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Full text of "Le devin du village"

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LE  HURON,  COMÉDIE. 

Tout  s'apprivoife  en  un  jour 
Sous  les  loix  de  l'amour. 
LE  HURON  ,     Mlle.  DE  St.  YVES. 
Le  fore  nous  menace  , 
Et  le  danger  nous  glace  i 
L'orage  fait  place 
Au  foufBe  des  Zéphirs. 
Senfible  à  nos  foupirs  , 
L'amour  couronne  nos  defirs. 
Que  de  plaifirs  ! 
Non,  plus.de  larmes  ,  &c,' 
CHŒUR. 
Plus  de  larmes. 
Amour  ,  tes  charmes  ; 
Du  fein  de  leurs  alarmes  l 
Font  naître  les  plaifus. 

FIN. 


APPROBATION. 

J'Ai  lu  par  ordre  de  Monfeigneur  le  Vice-Chancelier 
le  Huron ,  Comédie  ;  &  je  crois  que  l'on  peui  en  per- 
mettre l'imprefilon.  A  Paris,  ce  17  ^^^^  ï7<^S. 

MARIN. 


LE  DEV 


D  U 


VIL 


TAR  J.  J.   ROUSSEAU, 


f^i^ 


^   PARIS, 

Aux  dépens   de    la   Compagnie. 


g^i:rJ«g™B;gjjlj*^'7T«^E;2sara 


M.     DCC.    LXXI. 


JCTEURS. 

LE  DEVIN. 

COLIN. 

COLETTE. 

TROUPE   de   Villageois   &:   de 
Villageoifes. 


T>V  VILLAGEe 


Le  Théâtre  repréfente,  d'un  côté ,  la  mai/on  du  Devin; 
de  l  autre ,  des  arbres  ,  des  fontaines  ;  &  dans  le  fond  y 
tin  Hameau. 


SCENE    T  R  E  M  1  E  R  E, 

COLETTE  pleurant ,  &  seffuyant  les  yeu:>ç 
defon  tablier. 


'Ai  perdu  tout  mon  bonheur  ; 
J'ai  perdu  mon  ferviteur  ; 

Colin  me  délaifle.  bis. 

J'ai  perdu  mon  ferviteur  ; 
J'ai  perdu  tout  mon  bonliQur  s 
Colin  me  délaifle.  bis. 

Hélas  !  il  a  pu  changer. 
Je  voudrois  n'y  plus  fonger: 
Hélas  !  héla^  !  il  a  pu  changer  ^ 


^  ,Le  Devin  du  Village. 

Jevoudrois  n'y  plus  Tongor: 
Hélas  !  helas  !  j^y  longe  fans  ceflTe.  hi^^: 

J'ai  pe-du  ,  S^c. 

Colin  me  délalfle.  bis. 

Il  m'aimoit  autrefois  ,  &  ce  fat  mon  malheur  : 

Mais  quelle  ell  donc  celle  qu'il  me  préfère  > 
Elle  eft  donc  bien  charmante  !  Imprudente  Bergère  , 
Ne  crai-.s-tu  point  les  maux  que  j  éprouve  en  ce  jour? 
Colin  m'a  pu  changer,  &  tu  peux  avoir  ton  tour. 

Que  me  fert  d'y  rêver  fans  ceiTe? 

Rien  ne  peut  guérir  mon  amour. 

Et  tout  augmente  ma  triftefle. 

J'ai  perdu  mon  ferviteur. 

J'ai  perdu  tout  mon  bonheur  : 
Colin  me  délaiflfe,  bis* 

Je  veux  le  haïr  ,  je  le  dois. 
Peut-être  il  m'aime  encor.  Pourquoi  me  fuir  fans  cefle? 

Il  me  cherchoit  tant  autrefois  ! 
Le  Devin  du  canton  fait  ici  fa  demeure  ; 
Il  fçait  tout ,  il  fçaura  le  fort  de  mon  amour. 
Je  le  vois,  &ie  veux  m'éclaircir  en  ce  jour. 


Ze  Devin  du  Village, 


39 


s  C  E  N  E    1 1. 
LE  DEVIN,  COLETTE. 

COLETTE.  (£'//£  compte  dans  fes  mains ,&  elle 
he/ite  en  approchant  du  Devin.  Elle  lui 
préfente  de  V argent ,  qu  elle  a  compte  & 
plié  dans  un  papier  durant  le  prélude^ 


P 


Erdrai-je  Colin  fans  retour  ? 
Dites-moi  s'il  faut  que  je  meure  ? 
LE  DEVIN. 
Je  lis  dans  votre  cœur,  &  j'ai  lu  dans  le  fien, 
COLETTE. 
O  Dieux! 

LE  DEVIN. 

Modérez-vous, 

COLETTE. 

Eh  bien? 
..     LE  DEVIN. 
Colin  vous  eft  infidelle. 
COLETTE. 
Je  me  meurs, 

LE  DEVIN. 
Et  pouttant  il  vous  aime  toujours. 
COLETTE. 
Que  dites-vous? 

LE  DEVIN. 

Plus  adroite  &  moins  belle; 
La  Dame  de  ces  lieux .... 


6  Le  Devin  du  Village, 

COLETTE. 

Il  me  quitte  pour  elle. 
LE  DEVIN. 
Je  vous  Tai  déjà  dit,  il  vous  aime  toujours. 
COLETTE. 

Et  toujours  il  me  fuit. 

LE  DEVIN. 

Comptez  fur  mon  fecours» 
Je  prétends  à  vos  pieds  ramener  le  volage. 
Coîin  veut  être  brave  ;  il  aime  à  fe  parer  : 
Sa  vanité  vous  a  fait  un  outrage. 
Que  fon  amour  doit  réparer. 

COLETTE. 
Si  des  galans  de  la  Ville 
J'eufTe  écouté  les  difcours; 
Ah  !  qu'il  m'eût  été  facile 
De  former  d'autres  amours  ♦. 

Mife  en  riche  Demoifelle  ; 
Je  brillerois  tous  les  jours  : 
De  rubans  &  de  dentelle 
Je  chargerois  mes  atours. 
Si  des  galans,  &c. 

Pour  l'amour  de  l'infidelle 
J'ai  refufé  mon  bonheur  : 
J'aimois  mieux  être  moins  belle, 
Et  lui  confjrver  mon  cœur. 
J'aimois  mieux,  &c. 
Si  des  galans,  8cc. 

LE  DEVIN. 
Je  vous  rendrai  le  fien ,  ce  fera  mon  ouvrage  : 
Vous,  à  le  mieux  garder  employez  tous  vos  foins  j 


Le  Devin  du  Village,  f 

pour  vous  faire  aimer  davantage  , 
Feignez ,  feignez  d'aimer  un  peu  moins, 
Air. 

L'amour  croît  s'il  s'inquiète. 
Il  s'endort  s'il  eft  content. 
La  Bergère  un  peu  coquette  , 
Rend  le  Berger  plus  confiant» 

COLETTE. 

A  vos  fages  leçons  Colette  s'abandonne» 
LE  DEVIN. 
Avec  colin  prenez  un  autre  ton, 

COLETTE. 

Je  feindrai  d'imiter  l'exemple  qu'il  me  donne* 
LE  DEVIN. 
Ne  l'imitez  pas  tout  de  bon  : 
Mais  qu'il  ne  puifle  le  connoître. 
Mon  art  m'apprend  qu'il  va  paroître. 

Je  vous  appellerai  quand  il  en  fera  temps. 


SCENE    III. 

LE  DEVIN/w/. 


j 


'Ai  tout  fçu  de  Colin  ;  &  les  pauvres  enfani 
Admirent  tous  les  deux  la  fcience  profonde 
Qui  me  fait  deviner  tout  ce  qu'ils  m'ont  appris. 
Leur  amour  à  propos  en  ce  jour  me  féconde  : 
En  les  rendant  heureux  ,  il  faut  que  je  confonde 
Be  la  Dame  du  lieu  les  airs  &  les  mépris. 


s  Le  Devin  du  Village. 


S  C  E  N  E    I  K 

LE     DEVIN,    COLIN. 

COLIN. 

JLi' Amour  &  vos  leçons  m'ont  enfin  rendu  fage  j 
Je  préfère  Colette  à  des  biens  fuperflus. 
Je  fçais  lui  plaire  en  habit  de  Village; 
Sous  un  habit  doré  qu'obtiendrai  je  de  plus? 

LE  DEVIN. 
Colin ,  iil  n  eft  plus  temps  ,  &  Colette  t-oublie.       - 

COLIN. 
Elle  m'oublie  !  6  Ciel  !  Colette  a  pu  changer  l 
LE  DEVIN. 
Elle  eft  femme  ,  jeune  &  jolie  ; 
Manqueroit-elle  à  fe  venger  ? 
COLIN. 

Air. 

Non,  Colette  n  eft  point  trompeufe  , 

Elle  m'a  promis  fa  foi  : 
Peut-elle  être  Tamoureufe 
D  un  autre  Berger  que  moi? 
Non ,  &:c. 

LE  DEVIN. 

Ce  n'eft  point  un  Berger  qu'elle  préfère  a  toi  î 

C'eft  un  bon  Monfieur  de  la  Ville. 

COLIN. 

Q^'^^ousU^^^ù  LE  DEVIN; 


I 


Z  e  Devin  dw  Village .  9 

LE  DEVIN. 
Mon  art. 
COLIN. 

Je  n'en  fçaurois  douter^ 
Hélas  !  qu'il  va  m'en  coûter 
Pour  avoir  été  trop  facile  ! 
Aurois-je  donc  perdu  Colette  fans  retour.? 

LE  DEVIN. 
On  fert  mal  à  la  fois  la  fortune  &  l'amour. 
D'être  fi  beau  garçon  quelquefois  il  en  coûte, 

COLIN. 
De  grâce  ,  apprenez-moi  le  moyen  d'éviter 
Le  coilp  affreux  que  je  redoute. 
LE  DEVIN. 
LaifTez-mol  feul  un  moment  confulter. 

Le  Devin  tire  de  fa  poche  un  Livre  de  grimoire  ,   &  un 
petit  Bâton  de  Jacob  ^  avec  lequel  il  fait  un  charme^ 

De  jeunes  Payfannes  qui  venoîent  confulter  le  Devin  , 
laiflent  romber  leur  préfent,  ôc  fe  fauvent  routes  effrayées  en 
appercevant  fes  contorfîons. 

Le  charme  eft  fait  :  Colette  en  ces  lieux  va  fe  rendre; 
Il  faut  ici  l'attendre. 

COLIN. 

A  l'appaifer  pourrai- je  parvenir? 

Hélas  !  voudra-t-elle  m'entendre? 
LE  DEVIN. 
Avec  uti  cœur  fidèle  &  tendre  , 
On  a  droit  de  tout  obtenir* 
à  part. 
Sur  ce  qu'elle  doit  dire  allons  la  prévenir. 


îo         Le  Devin  du  Village. 


j 


SCENE    V. 
COLIN /w/. 


E  vais  revoir  ma  charmante  maîtrefTe 
Adieu  Château  ^  grandeur ,  richefTe  , 
Votre  éclat  ne  me  tente  phis. 
Si  mes  pleurs ,  nies  foins  aflidus , 
Peuvent  toucher  ce  que  j'adore  , 
Je  vous  verrai  renaître  encore 
Doux  momens  que  j'ai  perdus  ! 
Je  vous  verrai ,  &c. 

Quand  on  fçait  aimer  &  plaire , 
A-t-on  befoin  d'autre  bien  ? 
Rends- moi  ton  cœur,  ma  Bergère  5 
Colin  t'a  rendu  le  fien. 
Mon  chalumeau ,  ma  houlette  , 
Soyez  mes  feules  grandeurs; 
Ma  parure  eft  ma  Colette  , 
Mes  tréfors  font  fes  faveurs» 
Quand  on  fçait ,  &c. 

Que  de  Seigneurs  d'importance 
Voudroient  bien  avoir  fa  foi  ! 
Malgré  toute  leur  paiffance , 
Ils  font  moins  heureux  que  moi. 
Ils  font  moins,  &c. 
Quand  on  fçait,  &:c. 


^ 


J 


Le  Devin  du  Village,  1 1 

SCENE    VI. 

COI.IN,  COLETTE. 

COLIN. 


E  l'apperçois ,  je  tremble  en  m'oflTrant  à  fa  vue  : 
Sauvons-nous.  Je  la  perds  fî  je  fuis, 
COLETTE. 
Il  mç  voit  :  que  je  fuis  émue  î 
Je  ne  fçais  où  j'en  fuis. 
Trop  près,  fans  y  fonger  ,  je  me  fuis  approchée, 

COLIN. 
Je  ne  puis  m'en  dédire  ,  il  la  faut  aborder, 
D^un  ton  radouci. 
Ma  Colette  ,  êtes-vous  fâchée  ? 
Je  fuis  Colin,  daignez  me  regarder. 

CO1.ETTE, 
Colin  m'aimoit ,  Colin  m'étoit  fidelle  ; 
Je  vous  regarde ,  &  ne  vois  plus  Colin, 
COLIN. 
Mon cœurn'a  point  changé:  mon  erreur  trop  cruelle, 
Venoitd'un  fort  jette  par  quelque  efprit  malin. 
Le  Devin  l'a  détruit.  Je  fuis,  malgré  l'envie. 
Toujours  Colin  ,  toujours  plus  amoureux. 

COLETTE. 
Par  un  fort ,  à  mon  tour ,  je  me  fens  pourfuivie  î 
I^e  Devin  n'y  peut  rien. 

COLIN. 
<2ue  je  fuis  malheureux  \ 


i%  Le  Devin  du  Village^ 

COLETTE. 

D'un  amant  plus  confiant ... 
COLIN. 

Ah  !  de  ma  mort  fulvle 

Votre  infidélité. . . 

COLETTE. 
Vos  foins  font  fuperflus  ; 
Non  ,  Colin ,  je  ne  t'aime  plus. 

COLIN. 

Air. 

Ta  foi  ne  m'eft  point  ravie; 
Non  ,  confulte  mieux  ton  cœurî 
Toi-même  ,  en  m'ôtant  la  vie  , 
Tu  perdrois  tout  ton  bonheur. 
Toi-même ,  &c. 

COLETTE  à  pan. 
Hélas  !  .  . .  Non  vous  m'avez  trahie } 

Vos  foins  font  fuperflus  : 
Non,  Colin  ,  je  ne  t'aime  plus. 
COLIN. 
C'en  efl:  donc  fait ,  vous  voulez  que  je  meure  j 
Et  je  vais  pour  jamais  m'éloigner  du  Hameau. 
COLETTE. 

Colin  ? 

COLIN, 

Quoi  ! 

COLETTE, 
Tu  me  fuis? 

COLIN. 

Faut-il  que  je  demeure 
Pour  vous  voir  un  amant  nouveau  ? 


Le  Devin  du  Village,         15 
DUO, 

COLETTE. 

Tant  qu'à  mon  Colin  j'ai  fçu  plaire  ; 
Mon  fort  combloit  mes  defirs. 

COLIN. 
Quand  je  plaifois  à  ma  Bergère , 
Je  vivois  dans  les  plaifirs. 

COLETTE. 
Depuis  que  fon  cœur  me  méprife  , 
Un  autre  a  gagné  le  mien. 

COLIN. 
Après  les  doux  nœuds  qu'elle  brife  , 
Seroit-il  un  autre  bien? 
Ma  Colette  fe  dégage. 

.    .   COLETTE. 
Je  crains  un  amant  volage. 

COLETTE  ")  Je  me  dégage  à  mon  tour  : 
&  ^Mon  cœur  devenu  paifible, 

COLIN.    J Oubliera  ,  s'il  efl  poffible  , 

Ç  chère  "^ 
Quetuluifus<  >unjour. 

C  cher  ^ 
COl.m  plus  lent. 
Quelque  bonheur  qu'on  me  promette 
Dans  les  nœuds  qui  me  font  offerts  , 
J'eufTe  encor  préféré  Colette 
A  tous  les  biens  de  l'univers. 

COLETTE. 
Quoiqu'un  Seigneur  jeune ,  aimable  , 
Me  parle  aujourd'hui  d'amour. 


I A         IjC  Devin  du  Village^ 

Colin  m'eût  femblé  préférable 
A  tout  l'éclat  de  la  Cour. 

COLIN. 
Ah  !  Colette. 

COLETTE. 

Ah  !  Berger  volage  j 
Faut-il  t'aimer  malgré  moi? 

V  K  É  L  U  D  E, 

Colin  fe  jette  aux  pieds  de  Colette;  elle  lui  fait  remar-^ 
quer  àfon  chapeau  un  ruban  quil  a  reçu  de  la  Dame: 
Colin  U  jette.  Colette  lui  en  donne  un  plus  fimple  ^ 
qu'il  reçoit  avec  tranfport, 

P  U  G. 

;COLETTE.r  A  jamais ,  Colin,  je  t'engage 

COLIN,       CA  jamais  Colin  t'engage 
COLETTE.r  Mon  cœur  &  ma  foi. 

COLIN.       cSpn  cœur  &  fa  fol. 

Qu'un  doux  mariage 

M'uniiTe  avec  toi. 
Aimons  toujours  fans  partage; 
ijue  l'amour  foit  notre  loi. 


Le  Devin  du  Village.        x  j 


^ 


SCENE    VIL 
LE  DEVIN,  COLIN,  COLETTE» 
'  _  LE  DEVIN. 

J  Evous  ai  délivrés  d'un  cruel  maléfice  : 
Vous  vous  aimez  encor,  malgré  les  envieux. 

Ils  lui  offrent  chacun  un  prèfenu 

COLIN. 

Quel  don  pourroit  jamais  payer  un  tel  fervice  ? 

LE  DEVIN  recevant  des  deux  mains. 

Je  fuis  afTez  payé  fi  vous  êtes  heureux. 

Venez  ,  jeunes  garçons  ;  venez,  aimables  filles; 

RalTemblez-vous ,  venez  les  imitier  ; 
Venez  ,  galans  Bergers;  venez  Beautés  gentilles , 
En  chantant  leur  bonheur  ,  apprendre  à  le  goûter. 


Le  Devin  du  Village, 

SCENE    V  I  I  î. 
COLIN,  COLETTE,  LE  DEVIN. 

Troupe     de     jeunes     Villageois     &   Villageoifes* 

Entrée  de  la  Jeiinejfe  du  Filiale, 

Chœur    avec    le    Devin. 


c 


zh  îcr:0 


lOlin  revient  à  fa  Bergère  , 
Célébrons  un  retour  fi  beau  : 
Que  leur  amitié  fincere 
Soit  un  charme  toujours  nouveau. 

sansleDevin. 

Du  Devin  de  notre  Village, 
Chantons  le  pouvoir  éclatant  î 
Il  ramené  ua  amant  volage  , 
Et  le  rend  heureux  6c  confiant, 

PASTORALE  pour  les  Villageois. 

Lei  Villageois  donnent  un  Bouquet  à  Colin  ,  qui  le 
préfente  à  Colette,^ 

,      F  O  R  L  A  N  E  pouf  les  Villageois. 

Lis  yUlageois  donnent   un   Bouquet  à  Colette  ,    qui 

U  donne  à  Colin, 

ROMANCE* 


ÎLe  Devin  du  Village,         ij 
ROMANCE. 

Dans  ma  cabane  obfcure  , 
Toujours  foucis  nouveaux  j 
,Vent ,  foleil  ou  froidure  , 
Toujours  peine  &  travaux. 
Colette  5  ma  Eergere, 
Si  tu  viens  l'habiter , 
Colin  5  dans  fa  chaumière  i 
N'a  rien  à  regretter. 

Des  champs ,  de  la  prairie  i 

Retournant  chaque  foir  , 
Chaque  foir  plus  chérie , 
Je  viendrai  te  revoir. 
Du  foleil,  dans  nos  plaines  ^ 
Devançant  le  retour. 
Je  chanterai  mes  peines. 
En  chantant  notre  amour. 


i8         Le  Devin  du  Village^ 


PANTOMIME. 

Entrée  de  la  Villageoise, 

Entrée  du   Courtisan. 

Il  apperçoic  la  Villageoife.  Elle  danfe  tandis 
qu'il  la  regarde.  Il  lui  offre  une  bourfe  ;  elle 
Ja  refufe  avec  dédain. 

Il  lui  préfente  un  collier  ;  elle  eflaye  le  collier: 
&^inri  parée,  elle  fe  regarde  avec complai- 
fance  dans  l'eau  d'une  fontaine. 

Entrée    du  Villageois. 

La  Villageoife  voyant  fa  douleur,  rend  fon 
collier. 

Le  Courtifan  l'apperçoir,  &  le  menace. 

La  Villageoileveurrappaifer,  &  fait  figne  au 
Villageois  de  s'en  aller.  Il  n'en  veut  rien  faire. 
Le  Courtifan  le  menace  de  le  tuer.  Ilsfejet- 
tent  aux  pieds  du  Courtifan  ,  qui  fe  laifle  tou- 
cher ,  &  les  unit.  Ils  fe  réjouiiïènt  tous  trois  ; 
le  Villageois,  de  leur  union;  &  le  Courti- 
fan ,  de  la  bonne  action  qu'il  a  faite. 


41. 


Le  Devin  du  Village,  19 

LE  DEVIN. 

Il  faut  tous  ,  à  l'envl  ,  nous  fignaler  ici  : 

Si  je  ne  puis  fauter  ainfi, 
Jç  dirai  pour  ma  part  une  chanfon  nouvelle, 

//  tire  une  chanfon  de  fa  poche. 

L'art  à  l'amour  eft  favorable  , 
Et  fans  art  l'amour  fçait  charmer  : 
A  la  Ville  on  eft  plus  aimable  , 
Au  Village  on  fçait  mieux  aimer. 

Ah  !  pour  l'ordinaire. 

L'amour  ne  fçait  guère 
Ce  qu'il  permet,  ce  qu'il  défend; 
C'eft  un  enfant,  c'eft  un  enfant. 

Elle  a  d'autres  couplets  :  je  la  trouve  aflez  belle, 

COLETTE. 

Voyons  :  nous  chanterons  aufll. 

Ici  de  la  fimple  nature 
L'amour  fuit  la  naïveté  : 
En  d'autres  lieux,  de  la  parure 
Il  cherche  l'éclat  emprunté. 

Ah  !  pour  l'ordinaire. 

L'amour  ne  fçait  guère 
Ce  qu'il  permet,  ce  qu'il  défend j 
C'eft  un  enfant ,  c'eft  un  enfant, 


ac         Le  Devin  du  Village. 
COLIN. 

Souvent  une  flamme  chérie 
Eft  celle  d'un  cœur  ingénu  : 
Souvent  pir  la  coque icerie 
Un  cœur  volage  eft  retenu. 

Ah  !  pour  l'ordinaire ,  &C. 

COLETTE. 

L'Amour  ,  félon  fa  fantaifie  , 
Ordonne  &  difpofe  de  nous  : 
Ce  Dieu  permet  la  jaloufiie. 
Et  ce  Dieu  punit  les  jaloux. 

Àh  !  pour  Tordinaire ,  &:c. 

COLIN. 

A  voltiger  de  belle  en  belle. 
On  perd  fouvent  l'heureux  inftant  : 
Souvent  un  Berger  trop  fidelle, 
Eft  moins  aimé  qu'un  inconftant. 

Ah  !  pour  l'ordinaire  ,  &c.     • 

COLETTE. 

A  fon  caprice  on  eft  en  butte  , 

Il  veut  les  ris ,  il  veut  les  pleurs  : 

Far  les  .  .  .  par  les  ...  (  Elle  a  peine  a  llr:.  ) 


Le  Devin  du  Village.        ^i 

CO'Ll^  Lui  aidant  à  déchiffrer. 
Par  les  rigueurs  on  le  rebute. 

COLETTE. 
On  TafFolblit  par  les  faveurs; 

Ensemble. 

Ah  !  pour  l'ordinaire  ; 

L'amour  ne  fçait  guère 
Ce  qu'il  permet,  ce  qu'il  défend; 
Ceft  un  enfant ,  c'eft  un  enfant. 

C  H  (E  U  R. 

C'eft  un  enfant,  c'eft  un 'enfant. 

Ariette   a   demi-jeu, 

COLETTE. 

Avec  l'objet  de  mes  amours 
Rien  ne  m'afflige  ,  tout  m'enchante  : 
Sans  cefTe  il  rit,  toujours  il  chante  ; 
C'eft  une  chaîne  d'heureux  jours. 
'     Quand  on  fçait  bien  aimer ,  que  la  vie  eft  charmante \ 

Tel  au  milieu  des  fleurs  qui  brillent  fur  fon  cours. 
Un  doux  ruifleau  coule  &  ferpente. 

Quand  on  fçait  bien  aimer,  6cc, 

Menuet. 


%t         Le  Devin  du  Village. 

a\LLEMANDE. 

COLETTE. 

Allons  danfer  fous  les  ormeaux; 
Animez-vous 5  jeunes  fillettes  : 
Allons  danfer  fous  les  ormeaux  , 
Galans ,  preffez  vos  chalumeaux. 

COLETTE  &  le  CHCEUR  re'petent. 

Repétons  mille  chanfonnettes  : 
Et  pour  avoir  le  cœur  joyeux, 
Danfons  avec  nos  amoureux  ; 
Mais  n'y  reftons  jamais  feulettes» 
Allons  danfer ,  &c. 

COLETTE.  Second  Couplet, 

A  la  Ville  on  fait  bien  plus  de  fracas  ; 
Mais  font-ils  aufli  gais  dans  leurs  ébats  ? 
Toujours  contens. 
Toujours  chantans  ; 
Plaifir  fans  art. 
Beautés  fans  fard  ; 
Tous  leurs  concerts  valent-ils  nos  mufettes  ? 

Allons  danfer  fous  les  ormeaux , 
Animez-vous ,  jeunes  fillettes  ; 
Allons  danfer  fous  les  ormeaux  , 
Galans,  preflfez  vos  chalumeaux, 

FIN, 


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