une
foule d'usages qui réclament une pureté de 97,5 pour
400. L’azote est employé à la fabrication de la cya-
namide calcique, et il est obtenu pour cela à 99,7
pour 400 de pureté. L'auteur a parlé de l'extraction
des gaz rares de l’air et de l'application du néon
à l'éclairage. La salle de conférence a été éclairée
par les tubes au néon, dont la lumière trop rouge
était corrigée par des lampes au mercure. Les audi-
teurs ont pu ainsi apprécier les avantages de cet
éclairage, qui, ainsi corrigé, conserve parfaitement
les couleurs et, au point de vue physiologique, est
bien supérieur à tous les éclairages en cours.
Par le nombre des communications qui ont fait
l'objet de ses réunions, par leur intérêt, par le
nombre des auditeurs qui ont assisté aux séances,
par le nombre de savants et d'hommes éminents
qui ont pris une part active aux discussions, le
deuxième Congrès national du froid marque certai-
nement une date dans le développement des indus-
tries frigorifiques en France. Il méritait de retenir
l'attention de nos lecteurs. Une fois de plus a été
démontrée la nécessité de l'union entre savants et
praticiens ; mais,chose consolante, cetaccord semble
se faire de plus en plus profond, et des manifesta-
tions comme celles auxquelles il nous a été donné
d'assister en sont la plus éclatante confirmation.
= J. CATHALA.
434 | | COSMOS
17 ocroBre 1912
Le nouveau dock flottant de 32000 tonnes de l'Amirauté anglaise.
Non moins importants que les grands navires de
guerre sont aujourd'hui, dans l’outillage naval, les
bassins flottants de radoub, qui permettent souvent
de sauver d'un désastre les båtimenis frappés
d’avarie.
L’Amirauté anglaise, dont l’activité ne se dément
pas un instant, ne cesse de perfectionner ses in-
stallations sous ce rapport, et, dans le courant de
celle année même, elle n’a pas acquis moins de
trois docks flottants, le premier pour les sous-
marins, le second pour les torpilleurs etle troisième,
last not least, pour les grands navires de guerre.
Tous trois établis par des ingénieurs dont la
science en cette matière est mondialement appré-
ciée, MM. Clark et Standfield, de Wesminster, et
construils par des spécialistes qui ont fourni des
appareils de ce genre dans toutes les parties du
monde, MM. Swan, Hunter et Wigham Richardson,
de Wallsend-on-Tyne, ces docks sont également
remarquables par la perfection de leur exécution;
mais c’est le dernier qui l'emporte en intérêt, à
raison de ses dimensions exceptionnelles, dépassant
toutes celles des docks que possédait jusqu'ici
l'Angleterre.
L’énorme appareil est formé essentiellement
d'un double fond, ou ponton proprement dit, et de
TRANSPORT DU DOCK FLOTTANT DE LA TYNE A LA MEDWAY.
deux paròis iatérales creuses allant à peu près
d’un bout à l’autre; l'appareil a 204 mètres de
longueur et 43,20 m de largeur; la largeur libre au
ommet est de 33,90 m; les cloisons latérales ont
19,80 m de hauteur à l'extérieur, et 14 mètres
au-dessus du ponton ; leur longueur atteint
156 mètres à la base et 132 mètres au sommet;
la profondeur du ponton est de 6 mètres ;
12 000 tonnes de plaques et de barres d’acier ont
été absorbées dans la construction, et le dock est
conditionné pour recevoir des bâtiments de
32 000 tonnes, avec un tirant d’eau allant jusqu’à
10,80 m.
La construction diffère de la disposition généra-
lement employée dans les anciens docks; ceux-ci
peuvent habituellement être partagés en sections,
de manière que le ponton soit utilisable lui-même
pour soutenir les parties auxquelles doivent être
apportés des soins d'entretien, de réparation ou
de peinture. Au contraire, le nouveau dock est
indémontable; les parois latérales font corps avec
le ponton, et elles contiennent l'équipement très
développé de l'appareil.
Des logements pour l'équipage, des salles à
manger, des lavatories, etc., sont ménagés à
tribord.
A bâbord se trouvent des ateliers, à savoir : une
forge, l'atelier des tours, l'atelier général et l'ate-
lier pour le travail du cuivre ; tous ces ateliers sont
largement équipés des machines les plus récentes :
tours rapides, machines à percer et à tarauder,
machines à estamper, cisailles, raboteuses, etc.;
il y a aussi un marteau électro-pneumatique, une
machine à cintrer hydraulique, etc.
Le dock est aussi pourvu d’une installation de
force motrice importante. Cette installation com-
prend, tout d'abord, quatre paires de chaudières,
placées par paire à chacune des extrémités de
chaque paroi; ces chaudières sont timbrées à
10-11 atmosphères ; elles fournissent la vapeur néces-
a
N° 1447
saire aux pompes, aux groupes électrogènes, etc.
Le ponton constituant le fond du dock est
divisé, dans le sens longitudinal et dans le sens
transversal, par un certain nombre de cloisons
élanches, et les deux parois latérales elles-mêmes
sont munies d’un pont élanche allant d’un bout à
l’autre; les cloisons et les ponts forment dans le
ponton et les parois quatre-vingts compartiments
étanches; ces compartiments sont groupés en sec-
tions; à chacune des sections. correspond un sys-
tème de vannes au moyen duquel le groupe peut
être à volonté rempli ou vidé.
Le pompage est assuré par huit pompes à
vapeur; les groupes se composent chacun d'une
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COSMOS
435
pompe centrifuge et d’une machine à vapeur com-
_pound; ils marchent à 275 tours par minute.
Indépendamment de cela, il y a, de chaque
côté, deux autres pompes à vapeur, à action
directe, celles-ci, et pouvant fournir 1 800 litres
deau par minute; elles sont employées pour le
service du nettoyage et pour le service d'incendie.
Toutes les vannes et tous les appareils de pom-
page des différents compartiments du dock sont
contrôlés d’une même cabine placée à l'extrémité
antérieure de la paroi de tribord; cette cabine
comprend deux longues tables sur lesquelles sont
fixés des manomètres qui indiquent la hauteur
d’eau dans tous les compartiments; le contrôle des
VUE INTÉRIEURE DE LA MURAILLE TRIBORD DU DOCK FLOTTANT.
valves est effectué par le système électro-pneuma-
tique Westinghouse. x
De chaque còté se trouve une grue roulante
électrique d’une capacité de 5 tonnes; les mouve-
ments de rotation, de levage, d'inclinaison et de
translation sont assurés par des moteurs distincts.
Huit puissants cabestans à vapeur sont installés
dans les parois pour permettre d'amener et de
maintenir en place les navires que le dock est
appelé à recevoir.
Le courant électrique est fourni par deux instal-
lations génératrices, placées l’une à droite, l’autre
à gauche, dans les parois, et équipées d'une ma-
chine à vapeur à grande vitesse et d’une dynamo
Westinghouse à courant continu.
L'énergie électrique sert à l'éclairage, à l’action-
nement des vannes, des grues, ainsi qu'à la com-
mande des machines des ateliers; elle peut, en
outre, être fournie aux bâliments placés dans le
dock, pour l'éclairage et pour la force motrice.
Enfin, une installation de compresseur, de chaque
côté, produit l'air comprimé nécessaire à l'ac-
tionnement de nombreuses machines-outils à com-
mande pneumalique.
Comme on le voit, le dock est puissamment
outillé, et, tant par la perfection de son équipe-
ment que par sa taille énorme, il enrichit remar-
quablement la flotte anglaise.
436
Le vol des
« L'axe d'un projectile lancé par un canon ou
par un fusil rayé demeure constamment à peu
près tangent à la trajectoire. » La figure 4 indique
les positions successives que le projectile prend
N
`
R RE
Mngn de tar f Angle de chuis
FıG. 1. — SCHÉMA EXACT INDIQUANT LES POSITIONS
D'UN PROJECTILE AUX DIVERS POINTS DE SA TRAJECTOIRE.
réellement aux différents points de son vol.
Nombre de personnes croient, au contraire, que
le projectile, tout au long de son parcours, main-
tient son axe dans une position parallèle à celle
qu'il avait au sortir de l'âme du canon. Cette
croyance peut se concrétiser dans le schéma de la
figure 2. Ajoutons bien vite qu'elle est tout à fait
erronée. M. N. C. Twining, contre-amiral de la
marine des Etats-Unis, s’est attaché à démolir ce
préjugé, qui est très répandu (4).
Le schéma de la figure 2, qui aurait la prétention
de représenter le vol des projectiles dans l'air, ne
F1G. 2. — SCHÉMA ERRONÉ.
peut invoquer en sa faveur ni la théorie ni les
faits. Ses défenseurs disent bien que le projectile
lancé par un canon rayé est doué d’un rapide mou-
vement de rotation autour de son axe antéro-posté-
rieur, qu'il constitue ainsi un gyroscope et qu'il
est donc apte à maintenir son axe constamment
parallèle à sa direction primitive. Ce serait vrai
dans le vide: mais ce n’est plus exact si l’on prend
en considération la résistance que le boulet à
pointe ogivale éprouve de la part de Pair.
Quand le projectile sort de l'âme du canon, la
résistance de lair commence par s'exercer en
pointe, parallèlement à la direction F (fig. 3), et la
résultante des forces ainsi appliquées passe par le
centre de gravité C. Elle n’a d'autre effet que de
diminuer la vitesse du projectile.
(1) The flight of projertiles: the actual positions
of a shell from gun to target, by rear-admiral
N. C. Twixixé, U. S. N., chief of the Bureau of Ord-
nance, Scientific American, 10 et 17 août 1912.
COSMOS
17 ocroBae 1912
projectiles.
Un coup d'œil jeté sur le schéma de la figure 1
montre que, dans la suite, la résistance de l'air ne
conserve pas la même direction. Elle est, en chaque
point de la trajectoire, en sens inverse de cette tra-
jectoire. Primitivement, elle est un peu inclinée
vers le bas, puis, quand le boulet est au sommet
de son vol, la résistance a pris la direction hori-
zontale; enfin, dans la dernière partie de la tra-
jectoire, elle vient nettement d'en bas. On peut
admettre en gros que le changement de direction
est de 4 degré par kilomètre de parcours.
Considérons le projectile parvenu à une certaine
distance du canon. La direction de la résistance
de l’air s’est rapprochée de l'horizontale; la force
résultante F' (fig. 3) frappe alors le projectile au-
dessous de la pointe, et sa direction ne passe plus
par le centre de gravité. Elle crée donc un petit
effort de renversement (1), qui, si le boulet n’était
pas animé d'un mouvement de rotation, parvien-
drait bientôt à retourner le projectile. Mais le pro-
jectile étant en rotation rapide comme un gyro-
scope, il réagit à la résistance de l'air comme tout
gyroscope réagit à une force extérieure qui lui est
appliquée, et il prend un mouvement paradoxal,
qui, du moins au début, s'effectue à angle droit de
la direction à laquelle on se serait attendu. Le
vent relatif atteint le boulet en dessous de la pointe;
celle-ci devrait, semble-il, dévier vers le haut;
F1G. 3. — RÉSISTANCE DE L'AIR SUR UN PROJECTILE AU VOL.
non, c'est vers la droite (2) qu’elle commence à
décliner. Puis, de même que laxe d'une toupie
inclinée décrit lentement un cône d’axe vertical,
de même l'axe du boulet ayant commencé à porter
sa pointe un peu vers la droite, continue son mou-
(1) Ce moment gyroscopique est proportionnel à la
résistance F' et à l'angle a que cette force fait avec
l'axe du boulet. i
(2) Ce mouvement ‘de l’axe du gyroscope, à angle
droit de la force qui lui est appliquée, est désigné
sous le nom de prévcession.Il s’effectue vers la droite,
étant donné que les boulets de canon sont toujours
animés d'une rotation dans le sens dextrorsum, pour
un observateur qui les regarde s'éloigner. La préces-
sion s'effectuerait vers la gauche si le mouvement
giratoire était inversé.
Ne 1447
vement de précession en décrivant un cône dont
l'axe se confond à peu près avec la trajectoire du
centre de gravité C. Il y a cette différence pour-
tant que l’axe de la toupie décrit successivement
plusieurs cònes complets; le projectile, au con-
traire, n’achève pas son mouvement de précession.
Voici la raison du fait :
La vitesse de rotation du boulet est énorme,
4000 à 20000 tours par minute ou davantage; le
moment renversant créé par l'air est relativement
faible. Dans ces conditions, la durée d’une période
de précession complète atteindrait probablement
une ou plusieurs secondes, car elle est d'autant
plus longue que la force qui agit pour dévier le
gyroscope est plus faible. Or, avant que le mouve-
ment de précession inauguré ne soit achevé, le
boulet s’est transporté à des centaines de mètres;
en ce point de la trajectoire, la résistance de l'air
a pris une nouvelle direction, F?, qui attaque le
projectile à une distance plus grande de la pointe.
La première précession s'arrête en cours de route
et une nourelle précession s'inaugure autour d'un
axe qui se confond pratiquement avec la direction
de lair F? et renvoie de nouveau la pointe du
boulet vers la droite pour lui faire décrire une por-
tion de cône, et ainsi de suite.
Vue d'en dessus (fig. 4), la pointe du boulet décrit
une série de festons et demeure presque continuel-
lement à droite de la trajectoire du centre de
gravité.
Vers la fin de sa course, la vitesse linéaire du
_Ligne de tir
ne
o
FIG. 4. — TRAJECTOIRE DU BOULET, VUE EN PLAN.
boulet est considérablement amortie, la résistance
de l’air diminue, ainsi que le moment gyroscopique;
la précession est donc plus lente et son amplitude
grandit avec sa durée, comme l'indique aussi le
schéma de la figure 4.
. Nous n’aborderons pas l'examen d’une autre
catégorie de forces exercées sur le boulet par l'air.
Il s’agit du frottement par lequel Fair s’oppose au
mouvement de rotation du boulet. M. Twining
COSMOS
437
montre sommairement qu'elles ont un double
résultat : elles tendent à rendre l'axe tangent à la
trajectoire du centre de gravité, et, de plus, elles
contribuent, avec d’autres causes, à faire dériver
le boulet en bloc vers le côté.
Les vérifications de la théorie.
M. Twining énumère nombre de faits d'observa-
lion ou d’expérience dé balistique qui trouvent
F1G. 5. — EMPREINTE SUR CIBLE.
En haut, schéma erroné: en bas, schéma exact.
leur explication toute naturelle dans la théorie qui
vient d’être sommairement présentée.
4° Les empreintes sur la cible.
En octobre 1909, la marine des États-Unis a fait
procéder, à Indian Head, Md., à des tirs sur cible
avec une pièce du calibre de 8 pouces (203 milli-
mèlres) à une distance de 7 000 mètres.
La pièce était braquée sous un angle de tir de
930 et le boulet aborda la cible sous un angle de
chute de 13°45'. La cible ne présentait, pratique-
ment, aucune résistance à la pénétration. Dans
l'hypothèse que le projectile conserve jusqu’au
bout son axe parallèle à la direction de tir, il
devait laisser dans la cible un trou ovale mesurant
390 millimètres (15,35 pouces) dansle sens vertical.
Or, en fait, ła perforation observée était pratique-
ment circulaire, d’un diamètre de 209 millimètres
(8,23 pouces), ce qui concorde bien avec l’autre
hypothèse qui veut que l'axe du boulet soit presque
tangent à la trajectoire.
2° Les photographies de projectiles au vol.
Au printemps de 1912, pendant les tirs de la
flotte américaine de l'Atlantique, on a photographié
les projectiles de gros calibre au vol à une distance
de 9000 mètres de la bouche. Tous les projectiles
438
retombaient la pointe baissée; à cetle distance,
leur axe se confondait avec la trajectoire à 2 degrés
près. -
3° Les observations visuelles des hommes postés
près de ces cibles confirment les indications du
schéma de la figure 1, à l’exclusion du deuxième
schéma.
4 Expériences sur un boulet en rotation dans
un courant d'air artificiel.
En 1911, le département de la marine des Etats-
Unis a créé un petit modèle de projectile, suspendu
à la manière d’un gyroscope, et qui pouvait être
animé d’une vitesse de rotation de 3000 à 5000 tours
par minute : c’est la vitesse angulaire d'un pro-
jectile de gros calibre. Pour imiter la résistance
de l'air sur le boulet au vol, on dirigeait sur le
F1G. 6, — ATTAQUE D'UNE CUIRASSE PAR UN BOULET.
En haut, schéma erroné; en bas, schéma exact.
Boulet de 305 mm à une distance de 9000 m de la pièce,
Angle de tir 7°40'; angle de chute 11°25.
modèle un jet d'air. Quand le jet d'air frappait le
modèle obliquement, celui-ci remettait aussitôt son
axe dans la direction du vent (1).
» La perforation des cuirasses. — Si le
schéma 2 était exact, les projectiles se briseraient
ou glisseraient à la surface des cuirasses épaisses
(1) On peut relire utilement l’article où M. de la
Fresnaye, à propos de la toupie dirigeable, a donné
une explication élémentaire très claire de l’action d'un
aimant sur un disque de fer doux en rotation rapide:
en appendice, l’auteur envisage précisément aussi
l'action d’un jet d’air sur le disque de la toupie.
(Cosmos, 6 janv. 1906, t. LIV, p. 19.)
:COSMOS
17 OCTOBRE 1912
d'acier très dur qui protègent les navires, sans
jamais les traverser. La comparaison des deux
schémas de la figure 6 fait bien saisir la différence
d'attaque suivant les deux hypothèses énoncées au
début.
Au cours de la discussion, on a dit parfois:
Dans les engagements navals, la perforation des
cuirasses est une rareté, ce qui montre bien que
les projectiles tirés à grande distance abordent
les cuirasses, comme l’indique le schéma supérieur.
Or, le percement des cuirasses par les boulets,
à grande distance, est parfaitement possible,
comme l'ont prouvé les tirs d'expérience de la
marine américaine en 19141, à une distance de
7100 mètres, contre des cuirasses modernes : une
cuirasse de 203 millimètres d'épaisseur, et deux de
254 millimètres, furent percées; les trous étaient
parfaitement ronds.
6° La faible perte de vitesse du boulet dans la
deuxième partie de sa trajectoire dépose aussi en
faveur de notre hypothèse. La vitesse va, bien
entendu, en diminuant continuellement, mais
cependant un peu moins vite à la fin qu'au début.
Le contraire devrait arriver si le boulet, dans la
partie descendante de sa trajectoire, frappait l'air
de côté suivant le schéma de Ja figure 2.
1° La dérive des projectiles. — Tous les projec-
tiles animés d’une rotation dextrorsum dérivent
vers la droite. C’est le contraire pour une balle à
jouer animée d’une rotation dextrorsum : la balle
à jouer dérive à gauche.
La dérive à gauche de la balle à jouer est facile
à expliquer. L'air entrainé par viscosité avec la
balle vient frapper l'air tranquille dans lequel la
balle se déplace; la réaction appliquée à la balle
elle-même est plus forte sur le côté droit que sur
le côté gauche. Un boulet de canon est le siège
d'un phénomène identique, mais l’effet est négli-
geable; la dérive du boulet, qui s'effectue d’ailleurs
en sens contraire, tient à d’autres causes.
La principale est, justement, la précession
gyroscopique dont nous avons parlé plus haut. La
pointe du boulet décrit des festons qui sont tous
entièrement à droite de la trajectoire suivie par
le centre de gravité du boulet; d’où résulte, dans
la résistance de l'air, une légère composante qui
tend à déplacer le boulet en bloc de la gauche
vers la droite. Et comme l’amplitude des préces-
sions va continuellement en augmentant, la dérive
va, elle aussi, en s’accélérant. Elle augmente rapi-
dement avec la portée.
8° Les grands angles de tir. — Les tenants du
schéma de la figure 2 seraient prêts à parier qu'un
projectile tiré sous un angle de près de 70° (comme
dans la figure 7) ne retombera jamais sur sa pointe.
Et pourtant, il retombe généralement sur sa pointe.
En mai 1912, l’armée américaine a procédé à des
tirs d'expérience sous un angle de 65°, avec cinq
N° 1447
projectiles du calibre de 305 millimètres (12 pouces);
sept hommes, dont quatre officiers, étaient postés
JL — ,
FIG. 7. — AUX GRANDS ANGLES DE TIR:
LE BOULET RETOMBE ENCORE SUR LA POINTF.
en observation. Les cinq projectiles retombèrent
tous la pointe la première.
Pour des angles de tir de 70° ou davantage, il
COSMOS
439
peut arriver que le boulet retombe sur l'arrière.
En effet, à mesure que la trajectoire montante se
rapproche de la verticale, les conditions qui favo-
riseraient le retournement du projectile deviennent
de plus en plus précaires : le schéma de la figure 7
montre qu'au sommet de la trajectoire la résistance
de l'air s'exerce non plus seulement sur l’ogive du
boulet, mais encore à l’aplomb et même en arrière
du centre de gravité : les effets de la résistance de
l'air à l'avant et à l'arrière du centre de gravité se
balancent partiellement. En fait, l’angle de tir des
mortiers est généralement limité à 65°; les vitesses
initiales sont assez faibles, et, en conséquence, on
limite à une valeur assez faible (1 500 à 4 000 tours
par minute) la vitesse de rotation des obus lancés.
par ces pièces.
. Inutile d'ajouter que tous les professionnels qui.
s'occupent de la balistique externe sont parfaite-
ment d'accord pour reconnaitre que les projectiles
allongés lancés par les canons rayés conservent
constamment leur axe à peu près tangent à la tra-
jectoire. B. L.
La culture du chrysanthème au Japon.
Comme l’agréable est souvent mieux apprécié
que l'utile, nous avons accoutumé depuis long-
temps d'admirer les jardiniers japonais, qui le
méritent, sans reconnaitre suffisamment qu'ils sont
les élèves des merveilleux agriculteurs chinois.
Ceux-ci, mieux que nuls au monde, donnent à un
sol souvent artificiel une irrigation, des soins, à la
culture, un traitement meilleurs que nous ne fai-
sons en Europe. Mais, tandis que les Chinois,
vivant dans une démocratie au régime foncier
familial et communal, traitant un fonds infini-
ment morcelé, sont plutôt restés, par besoin, puis
par goût, des maraichers incomparables, sacrifiant
le site à ‘la récolte, les Japonais, féodaux, possé-
dant de grands domaines et divisés en nobles et en
paysans et artisans, les uns maitres du sol et les
autres y travaillant pour le compte des premiers,
les Japonais ont consacré au luxe de l’art floral des
espaces et un labeur dont les Célestes ne disposaient
point. Ils doivent à ceux-ci l’amour de la terre et
l’acquit d’une longue expérience de soins. Grâce à
cela, les Nippons ont pu donner à leur pittoresque
patrie, où les décors des mers et des iles, des monts
et des vallées sont si délicieusement variés et fré-
quents, une parure florale d’une rare beauté. Le
livre captivant de Lefcadio Hearn détaille admira-
blement, entre tant de descriptions attachantes, le
résultat exquis du travail des jardiniers japonais.
Il ne faudrait toutefois pas conclure de ceci que
les Chinois ont quelque dédain pour les fleurs :
leur poésie et leurs arts graphiques démontrent le
contraire, et ils en cultivent avec soin. Mais les
Japonais ont donné aux fleurs une importance-
presque rituelle.
Pour ce qui nous occupe, c’est en l’an 386 après.
Jésus-Christ que le chrysanthème, cultivé en Chine:
trente siècles auparavant, le fut au Japon. Cette
fleur existait dans l'archipel nippon où elle servait.
à divers usages médicinaux et peut-être déjà de-
comestible. Mais les Célestes révélèrent aux Japo-
nais le parti ornemental que l'on en peut tirer.
Non seulement ils perfectionnèrent les espèces.
spontanées, mais ils importèrent des variétés déjà
cultivées chez eux, et les élèves dépassèrent gran-
dement les maitres. Les Japonais s’enthousias-
mèrent pour cette fleur ainsi transformée, et c’est
peut-être à cette admiration qu'est due son éléva-
tion au rang d'emblème national, de figuration dw
Soleil, ancètre des empereurs actuels, selon la
superstition de ce peuple. Le chrysanthème
— 0 kikou — stylisé orne les étendards des insu-
laires d'Extrème-Orient.
Au Japon, la nature en général, la fleur surtout,
sont l'objet d'une sorte de vénération. Selon les.
mœurs du vieux Japon, nul ne pouvait être mis à
mort tant que les arbres restaient fleuris. Peuple
peu porté aux spéculations de l'esprit, aux médita-
tions religieuses comme aux complications des
sciences exactes, « il laissa s'établir une mysté-
-rieuse fraternité entre lui et les fleurs ». La curio-
sité, étant dans leur matérialisme « incapable
d'éclairer les grandes ombres du ciel, baignait de
440
sa lueur douce les brins d'herbe ». J'emprunte ces
deux citations à M. Belessort, auteur de la Société
japonaise, beau livre écrit avant cette guerre de
1904, qui nous annonce un Japon industriel, socia-
liste et conquérant, où les fils des shogun et des
samouraï délaisseront les fleurs et feront à leur
pays naguère chevaleresque, terrible, puéril et
gracieux, un ciel de fumée sur un sol de misère.
Nulle part l’art du jardinier décorateur n'attei-
gnit la généralité, l'intensité qu’il offre dans
l'empire du Soleil Levant. Nulle part la nature
n'est moins sincère ni plus précieusement jolie.
Les sites, les rochers, les arbres semblent sortis de
la main de l'artisan. Les panoramas sont plutòt
une suite de petits tableaux qu’une vue d'ensemble.
Chaque détail : fleur, buisson, taillis, collines, est
travaillé avec un soin méticuleux, et les pierres plus
que tout encore.
On voit donc, par ceci, que le jardinier japonais
n’a qu'un but: forcer la nature, la soumettre aux
règles de sa propre esthétique. Le Nôtre procéda
de la sorte avec ses majestueux jardins du grand
siècle. Le Japon est le pays des fleurs géantes et
des arbres nains. On y réduit un cèdre aux dimen-
sions d'un arbuste naissant, et d’une modeste
anthémis des champs on tire un buisson de fleurs
extraordinaires.
À pratiquer cette végétation artificielle, le Japo-
nais a connu que la nature ne consent jamais à
modifier d'elle-même ses types et ses formes, en
constante harmonie avec les climats dans leur
végétation spontanée. La culture, d'ailleurs, est
toujours un artifice. Si simple qu’elle soit, elle
améliore toujours une plante, son aspect, son
apparence, son rendement. En augmentant jusqu'au
maximum l'intensité de la culture, on augmente
jusqu'à l’invraisemblable la différence existant
entre le type génuine et le type obtenu. Et dans
tous les détails: volume, coloris, nombre, forme,
parfum et saveur. Et là se révèle l'unique méthode
de la race jaune, l'observation seule la guide.
Mais quelle observation minutieuse et suivie! Des
générations d'hommes sont nécessaires pour noter
le dosage des engrais, les évolutions de la plante,
l'effet des pincements. Les Jaunes ressemblent à
ces écoliers qui, me pouvant résoudre un problème
d’arithmétique par les formules et le raisonne-
ment, arrivent à en trouver la solution par le
tâtonnement, avec de ła patience et du temps.
Chez nous, la chimie agricole donne par ses ana-
lyses de prompts résultats relatifs au dosage des
éléments de la lerre comme à la valeur des engrais,
et permettrait de réaliser des progrès immédiats
si nos agriculteurs avaient l'esprit d'assimilation
on d'imitation des Jaunes. Chez eux, rien que
l'observation, observation du défaut à corriger, du
remède à employer, recherches infiiment répétées,
au hasard des éléments restreints dont ils disposent.
COSMOS
47 ocroBnz {912%
Mais, une fois trouvée, la bonne manière est appli-
quée rituellement, avec une attention, une exacti-
tude dont peu des nôtres sont susceptibles. D'où
l'excellence fixe des résultats.
Ne raillons pas trop cette méthode, si peu com-
patible avec l'initiative de nos intelligences (chez
les gens instruits) et la hâte de nos efforts. C'est
à cette inlassable patience que les Chinois doivent
de tirer jusqu'à sept récoltes par an de leur fonds,
chacune de ces récoltes étant plus abondante que
l'unique obtenue par nos paysans selon leurs pro-
cédés de routine. C’est à cette méthode et à une
propreté trop souvent ignorée dans nos entreprises
agricoles que les jardiniers nippons doivent d’avoir
obtenu des curiosités florales. Certaines espèces,
chez eux, forment de véritables buissons, merveil-
leusement colorés. Les pivoines etleschrysanthèmes
atleignent surtout des développements surprenants.
Ce résultat d’un travail persévérant et réfléchi
doit être attribué plus au jardinier qu’à la nature.
La terre, l’eau et le soleil ne sont plus que les
auxiliaires de l’homme. Celui-ci commence par
choisir une terre légère, prise dans la forêt, à l'en-
droit où elle est le plus luxuriante. Il la fait
sécher, la tamise assez fin de façon à enlever les
pierrailles, les larves, etc. Cette terre est mêlée de
sable s’il le faut, puis mouillée. On la met dans des
pots ou dans des caissons placés à couvert; on y
sème les graines ou l'on y dispose les boutures, etle
régime des soins commence. L’arrosage, l'addition
de terre forestière riche en engrais sont l’objet
d'une attention quotidienne.
On ne saurait comparer le jardinier japonais au
nôtre. D'abord, la proportion de main-d'œuvre
par rapport à la production est plus grande chez
eux qu'ici, ensuite, il faut voir de quelle manière
chaque feuille même est soigneusement visitée,
nettoyée, arrachée au besoin, comment chaque
pétale est surveillé. Cette patience méticuleuse est
le propre de ces races pour qui le temps n'est rien
et dont la volonté asservit les nerfs. Et cet effort
est d'autant plus appréciable que les Japonais n'ont
pas le stimulant des expositions et des récompenses
et que les collections des jardins impériaux ne sont
pas visitées.
L'abri joue un grand rôle dass les cultures japo-
naises. Le climat souvent froid, les brouillards de
la mer et de la montagne, la neige assez tardive, les
vents du large, les ouragans, les cyclones, les pluies
torrentielles, les poussières volcaniques, le soleil
ardent de l'été, rendent le plein air trop éengereux
pour les plantes délicates.
Des châssis faits à la manière des shodji (van-
taux), garnis de papier blanc transhacide et posés
sur de minces poteaux de bambous, forment la
carcasse d’un système renforcé par des nattes fines
ou des claies en minces lattes de bambous.
Les nattes et les elaies mobiles sont mises et
N° 1447
retirées autant de fois par jour qu'il le faut pour
assurer la sécurité des cultures. La plante n’est
guère à l'air libre qu’à l’époque de la floraison.
Les engrais employés sont l’engrais humain, les
engrais animaux, les végétaux en décomposition,
les fumiers, les résidus mouillés des balayures et
les cendres.
L'arrosage se fait au moyen d’une citerne dont
l'eau est répartie sur loute l'étendue du terrain par
un tuyautage de bambou, toujours judicieusement
disposé.
Ajoutons qu'à l'heure actuelle les Japonais ne
font pas mieux que nous, surtout en grandes fleurs.
Les collections australiennes et anglaises, les col-
lections des professionnels français comme feu
Calvet ou de grands amateurs comme le marquis
de la T. d. P., ne le cèdent en rien aux belles flo-
raisons des iles lointaines. Mais ils ont été nos
COSMOS
441
initiateurs dans cette culture traditionnelle chez
eux, scientifique chez nous. Nos chrysanthèmes ont
plus que doublé de volume depuis trente ans. C'est
à peu près à cette époque que nous avons su quel
parti l’on pouvait tirer du Chrysanthemum indicum,
de l’humble fleur des champs dont les Japonais
ont fait le kikou emblématique et orgueilleux,
la fleur dont le nom, grâce à une œuvre littéraire
répandue, a contribué à faire connaitre le Japon
— un faux Japon d'escale heureuse, — qui ne
ressemble ni au pays des samouraï ni à celui des
vainqueurs de Moukden.
Nous pourrions encore retenir des Japonais la
leçon de soins constants qu'est leur culture, et les
imiter pour leur amour des fleurs, qu’ils chérissent
comme si la poussière des ancètres revivait dans
les corolles aux nuances splendidement variées.
G.L. NUMILE.
Les jouets au concours Lépine.‘
Le Père Lapin est un cuisinier devant ses deux
marmites. L'une sert uniquement de bonbonnière,
lautre contient un lapin. A un moment donné, le
couvercle de la seconde marmite se soulève, le
transmettant les mouvements des cames à diffé-
renis bras d'articulation. La came E agit sur le
levier G qui, par la bielle I, agit sur le bras J
tenant la fourchette K. Ce même levier, par la
bielle L et la manivelle M, fait manœuvrer la
bielle N commandant la planchette articulée O
(4) Suite, voir p. 413.
LE PÈRE LAPIN.
lapin apparait; le cuisinier, avec sa fourchette,
cherche à le piquer, mais le lapin disparait à temps.
Cette mécanique est à deux cames D et E logées
dans un carter F actionnant deux leviers G et H
sur laquelle repose le lapin. La came D, par le
levier H et la bielle R, actionne la tige S du bras
tenant le couvercle de la marmite. Enfin, la tête
du cuisinier oscille sous l'action de la bielle mą--
nivelle T commandée par la tige S.
L'avialion n'a pas fourni beaucoup de jouets
nouveaux cette année. À part quelques redites
442
plus au moins démarquées, nous n'avons que peu
à glaner. Le problème du jouet-aéroplane est aussi
ardu que celui de l’aéroplane-touriste.
L'enfant aime à construire. Afin de lui faciliter
cette tâche délicate, quand il s'agit d'établir de
petits aéroplanes en papier, un inventeur a conçu
une boite de construction très rudimentaire qu'il
COSMOS
17 OCTOBRE 1912
appelle l'Oiseau de France. La partie essentielle
est un gabarit en zinc dans lequel on introduit
une feuille de papier (la boite en contient une cer-
taine quantité) pliée en deux. On serre convena-
blement sur le gabarit tout en découpant le papier
en suivant les bords du métal. Après avoir sorti
le découpage et ouvert le papier, on trouve un
AÉËÉRO-PUZZLE.
petit aéroplane qui se leste en ajoutant un œillet
à l'avant et dont les ailes acquièrent une certaine
rigidité en collant une bande de papier sur leur
longueur. L'oiseau vole parfaitement.
L'Aéro-puzzsle est également un jeu de construc-
tion. Dans la boite sont jetés pêle-mêle de légers
bâtonnets de différentes longueurs que l’on assemble
à, l'aide d'armatures métalliques. Ces armatures
sont de petits tubes simplement ouverts aux deux
extrémités et dans lesquels on engage les bâton-
nets. Mais comme, dans la construction, il arrive
que trois, quatre, quelquefois cinq bâtonnets doivent
se réunir en un même point, les tubes comportent
AËROPLANE COMBY A AIR COMPRIMÉ.
alors des assemblages qui permettront aux enfants
de se reconnaitre. Malgré tout, cette construction
sera longue à établir, surtout dans les débuts, et je
conseille fort aux parents désireux de goûter plu:
sieurs heures consécutives de repos d'offrir ee
nouveau casse-tête moderne à leur turbulente pro-
géniture.
Un inventeur, M. J. Comby, s'est altaché à
résoudre le problème du moteur à air comprimé,
et il a construit, pour expérimenter son moteur,
un monoplan et un biplan qui volent parfaitement.
Ce moteur est à cinq cylindres étoilés, articulés
par leurs têtes sur une armature rigide. Les pis-
tons sont solidaires de tiges creuses par lesquelles
s'opèrent l'admission et l’échappement de l'air
comprimé, lequel est fourni par un réservoir
cylindrique allongé constituant le fuselage de
l'appareil. Après chaque expérience, le réservoir
CERF-VOLANT DE M. MARQUER.
est de nouveau rempli d'air comprimé avec une
simple pompe de bicyclette, et les appareils, le
monoplan comme le biplan, s'envolent du sol et
effectuent de très longs parcours. Aux essais qui
eurent lieu sur l’esplanade des Invalides, les aéro-
planes franchirent, à une dizaine de mètres de
hauteur, toute la largeur de l’esplanade, arrêtés
N° 1%47
par les arbres; on se rendait compte que leur vol
pourrait atteindre plusieurs centaines de mètres.
Les cerfs-volants, aussi peu nombreux que les
aéroplanes, eurent également un beau succès. Citons
celui de M. Julien, qui s’enleva et se maintint par-
failement dans l’air, et celui de M. Marquer, dont
le plan principal affecte la forme d’un dirigeable.
A côté de ces jouets, quelques inventeurs ont
exposé des modèles d’aéroplanes à construire en
grand; chacun d'eux représente une idée dont la
valeur ne peut être affirmée qu'après essais.
Malheureusement, les essais n’auront jamais lieu,
les constructeurs actuels n’ayant nullement l'in-
tention de se consacrer à l'étude d'engins ne répon-
dant pas aux données actuellement admises. Nous
devons ajouter que certains modèles exposés
appartiennent plutòt à une époque disparue; ils
eussent eu beaucoup de succès il y a quelque cin-
quante ans.
Pierrot regardant l'éclipse. — Ce jouet est le
meilleur de ceux que M. Gasselin a présentés cette
année. Pierrot, un verre fumé en main, regarde
l’éclipse avec beaucoup de satisfaction, se montre
inquiet dès qu’elle disparait et reprend son poste
d'observateur lorsque le disque lunaire vient de
nouveau se placer devant le Soleil.
Les deux parties du jouet : Pierrot et la boite
de l’éclipse sont solidaires du socle A. Le mouve-
ment est remonté à l'aide dune clé F placée à
l'arrière de la boite. Ce mouvement entraine une
came G à laquelle appartient le cercle lunaire.
La came G actionne une pièce I solidaire, par
le levier K, d'une manivelle J à laquelle est
COSMOS
443
reliée la tige L. Cette manivelle n'effectue que
des mouvements oscillants qu'elle transmet au
corps du Pierrot. Ces oscillations sont provoquées
par le bord échancré de la came G lorsque l'éclipse
commence. Une double patte N, montée sur l'axe
transversal en face du Pierrot, actionne le levier O-
PIERROT REGARDANT L'ÉCLIPSE.
qui fait mouvoir les bras P. Enfin, le mécanisme-
est complété par un ressort Q rappelant le per-
sonnage dans sa position normale après chaque
oscillation. En résumé, tous ces mouvements sont
commandés par une came unique G actionnant
une série de leviers à des moments déterminés.
LUCIEN FOURNIER.
SOCIÈTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 7 octobre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Sur un dispositif d’arc au fer fonctionnant
avec le courant alternatif. — Le fer émet un
nombre considérable de radiations qui se retrouvent
à l'état de raies d'absorption dans la plupart des
spectres des astres. Cette circonstance a conduit
depuis longtemps les astronomes à faire usage de
l’étincelle condensée, éclatant entre des électrodes de
fer, pour obtenir des spectres de comparaison propres
à la détermination des vitesses radiales des étoiles.
Cette source rayonnante, si commode à beaucoup
d'égards, a l'inconvénient de changer très notablement
d'intensité dès que les conditions ARDORO
varient tant soit peu.
Préoccupé de posséder une source de comparaison
se comportant toujours de la même manière et émet-
tant de nombreuses raies, M. Mavrice Hamy a été
amené à s'adresser aux radiations d'arc du fer four-
nies par un dispositif qui utilise le courant alternatif
du Secteur parisien de la rive gauche. Il décrit l'appa-
reil qu'il a imaginé et qui a RENE répondu à
son attente.
Sur la Srésénce de l’acidé cyanbyaciqie:
dans le Trèfle rampant (TrifoHum repens L.).
— Cette plante, très commune, croit dans les blés,
sur les bords des chemins ét des fossés.
Sous l'influence d’un ferment, la plante (sauvage),
en se décomposant, produit de l'acide cyanhydrique;
les folioles sont les organes les plus riches : douze
lots de provenances très diverses ont fourni, à lana-
lyse de M. MarceL MinaAxve, une teneur de # à 39 mil-
ligrammes par 100 grammes.
Comme plante présentant un intérèt industriel et
alimentaire et contenant de l'acide cyanhydrique, le
trèfle rampant s'ajoute à certains haricots, diverses
céréales, des plantes à graines oléagineuses, au lin, etc.
Sur la destruction de certains hémiptères
par les parasites végétaux. — M. Léororo LE
Movut a généralisé à divers hémiptères le procédé de
144
destruction de certains insectes, au moyen de parasites
végétaux, qui a été employé par MM. Metchnikoff et
Krassilschik en Russie, par le D' Snow aux États-
Unis, et par lui-mème en France.
Les pommiers du D'Raillard, de la Charité (Nièvre),
étant couverts du blanc caractéristique de la présence
du puceron lanigère, M. Le Moult traita ces arbres,
en septembre 1911, par des cultures microbiennes de
Sporotrichum globuliferum et de Botrytis bassiana;
le puceron n’a pas reparu au printemps sur les pom-
miers traités.
Mème succès, durant l'été de 1912, pour d’autres
pommiers traités par des cultures d'Zsaria densa, de
Sporotrichum globuliferum et de Botrytis bassiana.
L'auteur essaye le mème procédécontrelephylloxera.
Sur les caractéristiques simples des équations aux
dérivées partielles en deux variables. Note de M. Gus-
TAVE SANNIA. — Sur la théorie des équations partielles,
Note de M. N. Sazrrxow. — Remarques énergétiques
sur le mouvement d'un solide dans un liquide vis-
queux. Note de M. U. Cisotri. — Influence de la vitesse
de combustion sur le rendement d'un moteur à gaz.
Note de M. E. MÉRIGEAULT. — Sur un nouveau dosage
volumétrique de l'uranium. Note de M. V. AuGen. —
Sur le polychroïsme des cristaux de sulfate de potas-
sium colorés artificiellement. Note de M. Pauz GAUBERT.
— Sur l'absorption des rayons ultra-violets par les
chlorophylles à et 8 et par la chlorophylle cristallisée.
Note de MM. C. Duéré et W. pe Rocowskr. — Sur les
rapports des kystes de Carini du poumon des rats
avec le Trypanosoma Lewisi. Note de M. et M"™'° PIERRE
Deraxoe. — Les « Fibrincæœrper » de Zopf et leurs
relations avecles corpuscules métachromatiques. Note
de M. E. Poex.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L'’'AVANCEMENT DES SCIENCES !!)
Congrès de Nimes.
Mathématique, Astronomie et Mécanique (suile).
M. Euize BELor. 1° Les forces répulsices à l'origine
des mondes. — Les cosmogonies modernes admettent
en général ce postulat: a La loi de Newton et la
mécanique newtonienne doivent à elles seules expliquer
l'origine d'un monde. »
L'examen des phénomènes des comètes et des nove,
la théorie de la pression de radiation et l'analyse des
formules de la cosmogonie tourbillonnaire montrent,
au contraire, que dans une nébuleuse en voie de con-
densation la matière obéit d'abord aux forces répul-
sives avant d'obéir à l'attraction.
Par là on comprend comment la matière s’est étalée
radialement, aussi bien dans le système planétaire
que dans les nébuleuses spirales.
2° Les poslulats dans la nouvelle cosmogonie de
T. See. — Les raisonnements qui contiennent des hypo-
thèses cachées risquent fort d’être erronés.
La nouvelle cosmogonie, exposée par T. See dans
(1} Suite, voir p. +17.
COSMOS
17 OCTOBRE 14191412
son livre récent, The capture theory of cosmical evo-
lution, renferme un certain nombre de ces postulats
non explicites. En les mettant en lumière, on voit
nettement sur quelles bases fragiles est édifiée la
théorie de l'évolution cosmique, fondée sur l'idée de
la capture des astres dans le milieu résistant d'une
nébuleuse.
Le commandant Banisien. De quelques sommations
et séries. — L'auteur présente diverses sommes de
fractions formées par des termes en progression arith-
métique croissante; il en déduit diverses séries dont
quelques-unes sont sans doute inédites.
Ce travail lui a été suggéré comme généralisation
de formules de ce genre que lui a communiquées
l'abbé Cassin, curé de Domqueur, par Ailly-le-Haut-
Clocher (Somme), qui est un spécialiste de l'étude
des progressions.
M. A. Maire, bibliothécaire à la Sorbonne, publie
quelques lettres de H.-C. Schumacher adressées à Fran-
çois Arago et à Mauvais, astronome à l'Observatoire
de Paris. Ces premières lettres (des 28 mars, 20 aoùt
1843, 26 juin 1849), enrichiront une correspondance déjà
volumineuse et intéressante. Les lettres à Mauvais
datent du 22 juillet 1847.
M. Pezzer (Clermond-Ferrand) continue son étude
sur les équations aux dérivées partielles.
M. Gastron Tarry (Le Havre) présente des tables
à triple entrée des diviseurs des nombres de 1 à Ñ.
— Pour savoir si un nombre premier divise un nombre,
il suffit de regarder si un résidu donné par la table
est égal à la somme de deux autres résidus donnés.
En choisissant convenablement les bases B et A et
à l’aide d’un petit perfectionnement, on construit une
table allant jusqu’à 100 millions et comprenant
593 166 nombres de quatre chiffres au plus, par consé-
quent moias volumineuse qu'une table de Lebesgue
allant seulement jusqu'à 2 600 000.
M. Ganvès (Montauban). Contribution à l'étude du
jeu « le Solitaire ».—L'auteur relève d'abord une erreur
commise par Ch. Lucas, à ce sujet, dans son étude
sur ce jeu (ARécréations mathématiques, t. 1“). Il conclut
ensuite en démontrant que le problème général, pour
lequel il y a toujours possibilité de réussite, est celui
qui consiste à opérer sur le Solitaire décentré. |
M. C.-A. LaisanT. Sur les tables de diviseurs. —
L'auteur avait indiqué, en 1891, les principes de
la construction possible d’une telle table, jusqu'à
une limite assez étendue et reposant sur l'emploi
de moyens graphiques. La question est liée aux
progrès futurs de l’arithmétique et a provoqué de
nouveaux travaux de mathématiciens connus. Les pre-
miers procédés de M. Laisant étaient peu pratiques,
car les tables étaient trop étendues. Actuellement,
chaque page présentant 10 centimètres de largeur sur
20 de hauteur, soit 14 X 22 en faisant la part des
titres et des chiffres, la lecture graphique avec un
millimètre comme unité ne serait pas pénible. Pour
aller jusqu'à 100 millions, on pourrait, avec environ
4300 pages, et cela sans calculs auxiliaires, d’une
façon directe, déterminer les facteurs de chaque
nombre.
Le mémoire présenté à la section de mathématiques
présente un exemple des tables et des explications
très claires.
Ne 4147
Navigation. Génie civil et militaire.
Section présidée par M. Faure, ingénieur en chef
des ponts et chaussées, à Nimes.
M. Pauz DeEscoupss, directeur honoraire des manu-
factures de l'État, véritable apôtre du Æeboisement,
présente un rapport sur cette question, rappelle le
vœu émis par l'Association au Congrès de Toulouse
en 1910 : « Que des études soient entreprises en vue
d'établir les bases d’un reboisement rationnel capable
d'agir dans un sens favorable sur le régime des cours
d’eau. » Le reboisement rationnel doit, dans ces condi-
tions, être étudié dans deux buts distincts : 1° Diminu-
tion du ruissellement; 2° Atténuation des tourbillons
aériens, porteurs de pluies diluviennes.
Outre ses avantages directs, l'amélioration du régime
des eaux, qui permettra de réaliser la lutte contre les
inondations, aura les plus heureux effets pour la
navigation et pour l'alimentation des forces hydrau-
liques.
M. Boicèvr, président de la Chambre de commerce
de Béziers. Ligne Océan-Méditerranée (canal du Midi
et canal latéral à la Garonne), destinée à relier les
ports de Bordeanx et de Cette; cette ligne Océan-
Méditerranée est d’une importance capitale pour la
région, à partir de 1898, époque à laquelle ces deux
canaux ont été rachetés par l'Etat, et dans les cinq
années qui ont suivi, le tonnage s’est accru de 102 pour
400. Cet accroissement est un sùr garant de l'intensité
que prendra le trafic lorsque les courbes, les ponts et
les écluses permettront le passage des bateaux de
300 tonnes. Les améliorations demandées par toutes
les populations de la région et des diverses institu-
tions sont comprises dans le programme de 1903, et,
en outre, les 148 écluses qui desservent ces canaux,
doivent, conformément à la loi de 1879, être portées à
la longueur minimum de 38,50 m.
M.J. HeNnier (Marseille). 1° Les transports par voies
ferrées entre le port maritime de Marseille, la Suisse
et l'Italie du Nord. — En passant par la vallée infé-
rieure de l'Isère (Saint-André-le-Gaz et Belley), la
ligne du chemin de fer serait considérablement rac-
courcie. Il conviendrait, d’ailleurs, de remanier et
d'étendre le service des voyageurs et des marchan-
dises de Marseille et de Genève. Enfin, une suture
devrait être établie entre les voies ferrées et les voies
fluviales par l'établissement d'un certain nombre de
gares d’eau entre Marseille, Lyon et Genève.
2° Les transports frigorifiques par voies ferrées et
par voies maritimes ; leurs sutures avec les entrepôts
el ports de mer.
3° Aménagement du Rhône entre Lyon et la mer au
triple point de vue de la navigation, des forces
motrices et de l'irrigation. — Le programme nouveau,
élaboré pour transformer le régime de navigabilité du
Rhône, date de 1875 environ; il est presque exclusive-
ment une œuvre de combat contre le réseau des
chemins defer Paris-Lyon-Méditerranée. Le programme
nouveau a reçu un commencement d'exécution par
l’entreprise du canal de jonction de Marseille au
Rhône; ces travaux ont déjà dépassé, en trois années,
de plus de un tiers la somme prévue. La dépense
primitive, évaluée à 74 millions, s'élèvera certaine-
ment de 130 à 440 millions. Comme conclusion, il est
nécessaire d'envisager à brève échéance la reprise des
COSMOS
445
travaux d'amélioration du lit mineur du Rhône,
depuis Lyon jusqu’au Rhône maritime. :
M. Hurren (Nîmes). Aménagement du Rhône au point
de vue de l'irrigation. — L'auteur décrit les ouvrages
d'art prévus par le projet de loi présenté par le gou-
vernement pour la construction du canal dérivé du
Rhône, la prise d'eau étant située à Saint-Gilles et la
force motrice nécessaire fournie par une usine à
établir sur la Durance. M. Hutter demande qu’un vœu
soit formé pour que ce projet soit voté avant la fin de
la législature.
M. J. Evssenic (Carpentras). — Applications récentes
du saute-vent à l'aviation. (Voir Congrès de Reims
1907.) Les expériences ont eu lieu à Villacoublay sur
biplan militaire Wright. L'abri a été très efficace.
L'adaptation de cet appareil aux postes de pilotes de
dirigeables est actuellement à l’étude.
D'autres applications vont être faites sur des biplans
M. Farman, Doutre, Voisin, H. Farman.
M. Cuanzes Goparp (Nancy). La navigation intérieure
de la France. — Développement des transports par
eau à la fin du siècle dernier. Extension de notre
industrie nationale. Rétablissement des voies navi-
gables interrompues après la guerre franco-allemande.
Construction de nouveaux canaux. Transformation
` d'ouvrages d'art permettant à la batellerie d'augmenter
le tonnage de son matériel de transport. Activité tou-
jours croissante de la navigation en France. Tableaux
statistiques du tonnage dans ces dernières années.
Comparaison de ces résultats avec ceux obtenus
dans quelques pays étrangers. Création récente
d’un Office national de la navigation au ministère des
Travaux publics.
M. le Dr Auans (Montpellier). 4° /nfluence de la
forme des carènes sur la stabilité de marche. — Les
modèles qu’a construits M. Amans : ovoïde de révolu-
tion, ovoide ornithique, dytique piscoïde, ont même
longueur d’axe longitudinal, mais différent par leur
contour apparent. Une étude géométrique de ces con-
tours est d’abord faite. Ces modèles placés dans
une rivière homogène, M. Amans étudie : {° les valeurs
de la résistance frontale en fonction de l'incidence;
2 les intorsections de la ligne de poussée avec l’axe
longitudinal; 3° les valeurs de la résistance transver-
sale (dérive), lorsquel’incidence latérale varie de 0° à 90°.
M. Amans a trouvé des différences considérables
pour les courbes de résistance frontale et pour la
stabilité. L’ovoide de révolution:est le moins stable, le
dytique est celui qui a le moins de dérive (allusion
au cas du Vendémiaïire). Ces différences sont en rap-
port évident avec la forme spéciale des carènes. En
multipliant les expériences et en les taisant sur un
grand nombre de modèles, M. Amans pense qu'il
arrivera à mieux préciser l'influence de la forme el,
en particulier, le ròle joué par le contour apparent.
2’ Influence de la torsion sur la valeur de la résis-
tance et la stabilité des aéroplanes. — M. Amans a
déjà appelé l'attention des constructeurs sur les pro-
priétés aérodynamiques de la torsion. Avec un modèle
en bois zooptère, à torsion positive, il a obtenu des
résultats assez bons comme montée, et un rapport
de la trainée à la montée aussi bon que pour les
meilleures ailes ordinaires, et, pour la stabilité, des
résultats meilleurs. Il a aussi fait remarquer que la
416
torsion positive convient plutôt au vol horizontal,
tandis que la torsion négative convient à la descente
en vol plané, tout moteur éteint.
Le mémoire présenté est une étude aérodynamique
de deux ailes tordues, l’une à distum retombant, à
torsion négative; lautre à distum relevé, à torsion
COSMOS
17 OCTOBRE 1912
positive. Les chiffres obtenus confirment les conclu-
sions antérieures de M. Amans sur le rôle de la tor-
sion, tant pour le rendement propulsif et la stabi-
lité de marche que pour le ralentissement de vitesse
et la stabilité de chute.
(A suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
Chimie analytique, par le D° F. P. TREADWELL,
professeur à l'Institut polytechnique de Zurich,
traduit de l'allemand par Eb. DrRrixGeR et
ST. Goscixxy, chimistes. T. IT: Analyse quantita-
tive. In-8° de xvu1-802 pages, avec 135 figures et
une planche colorimétrique (cartonné, 12 fr).
Dunod et Pinat, 47 et 49, quai des Grands-
Augustins, Paris. 1942.
Ce manuel s'adresse à l'étudiant qui désire non
pas seulement apprendre, mais aussi comprendre;
il s'attache à fournir la raison théorique des pro-
cédés, des manœuvres et de tous les détails
‘techniques de l'analyse.
Dans son petit livre : Principes scientifiques de
la chimie analytique, le chimiste W. Ostwald
avait vigoureusement esquissé un projet de réforme
pour restituer l’appui de la théorie à l'analyse
qu'on envisageait comme purement pratique,
c'est-à-dire empirique.
Or, dit M. G. Urbain, professeur de chimie à la
Sorbonne, dans la préface au livre de Treadwell,
« pour concilier dans un ensemble harmonieux
le point de vue théorique indiqué par Ostwald avec
le point de vue pratique que l'on a toujours si
justement attribué à cette branche du savoir, un
livre nouveau était nécessaire. Ce livre devait
être écrit par un savant spécialisé dans les ques-
tions d'analyse, mais possédant en outre une très
haute culture générale. C’est ce livre que j'ai
l'honneur de présenter au public français. Son
auteur, M. Treadwell, qui est un savant universel-
lement apprécié, est professeur de chimie analy-
tique à l'Institut polytechnique de Zurich, qui est
l'un des centres les plus en vue de l'activité
scientifique actuelle. Le livre de M. Treadwell,
dont le succès a été considérable et qui a été déjà
traduit dans la plupart des langues, est par excel-
Jence un livre d'enseignement, mais c’est aussi un
livre d'une haute valeur pratique, dans lequel
l'auteur a su, avec un esprit critique très judi-
cieux, rassembler dans un ensemble cohérent les
meilleures méthodes tant anciennes que nouvelles.
Et, à ce point de vue, ce livre s'adresse aussi aux
spécialistes. Le traité d'analyse de M. Treadwell
est donc une œuvre originale à un double titre. Il
fixera pour de longues années l'élat et les ten-
dances de la science analytique moderne. En en
donnant une très fidèle traduction, MM. Duringer
et Goscinny rendent aux étudiants et aux chimistes
français un très réel service, et j'espère que le livre
de M. Treadwell deviendra classique en France
comme il l’est déjà à l'étranger ».
Ena voici les grandes divisions :
Généralités. — 1. Analyse gravimétrique ou par
pesée : dosage des métaux; dosage des métalloides.
— li. Volumétrie ou analyse par titrage : alcali-
métrie et acidimétrie; méthodes par oxydation et
réduction, analyses par précipitation. — III. Ana-
lyse des gaz.
Conférences sur les alliages, par MM. RENGADE,
Jouisois, BRoNIEwSkI, 36 pages 24 X 16, avec
figures et quatre planches hors texte. Publica-
tion de la Société de chimie-physique (2 fr.).
Librairie A. Hermann et fils, 6, rue de la Nor-
bonne, Paris, 1912.
M. E. Rengade expose comment, au moyen de
deux méthodes physiques, l'analyse thermique et
la métallographie microscopique, on peut déceler
la constilution des alliages et apporter de grandes
précisions sur leur structure. M. P. Jolibois montre
qu'il y a intérêt à ne pas négliger la méthode
plus ancienne, la méfhode chimique.
Les trois méthodes précédentes peuvent ètre
avantageusement complétées, comme le montre
M. W. Broniewski, moyennant la connaissance
des relations qui existent entre la structure des
alliages et leurs propriétés électriques; il envi-
sage cinq de ces propriétés : la résistance élec-
trique, le coefficient de température de cette résis-
tance, le pouvoir thermo-électrique, la variation
de ce pouvoir, enfin la force électromotrice de
dissolution.
Contre la métaphysique. Questions de méthode,
par Félix Le Daxrtec, chargé du cours de biologie
générale à la Sorbonne. Un vol. in-8° de 256 pages,
3,75 fr. (Bibliothèque de philosophie contem-
poraiñe). Librairie Félix Alcan, 108, boulevard
Saint-Germain, Paris.
Pour M. Le Dantec, le philosophe est un artiste,
un visionnaire : il ne saurait être un savant; il ne
fait pas nécessairement table rase du passé ni du
sentiment; il ne peut dès lors être un homme de
progrès ni une intelligence impartiale et métho-
dique. D'où l'opposition de la science et de la phi-
N° 1447
losophie, surtout de la philosophie qui vise à la
métaphysique. C’est ainsi qu’un Pasteur, un Claude
Bernard, un Darwin lui-même n’ont pas été, aux
yeux de M. Le Dantec, de vrais savants : les
malheureux, ils n’ont pas su dépouiller « la gangue
humaine qui entourait cet or pur » de leurs gran-
. dioses découvertes (p. 204).
Il va de soi que M. Le Dantec profite aussi de
ses attaques contre la métaphysique pour renou-
yeler les déclarations d’athéisme développées dans
un autre livre (p. 60).
ll n’y a pas lieu de discuter les affirmations ou
négations contenues dans l'ouvrage présent et dont
nous rappelons les principales. Mais ne peut-on
poser à l’auteur cette simple question : puisque le
sentiment est un fait, pourquoi ne point en tenir
compte comme des autres phénomènes internes
ou externes?
La télégraphie sans fil, la télémécanique et la
téléphonie sans fil à la portée de tout le
monde, par E. MoxiEr, ingénieur. Préface du
Dr E. Braxzy, membre de l'Institut. 6° édition,
revue et augmentée. Un vol. 149X142 de vi1-226 pages
avec figures (2,50 fr.). Dunodet Pinat. Paris. 1912.
L'édition nouvelle est enrichie d’additions im-
portantes.
D'abord une note sur les émissions musicales,
à note assez aiguë, grâce auxquelles les signaux
perçus dans l’écouteur téléphonique se distinguent
des bruits parasites : les émissions musicales per-
mettent seules la radiotélégraphie dans les pays
tropicaux, où les perturbations des ondes parasites
sont très fréquentes.
Un chapitre est consacré à la station de Ja tour
Eiffel. :
Mention est faite des applications spéciales de la
radiotélégraphie à la navigation : radiogonio-
mètre, phares hertziens, ainsi que des autres essais
pour la direction des ondes électriques.
Puits, sondages et sources, par M. RiNGELMANX,
professeur de génie rural à l’Institut national
agronomique. Un vol. in-18 de 300 pages avec
gravures (3,50 fr). Librairie agricole de la Mai-
son rustique, 20, rue Jacob, Paris.
L'eau, matière de première importance dans la
vie végétale et animale, est absolument indispen-
sable à toute exploitation agricole qui doit avoir
à sa disposition la quantité nécessaire à lalimen-
tation du bétail et à l'entretien des cultures.
L'ouvrage de M. Ringelmann a pour but d'indi-
quer les moyens de se procurer l’eau nécessaire en
tirant parti des ressources que la nature met
à notre disposition. . |
La pluie fournit à la terre l’eau qu’on y retrouve.
Une partie de cette eau s’évapore plus ou moins
rapidement, une autre partie ruisselle pour former
COSMOS
447
les rivières, une autre enfin pénètre dans le sol
pour former les nappes souterraines, L'étude de la
formation et de l'écoulement de ces nappes a été
poursuivie par M. Ringelmann avec le plus grand
soin, car elles forment les réservoirs dans lesquels
le cultivateur doit trouver -les ressources qui lui
sont nécessaires. C’est par les puits, les sondages,
la captation des sources qu'on tire parti de ces
nappes. Aussi M. Ringelmann expose, avec tous
les détails, la construction et l'entretien des puits
ordinaires, des puits artésiens, des puits forés.
L'étude des sources et de leur captation termine
le volume. Toutes les parties sont accompagnées
de gravures précises, le plus souvent dessinées par
Pauteur, qui complètent ses explications.
Ce livre excellent, rédigé avec l’habituelle clarté
de l'auteur, est appelé à rendre de grands services
aux propriétaires d'exploitations rurales.
La vie et la mort du globe, par M. A. BERGET,
professeur à l’Institut océanographique. Un vol.
de la Bibliothèque de philosophie scientifique,
de 326 pages (3 fr. 50). Flammarion, éditeur,
26, rue Racine.
La vie et la mort du globe; c'est une double
question qui nous touche de près, et ne peut que
nous intéresser puissamment. La façon et la clarté
avec lesquelles M. Berget la traite est de nature à
satisfaire le lecteur, qui trouvera dans ce livre des
exposés très nets de l’état actuel des connaissances
humaines sur ce sujet. Faut-il avouer pourtant
que nous avons éprouvé une déception? Dans une
bibliothèque de philosophiescientifique, la recherche
des causes, et des causes premières, parait devoir
être abordée : M. Berget se contente de signaler
le problème, à l'occasion de l'apparition de la vie
sur notre globe, sans oser l’aborder (p. 35). C'est
demeurer incomplet et infidèle au titre de l'ouvrage.
La Solidarité, par Léon Bourgeois, 7° édition,
revue et augmentée. Un vol. in-18 de 296 pages,
3,50 fr. Librairie Armand Colin, 5, rue de
Mézières, Paris.
Le livre et les doctrines de M. Bourgeois sont de
notoriété publique; ils sont, de l’aveu de M. Bou-
troux, « l'affirmation et comme le spécimen d'une
morale purement laïque ». Cette nouvelle édition
n'apporte point de théorie nouvelle, mais une série
d’études y ont été jointes au fond primilif et lui
servent de développements. Ainsi, M. Bourgeois a
étudié les rapports de la solidarité avec les idées
de justice et de liberté. dans ses discours au Con-
grès d'éducation sociale de 1100. À l'Ecole des
hautes études sociales, en 1901, il a montré les
conséquences sociales et les applications pratiques
de la solidarité. Entin, il en a précise les limites
en 1909, au Congrès de l'Institut international de
sociologie.
148
COSMOS
17 OCTOBRE 1942
PETITE CORRESPONDANCE
Erratum. — Une erreur typographique s'est
glissée dans la note publiée dans le numéro 1415
(3 octobre) à l'occasion de la perte que nous avons
faite dans la personne du regretté Petithenry.
On a imprimé qu'il était le gérant du Cosmos
depuis 1908; il fallait écrire : depuis 1888. Un
dévouement non démenti de vingt-quatre années
est plus méritoire qu'une persévérance de quatre
ans, surtout quand ces vingt-quatre années ont
vu les épreuves qui ont frappe la Maison où le
Cosmos a l'honneur de tenir une place modeste,
mais appréciée.
Adresses :
T. S. F. — Électrodes à la Wollaston pour détec-
teurs électrolytiques : Ducretet et Roger, 75, rue Claude-
Bernard, Paris (7 fr), ou grand bazar de l’Hôtel-de-
Ville (5.75 fr). — Fil de platine de 2 centièmes de mil-
limètre . Compagnie française des métaux (service du
platine), 239, rue Saint-Martin, Paris (1,50 fr le mètre).
Jouets décrits dans ce numéro: Pierrot regardant
l'éclipse, le Père Lapin: M. Gasselin, 82, rue Victor-
Hugo, à Puteaux. L'oiseau de France: M. Hurn,
44, rue Jean-Jacques-Rousseau, à Paris. L'aéro-purele :
M. Mignot, 153, rue Saint-Jacques, à Paris. Moteur à
air comprimé : M. Comby, 1$#, rue Monsieur-le-Prince,
à Paris.
M. P. P.. à P. — Vous trouverez dans ce numéro
tout ce qui vous est utile pour établir un poste réeep-
teur de T.S. F. — La cheminée d'usine peut servir
de porte-antenne : vous y attacherez un fil métallique,
de cuivre de préférence, isolé aux deux extrémités. Le
paratonnerre nè peut servir d'antenne, puisqu'il est
encontactavec la terre, mais il peut servir comme prise
de terre. D'ailleurs, dans quinze jours, un autre article
donnera les détails pour l'établissement des antennes.
M. P., au M. — Il existe, en effet, des dispositifs qui
permettent l'inscription des télégrammes sans fil,
wais ce ne sont que des appareils de laboratoire, et
encore pas très au point. Quand la transmission est
rapide, il arrive souvent que les signes Morse sont
mal transcrits. Pour plus de renseignements sur ce
point, vous pouvez vous adresser à la maison Ducretet
et Roger. 75, rue Claude-Bernard, ou chez Ancel,
9t, boulevard Pereire, qui pourront vous fournir le
relais et les appareils nécessaires. — Vous pouvez
essayer le cohéreur à aiguilles, mais nous doutons
que vous obteniez un bon résultat. — Une longue
antenne est toujours préférable; il faut environ
60 mètres à votre distance.
T. C. F. V., àL. (Canada). — Cette librairie n'existe
plus: il est probable que les ouvrages indiqués ne pour-
raient se trouver que d'occasion. — Nous sommes in-
compétents pour cette seconde question. — 3° et + Pour
cet objectif, il faudrait pouvoir consulter des ouvrages
très vastes et d'un prix élevé: BENrTHAM et Hooken,
Genera plantarum; De C\NnboLLE, Prodromus System.
natur. regni regetabilis, et ses suppléments ; SCHIMPER,
Synopsis Muscarum,; Henwie, Species Muscarum. S'il
ne s'agit que de rapporter les genres à leurs familles,
vous trouveriez bon nombre d'indications utiles dans
LınpLey et Moore, The treasury of Botany, Londres,
1870, Longmans, Green and C° (à chercher d'occasion
chez les revendeurs). — 5° On attribue le changement
de couleur des feuilles à l'automne à une oxygénation
de la chlorophylle par cessation de la fonction chloro-
phyllienne.
M. L., à P. — Voici comment vous pouvez con-
struire ce potentiomètre. Reliez les deux bornes d’une
pile constante (de 3 volts, par exemple) aux deux
extrémités À et B d’une résistance ohmique assez
élevée : cette résistance peut ètre constituée par un
fil de méta! fin, qui n’a pas besoin d'être un bon con-
ducteur; pratiquement, cette résistance, au lieu d’être
rectiligne, est enroulée sur un cylindre en matière
isolante; un contact glissant C se déplace le long
d'une génératrice du cylindre. Entre A et C, suivant
la position du contact, on peut produire la différence
de potentiel désirée, depuis 0 jusqu’à environ 3 volts.
M. A. F., à M. — La température exacte de l'air se
prend à l'ombre avec un thermomètre-fronde, ther-
momètre relié à une ficelle qu'on fait rapidement
tourner. Au soleil, les thermomètres marquent des
températures variables qui dépendent de la construc-
tion de l'instrument. En tous cas, le thermomètre
placé à l’ombre donne une température plus exacte
que celui placé au soleil.
M. P. H., à Q. — Le cérium et lethorium métalliques
s'’obtiennent bien par électrolyse de leurs chlorures
fondus; on les prépare aussi par des réactions pure-
ment chimiques, qu'il n’est pas possible d'indiquer
ici. Consultez le Dictionnaire de chimie pure et appli-
quée, de Wurtz (librairie Hachette, Paris), aux mots :
Cérium, Thorium et Terres rares.
N° 313 E. — Vous trouverez de la bauxite en petite
quantité chez les marchænds de produits chimiques,
par exemple, à la Société centrale de produits chi-
miques, 44, rue des Écoles, Paris (environ 1,95 fr le
kilogramme). — Débarrasser les chiens de leurs puces
n'est pas chose facile; les lavages aux savons divers
et les insecticides variés n’ont qu’ene durée éphé:
mère. On peut essayer de les envelopper dans une
couverture ayant servi à un cheval; les puces sont
mises en fuite. Le Cosmos a aussi signalé le procédé
par le vide (n° 1339, 24 sept. 1910). Ajoutons que nous
ne l'avons pas essayé.
M. À. P., à P. — Les résidus provenant de la fabri-
cation de l'’acétylène sont de l'oxyde de calcium
hydraté, et, par suite, sont susceptibles de recevoir
toutes les applications de la chaux ordinaire. Pour
faire du mortier, il suffit de mélenger cette chaux
provenant du carbure de calcium avec du sable fin.
La proportion de chaux est la mème que pour le
mortier ordinaire. Pour faire durcir plus vite le ciment
ainsi obtenu, vous pouvez y ajouter de la chaux
hydraulique. Les résidus du carbure de calcium
peuvent aussi servir pour le blanchiment des murs
(étables, etc.), pour le chaulage des arbres, comme
engrais de culture, etc.
Imprimerie P. Psnon-Yaau. 8 ot §, ruo Bayard, Paris, VILU’.
| Le pórani A. Faoz.
No 1448 — 2% ocroBre 1919
COSMOS
449
SOMMAIRE .
Tour du Monde. — L’absorption sélective de la lumière à la surface de la Lune. Conférence internationale
de l'heure. Les chutes d'eau constructrices. Le service sismologique en Grèce, dans les Balkans et dans
l'empire ottoman. La future carte météorologique biquetidienne de l'Eurasie. Le dactylophone, appareil
pour se faire comprendre des sourds. Le prix Nobel pour la médecine. La T.S.F. en aéroplane aux manœuvres
militaires. La T. S. F. au service des expéditions polaires. Appareil de sécurité contre les déchirures du
tuyautage de vapeur. Après le cinquantenaire du moteur à gaz. Nouveaux obus, p. #49.
Nouvelles machines à merceriser, Rousset, p. 454. — Un cinématographe à main, Bovka, p. 456. —
Télégraphie sans fil : réception des signaux et télégrammes, D'P. Corner, p. 458. — Sous-marins
allemands et norvégiens, Beccer, p. 461. — L’appauvrissement des forêts, DE Kirwan, p. 465. —
Les dangers d’un chauffage défectueux, Lanacue, p. 466. — L’utilité et la nocivité des araignées,
ACLOQUE, p. 468. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 471. Association française pour l’avan-
cement des sciences (suite), HénicaarD, p. 472. — Bibliographie, p. #74.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
L’absorption sélective de la lumière à la
surface de la Lune. — Nous avons déjà parlé des
premières recherches effectuées par l’astronome
américain R. W. Wood, sur l'absorption sélective
de la lumière à la surface de la Lune, et qui le con-
duisirent notamment à la découverte, prèsdu cratère
Aristarque, d’une tache qui se distinguait par lab-
sence de radiations ultra-violettes. Ces recherches
avaient été effectuées à l’aide de moyens optiques
assez rudimentaires : une lentille de quartz argentée
de 3 pouces seulement (76 mm) de diamètre.
M. Wood a repris récemment ces expériences
dans des conditions plus favorables, à l’aide d'un
miroir métallique de 42 pouces (305 mm) de dia-
mètre, recouvert d’une mince couche de nickel pur
afin de mieux réfléchir les radiations ultra-violettes.
Saas l'interposition d'aucun filtre sélecteur, ce mi-
roir donnait une image violette de la Lune; avec
un filtre orange foncé, il fournissait une image
jaune ; enfin, avec un filtre composé d’une lame ar-
gentée de verre « uviol », on obtenait une image
ultra-violette, qui devait évidemment être enregis-
trée par la méthode photographique.
La comparaison des images obtenues avec les
trois filtres a confirmé entièrement les résultats
auxquels était arrivé M. Wood dans ses premiers
essais, et y a ajouté des conclusions nouvelles.
C’est ainsi que l’astronome américain dé‘ouvrit
encore dans plusieurs des « mers » de notre satellite
des laches qui absorbaient sélectivement la lumière
et se montraient noires en lumière ultra-violette,
étaient à peine visibles dans le violet et paraissaient
brillantes dans le jaune.
Partant de l'hypothèse que ces taches, de même
que celle découverte près d’Aristarque, pourraient
être dues à un dépôt volcanique, M. Wood a effec-
T. LXVII No 1448.
tué des expériences comparatives avec des tufs d’ori-
gine plutonienne terrestre.
il a fini par trouver un de ces tufs qui apparaissait
obscur en lumière ultra-violette et montra à l'ana-
lyse du fer et des traces de soufre. Des photogra-
phies de roches portant des taches dues à des dépôts
ferreux montrèrent que ces taches disparaissaient
en lumière violette et ultra-violette, par contre, des
photographies similaires de plaques de tuf portant
des dépôts sulfureux reproduisirent l'apparition des
taches foncées en lumière ultra-violette et des
taches claires en lumière jaune.
I serait peut-être prématuré de déduire de ces
expériences que lestacheslanairesquin’apparaissent
qu’en lumière ultra-violettesont dues à des dépôtsde
soufre. En tout cas, les recherches de M. Wood,
lorsqu'elles auront recu tout leur développement et
auront, notamment, été étendues à toutes lesrégions
du spectre, fourniront sans doute des indications
intéressantes sur la nature géologique de la surface
lunaire.
Conférence internationale de l’houre. —
Cette Conférence, annoncée depuis quelques mois,
a ouvert ses séances le 15 octobre, à l'Observatoire
de Paris. L’inauguration de cette réunion a été faite
par le ministre de l'Instruction publique, et M. Bi-
gourdan, membre de l'Institut et du Bureau des
longiltudes, en a été élu président; l'assemblee
s’est divisée en un certain nombre de Commissions
ayant chacune à étudier une partie du programme.
L'objetprincipal cie la réunion était de déterminer
les règles de la télégraphie sans til dans l'avenir,
en ce qui concerne l'envoi de l'heure pour les dif-
férents besoins de l'astronomie, de la marine
et ceux des particuliers ; très naturellement,
ces signaux horaires doivent avoir une précision
plus ou moins grande, suivant ceux auxquels on
A50
s'adresse. La Conférence a eu aussi à étudier les
nombreux appareils pour la réception de l'heure,
pour sa conservation, etc., etc.
Voici, au surplus, les différentes questions sou-
mises aux études de la Conférence :
I. Détermination astronomique de l'heure ou de
la correction d'un garde-temps:
Méthode des passages. Méthode des hauteurs.
Enregistrements divers.
Emploi de la méthode « de l’œil et de l'oreille ».
Causes d’erreurs dans les divers cas et moyens
de les réduire. Précision aujourd'hui atteinte. Pré-
cision à rechercher.
H. Conservation de l'heure :
Modèles divers de pendules et de chronomètres.
Leur comparaison dans le même observatoire.
Détermination de la correction la plus probable
de la pendule directrice.
HI. Transmissionradiotélégraphique de l'heure:
Méthode à employer suivant le degré de préci-
sion désiré.
Envoi direct de l'heure d'un garde-temps.
Envoi indirect de l’heure par l’intermédiaire de
signaux rythmés permettant d’appliquer la mé-
thode des coïncidences.
IV. Collaboration de divers centres astrono-
miques pour assurer au mieux la connaissance
de l'heure :
Choix des centres.
V. Appareils radiotelégraphiques & employer
pour l'émission et la réception des signaux
horaires :
Modèles divers. Leur mise en œuvre. Portées.
VI. Degré de précision que doivent atteindre
les signaux horaires pour les diverses applica-
dions :
Astronomie et géodésie. Navigation.
Météorologie. Sismographie et applications scien-
tifiques diverses. Chemins de fer. Administrations
publiques, horlogers et particuliers.
VII, Étude de l'organisation générale à prévoir
tant pour la transmission que pour la réception
des signaux horaires, de manière à satisfaire
à tous les besoins.
PHYSIQUE DU GLOBE
Les chutes d’eau constructrices (J. ASSADA,
la Géographie, 15 octobre). — On a l'habitude de
considérer les chutes d'eau comme des agents
d’érosion et de ne voir que leur travail d'approfon-
dissement des vallées. Elles peuvent, sous l'effet
de certaines conditions, devenir des agents con-
slructeurs et contribuer au remblayage d'une vallée.
Cette apparente contradiction ne se trouve géné-
ralement que dans les régions karstiques, c'est-à-
dire les régions calcaires où les eaux, agrandissant
les fissures primitives de la roche, ont peu à peu
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
creusé de vastes entonnoirs circulaires, dont le
fond est constitué par une argile rouge, produit de
décalcification du calcaire. M. J. W Gregory s’est
plu à la souligner par divers exemples tirés de
Dalmatie, Bosnie et Herzégovine.
Les chutes de la Kerka en Dalmatie sont un
cas bien typique. Elles sont dues à une barre de
tuf calcaire que la rivière a construite elle-même
en travers de la vallée. La barre a 40 mètres de
haut et décompose le lit de la Kerka en une série
de chenaux, où se succèdent les cascatelles. En
amont de la chute, la rivière traverse deux lacs,
eux aussi formés par un barrage de tuf. Comme
la barre calcaire croit sans cesse, la retenue d’eau
augmente du même fait et les lacs voient leur su-
perficie s’accroitre.
Deux autres illustrations de ce phénomène se
trouvent en Bosnie-Herzégovine. Les chutes de To-
polie, sur la haute Kerda, ont près de 25 mètres de
hauteur, en dessous de la barre édifiée par les
eaux. Comme le seuil de tuf avance sans cesse,
l'ancien cañon amont est en train de se combler.
Bientôt la Kerda débouchera dans le bassin du
Knin par une vallée suspendue. Enfin les fameuses
chutes de Jajce, l’ancienne capitale de la Bosnie,
sont dues à la Pliva qui se précipite par-dessus une
barre de tuf de 25 mètres d'épaisseur dans l'Urbas.
Par des vestiges préhistoriques, on a pu se rendre
compte que depuis l’époque néolithique il s'était
déposé 18 mètres de tuf environ.
De cette constatation, on a déduit divers para-
doxes : les chutes d’eau peuvent avancer, au lieu
de reculer; former des plaines alluviales, au lieu
de les détruire; créer des lacs, au lieu de les drai-
ner. Ces paradoxes d'ailleurs n’ont qu’un intérêt
scientifique, le phénomène se produisant toujours
sur un espace infime.
Le service sismologique en Grèce dans les
Balkans et dans l’Empire ottoman. — La Grèce,
les Balkans et la Turquie sont remués par de graves
secousses politiques et... sismiques. Le sismologue
italien G. Agamennone regrette à bon droit que
rien de sérieux ne soit fait en Turquie pour l'étude
des tremblements de terre, qui y sont si fréquents
et si graves. (Rivista di Astronomia e Sciense
affini, juin.)
Au début de 1895, M. G. Agamennone fut chargé
par le gouvernement otloman d'installer en Tur-
quie un service sismologique et de publier dans un
bulletin les tremblements de terre observés en
Turquie et également dans les pays voisins, spé-
cialement la Grèce et la Bulgarie. Mais lorsque,
deux ans après, il rentra en Italie, le Bulletin sis-
mologique ainsi que le Bulletin météorologique,
qui lui était antérieur, ne tardèrent pas à tomber.
Heureusement, une louable émulation porta les
petits pays limitrophes de la Turquie, qui se sont
libérés de son joug à des époques diverses, à fonder
N° 1418
un service sismologique, généralement soudé au
service météorologique. En janvier 1896, ce fut
l'Observatoire d'Athènes qui commença la publi-
cation mensuelle des sismes observés en Grèce.
Vint ensuite le tour de la Bulgarie, où le professeur
Watzof, directeur de l’Institut météorologique de
Sofia, entreprit en 1902 de publier le relevé des
secousses ressenlies en Bulgarie au xix° siècle, etc. ;
puis, au début de 1905, il installa à Sofia une
paire de pendules horizontaux Bosch, qui ont déjà
enregistré 124 secousses en 1905 (25 avril-31 dé-
cembre), 74 en 1906, 86 en 1907, 83 en 1908,
108 en 1909.
La Bosnie et l’Herzégovine publient le relevé des
tremblements de terre depuis 1904; un microsis-
mographe Vicentini fonctionne depuis 1905 à Sara-
jevo; en outre, le professeur Mikaïilovich a publié
une intéressante monographie des sismes serbes
de 1901 à 1906 et a développé le service sismolo-
gique déjà existant.
Enfin la Roumanie, grâce à M. Hepites, a orga-
nisé dès 1890 la publicalion des sismes observés
depuis 1832; une paire de pendules Bosch à Buca-
rest enregistre les secousses.
Et la Turquie, qui avait déclanché ce mouvement
de progrès, est retombée dans l'inaction complète
et lindiférence vis-à-vis des études sismologiques;
la Macédoine et les iles turques de l'Archipel et
l'Asie Mineure continuent de subir périodiquement
des tremblements de terre graves et même désas-
treux sans que rien de sérieux soit fait pour étudier
ces phénomènes; l’Empire ottoman veut rester en
dehors de l'Association internationale de sismologie
créée depuis une dizaine d'années.
MÉTÉOROLOGIE
La future carte météorologique biquoti-
dienne de l’Eurasie. — La prévision scientifique
du temps repose sur l'examen de la carte météoro-
logique où l’on a tracé la distribution actuelle des
pressions barométriques, de la température, des
nuages, des vents : tous renseignements communi-
qués à un bureau central par les stations météoro-
logiques au moyen du télégraphe. Il importe que
les observations communiquées aient été, autant
que possible, recueillies simultanément, et que les
stations d'observation soient réparties sur une
importante portion du globe terrestre.
Pour satisfaire à ces conditions, le général Rykat-
chev, directeur du service météorologique russe,
vient de proposer à ses collègues météorologistes
des autres pays européens et asiatiques un vaste
plan qui serait inauguré en 1915 et qui comporte-
rait un système d'observations strictement simul-
tanées, deux fois par jour, en des stations réparties
sur tout le continent de l'Eurasie, y compris l'Is-
lande et le Japon.
COSMOS
451
Dès maintenant, pour l’Europe, le service d’ob-
servation pourrait à peu près fonclionner dans les
conditions voulues; mais en Sibérie, dans l'Inde,
en Chine et au Japon, les observations se font à
des moments différents suivant les stalions, et, en
outre, les observations ne sont pas généralement
communiqués par télégraphe.
Les deux instants choisis, dans le nouveau sys-
tème, pour faire le relevé simultané des éléments
météorologiques, seraient 7 heures du matin et
7 heures du soir, heure du méridien de Greenwich.
La carte météorologique de lEurasie couvrirait,
en longitude, plus de la moitié du globe. Celle du
malin paraitrait dans les journaux du soir, et la
carte du soir dans les journaux du matin.
SCIENCES MÉDICALES
Le dactylophone, appareil pour se faire
comprendre des sourds. — Quand une personne
ne peut se faire entendre distinctement d’un sourd
ou d’un dur d'oreille, si elle ignore la mimique,
la dactylologie (méthode des signes faits avec la
main), si le sourd de son côté les ignore; si ce
dernier ne sait pas ou ne peut pas lire sur les
lèvres qui lui parlent, il ne reste à cette personne
qu’un seul moyen de communiquer avec son inter-
locuteur infirme : l'écriture.
Or, à connaitre la dactylologie, la mimique, on
ne rencontre guère que les sourds élevés dans les
élablissements de sourds-muets (sourds de nais-
sance ou de première enfance) et leur entourage
immédiat.
Quant à la faculté de lire sur les lèvres, même
parfaitement acquise, elle est loin de toujours se
prèler à la véritable conversation, quand elle n'est
pas d'utilisation à peu près impossible pour ses
fidèles, tant il y a de personnes chez lesquelles on
ne distingue pas suffisamment les mouvements des
lèvres, la position et les déplacements de la langue.
Il en résulte que les sourds et les personnes
dures d'oreilles vivent forcément dans un isole-
ment qui est très pénible.
Cette situalion a ému M. le D" M.-A. Legrand,
un spécialisle des questions qui se rapportent à
l'ouïe, et auquel nous avons emprunté les lignes
qui précèdent. Il a imaginé, pour rendre toute
communication facile avec les sourds, un appa-
reil auquel il donne le nom de dactvlophone
(étymologie que nous ne voulons pas discuter ici)
qui permet de leur transmettre rapidement ce
que Pon veut dire, et qui permet aussi aux muets
d'exprimer leurs peusée sous une forme que tous
peuvent comprendre.
C’est une sorte de machine à écrire, avec clavier,
mais qui, au lieu d'imprimer les caractères, les
fait paraitre dans l'ordre voulu à la vue de lin-
terlocuteur; ces caractères, de grand format, en
452
impression grasse, sont très visibles, même à plu-
sieurs]mètres de distance. L'appareil montre ainsi
successivement les syllabes, voire les mots entiers,
en une succession rapide.
L'usage de la machine est des plus simples et en
quelques heures on devient expert dans son ma-
niement. Flle sera singulièrement appréciée dans
tous les milieux, et ils sont nombreux, où on a
affaire à des personnes atteintes de surdité plus
ou moins avancée (1).
Le prix Nobel pour la médecine. — Le prix
pour 1912 a été attribué au D' Alexis Carrel, chi-
rurgien français, que les tracasseries administra-
tives ont forcé à s’exiler et qui, aujourd'hui, occupe
une haute situation à l’Institut Rockefeller de New-
York pour les recherches médicales. Les travaux
du D" Carrel, qui ont eu un grand retentissement,
ont pour objet principal les sutures des vaisseaux
sanguinset la transplantation des organes vivants.
Le prix est cette année de 195000 francs.
RADIOTÉLÉGRAPHIE
La T. S. F. en aéroplane aux manœuvres
militaires. — La T. S. F., aux dernières ma-
nœuvres, a complété le service d'éclaireurs joué
par les aéroplanes; le succès de notre cinquième
arme est très justement souligné par l’Zndustrie
électrique (10 octobre).
Un biplan Maurice Farman de l’escadrille 2 était
muni d'un appareil de transmission et une petite
station volante de réception suivait le convoi des
tracteurs de l’escadrille et était installée chaque
fois près des terrains d'atterrissage.
Pendant les reconnaissances effectuées par le
biplan, la communication avec la petite station
était établie d’une façon permanente, de sorte que
l'on était renseigné à tout instant sur la situation
et sur les évolutions de l'avion.
Nous citerons une des plus belles reconnais-
sances effectuées. Partis de Mirebeau le 16, les
aviateurs se dirigèrent vers l’ennemi et relevèrent
toutes les positions dans la contrée, entre Courcoué,
Sainte-Maure, Sepmes et Dangé. Les renseigne-
ments furent transmis au fur et à mesure à l'état-
major, de sorte que ceux-ci parvenaient immédia-
tement à destination. Si l’on songe que cette
reconnaissance a été de deux heures, les premiers
renseignements envoyés par l'avion en arrivant
sur les lignes ennemies sont donc parvenus une
heure trois quarts avant le retour des aviateurs,
c'est-à-dire une heure trois quarts plus tôt que par
reconnaissance sans l'emploi de T. S. F.
C'est gràce au transmetteur à émissions musi-
(1) Les personnes qui ont intérêt à approfondir la
question peuvent demander lartiele complet du
D' Lcgrand à la revue lOuie, 2, rue des Volontaires,
à Paris, qui l'envoie gracieusement sur demande.
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
cales, système Rouzet, que de tels résultats ont été
obtenus. (Voir la description dans le Cosmos,
n° 4430, t. LXVI, p. 676.)
M. Rouzet, qui accomplissait une période volon-
taire pendant ces manœuvres, afin d'assurer la
bonne marche de ces premiers essais, a observé un
fonctionnement parfait aux différentes hauteurs,
Lorsque l’avion évoluait entre 500 et 1 600 mètres
de hauteur, la communication était excellente. Le
brouillard ou les nuages souvent interposés entre
l'avion et le poste récepteur ne gènaient en rien la
communication.
Ajoutons que l'appareil est d'une conduite facile.
Un sapeur du génie, ayant fait un stage de deux
mois seulement au bataillon de télégraphistes et
n'étant jamais monté en aéroplane, a exécuté par-
faitement la manœuvre lors de sa première envo-
lée, transmettant ses impressions et les observa-
tions par T, S. F. à une vitesse de manipulation de
900 mots par heure.
En songeant que le dispositif est complété par
l'avantage de pouvoir être isolé des autres stations
de T. S. F. (pendant les manœuvres, les autres sta-
tions de T. S. F. de l’armée n’ont nullement trou-
blé les communications de l'avion) et que plusieurs
avions peuvent ètre reliċs à des postes récepteurs
sans que les communications se troublent, on con-
çoit les nombreux services que l’on peut attendre
de l’application de la T. S. F, aux aéroplanes.
La télégraphie sans fil au service des expé-
ditions polaires. — L'expédition Amundsen au
pôle Nord, qui doit partir en 1913, aura à bord de
son navire, le Fram, une installation radiotélégra-
phique fournie gratuitement par la Compagnie
allemande Telefunken.
Le Fram pourra communiquer particulièrement
avec la station radiotélégraphique terrestre du
Spitzberg, distante du pôle de 4 650 kilomètres, et
dont la portée est évaluée à 4 000 kilomètres le
jour et à 2 000 kilomètres la nuit, en sorte que le
bâtiment portant les explorateurs recevra sûrement
des informations régulièrement durant la longue
nuit polaire, et peut-être aussi, quoique irréguliè-
rement, aux autres époques.
Il n’est pas sûr que le Fram puisse aussi bien
envoyer à destination des télégrammes : le fait
dépendra de sa distance au Spitzberg, de la puis-
sance de son poste et de l’antenne qu'on pourra
loger à bord. Cependant, comme les explorateurs
doivent demeurer absents durant cinq ou six ans, il
y a bien des chances pour que de temps à autre les
conditions leur soient favorables et qu'ils puissent
transmettre leurs dépèches jusqu’au Spitzberg.
ART DE L'’'INGÉNIEUR
Appareil de sécurité contre les déchirures
du tuyautage de vapeur. — On n'ignore pas les
No 1418
cruels accidents qui se sont produils à différentes
reprises dans les machineries et dans les chambres
de chauffe, par l’éclatement des tuyaux de conduite
de la vapeur.
M. Boudouin, mécanicien de la marine mar-
chande, bien placé pour connaitre lės risques de
telles éventualités, a imaginé un système pour
remédier au mal, système automatique, bien pré-
férable à tous ceux basés sur une manaœuvre à la
main, manœuvre qui ne se fait pas ou qui arrive
toujours trop tard.
Nous n’entreprendrons pas de décrire en détail
le système de M. Boudouin, dans lequel d’ingénieuses
dispositions parent à toutes les éventualités; nous
en dirons seulement le principe :
Sur la conduite principale de vapeur est inter-
posée une bolte en fonte comportant une soupape
entre le tuyau d'arrivée de la vapeur de la chau-
dière et celui qui la conduit aux machines. Cette
soupape est commandée par un piston qui, en
marche normale, la conserve entièrement ouverte.
Mais ce piston reçoit la pression de la vapeur, non
seulement sur sa face inférieure faisant partie de
la conduite, mais aussi par un tuyau auxiliaire sur
sa face supérieure. Dans ces conditions, si une
rupture de la conduite du tuyautage se produit au
delà de cet organe, il y a dépression plus ou moins
` brusque et plus ou moins importante dans la boite
en fonte; aussitòt la vapeur au-dessus du piston
agit pour la faire descendre et, par suite, ferme
la soupape à laquelle il est relié. Inutile d'ajouter
que si tel est le principe de l'inventeur, l’applica-
tion en est singulièrement moins simple ; il a fallu
imaginer une foule d'organes pour en rendre le
fonctionnement sûr et rapide.
Quoique l'appareil mait été imaginé qu'en vue
des déchirures du tuyautage, il n’est cependant
pas moins vrai que, si une partie de chaudière
venait à éclater, la dépression produite, de ce
fait, dans le collecteur amènerait la fermeture
des appareils de toutes les chaudières en com-
munication avec ledit collecteur, et empêcherait
ainsi la vidange de ces dernières dans celle avariée.
Il est à souhaiter que ce système, peu coûteux,
en somme, soit appliqué, non seulement dans les
navires, pour lesquels il a été imaginé, mais dans
toutes les usines où l’on emploie la vapeur sous
pression.
Après le cinquantenaire du moteur à gaz.
— On a inauguré une plaque commémorative à la
maison natale de Etienne Lenoir, l’inventeur du
moteur à gaz et à pétrole, né à Mussy-la-Ville,
petite commune du Luxembourg.
Parti pour Paris à l’âge de seize ans, Etienne
Lenoir, d'abord ouvrier émailleur, inventa un
nouvel émail blanc; puis, coup sur coup, un pro-
cédé de galvanoplastie, le compteur d'eau, un
mode d’étamage des glaces, des améliorations
COSMOS
453
dans le tannage des cuirs, divers signaux et freins
pour les chemins de fer. La Sociélé d’encourage-
ment et l'Institut de France lui décernèrent des
récompenses. Mais son œuvre la plus importante,
ce fut sa « machine à air dilaté par la combustion
du gaz », c’est-à-dire le moteur à gaz. Lenoir le
trouva en 1859, prit un brevet l’année suivante et,
en 1863, parvint à substituer au gaz, quand on le
voulait, le pétrole et la benzine.
Et il imagina même une automobile, embryon
des voitures actuelles. Il mourut en 1900.
ART MILITAIRE
Nouveaux obus. — [ans le dernier numéro
(p. 424), on relatait les premières expériences
faites à Cherbourg avec les nouveaux obus à écla-
tement retardé. Elles se sont continuées, et les
résultats oblenus sont tels qu'ils font prévoir, à
quelques marins, un changement radical dans les
flottes militaires.
Voici comment le correspondant du Yacht rend
compte de ces dernières expériences :
«Les tirs sur le Veptune ont continué le 2 octobre.
On tirait avec une pièce de 24 centimètres du fort
de Caplain, situé dans l'est de la rade, et, cette
fois, sur la cuirasse de ceinture, à bâbord milieu
et à la flottaison.
» Le premier projectile tiré fut aussi le dernier;
on vit s'élever une haute colonne d’eau à l'endroit
où il avait éclaté, puis le Neptune s'inclina sur
bâbord et coula rapidement, par 6 mètres de fond.
» Nous avions vu déjà couler, dans des condi-
tions analogues, le Duperré et l’Iéna, en rade des
Salins-d’Hyères. C’est une nouvelle et victorieuse
réponse à ceux qui mettent en doute la puissance
de notre armement.
» Nous avons donc des obus qui produisent l'effet
foudroyant d’une torpille; et notons qu'il ne s’agit
que du calibre de 24 centimètres, dont certains
auteurs étrangers ont plaisanté la faiblesse à pro-
pos de l'armement de nos « Danton »; notons aussi
que, récemment, le Mirabeau a mis 30 pour 100
de coups au but à 12 000 mètres de distance, avec
ses canons de 24 centimètres. Nous faisons ces
constatations sans autres commentaires.
» Les scaphandriers ont constaté que le projec-
tile tiré avait fait une énorme déchirure à la
coque; la chose était probable, vu la rapidité avec
laquelle le cuirassé s'était enfoncé. Ces résullats
pourraient bien faire revenir sur l'eau la question
des bateaux-canons rapides. »
Grâce à ce nouveau progrès, les combats mari-
times semblent devoir ètre bien simplifiés : dès les
premiers coups de canon, lennemi atteint disparai-
trait, et la victoire appartiendrait au premier feu,
On peut encore prévoir le cas des coups fourrés
qui feraient disparaitre en mème temps les deux
adversaires.
COSMOS
2% oCTOBRE 1912
Nouvelles machines à merceriser.
Le mercerisage du coton est, on le sail, un mode
d’apprèt consistant à faire agir sur les fibres for-
tement tendues une lessive concentrée de soude
caustique : le coton prend et garde l'aspect de la
soie. Le procédé fut découvert en 1896 par Thomas
et Prévost, deux teinturiers lyonnais établis à
Crefeld, le grand centre allemand du tissage des
soieries. En cherchant à teindre convenablement
Aussitòt ils prirent des brevets et firent connaitre
la méthode à tous les filaleurs et tisseurs de coton.
Le succès fut tel que le concessionnaire français
des brevets Thomas-Prévost ne versait aux inven-
teurs pas moins de 100 000 francs l'an.
Hélas! comme cest le cas chaque fois qu'on
prend un brevet pratiquement important, tout
aussitôt les inventeurs eurent à lutter contre deux
genres d'ennemis: 41° Les contrefacteurs qui, sous
prélexte de perfectionnements plus ou moins véri-
tables, prennent aussi force brevets, quitte à
employer secrètement la méthode primitive; 2° les
chercheurs d’ « antériorités », qui dénichent dans
une étoffe moitié soie moitié coton, ce qui n'est
pas facile, étant donné que la plupart des colo-
rants n'ont pas la même affinité pour un genre de
fibre que pour l'autre, ces techniciens furent
amenés à tendre l’étoffe dans un bain très alcalin.
Ils s’aperçurent finalement avec surprise qu'à la
suite de la baignade les fils de coton avaient, ou
presque, le même brillant que ceux de soie.
F1G. 1. — MACHINE A AXE TOURNANT HORIZONTAL.
Côté mercerisage.
les vieux brevets et les anciennes revues techniques
des cilations prouvant que l'invention n’est pas
nouvelle. |
Cette fois, les pilleurs d'épaves eurent beau jeu :
un savant anglais, Mercer, avait déjà, en 1851,
inventé le mercerisage, ainsi baptisé de son nom.
Sans doute l’opérait-il alors sans tension, ce qui ne
donne pas de brillant; mais un autre chimiste,
Lowe, avait en 1889 rebreveté le mercerisage en
parlant, sans d’ailleurs avoir l'air d'y attacher
grande importance, de la fameuse « tension »
indispensable.
Si bien que Thomas et Prévost virent en peu de
N° 1448
temps le Patentamt de Berlin reconnaitre qu'il
s'était trompé — ce qui, pour une administration
officielle, est un bel exemple d'’héroïsme! — annuler
en conséquence le brevet Thomas-Prévost, puis
tous les filateurs ou teinturiers s'occuper de merce-
risage. Aussi, le traitement des filés, par exemple,
qui coûtait 2 francs par kilogramme à l'origine,
fut-il vite réduit à 0,75.
On peut se demander, étant donné le succès
extrèmement rapide du mercerisage moderne,
pourquoi les brevets Mercer et Lowe avaient fait
un complet fiasco. Ceci provient de ce que le
« brillant » qu'on recherche avant tout n'est par-
COSMOS
455
failement oblenu que par la combinaison minu-
lieuse de plusieurs conditions: emploi de cotons
égypliens « jumels » ou américains « longues
soies » à l'exclusion des autres variétés; « gazage »
préalable des fils ou tissus passant dans la flamme
d'un brüleur à gaz où brülent tous les petits duvets
dépassants; emploi de lessives froides, etc. Les
praticiens qu'étaient Thomas et Prévost — grâce
peut-être au hasard qui les favorisa! — mirent le
mercerisage bien mieux au point que ne l'avaient
fait leurs prédécesseurs., Aussi, malgré de nom-
breuses tentatives de perfectionnement, la méthode
d’apprêt est-elle toujours, en principe, restée sem-
F1G. 2. — MACHINE A AXE TOURNANT HORIZONTAL.
Côté mécanisme.
blable. Les seules modifications importantes réa-
lisées au cours de ces dernières années consistent
dans l’appareillage : en principe, la machine produit
toujours le même traitement du filé, mais elle
permet d'opérer plus régulièrement, plus rapide-
ment et plus économiquement, à raison de la
récupération de soude et de la grosse production
par appareil et par ouvrier.
C’est ainsi qu'aux machines primitives pour filés
à marche alternative réglée par louvrier, on
substitue maintenant des appareils mercerisant de
façon automatique et continue. Les écheveaux
doivent être tendus entre des « guindres » tournant
lentement, de sorte que toutes les fibres soient
bien également traitées, puis baignées dans la les-
sive sodique. Il est ensuite indispensable d'enlever
le liquide d'imbibition par pressage et rinçage,
parce que, sans cela, dès qu’on cesserait de tendre
les fils, ceux-ci raccourciraient en perdant leur
brillant. Dans les anciennes machines (1), les paires
de guindres étaient généralement alignées sur des
(1) Nous ne pouvons, faute de place, les décrire ici,
mais il sera facile au besoin de se documenter sur la
question en lisant le petit volume le Mercerisage, que
nous avons publié dans l'Encyclopédie scientifique de
M. Léauté.
456
sommiers qu'on pouvait écarter l’un de l’autre
par un piston de presse hydraulique, des vis mises
mécaniquement ou des leviers à contrepoids. Dans
les machines continues, on a réuni les éléments
mercerisants autour d'un arbre central horizontal
si les guindres sont placées selon les génératrices
d’un cylindre (fig. 1) vertical quand elles sont dis-
posées radialement (fig, 3).
En principe, l'appareil est le même, que l'arbre
soit horizontal ou vertical, cette dernière forme,
F1G. 3. — MACHINE A AXE TOURNANT VERTICAL.
plus récemment innovée, paraissant seulement
préférable au point de vue facilité de construction .
et solidité à l'usage.
Dans tous les cas, les écheveaux sont placés sur le
devant de la machine, entre deux solides cylindres,
lesquels sont à ce moment rapprochés; mais à la
phase suivante, dès que, le « revolver » ayant fait
un sixième de tour, les bras se dirigent vers le
bas (fig. 1, 2) ou vers la droite (fig. 3), ils s'écartent
de façon à tendre l'écheveau. Ce dernier ou bien
plonge alors dans un bac plein d’une lessive de
soude, ou bien reçoit le réactif sous forme d'une
pluie fine. Après un temps d'arrêt assez court, pen-
dant lequel l’ouvrier a dégarni, puis rechargé
l'élément suivant, l’'écheveau passe à la station
suivante, où se poursuit le traitement par la soude.
Vient ensuite une période d’essorage, sous l’in-
fluence d’un rouleau caoutchouté appuyant forte-
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
ment contre le cylindre qui supporte les fils. Après
nouvelles petites courses, nouveaux arrêts et
lavages, d'abord à l'eau chaude, puis à l'eau
froide. Pendant toutés ces évolutions, l’écheveau
se déroule toujours par suite de la rotation d’une
des guindres sur elle-même, ce pour que toute la
masse des fils soit bien uniformément pénétrée et
apprètée. L'écheveau mercerisé et lavé a, de stade
en stade, cheminé tout autour de l’arbre à revolver,
si bien qu’il arrive là où il fut placé tout d'abord :
la guindre de tension se détend alors, et il est facile
de retirer l’écheveau pour aussitôt en replacer un
autre....., et le cycle continue ainsi sans cesse.
On conçoit que de la sorte un ouvrier — forcé
de suivre la vitesse de sa machine, réglée une fois
pour toutes — puisse produire bien plus qu'avec
un métier où il règle à chaque opération, tension,
durée d’action des bains, lavage... En outre, le tra-
vail est forcément plus régulier. Aussi les nouveaux
appareils se substituent un peu partout aux anciens,
surtout depuis que, outre les métiers allemands
compliqués (fig. 2), coùteux, lourds et trop aisé-
ment détraquables, il existe des métiers de prove-
nance anglaise bien plus simples (fig. 3).
Tout perfectionnement de ce genre doit être
d'autant mieux accueilli que le consommateur
profite toujours des progrès accomplis : il paye un
peu moins cher l’objet manufacturé, ce qui est
important, surtout quand il s’agit d’un produit
comme le coton mercerisé, succédané bon marché
de la soie. A noter que, dans ce cas, le bon marché
ne correspond pas à une qualité médiocre: le
coton mercerisé est plus solide que le coton ordi-
naire. Il est même curieux de constater le fait, car
de tous les traitements chimiques des textiles
(blanchiment, teinture, apprèt), seul le merceri-
sage produit un tel effet! Au reste, tous ou presque
tous ont fait usage du produit, souvent, d’ail-
leurs, sans y prendre garde, parce que le vendeur
l'avait qualifié de « soie végétale », « simili »,
« luciole », que sais-je encore... ; ou parce que le
fabricant avait si bien su le marier à d'autres fils
tissés moins brillants que nous le prenions pour
de la soie! Ceci pour bien montrer que, malgré
les idées généralement répandues, le mercerisage
est une des plus importantes spécialités de l’apprèt
des fils et tissus.
H. Rousser.
On cinématographe à main.
Le manque de stabilité des appareils limitait
jusqu'à présent la prise des vues cinématogra-
phiques en plein air, dans les cas de mouvements
inattendus ou dẹ scènes passagères inopinées. Afin
d'assurer la netteté des pellicules, on fixe solidement
le cinématographe sur un trépied assez lourd, par
conséquent difficile à transporter et long à mettre
en place au moment voulu. Cette condition de stabi-
lité est d'autant plus nécessaire que les moindres
tremblements ressentis par la bande se trouvent
N° 1448
démesurément agrandis par la projection, l’image
cinématographique, qui ne dépasse pas 20 milli-
mètres sur 25 milhmètres, allant se reproduire sur
un écran de plusieurs mètres carrés.
Un inventeur polonais, M. G. de Proszynski, vient
d'apporter un remède à ces inconvénients, grâce
au gyroscope et à l'air comprimé. Son cinémato-
graphe détective représenté ci-dessous résout, en
effet, ce difficile problème technique. Il ne pèse
guère plus qu’un kodak, et on peut prendre avec
lui des vues à l’improviste ou des images d'objets
se déplaçant selon une direction imprévue.
Voici les considérations théoriques qui l'ont
guidé dans la construction de son appareil.
Les tremblements des cinématographes ont
F1G. 1. — INTÉRIEUR DU CINÉMATOGRAPHE A MAIN.
LE MOTEUR ET LES TUBES D'AIR COMPRIMÉ.
diverses causes. Ils proviennent, indépendamment
des perturbations extérieures, soit du mécanisme
déroulant le film d’une facon saccadée, soit de la
main de l’opérateur qui l’entraîne par l’intermé-
diaire d’une manivelle. Mais ils se ramènent tous
à des déplacements parallèles à eux-mêmes en
n'importe quel sens, à des oscillations autour de
l'axe optique du cinématographe ou à des oscilla-
tions ayant leurs axes perpendiculaires à ce
dernier. Un caleul simple montre qu’en l'occurrence
on peut considérer comme nulles les deux premières
catégories de mouvements; il suffira donc d’em-
pêcher ou de diminuer très notablement les oscil-
lations dont les axes sont perpendiculaires à l'axe
optique de l'appareil, pour obtenir des impressions
très nettes.
COSMOS 457
Le cinémalographe de Proszynski surmonte ces
difficultés sans le secours du trépied. L’opératéur
n’a pas besoin non plus de la manivelle. Il s'inquiète
seulement de diriger son objectif afin que les
objets à cinématographier ne sortent pas de son
champ de visée.
Pours'opposer aux légères secousses de l'appareil},
le savant physicien s’est adressé au gyroscope,
dont il calcule les éléments et la vitesse en faisant
entrer en ligne de compte, d'une part, la force
approximative du tremblement de la main et le
poids du cinématographe et, d'autre part, le
maximum admissible du déplacement de l'impres-
sion sur le film ou sur la rétine en un temps donné.
Cependant, si le gyroscope amortit les oscillations
EE te
F1G. 2. — VOLANT GYROSCOPIQUÉ
ET MÉCANISME DE DÉROULEMENT DE LA PELLICULE.
furtives et rapides, il n'empèêcherait pas les mou-
vements lents dus à la manivelle; pour la supprimer,
l'inventeur emploie un moteur à air comprimé,
occupant un faible espace et assez fort toutefois
pour entrainer la pellicule à la vitesse nécessaire,
car les dynamos, les machines à explosion ou les
ressorts capables de dérouler 100 à 150 mètres de
bande (5 000 à 7 500 vues environ) pèseraient beau-
coup et seraient, en outre, trop encombrants.
A l'intérieur de l'appareil, qui a la forme d’une
boite rectangulaire de 15 X 22 X 95, se trouvent
donc un moteur gyroscopique, un réservoir d'air
composé de 5 tubes d'acier, un manomètre et un
mécanisme cinématographique de 150 mètres de’
film, avec compteur de bande, bouton. de démar-
rage, levier de vitesse et autres accessoires (fig. 1).
458
Une charge d'air suffit pour le déroulement d'une
pellicule entière (450 mètres), c'est-à-dire pour
l'impression de 7 000 à 8 000 images. Après épuise-
ment, on recharge très vile l’appareil au moyen
d'une petite pompe à main spéciale, analogue
à celles dont se servent les bicyclistes pour gonfler
leurs pneus.
Le nouveau cinématographe de Proszynski se
manœuvre aisément, comme on le voit. En dépit
du moteur gyroscopique (tig. 2), on opère avec cet
appareil dans tous les sens, on surprend l’objet
à cinématographier aussi facilement qu'un chasseur
épaule son fusil pour viser un lièvre s'enfuyant;
COSMOS
2% OCTOBRE 41942
on suit sans difficulté le voi d’un oiseau, les évo-
lutions d'un aéroplane ou d’un dirigeable, qu'on
soit même à cheval ou en voiture. Il suffit de faire
faire un demi-tour au bouton de démarrage pour
que la pellicule se déroule automatiquement et
qu'on puisse prendre à l'improviste la succession
des images représentant une scène animée quel-
conque.
Remarquons enfin que cette invention s’appli-
quera également aux lunettes et surtout aux
jumelles prismatiques dont le manque de fixité
pendant les visées empêche parfois de bien dis-
tinguer les objets éloignés. JacQUES BoYER.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
Réception des signaux et télégrammes.
Vers 10:40" du maltin, portons à l'oreille le
récepteur téléphonique, et, au moyen de l'inter-
rupteur, fermons le circuit. À ce moment, nous
devons percevoir un claquement sec, suivi d’un
léger sifflement qui s'arrête bientot si la force
électromotrice de la pile est convenable.
A 10°40m commence une série de crépitements
longs et brefs traduisant en son les traits et les
points de l'alphabet Morse (2). Ces crépitements
sont un préambule annonçant les signaux horaires :
XXX = Paris Observatoire = Signaux horaires
L'heure exacte est donnée ensuite par un point
à 1045", à 40h47" et à 10:49, Le premier signal
est précédé d'une série de traits; le second, d’une
série de traits suivis de deux points, et le troisième,
d'une série de traits suivis de quatre points.
Viennent immédiatement après, et sans inter-
ruption, deux tlélégrammes météorologiques, le
premier donnant la pression barométrique, la
direction et la vitesse du vent, ainsi que l'état de
la mer relevés dans diverses stations météorolo-
giques d'Europe et d'Amérique; le second faisant
(D Suite, voir p. 427.
(2) On trouvera leur signification dans la plupart
des dictionnaires et, avec toutes les indications de ser-
vice, à la troisième page de la couverture de l'alma-
nach que distribuent les facteurs du télégraphe au
moment des étrennes. Nous représenterons ici ces
diverses indications par les signes suivants : appel :
X; Séparation : —; attente : —; fin de transmission :
+; fin de travail : +; compris : compris; invitation
à Uransmettre : inu. à tr.
connaitre la situalion atmosphérique de Paris à
4030m,
Voici, par exemple, les télégrammes du 5 octobre :
= BCM = R. 330% = V. 70454 = O. 741222 —
C. xxxxxx — H. 722211 — S. 64303 — très forte
pression ouest et centre Europe profonde dépression
s’avance vers Islande — — KR. 33081 — V. 701454 —
O. 741222 — C. xxxxxx — H. 722211 — S. 64303 =
très forte pression ouest et centre Europe profonde
dépression s’avance vers Islande = = Paris = vent
6 mètres stationnaire nord nord est croît pression 772
décroît ciel découvert soleil — — v 6 m ss nord nord
est ce p 712 dd ciel découvert soleil + FL FL +
En se reportant aux indications données p. 309
du numéro 1390 (16 septembre 1941), il sera facile
de traduire ces télégrammes, en notant toutefois
que le zéro n'est pas donné par cinq traits comme
l'indique l'alphabet Morse, mais par un seul trait,
et que les observations manquantes sont rempla-
cées par un nombre équivalent de lettres x, et non
de chiffres 9.
Les deux premiers chiffres de chaque groupe
donnent, comme il a été indiqué, la pression baro-
métrique en millimètres au-dessus de 700. Les
deux suivants font connaitre la direction du vent;
le cinquième, sa vitesse, et le sixième, l’état de la
mer, d'après les conventions suivantes :
DIRECTION DU VENT
02 = NNE 18 = SSW
04 = NE 20 = SW
66 = ENE 22 = WSW
0o = E 2 = W
10 = ESE 25 = WNW
12 = SE 28 = NW
14 = SSE 30 = NNW
16 = S 32 =N
N° 1148
VITESSE DU VENT Aires
par secuade
D Caine pes admises 0 à ‘1
1 = Presque calme................. 1 à 2
2 — Très faible. — Légère brise.... 2 à 4
3 — Faible. — Petite brise.......... &4 à 6
4 — Modéré. — Jolie brise......... 6 à 8
5 — Assez fort. — Bonne brise..... 8 à 10
6 — Fort. — Bon frais....... és 10 à 12
7 = Très fort. — Grand frais....... 12 à 14
8 — Violent coup de vent.......... 45 à 16
= Tompele rire uma plus de 16
ETAT DE LA MER
0 — Calme 5 — Houleuse
1 — Très belle 6 — Très houleuse
2 — Belle 7 = Grosse
3 — Peu agitée 8 — Très grosse
4 — Agitée 9 = Furieuse
On obtiendra donc, pour le premier télégramme,
la traduction suivante :
— Bureau central météorologique = REYKIAVIK :
pression 733, vent d'est presque calme = VALENTIA :
pression 770, vent de sud-sud-est assez fort, mer agi-
tée = OveEssanr : pression 77%, vent de sud-est très
faible, mer belle — La CoRoGNE : pas d'observations
= HonrTA : pression 772, vent d’ouest-sud-ouest presque
calme, mer très belle — SAINT-PIERRE-MIQUELON : pres-
sion 764, vent de nord-nord-ouest faible — SITUATION
ATMOSPHÉRIQUE GÉNÉRALE : très forte pression ouest et
centre Europe; profonde dépression s’avance vers
Islande.
Après répétition complète de ce télégramme,
celui relatif à la situation atmosphérique de Paris
donne :
4° La vitesse du vent au sommet de la tour
Eiffel en mètres par seconde et le sens de sa varia-
tion;
2° La direction du vent et le sens de sa rotalion
vers le nord ou vers le sud ;
3° La pression barométrique au Bureau central
météorologique et le sens de sa variation;
4° L'état du ciel;
5° Les conditions particulières.
Ce télégramme est ensuite répété en abrégé, et
le tout se termine par l'indicatif FL de la station
de la Tour Eiffel.
L'état de l’atmosphère à Paris à 7"30" du matin
et à 230m du soir est donné de Ja même manière
à 8" et à 3". L’intensilé du son à la réception
est moindre, le poste utilisé pour la transmission
de ces deux télégrammes étant moins puissant que
celui qui sert à l’émission des signaux horaires.
Les télégrammes relatifs à l’état atmosphérique
de Paris ne sont pas donnés le dimanche ni les
jours fériés.
A 44°45m, à 14°47m et à 1149" du soir, une nou-
velle série de signaux horaires est envoyée de la
mème façon que le matin. Elle est précédée de
COSMOS
459
battements rythmés, analogues à ceux d’un métro-
nome, qui servent à l'envoi extrêmement précis
de l'heure par la méthode des coïncidences télé-
phoniques.
Voici, au sujet de ces battements, les explicz-
tions fournies par la stalion de la Tour Eiffel :
« Chaque nuit, à 23*30™ environ, il est transmis
une série de 480 points radiotélégraphiques espacés
de (1 — 5) seconde environ, les 60° et 120° étant
supprimés pour établir des repères de comptage.
Cette série est écoutée à l'Observatoire de Paris
dans un récepteur de T. S. F. et comparée aux
battements d’une pendule garde-lemps par la mé-
thode des coïncidences. Un calcul très simple per-
met de passer des heures notées à la pendule des
coincidences à celles exactes à un ou deux cen-
tièmes près des 1° et 180° points de la série, qu'on
transforme en heures temps légal en ajoutant la
correction correspondante de la pendule.
» Ces dernières heures sont transmises aussitòt
après le signal horaire de 23"49"0*, de la manière
suivante :
» Siles heures des 1% et 180° battements sont,
par exemple, 23"30"13:,28 et 23:33"8°,80, on
transmet les deux groupes de chiffres suivants
répétés deux fois :
= = 301328.330880 = 301328.330880 = =
» Pour connaitre avec une grande approximation
la correction à apporter à un chronomètre ou à une
pendule de précision par rapport à l'heure légale
de Observatoire, il suffit d'écouter ses battements
par l'intermédiaire d'un microphone, en même
temps que la série des 180 points transmise par la
Tour Eiffel. On calcule ensuite les heures du chro-
nomètre ou de la pendule aux moments du 1° et
du 180° points. En retranchant ces heures respec-
tivement de celles correspondantes qui sont radio-
télégraphiées par la Tour, on oblient deux valeurs
de la correction du chronomètre ou de la pendule
qui doivent concorder à deux centièmes près. »
Ce mode d’envoi très précis de l'heure a été
inauguré le 29 juillet. Jusqu'au 1°" octobre, les
signaux rythmés ont élé émis avant les signaux
horaires du matin, pour permettre aux observateurs
de s’exercer commodément. Les heures des {°° et
180° baltements étaient alors données immediate-
ment avant le télégramme BCM. Depuis le fr oc-
tobre, ce service est fait la nuit, de facon à per-
mettre aux Observatoires de province qui ont pu
faire des observations d'étoiles d'indiquer, le cas
échéant, par télégraphie ordinaire, la correction à
apporter à la pendule directrice.
Les heures des iè? et 180° battements sont main-
tenant répétées trois fois :
= 905920 BOAT = = DOUDOU GASETE = = 20502,
Jr
5471 L FL FL ==
460
Après les télégrammes météorologiques étaient
transmis jusqu'à ces derniers temps des appels et
des télégrammes chiffrés destinés aux postes se-
crets. Actuellement, on entendra presque tous les
jours, de 1" à 2" de l'après-midi, des exercices
en francais, en allemand, en anglais ou en chiffres
avec Toul (GTL), Verdun (GYR), Épinal (GÉN) et
Belfort (GBT).
A 8° du soir commence, au poste à émission
musicale, l'exercice dit « service de la marine »
avec les postes côtiers de France et les postes mili-
taires d'Algérie, de Tunisie et du Maroc (1).
Cet exercice débute ainsi:
xxx = Tous tous de FL FL — bsr les amis (ou
bsr les vieux, ou bsr les vx amis, ou bsr lous les amis,
ou bsr ts les amis) = (ou +).
XXX = TD TU TD de FL FL FL = ici sa sa sa =
TD TD de FL FL inv. a tr.
La Tour, après un bonsoir (bsr) aux amis, appelle
Dunkerque (TD), lui fait savoir qu'il n'y a rien de
nouveau à lui transmettre (sa)et l'invite à répondre.,
Le mot « ici » est souvent omis.
Après réponse de Dunkerque, la Tour reprend :
XXX = TD TD TD de FL FL = compris compris
compris mi ini bsr les amis +
>» «x = TC TC TC de FL FL = ici sa sa sa = TC
TC de FL inv. atr.
Elle fait savoir à Dunkerque que sa réponse a
été comprise, dit « merei » (mi) aux amis, et, leur
ayant souhaité le bonsoir, appelle Cherbourg (TC).
L'exercice continue ainsi dans l’ordre qui a été
indique.
Souvent, les réponses de Cherbourg, de Brest,
de l'escadre de la Manche et de Lorient sont mal
entendues par la Tour. Elle demande alors à Ro-
chefort, dont la réception est presque toujours
excellente :
eu — TR TR TR de FL FL FL = ici sa sa sa
qu'ont dETETC TO TO HS HS TLTL??=ici sa sa
sa qu'ont dit TC TC TO TQ HS HS TL TL??? =TRTR
de FL inv. atr.
Toulon (Mourillon) est de même très souvent
interrogé sur ce qu'ont dit Ajaccio et lescadre de
la Méditerranée ou, à son défaut, Toulon (instruc-
tion): IT. |
Oran doit aussi presque toujours répéter ce qu'ont
dit Fez et Taourirt.
On entendra assez souvent poser des questions
comme celle-ci:
M ee == TN TN TN de FL FL FL = avez-vous en-
tendu TZ TZ?? avez vs entendu TZ TZ?? = TN TN de
FL FL eur. a tr.
ou s'informer du sort d'un télégramme officiel :
>K = TZ TZ TZ de FL FL FL = avez vs Com-
pris compris compris olf nr 42 d'hier soir? Qu'a dit
(1) Voir lelite Correspondance du numéro 1434.
COSMOS
Î
2% OCTOBRE 1912
TN TN9? — avez vs compris compris compris off nr
42 d'hier soir?? Qu'a dit TN TN ?? = TZ TZ de FL FL
inv. à tr.
Le mot « compris » n'est pas transmis en toutes
lettres, mais remplacé par le signal correspondant.
Si la Tour dit:
XXX = TD TD TD de FL FL FL — rj rj? = TD
TD de FL FL inv. a tr.
cela signifie: « Dunkerque, répétez tout, nous
sommes troublés par d’autres transmissions. »
Si le trouble est causé par des parasites (bruits
étrangers de provenances diverses), la demande de
répétition (??) sera accompagnée des lettres rk rk
ou rks rks, au lieu de rj rj. Dans ce même lan-
gage conventionnel, pz signifie « parlez » (souvent
employé avec les postes de l'Est), bjr mrs cru??
représente cette phrase complète : « bonjour mes-
sieurs, comment recevez-vous? », r{b rtb veut dire
« réception très bonne », etc.
Pour terminer l'exercice, la Tour annonce:
XXX = Tous tous de FL FL = Prenez clôture à
22 h(eures) — aurez nouvelles à 22 hieures} = = pre-
nez clôture à 22 h(eures) = aurez nouvelles à 22 h(eures)
— bsr tous les vx amis + FL FL +
De 945m à 940m, avaient régulièrement lieu,
jusqu'à une date récente, des battements servant à
la détermination précise des longitudes par la mé-
thode des coincidences téléphoniques de Claude,
Ferrié et Driencourt (1). Après les battements on
pouvait entendre des appels et télégrammes chif-
frés, deslines aux postes secrets, comme ceux du
malin.
A 10 heures, enfin, sont envoyées, le plus souvent
au poste à émission musicale, les nouvelles de la
journée, puisées dans les journaux du soir. Les
nombres et les noms propres sont répétés après un
point d'interrogation ou un point ordinaire abrégé
(deux groupes de deux points, au lieu de trois
groupes) :
XXX = Tous tous de FL FL = Voici nouvelles =
Podgoritza? Podgoritza = Plus de 6 000? 6 000 Ma-
lissores se sont révoltés contre l'autorité ottomane et
attaquent les positions turques =
Constantinople? Constantinople = Les Turcs ont
repris la colline de Zayzali? Zayzali aux Monténégrins
après un combat acharné —
Belgrade? Belgrade — La mobilisation est terminée
en Serbie. Les armées opéreront formant un effectif
de près de 200 000? 200 000 hommes —
Ouchy ? Ouchy — Un délai de deux jours est donné
à la Turquie pour signer le traité de paix ou €onsa-
crer la rupture des négociations.
(4) On trouvera les renseignements les plus complets
sur cette méthode et de très utiles conseils sur la
réception des signaux radiotélégraphiques transmis
par la Tour Eiffel dans la brochure spécialement pu-
blice à ce sujet par le Bureau des Longitudes, Paris,
Gauthier-Villars, 4,79 fr,
N° 1448
Cherbourg? Cherbourg = Le sous-marin Euler ?
Euler a été lancé ce malin avec succès —
Casablanca? Casablanca = Le départ du sultan pour
Rabat? Rabat a lieu aujourd'hui. Le général Dalbiez ?
Dalbiez assure sa sécurité jusqu’à Oued Keta? Oued
Kela —
Sports — Charles Ledoux? Charles Ledoux le cham-
pion d'Europe poids bantam a battu hier soir Sam
Minto? Sam Minto + -+ bsr tous les amis de FL FL +
(12 octobre).
Voici donc l'horaire résumé des transmissions à
heure fixe de la Tour Eiffel : i
8* Télégramme météorologique Paris.
10"40" Signaux horaires, télégramme météorologique
BCM, télégramme météorologique Paris.
11° (Service spécial des postes secrets).
1" Exercice avec Toul, Verdun, Épinal, Belfort.
3" Télégramme météorologique Paris.
8" Service de la Marine.
9*15° (Battements).
Y°40* (Service des postes secrets).
19° Nouvelles.
11"30"* Battements pour l'envoi très précis de l'heure.
11°40" Signaux horaires.
Les télégrammes météorologiques, deslinés au
public non télégraphiste, sont transmis assez len-
tement. Au bout de quelques jours d’exercice, on
_arrive facilement à les prendre, soit directement,
en « lisant au son », soit en écrivant les points et
les traits sous la dictée de la Tour et en les tradui-
sant ensuite.
Les autres transmissions, faites pour des profes-
sionnels, sont manipulées beaucoup plus vite. Un
exercice assez prolongé est nécessaire pour pou-
voir les saisir convenablement.
On constatera généralement de légères variantes
de détails suivant les opérateurs.
e
* s
Outre les télégrammes envoyés régulièrement
tous les jours à heures fixes, on pourra en entendre
d’autres suivant les événements du jour ou les
nécessités du service. Mais, malheureusement,
ceux qui seraient les plus intéressants sont presque
toujours chiffrés !
C'est ainsi que, lors du récent voyage de M. Poin-
caré en Russie, d’interminables séries de groupes
de cinq chiffres lui étaient envoyées à bord du
Condé.
Quand des passagers turcs, membres du Crois-
sant-Rouge, se trouvaient séquestrés à Cagliari au
début de cette année, on entendit un jour (27 jan-
vier) ce télégramme, intercalé entre les deux bul-
letins météorologiques de 40"45" et adressé au
commandant du Ville-d' Alger :
XXX = MIQ MIQ MIQ de FL FL FL = .... Veuillez
faire escale à Cagliari pour prendre passagers turcs
et consul de France. Télégraphiez accusé réception
= MIQ MIQ MIQ de FL FL FL inv. â tr.
COSMOS
461
Récemment (16 septembre), le télégramme mé-
téorologique de 8! était suivi de cette question
posée au ballon Ad)udant-Vincenot : |
XXX = AV AV AV de FL FL FL = Avez-vous
pris BCM?? = Avez-vous pris BCM?? = AV AV de
FL FL inv. å tr.
Au bout de quelques instants, il lui était dit :
X AV de FL = rtb rtb rtb rib. bjr bjr vx bjr vx
bjr vx + AV AV de FL FL inv. å tr.
puis, un peu plus tard :
X AV AV de FL — Réceplion moins bonne, plus
faible, devez vous éloigner = AV de FL inv. à tr.
et, enfin, après quelques minutes :
XX = AV AV de FL = compris compris bsr bsr
= AVY AV de FL FL +.
La Tour a quelquefois autre chose que sa sa sa
à transmettre aux postes du « service de la ma-
rine ». On peut l'entendre, par exemple, dire
à Fez (25 juillet) :
XXX = FZ FZ FZ de FL FL = .... Adjudant
Auclairtableau pour sous-lieutenant félicitations. Prière
envoyer urgence numéro moteur pour lequel culasse
de rechange est demandée = FZ FZ de FL inv. à tr.
ou à Taourirt (5 aoùt) :
XXX = TRT TRT TRT de FL FL = .... Sgt Stroz-
zega nommé adjudant à date du 3 aoùt = TRT TRT
de FL FL.
Le bey de Tunis, visitant le poste, en profitait
le 49 juillet, pour envoyer à Bizerte ce télégramme:
XXX = TZ TZ TZ de FL FL FL = .... Princesse
Kamar Salamars à Tunis = Vous télégraphie de la
Tour Eiffel à 300 mètres d'altitude par T. S. F.
Donnez-moi vos nouvelles. Salutations famille = TZ
TZ de FL FL env. à tr.
La note amusante elle-même ne manque pas. Au
cours d'essais avec Nancy, était un jour (11 mars)
gravement donné ce conseil :
Si vous voulez avoir des enfants sains, vigoureux,
robustes, nourrissez-les avec du cacao Bensdorp, de
la phosphatine Falières et du... Cadum.
Une autre fois (25 mars), le sapeur de service se
demandait, anxieux, si
l'homme descend du singe ??
puis, lyrique :
O Védrines, tu me fais l'effet d'un aigle que je vou-
drais etc.....
et comme conclusion :
Croquenot chausse bien, mais Ribouy habille mieux.
(A suivre.) D" PIERRE CORRET.
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
Sous-marins allemands et norvégiens.
Au contraire de ce qui se passe en France, et
suivant une méthode qui ne semble pas donner de
mauvais résultats partout où elle est pratiquée,
les Allemands ne construisent généralement pas
eux-mêmes leurs sous-marins : ils se fournissent
auprès de chantiers navals spécialistes. Le type
de sous-marins, ou plus exactement de submer-
sible, qui a été adopté par la marine de guerre
allemande, est le type dit « Germania », imaginé
et établi par les fameux chantiers Germania, dé-
pendant de la maison Krupp, chanliers qui se
LE SOUS-MARIN PRÊT A LA SUBMERSION.
en particulier ce Kobben dont nous venons de
parler, sont du type submersible. Il y a, entre les
deux genres de bateaux pouvant naviguer sous
Veau et que l’on désigne soit sous le nom propre
de sous-marins, soit sous le nom de submersibles,
des différences assez nettes qui sont maintenant
connues de tout le monde. Les submersibles, qui
sont d'ailleurs maintenant préférés aux sous-
marins proprement dits, ont un tirant d’eau
moins fort quand ils naviguent en surface, tout
simplement parce qu'ils ont un franc-bord supé-
rieur, qu'ils s'élèvent davantage au-dessus de
Veau, et par conséquent qu'ils présentent des
conditions meilleures d’habitabilité et d’assiette
trouvent à Kiel. Et comme ce type de submersible
se trouve, pour ainsi dire, dans le commerce, la
maison Krupp en fournit également à des pays
étrangers; tout récemment, elle en a vendu un
à la Norvège, du nom de Kobben, ce qui justifie
notre titre, un peu bizarre au premier abord, assi-
milant les sous-marins allemands et les sous-
marins norvégiens.
Nous venons d'employer allernativement le mot
de sous-marins et submersibles. On sait que les
bateaux sous-marins adoptés par l’Allemagne, et
à la mer en même temps que de vitesse. Les sub-
mersibles, au contraire des sous-marins, sont
généralement munis d’une double coque, ce qui
leur donne une grande sécurité contre les abor-
dages. Actuellement, on ne lance plus guère dans
aucun pays de sous-marins proprement dits; si
bien que, quand on parle, d’une façon générale, de
bateaux -sous-marins, il faut entendre bateaux
submersibles. Les chantiers Krupp, pour leur part,
ont construit jusqu’à présent une douzaine de sub-
mersibles du type que nous allons examiner, dont
quatre pour la marine russe, deux pour la marine
austro-hongroise, un pour la marine norvégienne,
et les autres pour la marine allemande.
N° 11:48
Par leurs caractéristiques principales, tous ces
bateaux sont à peu près exactement semblables au
Kobben.
Celui-ci, quand il navigue en surface, a quelque
peu l'apparence d’un torpilleur ordinaire. Ses dimen-
sions principales sont 39,30 m comme longueur,
3,70 m comme largeur, 2,87 m comme tirant d’eau.
Lorsqu'il navigue à la surface, il déplace 205 tonnes;
COSMOS
163
submergé, il déplace 255 tonnes. Comme on peut
le voir par la photographie qui représente le
bateau en construction par le travers de la chambre
des machines (et qui donne comme une coupe par-
faile du bateau un peu en arrière du kiosque, et
presque par son point le plus large, par son maitre-
bau), le bateau comporte deux coques; l'inter-
valle est utilisé pour constiluer des réservoirs de
VUE INTÉRIEURE DE LA CHAMBRE DES MACHINES DANS LE SOUS-MARIN « KOBBEN ».
pétrole et d'huile, ou des water-ballasts, suivant
le point où l’on considère cette coque. Cet espace
compris entre les deux coques est d'ailleurs divisé
en de nombreux compartiments étanches, qui ont
pour but de réduire l’effet d’une avarie à la coque
extérieure; plusieurs de ces compartiments pour-
raient être envahis par l’eau sans que la flottabi-
lité du bateau fût compromise. La coque intérieure
se compose, dans le sens de la longueur, de trois
sections soudées et boulonnées ensemble, pour pré-
senterune soliditéelune résistance toutes spéciales ;
l'épaisseur de celle coque est telle qu elle peut
résister à une pression d'eau de 90 mètres. pour le
cas où une avarie ferait descendre le torpilleur
jusqu’à semblable profondeur. À l'arrière du sub-
mersible se trouve une chambre renfermant les
46%
accumulateurs; un peu plus loin, nous apercevons
la salle des machines, celle que nous montre pré-
cisément la photographie prise durant la construc-
tion du bateau. Au milieu sont les water-ballasts
intérieurs, et, au-dessus, le kiosque contenant les
appareils de direction pour la navigation en sur-
face et en plongée: non seulement le gouvernail
et les commandes diverses, mais encore les péri-
scopes et les manomètres. Plus à l’avant se trouvent
la chambre des officiers, puis le poste de l’équi-
page, et enfin la chambre des torpilles contenant
deux tubes. Un troisième tube est disposé sur le
pont, à l'arrière. On a prévu, comme de coutume,
deux paires de gouvernails horizontaux, placés à
l'avant et à l'arrière, de chaque côté de la coque
extérieure; ils servent à diriger le mouvement
de plongée. A l'extrême arrière est un gouvernail
ordinaire double, qui sert à la direction en plan à
droite ou à gauche. La puissance motrice fournie
aux deux hélices est engendrée par deux moteurs
à pétrole qui ont ensemble une puissance de 450
chevaux; dans la navigation immergée, ils sont
remplacés par deux moteurs électriques, d’une
puissance totale de 250 chevaux, et qui sont, eux,
alimentés par les batteries d’accumulateurs dont
nous parlions, batteries d’une capacité de 590 kilo-
watts-heure. Les hélices sont du type à ailes réver-
sibles, le changement de position de ces ailes étant
commandé par une manette spéciale qui se trouve
dans la chambre des accumulateurs. Ceux-ci sont,
bien entendu, fermés hermétiquement pour empè-
cher tout déversement d’acide sous l'influence du
roulis. Nous ne parlons pas des engins auxiliaires
ordinaires: pompes de cale mues par les moteurs;
pompes auxiliaires à bras; compresseurs à basse
pression et compresseurs à haute pression, destinés
à fournir l'air nécessaire pour chasser l’eau des
ballasts et assurer la propulsion des torpilles;
ven{ilateurs électriques, treuils, pompes servant
à régler l'assiette du bateau, etc.
Un bateau de ce type peut fournir une vitesse
en surface de 12 nœuds et, en plongée, de 9 nœuds.
Le rayon d'action en surface est de 1450 milles
marins à vitesse réduite de 9 nœuds; il peut
fournir 45 milles en plongée à la vitesse de
6,5 nœuds. L’équipage d'un submersible Germania
est généralement de 10 hommes. Il suffit de trois
à cinq minutes pour effectuer tous les préparatifs
de plongée; en quinze secondes, la submersion
serait assurée. Pendant la marche en surface, l’air
nécessaire au fonctionnement des moteurs à pé-
trole est aspiré à l'intérieur du bateau; mais il
est remplacé constamment, dans les espaces d’où
il est ainsi attiré, par de l'air pris au dehors au
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
moyen de deux tubes verticaux de ventilation;
de cette façon, la ventilation générale du submer-
sible est obtenue dans les meilleures conditions
pour son équipage. Le poids du pétrole brülé est
automatiquement “ompensé par l'admission, dans
des water-ballasts, d'un poids d’eau équivalent.
Pendant la navigation en plongée, l'air qui s’est
échauffé dans la chambre des machines est aspiré
par des ventilateurs qui le font passer dans divers
appareils de purification, de dessiccation et de refroi-
dissement; puis il retourne refroidi à la chambre
des machines. Le navire peut ainsi rester vingt-
quatre heures en plongée sans que son équipage
soit incommodé. Notons que les tiges des péri-
scopes, qui sont comme les yeux du sous-marin,
sont actionnées par un moteur électrique; elles
ont 2 mètres de hauteur et permettent au bateau
de naviguer à une profondeur qui le met à l'abri
des projectiles. Le kiosque, qui peut contenir trois
hommes, communique avec la coque interne par
une porte étanche, qui est la seule ouverture à
l'intérieur du bateau; elle est protégée par des
blindages contre le tir de la petite artillerie.
Naturellement on a perfectionné autant qu'il
était possible les dispositifs de sécurité. Non seule-
ment il existe une quille amovible, pesant cinq
tonnes, que l’on peut détacher par la simple ma-
nœuvyre d'une poignée, si l'on a besoin que le
bateau revienne rapidement à la surface, mais
encore les water-ballasts peuvent être remplis
d'air comprimé très vite, grâce à un réservoir
d'air comprimé de 3,5 mètres cubes de capacité, qui
est maintenu constamment sous pression. Ainsi
qu'on peut le voir en examinant la photographie
qui montre une section du bateau, on a rivé sur
la coque de ces submersibles des sortes d’anses
métalliques puissantes, sur lesquelles on pourrait
attacher des haussières. D'autre part, une ligne
téléphonique a une de ses extrémités fixée à une
bouée qui peut être lâchée de l’intérieur du
bateau par un dispositif automatique, et cette
ligne téléphonique permettra de communiquer
avec la surface, le bateau demeurant immergé.
Ces submersibles sont d’ailleurs essayés par un
séjour de deux heures à 50 mètres de profondeur;
il faut qu'ils ne donnent aucun signe de déformation,
et qu'il ne se fasse aucune rentrée d'eau par les
moindres joints.
Ce type de sous-marin, parfaitement étudié,
semble des plus intéressants.
DANIEL BELLET,
prof. à l'Ecole des sciences politiques
et à l'Ecole des hautes études commerciales.
Ne 1418
COSMOS
465
L’'appauvrissement des forêts.
Le Cosmos, dans son numéro 4445 du 3 octobre
courant, a reproduit un article du Bulletin de la
Société de géographie de l'Est, dans lequel on lit
cette phrase :
a Nul n'ignore que la France se déboise très
rapidement et que, dans un avenir prochain, elle
devra importer la majeure partie du matériel
ligneux qui lui est nécessaire. Elle achète déjà
annuellement pour 175 millions de bois de con-
struction, etc. »
Il y a, dans ce passage, une part de vérité en
même temps que des erreurs de fait et d’appré-
ciation.
H n'est pas exact de dire que « la France se
déboise très rapidement ». Déjà la Société des
Agriculteurs de France, dans Ia session de 1909,
a fait justice de cette exagération; nous-même
l'avons combattue dans la Revue des questions
scientifiques de Bruxelles, fin juillet 1909 (1), et
dans le Correspondant du 25 novembre 1910 (2).
Non seulement la France se déboïise peu dans son
ensemble, mais elle tend même à se reboiser. Sans
parler des travaux de restauration des montagnes
par le reboisement et l'amélioration des pâturages,
œuvre considérable à laquelle le service forestier
travaille depuis un demi-siècle avec une constance
qui ne se dément point, l'initiative privée, excitée
depuis quelques années par un salutaire et éner-
gique mouvement de l'opinion, commence à entrer
avec activité dans la voie des reboisements, com-
binée, dans les pays de montagnes, avec l’amélio-
ration et l'aménagement des pâturages. Les résultats
obtenus sous ce rapport dans les Pyrénées par
l'Association centrale pour l'aménagement des
montagnes (PA. C. A. M., pour employer le
jargon abréviatif à la mode aujourd'hui), secondée
par le dévouement infatigable de son fondateur
et président, M. Paul Descombes, sont des plus
significatifs. De tous còlés se sont fondées des
Sociétés en faveur de la protection et de l’exten-
sion des forêts et des plantations d'arbres. Outre
la Société forestière de Franche-Comté et Belfort,
qui étend son action sur toute la France et au
delà, nous avons la Société des Amis des arbres,
dont le siège est à Paris, l’Association des Sylvi-
culteurs de Provence, le Groupe d’études limou-
sines, la Société ou Association de l'arbre et de
l'eau, et tant d’autres, non comprises les Sociétés
forestières enfantines des écoles primaires qui,
dans un grand nombre de communes, cultivent de
petites pépinières forestières, au moyen desquelles
(1) Revue des recueils périodiques : SYLvICULTURE :
Exploiter n'est pas déboiser.
(2) Article intitulé: Tout est-il pour le mieux en
forêt comme en montagne?
elles effectuent des plantations sur des terrains
communaux. Enfin, le Touring-Club de France
encourage par des subsides toutes les tentatives de
reboisement jugées sérieuses, dues à l'initiative
privée.
D'autre part, la manie de défrichement des ter-
rains boisés qui sévissait encore il y a à peine
trente ans a bien diminué en ces derniers temps,
et bon nombre de propriétaires, à l'inverse,
cherchent à tirer parti, par la plantation d’essences
forestières, de terres rebelles à la culture.
Ce qui précède est pour démentir l’assertion que
« la France se déboise très rapidement ».
Mais ce qui est exact, c'est que beaucoup de
forèts privées se dépeuplent, ce qui ne veut pas
dire, pour autant, qu'elles disparaissent, qu’elles
se déboisent. Klles se dépeuplent de vieux arbres
par la raison que, à l'inverse des bois de feu de
plus en plus dépréciés, les bois propres à la char-
pente et aux mille industries qui emploient le bois
voient leur prix s'élever de plus en plus. Ce phé-
nomène économique est à la fois l'effet et la cause
du dépeuplement dont nous venons de parler, et
le rédacteur du Bulletin de la Société de gén-
graphie de l'Est est dans le vrai quand il dit que,
de plus en plus, s'accroit en France le déficit des
bois d'œuvre de toute nature et que, de plus en
plus, s'élève l'excès de notre importation sur notre
exportation.
Le haut prix qu'acquiérent les bois propres au
service et à l'industrie incite les propriétaires
à exploiter leurs futaies. Mais le sol reste boisé, du
fait du taillis, des rejets de souches et des ense-
mencements naturels.
Toutefois, le capital-bois, le matériel, va eu
diminuant; et si la France ne se déboise pas, elle
s’appauvrit néanmoins en marchandise ligneuse.
On peut dire qu'il y a là, au point de vue de
l'économie forestière et commerciale, un inévitable
danger, sinon immédiat, du moins relativement
prochain. Et ce danger ne peut être conjuré qu'à
très longue échéance, car il faut un siècle et plus
pour produire du bois de charpente et vingt-cinq
ou trente ans tout au moins pour obtenir dn bois
d'industrie.
A cet égard, l'intérèt bien compris des proprié-
taires, conforme d'ailleurs à l'intérèt général, est
d’allonger les révolutions de leurs taillis. Au lieu
d'exploiter ceux-ci à quinze, dix-huit ou vingt ans,
alors qu'ils ne peuvent fournir que du bois de chauf-
fage de moins en moins demandé et, parlant, de
plus en plus déprécié, ils doivent se résigner à un
sacrifice nécessaire, mais momentané; il leur faut
modifier peu à peu l'aménagement de leurs forêts, de
manière à ne faire aucune coupe avant vingt-cinq
GG
ou trente ans. Encore, dans bien des cas, l'âge de
vingt-cinq ans sera-t-il insuffisant: ce point est
subordonné aux circonstances locales de plus ou
moins de rapidité de végétation ou de fécondité
du terrain.
En exploitant leurs bois à un âge suffisamment
avancé pour que les brins de taillis aient acquis
une valeur industrielle, les arbres de réserve
auront pris un plus fort diamètre en mème temps
qu’ils se seront élevés davantage; ils fourniront
ainsi un matériel plus abondant et plus rému-
nérateur.
L'ensemble des bois appartenant à des particu-
liers, si lon y joint quelques fortts communales
qui, par une douteuse interprétation du code, ont
échappé au régime forestier, n’est pas inférieur
à 8650 000 hectares, la plus grande partie en
taillis simples ou composés. Si l’on pouvait arriver
à n’exploiter plus les uns et les autres qu'à un âge
où, au lieu de fournir une marchandise de plus en
COSMOS
2% OCTOBRE 1912
plus dédaignée, comme les bois de feu, ils produi-
raient des bois d'industrie, ne füt-ce que de la pâte
à papier, la France ne serait bientôt plus tribu-
taire de l'étranger et en ‘deviendrait le fournisseur
au lieu d’en être le client.
Si, en outre, on arrivait à complanter en essence
forestière une partieseulement dessix millions d’hec-
tares de terres incultes existant en France (1), on
finirait bien par échapper au danger déjà prévu par
un grand homme d'Etat (Sully ou Colbert?) quand
il disait que la France périra faute de bois.
Il y aurait à tenir compte aussi d’une condition
éminemment défavorable à la conservation des
forêts privées et à la formation de forêts nouvelles
par les particuliers.
C'est la condition fiscale d'une surimposition qui
grève ces forêts bien plus que proportionnellement
à leur rendement. Mais c’est là un còté de la ques-
tionquinousentrainerail trop loin pour aujourd'hui.
C. DE KIRWAN.
`~
Les dangers ďun chauffage défectueux.
Les premières atteintes de l’hiver ramènent avec
celles les préoccupations du chauffage des apparte-
ments.
Le moment est venu de rappeler combien cette
question est importante au point de vue de l'hygiène
et de signaler les graves accidents auxquels nous
sommes exposés si nous négligeons certaines pré-
cautions.
Un chauffage défectueux constitue le plus souvent
une menace d'empoisonnement chronique; il n'est
pas rare qu'il cause la mort.
Or, il en est de l’intoxication par les gaz prove-
nant de la combustion du bois, ou du charbon de
terre, ou du gaz d'éclairage, comme de l’empoison-
nement par les champignons: les catastrophes
dont nous somines témoins chaque hiver, malgré
leur retentissement, n'empèchent pas les impru-
dences nouvelles!
On ne saurait donc trop attirer l'attention du
public sur les dangers qui le menacent et lui recom-
mander la prudence.
A Paris, dit le D" Ogier, chef du laboratoire de l
la préfecture de police, les accidents causés par
l’oxyde de carbone sont innombrables. Les plus
fréquents sont dus à l'emploi d'appareils de chauf-
fage du genre de ceux qu'on appelle à combustion
lente, au mauvais fonctionnement de ces appareils,
à des dispositions défectueuses des cheminées par
où s'écoulent les produits de la combustion.
I! est permis de croire qu'un grand nombre de
morts causċes par des poĉles mobiles passent ina-
perenes et que bien des malaises non suivis de
mort sont altribuables à l'inhalation prolongée de
mélanges gazeux contenant de faibles proportions
d'oxyde de carbone.
À Paris, une des formes les plus communes et
les plus insidieuses d'empoisonnement consiste dans
l’envahissement par les gaz délétères des logements
dans les maisons anciennes, grâce aux fissures qui,
peu à peu, détériorent les cheminées insuffisam-
ment surveillées; souvent, ces fissures sont si peu
apparentes que les victimes ne peuvent se douter
du danger qui les menace.
Nous voudrions donner simplement ici quelques
indications sur Îles phénomènes physiologiques
pouvant faire présagerl’empoisonnement par l’oxyde
de carbone, alors mème que tout concourrait dans
un appartement d’apparences irréprochables à in-
spirer une trompeuse sécurité.
L'air d’une salle envahie par ce gaz ne donne pas
d'indications nettes à l'odorat quand le taux de
l’oxyde de carbone est minime et pourtant suffisant
pour mettre la vie humaine en péril. On a conseillé
une réaction extrêmement sensible : installer une
cage contenant un animal de petites dimensions,
un oiseau ou une souris, dans l’appartement sus-
pect. Ces petits êtres succombent rapidement dans
une atmosphère renfermant moins de 0,1 pour
(1) Ces terrains se répartissent ainsi, d’après l'An-
nuatre des eaux et forèts pour 1912 ;
Landes, pâlis, bruyères, etc...... 3 898 530 hectares
Montagnes dénudées et rochers... 4972 994 —
Terrains mouilleux et marécageux. 316 573 =
TOUDICRES este ire 38 292 —
6 226 389 —
N° 1448
400 (1) d'oxyde de carbone ; ce moyen est infaillible,
mais tout le monde n’a pas rapidement à sa dispo-
sition un oiseau ou une souris.
Il nous parait plus pratique de noter attentive-
ment les troubles qui peuvent survenir dans l'état
de santé habituel de chacun de nous.
Dans l’empoisonnement graduel, on observe de
la pesanteur de tête, des vertiges, des tremblements,
de la faiblesse musculaire. L’anémie, les bourdon-
nements d'oreille, divers troubles nerveux, des
troubles de la nutrition surviennent ensuite; les
saignements de nez deviennent fréquents, la cou-
leur de l'urine se fonce et prend parfois la teinte
du sang. |
Souvent on ne prête qu’une attention superficielle
à tous ces phénomènes insolites parce qu'ils
semblent passagers, et pourtant ils constituent des
symptômes graves. Si les hémorragies nasales se
multiplient, observez la couleur du sang. Le sang
d'un intoxiqué, mème légèrement, est plus rouge,
plus rutilant. Il y a trois ans, dans un de nos
grands hòpitaux militaires, nous remarquions que
trois infirmiers, travaillanten hiver dans une salle
mal aérée et chauffée à la houille par un grand
poêle en fonte, saignaient régulièrement du nez
tous les matins. L'examen spectroscopique de leur
sang nous convainquit de suite que l’hémorragie
n'avait pas d'autre cause que l’oxyde de carbone.
On ne peut songer à établir un diagnostic certain
sur l'analyse de l'urine; la présence de l’oxyde de
carbone dans le sang ne semble pas changer la
constitution de l’urine, mais il en est autrement
de l’examen du sang : c’est à lui qu’il faut recourir
pour lever tous les doutes.
Il est toujours facile de provoquer un saignement
de nez si l'action de l’oxyde de carbone ne l'a pas
déterminé naturellement. Recueillez ce sang, une
très petite quantité suffit (par exemple, le volume
d’un dé à coudre au maximum). Portez ce sang
coagulé ou liquide à un laboratoire d'hôpital ou
à un pharmacien ou à un chimiste, et priez-le de
lexaminer au spectroscope. C'est une opération
facile et rapide. Pour la réaliser, il suffit de diluer
quelques gouttes de sang dans un peu d'eau di-
stillée. La solution rendue limpide, si cela est néces-
saire, par une filtration au papier est introduite
dans un tube en verre bouché ou dans une petite
cuve de verre à faces parallèles et placée devant
la fente du spectroscope. Nous ne pouvons donner
ici une description de cet instrument. Rappelons
seulement que la spectroscopie consiste essentiel-
lement en l'examen au moyen d’une lunette gros-
sissante de la lumière émise par une source quel-
conque : Soleil, bec de gaz, etc., et décomposée par
un prisme. Certains corps incandescents (gaz,
(1) Une atmosphère renfermant 1:500 de CO est très
dangereuse pour l’homme. Il meurt rapidement en
respirant de l'air chargé de 4: 200 de CO.
COSMOS
467
mélaux, etc.) présentent dans le spectre ainsi
observé des raies caractéristiques invariables, bril-
lantes et colorées ou bien obscures. Les solutions
d’une foule de composés interposées entre la source
lumineuse et le prisme présentent également des
raies ou des bandes toujours reconnaissables et
occupant des positions invariables.
Dans ces conditions, le sang pur très dilué inter-
posé fait apparaitre dans le spectre deux bandes
sombres : la première dans le jaune, la seconde,
plus large, à droite de la précédente. Le spectre du
sang oxycarboné, c’est-à-dire chargé d'oxyde de
carbone, donne également deux bandes d'absorption,
mais elles sont légèrement déviées vers la droite.
De plus, si on traite la solution de sang normal
par un corps réducteur comme le sulfhydrate
d'ammoniaque, on voit apparaitre un nouveau.
spectre d'absorption, celui de l'hémoglobine réduite,
caractérisé par une raie obscure qui occupe à peu
près l'espace intermédiaire entre les deux raies
primitives et qui est un peu plus pâle et plus large:
que celles-ci. Le sang chargé d'oxyde de carbone et
traité de la même facon donne un résultat tout
différent. La combinaison du gaz avec l'hémoglo-.
bine n'est pas réduite et, les deux bandes persistent.
Bien entendu, la différenciation est d'autant plus
nette que le sang intoxiqué est plus chargé d'oxyde
de carbone. Souvent, le mélange de sang resté.
normal au sang oxycarboné est tel que l’observa-
tion du spectre perd sa netteté, mais il est toujours
facile d'observer en mème temps le spectre de
quelques gouttes de sang provenant d’une personne
en parfait état de santé. Si les deux spectres ne
sont pas superposables, c'est-à-dire identiques, on
sera en droit de conclure à l’altération du sang:
suspecté. Vibert et Ogier ont trouvé que la réaction
spectroscopique cessait d’être appréciable lorsque:
l'hémoglobine oxycarbonée était inférieure au:
dixième de l’hémoglobine totale du sang; on peut
encore augmenter la sensibilité de ce procédé en
opérant sur une quantité un peu plus grande de
sang, extrayant l'oxyde de carbone par la chaleur
et par le vide et le concentrant dans un faible
volume de sang (Moitessier et Bertin-Sans\. Ces
opérations sont faciles à réaliser dans un labora-
toire ordinaire. Du sang normal renfermant {: 109:
d'hémoglobine oxycarbante peut ètre ainsi observé
utilement (Saint-Martin).
Dès qu'il est bien établi que les malaises res-
sentis sont imputables anx gaz dégagės par une
cheminée, il faut sans retard faire exécuter les
travaux nécessaires pour remédier à cet état défec-
tueux. Rappelons que, dans le cas d'intoxication
aiguë, rapide, le premier remède consiste à traiter
le malale par tous les procédés propres à intro-
duire de l'oxygène dans le sang, car si l'oxyde de
carbone possède la propriété de déplacer dans les
poumons l'oxygène de l’oxyhémoglobine, cette pro-
468
priété est réversible, et l'oxygène à son tour est
capable de dissocier la combinaison du sang avec
le gaz toxique et de se substituer à ce dernier. Il
est donc indispensable de recourir à la respiration
artificielle et aux inhalations d'oxygène. Le poison
gazeux s'éliminera en nature par les poumons,
mais ce n’est pas vingt litres d'oxygène qu'il faut
faire respirer à la personne intoxiquée, ce sont des
centaines de litres!
Les empoisonnements par l'oxyde de carbone se
produisent fréquemment la nuit dans des chambres
fermées. Dans les modestes logis, chacun est bien
souvent obligé de clore sa chambre. Lorsqu'on peut
agir autrement, il ne faut pas hésiter à le faire. Il
est très sain de dormir en plaçant son lit en dehors
de tout courant d'air, mais en laissant par une
porte entr'ouverte la communication libre avec une
pièce voisine, et si dans cette pièce adjacente à la
chambre à coucher on peut laisser entrer librement
par un vasistas l’air du dehors, tout sera pour le
mieux. Mème dans les climats froids, cette facon
de procéder est saine et hygiénique.
On a prétendu qu'il importait peu, lorsqu'il s’agis-
sait d'une atmosphère viciée par l’oxyde de carbone,
d'être couché par terre, ou sur un lit bas, ou sur
un lit élevé, l'oxyde de carbone ayant à peu près la
même densité que l'air et, de ce fait, se diffusant
rapidement. ‘Pourtant il est bien certain que la
position du dormeur rapproché du sol est la plus
dangereuse. En effet, un dégagement d'oxyde de
carbone est généralement accompagné d'acide
carbonique. Ce dernier se localisant dansles couches
voisines du sol diminue la richesse en oxygène de
l'espace où il se répand. Or, ce qui détermine la
gravité des accidents, ce n’est pas la masse absolue
d'oxyde de carbone entrée dans le sang, mais le
rapport entre les masses d'oxyde de carbone et
d'oxygène simultanément introduites.
COSMOS
24 OCTOBRE 1912
Tout le monde a encore présent à l’esprit l’acci-
dent dont furent victimes M. et M"° Emile Zola: le
premier fut trouvé mort sur le sol de sa chambre;
la seconde, étendue sur Île lit, était encore vivante
et put être sauvée. Dans le mème ordre d'idées,
le D" Kurt Volff, professeur à Dresde, a signalé, il
y a quelques années, un cas particulièrement remar-
quable d'intoxication par l’oxyde de carbone, où
lon trouva morts le matin dans une écurie un sol-
dat ordonnance ainsi que deux chevaux logeant
habituellement dans cette écurie, tandis que deux
autres chevaux étrangers furent trouvés debout,
indisposés, sans doute, mais vivants. Ces deux der-
niers chevaux avaient passé certainement toute la
nuit dans cette position, comme le font d'ordinaire
ces animaux dans une écurie qui ne leur est pas
familière : c'est à cette circonstance qu’ils durent
évidemment d'échapper à la mort.
Dans cette courte étude, nous nous sommes
occupés uniquement de l’oxyde de carbone, soit
qu'il provienne de la combustion du bois, du coke,
de la houille, soit qu'il ait pour origine la combus-
tion du gaz d'éclairage. Nous aurions encore à
mentionner les dangers auxquels nous exposent
les réchauds à gaz, les poîles à pétrole. Les gaz
qu'ils dégagent sont évidemment malsains, mais
bien moins dangereux que ceux qui proviennent de
la combustion de la houille dans les cheminées
mal entretenues ou des poèles mobiles.
Lorsque les réchauds à gaz et les poles à pétrole
sont bien réglés, ils n’émettent que très peu d'oxyde
de carbone, et c’est surtout par l’acide carbonique
qu ils vicient l’atmosphère. Or, il est plus facile de
se défendre contre l'acide carbonique que contre
l'oxyde de carbone; le second de ces gaz est
soixante fois plus toxique que le premier.
Dr LAHACHE.
2 UMMM
L'utilité et la nocuité des araignées.
Les araignées comptent parmi les animaux les
plus industrieux; leur habileté à ourdir des pièges
soyeux d'une confection souvent compliquée, leur
patience à attendre le gibier, le talent qu’elles
déploient pour se défendre contre leurs ennemis
ou pour ligotter une proie trop énergique, leur tou-
chante sollicitude maternelle, leur valent l’atten-
tion sympathique des naturalistes qui étudient leurs
mœurs.
En outre, comme toute celte ingéniosité se dé-
pense, en somme, au bénéfice de l’homme, qui
trouve dans les araignées, tant champêtres et
forestières que domestiques, de précieux auxiliaires
dans su lutte contre les insectes malfaisants, les-
quels sont légion, il semblerait que ces si utiles
arthropodes dussent être traités généralement avec
les égards et la bienveillance mérités par leurs
services.
Cependant, les araignées sont partout traquées,
pourchassées, détruites; et cet ostracisme recon-
nait des causes diverses, parmi lesquelles il en est
qui ont au moins une apparence de légitimité,
tandis que les autres sont de pures calomnies,
basées sur l'erreur, le préjugé et ignorance.
Parmi les griefs réels figurent l'incommodité et
le caractère peu esthétique des toiles tendues dans
les coins des appartements ou suspendues aux pla-
fonds; ces toiles, surtout lorsque la poussière s’y
est accumulée, représentent, on doit le recon-
naitre, un mode de décoration peu susceptible
N° 1448
d'ètre tolérée dans une maison bien tenue. En
outre, bien des personnes éprouvent une insur-
montable répugnance à l'égard de l'araignée elle-
mème, surtout pour les grosses espèces, dont l'as-
pect livide et les longues pattes velues font des
objets hideux et de physionomie modérément ave-
nante. C’est une sorte d’idiosyncrasie nerveuse,
F1G. 1. — BOUCHE D'UNE ARAIGNÉE (Dysdera).
analogue à celle qui s’exerce à l’endroit d'autres
animaux, comme les reptiles, les souris, et qui
peut être assez intense pour qu'on ait vu des mili-
taires d'une grande bravoure éprouver une syncope
au seul aspect d'une araignée.
Mais, en dehors de ces motifs excusables de
répulsion, combien d’accusations erronées dont
l'expérience a fait justice! Bien des personnes sont
eonvaineues qu’une boisson où une araignée est
tombée se trouve empoisonnée; que la morsure
de ces bestioles est dangereuse, et que leur simple
contact peut même être vénéneux, occasionner sur
la peau des rougeurs, des boutons, communiquer
des propriétés malfaisantes aux fruits qu'elles
touchent dans les jardins.
Le caractère vénéneux des araignées est infirmé
FIG, 2. — CHÉLICÈRE ET GLANDE A VENIN (Mygale).
par le fait que dans certains pays elles figurent
dans la nourriture de l'homme. Les habitants indi-
gènes de la Nouvelle-Calédonie mangent avec
délices, au témoignage de l'entomologiste Bois-
duval, une grosse espèce d'épeire, à laquelle ils
trouvent un goût exquis. Ce serait encore ici Poc-
casion de rappeler le cas de l’astronome Lalande
COSMOS
469
croquant avec plaisir des araignées, mais peut-être
n'y a-t-il là qu'une légende. L'’abdomen de la
tégénaire domestique, bien lavé et frotté d’un peu
de beurre, offre, parait-il, une saveur délicate, rap-
pelant celle de la noisette. Tous d’ailleurs, à notre
insu, nous avalons sans aucune fâcheuse consé-
quence de petites araignées du genre Theridion,
dissimulées parmi les grains des grappes de raisins
cueillies à l'automne.
Relativement aux suites de la piqûre, les craintes
populaires sont un peu plus justifiées, mais le
danger est de beaucoup moins grand qu'on ne le
prétend généralement. L'appareil à venin des
araignées est formé par deux glandes tubuleuses
sécrétrices, disposées symétriquement de chaque
côté de la tête, et aboutissant chacune à un réser-
voir où s’accumule leur produit de sécrétion;
l'appareil d'inoculation est constitué par deux
\ f
N j à
FIG. 3. — « SEGESTRIA PERFIDA ».
pinces biarticulées, ou cAélicères, que l’on s'ac-
corde à considérer comme des antennes modifiées,
et qui sont percées sur toute leur longueur d'un
canal servant de passage au venin.
Les effets de ce venin sont rapidement mortels
pour les insectes et les autres animaux à sang
froid, dont les araignées font leur proie ordi-
naire, et même, chez certaines espèces exotiques
(la mygale aviculaire, par exemple, de l’Amérique
du Sud), pour les petits animaux à sang chaud;
mais ils n'occasionnent pas chez l’homme d’acci-
dents graves. Dans les circonstances normales, et
en dehors d'une réceplivité exceptionnelle comme
on en constate parfois des exemples à l'égard
d’autres venins et mème de substances non toxiques,
la morsure des plus grosses espèces n'est pas plus
dangereuse que la piqüre d’une guèpe ou d'un
moustique. Sa plus incommode conséquence est le
symptôme douleur, qui disparait dès que le venin
a été résorbé.
#70
Cependant, certaines araignées de grande taille
peuvent quelquefois occasionner un pọu de fièvre
par leur morsure. Telle est la farentule, grosse
lycose assez commune dans la Pouille, et qui
a donné lieu aux exagérations et aux légendes que
tout le monde connait, légendes que des médecins
sérieux, comme Boccone, Valetta, Valentini, ont
contribué à accréditer, et qui eurent même, en
4702, les honneurs d’une discussion à l’Académie
des sciences de Paris.
On prétendait que la morsure de cette araignée
causait des désordres nerveux d’un caractère
extravagant, le tarentisme, et que ces désordres
ne pouvaient être guéris que si l’on faisait danser
le patient, jusqu'à ce qu’il tombât de fatigue, aux
sons d’une pastorale spéciale, la farentola. La
Jycose tarentule existe toujours en Italie; la fièvre
qui se déclare parfois à la suite de sa piqûre, chez
des individus très susceptibles, en particulier chez
des femmes nerveuses, cède très facilement à l’ad-
ministration, sans accompagnement de musique,
de quelques sudorifiques.
Des expériences précises et assez courageuses
ont été faites il y a déjà plusieurs années sur la
capacité vénénifique des araignées par le D' Dugès,
de Montpellier. Ces expériences ne sont pas ignorées
des naturalistes, surtout des entomologistes; j'en
rappellerai les résultats pour les lecteurs qui ne
font pas une étude spéciale de ce domaine de
l'histoire naturelle.
Les expériences de Dugès ont porté sur plusieurs
espèces, choisies à raison de la différence de
structure de leur appareil inoculateur, et aussi de
l'inégale intensité de leurs réactions défensives
contre l'assaillant qui les inquiète. Les épeires, les
ségestries et les autres types analogues, dont les
chélicères trop peu robustes sont impuissantes à
percer l’épiderme humain, ne firent éprouver
à l'expérimentateur qu'un pincement peu doulou-
reux.
Avec la Dysdère érythrine, plus petite, mais
munie de chélicères proportionnellement plus
longues et surlout plus aiguës, la piqüre était plus
sensible et s'accompagnait d'une cuisson vive, mais
de très faible durée. La Clubiona nutrix, espèce
très courageuse qui, lorsqu'elle est attaquée, et
surtout quand elle a des petits, menace vaillam-
ment l’adversaire de ses pinces où suinte une gout-
telette de venin, et qui possède d'ailleurs des
chélicères solides et très aiguës, ne produisait
également que des piqûres si fines et si superfi-
cìelles, que lon eùt pu croire lépiderme intact,
sans la cuisson, la rougeur et la petite ampoule qui
se manifestaient au point saisi entre les crochets.
Enfin, après avoir expérimenté ces différentes
araignées de petite taille ou faiblement armées,
Dugès se soumit à la piqûre d'une espèce que ses
grandes dimensions et la force de ses tenailles
COSMOS
24 OCTOBRE 1919
rendent théoriquement plus redoutable, la Seges-
tria perfida, vulgairement araignée des caves.
L'individu choisi mesurait 2 centimètres, des mandi-
bules aux filières; saisi avec précaution par les
pattes reployées, il fut placé d’abord sur différents
objets, sur les vêtements de l’expérimentateur,
sans qu’il manifestât la moindre velléité de mordre.
Mais à peine fut-il venu en contact avec la peau
nue de l’avant-bras, qu'il en saisit un pli entre ses
robustes chélicères d'un vert métallique, et y
enfonça ses crochets; quoique laissé libre, il y
demeura suspendu quelques instants, puis il se
laissa tomber et s'enfuit, laissant sur l'épiderme,
à 4 millimètres d’écartement, deux petites plaies
rouges, à peine saignantes, légèrement ecchymosées
au pourtour, et comparables à celles qu'aurait pu
produire la piqüre d’une grosse épingle.
Au moment de la morsure, la sensation éprouvée
fut assez forte pour mériter le nom de douleur;
elle était analogue à celle d’une piqüre d'ortie.
Elle persista, en s’atténuant graduellement, pen-
dant six à sept minutes. Presque aussitôt, une
ampoule blanchätre se forma autour des deux
piqüres, tandis que tout le pourtour, sur un dia-
mètre d'environ 2,5 cm, se colorait en rouge et se
soulevait légèrement, sous l'afflux du sang. La
résorption du poison introduit s'opéra très rapide-
ment, et, au bout d’une heure et demie, tout symp-
tòme inflammatoire avait disparu.
En général, les araignées sont peu agressives,
et, leurs chélicères ayant surtout pour fonction de
paralyser par l'inoculation du venin les bestioles
qu'elles capturent, elles n’ont pas de tendance
à s'en servir comme d'un moyen de défense contre
leurs adversaires, ou pour attaquer des animaux
n’appartenant pas au cadre zoologique de leurs
proies ordinaires. On vient de voir que la ségestrie
au moins fait exception, et saisit à l’occasion,
même sans provocation, l’épiderme humain. La
tégénaire domestique, qui est l’espèce que l’on
accuse le plus communément d'attaquer l'homme
et de sucer son sang en provoquant au point piqué
une ampoule, parait assez timide et ne mord pas
lorsqu'on la saisit, Cependant, l'obscurité nocturne
lui donne peut-être plus de hardiesse, et, comme
. elle est souvent la seule araignée des maisons, on
ne voit pas bien à quelle autre espèce il faudrait
rapporter ces boutons que l’on observe parfois sur
la peau au réveil, et où l'on distingue deux petits
points rouges, trace d'une double piqûre que ne
pourraient faire les insectes suceurs, munis d'un
rostre unique.
Le fait est d’ailleurs assez rare pour que l’on
puisse considérer les araignées, du moins dans
nos pays, comme réellement sans danger pour
l'homme, d'autant plus que leur venin n'est ni
assez énergique ni surtout assez abondant pour
causer des désordes graves dans un organisme
N° 1348
volumineux. Chez certaines espèces même, comme
les mygales, ce venin est si peu abondant qu'elles
doivent suppléer à son insuffisance par une éner-
gique dépense de force musculaire. Ainsi Dugès
a vu une grosse mouche bleue survivre à la mor-
sure d'une mygale masonne qui l'avait tenue entre
ses chélicères pendant dix minutes, tandis que
COSMOS
471
dans le même temps cette araignée vint à bout,
par la seule force de ses mandibules, d'étrangler
un lézard long de 410 centimètres. En résumé, les
araignées demeurent des animaux plus utiles que
nuisibles, et les quelques inconvénients auxquels
eHes donnent lieu sont d'une nature facilement
évitable. À. ACLOQUE.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 14 octobre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
La 17' Conférence générale de l’Associa-
tion géodésique internationale. — La 17° réu-
nion générale de l'Association géodésique internatio-
nale a eu lieu du {7 au 27 septembre, à Hambourg.
Les séances générales ont eu lieu les 17, 19, 21, 23, 25
et 27 septembre sous la présidence de M. le général
Bassot. M. BaizzAUD rend compte des travaux, des dis-
cussions et des résolutions qui ont été prises. Les
membres francais présents étaient, avec M. le général
Bassot, MM. Ch. Lallemand, directeur du Service du
nivellement général de la France; le colonel R. Bour-
geois, directeur du Service géographique de l’armée;
F. Hanusse, directeur du Service hydrographique de
la marine: le lieutenant-colonel Lallemand, chef de la
Sectivn de géodésie au Service géographique de
l’armée; B. Baillaud, directeur de l’Observatoire.
Note sur quelques minéraux de Madagascar
dont plusieurs peuvent être utilisés comme
gemmes. — Toutes les roches granitiques connues
présentent la particularité commune d’avoir leurs
feldspaths plus ou moins opaques ou, tout au moins,
troubles, par suite du développement secondaire de
produits d'altération, cristallins ou amorphes.
La pegmatite, au contraire, est remarquable en ce
que tous ses minéraux constitutifs se présentent dans
un état de pureté idéale et donnent, par suite, des
indications sur ce que peuvent ètre les roches grani-
tiques dans leur état de fraicheur originelle.
Tous ces minéraux, quartz, orthose, diopside, apa-
tite, sont transparents et d’une limpidité telle qu'ils
peuvent être utilisés comme gemmes.
M. A. Lacroix à étudié un certain nombre de ces
minéraux provenant de Madagascar et dont la con-
servation est remarquable. Il en cite plusieurs qui
devront désormais figurer dans la liste des pierres
précieuses. Il expose les qualités optiques et les com-
position chimique de ces divers produits.
Sur Ia théorie cinétique des gaz ionisés et
le principe de Carnot. — La théorie des gaz ioni-
sés dans un champ magnétique conduit à une consé-
quence assez singulière, qui met en cause le principe
de Carnot. En effet, comme le montre M. Gouy, abs-
traction faite des rencontres, la pesanteur combinée
avec le champ magnétique uniforme imprime aux
ions un moyen mouvement qui est perpendiculaire à
ces deux vecteurs, et dont le sens est opposé pour
les ions des deux signes; les rencontres avec les molé-
cules annulent ce mouvement quand le gaz est très
dense; mais, dans un gaz raréfié, ces mouvements
existent et on pourrait recueillir un courant capable
de produire un travail extérieur indéfini.
Si, cependant, le principe de Carnot est ici en défaut,
on peut trouver la raison de cette dérogation : elle se
trouve dans ce fait que l’action simultanée de la pe-
santeur et du champ magnétique uniforme imprime
aux ions des mouvements qui, dans une certaine me-
sure, sont coordonnés, contrairement au caractère
normal de l'agitation thermique. Le champ magnétique
joue le rôle du démon de Maxwell, qui, sans fournir
d'énergie, exerce sur les particules une action direc-
trice et sélective, les faisant ainsi échapper à la loi
statistique qui constitue le second principe de la ther-
modynamique.
Sur l’opacité aux rayons X de tissus conve-
nablement chargés par une teinture aux sels
de plomb. — Dans le but d'améliorer les moyens de
protection des opérateurs, qui manipulent habituelle-
ment les rayons X,contre la dangereuse radiodermite
professionnelle, M. L.-G. Droit a utilisé la propriété
que possède la soie d’absorber, au cours des opéra-
tions de teinture, des quantités considérables de com-
posés métalliques. Avec le concours de MM. Guicherd
et Sisley, de Lyon, il a réalisé des schappes de soie-
ayant recu, par les procédés de la teinturerie,
d'énormes charges de phosphostannate de plomb.
Deux à six épaisseurs de ce tissu, qui est relativement
souple, forment écran efficace contre la radiodermite.
Sur la dyssymétrie des ions positifs et né:a-
tifs relativement à la condensation de la
vapeur d’eau dans une atmosphère de gaz
carbonique. — Note de M. Besson.
Deux écrans de plomb de 6 centimètres d'“paisseur
placés l’un au-dessus de l’autre, à une distance de
3 millimètres, laissent passer un faisceau étroit de
rayons de Rentgen venant raser la plate-forme.
Le gaz carbonique est soumispendant deux secondes
à l’action du rayonnement; on établit un champ de
& volts qu’on peut inverser à volonté.
La dyssvmétrie apparait très nettement par obser-
vation directe; la pluie ou le nuage qui résulte de la
condensation sur les ions négatifs en excès est visible-
ment plus intense que dans le cas où ce sont les ions
positifs qui prédominent.
Le phénomène observé est beaucoup plus net que
dans le cas de l'air.
472
Résultats scientifiques de l'excursion alpine de la
Geologische Vereiniqung : les nappes lépontines dans les
Tauern. Note de M. Pieare Termien. — De l'influence
de la castration sur la formation du sucre dans
les tiges du maïs et du sorgho sucré. Note de
M. Évocano Hrckez. — Observations de la comète
Gale (1912 a), faites à l'Observatoire de Lyon. Note de
M. J. Guirrauue: à l’'Obervatoire de Marseille par
M. Bonnrzzv; à celui de Besançon par M. CHOFARDET.
— Sur l'orientation des équatoriaux photographiques.
Note de M. Enxesr EscLancox. — Sur les systèmes con-
jugućs. Note de M. A. Perot. — Sur le principe de
Dirichlet. Note de M. HEeNR1 LEBESGUE. — Sur un point
encore controversé dans l'étude des chronomètres
marins. Note de M. Juzes ANbranr. — De l'association
moléculaire dans les gaz. Note de M. J. pe Borssouory.
— Attraction électrique de deux sphères conductrices;
propriétés de familles de polynomes intervenant dans
ce problème et leurs relations avec les fonctions sphé-
riques d'ordre supérieur de Heine. Note de MM. À. Guit-
LET et M. AvsBeRT. — Sur la dureté des métaux. Note
de M. Hanrior. — Génération de grains volumineux
dans les métaux. Note de M. Fézix Rosix ; l’auteur
examine les conditions déterminant ces phénomènes qui
résultent du recuit, du pliage et du perforage, et qui,
par suite, jouent industriellement un rôle important.
— La loi des masses. Ses vérifications contradictoires
et sa défense par M. Le Chatelier. Note de M. ALBERT
Corsox. — Variations de l’optimum de température
sous l'influence du milieu chez le Mucor Rourii. Note
de M. Mavuice Dunanpanp. — Sur la cytologie du Cap-
nodium meridionale et du mycélium des fumagines.
Note de M. G. Anxacp, — Composition chimique du
sang et hémolyse. Note de MM. ANDré Mayen et GEORGES
SCHAEFFER. — Synthèse de galactosides d’alcools à
l'aide de l'émulsine. Ethylgalactoside ß. Note de
MM. Eu. Bounouezor et H. Hénissey. — Un cas de
reproduction extraordinaire chez un Protiste, Poly-
spira Delagei Minkiew. Note de M. Rouvazu MiIXkIEWICZ.
— Sur l'existence de plusieurs nappes superposées
dans la Cordillére cantabrique, entre Santander et
Llanes. Note de MM. Lron BEerrnaxo et Louis MEN-
GAUD. — Après avoir étudié la structure du bassin
d'Urville (Calvados) et ses conséquences, au point de
vue de l’exploitabilité du minerai de fer, M. L. Cayeux
démontre que ce bassin assure à l'industrie une
réserve de minerai de beaucoup supérieure au ton-
nage prévu. C’est à l’ouest de la vallée de la Laize,
par suite de la largeur du bassin, de son relèvement
graduel et de la plus grande épaisseur du minerai,
que les exploitations seront les plus heureuses.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES!)
Congrès de Nimes.
Section de physique.
Prcsidée par M. Taissiizv, professeur agrégé à l'École
supérieure de pharmacie de Paris, cette section a
reçu communication de nombreux et intéressants tra-
vaux.
r
(1) Suite, voir p. jti.
COSMOS
2% OCTOBRE 191%
MM. Masson et Faucon (Montpellier) étudient lab-
sorption des radiations ultra-violettes par les alcools
de la série grasse. — iis se sont servis d'un spectro-
graphe en quartz muni d’une échelle en longueurs
d'onde graduée sur quartz et repérée sur les raies du
cuivre. La source lumineuse employée était l'arc élec-
trique jaillissant entre deux électrodes métalliques.
La plaque photogtaphique est impressionnée depuis
À = 5 015 (vert) jusqu’à 2 v00 de l'extrème ultra-violet.
Un courant continu est employé (3 ampères sous
110 volts) maintenu constant. Les liquides à observer
étaient contenus dans des tubes en verre de longueurs
variables, gradués en millimètres et obturés par des
disques de quartz. Sur chaque plaque ont été photo-
graphiés, avec la méme durée de pose, le spectre
témoin des électrodes, l'échelle en longueurs d’onde,
onze spectres correspondant à des épaisseurs ditré-
rentes de même liquide.
Les alcools étudiés avaient diverses provenances, et,
après rectification, on n'avait recueilli que les frac-
tions passant à la température d’ébullition du liquide
pur. Pour chacun, des résultats comparables ont été
donnés par plusieurs échantillons d'origine différente.
Les alcools primaires normaux, secondaires normaux,
tertiaires et primaires non normaux ont été ainsi
étudiés.
Des recherches sont actuellement poursuivies con-
cernant les bandes des spectrogrammes, des aldéhydes
et des acides correspondants.
M. Cu. Féry. 1° Nouvelles méthodes calorimétriques.
— Les lectures se font dans le calorimètre Féry par
un procédé thermo-électrique et n’ont besoin d'ètre
soumises à aucune correction de refroidissement ; bien
que construit pour des mesures industrielles, cet
appareil permettrait, en effectuant des lectures sur
un galvanomètre à miroir, de faire les recherches
thermochimiques les plus délicates.
2 La spectrographie et ses applications. — Le nou-
veau spectrographe s'applique à toutes les études
pouvant ètre faites à l’aide des appareils ordinaires.
Parmi ces applications spéciales, on peut citer : la
recherche du radium et la conduite du traitement
des minerais qui le renferment; l'examen des impu-
retés, en parliculier la présence du plomb dans les
métaux précieux les rendant impropres à la frappe
des monnaies; la recherche et le dosage, par les raies
ultimes de De Gramont, de l'argent dans les galènes;
la recherche des terres rares; la mesure bactéricide
par arcs à vapeur de mercure, etc.
Le D'° S. Lepuc (Nantes). La structure dynamique,
— Le point de vue dynamique est aussi étendu, aussi
général, mais doit être plus fécond que le point de
vue statique. Un corps est mieux défini par sa struc-
ture dynamique que par sa structure statique. L'au-
teur a trouvé des structures dynamiques identiques
en électricité, magnétisme, électrolvse, diffusion, cris-
tallisation, et chez les êtres vivants on y trouve des
formes analogues : formes arborescentes semblables à
celles des végétaux. Quelques photographies montrent
les remarquables analogies qui résultent de la confor-
mité des structures dynamiques (reproduction de la
forme et des détails d'une feuille végétale); de rami-
Ne 1448
fications arborescentes; de ramifications avec modifi-
cations terminales; la cristallisation du sulfate de
cuivre en milieu colloïdal; du nitrate de potassium
cristallisé dans la gélatine; un dépôt électrolytique
d'argent autour d’un centre cathodique. « La considé-
ration de la structure dynamique paraît si impor-
tante pour Île progrès général, conclut M. Leduc,
que l'on ne saurait trop appeler sur elle l'attention
de tous ceux qui s'intéressent à la connaissance de la
nature. »
M. CaéxNevgavu (Paris) étudie la viscosité des solu-
tions. — Il donne dans trois tableaux, pour l'alcool
éthylique, l'acide sulfurique et l’acide azotique, les
valeurs des diverses constantes des dissolutions
aqueuses de ces corps et principalement la viscosité.
L'influence de la capillarité parait assez faible pour
pouvoir être négligée. On est amené à admettre que
les hydrates en solution ne sont en réalité que
des mélanges ou des associations de molécules, ou
bien, ce qui est aussi vraisemblable, que les divers
agents physiques ne mettent pas en jeu les mèmes
propriétés des molécules. En dehors de toute hypo-
thèse, la viscosité, comme la lumière, ne ‘paraît pas
indiquer dans les solutions un grand nombre de com-
posés dissous.
Des études faites sur la viscosité du latex, ou des
solutions de divers caoutchoucs dans la benzine ou
dans divers solvants organiques peuvent présenter
un grand intérèt pour certaines applications du caout-
chouc et pour la détermination de la valeur indus-
trielle de la matière, pour ces applications.
M. Davuzère (Toulouse) {{es Tourbillons cellulaires
isolés) fait connaitre les faits nouveaux qu'il a obser-
vés, relatifs à la cire blanche d'abeille du commerce,
dont le pcint de fusion est voisin de 60°. La substance
fondue et filtrée est versée en couche mince sur un
bain de mercure de 8 cm d'épaisseur et 20 cm de
diamètre chauffé au bain de sable. La surface de
mercure, absolument plane quand on la chauffe,
forme un miroir d’une horizontalité parfaite et permet
l'observation et la photographie des tourbillons par
les procédés optiques de M. Bénard. L'auteur a ob-
servé ce qui 8e produit entre 80° et i4üe et a constaté
que l’on revient à haute température à la distribution
de tourbillons d’où l’on était parti, mais la grosseur de
ces nouveaux tourbillons isolés est beaucoup plus
grande que celle des premiers et leur aspect complé-
tement différent.
M. Gavrra Sizes (Toulouse). 1° Za résonanre multiple
des cloches. — L'auteur, avec M. Massol, a déjà dé-
montré (Congrès de Toulouse 1910) que les diapasons
vibrent une échelle harmonique de sons dont les hau-
teurs varient dans une étendue de douze octaves envi-
ron. Le son prédominant occupe le centre de cette
manifestation vibratoire; au lieu d’en êtrele son géné-
rateur, ou son fondamental, il n’est que l’harmonique,
le mieux favorisé par la manière d'être du corps
sonore. M. Sizes se propose, dans son mémoire actuel,
de démontrer qu'il en est de mème avec les cloches,
les gongs, les tams-tams. Les expériences furent faites
sur les quatre principales cloches de la cathédrale de
Montpellier.
COSMOS
473
> La résonance multiple des gongs el des tams-lams
chinois.
Le gong n'ayant qu’un centre de vibrations né
donne lieu qu’à une seule échelle tonale de sons. Il se
rattache au mode de vibration d’une corde fixée aux
deux extrémités. La fondamentale est en fonction de
dominante, comme dans les cloches et les diapasons,
mais le son prédominant est ici en fonction d’octave
de fondamentale au lieu de quinte.
L'effet produit par le tam-tam est tout différent : ses
vibrations manquent d'éclat à cause de la protubé-
rance sphérique dont le centre est agrémenté et qui
enlève toute souplesse à la partie vibrante. Les vibra-
tions se réduisent aux sons partiels supérieurs de
premier ordre, en rapport de quinte et d'octave. Par
sa constitution trop rigide, il ne peut vibrer d’harmo-
niques basses; de là son manque d'intensité; il ne
vibre pas non plus d’harmoniques relativement éle-
vées; de là son manque d'éclat.
Il est intéressant de remarquer que la cloche, comme
le tam-tam, a deux centres de vibrations, mais mieux
favorisés par une élasticité plus complète. Le rebord
ou pince vibre l'échelle inférieure. La frappe, qui est
à la base de l'échelle partielle supérieure, vibre le
son prédominant en relation de quinte avec le fonda-
mental. La faussure vibre la tierce mineure, harmo-
nique 7/6, suivie de la quarte et de la quinte du son
prédominant. Cette quinte est en fonction de la
9° harmonique de la fondamentale. Les sons suraigus
vibrent de ia partie médiane à la calotte. Gomme cela
se produit avec les cors et les trompettes, plus le
corps vibrant est court, plus la fonrtion harmonique
du son prédominant s'élève dans les degrés de
l'échelle générale, favorisant ainsi l'étendue de
l'échelle inférieure. Dans les quatre cloches de la
cathédrale de Montpellier, cette fonction passe de la
double quinte dans les deux premières à la neuvième
dans les deux autres. Le mode de vibration des
cloches se rapproche donc de celui des cors et des
trompettes.
M. Roré (Toulouse). Rerherrhes sur l'influence des
radiations solaires et des perturbations atmosphériques
sur la propagation des ondes hertsiennes. — Íl y a eu,
peudant l’éclipse du 17 avril, une augmentation nette
dans l'intensité de la réception, ce que montre très
nettement le diagramme que présente M. Rothé. Cette
augmentation doit-elle être attribuée à l'influence
directe des rayons solaires ou aux seules variutions
atmosphériques corrélatives du phénomène? Une étude
approfondie des résultats obtenus dans les diverses
stations, des heures auxquelles l'augmentation s'est
produite aux différents postes, mettra peut-être ce fait
en évidence.
MM. Rorué et Gnécomne De BoLLEMoNT. Elude spec-
trographique de la lumière solaire pendant l'éclipse
du 17 avril 1912, — Cette étude a été faite à l'aide
du spectroscope de Hilger; 51 photographies du
spectre ont été faites; la durée de pose était de
dix secondes.
Le mémoire présente un tableau donnant les
mesures et en méme temps les densités correspondant
aux angles mesurés, ainsi que les courbes oblenues
eu portant les temps en abscisses et les densités en
171
ordonnées. L'examen de ces courbes montre que la
densité photographique pour les radiations étudiées
décroit rapidement et d'une facon régulitre juqu'au
moment du maximum de l'éclipse, pour croître
ensuite.
On voit de plus qu’au moment du maximum cette
COSMOS
2% OCTOBRE 1912
densité diminue moins pour l’orangé que pourle bleu
et l'ultra-violet, c’est à-dire qu'à ce moment il y aurait
eu en plus grande quantité émission des radiations
situées vers la région rouge du spectre.
(A suivre.) E. Héaicuanrn.
BIBLIOGRAPHIE
Cours de mathématiques supérieures à l’usage
des candidats à la licence ès sciences phy-
siques, par l'abbé E. Srorrars, professeur à la
Facullé catholique des sciences, directeur de
l’Institut catholique d’arts et méliers de Lille.
Troisième édition, entièrement refondue. Deux
volumes de x-398 et 362 pages. Gauthier-Villars,
Paris, 1911.
La première édition de cet ouvrage date de 1891.
Depuis lors, la plupart des Facultés ont fondé un
certificat de mathématiques générales qui, joint
à deux autres cerlificats, confère le titre de licencié
ès sciences : or, le Cours de mathématiques supé-
rieures de l'abbé Stoffaës répondait par avance
aux exigences de ce programme. Cependant le
développement de la physique, le rôle plus impor-
tant joué par les mathématiques dans l'enseigne-
ment des Facultés et des Ecoles techniques, et géné-
ralement le relèvement du niveau scientifique des
étudiants invitaient M. Stoffaës à compléter les
deux précédentes rédactions de son livre et à intro-
duire même quelques chapitres nouveaux, tels : les
généralités sur les équations, les notions sur les
fonctions hyperboliques, .les séries entières, la
courbure des surfaces, etc.
Tout en adoptant une forme didactique parfaite,
l'auteur n’a pas voulu s’astreindre à une division
rigoureuse en trois parties : compléments d'algèbre,
géométrie analytique, analyse. 11 a gradué l'effort
demandé à l'étudiant. C'est ainsi qu'il a intercalé
les différentielles et intégrales entre les premières
notions d’analytique et les courbes et surfaces,
réservant les équations différentielles pour la fin.
Voici la distribution des matières dans les deux
volumes :
T. I: Compléments d'algèbre élémentaire.
Dérivées. Équations. Géométrie analytique. Diffé-
rentielles et intégrales. |
T.I[: Courbes et surfaces. Équalions différenticlles.
Des applications pratiques sont empruntées à la
physique (équation de van der Waals), à la méca-
nique rationnelle (équation des cordes vibrantes),
à l'électricité.
Après l'apparilion récente d'ouvrages similaires,
le Cours de mathématiques supérieures mérite
encore hautement de retenir la faveur des futurs
physiciens et de tous ceux qui ont le désir de s'ini-
tier au calcul différentiel et intégral.
Cinématique appliquée et mécanismes, par
L. Jacos, ingénieur général de l'artillerie na-
vale, directeur du Laboratoire central de la
marine. Un vol.grand in-18 jésusdexxrv-362 pages,
avec 171 figures, de l'Encyclopédie scientifique,
publiée sous la direction du D" Toulouse (cartonné
toile, 5 fr). O. Doin et fils, éditeurs, 8, place de
l'Odéon, Paris, 1912.
L'examen des mécanismes très nombreux que
l'on rencontre aujourd'hui dans la pratique néces-
site au préalable une classification de ces organes.
Beaucoup d'essais ont été faits dans cet ordre
d'idées, sans que l'on soit arrivé à un résultat
entièrement satisfaisant. L'auteur remarque que ce
fait parait tenir à la nature même de la question.
Il adopte la méthode de classification de Willis, en
la modifiant légèrement, et au point de vue de la
division, el au point de vue de la terminologie.
L'exposé des propriétés des roues dentées tient
une place en rapport avec l'importance de ces
mécanismes. La théorie en est bien connue, mais
l’auteur a voulu en rapprocher les méthodes pra-
tiques et les données numériques actuellement
usitées pour tracer ces organes, dont la construc-
tion est organisée aujourd’hui d'une façon tout à
fait industrielle.
L'étude cinématique d'un mécanisme doit en
précéder l’étude dynamique, qu’elle est de nature
à préparer très efficacement en permettant, par
l'emploi de méthodes convenables, la détermina-
tion des forces d'inertie. Ce point de vue souvent
négligé a été traité en détail, et on en verra toute
l'importance dans la partie de l'ouvrage consacrée
aux jonclions par liens rigides. La méthode géo-
métrique employée est due à M. l'ingénieur en
chef du génie marilime Marbec; elle est encore
peu répandue, et un exposé en a été donné au début
de l'ouvrage.
Deuxième essai de démonstration générale
du théorème de Fermat, par Loi Lussan,
ancien élève de l'Ecole polytechnique, colonel
du génie en retraile à Gan (B.-P.). In-8°, 9 pages
(4 fr). Librairies V'e Léon Ribaut, à Pau, et
Gauthier-Villars, à Paris. 1912.
Il s'agit de la solution en nombres entiers de
équation x” + y” = 2", que Fermat a dite impos-
sible lorsque x est plus grand que 2, mais sans
N° 1448
publier la démonstration de cette impossibilité.
M. Lussan, compatriote de Fermat en pays d'Ar-
magnac (Vascones ambo), s'était précédemment
essayé à résoudre le problème posé par Fermat
(voir Cosmos, t. LXVI, n° 1406, p. 27), mais ayant
reconnu que certaines de ses déductions étaient
inexactes, ila retouché sa démonstration pour lui
donner plus de rigueur.
La sociologie générale et les lois sociolo-
giques, par M. Gasron RicHanD. Un vol. de la
Bibliothèque de sociologie (Encyclopédie scien-
tifique), de 396 pages (relié, 5 fr.). Doin et fils,
éditeurs, 8, place de l'Odéon, Paris.
Les phénomènes sociaux sont de natures diverses
et peuvent se ranger en groupes distincts : phéno-
mènes religieux, phénomènes économiques, etc.
Ces catégories forment-elles des séries indépen-
dantes et closes, objet de sciences spéciales et indé-
pendantes, ou bien se compénètrent-elles suffisam-
ment de façon à donner lieu à une science
générale des phénomènes sociaux, à une socio-
logie générale? M. Gaston Richard soutient cette
seconde manière de voir en s'appuyant d’une part
sur le caractère circulaire ou de compénétration
réciproque qui s'attache aux phénomènes sociaux,
et, d'autre part, sur ce fait que la sociologie géné-
rale répond aux trois conditions imposées à toute
science : la généralité, l’enchainement causal, la
preuve. L’argumentalion de l’auteur est très
serrée, et MM. Durkheim, avec sa théorie de la
Société organique, et Léon Bourgeois, avec sa
morale de la solidarité, ont pu s'apercevoir de la
vigueur de logique avec laquelle leurs hypothèses
ont été combattues. — La manière de voir de
M. Gaston Richard, dont il est impossible de signa-
ler et d'apprécier les multiples idées éparses en
son livre, nous est apparue juste sur les points
que nous mentionnons.
L'invention de la poudre sans fumée en 1870,
par L. Saincaire. Une brochure in-8° de
21 pages (0,75 fr). Librairie Berger-Levrault,
rue des Beaux-Arts, Paris.
Depuis quelques années, on a eu souvent l’occasion
de parler des poudres sans fumée. Cette brochure
fort curieuse réunit à ce sujet diverses publi-
cations, d’après lesquelles il semble bien qu'une
poudre sans fumée, semblable sous bien des
rapports à celles employées maintenant dans les
diverses armées, aurait élé inventée vers 1870 par
M. Volkmann et aurait eu un commencement de
fabrication en Autriche.
Plus d’empoisonnement par les champignons!
Les dix champignons qui tuent; comment
les reconnaître. — Plaquette avec planche
COSMOS 475
de 12 figures d'après nature (0,50 fr), par
M. l’abbé L. Parcor, à D'huizon, près La Ferté-
Alais (Seine-et-Oise). (Moyennant 0,23 fron peut
se procurer une planche coloriée des champignons
signalés.)
La saison désastreuse qui a favorisé une poussée
exceptionnelle de champignons a causé, grâce
à l'imprudence invraisemblable d'une foule de col-
lecteurs amateurs, les accidents les plus cruels.
M. l'abbé Parcot, un mycologue distingué, ému
par ces événements, a réuni en quelques lignes les
renseignements qui doivent permettre de recon-
naitre les champignons certainement vénéneux. Ce
travail est à la portée de tous; une planche complète
le texte. C'est uvre excellente. Souhaiions que les
intéressés la consultent et surtout qu'ils sachent
apporter à cette lecture l’attention nécessaire pour
en tirer bon profit et pour ne pas s'égarer dans
une confiance qui pourrait avoir des suites désas-
treuses.
Commission de la Conservation au Canada.
(Ottawa).
Cette Commission, sous la présidence de l’Hon.
Clifford Sifton, a pour objet l'étude de tout ce
qui constitue la richesse de ce beau pays, conser-
vation et amélioration.
Elle est constituée par sept Comités, dont voici
l'énumération : Pècheries, gibier et animaux à
fourrures. — Forèts. — Terres. — Minéraux. —
Presse et organisation coopérantes. — Santé pu-
blique. — Eaux et forces hydrauliques.
Nous venons de recevoir les rapports de quatre
de ces Commissions, en deux beaux volumes char-
gés d'illustralions pittoresques etaccompagnés d'un
album de très belles cartes.
I. — Terres, pécheries et gibier, minéraur.
Il est impossible de rendre compte, en quelques
lignes, de travaux aussi considérables. Nous y
relevons, parce que cela a un intérêt tout spécial
pour nous, la longue histoire des pêcheries de
Terre-Neuve, les nombreuses difficultés auxquelles
clles ont donné lieu. Il est à regretter que nos
ministres, il y a quelques années, n'aient pas été
aussi bien documentés sur cetie grave question,
Il. — Les [forces hydranligues du Carada,
Ce travail considérable n'a pas demandé moins
de deux annces de travaux aux fonctionnaires de la
Conservation; sa rédaction a été contiée aux per-
sonnages les plus compétents: M. Arthur V. White
et MM. Leo Denis, W. J. Diek et G. B. Hall. Cette
étude est accompagnée d'un album de très belles
cartes.
——-—- - -m —— — —
COSMOS
2% OCTOBRE 1912
FORMULAIRE
Préparation d’une colle à la dextrine. —
M. John Eggers indique un procédé de préparation
de la colle que le commerce livre sous le nom de
« library paste » et qu'utilisent un grand nombre
de photographes pour le montage des épreuves.
Dextrine blanche...... Hdi 500 g.
Eau à 71 degrés centigrades....,. 1193 cm’
Essence de Wintergreen........ 0,5 em’
Essence de giroile............ s 0,5 cm?
On porte leau à 71 degrés centigrades et on
ajoute, par petites quantités, la dextrine en ayant
soin de ne pas laisser varier la température de
plus de { degré jusqu’à dissolution de la dextrine.
On ajoute alors les essences et on laisse refroidir.
On met en flacons bouchés et on abandonne huit
à quinze jours pour laisser prendre de la consis-
tance.
L'auteur attache la plus grande importance à la
question de la température (74 degrés centigrades).
(Photo-Revue, 22 sept.)
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses :
Le dispositif de sùreté pour les canalisations de
vapeur sous pression a été inventé par M. Boudouin,
1, rue Torte, Marseille.
M. A. L., à M. — Nous avons demandé cette adresse
à notre rédacteur: nous vous l'indiquerons dès qu'elle
nous sera parvenue.
X. Y. Z., à B. — 1° ouvrage sur les cerfs-volants:
Les cerfs-volants, par J. Leconse (3,50 fr). Librairie
Vuibert,63, boulevard Saint-Germain; Les cerfs-rolants
et leurs applications militaires, par le Lt Bors (3 fr).
Librairie Dunod et Pinat, 49, quai des Grands-Augus-
tins. — ? Aide-mémoire de l'ingénieur: Formules,
lables et renseignements usuels, par J. Cuavoez (2 vol.,
30 fr). Librairie Dunod et Pinat; ou Notes et formules
de l'ingénieur (12,50 fr). Librairie Bernard, 1, rue de
Médicis. — 3 Ouvrage sur le dessin de machines :
Dessin industriel, par Dupuis et Lousanp, 3 vol. dont
un atlas (15 fr). Librairie Dunod et Pinat; Pratique
de l'art de construire, par Craunez, LAROQUE et DaniËs
(22 fr). Mème librairie. — 4° Renseignements sur les
injecteurs fonctionnant avec de l’eau pour entrainer
une autre portion d'eau chargée de matières étran-
gères: nous n'avons rien trouvé sur ce sujet. Peut-ètre
un de nos lecteurs pourra-t-il nous renseigner.
M. A. D., à V. — Vous pouvez demander cette bro-
chure au Dr Alexandre, médecin au sanatorium
d'Hauteville (Ain). IL vous lenverra. H n’y a aucune
indication d'éditeur et de prix.
M. H. B., à P. — La soudure des pièces d’alumi-
nium n'est pas facile, comme vous pourrez le voir en
vous reportant au Cosmos (t. LX, n° 1264, 17 avril
1909). On a recours à la soudure autogène, en
emplovant des poudres spéciales. Vous trouverez les
produits spéciaux poursoudure, brasure del'aluminiuim
à la maison Odam et Cie, 131, rue d’Avron, Paris, XX°.
M. H. E, à M. — Les bouteilles en papier sont
fabrituées par la Purity paper bottle Company, de
Washington. Nous ne connaissons pas de correspon-
dant en France.
M. G. H., à N. — Le détecteur de M. Duroquier est
un détecteur à cristaux (cristal de galène naturelle
qui a subiun traitement spécial que l'inventeur garde
secret. Les cristaux sont sensibles sur toute leur
su:face, presque uniformément. Une pointe de cuivre
vient s'appuyer sur le cristal, et une molette exté-
rieure permet de la fixer dans une position invariable
quand on a trouvé un point particulièrement sensible
de la galène.
M. J. de L., à B. — On ne saurait tirer parti soi-
mème économiquement de ces résidus; il faut
s'adresser aux raffineries qui les achètent quand la
quantité est suffisante et la richesse acceptable. Il y a,
en effet, des ouvrages traitant de la métallurgie de ces
métaux, mais la question qui vous intéresse y tient
peu de place. — Le nombre des petits métiers s'exerçant
en chambre est incommensurable. Si vous en avez un
spécialement en vue, on tàächera de trouver le livre
qui parle de sa technologie; mais il n’existe pas d'ou-
vrage général.
M. M. T., à F. — La meilleure solution serait de
fabriquer un rhéostat à liquide dans lequel les plaques
pourraient se plonger plus ou moins. Un tel dispositif
suffirait pour faire fonctionner les quelques appareils
que vous mentionnez.
M. H. R.. à C. (Cuba). — En général, pour empè-
cher Jes dégagements des vapeurs acides des accumu-
lateurs, on recouvre les bacs. Les bacs en verre et en
ébonite ont un couvercle de mème substance, et les
joints sont bouchés au moyen d'un mastic élastique
et inattaquable aux acides (3 parties de cire minérale,
2 parties de colophane et 0,5 partie de gomme para,
le tout fondu au bain-marie et bien mélangé); les bacs
en celluloïd ont un couvercle de celluloïd collé avec
une colle spéciale (rognures de celluloïd dissoutes
dans de l’acétate d'amyle). Il faut cependant une petite
ouverture pour laisser échapper les gaz. On peut
aussi immobiliser l’électrolyte, mais ce procédé qui
permet d'éviter l'évaporation n’empéche pas le dégage-
ment de vapeur, et il accroît la résistance intérieure
de l’accumulateur.
M. P. M. C.. à M. — Dans un moteur désaxé, l’aug-
mentation de vitesse pendant la course descendante
tient justement à cette construction spéciale. Vous vous
en rendrez très bien compte en voyant une représen-
tation schématique d'un tel moteur. Pour vous donner
un renseignement précis sur cette augmentation de
vitesse, il faudrait connaître la course, le diamètre du
piston, la longueur de la bielle, outre les éléments que
vous indiquez.
ON
Imprimerie P. Fenon-Vrau. 3 et 5, rue Bayard, Paris, VIIIe.
Le gérant: A. FAIGLE.
No 4449 — 31 ocToBRE 1912
COSMOS
477
SOMMAIRE
Tour du Monde. — L’éclipse de Soleil du 10 octobre 1912. Redécouverte de la comète périodique de
Tuttle. L’envahissement par la race canine. Transformation rapide d’une espèce de poisson. Condensateurs
réducteurs de tension pour lampes électriques. La suddite. Substituts du charbon dans l'avenir. Variation
de l'intensité lumineuse du jour suivant les heures et les saisons. Les pêcheries d'ambre de la Prusse
orientale. Une silice de forme nouvelle. Le transport de l'hydrogène à grande distance par canalisation
La valeur de l'eau de mer, p. 477.
Correspondance. — Un bolide, J. be LA Porte, p. 481.
Installation de sécurité Martini et Huneke pour la manutention des liquides inflammables,
J. Boren, p. 482. — Télégraphie sans fil
: réception à domicile des signaux horaires (suite),
D" P. Conner, p. 485. — Perfectionnements aux hydroaéroplanes, Fournier, p. 488. — Les navires-
écoles de la marine marchande, GRADE&NwWITZ, p. 489. — Notes pratiques de chimie, J. Garçon,
p. 493. — Un tableau allégorique : la Pharmacie, GoubALuiER, p. 495. — Sociétés savantes : Académie
des sciences, p. 499. — Associalion française pour l’avancement des sciences (suite), HÉricHanD, p. 500. —
Bibliographie, p. 501.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
L’éclipse dé Soleil du 10 octobre 1912. —
Il semble décidément qu'il faille conserver peu
d'espoir dans le résultat des observations de la
dernière éclipse.
Un télégramme de M. F. Ristenpart, directeur
de l’Observatoire de Santiago du Chili, à l'éditeur
des Astronomische Nachrichten, mande en effet
qu'à Christina, dans l'État de Minas Geraes, où
s'était établie l'expédition chilienne, la pluie a
empèché presque toutes les observations. On a pu
cependant suivre avec une pile au sélénium la
variation lumineuse du phénomène qui a été con-
venablement enregistrée.
M. H. Morize, directeur de l'Observatoire de Rio-
de-Janeiro (Brésil), accompagnait M. Ristenpart, et
ses préparatifs ont eu le même sort.
D'autre part, un télégramme de M. C.-D. Perrine,
l'ancien astronome du Mont-Hamilton, devenu direc-
teur de l'Observatoire de La Plata (Argentine),
à M. E.-C. Pickering, et que celui-ci a transmis
à Kiel, signale qu’il a également eu de la pluie.
Seul donc, jusqu'ici, M. Worthington n’a pas
donné de ses nouvelles, et il reste un faible espoir
qu'il ait pu faire beau à Uberaba, où l’astronome
anglais s'était posté.
P.-S. — Un télégramme de Rio-de-Janeiro au
Bureau central des télégrammes astronomiques, en
date du 17 octobre, annonce que les observations
entreprises dans une localité qui n’est pas indiquée,
par M. L.-G. Tufino, de Observatoire de Quito
(Équateur), ont réussi.
Redécouverte de la Comète périodique de
Tuttle (Schaumasse 1912 b). — La comète ré-
cemment découverte à Nice par M. A.Schaumasse,
le 19 octobre, et que l'on croyait nouvelle, a été
T. LXVII. No 1549.
identifiée depuis avec une comète périodique, la
comète Tuttle. Nous dirons dans notre prochain
numéro comment on est arrivé à cette constatation.
HYGIÈNE
L’envahissement par la race canine. — Dans
son rapport sur le service vétérinaire sanitaire, en
1911, M. Martel, chef du service, constate que la
rage reste encore trop fréquente en France, car on
signale de 300 à 500 cas par an; il estime qu’elle
aurait entièrement disparu si les règlements admi-
nistralifs contre leschiens errants étaient appliqués.
Cette maladie devient rare dans le département
de la Seine, trois ou quatre cas par an. Cependant,
M. Martel constate que la population canine ne
cesse d’augmenter dans des proportions exagérées;
il trouve que cette augmentation n’a aucune raison
d’être et quelle constitue un danger public.
Nous partageons son avis pour différentes rai-
sons; d’abord, il est odieux de voir nos rues
encombrées de chiens, gros et petits, quand tant
de gens ont grand'peine à vivre; c'est non seule-
ment un danger, mais une gêne pour tout le
monde. Dans les villes, les chiens ne sont en gé-
néral que des bêtes de luxe; nous aimons ces bons
animaux, mais nous ne nous croyons pas le droit de
les imposer, eux et leurs déplorables habitudes, à nos
voisins; qu’on ait à la campagne des chiens en se
bornant au nécessaire, cest très bien; mais, dans
les rues d'une grande ville, c'est abusif. Qu'on
nous fasse grâce des phrases sentimentales, vieilles
rengaines trop connues. Si la disparition de chiens
cause quelque chagrin à certaines personnes,
la grande majorité s'en félicitera. Le chien de
ville, même chez les pauvres, est un animal de
luxe, puisqu'il faut payer l'impot et le nourrir,
nous ne demandons pas sa mort, mais qu'on
178
impose sévèrement; la taxe actuelle est un
encouragement à sa multiplication; d’ailleurs, si
on la paye à la campagne, où tout le monde connait
les chiens de ses voisins, on ne saurait dire com-
bien y échappent dans les grandes villes comme
Paris.
Un impôt sérieux, excessif, fera diminuer le
nombre des chiens qui salissent et encombrent les
voies publiques dans les villes. Tout le monde y
gagnera: d'abord le gros public qui doit subir leur
présence; puis le fisc qui, sans doute, verradiminuer
le nombre des imposés, mais non les sommes qu'il
en tire, et enfin les gens de peu de fortune qui seront
forcés de renoncer à une bouche inutile dans leur
ménage. Le regretté D” Menard avait jadis exposé
cette thèse avec beaucoup de talent, dans le
Cosmos.
BIOLOGIE
Transformation rapide d’une espèce de pois-
son (d'après la Revue scientifique, 19 octobre).
— M. A. Thienemann a signalé dans Naturwis-
senschaftliche Wochenschrift le cas d'une espèce
de poisson qui, dans le court délai de quarante
ans, représentant une succession de sept généra-
tions, s'est changée sinon en une espèce, du
moins en une variété nouvelle.
Il sagit d'un poisson du genre Coregonus, du
lac de Laach, dans l’Eifel, en Prusse rhénane; ce
lac est d’origine très ancienne. Le couvent de
Maria-Laach se trouve à proximité du lac; la
pêche y est pratiquée par les religieux depuis plus
de cent ans. Des dossiers du couvent, compulsés
par M. Thienemann, il ressort que jamais jusqu'à
ces derniers temps des corégones ne furent pêchés
ni observés dans le lac. En 1866, le Père Jésuite
qui dirigeait le service des pêches fit venir de Po-
méranie des œufs de Coregonus maraena, et du
lac de Constance des œufs de Coregonus fera. En
4872, un nouveau million d'œufs de C. fera fut
expédié de Constance. Parmi les œufs de Pomé-
ranie, la plupart ont péri pendant le transport,
ceux qui ont été mis dans le lac n’ont jamais rien
donné; les souvenirs des pècheurs et les recherches
spéciales faites par l’auteur à cet égard sont for-
mels : les Coregonus maraena ont disparu du lac
sans laisser trace. Les alevins de C. fera ont été
observés pendant un certain temps, puis ont été
perdus de vue.
Mais voici qu’en 1900, par hasard, ont été pris
dans desnasses quelques poissons d'espèce inconnue.
Un religieux du couvent, d'origine suisse, a reconnu
qu'il s'agit de C. fera. Pour plus de sûreté, on les
a envoyés aux spécialistes suisses, qui ont confirmé
le diagnostic, mais ont ajouté que les spécimens
envoyés diffèrent à divers égards des C. fera du
lac de Constance. En 1906, environ 1 000 corégones
ont été pris, el depuis on continue à les pêcher
COSMOS
91 OCTOBRE 1912
tous les ans; d’ailleurs, une piscifacture rationnelle
assure leur maintien.
Le plus curieux de l’histoire est que les coré-
gones du lac de Laach ne ressemblent ni aux
C. fera, dont ils dérivent cependant directement,
ni à aucune autre espèce de corégone; ils forment
un groupe nouveau que M. Thienemann a baptisé
du nom: Coregonus fera, varietas Sancti Bern-
hardi.
Les œufs ressemblent à ceux des autres coré-
gones, mais les larves sont modifiées d’une façon
caractéristique ; en particulier elles sont complète-
ment dépourvues de pigment, alors que les larves
de C. fera ont un pigment jaune. Il est à noter
que chez les corégones des lacs alpins du Nord,
Nüsslin (1908 et 1909) a également signalé labsence
de pigment, et a attribué cela à la transparence
de l’eau et à la pauvreté de celle-ci en organismes
planktoniques. Or, l’eau du lac de Laach est beau-
coup plus transparente et plus pauvre en plankton
que celle du lac de Constance.
A l'état adulte, il y a également des différences.
Ainsi, le filtre branchial de la nouvelle forme est
extrêmement serré, le plus serré que l’on con-
naisse. La structure de cet organe est d’une façon
générale en rapport avec le mode de nutrition. Il
est assez grossier chez la truite, par exemple, qui
se nourrit d'organismes assez volumineux, et plus
fin chez la carpe. Les corégones du lac de Laach
se nourrissent exclusivement de petits organismes
planktoniques, comme l’a montré l'étude du con-
tenu stomacal et intestinal. Par contre, les C. fera
du lac de Constance se nourrissent de mollusques,
de vers, de cyclopes, d’aselles, de larves de diptères,
et accidentellement d'animaux planktoniques.
ÉLECTRICITÉ INDUSTRIELLE
Condensateurs réducteurs de tension pour
lampes électriques. — On sait que l’on a intérèt
à employer des lampes à filament métallique éta-
blies pour une tension de 20 à 30 volts; elles sont
moins fragiles que des lampes à 400 ou 200 volts
ayant même puissance lumineuse, et, leur filament
étant plus gros, on peut le soumettre à un régime
intensif et à une plus haute température sans ris-
quer de le briser.
Sur les réseaux à courant alternatif, on emploie
déjà dans ce but de petils transformateurs sta-
tiques, constitués par un noyau de tôles de fer
sur lequel sont enroulées deux bobines, l’une en
fil long et assez fin, reliée au réseau à 4100 ou
200 volts, l’autre en fil plus court et plus gros four-
nissant à la lampe la tension réduite qui lui con-
vient. Mais ces appareils, qui méritent bien le nom
d'économiseurs qu'on leur donne parfois, ne sont
pourtant pas sans inconvénients: même quand la
lampe est éteinte, ils s'échauffent un peu et con-
somment donc inutilement de l’énergie.
N° 1449
Des économiseurs présentant les mêmes avan-
tages peuvent être réalisés au moyen de condensa-
teurs montés en série avec les lampes pour diviser
la tension totale et la réduire aux bornes de la
lampe. MM. Ashton et Helsby ont récemment mon-
tré que l’on peut arriver à des résultats pratiques
intéressants. Ils ont constitué des condensateurs au
moyen de deux feuilles métalliques isolées au
papier et enroulées en forme de cylindre de 50 mil-
limètres de diamètre et 150 millimètres de lon-
gueur; on les loge dans le socle des lampes ou
bien près de l'interrupteur.
Avec un seul condensateur, on peut monter plu-
sieurs lampes en série : qu’une seule lampe fonc-
tionne ou que plusieurs lampes soient allumées à la
fois, intensité du courant et l'intensité lumineuse de
chaque lampe ne varieront que d'une quantité insi-
gnifiante. Supposons trois lampes de 16 volts, toutes
en série, avec un condensateur, l'ensemble étant
alimenté par un courant alternatif à 220 volts et
à une fréquence de 50 périodes par seconde. Si
l'on éteint deux lampes, la troisième ne souf-
frira nullement d’un excès de courant (l'intensité
monte seulement à 4,01 fois l'intensité normale).
Inversement, on peut monter en série, soit quatre,
soit cinq lampes avec le même condensateur, et
elles brilleront d’un éclat à peu près normal {avec
cinq lampes, l'intensité est encore 0,97 fois l’inten-
sité normale).
Autres avantages intéressants, surtout pour
l'usine qui produit et qui vend l'énergie électrique.
Le condensateur, dans le cas de la fourniture du
courant à forfait, joue le ròle de limiteur auto-
matique et empêche l’abonné d'utiliser plus de
lampes ou des lampes plus fortes qu'il n’a été
prévu dans le contrat. Les électriciens savent que
les condensateurs établis en divers points d’un
réseau alternatif augmentent le « facteur de puis-
sance » général et augmentent le rendement de
l'installation. Enfin, en cas de court-circuit sur les
lampes, on ne court aucun risque, le condensateur
étant prévu pour supporter la tension totale.
SOURCES D'ÉNERGIE
La suddite. — Le Soudan n’a pas de charbon
et manque de bois; si on n'a guère besoin de
combustible pour se chauffer, celte pénurie a
néanmoins mille inconvénients, spécialement au
point de vue industriel.
On a cherché à remédier à cette pauvreté, et
l'honneur d’avoir trouvé une solution revient à
deux Allemands, M. Von Rath et le professeur
Hooring, et à un Anglais, le capitaine Benett-Dam-
pier, et cette solution est des plus originales.
On sait que le Nil Blanc et le Nil Bleu sont
encombrés par une végétation qui pousse et se
multiplie avec une rapidité formidable; c’est le
COSMOS
479
sudd. Elle entrave la navigation et même le débit
du fleuve, et elle a joué un ròle des plus sérieux
dans les difficultés que l’on a eu à remonter le Nil
jusqu'aux lacs.
Les inventeurs ont eu la pensée de créer un
combustible avec cette plante, qui semble inépui-
sable.
Ils ont créé des usines, dont une à Khartoum.
Le sudd brut, coupé, séché et pressé sous forme
de briquettes compactes, a donné d'excellents résul-
tats, et déjà la Société qui exploite cette matière
a de nombreux clients.
Il faut deux tonnes de suddite (c’est le nom
donné au produit) pour remplacer une tonne de
charbon; mais comme elle ne coûte presque rien,
l'économie est toute en sa faveur.
En effet, le sudd arrive à une hauteur de 4,5
à 6 mètres et pousse avec une telle rapidité qu’il
atteint plus de 2 mètres trois semaines après avoir
été coupé. Lorsqu'on l'a coupé, on forme des
radeaux avec les bottes, radeaux qui, si grands
qu'ils soient, dérivent sous la conduite de deux
noirs, sans accident.
Le soleil se charge de dessécher la récolte en un
temps fort court.
La main-d'œuvre étant pour rien en ce pays,
les briquettes de suddite peuvent être vendues
28 francs la tonne dans des lieux où le charbon
coùte 104 francs. Terminons en disant que le capi-
taine Benett-Dampier propose d'enrichir la suddite
(sans doute avec un hydrocarbure), enrichissement
qui coùterait à peine quelques francs et qui
aménerait les choses à ce point qu'une tonne de
cette suddite améliorée équivaudrait, dit-il, à trois
tonnes de charbon.
Substituts du charbon dans l’avenir. —
L'Écho des Mines (3 octobre 19142) analyse une
communication de M. Giacomo Ciamician au
huitième Congrès de chimie appliquée; elle présente
le plus grand intérêt.
La terre renferme encore d'énormes quantités
de charbon, mais non tout extrayable. Or, la civi-
lisation moderne est fille du charbon. Aussi, la
question de combustible pour lavenir doit com-
mencer à préoccuper l'humanité. Se basant sur
l'estimation suivante, savoir que la constante
solaire est de trois petites calories par minute par
centimètre carré ou 30 grandes calories par minute
par mètre carré, on peul déduire qu'un kilomètre
carré de sol recoit une quantité de chaleur équiva-
lente à celle de 1000 tonnes de charbon. Le désert
du Sahara, avec ses 6 millions de kilomètres carrées,
reçoit journellement du Soleil une énergie ther-
mique équivalente à 6 milliards de tonnes, soit en
un jour six fois la production mondiale annuelle
de charbon. En ce qui concerne l'énergie solaire
emmagasinée par les plantes, disons que sur les
428 millions de kilomètres carrés de surface de
480
sol, dans le monde entier, on a une production
annuelle de 32 milliards de tonnes de végétaux
qui, par combustion, donneraient une quantité de
chaleur correspondant à 18 milliards de tonnes de
houille, soit dix-huit fois la production mondiale
annuelle de houille et lignite actuellement. Suivant
l'auteur, il serait possible d’augmenter la produc-
lion de matières organiques en certains lieux, par
une culture appropriée, de manière à produire de
nouvelles sources d'énergie. Aujourd’hui, n’a-t-on
pas trouvé des gazogènes pour utiliser mème les
végélaux et en séparer l'azote (procédé Mond, par
exemple) qui fournit des engrais de plus en plus
demandés. D'autre part, les plantes sont appelées
à fournir dans l’avenir les plus grandes parties de
substances secondaires, alcaloïde, glucose, essence,
colorants, etc., que l'on fabrique aujourd’hui arti-
ficiellement (exemple: les couleurs dérivées du
goudron de houille), mais la question d'élévation
des prix arrèlera à un moment donné la synthèse
de beaucoup de ces produits, et alors on reviendra
aux plantes.
Une autre utilisation de l'énergie solaire est par
les réactions photochimiques : radiations fossiles
analogues à celles du procédé d'assimilation des
plantes. Avec de convenables catalyseurs, les
régions désertes des tropiques pourraient extraire
une énorme quantité d'énergie. La science, basée
sur les phénomènes récemment découverts des
radiations, est encore jeune, mais on peut escompter
d’elle un avenir brillant. L’électricité n’a-elle pas
commencé avec l’observation modeste d’attractions
insignifiantes entre différents corps, et cependant
aujourd’hui elle est une source de plus en plus
importante d'énergie industrielle. On peut conce-
voir des batteries photochimiques, et la question est
de trouver de convenables catalyseurs et sensibi-
lisateurs utilisant la lumière « énergie fossile ».
Fn conclusion, avec l’utilisation de l'énergie
solaire, les régions tropicales seraient conquises
par la civilisation. La où la végétation est riche,
la photochimie serait laissée aux plantes avec une
culture rationnelle. Dans les régions désertiques
inaptes à la culture, la photochimie transformerait
l'énergie solaire à des buts pratiques. L'auteur voit
dans l'avenir, sur les terres arides, s'élever des
colonies industrielles sans fumée, avec des forèts
de tubes de verres sur les plaines et des bâtiments
en verre, ulilisant des procédés photochimiques
qui ont été jusqu'ici gardés secrets par les plantes.
A titre personnel, nous ajouterons que l’utilisa-
tion directe de la chaleur solaire a déjà fait l'objet
de diverses expériences, notamment en Amérique,
en Allemagne, où,en travaillant avec de l'eau sur
de grandes surfaces, on produit une vapeur qui peut
ètre utilisée dans les turbines à basse pression. Il
serait méme question de faire une telle installation
en Egypte (un projet américain existe à ce sujet).
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
D'autre part, en Italie, pays sans charbon, le pro-
fesseur Cerutti, dans une conférence à l'Associa-
tion chimique industrielle de Turin, exprimait le
væu de recourir à des plantations de certains
végélaux à croissance rapide, les procédés de
gazéification faisant de rapides progrès pour uti-
liser toutes substances végétales, depuis la tourbe
jusqu’à la paille, les feuilles d'arbres.
PHOTOGRAPHIE
Variation de l’intensité lumineuse du jour
suivant les heures et les saisons. — Au cours
de l’année 1940, le lieutenant-colonel Houdaille a
déterminé, au moyen de son sensitomètre à teintes,
l'intensité, au point de vue photographique, de la
lumière ambiante à différentes heures dela journée.
Comme conséquence pratique et comme application
de son étude, il a établi le tableau suivant, à
l'usage des photographes qui veulent connaitre au
moins en première approximation la durée de pose
qui convient en une saison et à une heure déter-
minées (Bull. Soc. fr. de Photographie, octobre).
Durée de pose.
HEURES JANYIRR MARS JUIN
ET DECEMBRE ET SEVTEMBRE ET JUILLET
D — — TD
6 _— — 37
7 — 15 2j
8 — 37 20
9 19 2 45
40 37 20 12
11 2 4 114
42 20 13 10
{ 29 15 li
2 3T 20 12
3 75 2) 15
4 — 37 20
D — TS 25
6 — — 37
75
a,
Les nombres ci-dessus représentent, en secondes,
la durée de pose pour obtenir une image correcte
sur plaque autochrome, l'objectif étant ouvert à
F: 140. Ils représentent également, mais cette fois en
centièmes de seconde, la durée de pose convenable
pour la photographie en noir sur plaques extra-
rapides, l'objectif étant ouvert à F: 40.
VARIA
Les pêcheries d’ambre de la Prusse orien-
tale (La Géographie, 15 août 1912). — L'exploita-
tion de l'ambre est depuis longtemps un monopole
de l’Etat prussien; elle a pour siège la province de
Prusse orientale et surtout les còtes du Samland,
de Pillau à Cranz, entre le Frisches Haff et le
Kurisches Haff. L'exploitation en fut affermée jus-
qu'en 41899; puis l'Etat la reprit à son compte jus-
qu'en 1914 où elle fut confiée à la ville de Pillau.
N° 1449
La récolte se fait toute l’année, mais elle est
plus particulièrement fructueuse au moment des
tempêtes d'équinoxe, lorsque les vents et les cou-
rants rejettent l’ambre vers le rivage. Quand le
calme est rétabli, les pêcheurs vont draguer jus-
qu'à 4 500 mètres du bord et entassent leur récolte
sur la grève, où les femmes et les enfants
recherchent l’ambre parmi les varechs et les allu-
vions.
Les morceaux d’ambre sont ensuite classés
d’après la grosseur, la forme et la couleur. Leur
valeur augmente lorsqu'ils portent des empreintes
animales ou végétales : cheveux, plumes, lézard,
coquillages, écrevisse, araignée, scorpion et même
des bulles d’air ou des gouttes d’eau. Le prix des
morceaux varie ordinairement de 0,65 fr à 3,75 fr,
mais peut atteindre plusieurs centaines de francs;
une livre d’ambre rapporte en moyenne 6,25 fr et
peut aller jusqu’à 37,5 fr; les grosses pièces
pèsent jusqu’à 500 grammes; la couleur est très
variable: jaune, laiteuse, rouge-brun, vert éme-
raude; beaucoup de fragments sont incolores. Un
pèécheur retire annuellement 125 francs de cette
exploitation qui représente en moyenne une valeur
de 7,5 millions de francs. Pierre Clerget.
Une silice de forme nouvelle. — Un vient
de découvrir aux Etats-Unis un dépôt de chaux
secondaire contenant, à l’état d’extrème division,
de la silice avec du chlorure de sodium et des
traces de fer, d'aluminium et de magnésium. Les
carbonates étant dissous par l’acide chlorhydrique,
la silice restant se présente sous la forme d'une
poussière blanche et impalpable. Mêlée à l’eau, elle
constitue un liquide laiteux traversant les meilleurs
filtres de papier, mais elle n’est pas soluble même
dans les alcalis concentrés; cependant, elle l'est
par l’acide sulfurique concentré. On estime qu'il
s'agit d’une nouvelle forme de silice, probablement
d'origine secondaire, précipitée jadis d’une solu-
tion, en même temps que les carbonates de calcium.
Le transport de l’hydrogène à grande di-
stance par canalisation. — On n'avait pas eu
l’occasion, jusqu'ici, d'appliquer à l'hydrogène le
système de transports par tuyaux, qui est employé
de longue date pour le gaz naturel et pour le gaz
de houille. Or, la Chemische Fabrik Griesheim,
qui se livre à la fabrication de la soude caustique
et du chlore, obtient comme sous-produits de
grandes quantités d'hydrogène : jusqu'ici, une
partie seulement de ce gaz était comprimée dans
des bouteilles d'acier et livrée au commerce.
À présent, la fabrique expédie le gaz par une con-
duite longue de 4,5 km, au garage des ballons de
Francfort-sur-le-Mein: la conduite peut débiter
4 000 mètres cubes par jour, le gaz est envoyé sous
une pression de 1 000 millimètres d’eau; au garage,
il est mis en réserve dans un gazomètre d'une con-
COSMOS
481
tenance de 6000 mètres cubes, d’où partent des
conduites secondaires pour le gonflement des
ballons.
Les éléments de la conduite ont presque tous été
assemblés par soudure autogène, de manière à
réduire les pertes de gaz.
La valeur de l’eau de mer. — On a parlé sou-
vent de la quantité de métaux précieux que con-
tient l'eau de mer; si minime qu'elle soit, Pim-
mensité des océans fait que cette quantité est pour
ainsi dire incommensurable. La seule difficulté,
c'est d'extraire ces richesses à un prix qui n'excède
pas leur valeur. Nombre de chimistes se sont
occupés de ce problème, aucun ne l’a encore résolu.
Pour encourager les chercheurs, M. H. S. Black-
more (Cassier's Magazine) donne quelques chiffres
d'estimation qui sont en effet très encourageants.
D’après cet auteur, un kilomètre cube d’eau de mer
contiendrait environ, au taux du jour, 141 millions
de francs d’or, 10 millions d'argent et 74 millions
d’iodures.
C’est peut-être pour cela que le fisc défend avec
tant d'énergie de puiser l'eau de mer sur le ri-
vage!
CORRESPONDANCE
Un bolide.
Je me permets de signaler, comme pouvant inté-
resser les lecteurs du Cosmos, le passage d'un
bolide dont j'ai été témoin le 23 octobre 1912, à
7 heures précises (heure des gares).
Le temps était découvert et le ciel, par consé-
quent, très lumineux. Néanmoins, ce bolide avait
un éclat extraordinaire, et sa visibililé était telle
que je l'ai aperçu, bien que mon acuité visuelle ne
soit que de 0,3 à 0,4.
La trajectoire était horizontale, de l'Est à l'Ouest
(en regardant juste dans la direction du Sud).
Après un parcours de quelques degrés, il a
explosé comme une fusée.
Le ciel était découvert; il y avait seulement sur
le parcours du météore un léger cirrus très
diaphane à travers lequel il a passé, laissant
derrière lui une trainée blanche qui a persisté
quelques secondes, puis s’est condensée en grains
de chapelet, se réduisant finalement à deux taches
très allongées qui ont disparu au bout d'une
minute ou deux.
La hauteur du bolide au-dessus de l’horizon était
d'environ 24°.
Ma position géographique était la suivante, avec
l'approximation que comporte la carte au 80 000° :
Longitude, 0 gr 3T 2⁄3 Est. |
Latitude, 56 gr 7 1/2 Nord.
J. DE LA PORTR-
Nœux-les-Mines, 2+ octobre 1912.
482
Installation de sécurité
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
Martini et Huneke
pour la manutention des liquides inflammables.
On a imaginé de nombreuses méthodes permet-
tant de manipuler — soi-disant sans danger —
les liquides inflammables. Mais, vu les accidents
auxquels la manutention de ces corps donne souvent
lieu, les appareils employés jusqu'ici semblent
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#74
aussi impuissants à les prévenir que les mesures
administratives.
Le système Martini et Huneke, qui a déjà reçu
en Allemagne la sanction de la pratique et qui
commence à s'introduire en France, parait au con-
mr
F1G. 1. — DISPOSITIF DE SÉCURITÉ POUR L'EMMAGASINAGE DES LIQUIDES INFLAMMABLES.
traire résoudre complètement le problème. Il
satisfait effectivement aux conditions générales à
remplir par les appareils de ce genre et qu’on peut
énoncer de la façon suivante. Toute installation
de sécurité pour la manutention des liquides
inflammables doit :
1° Fonctionner d’une manière rigoureusement
automatique, indépendamment de l'ouvrier et
même contre sa volonté malveillante ou simple-
ment défaillante.
2° Posséder des organes simples, un mécanisme
compliqué faisant souvent défaut au moment
opportun.
3° Être, à chaque instant, d'un contròle facile
dans toutes ses parties, afin qu'on s’assure de son
fonctionnement d’une manière permanente.
La figure 1 représente schématiquement une
installation Martini et Huneke dont voici les dispo-
sitions caractéristiques. D'abord, aussi bien dans
les parties relatives à l’'emmagasinage que dans
celles de la manutention, l'air s’y trouve remplacé
par l'acide carbonique ou mieux par l'azote com-
primé. Ce gaz sert non seulement d'agent protec-
teur, mais sa pression détermine le mouvement du
liquide dès qu'il trouve une issue. En outre, une
gaine préservatrice et remplie également de gaz
inerte enrobe les canalisations et la robinetterie,
de manière que le liquide ne peut circuler qu'en
cas d'étanchéité parfaite de l’appareil, S'il se pro-
duit une fuite en un point quelconque de l'in-
stallation, le liquide s’arrête et demeure dans le
réservoir à labri soit de l'explosion, soit de l'in-
== =
No 1419
cendie, l'air étant nécessaire à l’inflammation
directe du liquide comme à la formation d’un mé-
lange explosif. En définitive, tout danger se trouve
écarté, qu’il vienne d'une flamme extérieure ou —
comme le veulent certaines théories récemment
émises pour expliquer des accidentsbizarres — d'une
étincelle électrique déterminée par le frottement du
liquide non conducteur contre les parois métalliques
des réservoirs, au cours des transvasements.
Le réservoir-magasin M est en tôle très épaisse
et complètement étanche. L'installation comprend,
COSMOS 483
de transport T au moyen de deux tuyauteries;
l’une E siphonne le liquide pendant que l'autre G
permet au gaz du réservoir d’aller remplacer, dans
le tonneau, l'hydrocarbure écoulé. Grâce à cette
disposition, la minime quantité de liquide restée
au fond du fût ou ruisselant le long de ces parois
ne donne pas naissance à un mélange explosif
alors que le liquide se trouve remplacé par l'air
dans les autres systèmes de vidange.
La pression du gaz sert à déterminer la montée
du liquide dans la canalisation intérieure, tandis
que la partie annulaire qui l'entoure, toujours en
F1G. 2. — INSTALLATION MARTINI ET HUNEKE
POUR LES EXPÉRIENCES DU 11 JUILLET 1912. j
Un ouvrier soutire du benzol.
en outre, un poste d'emmagasinage, un récipient
jaugeur avec un poste de soutirage, un tube de
gaz inerte comprimé B et des canalisations reliant
les différentes parties du système.
Un enduit asphalté recouvre extérieurement le
réservoir M quon enterre dans le sol à une pro-
fondeur suffisante pour qu'un incendie, venant à
se déclarer dans le voisinage, ne puisse le dété-
riorer. D'autre part, la tòle ne saurait se piquer
à la longue; m'étant intérieurement en contact
qu'avec des corps inertes, elle ne s’oxyde pas.
Pour emmagasiner un liquide inflammable, une
fois le réservoir plein d’azote, on le relie au fût
F1G. %. — ÉTAT DE L'INSTALLATION APRÈS L'INCENDIE.
Toutes les canalisations ont fondu, mais le réservoir à benzol
situé en arrière est demeuré indemne.
communication avec l'atmosphère inerte du réser-
voir, assure instantanément le retour de tout le
liquide renfermé dans les tuyaux distributeurs, en
cas de fuite dans l’une ou l’autre des canalisations.
Si la fissure se produit dans la tuyauterie inté-
rieure, la pression s’égalise en tous les points du
liquide manipulé, et si l’avarie se déclare dans
l'enveloppe extérieure, le gaz, servant de monte-
jus, revient de suite à la pression atmosphérique.
D'autre part, une gaine protège aussi la robinet-
terie, et pour compléter ce dispositif de sécurité,
les différentes canalisations se terminent à leur
débouché dans le réservoir par un antidiffuseur.
184
Cet organe comprend un cylindre central enfermé
dans une cuvette concentrique percée de trous à
sa partie supérieure et recouverte d'un manteau.
Il constitue une soupape de sùreté évitant que le
gaz inerte du réservoir y soit remplacé par de Pair
si un incendie ou toute autre cause détruit les
tuyauteries. En ce cas, le gaz se détend par barbo-
tage à travers l'antidiffuseur jusqu'à l'instant où
sa pression égale celle de la petite colonne de
liquide de l'appareil formant garde hydraulique
et empèche la rentrée de l'air dans le réservoir.
Le manteau recouvre seulement la moitié de la
cuvette s'il s’agit d’une arrivée de liquide dans le
magasin, et au contraire la cuvette entière dans le
cas d’un tuyau d'aspiration afin de permettre le
siphonnage du liquide. Enfin, toutes les canalisa-
tions extérieures portent des bouchons fusibles à
basse température qui, en assurant le retour auto-
matique du liquide dangereux au magasin, com-
plètent les dispositifs de sécurité.
Quant au fonctionnement du système Martini et
Huneke, la description précédente permet de
sen rendre compte aisément. L’azote contenu
dans la bouteille de gaz liquifié du commerce B
va par le tuyau 4 au détenteur D, d'où la con-
duite 2 amène au réservoir. Quand il s'agit d'em-
magasiner du liquide, on transporte le fût T près
des robinets du poste auxquels le relient des tuyaux
flexibles. Par l’un de ceux-ci E, le transvasement
s'opère, grâce à la canalisation 4, tandis que par
lautre G le gaz remonte du réservoir au tonneau,
à l’aide de la conduite 3, en sorte que l'azote rem-
place au fur et à mesure le liquide extrait.
Dans les petites installations, une pompe à main
suffit pour amorcer le siphonnage puisque la pres-
sion du réservoir d'emmagasinage égale celle du
tonneau de transport; dans les postes plus impor-
tants, après avoir fermé le robinet E, on laisse une
surpression momentanée du gaz s'établir dans le fût.
Lorsqu'on veut soutirer de l'hydrocarbure, par
exemple si un autobus avant de sortir du dépôt
veut prendre sa charge de benzol, on appuie sur
le levier du robinet de soutirage S, le liquide
remonte par la conduite 5 dont l'espace annulaire
communique avec l’atmosphère de gaz du réservoir
par le branchement à (schéma fig. 1). Si l'enveloppe
extérieure de cette canalisation venait à se rompre,
l'azote du réservoir se détendrait au dehors. La
pression faisant alors défaut, le liquide ne mon-
terait plus dans la tuyauterie et retournerait au
réservoir, Du reste, les inventeurs réalisent cette
condition à l'aide dun robinet spécial qui met en
communication les deux enveloppes quand, dans le
but d'éviter la congélation, on veut assurer le vide de
la canalisation en dehors des périodes de service.
Le robinet de soulirage est également à double
enveloppe, ainsi que le reste de la tuyauterie: il
comprend une soupape qu'un ressort maintient en
COSMOS
31 OCTOBRE 1949
place, et, comme nous l’avons vu plus haut, il suffit
d'appuyer sur le levier de soutirage pour provoquer
l'écoulement du liquide, car, par suite de la com-
pression exercée sur le ressort, la soupape s'écarte.
D'autre part, puisque celle-ci revient à la position
de fermeture lorsqu'on abandonne le levier, ce dis-
positif assure la présence du préposé pendant la durée
du chargement. Enfin, il porte un bouchon fusible.
Pour qu'on puisse surveiller le fonctionnement
général du liquide inflammable pendant toutes ses
manutentions, MM. Martini et Huneke annexent
encore à leurs installations un manomètre à mer-
cure L et un indicateur de niveau N (fig. 4). Le
premier de ces appareils se compose d’une cuvette
inférieure étanche, d’une cuvette supérieure com-
muniquant avec l’atmosphère et d'un tube de
verre sur lequel se lit la pression; à côté de ce
tube, il en existe un second en fer dont la tête
affleure au fond de la cuvette supérieure et dont le
pied plonge dans le mercure de la cuvette infé-
rieure. Quant à l'indicateur de niveau, il comprend
un flotteur suspendu à l'extrémité d’un câble pas-
sant sur une poulie à la partie supérieure et que
tend un contrepoids. L'ensemble de ces organes
est protégé par une gaine métallique communi-
quant librement avec latmosphère de gaz du
réservoir d'emmagasinage. Le câble se trouve rem-
placé, sur une partie de sa longueur, par une ré-
gletite en aluminium graduée se déplaçant devant
une lucarne vitrée. Si un défaut d'étanchéité venait
à se produire en un point de l'indicateur, le gaz
s'échapperait, et ce fait rendrait impossible le sou-
tirage. Grâce à ces organes, longs peut-être à
décrire, mais d'un fonctionnement automatique
et sûr, le système Martini et Huneke permet
d'écarter tout danger d'incendie dans la manipu-
lation des liquides inflammables.
La « Compagnie pour la fabrication des comp-
teurs et matériel d'usines à gaz », qui exploite ce
brevet en France, a voulu, du reste, convaincre
récemment le Conseil d'hygiène, la Commission
technique de l’armée et autres administrations
intéressées de la valeur des appareils qu'elle con-
struit. Le 44 juillet 1912, elle exécuta, à Montreuil,
une suite d'expériences ayant pour but de montrer
les dangers de la manutention des liquides inflam-
mables et l’efficacité des procédés Martini et
Huneke. Notre objectif aidant, nous allons en re-
later succinctement les phases principales.
D'abord, pour remplir la première partie du pro-
gramme (démonstration des dangers de manuten-
tion des liquides inflammables par les méthodes
ordinaires), on disposa en différents points du ter-
rain quatre touries en verre d’une contenance de
50 litres, munies d'un dispositif permettant de
faire jaillir à l'intérieur de chacune d’elles un arc
électrique. La première tourie renfermait une cer-
taine quantité de benzol surmonté d’une atmo-
Ne 11:49
sphère d'azote, tandis qu’on versa du benzol dans la
seconde, le reste de l'enceinte étant occupé par
Fair et non par un gaz inerte. Enfin, dans les touries
set 4, on mitdestracesde benzol (5 centimètres cubes
dans chacune) afin de représenter l’atmosphère
explosible des füts vides ayant contenu un hydro-
carbure.Ces préparatifs achevés, onenvoya successi-
vement le courant dans chacun des quatre récipients.
Dans la première tourie protégée par de l’azote,
l'arc électrique ne produisit aucun effet. Dans la
seconde, le liquide commença par s'enflammer,
puis la tourie éclata par suite de la chaleur déve-
loppée. Quant aux touries 3 et 4, qui contenaient
seulement des traces de liquide, elles volérent en
éclats dès le jaillissement de l’étincelle, les vapeurs
de benzine formant un mélange explosif en pré-
sence de l’air.
La deuxième série d'expériences s’effectua au
moyen d'un réservoir de 200 litres de benzol placé
dans une fosse de 4 mètre de large sur 1,5 m de
longueur et autant de profondeur. On répandit une
certaine quantité de benzol dans le fond du trou
de façon à se trouver dans les mêmes conditions
que si le réservoir présentait une fuite. Puis on
recouvrit l’ensemble de tôles sur lesquelles on jeta
un peu de terre, et, grâce à un dispositif de fortune,
on fit jaillir un arc électrique au milieu des
vapeurs inflammables de la fosse. Il se produisit
alors une petite explosion qui enflamma le liquide
répandu dans Île fond de la fosse, incendia l'hydro-
carbure contenu dans le réservoir dont il amena
finalement la destruction.
Enfin, la dernière partie du programme fut cou-
sacrée en quelque sorte à l'apothéose du système.
On établit sur le terrain une installation de for-
tune Martini et Huneke (fig. 2) qui correspondait
en principe à celle du schéma (fig. 1). Toutefois
on avait groupé les différents organes sur nn
même panneau de maçonnerie. De plus, les cana-
COSMOS
KRS
lisations, enterrées d'ordinaire, avaient été dépour-
vues de toute protection. Le réservoir-magasin,
d'une capacité de un mètre cube, renfermait 800
litres de benzol environ et fut recouvert finale-
ment de 0,5 m de sable. Puis, après avoir entassé
du bois imprégné de benzol contre la murette por-
tant les appareils, au-dessus de toutes les canali-
sations et sur l'emplacement même du réservoir
et de la bouteille à gaz comprimé, on l’alluma de
manière à provoquer un violent incendie. Le gaz
sous pression s’échappa de l'installation, et presque
aussitôt, le fusible du robinet de soutirage ayant
fonctionné, le liquide retourna au réservoir. L'in-
cendie s'éteignit de lui-même, non sans avoir
laissé la tuyauterie en piteux état. Mais le réservoir
demeura indemne et le benzol ne s’écoula pas au
dehors, quoique toutes les canalisations fussent
détruites, comme en témoigne la vue prise quelques
instants après (fig. à).
Le sable avait donc protégé le réservoir d’une
facon très eftlicace contre un incendie extérieur.
D'ailleurs, le système Martini et Huneke a déjà
fait ses preuves dans nombre d'établissements
français et étrangers. Il fonctionne, en particulier,
aux poudreries de Spandau et de Hanau (Allemagne),
de Bologne (Italie), aux mines de Gelsenkirchen,
à la fabrique d'automobiles Peugeot à Valentigney,
à la Taxamotor, Compagnie de Copenhague, et
bientôt tous les dépôts d'autobus de la Compagnie
des omnibus de Paris en seront pourvus. Dans ces
derniers, quand on veut transvaser l'hydrocarbure
dans le réservoir d’une voiture, on amène celle-ci
devant le poste de soutirage, et, après lavoir
reliée par un tuyau flexible au robinet de sureté,
le préposé au chargement n'a qu'à presser sur un
levier pour provoquer l'écoulement, Le chargement
s'opère, de la sorte, en quelques minutes et sans
danger.
JACQUES Boy.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
Il. Réception à de plus grandes distances.
Le dispositif que nous avons décrit ne permet
de recevoir les radiotélégrammes de la tour Eif'el
qu'à une distance relativement faible du poste
d'émission.
Plus on en sera éloigné, plus il faudra aug-
menter la sensibilité de l’appareil récepteur, en
perfectionnant ses différentes parties.
(1) Suite, voir p. 458.
Récepteurs téléphoniques,
Un premier gain de sensibilité sera obtenu en
employant à la fois deux récepteurs au lieu d'un seul.
On les groupera en série ou en parallèle (fg. ©),
suivant les cas et suivant la résistance relative du
détecteur et des téléphones. Un essai montrera
lequel des deux montages sera prélérable. Le grou-
pement en parallèle ne donnera de bons résultats
qu'avec deux téléphones à peu près semblables.
S'ils sont de résistances notablement différentes,
486
la plus grande partie du courant passera par le télé-
phone le moins résistant, au détriment de lautre.
La sensibilité sera accrue dans de très grandes
proportions si le ou les téléphones employés sont
d'un modèle à grande résistance spécialement
construits pour la télégraphie sans fil: modèles
Ducretet, 4000 ohms, ou Sullivan, 3 750 ohms, dans
lesquels la grande résistance est due au grand
nombre de tours de fil, et non à l'emploi de fil
d'un métal très résistant, comme dans certains
téléphones à bas prix (1).
Antenne.
L'augmentation des dimensions de l’antenne est
le meilleur moyen dont nous disposions pour aug-
menter presque indéfiniment la sensibilité du
poste récepteur. Avec une antenne suffisamment
développée, on peut percevoir les signaux de la
tour Eiffel à plusieurs milliers de kilomètres.
F1G. 5. — MONTAGE DES TÉLÉPHONES EN SÉRIE
ET EN PARALLÈLE.
Au lieu d'un fil de quelques mètres à l'intérieur
d’un appartement, nous tendrons à l’extérieur un
fil le plus long possible. L'idéal serait de dresser
verlicalement une antenne équivalente à celle du
poste d'émission (un fil de 550 mètres pour la tour
Eiffel). Cette condition n'est guère réalisable que
par l'emploi d'un cerf-volant porte-antenne: on
obtient ainsi des réceptions d’une extraordinaire
intensité; mais, malheureusement, le vent ne
souflle pas tous les jours. À défaut d'antenne sup-
portée par cerf-volant, nous nous contenterons
donc d’un fil le plus long possible, tendu oblique-
ment ou horizontalement à la plus grande hauteur
possible au-dessus du sol ou des conducteurs reliés
au sol (fig. 6). Il sera de cuivre rouge de préférence,
nu ou isolé; son diamètre importe peu.
Moins haute sera l'antenne, plus elle devra être
Jongue. Nous avons parfaitement reçu les télé-
grammes de la tour Eiffel à 300 kilomètres de
Paris environ avec un fil nu de 300 mètres simple-
ment étendu à terre sur le bord d’une route. Les
(1) Voir adresses Petite Correspondance, p. 504.
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
signaux de Glace-Bay (Canada) ont pu de mème
être entendus en Allemagne avec un fil de
4 300 mètres disposé à un mètre du sol. A une
hauteur d’une dizaine de mètres et dans un en-
droit bien dégagé, un fil horizontal de 400 mètres
permettra d'entendre les signaux de la Tour jusqu'à
FıG. 6. — ANTENNE HORIZONTALE A UN FIL.
près de 4000 kilomètres en faisant usage d'une
bobine d'accord, comme nous l'indiquerons plus
loin. A une distance moindre, une longueur d'au-
tant moins grande sera nécessaire qu’on sera
moins éloigné de Paris. On pourra compter à peu
près 10 mètres par 100 kilomètres.
Si l'on ne dispose pas d’un emplacement sufli-
sant, on améliorera beaucoup la réception en
employant à la fois plusieurs fils parallèles ou
divergents, écartés les uns des autres de un mètre
au moins, et se réunissant en un seul à l'entrée du
poste de réception (fig. 7). Avec trois ou quatre
fils, trente mètres sufliront pour une distance de
500 kilomètres, et cinquante mètres pour 800 kilo-
mètres. Il y a avantage à ce que tous les fils soient
de même longueur et placés à la mème hauteur.
Au cas contraire, il sera bon de réunir entre elles
par un fil transversal les extrémités les plus
éloignées du poste de réception.
La figure 8 représente une antenne que l’on peut
employer lorsqu'on ne dispose que d'un espace
très restreint. Une antenne de ce genre, dont les
parties horizontale et verticale ont chacune dix
mètres de longueur, nous permet d'entendre, aux
environs de Paris (avec le détecteur à galène qui
sera décrit plus loin), les postes de Poldhu en Angle-
terre (600 km), Norddeich en Allemagne (700 km),
F1G. 7. — ANTENNE HORIZONTALE
A TROIS FILS PARALLÈLES.
Barcelone (800 km), Madrid (1 000 km), Cliffden
en Irlande (1000 km), Gibraltar (1500 km), etc.,
bien que la partie verticale soit entourée de toutes
parts et sur presque toute sa hauteur d'arbres et
de murs élevés et très rapprochés.
Si on a le choix de l'orientation, les fils seront
Ne 4149
disposés le plus possible dans la direction de la
tour Eiffel, le poste récepteur étant placé à l’extré-
mité la plus rapprochée de Paris, contrairement à
ce qu'on pourrait peut-être supposer à priori.
A défaut d’antenne composée de fils parallèles
ou divergents, on pourra employer, avec des résul-
F1G. 8. — ANTENNE DANS UN CAS
OU L'ESPACE DISPONIBLE EST TRÈS RESTREINT.
tats cependant un peu inférieurs comme netteté de
son, une bande de treillis de fil de fer galvanisé de
longueur relativement faible. Suspendue horizon-
talement dans un grenier, une pareille bande, de
un mètre de largeur sur dix mètres de longueur,
permet d'entendre la tour Eiffel à plusieurs cen-
taines de kilomètres.
L’antenne sera isolée de ses supports au moyen
d'isolateurs quelconques : poulies de porcelaine,
bâtons d'ébonite, bois paraffiné, etc. (fig. 9). Le fil
la reliant aux appareils ne devra être appliqué aux
murs que le moins possible (surtout au voisinage
de conduites d'eau ou de gaz). Le mieux serait
qu’il reste toujours isolé dans l’espace, à un mètre
au moins de toute construction ou de tout conduc-
teur relié à la terre. A l'entrée de poste, il sera
bon d'employer du fil à fort isolement, comme
celui que vendent les marchands d'accessoires
d'automobiles pour relier la magnéto aux bougies
d'allumage.
Que va dire la Poste?
Un particulier a-t-il le droit d’établir une antenne
pour la réception des radiotélégrammes ?
Certains amateurs ont été priés par l’adminis-
tration des Postes de supprimer leur antenne. Les
uns, craintifs, ont donné satisfaction à ce désir.
D’autres s’y sont refusés, pensant avoir le droit de
planter un poteau dans leur jardin ou sur leur
toit et d'y accrocher tous les fils de fer ou de cuivre
qu'il leur plairait.Il y en a même qui ont répondu
aux petits papiers de l'administration et aux visites
de ses inspecteurs en doublant les dimensions de
leur antenne. {ls n’ont plus été inquiétés.
COSMOS
487
Ailleurs, un ingénieur des Postes est venu visiter
l'installation, et, constatant qu'elle ne comportait
que des dispositifs de réception, il s’est retiré en
disant qu'on pouvait laisser le poste, mais en rap-
pelant que la transmission était interdite.
M. Ch. Lescœur, professeur de droit à l’Institut
catholique, a spécialement étudié la question daus
un très intéressant article de la Revue économique
et financière (1). « Le but de l'administration,
dit-il, doit être de se faire demander des autorisa-
tionsqu'’elle accorderait moyennantdes redevances;
c'est une question de gros sous. Mais nous croyons
pouvoir affirmer que, en l'état des textes, ces pré-
tentions sont dénuées de tout fondement : il n’y a
qu’à y tenir tête résolument.
» Le texte fondamental est le décret-loi du
27 décembre 1851: « Art. 4°. — Aucune ligne télé-
» graphique ne peut être établie ou employée à la
» transmission des correspondances que par le
» gouvernement. Quiconque fransmettra sans
» autorisation des signaux d’un lieu à un autre,
» soit à l’aide de machines télégraphiques, soit
« par tout autre moyen, sera puni d’un emprison-
» nement d'un mois à un an et d'une amende de
» 4 000 à 10 000 francs. En cas de condamnation,
» le gouvernement pourra ordonner la destruction
» des appareils et machines télégraphiques. »
M. Lescœur fait remarquer, en passant, que
l’ampleur de ce texte interdit à un sourd-muet de
converser publiquement dans la langue mimée
de l’abbé de l’Épée et nous défend même de
saluer quelqu'un dans la rue. « Car, dit-il, nous ne
faisons pas autre chose que « transmettre des
» signaux d'un lieu à un autre »; nous exprimons
ainsi à quelqu'un l'estime que nous avons pour lui,
ou tout au moins nous lui donnons à entendre que
Fic. 9. — ISOLEMENT DE L'ANTENNE
PAR DES POULIES DE PORCELAINE.
nous savons qui il est. Espérons que l’administra-
tion n'usera pas rigoureusement de son droit.
(1) Le monopole de l'État et la T. S. F. La Revue
économique el financière, n° des 23 et 30 mars 1912.
Bureaux du journal, 30, rue de Provence, Paris.
188
» La télégraphiesans fil ne pouvait pas échapper
au monopole. L'État a cru devoir s'en expliquer
formellement. « L'administration des Postes et
» Télégraphes est seule chargée de l'établissement
» et de l'exploitation des postes de télégraphie
» sans fil destinés à l'échange de la correspondance
» officielle ou privée... » Tel est l’article 4° du
décret des 7-9 février 4903, qui ne fait qu'appliquer
à la nouvelle télégraphie le décret de 4854. L'ar- :
ticle 2 ajoute que « des postes destinés à l'échange
» des correspondances d'intérêt privé pourront être
» établis et exploités par des particuliers après
» autorisation donnée par le ministre... » Les
conditions d'établissement et d'exploitation de ces
postes, et notamment la redevance à payer, sont
fixées par les arrêtés d'autorisation.
» Ces textes sont clairs. Le droit qui est réservé
à l'Etat, le droit sur lequel les particuliers ne
peuvent pas entreprendre, le droit qu'ils ne
peuvent exercer qu’en vertu d'une autorisation et
dans les conditions fixées par l’administration,
c’est le droit de transmettre des signaux, c’est le
droit d'échanger des correspondances. Mais autre
chose est transmettre, autre chose est recetoir.
C’est même tout le contraire. Qu'il me soit interdit
d'établir chez moi, à mon usage personnel, un mât
de sémaphore pour correspondre avec un voisin de
campagne, c’est la loi. Mais cela n'implique pas
que je sois déchu du droit d'appliquer mon œil à
une lunette pour percevoir les avis que transmet
aux navires le sémaphore officiel.
» Ainsi donc, je peux établir chez moi, dans un
immeuble dont j'ai la propriété ou la jouissance,
des appareils de réception: antennes verticales ou
horizontales, cohéreurs Branly, détecteurs électro-
lytiques ou autres, dispositifs de syntonisalion, etc. ;
je puis régler ma montre sur les signaux de la
tour Eiffel, profiter des avertissements d'orages,
intercepter les dépèches diplomatiques ou commer-
ciales (quil me sera d'ailleurs impossible de tra-
duire si elles sont rédigées en un langage conven-
tionnel dont je n'ai pas la clé); le tout, sans avoir
à demander aucune autorisation administrative,
sans avoir à payer aucune redevance, sans ĉtre
exposé à recevoir la visite des agents mentionnés
par l'article 40 du décret de 4851, sans être pas-
sible de prison ni d'amende, sans courir le risque
de voir confisquer et détruire mes appareils.
» Cela n’est pas douteux en l’état des textes.
Que l'administration fasse voter une loi si elle
veut qu'il en soit autrement. Remarquons qu'une
loi serait nécessaire, un simple décret ne suflirait
pas: le décret de 1854 est un décret-loi, et un
décret-loi ne peut être modifié que par une loi. »
Nous avons soumis à M. Lescœur la copie d’une
lettre adressée à des constructeurs parisiens d’ap-
pareils de télégraphie sans fil par le directeur de
l'exploitation télégraphique, au nom du sous-secré-
COSMOS
3Å OCTOBRE 19192
taire d'Etat des Postes et des Télégraphes, et dont
voici le texte :
MESSIEURS,
J'ai l'honneur de vous informer, à toutes fins utiles,
que, conformément à l’avis exprimé par la Commission
interministérielle de la télégraphie sans fil, j'ai décidé
que les Compagnies de chemins de fer, les Observa-
toires, les Instituts météorologiques et, en général,
les Compagnies ou établissements assurant un service
public, pourront seuls être autorisés à installer des
postes de télégraphie sans fil destinés à recevoir les
signaux horaires émis par la station de la tour Eiffel.
Agréez, Messieurs, etc.
Cette lettre, nous a répondu M. Lescœur, «na
absolument aucune valeur. Il n’y a aucun compte
à en tenir. Contre un décret-loi, celui du 27 dé-
cembre 1851, qu'est-ce que peut la décision du
sous-secrétaire d'Etat? Le monopole de l’Etat
n'existe que dans les termes rigoureux de la loi qui
l'établit. Le texte fondamental, le seul important,
est le décret-loi de 1851. Les décrets subséquents
ne peuvent ni l’abroger ni le modifier. Ils ne
peuvent que l’interpréter eten assurer l’exécution.
Ils ne font qu’appliquer à la T. S. F. les règles posées
en 14851. En sorte que l'administration est sûre de
perdre le procès qu’elle intenterait pour installation
d'antennes et d'appareils récepteurs. Et c'est pour-
quoi elle se contente de menaces et d’intimidation. »
Ainsi donc, si l’administration ne poursuit pas
ceux qui établissent des antennes et des postes de
réception, c'est parce qu’elle n’est pas armée pour
les poursuivre. Il lui faudrait une loi interdisant
la réception comme la transmission, et cette loi,
qui jusqu'ici n'existe pas, semble bien difficile à
établir. Ne serait-il pas d'abord indispensable d'in-
terdire l’accès du Champ de Mars, où l'intensité du
bruit de la transmission permet de lire facilement
tous les télégrammes? Et puis, la loi établie, il
faudrait pouvoir en assurer l'exécution! Or, rien
n'est plus facile que de recevoir les télégrammes
de la tour Eiffel sans antenne extérieure. Même
loin de Paris, à 250 ou 300 kilomètres, on peut y
arriver avec un fil d’un mètre seulement à l’inté-
rieur d’un appartement. Quant au détecteur, il
suffit, pour en établir un, de mettre une pointe
métallique au contact d’un morceau de papier
buvard imbibé d’eau salée, de piquer à des pro-
fondeurs très inégales deux aiguilles dans une
pomme de terre, ou mème, tout simplement, de
poser un doigt sur une arète métallique avec une
pression convenable [{).
Mieux vaut donc peut-ètre laisser faire ce qu’on
ne pourrait empêcher...
(À suivre.) D" PIERRE CORRET.
(1) On a pu, par ce procédé, entendre à la tour
Eiffel les télégrammes de Cliffden et de Norddeich, à
plus de 1 000 kilomètres (J. BouLaNcer et G. FERRIÉ, la
Télégraphie sans fil et les ondes électriques, p. 274.)
N° 1449
COSMOS
489
Perfectionnements aux hydroaéroplanes.
Les petits inventeurs, que nous rencontrons
chaque année au concours Lépine, ont parfois des
idées bien ingénieuses, si elles ne sont pas toujours
pratiques. L'un d'eux, M. Leuillieux, inventeur heu-
reux de l’aéronette que nous avons présentée l’an
dernier à nos lecteurs, s'est attaqué cette année
au problème des hydroaéroplanes, et il a trouvé
deux solutions qui nous ont paru très heureuses.
Ayant observé que les hydroaéroplanes ont une
tendance exagérée à piquer de l'avant lorsqu'ils
amerrissent (le mot serait admis), il a imaginé un
dispositif permettant de changer l'incidence des
flotteurs au moment où ils touchent la nappe
= Fic. 1. — FLOTTEURS MOBILES POUR HYDROAËROPLANES.
liquide. Pour obtenir le résultat cherché, le flot-
teur est relié au châssis par deux articulations
A et B, et il peut tourner autour de la première.
La seconde B est solidaire de deux leviers G et D;
laxe E est solidaire d'une commande placée sous
la main du pilote. Il suffit d'agir sur cette commande
pour abaisser la partie arrière du flotteur et
l'amener au contact de leau en premier lieu. Le
flotteur agissant sur l’air comme surface sustenta-
trice lorsqu'il est suffisamment large, le pilote
devra corriger, en manœuvrant le gouvernail de
laéroplane, l'action de cette surface brusquement
inclinée. L'appareil subira une légėre résistance
à l'avancement pendant les 200 ou 300 mètres de
vol que demande la préparation à la prise de con-
tact avec l’eau. Dès que ce contact est réalisé,
l'appareil reprend de lui-même sa position normale.
La seconde invention est un frein progressif
pour les mêmes oiseaux marins. Lorsqu'un hydro-
aéroplane se pose sur l’eau, il conserve une cer-
taine vitesse qu’il est difficile à l’aviateur de
réduire. Le pilote se laisse aller au gré des vents et
des lames, la vitesse n'étant pas suflisante pour
que l'appareil obéisse au gouvernail aérien, et il
ne peut éviter un obstacle. C'est alors qwintervient
le frein. Il est constitué par deux gouvernails
;
\ /
F1G. 2. — FREIN PROGRESSIF.
A et B (fig. 2) adaptés à l'arrière du ou des flot-
teurs. L’arc de pivotement de ces gouvernails est
oblique, ce qui permet à la surface de freinage de
pénétrer progressivement dans l'eau, et cela dans
le sens de la marche pour n'offrir aucune résis-
tance. L'aviateur agit alors sur sa commande et
donne à ses deux gouvernails l’inclinaison qu'il
désire pour diriger son appareil. Rien ne s'oppose
a priori à ce que ces deux dispositifs nouveaux
puissent. être appliqués avec succès à la navigation
aéro-maritime.
L- F:
Les navires-écoles de
Une Compagnie de navigation allemande, le
Norddeutscher Lloyd, possède deux navires-écoles
où les aspirants au grade d'officier de la marine
marchande reçoivent une éducation en tout ana-
logue à celle qu’on donne en général aux officiers
de lẹ marine de guerre. Les élèves de ces navires-
écoles ne sont pas seulement instruits dans toutes
les doctrines scientifiques nécessaires au naviga-
teur, ils font un apprentissage pratique qui embrasse
les travaux multiples de la vie du marin.
la marine marchande.
Ces navires-écoles, le Herzogin-Sophie-Charlotte
et le Hersogin-Cecilie, font chaque année une
longue croisière commençant au printemps; comme
navires de la marine marchande, ils transportent
du fret au long cours. Ce sont de grands voiliers
à quatre mâäts parfaitement aménagés et d'une
construction entiérement métullique. Plutôt que
de choisir des steamers, on a préféré des voiliers,
non seulement pour pouvoir former des timoniers,
mais pour donner aux élèves l’occasion, que ne pré-
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LE NAVIRE-ÉCOLE ALLEMAND « HERZOGIN-SOPHIE-CHARLOTTE ».
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DANS LES VERGUES.
192
sentent que les voiliers, d'acquérir les qualités
requises pour leur service si difficile : adresse phy-
sique, courage, sang-froid, etc., d’autant plus que
l'apprentissage individuel est bien plus facile
à faire sur les voiliers qu'à bord d'un bateau
à vapeur.
L'apprentissage complet des élèves-officiers à
bord des navires-écoles dure trois ans. Les jeunes
gens entrent comme mousses et ne s'engagent que
pour la durée d’un voyage, soit environ un an. Au
bout de la première année, ils seront promus
matelots de 3° classe et après une seconde année,
matelots de 2° classe, tout en s’engageant pour
une troisième année. Comme on enrôle chaque
année environ 4) jeunes gens, le nombre des élèves
LES ÉLÈVES AU GOUVERNAIL
DU NAVIRE-ÉCOLE « SOPHIE-CHARLOTTE ».
sur les deux navires, en service complet, est au
total d'environ 120. L'équipage de chaque navire
se compose d'un capitaine, de quatre officiers,
d'un professeur de l’enseignement secondaire, du
médecin et des hommes indispensables. Les élèves
habitent, sous la surveillance des officiers et du
professeur, des compartiments spéciaux du navire.
A côté de l'apprentissage marin, fait, d'après une
habitude généralement reçue, pendant des veillées
régulières, sous la conduite des officiers, les élèves
recoivent tous les jours, si le temps le permet,
environ trois heures d'instruction théorique dans
les différents domaines de la navigation, dans la
langue anglaise, dans les mathématiques et dans
l'art du timonier.
Après avoir terminé cet apprentissage triennal,
COSMOS
31 OCTOBRE 191412
les élèves, à moins qu’ils ne restent sur le navire-
école à titre de matelots de 1'° classe, sont
attachés pour une période de neuf à douze mois
aux navires du Norddeutscher Lloyd, où ils font
le service de m':telots. Au bout de cette quatrième
année, ils auront rempli les conditions réglemen-
taires requises pour être admis à l'examen de
timonier, précédé toutefois d’un stage à l’école
de navigalion, qui, à raison de l'éducation reçue
à bord du navire-école, ne sera en général que de
quatre mois (au lieu de neuf). Les élèves ayant
obtenu le diplôme de timonier marin sont employés
autant que possible, comme quatrièmes officiers,
à bord des steamers de la Compagnie, sans qu'il
y ait toutefois aucun engagement de leur part. Les
LA MANŒUVRE DE MISE A L'EAU
D'UNE EMBARCATION.
autres Compagnies de navigation de Brême se sont
du reste entendues avec le Norddeutscher Lloyd
pour prendre les élèves des navires-écoles en con-
sidération pour les engagements à bord de leurs
navires. Après deux années supplémentaires de
service, ils retournent pendant quatre à cinq mois
à l'école de navigation pour y passer l’examen de
navigateurs au long cours, qui termine leur édu-
cation théorique. Ce diplòme les autorise, en effet,
à conduire comme capitaines des navires marchands
de dimensions quelconques sur toutes les mers.
Sans être brillantes, les conditions matérielles
de leur carrière leur garantissent un avancement
relativement rapide et un avenir assuré.
D' ALFRED GRADENWITZ.
Ne 1449
COSMOS
493
NOTES PRATIQUES DE CHIMIE
par M. JULES GARÇON
A travers les applications de la chimie: LA DERNIÈRE DES FONCTIONS AZOTÉES : LA FONCTION ALBUMI-
NOIDE. — LE NICKELAGE ÉPAIS. — EFFICACITÉ DE L'ORGANISATION DANS UN ATELIER DE FONDERIE. == ACCROIS-
SEMENT DES ACTIVITÉS PHYSIOLOGIQUES PAR SIMPLE MÉLANGE. — MÉTALLISATION DU (BOIS. — SUPÉRIORITÉ DE
LA PYRIDINE POUR LA DÉNATURATION DES ALCOOLS. — CONTRÔLE DE LA STÉRILISATION. — VARIA.
La dernière des fonctions arotées : la fonction
albuminoïde. — Les substances albuminoiïdes sont
des composés très complexes formés de carbone,
d'oxygène, d'hydrogène et d'azote, avec une petite
proportion d’autres éléments, en particulier du
soufre et quelquefois du phosphore. Leur composi-
tion et leurs propriétés les rapprochent de lalbu-
mine que l’on trouve dans le blanc d'œuf ou dans
le sang.
Le chimiste français Schutzenberger a poursuivi
pendant une vingtaine d'années, à partir de 41870,
un travail des plus importants sur les produits
d'hydratation des matières albuminoïdes; son tra-
vail l’a amené à considérer ces matières comme
des uréides trés complexes à acides aminés variés,
les diverses albuminoïdes se différenciant l’une de
l'autre par la nature de ces acides aminés. Des
travaux récents, et en particulier ceux de Fischer
et de son école, ont apporté un appoint considé-
rable à l’étude de ces produits de décomposition
des albuminoiïdes, c'est-à-dire à l'étude des produits
amidés et à leur synthèse.
La composition brute des albuminoïdes se rap-
proche de lu formule C'?H''!O%N't'S.
Les matières albuminoïdes précipitent avec les
sels métalliques, avec le tannin, avec l'alcool;
c'est la base de nombreuses applications dans le
mordançage et la teinture des fibres, dans le tan-
nage, ou pour coller les boissons alcooliques. C'est
aussi la raison pour laquelle l'eau albumineuse (un
blanc d'œuf délayé dans un litre d’eau) est le
contrepoison des sels métalliques, et en particulier
de ceux de mercure et de cuivre; pour laquelle,
enfin, le lait est si préconisé contre le saturnisme,
l'hydrargyrisme, etc.
Toutes les matières albuminoïdes, sous l'influence
des ferments solubles ou des acides, se trans-
forment par déshydratation en parapeptones ou
syntonines, qui sont des gelées insolubles dans
l'eau pure, et en peptones ou albuminoses, qui
sont des corps solubles et facilement assimilables
par l'organisme animal. Aussi les doane-t-on comme
reconstituants (somatose, etc.), mais ils sont désa-
gréablement odorants et s’altèérent aisément. Les
ferments solubles qui produisent celte peptonisa-
tion sont ceux qui existent dans la salive, le suc
gastrique (pepsine), le suc pancréatique (pancrea-
{ine), la bile, le papaya (papaïne), etc. Les pep-
tones sont des toniques qu'on absorbe à l’état pur,
ou sous forme de vin, sirops, élixirs, poudres des-
séchées, etc. |
Les matières albuminoides sont décomposées
par la chaleur, en produisant une odeur désa-
gréable. Abandonnées à elles-mêmes à l'air, elles
subissent la fermentation putride.
Les matières albuminoïdes existent dans les
tissus des animaux et dans la plupart des graines
des végétaux. Les plus importantes sont: l’albu-
mine d'œuf, l’albumine de sang, la caséine, la
fibrine, la gélatine.
Albumine de l'œuf, — Le blanc d'œuf en est
une dissolution aqueuse à 12,5 pour 100 qui se coa-
gule par la chaleur vers 70°; l’albumine coagulée
n'est plus soluble dans l’eau et les acides.
Albumine du sang ou sérine. — On la retire du
sérum. Elle sert, ainsi que la précédente, comme
antidote des poisons métalliques, pour fixer les
couleurs vapeurs, pour clarifier les jus, pour pré-
parer des antiseptiques argentiques (protargol,
argyrol, etc.); enfin comme matière d'apprèt. Sa
décoloration a été longtemps un problème indus-
triel.
Caséine, — Elle est insoluble dans l'eau. Cest
la base des fromages caillés. Ses dissolutions dans
les alcalis servent comme matières d'apprèt pour
rendre les tissus et les papiers imperméables à
l'eau; comme matières de fixation, pour métalliser
les tissus, les papiers et les cuirs; enfin comme
colles. Son mélange avec le formol est la base de
la galalithe, succédané du celluloid. La caséine est
la base d'un grand nombre de préparations alimen-
taires.
Le gluten est une caséine végétale qui existe
dans la farine des céréales.
Fibrine. — C'est une albumine du sang inso-
luble.
L'hémoglobine du sang est le principe actif des
globules rouges, et comme elle renferme du fer,
elle constitue un reconstituant excellent, qu’on
ordonnance en cachets ou en solution.
Gélatine, — Flle résulte de l’action de l'eau
bouillante sur losséine, matière albuminoïde inso-
luble des os. La gélatine est soluble dans cinq fois
son poids d’eau; c'est la colle forte ou colle de
peau, colle liquide.
19%
Le nickelage épais. — M. A. Hollard a étudié le
nickelage en dépôts épais. Il conseille l'emploi du
fluoborate de nickel, qui lui a donné de beaux
dépots épais aussi bien sur métal que sur em-
preintes plombaginées de gutta ou de cire.
Ce fluoborate de nickel se prépare en dissolvant
de l’acide borique dans une solution d'acide fluor-
hydrique pur du commerce à 43-46 grammes
de HFI par 400 grammes de solution; et dans cet
acide on dissout du carbonate de nickel frais et
encore humide. On prépare ce dernier en préci-
pitant une solution tiède de sulfate de nickel
(600 grammes de sulfate de nickel cristallisé dans
5500 grammes d’eau) par une solution chaude
de 350 grammes de carbonate de soude dans
1000 grammes d’eau, brassant le précipité dans
l'eau distillée et filtrant à diverses reprises jusqu à
ce que l’eau de lavage ne réagisse plus avec le
chlorure de baryum.
On verse 430 grammes d’acide borique dans
250 grammes d’eau bouillante; remuer, laisser
refroidir et transvaser le tout dans un récipient en
gutta. L'acide borique, ainsi divisé et imprégné
d'eau, se dissout facilement dans 285 gramimes de
la solution d’acide fluorhydrique. Lorsque tout est
dissous, on introduit peu à peu le carbonate de
nickel qui se dissout à son tour. On triture les
grains de carbonate non dissous, puis on agite une
vingtaine d'heures afin d'obtenir la saturation com-
plète de l'acide fluoborique. On filtre, on lave, et
on étend à 2 litres. On électrolyse le bain pendant
cinq à six jours, entre anode de nickel fondu pur
et cathode d’égale surface. Le bain est alors propre
à déposer le nickel en couche aussi épaisse que
l'on veut, sous un régime de un ampère pour des
électrodes de 145 mm X 180 mm, écartées de
4 centimètres.
Les empreintes de cire ou de gutta plombaginées,
encadrées par un fil de cuivre qui s'y enfonce de
distance en distance, seront mouillées avec de
l'alcool avant d'être mises dans le bain de nickel.
Celui-ci dépose son nickel directement sur la
fonte et sur l’aluminium
Pour obtenir des dépôts d’étain épais et non
spongieux, M. Hollard recommande le stannate de
soude en présence de sulfate de soude: 125 grammes
de stannate el 200 grammes de sulfate de soude
par litre.
Pour obtenir des dépôts de zinc, il recommande
le sulfate de zinc en solution acidulée par un acide
organique, et en présence d'acétate d’ammoniaque
qui évite l'acidité croissante du bain. Soit, par litre
de bain à 50°, sulfate de zinc 225 grammes, sulfate
d'ammoniaque 50 grammes, acétate d'ammoniaque
00 grammes, acide citrique 42 grammes.
£fficacité de l'organisation dans un atelier de
fonderie. — Les questions d'organisation scienti-
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
fique des usines et ateliers sont aujourd'hui pas-
sées au premier plan des préoccupations de l'in-
dustriel. A ceux qui ne seraient pas convaincus,
nous nous contenterons de citer ce fait, extrait d’une
étude de M. W. Crozier sur l'introduction des nou-
velles méthodes dans les arsenaux des Etats-Unis.
Il s'agit, comme l’on sait, de confier à un service
spécial la préparation et l'observation des travaux
dans tous leurs détails.
La fabrication d'un moule pour pommeaude selle,
à l'arsenal de Watertown, demandait cinquante-
trois minutes avec le travail à la journée. Le service
d'organisation scientifique du travail montra que
vingt-quatre minutes seulement étaient nécessaires.
11 fut décidé que toute minute économisée, à partir
d’une base de prime (soit 40 ou 50 minutes pour le
cas précité), serait payée en sus du salaire normal.
La seule annonce de cette décision causa la grève
des mouleurs ; ils furent remplacés ou rentrèrent
quelques jours après. Et l'on constata qu’un des
nouveaux embauchés faisait son travail en vingt
minutes et soutenait cette marche sans difficulté
la journée entière; un des anciens mouleurs soutint
son travail à l'allure de vingt-huit minutes. Comme
le prix de revient du moule de pommeau était de
5,85 fr pour cinquante-trois minutes et de 2,70 fr
pour vingt minutes, il y avait économie par moule
de 3,45 fr, et par journée d'ouvrier fabriquant
24 moules, l’économie atteignit 75,60 fr. Le spé-
cialiste chargé de l’organisation coûtait 75 francs,
c'est-à-dire quil était payé par l’économie d’un
seul ouvrier, et celui-ci touchait 60 pour 400 en
plus du salaire antérieur.
Accroissement des activités physiologiques par
simple mélange. — Lorsqu'on mélange ensemble
de la cocaïne avec de la novococaine ou de la
b-eucaine, les effets anesthésiques s’additionnent
simplement. Mais lorsqu'on mélange ces substances
avec un poids égal d’antipyrine, M. Béla von
Issekutz a constaté que l’action anesthésique aug-
mente de 46 pour 100 pour la cocaïne, de 19 pour 100
pour la novococaine, de 39 pour 4100 pour la
b-eucaine.
Métallisation du bois. — L'Électricien du
5 octobre (d'aprèsle Hechantiker)indique un procédé
assez compliqué, mais intéressant, de métallisation
électrolytique du bois. Il consiste à imperméabi-
liser d'abord le bois, puis à lui donner une couche
de vernis qu'on laisse sécher une nuit, une seconde
couche qu’on ne laisse sécher que quelques heures
pour qu'elle demeure un peu visqueuse, afin de
pouvoir appliquer, au pinceau, une quatrième
couche de cuivre très finement divisé. La surface
du bois est devenue bonne conductrice. On bouche
les inégalités de celte couche cuivrique par un très
léger dépôt d'argent, et enfin on applique, par élec-
trolyse, l'enveloppe métallique voulue.
N° 1419
Il semble bien plus simple d'utiliser simplement
le procédé de métallisation par pulvérisation de
Schoop, dont le Cosmos a déjà parlé (t. LAIT, p.549)
et qui donne de merveilleux résultats que l'on peut
admirer dans les bureaux de la Société de métal-
lisation.
Supériorité de la pyridine pour la dénatura-
lion des alcools. — En Allemagne, l'esprit de bois
ou méthylène n’est pas employé seul pour la déna-
turation de l'alcool. À 2 parties d'esprit de bois
pour 100 parties d'alcool, on ajoute 0,5 partie de
pyridine. Les nombreux substituts qui ont été pro-
posés n'ont pas pu remplacer cette dernière à cause
des avantages suivants : elle est miscible en toutes
proportions dans l’eau; elle donne à l'alcool un
goùt extrêmement désagréable; elle est facile à se
procurer; sa faible basicité fait qu’elle n’est fixée
par les acides minéraux que s’ils sont employés en
grand excès; à la proportion indiquée plus haut,
le charbon de bois ne l’absorbe qu’en petite quan-
tité; elle est combustible sans résidu; elle accroit
plutôt le pouvoir dissolvant de l'alcool; enfin, elle
est inoffensive à ce degré de dilution.
Contrôle de la stérilisation. — « Il est universel-
lement admis, dit M. Grimbert dans le Journal de
Pharmacie (1° juillet 1912), que la vapeur d’eau
sous pression constitue le mode de stérilisation le
COSMOS 495
plus pratique et le plus parfait pour les objets qui
peuvent supporter sans en être détériorés l'action
de la vapeur humide à haute température.
» Si on adopte pour la stérilisation à l’autoclave
la température maximum de 130°, pendant un
temps qui pourra varier avec la nature des objets
à traiter, mais qui ne dépassera jamais une heure,
on peut en toute sécurité employer comme contrôle
des tubes à acide benzoïque fondant seulement
à 120°-121°, de manière à se mettre à l'abri des
surprises auxquelles nous exposent les indicateurs,
et considérer comme stérile tout milieu où l'acide
benzoïque aura fondu. »
Varia. — Les fleurs artificielles en celluloid
tendent de plus en plus à être remplacées par des
substances moins dangereuses, comme l’acétate de
cellulose. Celui-ci ne s'’enflammerait que vers 120°,
tandis que le premier s'enflammerait vers 80°. Mais
l’acétocellulose prend moins bien certaines couleurs.
— Le chlorure d’éthyle et le chlorure de méthyle
sont très inflammables, mais ne donnent pas de
mélanges détonants avec l'air.
— Pour le déplacement des hydrocarbures, on
préfère le gaz azote au gaz carbonique, parce qu'il
est meilleur marché et moins soluble dans l’essence,
mais il faut que l'azote renferme le moins possible
d'oxygène. (Extrait du rapport de M. Paul Adam
sur les établissements classés.) (Voir p. 482).
Ün tableau allégorique : la Pharmacie.
Quand le médecin anglais Lister visila Paris en
4698, il se plut à constater que plusieurs « bou-
tiques d’apothicaires sont fort ornées et ont même
un air de grandeur (1) ». Si ces deux caractères
se rencontraient dans la réalité, ils ne pouvaient
faire défaut à une peinture allégorique dont la
Pharmacie était le sujet. Ce tableau, tiré du cabinet
de Ms? le duc de Picquigny, fut inventé et peint
par J. de la Jouë, sur qui les dictionnaires d'artistes
gardent un regrettable silence; des deux Cochin,
ce fut, selon toute vraisemblance, Charles-Nicolas,
le père (1688 ? 1754) qui en exécuta la gravure (2).
(1) Voyage à Paris, traduit par E. de SERMIZELLES.
Cité par A. FRANKLIN. Les médicaments, p. 18.
(2) Cette gravure a été reproduite en planche hors-
texte dans Jehan de Louvegny, apothicaire amiénois,
par M. O. TuaoreL. Amiens. Yvert et Tellier. 1906.
(Voir: Une apothicairerie à Amiens, en 1520, Cosmos,
48 avril 41908, n° 1212.) Une copie de ce tableau
décore actuellement la pharmacie F. Boyeldieu, 5, rue
des Vergeaux, à Amiens; elle est cependant inexacte:
pour le dessin, parce que l'ordonnance générale du
sujet a été légèrement modifiée à cause de l'encadre-
ment; pour les couleurs, parce que ce tableau a été
exécuté d’après la gravure de Cochin.
Soucieux d'ètre aussi exact que complet, le
peintre u tenu à montrer à la fois le laboratoire
et la boutique, disposant toutefois celle-ci au
second plan d'une vaste salle circulaire et voùtée:;
la simplicité de l'architecture a quelque chose d'im-
posant; quant au décor, il conviendrait dans son
ensemble à cette très folle sæur de la pharmacie
qu'est l'alchimie.
La boutique de l'apothicaire n’a point, à propre-
ment parler, de mystères pour le public quila fré-
quente à regret; il en connait la disposition géné-
rale et a eu le temps, durant ses stations, d’en
observer les particularités qui l'ont frappé. Il en va
autrement du laboratoire: c'est d'abord la partie
essentielle de l'établissement; en outre, elle est,
ainsi qu'en bien d'autres cas, d'autant plus intéres-
sante qu'on n'en a point communément l'accès et
qu'on la soupçonne seulement; elle abrite la
préparation des mixtures compliquées et les distil-
lations savantes; elle a, par son attirail un peu
étrange, l'avantage d'offrir un précieux élément
de pittoresque. La dévoiler et en faire le centre
même de sa composition était de la part de l’artiste
une conception non moins heureuse que justifiée.
196
Bien en évidence, sur la plate-forme d'un
perron, dont les derniers degrés apparaissent au
bord du tableau et rehaussent, au propre et au
figuré, l'importance du personnage, le pharmacien
est assis dans un fauteuil confortable; la tète cou-
verte d'un bonnet fourré, vêtu d’une longue robe
que laisse voir son ample manteau entr'ouvert, une
baguette à la main, il se révèle au premier coup
d’œil le souverain de ce domaine, dont le vulgaire
se fait une haute idée, à raison de son ignorance
même; il semble, comme Pascal l’a remarqué à
propos des médecins, qu’il s'agisse ici de frapper
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COSMOS
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31 OCTOBRE 191%
l'imagination par cet accoutrement d'apparat et
de faire naitre un respect que la seule majesté de
la science serait impuissante à inspirer (4).
Aux pieds du maitre gisent dans l’habile désordre,
où se reconnaît un effet de l’art, les feuillets chif-
fonnés des ordonnances et du Codex. Une corbeille
inclinée sur les degrés contient le combustible des-
tiné à l'alimentation du fourneau voisin, sur lequel
s’élabore une de ces curieuses distillationsen faveur
à cette époque; les flammes qui s’échappent de
ses ouvertures laissent soupçonner l'activité du
foyer. Près de là sont disposés des vases et des
sit.
LA PI, ARM. AC LF,
a lire du cabmet de
Monseique ur de Duc de Pie ot UN y,
a A A D r sre G Papa horar arara de Mes rw A Aaipoos ETAN
flacons diversement coiffés; trois ballons à long
col pendent sous la corniche de la hotte. Sous la
hotte même du laboratoire, on distingue un four-
neau portatif; il s'y opère une préparation, dont
les vapeurs viennent apparemment se condenser
dans un ballon à long col placé sur un haut et léger
support; à còté, un cornet de papier à filtrer sur-
monte le goulot d'une bouteille pansue munie
d'une anse,
En face, deux consoles renversées, et sur le côté
droit une console rampante très allongée, qui
sépare le laboratoire de la boutique, soutiennent
celle hotte en forme de dôme à contre-courbe;
sur son rebord semi-circulaire alternent des vases
de verre retournés et des cornues. Une étrange
tête armée d’une corne et une large bouteille à
col court dominent le tout.
Entre toutes les apothicaireries, Lister avait
(1) Le maître apothicaire faisant dans sa boutique
la leçon à son apprenti (figure extraite de l'Ortus
sanitatis, Paris, Vérand, vers 1499, et reproduite
dans Granel, Histoire de la pharmacie à Avignon,
du xu° siècle a la Révolution, Maloine, Paris, 1905,
p- 26) porte une sorte de calotte et une robe assez
semblable à celle de nos magistrats actuels, sauf un
grand col rabattu.
N° 1449
remarqué celle de Mathieu-Francois Geoffroy, qui
fut échevin de la ville en 1685 et père du célèbre
Etienne Geoffroy, mort professeur au Collège de
France et doyen de la Faculté de médecine. « Elle
est, dit-il, dans la rue Bourgtibourg. L'entrée de la
basse-cour est par une porte cochère avec des
niches où sont de grands vases de cuivre. Quand
vous êtes entré, vous trouvez des salles ornées
d'énormes vases et de mortiers de bronze, qui sont
là autant pour la parade que pour l'usage. Les
drogues et les préparations sont dans des armoires
rangées autour de ces pièces (1). » Dans l’apothi-
cairerie des Feuillants, installée dans ce couvent
en 4637 par le Fr. Christophe de Saint-François (2),
la pièce était entourée d’'armoires vitrées dont
l’entablement était chargé de beaux vases.
Dans la peinture qui nous occupe, une baie spa-
cieuse donne accès dans la boutique, et c’est sous
une arcade aveugle que sont alignés sur des rayons
les pots, qui faisaient l'orgueil des pharmacies
d'autrefois; une échelle, que l'artiste n’a eu garde
d'oublier, permettait d'atteindre les plus hauts
placés (3). Si les peintures des pots attiraient l’at-
tention des curieux, leurs étiquettes avaient de
quoi intriguer les profanes et éveiller en eux du
même coup la vénération de la science (4).
Le reste du décor ne contribuait pas peu à accen-
tuer ces impressions et n'était d’ailleurs pas de
pure parade.
Dès l'entrée, le grand os de scie pendu le long
de l’ébrasement ne devait pas manquer de provo-
quer un étonnement mêlé de crainte.
A la naissance de Farc, la bouche ouverte de
lhippopotame laisse voir ses grosses dents, qui,
ne jaunissant pas comme l'ivoire et d'une consis-
tance beaucoup plus dure, étaient fort recherchées
« par tous ceux qui se mêlent d'arracher les dents
et d'en remettre d’artificielles ». Débitées en petites
plaques minces et percées en deux endroits afin
qu'on y püt passer un ruban, elles étaient portées
par bien des personnes, en guise d’amulette, contre
la crampe, la goutte sciatique et les hémorragies;
leur était-ce d'un grand secours? C’est plus que
problématique. |
Suspendu à la clé du cintre se balance un animal
(1) LisTER, 0p. cit.
(2) Recherches sur Paris, par SauvaL, t, I", p. 485
Cité par A. FRANKLIN, op. cil., p. A7 et 18.
(3) Dans la « boutique pharmaceutique » figurée
dans les œuvres de Jean de Renou, un commis est
monté sur l'échelle pour prendre à deux mains sur
le rayon le plus élevé un pot ovoïde passablement
volumineux. (Voir A. FRANKLIN, op. cit., p. 16.)
(4) S'il nous est permis de faire état d’un souvenir
personnel, nous avouerons n'avoir, dans notre enfance,
jamais pénétré chez les pharmaciens sans éprouver
ces sentiments. Et n'y-a-t-il pas plus d’un point de
contact entre la mentalité de l'enfant et celle du
peuple?
COSMOS
197
que nous n'avons pas réussi à identifier, mais qui
n'est probablement pas sans rapports avec le poisson
« orbis », cité en 1623 par Laurens Catelan ; c'était
le diodon, appelé aussi « hérisson de mer » et
« poisson armé », à cause des multiples piquants
dont tout son corps est garni; il se tourne « contre
le vent, quoyque mort, farcy de bourre et pendu
au plancher des maisons (1) ». Un œuf d'autruche
peut-être, dont le principal intérèt réside dans son
volume, lui fait pendant vers l'intérieur (2).
A la suite, un reptile saurien rappelle cette
« peau d’un lézard de trois pieds et demi remplie
de foin, curiosité agréable pour pendre au plancher
d'une chambre » que, dans Molière (3), La Flèche
vend à Cléante; de plus, c’est ici une curiosité
utile. Est-ce un crocodile? Sa graisse, mélangée
à la cire blanche, entrait dans la composition d’une
pâte qu'il suffisait de brüler dans une lampe pour
faire taire les grenouilles (4). Y veut-on voir le
« scing » ou « scinque » du Levant? Sa queue et
ses reins étaient employés comme ils le sont encore
Diopons.
par les pharmaciens orientaux. N'est-ce qu'une
représentation exagérée du simple lézard? Con-
verti en huile par infusion ou par décoction, il
était fortifiant et résolutif, activait la croissance
des cheveux ou aidait à la disparition des taches
de la peau; pulvérisé, il avait la propriété de favo-
riser la chute des dents cariées et gâtées; il sufti-
sait de déposer un peu de cette poudre dans le
creux de la dent malade, en ayant soin qu'il ne
s'en répandit point sur quelque dent saine. D'après
Jean Gœurot, médecin de François Ie", il n'était
(1) « Estant desséché et rempli de bourre ou de
quelque autre chose, écrivait Rondelet, on le pend aux
temples et aux maisons et a toujours le bec tourné
contre le vent. »
(2) « Les Turcs et les Persans suspendent les œufs
d'autruche, comme ornement, à la voùte de leurs
mosquées. » (VaLmont pe Bomare, Dict. d'hist. nat.
T. I’, art. « Autruche ».)
(3) L’Avare, acte IT, scène I.
(4) D'après un traité de médecine provenant de la
bibliothèque des Augustins d'Amiens.
498
pas jusqu’à ses excréments qui ne fussent salu-
taires en cataplasmes..... contre les taies des
yeux.
Au-dessous, cette énorme araignée ne pourra, vu
sa taille, être enclose vivante dans une coquille de
noix (4) qui, portée au cou, triompherait des fièvres
tierces et quartes les plus rebelles; macérée pen-
dant vingt-quatre heures avec plusieurs de ses con-
génères, elle fournira une huile précieuse contre
les maladies malignes et contagieuses.
L'animal bizarre qui lui fait face, de l’autre côté
de la hotte, peut être considéré comme un renard,
si l’on ne se montre pas trop difficile sur l’exacti-
tude de ses dimensions, par rapport à l’araignée,
par exemple. La peau, la graisse et l'huile de
renard passaient pour guérir les rhumatismes et
les humeurs froides; son poumon « lavé en vin »
était recommandé contre la phtisie, et son sang,
appliqué en lotions aussi chaudes que possible,
avait « vertu de rompre la pierre aux reins et en
la vessie » (2).
On reconnait, accrochée à la voùte, une coquille
marine fossile; elle est décorative, et symbolique
aussi, car les os d'animaux « devenus fossiles » et
désignés sous le nom d’ « unicorne fossile » étaient
d'un fréquent usage en médecine chez les Alle-
mands, les Italiens et les Polonais pour arrêter le
cours de ventre, pour résister aux venins, pour
combattre lépilepsie, pour déterger même les
vieux ulcères et fortifier les yeux, encore que tant
et de telles vertus commençassent à parailre dou-
teuses à quelques disciples d'Esculape. |
Les cornes étaient en général très appréciées;
qu'elles provinssent du cerf, du chevreuil, de la
licorne, du narval ou du rhinocéros, elles consti-
tuaient des antidotes assurés contre les venins et
les fièvres malignes. Mais Pierre Pomet, savant
apothicaire du xvu* siècle, avoue qu'il vendait pour
corne de licorne des défenses de narval : « Ce sont,
dit-il, les tronçons de cette corne que nous vendons
à Paris, comme ils se vendent ailleurs, pour véri-
table corne de licorne. »
Les dents d'éléphant réconfortaient le cœur, et
la gelée, préparée avec son ivoire, passait même
pour plus eflicace que la corne de cerf dans les
hémorragies. La tète du pachyderme placée au
bas de l’oculus a donc ici sa raison d’être.
Il en est de même pour la tortue à peine visible
au-dessus de l'oculus; le corps de l'animal, privé
de la tète, des pattes et de la queue, donnait un
bouillon adoucissant et nourrissant, du meilleur
effet dans les maladies de poitrine; il arrivait qu’à
défaut de cette chair plutôt rare, on plongeñt tout
simplement dans le pot-au-feu un morceau de
veau; la décoction n'était pas moins appelée
(1) À moins que ce ne soit une noix de coco.
(2) Voir Usages du renard, Cosmos, 2 juillet 1910,
n° 1:27,
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
« bouillon de tortue »; n'est-ce pas la foi qui
sauve? (4) On en tirait encore un sirop contre
l'enrouement et la toux; son suc huileux et balsa-
mique corrigeait la salure du sang; son sang était
estimé contre l'épilepsie, et son fiel contre les
maux d’yeux; l’usage de sa chair comme nourri-
ture amenait, en Portugal, la guérison des lépreux
et des scorbutiques; enfin, ses œufs avaient des
propriétés fébrifuges et narcotiques.
Par son corps fusiforme, le poisson, qu'on dis-
tingue entre la tête d’éléphant et l’ammonite et
un peu au-dessous d'elles, peut s’apparenter aux
Carchariidés; à cette famille appartient le requin
proprement dit, dont la cervelle très blanche,
séchée et mise en poudre, était fort apéritive et
diurétique ; ses dents pulvérisées et prises à la dose
de deux scrupules étaient recommandées pour
arrêter le cours de ventre, faire cesser les hémor-
ragies, provoquer les urines et même détruire la
pierre; mais cette dernière vertu n'inspirait pas
à tous une égale confiance; on enchâssait dans de
l'argent celles de ces dents qui sont unies pour en
faire des hochets dont les enfants se servent pour
aider leurs dents à percer; celles qui sont den-
telées é'aient autrefois enchâssées par les orfèvres;
ils les vendaient à des individus crédules, qui les
portaient en amulettes pour soulager leurs dou-
leurs odontalgiques ou se guérir de la peur. Ron-
delet assure qu’on en préparait d'excellents denti-
frices pour blanchir les dents et les affermir. Les
dents qu'on apportait de Malte sous le nom de
« langues pétrifiées de serpents » ou « glossopètres »
n'étaient autres que les vulgaires dents de quelque
carchariidé (2).
Nous ne voulons pas oublier l’artistique cartel
qui repose sur une console largement évidée pour
permettre le passage des poids et l’ample oscilla-
tion du pendule; son monotone et continuel tic-tac
rappelle au maitre du logis comme à ses clients la
fuite ailée des heures que nous dérobe cet insigne
larron qu’est le temps (3) et dont est faite la trame
de notre vie; par ailleurs, l'accumulation des
produits pharmaceutiques les conviait à songer
que la vie tire moins son prix du fait d'exister que
de la santé: Non est vivere, sed valere, vita.
A gauche de la composition, un garçon de labo-
ratoire transporte de l'officine dans la boutique un
vaste panier à claire-voie.
Par plus d'un de ses détails, cet ensemble fait
songer aux magasins de bric-à-brac; la faute en
est moins à l'artiste qu’à létat de la science phar-
maceutique à l'époque où il vivait; c'est d'eux que
(1) Voir Un traité de médecine vulgarisée au
xvin’ siècle, Cosmas, 17 septembre 1904, n° 1025.
(2) Huile de foie de requin, Cosmos, 11 juillet 1912,
n° 1433.
(3) O temps, suspends ton vol, fait humoristique-
ment remarquer Em. Faguet, d'après Lamartine.
N° 1449
l’allégorie tire toute son importance et sa signifi-
cation précise; à considérer cette œuvre, les con-
temporains du peintre et du graveur ne doutaient
pas qu'ils n'eussent sous les yeux la pharmacie. Il
ne nous est pas toujours donné d’éprouver pareille
ns
COSMOS
499
certitude devant telle œuvre d'art moderne qui
prétend symboliser quelqu'une des branches de la
science ou de ses plus récentes découvertes.
LON GOCDALLIER.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 21 octobre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Remarques complémentaires sur les protu-
bérances, alignements et filaments de l’at-
mosphère solaire supérieure. influence du
champ électrique solaire. — M. H. DESLANDRES
revient sur sa dernière communication et la complète,
en analysant les résultats obtenus à Meudon. Entre
autres observations, M. Deslandres cite une mesure
faite avec M. Burson de l’épaisseur de la chromosphėre
moyenne sur trois épreuves de vitesse radiale choisies
un peu au hasard, l'épaisseur a été trouvée plus
grande aux pôles qu'à l'équateur, la différence étant
variable d’une épreuve à l’autre et plus grande dans
l'hémisphère Sud que dans l'hémisphère Nord. Il
semble donc que cette épaisseur de la chromosphtre
soit un élément variable du Soleil, digne d'ètre relevé
d'une manière continue.
En terminant, le savant astronome regrelte que la
pénuriedel'Observaloirede Meudon soit telle quel’on en
soit réduit à accumuler les documents sans pouvoir les
étudier.
Sur la respiration des plantes vertes. —
MM. Maquexne et DEmuoussy constatent que si, depuis
maintenant un siècle que l'étude de la respiration des
plantes est entrée dans le domaine de la physiologie
générale, un grand nombre de travaux se sont
succédé, qui ont fait connaitre la nature des échanges
gazeux qui la caractérisent, ainsi que les principales
circonstances extérieures ou d'origine interne qui la
modifient, cependant, on est encore très mal renseigné
O1
en ce qui concerne le rapport 2o, chez les plantes.
Cette incertitude tient sans aucun doute aux modes
d'observation. Il est nécessaire, lorsqu'on se propose
de déterminer le quotient respiratoire réel d'un
organe végétal détaché de sa souche, de prendre
celui-ci sur un sujet en état d'équilibre dans toutes
ses parties et d'opérer en un temps très court, à une
température voisine de celle qu'il possédait au moment
de la cueillette.
Sur les triangulations géodésiques complé-
mentaires des hautes régions des Alpes fran-
caises. — M. HELsroNNER donne un rapide compte
rendu des opérations effectuées dans cette dixième
campagne, dont les résultats ont été beaucoup plus
heureux que ne pouvait le faire espérer la déplorable
saison que nous avons traversée. Une première série
a eu lieu du 24 juin au 1” juillet, l’autre du 2 juillet
au 22 septembre, en s'appuyant sur la chaine fonda-
mentale établie précédemment.
Influence de la vitesse de combustion sur
le rendement d’un moteur à gaz. — M. E. Meni-
GEAULT déduit de sa note antérieure les règles sui-
vantes:
. 4° Si aucune condition ne limite la compression
avant allumage (par exemple si l'air et le combustible
sont comprimés séparément), il y a intérèt à pousser
cette compression jusqu’à la pression maximum que
peut supporter le cylindre, puis à faire une combus-
tion à pression constante. Voilà l'explication de
l'avantage du moteur Diesel;
2 Si certaines conditions limitent la compression
avant allumage et si la pression à laquelle peut résister
le cylindre est pratiquement illimitée, il y a intérèt
à faire une combustion instantanée.
Ces conclusions, vraies pour des moteurs adiaba-
tiques, c'est-à-dire où il n’y aurait pas de transmission
de chaleur par les parois, sont probablement appli-
cables aux moteurs réels, dans lesquels les actions de
parois sont importantes.
Captation des ondes hertziennes par des
antennes purement horizontales tendues au
ras du sol, et, par extension, utilisation des
fils télégraphiques et téléphoniques d’abon-
nés. — Le mois dernier, à Saint-Brieuc, M. ParL
Jécoc a expérimenté une antenne purement horizon-
tale et tendue parallélement au sol, à peine à hauteur
d'homme, un peu analogue au dispositif Kiebitz.
Sur un terrain légérement incliné, un fil tendu de
80 mètres de long n'a pas permis de recevoir Îles
signaux horaires de la tour Eitfel ; avec deux fils écartés
de 30 centimètres l'un de l’autre, la réception devint
tiès bonne. Avec trois et quatre fils, l'etfet resta Île
mème.
En reliant un appareil récepteur de T. S. F. àla
borne-ligne d’un appareiltéléphonique d'abonné ou d'un
appareil télégraphique, les signaux de T. S, F. sont
fortement décelés. Mais, pouréteindre les bruits para-
sites, il convient d'intercaler un petit condensateur.
Sur l’action du vaccin antityphoïdique po-
lyvalent, chez les personnes en état d'infec-
tion latente par le bacille d'Eberth. — Le
Dr H. VixcexT montre que l'immunisation active à
l’aide du vaccin polyvalent, opérée en temps d'épi-
démie, donne la possibilité de protéger même les per-
sonnes déja infectées vingt-quatre heures ou jua-
rante-huit heures auparavant, par le bacille d'Eberth.
Si l'infection spécifique est plus ancienne, le bacille
a eu le temps de pulluler et d'envahir le sang pendant
la phase silencieuse d’incubation. En pareille occur-
rence, l’inoculation de typho-vaccin arrive évidem-
500
ment trop tard pour enrayer le processus infectieux.
Or, il a été permis d'observer que, mème dans cette
circonstance, l'inoculation de l'antigène a eu pour
conséquence une protection appréciable du sujet.
Le vaccin a jusqu'ici été inoculé à. 20 000 individus;
aucun des vaccinés, mème au milieu d'épidémies très
graves, n'a contracté la fièvre typhoïde.
Sur le rôle antiseptique du sel marin et du
sucre. — M. L. LiNvEtT pense que ce rôle s'explique
par la facilité avec laquelle les microbes se plasmo-
lysent: ils cèdent à une solution concentrée de sel ou
de suere une partie de leurs éléments constitutifs,
s'atfaiblissent et ne présentent plus la mème capa-
cité de reproduction.
L'auteur s'est procuré des microbes de levure de
distillerie, qu'il a placés vingt-quatre heures dans des
solutions soit de sucre, soit de sel (allant pour le
sucre jusqu’à 80 et pour le sel jusqu'à 8 pour 100);
au bout de ce temps, les cellules se sont fortement
appauvries en divers éléments, notamment l'azote,
l'acide phosphorique, la potasse, que l'auteur a dosés
dans les liquides filtrés. Les cellules, vues au micro-
scope, paraissent amaigries; elles ne se développent
ensuite qu'avec un retard d'autant plus grand qu’elles
ont séjourné au contaet de solutions plus concentrées.
Jaugeage de cours d’eau par l'analyse chimique.
Note de M. Tu. ScileæsiNé père. — Découverte et
observations de la coméëte 1912 b (Schaumasse) faites
à l'Observatoire de Nice. Note de M. A. SCHAUMASSE. —
Observations de la nouvelle comete Gale (1912 a). Note
de M. GiacosINI. — Observations de la comète Gale
(1912 a) faites à l'Observatoire de Besançon. Note de
M. P. Breek. — Sur les substitutions crémoniennes.
Note de M. LÉON AUTONNE. — Sur un théorème de
M. Picard. Note de M. T.-H. Gaoxwazz. — Sur un théo-
réme de Stieltjes. Note de M. GE£onGE Porya. — Sur
la réfraction et la rotation magnétique des mélanges.
Note de M. P.-Tu. Muzrer el M V. GUERDJIKOFF. —
Méthode simple pour la préparation des oxydes miné-
raux. Note de M. Mavrice Bilzy. — M, LuciEN DANIEL
est parvenu à grelfer la carotte sur le fenouil poivré;
c'est un joli problème résolu et qui a son intérét au
point de vue de la physiologie botanique; mais Îles
resultats semblent ne rien avoir de pratique. —
Recherches sur la présence d'acide nitreux dans la
sève des végélaux supérieurs. Note de P. Mazé: l'au-
teur établit que l'acide nitreux existe normalement
dans la sève des végétaux; il est élaboré par les cel-
lules vivantes, il ne dérive pas des nitrates par voie
de réduction, et sa concentration est en raison inverse
de l'activité végétale. — Sur un nouveau groupe
naturel de plantes à acide cYanhvdrique,les Calyran-
tharves. Note de M, Marcrz MinaNne. — Sur la pré-
sence des corpuscules de Herbst dans la glande uro-
pygienne des oiseaux. Note de M. Paer Panis. — Action
des rayons ultra-violets sur le suc pancréalique. Leur
intluence sur l'activation du suc par la kinase et par
les sels de calcium. Note de MM. C. DELezeNse et
M. LissoxxÉ. — Fermentation du sucre par le Barillus
subtilis. Production du 2. 3-butyléneglvcol. Note de
M. LEuoIGNE. — Sur des empreintes (meduses, algues)
recueillies dans le carbonifère des environs de Suez.
Note de MM. Couvar et FRITEL. — Dissolution de la
silice dansles eaux souterraines. Note de M. F. DIENERT.
COSMOS
J1 OCTOBRE 1912
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES !)
Congrès de Nimes.
Chimie.
Sous la présidence de M. J. MEUxIER, chef detravaux
à l'École centrale des arts et manufactures.
M. ALEXANDRE H&uBEaT. 1° Une modification du procede
de Marsh par le dosage de l'arsenic. — C'est une com-
binaison de la méthode de Van Bylert et des perfec-
tionnements d’Armand Gauthier et de G. Bertrand.
On a obtenu ainsi des teneurs en arsenic descendant
jusqu’au demi-milliëéme, et méme jusqu'au quart de
milheme de milligramme.
> La Chimie en horticulture. Pour le Vresea splendens
(famille des Broméliacées), l'addition d'une dose de
25 grammes de phosphate de soude par mètre carré
a donné le meilleur résultat. Pour les Anthurium
Scherzeriunum (Aroïdées), 40 grainmes de phosphate
de potasse par mètre carré amènent un dévelop-
pement considérable. Les chrysanthèmes (Composés)
acquièrent une plus-value très importante quand on
additionne leur sol de nitrate de soude ou de sulfate
d'ammoniaque comme complément d'azote et de phos-
phate ammoniaco-magnésien, ou de phosphate d'am-
moniaque comme complément d'acide phosphorique
et d'azote. Ces engrais doivent être distribuës en
arrosage au millième. Pour les Cattleya (Orchidées),
il convient d’additionner le sol inerte de mélanges de
nitrates d’ammoniaque, de potasse, de chaux, et de
phosphate d'amimoniaque. La culture des azalées
(Éricacées) exige pendant la première année un apport
supplémentaire d'azote, de chaux, de potasse et d'acide
phosphorique; pendant la deuxième année, l'azote seul
fait défaut, et pendant la troisième année le terreau
dans lequel on les cultive suflit à leurs besoins. La
dépensé est presque insignitiante. La culture des
cyclamens (Primulacées) ne peut réussir qu’en agis-
sant surtout au point de vue physique sur le sol.
L'étude systématique des dracœæna, des chrysanthemes
des cyclamens, des menthes, a permis d'énoncer cette
conclusion: l'engrais n’influe pas sur la marche rela-
tive de l'assimilation, mais il l’augmente considérable-
ment. Il convient de citer les travaux du D' Gritlith,
en Angleterre, qui a entrepris des analyses du mme
genre.
Contribution à l'étude des fermentations visqueuses.
M. E. Kaysen, Paris. Cette étude a une grande impor-
tance dans le traitement des cidres gras: les moyens
pour lutter contre cette maladie sont préventifs ou
curatifs. Moyens préventifs : très grande propreté,
défécation rationnellement conduite, fermentation
régulière et choix de pomimnes de mème maturité, fil-
trations, ouillages, soutirages judicieux et grande
surveillance des cidres fabriqués, pour enrayer la
maladie au début. Comme moyens curatifs : fouettage
vigoureux du cidre, aération a quelquefois donné
de bons résultats.
M. Genser (Marseille). — 4° Sacrharification de
l'amidon par la salive et la diastase de l'orge en pre-
sence d'eau oxyqénée.
(1) Suite, voir p. #72.
N° 1449
> Action des halogènes et des composés halogénés
du mercure sur la saccharification de l'amidon par la
diastase du malt etl la salive.
Sur les réactions du phosphore et du calrium arec
les molécules protéiques (M. L. Liver, Paris).
Sur l'ambréine, par M. J. Risan (Paris). — Cette sub-
stance n’a pas été étudiée depuis Pelletier et Caventou,
1820-1832), sans doute à cause du prix élevé de la
matière première dont on l'extrait: elle atteint en
effet, aujourd'hui encore, 5 000 francs le kilogramme,
matière première dans laquellel'ambréine peut n’exister
qu'en proportions très variables ou mème étre absente.
Une circonstance fortuite a mis l’auteur en possession
de quelques grammes de cette substance; il a pu l’étu-
dier au point de vue de l’électrisation, du pouvoir
rotatoire: inodore, insoluble dans l'eau, soluble dans
le pétrole, la benzine, le chloroforme, le tétrachlorure
et le sulfure de carbone, qui se prêtent mal à sa cris-
tallisation, tandis que l’alcoo!l et l’éther l'abandonnent
facilement cristallisée. — Analyse de cette substance
précieuse. — Essais cryoscopiques. — Le chlore en
solution dans le tétrachlorure conduit à une décom-
position de la matière.
Des tentatives dans diverses directions, action des
anhydrides acétiques, phosphoriques, etc., ont épuisé
la petite provision d'ambréine.
M. AnDRé MEYER (Paris) étudie quelques dérivés de
la phénylisoxazolone. — Elle possède, d’après les
résultats exposés dans ce mémoire, une assez grande
aptitude réactionnelle. C’est un corps capable, comme
l'éther B-cétonique qui lui donne naissance, de se
tautomériser facilement. Les produits colorés qui en
COSMOS
501
dérivent sont intéressants à envisager : ils permettront
de contribuer à étendre les connaissances sur les
relations existant entre la couleur et la constitution
en chimie organique.
MM. J. Viile et Mestarzar (Montpellier). De l'origine
burcale des oxydases, des perorydases et des substances
peroxyliliques de la salive mixte. — On ne saurait
continuer à les considérer comme étant d'origine
glandulaire. Le moindre effort d'expectoration, le
lavage de la bouche avec de l’eau distillée suffisent
pour amener la présence de traces d’hémoglobine
(globules rouges), de même qu'il y a contact, dans la
bouche, de la salive avec les leucocytes, des cellules
de desquamation et autres éléments figurés, toutes
raisons qui suffisent à expliquer les réactions obtenues
avec la salive mixte et non retrouvées avec la salive
pure.
MM. Pavut JEancanp et CoNraD SATIE. l’nifiration des
méthodes d'analyse des huiles essentielles. — L'estima-
tion d’une huile essentielle reposant sur la détermina-
tion de constantes physico-chimiques, il importe que
les mesures soient faites dans les laboratoires du
monde entier par des méthodes identiques; c’est seu-
lement dans ces conditions que les chiffres trouvés
ont de la valeur. Les auteurs, dans leur mémoire,
insistent sur les méthodes générales employées dans
l'analyse des substances obtenues par distillation à la
vapeur d’eau. Ils se proposent d'étudier ensuite les
méthodes à appliquer pour l'estimation des autres
matières odorantes.
(4 suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
Grandeur et figure de la Terre, par J.-B.-J. De-
LAMBRE. Ouvrage augmenté de notes, de cartes, et
publié par les soins de G. Bicourpan, membre de
l'Institut. In-8° (25 X 16) de vrr-402 pages avec
31 figures et cartes (15 fr). (rauthier-Villars,
Paris, 4912.
Delambre, né à Amiens en 41749, qui s’occupa
d'astronomie à partir de 1782 et fut reçu à l'Aca-
démie des sciences en 1792. fut désigné, quelques
mois après sa nomination, pour s'occuper avec
Méchain de la mesure de l'arc de méridien qui
s'étend de Dunkerque à Barcelone : cette mesure
devait servir de base au système métrique décimal,
en fournissant une valeur très exacte du quart du
méridien terrestre.
A sa mort(1822), Delambre laissa deux ouvrages
inédits : l'Zrstoire de l'astronomie au xviie sircle,
publiée par L. Mathieu en 1827, et l'Histoire de
la mesure de la Terre que M. G. Bigourdan publie
aujourd’hui sous le titre adopté par l’auteur : Gran-
deur et figure de la Terre.
Le manuscrit de ce dernier ouvrage est contenu
dans une chemise portant de la main de L. Mathieu :
« Figure de la Terre. Manuscrit sur lequel
M. Delambre parait avoir fait sa copie définitive. »
Le style du manuscrit est assez souvent négligé;
parfois M. Bigourdan a cru devoir le moditier par
l'addition de certains mots qu'il a généralement pla-
cés entre crochets ou entre parenthèses. Il a aussi
ajouté la ponctuation, ordinairement absente, et
reclifié diverses citations en remontant aux sources.
L'orthographe est souvent incertaine, aussi l’édi-
teur a adopté celle de la Base du système métrique.
Enfin, les exigences typographiques ont souvent
obligé de modilier certains tableaux. Mais tous ces
changements ont été faits avec la plus grande
réserve, de manière à bien conserver à l'œuvre
son caractère propre.
Voici le contenu du livre. Après un rappel sonn-
maire des anciennes mesures de la Terre, depuis
Ératosthène jusqu’à celle de Picard, qui fournit
fort à propos à Newton l’occasion de vérifier son
hypothèse sur l'attraction de la Lune par la Terre,
Delambre fait l'examen détaillé des mesures de la
Terre effectuées depuis 1700 jusqu'à 1809 environ;
il les relate à peu près d’après l'ordre chronolo-
gique et les analyse avec une critique serrée, mais
nullement malveillante.
902
il rapporte donec les travaux et les résultats des
trois mesures successives de la méridienne de
France, avec, à peu près à leur date, les mesures
d'arc du méridien faites en Laponie, au Pérou, en
divers pays d'Europe; enfin, les mesures de degrés
terrestres faites après 1800. Comme de juste, le
style devient plus pittoresque et animé quand l'au-
teur aborde le récit de ses propres aventures et de
celles de Méchain, aux prises avec la Révolution,
soupconnés et jalousés par le Comité du salut
public, arrètés en leurs travaux par la guerre.
Les Macrolépidoptères du globe, par le pro-
fesseur D" ADALBERT SEITZ, 4°" vol. (relié en deux
parties, texte et planches séparément): Diurnes
paléarctiques avec 89 planches en couleurs
(3470 figures). Alfred Kernen, éditeur, à Stuttgard.
Le directeur du Jardin zoologique de Francfort-
sur-le-Mein, le D" Adalbert Seitz, a entrepris avec la
collaboration des spécialistes les plus renommés
tels que Aurivillius, Fruhstorfer, Janet, Jordan,
Mabille, etc., la publication d’un ouvrage systéma-
tique sur l’ensemble des Macrolépidoptères du
globe en 16 volumes, comprenant environ 40 000 fi-
gures en couleurs. Les quatre premiers volumes
seront consacrés à la faune paléarctique, les autres
aux papillons exotiques; un volume supplémentaire
contiendra les généralités, la morphologie, la bio-
logie et la géographie. Le premier volume, dont
nous présentons la traduction française aux lecteurs
du Cosmos, permet de constater que le plan élaboré
par M. Seilz a été non seulement fidèlement exé-
culté, mais notablement dépassé. L'ouvrage qui,
dans l'esprit de son auteur, ne devait être qu’un
manuel élémentaire permettant la détermination
de tous les Macrolépidoptères, sera après son achè-
vement une véritable encyclopédie où le public
trouvera résumé l'état actuel de nos connaissances
lépidoptérologiques. L'auteur et l'éditeur n'ont rien
négligé pour faire une œuvre consciencieuse. Per-
sonne n'était mieux préparé que M. Seitz pour
diriger une entreprise semblable; pendant vingt
années de voyages, il a étudié sur place les faunes
lépidoptérologiques les plus diverses et les plus
intéressantes. Les ouvrages systématiques et les
monographies parus antérieurement ont été mis
à contribution. Les trésors de tous les grands
musées d'Europe, d'Amérique et d'Australie, des
collections privées les plus renommées ont fourni
les documents nécessaires pour l'exécution des
figures, et les exemplaires uniques les plus précieux
ont pu ètre ainsi reproduits jour la première fois.
Ce sont là les bases solides sur lesquelles reposent
les matériaux condensés dans le premier volume,
consacré aux rhopalocères paléarctiques. Les neuf
familles traitées sont précédées chacune d’une
introduction plus ou moins longue, et la plupart
forment d'importantes monographies. Une liste
COSMOS
J1 OCTOBRE 1912
alphabétique des formes mentionnées avec renvoi
aux descriptions originales termine chaque famille
et permet ainsi de compléter, s'il y a lieu, cer-
taines diagnoses trop succinctes. Les difficultés que
soulève parfois la classification sont notées avec
soin et les problèmes biologiques sont signalés.
La traduction française, due au président de la
Société entomologique de France, est soignée et
présente certaines particularités que nous n'avons
garde de passer sous silence. La terminologie de
l'original comprend, outre les noms vulgaires, un
certain nombre de termes de classification souvent
très expressifs pour lesquels la langue française ne
possède pas d'équivalents. M. Janet les a conservés
entre parenthèses et en a donné une traduction
littérale en note. D'autres annotations servent
à interpréter, à compléter et parfois aussi à rec-
tifier le texte original. Le traducteur s'est, en
outre, astreint à vérifier rigoureusement les indi-
cations bibliographiques.
La disposition des figures en lignes et l'emploi
de nombreuses demi-figures ont permis de grouper
jusqu’à 90 figures sur une même planche (pl. 79).
Ces figures représentant presque toutes les formes
principales sont, en général, d’une exactitude par-
faite comme dessin et coloris et complètent agréa-
blement le texte descriptif. L'éditeur a réussi ainsi
à offrir au public l'ouvrage le plus complet et le
plus richement illustré qui ait paru jusqu'à ce jour,
et cela à un prix relativement peu élevé.
Somme toute, le premier volume fait bien augurer
de la suite (les volumes 2, 3, 5, 9, 10 et 13 paraissent
en livraisons, le volume 3 sera achevé avant la fin
de l’année), et les imperfections ou lacunes que la
critique pourra signaler ne diminueront en rien la
valeur de ce magnifique ouvrage de référence, que
consulteront avec fruit les lépidoptérologues de
profession aussi bien que les simples amateurs
lorsqu'ils auront un papillon nouveau à déterminer
et à classer. J. Jorivaun.
La machine et la main-d'œuvre humaine, par
DaniEL BELLET, professeur à l'École des sciences
politiques. Un vol. in-8° de 300 pages de l’'Ency-
clopédie scientifique (cartonné, 5 fr). Librairie
0. Doin, 8, place de l'Odéon, Paris.
L'homme, considéré comme machine, a un déplo-
rable rendement, mais c’est aussi un être intelli-
gent. Il a, dès la création, compris son impuis-
sance, et a eu l’idée d'utiliser pour son service les
animaux d’abord, puis les machines. La machine,
suivant une originale définition, est « tout ce qui,
en plus des ongles et des dents, sert à l’homme
pour travailler ».
L'homme a d’abord fabriqué les outils capables
d'aider à son labeur tout en diminuant ses efforts;
puis, devenu plus exigeant, il a imaginé ceux qui
accomplissent toute la partie pénible de la besogne,
N° 41449
ne lui laissant que les soins de conduite et de sur-
veillance.
La main-d'œuvre humaine est de plus en plus
remplacée par le machinisme, parce qu’on y trouve
avantage au point de vue de la bonne fabrication
et de la diminution des prix de revient. Mais la
transformation ne s'est pas opérée sans modifier
profondément les conditions économiques. Long-
temps, lesmachines furent accueillies avec défiance,
et de nos jours encore les ouvriers leur reprochent
de les empêcher de gagner leur vie. Bien plus, il
y a toute une école d'économistes qui combattent
contre elles, prétendant que le développement du
machinisme se fait aux dépens du travailleur
manuel.
C'est à ces atlaques que répond l'ouvrage de
notre si dévoué collaborateur, M. D. Bellet. Après
avoir rappelé les débuts du machinisme dans le
monde et ses applications dans la vie moderne, il
discute les opinions rappelées plus haut, et, sans
vouloir nier que l’adoption de machines nouvelles
crée pendant un certain temps une gène passagère
pour les ouvriers d’une industrie déterminée, il
montre que l'avènement d’un machinisme de plus
en plus développé est une loi inéluctable du pro-
grès, et aussi qu'il est dans l’ensemble une source
de bienfaits de toutes sortes. Aussi les ouvriers, au
lieu de lutter inutilement contre lui, devraient
chercher à s'adapter aux nouvelles méthodes qui
font plus appel à ses qualités intellectuelles qu’à
sa force musculaire.
L'industrie de l’équarrissage. Traitement ra-
tionnel des cadavres d'animaux, des viandes
saisies, des déchets de boucheries, etc., par
H. Marre, chef du service vétérinaire sanitaire
à la Préfecture de police. In-8° de 376 pages avec
122 figures (broché, 12,50 fr; cartonné, 14 fr).
H. Dunod et E. Pinat, éditeurs, 47, quai des
Grands-Augustins, Paris. 4911.
L'état d'infériorité de la plupart de nos ateliers
d'équarrissage, l'insuffisance des rendements qu'ils
fournissent et les nombreux inconvénients inhé-
rents à leur mauvaise installation ont incité
M. Martel à faire connaitre ce que doit être l'ate-
lier moderne.
La réforme de l’équarrissage est liée à celle de
l'inspection des viandes et à la réorganisation de
nos abattoirs publics. Il est temps que, s'inspirant
de ce qui a été fait à l'étranger, au cours de ces
vingt-cinq dernières années, on essaye de moder-
niser en France une industrie dont lesintérèts sont
intimement hHés à ceux de l’agriculture et des
diverses professions relevant de l’industrie ani-
male.
Malgré les louables efforts de Payen (1824-1830),
le travail de A. Morel (1897) et les exemples
COSMOS
503
donnés par Marcel Dupont (1901) et par G. Barrier
(1902), l'industrie de l'équarrissage évolue toujours
avec lenteur. Le plus vif désir de M. Martel est de
concourir au développement du mouvement qui
s'affirme en France en faveur des appareils per-
fectionnés. Avec tous les hygiénistes modernes, il
est convaincu que l'industrie de l’équarrissage bien
comprise peut maintenant s'exercer partout, voire
même au sein des agglomérations urbaines; on
possède aujourd'hui des méthodes dont les perfec-
tionnements laissent bien peu à désirer, tant au
point de vue de l'hygiène qu’au point de vue éco-
nomique.
Puisse cet essai contribuer à diffuser chez les
industriels quelques notions utiles relatives à
l'emploi de méthodes qui ont fait leurs preuves,
inciter les villes qui créent des abattoirs modernes
à leur annexer des stations d'équarrissage bien
agencées que pourront exploiter les Syndicats de
bouchers, et éveiller, au sein des Sociétés d'assu-
rances contre la mortalité du bétail, cette idée
que l'on peut retirer des cadavres autre chose que
la valeur du cuir.
Le jeûne qui guérit, par le D° Enwarb Hooker
Dewey. Traduit de l'anglais par PauL NYSSENS,
Un vol. (18 X 13) de 290 pages (3,50 fr). A. Ma-
loine, 25, rue de l’Ecole-de-Médecine, Paris.
« La majorité des humains creusent leur tombe
avec leurs dents », a dit un auteur américain. Le
Dr Dewey, Américain lui-même, s'est persuadé, par
sa pratique médicale, de l'utilité de la diète absolue
et prolongée pour la guérison des maladies :
l'usage des médicaments est réprouvé par lui
comme une superstition médicale.
Le « jeùne qui guérit » se prolonge non pas seu-
lement pendant des jours, mais pendant des
semaines et, en certains cas, pendant deux mois,
jusqu'à ce que la sensation de faim, qui, parait-il,
avait disparu au bout de quelques jours de diète,
soit revenue; l'auteur rapporte diverses observa-
tions avec dėlails.
Il paraitrait que cette cure a réussi, en Amérique.
L’aérophotographie. Une brochure illustrée
19 X 13 de 36 pages. Prix (0,60 fr). Publica-
tions Lucien Anfrv, 155 Dis, rue de la Conven-
tion, Paris, XVe.
Ce petit ouvrage constitue un guide précieux et
renseigne de la facon la plus exacte les amateurs
de photographie en ballon sphérique ou dirigeable,
en aéroplane ou par cerfs-volants, moyen à la
portée de tous.
vulgarisera la photographie aérienne et per-
mettra à chacun de réussir lès merveilleux clichés
panoramiques que seuls les spécialistes obtenaient
Jusqu'ici.
50%
COSMOS
31 OCTOBRE 1912
FORMULAIRE
Procédé permettant d’obtenir rapidement
l’imperméabilité des tissus. — Ce procédé est
basé sur l'emploi du blanc de baleine. Il offre sur
les nombreux procédés connus à l'heure actuelle,
qui utilisent aussi ce produit, l'avantage de ne
nécessiter aucun dissolvant, coûteux ou dange-
reux.
Pour obtenir l'imperméabilisation d’un tissu, on
transforme tout d'abord le blanc de baleine en son
dérivé sodique soluble, en chauffant, vers 2000, ce
produit au contact de soude concentrée.
On fait alors une solution diluée du dérivé
sodique ainsi obtenu, dans laquelle on immerge
rapidement le tissu, que l’on plonge ensuite, après
essorage, dans une solution d’acétate d’alumine à
ə pour 400.
Le séchage du tissu ainsi traité termine limper-
méabilisation, qui est absolument parfaite.
(Inventions illustrées.)
Fûts à assainir. — Quelle que soit la cause de
l'infection des tonneaux et des futailles, il est facile
de les débarrasser de toute mauvaise odeur et à
peu de frais.
Les mauvais goûts qui infectent profondément le
bois des futailles, les odeurs de moisi, d’évent et
celles de la lie putréfiée ne résistent pas au traite-
ment suivant : débonder et ventiler pendant
quelques jours, au moyen de trous de foret; verser
ensuite dans chaque fùt deux litres d'eau qu’on
mélange de 120 grammes d'acide sulfurique par
hectolitre; agiter avec soin ce mélange; vider, puis
passer un lait de chaux (cinq litres d'eau, un litre
de chaux), rincer enfin à grande eau et égoutter.
On méchera et on bouchera la futaille qui est
alors en état de recevoir le vin, car elle est parfai-
tement exempte de tout mauvais goût.
Voici un autre procédé : faire dissoudre 3 kilo-
grammes de soude dans 20 litres d'eau bouillante
et verser le tout dans la futaille à traiter.
On bonde, on agite dans tous les sens, on roule
et retourne le füt alternativement sur chaque fond,
de manière que toutes les parties du bois soient
successivement attaquées par la solution. On laisse
séjourner cette eau pendant quelques heures, en
agilant de temps à autre; après quoi, on laisse
écouler l’eau de soude, on rince à l’eau chaude,
puis à l’eau froide, jusqu’à ce que cette dernière
sorte de la barrique parfaitement claire.
Lubrifiant pour les outils dans le travail de
l'acier. — M. J. Badge, dans l American Machinist,
indique comme lubrifiant des mèches pour percer
les aciers durs, tels que les ressorts trempés,
la térébenthine qui, dit-il, économise 40 pour 100
du temps nécessaire å l'opération. On ajoute qwun
mélange de moitié térébenthine et moitié alcool
camphré forme un excellent adjuvant à l'action
du burin. On peut encore se servir d'acide nitrique
pour travailler sur le tour l'acier trempé; mais
l'opération est délicate, car il faut se garer des
projections dans les yeux.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresse des appareils décrits :
Les flotteurs mobiles et les freins pour hydroaéro-
planes ont été imaginés par M. Leuilleux, 14, rue Le
Bua, Paris.
T. S. F. — Récepteurs téléphoniques de grande
résistance: modèle Ducretet 4 000 ohms : Ducretet et
Roger, 75, rue Claude-Bernard, Paris (30 fr); modèle
Sullivan 3750 ohms: Compagnie générale radiotélé-
graphique, 25, rue des Usines, Paris (35 fr).—Cerf-volant
«a Roloplan »: La Rerue du Cerf-Valant, 1, boulevard
Henri-iV, Paris (biplan 1,50 m : 10,50 fr: 1,80 m: 13 fr).
— Fil bi-métal 6:40 min. recuit pour antenne sup-
portée par cerf-volant. Quincaillerie Doré, 26, rue des
Écoles, Paris.
M. T. G., à M. (Mexique). — Adressez-vous de notre
part à l'Office central de l'acétylène, 10#, boulevard de
Ciichv, à Paris, qui répondra d'une manière trés docu-
mentée à toutes vos questicns.
Henry D. — Nous vous conscillons de prendre les
deux volumes suivants, qui se complètent mutuelle-
ment: le Bréviaire du chaufeur {8 fr) et Sur la
route (6 fr), par le Dr BouwEn. Librairie Dunod et
Pinat, 49, quai des Grands-Auwustins, Paris.
M. A. L.,à T.— Tous les fabricants d'accumulateurs
pourrontvous fournir une batterie transportable comme
celle que vous désirez: par exemple, la Société des
accumulateurs Tudor, 26, rue de la Bienfaisance, Paris.
Mais, pour les charger avec le courant alternatif de
votre secteur, il vous faudra un appareil ne laissant
passer le courant que dans un sens, par exemple, la
soupape Soulier, fabriquée par la Société des appareils
économiques d'électricité, 29, rue de Provence, Paris.
— Vous aurez beaucoup de diflicultés à monter vous-
ième un appareil électrique pour allumage des becs
de gaz, il vous faudrait plusieurs piles et, de plus,
une bobine de Ruhmkorff pour transformer le courant.
Il vaudrait mieux, croyons-nous, employer uñ sys-
tème existant dans le commerce, par exemple l’allu-
meur extincteur du gaz à distance Goté. Prissette, con-
structeur, La Capelle (Aisne).
M. C. F., à A. — La question que vous posez est
trop générale pour que nous puissions y répondre.
Vous pourrez choisir des ouvrages de physiologie dans
le catalogue de la librairie Maloine, 25, rue de l'École-
de-Médecine, et, pour les ouvrages de psychologie, dans
celui de la librairie Alcan, 4108, boulevard Saint-
Germain. Évidemment, ces deux librairies sont éclec-
tiques et possèdent des ouvrages de toute nature.
Imprimerie P. Fenon-Vrau. 8 et 5, rue Bayard, Paris. VIH’.
Le gérant: À. FaiüLe.
No 1450 — 7 NOVEMBRE 1919
COSMOS
505
SOMMAIRE
Tour du Monde. — Les chambres à air de bicyclettes employées comme ligatures. A propos du campanile
de Venise. Au canal de Panama. Les écartements des voies ferrées. Une lampe à incandescence qui parle.
Solidité mécanique des lampes à filament métallique étiré. Lignes aériennes à haute tension. Les réservoirs
antiroulis du paquebot Laconia. L'’agrandissement des torpilles de guerre. La plus grande distance
franchie en ballon. Inflammation spontanée du charbon, p. 505.
Correspondance. — La baguette divinatoire, VixcexT Lovis, p. 508.
Redécouverte de la comète périodique de Tuttle (1912 b), be Rov, p. 509. — Machine à laver
14 000 assiettes par heure, Bover, p. 510. — Télégraphie sans fil: réception à domicile des
signaux horaires (suite), D° PIERRE CoRRET, p. 512. — Le pancréas et ses ferments, AcLoque, p. 515.
— Les travaux d’alimentation d’eau de Mexico, BELLET, p. 517. — L’avenir du chauffage élec-
trique, Marre, p. 521. — Des moyens propres à assurer aux pommes de terre une bonne con-
servation, RoLET, p. 523. — A propos des récentes expériences de M. Raoul Pictet, PIERRE COURBET,
p. 526. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 527. Association française pour l'avancement
des sciences, p. 529. — Bibliographie, p. 530.
TOUR DU MONDE
SCIENCES MÉDICALES
Les chambres à air de bicyclettes employées
comme ligatures. — M. M. Thiry, chef des travaux
à la Faculté de médecine de Nancy, et M. Perrin,
agrégé de cette même Faculté, ont eu la pensée
d'utiliser la chambre à air de la bicyclette comme
bande hémostatique et comme ligature dans les
cds d’envenimalion.
Les accidents se produisent souvent loin de tout
matériel de secours; en temps de guerre, des cas se
présentent où les blessés sont assez nombreux
pour que les approvisionnements les plus complets
puissent se trouver insuflisants. C'est pourquoi il
ne faut négliger aucun moyen de fortune.
La chambre à air de bicyclette a paru aux deux
savants docteurs de Nancy l'appareil idéal de for-
tune, et ils montrent, qu’il s'agisse des modèles de
chambres à air continues, Michelin, ou des modèles
interrompus, Simplex, que l'une et l’autre peuvent,
sinon remplacer, du moins suppléer la bande
d'Esmarch ou la bande Denain.
La chambre à air, bande moins brutale, peut
être employée par les mains les moins expérimen-
tées: une fois en place, il est facile d'en régler le
serrage par une insufflation d'air plus ou moins
abondante ; en plus, repliée et vide, elle peut ètre
introduite dans le moindre sac à pansement; ceci
est vrai surtout pour la chambre Simplex; celle-ci
est d'ailleurs adoptée dans les Compagnies de
cyclistes. Cependant, comme il ne s’agit pas de
désarmer une bicyclette chaque fois que l’on a
besoin de faire une ligature, les auteurs proposent
d'introduire dans le matériel chirurgical quelques-
unes de ces bandes, qui ne tiennent aucune place,
qui sont d’un poids inférieur et qui sont d'aulant
moins coûteuses, qu'elles peuvent servir indéfini-
ment.
T. LXVII. N° 1450.
GÉNIE CIVIL
A propos du campanile de Venise. — Nous
donnions récemment (p. 312) quelques détails sur
le campanile de Venise nouvellement reconstruit;
en voici quelques autres qui ne sont pas sans
intérêt.
Le massif des fondations, formé de nombreux
pilotis noyés dans une masse de
béton, avait dans l’ancien mo-
nument 222 mètres carrés. Les
nouveaux travaux ont porté ses
dimensions à 407 mètres carrés.
Le massif des fondations est
évalué au poids de 42970 000 ki-
logrammes et celui de la con-
struction au-dessus du sol à
8 900 000 kilogrammes.
Le monument porte dans sa
charpente supérieure cinq TT
cloches de poids respectifs de ||
|
3 625, 2556, 1087, 1366 et
4 011 kilogrammes. H
La statue de saint Marc qui r
surmonte l'édifice ajoute à sa h
hauteur de 90 m, 10,5 m; elle
pèse 4 300 kilogrammes. La
grande originalité de cette statue
aérienne, c'est qu'elle est établie de facon à
s'orienter au vent. Pour rendre parfaitement
mobile une masse aussi considérable, il a fallu
employer les artifices les plus ingénieux fournis
par l'industrie moderne.
Le campanile se termine par une charpente en
fer sur laquelle la statue est emboitée. L'axe de
cette charpente se prolonge dans la maçonnerie
pour assurer son immobilité malgré les vents les
plus violents. Cet axe porte à sa partie inférieure
506
un contrepoids de 1300 kilogrammes destiné à
ramener le centre de gravité de l'ensemble à la
surface supérieure du piédestal. La statue est portée
par deux patins à billes, l’un à la hauteur de la
poitrine, l’autre à sa base, sur le piédestal. Un léger
jeu permet une légère inclinaison de la statue en
cas de violentes rafales ou de mouvements du sol.
L'ensemble de ces organes étant caché dans la
stalue ou noyé dans la maçonnerie à une hauteur
considérable, leur visite ne sera guère possible.
Aussi ont-ils été établis avec le plus grand soin; le
choix des matériaux, la lubrification par une pâte de
graphite font espérer aux ingénieurs que l’ensemble
fonctionnera sans accrocs pendant plusieurs siècles.
Au canal de Panama. — Un nouvel éboule-
ment, dont la masse est estimée à 900 000 mètres
cubes, vient de se produire dans la tranchée de la
Eulebra; c’est le troisième en moins d’un mois. Il
est intéressant de rappeler que les experts estiment
que ces accidents se renouvelleront souvent encore
et qu'ils croient qu'il n'y a aucun moyen de les
empêcher. Les assises formant les collines ouvertes
par la tranchée sont inclinées vers le canal et
séparées par des couches d'argile; les infiltrations
d'eau aidant, les parties rocheuses n'étant plus
soutenues, puisque la tranchée les a coupées,
glissent sur cette argile. Le remède serait d'établir
Ja berge suivant la pente de ces couches, mais il
faudrait pour cela enlever des montagnes entières.
Quand le canal sera livré à la circulation, ces glisse-
ments pourraient causer de véritables calastrophes.
Les écartements des voies ferrées (Genie
civil, 12 octobre). — Les écartements usuels
peuvent se grouper en cinq catégories : 4° les voies
larges, à écartement de plus de 1,50 m et jusqu’à
7 pieds de la jauge de Brunel, soit 2,134 m; 2° la
voie dite « normale », à écartement moyen de
4,435 m, avec quelques centimètres de variation
en plus ou en moins; 3° la voie métrique, de
4 mélre environ; 4° les voies élroites, de 0,85 m à
0,60 m; 5° les voies exceptionnelles, de moins de
0,60 m et de plus de 7 pieds ou 2,134 m.
La voie large de 7 pieds, écartement dû à Bru-
nel, a deux grands avantages : sa grande stabilité
et la plus grande capacité des trains; ses princi-
paux inconvénients sont un coùt plus élevé et la
nécessité d'employer un rayon de courbe plus
grand. En Europe, deux pays ont conservé la voie
large : PIrlande, 4,60 m, comme au Brésil et au
Chili. el la péninsule ibérique, où l'écartement est
de 4,675 m, comme aux Indes anglaises, au Siam
et dans une partie de la République Argentine.
Cet écartement n'a pas d'inconvénient pour Tir-
lande; mais il n'en est pas de mème pour l'Es-
pagne: le changement de voie, à la frontière
pyrénéenne, cause une perte d'argent et de lemps
considérable.
COSMOS
7 NOVEMBRE 1912
À l'exception de l'Irlande, de l’ Espagne, du Por-
tugal et de la Russie, l’écartement de 1,435 m est
l'écartement principal de l'Europe; il est celui des
États-Unis. Quelques Compagnies ont augmenté un
peu cette jauge pour donner plus de jeu latéral;
les limites extrêmes, admises au Congrès de Vienne,
sont 1,431 m et 1,460 m.
Les chemins de fer de Russie et de Sibérie sont,
par mesure stratégique, à écartement un peu plus
grand, de 41,524 m.
Le groupe des voies métriques est important;
l'écartement de 1,067 m se trouve dans la Grande-
Bretagne, la Russie, la Suède, la Norvège, la Hol-
lande et le nord de la Belgique; hors d'Europe, on
le rencontre au Japon, aux Indes néerlandaises et
dans certaines colonies en Afrique. L’écartement
de 4 mètre existe dans le reste de la Belgique, en
France, au Danemark, en Suisse, en Italie, dans
la péninsule ibérique et une partie de la Russie;
hors d'Europe : dans la plupart des colonies fran-
çaises, une grande partie des Indes anglaises et de
l'Amérique du Sud. Les autres écartements mé-
triques sont moins répandus.
Pour les voies étroites, il existe sept écarle-
ments: les plus employés sont ceux de 0,80 m
(Suisse, Indes hollandaises); 0,85 m (Allemagne);
0,762 m (Indes anglaises, Chili, Bolivie).
En résumé, le nombre des écartements utilisés
est très considérable, quoique moindre aujourd’hui
qu'au début de la construction des chemins de fer;
il conviendrait de chercher à apporter remède à
cette situation. Il faut noter, toutefois, que le
changement d'écartement n’est pas toujours con-
damnable : pour une ligne très longue, les pertes
de temps et d'argent qu'entraine un transborde-
ment sont peu importantes, comparées aux frais
du trajet total; dans les pays neufs, des prolonge-
ments de pénétration plus économiques, à écarte-
ment plus étroit, sont également très justifiés.
Les moyens tentés pour obvier aux inconvénients
qui résultent de ces changements d’écartement
portent sur la voie ou sur le matériel. On peut
poser les deux voies côte à côte, placer un troi-
sième rail ou la voie plus étroite à l'intérieur de
l'autre. Les procédés portant sur le matériel con-
sislent à uliliser des essieux spéciaux, à écartement
des roues variable, ou des wagons à caisse mobile,
ce qui n'intreduit pas une complication bien grande
dans la construction du matériel.
ll ny a plus à revenir sur l'’écartement, dit
« normal », de 1,435 m, adopté pour l’Europe con-
tinentale et l'Amérique du Nord. L'Espagne et le
Portugal ont tout intérèt à l’adopter. Dans l’Amé-
rique du Sud, où l'on construit beaucoup, il existe
trois écartements pour les lignes principales :
1 mètre; 1,60 m (ou 1,676 m) et 1,435 m ; si l’on
n’y apporte rapidement remède, il sera bientôt
trop tard pour y accomplir l'unification.
Ne 1450
ÉLECTRICITÉ
Une lampe à incandescence qui parle. —
MM. K. Ort et J. Rieger (Phys. Zeits., 45 juin;
Revue électrique, 41 octobre) nous enseignent
comment nous pouvons faire jouer à une lampe
électrique à incandescence le rôle de récepteur
téléphonique.
L'expérience, pour réussir, exige l'emploi d'une
lampe à filament métallique d'une certaine puis-
sance, une lampe Osram de 100 bougies, par
exemple. Voici le montage utilisé. La lampe est
reliée à un réseau à courant continu à 120 volts,
avec interposition d’une bobine de self-induction.
En dérivation aux deux bornes de la lampe, sont
disposés une capacité et le circuit secondaire d'un
transformateur téléphonique; le circuit primaire
de ce transformateur comprend une source d'élec-
tricité (cinq éléments d’accumulateur) et un micro-
phone puissant. Les paroles qu'on prononce devant
le microphone sont reproduites par la lampe.
Voici, d’après les auteurs, l'explication de ce
phénomène.
Le courant téléphonique qui se superpose au
courant continu provoque dans le filament des
variations de température; les variations d'échauf-
fement communiquent au verre de l'ampoule des
vibrations qui se transmettent à l'air extérieur.
On ne peut pas faire parler une lampe de 16 ou
32 bougies, car le verre est trop épais et les varia-
tions d’échauffement trop faibles. L'effet serait
particulièrement intense avec des lampes de
500 ou 1000 bougies, surtout si les ampoules
étaient en verre extra-mince.
Solidité mécanique des lampes à filament
métallique étiré. L'Electrical Engineering
rapporte que, tout récemment, un autobus s'est
jeté contre un réverbère dans Marylebone Road
(Londres). Le choc fut si violent que la colonne se
brisa en deux et que la lanterne, précipitée sur le
sol, eut tous ses verres mis en pièces. Si extraor-
dinaire que la chose puisse paraitre, on constala
que les lampes Osram contenues dans cette lanterne
étaient demeurées intactes: quand on eut lancé le
courant, elles s'allumèrent instantanément, don-
nant leur éclat accoutumé. Voilà une preuve remar-
quable de la solidité mécanique des lampes Osram
à filament étiré. (Électricien.) G.
Lignes aériennes à haute tension (Elektro-
technische Zeitschrift du 8 aoùt). — Dans un article
dans lequel il s'élève contre les prescriptions du
règlement allemand sur le calcul des canalisations
aériennes, règlement dans lequel on admet que la
surcharge de neige est proportionnelle au diamètre
du conducteur, M. le D' Maguene constate que l’on
n'a jamais de dépôt de neige sur les lignes à
100000 volts et au-dessus, même quand elles ne
`
COSMOS
507
sont pas chargées et que les conducteurs sont froids;
ce fait doit être attribué à une action électrosta-
tique. M. Maguene fait remarquer que, dans les
calculs, il faut cependant tenir compte de la sur-
charge de neige, car les lignes ne sont pas toujours
sous tension. F. L. (Industrie électrique.)
MARINE
Les réservoirs antiroulis du paquebot
« Laconia ». — La Compagnie Cunard a mis en
service, le 20 janvier dernier, un navire neuf, le
Laconia, destiné à la ligne Boston-Liverpool,
comme le Franconia, mis en service l'an dernier.
Ces deux navires ne diffèrent que par la présence
sur le Laconia de réservoirs spéciaux destinés à
réduire le roulis. La comparaison de ces deux
navires identiques, employés sur le mème service,
permettra des conclusions fort intéressantes sur
l'augmentation de confortable qu'on peut attendre
des réservoirs antiroulis et sur l’action que ceux-ci
peuvent exercer sur la résistance de la coque.
Ces deux navires, de 25 000 tonneaux de dépla-
cement, ont 190 mètres de longueur, 22 mètres de
largeur: ils transportent 300 voyageurs de pre-
mière classe, 400 de seconde, 2000 de troisième et
71000 tonnes de cargaison. Ce sont donc des
navires sérieux, qui permettront d'obtenir des ren-
seignements applicables à la construction du
Cunarder géant, Aquitania, acluellement sur chan-
tier dans la Clyde.
Les réservoirs antiroulis ne sont pas une inven-
{ion nouvelle. Depuis longlemps on avait proposé
de placer à bord des navires deux réservoirs, un
sur bäbord, l'autre sur tribord, réunis par un con-
duit transversal. On pensait que le roulis ferait
osciller l’eau d’un réservoir à l'autre, et on espérait
qu'en retardant le passage de l’eau dans le conduit
qui réunit les réservoirs, on pourrait obtenir ce
résultat intéressant que ce serait dans le réservoir
soulevé par le roulis que l'eau viendrait se préci-
piter, et non dans celui qui s’abaisse. Le poids de
l'eau ainsi oscillante s'opposerait au roulis et pour-
rait réduire son amplitude.
M. H. Frahm, directeur des chantiers navals
Blohm et Voss, à Hambourg, en a établi la théorie
et en a étudié l'application dans les navires alle-
mands Ypiranga, Corcovado, (General (nous
avons décrit ces trois navires et leurs réservoirs
antiroulis, avec figures à l’appui, dans le Cosmos,
t. LXV, n° 1380, 9 septembre 4944), America,
Aaiserin-Augusta- Victoria, Cleveland, Cincin-
nati, Victor-Luise, ainsi que dans Îles grands
paquebots Cap-Finisterre et Imperator, rècem-
ment lancés.
La Compagnie Cunard s'est décidée, en présence
des résultats acquis en Allemagne, à essayer aussi
de ces réservoirs antiroulis, et le Laconia est son
508
premier essai. Elle a voulu une expérience com-
plète et elle a ajouté au Laconia un dispositif
spécial d'enregistrement des coups de roulis et de
leur amplitude.
Sur le Laconia, il y a deux groupes de réser-
voirs antiroulis, indépendants l’un de l’autre, que
l'on peut mettre en service conjointement ou sépa-
rément, pour graduer les effets. La manœuvre se
fait en ouvrant ou en fermant graduellement la
valve qui fait communiquer Pair surmontant les
deux bassins conjugués.
L’agrandissement des torpilles de guerre.
— Le calibre des torpilles usitées dans les diffé-
rentes marines de guerre était jusqu'ici de 45 cen-
timètres. Un mouvement bien net est esquissé pour
l'agrandissement du calibre et de la charge d’explo-
sifs.
Les Etats-Unis ont commencé à prendre une tor-
pille de 53 centimètres de diamètre, chargée de
450 kilogrammes d'explosif. C’est le tour de la
marine anglaise, dont les nouveaux bâtiments sont
munis de torpilles de 53 centimètres également de
diamètre et de 5,63 m de long, portant 143 kilo-
grammes d’explosif.
La vitesse de ces engins est de 30 nœuds, corres-
pondant à un parcours de 7 000 mètres, ou de
40 nœuds, mais avec un parcours total moindre;
un type anglais tout récent atteint cependant une
portée de 9000 mètres à la vitesse de 40 nœuds.
Les torpilles usuelles Whitehead de 45 centimètres
sont nettement dépassées, car elles n'atteignent
qu'une portée de 3 000-4 000 mètres à la vitesse de
30 nœuds, et de { 000 mètres seulement à la vitesse
de 40 nœuds.
VARIA
La plus grande distance franchie en ballon.
— Le 7 janvier dernier, M. E. Dubonnet était
arrivé à dépasser le record de distance accompli
en ballon sphérique, que détenait M. de la Vaulx
depuis le 41 octobre 41900.
Or, au cours de la septième coupe Gordon-
Bennett, qui s’est disputée le 27 octobre dernier,
un pilote francais. M. Maurice Bienaimé, parti de
Stuttgard à bord du ballon Picardie, est allé
atterrir à Riasan, au sud-est de Moscou. La dis-
tance parcourue ainsi est d'environ 2200 kilo-
mètres, tandis que celle atteinte par M. Dubonnet
n'est que de 2 000 kilomètres environ.
Inflammation spontanée du charbon. (£{e/-
troterhnische Zeitschrift, du 8 août.) — MM.S.-W.
Parr et F.-W Kressmann, de l'Université de l'Illi-
nois, ont fait des expériences très intéressantes au
sujel de l'inflammation spontanée du charbon; ces
expėrimentateurs ont constaté que l'élévation de
température du charbon dépend de la quantité de
soufre qu'il contient, qu'elle augmente au fur et à
COSMOS
7 NOVEMBRE 1942
mesure que le charbon est en plus petits morceaux
et que l'humidité la favorise. Les expérimenta-
teurs arrivent aux conclusions pratiques suivantes :
a. Éviter toute introduction de chaleur exté-
rieure;
b. Enlever toute poussière de charbon ;
c. Tenir le charbon au sec;
d. Refroidir le charbon au moyen de tuyaux de
refroidissement; ne pas y insuffler de l'air froid,
car le danger d'incendie serait augmenté, l'oxygène
se renouvelant, (/ndustrie électrique.) PF, L:
CORRESPONDANCE
La baguette divinatoire.
À différentes reprises, cette année 1912, ont paru
dans le Cosmos divers articles concernant la ba-
guelte des sourciers. Ayant suivi avec intérêt cette
question qui m'occupe depuis une dizaine d'années,
permettez-moi de vous dire qu'elle n’est pas jugée
du tout, et que des expériences, tous les jours plus
récentes, sont aptes à amener un jour nouveau
sur cette question très vieille.
Je résumerai seulement ici les expériences et
essais auxquels je me suis livré depuis une dizaine
d'années. Je dois dire qu'avant cela j'étais com-
plètement hostile à cette croyance. Sur la demande
des intéressés, je pourrai donner les éclaircisse-
ments voulus.
Je dis que la croyance à la baguette des sour-
ciers est fondée. Elle donne toujours des indica-
tions semblables, si bien que plusieurs sourciers
passant à leur insu au mème endroit fourniront
les mèmes indications.
La baguctle ne donne d'indications qu'en mar-
chant perpendiculairement à la direction des veines
souterraines, ce qui a lieu généralement en suivant
perpendiculairement la pente du terrain, mais il y
a de nombreuses exceptions, dues sans doute aux
couches lintérieures du sol. La baguette en elle-
mème, branche de coudrier en forme de fourche,
n'est rien, car toute autre essence de bois donne
les mêmes résultats, à condition que les deux
branches de la fourche soient égales en grosseur
et longueur et suffisamment souples. Comme c’est
dans le coudrier que l'on trouve le mieux son
affaire, c'est, je crois, ce qui justifie son emploi.
Le tempérament seul de la personne jouerait
un ròle, ce qui explique que peu de personnes
peuvent s’en servir.
Si l’on maintient convenablement la baguette,
elle ne peut bouger des mains et on peut ainsi
marcher longtemps sans rien déranger si l’on n’est
pas apte à l'effet de la baguette ou si l'on ne ren-
conire aucune influence.
N° 1450
La baguette ne fonctionne que sur l'écoulement
souterrain naturel et pas sur une conduite artifi-
cielle même très abondante, ce qui rend parfois
service.
La baguette ne s'abaisse pas vers le sol, de la
manière que nous opérons ici, en la maintenant
avec les deux mains, les ongles en dessus; mais
elle s'élève vers la figure de l'opérateur. Il n'y a
sans doute qu'une différence dans son emploi, les
indications devant être concordantes.
Quant à déceler l'abondance et la profondeur de
l'eau souterraine, il faut de patientes observations
suivies pendant longtemps, car il est vrai que la
baguette met un temps plus ou moins long depuis la
première oscillation pour prendre la position ver-
ticale, et qu’elle subit des soubresauts indépendants
de la volonté, d’autant plus forts qu’il est à sup-
poser que l’eau est plus abondante.
Dans bien des cas, le commun des personnes
peut juger de la présence de l’eau à l’observation
du terrain, mais la baguette, maniée les yeux ban-
COSMOS
509
dés ou la nuit, donnera des indications qui ne
pourront être discutées.
En résumé, la baguette peut être utile dans bien
des cas. Ses indications sont toujours exactes (si
l'opérateur est de bonne foi), quant à la présence
de l’eau en plus ou moins grande abondance et
plus ou moins profonde. La baguette de coudrier
ne sert que de bâton de voyage, seul le tempéra-
ment de la personne joue un rôle, sans doute par
l'intermédiaire inconscient des muscles de l'avant-
bras ou du poignet, mouvement imperceptible,
même à un examen attentif.
Telles sont les considérations auxquelles entoute
bonne foi je suis arrivé, après de nombreuses ob-
servations suivies pendant dix ans. Si cela peut
faire exécuter un pas de plus dans cette question
de la baguette, je vous prierai d'en informer vos
lecteurs. |
VixcenT Louis fils,
a la Côte du Val-d'Ajol (Vosges),
propriétaire agriculteur.
Redécouverte de la comète périodique de Tuttle (1912 b).
La comète périodique de Tuttle, attendue au
périhélie, pour son cinquième retour en janvier
prochain, vient d’être retrouvée à l'Observatoire
de Nice, et cela, comme on le voit assezsouvenl, sans
que l’astronome se doutât qu'il eùt affaire à elle.
Le retour de cette comète était prévu, et un
chapelain de Blaca, dans l'ile Brazza, sur la côte
dalmate, qui emploie ses loisirs à des prédictions
astronomiques, avait publié le 22 septembre dans
les Astronomische Nachrichten une éphéméride
de l’astre qui, sans tenir compte des perturbations,
le plaçait à la mi-octobre dans la constellation de
la Grande-Ourse, aux confins de la Girafe. Mais
personne n'avait trouvé trace d’une comète dans
cetle position.
Or, le 49 octobre au matin, M. A. Schaumasse,
de l'Observatoire de Nice, découvrait dans la con-
stellation du Sextant, près de l’équateur céleste,
une très faible comète de grandeur 11,5, se diri-
geant vers l'Est et dont la position, le 18 octobre,
à 175,0, temps moyen astronomique de Nice,
était la suivante :
R = 9577,6 DO = + 1°36
Cette comète fut observée à Nice pendant plu-
sieurs nuits, et M. G. Fayet, aidé par M. Schaumasse,
s'empressa d'en calculer les éléments. A leur
grande surprise, le 24 octobre, les calculateurs
trouvèrent que les éléments de la nouvelle comète
étaient presque identiques à ceux de la comète de
Tuttle, dont la position, d’après l’'éphéméride, devait
être, au moment de l’observation ci-dessus :
R = 9392%,5 ® = + 7345
On voit que l'erreur de cette éphéméride attei-
gnait une valeur de — 729 en déclinaison, ce
qui prouverait combien il est vain de vouloir pré-
dire la position d’une comète périodique sans tenir
compte des perturbations provoquées par les
planètes.
L'astre attendu est le second du genre trouvé
par M. Schaumasse et le quinzième découvert à
l'Observatoire de Nice.
La circulaire n° 136 du Bureau central de Kiel
fournit des détails sur la nouvelle comète qui
semblent ne plus permettre aucun doute sur son
identité avec la comète de Tuttle. On s'en rendra
compte aisément en comparant les éléments des
orbites des deux comètes que nous avons rappro-
chés ci-dessous, ceux de la comète 1912 b étant
déduits par MM. Fayet et Schaumasse des Obser-
vations de Nice les 18, 19 et 20 octobre, ceux de
la comète de Tuttle ayant été calculés par M. Rahts
pour l'apparition de 1899 et publiés dans les Astr'o-
nomische Nachrichten n? 3532 (et non 3555 comme
l'indique erronément, depuis plusieurs années, la
Connaissance des temps):
Comete de Tuttle
1S99 mai +,52051 T. M. P.
e e)
269 4933,6" 1900,0
Camète 1912 b
T = 49f20et.25,3153
O — 270 23N
>u —— “mi
~
. s e yoy =y LAN
t—= 3 525354 4 29 16,3 !
q = 1,050162 1,01977
e = 0,S2[7125
On voit que, sauf peut-ċtre pour g (distance
périhélie), les chifres concordent admirablement.
910
MM. Fayet et Schaumasse n’ont pas déterminé e
(excentricité), l'arc décrit en trois jours par la co-
mète étant trop faible pour permettre ce calcul assez
délicat.
Les astronomes de Nice ont toutefois calculé
l’éphéméride suivante de l'astre, qui donnera une
idée de son mouvement:
S NO
DATE 1912 | ASCENSION DISTANCE
DÉCLINAISON |L mmen
Ninuit de Paris DROITE au Soleil Jà la Terre
10° 8°14 — VPV
10 19 32 — 751 1,051
10 30 56 — 1241
10 42 26 — 17 25 1,062
10 54 29 222
{1 6 40 — 262% 1,089
1149 7 — 30 +1
11 31 03 — 3439 1,536
li 44 53
On voit que la comète se dirige très rapidement
vers le Sud-Est. A partir de la mi-novembre, sọn
observation sera réservée aux observateurs de
l'hémisphère austral. L'astre parait avoir passé au
plus près de la Terre vers son passage au périhélie, et,
COSMOS
7 NOVEMBRE 1912
depuis lors, son éclat doit théoriquement diminuer.
[l est curieux de constater que le calcul, effectué
sans tenir compte des perturbations planétaires,
fixait le retour de la comète au périhélie au
3 janvier 1913. L’astre est donc en avance de
soixante-dix jours. En fait, la révolution qu'il
vient de décrire autour du Soleil est la plus courte
qu'on ait constatée depuis sa découverte, ce qui
fut également le cas pour la comète de Halley lors
de sa récente réapparition.
La comète de Tuttle est, dans l’ordre de date, la
huitième des vingt comètes dont la périodicité
a été constatée par plus d’une apparition. C’est,
après celles de Halley, d'Obbers et de Pons-Brooks,
celle dont la période — 13,667 années — est la
plus longue. Elle appartient au groupe saturnien,
c'est-à-dire qu’à son aphélie, situé à la distance
de 10,41, elle s'éloigne peu au delà de l'orbite de
Saturne. La distance de son périhélie, un peu
extérieur à l'orbite terrestre, est de 4,02. Son mou-
vement est direct. Elle fut découverte le 4 janvier
1858 par Tuttle, à Cambridge, près de Boston, aux
États-Unis. Presque aussitôt, Pape trouva que ses
éléments étaient identiques à ceux de la comète
de janvier 1790. Depuis 1858, elle a été revue
à chacun de ses retours, en 1871, 1885 et 1899.
F. ne R.
Machine à laver 14000 assiettes par heure.
Grâce au plongeur automatique que vient
d'imaginer M. Hamet et qui fonctionne depuis
quelque temps dans les cuisines de la Samaritaine,
un seul homme peut rincer, stériliser et essuyer
sans fatigue plus de 44000 assiettes par heure.
Construite en acier forgé et étiré, cetle machine
très simple et d’une grande solidité se compose
d'un tambour formé par deux pièces hexagonales
montées sur un axe et accouplées par six barreaux
cylindriques sur lesquelles peuvent s’accrocher des
nacelles destinées à recevoir des paniers de vais-
selle.
Comme notre photographie permet de s'en
rendre compte, l’axe du tambour tourne dans deux
paliers fixés sur les deux côtés d'un bac long de
4,40 m, large de 0,80 m et profond de 0,55 m.
L'appareil s'élève d’environ 0,95 m au-dessus de
ce récipient qui renferme de l'eau bouillante obte-
nue par le chauffage au charbon, au gaz ou à la
vapeur.
A la Samaritaine, afin d'accélérer le service,
plusieurs hommes se tiennent aux abords du plon-
geur automatique et procèdent de la manière sui-
vante. lis commencent par laver grossièrement la
vaisselle à la main puis la rangent au fur et à
mesure dans des paniers en fer étamé. Le remplis-
sage de ces paniers ne nécessite pas d’ailleurs une
manutentionsupplémentaire ; chaque homme place
les assiettes qu'il vient de laver dans le panier
(mis sur un de ses bouts) au lieu de les poser sur
la tablette du bac. Une fois le panier plein, il le
rabat sur le fond : les assiettes se trouvent alors
dans la position verticale. |
Le laveur fait ensuite fonctionner la machine,
met un ou deux paniers dans chaque nacelle et
imprime au tambour une rotation d’un sixième de
tour en appuyant sur le barreau sis à hauteur
de sa tète, de façon à amener la machine devant lui.
Quand les six nacelles sont chargées, la première
qui a accompli un tour complet occupe la même
position qu'au moment de son chargement; la vais-
selle qu’elle renferme se trouve alors stérilisée et
essuyée par suite de sonséjour dans l’eau bouillante.
A partir de ce moment, il ne reste plus qu'à
enlever de chaque nacelle les paniers de vaisselle
sèche pour les remplacer par d'autres et ainsi de
suite. Du reste, les hommes n'ont pas besoin
d'équilibrer les paniers, car le plongeur porte des
freins destinés à modérer la vitesse de rotation du
tambour et à l'empêcher de tourner en arrière
lorsqu'on enlève des paniers de la nacelle.
Le temps nécessaire au déchargement el au
Ne 1150
chargement de chaque nacelle (dix secondes envi-
ron) est suffisant pour que la vaisselle prenne la tem-
pérature de leau bouillante et sèche immédiate-
ment.
En définitive, les assiettes restent vingt secondes
dans l'eau puisqu'il y a toujours deux nacelles im-
mergées. Comme chaque panier contient 20 assiettes
environ, il sort donc de l'appareil 40 assiettes rin-
cées et essuyées toutes les dix secondes, soit
240 par minute et 14 400 par heure environ.
Le fonctionnement du plongeur automatique
Hamet ne nécessite qu’un minime effort de la part
du laveur, le poids des nacelles qui montent éga-
COSMOS
o11
lant à peu près celui des nacelles descendantes.
Comme d’autre part la vaisselle sort de la machine
absolument sèche et brillante ainsi que nous avons
pu le constater lors de notre visite, nul doute que
dans les hôtels, les restaurants, les hospices, les
lycées et autres établissements similaires, on
n'installe cet appareil simple qui réalise une éco-
nomie de main-d'œuvre très appréciable sur le
lavage à la main.
Pour les cuisines de moindre importance,
M. Hamet a fait construire un petit plongeur repo-
sant sur le même principe. L'appareil comprend
un double balancier supportant une seule nacelle
équilibrée par un contrepoids; laxe de ce double
balancier tourne dans deux paliers que l'on fixe
sur deux côtés d’un bac à eau bouillante. On dis-
pose la machine de façon que la nacelle reste
stable lorsqu'elle est à la position de chargement
ou quand elle est immergée, quel que soit le poids
des assiettes contenues dans les paniers.
L'homme met la vaisselle qu'il vient de laver
dans les paniers, comme il a été dit pour le grand
appareil. Une fois les deux paniers garnis, il les
place dans la nacelle qu'il fait descendre dans
l'eau bouillante et revient continuer son lavage.
Lorsque deux autres paniers sont pleins, il soulève
MACHINE A LAVER LES ASSIETTES (1% 000 PAR HEURE).
la nacelle, retire les paniers de vaisselle rincée qui
sèche presque instantanément et les remplace par
d'autres. En laissant la nacelle une minute dans
l'eau bouillante on peut, avec le petit plongeur
automatique, rincer et essuyer 2 400 assiettes par
heure, quantilé que l’on peut augmenter en
réduisant la durée de l'immersion.
Souhaitons à M. Hamet d'inventer prochaine-
ment une machine pour remplacer les cuisinières,
la question des domestiques sera alors résolue,
la paix reviendra dans les ménages bourgeois, et
toutes les maitresses de maison le béniront!
JACQUES Boyer.
COSMOS
7 NOVEMBRE 1942
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ®©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
II. Réception à de plus grandes distances.
Bobine d’accord,
L'idéal, avons-nous dit, serait d'établir une
antenne équivalente à celle du poste d'émission.
Pour la tour Eiffel, dont l’antenne est formée de
"|
m
|
I
y
u
OHO
Fia. 10. — BOBINES DE FIL POUR SONNERIES ÉLECTRIQUES
UTILISÉES COMME BOBINES D'ACCORD.
six fils de 425 mètres et dont la longueur d'onde
est de 2200 mètres environ, il faudrait un fil de
550 mètres (le quart de la longueur d'onde) ou
plusieurs fils de moindre longueur.
Outre l'avantage de présenter une très grande
surface collectrice, une pareille antenne aurait
surtout celui de posséder la même période propre
d'oscillation que celle de la Tour, de se trouver
« en résonance » avec elle, et d'entrer par suite
elle-même en vibration avec le maximum d'inten-
sité sous l'influence des ondes reçues.
Cet idéal ne sera en pratique presque jamais
alteint, les dispositions locales obligeant à peu près
toujours à se contenter d’une antenne de dimen-
sions beaucoup moindres. A défaut de la grande
urface co Ilertrice que nous ne pourrons réaliser,
il nous sera cependant possible de mettre notre
petite antenne exactement en résonance avec celle
de la tour l'iffel, de l’«aceorder » avec elle, comme
on accorde ensemble deux instruments de musique.
(1) Suite, voir p. 435.
Puisqu'elle se trouvera presque sûrement beau-
coup trop courte pour vibrer à l'unisson de celle
du poste d'émission, nous devrons tout simplement
. lui « mettre une rallonge ». A nolre antenne trop
peu développée nous ajouterons, à l’intérieur
même du poste de réception, une longueur de fil
suffisante pour obtenir l'accord.
Ce fil, qui pourrait être disposé d’une façon quel-
conque (en zigzags, par exemple, à distance suffi-
sante des murs), recevra le plus souvent la forme
d'une bobine, forme sous laquelle la longueur
nécessaire sera beaucoup réduite, à cause de la
self-induction beaucoup plus grande dans une
bobine que dans un fil rectiligne (la longueur
d'onde propre d’une antenne étant proportionnelle
au produit de sa capacité par sa self-induction).
On pourra utiliser, par exemple, des bobines de
fil de 0,9 mm pour sonneries électriques, telles
qu'on les trouve dans le commerce (fig. 40). Avec
une antenne à deux fils de 12 à 145 mètres, on se
trouvera à peu près à l'accord en intercalant dans
l'antenne deux bobines de 500 grammes (1140 mètres
environ). L’intensité de la réception augmente très
rapidement à mesure qu'on approche de la réso-
nance; elle ne diminue ensuite que plus lentement
lorsqu'on ajoute une plus grande longueur de fil.
I vaut donc mieux en employer un peu trop que
pas assez. On essayera donc si l’adjonction d'une
troisième bobine ou seulement d’une demi-bobine
n'’améliorerait pas les résultats.
La recherche de l’accord exact sera grandement
facilitée en faisant usage d’une bobine à une seule
couche de fil dont les spires seront dénudées sui-
vant une génératrice sur laquelle glissera un cur-
-m f
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A f A
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PA h 5
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F16. 11. — BOBINE D'ACCORD A UNE SEULE COUCHE
AVEC CURSEUR (COUPE LONGITUDINALE).
seur. Outre qu'on pourra ainsi faire varier pro-
gressivement ka self-induction et s'arrêter exacte-
ment au point convenable, la réception sera un
peu meilleure avec une bobine à une seule couche
qu'avec les bobines de fil pour sonnettes.
No 41150
On trouve dans le commerce des bobines d'ac-
cord à des prix variables suivant le soin apporté
à leur fabrication, mais il est assez facile d’en con-
struire une soi-même. Il suffit, en effet, d'enrouler
une couche de fil isolé sur une petite caisse d'em-
ballage ou mieux sur un tube de carton de 8 à
40 centimètres de diamètre (fig. 14).
Ne pas prendre un cylindre de bois dont le dia-
mètre pourrait varier légèrement sous l'influence
de l'humidité ou de la sécheresse. Au bout d'un
certain temps, les spires arriveraient à chevaucher
les unes sur les autres et le bobinage serait à
refaire. Si l’on veut employer du bois, il faudra le
choisir de section carrée ou rectangulaire (comme
la caisse d'emballage) pour que le jeu minime que
chaque spire pourra prendre ne puisse se trans-
mettre à ses voisines.
Le tube de carton sera renforcé à sesextrémités,
et au besoin en son milieu, par des disques de
ANT Us
DOn
E fl)
F1G. 12. — MONTAGE EN DÉRIVATION SUR LA SELF.
bois. On enroulera sur lui 100 à 150 mètres de fil
émaillé de 5 à 7 dixièmes de millimètre, qu'il sera
très facile de dénuder au couteau suivant une
génératrice. Une règle de laiton de 5 à 7 milli-
mètres d'épaisseur, sur laquelle se déplacera le cur-
seur, sera fixée aux disques de bois des extrémités.
Ce curseur sera lui-même constitué par un mor-
ceau de tube de laiton carré coulissant exactement
sur la règle, et sur lequel sera soudé ou vissé un
ressort doux qu'on se procurera chez un horloger.
Il sera bon de vernir le curseur ou d'enrouler sur
lui un peu de chatterton pour l'isoler de la main qui
le fera mouvoir. Les deux bouts du fil seront réunis
à des bornes vissées sur les deux disques de bois
des extrémités. Une troisième borne sera reliée
à la règle de laiton.
Avec l'emploi d'une bobine d'accord (à curseur
ou non), il y aura avantage à ne pas laisser le
détecteur intercalé dans le circuit antenne-terre,
mais à le monter, avec le téléphone et la pile, en
COSMOS
513
dérivation sur la bobine suivant l'un des schémas
des figures 12 et 13 (1).
Pendant la réception d'un télégramme, on dépla-
cera progressivement le curseur jusqu'à ce que le
son le plus intense soit obtenu dans le téléphone.
Detecteurs à cristaux.
Un dernier moyen d'augmenter la sensibilité du
poste de réception pourra être d'employer un détec-
teur à cristaux au lieu du détecteur électrolytique.
On peut, en effet, avec ces détecteurs, obtenir une
très grande sensibilité. Ils ont, de plus, l'avantage
d'être d’une construction assez simple et de fonc-
tionner sans pile avec la plupart des minéraux
employés, mais ils présentent, d'autre part, plu-
sieurs inconvénients. On ne peut d'abord pas tou-
jours se procurer facilement des cristaux naturels
convenables ou en préparer d’artificiels qui donnent
AL
He
O-O
E M
F1G. 13 — VARIANTE DU MONTAGE EN DÉRIVATION
SUR LA SELF,
des résultats vraiment satisfaisants. Quand, dans
un lot de cristaux, on en a trouvé un bon parmi
d’autres ne présentant qu'une sensibilité médiocre
où nulle, il faut chercher ses points sensibles.
Lorsqu'enfin on a trouvé un de ces points, il suftit
souvent d'un choc ou de trépidations pour le faire
perdre, à moins d'employer des dispositifs spéciaux
de fixation.
Ces réserves faites, on peut, avec un bon cristal,
obtenir une sensibilité dépassant très notablement
celle du détecteur électrolytique.
On se procurera chez un marchand de produits
chimiques une certaine quantité de galène en cris-
taux, de pyrite de fer ou de carborundum dont on
essavera successivement les morceaux. Avec le
carborundum, l'emploi d'une pile est necessaire,
comme avec le détecteur électrolytique. C'est la
galène qui nous a donné jusqu'ici les meilleurs
résultats; dans un kilogramme provenant de la
(1) Voir Cosmos, t. LXVI, n° 1412, p. 185.
51%
maison Poulenc, nous avons trouvé un morceau
présentant de nombreux points très sensibles;
mais, par contre, dans plusieurs autres kilo-
grammes, nous n’avons pu trouver un seul mor-
ceau comparable au premier (1).
Le détecteur lui-même servira à l'essai des cris-
F1G. 14. — DÉTECTEUR A CRISTAL IMPROVISÉ.
taux. On pourrait le constituer, très rudimentaire-
ment, en enserrant le cristal à étudier dans une
boucle de fil de cuivre, et en faisant reposer sur
lui l'extrémité appointée d’un autre conducteur
semblable (fig. 14), mais il est presque indispen-
sable de recourir à un dispositif quelconque assu-
7 7
ALL CTI Ltd I 17e AE ÉLUS LU
nr”
7
7
L
F1G. 15. — DÉTECTEUR A CRISTAUX.
rant un peu plus de stabilité et qu'on pourra ima-
giner facilement.
Voici celui que nous employons (fig. 15) :
Le socle et les bornes proviennent d’une petite
bobine de Ruhmkorff hors d'usage. Le levier coudé
est un ancien crochet-commutateur de téléphone
d'appartement dont la courbure a été redressée et
forme maintenant la branche horizontale du levier.
A cette branche est soudé un morceau de fil de
cuivre de 0,5 mm de diamètre dont l'extrémité
recourbée et soigneusement appointée à la lime
douce repose sur le cristal. L'autre branche du
levier est garnie d'un morceau d’ébonite prove-
nant d'un bouchon d'accumulateur. C’est sur lui
qu'on agit pour soulever la pointe. Le cristal est
placé sur une plaque métallique (morceau de
boîte de fer-blanc) clouée au socle. Du papier
d'étain froissé forme matelas plastique entre la
plaque et lui, épousant les inégalités de sa surface
(1) On trouve dans le commerce de la galène spé-
cialement choisie pour T. S. F., mais naturellement
à des prix beaucoup plus élevés que celle des mar-
chands de produits chimiques.
COSMOS
7 NOVEMBRE 149412
et assurant un bon contact. Une des bornes est
reliée au levier, l’autre à la plaque métallique sur
laquelle on déplace par glissement le cristal pour
explorer la sensibilité de tous les points de sa sur-
face.
On montera le détecteur à cristaux dans le cir-
cuit récepteur exactement comme le détecteur
électrolytique, sauf suppression de la pile (fig. 46).
La pointe peut être à peu près indifféremment
reliée à l'antenne ou à la terre.
La recherche des points sensibles se fera, soit
à un moment où l’on sait qu'a lieu une transmis-
sion de la tour Eiffel, soit en utilisant les ondes
émises jusqu'à quelques mètres par la petite étin-
celle de rupture qui se produit au trembleur d'une
sonnette électrique. Cette sonnette sera démunie
de son timbre; on écartera le plus possible le trem-
DA
F1G. 16. — MONTAGE D'UN DÉTECTEUR A CRISTAUX.
bleur de l’électro-aimant pour éviter le bruit que
produit l’armature en venant frapper les noyaux
de celui-ci, et le réglage sera fait de façon à obte-
nir des vibrations amples et peu rapides. L’antenne
de ce poste émetteur en miniature consistera en
un fil d'un mètre environ partant du ressort du
trembleur ou de la vis de réglage (fig. 17). On le
disposera au voisinage de l'appareil de réception.
F10. 12. — DISPOSITIF D'ESSAI.
En cas de faible sensibilité du cristal employé, on
pourra même le relier directement à un point quel-
conque du circuit récepteur. Les vibrations du
trembleur produiront dans les téléphones un bruit
d'autant plus intense que le point en essai sera
plus sensible.
N° 1450
Cristaux artificiels. — La galène (sulfure de
plomb naturel) peut être remplaeée par du sulfure
de plomb artificiellement préparé. M. Flajolet (1)
et le P. Alard (2) ont indiqué cette préparation. Il
suffit de faire chauffer dans un tube à essais un
mélange de fleur de soufre ou de soufre en canons
pulvérisé et de limaille fine de plomb (soufre, 1 g;
plomb, 5 g; ou parties égales en volume). Au bout
de quelques instants, la combinaison se produit
avec incandescence. Après refroidissement, on
brise le tube et on casse en morceaux le sulfure
obtenu. Les points sensibles se trouvent, soit sur
la croûte extérieure, soit sur les petites aspérités
cristallines de l’intérieur.
Nous n’avons pu personnellement obtenir par ce
procédé des cristaux aussi sensibles que la bonne
COSMOS
13
galène naturelle. Il nous a paru qu'il y avait inté-
rêt à effectuer la combinaison avec un excès de
soufre ; il ne faut donc pas faire l’opéralion dans
une capsule présentant à l'air une grande surface
et dans laquelle une partie du soufre pourrait
brüler.
Nous avons essayé l'emploi de plomb en poudre
au lieu de limaille. Le sulfure résultant est
amorphe et souvent très friable. Il est cependant
possible, dans des conditions encore mal détermi-
nées de préparation, d'en obtenir de plus consistant,
sous forme d’une sorte de scorie poreuse, nulle-
ment cristalline, relativement peu fragile et pré-
sentant de nombreux points plus sensibles que
ceux des meilleures galènes.
D" PIERRE CORRET.
Le pancréas et ses ferments.
Le pancréas est une grosse glande annexée au
tube digestif, et dont le nom fait allusion à son appa-
rence charnue (de zžv, tout, et xpćas, chair); le ròle
de cette glande, qui a fait l'objet en ces derniers
temps d'assez nombreux travaux, est complexe, sa
destination essentielle étant de sécréter des fer-
ments propres à poursuivre et à achever la diges-
tion des substances de nature variée qui parviennent
dans l'intestin après avoir subi déjà l'action de la
salive et du suc gastrique.
La forme générale de l’organe est celle d’une
langue; il s'étend en travers dans la cavité abdo-
minale, un peu en arrière de l'estomac, de telle
manière qu’il n’est bien visible que lorsque celui-ci
est ôté. Il a un aspeet granuleux qui, joint à sa
couleur grisâtre, le fait à ce point ressembler aux
glandes salivaires que les anciens anatomistes ne
le nommaient pas autrement que la glande sali-
vaire de l'abdomen.
Sa longueur moyenne est de 45 centimètres sur
4 centimètres environ de largeur; son épaisseur
est très faible (4 centimètre), son poids est de
60 à 80 grammes. Il est renflé à son extrémité
droite, qui en constitue la tête, et qui se loge dans
l’anse du duodénum; la partie opposée (la queue)
est effilée et s’arrète à proximité de la rate.
Le pancréas se rattache par sa structure aux
glandes en grappe, dont font partie aussi les
glandes salivaires; les cellules chargées de puiser
dans le sang les éléments nécessaires à la synthèse
des sécrétions pancréaliques se groupent en petites
ampoules (les acini), dont les canaux se réunissent
en tubes de plus en plus gros, aboutissant finale-
ment dans un conduit qui parcourt la glande d'un
bout à l’autre.
(1) Voir Cosmos, t. LXVI, n° 4417, p. 332.
(2) Voir Cosmos, t. LXVI, n° 1419, p. 372.
Ce conduit est nommé le canal de Wirsung; il
a le calibre à peu près d’une plume d'oie; près de
l'intestin, il s'unit au canal cholédoque, qui amène
la bile du foie, et il débouche à còté de ce canal,
mais par un orifice distinct, au fond de l'ampoule
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F1G. 1. — PANCRÉAS HUMAIN,
AVEC LES ARTÈRES QUI L’ALIMENTENT.
de Water, sorte de petit entonnoir formé par la
paroi interne du duodénum; un peu plus haut dans
celle portion de l'intestin est encore un orifice,
par lequel débouche un conduit accessoire greffé
sur le canal de Wirsung.
A l'inverse des glandes salivaires de la bouche,
qui sont en fonctionnement permanent avec surex-
citation au moment de la mastication, le pancréas
n’est actif que par intermittences. La sécrétion du
liquide pancréatique se produit à chaque fois que
l'estomac, forçant la résistance du pylore, lance
dans l'intestin une portion de son contenu, masse
plus ou moins volumineuse d’aliments brassés,
pétris et imprégnés de suc gastrique,
516
Cette sécrétion n’est pas, comme on pourrait le
penser, un réflexe nerveux, mais la conséquence
d’une excitation chimique. L’acide chlorhydrique du
suc gastrique imprégnant le chyme, c’est-à-dire la
bouillie alimentaire réalisée par l’action mécanique
et chimique de l’estomac, provoque dans les cellules
épithéliales de la muqueuse intestinale la forma-
tion d'une substance particulière, la sécrétine, qui,
rapidement entrainée par le sang, excite à son
arrivée dans le pancréas l’activité spéciale des
cellules sécrétrices des acini. Une solution alcaline
introduite dans l'estomac arrète brusquement la
sécrétion pancréalique.
Il y a entre l'estomac et le pancréas, sous la
dépendance du fonctionnement chimique propre
de ces deux organes, une curieuse relation méca-
F1G. 2. — COUPE (DEMI-SCHÉMATIQUE)
DANS LA TÊTE DU PANCRÉAS.
nique, qui montre comment tout s’enchaine avec
une admirable simplicité dans la merveilleuse
machine humaine. L'étude aux rayons X a permis
de constater que, contrairement aux idées reçues,
l'estomac en travail de digestion ne se vide pas en
une seule fois, mais par flots successifs. L’évacua-
tion dans l'intestin de chacun de ces flots néces-
site l’ouverture du pylore, ouverture qu'il y a tout
lieu de croire produite par un excès d'acide libre
dù à la saturation de la masse alimentaire; d'autre
part, l'acide ainsi déversé dans l'intestin fait, par
voie réflexe, fermer le pylore, et arrête les con-
tractions de l'estomac jusqu’à ce qu'il ait été neu-
tralisé par les sécrétions alcalines du pancréas et
de l'intestin. Ainsi, tant qu’il y a de l'acide dans
le duodénum, l'estomac ne se contracte pas, et le
pancréas excité sécrète un liquide neutralisant;
COSMOS
7 NOYEMBRE 1912
quand il n’y a plus d'acide, l'estomac reprend son
travail, jusqu’à ce qu'un nouvel excès d'acide pro-
voque une nouvelle ouverture du pylore et la
reprise des mêmes phénomènes.
Le suc pancréatique est un liquide visqueux et
clair, alcalin comme la salive et le suc intestinal.
Sa sécrétion est assez abondante et, observée chez
des hommes portant une fistule, a atteint par jour
entre 300 et 800 grammes. Il est composé pour une
proportion très grande d’eau contenant en disso-
lution des éléments minéraux ou inorganiques et
une partie albuminoïde ou vivante. Les éléments
minéraux sont du carbonate, du phosphate et du
chlorure de soude, ce dernier étant le plus abon-
dant (7 millièmes); la partie organique est repré-
sentée par quatre ferments solubles, dont chacun
exerce son aclion propre sur une catégorie
d'aliments.
A leur arrivée dans l'intestin, et lorsque le repas
a comporté les substances variées qui le composent
d'ordinaire, ces aliments peuvent se ranger en
deux séries; les uns ont subi, par le fait des fer-
ments de la salive et du suc gastrique (ptyaline,
pepsine, lipase), un commencement de digestion :
ce sont les substances azotées, les féculents, les
graisses et les maltoses; les autres n'ont pas été
attaqués : ce sont les sucres de saccharose. Les
quatre sortes d'aliments de la première série,
à l'exclusion de ceux de la seconde, sont justiciables
des ferments du suc pancréatique, dont voici res-
pectivement les noms et le mode d'action.
Ces ferments, au nombre de quatre aussi, sont
l'amylase ou diastase pancréatique, la maltase, la
trypsine et la lipase pancréatique. L'amylase du
pancréas est identique à la ptyaline de la salive et
a comme elle, mais à un degré beaucoup plus
énergique, le pouvoir de transformer l'amidon des
aliments féculents en sucre de maltose; elle reprend
donc et achève la digestion de cet amidon seule-
ment commencée par la salive.
Les maltoses formées par l'action de la ptyaline
et de l'amylase pancréatique sont, pour une partie,
hydratées par la maltase qui les dédouble en deux
molécules de glucose assimilable, et, pour lautre
partie, échappée à la maltase, transformées en
glucose par le suc intestinal.
La trypsine n'est pas autre chose qu'une pepsine
pancréatique ; elle a, comme la pepsine gastrique,
le pouvoir de digérer les substances azotées, qu’elle
transforme en diverses albumines solubles et
assimilables : peptones, albumoses, etc. A l'inverse
toutefois de la pepsine, qui magit qu'en milieu
acide et exige pour accomplir normalement son
rôle la présence d’au moins 2 à 3 millièmes d’acide
chlorhydrique, la trypsine n'opère que sur des ali-
ments neutres ou basiques; la neutralisation du
chyme, qui parvient acide dans le duodénum, est
obtenue par la bile, qui se déverse avec le suc pan-
N° 1450
créatique dans la même région de l'intestin; les
éléments azotés de ce chyme ne sont attaqués par
la trypsine que lorsque l'acide chlorhydrique qu'il
contient a été à peu près totalement neutralisé par
la bile; une faible proportion d'acide (4 millième)
suffit à entraver l’action digestive de la trypsine.
On estime que, dans les conditions normales, la
quantité d'aliments azotés digérée dans le duo-
dénum par la trypsine est sensiblement égale
à celle digérée dans l'estomac par la pepsine.
Exceptionnellement, ce rdle de la trypsine peut
s'exagérer et se substituer mème complètement
à celui de la pepsine; c'est ainsi que chez des
animaux carnivores ou omnivores (le chien, le
chat, le cochon) on a pu suturer expérimentale-
ment le cardia au pylore sans troubler sensible-
ment la nutrition générale, et que l’ablation chirur-
gicale de l'estomac peut être pratiquée chez
l’homme, par exemple dans le cas de cancer; les
sécrétions pancréatiques assurent alors la digestion
des albuminoïdes dans la proportion nécessaire
à la santé.
Le quatrième ferment du suc pancréatique est
une lipase, qui reprend et achève la digestion des
graisses commencée par la lipase du suc gastrique.
Cette digestion consiste, d’une part, en une émul-
sion, d'autre part, en une saponification; elle est
donc le fruit d'une action partiellement physique
et partiellement chimique. L'émuilsion d’une huile
par le liquide pancréalique est presque instantanée
et durable; l’huile ainsi émulsionnée devient direc-
tement assimilable.
Quant à la saponification, c'est une réaction chi-
mique dans laquelle la lipase dédoub!e les graisses
COSMOS
517
en glycérine et en acides gras (oléique, stéurique,
margarique), dont une partie se combine avec les
sels de soude du liquide pancréatique pour former
des oléates, des stéarates et des margarates de
soude, C'est-à-dire des savons alcalins, dissous et
assimilables.
La trypsine comme la lipase w'existent pas dans
le suc pancréatique à l'état de ferments im média-
tement aclifs, mais à l’état de proferments dont
l'activité ne s'éveille que par un mélange avec
d'autres sécrétions de organisme. Le proferment
de la trypsine, le frypsinogène, ne-se convertit en
trypsine active que quelques heures après le repas,
lorsqu'il s'est mélangé avec le suc intestinal, lequel
contient une entérokinase qui a la vertu spéciale
d'opérer celte conversion; celui de la lipase doit
être mélangé avec la bile pour devenir une lipase
active.
En outre de ses ferments directement utiles à la
digestion, le pancréas élabore encore dans cer-
taines de ces cellules une substance qui, absorbée
par le sang, permet l'assimilation des glucoses
introduits dans la circulation. L’ablation totale
du pancréas fait cesser cette assimilation et prs-
voque, chez les animaux où elle est pratiquée, un
intense diabète, rapidement mortel: diabète qui
est évilé si, en un point quelconque du corps, on
greffe un fragment de pancréas qui, n’intervenant
plus dans la fonction digestive, continue cepen-
dant de fournir au sang le produit nécessaire à la
digestion des sucres. En résumé, le pancréas doit
ètre considéré comme un organe important, dont
les maladies peuvent jeter un trouble grave dans
la nutrition de l'organisme. À. ACLOQUE.
Les travaux d’alimentation d’eau de Mexico.
On donne, et avec raison, de plus en plus d'im-
portance aux questions d'alimentation d'eau: eau
pure en abondance pour les puissantes aggloméra-
tions qui se constituent un peu de tous côtés, et où
la vie agglomérée n’est possible que si l’on trouve
à sa disposilion de la bonne eau en quantité suf-
fisante. Or, presque jusqu'à ces temps derniers,
Mexico, qui est réellement une grande ville, et
remarquable à tant d'égards, n'avait que de l'eau
en quantité insuffisante, et une eau qui, au point
de vue hygiénique, laissait beaucoup à désirer.
Depuis des siècles, la population de la ville
n'avait à sa disposition que les sources qui se
trouvent à la base de l'élévation dite de Chapul-
tepec, dans la banlieue Ouest de la ville. Ces
sources n’ont qu'un débit assez réduit, elles sont
loin de donner toute sécurité; enfin Mexico, à
l'heure actuelle, compte plus de 400 000 habitants.
C'est pour cela que, en 1900, la municipalité de la
ville décida de faire faire toutes les études néces-
saires et ensuite les travaux indispensables pour
doter Mexico d'une alimentation très abondante
deau pure, destinée à répondre, non seulement
aux besoins actuels, mais aux besoins de lavenir.
Bientôt une Commission spéciale fut nommée
pour l'exécution de ces importants travaux, Com-
mission à la tète de laquelle se trouvait notre émi-
nent collègue M. José Limantour, connu d'autre
part comme ministre des Finances du Mexique, et
qui avait comme directeur technique M. Manuel
Marroquin y Rivera, auquel nous devons les détails
les plus complets sur ces travaux, et une abondante
moisson de photographies dont nous faisons par-
tiellement profiter nos lecteurs. Cette Commission
compte, d'ailleurs, des ingénieurs français sortis
des Arts et Métiers, comme M. Feuillebois et
d’autres. C'est l'ingénieur en chef Marroquin, un
des ingénieurs les plus connus du Mexique, qui a
518
eu à dresser complètement les plans et les projets,
et à diriger toute la construction de ce vaste sys-
tème d'alimentation ; construction qui n’a pas
demandé moins de cinq années, à partir du mo-
ment où les projets définitifs ont été arrêtés, à la
suile d'études prolongées sur lesquelles nous
avons pas à insister. Tous ces travaux sont parti-
culièrement intéressants, et par leur nouveauté
dans le pays, et par l’usage que l’on y a fait fort
savamment du béton armé, et par les machines
très ingénieuses que l’on a mises à contribution
COSMOS
7 NOVEMBRE 1919
pour activer l'élablissement des conduiles, des
réservoirs, le creusement des galeries, etc.
On avait constaté que, au pied des montagnes
dites d’Ajusco, qui bordent la vallée de Mexico au
Sud, il se trouvait souterrainement un vaste bassin
d'eau artésienne. Ces eaux élaient tout naturelle-
ment indiquées comme susceptibles d'alimenter de
façon satisfaisante Mexico. Ce sont elles-mêmes
qui remontent à la surface sous la forme de quatre
sources qui se contentaient jusqu’à présent d'ali-
menter le lac Xochimilco. En lui-même, ce lac
CONSTRUCTION DE L'AQUEDUC : LA CARCASSE MÉTALLIQUE.
vaut la peine d’être connu. Il est actuellement
recouvert sur les deux tiers de sa superficie par
des sortes de jardins flottants extrêmement fertiles,
qui portent le nom local de Chinampar. Ils sont
formés de détritus végétaux et de vases extraites,
du fond du lac, que l'on fixe en plantant des arbres
sur les bords des massifs ainsi obtenus. C'est la.
végétation arborescente seule qui empêche ces
détritus de tomber au fond de leau. Il va sans
dire que ces accumulations de vases et de détritus
présentent une intensité de végétation et une fer-
tilité rares, grâce aussi à l'humidité abondante qui
y est distribuée par les eaux artésiennes remontant
naturellement jusqu’au niveau du sol. Ces eaux
arlésiennes se présentaient avec les meilleures
qualités; elles ont commencé par traverser des
masses de basalte, de cendres volcaniques, pour
descendre profondément à labri des laves qui
forment les derniers contreforts de la montagne.
On peut dire que ce sont de véritables eaux de
source, en y attachant le sens favorable du mot.
D'ailleurs, comme presque toujours en matière
d'eau artésienne, on se trouve en présence d’un
vaste réservoir souterrain qui forme vase commu-
N° 1450
niquant avec l'extérieur, et assure une régularité
rare de la sortie de l’eau. On n'a aucune crainte
que le débit de cette eau diminue pendant les mois
de sécheresse, et l’expérience déjà faite a confirmé
les conclusions auxquelles on était déjà arrivé en
cette matière. Les analyses bactériologiques les
plus sûres ont été failes, qui ont donné une
tranquillité complète au point de vue de l'hygiène.
Pour ce qui est de la composition chimique, on
trouve un peu d'acide carbonique, très peu de car-
bonate de chaux et de sulfate de chaux, de sulfate
COSMOS 519
de magnésie et de chlorure de sodium, celui-ci en
quantité extrêmement faible. Toute l’année, ces
eaux ont une température moyenne de 13 degrés
centigrades.
Naturellement, on ne s’est pas contenté de capter
les eaux qui remontaient d’elles-mêmes pour ali-
menter le lac Xochimilco. On a foré tout à coté
des puits artésiens, qui ont augmenté considérable-
ment le débit de l’eau disponible. On se borne,
il est vrai, à l'heure actuelle, à utiliser et à capter
effectivement 2000 litres par seconde; mais on
LE CHASSIS POUR LE COULAGE DU BÉTON; LA GRUE DE TRANSPORT ET LE MALAXEUR.
estime que le débit de l’eau que l’on pourrait
envoyer sur Mexico dépasserait largement au besoin
2500 litres par seconde. Un pareil débit per-
mettra de fournir facilement 450 litres d'eau par
tête et par jour, lorsque la population de la ville sera
de 600000 habitants, ce qui n’est pas encore tout
prochain. En fait, le niveau auquel se présentent
les eaux en sortant des puits artésiens est à peu
près le même que le niveau de Mexico; aussi fal-
lait-il prendre des mesures pour assurer l’arrivée
de cette eau jusque dans les réservoirs de la ville
et jusque dans les maisons mêmes à desservir. On
s’est décidé pour une combinaison qui peut paraitre
bizarre au premier abord, mais qui donne de très
bons résultats.
On a voulu éviter de soumettre à une pression
considérable la conduite de 30 kilomètres environ
qui aurait à amener l’eau depuis le point de cap-
lation jusqu'à la ville. Aussi bien ne faut-il pas
oublier que l’on est dans un pays de tremblements
de terre, où des fissures peuvent se produire assez
facilement dans des conduites de ce genre. La solu-
tion adoptée a consisté à installer sur place même
une station de pompes, qui relèvent les eaux four-
520
nies par les puits artésiens à une hauteur maximum
de 12 mètres. C’est de ce niveau ensuite que, sous
la seule influence de la gravité, l’eau s'écoule vers
Mexico et vers les réservoirs. Mais, avant d'arriver
à ceux-ci, cette eau passe par une station de
pompes qui la relèvent à une hauteur convenable et
mettent, par conséquent, l’eau sous pression pour
la distribution en ville et à domicile. Il ne faut
pas croire que celte solution ait été particulière-
ment coùteuse; la municipalité a pu s'entendre
avec la Compagnie mexicaine de lumière et de
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COSMOS
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7 NOVEMBRE 1912
force motrice. Elle paye simplement à cette Com-
pagnie la quantité d'eau pompée, suivant la hau-
teur à laquelle elle est pompée ; la municipalité
n’a point eu à immobiliser de fonds sous la forme
d'installations de pompes ou autres. Les pompes
sont, du reste, des appareils centrifuges actionnés
électriquement, qui donnent les meilleurs résultats.
Tous les engins sont en double, pour remédier &
un accident imprévu.
Nous avons dit que les installations ont été assez
malaisées à mener à bien; que, d'autre part, on a
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CONSTRUCTION DES RÉSERVOIRS.
fait appel couramment au ciment armé. C’est ainsi
que, pour les stations de pompes, on a dù con-
struire de vastes chambres dans lesquelles les eaux
artésiennes s'écoulent naturellement, et où puisent
les appareils centrifuges. Ces chambres ont été
construiles en béton armé très solide, pour éviter
l'influence des poussées inférieures provenant des
eaux d'infiltration. Elles sont susceptibles, pour
ainsi dire, de flotter dans les terrains très mobiles
et très aquifères où elles ont été installées.
Si nous considérons l'aqueduc, qui est destiné à
amener sous l'influence de la gravité, comme nous
le disions, leau depuis la station de départ jusqu’à
la station de compression, nous verrons qu'il offre
une pente de 30 centimètres par kilomètre, et que
sa capacité, de débit est de 2300 litres par seconde
environ. Cette conduite est de forme circulaire;
son diamètre est variable entre 1,45 m et 1,80 m.
C'est un véritable tube en ciment armé d'une
épaisseur de 18 centimètres; le ciment ou plutôt
le béton étant composé d’un volume de ciment, de
trois volumes de sable et de trois volumes de
pierre; la pierre est obtenue par trituration des
laves volcaniques. L’armature est faite en barres
No 4460
d'acier ondulé. Elle a été construite sur place. Bien
entendu, des joints d'acier ont dù être prévus de
place en place, toujours pour lutter contre ces
tremblements de terre dont l'influence est si redou-
table au Mexique. On a disposé des cheminées de
ventilation et des valves de contròle tous les
333 mètres. Cela permet d'isoler des sections et
de faciliter les réparations sans vider complètement
la conduite. Elle est entièrement au-dessus de
terre, car on n'a pas à redouter la congélation
sous le climat de Mexico et des environs. Tous les
cinq kilomètres, on a établi une sorte de déversoir
permettant aux eaux de s'écouler, si elles arrivaient
en trop grande abondance par rapport à la con-
sommation. Les eaux qui se déverseraient ainsi
rejoindraient un canal situé à peu de distance.
Tout le long de la conduite, et pour en faciliter la
construclion, on avait posé une voie ferrée légère,
qui a permis d'amener sur place à bon marché les
matériaux nécessaires. La construction s’est faite
dans les conditions les plus curieuses et les plus
pratiques. Pour le coulage du béton autour des
armatures, les cintres intérieurs élaient en tôle;
ils étaient démontables, et on les transportait à
l'intérieur du tube sur une voie fixée à la partie
inférieure de ce qui allait devenir la conduite. La
forme extérieure de celle-ci était donnée par des
châssis en bois, qui étaient transportés au fur et à
mesure à l'avant des travaux par une grue, après
décintrage de la portion coulée ayant fait prise.
Cette grue circulait sur la voie ferrée parallèle à
la conduite. Un malaxeur mécanique à béton avait
été prévu, et était monté sur un chariot qu’on fai-
sait glisser sur la voie servant également à la
grue et aux wagons de transport; si bien que la
fabrication et la coulée du béton se faisaient avec
une rapidité rare.
Nous ne dirons rien de la station des pompes
élévatoires devant relever l’eau jusqu'aux réser-
voirs. Ce sont des pompes centrifuges mues élec-
triquement. Pour ce qui est des réservoirs, 1is sont
au nombre de quatre, et tous circulaires. Comme
on peut le voir en se reportant à la photographie
qui représente la construction de la partie inférieure
COSMOS
921
de ces réservoirs, et des piliers en béton armé,
comme le reste, devant soutenir leur toiture, l’éta-
blissement en a été fait suivant les méthodes les
plus modernes. Ces réservoirs sont à une altitude de
90 mètres au-dessus de la ville. Ils ont 100 mètres de
diamètre et une capacité moyenne de 50 000 mètres
cubes chacun. Ensemble ils peuvent répondre à la
consommation actuelle pendant une trentaine
d'heures. On a rapporté des terres par-dessus, de
façon à les maintenir bien au frais; on a planté
des fleurs, des plantes, des arbres; et maintenant
les terrains qui les recouvrent constituent une
annexe du parc de Chapultepec, une des principales
promenades de Mexico. Ajoutons encore que, de
la vaste chambre en bélon armé qui reçoit leau
provenant de ces réservoirs, part une grande ga-
lerie carrée qui traverse toute la ville de l’ouest à
l'est; galerie en béton, sorte de souterrain de 1,8 m
de large. On y a placé les grandes conduites d’ali-
mentation, et on y a réservé d’autre part de la
place pour les fils télégraphiques, les fils télépho-
niques et les distributions de lumière et d'énergie.
L'établissement même de cette galerie s’est fait
dans des conditions toutes particulières. On a
commencé par creuser la grande tranchée; puis
on y a descendu et maçonné successivement des
éléments en forme d'U, et fails de béton armé,
qui constituaient les parois et la base; on a procédé
de mème pour le toit de la galerie. C'étaient les
voies de tramways de la ville qui servaientà amener
à pied-d'œuvre ces éléments de construction, L’ex-
trémité orientale de ce souterrain est en relation
directe avec le grand égout collecteur de la ville;
de sorte que, si quelque canalisation venait à se
rompre dans cetle sorte de voie souterraine, les
eaux s'écouleraient toul naturellement sans pouvoir
inonder les rues.
La ville de Mexico aura dépensé quelque 45 mil-
lions de francs quand ce service d'alimentation des
eaux sera absolument terminé; mais il est tout à
fait remarquable, et il fait grand honneur et à
M. l'ingénieur en chef Marroquin et à tous ses
collaborateurs. DANIEL BELLET,
prof. à l'Ecole des sciences politiques.
L'avenir du chauffage électrique.
Née d'hier, l’industrie qui s’occupe de produire
et de distribuer l’énergie électrique a pris, au cours
des quinze ou vingt dernières années, un essor
véritablement prodigieux. Par elle, les transports
en commun et l’éclairage d’une part, de l'autre la
fabrication des produits chimiques ont été rénovés,
tandis que le traitement des minerais, l'usinage
des métaux et, d'une façon générale, tout lappa-
reillage mécanique ont modifié de fond en comble
leurs méthodes traditionnelles. Sans exagération
aucune, on peut dire que, si les hommes du
xix° siècle ont assisté au triomphe de la vapeur,
ceux du xx° verront l’apothéose de l'électricité.
Cependant, il n’est pas douteux que les usines
génératrices de courant seraient, à l'heure actuelle,
infiniment plus prospères qu’elles ne le sont s’il
leur était pratiquement possible de fournir à leurs
clients la chaleur, en même temps que la lumière
522
et la force motrice. Il y a là pour elles un grave
problème à résoudre, celui d'engager avec des
chances de succès la lutte contre les divers com-
bustibles d'usage courant, et de supplanter défini-
tivement, pour le chauffage domestique, le bois, le
charbon, le gaz et le pétrole.
Ce problème est-il insoluble? C'est ce que s'est
appliqué à examiner le dernier Congrès interna-
tional des applications électriques, et les spécialistes
du monde entier, réunis à Turin pour prendre part
à ses travaux, ont été saisis à ce sujet par M. Ro-
sander d’un rapport substantiel dont les conclusions
doivent être méditées.
Il faut tout d’abord se rappeler que, pour de
moment, trois moyens seulement sont employés
dans le but de transformer l'électricité en chaleur :
arc électrique, courants de Foucault et effet Joule.
Les deux premiers conviennent à peu près unique-
ment aux applications industrielles, notamment
aux fours électriques : seul, l'effet Joule parait
susceptible d'applications domestiques et ména-
gères.
Le mode de production de chaleur qui participe
de lui réside entièrement dans la transformation
de l'électricité en énergie thermique par son pas-
sage à travers une résistance ohmique appropriée,
résistance qui peut, suivant les cas, être non métal-
lique, métallique ou agglomérée.
Les résistances non métalliques sont constituées
par des filaments de charbon placés dans une
ampoule purgée d'air, mais contenant un gaz inerte,
qui est généralement un carbure d'hydrogène, et
dont le rôle est d’atténuer l'éclat lumineux du fil
en même temps que de rayonner par convection
une partie de la chaleur produite. On peut, du
reste, pour constituer le filament, remplacer le
charbon par du silundum, c'est-à-dire par un sili-
ciure de carbone particulièrement dur et résistant,
qui est réputé infusible.
Les résistances métalliques, beaucoup plus fré-
quemment employées, sont en général formées
d'alliages très peu oxydables, à coefficient de tem-
pérature assez bas, mais qui, néanmoins, subissent
à la longue des modifications de structure par les-
quelles leur solidité se trouve compromise; de
plus, fusibles à des températures relativement peu
élevées, elles ne sauraient se prèter à tous les
usages. …
Quant aux résistances agglomérées, elles sont
représentées par des mélanges de métaux conduc-
teurs, nickel, chrome, platine, ou de sels divers,
avec des substances non conductrices, argile, gra-
phite, silice, par exemple.
Quelle que soit la résistance employée, il est
d'ailleurs incontestable que de grands progrès
restent à réaliser dans les appareils de chauffage
actuellement en usage; ces progrès portent sur
trois points d'une extrème importance: robustesse,
COSMOS
7 NOVEMBRE 4919
prix de revient, facilité de réparation. Les con-
structeurs ont, par conséquent, le devoir primor-
dial d'étudier chacun d'eux avec le plus grand soin
afin d'améliorer autant qu'ils le peuvent les types
commerciaux dont ils proposent l’achat au grand
publie.
_ Parmi les appareils de vente usuelle destinés à
assurer le chauffage domestique, les uns donnent
ce qu'on pourrait appeler une chaleur directe : ce
sont les bouillottes électriques, qu'il est possible
de tenir à la main, pendant que l’eau dont elles
sont emplies est portée à l’ébullition, cequitémoigne
d'un rendement utile élevé; les autres donnent
une chaleur indirecte : ce sont des fourneaux sur
lesquels on place les objets à chauffer. Dans les
premiers, plus de 90 pour 400 de la chaleur pro-
duite sont utilisés; dans les seconds, le rendement
est beaucoup moindre, mais, en revanche, ils sont
d'une application beaucoup plus commode puis-
qu'ils rendent possible l'utilisation des ustensiles
habituels. On conçoit sans peine que les radiateurs
destinés à fournir uniquement la chaleur aux
appartements peuvent être pratiquement assimilés
aux appareils du second type; dès lors, la déter-
mination de leur « valeur chauffante » peut être
très logiquement faite en précisant leurs appli-
cations culinaires normales.
Citant des chiffres donnés par M. Ritter dans
l'Elektrotechnische Zeitschrift, M. Rosander in-
dique dans son rapport qu'il faut dépenser 240 watts-
heure pour cuire 850 grammes de poisson, 320 w-h
pour cuire 4 500 grammes de viande de bœuf et
800 w-h pour rôtir À kilogramme de veau. D’autre
part, M. Goisot a indiqué qu'il faut de 0,4 à 0,5 ki-
lowatt-heure pour cuire un kilogramme de viande
de boucherie. Si l’on rapproche cette consomma-
tion de courant de celle que le gaz nécessiterait,
toutes conditions étant égales, on constate qu'un
kilowatt-heure est l'équivalent thermique de
0,415 m° de gaz, ce qui revient à dire que pour
être économiquement applicable à la cuisine, le
courant électrique devrait être fourni à un prix
tel que le kilowatt-heure ne coûtât pas plus cher
que 0,415 m? de gaz.
Il convient de noter que ces chiffres ne sont
pas admis par tous les spécialistes qui ont éludié
la question : les opinions formulées à ce sujet sont
mème assez contradictoires. C’est ainsi, parexemple,
que l’Electricien (17 févr. 1912, p. 109) a signalé,
d'après l Electrical Review, l exemple d'un ménage
d'employés habitant la banlieue de Londres, et
qui, en 4907 et en 1908, dépensa 512,35 fr. et
427,10 fr. pour payer le gaz et le charbon dont il
se servit pour la cuisine, l'éclairage et le chauffage
de l'eau destinée aux besoins domestiques; en 1909,
la comptabilité ne fut pas tenue, mais on la reprit
en 1910 et en 1911 en même temps qu'on adoptait
l'éclairage et le chauffage électriques : les dépenses
N° 1450
furent de 556,35 fr. et 555,40 fr. pour ces deux
années, notablement supérieures, par conséquent,
aux dépenses correspondantes de 1907 et 1908.
Toutefois, alors que, pour ces deux dernièresannées,
les notes de boucherie furent respectivement de
1 258,25 fr. et 4 350,90 fr., elles n’atteignirent que
962,90 fr. en 19140 et 835,10 fr. en 1911, sans que rien
ait été changé dans l'alimentation du ménage.
Cette sensible diminution des achats, résulte,
d'après notre confrère, de ce que les pertes de
viande à la cuisson sont bien moindres avec l’élec-
tricité ‘qu'avec les anciens modes de chauffage.
Il en résulte, pour le ménage considéré, une éco-
nomie annuelle de 400 à 500 francs, très supérieure
à la différence des frais nécessités par l'électricité
et par le charbon ou le gaz.
Toutefois, M. Rosander ne croit pas devoir par-
tager cet optimisme; il a institué de nombreuses
expériences comparatives, à la suite desquelles il
estime être dans le vrai en affirmant que un
kilowatt-heure équivaut, au point de vue pratique
de la dépense nécessaire, à un peu plus de 0,5 m*,
mais à un peu moins de 4 mètre cube de gaz.
Or, en Europe, les fournisseurs de courant font
payer le kilowatt-heure de 0,15 fr à 0,25 fr, ce
qui rend la cuisine électrique notablement plus
dispendieuse que la cuisine au gaz.
Par suite, il ne saurait être possible à l’électri-
cité de lutter contre le gaz pour le chauffage domes-
tique qu'à la condition d’abaisser le prix du
kilowatt-heure entre 0,08 fr et 0,15 fr. C’est là une
nécessité inéluctable, et les industriels, propriétaires
ou exploitants de stations aussi bien que fabricants
d'appareils de chauffage, doivent s'en bien péné-
trer. Tant que ces prix ne seront pas atteints, le
chauffage domestique à l'électricité sera un luxe
véritable, ce qui revient à dire qu'il ne se vulgari-
sera pas.
A tous les points de vue cependant, il faudrait
souhaiter sa généralisation rapide. La cuisson
électrique offre sur la cuisson au gaz de tels avan-
tages qu’elle doit être considérée comme ayant un
COSMOS
523
avenir certain : sécurité contre l'incendie, propreté,
valeur hygiénique, rendement commercial élevé,
facilité de réglage, commodité, tout milite en sa,
faveur. Quelques boulangers l'ont appliquée à leurs
fours, et le pain qu’ils fabriquent est parfait; la.
marine de guerre, après en avoir doté ses cuirassés,.
vient de l’étendre à tous les navires de sa flotte
armée; ce sont là des expériences pratiques dont
la portée est concluante.
Par suite, on peut prédire que, le jour où son
adoption sera devenue économiquement possible,
elle sera sans retard réalisée partout. Les débouchés
actuels des usines productrices de courant s’en
trouveront grandis dans des proporlions insoup-
çonnées.
Il faut donc que l’abaissement à 0,08 fr environ
du ptix du kilowatt-heure soit étudié de façon très
sérieuse : l’utilisation rationnelle des innombrables.
chutes d’eau de notre territoire facilitera, dans un
avenir prochain, cette réforme industrielle vrai-
ment démocratique. En attendant, peut-être pour-
rait-on se contenter d'accorder au public le double
tarif, usité en Suède et en Suisse, où, pour éviter
que les charges maxima de l'énergie consommée
par la cuisine ne coïncident avec celles de la lu-
mière, les stations consentent presque partout un
prix réduit pour le courant fourni en dehors des
. heures d'éclairage. Cette mesure est, à coup sùr,
gênante pour les consommateurs, qui ne peuvent
pas préparer leur cuisine aux moments de leur
choix; elle est néanmoins préférable aux tarifs uni-
formes et rigides des stations françaises. Du reste,
elle est déjà adoptée depuis peu sur quelques-uns.
de nos réseaux dans les régions de houille blanche.
Mais elle ne saurait avoir qu'un caractère provi-
soire.
L’abaissement définitif du prix de vente du.
kilowatt-heure apparait, au contraire, comme une:
nécessité à laquelle les usines génératrices ne
peuvent pas se soustraire, si elles veulent lutter à.
armes égales contre les divers combustibles actuel
lement en usage. FRANCIS MARRE.
——_——_—_——————
Des moyens propres à assurer aux pommes de terre
une bonne conservation.
La conservation du premier de nos légumes, la
pomme de terre, le pain de certaines régions, ne
cesse de préoccuper les agronomes et les savants.
Si la plante a, en plein champ, ses ennemis,
insectes et champignons, sans compter les gelées;
-les tubercules, eux, ne sont pas à l’abri de toute
vicissitude, quand on les a entassés dans un local
où on les croit, trop souvent, en toute sécurité.
Or, il y a à craindre pour eux,]| outre le gel, la
germination et, ce qui est plus grave, la pourri-
ture.
La germination prématurée est surtout favorisée
par une douce température. La pourriture, elle,
est engendrée par des germes de microorganismes
divers qui sont comme sollicités par l'humidité et.
la chaleur. I] faut, également, compter avec cer-
tains insectes, tel ce minuscule papillon ou teigne
de la pomme de terre, dont la larve faisait tant.
524
parler d'elle, hier encore, par ses ravages sur le
littoral varois : il s'agit du PAtorimæa solanella.
On peut, il est vrai, combattre assez facilement ce
petit lépidoptére en traitant plusieurs fois de
suite les pommes de terre réunies dans un endroit
clos, avec du sulfure de carbone ou de l’oxyde de
carbone, corps qui, malheureusement, ne sont pas
sans danger pour les opérateurs, le premier don-
nant des vapeurs très inflammables, le second
étant un gaz très toxique.
Il est toujours préférable de prévenir le mal,
c'est-à-dire, en l'espèce, d’empècher l'insidieux
insecte de pondre sur les tubercules. Dans la
région d'Hyères, nous apprend M. le Dr Vidal, les
horticulteurs mettent en las les pommes de terre
immédiatement après l’arrachage, les recouvrent,
pendant la journée, d'une étoffe quelconque, puis,
le soir venu, les transportent dans un endroit frais
et obscur. D’autres se contentent, après les avoir
entassées au pied d'un arbre, de les ensevelir sous
une couche de sable ou d’algues marines. Cette
dernière couverture, dit l'auteur, agit-elle parce
qu'elle abrite complètement les tubercules, ou
est-ce son odeur qui écarte les papillons? Un ne
sait.
Mais l'aire d'action de ce nouveau fléau est assez
restreinte pour espérer qu'on en aura, sans donte,
bientôt raison. Il n'en est pas de mème des mala-
dies cryptogamiques et, en particulier, de celle
qui est occasionnée par le champignon PAyto-
phtora infestans ou mildiou de la pomme de terre,
malheureusement trop connu. Tout tubercule qui
provient d'un pied attaqué est presque irrémédia-
blement voué aux germes de la pourriture, impos-
sible, par conséquent, à conserver sain. Aussi con-
seille-t-on, avec juste raison, non seulement de
traiter convenablement aux bouillies cupriques
les champs attaqués, mais, en outre, de brùler sur
place les fanes et les tubercules atteints, que l'on
a generalement la fAcheuse habitude de laisser sur
le sol apres la récolte; de ne pas cultiver pendant
un certain temps les terrains infestés, ou, mieux,
de n'ensemencer que des sols neufs, ce qui ne
peut ètre qu'un cas particulier. Enfin, on ne doit
employer, comme semence, que des tubercules
sélectionnés, parfaitement sains, ne provenant pas
de champs où a sévi le Phytophtora, ou toute
autre maladie. Ce choix s'opère au moment mme
de la révolte, en mettant de colé les plus mürs,
de bonne grosseur moyenne.
Il est préférable de ne pas semer en mélange
des varièlés différentes comme époque de matu-
ritė, car il en est, parmi ces dernières, qui se con-
servent plus difficilement, telles la saucisse, la
rouye farineuse, etc. La récolte doit se faire
quand les fanes sont bien sèches, car les pommes
de terre incomplètement mures, trop aqueuses,
se rident ou pourrissent facilement. De mème, il
COSMOS
7 NOVEMBRE 41919
ne faut procéder à l’emmagasinage que lorsque les
tubercules sont secs, non mouillés par les pluies,
par exemple. Il faut toujours les laisser se res-
suyer, au besoin, sous un abri aéré, si le temps
n'est pas propice.
Il ne suffit pas, ensuite, de laisser la récolte
entassée dans un coin quelconque, une cave ou
autre local chaud, peu aéré, parfois humide et
malsain. Dans un tel milieu, les tubercules s’al-
tèrent, pourrissent ou germent prématurément.
Dans ce dernier état, ils « s’usent », s'épuisent, se
vident d'autant plus vite que les pousses sont plus
longues, et ils sont alors chargés d’un produit
toxique, la solanine. La fubérisation, le filage, la
filosité, sont caractérisés par des germes longs et
grèles.
Dans les ménages, où l’on n’a pas, généralement,
de grandes quantités de produits à conserver, on
peut mettre à contribution un procédé simple, qui
ne réclame qu'un peu de patience, et qui est,
parait-il, assez courant dans les fermes du Nord.
l! suffit, à l’aide d'un couteau ou d'un porte-plume
armé d'une plume retournée, d'enlever les yeux
du tubercule en les extirpant sur une épaisseur de
2 à 3 millimètres. Il est préférable de ne procéder
à cette opération que lorsque les germes sont très
apparents, ordinairement à l'approche du prin-
temps.
Mais, le plus souvent, on se contente d’égermer
à la main, de temps en temps, tous les mois, par
exemple, si la cave est chaude.
La méthode Schribaux permet de traiter une
grande quantité de produits à la fois. Mais elle
demande quelques précautions dans les manipula-
tions de l’acide sulfurique employé comme agent
actif, qui doit brùler les yeux, les germes. Il suflit
de laisser tremper les tubercules dix à douze heures
dans une solution à 1 à 2 pour 100 ď'’acide du com-
merce, marquant 66° B., contenue dans un récipient
en bois. On doit toujours verser les 1 à 2 litres de cor-
rosif dans les 100 litres d'eau, tout en agitant celle-ci,
et ne pas faire le contraire, sinon on s'exposerait
à des projections. Au prix de 0,30 fr le kilogramme
d'acide sulfurique, un hectolitre de solution à
1 pour 100 revient à 0,55 fr, et au double si elle
est à 2 pour 100.
Après le trempage des tubercules, on les lave à
l'eau, puis on les sèche. On les conserve ensuite dans
un endroit bien aéré, un grenier, par exemple.
On comprend aisément que le degré de sensibi-
lité des germes au regard de l'acide soit variable
avec leur état physiologique. Ils sont, par exemple,
plus fragiles quand ils commencent à végéter. Le
traitement sera donc plus efficace si on l'applique
au printemps plutôt qu’à la récolte. Il est presque -
superflu de dire qu'il importe de choisir, ici aussi,
des tubercules bien sains, de bonne garde, et préa-
lablement lavés. S'ils sont souillés de terre cal-
N° 145
caire, par exemple, celle-ci saturera une partie de
l'acide, abaïissant ainsi le degré de concentration
de la solution. Enfin, toutes les variétés ne sont
pas également sensibles. En un mot, il est bon,
surtout si l'on a à traiter une grande quantité, de
faire un essai préalable sur quelques tubercules,
et en employant trois solutions à 4 pour 400,
4,5 pour 100 et 2 pour 100. On les examine trois
jours après la sortie du bain, en les coupant sui-
vant les yeux. On voit si ces derniers sont mor-
tifés. On vérifie également si la peau n'est pas
altérée. On en déduit, alors, la solution qu'il faut
adopter.
On a cité un habile agriculteur qui, chaque
année, et depuis très longtemps, traile ainsi avec
succès 3 000 kilogrammes de pommes de terre
dès qu'elles commencent à germer. Il utilise,
comme matériel, de vieilles futailles en bois,
défoncées par un bout, et des corbeilles de 60 litres
environ, contenant des légumes. Ces corbeilles
peuvent être tenues dans la solution à l'aide de
perches passées dans l'anse ou, mieux, en s'aidant
d'une potence à poulie, qui facilite les manipula-
tions.
On a encore préconisé l'emploi de l’eau bouil-
lante, dans laquelle on laisse les tubercules une
à deux minutes, temps suffisant pour détruire les
germes, mais quil est bon de controler, au préa-
lable, sur quelques pommes de terre.
Les ménagères trouveront peut-être toutes ces
manipulations bien compliquées. Pour de petites
quantités, on a bien décrit des procédés de conser-
vation plus simples, mais moins sùrs. Par exemple,
les pommes de terre saines et bien sèches sont
mises dans une cuve, un tonneau, etc., en proje-
tant sur les couches de la cendre ou du sable bien
sec. Enfin, on couvre le tas avec de la menue
paille. On peut, d'ailleurs, utiliser aussi d'autres
matières mauvaises conductrices de la chaleur, ou
absorbant l'humidité, comme poussier de charbon
de bois, poussière de tourbe, paille sèche. On
accuse les balles de céréales de retenir trop d’eau
dans leur cavité. Quand on emploie un tonneau,
une bonne précaution, c'est de couler du plätre
sur le fond remis en place. Il importe beaucoup,
dans tous les cas, de ne mettre en réserve que des
tubercules bien secs et, mème, d’'absorber l'humidité
qui pourrait se condenser par un excipient appro-
prié. Ainsi, on peut les saupuudrer avec de la chaux
récemment éleinte. Il ne faut guère que 5 à 6 kilo-
grammes de cet ingrédient par 4 000 kilogrammes
de pommes de terre. On a proposé encore de sau-
poudrer avec de la fleur de soufre (1 kilogramme
par 1 000 kilogrammes) pour détruire les germes
de champignons et empêcher les cloportes de les
transporter.
Le procédé de conservation dans des matières
pulvérulentes n’est efficace que pour de petites
COSMOS
525
quantités. En effet, les pommes de terre, bien que
détachées de la plante-mère, ne conservent pas
moins un certain degré de vie ralentie : elles res-
pirent et transpirent, rejetant donc du gaz carbo-
nique, qui est toxique pour elles, et de la vapeur
d'eau, qui doivent être expulsés. Mais, précisé-
ment, quand les tubercules sont entassés en masse
et enfouis dans une matière isolante, l'air ne peut
circuler, et l'atmosphère ambiante se sature de
gaz carbonique stagnant, d'ailleurs plus lourd que ce
dernier. Il faut remarquer, aussi, que les phénomènes
qui accompagnent la vie physiologique des tissus
se traduisent par une élévation de température
qui favorise les germes d’altération et la végétation
des yeux. M. Parisot a montré que le gaz carbo-
nique solubilise les matériaux utiles à cette végé-
lation, et d'autant plus que les pousses sont plus
longues.
En résumé, il faut s'attacher à faire des tas peu
volumineux, dont l'épaisseur ne devrait pas dé-
passer, si possible, 70 à 80 centimètres, et en res-
tant, au besoin, au-dessus de 7000 kilogrammes
pour éviter les frais, en un lieu sain, non humide,
bien aéré, à l'abri de la gelċe, et à favoriser, par
un dispositif approprié, la libre circulation des
gaz, sans excès, car il y aurait perte trop marquée
d'eau des tubercules, qui se rideraient. Le local
qui convient le mieux, c'est le magasin; mais les
celliers, les caves saines peuvent ètre utilisées
aussi, car ils sont mieux à l'abri des variations de
température, qui exposent les tubercules aux
gelées et aux condensations de la vapeur d'eau.
On évitera à ces derniers le contact direct avec
les parois, en tapissant les murs de planches ou
de paille, en disposant sur le sol des fagots ou un
plancher à claire-voie. En outre, on placera dans
la masse mème du tas des tuyaux en poterie ou de
simples fagots qui feront oflice de cheminées
d'aération. La chaux, le soufre, dont nous avons
parlé plus haut, sont avantageusement employés
ici aussi. Les petits tas doivent être recherchés,
avant tout, car ils permettent de brasser souvent
la masse, par exemple toutes les cinq semaines et
plus souvent encore à la fin de l'hiver et au prin-
temps, alors qu'à l'approche du renouveau le tra-
vail physiologique des cellules s'accélère, que
deviennent maximum, par conséquent, la produc-
tion du gaz carbonique et celle de la vapeur d'eau.
D'ailleurs, pour entraver cette activité naturelle
des tissus, il serait très utile d'entretenir dans la
masse des tas volumineux une assez basse tempé-
ture, + 7° à + 8", par exemple. Mais le brassage
a l'avantage de briser les germes longs. On peut
encore y procéder à la main, quelquefois, mème, en
passant au four. Dans tous les cas, il faut enlever
les tubercules qui auraient pu ètre blessés dans le
brassage.
On a signalé l'appareil Holtz pour la ventilation
526
forcée avec de l'air refroidi, au besoin, ou en met-
tant à profit, au printemps et à l'automne, les
heures matinales. Le dispositif réclame, naturelle-
ment, une force motrice, mais il n’exige pas la
présence de tuyaux au sein du tas pour le ventiler.
Une heure de travail suffirait pour préserver, pen-
dant une semaine, le tas de la pourriture. M. Holtz
{propriétaire à Bruchau, cercle de Tuchel, en
Prusse occidentale) a, dit-on, installé son appareil
dans la cave de pommes de terre de la distillerie
coopérative de Frankenhagen, près Konitz. « Dans
Je but de conserver les pommes de terre jusqu'à
l'été, dit l’auteur, on construit de grandes sécheries
qui coûtent de 30000 à 70 000 marks. Or, mes
appareils ne coùtent que quelques centaines de
marks, et ils fournissent un meilleur résultat, puis-
qu'ils conservent les pommes de terre intactes. »
On garde encore les pommes de terre comme on
le fait des betteraves, c'est-à-dire en silos, mais moins
volumineux. Ils ont, d'ordinaire, 1,5 m de largeur
à la base et 4 mètre de hauteur, pour la plus grande
partie dans le sol. On les établit quelquefois rez de
terre, en les entourant d'un fossé. Ici aussi, lors de
l'établissement du tas et avant de couvrir de paille,
buis de terre tassée, on ménagera des canaux
COSMOS
7 NOVEMBRE 19412
d'air, des cheminées. Si en silo les pertes de poids
brut sont moins élevées qu'en cave, celles de
matière sèche et de fécule sont, par contre, très
marquées. En outre, la saveur des tubercules est
moins appréciée, à la fois plus aqueuse et plus
sucrée. Ce procédé est donc le dernier à proposer,
sans compter qu'il rend la surveillance très difficile.
Il faut, en effet, examiner de temps en temps
les pommes de terre, et non seulement les couches
supérieures, mais surtout le milieu du tas, là où
s’amorce généralement la pourriture, pour gagner
de proche en proche. S'ils’agit d'un silo, on vérifiera
les points d’affaissement qui pourraient se produire.
Disons, en terminant, que les tubercules gelés
ne doivent pas être considérés comme perdus.
Avant le dégel, on les fait tremper dans de leau
dégourdie, le temps strictement nécessaire pour
les dégeler. S'ils restaient plus longtemps, ils pour-
raient devenir acides et se corrompre. A leur
sortie de l’eau, ils sont coupés en tranches, échau-
dés par les procédés ordinaires du blanchiment,
puis desséchés au four ou dans une étuve et con-
servés ainsi pour être utilisés après avoir été
trempés et cuits comme tout autre légume des-
séché. ROLET.
R propos des récentes expériences de M. Raoul Pictet.
M. B. Latour a résumé récemment (1) pour les
lecteurs du Cosmos les expériences très intéressantes
de M. Raoul Pictet relativement à l'influence des
très basses températures sur les combinaisons
chimiques et sur les êtres vivants. M. Latour a fait
justementremarquer l'absurdité et arbitraire des
conséquences que M. Pictet a prétendu en tirer au
point de vue philosophique. On se rappelle que le
savant de Berlin prétendait que les êtres soumis à
ces tres basses températures, après être morts réel-
lement, ressusritaient quand la température remon-
tait, « la vie étant une propriété générale de la
matière qui se manifeste spontanément ausssitòt
quun tissu organisé, quoique tué par le froid,
serait mis dans des conditions convenables de tem-
«pérature ».
Cette hypothèse, dont M. Latour a bien fait res-
sortir le caractère arbitraire, se rattache à la
-théorie que nous avons discutée ici même à propos
des idées de M. Loeb, à savoir que la vie serait
due uniquement aux forces physico-chimiques de la
-matière.
Mais il nous semble que les expériences de
M. Raoul Pictet, loin de justifier cette théorie,
ajoutent, au contraire, une réfutation nouvelle et
“vraiment expérimentale à celles que nous avons
déjà données.
(1) Voir le Cosmos, n° 1442.
M. Pictet a démontré, en effet, que les combi-
naisons chimiques sont absolument arrêtées au-
dessous d'une température de — 425°. Certains
êtres soumis à celte température sont atleints
d'une sorte de léthargie qui disparait aussitot que la
température est redevenue normale.
La vie a donc persisté en eux, alors que les phé-
nomènes physico-chimiques avaient entièrement
cessé. La conséquence logique de ce fait très impor-
tant, c’est que la vie n'est pas de nature physico-
chimique, sans cela elle eùt disparu avec les phé-
nomènes de cet ordre, car la vie une fois vraiment
disparue ne reparait jamais.
La vie, disons-nous, une fois disparue ne revient
pas. Cela est un fait d'expérience constante et uni-
verselle sur lequel il pourrait paraître oiseux
d'insister. Mais puisque M. Pictet semble le mettre
en doute et affirme que la vie renait dans certaines
circonstances, il n’est pas inutile de montrer qu'il
n'en est rien. Et ce sont les propres expériences de
M. Pictet qui vont encore nous le démontrer.
Car si la vie est une propriété universelle de la
matière qui se manifeste spontanément aussitôt
qu'un tissu organisé est dans des conditions conve-
nables de température, comment expliquer qu'il
y ait pour chaque espèce d'êtres une limite de
température, au-dessous de laquelle la vie disparait
définitivement sans qu'on puisse jamais la faire
N° 1450
réapparaitre. Et remarquons que cette limite ne
coincide nullement avec la cessation ahsolue des
phénomènes chimiques, ce qui est encore une
preuve que les deux ordres de phénomènes chimique
et biologique ne sont pas identiques.
Ainsi, tandis que les infusoires et les rotifères
résistent à des températures de — 80° à — 90°, que
les grenouilles subissent un refroidissement et une
congélation de — 28° sans périr, les œufs d'oiseaux,
ceux de fourmis sont tous tués à des températures
variant de 0° à — 5°, températures auxquelles pour-
tant les phénomènes physico-chimiques ne sont
nullement arrêtés,
S'il suffisait qu'un assemblage de cellules orga-
nisées soit mis dans des conditions convenables de
température pour que la vie s'y manifeste sponta-
nément, comment se fait-il qu'un être préalable-
ment vivant, congelé au-dessous d’une certaine
limite, ne puisse jamais plus revivre?
Voici, par exemple, des poissons, assemblage de
cellules organisées, que l’on soumet à des tempé-
ratures de — 15°; leur vie semble disparaitre; elle
subsiste cependant d’une façon latente, puisque,
ramenés à la température normale, ils reprennent
le cours de leur vie, tandis que si l’on abaisse la
température jusqu’à — 20°, la vie ne réapparait
jamais. Si l'hypothèse de M. Pictet était exacte,
la vie devrait se manifester à nouveau, quelle que
soit la température à laquelle ont été soumises ces
cellules organisées, ausssi bien à — 150° qu'à — 20°
ou qu'à 0°.
On se souvient des théories audacieuses dont
COSMOS
927
M. Loeb s'est fait récemment l'écho et que nous
avons discutées ici même. M. Loeb prétend — avec
l'école matérialiste dont il est le franc adepte —
que la science arrivera un jour à faire la synthèse
d'un être vivant et à créer la vie. Les expériences
de M. Pictet nous permettent de juger la valeur
de cette prétention. Car, enfin, cette synthèse d’un.
être vivant — qui est le premier point à obtenir, —
elle se trouve réalisée dans ces expériences.
Voici des œufs, des infusoires qui ont été refroidis
à des températures de — 100° à — 15500 et desquels la
vie s’est bien définitivement retirée; leur organisme
subsiste intégralement; il n'y a pas de différence
entre ce qu’il était à — 60°, par exemple, et ce qu'il
est à — 100°. Le savant a donc sous la main un orga-
nisme complet, bien oufillé pour la vie, qui vivait
il y a quelques minutes à peine. Et cependant, st
l'on fait remonter la température, la vie ne repa-
rait plus dans cet organisme.
Qu'est-ce à dire? sinon que de créer un orga-
nisme ne suffit pas pour créer la vie; que celle-ci
ne résulte pas d’un assemblage de cellules orga-
nisées mises dans des conditions matérielles con-
venables, mais qu’il faut en outre quelque chose
de spécial, ce que nous appelons un principe, pour
les animer?
Et ainsi ressort une fois de plus cette conclusion
qui est d'ordre rigoureusement scientifique — on
peut même dire d'ordre expérimental, — à savoir
que la vie n’est pas de nature matérielle et ne
dépend pas uniquement des lois physico-chimiques
de la matière. PIERRE COURBET.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 28 octobre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Observations du Soleil faites à Observa-
toire de Lyon pendant le premier trimestre
de 1912. — M. Guriravue donne, comme de coutume,
les tableaux de ces observations qui portent sur
soixante jours pour ce trimestre.
Il résulte de leur interprétation que le phénomène
des taches passe actuellement par un minimum d'ac-
tivité. La surface totale des groupes de facules est peu
différente de celle notée précédemment, malgré que
leur nombre soit plus élevé d’un tiers.
Principe d’une nouvelle méthode de mesure
de la vitesse de la lumière. — Cette méthode
dérive du procédé classique du miroir tournant où
l'on évalue, comme on sait, le temps que met la
lumière à parcourir une distance connue par celui
que met à tourner d’un angle mesuré un miroir dont
la vitesse angulaire est connue.
Pour éviter la mesure délicate de cette vitesse angu-
laire, M. Cu. FéRy a imaginé un dispositif où le miroir
concave est fixé sur l'une des branches d'un diapason.
Sur les différents modes de décomposition
photochimique du glucose et du galactose
suivant la longueur d'onde des radiations.
— MM. Daxiez BEnTuELOT et HENRY GAUDECHON ont pré-
cédemment indiqué que, dans les décomposilions par
la lumière, la fréquence vibratoire des radiations joue
un rôle parallèle à celui de la température dans les
décompositions par la chaleur. Les rayons visibles et
l'ultra-violet initial (0,4 & à 0,3 u) agissent comme une
élévation de température modérée qui n'attaque que
les corps les plus altérables; J'ultra-violet moyen
(0,3 p à 0,2 p) produit, comme la température du
rouge, les décompositions pyrogénées el les combus-
tions totales des matières organiques; l’ultra-violet
extrème enfin (0,2 w à 0,1 u) dissocie les composés les
plus stables, tels que l’eau ou l'anhydride carbonique,
comme font les très hautes températures.
De là ressort l'utilité de procéder méthodiquement:
avec des radiations de fréquences croissantes et de
déterminer pour chaque réaction les premières radia-
tions elficaces.
528
Les auteurs poursuivent cette étude pour les
sucres. La décomposition du glucose et des sucres
aldéhydiques commence avec l’ultra-violet moyen
entre 0,30 u et 0,15 p, la fonction aldéhyde COH est
seule gazéifiée, et la pheotolyse donne exactement
2 volumes d'oxyde de carbone pour 1 volume
d'hydrogène. Puis, sous l’action de vibrations plus
rapides, les fonctions alcooliques sont entamées, la
proportion d'hydrogène augmente et finit par dominer
dans le mélange.
Influence de la lumière sur la transpiration
des feuilles vertes et des feuilles sans chlo-
rophylle. — Les études de M. LECLERC DU SABLoN
l'ont conduit à constater que l'influence des radiations
solaires sur la transpiration est du mème ordre pour
des feuilles qui ont de la chlorophylle et pour celles
qui n’en ont pas. On ne peut donc pas dire que l’aug-
mentation de la transpiration au soleil est due essen-
ticllement à l'absorption des radiations par la chloro-
phylile.
La cause principale de l'influence de la lumière sur
la transpiration existe aussi bien dans les feuilles
blanches que dans les feuilles vertes. On doit la cher-
cher dans les variations de perméabilité de la mem-
brane protoplasmique.
Les expériences faites à la lumière diffuse et à l’obs-
curité concordent avec celles qui ont eu lieu au soleil
et à l'ombre. La transpiration est plus forte à la
lumière diffuse qu’à l'obscurité, aussi bien pour les
feuilles blanches que pour les feuilles vertes.
L'intensité de la transpiration des plantes est donc
surtout réglée par le degré de perméabilité des mem-
branes protoplasmiques.
Nouvelle lampe à rayonnement ultra-violet
très puissant et son utilisation à la stérilisa-
tion de grandes quantités d’eau. Note de
MM. Victor HENRI, ANDRE ITELBRONNER et Max pe Reck-
LINGHAUSEN. — Les auteurs ont constitué une lampe.
formée d'un tube en U en quartz dont les branches se
touchent presque, et qui fonctionne sur un réseau de
500 volts, en absorbant 397 volts et 3 ampères. Bien
que ne consommant qu'une puissance # à 5 fois plus
grande, la nouvelle lampe présente un rayonnement
ultra-violet 50 à 60 fois plus intense qu’une lampe à
110 volts brülant au régime de 75 volts et 3,+ampères.
Deux lampes de ce genre, en service dans une instal-
lation urbaine de stérilisation de l’eau, n'avaient
encore rien perdu de leur puissance de rayonnement
après douze cents heures de fonctionnement
Recherches sur l'urée. — L'urée est-elle pro-
duite uniquement par les animaux? Les investigations
que M. R. Fosse poursuit depuis plusieurs années
l'ont amené à reconnaitre qu'elle existe au moins en
minime quantité dans une foule de végétaux, et il
émet ces conclusions:
L'urée est fréqueniment contenue dans les végétaux
supérieurs, généralement en très faible proportion. Sa
présence peut être caractérisée dans les plantes dont
Jes noms suivent :
Cichorium endiria (endive et chicorée friste): Cu-
curbita martmna (potiron); Cucumis melo (meloni;
Brassica oleracea (choux-Ileurs); Brassica napus
COSMOS
7 NOVEMBRE 1912
(navet); Spinacia oleracea (épinard); Daucus carotta
(carotte); Solanum tuberosum (pomme de terre).
Il serait prématuré d’en conclure que l'urée doit
être considérée comme un produit physiologique de
la cellule végétale.
Il est possible que son origine, beaucoup plus loin-
taine, remonte, soit partiellement, soit en totalité,
à la terre végétale, où l’urée existe etse forme d'après
les nombreuses expériences de l’auteur.
Streptocoque sensibilisé et sarcome. — Un
fait connu, c'est l’antagonisme du streptocoque de
l'érysipèle humain à l'égard des tumeurs malignes
et, en particulier, les sarcomes, quel que soit le siège
des néoplasmes ou cancers.
M. RosenT Ooier a réussi à rendre le streptocoque
inoffensif pour l'organisme, tout en lui conservant ses
propriétés antagonistes vis-à-vis de l'élément malin.
Le premier point est réalisé par la sensibilisation
des streptocoques dans le sérum antistreptococcique,
selon la méthode de Besredka.
La sensibilisation, et c'est là le point important, ne
lui fait pas perdre ses propriétés antagonistes vis-à-vis
de la cellule maligne sur laquelle le virus exerce une
action nocive, quel que scit le point de l'organisme où
on l'injecte.
Acide dilactylique racémique et acide dilactylique
inactif. Note de M. E. JuncrLEIscH. — Sur la mutation
gemmaire culturale de Solanum immite Dunal. Note
de M. Évouarv HecxeL. L'auteur donne des détails sur
ses nouvelles expériences pour arriver à la mutation
de ce tubercule; par le fait, le Solanum Jamesii Torray,
cultivé depuis trois ans, n'a pas encore donné
mutation de ses tubercules, sinon une transformation
de la couleur. — Éléments provisoires de la comète
1912 b. Note de M. A. ScHauMasse. — Identité probable
de la nouvelle comète 1912 à avec la comète périodique
Tuttle. Note de M. G. Fayer. — Observations de la
comète 1912 a (Gale), faites à l'Observatoire de Mar-
seille. Note de M. BonnELLy. — Sur certains systèmes
conjugués. Note de M. À. PEror. — Remarques sur
certains théorèmes d'existence. Note de M. Maurice
GEvREY. — Le théorème de M. Picard et les fonctions
multiformes. Note de M. Geonces Rémorxpos. — Écla-
teur électrométrique constitué par deux sphères con-
ductrices. Calcul des charges, des potentiels, de l’action
mutuelle de disruption. Note de MM. A. Guizcer et
M. AUBEnT. — Cryoscopie dans le sulfate de soude
à 10 molécules d’eau. MM. A, Bouraric et C. LEENHARDT.
— Hydrolyse photochimique des solutions trèsétendues
d'acides chloroplatiniques. Note de MM. Pare Jos et
Mancez Bozz. — Sur l'écrouissage. Note de M. HaxrioT;
l’auteur donne une nouvelle définition de l’écrouis-
sage el propose de l’apprécier par un nombre, rapport
des duretés du métal considéré et de ce même métal
complètement recuit. — Étude sur les sulfites doubles
alcalins et de mercure. Note de M. H. Baubienr. —
Action de l’eau oxygénée sur le trithiényle. Note de
M. Maurice Laxray. — Action de l'acide formique sur
les triarylearbinols. Note de MM. A. Guyor et A. KovAcHE.
— Sur quelques nouveaux dérivés de la phénylisoxa-
zolone. Note de M. Axnré Meyer. — Recherches sur les
méthodes de dosage des saponines. Note de M'™ MArie
Konsakopr. — Calcul du débit des pelites rigoles et des
N° 1450
caniveaux. Note de M. RiIXGELMANN. — Synthèses de glu-
cosides d’alcools à l’aide de l’émulsine. Isopropygluco-
side 8 etisoamylglucoside 8. Note de MM. Eu. Borrque-
LoT et M. BaioEez. — Le rôle de la caféine dans l'action
diurétique du café. Note de MM. M. Tirrexeac et H. Bus-
quer ; les auteurs établissent que la décaféination fait
perdre au café la majeure partie de ses etlets sur la
sécrétion rénale, et la caféine est l'agent, sinon exclusif,
tout au moins principal de l’action diurétique du café.
— Sur la nutrition minérale du bacille tuberculeux.
Note de M. B. Sautox. — Sur quelques points de l'ana-
tomie des organes génitaux mâles des Lémuriens.
Note de M. Max KoLumanx.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES!)
Congrès de Nimes.
Météorologie et Physique du globe.
Section présidée par M. le chanoine V. Raczor,
directeur de l'Observatoire de Langres.
M. E. DuRAND-GRÉVILLE présentetroiscommunicalions:
1t La « Loi des grains » complétée par la « Loi des
crochets de grains ». = Ce nom de crochet de grain est
le véritable nom de ce qu'on appelle souvent nez
d'orage ou crochet d'orage. W\ peut affecter les formes
les plus variées : sa forme dépend, d'ailleurs, unique-
ment de l'angle que fait le ruban de grain avec la
trajectoire du centre de la dépression dont il fait
partie. Tout crochet de grain est marqué dans le
barogramme par une déviation qui peut, même dans
certains cas, n'être qu’une cessation brusque de la
baisse, ou, mieux encore, une simple diminution
brusque de la rapidité de la baisse; tous les points du
crochet se trouvent toujours au-dessus des points
correspondants du barogramme régulier qui aurait
été tracé si la dépression n'avait pas eu de ruban de
grain.
% Les rubans de grains et l'aviation. — I faut, dans
l'intérêt des aviateurs, arriver à établir un service
d'annonce rapide des grains. En attendant, voici les
précautions à prendre : quand l'aviateur voit paraître
à l'horizon la masse nuageuse le plus souvent conco-
mitante au grain, ou quand il aperçoit 'au loin la
poussière du sol soulevée par le vent de grain, il doit :
1° s'élever à quelques centaines de mètres pour éviter
les remous; 2? manæœuvrer pour se diriger exactement
contre le vent de grain (ordinairement, dans nos
régions, le vent de grain se déplace vers l'E. ou
l'E.-N.-E.). Le vent redevenant ensuite modéré, il
reprendra sa route. Ainsi sera évité le danger d'être
culbuté par le vent violent pris obliquement.
3° Mise au point de quelques objections à la théorie
des grains et de la grèle de M. Durand-Gréville.
M. GABRIEL Guicperr (Caen). — De la prévision des
orages. La conclusion de ce travail est que toute pré-
vision d'orage doit se baser sur l'examen simultané
de la situation barométrique et des successions nua-
geuses, Plus que les dépressions, les nuages indiquent
(1) Suite, voir p. 500.
COSMOS
529
pour le lendemain la direction et la vi'esse de l’orage
attendu qui suit une direction rectiligne ou du moins
une courbe de très grand rayon, vingt-quatre ou qua-
rante-huit heures d'avance. L’orage, le cirro-nimbus,
n'existe donc que dans les hautes régions, et dès lors
il ne peut y avoir aucun moyen d'action ni sur leur
trajectoire ni sur leurs effets.
La descente progressive des nuages supérieurs est
peut-être une cause de destruction des orages.
M. le D' E.-J. Marovès (Toulouse). Opinions sur l'ori-
gine du magnétisme terrestre. — L'auteur fait l'his-
torique de la question depuis 1660, où Gilbert avanca
que la Terre devait ètre considérée comme un aimant
puissant. L'auteur admet que chacune des diverses
théories énoncées parait contenir une part de vérité
et qu'on devrait admettre que le magnétisme terrestre
résulte de trois phénomènes principaux que l'on
pourrait désigner, suivant leur localisation : 1° dans
la lilosphère :2° dans l'atmosphère ; 3° dans le noyau
central. Il recherche ensuite d’où viendrait le champ
magnétique inducteur. Il rappelle à ce sujet la théorie
de M. Bigelow, l'argument qui lui est contraire de
lord Kelvin. Suit une étude des orages magnétiques.
Les variations du champ magnétique inducteur et les
ébranlements électro-magnétiques seraient produits
par une cause unique, et ces deux etlets d’une même
cause nous arriveraient simultanément du Soleil,
avec la vitesse de la lumière, pour modifier les cou-
rants électriques normaux de notre atmosphère et du
noyau central de notre sphère, modifications que nous
percevrions sous forme de perturbations et d'orages
magnétiques.
Recherches sur les causes des perturbations de latino-
sphère. M. ALBERT Novos (Bordeaux), — Ces recherches
ont été faites en s'aidant des documents suivants :
t° Les cartes publiées par le ministère de l'Agricul-
ture des États-Unis d'Amérique: % l'état de la sur-
face solaire d’après les relevés mensuels de l'Obser-
vatoire de Cartuja; 3° les positions planétaires par
rapport au Soleil d'après des relevés en collaboration
avec M. de Cointeville, d’après les tables du Bureau
des Longitudes; + les positions de notre satellite
d'aprés les annuaires astronomiques; à les relevés
de l’état général de l’atmosphère, particulièrement en
Europe. Etude qui porte sur les trois années 1909,
1910, 1911, proches du minimum solaire actuel 1911-
1912.
M. Raphaez Dusois (Lyon) présente une Vote pour
servir à l'étude du méranisne de la formation de la
gréle, dans laquelle il attire l'attention des météoro-
logistes sur le fait que chaque grèlon contiendrait, ainsi
qu'il l'a constaté à laide da microscope, des pous-
sivres. Ce fait, d'après un certain nombre de metċoro-
logistes et particulièrement selon l'opinion du D' Vidal
(d'Hyères), pourrait ouvrir une voie nouvelle de
recherches dans le domaine sì peu connu encore des
orages de grèle.
Des orages en général. Le D'E. Vivar (Hyères) pré-
sente sur ce sujet un important mémoire dans lequel
il étudie : la genèse des orages, les tourbillons (pro-
duction de la gréle}), la direction des orages. Sa con-
clusion est qu'il faut : 1° que l’État favorise non
530
seulement les divers procédés ayant donné depuis
plusieurs années des résultats favorables dans la lutte
contre la grêle, mais encore celui proposé par M. de
Beauchamp; 2° que la question de la lutte contre la
.grèle soit reportée au prochain Congrès, dans lequel
M. Vidal compte s'occuper des orages de grele en
particulier.
MM. L. Povez et le professeur ALserTt TurParn (Poi-
tiers). Observations, enregistrements et prévisions
d'orages faits au poste de Paris-la-Nation (rue de
Lagny) de juillet 1911 à juillet 1912. — L'emploi
d'appareils d'enregistrement et cohéreur à aiguilles a
pu éviter au parc paragrèle de Montreuil la dépense
d'un tir inutile à maintes reprises, soit environ
200 francs chaque fois. Les enregistrements de cette
station constituent de plus des documents météoro-
logiques de grande valeur. Les indications combinées
qu’elle donne permettent également parfois de prévoir
vingt-quatre heures à l'avance des temps orageux,
comme cela est arrivé pour la prévision du 3 juillet.
Coups de foudre et mise à terre. M. ALBERT TURPAIN.
— Pour que l'effet des paratonnerres soit efficace,
‘il résulte de ce mémoire qu'il est nécessaire : 1° que
le conducteur vertical soit exactement rectiligne, pre-
nant terre au point même qui le projette sur le sol;
V que la réduction soit égale au minimum de la self-
induction.
COSMOS
7 NOVEMBRE 41912
Atertissements météorologiques agricoles donnés
par l'Observatoire de Perpignan au cours de 1913 et
leur opportunité suivant les conditions de milieu.
M. O. MENGeL.
M. le chanoine V. Raccor : 4° Vague de froid du
2 au 6 février 1912 sur le plateau de Langres. —
Il ressort de son diagramme que les brusques et forts
refroidissements, l’hiver, sont plutôt l'effet des dépres-
sions que du vent et de la nébulosité.
2° Anomalies de la direction du vent de janvier 1911
a mars 1912. — Elles ont consisté en ce que, de
janvier jusqu'à septembre 1914, les courants polaires
avaient sensiblement prédominé, mais depuis sep-
tembre 1911 jusqu’à mars 1912, la prédominance est
revenue aux équatoriaux, au point non seulement
de rétablir l’équilibre en leur faveur, mais de leur
donner mème une prépondérance de vingt-trois jours.
3° Prévision du temps à longue échéance de juin 1911
a mai 1912. — Deux méthodes ont permis toutes
les prévisions, dont une ‘pour les trimestres. La pre-
mière méthode n’a eu que des succès pour le baro-
mètre et le thermomètre, tandis que la deuxième n’a
eu que des échecs, et pourquoi? À raison de la pré-
pondérance, cette année, de la loi de période sur celle
d'équilibre. Quant à la pluie, il n’y a eu que des
échecs, qui portent sur les deux méthodes.
(A suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
Conférences sur quelques thèmes choisis de
la chimie physique, pure et appliquée, par
SVANTE ARRHÉNIUS, directeur de l'Institut Nobel
scientifique à Stockholm. In-8° de 112 pages,
avec figures (3 fr). Librairie scientifique A. Her-
mann et fils, 6, rue de la Sorbonne, Paris, 1912.
Le savant suédois a donné ces conférences à
l'Université de Paris, du 6 au 13 murs 1911. Elles
ont trait aux objets suivants :
4° La théorie moléculaire. L'auteur constate
qu'elle a triomphé aujourd’hui des attaques des
énergélistes, tel le chimiste Ostwald, qui concède
que la matière n'est pas continue, mais divisée en
particules distinctes, qui ne sont autres que les
molécules de la chimie; il loue hautement la va-
leur ct l'élégance du travail de M. J. Perrin, sur
la détermination du nombre de particules conte-
nues dans une molécule-gramme;
2° Les suspensions et les phénomènes d’absorp-
tion. Il montre les rapports de continuité qui
existent entre les solutions proprement dites et les
suspensions colloïdales;
30 L'énergie libre et la mesure de l'affinité
chimique;
+ Les atmosphères des planètes ;
9" Les conditions physiques de la planète Mars.
Arrhénius estime très peu probable que la planète
soit susceptible de porter quelque végétation. La
température moyenne y serait d'environ — 28° C.,
la sécheresse extrème, le climat désertique ; les
nuages qui cachent parfois une partie de la surface
du sol martien seraient dus à la poussière fine
soulevée par le vent. D’auteur estime que le pro-
blème martien doit être résolu en se servant le plus
possible des analogies terrestres. Les « canaux »
de Mars sont assimilables à telles lignes de brisure
de l'écorce terrestre reconnues par les géologues
en Bohème, en Calabre, dans l'Amérique du Nord
et du Sud.
Encyclopédie Roret. — Librairie Mulo, 12, rue
Hautefeuille.
Conducteur de chaudières à vapeur, par P. BLa-
CARNOUX, ingénieur A. M. (3 fr).
Les nouvelles chaudières, munies de systèmes
tubulaires compliqués de surchauffeurs, etc., de-
mandent à ceux qui les conduisent un peu plus de
science que celle qui suffisait à leurs prédécesseurs.
Dans ce petit ouvrage, écrit pour les ouvriers,
M. Blancarnoux leur apprend une foule de choses
qu'ils devraient tous connaitre. Son livre parle
successivement de la combustion et de la vapori-
sation, des chaudières et de leurs accessoires: enfin,
de leur conduite et de leur entretien.
N° 1450
L'ouvrage se termine par une longue liste des
accidents causés par les générateurs, véritable
leçon de choses qui montre ce qu’il faut faire et
ce qu’il faut éviter pour échapper aux catastrophes.
Nouveau manuel complet du jeu de cartes, par
E. Lones, receveur des postes en retraite (3,50 fr).
Il parait que l'on joue aux cartes plus que jamais;
nous nous inclinons devant cette asserlion, quoique
nous soyons loin de l'avoir constatée autour de
nous.
Au surplus, il ne serait pas étonnant que cette
passion se soit développée, si nous en jugeons par
la liste formidable de jeux divers que M. Lones
nous révèle. Nous ne savons où l’on pourrait trou-
ver ailleurs des règles de jeux si nombreuses et si
variées. On les a souvent données pour les jeux
principaux : écarté, whist, bridge, piquet, etc., etc.,
mais où trouver celles de la sizette, de la tritride,
et de vingt autres? M. Lones a comblé cette lacune
pour les amateurs de ce genre de curiosités, mais
il a fait plus; non seulement il expose les règles
des jeux, mais aussi la facon de les utiliser, et leur
philosophie.
Manuel pratique de chauffage central, par
L. PREISNER, ingénieur. Un vol. in-8° de 46 pages
(broché, 1,75). Librairie Desforges, 29, quai des
Grands-Augustins, Paris.
Nos ancêtres ne connaissaient, pour se chauffer
en hiver, que les cheminées, qui consomment énor-
mément sans donner de chaleur; les poêles, et
surtout les poêles mobiles, sont plus économiques,
mais donnent des craintes permanentes d’asphyxie.
Le seul mode pratique de chauffage est le chauffage
central, qui peut se placer indifféremment dans les
bâtiments nouveaux et dans les anciennes con-
structions.
La brochure de l’auteur a pour but de mettre au
courant de la question un grand nombre de per-
sonnes qui ignorent tout du chauffage central. Ces
quelques pages leur montreront {ous les avantages
de ce système en même temps que sa simplicité et
son économie.
L'auteur décrit une installation de chauffage par
la vapeur à basse pression, une autre par l'eau
chaude, montre dans quel cas l’une est préférable
à l’autre, indique les calculs nécessaires pour con-
naitre d'avance l'importance de l'installation à
faire et donne des conseils pour la bonne marche
et l'entretien des appareils.
Nos mitrailleuses, ce qu’elles sont, ce qu'il
faut en attendre, par le L' DuPsyré. Un vol.
COSMOS
531
in-8° de 98 pages, avec gravures (2 fr). Librairie
Berger-Levrault, 5, rue des Beaux-Arts, Paris.
La mitrailleuse apparait pour la première fois
sur les champs de bataille pendant la guerre de
Sécession. En 1870, la France possédait des mi-
trailleuses qui, mal connues des servants et des
officiers, ne donnèrent pas de bons résultats. Depuis
cetle époque, diverses campagnes, et surtout la
guerre russo-japonaise, ont montré toute la valeur
de cet engin meurtrier, appelé par les Russes
« l'arrosoir du diable ».
Comme toutes les armées européennes. l’armée
française est dotée d’une mitrailleuse. Par ses qua-
lités, celle-ci peut ètre comparée avec avantage à
celles des autres puissances. L'effet que peut produire
cet engin meurtrier est considérable, à la condition
qu'il soit entre les mains d'hommes très exercés et
d'officiers spécialement aptes à les commander.
Le lieutenant Dupeyÿré à voulu donner, dans cet
ouvrage très intéressant, une idée précise de lor-
ganisalion des mitrailleuses en France : répartition
entre les différentes armes, organisation des sec-
tions, approvisionnement et matériel affecté à
chaque section; puis il étudie les conditions d’uti-
lisation des engins en tempsde guerre, soit à l’avant-
garde, soit pour soutenir l'infanterie ou la cava-
lerie, dans l'offensive et dans la défensive. Des
exemples tirésde la guerre russo-japonaise montrent
éloquemment la puissance meurtrière de cette arme
et le rôle si considérable qu’elle sera appelée à
jouer dans la prochaine guerre.
La puissance navale nécessaire, par le contre-
amiral Darrieus. Une brochure de 62 pages
(0,25 fr). Librairie Bernard Grasset, 61, rue des
Saints-Pères.
Par le développement de ses côtes, la France
doit avoir une marine militaire puissante: une
armée très forte qui ne serait pas soutenue par une
flotte nombreuse et entrainée serait pratiquement
insuffisante pour assurer la sécurité de notre
pays.
En effet, sans marine militaire, nous assisterions
en temps de guerre à la destruction de nos navires
de commerce, chargés de nous approvisionner, au
débarquement des troupes ennemies sur nos côtes
et au bombardement de nos ports, à l'impossibi-
lité de transporter notre armée d'Afrique.
La puissance navale n’est pas un luxe pour la
France, c'est une nécessité; cette vérité, longtemps
méconnue, ne semble pas encore admise actuelle-
ment. Souhaitons que le cri d'alarme de amiral
Darriens soil enfin entendu de nos gouvernants.
COSMOS
7 NOVEMBRE 1912
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses des appareils décrits :
Télégraphie sans fil: Fil émaillé pour bobines d’ac-
cord, ébonite, règles et tubes de laiton carrés : quin-
caillerie Doré, 26, rue des Écoles, Paris. — Bobines
d'accord: Ducretet et Roger; Ancel, 91, boulevard
Pereire; Chaudet, 10, rue Dupetit-Thouars, Paris. —
Tubes de carton 0,08 X 0,80: Chouanard, 190, quai
Jemmapes (0,40 fr); tubes plus forts : Ruggieri,
94, rue d'Amsterdam. — Galène, plomb en poudre :
Poulenc, 122, boulevard Saint-Germain. — Galène spé-
cialement sélectionnée pour T. 8. F.: Pellin, 5, avenue
d'Orléans; Ancel. — Pyrite de fer sensible: Ducretet
et Roger, Ancel.
M. L. L., à P. — Oui, les articles sur la télégraphie
sans fil que nous publions en ce moment seront tirés
à part en une brochure. — Pour lire au son, il n'y a
pas d’autre procédé que la persévérance. Au début,
s'habituer à écrire les signes Morse transmis par la
Tour, surtout à 8° et 140*49" du matin et 3* du soir,
moments où la transmission n'est pas trop rapide,
puis les traduire. Au bout d'une quinzaine de jours,
vous les saurez bien par cœur, et il vous sera facile
de les comprendre sans écrire. Pour les nouvelles
données entre huit et dix heures du soir, il vous faudra
plus longtemps pour pouvoir les comprendre, à cause
de l'allure rapide de la transmission.
M. P. B., à S. S.-P. (Réunion). — Les cylindres
moulès pour phonographes sont en cire. Pour effacer
l'impression devenue défectueuse, il faut prendre un
morceau de peau de chamois, verser quelques gouttes
d'essence de térébenthine et frotter légèrement en
faisant tourner lentement le cylindre à la main; quand
les traces de l'enregistrement ont disparu, on frotle à
nouveau de la même façon, mais en remplaçant la
térébenthine par de l'alcool du commerce. Ce procédé
amollit la partie superficielle de la cire. Peut-être
qu'en procédant de suite à une nouvelle impression
du rouleau vous obtiendriez un bon résultat. Le moyen
que vous proposez ne semble pas pratique, car la sur-
face du cylindre doit rester parfaitement cylindrique.
M. M. T., à F. — Nous avons dit quelques mots du
vieillissement artificiel des eaux-de-vie. (Voir Cosmos,
t LVII, n°1193, p. 607.) — Pour plus de détails, re-
portez-vous à l'ouvrage de M. E. DouzaL: Production
électrique de l'osone et applications industrielles
(43 fr). Librairie Béranger, 15, rue des Saints-Pères,
Paris.
M. A. L., à M. — Les moulins électriques à café et
à épices, décrits dans le numéro 1428 du 6 juin der-
nier, se trouvent à la Société française Oerlikon,
9, rue Pillet- Will, Paris.
M. P. V., à S. — Le Cosmos a donné un article sur
l'industrie de la bauxite dans le numéro 14143 du
92 décembre 1906. Vous y trouverez les renseigne-
ments que vous demandez. Ces renseignements sont
forcément assez restreints. Vous en trouverez de plus
complets dans l'ouvrage: l'Aluminium, par Moisson-
NIER (7,50 fr). Librairie Gauthier-Villars, 55, quai des
Grands-Augustins, Paris. Nous vous faisons envoyer
le numéro du Cosmos.
R. P. H. B., à O. — Nous n'avons pas d'autre
adresse que celle donnée dans l’article. Elle suffit,
d'ailleurs. La Société pour la fabrication de la pompe
Rotoplunge a son siège à Cardiff (Angleterre).
M. H., à H. — Nous avons donné autrefois un for-
mulaire pour faire réapparaitre l'encre pâlie. Veuillez
vous reporter au tome XLIV, n° 856, p. 798. Mais il
faudra apporter quelque précaution à l'opération et
faire d’abord un essai sur de petites dimensions. —
Nous pensons qu'il s’agit d'un article de M. l'abbé
Breuil (« Sur la présence d'éolithes à la base de
l’éocène parisien ») qui a été publié dans la revue
l'Anthropologie (librairie Masson), t. XXI, 1910.
R.P.P.F..à M.(Canada). — Librairie numismatique
Rollin et Feuardent, #, rue de Louvois. On vous y
fournira les renseignements demandés. — Pour les
tableaux muraux d'enseignement, librairie Émile
Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris. — Ces décalcomanies
se font surtout pour projections et en ont le format.
Le service des projections de la Bonne Presse pourra
vous procurer celles dont vous avez besoin.
M. G. L., à D. — Dans ces conditions, nous vous
conseillons plutôt le livre de DE VALBREUSE. — Ce livre
et les articles que nous publions actuellement vous
permettront de faire les expériences nécessaires. Nous
ne connaissons pas d'ouvrage répondant directement
à cette question.
R. J., à T. — 1° Chaque mètre de votre self repré-
sente une certaine longueur équivalente sjoutée à
l'antenne, longueur que l’on peut noter par la lettre y.
Soit zx la « valeur » (en mètres) de votre antenne. Vos
essais variés vous permettent de former diverses
équations d'où vous dégagerez T et y. Exemple : pour
la tour Eiffel, longueur d'onde, 2 200 mètres, correspon-
dant à une antenne équivalente de 550 mètres : l’équa-
tion serait æ + 42 y — 550; le nombre 42 élant la
longueur de self que vous indiquez. Si la station Mar-
coni travaille avec une longueur d'onde de 4000 mètres,
vous obtenez une autre équation : æ + 80 y — 1 000.
Essayez ainsi d'obtenir au moins une première
approximation, que vous contrôlerez, si vous con-
naissez la longueur d'onde de divers autres postes. —
Plusieurs incertitudes subsistent. D'abord, êtes-vous
en accord avec la longueur d'onde fondamentale ou
avec une des harmoniques? D'autre pert, une spire
ou une longueur / de votre self a une « valeur » qui
est susceptible de varier avec la position du curseur.
Quand la hauteur de la bobine est double de son dia-
mètre, une longueur l de fil enroulé (en une seule
couche) équivaut sensiblement à une longueur l d'an-
tenne ; si la bobine est très courte, relativement à son
diamètre, une longueur l de fil équivaut à une lon-
gueur nl d'antenne, n étant plus grand que 1 et pou-
vant mime devenir assez grand. — 2 Vous trouverez
la réponse à celte autre question dans l’article de
M. P. Corret, en cours de publication.
1
Imprimerie P. Fenon-Vaav. B et B, rue Bayard, Paris. VIII®.
Le gérant: A FaAiGLs.
No 1451 — 14 NOVEMBRE 1912
COSMOS
533
SOMMAIRE
Tour du monde. — Encore une nouvelle comète 1912 c (Borrelly). L'identité de la comète 1912 b (Schau-
masse) avec la comète de Tuttle. Le Soleil est-il une étoile variable? La foudre et les arbres. La pluie
augmente -t-elle à Paris? Les puits artésiens de Londres. Les poissons du Sahara. L’ « électrit », un
nouvel abrasif. Engrenages en étoffes comprimées. L'industrie des gants à Grenoble. Refonte des papiers
imprimés. Le papier de genèts. Éponges en papier. L'emploi de l'ozone dans les frigorifiques, p. 533.
La grue flottante de sauvetage de l’arsenal de Pola, Beer, p. 537. — L’huile de ricin et l'aéroplane,
F. Marre, p. 540. — Télégraphie sans fil : réception à domicile des signaux horaires (suite),
D' Pigare Corner, p. 541. — La boussole gyroscopique Sperry, Mancuaxp, p. 545. — Les méthodes
modernes de diagnostic sérologique, D' Go6&i4, p. 549. — L’astronomie physique et la théorie
cinétique des gaz, D' Nono, p. 552. — Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 555. Société
astronomique de France, B. Latour, p.
HércHaRD, p. 557. — Bibliographie, p. 558.
556. Association française pour l'avancement des sciences (suite).
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Encore une nouvelle comète, 1912 c (Bor-
relly). — Alors qu'on n'avait découvert aucune
comète pendant les sept premiers mois de l’année,
elles se suivent maintenant avec une rapidité
déconcertante.
La troisième a été trouvée le 2 novembre au
soir, à l’antique Observatoire de Marseille, fondé
en 4702 par la Compagnie de Jésus. L'auteur de
la découverte est M. A. Borrelly, qui, comme on
sait, n’en est pas, sous ce rapport, à son coup
d’essai. Le 2 novembre, à 71397,9 temps moyen
local, la comète occupait la position apparente
suivante :
R =A Q = —+ 3857,
e'est-à-dire près de f Hercule, à 42 degrés environ |
à l’ouest de Véga de la Lyre. L’astre se dirigeait
vers Le Sud-Est et son éclat était de 10° grandeur.
Le lendemain, 3 novembre, M. Kritzinger, l'obser-
vant avec le grand équatorial de 29 centimètres
de l'Observatoire de Bothkamp (Holstein), près de
6 Hercule, lui trouvait un éclat total de grandeur 8,
une condensation centrale de grandeur 9, et une
faible chevelure elliptique mesurant 5’ sur 4.
_ Ce même jour aussi, M. Abetti lui trouvait à
Areetri (Florence) l'éclat d’une étoile 9,5.
Les éléments paraboliques provisoires du nou-
vel astre ont été caleulés par M. H. Kobold d'après
les observations des 3, 4 et 5 novembre et publiés
dans le cireulaire n° 437 de la Centralstelle de
Kiel (7 novembre). Les voici :
T = 1912 oct. 21,9879 T. M. Berlin
w = :401°31,21
= 144 52,69 ? 1912,0
i = 424 9,604
q = 0,04572 — 166 097 000 km.
Ne 1451.
M. Kobold en a tiré l’éphéméride suivante qui
permettra de trouver l’astre sans difficulté :
| DISTANCE
naATe 1912
ASCENSION | Aa] Flat
Minuit noi DEGLINAISON | oy 41 a
| Berlin. Soleil, | Terre.
Ü Nov. 8] 1832 4e | + 2853,4
0! 49 38 4 | + 27 20,2
| 10 | 48 43 38 | 2048,3 |
| I 48 58 58 + 2419,7 11,16011,071| 8,5
121 18 54 2 | + 2253,3
| 131 A8 58 51 | Æ 21 29,8
| 141 19 325 | + 20 7,8
| 151 19 746 | + isis 9 [1,18011, 1481 8,7
| 16 | 19 1156 | L 1732,
| 17 | 49 1555 | — 16 19,2
| 18 | 491943 | +15 8,
| 49 | 19 2321 | + 12596 |1,2031/1, 236| 8,9
On voit, d'après ces données, que la comète a
déjà passé au plus près du Soleil le 21 octobre,
donc avant sa découverte, et que depuis lors elle
s'éloigne à la fois de l'astre central et de la Terre.
Par suite, son éclat doit théoriquement diminuer. Il
est possible qu’il ait été plus considérable le mois
dernier et qu’on retrouve l’astre sur des photogra-
phies. |
Pendant tout le mois de novembre, la comète
pourra être aperçue dans une petite lunette. File
a passé au sud de la Lyre, va traverser la Flèche
et entrer dans l’Aigle, où nous la perdrons de vue
en décembre.
Cette comète est, croyons-nous, la septième que
découvre M. Borrelly.
534
L'identité de la comète 1912 b (Schaumasse)
avec la comète de Tuttle. — M. G. Fayet, con-
sidérant les grands écarts entre les dates du passage
au périhélie et les déclinaisons géocentriques de
Ja comète Schaumasse et de la comète de Tuttle,
avait exprimé certains doutes sur l'identité des
deux astres. Il était certain qu'ils se mouvaient
dans des orbites presque semblables, mais l'erreur
de 5° dans l’anomalie moyenne et la différence de
presque 4” dans le moyen mouvement auraient pu
conduire à croire que la comète de Tuttle s'était
divisée, comme autrefois celle de Biéla, et que
M. Schaumasse n'en aurait retrouvé qu'un des
fragments.
L'habile calculateur de Nice a cependant re-
cherché si les écarts constatés ne pouvaient pas être
attribués aux perturbations survenues depuis 1899
et négligées dans l'éphéméride publiée pour cette
année, et il a trouvé qu'à la fin de 1900 la comète
de Tuttle s'était approchée de Jupiter jusqu’à une
distance minimum inférieure à 0,8 (119 600 000 km).
Recherchant ensuite rapidement l’effet approximatif
de ce passage de la comète aussi près de la plus
grosse planète de notre système, M. Fayet trouve
que le passage au périhélie se produit le 9 octobre
1912, c’est-à-dire {rois mois plus tôt que ne l'indique
l'orbite de 1899. Et dans ces conditions, M. Fayet
conclut que l'identité de la nouvelle comète décou-
verte par M. Schaumasse avec celle de Tuttle est,
sinon certaine, du moins assez probable.
Il serait néanmoins fort intéressant que le calcul
complet des perturbations pour l'intervalle 1899-41912
soit entrepris et qu’on ne néglige plus, à l'avenir,
un travail aussi ulile.
Ajoutons encore qu'il résulte d'une communica-
tion de M. William R. Brooks, le célèbre « chasseur
de comètes » de Geneva (Etats-Unis), que celui-ci
découvrit indépendamment la comète de Tuttle
deux jours après M. Schaumasse, le 20 octobre au
malin. Il en avisa télégraphiquement les astro-
nomes de Cambridge le 20 à 6 heures du matin,
alors qu'il n’apprit qu’il avait été devancé par son
collègue français que dans l'après-midi du même
jour.
Le Soleil est-il une étoile variable? —
Science (25 octobre) signale le retour en Amérique
de l'expédition scientifique faite en Algérie par
M. Abbot, directeur de l'Observatoire astrophysique
smithsonien. Celte mission a résidé durant cinq
mois à Bassour (Algérie) pour compléter et achever
l'étude de la variabilité du Soleil. :
Voici sept ans que l'Observatoire gmithsonien
poursuit des mesures au mont Wilson (Californie)
concernant la quantité de chaleur solaire reçue
quotidiennement soit à la surface de la Terre, soit
à la limite supérieure de l'atmosphère.
Les premiers résultats indiquaient que le Soleil
est une étoile variable; la variation de son rayon-
COSMOS
14 NOVEMBRE 1942
nement atteindrait une amplitude de 5 à 10 pour
400, et la périodicité, irrégulière, serait de cinq à
dix jours.
L'an dernier, comme nous l’avons dit (Cosmos,
t. LXVI, n° 1443, p. 197), M. Abbot a déjà observé
en Algérie, tandis que son collègue, M. Aldrich,
exécutait des mesures analogues au mont Wilson,
en Californie. Voici la raison de ces observations
simultanées. Les mesures exécutées au mont Wil-
son peuvent avoir été affectées par les conditions
atmosphériques locales. Mais, l'Algérie et la Cali-
fornie étant distantes d’un tiers de la circonférence
terrestre, il est peu probable que les circonstances
locales viennent affecter les deux stations, au
même jour, de la même manière. Les observations
de 1911 supportaient bien l'hypothèse de la varia-
bilité solaire, mais la nébulosité n’a pas permis
de multiplier suffisamment les jours d'observation
pour rendre l'expérience décisive. Aussi M. Abbot
a cru devoir la reprendre cette année.
Il a été assisté en Algérie par M. Anders Knutson
Angström, d'Upsala (Suède), le petit-fils d’Anders
Angström, dont le nom est à jamais associé à l’his-
toire de la spectroscopie; le fils de Knut Angstrôm,
qui a inventé nombre d'instruments remarquables
pour mesurer la radiation solaire. i
Les observations faites à Bassour cette année
sont, parait-il, très satisfaisantes. Elles ont occupé
soixante-quatre jours, sur lesquels cinquante au
moins correspondent à des observations simultanées
exécutées par M. Fowle au mont Wilson. On a
tout lieu de croire qu'elles seront décisives et per-
mettront de répondre catégoriquement par oui ou
non à la question de la variabilité du Soleil.
ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE
La foudre et les arbres. — Le service forestier
des États-Unis publie dans son Bulletin 4144 un
relevé des incendies de forèts causés par la foudre;
les données ont été fournies par 3000 employés
du service. Une fois de plus, on reconnait là que
la prétendue préférence de la foudre pour cer-
taines espèces d'arbres est un préjugé populaire.
Voici, d'après le Scientific American du 19 oc-
tobre, les conclusions énoncées dans le Bulletin :
41° Les arbres sont, de tous les objets, les plus
fréquemment frappés par la foudre, parce que :
a ils sont très nombreux; b ils sont comme une
extension du sol lui-même vers les nuages orageux;
c leurs branches étendues dans l’air et leurs racines
rayonnant dans le sol représentent une forme
idéale pour conduire une décharge électrique vers
la terre.
2 Toutes les espèces d'arbres sont indifférem-
ment frappées par la foudre.
3° La majorité des individus frappés dans une
localité appartient à l'espèce qui domine par le
nombre.
N° 1151
4° Le danger de foudroiement d’un arbre est
plus grand : a s'il domine par sa taille les arbres
environnants; b s'il est isolé; c s'il pousse sur une
hauteur; d s'il est bien enraciné (en profondeur);
e s’il est bon conducteur au moment de la
décharge, c'est-à-dire si des conditions temporaires,
par exemple, l’humectation par la pluie le rendent
momentanément plus conducteur pour l'électricité.
3° La foudre peut incendier les forêts en met-
tant le feu, soit à l’arbre lui-même, soit à l’humus
au pied de l'arbre: ce dernier cas semble le plus
fréquent.
Ces conclusions s'accordent bien avec l'opinion
exprimée par certains de nos inspecteurs forestiers
de France (Voir Cosmos, t. LIX, n° 1236, p. 364.)
et avec les conclusions qui se dégageaient d’un
travail très étendu publié par M. Vanderlinden,
assistant au service météorologique de Belgique.
(Voir Cosmos, t. LVII, n° 1196, p. 704.)
MÉTÉOROLOGIE
La pluisaugmente-t-elle Paris ?—M.C.Flam-
marion a publié un relevé des pluies à Paris depuis
le règne de Louis XIV. Il conclut à une augmenta-
tion séculaire de la pluie à Paris, augmentation
1806-1810............. 464 1841-1845.,...
1811-1815......,....., 492 1846-1850...
1816-1820............. 509 1851-1855.....
1821-1825..,.......... 502 1856 1860.....
1826-1830...,......... 526 1861-1865.....
1831-1835............. 472 1866-1870.....
1836-1840..,.......... 518 1871-1875.....
La moyenne générale est 510 millimètres: le
premier tiers de la série donne 502, le second 521,
le dernier 508; il n'y a donc aucune apparence
d'augmentation progressive dans les trente der-
nières années, malgré les quantités de pluie très
élevées recueillies en 1909 et surtout en 1910, qui
a fourni le maximum absolu (724 millimètres) des
cent cinq années considérées.
GÉOLOGIE
Les puits artésions de Londres. — D'après
une note publiée par le Journal of the royal So-
ciety of Arts (25 octobre), Londres possède mainte-
nant un très grand nombre de puits artésiens.
Les anciens puits sont ceux de la Banque d'An-
gleterre, de 102 mètres de profondeur (creusé en
1852); de Trafalgar Square, de 121 m (1847); de la
brasserie Meux, Tottenham Court Road, de 110 m
(1843), plus tard approfondi à 349 m (1876); de
la gare Victoria, de 410 m (1861), et d'un grand
nombre de brasseries, distilleries et usines. Pour
tous ces puits, on est descendu à travers l'argile
de Londres pour commencer ensuite le forage
proprement dit jusqu'à ce que l’eau monte dans le
puits.
COSMOS
535
bien marquée surtout depuis le début du xıx® siècle,
date à laquelle ont commencé les mesurés pluvio-
métriques très précises. (Cf. Cosmos, n° 1442,
12 sept. 1912, p. 281.) |
M. A. Angot n'admet pas cette conclusion (An-
nuaire de la Soc: météor. de France, juill.).
Pour former son tableau, dit-il, M. Flammarion
a pris les nombres fournis par le pluviomètre de
l'Observatoire de Paris (Terrasse) jusqu’en 1872,
et, depuis le 1° janvier 1873, ceux de Montsouris,
en ajoutant simplement : « Les conditions restent
à peu près les mêmes. » Or, c’est précisément de
ce changement de station que résulte l’augmenta-
tion apparente de la pluie. La comparaison des
observations faites simultanément dans les deux
stations pendant trente ans (4881-1910) montre, en
effet, que les hauteurs de pluie y sont dans le rap-
port de 4 à 1,14. Il n'est donc point légitime de
mèler les deux séries.
Le tableau suivant donne, en millimètres d'eau,
les hauteurs moyennes de pluie par périodes de
cinq ans, pendant les cent cinq années 1806-1910,
de l'Observatoire de Paris (Terrasse), où les condi-
tions sont restées les mêmes pendant toute la pé-
riode. |
eos 513 1876-1880............. 540
ss 047 1881-1885............ 478
reas 514 1886-1890...........,. 470
ses 543 1891-1895. ennnen 467
TRS 462 1R96G-1900............. 504
han 523 1901-190$......,,..... 939
rte 241) 1906-1910,,.,,, ...... 09
Par contre, dans les dernières années, on n’a eu
recours qu'au système du forage; les puits arté-
siens se sont extraordinairement multipliés, à
usage des bains publics, des stations génératrices
d'électricité, etc. On peut mentionner ceux du
Central London Railway, station de Shepherd’s
Bush, 14146 m; des bains de St. Pancras, 122 m; des
bains de Bethnal Green, 155 m; du dépôt de tram-
ways du London County Concil, à Greenwich,
407 m; de la station d'électricité de Hackney,
137 m; et une douzaine d’autres puits, dont la pro-
fondeur est comprise entre 120 et 150 mètres.
La profondeur à laquelle on atteint la craie
varie beaucoup : 25 m à Hackney, 32 m à Green-
wich, 49 m à St. Pancras, 741 m à Queen Anne's
Gate et 78 m à Ashley Gardens.
Observation analogue pour les débits, qui varient
suivant le district et la porosité des terrains, ainsi
que la puissance des pompes; le débit des puits
va de 23 à 230 ou mème 369 mètres cubes par jour.
ZOOLOGIE
Les poissons du Sahara. — Il peut paraitre
extraordinaire de parler des poissons du Sahara.
On se représente mal, en effet, que ces animaux
536
esseniiellement aquatiques puissent s'adapter à la
vie dans 'ces régions sablonneuses et désertiques
où tout grand cours d'eau fait aujourd’hui complè-
tement défaut. Il existe cependant quelques pois-
sons dans le Sahara; au sud de l'Atlas, dans les
Chotts, dans les puits, dans les sources chaudes
ou froides, on rencontre une population ichtyolo-
gique assez nombreuse sinon variée. On voit appa-
raitre là les premiers Cichlidés, qui, bien que
coexistant parfois avec quelques Cyprinodontes à
facies européen, représentent des types de la zone
équatoriale, 'nettement africaine (Pellegrin, A. F.
A. S., Dijon, 1941).
Plus au Sud, même en plein désert, dans le
massif du Tassili des Azdjers, existent à Ifédil des
sources qui ne tarissent jamais. Le capitaine Cor-
tier en a rapporté au Muséum deux espèces de
barbeaux, le Barbus deserti et le B. biscarensis.
Ce sont là incontestablement les résidus d’une
faune jadis beaucoup plus abondante. Le Sahara,
aujourd'hui presque complètement privé d’eau,
avait à une époque relativement peu reculée un
régime hydrographique bien différent de ce qu'il
est aujourd'hui. Mème à une période historique,
du temps des Carthaginois et des Romains, il y
avait cerlainement des cours d'eau importants
dans certaines régions aujourd'hui désertiques. Là
où elles ont pu, les espèces aquatiques se sont
maintenues, mais ces points deviennent de plus en
plus rares.
Aussi l'étude zoologique de M. Pellegrin apporte-
t-elle une confirmation intéressante aux conclusions
géologiques formulées par MM. Gautier et Chudeau.
(Revue scientifique.) P. L.
INDUSTRIE
L’ « Electrit », un nouvel abrasif., — L’Ame-
rican Machinist signale un nouvel abrasif,
l’E£lectrit, obtenu en fondant l'oxyde pur d’alumi-
nium dans un four électrique, à une température
voisine de 3 000° C. Son poids spécifique est moins
élevé que celui de l’émeri et que celui du corin-
don, mais sa dureté est beaucoup plus élevée ;
elle occuperait le rang 9 1/4 sur l'échelle admise
qui a 40 pour maximum. Les grains d'électrit, à peu
près amorphes, résistent à la pression et aux chocs,
étantélastiques et non cassants. Pour les employer,
on les noie dans une pâte céramique dont on fait
des meules; l’humidité et les acides ne les
attaquent pas, et on peut les employer pour
meuler, soit mouillées, soit à sec.
Engrenages en étoffes comprimées. — Depuis
quelque temps on utilise aux Etats-Unis des roues
d'engrenages fabriquées en étoffes de toile ou de
coton comprimées à la presse hydraulique, à plu-
sieurs tonnes par centimètre carré. Les essais de
ces engrenages ont porté sur une durée de deux
ans et ont parfaitement réussi.
COSMOS
14 NOVEMBRE 4191412
Les avantages de ce genre d’engrenage sont les
suivants : résistance à l’humidité, à la sécheresse,
à la chaleur, aux changements de temps, marche
silencieuse, résistance aux choes violents, suppres-
sion du graissage, longue durée. Ces engrenagessont
surtout utilisés pour la commande des machines-
outils, des grues, des métiers à tisser, des machines
dans les fabriques de papier, etc.
L'industrie des gants à Grenoble. — Tout le
monde sait que Grenoble est un des grands centres
de fabrication des gants, mais peu de personnes se
figurent l'importance de sa production.
A Grenoble, 3 000 ouvriers, hommes ou femmes,
travaillent pour cette industrie dans les fabriques,
tandis que 20 000 se livrent aux mêmes occupations
à domicile. Leur production annuelle atteint
4 500 000 douzaines de paires.
Pour soutenir la concurrence étrangère en obte-
nant de meilleurs résultats dans la fabrication,
on a fondé une école spéciale, annexe de l’école
Vaucanson, où les élèves doivent passer trois ou
quatre ans et apprendre tout ce qui concerne l’ori-
gine, la qualité, la manutention des peaux employées,
leur commerce, leur préparation et la technologie
de leur mise en œuvre. On compte que l'école
fournira chaque année unedizaine d'élèves dipldmés,
capables de diriger les grandes fabriques et très
au courant de toutes les questions commerciales
qui concernent cette industrie spéciale.
LE PAPIER
Refonte des papiers imprimés. — Les impri-
més, vieux journaux ou vieux livres, sont repris en
papeterie pour confectionner du carton, du papier
d'emballage ou du papier teinté, mais il est très
difficile d'en faire du papier blanc : l'encre qui les
a noircis communique à la pâte une coloration gri-
sâtre qui résiste aux agents chimiques. Ce que l’on
peut tenter, c’est de dissoudre l’huile ou la sub-
stance résineuse qui a servi de véhicule au pigment
noir, afin d’entrainer ensuite celui-ci par des
lavages.
On a ainsi essayé des solvants divers: solution
savonneuse, pétrole et soude caustique, etc. (Cf.
Cosmos, t. LVIT, p. 511.) D'Amérique nous vient
un procédé (brevet n° 4 029848) qui doit, d’après
l'inventeur, M. Burby, donner satisfaction plus
complètement que ses devanciers.
Les vieux papiers imprimés destinés à la refonte
sont traités dans une dissolution bouillante de
borax : 45 mètres cubes de solution à 2 pour 100,
pour traiter une tonne de papier. Le véhicule du
pigment de l'encre d'imprimerie se dissout. Le
traitement se fait progressivement, par doses
réduites de pâte de papier et de solution. La ma-
tière est ensuite déversée dans une cuve munie
d’agitateurs, lavée à l’eau fraîche, puis amenée sur
des tamis où on déverse de l’eau en pression pour
Ne 1451
enlever les dernières traces du pigment coloré.
Voilà peut-ètre pour obvier partiellement à la
crise du papier et au danger du déboisement.
Le papier de genêts. — Le nombre des ma-
tières qu'on a proposées pour remplacer le bois
dans la fabrication du papier est considérable.
Beaucoup ont été essayées, maïs, pour diverses
raisons, on n'est pas arrivé à les utiliser d’une
façon pratique. Les unes, comme le bambou, le
mürier, l’alfa, donnent un papier de bonne qua-
lité, mais d'un prix de revient trop élevé; les
autres, comme Îles sarments de vigne, sont trop
peu abondantes pour alimenter l’industrie.
On fait actuellement en Italie des essais avec le
genêt. Cette plante, très riche en fibres textiles,
croit spontanément dans les terrains incultes, est
très résistante et ne demande aucun soin. Un
mème pied peut, pendant une vingtaine d’années,
produire des rameaux longs et flexibles, et les seuls
frais proviennent de la récolte et du transport.
Voici, d’après le Génie civil (5 octobre), un
résumé des opérations du traitement qu'on fait
subir au genêt.
La plante est d’abord desséchée à Pair, puis
découpée et passée dans un premier broyeur. On
trempe une huitaine de jours dans la soude caus-
tique, on broie à nouveau, et on passe la matière
ainsi traitée à la presse hydraulique pour éliminer
toute la partie humide qui constitue les sous-
produits utilisables. Puis on procède à l’éfaufile-
ment, au lavage ef au blanchissage.
La pâte ainsi obtenue est de bonne qualité, et
peut faire du papier à lettre, à dessin; elle se
vend environ 40 francs par 100 kilogrammes.
Les sous-produits contiennent une grande quan-
COSMOS
537
tité de liquides alcalins qui conviennent parfaite
ment à la fabrication des savons. Cessous-produits
représentent une valeur d'une trentaine de francs
pour chaque quintal de pâte fabriquée.
| Éponges en papier. — Il n’est pas question ici
du papier buvard, mais d'un nouveau procédé, dů
à un ingénieur de Francfort, pour la fabrication
d'éponges en pâte à papier. La cellulose, traitée
au chlorure de zinc, forme une masse visqueuse à
laquelle on ajoute du sel ordinaire; elle subit
ensuite un raffinage, après quoi elle se prête à la
fabrication des éponges.
On emploie à cet effet une presse spéciale garnie
de nombreuses pointes métalliques qui plongent
dans la pâte et forment des petits canaux comme
ceux des éponges véritables. Ainsi agitée dans tous
les sens, la pâte finit par acquérir l’aspect de
l'éponge naturelle et peut être divisée en fractions
de toutes dimensions. (Courrier du Livre.)
VARIA
L'emploi de l’ozone dans les frigorifiques
(Génie civil, 17 août). — MM. G. Bouvier et
E. Saint-Père préconisent lemploi de l'ozone dans
les frigorifiques pour la conservation des denrées.
Le pouvoir désinfectant de ce gaz est considérable.
Des fruits couverts de moisissures, mis à proxi-
mité d'un courant d'air ozonisé, ont été débar-
rassés de leurs moisissures qui, malgré un état
hygrométrique de 0,80, sont tombées en poussière.
Des viandes ont pu être conservées, à la tempé-
rature de 4°, pendant plus de trois semaines,
moyennant l'intervention d'un appareil ozonisateur
ordinaire.
La grue flottante de sauvetage de l’arsenal de Pola.
La grue flottante à double cantilever, autrement
dit à double porte-à-faux, dont nous voulons
parler aujourd'hui, présente cet intér't, non pas
seulement d'offrir une disposition toute particulière
dont on peut juger à première vue, mais encore de
pouvoir s'appliquer fort utilement, et d’une façon
qui semble assez pratique, au relèvement des
sous-marins coulés, des épaves quelconques, en
même temps qu’au levage et à la manutention des
charges les plus diverses. Un coup d'œil sur l’une
des photographies que nous devons au construc-
teur de cette machine, la Société Prager Maschi-
nenbau Actien Gesellschaft, fait saisir immédiate-
ment l'apparence bizarre tout d'abord, mais par-
faitement étudiée de cet appareil de soulèvement
qui peut supporter des charges de 420 tonnes.
C’est l'administration de l'arsenal naval de Pola,
arsenal que possède l'Autriche sur l’Adriatique,
qui a commandé la grue en question aux chantiers
de Prague. Il s'agissait de posséder une grue
susceptible au besoin de relever, ou tout au
moins de soulever à peu près jusqu'à la surface
de l’eau, un sous-marin pas trop pesant, en mème
temps que de mettre à bord des navires de guerre
des grosses pièces d'artillerie, des chaudières, et,
en général, tous les objets de poids considérable,
En fait, l'appareil est double, car il est muni de
deux chariots-treuils qui ont chacun une puissance
unitaire de soulèvement de 120 tonnes; des dispo-
sitions ont été prises pour que les deux treuils
puissent prendre deux positions respectives bien
différentes, suivant les cas. S'il s’agit de soulever,
par l'avant de l'appareil, une charge submergée par-
ticulièrement pesante, on amènera les deux treuils
roulant sur les chemins supérieurs, de manière
qu'ils travaillent, l’un à une distance maximum de
538
4,5 m de la ligne extrème de l’avant du ponton
portant les dispositifs de soulèvement, le second
treuil se trouvant immédiatement en avant (fig. 1).
On voit qu'on les fait travailler simultanément
sur une seule poulie de levage. Mais on a prévu,
d'autre part, dans la coque même du ponton, un
vaste panneau mesurant 7,6 m de long sur 3,4 m
de large; quand ce panneau est ouvert, on peut
faire descendre, par cette vaste ouverture, le treuil
et ses câbles de levage à l'aplomb mème d’une
charge qui se trouverait sous l'avant du ponton.
S'il s’agit du soulèvement d'un sous-marin, on
amène le ponton de manière que le panneau soit
au-dessus d’une des extrémités de ce petit navire.
On y frappe le treuil arrière tandis que le treuil
avant, qu’on aura conduit sur le chemin de roule-
ment, sera relié par des câbles de levage à l’autre
extrémité (fig. 2). On estime que, dans ces condi-
tions, on a la possibilité de soulever le bateau
jusqu’à faire émerger la tourelle de commande-
ment et lorifice d'introduction des hommes; il
PE ——
RTS
- —— — - — -
F1G. 1. — LYS DEUX TREUILS
TRAVAILLENT AU MÊME POINT.
est possible de déboulonner cette tourelle, de
venir au secours de l'équipage, en attendant que
l’on puisse transporter le sous-marin en un endroit
où l’on !procédera à son sauvetage définitif. Les
dispositifs de soulèvement, les palans, les câbles,
les treuils, sont disposés de telle sorte qu’on peut
soulever en une seule opération une charge immer-
gée à une profondeur de 40 mètres, et même au
besoin aller ja chercher jusqu’à 50 mètres. Disons
tout de suite que, à la suite d'études complexes et
très savantes, les ingénieurs de la maison de con-
struction de Prague, plutôt que de recourir à des
chaines pour faire passer sur les treuils et pour
soulever les charges, se sont montrés favorables à
l'emploi de câbles en fil métallique, faits de fils
d'acier galvanisé et élablis dans des conditions
toutes particulières,
Si nous examinons l'appareil dans son ensemble,
nous constatons que le ponton a une longueur de
33,9 m pour une largeur de 23,5 m; le creux de ce
ponton est de 4,5 m jusqu'à ses parties supérieures.
Tout l'intérieur est pour ainsi dire consacré à la
COSMOS
14 NOVEMBRE 141912
machinerie et aux pompes, en mème temps qu’au
réservoir à ballast, qui permet d'équilibrer ce
ponton par rapport à la charge et aux déplace-
ments qu'on lui fera subir. A l’arrière de la con-
struction supérieure abritant les divers treuils,
cabestans, se trouve une sorte de tourelle métal-
lique où vont passer les câbles de renvoi, avant de
commander les mouvements variés des chariots
portant les treuils de levage. La hauteur maxi-
mum de soulèvement d'une charge au-dessus de
leau est de 24 mètres. Nous avons indiqué tout à
l'heure la position extrême que peut occuper le treuil
arrière, quand le treuil avant est lui-même à son
maximum de porte-à-faux, avec charge maximum.
A ce moment, on peut soulever une charge de
240 tonnes, l’axe vertical de cette charge se trou-
vant à une distance de 3,6 m de l’avant mème du
ponton. Il va sans dire que l’appareil a été essayé
dans les conditions les plus rudes; on a fait porter
DD |
B l <
į
F1G. 2. — LES DEUX TREUILS
AGISSENT SUR DEUX POINTS DIFFÉRENTS.
à chacun de ses treuils, simultanément, une charge
de 150 tonnes, le treuil avant se trouvant à une
distance de 14,5 m de la ligne correspondant à la
paroi avant extrème du ponton. Normalement,
pour les travaux d'arsenal, c'est seulement le
treuil avant qui est employé, soulevant une charge
de 120 tonnes à cette distance de 14,5 m, et une
charge de 90 tonnes à 18 mètres en avant du pon-
ton. Bien entendu, chaque crochet de soulève-
ment dépendant d’un des treuils peut prendre un
mouvement transversal par rapport aux chariots
portant le treuil. Tous les câbles de soulèvement
et autres sont placés symétriquement, et toutes
les forces convergent vers un centre commun. Les
câbles de mouvement transversal sont doubles
pour chacun des crochets et pour chaque direction
de déplacement. Ils sont du système sans fin; ils
vont tourner autour de poulies à l'extrême avant
du porte-à-faux. Naturellement, vu l'importance
des charges à soulever, on a adopté un système
de mouflage particulièrement robuste et de grandes
dimensions.
N° 1451
Donnons rapidement quelques indications sur les
câbles employés dans cet appareil, dont la solidité
doit être à toute épreuve : ils ont été fabriqués par
une grande usine spéciale de Vienne, la Compa-
gnie « Saint-Egyder et Torons »; il sont toujours
doubles et disposés de telle sorte que chacun agisse
contre la tendance que pourrait avoir l’autre à se
dérouler. Les deux câbles de soulèvement propre-
ment dit, de 8 mètres de long, ont 55 millimètres
de diamètre ; ils sont faits de fil d'acier de 1,4 mm
(acier fondu). Cet acier est donné comme ayant
une résistance à la rupture de 160 kg: mm, ce
qui assure à chacun des câbles une résistance à
LA
7
A
À
COSMOS
539
la rupture de 792 tonnes. Ces câbles pèsent
11,4 kg par mètre courant. A l’intérieur de chacun
d'eux, il y a toujours un câble central formé de
chanvre goudronné, autour duquel se tordent
d’abord neuf torons, quinze autres étant enroulés
par-dessus ces premiers. Les élingues servant à
rattacher les charges à la poulie de soulèvement
comportent un câble central en chanvre goudronné
autour duquelsont enroulés des câbles métalliques,
chacun de ceux-ci élant formé de 18 torons
autour d'un câble central en chanvre goudronné
également; chacun des torons est fait de 44 fils
d'acier fondu de 1,25 mm de diamètre. Si bien que
F1G. 3. — GRUE DE L’ARSENAL DE POLA,
le câble d’élinguage, dans son ensemble, a un
diamètre de 82 millimètres et une résistance à la
rupture de 278 000 kilogrammes.
Sans pouvoir insister malheureusement plus
longtemps sur cette grue si intéressante, disons
que l'appareil de soulèvement et le ponton sont
faits en acier à navire de la meilleure qualité. En
regardant la photographie, on a remarqué l'arti-
culation des jambes métalliques supportant le pont
sur lequel circulent les treuils de soulèvement.
Bien entendu, le ponton est muni d'un dispositif
de propulsion qui lui permet de se rendre à pied
d'œuvre. Ce ponton est partagé en dix comparti-
ments étanches, pour éviter toutes chances d’ac-
cident; les compartiments arrière servent au lest,
une parlie d’entre eux étant remplis d'un lest fixe
formé de béton; les choses sont prévues de telle
sorte qu'avec n'importe quelle charge la grue
demeure sensiblement horizontale. Des poutres
longitudinales et transversales consolident le pon-
ton, surtout à l’aplomb des jambes supportant la
passerelle, et aussi à l’aplomb des cabestans qui
servent à faire papillonner le pontonet à l’amener
exactement en place, en le maintenant fixe à cette
place. Normalement, le ponton a un franc-bord de
1,8 m. En service régulier, cette grue puissante
peut soulever une charge de 30 tonnes à une
vitesse de 4,5 m par minute; l'allure se réduit à
340
75 centimètres par minute quand il s’agit de sou-
lever 120 tonnes, et enfin moitié moins quand on
se trouve en présence d’un poids de 240 tonnes à
lever.
Cet appareil est aussi intéressant que curieux
COSMOS
14 NovemBer 1942
dans sa disposition générale; les ingénieurs de
l’arsenal de Pola affirment qu'il leur rend déjà des
services tout à fait précieux.
| DANIEL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques.
L'huile de ricin et aéroplane.
D'une façon presque générale, les aviateurs
ont adopté, pour lubrifier les organes mobiles de
leurs appareils, l'huile de ricin dont le publie con-
nait surtout les propriétés purgatives. Les raisons
de ce choix sont aisées à comprendre.
L'huile de ricina possède, en effet, des qualités
exceptionnelles au point de vue du graissage des
moteurs. À l'encontre de ce qui caractérise les
autres huiles végétales, elle ne renferme ni palmi-
tine ni oléine et fort peu de stéarine. Son consti-
tuant principal est la triricinoléine, qui est un
glycéryde de l'acide triricinoléique. Sa densité
(0,966 à + 15°,5), la range parmi les huiles les plus
lourdes, très près de l’huile de résine, et au niveau
des huiles artificiellement épaissies par « soufflage »
d'air à haute température. Pratiquement, sa des-
siccalion à l’air est nulle, et elle offre une grande
résistance au rancissement, à coadition d'être par-
faitement raffinée. Elle ne se solidifie qu’au-dessous
de — 10°, et sa fluidité n’augmente pas sensible-
ment du fait de l'élévation de température. Ce
dernier caractère est tout à fait remarquable,
étant donné surtout que l'huile de ricin présente
la viscosité la plus élevée de toutes les huiles,
exception faite des huiles « soufflées » dont il vient
d’être dit un mot. En outre, son insolubilité pra-
tiquement complète dans les pétroles et les huiles
minérales en fait un lubrifiant précieux pour les
moteurs, d'autant qu'elle n’attaque pas le caout-
chouc,
Mais ce sont là les propriétés spéciales à l’huile
de ricin soigneusement préparée en vue des usages
pharmaceutiques; comme cette huile aurait prati-
quement un prix de revient trop élevé pour pou-
voir être employée au graissage industriel, ce sont
en réalité les huiles de deuxième et troisième pres-
sions qui servent à cet usage.
Aussi les frères Galliot, qui ont fait d’elles dans
Omnia une étude intéressante et complète, se
sont-ils demandé si, dans la pratique, ces huiles
constituent bien le meilleur des lubrifiants. Tout
d'abord, ils font remarquer que, pour peu que
l'huile de ricin industrielle soit adultérée par une
autre huile (colza, lard-oil, etc.), son insolubilité
dans les pétroles et les huiles minérales disparait,
ce qui peut avoir pour conséquence de fâcheux
gr'ippages dans les moteurs rotatifs.
Il est donc fort important de ne jamais employer
d'huile de ricin sophistiquée, et, à ce propos, il
n'est peut-être pas inutile de rappeler Fessai de
Finkener qui permet d'en apprécier rapidement La
pureté. Dans un tube en verre gradué, on verse
10 centimètres cubes de l'huile à essayer at
50 centimètres cubes d'alcool à 90° ; on agite pour
assurer la mise en dissolution. A la température
de + 15°, le liquide obtenu est parfaitement lim
pide et brillant. Si l’huile de ricin essayée conte-
pait au moins 5 pour 400 d'huile étrangère, la solu-
tion est trouble et son louchissement persiste, même
si on élève à + 20° la température du mélange
alcool plus huile.
De plus, une bonne huile de graissage doit être
absolument neutre. Or, si l'huile pure de ricin
obtenue par première pression ne renferme que
des quantités infimes d'acides gras libres, il men
est pas de mème des huiles de seconde et de troi-
sième pressions, dont l'acidité libre est souvent
assez élevée pour causer la détérioration rapide
des pièces métalliques qu’elle a pour mission de
lubrifier, en sorte que souvent l’économie assurée
par une bonne lubrifaction est perdue par l’usure
résultant d’un excès d’acidité de l'huile.
Mais, par-dessus tout, l’inconvénient le plus
sérieux que présente l'huile de ricin réside dans
sa très faible combustibilité. Arrivée dans la
chambre d'explosion du moteur, elle donne, sous
l'effet des hautes températures qu’elle y supporte,
un dépôt gluant qui encrasse les clapets d'autant
plus malheureusement que le pétrole ne le dissout
pas. Force est donc de nettoyer, c'est-à-dire de
démonter fréquemment le moteur.
En un mot, on peut dire que si l’huile de ricin
possède des qualités lubrifiantes de premier
ordre qui la font très justement rechercher pour
les moteurs d'aéroplane et d'automobile, ces qua
lités sont compensées dans une certaine mesure
par des défauts graves: dès lors, on est en droit
de se demander si, pour employer une expression
célèbre, ceci ne tuera pas cela. C'est ua peu
l'avis de MM. Galliot: à la suite de toute uue
série d'essais comparatifs, ils n'hésitent pas à
déclarer que, tout au moins pour les moteurs
normaux qui ne réclament pas de lubrifiants
exceptionnellement parfaits, ils n'ont pas observé
de différences bien sensibles entre l'huile de ricin
et une très bonne huile spéciale,
N° 4451
Ïl semble cependant que le problème puisse
comporter une solution tout autre que le rempla-
cement pur et simple de l'huile de ricin. Cette
solution comporterait le développement de la cul-
ture du ricin : celui-ci, qui n’est à l’heure actuelle
pas autre chose qu’une plante médicinale ou orne-
mentale, pourrait fort bien devenir une plante
industrielle et être cultivé de façon intensive, de
manière à accroitre la production de ses graines et
à en abaisser le prix de revient. L n'est pas douteux
que si ua large débouché s’offrait à la culture des
COSMOS
541
graines du ricin, la technique d’extraction de l'huile
contenue en elles ferait bien vite des progrès suff-
sants pour que J'industrie ait à sa disposition un
produit très pur et de tous points analogue au pro-
duit pharmaceutique actuel. Il est certain qu'alors
on trouverait un artifice quelconque pour combattre
l'encrassement des clapets, c'est-à-dire pour sup-
primer le plus grave des reproches adressés aujour-
d'hui à l'huile de ricin.
La parole semble donc ètre aux cultivateurs.
Francis MARRE.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
III. Réception à très grande distance.
Plus on sera éloigné de Paris, plus développée
devra ètre l'antenne qu'il faudra établir. Il arri-
vera alors qu'avec celte grande antenne on enten-
dra beaucoup d’autres postes que celui de la tour
Eiffel. Quand ceux-ci transmettront en mème temps
qu'elle, ils pourront gèner considérablement la
réception, ou même l'empêcher tout à fait, s'ils
sont assez puissants ou suffisamment rapprochés.
U importera donc de pouvoir choisir, parmi plu-
sieurs transmissions simultanées, celle qu’on vou-
dra écouter, en augmentant le plus possible l'inten-
sité de sa réception et en atténuant celle des
signaux perturbateurs.
On y arrivera, à condition que les longueurs d'onde
des signaux simultanés soient suffisamment diffé-
rentes, au moyen des montages dits « par induc-
tion » ou « en Oudin ».
Montage par induction.
Nous avons vu qu'une antenne accordée pour une
certaine longueur d'onde possède la propriété d'en-
trer en vibration avec le maximum d'intensité
sous lPinfluence d’ondes de cette longueur.
Si, dans l’espace qui l’environne, existe un mé-
lange d'ondes d'intensités semblables, mais de
longueurs différentes, elle choisit, pour ainsi dire,
dans ce mélange, d’abord les ondes qui se rap-
prochent le plus de la sienne propre, et ensuite,
avec des intensités décroissantes, celles qui en dif-
fèrent davantage. En sorte que le mélange d'ondes
existant dans l'antenne à la suite de ce choix dif-
fère de celui de l’espace environnant. Dans celui-ci,
nous avons supposé que toutes les ondes avaient
même intensité; dans l'antenne, elles ont été
« classées » en ordre décroissant : celles qui cor-
(1) Suite, voir p. 512.
respondent à l'accord exact prédominent; les
autres n'ont été captées que dans une proportion
moindre, et d'autant plus faible qu’elles diffèrent
plus des premières.
L'antenne accordée a donc opéré une sorte de
triage qui peut suflire si les ondes simultanées sont
de longueurs assez différentes ou si l'intensité de
celles qu’on désire recueillir est déjà dans l’espace
notablement plus grande que celle des autres.
Cest ce qui a lieu pour la réception des signaux
de la tour Eilfel lorsqu'on ne se trouve pas à une
très grande distance de Paris.
Les dispositifs décrits jusqu'ici, qui n'utilisent
que cette proprièté sélective de l'antenne accordée,
conviennent alors parfaitement. Mais, à grande
distance, lorsque, malgré l'accord, les signaux de
la four ne surpassent plus en intensité ceux de
postes moins puissants, mais plus rapprochés, il
devient nécessaire d'opérer un triage d'ondes plus
rigoureux. Dans le mélange existant dans l'antenne
et qui résulte déjà d'un premier triage, il faut
faire un deuxième choix, conservant le plus pos-
sible leur intensité aux ondes qu'on veut recueillir
et affaiblissant encore les autres. Ce deuxième
choix se fait exactement comme le premier, en
utilisant de nouveau les propriétés sélectives des
circuits accordés.
L'antenne n'est plus alors reliée directement au
circuit récepteur. Complétée par sa bobine d'ac-
cord, elle agit sur lui à petite distance, tout comme
agit sur elle à grande distance l'antenne du poste
d'émission. On fait, pour ainsi dire, de la télégra-
phie sans fil « en chambre » avec un poste d'émis-
sion et un poste de réception très voisins: la bobine
d'accord de l'antenne sert de poste d'émission; le
circuit récepteur, muni également d'une bobine
d'accord, constitue le poste de réception (fig. 48).
Les oscillations qui, sous l'influence des ondes
542
recueillies, se produisent dans l’antenne réceptrice,
sont, en effet, toutes proportions gardées, exacte-
ment comparables à celles qu’on provoque violem-
ment dans celle du poste d'émission. La bobine
d'accord, qui réunit dans un faible espace une
notable portion du circuit antenne-terre accordé,
émet donc jusqu’à une petite distance un mélange
d'ondes où un premier triage a déjà été fait. En
accordant le circuit récepteur sur les mêmes ondes,
il opère à son tour un second triage, en tout sem-
blable au premier, qui augmente beaucoup la pré-
dominance des ondes à recueillir sur les ondes per-
turbatrices.
On pourrait, pour augmenter encore la sélection,
faire agir ce second circuit sur un troisième égale-
ment accordé, et ainsi de suite (méthode des cir-
cuits intermédiaires purificateurs de Stone). Dans
la pralique ordinaire, l’utilisation d’un seul circuit
induit est suffisante. Sa bobine d'accord, disposée
MORE SEC M
br po HP
5ni + | hi y i i
LU plan
F1G. 18. — SCHÉMA DE LA RÉCEPTION PAR INDUCTION.
à proximité de celle du circuit antenne-terre, lui
sert en mème temps d'antenne réceptrice, pour
poursuivre la comparaison de télégraphie en
chambre faite plus haut.
Avec une bonne antenne, on peut recevoir les
télégrammes de la tour Eiffel à plusieurs centaines
de kilomètres au moyen du dispositif schématique
de la figure 18 qui n’est, en réalité, qu'une sorte
de dédoublement des montages précédemment
indiqués (cf. fig. 13). L'écartement des deux
bobines peut aller jusqu’à un ou deux mètres, sui-
vant les distances et suivant les dimensions de
l'antenne.
Accouplement. — A mesure qu'augmente cet
écartement, l'induction de la bobine antenne-terre
sur celle du circuit récepteur diminue : les radio-
télégraphistes disent que l'accouplement du secon-
daire avec le primaire devient de plus en plus lâche
ou de moins en moins serré. L'intensité des signaux
diminue en mêmetemps; mais, s’ilexiste dessignaux
COSMOS
14 NOVEMBRE 191%
perturbateurs qui n'ont pas encore été entièrement
éliminés par le second triage, on remarque que
leur intensité diminue beaucoup plus vite que celle
de ceux pour lesquels l’accord a été réalisé. Si les
différences de longueur d'onde sont suffisantes, on
peut arriver à les réduire tous successivement au
silence en ne laissant subsister que les signaux
choisis, un peu affaiblis, eux aussi, mais encore
nettement perceptibles.
Il se produit pour la « télégraphie en chambre »
le même phénomène que dans les communications
à grande distance. Dans Paris (accouplement rigide
entre le poste de réception et celui d'émission), les
signaux de la tour Eiffel impressionnent n'importe
quelle petite antenne, accordée ou non, et il est
impossible de se débarrasser d'eux pour écouter
une transmission lointaine. À grande distance, au
contraire (accouplement lâche), ces mêmes signaux
ne peuvent plus agir que sur les antennes spéciale-
ment accordées pour eux; un accord différent les
élimine facilement.
La diminution de l'accouplement est donc un
moyen précieux pour aider au second triage pro-
duit par l'accord des circuits primaire et secon-
daire. Elle facilite même cet accord dans une cer-
taine mesure en diminuant la gêne que s’apportent
mutuellement les deux circuits par leurs réactions
réciproques. On constatera, en effet, que souvent
l'intensité maximum du son n’est pas obtenue en
rapprochant le plus possible le secondaire du pri-
maire, mais, au contraire, en l'en écartant à une
certaine distance : le son augmente d’abord avec
l'écart, pour diminuer ensuite progressivement.
Amortissement. — En manœuvrant les curseurs
du dispositif schématique de la figure 18, on remar-
quera immédiatement une grande différence entre
l'accord obtenu au primaire et au secondaire. Le
premier sera très net: l'intensité du son croitra
jusqu’à une certaine position du curseur, pour
décroitre ensuite. Le second sera, au contraire,
très peu net, ou même manquera tout à fait : plus
grand sera le nombre de spires soumises à l'induc-
tion introduites dans le circuit, plus intense sera
le son obtenu.
Il n’y aurait à cela que des avantages, si des
signaux étrangers ne devaient pas être éliminés
par le triage que doit effectuer l’accord du circuit
secondaire qui justement fait défaut.
A quoi tient donc cette fâcheuse non-accordabi-
lité du secondaire? Elle tient à la présence du
détecteur et des récepteurs téléphoniques en série
dans le circuit récepteur.
Une antenne ou un circuit oscillant entrant en
vibration sous l'influence d'ondes pour lesquelles
ils sont accordés sont tout à fait comparables
à une balançoire à laquelle on donne périodique-
ment, au bon moment (c'est-à-dire avec le même
N° 1451
rythme que celui de ses oscillations propres), une
série de nouvelles impulsions.
Lorsque, à la fin de la première oscillation, elle
revient à portée de la main, prête à repartir dans
l’autre sens, elle a conservé l'effet presque entier
de la première impulsion. Abandonnée à elle-
mème, elle effectuerait une seconde oscillation
presque égale à la première; si une deuxième im-
pulsion lui est donnée au moment convenable, son
effet s'ajoute à presque tout l'effet de la première,
et l’amplitude d’oscillation augmente. Elle aug-
mentera encore à la troisième impulsion et ainsi
F1G. 19. — TÉLÉPHONES EN DÉRIVATION SUR LE DÉTECTEUR.
de suite: c’est un effet de résonance mécanique.
Il n’en est plus de même si les impulsions sont
données à contre-temps (cas d'une antenne non
accordée dont la période propre d'’oscillation est
différente de celle des ondes à recevoir) ou si les
frottements auxquels est soumise la balançoire
sont très considérables.
Dans ce dernier cas, s’il n’est pas donné de nou-
velles impulsions, les oscillations ont tendance à
s’amortir d'autant plus vite que les frottements
sont plus grands. Si de nouvelles impulsions sont
données, leur effet ne s’ajoute plus qu’à un faible
reste de celui des précédentes. L’amplitude d’oscil-
lation n’augmente que peu, ou même n’augmente
pas du tout si les frottements sont tellement
grands que tout l'effet d'une impulsion soit dépensé
au cours de l’oscillation qui la suit: la balançoire,
après un léger déplacement, revient presque im-
médiatement s'arrêter dans la position verticale.
Peu importe alors le moment où lui sera donnée
une nouvelle impulsion : elle doit chaque fois
repartir de la position de repos complet et ne fait
que suivre passivement et sans « préférence » pour
aucun rythme les mouvements qu'on lui imprime.
Il n’est plus possible d'obtenir des oscillations de
grande amplitude par addition des effets d'im-
pulsions successives: la balançoire n’a plus de
période propre d’oscillation, il n'y a plus ď’ « ac-
cord » possible entre ses mouvemenis et ceux de
la personne qui voudrait la faire osciller.
Il en est de même du circuit secondaire compre-
nant en série le détecteur et le récepteur télépho-
COSMOS
GNN ve nY 543
nique. Leur grande cé.t-<urtout la self-
induction considérable des téléphones jouent le
même rôle que les frottements dans le cas de la
balançoire : ils amortissent les oscillations jusqu’à
extinction complète. Nous avons employé, comme
moyen d'accord, une bobine à self-induclion mo-
dérée, pour ralentir les vibrations trop rapides
d'une antenne trop courte et augmenter ainsi sa
longueur d'onde; la self-induction très grande des
téléphones ralentit les oscillations au point de les
arrêter tout à fait. Comme la balançoire à grand
frottement, le circuit secondaire n’a plus de période
propre d'oscillation, il n’est plus accordable sur
une longueur d'onde définie.
Cette particularilé a été utilisée dans les mon-
tages en simple dérivation sur la self, où nous
ne pouvions, avec notre unique curseur, accorder
que le circuit antenne-terre; le circuit récepteur,
en partie confondu avec lui et ne présentant pas
de période propre d'oscillation, obéissait passive-
ment aux différences de potentiel alternatives se
produisant à ses extrémités. S'il avait été débar-
rassé de son amortissement considérable, il aurait
eu, lui aussi, une période propre d'’oscillation et
aurait dû être accordé, comme le circuit antenne-
terre, sur la longueur d'onde à recevoir. Les dis-
positions du circuit récepteur que nous allons
étudier maintenant ne conviendraient donc pas
au montage en dérivation sur la self. Il faudrait
disposer d'un second curseur pour accorder le cir-
cuit récepteur; c'est ce qui sera fait dans le mon-
tage en Oudin.
Un premier moyen pour diminuer l’amortisse-
ment du circuit récepteur consiste à ne pas dis-
Fia. 20. — UN CONDENSATEUR INTRODUIT DANS LE CIRCUIT
~ SECONDAIRE EMPÊCHE LA BOBINE D'ACCORD DE MBTTRE
LE DÉTECTEUR EN COURT-CIRCUIT.
poser les téléphones en série avec le détecteur
dans le circuit secondaire, mais à les monter en
dérivation sur lui, en dehors de ce circuit (fig. 49),
comme nous l'avons fait dans le premier montage,
qui ne comportait pas de bobine d'accord en déri-
vation (cf. fig. 4 et 10).
Mais il est facile de se rendre compte que la
présence de cette bobine très peu résistante met
maintenant en court-circuit les bornes du détecteur.
De sorte que, dans le cas d'un détecteur électroly-
tique, il est impossible d'appliquer à ses bornes la
force électromotrice nécessaire ; et, dans le cas
514
d'un détecteur à cristaux, le courant engendré par
les oscillations au niveau du détecteur passe
presque tout entier par la bobine d'accord et non
par le téléphone, beaucoup plus résistant.
Il faudrait pouvoir barrer le passage au courant,
tout en permettant aux oscillations de s'établir
librement dans le circuit secondaire.
Or, il existe justement un appareil jouissant de
la propriété d'opposer un obstacle infranchissable
aux courants ordinaires, tout en se laissant très
facilement traverser par les oscillations alterna-
tives. C'est un condensateur. On lintercalera,
comme le montre la figure 20, dans le circuit se-
condaire (1). Ce circuit, ne présentant plus mainte-
nant qu'un faible amortissement, sera suscep-
tible d'un accord beaucoup plus précis qu'’aupara-
vant, et le second triage d'ondes dù à cet accord
deviendra beaucoup plus rigoureux.
Le condensateur pourra ètre de dimensions à
peu près quelconques. On le constituera par une
dizaine de feuilles de papier d’étain de 8 à 10 cen-
F1G. 21. — LE DÉTECTEUR EST PLACÉ EN DÉRIVATION SUR
UN CONDENSATEUR. (MONTAGE FMPLOYÉ A LA TOUR EIFFEL
AVIC DÉTECTEUR ÉLECTROLYTIQUE.)
mètres de côté, par exemple, séparées par des
feuilles de papier huilé ou paraffiné. Le tout sera
serré par des vis entre deux planchèttes un peu
plus grandes portant deux bornes qui seront
reliées, l’une aux feuilles de rang pair, l’autre à
celles de rang impair. Le condensateur qu'on trouve
dans le socle d'une petite bobine de Ruhmkorff
convient parfaitement; ses connexions avec le
trembleur et le bobinage devront être supprimées.
Dans cette première disposition du secondaire,
le détecteur reste intercalé dans le circuit, et sa
résistance est encore une cause non négligeable
d'amortissement (2). La précieuse propriété des
condensateurs permet de le faire sortir, lui aussi,
(1) Ce condensateur a été oublié dans le montage
indiqué par la figure 11 bis de la brochure du Bureau
des longitudes. Tel qu'il est figuré, ce montage est
donc défectueux et ne peut donner aucun résultat.
(2) C'est pour éviter l'amortissement produit dans
le circuit antenne-terre par la présence du détecteur
que nous avons monté celui-ci en dérivation dès que
nous avons employé une bobine d'accord.
COSMOS
1% NOVEMBRE 191%
du circuit secondaire. On peut, soit le placer en
dérivation sur un nouveau condensateur (fig. 24),
soit monter le détecteur en dérivation sur un con-
densateur et les téléphones en dérivation sur un
autre (fig. 22). Le condensateur des téléphones
peut être celui qui nous a servi précédement ; il
y a avantage à ce que celui du détecteur soit
réglable.
& Ce montage peut ètre simplifié, en n'employant
plus qu’un seul condensateur réglable (fig. 23). On
F1G. 22. — LE DÉTECTRUR EST PLACÉ EN DÉRIVATION SUR
UN CONDENSATEUR, ET LES TÉLÉPHONES EN DÉRIVATION
SUR UN AUTRE CONDENSATEUR. (MONTAGE EMPLOYÉ A LA
TOUR EIFFEL AVEC DÉTECTEUR A CRISTAUX.
a alors la possibilité de faire varier rapidement
lamortissement du circuit secondaire et d'obtenir
ainsi à volonté un accord peu précis ou un accord
très net. Si la valeur des surfaces en regard dans
le condensateur est réduite à zéro, on retombe en
elfet dans le cas du montage en série, à grand
amortissement, à selection médiocre et à réglage
imprécis. On peut alors entendre, avec le mème
réglage, des postes de longueurs d'onde différentes;
c'est la position d'attente qui permet de s'aperce-
voir qu'une transmission est faite, même si on se
trouve sur un réglage assez éloigné de celui que
nécessiterait sa parfaite réception. En augmentant,
au contraire, la valeur des surfaces, l'amortisse-
F1G. 23. — SIMPLIFICATION DU MONTAGE PRÉCÉDENT,
ment diminue, la sélection s’améliore et le réglage
se précise (1). C’est la position dite de « syntonie »,
qui permet d'écouter un poste bien déterminé sans
être gêné par d'autres transmissions simultanées
de longueurs d'onde différentes.
(A suivre.) D" PIERRE CORRET.
(1) L’'accouplement se relâche en mêmetemps, comme
on le verra, ce qui contribue à augmenter l'efficacité
de la sélection.
Ne 1451
COSMOS
45
La boussole gyroscopique Sperry.
Toutes les marines du monde s'occupent actuel-
lement de la boussole gyroscopique; cet instrument
remarquable a atteint en peu de temps un degré
de perfection très élevé; il est dans la navigation
un auxiliaire précieux; son introduction y constitue
une étape aussi importante que le fût, il y a six
siècles, la mise en pratique de la boussole magné-
tique ; depuis six ans que fut imaginé le premier
instrument de ce genre, le système s’est répandu
d'une façon merveilleuse; dans ce laps de temps.
il s’est développé plus que la boussole magnétique
sur ses six siècles d'existence.
Les principes sur lesquels est bàsée la boussole
FIG. 1.
gyroscopique sont bien connus; il n’est plus permis,
en tout cas, de les ignorer en France, dans le pays
où ils furent reconnus, étudiés et énoncés par
Foucault (1).
On sait qu'un gyroscope lancé tend à se main-
tenir par l'effet de l’inertie dans le plan où il a été
mis en mouvement; s’il est soumis à une force
angulaire extérieure, son plan se déplace jusqu’à
ce que son axe de rotation soit parallèle à la force
agissante et que la direction de la rotation et celle
de la force concordent.
Prenons un gyroscope ordinaire; munissons-le,
pour la facilité, d’un petit disque en carton portant
les points cardinaux, comme il est montré à la
figure 1; fixons à la carcasse, de la façon indiquée
par cette même figure, deux bouts de ficelle:
lançons-le ; puis, le tenant par les ficelles, tournons
(1) Voir Ccsnos, n° 1385, t. LXV, p. 181.
sur les talons, comme il est montré à la figure 2,
nous verrons le gyroscope s'orienter de telle façon
que l’une des extrémités de son axe se dirige vers
notre tête qui représente, soit le pèle Nord de la
Terre (si nous tournons de droite à gauche), soit
le pôle Sud (si nous tournons en sens contraire).
Sans entrer dans l'étude théorique du phéno-
mène, nous pouvons dire que le déplacement du
gyroscope donne lieu à l'apparition d’une force
dite de précession qui est d’ailleurs la conséquence
PÔLE
NORD
PÕLE
SUD
FIG. 2.
logique de l’inertie, car le système n’est en équi-
libre que si le gyroscope tourne dans un plan paral-
lèle au couple auquel il est soumis et dans la
direction de ce couple, comme nous l'avons dit
plus haut.
Un gyroscope abandonné à lui-même en un point
quelconque de la surface de la Terre modifie son
orientation par le seul fait de la rotation terrestre:
il ne se trouve dans une position de stabilité défi-
nitive que si son axe est placé dans le plan du
méridien géographique.
On voit par là que, théoriquement, la boussole
gyroscopique est excessivement simple et, en outre,
qu’elle échappe aux causes d'erreur et de variation
qui affligent la boussole magnétique; en pratique,
cependant, on rencontre certaines difficultés: à
réaliser d’abord un système dont le mouvement
soit convenablement entretenu et ensuite une sus-
pension qui laisse à l'instrument la liberté voulue ;
546
enfin, de même que le mouvement terrestre, le
mouvement du bateau sur lequel est placée la
boussole tend à faire dévier le plan de celle-ci
FıG. 3. — BOITE ÉTANCHE
RENFERMANT L'’ALTERNOMOTEUR GYROSCOPIQUE.
d'une façon plus ou moins marquée, selon la
vitesse et la direction de marche et suivant la lati-
FIG. 4. — LA MÊME, VUE DANS UNE AUTRE POSITION
AVEC SON ANNEAU (ÉLÉMENT € SENSIBLE » DE LA BOUSSOLE).
tude, ces trois données modifiant la grandeur des
forces agissantes.
Le mérite de M. Sperry, comparativement à la
COSMOS
{4 NOVEMBRE 1912
plupart des inventeurs qui se sont occupés de
l'étude et de la construclion de boussoles gyrosco-
piques, est d’avoir su établir un instrument qui
satisfil à ces différentes conditions sans comporter
la suspension par flotteur à mercure que l’on em-
ploie dans d’autres systèmes et sans que les lec-
tures demandent les correclions mathématiques
exigées ordinairement; nous allons décrire som-
mairement les dispositions qu'il applique dans
ce but.
L'appareil comprend en premier lieu une roue
gyroscopique en acier sur laquelle est monté le
p 4 Tr. ta pur eps”
A
EN
A Oege e
F1G.5.— L'ANNEAU € FANTÔME » PORTANT LE LIMBE GRADUÉ.
rotor de l'alternomoteur électrique qui met le sys-
tème en mouvement; la roue avec le rotor et le
stator de l’alternateur sont placés dans une boite
où l’on fait le vide; la roue y tourne à une vitesse
de 8600 tours par minute sur des paliers à billes
graissés automatiquement ; la vitesse de rotation
est sensiblement moindre que dans les gyroscopes
allemands, par exemple, qui marchent à plus de
20 000 tours par minute : le système moteur absorbe
une puissance d’un peumoins d’un quart de kilo-
wall.
La boite du gyroscope est montrée à la figure 3
qui fait voir la tubulure par laquelle en est aspiré
N° 1451
l'air, ainsi que lemanomètre; la boite est elle-même
montée sur un anneau vertical sur lequel elle est
soigneusement équilibrée, de façon à pouvoir
prendre une position quelconque, comme il est
représenté à la figure 4.
L'anneau vertical constitue avec la boite ce que
l'on appelle l'élément sensible; il est suspendu par
des fils de piano sur un second anneau vertical (fig.5)
où il peut pivoter autour d'un axe vertical.
C'est par l'intermédiaire de cet anneau, portant
COSMOS
547
à cette fin des bagues de contact, que le courant
est introduit dans la boite pour aller au moteur
aclionnant la roue gyroscopique.
L'anneau à son tour pivote dans un palier
à billes supporté par un croisillon à quatre branches
(fig. 6) qui est fixé sur le bâti de l’appareil; ce
bâti est monté sur une suspension à la Cardan et
le tout est agencé de la façon indiquée par la
figure 7.
L'anneau vertical montré par la figure 5 est con-
F1G. 6. — BOUSSOLE COMPLÈTE, VUE PAR-DESSUS.
jugué à l'élément sensible électriquement; il þorte,
en effet, une roue dentée dans les dents de laquelle
engrène le pignon d’un petit moteur monté sur le
bâti.
La boite de la roue gyroscopique porte deux
galets de contacts; l’anneau susmentionné, deux
paires de contacts fixes; tout mouvement de lélé-
ment sensible par rapport à l'anneau vertical
modifie les contacts; ceux-ci contrôlent le circuit
du moteur dont nous venons de parler et le font
marcher dans un sens ou dans l’autre, selon le
sens de la déviation. |
L'anneau de suspension se déplace donc aussitôt
et il suit fidèlement tous les mouvements de lélé-
ment sensible, ce qui lui a fait donner le nom
d'anneau fantôme.
L'anneau fantòme porte, ainsi qu’on le voit à la
figure 5, le limbe gradué.
. Sur le bâti sont, d'autre part, agencés les dispo-
sitifs mécaniques qui corrigent automatiquement
518
les erreurs de l'instrument; ils sont actionnés à la
main au moyen de boutons moletés; ils servent,
l’un à la correction des erreurs de vitesse, l’autre
à la correction des erreurs de latitude.
Un indicateur de niveau permet de vérifier si
l'axe de rotation est bien horizontal et si le compas
aD. RS RES
A z De
Pre
Pr
F1G. 7. — BOUSSOLE SPERRY, HABITACLE OUVERT.
gyroscopique se trouve effectivement dans le plan
du méridien; d'autre part, un amortisseur est
inséré entre le fantôme et l'élément pour éliminer
les oscillations de l'instrument, dont les indications
sont ainsi rendues rapides et sûres.
COSMOS
1% NOVEMBRE 1912
Au mécanisme du fantôme est adapté un dispo-
sitif de transmission composé essentiellement d'un
commutateur distributeur qui commande les cir-
cuits des appareils indicateurs.
La boussole gyroscopique n'est pas employée
directement; elle sert comme appareil central,
mais les indications sont données au personnel
à l’aide de répétiteurs.
Le répétiteur est formé d'un disque gradué
actionné par un petit électromoteur dont le mou-
vement est controlé pas à pas par le distributeur
du compas principal; chaque émission, due à un
déplacement de l’élément dans un sens ou dans
l'autre, produit un déplacement concordant du
disque indicateur, et tous les appareils mis en cir-
cuit marchent synchroniquement avec le compas
principal.
L'installation comprend, pour le surplus, un
panneau de distribution, un moteur générateur
pour la production des courants alternatifs et des
courants continus nécessaires à l’actionnement du
gyroscope et des répétiteurs, des fusibles, des
lampes-pilotes, etc.
Elle est naturellement à peu près analogue à
celle des autres systèmes de boussole gyroscopique,
mais l'appareil central est beaucoup plus robuste
et sensiblement moins complexe que les appareils
antérieurs; le mode de suspension qui y est em-
ployé lui donne notamment une supériorité très
appréciable au point de vue du rendement et il en
résulte qu'avec une puissance absorbée équivalente
on arrive à un couple directeur notablement plus
fort (dix fois); ce couple est ainsi considérablement
plus grand que dans les meilleures boussoles ma-
gnétiques (250 fois).
Le compas gyroscopique Sperry se prête, en
outre, très bien à l’enregistrement des directions
de marche, problème que l’on n'est guère parvenu
à résoudre de façon satisfaisante avec la boussole
magnétique. H. MARCHAND.
Les méthodes modernes de diagnostic sérologique.
La lutte entre les microbes pathogènes et Îles
cellules de l'organisme malade donne lieu à la for-
mation de certaines substances spécifiques conte-
nues dans le sang et les humeurs. La détermination
exacte de ces substances, produits des réactions de
défense de l'organisme, s'obtient moyennant plu-
sieurs procédés de laboratoire, dont quelques-uns, à
cause de leur extrême délicatesse, ne donnent des
résultats appréciables qu'entre les mains de cher-
cheurs expérimentés, tandis que d’autres, exigeant
moins de précautions et comportant moins de
chances d'erreur, sont des procédés diagnostiques
à la portée de tous les médecins.
Nombre de lecteurs du Cosmos, qui, sans être
médecins, s'intéressent aux problèmes de la bio-
logie appliquée à la médecine, liront peut-être
avec profit ces quelques notes sur les différents
procédés modernes de diagnostic sérologique, c’est-
à-dire de diagnostic fondé sur les propriétés des
sérums d'individus atteints de différentes maladies.
Nous nous dispenserons de rappeler les théories
sur l’immunité en général, la vaccination, la for-
mation des anticorps et des antitoxines dans l'or-
ganisme, la lutte des microbes, de leurs poisons,
et, en général, de tous les principes organiques
hétérogènes avec les éléments phagocytaires fixes
No 1461
et mobiles et avec les substances défensives ver-
sées dans le sang et les humeurs, soit par ces élé-
ments phagocytaires, soit par les différentes cel-
lules des tissus. Nous supposerons tout cela connu
de nos lecteurs, pour lesquels ce journal a publié
nombre d'articles où ces questions ont été sufi-
samment, développées et remarquablement éclair-
cies, entre autres par le regretté D° L. Menard.
On trouvera dans ces articles une foule de rensei-
gnements précieux qui nous dispenseront d'entrer
dans les détails des théories immunitaires aux-
quelles se rattachent les procédés modernes de
diagnostic sérologique.
l. L'épreuve de l’agglutination.
De tous les procédés de diagnostic sérologique
des maladies microbiennes, celui de l'agglutination,
ou séro-diagnostic, est, sans contredit, le plus uni-
versellement connu et apprécié, le plus générale-
ment employé dans la pratique médicale. Il ne
faudrait pas croire, cependant, qu'il puisse être de
quelque secours dans tous les cas de maladies
d'origine douteuse: on l’a essayé pour le diagnostic
différentiel entre les maladies causées par Îles
principaux microbes : il n’a donné de résullats
vraiment satisfaisants, c'est-à-dire sûrs et facile-
ment appréciables, que dans l'infection causée par
le bacille d'Éberth et ses proches parents: la fièvre
typhoîïde.
C’est le premier des séro-diagnostics cliniques
trouvé par Widal.
« Lorsqu'on regarde au microscope une goutte
d’une culture en bouillon de bacilles typhiques,
les microbes, très mobiles, isolés les uns des
autres, sont régulièrement répartis dans le liquide :
la suspension est homogène. Si l’on ajoute un
peu de sérum d'un animal préparé par des injec-
tions de bacilles typhiques, ou dun homme qui a
la fièvre typhoïde, les bacilles perdent leur mobi-
lité et s’assemblent en amas: on dit qu’ils sont
agglutinés par le sérum. Si l’on ajoute le sérum
dans un petit tube contenant une culture en bouil-
lon, on voit à l’œil nu des grumeaux se former
et se déposer au fond du tube; l'agglutination est
aussi une sédimentation. Les sérums normaux ne
jouissent pas de cette propriété ou ne la possèdent
jamais au même degré. On mesure le pouvoir
agglutinant en éprouvant, sur un liquide conte-
nant des microbes en suspension, des dilutions
plus ou moins étendues de sérum. On dit que
tel sérum agglutine à 4 pour 50, 4 pour 100,
1 pour 1000, etc. » (1)
N a été démontré que les sérums normaux pré-
sentent assez souvent des propriétés agglutinantes,
quoique à un taux toujours très faible. Ces pro-
priétés semblent dépendre de la présence dans le
(1) E. Bunaner, Microbes et toxines, p. 291.
COSMOS
549
sang et les humeurs de certaines substances appe-
lées « agglutinines », qui réunissent en amas les
microbes contenus dans les cultures liquides. La
quantité de ces substances augmente notablement
lorsque, soit à cause d'un traitement immaunisant
au moyen des injections répétées de microbes
atténués ou morts, soit à cause d’une infection
accidentelle, les éléments cellulaires de l'orga-
nisme entrent en activité défensive vis-à-vis des
microbes infectieux. La production intensive des
agglutinines dans l’organisme semble bien liée à
l'activité des processus défensifs, car le taux de
l’agglutination dans les cas de fièvre typhoïde très
grave s’abaisse et peut même se réduire à zéro.
Il n'existe pas seulement des agglutinines micro-
biennes ; il y a des agglutinines globulaires, ca-
pables d’agglutiner les globules rouges du sang.
Par exemple, le sérum de cobaye agglutine les glo-
bules rouges du lapin et de la poule; celui du lapin
agglutine faiblement les globules rouges du cobaye,
de la poule, du rat et mème de l’homme: celui de
la poule agglutine faiblement les globules rouges
du chien, du rat, du lapin, du cobaye, du pigeon;
celui de la chèvre agglutine fortement les globules
rouges du rat, etc. De mème que les agglutinines
microbiennes, les agglutinines globulaires se
trouvent en grande quantilé dans le sérum des
animaux inoculés méthodiquement avec des glo-
bules rouges ou avec le sang d'animaux d'espèces
différentes.
L’agglutination du bacille typhique, qui permet
de pratiquer si aisément le diagnostic de la fièvre
typhoide, n'est donc pas un cas parliculier et
rentre dans une grande loi de la pathologie géné-
rale. Mais, pour des raisons qui, en partie au moins,
nous échappent, l'organisme ne réagit pas toujours
de la méme façon aux infections, spontanées ou
expérimentales, causċes par les bactéries patho-
gènes. L'organisme humain, par exemple, peut
lutter avantageusement contre l'infection causée
par le pneumocoque, l'agent infectieux de la pneu-
monie; et pourtant, le pouvoir agglutinant des
malades et des convalescents de pneumonie s'est
toujours montrée vis-à-vis du pneumocoque remar-
quablement faible. Il faut en conclure que, dans
le mécanisme complexe de la défense antimicro-
bienne de l'organisme, entrent en jeu différents
processus selon la nature des diverses infections.
Par exemple, dans certaines maladies microbiennes,
entre en jeu spécialement l'activité productrice
des agglutinines: c'est le cas de la fièvre typhoide.
Voyons comment s'exécute, pratiquement et faci-
lement, le séro-diagnostice typhique dans la plu-
part des laboratoires de bactériologie clinique.
La méthode la plus rapide, qui exige cependant
l'emploi du microscope, est la suivante :
Aussitôt qu'on a décidé de pratiquer le séro-dia-
gnostic dans un cas suspect de fièvre typhoïde, on
550
prélève d’abord, au moyen d’une légère saignée au
bras du malade, la petite quantité de sang néces-
saire, qu’on recueille dans une éprouvette et qu’on
laisse en repos dans un endroit frais, de façon à
permettre au sérum de se bien séparer du caillot.
D'autre part, on ensemence avec une petite quan-
tité de cullure sur gélose de bacilles typhiques un
ou deux tubes de bouillon peptonisé, qu'on laisse
à l’étuve à 37° pendant douze à vingt-quatre heures,
jusqu'à ce que le bouillon se présente uniformé-
ment et légèrement trouble. Dans une goutte de
cette culture examinée au microscope, on aperçoit,
comme nous l'avons déjà dit, des myriades de
bacilles typhiques isolés les uns des autres et ani-
més de rapides mouvements de rotation et de
translation.
On aspire alors dans une pipette en verre quelques
centimètres cubes de culture, et on en fait tomber
successivement 25, 50, 100 gouttes, etc., dans une
série de petites capsules en porcelaine ou de verres
de montre. Ensuite, avec la même pipette, soigneu-
F1G. 1. — BOUILLON DE CULTURE DE BACILLES TYPHIQUES.
À, avant l'agglutination ; B, après.
sement lavée et séchée, on prélève une petite
quantité de sérum, dont on laisse tomber une
goutte dans chacune des capsules. On mélange
bien le contenu de chaque capsule au moyen d’une
anse de platine, et après quelques minutes de repos
on dispose le matériel pour l’examen microsco-
pique.
A cet effet, on se sert généralement d'une
grande lame de verre épais, creusée sur une des
faces de plusieurs godets arrondis. On dépose une
goutte de chaque mélange sérum-bouillon sur une
lamelle en verre très mince (lamelle couvre-objet);
puis on retourne avec précaution chaque lamelle,
et on la pose délicatement sur un des godets de la
lame porte-objet, dont le bord a été enduit de va-
seline de façon à empêcher l'évaporation de la
goutte suspendue, par capillarité, à la lemelle. On
réalise ainsi, comme disent les techniciens, une
série de cultures ex cellule, ou en goutte pen-
dante, qui peuvent être examinées très commodé-
ment au microscope.
L'aspect des gouttes pendantes dans lesquelles
s'est réalisée l’agglutination est, dans les cas fran-
COSMOS
1% NOVEMBRE 1919
chement positifs, tellement caractéristique qu'il
ne saurait y avoir facilement d'erreur d’apprécia-
tion. Les bacilles typhiques apparaissent dans le
champ du microscope réunis en amas confluents
ou distincts, les uns très considérables, les autres
plus petits. On ne saurait mieux caractériser
l’aspect de la culture agglutinée qu’en la comparant
à la carte d'un archipel (1).
Les bacilles agglutinés ont perdu leur mobilité;
cependant, ce n’est pas sur cette perte de mobilité
qu'est fondé le séro-diagnostic. Celui-ci peut s'exé-
cuter aussi bien avec des bacilles vivants qu'avec
des bacilles tués à la chaleur.
Lorsqu'on ne dispose pas d'un bon microscope,
on peut exécuter le séro-diagnostic en plaçant les
mélanges titrés de sérum-bouillon dans une série
de tubes à essai ou de petites éprouvettes, qu'on
laisse en repos dans l’étuve à 37°. « Au bout d'un
temps variant entre quatre et sept heures — dit
M. Widal, — quelques grumeaux apparaissent
(dans le tube où se produit l’agglutination), et, en
douze à vingt-quatre heures, le tube a pris un
aspect tout à fait caractéristique : les microbes se
sont amassés au fond du tube pour y former un
précipité de petits flocons blanchâtres et laissent
le bouillon presque complètement clair. Par agita-
tion, ces flocons n'arrivent pas à se dissoudre com-
plètement; ils laissent toujours un précipité nageant
dans le liquide sous forme d’une poussière très
fine. » Le tube témoin (celui où on n’a mis que du
bouillon typhique) est trouble dans son ensemble,
et la distinction entre la culture agglutinée et la
culture normale éclale au premier coup d'œil.
Il y a des cas où le malade présente des symp-
tòmes cliniques qui déposent pour la fièvre typhoïde,
tandis que le séro-diagnostic est douteux ou faible.
Il faut alors envisager deux possibilités: ou le
malade est en des conditions très graves et ne peut
fabriquer des substances agglutinantes, ou bien le
microbe qui est la cause de sa maladie n'est pas
tout à fait identique, quoique semblable et même
proche parent, au bacille typhique, c’est-à-dire
appartient à la catégorie des bacilles paratyphiques,
dont on connait et lon cultive dans les labora-
toires plusieurs variétés. Le doute sera éclairci
lorsqu'on aura répété le séro-diagnostic au moyen
d'une culture de bacilles paratyphiques, car ces
bacilles sont, eux aussi, facilement agglutinés par
le sérum des sujets qu’ils ont infectés.
D'autre part, le séro-diagnostic peut être positif
en l'absence de symptòmes de fièvre typhoide,
lorsque le malade a déjà souffert de cette maladie,
car les propriétés agglutinantes du sérum des
typhiques se conservent, après la maladie, pendant
plusieurs années.
L'agglutination a été appliquée au diagnostic de
(1) Tarcuerri et Goccra : Microscopie et bactériologie
clinique, p. 473.
N° 1451
plusieurs maladies infectieuses, mais elle donne
les meilleurs résultats dans la fièvre typhoide,
maladie que tous les praticiens ont l’occasion de
soigner. Nous devons cependant rappeler qu'elle
rend aussi des services très appréciables pour le
diagnostic de la dysenterie bacillaire, de la ménin-
gite cérébro-spinale épidémique et du choléra.
MM. Arloing et Courmant l'ont essayée dans des
cas douteux de tuberculose, selon une méthode qui
exige, cependant, beaucoup de pratique. Somme
toute, la réaction agglutinante ou réaclion de
Widal reste encore l'épreuve de choix pour le dia-
gnostic de la fièvre typhoide.
On a recours à l’agglutination pour identifier
sûrement les germes suspects que l'on trouve, en
temps d’épidémie, dans les eaux douteuses et dans
les selles des malades. La réaction, en effet, per-
met très bien, lorsqu'on a en main un sérum agglu-
tinant, par exemple le bacille typhique, d'identifier
à celui-ci tout germe facilement agglutinable trouvé
dans l’eau d’une citerne ou d’un puits. De même,
en temps de choléra, on emploie le sérum agglu-
tinant d’un animal préparé par plusieurs injections
immunisantes d'un vibrion cholérique pour s'assu-
rer de l'identité des germes microbiens isolés d’une
eau suspecte ou d’une diarrhée cholériforme.
L'agglutination est donc aussi une pierre de
touche pour l’étude des races microbiennes. Elle
est d'un grand secours au médecin hygiéniste.
Il. Le précipito-diagnostic.
Toutes les albumines, végétales et animales,
injectées à plusieurs reprises à des animaux du
laboratoire, déterminent le développement dans
leur sang et leurs humeurs de certains anticorps
appelés « précipitines », qu’on trouve en plus ou
moins grande abondance dans le sérum et qui con-
fèrent à celui-ci la propriété de former un préci-
pité lorsqu'on le mélange à des solutions limpides
des susdites albumines.
Par exemple, lorsqu'on injecte à un lapin, à plu-
sieurs reprises, du sérum de cheval, le sérum du
lapin ainsi immunisé forme un précipité lorsqu'il est
mélangé ou porté simplement ‘en contact avec du
sérum de cheval.
On connait les remarquables résultats que peut
fournir à la médecine légale l’emploi du précipito-
diagnostic. « Un homme est accusé d’assassinat,
on a saisi chez lui un vêtement taché de sang;
l'accusé (c’est, je suppose, un boucher) prétend
que c’est du sang de bœuf; la justice demande que
l’on fasse le séro-diagnostic (le précipito-diagnostic)
de ces taches. On en découpe quelques-unes dans
le vêtement, on les lave dans de l’eau salée, et
avec ce liquide on fait l’épreuve de la précipitation :
le liquide donne un précipité avec un sérum d’ani-
COSMOS
So!
mal préalablement traité avec du sang humain, si
la tache était de sang humain. » (4)
Il y a des précipitines albuminoïdes et des
précipitines bactériennes, lesquelles ne sont qu'une
espèce des premières. Prenons une culture en
bouillon de bacilles typhiques; en la filtrant,
nous obtenons un liquide clair ne contenant pas
de microbes. Ajoutons-y un peu de sérum antity-
phique très actif; le mélange se trouble; il se forme
un précipité qui se dépose au fond du tube. Au
lieu d’agglutination, nous avons eu une précipita-
tion, c’est-à-dire la formation d’un nuage de petits
flocons blanchâtres, dû à une réaction qui se pro-
duit entre le sérum antityphique, riche en anti-
corps spécifiques pour le bacille d'Eberth, et les
substances protoplasmiques, provenant du corps
SEE
FIG. 2. — MATÉRIEL
EMPLOYÉ POUR LE PRÉCIPITO-DIAGNOSTIC.
A, tube à essai; B, pastilles de chlorure de sodium; C, enton-
noir filtrant spécial; D, éprouvette; E, sérum précipitant.
ou du métabolisme des bacilles, contenues dans le
bouillon de culture filtré.
On a essayé d'utiliser la réaction précipitante
pour le diagnostic de différentes maladies infec-
tieuses. Le sérum des malades contenant des anti-
corps spécifiques pour les microbes auxquels est
due la maladie, il n’y a qu’à mettre en contact ce
sérum avec un extrait aqueux et limpide des bac-
téries auxquelles on croit devoir attribuer la
maladie. Cependant, cette épreuve est, dans la pra-
tique, beaucoup plus délicate que celle de l’agglu-
tination, ce qui fait qu'on y a recours plus rare-
ment. Il est préférable, afin d'éviter plus facilement
les chances d’erreur, de ne point mélanger brus-
quement et intimement les deux réactifs — sérum.
(4) E. Burner, op. cit., p. 294.
552
et extrait microbien, — mais de les porter lente-
ment en contact, de façon à les stratifier l’un sur
l’autre. Il se forme de la sorte après quelques
minutes, dans l’éprouvette où se produit la réac-
tion, une opacité circulaire bien évidente à la sur-
face de contact du sérum et de l'extrait micro-
bien. C’est ce qu’on appelle la « réaction zonale ».
I est facile d'exécuter, même hors du labora-
toire, la réaction zonale moyennant un petit appa-
reil très simple, proposé par M. Ascoli de l'Institut
sérothérapique milanais. Cet appareil comprend :
4° Une éprouvette à pied, qu'on remplit d’abord,
jusqu’à une certaine hauteur, de sérum ; 2° un petit
entonnoir, dont le tuyau très mince est recourbé
de façon que son orifice se trouve en contact avec
la paroi de l’éprouvette, tout près de la surface du
sérum; 3° un filtre en amiante, qu'on place dans
l’entonnoir pour filtrer l'extrait microbien.
L'usage de cet appareil est très simple. On super-
pose l’entonnoir, muni du filtre en amiante, à
l’éprouvette contenant le sérum, et on y verse l’ex-
trait microbien ou, tout simplement, un bouillon
de culture. Le liquide contenant les substances
protoplasmiques microbiennes vient en contact
tout doucement avec le sérum, et si celui-ci contient
des anticorps correspondants, la réaction zonale
apparait d'une facon évidente (1).
COSMOS
14 NOVEMBRE 1942
Lorsqu'il s’agit d'identifier la nature de certaines
bactéries contenues, par exemple, dans le pus, les
eaux suspectes, etc., on dissout le matériel à exa-
miner dans de l’eau salée physiologique et on verse
le mélange dans l'entonnoir après avoir mis dans
l’éprouvette un sérum d'animal immæmunisé au
moyen d'injections convenables des bactéries qu'on
cherche à identifier dans le matériel soumis à
l'examen.
Nous ajouterons, par curiosité, que le précipito-
diagnostic est également utilisé pour le dépistage
de certaines fraudes dans la fabrication des pro-
duits alimentaires. « Un marchand est accusé de
vendre de la saucisse de cheval sous l'étiquette de
saucisse de porc. On fait avec de l'eau un extrait
de la viande incriminée. Si la saucisse est de
viande de cheval, cet extrait donne un précipité
avec un sérum d'animal préalablement traité au
moyen d'injections d'extrait de viande de cheval.
Le diagnostic est encore possible avec des viandes
fumées et desséchées. Par la même méthode, on
peut diagnostiquer le lait de vache, de chèvre, etc.
La réaction est sensible au 1/100 009, c’est-à-dire
qu'elle donne une réponse avec un extrait ne con-
tenant que le 1/100 000 de son poids de l’albumine
à déterminer. » (4)
(A suivre.)
Lastronomie physique et la théorie cinétique des gaz.
Les récentes découvertes dues à l'application des
théories cinétiques et ionistiques des gaz vont nous
ouvrir un vasle champ d'études astrophysiques.
Nous savons que la lumière constitue le prin-
cipal moyen d'investigation dans le champ céleste;
aussi est-ce à cette forme vibratoire de l'énergie
que nous nous adresserons de préférence pour
étudier la structure physique et chimique des
astres, ainsi que leurs constantes dynamiques.
L'astronomie physique, de création relativement
récente, est redevable de ses rapides progrès à
l'étude spectroscopique des gaz ainsi qu'aux rela-
tions qui existent entre l'émission et l’absorption
lumineuse. C’est ainsi que nous avons appris à
connaitre la structure probable du Soleil et des
étoiles, ainsi que l'unité dans la composition chi-
mique de l'univers.
C'est anssi, par l'application du principe Döppler-
Fizeau, que de nouvelles voies ont été ouvertes à
la physique céleste, et c’est à l'application du phé-
nomène de Zeeman, reliant étroitement les effets
lumineux aux effets électromagnétiques, que nous
avons pu prendre connaissance du champ magné-
tique solaire. Le déplacement des raies spectrales
par la rotation ou la translation des astres, ou
(1) A. Ascour: Eléments de séroloyie, p. 126.
seulement d'une partie de leur masse, fournit de
précieuses indications pour la mécanique céleste.
Le déplacement des raies par la pression gazeuse
donne, de son côté, un moyen d'évaluer la pression
de la chromosphère. Enfin, les lois du rayonnement
des corps noirs constituent une méthode d'évalua-
tion de la température extérieure des astres, grâce
aux récentes études de divers physiciens, en parti-
culier de MM. Buisson et Fabry (2); ce nouveau
champ d’études de la physique céleste s'annonce
comme devant être fertile en découvertes.
Ces nouvelles études sont basées sur les varia-
tions que subissent la largeur des raies spectrales
suivant la pression, la température et la masse des
particules gazeuses.
Des relations simples paraissent exister entre
les trois variables précédentes, et la connaissance
de deux d'entre elles conduit facilement à la déter-
mination de la troisième.
(1) E. BunxeT: op. cit., p. 214. — On prétend que la
réaction précipitante a réussi même surdes émulsions
de parcelles de momies de 3 000 à 5 000 ans.
(2) Comptes rendus de l’Académie des sciences,
t. CLIV. Avril-mai 19142. Journal de physique, juin 1912,
La largeur des raies spectrales et la théorie cinétique
des gaz, Buisson et Fasrr.
No 1451
Rappalons brièvement le principe sur lequel se
sont besés MM. Buisson et Fabry pour atteindre ces
résultats.
La rotation des atomes autour des molécules, et
des électrons autour des atomes, dans un milieu
gazeux très raréfié, s'effectue avec une vitesse
excessive, autour d’orbites minuscules.
Les passages de la particule aux deux extrémités
d'uamèmediamètre orbital constituent.une véritable
vibration, dont la période peut atteindre celle des
ondes lumineuses et dont l'amplitude ou diamètre
orbital est de même ordre que eelle des lougueurs
d'ondes lumineuses.
Les vibrations électro-magnétiques qui résultent
de la rapide oscillation de le particule chargée
d'électricité se transmettent au loin, sous forme
de vibrations lumineuses, par l'intermédiaire de
l’éther environnant. Telle est du moins l’explica-
tion que l’on donne actuellement des effets lumi-
peux dans les gaz raréfés!
L'onde lumineuse se manifeste à nos yeux sous
la forme d'ume raie speetrale, dont la largeur
dépend de la vitesse oscillatoire de la particule,
laquelle est elle-même déterminée par le rapport V
déduit de la théorie einétique des gaz:
V = A y I
m
dans lequel :
À est une constante connue.
T est la température du gaz raréfié.
m est [la masse de Ia particule en mouvement.
La largeur L de la raie est elle-même calculée
à l’aide de la relation :
L= y T
m
dans laquelle 1 représente la longueur d'onde de
la vibration moyenne à laquelle appartient la raie
spectrale.
Cette dernière relatior montre que les raies les
plus étroites sont produites, pour une longueur
d'onde déterminée, par les particules en mouve-
ment qui ont la masse la plus grande, et qui sont,
en outre, soumises à la température la plus basse.
En pratique, il est possible de mesurer facile-
ment la largeur des raies, à l'aide des phénomènes
d’interférence. °
En effet, si l'on considère un système ordinaire
de franges d’interférence, à deux ondes lumineuses,
dans lequel ła différence de marche est égale à x,
l'ordre d’interférence n est donné par:
n =
ts
Les franges deviennent nettement visibles quand
n est petit; puis cette visibilité décroit au fur et à
mesure que # croit, jusqu’à une limite où elle dis-
parait.
COSMOS
553
Cette limite est précisément donnée par ls
relation suivante :
N = 0,441
À __ à
e 23Xe
avec e égal à la largeur.
En faisant: 2,3 : = å, on a: N = À.
La limite de visibilité des franges est done
atteinte quand il y a discordance entre les interié-
rences produites par les radiations de la longueur
d'onde à et celles de la longueur d'onde :
â
1+ 3
Le nombre N peut être appelé la finesse des raies,
et, d’après la théorie cinétique des gaz, ce nombre N
pourra être également exprimé par la relation sui-
vante :
N — 1,2 1 y 2
x< T
Dans la pratique, c'est cette dernière relation
que l’on applique expérimentalement.
Si l’on admet que les gaz sont suffisamment raré-
fiés pour que les perturbations dues aux chocs
moléculaires soient pratiquement négligeables,
l'effet Dôüppler-Fizeau subsiste seul, et la relation
précédente est applicable avec une rigueur suffi-
sente.
Diverses vérifications expérimentales ont, du
reste, permis de vérifier l'exactitude des données
théoriques. (est ainsi que Michelson a déterminé
expérimentalement les radiations produites par
des vapeurs métalliques à faible pression, et la
limite N d’interférence concorde avec celle déduite
de la théorie.
On détermine en valeur absolue la température F
de l’étuve où le gaz est chauffé ainsi que la masse
atomique m du corps. C'est ainsi que l’on trouve
pour le mercure :
m = 200)
T = 400 absolus.
L'observation donne :
N = 770 000
La théorie donne :
N = 860 000
Pour le cadmium on trouve :
mga = 112
T = 600!
L'observation donrie :
N = #50 000
La théorie :
N = 520 000.
Si l'on étudie des gaz simples tels que l’hélium,
le néon, le krypton, en opérant à la température
St
ordinaire, c'est-à-dire à 290° absolus, puis à la tem-
pérature de l'air liquide, soit 91° absolus, on trouve
des résultats dont la concordance est remarquable.
Le tableau ci-après en fait mention:
TEMPÉRATURE
ORDINAIRE Air
a
Nasse | Longueur
atomique| d'onde
m x
liquide
N observe N calcule IN” observe
5 876
5 852 |324 0001321 000| 515 000
5 5:0 | 600 000! 597 000! 950 000
Hélium . $
Néon... 20
Krypton.| 83
144 000! 1## 0001251 000! 1,66
1,60
1,58
N' ; , ;
Les rapports N sont égaux à la racine carrée
du rapport inverse des températures absolues; ces
rapports devraient être sensiblement égaux à 1,78:
il suffit d'une petite différence entre la température
du gaz et celle de l'enceinte de létuve pour expli-
quer le léger écart qui existe entre ce dernier chiffre
et ceux du tableau. Des mesures plus précises con-
firmeront très probablement ce résultat.
Si Pon détermine par lexpérience les limites
d'interférence pour l'hélium et l'hydrogène, on
constate que les diverses raies spectrales qui sont
émises par ces gaz à l'état incandescent se rap-
portent à des masses qui correspondent à leurs
poids atomiques respectifs.
Il parait donc logique de conclure de ce fait que
la masse des particules incandescentes en mouve-
ment, qui constituent les centres d'émission lumi-
neuse, sont les atomes eux-mêmes et non des parti-
cules de masse moindre. i ' m
D'autre part, si l'on cherche à déterminer la
température des molécules gazeuses d'une masse
déterminée produisant des effets interférentiels
donnés, on arrive à deux conclusions opposées.
Dans l'une. la température seule est la cause de la
luminosité des gaz; dans l’autre, le gaz émet de la
lumière à une température extrèmement basse,
voisine du zéro absolu.
Il semble cependant possible de concilier ces
deux faits opposés en admettant que les effets
cinétiques dans Îles gaz où ils se manifestent ne
procèdent pas de causes semblables.
L'influence de la pression et des chocs molécu-
laires ainsi que les effets d'ordre purement ionis-
tique doivent s'y manifester d'une façon complè-
tement différente.
Les résuitats d'ensemble étant acquis, il a été
possible de les appliquer aux recherches d'astro-
physique.
On peut déjà en déduire une méthode indirecte
pour determiner la température extérieure du Soleil.
En cet, si l'on étudie les raies noires de l'hydro-
gene, du sodium et du fer qu'émet l'atmosphère
COSMOS
14 NOVEMBRE 1912
solaire, et si l’on admet une pression de six atmo-
sphères dans cette couche gazeuse, d’après la
mesure du déplacement de ces raies vers le rouge,
on calcule que, dans la région 4400 du spectre
solaire, les raies du fer auraient une largeur de
0,068 angstrôom, au lieu de 0,070 que donne
l'observation directe, la température extérieure dn
Soleil étant supposée de 6 000° absolus.
On voit immédiatement que la concordance est
suffisamment évidente pour en conclure que le
chiffre de 6 000? admis pour la température exté-
rieure du Soleil doit être bien voisine de la réalité.
Ce résultat important vient, du reste, confirmer
ceux qui ont été déjà obtenus dans ces dernières
années à l’aide de méthodes entièrement diffé-
rentes.
On a toutefois constaté que les raies H et K du
calcium ont une largeur incomparablement plus
grande que celle déduite de la théorie. Il y aurait
probablement un grand intérét à rechercher la
cause de l'exception précédente, qui n'est, sans
doute, qu'apparente. Il résulterait peut-être de
ces recherches quelque découverte intéressante
dans la cinétique des gaz ou dans l'étude de la
constitution physique du Soleil.
Il serait également très intéressant de déterminer
la largeur des raies spectrales qu'émettent les pro-
tubérances solaires. Si l’on admet une faible pres-
sion dans ces masses gazeuses, ce qui semble pro-
bable, on aurait un moyenindirect d’en déterminer
la température. L'intérêt n’est pas moindre dans
la détermination de la température des nébuleuses.
Si l’on étudie, par exemple, la nébuleuse d'Orion,
l'analyse spectrale y décèle, à còté de l'hydrogène
et de l'hélium, la présence de deux corps inconnus,
dont l'un a été appelé nébulium. Ce corps est carac-
térisé par deux raies 4939 et 5007, dont l'intensité
lumineuse est remarquable. Un autre corpsinconnu,
non dénommé, est caractérisé par une forte raie
ultra-violetle 3726. — Dès que nous serons fixés
sur la nature des substances qui émettent les raies
spectrales précédentes, nous connaitrons, par cela
mème, les poids atomiques de ces substances, et il
nous deviendra possible, par l'application de la
méthode interférentielle de MM. Buisson et Fabry,
d'en déduire la température de la nébuleuse.
Inversement, la congaissance de cette tempéra-
ture nous permettra de déduire le poids ato-
mique des substances inconnues, dont les raies spec-
trales donnent des franges d'interférence détermi-
nées.
Les méthodes physiques actuellement connues
restent impuissantes pour nous renseigner sur les
diverses questions précédentes, et l’on prévoit faci-
ment tout l'intérêt qu'il y aurait à les résoudre
par la nouvelle méthode de MM. Buisson et Fabry.
On connait déjà la raie 3726 qu’émet la nébu-
leuse d'Orion, et l'on suppose qu'elle pourrait bien
N° 1451
appartenir à l’oxygène; mais on ignore encore la
valeur exacte de la longueur d'onde correspon-
dante. Il ne nous est donc pas possible de trancher
cette question d'une façon définitive.
Il sera également facile de déterminer les
vitesses radiales des divers points d’une nébuleuse
et d'en étudier la circulation gazeuse lorsqu'on
aura mieux précisé les données du problème
précédent.
MM. Buisson et Fabry ont déjà commencé une
étude expérimentale de ces intéressants problèmes
d’astrophysique.
Ils ont établi un appareil interférentiel que l'on
dispose au-devant d'une lunette ou d'un télescope.
L'image amplifiée de la nébuleuse ainsi que l’image
des anneaux interférentiels sont projetées sur une
plaque photographique où elles se superposent.
Les premiers résultats qui ont été déjà obtenus
par ces habiles expérimentateurs sont des plus
encourageants.
C'est ainsi que, après une pose de quarante-cinq
minutes, les clichés ont montré de beaux réseaux
d’interférence correspondant à une différence de
marche de 4 millimètres, sous le numéro 3 726,
qu’on al{tribue à l'oxygène. .
COSMOS
555
Bien qu'on ignore encore le poids atomique exact
de ce corps, il semble probable qu’il est peu élevé,
et l'on peut déjà conclure de ce premier résultat
que les interférences d’ordre 10 600 correspondent
à une basse température de la nébuleuse d'Orion.
Si cette conclusion se confirme on devra admettre
que l’incandescence des gaz qui composent cette
nébuleuse est probablement d'origine électrique.
On voit immédiatement quelles conséquences
importantes l'astronomie physique peut déjà tirer
de ces premières déterminations. .
Lorsque, d’autre part, il nous aura été possible
de préciser la température absolue de la nébuleuse
d'Orion, nous aurons en main les données néces-
saires pour déterminer le poids atomique du nébu-
lium et des autres substances inconnues qui con-
stituent la masse principale de ces mondes éloignés.
D'autres déductions pratiques importantes surgi-
ront probablement de la précieuse découverte de
MM. Buisson et Fabry. Les astronomes ne sauront
trop remercier les habiles physiciens français de
leur avoir ouvert cette nouvelle voie dans l'étude
de la physique stellaire.
A. NODON,
Président de la Soc. astr. de Bordeaux.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 4 novembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Élection. — M. Mancuaz a été élu membre de la
section d'Anatomie et de Zoologie par 42 suffrages sur
60 suffrages exprimés, en remplacement de M. Joannès
Chatin, décédé.
La Conférence internationale de Pheure, —
M. Bicourpax résume les travaux de la première Con-
férence internationale de l'heure qui s’est réunie à
Paris, à l'Observatoire, le 45 octobre, et qu'il a présidée:
quinze gouvernements étrangers étaient représentés.
M. Cu. Lazemanp fait hommage à l’Académie d’un
exemplaire du Projet d'organisation d'un service inter-
nalional de l'heure qu'au nom du Bureau des longi-
tudes il a présenté à la Conférence internationale de
l'heure, et il y joint quelques explications sur la
genèse et la portée de ce projet.
Dans ses grandes lignes, ce projet a été unanime-
ment adopté par la Conférence. En outre, sur la pro-
position du chef de la délégation allemande, M. le pro-
fesseur W. Fæœærster, Paris a été choisi comme siège
du futur Bureau international de l'heure, avec la tour
Liffel comme poste central de signaux, huit stations
auxiliaires réparties sur le globe devant recevoir de
celle-ci l'heure universelle à transmettre ensuite
autour d'elles.
La liste ci-après indique les stations qui seront vrai-
semblablement en état, au 4° juillet 1913, de jouer le
ròle de centres d'émissions horaires, et les heures
auxquelles devront être faites ces émissions:
Heures,
temps civil de Greenwich,
h
Par rer 0 (minuit)
San Fernando (Brésil) ........... 2
Arlington (Etats-Unis)............ 3
Mani: ut 4 (provisoire)
Mogadiscio (Somalie italienne)... 4
Tombon t toUs cnni sree ia G
PADS iaae aE NAER 410
Norddeich-Wilhelmshaven ....... 42 (midi)
San Fernando iBrésil)}............ 16
. Arlington (Etats-Unis)....,,,..... 17
Massaouah (Erythrée).,.......... I8
San FrAnCiSCO mcm ends 20
Norddeich-Wilhelmshaven........ 22
Les centres d'émissions horaires feront usage d'une
longueur d'onde uniforme d'environ 2500 mètres.
L'émission de ces signaux se fera d’après un schéma
uniforme, différent du schéma actuel de la tour Eiffel :
ils dureront en tout trois minutes, y compris les
signaux d'avertissement, depuis 51"0° jusqu'à 600".
Nous reproduirons prochainement ce schéma.
Sur l'origine des planètes et de leurs
satellites. — Guidé par des analogies expérimen-
tales, M. Ka. BinkELAXD a été amené à penser qu'il
existe, dans les systèmes solaires en évolution, des
556
forces d’origine électromagnétique du même ordre de
grandeur que celle de la gravitation, et que ces forces
agissant de concert ont donné naissance autour du
Soleil à des planètes ayant des orbites presque circu-
laires, situées à peu près dans le mème plan, à des
lunes et à des anneaux autour des planètes, à des
nébuleuses en forme d'anneaux ou de spirales.
M. Birkeland expose les calculs auxquels l’ontconduit
ces considérations et décrit les expériences qui sont
venues confirmer sa théorie. Il est inutile de dire que
dans une démonstration de ce genre les hypothèses
“ouent un certain ròle.
Sur une cause d’explosion de tubes conte-
nant un mélange comprimé d’air et d’hydro-
gène. — Au mois d'août 1911 deux ouvriers furent
tués à Chalais par l'explosion de tubes à hydrogène
comprimé remplis par l’industrie privée. Ces ouvriers
étaient chargés de mesurer la pression des tubes el
la densité du gaz, qui se trouvait accidentellement
mélangé d’air pur. |
M. LeLancE a obtenu d’effectuer au laboratoire d'aé-
ronautique militaire des expériences destinées à éta-
blir le bien-fondé de l'hypothèse suivante :
L'inflammation du mélange comprimé d'air et d’hy-
drogène contenu dans le tube a été causée par la
compression rapide (par le gaz comprimé) de l'air
enfermé dans le tube du manomètre.
Comme objection à cette hypothèse, on peut ètre
tenté de dire : le gazcomprimé, lorsqu'il pénètre dans
le tube manométrique, est laminé par le pointeau; il
y a, en conséquence, mélange intime de ce gəz, re-
froidi par sa détente,avec l’air du manomètre, qui n’a
dès lors aucune raison de s'échauffer. A cela l’auteur
répond qu’il se forme dans le tube manométrique des
vortex d'air qui refusent de se mélanger au gaz com-
primant et subissent une compression se rapprochant
d'autant mieux de la compression adiabatique qu'ils
ne touchent pas les parois du tube.
L'auteur a aussi expérimenté avec succès un dispo-
sitif de sécurité contre Je retour de pareils accidents,
consistant à remplir, avec des rondelles de toiles
métalliques, un tube interposé entre le manomètre et
le tube à gaz. Ces toiles doivent avoir une masse
calorifique telle qu’elles ne soient pas échauffées sen-
siblement par la combustion du mélange contenu dans
le tube manométrique.
Il convient aussi d’éviter tout cul-de-sac dans les
canalisations d'un gaz comprimé pouvant être acci-
dentellement explosif; les culs-de-sac obligés doivent
être munis d’un dispositif de toiles métalliques propre
à empêcher la compression adiabatique ou à éteindre
les gaz qui s'enflammeraicnt dans ce cul-de-sac.
Le théorème du dernier multiplicateur de Jacobi,
rattaché à la formule dite d’Ostrogradsky ou de Green.
Note de M. Part APPELL. — Sur l’âge des schistes lus-
trés des Alpes franco-italiennes. Note de MM. W. KILIAN
et Cu. PrssexoT. — Éléments elliptiques de la comète
1912 (b) Schaumasse, identité de cet astre avec la
comète de Tuttle. Note de MM. Fayer et SCHAUMASSE.
— Observations spectroscopiques de la comète 1912 a
{Gale} faites à l'Observatoire de Meudon. Note de
M. P. Inrac. — Découverte et observations de la co-
mète 1912 c, faites à l'Observatoire de Marseille. Note
COSMOS
14 NOVEMBRE 1912
de M. Bonneity. — Les problèmes de Cantor et de
Dubois-Reymond dans la théorie des séries de poly-
nomes de Legendre. Note de M. MicHEL PLANCHEREL. —
Sur le spectre de rotation magnétique de la vapeur de
brome. Note de M. G. Rinaup. — Sur l'ionisation
des gaz par les rayons de Schumann. Note de MM. Léon
et Eucène BLoca. — Sur les couples thermo-électriques.
Note de M. GroRGEs MEsLIN. — Nouvelle méthode pour
déterminer le rapport y des deux chaleurs spécifiques
des gaz. Note de M. A. Lenuc. — Des actions opposées
du champ magnétique sur la conductibilité électrique
des gaz raréfiés en fonction de la valeur du champ
et du degré de vide. Note de M. HENRI STASSANO. —
Sur une météorite du Hedjaz (Arabie). Note de
M. J. Couxar. — Variation périodique des caractères
spécifiques. Note de M. Pavz VuiLzLemiN. — Non-
fixation de l’acide phosphorique par une terre acide
de forèt. Note de M. A. Psrir. — Sur les formes que le
phosphore et le calcium affectent dans la caséine du
lait. Note de M. L. Lixpsr. — Sur l'existence de prin-
cipes cyanogénétiques dans une nouvelle centaurée
(Centaurea crocodylium L.) et dans une commélinacée
(Tinantia fugax Scheidw.}). Note de M. ManceL MIRANDE.
— L'antigène dans la réaction de Wassermann. Note
de M. A. DEsmouLIÈRE. — Observations relatives aux
manifestations vocales d’un anthropoïde (Hylobates
leucogenys Ogilby). Note de M. Louis BouTan; nous
nous proposons de donner plus qu'une analyse de
cette intéressante communication.
SOCIÉTÉ ASTRONOMIQUE DE FRANCE
Séance du mercredi 6 novembre.
PRÉSIDENCE DE M. P. PUISEUX.
M. KF. Quoéxisser, astronome à l’Observatoire de
Juvisy, intéresse vivement les membres présents de
la Société en parlant de la réception des signaux
horaires et des dépèches météorologiques du poste -de
télégraphie sans fil de la tour Eiffel, ainsi que de la
construction des appareils d'amateurs. Il se réfère
avec éloges aux articles de M. P. Corret en cours de
publication dans le Cosmos (1).
En terminant, le distingué astronome projette une
très curieuse photographie, toute récente, de la comète
Gale, qui est maintenant pourvue de deux queues:
une queue normale et assez étendue, dirigée à l'op-
posé du Soleil, et une autre queue anormale, plus
faible, dirigée presque à angle droit; confondue
d'abord avec la queue normale, elle s’en est écartée
graduellement pour arriver à l’angle actuel de diver-
gence de 86°.
M. Mouronvar, ingénieur, présente un dispositif
permettant d'effectuer, avec la mème lunette, des obser-
vations simples, tant micrométriques que photogra-
phiques, avec ou sans agrandissement. B. L.
(1) À la demande de nos lecteurs, nous avons décidé
de tirer à part, en une brochure de format maniable,
les articles de M. Corret sur la T. S. F. quand la série
en sera terminée. Le Cosmos donnera avis, en temps
convenable, de l'apparition de cette brochure.
N° 1451
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES {1
Congrès de Nimes.
Géologie et minéralogie.
Cette section était présidée pear M. F. Roman, chargé
de cours à la Faculté des sciences (Lyon), qui rem-
plaçait M. le professeur W. Kilian (Grenoble). M. Ga-
BRIEL CARRIERE (Nimes) fut nommé président d’hon-
neur, et M. Pauz LEuoixe (Paris) vice-président.
M. Grorces Courry (Paris), à propos du forage d'un
puits à Etrechy (Seine-et-Oise), au lieu dit « La patte
d'oie », à une altitude de 130 mètres, indique que l’on
trouva les sables stampiens de Fontainebleau sur une
épaisseur de 43 mètres; à la base, un banc de 3 mètres
de mollasse. Les couches sannoisienmes étaient d’un
développement analogue à celui indiqué sur la feuille
géologique. Le calcaire de Brie y atteignait 7 mètres,
avec blocs de silice hydratée. L'argile verte alter-
nait avec Îles marnes blanches hydrauliques sur
30 mètres. Puis une grosse lacune de sédimentation :
du sannoisien on passe brusquement au sparnacien,
qui est là une formation laguno-fluviale. L'argile plas-
tique grise est intercalée sur 40 mètres entre de fortes
assises sableuses, où se rencontrent des galets roulés.
Ces sables granulitiques sont meubles.
Ce forage s’est terminé sur la craie supérieure À
Belemnitella mucronata, par 39 mètres d’épaisseur.
L'anticlinal du Hurepoix a donc favorisé les régressions
lutétiennes, bartonniennes et ludiennes, jusqu'au
moment où les dépôts stampiens vinrent recouvrir le
dôme crétacé de Sermaise, dans les environs de
Dourdan.
L'avalanche du glacier de Sollières et la crue gla-
ciaire du début du xix’ siécle en Maurienne.
M. Pauz GiranniN (Fribourg, Suisse). Les glaciers de
Maurienne étaient en état de maximum en 1814.
L'existence du'glaeier du vallon de Sollières descendant
jusqu'à la zone de la forêt est particulièrement in-
struetive ; ses avalanches répétées, dans la suite des
temps, ont dù rejeter l’Are vers la gauche, et, formant
barrage de glace compacte au fond de la vallée,
lorsque le glacier s’avançait plus bas, elles ont dù
transformer à plusieurs reprises la plaine de Sollières
à Termignon en lac de barrage; ainsi s'expliquent les
terrasses d'alluvions anciennes, mises à nu par l'Arc
sous la moraine quaternaire et qui ont comblé ce
petit bassin, le transformant en plaine unie.
M. Pauz Lemoixe (Paris) a fait la Bibliographie de la
géologie de l'Afrique occidentale française. Les tra-
vaux géologiques sur la plus grande de nos colonies
sont très nombreux, quoique très dispersés et présen-
tant de fréquentes lacunes. L'auteur a fait œuvre très
utile de réunir les titres de ees diverses notes. Cette
bibliographie n’est du reste que provisoire; ce sont
les préliminaires d’un travail très important qu'il
poursuit en ce moment.
MM. W. Kiuax et P. Resouz (Grenoble) étudient
quelques Æolcodiscus nouveaux de l'Hauteribien de
La Bègüe, près La Palud (Basses-Alpes).
(1) Sæite, voir p. 529.
COSMOS
587
M. W. Krutax est Fauteur d’une Carte de la réparti-
tion du glaciaire urgaonien dans le sud-est de la France.
I y décrit l’urgonien du Jura, du Vivarais, de la
Provence : à l’est de la région delphino-provençale
règne exelusivement le facies vaseux.
M. A. Joy (Constantine) continue son étude sur la
tectonique des Hautes-Plaines constantinoises ; il
remarque toutefois que rien n'est stable encore dans
ce pays-là, la fréquence des sismes ne le dit que
trop.
Du même auteur, note sur le jurassique de Chellala
(province d'Alger).
M. Pauz LEOINE conclut, d’un travail sur la présence
probable des roches anciennes dans les alluvions de la
Marne à Chelles, bien connues par la découverte
qu'Ameghino y a faite en 1881 de graviers à Elephas
antiquus Felc., à un niveau à peine plus élevé que le
fond des vallées actuelles, que les roches anciennes
provenant des Vosges ont été dispersées, à une
époque vraisemblablement pliocène, sur les plateaux
qui vont de la Moselle à la Marne. Les parties les plus
occidentales de ces lambeaux de dispersion, reconnus
par Bleicher, auraient été remaniées par la Marne
quaternaire. Il sera nécessaire de reprendre, à ce
point de vue, l'étude des alluvions de la Marne, sur-
tout dans les parties hautes de son cours. Des recherches
dans ce sens sur les diverses rivières du Bassin de
Paris pourront d’ailleurs être très fructueuses, car
elles pourront faire connaitre l’évolution des phéno-
mènes d'érosion et des cycles hydrographiques qui
ont dù se succéder dans le Bassin de Paris depuis le
commencement du miocène et dont il ne reste plus de
trace visible.
M. le chanoine Acrernr Duraxp (Nimes) lit une
étude sur le pliocène de la réyion de Saint-Laurent-
des-Arbres. — C'est une synthèse rapide des connais-
sances considérées comme acquises sur une série
stratigraphique de la région. Ce travail est terminé
par une intéressante bibliographie de la question.
M. Savonnix (Alzer) présente deux mémoires : 1° Sur
la stratigraphie et la tectonique des réqions de Ber-
rouaquia el Boyhari (Algérie). — Il n’y a pas d’aeci-
dent singulier véritablement dans la structure de tout
ce pays. Les nombreux étages qui s’y présentent en
beaux aflleurements sont harmoniquement plissés avec
tendance au déversement méridional de toutes les
boucles anticlinales. Ils sont, en outre, de plus en
plus récents à mesure que l’on progresse du Nord au
Sud, depuis Berrouaguia jusqu'aux steppes de Boghari.
> Remarques sur une importante ligne architecto-
nique au sud du Tell alyéro-constantinois.
Le pays ehevauchant sur le revers Sud de la chaine
des Biban peut être envisagé comme l’avant-pays d'une
région de nappes poussé vers le Sud et énergique-
ment plissé. Les plis ont parfois déferlé sur les dòmes
démantelés qui font partie de l’Atlas saharien par
rapport à l'Atlas tellien. Cette antériorité a cependant
été méconnue et même niée, récemment encore, par
d’habiles géologues qui semblent avoir mal inter-
prété la pensée d'Etienne Ritter sur la constitution des
Monts du Djebel-Amour et des Ouled-Nail.
M. Douxaui (Lille). Carte géologique et carte agrono-
mique. — On devra, pour éviter les inconvénients que
558
présente la carte géologique actuelle, exécuter une
Carte au
1
mo W est celle adoptée pour le plan
d'assemblage des plans cadastraux. Cette carte
agrogéologique représentera tous les sols le plus sim-
plement et le plus clairement possible. Ces cartes
devront porter tous les renseignements géologiques
qui peuvent intéresser directement ou indirectement
les agriculteurs. Aux agronomes appartiendrait la
tâche d'analyser les différents sols ou sous-sols et
d'en déduire des conclusions pratiques.
M. Cosswanx (Paris) donne son cinquième article
d'un travail général sur les Pélécypodes jurassiques
recueillis en France.
M. GABRIEL CARRIÈRE (Nimes) donne, sous le titre de
Contacts du pliocéne marin et du sannoisien avec
l'hauterivien aux environs de Nimes, un commen-
taire de l’excursion géologique faite le 2 aoùt par la
section aux environs de Nîmes. On a pu recueillir vers
le sommet de la colline de Puech d'’Autel les espèces
suivantes : Limnæa longicosta Brg, Planorbis steno-
COSMOS
14 NOVEMBRE 1919
cylotus Font, Melania Juliani, nov. spec., Melanoïdes
albigens Noulet (variété Dumasi, Font), Melanopsis
acrolepta Font, Vivipara soricinensis Noulet, Veritina
Lautricensis Noulet, Sphærium Besteranæ Font.
Malgré son étendue restreinte, le sannoisien de ce
gisement est intéressant à visiter, {ne serait-ce que
comme exemple des plissements et des ablations que
la formation lacustre a subis depuis son dépôt.
M. Rowan examine les zones à Céphalopodes du Turo-
nien du Gard et.du Vaucluse. — il conclut que les gise-
ments de la vallée du Rhône seraient caractérisés par
une faune de céphalopodes comportant principalement
des formes septentrionales analogues à celles de la
vallée de la Loire à laquelle vient s’adjoindre un
certain nombre de types à affinités africaines, démon-
trant ainsi une libre communication avec le Sud pen-
dant toute la période ligérienne qui se continue pen-
dant l’angoumien avec un facies plus côtier, prépa-
rant les facies à rudistes et à lignites du sommet du
crétacé.
(A suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
Mesure des angles. Hyperboles étoilées et
développantes, parle commandant D. GAUTIER,
ancien élève de l'Ecole polytechnique. In-8°
(23 X 14) de 1v-84 pages avec 14 figures (2 fr).
Gauthier-Villars, Paris, 1914.
Les hyperboles étoilées et l’'hyperbole dévelop-
‘pante peuvent servir à constituer des graphiques,
pour la solution non seulement du problème de la
trisection de l'angle, mais encore du problème
général de la division des angles, avec une étroite
approximation. |
Il faut avouer qu'Archimède avait déjà fourni
une solution analogue du problème, faisant inter-
venir l'emploi d’une courbe transcendante : en
effet, la spirale d’Archimède permet de trouver
deux longueurs dont le rapport soit celui de deux
angles donnés. Mais, de l'avis de M. Gautier,
l’hyperbole développante est, de toutes les courbes
transcendantes à employer, celle qui donne les
meilleurs résultats, parce qu’elle est la plus simple
et parce qu elle fournit les tracés les plus précis.
La mème courbe permet de résoudre d’une façon
pratique et très approchée la quadrature du cercle.
Indépendamment de ces applications, la théorie
des hyperboles étoilées a son intérêt propre et
mérite sa place dans le cadre de la géométrie.
Principes d'organisation scientifique des
usines, par FREDERIC WixsLow TayLior. Traduc-
tion de J. RoYer, ingénieur. Un voi. in-80 de
152 pages (4 fr). Librairie Dunod et Pinat, Paris.
Nous avons indiqué autrefois ici même (Cosmos,
aout 1903, t. LIH) les résultats remarquables obtenus
aux États-Unis par l’organisation scientifique du
travail dans les usines. Le livre de M. Taylor est
une étude très approfondie et très documentée sur
ce sujet.
La production journalière d'un ouvrier dépend
de beaucoup de facteurs, principalement des condi-
tions physiologiques inhérentes à sanaturehumaine,
de la perfection des outils mis à sa disposition, de
l'organisation du travail réglée par ses chefs d'ate-
lier. En étudiant ces différents facteurs et en les
faisant varier pour trouver la combinaison la plus
favorable, on arrive à obtenir de la part de l’ou-
vrier un travail trois ou quatre fois plus considé-
rable sans fatigue supplémentaire. On parvient
à ces résultats en chronométrant au dixième de
seconde chaque mouvement de l'ouvrier et suppri-
mant les mouvements inutiles. On cherche ensuite
à accélérer la vitesse de chaque mouvement utile
en mettant sous la main de l'ouvrier tous les outils
ou matériaux quil doit remuer, en étudiant les
conditions de fatigue physiologique : intensité de
l'éclairement, alternance de repos et de mouve-
ment, [valeur la plus favorable de l'effort muscu-
laire.
Ce n'est qu'après un travail de plusieurs années
que M. Taylor a pu déterminer ces règles scienti-
fiques. Elles lui ont donné de magnifiques résultats
dans l'industrie du travail du fer, la maçonnerie,
la construction automobile. Pour chaque branche,
il lui a fallu faire de nouvelles applications de sa
méthode. Mais ce qui a été le plus difficile, ç'a été
de faire accepter des ouvriers le nouveau mode de
travail. Ceux-ci, en effet, routiniers et défiants,
N° 1451
n'ont accepté la discipline très stricte qui leur est
imposée que moyennant une augmentation de
salaire, de plus en plus forte suivant l’augmenta-
tion de production fournie par eux.
L'application systématique de ces méthodes per-
mettrait certainement de doubler du jour au len-
demain la produetion et par suite la richesse de
tous les pays. Mais cette organisation nouvelle du
travail ne pourra être réalisée que par des ingé-
nieurs profondément imbus de la méthode scienti-
fique.
Heureusement, on commence à s’en préoccuper
en France, et les ingénieurs auront profit à lire ce
très intéressant travail.
La renaissance de l’orgueil français, par
M. Eriexxe Rey. Un vol. in-18 jésus (collection :
les Études contemporaines) de 214 pages (2 fr.).
Bernard Grasset, éditeur, 61, rue des Saints-
Pères, Paris.
Ce fut un beau mouvement, celui qui, après le
coup d'Agadir, dressa la France entière en face de
l'Allemagne arrogante et provocatrice. Cette atti-
tude était tout ensemble une résultante et une
cause dans la renaissance de l'orgueil français.
M. Rey cherche à se rendre compte et de cet
esprit nouveau et des facteurs visibles ou cachés
auxquels il est dû. Son analyse ne provoquera pas
l'unanimité des suffrages, car l'auteur, malgré ses
intentions que nous croyons sincères, s’y montre
en fait partial et même injuste. Au gouvernement
de la République il attribue le mérite principal du
changement constaté. L'auteur a-t-il oublié les
faveurs dont, durant de trop longues années, ont
joui les apôtres de l’antimilitarisme, les rédacteurs
des fiches qui ont saboté notre armée? M. Rey
se montre injuste vis-à-vis de l’Église de France et
haineux envers le Pape. Lisez plutôt : « Depuis
dix ans, elle n’a su qu'une chose, s’asservir à un
pape qui a fait de l’incompréhension universelle
un système de gouvernement. » (P. 129.) Cette
phrase dit aux catholiques l'esprit de M. Rey.
Les pratiques chirurgicales chez les Arabes,
par le D" H.-J. Briox. Un vol. (25 X 16) de 113 pages.
Jouve, 15, rue Racine, Paris.
En contact intime pendant plusieurs années avec
les Arabes de l'Algérie et du désert, de par ses
fonctions de médecin et comme voyageur, l'au-
teur a recueilli des notes sur les pratiques chirur-
gicales arabes et s’est trouvé amené à les com-
parer aux pratiques anciennes, telles qu’elles se
trouvent consignées dans les auteurs arabes, notam-
ment Abulcasis.
En fait, la chirurgie moderne des Arabes est
celle d’un peuple quasi fossile. Non point que les
procédés opératoires manquent de hardiesse et
d'ingéniosité, mais les pratiques usitées aujour-
COSMOS
559
d'hui sont textuellement, souvent, celles des siècles
d'autrefois. La chirurgie arabe était issue de la
science grecque; elle avait. apporté quelques nou-
veautés : usage éventuel, dès le x° siècle, de Panes-
thésieopératoire par desdécoctionsd'ivraie,d’opium,
de jusquiame; sutures au moyen de pinces de
fourmis, etc. Les traités de chirurgie de la Renais-
sance ont beaucoup hérité des auteurs arabes.
La chirurgie arabeignore, bien entendu, l’asepsie;
mais, dit l’auteur, elle n’en a presque pas besoin:
l’Arabe présente une résistance extraordinaire aux
infections et suppurations, grâce au climat sec et
à la vive lumière, qui sont des antiseptiques mer-
veilleusement efficaces. °
Notre pain quotidien, par A. Rousser (4 fr).
Librairie de la Bonne Presse, 5, rue Bayard, Paris.
La collection scientifique de la Bonne Presse
vient de s'enrichir de ce nouveau volume dont
l'éloge n’est pas à faire puisqu'il est dû à notre
distingué collaborateur M. Rousset.
Il fallait tout son talent et sa pleine possession
des faits si complexes qui touchent à ‘cette ques-
tion pour condenser en une centaine de pages
un sujet aussi vaste, en le traitant cependant com-
plètement. Une simple nomenclature des chapitres
indique le plan adopté : la terre et ses secrets; —
le bon grain; — le blé qui lève; — la moisson;
— du grain å la farine; — notre pain; — le pain
aliment. Chacun de ces chapitres donne lieu aux
développements les plus intructifs et d'autant plus
intéressants que le livre est largement et sagace-
ment illustré.
L'auteur ne s’est pas borné à l'étude matérielle
de la question; dans des lignes sincères et pleines
de foi, il dit et fait comprendre la reconnaissance
que nous devons au Dispensateur de toutes choses
qui nous donne le pain quotidien, l’aliment sacré.
Aide-mémoire du photographe, par G. MEÉNÉ-
TRAT. Tomel : Mathématiques, physique, chimie.
Une brochure de 70 pages (0,75 fr). Charles
Mendel, éditeur, 118, rue d’Assas, Paris.
Il existe des aide-mémoire pour beaucoup de
branches de sciences; en voici un créé tout spé-
cialement pour les photographes. Il comprendra
huit volumes qui emorasseront toutes les connais-
sances pouvant être notées, mises en formules ou
en tableaux, et qu'il est indispensable au photo-
graphe de posséder ou tout au moins de pouvoir
retrouver en cas de besoin.
Ce premier tome comprend les documents
mathématiques, physiques et chimiques relatifs à
la photographie (mesures, vitesses des mobiles;
points de fusion, d'ébullition, mélanges réfrigé-
rants; poids atomique, propriétés et conservation
des substances employées; corps toxiques et anti-
dotes, elc.).
COSMOS
14 NOVEMBRE 41919
FORMULAIRE
Pour dégeler les prises d’eau. — En hiver,
on voit souvent, à Paris, les cantonniers brüler des
balais entiers sur les plaques de prises d’eau pour
tâcher de les dégeler. Ce procédé très primitif est
souvent inefficace. Les pompiers ont recours, en
général, aux lampes à souder, mais ce moyen
demande beaucoup de temps.
La Rerue générale de l'Acétylène indique que des
expériences très complètes ont été faites par des
pompiers allemands pour le dégel des prises d’eau
d'incendie. On eut l’idée de répandre du carbure
de calcium sur la couche glacée, et d'allumer le gaz
engendré. Une prise recouverte d'une forte couche de
glace ne demande, par ce procédé, que neuf minutes
pour permettre l'enlèvement de la plaque de prise.
On répandit de nouveau du earbure dans la
cavité, et au bout de huit nouvelles minutes, on
put se servir de la prise d’eau. Cependant, ce pro-
cédé nécessite quelque prudence, car il se produit
parfois une série d’explosions.
On peut encore étendre une couche de chaux
vive que l’on arrose pour l’éleindre. La chaleur
progressivement dégagée par la chaux fond la
glace des tuyaux.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses :
La grue de Pola a été construite par la Compagnie
Prager Maschinenbau Actien Gesellschaft, 36, Marien-
gasse, à Prague (Bohème).
M. C. N., à A. — La brochure reproduisant les
articles sur la télégraphie sans fil qui paraissent
actuellement dans le Cosmos sera prète dans un mois
environ. Elle se trouvera à nos bureaux. Nous ne sau-
rions vous dire le prix, mais il sera peu élevé.
M... 76, rue d'Oultremont., — Nous avons reçu
votre curieuse communication, et nous nous sommes
reportés à la source indiquée; nous croyons intéres-
sant de reproduire la note de 1802. Nous regrettons
de n'avoir su lire votre signature, et nous ne pouvons
dire à qui nous devons ce renseignement; consenti-
riez-vous à combler cette lacune?
R. P. L.,à G. — Pour la destruction des rats, vous
pouvez prendre la poudre de Méring, 84, faubourg
Saint-Honoré, ou encore le virus contagieux Laroche
à Villemomble (Seine). :
hf. C. B., à GC. F. — L'édition francaise du livre:
les Macroleépidoptéres du globe, se trouve à la librairie
Le Soudier, 174, boulevard Saint-Germain, Paris. Nous
ignorons le prix, qui doit varier avec chaque volume.
M. G. P., au G. — Le fil de platine de un dixième
de millimètre est trop gros pour pouvoir être employé
à la fabrication d’une électrode de détecteur électro-
lytique. Vous pouvez d'ailleurs essayer d'en construire
une, l'opération n'étant pas compliquée. — Nous ne
pouvons vous fixer sur ce point. Le détecteur électro-
lytique est plus régulier; le détecteur à cristaux
(quand le cristal employé est bien choisi) est plus
sensible, et permet de travailler avec un récepteur
quelconque.— Les machines statiques peuvent servir,
évidemment; mais celles ont l'inconvénient de ne
fournir que des courants intermittents avec lesquels
il ne serait pas possible d'obtenir des séries de traits et
de points. Il est plus simple de prendre une bobine de
Rüuhmkortf.
M. P.R.,à P. — Ces nombres sont relatifs: si en
décembre, à midi, on a obtenu une bonne épreuve en
posant pendant deux secondes, par exemple, il faut
poser moitié moins à la même heure en juin; toutes
choses égales, d'ailleurs : ouverture du diaphragme,
rapidité des plaques, état du ciel, etc.
M. H. H., à A. — Voyez les adresses données dans
le dernier numéro. — S'il s’agit d'appareils de T.S. F.
pour amateurs, cet ouvrage n'existe pas. — Stérilisa-
tion des eaux par rayons ultra-violets: Société fran-
çaise pour les applications des rayons ultra-violets,
73, boulevard Haussmann: Billon-Daguerre, 8, rue de
Normandie, Asnières: Méran frères, 155, faubourg
Poissonnière, Paris. Par l'ozone, Compagnie générale
de l’ozone, 11 bis, boulevard Haussmann; E. Douzal,
7, rue Dutot, Paris.
M. l’abbé C., à St.-S. du P. — Nous n'avons pas
d’autres détails sur le détecteur « KK >» que ceux
parus dans l'£lectricien. Adressez-vous. directement
à cette dernière revue.— Fabrique d’aimants:Splindler,
41, rue du Chäteau-d'Eau, Paris.
M™ A. A., à A. — Le renseignement que vous
demandez est tout à fait en dehors de notre compé-
tence et nous ne savons où nous pourrions le décou-
vrir.
M. L. T. C., à T. — Ces matières ne se trouvent pas
en un seul ouvrage. — Télégraphie sans fil: Pre-
mières notions de télégraphie et de téléphonie sans
fil, par BéGésé (4 fr). Librairie Omnia, 3%, rue Pergo-
lèse, Paris. Courants alternatifs: l'Électricité indus-
trielle (3° partie}, par Lesors (4 fr). Librairie Dela-
grave, 15, rue Soutillot, Paris.
M. B. S., à M. — Lampes électriques à vapeur de
mercure: Westinghouse electric Company, $, rue
Auber, Paris. — Nous avons bien souvent parlé de
cette lampe, notamment dans le numéro 946 (14 mars
1903).
M. H., au M. — Nous avons donné une formuie pour
la désinfection des puits dans le numéro 1287 du
25 septembre 1909. Veuillez vous y reporter.
I imerie P. Frnon-Vaas. 3 ot 5, ruo Bayard, Paris, VIR.,
E $o pérant : A. Paran.
No 4452 — 91 NovEMBRE 1912
COSMOS 561
SOMMAIRE
Tour du Monde. — L'éclat de la Lune à ses diverses phases. Service d'avertissement météorologique par
T. S. F. pour les aviateurs en Allemagne. La désintégration de la matière sous l’action des rayons
cathodiques. La station radiotélégraphique américaine d’Arlington. Pour augmenter l'intensité du son
téléphonique. Une balle incendiaire contre les dirigeables. Écran métallisé Fulgor pour projections et
cinématographe. La force motrice qu’on peut tirer d'une ionne de charbon, p. 564.
Recherches sur la toxicité des champignons, J. PanrisoT. p. 564. — Les premiers habitants du globe,
P. Couses, p. 566. — Télégraphie sans fil
: réception à domicile des signaux horaires (suite),
P. ConreT, p. 568. — L’acoustèle Daguia-Diénert, Fouanier, p. 571. — L’industrie du chauffage
central, Mancaann, p. 572. — Le barrage de Galveston, GnapEnwiTz, p. 574. — Les méthodes
modernes de diagnostic sérologique (suite), D” Goccia, p. 576. — Un coup d’œil sur le passé :
les animaux qui guérissent, Coupix, p. 579. — La coagulation du sang, Accootr, p. 581. — Sociétés
savantes : Académie des sciences, p. 583. — Association française pour l'avancement des sciences (suite),
HéricHarb, p. 585. — Bibliographie, p. 586.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
L’éclat de la Lune à ses diverses phases. —
La clarté de l'astre des nuits a plus inspiré les
poètes que les astronomes, qui n’ont pas souvent
pensé à faire la mesure des éclats relatifs aux
diverses phases de notre satellite. Ce n'est qu'à
une époque récente que de pareilles mesures ont
été effectuées, d’un côté, par W. H. Pickering, de
l’autre, par Stebbins et Brown; le premier opérait
à l’aide d’une lampe étalon au pentane par la
méthode de l'égalisation des ombres; les autres
employaient un photomètre au sélénium.
Sans avoir connaissance des travaux des auteurs
précédents, l’astronome de Prague, le D"A. Scheller,
a aussi comparé, en 1906-1907, la clarté des diverses
phases de la Lune; nous trouvons les résultats
qu'il a obtenus résumés dans Prometheus (9 nov.).
Scheller se servait d'une méthode de photométrie
photographique : au moyen d’un appareil sans
lentilles, il opérait le noircissement des plaques
sensibles, d’une part, sous l'effet de la lumière
lunaire; d'autre part, sous l'action d’une lampe
étalon Hefner.
Des 42 déterminations qu'il a exécutées, il con-
clut d’abord que la lumière lunaire est extraordi-
nairement actinique, comme disent les photo-
graphes, c'est-à-dire capable d’impressionner la
plaque photographique. L’éclat photographique de
la Lune correspond à celui de 2,45 bougies placées
à une distance de un mètre de la plaque sensible
(les bougies en question sont des unités Hefner,
égales chacune à 0,9 bougie internationale, ce qui,
en notations photométriques françaises et interna-
tionales, donne à la Lune un éclat photographique
de 2,20 bougies-mètre). Ainsi, mesuré par la mé-
thode photographique, l'éclat lunaire parait envi-
ron dix fois plus fort que s'il est mesuré par des
T. LXVII. N° 1452.
comparaisons visuelles, car ces dernières indiquent
seulement 0,25 bougie-mètre s'il s'agit d'unités
Hefner, 0,22 bougie-mètre, s'il s'agit d'unité inter-
nationale.
Fait très intéressant : l'éclat photographique de
la Lune à l'époque du dernier quartier dépasse
énormément celui du premier quartier : en repré-
sentant par 60 l'éclat (photographique) de la pleine
Lune, celui du premier quartier vaudrait 6 et celui
du dernier quartier 10. Ces différences s'expliquent
par l'inégale répartilion des montagnes et des
a mers » à la surface de la Lune. Le rapport des
mers au reste de la surface visible est de 4 : 4,23
pour le premier quartier et de 1: 2,65 pour le
dernier quartier. Les régions lunaires désignées
sous le nom de mers renvoient done une lumière
plus actinique que les montagnes.
MÉTÉOROLOGIE
Service d'avertissement météorologique par
T. S. F. pour les aviateurs en Allemagne.
— Depuis le 4° juin, un nouveau service d’avertis-
sement pour les aviateurs a élé organisé en Alle-
magne. Outre la centrale de l’Observatoire aéro-
naulique de Lindenberg, qui était déjà en service,
on a inauguré celle de Francfort-sur-le-Mein, qui
est reliée au Bureau météorologique de cette ville.
Ces deux centrales donnent radiotélégraphique-
ment à tous les intéressés des renseignements sur
l’état de l'atmosphère et la prévision du temps. Les
deux centrales de Lindenberg et Francfort, qui
sont pourvues du service météorologique ordinaire,
reçoivent télégraphiquement tous les jours, de 8 à
9 heures du matin, de 15 stations allemandes et
de quelques stations étrangères, des renseignements
sur les conditions du vent. Elles recoivent, en outre,
dé 600 bureaux de poste allemands un avis télé-
graphique avant ou au moment où un orage se
produit. Les centrales sont donc en mesure de
communiquerauxaviateurs,par laradiotélégraphie,
des renseignements sur l'état probable de l’atmo-
sphère, qui peuvent être très importants pour eux.
PHYSIQUE
La désintégration de la matière sous l’ac-
tion des rayons cathodiques. — Le radium et
les autres corps radioactifs ont habitué les physi-
ciens et les chimistes à l'idée de la transmutation
des éléments: il est hors de doute que l'atome de
radium, par une série de dégradations, aboutit
à n'être plus qu'un alome d'hélium, substance
chimique toute différente du radium et classée en
chimie parmi les corps simples.
L'habile expérimentateur sir William Ramsay
montra, en outre, dès 1907, que, soumis au bombar-
dement des particules « émises par l'émanation du
radium, le cuivre lui-même se transmue en lithium,
corps de la mème famille, mais de poids atomique
plus faible; puis, en 1909, que les éléments de la
famille du carbone, à savoir : le silicium, le titane,
le zirconium, le plomb, le thorium, soumis durant
quatre semaines à l'action de l'émanation radio-
active, se désagrègent partiellement en abandon-
nant tous du carbone, qui mexistait point aupa-
ravant. (Cf. Le radium et la transmutation des
éléments chimiques. Cosmos t. LXT, n° 1278, p. 93,
el n° 4299, p. 673.)
Sir William Ramsay signalait encore, il y a
quelque temps (Vature, 18 juillet), deux autres
constatations qu'il a faites en collaboration avec le
professeur Norman Collie, et qui s'expliquent bien,
toujours dans l'hypothèse de la désintégration des
atomes chimiques. '
Ayantà sa disposilion quatre ampoules à rayons X
noircies par l'usage et devenues inutilisables, il les
brisa, mit les morceaux de verre noircis dans un
tube relié à une pompe à vide, commença par
enlever tout l'air adhérent au verre par des lavages
répétés à l'oxygène pur; puis il chauffa le tube au
rouge pour faciliter le dégagement des gaz qui
avaient pénétré dans le verre et en avaient diminué
la transparence. Ces gaz ayant été recueillis, il éli-
mina loute ła parlie facilement condensable (en
Vabsorbant au moyen de charbon de bois refroidi)
de manière à ne conserver que l'hydrogène, lhé-
hum et le néon, s’il s'en trouvait. Le gaz résiduel
recueilli dans un tube capillaire et illuminé par la
décharge électrique montra surtout le spectre de
l'hélium ; il v avait aussi une trace de néon. L’ori-
gine de ces deux gaz ne peut guère provenir que
des décharges cathodiques, qui auraient désagrégé
la matière de l’ampoule à rayons X.
L'autre expérience consisla à exposer du fluo-
rure de calcium, préalablement chauffé au rouge,
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
à l'action prolongée des rayons cathodiques. La
surface est portée au rouge sous le choc des élec-
trons lancés à d'énormes vitesses; quelques gaz se
dégagèrent : fluorure de silicium, oxygène, oxyde de
carbone. On les pompa de temps en temps, durant
quelques jours, pour éliminer toute cause d'incer-
titude dans l'expérience finale; comme l’ampoule
à rayons cathodiques n’est pas capable de fonc-
tionner si on n’y fait le vide parfait, il fallait y
introduire un peu de gaz de temps en temps : on
employait à cet effet l'oxygène. Les gaz dégagés
ayant été épuisés à quatre reprises, la cinquième
fois on les recueillit pour les analyser : après éli-
mination des gaz facilement condensables, on
reconnut que le résidu était du néon pur, sans
trace d'hélium. Il est vraisemblable que ce néon
avait été produit par les rayons cathodiques aux
dépens du fluorure de calcium.
Ces expériences diffèrent de celles qui furent
exécutées en employant le radium en ceci: le
radium, ou plutôt son émanation, produit des par-
ticules «a, c'est-à-dire des atomes d'hélium chargés
d'électricité et animés de grandes vitesses: ces
boulets, comparables en grosseur aux alomes de
matière, se montrent, par le fait, capables de
démolir ces atomes, de les désintégrer en d'autres
atomes plus simples. Dans le cas des rayons catho-
diques, il y a bien encore bombardement des atomes
matériels: mais le boulet, ici, n'est plus compa-
rable, comme masse, aux atomes qu'il vient cho-
quer ; le boulet est l'électron, c'est-à-dire une’masse
mille fois plus petite que l'atome d'hydrogène,
quarante mille fois plus petite que l’atome de cal-
cium..... Ilest vrai qu'il est expulsé par la cathode
à une vitesse énorme, presque comparable à celle
de la lumière. En fait, l'expérience de Ramsay
semblerait indiquer que, si minime que soit sa
masse, ce boulet est, lui aussi, capable de démolir
les atomes chimiques proprement dits.
ÉLECTRICITÉ
La station radiotélégraphique américaine
d’Arlington. — La stalion d'Arlington est une
de celles qui ont été agréées comme centres d'émis-
sions horaires par la Conférence internationale de
l'heure : elle enverra les signaux horaires chaque
jour à 3 heures et à 17 heures, temps civil de
Greenwich.
Erigée par le département de la Marine des Etats-
Unis, à Fort Meyer, Arlington (Virginie), elle aura,
à son achèvement, coùté un million de dollars.
Elle a été essayée dans la nuit du 28 octobre, où
des dépèches furent expédiées aux stalions de Key
West et de Colon. Son rayon d'action atteindra,
espère-t-on, 4 800 kilomètres dans les conditions
normales.
ll convient de signaler le dispositif de l'antenne,
Ne 4452
qui est supportée par trois tours d'acier, réunies
à leur sommet par des séries de 23 conducteurs;
les trois tours sont disposées aux sommets d’un
triangle dont le centre est occupé par la cabine de
manipulation.
Les tours sont inégales: l'une, située à l'Ouest,
s élève à 183 mètres, sur un soubassement de
i+ mètres carrés, tandis que les deux autres n’ont
qu'une hauteur de 137 mètres, sur une base de
11 mètres carrés.
L'équipement radiotélégraphique de la station,
bien que spécial à la Marine, n'est pas absolument
nouveau, car il a élé soumis à des essais complets
de huit mois, en 1910, à la station Fessenden de
Brant Rock (Massachusetts): il comprend un groupe
moteur-générateur de 100 kilowatts, entrainant,
en bout d'arbre, un éclateur synchrone.
Pour augmenter l'intensité du son télépho-
nique. — Un inventeur danois, M. Petersen, direc-
teur de banque à Nykæbing (ile de Falster), aurait,
suivant l'Électricien du 2 novembre, obtenu un
important perfectionnement dans les transmissions
téléphoniques en échauffant le pavillon du récep-
teur. Cet échauffement agit évidemment sur la
densité de l'air voisin du diaphragme ; comment
l'intensité du son est-elle augmentée? Mais le fait
est que les sons téléphoniques sont extraordinaire-
ment renforcés et distincts, quelle que soit la
nature de la membrane : mica, charbon, métal;
en outre, il importe peu que cette membrane soit
fortement ou faiblement tendue.
Lors de conversations téléphoniques échangées,
à titre d’essai, entre Nykæbing et Copenhague, les
sons parvenaient si intenses que les correspondants
pouvaient percevoir les mots transmis après avoir
placé leur récepteur sur une table et s’en être
éloignés sensiblement.
ART MILITAIRE
Une balle incendiaire contre lesdirigeables.
— On a essayé, en Allemagne, une balle spéciale
destinée au tir contre les aérostats ou les diri-
geables, et capable, non pas seulement d'agir par
perforation comme les projectiles ordinaires, mais
de déterminer l'inflammation du gaz contenu dans
les ballons. Cette balle, qui se tire avec l’ancien
fusil de guerre allemand modèle 714, du calibre de
11 millimètres, est un projectile creux muni de
petites ailettes qui s'ouvrent en s’écartant, dès la
sortie du fusil, par l’action d’un petit ressort qui
était bandé durant le trajet dans l'âme.
Outre que ces aileltes ainsi écartées déterminent
dans la « peau » du ballon des déchirures irrégu-
lières, beaucoup plus étendues que le trou rond et
net percé par les balles ordinaires, lequel n’occa-
sionne qu’une déperdition lente et insignifiante du
gaz, la poussée d'avant en arrière qu'elles subissent
COSMOS
563
de la part de l'enveloppe est, parait-il, assez forte
pour actionner une petite gâchette enflammant
par choc une composition fulminante, disposée à
l'intérieur du projectile. Il men faudrait pas davan-
tage, malgré la rapidité avec laquelle la balle tra-
verse la carène, pour allumer l'hydrogène si
inflammable du ballon et déterminer l'incendie,
l'explosion et la perte totale de l’engin. Les expé-
riences récemment faites au polygone de Neu-
manswald ont donné des résultats satisfaisants, et
chaque coup tiré aurait mis le feu au but.
Comme il suffit que la balle incendiaire ren-
contre la paroi du ballon, cette balle serait done
utilisable à toutes les portées du fusil, soit jusqu'à
1 800 mètres, si les portées anciennes du modèle 71
ont pu, ce qui est douteux, être conservées avec ce
projectile spécial.
PROJECTIONS
Écran métallisé « Fulgor » pour projections
et cinématographe. — Pour obtenir des projec-
tions très brillantes avec un agrandissement con-
sidérable, il faut avoir à sa disposition un puissant
éclairage. C’est pourquoi les constructeurs ont
cherché à perfectionner les sources lumineuses,
passant successivement de la lampe à pétrole à
l’incandescence au moyen de différents procédés,
puis à la lumière oxy-hydrique, oxy-acétylénique,
enfin à l'arc électrique.
Les résultats obtenus sont déjà très remar-
quables. Mais les constructeurs ont voulu faire
mieux encore; et, ne pouvant augmenter indéfini-
ment la puissance des foyers lumineux, ils ont
cherché à améliorer la surface sur laquelle les
images sont projelées. Le simple calicot fut
d’abord remplacé par une toile recouverte d'un
enduit blanc; puis on essaya le verre dépoli et
enfin l’écran métallisé. Ce dernier est très supé-
rieur à la toile blanchie, au point de vue du ren-
dement lumineux, et au verre dépoli qui est trop
fragile. La grande difficulté était de trouver un
enduit donnant une grande luminosité, ne s`écail-
lant pas, et cependant facile à établir à des prix
abordables.
Le service de projections de la Bonne Presse
met en vente un écran métallisé à la poudre d'alu-
minium, le Fulgor, qui possède toutes les qualilés
désirables pour ce genre d'écran.
‘L'aspect général est celui d’une pièce de tissu
souple, semblable à de la toile cirée, présentant
une surface argentée, d'une grande uniformité,
encadrée d'une marge noire dans laquelle sont
ménagés les «œillets. Cet écran se tend sur un
châssis démontable de la mème facon que les
modèles ordinaires et il peut se rouler sans incon-
vénient, ce qui facilite le transport.
Nous avons assisté à des essais faits avec cet
H64
écran, et les résultats sont tout à fait remarquables.
On parvient trés bien à projeter sur cet écran des
cartes postales ordinaires et même des vues ciné-
matographiques avec un simple chalumeau à oxy-
essence!
Une expérience surtout fait bien ressortir la
grande amélioration réalisée : elle consiste à pro-
jeter une même plaque sur un écran fait de trois
morceaux: un de calicot ordinaire, l’autre de toile
rendue opaque par un vernis blanc, le troisième
de toile métallisée. On se rend ainsi parfaitement
compte de la valeur respective de chaque échan-
tillon. D'ailleurs, le procès-verbal d'essai officiel
effectué au laboratoire des Arts et Métiers montre
que le Fulgor est 3,7 fois plus lumineux que Le
calicot et 2,9 fois que l’écran opaque (en l'espèce,
un écran Phebe).
Le seul inconvénient du nouvel écran, inconvé-
nient qui existe déjà avec les autres, mais plus
atténué, tient à sa nature même. En effet, le Ful-
gor n’est si lumineux que parce qu'il absorbe très
peu de la lumière reçue, et la réfléchit en presque
totalité. Mais il la réfléchit surtout dans une direc-
tion normale à sa surface, el assez peu obliquement.
De sorte que le spectateur voit très bien s’il est en
face de l'écran, mais moins bien s’il est placé de
côté. Il suflit, d’ailleurs, de connaitre ce défaut
pour en éviter les ennuis, on fera les projections
dans une salle plus longue que large, ou bien les
spectateurs seront avertis de ne pas occuper les
places trop éloignées de la normale.
Grâce à cet écran tout à fait remarquable, les
projectionnistes pourront soit augmenter beaucoup
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
l'agrandissement de leurs projections, soit employer
des sources lumineuses moins puissantes, soit
encore, en conservant leurs anciens dispositifs,
améliorer la luminosité et le relief des vues qu'ils
montreront à leurs spectateurs.
VARIA
La force motrice qu’on peut tirer d’une
tonne de charbon (Revue électrique, 25 octobre).
— Dans un groupe : chaudière à vapeur-turbine,
la consommation de charbon est d'au moins 0,7 kg
par cheval-heure; c'est donc 41 428 chevaux-heure
que fournit une tonne de charbon dans ces condi-
tions. Mais on peut en retirer une quantité d’éner-
gie bien plus considérable si, au lieu de brüler
cette tonne de charbon dans le foyer d’une chau-
dière, on la soumet à la distillation.
Cette distillation fournit, en effet : 1° 400 mètres
cubes de gaz qui, à raison de 0,5 m°’ par cheval-
heure, produiront dans un moteur à explosion
800 chevaux-heure; 2° 55 kilogrammes de goudron
donnant 17 kilogrammes d'huile lourde d’une den-
sité moyenne de 4,10 et d'une puissance calorifique
de 9500 calories par kg qui, brülées dans un moteur
Diesel, produiront 85 chevaux-heure; 3° 700 kilo-
grammes de coke, qui, dans un gazogène, produiront
une quantité de gaz pauvre pouvant donner, dans
un moteur à explosion, à raison de0,6 kg de coke par
cheval-heure, une énergie de 1166 chevaux-heure.
Dans ces conditions, une tonne de charbon donne
donc 2 051 chevaux-heure, soit 43 pour 100 en plus
de ce qu’elle donne avec une turbine à vapeur.
Recherches sur la toxicité des champignons.
Leur pouvoir hémolytique. “
Plusieurs intoxications à la suite d’ingestion de
champignons s'étant produites dans notre région,
nous avons été conduits par l'examen du sang à
considérer l’ictère présenté par quelques-uns des
malades comme relevant d’une origine hémolytique.
Ces constatations nous ont engagés à poursuivre
des recherches sur la toxicité des champignons et
tout particulièrement sur le pouvoir destructif du
sang que possèdent leurs extraits.
Depuis les travaux de Kobert en 1894 et surtout
ceux de W. Ford (1906-1911), on admet qu’il existe
dans Amanita phalloides Fr, une substance hémo-
lytique; pour le premier de ces auteurs, il s'agit
d'une toxalbumine qu’il appelle phalline, et pour
Ford d'un glucoside qu'il dénomme amanita-hémo-
lysine (qu'il a également retrouvé dans Amanita
(1) Comptes rendus, 30 septembre 1912.
rubescens Pers). René Ferry, dans son étude sur
les amanites (1914), a d’ailleurs donné un exposé
très complet de la question en y joignant les résul-
tats de ses recherches personnelles et de celles entre-
prises avec Schmitt sur la toxicitéde ces Agaricinées.
Les nouvelles acquisitions sur l’hémolyse et les
ictères hémolytiques nous ont permis d'envisager
cette question en utilisant les procédés et Ja tech-
nique qu'on doit suivre aujourd'hui en pareille
matière.
Des champignons, fraichement récoltés, sont
broyés et mis en macération dans un nombre de
centimètres cubes de NaCi à 9 grammes pour
1 000, égal à moitié de leur poids. Au bout d’une
demi-heure, on recueille par expression toute la
portion liquide et l’on ramène au taux de 9 grammes
NaCI pour 1 000. C'est avec cet extrait qu'est faite
la recherche du pouvoir hémolytique in vitro et
Ne 1452
in vivo. Nous ne pouvons donner ici le détail de
la technique utilisée: elle est identique à celle
qu'on suit pour la mise en évidence des hémoly-
sines bactériennes, organiques, etc. Ainsi nous
a-t-il été possible d'obtenir des résultats expéri-
mentaux comparables entre eux et de mettre en
parallèle les différentes espèces au point de vue
de l'intensité de leur toxicité hémolytique. Nos
recherches ont porté sur un nombre de champi-
gnons, comestibles et toxiques, appartenant aux
principales familles, en particulier aux Agarici-
nées, Polyporées,Hydnacées, Clavariées, Pézizacées.
Nous avons étudié, dans les mêmes conditions
d'expérience, l'action des extraits modifiés par la
chaleur, par certaines substances chimiques; l’in-
fluence d'agents antihémolytiques, etc.
Ou peut dire que, d'une façon générale, le pou-
voir hémolytique des champignons, lorsqu'il existe,
est très intense in vitro et qu'il se manifeste
d’une façon aussi marquée in vivo. Par exemple,
l'injection intraveineuse, à un lapin adulte, de
moins de dix gouttes d’un de nos extraits d'Ama-
nite phalloides Fr., tue l'animal en quelques
secondes. On constate par examen du sang, pré-
levé presque immédiatement après l'injection, que
le sérum a une coloration rouge cerise (hémoglo-
binémie) et que les globules hémolysent dans des
solutions salées même hypertoniques (10 et 11
pour 1000). Par voie sous-cutanée et avec de plus
faibles doses, on peut obtenir une survie de quelques
jours et la production d’un véritable ictère hémo-
lytique (fragilité globulaire, anémie, urobilinurie;
à l’autopsie, infiltration pigmentaire de la rate, du
foie, etc.).
Sans conteste, Amanita phalloides Fr. possède
le pouvoir hémolytique le plus considérable; mais
la plupart des champignons vénéneux ont égale-
ment une action hémolysante intense, bien que
moins marquée. Seul Entoloma lividum Fr. nous
en a semblé dépourvu. Fait important, beaucoup de
champignons comestibles exercent également cette
action destructive du sang, non seulement A manita
rubescens Pers., mais encore Hydnum repandum
Lin., Zricholomia nudum Fr., Laccaria laccata
Be. et Br., Craterellus cornucoepiodes Fr., etc.
Dans certains cas, en plus de l’hémolyse, il y a
très rapidement début de mutation de l’oxyhémo-
globine en méthémoglobine, hémoglobine réduite,
par exemple.
Les diverses parties d'un champignon hémoly-
sant possèdent chacune ce pouvoir hémolytique,
volve et pied, chapeau (ce dernier à un plus haut
degré peut-être).
Des espèces non hémolysantes quand le champi-
gnon est jeune et frais peuvent le devenir par
vieillissement. Ces faits sont à rapprocher de ceux
observés pour nos extraits liquides, qui, aban-
dunnés à eux-mêmes pendant douze heures, hémo-
COSMOS
565
lysaient alors qu’ils étaient auparavant sans action,
Gette constatation semble devoir être rapportée
à la présence d'hémolysines bactériennes secon-
daires; ainsi s'expliquent ‘certaines intoxications
par les champignons n'ayant plus une fraicheur
absolue.
D'une façon générale, le chauffage atténue ce
pouvoir hémolytique. L’autoclave à 120° pendant
vingt minutes l’abolit complètement dans certains
cas; dans d'autres il faut deux ou trois opéra-
tions. L'ébullition pendant cinq minutes à feu au
semble presque toujours suffisante, les liquides
n'hémolysant plus, mais les précipités formés dans
leur sein conservant quelquefois un certain pouvoir
hémolytique.
Ces phénomènes semblent devoir être attribués
aux transformations chimiques plus ou moins
complètes d'un glucoside; nos recherches engagent
à conclure, en effet, que le pouvoir hémolytique
des champignons est dù (en grande partie lout au
moins) à l'aclion d'un glucoside. Par exemple, nos
extraits, après chauffage, réduisent la liqueur de
Fehling, ce que, auparavant, ils ne faisaient pas,
ou seulement après une ébullition beaucoup plus
longue, nécessitée parle dédoublement du glucoside.
Certaines substances, en particulier la cholesté-
rine, ont le pouvoir de diminuer l’action hémoly-
tique des glucosides (Ransom, Hausmann, ete.).
Or, le lait, le jaune d'œuf (qui renferment de la
cholestérine) ont atténué et ralenti, dans des pro-
portions très notables, le pouvoir hémolytique
d'extraits éminemments actifs d’'Amanita phal-
loides Fr. Par contre, le charbon animal, même
après un contact de plusieurs heures, laisse sub-
sister l'action hémolysante.
Lorsqu'un extrait chauffé n'est plus hémoly-
tique, il perd une grande partie de sa toxicité in
vivo (10 fois moins toxique avec nos extraits
d'Amanita phalloides Fr.) parfois toute sa toxicité.
Mais lorsque le champignon en totalité est traité
suivant les méthodes culinaires il garde souvent
un certain pouvoir hémolytique; ce fait est à rap-
procher de la constatation faite par Radais et Sar-
tory que le poison d’oronge ciguë estencore retenu
par la trame fongique après coction à 100°.
En mettant en évidence le pouvoir hémolysant
de bon nombre de champignons, même comes-
tibles, nos recherches permettent de saisir la
pathogénie des ictères hémolytiques qu'ils peuvent
produire. Elles rendent compte des accidents sur-
venant malgré la cuisson, que celle-ci soit insuffi-
sante, que la toxicité hémolyÿtique (variable chez
une même sorte de champignons) soit plus marquée.
Elles prouvent la nécessité de faire subir aux cham-
pignons une cuisson très prolongée et à assez haute
température (utilité de l’adjonction d'huile), afin
de déterminer lhydrolyse complète du glucoside
hémolytique. Jacours PARISOT et VERNIER.
566
COSMOS
94 NOVEMBRE 1912
Les premiers habitants du globe.
Topffer, dans ses Voyages en zsiyzag, a plai-
samment raillé les géologues, qui, le dos tourné
aux plus splendides paysages, détachent des es-
quilles de roches à grands coups de marteau et les
examinent ensuite curieusement à la loupe.
Il faut avouer que l'outillage hétéroclite, les
vêtements salis et poudreux, les allures bizarres
des géologues sont autant de raisons pour attirer
sur eux la curiosité et les railleries des non initiés.
Citons Töpffer : « En ce moment arrivaient les
trois géologues..... dans quel état! ruisselants par
les coudes, par les poches, par le nez, par les cinq
doigts; des hannetons flottant dans le cataclysme
d’une ornière, des noyés du déluge nageant vers
et néanmoins attentifs encore aux
cailloux, regardant du coin de l'œil les stratifi-
cations »,
Les quelques centaines de pionniers de la science
qui, sur toute la terre, affrontent les durs climats
et les éléments déchainés pour arracher au solses
secrets, mériteraient mieux; nous allons en donner
une preuve.
Feuilletant ce grand livre des couches terrestres,
dont chaque strate est une page, les paléontolo-
gistes cherchent, depuis environ un siècle, à con-
naitre la faune primordiale, celle qui a peuplé le
globe à ses débuts, lorsque l'écorce terrestre fut
assez froide pour que le Créateur y semàt la vie.
C'est l’historique de leurs patients progrès que
nous voulons faire ici.
Au-dessus des terrains cristallophylliens (gneiss
et micaschistes), qui constituent le substratum des
couches sédimentaires, se développent les terrains
primaires inférieurs, dont voici la succession:
\ supérieur ou gothlandien à graptolithes
“AIRES | inférieur ou ordovicien à Calymene —
\ supérieur ou potsdamien à Olenus z
Cambrien < moyen ou acadien à Paradoxides »
| inférieur ou géorgien à Olenellus E
Précambrien ou algonkien à Beltina Danai /
Jusqu'au milieu du xix° siècle, les plus anciens
fossiles connus provenaient du silurien. Dès 1840,
l'illustre géolugue Murchison publiait, sous le titre
de Siluria, un ouvrage dans lequel il décrivait
950 espèces d'animaux éteints (1).
Aujourd'hui, le nombre en est immense, et ces
espèces se répartissent dans presque toutes Îles
divisions du règne animal.
La faune silurienne comprend : des éponges, des
polypiers, des hvdroïdes, des échinodermes, des
bryozcaires, des brachiopodes, des mollusques, des
annélides, des arthropodes, notamment des scor-
Ri) Voir Cuances DEPéRET, les Transformalions du
monde animal. Flammarion, 1907, p. 330 et suiv.
pions à respiration aérienne, enfin des poissons.
Comme ces animaux si variés étaient déjà très
perfectionnés, il fallait leur supposer des ancêtres.
Ce fut Joachim Barrande, un Français, qui les dé-
couvrit dans le cambrien moyen de Bohême, et les
décrivit à partir de 4852 (1). Cette faune comprend
de nombreux trilobites (crustacés), quelques bra-
chiopodes, un mollusque ptéropode et des échino-
dermes. Appelée primordiale par Barrande, elle ne
tarda pas à être retrouvée en France, en Angle-
terre, en Espagne, en Suède, en Amérique, etc.,
chaque découverte nouvelle lenrichissant d'une
facon inattendue.
D'ailleurs, le D" f. Hicks exhumait entre temps,
au promontoire de Saint-David’s, dans le pays de
Galles, les premiers fossiles caractéristiques du
cambrien le plus inférieur (Geol. Soc. Lond., XXVII,
P. 384; XXXVII, p. 68). Tout près de la base, il re-
cueillait des fragments de trilobite, crustacé du
genre Olenellus (fig. 2) (Geol. Mag., 1892, p. 24).
Il semblait qu'après cela tout espoir de ren-
contrer des formes plus anciennes devait ètre aban-
donné.
Cependant, sous le cambrien inférieur se déve-
loppent, dans plusieurs régions du globe, d'énormes
masses de terrains stratifiés: calcaires, grès,
schistes et conglomérats, désignés sous le nom
général de prérambrien.
Longtemps on qualifia cet ensemble de terrains
soiques où, ce qui est plus prudent, de couches
agnostosoiques.
Dans certaines régions, où le métamorphisme
n'a pas trop altéré la texture originelle des sédi-
ments précambriens, de vagues traces de vie
furent signalées, notamment des pistes ou des per-
forations d'organismes problématiques, observées
dans les grès des Highlands d'Écosse et retrouvées
par Lebesconte dans les schistes des environs de
Rennes.
Le 8 aoùt 41892, le D" Charles Barrois annonçait
à l'Académie des sciences la découverte de radio-
laires dans les phtanites précambriens de Lam-
balle (Còtes-du-Nord) (2).
L'examen approfondi de ces phtanites révélait à
M. Cayeux l'existence, dans cette roche, de radio-
laires (3) incontestables (fig. 4), de foramini-
(4) BanRaNuE, Syst. silurien du centre de la Bohème.
24 parties. Prague, 1852-94 ; gr.in-4° avec 1220 planches.
(2) Dr Cuances Banrois, Sur la présence de fossiles
dans le terrain asoique de Bretagne. C. R. Ac. SC.,
8 aoùt 1892, p. 326-328.
(3) Lucien Cavevx, les Preuves de l'eristence dorga-
nismes dans le terrain précambrien. Première note
sur les radiolaires précambriens. Bull. Soc. Géol. de
Fr., 3° série, t. XXI, 4894, p. 197-228, pl. XI.
Ne 1452
fères (1) et de spicules d’éponges (2). Cette faune
possédait bien les caractères les plus vraisem-
blables d’un monde animal encore très près de ses
origines. Il fallut bientôt renoncer une fois de
plus à cette manière de voir simpliste.
En avril 4899, M. Charles Walcott publiait dans
COSMOS
567
le Bulletin de la Société géologique d'Amérique
a'travail sur les formations fossilifères précam-
briennes du grand cañon du Colorado et de ceux
de Deep-Creeck et de Sawsmill (Montana (1).
Il décrivait des restes de colonies d’'hydroides
voisines des stomatopores, des mollusques à coquille
F1G. 1. — RADIOLAIRES DES PHTANITES PRÉCAMBRIENS DE LAMBALLE (CÔTES-DU-NORD).
conique (genre Aspidella) rappelant les patelles
(fig.3),d'incertains ptéropodes pélagiques,unanneau
de trilobite, des pistes d’annélides, enfin de nom-
breux débris de grands crustacés, dont la forme la
mieux caractérisée a recu le nom de Beltina Danai.
FIG. 2. — « OLENELLUS KJERULFI »
TRILOBITE DU CAMBRIEN INFÉRIEUR DE NORVÈGE.
Enfin, le Cosmos signalait, au début de l’année (3),
(1) L. Cayeux, Sur la présence de restes de forami-
nifères dans les terrains précambriens de Bretagne.
C. R. Ac. Sc., 1894, p. 1433-1435, 6 figures.
(2) L. Cayeux, De l'existence de nombreux débris d2
spongiaires dans le précambrien de Bretagne. Ann.
Soc. Géol. du Nord, 23, 1895, p. 52-65, 2 planches.
(3) Pauz LEMOINE, les Plus anciens fossiles (Cosmos,
n° 1406, 4 janv. 1912, p. 5; ide Revue scientifique).
la découverte par M. Lucien Cayeux, de restes d'en-
crines dans le terrain huronien des États-Unis (2).
Cet ensemble de découvertes conduit aux conclu-
sions suivantes :
1° L'époque précambrienne (huronien-algonkien)
possède une faune très différenciée qui comprend
des animaux relativement élevés dans l'échelle des
êtres: échinodermes, mollusques, gigantostracés.
20 Le globe terrestre était suffisamment refroidi
F1G. 3. — « ASPIDELLA »; GENRE DE MOLLUSQUE
VOISIN DES PATELLES (PRÉCAMBRIEN DES ETATS-UNIS).
au précambrien pour permettre la vie, dans les eaux,
à des animaux à corps mou ou revêtu de chitine.
“{4) C. D. Warcorr, Pre-Cambrian Fossiliferous For-
mations (Bull. of the Geol. Soc. of America. Vol. X,
avril 1899, p. 199-244, pl. XXII à XXVIII).
(2) Lucrex Cayeux, Eristence de restes organiques
dans les roches ferrugineuses associées aux minerais
de fer huroniens des États-Unis (C. R. Ac. Sc., t. CLIII,
p. 910, 1911),
568
4 Les arguments des monistes perdent de leur
valeur en présence d’une telle différenciation des
êtres au premier âge de la Ferre.
Nous ne doutons pas que ła longue patience et la
ténacilé des géologues, dont nous parlions au dé-
COSMOS
21 NOVEMBRE 1919
but de cet article, n’amènent de nouvelles décou-
vertes encore plus étonnantes, élargissant chaque
fois plus le champ grandiose de la science.
Parn Coupes fils.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
III. Réception à très grande distance.
Self d'antenne. — En réglant le ou les condensa-
teurs à capacité variable placés en dérivation dans le
circuit, on constatera que plus on augmentera les
surfaces en regard, moins il faudra prendre de
spires sur la bobine d'accord pour maintenir à son
maximum l'intensité du son. (Pour conserver con-
stant le produit de la capacité par la self qui carac-
térise la longueur d'onde propre du circuit, on
diminue le facteur self à mesure qu'on augmente
le facteur capacité.) Cette diminution du nombre
des spires soumises à l'induction exercée par
le circuit antenne-terre aura, à son tour, une autre
conséquence. Elle est équivalente à la réduction
des dimensions de l’antenne réceptrice dans la com-
paraison de la télégraphie sans fil en chambre.
Comme l'écarlement entre les deux circuits, elle
est donc un moyen de diminuer l’action du pri-
maire sur le secondaire, c'est-à-dire de relâcher
l'accouplement entre ces deux circuits.
On combinera avantageusement ce second moyen
avec le premier, et on le complétera par un troi-
site qui est une diminution analogue du nombre
des spires actives de la bobine inductrice. Les dis-
positifs employés dans la pratique ne permettent
pas, en effet, un très grand écartement entre le
primaire et le secondaire. Il peut donc être utile,
dans bien des cas, de disposer d’un autre moyen
de réglage de l'accouplement. C’est la diminution
. du nombre de spires actives des bobines primaire
el secondaire.
Cette double diminution permet d'obtenir un
accouplement très lâche, mais elle a en mème
temps l'inconvénient de faire disparaitre l'accord
du cireuit antenne-terre, puisque celui-ci n'est
obtenu qu'au moyen d’un nombre bien déterminé
de spires de la bobine primaire.
Si on diminue le nombre de ces spires, l'accord
ne pourra ètre maintenu qu'à condition de coim-
penser cette diminulion en un autre point du cir-
cuit primaire, exactement comme la diminution
(1) Suite, voir p. 541.
du nombre de spires de la bobine induite était
compensée, dans le circuit secondaire, par l’aug-
mentation de capacité des condensateurs.
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F1G. 24. — INTRODUCTION
D'UNE SELF D'ANTENNE DANS LE CIRCUIT ANTENNE-TERRE.
On opérera cette compensation au moyen d’une
seconde bobine d'accord, dite self d'antenne,
introduite en série dans le circuit antenne-terre
(fig. 24) à distance telle du circuit secondaire qu’elle
soit sans elfet notable d’induction sur lui. Chaque
fois que des spires auront été supprimées à la
bobine primaire, on en donnera un nombre équi-
valent à la self d’antenne. La valeur de l’accouple-
ment pourra ainsi être diminuée autant qu’on
voudra, tout en conservant l’accord.
Comme il n’y aura jamais intérêt à avoir un
accouplement très serré, une grande partie de l'ac-
cord sera toujours obtenue au moyen de la self
d'antenne, et il ne restera à la bobine primaire
quun nombre de spires relativement restreint. H
N° 1452
sera donc inutile de donner à cette bobine de
grandes dimensions et de la rendre capable, en
particulier, de fournir à elle seule l’accord néces-
saire. Celle du secondaire devra, par contre, être
plus grande. Nous savons, en effet, que dans le cir-
cuit antenne-terre un nombre de spires d'autant
moins grand doit être pris sur la bobine d'accord
que l'antenne est plus développée. Dans le circuit
secondaire, qui ne comporte aucune antenne, Île
nombre de spires correspondant à l'accord pour
une longueur d'onde donnée sera porté à son
maximum, et toujours plus grand, par conséquent,
qu'au primaire.
Condensateur d'antenne. — Avec une pelite an-
tenne, on est toujours sùr de n'avoir à recueillir que
Fia. 25. — INTRODUCTION D'UN CONDENSATEUR RÉGLABLE
EN SÉRIE DANS LE CIRCUIT ANTENNE-TERRE. MONTAGE
COMPLET KMPLOYÉ À LA TOUR EIFFEL AVEC DÉTECTEUR
A CRISTAUX.
des ondes plus longues que celle propre à cette an-
tenne. Lesréglagesà effectuer se fontdoncloujoursen
augmentant la self-induction du circuit antenne-
terreau moyen d’une bobine d'accord. Mais, avecune
grande antenne, le cas contraire peut se présenter.
I faut alors pouvoir diminuer sa longueur d'onde
propre au lieu de l’augmenter. Pour cela, au lieu
d’augmenter le facteur self-induction, on diminue
le facteur capacité au moyen d’un condensateur
réglable intercalé en série dans le circuit antenne-
terre. Les propriétés des condensateurs varient en
effet avec leur montage. En dérivation, ils aug-
mentent la capacité; en série, ils la diminuent. H
se passe là quelque chose d'analogue aux varia-
tions qu’on produit dans Îles propriétés d’une bat-
COSMOS
569
terie de piles ou d'accumulateurs suivant qu’on en
groupe les éléments en quantité ou en tension. La
longueur d'onde propre de l'antenne diminuera
d'autant plus qu'on diminuera davantage les sur-
faces en regard dans le condensateur. Lorsqu'il
n’y aura pas lieu de recourir à cette diminution,
les armatures seront mises en court-circuit par la
fermeture d'un interrupteur placé entre leurs
bornes.
Un poste complet à grande antenne pour la
réception par induction d'ondes de longueur quel-
conque comprendra donc au primaire: antenne,
self d'antenne, bobinage primaire, condensateur
d'antenne réglable et court-circuitable, terre; et
au secondaire : bobinage secondaire, détecteur
(avec pile ou potentiomètre, s’il est électrolytique),
téléphones et condensateurs réglables (fig. 25). C’est
le montage complet employé à la tour Eiffel avec
détecteur à cristaux.
Construction d'un dispositif de réception par
induction. — Le dispositif schématique d'induetion
à deux bobines juxtaposées, qui a servi aux explica-
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F1G. 26. — BOBINE SECONDAIRE.
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tions précédentes, ne permet d'obtenir qu’un accou-
plement assez lâche qui serait souvent insuffisant
pour la réception de signaux peu intenses. Dans la
pratique, ces deux bobines juxtaposées sont rempla-
cées par deux bobines concentriques qu’on peut
faire rentrer plus ou moins l'une dans l'autre (1).
La bobine secordaire est très analogue à une
bobine d’accord ordinaire. Comme la bobine pri-
maire doit l’entourer et se déplacer sur elle, le
réglage par curseur est remplacé par un réglage par
commutateur à plots (2). Le bobinage, d'autre
part, ne s'étend pas sur toute la longueur du tube
de carton servant de carcasse. afin que le primaire
puisse ne recouvrir à volonté qu'une partie plus
ou moins grande du secondaire (fig. 26).
(1) La maison Ducretet construit un dispositif de
réception par induction dans lequel les circuits pri-
maire el secondaire sont formés de deux spirales dis-
posées en regard l'une de l'autre dans deux plans
parallèles et tout à fait analogues aux classiques spi-
rales de Matteucci. L'accouplement varie avec l'écar-
tement entre les spirales, deux commutateurs à
45 plots permettent d'introduire dans les ciréuits un
nombre plus ou moins considérable de spires.
(2) On peut aussi employer plusieurs secondaires
interchangeables à réglages fixes différents.
570
On pourra laisser sans bobinage une longueur
du tube de carton égale à la moitié environ de la
partie bobinée. A bobinage égal, une bobine secon-
daire sera donc moitié plus longue qu'une bobine
d'accord ordinaire permettant les réglages corres-
pondants. Le fil émaillé, facile à dénuder pour
l'etablissement d'un réglage à curseur, mais d'un
prix relativement élevé, pourra ètre remplacé par
du simple fil pour électros isolé à une ou deux
couches de coton. Un commutateur à plots sera
disposé sur la joue de la bobine correspondant
au côté bobiné. Ce commutateur pourra être à
8, 10 ou 15 plots suivant la longueur du bobinage.
Les plots en seront reliés intérieurement à des
points équidistants du secondaire, par exemple
de 25 en 25 spires si le commutateur est à 15 plots
el si la bobine porte 375 spires. Des clous de tapis-
sier, à tête dorée presque hémisphérique, consti-
tueront des plots très pratiques et très bon marché.
Ce réglage par plots est évidemment moins
précis que le réglage par curseur, mais la présence
de condensateurs réglables dans le circuit secon-
daire permet de parfaire exactement l'accord dans
les limites comprises entre deux plots consécutifs.
Avec un bobinage long, permettant l'accord sur
de grandes longueurs d'onde, il sera bon de prévoir
une ou plusieurs coupures reliées à des interrup-
teurs qui pourront ètre placés sur la mème joue
que le commutateur à plots. Lorsque l'accord ne,
sera fait que sur des longueurs d’onde moyennes
ou courtes, ces coupures permeltront d'isoler la
partie du bobinage non utilisée dont l'effet pourrait
être nuisible à la réception. |
Il sera utile enfin de recouvrir entièrement la
bobine secondaire d'une feuille de bristol collée
sur elle, qui facilitera le glissement de la bobine
primaire tout en protégeant les spires contre
l'usure pouvant résulter de ce glissement.
+
F1G. 27.
BOBINE PRIMAIRE MOBILE SUR LA BOBINE SECONDAIRE.
La bobine primaire ne diffère d'une bobine d'ac-
cord ordinaire que par la longueur moindre de
son bobinare, qui sera égal au quart environ du
bobinage serondaire (fig. 27). Le tube lui servant de
carcasse devra ètre de diamètre suffisant pour
pouvoir glisser sans grand frottement sur la bo-
line induite. Les deux planchettes formant les
joues présenteront un orifice circulaire sur le pour-
tour duquel sera collé et cloué le tube de carton.
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
On obtiendra la variation de l'accouplement en
faisant avancer plus ou moins la bobine primaire
sur le bobinage secondaire, ou au contraire en la
ramenant sur la partie dépourvue de spires.
Construction de condensateurs réglables. —
Les condensateurs réglables que l'on trouve
dans le commerce sont d’un prix assez élevé. Il
est facile d'en constituer un donnant d'excellents
Fic. 28. — CONDENSATEUR RÉGLABLE.
résultats au moyen de deux tubes de laiton ren-
trant Pun dans lautre à la manière des tubes
d'une longue-vue (fig. 28). On prendra, par exemple,
deux tubes de 60 à 70 centimètres de longueur.
L'un aura de 30 à 35 millimètres de diamètre.
L'autre sera de diamètre un peu plus faible. On
l'isolera du tube plus gros dans lequel il doit entrer
au moyen de papier fort, de toile d'architecte ou
de diachylon, collés sur toute sa surface extérieure.
La toile d'architecte est moins facile à coller que
le diachylon, mais, étant plus mince, elle permet
l'emploi de tubes de diamètres moins différents
constiluant, à volume égal, des condensateurs de
plus grande capacité et, par conséquent, d'effica-
cilé plus grande. Une pince-borne sera fixée sur
chacun des tubes pour l’établissement des con-
nexions.
Pour diminuer l'encombrement, on pourra faire
usage simultanément de plusieurs condensateurs
constitués par des tubes moins longs et réunis en
parallèle. On en facilitera la manœuvre en fixant
de part et d’autre les tubes à deux planchettes
qu'il suflira de rapprocher ou d’éloigner l’une de
l'autre pour augmenter ou diminuer la capacité
(fig. 20).
On peut encore construire un condensateur ré-
glable de la manièse suivante :
Sur une pellicule de Kodak dégélatinée par
immersion dans de l'eau chaude ou de l'eau de
Javel, on colle une bande de papier d’étain un peu
moins large qu'elle au moyen de colle au cel-
luloïid (1). Une deuxième pellicule reçoit de la
mème manière une autre bande de papier d'étain.
Ces deux pellicules, éloignées l’une de l'autre sur
tout le reste de leur étendue, sont fixées par une
(1) Cette colle se prépare en dissolvant des rognures
de celluloid dans un mélange par parties égales d’act-
tone et d’acétate d'amyle. Elle constitue, d'autre part,
un excellent vernis isolant pouvant servir en parti-
culier à protéger contre les frottements les spires
d'une bobine ou à les coller entre elles si elles avaient
tendance au chevauchement.
N° 1452
de leurs extrémités à une bobine de bois sem-
blable à celles sur lesquelles les livrent les mar-
chands de fournitures photographiques, de façon
que la feuille d’étain collée sur une des pellicules
soit au contact de la face celluloid de l'autre. En
enroulant ensemble les deux bandes sur le cylindre,
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F1G. 29. — CONDENSATEUR RÉGLABLE
FORMÉ DE PLUSIEURS TUBES RÉUNIS EN PARALLÈLE.
on augmente de plus en plus les surfaces métal-
liques en regard et, par conséquent, la capacité
du condensateur ainsi formé. Pour la commodité
de l'emploi, il est utile de fixer les extrémités
libres des bandes de celluloïd à deux autres bo-
COSMOS
571
bines servant à enrouler la partie non utilisée et
munies d'un ressort de rappel fonctionnant comme
celui des stores de wagons de chemins de fer. Les
deux bandes abandonnent ainsi progressivement
les bobines magasins à mesure qu'on les enroule
sur la bobine condensateur, et regagnent de la
même façon leur place primitive quand on n’en
utilise qu'une moindre longueur (fig. 30).
F1G. 30. — CONDENSATEUR RÉGLABLE A ROULEAUX.
Si l’on ne dispose pas de pellicules photogra-
phiques suffisamment larges, on pourra coudre
les feuilles d’étain entre deux bandes de toile
d'architecte et les enrouler sur des cylindres de
bois de 4 à 5 centimètres de diamètre, comme des
rouleaux de pâtissier, par exemple.
(A suivre ) D" PIERRE CORRET.
m
L’Acoustèle Daguin-Diénert.
L'acoustèle Daguin, destiné primitivement à
percevoir les bruits éloignés et à en reconnaitre la
nature, na pas tardé à recevoir une application
plus pralique. Il a paru logique, en effet, aux
F1G. 1. — APPAREIL DAGUIN, MODIFIÉ PAR M. DIÉNERT.
chercheurs d’eaux souterraines de l'appliquer à
leurs travaux, et les résullats obtenus ont été tout
à fait concluants (1).
(1) Voir la note donnée à l'Académie des sciences
par MM. Diénert, Guillerd et Marrec, le 1‘ juin 1908.
L'appareil n’est pas destiné à rendre inutile l'in-
tervention des sourciers; ces derniers possèdent
une faculté spéciale qu'aucun instrument ne peut
remplacer; mais cette faculté appartient à fort
peu d'individus, et, en général, on ne fait inter-
©e
venir le sourcier que dans le cas où des travaux
importants sont à prévoir. Le simple particulier
est donc forcé de s'en rapporter à ses vagues con-
naissances géologiques en usant des moyens
empiriques que chacun connait pour chercher lui-
même la rigole souter-
raine dont il désire capter
leau.
L’acoustèle Daguin peut
alors venir en aide au
plus inexpérimenté des
chercheurs de sources.
C'est un cône à pavillon
évasé terminé par une
trompe que l’on place dans
l'oreille. Si l’on a soin de
creuser dans le sol un
trou de 20 à 30 centimètres
de profondeur, à endroit
où l’on suppose la pré-
sence d’une eau souter-
raine, et que l’on y place
le pavillon de lacoustèle
en le recouvrant de terre
sur ses bords, on supprime
à peu près complètement
l’action du vent sur l'ap-
pareil. Tout bruit souter-
rain, en particulier le bruit
que fait l'eau roulant sur
des cailloux, des roches, et surtout en tombant
en cascade, devient très perceptible à une profon-
deur de plusieurs mètres et même à une distance
de cinquante mètres à droite ou à gauche du drain.
M. Diénert est parvenu à augmenter la sensibi-
F16G. 2. — DÉTAIL
DE L’ACOUSTÈLE DAGUIN.
)72 COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
lité de cette sorte de cornet acoustique en l’enfer-
mant dans une pyramide de bois dont en enfonce
encore la grande base dans le sol, comme précé-
demment. De plus, l’espace libre entre le pavillon
et les côtés de la pyramide est garni de feutre sur
une certaine hauteur. Enfin, le bec recourbé de
l'acoustèle primitif a été remplacé par un tube
acoustique souple se terminant par deux écouteurs
qui se fixent aux oreilles. L'appareil ainsi con-
struit est parfaitement étanche aux bruits du
dehors.
Il y a lieu d'observer que l'acoustèle ne saurait
révéler la présence de l’eau dans tous les cas. Si
l’on se trouve au-dessus d'une nappe stagnante, ou
mème d'une rivière souterraine coulant sur un
lit de sable, l'instrument demeure muet parce que
l'eau est silencieuse. Pour qu’il remplisse la fonc-
tion pour laquelle il est construit, il est absolument
nécessaire que l’eau fasse du bruit. On voit que la
supériorité du sourcier demeure acquise.
L'acoustèle peut ètre utilisé dans d'autres circon-
slances, comme, par exemple, pour reconnaitre
une fuite dans une canalisation souterraine. Il a
toujours été employé avec succès, dans ces condi-
tions, par les entrepreneurs, qui s'évitent ainsi des
fouilles parfois importantes.
D'autres applications sont à prévoir, par exemple
en cas d'accident dans les centres miniers, en révé-
lant les efforts faits par les victimes pour attirer
l'attention des sauveteurs et indiquer la place où
elles se trouvent. On pourrait même l'utiliser å la
chasse, comme pour la recherche des furets dans
les terriers; mais il suffit qu'il soit à même de
rendre des services aux chercheurs d’eaux pour
mériter qu'on s'y intéresse. LUCIEN FOURNIER.
L'industrie du chauffage central.
Les procédés de chauffage central sont plus
anciens qu'on ne se l’imagine généralement.
Lorsque, quittant les régions clémentes qu'ils
avaient habitées jusqu'alors, les Romainsenvahirent
les parties plus froides de l'Europe, ils imaginèrent,
pour se chauffer, des installations de chauffage
central, les hypocaustes, dont des vestiges ont été
retrouvés en plusieurs endroits. Les installations
de chaulTage central ne furent pas non plus incon-
nues au moyen âge : il y én avait alors dans beau-
coup d'établissements publics, dans les cloitres,
dans les habitations de la classe riche, etc. Elles
disparurent presque complètement, il est vrai,
pendant les premiers siècles de la période moderne,
mais la méthode reprit un nouvel essor, considé-
rable cette fois, dès le second quart du xrxe siècle,
lorsque l’on apprit à employer, comme véhicule
de la chaleur, non seulement l'air, mais l’eau et
la vapeur; dès ce moment, les procédés de chauf-
fage central s’améliorèrent et s’industrialisèrent
beaucoup; de grands établissements de fabrication
mécanique s’outillèrent pour la construction des
appareils nécessaires, et, peu après, il s’en constitua
pour cette fabrication exclusivement.
Vers 1860 déjà, les avantages du chauffage cen-
tral étaient généralement appréciés; depuis plu-
sieurs années, on les avait remis en honneur, dans
les établissements de bain, dans les serres chaudes,
dans les fabriques, etc. ; l’on admettuit sans réserve,
à cetle époque, l'utilité de la méthode dont il
s’agit pour les locaux d’administration, les hôpi-
taux, les écoles, etc., bref, pour tous les bâti-
ments où un chauffage régulier et constant est
nécessaire; dès ce moment aussi, l'on établissait
des inslallalions centrales pour le chauffage de
groupes de bâtiments, à l'effet de supprimer les
N° 1452
ennuis résultant, avec les méthodes ordinaires, de
la nécessité d'entretenir des feux, de la production
des poussières du charbon, des dégagements des
fumées par les foyers, etc.; on avait en outre
reconnu que les dangers d'incendie sont beaucoup
moindres avec les installations de chauffage cen-
tral qu'avec les autres; cette circonstance était
considérée comme particulièrement importante
pour les hòpitaux, musées, etc., et plus encore
pour les théâtres.
Un ouvrage publié en 1878 évalue à 460 le
nombre de théâtres détruits par le feu de 1775 à
1875, et à 625 millions de francs les pertes maté-
rielles qui en résultèrent ; à la suite de l'introduc-
tion de l'emploi du chauffage central, les sinistres
devinrent sensiblement moins fréquents; une étude
parue en Allemagne indique, pour les années 1882,
1883, 1884, 1885 et 1886, 25, 22, 10, 8 et 8 incen-
dies de théâtre; il est vrai que cette époque fut
marquée également par la mise en vigueur de
dispositions de police plus rigoureuses, par une
surveillance plus attentive des bâtiments dangereux
et par l'introduction de l'éclairage électrique,
toutes circonstances qui contribuèrent à diminuer
les risques d'incendie.
Quoi qu'il en soit, on peut dire que la période
de prospérité de l’industrie du chauffage central
a commencé il y a cinquante ans; elle rencontra
d'abord un réel engouement, auquel succédèrent
bientôt des désillusions : dans beaucoup de loca-
lités, des installations de chauffage central ne
donnèrent pas satisfaction; lon eut à se plaindre
notamment du peu de régularité du fonctionne-
ment de certains appareils; mais ces insuccès ne
furent qu'un stimulant pour les constructeurs, et
ils les incitèrent à améliorer leurs systèmes.
D'une façon générale, l'utilité du chauffage cen-
tral, en dehors des qualités particulières de cette
méthode, peut dépendre de deux éléments princi-
paux : en premier lieu, le prix plus ou moins élevé
du charbon ; en second lieu, la proportion de grands
immeubles dans la localité intéressée.
Que le prix du charbon influe sur la multiplica-
tion des installations de chauffage central, cela se
comprend facilement, l'économie de la méthode
est naturellement d'autant plus manifeste que le
prix du charbon est plus élevé, puisqu’alors appa-
rait mieux l'avantage de la réduction des dépenses
de combustible.
De même, c’est naturellement pour les grands
immeubles que le chauffage central a le plus
d'intérêt; dans les petits, on ne chauffe ordinaire-
ment qu'une partie des locaux avec le chauffage
central, l'installation peut de la sorte être mul
utilisée; de ce seul chef, les pertes peuvent devenir
anormales, comparativement au service rendu, et
détruire le bénéfice de l'augmentation de rende-
ment du foyer même.
COSMOS
573
Un facteur de succès nouveau a encore été
apporté dans la suite au chauffage central; c’est la
cherté de la main-d'œuvre; le recrutement de la
domesticité est partout de plus en plus difficile, et
les exigences des serviteurs s’accentuent sans
cesse, de sorte qu'il est de plus en plus urgent de
substituer aux procédés anciens, demandant beau-
coup de soins, des procédés nouveaux diminuant
le personnel nécessaire.
Les trois facteurs indiqués ci-dessus se sont parti-
culièrement fait sentir dans les dernières années, par
suite des grandes transformations entreprises dans
la plupart des villes importantes, de la démolition
et de la reconstruction des vieux quartiers, etc.
Dans certaines villes, on constate une augmen-
talion extraordinaire des installations de chauffage
central; on cite, notamment, le cas de localités alle-
mandes où, sur les nouvelles habitations édifiées, les
six dixièmes appliquent le système dont il s’agit.
Le chauffage central est aussi d’un emploi général
aujourd'hui dans les grandes fabriques.
Le prix des appareils a d’ailleurs diminué sensi-
blement depuis l'origine ; la construction du maté-
riel, qui d'abord s'était surtout développée en
Amérique, est aujourd'hui implantée en Europe;
elle n'y est pas encore aussi avancée, au point de
vue technique, qu'aux États-Unis; néanmoins, des
spécialistes européens ont apporté une part de con-
tribution importante au perfectionnement de la
fabrication ; l’amélivration la plus intéressante qui
ait été réalisée est l'uniformisation de l'outillage,
permettant d'arriver avec un nombre restreint de
constituants types à la réalisation des installations
les plus diverses.
Les principes mis en œuvre dans les appareils
actuels ne sont pas différents de ceux utilises dès
4840, tout au plus l'application en est-elle plus
rationnelle; mais, à l'heure présente, deux ten-
dances opposées se manifestent: d'une part, on
cherche, dans les immeubles loués par partie, à
substituer aux installations de chauffage général,
avec un seul fover central, des installations où
chaque locataire a son propre foyer; d'autre part
on seflorce de centraliser la production de la
chaleur pour plusieurs immeubles, pour un groupe
de maisons, pour un quartier.
Celte dernière méthode est particulièrement en
faveur aux État-Unis; elle y a élé essayée dès 1880,
mais ce n'est que depuis quelque temps qu'elle
donne vraiment satisfaction: les installations de
chauffage central y ont été combinées aux instal-
lations génératrices d'électricité, pour le plus grand
profit des unes et des autres.
Tel est l'avantage de cette combinaison que,
dans des installations moins importantes et ne
servant que pour un établissement donné, on
adjoint aux équipements de chauffage des machines
électrogènes utilisant toute la vapeur disponible
574 COSMOS
pour la production de l'électricité et vendant à
des tiers leur excédent d'énergie électrique. 449
Les conditions sont malheureusement beaucoup
moins favorables pour la distribution de la chaleur
que pour la distribution de l'électricité, et aujour-
d’hui se marque de mieux en mieux le besoin d’une
centralisation aussi complète que possible; on
21 NOVEMBRE 1919
peut prévoir que l'électricité jouera plus tard un
rôle important comme intermédiaire dans la dis-
tribution du chauffage.
Dans l’état actuel de la science, de la technique
et de l’industrie, c’est incontestablement la dis-
tribution électrique qui fournit la solution la plus
élégante du problème. MARCHAND.
naf
Le barrage de Galveston.
La technique américaine vient d'achever une
œuvre grandiose en convertissant l'ile de Galveston
en presqu'ile par un barrage monstre qui franchit
la baie en mettant les produits de toute une moitié
Z `
K
VUE GÉNÉRALE DU BARRAGE DE GALVESTON.
du coniinent en relation avec le port le plus im-
portant du Sud-Ouest.
Ce barrage, fait de terre, d'acier et de béton, se
compose de trois parties, à savoir de deux barrages
proprement dits, respectivement de 1 400 et de
1660 mètres de longueur (vers le continent de
Texas et lile de Galveston), et d'un pont immense
en arches de béton de 742 mètres de longueur, qui,
au milieu, donne passage aux navires par un pont
à bascule de 30 mètres d'ouverture.
Ce pont à bascule, large de 13,2 m, porte la
roule carrossable, deux voies de chemins de fer
à vapeur et une voie de chemin de fer électrique
desservant la ligne suburbaine de Galveston-Hous-
ton. Le pont en béton a une largeur plus grande
de 6,6 m. Les deux barrages proprement dits
ont, au sommet, une largeur de 36 mètres, dont
15 mètres destinés aux chemins de fer à vapeur,
8,1 m aux chemins de fer suburbains et 12,9 m
à la route carrossable. L’axe de la construction tout
entière,sa ligne médiane, est presque parallèle aux
ponts de chevalets du chemin de fer de Santa-Fé.
La partie la plus imposante de cette construction,
c'est le pont à bascule, avec Ja jetée puissante sur
laquelle il repose. Lorsque le pont a été soulevé
pour donner passage aux navires, il monte librement
dans l’air à une hauteur d'environ 50 mètres; il pèse
près de 1 500 000 kilogrammes, dont 700 000 kilo-
grammes d'acier et le reste en béton.
Afin de supporter un poids si énorme, il a fallu
construire une jetée de dimensions extraordinaires.
Après avoir creusé l'argile dure au fond de la baie
de Galveston jusqu'à 3,3 m-5,4 m de profondeur,
on y a enfoncé 32 piliers de pin créosoté de
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N° 1452.
2 mètres de longueur, et sur cette fondation on
a déversé plus de 3000 mètres cubes d’un mélange
de béton (d’un poids d'environ 3500 000 kilo-
grammes) renfermant environ 1 500 kilogrammes
d'armatures d'acier. C'est sur cette jetée qu'on
plaça le pont métallique pesant, à son tour, envi-
ron 1 500 000 kilogrammes.
Malgré la construction si robuste du pont à bas-
cule, on a si bien équihbré les poids que le pont
est soulevé et abaissé avec une dépense d'énergie
très faible. Ce n’est, en effet, que pour vaincre les
frottements qu'il faut dépenser de l'énergie; le
pont s'arrête en toute position voulue. Sur le côté
Ouest du barrage (vers le continent), se trouve un
COSMOS 575
bâliment en béton où sont installées les machines
actionnant le pont. Cette installation se compose
de deux moteurs électriques de 50 chevaux, ali-
mentés par lusine de force motrice du chemin de
fer électrique Galveston-Houston, d'un moteur à es-
sence de 50 chevaux et de batteries d’accumulateurs
d'une capacité suffisante pour entretenir, pendant
plusieurs jours, le service du pont (lors d'une
interruption du service de l’usine d'électricité, etc.).
Afin d'assurer en toute éventualité le service du
pont, on a toutefois ajouté un engrenage à main.
Le pont en béton ne comporte pas moins de
28 arches d'une portée individuelle de 21 mètres et
de 2,7 m de flèche. Ces arches prennent appui sur
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LE BARRAGE DE GALVESTON, AU PASSAGE D'UN TRAIN ET D'UN TRAMWAY.
des barrages reposant sur le fond argileux de la
baie. Afin de donner une idée de la construction de
ces barrages de fondation, nous ferons remarquer
que chaque barrage renferme environ 1 200 mètres
cubes de béton, qu'il est à sa base d'une largeur de
8,1 m et n'arrive qu'à peine de 0,6 m au-dessus
du niveau des eaux. Plus de la moitié des frais de
construction correspond à ces fondations et à la
construction du pont en arcs.
Chaque travée du pont se compose de deux sec-
{ions longitudinales; la section destinée au service
des chemins de fer est de 13,5 m et celle de la
route carrossable de 6,5 m de largeur.
Après qu’on eùt terminé la construction des arcs
armés de barres d'acier, l’espace superposé et lin-
tervalle des parois de soutènement furent remplis
de sable provenant du fond de la baie.
Les barrages proprement dits ont, au sommet,
36 mètres et, au niveau de l'eau, 46,2 m de
largeur. Ils se composent d’un double pilotis en
bélon armé, enfoncé à environ 1,5 m de profon-
deur dans le fond argileux, et qui pénètre d'à peu
près 0,9 m au delà du niveau moyen de basse
marée; les piles sont assemblées en versant du
mortier dans leurs rainures cylindriques latérales.
Après avoir ensuite appliqué à ce double pilotis
des calottes en béton armé, on a disposé entre les
deux rangées, à environ 3 mètres de distance, des
barres d'ancrage. On a ensuite rempli les inter-
valles de sable monté du fond de la mer, et, après
avoir recouvert les talus du barrage de plaques de
béton de 12 centimètres d'épaisseur, on a calfeutré
les joints avec du feutre goudronné.
D' ALFRED GRADENWITZ.
576
COSMOS
21 NOVEMBRE 1919
Les méthodes modernes de diagnostic sérologique."”
Ill, La fixation de l’alexine.
Rappelons, très sommairement, quelques notions
sur les phénomènes de l’immunité acquise, soit par
la vaccination, soil par une infection accidentelle.
Selon la théorie généralement acceptée, celle de
M. Ehrlich, le développement de l’immunité pour
les différentes substances biotoxiques A, B, C, etc.,
dépend — au moins en partie — de ce que, sous
l'influence de ces substances sur les cellules des
tissus, il se développe dans l'organisme certains
principes antagonistes spécifiques A’, B', C, ete.,
appelés « sensibilisatrices » ou « anticorps », dont
la propriété est de rendre sensibles les substances
biotoxiques — auxquelles on donne le nom d’«an-
tigènes » — à l’action neutralisante et protectrice
de l’ « alexine » ou « complément », lequel n’est
pas proprement un produit d'immunisation et se
trouve dans tous les sérums neufs et frais.
Ainsi, lorsqu'un antigène A pénètre dans un
organisme animal capable d'en ressentir les effets
nuisibles, il se forme dans celui-ci une sensibili-
satrice spécifique A’ qui met l’antigène A dans les
conditions favorables pour s'unir avec la substance
générique protectrice des humeurs, l’alexine. Le
groupe moléculaire anfigène À + anticorps (sen-
sibilisatrice) À + alexine est neutre, incapable
d'exercer aucune influence nuisible ou bienfaisante
sur les cellules de l'organisme.
L'alexine disparait d'un sérum lorsqu’on le
chauffe à 56° pendant une demi-heure. Les sensibi-
lisatrices, au contraire, ne sont point détruites par
la chaleur. Par conséquent, un sérum frais, riche
en sensibilisatrices A’, devient inactif envers l’anti-
gène A s'il est chauffé à 56°; mais, si on lui ajoute
un peu d'un sérum frais quelconque — c’est-à-dire
un peu d'alexine, — il reprend toutes ses propriétés.
On a imaginé des représentations graphiques
(Voir fig. 3.) pour expliquer clairement comment,
dans un mélange de plusieurs sensibilisatrices spé-
cifiques contenues dans un même sérum actif,
chaque sensibilisatrice trouve facilement son anti-
gène correspondant, sur lequel l’alexine devient
alors capable de se fixer. (On appelle aussi l’alexine:
substance fixatrice.\
MM. Bordet et Gengou ont utilisé ces remar-
quables propriétés des sérums pour leur méthode
de diagnostic sérologique, laquelle se perfectionne
de jour en jour et, à cause de son extraordinaire
sensibilité, donne des résultats très brillants pour
le diagnostic des maladies infectieuses, des affec-
ions vermineuses et mème des tumeurs malignes
(sarcomes, cancers).
(1) Suite, voir p. 548.
L'alexine se trouve dans les sérums en quantité
limitée. Une dose déterminée d'un sérum très actif
envers un antigène À ne peut donc neutraliser
qu'une quantité limitée de cet antigène. Si dans
un tube on mélange, par exemple, un centimètre
cube d’un sérum actif quelconque avec une sub-
stance capable de fonctionner comme antigène,
après quelque temps il n’y a plus d’alexine libre
dans le mélange. Si l’on pouvait constater facile-
ment cette disparition de l’alexine libre dans le
sérum examiné, on aurait un moyen pour déceler
dans les sérums la présence de sensibilisatrices
(anticorps) spécifiques. Si, par exemple, l’antigène
est un extrait de bacilles typhiques, on pourrait
conclure que le sérum contenait des sensibilisa-
trices ou anticorps pour le bacille d’Eberth et, par
conséquent, que l'individu fournisseur du sérum
E Alexine
FiG. 3. — DANS UN SÉRUM CONTENANT DE L'ALEXINE,
CHAQUE SENSIBILISATRICE S’UNIT A SON ANTIGÈNE COR-
RESPONDANT. L’'ANTIGÈNE SENSIBILISÉ S'UNIT ALORS AVEC
L'ALEXINE.
i 3 Sensibrhisatrices Antiqénes
(s'il s’agit d'un malade) est très probablement
atteint de fièvre typhoïde. Mais comment démon-
trer la disparition de l’alexine? On y parvient faci-
lement, grâce à un procédé très simple et très
ingénieux que nous allons exposer.
Lesérum d'un animal appartenant à une espèce A
acquiert la propriété de dissoudre les globules
rouges des animaux d’une autre espèce B lorsqu'on
injecte à plusieurs reprises à l'animal d'espèce A
des globules rouges de l'espèce B. Ce phénomène,
appelé « hémolyse », rentre lui aussi dans la caté-
gorie des réactions immunitaires. Une suspension
de globules rouges en eau salée physiologique
devient, au bout de quelque temps, limpide et
incolore, à cause de la précipitation des globules
rouges au fond du tube à essai. Mais si on a mé-
langé la suspension de globules avec un sérum
hémolytique actif (non chauffé), la dissolution plus
ou moins rapide des globules rouges est cause que
l’'hémoglobine se mélange à l’eau salée et la teint
Ne 1152
uniformément en rouge. On dit, dans ce second
cas, qu'il ya eu hémolyÿse. — L’hémolyse, elle
aussi, s’accomplit à la suite de la fixation de
l’alexine sur les globules rouges sensibilisés par la
sensibilisatrice spécifique hémolytique.
Voici comment s'exécute la réaction de Bordet
et Gengou, qu’on appelle aussi « épreuve de la
déviation (ou fixation) de l’alexine ».
Soit, par exemple, le cas d’un malade qu'on
suppose atteint de fièvre typhoide et dont le sérum,
par conséquent, est censé contenir des principes
défensifs antityphiques, des sensibilisatrices spéci-
fiques pour les bacilles d'Eberth. Nous mélangeons
dans une petite éprouvette des bacilles typhiques
avec de l’alexine (c’est-à-dire un sérum quelconque
non réchauffé) et avec du sérum inactivé (réchaufté
à 56° et, par conséquent, privé d’alexine) du ma-
lade (sensibilisatrice antityphique), et nous laissons
le mélange à l’étuve pendant un temps convenable.
D'autre part, nous mélangeons dans une autre
éprouvette une suspension en eau salée physiolo-
gique de globules rouges de lapin avec du sérum
de cobaye hémolytique pour le lapin, mais inactivé
lui aussi à 56° (sensibilisatrice hémolytique). I ne
reste, après quelque temps, qu’à mélanger ensemble
le contenu des deux éprouvettes et à observer s’il
se produit ou non l'hémolyse. Dans le premier cas,
on conclut que le sérum du malade ne contient pas
de sensibilisatrices pour le bacille d'Eberth, car,
en cas contraire, ceux-ci auraient élé sensibilisés
et, par conséquent, auraient absorbé, dévié l'aiexine
durant leur contact avec celle-ci et le sérum du
malade inactivé. Dans le second cas, l’absence
d’hémolyse signifie clairement que, durant le con-
tact des bacilles typhiques avec le sérum du ma-
lade et l’alexine, celle-ci a été absorbée, déviée par
l’antigène typhique moyennant l'intermédiaire de
la sensibilisatrice contenue dans le sérum du ma-
lade ; le mélange ne contenant plus de l’alexine
libre, l’'hémolyse ne peut plus se réaliser lorsqu'on
mélange le contenu des deux éprouvettes.
On comprendra mieux le mécanisme de la réac-
tion de Bordet et Gengou en se rapportant à notre
schéma n° 4.
Cette réaction, dont nous avons indiqué simple-
ment les lignes générales, ne peut donner des
résultats sérieux qu’à la condition de faire d'abord
une série d'expériences préalables. Il faut, en effet,
préalablement : 4° S'assurer que les globules rouges
ne s’hémolysent pas spontanément ; 20 déterminer
l'activité du sérum hémolytique; 3° déterminer
l'activité de l’alexine, qui varie selon l'ancienneté
du sérum; 4 déterminer le mélange optimum
pour que l’hémolyse se fasse à 37°, en un quart
d'heure, avec le minimum de sérum hémolytique
pour un centimètre cube d'émulsion au vingtième
des globules dans l'eau physiologique ; 5° voir si l’an-
tigène à lui seul ou le sérum à lui seul ne dévie
COSMOS
877
pas l’alexine. 11 faut savoir, en effet, que, si l’on
enfploie de fortes doses de n'importe quelle ma-
tière contenant des albuminoïdes, il peut y avoir
une déviation mécanique de ľalexine, déviation
qui peut se produire même avec des particules
figurées de différentes natures. Tout cela démontre
bien que la déviation de l’alexine dans un but dia-
gnostique n'est pas à la portée de tout le monde.
En revanche, la méthode de Bordet et Gengou,
exactement appliquée au diagnostic d'une longue
série de maladies, a denné des résultats inattendus.
En se servant, comme antigène, du liquide des
kystes hydatiques, M. Ghedini a pu diagnostiquer
l'échinocoque, et, en utilisant de la mème façon des
extraits de tumeurs malignes fraichement préparés,
. Bacilles
V Alexine l
` lyphiques
&
v
NX
d sE
o densibihsatrics Globules
£ rouges
Bacrlles
lyphiques
6 m
V
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À
T Globules
Alexine
rouges
4’
.
F1G. 4. — LA RÉACTION DK BORDET ET GENGOU.
SCHÉMA DE LA COAGULATION DU SANG
plusieurs expérimentateurs ont réalisé des diagno-
stics très précoces du cancer de l'estomar. Appli-
quée au diagnostic précoce de la tuberculose, la
méthode de la déviation de l’alexine a donné des
résultats bien plus sensibles que l'épreuve de l'ag-
glutination.
On peut lui reprocher qu’elle n'indique pas si
l'individu fournisseur du sérum est vraiment en
proie à un processus tuberculenx, ou bien s’il n’est
que porteur dans son sang de principes antitu-
berculaires dépendant d'une infection bacillaire
éteinte. Mais c'est là, malheureusement, un défaut
qui est propre à toutes les épreuves diagnostiques
sérologiques.
La « réaction de Wassermann », qui sert
à reconnaitre, moyennant l'examen du sérum,
578 COSMOS
certaine maladie très répandue dans le genre
humain et causée par un spirille découvert par
Schaudinn, est une application de la réaction de
Bordet et Gengou à la recherche de l’anticorps spi-
rillique.
Quoique non rigoureusement spécifique — on
peut voir se produire la réaction dans des cas
de lèpre, de scarlatine, de trypanosomiases, — la
méthode n'en est pas moins applicable en clinique,
où elle rend, de très grands services.
IV. La meiostagmin-réaction.
Mettons en présence l'un de l’autre du sérum
d'un individu atteint de la fièvre typhoide avec
une émulsion ou un extrait aqueux de bacilles
typhiques. On se demande s’il ne pourrait y avoir
d'autre moyen que la réaction très délicate de
Bordet et Gengou pour mettre en évidence la com-
binaison dessubstances protoplasmatiquestyphiques
(antigène) avec l’alexine par l'entremise des sub-
stances spécifiques défensives (sensibilisatrices) du
sérum.
Partant de l’hypothèse formulée par MM. Wei-
chardt et Ciuffo, selon laquelle les réactions mises
en lumière par l'inhibition de l'hémolÿse dans
l'épreuve de Bordet et Gengou s'accompagneraient
de certaines modilications d'ordre physico-chimique
des mélanges de sérum et d’antigène, M. Maurice
Ascoli, de l’Université de Pavie, a essayé un nou-
veau procédé de séro-diagnostic très original : la
« meiostagmin-réaction ». Nous en exposerons
rapidement la théorie et la technique.
Tout le monde connait le compte-gouttes, con-
stitué par un tube à extrémité allongée et à ori-
fice très étroit. Le liquide introduit ou aspiré dans
le compte-gouttes, au lieu de s'écouler en mince
filet par l'orifice inférieur, en sort sous forme de
gouttes plus ou moins grosses selon le diamètre
de cet orifice, la matière dont est fait le compte-
gouttes et la nature du liquide. Ce phénomène est
dù à la capillarité : l'adhérence du liquide avec le
bord de l'oritice capillaire de la pipette — le phé-
nomène ne se produit pas dans le cas, par exemple,
du mercure, lequel n’adhère pas au verre — em-
pèche le liquide de s'écouler librement et l'oblige
à former un globule dont la surface, à cause de la
tension superficielle des liquides, se comporte
comme une membrane élastique (ou ménisque
convexe). La goutte se détache et tombe chaque
fois que se rompt l'équilibre entre son poids, d'une
part, la force d’adhérence et la tension superficielle
du liquide, d'autre part.
En remplissant successivement une pipette avec
différents liquides et en comptant le nombre des
gouttes qui s'écoulent chaque fois de l'instrument,
on mesure les tensions superficielles relatives de
ces liquides. Cette tension s'exprime généralement
21 NovEMBRE 1912
moyennant un chiffre relatif à la tension super-
ficielle de l’eau distillée, selon la formule :
Z
v=kD;zZ
dans laquelle y indique la tension superficielle
relative du liquide en expérience, D sa densité,
Z et Z' le nombre des gouttes qui s'écoulent de la
pipette selon qu’on l’a remplie du liquide en ques-
tion ou d'eau distillée, Æ une constante fixe.
(La température ne doit pas varier pendant l'ex-
périence.)
Au lieu d'une simple pipette, on se sert, pour
ces expériences délicates, d’un instrument appelé
« stalagmomètre » (de orarxyuég — distillation,
écoulement goutte à goutte), consistant en une
petite ampoule située le long du trajet d'un tube
très mince, bien calibrė, replié à baïonnette, dont
l'extrémité inférieure a la forme d'un disque hori-
zonlal percé en son milieu d'un orifice capillaire.
On remplit l’instrument, bien lavé et dègraissé,
avec de l’eau distillée, et on compte le nombre de
gouttes qui s’écoulent pendant le temps employé
par l’ampoule pour se vider. On recommence
l'opération avec le liquide dont il s’agit de déter-
miner la tension superficielle relative à l’eau dis-
tillée (à la température de 15°).
M. Maurice Ascoli, ayant observé que la tension
superficielle d’un sérum frais contenant des anti-
corps s'abaisse d'une façon sensible, quoique assez
faible, lorsqu'on mélange ce sérum à lantigène
correspondant, a proposé d'utiliser le stalagmo-
mètre pour la mise en évidence de la fixation de
lalexine. La « meiostagmin-réaction » (de peiwv
= plus petit et otáypa = goutte) s'exécute facile-
ment selon la technique que nous avons exposée
pour la détermination de la tension superficielle
relative des liquides. Supposons qu'on ait affaire à
un cas suspect de tuberculose. On prépare, d’une
part, une dilution à 5 pour 100 de sérum frais du
malade en eau salée physiologique; de l’autre, une
dilution à 2 pour 100 d'un extrait de bacilles
tuberculeux, dont le mode de préparation n'inté-
resserait pas les lecteurs, et qui doit remplir la
fonction d’antigène. A un centimètre cube de cet
antigène, on ajoute 9 centimètres cubes de la dilu-
tion de sérum, après quoi, on compte immédiate-
ment le nombre de gouttes que donne le stalag-
momètre pour l'unité de volume choisie à la
température de 15°. Ce qui reste du mélange anti-
gène-séruim est laissé à l’étuve à 37° pendant deux
heures (ou bien dans un bain-marie à 30° pendant
une heure). On répète lopération au stalagmo-
mètre après avoir laissé refroidir le mélange à 15°.
Si l’on trouve une différence tant soit peu évidente,
mais exactement contrôlée, entre le nombre des
gouttes comptées à chaque opération, c'est-à-dire
si l'unité de volume du mélange antigène-sérum
tenu deux heures à l’étuve donne un nombre de
N° 1452
gouttes supérieur à celui donné, pour la même
unité de volume, par le même mélange fraiche-
ment préparé, on conclut que le sérum examiné
contient des anticorps spécifiques capables, durant
le séjour à l'éluve, de s'unir à l’antigène tubercu-
leux.
Voici quelques exemples relatits à la tuberculose
qui nous dispenseront de recourir à d’autres expli-
calions :
Nombre de gouttes,
AVANT | APRÈS
Un cas de tuberculose disséminée.
Un cas de méningite tuberculeuse.
Un cas de tuberculose pulmonaire.
Un cas de péritonite tuberculeuse.
Un cas de bronchopneumonie.....
Un cas de gastro-entérite......
Un cas de rachitisme .............
Bien entendu, on doit contrôler aussi le nombre
de gouttes donné par le stalagmomètre rempli
successivement de sérum frais et de sérum tenu
à l'éluve pendant deux heures sans addition d’an-
tigène. La différence doit êlre minime.
La valeur pratique de la meiostagmin-réaction
a été discutée et mérite d’être confirmée par une
longue série d'expériences. Cependant elle so donné,
dans des cas de fièvre typhoiïde, des résultats non
moins sirs que l’agglulino-réaction de Widal. Elle
a été employée avec succès pour le diagnostic de
la tuberculose. On l’a essayée, concurremment avec
l'épreuve de Wassermann, dans les cas suspects de
COSMOS
519
maladie causée par le microparasite de Schaudinn.
Elle a permis à MM. Ascoli et izar, moyennant
lemploi d'extraits de tumeurs comme antigène, de
diagnostiquer le développement du cancer dans des.
cas où l'épreuve de MM. Bordet et Gengou n'avait
donné aucun résultat.
Sa
Nous ne voulons pas terminer cette revue sans
signaler un nouveau procédé de séro-diagnostic
qui a élé proposé par M. Freund dans les cas sus-
pecls de cancer. Cette réaction est basée sur le
fait que le sérum des sujets non cancéreux détruit
par un phénomène de cytolyse les cellules cancé-
reuses el respecte, au contraire, les cellules nor-
males, tandis que le sérum des cancéreux n’exerce
qu’une aclion cytolytique limitée sur les cellules-
des tumeurs malignes. Il est facile de se rendre
compte de la destruction des cellules cancéreuses
dans le sérum d'un sujet sain en comptant à plu-
sieurs reprises au microscope le nombre de ces
cellules, lequel diminue rapidement à chaque nou-
velle observation. La différence entre l’évolution
de la cytolyse dans le sérum normal et dans celui:
des cancéreux est clairement appréciable et per-
meltlrait, parait-il, quelquefois de reconnaitre l’exis-
tence d'une tumeur maligne qui n'est encore révé-
lée par aucun symptòme clinique.
C’est là un résultat des plus encourageants, car
on sait combien il importe de diagnostiquer le
cancer lorsqu'il est encore temps de l’extirper
complètement et facilement. Tel est, du reste, le
but principal de tous les procédés de séro-dia-
gnostic: reconnaitre la présence et la nature d'une
maladie avant qu'il soit trop tard pour la soigner
et la guerir.
D P. GOGGIA.
Un coup d’œil sur le passé : les béles qui guérissent.
Tandis que les médicaments actuels sont presque
tous du domaine de la chimie et de la botanique,
plusieurs autrefois étaient tirés des animaux. Et si
l'on jette un coup d'œil sur ceux-ci, on est étonne
de voir que nos pères, ou plutòt nos grands-pères,
aient pu croire à leur vertu. Dans un ouvrage
qui date de 1765 — ce qui, en somme, n'est pas
très vieux — et qui s'intitule : « Les plantes et les
animaux d'usage en médecine, décrits dans la
Matière medicale de M. Geoffroy, médecin », on
ne trouve pas moins de cent trente-quatre animaux
susceptibles de nous guérir.
Et parmi ces animaux, on n'est pas peu étonné
de trouver l’homme et la femme. Voici, d'après
l'auteur, leurs « vertus et usages ». La cendre de
cheveux, en infusion dans le vin, est désobstruante.
La dose est depuis un demi-gros jusqu'à un gros.
Les ongles des doigts râpés font un purgatif et
vomitif très violent, à la dose d’un scrupule en sub-
stance et de deux scrupules en infusion. L'’urine
est apérilive, atlénuante, résolutive et désob-
struante : la dose est de cinq ou six onces, récente et
tiède. La momie d Egypte, qui est des corps an-
ciennement embaumés par les Egypltiens, est
céphalique, désobstruante, à la dose d'un demi-
gros jusqu'à deux serupules. La poudre de crâne
humain est antiépileptique, depuis douze grains
jusqu’à deux scrupules. Le lait de femme est
béchique, restaurant, à la dose du lait d'Anesse {pas
flatteur, le médecin!). Extéricurement, les cheveux
brülés et sentis sur-le-champ calinent les vapeurs
hystériques. La cire des oreilles est savonneuse,
détersive. La salive est détersive, adoucissante. Le
sang en poudre est astringent. L'urine est adoucis-
580
sante, fortifiante. Les excréments pulvérisés sont
émollients, adoucissants, digestifs, maturatifs: La
graisse est anodine, émoiliente. La momie d'Egypte
est vulnéraire, détersive; elle entre dans l’emplâtre
opodeldoch, styptique. Le crâne humain fait partie
de l'eau d'hirondelle, la poudre de guttete, anti-
spasmodique; son esprit volatil entre dans les
gouttes d'Angleterre, céphaliques, anodines.
Parmi les « autres » animaux, citons-en quelques-
uns, peu connus à ce point de vue ; remarquez que
celui qui les recommande n'est ni un charlatan
ni un sorcier, mais un médecin sérieux — pour
l’époque.
La cendre d'une taupe calcinée est détersive,
adoucissante, depuis un demi-gros jusqu’à un scru-
pule. Son cœur, en poudre, est astringent. Son
foie, en poudre, est antihystérique. Extérieurement,
la cendre de laupe est détersive; le sang récent de
même.
Le fiel de l'ours est incisif, pénétrant, céphalique :
la dose est depuis deux ou trois gouttes jusqu'à
huit. Extérieurement, la graisse est émolliente,
fortitiante; elle entre dans l’onguent martiatum.
Certains organes de la truie, cuits et mangés,
sont un très bon remède contre l'incontinence
d'urine. Extérieurement, la graisse récente fon-
due, qu’on nomme saindoux, est anodine, émol-
liente; le vieux lard fondu est détersif, consoli-
dant; le vieux oing, qui est la vieille graisse em-
puantie, est émollient, résolutif; la ficnte est
détersive, résolutive.
Le sang du rhinocéros, en poudre, ainsi que les
ongles et surtout la corne, sont sudorifiques, alexi-
tères, depuis un scrupule jusqu’à deux.
La fiente de brebis et de mouton est discussive,
apéritive, depuis deux scrupules jusqu'à un gros.
Les bouillons de poumons d'agneau sont béchiques,
adoucissants. La caillette est alexitère.
Les vertus de la souris et du rat sont les mêmes:
la fiente, en poudre, est purgative, diurétique,
depuis douze grains jusqu'à un gros. Extérieure-
ment, l’auimal, réduit en cendres, est détersif: le
sang est discussif, résolulif. Les crottes de rat sont
détersives.
Extérieurement, la chair de la fouine bouillie
dans l'huile est anodine, résolutive, nervine: la
fiente est résolulive, émolliente; le fiel est ophtal-
mique.
Les quatre pierres (?) qu'on trouve dans la tète
du Jlamentin sont fébrifuges, diurétiques, depuis
douze grains jusqu’à un scrupule.
Le cœur. le foie, les poumons, le sang pulvérisés
du lièvre sont un remède astringent, céphalique,
dinurélique, hystérique, à la dose d'un scrupule
jusqu'à un gros. Les reins sont diurétiques À la
méme dose. Le poil calciné est dinrétique, depuis
douze grains jusqu'à un demi-gros. La présure ou
matière caséeuse du fond de l'estomac est cépha-
COSMOS
21 NOVEMBRE 41942
ique, alexitère. Le talon ou astragale est cépha-
lique ou adoucissant. Extérieurement, le fiel est
ophtalmique ; la graisse est maturative.
Extérieurement, un chat vivant, fendu par le
dos, appliqué tout chaud sur le côté dans la
pleurésie, l’y laissant huit ou dix heures, est dis-
cussif, résolutif. La graisse est émolliente, péné-
trante, résolutive.
Le sabot de l'âne, pulvérisé, peut être substitué
à l'ongle de l'élan, qui est céphalique et antiépi-
leptique. La fiente, en poudre, est astringente.
Le sang d'ânon, reçu sur un linge et séché au
soleil, est céphalique.
Toutes les parties du cerf suivantes sont diapho-
réliques, alexipharmaques : la râpure de corne,
la gelée de corne, l'os du cœur, le sang en poudre,
la moelle récente.
Le poumon de renard est béchique. Extérieure-
ment, l'huile de renard, qui est une décoction de
l'animal dans l'huile d'olive, est adoucissante,
nervine, de même que la graisse.
La graisse du chien est vuinéraire, détersive,
consolidante. La fiente (qu'on nomme album gre-
cum) est détersive, atténuante, résolutive. Exté-
rieurement, la graisse est vulnéraire, détersive: la
fiente est incisive, pénétrante, résolutive. On pré-
pare, avec de petits chiens entiers, un baume for-
lifiant, nervin, résolutif. La peau préparée est
détersive.
Le sang du taureau est astringent, antihysté-
rique. Le fiel, à la dose d’un gros, en lavement,
est laxatif; les cornes et les ongles, en poudre, sont
antiépileptiques. L'urine de la vache, qu’on nomme
eau de mille-fleurs (cette épithète ne manque pas
d'une certaine poésie.....), chaude, à la dose de
deux verres, est purgative. Les tendons, réduits en
poudre, sont fébrifuges, sudorifiques; l'os de la
jambe, en poudre, est fortifiant, nervin; la pierre
ou bézoard de la vésicule du fiel, en poudre, est
sudorifique, apéritive, alexitère, à l’intérieur,
tandis qu'à l'extérieur elle est sternutatoire.
La cendre de pie estophtalmique. La poudre des
os du pic vert est diurétique. Le fiel du faisan est
ophtalmique, de même que celui de la perdrix
grise, du paon. Le roitelet cuit ou sa poudre est
diurétique. La fiente du moineau, à la dose de deux
ou trois grains, dans la bouillie, « lâche le ventre »
aux petits enfants. Le hoche-queue, en poudre,
est très apéritif. L’hirondelle est céphalique, inci-
sive, antihystérique, ophtalmique; sa fiente est
très chaude, âcre, diurétique; extérieurement, le
nid d’hirondelle est résolutif. Extérieurement, un
jeune cygne, cuit dans l'huile, est adoucissant. Le
bouillon de coucou est céphalique, adoucissant; la
fiente, en infusion, est bonne contre la rage. Le
cerveau du corbeau est céphalique, nervin.
La cendre de salamandre est détersive. La poudre
et les cendres de crapaud sont diurétiques, sudori-
Ne 1452
fiques; l’infusion du erapaud dans l'huile de lin
est anodine, détersive. Les grenouilles sont humec-
tantes, incrassantes, béchiques: on en fait des
bouillons; le foie est céphalique; le sang est vul-
néraire. Les lézards sont fortiliants, résolutifs;
leur fiente est ophtalmique. La vipère est cor-
diale (!), diaphorétique, alexitère. Les petits os
qu’on trouve dans la tête de la perche, vers l'ori-
gine de son dos, réduits en poudre, sont apéritifs,
absorbants. Le fiel du brochet est apéritif, fébri-
fuge. Le foie et le fiel de l’anguille, réduits en
poudre et mêlés ensemble, sont diurétiques, hysté-
COSMOS
581
riques, ainsi que la peau en poudre. Les poux sont
apéritifs (!)}, fébrifuges. Le bouillon d'écrevisse
purifie le sang. L’extrémité des pinces des crabes,
en poudre impalpable, est apéritive, absorbante,
adoucissante, antiseorbutique. Extérieurement, la
soie d'araignée est astringente et consolidante. Les
abeilles, séchées et mises en poudre, sont diuré-
tiques. La poudre des coquilles de moules est
sudorifique et fébrifuge.
Tout cela nous semble bien bizarre. Mais n’en
sera-t-il pas de même plus tard de nos médications
actuelles? HENRI COUPIX.
La coagulation du sané.
Lorsqu'on recueille le sang sans précautions par-
ticulières au sortir d’un vaisseau et qu’on laban-
donne au repos dans un vase, il subit une décom-
position spéciale qui a pour résultat de le séparer
en deux parties : l’une qui se prend en une masse
gélatineuse, dense, rouge, tombant lentement au
fond du vase, et que l’on nomme le caillot ; l'autre,
liquide et légèrement jaunâtre, constituant le
sérum.
C'est le phénomène de la coagulation; sa marche
se caractérise par une rétraction progressive du
caillot, qui, d’abord homogène, se contracte de
plus en plus en laissant exsuder le sérum en pro-
portion de plus en plus grande. A la fin, le caillot
devient dur, élastique, spongieux, et se trouve
comme en suspension dans le sérum exsudé.
La cause mécanique de la formation du caillot
est l'apparition dans le sang d'une substance nou-
velle, la fibrine, qui n'existait pas en cet état dans
le plasma sanguin, c'est-à-dire dans le liquide qui
véhicule par tous les vaisseaux du corps les glo-
bules rouges et les globules blancs du sang. La
fibrine se présente sous la forme de très fins fila-
ments entrecroisés; entrainés par leur poids, ces
filaments tombent au fond du vase, emprisonnant
tes globules et les enserrant en une masse progres-
sivement plus compacte, qui devient le caillot,
tandis que la partie liquide est exprimée au dehors
pour former le sérum.
Les leucocytes, plus légers que les hématies,
tendent à remonter vers la surface du caillot, où,
se mélangeant avec la fibrine, ils forment une
couche spongieuse blanchâtre plus ou moins appa-
rente, le couenne; celle-ci n'est bien visible que
dans le sang des espèces où la coagulation ne se
fait spontanément qu'avec une certaine lenteur (le
cheval, par exemple), ou dans celui des animaux
où la coagulation, normalement rapide, est artifi-
cieHement retardée par le froid, l’aldition de sucre
on d'une solution alcaline.
La coagulatior, ou séparation du sang d'une
part en sérum, ď'’autre part en un mélange de
fibrine, d’hématies et de leucocytes, n'a lien qu’au-
tant que le liquide est abandonné au repos au
sortir du vaisseau qui le fournit. On peut l’empi-
cher, c’est-à-dire, pour employer un langage plus
scientifique, pousser plus loin la décomposition du
sang, et obtenir séparément le sérum, les globules
et la fibrine, en battant le liquide frais avec un
agitateur de verre ou un petit balai de brindilles
d'osier.
Si l’on prive par ce moyen le sang du repos
nécessaire à la constitution du raillot, la fibrine
s’altache à l’agitateur ou aux brindilles du balai à
mesure de sa formation, en flocons filamenteux et
élastiques. Les globules dès lors cessent d’itre
emprisonnés et demeurent en suspension dans le
sérum, dont on peut aisément les séparer en le fil-
trant simplement sur papier; quant à la fibrine,
rien n’est plus facile que de la débarrasser des
globules qui y sont restes adhérents par un lavage
sous un filet d’eau; elle apparait alors sous forme
de filaments grisätres, semblables au gluten du
pain. Un litre de sang donne en moyenne de 2 à
3 grammes de fibrine seche.
La fibrine, quni est le l'acteur mécanique essentiel
du phénomène de la coagulation, est formée plus
ou moins rapidement, dans le sang extrait du
corps, aux dépens d'une albumine spéciale, le
fibrinogène, existant dans le plasma du sang vivant
au {aux, très faible, de 2? à 4 grammes par litre.
Le fibrinogène ne se retrouve plus en aucune pro-
porlion, lorsque la coagulation est complète, dans
le sérum où baigne le caillot: si, en effet, on chauffe
ce sérum à 56”, température de coagulation du
fibrinogène, il reste limpide et ne prend pas le
caractère trouble qui révélerait la presence de
cette albumine spéciale 1).
Donc, le fibrinogène disparait totalement du
(t) Les autres albumines du plasma nè commencent
à se troubler qu'au-dessus de 60°.
582
sang pendant la coagulation; mais, d'autre part, il
n’est pas en enlier emplọyé à la formalion de la
fibrine; en effet, le même volume de sang contient
toujours, dans les vaisseaux, plus de fibrinogène
qu'il ne renferme de fibrine après la constitution
du caillot. Il y a tout lieu de supposer que la por-
tion de fibrinogène qui ne se convertit pas en
fibrine donne naissance à une nouvelle matjère
protéique, la fibrino-globuline, dont on constate
la présence dans le sérum et qui n'existe pas dans
le plasma. Le sérum entourant le caillot présente
d’une manière générale la même composition que
le plasma, mais il ne renferme plus de fibrinogène
etil contient en plus de la fibrino-globuline. La
portion de fibrinogène employée à la formation de
la fibrine oscille entre 60 et 70 centièmes; le
reste se converlit en fibrino-globuline.
Ces faits permettent assez légitimement de con-
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SCHÉMA DE LA COAGULATION DU SANG.
sidérer la coagulation du sang comme la consé-
quence mécanique d’un dédoublement du fibrino-
gène du plasma en fibrine, qui s'unit aux globules
pour former le caillot, et en fibrino-globuline, qui
reste dans le sérum. Ce dédoublement est un acte
chimique d’une nature particulière, une fermenta-
tion, qui impose l'idée d'un ferment capable de
transformer le fibrinogène; c’est, en effet, dans
cette voie que les physiologistes ont cherché la
cause initiale et biologique de la coagulation, cause
sur laquelle la rétraction de la fibrine se greffe
comme un facteur secondaire et purement phy-
sique.
L'assimilation de la coagulation à un phénomène
diaslasique repose sur quelques faits précis, qu’il
est utile de connaitre parce qu’ils mettent en
lumière les conditions dont le concours est néces-
saire à cetle fermentation spéciale du fibrinogène.
Il est, par exemple, établi que trois facteurs em-
pruntésà l'organisme lui-même sont indispensables
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
à la genèse du ferment coagulant; parmi ces fac-
teurs, deux sont de nature organique, les leucocytes
ou globules blancs et le plasma sanguin; l’autre
est minéral, la chaux.
L'intervention obligatoire des leucocytes a été
mise en évidence par une expérience d'Alexandre
Schmidt, réalisée sur du sang de cheval, qui a la
propriété d'abandonner facilement ses globules.
Recevant de ce sang dans un vase refroidi, l’expé-
rimentateur en décantait le plasma et le filtrait,
enle maintenant à basse température ; les globules,
rigidifiés par le froid, restaient sur le papier. Dans
ces conditions, le plasma, presque complétement
déglobulisé, ne se coagulait pas, ou se coagulait
seulement avec une extrême lenteur: si alors on
ajoutait des globules restés sur le filtre, un caillot
compact se formait immédiatement. D'autres expé-
riences ont démontré que les hématies, ou globules
rouges, sont sans action sur la coagulation; c'est
donc, parmi les éléments figurés du sang, aux
seuls globules blancs que l'on doit attribuer une
intervention nécessaire dans le phénomène. Cette
intervention est supposée s'effectuer par la sécré-
tion d'une substance spéciale, la {hrombokinase
(encore appelée thrombozyme ou leucothrombine).
En second lieu, il est reconnu que les leucocytes
sont impuissants à provoquer la formation du fer-
ment coagulant si on les laisse agir seuls et indé-
pendamment du plasma qui les baigne, si par des
lavages successifs on les débarrasse de ce plasma.
Celui-ci fournit son appoint au phénomène par un
élément qui lui est propre, le {hrombogène.
Enfin la chaux est indispensable à la coagulation
par la part qu'elle prend à la constitution de la
fibrine. Dès 1890, des expériences d’Arthus et Pagès
avaient établi que, si l’on reçoit du sang dans une
solution contenant { millième d'oxalate de potasse,
le sang ainsi alcaliné cesse d'ètre coagulable. On
a reconnu depuis que toutes les substances capables
de précipiter le calcium produisent le même
résultat. Inversement, si à du sang rendu incoagu-
lable par l'addition d'une solution alcaline on re-
stitue du chlorure de calcium, la coagulabilité repa-
rait. L'intervention de la chaux n'est d'ailleurs
indispensable qu'au moment de la formation de la
diastase coagulante; si, en effet, lorsque ce fer-
ment est constitué, on décalcifie le sang par un
oxalate alcalin, l'aptitude à la coagulation n'en
persiste pas moins.
La réunion et l’action combinée des trois fac-
teurs qui viennent d’être énumérés, thrombokinase
des leucocytes, thrombogène du plasma, sels de
calcium fournis également par le plasma, ont pour
résultat la synthèse du ferment coagulant, désigné
par les physiologistes sous les noms de fibrine-fer-
ment, thrombine ou plasmase. Cette substance se
range dans le groupe des ferments solubles; c'est
proprement un aucléo-albuminate de calcium. La
No 4452
nucléo-albumine qui entre dans sa composition est
elle-même un composé de l’albumine du plasma
sanguin avec la nucleine, substance constitutive
des noyaux des leucocyles, mise en liberté par la
décomposition de ces cellules dans le sang extrait
des vaisseaux. À mesure que la nucléo-albumine se
répand dans le plasma, elle se combine avec les
sels de chaux de ce plasma et réalise du nucléo-
albuminate de calcium. Tous les physiologistes
cependant n’admeltent pas ce mode de formation
du ferment coagulant, et il en est même qui pré-
fèrent le considérer comme un produit de sécré-
tion directe des leucocytes.
Quoi qu'il en soit de sa genèse, la diastase de la
coagulation sanguine n'’agit pas immédiatement
par le fait même de sa formation; elle ne possède
que l'aptitude à dédoubler le fibrinogène, et pour
que les effets de cette aptitude se manifestent, cer-
taines conditions physiques sont encore nécessaires.
On voit que le phénomène ne manque pas de com-
plication. Des expériences de Zahn ont démontré
que, si l’on introduit dans le cœur d'animaux
vivants des baguettes de verre lisse, on ne provoque
aucun phénomène de coagulation; si, au contraire,
les baguettes introduites ont été au préalablerayées
à la lime, un caillot se montre sur le trait. De
mème du sang recu dans un vase dont les parois
intérieures ont été rendues très lisses par une
couche de paraffine ou de vaseline peut conserver
pendant très longtemps son caractère liquide, bien
que les conditions biochimiques nécessaires à la
COSMOS
583
coagulation soient réalisées; si à ce sang on ajoute
du éharbon en poudre ou du verre pilé, le caillot
se forme immédiatement. |
Il semble bien qu’on ne puisse faire appel, dans
ce curieux phénomène, qu’à une intervention pure-
ment physique. On a supposé avec quelque vrai-
semblance que les divers éléments en présence
dans le sang fraichement extrait du corps forment
un complexe colloïdal en équilibre instable, qui
persiste dans cet état tant que n'intervient pas la
cause physique capable de rompre l'équilibre. Cette:
cause physique étant fournie, par exemple par
l'état rugueux des parois du vase ou par l'addition
de corps pulvérulents, la rupture de léquilibre
permet la réaction réciproque des facteurs en pré--
sence et la succession des phénomènes dont le-
dernier terme est la coagulation.
En résumé, celle-ci apparait, d'après l’opinion
assez générale des physiologistes modernes, comme
une digestion, dont l'agent est un ferment qui,
après avoir dédoublé et coagulé le fibrinogène du
plasma sanguin, attaque et dissout la fibrine.
formée. C'est une fibrinolyse — un mode par con-
séquent de l'antolyse digestive par laquelle se dé-
truisent après leur mort les tissus vivants. Lors-
qu'elle se produit dans un organisme en vie, elle
conduit à deux résultats opposés: bienfaisante
dans les cas d’hémorragie, où Ja formation du.
caillot arrète l'écoulement du sang, elle devient
pathologique lorsqu'elle lance une embolie dans le-
torrent circulatoire. A. ACLOQUE.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 11 novembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Conductibllité intermittente des minces
couches diélectriques.— Entre deux disques mé-
talliques horizontaux de 32 millimètres de diamètre,
à faces parfaitement planes et servant d’électrodes,
M. Évouaru BraxLy interpose une couche trés mince
d'une substance diélectrique, c'est-à-dire isolante pour
l'électricité, et il augmente lentement la pression entre
les deux disques.
L'auteur a essayé des lames minces diélectriques
diverses : feuilles de gutta-percha de 25 à 10 microns,
lames de collodion de 15 à 10 u, feuilles de mica de
5 p, résine, gomme laque, enduits de celluloïd ou de
paraffine.
Toutes les lames minces se sont montrées conduc-
trices pour une certaine pression, généralement infé-
rieure à un demi-kilogramme par centimètre carré et
souvent beaucoup plus faible avec une force électro-
motrice suffisante. Leur conductibilité s’est montrée,
dans une certaine mesure, comparable à la conducti-
bililé des conducteurs métalliques.
Tout comme pour les radioconducteurs proprement
dits, quand une conductibilité suflisante avec quelques
éléments de pile thermo-électrique avait été acquise
par ces lames, une étincelle de décharge de conden-
sateur produite à distance diminuait brusquement et
notablement la résistance d'une facon persistante, un.
choc approprié la rétablissait.
Le Congrès de l’Association francaise du
froid. — M. Anmann Gautier, délégué, avec M. d'AR-
soNvaz au Congrès du froid, à Toulouse à la fin de
septembre, rend sommairement compte des travaux.
du Congrès, dont les six sections ont eu à examiner
cent dix Conimunicalions.
La 1'° section avait à s'occuper des gaz liquéfiés et.
du matériel frigoritique.
La 2°, des nouvelles applications du froid à la con-
servation des matières périssables.
La 3°, des principales applications du froid à l'in-
dustrie nationale.
La £° a étudié l'état actuel des transports frigori-
fiques en France.
58%
La 5° s’est préoccupée de l'enseignement de Ia science
du froid et de ses applications.
Enfin la 6° a eu à examiner les applications du
froid à l'hygiène.
Sillage et saccien à l'arrière des navires.
— Des expériences effectuées par le Creusot sur le
contre-torpilleur S 7, bâtiment de 470 tonneaux à trois
lignes d'arbres, viennent de jeter un jour nouveau
sur le problème de la propulsion en général et sur
l'emploi des hélices des turbines À allure rapide en
particulier. M. Poincet en rend compte et les discute;
il ressort de son étude que ces expériences mènent
aux conclusions suivantes :
1° La justification des essais de petit modèle et la
possibilité de résoudre complètement le problème de
la propulsion pour le cas des bâtiments à deux hélices
latérales ;
2 Le rendement des hélices de turbines correcte-
ment établi et dans les limites où la cavitation n’'ine
tervient pas peut atteindre 70 pour 100;
3° 11 paraît nécessaire de compléter les expériences
de petit modèle sur le cas de la marche à plus de
deux hélices afin d’élucider les questions de succion
et surtout de sillage qui ont une répercussion consi-
dérable sur le rendement propulsif.
Au sujet de l'emploi, dans la construction
de l’aéroplane, des empennages porteurs. —
L’'empennage de la plupart des aéroplanes actuels
contribue à leur sustentation; c'est, en d'autres termes,
un empennage porteur.
Le V longitudinal de l'aéroplane, c'est-à-dire l'angle
que font entre eux la voilure et l’empennage, présente
donc nécessairement, dans ce cas, une valeur intérieure
à celle qu'offre l'incidence de régime de la voilure, et
cela d'autant plus que l’empennage porte davantage:
et c'est un inconvénient, car ce V longitudinal est,
comme on sait, un élément primordial de stabilité.
M. DocuÈNE montre qu'il conviendrait d'adopter des
dispositions de construction telles que l'empennage fût
aussi peu porteur que possible, neutre s’il se pouvait
ou, mieux encore, négatif, c'est-à-dire attaqué, en vol
de régime, par-dessus.
Avantage supplémentaire entrainé par le dernier
dispositif: la voilure principale ne serait plus placée
en avant du centre de gravité, comme maintenant,
pour équilibrer la force sustentatrice de l'empennage
porteur, mais en arrière, et agirait donc comme
une girouette qui s'efface devant le vent relatif, au
lieu de se braquer dangereusement.
Sur une formule de vitesse applicable aux
aéroplanes. — M. ALphovse BERGET a établi pour
les aéroplancs une formule analogue à celle qu'il a
donnée en janvier 4909 pour les ballons dirigeables.
Dérignons par V la vitesse de l’aéroplane en myria-
mètres par heure; par F la puissance du moteur
évaluée en chevaux: par S la surface portante des
ailes, évaluée en mètres carrés, et par À un coeffi-
cient numérique; on a la relation empirique simple
v= a VE
S
Le coefficient À, quel que soit le type d’atroplane
pris parmi ceux qui existent actuellement, est toujours
COSMOS
21 NOVEMBRE 191%
pratiquement compris entre 7 et 8; sa vateur fournit
une appréciation du cocflicieat d'utilisation de l'ap-
pareil.
Voici le tableau où sont reproduites les données
relatives aux avions considérés et les valeurs corres-
pondantes du coefficient.
Avions. Surface Puissance Vitesse
m = monoplan. portante du moteur en myriamétres
b = kipa. am? chevaux. par beure. (Coefficient 4.
Astra (b.). 48 70 9,0 7,80
Acviatic (m.). 30 100 11,5 7,10
Blériot (m.). 15 50 10,5 7,10
Caudron (b.). 20 25 8,0 7,35
Clément-Bayard (b.). 28 50 9,0 7,37
Goupy (b.). 27 50 9,5 7,72
Morane (m.). 14 50 41,5 7,95
Rep (m.). 24 60 10,5 Ti?
Sommer (m.). 16 50 10,0 6,86
Tellier (m.). 28 50 9,0 7,40
Zodiac (b.). 32 50 9,5 8,10
La formule est empirique, indépendante de toute
théorie et de toute hypothèse; elle n'est valable que
pour les types usuels d’aéroplanes et pour des vitesses
de S0 à 130 kilomètres par heure. Dans ces limites,
elle permet de calculer d’avance la puissance mini-
mum nécessaire à la propulsion d’un avion.
Le coefficient À, coefficient d'utilisation, est d'autant
meilleur que sa valeur est plus haute; mais cette
qualité ne regarde que la vitesse; un coefficient de 7
seulement n'indique pas nécessairement un mauvais
avion. si on n’a pas cherché, dans sa construction, à
développer sa vitesse.
Sar des phénomènes de pseudo-résonance
électrique. — Au cours de ses recherches sur les
tubes luminescents au néon, M. GForGEs CLAUDE a
observé un phénomène qui paraît susceptible de se
reproduire dans différentes circonstances.
Il a été amené à éludier l’emploi de condensateurs
montés en série avec les tubes au néon. À ce propos,
il a placé sur une différence de potentiel alternative
de # 000 volts (50 périodes : s) un circuit constitué par
le montage en série d’un condensateur de 0,67 micro-
farad, d’un ampèremètre thermique de ? amptres et
d’un nombre variable de tubes à néon de 7,50 m de
long et #4 centimètres de diamètre. Or, il a eu la sur-
prise de constater que, contrairement à toutes les pré-
visions, l'intensité allait en croissant avec le nombre
des tubes montés en série dans le circuit. Partie de
0,7 ampère avec le condensateur seul, l'intensité passe
de 6,88 avec un seul tube, 14,10 avec deux, 1,22 avec
trois, et atteint 1,26 ampère pour quatre tubes en
série! Un cinquième tube, cependant, dont l'insertion
rend d’ailleurs l’allumage très difficile, a provoqué
une légère diminution de l'intensité, qui paraît ainsi
présenter un maximum pour quatre tubes.
L'auteur expose ce qu'il suppose l'explication du
phénomène, et cette explication le porte à lui donner
le nom de pseudo-résonance, en raison de ses rapports
avec une vraie résonance.
Une autre particularité accompagne le phénomène.
Si l'on photomètre l'un des tubes en essai pendant
qu'on augmente le nombre des tubes, on constate que.
bien que le courant augmente énormément, l'intensité
N° 1452
lumineuse du tube diminue légèrement, alors que
l'éclat d’une lampe à incandescence, placée dans le
circuit, augmente énormément.
Capacité pulmonaire minimum compatible
avec la vie. — Comme le rein et les glandes surré-
pales, les poumons ont une capacité fonctionnelle
bien supérieure à celle que nécessite l'entretien de la
vie. Pour le montrer, MM. LÉON BrnnaRo, A. LE PLAY
et Cu. Maxroux ont, chez le chien, réduit les poumons
à l’inactivité presque complète par l'opération du
pneumothorax : ils refoulent complètement l'un des
poumons et partiellement l'autre, en injectant de
l'azote dans la cavité pleurale. Le chien était sacrifié
après vingt-quatre heures; et des mesures indirectes
montraient qu’il avait vécu avec un sixième seule-
ment de ses poumons en fonction.
Observations à Marseille de la comète Borrelly
(1912 c) par M. BorreLLY, par M. Coccia et par
M. Es{ıoL; à Paris, par M. GiacosiNi; à Lyon, par
MM. Lurzer et GuiiLaume; à Besançon, par M. Cuor-
FARDET et par M. P. Bruck. — Observations de la
comète Schaumasse (1912 b) à Lyon, par M. GUILLAUME.
— M. Louis Fasry indique une méthode d'identifica-
tion des petites planètes. — Sur un système ditféren-
tiel formé par M. Schlesinger. Note de M. Jean Csuazy.
— Sur l'unicité du développement trigonométrique.
Note de M. C.-). be LA VALLÉE Poussix. — Nouveau
héorème sur les effets des moments. Note de M. HıseLy.
— Les franges des lames cristallines holoèdres à
faces parallèles. Note de M. C. Raveau. — Sur l’étirage
des métaux. Note de M. HanrioT. — Sur le dosage des
tipoïdes dans le sérum sanguin. Note de MM, L. Griw-
BERT @t M. LauDaT. — Sur le spléno-diagnostic de la
fièvre typhoïde. Note de M. H. VincexT. — Sur l'in-
fluence de la température sur la marche du dévelop-
pement de Maïa squinado Herbst. Note de M. C. Scule-
GEL. — Répartition des ossements humains trouvés
dans le gisement moustérien de La Quina (Charente).
Note de M. Henri ManrTix. — Sur la structure des
Pyrénées cantabriques et leurs relations probables
avec les Pyrénées occidentales. Note de MM. Lron
Benrranp et Louis MENGauD. — Découverte d’un gise-
ment de vertébrés dans l’Aquitanien supérieur de
l'Agenais. L'âge géologique de la faune de Saint-
Gérand-le-Puy. Note de M. G. Vasseur.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES (1)
Congrès de Nîmes.
Botanique.
Présidée par M. Flahault, professeur à la Faculté
des sciences (Montpellier), cette section a nommé pré-
sident d'honneur M. de Waldeman, directeur du Jardin
botanique de l'Etat (Bruxelles), et M. C.-E. Bertrand,
professeur à la Faculté des sciences (Lille), comme
vice-président.
(1) Suite, voir p. 557.
COSMOS 585
M. Cananès (Nimes) étudie quelques plantes méditer-
raníennes rares, Lavatera punctata All.. Centaurea
diffusa Lamk (variété à feuilles blanches). Convo/vu-
lus althesidens L. et Parietaria lusitanica L. Les
trois dernières espèces constituent des nouveautés
pour la flore du Gard,
M. C.-E. BenTranp (Lille) présente ses observations
sur certaines particularités de la structure de quelques
plantes anciennes : 1° Ditférenciation histologique du
bois secondaire des Dicotylédones et le défaut de loca-
lisation de ses gros vaisseaux. 2 Le bois secondaire
sans vaisseaux avec lame fibreuse et rayons ligneux
alternants. 3° Le bois secondaire du style des Spheno-
phyllum, états différents de ce tissu devant les régions
polaires et sur les faces latérales du bois primaire.
Complexité plus grande de tissus des rayons. £ La
différenciation du secteur ligneux secondaire des
stipes du Calamodendron. Les bandes mécaniques laté-
rales opposées à sa masse aquifère médiane. # Les
ilots cribles extérieurs du liber primaire dans le stipe
de Sigillaria spinulosa. 6” Comment on arrive à lire
les organisations réduites. La trace foliaire de Sigil-
laria spinulosa, dans la couche subéreuse du stipe
dans la fronde.
Une fois encore la connaissance des structures fos-
siles se montre indispensable pour la compréhension
des formes réduites qui ont persisté. Pour la plupart
de ces réduites, la lecture n’est possible que quand
on a trouvé des traces foliaires suffisamment larges
et développées pour montrer toutes leurs complica-
tions.
M" MarGuERITE BELÈZE (Montfort-l'Amaury). Le Goo-
dyera repens R. Br. Cest le Satyrium repens L., le
Neothia repens Sw.-D. C., l'Epipactis repens All.
Crantz, en français la Goodyċre rampante dont l'aire
de dispersion s'étend, d’après le D: X. Gillot, depuis
l'Ecosse, la Laponie et la Sibérie, au Nord (70° de lati-
tude Nord), jusqu'aux confins de la Sibérie orientale
(163° longitude Est). Dissiminée en Scandinavie, Dane-
mark,surtout dans l'Europe australe, clleest assez com-
mune en France, dans les Vosges, le Jura, les Alpes
dauphinoises et les Alpes de Savoie, les Pyrénées,
mais rare dans le Massif central. Cette plante a tou-
jours apparu soudainement dans les environs de
Paris; elle pousse sous les pins sylvestres générale-
ment. M" Belize l'a découverte dans la fort de
Rambouillet, à 1tkilomètres;aux Essarts-le-Roise trouve
la localité la plus rapprochée. L'hypothèse de l’intro-
duction des rhizomes de cette orchidée sous terre
quand on plante de jeunes pins est à écarter, puisque
les pins de la forèt de Rambouillet ont été semés sur
place; quant au transport des graines par le vent, la
distance citée plus haut le rend difticilement admis-
sible.
M. FE. Decrocx (Marseille). -- L'£rithronium dens
canis croit normalement dans les forêts, les bois,
clairières et landes de la zone des hètres et de la zone
subalpine, aussi est-il surprenant de la rencontrer
aux environs de Marseitle, dans la zone essentiellement
caractérisée par le pin d'Alep. Cette plante est actuel-
lement connue dans la seule localité de Pichauris
pour les Bouches-du-Rhône, dans les bois de La Garde
Freinet, au Défens (Var), et sur les hauteurs de la
586
région niçoise à partir de 800 mètres pour les Alpes
Maritimes. +.
M. J. Lacanoe (Montpellier). — Répartition topogra-
phique de quelques champignons aux environs de
Montpellier. — Cet aperçu de la végétation fongique
sur un espace limité suffit à mettre en évidence deux
notions fondamentales applicables à l'étude biogéogra-
phique des champignons. D'une part, la notion de
dénombrement spécifique qui correspond à la fré-
quence des individus, d'autre part, la notion d'habitat
normal, c'est-à-dire le rapport étroit des espèces avec
le sol et la végétation. L'une est une vue d'ensemble,
l’autre une appréciation critique des détails. Elles se
complètent mutuellement et concourent à la connais-
sance méthodique, raisonnée, de la biologie de ces
végétaux. Les conditions de vie et de répartition des
espèces communes sont plus intéressantes, au point
de vue biologique, que la découverte d'espèces rares
ou nouvelles.
M. J. Pavizzarp (Montpellier). L'évolution périodique
du plankton végétal dans la Méditerranée occidentale.
— La conclusion de ce travail est que cette évolution
périodique est en rapport avec les migrations des
poissons, et, par conséquent, avec l'économie des pêches
maritimes.
MM. les D'* Cuauzes GERBER et P. FLouRENS (Marseille)
Sur le Latex de « Calotropis procera » R. Br. — Cette
.asclépiadée est un arbuste assez grand, caractéris-
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
tique des régions désertiques de l'Afrique du Nord.
Elle n'est en usage encore que pour les fibres libé-
riennes de la tige et les aigrettes des graines ; il serait
tout au plus possible de tirer une gutta de son latex
abondant; mais dans ce latex les auteurs signalent la
présence d’un ferment protéolytique appartenant au
groupe présures du lait bouilli. Il est très résistant
à la chaleur. À certaines doses, les alcalis sont nette-
ment accélérateurs. En cela le ferment protéolytique
de cette plante se rapproche de celui de la belladone
et de la diastase.
M. Decrock. — Le bois de Lansac. — Contribution
à l'étude de la végétation de Plan-du-Bourgy. — Cette
localité est située entre Arles et Fos-sur-Mer. Il existe
un bois dans ses terrains salés! C'est un bois de
genévriers de Phénicie (J/unipera phœnica), comme il
s'en rencontre en Camargue, mais ici les arbres sont
assez régulièrement plantés à des distances de 3 à
10 mètres. Les assauts du mistral les ont empèchés
de s'élever à plus de 3 à + mètres. L'auteur donne la
liste des espèces qui vivent à l'abri de ce bois
d'aspect sporadique. Les dépressions sont fréqueim-
ment inondées en hiver, la proximité des marais
salants donne à l’eau une salure assez prononcée
pour que, dans la saison sèche, le sol imprégné de
sel ne puisse porter que des espèces franchement
halophiles.
(A suivre.) S. HÉRICHARD.
—— m
BIBLIOGRAPHIE
La résonance du toucher et la topographie
des pulpes, par M™° Mare Jaëzz. Un vol. in-8°
de xv-161 pages, avec 17 planches hors texte,
(6 fr). Librairie Félix Alcan, Paris. 1912.
Le nouvel ouvrage de Mme M. Jaëll apporte une
contribution des plus intéressantes à l'étude des
rapports qui peuvent exister entre nos différentes
sensations. |
En faisant intervenir l'idée de couleur dans l’édu-
calion de la sensibilité manuelle, M'"° Jaëll réalise
-des rapports de sensations sous l'influence des-
quels l'harmonisation du toucher et l'audition
mentale des sons, transformées déjà par les alti-
tudes de la main, se développent et se perfec-
tionnent. Me Jaëll établit aussi par de nouvelles
expériences la relation absolue de la topographie
des pulpes avec la sensibilité de la main. Les per-
ceptions mentales que nous sommes susceptibles
de former volontairement constituent ainsi un
réseau d'influences capables de rendre nos fonc-
tions tactiles spontanément cohérentes, les émis-
sions des sons spontanément harmonicuses.
Si quelque lecteur conçoit un doute sur l'objec-
livilé de certains des phénomènes d'associations
allégués en ce livre, il pourra néanmoins s'inté-
resser à l'étude de la psychologie de l’art ou de
l'artiste. Les musiciens surtout rencontreront là
des idées nouvelles qu’ils sont à même de contrôler.
Construction et installation moderne des
usines et des ateliers, par PauL Razous, pro-
fesseur à l'École spéciale des travaux publics.
Un vol. in-8° de 500 pages (45 fr). Librairie
Monroty, 30, rue Jacob, Paris.
La construction d’une usine et son installation
n’est pas chose aussi aisée qu’on pourrait le croire;
il faut d'abord observer les règles générales impo-
sées par ce genre d'édifices; puis faire entrer en
ligne de comple le genre d'industrie à laquelle elle
est destinée; enfin observer les réglementations
sur l'hygiène des ateliers. En général, les établis-
sements industriels sont construits légèrement,
avec économie, et de façon à pouvoir s'agrandir
si l'affaire prend de l'extension.
L'auteur indique dans une première partie les
formes générales qu’on doit donner aux bâtiments,
ainsi que les matériaux susceptibles d'être em-
ployés suivant les besoins: bois, fer, maçonnerie.
Dans un second chapitre, M. Razous étudie
l'installation des usines; en premier lieu sont
passées en revue les machines motrices: moteurs
hydrauliques, à air, à vapeur, à gaz, à pétrole,
No 1152
à alcool, etc. Cette partie, très développée, donne
les considérations qui doivent faire adopter un
système plutôt que l’autre, suivant l'usage auquel
est destinée la machine. Ensuite vient l’étude dela
transmission de la force motrice, soit par électri-
cité, par air comprimé, par poulies et courroies.
Enfin l’auteur donne tous les conseils pratiques
relatifs au transport des matières premières à
l'usine, à l'éclairage, au chauffage des ateliers,
à l'outillage mécanique pour tous les corps d'in-
dustrie. Un chapitre spécial étudie les hauts four-
neaux et les fours industriels tels qu'ils sont réa-
lisés dans la grande industrie.
Ce livre est très complet. Quand il ne peut don-
ner tous les détails d'une question trop complexe,
il renvoie à des ouvrages spéciaux sur le sujet.
C'est donc une mine inépuisable de renseignements
qui ont la plus grande valeur pour les chefs d’in-
dustrie. Grâce à lui, on peut d'avance préparer un
plan complet d’une installation nouvelle et éviter
des surprises parfois lourdes de conséquences dans
l'établissement d’une usine.
Maryland Geological Survey.TheJohns Hopkins
Press, 1911. Baltimore.
Nous venons de recevoir trois volumes et un
atlas de cartes de ce service du Maryland, volumes
édités avec le luxe habituel de toutes les publica-
tions américaines, où abondent les belles gravures
et les cartes d'une grande perfection d'exécution.
Voici la liste de ces volumes :
l. Neuvième volume. Ce nouveau volume de la
série des rapports généraux du service géologique
comprend quatre parties : Les deux premières sont
consacrées au tracé, à la construction et à l’entre-
tien des routes; de nombreuses cartes permettent
de juger des résultats obtenus. Ce sont les derniers
rapports que le Geological Survey donnera sur ce
sujet. Désormais, cette question des routes sort de
ses attribulions, un service spécial, la Commission
des routes de l'État, ayant été créé en 1910. —
Les rapports contenus dans ce volume sont dus à
M. WazcrTer WiLson Crosgy et à M. WiLLiaȚM BULLOCK
CLARK, superintendant.
La troisième partie traite des gisements de mine-
rais de fer dans l’État, de la métallurgie et de Fin-
dustrie de ce métal. Elle a pour auteur M. Joseru
T. SINGEwWALD, Jr.
La quatrième partie, la plus courte, a pour auteur
M. L. A. Bauer. C’est une étude sur la ligne d’égale
déclinaison magnétique de l'État du Maryland.
Il. Maryland Lower Cretaceous by Wizzrau But-
LOCK CLARK, ARTHUR B. BiBBiNs and EDWARD
W. Berny.
De premiers rapports sur la géologie systéma-
tique et sur la paléontologie du Maryland ont
traité de léocène, du miocène et du plio-pleisto-
COSMOS
587
cène. Celui-ci termine la série en traitant du cré-
tacé inférieur, terrain qui occupe une grande place
dans cet Etat.
Le volume se termine par 447 planches, d'une
admirable exécution, représentant les fossiles re-
cueillis dans ce terrain.
HI. Prince Georges County. Différents auteurs
ont contribué à létude de cette partie du Mary-
land. Après avoir indiqué sa position dans l'État
et les principales caractéristiques physiques, les
auleurs examinent successivement sa physiogra-
phie, sa géologie, ses ressources minérales, son
sol, son climat, son hydrographie, ses éléments
magnétiques, ses forêts.
L'ouvrage, largement illustré, est accompagné
d'un atlas.
Livres parus récemment :
Utilisation du flux et du reflux surtout sur
le littoral de la Manche, par Jurres SéveriN. Extrait
des comptes rendus de PAFAS, 28, rue Serpente,
Paris.
Le vol des grands reptiles et insectes disparus
semble indiquer une pression atmosphérique
élevée, par M.-E. et A. HarLé. Extrait du bulletin
de la Société géologique de France, 28, rue Ser-
pente, Paris.
Catalogue alphabétique des livres, brochures
et cartes de la bibliothèque de l'Observatoire de
Belgique. à l'crle. ayez, imprimeur, 112, rue de
Louvain. Bruxelles.
Annales de l'Observatoire astronomique de
Zà-sé (Chine), t. V, année 1909. Chang- Hai, im-
primerie de la Mission catholique, orphelinat de
T'ou-sè-wè.
Annual report of the Director of the Weather
bureau for the year 1908. WE partie : meteorolo-
gical observalions made at the secondary stations
during the calendar vear 1908. Manille (Philippines).
Bureau of printing,
Alrune misure maynetiche eseguite nell Est-
A/rica inglese e nella Somalia italiana;
La carta magnetica del Benadir:
I compiti dell Ufficio centrale di meteurologia
nella Libia italiana, par Luisi Parazzo, directeur
de l'Office central de météorologie. Rome, Typo-
graphie nationale Bertero, via Umbria.
Coordenadas geograficas determinadas por el
mapa fisico y politico de Venesuela, par F. AGUER-
REVERE. Typographie Cosmos, à Caracas.
A propos de l'appel des savants étrangers rela-
tif aux droits de la Finlande, par le professeur
BERENDTS, traduit du russe par le comte DU CHAYLA.
Saint-Pétersbourg, imprimerie Kirchbaum, Novoi-
saakievskaya, 20.
COSMOS
21 NOVEMBRE 1912
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses :
T. S. F. — Fil isolé une ou deux couches coton:
Bazar d'Électricité, 34, boulevard Henri IV; Grand
Bazar de l’Hôtel-de-Ville. — Tubes de laiton : Quin-
caillerie Doré. — Feuilles d’étain pour condensateurs :
Ancel. — Diachylon: chez tous les pharmaciens. —
Toile d'architecte: chez les principaux papetiers.
L'acoustèle Daguin-Diénert est construit par la
maison Ducretet et Roger, 75, rue Claude-Bernard,
Paris.
M. J. D., à V. — Les renseignements donnés dans
le numéro 1450, p. 513, el ceux qui paraissent aujour-
d'hui fournissent toutes les indications nécessaires
pour construire les bobines primaire et secondaire
dans le cas de montage par induction. La grosseur
et la longueur du fìl sont indiquées pour la bobine
secondaire; pour la bobine primaire, la grosseur du
fil est la même, mais la longueur est environ quatre
fois moindre.
M. V. D., à S. — Nous m’avons pas l'adresse de
l’ « Electrit ». L’American machinist, World Building,
New-York (Etats-Unis). — M. de Recklinghausen babite
au Bas-Meudon. Comme cette adresse n’est pas sufi-
sante, vous pourriez en avoir une plus complète par
la maison Pucech-Chabal, 34, rue Ampère, Paris, qui
exploite le procédé Henry, Ielbronner et Reckling-
hausen.
M. C. P., à L. — L'Étude pratique des roches, de
F. RiNNE, a été éditée par la librairie Lamarre, 4, rue
Antoine-Dubois, Paris. Il vient de paraître une seconde
édition de cet ouvrage, revue et augmentée, du prix
de 16 francs.
M. G., à R. — La brochure reproduisant les articles
sur la télégraphie sans fil en cours de publication
dans le Cosmos paraîtra vers le milieu du mois de
décembre prochain.
M. l'abbé D., à S. — Si vous ne prenez pas la pré-
caution de couvrir la mèche de votre lampe à alcool
après l'avoir éteinte, l'alcool s'évapore à lair, ce qui
a pòur résultat un affaiblissement du degré de l'alcool.
La mèche n'est plus imbibée que par de l’eau. —
Nous ne savons s’il existe des mèches de lampe en
amiante. Vous pourriez vous adresser à l’Amiante,
de Flers (Orne).
H. 0. V. E. — Les renseignements que vous cher-
chez sur l'extraction du tartre des lies de vin et sur
la fabrication de l'acide tartrique se trouvent dans des
dictionnaires de chimie; par exemple, dans le tome HI
du Dictionnaire de chimie pure et appliquée, de
Wvrrrz, et son deuxième supplément, volume VH.
Librairie Hachette, 79, boulevard Saint-Germain, Paris.
M. le V" de B., à B. — Machine à calculer légère :
le « comptator », poids 700 grammes (195 fr). H. Eggers,
42, rue de Chabrol, Paris.
M. B., n° 4149-4239, à S.-G. (Indes anglaises). —
Pour empêcher le cuir de moisir, il suftit d’enduire
de temps en temps les objets en cuir d'essence de
térébenthine. Il n’est pas possible d'empêcher l'humi-
dité de l’air de se déposer sur les murs ou les par-
quets, sauf en chauffant les appartements. — Il nous
paraît difficile de vous donner satisfaction sous ce
dernier rapport (tables) au moins pour le moment,
M. J. M. C., St-P. (Brésil). — Vous auriez avantage,
pour la filtration et l’épuration biologique de l’eau,
à avoir recours aux filtres à sable. Vous trouveriez
des modèles de différents débits à la Société générale
d'épuration Asepl'eau, 28, rue de Châteaudun, ou à la
maison Chevalet, 111, rue Mozart, tous deux à Paris.
M. À. B., à M. — Les caractères distinctifs des divers
styles d'ameublement vous seront parfaitement indi-
qués, avec %44 planches à l'appui, dans le volume :
Menuiserie d'art contemporaine (32 fr). Librairie
Mulo, 12, rue Hautefeuille, Paris.
M. C. N., à A. — Mesurer la hauteur à laquelle se
trouve un cerf-volant est un problème des plus
simples en trigonométrie. On en trouve la solution
dans les ouvrages élémentaires. Le problème est
résolu aussi dans les géométries sous ce titre : déter-
miner la hauteur d'un point inaccessible. Si la trigo-
nométrie ne vous est pas familière, vous obtiendrez
un résultat approché, par la méthode graphique, en
faisant un dessin soigné à une échelle d'un centième,
par exemple. Un appareil du genre graphomètre
pourrait servir dans tous les cas. Peut-être le dendro-
mètre Morin, 11, rue Dulong, Paris, vous permettrait-il
d’avoir directement et sans calcul cette hauteur.
M. J. Q., à E. S. (Danemark). — La stérilisation des
eaux par rayons ultra-violets, par les procédés
V. Henry, A. Helbronner et de Recklinghausen est
exploitée par la maison Puech-Chabal, 34, rue Ampère,
Paris. — Un article général sur les applications des
rayons ultra-violets a paru dans le tome LXVI, n° 1422,
p. #73. — Si vous voulez bien nous envoyer là note
en question, nous tàcherons d'en tirer le meilleur
parti possible.
M. R. de M. — La note publiée indique que ces
condensateurs-réducteurs en sont seulement à la pé-
riode d'essais. D'ailleurs, il y a tous les renseigne-
ments nécessaires pour les construire. Des condensa-
teurs de ce genre sont employés en téléphonie dans
les postes à batterie centrale; vous en trouverez pro-
bablement à la Société industrielle des téléphones,
25, rue du Quatre-Septembre, Paris.
Un abonné, à G. — Baromètres, thermomètres de
précision, Tonnelot, 25, rue du Sommerard; enregis-
treurs, Richard, 25, rue Melingue; géodésie et mathé-
matiques, Morin, 11, rue Dulong, tous à Paris. Pour
une réponse plus précise, veuillez indiquer de quelle
branche des sciences il s’agit.
M. Y.,à P. — 11 y a longtemps que l’on a proposé
l'élevage des lapins ‘pour se faire des rentes; peu de
personnes y ont réussi: nous croyons pouvoir affirmer
que celui des rats n'a jamais été rémunérateur.
M. A. R., à D. — Un vernis quelconque à l'alcool!
y suffit.
imprimerie P. F&rON-VRau. 8 et 5, rue Bayard, Paris. VIII°,
Le gérant: À. Faious,
—_———— 2 ——— —————
No 1453 — 98 NOVEMBRE 1912
COSMOS
569
SOMMAIRE
Tour du monde. — L'électricité des gouttes d’eau. Le développement des chemins de fer du monde depuis
soixante-dix ans. Statistiques téléphoniques pour 1911. L'emploi des souris et des oiseaux pour déceler
l’oxyde de carbone après les incendies et les explosions de mines. Les lieux de ponte de l’anguille
vulgaire dans l’Atlantique. La culture du camphrier en Amérique. Les dimensions des canaux maritimes
et des navires de l'avenir. La désignalion des canons de marine. Le gruyère, p. 589.
Télégraphie sans fil : réception à domicile des signaux horaires (suite), D' Pienn& CoRRET, p. 593. —
Un navire transporteur de sous-marins: le « Kanguroo », M. HIEGELBACHER, p. 595. — Ondemètre
à lecture directe, BERTHIER, p. 596. — Nouvel explosif à l’oxygène liquide du D' Nodon, p. 598.
— L'achèvement du réseau des chemins de fer du Jura: la ligne Morez-Saint-Claude,
RevercuoN, p. 601. — Les oscillations de la péninsule balkanique, P. Couses, p. 605. — Le canal
de Panama, L'-C' Jeaxxez, p. 606. — Expériences sismologiques sous l’empereur Justinien,
DE MONTESSUS DE BALLORE, p. 608. — Piocheur pulvériseur automoteur Chouchak, ForrxiEr, p. 610.
Sociétés savantes : Académie des sciences, p. 611. — Association française pour l'avancement des
sciences (suite), HÉricHaunb, p. 612. — Bibliographie, p. 613.
TOUR DU MONDE
PHYSIQUE
L’électricité des gouttes d’eau. — Quand un
jet liquide se divise en gouttes dans l'air, on sait
que ces gouttes se chargent positivement, l'air
étant chargé négativement. Cet effet a été utilisé
par lord Kelvin comme tin moyen de créer des
charges électriques; on l'utilise pour les mesures
de l'électricité de atmosphère. Cependant, la nature
des causes qui produisent ces charges est encore
inconnue.
Le D" Von Bernalak, de l'Université d'Heidelberg,
dans un article des Annalen der Physik d'octobre,
émet cette opinion que cette production des charges
électriques est intimement liée avec la formation
de gouttes infiniment petites qui accompagnent les
gouttes principales. Il constate que si le nombre
de ces gouttes secondaires est accru en produisant
rapidement de grosses gouttes primaires à l'issue
d’un tube dont le bout inférieur est élargi, l'en-
semble de la charge produite est considérablement
augmenté.
STATISTIQUE
Le développement des chemins de fer du
monde depuis soixante-dixans.—La Chronique
des ingénieurs civils de septembre emprunte à
un inléressant tableau, paru dans Archiv für
Eisenbahnivesen, l’esquisse du développement des
chemins de fer mondiaux depuis 1840 jusqu'à 1910.
Voici les chiffres pour les dates principales.
1840..... 7700 km 1880... 372 400 km
1850.... 38600 — 1890.... 617 300 —
1860.... 108000 — 1900,... 190100 —
1870.... 209000 — 4910.... 1030000 —
Le développement le plus considérable s'est pro-
duit dans la période de 4880 à 1890, où l'accrois-
T. LXVII. N° 1453.
sement a été de 244 900 kilomètres; une grande
partie provient des Etats-Unis, où l'augmentation
a été de 417000 kilomètres. On peut mentionner
aussi le développement des chemins de fer de
l'Asie et de l'Afrique, qui a influé notablement sur
l'accroissement de 239 900 kilomètres qui s’est pro-
duit dans la période de 4900 à 1910.
Les 1030000 kilomètres existant en 1910 se
répartissent de la manitre suivante :
AMORUIUÉ Si sreéeter ed 526 000 km
Europe.................. AS3No0 —
NS et res aues 101900 —
AIT Reda 365850 —
AUS LE. ls.ns sa ei stolið —
Les 333850 kilomètres des chemins de fer de
l'Europe se répartissent comme suit en ne comp-
tant que les pays qui possèdent plus de 10000 ki-
lométres de voies ferrées :
AlGINAUne., sr osseuse 61 150 km
FESSES See RUES 59 560 —
PAS sas ne 49380 —
Autriche-Hongrie......... $4370 —
Grande-Bretagne ..,....... 37 850 —
FR ue a ets 16160 —
Espagne orso iaeaea 45 000 —
EL | PP NT 43 980 —
Les autres contrées européennes se partagent
les 35 600 kilometres restants.
On peut estimer approximativement à 284 mil-
liards de francs le coùt d'établissement de l'en-
semble des chemins de ferdu monde, dont 30 pour
400 environ appartiennent aux gouvernements des
pays respectifs.
(Voir, sur la mème question, le Cosmos, t. LXI,
n° 1282, p. 197 : Les chemins de fer du monde
entier en 1907: ett. EXUL, n° 4354, p. 676 : Les
chemins de fer européens depuis cinquante ans.)
590
Statistiques téléphoniques pour 1911.
D’après des statistiques américaines résumées par
l'Électricien du 16 novembre, le nombre des postes
d'abonnés au téléphone, pour toute la Terre, au
4°" janvier 1912, s'élevait à 142,5 millions d’unités;'
et à la même date, le développement des conduc-
teurs téléphoniques atteignait 47,5 millions de
kilomètres, de quoi entourer la Terre, à l'équateur,
de poteaux portant plus de mille fils. L'augmen-
tation pour l’année, tant du nombre des postes
que de la longueur des conducteurs, représente en
moyenne 40 pour 100; pour l'Europe pourtant,
l'augmentation n'est que de 8 pour 100.
Du nombre mondial des postes d'abonnés, 26
pour 100 reviennent à l’Europe, et 67 pour 1400 aux
États-Unis d'Amérique, qui, on le voit, possèdent
une énorme avance sur les autres pays au point
de vue de l'utilisation du téléphone : là-bas, les
posles d'abonnés sont répartis d'une manière
presque équivalente à l’intérieur et à l'extérieur
des grandes villes, tandis qu'en Europe, la majo-
rilé des postes d'abonnés se trouve dans les
villes de plus de 100 000 habitants, bien que leur
population ne représente que 14 pour 100 de lą
population totale. A noter qu'en Europe, dans ce
qui était la Turquie d'Europe, trois grandes villes,
Constantinople, Andrinople et Salonique, ne pos-
sédaient encore, au 1‘ janvier 4914, pour ainsi
dire, aucune installation téléphonique mise à la
disposition du public. |
Au 4° janvier, sur 100 habitants, on rencon-
trail dans les grandes villes d'Europe et d'Amé-
rique les nombres de postes d'abonnés ci-après :
EUROPE AMÉRIQUE
Stockholm 19,9 Los Angeles 24,0
Copenhague 7,0 Chicago 41,0
Chrisliania 6,9 Boston 9,2
Berlin 5,3 Philadelphie 8,6
Hambourg 4,7 New-York 8,3
Londres 2,8
Paris 2,7
Vienne 2,3
Saint-Pétersbourg 2,2
Par comparaison aux recettes des télégraphes,
les revenus des téléphones sont, en France, sur le
pied d'égalité; ils sont moindres en Italie, en Russie
et en Espagne; par contre, dans les autres pays
comme la Suède, le Danemark, l'Allemagne, etc.,
où la téléphonie est très développée, les recettes
brules données par l'exploitation téléphonique
l'emportent énormément sur celles données par le
télcgraphe.
HYGIÈNE
L'emploi des souris et des oiseaux pour
déceler l’oxyde de carbone après les incen-
dies et les explosions de mines (Revue géné-
rale des Sciences, 15 novembre). — La pøésence
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
de loxyde de carbone dans l'atmosphère des
mines après une explosion ou un incendie a causé
la mort d’un très grand nombre de mineurs. Ce
gaz n'est pas seulement l’un des plus dangereux
qui puissent se produire, mais encore l’un des
plus difficiles à déceler. Il est moins sensible aux
réactifs chimiques que le grisou. par exemple, et
sa recherche demande le concours d’une personne
un peu versée dans l'analyse des gaz.
Chargé par le Bureau des mines des États-Unis
d'étudier cette question, M. G.-A. Burrell s’est livré
à de patientes recherches qui l’ont amené à con-
sidérer l'emploi des pelits animaux comme supé-
rieur aux réaclifs chimiques pour déceler la pré-
sence de l’oxyde de carbone (1). Cette méthode n'est
pas absolument nouvelle : Haldane avait déjà pré-
conisé l'usage de la souris; mais M. Burreil paraît
être le premier à avoir déterminé exactement
l'effet de quantités connues d'oxyde de carbone sur
ce petit animal, ainsi que sur un oiseau, le canari.
Voici le résumé de ses observations :
POURCENTAGE
be CO EFFET PRODUIT
Souris.
0,16 Très léger malaise au bout d'une heure.
0,20 Malaise en 8 minutes; collapsus partiel
en 15 minutes.
0,31 Malaise en #£# minutes; collapsus en
7,5 minutes ; perte du pouvoir muscu-
laire en 35 minutes.
0,46 Malaise en 2 minutes; collapsus en
& minutes.
0,57 Malaise en une minute; collapsus en
2 minutes; perte du pouvoir muscu-
laire en 7 minutes; mort en 16 minutes.
0,77 Malaise en une minute; perte du pou-
voir musculaire en 6,5 minutes: mort
en 12,5 minutes.
Canari.
0.09 Très léger malaise au bout d’une heure.
0,12 L'animal se trouve plus faible au bout
d'une heure que dans le cas précédent.
0,15 Malaise en 3 minutes; tombe de son
perchoir au bout de 8 minutes.
0,20 Malaise en 1,5 minute; tombe de son
perchoir au bout de 5 minutes.
0,29 Tombe de son perchoir en 2,5 minutes.
On voit que les canaris sont bien supérieurs aux
souris pour indiquer la présence de gaz nocifs
dans l'atmosphère des mines, puisqu'ils donnent
plus rapidement des signes de malaise en présence
de petites quantités de CO; d'autre part, leurs
symptômes d'intoxication sont bien mieux définis.
M. Burrell a employé les canaris pour explorer
l'air de diverses mines après explosion. Les ani-
maux élaient placés dans des cages portées par
(i) Le D' Menard a jadis préconisé dans le Cosmos
cet emploi des petits oiseaux pour le méme objet.
No 1453
des hommes pourvus d'appareils respiratoires. Les
observations, contrôlées par des analyses d'air,
ont été tout à fait démonstratives, et l’auteur
recommande fortement la généralisation de ce
moyen très simple d’investigation.
ICHTYOLOGIE
Les lieux de ponte de l’anguille vulgaire,
dans l’Atlantique. — En 1856, le professeur
Kaup décrivait, parmi les poissons apodes réunis
dans les collections du British Museum, un petit
poisson comprimé, transparent comme du cristal,
de 8 centimètres de long, provenant du détroit de
Messine, qui fut dénommé ZLeptocephalus brevi-
rostris. ll fallut attendre quarante ans pour que,
en 1895, deux savants italiens, Grassi et Calan-
druccio, découvrissent que ce leptocéphale n’est pas
une espèce indépendante, mais la forme larvaire
de l’anguille commune (Anguilla vulgaris Tur-
ton). Ces deux auteurs pensaient, en outre, que
ces larves vivaient à grande profondeur, et que
seuls les tourbillons du détroit de Messine étaient
capables de les ramener à la surface.
Pendant dix ans, le problème de la biologie de
l’anguille resta au même point. Or, en 41904,
M. J. Schmidt, à bord du navire de recherches
océanographiques, le Thor, captura, à la surface
de l'Atlantique, mais au-dessus d'une grande pro-
fondeur, à l’ouest des iles Féroé, un spécimen un
peu plus jeune (7,5 cm) de Leptocephalus brevi-
rostris, et ce fait donna une impulsion nouvelle
aux recherches de la Commission danoise pour les
explorations de la mer, dont M. Schmidt est
membre : pour celte Commission, la question offre
ua intérêt particulier, le Danemark étant le pays
où la pêche des anguilles joue le plus grand ròle
(J. Scaminr, Bull. Soc. centr. Aquiculture et
Pêche, sept.-oct.).
Après la campagne de 1905 sur le Thor, qui ren-
contra des centaines de larves jeunes (de 8,8 cm à
6,0 cm) entre l'Islande et la Bretagne, M. Schmidt
pouvait conclure déjà que toutes les anguilles
vivant dans les bassins de la mer du Nord ou de
la Baltique, ainsi quen Norvège, sont originaires
de l'Atlantique. |
Les explorations de 1908 et 1910, cette fois en
Méditerranée, montrèrent que l'anguille ne se
reproduit nullement dans la Méditerranée; les
larves sont amenées de l’Atlantique, par le détroit
de Gibraltar, où toute l'année les couches d'eau
supérieures, où vivent ces larves, se meuvent vers
l'Est à une vitesse de 12 à 18 milles par jour.
Réuaïissant tous les renseignements fournis par.
d'assez nombreuses captures de larves jeunes en
plein Atlantique, M. Schmidt ne doute pas que les
champs de ponte de l’anguille ne se trouvent bien
loin dans l'Océan et que, pendant leur évolution,
COSMOS
591
les larves ne parcourent des milliers de kilomètres,
entrainées par le courant du Gulf-Stream et ses
rameaux. Comme on n'a pas encore trouvé de
larves mesurant moins de 3,5 cm, et qu'on ne
connait pas suffisamment la direction des courants
de l’Atlantique central ni leur vitesse, on ne peut
préciser les lieux où sont nées ces larves, mais il
est probable que la mer des Sargasses est un
champ principal de ponte de notre anguille.
On ne peut plus assurer, avec Grassi en 1896,
que celte ponte se fait dans les grandes profon-
deurs et près du fond, depuis que J. Schmidt a
établi en 1908 que les œufs et les larves d’un grand
nombre de murénidés habitent normalement la
surface. On serait plutôt porté à croire que l’an-
guille se reproduit dans des couches intermédiaires,
sans contact avec le fond; toutefois, on ne peut
l'affirmer. Les plus petites larves que lon con-
naisse ont été prises près de la surface, au-dessus
des profondeurs de l'Atlantique central.
SYLVICULTURE
La culture du camphrier en Amérique
(Revue scientifique, 9 novembre). — Depuis une
quarantaine d'années, on cultivait le camphrier
dans la Floride, mais seulement comme arbre
d'ornement ou pour former des haies brise-vent,
comme les cyprès de Provence. Cependant, cette
culture est devenue assez importante pour qu'un
certain pépiniériste vende jusqu à 15 000 pieds par
an à des clients disséminés dans une trentaine
d'Etats de l'Union.
En 1905, le département de l'Agriculture résolut
de lancer la culture du camphrier aux fins indus-
trielles; à ce moment-là, tout le camphre employé
aux Etats-Unis provenait du Japon, et il s'agissait
d'essayer d'échapper à cette sujétion. Il distribua
des plants dans tous les Etats du Sud.
Actuellement, la tentative a réussi à souhait,
l'Union n'importe presque plus de camphre et
même elle pourra bientôt en exporter. Le cam-
phrier prospère dans des terrains pauvres, sablon-
neux, où nulle autre culture ne peut se développer.
Une plantation de sept ou huit hectares suffit pour
rémunérer Ja construction d'une distillerie. La
production du camphre varie de 3,0 à 4,5 tonnes
par hectare, et le prix de vente en gros oscille
entre 8 et 12 francs par kilogramme.
Le camphrier est exploitable dès la cinquième
année, alors qu’il atteint environ 2.50 m. Alors
qu'en Asie on retire le camphre du bois de l'arbre
même, en Amérique on n'utilise que les feuilles et
les menus branchages, d'où énorme accroissement
de la productivité d'une plantation. |
La distillation s'opère à souhait par le procédé
le plussimple. On remplit de feuilles et de ramilles
une cuve que l'on fait traverser par la vapeur.
592
Celle-ci, vite chargée de camphre à l'état volatil,
passe dans un condenseur, où la matière se dépose
sur les parois en masse semi-solide tandis que
l'huile surnage. A. CR.
MARINE
Les dimensions des canaux maritimes et
des navires de l'avenir. — L'augmentation
rapide des dimensions des navires de commerce
dans ces dernières années, et l'incertitude qui en
résulte dans les prévisions des projets de construc-
tion et d’agrandissement des ports et des canaux
maritimes donne un intérêt particulier à la ques-
tion des dimensions probables des navires de
l'avenir, qui a été traitée au Congrès international
de navigation, en mai, à Philadelphie.
M. S. E. L. Corthell, rapporteur pour les États-
Unis, a noté que ses prédictions de 1898 ont
été justifiées. A l’heure actuelle, le chiffre de
30 000 tonnes a été dépassé par les déplacements
de quelques transatlantiques géants. M. Foster
King, ingénieur en chef de la British Corporation,
prévoit que les dimensions ci-dessous, exprimées
en mètres, seront atteintes en 1970 :
LONGUEUR LARGEUR
Paquebots transatlantiques.... 550 67
Paquebots des lignes africaines
et asiatiques........:....... 274 34
Gros cargos................. si 483 27
tandis que M. Corthell indique, pour 1948 il est
vrai, des dimensions un peu moins colossales, soit
333 m X 33 m pour les plus gros navires, avec un
tirant d’eau de 12,2 m.
Le « tirant d'air ». est une donnée également
intéressante en vue des travaux d'art, la télégra-
phie sans fil nécessite des antennes d’une hauteur
considérable : un navire de 9,4 m de tirant d'eau
présente un tirant d'air de 62,8 m;
Le rapporteur général, M. C. E. Grunsky, avait
présenté au Congrès les conclusions suivantes :
1° Il est désirable que le tirant d’eau des navires
au long cours soit limité ;
2° Les gouvernements n’accorderont aucune sub-
vention aux navires d’un tirant d'eau supérieur
à 9,8 m;
3° Les dimensions maxima à admettre pour les
navires construits ou exploités avec l’aide des gou-
vernements seraient:
Longueur totale hors tout......,... 275 m
Lairet s éusdaeratoueiresssntsese 32 m
Tirant d'eau.............s..os.sve.
Longueur utile.,.................. 305 m
ÉAFOCRES LAS 33,6 m
Hauteur d'eau sur buses.........., 10,7 m
satisferait les exigences raisonnables du trafic;
5 La section mouillée d'un canal maritime
COSMOS
28 NOVEMBRE 1914
devrait être égale à cinq fois la section immergée
du maitre-couple du plus grand navire transilant,
et la profondeur devrait laisser 4 mètre d’eau sous
la quille de ce navire; ces dimensions sont cepen-
dant fonction de la vitesse et de l'importance du
trafic et seraient déterminées par les conditions
locales.
Les quatre premières conclusions, qui tendent à
la limitation des dimensions des navires, ont été
rejetées après discussion.
La désignation des canons de marine. —
On sait que les canons sont désignés d'après leur
calibre. Néanmoins, il s'établit encore des confu-
sions fréquentes; par exemple, pour les grosses
pièces qui arment nos cuirassés, on entend dire,
suivant les auteurs, canons de 305 ou canons de
30 centimètres.
Nous trouvons dans notre confrère la Ligue
maritime la règle qui doit présider aux dénomina-
tion des bouches à feu. Les canons sont désignés
par leur calibre; le calibre est le diamètre de
Pame. Ce diamètre se mesure en centimètres pour
les pièces dont le calibre est supérieur à 10 centi-
mètres, et en millimètres pour celles qui sont
en dessous de 100 millimètres.
On doit donc dire: un canon de 30 centimètres,
de 24 centimètres, pour les pièces de gros ealibre,
et canon de 65 millimètres, de 47 millimètres, pour
la petite artillerie.
Ajoutons ce petit renseignement ; un canon de
30 centimètres pèse à peu près 50 tonnes
(50 000 kg). Or, le prix des canons étant d'environ
7 francs par kilogramme, on voit qu'une seule de
ces bouches à feu revient approximativement à
350 000 francs!
VARIA
Le gruyère. — Jadis, nos ménagères, quand elles
achetaient du fromage de gruyère se contentaient,
après un examen sommaire, de constater l’état des
yeux, plus ou moins humides; elles distinguaient le
grand pleureur et le petit pleureur; cela suffisait
à justifier leur choix, et nous, les consommateurs,
nous nous en trouvions bien. Mais les temps ont
marché depuis ; on fait du gruyère un peu partout,
mème à Paris, avec le lait laissé pour compte chaque
jour dans les crémeries, et on livre au commerce
les produits les plus divers: la distinetion de nos
ménagères de jadis paraitrait enfantine.
Néanmoins, les yeux ou trous caractérisentencore
les fromages de gruyère et disent s'ils sont sains
ou non. Nous lisons dans la Revue scientifique
(9 novembre) que M. Grandvoinuet a entrepris de
comparer au moyen de la photographie les mala-
dies des fromages manqués.
Les fromages gonflés sonnent creux, ont des
yeux énormes et des criques intérieures. Cette
maladie est causée par des fermentations trop
N° 1453
rapides. On y remédie en atténuant la présure et
salant fortement pour éviter les fermentations
secondaires.
Les fromages lainés présentent sur la tranche
des fissures aplaties au lieu d'avoir des yeux ronds.
La maladie provient de causesinversesde la gonflure.
Les fromages mille-trous proviennent de lait
acide. La påte présente un goùt désagréable.
Les fromages multipliés ou chargés ont les yeux
mal répartis par suite du manque d'homogénéité
du caillé.
Les fromages bréchés ou faux-grain ont des
COSMOS
593
yeux irréguliers comme forme et comme dimen-
sions. Les temps orageux contribuent parfois à cet
état. Il faut augmenter la pression et changer sou-
vent les toiles. |
Les fromages cuiteux ont des poches volumi-
neuses, véritables « géodes » garnies parfois de
moisissures; on doit affiner le grain du caillé.
La sonde des fromagers doit rencontrer quatre
yeux dans les pièces bien réussies.
Voilà des renseignements intéressants pour les
acheteurs, et cependant combien en est-il qui les
uliliseront ?
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL ©
Réception à domicile
des signaux horaires
et des radiotélégrammes météorologiques de la tour Eiffel.
Montage en Oudin.
Le montage en Oudin, que représente la figure 34
et qu’on réalise au moyen d'une bobine d'accord
à deux curseurs indépendants, est intermédiaire à
la dérivation et à l'induction.
On peut, en effet, le considérer soit comme un
montage en dérivation sur la self dans lequel le
F1G. 31. — MONTAGE EN OUDIN.
circuit récepteur, débarrassé de son amortisse-
ment, est réglable au moyen d'un second curseur,
indépendamment du circuit antenne-terre (cf.
fig. 43 et 20), soit comme un montage par induc-
tion dans lequel les bobinages primaire AC et se-
condaire BC, en partie confondus sur une même
bobine, ont une partie commune AC qui détermine
leur accouplement (cf. fig. 18).
Les résultats obtenus au moyen de ce montage
sont également intermédiaires à ceux que pro-
curent la dérivation et l'induction. La sélection
(1) Suite, voir p. 568.
est meilleure que dans la dérivation simple, en
raison de l'accord possible du circuit récepteur.
Elle est moins bonne que dans l'induction parce
que l’accouplement des deux circuits reste toujours
serré, le secondaire comprenant toujours la tota-
lité du primaire.
Il est cependant possible de relâcher cet accou-
plement par deux procédés, que l’on peut employer
ensemble ou séparément.
Le premier consiste à faire usage d'une self
F1G. 32., — EMPLOI DE TROIS CURSEURS,
d'antenne au primaire et de condensateurs ré-
glables au secondaire, comme dans le montage
par induction. On peut ainsi diminuer à volonté le
nombre des spires primaires et secondaires con-
fondues sur la bobine et utiliser pour le montage
en Oudin tous les dispositifs indiqués à propos de
l'induction.
-Le second procédé consiste à employer une bo-
bine à trois curseurs indépendants (fig. 32). Le
réglage du primaire est déterminé par le nombre
de spires comprises entre A et C; celui du secon-
daire par le nombre de spires entre B et D.
Une fois ce dernier réglage effectué, on peut dé-
594
placer « en bloc » les deux curseurs B et D vers
l’une ou l’autre extrémité de la bobine, en main-
tenant constant leur écartement. L'accord obtenu
persiste, mais le nombre des spires communes aux
deux circuits diminue si l’on éloigne les deux cur-
seurs B et D de l'extrémité C, ou augmente au
contraire si on les en rapproche.
On pourrait employer de même une bobine à
quatre curseurs (fig. 33) permettant de réaliser des
combinaisons encore plus variées entre le bobinage
primaire AC et le secondaire BD, mais les avan-
tages de ce dispositif sur le précédent ne paraissent
pas justifier la complication apportée par l'emploi
d’un quatrième curseur.
Principaux postes qu’on peut entendre.
Dès qu’on disposera d’une antenne un peu déve-
loppée, on pourra chercher à entendre le poste
allemand de Norddeich, situé à l’embouchure. de
lFElbe. On le reconnaitra à sa note musicale aiguë
A
us
WA: l AHAS EE
à |: ™ + HAUT
brun
DA 1 B
F16. 33. — EMPLOI DE QUATRE CURSEURS.
et comme un peu enrouée, aux signaux horaires
qu'il émet à midi et à minuit, à l'indicatif KND
dont il signe ses télégrammes et à son réglage
particulier. [l envoie les nouvelles aux paquebots
(Zeitungsdienst) le matin à 9h30" et le soir à
40°30®. Ses signaux horaires sont ainsi donnés :
vers 1155", série de v, à 11"57"475, signal appel
suivi des lettres KND (indicatif de Norddeich),
puis de MGZ (initiales allemandes des mots : temps
moyen de Greenwich); à 11"58"383, nouveau signal
appel, à 1158746" et à chacune des quatre secondes
suivantes, un trait; de même à 11"58"56° et à
44596; ensuite pose de 26 secondes, puis trois
nouvelles séries de cinq traits, de seconde en se-
conte, commencant respectivement à 11"59"365,
à 14159465 et à 11"59756%. Le dernier trait est
donné à midi ou minuit juste. Six secondes après
est enfin envoyé le signal fin de transmission. Un
télégramme météorologique, manipulé très len-
tement, suit les signaux horaires de midi; sa
transmission dure une dizaine de minutes. La self
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
nécessaire pour obtenir l’accord de Norddeich est
égale aux 3/4 environ de celle que demande la
tour Eiffel (3/4 FL).
À 40 heures du matin et à 10 heures du soir, on
entendra le poste de Cleethorpes, situé au nord-
est de Lincoln en Angleterre, envoyer le bulletin
météorologique général de Grande-Bretagne (Wea-
ther report) avec prévisions (forecast). Durée de
la transmission : 43 à 20 minutes. Émission mu-
sicale à note un peu bitonale et changeante, moins
aiguë que celle de Norddeich. Self d'accord :
double de celle de la tour Eiffel (2 FL).
Ce même poste envoie également jour et nuit,
aux heures et aux demies, un court télégramme
qui, à 1430" du soir, par exemple, est ainsi conçu :
Compris CQ CQ vsa (ou vsz) . Jofubo .?. Jofubo .
23 30 compris . z.
Cette transmission est souvent en retard ou en
avance de quelques minutes. Les lettres CQ CQ
constituent le « signal de recherche », analogue
au « tous » de la tour Eiffel, employé par une sta-
tion qui désire entrer en communication avec des
navires sans cependant connaître les noms de
ceux qui se trouvent dans son rayon d’action. Les
points sont des points abrégés (à deux groupes de
deux points, au lieu de trois groupes).
Pour les premiers essais, on écoutera de préfé-
rence les nouvelles et signaux horaires de Nord-
deich ou le bulletin météorologique de Cleethorpes
envoyés le soir. La portée des ondes hertziennes
de moyenne longueur étant beaucoup plus consi-
dérable la nuit que le jour, la réception est beau-
coup plus facile le soir que le matin.
À 11°30® du soir, la station de Poldhu, au cap
Lizard, en Angleterre, envoie les nouvelles pour la
rédaction du Journal de l'Atlantique imprimé
tous les jours à bord des paquebots ayant traité avec
la Compagnie Marconi. Cette transmission dure
environ deux heures avec plusieurs arrêts de courte
durée. Elle est plus facile à entendre que celles de
Norddeich et de Cleethorpes. Emission musicale à
note grave ronflée; manipulation mécanique très
régière. Self d'accord : 1 2/3 à 1 3/4 FL.
Entre 90" et 100" du soir, en entendra
souvent Madrid (MAD) et Barcelone (BM) corres-
pondre avec Ceuta et le cuirassé Giralda. Emis-
sion musicale à note un peu moins aiguë que celle
de Norddeich: manipulation en général mauvaise
et difficile à suivre. Self d'accord un peu moindre
que celle de Norddeich.
Clifden (Irlande) échange presque constamment
de longs télégrammes avec Glace-Bay (Canada).
Émission musicale à note analogue à celle de
Poldhu, mais moins grave et non ronflée. Sa très
grande longueur d'onde (6 FL environ) le rend
difficile à entendre malgré sa puissance lorsqu'on
ne dispose pas d’une grande antenne. Il en est de
mème de Coltano, en Italie.
N° 1453
Outre ces grands postes, on pourra entendre
ceux du service de la marine et ceux de l'Est
répondre à la tour Eiffel ou correspondre entre eux.
Ils sont presque tous à émission non musicale.
L'accord de Dunkerque, de Cherbourg, de Brest,
de Lorient, de Rochefort et d’Ajaccio est obtenu
avec une self égale à environ 1/4 FL; il y a d’un
poste à l’autre de légères différences en plus ou en
moins. Celui des escadres et de Toulon (instruction)
avec moitié moins de spires (crépitement souvent
très lent). Toulon (Mourillon), Bizerte et Oran
sont de longueurs d'onde plus grandes : Toulon
(son grinçant) demande à peu près 1/2 FL, Bizerte
un peu plus; Oran (note demi-musicale un peu
bitonale) se rapproche davantage du réglage de
Norddeich : il est à peu près à égale distance entre
1/2 FL et 3/4 FL.
Verdun est entre Dunkerque et Toulon, Belfort
a à peu près le réglage de Toulon, Toul celui
d'Oran, Epinal celui de Norddeich.
Dans la région parisienne on entendra, au mo-
ment de l'instruction des sapeurs télégraphistes,
les exercices des forts formant le « petit réseau » :
Mont Valérien (MV), Palaiseau (PL), Villeneuve-
Saint-Georges (VG), etc.
Le matin, de 9"0m à 10"45", et le soir, de 50m
à 70", on pourra suivre les essais autorisés
des constructeurs parisiens d'appareils de T.S. F.,
notamment ceux de la Compagnie Générale Radio-
télégraphique entre son poste de la rue des Plantes
COSMOS 595
(CGR) et un poste installé par elle en Angleterre,
où entre la rue des Usines (RDU) et Harfleur (HFR).
Le mot lux est souvent répété un très grand
nombre de fois. Des airs musicaux sont assez fré-
quemment transmis, soit au moyen d’un poste à
émission musicale variable, soit dans des essais de
téléphonie sans fil. Ces derniers sont presque tou-
jours reconnaissables aux crachements caractéris-
tiques des arcs servant à la production des ondes
entretenues. La transmission des airs musicaux
est, en général, assez satisfaisante. La Paimpolaise,
lé Biniou, l'hymne national anglais et Au clair
de la lune sont les principaux morceaux du réper-
toire. La transmission de la parole, au contraire,
laisse presque toujours beaucoup à désirer. Au
milieu du bruit des arcs, on devine, plutôt qu'on
ne comprend, des mots ou des lambeaux de
phrases : Allo, allo, allo, allo,..... çà va? ça va
bien? on vous cause, entendez-vous ?..….. Elle est
cependant parfois très nette et tout à fait exempte
des bruits parasites qui la couvrent le plus souvent.
Nous n'avons indiqué ici que les postes princi-
paux. On pourra en entendre un très grand nombre
d’autres dont on trouvera la liste avec indicatifs
d'appel, longueur d'onde, portée normale, et tous
autres renseignements dans la Nomenclature of fi-
cielle des stations radiotélégraphiques publiée à
Berne parc lẹ Bureau international de l'Union
télégraphique.
D' PIERRE CORRET.
On navire transporteur de sous-marins.
LE «
-= Nous avions annoncé, il y a un an, dans notre
numéro 1373 du 20 mai 1911, que la Société
—
Heee E
KANGUROO »
Schneider faisait construire un navire spécial des-
tiné au transport des sous-marins commandés
k e CA
us - MO ' f
TLA
< »
+ ve.
AMÉNAGEMENTS INTÉRIEURS DU TRANSPORTEUR DE SOUS-MARINS « KANGUROO ».
à cette Société par les gouvernements d'outre-mer.
Le navire vient d'achever sa première traversée
de Toulon à Callao (Pérou).
Hâtons-nous de dire que l'expérience est con-
cluante. Examinons comment a été réalisé le
projet dont nous avions parlé.
Le Kanguroo est divisé en trois parties princi-
pales :
ie
. où.
596 COSMOS
1° La partie arrière contenant la machinerie, les
pompes, les logements pour quatre officiers, trois
mécaniciens, treize marins et chauffeurs, deux
mousses, composant l'équipage du navire; elle
contient, en outre, les cabines et dortoirs du per-
sonnel du sous-marin transporté, personnel qui
s'élève à six officiers et seize hommes; elle ren-
ferme enfin une soute spéciale pour le transport
des torpilles.
2° La partie centrale, constituée par une cale
dans laquelle est placé le sous-marin. Cette cale
mesure 58 mètres de long et elle a un volume de
3 300 mètres cubes; elle est fermée à sa partie supé-
rieure par des panneaux qui s’enlèvent à volonté au
moyen d’un pont roulant circulant sur le pont du
navire; ses côtés et sa partie inférieure sont à
double paroi; l'espace compris dans cette double
paroi forme caissons d'air sur les côtés et caissons
28 NOVEMBRE 1912
à eau ou « water-ballast » dans la partieinférieure.
La cale communique avec la mer d'une part, par
la partie avant du navire, d'autre part, par des
vannes de fond.
3° La partie avant est constituée par une sorte
de caisson limité en arrière par une porte d’acier
étanche la séparant de la cale; sur les côtés et au
fond par une double paroi formant trois water-
ballasts; en haut par un pont métallique fixe.
L'introduction du sous-marin se fait de la facon
suivante : le Xanguroo est d’abord dans sa position
normale; on modifie cette position en faisant relever
l'avant du navire légèrement au-dessus de l’eau, et
ceci grâce aux water-ballasts de l'avant qu'on
a vidés d’une partie de leur eau; on obtient ainsi
une seconde position. Alors on enlève la partie de
lavant du navire dont on ouvre la porte de com-
munication avec la cale; on ouvre les vannes du
LE TRANSPORTEUR DE SOUS-MARINS « KANGUROO ».
fond de la cale, puis, au moyen des water-ballasts
de la paroi de la cale qu'on remplit d'eau, on donne
au navire une position n° 3 dans laquelle l’avant
plonge dans l'eau, mettant ainsi en communication
la cale et la mer par l'intermédiaire de la partie
avant du navire. On fait alors pénétrer le sous-
marin dans le Aanguroo; une fois cette opération
délicate terminée, on fait émerger l'avant du
navire toujours par le jeu du water-ballast; on
ferme la porte d'acier, on replace la partie avant
et on ferme les vannes de communication de la
cale et de la mer; on enlève l'eau de la cale au
moyen des pompes que porte le Aanguroo; on a
eu soin, au préalable, de placer sur le fond de la
cale des tins qui soutiendront le sous-marin pendant
la traversée.
A l’arrivée, on effectuera les opérations inverses
sans aucun secours extérieur, comme au départ.
Il faut noter que l'opération d'enlèvement et de
remise en place de la partie avant du navire est
relativement longue, car elle comporte dérivetage
et déboulonnage de membrures d'abord, rivetage
et reboulonnage ensuite.
Le Aanguroo, construit à Bordeaux par la Société
des chantiers et ateliers de la Gironde, d’après les
plans de la maison Schneider et Ci, s'est rendu
d’abord de Bordeaux à Toulon sans incident.
Dans son premier voyage de Toulon à Callao, il
a transporté un sous-marin de 46,25 m de long,
appelé Ferré, et dont le tonnage en immersion
complète est de 435 tonneaux.
Le Aanguroo a une longueur de 93 mètres, une
largeur de 12 mètres. Il est entièrement en acier;
son moteur est une machine alternative à triple
expansion d’une puissance de 850 chevaux, lui per-
mettant une vitesse de 10 nœuds environ. 1l peut
porter un poids utile de 3 830 tonneaux.
MARCEL HEGELBACHER.
N° 1453
COSMOS
597
Ondemètre à lecture directe.
En général on mesure indirectement la longueur
des ondes électriques en mettant en résonance avec
le circuit étudié un autre circuit dont les formes
géométriques rendent facile le calcul de la self et
de la capacité et, par suite, de la longueur d’onde.
Les ondemètres de Donitz, Drude, Slaby, Fleming,
F1G. 1. —— ONDEMÈTRE HUTH, PROFIL.
reposent, sur ce principe. L'appareil Huth, de Berlin,
utilise également la résonance, mais il se différencie
des précédents en ce qu'il ne nécessite pas la
recherche du point de résonance : la détermination
de la longueur d'onde, et respectivement de la fré-
quence d’un circuit oscillant s’obtiennent par une
.
PETEERE
|
F1G. 2. — ONDEMÈTRE HUTH, FACE,
simple lecture, comme dans les appareils ordinaires
de mesure : voltmètres, ampèremètres..…..
Les figures 1 et 2 donnent un schéma du dispo-
sitif imaginé par M. Hutb. C représente un conden-
z ” K o ae 4
WEARER SR pr
s Pad
n G €
he. s ` : Ft à LE
20 NUE
ETE n oa > CA T
F1G. 3. — ONDEMÈTRE DE LABORATOIRE.
salteur constamment réglable, L une self-induction
également réglable, A un tube de verre (rempli de
FIG. 4. — ONDEMÈTRE POUR TABLEAU.
néon ou d’hélium comme dans le kummètre de
Fleming), qui est monté en parallèle avec la self
598
ou la capacité et indique la résonance en s'illumi-
nant. Pour que l’on ne soit pas obligé de procéder
par tâtonnements et que l'appareil donne des indi-
cations immédiates, l’une des grandeurs variables
— dans le cas considéré, on a choisi la capacité —
est soumise à des fluctuations rapides grâce à un
mouvement d’horlogerie ou à un petit moteur élec-
trique M, de manière à lui faire parcourir toute
l'échelle de ses variations. }] en résulte qu'à chaque
rotation le point de résonance est atleint, tandis
que le tube témoin s'illumine. Ce phénomène se
produisant toujours au même endroit, le point de
résonance se trouve marqué par un mince trait
lumineux. Le tube témoin tournant sur une échelle
graduée en longueur d'ondes B (fig. 2), on peut lire
directement la longueur d'onde et respectivement
la fréquence du circuit à étudier.
COSMOS
28 NOVEMBRE 1919
Cette méthode présente l’avanlage de permettre
non seulement la lecture immédiate de la longueur
d'onde, mais encore de donner des résultats irès
précis, les résultais oblenus étant toujours les
mêmes, ce qui n'est pas le cas avec les autres pro-
cédés qui dépendent de l’habileté de l'opérateur.
De plus, les lectures sont extrèmement rapides.
L'appareil Huth est représenté par les figures 3
et 4. Dans le premier modèle (fig. 3), destiné au
laboratoire, l’ondemètre et le moteur sont disposés
sur une fourche montée sur un pied ; dans le second
(fig. 4), l'axe de l’ondemètre est horizontal; les
lectures se font sur une échelle verticale. (On voit
le mince trait lumineux indiquant 2600 m.) Le
premier appareil est transportable, le second est
destiné à demeurer fixé à une paroi ou à un tableau
de distribulion. A. B.
Nouvel explosif à l'oxygène liquide du D" Nodon. *
On connait déjà les propriétés explosives que
possèdent Jes mélanges d'oxygène liquide avec de
l'alcool, du pétrole, du coton, de la cellulose, du
papier, du charbon en poudre. Mais ces divers
explosifs n'ont été encore essayés que dans les
laboratoires, et, tels qu'ils se présentent, ils ne
sont susceptibles d'aucune application pratique
dans l'artillerie et dans l'industrie minière.
Ils sont effectivement très instables, et ils dé-
tonnent souvent spontanément au moment même
où l’on effectue le mélange; ils possèdent, en
outre, des propriétés extrêmement brisantes dues
à une combinaison instantanée de toute la masse;
ces propriétés sont opposées à l'emploi de tels
explosifs dans les armes à feu, où l’on exige, au
contraire, des qualités balistiques progressives et
accélératrices. En dernier lieu, l'oxygène liquide
s’évapore très rapidement dans le mélange, et la
composition de celui-ci se modifie entièrement au
bout de quelques instants.
L'invention du D° Nodon consiste précisément à
réaliser des explosifs composés d'oxygène liquide
et de produits carburés qui possèdent toutes les
qualités exigées par les poudres de guerre, en
évitant toutefois les graves inconvénients de la
plupart de ces dernières.
Il convient d’abord que l’explosif soit suscep-
tible de provoquer des effets progressifs el accélé-
rateurs, ayant pour résultat de vaincre graduel-
lement l'inertie du projectile, et de communiquer
à celui-ci une vilesse sans cesse croissante jusqu’à
la sortie du canon.
On obtient ce résultat en utilisant des poudres
(1) Ce nouvel explosif a fait l’objet d'un récent
brevet d'invention,
constituées par des grains distincts, de dimensions
sensiblement égales, dont l’inflammation com-
mence d'abord par la surface extérieure avec une
certaine lenteur, puis qui se communique graduel-
lement à toute la masse des grains d’explosif.
C'est, du reste, la méthode généralement adoptée
dans les poudres modernes sans fumée à base de
nitroglycérine et de pyroxyle.
Dans le cas de l’explosif nouveau désigné par
l'inventeur sous le nom d'’explosif intégral, on
atteint un but analogue, en fabriquant de petites
masses comprimées, destinées à représenter les
grains de poudre, sous forme de cubes, de paral-
lélépipèdes, de cylindres ou de sphères. Ces grains
sont obtenus à l'aide de diverses substances
inertes ou combustibles. Nous signalerons d’abord
l'emploi de la silice fossile, telle qu’elle sert à
fabriquer la dynamite, la ponce pulvérisée, etc.;
on imprègne ces substances poreuses d’un carbure
liquide tel que de l’alcool ou de la glycérine, qu'on
additionne d’une quantité variable d’eau de com-
binaison dans le but de régler la vitesse explosive.
On peut également employer de la benzine, du
pétrole, etc. On agglomère la poussière à l’aide
d’une substance agglutinante appropriée, telle, par
exemple, que la paraffine, le goudron sec, etc., et
lon conduit l’agglomération de telle sorte que la
surface de chaque grain soit sensiblement moins
poreuse que l'intérieur.
Ces grains de combustible aggloméré sont en-
tassés dans des gargousses spéciales.
Ces gargousses sont constituées par un petit
réservoir cylindrique en laiton argenté bien
poli sur les deux faces; ce réservoir est par-
faitement clos après l'introduction des grains
agglomérés, sauf une petite ouverture par laquelle
No 1453
on introduira loxygène liquide. Ce cylindre est
pourvu d’une amorce au fulminate; il est entouré
d'une subslance calorifuge, telle que la laine de
verre, le feutre, etc., dont le but est d'éviter tout
mouvement convectif de lair extérieur, lorsque
l'enveloppe métallique est amenée à la très basse
température de l'oxygène liquide.
Le calorifuge est entouré d’une seconde enve-
loppe métallique également en laiton argenté par-
faitement poli sur les deux faces. Le but que l’on
se propose d’atteindre en utilisant des surfaces en
métal argenté bien poli est d'éviter les pertes de
frigories par rayonnement. En fait, des réservoirs
combinés comme nous venons de le dire per-
meltent de conserver de l'oxygène liquide pendant
une heure sans perte importante. Pendant l’espace
de quelques minutes que dure l'opération du rem-
plissage de la cartouche, de sa mise en place et de
sa mise à feu, la perte d'oxygène liquide par
évaporation est très faible et négligeable en pra-
tique. C’est là un point très important.
La quantité d'oxygène que l'on verse dans la
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COSMOS
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599
cartouche est du reste calculée pour qu'elle corres-
ponde à une combinaison intégrale avec le com-
buslible, en tenant compte de la perle du liquide
par évaporation pendant la durée des manœuvres.
La méthode qui consiste à verser directement
l'oxygène liquide au sein même de la matière
combustible peut être utilisée quand la combinaison
ne s'effectue pas spontanément pendant l'opération.
Ce fait se produit parfois sans cause apparente;
aussi est-il prudent d'utiliser une cartouche d’un
modèle un peu différent du précédent qui permet
d'éviter complètement le grave danger de cette
méthode. Dans ce but, on dispose au milieu de la
cartouche, au sein même des grains agglomérés,
un tube réservoir en métal mince. Ce réservoir
est muni d’une tubulure qui débouche à l’exté-
rieur de la cartouche. C’est par cette tubulure
qu’on introduit l'oxygène liquide dans le réservoir.
Sous l’action des frigories de l’oxygène liquide,
l'enveloppe métallique de ce réservoir devient
fragile comme le verre, et il suffit du choc violent
d'un percuteur extérieur au canon pour briser
COUPE D'UN CANON CHARGÉ AVEC LA GARGOUSSE A OXYGÈNE LIQUIDE.
celte enveloppe en mille pièces, et permettre à
l'oxygène liquide d’inonder en un instant tout l'in-
térieur de la cartouche. On introduit dans le ré-
servoir une quantité d'oxygène liquide supérieure
à celle qui est nécessaire afin de prévoir l'évapo-
ration qui se produira au moment du contact de
ce liquide avec les grains agglomérés. La percus-
sion précédente est accompagnée d’une seconde
percussion qui effectue la mise à feu au moyen
de la capsule de fulminate de mercure que ren-
ferme la cartouche.
Les grains agglomérés peuvent être constitués
par une poudre absorbante de nature organique
au lieu d'être constitués par une poudre minérale
de nature inerte. On utilise, suivant les résultats
que l’on désire obtenir, de la poudre de sucre,
d'amidon, de dextrine, etc., ou bien encore du
coton, de la cellulose, etc. On prend le soin d’ag-
glomérer ces diverses substances à l’aide d’un
agglutinant approprié, tel que la paraffine, par
exemple, et lon s'arrange de façon que la sur-
face de chaque grain ait une porosité moindre que
l’intérieur.
On peut utiliser ces substances telles quelles ou
bien accroitre leurs propriétés explosives en y
introduisant une quantité variable d’un carbure
liquide tel que l'alcool, la glycérine, la benzine, le
pétrole, etc.
On introduit ensuite cette poudre dans la car-
touche décrite précédemment.
Ces indications démontrent combien sont nom-
breuses les combinaisons que l’on peut adopter
pour obtenir des explosifs pour armes à feu don-
nant des effets progressifs réglables à volonté.
Nous savons que l’on peut également donner à
l'explosif intégral les effets brisants les plus vio-
lents lorsqu'on veut l'utiliser pour désagréger les
roches dans les mines.
L'ensemble des diverses combinaisons précé-
dentes fait l’objet des brevets du D" Nodon.
Rappelons que l'emploi de l'explosif intégral
sous l’une quelconque de ses formes présente sur
les poudres actuelles l’avantage indiscutable de ne
pas nécessiter de provisions préalables; qu'il ne
peut jamais donner naissance à des explosions
accidentelles dans les navires de guerre et que sa
600
production peut être obtenue d'une façon continue
et indéfinie, puisque son principe actif, l'oxygène
liquide, est puisé directement dans l’air.
Ajoutons que le prix de revient de cet explosif
est très minime et hors de proportion avec celui
des explosifs actuels. Une première dépense doit
être faite pour la fabrication des cartouches, com-
prenant les grains combustibles, l’amorce, les
enveloppes et le projectile, mais, en réalité, c’est la
plus grosse dépense que l’on aura à faire; car,
le prix de l'oxygène liquide fabriqué à bord et
conservé pendant plusieurs heures dans des réser-
voirs appropriés est minime.
APPAREIL CLAUDE, PETIT MODÈLE,
POUR LA FABRICATION DE L'OXYGÈNE LIQUIDE.
En effet, un matériel tel que le construit cou-
ramment la Société de lair liquide, à Boulogne-
sur-Seine, peut fabriquer 125 kilogrammes d’oxy-
gène liquide par heure, avec une puissance de 80 che-
vaux environ. Si l’on compte le prix de revient à
raison de 40 centimes par cheval-heure, comme
on l’oblient environ à bord des navires de guerre,
la dépense ressortirait à 0,064 fr par kilogramme
d'oxygène liquide. En comptant les frais provenant
de l'absorption de l’acide carbonique et de la vapeur
d'eau de l'air, ainsi que l'amortissement et l'entre-
tien du matériel, cette dépense serait approxima-
tivement de 40 centimes par kilogramme.
En admettant que l'on perde la moitié de l'oxy-
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
gène liquide pár évaporation, ce prix ne s'élèverait
encore qu'à 20 centimes par kilogramme.
Or, un kilogramme d'oxygène liquide peut pro-
duire 41,5 kilogramme d’explosif; on voit donc à
quel prix infime tomberait le kilogramme d'explosif.
D'autre part, une installation industrielle, qui
serait susceptible de produire 125 kilogrammes
d'oxygène liquide par heure, telle qu’elle existe,
par exemple, à l'usine de Boulogne en travail cou-
rant, permettrait d'alimenter à bord d'un navire
de guerre la totalité des pièces d'artillerie.
Le coût d'une telle installation n’est du reste
relativement pas élevé, si on le compare à tous les
autres frais que nécessite l'artillerie actuelle ; ce
coût s’élèverait à 125 000 francs environ.
La puissance de 80 chevaux se trouverait facile-
ment à bord des cuirassés. Dans les batteries de
forteresse, il serait nécessaire d’adjoindre un moteur
à pétrole à l'installation.
Enfin, l’encombrement d’une telle installation
n'est pas considérable, et il u’excéderait certaine-
ment pas celui des provisions d'artillerie à bord
des navires de guerre actuels.
+
a è
Il est possible de comparer la puissance explosive
de l'explosif intégral du D" Nodon, à base d’oxy-
gène liquide, à celle des explosifs les plus puis-
sants tels que la nitroglycérine.
Le calcul de la chaleur fournie par l'explosion
se fait en retranchant de la chaleur qui est dégagée
par la formation des produits (anhydride carbo-
nique, vapeur d’eau, etc.) qui prennent naissance
lors de l'explosion la chaleur qui avait élé dégagée
par la formation de l'explosif à partir de ses élé-
ments.
Nitroglycérine. — Lors de la réunion des élé-
ments de la nitroglycérine, la combinaison
Ci + Ho Az3 + O9 — C3 H5 (AzO5)'
a dégagé 98 calories.
D'autre part, lors de la formation des produits
d’explosion :
3C + 60 = 3C0 dégage 3 X 94 — 282 calories.
5H + 2,50 — 2,5H:0 dégage 2,5 X 69 — 172 calories.
Total : 454 calories.
La chaleur fournie en définitive par l'explosion
est donc (454 — 98), soit 356 calories par molécule-
gramme, c'est-à-dire par 227 grammes de nitro-
glycérine, ce qui correspond à 4570 calories par
kilogramme. MM. Sarrau et Vieille ont trouvé par
l'expérience un chiffre très voisin du chiffre théo-
rique.
Explosif intégral. — Admettons le mélange
dosé d’alcool et d'oxygène:
C*HsO + 60
Lors de la réunion des éléments de l'alcool :
C? + H’ + O = C'H‘O a dégagé 70 calories.
N° 1453
D'autre part, lors de la formation des produits
d'explosion ;
2C + 40 — 2C0* dégage 2 X 94 — 188 calories,
6H + 30 — 3H°0 dégage 3 X 69 — 207 calories.
Total : 395 calories.
La chaleur fournie par l'explosion est donc
(395 — 70), soit 325 calories par molécule-gramme,
c'est-à-dire par 66 grammes d'alcool. Mais il faut
déduire la chaleur nécessaire pour réchauffer
l'oxygène liquide, dont Ia température est de
— 190°, et pour le vaporiser. La chaleur latente de
COSMOS
601
volatilisation de l'oxygène est d'environ 200 ca-
lories par kilogramme, ce qui correspond à 19 ca-
lories pour les 96 grammes (60) employés. En
définitive, la chaleur fournie par l’explosion est
de (325 — 19), soit 306 calories par 66 grammes
d'alcool et 96 grammes d'oxygène, c’est-à-dire par
162 grammes d'explosif.
On voit qu'un kilogramme d’explosif à oxygène
liquide dégagera 1 890 calories, c'est-à-dire que la
puissance de l'explosif intégral sera sensiblement
supérieure à celle des plus puissants explosifs usités.
L’achèvement du réseau de chemins de fer du Jura.
La ligne Morez-Saint-Claude.
Il a déjà été question à diverses reprises, dans les
colonnes du Cosmos, de la montagne du Jura, de
ses sites et de ses voies de pénétration. Le Jura
français n’a qu'un défaut, c'est de n'être pas en
Suisse! Mais c'est encore par le temps qui court
un bien gros défaut, un défaut incurable, on peut
le dire! On a beau répéter aux touristes que le
Jura français est très beau, et qu’on y peut passer
SP YORBIER
11686 bd
F1G. 1. — MOREZ ET SES ENVIRONS.
PLAN DE LA BOUCLE DE REBROUSSEMENT DE MOREZ A MORBIFR.
ses vacances aussi agréablement qu'en Suisse, et à
bien meilleur compte, les touristes restent scep-
tiques et continuent de traverser la frontière
jurassienne en pleine nuit pour aller promener
leur snobisme ennuyé dans les stations helvétiques
consacrées par la mode et par une savante et
ingénieuse réclame.
Je n’ai aucunement ka prétention de guérir les
fanatiques de la Suisse en leur parlant encore du
Jura, mais il me semble intéressant de signaler
Ta 6luse., x
T Lyon.
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aux amis de la nature l'achèvement des voies de
pénétration de cette région poélique où règne en
maitre le sapin idéal et magnifique, puissamment
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FIG. 2 — PLAN DE LA LIGNE DE MOREZ A SAINT CLAUDE.
campé dans une terre solide et forte; où les rivières
courent, gambadent, cascadent; où des lacs char-
manis et parés de verdure appellent la rêverie; où
les cluses profondément déchiquetées alternent
‘avec les horizons infinis.
Depuis une vingtaine d’années, les chemins de
fer et les tramways s'ingénient à escalader les
rampes et les gradins de ce coin de la Franche-
Comté. Il ne leur restait plas qu’à joindre, pour
terminer leur œuvre sociale, les deux villes indus-
602
trielles de Morez et de Saint-Claude : de Morez;
pays des horloges et des lunettes; de Saint-Claude,
pays des pipes.
C'est fait.
Tout cet été, les trains du P.-L.-M. ont circulé
sur ce tronçon de ligne dont l'inauguration officielle
a eu lieu le 43 octobre.
Aujourd'hui, le voyageur intéressé peut se rendre
de Paris à Saint-Claude et à Morez en moins de
temps qu'il ne lui en faut pour aller à Lucerne ou
à Thoune. - '
Et il peut aller de Paris à Genève en passant par
COSMOS
a ŠĀ ASSET 1
28 NOVEMBRE 1912
les deux intéressantes petites cités jurassiennes.
Il y a exactement, par la nouvelle voie ferrée,
24 kilomètres entre Morez et Saint-Claude. Le pre-
mier est à 734 mètres d’allitude, le second à 439.
C'est donc une différence de niveau de 295 mètres
qui sépare les deux extrémités du tronçon. La
pente augmente progressivement, partant de 4 mil-
limètres par mètre pour atteindre 20 et 22. Mais
que d’accidents dans le parcours!
Tout d’abord, la ligne sort de Morez au moyen
d'un rebroussement comme en présentent les che-
mins de fer andins. Nous donnons le plan‘de la
>
~- S -
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FıG. 3. — LIGNE DE MOREZ A SAINT-CLAUDE : LE GRAND VIADUC DE MORFZ.
gare de Morez et de ses envi‘ons d’après les docu-
ments officiels de la Compagnie P.-L.-M. Nous don-
nons également une vue perspective de ce coin de
terrain d’après une photographie de M. Laheurte,
arliste morézien. Cette vue est suggestive (fig. 3). Ẹlle
montre nettement quelle accumulation formidable
de travaux d'art il a fallu faire entre deux com-
munes qui se touchent : Morbier et Morez.
La distance des deux gares à vol d'oiseau ne
dépasse pas un kilomètre. Mais pour racheter une
différence de niveau de 125 mètres, il a fallu
donner à la ligne un développement de 6 kilo-
mètres, sur lequel on rencontre 1181 mètres de
souterrains et 627 mètres de viaducs.
Lun de ces viaducs, que l'on voit en haut à
gauche de la ‘photographie de M. Laheurte, est
particulièrement impressionnant. Il est curviligne
et se détache de la montagne pour venir s'y res-
souder après une excursion de 165 mètres dans le
vide. Ce viaduc surplombe d'une centaine de
mètres celui du premier plan également curviligne
et sur lequel passent les rails de Morez à Saint-
Claude.
Ce viaduc, le plus long de la section et qui fran-
chit les maisons de Morez-le-Bas, mesure 180 mètres
de long. ll a une courbure de 250 mètres de rayon.
La ligne comporte en outre huit autres viaducs
formant, avec celui dont il est question, 647 mètres.
N° 1453
Elle passe également à travers 4728 mèlres de
souterrains, c'est-à-dire que, sur près d'un quart
de son parcours, elle emprunte des travaux d'art
considérables et curieux.
Voici la liste de ces travaux:
80 mètres. Haateur i7 m.
180 mètres. Hauteur 38,26 m.
223 mètres.
73 mètres. Hauteur 44,77 m.
Viaduc de la Source...
Viaduc de Morez.......
Souterrain des Essards.
Viaduc dru Saillard.....
Souterrain des Batail-
IAE: rire 148 mètres.
Souterrain de Lézair... 341 mètres.
Souterrain de la Pointe. 18 mètres.
COSMOS
603
213 mètres.
248 mètres.
60 mètres.
54 mètres. Hauteur 14,26 m.
25 mètres. Hauteur 12,93 m.
Souterrain du Grépillón.
Souterrain du Chalet...
Souterrain de Tancua...
Viaduc du Puits........
Viaduc du Cret.........
Souterrain des Apla-
126 mètres.
Viaduc de la Culée..... 15 mètres. Hauteur 12,16 m.
Souterrain de la Gouille
BOT Lu cet 1742 mètres.
Souterrain de Sous la
COMM urine ira 78 mètres,
213 mètres.
60 mètres. Hauteur 26,55 m.
513 mètres.
Soulerrain des Frettes.
Viaduc de Valfin.......
Souterrain de Yalfin....
F1G. 4. — UN ATELIER DE LUNETIERS A MOREZ.
Souterrain du Crapaud. 246 mètres.
Viaduc de la Grande
Roche ....... rs duss 70 mètres. Hauteur 8,60 m.
Souterrain du Champ
de Bienne............ 39 mètres.
Souterrain de Mada-
BABCEP. sus ctmusaesa 80 mètres.
Viaduc du Pain de
SUCRE rome venue 90 mètres.Hauteur 15,64 m.
Souterrain du Pain de
DROLO sécu aitas 102 mètres.
Souterrain de la Serre. 52 mètres.
Souterrain de Saint-
CAN: Es ous 286 mètres.
Longueurtotale des souterrains et viaducs. 5375 mètres.
J'ai parcouru cette ligne quelques jours après
son ouverture à la circulation. Elle est ravissante,
et j'avais tant de plaisir à regarder par la portière
de mon compartiment la Bienne qui serpentait
capricieusement à 200 mètres au-dessous de moi,
que j'en oubliais complètement le misérable aspect
des wagons lépreux et branlants de troisième classe
que la Compagnie P.-L.-M. exile en service là-bas
en attendant que, croulant de tous còtés et inondés
par tous leurs ais, ils ne puissent plus être utilisés
que comme roulottes d'occasion par des bohémiens
calamiteux !
Plus de cent ruisseaux ou ravines sillonnent la
pente rapide au bas de laquelle, tourmentée,
60%
bruyante, gonflée par les pluies d'été, la Bienne
roule ses eaux agitées et crache son écume aux
innombrables obstacles rocheux qui entravent sa
course. À droite, à gauche, elle se gave de cascades
et de cascatelles qui dévalent par les sentiers
escarpés comme par les lits rocailleux de petits
torrents fantasques. Il semble qu'elle se souvienne
du temps où, puissante et gigantesque, elle striait
` et zébrait la roche énorme de ses flots indomptés,
arrachant, raclant, pulvérisant, entrainant vers le
Rhône des millions de mètres cubes de pierre!
Mais on a beau aller lentement, on finit toujours
par arriver.
Je suis donc arrivé à Saint-Claude.
J'ai déjà eu l'honneur de présenter cette pitto-
resque ruche industrielle aux lecteurs du Cosmos.
Je n’en dirai rien aujourd hui, sinon que la fièvre
des constructions y bat son plein, ni plus ni moins
qu’à Paris, et que les propriétaires y font des
affaires d'or. On construit jusque sur les talus du
chemin de fer, et les appartements se louent en
moyenne 150 francs la chambre. Si le proverbe est
vrai qui prétend que tout va bien quand va le båti-
ment, les habitants de Saint-Claude nagent dans
la prospérité!
Revenons donc à Morez, si vous voulez bien.
Morez fut longtemps seulement le pays des com-
toises, de ces grandes et robustes horloges à poids,
aux sonneries multipliées, aux boites pansues déco-
rées de couleurs étourdissantes. Aujourd'hui, le
mouvement de Morez est en baisse. Faute d’avoir
renouvelé leurs vieilles méthodes d’établissage et
d'avoir adopté la falrication mécanique intense
et l'extrême division du travail, l'horlogerie moré-
zienne périclite et se meurt.
Mais en revanche prospère la lunetterie qui,
elle, a franchement embrassé le progrès.
Elle fut introduite dans la petite ville par Pierre-
Hyacinthe Caseaux, vers 1796. En 1810, il ny
avait encore que treize lunetiers, et la production
annuelle ne dépassait pas 300 douzaines de lunettes
représentant une valeur de 6000 francs. En 1848,
on fabriquait 60000 douzaines valant 300 000 francs,
et, en 1383, 912 000 douzaines pour 3 millions de
francs.
En 1903, dans une plaquette fort documentée
sur la ZLunetterie dans le canton de Morez,
M. Rouyer estimait la production à 4 million de
douzaines représentant 4 millions de francs.
Je crois qu'aujourd'hui on peut évaluer à environ
> millions de francs l'importance de fabrication
morézsienne en lunetterie.
J'ai eu l’occasion de visiter à Morez deux fabriques
de lunetterie, celles de M. Lancon et de MM. Jac-
quemin. Gräce à l'amabhilité de ces derniers, il
n'est possible de faire passer sous les yeux des lec-
teurs du Cosmos une vue d'atelier exécutée par
l'artiste émérite qu'est M. Laheurte.
COSMOS
28 NOVEMBRE 19412
Dans ces ateliers, la matière première métallique
entre sous la forme de fil ou de petites barres.
. Les barres sont découpées en petits morceaux,
les fils sont laminés de manière à ménager dans
leur longueur la rainure qui servira à loger le
verre.
Le nombre des passes nécessaires pour amener
une paire de lunettes ou un pince-nez à l’état com-
plet est considérable. Certains ouvriers donnent au
fil de la carcasse une simple courbure rudimen-
taire, alors que d’autres percent seulement un
trou ou donnent un coup de fraise. Certains sont
occupés à entortiller autour des pièces à souder un
mince fil de soudure que le chalumeau fondra tout
à l'heure. Pour donner une idée de l'attention
qu'apportent les grands fabricants à réduire au
minimum la main-d'œuvre, je dirai que, par
exemple, chez M. Lançon, c'est une ingénieuse
petite machine-outil qui se charge de lentortille-
ment de ce fil de soudure.
Le développement prodigieux de l'automobile
a récemment favorisé la naissance d’une nouvelle
branche de cette intéressante industrie, celle des
lunettes d’auto. Il s’en fait de toutes les formes,
de toutes les grandeurs, de tous les aspects, d'or-
dinaires, de luxueuses, des jaunes, des vertes, des
brunes. Les unes protègent simplement l'œil, les
autres descendent sous le nez, d'autres encore sont
de véritables masquescachant entièrement la figure.
La lunette d'auto est une spécialité de la maison
Jacquemin, qui fournit cet article aux marchands
d'accessoires et aux magasins de nouveautés. Elle
possède un véritable atelier de confection dans
lequel des dames et des demoiselles habillent, avec
toute l’élégance qu'elles comportent, ees lunettes
bizarres et compliquées.
A côté de ces comtoises et de ces œils-de-bœuf,
de ces lunettes et de ces pince-nez, Morez fabrique
aussi des cadrans et des plaques émaillées, ainsi
que des horloges de clocher.
L'horloge morézienne de clocher se distingue
essentiellement de celle dite de Paris par son mé-
canisme de sonnerie qui est celui de nos pendules
dites à rteau ou à crémaillère et qui est théori-
quement et à peu près pratiquement indécomptable,
alors que le mouvement de Paris est à roue de
comple ou à chaperon, comme il l'était au temps
de S. M. Charles le Sage.
Il résulte de cette différence de système une dif-
férence d'aspect des deux mouvements.
Morez est le gros fournisseur d'horloges publiques
de France. Ses produits sont sensiblement moins
chers que ceux de Paris (lesquels, entre parenthèses,
sont généralement fabriqués loin de eette ville).
On raconte dans la région, à propos de lhorlo-
gerie morézienne de clocher, une petite histoire
que vous me permettrez de vous conter sous sa
forme poétique.
Ne 1453
En ce temps-là, il n’y avait pas encore de voie
ferrée entre Saint-Claude et Morez. On ne pensait
même pas qu’il y en put avoir une un jour. Malgré
la petite rivalité existant entre les deux cités,
Saint-Claude avait, par l'intermédiaire de son
maire Reydellet, commandé une horloge à Morez
dans la personne du fabricant Odobey, un nom
fort connu dans le monde de la grosse horlogerie.
Cette horloge une fois installée, il surgit entre
maire et fournisseur une contestation qui retarda
le règlement de compte pendant assez longtemps.
L'horloge sonnait les quarts sur trois cloches
donnant les notes sol, la, si, et les heures sur un
do grave.
Les loustics de Saint-Claude eurent tòt fait de
mettre des paroles sous ces quatre notes. Lorsque
l'heure sonnait, on entendait chanter :
Reydellet,
Entends-tu
Odobey
Qui te dit:
Paye, Paye, Paye...
Les oscillations de la
Il semble que le caractère turbulent et belli-
queux des peuples balkaniques soit la résultante,
ou la répercussion sur eux, de l'instabilité du sol
qu'ils habitent.
En effet, depuis la plus haute antiquité, l’his-
toire a enregistré les mouvements du sol dans la
Méditerranée orientale, mouvements bien anté-
rieurs à l’homme et qui se continueront longtemps
encore, jusqu’à la mort de le Terre.
Selon le témoignage de plusieurs auteurs anciens,
Hélice et Bura, dans l'Archipel grec, furent englou-
ties dans la mer par un tremblement de terre,
en 373 avant Jésus-Christ; et Ovide prétend qu’on
voyait sous les eaux les murs de ces deux villes.
Près du même point, en 1847, Vatitza fut réduite
en ruines par l'effet d'une secousse souterraine.
Les traditions relatives aux grandes inondations
que l’on dil avoir eu lieu en Grèce, ainsi que sur
tes confins des établissements grecs, et qui, des
âges les plus reculés, sont parvenues jusqu'à
nous, ont eu, sans doute, pour origine quelques
séries de catastrophes locales dues, pour la plupart,
à des tremblements de terre.
Le déluge de Samothrace donna lieu à l’inonda-
tion des rivages de cette petite fle et de la partie
voisine du continent asiatique, par les eaux de la
mer. Suivant Diodore de Sicile, les habitants eurent
le temps de se réfugier sur les montagnes et
d'échapper par la fuite au danger qui les mena-
çait. On ne saurait douter qu'à cette époque il ne
COSMOS
605
Pendant que d’autres répondaient sur le mème
air :
Odobey,
Entends-iu
Reydellet
Qui te dit:
P, 9, Pana,
Vous m'excuserez de ne point écrire ce que cou-
vrait le do dans cette réponse qu’on eùt pu tra-
duire poliment par zut, si zut eùt existé à cette
époque lointaine !
Cela n'empêche pas, du reste, les horloges de
clocher fabriquées à Morez de se comporter très
convenablement dans les mairies et dans les églises
où elles sont installées.
Ni les Moréziens et les Saint-Claudiens de $se
traiter en frères et de s’aller voir les uns les autres,
depuis qu’ils ont un chemin de fer, un joli chemin
de fer qui ne redoit rien à ceux de la Suisse et dont
ils ne demandent qu'à faire les honneurs aux Fran-
çais de France.
LÉoPozp REVERCHON.
péninsule balkanique.
se soit produit un abaissement de la còte, accom-
pagné de tremblements de terre et d'invasions de
la mer.
Mais, à côté de ces phénomènes . violents —
parmi lesquels on peut classer l'apparition de l'ile
de Santorin, de ses satellites et de l'ile Julia, — il
en est d'autres bien plus vastes, bien plus lents,
mais qui ont un intérèt primordial : nous voulons
parler des oscillations des lignes de rivages.
Ce sont des mouvements embrassant une grande
étendue et capables, à la longue, de modifier sen-
siblement les conditions réciproques de la terre
ferme et de l'océan. La réalité de ces oscillations,
toujours très lentes, est attestée par le déplace-
ment que les lignes des rivages maritimes subissent
en de nombreux points du globe, et par suite des-
quels d'anciennes plages se montrent aujourd’hui
sensiblement plus haut que le niveau de la mer,
tandis que des plaines ou des côtes, autrefois
émergées, sont maintenant sous-marines.
C'est ainsi que de nombreux indices de submer-
sion se manifestent sur les rivages de l'Albanie et
de la Grèce. Dans l'Attique, certaines voies ro-
maines du golfe d’Arta sont aujourd'hui recou-
vertes de 1,2 m d’eau. L'isthme de Corinthe est
plus étroit qu’autrefois, et d'anciennes villes ne
sont plus que des amas de ruines submergées (1).
Pour ce qui concerne le sol de la Grèce et des
régions voisines, ces phénomènes ont été fort bien
(1) À. Issez, Dradisismi. Genova, 1883.
606
étudiés par M. Ph. Négris, dans de nombreuses
publications (1). p
Les géologues les plus autorisés sont aujourd’hui
séparés en deux camps. Les uns considèrent les
dernières oscillations des rivages comme dues
uniquement à des mouvements propres aux conti-
nents, qui se déforment, et supposent le niveau de
la mer stable. Les autres, au contraire, attribuent
les oscillations à des mouvements eusfatiques du
niveau de la mer. `
Il ne semble pas qu'on soit en droit de rejeter,
de prime abord, l'une ou l’autre de ces deux opi-
nions, car l'histoire du passé, éclairée par les
brillants travaux d’'Édouard Suess (/a Face de la
Terre), nous montre les deux phénomènes 8e
répéter à plusieurs reprises.
La succession des phénomènes tectoniques qui
se sont produits en Grèce depuis l’époque plio-
cène est le meilleur exemple que l’on puisse invo-
quer en faveur de ces deux théories.
Au pliocène, les plis pindiques, ces rameaux
des plis alpins, avaient fait émerger toute la
Grèce, en soulevant les conglomérots de la Mes-
sénie; la mer du deuxième étage méditerranéen
avait taillé sur ces plis les terrasses d’abrasion.
Cependant, à la suite de la surrection définitive
des Alpes, des fosses sillonnent le pays et sont
occupées, les unes par la mer, les autres par des
eaux douces qui y déposent surtout des sédiments
marneux. Certaines de ces fosses, comme celle du
golfe de Corinthe, semblent s’approfondir à mesure
que le dépôt augmente d'épaisseur; elles ne
tardent pas à recevoir des couches épaisses de con-
glomérats, probablement à la suite de la nou-
velle surrection pliocène qui se prépare. D’autre
part, dans le sud du Péloponèse, les marnes sont
souvent recouvertes directement par un calcaire
compact.
Bientot, la surrection pliocène est à son apogée,
portant les couches levantines à 1 759 mètres d’al-
tilude au nord du Péloponèse, et à près de
4 000 mètres dans la Locride, tandis que les ter-
rasses d'abrasion antérieures au pliocène sont
elles-mêmes soulevées contre le Ziria et le Chelmos
à 1 500 et même à 1 700 mètres.
L'écorce ne tarde pas à se fracturer sous l’ac-
centuation des pressions latérales. Les formations
pliocènes se disloquent et se disposent en marches
d'escalier gigantesques, tandis que les éboulis pro-
venant des cassures s'entassent sur les couches
(1) Pu. Nécris, Délos et la transgression actuelle des
mers. Athènes, 1907, Les terrasses du nord du Pelopo-
nèse et la rêgression quaternaire. Athènes, 1910.
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
pliocènes redressées, et que la mer s’acharne sur
ces éboulis en les aplanissant à 600 mètres. Celite
mer taille des terrasses au même niveau sur
d'autres couches tendres, comme les marnes levan-
tines de Corinthe, ou le flysch de la vallée de
Pournarokastro.
Les efondrements de l'écorce, prenant encore
plus d'importance et englobant, sans doute, à cette
époque, l’Atlas oriental, la Tyrrhénide et d’autres
terres dans l'océan Atlantique, la faune boréale
pénètre jusqu’à Rhodes. C’est à ces effondrements
qu’il faut rapporter la régression du pliocène
supérieur, du niveau de 600 mètres, à celui de
390 mètres.
À ce niveau, la mer stationna pour former des
bancs de quelques mètres de conglomérats sableux
coquilliers, qui reposent encore aujourd’hui hori-
zontalement sur les marnes levantines en discor-
dance.
La mer continua à baisser par étapes de faible
durée et de faible amplitude, comme le montrent,
d'un côté : la succession presque continue de per-
forations de pholades sur les rochers, l'absence de
ressauls sur les terrasses quaternaires; de l’autre,
la similitude des coquilles, trouvées aux points les
plus élevés comme aux points les plus bas, atteints
par la mer en recul, avec les coquilles actuelles.
Cette dernière régression parait connexe de l’effon-
drement de l’Egéide, qui a été accompagné de la:
dislocalion des conglomérats coquilliers horizon-
taux, et d’autres effondrements dans la Méditer-
ranée, la mer Rouge et l'océan Atlanlique.
Enfin la régression cesse et la transgression
commence. L'arrêt de la régression marque la fin
des grands effondrements, et la transgression qui
suit montre que les voussoirs écroulés se res-
serrent de nouveau par le développement des pres-
sions latérales : quelque fond de mer commence
encore, sans doute, à se bomber, sur l'emplace-
ment de quelque chaine future.
Ce résumé des grands phénomènes de la vie de
la Terre — dans cet endroit favorable aux observa-
tions qu'est la péninsule balkanique — est riche
en enseignements.
On y saisit sur le vif les mouvements de la
croûte terrestre (lithosphère), cherchant à épouser
les contours du noyau central métallique (bary-
sphère) sans cesse modifiés et amoindris par les
oxydations intenses d'où résulte la zone ignée
(pyrosphère).
Ces mouvements ne cesseront que le jour où la
Terre, comme la Lune, aura absorbé ses fluides ; ce
sera la mort de notre planète.
Pau Couses fils.
N° 1453
COSMOS
607
Le canal de Panama.
Les travaux d'achèvement du canal de Panama
sont poussés activement, et l’on peut déjà entrevoir
l'époque où les navires passeront à travers l’isthme
d'un océan dans l'autre.
On a suivi, dans ces colonnes, de mois en mois,
les modifications des plans et les travaux de cette
œuvre gigantesque; on a signalé les péripéties
continuelles qui ont marqué les différentes phases
de l’entreprise. Le moment semble venu de jeter
un coup d'œil d'ensemble sur la situation actuelle
et de dire le point auquel les efforts des Américains
ont conduit cette entreprise extraodinaire dont
la France a eu l’iniliative, mais qu'elle n’a malheu-
reusement pas su mener à bonne fin.
La direction générale du canal entre Colon sur
l'Atlantique et Panama sur le Pacifique est du
Nord-Ouest au Sud-Est. Panama est situé à 35 ki-
lomètres à l'est de Colon. Sa longueur totale, y
compris les chenaux balisés dans la baie de Limon
d'une part, et däns celle de Panama de l’autre,
est de 80,5 kilomètres.
On peut considérer le canal comme commençant
à l'entrée de la baie de Limon. Pour protéger
l'intérieur de cette baie contre les vents du Nord-
Ouest très violents en hiver, on a construit une
jetée de 3 300 mètres de longueur entre la pointe
Toro et l’ouverture du canal. Le chenal balisé dans
la baie de Limon a une longueur de 7 kilomètres
environ. À partir du point où il entre sur la terre
ferme, le canal a 150 mètres de largeur sur
12,5 m de profondeur. À 14 kilomètres de la côte,
se trouvent les écluses et le barrage de Gatun.
Ces écluses sont réparties en trois groupes de
deux écluses accolées. La différence de niveau entre
le bief supérieur et le bief inférieur est de
26 mètres. Quant à la digue, elle barre la vallée
de Chagres et transforme cette vallée en un vaste
lac qui n’a pas moins de 42 474 hectares de super-
ficie.
A partir de Gatun jusqu’à Pedro Miguel, c'est-
à-dire sur une longueur de 63 kilomètres, le canal
est de niveau, mais sa largeur n'est pas uniforme.
Elle est d’abord de 300 mètres près de Gatun et
diminue progressivement jusqu'à n'être plus que
de 90 entre le 48° et le 63° kilomètre, c'est-à-dire
dans la partie qui correspond à la tranchée de la
Culebra.
Immédiatement après la tranchée de la Culebra,
on arrive à l’écluse de Pedro Miguel, sur le versant
de l'océan Pacifique. Après cette écluse qui abaisse
le niveau d'eau de 9 mètres, le canal traverse le
lac artificiel de Miraflores, formé par la réunion
des eaux de trois rivières, le Rio Grande, le Pedro
Miguel et le Cocoli, et d’une longueur de 3 kilo-
mètres environ. A la sortie de ce lac, le canal
franchit les deux écluses doubles de Miraflores et
arrive ainsi au niveau de l'océan Pacifique. Entre
le 72*et le 73° kilomètre, le canal quitte la terre
ferme et se prolonge dans la baie de Panama par
un chenal balisé de 7 kilomètres. Pour s'opposer à
l'envasement rapide de ce chenal, on a dù con-
struire à l'Est une jetée de 5 kilomètres de lon-
gueur entre la Punta Mala et les iles Naos.
Le tracé du canal est assez sinueux, et sur la lon-
gueur totale de 80 kilomètres, il n’y a pas moins
de 22 coudes dont quelques-uns sont presque à
angle droit. Fn chacun de ces coudes, on a eu soin
d'élargir le canal pour permettre aux navires de:
les franchir plus facilement. On estime que le pas-
sage complet exigera de dix à douze heures, dont
{rois pour les écluses.
En ce qui concerne l’excavation du canal, on
TRACÉ DU CANAL DE PANAMA.
pense que le total des déblais ne sera pas inférieur
à 153 millions de mètres cubes, dont 69 millions
pour la Culebra. Ce chiffre pourtant sera sans
doute dépassé, parce qu'il se produit fréquemment
des glissements de terrain qui occasionnent des
travaux supplémentaires de déblaiement. Pour
rendre ces glissements moins dangereux, on sera
obligé de raser sur une certaine hauteur le sommet
des collines qui avoisinent le canal.
Écluses. — Les écluses méritent certainement
une mention particulière parce qu'elles sont de
dimensions colossales et qu’elles ont été construites
avec un soin extrême dans le but d’écarter toute
chance d’accident. Comme nous l'avons dit ci-
‘dessus, chaque écluse est double, l’une servant à
la montée et l’autre à la descente. La longueur de
chaque bief entre les portes d'amont et d'aval est
de 300 mètres, mais comme il y a beaucoup de
navires dont la longueur ne dépasse pas 180 mètres,
on a disposé dans chaque écluse une porte inter-
608
médiaire qui permet de la partager en deux biefs,
l’un de 180, l’autre de 120 mètres; on économisera
ainsi l’eau nécessaire au passage. La largeur est
de 33 mètres et la profondeur de 12 mètres. Les
deux écluses jumelles sont séparées par un mur de
25 mètres de hauteur sur 18 d'épaisseur.
La hauteur des vantaux des portes varie entre
44 mètres et 24 mètres; la largeur est de 20 mètres
et l'épaisseur de 2,1 m au centre. Le poids d’un
vantail varie de 300 à 600 tonnes. Inutile d'ajouter
que pour remuer des masses pareilles on emploie
l'électricité. En outre, pour faciliter le mouvement
de ces vantaux, on a donné à leur partie inférieure
la forme d'une caisse étanche remplie d'air. La
dimension de cette caisse est telle que le vantail
est en équilibre sur l'eau. Quand la porte est fermée,
on introduit de l’eau dans la partie supérieure des
vantaux qui s’enfoncent alors et viennent reposer
sur le fond de l’écluse, ce qui assure l'étanchéité
du fond.
Comme ilest de la plus haute importance d'éviter
tout accident, on a imaginé toute une série de
dispositifs pour protéger les portes contre les
chocs.
En premier lieu, le mur qui sépare les deux
écluses accolées est prolongé sur une longueur de
300 mètres en amont et en aval des portes extrêmes.
Tout navire avant de franchir l'écluse doit s'arrêter
près de ce mur. À partir de ce moment, le navire
ne doit plus progresser par ses propres moyens,
mais il est pris à la remorque par des locomotives
électriques circulant des deux côtés de l’écluse sur
Expériences sismologiques
On sait le rôle considérable que les Japonais
ont su donner à l’expérimentation en sismologie,
et leur table à chocs, destinée à produire sur des
matériaux divers et même sur des éléments de
constructions les effets de tremblements de terre
artificiels, a rendu et rendra sans doute encore les
plus grands services à l'étude des effets des
sismes naturels sur les édifices, en un mot servira
aux progrès de l’art de construire dans les pays
à tremblements de terre. Ce n'est cependant pas
d'aujourd'hui (Vil novi sub sole) que des expé-
riences ont été instituées pour l'étude des tremble-
ments de terre, et dès le vi siècle de notre ère,
sous Justinien, vers 550 ou 560, nous trouvons
qu'un philosophe byzantin avait cherché à produire
artificiellement ces phénomènes.
Il ne sera pas sans intérêt de lire le curieux récit
qui se rencontie dans Agathias le Scholaslique,
l'historien du règne du célèbre empereur Justinien
et son contemporain (Agatiæœ Scholastici de Im-
perio et Rebus gestis Justiniani Imperatoris libri
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
des voies à crémaillères. Le nombre de ces locomo-
tives varie naturellement suivant le tonnage des
navires. On estime qu'il en faudra douze pour un
paquebot de la taille de Olympic.
On a prévu le cas où, par suite d’une fausse
manœuvre, le navire ne s’arrêterait pas avant de
franchir l’écluse et continuerait à s’avancer, de
manière à rendre un choc inévitable ; pour obtenir
l'arrêt du navire, on a disposé à une trentaine de
mètres en avant de la porte une chaine dont les
deux extrémités sont fixées à des freins hydrau-
liques puissants encastrés dans les murs latéraux.
Cette chaine, en temps normal, repose sur le fond
du bief, mais, en cas de danger, elle peut ètre
relevée instantanément et barrer la route au navire
qu’elle force ainsi à s'arrêter.
Dans chaque groupe d’écluses, c’est évidemment
l’écluse la plus élevée qui est la plus importante
et qui doit être protégée avec le plus de soins.
A cet effet, on a placé une double porte à chaque
extrémité de cette écluse, de sorte que, si un acci-
dent arrive à la première porte, la seconde assu-
rera la retenue de l’eau.
Comme nous l’avons dit en commençant, tous
ces travaux sont assez avancés pour qu’on puisse
en apercevoir la fin. On ne saurait toutefois fixer
une date précise, parce que des accidents imprévus
sont toujours à craindre. Si tout se passe norma-
lement, les ingénieurs espèrent que l’inauguration
du canal pourra avoir lieu au mois d'août 1913.
Lt-C! JEANNEL.
sous l’empereur Justinien.
quinque. Venetiis. MDCCXXIX, 1. V, p. 4104-106).
Ce document est, à bien des titres, fort intéressant.
A cette époque régnaient sur les tremblements de
terre, et sans conteste, les théories d'Aristote,
d'après lesquelles ces phénomènes sont dus à des
vents déchainés dans les cavernes souterraines,
à des espèces d'explosions ou de tempêtes hypo-
thétiques. Ces théories ont traversé victorieusement
tout le moyen âge; elles n'ont même pas encore
désarmé, et si elles ont changé de vètement, elles
nous restent sous la forme des théories sismicovol-
caniques et de quelques autres analogues dont les
partisans ou les inventeurs du xx° siècle ne veulent
pas se rendre à l'évidence des observations qui en
démontrent le peu de bien fondé.
Quoi qu’il en soit, les réflexions dont Agathias
fait suivre la description de ces expériences sont
pleines de bon sens lorsqu'il nie qu'on puisse en
déduire que la nature se conforme à ces procédés
artificiels dans la production des tremblements de
terre. Et cependant Agathias partageait les idées
N° 1453
de son temps, c'est-à-dire celles d’Aristote, et ces
expériences mêmes semblent avoir été destinées
à imiter l'hypothétique procédé naturel, car on
peut négliger le caractère épisodique du document.
On sait aussi que le colonel de Rochas a autre-
fois exhumé d'anciens textes d’où il ressort que les
physiciens de l'antiquité connaissaient la machine
à vapeur, quoiqu'ils ne semblent pas en avoir tiré
d’applications industrielles. Le récit d’Agathias
confirme les résultats obtenus par ce savant oflicier.
«..... I y avait à Byzance (i) un certain Zénon,
inscrit au ròle des rhéteurs, d'ailleurs homme
fameux et très familier de l'empereur. Il habitait
auprès d’Anthémius; aussi les voyait-on souvent
réunis dans le domicile de l’un ou de l’autre et
comme renfermés dans les bornes d'une mème et
unique propriété. Mais, avec le temps, survint entre
eux quelque dispute et même de la haine, soit à la
suite de regards indiscrets, ce qui peut-être n'avait
pas lieu au début, soil parce qu’un nouvel édifice,
monté à trop grande hauteur, faisait obstacle à la
lumière, soit par tout autre motif, ainsi qu'il doit
se produire des querelles entre voisins. Ne pouvant
lutter à armes égales sur le terrain des fortes
paroles et de l’éloquence, un art qu'il ignorait,
Anthémius voulut se dédommager de ses ennuis.
L’habitation de Zénon était haute, très vaste et
artistement ornée; il avait coutume de s'y tenir
souvent et d'y convier ses meilleurs amis à des
festins. Les pièces basses non seulement étaient
contiguës à la maison d'Anthémius, mais en fai-
saient pour ainsi dire partie, de sorte qu'une même
toiture intermédiaire s’étendait du haut de l’une
vers la base de l’autre. Ce fut là que dans plusieurs
pièces de sa propre maison Anthémius disposa de
grands chaudrons remplis d’eau, dont il ferma
hermétiquement le tour extérieur au moyen de
larges pièces de cu:ir, qui se prolongeaient d’abord
en forme de tuyaux, puis en forme de tubes plus
étroits, dont il fixa les extrémités aux poutres et
aux solives en les y accrochant soigneusement. De
la sorte, toute vapeur tendant naturellement à
s'élever par ces tubes serait poussée d’un libre élan
vers le haut et se trouverait amenée jusqu'au fai-
tage de la toiture auquel ils atteignaient, sans
pouvoir fuir ni s'épandre au dehors. Les choses
ainsi disposées en cachette, Anthémius alluma un
grand feu sous les chaudrons et en aviva la flamme.
Aussitòt que leau fut échauffée et se fut mise
à bouillonner avec violence, la vapeur produite
s'éleva rapidement, et, n'ayant pas d'autre issue que
les tubes, elle s'en vint choquer contre les pièces
de charpente de la toiture qu'elle mit en état de
commotion en les faisant trembler et craquer,
sans que personne püt en deviner la cause. Les
convives de Zénon, saisis de crainte et de terreur,
(1) La traduction n’est pas absolument littérale,
quoique fidèle.
COSMOS
609
s’enfuirent à la rue, implorant le ciel et poussant
des cris, tant ils étaient frappés de l’imminence du
péril, Anthémius se rendit en hâte au palais de
Zénon et, les interrogeant sur ce qu'ils avaient
senti du tremblement de terre, leur demandait
s’il leur en était résulté quelque détriment. Il les
consola de bonnes et amicales paroles dans ces
circonstances malheureuses, mais il ne put insister
trop longtemps de crainte de se découvrir à des
personnes qui n'auraient pas longtemps tardé
à l’accuser lui-même. Il avait donc reproduit arti-
{iciellement les arguments de ceux qui attribuent
les tremblements de terre à des exhalaisons ou
à des explosions gazeuses, et il avait employé tout
son art à imiter la nature. Mais si ces choses me
- paraissent ingénieuses elinventées avec adresse, en
aucune façon ce ne sont d'évidentes démonstrations
de ce qu'il en est réellement... D'ailleurs, quoique
ces expériences ne doivent pas ètre considérées
comme méprisables ou impropres, il n’en faut pas
moins chercher quelques autres causes des fléaux
terrestres, si toutefois il convient de le faire. An-
thémius n’ourdit pas que cette seule machination
contre Zénon, mais encore il lui déchaina des
éclairs et des tonnerres..…. (Les expériences à ce
sujel sont trop puériles pour qu'il vaille la peine
de les rapporter.....) Ce fut au point que Zénon,
ayant fini par se rendre comple avec chagrin d’où
lui venaient toutes ces choses singulières, vint se
jeter publiquement aux pieds de l'empereur pour
accuser Anthémius de méchanceté et de scéléra-
tesse, en déployant toutes les grâces et l'élégance
de sa parole pour justifier son courroux. Faisant
allusion à ses souvenirs poétiques, il proclama iro-
niquement devant le Senat qu'il lui était impossible
de lutter à armeségales contre Jupiter tonnantetdis-
pensateur de la foudre, ni contre Neptune fauteur
des tremblements de terre. Ces applications de l'art
sont aussi louables qu’intéressantes, mais il n'est
cependant pas forcé que la nalure les imite ou les
reproduise. Quelque opinion qu’on en veuille avoir,
il ne m'en faul pas moins revenir à ma narration
antérieure... »
A cela ne se bornent pas les enseignements que
l’on peut tirer de l'histoire de Juslinien par
Agathias le Scholastique. Séjournant à Alexandrie
pour y subir des épreuves de jurisprudence, dit-il,
on y ressenlit, mais déjà fort atténué, le tremble-
ment de terre qui détruisit Béryte (Beyrouth)
en 551. Il fait alors très judicieusement observer
que, pour être sans importance réelle, cet événe-
ment n'en était pas moins fächeux, parce que les
édifices une fois ébranlés seraient plus tard une
plus facile proie pour les secousses de l’avenir. Or,
justement l'étude détaillée des grands tremble-
ments de terre modernes a montré de la plus claire
façon combien les dégâts sont augmentés quand
on n'a pas eu le soin de réparer les avaries dues
610
à des sismes antérieurs, pour insignifiantes qu'elles
aient été.
Les briques cuites au soleil sont de tempsimmémo-
vial un des plus communs matériaux de construction
dans les pays d'Orient, et il semble qu’elles aient élé
employées pour ériger la tour de Babel. Elles ont
suivi la civilisation arabe vers l'Ouest, et avec les
Espagnols elles prédominent encore dans les répu-
bliques hispano-américaines, et l’on professe ici
assez généralement celte opinion erronée qu’elles
résistent bien aux tremblements de terre. Ce n'est
pas le lieu d'exposer les circonstances qui ont
donné occasion à cette erreur d’appréciation, mais
COSMOS
98 NOVEMBRE 1912
il est piquant de lire qu'Agathias la condamnait
déjà. Se rendant, en effet, par mer d’Alexandrie
à Constantinople, il s'arrêta à l'ile de Cos, qui
venait d’être ravagée par un tremblement de terre
en 554. Après avoir décrit de la façon la plus pré-
cise, presque scientifique même, l’aspect lamentable
des décombres de la capitale, il ajoute (/.c., p.38):
Les édifices construits, comme il convient, de
pierre et de chaux, ou même de matériaux plus
solides et plus durables, ne résistèrent pas mieux
que les petites habitations élevées par la méthode
agreste de briques non cuites et d'argile.
DE MonNTEssus DE BALLORE.
Piocheur-pulvériseur automoteur Chouchak.
La motoculture ne comporte pas seulement des’
machines puissantes destinées aux labours profonds;
* elle commence également à mettre en service des
engins moins lourds répondant à des besoins
autres, non moins impérieux, comme le travail,
superficiel du sol dans les plantations en ligne. Un:
agronome russe, M. Dimitry Chouchak, vient de
faire construire dans les aleliers de M. Bajac, à
= PÉIRAI EEE
Liancourt (Oise), une machine de ce genre que
représente notre gravure.
L'appareillage est porté par un châssis automo-
bile muni de trois roues; les deux roues avant
sont motrices et celle d’arrière est directrice. A
l'arrière, ce châssis est relevé en arc de cercle pour
laisser une place au tambour. Le siège du conduc-
teur prolonge ce châssis qui porte la tige de direc-
PIOCHEUR-PULVÉRISEUR CHOUCHAK.
tion sur laquelle est calé le volant de manœuvre,
A l'avant est placé le moteur de 8-9 chevaux et le
radiateur circulaire.
Le moteur actionne, par l'intermédiaire d'un
embrayage à friction, un changement de vitesse
renfermé dans un carter à bain d'huile. L'arbre
transversal transmet son mouvement à un arbre
intermédiaire qui commande, par l’une de ses
extrémités, l'essieu moteur et par lautre l'arbre
du système piocheur. Cette dernière commande
étant facultative est supprimée lorsque l'appareil
doit simplement se déplacer sans effectuer aucun
travail.
Le système piocheur comporte un châssis rigide
articulé sur l'arrière des coussinets de l'arbre in-
termédiaire, les têtes d’articulation permettant de
tendre à volonté la chaîne de commande. Ce châssis
porte un arbre transversal sur lequel sont calées
six pioches rotatives constituées chacune par quatre
bandes d'acier fixées à demeure sur un croisillon
Ne 1153
et quatre raclettes mobiles rappelées par des res-
sorts. À chaque tour, en un point convenablement
déterminé, et sous la poussée d'un doigt qui heurte
un butoir fixé sur le cadre, ces raclettes sont
poussées en arrière et rappelées ensuite par leurs
ressorts. Ce mouvement a pour effet de projeter
vers l'arrière de la machine, en la pulvérisant, la
terre détachée par la pioche.
L'ensemble du système piocheur peut se relever
et se régler à volonté en profondeur au moyen
d'une commande à vis à pas rapide placée à portée
de la main du conducteur. La vitesse d'avancement
des roues motrices étant de 2 kilomètres par heure
COSMOS
611
tandis que celle dés pioches, à la pointe, est de
8 km : h, on voit que chaque pioche, à son pas-
sage, détache une certaine quantité de terre et que
la résistance due à ce travail agit dans un sens
favorable à l'avancement du véhicule. |
Le travail exécuté par cette piocheuse atteint au
maximum une profondeur de 10 centimètres sur
une largeur de 1,08 m. La couche superficielle du
sol est complètement divisée et pulvérisée. Les
vilesses sont à volonté et selon la profondeur at-
teinte de 2, 4 et même 8 kilomètres par heure. La
piocheuse pèse 800 kilogrammes environ, en ordre
de marche. L. F.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 18 novembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Élection. — M. Iuseaux est élu Correspondant
pour la section d'économie rurale par 33 suffrages sur
49 exprimés, en remplacement de Æ. Arloing, décédé.
La chaleur spécifique des corps à basse
température. — Des recherches récentes ont
montré que tous les corps s'écartent à basse tempé-
rature de la loi indiquée par Dulong et Petit, d’après
laquelle la chaleur spécifique atomique des éléments
solides et liquides est égale à 6 environ. En effet, la
chaleur spécifique diminue très rapidement au voisi-
nage de — 200° et semble devenir nulle au zéro absolu.
Einstein a essayé de rendre compte de cette diminu-
tion par une théorie qui se rattache à celle du rayon-
nement; M. Jacques Duccaux indique une autre cause
possible.
Les éléments qui, à la température ordinaire,
S’écartent le plus de la loi de Dulong et Petit, sont le
carbone (chaleur atomique du diamant 1,35, du gra-
phite 1,92), le bore (3,3) et le silicium (4,7). Or, ces
éléments, et particulièrement le diamant, sont ceux
que les chimistes considèrent comme étant le plus
fortement polymérisés. On peut étendre cette remarque
aux corps composés, et se demander s’il n’y a pas là
un fait général, et si la diminution de la chaleur spé-
cifique à basse température ne peut pas être due sim-
plement à une polymérisation de plus en plus avancée.
Éveil tardif des centres bulbaires. — Lors-
qu'un nouveau-né ne respire pas aussitôt après la
naissance, on éveille ses centres respiratoires bul-
baires au moyen d'aspersions froides de la face, dont
le nerf {rijjumeau transmet l'excitation au bulbe. C'est
Ce qu'on fait également pour la syncope des centres
Cardiaques. On peut aussi exciter la muqueuse nasale
par l'éther, l'ammoniaque, l'iodure d'éthyle, le
datura, etc., et faire ainsi cesser divers désarrois bul-
baires, asthme, ébriété, palpitalions, vertiges.
Üne cautérisation infiniment légère de la muqueuse
nasale, suivant la méthode pratiquée par M. PIERRE
BoxxiEr, peut servir à éveiller tous les centres bul-
baires et à mettre ainsi en branle ou à rectifier un
très grand nombre de fonctions.
L'auteur a ainsi guéri complètement une fillette
àägée de douze jours qui n'avait encore pu téter ni
boire correctement et était, par inanition, descendue
à la moitié de son poids initial.
Les sphincters sont quelquefois réglés tardivement ;.
d'où les incontinences fécales et urinaires; ce procédé
permet de les résoudre souvent en une séance, même
chez l'idiot, le myxædémateux ou l’épileptique.
On peut également éveiller ou réveiller les centres
qui président aux diverses sécrétions externes ou
internes. C'est ainsi qu'on peut, chez le nourrisson,
faire disparaitre l'intolérance digestive à l'égard de
certains laits, ou plus tard, chez l'enfant et chez
l'adulte, vis-à-vis de certaines espèces alimentaires.
De même pour les sécrétions internes qui servent
à la croissance, au développement intellectuel et
physique.
Les lois du travail professionnel. — Les
études physiologiques se poursuivent avec ardeur
depuis plus de vingt ans pour approfondir la science
du moteur humain; de nombreux instruments ont
été imaginés pour en saisir toutes les phases.
M. Jeres Asar s'est livré à des expériences sur l'art du
limeur. Grâce à la relation quantitative entre l’oxygène
consommé par l'ouvrier et sa dépense d'énergie,
gràce à l'emploi des procédés graphiques de Marey,
on peut évaluer les efforts musculaires, le travail
utile et la dépense énergétique correspondante. Faisant
varier ensuite chaque élément du travail, sa vitesse, sa
durée totale, les attitudes de l'ouvrier, la forme et les
dimensions de l'outil, on a cherché les conditions du
travail maximum. De cette étude, M. Amar a pu con-
clure le mode de travail le plus favorable quant au
rendement, à la moindre fatigue, à l'hygiène. Il
indique quelle doit être la position du corps de
l'ouvrier, avec quelle vitesse il doit poursuivre son
travail, etc., pour obtenir un rendement maximum
avec un minimum de fatigue.
De l’inoculation intraveineuse des bacilles
typhiques morts à homme. — MM. Cua, NicoLLE,
A. Coxon et E. Conseiz, qui ont immunisé plusieurs
612
sujets contre la dysenterie par inoculation veineuse
de microbes lavés, bieu isolés par des centrifugations
successives et en suspension dans une quantité notable
d'eau physiologique, ont étendu leur méthode au
bacille typhique, mais avec cette différence qu'ils
n'emploient ici, par surcroit de précaution, que des
cultures mortes.
Les bacilles sont tués par un chauffage de trente
minutes à 52°, lavés et émulsionnés en eau physiolo-
gique, de telle sorte qu'une goutte du produit repré-
sente 400 millions de microbes.
Soixante personnes de la Régence de Tunis ont reçu
deux inoculations, pratiquées à quinze jours g'in-
tervalle: la première d'une goutte, diluée dans l’eau
physiologique, la seconde de trois gouttes.
La production des anticorps est notable et immé-
diate. Le procédé est remarquable par l'absence de
réaction et de douleurs locales.
A la suite de ces essais, les auteurs ont créé un
service public de vaccinations antityphoïdiques, basé
sur cette méthode (cultures mortes); il fonctionne
régulièrement à l’Institut Pasteur de Tunis.
Sur la polyvalence des sérums antity-
phiques. — Les auteurs qui se sont occupés de pré-
parer des sérums antityphiques au cours de ces der-
nières années tendent à utiliser, pour l’immunisalion
des animaux producteurs d’anticorps, des races de
bacilles d'Eberth de provenances diverses mélangées
à des souches différentes de bacilles paratyphiques,
attachant une importance de plus en plus grande à la
polyvalence des sérums ainsi obtenus.
MM. AUGrsTE LUMIÈRE et JEAN CHEVROTIER ont voulu
élargir cette idée de polyvalence en ne la limitant pas
aux seules races de bacilles d’Eberth et de paraty-
phique et en y comprenant encore le bacille Coli.
Ils ont bien vérifié, sur des animaux, que dans le
sérum complexe les propriétés antilosiques se rap-
portant à chacune des espèces microbiennes se ren-
contrent rigoureusement réunies.
Ils poursuivent l'étude en ce qui regarde tout
d'abord les bacilles de Lôfller, le streptocoque et le
staphylocoque associés, et comptent étendre ensuite
leur expérimentation aux infections mixtes les plus
diverses,
Etude et mensurations de 100 vagabonds
francais. — MM. A. Mane et L. Mac-Auirre ont
étudié les mensurations de 100 vagabonds d'après les
documents du service anthropométrique de la Pré-
fecture de police, et ils les ont classés par région et
par types.
L'étude morphologique de ces individus permet de
les considérer dans leur ensemble comme ayant eu
un développement physique irrégulier, 53 d'entre eux
sont des types absolument indécis, 7 étaient des céré-
braux tres déformés, porteurs d'asymétries considé-
raules et quelques-uns microcéphales; 37 peuvent être
rangés parmi les musculaires; mais chez ceux-ci,
l'étude des segments des membres révèle des allonge-
ments ou des raccourcissements monstrueux, ? étaient
des digestifs, I seul respiratoire.
Sur 100, 12 étaient macrocéphales, 4 microcéphales.
99 présentaient de l'asymétrie faciale, 49 avaient les
yeux bleus ou à peine piquetés de jaune, 19 seulement
présentaient un iris de couleur foncée allant du
COSMOS
98 NOVEMBRE 191%
marron en cercle au marron absolu; les cheveux ont
été trouvés chätains 73 fois et blonds 22 fois, 2 étaient
roux, 2 seulement étaient porteurs de cheveux noirs.
Fait très curieux sur cet ensemble de 100 individus
(dont plus des trois quarts avaient entre trente et cin-
quante-neuf ans) 5 seulement avaient les cheveux gris.
Ces mensurations n’ont révélé aucune caractéris-
tique véritable.
Tremblements de terre d’origine épirogé-
nique problable dans le Michigan et le Wis-
consin. — Le Michigan et le Wisconsin sont le
théàtre de rares et faibles tremblements de terre. Les
ingénieurs du pays considèrent les sismes en ques-
tion comme dus aux Airblasts, ou Bergschlæge, fré-
quents dans cette région minière. Ce seraient des
tremblements de terre d’origine artificielle, causés par
l'exploitation mème des mines. M. pe MoxTEssts LE
BaLLonE estime que cette explication est inadmissible.
Écartant l'hypothèse de l'exploitation des mines et celle
de l’origine tectonique. il pense qu'il ne reste qu'une
explication possible, celle d'une relation avec les
simples mouvements épirogéniques dont la région a
été le théàtre pendant la période glaciaire.
Sur la migration verticale des animaux
bathypélagiques. — Au cours des deux dernières
croisières scientifiques de S. A. S. le prince de Mo-
naco à bord de son yacht Hirondelle, M. BounÉE a
procédé, avec le filet de remorque de son invention,
à des séries de pêches faites de jour et de nuit à des
profondeurs semblables.
Il a été amené à la curieuse constatation que de
nombreux animaux, et notamment des poissons dont
l'habitat normal pendant le jour est situé à une profon-
deur dépassant {'OUU mètres, montent pendant la nuit
à une faible distance de la surface. On voit donc qu’en
l'espace de quelques heures ces ètres peuvent subir
une variation de pression d'une centaine de kilo-
grammes au moins par centimètre carré et passer
de la température de 6° environ à celle de 17° et méme
plus. Cette dernière constatation contredit la croyance
assez généralement répandue qui veut que les ani-
maux de chaque espèce vivent à des températures à
peu près constantes.
Les animaux qui obéissent à cette migration verti-
cale semblent ètre spécialement ceux à organes lumi-
neux. On sait par les dernières recherches que cer-
tains rayons du spectre solaire peuvent ètre décelés
jusqu’à la profondeur de 1000 mètres dans l'eau. Il
semble que, la nuit venue, les animaux lumineux
des couches plus basses remontent dans la zone de-
venue obscure pour y chercher leur alimentation en
attirant leurs proies gräce à la phosphorescence qu'ils
émettent. N'est-ce pas de la sorte et pour des raisons
analogues que certains pêcheurs attendent la nuit
pour pratiquer l'opération si destructive de la pêche
au feu?
Dugastella marocana, crevette primitive nouvelle
de la famille des Atyidés. Note de M. E.-L. Bouvtæn.
— Sur quelques généralisations des théorèmes de
M. Picard. Note de M. Pauz MonTeL. — Sur les inva-
riants du calcul des variations. Note de M. Tas. ps
Doper. — Le principe de relativité et la loi de varia-
tion des forces centrales. Note de M. LÉmERAY. — Sur
Ne 1453
un galvanomètre amorti à aimant mobile. Note de
M. Cu. FéÉny; le perfectionnement apporté par l'au-
teur donne une grande sensibilité à l'instrument. —
Nouveau réactif du chlore et du brome libres et com-
binés. Note de MM. G. Dexicës et L. CHELLE ; ce réactif
est d'un emploi très rapide et d’une sensibilité ex-
trème ; en quelques minutes, par son emploi, on a pu
constater que l’eau du bassin d'Arcachon renferme,
à l’état de bromure, 0,060 g de brome par litre; celle
du Fayet-Saint-Gervais, 0,014 g; celle de Chätel-Guyon
(Gubler), 0,006 g; celle de la Bourboule (Choussv),
0,004 g. — Éthers-sels dérivés des cyclanols et des
acides forméniques. Note de MM. J.-B. SeXpERENS et
JEAN ABouLENC. — Sur la photolyse du saccharose par
les rayons ultra-violets. Note de MM. Danigz BERTHELOT
et HENRI GauorcHon, — Transformation d'un alcool
en sulfure ou en peroxyde, au moyen de l'hydrogène
sulfuré ou de l’eau oxygénée. Note de M. R. Fosse. —
Sur quelques composés complexes du chlorure plati-
neux avec l'amino-acétal. Note de MM. J. TCHOUGAEFF
et B. ORELKINE. — Formation des chromosomes hété-
rotypiques chez le Polypodium vulgare L. Note de
M. R. oe LirTanDière. — Influence combinée de la
température et du milieu sur le développement du
Maucor Rourii. Note de M. Maurice DurANbARD. — Sur
la présence de la gentiopicrine dans la Swertie vivace.
Note de M. Marc Brivez. — Sur le rôle biochimique
des peroxydases dans la transformation de l'orcine en
orcéine. Note de M. J. Wor.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L'AVANCEMENT DES SCIENCES!)
Congrès de Nimes,
Zoologie, Anatomie, Physiologie.
Le président de cette section était M. Gaston Dar-
boux, professeur à la Faculté des sciences de Mar-
seille, fils du savant mathématicien.
M. Max. KoLLuann (Paris) présente un mémoire
1° sur les organes génitaux males des Lémuriens; 2° sur
les mitochondres de quelques épithéliums.
La mytiliculture en France. M. Henri MarcHaxn. —
Les choses ont empiré depuis 1890, où M. le professeur
Raphaïl Dubois, de Lyon, les signalait : 1 200 000 kilo-
grammes de moules vendues aux Halles sont d'origine
étrangère et 13500 d'origine française !
Pour arriver à contre-balancer la concurrence étran-
gère il conviendrait : 1° de confier le choix des empila-
cements des parcs à des spécialistes; 2° d'établir une
carte océanographique de toutes nos côtes; 3° de créer,
à Tamaris, par exemple, un parc modèle, et de faire
là une série de conférences auxquelles seraient conviés
les marins de la flotte; 4° d'assurer par une surveil-
lance effective le respect de la propriété des parcs;
5 d'étudier toutes les circonstances susceptibles de
polluer ou de contaminer les parcs; 6° enfin, de pré-
voir une ṣérie d'améliorations décrites dans le mémoire
de M. Marchand. Ces parcs pourraient encore rendre
(4) Suite, voir p. 585.
COSMOS
643
de signalés services à la spongiculture et à l’ostréi-
culture.
M. le D'R. JEANxEL indique et décrit la Faune des
hautes montagnes de l'Afrique orientale. — Plusieurs
centaines de mille individus animaux invertébrés
et un millier d'échantillons botaniques, ont été rap-
portés pour le Muséum par l’auteur. On y trouvera un
grand nombre de formes nouvelles.
M. Jacques PsiLiecuin. Les vertébrés des eaux
douces du Maroc. — Ce pays possède dans la famille
des Cyprinidés un nombre relativement élevé d'espèces
particulières d'un genre largement représenté en
Europe, le genre barbeau ; par contre, la présence de
poissons comme la truite et toutes les formes ana-
dromes et catadromes communes à ses eaux et aux
nôtres, contribuent à donner à l’ensemble de sa faune
ichtyologique un facies européen très prononcé.
Recherches sur la croissance de la sardine (Clupea
pilchardus Walb). — M. Louis Face (Banyuls-sur-
Mer) arrive à conclure dans ce travail que cette Clupe
peut atteindre, au moins dans l'océan, sa septième ou
sa huitième année. Par ce caractère, la sardine avec
le sprat qui vit six ou sept ans et le hareng qui
atteint facilement sa douzième année, s'opposent
aussi à l'anchois, dont on ne connait encore pas d'in-
dividu ayant dépassé sa troisième année. Une crois-
sance lente semble donc, dans ce cas, ètre en rap-
port avec une longévité plus grande. C'est ainsi que
les caractéristiques biologiques viennent à l'appui des
caractères morphologiques qui ont engagé les auteurs
à séparer les £Engarulideæ des Clupeidre.
Distribution géographique de rertaines larres (Ülu-
riennes)des poissons apodes. — L'étude de M. le D' Louis
RouLE (Paris) le conduit aux résultats suivants comme
conclusions :
4° La ponte des apodes générateurs de larves tilu-
riennes (qui sont sans doute des ophychyidés) s'ac-
complit à proximité et au-dessus des grandes profon-
deurs (zone mésoabyssale au-dessous du niveau
franchement pélagial).
2° Les espèces de ces générateurs habitent la Médi-
terranée et l'océan Atlantique : elles font partie de la
faune commune aux deux mers.
3° Les dates de reproduction et celles du dévelop-
pement embryonnaire sont en avance dans la Méditer-
ranée et les parties chaudes de l'Atlantique, par
rapport aux régions océaniques, plus froides, ainsi
que cela se remarque chez plusieurs autres espèces
de poissons.
Notes sur les migrations des Chiroptères. M. Albert
HuGves (Saint-Genies-de-Malgoirès, Gard). — Il semble
résulter des observations de l'auteur faites dans deux
grottes du département des Bouches-du-Rhône et
dans une vingtaine de celles du Gard que les chauves-
souris, plus particulièrement abondantes dans ces
grottes du 1» octobre au 15 décembre, deviennent
rares et méme introuvables par la suite, pour ne repa-
raitre qu'au mois de mars. L'auteur signale, pour les
quelques espèces et pour la petite région qu'il a pu
observer, les dates qui lui paraissent ètre les époques
les plus actives des passages, des déplacements ou
des migrations.
61:
Observations sur la faune cécidologique de Provence.
M. Jules Corre (Marseille). — Le catalogue de ces
cécidies comprend 750 galles dont beaucoup sont
nouvelles : la liste des cécidozoaires a été accrue de
dix-huit espèces qui ont permis la création de deux
genres nouveaux de microlépidoptères. L'auteur
indique, dans son mémoire, quels sont, parmi les
-cécidozoaires recueillis, ceux qui aident à donner à la
faune provençale sòn caractère méditerranéen.
M. Paul Paris. 1° Un cas de myase intestinale. —
Des cas analogues chez l'homme ne sont pas rares :
les espèces de diptères dont les larves peuvent para-
siter notre tube digestif sont nombreuses : Anfhomya, `
Pogomya vivant aux dépens des végétaux; le Driso-
phila melanogastra vivant dans la crème aigrie; le
Piophila casei du fromage ; le Teichomyra fusca
des urinoirs et des lieux d'aisance sont les espèces
les plus fréquemment observées. Un cas spécial chez
Thomme est signalé dans le mémoire.
2° Curieux cas de tératologie chez une grenouille. —
La voùte palatine portait en son milieu un œil normal
de dimension et d’aspect, dont les bords étaient en
continuité absolue avec la muqueuse buccale.
MM. Macxan et J. Le LaniBoisiÈère. 1° Nouvelles re-
cherches sur la densité des poissons. — Ces recherches
COSMOS
LA
28 NOVEMBRE 1912
ont porté sur 72 espèces’; on peut les diviser en deux
groupes :
1° Ceux dont la densité est inférieure à 1.
2 Ceux dont la densité est supérieure à 1. Dans le
premier se placent seulement des poissons d’eau
douce; les poissons marins sont toujours plus lourds
que leur milieu, l’eau de mer.
Les poissons plats vivant au fond de la mer ont
toujours une densité très supérieure à leur milieu.
2 Nombre de myotomes chez les poissons. — Ce sont
les squalides qui ont le plus de myotomes et les acan-
thoptérigiens qui en ont le moins.
La conclusion de ce travail est la suivante:
Chez les poissons, le nombre des myotomes croit
avec la rapidité de l'animal et décroit au fur et à
mesure que la souplesse du corps diminue. De plus,
le nombre de ces myotomes est sensiblement le même
chez des espèces à vitesse ou rigidité identiques.
Le poids des muscles pectoraux et le poids du cœur
chez les animaux, M. A. MAGNAN, — Le poids du cœur
. est directement en rapport avec le poids des muscles
pectoraux. Pour les planeurs, l’effort fait pour voler
est petit, le cœur l’est également. Pour les rameurs,
le cœur est très développé.
(A suivre.) E. HÉRICHARD.
BIBLIOGRAPHIE
La géographie humaine. Essai de classification
positive. Principes et exemples, par JEAN
BRUNES, professeur de géographie humaine au
Collège de France, professeur honoraire de géo-.
graphie aux Universités de Fribourg et de Lau-
sanne. 2e édition, revue et augmentée, avec
272 gravures et cartes dans le texte ou hors
texte. Un fort vol. grand in-8° de xv-802 pages
(20 fr). Librairie Félix Alcan, Paris.
Le Cosmos a eu l’occasion, lors de la première
édition de cette œuvre, de dire longuement tout le
bien qu'il en pensait (Voir Cosmos, n° 4374 du 27-
mai 4911, p. 574). Nous ne sommes pas étonnés
de voir au bout d’un an et demi seulement paraitre
une deuxième édition. Unique en son genre,
capitale par sa maitrise el sa portée, la Géographie
humaine de M. Jean Brunhes, dont nous saluons
ici la récente nomination au Collège de France,
s'est assurée une place dans toutes les bibliothèques
sérieuses. Les développements nouveaux introduits
par l’auteur concernent surtout les relations entre
la géographie proprement dite et l'ethnographie,
c'est-à-dire que l’auteur y perfectionne celles de
ses idées personnelles qui avaient le plus intéressé
le monde savant.
Fisica medica (fisiologia, clinica, terapia),
par le professeur C. P. Gocaia (8,50 lires). Ulrico
Hœæpli, éditeur à Milan.
Ce manuel appartient à la collection Hæpli dont
l'éloge n'est plus à faire; mais pour nos lecteurs il
a une autre recommandation, le nom de son
auteur, dont ils connaissent par expérience la clarté
et le talent d'exposilion.
Il serait difficile de rendre compte en quelques
. lignes d'un ouvrage traitant de matières aussi
importantes résumées en 68 chapitres et environ
1 000 pages. Qu'il nous suffise de dire qu'il est très
complet et que les méthodes électriques qui se sont
introduites sous toutes les formes dans la théra-
peutique y tiennent une large place; les dernières
découvertes y sont l’objet de chapitres spéciaux.
Nous le recommandons à tous les étudiants en
médecine, et aussi à toutes les personnes curieuses
des choses de la science, qui connaissent la langue
italienne.
La théorie du navire, par M. BocRDELLE, ingé-
nieur principal de Ia marine, du cadre de
réserve. Deux vol. in-18 jésus, cartonnés toile,
formant 750 pages, avec 249 figures dans le
texte (10 fr). Librairie O. Doin et fils, 8, place
de l'Odéon.
La librairie Doin a déjà publié dans son Ency-
clopédie scientifique deux ouvrages: Constructions
navales, de M. Rougé, et Machines et chaudières
marines, de M. Drome; celui que nous signalons
aujourd'hui complète un ensemble sur l'état actuel
> de la science et de l'architecture navale. Nous
estimons que ce dernier ouvrage aurait dû prendre
le premier rang dans cette série.
Le premier volume de cette théorie des navires
Ne 1453
comprend l’étude géométrique et stalique des
navires et les méthodes pratiques de calcul des
carènes. |
Le second volume est relatif à l'étude de la
résistance des carènes, aux mouvements du roulis
et aux qualités nautiques.
Quoique l’auteur se soit efforcé de choisir les
démonstrations les plus simples parmi les plus
rigoureuses, de manière à faciliter dans la plus
grande mesure Ja lecture de l'ouvrage, nous devons
prévenir nos lecteurs que M. Bourdelle n'a pu
éviter dans bien des cas le domaine des mathéma-
tiques supérieures. Son livre s'adresse donc plutôt
aux spécialistes qu'au grand public.
Œuvres de Charles Hermite, publiées sous les
auspices de l’Académie des sciences, par Émire
Picard, membre de l'Institut, t. IHI. Volume de
iv-527 pages avec un portrait {18 fr). Librairie
Gauthier-Villars, Paris, 4942.
Les Mémoires ici reproduits vont de 1872 à 1880.
Ce volume commence toutefois par un travail iné-
dit Sur l'extension du théorème de Sturm à un
système d'équations simultanées, datant de la
jeunesse d’Hermite, retrouvé récemment dans les
papiers de Liouville. On lira aussi dans ce tome
divers chapitres empruntés au Cours d'analyse de
l'École polytechnique, une note publiée dans l’A[-
gèbre supérieure de Serret sur les équations réso-
lubles par radicaux, et enfin une lecon sur l’Équa-
tion de Lamé, faite à l'Ecole polytechnique pen-
dant l'hiver de 1872-1873, qui semble bien contenir
les premières recherches d'Hermile sur une question
qu’il devait approfondir quelques années plus tard.
Le portrait placé au commencement du volume
représente Hermite vers l’âge de soixante-cinq ans.
Annuaire du Bureau des longitudes pour
19138 (1,50 fr). Librairie Gauthier-Villars, Paris.
Cet annuaire, si précieux par le nombre des do-
euments qu'il contient, renferme pour cette année
4913, après les documents astronomiques, des
tableaux relatifs à la métrologie, aux monnaies, à
la géographie, à la stalistique et à la météorologie;
on sait que c’est la part réservée aux années de
millésime impair, les années paires contenant,
outre les documents astronomiques, communs à
toutes les éditions, les tableaux détaillés relatifs à
la physique et à la chimie.
Le volume se termine par d’intéressantes notices :
du commandant FERRÉ sur l'Application de la
télégraphie sans fil à l'envoi de l'heure, et de
M. Bicourpan sur l'Éclipse de Soleil du 17 avril
1912 (résumé des observalions qu’elle a permis
d'effectuer).
La pêche au bord de la mer, par L. JOUENNE et
J.-H. Perreau. Un vol. in-48 de 324 pages, illustré
COSMOS
615
de nombreuses photogravures (cartonné : 4 fr.).
Librairie J.-B. Baillière et fils, 49, rue Haute-
feuille, Paris.
La pêche au bord de la mer est un des plus
grands plaisirs qu'on puisse trouver pendant les
séjours annuels que tant de baigneurs vont faire
sur nos côtes françaises. Elle présente plus de
variété et plus d’attraits que la pêche en eau douce,
et chacun peut trouver, parmi les différents genres
de pêche, celui qui convient le mieux à ses goûts
et à son tempérament. Bien que, depuis quelques
années, se dessine chez nous un mouvement en
faveur de ce sport sain et captivant, nous sommes
encore loin d'égaler les Anglais, chez qui la pêche
en mer, surtout la pèche à la ligne, est pratiquée
avec passion.
C'est pour développer en France la pèche en eau
salée que les auteurs ont écrit cet ouvrage. Ces
deux fervents de la mer ont une grande connais-
sance et une longue pratique de la pèche. Aussi
trouvera-t-on dans ce livre des conseils prutiques
qui feront en peu de temps, de l'amateur le plus
inexpérimenté, un pêcheur très averti. À côté des
ines distractions de la vie active, l'hôte passager
de nos plages se passionnera à l'attrait imprévu
des choses de la mer.
Ajoutons aussi que le simple lecteur suivra
avec plaisir les descriptions remplies d'intérèt
des différents genres de pêche: pèche des grèves,
pêche de rocher, en bateau, dans les estuaires,
dans les ports; l'énumération des engins faciles
à se procurer, des amorces qui se trouvent sur le
bord mème de la mer, des poissons qu'on peut
prendre; et tout cela, joint aux sensations mul-
tiples éprouvées et racontées par les auteurs, aura
pour résultat de transformer à l'occasion de simples
baigneurs en pêcheurs convaincus.
Conférences sur la cinématographie, par
M. E. Kress, organisées par le Syndicat des
anteurs et gens de lettres. Librairie Charles
Mendel, 4418, rue d'Assas, Paris.
4 conférence: L'appareil de prise de vues
cinématographiques (0,75 fr).
5° conférence : La prise des vues cinéematogra-
phiques ; éclairages et couleurs (0,30 fr).
6° conférence: La décoration, le costume, le
maquillage (0,75 fr).
7° conférence : Trucs et illusions (0,30 fr).
8° conférence: Le geste et l'attitude: l'art
mimique au cinématographe (0,30 fr).
Ces conférences, très documentées, s'occupent
de la prise des vues; elles sont donc particulièrement
utiles aux fabricants de films, mettleurs en scène,
acteurs, à tous ceux qui désirent composer un
tableau à reproduire par la cinématographie.
———— —— 2 -c MMM
616
COSMOS
28 NOVEMBRE 1912
FORMULAIRE
Imperméabilisation du béton. — Obtenir un
béton imperméable est la préoccupation des con-
structeurs. Au sixième Congrès de l'Association
internationale pour l’essai des matériaux, qui s'est
tenu à New-York au mois de septembre, M.Grittner,
de Budapest, a fait connaitre que les produits offerts
par le commerce pour imperméabiliser le béton
sont peu satisfaisants. Deux procédés seulement
lui ont réussi :
4° La fluatation, c'est-à-dire le traitement super-
ficiel par des fluosilicates qui, en se décomposant
au contact du carbonate calcaire, donnent lieu à
des corps insolubles, comme la silice et le fluorure
de calcium, qui remplissent les pores du béton;
mais ce traitement exige beaucoup de travail;
2° L'emploi d'une solution de savon de potasse
(savon noir mou) à 8 pour 100, au lieu d’eau, pour
la préparation du béton, à condition d'employer
un dosage d'au moins 300 kilogrammes de ciment
par mètre cube de béton.
Au même Congrès, M. Gary a déclaré avoir fait
des essais sur vingt matières imperméabilisantes
diverses : au début, les résultats sont souvent
excellents, notamment avec le mortier à 5 pour 100
de savon de potasse et à 4-5 pour 100 d'huile lourde
en émulsion; mais toujours quand l'eau est par-
venue à passer, les produits ont perdu toute effica-
cité. Le meilleur moyen d’imperméabiliser le béton
est, selon lui, de le revêtir de plusieurs eaduits
successifs de ciment pur, puis de le badigeonner
au goudron.
Le Génie civil du 16 novembre nous apprend
que, à Paris, au laboratoire de l’École des ponts et
chaussées, on a de même reconnu que les produits
imperméabilisants du commerce, qui donnent par-
fois une étanchéité parfaite aux faibles pressions
(quelques décimètres d'eau), se laissent tous tra-
verser aux fortes pressions; et alors, généralement,
le mortier constitué avec eux devient plus per-
méable que celui qui ne les contient pas. Un béton
à forte dose de ciment, recouvert de goudron,
parait le mieux résoudre le problème de l'étan-
chéité à l’eau. Les enduits trop gras augmentent
peu l'étanchéité, car ils se fissurent par le retrait,
conséquence de leur dosage excessif en ciment, et
adhérent mal au bélon moins riche.
PETITE
H. O. V. E. — Nous complétons ici les renseigne-
ments qui vous ont été donnés dans le dernier numéro
à propos de l'extraction du tartre des lies de vin.
Vous trouverez un chapitre très documenté sur cette
question dans l'ouvrage les Dérivés tartriques du vin,
par M. P. Cares (4,90 fr). Librairie Mulo, 12, rue
Iautefeuille, Paris.
M. G. L., à D. — Pour la construction des cerfs-
volants, vous trouverez à la librairie aéronautique,
32, rue Madame, Paris, le Constructeur de cerfs-
tolants avec indications et plans, par Dunoucuer et
Paorcue, Il y a plusieurs séries : la première sur les
cerfs-volants simples (1,50 fr); nous croyons que
d'autres ont déjà paru. Voir aussi le livre de Leconntu :
les Cerfs-volants (3,50 fr), que vous trouverez à la
mème librairie. |
M. J. Z., à V. (Espagne). — Le fil servant à la con-
fection de la bobine primaire et de la bobine secon-
daire est le mème; d'ailleurs, vous avez dù trouver
dansle dernier numéro toutes les indications qui vous
manquaient pour constituer le montage en induction.
Dans celui-ci, vous aurez les renseignements voulus
pour recevoir les signaux de Norddeich.
M. L. R, à M. — Nous ne vous conseillons pas de
construire vous-méime un récepteur téléphonique: il
est bien plus simple d'en acheter un tout fait spécial
pour la T. S. F. Vous pouvez très bien en construire
un de $900 ohms de résistance avec lequel vous
entendrez beaucoup moins nettement qu'avec un
Simple appareil de bazar. La fabrication de ces récep-
CORRESPONDANCE
teurs trés sensibles est très délicate. — L'Élertricien,
librairie Dunod et Pinat, 49, quai des Grands-Augus-
tins, Paris (0,50 fr le numéro).
D' T., à C. — Le lessivage du tabac utilisé pour la
fabrication du « caporal doux » lui fait perdre environ
les deux tiers de sa nicotine. La teneur en nicotine du
tabac ordinaire variant entre 2,5 et 2,9 pour 100
{matières sèches), le caporal doux n’en contient plus
que de 0,8 à 1,0 pour 100. Vous pouvez faire d’ailleurs
vous-même le dosage de la nicotine par la méthode
Schlæsing, que nous avons décrite dans le naméro
1417 du Cosmos (21 mars 1912). — Ouvrages sur
l'électricité : L’ Electricité et ses applications, par
L. GrærTz (12 fr). Masson, 126, boulevard Saint-Ger-
main, Paris.
M. J. D., à B. — Un kilogramme de matière grasse
extraite du lait donne un peu plus de un kilogramme
de beurre, car le beurre commercial contient en plus
de 10 à 1# pour 100 d'eau et 2 pour 100 de matières
diverses (sels, caséine.....). 100 kilogrammes de ma-
tière grasse fournissent 106 à 112 kilogrammes de
beurre commercial. — La crème extraite du lait ren-
ferme, suivant la provenance des laits, de 20 à 40 pour
100 de matières grasses. Un kilogramme de crème
donne donc de 200 à 400 grammes de beurre. — N
n'est pas possible de trouver le renseignement demandé
par votre troisième question; cela dépend de trop de
facteurs.
Imprimerie P. Fenon-Vaac. 3 et 5, ruo Bayard, Paris, VII’.
Le gérant: A. FaioLt.
No 1454 — !j DÉCEMBRE 1919
COSMOS
617
SOMMAIRE
Nécrologie. — Le R. P. VINCENT DE PauL BaiLzy, p. 617.
Tour du monde. — Un cas de foudre globulaire double. L'origine des rayons 8 et y des substances radio-
actives. Les plantes-boussoles. Signaux horaires internationaux. Le dragage de l'or. Tissus de coton
incombustibles. L'Association des sciences anglaise, p. 618.
Revue de l’aviation : le Salon des avions en 1912, Fournier, p. 622. — L’hygiène du beurre,
G. CHARRIÈRE, p. 624. — Les pyrèthres, AcLoQuE, p. 626. — Thermomètre à contact électrique, A.B.
p. 629. — Nouveau phototélégraphe portatif Ed. Belin, Boyer, p. 630. — Les races humaines néo-
lithiques, G. Driorx, p. 633. — Sismographe Cartuja à composante verticale, R. P. Navarro,
NEUMANN, S. J., p. 635. — Perceptions successives de l’infiniment petit, Rousser, p. 636. — Obser-
vations relatives aux manifestations vocales d’un anthropoïde, L. BouTax, p. 638. — Sociétés
savantes : Académie des sciences, p. 639. — Association française pour l'avancement des sciences (suite),
HéricHanD, p. 641. — Bibliographie, p. 642.
ES
LE R. P. VINCENT DE PAUL BAILLY
Le Cosmos, qui s'abrite depuis vingt-huit ans à
la Maison de la Bonne Presse, dépose aujourd'hui
ses regrets et ses prières sur la tombe du vénéré
P. Vincent de Paul Bailly, le fondateur de cette
Maison, celui qui, en 1884, un mois après la mort
de M. l'abbé Moigno, recueillait notre revue, à côté
du Pèlerin et de la Croix, pour la faire vivre et
grandir.
Il s'est doucement éteint à Paris le lundi 2 dé-
cembre, au matin, ayant juste achevé sa quatre-
vingtième année.
Né le 2 décembre 1832, il vit passer dans les
salons de son père et à la Société des Bonnes
Etudes tout ce que la renaissance catholique
comptait dhommes apostoliques. De ce centre
d'œuvres allait bientôt germer notamment l’œuvre
des Conférences de Saint-Vincent de Paul.
En 1852, il entra dans l'administration du télé-
graphe, qui venait de naitre et dont on entrevoyait
seulement les immenses applications qui devaient
T. LXVII. No 1454.
révolutionner} le monde. Le personnel était bien
peu nombreux alors, et le P. Bailly a conté com-
ment il eut l'idée de correspondre avec des sta-
tions de plus en plus lointaines et fit ainsi nota-
blement progresser l'invention en se passant des
relais que l’on avait cru d'abord nécessaires.
Il fut quelque temps attaché comme télégra-
phiste au service personnel de l’empereur.
618
S'étant à diverses reprises retrouvé à Nimes
auprès du P. d’Alzon, qu'il avait connu à Paris
dans les salons de M. Baïlly, il entra à vingt-huit
ans dans la Congrégation nouvellement fondée
des Augustins de l'Assomption, en même temps
que son plus jeune frère Emmanuel, aujourd'hui
Supérieur général de la Congrégalion.
Ordonné prètre à Rome, directeur du collège de
Nimes, aumônier des zouaves pontificaux, aumo-
nier militaire à la guerre de 1870, il avait bien
mérité déjà de la religion et de la patrie. Mais
dès lors, les œuvres de presse allaient principale-
ment prendre son activité, sans l’empècher de
travailler aux œuvres des cercles ouvriers et des
pèlerinages à Lourdes, Rome et Jérusalem.
Depuis douze ans, la persécution dirigée contre
les Congrégalions tenait le vénérable religieux
à l'écart de la Croix, fondée et dirigée par lui.
M. Paul Feron-Vrau assuma la lourde tâche de la
Maison de la Bonne Presse, qu'il a dù, à cause des
COSMOS
Ə DÉCEMBRE 1942
décisions de la justice, acheter et payer deux fois.
Une belle et haute pensée a dominé toute la vie
du P. Vincent de Paul Bailly, la pensée que le
P. d’Alzon a résumée dans la devise de l’Assomp-
tion : Adveniat regnum tuum. Faire régner Dieu
dans les esprits d’abord: le P. Bailly avait voulu
que le Cosmos eùt, lui aussi, ce ròle, à côté des
autres publications catholiques de la Bonne Presse,
en montrant que la vérité scientifique s'allie sans
peine à la vérité intégrale telle que nous la pré-
sente l'Eglise catholique.
M. Bernard Bailly, le frère du vénéré défunt, a
assumé auprès de lui cette tâche depuis l’année 1884,
époque où il a pris la direction du Cosmos.
Nous le prions très particulièrement, en cette
douloureuse circonstance, d'agréer l'hommage de
notre vive sympathie, à laquelle nous osons joindre
celle de tous nos lecteurs.
La Rédaction du Cosmos.
RE
TOUR DU MONDE
MÉTÉOROLOGIE
Un cas de foudre globulaire double. — Un
cas remarquable de foudre en boule vient d'être
décrit par MM. H. Dember et U. Meyer (Ciel et
Terre, sept.). L'endroit où le phénomène se pro-
duisit, quoique des nuages orageux fussent visibles
à proximité, n’élait pas à ce moment visité par
l'orage, et, fait exceptionnel, aucun éclair ordinaire
ne précéda la foudre globulaire. Au moment où le
météore fut aperçu, il était composé de deux globes
situés l’un au-dessus de l'autre et reliés par un
mince cordon faiblement lumineux d'apparence
granulaire.
Les deux globes, de couleur orange, étaient
animés d'un mouvement horizontal commun dirigé
vers le Nord-Est (tandis qu'à un kilomètre de là,
au point où se tenaient les observateurs, le: vent
soufflait du Nord); le globe supérieur, le plus
gros des deux, se tenait à distance constante du
sol; l'autre descendit jusqu’à la surface du sol et
le cordon lumineux s'éteignit, et les deux globes
continuèrent de se mouvoir horizontalement, en se
tenant tonjours sur une verticale commune. Le
météore resta visible pendant deux minutes, durée
exceptionnelle qui fut peut-être favorisée par
l'absence de pluie ou d'agitation atmosphérique.
Enfin les deux globes s'étcignirent sans coup de
foudre final, d'une manière complètement silen-
cieuse. m;
Le cas précédent diffère sensiblement du cas
typique de foudre globulaire tel qu'il était déerit et
expliqué par le professeur W.-M. Thornton, du col-
lège Armstrong, de Newcastle-sur-Tyne; d’après
cet auteur, la foudre globulaire descend lentement
d’un nuage, généralement après un violent coup de
tonnerre, sous la forme d’une boule lumineuse
bleuätre; elle rebondit du sol lorsqu'elle le touche,
puis se déplace encore quelques mètres horizonta-
lement. Ces boules suivent volontiers un conducteur
électrique, par exemple une conduite de gaz, et
éclatent lorsqu'elles entrent en contact avec l’eau;
l'explosion se produit aussi quelquefois en l'air.
La boule disparait alors instantanément en produi-
sant une violente explosion qui peut causer des
dégâts importants et qui dégage une forte odeur
d'ozone. L’ozone est un composé d'oxygène à trois
atomes 0°, qui se forme notamment avec accom-
pagnement d'une lueur bleuâtre, lors des décharges
atmosphériques intenses, sous l'action de l'étin-
celle électrique, aux dépens de l'oxygène ordinaire
de l'air, dont la molécule est diatomique, O°.
Thornton prétend justement que la foudre glo-
bulaire est principalement constituée par une
masse d'ozone : dans cette hypothèse, on s'explique
que la teinte de la boule soit généralement bleuûtre,
que celte masse lumineuse descende lentement à
travers l'atmosphère, vu que la densité de l'ozone
est environ 1,7 fois celle de l'air, et enfin que la
disparition instantanée de cette boule bleuâtre se
fasse avec explosion, car la transformation de
l'ozone en oxygène libère une graade quantité
d'énergie. L'’ozone serait engendré lors d'une dé-
charge atmosphérique de la mème manière qu'il
No 145%
prend naissance à l'extrémité d'une pointe elec-
trisée, qui est le siège d’une intense ionisation.
Les cas de foudre globulaire peuvent fort bien,
comme on l’a vu plus haut, ne pas se conformer
tous au schéma classique de M. Thornton.
PHYSIQUE
L'origine des rayons 8 et ; des substances
radio-actives. — Une subslance radio-active, en
se désagrégeant, émet dans l’espace avoisinant de
l'énergie sous la forme de trois rayonnements dis-
tincts, qu'on a désignés par les trois premières
lettres grecques a, 8, y. Les rayons « sont formés
par un flux, une succession de particules a, qu'on
sait être des particules matérielles chargées d'élec-
tricité positive et expulsées par l'atome radio-actif
à l'instant où il se transforme; M. Rutherford a
montré que la particule « n’est pas autre chose
qu'un atome d'hélium (de masse quadruple de celle
de l'atome d'hydrogène : H = 1; He = 4) et qui
porte avec lui deux fois la charge élémentaire
d'électricité positive (car, comme la matière, l’élec-
tricité a une structure corpusculaire, on est arrivé
à la conception d’un atome d'électricité indivisible ;
les quantités d'électricité que l’on mesure sont tou-
jours un multiple entier de cet atome et les valeurs
intermédiaires n'existent pas). Pour chaque sub-
stance radio-active, la vitesse initiale d'émission
des particules a est bien déterminée; elle est tou-
jours la même pour l’atome radio-actif considéré.
Ainsi l'émission des rayons « est assez simple.
Dans le cas des rayons 8, la complexité est un
peu plus grande. Est-il nécessaire de rappeler
d'abord quelle est la nature de ce rayonnement? Il
est analogue au rayonnement cathodique des am-
poules à vide : c'est un flux de particules 8, c'est-
à-dire de parcelles élémentaires d'électricité néga-
tive (ou électrons), dont chacune a une masse
égale à environ un millième de celle de l'atome
d'hydrogène. Les rayons 8 ne diffèrent les uns des
autres que par la vitesse initiale avec laquelle les
particules B sont expulsées, soit par la cathode de
ampoule à rayons X, soit du sein de l'atome
radio-actif : vitesse qui est d'ailleurs toujours
énorme et comparable à celle de la lumière.
Or, les travaux de V. Baeyer, Hahn, Meitner ct,
plus récemment, ceux de Danysz ont fait voir
qu'une substance radio-active déterminée expulse
non pas une, mais plusieurs sortes de rayons 3 ca-
ractérisés chacun par une certaine valeur bien
déterminée de vitesse initiale. Le fait a été mis en
évidence par Hahn sur les produits radio-actifs
Thorium D et Mésothorium 2; Danysz, en déviant
par l'aimant le faisceau émis par le Radium B et
le Radium C, a constaté que le spectre des rayons 8
ainsi étalé comporte 23 groupes distincts, corres-
pondant à autant de valeurs distinctes de la vitesse
des particules 6.
COSMOS
619
Comment s’expliquer que le rayonnement $, à
la différence du rayonnement a, ne soit pas homo-
gène? M. Rutherford propose l'explication sui-
vante (Revue scientifique, 23 nov.) :
En principe, loutes les parlicules 8 émises par
une substance radio-active délerminėe sont chas-
sées avec la mème vitesse. Mais latome chimique
d'où prend naissance ce corpuscule 8 est un monde :
un monde en miniature, sans doute, mais un
monde quand mème très vaste, eu égard aux
dimensions du corpuscule 8. On sait en effet que
J.-J. Thomson a comparé d'une façon suggestive
l'atome chimique à une sorte de système astrono-
mique minuscule, constitué, en guise de planètes,
par plusieurs anneaux concentriques d'électrons;
ceux-ci gravitent autour d'un centre d'électricité
positive, et ils sont généralement en équilibre
stable sous l’action des attractions et répulsions
électriques mutuelles ainsi que de la force cen-
trifuge; mais chez les atomes radio-actifs, pour
une raison d'ailleurs jusqu'ici inconnue, cet équi-
libre se trouve à certains moments détruit, l’un
des petits asilres de ce système astronomique
s'échappe, et les autres reprennent pour un certain
temps un élat d'équilibre différent et constituent
un corps chimiquement différent.
Il arrive donc que le corpuscule 8 (électron),
avant d'avoir quitté définitivement le système,
rencontre une fais, deux fois, trois fois, etc., les
autres éléments constitulifs du groupe, d'où, à
chaque fois, une perturbation, un choc, qui lui fait
perdre une fraction déterminée de sa vitesse : cer-
tains électrons sortent de l'atome sans choc,
d'autres après un choc, d’autres après plusieurs.
On comprend assez bien, en cette hypothèse, com-
ment le Radium B et le Radium C peuvent
émettre jusqu'à 23 sortes de rayons 4.
En mème temps sont émis des rayons +. Les
rayons y sont identiques aux rayons X; ce sont des
perturbations électriques qui prennent naissance
aux endroits heurtés brusquement par un corpus-
eule 3. En fail, on constate que les substances
radio-actives, telles que le Radium C, le Thorium D,
le Mésothorium ?, qui possèdent des rayons 3 de
diverses sortes, émettent aussi des rayons y péné-
trants. Toujours dans la théorie de Rutherford, on
saisit bien l'origine des rayons y en question; ils
ont pris naissance à l'intérieur mème de l'atome
radio-actif et ils représentent justement l'énergie
soustraite aux corpuscules 8 en mouvement, lors
des chocs et des pertes de vitesse que ceux-ci ont
eu à subir.
BOTANIQUE
Les plantes-boussoles (Ciel et Terre, sep-
tembre).— Sous ce nom, les botanistes américains
et allemands désignent certaines plantes dont les
feuilles se placent naturellement dans un plan plus
620
ou moins rapproché du méridien. La plus connue,
dans les prairies du Far-West, est le Si/phium
taciniatum; elle alteint là une hauteur de près de
3 mètres et est dénommée vulgairement compass
plant. Ce sont les plantes jeunes qui présentent
l'orientation la plus nette; les feuilles radicales se
tordent de façon à présenter leurs faces à l'Ouest
et à l'Est, les pointes au Nord et au Sud par con-
séquent. Depuis longtemps, les chasseurs de la
prairie utilisent cette propriété pour s'orienter par
ciel couvert. De même, sir Joseph Hooker, en che-
min de fer, reconnaissait bien vite les changements
de direction à l’apparence générale des Si/phium
éparpillés dans la plaine (Cosmos, t. XXXV, p. 255).
_ En Europe, cette propriété curieuse est frappante
chez la laitue sauvage (Lactuca scariola), et il est
étonnant qu'elle n’ait pas plus tôt attiré l’attention,
quoiqu’on eût remarqué le parallélisme des plans
verticaux des feuilles rares de cette plante, sans
y reconnaitre le plan méridien. Un savant alle-
mand, Stahl, a récemment publié une intéressante
monographie de cette plante dans laquelle il met
en évidence les raisons physiologiques de la parti-
cularité qu'elle présente.
On peut l'attribuer, d'après lui, à ce que, pour
assurer son existence et le développement de ses
graines, la laitue sauvage doit utiliser le plus long-
temps possible le rayonnement solaire et éviter
en même temps une insolation trop active; la rigi-
dité de ses tiges empècherait d’aillenrs les feuilles
de se déplacer aisément, comme le font celles de
tant d’autres plantes héliotropiques. Il faut écarter
ici des hypothèses, comme celle d'une défense in-
stinctive contre la violence de vents constants, qui
pourrait cependant avoir une certaine valeur dans
le cas des plantes des prairies (Texas-Arizona) et
en tout cas celle assez bizarre d'une protection
naturelle contre ła grêle qu'a émise autrefois le
botaniste Delpino. On sait que certains arbres,
comme les eucalyptus, se font remarquer par la
position particulièrede leurs feuilles, qu’ils exposent
le moins possible aux rayons solaires; mais pour
eux, il s'agit d'éviter l’évaporation trop rapide du
liquide des cellules épidermiques, et les plans ver-
ticaux variés des feuilles n'ont rien de particuliè-
rement astronomique.
TÉLÉGRAPHIE SANS FIL
Signaux horaires internationaux. — La Con-
férence internationale de lheure, qui s'est ouverte
à Paris le 15 octobre 1912, s’est préoccupée de
l'unification des méthodes d'envoi de l'heure par
la radiotélégraphie. Jusqu'ici, les signaux sont très
différents pour les divers postes d'émission (Paris,
Norddeich, Washington, Halifax). Is se répartissent
à «les intervalles irréguliers : ainsi Paris et Nord-
deich, la nuit, n’émettent leurs signaux qu’à un
quart d'heure d'intervalle, à 23°45" et à 24"Om. La
COSMOS
5 DÉCEMBRE 1912
Conférence a jugé désirable qu’en chaque point du
globe on puisse toujours recevoir un signal horaire
de nuit et un signal horaire de jour, le nombre
total des signaux perceptibles en ce point ne
dépassant pas, en principe, quatre par 24 heures.
La répartition définitive des centres d'émissions
horaires sera confiée à la Commission internatio-
nale de l'heure. La liste ci-dessous indique les sta-
tions qui seront vraisemblablement en état, au
4°" juillet 1913, de jouer le rôle de centres d'émis-
0
pp EE
s/ xX HO
PL ST Pa
Ÿ
DIAGRANME INDIQUANT LE GENRE ET LA DISTRIBUTION
DES SIGNAUX HORAIRES INTERNATION AUX.
De 57% o° à 575o : signaux d'avertissement.
De 57755" à 58® 0° ;
De 58e 8 à 59® 0" > signaux horaires.
De 59= ü* 4 60% 0°
sions horaires, et les heures auxquelles devront
être faites ces émissions :
Heures.
temps civil de breenwieh.
Parisiens it en aa 0 (minuit).
San Fernando (Brésil)........... 2
Arlington (États-Unis) ........... 3
ManHle:ssss secs este 4 (provisoire).
Mogadiscio (Somalie italienne)... 4
Tombouctou .................... 6
PaTIB ii semis ie 10
Norddeich-Wilhelmshaven....... 42 (midi).
San Fernando (Brésil) ........... 16
Arlington (États-Unis)........... 17
Massaouah {Erythrée)............ 18
San Francisco ….................. 20
Norddeich-Wilhelmshaven....... 22
Toute station horaire autre que les précédentes,
qui viendrait à être créée, ne pourra, en principe,
faire ses émissions qu'à des heures (de Greenwich)
rondes, différentes des heures ci-dessus.
Les signaux horaires seront uniformément pro-
duits conformément au schéma ci-dessus.
N° 1154
Les signaux d'avertissement de 570 à 57530
seront effectués à la main par l'opérateur télégra-
phiste; mais les signaux horaires proprement dits,
figurés en traits et en points plus gros sur le
schéma, seront effectués automatiquement par la
pendule : les traits couvrent une durée d'une
seconde et les intervalles sont aussi d'une seconde;
les points couvrent un quart de seconde.
Le nouveau système de signalement de l'heure
ne prendra, comme on voit, que quatre minutes, et
il fournira plus de trente tops horaires nets et suf-
fisamment précis pour répondre aux besoins pré-
sents de la navigation, des services de chemins de
fer, de la météorologie, de la sismologie et de
l'étude du magnétisme terrestre.
Lescentresd'émissionshoraires ferontusage d'une
longueur d'onde uniforme d'environ 2 500 mètres.
MINES
Le dragage de l’or. — En 1941, la production
aurifère mondiale s’est chiffrée à 3330 millions de
francs; sur celte somme considérable, près de
102 millions de francs représentent la valeur de
l'or extrait, à l’aide de dragues, de sables alluvion-
naires. Parmi les contrées où le métal précieux est
recueilli de cette manière, la Californie occupe le
premier rang avec une production de #41 millions
de francs. Les districts aurifères de l'Alaska et du
Yukon viennent ensuite avec 17,5 millions de
francs, puis la Nouvelle-Zélande, qui a vu naitre
cette industrie, et dont le rendement dépasse
7,5 millions de francs. Enfin, la production de la
Sibérie est supérieure à 14 millions de francs.
On estime qu'un nombre total de 390 dragues
est actuellement en activité, depuis les appareils
primitifs en usage aux Philippines et les petites
dragues employées dans la Guyane hollandaise,
jusqu'aux formidables engins d’une capacité de
presque un demi-mètre cube qui servent aux dra-
gages de l'or en Californie et au Yukon.
La première tentative de dragage de l'or a été
effectuée en 1867, dans la Nouvelle-Angleterre.
Cette industrie a, par la suite, fait de rapides pro-
grès, et, en 1889, il y avait en Nouvelle-Zélande
toute une flottille de bateaux-dragues d’un tonnage
restreint et dont le prix par unité n’excédait pas
400 000 francs.
La première grande drague a été mise en service
en Californie dans le courant de l'année 4898;
c'est elle qui a servi depuis de modèle à toutes les
autres employées, soit dans l'Alaska, soit dans le
Yukon ou la Sibérie.
La production du Colorado, en 19114, a atteint envi-
ron { 750000 francs;celle du Montana,3:00000 francs,
et le rendement de l’Idaho, 1 050 000 francs. D'autre
part, pendant cette mème période, des dragages
aurifères ont été effectués avec quelque succès
dans le South Dakota, l'Arizona et dans l'Etat de
COSMOS
621
Nevada. Dans ces régions, les travaux sont relali-
vement faciles; il n'en est pas de mème dans
l'Alaska et le Yukon, à raison de ce fait que le gra-
vier y est presque toujours durci par le gel.
Dans l'Amérique du Sud, le dragage des sables
auritères a réalisé quelques progrès au cours de
ces dernières années, notamment au Brésil, dans
l'Argentine, la Colombie, ainsi que dans les Guvanes
hollandaise et française. En Sibérie, cette indus-
trie prend de plus en plus d'importance.
Il a été installé récemment une drague puissante
près du lac Baikal, et il doit s'y en établir plusieurs
autres.
L'industrie du dragage de lor tend à se déve-
lopper également dans la partie méridionale de
l'Amérique du Sud, de la Terre de Feu; en Asie,
dans la péninsule malaise, ainsi qu'à la Gòte de FOr
et dans la Guinée française, en Afrique occidentale.
INDUSTRIE
Tissus de coton incombustibles (Technique
moderne, 15 novembre). — On a de tout temps
cherché à se prémunir contre le feu, en rendant
incombustibles le bois et les étoffes. On a successi-
vement employé un mélange de vinaigre et d'ar-
gile, l'argile et le gypse, le mélange d'alun, de
borax et d'acide sulfurique, l'alun et le sulfate de
fer, puis le silicate de soude et la craie, le sulfate
de cuivre, le phosphate d'ammoniaque, enfin le
chlorure de zinc pour ignifuger le bois.
Les substances preéconisées jusqu'à présent pour
ignifuger les tissus de coton — solution d'alun,
solution formée de trois parties de phosphate
dammoniaque, deux parties de chlorure d'ainmo-
nium et une partie de sulfate d'ammoniaque dans
quarante parties d'eau, sels d'ammoniaque et
tungstate de sodium — ont le défaut de ne pas
résister au lavage.
Les expériences de MM. W.-H. Perkin et L. Brad-
bury, commenvées sur les sels d'acide tungstique,
montrèrent que, parmi eux, le tungstate de zinc et
le tungstate d'étain offrent la plus grande résis-
tance au lavage par leau et le savon.
Les expériences, poursuivies sur des sels de presque
toutes les espèces, montrèrent que certains sels so-
lubles, telsque les aluminates, les antimoniates, les
zincales, les plombates, dans lesquels l'oxvde métal-
lique joue le ròle d'acide, donnent, notamment
avec les sels de zine et d'étain, des précipités qui
résistent beaucoup mieux aux lavages que les sels
insolubles ordinaires, tels que le sulfate de baryte
et le phosphate de magnésie.
Les essais portèrent alors sur les sels d’étain :
les stannites, les stannates s'unissent à la fibre de
coton plus intimement qu'aucun des sels précé-
dents.
Les premiers tissus ignifugés mis sur le marché
étaient traités de la facon suivante : le morceau
622
de flanelle était plongé d’abord dans une solution
de stannate de sodium, puis dans un bain formé
de tungstate de sodium, d’acétate de zinc et d'acide
acétique. Mais les tissus ainsi préparés avaient le
défaut d’être hygroscopiques, de conserver l'odeur
de l'acide acétique, de n'être pas complètement
incombustibles, et enfin de revenir trop cher.
Après divers essais, le procédé suivant fut adopté :
le morceau de flanelle est plongé dans une solu-
tion de stannate de soude, de façon à en èlre
complètement imprégné, il est ensuite débarrassé
de l'excès de liquide par compression entre des
cylindres, complètement séché sur un tambour de
cuivre chauffé, immergé dans une solution de
sulfate d’ammoniaque, puis de nouveau essoré et
séché. Le tissu s'imprègne ainsi, outre l'oxyde
d'étain, de sulfate de soude qu'on élimine par lavage
à l’eau.
Un grand nombre d'expériences ont établi que
le tissu ainsi préparé est complètement incom-
bustlible et que la couche protectrice ne s'en va
pas par un lessivage à l'eau chaude et au savon;
les couleurs délicates du tissu ne sont pas allérées,
l'étoffe devient plus souple, plus pleine et plus
solide. D'après les essais de la Chambre de com-
merce de Manchester, la résistance à la traction
est augmentée de 20 pour 100.
Actuellement, cette flanelle incombustible est
fabriquée par W. Lipp Bros et Tod, à Manchester,
sous le nom de « Non-Flam »; le prix élevé de
Revue
LE SALON DES
Officiellement l'aéroplane n'existe plus : cest
l'avion. Du moins le ministre de la Guerre en a
décidé ainsi, et comme l'aviation est devenue une
« arme », nous devons nous incliner. Le mot est
d’ailleurs excellent, puisqu'il appartient à Ader,
le premier homme qui ail volé.
Les avions de cette année ressemblent à ceux de
l'an dernier; aucun n'est encore capable de navi-
guer sans deux ailes solides, tendues d’une toile
vernie. À l'avant, le moteur, l'hélice. Patins et roues
occupent toujours la mème place, avec parfois
d'excellentes simplifications.
Mais l'appareil est entièrement habillé de toile.
On ne voit plus ou presque plus de squelettes de
bois ou de métal. Plusieurs fuselages sont devenus
de vérilables coques de périssoires, renflées à
Javant, très eflilées à l'arrière. Encore triangu-
laires ou quadrangulaires l'an dernier, ce sont
maintenant de vrais cônes parfaitement réguliers.
COSMOS 5
DÉCEMBRE 1912
Pétain a empèché jusqu'ici usage de ces tissus de
se répandre rapidement.
VARIA
L'Association des sciences anglaise. — Notre
excellente Association des sciences tient ses Con-
grès dans les principales villes de France, chan-
geant chaque année le lieu de ses réunions : elle
la même fixé en Algérie il y a quelques années.
Mais cet exode n'est rien, comparé à l'initiative
de l'Association anglaise. Celle-ci a tenu ses ses-
sions : trois fois au Canada, une fois dans le Sud
africain, et voici qu'elle prépare sa réunion de
4914 en Australie, à Sydney et à Melbourne.
Malgré la distance, on compte sur la présence de
200 à 300 membres, venant de toutes les posses-
sions britanniques.
Du reste, le gouvernement fédéral consent à
tous les sacrifices pour attirer ces visiteurs; il a
voté une somme de 375 000 francs pour faire face
aux dépenses, des navires seront mis à la disposi-
tion des congressistes pour leur permeltre de
visiter toutes les còtes du continent, partie du
Pacifique occidental, etc.
Les premières réunions tenues hors d’Angle-
terre ont eu les meilleurs et les plus encourageants
résultats. Ces visites dans les colonies, stimulent
l'ardeur des Sociétés savantes locales, les font con-
naitre el leur apportent un concours très apprécié.
de ľaviation.
AVIONS EN 1912
Le còne se termine au moteur, qu'il enrobe parfois
dans une carapace métallique, laquelle se prolonge
sous toute la partie contenant les « œuvres vives »
de l'appareil.
Les constructeurs, qui s’appliquent avant tout à
salisfaire aux exigences de leur clientèle militaire,
se sont encore jetés pêle-mêle sur l'avion marin,
l'hydroaéroplane qui a tant fait parler de lui cette
année. Presque tous ls stands en exposent un
modèle, et dans celte voie les constructeurs ont
imaginé des choses réellement neuves et intéres-
santes, comme par exemple le canot glisseur, qui
remplit les fontions de flotteur, surmonté d'ailes
d'aéroplane.
Si nous observons sommairement les détails,
nous remarquerons que les constructeurs s'efforcent
d'éliminer les résistances nuisibles en diminuant
le nombre des haubans, en remplaçant les nom-
breuses cordes à piano par des lames ou des cäbles
N° 145%
d'acier. Les sièges des pilotes disparaissent dans
le fuselage, et la planche des débuts a fait place
à des « carrosseries » capitonnées. Les aviateurs
ne s’en plaindront pas. Le bois cède peu à peu la
place au tube d'acier et même à la tôle emboutie.
En somine, il y a progrès incontestable, et on le
constate d'autant mieux que le règne des appareils
dits de démonstration a disparu dans la grande
nef. On rencontre encore, par-ci par-là, comme
honteux de se produire au grand jour, quelques
modèles réduits, mais le public parait s’en désin-
COSMOS 623
téresser. Les hélicoptères eux-mêmes n'osent plus
se montrer. Cependant les aviettes se sont réservé
un emplacement dans une galerie. Ce doit être
une concession à perpétuité.
Nous allons décrire quelques-uns des principaux
appareils exposés, les types créés dans l’armée en
vue des conquêtes futures. Disons d'ores et déjà que
le monoplan gagne du terrain: les biplans nous
font l'effet d'ètre de vieilles machines. Cepen-
dant ils présentent beaucoup d'avantages et leur
disparition n’est passi proche qu'on pourrait lecroire.
UN COIN DU SALON DE L'AÉRONAUTIQUE.
1, double monoplan Bréguet. — 2, monoplan REP. — 3, monoplan Blériot,
Double monoplan Bréguet. — Cet appareil, des-
tiné à l’armée, est d'une construction particuliè-
rement intéressante. Ses caractéristiques sont les
suivantes : envergure 13,65 m, longueur 8,75 m,
surface portante 36 mètres carrés, hauteur 3,35 m,
poids à vide 550 kilogrammes. Les ailes sont tou-
jours construiles comme nous l’avons dit l’an der-
nier (n° 1411, p. 155, 8 février 1912), c'est-à-dire
qu'elles sont souples et peuvent se replier pour le
transport. Pour cela, on leur fait subir, autour
d’une genouillère à deux axes appropriés, un pre-
mier mouvement de rotation qui ramène le plan
de chaque aile presque vertical, puis un deuxième
mouvement autour d'un axe vertical qui les-
applique le long du fuselage.
La queue, cruciforme, est constituée par deux
surfaces orihogonales; la surface horizontale ne
porte que son propre poids; elle se compose de
deux parties qui se raballent verlicalement le
long de la surface consliluant le gouvernail de
direction pour permettre le repliage complet des
ailes.
Le båti du motcur est fait de tubes d'acier sup-
portant le moteur à l'avant el le réservoir d'essence
en charge. Un capot protège le passager contre
le vent et les projections d'huile, et met à l'abri
le cartoscope et la planchette où s'inscrivent les
observations de route.
Le châssis d'atterrissage est constitué par un tri-
cycle dont la’ roue avant est supportée par une
62%
fourche en tubes d’acier. Les deux autres roues
sont légèrement en arrière du centre de gravité.
L'amortisseur avant comporte un tube à l’intérieur
duquel se déplace un second tube appuyant sur un
piston comprimant un ressort à boudin. Les deux
roues arrière sont munies de dispositifs oléopneu-
matiques capables d'absorber des chocs très violents.
Bi-monoplan Goupy. — La grande particularité
de ce modèle réside dans le système de commande
C. A. D., qui a été adopté. Il est constitué par
une gaine extérieure en cuivre ou en aluminium
dans laquelle se trouve un ressort spiral dit
flexible dont les spires se touchent. Un câble ou
âme occupe l'intérieur du flexible. Les extrémités
se terminent par deux tiges rigides. La commande
C. A. D. transmet donc mécaniquement dans les
deux sens tous les mouvements que l'on désire :
le câble intérieur par la traction et le flexible qui
l'entoure par la poussée.
Blériot. — A côté des appareils de construction
courante exposés au stand Blériot figure un nou-
veau monoplan militaire à deux places, qui diffère
sensiblement de ses voisins. C’est un avion rapide
destiné aux reconnaissances à grand rayon et
capable d'emporter des approvisionnements néces-
saires pour quatre heures de vol. Un moteur Gnome
de 80 chevaux peut lui communiquer une vitesse
de 120 kilomètres par heure. Les commandes et
organes de manœuvre sont semblables à celles des
autres appareils. Les ailes sont quelque peu recu-
lées afin de permettre une plus grande visibilité :
le pilote et le passager, étant placés côte à côte,
très près du moteur, peuvent voir le sol jusqu’à
l'aplomb de l'avant des ailes. L'appareil est. blindé
par une ceinture en acier spécial trempe qui pro-
tège le pilote et le passager; elle résiste, à 500 m,
à la balle d'un fusil. D'autre part, la vulnérabilité
est encore diminuée par la forme arrondie adoptée
à l'avant.
Cet avion comporte une coque en liège agglutiné
entre des spires de toile collée. A l'avant, une tôle
très puissante ferme la coque et protège le groupe
propulseur. Le châssis d'atterrissage est rendu
me
COSMOS
5 DÉCEMBRE 1912
très souple par un amortisseur à air comprimé
freiné par de la glycérine. En cas d'accident, on
le démonte en enlevant seulement deux boulons.
Quant à la voilure, elle est semblable à celle des
autres avions Blériot et elle se démonte facilement.
Toutes les saillies ont été supprimées le long du
fuselage sur lequel lair glisse sans rencontrer
d'obstacle. Les sièges et le réservoir d'essence se
trouvent au centre de gravité de l'appareil, ce qui
permet un équilibrage longitudinal indépendant
du poids des aviateurs et de la consommation
d'essence. Les caractéristiques de cet appareil sont
les suivantes : longueur 8,9 m, envergure 42,25 m,
poids à vide 373 kilogrammes, hélice de 2,60 m
de diamètre, surface alaire 25 mètres carrés, gou-
vernail au pied, gauchissement et stabilisateur à
Ja main, plan arrière très légèrement porteur.
Nieuport. — Le petit monoplan Nieuport, muni
d'un moteur Nieuport de 30 chevaux, est assez sem-
blable à celui que nous avons décrit lan dernier
(n° 14411, p. 153). Quelques modifications y ont été
cependant apportées, notamment en ce qui touche
le haubanage des ailes qui est constitué par huit
câbles placés au-dessus, et huit cordes à piano en
dessous. Ce mode d'attache permet aux ailes de
supporter une charge de 4 000 à 5 000 kilogrammes.
La dernière création Nieuport est représentée
au Salon par un monoplan de 50 chevaux, con-
siruit d'après les données établies par l'ingénieur
Nieuport, mais allégé. Le train d'atterrissage a
été réduit à sa plus simple expression, la suspen-
sion étant constituée par une simple lame remplis-
sant les fonctions d'essieu pour les roues. De plus,
le démontage a été rendu extrèmement rapide
grâce à une pyramide spéciale permettant de
replier les ailes ie long du fuselage et de mettre
l'appareil en état de transport sur les routes.
Enfin la question du freinage a été réalisée en per-
mettant aux ailes de se cabrer dès que l'appareil
a pris contact avec le sol. Ses dimensions sont les
suivantes: envergure 8,72 m, longueur 6,91 m, sur-
face totale 13 mètres carrés, poids 260 kilogrammes.
(A suivre.) L. FOURNIER.
Lhygiène du beurre
La fabrication du beurre remonte à la plus haute
antiquité. A l'époque idyllique où l’homme se
nourrissait du lait de ses brebis, des fruits de sau-
vageons et de l'eau pure des sources fraiches, les
pâtres avaient déjà remarqué que les globules
imtyreux s'assemblaient en crème à la surface du
lait en repos dans les jarres d'argile grossièrement
p'trie, et qu'il suffisail de battre et de mélanger
d'une facon assez rudimentaire celte crème pour
assuier la soudure intime des corpuscules gras et
faire du beurre. Depuis, les siècles ont coulé sans
qu'aucun perfectionnement vraiment important
ait été réalisé dans cette technique primitive. A
l'inverse des autres industries dont la vie, comme
celle des individus, est faite de modifications in-
cessantes, d'améliorations et d’adaptations conti-
nuelles dans ce « struggle for life » universel,
inéluctable pour tout ce qui ne veut pas disparaitre,
l'industrie beurrière, à peu près indifférente aux
conquêtes de la science ét aux bouleversements
N° 4451
économiques, semble avoir traversé lessiècles dans
un élat léthargique. En maintes fermes, les jarres
où la crème monte naturellement à la surface du
lait ne différent pas sensiblement des vases gros-
siers de l'antiquité, et la rudimentaire baratte en
bois où cette crème est battue ne témoigne pas
d'un esprit inventif ni de moyens de réalisation
bien avancés. Dans les grandes laiteries, toutefois,
la nécessité de faire face à une demande grandis-
sante a obligé, pour produire plus vite, à substituer
les moteurs inanimés à la main-d'œuvre lente et
peu puissante de l'homme, et à créer, par suile,
un matériel qui puisse résister aux efforts brutaux
des machines. De là sont nés les écrémeuses cen-
trifuges, les barattes et les malaxeurs modernes,
mais c'est à peu près tout ce que l'industrie beur-
rière a consenti pour sacrifier au progrès. Dans
quelques usines peu nombreuses, cependant, où la
présence d'hommes scientifiques a permis de ne
plus laisser la fabrication au seul hasard, on a
renoncé aux fermentations spontanées qui assurent
la maturation de la crème, pour ne plus laisser tra-
vailler que les ferments utiles. A cet effet, par une
pasteurisation préalable, vers 75°-80°, on détruit
tous les germes naturels, bons et mauvais, de la
crème, qu'on ensemence ensuite de cultures pures.
Mais c'est là l'exception; et encore la méthode
reste-t-elle fort imparfaite, bien qu'elle assure de
plus grandes qualités au beurre en le débarras-
sant de germes nuisibles ou pathogènes. Ce beurre
n’en reste pas moins, en effet, éminemment alté-
rable puisqu'il peut être conservé pendant huit
jours à peine, en été, et au-delà sa conservation n’a
pu être prolongée que de quelques semaines par la
stérilisation des eaux servant à son lavage. MM. Dor-
nic et Daire sont arrivés à ce résultat en soumet-
tani l'eau aux rayons ultra-violets d'une lampe à
vapeur de mercure (Ac. des sciences, 1909, CXLIN,
p. 394-356). La stérilisation directe du beurre, de
la crème et mème du lait n'a conduit qu'à des
résultats défectueux, l'action des rayons ultra-vio-
lets se traduisant par l'apparition d'une odeur et
d’un goùt de suif dans le beurre qui devient, de ce
fait, invendable. Néanmoins, ces expériences ont
très nettement fait ressortir l'importance du fac-
teur eau dans la fabrication du beurre, en mon-
trant que les microbes causant le rancissement
sont le plus souvent apportés par leau. Or, celle-ci
est employée en grande quantité en beurrerie, non
seulement pour le nettoyage des locaux et des
vaisseaux, mais aussi pour le délaitage du beurre.
Ce dernier doit ètre, en effet, lavé copieusement pour
être purgé de son sérum où babeurre dont la pré-
sence, en quantité appréciable, compromettrait
singulièrement la conservation du produit.
On est très généralement pénétré aujourd'hui de
l'importance de ces lavages du beurre dans la
baratte, et ils sont effectués à peu près partout.
COSMOS
625
Certains ont même trop bien vu l'intérêt de cette
pratique dont ils ont aperçu, non seulement l'avan-
tage technique, mais encore l'avantage économique.
Rien n'est plus facile, en effet, que d'oublier, au
cours du malaxage, une notable quantité d'eau
dans son beurre; au besoin, on en augmente encore
la proportion en y laissant aussi un peu de caséine
ou v ajoutant un caséinate, le caséinate de soude, de
préférence, qui possède la propriété de se gonfler
abondamment dans l’eau dont il se charge. C'est
chose bien tentante que vendre l'eau au prix co-
quet qu’atteint le beurre. Et c'est pourquoi on ren-
contre si souvent, de nos jours, des beurres renfer-
mant 20, 25 et 30 pour 100 d’eau alors que la
teneur normale, sous nos climats, oscille entre 14
et 17 pour 100. Si, d'aventure, l'expert trouve sus-
pect un beurre aussi chargé d’eau, on ne manque
pas de lui objecter la bonne foi du producteur dont
il faut seulement accuser le mauvais outillage et
l'ignorance. Cela peut se produire quelquefois,
mais il devient inconcevable d'obliger, par une
tolérance excessive, le consommateur à payer
d'autant plus cher un produit que celui-ci est plus
mal fabriqué. C’est une véritable prime à l'igno-
rance et aussi à la malhonnètelé, car, profitant de
cette tolérance, des fraudeurs scientifiquement
organisés fabriquent des beurres mouillés dans la
proportion maximum autorisée par la jurisprudence.
Le malheur est qu'on ne porte pas seulement at-
teinte au porte-monnaie, mais aussi, et bien plus
gravement, à la santé du public. Les eaux ainsi
employées sont, on s’en doute, loin d'avoir la
pureté bactériologique désirable. Les puits et ci-
ternes, mis le plus souvent à contribution, consti-
tuent un danger dont la gravité n'échappera à per-
sonne, car ils sont le réceptacle de toutes les souil-
lures des toits, et, parce que rarement étanches, ils
reçoivent des eaux de ruissellement ou d'intiltra-
tion entraînant en suspension mille débris orga-
niques et les germes dont ils sont chargés, sans
compter que, dans de très nombreuses fermes mal
lenues, le voisinage du tas de fumier aggrave en-
core cette situation.
Or, par une aberration étrange, qu'il s'agisse de
lait, de fromage ou de beurre, leur seule composi-
tion chimique est envisagée dans l'établissement
de leur valeur. On n'a tenu aucun compte de leurs
qualités bactériologiques, qui cependant, en toute
logique, devraient primer leurs qualités alimen-
taires. Il ne faut pourtant pas se le dissimuler, par
l'extrème facilité avec laquelle ils se laissent in-
fecter, ces aliments sont redoutables. Le D° Bruck
a établi, il y a une dizaine d'années, qu'en ense-
mencant soit le lait, soit l'eau servant à rincer
les vases, avec des bacilles typhiques, on retrou-
vait ces microgermes dans le beurre, où ils res-
taient vivants pendant près d'un mois. Plus récem-
ment, on a fait aux Etats-Unis des recherches dont
Fe
tb
626
MM. Ch. F. Briseol et W. J. Mc Neal ont donné
les peu rassurants résultats suivants (University
of Illinois Agricult. Experim. Station; Bulletin
n° 149, février 1911):
Sur 1233 échantillons de beurre examinés, 163,
soit 13,2 pour 100 ont été reconnus infectés par le
bacille de la tuberculose, et ces bacilles conservent
leur virulence pendant plus de cing mois dans les
beurres salés normalement. En comparant ces -
recherches avec les travaux effectués depuis vingt
ans sur cette question, on constate que la propor-
tion des beurres contenant le bacille de Koch ne
diminue pas.
Or, tout le beurre consommé ne passe pas par
la cuisine et n’est pas porté à une température de
100°. Une notable partie est consommée telle quelle
sur la table, constituant, par conséquent, un dan-
ger permanent pour la santé publique. Alors qu’il
existe une police sanitaire dont le but est d’em-
pêcher les viandes malsaines d'arriver jusqu’au
consommateur, il est effrayant de songer qu'au-
cune réglementation ne nous préserve contre
l'ignorance et la malpropreté des fabricants de
beurre. Et ceux-ci n’ont vraiment pas le droit de
s'étonner si de plus en plus le public les délaisse
en faveur de certaines graisses végétales dont lin-
dustrie, née d'hier, a su, par exemple, transformer
l'huile repoussante de coprah en une matière
grasse qui, comme la végétaline, est d’une pureté
absolue et d'une conservation pratiquement illimi-
tée. On ne voil pas bien pourquoi les producteurs de
beurre n'arriveraient pas, comme les fabricants de
celte graisse de coco, à obtenir un produit anhydre
offrant une remarquable résistance aux infections
microbiennes et aux fermentations pathologiques.
Toute l’activité des industriels beurriers ne doit
pas se borner à affirmer que le beurre est un pro-
COSMOS
5 DÉCEMBRE 191%
duit de luxe et à réclamer sans cesse aux pouvoirs
publics protection contre ceci ou cela. C'est à eux,
et à eux seuls, qu'il appartient de perfectionner
leur fabrication et surtout de redonner la sécurité
au consommateur en lui fournissant un aliment
qui soit toujours dénué de germes nocifs. Par sa
sapidité, certes, le beurre restera toujours préféré
aux graisses végétales, mais c'est à peu près la
seule supériorité qu’il ait actuellement sur la graisse
de coco, laquelle se recommande, par contre, par
ses qualités nutritives indiscutables, sa digestibilité
supérieure, sa propreté bactériologique absolue et
son bon marché, ce qui a bien aussi son impor-
tance à notre époque de « vie chère ». Que les
beurriers y prennent garde : sous forme de végèta-
line, la production de cette graisse atleint déjà
plus de 8000 tonnes par an contre 60 tonnes la
première année. Or, après celle-ci, ce sera le tour
du beurre de Karité, du beurre de Galam, de palme,
de Shea, de mango, etc., de l’une ou plusieurs de
ces quelque vingt espèces végétales dont les graisses
concrètes viendront concurrencer dangereusement
le beurre lorsque leur fabrication aura atteint le
degré de perfection réalisé aujourd’hui dans celle
de la végétaline. Et ce n'est pas l'arsenal des lois,
si favorable qu’on puisse le souhaiter, qui pourra
sauver le beurre. Un produit ne s'impose ou ne se
maintient que par ses qualités propres et non point
par celles qu'il pourrait tirer momentanément
d'une législation de faveur. C’est là une fatalité
économique dont il conviendrait de se féliciter, en
l'espèce, si elle avait pour résultat de secouer vic-
torieusement la torpeur des producteurs de beurre
en les obligeant à travailler d’une façon plus scien-
tifique et surtout plus conforme à l'hygiène. Mais
il n’est que temps! G. CHARRIÈRE,
ingénieur agronome.
Les pyrèthres.
Sous le nom de pyrèthres, on groupe vulgaire-
ment un certain nombre d'espèces de la famille
des Composées, ayant des traits de parenté assez
évidents et appartenant, au point de vue botanique,
à des genres voisins. Ces plantes, par la délicatesse
de leurs fleurs rayonnées et l'austère élégance de
leur feuillage, offrent quelques ressources à l'hor-
üiculteur pour la formation de corbeilles ou de
plates-bandes; quelques-unes, sans se soustraire
à cetle deslination ornementale, possèdent, en
outre, de très uliles vertus thérapeutiques ou insec-
ticides. Voici quelques mots sur celles qui méritent,
à ce triple point de vue, une mention spéciale.
L'usage médicinal étant évidemment, dans la
subordination des ulilités des plantes, celui auquel
il convient de donner le premier rang, je commen-
cerai par l'espèce qui porte plus particulièrement,
dans les officines, le nom de pyrèthre. Elle est alliée
aux séneçons, et la nomenclature botanique lui
a attribué le nom d’Anacyclus pyrethrum (D. C.).
C'est sa racine que l’on emploie en médecine;
cette racine cest longue d'une dizaine de centi-
mètres, fusiforme ou cylindrique, ordinairement
non rameuse, de consistance charnue, blanchâtre
à l'intérieur, grise et ridée à l'extérieur. La plante
croit indigène dans les endroits montueux de l'Al-
gérie, de lľ’Arabie, de la Syrie; sa racine nous est
expédiée sèche de Tunis.
Si on place sur la peau une tige de pyrèthre
fraichement cueillie, elle y produit instantanément
une sensation de froid. L'odeur de la plante est
aromalique, mais désagréable; sa saveur est âcre
N° 145%
et irritante; un fragment introduit dans la bouche
provoque une abondante salivation.
La racine contient un alcaloïde, la pipérovatine.
Elle est employée à titre de sialagogue, dans les
cas où l’excitation fonctionnelle des glandes sali-
vaires peut être directement ou indirectement utile.
On la prescrit, par exemple, dans certaines mi-
graines, dans les affections névralgiques et rhuma-
tismales de la face, dans la paralysie de la langue
ou du pharynx, et aussi quelquefois dans l’embarras
gastrique lorsqu'il y a lieu, par hypersécrétion sali-
vaire, de débarrasser la bouche de son enduit épi-
thélial et muqueux.
La racine de pyrèthre s’administre sous forme
de poudre, d'extrait fluide ou de teinture. Ces deux
dernières préparations sont d’énergiques irritants
F.G. 1. — RACINE PHARMACEUTIQUE
D’ « ANACYCLUS PYRETHRUM ».
locaux qui trouvent leur emploi à l'extérieur contre
les différentes espèces de poux et qui détruisent
ces insectes et leurs œufs sans être préjudiciables
à la peau; ce traitement des phtiriases est moins
dangereux que celui par le sublimé ou l’onguent
mercuriel. Cependant, chez des sujets particulière-
ment sensibles, il peut être toxique; on ne doit
donc y avoir recours qu'avec prudence et sous le
contrôle d’un médecin.
Après l'espèce directement utile à la thérapeu-
tique humaine, en voici d’autres auxquelles nous
devons aussi quelque reconnaissance, parce qu'elles
nous procurent la possibilité d’une lutte efficace
contre les menus insectes sanguinaires, comme les
puces et les punaises, qui s'installent dans nos
maisons avec le dessein de vivre à nos dépens.
Il y a déjà longtemps qu'on a fait remarquer
COSMOS
627
que les plantes « pulicifuges » réellement efficaces
se rangent dans la famille des Composées. Elles
doivent cette vertu à la toxicité de certaines
substances élaborées dans leurs tissus; celles qui
jouissent à ce point de vue d’une réputation popu-
laire sont la vulgaire Pulicaire, si abondante dans
nos marécages et qui peuple même la berge des
fossés bordant les chemins, et la grande margue-
rite (Chrysanthemum leucanthemum), qui, em-
ployée en Bosnie et en Dalmalie pour la litière des
F1G. 2. — « PYRETHRUM ROSEUM »,
animaux domestiques, en chasse les parasites avec
tant d'efficacité que la rareté des puces dans ces
pays à pu être signalée comme un fait biologique
digne d’être particulièrement mis en relief.
Mais c’est surtout chez quelques pyrèthres, dont
il va être parlé, que ces propriétés insecticides sont
hautement développées, au point de justifier et de
‘rendre très rémunératrice l’exploitation écono-
mique qui est faite de ces plantes en vue d’en
obtenir un produit spécifique pour la destruction
des insectes parasites de nos maisons.
Les espèces accueillies pour cet objet dans le
628
commerce de la droguerie sont principalement le
Pyrethrum carneum et le P. roseum, qui sont
depuis longtemps cultivés dans nos jardins pour
leurs qualités ornementales, et dont la patrie
d'origine est la Perse et le Caucase. Le mélange
pulvérisé des fleurs de ces deux espèces fournit la
poudre commercialement désignée sous le nom de
« pyrèthre du Caucase ».
Aux yeux du botaniste, ce sont deux plantes très:
étroitement apparentées et difficiles à distinguer
lune de l'autre par des caractères précis. Chez le
roseum, les capitules sont d’un rose plus ou moins
intense; cette teinte est, au contraire, très diluée
sur les demi-fleurons du carneum. De plus, dans le
premier, les feuilles sont moins découpées, à divi-
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FIG. 3. — e CHRYSANTHEMUM PARTHENIUM ».
sion plus étroites, à dentelures rapprochées et non
divergentes, et les pédoncules sont volontiers réunis
en petits groupes au mème point des rameaux,
tandis qu'ils sont plus ordinairement solitaires
chez le roseum.
Dans leur patrie, ces deux pyrèthres, auxquels
s'applique indifléremiment le nom de camomille
rouge où de eamonille perse, sont vulgairement
désignés sous les termes de « tueur de puces »,
« herbe de puce ». Ce sont de pelits arbrisseaux
assez trapus dont la rusticité dans nos jardins
s'explique par le fail que, dans les montagnes cau-
casiennes sur les pentes desquelles ils s'élèvent
jusqu à une grande hauteur, ils ont à subir des
froids rigoureus; ils se tirent d'ailleurs à leur
avanta,se deces défavorables condilions biologiques.
COSMOS 5 DÉCEMBRE 491%
et un abaissement du thermomètre à 20° au-dessous
de zéro les laisse parfaitement indemnes.
Ces deux espèces sont cultivées en grand, pour
leurs propriétés insecticides, dans divers cercles
et districts de la Russie méridionale. Particularité
curieuse, leur exploitation économique, mème en
Caucasie, où elles sont indigènes, serait relative-
ment récente et ne remonterait pas au delà de la
première moitié du x1x° siècle. Les débuts de cette
exploitation auraient eu une origine un peu fortuite.
On raconte, en effet, qu'un marchand arménien,
voyageant dans l’Asie méridionale, observa que les
habitants, pour se défendre des piquüres des insectes
domestiques, employaient une certaine substance
pulvérisée. [i reconnut que cette substance n’était
autre chose que des capitules de camomille rouge
réduits en poudre. Rentré dans son pays, le mar-
chand, qui s'appelait Sumbitoff, fit part de son
observation à son fils, lequel n’y attacha, à ce mo-
ment, que peu d'importance.
Mais, quelques années plus tard, ce fils, ayant
perdu sa fortune, se souvint du secret que son père
lui avait révélé; il se mit à cultiver des pyrèthres
et à fabriquer de la poudre insecticide; ce com-
merce lui rapporta immédiatement de beaux béné-
fices. En 1818, il vendait 35 roubles (près de 100 fr)
le poud (environ 20 kilogrammes) de poudre de
pyrèthre; naturellement le secret de son rapide
enrichissement transpira, et il eut bientôt de nom-
breux imitateurs; des villages entiers s’adonnèrent
à la culture de la précieuse plante dont le trafic,
malgré cette concurrence, est, parait-il, demeuré
assez rémunérateur.
La floraison de la camomille rouge commence
en juin et se prolonge pendant plus d’un mois;
c'est le moment de la récolte des capitules, qui
doivent étre cueillis par un temps sec; un bon
ouvrier pcut en récolter en un jour de 45 à 40 kilo-
grammes. Les fleurs sont, pour plus de commodité,
séchées au soleil, quoiqu'on ait remarqué que
celles que l'on fait sécher à l'ombre conservent des
propriétés insecticides plus énergiques. On pulvé-
rise grossièrement à la main les fleurs sèches,
puis on obtient une poudre très fine à l’aide de
petites meules ou d'un moulin à bras.
Les propriétés insecticides du pyrèthre sont dues
à la présence dans ses fleurs d’une grande quantité
d'huile essentielle et d’oléorésine. Il convient
d'ajouter qu'en dehors de leurs vertus si spéciales
contre l’engeance malfaisante des parasites domes-
tiques, les Pyrethrum roseum et carneum possèdent
des qualités ornementales qui leur avaient ouvert
l’accès des jardins bien avant qu'ils ne fussent
introduits dans le commerce de la droguerie. Ce
sont de belles plantes, très rustiques et offrant, en
outre, l'avantage de s'accommoder de tous les ter-
ains et de végéter aussi volontiers dans un sol
humide qu'à une exposition sèche.
N° 1454
Enfin, pour terminer cette liste des pyrèthres
intéressants, je signalerai une petite espèce indi-
gène qu'on désigne assez communément sous ce
nom, bien qu'elle porte en botanique celui de
Chrysanthemum parthenium; c'est une plante
d'un vert gai, aux feuilles découpées en segments
assez larges. Dans le type sauvage, les demi-fleu-
rons sont blancs et le disque jaune; mais on en
cultive une variété où les capitules sont presque
entièrement blancs et simulent des fleurs doubles.
COSMOS
629
Cette espèce est très utile pour la décoration des
massifs et des plates-bandes; elle a donné une
variété à feuillage d'un vert jaune, le « pyrèthre
doré » (golden Feather des Anglais), qui est
de plus en plus employée pour les bordures.
Le type et ses variétės se reproduisent, soit
de semis, soit par éclats ou boutures de pousses
feuillées.
A. ACLOQUE.
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Thermomètre à contact électrique
pour étuves à température constante.’
La précision toujours plus grande des épreuves
que doivent subir les chronomètres et les montres
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4
THERMOMÈTRE A CONTACT ÉLECTRIQUE (RÉDUIT DE MOITIÉ).
marines dans les concours a incité les constructeurs
à établir un matériel spécial permettant d'obtenir
automatiquement dans une étuve une température
aussi constante que possible.
Les usines Lecoq et Ci* (Acacias-Genève) viennent
de donner de ce problème délicat une solution
aussi pratique qu'élégante. Elle repose sur l'emploi
d'un thermomètre formé d’un réservoir lenticulaire
rempli d'un liquide volatil. Le disque, analogue
à celui de certains baromètres ou thermomètres
enregistreurs, est rempli sous pression : à cet effet,
les deux flasques étant écartées — grâce à leur
élasticité, — on introduit le liquide volatil, puis
on le ferme hermétiquement. On a constaté que
lon obtenait ainsi des résultats incomparablement
plus précis. Les mouvements de la paroi libre du
réservoir sont transmis électriquement à l'appareil
d'utilisation par un dispositif convenable.
La figure 1 représente
pareil :
A est le réservoir lenticulaire dilatable:
B, le levier amplificateur pivotant en C:
D, le contact électrique;
E, l'appareil de réglage de la température;
F, les pièces de contact du réservoir et du
levier ;
G, la cloison de l'étuve;
H, le support de fixation.
Le réglage, à fonctionnement éxtérieur (mo-
lette E), permet de choisir, dans une certaine ->
limite, la température que l'on désire atteindre et
ne pas dépasser (par exemple, de 32° à 38°).
La sensibilité est telle que l’on obtient facilement
une température constante à quelques dixièmes
de degré.
Les applications de cet appareil sont nom-
breuses: étuves employées dans l'horlogerie, sté-
rilisation, culture microbienne, couveuses, etc.
le schéma de lap-
A. B.
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630
COSMOS
D DÉCEMBRE 1912
Nouveau phototélégraphe portatif Édouard Belin.
Un physicien français déjà connu par de remar-
quables travaux électriques, M, Edouard Belin,
vient d'inventer un appareil à mains permettant le
reportage photographique par téléphone (1).
Ce nouveau phototélégraphe (fig. 1), d'un vo-
lume et d'un poids minimes, constitue un poste
transmetteur complet qu'on peut brancher sur
une ligne téléphonique aboutissant à la station
éloignée, dont nous verrons plus loin les organes
de réception. La transmission repose sur les pro-
priétés que possède la gélatine bichromatée. On
sait, en effet, que dans la méthode dite « au
charbon », inventée par Poitevin, les épreuves
photographiques s’obtiennent avec du papier sen-
sibilisé à la gélatine bichromatée, qui devient
insoluble lorsqu'on l’expose au jour. Une fois
sorties du châssis-presse, on les lave à l’eau chaude,
et la gélatine se dissout plus ou moins selon le
FIG. 1. — NOUVEAU PHOTOTÉLÉGRAPHE PGRTATIF EDOUARD BELIN, APPAREIL TRANSMETTEUR.
A, cylindre sur lequel s'enroule la photographie à transmettre. — B, barillet renfermant le ressort moteur.
C, rhéomicrophone. — M, milliampèremètre. — R, régulateur.
degré d'opacité des différentes parties du cliché.
Finalement, on a des épreuves présentant des
creux et des reliefs qui correspondent respective-
ment aux blancs et aux noirs du négatif original.
Les demi-leintes se traduisent par des hauteurs
intermédiaires el rigoureusement proportionnelles
à leurs intensilés.
On tend alors cette épreuve sans la coller sur le
cylindre À du phototélégraphe portatif mis en
(4) Voir dans le Cosmos 1907, n° 1192, p. 600-603,
notre arlicle sur le premier phototélégraphe Belin non
portatif,
mouvement par un ressort puissant contenu dans
un barillet B. Ce ressort, qui se remonte de l’exté-
rieur au moyen d'une vis, aclionne également,
par l'intermédiaire de roues multiplicatrices, un
régulateur R assurant au cylindre une vitesse
constante qu'on contròle d'ailleurs à l’aide de l'in-
dex gradué vu sur le devant de l'appareil. Un mil-
liampèremètre M se trouve, en outre, sur la
gauche de la boite.
Dans sa rotation, la vis provoque le déplacement
de la pointe exploratrice d’un rhéomicrophone C
composé d'un cadre formant comme les côtés
N° 1454
d’une boite dont une plaque isolante constitue le
fond, et dont le couvercle est une lame flexible
conductrice en charbon destinée à traduire les
variations de relief de l’image en courants d’inten-
sité différente dans la ligne. Pour cela, on inter-
cale des résistances convenablement calculées
entre dix plots disposés sur la plaque isolante. Le
courant venant d’une petite batterie de piles arrive
au premier plot, toujours en contact avec la lame
conductrice, puis sort par le fil rattaché au dernier
plot. Par suite des pressions plus ou moins fortes
COSMOS
631
exercées sur elle, selon les creux ou les reliefs du
cliché à la gélatine bichromatée, ceite lame, en
s'infléchissant plus ou moins, vient toucher un
nombre de plots variable et croissant avec la force
de l’impulsion reçue. D'où variations successives
de l'intensité du courant envoyé dans la ligne.
D'autre part, grâce à l'emploi de contacts micro-
phoniques, on évite la brusque mise en court-cir-
cuit des bobines, et on obtient beaucoup plus de
douceur dans la transmission des photographies.
Nous n'entrerons pas dans plus de détails au
F1G. 2. — APPAREIL RÉCEPTEUR DE LA STATION D'ARRIVÉE.
A1, lampe Nernst. — B,, oscillographe Blondel. — C;, lentille aplanétique et gamme de teintes. — D,, chassis photographique
contenant le cylindre et la préparation sensible. — M;,, moteur électrique.
sujet des organes du phototélégraphe portalif,
long peut-être à décrire, mais d’un maniement aisé
et sûr. Ajoutons seulement que des mécanismes
convenables assurent un synchronisme parfait des
cylindres et un réglage rapide du rhéomicrophone.
Rendons-nous compte maintenant de la façon
dont notre reporter-photographe va pouvoir luti-
liser.
Après avoir pris une vue avec son kodak ou son
détective, il en tire une épreuve à la gélatine bi-
chromatée qu'avant séchage il dispose sur le
cylindre du phototélégraphe, puis il entre dans
une cabine téléphonique quelconque, met son appa-
reil en communication avec la ligne. A la station
d'arrivée, son correspondant relie l'extrémité des
mêmes fils téléphoniques au poste récepteur d'un
grand pholotélégraphe Belin sur le cylindre duquel
se trouve mis le papier à impressionner, protégé
par une sorte de châssis photographique hexagonal.
Tout est prêt alors pour l'envoi de la photogra-
phie. Les opérateurs, après avoir échangé les si-
gnaux nécessaires et synchronisé leurs appareils,
opèrent la transmission. Il faut remarquer, du
reste, que la mise du phototélégraphe en dériva-
632
tion sur la ligne ne nuit d'aucune manière au fonc-
tionnement simultané du poste téléphonique.
Inspectons, pendant les quatre minutes que va
durer la transmission de la photographie, les or-
ganes du poste récepteur. Une lampe NernstA,(fig.2)
sert de source lumineuse ; elle projette ses rayons
sur la surface sensible à impressionner à travers un
oscillographe Blondel B,.Ce dernier se compose de
deux grosses bobines entre lesquelles oscille un
miroir dont}les mouvements sont proportionnels
à l'intensité des courants recus. Le faisceau émis
Fıc. 3. — PORTRAIT TRANSMIS
AU MOYEN DU PHOTOTÉLÉGRAPHE BELIN.
par la lampe Nernst se réfléchit sur cette petite
glace, puis il passe au travers d'une lentille apla-
nétique C, contre laquelle l'inventeur applique une
gamme de teintes ou lame de verre nuancée gra-
duellement de droite à gauche, depuis le noir jus-
qu'à la transparence parfaite. D'autre part; grâce
au moteur électrique M, (vu sous la table de l'ap-
pareilet dont la vitesse est rigoureusement accordée
avec celle du mécanisme du poste transmetteur au
moyen d’un rhéostat spécial et d'un fréquence-
mètre à lames), le cylindre récepteur, de dimensions
COSMOS
5 DÉCEMBRE 1912
identiques à celui du poste transmetteur, tourne
dans une boite en bois D,. Cette chambre noire est
percée, contre la préparation sensible enroulée,
d’une ouverture circulaire de un tiers de millimètre
de diamètre à raison de l’écartement 'choisi pour
les spires. Par cet orifice, excessivement ténu, pé-
nètrent les rayons lumineux seuls, tandis que les
parois de la boite arrêtent les irradiations du fais-
ceau qui donneraient du flou à l’épreuve finale.
Comme les reliefs de l’image du phototélégraphe
transmetteur impriment à la lame du rhéomicro-
phone de continuels déplacements, le courant
envoyé prend une intensité qui varie proportion-
nellement aux creux et aux saillies de l’épreuve
originale.
Ces variations électriques communiquent au
miroir de l’oscillographe des déviations succes-
sives très rapides. Par suite, le faisceau lumineux
… réfléchi oscille lui-même de droite à gauche, du
centre au bord de la lentille ; il rencontre lagamme
de teintes qui réduit plus ou moins son intensité
lumineuse. D'autre part, puisqu'on a disposé la
pellicule sensible au foyer conjugué du miroir par
rapport à la lentille, le trou est continuellement
éclairé. Donc, quand le faisceau tombe au centre
de la lentille, la transparence absolue de la gamme
ne produisant aucune extinction, l'impression
lumineuse devient maximum, et on obtient sur
l'épreuve originale un noir photographique. Au
contraire, si le faisceau lumineux réfléchi tombe
sur le bord de la lentille, l'opacité absolue de la
gamme produit une extinction complète et par
suite un blanc. Pour toutes les positions intermé-
diaires du faisceau réfléchi, l'échelle de teintes
détermine l’affaiblissement convenable, et l'effet
photographique désiré se réalise.
Divers moyens mathématiques ou mécaniques
permettent de graduer exactement la gamme de
teintes, de régler la rotation du cylindre et la sen-
sibilité de l'oscillographe. L'image reçue est alors
entièrement conforme à l'original. Une de nos
illustrations — reproduction sans retouche d’une
phototélégraphie originale (fig. 3) obtenue récem-
ment par M. Edouard Belin — témoigne de la
finesse du procédé, essayé il y a quelque temps
sur une ligne téléphonique française d’environ
150 kilomètres de longueur. D'ailleurs, l'inventeur
espère mème réduire la durée de transmission au
cours des prochaines expériences publiques qui
auront lieu entre une grande ville du Sud-Ouest et
Paris, afin de consacrer définitivement la valeur
de son phototélégraphe portatif.
JacouEs BOYER.
Ne 425%
COSMOS
633
Les races humaines néolithiques.
Les différentes races humaines qui, aux temps
paléolithiques, peuplaient l’Europe centrale et occi-
dentale, rentrent, si l’on en juge d'après les docu-
ments actuels, dans la série dolichocéphale (4). Il
nen est pas de même des races néolithiques. Le
type brachycéphale apparait et se répand; les deux
types se trouvant en contact donnent naissance à
de nombreuses variétés et formes intermédiaires.
Aussi l'étude des races néolithiques est-elle très
complexe. « Au lieu d’un petit nombre de formes
nettement définies et susceptibles d’être groupées
dans le cadre d'une classification simple, nous ren-
controns des types multiples comportant de nom-
breuses variétés. Aussi, malgré les efforts persévé-
rants des spécialistes, les théories relatives à Pori-
gine et à la répartition des anciennes races
européennes, théories nombreuses et souvent
confuses, ne procurent à l’histoire primitive de
l’humanité que des données trop probléma-
tiques. » (2)
Dans les Iles Britanniques et la Russie, le type
dolichocéphale est seul représenté; en Espagne,
en Portugal, en Suède, les deux races dolichocé-
phale et brachycéphale sont mélangées, mais la
première domine; en France, en Suisse, en Alle-
magne, en Autriche, le mélange est bien plus
accentué (3).
Pour ce qui est de la France en particulier, on
peut cependant répartir les squelettes de l’âge de
la pierre polie en deux groupes principaux : un
groupe dolichocéphale et un groupe brachycéphale.
Ce dernier est représenté surtout dans la France
orientale, le premier dans les provinces de l'Ouest
et du Sud-Ouest.
4° Le groupe dolichocéphale ou groupe des
Baumes-Chaudes. — Il tire son nom des grottes
de Baumes-Chaudes, près de Saint-Georges-de-
(1) Cf. Cosmos, n° 1430. Pespère revenir d'une façon
plus détaillée sur la découverte d'Ipswich, signalée
dans ce dernier article. Qu'il me suffise pour l'instant
de constater combien étaient nécessaires les réserves
de ma conclusion: l’ancienneté du squelette en ques-
tion serait en effet actuellement abandonnée par plu-
sieurs savants anglais et français, parmi lesquels
M. Boule. Cf. Revue du Clergé français, À. Bouyssoxte,
le Squelette d'Ipsivrich, numéro du 15 sept. 1912.
M. Boule, d’ailleurs, avait déjà fait part de ses doutes
dans l’Aathropologie: « Si l'antiquité du squelette d'Tps-
wich était scientifiquement démontrée, nous serions
en présence d’une découverte de tout premier ordre;
mais il me parait prudent d'attendre pour ètre fixé
les témoignages de géologues et de paléontologistes
avertis. » Janvier-février 1912, p. 118.
(2) DÉcueLeTTE, Manuel, p. 482.
(3) Cf. J. pe Moncan: les Premiéres civilisations,
p. 158.
Lévejae (Lozère). Ces grottes, fouillées (4875-1878)
par le D' Prunières, à qui d’ailleurs l’on doit en
grande partie l'étude des stations analogues de Ja
Lozère et du Gard, formaient de véritables ossuaires.
dans lesquels étaient amoncelés sans ordre de
nombreux débris humains: l'une d'elles a livré les
restes de près de 300 cadavres de tout sexe et de
tout âge. Le mobilier funéraire, comme il arrive
souvent dans les ossuaires néolithiques, était
extrêmement pauvre.
Ce type des Baumes-Chaudes a de grandes affi-
nités avec celui de Cro-Magnon, tout en ayant un
aspect général plus harmonieux. Le crâne est doli-
chocéphale; trente-cinq ont été mesurés et ont
fourni des indices céphaliques variant entre 64,3
et 75,1, avec une moyenne de 72,6 (1); le front
est haut, très développé, les arcades sourcillères
peu saillantes ; le prognathisme est nul, la région
occipitale, en revanche, présente une saillie en
forme de chignon; la capacité crânienne est grande,
en rapport avec la tète, volumineuse comme celle-
du type Cro-Magnon, mais à contours plus affinés.
Les tibias sont platycnémiques (rìazvs, large,
xvrur, jambe, tibia), c'est-à-dire aplatis en lame-
de sabre, particularité fréquente chez les néoli-
thiques, mais très rare dans les populations
actuelles. Le squelette est élancé; la taille est
médiocre, 4,60 m environ pour les adultes; cette
taille a été calculée sur 15 férnurs dont la longueur
moyenne était de 423 millimètres.
Au type des Baumes-Chaudes se rattache le type
dit de l'}omme-Mort, de la grotte du mème nom,
située à Saint-Pierre-des-Tripiers (sud-ouest de la
Lozère). Là encore, le mobilier funéraire était très
pauvre; quant aux squelettes, ils étaient une cin-
quantaine environ. Le tvpe est encore dolichocé-
phale, mais présentant des marques évidentes de
métissage brachvcéphale, quoique peu prononcées.
Sur 19 crânes, en effet, 17 ont un indice céphalique
compris entre 6N.2 et 76,7, les deux autres avant
respectivement 78,5 et 78,8 (mésaticéphales). Le
squelette est relativement grêle et la taille varie
entre 4,48 m et 1,65 m.
A ces deux types, le Dr Lucien Mayet vient
(1) Rappelons pour mémoire la nomenclature crà-
nienne de Broca, basée sur l'indice céphalique. Sur
ce dernier, Cf. Cosmos, art. cit.
Dolichocéphales....,.... au-dessous de 75.
Sous-dolichocéphales...,. au-dessous de 77,7
jusqu'à %5.
Mésaticéphales ou méso-
CÉPDRAIUSS.. sas entre 77,7 et X0.
Sous-brachycéphales ..., au-dessus de S0
Jusqu'à 83,3.
Brachycéphales ,........ au-dessus de 83,3.
63%
d'ajouter celui de #ontouliers (Hérault) (1). Ce
dernier, lui aussi, est dolichocéphale, avec infiltra-
tion brachycéphale un peu plus accentuée que
dans le précédent. « Les crânes recueillis sont en
majorité dolichocéphales et forment une série assez
homogène de douze crânes dont les indices s’éche-
Jonnent entre 72,1 et 77,9. Deux crânes ayant res-
pectivement un indice de 82,2 et 80 traduisent
neltement l’infiltralion du sang brachycéphale
dans cette ancienne population dolichocéphale.
Celle-ci était d'une race plutòt affinée, avec un
squelette plutôt grèleque massif, une taille moyenne
de 1,60 m, un crâne aux lignes harmonieuses avec
front bombé et bien développé. La face était
courte avec des orbites basses et élargies trans-
versalement.... Le degré de prognathisme ne sau-
rait être déterminé avec les pièces mal conservées :
ce prognathisme me parait minimum et sans
aucun rapport avec celui des races humaines infé-
rieures actuelles, non plus qu'avec celui des hommes
fossiles du quaternaire moyen » (2).
2° Le groupe brachycéphale. — Ce groupe a
aussi reçu les noms de groupe de Grenelle {à
Paris), de Furfooz (près Dinant, Belgique), ou
encore de La Truchère (Saône-et-Loire). Cette race,
de taille moyenne, avait tout d'abord été classée
par MM. de Quatrefages et Hamy parmi les races
paléolithiques; mais on a reconnu plus tard que
cette race était néolithique: la méprise, d’ailleurs,
est compréhensible : ces corps avaient très bien
pu être déposés soit fortuitement (Grenelle), soit
intentionnellement (Trou du Frontal, à Furfooz) à
la surface de dépôts paléolithiques.
L'habitat de la race brachycéphale était, nous
l'avons déjà dit, les provinces orientales de la
France; on peut mème encore distinguer deux
centres principaux: un centre belge au Nord-Est
(Pas-de-Calais, Aisne, Meuse, Oise, Marne, Seine-
ct-Marne, Seine-et-Oise), un centre allobroge
(Savoie, Isère, Drôme). Il me semble intéressant
de noter ici une particularité que l’on rencontre
souvent chez les néolithiques belges, le T sincipi-
tal, espèce de cicatrice tracée plus ou moins pro-
fondément le long de la suture unissant les deux
pariétaux, se terminant au sommet de la tête
(sinciput) par un autre sillon perpendiculaire au
premier (3).
(1) Lucien Maver, les Néolithiques de Montouliers.
Etude sommaire d'un ossuaire néolithique découvert
& Montouliers (Hérault), dans l'Anthropologie, janvier-
février 1912.
(2) D° Maver, l'Anthropologie, art. cit., p. 91 et 68.
(3) On a déjà réuni un certain nombre de textes
de l'antiquité et du moyen äge susceptibles d'expli-
quer cette étrange coutume. Il en résulte que, depuis
l'époque classique, l'usage existait de pratiquer par-
fois, sur le sommet de la tċte, des incisions ou cauté-
risalions en forme de croix, soit dans un but théra-
COSMOS 5 DÉCEMBRE 1912
Quelle est la cause de l'introduction dans nos
régions de cette race qui, par son union avec la
précédente, devait donner naissance à de nombreux
types mixtes et finalement constituer nos races
modernes? Je ne veux pas entrer dans les discus-
sions soulevées par cette question; qu'il suffise de
savoir que des deux hypothèses proposées : lutte
violente au cours de laquelle la race nouvelle aurait
vaincu et conquis la race antérieure ou bien infil-
tralion pacifique et progressive, la dernière semble
être la plus probable; l'a:cord cependant est loin
d'être fait, et l'hypothèse de l'invasion violente
garde encore de savants défenseurs. Quant à l'opi-
nion émise par le D' Adolphe Bloch: transforma-
tion du type dolichocéphale en type brachycéphale
par des modifications successives dues à l’influence
du milieu, elle ne semble pas avoir été admise
par les anthropologistes.
IL nous faut, pour être complet, signaler parmi
les races vivant aux temps néolithiques la présence
en certains endroits d'individus nains ou « pyg-
mées ». Leur proportion est parfois si forte qu’on
a pu se demander s'ils ne formaient pas un groupe
humain spécial, analogue aux négrilles actuels,
plutôt que d'attribuer leur existence à un arrêt
pathologique de la croissance dů à des causes
purement locales. « Certaines sépultures néoli-
thiques de la Suisse ont livré les restes osseux
d'individus de très petite taille, qui ont rappelé le
souvenir des pygmées de l'antiquité, bien connus
par les textes et les monuments des époques
grecque et romaine. La première mention de ces
nains se rencontre déjà dans l’Iliade. Hérodote les
signale sur le cours supérieur du Nil. Plusieurs
écrivains grecs alexandrins connaissent les pyg-
mées de l'Inde et de l'Afrique équatoriale. Aristote
mentionne dans les marais situés au sud de
l'Égypte, et d'où sort le Nil, une race de petits
hommes qui vivaient dans ces trous. L’ethnogra-
phie moderne a démontré que ces asserlions des
auteurs de l’antiquité n'étaient nullement, comme
on lavait cru, de simples récits fabuleux. On con-
nait de nombreuses tribus de nains dans l'Inde, en
Océanie et surtout en Afrique, où les nains (né-
grilles) sont dispersés, d'après M. Deniker, sur une
large zone qui s'étend à 3° au nord et au sud de
l'Equateur, à travers tout le continent africain,
depuis l’Ouganda jusqu'au Gabon.
» L'Europe a également possédé aux temps néo-
lithiques quelques tribus de nains ou tout au moins
peutique ou préservalif, soit comme signe de consé-
cralion ou d'initiation analogue aux tonsures des
clercs, soit encore comme simple ornement rappelant
la scarification de la face. L’archéologie préhistorique
établit la haute antiquité de ces pratiques. » DÉGuE-
LETTE, Op. eil., pe ASi.
Ne 145%
d'hommes de très petite taille. On les a signalés
en Suisse dans les stations du Schweizersbild (près
Schaffouse) et du Dachsenbüel..…. Dans le premier
abri, M. Nüesch trouva, à côté de sépultures con-
tenant des individus de taille moyenne (1,60 m et
au-dessus), cinq squelettes dont M. Kollmann a
évalué la taille moyenne à 1,38-1,42 m. Toutes
ces sépultures ont élé classées au néolithique. Dans
la caverne du Dachsenbüel, près de Herblingen,
canton de Schaffouse, le D°' Von Mandach ren-
contra, en 4874, une tombe néolithique fermée par
COSMOS
635
des dalles, renfermant plusieurs corps d'adultes et
d'enfants, notamment une femme de très petite
taille...
» En France, on reconnait çà et là, à l’aide des
mensurations de squelettes néolithiques, la présence
sporadique d’adultes de petite taille, par exemple
dans l'allée couverte des Mureaux (Seine-et-Oise),
où la taille des femmes n'alteint en moyenne que
1,55 m, tandis que celle des hommes s'élève à
1,70 m. La plus petite taille des squelettes de
femmes arrive à peine à 41,50 m. » (1) G. Drioux.
o
Sismographe Cartuja à composante verticale.
Modèle de démonstration.
Avant de construire une puissante composante
verticale comparable aux bifilaires Cartuja de 425
et de 305 kilogrammes de masse et au Cartuja ver-
tical de 280 kilogrammes, nous avons voulu nous
essayer d’abord avec un petit instrument utilisable
comme modèle de démonstration.
Son poids total est de 2750 grammes, sa hauteur
32 centimètres; il est donc de dimensions très
réduites. La masse pendulaire est de 273 grammes,
la période propre de 2,1 secondes; le grossissement
peut varier entre 10 et 25 fois, et un amortissement
jusqu’à l’apériodicité s'obtient très facilement par
le moyen d’un petit cylindre en bois susceptible
d’être fixé à la masse pendulaire el qu’on immerge
plus ou moins dans la vaseline liquide contenue
dans un réservoir cylindrique. Cet amortisseur peut
rapidement être adapté ou, par contre, mis de côté.
La formule générale qui donne la période, en
secondes, d'une composante verticale en fonction
de l'élongation du ressort sous le poids de la
masse est: à
LES VE
g
ou dans le système métrique:
Tyg
à peu près. Si comme à Comrie, en 1844 (4), l'appli-
cation du ressort à boudin ne se fait pas directe-
ment à la masse, mais par l'entremise d'un levier
dont les bras (distances entre le point d'application
du ressort et le centre de gravité de la masse, et
enire le point d'appui et le point d'application du
levier) soient L et / respectivement, la formule pré-
cédente se transforme en :
LES EE
\ l
Si le point d'application du ressort se fait plus
(1) Cosmos, n° 1328 (9 juill. 19410), p. 32-34, fig. 2.
(2) D' R. EnLerT, Zusammenstellung, etc., der Seismo-
meter (Beitræge cur Geophysik, III, 2, S. 424, Fig. 55).
bas que le centre de gravité de la masse, la période
de l'instrument se rehausse, de même qu'avec l’ac-
tion de ressorts qui opposent une certaine résis-
tance aux déplacements de la masse en fonction de
SISMOGRAPHE A COMPOSANTE VERTICALE DE CARTUJA.
la gravité et de l’élasticité du ressort à boudin. Des
poids convenablement disposés à l'opposé de la
masse et plus haut augmentent aussi la période.
Tous ces dispositifs sont réunis dans ce petit
modèle de démonstralion, que nous désignons, tout
comme les autres instruments également construits
sous notre direction par des Frères coadjuteurs de
notre Compagnie de Jésus, sous le titre de Cartuja,
du nom de la station sismologique actuellement à
notre charge.
(1) DÉCHELETTE, Manuel, p. 483.
636
Le ressort à boudin est en laiton écroui de
2,5 mm de diamètre; les spires de l’hélice me-
surent 42 millimètres de diamètre, et la longueur
totale du fil métallique est de 3640 millimètres.
Une livre anglaise (453 grammes), convenablement
suspendue, produit une élongation de 43 milli-
mètres, ce qui permet le calcul du module de rigi-
dité (G, second module de Young, constante u de
Lamé), d’après la formule :
__2LRM 2» 3640 X 440 X 0,453
am E 3,146 X 2,44 X 43
— 4,3 X 10" (C. G. S.).
= 4 400 =
Le module de torsion ou coefficient de Coulomb
est :
zG
Y= 32
= 4,25 X 10" (C. G. S.).
Dans la supposition que la valeur du coefficient
de Poisson ou c soit = 0,3, le module d'élasticité
de Young serait: E = 11,2 X 101! (C. G. S.).
La masse directement suspendue produit une
élongation de 27 millimètres, correspondant à une
période de 0,33 seconde. L'élongation qu'elle
devait produire avec L = 2 /, en tenant compte du
poids de son étrier en fer, ne devrait pas dépasser
de 60 à 65 millimètres. Le reste de l’étirage jus-
qu’à 410 millimètres est produit par les deux res-
———_——
COSMOS
5 DÉCEMBRE 19412
sorts plats d'acier trempé bien que très minces,
qui servent d’axe d’oscillation à la messe. Si le
centre de gravité de celle-ci était à la même hau-
teur que le point inférieur d'application du ressort
à boudin, la période serait de 0,94 seconde, tandis
qu’elle est de 2,1 secondes (correspondant à une
élongation de 1 100 millimètres), avec le petit poids
supplémentaire et le levier multiplicateur-inscrip-
teur avec son spiral de réveille-matin monté, et de
1,5 seconde correspondant à 560 millimètres
d’élongation dans les mêmes conditions, mais sans
le poids.
Malgré sa masse insignifiante et ses dimensions
qui le font apparaitre comme un petit jouet scien-
tifique plus que comme un instrument sérieux, le sis-
mographe à composante verticale Cartuja, modèle
de démonstration, est capable, non seulement de
donner des graphiques de tremblements de terre
sensibles, faibles, moyens ou un peu sévères, mais
aussi d'accuser des mouvements artificiels, y com-
pris même ceux produits dans le sol par le fonction-
nement des petits moteurs à explosion, quoique,
pour ces derniers, une masse de plusieurs kilo-
grammes soit presque nécessaire.
Exx.-M°-S. Navarno NEUMANX, S. J.,
directeur de la Station sismologique,
de Cartuja (Grenade).
Perceptions successives de linfiniment petit.
L'infiniment petit ? Il semble que, de par sa
nature même, il soit impossible sinon de le conce-
voir, du moins de le percevoir et de le mesurer.
De fait, il est ainsi théoriquement et en principe.
On ne peut, en pratique, que chercher à se
rapprocher davantage de cet infini qui, malgré les
étonnants progrès accomplis, demeure et sera tou-
jours insaisissable. Il n’est pas moins intéressant
d'examiner la suite des efforts faits par les savants
des diverses spécialités en vue de diminuer les
divers aspects de l'infiniment petit perceptible.
Plusieurs moyens, en effet, s'offrent pour per-
mettre d'imaginer nettement l'extrême petitesse.
Les plus simples sont le raisonnement et la com-
paraison, alliés de la plus admirable façon dans la
page bien connue de l'illustre philosophe catho-
lique auteur des Pensées. Un autre moyen, en
quelque sorte analogue, est donné par les mathé-
maliques : un grand nombre de décimales, un
chitfre à puissance élevée indiquent nettement des
ordres de grandeur extrêmement petits. Toutefois,
on n'exprime ainsi que des notions abstraites.
L'esprit simple et aimant la clarté peut préférer
à ces spéculations elles-mêmes infinies des chiffres
sans doute moins petits, mais exprimant des réa-
lités, des faits tangibles et mesurables. A l’intérèt
philosophique de la connaissance de tehes notions,
se joint un intérêt autrement considérable : dans
les diverses sciences, il est de la plus haute utilité
de progresser dans la connaissance de l'infiniment
petit analysable. Ainsi est rendue possible la véri-
fication plus exacte des lois, ainsi devient mieux
connue la structure intime des choses. l
On jugera des progrès accomplis à ces points de
vue par les savants des temps modernes d'après
la rapide histoire que nous allons retracer des con-
ceptions successives de l’infiniment petit visible
d'une part, et de l'infiniment petit pondérable
d'autre part.
L'infiniment petit microscopique. — Sans aucun
des moyens perfectionnés du laboratoire, il est
évident que l’extrèmement petit visible l’emporte
de beaucoup sur celui qu'on peut usuellement
peser : une patte de mouche ou un grain de pollen
ne feront nullement osciller l'aiguille du pèse-
lettre. Nous verrons se conserver cette supériorité
due à l’extrème perfection de l'œil. Toutefois, la
puissance visuelle peut être aisément multipliée,
et il est souvent utile de le faire. La loupe, qui est
bien le plus simple des instruments d'optique,
connu dès la plus haute antiquité, permet ainsi de
Ne 11454
grandir jusqu'à cinquante fois le diamètre apparent
des objets (1).
* Le pouvoir grossissant de la loupe est limité
assez étroilement par l'imperfection forcée du
mécanisme rudimentaire de l'appareil. C'est pour-
quoi on imagina d'associer deux éléments optiques :
le doublet, formé de deux loupes accolées, permet
d'atteindre un grossissement de 400 diamètres.
H s'agit d'ailleurs, dans ce cas, d'appareils mo-
dernes très perfectionnés, dont la puissance est
supérieure aux premiers mieroscopes imaginés en
Hollande à la fin du xvr siècle par Zacharias Jan-
sen, le lunettier de Middlebourg. Le microscope
véritable, formé de deux éléments : l’oculaire et
l'objectif, montés aux extrémités d'un tube, ne
permit guère d'obtenir de forts grossissements qu'au
début du siècle dernier. C'est plus tard encore, vers
4850, qu'on construisit les premiers appareils à
multilentilles calculées de façon à se corriger entre
elles. On imagina ensuite les objectifs à immer-
sion, réunis à l’objet examiné par une goutte
d'huile transparente, ce qui permet de supprimer
la réfraction au contact de l'air. Les appareils à
immersion sont indispensables pour les travaux de
bactériologie où l’on doit examiner couramment
des microbes extrêmement petits, tels que le bacille
de Koch, par exemple (tuberculose), à des grossisse-
ments d'au moins 1 000 diamètres. On peut d’ail-
leurs arriver à 4500 et 2000 diamètres, mais à
l’aide de microscopes très délicats, véritables chefs-
d'œuvre de fabrication.
Au cours de ces dernières années, un nouveau
perfectionnement de haute importance devait être
apporté au microscope, qui permit de reculer beau-
coup la limite de visibilité. Nous ne voyons rien
habituellement dans lair de la maison. Qu'un
rayon de Soleil pénètre pourtant par la fenètre,
son trajet illumine une infinité de poussières
microscopiques en suspension. De même, au lieu
d'éclairer les objets regardés au microscope par
transparence ou par réflexion, qu’on y dirige trans-
versalement un rayon de vive lumière, et sur le
fond sombre du champ apparaitront des taches
brillantes formées par des corpuscules reflétant un
peu de clarté. Lultra-microscope ainsi réalisé, per-
met la vue de poussières si fines qu'elles n’altèrent
nullement la transparence des liquides où elles
sont et passent à travers les filtres les mieux faits,
qu'on ne peut voir leur forme réelle, mais seule-
ment les taches qui indiquent leur présence. Ainsi,
les particules solides du métal contenu dans une
solution d’or colloïdal peuvent mesurer à peu près
six cent-millièmes de millimètre!
Est-ce là tout ? Non; il paraissait impossible de
pouvoir pénétrer plus loin, étant donné que la
(4) Breswster a présenté en 1852, à la Société royale
de Londres, une loupe de cristal de roche retrouvée
au cours de fouilles à Ninive.
COSMOS
637
lumière est formée d'une vibration d'une certaine
amplitude au delà de laquelle les choses ne peuvent
plus donner d'image visible. Pour surmonter cette
impossibilité apparente, on eut l'idée d'employer,
pour voir ces choses « étonnantes par leur peti-
tesse », des rayons de lumière nouvelle. L’ultra-
violet, fait de vibrations à amplitudes extrêmement
courtes, sert à l'éclairage de certains microscopes
et révèle de nouveaux détails ignorés. Sans doute,
il est invisible à l'œil, maisil est capable d'impres-
sionner la plaque sensible, qui permettra indirecte-
ment de voir malgré tout quelques secrets aupara-
vant insoupçonnés..... (1)
Mesure pondérale de l'infiniment petit. — On
sait que les chimistes effectuent les pesées à l’aide
de balances remarquablement sensibles. Une bonne
balance de laboratoire permet d'apprécier facile-
ment le dixième de milligramme (0,000 1 g); et
s’il s’agit d'un appareil destiné aux essais de haute
précision, on peut même atteindre la sensibilité
au centième de milligramme (0,00001 g). On
obtient cela avec des dispositifs somme toute
analogues à ceux de la balance classique à fléau :
l'appareil ne diffère que par le soin extrème pris
dans la construction, lechoix des matièresemployées
et la minutie avec laquelle on effectue les essais.
A l'établissement international des poids et me-
sures de Meudon, par exemple, certaines balances
reposent sur un massif de maconnerie s'enfoncant
dans le sol sans contact avec le plañcher, et l’opé-
rateur manipule à distance de plusieurs mètres
pour que son soutlle ne fasse pas varier la tempé-
rature. En effet, quand on opère avec une telle
précision, les moindres changements de tempera-
ture, de pression atmosphériques apportent des
perturbations capables de fausser les résultats.
Déjà, dans certaines de ces balances, les dépla-
cements du fléau sont observés à l'aide d'un micro-
scope : comme l'angle forméavec l'horizontale varie
selon l'excès de charge, on conçoit que, par visée
d'un point du fléau et comparaison avec une gra-
dualion micrométique, on puisse apprécier des
fractions de matière pesante plus petites encore que
celles dont nous avons noté l’extrème petitesse :
on peut arriver ainsi au millième de milligramme
(0,000 001 g).
La fameuse balance, récemment imaginée par
l'illustre physicien anglais W. Ramsay (2), est
bien autrement sensible: elle donne moins du
cent-millième de milligramme (0,000 000003 g)!
Elle est micro-manométrique, c'est-à-dire qu’un
déplacement du fléau est apprécié par un micro-
scope et qu'il est provoqué par une variation de
(t) Toutes choses égales, on peut voir à l’ultra-violet
un objet égal à 0,36 fois de celui tout juste visible
à la lumière blanche. (Cotton-Mouton.)
(2) Cf. description et gravure données dans le Cos-
mos, t. LXVI, n° 1418, p. 344, 28 mars 1912.
638
pression manométriquement mesurée. Ce fléau est
en silice, matière à la fois très dure (ce qui permet
de tailler les couteaux porteurs dans la substance
même) et presque insensible aux variations de
température (on évite ainsi une cause d'erreurs et
d'ennuis). La balance est contenue dans une boite
métallique étanche reliée à une pompe pneuma-
tique. Dans ces conditions, si l'on a suspendu à
l'une des extrémités une ampoule de quartz con-
tenant quelques millimètres cubes d'un gaz à
peser, le tout étant lesté par une charge placée
de l'autre còté, il suffit de faire varier la pres-
sion pour que S'établisse exactement l'équilibre.
Ainsi, l’artifice permet de remplacer des poids —
pratiquement impossibles à fabriquer — par un
manomètre. L'équilibre établi, on brise la pointe de
l’ampoule qui tombe dans une cupule placée des-
sous, on fait le vide, on laisse rentrer l'air : le gaz
de l'ampoule est de la sorte éliminé. Finalement
on établit à nouveau l’équilibre : la pression néces-
saire pour cela diffère de celle constatée en premier,
puisqu’au gaz de l'ampoule est substitué de lair,
dont la densité diffère. Connaissant le volume de
l'ampoule et la densitė de l'air, il devient possible
de calculer le poids de gaz d'après la différence des
deux pressions manométriques.
Les poids de substance déterminée de la sorte
sont-ils à la limite de l'infiniment petit pondéral ?
Non, et on peut apprécier des quantités plus faibles
encore de malière. Toutefois, c'est à laide de pro-
cédés en général assez peu précis; on peut moins
obtenir des chiffres que des ordres de grandeur.
On sait que le spectroscope, qui permet d'analyser
la substance des étoiles au rayonnement de leur
lumière, est extrêmement sensible ; c’est ainsi qu'on
peut apprėcier 0,000 000 000 2 g d'hélium, gaz rare
que contiennent l'atmosphère du Soleil et certains
COSMOS
B DÉCEMBRE 1914
minéraux terrestres. Nous possédons chacun un
appareil encore plus compliqué et sensible que le
spectroscope, c'est le nez, qui est capable de sentir
les odeurs produites par des quantités infiniment
petites de certaines substances très parfumées.
Ainsi, un produit chimique à très mauvaise odeur,
combinaison d'alcool et d'hydrogène sulfuré (le
gaz que dégagent les œufs pourris), donne, à dose
de 0,000 000 000 01 g, une sensation très percep-
tible.
Et ce n'est pas là un record !
Il est encore un moyen d'appréciation plus sen-
sible, au moins en ce qui concerne le radium, dont
on connait la curieuse propriété de décharger à
distance un condensateur électrique. L'électroscope
de Curie, basé sur cette propriété pour per-
mettre la mesure du radium, permet de constater
la présence de cet élément à dose minimum de
0,000 000 000 001 g, soit un milliardième de milli-
gramme! « Si, dit Ramsay, un milligramme de
radium élait partagé enlre les deux milliards
d'hommes vivant à la surface de la Terre, chacun
deux en posséderait assez pour décharger cinq
électroscopes et pouvoir ainsi, s’il était assez habile,
étudier les propriétés les plus importantes de ce
COrpS..... »
si On a peine à concevoir qu'il puisse exister
un tel atome imperceptible. Et pourtant, il faut
évidemment voir là, peut-être, « une infinité de
mondes dont chacun a son firmament, ses planètes,
sa terre... danscetle terre, des animaux..... ettrou-
ver encorè dans les autres la même chose, sans fin
ni repos... » Quels vastes et riches champs nos
savants ont-ils encore à moissonner! Et quelles
nouvelles poussières d'alomes nous feront-ils bien-
tôt voir dans le champ de nouveaux mystérieux
appareils ? Henri ROUSSET.
Observations relatives aux manifestations vocales
d’un Anthropoïde (Hylobates leucogenys Ogilby)".
J'ai suivi pendant plus de cinq années l’évolulion
d'un gibbon (Hylobates leucogenys Ogilby), et j'ai
noté avec soin ses manifestations vocales.
Ces observations ont de l'intérêt, parce que
l'animal ayant été placé dès son jeune âge dans
des conditions particulières (isolement de ses sem-
blables), la comparaison de ses manifestations
vocales avec celles des anthropoiïdes de la mème
espèce, sauvages ou vivant en captivité dans leur
pavs d’origine, nous renseigne sur la nature des
sans émis par ces mammifères.
Indépendamment du grand chant caractéristique
r
(1) Comptes rendus, % novembre 1912,
qui traduit chez l’adulte un état d'excitalion, j'ai
noté chez cet hylobate treize manifestations vocales
principales, traduisant des états de satisfaction ou
de bien-être, de malaise ou de crainte, et des états
intermédiaires.
Voici le tableau des principales émissions vocales
de l'/ylobate leucogenys :
4° État de satisfaction ou de bien-être. — Hoc
hooc hoc; hoc hous houc, hag couag, gouacgac:
hein, hem (à la fois toux et han causé par un
effort); koui, hiig, hig (avec écartement des
lèvres).
Ne 1154
2 État de malaise ou de crainte. — Hoc
hoouc, hoc; koc, hog, koug hiiig; ook, okouk
(grave et saccadé) ; crucg, crenng (avec grincement
des dents).
3 État intermédiaire. — Thuinng (doux et
plaintif); hoooougig (plaintif et long); kou hig,
ook; preutt, prurrt (avec vibration des lèvres).
# Grand chant d'excitation (avec roulades).
Malgré leur variété et leur nombre, les sons
émis par l’anthropoïde que j'ai observé ne servent
à indiquer que des notions assez vagues : dangereux,
agréable, bon, mauvais, amitié, inimitié.
Je ne crois pas qu’on puisse leur donner la
valeur des mots et les considérer comme les termes
d'un langage, ainsi que voudrait le faire M. Gar-
ner ({) pour les singes qu’il a étudiés.
Ces sons ne représentent pas un langage rudi-
mentaire, mais constituent quelque chose de très
différent du langage, tel qu’on doit le définir
scientifiquement. Ils n'ont que la valeur d’un
pseudo-langage, parce qu'ils différent des mots
quanlitativement, et aussi qualitativement.
. Je base cette affirmation sur les faits constatés
pendant l'évolution de l’hylobate que j'ai élevé.
Je dois remarquer qu’au moment où j'en ai pris
possession, il ne prenait contact avec le monde
extérieur que pour prendre sa nourriture, et qu'à
partir du jour de sa captivité il est resté sous ma
surveillance et pratiquement à l’abri de tout con-
tact avec ses semblables.
COSMOS
639
Cependant, tous les sons que j'avais entendu
émettre par les hylobates de la même espèce,
libres ou captifs, dans leur pays d'origine, ont été
reproduits par lui, spontanément et sans éducation.
Ceci est particulièrement remarquable pour le chant
caractéristique de sa race.
A son arrivée en France (février 1909), l'animal
très jeune, puisqu'il mavait pas complété sa denti-
tion de lait, n’avait encore jamais essayé d'émettre
le grand chant. Ce n’est que plusieurs mois après
son arrivée qu'il commença quelques tentatives.
Peu à peu, le chant mal ébauché devint plus
fort et plus complet. Enfin, plusieurs mois après,
enregistré sur le phonographe, il ne parait différer
en rien du chant si caractéristique que j'ai entendu
à maintes reprises dans les forèts de Annam et
du Tonkin.
On peut conclure de ces faits que les sons émis
par les gibbons de la même espèce et à l’élat sau-
vage sont spontanés.
Etant donné que le gibbon est le mammifère
qui présente les manifestations vocales les plus
étendues, il semble permis d'étendre cette conclu-
sion aux autres mammifères et de dire :
Que les sons émis par les mammifères consti-
tuent un pseudo-langage el diffèrent des sons du
langage proprement dit en ce qu’ils ne sont pas le
produit d’une éducation, qu'ils n'ont rien de con-
ventionnel et représentent des sons spontanés.
Louis BOUTAN.
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 25 novembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Sur le vol à voile. — L'oiseau voilier entretient
son énergie et, par suite, son vol en manœuvrant de
manière à être actionné à certains moments par une
force tangentielle propulsive. M. Thouvexy établit que
les conditions dans lesquelles la propulsion prend
naissance sont les suivantes :
À. L'oiseau ayant vent debout décrit une trajec-
toire dont la pente est plus ascendante ou moins des-
cendante que celle de la vitesse du vent prise en sens
inverse.
B. L'oiseau ayant vent arrière décrit une trajectoire
dont la pente est plus descendante ou moins ascen-
dante que celle du vent.
C. Par vent horizontal, l’oiseau décrit dans un plan
horizontal une trajectoire opposant sa convexité au
vent.
A l'aide des principes et des formules établis, l’au-
teur a pu trouver des explicalions rationnelles pour
(2) Garner, Speech of Monkey.
presque toutes les manıruvres connues et suffisam-
ment décrites, Cette méthode a montré, notamment,
que le voilier ne fait pas usage d'un mécanisme unique;
tout en n'appliquant qu'un nombre très restreint de
principes, il varie assez ses procédés d'exécution pour
que chaque type d'évolution comporte sa théorie par-
ticulière.
Sur une méthode expérimentale pour déter-
miner à l'avance les tensions qui se produi-
ront dans les constructions. — Pour un projet
de pont de 97 mètres d'ouverture, à arc encastré et
tablier partiellement solidaire de l'arc, M. MESNAGER
a fait faire un modèle en verre à l'échelle de 3 mil-
licmes. La méthode qui consiste à fabriquer des
pivces en réduction el à étudier la répartition des
efforts et des tensions qui s'y produisent en faisant
tomber normalement en chaque point un rayon de
lumière polarisé n'élait usitée que pour des pièces de
forme simple; la raison est que le verre est coùteux
à tailler, qu'il est ditlicile de faire des blocs évidés,
qu'on ne peut souder les pièces sans produire des
eflets de trempe importants. L'auteur à pu cependant
réaliser un modèle compliqué en collant simplement
avec de la gélatine, rendue soluble à froid, les unes
sur les autres, des pièces de verre découpées dans
des feuilles de glace recuiles avec soin.
610
Pour le modele de pont, il a été possible d'obtenir:
l° les points où se produiront les plus grandes ten-
sions; 2’ les combinaisons de charges les plus défa-
vorables; 3° la valeur des plus grandes tensions ou
pressions.
La dépense du modèle n'a pas atteint le millième de
celle de l'ouvrage.
Radiotélégraphie : Sur la réception d’an-
tennes au ras du sol. — M. EE. RoTué complète
sa note du 22 janvier {912 en signalant les nouveaux
essais faits près de Saint-Dié: les résultats dilfèrent
un peu de ceux qu'a obtenus M. Jégou près de Saint-
Brieuc, àù une distance de Paris à peu près égale à
celle de Saint-Dié, inais dans la direction opposée.
L’antenne dont il s’est servi était un fil de cuivre
unique placé sur des potelets de 15 centimètres de
haut, très mal isolé, touchant parfois l'herbe.
La longueur a varié d’un minimum de 15 mètres
jusqu'à un maximum de 35 mètres. Cette antenne
communiquait avec une conduite d'eau {conduite
d'arrosage du jardin), par l'intermédiaire d'une bo-
bine de self de 0,005 henry. Elle n’était pas orientée
dans la direction Paris. Le circuit du détecteur, com-
prenant en série le détecteur, le téléphone et les piles,
était en dérivation entre le sol et le point d'attache
de l'antenne et de la self. Dans ces conditions, on
entend parfaitement la tour Eittel.
Micromanomètre. — Le manomètre extrme-
ment sensible construit par M. A. Henry est constitué
par une sorte de niveau d'eau : dans le tube hori-
zontal qui joint les deux réservoirs. le liquide est
séparé en deux parties à l’aide d’une bulle d’air jouant
le rôle d’index. Le meilleur liquide à employer est le
tétrachlorure de carbone, ininflammable, inaltérable
à l'air et peu visqueux. Dans un de ces micromano-
mètres, un grain de plomb de 2,2 mm de diamètre,
mis dans un des réservoirs qui mesurent #5 milli-
mètres de diamètre, déplace très nettement la bulle :
l'appareil accuse donc une variation de pression de
0,005 millimètre d’eau.
Influence de la radio-activité sar le déve-
loppement des plantes. — Comme substance
radio-active, M. J. STokLasa a employé du nasturan,
qui accuse une teneur en radium de 0,136 mg par
kilogramime; le nasturan était enfermé dans des réci-
pients de verre, immergés à leur tour dans la solu-
tion nutritive, au contact des racines des plantes.
Après trente jours de végétation, surtout dans le cas
du maïs, on constate de grandes différences avec les
témoins : le poids de neuf plantes venues sans nasturan
était de 20,16 g; avec 0,5 g de matière radio-active, la
végétation était plus toutfue et a donné, après trente-
deux jours, 36,24 g de récolte, En revanche, 1 gramme
de nasturan n'a plus donné que 3,88 g; avec ? grammes,
la récolte s'est encore abaissée à 3.26 g, et avec
t grammes à 262 g.
La quantité Ja plus favorable de matitre active a
donc été de 6,5: au delà de cette dose, elle est devenue
franchement nuisible.
L'auteur a constaté aussi un développement remar-
quable de graines et plantes diverses : blé, orge, fève,
pois, trèfle, arrosées avec les eaux très radio-actives
de Joachirustal, puisées chaque jour à la source, car
COSMOS
5 DÉCEMBRE 4942
leur activité disparait assez vite. Ces eaux ont, par
contre, une influence empéchante sur certains microor-
ganismes.
Sur la faune ichtyologique des côtes de
l’Angola. — En se basant sur les collections de pois-
sons comestibles rapportées de cette région au
Muséum de Paris, par M. Gruvel, M. Jacoves PELLE-
GRIN examine les rapports qui peuvent exister entre la
faune ichtyologique de parties du littoral africain
situées, au nord et au sud de l'Atlantique, à des lati-
tudes sensiblement analogues.
Sur 34 espèces recucillies, une seule est spéciale à la
région; 18 appartiennent à la faune des côtes de
France et # autres, qui ne se rencontrent pas en France,
existent cependant en Méditerranée.
La conclusion qui s'impose, c'est que la faune ichtvo-
logique marine du sud de l’Angola, comme celle des
côtes de Mauritanie et du Sénégal, comprend un mé-
lange de formes tempérées et de formes tropicales,
les premières semblant prédominer.
En outre, abstraction faite des espèces à distribu-
tion géographique très étendue, un grand nombre de
poissons communs de la Méditerranée et des parties
avoisinantes de l'Atlantique se retrouvent aussi en
abondance sur le littoral Sud de l’Angola, tandis qu'ils
disparaissent complètement ou sont tout à fait acci-
dentels sous l'équateur, à la surface, ou près des côtes
africaines.
Ces similitudes de faune semblent correspondre sur-
tout à des similitudes de conditions de milieu et de
température.
Cinquième liste de nébuleuses découvertes à l'Ob-
servaloire de Paris. Note de M. G. Bicourpan. — Sur
la détermination du coefficient respiratoire réel. Note
de MM. L. MaouEexxe et E. Demoussy. — Sur l’action
simultanée de la pesanteur et du champ magnétique
uniforme sur un gaz ionisé. Note de M. Gouy. — La
Commission des paratonnerres, composée des membres
de la section de Physique et de MM. Vire et LE
CHATELIER, a été priće par le sous-secrétaire d'État
des Postes et des Télégraphes de donner son avis sur
les dispositifs électriques dits « Niagaras », et sur les
dangers auxquels peuvent étre exposés les bureaux
centraux télégraphiques et téléphoniques établis dans
le voisinage. — Sur la valeur asymptotique de la
meilleure approximation des fonctions analytiques.
Note de M. Serce BERNSTEIN. — Remarques sur la note
de M. Kr. Birkeland, relative à l'origine des planètes
et de leurs satellites. Note de M. Cane STŒœRMER. — Sur
l'ionisation de l'air par l'arc au mercure sous quartz.
Note de MM. Léon et Eucixe BLocu. — Le coefficient
critique et le poids moléculaire des corps au point cri-
tique. Note de M. À. BourTanic. — Sur les propriétés
therme-électriques du système fer-nickel-carbone.
Note de MM. Eveèxe-L. Duprey et A. Ponrevin. — Sur
les réactions chimiques de l'or f et sur l'or cristallisé.
Note de MM. M. Haxuior et F. Raout. — Sur la car-
piline, nouvel alcaloide du jaborandi. Note de
MM. E. Lécer et FenniNAND Roques. — Sur l’introduc-
tion et sur la réussite du giroflier au Gabon. Note de
M. Avg. CHEVALIER. — Le gamétophyte des Marchan-
liales. De l'importance de ses caractères anatomiques.
Note de M. À. LamoTuE. — La vérité du schéma hété-
rohoméotvpique. Note de M. V. GrÉçGoine. — Nou-
No 1454
velle contribution à l'étude des substances hémoly-
tiques dérivées du sérum et du vitellus de l'œuf,
soumis à l’action des venins. Note de M.C. D8LEZENNE
et M'™ S. Lenrsr. — Propriétés physiologiques de cer-
tains lipoiïdes. Les lipoiïdes homo-et hétéro-stimulants
des organes. Note de M. Hexar Iscovesco. — Sur la
durée de la circulation pulmonaire. Note de
MAL. J.-P. LaNczois et G. Dessotis. — L'antigéne dans
la réaction de Wassermann. Note de M. A. DEsuoc-
LIÈRE. — Variations du ventricule succenturié et du
gésier entrainées chez les canards par divers régimes
alimentaires. Note de M. A. MaGxanx. — Sur les divi-
sions de l’éocène en Égypte. Note de M. R. FourTac.
— Sur la faune de vertébrés découverte dans l'aqui-
tanien supérieur de l'Agenais. Note de M, G. Vasseur,
.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’'AVYANCEMENT DES SCIENCES!”
Congrès de Nîmes.
Anthropologie.
Sous la présidence du D’ Marian, directeur du
musée arlésien d’ethnographie, la Section a nommé
M. ADniEN bpe MonrTtILLET président d'honneur, et
MM. Félix Mazaunic et GaLiEex MEXGaup (Nimes) vice-
présidents ; le secrétaire était notre aimable collabora-
teur, M. GÉNEAU.
M. L. Ginaux (Paris) 1° a étudié les Monuments
mégalithiques des communes de Lussos, de Laville-
dieu et de Saint-Laurent-sur-Coiron, canton de Ville-
neuve-de-Berg (Ardèche). Ce canton a déjà été exploré,
il y a une quarantaine d'années, par M. Ollier de
Marichard; au lieu des vingt dolmens cités dans son
ouvrage les Monuments mégalithiques du Vivarais,
M. Giraux en a reconnu vingt-cinq, qu'il a explorés
complètement. L'auteur est intimement persuadé qu'il
retrouvera sur le territoire de la dernière de ces com-
munes d’autres monuments encore. Les dolmens
sont alignés sur des parallèles, il se propose de re-
chercher si cet alignement se continue pour les monu-
ments d'autres communes plus au Sud. L'entrée de
tous ces dolmens est située du côté du Soleil levant,
variant seulement de l'E.-E.-S. au S.-S.-E.
2 Description des ossements utilisés provenant de la
grotte de Bize (Aude). — Recherches très anciennes
de Tournal, d'autres très nombreuses ont été faites
depuis. M. Jean Miquel est l'auteur de celles que
M. Giraux expose. La grotte a été occupe pendant
toute la durée du solutréen, ainsi que pendant le
magdalénien et le quaternaire. Les fouilles exposées
dans ce travail ont permis de récolter des silex taillés
et un très grand nombre d'ossements travaillés :
pointes, lissoirs, aiguilles. La faune nombreuse de
celte grotte appartenait au bœuf, au cheval, au renne
et à l'ours.
Ces instruments présentent des traces d'utilisation,
dépécement, des traces gravées intentionnelles, des
traces de morsures.
MM. les D” Lrcies Mayer (Lyon) et A. Gazer (Olonzac)
(1) Suite, voir p. 613.
COSMOS
611
ont exploré la Grotte des Poteries, à Fauzan, décou-
verte par M. Gazel.
Cette grotte a dù servir d'ossuaire au début du
néolithique, a été habitée vers la fin du néolithique
et pendant la fin des temps préhistoriques, et a enfin
été retrouvée et utilisée comme salle, passagèrement,
à la fin du moyen àge. |
M. Marits Daizoxr (Alger) étudie les /ndustries de
la pierre dans le nord de l'Oranie et en conclut que
l'industrie préhistorique est à peu près la mme dans
tous les gisements du Tell qu'il a pu explorer; elle a
de grandes analogies avec celle des Hauts-Plateaux et
du Sahara, sinon une complète similitude. Les sta-
tions du Sud se distinguent par l’abondance extraor-
dinaire des belles pointes de flèches et la présence de
rares types (hachettes plates, pointes à écusson) que
l'on peut espérer, sans doute, rencontrer un jour plus
au Nord.
Céramique ancienne trouvée a Marseille. — M. Sra-
NISLAS CLASTRIER avait la surveillance archéologique de
la rue Rouge, de celle des Grandes-Maries et de la
rue des Phocéens ; une ample moisson a été récoltée,
M. Clastrier en présente des spécimens.
M. L. FraxcHET (Asnières) étudie la Technique réra-
mique chez les negres de l'Afrique centrale. — On ne
compte guère que 10 pour 100 des tribus où cette
industrie soit pratiquée par les hommes. Ce sont habi-
tuellement les femmes qui s’y consacrent. On trouvera
dans cet important mémoire des renseignements sur
l'argile employée, les dégraissants, le façonnage, le
séchage, la décoration, la cuisson. Une intéressante
bibliographie termine le mémoire.
M. D. Peyvrosy (Les Eyzies de Tayac) a effectué de
Nouvelles fouilles aux Champs-Blanes. — Il y a décou-
vert des sculptures appartenant à une phase très an-
cienne du magdalénien, et qui doivent ètre presque
synchrones du niveau inférieur de la Madeleine. Les
découvertes de ce genre ouvrent des horizons nou-
veaux sur l'art et les murs des Paléolithiques supé-
rieurs.
Une conséquence importante semble pouvoir être
tirée de là: chaque tribu devait ètre indépendante,
avoir son chef, son sorcier, son habitat, son temple,
avec ses dieux particuliers.
M. GEunues CorrTY (Paris). La schematisation du
chariot «à l'époque préhistorique. — L'auteur a récem-
ment relevé sur une roche de la forèt de Fontainebleau
« l'abri Jean La Fontaine », un pétroglyphe qui peut
se rapprocher de ce que M. Reber a appele une deui-
roue (pétroglyphe d'HubelwWangen, Suede), Le signe
de Mance-Scoul, près Guérande, est sans doute du
méme groupe que ceux de Lardy ou celai de la grotte
du Bourrelier à Matesherbes. La cupule qui entoure
ces signes symboliserait łe chariot tont entier. Les
pétroglyphes de la région parisienne présentent évi-
deminent un aspect plus archaique que ceux du lac
des Merveilles, par exemple, mais leur sens est ana-
logue.
M. G. RorxEL (Cherbourg) a trouvé des vestiges
d'habitations protohistoriques dans la baie de Nacque-
viile (Manche).
M. le D' Jees (Joyeuse, Ardèche) a relevé sous les
642
parois de la salle terminale de la grotte de Caïre-Crès
des graffiti historiques, trois figures de bouquetins
et de chèvres.
M. Couvoxr (Amiens) donne une chronologie et une
stratigraphie des industries néolithiques et paléoli-
thiques dans les dépüts holocènes et pléistocènes du nord
de la France.
M. Corre (Pertuis). Les idées actuelles sur le pléisto-
cène provençal. — Dans ce travail sont résumés les opi-
nions de MM. Rutot, Penck, Marcelin Boule, D. Martin,
Joleaud, Répelin, et un essai de concordance des élé-
ments des travaux de ces deux derniers et de ceux
de M. Penck.
Les Umbranici. = M. le D' ManiGxaN rappelle que
les anciens historiens et géographes grecs ou romains
disent que ces peuples habitaient le Bas-Languedoc,
antérieurement aux Ligures et aux Ibères. La table
de Peutinger place l'habitat de ceux-ci entre l'Hérault
et le Rhône. L'auteur démontre que ces Umbranici
étaient des peuples de la pierre polie. Il s'appuie sur
les travaux concordants de M. Gabriel Carrière (pa-
léoethnologie des Cévennes) et de M. Mayet (ossuaire
néolithique de Mont-Louis), et sur les observations de
Lapouge sur la platycnémie commune à l'époque néo-
lithique; fréquente encore dans la population actuelle
du Bas-Languedoc, cette forme est devenue un caractère
racial. D’après de Lapouge, c'est aux Umbranici qu'il
COSMOS
5 DÉCEMBRE 19192
faut attribuer les inscriptions en caractères grecs,
antérieures aux Gaulois, inscriplions trouvées dans le
Gard, l'Hérault, la Vaucluse et les Bouches-du-Rhône.
La langue parlée était aussi voisine du latin que
l'osque ou l'ombrien.
M. Boyard (Nan-sous-Thil, Côte-d'Or) continue ses
fouilles de l'abri sous roche du Poron des Cuëches. —
Elles ont atteint la couche magdalénienne en 1911-
1912, elle est formée de terre jaunâtre, quelques poches
de sable grossier existent le long de la paroi et dans
l'épaisseur de la couche. Cette couche est épaisse de
£ mètres, il ne semble pas qu'il y ait de différence
dans son industrie. La faune aussi est la mème. La
base actuelle de la fouille remonterait au moins au
magdalénien inférieur. 5
M. le D’ Marcez Baupocin (Paris) a découvert un
polissoir à stries de charrue, enfoui sous les sables de
l'ile de Riez (Vendée). — Ce polissoir néolithique est
le premier découvert dans cette partie de la Vendée
maritime, il était enfoui sous le sable d'une dune fort
ancienne préromaine, fait extrêmement rare, peut-ètre
unique jusqu'ici. M. Baudouin en a fait l'étude com-
plète. En plus de nombreuses cuvettes, ce polissoir
présente des stries superposées, d'âge différent, qui
ne peuvent ètre dues qu’au soc de la charrue, et même
une gravure de sabot d'équidé.
(A suivre.) E. Héricuaro.
BIBLIOGRAPHIE
Exploitation des mines métalliques. Méthodes
d'extraction des minerais, par W.-R. CRANE,
professeur et doyen de l'Ecole des mines et de
métallurgie du State college de Pensylvanie,
traduit et augmenté par ALBERT BORDEAUX, ingé-
nieur des mines. In-8 de vur-182 pages avec
65 figures (broché, 9 francs; cartonné, 10,50 fr).
H. Dunod et E. Pinat, éditeurs, 47 et 49, quai
des Grands-Augustins, Paris, 14912.
Il n'existait jusqu'ici aucun ouvrage où l'on
puisse trouver une description systématique et
détaillée des méthodes d'extraction des minerais.
C'est avec cette pensée que M. Crane a rédigé
cet ouvrage, uniquement consacré aux méthodes
d'extraction des minerais, espérant ainsi rendre
service à la fois à l'étudiant et à l’exploilant pour
acquérir la connaissance de l'extraction et pour
comparer les méthodes. Pour que l'ouvrage soit
aussi ulile que possible, les descriptions sont courtes
et accompagnées d'illustrations nombreuses. En
oulre, lapplivation de chaque méthode a été fixée
par un excimple, avec les avantages et les incon-
vénients de son emploi.
La classilication adoptée pour les diverses m“-
thodes est fondée sur l'étendue du gite, plutot que
sur le genre de minerai ou de métal, ou le carac-
tère du gisement; re procédé semble être à la fois
le plus simple et le plus logique. L'auteur n’a eu
l'intention de décrire que les méthodes qui ont
fait leur preuve par le succès, et cela non seute-
ment dans un endroit, mais dans plusieurs; il n’a
voulu étudier ni les méthodes à l'état de projet ni
celles qui sont en cours d'expérience.
Pour vérifier les descriptions et étudier les mé-
thodes dans tous leurs détails, l’auteur a visité des
mines en nombre suffisant pour voir toutes les
méthodes exposées.
M. A. Bordeaux a cru rendre service aux lecteurs
français en traduisant le travail du savant amé-
ricain.
Les méthodes employées aux États-Unis pour
l'extraction des minerais sont en effet très variées
et diffèrent notablement de celles qu'on emploie
pour les mines de charbon. Or, dans les traités
d'exploitation des mines publiés en français, les
méthodes décrites sont presque uniquement celles
qui sont adoptées pour les mines de charbon. Il
n'est fait aux mines métalliques que de rares
allusions.
Or, les Etats-Unis sont au contraire le théâtre
d'une exploitation intensive des mines métalliques
sur une très vaste échelle.
Comme depuis quelques années il se fait en
France un mouvement actif au sujet de l’exploita-
No 1454
tion des mines d'or, et comme beaucoup de per-
sonnes s'intéressent aux mines métalliques de
l'étranger, il a semblé d'autant plus à propos de
présenter un ouvrage ayant un but utile et pou-
vant servir aussi bien aux étudiants, comme le dit
le professeur Crane, qu'aux ingénieurs des mines,
aux administrateurs des Compagnies minières, et
même aux actionnaires qui s'intéressent à autre
chose qu'à la spéculation financière.
Les moteurs Diesel, type fixe et type marine,
par À. P. CHazkirY, B. Sc. (Londres), A. M. Inst.
CG. E., A.L E. E., avec une introduction par le
D° Ruporr Diesel, traduit de l'anglais par
CH. LorpiæRr, ingénieur civil des mines. In-8° de
xv1-250 pages avec 82 figures (broché, 12 francs,
cartonné, 13,50 fr). Dunod et Pinat, éditeurs.
47 et 49, quai des Grands-Augustins, Paris, 1912.
L'intérêt que le moteur Diesel a suscité depuis
quelques années est remarquable par son caractère
de spontanéité et de généralité. Les questions sou-
levées sont plutôt d'ordre commercial que technique.
C’est ce que M. Chalkley a eu en vue en traitant
ce sujet; il s’est efforcé de rendre ce livre pratique
pour tous ceux qui, pour des raisons très différentes,
ressentent la nécessité de se familiariser avec le
moteur Diesel, et c’est avec intention que certaines
notions élémentaires y ont été traitées pour venir
en aide au lecteur non technicien. Jusqu'ici, on
n'a publié aucun livre uniquement consacré à ce
type de moteur, et il est inutile de dire que l’im-
portance qu'il a prise depuis quelque temps est
plus que suffisante pour justifier pareille entre-
prise.
En matière scientifique, il est quelquefois pos-
sible, avec beaucoup d'attention, de se faire une
opinion à peu près exacte quant à lavenir réservė
è certaines questions. L'adoption générale des
moteurs Diesel sur terre est un fait acquis, et
comme il existe déjà environ 300 navires actionnés
par ces moteurs, on peut prédire en toute sécurité
qu'ils obtiendront un très grand succès, étant
donné surtout que l’on touche presque à la fin de
la période d'essais, si désirable en pareille matière.
Même en admettant que les espérances du début
n'aient été que partiellement réalisées, l’introduc-
tion du moteur Diesel sur le marché aura peut-être
plus d'importance qu'aucune autre invention ré-
cente touchant la science de l'ingénieur.
On étudie successivement dans cet ouvrage : la
théorie des moteurs thermiques; le fonctionne-
ment, la conduite, la construction, l'installation,
la marche, l'essai et l'avenir des moteurs Diesel.
Dans la traduction que M. Lordier donne du
remarquable travail de M. A.-P. Chalkley, il a
conservé intégralement le plan très clair adopté
par l’auteur anglais, ainsi que sa division en para-
graphes. Les notions de thermodynamique appli-
COSMOS
623
quée, qui forment le premier chapitre du livre,
ont été seules transformées, afin de les rendre faci-
lement compréhensibles pour les lecteurs français.
Les produits coloniaux. Origine, production,
commerce, par MM. G. Carrs, docteur ès sciences,
ancien directeur général de l’Agricullure en Indo-
Chine, et D. Bois, assistant au Muséum d'histoire
naturelle, professeur à l'École coloniale. Un vol.
in-18 jésus de 680 pages, avec 202 gravures et
cartes dans le texte (7 fr). Librairie Armand
Colin, 5, rue de Mézières, Paris.
Les personnes qui se décident à aller vivre aux
colonies ont avant tout besoin de connaitre à quoi
elles pourront employer leur activité. Voici un
ouvrage très remarquable qui leur rendra service.
C'est, en effet, une véritable encyclopédie, qui
étudie les divers produits coloniaux selon leur
origine; les auteurs ont puisé aux meilleurs sources,
et donnent sur les différents sujets traités une biblio-
graphie fort complète, qu'on pourra consulter si
l'on veut être plus abondamment documenté pour
certains cas spéciaux. Le plan du livre, très ra-
tionnel, permet de trouver immédiatement les
renseignements dont on a besoin, et des gravures
fort bien exécutées illustrent le texte et donnent
un aperçu très exact des différents produits colo-
niaux, originaires de tout le globe, mais particu-
lièrement des possessions françaises.
L'ouvrage est divisé en trois parties : produits
du règne végétal, du règne animal et du règne
minéral; et pour chacun d’eux, on part de lori-
gine pour aboutir à l'usage pratique que l'on en
peut faire. C’est dire que le coté commercial lui-
mème n'est pas laissé de côté.
La première partie est de beaucoup la plus déve-
loppee;, c'est, en effet, la culture qui est surtout
pratiquée par les colons. La seconde partie s'oc-
cupe des produits d'origine animale : soie, plumes,
ivoire, pécheries et élevage. La partie minérale
est plus restreinte, et la bibliographie, sur ce point,
peu élendue. Cela tient à ce que les exploitations
minicres sont le fait de Compagnies, et intéressent
moins les colons isolés. Le but des auteurs est
d'être utile aux élèves des écoles coloniales, aux
planteurs et administrateurs de domaines colo-
niaux : nous croyons qu'ils l'ont parfaitement
atteint.
Annales del Observatorio del colegio N. S.de
Mont-Serrat. Observaciones meteorologicas de
1911. Habana, imprimerie « Avisador comer-
cial », Amargura 30.
Après une brève description du nouvel Observa-
toire, l'ouvrage mentionne divers cyclones et
ouragans qui ont eu lieu à l'ile de Cuba, el indique
les avantages que procure la méthode de notre
ami M. Guilbert pour la prévision des ouragans.
COSMOS $
5 DÉCEMBRE 19412
FORMULAIRE
Fermeture hermétique des bouteilles. —
Les bouteilles d’eau gazeuse sont bouchées avec
des bouchons très comprimés, nécessaires pour
maintenir la pression intérieure, mais très difficiles
à remettre quand on les a enlevés. Un de nos lec-
—
PETITE
Erratum. — Une erreur typographique s'est glissée
dans le dernier article (n° 1452} de notre collabora-
teur M. Goggia. La seconde ligne de la légende de la
figure # doit être supprimée.
M. E. S., à S. — 1° A longueur de fil égale, la self
est d’autant plus grande que le bobinage est moins
long (fil fin, bobine de grand diamètre). Mais Îles
résultats semblent d'autant meilleurs à la réception que
la self nécessaire est obtenue avec une plus grande
longueur de fil (fil gros, bobine de petit diamètre).
Une bobine de petit diamètre permet aussi un réglage
plus précis par suite de la longueur moins grande
des spires que le déplacement du curseur met succes-
sivement en circuit. — 2° Avec des bobines de grand
diamètre et de faible longueur, on peut en effet faire
varier l'accouplement par rotation d'une des bobines
autour d'un axe perpendiculaire à celui de l'autre.
2e procédé, qui est souvent employé, a aussi été uti-
lisé pour la construction de certaines selfs d'antenne,
dites variomètres, dans lesquelles les deux bobines
sont reliées en série. La rotation d'une bobine par
rapport à l'autre fait varier la self-induction de l'en-
semble.
M. H. de B., à G. — Le Cosmos a parlé des travaux
du D' Carrel dans le numéro 1345 du 26 novembre
4910 et dans le numéro 1407 du 1! janvier 1912; dans
chacun d'eux, on indique dans quelles publications le
D' Carrel a fait paraître ses communications.
M. P. H., à Q. — L'article du D" Corret que nous
venons de publier dans le Cosmos vous donnera tous
les renseignements nécessaires pour établir un poste
récepteur de T. S. F. Le récepteur peut ètre un
simple récepteur téléphonique ordinaire; si vous ne
le trouvez pas assez sensible, il faut en prendre un
spécial pour T. S. F.; la résistance de ces appareils
varie suivant les constructeurs. Le détecteur électro-
lytique est très suffisant et, en pratique, très régulier.
La longueur de l'antenne varie avec la distance qui
vous sépare du poste émetteur; toutes les indications
sont données dans l’article précité. La réception sera
d'autant meilleure que les fils seront plus longs et
plus élevés. Un fil nu est très sutlisant, pourvu qu'il
soit isolé à ses deux extrémités.
R. P. G., à T. (Perse). — Les condensateurs réduc-
tours de tension, dont nous avons parlé dans le
numéro 1449 du 31 octobre dernier, sont seulement
dans là période d'essai, et ne se trouvent pas dans le
commerce. Vous pourriez peut-étre, si vous voulez
taire une installation à 30 volts, soit vous servir tou-
jours des accumulateurs, soit adopter en plus un
transformateur statique, pour marcher directement
le soir sur le courant triphasé.
M. 3. B., à P. — Nous avons soumis votre dispositif
teurs nous signale que rien n'est pourtant plus
facile quand on prend la précaution, avant de ren-
foncer le bouchon, de le fendre avec un couteau
dans la partie inférieure, suivant le diamètre, et
sur le quart de la hauteur environ.
CORRESPONDANCE
à notre collaborateur. Il l’a trouvé intéressant, mais
de construction assez compliquée. Son article ayant
surtout pour but de permettre la réalisation facile des
appareils nécessaires, il a préféré indiquer le conden-
sateur réglable fait avec des tubes de cuivre rentrant
les uns dans les autres, qui donne de bons résultats.
M. J. S., F. — Les notions que vous semblez avoir
sur le grisou ne sont pas suffisantes pour discuter
cette question, qui est depuis longtemps étudiée très
sérieusement par les ingénieurs. Des stations d’essai
fonctionnent par exemple à Liévin, avec des galeries
artificielles (voir Cosmos, t. LXII, n° 1326, p. 703),
et des expériences vont étre faites dans la mine même,
à Commentry.
M. J. G., à C. — A propos du condensateur-réduc-
teur de tension : si on intercale dans le circuit, ali-
menté sous une tension E, un condensateur de capa-
citéCet une lampe dont la tension normale est e, on a
(l étant intensité efficace, w la pulsation, et induc-
tance étant supposée négligeable):
I X 105
(0) yE: — e?.
C est exprimé en microfarads.— L'intensité est don-
née dans la note en question (n° 41449); c'est Pinten-
sité normale, à quelques centièmes près, dans les cas
les plus défavorables.
Un abonné, à G. — Pour ces thermomètres de pré-
cision, adressez-vous à la maison Tonnelot, dont vous
avez l'adresse. — Les baromètres les plus précis sont
évidemment ceux à mercure. Cependant, pour un
amateur, le baromètre anéroïde est très suffisant,
pourvu que son réglage soit vérifié de temps en temps.
M. F. M. B., à A. — Bulletin de l'Institut Pasteur,
bimensuel (26 fr par an); et Comptes rendus hebdo-
madaires de la Société de biologie (28 fr par an).
Librairie Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris.
M. E. L., à N. — La lumitre fournie par une lampe
à filament métallique ordinaire est bien faible pour
donner de bonnes projections, même peu agrandies;
il y a avantage à ce que les filaments soient rappro-
chés le plus possible. — La transformation est peu de
chose et il est facile de la faire opérer dans votre ville. —
Si votre rhéostat laisse passer encore trop de courant
lorsque toutes les spires sont utilisées, il est facile,
soit d'en augmenter le nombre, soit plutòt d'y ajouter
un rhéostat liquide.
M.H.V.T. W.,à T.— Ces pierres pourront vous étre
fournies par les Carrières de Corbeil, 5, rue Lailitte.
à Paris, ou par M. A. Desforges, carrières d'Orgenoy,
à Ponthierry (Seine-et-Marne).
0 a ae e A
Imprimerie P. Fernon-Vaau. 3 et 5, rue Bayard, Paris, VIlle..
Le gérant: A. FAIGLs.
Ne 1455 — 42 DÉCEMBRE 1919
COSMOS
645
SOMMAIRE
Tour du monde. — Le sondage des espaces stellaires par les grands instruments d'optique. Comparaison
des deux étés 1911 et 1912. La Faculté de médecine de Beyrouth. Le gaz naturel aux États-Unis d'Amérique.
Expériences sur la formation du charbon. Le tunnel sous la Manche. Éclairage du canal de Panama.
Statistique des stations de télégraphie sans fil. Le réseau téléphonique le plus chargé du monde. Une
centrale minuscule. Le Salon de l'automobile. Le cinématographe en couleurs, p. 645.
Correspondance. — L'équalion de Képler et la règle à calcul, J. VrrrRanT, p. 650.
Dans une forcerie de Boules-de-neige, J. Boyer, p. 650. — Hygiène alimentaire. Deux ennemis
de l’enfance : le biberon et le lait anormal, D’ LanacHe, p. 652. — Revue de l’aviation : le Salon
des avions en 1912 (suite), Fournier, p. 654. — Le pin noir d'Autriche, C. ve Kirwan, p. 656. — Les
tourelles de transformateurs de la Société Oerlikon, D. Briuer, p. 657. — La culture du pommier,
F. Marre, p. 660. — Ventilateurs mécaniques, A. B., p. 642. — L’introduction et la réussite du
giroflier au Gabon, A. CHEvauirn, p. 663. — Le vieux neuf : le dactylophone, p. 664. — Sociétés
savantes :
graphie, p. 669.
Académie des sciences, p. 666. Société astronomique de France, B. L., p. 667. — Biblio-
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Le sondage des espaces stellaires par les
grands instruments d'optique. Les progrès
de l’astronomie sont liés à ceux de l’optique. Toute
augmentation de la puissance des lunettes et des
télescopes constitue un pas en avant dans notre
connaissance de l’univers sidéral.
Le professeur E. C. Pickering, dans une circu-
laire de l’Observatoire de Harvard College, donne
un tableau résumant les résultats photographiques
obtenus avec des instruments de puissances diffé-
rentes, jusqu’au plus puissant qui ait été construit.
Voici quelques chiffres que la Gazette astronomique
d'Anvers a empruntés à ce tableau.
La pose était uniformément d’une heure; la der-
nière colonne indique quelle est la grandeur des
étoiles les plus faibles qui ont impressionné la
plaque sensible.
Ouverture de l'instrument.
Etoiles Jes plus faibles
qui ant ètè enregistrées.
illimetres. Grandeur itrllaire.
Lunette de 12 9,7
— 2 11,5
— 102 13,3
— 200 45,0
Télescope de 280 45,6
— 330 16,8
— 610 16,5
= 915 18,9
Enfin, avec le grand télescope de 152 centimètres
d'ouverture du mont Wilson, on a réussi à photo-
&raphier, mais avec uue pose de quatre heures, les
étoiles de grandeur 24,0.
MÉTÉOROLOGIE
Comparaison des deux étés 1911 et 1912.
(A. Ancor, Société nationale d'Agriculture,
T. LXVII. N° 1455.
9 octobre). — Les deux étés de 1944 et de 1913
ont présenté tous deux des caractères absolument
exceptionnels et que leur succession rend plus
exceptionnels encore. Non seulement le mois d'août
4944 a été le plus chaud mois d'août que l'on con-
naisse à Paris depuis qu'on y possède des observa-
tions comparables entre elles, mais jamais on
n'avait observé jusqu'ici une suite de trois mois
conséculifs, juillet, août et septembre, qui ait offert
une température movenne aussi haute qu'en 1914.
Jamais aussi on n’avait éprouvé dans un été un aussi
grand nombre de jours très chauds : la tempéra-
ture a atteint ou dépassé 32 fois 30° dans l’été de
4911, à Paris, alors que le nombre le plus élevé
connu antérieurement était seulement de 17.
Les trois mois de juillet, aoùt et septembre 1912
offrent, avec ceux de l’année précédente, le con-
traste le plus violent que l'an puisse imaginer.
Après de fortes chaleurs du 10 au 18 juillet, la
température a baissé progressivement et est tombée
au-dessous de la normale à partir du 28: elle est
depuis restée continuellement au-dessous de la
normale jusqu'au 29 septembre, sauf le 29 août; on
ne trouverait pas d'exemples de froids aussi per-
sistants en été dans la longue série des observa-
tions de Paris. Les deux mois d'août et de sep-
tembre 1912 sont, chacun individuellement, les
deux mois de même nom les plus froids que l’on
connaisse, le déticit des moyennes, par rapport à
la normale, a été de 2,8 degrés en aoùt et de 3,2 de-
grés en septembre; il est curieux de noter que ces
deux mois ont été exactement l'opposé de ceux de
mars et de février, qui avaient respectivement
donné des excès sur la normale de 2,8 degrés et
3,3 degrés, l'ensemble de ces quatre mois n influera
donc pas sur la moyenne générale de l’année.
En même temps que les températures moyennes
d'aoùût et de septembre étaient aussi basses, les
646
maxima absolus de ces deux mois ont été eux-mêmes
extraordinaires : 24°,7 en aoùt et 21°,1 en sep-
tembre; depuis 1851 au moins, on n’en connait
pas d’aussi bas, et il est curieux de les rapprocher
des maxima 36°,5 et 35°,8, observés les mois dans
correspondants de 1911. Par contre, les minima
absolus, tout en étant bas, 7°,1 en août et 0°,9 en
septembre, ne sont pas extraordinaires et ont
déjà été dépassés.
Cette persistance de temps froid est due à une
prédominance remarquable des vents de la région
Ouest en aoùt, où la mer est plus froide que la
terre, et des vents de la région Nord en septembre.
En aoùt, toute la moitié Nord de la France s'est
trouvée sous l'influence d'une série de dépressions
qui traversaient les iles Britanniques, dans une
sorie de couloir séparant deux zones de hautes pres-
sions sur les Açores et sur l'Islande. Les pluies
amenées par ces dépressions ont causé en Angle-
terre des inondations désastreuses et ont été géné-
ralement fortes dans le nord de la France: 83 mil-
limètres à Paris au lieu de la moyenne normale,
50 millimètres. Par contre, les pays situés dans
l'extrême Nord, Norvège, Islande, Spitzberg, jouis-
saient généralement d'un temps beau, sec et rela-
tivement chaud. En septembre, le régime domi-
nant était tout diférent: une zone de hautes pres-
sions se tenait d'ordinaire sur la mer du Nord ou
la Scandinavie. La France recevait alors des vents
de Nord à Est, qui amenaient avec eux une tem-
pérature très basse, mais en mème temps un temps
sec. La pluie de septembre 1912 est, en effet, une
des plus fuibles que l’on connaisse à Paris; elle n’a
donné en tout que 9 millimètres, soit moins du
cinquième de la quantité normale, 49 millimètres.
À part septembre 1895 qui a été pratiquement sans
pluie, il faut remonter jusqu'en 1834 pour trouver
un mois de septembre aussi sec à Paris. i
-H n’y a donc, en somme, qu'un trait commun
aux deux mois d'aoùt et de septembre 1912, leur
température extrêmement basse. Mais ces basses
températures ont été amenées par des condilions
météorologiques très différentes, et ces différences
se sont manifestées par l’opposition des quantités
de pluie très grandes en août, excessivement faibles
en septembre. :
Les trois étés de 1910, 1941 et 1912, qui ont, tous
trois, été extraordinaires à des titres très différents,
montrent bien quel peu de confiance on doit avoir
dans les hypothèses relatives à l’existence de
périodes alternativement chaudes ou froides, sèches
ou humides, et dans l'application de ces hypo-
thèses vagues à la prévision du temps. Il importe
peu aux agriculteurs qu'une certaine série d'années
soit, dans son ensemble,un peu plus chaude ou un
peu plus froide qu'une autre. Ce qui influe sur les
récoltes, ce n'est pas le caractère moyen d'un
groupe d'années mal défini, mais le caractère
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
propre de chaque année en particulier. Qu'il y
ait ou non une périodicité plus ou moins vague,
l'exemple néfaste de 1910, 19141 et 1912 vient de
nous prouver que deux années consécutives peuvent
présenter des caractères tellement différents, que
l'on rencontre dans l’une et dans l’autre les valeurs
les plus extrêmes de la chaleur et du froid, de la
sécheresse ou de la pluie.
MÉDECINE
La Faculté de médecine de Beyrouth. —
Le 19 novembre ont eu lieu la bénédiction et
l'inauguration de la nouvelle Faculté de médecine
française de Beyrouth, élevée grâce à l’appui de la
souscription ouverte en France et dans la presse
de Paris. En présence du consul général, M. Couget,
assisté des états-majors des navires de guerre fran-
çais #enri-1V et Aontcalm, du délégué apo-
stolique de Syrie, du jury d'examen français, des
professeurs de la Faculté de Beyrouth, des notabi-
lités des colonies française et syrienne, fut faite la
délivrance des diplòmes aux nouveaux docteurs.
Plusieurs discours ont été prononcés par le
Dr Khoury, au nom des anciens élèves; par le pro-
fesseur de Lapersonne, président du jury d'examen;
par le D° Ramy bey, délégué du gouvernement
ottoman; par le consul général de France et par
le R. P. Cattin, S. J., chancelier de la Faculté.
COMBUSTIBLES NATURELS
Le gaz naturel aux États-Unis d'Amérique.
— En 1901, il existait aux États-Unis 10000 puits
fournissant du gaz naturel. Le débit moyen de ces
puits était 4 600 mètres cubes par jour et quelques-
uns avaient un débit journalier de 70Ù 000 mètres
cubes. A l'heure actuelle, la production totale
atteint 141 600 millions de mètres cubes. En 1904,
la canalisation la plus longue destinée au transport
de ce gaz avait 160 kilomètres de longueur.
Actuellement, il en existe une de 640 kilomètres
entre Buffalo et la Virginie occidentale. Il y a en
projet une canalisation de 720 kilomètres de lon-
gueur entre Saint-Louis et les puits du district de
Caddo dans la Louisiane. La longueur totale de
ces canalisations atteint 30 000 kilomètres. La
pression du gaz, qui, dans certains puits, atteint
80 atmosphères, suffit pour refouler celui-ci dans
les conduites. Quand cette pression est insuffisante,
on établit le long de la canalisation des relais de
pompes dont la puissance varie entre 50 et 2000 che-
vaux. Le gaz naturel contient 90 pour 100 de mé-
thane et sa puissance calorifique moyenne est de
8 200 calories par mètre cube. (R. 1.)
Expériences sur la formation du charbon
(/evue électrique, 22 nov.). — Des expériences
faites par le D" Bergiers, de Hanovre, ont permis
Ne 1455
de se rendre compte d'une façon approximative du
temps nécessaire pour la transformation de la
tourbe et de la cellulose en charbon.
La tourbe et la cellulose étaient chauffées dans
un obus (du genre de l'obus calorimétrique), à des
températures variant de 250° à 350°. La pression
était certainement supérieure à 100 atmosphères.
On obtenait ainsi un charbon très gras et en mème
temps un mélange gazeux formé principalement
d’anhydride carbonique et de méthane. La tourbe
employée contenait 85 pour 100 d’eau environ; la
détermination de sa composition, après élimination
de l’eau, donnait les proportions centésimales sui-
vantes. C: 52,4; O: 41,4; H: 5,50; Az : 0,70. La
composition du charbon obtenu variait avec la
température et la durée du chauffage; le tableau
suivant, qui résume les résultats obtenus, montre
que la teneur en carbone augmente à mesure que
croissent celte température et cette durée; c'est le
contraire qui a lieu pour la teneur en oxygène.
Trmp'rature Temps Composition da charbon obtenu.
z T OO se +
è en E ———
Produit primitif. degrés ©. heures. C. (LA H. Az.
Tourbe..… 250 8 74,3 194 520 1,07
— 300 R 77,0 16,9 5,00 1,07
= 340 8 N1,2 13,3 4,65 0,89
— 340 24 840 104 $62 0,95
= 350 A1 85,2 40,4 450 >»
Cellulose. SIO 64 837 10,9 540 »
_ 340 8 834 11,7 5,20 >»
On voit donc que, par un chauffage suffisamment
prolongé à une température d’environ 340°, on peut
obtenir un charbon ayant la composition d'un
charbon bitumineux naturel.
Ces résultats permettent de se faire une idée
très approximative de la durée de formation du
charbon dans la nature. En partant de la cellulose,
on obtiendra à peu près le même charbon par un
chauffage de huit heures à 340° ou de soixante-
quatre heures à 310°. Donc, pour un accroissement
detempérature de 30 degrés, la vitesse de formation
du charbon est doublée. D'après cela, la formation
du charbon dans la nature aurait duré environ
huit millions d'années. Cette conclusion concorde
avec celle des géologues.
GÉNIE CIVIL
Le tunnel sous la Manche. — On parle de
nouveau et avec une certaine activité du tunnel
sous la Manche, si vivement combattu et malheu-
reusement avec tant de succès par certains groupes
intéressés en Angleterre. Mais l'exécution de ce
tunnel s'impose et nombre de corps constitués ont
émis des vœux pour qu'il soit au moins tenté. On
commence même à escompter un établissement.
M. W. Rose Smith vient, à ce sujet, de publier une
brochure dont l'Électricien analyse une partie.
COSMOS
6147
L'auteur propose la construction d'un chemin de
fer électrique de Londres à Douvres. Ce chemin de
fer serait prolongé par une ligne se rendant à
Calais dans un tunnel creusé sous la Manche, puis
par une autre ligne, également électrique, se ren-
dant jusqu’à Paris. M. Smith annonce que des
négociations vont être engagées avec un groupe
de financiers parisiens en vue de la formation
d'une Compagnie qui construirait la ligne électrique
de Paris à Calais, ainsi que la partie du tunnel dont
doit se charger la France. On évitera toutes com-
plications dans la réalisation de l’entreprise en con-
stituant une Compagnie anglo-française, laquelle
aura mission d'obtenir des Parlements des deux
pays toutes les concessions et autorisations néces-
saires. La construction du tunnel, y compris l'in-
térêt sur le capital engagé dans les travaux, qui
dureront cinq ans, entrainera une dépense de
4125 millions de francs, estimation qui nous parait
bien faible.
ACÉTYLÈNE
Eclairage du canal de Panama (Electricien,
23 novembre). Entre autres particularités inté-
ressantes se rencontrant sur le canal de Panama,
le Times Engineering Supplement signale un ingé-
nieux système d'éclairage destiné à faciliter la
navigalion durant la nuit. Aux entrées du canal et
au travers du lac Gatun, une double rangée d'en-
viron 60 bouées automatiquement allumées mar-
quera le chenal. La fourniture des dispositifs
d'éclairement de ces bouées a été contite à une
entreprise de Philadelphie. Toutes les boutes en
question porteront des lanternes avant une portée
optique d'environ {9 kilomètres et chaque feu aura
sa caractéristique distincte. À cet effet, chaque
lanterne sera pourvue de projecteurs dont certains
produiront des éclats simples et d’autres des éclats
complexes. On évitera emploi de feux colorés.
Deux feux, déjà installés à l'entrée, du côté du
Pacifique, ont une portée optique de plus de
32 kilomètres. Une soupape commandée par la
radiation solaire sert à éteindre les feux au lever
du Soleil et à les rallumer à l'approche de la nuite
Cette soupape est formée d'un solide cylindre en
verre qui renferme quatre tiges métalliques. La
tige centrale porte une couche de noir de fumée
qui lui permet d'absorber la lumière, tandis que
les trois autres tiges étant polies réfléchissent les
rayons lumineux. Exposée à la lumière, la tige
centrale, par suile de sa surface absorbante, se
dilate plus que les autres, et sa dilatalion entraine
la fermeture de la soupape, d’où admission de
l'acétylène, le corps éclairant employé, dans le
brileur principal. Une flamme-veilleuse qui brile
continuellement sert à allumer le gaz. — G.
Rappelons aussi qu’une usine électrique pour
éclairage et force motrice sera installée à Gatun.
648 COSMOS 12 DÉCEMBRE 4912
ÉLECTRICITÉ
Statistique des stations de télégraphie sans
fil. — M. H. Thurn, de Berlin, donne, dans une
étude sur la télégraphie sans fil d’après les statis-
tiques du Bureau international au 15 juillet 41912,
des tableaux du nombre de postes établis dans les
divers pays, tant à bord des navires que sur les
côtes. Notre confrère l'Industrie électrique (25nov.)
a, d'après ces tableaux, dressé le suivant, qui donne
les principaux renseignements sur ces différents
postes:
NOMBRE NOMBRE
DB STATIONS DE NAVIRES DE STATIONS COTIÈRES
Aea Dole A ELEL
| PAYS Ouvertes seulement
al
DR GUERBE DE COMMERCE TOTAL TOTAL serres officiel
où en eas de danger
sur aer.
Belgique. ionsimissersuine n
ET E E ETET 2
BUIGAFIB Senna una 1
CARAdR ns Sen uii et 2
GTOCeL sa asie er 13
Grande-Bretagne ................ 213
Maheo dus en nn 1i
Pays-Bas et colonies.......,...... 20
Indes hollandaises .............. »
NORVERO.: 5 sit Nan 1
Autriche-Hongrie................
Portugais side
Roumanie.......................
ÉSDOgNe. ns sudia unes nue
x
"3
œ
5
O
œ
m
l dr
1 m
Uruguay. issus 5
Il faut ajouter aux données de ce tableau les
stations côtières des colonies suivantes: Congo
belge, 1 ; Guinée britannique, 1 ; Indes anglaises, 10;
Somalie anglaise, 2; Cocos keeling, 4; Curaçao, 3:
Afrique française, 5; Indo-Chine, 3; Fidji, 3; Gi-
braltar, 1; Somalie italienne, 7; Liberia, 2; Mada-
gascar, 2; Malte, 4; Maroc, 7; Union sud-afri-
caine, 2; Trinité, 4; Tunis, 1; Indes orientales, 3;
Zanzibar, 2.
En résumé, il y avait au 45 juillet 2 450 navires
munis de stations de télégraphie sans fil, dont
|
|
|
|
|
|
1 4 »
5 60 » » |
47 47 3 »
47 17 i » |
» 25 411 » |
» 1 i »
11 13 33 »
» 11 4 å
» 16 » »
i 2 å :
206 318 29 »
68 209 17 6
17 » »
+59 668 43 27 |
47 124 19 2 |
30 100 7 »
» { 5 » |
t t4 1 » |
36 56 9 6 |
1 1 j »
10 27 6 » |
11 48 3 »
t 9 5 »
9 3 4 »
3 73 19 13
2 29 3 4
27 34 10 5 !
» 2 b » |
i 6 5 » |
253 500 142 50 |
1 262 2 450 37 114
1 188 de guerre et 1 262 de commerce, et 440 sta-
tions côtières dont 145 servant exclusivement
aux services officiels, les 295% autres stations côtières
étant ouvertes au service général ou à un service
public restreint.
Les chiffres suivants donnent une idée de l'im-
portance qu'a prise la télégraphie sans fil. En 1941,
les stations côtières allemandes ont reçu ou envoyé
13 206 télégrammes privés avec 281 000 mots; les
stations côtières anglaises ont envoyé, en 1911,
D 640 télégrammes à des navires et reçu 34 161 télé-
Ne 1455
grammes de ces derniers; du 13 mai au 1° mars
1914, des stations côtières françaises ont reçu ou
envoyé 8 768 télégrammes privés avec 96 783 mots;
parmi celles-ci, celle d'Ouessant avec 3 084 télé-
grammes, et celle de Saintes-Maries-de-la-Mer avec
3082 télégrammes, ont été les plus chargées.
Un navire allant de Hambourg à New-York a,
pendant un voyage aller et retour, envoyé ou reçu
326 télégrammes avec 6 664 mots.
Les « lettres de l’océan », qui sont écrites par les
passagers à bord, et transmises par télégraphie
sans fil sur mer, puis par la poste sur terre, ont eu
également un grand succès; deux mois à peine
après l'introduction de ce nouveau service, on en
avait transmis 700 avec 21000 mots, rien que dans
l’Amérique du Sud.
Le réseau téléphonique le plus chargé du
monde. — Dans les statistiques téléphoniques, la
ville de Stockholm vient en tète avec un nombre
extraordinaire de postes d'abonnés, 191,5 postes
par 4 000 habitants, presque un poste par cinq habi-
tants, tandis que Copenhague ne possède, relati-
vement, que la moitié de ce nombre : 96,5 postes
par 4 000 habitants. [l] convient de dire, pour expli-
quer la position étrange de Stockholm au point de
vue téléphonique, que la ville a deux réseaux qui
pe communiquent absolument pas l’un avec l’autre,
appartenant l'un à l'Etat et l’autre à une Société,
de sorte que beaucoup de commerçants sont obli-
gés d'avoir deux postes, un sur chaque réseau.
` Une centrale minuscule. — La plus petite
usine centrale d'électricité est certainement celle
de l’humble bourgade du Sacramento, dans le
Nebraska, et qui est signalée par l’Electrical
World. Cette petite agglomération ne compte qu’une
douzaine d'habitants: néanmoins, un M. E. G. An-
derson n’a pas hésité à y construire une station
d'électricité. Oh! celle-ci est fort modeste: une
machine de trois chevaux, chauffée au charbon et
au pétrole, suffit à tous les besoins représentés
par 30 lampes au tantale réparties dans toute la
localité.
AUTOMOBILISME
Le Salon de l’automobile. — Le Salon de
l'automobile s’est ouvert le samedi 7 décembre, et
doit durer jusqu'au 24 décembre prochain. L'af-
fluence des visiteurs a été telle, les premiers jours,
qu’il était presque impossible d'approcher des voi-
tures exposées. C'est une preuve que la foule ne
cesse pas de s'intéresser à l'automobilisme et
tient à rester au courant des nouveautés et des
perfectionnements apportés à la fabrication.
Nous reviendrons plus en détail sur cette expo-
sition; disons seulement aujourd’hui que l'industrie
de l’automobile est plus florissante que jamais, si
on en juge par la quantité de modèles exposés. On
peut constater que les constructeurs semblent
COSMOS 649
s'éloigner des châssis moastres ; il y a peu de fortes
voitures; au contraire, la majorité se tient dans
les puissances moyennes, de 40 à 42 chevaux, et il
y a un grand nombre de voiturettes plus faibles et
de prix abordables. Les différents organes sont de
plus en plus cachés, et les moteurs forment un
bloc presque uni; les roues sont indifféremment
métalliques ou en bois. En somme, pas de nou-
veautés sensationnelles, mais des perfectionne-
ments qui ont leur importance.
La décoration des stands est très réussie; le
Grand Palais à, lui aussi, revèiu une parure de
fète, et la verrière du toit est recouverte dans toute
son étendue de draperies aux vives couleurs parti-
culiérement agréables à voir le soir, à la lumière
de milliers de lampes électriques. Cette exposition
est une preuve indéniable de l'état florissant de
l'industrie automobile française.
CINÉMATOGRAPHIE
Le cinématographe en couleurs. — Si les
établissements Gaumont se sont promis de nous
étonner, ils y ont parfaitement réussi. Il y a peu
d'années, nous avions déjà été à même d'apprécier
leur cinématographe parlant; dernièrement, nous
avons pu nous rendre compte de visu des magni-
fiques résultats obtenus parleur dernière nouveauté:
le cinématographe en couleurs.
Voici par quel procédé M. Gaumont obtient cette
vraie merveille. L'appareil de prise de vue possède
trois objectifs superposés et disposés de telle sorte
qu'ils prennent chacun la mème vue exactement.
Devant chaque objectif est placé un filtre coloré :
l'un bleu-violet, l'autre vert, le troisième rouge-
orangé. Les vues sont donc prises trois par trois,
superposées sur une même pellicule, mais chacune
n'est impressivnnée que par les rayons sélectionnés
au moyen des écrans-filtres. Le développement
donne urne bande négative noire et blanche et le
tirage de la bande positive se fait comme d'ordi-
naire. La projection s'opère avec un appareil
ayant, lui aussi, trois objectifs superposés et
munis des mêmes écrans qui ont servi à la prise
du négatif. Les trois images viennent coincider
sur l'écran pour n'en former qu'une seule; il se
forme alors une synthèse des trois couleurs fonda-
mentales qui reproduit exactement celles de la
nature.
C'est simple à dire; c'est beaucoup plus difticile
à réaliser, et les auteurs ont eu bien des obstacles
à surmonter. D'abord, il fallait escamoter trois
vues au lieu d'une à chaque changement. On a dû,
pour cela, imaginer un mécanisme d'assez longue
course qui cependant ne fut pas trop brutal. Pour
faciliter la construction, on a diminué d'un quart
la hauteur habituelle des images, de sorte que,
pour un même sujet, la bande a deux fois et quart
650
la hauteur d’une bande ordinaire. Puis il a fallu
étudier les filtres sélecteurs pour obtenir les cou-
leurs réelles et en particulier le blanc pur. Enfin,
de toute nécessité, la pellicule cinématographique
devait être absolument panchromatique et aussi
rapide pour le rouge que pour le bleu ou le violet.
Toutes ces difficultés ont été résolues par les
établissements Gaumont, et les vues que nous avons
été invités à voir, le 6 décembre, nous ont montré
que la réalisation de la cinématographie en couleurs
par le procédé trichrome avait atteint du premier
coup la perfection. La reproduction des couleurs
est d'une exactitude rigoureuse, et il n’est pas de
teinte, quelle qu’en soit la délicatesse, qui ne soit
admirablement rendue. Nous avons pu voir toute
une série de bouquets de fleurs et une collection
de papillons aux reflets nacrés qui ont soulevé
l'enthousiasme des spectateurs. Et les paysages,
notamment des vaches à l'abreuvoir et une scène
de la moisson, sont, en tous points, remarquables
et donnent une impression de campagne enso-
leillée de la plus parfaite réalité.
CORRESPONDANCE
L’équation de Képler et la règle à calcul.
On sait que pour résoudre l'équation de Képler :
u — e sin u = M, de manière à obtenir l'anomalie
excentrique u d'un astre à orbite elliptique en
fonction de l'excentricité e et de l’anomalie
moyenne M, il faut procéder par approximations
successives. Une méthode très simple (1) consiste
à remplacer d’abord u sous le signe sin par la
valeur M elle-même,ce qui donne: u, =M + esin M;
puis par «,, d'où u, = M + e sin u,, et ainsi de
suite. Le seul inconvénient est que, dans le cas des
excentricités assez fortes, la convergence est lente,
ce qui oblige à recommencer la même opération
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1942
un grand nombre de fois. I] y a alors avantage
à employer la règle à calcul pour obtenir les pre-
mières approximations, qui sont nécessairement
assez grossières. Voici comment on peut procéder
rapidement avec la règle Mannheim de 26 centi-
mètres à curseur.
Soit l'exemple (4) : e — 0, 554 94, M = 34°4936”.
Arrondissant les données et prenant la minute
pour unité d'arc, l'équation peut s'inscrire :
34°20 + a sin ų = u. Il s’agit de former le
second terme du premier membre, pour une série
de valeurs de u et avec le moins de mouvements
et de lectures possible. Pour cela, amenons l'index
gauche de la réglette mobile sous le signe ' de
Péchelle supérieure fixe (ce signe est situé un peu
à droite de = et représente, on le sait : r carac-
téristique 3), puis lisons sur l'échelle supérieure
gauche de la réglette mobile les premiers chiffres
de l’excentricité, soit 555, et amenons-y le curseur :
nous marquons ainsi sur l'échelle supérieure fixe
e
sin 1’
faudra plus toucher au curseur. Retournant alors
la règle, cherchons sur l'échelle des sin le trait
fictif qui correspond à 34° 20’ et amenons-le sous
le trait de repère tracé dans l'encoche droite de la
règle : à ce moment, le curseur indique sur la
réglette mobile les premiers chiffres du terme
cherché, soit 1,08. Plaçant la virgule d'après les
règles ordinaires, on a 4080’. On peut sans incon-
vénient arrondir cette première valeur et la faire
égale à 20°, ce qui donne w, — 54 20’, qu'on lira
à son tour sur l'échelle des sin ; le nouveau résultat
Ju sous le curseur (4600 environ) conduira à
u, = 61°. Une troisième approximation faite avec
plus de soin conduira à u, — 62° 31. Pour pousser
plus loin, il faut recourir aux tables de logarithmes.
JH. VITTRANT.
qu'il est inutile de lire, mais il ne
la valeur
Dans une forcerie de « Boules-de-neige ».
Les Boules-de-neige, dont les gracieuses gerbes
viennent, depuis plusieurs années, concurrencer
les lilas blancs pour la décoration hivernale des
salons parisiens, n'arrivent pas en droite ligne de
Cannes ou de Nice, comme plus d’un de nes lec-
teurs Île croit peut-être. Ces fleurs, qui se vendent
presque à poids d'or au moment des fêtes de Noël
et du jour de l'an, sont nées simplement aux
portes de l'aris : à Vitry-sur-Seine ou à Chätenay,
à Sceaux, Châtillon ou Clamart! Les arbustes
qui les produisent poussent dans l'atmosphère
(1) Voir, par exemple, Arpezr et DAUTHEVILLE, Précis
de mécanique rationnelle, p. 292.
factice de sombres « usines » que nous allons
visiter.
Les Viornes, connues en France sous le nom de
« Boules-de-neige », sont des arbrisseaux à feuilles
opposées et pétiolées, produisant de gracieuses
fleurs blanches groupées en corymbes. Aussi, depuis
qu'on les cultive en hiver dans la banlieue de la
capitale, ces jolies plantes sont très recherchées.
Leur forçage s’opère à peu de choses près comme
celui des lilas.
On arrache les arbustes des pépinières à partir
du 15 novembre, en ayant soin de laisser autour
(1) Cf, ANvoyEr, Cours d'astronomie, t. I", p. 221.
N° 1455
de chaque pied une épaisse motte de terre. Puis on
les rentre sous les hangars de l'établissement après
avoir entouré leurs racines très flexibles d’une
gaine de paille. A droite et à gauche de ces tiges
dénudées, empilées les-unes sur les autres jusqu'au
toit, et ressemblant beaucoup plus à des fagots de
bois mort qu’à des plants destinés à fournir sous
peu de blanches gerbes odorantes, courent les rails
d’un petit Decauville.
Au fur et à mesure des besoins, les jardiniers
chargent les Viornes sur un wagonnet, afin de les
amener jusqu'aux chambres chaudes construites
des deux côtés d’une allée centrale. Dans ces serres
spéciales, on les plante en leur conservant leur
gaine de paille, comme la photographie ci-dessous
permet de s’en rendre compte (fig. 1).
La couche de terre qui recouvre le sol mesure
10 à 45 centimètres de profondeur, et des généra-
- FIG. 1. — PLANTATION DES VIORNES.
ON LÉS ENTERRE AVEC LEUR EMBALLAGE DE PAILLE,
teurs disposés au-devant de chaque porte main-
tiennent à l'intérieur des cases une température
de 28° à 30°, gråce à des tuyaux qui serpentent le
long des murs. Une fois la plantation achevée, on
tire les paillassons qui recouvrent les toitures
vitrées afin qu’une obscurité presque complète
règne durant les premiers jours dans les « cou-
veuses » de Boules-de-neige; on soulève toutefois
ces lattes quotidiennement, pendant quelques mi-
nutes, afin de renouveler lair et de donner aux
plantes juste la quantité de lumière nécessaire à
leur développement,
Au milieu de cette nuit factice, les fleurs de
Viornes blanchissent en devenant chlorotiques. Pour
leur donner un peu de montant et surtout les
empêcher de jaunir, on ouvre les stores vers la
fin de leur croissance, qui s'opère d'ailleurs rapi-
dement dans l'atmosphère attiédie de ces serres.
Après peu de jours de forçage, les bourgeons
COSMOS
651
commencent à débourrer, et il faut procéder à
l'ébourgeonnage. Cette opération consiste à con-
server simplement au sommet de chaque tige deux
à quatre bourgeons à fleurs et deux bourgeons à
feuilles et à supprimer les autres, afin de reporter
sur ceux qui restent la vigueur de la sève. Après
une quinzaine de jours percent quelques pousses
vert tendre, et les grappes de Boules-de-neige se
montrent timidement. Puis, du vingt-cinquième au
trentième jour, la serre entière s'épanouit en
globes dont les blancs pétales sont d'un très bel
effet décoratif.
Les forceurs s'arrangent pour planter chaque
chambre à quelques jours d'intervalle, de manière
que les floraisons se succèdent sans interruption de
F1G. 2. — CUEILLETTE DES BOULES-DE-NEIGE
APRÈS UN MOIS DE FORÇAGE ENVIRON.
la mi-novembre au commencement de mai. Durant
ce temps, on cueille chaque soir les Boules-de-
neige, en tranchant au sécateur les tiges fleuries
(fig. 2). Au fur et à mesure de la cueillette, les
jardiniers les portent ensuite par brassée dans une
cave fraiche. Là, ils les mettent dans des cuves
pleines d’eau où elles attendent que les femmes les
prennent pour les parer avant leur expédition.
Dès le lendemain matin, soigneusement entassées
dans des paniers capitonnés, ces gerbes virginales
partiront pour les Halles, et des commissionnaires
les achèteront en mème temps que des roses et des
lilas également forcés, pour les réexpédier aux
grands fleuristes de Paris et même de Nice ou de
Cannes.
La saison des Boules-de-neige s’achève avec le
printemps, lorsque les fleurs poussées en pleine
terre arrivent sur le marché.
Jacoues Boyer.
652
COSMOS
12 péceupRe 1912
HYGIÈNE ALIMENTAIRE |
Deux ennemis de l'enfance : le biberon et le lait anormal
Effrayé par l'accroissement régulier et constant
de la mortalité infantile, le gouvernement allemand
a décidé, il y a plusieurs mois, d’en rechercher les
causes.
Après une enquête approfondie, il les a trouvées
dans les conditions défectueuses qui président à
l'allaitement; mais ce n’est pas, comme certains
pourraient le croire à priori, le lait lui-mème qui
est incriminé, cest la façon dont il est donné
à l'enfant.
Il ne peut être question ici que de l'allaitement
artificiel par le lait de vache. La mortalité infan-
tile est, avant tout, causée par les gastrites et les
entérites. Ces maladies sont beaucoup moins nom-
breuses chez les enfants élevés au sein que chez ies
enfants nourris aw biberon. Donc, d'après les auto-
rités médicales allemandes, la cause principale de
la mortalité ne peut être que le biberon.
Le gouvernement a pris la résolution d'inter-
venir et de réglementer l'usage du biberon. Les
instruments plus ou moins fantaisistes, munis de
tétines et de tuyaux en caoutchouc fort difiiciles
à désinfecter, en usage actuellement, disparaitront
poùr faire place à un modèle officiel unique plus
conforme dans l'esprit du législateur aux condi-
tions hygièRriques qui doivent présider à l'allaite-
ment artificiel. i
Il est bien évident que le mécanisme compliqué
de la plupart des bibeïñons ne peut être favorable
à l'hygiène de l'enfance, mais nous nous deman-
dons s’il n’y a pas lieu de regarder au delà et
d'examiner minutieusement si le lait lui-même
répond toujours aux conditions réclamées par les
estomacs des petits enfants.
Ne nous occupons pas des laits mouillés et écré-
més. Supposons que la police des denrées alimen-
taires est parfaite et qu'aucune fraude de ce genre
n'est possible, Mais, par ailleurs, peut-on affirmer
que le lait, le lait pour l'enfance, ne laisse jamais
à désirer ?
La vache n’est point un ètre auquel on puisse im-
poser les traitements les plus variés, que l’on puisse
soumettre aux régimes alimentaires les plus dis-
semblables sans que les constantes de son lait se
ressentent du milieu, des obligations, des habitudes,
du régime imposés.
En ce qui concerne la composition de la matière
sucrée, de la matière albuminoïde et de la matière
grasse, le lait normal présente une régularité
remarquable (4), et la nature a réglé la proportion
(1) A condition que les vaches soient en bonne sanlè
et éloignées de l'époque du vélage.
des différents glycérides qui constituent la matière
grasse avec une harmonie telle que cet aliment,
soit à l’état d'émulsion naturelle, soit à l’état de
crème, soit sous forme de beurre, est accueilli,
digéré et assimilé avec le maximum de facilité.
Mais cet équilibre n'est réalisé que dans certaines
conditions bien définies, et rien n'est plus facile que
de le rompre.
Le régime le plus conforme à la nature des
bovidés est le régime pastoral ; c’est celui qui les
rapproche le plus de l'allure initiale de leur exis-
tence avant leur asservissement à l’homme. Paitre
au grand air pendant les saisons tempérées; pen-
dant les saisons rigoureuses, être abrité dans des
étables hygiéniquement construites en pleine cam-
pagne, bien aérées, bien propres, et y recevoir
comme nourriture à l’état sec les végétaux des
prairies livréés à la pâture: telles sont les condi-
tions idéales de l’organisation des troupeaux, et la
qualité de leur lait est encore intimement liée à la
nature des espèces herbacées. Sous ce rapport, les
pelouses ou prairies d’allitude moyenne, celles qui
couronnent les chaumes de la Forèt-Noire, des
Vosges, du Jura, des monts du Vivarais, etc., con-
slituent des habitats de choix.
S'il est un lait parfait, un lait type, c’est bien
celui des vaches appartenant à ces régions.
À mesure que l'on s'écarte de ces conditions et
qu'on déplace les laitières du milieu auquel elles
sont le mieux adaptées, on modifie insensiblement
la qualité de leur lait, et ces modifications suivent
une gamme qui s'étend du lait parfaitement normal
jusqu'aux laits franchement anormaux signalés
depuis quelques années, et surtout depuis quelques
mois, par différentes publications, entre autres par
les Annales des falsifications. Quand on dit lait
anormal, c'est matière grasse du lait anormal
qu’il faut comprendre, car, jusqu'à présent, l'ana-
lyse n’a décelé aucune déformation dans les ma-
tières sucrées et les matières albuminoïdes du lait,
quelle que soit l’alimentation imposée aux laitières.
Les nécessités sociales cantonnent autour des
grandes cités toute une armée de laitières dont
l'existence sédentaire ne peut être comparée à celle
des vaches suisses ou vosgiennes. La pénurie de
fourrages verts, et surtout de fourrages choisis,
oblige les éleveurs à recourir à des rations qui, sous
un faible volume, renferment des substances très
nourrissantes.
Les statistiques publiées par le service de l’agri-
culture en Allemagne nous renseigneront sur l'im-
portance de ce genre d'alimentation.
On peut évaluer la totalité des matières alimen-
Ne 1455
taires préparées pour le bétail et produites par les
industries agricoles à :
Résidus de brasseries. 60 millions de fr. par an
Distilleries de pommes
de terre........ e... 30 —
Distilleries de grains.. $ —
Féculeries et amidon-
DOrIOB aie 10 —
Sucreries.,....., Ses 45 —
Ajoutons à ces spécialités les tourteaux de pail-
mistes, de coco, de colza, de chanvre, de lin, d'œil-
lette, de tournesol, de sésame, d’arachide, de graine
de coton, de cameline, de germes de mais, de sons
divers, de gousses de pois, et les tourteaux de ces
mêmes substances alliées à la mélasse, et nous
aurons le tableau à peu près complet de l'immense
variété d'aliments industriels qui pénètrent dans
les étables. Nous sommes vraiment loin de la pri-
mitive nourriture herbacée à laquelle le Créateur
adapta la dentition, l'estomac et l'intestin des
ruminants.
Il ne paraissait pas possible qu'un lait uniforme
soit la résultante d’une alimentation établie d’après
la nomenclature prodigieusement complexe que
nous venons d'exposer, et dans laquelle les préfé-
rences locales puisent largement pour l'entretien
des troupeaux qui stabulent dans les banlieues des
grandes villes. L'analyse chimique est venue con-
firmer ces prévisions.
Faire l’analyse de la matière grasse du lait n’est
pas chose facile, et après cent ans de discussions
et de recherches, l'incertitude est encore grande
sur Îles proportions de butyrine, de caproine, de
-palmitine, de stéarine qui la constituent, et sur la
façon dont ces corps sont associés à l’oléine dans
le beurre, si bien que, d’après le D' Haton, la vague
définition donnée par Chevreul, il y a bien près
d’un siècle serait encore aujourd'hui la seule exacte :
a Le beurre est un composé de différents glycé-
rides ». ;
Néanmoins l'analyse chimique a constaté que
certains rapports, certaines constantes donnaient
à l’appréciation de la matière grasse du lait une
base certaine; tels sont le rapport des acides gras
volatils solubles aux acidesgras volatils insolubles,
l'indice de saponification, la température crilique
de dissolution dans l'alcool; et la physiologie et
l’analyse coprologique nous apprennent que le
coefficient d'utilisation de cette matière grasse,
c'est-à-dire le rapport de la quantité assimilée à la
quantité ingérée, est voisin de 0,94 quand le lait
est normal.
Cette dernière donnée surtout a une grande
importance. Lorsque les vaches reçoivent une ali-
mentation insuffisante ou capable de leur occa-
sionner des diarrhées ou des inflammations intes-
tinales, lorsqu'elles sont soumises à des travaux
excessifs (ce n'est pas le cas des vaches urbaines),
-
s
COSMOS
653
lorsqu'elles vivent dans une atmosphère trop con-
finée, lorsqu'elles sont devenues tuberculeuses, lors-
qu’on leur donne des résidus de brasserie avec
abus, ce coefficient peut descendre de plusieurs
unités. La vache se désuiffe et la matière grasse du
lait se comporte comme si on l'avait additionnée
de margarine ou de stéarine. Sa faculté émulsive,
partant sa digestibilité, diminue.
Lorsqu'on donne aux laitières une dose excessive
de feuilles de betteraves, de tourteaux divers, tou-
jours acides, de résidus de sucreries, la quantité
des acides gras volatils du lait s'exagère et rend
plus difficile l'action des sécrétions biliaires et
pancréatiques sur les globules graisseux.
S'il ne s'agissait que des désordres que ces ano-
malies peuvent causer dans l'organisme de l'espèce
humaine adulte, il serait déraisonnable d’en exa-
gérer l'importance ; elles échappent à la dégusta-
tion. Un estomac valide ne peut guère s’en aper-
cevoir, et leur retentissement sur la santé générale
a peu de portée et ne devient sérieux que chez les
individus antérieurement débilités, tels les colo-
niaux fatigués par les gastrites, les entérites, etc.
Néanmoins, ces laits sont toujours suspects, car ils
proviennent de vaches en mauvais état de santé, el
la prolongation de cette situation aboutit générale-
ment à la tuberculose.
Un tel état de chose est autrement redoutable
quand il s’agit des petits enfants, et le mélange des
traites de toutes les étables où s’industrialise le
lait des grandes villes, en supposant qu'il puisse
donner toujours un lait marchand de composition
régulière, est loin de constituer un aliment inof-
fensif.
Nous n'avons fait qu exposer briëévement ici cette
question que nous avons éludiée avec plus de
détails antérieurement (Voir Revue internationale
de méderine et de chirurgie, ?5 fevrier et 25 mars
4912: la Médecine pratique, avril 4912; la Presse
médicale, 2S août 1912) et nous arrivons tout de
suite aux conclusions.
Les petits êtres privés du sein de leur mère
n'ont pas à redouter le biberon seulement. Ils ont
pour ennemi le lait des vaches âgées ou tubercu-
leuses, le lait des vaches déprimées ou surmenées,
le lait des vaches nourries avec des produits d'usine
et qui ont été créées pour d’autres festins que ceux
que nous leur offrons.
Leur alimentation perfectionnée est peut-êlre un
acheminement vers le bol des âges fulurs dont
parlait le chimiste Berthelot, mais il y manque
l'élément essentiel, primordial, que l'estomac des
ruminants réclame à la flore variée des prairies
de notre climat tempéré.
En présence des désastres que cette siluation
cause à nos petits enfants, notre devoir est de
pousser inlassablement un cri d'alarme.
E. LAHACHE.
654
Revue de
LE SALON DES
Biplan de place Sommer. — Cet avion a été
construit pour permettre de longues reconnais-
sances avec deux ou trois passagers.
La stabilitė latérale est assurée par six ailerons
dont deux, conjugués aux gouvernails de direction,
peuvent être à volonté commandés par les pieds,
les autres à la main. Le stabilisateur longitudinal
est placé à l'avant et commandé par un levier agis-
sant sur le gouvernail de profondeur et les quatre
ailerons.
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
l'aviation."
AVIONS EN 1912
Biplan Caudron. — Il se caractérise par la lar-
geur du châssis d'atterrissage, qui a été portée à
3 mètres et augmente la sécurité. Les ailes sont
à nervures flexibles corrigeant automatiquement
les déplacements du centre de pression et s'effa-
çant légèrement aux grandes vitesses.
Appareils Marcel Besson. — Ce sont des aéro-
planes et hydroaéroplanes entièrement métalliques.
lls appartiennent au type Canard sans empennage
F1G. 2. — APPAREIL DRZEWIECKI-RATMANOFF.
et comportent deux plans en tandem; la surface
alaire avant est très réduite. L’hélice est placée à
l'arrière du plan principal. Les surfaces, très
épaisses contre le fuselage, vont en s’amincissant
jusqu’à l'extrémité, qui est relevée. Le principe de
la construction de ses ailes permet de réduire le
travail des haubans. L’abaissement du centre de
gravité, le dièdre des ailes, leur relèvement à
l'extrémité, ainsi que les deux ailerons non porteurs
assurent la stabilité transversale. La stabilité lon-
gitudinale est oblenue par l'emplacement des
centres et par le petit plan fixe situé à l'avant. Ce
plan permet de limiter l'angle de chute. A l'arrière
(1) Suite, voir p. 622.
du fuselage et en dessous se trouve le plan dit de
dérive, sorte de quille qui assure la stabilité de
route en annihilant les mouvements pendulaires
que pourrait occasionner l’abaissement du centre
de gravité. Le gouvernail de direction est à l’avant.
Le pilote, très éloigné du moteur, se trouve un
peu en avant du centre de gravité. Les deux pas-
sagers sont derrière lui, en tandem.
Le Tubavion. — La grande originalité de cet
appareil réside dans l'emploi d'un tube unique
longitudinal, constituant en quelque sorte l'âme
de l’aéroplane. Tous les organes : châssis d'atter-
rissage, axe de gauchissement, support du moteur,
qui est placé à l’arrière des ailes, sont solidaires
N° 1155
de ce tube central. Le moteur rotatif est vissé à
l'extrémité du tube par sa flasque de distribution;
la poutrelle formant la queue est fixée sur le carter
du moteur par un double roulement à billes; deux
tubes travaillant à la compression la rattachent
également au châssis. Les gouvernails sont entiè-
rement en aluminium ainsi que l’empennage fixe.
Les ailes sont également métalliques; mais alors
que primitivement elles étaient constituées par une
simple feuille d’aluminium, celles du modèle actuel
sont mi-partie aluminium (voilage inférieur) et
mi-partie toile (voilage supérieur).
Obus Borel. — Cet aéroplane joint la légèreté à
la puissance du vol. Le fuselage est une charpente
de longerons entretoisés recouverte d’un plaquage
très léger tenant lieu d'entoilage. Cette sorte de
coque, qui mesure 5 mètres de longueur, ne pèse
que 17,5 kg et supporte sans flexion appréciable
une charge de 500 kilogrammes. Les longerons
des ailes sont en bois creux, armés sur leurs faces
de plaques de tôle d'acier au nickel.
Biplan Clément-Bayard. — Caractéristiques :
plan supérieur 46 mètres, plan inférieur 414 mètres,
largeur des plans 2 mètres, surface portante
50 mètres carrés, poids à vide 650 kilogrammes,
charge utile 600 kilogrammes.
Le fuselage, en tubes d'acier au nickel, est à sec-
tion penlagonale à l’avant. A l'arrière du siège du
pilote, la section devient triangulaire et va en
diminuant jusqu’à l'extrémité qui supporte l'em-
pennage et le gouvernail; il constitue ainsi une
carène donnant le minimum de résistance à
l'avancement.
Les ailes sont emmanchées dans le fuselage par
des articulations métalliques permeltant un dé-
montage rapide. Le haubanage est assuré par
des câbles souples en acier pourvus de tendeurs.
L'empennage et les gouvernails sont également à
carcasse métallique.
Les commandes sont montées à billes afin d'éviter
tout effort nuisible dü à des frottements. Les
câbles de commande sont épissés sur des cosses
constituées par des poulies en aluminium; on
obtient ainsi une articulation parfaite, et le câble
travaille normalement à la traction. Le gouvernail
de profondeur et le gauchissement sont commandés
par un levier unique, et le gouvernail de direction
par une barre au pied.
Devant le pilote, protégé par un capot, se
trouvent les deux places des passagers; devant
eux, un tablier en acajou reçoit les instruments
d'observation, d'orientation, le porte-carte; un
téléphone leur permet d'être en communication
constante avec le pilote. Devant ce dernier, un
tablier en bois porte tous les accessoires du con-
trôle : compte-tours, manomètre de pression, alti-
mètre, niveau d'essence.
COSMOS
655
La maison Clément-Bayard construit également
un monoplan à une seule place, sur les données du
biplan. Il est également métallique; le fuselage,
les ailes, les commandes, les organes de direction
sont semblables; seul le châssis d'atterrissage dif-
fère. Ce monoplan mesure 9,2 m d'envergure,
7,5 m de longueur totale. L'appareil pèse 290 kilo-
grammes et peut enlever une charge utile de
330 kilogrammes.
La stabilité automatique. — La stabilité pro-
prement dite a fait peu de progrès chez la plu-
-part des constructeurs, qui conservent les moyens
empiriques suggérés dès l'origine de l'aviation.
Cependant on remarque une tendance à abaisser
le centre de gravité et à rendre les plans fixes
d’empennage de moins en moins porteurs.
M. Drzewiecki expose au stand Ratmanoff un
appareil automatiquement stable (fig. 2), où les
parties lourdes sont réparties tout le long du fuse-
lage; le moteur est à l'arrière, les réservoirs au
centre, le pilote et le passager à l'avant. L'inven-
0
F1G. 3 — SCHÉMA DU STABILISATRUR AUTOMATIQUE
DES FRÈRES MOREAU.
P, nacelle. — A, aile. — B, point d'oscillation de la nacel'e.
H, fuselage. — C D E F, leviers, — G, stabilisateur.
teur affirme que la dispersion des poids assure à
son appareil une plus grande inertie aux forces
déséquilibrantes. D'autre part, l'inventeur a posé
en principe que la variation d'incidence de l'aile,
obtenue par rotation autour d'un axe transversal,
suffit à conduire l'appareil dans le plan vertical.
Dans le plan horizontal, deux ailerons verticaux
conjugués, disposés sur les extrémités des surfaces
arrière, assurent la direction. Le plan arrière est
fixe. Les deux plans avant sont indépendants et
commandés chacun par un levier vertical placé
devant le pilote. Celui-ci demeure donc le maitre
absolu des mouvements des ailes en agissant sur
l'un ou l’autre levier, ou sur les deux à la fois. L’équi-
librage des poids est très facile, quel que soit le
nombre des passagers : on agit sur l’incidence des
ailes de manière que, dans tous les cas, la résul-
tante de sustentation passe par le centre de gravité.
La stabilité automatique proprement dite est
représentée par le dispositif des frères Moreau,
basé sur l’action du pendule. Ils ont exposé au
Salon leur curieux appareil dans lequel le pendule,
à oscillations longitudinales, est constitué par le
656
siège de l’aviateur. Ce siège est articulé sur un
axe transversal passant par le centre de pression
de la voiture et relié par un système de bielles et
de leviers au stabilisateur arrière.
Nous donnons un dessin schématique du sys-
tème. On voit que si l'appareil vient à piquer, pour
une cause quelconque, la nacelle P est portée vers
lavant, entrainant le système de leviers articulés
en C D E et F. La queue oscille vers le bas et
COSMOS
12 DÉCEMBRE 19412
diminue ainsi l'incidence de l’'empennage. L'appareil
se cabre immédiatement. Mais si un changement
violent survient dans la vitesse de l'appareil, en
cas de gros temps, par exemple, le système agirait
à contre-sens. Afin de parer à cet inconvénient,
les inventeurs ont conçu un système également
automatique qui bloque immédiatement le stabi-
lisateur.
(A suivre.) L. Fournise.
Le pin noir d'Autriche.
Dans les nombreux travaux ou entreprises ayant
pour objet soit le repeuplement des forèts plus ou
moins ruinées ou clairiérées, soit le boisement ou
reboisement de terres incultes ou de sols autrefois
boisés, le pin laricio d'Autriche, race très distincte
du laricio de Corse bien que ne s’en séparant pas
spécifiquement, mais plus connue et plus répandue
sous la dénomination de « pin noir d'Autriche »,
joue souvent un rôle important.
L'un des avantages de cette essence, et des plus
appréciés, est la facilité avec laquelle elle s’accom-
mode des sols calcaires les plus arides et les plus
secs, comme aussi des climats les plus froids. Ce
sont là des facultés précieuses, notamment pour
l'utilisation de ceux de ces terrains dont la mise
en culture ne serait pas réalisable, ou ne le serait
que moyennant des frais hors de proportion avec
le résultat à obtenir.
Mais ce serait une erreur de croire que notre
pin ne réussit que dans le calcaire. Il peut pros-
pérer même dans les sols argileux et argilo-siliceux.
Seuls lui sont contraires les sables siliceux purs,
qu'affectionne au contraire le pin sylvestre; encore
peut-il sen accommoder à la rigueur s'ils reposent
sur un fond humide.
Dans les travaux de reboisement des montagnes
du département du Puy-de-Dôme, commencés il y
a une soixantaine d'années par l'initiative de
M. Leclerc, inspecteur des forêts à Clermont-
Ferrand, on a employé sur le flane des puys
(volcans éleints), sur les cheyres (anciennes cou-
léėes de lave), le pin noir d'Autriche concurremment
avec l’épicea, le mélèze, le pin d'Auvergne (race
locale du pin sylvestre). Plus tard, on y a ajouté
le chêne, le châtaignier, le hêtre et le sapin. Ces
terrains sont à base de trachyte, de basalte, de
gneiss, de granite, etc.
Toutes ces essences ont plus ou moins bien réussi
durant leur jeunesse, Peu à peu, une certaine
sélertion s'est opérée. Les mélèzes ne dépassent
pus l'âge de vingt-cinq ou trente ans et dispa-
raissent. Les sapins prospèrent à partir de 500 ou
600 mètres d'altitude, et les châtaigniers au-dessous
de 750 et 700 mètres. Le hêtre, comme essence
subordonnée, se comporte assez bien. Le chêne
réussit seulement par places; et les peuplements
d’épicea, qui, il y a moins de trente ans, offraient
encore toutes les apparences d’une végétation luxu-
riante, paraissent aujourd’hui bien compromis.
Le pin noir d'Autriche s'est très bien comporté
jusqu'ici, ce qui prouve que les sols à base grani-
tique ne lui sont pas contraires. Mais, bien qu'âgé
déjà de cinquante à soixante ans, il ne se régénère
pas encore de lui-nième, alors que normalement il
doit fructifier dès l'âge de trente ans et donner sa
semence tous les deux ou trois ans. Par suite de
cette circonstance, les forestiers du pays le consi-
dèrent seulement comme une essence transitoire,
destinée à être ultérieurement remplacée. Aussi
bien, le bois qu'il donne dans ces contrées y est-il
peu eslimé.
Reste le pin sylvestre indigène ou pin d'Auvergne;
ii vivote modestement, mais persévéramment, et
parait destiné, avec le sapin, à se fixer définitive-
ment sur le sol ingrat des montagnes volcaniques.
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De ce qui précède il résulte que le pin noir
d'Autriche n’est pas encore naturalisé en Auvergne,
puisque jusqu'ici il ne s’y est pas ressemé de lui-
mème. Il n'en est pas moins vrai que, depuis
soixante ans, il végète et croit sans donner encore
de signes de dépérissement, dans des terrains d'ori-
gine ignée où prospèrent le sapin commun (Abies
pectinata), le hêtre, le pin sylvestre et, aux alti-
tudes moyennes, le châtaignier, ce dernier essence
calcifuge.
Dans son pays d'origine, en Wienerwald, aux
environs de Vienne, le pin noir d'Autriche se ren-
contre naturellement sur des terrains détritiques
à gros éléments où le carbonate de chaux est rare.
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Quelle est au juste, dans la classification bota-
nique, la place qu'occupe notre pin? On a dit plus
haut que, tout en étant très distinct du laricio de
N° 1455
Corse, il ne s’en sépare pas spécifiquement ; il en
serait une variété stable, une race. Telle est du
moins la classification la plus récente. Il n’en a pas
été toujours ainsi. C’est Linné qui, considérant ce
pin comme une espèce légitime, l'avait dénommé
Pinus nigra, nom qui lui est resté, augmenté du
nom de son pays d'origine, Austriæ ou austriaca.
Mais Endlicher et après lui deux professeurs
successifs d'histoire naturelle (botanique et zoo-
logie) à l’école forestière de Nancy, A. Mathieu et
Paul Fliche (1), ont attribué à une seule espèce, du
type laricio, les cinq pins botaniquement voisins,
de Corse, de Calabre, d'Autriche, des Cévennes
ou de Montpellier, et des Pyrénées, nonobstant les
différences assez sensibles qui les distinguent.
Le pin noir d'Autriche, notamment, se sépare en
bien des points du laricio de Corse,le type de l’espèce.
Tandis que ce dernier peut parvenir, rarement, il
est vrai, à une hauteur de 45 mètres avec un diamètre
à la base de 1,8 à 2,0 mètres, le laricio d'Autriche
ne dépasse pas (quand il les atteint) 30 à 35 mètres
avec 1,00 à 1,35 mètre de diamètre. La tige du
laricio de Corse, très droite, se maintient presque
cylindrique jusqu'à une grande hauteur; il perd
rapidement ses branches latérales, et son feuillage
peu abondant est d’un vert franc, mais médiocre-
ment foncé.
Au contraire, son congénère autrichien, aux
fortes branches et à l’épais feuillage d'un vert
sombre, offre rarement un fit aussi régulièrement
droit. En revanche, il étend sur le sol un couvert
abondant et y laisse tomber chaque année une
masse de feuilles mortes et autres détritus qui, en
se décomposant, l'enrichit promptement d'une
riche couche d’humus.
Le couvert du pin de Corse est relativement léger
et laisse peu de détritus sur le sol; son enracine-
ment est faible comparativement aux dimensions
de l’arbre et ne lui donne pas une assiette solide
contre l’action des grands vents. C’est tout l'opposé
pour le pin noir d'Autriche: ses racines nom-
breuses, fortes, traçantes, s'étendent au loin, s'in-
sinuent à travers la pierraille ou dans les fentes
et fissures des rochers et donnent à l'arbre une
grande force de résistance à l'effort des grands
vents et des orages. Cette solidité d’assiette le
rend précieux pour établir des abris et des brise-
COSMOS
—
~
vent sur les plateaux exposés aux vents violents et
où l'épicea, aux racines exclusivement traçantes et
superficielles, serait infailliblement renversé dès
qu'il aurait acquis une certaine force en diamètre
et en hauteur.
Une particularité remarquable du pin noir d'Au-
triche, c'est de supporter, mieux qu'aucun autre de
ses congénères, le couvert des arbres, se rappro-
chant en cela de l'if et du sapin. Après avoir
dominé (pourvu que ce ne soit pas pendant trop
longtemps), il peut, découvert à propos, redevenir
vigoureux et bienvenant. Arrivé à un certain déve-
loppement, il réclame, en massif, des éclaircies un
peu fortes, précisément du fait de sa large ramure.
——
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En résumé, le pin noir d'Autriche, Pinus nigra
austriaca (puisque c’est sous ce nom qu'il est le plus
connu), est une essence qui, pouvant supporter des
climats très froids, se plait aussi bien sur les pla-
teaux que sur les pentes et ne craint pas les gorges
resserrées. [l réussit à loutes les expositions, bien
qu'il se plaise davantage sur les versants exposés
à l'Ouest et au Sud. Il s’accommode, sauf l'excep-
tion signalée plus haut, de toute espèce de terrains.
En dehors des sables siliceux secs qui lui sont
nettement contraires, il accepte à la rigueur les
sols les plus médiocres, les plus rebelles, tout en
manifestant parmi ceux-là une préférence marquée
pour ceux où domine le calcaire et où le pin syl-
vestre ne végète que difficilement. On le rencontre
jusque parmi des pierres calcaires à peine recou-
vertes d’une mince couche de terre végétale, maigre
el improductive.
A la vérité, il n'acquiert pas, dans des sols aussi
ingrats, les dimensions de 35 mètres de hauteur et
de 4,35 m de diamètre dont nous parlions tout à
l'heure; mais il peut encore atteindre 15 à 18 mètres
d’élévation avec 50 centimètres de diamètre, ce qui
est fort appréciable en des sols aussi nuls. Sans
compter que la présence prolongée sur eux d'un
peuplement forestier de ce genre accroitrait et amé-
liorerait fort sensiblement l’épaisseur si minime de
la couche de terre végétale recouvrant ces pierres.
Aussi « ne doit-on pas être étonné, dit un syl-
viculteur des Ardennes, de voir le pin noir d’Au-
triche réussir admirablement dans notre terrain
crayeux de Champagne » (4). C. DE KIRWAN.
Les tourelles de transformateurs de la Société Oerlikon.
En matière d'électricité, c’est-à-dire de dis-
tribution du courant électrique et de fabrication
de ce courant, plus qu'en toute autre matière, on
(1) Cf. La Flore forestière de A. Marnier, 4° édition,
complétée ét publiée par Pavz FLicue. 1897, Paris et
Nancy.
applique de jour en jour davantage les principes
de concentration: c’est-à-dire que l’on tend, dans
tous les pays, à installer des usines de production
(4) Jures FuérorT, propriétaire-sylviculteur à Aus-
sonce (Ardennes): Notice sur le pin noir d'Autriche
employé pour boiser les plaines de la Champagne.
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658
de courant, des centrales toutes-puissantes, desser-
vant une clientèle et par conséquent une surface
plus étendues. Ce mouvement de concentralion
peut s’observer là même où la génération du cou-
rant électrique se fait à l'aide de machines à vapeur
chauffées au charbon ; à plus forte raison se produit-
il là où l’on recourt à des chutes d’eau pour obtenir
l'énergie électrique. Comme conséquence, on est
alors amené à envoyer le courant à des distances de
plus en plus grandes ; les centaines de kilomètres
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INTÉRIEUR DE LA CABINE ET VUE DU TRANSFORMATEUR. }
n’effrayent plus les lechniciens à l’heure présente.
Mais il est indispensable, dans ces conditions, que
le courant suive des canalisations qui ne coùtent
point trop cher, par conséquent n'aient pas une
section trop forte; et l’on n'arrive au résultat voulu
qu’en transmellant des courants à très haute
tension.
Toutefois, ces courants à haute tension ne
peuvent être admis à l'intérieur des habitations,
des constructions où ils seront praliquement uli-
lisés ; et il faut par suite toujours les transformer,
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
ce qui, en réalité, consiste seulement à abaisser
leur tension, en les faisant passer par des postes
de transformateurs. Quelquefois ces derniers seront
installés à l'entrée des lieux habités, et le courant
circulera alors à tension réduite à l’intérieur de
ces agglomérations ; quelquefois on a intérêt à
n'opérer la transformation que tout près des
maisons où le courant sera distribué sous faible
tension. Parfois même on installe le poste de
transformateurs (mais ce n’est pas toujours sans
inconvénient) dans la construction même où le
courant, une fois abaissé comme tension, doit être
distribué.
Comme de plus en plus le débit de tés
électrique se fait dans de petites localités éloignées
de la centrale, n’exigeant qu’un poste de transfor-
mateurs de faible puissance, la construclion des
maisonnettes où d'ordinaire l’on installe les trans-
formateurs devient beaucoup trop coûteuse par
rapport à l'énergie consommée. C’est pour remé-
dier à cet inconvénient, et pour fournir ;à l'installa-
tion de transformation des constructions aussi
sommaires, aussi simples et aussi peu coûteuses
que possible, que la Société Oerlikon, dont les ate-
liers se trouvent près de Zurich, mais qui a une
filiale en France, a combiné des tourelles métal-
liques qui peuvent être amenées sur place entière-
ment construites et montées, et dans le bas
desquelles on disposera de la façon la plus écono-
mique le poste de transformation nécessaire. Les
photographies que nous donnons de ces tourelles
font presque immédiatement comprendre leurs dis-
positions essentielles et très simples. Elles sont
constituées, en réalité, par un poteau en treillis
métallique, comportant à sa partie inférieure une
cabine, également métallique et munie de deux
grandes portes de visite, qui renferme le transfor-
mateur et les appareils divers. Il va sans dire que
ce pylône métallique, monté sur un soubassement
de béton ou de maconnerie proprement dite, fournit
un point d'appui des plus solides pour les canalisa-
tions aériennes qui vont apporter le courant sous
haute tension, et pour celles qui distribueront aux
alentours ce courant transformé. La cabine au bas
du pylône est suffisamment large pour que l'on
visite et entretienne sans aucune difficulté les
appareils divers qu'elle renferme. Le plus généra-
lement, les cabines comportent, comme nous
l'avons dit, deux portes de service, une pour le
côté haute tension, l’autre pour le còté basse ten-
sion. Au besoin, on peut les disposer de manière
qu'elles s'ouvrent des quatre côtés. L'entrée des
conduites primaires s'effectue par un tuyau en
tôle galvanisée de 30 à 60 centimètres de diamètre.
A chaque extrémité de ce tuyau est disposée une
pièce de fonte en forme d'étoile, sur laquelle est
fixé un tendeur pour trois ou six conducteurs en
fil de cuivre nu. Les conducteurs sont dirigés vers
N° 1455
l'extérieur par des passe-fils en porcelaine, protégés
contre la pluie par un avant-toit. Le tuyau est
naturellement disposé pour que la pluie ne puisse
y pénétrer et parvenir dans la cabine. On aperçoit
à la base de la tourelle, ou plus exactement de la
COSMOS
659
cabine, des ouvertures ménagées pour laisser entrer
librement l'air frais à l'intérieur de cette cabine.
lse produit un tirage grâce au tuyau dont nous
parlions, et on assure ainsi une ventilation éner-
gique et constante du transformateur. On a d'ail-
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UNE TOURELLE OERLIKON DANS UN VILLAGE SUISSE.
leurs prévu également un dispositif grâce auquel
leau qui se forme inévitablement par condensa-
tion, au moins aux basses températures, sur les
parois du tuyau, s'échappe par une ouverture pra-
tiquée à la partie inférieure de ce tuyau.
Les tourelles de transformateurs de la Société
Oerlikon s'exécutent en trois grandeurs, pour
répondre aux divers besoins des circonstances
locales. Pour le type de grandeur maximum, les
dimensions réservées aux transformateurs sont de
660
1,3 m de long sur 1,5 m de haut et 4 mètre de
large. En fait, ce grand modèle est suffisamment
spacieux pour abriter deux petits transformateurs
au lieu d'un grand. Au cas où l’on recourt à deux
petits transformateurs, on installe des barres col-
lectrices pourvues de secteurs de ligne, si bien que
les transformateurs peuvent fonctionner indivi-
duellement ou en parallèle. Ce sont là des détails
d'installation qui n’ont pas grande importance,
étant donné que nous voulions surtout attirer l'at-
tention sur une combinaison fort ingénieuse de
poste de transformateur. Ainsi que nous le lais-
sions entendre tout à l'heure, ces tourelles peuvent
ètre complètement montées dans les ateliers, sans
Jes transformateurs, bien entendu, et expédiées de
la sorte. Arrivées au lieu de destination, on les fixe
sur leurs fondations. On peut rapidement effectuer
les connexions des conduites primaire et secon-
daire, ainsi que celles des transformateurs, et la
mise en service se fera presque immédiatement.
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1919
Il va de soi que les pylônes métalliques ainsi éta-
blis en fers profilés de type courant ne reviennent
qu'à un prix assez minime. Le jour où des modifi-
cations s’imposent dans la distribution d'électricité,
on peut les déplacer sans grand'peine ; il suffit de
faire ailleurs une nouvelle fondation en maçon-
nerie. Quant à leur aspect, il n’a rien de désa-
gréable, aujourd’hui du moins que nous sommes
si habitués aux constructions métalliques en treillis:
on peut donc les disposer un peu n'importe où, et
à proximité des maisons, sans nuire à l'aspect
général du pays. On peut les fermer complètement
au moyen de feuilles en métal à base de cuivre,
et le revètement ainsi constitué sera peint d'une
couleur pouvant s’harmoniser avec le voisinage.
Les distributions d'électricité à la campagne
vont être certainement facilitées par la mise à con-
tribution de ces curieuses tourelles de transfor-
mation. DaxieL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques.
La culture du pommier.
Le pommier semble ètre originaire d'Europe, où
on l'a rencontré de tout temps à l’état sauvage,
mêlé aux essences les plus diverses. Sa culture, en
France, remonte au v° siècle, et l’on prétend, sans
trop de preuves d’ailleurs, que l’art d'extraire
de ses fruits une boisson fermentée nous vient des
Hébreux par l'intermédiaire des Espagnols. Quoi
qu’il en soit, les Romains faisaient déjà du cidre,
et cependant on s'accorde généralement à fixer au
xvi® siècle seulement le début de la production
cidrière en Normandie. Il est certain que, depuis
cette époque, d'importants progrès ont été réalisés.
L'aire géographique du pommier est considé-
rable. On le rencontre dans presque tous les jar-
dins, et, bien que ses préférences semblent devoir
le limiter aux zones tempérées, mais plutòt froides,
où règne la brume, on en trouve de très jolis spéci-
mens dans les vallées fraiches du Var et de l'Au-
baye, ainsi qu’aux environs de Naples.
Le gros de la production toutefois se cantonne
dans la Bretagne et dans la Normandie. Les seuls
départements de l'Ille-et-Vilaine, de la Manche, du
Calvados, de l'Orne, de la Seine-Inférieure, des
Cotes-du-Nord, du Morbihan et de l'Eure repré-
sentent les deux tiers de notre production natio-
nale qui, bon an mal an, se chifre par 40 mil-
lions d’hectolitres de pommes et 14 millions d’hec-
tolitres de cidre. Les récoltes sont, en effet,
extrèmement variables suivant les années: en 1883,
24 millions d’hectolitres de cidre; en 1884, 11 mil-
lions; en 1885, 6 millions seulement, et en 1893,
30 millions. Les conditions météorologiques de
l’année ne suffisent pas toujours à expliquer ces
énormes saules dans la production. Il faut y voir
surtout l'indifférence culturale dans laquelle s'en-
dorment trop souvent encore les pommiculteurs.
Beaucoup d'entre eux ne font rien pour prolonger
la longévité de leurs arbres, non plus que pour
régulariser la fructification, et leurs soins s'en vont
aux autres cultures. I] est cependant indéniable
qu'après une récolte exceptionnellement heureuse,
l'arbre est affaibli à la fois par la grosse perte
d'éléments utiles et par l'aclion mécanique pro-
longée de tout le poids des fruits : de nombreuses
branches peuvent être abimées ou cassées; le sol
lui-même, qui a dû fournir la matière première
nécessaire à une énorme production, est sensible-
ment appauvri tout autour du réseau des racines,
aggravant l'état de dépression de l'arbre. Il con-
vient donc de restituer au sol au moins ce qu'il
a perdu, et de faire une toilette soignée du pom-
mier en le débarrassant des branches mortes ou
cassées, en élaguant les touffes intérieures, de
façon à assurer un large accès à l'air, à la lumière
et aux rayons calorifiques du Soleil.
Cette opération se fait évidemment pendant le
repos de la végétation au cours de l'hiver. On sec-
tionne à la serpe, près du tronc, avec un léger
empåtement pour que le tronc lui-même ne puisse
pas être intéressé par les complications possibles.
La section doit être bien nette, toute hachure ou
meurtrissure équivalant à upe blessure vérilable
et rendant plus facile l'infection parasitaire; aussi
doit-on protéger sans retard toute solution de con-
tinuité des tissus par une couche de coaltar ou de
maslic.
Ne 4455
On doit aussi mettre à profit cette période de
moindre travail pour pourchasser sans merci les
insectes qui ont profité de la moindre fissure, de
la moindre crevasse, pour se mettre sous l'écorce
à l'abri des rigueurs de l'hiver. Toutes les vieilles
écorces sont enlevées au gant de fer et brülées aus-
sitòt. On badigeonne leur place au lait de chaux.
De même les lichens et les mousses, qui nuisent
doublement parce que parasites eux-mêmes et parce
que abritant de nombreux insectes, doivent être
rigoureusement détruits. À l’aide d'un pulvérisa-
teur ordinaire et d'une lance un peu longue, on les
inonde d'une dissolution de sulfate de fer à 8 ou 10
pour 100, en prenant la précaution de nettoyer lap-
pareil aussitôt après s’en être servi, car la solution
employée a une action corrosive sur le cuivre du
pulvérisateur. La mousse noircit et se détache faci-
lement au gant métallique deux ou trois jours après
l'opération.
Le gui, qui s'installe si volontiers sur les pom-
miers, absorbe par ses nombreux suçons une im-
portante quantité de sève élaborée destinée aux
rameaux qui, n'en recevant plus qu'en quantité
insuffisante, se dessèchent et meurent. Pour dé-
truire le gui, il suffit d'inciser l’écorce en un point
au moins de chacun de ses jets.
A part les terrains trop calcaires ou trop argi-
leux, le pommier vient dans tous les sols Il aime
particulièrement les terrains frais, mais non hu-
mides, dont le type semble être un sol argilo-
siliceux, graveleux, où la prédominance de l'argile
sur la silice n'est pas très marquée. Le pommier
redoute à la fois la sécheresse et l'humidité dans
le sol, mais affectionne particulièrement les atmo-
sphères chargées de vapeur d’eau.
Il faut donc, en conséquence, éviter pour lui les
expositions chaudes ou trop ventées, et, naturelle-
ment, les points où sévissent les gelées printanières.
La multiplication la plus usitée, parce que la
meilleure, se fait par le greffage. Quand on pré-
fère recourir au bouturage, les arbres restent peu
vigoureux et donnent toujours des fruits acides. On
ne greffe guère que sur pommier frane, sur Doucin
ou sur Paradis. Le pommier franc qui provient de
semis donne des sujets très vigoureux, convenant
parfaitement pour le plein vent. Les deux autres,
d’origine inconnue, sont bien moins vigourenx; on
les réserve aux vergers, le Paradis étant choisi
pour les petites tailles. On greffe généralement en
fente sur pied franc et en écusson sur les deux
autres. Le plus exigeant au point de vue de la fer-
tilité du sol est le Paradis et surtout le P. noir de
Vitry.
[l existe un très grand nombre de variétés clas-
sées, suivant les uns, d'après l’époque de la florai-
son, suivant les autres, d'après l’époque de la ma-
COSMOS
661
turation, les ordres de ces deux époques n'étant
pas identiques; suivant d’autres enfin, d’après la
forme, la couleur et la saveur des fruits.
Ce sont là, d'ailleurs, des classifications d’une
importance seulement théorique. Ce qui intéresse
dans la culture industrielle des pommes à cidre
est la composition du jus. On ne recherche vrai-
ment que les qualités donnant des jus à haute den-
sité, et on entend par là des jus renfermant en
moyenne 44 pour 400 de sucre, 5 pour 4000 de
tannin, 42 pour 1000 de mucilage, 4 pour 4 000
d'acidité. Lorsque, toutes choses restant égales par
ailleurs, la teneur en sucre augmente, les pommes
sont à saveur douce. Si c'est je tannin, elles sont
à saveur amère, et à saveur acide, si la proportion
des acides malique et tartrique dépasse 1 pour
1000. Ces dernières sont à rejeter, car, pour pro-
duire un bon cidre, l'acidité est largement sufti-
sanle dans les douces et les douces-amères.
Il est aujourd'hui admis que les pommes de troi-
sième saison ou pommes dures, mürissant en dé-
cembre-janvier, donnent des cidres se conservant
le plus longtemps.
On est moins bien fixé en ce qui concerne l'in-
fluence de l'époque de floraison. En dépit de nom-
breuses observations qui n'ont fait que nous doter
de la classification en hätives, demi-hâtives, inter-
médiaires, demi-tardives et tardives, on n'a pu
encore dégager de conclusion pratique. Il apparait
cependant que les premières sont plus exposées
aux effets désastreux des gelées printanières, des
fameux « saints de glace » si redoutés dans nos
campagnes où on attribue leurs méfaits à la lune
rousse, qui n'en est évidemment que l'indifférent
temoin, puisque ces fameuses gelées se produisent
en avril dans le Midi et les 11, 12 et 13 mai sous
le climat de Paris. La raison en est beaucoup plus
simple. Vers cette époque, en effet, où l'atmosphère
est généralement peu nébuleuse et la terre encore
peu couverte de végétation, la radialion noc-
turne est assez intense, et par suite l’abaissement
de température assez considérable pour provoquer
la formation de la gelée, dont les effets sont d'au-
tant plus nuisibles que les bourgeons sont plus
tendres. On pourrail à la rigueur faire, come
dans certaines régions méridionales pour les aman-
diers, les pêchers ou les cerisiers, retarder le
départ de la végétation en déchaussant les pieds
vers la fin de l'hiver. Mais c'est là un bien gros
travail pour un résultat bien incertain. Nous
n'avons malheureusement aucune action sur lat-
mosphèére, mais si les arbres sont bien soignés,
s'ils ont reçu avec le labour d'hiver un bon apport
de scories de déphosphoration et de kaïnite, et si,
au printemps, on leur donne en deux fois 150 à
200 kilogrammes de nitrate, ils résisteront beau-
coup mieux aux intempéries.
Le pommier est sujet à un certain nombre de
602
maladies et d'accidents. Il arrive souvent que, par
suite d’inégalité dans le développement, il se pro-
duit un étranglement de la tige. fl faut dans ce
cas, et du côté le plus faible, pratiquer, sur toute
la longueur de la tige, une incision n'intéressant
que l'écorce : l'assise des cellules génératrices ou
cambium s’accroft alors plus aisément.
Nombre d’arbres sont atteinis de chancres et de
la pourriture des racines. Ces deux affections pro-
viennent d’un excès d'humidité et du manque d'’aé-
ration dans le sol, où s'établissent des fermentations
aux produits nocifs. [Il convient d’assainir par des
labours profonds et au besoin par un drainage..
La carie se manifeste fréquemment sur les sujets
très âgés et provoque l'excavation intérieure du
tronc. où s'installent de nombreux champignons.
ll faut intervenir dès que possible, lamber l'exca-
vation avec de la paille, la combler de pierres et
cimenter l'ouverture de façon à éviter les infections
ultérieures.
Parmi les insectes nuisibles, pyrale, puceron
lanigère, anthonome, chématobie, etc., il est plus
particulièrement malaisé de se débarrasser du
puceron lanigère et de l’anthonome. Le premier
D,
Ventilateurs
On connait le petit éventail « Zéphir », formé
d'ailettes légères mues par un mouvement d’hor-
logerie placé dans le support de l'appareil. Un dis-
VENTILATEURS TRIUMPH ET AQUILON.
positif analogue a été appliqué par divers construc-
teurs à des appareils de plus grandes dimensions.
Il existe actuellement de véritables ventilateurs
marchant plusieurs heures, grâce à un puissant
ressort. C'est ainsi que les divers modèles du ven-
tilateur « Triumph » fonctionnent pendant une à
cinq heures, le nombre de tours par minute étant
de 250 à 650, le volume d'air déplacé de 60 à
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
est, en effet, protégé par un duvet laineux qu'il
faut d'abord dissoudre pour atleindre efficacement
l'insecte. Le mieux est de badigeonner ses colonies
au pétrole pendant l'hiver, alors qu'il n'y a pas de
feuilles, et à l’alcool à brüler en été, car le pétrole
tuerait les feuilles. Pour l’anthonome, il n’y a guère
que l’anthonomage, encore qu'il soit coùteux et pra-
tique seulement pour de petits espaces. Comme
l'insecte pond ses œufs à l'intérieur des boutons
à fruit non épanouis, il faut ramasser ces boutons
desséchés et les brüler. Le matin, de bonne heure,
alors que le charançon est encore engourdi, on
secoue l'arbre au-dessus d’une toile et on brüle
tous les insectes ainsi précipités.
Pour terminer enfin, on ne saurait trop recom-
mander de ménager l'arbre à la récolte en ne le
gaulant pas, mais en secouant les branches à l’aide
d’un crochet, et de conseiller aux pomiculteurs,
désireux que leurs fruits ne s’abiment pas dans
leur chute, de bécher le sol au-dessous de l'arbre
ou mieux de tendre une toile au-dessus du sol.
FRANCIS MARRE.
mécaniques.
600 mètres cubes par heure. Le diamètre des
ailes de l'appareil est de 25 centimètres.
Il suffit de quelques secondes pour effectuer le
remontage (30 tours de manivelle environ).
Les avantages de ces appareils sont: le poids
relativement peu élevé (il oscille entre 1,8 kg pour
les ventilateurs de table et 25 kilogrammes pour
les ventilateurs les plus puissants, les dimensions
étant de 50 cm X 28 cm X 20 cm), le prix très
modéré (40. à 125 francs), la consommation nulle:
ils sont extrèmement économiques, puisqu'ils ne
nécessitent aucune installation, aucune canali-
sation et n'emploient ni courant ni eau $ous pres-
sion.
Dans le ventilateur « Aquilon », fabriqué en
France, le mouvement est transmis aux ailettes
mobiles non par une courroie, mais par une cré-
maillère et une vis sans fin qui ne peuvent pas
prendre de jeu. L'appareil, remonté avec une
manivelle, peut marcher, suivant le modèle, d’une
demi-heure à une heure et demie sans arrêt. Un
système de frein spécial permet de bloquer à
volonté l’hélice ou de la mettre en mouvement
instantanément.
Ces divers appareils peuvent être employés dans
une foule de circonstances. Ils peuvent servir soit
de ventilateurs d'appartement pour changer l'air de
la chambre des malades, disperser et évacuer la
fumée du tabac, rafraichir l'atmosphère..... on les
Ne 1455
place volontiers sur les tables au milieu des con-
vives; soit de ventilateurs de laboratoire, pour
sécher, évaporer.
Ils peuvent rendre service aux amateurs photo-
graphes pour le séchage rapide, à température peu
élevée, des couches sensibles: papiers et plaques
émulsionnées, gélatine, gomme bichromatée,
orthochromatisme..... Comme ils portent en eux-
mêmes leur moteur, ils sont complètement indé-
pendants; on peut donc les transporter dans les
locaux les plus divers.
Ne pourrait-on pas, par exemple, les combiner
avec certains brûleurs à pétrole destinés au chauf-
fage ou même à l'éclairage, de manière à obtenir
une combustion plus parfaite et à supprimer toute
odeur, tout en obtenant une meilleure utilisation
du combustible ? :
CR
Ventiler est bien, purifier est peut-être encore
mieux. Il est des cas, en effet, où la ventilation n'est
pas chose facile; dans les chambres de malades,
par exemple, la crainte des courants d'air ne permet
pas toujours de renouveler l’atmosphère comme il
serait cependant utile de le faire. Pour arriver à
remplacer l'oxygène absorbé sans qu'il soit néces-
saire d'ouvrir les fenêtres, on a imaginé divers
petits appareils susceptibles de produire ce gaz
économiquement. Signalons notamment le « Bio-
come », construit sur les indications de M. Joubert,
l'inventeur de |l’oxylithe.
100 grammes d’oxylithe produisent 45 litres
d'oxygène chimiquement pur (99,9 pour 400), quan-
tité suffisante pour un homme pendant une heure,
à supposer qu'il ne reçoive pas d'air d'autre part.
COSMOS
663
Mais dans une chambre même bien close, il suffit
d'ajouter à l'air l'oxygène produit par 100 ou
200 grammes d'oxylithe toutes les vingt-quatre
heures pour avoir une atmosphère respirable sans
ouvrir les fenêtres et en évitant ainsi les change-
ment de température dangereux pour le malade.
Le « Biocome »est une sorte de petit seau divisé
en deux compartiments superposés. On met dans
le compartiment inférieur un petit cube d’oxylithe.
On remplit d’eau aux deux tiers le compartiment
supérieur et on dévisse très légèrement le pointeau
de façon à laisser couler l’eau à raison d’une goutte
par trois secondes. Aussitôt que l'eau est en contact
avec l’oxylithe, l'oxygène se dégage; il sort par le
tuyau de caoutchouc qui communique par une de
ses extrémités avec la partieinférieure, et l’on plonge
l'autre extrémité dans le réservoir supérieur afin
de laisser dans l’eau les particules de soude que
l'oxygène peut entrainer à sa suite.
Les résidus de l’oxylithe forment une dissolution
de soude caustique qu'on peut employer pour le
lavage en ayant soin de l'étendre d'environ quatre
fois son volume d’eau, car trop concentrée elle
mange les couleurs. Cette dissolution est également
utile dans une chambre de malade, où, exposée à
l'air, elle absorbe l'acide carbonique en formant
des cristaux de carbonate de soude.
Ainsi, d’une part, on enrichit l'atmosphère en
lui fournissant de l’oxygène, et, d'autre part, on
enlève les produits nuisibles en fixant l'acide car-
bonique. Peut-être obliendrait-on de meilleurs
résultats en se servant d'un jet d’eau ou d'un pul-
vérisateur alimentés par la solution caustique?
A. B.
L'introduction et la réussite du giroflier au Gabon. ”
Le giroflier (Caryophyllus aromaticus L.), ori-
ginaire de l'archipel indomalais et cullivé dans
la région de Zanzibar, d’où sort la plus grande
partie des clous de girofle consommés dans le
monde, était totalement inconnu dans l'Ouest
africain il y a vingt-cinq ans.
Au cours d'un récent voyage en Afrique tropi-
cale, nous avons constaté que cet arbre précieux
croit aujourd’hui en de nombreux points du Gabon
et du Congo. Il n’existe que quelques exemplaires
en chaque endroit, mais ils trouvent, au Gabon
surtout, des conditions climatériques très favo-
rables : ils sont vigoureux, exempts de maladies,
fleurissent et fructifient abondamment chaque
année.
(1) Comptes rendus de l’Académie des sciences, séance
du 2% novembre 1912. Note de M. AuG. GHEVALIER, pré-
sentée par M. Édouard Perrier.
- L'introduction de cette essence précieuse n'est
pas le résultat du hasard. Nous publions ci-après
quelques notes inédites permettant de préciser
l'histoire de cette introduction et montrant avec
quelle volonté Maxime Cornu, professeur à la
chaire des cultures du Muséum, s'attache à doter
notre colonie de cette utile ressource.
Ces notes sont extraites de lettres de M. Cornu
au R. P. Klaine, décédé récemment, et auquel ła
science doit tant de matériaux de haute valeur.
Les premiers plants furent apportés par le jardi-
nier E. Pierre, élève de M. Cornu, fondateur du
Jardin d’essai de Libreville, embarqué à Cherbourg
le 6 février 1887, ainsi qu'en témoigne Île passage
suivant d'une lettre du 18 mars 1887:
« Nous essayerons de vous envoyer le giroflier
dont nous avons une jolie série. Pour cette dernière
espèce je vous recommande tout particulièrement
de ne point ‘toucher le moins du monde aux
66%
racines: la plante ne le supporte pas. Il faudra
placer la petite plante avec sa motte de terre bien
entière et intacte dans le lieu qui lui aura été
choisi et qui sera définitif. On lui aura fait sa place
à l’avance de façon à ne point froisser le système
des racines (sol ameubli, enrichi, etc.). La plante
poussera avec vigueur une fois reprise. Je vous
prie de communiquer cette note à M. Pierre. Je
lui ai remis du reste un ou deux pieds de giroflier.
Il ne devra pas essayer de les déplacer sous aucun
prétexte: ce seraient des arbres perdus. » Peu
après il écrit encore : « Nous avons eu beaucoup
de peine à nous procurer des girofliers. J'en ai
reçu bon nombre de graines de Java. Actuellement
nous en durcissons des petits plants pour vous les
expédier, mais c'est très difficile. Les graines
voyagent aussi très diflicilement. Nous arriverons
surement à introduire la plante au Gabon; c'est
une question de mois. »
L'occasion d'un envoi se présente au début
d’avril 4887. Dans une lettre datée du 4°° avril
adressée au R. P. Klaine, M. Cornu joint une « liste
de plantes et graines expédiées à M. Ballay, gou-
verneur du Gabon, en le priant de vouloir bien
partager avec le P. Klaine ». Il y figure quatre
plants de giroflier pour lesquels on renouvelle les
recommandations ci-dessus. Il faut croire que les
deux premiers envois n'ont pas réussi, car le
dt octobre 1887 Cornu écrit : « Je vous adresse
selon votre demande deux muscadiers et deux
girofliers. » Ce second envoi n'eut pas plus de
succès, car une lettre d'avril 4888 de M. Cornu à
E. Pierre apprend que tout est à recommencer. Le
professeur s'attache alors à faire parvenir au
Gabon des graines de la même plante.
Le 3 aoùt 1888, il écrit : « Comment vont vos
semis de girofliers ? » le 1°° septembre 1888 : « Je
suis heureux que les graines de giroflier aient bien
réussi »; le 2 juin 1891 : « Je vous adresse par la
poste quatre petites boites renfermant des graines
stratilices de giroflier. Dites-moi comment elles
auront supporté le voyage. J’envoie cinq boites à
M. de Brazza et une boite à Mer Carrie (évêque de
Loango). Essayez de répandre cette espèce si utile
et d'une si haute valeur. »
Puis le professeur du Muséum apprend que les
plants vont bien, car le 4° décembre 1891 il écrit :
« Je vous envoie la copie d’une courte note sur la
culture des girofliers à Zanzibar, je vais envoyer
la même note au gouverneur général alin de lui
montrer l'importance de cette culture. Je crois
avoir, à l'aide du concours très bienveillant de
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
M. le D' Ballay, réussi à faire parvenir au Gabon
et sur la côte occidentale d'Afrique les premiers
girofliers. »
Enfin, en 14893, les plans âgés de six ans fleurissent
pour la première fois à Libreville ainsi qu'en
témoignent les extraits suivants :
24 septembre 1893 : « L'état si florissant des giro-
fliers me comble de joie... Enfin! ne laissez
perdre aucun des fruits, cela est de première
importance pour la colonie ! Parlez-m'en souvent. »
2 janvier 1894 : « Le giroflier est enfin en fleur à
Libreville; il a même donné des fruits, voilà une
espèce à multiplier. »
Dans les correspondances qui suivirent, Maxime
Cornu continua à s'intéresser à cette introduction
et fit tous ses efforts pour faire répandre la culture
du giroflier au Gabon. Quand il mourut, en 1901, il
n'existait encore dans l'Ouest africain comme giro-
fliers fleurissant et fructifiant que les quelques
plants cultivés au Jardin d’essai et à la mission
catholique de Libreville, ainsi que je pus le con-
stater en juillet 1902.
Ces plants ont fourni un grand nombre de
graines qui ont permis de répandre l'espèce en les
points les plus divers de l’Afrique équatoriale fran-
çaise et du Congo belge. Il existe actuellement des
girofliers en production dans les environs de
Libreville et dans les principales plantations bor-
dant les rives du Como, dans le Bas-Ogooué, dans
la région de Loango, au Jardin d'essai de Brazza-
ville. Au Congo belge, nous en avons observé au
Jardin botanique d’Eala, à la mission des Jésuites
à Kisantu, à la station forestière de Calamou près
Boma, à la plantation de Temvo au Mayumbe.
Nulle part cependant giroflier n’atteint un aussi
beau développement qu'au Gabon équatorial. Là il
pousse vigoureusement, mème dans les terrains
argilo-sablonneux pauvres où ni le cacaoyer ni le
caféier ne sauraient réussir; il se passe d'abri et
doit seulement être protégé par des brise-vent; il
développe ses boutons floraux en juin-juillet, en
pleine saison sèche, à une époque où l'on peut les
cueillir et les sécher facilement. Il produit dès la
cinquième année; à partir de la dixième année
un arbre peut fournir, sil est bien entreteau,
3 à 10 kilogrammes de clous de girofle. Il demande
peu de soins et pourrait, comme à Zanzibar, faire
la base d’une culture familiale pour les indigènes
et les petits colons. C'est en définitive une acqui-
sition très précieuse pour notre belle colonie du
Congo.
A. CHEVALIER.
No 1465
COSMOS
665
Le vieux neuf, le dactylophone.
Dans le numéro 14418 du Cosmos (24 octobre 1912),
on signalait l'intéressante invention, faite par le
D" M.-A. Legrand, d'un appareil baptisé le dacty-
lophone, destiné à rendre faciles les communica-
tions avec les sourds.
Or, le célèbre spécialiste ne se doutait certaine-
ment pas qu’il ressuscitait une invention datant
de plus d'un siècle ; cela n'enlève rien à son mérite,
mais le fait est intéressant :
Nous avons à ce sujet reçu la lettre suivante :
« Cet appareil est décrit dans le numéro du
25 messidor an X (14 juillet 1802), du Journal de
Paris, sous le nom de féléloque ou opltilogue,
comme inventé par le citoyen Belprey, avec son
clavier et ses mots apparaissant à la vue.
» Vous pouvez vous en assurer en consultant
une collection de la Bibliothèque nationale. »
Nous nous sommes empressés de nous reporter
à la source indiquée, et nous avons trouvé le très
curieux article suivant, auquel le style de l'époque
n'enlève rien de sa saveur, au contraire; nous
sommes convaincus que sa reproduction intéressera
nos lecteurs.
De loptilogue, ou du cylindre parlant, appliqué à la
transmission des idées chez les sourds-muets, à la
communication lointaine des habitants de la cam-
pagne, à l'interprétation des ballets pantomimes, àla
célébration des fêtes nationales età la publication des
ordres du gouvernement, avec une planche explica-
tive, par le citoyen BeELPREY. Prix : 1,50 fr, et 1,80 fr
franc de port. A Paris, chez Dabin, libraire, au bas
de l'escalier de la Bibliothèque du tribunat, et chez
l’auteur, rue de Grenelle-Saint-Germain, n° 334 (1).
Condillac dit quelque part que le secret des décou-
vertes consiste dans l’art de décomposer et de recom-
poser. Le citoyen Belprey vient de prouver matériel-
lement la justesse de ce principe et en a fait une
heureuse application à la figure des signes écrits. H
a imaginé de décomposer celle de nos lettres en figures
partielles et élémentaires rassemblées dans une Letour
mére, dont les autres ne sont plus que les différentes
fractions, et qui peut les engendrer toutes : c'est à
cette idée qu'est due l'invention du cylindre parlant.
Cette machine, qui a déjà été l'objet d'un rapport
favorable, et dont les journaux parlérent dans le temps,
a été perfectionnée depuis par l’auteur. Il en otire
aujourd’hui un nouveau modèle, sous la forme d'un
meuble d'appartement appelé télélogue domestique.
et destiné à mettre en communication lointaine les
habitants de la campagne. |
Avant de considérer le cylindre parlant dans ses
diverses applications, rappelons en peu de mots ses
propriétés.
Ce cylindre, lorsqu'on le fait tourner et qu'or touche
(1) Journal de Paris, 25 messidor an X, p. 1841.
sur un clavier qui lui est adapté, présente subitement
des lettres plus ou moins colossales qui, après avoir
tourné autour de lui et s'être montrées vers tous les
points, viennent s’eflacer d'elles-mémes immédiatement
a côté de celui où on en fait paraître d'autres en con-
tinuant de toucher sur le clavier. Par ce moyen, toute
la pensée de celui qui transmet s'écrit et se dévide
autour de cet instrument qui récite à l'œil le plus
long discours par une succession de syllabes écrites,
précisément comme on Île réciterait à l'oreille par une
succession de syllabes articulées : ainsi, dit l’auteur,
il rend l'écriture aussi fugitive que la parole, la fait
voler comme elle, et lui donne les mèmes propriétés
à l'égard du sens auquel il la transmet. Le jour, les
lettres se tracent en vide et en ombre sur la surface
blanche du cylindre; la nuit, elles se montrent en
transparent au moyen d’une lumière placée dans le
centre et d’un voile blanc qui entourela zone tournante.
Parler à la vue, parler au loin, parler à tous et
parler dans le tumulte, tels sont les avantages à con-
sidérer dans l'’optilogue.
Exécuté en petit et renfermé dans une espèce de
chiffonnière qui laisse voir son côté de transmission,
et dans laquelle on le fait tourner avec les pieds pen-
dant qu’on touche sur son clavier, c’est un meuble
élégant et transportable avec lequel un sourd-muet
peut parler à une assemblée de 2000 à 3 U0O personnes.
Exécuté en plus grand et élevé à hauteur de croisée,
sur quatre pieils à roulettes, le même meuble devient
un féléloque domestique. qui, soumettant la pensée à
l'action des lunettes de longue vue, la transmet au
loin, sans lui faire subir la double traduction des
idées en signaux et des signaux en idées. Il faut voir
dans l'ouvrage mème comment le secret des conver-
sations lointaines se concilie avec cette précieuse pro-
priété.
En développant les applications du télélogue, l'au-
teur n'oublie pas de supposer deux amans se par-
lant dans une belle nuit d'été, et d'un bord à l'autre
d’un lac, de leur union prochaine. Il prédit un temps
où l'usage de ce meuble, devenu universel, aura trans-
porté à la campagne tous les plaisirs de la communi-
cation sociale et les aura dégagés des entraves de la
distance pour les marier à ceux de la nature; où les
vallées et les plaines seront devenues des salons de
conversation; où l'horizon s’animera de pensée; où
l'on pourra voir celle d’un ami ou d'une femme
aimable dans l'éloignement d'un riant pavsage: ou
les habitans de tout un pays, se secourant muluel-
lement dans l’échange de leur transmission, seront
présens les uns aux autres malgré leur éloignement
physique; où leurs relations se seront nécessaire-
ment multipliées par ce voisinage moral; où les bul-
letins de santé, les civilités réciproques, les commis-
sions données, les secours réclamés, les rendez-vous
concertés, les visites annoncées, les nouvelles pu-
blique» et domestiques, les tendres propos des amans,
les enquètes curieuses des femmes circulant avec une
rapidité électrique sur un vaste théàtre et échappant
à toutes les lois de la distance et de l'opacité, auront
précipité le mouvement social, uni l'état de société
066
à l'état d'absence, associé de nouveaux plaisirs à
l'amour et à l'amitié, et enfin totalement changé l’art
de l'intrigue, à la grande satisfaction des romanciers
de ce temps-là.
Sans examiner si l’auteur n’exagère point ici les
développements possibles de son invention, nous pas-
sons à la plus importante des applications qu'il pro-
pose d’en faire.
Un optilogue colossal, renfermé dans un édifice cir-
culaire percé de plusieurs ouvertures ou bouches
dirigées vers tous les points, lui donne la propriété
de réciter au loin, par toutes ses bouches, de tous les
côtés, à une très grande multitude d'hommes, la nuit
comme le jour et dans le tumulte d'une sédition ou
d'une fète publique, le discours qui se dévide autour
du cylindre.
COSMOS
42 DÉCEMBRE 1912
Deux hommes, dont l'un touche sur le clavier placé
au centre et l’autre fait tourner l’optilogue comme un
jeu de bague en marchant circulairement dans l'inté-
rieur de l'édifice, suffisent pour animer un publicateur.
Le pavillon médial du Palais consulaire, coëtfé
d'un publicateur à deux bouches, parlerait d'un côté
à tout le jardin des Tuileries jusqu'à la place de la
Concorde, et de l’autre à toute la place du Carrousel.
Si, dans la suite, les publicateurs ou les tours par-
lantes se multipliaient assez sur le sol de la France
pour être à portée de se copier mutuellement en se
fixant avec de bonnes lunettes, un discours prononcé
par le publicateur de la capitale, s'étendant tout
autour et par une ondulation rapide jusqu'aux extré-
mités de la France, aurait pour auditoire la nation
qui l'habite.
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 2 décembre 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Élections. — M. Pu.-A. GuYE a été élu Corres-
pondant pour la Section de chimie par 44 suffrages
sur 47 exprimés, en remplacement de M. Adolf von
Baeyer, ċlu Associé étranger.
M. Bazcaxp a été élu Correspondant pour la Section
d'économie rurale par 32 sutfrages sur #3 exprimés,
en remplacement de #. Pagnoul, décédé. :
Contribution à l’étude de la scintillation.
— La scintillation stellaire se manifeste par des chan-
gements brusques d'éclat, accompagnés, dés que la
distance zénithale est assez grande, de changements
de coloration. Nous avons aujourd’hui l'explication
du phénomène, qui apparaît comme une conséquence
de la non-homogénéité de l'air et de son agitalion,
Toutefois, certaines apparences, qui semblent liées à
l'éclat et à la couleur de l'astre observé, restent
encore mystérieuses et échappent à la théorie qu'ont
permis d'édifier les nombreuses recherches antérieures.
M. Cu. Gazussor à etfectué à son tour différents essais
pour tächer d’en déduire une explication du phéno-
mène.
Ses observations ne lui ont pas donné des résultats
détinilifs, mais cette étude préliminaire montre que
le phénomene de la sciutillation comporte une partie
subjective qu'on ne peut négliger, soit au point de
vue de ses apparences, soit au point vue de ses
eflets sur les estimations d'éclat, et les résultats
obtenus jettent quelque lumiċre sur certains faits
d'observations.
A propos de la communication de M. Gouy :
« Sur la théorie des gaz ionisés etle principe
de Carnot ».— M. Gouy, dans sa note du 14 octobre,
imaginait un dispositif où un champ magnétique hori-
zontal combiné au champ vertical de la pesanteur
communiquait des mouvements permanents en sens
contraires aux ions des deux signes: d'où un courant
électrique permanent, dont la production serait contra-
dicloire avec le principe de Carnot. M. C.-G. Darwin
montre que la séparation des ions, telle qu'elle était
alléguée par M. Gouy, ne se produit pas, et que le
second principe de la thermodynamique reste sauf.
Sur la réflexion des rayons cathodiques
lents. — M. L. HocrLeviGte a indiqué que les élec-
trons émanés d’un filament de carbone incandescent
peuvent, sous l’aclion du champ électrique créé par
une différence de potentiel voisine de 100 volts,
donner un pinceau cathodique bien délimité, dont la
vitesse approche de 5 000 kilomètres par seconde; ce
pinceau est visible sur tout son parcours, gràce à la
présence de traces de vapeurs de mercure dans
l'espace, privé de tous autres gaz, où il se propage.
Lorsqu'il vient à frapper la paroi de verre du réci-
pient où il se propage, il se réfléchit nettement; il se
réfléchit également sur une lame métallique placée
à l’intérieur du récipient. Ce fait s'explique diflicile-
ment par un rebondissement des électrons, étant
données les dimensions exiguës de ces électrons par
rapport à celles des éléments matériels qui constituent
les parois; en réalité, cette réflexion est due à un
phénomène électrostatique; elle a pour cause l'inflexion
des trajectoires des électrons dans le champ électrique
maintenu à l'intérieur du récipient.
L'auteur présente un dispositif où l’on voit cette
réflexion apparente se faire, soit au contact de le lame
de verre ou de métal, soit à une certaine distance de
la lame.
Sur la limite de formation des composés
dits « endothermiques » aux températures
très élevées. — D'après le principe du déplacement
de l'équilibre chimique de Le Chatelier-Van't Hoff, la
production, aux températures élevées, de réactions
absorbant de: la chaleur aboutit, dans certains
Systèmes, à la formation de composés dits endother-
miques; tel, par exemple, l’oxyde d’azote,
Celle formation est-elle favorisée sans limite par
l'élévation de la température? Si oui, beaucoup de
composés, oxydes d'azote NO, N,0, ozone, chlorure
d'azote, cyanogène, sulfure de carbone, existeraient
N° 1455
dans les régions de plus en plus chaudes, à des con-
centrations de plus en plus élevées.
Cette conséquence du principe de Le Chatelier-
Van’t Hoff heurte le sens chimique, habitué à conce-
voir la destruction des édifices moléculaires par des
températures suffisamment hautes; elle est en contra-
diction avec l'analyse spectrale, qui prouve la nature
élémentaire et non complexe des corps existant sur
les astres les plus chauds.
Cette contradiction tombe en faisant intervenir la
dissociation des molécules en atomes; or, quelques
travaux récents l'ont mise en évidence pour plusieurs
éléments et permis l'évaluation de la chaleur de for-
mation des molécules à partir des atomes; celle-ci est
toujours considérable: par exemple, à 2427°, deux
atomes dissociés d'hydrogène H s'unissent pour former
une molécule H? en dégageant 130 calories par molé-
cule-gramme. Ainsi, aux températures suffisamment
élevées, la formation des corps dits endothermiques
(ils ne sont endothermiques que parce que leur cha-
leur de formation est évaluée à partir des molécules)
deviendra exothermique, et leur concentration dimi-
nuéra aves l'élévation de température; M. E. BRINER
établit un théorème qui montre qu'elle passe par un
maximum.
En somme, à partir des atomes, tous les composés
sont exothermiques.
Des applications de diathermie comme ra-
tion énergétique d’appoint. — Chez l'homme et
chez les animaux homéothermes, une partie de l'éner-
gie des aliments est dépensée pour maintenir la tem-
pérature du corps constante, en dépit des déperditions
extérieures, variant d'après la surface du corps, la
température ambiante, la protection du vétement, elc.,
et aussi l’état de santé du sujet. Cette quantité d’éner-
gie peut étre la moitié ou plus de l'énergie repré-
sentée par les aliments. Pourquoi, dans ces condi-
tions, ne pas lui fournir, en nature, cette grande
quantité de chaleur, au lieu de la lui laisser tirer des
aliments qu’il faut digérer et brüler, en surmenant
les appareils physiologiques qui servent à cette diges-
tion et à cette combustion ? C’est ce que M. J. BERGONIÉ
fait par la diathermie, c'est-à-dire par l'application
des courants électriques de haute fréquence suivant
la technique de M. d'Arsonval, courants qui sont sans
danger. En appliquant sur le corps des électrodes
larges (30 dm? au total), on peut envoyer dans l'orga-
nisme une intensité efficace de 2 à 3 ampères, sous
une différence de potentiel de 4 000 à 2500 volts, sans
aucune autre sensation que celle de la chaleur; on
fournit ainsi à l'homme, en une heure, un millier de
calories, le tiers de la ration alimentaire de sa
journée. l
Nombre de maladies: marasme, hypotherinie, ina-
nition, anémies, sont justiciables de ce traitement.
Sur la vaccinothérapie de la fièvre ty-
phoïde. — MM. ArDpiN-DELTEIL, L. NÈGRE et MAURICE
RavNaub ont entrepris, depuis plus d'un an, l'élude
du traitement de l'infection éberthienne par les vac-
cins antityphiques et, en particulier, par le vaccin
sensibilisé vivant de Besredka. Leurs recherches leur
permettent de conclure que : 4° la vaccinothérapie
semble bien diminuer la gravité de la maladie; sur
trente-sept cas, ils n'ont eu aucun décès, tandis que
COSMOS
667
les non-vaccinés fournissent une proportion de 8,38
pour 100; 2° elle diminue le nombre des rechutes :
5,4 pour 100 au lieu de 9,75 pour 100; 3° elle paraît
abréger la durée de la maladie, d'autant plus que le
traitement est institué plus près du début de l'in-
fection.
Action de doses infinitésimales de diverses
substances alcalines, fixes ou volatiles, sur
la vitalité des microbes. — MM. A. TriLiat et
M. Fouassier établissent que les bases volatiles prove-
nant de la décomposition organique agissent différem-
ment sur Îles microbes qui se trouvent à l’état de
souffrance, comme c’est le cas lorsqu'ils sont en sus-
pension dans l'air ou dans l’eau, non seulement en
neutralisant ou alcalinisant les milieux, mais surtout
en leur fournissant une nourriture gazeuse. Celle-ci
pourrait ètre considérée, non comme une alimenta-
tion normale, mais comme une alimentation d'attente
leur permettant de prolonger leur existence.
Observations sur les glandines à Verrières-
le-Buisson. — M. Bouvier, qui avait reçu des glan-
dines du Mexique, en a remis vingt-cinq exemplaires
à M. Pu. DE ViLuorix pour étudier les mœurs de ces
gastéropodes à Verrières-le-Buisson.
Il résulte des observations qui y furent faites que la
grosse glandine du Mexique est très avide d'escargots,
qu’elle ne touche pas aux limaces ni aux plantes,
qu'elle s’accouple dans la région parisienne et qu'elle
peut mème y pondre. Reste à savoir si la ponte sera
féconde et si le mollusque pourra subir l'hiver de nas
climats: ces questions présentent un intérêt pratique
évident; elles méritent d'ètre résolues et le seront
sans doute au cours de l'année prochaine. En tout
cas, on sait qu'une petite espèce de glandine est
répandue dans la région méditerranéenne où M. Bou-
vier a fait mettre en observation plusieurs lots de
Glandina olivacea.
Développement «in vitro » de blastodermes
et de jeunes embryons de mammifères, —
M. A. BracHET a employé, quelque peu modifiée, la
méthode que Harrison et Burrows ont imaginée, et
dont Carrel a tiré de si remarquables applications.
Dans du plasma bien clair extrait par ponction caro-
tidienne du sang d’une lapine et tenu à l’étuve à
39°,5, il met les jeunes blastouystes retirés des cornes
utérines de l'animal: ces vésicules blastodermiques
n'ont que cinq à six jours et aucune ébauche em-
bryonnaire n’est encore constituée. Or, immobilisés
dans le plasma coagulé, ces œufs ne se maintiennent
pas seulement en vie, mais ils se fixent et se déve-
loppent, au moins durant quarante-huit heures, en
absorbant activement les éléments du plasma ambiant.
Ainsi, le changement de milieu n'a modifié en rien le
déterminisme héréditaire de l'œuf.
Sur l'existence de roches à néphéline dansles schistes
cristallins de Madagascar. Note de M. A. Lacroix. —
L'oligoctne du bassin de Roanne et ses faunes de
mammifères fossiles. Note de M. Cnanzes DEPÉRET, —
M. Pienre TEnuiEn présente à l'Académie et recom-
mande très chaleureusement un mémoire de M. KOBER,
de Vienne, sur la structure des Alpes Nord orientales.
— Sur un problème d'inversion posé par Abel. Note
668
de M. Paraicx Browxe. — Sur la réduction des équa-
tions à trois variables aux formes canoniques que
comporte la méthode des points alignés. Note de
M. M. D'Ocacxe. — Le régime des crues dans le réseau
fluvial congolais. Note de M. Rovssixe; cet ingénieur
hydrographe dirigeait la mission Congo-Oubangui-
Sanga, qui a été amenée, pour la rédaction de cartes
hydrographiques, à étudier soigneusement le régime
des crues dans le Congo et ses affluents. — Cartes de
la deuxième expédition antarctique française. Note de
M. CuarcorT; en présentant ces cartes dues au hieute-
nant de vaisseau Bongrain et à l'enseigne de vaisseau
Godfroy, M. Charcot fait remarquer qu'elles com-
plètent, avec les cartes de la première expédition dues
au lieutenant de vaisseau Matha, un ensemble qui, en
dehors de l'intérèt scientifique, a déjà donné des
résultats pratiques considérables en permettant aux
baleiniers de naviguer avec plus de sécurité dans ces
régions, et trente-six navires ont ainsi pu réaliser
d'énormes profits. — Inversion du saccharose par les
rayons ultra-violets. Note de MM. HENRI Bignry, Vicron
Henni et ALperT Raxc. — Photolyse des diverses caté-
gories de sucres par la lumière ultra-violette. Note de
MM. Darie BertneLoT et Henry Gavpecton. — Action
de la potasse caustique sur le cyclohexanol; synthese
du cyclohexanyleyclohexanol et du dicyclohexanylcy-
clohexanol. Note de M. Mancez GUENBET. — M. LUCIEN
Dai a réussi la grefle du cresson de fontaine sur
le chou moellier: cette réussite montre que, en rédui-
sant les ditférences existant entre les capacités fonc-
tionnelles de deux plantes d'habitat différent par une
adaptation progressive rationnelle, on peut arriver
à réussir des grelles qui échouent avec les méthodes
ordinaires. — Sur les cultures de mousses en milieux
stérilisés. Note de M. M. Senverraz. — Recherches sur
la variation des matières grasses, des sucres et de la
saponine au cours de la maturation des graines de
Lychnis Githago. Note de M'™™ Manie Konsakorr. —
Sur la présence de la gentiopicrine, du gentianose ct
du saccharose dans les racines fraîches de la gentiane
à feuille d’asclépiade. Note de M. Marc Brinez. — Les
terres noires de la vallée de l’oued R’Dom au Maroc.
Note de M. G. Gin. — Étude agrologique du manga-
nese. Note de M. P. Norris; cette étude permet de
constater que la terre arable insolubilise et retient le
manganèse d'une façon analogue à celle dont elle
absorbe l’ammoniaque, la potasse et l'acide phospho-
rique. — Les réactions humorales dans la vaccine
humaine ou expérimentale et dans la variole (réac-
lions d'infection, réactions d'immunilé}. Note de
MM. Pierre Teissier et Paenne GastineL. — De la relation
qui unit le temps de latence de la réaction à l'intensité
de l'excitation. Note de M. HENRI Piénox. — Action de
l'aluminium activé sur les extraits alcaloïdiques. Son
emploi en toxicologie. Note de M. E. KOHN-ABREST. —
Influence comparée du potassium, du rubidium et du
cwsium sur le développement et la sporulation de
l'ispergillus niyer. Note de M. B. SauTox. — Activation
de certains processus d’o\ydation microbiens par Îcs
sels d'urane. Note de MM. AucLuon et R. SAzEnac. —
Les dépôts glaciaires locaus du Vercors et des envi-
rons du Villard-de-Lans. Note de M. CHARLES JACOB. —
Etude morphologique sur les terrasses des environs
de Lvon. Nolc de M. I. Assapa. — Le rôle magnétique
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
des océans et la constitution de l'écorce terrestre.
Note de M. ALpuoxse Bercer; nous reviendrons sur
cette note intéressante. — Sur les tremblements de
terre des provinces baltiques de la Russie (Esthonie,
Livonie et Couriande). Note de M. px MonTEssus LE
BazLore. — Etude de ia radio-activilé des sources de
Vichy et de quelques autres stations. Note de
MM. A. Lasonpe et A. LEPAPE.
SOCIÉTÉ ASTRONOMIQUE DE FRANCE
Séance du mercredi 4 décembre.
PRÉSIDENCE DE M. P. PUISEUX.
Après que M. Puiserx, membre de l'Institut et astro-
nome à l'Observatoire de Paris, a donné quelques
échos de la Conférence internationale de l'heure,
qui s’est tenue le 15 octobre et les jours suivants
à l'Observatoire, M. Daniez BERTHELOT parle sur les
rayons ultra-violets et leurs applications praliques.
Les rayons ultra-violets, c’est, pour le physicien, le
summum de la lumière; leur fréquence d’oscillation
est plus grande que celle de la lumière visible, et, à
raison de cette fréquence même, ils posstdent une
plus grande énergie. Quand l'atmosphère ne joue
plus vis-à-vis d'eux son ròle absorbant, ces rayons
attaquent la peau, produisant le coup de soleil des
régions alpines ou des déserts privés de vapeur d’eau.
ils tuent rapidement les microorganismes; aussi le
conférencier traite-t-il avec dédain l'hypothèse de la
« panspermie interastrale », de l'ensemencement des
astres par des germes vivants microscopiques enlevés
à la surface d’autres astres, car de tels germes vivants
seraient rapidement tués, en leurs pérégrinations à
travers l’espace, par les rayons ultra-violets des soleils.
L'ultra-violet est invisible, mais il est révélé facile-
ment soit par la plaque sensible, soit par un écran
fluorescent (platinocyanure de baryum, verre d'urane,
sulfate de quinine, etc.), qui dégrade l'énergie de la
radiation à haute fréquence en restituant une radiation
à moindre fiéquence, comprise dans les limites du
spectre de la lumière visible.
Presque tous les milieux sont très absorbants pour
les rayons ultra-violets : l’air, le verre ordinaire les
arrètent, et, à ce point de vue, ces rayons sont aux
antipodes des rayons X, qui traversent même les
métaux. Le quartz ainsi que la fluorine ou spath fluor
se laissent traverser par l’ultra-violet. Depuis quelques
années, on a réussi à fabriquer des lampes à vapeur
de mercure en verre de quartz, qui fournissent « à
torrents » les rayons ultra-violets qu’on ne produisait
que parcimonieusement autrefois par les tubes à gaz
raréfiés ou les arcs électriques jaillissant entre métaux
à l'air libre. Finsen avait déjà appliqué avec succes
larc entre électrodes de fer à la guérison des lupus.
Aujourd'hui qu'on les produit en grand, les rayons
ultra-violets reçoivent des applications nombreuses et
importantes. Aussi, de mème qu'on a créé en chimie
le chapitre de l’électrolyse, il faudra bientôt donner
une place à part aux réactions de photolyse (décompo-
sitions chimiques très énergiques et très rapides
opérées par la lumière ultra-violette), ainsi qu'aux
N° 1455
réactions de pholosynthèse. On peut dire désormais
que l’action de la lumière sur les substances chimiques
est aussi générale et aussi importante que l'action
bien connue de la chaleur et de l'électricité.
L'action destructrice des rayons ultra-violets de la
lampe en quartz sur les tissus et organismes vivants est
presque foudroyante : à regarder cette lampe durant
une dizaine de secondes, on risquerait une grave ophtal-
mie, à moins de se protéger par des lunettes de verre
COSMOS
669
ordinaire. En une durée de ÿ à 60 secondes, les bacilles
de la fièvre typhoïde, du tétanos, de la tuberculose,
le vibrion cholérique exposés à 10 centimètres d'une
lampe en quartz à 110 volts sont tués. Aussi les rayons
ultra-violets sont-ils employés dans des installations
très importantes pour la stérilisation des eaux de
ville, notamment par les services municipaux de
Paris et de Marseille. ;
B. LATOUR.
BIBLIOGRAPHIE
Précis d’optique publié d’après l'ouvrage de
PauL Drue, refondu et complété par Marcri
BoLL, professeur agrégé de l'Université. Préface
de PauL Langevin, professeur au Collège de
France. T. [Il : Optique électro-magnétique;
Optiqueénergétique.In-8° (25 X 16) deiv-362 pages
avec 64 figures (12 fr). Gauthier-Villars, Paris,
1942.
En analysant le tome le du Précis d'optique,
nous avons dit quel est le caractère de cet ouvrage,
remarquable adaptation du Lehrbuch der Optik
que Drude publia en 1900 (Cosmos, t. LXV, n° 13914,
p. 362). Ce premier tome contenait l'Optique géo-
métrique et l'Optique ondulatoire.
Le second tome, qui termine l'ouvrage, contient
l'exposé systématique de la théorie électro-magné-
tique et de la théorie électronique de la lumière,
ainsi que l'étude des lois et des théories du rayon-
nement. Chacune de ces deux parties : Optique
électro-magnétique et Optique énergétique, dé-
bute, dans l'édition française, par deux chapitres
d'introduction où se trouvent résumées les notions
indispensables d'électro-magnétisme et de thermo-
dynamique.
Divers physiciens, Fresnel spécialement, avaient
constitué des théories mécaniques bien cohérentes
et assez complètes de la lumière : la lumière était
un phénomène ondulatoire assimilable au son,
mais avec cette première différence qu’elle se pro-
pageaït non dans l'air, mais dans un milieu hypo-
thétique, l’éther, qu’on a imaginé justement pour
sauver les théories mécaniques; et avec cette autre
différence que les vibrations lumineuses sont trans-
versales, c'est-à-dire s'effectuent dans une direc-
tion perpendiculaire au sens de translation de la
lumière, tandis que les fluides comme l’eau ou
l'air ne transmettent que des vibrations longitu-
dinales. Diverses difficultés rencontrées par les
théories mécaniques de la lumière ont été sur-
montées victorieusement, au prix de quelques
complications supplémentaires. Le reproche vrai-
ment sérieux qu'on peut leur faire et qui a été la
cause de leur décadence, c’est qu'elles restent
muettes sur les rapports qu’on sait exister entre
l'optique et l'électricité; aussi, après avoir tiré
de l'optique ondulatoire tout ce qu'elle pouvait
donner, il convient de poursuivre l'étude de
l'optique en empruntant le point de vue électro-
magnétique : tous les résultats acquis par les théo-
ries précédentes subsistent, et, en outre, des avan-
tages tout nouveaux sont immédiatement acquis
du chef de la théorie électro-magnétique.
À la base de cette théorie, on suppose, avec
Faraday, Maxwell et Hertz, que la propagation de
la lumière dans un milieu transparent est identique
à la propagation d'une onde électro-magnétique
dans un isolant. Voici les avantages spéciaux de la
théorie. D'abord la transversalité des ondes, qui
paraissait si étrange dans la théorie mécanique,
résulte directement des théories générales de
Maxwell sur l’électro-magnétisme. En second lieu,
le fait que la vitesse de la lumière et la vitesse des
ondes électro-magnétiques (employées en télé-
graphie sans fil sont égales s'explique aisément,
si l’on admet que la lumière n’est pas autre chose
que des ondes électro-magnétiques. Voilà l’avan-
tage essentiel de la nouvelle théorie: grâce à elle,
deux parties de la physique, tout d’abord si diffé-
rentes comme l'optique et l'électricité, se rejoignent
par suite d'expériences quantitatives très précises.
Enfin, la théorie électro-magnétique a permis d’in-
terpréter et même parfois de prévoir différents
phénomènes électro-optiques et magnéto-optiques :
phénomène de Faraday, phénomène de Zeeman,
phénomène de Kerr, etc. : toutes questions qui
sont développées dans l'ouvrage indiqué, et avec
le secours de l'analyse mathématique.
A l'optique électro-magnétique se rattache la
question très débattue : L’éther reste-t-il toujours
en repos, ou bien subit-il de la part des objets en
mouvement un entrainement partiel? H.-A. Lo-
rentz, pour satisfaire aux observations physiques,
et notamment pour expliquer l’aberration des
étoiles, a admis que l'éther reste toujours en repos;
mais alors l’éther, étant immobile, devrait pouvoir
servir de point de repère pour les corps en mouve-
ment; s'il s'agit de la Terre en particulier, on de-
vrait pouvoir déceler son mouvement par rapport à
l'éther, au moyen de certaines expériences optiques;
par exemple, étant donné une longueur AB mesurée
670
à la surface de la Terre, la lumière emploiera à la
parcourir des durées différentes suivant que la
longueur AB est dirigée dans le sens de la transla-
tion terrestre ou au contraire dans le sens perpen-
diculaire. L'expérience a été faite par Michelson;
le résultat a été négatif. Faut-il donc abandonner
l'hypothèse de l'éther immobile ? On peut se tirer
autrement de cette difficulté. Lorentz et Fitzgerald
émettent cette nouvelle hypothèse que la longueur
d’un corps solide dépend de son mouvement dans
l'espace : deux règles parallèles et égales, d'un
mètre, par exemple, ne sont plus égales quand
elles sont disposées l’une dans le sens du mouve-
ment de la Terre el l’autre à angle droit. Et c’est
ce qui fait que les deux longueurs AB de tout à
l'heure, bien que différentes, ont pourtant l'air
d'être égales, car le mètre avec lequel on les
mesure se raccourcit ou se rallonge, suivant la
direction, de manière à établir une exacte com-
pensation. D'ailleurs, la contraction en question
est extrêmement faible : le diamètre terrestre qui
coïncide avec la direction de son mouvement de
translation dans l’éther est diminué de 13 centi-
mètres par rapport au diamètre qui lui est perpen-
diculaire.
Plus récemment, à la suite des expériences de
Rayleigh (1902) et de Brace (1904), Lorentz a dù
admettre en outre que cette même contraction se
produit pour les électrons en mouvement.
Il semblerait que la nature se joue de nos phy-
siciens pour leur dérober tous les moyens par les-
quels ils espéraient surprendre le mouvement des
corps relativement à l’éther immobile. Aussi un
postulat très général et très solide de la physique
moderne est le principe de relativité : Il n'existe
aucun moyen de mettre en évidence le mouvement
absolu des corps (on entend ici par mouvement
absolu le déplacement mesuré par rapportàl'éther).
Je ne m'étendrai point sur la dernière partie :
Optique énergétique, qui est également très
riche en résultats récents. Au livre de rude, le
traducteur a ajoulé des développements impor-
tants relatifs aux différentes méthodes de mesure
de l'énergie rayonnante, aux constantes des lois
du rayonnement, à l'étude des pyromètres, à
l'émission des corps gris et des corps colorés,
ainsi qu’à la photoluminescence.
Mémoires sur l'électricité et l’optique, par
A. Poter, membre de l'Institut, publiés et anno-
tes par A. BLONDEL, avec une préface de H. Poix-
CARE. [n-8" (25 Xx 16) de xv-330 pages, avec
T4 figures et un portrait de A. Potier (43 fr).
Gauthier-Viliars, Paris, 1912.
Alfred Potier (1840-1905) a joint l'activité scien-
tfique la plus large à la plus austère modeslie.
Conme la dit son ami, le regretté A. de Lappa-
vent, « il est presque merveilleux qu'il puisse se
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
trouver des savants capables d'exceller en n'im-
porte quelle matière et de se montrer, dans tous
les domaines où leur activité pénètre, des maitres
incontestés. Ce privilège, nul ne l’a possédé de
nos jours à un degré plus éminent que Alfred
Potier, et, de plus, par une rencontre bien peu
commune, sa maitrise a eu ce caractère de s'exer-
cer avec d'autant moins de bruit qu'elle était plus
unanimement acceptée. » Il ne lui a point suffi, en
effet, de toucher à toutesles parties de la physique;
professeur à l'Ecole des mines aussi bien qu'à
l'Ecole polytechnique, il était aussi estimé des géo-
logues que des physiciens; pendant de longues
années, il a pris une part active aux travaux de la
carte géologique détaillée de la France, et il tra-
vailla aussi en commun avec A. de Lapparent en
1876, à l'exploration et aux sondages du détroit du
pas de Calais pour le compte de la Compagnie du
tunnel sous-marin qui devrait déjà relier l'Angle-
terre au continent.
M. Blondel, élève et ami de Potier, a recueilli
les mémoires épars du maitre pour les rendre
facilement accessibles à tous; mais, pour diverses
raisons qu'il expose, il a laissé de côté ceux qui se
rapportent aux études de géologie et quelques
autres qui, relatifs à l'électricité ou l'optique, n'ont
plus d'intérêt immédiat. Les mémoires reproduits
ici avec annotations sont classés en trois parties,
suivant qu’ils se rapportent à l'Électricité théo-
rique (y compris la théorie électro-magnétique de
la lumière, car Potier a beaucoup contribué à
populariser Maxwell en France), à l’Électrotech-
nique et à l'Optique respectivement.
C'est surtout aux électriciens que s'adresse ce
recueil. C’est parmi eux, du reste, que Potier est
le mieux connu, à la fois par ses travaux d'électro-
technique, qui ont occupé toute la dernière partie
de sa vie, et par les conseils éclairés qu'il n’a cessé
de prodiguer à tous les physiciens ou industriels
qui le consultaient sur les principes ou les appli-
cations de la science électrique.
Lever des plans et nivellement, par C.-L. Dr-
RAND-CLAYE, ingénieur en chef des ponts etchaus-
sées; ANDRÉ PELLETAN, ingénieur au corps des
mines, et CHARLES LaALLEMAND, membre de l'Insti-
tut et du Bureau des longitudes, inspecteur géné-
ral au corps des mines, directeur du service du
nivellement général de la France. Opérations sur
Le terrain. Opérations souterraines. Nivellement
‘de haute précision. Deuxième tirage des deux
premières parties, deuxième édition, revue et
augmentée, de la troisième partie. Un vol. grand
in-8° de 786 pages avec 293 figures, de l’Ency-
clopédie des travaux publics fondée par
M.-C. Lechalas (25 fr). Librairie polytechnique
Ch. Béranger,15, rue des Saints-Pères, Paris,1912.
M.Durand-Clayetraitethéoriquement et pratique-
Ne 1155
ment des opérations de lever des plans et de nivel-
lement à la surface du sol; puis M. A. Pelletan
traite des opérations de topographie souterraine
(mines et carrières), soit par le moyen plus usuel
de la boussole suspendue et de l’éclimètre, soit par
l'emploi du théodolite de mines ou des boussoles
à lunetles, ainsi que des opérations assez délicates
qui ont pour but de rattacher l'orientation des
plans souterrains à la direction de la méridienne.
La troisième partie, très étendue (de la page 350
jusqu’à la fin), est un traité complet des nivelle-
ments de haute précision. Quand l'opération du
nivellement doit s'étendre à un grand territoire,
elle devient excessivement compliquée; on ne peut
plus supposer que les surfaces de niveau sont par-
tout parallèles, à cause surtout de l’aplatissement
terrestre : si l’on se contentait de faire un nivelle-
ment purement géométrique, on trouverait autant
de valeurs pour la différence de niveau de deux
points qu'il y a de chemins pour aller de l’un
à l'autre de ces points. Aux chiffres bruts donnés
par le nivellement géométrique, il faut appliquer
une correction qui tient compte de l'altitude et de
la latitude des points en question ; pour réduire les
erreurs de réfraction, il convient de limiter la lon-
gueur de chaque nivelée à 120 ou 150 mètres et de
placer toujours le niveau à distance égale des deux
mires. M. C. Lallemand décrit les instruments,
notamment la mire à compensation de température
du colonel Goulier, les opérations sur le terrain
ainsi que les systèmes de contrôle de la justesse de
ces opérations et les détails des calculs, qui se font
en double, à titre de contrôle, par deux méthodes
et par deux calculateurs différents. Le niveau
moyen de la mer, qui est la surface de comparai-
son des altitudes, est déterminé par un médinaré-
mètre très ingénieux et très simple que l’auteur
a créé en 1885 pour le service du nivellement
général de la France et dont il donne la théorie
analytique. Une curieuse note de quelques pages,
mises en appendice, concerne les primes et salaires
des agents du service : en dehors du salaire normal,
les agents employés aux travaux du nivellement
COSMOS
671
général de la France reçoivent des primes calcu-
lées de manière qu’à un accroissement du salaire
total réponde un abaissement du prix de revient :
c'est une sorte de participation de l’ouvrier aux
bénéfices du patron. Avec ce mode de rémunéra-
tion, le salaire journalier des porte-mines a presque
doublé, tandis que le prix de revient kilométrique
des nivellements de premier ordre, de 40 francs
en 1884, s'est abaissé à 33 francs en 1888 et à
31 francs aujourd'hui, les frais généraux ayant
proportionnellement diminué au fur el à mesure
de l’augmentation de rendement des opérateurs.
Manuel d’agriculture tropicale, par J.-C. Wirus,
directeur des Jardins botaniques de Ceylan, tra-
duit par Ern. MonTépic, licencié ès sciences. Un
vol. in-8° de 286 pages, avec 25 planches (8 fr).
Librairie Dunod et Pinat. 49, quai des Grands-
Auguslins, Paris.
Les pays tropicaux comprennent une surface
énorme de territoires; mais tous ne sont pas fer-
tiles, il sen faut. D'autre part, il ne faudrait pas
croire qu'il est facile de s'installer agriculteur dans
ces pays neufs et que les récoltes se produisent
abondantes sans beaucoup de travail et de soins.
L'auteur, très au courant des questions d’agri-
culture tropicale, donne d'excellents conseils qui
seront profitables aux personnes tentées d'aller
s'établir sur ces terres. Il indique les conditions
que doivent remplir les terrains au point de vue
climat, fertilité, voies de communication, prix de
vente, les capitaux qu'il faut posséder suivant le
genre de culture auquel on veut se livrer et la
main-d'œuvre dont il est impossible de se passer.
On trouve encore dans ce livre différents détails
sur les populations, les outils, les travaux d'irriga-
tion, de drainage, etc.
Enfin, une grosse partie du livre est consacrée
à l'étude des cultures diverses qu'on peut entre-
prendre: riz, sucre, thé, café, cacao, palmiers,
épices, fruits et légumes, tabac, opium, chanvre
et autres textiles, cola, coca, caoutchouc. Un
chapitre spécial est consacré à l’élevage du bétail.
PETITE CORRESPONDANCE
Avis. — Nous rappelons à nos lecteurs que nous ne
répondons pas aux lettres non signées.
Adresses :
Les ventilateurs Triumph sont construits par la
fabrique Stegmeier et Cie, à Stutigard (Allemagne). —
Ventilateurs à ressorts genre Aquilon : M. Plan et Cie,
24, rue des Pelites-Écuries, Paris.
M. J. B. RK., à St-D. de G. — Nous ne saurions vous
donner le renseignement demandé. Ecrivez directe-
ment chez de Dion-Bouton, 34, quai National, à Pu-
teaux (Seine), ou à la maison Brouhot, à Vierzon (Cher).
H. P., à B. (Colombie). — Le verre Soleil: Y, rue
Louis-le-Grand ; le prisme Luvfer: 44, rue de l'Aque-
duc, Paris. — Les machines à diviser ne sont pas assez
couramment demandées pour qu'on en trouve de
toutes construites. Il faudrait la commander. Adressez-
vous à la maison Morin, t1, rue Dulong, Paris. — Pour
souder la fonte, s’il s’agit de pitces qui ne doivent pas
s'échauffer, il faut frotter les parties à réunir avec
une brosse de fil de laiton jusqu'à ce que la surface
soit jaune. On soude ensuite à l’étain. Autrement, il n°y
a que la soudure autogène qui puisse être assez solide.
672
M. L. B., à A. — L'adresse indiquée est exacte; nous
sommes surpris qu'on ne vous donne aucun signe de
vie. — Vous pourrez aussi vous procurer du fil émaillé
chez Ducretet et Roger, 35, rue Claude-Bernard, Paris.
M.J.P.,à R. — 1° Les montages à employer à la
réception pour la téléphonie sans fil sont les mêmes
que pour la télégraphie. Le montage par induction qui
permet d'obtenir une meilleure sélection et une syn-
tonie plus rigoureuse est cependant préférable. 2° Les
transmissions n'ont pas lieu régulièrement tous les
jours. Elles sont ordinairement faites, soit le matin,
entre 9"0" et 10*45*; soit le soir, entre 5"0" et 7*0»,
heures auxquelles les constructeurs sont autorisés
à faire leurs essais. 3° La longueur d'onde employée
est généralement un peu inférieure à celle de Verdun:
la self nécessaire est à peu près égale au tiers de celle
que demande F. L.
M. M. G., à ..... — Avec une pile Leclanché, votre
potentiomètre devra présenter une grande résistance
pour éviter la polarisation des éléments: 1000 ohms,
par exemple, que vous obtiendrez avec 160 mètres
environ de fil de ferro-nickel de 6,4 mm de diamètre
ou avec une longueur moindre de fil plus fin. Vous
trouverez au Bazar d'Electricité(3$, boulevard Henri IV,
Paris) un modèle de rhéostat à trois bornes, de
1195 ohms, coùtant une trentaine de francs et pou-
vant être ulilisé comme potentiomètre dans le cas que
vous indiquez. Avec deux accumulateurs, la polarisa-
tion n'est pas à craindre et la résistance du poten-
tiometre peut être beaucoup moindre (100 à 200 ohms).
Les accumulateurs se déchargeront cependant d'au-
tant plus vite que la résistance sera moins grande.
La maison Ancel (91, boulevard Pereire, Paris) poarra
vous fournir, à un prix relativement peu élevé, un
potentiomètre à utiliser avec deux accumulateurs
(25 fr). — Le rôle des condensateurs a été expliqué
dans la série d'articles que nous venons de publier.
Vous y verrez également que, des montages repré-
sentés par vos trois schémas, lé premier n'est pas
a conseiller, le second est employé de préférence avec
détecteur à cristaux et le troisième avec détecteur
“lectrolytique. Vous y trouverez enfin la raison de
l'emploi d'une bobine à deux Curseurs (montage en
Oudin).
M. J. D., à G. — Les eristaux de galène sélectionnés
sont certainement sensibles; il n'est pas utile de les
essayer de nouveau. Pourtant, cette opération est
facile: elle est indiquée dans le numéro 1850 du
(osmos. Nous vous conseillons plutôt de construire un
détecteur électrolytique, beaucoup plus régulier et
toujours prêt, La construction des bobines d'accord
est décrite dans le mème numéro. H faut environ
150 métres de fil. Une seule bobine peut suffire, mais
avec deux vous obtiendrez de bien meilleurs résultats.
— Nous sommes très touchés de votre sympathie.
M. G. L., à D. — Votre prise de terre est suffisante
comme cela. — Vos fils peuvent être employés tels
qu'is sont pour faire l'antenne. Pour celle-ci, une lon-
gueur de 100 mètres semble suffisante. H n'est pas
i“ressaire qu'elle soit absolument rectiligne. Vous
pouvez donc ne pas trop tendre le fil, pour éviter la
rupture. Essayez d'abord avee cette antenne. Vous
l'allongerez seulement si elle ne suffit pas. — La
distance entre les électrodes n'a qu'une importance
COSMOS
12 DÉCEMBRE 1912
très secondaire; vous pouvez les éloigner d'un centi-
mètre environ. — Le fil indiqué pour la bobine d’ac-
cord peut servir, mais il en faudra une plus grande
longueur, environ de 180 à 200 mètres. — Nous croyons
que, si votre montage est bien établi, vous pourrez
recevoir parfaitement les signaux horaires. Suivez
attentivement les petites correspondances, qui donnent
toutes des renseignements capables de vous inté-
resser.
M. H. H., à A. — Vous pouvez prendre le métal qui
vous plaira pour votre détecteur à cristaux; mais les
métaux inoxydables ne sont pas nécessaires. De mème,
vous pouvez enfermer l’appareil dans une boîte, à la
condition d'isoler les fils à leur entrée dans les parois
de la boîte.
M. A. E. L., à S. — Il n’y a pas d'autre remède que
d'augmenter le tirage de votre cheminée pour vous
débarrasser de la fumée; et, pour éviterles vapeurs et
les odeurs de cuisine. il faut faire établir une prise
d'air avec appel extérieur, soit par cheminée, soil
à l’aide d'un ventilateur mú mécaniquement.
M. V. L., à J. — Le Manuel de technique microsco-
pique, par Bornx ot OpreL, traduit par E. pe RotviLLE,
répond à vos deux premiéres questions : description
de l'instrument, manière de faire une préparation,
microtome, etc. (6 fr). Librairie Dunod et Pinat,
49, quai des Grands-Augustins, Paris. A signaler
aussi ke Guide élémentaire de technique microscopique,
par L. ne Nanvaz (1,50 fr), mème librairie. — Pour la
{roïsième, nous ne savons si vous voulez parler de
dessins ou de photographies faits à l'aide du micro-
scope.
M. D. C. M., à G. — Le livre : Hydraulique agricole
(t. 1“), de Levy Sarvaron et Fuicx (15 fr). Librairie
Dunod et Pinat, 45, quai des Grands-Augustins, Paris,
contient un chapitre détaillé sur la défense des berges
des cours d'eau. — Notions élémentaires du calcul
différentiel et du calcul intégral, par J. PavLy (8 fr).
Librairie Béranger, 15, rue des Saints-Pères, Paris, ou
bien Cours de mathématiques supérieures, par l’abbé
Srorrags (2 vol., 10 fr). Librairie Gauthier-Villars,
55, quai des Grands-Augustins, Paris. — Leçons sur
l'électricité, par Eric Gérann (2 vol., 12 fr chacun).
Gauthier-Villars; pour les petites iastallations domes-
tiques : Tout le monde électricien, par H. DE Gaarri-
eny (3 fr). Pratic-Bibliothèque, 1, rue du Pont-de-Lodi,
Paris.
M. E. L. 5. P. — Nous ne connaissons, dans cet
ordre d'idées, que l'1f/as de poche des insectes de
France utiles et nuisibles, par Donck, qui contient
72 planches coloriées représentent 322 insectes (6,50 fr).
Librairie horticole, 84 bis, rue de Grenelle, Paris.
M. J. L. Q., à G.— Guide pratique d'éducation phy-
sique, par G. Héexrr (8 fr). Librairie Vuibert, 63, bou-
levard Saint-Germain, Paris. — La cuisine rationnelle
des malades et des bien portants, par Moziz-Waniss
(5,50 fr). Librairie Maloine, 25, rue de l’Ecole-de-mé-
decine, Paris. Vous trouverez d'ailleurs une grande
variété d'ouvrages sur cette question en demandant
le catalogue de cette librairie. — Oui, le service de
Commission peut se charger de vous procurer Îles
ouvrages que vous désirez obtenir.
imprimerie P. Fenou-Vaau. 8 et 6, rue Bayard, Paris. VINT°.
Le pgérest : À. Pants.
No 1456 — 19 DÉCEMBRE 1919
COSMOS
673
SOMMAIRE
Tour du monde. — Détermination spectroscopique de la parallaxe solaire. Verre de silice résistant à la
chaleur. Glace opaque et glace transparente. Les gros œufs danois. Trutles de Provence. L'attaque des
ustensiles en aluminium. Un nouveau tarif électrique à Boston. Supports permettant la cuisson électrique
sur les fers à repasser renversés. L'emploi du béton armé pour l’asséchement du Zuyderzée. Le paquebot
Jmperator. L'altitude en aéroplane. Nouveau porte-copie pour machines à écrire. Nouvel alliage d'alumi-
nium : l’argental, p. 673.
Les grandes centrales génératrices d’électricité, Manchanv, p. 678. — Les blattes, AcLooue, p. 680. —
Appareil photographique à fentes, GRAbENwITz, p. 682. — Gravures et sculptures de l’époque
aurignacienne, G. Drioux, p. 683. — La motoculture et le motoculteur, Fourier, p. 685. — Notes
pratiques de chimie, J. Gançcox, p. 689. — Le nouveau bateau-feu du Havre, P. GribeL, p. 692. —
- Sociètés savantes : Académie des sciences, p. 6%. — Association francaise pour l'avancement des
sciences (fin), Hénichanv, p. 696. — Bibliographie, p. 697.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Détermination spectroscopique de la paral-
laxe solaire (Revue scientifique, 1 déc. 1912). —
La vitesse moyenne avec laquelle notre planète
décrit son orbite annuelle autour du Soleil est voi-
sine de 30 kilomètres par seconde. Si l’on suppose
une étoile dans l'écliptique et en quadrature avec
le Soleil, et si l’on détermine sa vitesse par la mé-
thode spestroscopique, on obtiendra une valeur qui
sera affectée par l'effet total de notre propre vitesse;
il en résulte que des déterminations de cette espèce,
effectuées lors de deux quadratures successives,
devront conduire à des résultats différant entre
eux du double de la vitesse terrestre.
On dispose donc ainsi d'un procédé susceplible
de fournir la distance de la Terre au Soleil ainsi
que la parallaxe solaire, M. B. Turner a consacré
tout récemment à cetle question une étude inté-
ressante (1) dont nous allons citer les points prin-
cipaux.
Le problème n’est pas aussi simple qu'il peut
apparaitre à première vue; tout d'abord, les étoiles
présentant un type spectral et une grandeur favo-
rable pour les déterminations de vitesses ne se
trouvent pas exactement dans l'écliptique; ensuite
l’orbite terrestre étant elliptique, la vitesse de notre
globe est variable, sans compter que l'observateur
lui-même possède, relativement à l'étoile, une
vitesse qui dépend de l’heure à laquelle est faite la
mesure.
H faut également tenir compte de l'action de
notre satellite qui modifie un peu notre vitesse
elliptique; en outre, les observations ne peuvent
pas toujours être effectuées à l'époque exacte d'une
(1) Publication of the astronomical Soriety of the
Pacific, n° 154.
T. LXVII, Ne 1556.
quadrature ; enfin, l'étoile considérée peut former
un couple spectroscopique et avoir une vitesse
variable relativement à l'observateur.
On opère donc, en réalité, assez loin des condi-
tions idéales, et il est nécessaire de tenir compte,
dans les calculs, de nombreux termes correctifs;
néanmoins, les travaux effectués dans celte voie.
à l'Observatoire du Cap, montrent que la méthode
en question est capable de conduire à une valeur
précise de la parallaxe solaire.
Les recherches dont il s'agit comprennent plus
de 300 spectrogramimes pris sur les étoiles bril-
lantes: a Taureau, x Orion, a Petit Chien, 3 Gé-
meaux, a Bouvier, x Centaure et x Scorpion. Pour
obtenir la vitesse stellaire, cinq clichés du Soleil
ont été comparés avec un cliché de chaque étoile,
à l’aide du spectrocomparateur de M. Hartmann;
ensuite, le cliché stellaire a été comparé avec tous
les autres spectrogrammes du mème astre.
Sans entrer dans le détail des calculs intermé-
diaires, contentons-nous de fournir le relevé des
résultats relatifs à chacune des étoiles étudiées:
Étoiles. Parallaxe solaire (7e).
a Taurtcau..... eeose Peeni enai 57,52
a Ar seee ET E E S R 530
a Pont Chiem ece oira dei iesen aa 8,763
P T E E E ETE 8 83
IRON e osrceras tisa KE r EEEa S 507
dy Centa éea earnen us art 8 ,7:3
a SCOPO LL NME Se 8 805
Ce qui donne, comme résultat moyen:
m = 8,799 a- 0,0063.
Cette valeur présente un accord remarquabie
avec celle 8”.807 -- 0”.0027 que M. Hinks vient de
conclure de la discussion de plusieurs centaines de
clichés de la planète Eros, obtenus dans 12 Obser-
vatoires différents, pendant l'opposition de 1900.
67%
D'ailleurs, on a entrepris au Cap une nouvelle
recherche du même ordre, mais cette fois sur un
nombre d'étoiles beaucoup plus considérable (plus
d'une cinquantaine), de sorte que d'ici quelques
années on pourra déduire, par cette méthode, une
valeur vraisemblablement très précise de la paral-
laxe solaire. G. F.
PHYSIQUE
Verre de silice résistant à la chaleur. — On
sait utiliser maintenant le quartz fondu pour en
fabriquer des récipients destinés à aller au feu, des
lampes à vapeur de mercure laissant filtrer les
rayons ultra-violets, etc.; ce verre de silice pure,
ayant un très faible coefficient de dilatation, sup-
porte sans se fendre les variations soudaines de
température. Cependant, quand il est maintenu
longtemps au voisinage de son point de fusion, il
a tendance à recristalliser, ce qui lui fait perdre
une partie de sa résistance mécanique.
Pour retarder cette cristallisation, M. Thomas
a trouvé qu'il suffisait d'ajouter à la silice un peu
d'oxyde métallique, spécialement des oxydes de
zirconium et de titane; une teneur en oxydes de
4 pour 1000 accroit la résistance mécanique de
20 à 50 centièmes. L'auteur pense que ces oxydes
sont en suspension à l'état colloïdal dans la silice,
et qu'ils s'opposent, par une sorte de frottement
interne, à la cristallisation de la silice.
Glace opaque et glace transparente. — Ja
glace à rafraichir devrait toujours ètre transpa-
rente; la transparence de la glace est, pour l'ache-
teur, la garantie pratique de la valeur de la mar-
chandise qu il acquiert.
En effet, M. Taboury, au Congrès du froid de
Toulouse, a signalé la difficulté qu'il y a à garantir
la valeur frigorifique de la glace opaque. Tandis
que la glace transparente, cn fondant, dégage tou-
jours quatre-vingt calories par kilogramme, avec
une approximation de seulement 5 pour 100, il
parait que la glace opaque, quoique atteignant
parlois cette mème valeur de quatre-vingt calories
par kilogramme, présente d’autres fois un déficit
qui irait Jusqu'à 35 et 40 pour 100.
AGRICULTURE
Les gros œufs danois. — fn quelques années,
les agriculteurs danois sont arrivés à produire
en quantités toujours croissantes des œufs auxquels
lenr grosseur assure des débouchés faciles sur tous
les marchés exportation. IH en est résulté une
extension considérable de leur industrie avicole,
et par suite une énorme augmentation des béné-
fices fournis par leurs basses-cours. La Chambre
de comimuvrce française de Londres publie à ce
sujet des documents très significatifs : sur
2109 caisses expédiées du Danemark à Londres
COSMOS
19 DÉCEMBRE 191%
pendant la première semaine d'avril, 132 conte-
naient des œufs pesant 83 kilogrammes par mille,
272 des œufs pesant 72 kilogrammes par mille,
174 des œufs pesant 64 à 65 kilogrammes par mille.
Ce dernier chiffre, qui représente le minimum de
poids des œufs danois, correspond au poids maxi-
mum des œufs français. Or, chacun sait que, plus
un œuf est à la fois gros et lourd, plus il est
recherché, plus il est payé cher. Rien d'étonnant,
par suite, à ce que le Danemark soit sur le point
de nous supplanter complètement auprès des
acheteurs britanniques.
Cependant, nos races de poules et notre climat
peuvent soutenir avantageusement toutes les com-
paraisons. Mais l'élevage des pondeuses est, en
général, laissé chez nous au hasard, et aucun prin-
cipe de sélection intelligente n'intervient pour
améliorer les sujets et faire sacrifier ceux qui
s’abâtardissent. L’exemple de nos concurrents
danois montre qu'il est grand temps de renoncer
à ces pratiques roulinières. FRANCIS MARRE.
Truffes de Provence. — On est tellement habi-
{tué à accoler aux truffes le nom du Périgord que
bien des personnes ignorent que la Provence en
fournit quantité dans sa partie qui était jadis le
Comtat- Venaissin, aujourd’hui département de
Vaucluse. |
Ce cryplogame est une des richesses de cette
région. On le trouve surtout dans la partie monta-
gneuse du département où il se multiplie dans
les sols calcaires au voisinage des racines des chènes
et tout spécialement dans la forèt de Sarrians, sur
les pentes du mont Ventoux.
Les marchés principaux de truffes sont à Apt et
à Carpentras. On estime qu'il y passe annuellement
500 000 kilogrammes de cryptogames, d’une valeur
totale de cinq millions de francs.
Un seul petit village, celui de Béduin, situé en
plein district truffier, tire un revenu de 60000 francs
du fermage de 25 000 parcelles produisant des
truffes; terrains silués sur les terres appartenant
à la commune.
CHIMIE INDUSTRIELLE
L'attaque des ustensiles en aluminium. —
De nombreuses recherches ont été effectuées pour
déterminer jusqu’à quel point les ustensiles en alu-
minium supportaient sans attaque le contact avec
l’eau, l'air, la bière, le lait, etc.
Récemment, MM. F. Schonfeld et G. Himmelfarb
(Woch. für Brau, 1942; Revue électrique, 22 nov.)
ont étudié la façon dont se comportent les réser-
voirs en aluminium employés pour les cuves de
fermentation en brasserie. Ces réservoirs ont servi
pendant quatre ans sans monirer aucune altéra-
tion. Des plaques d'aluminium qu'on avait sus-
penducs pendant cing mois dans les cuves, en
N° 1456
totalité ou en partie, ont montré une augmentation
de poids par suite d'un dépôt, mais ce dépôt con-
sistait surtout en phosphate de calcium, et si on
l’enlevait avec de l’acide azotique, on trouvait
au-dessous de l'aluminium nullement altéré.
L'aluminium est moins résistant à l'air humide;
il y subit une sorte de rouille avec formation de
pointes efflorescentes d'oxyde d'aluminium et un
piquage sous-jacent. |
L’aluminium, en conséquence, peut être recom-
mandé comme matière pour la construction de
cuves à fermentation, mais il est utile dans ce cas
d'en recouvrir l'extérieur et les parties intérieures
non en contact avec le liquide d’une couche de
laque, de poix ou de papier imperméable.
ÉLECTRICITÉ
Un nouveau tarif électrique à Boston. —
L'Electrical World (Élertricien du 23 novembre)
rapporte que la Compagnie d'éclairage Edison, de
Boston, vient d'arrèter un nouveau tarif qui est
entré en vigueur le 4e octobre et qui s'applique
particulièrement à la vente du courant affecté à
la charge des batteries d’accumulateurs, au chauf-
fage, au repassage électrique, au service de réfri-
gération, d'alimentation en eau et d'irrigation.
En vertu du nouveau tarif en question, le courant
est vendu au prix d'à peu près 0,50 fr par kilowatt-
heure pour toute quantité ne dépassant point20 kw-h
par mois, avec un minimum de 62 francs par
compteur et par an. Au-dessus de 20 kw-h par
mois, le prix de vente est réduit à 0,15 jusqu'à
2 000 kilowatts-heure par mois. Pour les quantités
de courant en sus de ce dernier chiffre, le prix de
vente est encore abaissé et réduit à 0,10, pourvu
que l’abonné s'engage à payer à raison de 0,50 fr
par kw-h pour le courant utilisé durant certaines
heures spéciales que la Compagnie fixe de temps
à autre. Ces heures spéciales comportant une
majoration de prix, ne peuvent pas ètre au
nombre de plus de 500 durant l’année, ni au
nombre de plus de quatre pour une journée quel-
conque. Le nouveau tarif prévoit, en oulre, que,
chaque fois que la consommation de courant s'élè-
vera à moins de 520 francs pour un mois, l’abonné
payera une redevance mensuelle de 26 francs pour
l’utilisation de son compteur. Toutefois, si la con-
sommation mensuelle de courant, bien qu'infé-
rieure à 520 francs, est supérieure à 49% francs,
l'abonné ne doit acquitter que la différence entre
ces deux sommes à titre de frais de compteur.
Supports permettant la cuisson électrique
sur les fers à repasser renversés. — L'Æ/er-
trical Revier and Western Electrician (cité par
l'Électricien du 23 novembre) rapporte que la
Compagnie Marion Light and Heating, de Marion
COSMOS
(Indiana, Etats-Unis), à récemment distribué à ses
clients qui disposent de fers électriques à repasser
400 petits supports destinés à maintenir ces fers
dans une position renversée pour y cuire des ali-
ments, chauffer de l'eau, etc. Ces supports sont
construits avec des lames en fer de 9 millimètres
et de 1,5 mm, solidement rivées ensemble ct
peintes au bronze d'aluminium. Les supports en
question, fabriqués par séries de 100, reviennent
chacun à 0,68 fr, mais ils ont été distribués gratui-
tement par la station centrale à {out abonné qui a
manifesté le désir d'en recevoir un. Lesdits supports
s'adaptent à un fer électrique quelconque et per-
mettent d'utiliser la surface renversée de ce fer
pour chauffer de l’eau, faire cuire des œufs, faire
bouillir du café, etc. Il a été constaté que les
abonnés ayant reçu ces supports avaient augmenté
chacun leur consommation mensuelle en courant
d'environ 0,68 fr, en sorte que les petits dispositifs
précités se sont trouvés remboursés à la Compagnie
au bout du premier mois de leur utilisation. — (r.
GÉNIE CIVIL
L'emploi du béton armé pour l’asséchement
du Zuyderzée. — Une Commission du béton armé
avait été nommée par la Zuidersee Vereeniging
pour étudier les économies qu’on pourrait réaliser
par l'application du béton armé aux travaux d'as-
séchement partiel du Zuyderzée (Pays-Bas).
C'est que le béton est corrode par les sels de ma-
gnésie que renferme l’eau de mer.
Le rapport de la Commission, que nous trouvons
analysé brièvement dans le Genie civil du 30 no-
vembre, conclut que les travaux en béton armé
exposés à la mer, qui ont élé exécutés aux Pays-
as ou à l'étranger, ne sont pas encore assez anciens
pour qu'on puisse se prononcer d'une façon défini-
live en ľaveur de ce matériau; toutefois, les résul-
tals acquis semblent justifier cet emploi moyennant
quelques réserves et l'observation de certaines
règles, par exemple l'emploi de mortiers riches en
citnent et le durcissement prolongé des blocs à l'air
avant leur mise à la mer.
En ce qui concerne le Zuyderzée, on pourrait
employer surtout à la construction des écluses et
des ponts fixes. L'avis est moins favorable pour Île
revêtement des digues, tant à la mer que le long
des canaux et lacs intérieurs, et cela à raison des
tassements qui ne manqueront pas de se produire
dans des ouvrages neufs.
En ce qui concerne le travail principal, la grande
digue de barrage, celle-ci se composera de deux par-
ties : la digue barrant le Amsteldiep, de 2 300 mètres
de longueur, et la digue reliant l'ile de Wieringen
à Piaam (còte de la Frise), qui aura 27 kilomètres
de longueur. Pour cette dernière partie, on forme-
rait une ile artificielle en rehaussant un des bas-
676
fonds situés entre les points extrêmes. À partir des
quatre points fixes établis de cette façon, on con-
struirait les digues par les moyens habituels en
usage pour ces travaux aux Pays-Bas (corps de sable
et revêtement d'argile), de façon à réduire gra-
duellement les passages libres offerts aux courants
de marée jusqu’au moment où la force progressive
de ces courants rendra impossible l'avancement
des travaux.
C’est ici que le rapport suggère l'emploi du béton
armé à titre provisoire, pour opérer la fermelure
des passages par des caissons en béton placés au
moment propice. Ces caissons seraient ensuite
incorporés dans la digue proprement dite et, par
suite, soustraits à l’action prolongée de l’eau de
mer.
MARINE
” Le paquebot « Imperator » (Bulletin de la
Société des ingénieurs civils, octobre 1912). — Ce
paquebot, le plus grand qui existe, puisque son
déplacement atteindra 65 000 tonnes, soit 5 000 de
plus que celui du malheureux Titanic, est construit
pour la Hamburg Amerika Linie par les chantiers
de Hambourg de la Société Vulcan; sa mise à l’eau
a élé opérée en présence de l’empereur le 23 mai
dernier.
La longueur de l’Zmperator est de 900 pieds,
soit 274,5 m; ce navire est le premier qui maura
que 100 pieds de moins que la fameuse longueur
de 1 000 pieds dont les constructeurs parlent depuis
des années comme d’un chiffre qu’on doit atteindre
dans un avenir plus ou moins rapproché. La lar-
geur est de 29,3 m et le creux de 48,9 m. lya
30,5 m de la quille au pont des embarcations, et
la hauteur des pommes des måts au-dessus de la
quille n’aura pas moins de 75 mètres. Ces mâts
seront au nombre de deux, et il y aura trois chemi-
nées de section ovale de 8,85 m sur 5,5 m, dont la
partie supérieure sera à 55 mètres au-dessus de la
quille. Le gouvernail pèsera 95 tonnes et sa mèche
aura un diamètre de 0,75 m.
Ce paquebot gigantesque sera propulsé par des
turbines d'une puissance collective de 70 000 che-
vaux, agissant sur quatre arbres qui lui assureront
une vitesse de 22,5 nœuds. Un détail remarquable
est que la vapeur sera fournie à ces turbines par
des chaudières à tubes d'eau: c'est la première
fois que ces générateurs sont appliqués à de très
grands paquebots.
Une disposition qui sera très appréciée par les
passagers est l'installation des réservoirs antiroulis,
du systèrug Frahm. On sait que ce système consiste
à disposer de grandes capacités sur les deux côtés
de la coque et à les mettre en communication par
des canaux appropriés qui laissent passer l’eau d’un
bord à l'autre selon les mouvements du navire, le
passage étant contrôlé par des valves. L'expérience
COSMOS
19 DÉCEMBRE 4942
acquise sur quelques paquebots à passagers a fait
voir que le système Frahm est le meilleur procédé
connu à ce jour pour contrarier les effets du roulis.
Le récent désastre du Titanic amène tout natu-
rellement à se demander quelles précautions ont
été prises dans la construction du nouveau paquebot
pour l'empêcher de sombrer en deux heures de
temps, dans le cas d'un accident semblable à celui
auquel nous venons de faire allusion.
On a proposé divers moyens, par exemple l'em-
ploi d'une double coque dans la partie immergée
ou l'installation de cloisons longitudinales réser-
vant des soutes à charbon sur les còtés dans le voi-
sinage des chaudières. La division de la coque de
lľ/mperator dans la partie au-dessous de la flot-
taison a été faile sous la surveillance du Lloyd
allemand et de la Commission pour l'émigration.
Elle consiste en une série de cloisons transversales
et longitudinales. Les premières sont au nombre de
douze, s’élevant jusqu’au deuxième pont au-dessus
de la flottaison, à l’exceplion de la cloison d'avant
ou de collision, qui s'élève jusqu’au quatrième pont
au-dessus de l'eau. Ces cloisons sont croisées par
d’autres longitudinales, qui divisent les espaces
consacrés aux machines et chaudières en vingt-
quatre compartiments étanches dans la partie
immergée.
Il y a quatre chambres de chauffe; les soutes à
charbon sont placées au-dessus des chaudières et
sur les côtés de celles-ci. Les cloisons longitudi-
nales se trouvent à 6,1 m environ des parois de la
coque et vont de la cloison transversale n° 4 à la
cloison n° 8.
Derrière la chaufferie le plus à l'arrière est la
chambre avant des turbines, laquelle est protégée
par deux cloisons latérales; l’espace entre ces cloi-
sons et la coque est occupé par les auxiliaires. La
chambre arrière des turbines est divisée en deux
parties par une cloison centrale disposée dans le
sens de l’axe du navire.
Un intérêt spécial s'attache à l'installation des
turbines, à cause de leurs dimensions énormes.
La partie tournante de ces appareils, qui a 3,4 m
dediamètreet7,5 m de longueur, porte 50 000 aubes :
les arbres ont tous 0,457 m de diamètre. Les hélices
en bronze ont 5 mètres de diamètre. Bien qu'on
ait parlé de 70000 chevaux, on estime que la puis-
sance développée s'élèvera à 80 000-85 000 chevaux,
soit 20 000-21 000 par turbine.
Le gouvernement allemand, en exerçant sa sur-
veillance sur la construction des navires destinés
à transporter des passagers, s'attache autant à la
protection contre l'incendie qu’aux risques de la
navigation proprement dite. Il y a sur les paque-
bots du genre de l’?Zmperator quantité de matières
combustibles sous forme de cloisons, menuiserie,
peinture, vernis, et comprenant tout ce qui tient à
l'ornementation. Si le feu prend à quelque partie
N° 1456
de ce genre, il se propage sans obstacle sur de très
grandes longueurs. On a prévenu cette facile pro-
pagation par l'installation de cloisons légères en
acier, munies de portes qu'on peut fermer en cas
de besoin avec une extrème rapidité.
La Hamburg Amerika Linie compte que le nou-
veau paquebot pourra effectuer son premier voyage
au commencement de l'été 1913.
VARIA
L’altitude en aéroplane. — L’aviateur Garros
vient de reprendre le record de l'altitude en aéro-
plane; il lui avait été ravi le 17 septembre der-
nier par Legagneux, qui était monté à 5720 mètres.
Après plusieurs essais infructueux à Marseille
d'abord, puis à Tunis, il a réussi, le 44 décembre
dernier, à s'élever à la hauteur de 5 800 mètres. A
titre documentaire, voici les principales « étapes »,
en fin d'année, de ce record de la hauteur :
18 décembre 1908 : Wright, 115 mètres.
4° décembre 1909 : Latham, 453 mètres.
9 décembre 1910 : Legagneux, 3100 mètres.
4 septembre 1911 : Garros, 3 900 mètres.
41 décembre 1912 : Garros, 5 800 mètres.
Nouveau porte-copie pour machines à écrire.
— Le porte-copie est un accessoire presque indis-
pensable des machines à écrire. Il permet, pour tous
F1G. 1.
les travaux de transcription, d’avoir sous les yeux le
manuscrit. Au contraire, quand celui-ci est posé
sur la table, à côté de la machine, l'opérateur est
constamment obligé de détourner la tête et de se
pencher pour se reporter au texte. Il en résulte
une fatigue du buste et de la vue et une sérieuse
perte de temps.
Ces porte-copie existent en grand nombre dans
COSMOS
677
le commerce, et les dactylographes n'ont que l'em-
barras de choisir. Les uns se posent sur la table,
les autres s'adaptent sur le bâti de la machine. Ils
ont chacun leurs avantages; ils ont tous un incon-
vénient : une fois mis en place, le porte- copie a une
position fixe qu'on ne peut modifier à son gré, sui-
vant les circonstances.
Le nouveau porte-copie « le Flexible » est, au
F1G. 2.
contraire, parfaitement mobile. Il se compose d'un
pied, qu'on place sous celui de la machine (tig. 1)
pour lui donner la stabilité voulue, et d'une pince
qui ne présente rien de spécial. Ces deux pièces
sont réunies par une tige, qui est la partie originale
et vraiment intéressante de cet appareil.
Cette tige, composée d’un alliage à base de plomb
recouvert d'un tissu métallique tressé, est souple
en tous sens. Elle se plie à toutes les exigences,
s'approche du dactylographe myope ou s'éloigne,
se hausse ou s'abaisse, en un mot, prend toutes
les positions désirées par l’opérateur, et cela d'un
seul mouvement de la main, par torsion de la tige
flexible, sans qu'il y ait lieu de modifier quoi que
ce soit dans la position du pied ou de la pince de
l'appareil.
La souplesse de la tige est vraiment remarquable;
on croirait voir une couleuvre se tordant en tous
sens et gardant la position qu'on l’oblige à prendre,
et, malgré cette flexibilité, elle offre assez de résis-
tance pour supporter le poids d’un fort block-notes.
Enfin sa durée est illimitée, quel que soit le
nombre de torsions qu'on lui fera subir.
La figure 2 représente l'appareil dont la pince
maintient un block-notes ouvert. On peut remar-
quer sur cette pince une petite barre métallique,
mobile en tous sens, qui sert de signet lorsqu'on
doit interrompre le travail de copie. Ce perfection-
678
nement permel de retrouver tout de suite, quand
on reprend son travail, l'endroit où on en était
reslé.
Comme on le voit, ce porte-copie est particulière-
ment commode pour les dactylographes, pour qui
il a élé spécialement combiné, mais il peut encore
servir à d'autres usages; par exemple, en le plaçant
complètement redressé sur une table ordinaire, il
fera un très commode pupitre à musique pour les
ioueurs de flüte ou de violon.
COSMOS -7
19 DÉCEMBRE 1919
Nouvel alliage d'aluminium : l’argental. —
Mc Adams, déjà connu par son alliage léger et
résistant, Mc Adamite, lance un nouvel alliage
d'argent et d'aluminium, qui a toutes les qualités
de largent, sauf son poids, susceptible d'être tra-
vaillé de toutes manières, prenant un beau poli.
L’argental est destiné à remplacer l'argent en orfè-
vrerie. Il est blanc comme l'argent, plus résistant
que l'aluminium et l'argent pris isolément. Sa
masse spécifique est le tiers de celle de l'argent.
Les grandes centrales génératrices d'électricité.
Lorsque, documents stalistiques en mains, l'on
compare le développement actuel des installations
d'électricité à celui des usines de la fin du siècle
dernier, par exemple, on constale qu'un progrès
considérable a été réalisé en ces dernières années.
Les chiffres, cependant, ne donnent au profane
qu'une impression assez faible et peu en rapport,
en tout cas, avec les étapes franchies. Pour se faire
mieux une idée de ce qui a été fait dans cette voie,
il faut se rappeler les installalions du passé et
évoquer l'image des groupes qui les constituaient,
pour les mettre en regard de nos installations pré-
sentes; au besoin, la revue illustrée est là pour
remplacer les souvenirs que l’on n’a point.
Feuilletez une publicalion technique d'il y a
quelques années, vous y découvrirez bientòt la
photographie ou le dessin d'une « grande » usine
de l'époque, et vous resterez étonné de l'écart qui
existe entre ces installations-là et celles que nous
possédons aujourd'hui. |
Et si, plus attentif, vous ne vous bornez pas à
tenir compte uniquement des dimensions des ma-
chines que l'on vous montre, si vous faites en
outre le parallèle entre les puissances développées,
vous vous apercevez que si les équipements actuels
n’élaient incomparablement plus compacts el plus
ramassés que les anciens, lesinstallations d’aujour-
d'hui auraient une taille fantastique.
Comme on le sait, ce nest guère à plus d'une
trentaine d'années que remonte la fondation des
premières usines d'électricité pour l'alimentation
de distributions publiques.
Ces premières usines furent généralement des
plus modestes; elles ne comportaient que des équi-
pements de puissance restreinte divisés en machines
relativement faibles; le matériel dont on disposait
alors étail encore rudimentaire et les applications
réalisables, peu variées; l'électricité n’était em-
ployée que pour l'éclairage, on alimentait d’ailleurs
séparément les lampes à arc et les lampes à incan-
desrenee ; ces deux catégories de lampes exigeaient
des tensions différentes, et il fallait des machines
spéciales pour alimenter chacune d'elles.
Vers 1885, deux modifications importantes déter-
minèrent un progrès notable dans le développe-
ment des installations d'électricité en rendant l’uti-
lisation de l'énergie électrique plus profitable et
plus facile, et en permettant l'unification des
réseaux.
Ce furent l'apparition d'un nouveau système de
lampes à arc et l'introduction du moteur électrique
dans les usages industriels; dès ce moment, les
centrales entrèrent dans une période de progrès
tout à fait caractéristique; le matériel s’unifor-
misa, on adopta des types plus gros et les installa-
lions devinrent plus grandes et plus nombreuses.
Une nouvelle étape commença lorsque l'on se
rendit compte des avantages que présentent les
courants alternatifs polyphasés, pour la réalisation
de transmissions électriques économiques. On
n'avait fait auparavant fonctionner les usines géné-
ratrices que sur des réseaux limilés; on étendit
les zones desservies par une mème installation, et
l'on établit des usines dans les conditions les plus
avantageuses. re
Le progrès devint plus réel encore après la mise
au point de machines capables de convertir écono-
miquement les courants alternatifs en courant
conlinu, mieux approprié aux applications usuelles,
ce qui permit de bénéficier simultanément des qua-
lités des deux syslèmes, à courant continu et à
courant alternatif.
Bientot les réseaux de distribution prirent une
extension considérable; les usines s’agrandirent,
dotées d'un outillage de plus en plus efficace et
sûr; le matériel de génération et de distribution
s'améliora d'une façon extraordinaire.
Ainsi que nous l'avons dit plus haut, les progrès
ont élé surtout considérables dans les dernières
années; aujourd hui, l'on ne s'étonne plus de ren-
contrer dans une centrale des équipements capables
de fournir des milliers de kilowatts; les grandes
capitales ont toutes de puissantes installations, et
les groupes y atteignent généralement une puis-
sance plus grande que celle des plus grandes cen-
trales d'il y a dix ou douze ans.
N° 1456
C'est particulièrement l'adoption de la turbine
à vapeur pour la constitution des groupes électro-
gènes, en remplacement des machines à pistons,
qui a conduit à cette augmentation des puissances,
sans laquelle les usines génératrices se seraient
trouvées dans l'impossibilité de faire face au déve-
loppement des applications de l'électricité.
Considérablement plus puissante, sous un volume
donné, que la machine à pistons, la turbine à va-
peur permet en effet,de concentrer en un seul groupe
électrogène des puissances énormes, quadruples et
quintuples de celles auxquelles on se bornait, au
début du siècle, avec les machines à pistons.
COSMOS
yill- Le
o 679
LDPMAVE ICT
Laconstruction électro-mécai A Lipérnit :
jourd'hui couramment des groupes JE -T0 0 0 et
12 000 kilowatts; à New-York, à Chicago, etc., plu-
sieurs usines en ont de 45 000 et de 20 000 kilowatts;
les constructeurs européens ne sont pas moins
avancés, d'ailleurs, et on les voit à mème de fournir
des groupes de 20 000, de 25 000 kilowatts.
Quelle étape franchie en douze années: passer
de 4 500 chevaux, puissance des turbines installées
en 1900 à la centrale d’Elberfeld, les plus grosses
à cette date, aux chiffres ci-dessus!
Les turbines de grande puissance ont, d'ailleurs,
sur les petites des avantages sensibles; l'obtention
TURBINE BROW N-BOVERI-PARSONS DE 28 000 CHEVAUX.
d'un fonctionnement économique est beaucoup
plus simple; avec les petites, on doit admettre des
vitesses de rotation élevées, moins bien compa-
tibles avec une construction mécanique parfaite-
ment robuste. Hé ;
Aussi, en fait, c'est la dynamo, et surtout la
partie tournante de celle-ci, qui fixe la limite
maximum de puissance possible : car la construc-
tion du rotor de la dynamo est délicate; la ma-
chine est soumise à un travail très pénible ininter-
rompu; des à-coups fréquents l’atteignent ; les réac-
tions mécaniques y sont énormes, et le tout doit
être étudié de telle sorte que l'équilibre soit encore
parfait après un service de plusieurs années.
Que l’on songe, par exemple, aux seules pertes
d'énergie électrique qui se produisent dans le
groupe et s’y transforment en chaleur; elles
alteignent toujours au moins quelques millièmes;
or, une perte de 4 millième seulement, dans une
machine de 20000 kilowatts, cela représente
20 kilowatts. 20 kilowatts dépensés d’une façon
ininterrompue pour échauffer la machine, de quoi
alimenter 4000 lampes de 16 bougies à filament
métallique.
On comprend facilement quelles difficultés
entraine un pareil dégagement de chaleur et comme
il faut que la machine soit ventilée soigneusement,
que les paliers soient graissés avec soin, que tous
GRO
les organes soient convenablement équilibrés.
Pour ce qui est notamment du seul point de la
ventilation — les autres sont trop techniques pour
que nous puissions en aborder l'examen ici, — il
faut recourir à des méthodes de réfrigération par
circulation énergique; les machines sont enfermées
dans une enveloppe appropriée; on y fait passer
un courant d'air énergique; des ventilateurs
mettent l’air en circulation; tout un système de
canaux est établi pour amener et éconduire l'air,
des filtres à poussière sont insérés sur les con-
duites, etc., etc.
COSMOS
19 DÉCEMBRE 191%
Ainsi, dix questions qui paraissent au premier
abord secondaires et qui ne sont, en effet, que des
questions de détail comparativement à l’ensemble
du problème, tant la portée de celui-ci est grande,
ont chacune une importance considérable et ont
demandé à être résolues d’une façon approfondie.
Mais l’art de l'ingénieur marche en tout à pas
de géani aujourd'hui, et les grandes centrales élec-
triques actuelles, avec leurs grands groupes géné-
rateurs monstres, fonctionnent d’une manière de
plus en plus satisfaisante et s’acheminent vers une
perfection presque idéale. H. MARCHAND.
Les blattes.
L'ordre des insectes orthoptères renferme beau-
coup d'espèces que leur physionomie peu ave-
nante, leurs instincts prédateurs, leur incommodité
rendent en général antipathiques, et qui ne peuvent
guère trouver grâce qu'aux yeux des naturalistes.
Parmi cette engeance repoussante où se classent
la forficule, la courtilière, les grillons, les criquets,
les sauterelles, viennent assurément en bon rang,
pour leur aspect odieux et l’importance de leurs
méfaits, les Hattes, malodorantes bestioles que tout
le monde maudit et pourchasse, aussi bien sous
leur nom entomologique que sous leurs dénomina-
tions vulgaires de cafards, kakerlacs el cancrelats.
Les mœurs de ces insectes laids et répugnants.
si pernicieux dans les maisons qu'ils ont envahies,
offrent cependant quelques trails intéressants, qui
leur méritent l'indulgence des zoologistes, et que
d’ailleurs il est utile de connaitre, ne füt-ce que
pour en tirer d’efficaces moyens de destruction.
Il n’est pas nécessaire de faire le portrait des
blattes; leur faciès elliptique et déprimé est bien
connu. Les deux espèces qui, dans nos pays, s’in-
troduisent le plus volontiers dans les maisons sont
la blatte orientale (Blatta orientalis L.), à laquelle
revient plus particulièrement le nom de cafard,
et la blatte américaine (B. americana L.), plus
spécialement désignée sous le nom de cancrelat.
Celle-ci possède, à l'état adulte, des élytres (ailes
supérieures) bien développés dans les deux sexes,
non tronqués, et plus longs que l'abdomen; sa cou-
leur est ferrugineuse; elle s’introduit surtout dans
les magasins, les serres. La blatte orientale, plus
commnne, ne manifeste pas, au contraire, de pré-
férence bien marquée dans le choix d'un local et se
plait indifféremment partout où elle trouve à se
pourrir; elle se distingue de sa congénère en ce
que ses élytres, bien développés el tronqués chez
le mâle, sont réduits chez la femelle à de petits
lobes latéraux: elle est brune avec les pattes rousses.
La blatte américaine mesure de 23 à 32 millimètres
de long; la blatte orientale de 19 à 25.
L'une et l’autre sont d'ailleurs des insectes très
malfaisants, et c'est à ce trait de leurs mœurs que
fait allusion leur nom générique, lequel dérive du
grec Shintw, Je nuis. Kiles sont omnivores, leurs
mandibules très robustes étant aptes à entamer les
substances alimentaires les plus diverses, depuis
le pain jusqu'à la viande et mème le cuir.
Les blattes, leurs méfaits el odeur nauséabonde
qu'elles exhalent, et qui, comme celle de la punaise,
persiste parfois assez longtemps sur les objets
qu'elles ont touchés, étaient connus dès l’antiquité.
Dans sa comédie de la Paix, Aristophane fait allu-
sion à leur puanteur, et Horace les a placées, pour
l'importance et la nature des dégäts, sur le mème
rang que les teignes:
Cui siragula vestis,
Blattarum ac linearum epult,
Putrescil in arca.
« Dont la couverture pourrit dans un coffre, fes-
{in des blattes et des teignes. »
C'est surtout à nos provisions de bouche que
s'attaquent les blattes, et cest en vue de leur con-
quète qu’elles s’introduisent dans nos habitations.
Aussi abondent-elles dans les locaux où sont em-
magasinées ces provisions, surtout dans ceux où
règne en mème temps une température assez éle-
vée: cuisines, boulangeries, pâtisseries, cale des
navires marchands. Elles dévorent et souillent tout,
et il est très difficile de s’opposer à leur invasion,
leur corps plat leur permettant de s'introduire dans
les moindres fentes des caisses et des barils. A
bord des bâtiments faisant les voyages au long
cours, le seul moyen que l’on ait souvent d’empè-
cher leurs méfaits est d’enfermer les provisions
dans des boites de zinc ou de tôle bien soudées.
Tout ce qui peut se manger est à leur goût;
elles ont cependant des préférences : le pain blanc,
par exemple, passe dans leur estime avant le pain
noir, et la farine avant la viande. C'est ce qui
explique comment, saisies dans la pâte d'où elles
N° 1456
n'ont pu se dégager, elles sont parfois portées au
four et cuites avec le pain; le client qui trouve
ensuite inopinément sous la dent ce peu attrayant
morceau n’a qu'une ressource pour atténuer sa
répugnance, cest de croire, sur l'affirmation du
boulanger, qu'il a eu affaire, non à une blatte,
F1G. 1. — LA BLATTE ORIENTALE (Blatta
ou Periplaneta orientalis) ET SA LARVE TRÈS JEUNE.
mais à un simple cri-cri, hôte inévitable, comme
on sait, des fournils.
Chamisso a raconté comment des marins, ayant
ouvert pendant une traversée des barils qui avaient
recu au départ du riz et du blé, les trouvèrent
remplis, à leur grand désappointement, de mil-
liers d'individus de la blatte germanique qui,
pour trouver place dans ces récipients, avaient jugé
bon d'en dévorer au préalable le contenu.
En cas de disette, et si la farine, le pain ou la
viande manquent, les blattes exercent leur appétit
aux dépens de toute substance organique à leur
portée, surtout animale : les fourrures, la laine, la
soie deviennent en ce cas la proie de leurs man-
dibules. On en a vu se mettre à ronger le cirage
des bottes pour passer de là insensiblement au
cuir que recouvrait le cirage.
Les serres reçoivent aussi quelquefois leur visite
intéressée et très préjudiciable. Boisduval rapporte
dans son Entomologie horticole quelques exemples
de grands établissements ayant subi, du fait des
blattes, des pertes considérables, spécialement en
orchidées et en autres plantes précieuses, que ces
terribles insectes rongeaient avidement. Enfin, les
amateurs de livres ont à faire pour leur part de
graves reproches aux blattes, qui, si elles ont l’accès
des bibliothèques, entament aussi bien le papier
COSMOS
681
que les reliures, et qu'il convient par suite de
ranger dans la catégorie assez nombreuse des
insectes bibliophages.
Tous ces dégâts sont plus particulièrement le
fait de la blatte orientale; cependant, la blatte
américaine, que nous avons reçue, à ce qu'on croit,
des Antilles, est bien à redouter aussi dans les
locaux qu'elle recherche plus particulièrement. A
Paris, elle s’est établie dans les raffineries; dans
les ports de mer, elle infeste les magasins et les
entrepôts de sucres et autres denrées coloniales.
Deux espèces qui, chez nous, habitent les bois,
où elles vivent sous la mousse et les feuilles mortes
aux dépens des détritus animaux et végétaux, se
sont domestiquées dans les pays du Nord, où elles
causent les mêmes dégàts que dans nos contrées
les blaties orientale et américaine: ce sont les
blattes germanique et laponne. Les Russes affirment
que la blatte germanique fut importée de Prusse
dans les bagages de leur armée après la guerre de
Sept Ans (1756-1762). Jusqu'à cette époque, elle était
inconnue à Saint-Pétersbourg où elle pullule aujour-
d’hui. Dans les pays septentrionaux qu'elle infeste,
la blatte laponne se rend particulièrement incom-
mode en dévorant les poissons fumés qui consti-
tuent en hiver la principale nourriture des habi-
tants.
La destruction des blattes est rendue plus diffi-
cile par ce fait que ce sont des insectes nocturnes
qui se cachent pendant le jour. A bord des navires,
le kakerlac américain explore la nuit les recoins
du bâtiment, et il lui arrive, au cours de ses péré-
grinations, de grimper sans scrupules sur le visage
des passagers endormis. C’est aussi dans les
ténèbres que la blatte orientale cherche sa nourri-
Fic. 2. — TÊTE DE BLATTE (vue de face).
ture; si, au milieu de la nuit, on entre à l’impro-
viste avec une lumière dans une cuisine ou une
boulangerie infestées par ces insectes, on les sur-
prend attablés et courant avec une étonnante
vélocité.
Les blattes sont assez prolifiques, comme c'est
682
ordinairement le cas pour les espèces malfaisantes,
qui, par leur nocuité, s’atlirent beaucoup d'’enne-
mis; les femelles témoignent à l'égard de leurs
œufs d’une certaine sollicitude maternelle. Au mo-
ment de la ponte, elles laissent sorlir en partie,
à l'extrémité de leur abdomen, un corps arfondi
qui n’est autre chose qu’un amas d'œufs agglomé-
rés, une oothèque. Elles portent cette oothèque
pendant un temps variable, qui peut aller jusqu à
plusieurs semaines, et, après l'avoir ainsi trainée,
elles la déposent finalement, à l’époque opportune,
dans quelque coin.
C'est le moment de l'éclosion; les jeunes larves
ne tardent pas à sortir de l'œuf et à s'évader de la
coque de l’oothèque, assistées par la mère qui les
aide à déchirer cette coque. Elles se répandent de
nous côtés et se mettent aussitôt à chercher leur
ourriture. Elles sont toujours agiles et revêtent
progressivement la forme de l'adulte par une série
de mues dont l'une, qui équivaut à une nymphose,
leur confère des ailes. Dans les endroits où les
blattes ont fait élection de domicile, on les voit
grouiller en troupes nombreuses, composées d'in-
dividus de tout âge et, par suite, de toutes dimen-
sions.
C'est surtout dans les pays chauds que les ravages
des blattes atteignent une intensité désastreuse.
Aux Antilles, elles constituent un véritable fléau, et
il leur suffit parfois d’une nuit pour percer des
malles, des caisses, des valises et arriver ainsi jus-
qu'aux objets que l’on pouvait croire le mieux à
l'abri de leurs attaques. Elles infestent parfois à ce
point les murs, les lits, les tables, qu'il devient
impossible de préserver les aliments de leur con-
tact. Les espèces de nos pays ne sont d'ailleurs que
des naines auprès de la ‘grande blatte géante de
¿COSMOS
19 DÉCEMBRE 1912
Cayenne et du Brésil, qui peut atteindre 7 centi-
mètres de long et 18 centimètres d'envergure et
qui pousse la férocité, est-il affirmé, jusqu’à ronger
pendant la nuit les ongles des personnes endormies.
Dans ces contrées où les blattes se rendent si
malfaisantes, la guerre leur est faile systématique-
ment et avec une efficace ingéniosité. Aux colonies,
on dispose pour les prendre des pièges formés de
boites en bois ouvrant à charnière et percées sur
un côté, près du fond, d’une ouverture horizontale
longue, mais très étroite. Dans ces boites, on place
comme appâls un morceau de lard ou de pain
d'épice; les blaites qui y entrent, attirées par
l’appât, restent dans les boites où elles trouvent
l'obscurité; lorsqu'elles sont ainsi prises, on les
écrase ou on les asphyxie en enflammant dans la
_ boite quelques allumettes.
Ce piège ingénieux trouverait certainement une
utile application dans nos maisons, ainsi que d'autres
plus simples qu'il est facile d'imaginer. On peut,
par exemple, disposer dans les recoins habités par
les blattes des pots à surface déclive très lisse où
elles roulent au moindre faux pas sans avoir en-
suite la possibilité de remonter ou, à moindres
frais encore, des linges humides dans les replis
desquels elles se réfugient et où il n’y a plus qu'à
les recueillir pour leur infliger tel supplice que l’on
voudra. La lutte contre cette malfaisante engeance
peut se faire encore par quelques moyens plus
scientifiques : insuftlation de poudre de pyrèthre,
petits récipients contenant de la benzine ou du sul-
fure de carbone. Cela, en attendant que l’on accli-
mate le chlorion, guëpe qui, à Maurice et à Bour-
bon, nourrit ses larves de blattes préalablement
anesthésiées par son aiguillon.
A. ACLOQUE.
L'appareil photographique à fentes.
On connait les appareils photographiques désignés
sous le nom de slténopé, où la lentille est rem-
placée par un simple trou fin, en général circulaire.
Cet appareil, malgré sa remarquable simplicité et
son bon marché incomparable, ne jouit pas d’une
grande faveur, à raison du flou des clichés qu’il
donne et du peu d'intensité lumineuse de l'orifice.
Néanmoins, ce curieux appareil est employé de
ternps en temps, pour les vues artistiques de
paysages, où ses inconvénients se font moins sentir,
tandis que ses avantages (estompé et profondeur
des teintes, absence de réflexions et de déforma-
tions) peuvent ètre pleinement utilisés.
M. Wolfgang Otto, à Kiel, a eu l'idée de généra-
liser d'une façon fort curieuse le principe de cet
appareil photographique, en remplaçant lorifice
circulaire par des fentes, rectilignes ou non.
La figure 4 représente schématiquement la dis-
position du nouvel appareil et l'allure des rayons.
La paroi antérieure comporte, au lieu de l'orifice
fin, une fente horizontale et, à une certaine dis-
tance en arrière, une autre paroi étanche à la
lumière où l’on a également pratiqué une fente,
mais d'une direction différente de la première.
Dans la plupart des cas, l'une des fentes est verti-
cale, l’autre horizontale, mais d’autres combinai-
sons donnent également d'intéressants résultats.
L'ouverture, généralement assimilable à un
point, de l'appareil à orifice circulaire, se trouve,
on le voit, dédoublée en deux fentes que nous sup-
poserons, pour plus de simplicité, d'une largeur
négligeable. Plus ces deux fentes se rapprochent
lune de l’autre, et plus l’image ressemblera à celle
que fournit l'appareil à sténopé. Lorsque cette dis-
N° 1:56
tance s’annule, nous retrouvons, en effet, une seule
ouverture rectangulaire.
Dans la disposition représentée à la figure 1,
toutes les lignes verticales de l’objet D sont repro-
duites à la même échelle que si l'objectif se trou-
vait à la dislance de la fente horizontale pg (voir
le schéma explicatif, fig. 2); par contre, les dimen-
sions des lignes horizontales de l’image sont déter-
minées par la distance entre la fente verticale rs
et la plaque A (voir le schéma explicatif, fig. 3).
La figure 4, par exemple, a élé prise en dispo-
sant la plaque A à 21 centimètres de la fente hori-
zontale et à 44 centimètres de la fente verticale;
les lignes verticales, telles que ab (fig. 2), y sont
donc plus grandes que leslignes horizontales telles
que cd (fig. 3).
La figure 5 a été prise du même endroit, après
avoir retourné les deux fentes de 90 degrés. L'effet
que nous indiquions pour l’autre plaque est ici
inversé. l
Le raccourcissement de lune des dimensions
n’est que peu frappant à première vue; ce n’est
qu'en comparant les deux vues qu'on se rend bien
compte de la différence.
Cet appareil, loin d'être une simple curiosité
scientifique, pourra servir à des usages pratiques.
Les architectes pourront, par exemple, l'employer
pour modifier rapidement leurs dessins, les carica-
turistes pour produire des effets de déformations
comiques, les peintres décorateurs pour varier à
COSMOS
683
linfini les patrons de tissus et de tapis, et pour
modifier les différentes formes de caractères typo-
EA
FiG. 4 ET 5. — DEUX VUES D'UN MÊME OBJET, PRISES DU
MÊME ENDROIT, MAIS EN INVERSANT LA DIRECTION DES
FENTES DE L'APPAREIL.
graphiques. Dans bien des cas, on peut trouver par
le calcul la forme de fente produisant une défor-
malion donnée. D' A. GRADENWITZ.
= — — — —
Gravure et sculptures de l’époque aurignacienne.
Jusqu'à ces dernières années, l’art de la gravure
était considéré comme ayant pris naissance à
l'époque magdalénienne. Ce n’est en effet qu'en
1906 que M. l’abbé Breuil a constaté sa présence
à l’époque aurignacienne : au cours de fouilles pra-
tiquées dans la grotte du Trilobite, à Arcy-sur-
Cure (Yonne), l’abbé Parat avait découvert un
galet schisteux strié de figures de rhinocéros et de
capridés, ainsi qu'un os de renne représentant un
végétal. Le niveau auquel appartenaient ces objets
était l’aurignacien supérieur; le caractère primitif
des dessins était, lui aussi, d'autre part, un argu-
ment en faveur de leur ancienneté; on était donc
en présence de la plus ancienne gravure connue de
GS
l'époque aurignacienne. Mais ces spécimens étaient
uniques. Aussi, tout en reconnaissant le style
archaïque de ces gravures comparables, à ce titre,
aux plus anciens dessins pariétaux des cavernes,
dont les plus primitifs se classent précisément au
niveau aurignacien, convenait-il, selon M. Déche-
lette, « de se montrer encore circonspect sur les
conclusions à tirer de ces découvertes » (1).
Ces spécimens ne sont plus actuellement les
seuls du genre. M. Eugène Pittard vient de donner,
dans Anthropologie, la description d'un galet
gravé provenant de la station aurignacienne des
Rebières (Dordogne). Ce galet est un morceau
irrégulier de grès verdâtre, d'une longueur de
12 centimètres et demi et d'une largeur médiane
de 6 centimètres.
« Les incisions sont très fines. Elles ont été pra-
tiquées à l'aide d'un burin aigu. Ces traits occupent
presque toute la longueur du galet. L'artiste auri-
guacien qui a gravé ces traits a dessiné un animal
complet et l'esquisse d'un autre animal. C'était.
déjà un homine maitre de son instrument, car
pour l'animal qui est complètement figuré, il ne
sv est pas repris à plusieurs fois, sauf peut-être
pour un trait des pattes de devant. L'animal
représenté en entier est vraisemblablement un
cheval, reconnaissable surtout à la forme générale
de sa tète, à son museau et au caractère de sa
lèvre inférieure que l'artiste primitif a fort juste-
ment indiqué. L'attitude donnée à ce cheval est
évideninent très mauvaise, et, n’était la tête, on
pourrait croire à la représentation d’un autre
animal, d'un ours, par exemple. La queue fait
défaut. Les extrémités des jambes ne sont pas
terminées et les sabots ne sont pas indiqués. En
outre, comme dans le dessin de rhinocéros sur
schiste découvert par M. l'abbé Parat, le tracé des
attaches des membres n'est pas figuré. Le corps et
les membres sont limités par un contour presque
eontinu. Il n'v a que la jambe gauche de derrière
convrant la partie supérieure de la jambe droite
qui interrompt ce contour continu. L'oreille est à
peine indiquée, et l'œil ne l'est pas. Cette gravure
est évidemment d'un style très archaïque. Quant à
lautre dessin qui se trouve sur la même fare du
galet, il est difficile de l'identifier. Peut-être s'agit-il
de la représentation, plus simplifiée encore que
celle du cheval, dun mammouth? Au premier
moment, javais eru voir la tête très fruste d'un rhi-
nocéros. L'autre face du galet porte aussi de nom-
breux traits, gravés avec la mème technique. Mais,
jusqu'à présent, il nous a été impossible de dis-
cerner exactement ce que représentent ces
traits. » (2)
(1) Manuel, p. 127,
(2) ECGÈNE Pirrans, Une gravure sur galet de l'époque
auvigiavienne, dans Anthropologie, 19142, n° 3-4. —
A la lin de sa note, M. Pittard annonce une nouvelle
COSMOS
19 DÉCEMBRE 1912
Cetle découverte, s’ajoutant à la précédente de
l'abbé Parat, la confirme, s'il en était besoin, et rend
plus évidente l'existence de la gravure à la période
aurignucienne.
+
+. «
Une autre découverte, qu'il est intéressant de
signaler ici, est celle du D" Lalanne. Il explore,
depuis 1908, labri sous roche de Laussel (Dor-
dogne). Ce gisement, qui s'étend sur 126 mètres
de long et sur une largeur jamais inférieure à
45 mètres, lui a fourni de la base au sommet six
niveaux distincts :
4° Un niveau acheuléen:
2° Un niveau moustėrien;
3° Un niveau aurignacien moyen ou typique:
4 Un niveau aurignacien supérieur ;
y” Un niveau solutréen inférieur ;
5° Un niveau solutréen supérieur.
Ces distinctions ont été d'autant plus faciles à
établir que les couches archéologiques sont régu-
lièrement séparées les unes des autres par une
couche stérile, ce qui laisserait supposer que cet
abri fut alternativement occupé et abandonné.
« Pour l’aurignacien supérieur, Laussel peut être
considéré comme l’un des gisements actuellement
connus les plus riches et les mieux caractérisés, et
il peut être comparé à ce qu’est la station clas-
sique de Laugerie haute pour le solutréen. En effet,
tandis que les autres assises s'interrompent par-
fois, l’aurignacien supérieur occupe toute l’étendue
de labri, et cela sous une épaisseur considé-
rable. » (1) Aussi bien est-ce à ce niveau que le
D' Lalanne a eu la bonne fortune de mettre à jour
quatre bas-reliefs à figuration humaine dont l'étude
a quelque importance pour la connaissance anato-
mique des races qui les ont sculptés: trois des bas-
reliefs, en cffet, figurent des femmes, et le quatrième
figure un homme. Le plus important représente
une femme tenant en sa main droite une corne de
bison. La sculpture a 46 centimètres de haut et
porte des traces de peinture rouge; la tête n'est
pas détaillée, mais le corps dénote, de la part de
artiste, une grande habileté sculpturale.
Si nous considérons les trois sculptures fémi-
nines en question, « nous voyons que, provenant
d'un même gisement, appartenant à une même
époque, elles présentent un caractère commun,
découverte du méme genre et du mème niveau,
faite par un de ses collègues, M. Didon, de Péri-
gueux. Cette dernière gravure sur pierre représen-
terait un équidé. Pour être complet, il faudrait men-
tionner encore ditférents objets gravés, rapportés par
M. l'abbé Breuil à l'époque aurignacienne : l'existence
de la gravure sur menus objets à cette époque ne fait
maintenant plus de doute.
(1) G. LALANNE, Bas-reliefs àa figuration humaine de
Cabri sous roche de «a Laussel » (Dordogne), dans
l'Anthropuloyie, 1912, n° 2, p. 130.
N° 1456
celui de figurer des femmes stéalopvges » (1). EL
c'est précisément ce caractère de stéatopygie, déve-
loppement exagéré des tissus adipeux recouvrant
les muscles fessiers (o:éas. graisse; nr, fesse),
qui fait en partie l'intérèt de la découverte. Cette
dernière vient en effet grossir le nombre des sculp-
tures stéalopyges déjà connues : statuettes de Bras-
sempouy (Landes), des grottes de Grimaldi, près
de Menton; de Willendorf (Autriche), pour ne
parler que du paléolithique, car, à l'époque néoli-
thique, les figurines de ce genre occupent une aire
de dispersion très étendue.
En présence de tous ces rapprochements, il est
tout naturel de se demander si cette stéatopygie
chez la femme ne constituerait pas un caractère
ethnique, caractère que l’on rencontre d'ailleurs
actuellement chez certains sauvages (Hottentots,
Boschimans |2]}). Piette s'était déjà posé la ques-
tion et l'avait résolue par l'affirmative. Le
D' Lalanne la résout dans le même sens: « Cette
stéatopygie doit-elle ċtre considéėrċe comme un
caractère ethnique? Il y a toul lieu de le croire.
Cette sorte de lipomatose (;:+::, graisse) semblait
ètre pour la femme aurignacienne un caractere
esthétique, constituait un idéal de beauté que les
artistes de cette époque aimaient à reproduire avec
leurs burins..... Cela nous permet de conclure qu’à
l'époque aurignacienne, le midi de l'Europe, et pro-
bablement tout le pourtour du bassin méditerra-
néen, a été habité par une race probablement
négroïde et caractérisée par une stéatopygie très
marquée de la région pelvienne chez la femme. »
Quant aux autres caractères anatomiques, plu-
sieurs d'entre eux se rencontrent encore fréquem-
ment chez les femmes des populations inférieures:
« Le visage était allongé, le menton terminé en
pointe, les pommettes saillantes. Les cheveux
étaient courts et rassemblés en petits bouquets.
Les seins étaient longs et pendants. Le ventre était
volumineux comme chez les femmes grasses; les
hanches faisaient une saillie énorme, au-dessous de
COSMOS
685
laquelle une deuxième saillie correspondait à la tète
du fémur. Un bourrelet charnu se dessinait sur la
région externe des cuisses. La partie inférieure du
membre était plutot grèle. ll en était de mème du
membre supérieur, qui conservait une certaine
finesse. » (4)
Si maintenant nous examinons la quatrième
sculpture représentant un homme, le contraste est
frappant. L'aspect général est élégant et présente
une finesse de corps « qui fait ressortir davantage
les caractères stéalopyges de la femme ».
Les analogies anatomiques sont nombreuses
entre les races qui possédaient ces caractères, el
certaines tribus sauvages actuelles, les tribus bos-
chimanes en particulier. Ces analogies, d'autr
part, ne sont pas les seules : on sait, en effet, que
les peintures rupestres des Boschimans ressemblent
d'une manière frappante aux peintures de certaines
cavernes paléolithiques, de celles d'Espagne sur-
tout.
Toutes ces analogies sont telles que lon a pu
examiner l'hypothèse d'une descenslance. La chose
à la rigueur ne serait pas impossible. Il pourrait
se faire que les Hotlentots, les Boschimans soient
issus de lrogladytes quaternaires refoules suvces-
sivement hors de leurs terres par des peuples de
civilisation supérieure. La preuve est loin d'en ètre
faite. « 11 serait sans doute prématuré, écrit avec
raison le D Lalanne, de conclure que les Boschi-
mans actuels sont des descendants de nos ar-
listes sculpteurs et graveurs des temps aurigna-
ciens. » (2)
Ce qui, touchant Pévolution géncrale de lhuma-
nité, est certainement plus important a considérer,
c'est que — les découvertes archéologiques viennent
à chaqueinstant le confirmer, — sous tous rapports,
constitution anatomique, murs, coutumes, indus-
trie, les anciennes races préhistoriques se rap-
prochent beaucoup plus du sauvase actuel que du
civilisé.
1. D'RIOUX,
La motoculture et le motoculteur.
La culture mécanique a fait l'objet d'études tech-
niques extrèmement nombreuses permettant de
concevoir l'introduction dans les fermes d'un ma-
tériel nouveau et intéressant. Les ingénieurs, dont
l'attention s'est trouvée attirée vers cette voie, ont
alors construit des machines labourceuses automo-
biles répondant plus ou moins aux nécessités d’un
(4) Art. cit.; p. 146.
(2) Boschimansou Bochimans ou Bushmen (hommes
des buissons): peuple sauvage de l'Afrique méridio-
nale, sur le haut Orange, au nord de la colonie du
Cap.
excellent labour. H! semble, a priori, qwil suffise
de retourner le sol purement et simplement, comme
le font les charrues actuelles. Mais si Fon veut
bien serrer la question de plus près, on ne tarde
pas à s'apercevoir que le travail de la charrue est
loin d'être parfait, loin de valoir le travail à la
bèche tel que le pratiquent les jardiniers. D'ail-
leurs, il suflit de comparer les résultats obtenus
par le maraicher et le cultivateur pour juger com-
(1) Zbid.
(2) Zbid,
686
bien la manière de préparer la terre exerce une
influence sur la production du sol.
M. Julien, dans une conférence faite à la Société
d'encouragement pour l'Industrie nationale sur le
labourage mécanique, a résumé, avec une réelle
maitrise, le question si complexe du labourage.
Avant de passer à l'étude du motoculteur, il nous
semble nécessaire d'exposer brièvement les idées
émises par le conférencier, idées dont tous les
agriculteurs peuvent tirer profit (1).
Dombasle était d'avis que le plus parfait des
labours est celui qui s'exécute à la bèche; on doit
donc chercher à réaliser ce travail avec la charrue.
COSMOS
19 DÉCEMBRE 1912
Le labour à la charrue peut égaler celui de la
bèche au point de vue de la profondeur, mais il lui
est très inférieur quant à la division de la terre.
L'abbé Rosier était déjà de cet avis, et les techni-
ciens modernes partagent tous cetle manière de
voir, mais jusqu'ici aucun remède sérieux m'avait
été tenté. |
S'il était possible au cultivateur de profiter du
moment favorable pour retourner ses terres, c'est-
à-dire des quelques rares jours où le sol n'est ni
trop humide ni trop sec, la charrue à soc pourrait
suffire, car la terre est culbutée sans cohésion et
s'effrile en se versant; mais cette condition n'est
LE MOTOCULTEUR : LES GRIFFES SONT RELEVÉES ET DÉCOUVERTES, AINSI QUE LE BALAI DE RETENUE DES TERRES.
jamais réalisable, le cultivateur laboure quand il
peut, renverse une terre qui se tient en blocs ou
bien une bande compacte. Il reste la ressource
d'ameublir la terre; parfois la nature s’en charge,
le gel et le dégel ayant pour effet d'efriter les
mottes. C'est là un moyen empirique, qui ne con-
vient pas sous toutes les latitudes et laisse souvent
des déboires. Il faut bien ajouter aussi que l'émiet-
tage mécanique, par la herse, les scarificateurs,
(1) La librairie Hachette édite d'ailleurs, en ce mo-
ment, un ouvrage complet sur cette question: Za
motocullure (principes agrologiques, outillage méca-
nique, méthodes culturales), par M. JuLIen, consul de
France honoraire.
n’est jamais que superficiel, les mottes demeurent
telles quelles au fond du sillon et les racines des
plantes les conlournent sans y puiser beaucoup
d'aliments. De plus, les espaces vides entre les
mottes, plus ou moins comblés de terre, ne sont
d'aucune utilité à la plante. Enfin, le fond du sillon
a été poli, comprimé par le soc de la charrue, et
constitue une couche isolante placée entre la terre
remuée et celle que n’a pas atteinte la charrue. Les
racines des plantes éprouvent donc de grandes dif-
ficultés à chercher leur nourriture dans un sous-sol
aussi peu préparé à les recevoir. Aussi les labours
doivent-ils être assez profonds pour que la plante
trouve des aliments dans la partie du sol soumise
Ne 1456
à l’action de la charrue. Il est donc nécessaire
d’émiciter, non seulement la surface, mais aussi
le fond du labour afin de multiplier les points de
contact entre lä couche travaillée et la couche
sous-jacente, afin d'établir une certaine continuité
permettant aux racines d'’atleindre les sucs nour-
riciers demeurant dans les profondeurs du sous-
sol.
Ces données élant établies, comment est-il pos-
sible de réaliser mécaniquement un labour don-
nant le résultat cherché? Dans les ateliers où l’on
travaille le bois et le fer, l'antique matériel : limes,
burins, rabots, a fait place à un outil nouveau, la
fraise. Est-il possible d'appliquer le principe de
COSMOS
687
la fraise à l’agricullure ? Bien des chercheurs se
sont altelés à ce problème, et diverses solutions
sont apparues, comme les fraises rigides Koszegi
et Quillenec. Leur rigidité entraine un poids excessif,
car les outils doivent résister à tous les chocs, les
briser, et si ce dernier résultat n’est pas atteint ils
se brisent eux-mêmes. Les sols de culture étant
loin d’être homogènes, il devient nécessaire de
tenir compte de ce facteur dans la construction
des fraises agricoles. L’émiettement convenable
du sol ne peut donc se faire qu'avec des fraises à
oulils élastiques agissant comme les griffes des
animaux fouisseurs. L'ingénieur Meyembourg,
s'inspirant de ces principes, a construit un appareil
LE MOTOCULTEUR EFFECTUE DES ESSAIS D'ENSEMENCEMENT.
dont les outils faits de simples tiges d’acier recour-
bées en griffes grattent le sol et le réduisent en
mietles. C'est de cet appareil que nous allons
parler.
Le châssis est porté par quatre roues; celles
d'avant, rapprochées l'une de l'autre, sont direc-
trices ; celles d’arrière, énormes, sont motrices. Le
moteur, vertical, à quatre cylindres développe 25
chevaux. L'axe des roues motrices porte une sorte
d’étrier à l’extrémité duquel un axe horizontal
sert de support aux griffes. Pendant le transport,
cet étrier est relevé et les griffes sont maintenues
éloignées du sol. L’axe central recoit trente ran-
gées de supports soutenant chacun une série de
quatre griffes. La machine travaille donc avec
120 griffes. La mise en place de ces griffes, qui
sont de simples crochets d'acier, coùlant 10 cen-
times chacun seulement, s'effectue très simplement
en engageant leur extrémité convenablement bou-
clée dans la branche libre recourbée d'un ressort
à boudin entourant le support. Ce ressort commu-
nique à la griffe une souplesse remarquable en lui
permettant de céder devant l'obstacle très résis-
tant, ou de le soulever en le rejetant en arrière.
Pendant les expériences qui eurent lieu récemment
à Massy-Palaiseau, dans la propriété de MM. de
Vilmorin-Andrieux, des blocs de meulière de 10 à
15 kilogrammes furent placés en avant de la ma-
688
chine et chassés en arrière par les griffes sans que
Pune d'elles ait subi le moindre dommage.
Nous avons dit que le remplacement d'une griffe
est instantané; celui d'une série de quatre griffes
s'effectue avec autant de rapidité. L’axe qui les
porte est engagé dans deux encoches, et les griffes
ne sont maintenues que par l'extrémité libre des
ressorts à boudin s'engageant sous un montant du
support; il suffit de dégager ces ressorts avec un
tournevis pour les libérer instantanément. L'outil
travailleur apparait donc avec une simplicité décon-
certante.
Dès que l’on arrive à l’extrémité du champ à
travailler, laxe des griffes est abaissé et em-
COSMOS
19 DÉCEMBRE 194192
brayé : sa jhauteur est réglée en agissant sur le
support de deux patins solidaires de cet axe à ses
deux extrémités et dont la tige, glissant dans une
gaine, donne la profondeur du labour. Le conduc-
teur remonte alors sur son siège, et sans aucune
aide embraye son moteur, et la machine se meten
route. L'axe des griffes tourne à 180 tours par
minute.
A une telle vitesse, les griffes graitent énergique-
ment le sol, le réduisent en miettes comme si le
travail était effectué par un groupe de blaireaux
dressés å cet usage. La terre est rejetée en arrière,
si violemment que l’on a dü arrêter son élan en
ajoutant, derrière les griffes, un balai métallique
LE TRAVAIL DU MOTOCULTEUR DANS UN CHAMP RECOUVERT DE FUMIER.
qui la retient et l'oblige à constituer un sol très
uni. Ce travail est en réalité un travail de fraiseuse
agricole, rabotant le champ dans les mêmes con-
ditions qu'à l'atelier la fraise travaille le bois ou
le fer que l’ouvrier amène à son contact.
Le motoculteur pèse, en ordre de marche,
1 320 kilogrammes. La quantité de travail dépend
de la profondeur, la largeur de ce que nous appel-
lerons toujours le « sillon » étant de 2,2 m. Sous
une profondeur de 25 centimètres, elle laboure un
hectare en une journée; mais s’il s’agit seulement
de travaux superficiels, la surface labourée peut
alteindre jusqu’à 8 et 10 hectares.
On voit que les reproches qui peuvent être
adressés à la charrue disparaissent totalement
devant cet émiettement du sol. Or, il est incontes-
table que cet ameublissement intense favorise dans
la plus large mesure l’activité de la végétation.
Les procédés ouest-américains du dry-farming ne
sont pas autre chose: la culture s'effectue sans
engrais ni fumier, et les récoltes sont abondantes
par l’entretien constant de la surface des terres.
Une nitrification intense se produit et les plantes
s'assimilent intégralement toutes les matières orga-
niques azotées tenues en réserve dans Île sol.
Certains agriculteurs considèrent, cependant,
que la présence des mottes, dans les labours
d'hiver, est nécessaire. Si Pon veut bien se rendre
compte que la production de la motte est simple-
ment due à l’action de la charrue au lieu d’être
N° 1456
voulue par le cultivateur, on conviendra qu'elle
n'a d'autre raison d'être que parce qw'elle est im-
posée par l'outil. La gelée puis le dégel émiettent
cette motte, et il est indispensable que cet émiette-
ment se soit effectué avant qu'on ne confie lasemence
à la terre. En réalité, on subit la motte en comp-
tant sur l’action des agents atmosphériques pour la
désagréger. C'est purement et simplement de la
culture empirique. Combien serait préférable
l'émiettement total du sol après la récolte, émiet-
tement incorporant intimement les chaumes à la
terre, facilitant l'aération et préparant ainsi la
terre à un labour profond au printemps.
Il nous reste à envisager la question de l’enfouis-
sement du fumier, qui est essentielle dans nos
régions. Il nous suffit, pour assurer que cet enfouis-
sement s'effectue dans les conditions les plus avan-
tageuses, de prier nos lecteurs d'étudier la photo-
graphie que nous publions et qui montre « un
COSMOS
689
sillon » accompagné d’une portion de sol recouvert
de fumier et de la contreportion ameublie. Elle
est extrêmement curieuse. Le fumier, au lieu d’être
enfoui par paquets au fond du sillon, se trouve
émietté dans les mêmes conditions que la terre,
avec laquelle il se mélange par fragments ténus.
Les essais ont même porté sur de longues pailles,
qui n'ont pas résisté à l’action des griffes.
Le motoculteur se présente donc comme un in-
strument destiné à entrainer une méthode nouvelle
de labour, méthode tout à fait indispensable à
appliquer principalement dans les régions sèches
où les labours d’été sont à peu près impossibles
avec les moyens actuels. Par l'émiettement du sol
on permettra aux racines des plantes de se déve-
lopper normalement, sans aucune gène, et de
recueillir tous les aliments dont elles ont besoin.
LUCIEN FOURNIER.
NOTES PRATIQUES DE CHIMIE
par M. JULES GARÇON
A travers les applications de la chimie: Corr D'OEIL GÉNÉRAL SUR LA CHIMIE. — SUR L'ÉMANATION DU
THORIUM. — FABRICATION DES JOUETS EN VERRE POUR ARBRES DE NOEL. — MEULES EN CARBORUNDUM. —
LA PORCELAINE DE MAGNÉSIE. — DRNTIFRICE À L'IObES: SIROP IODOTANNIQUE, — L'EUCALYPTOL N'EST PAS
VERMIFUGE. — CUIVRAGE DU PLATRE. — PROTECTION DES SEMAILLES DE BLÉ CONTRE LES CORBEAUX.
Coup d'œil général sur la chimie. — Ces notes
ont accompli leur rôle si elles ont démontré que la
chimie s'occupe de iout, touche à tout, et que nous
pouvons appliquer les données de la chimie à tout
en chaque instant de notre vie. La chimie peut donc
être la meilleure des choses, pourvu que nous nous
bornions à ne nous en servir que pour les bonnes
choses, ainsi qu’on le doit de toute science. Sous le
bénéfice de cette distinction, la chimie est la meil-
leure des choses, parce que ses applications sont
innombrables et journalières, aussi bien en méde-
cine, en hygiène, en agriculture, en industrie que
dans la sphère de l'économie domestique et de la
vie quotidienne. Cette science prestigieuse s'occupe
de tout le monde matériel, jusqu’à analyser la
matière des astres qui circulent dans l'espace à des
millions de lieues de l'astre que nous habitons. Ft,
corollaire forcé, la chimie exerce son influence
sur la situation industrielle des peuples et sur leurs
relations commerciales. Jusqu'où nous mènera
l'essor magnifique que cette science nous offre
depuis un demi-siècle ?
La chimie est donc l’une des sciences qu'il y a le
plus grand intérêt à connaitre. C'est aussi, con-
trairement à une croyance trop répandue, lune de
celles qu’il est le plus facile de s’assimiler. Mais
son enseignement doit être réformé dans le sens
des applications rattachées à chaque propriété d’où
elles dérivent. La chimie, ainsi comprise, offre
à Pesprit une collection merveilleuse de faits utiles,
inléressants et amusants.
Pour plus grande simplification, la notation chi-
mique n'est qu'un moyen de représenter symboli-
quement les corps par la première lettre de leurs
noms, et les équations chimiques sont, de mème,
les représentations symboliques et abrégées des
réactions.
Quant à la nomenclature, elle repose tout entière
sur le principe de la réunion dans une mème classe
ou fonction des corps qui possèdent des propriétés
générales voisines. Nous avons vu quelles sont les
principales de ces fonctions: fonction acide, f. base,
f. sel, f, hydrocarbure, f. alcool, f. aldéhvde,
f. éther, f. hydrate de carbone; enfin, fonctions
azotées : amine, amide, azine, azoïique, aleaioide
naturel, albuminoïde, et nous avons étudié les
applications principales de chacune de ces grandes
fonctions.
Il reste à montrer combien les lois qui président
aux actions mutuelles des innombrables composés
rentrant dans ces fonctions sont simples et peu
nombreuses.
Sur l'éemanation du thorium. — Les composés
actifs du thorium peuvent être utilisés de diffé-
rentes manières en thérapeutique. On peut les
690
inhaler par les poumons; on peut les ingérer; on
peut prendre un bain de thorium X; on peut appli-
quer des sachets humides renfermant des sels de
thorium. Enfin, on peut injecter une eau radio-
aclive, par exemple, dans des tumeurs ou dans les
veines. Cet emploi nouveau est exposé par M. Dow-
son Turner dans les Proceedings of the Royal
Society of Edinburgh.
Fabrication des jouets en verre pour arbres de
Noël. — Dans les montagnes de Thuringe, à une
trentaine de kilomètres de Cobourg, il existe une
industrie toute spéciale, celle de la fabrication des
jouets et petits objets en verre pour arbres de
Noël; le village de Laoucha en est le centre.
Un rapport du vice-consul d'Amérique à Cobourg
nous donne des détails intéressants sur cette indus-
trie. Les habitants y montrent une habileté élon-
nante à souffler des petites boules, des étoiles, etc.
de verre. Les souffleurs achètent des tubes en verre
plus ou moins épais; ils les chauffent en un point
à l'aide d’une soufllerie mue avec une pédale,
comme le chimiste le fait dans son laboratoire. Et
ces villageois arrivent ainsi à donner dans le tube
des coups de souffle exactement dosés pour produire
les résultats cherchés. Les effets obtenus sont éton-
nants, puisque les souffleurs n'arrivent pas seule-
ment à fabriquer des ballons, des étoiles, mais
aussi des petits bateaux, des animaux aux membres
les plus délicats, des fleurs même aux pétales
diversement coloriés. La coloration se fait généra-
lement à la main et extérieurement.
Les véritables difficultés commencent lorsque
l'article est tout fabriqué. En effet, ces objets sont
si fragiles que, pour les expédier, on est obligé de
prendre des soins tout particuliers. On les enrobe
douillettement de coton et on les empaquette dans
des boites en carton; le tout est si léger que les
expéditions peuvent se faire par la poste. Mais
à partir de la mi-novembre, le nombre des colis
arrivant à Cobourg des montagnes environnantes
pour ètre expédiés par la poste devient si consi-
dérable que, non seulement on est obligé d'adjoindre
au service postal des employés supplémentaires,
mais même l'on est forcé de mettre aux trains
des wagons supplémentaires pour enlever les nom-
breux petits colis. |
Meules au carborundum. — On obtient des
meules très solides en soudant des cristaux de
carborundum dans une masse de porcelaine. Pour
cela, on commence par cribler les cristaux pour
les avoir biep égaux et on ajoute au produit criblé
poids égal d'un mélange de feldspath et de kaolin
bien pulvérisés. On fait, avec un peu d’eau, une
pâle épaisse qu'on presse dans des moules, sous
une pression modérée de facon à ne pas écraser
les cristaux. Il reste à cuire dans un four à porce-
laine.
COSMOS
19 DÉCEMBRE 1942
La porcelaine de magnésie. — M. A. Rigaud
rappelle, dans l’un des derniers numéros de notre
collègue la Revue scientifique, que Sainte-Claire-
Deville et Caron, au cours de leurs recherches sur
les températures élevées, ont montré le parti que
l'on peut tirer de l'infusibilité et de la stabilité de
la magnésie pour l'utiliser comme matière réfrac-
taire. Nous citons textuellement sa note intéres-
sante :
« Par compression de la magnésie fortement cal-
cinée, mélangée d'une faible proportion de magné-
sie moins cuite, ils obtenaient les creusets et
nacelles nécessaires à leurs expériences (1865 et
1868). Dès 1869, les usines céramiques Muller,
d’Ivry, appliquaient les revêtements de magnésie
aux convertisseurs et aux fours Martin des aciéries,
comme soles basiques déphosphoreuses et désulfu-
reuses. M. Th. Schlæsing, dans une série de mé-
moires (1884), a indiqué les principes qui ont servi
à créer l'industrie des matériaux réfractaires en
magnésie pour les fours de la métallurgie. Cette
industrie est aujourd'hui très développée (Len-
cauchez, Bulletin des Ingénieurs civils, 1893). La
magnésie, provenant du carbonate ou du chlorure,
est employée seule ou associée au charbon, à la
chaux (dolomie), à l’oxyde de fer (7 à 8 pour 40),
à l’oxyde de chrome, à la silice, à l’alumine. »
Il est indispensable, dans lu fabrication des
briques et des creusets de magnèsie, de ies porter
à une température très élevée pouréviter le retrait.
On sait que la densité de la magnésie croit avec la
température à laquelle elle a été portée.
Pour l’usage des laboratoires, la manufacture
royale de porcelaine de Berlin fabrique, depuis
quelques années, des creusets, nacelles, tubes en
magnésie pure, dont l'aspect rappelle celui de la
porcelaine, ce qui a fait donner à la magnésie
ainsi façonnée le nom de porcelaine de magnésie.
Tous les chimistes qui s'occupent des réactions aux
températures élevées utilisent cette porcelaine de
magnésie, en particulier dans les fours électriques
à résistance. Cette porcelaine, aux températures
élevées, ne subit pas de retrait. Elle ne convient
plus cependant aux températures du four élec-
trique, car alors elle se brise en nombreux frag-
ments. Pour éviter le retrait, il est nécessaire de
réaliser une véritable porcelaine par vitrification
de la masse; la porcelaine de magnésie de Berlin
n'est qu'une faience opaque. M. Binet de Jassoneix,
pour des recherches sur les borures (Thèse, Paris,
1909), est arrivé à préparer des creusets et nacelles
en magnésie pure fondue au four électrique. La
magnésie fond au four électrique plus difficilement
que la chaux. Il faut prolonger la chauffe pour
avoir une fusion complète (Revue de métallurgie,
1907).
Dentifrice à l'iode. — Le D' Carlès, de Bordeaux,
donne la formule suivante pour l'emploi de l'iode
N° 1456
dans l’antisepsie buccale. « Dans 20 grammes de
teinture d'iode, on dissout 1 gramme d'’iodure de
potassium et on verse 1 à 3 goultes de cette tein-
ture d’iode iodurée dans un quart de verre d’eau
tiède. Avec ce topique, on se rince minutieusement
Ja bouche.
» Par ce rinçage, la muqueuse buccale se trouve
tapissée d’une couche très légère d'iode libre, à
dose non nuisible, mais suffisante pour désinfecter
l'haleine et prévenir la formation des tartres et
entraver l'évolution des caries ».
D’après M. Carlès, l’iode ne jaunit pas les dents
à cette dose très réduite. On peut l’admettre, car
l'iode jouit, ainsi que le brome, des mêmes pro-
priétés décolorantes que le chlore, pourvu qu’ils ne
soient pas en proportion suffisante pour colorer par
eux-mêmes les corps.
Sirop iodotannique. — Comme tonique, le sirop
iodotannique conserve sa vogue.
Les formules proposées dans les diverses phar-
macopées pour la teinture d’iode et pour le sirop
iodotannique ont inspiré un nombre incroyable de
notes. M. H. Pecker, pharmacien militaire à Bône,
y ajoute une contribution (Journal de Pharmacie
du 46 juillet 1912). Pour lui, le mode de prépara-
tion du sirop iodotannique inscrit au Codex de 14908
présente encore de nombreux désavantages, et par-
ticulièrement il exige un temps fort long. On
obtient un sirop iodotannique de formule satisfai-
sante en ajoutant simplement du tannin à de la
teinture d'iode, soit 4 grammes de tannin à
20 grammes de teinture d'iode; on agite et on
verse ensuite 976 grammes de sirop simple et on
mèle. Il suffit de placer au bain-marie la fiole ren-
fermant le mélange, après l'avoir bien bouchée;
lorsque la couleur rouge vire au jaune acajou, ce
qui demande environ un quart d’heure, on enlève
la fiole. On s’assurera, au moyen d’un pain azyme,
que tout l’iode est combiné.
M. L. Grimber (revenant, dans le numéro du
16 août, sur Ja question) passe en revue les nom-
breuses récriminations qui ont vu le jour depuis
que la pharmacopée de 1908 est devenue oflicielle,
et il se rallie à la formule de Mauser: iode 2,
tannin 4, eau 400, sucre 600; la conservation est
parfaite.
Leucalyptol n'est pas vermifuge. — L'eucalyptol
ou cinéol est parfois ordonné comme vermifuge,
principalement pour les enfants atteints d’asca-
rides. [l faut absolument le prohiber, car, d'après
M. H. Brüning, des doses même fortes n’ont aucun
effet sur les ascarides, mais des doses même faibles
provoquent chez les enfants des malaises et des
vomissements. L’eucalyptol combiné au chloro-
forme et à l’huile de ricin n’est donc vermifuge
que grâce à la présence du chloroforme.
COSMOS
691
Cuivrage du platre. — Pour obtenir un bon
dépôt galvanique de cuivre sur le plâtre, M. A. Du-
fay (Chemical News du 8 novembre) chauffe le
plâtre dans une étuve bien ventilée à 50°, puis
l'introduit dans un bain de paraffine à 50°-60°: il
l'enlève lorsqu'il ne se dégage plus de gaz, et le
laisse refroidir. On recouvre alors la surface avec
une faible couche de collodion photographique,
libre de sel d'argent et étendu de neuf fois son
volume d'alcool et d'éther. On laisse sécher. On
recouvre de graphite, on relie avec des conduc-
teurs, on mel de nouveau une couche de graphite
et on place le tout dans une solulion à 10 pour 400
de sulfate d'aluminium ou d'alun. On l'y laisse
quelques minutes seulement. On relie alors le
moule de plâtre avec une source électrique de
3 volts 4 ampère par décimètre carré, et on intro-
duit dans un bain de sulfate de cuivre additionné
de 3à 8 pour 100 d'acide sulfurique. On complète
le circuil avec une anode de cuivre. Il se dépose
très vite une mince couche de cuivre qui s’épaissit
rapidement.
On pourrait utiliser cette solution de sulfate
d'aluminium et de sulfate de cuivre dans le raffi-
nage du cuivre, pour produire économiquement
lalliage d'aluminium et de cuivre, puisqu'il suffi-
rait d'introduire dans le bain la quantité voulue de
sulfate d'aluminium. On pourrait également l’uti-
liser dans les laboratoires pour déterminer l’alumine
par électrolyse.
La protection des semailles des blés contre les
ravages des corbeaux a inspiré à M. le professeur
Henri Hitier les réflexions suivantes (correspon-
dances du Journal d'Agriculture pratique).
Pour protéger les blés, M. S. Tétard, de Gonesse,
a signalé, il y a une vingtaine d’années déjà, un
procédé qui lui donnait des résultats absolument
efficaces. Sa méthode consiste à enduire le grain
de goudron additionné de pétrole et d'acide phé-
nique, mais il faut utiliser le goudron de gaz d'une
odeur pénétrante et l’acide phénique en solution
concentrée. : |
Voici comment M. Hitier propose le mélange :
« Mettre sur un feu doux la marmite contenant
le goudron; au moment où les premiers signes
d'ébullition indiquent qu’il est bien chaud, retirer
du feu par crainte d'incendie, puis agiter le pétrole
et enfin verser lacide phénique en remuant vive-
ment la masse pendant quelques minutes à l'aide
d’un bâton; on obtient un bon mélange qui, même
après s'être refroidi, reste complètement liquide.
6 litres de goudron de gaz, auxquels on ajoute
3 litres de pétrole et 1 litre d'acide phénique, suf-
fisent pour 10 quintaux de semences ».
Pour prâliner les semences à l’aide de ce mé-
lange, M. Tétlard agissait ainsi: sur une aire
étanche, détacher à la pelle du tas de blé à traiter
692
un quintal environ sur lequel on verse un litre de
melange: remuer aussitôt très vivement à l’aide de
la pelle jusqu'à ce que chaque grain soil bien
noirci et que la masse présente la nuance d’un
tas de café grillé; continuer ainsi en traitant chaque
fois un quintal de semence.
La semence goudronnée ne peut être semée telle
quelle: elle adhérerait aux cuillers du semoir et en
rendrait le fonctionnement impossible. On remédie
COSMOS
149 DÉCEMBRE 1912
à cet inconvénient en versant sur le tas de blé
environ un litre de phosphate naturel pulvérisé par
un brassage sommaire; le grain, complètement
séché, se sème alors aussi facilement que le blé
ordinaire. La semence ainsi traitée, les corbeaux
n'y toucheront pas.
Bien entendu, le blé de semence a du être sulfaté
au préalable pour garantir les grains de semence
de la carie et du charbon.
Le nouveau bateau-feu du Havre.
Un doit établir prochainement — avant la fin de
cette année — un bateau-feu que réclamaient avec
instance depuis longtemps les marins du Havre et
qui sera destiné à faciliter l'atterrissage de ce port
dans les temps de brume si fréquents dans la
Manche.
Ce bateau-feu sera mouillé à environ 7 milles
(13 kilomètres) dans le N. 75" 0, du cap de la
Hève, sur la route de Barfleur à l'entrée de la
passe du Havre. Il sera constitué par un ponton de
40 mètres de longueur et de 6 mètres de largeur,
peint par bandes horizontales alternativement
rouges et noires et portant en grosses lettres
blanches les mots Le Harre peints sur chaque
paroi.
Ce ponton portera en son milieu, au sommet
d'un mât militaire haut de 12 mètres, une lanterne
dans laquelle tournera un appareil lenticulaire de
0.25 m de distance focale, éclairé électriquement
et émettant des éclats rouges groupes par deux
toutes les dix secondes.
La puissance lumineuse du feu sera de { NX) becs
Carcel. Les portées lumineuses atteintes ou dépas-
sées pendant les 50 centièmes et les 90 centièmes
de l'année s'éléveront respectivement à 48 et
6 milles (43 et 11 kilomètres).
Une sirène à air comprimé, installée sur le roufle
du bateau, émettra en temps de brume des sons
groupés par trois toutes les minutes. De plus, une
cloche sous-marine émettra également en temps
de brume des sons groupés par trois toutes les
guinze secondes.
Plus tard, le nouveau feu flottant doit être muni
d'un appareil hertzien comportant, en temps de
brume, lémission régulière, toutes les trente
secondes, de sisnaux produisant dans le téléphone
le sonut 1, et rvthmés de manière à répéter pen-
dant dix secondes à cadence lente la lettre H de
l'alphabet Morse.
On voit que ce nouveau bateau-feu sera muni de
tous les perfectionnements modernes, et nul doute
qu'il ne soit appel à rendre de grands services à
la navigation maritime qui fréquente notre grand
port de la Manche.
Nous avons dit que les marins du Havre réclament
depuis longtemps l'amélioration des conditions
d'atterrissage sur leur port.
C'est en 1901 que divers commandants de paque-
bots de la Compagnie transatlantique adressèrent
au ministre de la Marine des rapports lui signalant
les difficultés qu'ils éprouvaient à atterrir au
Havre en temps de brume, leur seul point de
reconnaissance étant alors la bouée à sifflet,
mouillée à deux milles à peine des petits fonds.
L'insuffisance de ce signal sonore, son faible éloi-
gnement des dangers ne répondaient nullement
aux grandes vitesses des paquebots modernes.
Ils faisaient ressortir en même temps combien
l'atterrissage sur New-York est plus facile dans
les mèmes conditions de temps, la route étant
jalonnée par trois feux flottants munis de sifflets
à vapeur puissants, mouillés par des fonds de
99, 30 et 20 mètres quon peut toujours venir
chercher à la sonde sans danger.
Quand on fait le trajet inverse, de New-York au
Havre, on a, il est vrai, la ressource de venir
reconnaitre les iles Sorlingues ou le cap Lizard; et
de là au Havre on peut admettre qu’il n’y a pas à
craindre, pour un paquebot rapide, une erreur sur
sa position de plus de quatre à cinq milles dans le
sens perpendiculaire à la route.
Mais cette incertitude, si faible qu’elle soit rela-
tivement, n’en oblige pas moins les commandants
à modérer leur vitesse en cas de brume, à rectifier
leur route, à tâtonner pour reconnaitre la bouée
à sifflet, en un mot à perdre du temps.
Or, c'est surtout pour les grands paquebots
modernes que le temps est de l’argent.
Pouvait-on améliorer ces conditions d'atterrissage
en se servant desindications fournies par la sonde ?
Un sait qu'avec les appareils Thomson-Houston,
basés sur la loi de Mariotte, les navires n’ont plus
besoin de stopper comme autrefois pour sonder,
et peuvent, sans ralentir sensiblement leur vitesse,
N° 1456
savoir la quantité d’eau qu'ils ont à un moment
donné sous la quille. Mais pour en déduire un lieu
géométrique relatif à leur position, il faut de
bonnes cartes d'atterrissage et une connaissance
exacte de la marée. Or, les cartes hydrographiques,
levées à une époque où l’on ne connaissait pas la
marine à vapeur à grande vitesse, ne donnaient
que des renseignements très espacés sur les pro-
fondeurs du large, et quant à la marée, elle pos-
sède dans les parages de la baie de Seine un régime
assez compliqué qui rend quelque peu aléatoires les
réductions que lon doit faire pour ramener les
profondeurs obtenues au zéro des cartes marines.
Cependant, une nouvelle reconnaissance hydro-
COSMOS
693
graphique des atterrages du Havre s'imposait sans
plus tarder. Elle eut lieu en 1907 et 1908, sous la
direction de l'ingénieur en chef Driencourt.
Elle fit ressortir un relief sous-marin d'une forme
telle qu'il est impossible de se servir commodé-
ment des indications de la sonde pour atterrir au
Havre, les courbes de niveau coupant sous un angle
assez aigu la route des navires qui viennent de
Barfleur pour chercher l’entrée de ce port.
I fallut donc se rendre à l'évidence; on ne pouvait
donner satisfaction aux capitaines de paquebots
sans jalonner leur route par des appareils portant
de puissants engins sonores.
Cette question des engins sonores avait fait, du
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LA BAIE DE SEINE ET L'EMPLACEMENT DU NOUVEAU BATEAU-FEU,
reste, un grand pas dans ces dernières années.
Ces sortes d'engins autrefois en usage consis-
taient uniquement, en ce qui concerne les appa-
reils de pleine mer, en des cloches ou des sifflets
montés sur des bouées et actionnés simplement par
le mouvement des vagues. Tel est le cas, par
exemple, de la bouée à sifflet de la Hève qui est
mouillée à 4 milles à l’ouest du Havre, etconstiluait
jusqu’à présent, comme nous l'avons dit, l'unique
ressource des navigateurs cherchant à entrer dans
ce port par temps de brume. Quand la mer est
agitée, ces cloches ou sifflets, surtout ces derniers,
peuvent s'entendre assez loin; mais il arrive préci-
sément que les brumes les plus épaisses sont
presque toujours accompagnées de calmes plats,
de sorte que ces appareils ne peuvent servir au
moment où on en a le plus besoin. On a pensé les
actionner de terre, au moyen d'une transmission
électrique d'énergie; mais aux abords de ports
aussi fréquentés, les câbles électriques seraient
bien vite détériorés par les ancres des bateaux qui
viennent mouiller aux alentours ou par les chaluts
des pêcheurs. |
Un premier progrès fut la substitution de
signaux sonores sous-marins aux signaux aériens.
On sait que l'eau propage le son beaucoup mieux
que l'air. Des expériences entreprises avec des
récepteurs perfectionnés et des cloches à son très
aigu donnèrent des résultats nettement supérieurs
à ceux qu'on obtient dans l'air, non seulement
69%
pour l'étendue ct la régularité de la porlée, mais
— chose très importante, on peut même dire essen-
tielle, pour le navigateur — pour la direction d'où
émane le son.
Tous ceux qui se sont trouvés en mer pris par la
brume savent en effet quelle espèce d'angoisse on
éprouve en entendant une cloche ou une sirène.
On est prévenu qu'il y a quelqu'un ou quelque chose
dans le voisinage, mais il est impossible de savoir
dans quelle direction et, par suite, de quel côté il
faut se diriger pour le reconnailre ou l'éviter.
C'est donc un progrès essentiel que celui qui permet
au marin de se rendre compte d’une façon même
grossière de la direction d'où provient le son.
Inaugurés aux Etats-Unis, les signaux sonores
sous-marins ne tardèrent pas à ètre fort appréciés,
surtout par la navigation transatlantique, et leur
usage se répandit rapidement sur les còtes d’Furope
comme sur celles d'Amérique. En France, une pre-
mière application en fut faite au feu flottant du
Sandettié, près de Dunkerque, où fonctionne
depuis 1906 une cloche à air comprimé. Une
seconde fut réalisée aux abords de la digue de
Cherbourg, avec une cloche actionnée électrique-
ment. Enfin, on vient d'en établir une à Ouessant,
portée à l'extrémité d'une grande poutre qui
s'avance au loin dans la mer.
Au Havre mime, on fit deux essais de signaux
sous-marins; une cloche sous-marine actionnée par
les vagues fut installée près de la bouée à sifflet,
une autre actionnée par l'air comprimé, au pied
du musoir de la digue Nord. Le fonctionnement de
ces deux cloches et leur degré d'utilité furent
éludiés par les commandants de la Compagnie
transatlantique. On reconnut que la cloche du
large rendait quelques ‘services: mais la portée des
sons était trop faible et lenr défaut de rythme les
rendait difficiles à saisir au milieu des bruits si
variés de la mer et des navires.
Quant à celle du musoir, on constata qu’elle
était plutot dangereuse en raison de sa position
sur un obstacle fixe et à l'intérieur des dangers
qui entourent la rade, et ces essais furent bientôt
définitivement interrompus.
En résumé, ce que demandaient les marins pour
pouvoir atterrir en toute sécurité, etsans perdre de
temps en cas de brume, sur un grand port comme
Le Havre, cest un signal sonore sous-marin puis-
sant, mouillé assez au large des dangers pour qu'on
puisse sans crainte venir le reconnaitre, et situé
sur la ronte mème des bateaux qui en ont besoin.
Tels sont les desiderata qui furent nettement
COSMOS
19 DÉCEMBRE 1912
formulés au cours d'une Commission nautique qui
réunit en 419410 les principales autorités, marins et
ingénieurs, du port du Havre.
Il fut reconnu unanimement qu'une simple bouée
ne pourrail suffire à donner satisfaction à ces desi-
derata, cette bouée pouvant être déplacée soit par
suite d'un abordage, soit par le dragage des bateaux
chalutiers qui viennent en si grand nombre, en cer-
taines saisons, pêcher dans ces parages; et on en
arriva forcément à la solution d'un bateau gardé,
mouillé à environ 7 milles de l'entrée, distance
suffisante pour qu'en venant le chercher on ne
coure pas le risque de faire côte ou de s’échouer
sur les dangers qui entourent la rade, et assez
faible pour qu'un navire rapide soit assuré, dans le
temps qu'il mettra à la franchir, de ne pas dévier
assez pour manquer l'entrée du chenal. Cette solu-
tion relalivement coùteuse — 800000 francs de
frais de premier établissement et 40000 francs
d'entretien annuel — s'impose cependant si l'on
veut maintenir notre grand port de la Manche au
niveau des nécessités de la navigation moderne.
Une de ces nécessités, c'est, au moins pour les
paquebots et la navigalion ď’escale, d'arriver à jour
fixe et mème à heure fixe; et ce n’est pas seule-
ment la Compagnie transatlantique, ce sont toutes
les autres Compagnies dont les navires font escale
au Havre qui réclamaient cette importante amélio-
ration. Le nouveau bateau-feu leur donnera à tous
une pleine satisfaction. L'emplacement qu'on x
choisi ne favorisera pas exclusivement les navires
venant d'au delà de Barfleur. Ceux en provenance
des ports du Nord et de l'Angleterre n'auront qu'un
léger détour à faire pour y passer en temps de
brume. De plus, il est situé dans le voisinage de la
route des cabotcurs qui vont du nord de la Manche
aux ports du Calvados. Il correspond donc à toutes
les routes suivies par la navigation dans ces
parages, et servira non seulement aux navires
qui fréquentent le port du Havre, mais encore à
ceux de plus en plus nombreux qui se dirigent
vers les ports de Rouen et de Caen. On estime
que c’est à une navigation de plus de 15 millions
de tonnes que servira le nouveau bateau-feu.
Le feu du bateau sera visible de la digue Nord
du Havre et de La Hève, ce qui permettra de sur-
veiller son fonctionnement d’une façon continue.
En outre, la proximité relative du bateau-feu au
port facilitera la vérification de sa position, les
remises en place après déradage et les substitutions
d’un rechange à l’autre.
(A suivre.) P. GUIDEL.
Ne 1156
COSMOS
695
SOCIÉTÉS SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 9 décembré 1912.
PRÉSIDENCE DE M. LIPPMANN.
Élections. — M, Havauanb est élu membre dans
la Section de Géométrie, par 36 suffrages sur 57 expri-
més, en remplacement de M. Poincaré, décédé.
Une expérience nouvelle sur les rotations
ionomagnétiques. — M. A. Ricui a donné ce nom
aux mouvements de rotalion qui se produisent lorsque,
sur un corps pouvant tourner aisément autour d'un
axe et placé da:s un gaz raréfié et ionisé, on fait
agir un champ magnélique dirigé suivant ledit axe.
Les trajectoires des ions (et des électrons) entre deux
chocs successifs deviennent alors curvilignes (des
hélices si le champ est uniforme), et les directions des
chocs sur la surface du corps mobile s'inclinent toutes
dans un même sens, d’où la rotation.
Les rotations ainsi observées ne sont que l'effet dif-
férentiel des actions de sens contraire dues aux ions
des deux espèces.
Il'est clair que les rotalions ionomagnétiques devien-
draient beaucoup plus considérables, méme avec faible
ionisation du gaz, s’il était possible de supprimer les
ions de l’un des deux signes. Or, l’auteur a obtenu un
résultat analogue tout simplement en électrisant le
corps mobile, qui alors peut jouer le rûle d'électrode.
Si, par exemple, on le charge négalivement, ce seront
seulement des ions positifs qui pourront produire leur
effet, les particules négatives étant pour la plupart
repoussées.
Influence de la forme géométrique des corps
solides sur les actions chimiques qu’ils su-
bissent à basse pression. — Dans les conditions
ordinaires de pression, le chimiste, en étudiant l'ac-
tion d'un gaz sur un solide, n'a pas à s'occuper de la
forme géométrique de ce dernier. Il n'en est plus de
même aux basses pressions (1 à0,0l mm de mercure),
où M. G. ResovL a obtenu des exemples d'action chi-
mique montrant, de la manière la plus nette, l'influence
de la forme géométrique d'un corps sur son attaque
par un gaz.
A une pression de 0,1 mm, une lame de cuivre,
atlaquée par le soufre provenant d'un morceau de
caoutchouc vulcanisé situé au voisinage, se recouvre
de sulfure sur les bords, puis le noircissement gagne
lentement les parties centrales, quelle que soit la posi-
tion de la lame. L’altaque se poursuivant, il se forme
des colorations de lames minces suivant des plages
parallèles aux bords de la lame; ces colorations ren-
seignent sur l'épaisseur de la couche de sulfure formé
et, par suite, sur l'intensité de l’action chimique aux
divers points de la lame: cette intensité est beaucoup
plus vive sur les bords que sur la partie centrale.
Tout se passe comme s'il y avait autour de la lame
une atmosphère gazeuze protectrice qui se résorberait
peu à peu, abandonnant les bords,se maintenant sur
les parties centrales et s'opposant à la diffusion du
gaz réagissant.
Sur un ellipsoïde, attaque se produit en commen-
cant par les sommets où le rayon de courbure est
le plus pelit. Sur une sphère, l'attaque est uniforme;
mais si l’on introduit ensemble dans l'appareil deux
sphères de diamètre différent, par exemple, l’une de
19 millimètres et l’autre de 2 millimètres de diamètre,
on constate que la sphère la plus petite est celle qui
est le plus rapidement attaquée.
Essai d'évaluation de la cohésion diélectrique d'un
gaz rare, avec de pelites quantités de malière. Note
de M. E. Boutyr. — Sur l'emploi du manometre à l'étude
de la respiration des plantes. Note de MM. L. MAQUENNE
et E. Deuoussy. — L'expédition du capitaine Roald
Amundsen au pôle Sud; M. CH. Lazueuanb présente la
traduction francaise par M. Ragor de la relation de ce
voyage. Parmi les observations faites au cours de ce
voyage, il faut citer les preuves du caractère conti-
nental de l'énorme glacier qui occupe la partie la plus
méridionale de la mer de Ross. Les précédents voya-
geurs l'avaient, au contraire, présenté comme une
nappe flottante. — Dissipation et discontinuité de
l'énergie. Note de M. Découse. — Sur la propagation
de l'onde explosive dans les solides. Note de MM. J. Tar-
FANEL et H. DauTricHe. — Sur un théorème de M. Eins-
tein. Note de M. Léuenav. — Sur le rôle des ampères-
tours longitudinaux au moment de la commutation
dans les machines dynamo-électriques à courant con-
tinu. Note de M. R. SwyxuEebauw. — Sur les propriétés
optiques d'un liquide soumis à l'action simultanée de
deux champs électrique el magnétique, et sur la symé-
trie moléculaire. Note de M. A. Cortos. — Sur l'aiman-
lation de l’eau et de l'oxygène. Note de MM. PIERRE
Weiss et AUGUSTE Piccanv. — Nouvelle mesure de la
décomposition magnétique des raies de la deuxième
série secondaire du zinc, et vérilication quantitative
de la loi de Preston. Note de M. R. Fortkar. — Sur le
pouvoir ditfusif du noir de platine et le coeflicient de
la loi de Stefan. Note de MM. Cu. Feny et M. Dreco.
— Méthode de mesure des très grandes résistances.
Note de M. Tounxien. — Sur de nouvelles formes de
combustion gazeuse tourbillonnaire, et sur leur ana-
logie d'apparence avec certains phénomènes astrono-
miques. Note de M. JEAN MEUNIER. — Théorie de l’efflo-
rescence des hydrates salins. Note de MM. Cu. Bov-
LANGER et G. UnBaIX. — Action des acides sur l'oxyde
uraneux. Note de M. A. Coras; l'auteur établit que
l’oxyde uraneux se dissout lentement dans l'acide
chlorhydrique et que la quantité d'oxyde dissous dans
un temps donné varie énormément avec le mode de
préparation de l'oxyde. — Synthèses au moyen des
dérivés organo-zinciques mixtes. Cétones 2-polychlo-
rées. Constitution de la trichloracétone ordinaire.
Note de M. E.-E. Bras. — Éthéritication des cvcla-
nols par les acides aromatiques. Note de MM. J.-B. SEN-
LERENS et JEAN ABOULENC. — Sur la structure anormale
de la tige du /ochea corrinea D. G. Note de M. Rav-
MoNb HauerT. — Hybrides de cobaves sauvages (Cavia
Cutleri, C. Aperea) el de cobayes domestiques
696
(GC. Cobayax. Note de MM. L. BuariNouEu et À. Prévor.
— Contribution au traitement des enfants arriérés par
les extraits endocriniens associés. Note de M. Roc
Drerx. — Sur le développement du squelette de l'aile
chez le pinsonin. Note de HM. R. AxXTuoxy et L. Gus.
— Sur le développement de la muraille chez le Keno-
balanus globicipitis Steenstrup. Note de M. A. GREVEL,
— Sur une nouvelle varièté pæcilogonique du Paule-
moneles varians Leach. Note de M. E. SorLacb. —
L'action des rayons N sur la segmentation de l'œuf
d'Asraris meyalorephala. Note de M. E. FAURÉ-FREMIET.
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR L’AVANCEMENT DES SCIENCES ‘!)
Congrès de Nimes.
Histoire et archéologie.
Sous la présidence de M. J. TourTaix, membre du
Comité des travaux historiques et scientifiques, cette
section a nommé présidents d'honneur: M. R. Cagnat,
Salomon Reinach, R. de Lastérie, membres de l'In-
stitut; le commandant Espérandieu, correspondant de
l'Institut, et M. G. Maurin, vice-président.
M. Sr. CLasruien (Marseille) fait une communication
sur la découverte de fours romains faits a Saint-Andre
(Marseille), par M. M. Dubois, président du Comité du
Vieu.r-Marseille, Ces deux fours à céramique sont des
plus curieux. Jls sont construits en fragments de tuiles
reliées avec de l'argile comme mortier.
M. l'abbé Cuucrox (Septèmes ‘Bouches-du-Rhone )
étudie une sepulture a incineration à Gardanne. Ce
monument à peu de similaires dans la Narbonnaise:
il est rare de trouver le contraste qu'il présente, les
précautions prises à l’intérieur pour assurer la con-
servation de lurne et l'emploi, peut-ètre de fortune,
d'une auge pour la contenir.
M. Touts décrit un logement quulois de trois pieces
a Alisia. C'est un des vestiges les plus importants de
la cité gauloise au siège fameux de l'an 52. Elle a été
découverte en 1912 au lieu dit « en Curiot ». On des-
cendait par un escalier, dont quatre marches se sont
conservées, dans cette excavation. Une première pièce
que lon atteignait par cet escalier avait trois de ses
parois formees par la roche ; la quatriċme paroi était
demi-naturelle, demi-artificielle. La seconde pièce
communiquait tres largement avec celle-ci qui était
certainement la plus importante. L'ouverture qui
donne sur la troisième pièce est assez étroite. Un
enduit de chaux garnissait les murailles séparatives
des trois pieces. Le fover antique est encore en place
dans la troisième pièce. Le sol était formé pour les
trois picces par la roche nue. Ce n'étaient pas là des
caves, comme on l'a prétendu, la présence de ce foyer
le prouve nettement.
M. Er. Micuox (Paris) étudie l « Apollon » de Nimes,
ami se trouve dans les galeries du Louvre; il fait l'his-
torique du don de cette statuctte trouvée dans le
teinple de Diane par la ville de Nimes, échange
(D Fin, voir p. 6Hi.
COSMOS
19 DÉCEMBRE 191412
contre « une collection de plàtres provenant des ate.
liers de moulage du musée royal et un tableau destiné
à orner la cathédrale de Nimes ». La conclusion de
cet intéressant travail est que l'absence d'attributs
rend la dénomination aléatoire, mais ne serait-on pas
surtout porté à songer, comme M. Et. Michon lécrivait
jadis, à quelque divinité. héros ou génie, en rapport
avec les eaux ou la source.
MM. Vassy (Vienne) et C. Gry (Givors) décrivent
trois mosaãiques romaines formant le sol de trois pièces
d'une habitation yallo-romaine, mosaïques qu'ils ont
découvertes à Sainte-Colomhe-les- Vienne et Sainl-
liomain-en-liier (Rhône). Ces deux localités, à l'époque
romaine, formaient un quartier de Vienne, séparé par
le Rhône. (Vienna pulchra était la dénomination de
cette partie de la ville.) Ces trois mosaïques étaient
situées tout à côté de celle d'Hylas (musée de Gre-
noble) et semblent appartenir à la mème habitation.
Description de ces trois mosaïques: d'après elles,
l'habitation doit être datée du début du 1° siècle, qui
est encore pour Vienne la belle période artistique
gallo-romaine. Elles ne ressemblent en rien aux gros-
sivres mosaïques d'Afrique, de Timgad et de la Tri-
politaine, pas plus qu’à celles de Rome ou de Pompéi;
elles ont une marque d'origine locale. Des sondages
ont montré aux auteurs de ce mémoire qu'à 75 cenli-
mètres de profondeur existait une autre mosaïque,
très grossière, antérieure à la construction de la villa,
qui aurait donc été bâtie sur l'emplacement d'habita-
tions ordinaires.
Agronomie.
Présidée par M. Lacatu, professeur à l’École natio-
nale d'agriculture de Montpellier.
M. ALEXANDRE HÉBSERT (Paris) 1° donne la composition
de divers produits, graines où tubercules amylacés ou
féculents de l'Afrique occidentale française. Ce sont :
du maïs blanc du Dahomey qui peut être comparé.
au point de vue de la valeur, à nos produits indigènes ;
des ignames assez comparables comme composition
à la pomme de terre. Leur valeur est au moins sem-
blable à celle du manioc soc. La moelle d'£Encepha-
lastos Basteri est riche en hydrates de carbone : sucres
et amidon; les indigènes fabriquent une espèce de
pain avec la fécule qu’on en extrait.
2 Étudie au point de vue chimique les fruits de
Sorindebia oleasa. La pulpe du fruit est très sucrée;
dans le pays d'origine on en obtient par fermentation
une boisson analogue au cidre, mais très peu riche en
alcool. Et l'amande, qui est le noyau du fruit, est très
oltagineuse ; on s'en sert pour fabriquer de l'huile et
du savon; les acides gras qu'il donne ont un point de
fusion trop bas pour servir à la fabrication de bougies
ou méme de chandelles.
M. Vicron Mosséni (le Caire, Egypte) indique un nou-
ceau système de dessolement des terres.
Ce système occasionne une perte supplémentaire de
terrain de 2 à + pour 100 suivant la nature de la terre
et la disposition générale du réseau de drainage. Les
frais supplémentaires de création sont d'environ 40 à
5 francs par hectare avec des tuyaux de bois gou-
dronné, 60 à 65 francs avec des tuyaux en tôle de
12 centimètres de diametre et 2,5 millimètres
N° 1456
d'épaisseur. Les frais supplémentaires d'entretien ne
dépassent guère 5 à 10 pour 100 des frais ordinaires: ils
sont largement compensés par la réduction des frais
annuels de curage de fossés, mais ce supplément est
bien peu de chose vis-à-vis de la rapidité obtenue: on
aurait avantage à recourir au système mixte préconisé
dans ce travail.
Hygiène et médecine publiques.
Présidence de M. Henri de MoxrnichEr, ingénieur
civil (Marseille). M. Jules Cocuwoxr (Lyon), président
d'honneur : M. Rozanrs (Lille), vice-président.
La question de la collecte et du traitement des ordures
ménagères avait pour rapporteur M. Pacz Razocs,
commissaire contrôleur au ministère du Travail et de
la Prévoyance sociale. La conclusion de ce rapport est
que la méthode économique consiste à retirer de ces
ordures tout ce qui est particulièrement humide ou
susceptible d'être employé comme engrais, puis à
brüler le reste, les usines d'incinération pouvant, en
période d'épidémie, brüler la totalité de ces ordures.
Un rapport de M. le D' A. Rochaix (Lyon) mettait au
point la question de l'épuration des eaur destinées à
l'alimentation publique. Les divers procédés d'épura-
tion y étaient exposés avec les résultats fournis par cha-
cun d'eux. Le rapporteur concluait que les filtres ne
donnent pas une épuration complète au point de vue
bactérien. Actuellement, seuls, deux procédés, lozo-
nisation et la stérilisation par les rayons ultra-violets
après préfiltration, permettent, dansla majorité des cas,
d'obtenir une épuration absolue et de fournir aux
agglomérations urbaines une eau potable irréprochable.
Sur la demande du D' Buffon, adjoint au maire de
Nice, et après discussion, la Section établit ainsi la
définition du mot clarifié appliqué à une eau d’ali-
mentation: « C’est une eau qui permet la lecture des
caractères d'imprimerie par vision opérée à travers
un tube contenant une largeur de cinq mètres d'eau
à observer. »
M. Gacor décrit une installation transportable de
stérilisation des eaux par les rayons ultra-violets qui
fonctionne depuis plus d’un an à l'hôpital d'Oudjda.
L'eau est utilisée comme boisson, sert à la préparation
des polions et au lavage aseptique des mains des chi-
rurgiens et au pansement des blessés et opérés. L'ap-
plication du procédé est d’ailleurs possible aux navires
en adoptant une suspension à la cardan et en ne fai-
sant pas fonctionner la lampe sur un courant inférieur
COSMOS
697
à 110 volts. La quantité de rayons émis par la lampe
étant proportionnelle à la température, il y a donc
intérét à ne pas immerger ni refroidir la lampe.
M. Le Covprey be La Fonest rapporte la troisieme
question mise à l’ordre du jour de la Section : Epura-
hon des eaux d'éqoult: la solution de la question ne
lui parait pas encore mème entrevue dans le lointain.
M.de Moxrricuen fait une communication sur la S{a/ion
d'épuration des euur degout d'Arr-en-Prorenre, Le
svstème comprend quatre échelons: 1° élimination
des sables et matières lourdes; 2 décantation du se-
vage frais et dissociation des matières organiques;
3" oxvdation de l'efluent sur lits percolateurs à
sprinkler: 4° décantation finale.
M. AureEGélo (Lyon) continue ses travaux relatifs à
l'alimentation carnée des populations rurales el des
soldats en garnison, en manϾurres el en Campagne.
M. le D' Avriex Loin traite la question du luit von-
densé et de la diarrhée d'eté. Le lait condensé ne
contient, en plus du lait ordinaire, que du sucre: il
n'offre que dés avantages pour l'alimentation des
enfants du premier àge: il donne le moyen d'avoir du
lait propre: ces deux éléments, lait condensé et diar-
rhée d'éte, sont inséparables,
M. ÉuiLe Cacuerx étudie les Bureau.r allemands de
constructions relatives aur logements. Ces Baubera-
tungstelle examinent les plans de maisons à construire
et indiquent les modifications qu'il y aurait lieu d'y
apporter concernant l'aspect extérieur. la distribution
des logements, les appareils de chauffage et d'assai-
nissement, l'économie à apporter dans les construc-
tions.
M. A. Avcikre (Nimes) indique les moyens de reme-
dier aux inconvénients de Uair cicièé dans les locauwr
d'habitation et de reunion par des aérateurs et des
aspirateurs électriques disposés au-dessous des lustres
et correspondant à des cheminées centrales d'évacua-
tion d'air allant du plafond de la salle au-dessus de
la toiture.
M. Auuab Precu. — Filtration des grands rolumes
d'eau. Ce mémoire peut se résumer par lapprécia-
tion de M. Imbeaux à propos du systéme qu'il préco-
nise : « Faire durer les filtres fins le plus longtemps
possible, et cela en préfiltrant, en dégrossissant l'eau
autant que faire se peut en avant d'eux; c'est là tout
le secret. »
E. Héuicuanb.
mI ‘Iiii
BIBLIOGRAPHIE
Traité de chimie générale, par W. NeryNsr, pro-
fesseur à l’Université et directeur de l'Institut
de chimie physique de l'Université de Berlin.
Ouvrage traduit sur la 6° édition allemande par
A. Convisy. Deuxième partie : Transformations
de la matière et de l'énergie. Un vol. grand in-8°
de 422 pages (10 fr). Librairie scientifique
A. Hermann, 6, rue de la Sorbonne, Paris, 4912.
En somme, l'ouvrage tout entier, je veux parler
de ce deuxième tome de la Chimie generale, est
une théorie de l’aflinité chimique, dont le but final
est de ramener à des actions physiques bien étu-
diées toutes les causes qui agissent dans les trans-
formations de la matière. Les philosophes grecs
ont parlé de l'amour et de la haine des atomes
comme causes des changements matériels: et
698
depuis leur époque lointaine, la question de la
nature des forces chimiques n’a guère progressé
que lorsqu'on abandonna les pourquoi pour exa-
miner les comment ; les chimistes, renonçant pro-
visoirement à la question de l'essence des forces
qui agissent dans les transformations chimiques,
se sont attachés à déterminer les modes d'action
de ces forces et particulièrement leur dépendance
des conditions extérieures, telles que le rapport
des masses, la pression, la température. La magni-
fique floraison actuelle de la chimie physique in-
dique que la nouvelle voie était bien choisie.
Le livre HI (les transformations de la matière)
comprend la statique chimique et la cinélique chi-
mique, c'est-à-dire l'étude de l'équilibre des sys-
tèmes réagissants et celle de la vitesse de réaction.
Toutes ces notions ont été vivement éclairées par
la loi de l’action des masses, qui trouve en ce
chapitre de la chimie physique des applications
conlinuelles. Guldberg et Waage, deux savants
norvégiens, ont la première fois formulé complète-
ment cette loi remarquable dans un mémoire qui,
pour le rappeler en passant, fut adressé en 1864
à l'abbé Moigno et publié dans les Mondes (t. V,
p. 407 et p. 627). Ces deux savants s'inspiraient de
l'hypothèse que l’état d'équilibre de la matière ne
doit pasèlre considéré comme statique, maiscomme
dynamique. Ainsi, un récipient contenant de l’eau
liquide surmontée de sa vapeur, à une ternpéralure
constante, semble n'être le siège d'aucune varia-
tion, or, l'équilibre que l’on observe là entre l’eau
et la vapeur ne doit pas ètre envisagé comme ré-
sultant de l'absence de vaporisation de l’eau liquide
et de lu liquéfaction de l'eau gazeuse ; au contraire,
ces deux phénomènes se produisent de facon inin-
terrompue, et si l'équilibre existe pourtant, c'est
qu'à un moment quelconque il y a autant de molé-
cules d’eau qui traversent une portion donnée de
la surface liquide dans les deux directions oppo-
sées. Voilà un cas d’équilibre physique. De même
si une réaction chimique est arrivée à l’état d'équi-
libre, ce n'est pas que toute transformation ait
cessé, mais il se produit généralement deux trans-
formations inverses, et létat d'équilibre est carac-
térisé là aussi par le fait qu'à chaque instant la
quantité de matière qui subit l'une des transfor-
mations est égale à celle qui subit la transforma-
tion opposée (équilibre des réactions réversibles).
C'est ce qui arrive si l'on mélange soit de l'alcool
et de l'acide acélique, soit de léther (acétate
d'éthyle) et de l’eau; si l’on a employé l'alcool et
l'acide acetique, ces deux substances réagissent
pour former de Péther et de l'eau; si l'on a em-
ployé l'éther et l’eau, ces deux substances, inver-
sement, produisent de l'alcool et de l'acide acé-
tique. Dans les deux cas, la réaction est incom-
plrle, c'est-à-dire qu'elle ne va pas jusqu'à la trans-
formalion totale des constituants qu'on a mis en
COSMOS
19 DÉCEMBRE 1912
présence, elle s'arrête auparavant et il s'établit un
état d'équilibre dans lequel les quatre substances
restent en présence. Mais les proportions finales
dépendent des masses actives, autrement dit des
concentrations initiales, des composants réagis-
sants. La loi de Guldberg et Waage fait ainsi faci-
lement connaitre comment l’état d'équilibre varie
avec le rapport quantitatif des composants réagis-
sants (statique chimique) et, en outre, la vitesse
avec laquelle le système s'approche de cet état
(cinétique chimique).
Par contre, cette loi de l'action des masses ne
nous dit rien de l'influence de la température; les
lois qui régissent l'influence de la chaleur et aussi
l'influence des autres formes d'énergie : électricité,
lumière sur les réactions chimiques, remplissent le
livre IV (les transformations de l'énergie). Nous
abordons donc trois chapitres importants de chimie
physique, à savoir : la thermochimie, l'électrochimie
(piles et accumulateurs), la photochimie. Le pre-
mier est de beaucoup le plus étendu. Il fournit
l’occasion d'étudier, à la lumière de la thermodyÿna-
mique, le cas général de l'équilibre chimique et
des vitesses de réaction, cette fois en faisant inter-
venir l'action de la température (explosions et
inflammations ; propagation de la combustion dans
les mélanges gazeux). On sait que Berthelot, en
déterminant les quantilés de chaleur dégagées et
absorbées par les réactions chimiques el en éta-
blissant le principe du travail maximum, avait eu
tout d'abord la prétention de prévoir le sens des
réactions chimiques et de mesurer l’affinité des
corps ; suivant lui, toute transformation chimique
devrait donner naissance aux substances dont la
formation dégage le plus de chaleur. Berthelot a
bientôt reconnu l'insuffisance de son principe, et il
a cherché à le corriger, mais sans parvenir à l'éta-
blir sur une base solide, car ce principe est con-
traire, en sa généralité, aux principes bien établis
de la thermodynamique, et il ne peut guère servir
que de règle empirique dans un nombre limité de
cas. Par contre, M. Nernst expose brièvement un
nouveau théorème de thermodynamique qu'il a fait
connaitre en 1906 et qui permet de calculer les
équilibres chimiques d’après les données ther-
miques; c'est-à-dire qu'ainsi se trouve résolu le
problème que Berthelot avait cherché à résoudre
par son principe du travail maximum. Le théorème
de Nernst est rapidement devenu classique.
L'ouvrage de Nernst est aisément abordable, en
son ensemble, à tout lecteur possédant les no-
tions élémentaires du calcul différentiel et inté-
gral.
Konstant auftretende secundære Maxima und
Minima in den jæhrlichen Verlauf der me-
teorologischen Erscheinungen, von D" vAN
RUCKEVORSEL, Sixième et septième parties. In-40
No 1450
de 23 et 39 pages. W. J. van Hengel, Rotterdam,
1912.
L'auteur poursuit minutieusement ses enquites
pour dégager certains « maxima et minima secon-
daires qui reviennent constamment dans le cours
annuel des phénomènes météorologiques ». Il met
en regard les courbes annuelles moyennes des
taches solaires, de la température en certaines
localités, de la variation du magnétisme terrestre,
enfin de la mortalité en des localités déterminées,
de la pression atmosphérique et des hauteurs de
précipitations. La période qui mesure un douzième
de l’année se rencontre plus fréquemment que les
autres.
Le blé, par MM. FRaxro1s et Pierre RBERTHAULT. Un
vol. in-18 de 164 pages, avec 93 gravures (1,50 fr).
Librairie de la Maison Rustique, 26, rue Jacob,
Paris.
Le blé, matière de première nécessité et dont la
culture est si considérable en France, a besoin d’être
bien connu de tous les agriculteurs. Le livre de
MM. Berthault père et fils a été écrit à leur intention.
Les auteurs exposent d'abord l'importance de la
culture du blé et son historique, les caractères
botaniques de la plante, les phases de son déve-
loppement et les conditions climatiques qu'elle
exige; ils passent en revue les principales variétés
cullivées aujourd'hui, et abordent ensuite ce qui
se rapporte à la culture : le terrain, les exigences
du blé en principes fertilisants, sa place dans l'as-
solement, le choix à faire entre les variétés sui-
vant les circonstances. Des chapitres spéciaux sont
consacrés au choix et à la préparation des semences,
aux semailles, aux soins d'entretien pendant la
végétation, aux méthodes de récolte, au rendement
en grain et en paille. Le livre se termine par
l'examen des maladies qui peuvent atteindre le
blé et des parasiles qui l’aitaquent aux différentes
phases de son existence.
Ce livre constiluera le meilleur guide en vue de
l'accroissement des rendements dont on doit se
préoccuper de plus en plus.
Zigzags au pays de la science, par A. ACLOQUE.
Un vol. gr. in-8° (27 X 18) de 360 pages, avec
illustrations (broché, 2.50 fr: cartonné, 3,25 fr),
4912. Tours, maison A. Mame et fils.
La science est un champ immense; M. Acloque,
en sy promenant en zigzag, se serait exposé à ne
recueillir que des observations bien incomplètes sur
chaque sujet, et, en changeant à chaque instant de
sujet, à ne nous donner qu'une sorte de pot pourri.
Sa sagesse a évité ce danger. Comme tout bon
cultivateur, il a divisé son cha:mp de la science en
nombreux compartiments, chacun consacré à une
COSMOS
699
culture différente. Dans ce premier volume, il ne
s'occupe que de quelques-unes de ces parties, mais
il promet de compléter son œuvre, et la suite sera
attendue avec impatience à raison de l'intérêt
que l'auteur a su donner à ce début.
La plus grande partie du volume est consacrée
à l'entomologie; c'est du Fabre du meilleur cru;
de nombreuses pages s'occupent de botanique.
Mais l'auteur ne s’est pas borné à ces branches,
sujets favoris de ses éludes, qu'il a traitées avec
toute la maitrise que son savoir pouvait y apporter;
la météorologie, l’astronomie ne sont pas oubliées;
le lecteur est même transporté par le pouvoir
des fées dans le monde de l'automobilisme et de
l'aviation, mais, hélas! avec une rapidité décon-
certante.
Quoi qu'il en soit, l’ouvrage est agréable, instruc-
tif et bien fait pour inspirer aux jeunes gens le
goût des sciences naturelles. Le texte, vif et alerte,
est accompagné de nombreuses illustrations.
Celles dues au crayon de M. Acloque sont impec-
cables et ne laissent rien à désirer; mais celles
choisies par l'éditeur sont trop souvent la repro-
duction d'anciennes gravures faites à une époque
où les dessinateurs ne se piquaient guère d’exacti-
tude en malière scientifique, et dans un si beau
livre, si réussi à d'autres points de vue, cela choque
un peu.
Aéro-Manuel 14912-41913. Repertoire sportif,
technique et commercial de l'aéronautique, par
Cu. Faroux, ingénieur, ancien élève de l'Ecole
polytechnique, rédacteur en chefde la Vie aulo-
mobile. Un vol. in-8° de 758 pages avec gravures
(2° édition) (10 fr). Librairie Dunod et Pinat,
Paris, 1912.
Cet ouvrage a été publié pour la première fois
en 1911.
Son auteur s'est efforcé de présenter, dans un
cadre clair et pratique, un ensemble coordonné de
documents et de renseignements relatifs au sport,
à la construction et à l'industrie aéronautiques, et
qu'il est utile d'avoir sous la main, si l’on s'inté-
resse, à quelque titre que ce soit, à la locomotion
nouvelle.
La seconde édition est tenue très au courant du
progrès de cette branche spéciale. Certaines parties
de l'ouvrage n'ont pas changé, par exemple, le
dictionnaire des termes employés en aéronautique
et en avialion. Mais la liste des pilotes brevetés,
des records établis, tant français qu'élrangers, est
complétée, et celle qui donne le nom et l'adresse
des industriels spécialisés dans la construction des
appareils plus légers et plus lourds que l'air a été
complètement refondue et mise au point. Les
renseignements fournis s'étendent jusqu'à sep-
tembre 1912.
100
COSMOS
19 DÉCEMBRE 19412
FORMULAIRE
Pour enlever les bouchons collés. — Les
bouchons des bouteilles contenant un liquide
sirupeux collent assez souvent à l’intérieur du
goulot, et se cassent quand on veut les retirer.
Pour les décoller, il suffit de les enfoncer d’abord
légèrement. Ils se retirent alors sans difficulté.
PETITE CORRESPONDANCE
Adresses :
Le porte-copie « le flexible » se trouve chez M. P. Scou-
bart, 60, rue du Faubourg-Saint-Denis, Paris.
M. M. T., à A. — Ces pages de couverture ne nous
appartiennent pas, et nous ne croyons pas que votre
désir soit possible à réaliser.
M. L. D., à St-E-la-T. — Dans ces articles sur la
télégraphie sans fil, le D' Corret ne conseille pas de
faire les bobines d'accord en fil isolé au coton, mais
en fil émaillé. De sorte que votre observation, très
juste, d’ailleurs, n’était pas indispensable. On peut
aussi employer, pour maintenir les fils isolés au coton,
la colle au celluloïd indiquée dans le numéro 1452,
p. 570. — Pour ce recueil du Bureau international de
Berne, voir ici mème la réponse à M. A. M., à E.
M.A.D.,à F.—Iln'y a pas moyen d'insérer d'aver-
tisseur dans le circuit. — Les spires dénudées suivant
une génératrice sont encore isolées quand on a soin
de ne dénuder que la surface. Ceci, pour les bobines
en fil émaillé. Pour les bobines faites en fil isolé au
coton, il faut, avant ae dénuder, vernir les spires, soit
avec le vernis au celluloïd (voir Cosmos, p. 570), soit
avec du bitume de Judée dissous dans le benzol. Mais,
le système que vous employez (dénudage d’une spire
sur deux) est aussi très bon.
M. A. P., au H. — Avec quatre fils de 7 mètres,
placés à 1 mètre de distance les uns au-dessus des
autres, vous entendrez certainement la tour Eittel. —
Pour la construction des bobines d'accord, voyez la
réponse ci-dessus. Il vaut mieux serrer les spires les
unes contre les autres. Pour le montage, voir les
articles parus ici même ou attendez la brochure que
nous vous enverrons dès qu'elle sera prète.
M. C. R.,àa C. — Au sujet de la lampe à incahdes-
cence qui parle (Cosimos, ne 1450), si vous voulez des
renseignements plus étendus, il faut vous reporter à
la livraison du 15 juin de Physikalische Zeitschrift
(Steinsgraben, Si, à Gattingue). — Vous avez fortui-
tement réalisé un condensateur chantant: sur la
théorie et la réalisation du condensateur parlant, voir
Cosmas, t. LXIL, ne 1307, p. 172 (appareil des mèmes
auteurs Ort et Rieger), et antérieurement Cosmos,
t. LV n° 116$, p. 553, no 1165, p. 983; n° 11fx,
p. 600.
M. J. P., à N. — Nous vous remercions des observa-
tions que vous nous envoyez; nous communiguons
votre lettre à l'auteur.
M. A. de la S., à P. — Vous pouvez parfaitement
construire une bobine d'accord avec dutil de 0,2 mm:
il faudra environ une cinquantaine de mètres. Naturel-
lement le til doit étre isolé, Une seule bobine sutira,
avec Ja longueur d'antenne indiquée.
R. F. B., à St-G. (Indes anglaises). — Oui, la bande
est nécessaire pour obtenir ici une réponse. — Nous
pensons vous donner satisfaction l'an prochain pour
une table bibliograhpique. — Les chambres à air
interrompues Simplex sont fabriquées par la maison
Michelin, à Clermont-Ferrand. — Za construction
moderne, hebdomadaire, 13, rue Bonaparte: étranger,
35 francs par an (abonnement partant du 4" avril ou
du i” octobre}. — Merci pour les renseignemeuts sur
les termites; nous les utiliserons.
M. A. M., à E. — Cet ouvrage est publié par le
« Bureau international de l’Union télégraphique » de
Berne. Il est d’ailleurs épuisé en ce moment, mais va
être réédité. C'est à cette adresse qu'il faut vous ren-
seigner. — Il n’est pas possible, avec le bulletiu météo-
rologique envoyé par la tour Eiffel, de faire la prévision
scientifique du temps. I est loin d'être assez complet
pour cela.
M. G. de L., à L. — Reliures mobiles: Frank,
4, rue de l'Échiquier; Terquem, 31 bis, boulevard
Haussmann, à Paris.
M. B. M., à B. — Le fil émaillé est du fil de cuivre
recouvert d'un vernis émail au four, comme les cadres
de bicyclettes. — Les tubes d’oxygène comprimé
peuvent parfaitement éclater. Reportez-vous au Cosmos
(n° 1178, 24 aoùt 1907, p. 219).
M. J. H. S., à P. — Vous pouvez construire facile-
ment une bobine d’accord pour percevoir les signaux
de Clifden et de Coltano. Il suffit d'augmenter la lon-
gueur du fil de la bobine. Pour Coltano, la self doit
ètre un peu plus du double de celle de la tour
Eiffel. Clifden est en deçà. — Le fil fin a l'inconvé-
nient d'offrir plus de résistance; mais il donne une
self plus grande; il en faut par suite une plus faible
longueur. Il y a avantage à bobiner en spires de
grand diamètre, les spires se touchant autant que pos-
Sible, si on cherche l'économie et le faible encombre-
ment. L'article du numéro 4451, p. 544, indique les
dimensions des feuilles de condensateur. — Le bruit
que vous entendez doit provenir de l'électrode posi-
tive å fil de platine. Frottez-en légċèrement l'extrémité
sur une feuille de papier émeri fin. — La brochure
reproduira les articles du Cosmos. Jusqu'ici, nous
n'avons rien vu de similaire au point de vue pratique.
Pour la nomenclature publiée à Berne, voir réponse
donnée plus haut à M. A. M., à E. — Nous croyons
que le dispositif de détecteur électrolytique dont vous
parlez a déjà été essayé.
Imprimerie P. F&ron-Vaau. 3 ct 5, rue Bayard, Paris. VIN’.
Le gérant: A. FarvLe.
No 4457 — 26 DÉCEMBRE 1912
COSMOS
704
SOMMAIRE
Tour du monde. — Une remarquable pluie de météorites. Fortes pluies dans le Norfolk. Les hivers doux.
Que signifie la griffe de Saint-Hubert? Les besoins en albumine des jeunes animaux. La téléphonie dans
les mines. Les perturbations électriques de l'atmosphère et la télégraphie sans fil. Production directe du
gaz dans les houillères. A propos d'un procédé de clarification des eaux. Les tansports frigorifiques en
France. Altitude atteinte par un ballon-sonde. De Tunisie en Sicile en aéroplane. Notre brochure. Le carat
décimal, p. 701.
Un chemin de fer minier aérien, BELLET, p. 706. — Le rôle magnétique dəs océans etla constitution
de l’écorce terrestre, A. BERGET, p. 708. — Le laboratoire d’une sucrerie, Rovsser, p. 709. — La
configuration générale des chaînes de montagnes, Novon, p. 711. — Les fourrures modernes et
leur préparation, J. Boyer, p. 712. — La crampe des télégraphistes, Fovaxier, p. 716. — Le nouveau
bateau-feu du Havre {suite}, P. Guinez, p. 718. — Les nymphes de la baie de Shima, L. Kuenrz,
p. 720. — Sociétés savantes : Académie des sciences : séance solennelle, p. 721. — Bibliographie, p.721.
TOUR DU MONDE
ASTRONOMIE
Une remarquable pluie de météorites. —
Elle est survenue le 49 juillet près de Holbrook,
comté de Navajo, Arizona: un bolide passa sur la
localité à 18"30™, avec un bruit énorme qui se pro-
longea une demi-minule au moins. On vit des
pierres tomber en grand nombre près Aztec, soule-
vant le sable du désert; dans la suite, les gens de
l'endroit en recueillirent une quantité, qui ont été
examinées par M. W.-M. Foote (Vature, 12 déc.).
Le morceau le plus gros pèse plus de 6 kilo-
grammes; plusieurs de 2 kilogrammes ont été
ramassés sur une aire allongée de 5 kilomètres de
long sur 4 kilomètre de large. L'analyse témoigne
qu’on se trouve en présence d’une météorite consti-
tuée par : fer-nickel, 3,68 ; silice, 96,32.
Les 14000 morceaux recueillis pèsent en tout
220 kilogrammes ; ce nombre se décompose en :
29 pierres pesant individuellement de 6665 à
4 020 grammes; 6000 pierres pesant de 4000 à
4 gramme et 8 000 pierres pesant moinsde { gramme.
MÉTÉOROLOGIE
Fortes pluies dans le Norfolk. (Annuaire de
la Soc. météorol. de France, aoùt-septembre 4912).
— Des pluies exceptionnellement abondantes sont
tombées le 26 et le 27 aoùt 4942 dans le comté de
Norfolk. A Norwich, on a recueilli, en vingt-quatre
heures, 487 millimètres d'eau. Cette quantité n'a
été dépassée que deux fois en Angleterre depuis
41860 : le 12 novembre 1897, à Seathwaite, 204 mil-
limètres, et le 6 février 4894, au Ben Nevès,
497 millimètres. D’après la carte pluviométrique
que les premières observations ont permis de tra-
cer, Symons Meteorological Magazine évalue à
4 300 kilomètres carrés la surface sur laquelle la
tranche d’eau a atteint ou dépassé 150 millimètres.
T. LXVII. N° 1457.
Pour le comté de Norfolk, dont la superficie est de
8$ 300 kilomètres carrés environ, la hauteur moyenne
de pluie atteint 124 millimètres, ce qui correspond
à un total de 600 millions de mètres cubes d’eau.
Naturellement, cette énorme masse d’eau, tom-
bant dans une région où les pluies torrentielles
sont rares et sur un sol dont le relief est peu
accusé, ont causé des dégâts importants; plusieurs
personnes ont péri.
La carte synoptique du 26 août à 7 heures du
matin montre une dépression barométrique cou-
vrant le sud de l'Angleterre (742 millimètres). La
dépression se déplace lentement vers le Nord en se
creusant; à 6 heures du soir, le baromètre des-
cend à 736 millimètres à Norwich. La direction de
la trajectoire s'infléchit vers la droite quelques
heures plus tard, et, le 27 au matin, le centre de la
dépression se trouve près de l’ile d'Helgoland.
Dans les régions tropicales, et même parfois
dans les pays de climat tempéré, on a noté des
valeurs de la pluie encore plus exceptionnelles.
(Les grandes pluies, Cosmos, t. LVII, p. 643.)
Les hivers doux (l. Assapa, la Géographie,
15 novembre). — Le professeur Hellmann a étudié
dans Das Wetter, au point de vue de la lempéra-
ture et de la pluviosité, les hivers de Berlin de
1720 à 1898. Il en compte quarante-luril doux, c'est-
à-dire pour lesquels la somme des anomalies ther-
miques positives des deux mois de decembre et de
janvier dépasse ? degrés. Voici les conclusions de
celte étude, intéressant les périodes climatiques.
4° Les hivers doux n'apparaissent jamais isolés,
mais plutòt par groupes, et cela d'autant plus net-
tement qu'il s’est écoulé une période un peu longue
sans amener d'hiver doux.
2° Les plus grands intervalles entre ces groupes
ont été, en cent soixante-dix-huit ans, six fois de
dix ans ou plus : moyenne, {1,7 années. Pour diverses
raisons, il ne faut pas assimiler celle période à la
période undécennale des taches solaires ;
3° Les hivers doux sont généralement de longue
durée. Souvent l’anomalie positive se manifeste
déjà en novembre et se continue jusqu’en février
et souvent mème jusqu’en mars. On peut parier
19 contre 21 qu'après un hiver doux février aura
aussi une moyenne élevée. Les périodes de froid
tardif (février et mars) après un hiver doux sont
exceptionnelles : 8 fois sur 178;
4 Dans les hivers doux, l’anomalie thermique
positive est ordinairement maximum en janvier;
Ə Les hivers doux sont généralement humides.
ZOOTECHNIE
Que signifie la griffe de Saint-Hubert? —
Normalement, le chien porte, aux membres anté-
rieurs, cinq doigts dont un pouce très réduit qui
n'arrive pas au contact du sol, et, aux membres
postérieurs, quatre orteils seulement, le pouce
ayant disparu. Mais certains individus, et notam-
ment la plupart de ceux qui appartiennent à la
race de Brie, ont à ce niveau un ergot, simple ou
double, la griffe de Saint-Hubert des cynologues.
Un grand nombre de chasseurs et d'éleveurs con-
sidérent cet ergot comme un signe caractéristique
d’une race spéciale, et, à l'appui de leur opinion,
ils rappellent son existence régulière dans la
descendance des animaux qui l'ont possédé; mais
celte thèse n’est pas universellement admise.
M. Boucher, professeur de zootechnie à l’école
vétérinaire de Lyon, estime au contraire qu'il a
seulement un caractère acquis, susceptible d'appa-
raitre dans toutes les races, mais dépourvu de
toute signification spéciale. D'après lui, la griffe de
Saint-Hubert est tout simplement un accident;
anatomiquement, elle est la phalange ordinaire-
ment absente du gros orteil rudimentaire, qui se
développe pour des causes quelconques et dont
l'extrémilé libre se dédouble parfois, donnant le
double ergot. Elle n'est donc qu'une anomalie qui,
à l'égal de toutes les tares, se transmet fidèlement
dans la descendance: elle ne marque, en lous cas,
aucune espèce de supériorité.
Du resle, l’ergol joue le ròle dun véritable
harpon, accrochant au passage les ronces, les
éteules, les herbes coupantes, et causant au chien
des douleurs souvent fort aiguës. Les bergers
briards, chez lesjuels il est presque constant, lui
doivent des souffrances trés vives. Il est donc sage
de condamner délinitivement la grilfe de Saint-
Hubert, et pour cela d'écarter systématiquement
de la reproduction les ehiens qui la possèdent.
Les besoins en albumine de jeunes animaux.
— Ün a souvent inédit de ce que les agronomes
appellent des « normes alimentaires », c'est-à-dire
des régles formulées une fois pour toutes au sujet
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1949
de la quantité d’aliments dont les animaux ont
besoin. Nombre d’éleveurs se figurent que le maxi-
mum d'effet ne peut être obtenu sans une alimen-
talion maximum, et ils nourrissent leurs animaux
jusqu’à refus. Outre les troubles digestifs dont une
semblable pratique peut déterminer l'apparition,
ils provoquent ainsi chez leurs élèves une ten-
dance à la graisse qui diminue leur aptitude au
travail et produit, s’il s’agit de reproducteurs, une
dégénérescence fâcheuse de leurs organes les plus
essentiels. Il est infiniment plus rationnel et plus
sage de surveiller les animaux au moyen de la
bascule, et d'augmenter ou de diminuer les rations
suivant les indications qu’elle fournit.
En ce qui concerne les bovidés en état de crois-
sance, des essais ont été poursuivis pendant plu-
sieurs années à la station de Hohenheim, par
M. G. Fingerling, dans le but de vérifier si les
normes d'affouragement proposées par Kellner
doivent ou ne doivent pas être modifiées. Des
bouvillons Agés de quatre à cinq mois au début des
expériences et un bœuf de sept mois, tous de race
précoce, ont reçu à cet effet des doses variables.
Il a été reconnu qu'avec 1,5 kg d’albumines par
4 000 kilogrammes de poids vif et par jour, on
obtient une assimilalion sensiblement égale à celle
qui correspond à des quantités plus élevées, à la
condilion toutefois de faire figurer dans la ration
une quantité suffisante de fécule ou d'amidon.
Pour les bovidés en état de croissance, on ne
saarait donc réduire sans inconvénient les doses de
matières amylacées indiquées par les normes de
Kellner, et, celte condition étant remplie, il n°y a
aucun avantage à forcer la dose d'albumine, car
on fait augmenter seulement la désassimilation
d’azole, sans accroitre la quantité d’albumines
fixée dans l'organisme, tout en augmentant la
dépense matérielle, ce qui est loin d'être un
avantage. Francis MARRE.
TÉLÉGRAPHIE ET TÉLÉPHONIE
La téléphonie dans les mines. — L'Écho
des Mines décrit, d'après Zeits. des Ver. deutsch.
Ingen.,le procédé employé aux mines de Caroli-
nengluck, près Bochum (Prusse rhénane), pour trans-
mettre des signaux téléphoniques sans aucun
conducteur spécial entre divers postes de la mine
et le poste du directeur des travaux installé au jour.
Il consiste à utiliser comme conducteurs les con-
duites, les rails, etc., de la mine et à lancer dans
ces conducteurs des courants alternatifsde haute fré-
quence, au moyen d'un poste de téléphonie sans fil.
L'installalion, qui est alimentée par une petite
batterie d'accumulateurs, comprend, outre ses
postes transmetteur ct récepteurs, un dispositif
d'appel. Le courant alternatif à basse tension et à
haute fréquence passe directement par le mi-
crophone du poste transmetteur; se tension est
N° 1457
ensuite élevée jusqu'à la valeur nécessaire à la
transmission des signaux par une bobine d’induc-
tion. La distance de transmission atteint 1,7km avec
un courant primaire de 0,5 ampère, sous une tension
de 142 volts aux bornes de la batterie.
Les perturbations électriques de l’atmo-
sphère et la télégraphie sans fil. — On sait que
de pareilles perturbations sont très accentuées
dans les pays tropicaux et qu’elles sont aussi très
fréquentes dans nos régions en été, ainsi que dans
le voisinage des montagnes; par contre, en haute
mer, elles-paraissent être moindres. Elles pro-
duisent dans le téléphone récepteur tantot des cra-
quements, tantôt des sifflements, tantôt des bouil-
lonnements et toutes sortes de bruits, en particulier
le bruit connu sous le nom de friture. A cause de
tous ces bruits parasites, la réception normale des
dépêches est parfois malaisée, ou même complète-
ment empêchée. L'emploi de la syntonie aiguë
entre les postes ainsi que l’utilisation des émis-
sions chantantes (à haute fréquence d’étincelles)
et des dispositifs spéciaux de montage permettent
d'obvier dans une mesure à ces ennuis.
M. Mosler (Elektrotechnische Zeitschrift,
31 oct.; Lumière électrique T déc.) a entrepris,
d'août 1911 à la fin de juillet 4912, une série
d'essais dans le but d'observer les perturbations
perceptibles dans le téléphone récepteur aux diffé-
rentes époques de l'année. La station installée dans
ce but comportait une antenne à 6 fils de 18 mètres
de hauteur.
Sous le rapport des saisons, les perturbations
sont très rares pendant l'hiver, de novembre à
mars; puis leur fréquence croit d'avril jusqu’en
août, pour diminuer ensuite.
Chaque jour, on observe généralement un mini-
mum aux heures matinales.
Si des nuages orageux se trouvent au-dessus de
l'antenne, la fréquence des perturbations croit,
pour reprendre sa valeur normale après l’éloigne-
ment des nuages. Cependant, dans les journées très
chaudes, même en l'absence de nuages, la fré-
quence des perturbations peut être relativement
grande; mais les variations de fréquence sont
moins brusques et moins changeantes que les jours
de nuages orageux. D'une manière générale,
M. Mosler put établir que la fréquence des pertur-
bations varie, toutes choses égales d’ailleurs, dans
le même rapport que le potentiel électrique de
l’atmosphère ; elles sont dues à des phénomènes
d'influence électrostatique et se manifestent au
moment où les charges électriques de l'atmosphère
viennent à s’égaliser brusquement, quoique en
l'absence de tout éclair visible.
Les éclairs, eux aussi bien entendu, produisent
des sons dans les téléphones récepteurs, bruits
bien caractérisés qui se distinguent nettement des
bourdonnements et des craquements dus aux
COSMOS 703
décharges atmosphériques invisibles mentionnées
plus haut. Mais la portée des ondes électro-magné-
tiques engendrées par les éclairs n'est pas très
grande, étant donnés leur faible durée et leur rapide
amortissement. Ainsi, le 23 mars 1942, quoique
un orage eut éclaté à 200 kilomètres seulement,
M. Mosler n'observa pas de perturbations intenses
ni fréquentes. L'intensité des bruits parasites dus
aux éclairs va en décroissant rapidement avec la
distance; aussi est-il aisé de se rendre compte que
l'orage va en se rapprochant ou, inversement, en
s'éloignant.
La grèle et la neige, en touchant les antennes, y
abandonnent des charges électriques. Cet effet,
comme généralement celui des autres causes per-
turbatrices, est surtout sensible sur les antennes
très développées en hauteur et en surface. Les
antennes terrestres (par exemple celle que M. Mos-
ler établit au moyen de 2 fils de 150 mètres posés
par terre sur un champ sec) sont peu sensibles
aux perturbations : par temps assez couvert avec
tendance à l’orage, l’auteur compte 24 perturba-
tions par minute sur son antenne aérienne de
18 mètres de hauteur, mentionnée ci-dessus, et
47 seulement sur l’antenne terrestre.
La fréquence des perturbations croit nettement
avec la longueur d'ondes de l'antenne réceptrice,
à peu près dans les rapporls suivants:
LONGUEURS D'ONDES. FRÉQUENCES RELATIVES
MÈTRES, des perturbations.
5100 4
1 900 10
2 000 16
3 000 19
INDUSTRIE
Production directe du gaz dans les houil-
lères (Bulletin de la Sorivté des ingénieurs civils,
octobre 4912). — A la récente exposition relative
à la prévention de la fumée, tenue à Agricultural-
Hall, à Londres, sir William Ramsay, le savant si
renommé, fit connaitre pour la première fois ses
idées sur la production directe du gaz aux houil-
lères. Ces idées sont, comme on verra, bien hardies
et, n'était la réputation universelle de leur auteur,
pourraient passer pour une pure rèverte.
Sir William a une longue habitude de la mani-
pulation des gaz sur la plus pelite comme la plus
grande échelle, rien n'est plus facile que cette
manipulation; le gaz révèle toujours sa présence
et peut ètre conduit par des tuyaux appropriés où
on veut et en telle quantité qu'on le désire.
On sait que pour l'exploitation des mines de sel
gemmae, on envoie sous terre de l'eau qui dissout la
roche saline et qu'on ramène à la surface sous forme
de saumure; il ne parait ètre donc pas diflicile de
décomposer le charbon souterrain et d'en faire du
gaz qu'on aménera à la surface pour l'utiliser de la
70%
manière convenable pour le chauffage, l'éclairage
ou la force motrice. Pourquoi, au lieu d'amener à
grands frais le charbon aux cornues et aux fours
placés loin des mines, ne mettrait-on pas ces appa-
reils au fond des houillères, ou plutôt ne ferait-on pas
de ces houillères de vastes appareils de distillation?
Le gaz ainsi produit pourrait, par exemple, être
employé dans des moteurs qui sont les producteurs
de force les plus économiques qui existent, donnent
30 pour 400 de l'énergie contenue dans le charbon,
c'est-à-dire le double de ce que donnent les
machines à vapeur; les moteurs actionneraient
des générateurs d'électricité dont le courant serait
envoyé sous des tensions élevées à de très grandes
distances.
Sir William Ramsay ajoute qu’il aurait pris des
arrangements avec un propriétaire de charbonnage
qui le mettrait à même, à une date rapprochée,
d'entreprendre les essais nécessaires pour vérifier
la justesse de ses idées.
Les avantages à réaliser par ce procédé seraient
les suivants :
Production du courant électrique pour les che-
mins de fer et l'industrie à un prix descendant au
cinquième et peut-être au dixième du prix actuel;
Electrification générale des chemins de fer et
alimentation des usines en électricité au lieu de
charbon; |
Eclairage et chauffage domestiques à un prix
ne constituant qu'une fraction des prix actuels;
Réduction de la consommation des combustibles
qui prolongera d’une manière presque indéfinie la
durée des gisements houillers;
Suppression presque complète d’une main-
d'œuvre toujours plus ou moins dangereuse.
Dans une récente interwiew, Sir William a dit que
les essais qu'il a en vue pendant quelques mois, il
compte les exécuter sur une couche de bouille de
très faible valeur placée aussi près que possible de
la surface du sol pour réduire la dépense.
Pour atteindre cette couche, on fera un sondage
qui n'a pas besoin d'avoir plus de 0,45 m de dia-
mètre, dans lequel on descendra un tube de 0,15 m
de diamètre pour le vider d’eau; ce sondage indi-
quera la nature des diverses couches de terrain
traversés.
À l’intérieur du tube dont nous venons de parler,
on placera deux autres tubes logés lun dans
l'autre: le plus petit servira à l'extraction de l'eau,
et le plus grand à introduire de l'air, de la vapeur
ou même de faibles quantités d'eau servant à la
combustion du charbon. L'allumage se fera farile-
ment, par exemple au moyen dun fil électrique
qu’on introduira ct qu'on retirera ensuite. Rien de
tout cela ne parait présenter de sérieuses diffi-
cultés.
On pourra ainsi utiliser des gisements de char-
bon qui ne valent pas actuellement la peine d'être
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1912
exploités; on brülera le comhustible sur place au
lieu de l’extraire. On peut s'attendre à diverses
objections; les propriétaires de houillères diront,
par exemple, que cela consiste à mettre le feu eux
mines; si le charbon brüle intérieurement, le sol
s’affaissera, etc.
On peut répondre que la même chose se produit
dans les salines, l'effet est graduel et on l’accepte
tout naturellement. Il ne s'agit pas, d'ailleurs, de
supprimer les houillères, mais de les ménager
comme des réserves; d'ailleurs, il faudra toujours
du charbon; la marine en a besoin et on ne peut,
pour cette immense application, recourir quant à
présent à l'électricité produite dans les houillères.
Interrogé sur le point de savoir si les gaz pro-
duits dans ce système pourraient être utilisés
autrement que pour aclionner des moteurs à com-
bustion interne, sir William a répondu que c'était
une question de prix. On ne peut pas conduire le
gaz très loin à cause de la dépense relative aux
conduites. Si la distance est modérée, 13 kilo-
mètres par exemple, il y a intérêt à poser une
canalisation. Autrement, le plus avantageux est de
produire du courant électrique et de le distribuer.
Avec de hautes tensions, le prix pourra ètre réduit
à un centime pour l'unité qui coùte actuellement
10 centimes, et 40 s'il s'agit d'éclairage.
On pourra électrifier tous les chemins de fer à la
fois et fournir de la force à toutes les usines. Les
conséquences de cette révolution sont incalculables;
le fait qu'on pourra réduire au dixième, mettons
seulement au cinquième du prix actuel, le coût de
la force motrice, entrainera un développement
extraordinaire et un abaissement du prix de
revient.
Un autre avantage non moins important de la
conversion directe de charbon en gaz et en élec-
tricité est l'énorme économie de combustible. Sir
William Ramsay a établi dernièrement que dans
cent soixante-quinze ans les réserves de houille de
la Grande-Bretagne seront bien près d’être entière-
ment épuisées. Si on tient compte à titre de réserves
des gisements non encore exploités, réserves peut-
ètre un peu douteuses, on pourra poser comme
limite extrème le chiffre de deux cent cinquante
ans. La nouvelle méthode d'emploi du charbon
reculerait l'échéance fatale dans des limites très
étendues.
On peut dire en passant que la production à ce
prix extrèmement réduit du courant électrique
pourrait amener une révolution dans les procédés
de chauffage domestique en permettant d'employer
les tapis traversés par des conducteurs d’électri-
cité pour le chauffage des appartements.
Il serait prématuré d'émettre dès à présent un
avis sur la valeur du procédé préconisé par sir
William Ramsay, surtout s’il doit être prochaine-
ment l’objet d’un essai sur une échelle pratique.
N° 1:57
La question est évidemment du plus haut intérêt
pour tous les pays où la production de la houille
s'allie à un grand développement industriel.
A propos d’un procédé de clarification des
eaux. — On se souvient du procédé de traitement
des eaux dures et chargées de sels, appelé lumi-
nator, qui consistait à faire couler simplement les
eaux sur une plaque d'aluminium ondulée exposée
à la lumière. Nous lisons dans le Journal of the
Franklin Institute (novembre) que M. H.-B. Lake
a expérimenté le procédé dans des conditions
diverses, variant la forme de la plaque d'alumi-
nium (plaques à section en V, tubes), ainsi que les
conditions d'éclairage, en déterminant chaque fois
la dureté de l’eau, la teneur en sels solubles et
insolubles avant et après le traitement de l'eau.
L'auteur conclut que le procédé n’a point d'eftica-
cité bien marquée en ce qui concerne la purifica-
tion de l’eau.
FROID ARTIFICIEL
Les transports frigorifiques en France
(Technique moderne, 15 déc.). — En France, les
transports de denrées procurent aux chemins de
fer un trafic considérable en grande vitesse.
Une communication de M. Bougault, au Congrès
du froid de Toulouse, assigne à chacun des grands
réseaux, pour l’année 1911, le tonnage suivant :
ÉSE his ch 2 478 000 tonnes.
États seau 20 232 000
Me re care tr 139 000
NOPE eena aN 85 000
Paris-Orléans...........,.. 159 000
Paris-Lyon-Méditerranée ... 302 000
1 29, 000 ‘onnes.
Le transport en wagons frigorifiques ne repré-
sente qu'une infime partie de ce trafic. Cependant,
ce mode de transport a tendance à se développer,
et le nombre de ces wagons va en augmentant.
Actuellement, il existe en France 360 wagons
frigorifiques : 33 circulent sur le réseau de l’admi-
nistration des chemins de fer de l'Etat qui en est
propriétaire; 327 circulent sur les divers réseaux
pour le compte de Sociétés ou de particuliers.
211 wagons sont affectés aux transports des
viandes, beurres, poissons, volailles, fruits et pri-
meurs, savoir :
33 wagons appartenant aux chemins de fer de
l'Etat; le public peut demander le transport dans
ces wagons, en payant une taxe supplémentaire
(10 pour 100 du prix du transport):
478 wagons appartenant, les uns (la presque
totalité) à trois Sociétés francaises de transports
en wagons frigorifiques qui les mettent à la dispo-
sition du commerce, soit en location, soit contre
paiement d’un supplément de taxe: quelques autres
appartiennent à des expéditeurs de produits de
laiterie.
COSMOS
705
449 wagons glacières appartenant aux grandes
brasseries existant dans les départements des
Vosges, du Doubs, de Seine-et-Marne, des Bouches-
du-Rhône, sont affectés au transport des bières.
La réfrigéralion est produite par de la glace
placée dans des bacs, à l'intérieur des wagons.
25 wagons, appartenant à l’une des Sociétés en
question, sont munis d'appareils produisant le
froid à l’aide d'un gaz liquétié, dont on utilise la
chaleur latente de vaporisation; ces appareils com-
prennent: un compresseur actionné par l'essieu du
wagon à l’aide d’une courroie, un faisceau réfrigé-
rant placé dans l’intérieur du wagon et un conden-
seur supporté par le châssis, le tout fonctionnant
automatiquement.
D'après les renseignements recueillis, il semble
que l’on puisse évaluer à 8 000 ou 10 000 tonnes le
tonnage annuel approximatif des produits (laite-
rie, viandes, volailles mortes, fruits et primeurs)
transportés en wagons frigorifiques sur les grands
réseaux français.
AÉRONAUTIQUE
Altitude atteinte par un ballon-sonde. — lUn
ballon-sonde, lancé par l'Observatoire de Pavie,
s'est élevé à la hauteur de 37 000 mètres, battant
les records établis à ce jour pour ce genre d’ascen-
sion.
En effet, la plus grande hauteur atteinte jusqu'ici
par un ballon-sonde avait élé enregistrée le 41°" sep-
tembre 1910 à Huron (South Dakota); elle était de
30,4km.(Voir Cosmos, t. LAVI, n° 1411, 8 févr. 1912,
p. 141.)
De Tunisie en Sicile en aéroplane. — Mer-
credi 48 décembre, l’aviateur Garros, qui vient de
gagner le record de l'altitude en aéroplane, a quitté
Tunis vers 10 heures du matin, se dirigeant vers
la Sicile. Des torpilleurs francais et italiens jalon-
naient la route. L'aviateur a effectué la traversée
en deux heures environ et a atterri à Marsala.
La distance parrouvue au-dessus de la mer est
de 240 kilomètres environ.
Après avoir déjeuné, il reprit sa route vers Tra-
pani; il v est arrivé à 2"20™. Continuant son
voyage, les 2{ et 22 décembre, l’aviateur a gagné
l'Italie, a suivi le rivage de la Calabre, et a terinine
son voyage à Rome, où il a atterri le 22 à 225%
de l'après-midi.
VARIA
Notre brochure. — Les articles de notre savant
collaborateur le D? Pierre Corret sur la télégra-
phie sans fil pratique, publiés dans une série de
numéros du Cosmos, ont été tellement demandés
que nous avons du renoncer à les fournir pour ne
pas épuiser nos collections. Nous avons donc résolu
de les réunir en une brochure pour donner satis-
faction à nos correspondants.
106
Nous sommes heureux d'annoncer que cette bro-
chure sera mise en vente aux bureaux de la Maison
de la Bonne Presse, $, rue Bayard. à partir du
4° janvier 4943, au prix de 4 franc (1,10 fr franco).
Le carat décimal. — La France a adopté
le carat métrique de 200 milligrammes, valeur
se rapprochant de celles adoptées de différents
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1919
côtés, et dont les divergences n'étaient pas sans
causer beaucoup de troubles, quelques-uns voulus,
a-t-on dit quelquefois (1). Voici que les joailliers des
États-Unis viennent d'adopter le carat métrique, et
se proposent d'obtenir de la législation qu'il ait
désormais, sur le territoire de l'Union, une exis-
tence légale et obligatoire. C'est un grand point
gagné pour la cause décimale.
Un chemin de fer minier aérien.
Nos lecteurs savent les services que les chemins
de fer aériens rendent dans les pays de montagne,
notamment pour l’exploitation des mines situées
à grande altitude. En Espagne, depuis un certain
temps déjà, les câbles aériens sont mis à contri-
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bution de façon courante pour transporter jusqu’au
point d'utilisation les richesses minières. Il y a
pour cela des raisons nombreuses. D'abord le sol
de l'Espagne est très mouvementé, particulière-
ment dans les régions où se rencontrent des mine-
rais; d'aulre part, les voies ferrées, qui sont fort
difficiles à établir, ne seraient pas rémunératriees
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PROFIL EN LONG DE LA LIGNE AÉRIENNF.
si elles ne servaient qu’au transport de ces minerais.
On sait d’ailleurs que le réseau ferré de l'Espagne
est encore assez peu serré. Enfin, les routes elles-
mêmessont peu abondantes et assez malentretenues.
Récemment, une grande usine de construction de
câbles porteurs, qui s’est fait une spécialité en la
matière, la maison Bleichert, de Leipzig-Gohlis,
vient d'établir une nouvelle voie aérienne qui a
un intérêt particulier. Elle a été construite pour le
compte de la Sociélé anonyme des mines Del
Tessurero, qui a son siège à Madrid. Tesserero est
situé dans la province de Grenade. Cette exploila-
tion minière comporte dès maintenant une série
de puits qui se trouvent à plus de 15 kilomètres
de Hijate, ville desservie par la ligne de chemin
de fer de Lorca Majale. Entre le lieu d'extraction
et Hijate, il y a une différence de niveau de
3» mètres. De plus, comme on peut le voir sur
notre schéma (fig. 1), le chemin que l’on a dù
suivre n’est nullement régulier, et l’on rencontre
en un certain point, vers le milieu du parcours,
un ressaut considérable du sol qui a compliqué
l'établissement de la ligne. Celle-ci a été construite
en deux troncons, avec station de chargement à
la mine, station de déchargement à la gare de
Iijate, et une station dite d'angle à une distance
de 7,5 km de la station de départ.
Pour atteindre la station de chargement, les
minerais sont transportés sur des voies étroites
qui arrivent au-dessus d’une trémie dans laquelle
les wagonnets miniers sont culbutés. Cette trémie
permet ensuite de répartir le minerai dans les
wagonnets de la voie aérienne. Celle-ci comporte
en réalité deux câbles, mais un seul, celui du
haut, qui est câble porteur, forme la voie propre-
ment dite, tandis qu'’au-dessous se trouve le câble
tracteur, sur lequel les wagonnets s'accrochent,
grâce à un dispositif de pinces placé en contre-bas
des galets de roulement. Ce dispositif possède
deux mâchoires qui viennent pincer le cäble trac-
teur, uniquement sous l'effet du poids propre du
wagonnet chargé. L'énergie du serrage ainsi obtenu
permet de franchir les montées les plus raides,
avec la charge la plus lourde. Pendant la marche,
il est impossible que la pince se relâche et que le
wagonnet demeure en place. Il existe néanmoins,
entre les deux mâchoires de la pince, un jeu suffi-
sant pour que cette pince puisse s'adapter à des
câbles de diamètres différents. C’est là un dispo-
(i) Le carat a encore des valeurs différentes; ceux
de nos lecteurs qui désirent se renseigner sur cette
curieuse question pourront consulter la collection du
Cosmos où elle a été trailée très complètement (Voir
t. LIV, p. 59, 113, t. LXIV, p. 32 et t. LXV, p. 415).
N° 1457
sitif fort ingénieux, car il a fallu établir des
câbles tracteurs de diamètres différents suivant les
parties de la ligne.
Pour le passage de ce que nous avons appelé la
station d'angle, et où la ligne remonte pour redes-
cendre ensuite, les wagonnets arrivant à l'entrée
de la stalion sont reçus par un ouvrier qui les
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COSMOS
707
pousse à Ja main sur un court tronçon de rails
suspendus. Le système automatique de la pince
permet de passer facilement par celte station,
étant donné que le désaccouplement des wagonnets
d'avec le câble, au moment de l'entrée, et le réac-
couplement au moment de la sortie, se font auto-
maliquement, sans surveillance. C’est qu'en effet
UNE SECTION DU CHEMIN DE FER MINIER AÉRIEN.
le petit ehariot de chaque wagonnet porte latéra-
lement un galet supplémentaire, qui vient passer
sur des rails secondaires disposés dans les stations,
rails présentant une courte montée à l'entrée et une
courte descente à la sortie de la station. La montée
du galet sur le rail a pour effet de soulever la
charge qui assurait le coincement des mâchoires
sur le câble, et la descente, au contraire, a pour
résultat de laisser la charge venir assurer de nou-
veau le coincement et l’action de la prise sur le
câble. Ce même dispositif servira tout aussi bien
dans la station de chargement que dans celle de
déchargement; le wagonnet devient indépendant
du câble, et on peut le pousser à bras sur une
708
voie d'évitement. Il s’accouplera ensuite de lui-
même au câble tracteur, quand on l'aura ramené
au point voulu pour son départ.
Les câbles porteurs ont 31 ou 22 millimètres de
diamètre, suivant qu'il s’agit de wagonnets pleins ou
de wagonnets vides, car il y a, bien entendu, une
voie de retour. Les deux voies sont distantes de
2,5 m l’une de l’autre. La longueur de cette ligne
aérienne a nécessité l’emploi de 148 pylônes, qui
servent à la fois pour les deux voies. On rencontre
d’ailleurs des portées de 613 mètres et de 672 mètres
au sixième et au neuvième kilomètres. Des dispo-
sitifs tendeurs de câbles ont été installés aux deux
stations terminales, et, sur chaque tronçon, on a
posé également une double station tendeuse, que
les wagonnets franchissent sans aucune surveil-
lance ni difficulté. A la station d'angle, on dispose
d'une machinerie fournissant une puissance de
417 chevaux pour la traction sur le premier tronçon
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1942
de la voie aérienne. Sur le second tronçon, on se
trouve au contraire avoir un excédent d'énergie
d'environ 30 chevaux, par suite de l’inclinaison
suivie. Aussi a-t-il fallu installer un régulateur
hydraulique, relié au treuil de commande, et
compensant l'excédent d'énergie tout en régulari-
sant la vitesse de déplacement du câble tracteur.
Avant de finir, donnons quelques chiffres sur le
débit de cette ligne, débit qui varie suivant la
nature des minerais et leur degré d'humidité.
Avec le minerai le plus lourd, le débit maximum
est de 40 tonnes par heure; avec le minerai le
plus léger, ce débit descend jusqu'à 31,5. Les
wagonnets aériens marchent à la vitesse de 2,5 m
par seconde, et, dans l’ensemble, cette installation
rend déjà des services signalés.
DANIEL BELLET,
prof. à l'École des sciences politiques.
r
Le rôle magnétique des océans
et la constitution de l’écorce terrestre !!).
Dans un original et remarquable travail publié
en i890, M. H. Wilde a décrit un appareil, qu'il a
appelé le Hagnetarium et qui reproduit la distri-
bution du magnétisme terrestre à la surface du
globe terrestre. Le principe de cet appareil con-
siste à se représenter le magnétisme reel de la
Terre comme résultant de la combinaison de deux
actions : celle du noyau central et celle de l’enve-
loppe extérieure, c'est-à-dire de l'écorce propre-
ment dite. .
Pour faire agir deux forces correspondant à ces
deux actions, M. H. Wilde a réalisé deux systèmes
concentriques, mobiles autour d'axes inclinés lun
sur l’autre d'un angle de 23°,5 et mis en rotation
avec des \itesses inégales par une manivelle motrice
unique. Chaque sphère est recouverte d’une couche
de spires de tils conducteurs, formant ainsi une
bobine sphérique, et joue le role d'un aimant per-
manent quand le fil est parcouru par un courant.
A la surface de la sphère extérieure sont collés les
‘useaux qui figurent les terres et les mers du globe
et donnent à l'instrument l'aspect classique d’une
mappemonde. À laide d'une petite boussole de
déclinaison, on peut déterminer, en chaque point
de cetle mappemonde, la valeur actuelle de la
déclinaison, et, en faisant {ourner convenablement
la manivelle motrice, on peut, étant donnée l'iné-
galité des vitesses angulaires qu'elle communique
aux axes des deux sphères concentriques, espérer
reproduire les variations de cet élément, non plus
seulement dans l'espace, mais dans le temps.
(1) Comptes rendus (2 décembre 1112).
Les déterminations, faites sur l’instrument ainsi
conçu et compris, ne reproduisirent que très im-
parfaitement les particularités de la distribution
du magnétisme terrestre. M. H. Wilde eut alors
l'idée de recouvrir de feuilles de tèle les parties
de la mappemonde correspondant aux surfaces des
océans; à partir de ce moment, le résultat fut
aussi prodigieux qu'inattendu. Non seulement,
grâce au décalage des rotations, les variations
séculaires de la déclinaison furent reproduites
fidèlement pour les trois stations de Londres,
Sainte-Hélène et Capetown, mais encore la distri-
bution actuelle et sì capricieuse des isogones fut
retrouvée avec tous ses détails, y compris les
inflexions des isogones zéro, y compris l’ovale de
déclinaison nulle de la Sibérie orientale et la courbe
fermée de déclinaison minima à l’est du Paci-
fique. Une reproduction si fidèle d’un phénomène
naturel si complexe est un fait absolument remar-
quable et qui ne permet pas de négliger les con-
sidérations qui ont permis de la réaliser.
Toutefois, on peut se demander à quoi corres-
pond ce « rôle magnétique » joué par les océans,
et qui semble inexplicable au premier abord.
L'eau des mers n’a, en effet, pas de propriétés
magnétiques, et il semble difficile de comprendre
l'équivalence des masses océaniques avec celles
d'immenses plaques de fer d’égale étendue.
J'ai pensé qu'on pourrait expliquer ce fait si
curieux en rapprochant des expériences de H. Wilde
la si belle théorie de l'écorce terrestre suggérée il
y a un demi-siècle par Airy, reprise par Pratt et
N° 1457
formulée récemment sous une forme précise par
M. Gabriel Lippmann (4).
M. Lippmann suppose que l'écorce terrestre ne
s’est solidifiée que par morceaux, chacun de ces
morceaux étant analogue aux « scories » qui
prennent naissance à la surface d'un bain de métal
fondu, et flottant à la surface du magma terrestre
encore liquide. Peu à peu, les scories se sont sou-
dées les unes aux autres pour donner naissance à
cette « marqueterie » qui constitue l'écorce, comme
l'a si heureusement figuré de Lapparent. Mais
chaque morceau, alors qu'il flottait seul, était une
sorte de radeau, soumis à la loi de la poussée
archimédienne. Si l’un de ces radeaux supportait
une forte masse, devant devenir plus tard un con-
tinent, il devait avoir un « tirant d’eau » plus fort,
et l’on conçoit que le radeau, portant ce qui devait
ètre plus tard l’Himalaya, dut plonger plus profon-
dément que celui qui portait la charge beaucoup
plus faible d'un océan. L’écorce terrestre, d'après
M. Lippmann, doit donc être plus mince sous les
océans que sous les continents, où elle sera plus
épaisse.
D'autre part, on sait que les éléments qui consti-
tuent le noyau interne sont fortement magnétiques.
Dès lors, si l’on explique, à l’aide de la théorie de
M. Lippmann, les inégalités d'épaisseur de l'écorce
terrestre, on voit que, sous les océans, se trouvera
une épaisseur supplémentaire de matières magné-
tiques, par rapport à une surface parallèle au
géoide et rencontrant toutes les saillies inférieures
de l'écorce correspondant aux parties immergées
des fragments initiaux supportant les continents.
Une telle surface est figurée par un trait poin-
COSMOS 709
tillé sur le schéma ci-joint, et les masses magné-
tiques supplémentaires, correspondant aux plaques
de tôle du magnetarium, se voient en A, B,C:
elles sont donc appliquées sous les surfaces océa-
niques, et leur présence contre les surfaces des
mers en explique ainsi simplement le rôle magné-
tique, mis en évidence d’une facon si inattendue par
l'appareil de M. H. Wilde.
Remarquons que cette faiblesse de l'écorce au-
dessous des mers explique fort bien l'abondance
des volcans dans les grandes aires océaniques et
concorde avec la notion tétraédrique de l'écorce
terrestre, dont les faces submergees figurent les
dépressions où se sont logces les eaux.
ALPHONSE BERGET.
Le laboratoire d’une sucrerie.
On croit parfois que les laboratoires annexés
maintenant à la plupart des usines de produits chi-
miques, de matières alimentaires, de métallurgie,
sont uniquement destinés à faire des recherches
pour perfectionner les procédés de fabrication. On
s'imagine parfois aussi que le laboratoire industriel
est une sorte de luxe que se paye le gros fabricant
et qui ne sert pas à grand’chose..... La réalité est
différente : le laboratoire industriel est, à quelques
exceptions près, un instrument de contròle, con-
tròle absolument indispensable tant pour les trans-
actions : achat de matières premières, vente de
produits manufacturés, que pour le contrôle de la
fabrication. C’est ce que nous permettra de montrer
(4) G. Lippuanx, Sur la distribution de la matière à
la surface de la Terre (Comptes rendus, t. CXXXVI,
18 mai 1903, p. 4172 et 1173).
la description de l'installation et du role des labo-
ratoires qu’on trouve dans chaque sucrerie.
On ne conçoit pas un épicier sans balance. A
plus forte raison un industriel ne peut-il se passer
d'instruments de mesure. Or, si connaitre le
poids brut du charbon, de la betterave qu'achète
l'industriel est évideminent indispensable ; con-
naitre le poids net réel de matière utilisable l’est
au moins aulant. Si, au lieu de livrer 4 000 tonnes
de houille à 410 pour 100 de cendres et 2 pour 100
d'humidité, le marchand donne le mème poids de
matière contenant 15 pour 400 de cendres et 4 pour
400 d’eau, c'est absolument comme s'il donnait
plus de 70 tonnes en moins, Il est donc nécessaire
d’analvser les diverses matières premières. En. ce
qui concerne la betterave, qu’on achète pour le
sucre qu'elle renferme, cela est bien plus indis-
pensable encore : car, selon la variété de graine
710
employée et la nature des soins culturaux, le cul-
tivateur peut à volonté obtenir un gros poids de
racines pauvres en sucre ou un poids plus faible
de betteraves riches. Si on ne vérifiait pas la
teneur, il vendrait uniquement de la betterave
pauvre et lourde!
Aussi les betteraves sont-elles toujours achetées
d'autant plus cher qu'elles contiennent plus de
F1G. 1. — DÉTAIL DE LA RAPE.
Coupe et profil.
sucre. À la réception on prélève quelques racines
dans la voiture ou le wagon, on les nettoie, et on
les soumet à l’action d’une râpe (fig. 1) qui déchire
en pulpe fine le tissu végétal, en formant dans la
racine soit un trou, soit une fente-secteur. Il suffit
de placer cette pulpe dans une serviette de tissu
spécial, puis de soumettre le cachet à une forte
pression (fig. 2) pour recueillir le jus sucré de la
betterave. Comme ce liquide est d'autant plus
dense qu'il est plus sucré, on peut aisément déter-
miner la richesse approchée de la betterave en
prenant la densité par plongée d’un aréomètre.
Ce procédé, très souvent seul employé en pra-
tique pour contrôler les petites livraisons, n'est
toutefois pas très exact. Outre le sucre, le jus con-
tient, en effet, plus ou moins de matières denses :
sels, matières albuminoïdes, impuretés diverses,
qui faussent les indications de l’aréomètre spécial
ou saccharomètre employé en sucrerie. Aussi les
dosages véritables du sucre se font-ils par une
autre méthode. Le jus de pression — ou le résultat
de l'épuisement à l'eau d’un poids de râpure —
est additionné d'une solution de sous-acétate de
plomb qui précipite les matières pectiques, si bien
qu'on obtient facilement, en filtrant, un jus très
clair. Toutes les manipulations se font en fioles
jaugées et accessoires usuels des laboratoires
(fig. 3). Finalement, le liquide est placé dans un
long tube fermé aux deux extrémités par des ga-!
lets de verre, après quoi on place le tube dans un
« saccharimètre », appareil de précision coùtant
plusieurs centaines de francs et permettant de
faire traverser le liquide par un rayon de lumière
polarisée, laquelle est déviée par les solutions
sucrées proportionnellement au saccharose qu'elles
contiennent. En regardant dans l'oculaire de
l'appareil, avant mise en place du tube, on voit
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1912
deux « plages » également teintées ; dès que le tube
est posé, une des plages fonce, et il faut, pour
rétablir l'équilibre, tourner un bouton molleté qui
provoque le jeu d'un compensateur neutralisant la
déviation due au sucre : le degré de déplacement
du dispositif, mesuré par lecture au vernier sur
une échelle graduée, indique directement ou après
calcul très simple la quantité de saccharose ou
sucre cristallisable que contient le liquide.
Connaissant de la sorte — au moyen d'analyses
faites régulièrement plusieurs fois chaque jour —
la teneur en sucre des betteraves, il est facile de
calculer, d’après le poids de matières mises en
œuvre, la quantité de sucre entré en fabrication.
Des pesées et des dosages faits de même sur les
matières fabriquées, sucres blancs et roux, mélasse,
permettront de chiffrer le sucre sorti : on peut
établir ainsi la comptabilité technique de fabrica-
tion, le bilan étant complété par indication des
différentes pertes faites au cours de la fabrication.
On examine, en effet, au saccharimètre, après con-
venable préparation, les divers résidus de fabrica-
tion : « pulpes » presque épuisées qui servent à
nourrir les bestiaux, « écumes » précipitées dans
le jus pour l’épurer par combinaison de la chaux
et du gaz carbonique.
Ce contrôle des pertes diverses est d'autant plus
F1G. 2. — PRESSE.
nécessaire qu'industriellement la moindre imper-
fection de travail produit une perte notable :
qu’une sucrerie moyenne laisse 0,4 pour 1400 de
sucre dans les pulpes résiduelles au lieu de 0,2 pour
100, et voici, en fin de campagne, 200 000 kilo-
grammes de sucre absolument perdus, le résidu
étant vendu le même prix, qu’il soit riche ou non.
Ainsi lé chimiste surveille indirectement, mais
N° 1457
sûrement, les ouvriers, qui doivent travailler de
manière à laisser le moins de sucre possible dans
tous les résidus.
En outre, et pour compléter ce rôle, on n'assure
pas seulement au laboratoire le contrôle des divers
traitements de la sucrerie : il permet leur accom-
plissement régulier en vérifiant la qualité des
divers agents mis en œuvre.
Le lait de chaux est pesé à l’aréomètre et on
règle la quantité employée d’après le titre; le gaz
est mesuré dans une cloche graduée, puis agité
avec une solution de soude et mesuré à nouveau;
la différence des volumes indique la quantité de gaz
carbonique qu'il contient. On détermine le point
convenable où doivent être arrètées la carbonata-
tion, ia sulfitation des jus en mesurant un volume
exact, puis ajoutant un peu d’un « indicateur », puis
peu à peu, une liqueur « Litrée » acide coulant d'une
burette mesurée : quand la teinte change, l’alcali-
nité est neutralisée ; son intensité est fonction du
nombre de centimètres cubes qu'on vient de verser.
Dans les laboratoires de sucreries moyennes, il
n'y a d'ordinaire qu'un chimiste, souvent secondé
d’un aide qui fait le travail de nuit. La percée des
betteraves, le prélèvement des échantillons, tout
cela est fait par deux ou trois gamins convena-
blement dressés. Si l'un d'eux est sérieux et soi-
gneux, on peut même parfois lui confier un peu de
besogne analytique. Somme toute, les essais chi-
miques ne sont guère que des sortes de petites cui-
sines, particulièrement minutieuses et compliquées.
Outre la besogne en quelque sorte normale,
essentielle, on fait au laboratoire, surtout pour
occuper les loisirs de l'été — saison où les sucre-
ries sont en complète inactivité, — divers essais de
tous genres : analyse de charbon, des huiles de
graissage, du calcaire dont on s'approvisionne;
essais germinatifs pour contròler la valeur des
graines de betteraves, parfois observations météo-
rologiques, qui, échangées entre toute les sucre-
ries d’un pays, permettent de prévoir si la récolle
de betteraves sera bonne ou mauvaise, partant
quelles seront les variations du cours du sucre.
Besognes, somme toute, faciles, bien que très
minutieuses, et point n’est besoin d'être chimiste
pour les faire, pas plus que l'arpenteur ne doit
être géomètre au sens élevé du mot pour mesurer
—
COSMOS
711
un terrain. Toutefois, dans les laboratoires d'usines
importantes, le travail n'est pas seulement un
pur contrôle en quelque sorte machinal: on fait
là vraiment de la chimie; essais en petit de
nouvelles inventions industrielles, vérification
des résullats donnés par quelque changement de
marche, recherches pour expliquer certaines ano-
malies, obvier à certains insuccès. Tout cela est
de la science chimique. Comme, d’ailleurs, les
petites sucreries ne peuvent guère s'offrir le luxe
F1G. 3. — PRISE DE DENSITÉ DES JUS.
d'un laboratoire bien installé et d’un personnel
parfaitement qualifié pour faire avec toute garantie
de valeur les études sur de nouveaux procédés,
les travaux divers d'intérêt général; les Syndi-
cats de fabricants français, allemands et autri-
chiens ont créé des laboratoires centraux qui
rendent à tous les plus grands services. La sucrerie
est une industrie chimique; c’est du laboratoire
que vinrent la plupart des progrès réalisés dans
sa technique; il est absolument indispensable,
pour la fabrication bien faite, de continuer à en
utiliser sans cesse les enseignements et les travaux.
H. ROUSSET.
La configuration générale des chaînes de montagnes.
Dans une étude antérieure sur la configuration
des chaines de montagnes (Cosmos, 17 septembre
1904, p. 355), nous avions fait remarquer que la
chaine des Pyrénées, observée des hauteurs de
Capvern (Hautes-Pyrénées), présente un aspect
très caractéristique. Les points culminants de la
chaine forment les sommets de triangles dont le
còté Ouest est très étendu, tandis que le còté Est
est, au contraire, plus restreint.
Le côté Ouest sous-tend avec l’horizon un angle
moyen de 5° environ, le côté Est forme un angle
beaucoup plus ouvert de 45° environ.
112
Il semble donc que l’ensemble de chaque massif
ait été rejeté pour la plus grande partie dans la
direction Ouest.
Nous donnions, comme explication possible de
ce phénomène, l'entrainement provoqué par le
mouvement de la Terre à l’époque où la masse
granitique, se trouvant encore à l'état pâteux,
avait pu subir l'influence de l'action rotative ter-
restre.
Nous ajoutions : « En est-il de mème pour les
autres chaines de montagnes ou, au moins, pour
celles qui sont orientées dans la direction Est-
Ouest? L'observation en serait intéressante à
faire. »
Depuis cette époque, nous avons pu poursuivre nos
observations, et nous sommes arrivé à cette conclu-
sion intéressante que le phénomène précédent était
d'ordre général, et qu'il affectait, non seulement
tous les massifs montagneux sans exception, mais
également les dunes de sable qui se forment sous
l’action du vent, soit au Sahara, soit sur les còtes
telles que celles du golfe de Gascogne.
Nous avons eu, du reste, la bonne fortune de
retrouver des observations analogues déjà faites
antérieurement par un éminent météorologiste
anglais : l'amiral Fitz-Roy, qui les a consignées
dans un manuel pratique de météorologie. Cet
observateur avait noté les particularités suivantes :
« Nous croyons devoir appeler l'attention sur la
conformation très remarquable que présentent cer-
taines parties du globe; c’est une inclinaison
douce et graduelle de bas en haut, de l'Est vers
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1949
l'Ouest, et une pente rapide et escarpée des som-
mets, du còtlé de l'Ouest. Cette conformation, com-
mune à une grande partie du monde accessible du
côté de la mer, l’est beaucoup moins à l'intérieur
des grands continents. La Norwège, la plus grande
partie de l’Europe, l'Afrique et ses iles, les deux
Amériques, les Galapagos, les îles élevées de la
Polynésie, les chaines de l'Australie, de la Chine,
et généralement toutes les côtes de l'Asie, vues de
profil, du Sud au Nord, ont la forme du « Bec de
» Portland » si familier à nos compatriotes.
» C'est au physicien et au géologue qu'il faut
demander l'explication de ce phénomène, que nous
avons plus d’une fois remarqué et considéré avec
un vif intérèt. La première fois, c'est en arrivant
aux Galapagos. À la distance de quelques milles,
toutes ces iles semblaient ètre autant de « Becs de
» Portland », d'un profil parfaitement identique.
» Les nombreuses recherches auxquelles nousnous
sommes livré depuis cette époque (1836) nous ont
convaincu qu’à l'exception des grandes chaines de
montagnes, Est et Ouest, de l'intérieur des conti-
nents, ou des iles continentales (telles que l’Aus-
tralie et Bornéo), les chaines de montagnes courent
en général Nord et Sud, et que leur section a la
forme d'un coin dont la pointe est tournée vers
l'Est. »
En fait, la question que je posais en 1904 était
déjà résolue en 1836 par l'amiral Fitz-Roy, mais
comme elle parait ètre assez mal connue, il est
utile de la signaler à nouveau à l'attention des géo-
logues. A. Novo.
a ee —— nn — —
Les fourrures modernes et leur préparation.
Quand l'hiver est venu, le beau sexe veut se
parer de fourrures vraies ou fausses. La paysanne et
la riche citadine, l’ouvrière et la bourgeoise aiment
à compléter leur toilette par des manchons en zibe-
line ou des tours de cou en chinchilla, des cravates
enastrakan ouen hermine plus ou moins truquées. Si
leurs moyens le leur permettent, elles achètent des
manteaux de loutre et de petit-gris. Aussi, devant les
exigences féminines croissantes, les fourreurs ont
di singénier pour satisfaire leur clientèle et, les
animaux sauvages ne suflisant plus, ils deman-
dèrent à la toison des..... lapins de remplacer les
martres et les renards bleus devenus de plus en
plus rares. Si bien qu’artucllement la France trans-
forme, chaque année, 24 millions de peaux de ces
mammifères rongeurs en « loutres de Ménilmon-
tant »! Cest ainsi quon nomme ironiquement,
dans l'industrie de la pelleterie, les fourrures bon
marche, presque toutes les usines d'où elles sortent
se trouvant dans ce quartier de Paris.
Assistons donc à ces curieuses métamorphoses.
Le chiffonnier, qui a récolté les peaux une à une,
les fait sécher en les retournant, puis les vend à
un négociant qui les centralise par millions et qui,
à son tour, les cédera à l’appréteur. Elles y
arrivent sous un aspect peu séduisant : retournées,
toutes raides, maculées de chair et de sang. On
commence par les trier en écartant celles qui
paraissent impropres à subir l'apprêt et qu’on
emploie ultérieurement à d’autres usages, comme
nous le verrons plus loin.
Une fois trites, on met les bonnes peaux dans
un bain d’eau salée pour les amollir; on les y foule
quotidiennement en les plaçant chaque jour dans
un bain de moins en moins concentré; on termine
par de l'eau pure. On les ouvre ensuite au moyen
de la fendeuse (lig. 1). Cette machine se compose
d'une sorte de cône en fonte formé de deux par-
ties : l'une fixe, l'autre mobile, qu’une crémaillère
actionnée par un volant permet d'écarter de la
premicre. L'ouvrier tend la peau enfilée sur le
còne en imprimant une rotation à la roue, coupe
Ne 1457
la queue, les pattes et la tète, et la sectionne lon-
gitudinalement avec un tranchet.
Après le fendage, on trie encore les peaux et on
écharne celles qu'on conserve pour l'apprêt, c'est-
à-dire qu’on enlève toutes les portions de chair ou
de graisse adhérentes et qu’on égalise leur surface
à l'aide d’un couteau fixé verticalement sur un
banc. On arrache ensuite à la main les poils follets
qui se feutreraient ultérieurement. Arrive alors le
foulonnage, V'opération la plus importante de la
pelleterie. r
COSMOS
713
‘Au préalable, on enduit les peaux d’une couche
de dégras. On les introduit ensuite dans la machine
à foulon (fig. 2). Comme la photographie le montre,
cet appareil comprend une auge en bois dans
laquelle les peaux se trouvent malaxées en tous
sens, grâce aux mouvements alternatifs de deux
maillets. Sous l'influence des chocs répétés et de
la température modérée qu'on maintient dans le
récipient, le corps gras s’infiltre dans les pores des
peaux, qui sortent du foulon chamoisées et rendues
imputrescibles.
F1G. 1. — OUVERTURE DES PEAUX AU MOYEN DE LA FENDEUSE.
Il s’agit de les dégraisser pour qu’elles puissent
poursuivre la série de leurs transformations. On
les place pour cela dans des grands tonneaux
tournant sur des tourillons. Une ouverture pra-
tiquée sur la circonférence de chacun de ces
appareils permet l'introduction des peaux dans
son intérieur où l’on a mis au préalable de la
sciure de bois et du plâtre. Au cours de la rotation,
le mélange déshuile les peaux dont on achève le
séchage dans la roue à battre, tonneau analogue
au précédent, mais ayant des parois grillagées au
lieu d’être pleines. Les peaux se débarrassent alors
des parcelles de plâtre, de sciure ou poussières qui
les imprègnent. Puis quelques coups de baguette,
de peigne et de brosse terminent leur netloyage.
Les peaux, définitivement transformées en pel-
leteries, sont maintenant prêtes pour le /us/rage,
ou ensemble de manipulations ayant pour objet de
cacher leurs défauts, de rendre le poil brillant et
d'en modifier la couleur. Là, le génie fertile du
fourreur se donne libre carrière. Il va examiner
une à une chaque toison, afin d'enlever au tran-
chet les coupures, les parties de poil rare et autres
endroits défectueux. Il les remplace au moyen de
morceaux enlevés à d’autres peaux et cousus à
l'aide de machines spéciales. D’ailleurs, sauf pour
les peaux blanches destinées à imiter l’hermine et
les peaux de couleur assez jolies pour s'utiliser telles
quelles, il ne s'inquiète pas de la teinte des pièces
rapportées., Qu'elles soient noires, grises, rousses,
jaunes ou blanchâtres, peu importe, puisqu'on doit
lustrer, c’est-à-dire passer à la teinture, les peaux
entières. |
Ce rapiécage achevé, on tire les peaux sur le
banc d'écharnage afin de les assouplir, de les
distendre et d'enlever les dernières parcelles de
chair qui pourraient y adhérer. Dans certaines
FıG. 2. — MACHINE A FOULON.
usines, cette manipulation s'opère mécanique-
ment.
Mais, vu la plus ou moins grande longueur des
poils, les toisons des lapins ne pourraient se juxta-
poser ainsi sur un même vêtement, elles jureraient
côte à côte. Leur assemblage produirait une four-
rure d'aspect disgracieux. Il faut donc couper leurs
poils à une longueur uniforme et variable selon
l'animal sauvage qu'on désire imiter.
La machine à raser (fig. 3) possède comme
crganes essentiels deux rouleaux dont l’un supporte
la peau amenée par une toile sans fin, l’autre de
grandes lames disposées en hélice; l’écartement
laissé entre eux deux règle la longueur définitive
du poil. Après avoir cousu les peaux les unes à la
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1912
suite des autres, on les fait passer entre les deux
cylindres, dont l’un, portant les lames, tourne à
grande vitesse. Un disposilif spécial maintient,
d'autre part, les poils dans la position requise pour
assurer la régularité de la coupe. Toutefois, la
toilelte des fourrures doit encore se compléter par
l'épilage ou l’éjarrage, qui a pour but d'enlever les
poils trop rudes ou mal plantés. Généralement, en
effet, la toison d'un animal se compose de deux
catégories de poils: le duvet, qui, en recouvrant
immédiatement sa peau, le préserve du froid, et
le jarre, rude, gros et plus long que le précédent.
Comme ce dernier poil manque de souplesse, il se
F1G. 3. — MACHINE A RASER LES PEAUX.
redresse quand on plie la peau et donnerait aux
pelleteries même lustrées un aspect hirsute.
L'épilage mécanique repose sur la propriété que
possède le jarre de rester droit lorsqu'il passe sur
l'arète d'une lame. En conséquence, la machine à
épiler comprend en principe une barre fixe etun
rouleau tournant très lentement; ces organes
servent à tendre une toile sans fin sur laquelle
s'épinglent les peaux; d’autre part, des brosses,
animées d'un mouvement très rapide et situées
symétriquement par rapport à la barre taillée en
forme de lame, couchent le duvet au fur et à
mesure du passage des peaux, tandis que les jarres
se relèvent en avant de l’arête de la barre. Là,
un autre rouleau, porteur d'une lame tranchante
Ne 1:57
et tournant très vile, les coupe tout en respectant
le duvet.
Souvent, l’épilage s'exécute après la teinture. Le
lustreur reçoit donc des peaux de lapin toutes
rapiécées, de nuance unie ou diversement colorées.
Il va les teindre soit en plein, soit en laissant le
bout du poil d’un ton différent de celui du fond.
Quoique ces manipulations constituent des secrets
COSMOS 715
de fabrication gardés jalousement par les intéressés,
donnons une idée du travail compliqué des lus-
treurs.
Pour communiquer du brillant et du moelleux
aux poils, ils les frottent avec une brosse imbibée
d’un mélange d'alcool, de gomme laque, de glycé-
rine, de jaune d'œuf et d'huile de coton. Ils
repassent les toisons teintes avec des machines spé-
F1G. #4. — MACHINE A COUPER LES PEAUX DE REBUT EN LANIÈRES SURNOMMÉES € VERMICELLES ».
ciales, aux engrenages compliqués. La peau épouse
successivement une série de tambours cylindriques
et en sort parfaitement redressée. L'ouvrier qui la
reçoit lui donne un ultime coup de brosse. Pour
imiter les fourrures tachetées de blanc, on fait un
mouchetage avec un pinceau trempé dans l'hydro-
sulfite de sodium, etc.
Toutefois, avant de terminer les métamorphoses
d’une peau de lapin en fourrure de prix, les « fabri-
cants » doivent assortir les toisons, les classer par
longueur, par épaisseur de poil, par tailles, et sur-
tout les parer, leur donner un aspect régulier. Les
fourrures maquillées de la sorte passent alors aux
mains des confectionneuses.
De leur côté, les peaux blanches se teignent sou-
vent à la brosse, en plusieurs fois, de manière à
obtenir une nuance café au lait près du cuir et
une coloration plus foncée un peu au-dessus. Cette
1 16
opération s'exécute en relevant le poil à contre-
sens avec des peignes, puis on le rase à la lon-
gueur voulue à l’aide de la machine précédemment
décrite. Les fourrures sont ensuite brossées et
battues afin d'enlever les rognures et une dernière
fois élirées à sec.
Pour les peaux de moutons, on les dessuinte, on
les tanne et on sépare les touffes de poils par un
peignage soigné. La teinture s'effectue ensuite à la
brosse, ainsi que pour les peaux blanches, mais de
façon à avoir des poils bruns près de la peau et
noirs à l'autre extrémité. On peigne encore la
fourrure sèche afin de faire onduler les poils sans
les friser par touffes; on rase ensuite légèrement,
on étire à sec, et on imite de la sorte les plus rares
toisons.
Là s'arrête ce qu'on pourrait appeler la partie
industrielle du truquage des fourrures. Après vient
l’utilisation commerciale des produits manufac-
turés. Les queues de lapins se vendent aux fabri-
cants de chapeaux en « vrai » castor, tandis que
les rognures de peaux teintes, assorties par caté-
gories et cousues ensemble, sont soldées à bon
compte pour confectionner des blouses, des
jaquettes ou des étoffes à des « prix défiant toute
concurrence! »
Les cravates en hermine à 2,95 fr se font avec
du chat ou du lapin blancs à poils courts et drus;
un petit morceau de peau teinte, roulée et assem-
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1912
blée après coup simule, à s’y méprendre, la queue
du gracieux mammifère. La robe blanche d'un
doux mouton, défrisée et teinte, se transforme, sur
le catalogue des grands magasins, en toison d'un
animal féroce.
Probablement, nos lectrices se faisaient de la
confection des fourrures qu’elles portent une idée
plus simple. Il y a loin, en effet, des chasses d'au-
trefois à l’industrie que nous venons de décrire!
Quant aux peaux mises au rebut au cours de
l’apprètage, on les utilise pour M chapellerie.
Après les avoir fendues comme les précédentes,
elles passent à l'atelier de secrétage. Cette opéra-
tion consiste à imbiber les peaux, à l’aide d'une
brosse de chiendent, d’une dissolution de mercure
et d'acide nitrique. Le poil prend alors une consis-
tance particulière nécessaire pour le feutrage. On
les sèche ensuite dans une étuve, après quoi on les
brosse, et, de là, on les dirige vers la machine à
couper qui présente de grandes analogies avec la
raseuse de tout à l’heure. Toutefois, la lame enlève
non seulement le poil au ras de la peau, mais
coupe celte dernière en lanières, surnommées
« vermicelles » (fig. 4) par les techniciens. Avec
les poils, on confectionne les chapeaux de feutre:
avec le vermicelle, on fabrique de la colle, tandis
que la peau des pattes et de la tête, les poils arra-
chés et autres déchets des fourreurs s’emploient
comme engrais. Jacores BOYER.
La crampe des télégraphistes.
Beaucoup d'écrivains deviennent les victimes d'une
nervosité excessive qui rend leur écriture tout à fait
illisible. Heureusement la machine vient à leur
secours et certains d’entre eux usent des touches
avec dextérité. Lestélégraphistes ont également leur
crampe, de mème nature que la première, et qui
se manifeste, non par l'impossibilité d'écrire, mais
par celle de transmettre. Les morsistes sont les plus
atteints, et beaucoup doivent cesser la manipulation
vendant quelques mois. Ce repos de la main réta-
blit le système nerveux, et ia transmission redevient
bonne. Cependant, quelques-uns doivent abandon-
ner définitivement le manipulateur.
Jusqu'ici, on ne possédait que des éléments isolés
sur cette maladie spéciale. Le Gencral Post Office
britannique a eu l'idée de faire étudier scientifique-
ment la maladie par une Commission. Le rapport
de cette Commission a été communiqué au Journal
téleqraplique; est fort intéressant.
On remarque tout d'abord que la crampe des
télégraphistes a augmenté d'intensité au fur et
à mesure de la diffusion de l'appareil Morse. La
picmière descriplion de cette affection fnt faite en
belgique en 1855 par M. Ominus. En 1882, M. Fd-
mond Robinson, chirurgien du General Post Office,
à Lecds, souligna la similitude de cette affection
avec celle antérieurement connue sous le nom de
crampe des écrivains. Dans plusieurs pays, des cas
isolés furent ensuite observés. et. en 41903, le
le D" E. Cronbach publiait une monographie sur la
« névrose d'occupation » dans laquelle il décrivait
dix-sept cas observés à Berlin; sur ces cas, trois
élaient des morsistes et les autres des hughistes. Le
D" Cronbach démontre que l'affection est due au
travail exclusif à l’appareil Hughes et que le rem-
placement de ce travail par celui effectué au Morse
ne serait d'aucun effet quant à la prévention de la
crampe.
Un remède très simple s'était présenté à l'esprit:
faire alterner le travail au Hughes avec celui au
Morse. Il est efticace, en effet, mais la diffusion
croissante du système Morse ne permet plus cet
alternat régulier. L'administration anglaise a donc
demandé à la Commission nommée par elle de lui
indiquer les moyens préventifs capables de sous-
traire son personnel de télégraphistes aux atteintes
de la crampe. En attendant, et dès le début de ses
constatations, la Commission fut amenée à déclarer
Ne 1457
que, l'affection étant surtout sensible chez les vieux
télégraphistes, il y avait lieu de considérer la
crampe comme une maladie industrielle donnant
droit au payement d'une indemnité comme pour
les autres invalides du travail. C'était reconnaitre
officiellement l'existence de ce mal professionnel.
Diverses opinions se manifestèrent quant à la
nature et à l'origine de la crampe des télegra-
phistes. Elle fut considérée par certains comme un
désordre musculaire, par d'autres comme une
affection du système nerveux périphérique, et enfin
comme une affection du système nerveux central.
La Commission anglaise a admis cette dernière
manière de voir; elle ajoute que la crampe est le
résultat d’un affaiblissement ou d’une lésion du
mécanisme cérébral directeur, provoqué par la
surtension d'un groupe donné de muscles. La
crampe est caractérisée par un spasme visible de
Ja main ou du bras, ou de tous deux à la fois, durant
la manipulation, et par une diminution de la faculté
d'effectuer les mouvements coordonnés nécessités
par la manipulation. Les premiers symptômes sont
des malaises occasionnant ensuite une douleur
dans la main ou le bras. Elle apparait au début de
la manipulation, ce qui la distingue de la fatigue
musculaire.
Tout instrument qui exige des mouvements mus-
culaires répétés, de mème nature et d'amplitude
extrêmement limitée, peut provoquer un « spasme
d'occupation » ou une « névrose professionnelle ».
Or, la manipulation de la clé Morse exige ces mou-
vements rapprochés et de très faible amplitude.
Celle des claviers Hughes et Baudot engendre éga-
lement une forme de crampe ayant tout à fait la
forme de la crampe des pianistes. Dans chacun de
ces cas, les centres nerveux engagés sont différents,
puisqu’un morsiste atteint de la crampe peut ètre
employé au Hughes sans manifester la moindre
gène. Sur 177 télégraphistes hommes soumis à un
questionnaire, 4,8 pour 100 se plaignirent de la
crampe, 1,1 pour 1400 signalèrent une première
période subjective, et 28,8 pour {100 se plaignirent
de fatigue musculaire. Chez les dames, les divers
pourcentages furent de 2,4, 0,8 et 23.8.
La crampe des télégraphistes est une alfection
nerveuse résultant de la combinaison de deux fac-
teurs. une instabilité nerveuse et une fatigue
répélée provenant de la transmission. La fatigue
diffère de la crampe, puisqu'une personne de santé
moyenne peut la supporter sans ètre atteinte de la
crampe. En réalité, l'état du système nerveux seul
cause la crampe qui, chez un mème individu, peut
apparaitre à des époques différentes. La causeinitiale
étant connue, la crampe peut apparaitre chez les
sujets : présentant une faiblesse constitutionnelle,
inaptes au service télégraphique. ayant une trans-
mission défectueuse, subissant un travail excessif.
La construction du manipulateur Morse intervient
COSMOS 117
également pour une forte proportion dans l'appa-
rition de cette névrose professionnelle, La crampe
est donc le résultat d'un affaiblissement ou d'une
lésion du mécanisme central régulateur du cerveau.
La Commission instituée par l'Office postal bri-
tannique ne s'est pas seulement contentée d'étudier
le mal, elle a cherché le remède. Ce remède existe
tout entier dans le recrutement du personnel: à
cet effet, les futurs télégraphistes doivent être sou-
mis, avant leur admission dans les cadres de l'ad-
ministration, à un examen médical très sévère. De
plus, pendant leur stage, on doit s'efforcer de
reconnaitre les aptitudes de chacun, de façon à ne
conserver dans le personnel télégraphique que les
sujets parfaitement aptes à n'être jamais atteints
du moindre déséquilibre du système nerveux, les
autres jeunes gens étant dirigés sur d'autres ser-
vices.
En réalité, la crampe des télégraphistes apparait
à la suite du travail excessif à l'appareil Morse,
chez les personnes possédant une excitabilité ner-
veuse exagéree. Beaucoup de jeunes gens, en France
surtout, prennent la mauvaise habitude, dès qu'ils
savent transmettre, de travailler à une très grande
vitesse, non en vue d'écouler rapidement le travail,
mais pour se prouver à eux-mêmes qu'ils sont
d'excellents télégraphistes. La pratique de ce régime
conduit fatalement à la surexcitation nerveuse
qui s’accroit très rapidement si le correspondant
n'enregistre pas aussi vite qu'il les recoit les signaux
transmis à toute vitesse. Il en résulte parfois des
chicanes qui prennent vite le ton aigre el exas-
pèrent de plus en plus les deux correspondants. Ce
fait s'observe à tous les appareils, au Morse et au
Hughes, particulièrement àce dernier, dont l'appren-
lissage est long et dont la maitrise nécessite de
longues années de pratique. Si Fun des correspon-
dants est /aible et Vautre très fort et mal inten-
tionné, ce dernier coupe à chaque instant la trans-
mission, énerve très rapidement son collègue qui,
en quelques minutes, devient complètement inapte
à transmettre. Ces faits déplorables s'observent
très fréquemment dans les bureaux télégraphiques.
La crampe au Haghes et au Baudot nait, pour ainsi
dire, toujours de cette facon.
A l'appareil Morse, la mème cause subsiste, et
elle prend d'autant plus d'importance que la con-
struction du manipulateur est plus défectueuse.
Les petites clès Morse sont, en effet, plus ou
moins sures et nécessitent un cffort musculaire
plus ou moins intense. Dès que le transmetteur
commence às'énerver sous l'intluence de la grande
quantité de travail, de la mauvaise volonté du cor-
respondant, il coupe ses traits, qui se transforment
en deux points si le manipulateur est doux, ou
bien il manque les points si le manipulateur est
dur. D'autre part, la manière de tenir le manipu-
lateur excree également une influence très sensible
718
sur la naissance de la crampe. Normalement, le
morsiste doit tenir le bouton avec les trois premiers
doigts de la main droite, le pouce étant placé en
dessous. Mais la plupart des jeunes gens se sont
exercés, non dans des Cours, mais dans les petits
bureaux de province, sous la seule direction de
leurs collègues plus âgés qu'eux de quelques années.
Is s’entrainent ainsi à une manipulation fantaisiste
qui favorise la crampe.
Dans presque toutes les administralions euro-
péennes, le manipulateur est placé au bord de la
table, laissant le bras et la main absolument libres.
L'administration autrichienne estime que c'est là
une faute : elle place ses manipulateurs à 40 cen-
limètres en arrière du bord avant de la table. Le
télégraphiste manipule donc en appuyant son
coude. On prétend que la crampe des morsistes est
inconnue en Autriche. En Angleterre, en Belgique,
les jeunes gens sont habitués à manipuler avec la
main gauche; ils peuvent ainsi, dès la moindre
gène de la main droite, changer de main et se
reposer. Il serait précieux de procéder ainsi chez
nous, pour la raison admise par nos voisins et aussi
parce que la position du manipulateur faciliterait
la réception au lieu de la gêner.
Ces faits, suggérés par l'expérience, nè sont nul-
lement en désaccord avec les résultats acquis par
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1 912
la Commission anglaise. Il est certain que le télé-
graphiste calme ne sera jamais une victime de la
crampe; rien ne l’émeut, pas plus sa transmission
défectueuse que la vitesse exagérée de son corres-
pondant, que les retards éprouvés par les télé-
grammes. Il va, comme on dit, son petit bonhomme
de chemin et écoule parfaitement son travail. Le
« paquet de nerfs » fera toujours un télégraphiste
détestable à tous les points de vue, s’énervark lui-
même pour une faute bénigne de la part de son
correspondant et s'évertuant, par suite de sa ner-
vosité excessive, à l’'agacer sans cesse. Si ce corres-
pondant possède un système nerveux insuffisam-
ment robuste, il s'énerve chaque jour davantage,
et, en très peu de temps, il lui est devenu impos-
sible de transmettre, quelque soit l'appareil qu’on
lui mette dans les mains.
Jusqu'ici, les administrations télégraphiques ne
se sont pas préoccupées, dans le choix de leur per-
sonnel, de la valeur du système nerveux des candi-
dats. Elles doivent en tenir compte dans une très
large mesure et n’admettre dans les rangs des télé-
graphistes que ceux qui leur paraissent èlre d'une
constitution très saine. Combien de télégraphistes
sont incapables de transmettre correctement à un
appareil quelconque après dix ou quinze ans de
pratique ! LUCIEN FOURNIER.
Le nouveau bateau-feu du Havre.”
HI
Nous avons donné au début les principales carac-
téristiques du nouveau bateau-feu. Nous extrayons
d'une communication faite au Xile Congrès de
navigation tenu cet été à Philadelphie par M. de
Joly, ingénieur en chef au service central des
phares et balises, les détails suivants sur les parti-
cularités du puissant engin qui va entrer prochai-
nement en service.
ÉNONCÉ DES CARACTÉRISTIQUES SANDETTIÉ | LE HAVRE
Ė—_——__—_— (m
Longueur enlre perpendicu-
aires s.coos. rase
Largeur à la flottaison
Creux
Tirant d’eau (quille saillante
35,00 m
comprise) aaki ean ra Te
Déplacement
| Bras de levier métacentrique
transversal (9 —a)
| Distance du métacentre lon-
| gitudinal au-dessus du
| centre de carène.........
31,335 m | 44,290 m
(1) Suite, voir p. 692.
Les formes du bateau sont déduites de celles du
Sandettié, en service depuis plusieurs années à
£chelle de 0006 ar mehe
COUPE AU MAÎTRE COUPLE DU BATEAU-FEU « LE HAVRE ».
Dunkerque et qui, ayant donné les meilleurs résul-
tats au point de vue de la tenue à la mer, a été
N° 1457
imité en plusieurs pays étrangers. On a augmenté
seulement la longueur de manière à diminuer les
oscillations de tangage qui étaient devenues pré-
dominantes par la réduction des roulis et la faible
longueur de la coque.
Le tableau de la page précédente permet de se
rendre compte des différencesentre les deux bateaux.
Les oscillations de roulis seront amorties par
des quilles saillantes et n'auront aucun synchro-
nisme avec celle des lames de la baie de Seine.
D: e bric
o FES
(5 ð pi J Mac hine :
UTE 4 +
ME se k
TL
5 H L 0 D (]
CLU ReneR K
+
, | ~
4 n = į
€ EEE
ES: Ne
Echelle de 07005 par mètre
COSMOS
719
Les considérations de stabililé ayant conduit à
augmenter la longueur du bateau-feu, l’augmenta-
tion correspondante du déplacement a pu être con-
sacrée pour partie à l'installalion d'un appareil
moteur et propulseur dont les feux flottants
français n'avaient pas été pourvus jusqu’à ce jour,
mais qui parait de nature à rendre des services
notamment par gros temps pour soulager la chaine
et en cas de déradage. Le feu flottant Le Havre et
son rechange seront munis l'un et l’autre d'une
| M J
TETE J124
Coupe horizontale a Ja flohaison
DISPOSITION ET AMÉNAGEMENT DU FEU FLOTTANT GARDÉ « LE HAVRE ».
machine compound de 150 chevaux indiqués et
d’une hélice qui permettront de leur imprimer une
vitesse de 6,5 nœuds en route libre et en eau
calme. Deux chaudières tubulaires à retour de
flamme, munies d’un appareil de réchauffage per-
meltant leur mise en pression rapide, fourniront
simultanément à l'appareil moteur la vapeur à
12 kg par cm? nécessaire à la propulsion.
La puissance et la robustesse de cet appareil
évaporatoire conduisent à l'utiliser pour l'éclairage
du feu flottant. Alors que le Sandettié et son
rechange ont leur optique illuminée par un brü-
leur à incandescence par le gaz d'huile, l'optique
pendulaire du feu flottant Le Havre, dont les quatre
panneaux de 0,25 m de distance focale disposés
suivant un losange ouvert à ses deux extrémités
produiront, par leur rotation en vingt secondes sous
l’action d'une machine à poids ou d'un moteur
électrique, le caractère de feu à éclats groupés par
deux toutes les dix secondes, sera illuminée au
moyen d’une lampe formée de 12 filaments Nernst
répartis suivant les génératrices d’un cylindre ver-
720
tical de 30 millimètres de diamètre. L’éclal intrin-
sèque d'un filament Nernst incandescent étant de
33 becs Carcel, alors que les manchons incandes-
cents par le gaz d'huile dépassent rarement 2 becs
Carcel par centimètre carré de leur surface méri-
dienne, l’intensité lumineuse horizontale de l'appa-
reil atteindra 12000 becs Carcel en lumière blanche
(au lieu de 3500 becs Carcel au Sandettié). Les
circonstances locales conduisant à adopter la colo-
ration rouge, le feu aura une puissance lumineuse
effective de 2 400 becs Carcel. Les lampes Nernst
ont déjà été utilisées comme source lumineuse par
le service des phares pour divers feux de direction,
les bAtonnets étant alors placés horizontalement
au nombre de trois au foyer de projecteurs lenticu-
laires et échauffés au moment de l'allumage par
un dispositif électrique spécial. La lampe à bâlon-
nets verticaux multiples sera munie d'un dispositif
de réchauffage à gaz alimenté au moyen d’acétylène
dissous provenant de bouteilles associées à la queue
de l'appareil pendulaire. Ces bouteilles permet-
tront aussi de réaliser éventuellement un éclairage
de secours à l'incandescence par le gaz acétylène.
L'énergie électrique nécessaire à l'éclairage normal
sera fournie par lun ou l'autre des deux groupes
électrogènes de 5500 watts installés dans la salle
des machines. L'un de ces groupes sera muni d'un
moteur à vapeur compound, l’autre d'un moteur
à pétrole lampant.
Chaque groupe électrogène pourra fournir du
courant continu à 115 volts à la lampe et au mé-
canisme de l'appareil optique, aux distributions
d'éclairage des locaux, au poste de signaux hertziens
qui sera installé plus tard, et éventuellement du
courant triphasé au moteur de la cloche sous-marine
dont sera muni le feu flottant.
Ainsi que nous l’avons expliqué plus haut, le but
de ce bateau est surtout de servir de support aux
appareils sonores qui doivent guider la navigation
en {temps de brume. Par temps clair, le feu dont
aous venons de décrire les appareils ne jouera
qu'un role secondaire, les éclats du phare électrique
de La Hève devant porter bien plus loin que ceux
du feu flottant.
Celui-ci ne prendra d'importance véritable qu'en
temps couvert ou bouché. Ce sont donc ses appa-
reils sonores qui présentent le plus d'intérèt.
Ces appareils consisteront:
4" En une puissante sirène à air comprimé con-
somiiant par heure, à la pression de 2 kg
par cm, environ 150 mètres cubes d'air mesurés
à la pression atmosphérique et émettant des groupes
de trois sons brefs en succession rapide toutes les
minutes. rvthmés par un distributeur automatique.
L'air comprimé sera fourni au distributeur et à la
sirène par un compresseur vertical à vapeur à deux
eylindres installé dans la salle des machines.
Ce compresseur fonctionnera soit à la pression
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1919
de 2 kg par cm? correspondant au régime de
marche de la sirène, soit à la pression de 15 kg
par cm? obtenus par étages successifs pour emma-
gasiner dans. des réservoirs accumulateurs lair
nécessaire à la mise en marche instantanée de la
sirène dès l'apparition de la brume.
2° D'une cloche sous-marine actionnée électri-
quement et émettant en temps de brume des
groupes de trois sons toutes les quinze secondes.
30 D'un signal de brume hertzien comportant,
avec la longueur d'onde de 80 mètres, l'émission
régulière toutes les trente secondes de signaux pro-
duisant dans le téléphone le son musical wf, et
rythmés de manière à répéter pendant dix secondes
au moins, à faible vitesse, la lettre H de l'alphabet
Morse.
Le matériel électrique comprendra :
4° Un tronçon vertical traversant un isolateur
vissé dans le plafond du roufle et s'élevant à 2,5 m
en arrière du mât militaire portant l'appareil
d'éclairage du feu flottant.
2° Un tronçon presque horizontal isolé sur trois
fils tendus entre le potelet supérieur de la lanterne
et le mât de tape-cul du bateau.
3° Dans la salle des machines, un alternateur à
haute fréquence mů par un moteur électrique
recevant le courant continu d’un des groupes élec-
trogènes, un tableau de distribution et un manipu-
lateur automatique.
4 Dans une armoire vitrée placée dans le roule
au-dessous du tronçon vertical de l'antenne, les
appareils à haute tension comprenant le circuit
oscillant, un éclateur du type tube-plateau et un
ventilateur de soufllage mù par un petit moteur à
courant continu.
Le fonctionnement des divers signaux de brume
sera assuré normalement sur chaque bateau par
une des chaudiċres constituant l'appareil évapora-
toire, qui devra également fournir la vapeur néces-
saire à la marche d’un condenseur indépendant
auquel tous les engins du bord ramèneront leur
vapeur à travers un filtre à éponges; il en sera
ainsi en particulier du guindeau à vapeur destiné
à manœuvrer les ancres, dont la principale, de
forme champignon et du poids de 2000 kilogrammes,
sera frappée à l'extrémité d'une chaine de mouil-
lage de 300 mètres de longueur et de 44 milli-
mètres de calibre. Les chocs et rappels de la chaine
seront amorlis par l'interposition de ressorts fixés
sur bittes et formés de piles de rondelles Belleville
pouvant supporter une charge d'aplatissement de
45 000 kilogrammes.
La dépense d'établissement du feu flottant Le
Havre et de son rechange s'élève à 825 000 francs,
dont la moitié est fournie par les Chambres de
commerce du Havre et de Rouen.
PIERRE GUIDEL.
Ne 1457
COSMOS
721
Les « Nymphes » de la baie de Shima.
Dans le district de Shima, qui s'étend le long de
la côte japonaise baignée par l'océan Pacifique, il
existe une petite colonie obscure dont nombre
d'ethnographes semblent ignorer l’existence. Cette
colonie n’en est pas moins une curiosité qui mérite
une mention spéciale.
Datant de plus de dix siècles, elle ne comprend
qu’un seul et unique village dont la population
masculine se distingue par une insigne nullité,
mais dont la population féminine est particuliè-
rement intéressante.
En effet, dans cette agglomération, je dirais
minuscule, — elle ne compte que quelques centaines
d'habitants — les femmes sont à la fois chef et
soutien de la famille. Elles portent le nom de
« Nymphes », parce que leur occupation princi-
pale consiste à plonger dans la mer, souvent hou-
leuse, de la baie de Shima pour rechercher les
perles précieuses cachées dans les profondeurs de
l'océan.
Robustes et solidement bâties, le teint bronzé,
les nymphes accomplissent un travail excessive-
ment dur et pénible. Elles restent dans l’eau jus-
qu’à dix heures par jour, et, même au plus fort de
l'hiver, elles y demeurent deux ou trois heures.
Plongeuses et nageuses émérites, elles passent à
chaque plongée deux et même trois minutes sous
l’eau.
Et, quand elles reviennent de la mer, leur tâche
n’est pas terminée. Elles s'occupent alors de leur
ménage et de leurs enfants, tandis que les hommes
cultivent le plus beau « dolce farniente ». Très
rarement les femmes ont recours à eux.
La naissance d’une fille est une cause de réjouis-
sance et d'allégresse pour toute la gent féminine
de ‘la colonie, alors que celle d’un garçon passe
pour ainsi dire inaperçue, car elle est regardée
comme une malchance.
Dès l’âge de quatre ans, on mène les pelites
filles dans l'élément liquide pour leur apprendre
à nager et à plonger, et à treize ans elles sont
déjà admises au rang des nymphes. À partir de
cette époque, les nouvelles recrues travaillent pour
leur trousseau de fiancée, et, la plupart du temps,
elles arrivent à ramasser un pécule assez rondelet
avant leur mariage.
D'ailleurs, les plus expertes réussissent souvent
à se marier avec des hommes fortunés et de bonne
famille, car, à Shima, ce n'est pas tant la beauté
qui décide dans la question matrimoniale, mais
l'habileté plus ou moins grande d'une plongeuse.
Les nymphes se marient d'habitude entre seize
et vingt ans, mais elles continuent à plonger jusque
vers la quarantaine. Lorsqu’'elles cèdent leur place,
ce n’est point pour se reposer, car à elles encore
incombe le soin d'élever leurs petits-fils, ce qui
leur donne assez d'occupation pour que l’on puisse
dire que les femmes de la baie de Shima peinent
sans répit, jusqu'à la fin de leur vie, tandis que
les hommes, qui ne sont que leurs serviteurs, et
quels serviteurs! coulent une existence des plus
insipides et des plus insigniliantes.
Et, quoique le Japon passe pour ètre un des
ennemis réputés irréductibles des suffragettes, il
n'en offre pas moins un exemple vivant et instructif
aux suffragettes du mondeentier dansles«nymphes »
de Shima.
L. KUENTZ.
re
SOCIETES SAVANTES
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séancepublique annuelle du lundi16 décembre1912.
PRÉSIDÉE PAR M. GABRIEL LIPPMANN, PRÉSIDENT.
Le président ouvre la séance par le discours d'usage
et rend un dernier hommage aux collègues disparus
depuis un an.
Le mois de décembre 1912 a été dur pour la Com-
pagnie qui, en quelques jours, a perdu le naturaliste
Bornet, le géomètre astronome Radau et le chirur-
gien Lannelongue. Quelques jours plus tard, lord Lister,
associé étranger, le grand chirurgien. Puis Joannes
Chatin, le physiologiste, qu’elle avait accueilli en
1900. Enfin, Henri Poincaré, mathématicien, astronome
et physicien.
Le président donne à la mémoire de ces savants un
tribut d’éloges que nous reproduirons prochainement.
Après la proclamation des prix, M. Ph, van Tiesheim
a lu une notice sur la vie et les travaux de Jean-
Baptiste Dumas, le célèbre chimiste, ancien secrétaire
perpétuel de l'Académie des sciences.
Prix décernés.
GÉOMÉTRIE
Grand prix des sciences mathématiques. —
Prix biennal. Un grand prix de 3 000 francs est décerné
à M. Pienre Bourroux,
Un grand prix de 2 000 francs est décerné à M. JEAN
Cuazy.
Un grand prix de 2 000 francs est décerné à M. RENÉ
GARNIER,
722
Prix Francœur (1 000 fr). — Le prix est attribué
à feu Euize LEMOINE, pour l’ensemble de ses travaux.
Prix Poncelet (2 000 fr). — Prix annuel alternatif,
destiné cette année à récompenser l'auteur de l'ouvrage
le plus utile au progrès des sciences mathématiques
pures.
Le prix est décerné à M. Evwoxo MAiLuer, ingénieur
en chef des ponts et chaussées.
MÉCANIQUE
Prix Montyon (700 fr). — Le prix est décerné
à M. Av. Dourre, pour son s{abilisateur automatique
longitudinal des aéroplanes.
Prix Fourneyron. — Un prix de 1 000 francs est
décerné à M. G. ErreL, ingénieur, pour ses e.rpé-
riences sur la résistance de l'air.
Un prix de 700 francs est décerné à M. ARMAND DE
GnawonxT, duc de Guiche, pour ses travaux intitulés :
Essais d'Aérodynamique.
Prix Boileau (1300 fr). — Le prix est décerné
à M. A. Laray, professeur de physique à l'Ecole poly-
technique, pour l’ensemble de ses travaux relatifs aux
mouvements des fluides.
NAVIGATION
Prix extraordinaire de la Marine (6 000 fr). —
Le prix est partagé entre :
M. LE Pace, pilote-major de la flotte à l'Ecole de
pilotage de Saint-Servan, pour l’ensemble de ses tra-
vaux relatifs au pilotage;
M. le commandant Roxacu, auteur d'un appareil de
dragage pour déblayer les passes défendues par un
champ de mines sous-marines;
M. Maneec, ingénieur en chef de la Marine, sous-
directeur de l'Ecole d'application du Génie maritime
à Paris, pour son système d'écouvillonnage à air
comprimé.
Prix Plumey (4000 fr). — Le prix est partagé
entre :
M. Victron GauxiEr, directeur des constructions
navales, à Marseille, pour son système perfectionné
de périscope;
M. HExRtT Faske, pour son invention des flotteurs
pour hydroaéroplanes.
ASTRONOMIE
Prix Pierre Guzman (100 000 fr). — Décerné
à celui qui aura trouvé le moyen de communiquer.
avec un astre autre que Mars. À défaut de ce prix, les
intérèts seront attribués, en 1915, à un savant qui aura
fuit faire un progrès important à l'astronomie.
Le prix n'est pas décerné.
Prix Lalande (540 fr). — Le prix est partagé entre
MM. HE. Kogorv et C.-WN, Winrz, astronomes à l'Observa-
loire de Strasbourg, pour leurs travaux relatifs à la
détermination exucte des coordonnées d’un très grand
uvinbre de nébuleuses.
Prix Valz (400 fr). — Le prix est décerné à
M. ALEXANDRE SCHAUMASSE, astronome à l'Observatoire
de Nice, pour ses travaux relatifs aux petites planètes
et aux cometes.
Prix Janssen (300 fr). — Ce prix, consistant en une
médaille d'or, cst décerné à M. A. Peror, physicien-
COSMOS
96 DÉCEMBRE 1912
astronome à l'Observatoire de Meudon, pour ses tra-
vaux de physique pure, et en particulier pour ses
recherches, faites en commun avec M. Fabry, qui ont
conduit à une nouvelle méthode d’étude des spectres.
GÉOGRAPHIE
Prix Tchihatchef (3 000 fr). — Le prix est décerné
au duc DEs ABnhUZZES, pour son voyage d’explorations
scientifiques au Carakoroum et dons l'Himalaya occi-
dental.
Prix Binoux (2000 fr). — Le prix est décerné à
M. Ficuor, ingénieur hydrographe de la Marine, pour
son mémoire intitulé : Réduction au sphéroïde ter-
restre des données fournies par les opérations de
triangulation.
Prix Delalande-Guérineau (2 000 fr). — Décerné
à M. le capitaine Tizuo, pour ses travaux topogra-
phiques en Afrique centrale.
Prix Gay (1 500 fr). — Question posée : Etude des
marées de l'écorce terrestre.
Le prix n’est pas décerné.
Une mention de 500 francs est accordée à M. DELauxEY,
lieutenant-colonel en retraite, pour son mémoire inti-
tulé : Znfluences sismiques.
PHYSIQUE
Prix Hébert (1000 fr). — Le prix est décerné à
M. HouLceviGue, professeur à la Faculté des sciences
de Marseille, pour l’ensemble de ses travaux relatifs
à la physique. |
Prix Hughes (2 500 fr). — Le prix est décerné
M. ARNAUD LE GRAkoNT, pour l’ensemble de ses travaux
de spectroscopie.
Prix La Caze (10 000 fr). — Le prix est décerné
à M. MarceL BriLLouiN, professeur au Collège de France,
pour l'ensemble de ses travaux de physique pure et
de physique mathématique.
CHIMIE
Prix Jecker (10000 fr) — Ce prix, destiné à
récompenser l'auteur de travaux remarquables de
chimie organique, est décerné à M. BourQuELoT, pro-
fesseur à l'Ecole supérieure de pharmacie à Paris.
Prix Montyon (Arts insalubres). — Le prix, d'une
valeur de 2500 francs, est décerné à M. Pacz Abax,
inspecteur général des établissements classés, à la
Préfecture de police, pour l’ensemble de ses travaux
relatifs à l’ygiène industrielle.
Prix Cahours (3 000 fr). — Ce prix annuel, décerné
à titre d'encouragement à des jeunes gens qui se
seront déjà fait connaitre par quelques travaux inté-
ressants et plus particulièrement par des recherches-
sur la chimie, est partagé également entre M™* RAMARTÉ
Lucas, MM. Pauz CLausuanN et OsTWALD.
Prix La Caze (10 000 fr). — Le prix est décern-
à M. Unsaix, professeur de chimie minérale à la Sor-
bonne, pour l’ensemble de ses travaux.
MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE
Prix Victor Raulin (1 500 fr). — Ce prix, à cycle
et à sujets variables, est destiné cette année à faciliter
les travaux relatifs à la minéralogie ou à la pétro-
graphie.
No 1157
Le prix est décerné à M. HENRI ARSANDAUX, profes-
seur à l'Ecole municipale de physique et de chimie.
BOTANIQUE
Prix Desmarzières (1 600 fr). — Le prix est
décerné à MM. Eu et Emize Mancuar, pour leur tra-
vail intitulé : Aposporie et serualité chez les mousses.
Prix Montagne (1 500 fr). — Un prix de 1 000 francs
est décerné à M°° Pau Leuoixe, pour son travail sur un
groupe d'algues incrustées de calcaire,les Mélobésiées.
Ua prix de 500 francs est décerné à M. H. Cozuix,
pour un travail sur le Botrytis cinerea.
Prix de Coincy (900 fr). — Le prix est décerné
à M. CauiLce SERVETTAZ pour sa Monographie des
Eléagnacées.
ANATOMIE ET ZOOLOGIE
Prix da Gama Machado (1200 fr). — Ce prix
triennal est décerné à M. J. Duesserc, chargé de
cours à l’Institut d'anatomie de l'Université de Liège,
pour ses recherches sur la spermatogenèse chez le rat.
Prix Thore (200 fr). — Prix alternatif, destiné
cette année à récompenser des travaux sur les mœurs
et l'anatomie d'une espèce d'insectes d'Europe. Le
prix est décerné à M. ANTOINE GROUVELLE, pour
l’ensemble de ses travaux sur les Coléoptères clavi-
cornes, et pour son ouvrage intitulé: Synopsis des
Rhysodides et description d'espèces nouvelles.
Prix Savigny (1500 fr). — Le prix est décerné
à M. Lovis Germain, préparateur de zoologie au
Muséum d'histoire naturelle, pour l’ensemble de ses
travaux sur la Faune malacologique de l'Est africain.
MÉDECINE ET CHIRURGIE
Prix Montyon. — Trois prix de 2 500 francs cha-
cun sont décernés à :
M. V. Paco, pour ses travaux relalifs à ‘a Mesure
de la pression artérielle chez l'homme;
M. Caarces Nicozce, pour ses travaux surle Typhus
exanthématique ;
M. O. Josué, pour ses travaux sur l’Arfér:o-sclérose.
Trois mentions de 1 500 francs chacune sont accor-
dées à :
M. H. Carré, pour ses travaux originaux, traitant de
certaines affections du mouton sous la dépendance du
microbe de la suppuration caséeuse ;
MM. Marais et M. Lecer, pour leur ouvrage intitulé:
Recherches de parasitologie et de pathologie humaines
et animales au Tonkin;
M. ETIENNE GINESTOUs, pour son mémoire intitulé :
Ophtalmo-chromo-diagnostic et photothérapie ocu-
laire.
Des citations très honorables sont accordées à:
M. JEAN Troisier, pour son travail intitulé : Role des
hémolysines dans la genèse des pigments biliaires et
de l’urobiline :
MM. HENRI CLaune et STEPHEN CHaAuverT, pour leur
travail intitulé : Semiologie réelle des sécrétions
totales des nerfs mixtes périphériques ;
M. ALBERT Sézary, pour ses Recherches sur les surre-
nalites scléreuses;
M. A. Maciror, pour son £tude de la survie de la
COSMOS
723
cornée transparente de l'œil conservée en dehors de
l'organisme.
M. Louis REXoN, pour son ouvrage intitulé : Ze trai-
tement scientifique pratique de la tuberculose pulmo-
naire;
Noer FiESsINGER, pour son ouvrage intitulé : Za cel-
lule hépatique, particulièrement cheg les mammifères
el chez l’homme;
M. Gronëes ScHRe nER, pour son ouvrage intitulé :
La poliomyélite épidémique.
Prix Barbier (2 000 fr). — Le prix est décerné à
M. EuGèxe Lécer, pharmacien à l'hôpital Saint-Louis,
pour l’ensemble de ses travaux.
Prix Bréant (100 000 fr) — Ce prix, destiné à
récompenser celui qui aura trouvé le moyen de guérir
le Choléra asiatigne, n’est pas décerné.
L'Académie décerne, sur les arrérages de la fon-
dation :
Un prix de 2500 francs, à M. C.-J. Finlay, pour
l'ensemble de ses travaux Sur le rôle des moustiques
dans la propagation de la fièvre jaune;
Ua prix de 2500 francs, à M. A. AGRAMONTE, pour
l’ensemble de ses travaux sur le mème sujet.
Prix Godard (1000 fr) — Le prix est décerné
à M. Jacuces Panisor, pour ceux de ses travaux qui sc
référent au fonctionnement du rein et des capsules
surrénales : Pression artérielle et glandes à sécrétions
internes.
Prix du baron Larrey (750 fr). — Le prix est
décerné à M. TroussainT, médecin inspecteur de l'armée,
directeur du service de santé, pour son ouvrage inti-
tulé : La direction du service de santé en campagne.
Des mentions très honorables sont accordées à :
M. Ca. Teissier, médecin-major de 1" classe, au
5° régiment d'infanterie, à Paris, pour un travail inli-
tulé : De l'albuminurie latente dans l'armée;
M. Taron, médecin-major de 2° classe, à l'Ecole du
Val-de-Grûce, pour son mémoire intitulé : Etude sur
l'association de la srarlatine et de la rougeole;
M. R. Picacue, rmédecin-major au 14° régiment
d'infanterie, à Marseille, et M. G. Wouus, médecin
aide-major au 74° régiment d'infanterie, à Nancy, pour
leur mémoire intitulé: Recherches sur l'histologie
normale et pathologie du thymus chez quelques mam-
miferes:
M. A. Coxon, médecin-major, chef du Laboratoire de
bactériologie de l'hôpital militaire du Belvédire, à
Tunis, pour son mémoire intitulé : Etude bartériolo-
gique de l'épidémie de choléra qui a sévi, en 1911, sur
les troupes de la division d'occupation de la Tunisie.
Prix Bellion (i 400 fr). — Le prix est décerné à
M°° Banpa-LEcnaIN, vice-présidente du patronage des
aliénés du département de la Seine, pour la campagne
anti-alcoolique à laquelle elle a dévoué sa vie.
Une mention honorable est accordée à M.J. CAvail LÉ
pour son ouvrage intitulé: Le Charbon professionnel.
Prix Mège (10 000 fr). — Le prix n’est pas décerné.
Le prix annuel (300 fr), représenté par les arrérages
de la fondation, est décerné à M°’ Loxc-Laxony, chef
de clinique adjoint des maladies nerveuses à la
Faculté de médecine de Paris, pour son ouvrage inti-
tulé: La maladie de Little, étude anatomique elt
puthogénique.
~I
IC
pa~
PHYSIOLOGIE
Prix Montyon (Physiologie expérimentale). — Le
prix, d’une valeur de 750 francs, est décerné à
M. P. Portier, maitre de conférences à la Sorbonne,
pour ses ouvrages intitulés : Æecherrhes physiolo-
qiques sur les insectes aquatiques et Recherches phy-
siologiques sur les champignons entomophytes.
Des mentions très honorables sont accordées à :
M. Max HozLuaxx, préparateur au Muséum d'histoire
naturelle, pour ses travaux sur les Leurocytes;
M. Tuéovore Rosser, directeur de l'Institut phoné-
tique à l'Université de Grenoble, pour son travail
intitulé : Æecherches e.rpérimentales pour l'inscription
de la voir parlée;
M. Jures GLoven. pour son mémoire intitulé : ?hysio-
logie de la voir. Recherches sur la réception des ondes
sonores vocales et applications. Dissociation auditive
el graphique des timbres vocaur.
Prix Philipeaux (! 800 fr). — Le prix est partagé
entre :
M. Marcer Lisbonne, pour son travail inlitulé : Sur
deur conditions de milieu nécessaires à la saccharifi-
cation de l'amidon par les amylases salivaires et pan-
crealiques :
M. Euize-F. TEnRoINE, maitre de conférences à l'Ecole
des hautes études au Collège de France, pour l'en-
semble de ses travaux, portant principalement Sur
la constitution colloidale des constituants de lorga-
nisme, sur les ferments du suc pancrealique, cte.
Prix La Caze (10 000 fr). — Le prix est décerné
à M. E. WeniuEimEen, professeur à la Faculté de méde-
cine de Lille, pour l'ensemble de son œuvre physiolo-
gique.
Prix Martin-Damourette (1:00 fr). — Le prix
est décerné à M. Macri ARrTHUS, pour son travail
intitulé : Etude sur les sérums antivenimeur.
Prix Lallemand (1 809 fr). — Le prix est partagé
entre : |
MM. Gagnez PErir, professeur à l'Ecole nationale
vétérinaire d'Alfort, et L£éox MancuaNp, médecin en
chef de la maison nationale de Charenton, pour leur
mémoire intitulé : Recherches cliniques et anatomiques
sur da patholoyie comparée du système nerreuc;
M. GivsErre STERzI, professeur à l'Institut anato-
mique de l'Université de Padoue, pour son ouvrage
intitulé: X sistema nervoso central dei Vertebrati:
vol. l, Ciclostomi; vol. U, Pesci.
Une mention tres honorable est accordée à M. J. de
Goyox, mcdecin-major de 2 classe des troupes colo-
niales au 1° régiment d'artillerie à Rochefort-sur-Mer,
pour son travail: Sur la conduction sensitive dans la
moelle épiniere. |
Prix Pourat (il 000 fr). — Question posée : Apporter
des doruments nouveaur sur l'utilisation et Uassümi
lation des albuwminoides de la ration alimentaire.
Le prix est décerné à M. F. Macon, professeur de
physiologie à l'Ecole nationale vétérinaire de Lvon,
pour Son tasmoie inlitulé : Recherches sur le role des
yiaisses duus Caulilisaätion de Calbumine alimentaire.
STATISTIQUE
Prix Montyon. — Un d’une valeur de
S00 francs st décerné à M. IHENRt AUTERBR, pour <on
prix
COSMOS
26 DÉCEMBRE 19492
mémoire intitulé : Æssai d'ajustement des tables de
mortalité du Comité des Compagnies françaises d'assu-
rances sur la vie.
Un prix de 600 francs est décerné à M. Loris pe Goy,
directeur des contributions directes et du cadastre du
département de l'Aube, à Troyes, pour ses travaux
intitulés : Un coup d'œil sur nos finances départemen-
tales et communales. — Les subventions de l'État et la
mesure de leur effet utile. — Les voies ferrées d'in-
térèt local et l'intervention financière de l'État.
Une mention de 300 francs est attribuée à MM. E. Ja\-
SELME, professeur agrégé à la Faculté de médecine de
Paris, et A. BarsĖ, chef de clinique à la méme Faculté,
pouc leur £tude statistique sur les cas de cancer traités
à l'hôpital Tenon pendant la période 1901-1906.
Une mention de 300 francs est également attribuée
à M. BaoouiN-Lacouse, pour son travail intitulée : Sta-
listique microscopique de l'air, de l'eau et du sol de la
ville de Troyes.
HISTOIRE DES SCIENCES
Prix Binoux. — Un prix de 2 000 francs est décerné
à M. J.-L. Ileisenc, professeur à l’Université de
Copenhague, pour ses travaux relatifs à l Histoire des
mathématiques anciennes, et plus particulièrement
pour ses travaux sur le Traité de la méthode d'Archi-
mede.
Un prix de 1000 francs est décerné, sur les arré-
rages de la fondation, à M. Marcez LANDRIEU, pour son
volume sur La vie et l'œuvre de Lamarck.
PRIX GÉNÉRAUX
Médaille Arago. — Cette médaille d'or, décernée
par l’Académie sur la proposition de son bureau,
chaque fois qu'une découverte, un travail ou un ser-
vice rendu à la science lui paraïitront dignes de ce
témoignage de haute estime, est décernée au prince
RoLaxD BONAPARTE.
Médaille Berthelot. — Les médailles Berthelot
sont décernées aux lauréats des prix de chimie, qui
ne l'ont pas encore obtenue: MM. BourgueLoT, ParL
ADau, M°° RauanT-Lucais, MM. PauL CLAUSMANN, OswaLn.
Prix Gegner (4 000 fr). — Le prix est décerné à
M.-J.-H. Fasre, correspondant de l’Académie.
Prix Lannelongue (2 000 fr). — Les arrérages de
celte fondation, due à la libéralité de M. le professeur
Lannelongue, membre de l'Institut, sont partagés
entre M* Cusco et M°° Rrucx.
Prix Gustave Roux (1 000 fr). — Ce nouveau prix
annuel, fondé par M®° V'"* Gustave Roux, en souvenir
de son mari, est destiné à récompenser un jeune savant
francais dont les travaux auront paru remarquables
à l'Académie.
Le prix est décerné à M. Anmann BILLARD, agrégé,
docteur ès sciences naturelles, préparateur à la Faculté
des sciences, pour ses travaux sur les animaux de la
classe des //ydr'oides.
Prix Trémont (i 190 fr). — Le prix est attribué à
M. CuanLes FRÉMONT.
Prix Wilde (4 000 fr). — Le prix est décerné à M. le
commandant Feruié, pour l'ensemble de ses travaux
sur la télégraphie sans fil.
Prix Lonchampt (000 fr). — Ce prix annuel esl
destiné à récompenser l'auteur du meilleur mémoire
N° 4:57
sur les maladies de l’homme, des animaux et des
plantes, au point de vue plus spécial de l'introduction
des substances minérales en excès comme cause de
ces maladies.
Le prix est partagé : Un prix de 2 000 francs est
décerné à M. GRIMBERT; un prix de 1 000 francs est
décerné à M. Bacros; un prix de 1 000 francs est décerné
à M. Juzes Wozrr.
Prix Saïîntour (3 000 fr). — Un prix de 2 000 francs
est décerné à M. Macnice LauGenon, préparateur à la
Faculté de médecine de Paris, pour ses travaux de
Paléobotanique.
Une mention de 1 000 francs est accordée à M. Wir
DarviiLé, ingénieur, pour son ouvrage intitulé : L'eau
å la ville, à la campagne et dans la maison.
Prix Bordin (Sciences naturelles) (3000 fr). —
Question posée : Recherches sur le délerminisme de la
sexualité chez les êtres vivants.
Le prix n'est pas décerné.
Un encouragement de 2000 francs est accordé à
M. R. RosixsoN, pour son mémoire intitulé: Contri-
bulion à l'étude du déterminisme de la serualité chez
quelques mammifères.
Prix Houllevigue (5 000 fr). — Le prix est partagé.
Un prix de 3 000 francs est décerné à M. H. LEBESGUE,
maitre de conférences à la Faculté des sciences de
Paris.
Un prix de 2 000 francs est décerné à M. RaveĘu, pour
ses travaux dans le domaine de la physique.
Prix Caméré (4000 fr). — Le prix est décerné à
l’œuvre de feu M. GiıscLarn, ingénieur civil, ancien chef
de bataillon du génie, et plus spécialement à son sys-
tème de pont suspendu rigide.
Prix Jérôme Ponti (3500 fr). — Le prix est
décerné à M. Georces Rovx, pour son ouvrage intitulé :
Flore de France, de Corse et d Alsace-Lorraine.
Prix Leconte (:0 000 fr). — Le prix n'est pas
décerné.
L'Académie a déjà couronné l’année dernière l’œuvre
considérable de M. Cuanees TELuIER : elle lui accorde
en outre, cette année, la somme de 8 000 francs sur
les fonds Leconte.
Elle donne, sur les arrérages de la fondation, un
prix Leconte de 12 090 francs à M. Forest, pour l'en-
semble de ses découvertes relatives aux moteurs
à explosion.
Prix Laplace (les Œuvres de Laplace). — Le prix
est décerné à M. Jrces-AboLphe MEN, sorti premier de
l'Ecole polytechnique et entré, en qualité d'élève-
ingénieur, à l'Ecole des mines.
Prix Félix Rivot (2:00 fr). — Le prix est partagé
entre MM. JuULES-A DOLPHE MENJ et JULES-FRANCOIS-GABRIEL
DavaL, entrés les deux premiers, en qualité d'éléves-
ingénieurs, à l'Ecole des mines, et MM. ReNÉ-GAsToON-
RaywonD MaBiLLEAu et Ravmoxb-EuMaAxtUEL BOLLAK. entrés,
les deux premiers, au mème litre, à l'Ecole nationale
des ponts et chaussées.
Fonds Bonaparte (cinquième annuité: portée,
à partir de cette année, à 50 000 fr). — Le prince
Roland Bonaparte, par une lettre en date du 23 no-
vembre 1911, publiée dans les Comptes rendus de la
COSMOS 725
séance du 27 novembre, a déclaré vouloir mettre à la
disposition de l'Académie des sciences, pour l'encou-
ragement es recherches scientifiques parmi les tra-
vailleurs n'appartenant pas à cette Compagnie, cinq
nouvelles annuités de 50 000 francs.
Ces subrentions ont exclusivement pour but de pro-
voguer des découvertes en facilitant la tache de cher-
cheurs qui auraient deja fait leurs preuves en des
travau.r originau.r el qui manqueraient des ressources
suffisantes pour entreprendre où poursuivre leurs
inves{igations.
Attirés par cette largesse, les candidats ont afflué
cette année, et ils ont atteint le nombre de 87.
La Commission, à son très grand regret, n'en a pu
retenir que 16, auxquels elle a attribué une somme
totale de #1 000 francs, laissant en réserve 9 O0ù francs
destinés à augmenter la somme disponible en 1913.
Elle vous propose d'accorder :
4°, 2, 3 et +, en # parts égales, 12 009 francs aux
membres de la Mission scientifique du Maroc.
La Société de Géographie envoie au Maroc une
mission scientifique chargée spécialement de recherches
géologiques, zoologiques, botaniques et agronomiques,
à l'effet d'établir l'inventaire raisonné des richesses
naturelles du pays.
M. Loris Gesn, maître de conférences à la Sor-
bonne, président de la Société géologique de France,
était tout désigné par ses travaux et ses explorations
antérieures pour diriger les recherches géologiques et
minéralogiques.
M. Paray, instituteur à Oran, qui étudie depuis
quinze ans la faune du Maroc, s'occupera de la z00-
logie et de la préhistoire.
Pour la botanique, la Société de Géographie s'est
adressée à M. J. Piranb, professeur à l'Ecole de méde-
cine et de pharmacie de Tours, qui s'est voué depuis
longtemps à l'étude de la flore et de l'agriculture dans
l'Afrique du Nord.
D'autre part, M. le gouverneur général de l'Algérie
a bien voulu déléguer à la mission M. Bavariz, chef
du service vétérinaire et du service pastoral de l'Algérie.
Avec de telles compétences, avec l'appui du minis-
tère de la Guerre, du ministère des Affaires étrangères
et du ministère de l'Instruction publique, avec le con-
cours de divers groupements et de généreux dona-
teurs, le succés de la mission est certain. Mais si l’on
veut que les résultats correspondent à l'effort accompli.
il importe de laider pécuniairement. Nous sommes
assurés de répondre ainsi à la pensée du prince Roland
Bonaparte en contribuant à l'euvre de civilisation
que s'est imposte la France et que préparent si glo-
rieusement ses soldats.
5 3000 francs à M. le professeur de ManToNxE,
chargé d'un cours de géographie à la Sorbonne, et
à ses collaborateurs, MM. Jean Brunhe<, professeur
à l'Université de Fribourg, et Emile Chaix, professeur
à l'Université de Genève, pour leur permettre de pour-
suivre l'établissement et la publication d'une collection
de documents morphologiques, intitulée Allas photo-
graphique des formes du relief terrestre. Cette publi-
cation à été entreprise, conformément à un vieu du
IX° Congres international de Géographie, dans linten-
tion d'établir, suivant un plan rigoureusement tracé,
un ensemble de vues typiques de toutes les formes
726
actuellement connues du relief terrestre. La géogra-
phie physique y trouvera, méthodiquement classés,
des documents certains, tels que les réclame toute
science naturelle descriptive. La subvention accordée
allègera les charges financières des auteurs, en mème
temps qu'elle constituera pour leur œuvre un encou-
ragement précieux.
6° 3 000 francs à M. Louis Duxoyer. — M. Dunoyer a
déjà publié des travaux très remarqués, dans lesquels
s'affirment de très rares qualités d'esprit. Ses dernières
recherches sur la fluorescence de la vapeur de sodium
pur ont particulièrement frappé les physiciens par la
simplicité et la portée des résultats obtenus. La sub-
vention actuelle serait employée à la construction
d'appareils destinés à l'exploration complète des
spectres de fluorescence et d'absorption fournis par
les métaux alcalins. Ces appareils serviraient aussi
à l'étude des dépôts métalliques que M. Dunoyer a très
habilement réussi à obtenir par projection rectiligne
matérielle, d'origine purement cinétique. Ils l'aideront
à éclaircir quelque arcane du monde des atomes.
7° 3 000 francs à M. Hamer. — M. Hamet a entrepris,
en 1905, dans le laboratoire de notre confrère, M. van
Tieghem, l'étude des Crassulacées. JI a acquis sur ce
sujet une compétence telle que, de tous les points du
globe, lui sont arrivés des échantillons vivants et des
herbiers qui constituent actuellement un ensemble
exceptionnel de matériaux. M. Hamet a déjà tiré de
ces matériaux une œuvre considérable. Mais des cir-
constances cruelles lobligent à demander une sub-
vention, sans laquelle il ne pourrait pas achever son
travail auquel s'intéressent les botanistes du monde
entier, et que M. le professeur Engler doit insérer,
aussitòt fini, dans sa grande encyclopédie botanique
Das Pflansenreich.
8° 2 500 francs à M. Boseen, aide astronome à l'Obser-
vatoire de Meudon. — M. Bosler est un physicien
astronome ayant fait ses preuves. Instruit à la spec-
troscopie par notre confrère M. Deslandres, avec
lequel il a visité, lors du Congrès de l’Union solaire,
en 1910, les principaux observatoires des Etats-Unis,
il veut, profitant de l'expérience acquise, étudier les
spectres des planètes en vue de déterminer la rotation
de ces corps et la nature de leur atmosphère. Un
prisme à grande dispersion lui est nécessaire, et, par
conséquent, le moyen de l’acquérir.
9° 2 500 francs à M. BaLviT. — Après avoir été quelques
années oflicier de marine, M. Baldit s’est consacré à
l'étude dés sciences et principalement de la météoro.
logie électrique, qu'il étudia au Puy de Dome avec le
regretté Bernard Brunhes. Depuis deux ans, il effectue
ponctuellement la mesure des charges électriques de
toutes les pluies tombant sur son domaine du Puy-
en-Velay et il est arrivé à des résultats fort intéres-
sants, communiqués à l'Académie. Amené naturel-
reiment à élargir son programme et à y comprendre
tous les phénomènes d'électricité atmosphérique qui
accompagnent les pluies d'orage, il a besoin d'instru-
ments enregistreurs, à coté de ses électromètres à
wesure directe. La subvention proposée servira äl'achat
de ces instruments.
10° 2500 francs à M. Pace Pasca, maître de confé-
rences à l'Université de Lille. — Particulièrement
attiré par l'étude phvsico-chimique des corps com-
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1919
plexes minéraux et organiques, M. Pascal a déjà
fourni une somme considérable d’excellent travail.
Les produits qu'il a obtenus, les déterminations qu'il
a fuites de leurs propriétés magnétiques, ont été lar-
gement utilisés par MM. Weiss ct Cotton dans leurs
recherches sur le magnéton et sur la biréfringence
magnétique. Aujourd’hui, M. Pascal se propose d'étudier
l'absorption exercée dans l'ultra-violet par les corps
dont il a déterminé les propriétés magnéliques. Il
demande une subvention pour acheter les appareils
indispensables, dont il tirera certainement bon parti.
11° 2500 francs à M. Scuzecez. — M. Schlegel a
entrepris dans les laboratoires de notre confrère
M. Delage, à la Sorbonne et à Roscoff, sur le dévelop-
pement des Crustacés Brachyoures, des recherches
qu'il importe de lui voir poursuivre. Si la partie ana-
tomique et les déterminations spécifiques peuvent et
doivent être faites à Paris, les recherches et les collec-
tions de larves pélagiques, et surtout les travaux
d'élevage, imposent des séjours assez prolongés, l'été,
dans les laboratoires maritimes, qui seuls offrent les
conditions requises. La subvention présente couvrira
une partie des frais de séjour et de recherches.
12° 2 000 francs à M. Sauvaceav, professeur à l'Uni-
versité de Bordeaux. — La récolte méthodique de
nombreux exemplaires des espèces d’un mème genre
semble éminemment propre à fournir des résultats
intéressants sur leurs relations. La distribution géo-
graphique convient particulièrement à fixer la filiation
des espèces, si l'on sait rétablir le parcours qu'elles
ont suivi. C'est à ce point de vue que M. Sauvageau
s'est appliqué à observer la répartition des Cystoseira,
plantes marines de grande taille, dans l’Océan et la
Méditerranée. Il se propose de suivre cette répartition
dans la Méditerranée orientale, le peuplement s'étant
sans doute fait de l'Ouest à l'Est,
13° 2 000 francs à M. Wezscu, professeur à l’Université
de Poitiers, qui scrute depuis plusieurs années les for-
mations quaternaires et récentes de l’ouest de la
France, ainsi que les dépôts de tourbe littorale : phé-
nomènes complexes, car ils touchent aux bossellements
de l'écorce terrestre, aux changements de niveau de
nos côtes, à la configuration ancienne de la France.
La comparaison avec les phénomènes analogues, très
étudiés dans le nord-ouest de l'Europe, s'impose,
L'auteur l’a entreprise et demande les moyens de la
continuer.
14° 2 000 francs à M. Bierav, maître de conférences
à l'Ecole des hautes études, pour la continuation des
recherches entreprises par lui depuis dix ans au labo-
ratoire de notre confrère M. Dastre, et qui ont porté
spécialement sur les hydrates de carbone. M. Bierry
a étudié d'abord les diastases qui concourent à la
digestion des hydrates de carbone, puis l’action des
rayons ultra-violets sur les sucres complexes. Actuel-
lement, il s'occupe de l'assimilation du galactose chez
le chien normal ou chez le chien dont le foie a subi
des lésions. Il se propose, en outre, de suivre le méta-
bolisme des différents sucres chez le chien dépancréaté
ou chez l'homme diabétique, en notant parallélement
la marche de l’acidose : questions d'un intérèt théo-
rique certain et pouvant présenter un intérèt pratique,
très grand pour le diabétique.
15° 2000 francs à M. le D' Mawas, attaché au labora-
Ne 1457
toire d’embryogénie comparée du Collège de France,
pour lui permettre de continuer ses expériences sur le
mécanisme de l’accommodation de l'œil, particuliè-
rement chez le chien. Il se propose de les diriger de
façon à déterminer la forme du cristallin pendant
l’accommodation, à savoir si, alors, le cristallin bas-
cule ou tourne sur lui-mème, et à reconnaitre l’action
COSMOS 727
de certains nerfs, nolamiment du grand sympathique
cervical, sur l'accommodation.
46° 2090 francs à M. Gnuvez, maitre de conférences
à l’Université de Bordeaux, chargé de mission en
Afrique occidentale, pour l'aider dans l'exploration de
la baie du Lévrier (Mauritanie) au point de vue zoolo-
gique, océanographique et géographique.
BIBLIOGRAPHIE
Les nouveaux horizons de la science, par
H. GuizcemiNor, chef des travaux de physique
biologique à la Faculté de médecine, président
de la Société de radiologie médicale de Paris.
T. F°: la Matière; la Molécule; l'Atome. Un
vol. 49 X 12 de 297 pages (4 fr). G. Steinheil,
éditeur, 2, rue Casimir-Delavigne, Paris, 4912.
Dans la série d'études que M. Guilleminot inau-
gure par le volume en question, l'auteur s`est pro-
posé « de grouper un cerlain nombre de connais-
sances, de dale relativement récente, touchant la
nature et la genèse de la malière et de la vie, et
de montrer les déductions qu’on en peut tirer ».
Il s'adresse à ceux qui en sont restés aux con-
naissances physiques et chimiques acquises sur les
bancs de l’école, ou à ceux qui, ayant achevé depuis
un certain temps le cours de leurs éludes secon-
daires, ont imparfaitement suivi depuis dix ans,
vingt ans, le progrès des sciences.
Ce premier volume explique quelle idée on doit
se faire aujourd’hui de la constitution de la matière,
surtout à la lumière des théories atomiques et mo-
léculaires que nombre d'auteurs, et notamment, en
ces dernières années, M. dJ. Perrin, ont mises en
lumière. Atomes et molécules restent des hypo-
thèses; mais ces hypothèses ont conduit à tant de
vérifications heureuses que l’on parle maintenant
couramment de la réalité des atomes et des molé-
cules. En recourant le moins possible aux notations
mathématiques même élémentaires, l’auteur nous
donne un résumé généralement simple et clair de
la chimie physique : les trois états de la maticre,
liens inler-atomiques et liens inter-moléculaires;
théories cinéliques; cryoscopie, osmose, capillarité;
cristallisation; mouvements browniens; grandeurs
des molécules déduites de la théorie cinétique.
Idées paramédicales et médicosociales, par le
D" Grasser. Un vol. in-46 broché (3,50 fr).
Librairie Plon-Nourrit et Ci*, 8, rue Garanciċre,
Paris.
Ce volume s'adresse au grand public : rôle de la
médecine dans la société, mode de recrutement
du corps médical, tableau de la lutte engagée
contre l’alcoolisme et la tuberculose, extension
des maladies nerveuses, tout cela intéresse tout le
monde.
Nous atlirons spécialement l'attention ici sur
deux chapitres, celui consacré à Auguste Comte,
« demi-fou de génie » — où l'on peut voir à quelles
simagrées un grand esprit peut descendre et quels
dérèglements peuvent coexisler chez le même
homme avec les plus fortes conceptions, — et celui
qui a pour titre la morale scientifique et la morale
de l'Évangile devant La sociologie. Le D' Grasset,
avec la haute compétence qui lui appartient, y
conclut que l'Évangile est la source unique de « la
vérité qui rend libre ».
Dernières inventions, dernières découvertes,
par DaniEL BELLET. Un fort volume illustré de
44 gravures, broché (3 fr). Paris, Hachette,
79, boulevard Saint-Germain.
Collaborateur du Cosmos, M. D. Bellet est
bien connu et fort apprécié de nos lecteurs. Il
réunit dans cet intéressant volume — qui est un
volume d’étrennes pour futurs ingénieurs — in-
nombrable série des dernières découvertes dans
tout le champ de la science. Aéronaulique, météo-
rologie, astronomie, géologie, géographie, voyages,
agriculture, mécanique, médecine, hygiène, chi-
rurgie, physique, chimie, télégraphie, photogra-
phie, défense nationale, ces disciplines diverses
nous livrent, grâce à lui, sous une forme attrayante
qui n'exclut point la précision, leurs précieux
secrets. M. D. Bellet a donc fait œuvre utile et à la
fois agréable. Quant à son éditeur, nous ne pou-
vons pas ne pas remarquer qu'il a fait un vrai
tour de force de bon marché. A. GC.
Agenda aide-mémoire agricole pour 1913, par
G. Wery,sous-directeurde l’Institut national agro-
nomique. Un vol. in-18 de 432 pages (1,50 fr).
Librairie Baillitre, 19, rue Hautefeuille, Paris.
Nous avons déjà signalé, les années passées,
lagenda agricole de M. Wery; nous avons indiqué
la somme de renseignements utiles aux agricul-
teurs qu'il contient. Sous un format réduit, facile
à mettre en poche, il rendra à toul cultivaleur ou
gérant de propriété des services de toute nature.
728
COSMOS
26 DÉCEMBRE 1912
FORMULAIRE
Pour boucher les fuites des seaux, arro-
soirs, etc. — Prendre simplement du mastic de
vitrier ou de la céruse en pâte et en mettre une
petite boulette sur le trou ou la fente en l’étendant
avec une lame de couteau. Un arrosoir qui ne vau-
drait plus la peine d’être réparé peut encore durer
plusieurs années en employant ce procédé.
Consolidation des ossements fossiles. —
Beaucoup d’ossements fossiles deviennent très
friables, sous l'influence de l'air, peu de temps après
leur extraction. On peut y remédier en les trem-
pant, pendant une demi-heure, dans un bain com-
posé de:
Silicate de potasse chirurgical........
Eau ticde ........ PMR SES CRT UE
Í partie
1 partie
On laisse ensuite sécher à l'ombre. Au bout de
vingt-quatre heures, la pièce a acquis une grande
résistance. On peut aussi employer le plàtrage qui
consiste à enduire l’objet d’une légère couche de
plâtre délayé très clair, qu'on applique au moyen
d’un pinceau. Si plusieurs couches sont nécessaires,
attendre que la première soit bien sèche avant de
mettre la seconde.
PETITE
Avis. — Comme nous le disons dans le corps de ce
numéro, la brochure qui réunit les articles du
D' P. Corret sur la réception des signaux horaires et
télégrammes méteorologiques par la télégraphie sans
fil, sera mise en vente, à partir du 1” janvier 1913, au
prix de 1 fr (franco 1,10 fr), à la Maison de la Bonne
Presse, 5, rue Bayard, Paris.
M. A. P. 55. — Le pneumatique, par H. PETIT (6,50 fr).
Librairie Dunod et Pinat, #9, quai des Grands-Augus-
tns, Paris, vous donnera tous les détails de la fabri-
caton des bandages et des chambres à air. — Ma-
chines pour la fabrication des pneumatiques : A. Olier,
à Clermont-Ferrand,
M. L. P.. àa P. — Veuillez vous reporter à l'article :
l'hygiène du chauffye, paru dans le numéro 1424 du
Cosmos, du % mar 1912. La question y est traitée tout
au long. Les radiateurs à gaz et les porles à pétrole
sans tuyau d'évacuation répandent dans l'air de la
piece chauflée de l'acide carbonique, de la vapeur
d'uau et méme de l'oxyde de carbone, celui-ci parti-
culerement dangereux. Ces moyens de chautlage
sont tout à fait à éviter dans ces chambres de malades.
M. V. F., à La R. — Pour lẹ Biocome, décrit dans
le numero du 12 décembre, il faudrait vous adresser
à M. Jaubert, inventeur de l'oxvlithe, 155, boulevard
Malesherbes, Paris, on à la Société l'Oxvlithe, 158. rue
Vietor-Huwo, à Levallois-Perret,
M. A. FF.
plomb qui Jes entoure il faut les taire ehavtter de facon
à V. — Pour débarrasser ces piéces du
Le Manuel des recherches préhistoriques, à qui
nous empruntons ces détails, indique aussi les pro-
cédés à la parafline et au blanc de baleine. Dans
les deux cas, on fait fondre ces matières et on en-
duit les ossements avec un pinceau pendant qu’elles
sont en fusion.
Écran rouge inactinique pour éclairage de
laboratoire photographique. — D'après Ombres
et lumières (mars 1912), le rouge obtenu par la
formule suivante est complètement inactinique et
donnera une lumière dont on pourra ètre sûr avec
les émulsions les plus sensibles :
A Gélatine................... 110 grammes.
Bou aane a gte 115 —
Bichromate de potasse.... 20 —
B Nitrate d'argent........... 20 —
Eau distillée.......... se 28 —
Faire gonfler la gélatine dans l’eau, puis la faire
fondre et ajouter le bichromate. Mélanger les deux
solutions À et B et étendre le mélange sur une
glace propre. Il se forme une pellicule rouge rubis
qu'on emploie pour les lanternes de laboratoire.
CORRESPONDANCE
que le plomb s'oxyde à l'air: il suffira ensuite de
frotter pour qu'il s’en aille en poussière.
M. A. B., à S. — Equation personnelle : temps qui
s'écoule entre percevoir et enregistrer, qui varie avec
les observateurs et qui entre comme élément dans la
correction d'une observation.
M. P. U., à A. — La brochure de M. W. Rose Smith,
intitulée : Chemins de fer électriques erpress romme
moyens défensifs, a été analysée par la revue Electri-
cian. Nous ne savons où elle a été publiée. Vous pour-
riez le demander à la revue The Electrician, Salisbury
Court, à Londres.
M. J. H. S., à P. — Sur la foi d'un ouvrage inexact
nous vous avons donné quelques renseignements
erronés. Notre collaborateur, le D' P. Corret, nous
indique que la self nécessaire pour entendre Coltano
est voisine de 6 FL. Pour Clifden, le réglage est voisin
de celui de Coltano.
M. G,,à ? — Les récepteurs de 4000 ohms vous don-
neront dans tous les cas de bons résultats. Ils fonc-
tionnent bien avec les détecteurs à cristaux et sont
très supérieurs pour les détecteurs électrolytiques.
M. L. G.,àù C. — Nous vous conseillons de faire con-
struire votre habitalion d'après les procédés employés
dans volre pays. Si vous vouliez avoir recours au
béton armé ou au ciment coulé, il faudrait faire venir
des ouvriers Spéciaux, et nous ne croyons pas que
vous y auriez éronomie.
Imprimerie P. FsRON-Vrau. 3 et 5, rue Bayard, Paris. ViIll°.
Le gérant.: A. Failt.
LE
Supplément au *t COSMOS ” N° 1457.
COSMOS
SOIXANTE ET UNIÈME ANNÉE
NOUVELLE SÉRIE
TOME LXVII
DEUXIÈME SEMESTRE 1912
TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES
A
Abrasif nouveau, p. 556.
Accumulateur alcalin P. Gouin,
p- 179-
Accumulateurs : régénération des
plaques, p. 112.
Acide carbonique liquide (indus-
trie) p. 227-
En œnologie, p. 331.
Acier et fonte, p. 316.
— trempé (lubréfiant
| travailler), p. 5o4.
Acicrs à outils, p. 348.
Acoustèle Daguin, p. 571.
Actinomycose, p. 400.
Aéroplane : équilibre
vent, p. 60.
— à ailes concaves, p. 325.
Aéroplanes : formule de vitesse,
pour
dans Je
p- 584.
— Empennages porteurs,
p. 584.
Affiches de couleur : lisibilité,
p. 255.
Albumines, p. 493.
Alcaloïdes, p. 380.
Alcools de la série grasse : absorp-
tion des rayons ultra-
violets, p. 472.
Alcue : migration bizarre, p. 143.
Alliage argent-aluminium, p. 658.
Alpes françaises : triangulation,
p- 499.
Aluminium (Attaque des usten-
siles en), p. 674.
pêcheries de la Prusse,
p. 480.
Ampoules à incandescence : ré-
sistance, p. 289.
Animaux : répartition sur le
globe, p. 246.
— (Besoin en albumine des
jeunes), p. 702.
Anguille : leu de ponte, p. 591.
Ambre:
Antennes de T. S. F. Longueur
d'ondes, p. 228.
— horizontales, p. 499.
— au raz du sol, p. 64o.
Araignées: utilité et nocuité,
p. 408.
Arbres polaires : eroissance. p. 371.
Arc au fer avec courant alter-
natif, p. 443.
Atmosphère : perturbations élec-
triques, p. 703.
Aurignacien : gravures et sculp-
turcs, p. 683.
Automobile chirurgicale Boulant,
202.
Automobiles : construction en
Amérique, p. 5.
— au Japon, p. 396.
—— Salon, p. 649.
Automotrices nouvelles de l'Etat,
p. 174.
— pétrolćo-électriques. p. 237.
Aviation : altitude, p. 6, 254,
341, 677.
— Hauteur, distance, durée,
p. 341.
— Voyage. p. 306.
— Victimes, p. 396.
— D'ale en Corse, p. 425.
— “Salon de 1912, p. 622. 654.
— Voyase de Tunisie en Si-
cile. p. 705.
Avoine dans l'alimentation, p. 30.
Azole aérien: fixation par cata-
lyse, p. 170.
B
Bacilles typhiques morts inoculés
à Phomme, p. Grr.
Baguette des sourciers: juge-
ment, p. 116, 5o8.
Barry (R. P. Vincent de Pan,
Pp. 61%.
Baleine : chasse au Natal. p. 470.
Balistique : étude cinématogra-
phique des phénomènes,
p. 88.
Balkans : oscillations, p. 605.
Balle incendiaire contre diri-
geables, p. 563.
Ballon (La plus grande distance
en), p. 5O08.
Ballons : nouvelle étoffe, p.
Ballon-sonde : altitude
p. 709.
Barrage de Galveston, p. 574.
Bassin de Southampton, p. 4oë.
Bateau à fond de verre, p. 255.
Bateau-feu du Havre, p. 692, 718.
Batcaux-phares du Havre, p. 569.
Benzine {Maladie causée par la),
p. 339.
Bètes comme remède, p. 579.
Béton : impermćabilisation, p. 616.
Beurre : conservation, p. 28, G1.
— Humidité, p. 152.
— ct margarine, p. 243.
— liygiène, p. 624.
Beurres anormaux, p. 235.
Beyrouth : Faculté de médecine
p. 646.
Biberon et Jait anorimai, p. 65».
Bibliothèque Sainte-Sophie à
Constantinople, p. 395.
110.
atteinte,
kd
Bière : conservation en bou-
lenles, p. 945.
Blattes (Les), p. 680.
— Destruction, pe 112.
Blé: Protection contre les cor-
beaux, p. 601.
Bots : conservation, p. 56.
=- Métallisation, pe 404.
bolide, p. 481.
Bouchons collés : manière de les
enlever, p. 700.
Boutes-de-neige : forcerie, p.
Boussole gyroscopique
p- 545.
650.
Sperry.
730
Bouteilles (Machine à faire les),
p. 069.
-- (Fermeture hermétique des),
p. 641.
Bouvreuil, p. 173.
C
téléphoniques
eleuses, pe 229.
Faivre : composition,
p. 8I.
Caféine : action cardiaque, p. 164.
Camion-grue électrique, p. 2590.
Campagnols en 1912, p. 3067.
Campanile de Venise: recon-
struction, p. 312, boÿ.
Camphrier : culture en Amé-
rique, p. 997.
Canal de Panama :
. 298.
—- Travaux, p. 313.
— de Suez: dérocheur, p. 313.
— de Panama: éboulement,
p. 906.
— Etat, p. 607.
— Eclairage, p. 6437.
Canon le plus gros, p. 285.
Canons : causes d'éclatement,
p- 309.
— nouveaux, p.
— de marine:
p. Do».
Cannot de sauvetage à
p. 229.
Caoutchone : synthèse, p. 176.
—- Coloration, p. 309.
Capitale créée de toutes pièces,
4/40.
Carat décimal, p. 706.
Carbone ‘Oxyde de)
p- 130.
Carotte pigment, p. 195.
Cabines silen-
Cachets
électricité,
425.
désignation,
moteur,
toximètre,
Carte météorologique de l'Eu-
rasie, p. 451.
Cellules du cœur : battements
rythmiques, p. 253.
Centrale électrique minuscule,
p. 640.
Centrales d'électricité, p. 678.
Centres bulbaires éveillés par cau-
térisalion nasale, p. OJI.
Chaleur comme ration d'appoint,
p. Gti.
Chambres à air de bicyclettes
comme lbgature, p. 5o59.
Champignons : toxicité, p. D6A.
Charbon : examen par ravons X,
p- 115.
- Conservation, p. 115
--. Substitut pour l'avenir,
P. 479.
— Jnflammation
p. Do8.
- Force motrice d'une tonne,
pe Doh.
-. ‘Expériences sur la forma-
ion du‘. p. 646.
Classes: repeuplement par adop-
tion, p. 44.
Chauffage électrique en
p. 195.
— défectueux: dangers, p. 460.
— électrique ? avenir, p. 521.
— central, p. bza.
spontanée,
Suède,
TABLE DES MATIÈRES
Chaussures imperméables, p. 336.
Chemin de fer de Key-West,
p. 10.
— pan-américain, p. 145.
— électrique urbain : capa-
cité de trafic, p. 195.
-— de Morez à Saint-Claude,
p. 6or.
— minier aérien, p. 706.
Chemins de fer du monde,
p. D89.
— français après la guerre,
p. 159.
Chien parlant, p. 145.
Chiens: envahissement, p. 477.
Chimiques (Influence des formes
des corps sur les réac-
tions), p. 695.
Chlorophylle (Synthèse de la)
expérimentale par rayons
ultra-violets, p. 24.
à Tripoli et expédition
italienne, p. 58.
— donné par les
p. 283.
— combattu par le
p. 253.
Chronométrie moderne, p. 383.
Chronoscope P. A. P., p. 2AA.
Chrysanthèmes : culture au Ja-
pon, p. 439.
d'eau (Remblais
par des), p. 450.
Cigarettes turques d'Aden, p. 376.
Choléra
huîtres,
tabac,
Chutes créés
Ciment armé et rouille, p. 224.
Cinématographe sur plaques,
p. 48.
— à images rapides, p. 88,
136, 286.
— pour inspecter les viandes,
p. 144.
— à main, p. 490.
— en couleurs, p. 649.
Circulation des voitures, p. 340.
Cloches et gongs, résonance mul-
tiple, p. 473.
les faire tenir
plätre, p. 364.
Cœur : survie en dehors du corps,
AT,
Coffre-fort géant, p. 341.
Colle à fa dextrine, p. 476.
Colombo de Ceylan : port, p. 3783.
Combustion incandescente sans
flamme, p. 149.
Comete 1912 a (Gale), p. 333,
365, 304.
Clous : dans le
— 1912 D (Futtle), p. 509,
BSA.
= 191 e (Borrelly), p. 533.
Composés endothermiques : for-
mation, p. 666.
Compteurs kilométriques, p. 373.
Conduites sous Peau: — pose,
p. 126.
Confisenrs : maladie profession-
nelle, p. 355.
Confitures : fabrication ration-
nelle, p. 103.
Constructions en béton : essais,
p. 256.
— Détermination des ten-
sions, p. 639
Coronium (Gco-), p. 142.
Corps à basse température : cha-
leur spécifique, p. 671.
Côtes anglaises : érosion, p. 85.
— protégées par ciment armé,
. 98.
Courants aériens en Afrique occi-
dentale, p. 416.
Crampe des télégraphistes, p. 716.
Grâne de Descartes, p. 415.
Cralères Junaires : formation,
p. 164.
Crayons (Bois des), p. 60, 113.
Crépe : nettoyage, p. 280.
Cristallisations artistiques, p. 343.
Cruciféres parasites : destruction
par acide sulfurique,
p. 84.
Cuivres : conservation, p. 336.
Culture mécanique : appareils,
P. 209.
D
Dactylophone : ancienne inven-
tion, p. 451. 665.
Dentifrices à l’eau oxygénée,
p. 103.
— à l'iode, p. 6go.
Dés spéciaux pour loteries, p. 18.
Désinfection des mains par tein-
ture d'iode, p. 25.
Diagnostic sérologique, p. 548,
D76.
Diélectriqnes minces : conducti-
bilité, p. 583.
Dirigeables (Tir contre
p. 284.
Disques sans dents pour coupage
des mélaux, p. 5o.
Dock flottant de 32 000 tonnes,
p. 434.
Dragage électrique dans exploi-
tation aurifère, p. 153.
E
rendue
les).
oxygénće stable,
p- 112.
— Epuration sur aluminium.
p- 961.
— de mer: valeur, p. 4Rr.
Eaux du Nil: filtration. p. 118.
— de Pougnes: origine, p. 420.
Fau
-— de Mexico: alimentation,
p. 517.
Procédé de clarification,
p. 705.
Eclairage au gaz : réglage, p. 108.
— en air vicié, p. 257.
Eclairages : gaspillage de l'éner-
gie, p- 172.
Eclipse du soleil du ro octobre
1912, Pp. 421, 477.
— observée en Babylonie.
p. 491.
terrestre :
P. 708.
Ecran métallisé pour projections,
563.
Ecrasés, p. 6.
Écriture chinoise nouvelle, p. 218.
Ecueil sous-marin à Toulon,
p. 229.
Eglise amhulante, p. 357.
Egvpte : irrigations et desséche-
ments, p. 264.
Ecorce constitution,
Electricité : grands réseaux de
distribution, p. 33.
— Nouveau tarif à Boston,
p. 675.
Embryons : développement in
vilro, p. 667.
Empoisonnement par capsules de
fulininate, p. 381.
Encéphale de Phomme de la
Quina, p. 53.
PESSOUrECCS
p. 409.
mortalité
226.
Engrais phosphatés : dégradation
en terre. p. 196.
Energie : mondiales,
Enfants : en Europe,
Engrenages en étoffe. p. 536.
Ensilage et ferments lactiques,
p- 220.
Eponges en papier, p. 537.
Eruption du Taal: suites pos-
sibles, p- 4.
Escargots : leçon d'observation,
p. 202. 325.
Espaces stellaires : sondages,
p. 645.
Esquimaux d'Alaska : éducation
q ,
p- 217.
Essence : augmentation de prix,
p. 200.
Essences : dissolution de l'eau,
. 243.
Etat civil en aéronautique, p. 397.
Etés 1911 ct 1912 : comparaison,
p. 645.
Etoile double à longue période,
p. 366.
Etoiles doubles : masse, p. 113.
-- Explication des courants,
p. 141.
Eucalyptol comme
p. 691.
Evaporation du sol et temps plu-
vieux, p. 333
Explosif de sûreté nouveau, p. 5.
— à l'oxygène liquide, p. 698.
vermifuge,
F
Fers électriques à repasser pour
cuisson, p. 675.
Fermentation accomplie par une
bactérie, p. 410.
Feuilles vertes: transpiration,
p. 528.
Fièvre typhoïde : vaccination,
p. Ro. 665.
—- Immunisation, p. 278.
— récurrente transmise par
les poux, p. 278.
Filaments métalliques : résistance,
289.
Film voilé par décharges élec-
triques, p. 396.
Filtre-presse Berrigan, p. 34.
Flacons : nettoyage, p. 168.
Flore du bord de la mer, p. 64.
— des montagnes, p. 214.
Flotte de commerce française,
p- 199.
Fonte et acier, p. 316.
Foies gras : industrie, p. 404.
Forces hydrauliques nouvelles,
p- 394.
TABLE DES MATIÈRES
coloniales françaises,
p. 367.
— Appauvrissement, p. 465.
Fossiles des premiers âges, p. 560.
Foudre : victimes, p. 309.
— et les arbres, p. 554.
— globulaire double, p. 618.
Fourrures modernes: prépara-
tion, p. 712.
crémaloires automobiles,
p. 313.
Fourneanux monstres. p. 146.
Frigoriliques agricoles, p. 17.
Froid : H° Congrès national,
p. A1.
Fromages paraffinés, p. 3$2.
Fruits : toilelte et truquage, p. 8.
Funiculaire aérien à voyageurs
au Tyrol, p. 426.
Forêts
Fours
Füls 3 assainissement, p. Do4.
G
Gants: fabriques à Grenoble,
p- 536.
bones des fosses
tiques, p. 24.
— jionisés: thćorie cinétique,
p- 471, 552, 666.
— naturel aux Etats-Unis,
p. 646.
— Production directe dans les
houillères, p. 703.
Gélatine pour tuberculeux, p. 283.
Gelée: pénétration dans le sol,
p. 394.
Géologie : localités célèbres, p. 355.
— et minéralogie, p. 557.
Gibicr ct aéroplanes, p. 285.
Giroflier : introduction au Gabon,
Gaz des sep-
p. 663.
Glace transparente et opaque,
p. 674.
Glaciers : importance économique,
p- 86.
Globules rouges du sang aug-
mentés par la choles-
térine, p. 8o.
Glucose : décomposition photo-
chimique, p. 527.
Gorges de Pfeffers, p. 321.
Goudronnage des routes et auto-
goudronneuse, p. 62.
Goutte guérie par le cidre, p. 57.
Gouttes d'eau : électricité, p. 5Ko.
Grains et fermpéêtes, p. Bo.
Gréôle el givre an Mont-Blane,
D. 991.
Grue flottante de Pola, p. 537.
Gruyère, p. Do2.
Gurres: résullats métallurgiques,
p. 425.
Gutta percha : arbres de PAfrique
tropicale, p. 352.
Xi
Hélium : gisements, p. 108.
Hématies, p. 280.
Herbes : destruction
allées, p. 78.
— aquatiques : destruction par
le chlore électrolytique,
p. 19ô.
conférence internatio-
nale, p. 449. 555.
dans les
Heure :
731
Ilivers doux (Les), p. ot.
Homme de la Quina : encéphale,
p. 53.
Horloge électrique sans fil, p. 171.
Houille : gisements découverts
par des Français, p. 317.
— Gaspillage, p. 467.
-- . Pompage, pe 565.
Huile de foie de requin, p. 33.
— de ricin pour graissage,
p. 540.
Huìitres et choléra, p. 283.
llydro-aćroplanes: concours,
p- 201, 250.
— Voyage, p. 341.
—- Frein et flotteurs mobiles,
p- 459.
H\drogène : transport par cana-
lisation, p. 4ŝ1.
Hydroplane rapide, p. 257.
Hypertension artérielle : traite-
ment par électrisation
de Pabdomen, p. 164.
I
Icebergs : forme probable, p. 131.
Ile de soufre, p. 4.
— de Zante: secousses sis-
miques, p. 143.
lies françaises : propriété mor-
celée, p. 87.
lmperméabilisation des
p. 504.
Imprimerie en Chine. p. 257.
Infiniment petit : perceptions suc- -
cessives, p. 636.
Insectes parasites des végétaux :
influence des fortes cha-
leurs, p. 25.
Ions : rotations ionomagnétiques,
p. 695.
Irrigations en Egypte, p. 264.
— aux Etats-Unis, p. 293.
tissus,
J
Jouets, 12° concours. p. 395,
413, 441
— en verre, p. 690.
L
Laboratoire aérodynamique Eiffel,
p. 13.
Laboratoire Krupp, à
p. 394.
Laes regularisant la température,
p. 86.
Lait hygiénisé, p. 220.
— Pasteurisation, p. 232.
— anormal. p 659.
Lampes à inecandescence :
ment, p. 3o.
incandescence
mines, p. 259.
--- Condensateurs réducteurs
de tension, p. 478.
-— à filament métallique : so-
lidité. p. 507.
— à incandescence qui parle,
p. 507.
Essen,
rende-
dans les
==, A
Lanterne de projection : entre-
tien. p. 3902
Lave : ternpérature. p. 57.
Lentilles: réflexions nuisibles.
p. 395.
732
Leucocvtes, p. 344.
Levures : vitalité, p. 254.
Ligne électrique à 100 000 volts :
rupture, p. 228.
électriques à courants
faibles, gênées par cou-
rants industriels, p. 5S.
— à haute tension : couronne,
p. 87.
Liniteurs de courant. p. 148.
Liquides : stérilisation par elec-
tricité, p 226.
— inflammables :
tion, p. 482.
Lumière cendrée de la
p. 15.
— Variation d'intensité, p. 480.
— Mesure de la vitesse, p. 527.
Lune : lumière cendrée, p. 15.
— Forme aplatie, p. 360.
— Absorption sélective de la
Lignes
manuten-
Lune.
lumière, p. 449.
— Eclat suivant époques,
p. 561.
Lunettes grossissantes Zeiss,
p. 230.
M
Machine à laver les assiettes,
p. 9510.
Madagascar : gemmes, p. 249,
471.
Maison la plus haute, p. 258.
Manganèse : présence dans la
série animale, p. 54.
— dans le règne végétal,
P. 193.
Manomètre très sensible, p. 64o.
Marasquin français, p 382.
Marine de guerre au Japon,
p. 58.
— Marchande au Japon,
p- 199.
— Consommation du pé-
trole, p. 425.
-— marchande allemande,
école, p. 480.
Marmotte et peste, p. 137.
Maroc : carte, p. 136.
Marrons d'Inde, p. 302.
Matière : nouvelles théories,
P. 2192, 240, 960.
— Désacrégation par ra-
dium., p. 56».
Médecine : Accès des
p. 201.
Mévwarn (Chanoine), p 3.
Mer: plus grande profondeur,
p. A.
Mercerisaue : nouveaux appareils,
p. 454.
Métallurgie du fer: nouveaux
procédés, p. 205.
transparence à hante
température, p. 30.
- Point d'éhullition. p.
Meteorites Pluie de), p. 7or.
Météorologie : héros, p. 107.
— Avertissement anx avia-
teurs par T. S. F
p. 567.
Meuies anu carborundum, p. ao.
Facultés,
Métaux :
954.
°
TABLE DES MATIERES
Microbes : vitalité en présence
d'alcalis, p. 667.
Microscope stéréoscopique à un
objectif, p. 52.
Miel : manipulations utiles, p. 342.
Mimétisme : mécanisme, p. 114.
Mines de la Clarence : catastrophe,
p. 282.
Miroirs pour aider la circulation,
p. 540.
— paraboliques : formation in-
stantanée, p. 417.
Moissonneuse avec moteur à pé-
trole, p. 6o.
Montagne de fer de
p- 397.
Montagnes : configuration des
chaînes, p. 711.
Morsures des vipères:
p. 169, 243.
Moteur à pétrole sur moisson-
neuses, p. 6o
Durango,
remède,
— à gaz: cinquantenaire,
p- 453.
— Rendement et vitesse de
combustion, p. 499.
Moteurs à explosion pour navires
de gucrre, p. 94.
Motoculture et motoculteur,
p. 685.
Mouches vivant dans le formol,
P. 114.
— Danger, p. 14A.
Moulage des médaillons en plâtre,
p. 140.
Mousseux pour boissons, p. 244.
Moustiques (Préservation des),
p. 28.
Moutarde, p. 300.
Musée en plein air, p. 117.
N
Navire transporteur de sous-ma-
rins, p. 595.
proposition de réduc-
tion. p. 88.
— de guerre: moteurs to-
nants, p. 94.
— de plus en plus grands,
Navires :
D: 192:
— Propulsion électrique,
p- 173.
— Dimensions futures, p. 592.
Nébuleuses spirales : évolution,
184.
Négatifs photographiques :
provisoire, p. 508.
Nettoyage des rues par le vide,
257:
Nickelage épais, p 404.
Nuages : nouvelle methode de me-
sure, p. 262.
Nymphes de Ja baie de Shima,
p. 720.
fixage
O
Objectif photographique de 4 m.
de fover, p. 396.
Observatoire de Cordoba : téle-
scope, p. 85.
— de Montserrat à Cuba,
p. 404.
Obus nouveaux, p 424, 454.
Océanographie dans l'antiquité,
p. 49, 77, 107, 133.
Œufs : conservation par gaz
incrtes, p. 208.
— danois, p. 674.
Ondemètre à lecture
p. 597-
Or : dragage, p. 621.
Orages (Prévision des) : appareils
Turpain, p. 159.
Oxyde de carbone: souris et
oiseaux révélateurs,
p. 590.
'P
Palmiers : nouveau genre à Ma-
dagascar, p. 193.
Pancréas et ses ferments, p. 515.
Papier (Industrie du) en France,
p. 156, 368
— de genûts, p. 537.
Papiers imprimés pour faire du
papier nouveau, p. 536.
Paquebot Imperator, p. 676.
Paquebots : sécurité, p. 32.
Parallaxe solaire : détermination
spectroscopique, p. 673.
Paris : approvisionnement, p. 339.
Peintures paléolithiques en Es-
pagne, p. 95.
Pendule de Foucault à Fourvière,
=D.
— entretenu
p. 92.
Pensées ct leur culture, p. 39.
Peste : évolution chez la mar-
motte, p. 137.
PETITHENRY, p. 370.
Pétrole : consommation dans la
marine, p. 425.
Phagocythose et immunité de la
souris, p. 197-
Pharmacie ancienne, p. 495.
Photographie : appareils à fentes,
p. 682.
Photographies : contrôle de la-
vage, p. 308.
Photosphère solaire : spectre con-
tinu des vapeurs solaires,
directe,
électriquement,
p. 52.
Phototélégraphe E. Belin, p. 630.
Piérides, p. 233.
Piles : emploi dans les télégraphes
allemands, p. 32.
Pin noir d'Autriche, p. 656.
Piocheur automobile Chouchak,
p. 610.
Plans : lever par photographie,
p. 284.
Planètes transneptuniennes, p. 36.
— Origine, p. 555.
Plantes : respiration et tempéra-
ture, p. 52.
— Effet du courant électrique
sur les cellules, p. 52.
— décoratives: les tigridies,
p. 177-
— Prétendue radio-activité,
p. 227.
— vertes : respiration, p. 499.
— boussoles, p. 61g.
— Effet de la radio-activité,
p. 640.
Plâtre : cuivrage, p. 69r.
Pluie (Grosses gouttes de) et dé-
charges, p. 295.
— Evaluation des chutes,
p. 226.
Paris: augmentation,
p. 281, 535.
— artificielle, p. 809.
Pluics en France, p. 142.
— dans le Norfolk, p. 701.
PoirxcaRé (H.), p. 80, 416.
Poisson : transformation rapide
d'une espèce, p. 478.
Poissons du Sahara, p. 535.
==," A
— de grandes profondeurs :
émigration verticale,
p- 6r2.
— des côtes de l'Angola,
p. 640.
Pommes de terre : conservation,
p. 523.
Pommier : culture, p. 660.
Pompe à vide élevée Pfeiffer,
p. 66.
— à vide nouvelle, p. 423.
Porcelaine de magnésic, p. 69o.
Port de Londres : travaux, p. 59.
—- de la Havane : agrandisse-
ment, p. 349.
Porte-copic pour machine à écrire,
p. 677.
Potasse : applications, p. 242.
Poumons : quantité nécessaire à
la vie, p. 585.
Poussières de l'air, p. 4.
— Transport par le
p. 422.
Pressions de chocs, p. 254.
Prévision du temps en mer par
T. S. F., p. 253.
Prises d’eau (Dégeler les), p. 560.
Prix Nobel de médecine, p. 452.
Projectiles (Vol des), p. 436.
Proprićté très morcelée, p. 87.
Puériculture électrique, 65.
Puits de nuit, p. 394.
—- artésiens de Londres.
p. 535.
Pyrèthes (Plantes), p. 626.
Pyrométrie stellaire, p. 272.
Q
Quartz transparent de Madagascar,
vent,
p. 305.
R
Races humaines néolithiques,
p. 633.
Ralium (Explosions de), p. 115.
— Dans la chromesphère so-
laire, p. 113.
— Prix, p. 282.
Rails : résistance, p. 369.
Rayons cathodiques lents: ré-
flexion, p. 666.
Ravons X pour étudier le cœur,
— ultra-violets : influence sur
les animaux, p. 30.
— X: imperméabilité des tis-
sus chargés de plomb,
p. 471.
Règle à calcul et équation de Ké-
pler, p. 65o.
Reliures : conservation, p. 168.
TABLE DES MATIÈRES
Réservoir d'eau servant de pis-
cine, p. 59.
Résonance (Psendo-)
p. 584.
Restaurant automatique, p.
Rogue artificielle, p. 200.
Rosiers (Forçage des), p. 42.
Rouville: enlèvement par courant
électrique, p. 140.
— dissolvant., p. 294.
Roulis (Reéservoirs contre le),
507.
Routes les plus élevées, p. 256.
—- nationales: longueur,
électrique,
295.
p. 284.
— argileuses : cuisson, p. 305.
Rues: nettoyage par le vide,
. r
R =~
> P- 297-
Russie : invasion de sables, p. 143.
S
Sang (Analyse du) pour diagnos-
tic, p. 548, 576.
-— Coagulation, p. 581.
Sauterelles : hutte en Amérique
du Sud, p. 30.
Savon phéniqué, p. 420.
Scaphandre nouveau, p. 398.
Scintillation : étude, p. 666.
Sel ct sucre : rôle antiseptique,
p- 500.
Semoule (La), p. 357
Sépultures préhistoriques : dé-
couvertes, p. 256.
rhum comme tonique
du cœur, p. 438.
Sérums antityphiques, p.
612.
Sidération par la douleur, p. 254.
Sidérurgie française: avenir,
p. 199.
Signaux horaires: réception,
p. 427. 45S. AN5, 5r2.
54r. 569., 503.
— horaires internationaux,
p. 620.
Silice de forme nouvelle, p. 481.
Singe : pseudo-langage, p. 638.
Sirop iodotannique, p. 691.
Sisiographe Cartuja à compo-
sante verticale, p. 635.
Sismologie: point d'histoire, p. 21.
— à l'île de Pàques. p. 415.
— en Grèce, aux Balkans et
en Turquie, p. 450.
— sous l'empereur Justinien,
p- ON,
Sol : frémissements, p. 85.
—- Soulèvement au Japon,
Sérum :
Grr,
P. 41.
Solanum tuberosum : mutation.
. 278.
— Maglia: mutation, p. 305.
Soleil : radium dans la chromo-
sphère. p. 113.
— Déplacement dans l'espace,
141.
— Minimum d'activité. p. 251.
— Filaments et protubérances,
p. 305. 409.
— Eclipse du 10 octobre 1912.
p. 309, 421, 477.
— Effet chez l’homme et les
animaux, p. 42%.
733
— A l'Observatoire de Lyon,
p. 597.
— Etoile variable, p. 534.
Solulions : viscosité, p. 473.
Soufre (He dei, p. A.
— Action fertilisante, p. r33.
Sourds (Appareils pour faire com-
prendre les), p. 45r. 665.
Sous-marins allemands et norvé-
giens, p. 402.
— coulés: relevage, p.
Spitzberg, terre résersée, p. 984.
Sterilisation de l'eau : nouvelle
lampe à rayons ultra-
violets, p. 598.
STIEGELMANN, p. 307
Substances radio-actives : tabora-
toire d'essais, p. 263.
— radio-actives : origine des
rayons 3 et *, p. 679.
Succion à l'arrière des navires,
p. SARA.
Sucrerie : laboratoire, p. 709.
Suddite : combustible du Soudan,
p. 479-
: destruction électrolytique,
p. 199.
Tehad : phénomènes électriques.
p. 28r.
104.
Tarets
T
Télégramme globe-trotter, p. 88.
Télégraphie automatique nouveau
système, p. 46.
moderne. p. 260, 370.
T. S. F.: secret des dépèches,
p. 31.
— Réception par les abonnés
au téléphone, p. 31.
— Station de Seattle, p. go.
— Station de Nauen, p. r15.
— À grande distance, p. 255.
—- Poste portatif, p. 312.
— dans l'Océan Pacifique et
l'Amérique du Sud,
p. 494.
— transatlantique, p. 424.
—- Réception des signaux
horaires, p. 427. 458,
A85. Bra., BAr. 560, 50%.
aéroplane aux ma-
noœuvres, p. 452.
— pour expédition polaire,
p. 452.
— dans les mines. p.
— Ntation d’'Arlington, p. 56.
—- Stations actuelles meon-
diales, p. 61%
Téléphone à Pékin, p 334.
— Augm ntaton de l'inten-
site du son, p. 563.
=. Ntatistique, p. DQO.
— Reseau Le plus
p. 610.
Téléphonie automatique, p. 31.
= Suppression des bruits pa-
rasites, p 258.
Télescope de l'Observatoire de
Cordoba, p. 85.
Temps pluvicux et évaporation du
sol, p. 333.
Terre : forme, dimensions, relief,
p. 247, 275.
—- en
MEND,
chargé,
734
Têtards vivant dans l’eau salée,
p- 310.
Thé : consommation, p. 430.
Thermomètre à contact électrique,
p. 629.
Thorium : émanation., p. 689.
Tissus chargés de plomb imper-
méables aux rayons X,
p. 471.
— de voton incombustibles,
p. 621.
Toile goudronnée, p. 392.
Torpille-canon Davis, p 32.
Torpilles de guerre : agrandisse-
ment, p. 008.
Touage électrique, p. 346.
Tour Eiffel: mouvements verti-
caux, p. 52.
-— Poids. p. 201.
Transformateurs-tourelles Oerli-
kon, p. 6097.
Transformisme et eau de mer,
p- 120.
Transfusion du sang de veine à
veine, p. 309.
Transports frigorifiques en France,
705.
Travail professionnel :
tion, p. 6r1.
Trèfle rampant (Acide cyanhi-
drique dans le), p. 443.
Tremblement de terre de Turquie,
p. 169.
— au Brésil, p. 225.
— et taches solaires, p. 361.
amclora-
TABLE DES MATIÈRES
— du 14 septembre, p. 389.
Tremblements de terre: con-
stance probable, p. 25.
— Périodes de Bruckner,
p. 105.
Trombe du 3o juin 1912 à Ré-
gina, p. 29.
Trombes : trajectoire rectiligne,
P. 114.
Truffes de Provence, p. 674.
Tuberculose : Congrès de Rome,
pP. 72, 100, 129.
—- Action des éthers de glycé-
rine, p. 165.
— Vitolité du bacille, p. 278.
-— (Gelatine contre la), p. 283.
Tubes de gaz comprimés : cause
d'explosion, p. 556.
Tumeurs et radio-activité, p. 29.
Tunnel sous la Manche, p. 647.
Turbines Tesla à disques paral-
lèles, sans aubes p. 55.
Tuyaux d'acier : fabrication,
p. 181.
— de vapeur : appareil de sé-
curité, p. 452.
Typhon au Japon (sept. 1912),
p. 422.
U
Unité nouvelle: le siriomètre,
20.
Uranium : poids atomique, p. 8o.
Urée : recherches, p. 528.
Ustensiles de cave, p. 280.
v
Vaccination antituberculaire.
P. 129.
— auntityphique à Avignon,
p. 423, 499.
Vagabonds : mensuration, p. 61°.
Vapeur surchauffée : lois, p. 165.
Ventilateurs mécaniques, p. 66.
Vermifuges, p. 193.
Verre de silice résistant à la cha-
leur, p. 674.
Vers parasites : fixation dans l'in-
testin, p. 402.
Vertébrés : dénombrement. p. 3637.
Vie aux basses températures,
p. 2906, 526.
Vigne : effeuillage, p. 284.
Vins de 1911, p. 244.
Vipères du nord de la France,
S11.
Vitesse (Indicateurs de), p. 353.
Voies ferrées : écartement, p. 5ot.
Voitures à impériale, p. 255.
Vol à voile, p. 639.
Volcan Asama Yama, p. 142.
— sous-marin en Océanie,
. 225.
Volcans de la Réunion: con-
stitution minéralogique,
p. 360.
Z
Zuyderzée (Asséchement du) : em-
ploi du béton, p. 675.
TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS
A
ACLOQUE. — Les pensées : leur
culture, p. 39. — Les vermi-
fuges dans la thérapeutique
moderne, p. 123. — Les ti-
gridies décoratives, p. 177. —
Les piérides, p. 233. — Les élé-
ments figurés du sang, p. 259,
344. — L'actinomycose, p. 400.
— L'utilité et la novicité des
araignées, p. 468. — Le pan-
creas et ses ferments, p, 515.
— La coagulation du sang,
p. 9581. — Les pyrèthres,
p. 626. — Les blattes, p. 680.
B
BeLLer. — Le filtre-presse con-
tinu Berrigan, p. 34. — Les
moteurs tonants dans la ma-
rine de guerre, p. 94. — La
difficulté de pose des conduites
sous l’eau, p. 126. — La fa-
bricalion des grosses conduites
d'acier, p. 181. — Les grands
travaux d'irrigation aux Etats-
Unis, p. 293. — La transfor-
mation du’port de la Havane,
p. 349. — Cigarettes turques
d’Aden, p. 336. — Le grand
bassin en eau profonde de Sou-
thampton, p. 406. — Sous-
marins allemands et norvc-
giens, p. 461. — Les travaux
d'alimentation d'eau de Mexico,
p. 517. — La grue flottante de
sauvetage de l'arsenal de Pola,
p. 535. Les tourelles de
transformateurs de la Société
Oerlikon, p. 657. — Un che-
min de fer minier aérien,
p. 706.
Bergère. — Machine à fabriquer
les bouteilles, p. 6g.
Bercer (A.). — Le rôle magnt-
tique des océans ct la consti-
tution de l'écorce terrestre,
p. 708.
BERTHIER. — La pompe Pfeiffer
à mercure et la mesure des
vides élevés, p. 66. — Electri-
cité industrielle : les limiteurs
de courant, p. 148. — Accu-
mulateur alcalin Paul Gouin,
P. 179. — Les nouvelles théa-
ries de la matière, p. 212, 240.
269. — Indicateurs de vitesse
et compteurs kilométriques.
p. 373. — Ondemètre à lecture
directe, p. 596. — Thermo.
mètre à contact électrique.
p. 629. — Ventilateurs méca-
niques, p. 662.
Brancnon (A.). - - La toilette et
le truquage des fruits, p. 8.
=- Le repeuplement des chasses
par le systéme de l'adoption,
p. 44.
BONNAFFÉ (F.). —
fer marilime de
p. 10.
BourAx (L.). — Observations re-
latives aux manifestations vo-
cales d’un anthropoïde, p. 648.
Le chemin de
Key-West,
Boyer. — Le forcage des plantes:
les rosiers, p. 42. — La filtra-
tion des eaux du Nil dans
l’isthme de Suez, p. 18. —
Grillades et fourneaux monstres
chauffés au gaz, p. 146. — Lu-
nettes grossissantes Zeiss,
p. 230. — Nouvelles mé-
thodes de mesure des nuages
à l'observatoire de Montsouris,
p. 2602. — Lle ponton déro-
cheur du canal de Suez, p. 314.
-- La fixation des vers para-
siles dans l'intestin, p. 402. —
tn cinématographe à main.
p. 456. — Installation de sécn-
rité Martini et Iluncke pour la
manutention des liquides in-
flammables, p. 482. — Ma-
chine à laver r4 ooo assiettes à
l'heure, p. 510. — Nouvean
phototélégraphe portatif Be-
lin, p. 680. — Dans une for-
cerie de boules de neige, p. 650.
— Les fourrures modernes et
leur préparation, p. 712.
C
CaruazaA (EN. — Deuxième Con-
grès national du froid, p. 431.
CnanLes (F.). — La synthèse du
caoutchouc, p. 176.
CuanrièRe (G.Y. — L'hygiène dn
beurre, p. 624.
CuERPIN. — Le cinématographe
pour tous, p. 48. — Les nou-
velles automotrices électriques
des chemins de fer de l'Etat,
p. 174. — Le temps de pose
exact en photographie, p. 244.
— Un nouveau funiculaire aé-
rien au Tyrol, p. 426.
Couses (P,). -- Deux localités
géologiques célébres : Uchaux
et les Baux, p. 355. — L'ori-
gine des eaux de Pougues,
p. 4209. — Les premiers habi-
tants du glohe. p. 566. — Les
oscillations de la péninsule
balkanique, p. 605.
CoRRET (Pierre). — Télégraphie
sans fil : réception à domicile
des signaux horaires, p. 427,
495, 489, 512, D41, 508, 5ys.
CocviN. — La flore du bord de
la mer, p. 64. — La flore des
montagnes, p.214. — Ce qu'on
voit dans un escargot : une le-
çon d’observalion, p. 292, 328.
— Un coup d'il sur le passé:
les animaux qui guérissent,
p. 579.
Cour8eT (P.). — A propos des ré-
centes expériences de M. Raoul
Pictet, p. 526.
D
Dany (G.). — Pendule entretenu
électriquement, p. 92. — Auto-
motrices pétrolo-électriques,
p. 237.
Dioux (Abbé G.). — Les races
humaines néolithiques, p. 632.
— Gravures et sculptures de
l'époque aurignacienne, p. 683.
F
Fournier 9. — Le nouveau la-
boratoire aérodynamique de
M. Eiffel, p. 13. -- En nonveau
système de télégraphie automa-
tique, p. 46. -- Le goudron-
nage des routes et la nouvelle
auto-goudronneuse, p. 62. —
La voiture chirurgicale automo-
bile Boulant, p. 20%. — Avia-
tion : une idée nouvelle, p. 325.
— Les jouets au concours Lé-
pine, p. 387, 413, 441. — Per-
fectionements aux hydro-acro-
planes, p. 488. — L'acoustèle
Daguin-Diċnert, p. 57r. — Pio-
eheur pulvériseur auto-moteur
Chouchak, p. 610. — Revue de
l'aviation : le Salon des avions
en r912, p. 622, 654. — La
motoculture et le motoculteur,
p. 685. — La crampe des télé-
graphistes, p. 716.
G
Gançox. -— Notes
chimie. p. 199, 24,
ONY.
Gocot. — La ceure spécifique anti-
tubereuluire, p. 72. 100, r20.
-= Les gorges de la Tamina ct
les sources de Pfeffers, P. 91.
—- Methodes modernes de dia-
pratiques de
SO, 405.
N
gnostice sérologique, p. 54S,
oyo.
GOUDALLIER, — Un tableau allé-
gorique : la Pharmacie, p. 405.
GUADENWITZ (A.). — Les rayons X
au service du sport, p. 7. — Le
ciment armé dans la protection
736 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS
des côtes et rivages. p. 98. —
L'éducation des Esquimaux d'A-
laska, p. 217. ~- Un camion-
srue. électromobile, p. 230. —
100 vou photographies par se-
coude, pe 250. — La nature
artiste, p. 343. — Une église
ambulante, p. 377. — Un sea-
phandre d'un nouveau genre,
p. Syb. —- Les navires-écoles de
la marine marchande, p. 489.
— Le barrage de Galveston,
p. 074. — Appareil photogra-
phique à fentes, p. 082.
GuiveL. — Le nouveau bateau-
feu du Hävre, p. 69%, 718.
H
liéckLBacuzr. — Un navire trans-
porteur de sous-marins, le Kan-
guroo, p. 595.
Hiiucuanp. — Association fran-
vaise pour l'avancement des
sciences, p- 417, 44h, 472, 5oo,
529, 557, 585, 612, 640, 696.
J
Janet (C.). — Sur la forme pro-
bable de la partie immergée de
quelques icebergs, p. 131.
JEANNEL (C1). — Les irrigations et
les desséchements en Egypte et
au Soudan, p. 204. — Le port
de Colombo, p. 373 — Le
canal de Panama, p. 606.
K
hiınwan (DE). — Le transfor-
misme, ses variations et Peau
de mer, p. 120. — L'appau-
vrissement des forèts, p. 405.
— Le pin noir d'Autriche,
p. 050.
huzvrz (L.). — La nouvelle écri-
ture chinoise, p. 218 — la
plus haute maison de l'univers,
p. 255. — Une bibliothèque
unique au monde, p. 398. —
Les nymphes de la baie de
Shima. p. 720.
L
Lanacue. — Les beurres anor-
maux, p. 2385. — Les dangers
d'un chauffage defectucux,
p. 466. — Deux ennemis de
l'enfance : le biberon et le lait
anormal, p- 052.
Larne MaND. -— La terre : sa
forme et ses dimensions, p. 247,
279.
Lane. - La turbine Tesla à
disques paraleles sans aubes,
ES Le relevage des épaves
et des sous-marins, pe 104. --
La combustion incandescente
ans flamme, p. 149. —. Le la-
inratoire d'essais des substances
radioactives à Gif, p. 709.
Laroun. —- Le comportement
des êtres vivants aux basses
températures, p. 290. — 5o-
ciété astronomique de France,
p. 410., 550, 667. — Le vol des
projectiles, p. 436.
LoucuEux. — La
p. 299.
moutarde,
M
Maner (G. be). — La semoule et
sa fabrication, p. 357.
Marcuanp. — Les grands réseaux
de distribution d'électricité :
leur développement aux Etats-
Unis, p. 37. — Station radio-
télégraphique de Seattle, p. go.
— Le dragage électrique dans
l'exploitation des gisements au-
rifères, p. 153. — Les apparcils
de culture à vapeur, p. 209. —
La télégraphie moderne, p. 260,
371. — Le tonnage électrique
sur le canal de Saint-Quentin,
p. 346. — Les ressources mon-
diales d'énergie, p. 4og. — Le
nouveau dock flottant de 32 000
tonnes de l’Amirauté anglaise,
p. 434. — La boussole gyrosco-
pique Sperry, p. 545. — L'in-
dustrie du chauffage central,
p. 572. —- Les grandes centrales
génćratrices d'électricité p. 678.
MarMĮMon. —- Prévision des orages
et disposilifs paragrèles, p. 159.
Manne. — Pucriculturc électrique,
p. 65 — L'humidité des
beurres, p. 152. — Les lois de
la vapeur surchauffée, p. 163.
— Les ferments lactiques dans
l'ensilaye, p. 220. — Procédé
nouveau de pasteurisation du
lait, p. 232. — Suppression
des bruits parasites dans les
cominunications téléphoniques,
p. 258. — Résistance des fila-
ments métalliques dans les am-
poules à incandescence, p. 288.
— L'acide carbonique en œno-
logie, p- 331. — L'avenir du
chauflage électrique, p. 521. —
L'huile de ricin et laéroplane,
p. 540. — La culture du pom-
mier, p. 660.
MENNEVÉE. — [a répartition des
animaux sur le globe terrestre,
p. 246.
MonTESSUS (DE) pe BALLORE. —
Alexis Perrey : un point d'his-
toire de la sismologie, p. 22.
_ Expériences sismologiques
sous l'empereur Justinien,
p- UoN.
N
Niemann oR. P. Navarro). — Sis-
mographe Cartuja à
sante verticale, p. 035.
Nopo CA. — la lumière cen-
dree de la Lune, p- 15. =
L'astronomie physique ct Ja
théorie cinétique des gaz,
p. 552. - Nouvel explosif à
compo-
———— —————————— EE se A Faaa
190212, — Hinpranerie PAUL FEnox-VRaAr, 3 et 5, Tue Bavard, Paris, VIe. — Le gérant: A. Fault.
Poxygène liquide, p. 598. —
La configuration générale des
chaînes de montagnes, p. 711.
Numize. — Une contribution pos-
sible à l’industrie du papier en
France, p. 156. — Les arbres
à gutta-percha de l'Afrique
tropicale, p. 352. — La culture
du chrysanthème au Japon,
p. 439.
P
PLucneger. — L'avoine dans l'ali-
mentation humaine, p. 320.
R
REVERCHON. — Pyromètre stel-
laire, p. 272. — Le chrono-
graphe moderne, p. 383. —
L'achèvement du réscau de
chemin de fer du Jura: la
ligne Morez - Saint - Claude ,
p. or.
RousszT. — Procédés modernes
de métallurgie du fer, p. 205,
316. — Les marrons d'Inde,
p. 302. — Les aciers à outils,
p. 348. — Nouvelles machines
à merceriser, p. 454. — Per-
ceptions successives de l'infi- `
niment petit, p. 636. — Le
laboratoire d’une sucrerie,
p. 709.
Roy (F. pe). — Les quatre pla-
nètes transneptuniennes O, P,
Q, R, p. 36. — Redécouverte
de la comète périodique de
Tuttle (1912 b), p. 509.
S
SANTOLYNE (P.). — Les frigori-
fiques agricoles, p. 17. — La
conservation des œufs par le
f.oid ct les gaz inertes, p. 208.
— Les manipulations du miel
utiles à sa conservation, p. 342.
— [L'industrie des foies gras,
p. 404. — Des moyens propres
à assurer aux pommes de terre
une bonne conservation, p. 523.
SaponTa (A. DE). — Les chemins
de fer français aussitôt après la
guerre, p. 189.
sée (A). — L'évolution des né-
buleuses spirales, p. 184.
STIEGELMANN. — Les peintures ct
la stratigraphie paléolithiques
en Espagne, p. 95.
T
Tèru (F.). — Dés spéciaux pour
le tirage des loteries, p. 18
Tuouzer. — L'océanographie dans
l'antiquité, p. 49, 77, 107, 133.
V
Varor (J). — La grêle et le
givre au Mont Blanc, p. ?21.
mt
D PE ER € 4 EE o
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