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LE NATURALISTE
REVUE ILLUSTRÉE
DES SCIENCES NATURELLES
PRRRPREPE PERS LL SS SSSR IS SL E PSS PSS S PPS PP PR
1900
AVEC LA COLLABORATION DE MM.
ALLARD, membre de la Société entomologique de France. KŒTLER (D'), professeur à la Faculté des sciences de Lyon
ANCEY, membre de la Société malacologique de France. LAHILLE, docteur ès sciences.
AUSTAUT, membre de la Société entomologique de France. LARBALETRIER, professeur d'agriculture.
BATAILLON, préparateur à ia Faculté des sciences de Lyon. LATASTE (F.), ex-s.-directeur du musée de Sañtiago (Chili).
LOCOURT, ex-conservateur des galeries de zoologie du Muséum de Paris. LECOMTE (H.), agrégé de l'Université,
BOIS, assistant de Culture au Muséum d'histoire naturelle de Paris.
BONNET (D'), attaché au laboratoire de Botanique du Muséum de Paris.
BONNIER (Gaston), professeur à la Sorbonne.
BOURSAULT, géologue
BOULE, assistant de Géologie au Muséum de Paris.
BOUVIER, professeur au Muséum de Paris.
CHAUVEACD, agrégé de l'Université.
LÉVEILLÉ (H.), ex-professeur au collège colonial de Pondichéry.
MAGAUD D'AUBUSSON, membre de la Société zoologique de Franco.
MALART, directeur du laboratoire maritime de St-Vaast.
MALIN VAUD, secrétaire général de la Société botanique de France.
MALLOIZEL, secrétaire bibliothécaire au Muséum de Paris.
MASSAT, attaché au Muséum.
CHRÉTIEN, membre de la Société entomolosique de France. MÉNÉGAUX, agrégé de l'Université.
COMBES (Paul), explorateur, MEUNIER (Stanislas), professeur de Géologie au Muséum de Paris.
COLOMB, préparateur de Botanique à la Sorbonne. MOCQUARD (F,), assistant de Zoologie au Muséum de Paris.
COSMOVICI (D'), de Jassy. NOEL Dr (Paul), du laboratoire d'entomslogie de Rouen.
COSTANTIN, maitre de conférences à l'Ecole normale supérieure. OUSTALET, assistant de Zoologie au Muséum de Paris.
COUPIN, préparateur à la Sorbonne, PATOUILLARD, membre de la Société botanique de France.
CUÉNOT, docteur ès sciences, professeur à la Faculté des sciences de Nancy, PIZON (A.), professeur au lycée Janson, Paris.
DAGUILLON, maitre de conférences à la faculté des sciences de Paris. PLANET, membre de la Société entomologique de France.
DANGEARD, maitre de conférences à la Faculté de Poitiers. PLATEAU, professeur à l'Université de Gand.
DEBRAY, professeur à l'École supérieure des Sciences d'Alger. POUJADE, du Muséum d'histoire naturelle de Paris.
DANIEL (L.), docteur ès-sciences. POUSSARGUES (E. de), préparateur au Muséum d'histoire naturelle de Pari
DISSARD (A.), docteur ès-sciences. PRIEM, agrégé de l'Université,
DENIKER, bibliothécaire du Muséum de Paris. RABAUD (Et.), licencié ès sciences naturelles.
DUFOUR, docteur ès sciences. RAILLIET, professeur à l'Ecole vétérinaire d'Alfort,
FABRE-DOMERGUL, directeur du laboratoire de Concarneau. REGNAULT, docteur en médecine.
GADEAU DE KERVILLE, membre de la Société zoologique de France, RENAULT, du Muséum,
GAUBERT, préparateur au Muséum. ROUY , ancien vice-président de la Société botanique de France.
GIARD, chargé de cours à la Sorbonne. SANTINI (Em.), professeur de sciences.
GIROD (Dr Paul), professeur à la Faculté des sciences de Clermont-Ferrand. SAUVINET, assistant de Zoologie au Muséum de Paris.
GLANGEAUD, attaché au Collège de France, SAINT-LOUP (Remy), maitre de conférences à l'Ecole des Hautes Etudes.
GOUX, du Muséum d'histoire naturelle de Paris. SCHAECK (F. de), attaché au Muséum d'histoire naturelle de Paris.
GRANGER (A.), membre de la Société linnéenne de Bordeaux. SPALIKOWSKI, de Rouen.
GRUVEL, chef de travaux à la Faculté des sciences de Bordeaux. TROUESSART (D'), ex-directeur du Muséum d'histoire naturelle d'Angers.
HARIO'T, attaché au Muséum d'histoire naturelle de Paris. VAILLANT, profssseur au Muséum de Paris.
HECKEL (D° Ed.), professeur à la Faculté des sciences de Marseille. XAMBEU (Cap°.), membre de la Société entomologique de France.
HOULBERT, Docteur ès sciences. ETC ETC:
JOUSSEAUME (D'), ex-président de la Société zoologique de France.
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NN 77 24e
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PARAISSANT LE 1° ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
PAUL GROULT, Secréraire DE LA RÉDAGTION
re (USE me
22° Année
14° Année de la 2 Série
ABONNEMENT ANNUEL
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PARIS
LES FILS D’ÉMILE DEYROLLE, ÉDITEURS
46, RUE Du BAC, 46
1900
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29e ANNÉE 2 SÉRIE —
R° 308 1 JANVIER 1900
LE NATURALISTE
REVUE ILLUSTRÉE
PES SCIENCES
SABLIÈRE DE LA BEUVRIÈRE
PRÈS DE BÉTHUNE
Le tertiaire inférieur et spécialement de Landénien des
géologues belges, forme par ses affleurements, une large
zone de passage entre les régions crétacées de la Picardie
ou del’Artois et les plaines d’alluvions des Flandres.Ce
NATURELLES
les collines qui entourent en partie la ville. À lest et au
sud, à Beuvry, Verquin et Vaudricourt, on exploite et
surtout on a exploité de toute antiquité, non seulement le
sable, mais principalement les grès tabulaires subor-
donnés.
Tous les anciens monuments de Béthune sont cons-
truits en grès; le curieux beffroi du x1ve siècle en est un
bel exemple.
Vue d'ensemble de la Sablière de la Beuvrière.
terrain imprime aux pays qu'il intéresse, des caractères
spéciaux non seulement au point de vue topographique,
mais aussi à celui de la culture.
Entre la craie et l'argile de Flandre, on peut dire que
toutes les couches sont sableuses, sauf quelques accidents
gréseux, argileux ou ligniteux, observables en quelques
points et toujours sur une petite échelle.
Le Landénien supérieur en particulier, qui correspond
à l’argile plastique du bassin de Paris, est dans le Nord,
presque exclusivement sableux, à l'inverse d’ailleurs de
la puissante assise de l'argile de Flandre qui la recouvre
et qui est l'équivalent des sables du Soissonnais.
Les environs de Béthune se prêtent admirablement à
l'étude des diverses formations tertiaires inférieures. Les
sables landéniens sont exploités sur les flancs de toutes
Le Naluralisle, 46, rue du Bac, Paris.
Les grès, devenus assez rares par suite de cette exploi-
tation ancienne et active, ne sont plus guère extraits qu'à
Beuvry dans une carrière peu importante, mais très
remarquable par l'abondance des végétaux fossiles qu'on
trouve précisément dans les grès.
Quant au sable, il est principalement exploité à lu
Beuvrière, dans la carrière de M. Danaes; cette sablière
est la plus belle non seulement de la région, mais très
probablement aussi, de tout le nord de la France. Elle
est Située à l'extrémité nord d’un promontoire tertiaire
dirigé du $. O. au N. E. et formant une sorte de digi-
tation transversale aux collines de l’Artois, entre les val-
lées de la Lawe et de la Clarence.
Ce promontoire, d’une longueur de 5 kilomètres et
d'une largeur moyenne de 2 kilomètres, a sa ligne de
6 LE NATURALISTE
crête légèrement inclinée vers les Flandres en passant de
100 mètres à 90 mètres d'altitude. Si on se dirige du sud-
ouest vers l'extrémité, on rencontre successivement en
affleurements, la craie à Micraster cor testudinariwm, les
sables et tuffeaux glauconieux du Landénien inférieur,
les sables glauconieux et quartzeux du.Landénien supé-
rieur et enfin l'argile de Flandre; tels sont les divers ter-
rains figurés sur la carte géologique; mais l’épais man-
teau de limons qui recouvre la colline masque en partie
les affleurements et en outre les formations tertiaires
désignées sont loin de se présenter toutes ici avec leurs
caractères propres; le Landénien inférieur est peu déve-
loppé, et l’argile de Flandre est extrêmement réduite et
même les couches attribuées à cet étage sont presque
partout remaniées.
Tout l'intérêt est concentré sur la formation moyenne :
les sables du Landénien supérieur, à cause de leur puis-
sance et de l'exploitation qui en résulte.
L'examen de cette carrière doit commencer par une
vue d'ensemble en se plaçant à l'extrémité méridionale,
du côté le plus élevé par conséquent. La figure ci-jointe,
faite d'après une photographie prise de ce point, montre
non seulement la puissance des couches et l'étendue du
front de carrière (près de 400 mètres), mais encore la
situation générale de ce promontoire qui forme éperon à
l'origine des Flandres. Le panorama, sans être des plus
beaux parmi ceux qu'on peut considérer le long de
la crête de l’Artois, est ici cependant plein d’ensei-
gnements.
La grande plaine, sensiblement horizontale, présente de
place en place quelques monticules de même constitution
géologique que celle dont nous nous occupons ici, et on
peut même apercevoir à 25 kilomètres au nord le mont
Noir et le mont des Cats, dont les sommetsqui atteignent
respectivement 131 et 158 mètres d'altitude (cotes
remarquables pour les Flamands) sont constitués par les
couches inférieures du Pliocène. Enfin, les cheminées et
pylônes des puits de mines sont là pour rappeler le con-
traste qui existe entre la régularité des couches supé-
rieures, secondaires, tertiaires et quaternaires (morts
terrains des mineurs), et les remarquables accidents stra-
tigraphiques qui ont tant compliqué l'étude des terrains
primaires sous-jacents ainsi que l'exploitation de la
houille.
La coupe détaillée de la carrière donne de haut en
bas :
Lerre delDrUVere. eee ete Ce 0 m. 30
Argile panachée avec silez:..…......... 1 m. 50
Limon sableux et argileux jaunâtre. ....... 4 m. 50
Sable quartzeux blanc assez pur............ 5 m. 00
Sable: plauconieux grossier... 46e "Lee 6 m. 00
Sable slauconteux fin. 5.070 mar 4 m,. 00
On peut remarquera l'absence complète du grès.
La terre végétale, quartzeuse, riche en matières orga-
niques végétales à la plus grande analogie avec la terre
de bruyère que l’on rencontre à la surface de presque
tous les terrains sableux et en particulier sur les sables
de Fontainebleau. On y trouve, en outre, une grande
quantité de petits silex brisés et surtout éclatés, généra-
lement plats avec patine très blanche; quelques-uns
même sont entièrement transformés en cacholong.
L’argile panachée est foncée, rougeûtre ou grise avec
veinules blanches dans les parties suffisamment voisines
du sol pour que la réduction des sels de fer ait pu être
effectuée par les racines. Les silex, un peu plus volu-
mineux que ceux de la terre végétale sont un peu brisés,
mais à peine usés par le frottement, et ressemblent beau-
coup à ceux de l'argile à silex.
La couche de limon qui vient immédiatement sous
l'argile en est nettement séparée, sans ondulations ni
pénétrations en poches; ce limon est plutôt sableux, mais
contient juste assez d'argile pour lui donner une forte
cohésion.
Les sables commencent enfin au-dessous. Uniquement
quartzeux et blancs à la partie supérieure, ils se chargent
de plus en plus de glauconie en descendant. M. Gosseiet
a fait remarquer (1) que la grosseur des éléments de ce
sable va en diminuant vers la base et que le fond pré-
sente une régularité de dépôt qui contraste avec l’allure
plus tourmentée et les entrecroisements de lits des par-
ties supérieures. La teneur en glauconie décroit propor-
tionnellement à l'augmentation de la dimension des
graines de quartz.
Ce qui frappe à première vue, quand on observe l’en-
semble de la coupe, ce sont les très nombreuses zones
foncées qui s'alignent avec une remarquable régularité
sur toute l'étendue de la carrière; ces ligues, parfai-
tement droites et horizontales, sont indépendantes de la
stratification dont elles recoupent les parties inclinées ou
entrecroisées. Elles sont naturellement dues aux phéno-
mènes bien connus d'oxydation des parties glauconieuses
et sont postérieures au dépôt du sable, Il est probable
que ces modifications chimiques si régulières ont pour
origine la circuiation souterraine des eaux dans les
sables, depuis leur émersion. :
Les zones indiquent évidemment les positions succes-
sivement occupées par la surface d’une nappe souterraine
subissant des fluctuations du niveau, d’abord suivant les
saisons eten outre à la suite des mouvements géologiques
lents; dans le cas présent il s’agit sans aucun doute de
soulèvements.
Tout phénomène qui se manifeste par une trace hori-
zontale doit, en effet, être attribué à l’eau tranquille,
comme l’est toujours celle d’une nappe circulant dans
un milieu aussi homogène que les sables de cette région.
Les sables de la Beuvrière appartiennent sur toute la
hauteur exploitée au Landénien supérieur et corres-
pondent exactement aux sables d’Ostricourt des environs
de Douai.
Quant aux couches supérieures : limon, argile pana-
chée et silex, il paraît assez difficile de leur assigner un
âge précis; les fossiles y manquent totalement, on ne
peut raisonner que d’après les éléments minéralogiques,
qui proviennent de la craie du Landénien et de l'argile
de Flandre, Les caractères propres font défaut à ces ter
rains qui semblent plutôt être le produit de la dénuda-
tion et de la destruction lente sur place, ou tout au plus
à la suite d’un faible remaniements des formations préci-
tées, qui toutes existent ou plutôt ont existé à une alti-
tude supérieure vers la crête de l’Artois. Ces destructions
et par suite la formation des couches de limon et d'argile
du sommet du promontoire de la Beuvrière peuvent
avoir leur origine immédiatement après le tertiaire
moyen, et se sont naturellement continuées sans inter-
ruption depuis l’émersion définitive des roches inté-
ressées.
(1) Annales de la Société Géologique du Nord, t. XXVU,
j page 116.
‘
LE NATURALISTE ;
Les sables de la Beuvrière, dont l’active exploitation
est faite par trains complets, c’est-à-dire par certaines
tonnes, sont utilisés dans le nord à des usages très
variés suivant la grosseur et la composition des éléments.
Le sable blanc supérieur est naturellement le plus pré-
cieux, il peut être utilisé pour la verrerie grossiere,
mais il est surtout employé en grand pour sabler les
salles basses des habitations et lieux publics; sous Île
nom de grès, il sert de poudre à nettoyer dans les
ménages flamands. Une carrière de cette importance est
nécessaire dans ce pays où on a l’habitude de tout
frotter. Les sables verts sont employés pour la construc-
tion, pour le pavage ou pour le moulage des briques.
On peut remarquer sur la figure combien les parois de
la carrière sont maintenues verticales, par suite de la
cohésion du sable. Cette propriété peut tenir à la présence
d’une très faible proportion d'argile ou à la forme des
éléments quartzeux ou glauconieux restant adhérents,
grâce à l'humidité qui est maintenue par capillarité dans
ces interstices. Cette cohésion des sables facilite beau-
coup l'exploitation, mais offre souvent une fausse sécu-
rité; on prend trop l’habitude d'exploiter par tranches
verticales et il arrive quelquefois des glissements qui
peuvent amener des catastrophes.
Henri BOURSAULT.
LES ‘ SAUVAGES” DE NORMANDIE
Quand j'écris sauvages, je n’exagère nullement, croyez-
le bien, et pour, vous le prouver, laissez-moi vous révéler
les mœurs et habitudes de ces arriérés qui n'ont pu être
touchés sans doute des beautés de la civilisation,
C'est au cours de mes voyages anthropologiques en
Normandie, que j'ai pris contact avec eux.
Déjà mon collègue et ami M. Ziborowski avait le pre-
mier signalé sur les confins de l’Eure-et-Loir les popula-
tions cavernicoles d'Ezy. Je les ai étudiées moi-même, et
je puis affirmer que tout ce qu’en a dit M. Ziborowski est
rigoureusement exact.
Mais en dehors des caves d'Ezy, il y a également les
familles qui vivent à l’état sauvage, et cela aux portes
de Rouen dans les grottes d’Orival, et dans les misérables
maisons de Saint-Jacques-sur-Darnétal.
À Orival il est vrai, il s’agit surtout d'ouvriers sans
travail, mais à côté d'eux se trouvent de véritables tro-
glodytes, se nourrissant de racines, de mets grossiers, et
ne voulant pour rien au monde abandonner leur triste
situation.
Mais ceci n'est rien encore comparativement à ce qu'il
m'a été permi d'apprendre ou de voir ailleurs. Je veux
parler de la sauvagerie intime, c'est-à-dire de celle qui ne
s'affiche pas comme à Ezy ou à Orival, et qui ne se
révèle qu'aux rares observateurs servis par une véritable
occasion
Les sauvages de cette catégorie ne sortent JAMAIS de
chez eux. Ils sont toujours nombreux, vivant dans la
plus effrayante promiscuité, complètement nus, jamais
lavés, couchant sur des feuilles mortes ou sur des brins
de genêt, sans un meuble, sans un ustensille de cuisine,
mangeant le pain que des voisins charitables leur appor-
tent. à
Leurs maisons sont des huttes abandonnées, à moitié
ruinées qu'ils utilisent du mieux qu'ils peuvent, répa-
rant les dégâts (le la couverture avec de la'paille ou des
branches de sapin couvertes de boue.
L'un des membres de la colonie est chargé d'aller aux
provisions ; c'est le plus souvent un enfant qu’on affuble
d’une chemise pour sortir et qu'on lui enlève quand il
rentre.
A Saint-Jacques, les membres de la colonie ont recu
de certaines gens le nom de Canaques ! L'expression est
pittoresque et juste en même temps.
Près de Rouen, dans les terrains vagues qui avoisi-
nent la ville, et principalement sur le territoire de la
commune du Petit-Quevilly, existe un campement d'un
autre genre. Les maisons sont d'anciennes roulottes de
saltimbanques dont les brèches sont bouchées avec des
plaques de fer-blanc, des planches, de la paille, des car-
tons ramassés dans les environs.
C’est la misère sous toutes ses formes, mais la misère
voulue : ici l'intérêt réside en ce que tous les types
humains de la création se sont donné là rendez-vous.
On y voit en effet des Bohémiens pur sang, des Bretons,
des Lazzaroni, des Belges, des Andalouses, des Gascons,
peu de Normands, et chaque être qui se montre à son
facies spécial el caractéristique,
Evidemment ce serait fort intéressant pour l’anthro-
pologiste de pénétrer dans ces bouges, mais la plus
grande circonspection est de rigueur, et c'est le revolver
en poche qu'il faudrait s’y décider.
De loin, cependant, on peut voir des enfants comple-
tement nus, des femmes dans le même appareil. Quant
aux hommes chargés de la surveillance du camp, ils se
contentent soit d’une pouche, soit d'un châle roulé autour
des cuisses, ou d’un pantalon en loques. Ce sont les
suobs seuls qui se paient le luxe de ce dernier accoutre-
ment.
Pour être complet, je dois encore mentionner les sau-
vages roulants. Ceux-ci ne sont pas les moins curieux ;
figurez-vous des gens qui pendant 10, 15 ou 20 ans peut-
être ne sortent de leur roulotte que la nuit « quand tous
les chats sont gris » et qui se prêtent leurs habits quand
il leur faut absolument paraitre le jour.
Je possède l’histoire de deux de ces familles qu’il
serait trop long de dérouler ici, mais dont je citerai seu-
lement certains épisodes,
L'une de ces colonies comprenait deux hommes, dont
l’un était vannier, la femme ne se montrait que le soir.
Deux fillettes naquirent. Quand elles eurent trois ans,
leur père les viola sans plus de facon. Transportées toutes
deux à l’hospice général de Rouen dans un lamentable
état, elles se rétablirent pourtant assez vite. Une enquête
fut ouverte, le père était filé avec son complice et la
femme.
Voilà quelles sont les mœurs de certaines gens dans
la province la plus proche de Paris, Il serait pourtant
grand temps que la sauvagerie füt complètement éteinte,
mais il est d'autant plus difficile de la faire disparaitre,
que les sauvages en question se dérobent très facilement
aux investigations des importuns.
Dr Ed. SPALIKOWSKI,
9 LE NATURALISTE
MŒURS ET MÉTAMORPHOSES
DU
BRACHYDERES LUSITANICUS Fab.
COLÉOPTÈRE DE LA FAMILLE DES RHYNCOPHORES
Au printemps, lorsque les femelles du B. lusitanicus
se sont accouplées, l'abdomen de certaines d’entre elles
est, peu de temps après, farci de vers de Diptéres, lesquels
envahissent les intestins ainsi que l'ovaire; ces femelles
sont lentes dans leur marche, quelquefois mutilées, sou-
vent couchées sur leurs flancs ou sur leur dos, la région
abdominale de chacune d'elles est infestée d’une vinge-
taine de vers dont nous donnons la description sommaire
à laquelle nous ajoutons celle de la pupe :
Ver, longueur 2 millimètres, largeur 0 mill. 8.
Corps arrondi, légèrement arqué, jaunâtre, granuleux,
convexe, atténué vers les extrémités.
Téte petite, arrondie, pièces buccales réduites, le pre-
mier segment thoracique très développé, les suivants
courts, transverses, ainsi que les segments abdominaux
dont le dernier est arrondi.
Arrivés à leur complet développement, ces vers
quittent le corps qui leur à donné la vie, se fixent
sous un objet quelconque, puis se transforment en
pupe.
Pupe. Longeur 3 millimètres; largeur { millimètre.
Corps suhnaviculaire, jaunâtre, convexe, lisse et lui-
sant atténué vers les extrémités; les flancs élargis en
forme de lame; dessous lisse, finement pointillé, seg-
ment mal prolongé par deux courtes pointes; pupe
inerte dont la phase nymphale a une durée de 15 à
20 jours.
Lorsque les femelles du B. lusitanicus ne sont pas
contaminées par les vers parasites, leur ovaire est gorgé
d’un grand nombre d'œufs, une centaine environ, que la
mère pond sous les pierres ou dans le sol, par groupes de
dix à douze et toujours à proximité des pins; dans ce
milieu sont de jeunes racines que la larve rongera pour
s’en nourrir.
OŒEuf. Longueur, 0 mill. 6 ; diamètre, O0 mill. 2.
Oblong, jaunâtre pâle, finement réticulé, àbouts arron-
dis.
Œufs très petits, eu égard à la taille de la mère, mais
pondus en très grand nombre et dont l’éclosion a lieu
dix à douze jours après leur dépôt en terre.
Tant qu’elles sont jeunes. les larves, sans être réunies,
ne s’écartent pas; même au moment de leur plus grande
expansion, lors de leur transformation, il n’est pas rare
d'en trouver des groupes de trois à quatre.
Larve. Longueur, 12 millimètres; largeur, 3 milli-
mètres.
Corps apode, arqué, mou, charnu, blanc jaunâtre, avec
cils et spinules, clairsemés sur la surface, convexe en
dessus, subdéprimé en dessous, arrondi vers les deux
extrémités.
Téle petite, arrondie, rougeâtre, épistome flavescent,
bifovéolé, labre frangé de longues spinules rougeàtres ;
mandibules fortes à extrémité noire et bidentée, lobe
maxillaire court à bords pectinés, palpes biarticulés,
lèvre inférieure charnue, avec trait rougeâtre crucial,
prolongée par deux palpes bi-articulés, et par une courte
languette garnie de quatre spinules noires; antennes
très courtes de deux articles; pas de traces d’ocelles,
Segments thoraciques au nombre de trois, convexes,
blanchïtres, couverts de cils et de spinules, un peu
plus larges que la tête, le premier avec plaque cornée
jaunâtre,
Segments abdominaux larges, transversalement incisés,
les sept premiers formés de trois bourrelets, le huitième
avec plaque jaunâtre, le neuvième, réduit à extrémité
cornée et tronquée : une double rangée de mamelons
latéraux longe les flancs de ces segments.
Stigmates petits, orbiculaires, à péritrème corné,
Dans les bois de pins des environs de Ria, cette larve,
bien reconnaissable àses plaques cornées et calleuses,
mène une existence souterraine : elle vit des racines du
pin; à l’entrée de l'hiver, elle prend position au fond de
son réduit et y passe la mauvaise saison; au printemps,
elle redouble d'activité et, quand arrive juin, parvenue à
son complet développement, elle se faconne dans le sol
même une loge dont elle lisse les parois et s’y trans-
forme.
Nymphe. Longueur, 9 millimètres ; largeur, 3 milli-
metres.
Corps en ovale allongé, un peu arqué, charnu, blanc
Jaunâtre, convexe, couvert de petites spinules, arrondi
vers les deux extrémités.
Dans sa loge, la nymphe repose sur la région dorsale,
elle peut imprimer à son corps de légers mouvements dé-
fensifs ; la phase nymphale a une durée d’un mois environ.
Adulte, Ses téguments affermis, l’insecte, arrivé à l’état
de perfection, sort de son réduit et d'un pas lent et
comme compassé, il gagne l'arbre le plus rapproché et
s'y installe Jusqu'au moment de l’accouplement, puis le
mâle meurt et la femelle procède au dépôt de sa ponte
dans les conditions déjà décrites.
Cette espèce est à comprendre parmi les insectes nui-
sibles à la sylviculture.
CAP. XAMBEU.
LES ANIMAUX AU THÉATRE
Aimez-vous les animaux? On en met aujourd'hui dans
toutes les pièces
L'habitude en remonte d’ailleurs assez loin. Louis XIV,
pendant sa minorité, s'ennuyait mortellement, — il s’est
rattrapé plus tard. — Sa mère, ne sachant comment
l’amuser, eùt un Jour l’idée de faire représenter devant
lui Andromède, tragédie où la machinerie joue un certain
rôle. Le « clou » de la pièce était le fameux cheval Pégase
qui, pour s’accorder avec la mythologie, devait évoluer
dans l'air avec la grâce d’un oiseau, L’infortuné quadru-
pède s’acquitta à merveille de son rôle et ce fut vraiment
un spectacle nouveau que de le voir gigoter, les quatre
pieds ballants, et exécuter ses mouvements juste au
moment voulu. Il cs! vrai que le directeur de la scène
avait trouvé un moyen ingénieux pour exciter la verve,
— si l'on peut s'exprimer ainsi, — de l'animal : il l’affa-
mait par un jeûne prolongé et, au moment où il parais-
LE NATURALISTE 9
sait sur le théâtre, un machiniste vannait de l’avoine
dans la coulisse. Je vous laisse à penser comme le cheval
hennissait et se cabrait, à la grande joie des spectateurs
qui n'en connaissaient pas la cause, Le succès de Pégase
fut très grand et, depuis, tous les librettistes ont cherché
à introduire des animaux dans leurs pièces, assurés
qu'il sont de plaire ainsi au public, autant les tout petits
que les personnes âgées, — ces grands enfants.
Pendant longtemps, les animaux introduits sur la
scène ne furent que des bêtes, en quelque sortes banales,
et, en tout cas, familières, comme des chiens, des chats,
des ânes, etc, Mais ces mœurs furent bouleversées,
vers 1880, par Jules Verne et Dennery avec leur fameuse
pièce Le Tour du Monde en 80 jours. Je me souviens qu’à
cette époque, — j'étais jeune alors — je brülais d'envie
d'y assister, non pour voir des sauvages, ni un train
arrêté, ni les fourberies de je ne sais quel traitre, ni les
aventures fantastiques de Passepartout, toutes choses
dont cependant on disait merveille. Non, ce qui me
séduisait, — comme tout le monde d’ailleurs, — c'était
l'éléphant. Pensez donc, un éléphant «en viande » sur
la scène! Avait-on idée de ca! J'avais déjà vu beaucoup
d’éléphants au Jardin d’Acclimatation et au Jardin des
Plantes, et l'animal en lui-même ne m'intéressait plus.
Non, c'était tout simplement de le voir sur la scène avec
des acteurs, Et voilà comment on intéresse le public ! Le
succès de l'éléphant fut d’ailleurs si prodigieux qu'on le
fit assister au souper de centième, au Grand-Hôtel, où il
reçut dignement les congratulations de tous ses cama-
rades dont quelques-uns, gageons-le, étaient jaloux,
Depuis Le Tour du Monde, les animaux exotiques ont
été de plus en plus utilisés et je crois bien que l’on pour-
rait presque faire tout un cours de zoologie, rien qu'en
faisant défiler devant les yeux des élèves, toutes les bêtes
qui ont paru sur scène,
Et, le succès aidant, on en est venu, tant ce qui
touche aux bêtes au théâtre intéresse le public, à donner
leurs noms aux pièces elles-mêmes, soit que ces noms
se rapportent aux animaux eux-mêmes, soit qu'ils ne s'y
rattachent qu'indirectement. Ainsi : Le Crocodile, la
Cigale et la Fourmi, le Tigre du Bengale, le Tigre de la rue
Tronchet, l'Oiseau bleu, le Renurd bleu, le Phoque, le Loup
et l’Agneau, lOie du Caire, le Lézard, le Dindon, la Tortue,
l’Orang-Outang et enfin Shakspeare! qui n’est autre que
le nom d'un chien, le clou de la pièce actuellement
jouée aux Bouffes.
De tous les animaux employés pour la scène, les plus
nombreux sont naturellement les chiens dont le dressage
est facile, Il est rare qu’une pièce qui se respecte en soit
dépourvue. En ce moment même, on peut en voir un
intéressant représentant, Toby, dans Robinson Crusoë. Ce
Toby, dont le rôle principal consiste à porter les légumes
du pot-au-feu que doit préparer Vendredi, a une physio-
nomie très intelligente : on a pu la voir, au dernier Salon,
reproduite dans un charmant tableau de Weisser. Il est,
de plus, de haute lignée, tous ses ancêtres ayant obtenu
des récompenses aux expositions canines : sa grand’mère
maternelle, Comtesse, a même été célèbre parmi les ama-
teurs de chiens.
Souvent, les chiens n’ont aucun rôle à remplir, comme
par exemple dans cette pièce de Molière où il est dit si
crüment « qu'ils ont pissé partout », Mais souvent aussi,
ils doivent, — sans être des chiens savants, — avoir un
rôle plus actif, comme dans la fameuse meute de la Jeu-
nesse de Louis XIV. On se souvient encore d’un beau
lévrier, appartenant à Gaston Vassy, qui menait l’hallali
avec une maestria superbe : aussi était-on plein d'égards
pour lui; il avait sa loge, — pardon! sa niche, —- au
théâtre, et, chaque soir, on le ramenait en voiture.
Un bon chien acteur peut à lui seul faire réussir toute
une pièce. Il acquiert de ce fait une grande valeur : il y
a quelques années est mort, en Amérique, un Saint-Ber-
nard, Plinlimmon, qui n'avait pas son pareil pour les
mélodrames et que l’on avait payé 125.000 francs, —
excusez du peu.
Dans le livre d'or de la gent canine, on doit encore
compter la meute infernale des Mille el une Nuits, au
Châtelet. Des chiens de chasse, entièrement hibres, pour-
suivaient des danois maquillés en tigres et, très obéis-
sants, ne se jetaient à la curée que sur l’ordre du
piqueur, qui, entre parenthèses, était l'ancien piqueur
du prince Napoléon.
Parmi les autres chiens applaudis, il faut encore citer
Émile, le chien des Pyrénées, qui donnait véritablement la
réplique aux acteurs, Quand il voulait exprimer sa peine,
il poussait des hurlements à fendre l’âme. Il avait aussi
une scène assez difficile dont il se tirait fort bien : 1l se
dégageait de son collier pour aller voir son maitre pri-
sonnier et venait y repasser sa tête quand le geôlier arri-
vait.
Célèbres aussi le chien Caporal, dans les Cosaques,
ainsi que la levrette russe des Danicheff, le chien de
berger de Panurge et les lévriers de Serge Panine.
N'oublions pas non plus, — quoiqu'ils rentrent plutôt
dans les animaux savants, — les chiens qui, il y a deux
ou trois ans, simulaient une scène d'incendie dans un
music-hall des boulevards, Rien n'y manquait : les
manœuvres des pompiers, le sauvetage d'un enfant, la
mort du sauveteur, le désespoir de la veuve, Parrivée des
ambulances urbaines, etc.
Les chats sont rarement utilisés : ils ne sont pas nés
acteurs et ont le caractère très indépendant.
Quant aux chevaux, on en voit très souvent, mais seu-
lement comme figurants et ne servant qu'à porter des
cavaliers ou à trainer des voitures.
Chaque fois qu'ils le peuvent d’ailleurs, les auteurs
dramatiques remplacent les chevaux par des ânes, dont
le caractère débonnaire ne s’effraye pas autant aux sons de
la musique. Il est même rare qu'une opérette soit
dépourvue d’ânes : il n’y a rien de tel pour faire partur
les fusées joyeuses du rire. Tous ceux qui ont vu jouer
les Mousquetaires au couvent et les Quatre filles Aymon
doivent s’en souvenir. Mais, si placide qu'il soit, l'âne
retrouve parfois son naturel têtu et amène alors des mésa-
ventures cruelles, comme celle-ci, survenue à Molière
lui-même et dont nous empruntous le récit à M. Edmond
Le Roy. « On jouait une pièce titrée Don Quichotte, Et
c'était le moment où le chevalier de la Manche installe
Sancho dans son gouvernement. Molière, qui faisait
Sancho, attendait, monté sur son âne, et dans la coulisse.
le moment de paraitre, Or, voici que l’âne, qui sans doute
ne savait pas son rôle, s’obstina à vouloir devancer l'ins-
tant de son entrée. On sait combien l'âne est tétu.
Molière eut beau tirer sur le licol, et de toutes ses forces,
il eut beau appeler à son secours tous ses camarades :
« À moi, Baron! A moi, La Thorillière! ce maudit âne
rétif!.. » Rien n’y fit. La fidèle La Forêt, en riant de
tout son cœur, tâchait à le fixer en le retenant par
la queue; mais l’opiniâtreté de maître Aliboron, après
plusieurs saccades, fut victorieux de tous ces efforts : il
10 LE NATURALISTE
partit comme un trait et, s’élancant sur le théâtre, il
dérangea la scène non encore achevée. Cependant son
maitre criait aux spectateurs, tout en caracolant :
« Pardon, messieurs! pardon, mesdames! mais cette
mauvaise bête, que vous voyez là, a voulu entrer malgré
moi! » Comme la situation était, malgré tout, du plus
haut comique, le public prit au mieux la chose, mais
oncques depuis Molière ne voulut remonter sur son
âne. »
Dans le Voyage de Suzette, avec le cirque Blackson, on
a pu voir défiler un grand nombre d'animaux, de même
que dans la Revue jouée, il y a peu de temps, aux
Varietés. Mais ce sont là des tours de force qui coûtent
cher, même quand la pièce réussit, et les directeurs du
théâtre préfèrent n'utiliser que trois ou quatre espèces
animales, C’est ainsi que l’on a pu voir les lions et les
ours dans le Tour du Monde. déjà cité, la Biche au bois,
et les Bicyclistes en voyage. La Fermière, à l'Ambigu, ne
pouvait se passer de poules et de chèvres et toute la
presse a parlé du serpent vivant que portait Sarah
Bernhardt dans Cléopätre. Dans Robinson Crusoé, outre
le chien Toby, on peut voir une gentille petite chèvre,
Blanchette, qui rappelle celle du Pardon de Ploëérmel, et un
perroquet qui, à l’origine, devait répondre à Robinson et
à Vendredi, mais qui, s'embrouillant d'une manière
lamentable dans ses réponses, dut se contenter d’un rôle
muet et être remplacé par un comparse qui parle pour
lui dans la coulisse. On y voit aussi un singe, qui rappelle
un peu celui de Manette Salomon, singe qui, dans les
mains de Galipaux, devint rapidement célèbre. Mais, en
général, on se méfie des singes qui ne pensent qu'à faire
des farces et qui, d’ailleurs, dans les courants d'air des
coulisses, s’enrhument trop facilement.
Quant à l'éléphant, si on ne l’emploie pas plus sou-
vent, c’est qu'il coùte fort cher et se trouve difficilement
logeable et maniable. Car, avec lui, le succès est sûr et,
à ce propos, je m'en voudrais de ne pas reproduire l’anec-
dote suivante, racontée par le regretté Sarcey : « C'était
au Châtelet ou à la Gaité. Il y avait dans un drame
à grand spectacle un éléphant, qui faisait sa partie dans
un ballet, se remuant en cadence et balançant sa trompe.
On l'avait fort applaudi, et je ne jurerais pas que l'étoile
de la danse n’eût conçu quelque dépit de ce succès. Le
rideau baisse, et, aux acclamations du public, il se relève
presque immédiatement, Ces dames étaient là, se tenant
par la main et faisant force révérences. L'éléphant qui
occupait le devant de la scène, juste au-dessus du trou
du souffleur, n'avait pas bougé. Il nous regardait de son
petit œil malicieux, sur lequel se plissait sa paupière, Il
avait positivement l'air de nous dire ; « Tas d’idiots! Je
vous en ménage une bien bonne! Attendez voir! » Il se
retourne, et tout à coup, un cri d’effroi jaillit du trou du
souffleur, où s’engouffrait un torrent. Les musiciens se
sauvent effarés, emportant leurs partitions et leurs ins-
truments qui ruissellent. C’est un fou rire dans toute la
salle, L’énorme bête, une fois sa manifestation achevée,
évolue sur elle-même, nous salue de sa trompe et se
retire impassible, Ce sont là, je l'avoue, de rares bonnes
fortunes. »
Pour terminer, citons encore, parmi les animaux
ayant figuré au théâtre, les souris de l'Homme au masque
de fer, qui, un jour, grignotèrent, — pour de vrai,
comme disent les enfants, — un billet de mille à un
acteur, les Cygnes et les Canards de La Chatte blanche,
les moutons de Panurge, la Marmotte de la Grdce de
Dieu, le zèbre sur lequel arrive (cette année) la Belle
Hélène, les Chameaux du Grand Mogot, les Colombes
de Latude et enfin les Ramiers de Miss Robinson qui
venaient se poser sur Simon Girard au son d'une
musique si délicieuse :
Jolis ramiers,
M'écoutez-vous ?
C’est pour vous que je chante.
Henri COUPIN.
GÉOLOGIE DE L'ENFOUISSEMENT D'UNE CHAUSSÉE
DANS LE SOL
Quand on trouve un squelette fossile où antédiluvien
(comme on disait il y a 50 ans) enfoui dans les terrains
d’alluvion, on est tenté de lui attribuer des dizaines et
des centaines de milliers d'années, si l’on en croit les
anciens géologues; et cependant il y a tout lieu de croire
que l’on exagère considérablement son antique origine.
En effet, il suffit de considérer simplement ce qui se
passe actuellement sous nos veux, depuis quelques siècles
seulement, pour voir qu'en moins de 2000 ans, 1500 ans
peut-être, il peut se former un dépôt de plusieurs mètres
de profondeur, sur le niveau du sol d'autrefois; et cela
sur une étendue considérable de terrain.
Entre Noyon et Soissons, il y avait jadis une chaussée
romaine, qu'on dit avoir été réparée à l'époque mérovin-
gienne, du temps de la reine Brunehaut; d'où son nom
de chaussée Brunehaut. Cette chaussée a done à coup
sûr moins de 2000 ans d'existence; d'autant plus que la
chaussée romaine semble avoir été terminée sous l’em-
pereur Caracalla, c'est-à-dire vers le second siècle de
notre ère. Quant à Brunehaut, elle était encore dans
toute sa puissance, en l'an 600.
Cette chaussée traversait trois régions bien différentes :
la vallée de lOise, qui est inondée souvent pendant
l'hiver; puis elle longeait le pied de la montagne de Cutz,
pour escalader en pente douce cette montagne, qui fait
partie du vaste plateau dit montagne de Soissons.
La voie romaine traversait donc une vallée humide, la
pente d’une montagne et enfin le long plateau qui lui fait
suite. Nous ne la suivrons pas plus loin.
Très expérimenté dans la construction des routes, les
Romains avaiert eu bien soin de construire ces trois
troncons d'une manière tout à fait spéciale à chacune des
régions qu'il s'agissait de traverser.
Dans la vallée de l'Oise, c'était un véritable rempart,
élevé de plusieurs mètres au niveau du sol, afin de la
mettre à l'abri des inondations. Nous ne la décrirons
pas davantage. Qu'il nous suffise de dire qu’elle était
construite en pierres de taille du pays, de plus en plus
petites, au fur et à mesure qu'on se rapprochait de la sur-
face, qui était probablement recouverte de dalles, au lieu
de pavés.
En tous cas, les plus grosses pierres étaient au fond, à
la base, comme le dit M. Peigné-Delacourt.
Sur le plateau, elle était très large, surélevée au-dessus
du sol, et formée de pierres nummulitiques.
Mais, entre les deux, dans sa partie moyenne, sur la
LE NATURALISTE 11
pente de la montagne de Cutz, entre la vallée de l'Oise
et le plateau de la montagne de Soissons, la chaussée
Brunehaut avait une structure toute différente; elle était
formée de cailloux, et notamment de ces têtes de chat, si
abondantes dans les sables du Soissonnais, et dont on se
servait jadis pour empierrer les routes, avant de faire
usage de la pierre bleue de Belgiqne. Peut-être même
en avait-on tiré des alluvions de la vallée de l'Oise,
comme le fait la compagnie du chemin de fer pour le bal-
last de ses voies. Quoi qu'il en soit, la chaussée avait
alors une hauteur de plusieurs mètres, et formait un
puissant remblai au-dessus du sol, même sur la pente de
la colline.
Pourquoi un remblai en cet endroit? Certes, on com-
prend très bien qu'ils aient élevé une sorte de puissant
rempart, pour traverser la vallée de l'Oise à cause de ses
inondations périodiques; mais tout d’abord on ne
s'explique pas pourquoi ce remblai sur la pente de la
colline, que la route longe sur une grande longueur, avant
de se décider à grimper sur ses flancs.
Cela tient à une chose fort importante, que les
Romains avaient déjà observée depuis longtemps. Les
montagnes se dégradent avec les siècles plus rapidement
qu'on ne croit. Si donc on se contente de faire une route
au pied d’une montagne, une route qui longe la base de
cette montagne, elle ne tarde pas, du moins dans nos
localités, où les collines sont formées des sables du Sois-
sonnais, cette route ne tarde pas à être petit à petit
engloutie par les terres qui descendent incessamment de
la montagne, sous l'influence des agents atmosphériques.
Or, c'est là précisément ce qui explique pourquoi cette
voie romaine a dü être réparée, au temps de Brunehaut,
500 ans après son premier établissement.
Aujourd’hui, après 4200 ans, pendant lesquels on a
négligé de l’entretenir, aujourd’hui qu'on a duü construire
une nouvelle route à la place, parallèlement à la voie
ancienne, sur une certaine étendue, tout en l’utilisant
probablement en d'autres endroits, et notamment sur le
plateau où elle s'était évidemment mieux conservée;
aujourd'hui, cette voie romaine est complètement ense-
-velie, malgré son remblai de plusieurs mèêtres de hauteur
au-dessus du niveau du sol ancien, sous une couche de
terres descendues de la pente de la montagne, de plus
d’un mètre d'épaisseur,
Bien plus, sur la pente même de la montagne, là où
elle escaladait les flancs du plateau, elle disparait com-
plètement sous une couche de terre végétale de 2 ou
3 mètres d'épaisseur!
Et tout cela, malgré le formidable remblai élevé par
les Romains pour parer à cet inconvénient. On voit donc
que, dans certaines circonstances, la pente de nos mon-
tagnes descend tout doucement dans la vallée, de façon
à former en moins de 2000 ans une couche d'au moins
4 mètres d'épaisseur. C’est là un fait important à
retenir.
D' BouGonx.
DESCRIPTION D'UN COLÉOPTÈRE NOUVEAU
LUCANUS SINGULARIS. == LOUIS PLANET
(Nova species )
Indes orientales?
Le mâle de cette espèce n'est pas connu, mais, à en
juger par la femelle, il doit être voisin du Luc. lunifer,
car les ressemblances entre les deux femelles sont très
grandes.
La plus grande différence réside dans la forme du cor-
selet qui, chez le Luc. singularis, est bien moins convexe,
plus anguleux aux angles médians et beaucoup plus ré-
tréci en avant. Il est, en outre, plus finement rebordé.
Il convient d'ajouter que les mandibules sont propor-
tonnellement plus longues, etque leur bord interne, au
Lucanus singularis @, collection H. Boileau.
heu d'être sécuriforme, présente deux dents distinctes et
espacées, que l’épistôme est plus long et plus grêle, que
la granulation de la tête est moins profonde et que les
élytres sont plus régulièrement paralleles. Les feuillets
de l'antenne sont plus courts. Les pattes ont la même
structure, mais leur granulation et leur ponctuation sont
beaucoup plus faibles.
Le seul exemplaire que je connaisse de cette intéres-
sante espèce m'a été communiqué par M. H. Boileau et
porte comme seule indication de provenance : Inde orien-
tale. — La coloration de cette femelle est entièrement
noire, le corselet et les élvtres sont lisses et luisants; il
est probable qu'ils sont recouverts de villosité dans l'état
de nature.
Louis PLANET.
CHRONIQUE
La «muscea olearia » et la récolte des olives
dans les Pouilles (Italie),
L'insecte parasite musca olearia a fait cette année de
tels ravages dans les plantations d’oliviers des Pouilles,
de la Basilicate et du territoire d'Otrante qu'il n'y aura
pas de récolte et que, sur la plupart des points, les pro-
priétaires ne prendront même pas la peine de faire la
cueillette des fruits gâtés.
La Chambre de commerce de Gallipoli a reçu de tous
les maires auxquels elle s’est adressée, notamment de
12 LE NATURALISTE
Bari, Andria, Trani, Loreto, Monopoli, Mola, etc.
centres de production les plus importants d'olives, la
réponse presque unanime que cette année, sur le produit
annuel ordinaire, on réaliserait à peine le cinquième.
En présence d’un pareil dommage, le Conseil provincial
de Bari vient de voter une prime de 50,000 francs à
attribuer au meilleur procédé de destruction de la musca
olearia, On annonce également de Rome que le gouver-
nement royal a décidé, à la demande du ministre de
l'Agriculture, d'ajouter à cette somme une autre prime
de 10.000 francs. :
Les étrangers sont admis à prendre part à ce concours.
L'autorité préfectorale dans cette région à ailleurs
signalé d'urgence au gouvernement la nécessité de
venir en aide, dans la plus large mesure possible, cet
hiver, à la population agricole en vue de parer à la
disette.
La diphtérie aviaire. — Une épidémie de
diphtérie à été constatée chez l'homme qui a eu pour
point de départ une épidémie de diphtérie aviaire si
souveñt répandue dans nos basses-cours. Le microbe de
la diphtérie aviaire entraine, en général, chez l’homme
une maladie moins grave que celle produite par le
microbe de la diphtérie toxique de Klebs Lœæffler, il peut
néanmoins donner des angines qui causent la mort des
personnes atteintes. On ne saurait donc trop appeler
l'attention des gens qui soignent les bêtes malades et
leur indiquer les précautions à prendre pour éviter la
contagion.
Pour lutter contre cette maladie, les mesures hygié-
niques préconisées sont : la désinfection des poulaillers
et la mise en quarantaine des sujets devant entrer dans
les basse-cours,
D'autre part un traitement qui a donné des résultats
satisfaisants consiste dans l'emploi d’une dissolution de
50 grammes de sulfate de cuivre, dans 4 litres d’eau, au
moyen de laquelle on badigeonne à l’aide d’une plume
les muqueuses buccales et pharyngiennes des volailles
malades.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 11 décembre 1899.
M. Gabriel Bertrand a constaté la présence de la mau-
nocellulose dans Îles tissus ligneux des plants gymno-
spermes. [l avait démontré précédemment que le tissu ligneux
des plants angiospermes,, monocotylédones et dicotylédones,
était formé, quel que soit l'organe où on l'examine, de quatre
substances principales : la cellulose ordinaire, la vasculose de
Fremy, une sorte de résine probablement phénolique ou lignol,
et la gomme de bois, appelée aussi xylane. À la suite de
nouvelles recherches, l’auteur montre que,chez les Jjilantes
gymnospermes, la xjlane,à peu près absente, est remplacée parun
hydrate de carbone tout à fait différent, par delamanno-cellulose.
Dans la petite famille des Gnétacées, les trois genres qui la
composent n’ont fourni qu'un très petit rendement. C’est là
un-fait d'autant plus intéressant que les Gnétacées ne sont
pas de véritables gymnospermes, mais bien plutôt un terme de
passage, un véritable trait d’union entre les deux grands
groupes de phanérogames.
— M. E-L. Bouvier a fait de mouvelles observations
sur les Péripates américains. Les péripates américains se
divisent en deux sections : à la première appartiennent des
espèces qui ont 4 ou 5 papilles pédieuses; dans la seconde
viennent se grouper toutes les formes qui ont 3 papilles pé-
dieuses. Les premiers habitent tous les hauts plateaux de
la chaîne montagneuse qui avoisine le Pacifique, l'auteur les
localisés dans les îles et dans les vallées américaines situées
à l’est de la chaîne, il les appelle Péripales caraibes. Les An-
dicoles sont connus depuis la région de Tepec jusqu’en Boli-
vie; les Caraïbes se retrouvent depuis Cuba jusqu'aux rives de
l'Amazone. Les Péripates américains présentent une variété des
plus grandes, que leurs espèces andicoles ne sont pas sans
affinités avec les espèces caraïbes, mais qu’elles se rapprochent
aussi, par plus d’un point, des espèces non américaines.
— MM. Lucet et Constantin ont observé une nouvelle
mucorinée pathogène. Les parasites du groupe des Muco-
rinées qui attaquent les animaux supérieurs, sont encore peu
nombreux. En novembre 1898, M. le Dr Lambry, de Courtenay
(Loiret), soignait une femme qu'il croyait atteinte de tuber-
culose; il remit des crachats de la malade, à M. Lucet, qui
après examen ne reconnut pas le bacille de Koch, mais trouva
des globules rappelant ceux qu’on voit dans l’Aspergillose;
plusieurs examens donnèrent les mêmes résultats; la malade
fut soignée par la méthode recommandée contre l’Aspergillose
et guérit. Le champignon parasite est différent des espèces
pathogènes connues jusqu'à ce jour. Il diffère des Mucor pusillus,
corymbifer et ramosus par la présence de rhizoïdes se présen-
tant irrégulièrement de place en place sur le mycélium ram-
pant, quelquefois à la base des filaments fructifères, mais
souvent sans rapport avec eux. Les auteurs en ont fait le type
d’une section nouvelle du genre Mucor qu'ils proposent d’ap-
peler Rhisomucor et comme espèce R. parasiticus. Les expé-
riences faites sur leurs animaux établissent, d’une manière
indéniable, le caractère pathogène de l’espèce nouvelle.
— M. H. Révil adresse une note sur la Tectonique de
l'extrémité septentrionale des massifs de la Char-
treuse. La chaine Semnoz-Nivollet-Revard est la seule
chaîne du massif des Bauges qui se continue dans celui de la
Chartreuse. Les parties de ce dernier massif situées à l’ouest de
l'anticlinal jurassique d’Entremont naissent au sud de Cham-
béry et ne se prolongent pas vers le nord. Ces plis relaient
ceux situés à l’est de la chaîne du mont du Chat, mais n’en
sont pas la continuation directe, Ils ne sont que l'épanouis-
sement d’un pli simple dont on voit l’axe s’abaisser peu à peu
pour disparaitre ensuite avec plongement périclinal sous les
assises tertiaires et les alluvions quaternaires de la vallée
s'étendant de Chambéry à Aix-les-Bains. Cette dernière, formée
par la réunion des synclinaux de Couz et du Mollard, se con-
tinue au nord par le lac du Bourget et la vallée du Rhône;
elle s'accidente de deux anticlinaux importants: celui de la
Chambotte et celui du Vivier et de Roche-du-Roi.
M. Ch. Glangeaud donne le résultat de ses observations sur
les facies ctles conditions de dépôt du furonien de l'A-
quitaine. Le Turonien se divise en deux sous-étages : le Ligé-
rien et l’Angoumien. En raison de leur résistance à l'érosion,
les sédiments de l'Angoumien forment de pittoresques falaises,
surtout dans la région comprise entre Cognac, Angoulême et
Périgueux. Devant tout l’Angoumien s'édifiérent des amas de
Rudistes, véritables barres récifales atteignant parfois de
grandes dimensions. Les passages latéraux des calcaires à
rudistes sont fréquents et rapides dans l’Angoumien de l'Aqui-
taine: à quelques centaines de mètres d'un ilot à rudistes, on
a parfois une transformation pétrographique et paléontologique
profonde. L’épaisseur de l'Angoumien varie entre quelques
mètres et 95 mètres, c’est vers l'Océan (Charente-Inférieure)
que cet étage est le moins épais. Le maximum d’extension
et de profondeur de la mer Turonienne, a eu lieu à l’époque
ligérienne et le minimum durant l'Angoumien supérieur, pen-
dant le Ligérien et jusqu’au milieu de l'Angoumien inférieur,
les eaux marines s’avancaient assez loin vers les massifs cris-
tallins qui leur servaient de rivage. Le retrait de la mer se fit
sentir à la fin de l’Angoumien inférieur et s’accentua durant
l'Angoumien supérieur.
CCS
\
Séance publique annuelle du 18 décembre 1899.
Prix décernés en 1899 pour ce qui concerne les Sciences
naturelles et leurs applications.
__ Prix Delesse décerné à M. W. Kilian, professeur à l’'Uni-
versité de Grenoble, qui s’est consacré depuis dix ans avec
une activité et une énergie infatigables, à l'étude des Alpes
francaises.
__ Prix Fontanne à M. Emil Haug pour l’ensemble de ses
publications paléontologiques.
__ Prix Desmazières à M. l'abbé Huë pour son mémoire
appela pour cette raison Péripatles andicoles; les autres sont } sur une nouvelle classification des Lichens, fondée sur leur
LE NATURALISTE 13
Sr A PE ne Un D GE US
anatomie. — Une mention honorable est aussi accordée à
M. Leuduger- Fortmorel pour son travail sur les Diatomées de
la côte occidentale d'Afrique.
— Prix Montagne. Deux prix ont été attribués : l’un à
M. Jules Cardot, pour ses Recherches analomiques sur les Leu-
cobryacées, l'autre, au Frère Héribaud (Joseph) pour son ou-
vrage sur Les Muscinées d'Auvergne.
— Prix Thore a été partagé entre M. Parmentier, pour son
mémoire : Recherches sur la structure de la feuille des Fou-
gères el leur ciassification, et M. Bouilhac, pour ses Recherches
sur la végélalion de quelques alques d'eau douce.
— Le Grand prix des sciences physiques n'a pas été
décerné.
— Prix Bordin, Le sujet mis au concours avait pour but
l'étude des modifications des organes des sens chez les animaux
cavernicoles. Le prix a été décerné à M, Viré, par son travail :
Lu faune souterraine de la France. -
— Prix Savigny décerné à M. Guillaume Grandidier pour
son voyage à Madagascar.
— Prix Barbier partagé entre MM. Houdar et Jouanin
pour leurs recherches originales sur le lierre terrestre; M. La-
pecque pour ses observations relatives à la substitution du
chlorure de potassium au chlorure de sodium chez certaines
peuplades de l'Asie; et M. Schlagdenhaufen pour ses contri-
butions à l'étude du genre Coronilla, une Légumineuse.
— Prix Serres décerné à M. Roule, professeur à l’Univer-
sité de Toulouse, pourses trois ouvrages sur l'Embryogénie. Des
mentions honorables sont, de plus, accordées à MM. Caullery
et Mesnil pour deux mémoires dus à leur collaboration, sur
les Annelides Polychètes et sur les Sporozoaires; à M. Beard,
professeur à l'Université d'Edimbourg, pour ses deux mémoires:
On certains problems of verlebraie Embryology et The span of
gestation and the cause of birth.
— Prix Montyon (Physiologie expérimentale); décerné à
M. Le Hello, professeur au Haras du Pin pour ses éludes sur
le mécanisme de la locomotion du cheval. Une mention hono-
rable à été accordée à M. Quinton pour ses recherches sur la
constance du milieu marin originel à travers la série animale.
— Prix Lacaze Physiologie), à M. Morat pour l’ensemble
de ses travaux de Physiologie expérimentale.
— Prix Pourat à MM. Weiss et Carvalho pour leur mé-
moire sur l'étude de la contraction musculaire, principalement
dans la phase embryonnaire et la comparaison de ses carac-
tères avec ceux qu'on observe chez l'adulte.
— Prix Gay. L'Académie avait mis au concours, pour ce
prix, l'Etude des Mollusques unis de la Méditerranée, leur com-
paraison avec ceux des côtes océaniques francaises. Les beaux
mémoires que, depuis 1877, M. Albert Vayssière a publiés sur
ce sujet répondent admirablement à ce programme; aussi
l'Académie lui a-t-elle décerné le Prix Gay.
— Prix Montyon (4r{s insalubres), à M. Collin pour son
travail : Elude microscopique des aliments d'origine végétale.
— Prix Petit d'Ormoy (sciences physiques). Ce prix, d'une
valeur de 10.000 francs, a été décerné à M. Alfred Giard, le
distingué professeur d'embryogénie, comparée à la Sorbonne,
pour l’ensemble de ses travaux.
— Prix Æchihatchef à M. Verbeck pour ses recherches
géologiques dans les iles de Java et de Madoura.
— Prix Saintour à M. Lecaillon pour ses études d’embryo-
génie des Coléoptères, notamment des Chrysomélides.
Programme des prix proposés par les années 1900 à 1903.
— Prix L. La Caze. Un prix sera décerné en 1901 à l’ou-
vrage ou au mémoire qui aura le plus contribué aux progrès
de la Physiologie. Ce prix est de 10.000 francs.
— Prix Wilde, d’une valeur de 4000 francs, sera décerné en
1900 à la personne, sans distinction de nationalité, dont la
découverte ou l'ouvrage sur l’Astronomie, la Physique, la
Chimie, la Minéralogie, la Géologie ou la Mécanique expéri-
mentale aura été jugé par l’Académie le plus digne de récom-
pense.
— Prix Delesse, d’une valeur de 1400 francs, sera décerné
en 1901 à l'auteur, francais ou étranger, d’un travail concer-
nant les sciences géologiques, ou. à défaut, d’un travail con-
cernant les sciences minéralogiques.
— Prix Fontanne, d'une valeur de 2000 francs, sera dé-
cerné en 1901, à l’auteur de la meilleure publication paléonto-
logique.
— Prix Bordin, d'une valeur de 3000 franes, sera décerné
en 1901. Le sujet mis au concours est la question suivante :
Etudes sur l'influence des conditions extérieures sur le prolo-
plasma et le noyau chez les végélaux.
— Prix Barbier, d'une valeur de 2000 francs, sera décerné
en 1900 à celui qui fera une découverte précieuse dans les
sciences chirurgicale, médicale, pharmaceutique, et dans la
Botanique ayant rapport à l’art de guérir.
— Prix Desmazières, d’une valeur de 1600 francs, sera
décerné en 1900 à l'auteur français ou étranger, du meilleur et
du plus utile écrit, publié dans le courant de l'année précé-
dente, sur tout ou partie de la Cryptogamie.
— Prix Montagne, deux prix d'une valeur, l'un de
1000 francs, l’autre de 500 francs. Aux auteurs de travaux im-
portants ayant pour objet l’anatomie, la physiologie, le déve-
loppement ou la description des Cryptogames inférieurs (Thal-
lophytes et Muscinés); ce prix sera décerné en 1900.
— Prix de la Fons-Melicoq, d'une valeur de 900 francs,
sera décerné en 1900, au meilleur ouvrage de Botanique sur le
nord de la France, c'est-à-dire sur les départements du Nord,
du Pas-de-Calais, des Ardennes, de la Somme, de l'Oise et de
l'Aisne.
— Prix Thore, d'une valeur de 200 francs, sera décerné en
1900 au meilleur mémoire sur les Cryptogames cellulaires
d’Europe, ou sur les sciences ou l’anatomie d'une espèce d'In-
sectes d'Europe.
— Grand Prix des sciences physiques, d'une valeur
de 3000 francs, sera décerné en 1901. La question mise au
concours est la suivante : Etudier la biologie des hématoses
libres d'eau douce et humicoles, el plus particulièrement, les
formes et condition de leur reproduction.
— Prix Savigny, fondée par Mlle Letellier, d’une valeur
de 975 francs, sera décerné en 1900 à un jeune zoologiste
voyageur qui ne recevra pas de subvention du Gouvernement
et qui soccupera plus spécialement des animaux sans ver-
tèbres de l'Egypte et de la Syrie.
— Prix da Gama Machado, d’une valeur de 1200 francs,
sera décerné en 1900 au meilleur mémoire sur les parties co-
lorées du système segmentaire des animaux ou sur la matière
fécondantes des êtres animés.
— Prix Serres, d'une valeur de 1500 francs, sera décerné
en 1902 au meilleur ouvrage sur l’Embryologie générale
appliquée autant que possible a la Physiologie et à la Méde-
cine.
— Prix Montyonm, d’une valeur de 750 francs, sera déeerné
en 1900 au meilleur travail sur la physiologie.
— Prix Philipeaux, d'une valeur de 890 francs, sera dé-
cerné en 1900 au meilleur travail de Physiologie expérimen-
tale.
— Prix Gay, valeur 25(0 francs, sera décerné en 1900. Le
sujet mis au concours est le suivant : Appliquer à une région
de la France ou à une portion de la chaîne alpine, l'analyse
des circonstances géologiques qui ont déterminé les conditions
actuelles du relief et de l'hydrographie.
— Prix Cuvier, valeur 1500 francs, sera décerné en 1900 à
l'ouvrage le plus remarquable soit sur le règne animal, soit
sur la géologie.
— Prix Delalande-Guérimeau, d’une valeur de
1000 francs, sera décerné en 1900 au voyageur français ou au
savant qui, l’un ou l’autre, aura rendu le plus de services à la
France ou à la science.
— Prix Lecomte, d'une valeur de 50.000 francs, sera dé-
cerné en 1901, en un seul prix, sans préférence de nationalité :
19 aux auteurs de découvertes nouvelles et capitales en Mathé-
matique, Physique, Chimie, Histoire naturelle, sciences médi-
cales; 20 aux auteurs d'applications nouvelles de ces sciences,
applications qui devront donner des résultats de beaucoup
supérieurs à ceux obtenus jusque-là.
— Prix Tehihatehef, d’une valeur de 3000 francs, sera
décerné en 1900 au naturaliste de toute nationalité qui se sera
le plus distingué dans l'exploration du continent asiatique ou
des limitrophes, notamment des régions les moins connues et,
en conséquence, à l'exclusion des Indes britanniques, Sibérie
proprement dite, Asie-Mineure et Syrie.
P. Fucus.
14 LE NATURALISTE À
MICROGRAPHIE
TECHNIQUE HISTOLOGIQUE
MILIEUX CONSERVATEURS.— LUTAGE DES PRÉPARATIONS
Quand les préparations sont colorées, il ne reste plus
qu'à les monter, c'est-à-dire à placer les couches dans un
milieu qui conserve à la fois, autant que possible, les
tissus et la matière colorante qui les imprègne, puis à
recouvrir le tout d'une lamelle appropriée et, enfin, à
luter la préparation, c’est-à-dire à enfermer le milieu
conservateur dans une sorte de chambre qui ne permette
pas son évaporation ou sa disparition d’une facon quel-
conque.
Les milieux conservateurs doivent être, bien entendu,
parfaitement transparents, sous peine de nuire à la net-
teté des observations.
Les plus employés sont ou à base de résine où à base de
glycérine. Quelques autres d’un usage assez fréquent
pour certaines préparations ont des formules diverses.
Nous allons passer successivement en revue la plupart
de ces mélanges particuliers.
Mélanges à base de résine. — La résine la plus employée
certainement est le Baume de Canada. C’est une sub-
stance solide, légèrement jaunâtre, très soluble dans le
chloroforme, le xylol, l'essence de térébenthine, l'alcool,
la benzine, etc.
On le trouve, en général, tout préparé dans le com-
merce et dissous le plus souvent dans le chloroforme ou
le xylol, dans des tubes comme ceux renfermant la pein-
ture à l’huile.
On peut facilement le préparer soi-même en ayant
soin de le conserver dans des flacons bien bouchés pour
éviter l’évaporation rapide du dissolvant.
C'est certainement l’une des meilleures substances
pour le montage des préparations auxquelles il donne
beaucoup de clarté, de limpidité et de définition.
Lorsqu'on à employé préalablement le xylol comme
éclaireissant, il est préférable d'employer le baume au
xylol pour le montage des préparations; autrement, on
peut à peu près indifféremment se servir du chle-
roforme ou du xylol, les avantages et les inconvénients
sont à peu près les mêmes pour l’un que pour l’autre.
La solution, quel que soit le dissolvant, est légèrement
colorée en ïaune.
Le Dammar est également une résine soluble dans le
chloroforme, le xylol, la benzine, ete., et parfaitement
incolore, ce qui est un grand avantage sur le baume. Il
a l'inconvénient d'être excessivement cassant. On peut
remédier beaucoup à cet inconvénient en le faisant dis-
soudre dans l'essence de térébenthine ou encore dans un
mélange en parties égales d'essence de térébenthine et
de benzine.
I est préférable d'employer le dammar toutes les fois
que l'on veut faire des études d’histologie fine; mais, pour
la plupart des préparations ordinaires, le baume est pré-
férable.
On peut encore se servir de la Térébenthine de Venise
dissoute à chaud pendant un mois environ dans l'alcool
à 95°. Au bout de ce temps on décante, et la partie li-
qude que l’on obtient ainsi peut servir avec succès au
montage des préparations colorées; les couleurs s'y con-
servent très bien.
Mélanges à base de glycérine. — La glycérine employée
pour les divers mélanges dont nous allons parler ne doit
pas être prise au hasard. Il faut d’abord s'assurer de sa
réaction et la prendre de préférence absolument neutre.
La meilleure glycérine que l’on puisse employer seule
comme milieu conservateur est la glycérine anglaise
neutre. Pour l'employer seule on doit, autant que pos-
sible, la prendre pure ou la mélanger avec la plus petite
quantité possible d’eau distillée.
On peut aussi employer le mélange en parties égales
de glycérine, d'alcool et d’eau distillée.
Soit pure, soit à l’état de mélange, la glycérine a le
grave défaut de ne pas conserver les couleurs, surtout
les couleurs à base de carmin, d’hématoxyline et même
certaines couleurs d’aniline. On peut parer un peu à cet
inconvénient en acidifiant légèrement le mélange avec
quelques gouttes d'acide acétique.
À côté de cela, ces liqueurs ont l'avantage de per-
mettre une étude microscopique fine et facile et de mon-
ter cirecterhent les préparations sans qu'elles aient été
ni déshydratées, ni éclaircies, ce qui rend parfois d'im-
menses services.
Sous le nom de Gelée de glycérine, on désigne toute
une série de préparations diverses sur l’'énumération des-
quelles nous ne voulons pas entrer ici.
L'une de celle qui nous a donné les meilleurs
tats se prépare de la manière suivante :
On fait dissoudre une certaine quantité de gélatine
dans le double de son poids d’eau chaude, en ayant soin
de bien remuer pour rendre le mélange bien homogène ;
à ce moment on y ajoute, petit à petit, et en remuant
toujours une quantité de glycérine égale à 4 fois environ
le poids de la gélatine employée.
Les préparations peuvent être montées dans cette
gelée comme avec ia glycérine pure, mais à chaud bien
entendu.
La Gomme glycérique s'obtient en mélangeant 5 parties
d'eau et autant de gomme arabique.
Au bout de 24 heures, quand la dissolution est com-
plète, on ajoute 5 parties de glycérine et quelques gouttes
d'une solution concentrée d'acide phénique pour empé-
cher les moisissures.
Liquides conservateurs divers. — Il arrive quelquefois
que l’on est obligé de monter des préparations de tissus
frais qui ne se conservent que dans des milieux appro-
priés. L'un de ces milieux conservateurs les plus impor-
tants est sans contredit le sérum iodé.
Dans les grandes villes et à Paris, en particulier, il est
extrêmement facile de se procurer le sérum qui est l’élé-
ment essentiel de cette préparation.
Pour cela, on n’a qu’à faire prendre, dans les none)
des utérus gravides de mammifères, aussi frais que pos-
sible. On retire le liquide amniotique, on le filtre et on y
ajoute soit quelques paillettes d'iode, soit de la teinture
forte en plus ou moins grande quantité, selon que l'on
veut obtenir un sérum plus ou moins fortement iodé.
On emploie aussi quelquefois la Solution physiologique
saline qui est tout simplement une solution de sel marin
à 0,75 % dans l’eau distillée.
résul-
À. GRUVEL.
Le Gérant: PAUL GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17.
15
LE NATURALISTE
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22: ANNÉE
CHASSE DES ÉCHASSIERS AU HUTTEAU
SUR LES GRÈVES DE LA MANCHE
LES ESPÈCES QU'ON Y TUE
On fait aux échassiers, dans plusieurs pays maritimes,
une chasse très active. Elle a lieu au printemps et à
l'automne, époques de l’année où ces oiseaux se rendent
dans le Nord pour y nicher et en reviennent pour émi-
grer dans le Sud. La plupart voyagent en suivant les
côtes, et s'arrêtent de préférence dans l'intérieur des
baies et à l'embouchure des fleuves et des rivières, soit
pour attendre là des vents favorables qui leur permet-
tront de continuer leur route, soit pour se reposer quelque
temps dans des lieux où le flot, couvrant et délaissant
alternativement les grèves sur une grande étendue, leur
entretient une nourriture abondante. Ces haltes ne sont
pas sans péril; l'homme, le plus redoutable de tous
leurs ennemis, s'attaque à eux de diverses façons, au
fusil, au filet, à l’aide d’une foule d’engins, dont beau-
coup devraient être prohibés, car si quelques espèces
d’échassiers nous offrent une ressource appréciable au
point de vue de l’alimentation, — encore devrions-nous
en user avec une sage et utile modération — il en est
qui nous rendent des services d’un autre genre et mé-
ritent que nous les protégions (1).
Le massacre que l’on fait de ces oiseaux dans cer-
taines localités du littoral de la Manche, notamment
dans la baie de la Somme et dans celle de l'Authie,
située un peu plus au nord, dépasse réellement toute
mesure. La tolérance administrative qui laisse libre, en
toute saison, la chasse sur la côte, et dispense de tout
permis de port d'armes ceux qui s'y livrent, n’est pas
faite pour enrayer le mal. Il est accru par la présence
sur les lieux de chasse des représentants de maisons de
plumes pour mode, dont les offres assez élevées vien-
nent encore exciter la cupidité des indigènes. Du 15 avril
au commencement de juin, les villages de la côte déver-
sent sur les grèves de la Somme et de l’Authie une
légion pittoresque mais funeste de chasseurs. Pendant
près de deux mois, désertant toute autre occupation, ils
vivent dans la baie, terrés sous leur toile, dans l’at-
tente du flot qui leur pousse le gibier. Au moment op-
portun la poudre parle, de tous côtés résonnent les coups
de feu. Les malheureux échassiers, rejetés de place en
place, laissent partout des morts. C’est une tuerie géné-
rale, qui recommencera au passage d'automne.
La chasse au « hutteau » est la plus meurtrière de
toutes celles qu'on peut faire, au fusil, aux échassiers.
Elle repose sur la connaissance et l'exploitation des
mœurs sOciables et du naturel curieux de ces oiseaux.
Elle se pratique aux heures du flux.
Le procédé est des plus simples. Le chasseur creuse
dans le sable une tranchée de la longueur du corps,
èlargie en avant pour faciliter les mouvements des bras
l (1) Par exemple, le Vanneau, si pourchassé, en certains
pays, pour lui-même et pour ses œufs. La question du Van-
neau touche aux plus graves intérête de la sécurité de la Hol-
lande, prècisément le pays où l’on fait la plus grande destruc-
tion de ses nichées.
Le Naturalisle, 46, rue du Bac, Paris.
2% SÉRIE — N° 309
15 JANVIER 19 CO
et des épaules, Après avoir placé au fond de la fosse un
mince lit de paille afin de se garantir contre l'humidité,
il s’y étend à plat ventre ou sur le côté, et ramène sur
lui, au ras du sol, une toile fixée par quatre piquets, en
ayant soin de ménager sur le devant une ouverture pour
tirer, En face, il a disposé préalablement, à une quinzaine
de mètres, des oiseaux en bois ou, ce qui vaut encore
mieux, des oiseaux empaillés, qui lui servent d’appe-
lants, et que l’on nomme « étombis » en patois picard.
Une des principales qualités du huttier est d’être bon
siffieur, c’est-à-dire savoir bien imiter avec les lèvres ou
à l’aide d’un sifflet taillé le plus ordinairement dans un
os de mouton, le cri d'appel des differentes espèces
d’échassiers.
Lorsque la mer monte, le flot chasse peu à peu des
sables de la baie le gibier qui se rabat alors sur le rivage.
Ses bandes tourbillonnantes entendent le sifflet du hut-
tier, aperçcoivent les « étombis » qu'ilsprennent pour des
compagnons déjà posés, et s’abattent au milieu d'eux,
Le chasseur, sous sa toile dont la couleur se confond
avec celle de la grève, a tout le temps de tirer dans le
tas. Cette chasse, on le conçoit, est extrêmement pro-
ductive. Les oiseaux, d’abord effrayés par le coup de
fusil, mais ne vovant pas leur ennemi, ne fuyent pas
toujours. Hypnotisés, en quelque sorte, parles « étombis »
ils retombent parfois à la même place, après avoir tour-
billonné un instant au-dessus, comme s'ils voulaient
compter leurs morts. On peut détruire ainsi une bande
tout entière, sans bouger du hutteau, On ramasse morts
et blessés après le massacre total.
On se sert aussi de hutteaux mobiles qui permettent
d'aller au-devant du flot et, d’échelonner les affuts, mais
ces engins, dont la toile est soutenue par des cerceaux,
avec un léger cadre en bois sur le devant, et qui se re-
plient comme un accordéon, ont l'inconvénient d’être
beaucoup plus apparents qne le hutteau ordinaire, et
d’exciter la méfiance des oiseaux, surtout de certaines
espèces.
Dans la même région, à l'étang du hâble d'Ault, près
de Cayeux-sur-mer, on fait une chasse spéciale pour
‘ prendre les petits échassiers vivants, au moyen d'un
filet appelé « béquet ».
Au devant d'une hutte à canards construite sur le
bord, on établit dans l’eau un petit ilot allongé que l'on
garnit d’ « étombis »., Un panneau est étendu à plat, au
vent de l’ilot, relié à la hutte par une corde. Dans la
hutte, il y a ordinairement deux hommes, un siffleur et
un tendeur. Lorsque les oiseaux s’abattent, au moment
précis où leurs longues jambes vont toucher l’ilot, le
tendeur hale vigoureusement sur la corde, le panneau
se relève, retombe sur l’ilot et retient toute la bande
prisonnière. Cette chasse est une industrie de la localité
qui approvisionne d’échassiers vivants les volières des
amateurs et des jardinszoologiques, le surplus est étoufté
et envoyé sur les marchés.
On prend encore des échassiers dans es « flairons »,
grands filets à larges mailles, supportés par de hautes
perches que l'on tend en travers de la baie par les nuits
obscures, les « noirons », comme disent les pêcheurs
picards et que l’on emploie surtout pour la capture des
palmipèdes.
Les échassiers que l’on tue communément au hutteau
sont des Pluviers, des Chevaliers, des Bécasseaux, des
Barges, des Courlis, le Tournepierre, le Combattant, le
Sanderling, l'Avocette, la Spatule, etc.
16 LE NATURALISTE à
Je vais passer rapidement en revue les différentes
espèces des genres que je viens de signaler, en indiquant,
pour chacune d'elles, l'époque précise de son passage, et
en fournissant sur son compte quelques renseignements
qui peuvent être utiles aux ornithologistes désireux de
se procurer ces oiseaux ou de venir les observer sur les
lieux de chasse.
Pluvier doré (Charadrius pluvialis). — Commun, mais
s’abat moins souvent sur la côte et dans les « mollières »
que dans les marais. De passage régulier, par bandes,
au printemps : en mars, avril et mai; à l'automne : en
septembre, octobre et novembre.
Pluvier guignard (Charadrius morinellus). — Peu com-
mun dans la région de l'estuaire de la Somme, bien qu'il
y passe régulièrement, chaque année, au printemps et à
l'automne. Je ne l'ai jamais observé sur la grève ni dans
les mollières de l’intérieur de la baie,mais on le tue tous
les ans dans le marais du Crotoy, qui n’en est séparé que
par quelques dunes peu élevées et peu étendues. Il sy
montre de bonne heure en troupes plus ou moins nom-
breuses. On le retrouve en assez grande quantité dans
l'intérieur des terres, dès le mois d'août.
Pluvier à collier (Charadrius hiaticula) (1). — Très
commun au printemps et à l’automne le long des côtes
et dans l'intérieur de la baie. Lorsque l'hiver a été doux
et que le vent est favorable, on en voit de grandes bandes
dès le commencement de mars. Par les vents d'est et de
sud-est la baie de Somme en est parfois remplie.
Pluvier gravelotte (Charadrius minor). — Rare. On ne
le rencoutre dans la région que mêlé aux bandes de
l'espèce précédente.
Pluvier à collier interrompu (Charadrius cantianus). —
Très commun. Arrive un peu plus tard, que le Pluvier à
collier, en bandes. Se mêle volontiers à celles des autres
petits échassiers. Niche sur la côte, et la quitte l'hiver.
J'ai trouvé maintes fois le nid de ce Pluvier, simple dé-
pression dans le sable parmi des débris de coquillages
ou au milieu des galets, et rencontré des jeunes en duvet
courant comme des souris sur la grève.
Pluvier gris (Charadrius squatarola) (2). — Commun,
mais on en tue relativement un petit nombre, parce que
ce Pluvier, très méfiant, se laisse difficilement approcher
à découvert, et tombe peu volontiers au hutteau.
Ce magnifique oiseau tout vêtu de velours noir, varié,
au manteau de plaques d'argent, dans sa tenue de prin-
temps, narrive pas en baie de Somme avant le mois de
mai, quelquefois dès les premiers jours, plus souvent
vers le milieu du mois. Il se tient presque constamment
sur la côte ou dans l’intérieur de la baie, et ne fait guère
que traverser les marais. Il forme de petites troupes de
dix, vingt, trente individus, quelquefois moins, rarement
plus. Pendant la saison du passage, on entend son cri
d'appel qu'il pousse soit en volant, soit posé à terre. Il
repasse, mais en moins grand nombre, en août et sep-
tembre.
Tournepierre vulgaire (Strepsilos interpres) (3). — Com-
mun, au mois de mai et à la fin de l'été. Quelques-uns
reviennent dès le mois d'août. Isolé ou en petites troupes
de cinq à six individus. Aime à se mêler aux bandes des
autres petits échassiers et tombe facilement au hutteau.
Fréquente exclusivement la grève et les sables de la
baie, à basse mer.
(1) En baie de Somme : Religieuse.
(2) Picard : Houvière.
(3) Picard : Colombe.
Chevalier aboyeur (Totanus glottis) (4). — Commun au
printemps, fin d'avril et mai, repasse en août et sep-
tembre. Le plus souvent par paires ou en petits groupes.
Sur la plage, dans les mollières, et plus fréquemment
encore peut-être dans les marais et près des mares d’eau
douce.
Chevalier brun (Totanus fuscus) (2). — Commun. Passe
isolément ou par petites bandes, au printemps, dès le
milieu d'avril et en mai. On le rencontre alors dans la
baie et on le tue au hutteau. Il paraît cependant préférer
les marais d’eau douce. Revient à l'automne, mais le pas-
sage du printemps est le plus abondant.
Chevalier gambetre (Totanus calidrès) (3).—C'est peut-
être l'oiseau le plus commun dans la baie de Somme, au
passage du printemps. Il fait la joie du chasseur par
la facilité avec laquelle il répond au sifflet et tombe au
hutteau. Point n’est besoin même d’être caché pour l’at-
tirer à la portée du fusil. Je l'ai vu souvent voler en
cercle au-dessus de Ja tête d’un chasseur sachant conve-
nablement imiter son cri d'appel, et se faire tuer avant
d'avoir pu reconnaitre son erreur. Oiseau éminemment
bavard, le Pied rouge anime la baie, au printemps, des
notes claires et percantes de son sifflement continuel
dont il multiplie et varie les accents quand il va s’abattre
en compagnie.
De passage en mars, avril, mai, et au retour, en sep-
tembre et octobre. On en voit, dès la fin de juillet, de
petites troupes sur la côte et dans les marais. En
automne, il se tient plus volontiers sur la côte et dans
l’intérieur de la baie que dans les marais. à
Chevalier stagnatile (Totanus stagnatilis). — Ob-
servé au) hâble d'Ault, au printemps. Ne fait, je crois,
que des apparitions accidentelles. Dans tous les cas,
passage très irrégulier et très peu abondant.
Chevalier silvain (Totanus glareola). — De pas-
sage en mai et ensuite en août, septembre et octobre,
quelques-uns dès le mois de juillet. Au printemps, je l'ai
rencontré le plus souvent isolé ou par paires; dans Île
mois de septembre, au contraire, en petites troupes de
cinq, six et jusqu’à dix individus. Se tient presque tou-
jours dans les prairies humides et les marais, très rare-
ment sur la plage et dans les mollières. Son sifflet est
assez agréable et forme comme une espèce de ramage
quand l'oiseau va se poser.
Chevalier cul-blanc (Totanus ochropus). — Commun
au printemps dès le mois de mars, surtout en avril, et
dans la première quinzaine de mai. Fréquente les marais
d’eau douce, le bord des fossés. Je ne l'ai jamais ren-
contré sur les grèves; mais je l’ai fait lever souvent à
l'embouchure de la Maye, qui se jette dans la baie de
Somme au Vau de Rue, toujours isolément. Lorsqu'il
part, il jette un cri perçant, tui, tui, tui. On le tue quel-
quefois aux hutteaux des mollières.
Chevalier guignette (Totanus hypoleucos) (4). — Com-
mun, arrive en avril. Se tient le long des digues et
dans les canaux des mollières. Isolé, par paires ou en
petites troupes. Niche parfois parmi les jones et les
herbes. Il fait entendre fort tard, à nuit close, un petit
cri plaintif. La guignette blessée, qui tombe à l’eau,
plonge aussitôt et va sortir un peu plus loin. Revient en
août et septembre, quelques-uns en juillet. C’est le cul-
(1) Picard : Tilvot.
(2) Picard : Bouillard noër.
(3) Picard : Bouillard, Siffleur.
(4) Picard : Triot, Guerlette.
ni
LE NATURALISTE 1
blanc de rivière des chasseurs. Comme l'espèce précé-
dente, la Guignette vient se faire tuer, par hasard, aux
hutteaux des mollières.
Combattant ordinaire (Machetes pugnax) (1). — Passe
sur la côte et dans les marais en avril, quel-
quefois dès le mois de mars. On voit d'abord des
femelles, les mâles passent les dernier, En mai on trouve
des mâles avec leur parure, mais souvent encore incom-
plète.
Repasse en août et septembre, cette fois les mâles les
premiers, puis les femelles et les jeunes.
Niche accidentellement dans les prairies maréca-
geuses voisines de la mer.
Bécasseau maubèche (Tringa canutus) (2). — Très
commun, Il forme des bandes très nombreuses qui se
tiennent constamment sur la côte et les sables de la baie.
La Maubèche s'abat au hutteau avec une ingénuité
digne de compassion. On en tue, tous les ans des quan-
tités énormes.
Arrive dès le mois d'avril, mais surtout en mai,
Repasse en août, septembre et octobre.
Bécasseau violet (Tringa maritima). — Rare. Passe
en même temps que l'espèce précédente, mais on ne tue
que des individus isolés ou mêlés aux bandes des Mau-
bèches.
Bécasseau cocorli (Tringa subarquata). — Com-
mun, Passe en mai, jusqu'en juin. puis en août et sep-
tembre. On rencontre rarement seuls les Cocorlis, ils se
réunissent ordinairement aux bandes des autres échas-
siers, particuliérement, en baie de Somme, à celles du
Bécasseau brunette. C’est un oiseau essentiellement ma-
ritime qui s'éloigne peu de la plage.
Bécasseau brunette (Tringa torquata) (3). — Passe
en grandes bandes en avril, mai, jusqu'au commen-
cement de juin. Repasse, après avoir niché, dès le mois
d'août et en septembre, et l’on en voit pendant toute la
durée de l’automne.
Cette espèce est plus petite que la forme suivante; mais,
sauf la taille, et les dimensions du bec et des tarses, elle
est de tout point semblable au Bécasseau cincle, et doit
être considérée comme une race plus petite. Les deux
types d’ailleurs passent de l’un à l’autre par des formes
intermédiaires dont j'ai recueilli une série.
Bécasscau cincle (Tringa cinclus). — Beaucoup
moins commun sur les côtes de Picardie, que le Bécas-
seau brunette, Se montre aux mêmes époques. Forme
généralement des bandes à part, bien qu’on puisse tuer
quelques sujets mélés aux bandes des Brunettes.
Bécasseau platyrhinque (Tringa pygmæa). — Rare.
De passage irrégulier, aux mêmes époques que les
autres petits échassiers, On tue de temps en temps sur
la plage quelques Individus isolés.
Bécasseau minule (Tringa minuta). — Commun.
_ De passage régulier. Mêlé aux bandes de Brunettes ou
_ isolé.
Bécasseau temmia (Tringa Temminckii). — De
passage régulier comme l’espèce précédente, et aux
mêmes époques, mais moins commun, Se mêle aussi
aux bandes des Brunettes. Quelquefois isolé ou par
paires.
Sanderling des sables (Calidris arenaria) (4). —
(1) Picard : mäle, Paon de mer, femelle, Sotte ; Cotteret garu.
(2) Picard : Rousselte, Pouillette, Ouillard.
(3) Alouettes de mer.
(4) Picard : Guerlelle rouge ou blanche, selon la saison.
—
Commun. De passage régulier, au printemps : surtout
au mois de mai, et à l'automne : en septembre et octobre.
En troupes plus ou moins nombreuses où en compagnie
d'autres oiseaux de rivage.
Barge rousse (Limosa rufa) (1). — De passage régu-
lier au printemps, en mai et à l'automne, en septembre
et octobre. Quequefois en grandes bandes, ordinairement
en petites troupes qui ne dépassent pas une douzaine
. d'individus.
Barge égocéphale (Limosa ægocephala) (2). — Plus
commune que l'espèce précédente, se montre plus tôt, au
mois de mars et en avril, repasse en septembre et
octobre.
Courlis cendré (Numenius arquata) (3). — Très com-
mun. En bandes nombreuses, dans les mois de
mars, avril et mai. Dès les premiers jours de mai, le
passage commence à diminuer, et vers le milieu du mois
on n’en voit plus beaucoup. Il en revient au mois d'août,
parfois dès le milieu de juillet. Le passage de retour
grossit en septembre, octobre et novembre. C’est un
oiseau très défiant qu'il est difficile d'approcher à décou-
vert, mais qui tombe assez bien au hutteau.
Courlis corlieu (Numemtus minor) (4). — Moins com-
mun que le Courlis cendré. Passe plus tard. Au prin-
temps on n’en voit guère avant la mi-avril. Ne forme
pas de grandes bandes comme le Courlis cendré, se
montre en petites troupes et parfois isolément, Com-
mence à repasser, comme son congénère, à la mi-juillet.
Courlis à bec grêle (Numenius tenuirostris). — Rare.
De passage très irrégulier.
Récurvirostre avocette (Recurvirostra avocetta) (5) —.
Passe tous les ans, en petites troupes, en avril et mai.
On en voit ensuite en aout et septembre, mais en très
petit nombre. Se tient sur les sables et fréquente aussi
les grands marais voisins, Séjourne peu.
Spatule blanche (Platalea leucorodia) (6). — Passe
tous les ans, au printemps et à l’automne, mais en petit
nombre et séjourne peu, isolément ou en groupe de trois
ou quatre individus. La troupe la plus nombreuse que
j'aie jamais rencontrée était composée de dix individus.
La Spatule arrive quelquefois de très bonne heure,
quand la fin de l'hiver est douce. J'en ai tiré dans les
premiers jours de mars. Elle se montre ordinairement en
avril et mai, et repasse au commencement de septembre,
les sujets observés à cette époque sont presque toujours
des jeunes.
Tels sont les oiseaux que l’on tue habituellement au
hutteau, mais cette chasse est pleine de surprises, et de
temps -à autre survient au milieu des étombis quelque
gibier insolite. C’est ainsi que j'y ai vu tuer l'Ibis falci-
nelle, la Cigogne Noire, le Héron pourpré, des Phala-
ropes dentelés, mère des Faucons pèlerins qui se jettent
sur les appelants, et aussi des espèces très rares. J'ai
trouvé, il y a quelques années, dans le carnier d’un hut-
tier de la baie de Somme une Barge térek (Limosa terek.
Temm.),oiseau quihabite la Sibérie et les côtes de l'Asie.
Au mois de mai 4895, un huttier de Saint-Valery, a
tué, dans les mollières du fond de la baie, deux échasses
(4) Picard : Bouffarie.
(2) Picard : Pilhui, Bout feume.
(3) Picard : Corlu, Corleru.
(4) Picard : Colteret.
(5) Picard : Clette.
(6) Picard : Palotlier.
18 LE NATURALISTE
blanches, un mâle et une femelle (Himantopus candidus).
C’est une espèce que l’on ne voit plus, pour ainsi dire,
dans ces parages. Cependant le fait que cet oiseau porte
en patois picard un nom spécial et bien expressif, Gam-
bade, semble prouver qu'il s'y montrait autrefois moins
rarement qu'aujourd'hui. Un couple aurait même niché,
en 1819, dans les dunes de Saint-Quentin, à l’entrée de
la baie (1).
MAGAUD D'AUBUSSON.
2)
Les plantes bulbeuses de la Flore française :
Liliacées.
nn
RAR Te
Les plantes bulbeuses, autrement dites plantes à oignons,
ont le privilège d'attirer l'attention, d'exercer une véri-
table attraction sur l'amateur. Qui n'admire les Tulipes,
les Jacinthes, les Narcisses et toute cette pléiade, aussi
gracieuse qu'élégante, des Liliacées et des Amaryllidées?
Joignons-y les Glaïeuls, quoi que ce ne soit pas pour les
botanistes des plantes bulbeuses dans l’acception rigou-
reuse et exacte du mot. Il ne faudra point chercher sur
le sol français ces Lis merveilleux de la Chine et du
Japon, ces Tulipes de l'Asie orientale, ces Hippeastrum
brésiliens ; mais, tout modeste qu'il est, le lot, que nous
pouvons trouver chez nous, n'en est pas pour cela à dé-
daigner et mérite bien qu'on lui consacre quelques
instants d'attention.
Si nous nous en prenons aux Liliacées, nous n'avons
que l'embarras du choix entre les Tulipes, les Fritillaires,
les Lis, les Scilles, les Gagea, les Jacinthes, les Ornitho-
gales, les Muscari, l'Erythronium, le Lloydia et l Uropeta-
lium des hautes montagnes et, par le fait, plus rares et
dans la nature et dans les cultures : les Aulx eux-mêmes
ne devront point passer inaperçus.
Les Tulipes se plaisent dans la plaine; elles aiment les
champs cultivés, les vignes, et la plupart d’entre elles
ne sont pas, en eflet, spontanées chez nous, mais ont dû
être introduites à des époques plus ou moins reculées.
Les unes ont les étamines à filets barbus à la base, les
autres les ont glabres. Au premier groupe appartient le
Tulipa sylvestris L., belle espèce à fleurs jaunes, légère-
ment odorantes, penchées avant l’anthèse, campanulées,
à divisions de largeur très inégale, acumisées et barbues
au sommet, à feuilles linéaires, glaucescentes, à bulbe
sans stolons, donnant naissance à une tige élevée, qui
dépasse un peu les feuilles. C’est la tulipe sauvage qu’on
rencontre dans toute la France et qui pullule dans cer-
tains vignobles, au point d'être considérée comme une
mauvaise herbe.
Le Tulipa gallica Loisel de Provence en estune réduc-
tion à fleurs plus petites. Le Tulipa Celsiana D. C., a la
fleur dressée avant l’anthèse, jaune teintée de vin exté-
rieurement et les bulbes émettent des stolons. Il ap-
partient à la région méditerranéenne, remonte jusque
dans le Dauphiné et atteint le Maine-et-Loire ainsi que
l'Ille-et-Vilaine.
Au groupe des espèces à filets des étamines glâbres ap-
partient le Tulipa Clusiana D.C., type d’où sont issues la
plupart des formes cultivées dans les jardins. Les fleurs
(1) D'après M. de Lamotte, ornithologiste très informé, de
l'arrondissement d’Abbeville, qui a fourni des notes précieuses
à Vieillot pour la partie ornithologique du Nouveau Diction-
naire d'Histoire naturelle. Sa collection appartient aujourd’hui
au musée d’Abbeville.
sonthlanchesintérieurement, plus ou moins teintées de vin
sur le dos. C’est une plante méridionale. Le Tulipa Oculus
Solis Saint-Amans, de l’Agenais et du bassin de la Ga-
ronne, est une très belle plante du même groupe, à.
fleurs rouge écarlate à l'intérieur, pâle et vineux exté-
rieurement, tachées de violet à la base. Au voisinage se
trouve le Tulipa præcox Ten., originaire probablement
d'Italie, caractérisé par ses fleurs d'un beau rouge, en
coupe non évasée au sommet et à divisions très con-
caves. On l’a rencontré en Provence et aux environs de
Lyon. Le Tulipa Didieri Jord., de Guillestre, s'en dis-
tingue par le coloris de ses fleurs, d'un beau rouge pas-
sant par de nombreuses transitions au jaune pâle et mar-
quées dans leur quart inférieur et en dedans d’une tache
en forme de coin, bleu grisäâtre ou bien noirâtre bordée
de jaune. On signale encore comme appartenant à la
flore française le Tulipa Billietiana Jord., de Savoie, dédié
à l’archevêque de Chambéry, le cardinal Billiet qui
s’'adonna quelque peu à la botanique, à une certaine
époque de sa vie. Les fleurs sont grandes, jaunes, tein-
tées de rouge.
Bien différentes sont les Fritillaires avec leurs fleurs
brun-pourpré, brunâtres, quelquefois marquées de jaune,
si bizarrement panachées de carreaux en forme de
damier. Tout le monde connaît le Fritillaria Meleagris L.,
la fritillaire Pintade, qui orne si gracieusement, dès le
mois d'avril, les prairies humides de l’ouest et du centre
de la France, La région alpine des Pyrénées est la patrie
du F. pyrenaica L.; le Dauphiné voit naître le F, delphi-
nenis Gr. et les régions chaudes du Dauphiné, des Basses-
Alpes et du Var, fleurir le Fritillaria involucrata AI.
dont le damier floral est moins distinct que dans les es-
pèces précédentes et les feuilles très nettement opposées
et verticillées.
Avec les Lis apparaissent les perles des Liliacées fran-
çaises. Citons pour mémoire le Lis blanc (Lilium candi-
dum 1.) cultivé dans tous les jardins et Justement popu-
laire pour la beauté et la teinte virginale de sa fleur. Il
n’est pas réellement spontané en France. Ses fleurs sont
en cloche et dressées comme celles du Lilium croceum
Chaix qui les a safranées, souvent disposées par 2-4 en
ombelles au centre d’un verticille de 2-5 feuilles assez
larges. De la tige, haute de 4-6 décimètres, naissent des
feuilles étroites dépourvues de bulbilles à leur aisselle.
On le rencontre dans la partie subalpine du Dauphiné.
Ont les fleurs penchées avec les divisions roulées en
dehors, le Lis Martagan, le Lis des Pyrénées et le Lis
Pompon. Le Lilium Martagon L. à des fleurs roses ponc-
tuées de pourpre et des feuilles verticillées largement
lancéolées. I habite la région montagneuse dans toute la
France et descend jusque dans la Côte-d'Or. Le Lilium
pyrenaicum Gouan, de la partie élevée des Pyrénées, est
caractérisé par ses fleurs d’un beau jaune, ponctuées de
noir à la base, sa tige feuillée jusque dans la grappe.
Quant au Lilium Pomponium L. du Var, des Alpes-Mari-
times et des Basses-Alpes, sa tige, presque nue supérieu-
rement est terminée par une grappe de 1-6 fleurs d’un
rouge minium tirant sur l’orangé, ponctuées de noir à la
base.
Les Ornithogales sont plus humbles dans leur flo-
raison; leurs teintes sont aussi moins recherchées et
s’écartent peu du blanc ou du jaunâtre. Les fleurs y sont
dispersées en longue grappe qui ressemble à un épi,
très nombreuses dans l’Ornithogalum pyrenaicum L.,
abondant dans les bois humides de la France et dans
LE NATURALISTE 19
l'O. narbonense L. du Midi. Elles sont blanches avec
une bande dorsale verte dans cette dernière espèce
tandis qu’elle sont jaunâtres et insignifiantes dans la pre-
mière. Elles sont peu nombreuses et blanches, de
grandes dimensions dans l'O. nutans Li. dispersé sur
toutes les parties du territoire français, et arrivent à ne
former qu'un corymbe dans l'O. umbellatum L., bien
connu sous le nom populaire de Guigne midi, de Dame
d’onze heures et dans l'O. arabicum L. de Provence.
Le bleu appartient aux Scilles, aux Muscaris et aux
Jacinthes qui forment trois genres à affinités très rappro-
chées, Les divisions florales sont libres et étalées dans
les Scilla où nous trouvons la jolie scille à deux feuilles
(S. bifolia L.) qui décore si agréablement les bois du ju-
rassique dès le premier printemps. C’est une humble
plante, remplacée dans l’ouest par la Scilla verna à fleurs
plus nombreuses, À la même époque deux grandes es-
pèces entrent en floraison : Scilla lilio-Hyacinthus L. dans
l'Ouest, l’Auvergne et une partie du centre, avec des
bractées très longues et caractéristiques; Scilla hyacin-
thoïdes L,, à bractées courtes dans l'extrême Midi. Plus
rares sontles Scilla amæna L. etitalica L. également méri-
dionales et, à l'automne apparait la S. autumnalis L avec
des petites fleurs en grappes serrées et des feuilles parais-
sant après la floraison.
Les jacinthes on leurs fleurs à divisions conniventes
soudées jusqu'au milieu et étalées. C’est la Jacinthe
d'Orient avec sa variété blanche (Hyacinthus provincialis
et albulus Jord.),de la Provence, dontla culture, longtemps
sélectionnée, a produit les admirables plantes que nous
voyons chaque hiver. Les H. amethystinus L. et fastigiatus
Bertol. sont plus bumbles et appartiennent l’un aux
Pyrénées centrales, l’autre aux montagnes de la Corse,
On pourrait placer ici la Jacinthe de nos bois, l'Hyacinthus
non scriptus L. dont on a fait le genre Endymion, aux ca-
ractères ambigus, avec les divisions florales soudées seule-
ment à la base mais qui se trouve mieux avec les Scilles
sous le nom de Scilla nutans. La Scilla patula DC., assez
fréquemment cultivée, à fleurs plus grandes et plus ou-
vertes, à feuilles plus larges, appartient à peine à la flore
française ; on ne l’a indiquée qu’à Bayonne, Quant aux
Muscaris également de couleur bleue, leurs fleurs sont
en grelots, petites, très nombreuses et serrées. Partout
croît le M. racemosum DC., que le M. neglectum Guss.
remplace dans le midi, et le M. comosum Mill., ce der-
nier facile à distinguer à sa houppe terminale formée
de fleurs stériles, tous trois à fleurs ovoides. Les M. bo-
tryoides DC. et Lelievrei Bor., plus rares, les ont subglo-
buleuses. Peu distincts du genre Muscari sont les
Bellevalia dont les fleurs rappellent un peu celles des
Jacinthes, En Provence et dans le bassin de la Garonne
croit le B. romana Reichh, ; aux environs de Toulon, le
B. trifoliata Kunth. Pour être complet, il nous faudrait
citer encore les Allium dont deux espèces présentent
quelque interêt floral, l'Allium Victorialis L., des régions
montagneuses, à larges feuilles lancéolées, à ombelles com.
pactes de fleurs blanc-verdâtre, à bulbe très allongé et
horizontal ; l'A. neupolitanum Cyril. que le Midi expédie
à profusion aux Halles de Paris; le Nothoscordum fra-
grans Kuntb, de Hyères; l’Erythronium Dens-Canis L.
espèce montagnarde, à grande fleur violette, solitaire,
rappelant celle des Cyclamen, à feuilles maculées de
pourpre, à bulbilles semblables à des dents de chien; les
Gagea aux petites fleurs jaunes peu voyantes; le Lloydia
serotina Richb. du Dauphiné, à fleur blanche; l'Uropeta-
nm Serotinum Gaud. à fleurs jaunes, des Pyrénées:
l'Urginea Scilla Steinh., des bords de la [Méditerranée,
dont l'énorme oignon fournit à la pharmacie la Scille
maritime. P. HARIOT.
PHOTOGRAPHIE
Coloration des positifs pour projections.
— C’est un fait certain que la coloration toujours uni-
forme des positifs sur verre est bien monotone, On sait
qu'on peut modifier leur teinte générale en se basant sur
les deux faits suivants : 4° un positif ordinaire, plongé
dans un premier bain composé de ferrocyanure de potas-
sium et d’azotate d’urane, prend une coloration qui va
du brun au rouge sanguin, suivant les proportions des
deux constituants ; 2° plongé ensuite dans un bain de
perchlorure de fer, le diapositif passe du vert olive au
bleu de Prusse, suivant la concentration du bain.
On peut arriver à produire des effets variés en suivant
les indications qu'a données M. A. Parfait au PAoto-club
de Paris.
Si l’on plonge un diapositif dans le premier bain et
qu'on l'y laisse seulement le temps nécessaire pour que
les demi-teintes seules soient modifiées, tandis que les
parties opaques gardent leur coloration noire et restent
encore pour la plus grande portion constituées par de
l’argent non modifié, lorsque ensuite, on passera au
deuxième bain, le diapositif, au lieu de devenir entière-
ment bleu, donnera du bleu et du noir, En outre, si le
sujet présente des parties absolument claires, trans-
lucides, comme nous sommes ici en présence de réactions
qui s’exercent aux dépens de l’argent et non en présence
d’une coloration de la gélatine, les parties transparentes
du diapositif, ne contenant pas d'argent, ne prennent
aucune coloration. On peut donc par ce procédé pro-
duire facilement sur un positif, du bleu, du blanc et du
noir ; il suffit de limiter pour cela l’action du premier
bain. En tirant parti de la propriété que possède le cya-
nure de potassium de faire revenir un positif coloré à sa
teinte noire primitive, on peut produire un nouvel effet,
en passant légèrement un pinceau imbibé d’une solution
de cyanure ou d’ammoniaque, sur le premier plan, de
façon à créer une opposition entre le ciel et le terrain.
Ces procédés de coloration conviennent particulière-
ment aux vues de montagnes et permettent de rendre
certains effets de nuit. Dans ce dernier cas, après le pas-
sage au rouge brun dans le premier bain, on plonge le
positif dans un bain très dilué de perchlorure de fer, de
facon à amener au fond, dans la région des cimes, là où
la couche d’argent est très mince, une très légère colo-
ration bleuâtre : après avoir lavé l'épreuve on la presse
sur un buvard et on passe sur le ciel un pinceau trempé
dans une solution plus concentrée de perchlorure de fer
pour lamener à un bleu franc,
Il est important de noter que, pour qu'un positif con-
vienne bien à ces transformations, il faut que la pose
normale ait été dépassée, de facon que l’image soit plutôt
un peu faible et le ciel légèrement grisé ; il est en effet
nécessaire qu'il y ait de l'argent dans le ciel pour que la
coloration puisse s’y produire.
Tout ce qui précède suppose l'emploi des plaques au
lactate Guilleminot; avec des plaques au chlorure, les
résultats ne sont pas les mêmes. Ainsi une plaque à
l’'Ilford Alpha, soumise à ces bains, a donné dans le ciel
sous l’action du perchlorure de fer concentré, une colo-
ration rougeûtre. H. Coupix.
20 LE NATURALISTE
MICROGRAPRIE
TECHNIQUE HISTOLOGIQUE
La Liqueur de Pacini consiste en un mélange de
sublimé avec le double de son poids de sel de cuisine,
auquel on ajoute une quantité d'eau plus ou moins con-
sidérable suivant le titre de la solution que l’on veut
obtenir et l'usage que l’on désire en faire.
Le Liqueur de Ripart et Petit peut également servir
comme agent conservateur.
La Liqueur de Gilson spéciale pour la conservation des
préparations est formée de :
Eau distillée. 0e." rreere NA LOL AE 30 gr.
AÏCOOL A0 Se ur LUE eee el 60 gr.
Glycérimess ere renere eee 30 gr.
SUDIIME SE errereee- cer EE EEE UE 0 gr. 45
Acidesacetique.à 10 10/0 EPP IT EEE EEE 2 cc.
Cette liqueur ne doit être employée que pour la conser-
vation de tissus ayant été d’abord préalablement fixés
avec beaucoup de soin. C’est un milieu recommandé
toutes les fois que lon désire étudier la structure du
protoplasme ou du noyau.
Nous ne ferons que signaler en terminant : le Vert de
Méthyle auquel on ajoute une trace d'acide osmique et le
Picro-carmin qui est à la fois un agent fixateur, colorant
et conservateur des tissus, mais nous sommes loin de les
préconiser.
Certainement ils peuvent dans certains cas rendre
quelques services, mais il ne faut pas leur demander
beaucoup.
Lulage des préparations. — Lorsqu'on a versé sur les
coupes quelques gouttes du milieu conservateur que l’on
a choisi, 1l faut, dans la majorité des cas, recouvrir le tout
à l’aide d’une lamelle.
Les lamelles couvre-objet ont des formes, des dimen-
sions, des épaisseurs et des formes variables et chacun
emploie ce qui lui convient. Quelques conseils ne seront
peut-être pas inutiles, malgré cela.
Nous nous servons de deux dimensions de lamelles : les
unes petites 22/22mm nous servent aux usages courants,
pour l'examen à plat des tissus ou autres, mais jamais
pour des préparations sérieuses. Si nous employons les
petites à ces usages courants, c'est tout simplement parce
qu'elles coûtent bon marché et qu'on en casse beaucoup
dans une année de recherches.
Pour les préparations plus sérieuses et à conserver,
nous n’employons que les grandes lamelles rectangu-
laires 22/32mm, Elles sont commodes, car on peut faire
entrer un certain nombre de coupes au-dessous, et autant
que possible nous n’employons qu’une lamelle par lame
laissant tout le reste de la lame pour les indications de
l'étiquette.
Lorsqu'on place les coupes sur la lame, il faut autant
que possible ne pas s’exposer à dépasser les limites de la
lamelle que l'on désire employer ultérieurement; pour
cela on se sert d’un instrument appelé du nom pompeux
de photophore et qui consiste tout simplement en un
bloc de bois cubique, évasé obliquement suivant l’une de
ses faces sur laquelle on colle un morceau de miroir, Sur
la partie supérieure est collé un simple morceau de verre
à vitre sur le milieu duquel on a marqué à l'encre ou
même au diamant, les dimensions de ses lamelles. On
place la lame sur laquelle on veut coller les coupes,
au-dessus du cadre fixé pour la lamelle et l’on peut faire
ainsi pour les coupes sans s’exposer à dépasser les limites
de la lamelle.
Il y a des photophores beaucoup plus compliqués mais
nous trouvons que le précédent l’est déjà trop, aussi nous
abstiendrons-nous de les décrire, d'autant plus qu’on peut
parfaitement obtenir les mêmes résultats en traçant tout
simplement sur une feuille de papier blanc ou noir un
cadre de la dimension des lamelles à employer et en pla-
cant dessus, la lame préparée pour recevoir les coupes.
C'est le procédé dont nous nous servons et quoique
très primitif, nous le trouvons excellent.
J'ai dit que le plus souvent on recouvre la préparation
et le liquide conservateur d’une lamelle, mais on peut et
même on doit s’en dispenser dans certains Cas Spéciaux,
à la condition toutefois d'emplover un milieu à base de
Dammar où mieux encore de Baume.
C'est par exemple ce qui arrive dans les coupes de pré-
parations faites suivant les méthodes de Golgi ou de
Ramon y Cajal.
Quand on emploie des résines et une lamelle, ou peut
parfaitement se dispenser de luter les préparations, à la
condition d'employer le baume ou le dammar en solu-
tion semi-fluide seulement, surtout pas trop liquide, il
est préférable qu’elle soit plutôt légèrement solide que
trop fluide, car dans ce cas, lorsque le dissolvant s’est
évaporé, il peut se produire des vacuoles qui se rem-
plissent d’air et qui détériorent absolument la prépa-
ration.
Toutes les fois que le liquide conservateur est suscep-
tible de s’'évaporer facilement, le lutage doit être fait très
soigneusement faute de quoi, au bout d’un temps très
court, les préparations se dessèchent et ne sont plus
bonnes à rien.
Nous ne saurions trop attirer l’attention sur cette opé-
ration futile en apparence, mais grâce à laquelle, on
peut, si elle a été bien faite, étudier des préparations,
bien des années après qu'elles ont été faites et c’est là,
souvent, un avantage précieux qui peut éviter une bien
grande perte de temps.
Le meilleur lut est celui qui adhère le plus intimement
au verre.
Toutes les fois que le milieu conservateur est très
liquide (c’est-à-dire en somme tous, excepté ceux à base
de résine) on doit primitivement faire ce que l’on appelle
une cellule qui, naturellement doit avoir la forme et les
dimensions de la lamelle que l’on désire employer.
On trouve dans le commerce des lames où les cellules
sont toutes préparées, mais il est bon de savoir soi-même
les préparer. Les coupes ou autres préparations sont
placées dans les limites de la cellule, on ajoute le liquide
conservateur, on recouvre d’une lamelle et on lute, telle
est la marche à suivre dans ce cas.
Préparation de la cellule. — Les lames sur lesquelles
on veut préparer des cellules doivent être bien lavées à
l'alcool et bien essuyées, ce n’est qu’alors qu’on peut les
placer sur la fournette.
La Tournette se compose d’un châssis en bois échancré
d’un côté suivant un angle dièdre droit et, de l’autre, plus
élevé de façon à pouvoir appuyer la main.
La partie échancrée porte, sur son plan horizon-
tal, un plateau mobile sur un axe vertical. Ce plateau est
circulaire et porte sur sa périphérie deux valets qui
servent à fixer la lame dans une position déterminée.
LE NATURALISTE 21
ee ———_——…—…—"—"…—" —"…—…"…"…"—"—"—" "…"”"—"—…"…"—"—"—"—"—"— —"—"—"—…"…——…—…—…——————————
Sur la face du plateau, qui est en cuivre, on a tracé
préalablement les diagrammes des lamelles différentes
rondes ou carrées que l’on emploie, et ont peut alors pla-
cer la lame de facon que le diagramme voulu soit en
place sous la lamelle.
Si l’on à affaire à une lamelle carrée, la tournette ne
justifie guère son nom pour la préparation de la cellule,
car on doit immobiliser le plateau et, à l'aide d’un pin-
ceau rempli de la substance dont on veut faire la cellule,
passer des couches successives sur la lame en suivant le
diagramme de la lamelle que l'on aperçoit par transpa-
rence.
Si, au contraire, on veut faire une cellule circulaire, la
tournette devient alors indispensable. Dans ce cas, on
place l'extrémité de son pinceau sur le diagramme de la
lamelle que l’on veut employer et en le maintenant fixe
par l'immobilité de la main, on n’a plus qu’à faire tour-
ner le disque. On passe ainsi successivement deux ou
trois couches, en avant soin de laisser sécher chaque fois
la précédente, selon l’épiasseur que l’on veut donner à la
cellule.
La tournette sert encore lorsque, après avoir placé la la-
melle sur la cellule, on veut la luter, l'opération est
exactement la même que précédemment.
Le lutage doit toujours être fait autant que fpossible à
l’aide de la substance qui a servi à faire la cellule; mais
on emploie souvent le baume de Canada pour faire
la cellule et le bitume de Judée pour lester la pré-
paration. ;
Parmi les substances qui servent à fabriquer les luts
divers, le Bitume de Judée occupe une des premières
phaces. C’est une matière noire, solide et soluble dans la
benzine, l'essence de térébenthine, etc. La solution ainsi
obtenue n'a pas, la plupart du temps, une aflinité suffi-
sante pour le verre; on augmentente sa résistance en
ajoutant une petite quantité d'huile de ricin.
On trouve des dissolutions de bitume de Judée toutes
préparées, dans le commerce, chez les marchands de pro-
duits spéciaux pour la micrographie.
Le Mastic de Bell se trouve aussi tout préparé, c'est un
lut excellent, il est fluide et sèche très rapidement.
La Térébenthine de Venise que l’on emploie pour le lu-
tage des préparations est obtenue par dissolution dans
l'alcool fort, en assez grande quantité pour obtenir un
mélange très fluide et filtrable.
On filtre la solution et on évapore lentement au bain
de sable de facon à obtenir une substance solide qui doit
être employée avec un fer chaud spécial appelé fer à
luter.
Les fers à luter que l’on prend pour les luts à la téré-
benthine de Venise, la paraffine, etc.,enfin, pour tous ceux
qui doivent être employés à chaud, sont les mêmes que
ceux qui servent à la fixation des blocs de paraffine sur
les porte-objets microtomes.
La Paraffine peut servir comme lut de deux facons,
soit pure, soit mélangée à la térébenthine de Venise ou à
la cire blanche.
Ces deux derniers corps lui donnent une adhérence
beaucoup plus grande sur le verre.
Quand on l’emploie seule, il faut prendre de la paraffine
fondant à 60 ou 55°, elle a plus de résistance que celle qui
ne fond qu’à 40 ou 45°.
Par elle-même la parafline résiste peu, surtout lorsque
les préparations sont souvent maniées; aussi le plus sou-
vent passe-t-on par-dessus la parafline, un autre fut
obtenu par la dissolution de la Cire à cacheter dans l'al-
cool fort.
Ce corps ne peut guère servir que Comme vernis, peu
comme fut véritable. La solution alcoolique de cire
doit être presque visqueuse, car, si on l’emploie étant
trop fluide, il met un temps considérable à sécher et sa
force d’adhérence n’en est pas augmentée.
Enfin, la Gomme laque en solution alcoolique épaisse,
constitue encore un lut que l’on peut utiliser.
GRUVEL.
am
DESCRIPTION D'UN COLÉOPTÈRE NOUVEAU
LUCANUS CERVUS var. JUDAICUS-mihi
(var. nova.)
Ain-Tab.
Cette variété ne m'est connue que par un seul exem-
plaire de grand développement, qui m'a été communiqué
par M. H. Boileau et que je figure ici.
La coloration de ce spécimen est en entier d’un brun
châtain obscur, un peu terne et d'apparence mate, sur-
tout sur la tête et le thorax; sa conformation générale
Lucanus cervus var. Judaïicus
rappelle celle du Luc. cervus forme Syriacus que j'ai
figuré pl. 12, fig. 2 du premier volume de ce travail.
Elle en est même tellement voisine que, malgré
quelques différences, d’ailleurs légères, dans la confor-
mation du labre et de l’épistome, il me paraîtrait tout à
fait impossible de séparer ces deux formes, si cette nou-
velle variété (var. judaicus) ne possédait comme particu-
larité de n'avoir que quatre feuillets à la massue anten-
naire.
Il s’agit là, en effet, d'une différence très digne d’in-
térêt puisque toutes les autres variétés connues du Luc.
22 LE NATURALISTE
MEURT RE EE RE ER ETES EEE OR PT PER A AN NT
cervus possèdent soit 5, soit le plus souvent 6 feuillets
antennaires et que cette tendance à un sixième feuillet
est d'autant plus marquée que l’on s'approche de l'Orient.
J'ai dit que quelques autres différences caractérisent
le spécimen dont il s’agit ; il convient, en effet, de noter
que le clypeus est convexe et non déprimé comme cela
se voit presque toujours chez la var. syriacus, et que
l’épistome, presque vertical, est fort long, ogival, nette-
ment et fortement rebordé et qu'il se termine, en outre,
par un petit prolongement étroit et cylindrique dont je
n’ai vu l'équivalent chez aucun Lucane vrai.
L'examen d’autres spécimens de la même forme déci-
dera seul si cette disposition est normale ou si elle est
spéciale à l'individu qui fait l’objet de cette description.
La localité d'Aïn-Tab, qui est mentionnée comme pro-
venance de cet insecte, est l’ancienne Antioche de Taurie.
Elle est située à 90 kilomètres au N. E. d’Alep par
3703 lat. N. et 35°5° long. E.
Louis PLANET.
LE GUI VISCUM ALBUM
Le gui est une plante parasite que l’on rencontre com-
munément sur les vieux pommiers de pommes à cidre
en plein vent et sur le peuplier, notamment le peuplier
de Virginie. Il est excessivement rare sur les vieux
chênes, Quercus robur et pedunculata, Tout le monde
connaît la cérémonie de la cueillette du gui de Chêne par
les druides. On a encore rencontré le gui sur les arbres
suivants : poirier, aubépine, néflier, faux acacia, où tout
le monde peut en avoir vu; tandis qu'il est beaucoup
plus rare sur le pêcher, les arbres verts (Épicéa), l’érable,
le bouleau, le marronnier d'Inde, le châtaignier, le noi-
setier, etc. On l’a signalé sur plus de cent espèces
différentes d'arbres ou d’arbustes. On peut le semer
artificiellement sur les écorces des groseilliers, des
cerisiers, etc. ; quitte à enlever artificiellement l’épiderme
au besoin. On n’arrive pas encore à l’obtenir sur la vigne;
mais On y parviendra peut-être un jour.
On signale à Isigny le Buat (Manche), près de la ferme
du Bois, un Chêne pédonculé porteur d’un pied de gui
femelle, d’une puissance de végétation tout à fait extraor-
dinaire. Comme le dit fort bien M. Guérin, dans le Bul-
letin de la Société linnéenne de Normandie, il est vrai-
semblable que, jadis, certaines variétés de chênes,
actuellement devenues fort rares, étaient particulièrement
aptes à la reproduction du gui sacré, de sorte que ces
arbres étaient devenus des arbres sacrés pour les Gau-
lois. Il suffit d’ailleurs d’une seule touffe de gui pour
donner des branches de gui pendant des années, si on a
soin de la ménager et de ne pas la détruire en cassant la
branche du chêne qui la porte. Actuellement, on connait
assez de guis vivant sur le chêne, et on peut en faire
pousser au besoin (bien que cela soit extrêmement
délicat et que plusieurs expérimentateurs aient échoué),
pour en fournir aux cérémonies annuelles des Druides,
si on était tenté de les renouveler encore aujourd'hui.
Avec le goût des générations nouvelles pour la résur-
rection des cérémonies antiques, notamment des céré-
monies celtiques, on peut s’attendre à voir renaître, d’un
jour à l’autre, la cueillette du gui sacré avec une serpe
d'or. Les collèges de Druides ont encore de beaux jours
devant eux, car les cérémonies antiques de nos ancêtres
ont pour nous un inexprimable attrait. Le mot druide
vient précisément du grec, ôpue Chêne. En gaulois, chêne
se dit caer-quès ; d'où le quercus des Romains, d’après
Le Maout et Decaisne. Kar, Kaer, veut dire bois en Cel-
tique.
Gui vient de wi, gluant, visqueux, qui a fait en latin
viscosus, viscidus, et en botanique viscum, le nom du
gui : le gu et le v remplaçant le w germanique ou cel-
tique, dans gui, wi, viscum, visqueux. C’est du gui en
effet que l'on retire la glu dont on faisait jadis les gluaux,
pour capturer les oiseaux. On sait que les fruits du gui
sont blancs, d'où le nom de viscum album.
Les oiseaux sont extrêmement friands de ces baies.
Ils en avalent les graines, comme nous avalons les grains
de raisin quand nous en mangeons une grappe. Ces
graines passent dans leurs fientes sans avoir été digé-
rées ; de sorte que les oiseaux perchés sur les arbres
vont semer les graines du gui partout où ils perchent.
Les graines qui tombent à terre, sur le sol, ne germent
pas ; mais celles qui tombent sur les branches d’arbre
ont chance de germer, si ce sont des arbres dont l'écorce
présente les conditions voulues pour que ces graines
puissent germer facilement. Il semble qu'avec un peu
d'habileté et d'expérience on pourrait faire pousser des
guis sur une foule de plantes ligneuses, où on ne les
observe pas habituellement; en ayant soin de préparer
leur écorce convenablement, pour que la graine de gui
se trouve dans des conditions favorables à sa germination
et au développement ultérieur de la plante.
La question de la nocuité du gui, sur les arbres où il
est implanté, n'est pas douteuse, car tous les agricul-
teurs savent à quoi s’en tenir à ce sujet. Cependant il
faudrait savoir si, par hasard, la nature ne rendrait pas
aux arbres d’autres services, grâce au gui, pour les arbres
qui les portent. Son feuillage vert ne peut que fournir
du carbone et exciter la circulation de la sève, à cause
de l’absorption de l’eau par la plante parasite. En outre,
les oiseaux, qui viennent manger les baies du gui,
doivent dévorer une quantité infinie de chenilles, puce-
rons, vers rongeurs du bois, etc. En tous cas, il serait
intéressant de comparer entre eux deux vergers de même
âge dans deux pays différents, l'un couvert de guis et
l'autre soigneusement épuré de ce parasite, afin de voir
quel est celui des deux qui donne Je plus de fruits et
aussi les meilleures pommes ; sans trop regarder à celui
qui porte le plus beau bois.
Généralement, si le gui détériore les branches des
pommiers, il ne fait pas grand mal aux peupliers. I est
possible que, si un arbre était surchargé de guis, il fini-
rait par en souffrir ; mais nous avons rencontré d'excel-
lents pépiniéristes, qui nous ont dit, dans notre enfance,
que le gui n'avait jamais fait de mal aux peupliers ; sans
doute parce qu'il n'y en a ordinairement qu'un petit
nombre de touffes, dans notre pays du nord de la France,
sur chaque arbre. Si le gui fait du mal aux pommiers,
il n’y a qu’à l'enlever dans les pays où il gène ; mais il
faudrait voir d’abord si ce ne serait pas un mal pour un
bien, et si le mal est plus grand que le bien, avant de
prendre un parti définitif. La vérité est qu'il ny a
jamais de règle sans exception, et que ce qui est bon ici
peut être mauvais là-bas, et réciproquement. Ce qu'il y
a de curieux, c’est que le gui est parasite sur lui-même,
et que le gui porte-plante ne parait pas en souffrir du
tout.
D' BouGoNx.
D NP
LE NATURALISTE 93
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 26 décembre 1899.
— M. H. Milne-Edwards, directeur du Muséum d'histoire
naturelle de Paris, est nommé vice-président de l'Académie
pour l’année 1900.
— M. Gaston Bonnier donne à l’Académie le résultat de ses
recherches de cultures expérimentales sur l’adapta-
tion des plantes au ciimat méditerranéen. Les plantes
de la région méditerranéenne ont, en général, des caractères
qui semblent en rapport avec le climat spécial de cette région.
Ces plantes subissent le plus souvent deux périodes d’arrêt dans
leur végétation annuelle : l'une en hiver, moins marquée que
dans les régions tempérées; l’autre en été, par suite de la
grande sécheresse. Leur organisation permet aux végétaux
méditerranéens de supporter un éclairement plus grand en
même temps qu'une somme de chaleur plus élevée; elles ont,
par suite, une assimilation chlorophyllienne énergique et doi-
vent résister à une intense transpiration. Comme un grand
nombre d'espèces répandues dans les régions tempérées font
défaut dans le littoral méditerranéen, et, inversement, comme
la flore méditerranéenne contient un nombre considérable d’es-
pèces spéciales, on peut se demander si les espèces ou les va-
riétés qui croissent dans cette flore ont des caractères parti-
culiers que ne peuvent acquérir les espèces ou les variétés des
régions plus froides. L'auteur a recherché si, dans une cer-
taine limite tout au moins, les plantes des régions tempérées
ne peuvent pas s'adapter au climat méditerranéen, en modi-
fiant partiellement leur forme et leur structure. Il résulte des
expériences faites qu'un grand nombre d’espèces des régions
tempérées peuvent, dans une certaine mesure, changer de
forme pour s'adapter au climat méditerranéen. De plus, les
caractères provoqués par l'expérience se révélent, bien qu'avec
une intensité beaucoup moindre, comme analogues à ceux qu’on
remarque chez les végétaux croissant naturellement sur le lit-
toral méditerranéen, et qui donnent à la flore son aspect si
spécial.
— M. Albert Gaudry présente à l'Académie le résumé d’un
travail de M. Erland Nordenskjold sur la grotte du Glosso-
therium (Neomylodon) en Patagonie. Cet édenté nommé
Neomylodon Listai, par M. Ameghino, dont on a trouvé des
peaux garnies de poils et des excréments, est une espèce déjà
connue à l’état fossile; ce serait le sous-genre de Mylodon,
appelé Glossotherium Durwini, auquel on a donné aussi le
nom de Grypolherium. M. Nordenskjold prétend qu’on n’a pas
de preuves que cette singulière créature ait été domestiquée
et repousse le nom de G. domesticum. Il y a plusieurs grottes
auprès de la ferme Eberhardt, elles sont ouvertes dans des
conglomérats formés de fragments de porphyres et d’autres
roches cristallines. Le Glossotherium de la Cueva Eberhardt
ne vit plus de nos jours, mais il appartient cependant à des
temps moins anciens que l’époque quaternaire.
— M. Railliet adresse une note sur | évolution sans hété-
rogonie d'un Angiostome de la couleuvre à collier.
Les Angiostomes sont le type des nématodes hétérogoniques,
c’est-à-dire qu'ils offrent régulièrement deux ordres successifs
de générations sexuées, savoir : une forme monoïque et une
forme dioïque libre. M. Railliet a étudié un Angiostome du
poumon du Tropidonotus natrix dont le développement ne
comporte plus de génération libre. Ce ver, nommé par l’auteur
Angiostoma fuscovenosum, se présente sous l'aspect d’une fe-
melle longue de 3 à 5 millimètres, large de 150 à 190 p., de
teinte blanchâtre ; le corps est cylindrique, le tégument est strié
en travers ; l'extrémité céphalique est tronquée; l’intestin, for-
tement pigmenté, est à peu près cylindrique. Les œufs sont
pondus dans le poumon; ils évoluent et éclosent sur place. Ils
donnent des embryons rhabditiformes que l’on trouve en très
grand nombre, non seulement dans la cavité pulmonaire, mais
aussi dans le tube digestif, qui constitue leur voie normale
d'expulsion. Recueillis et conservés dans l’eau de rivière fil-
trée, ces larves rhabditiformes mesurent, au bout de quatre
jours, 660 y; à partir de ce moment, on les voit changer suc-
cessivement d’aspect et, six jours après, toutes ont subi une
mue et se présentent à l'état de larves sirongyloïdes ou filari-
formes. Ces larves représentent la phase ultime de la vie libre
de l'espèce, la forme qui doit réintégrer l’organisme de l'hôte.
— M. Pierre Fauvel a étudié le pigment des arénicoles.
I existe dans le tégument des Arénicoles deux pigments or-
dinairement regardés comme complètement destructifs :
19 un lipochrome jaune, contenu dans les cellules épithé-
liales, dépourvu d’éléments figurés et solubles dans l'alcool;
2° un segment noir, formé de fines granulations insolubles de
mélanine, localisés dans le tiers supérieur des cellules épider-
miques. C’est à ce dernier pigment que certains Arénicoles
doivent leur coloration noire. L'auteur s’est demandé si la
couleur noire, chez l'animal vivant, n’est pas due à une modi-
fication chimique du lipochrome jaune, à l'intérieur dés cel-
lules, sous l'influence d’un milieu acide. Le développement de
la pigmentation noire suit la même marche que la coloration
jaune. Les parties antérieure et postérieure du tube digestif
sont celles qui présentent une réaction acide et leur épithél\um
est en continuité avec celui des extrémités du corps. Les pig-
mentations noire et jaune augmentent avec l'âge. Les espèces
chez lesquelles le lipochrome est le plus abondant sont aussi
les plus fréquemment atteintes de mélanisme. Il résulte, de ces
remarques et des expériences faites, que la formation des gra-
nulations de mélanine, dans les cellules épithéliales, peuvent
être attribuées à une modification chimique du lipochrome, à
l'intérieur des cellules mêmes, sous l'influence de l'acidité pro-
venant soit du voisinage du tube digestif, soit de l’accumula—
tion des déchets organiques, soit enfin du milieu extérieur.
— M. Ed. Griffon expose les résultats de ses recherches sur
l'assimilation chlorophyllienne dans la lumière so-
laire qui a traversé des feuilles. Il s'agissait de voir ce
que devient la fonction assimilatrice dans la lumière trans-
mise après avoir traversé une, deux ou plusieurs feuilles. Der-
rière une seule feuille, on a toujours observé qu'il y a dé-
composition d’acide carbonique, par contre, le plus souvent,
derrière deux feuilles, et dans les mêmes conditions de milieu,
il y a généralement dégagement d’acide carbonique. Le pas-
sage de la lumière à travers une seule feuille affaiblit néan-
moins d’une nuance notable la force vive des radiations qui
servent à la fonction chlorophyllienne. Les résultats varient
cependant si on change les conditions de temps, de nature et
d’éclairement. Lorsque la lumière a traversé des feuilles, son
pouvoir assimilateur se trouve abaissé, non seulement à cause
de l’absorption des radiations par la chlorophylle, mais encore
par suite de l'absorption due aux parties incolores, nom-
breuses et surtout au protoplasma.
— M. Stanislas Meunier présente un complément d’ob-
servations sur Ja structure du diluvium de la Seine.
L'histoire du diluvium de la Seine apparait avec une simpli-
cité et une continuité qui contrastent avoc la première con-
clusion d'observations trop hätives. Là où, tout d’abord, onne
voyait que des témoignages de courants monstrueux par leur
volume et par leur vitesse, il n,y a que la preuve de la longue
persistance du régime encore en vigueur sous nos yeux. L’ana-
lyse attentive de la structure interne du diluvium suflit, à elle
seule et sans le secours d'aucune autre considération, pour
faire repousser toutes les hypothèses diluviennes successive-
ment présentées, même avec les modifications par lesquelles,
depuis Belgrand, on à essayé tant de fois de les accumuler.
L'histoire de la sédimentation fluviale est une de celles où la
légitimité de la doctrine actualiste apparaît le plus claire-
ment.
— MM. Vaschide et Van Melle émettent une nouvelle hy-
pothèse sur la nature des conditions physiques de
l'odorat. L'opinion classique de l’odorat est encore celle ad-
mise par les anciens physiciens grecs. La condition essentielle
serait que des particules des corps odorants, se détachant et
se répandant continuellement dans l'air, viennent en contact
interne avec la muqueuse olfactive. Les auteurs formulent une
nouvelle hypothèse. L’odorat ne provient pas d’un contact di-
rect entre les particules détachées des corps odoriférants et
les terminaisons des nerfs olfactifs, mais d’un rapport indirect
au moyen de rayons de courte ondulation, analogues mais non
semblables, à ceux que nous considérons cemme la cause de la
lumière, de la chaleur et des phénomènes Rüntgen, etc. Voici
les principales présomptions qui plaident en faveur de la thèse.
Il est certain que, en général, les sensations ne proviennent
pas directement des corps, mais plutôt du milieu ambiant.
Les nerfs olfactifs ont la même origine cérébrale que les nerfs
optiques, leurs fonctions doivent se ressembler; les odeurs
possèdent la faculté d’absorber la chaleur rayonnante ; donc
rapport entre les odeurs et les rayons de chaleur; les subs-
tances ne perdent pas de poids ni de volume, du moins d’une
facon appréciable, sauf les substances volatiles; il y a des
corps dont les particules se détachent et qui ne sentent pas, et
réciproquement; on a trouvé que l'absorption des odeurs varie
2; LE NATURALISTE
avec les couleurs des étoffes; la fatigue peut ne se porter que
sur une odeur, tandis que l’odorat reste intact pour d’autres
odeurs; l’air n’est pas le seul véhicule de l'odorat, car on peut
parfaitement sentir ayant les narines pleines d'une solution
odoriférante. Toutes ses remarques, fort judicieuses, semble-
raient prouver la justesse de l'hypothèse des auteurs, qui pour-
rait bien finir par étre admise.
P. Fucus.
Séance du 2 janvier 1900.
— C’est M. Maurice Lévy, qui, cette année, est Président de
l'Académie des sciences.
— MM. P.P. Dehérain et KE. Demoussy ont étudié pendant trois
annécs de culture des lupinsjblanes.Ces plantes n’acquièrent
qu’un très médiocre développement quand ils ne portent pas de
nodosités sur les racines, mais ces nodosités présentent des
aspects très divers. Elles peuvent être petites, espacées comme
les grains d’un chapelet, et se rencontrent sur les plus vigou-
reux dont la teneur en azote peut atteindre 3 % de la matière
sèche. Elles sont lisses, de médiocre dimension, formant par-
fois des couronnes au collet: les auteurs ont trouvé dans les
plantes qui les portent 2 % d'azote. Elles proviennent d’inocu-
lation et sont tantôt demi-sphériques, encastrées sur les raci-
nes, tantôt détachées; les plantes hospitalières contiennent
4 d'azote pour 100 de matière sèche. Elles sont énormes, ma-
melonnées en forme de framboises: les plantes auxquelles elles
appartiennent ne renferment que 0,6 à 0,8 d’azote pour 100 de
matière sèche. La réussite des cultures de cette légumineuse
parait devoir être attribuée à la présence dans le sol de bac-
téries favorables à la symbiose, qui organisent pour le lupin
l’azote atmosphérique. Elles semblent, en outre, s’opposer à la
formation, sur les racines, d'énormes nodosités, dues à d’au-
tres bactéries qui, bien qu'encore utiles, vivent cependant sur
les légumineux plutôt en parasites qu'en associées.
— M. A. B. Grifliths a déterminé la composition chimi-
que d'un pigment vert d’Amanita muscaria (champi-
gnon). Ce pigment ayant été dissous dans le chloroforme et
l’éther, on évapore à sec la solution filtrée. Le pigment vert
est une substance amorphe. Les analyses de ce pigment con-
duisent à la formule C?° H?0 010, Les solutions de ce pigment
ne donnent pas au spectroscope de bandes caractéristiques
d'absorption. Le pigment rouge d'Amanila muscaria répond à
la formule C1? H18 O5.
— MM. Em. Bourquelot et H. Hérissey ont fait des re-
cherches sur les ferments solubles produits, pendant
la germination, par les graines à albumen corné. Les
graines de Fénugrec (Trigonella Fœnum græcum) et de Lu-
zerne (Medicago saliva), qui ont été choisies comme sujets
d'étude, et probablement beaucoup d’autres graines, sécrètent
pendant la germination, comme le fait la graine de Caroubier,
des ferments solubles capables d’hydrolyser et de rendre assi-
milables les hydrates de carbone de réserve qui entrent dans la
composition de certains albumens cornés. L'action de ces fer-
ments est comparable à celle de l’acide sulfurique étendu
chaud.
— M. Bruyant a fait, à la station limnologique de Besse, des
recherches sur la variation du Plankton au lac Chau-
vet. La répartition du Plankton dans le lac Chauvet n’est
rien moins qu'uniforme; sil était permis de généraliser les
résultats fournis par une quarantaine de pêches, l’auteur con-
clurait que la majorité des espèces, c'est-à-dire les espèces qui
par leur volume constituent la plus grande partie des Planktons
(Entomostracées), s'accumulent pendant le jour dans la pro-
fondeur pour fuir une radiation trop intense. Pendant la nuit,
elles remontcraient au voisinage de la surface, tout au moins
jusqu’à la zone de 3 mètres.
— Mlle Marie Loyez adresse une note sur la constitution
du follicaie ovarien des Reptiles. Le follicule des Rep-
üles, au moins chez les Lacertiens et les Ophidiens, est com-
posé de deux sortes de cellules: de petites cellules follicu-
laires ordinaires, et de grandes cellules semblables à de jeu-
nes ovules que l'on peut considérer comme de véritables
ovules abortifs, et dont la fonction est probablement de con-
courir à la formation du vitellus.
P. Fucus.
LES PAPILLONS ET LES CHENILLES
EN FRANCE
Au mois de janvier.
Les papillons et les chenilles ne sont pas nombreux en
janvier, on en trouve, cependant, un petit peu partout
toutefois, mais surtout dans le midi de la France. Le
Cerastis vaccinii, la Noctuelle de l’Airelle, se prend dans
toute la France, à la miellée, ainsi que sa variété ou aber-
ration polita si remarquable par ses ailes d’un roux fer-
rugineux avec les dessins plus foncés. Ce papillon éclôt
d’ailleurs en octobre et novembre, hiverne et reparait
quelquefois à partir de janvier, L'Hybernia rupicapraria
H. se prend sur les haies. Dans le midi de la France, en
Provence, on peut prendre Chemerina caliginearia Ramb,
sur les cites et principalement le Citus incanus ; sur les
rochers on trouve Larentia multistrigaria, et sur le roma-
rin (Rosmarinus officinalis), l'Eupithecia rosmarinata.
Dans les champs, sur les plantes basses, on rencontre
encore en Provence la Coremia basochesiata de Dupon-
chel.
Les chenilles sont naturellement un peu plus nom-
breuses, mais on ne peut guère les signaler que dans la
France méridionale. La Leucania liltoralis Curtis se
trouve dans le Midi et dans la France occidentale sur
Calamogrostis arenaria et sur le Triticum acutum. L'El-
lopia prosapiara se rencontre sur les pins et les sapins
un peu dans toute la France. Polia cœrulescens Bdv. vit
dans le Midi, sur les Valérianées; Eupithecia Phœnicea-
ta se trouve à Marseille et à Hyères, sur le Juniperus
phœnica; Eupithecia rosmarinata sur le romarin, Eupi-
thecia pumilata sur les Chenopodées aux îles de Serins.
Les Mauves et Lavatères,en Provence, donnent asile à la
chenille de l’Eubolia malvata et les Genêts (Genista scopa-
rius surtout) à Eubolia peribolata Hubn, Toujours dans
la France méridionale, on peut rencontrer sur les plantes
basses ou sur les plantes potagères, l’Hadena Solieri
de Boisduval, sur l'Ajonc) nain (Ulex nanus) vit le
Crocallis dardoinaria etsur l'Armoise (Artemisia campestris)
la Scodiona emucidaria, sur les rochers où pousse Ja
Garance voyageuse (Rumia peregrina), on trouve la
Coremia basochesiata.
PPEFUCUS:
LA DESTRUCTION DES OISEAUX
EN CHARENTEÉE-INFÉRIEURE
Depuis de longues années que je fréquente Royan
dans la Charente-Inférieure, j'ai toujours été frappé par
la quantité relativement considérable d'oiseaux utiles
qui se vendent couramment sur le marché, du reste peu
important de cette petite ville.
Les oiseaux utiles qui ne se trouvent qu’exceptionnel-
lement à l’étalage des marchands de gibier, sont : l’engou-
levent, la huppe, les pics et quelques autres espèces
analogues. Je ne fais que citer ces espèces car leur vente
est exceptionnelle, mais il est à remarquer que les chas-
seurs très nombreux du pays, ne les épargnent jamais
|
L
LE NATURALISTE 2
5
ES PE
quandils les rencontrent. Mais je voudrais surtout attirer
l'attention sur la présence pour ainsi dire journalière sur
le marché de nombre d'oiseaux très utiles, tels que tra-
quets, bergeronnettes et surtout rouges-gorges : on trouve
aussi, plus rarement il est vrai, des fauvettes et autres
becs fins.
Ces oiseaux sont l’objet d’un commerce éhonté, les
marchands ne se donnent même pas la peine de les
plumer et les vendent tels quels, sûrs de leur impunité.
Il n’est pas rare au moment des passages de compter par
cinquantaines leurs dépouilles, à l’étalage des deux ou
trois marchands de volailles que comporte ce petit marché.
Il est aussi à remarquer que tous ces oiseaux sont pris
dans des pièges prohibés, car jamais Je n’ai rencontré
sur eux la trace du plomb.
Ces faits me paraissent intéressants à signaler, ils prou-
vent que l’on tue des oiseaux aussi utiles par plaisir et
sans raison, dans une région où le gibier est abondant.
UN ABONNE.
LES PLANTES DE FRANCE
Leurs Chenilles et leurs Papillons
GROSEILLER (Ribes)
Ribes uva-crispi. — Vanessa C. album L., Che-
nille de mai à juillet, papillon de juillet à septembre,
toute la France. Sesia tipuliformis L., chenille d'avril à
mai (tiges), papillon en mai, toute la France. Cerastis
silene L. V.,chenille en avril-mai, papillon en septembre,
octobre, toute la France. Phlogophora meticulosa L.,
chenille pendant toute la belle saison ainsi que le pa-
pillon, France entière. Halia Wavaria L., chemille en mai-
juin, papillon en juillet, France centrale et méridionale.
Abraxas grossulariata L., chenille en mai, papillon en
juillet, toute la France. Cidaria prunata, chemille en mai-
juin, papillon de juillet à septembre, toute la France.
Ribes nigrum, — Eupitheciu assimilata Doub., che-
nille en septembre-octobre, papillon en juin-juillet, toute
la France. Eupithecia exiguata H., chenille en septembre.
papillon en mai-juin, toute la France. Cidaria associata
Bdv., chenille en mai, papillon en juin-juillet, France
centrale.
MÉLILOT (Melilotus)
Melilotus officinalis., — Acidalia punctata Tr.,
chenille en avril, papillon en juillèt, France méridio-
nale et orientale, Lyon.
BAGUENAUDIER (Colutea)
Colutea arborescens, — Lycæna bætica L., che-
nille en juin-juillet, papillon d'août à octobre, France
centrale et méridionale. Lycæna œgon S. V., chenille en
mai, papillon en juin-juillet, toute la France. Lycœna
iolas, Och., chenille en mai-juin, papillon en juin-juillet-
département du Var.
CAILLE-LAIT (Galium)
Galium verum, — Deilephila Galii S. V. et Deile-
phila elpenor L., chenilles en juillet-août, papillons de
Juin à septembre, toute la France, Macroglossa Stella-
tarum L., chenille de mai à août, papillon au printemps
et à l'automne, toute la France. Noctua plecta L., che-
nille en automne, papillon de mai à août, toute la
France. Acidalia emarginata, chenille en juin, papillon
en juin-juillet, toute la France. Melanippe tristata Li,
chenille en juin, août, septembre, papillon d'avril à
juillet, France centrale et septentrionale. Melanippe ga-
liata H., chenille en juillet, papillon de mai à août,toute
la France, Cidaria dotata L., chenille en mai-juin, pa-
pillon en juin-juillet, toute la France. Eubolia virgata H.,
chenille en juin et octobre, papillon d'avril à juillet,
toute la France. Anticlea cucullata Huss., chenille en
juillet-août, papillon en mai-juin, France centrale et
orientale.
Galium mollugo.— Acidalia contiquaria H., che-
nille tout l'automne, papillon de juin à août, France mé-
ridionale, orientale, septentrionale, Auvergne. Larentia
salicata H., chenille en juin et octobre, papillon de mars
à mai, août et septembre, France centrale, méridionale
et orientale, Melanthia ocellata L., chenille juin et sep-
tembre, papillon de mai à août, toute la France, Mela-
nippe molluginata H., chenille tout l'été, papillon en mai
et juin, montagnes. Cidaria suffumata H., chenille en
mai-juin, papillon d'avril à juin, France centrale et
orientale.
Galium divers. — Agrotis multangula H., chenille
en mai, papillon en juillet, France centrale méridionale
et orientale. Tæniocampa gothica, chenille en juin-juillet
et octobre, papillon en mars-avril, août à octobre, toute
la France. Acidalia imitaria H., chenille pendant toute
la belle saison, ainsi que le papillon, France centrale et
méridionale. Larentia multistrigaria H., chenille en mai-
juin, papillon en mars, novembre et décembre, France
centrale et méridionale. Larentia viridaria F., chenille en
été et automne, papillon de mai à juillet, toute la France.
Anticlea rubidata, chenille en août et septembre, papillon
de mai à août, France centrale, méridionale et orientale.
Phibalapterix vittata, Bkh., chenille en mai, papillon en
juin, France centrale, méridionale et orientale.
CAROTTE (Daucus)
Daucus carota, — Papilio Machaon L., chenille
en mai et septembre, papillon en mai et juillet, toute la
France.
CERISIER (Cerasus)
Asteroscopus nubeculosus Esp., chenille en mai-juin,
papillon de mars à mai, France septentrionale, Alsace.
Selenia bilunaria Esp., chenille en mai, juin, août, sep-
tembre, papillon de mars à juillet, septembre, toute en
France.
DE PRIS EL CE ER De RU it OR MERE SONCRER SERRES
Le Gérant: PAuz GROULT.
9
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17,
LE NATURALISTE
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18
29 ANNÉE
De SÉRIE —
N° 310 1°" FÉVRIER 1900
Observations sur la Testudo Nigrita, Dum. Bib.
Les îles Galapagos sont un groupe d'iles stériles et
désertes situées dans l'Océan Pacifique à la hauteur de
la République de l’'Equateur. Elles appartiennent actuel-
lement aux Etats-Unis d'Amérique.
- Ces iles sont d'origine volcanique à l’aspect sauvage,
presque entièrement formées de masses énormes de
laves noires, elles ont une flore toute spéciale renfer-
mant de nombreuses cactées.
SR ru,
qu ;
Ex Te | ii le
mangée fraiche et salée et leur graisse fournissait une
huile claire et limpide.
Heureusement pour la science, de ces tortues ont pu
être transportées dans les musées et jardins zoologiques
et là être observées. C’est ainsi que deux tortues, le
male et la femelle, appartenant au groupe des tortues de
terre et au genre du Testudo Nigrita, Dum et Bib,ont pu
être observées dans les jardins de l'hôpital de Flades-
ville près Sydney, Australie, par M. Edgar R. Waite,
zOologiste américain.
Dans les dépendances de l'hôpital, ces chéloniens
avaient toute liberté, ils se nourrissaient principalement
d'herbes, mais on leur donnait aussi beaucoup de
légumes, les laitues étaient particulièrement appréciées
Tortue géante des îles Galapagos {Testudo nigrita).
Découvertes par les Espagnols au xvie siècle, elles
mériterent le nom d’ile des Tortues, par suite de la
quantité de Chéloniens qui vivaient sur ces îles ;en 1797,
Dampier, qui visita ces îles, parle de ces tortues gigan-
tesques et dit que tous les navires s’y arrêtaient et que
les matelots y restaient plusieurs mois pour chasser ces
animaux et se nourrir de leur chair. En 1830, la Répu-
blique de l'Équateur prend possession de ce groupe
d’iles ; des déportés y furent mis et firent une guerre
d’extermination aux chéloniens, et des porcs qui furent
amenés dans ces iles et retournèrent à l'état sauvage
détruisirent aussi beaucoup de ces animaux. En 1875,
on constata que le nombre des tortues allait en dimi-
nuant, il n'y en avait plus à l'ile Charles et Hood, mais
quelques-unes encore dans les autres îles. Le D' Gunther
qui visita ces iles en 1877, mentionne 5 espèces encore
vivantes. Ces tortues étaient remarquables par leur
grande taille et fournissaient à l'homme un mets savou-
reux, leur chair ressemblait à celle du poulet, elle était
Le Naturalisle, 46, rue du Bac, Paris.
et une plante entière était prise de la main et après deux
ou trois mouvements de mâchoire était avalée, Manger
était leur principale occupation. Elles n’avaient pas
beaucoup de goût pour le mouvement et ce n’est qu'en
réponse à des coups de bâton qu'elles se remuaient.
Qnand on employait ce moyen, la tortue se laissait
tomber lourdement, rentrant ses pattes contre les coups
de l’agresseur. Un homme employé dans l'établissement
se servait de son pied pour les faire avancer, mais un
jour son pied fut pris sous la carapace de la tortue et fut
cruellement écrasé.
Quand on retournaitle plus petit de ces chéloniens, la
femelle, deux ou trois hommes étaient suffisants. Mais pour
retourner le mâle il fallait cinq hommes, et en consé-
quence de l'énorme poids et des forces de cet animal, ils
étaient à peine capables de le retourner sens dessus des-
sous. Il fallait encore plus de monde pour le placer sur
la bascule et une fois là il fallait l’attacher afin de pré-
venir tous ses efforts. Finalement, quand le poids correct
28
était obtenu et que l’on permettait au reptile de se
remettre sur ses pattes, on voyait le sang couler entre
les écailles de la carapace.
Pendant le temps de la durée des observations de
M. Waite, la partie supérieure de la carapace de la
femelle était beaucoup usée, à cause des efforts du mâle
qui avait été payé de retour.
L'histoire de chacune de ces tortues doit être traitée à
à part.
1° Tortue mâle.
La tortue mâle était appelée communément Rotumah,
du nom de l’île où elle avait séjourné longtemps. Elle
provenait directement du groupe des îles Galapagos,
mais on ne sait pas exactement de laquelle. Voici
quelques particularités de son histoire :
Vers l’année 1866, elle fut donnée au regretté
Alexandre Mac Donald par le roi Georges de Tonga.
C'était un cadeau royal, c’est-à-dire un cadeau échangé
entre deux grands chefs égaux. Quand il fut amené de
Tonga à Rotumah, ce chelonien causa une grande sen-
sation parmi les naturels.
Elle fut ensuite apportée à Sydney dans un baleinier
appartenant à MM. Mac Donald et Smith. Le capitaine
Howard qui commandait le vaisseau, avait connu cette
tortue cinquante ans précédemment à Tonga où elle
avait été débarquée des iles Galapagos par un baleinier
américain quelques années avant. Dans la mémoire des
habitants, ses dimensions n'avaient pas changé.
De 1866 à 1896 cette tortue a vécu à Sydney et à cette
dernière date elle était transportée en Angleterre, ayant
été achetée par l’hon. Walter Rothschild pour sa ména-
gerie de Tring. Quand cette tortue passa dans la posses-
sion de M. Mac Donald, elle fut photographiée et c'est
la reproduction de cette photographie qui accompagne
cet article. Elle fut aussi mesurée et les mesures étaient
inscrites sur les bords de la carapace même de la tortue.
Voici ses dimensions en 1866 :
Longueur du nez à la queue. ..... 1 m. 90
Carapace ere rer a Dee 1 m. 40
Tour du:corps:#2.: See ele ele 2 m. 50
POIdS RARE DA ANR ER 290 k. 500
En 1896, cette tortue fut de nouveau mesurée, ses
dimensions n’avaient pas beaucoup changé :
Carapace 1 m. 420
CCC ECC CRC CRC PT
mais elle avait diminué de
260 k. 500.
20 Tortue femelle.
Cette tortue a été apportée à Sydney en 1853 par le
baleinier américain Winslow. C'était une enfant; elle
pesait 15 k. 300. En 1884, des observations furent faites
sur cet animal par le D' Cox. Elle mesurait, à cette
époque, du bout du nez à la naissance de la queue,4m.90,
En 1893, son poids était de 166 k. 780. A la fin de cette
année elle fut placée dans un enclos avec le mâle et en
septembre 1895 elle déposa six œufs dans un amas de
décombres. Ces œufs sont parfaitement ronds, blancs et
de 0 m. 065 de diamètre. En 1896, on prit de nouveau le
poids de cette tortue : elle pesait alors 97 k. 905 ; il est
à remarquer qu'elle avait diminué de poids.
A la fin de cette année, elle mourut et elle est exposée
ainsi que son squelette dans le Muséum de Sydney. Les
ovaires étaient dans de bonnes conditions et il est pro-
bable qu’elle aurait encore produit des œufs.
poids et pesait alors
LE NATURALISTE
Il serait heureux que des observations de ce genre
fussent faites dans nos ménageries; elles serviraient
utilement la science.
E. MASSAL.
L'ANTIQUITÉ DE L'HOMME
Le soulèvement des Alpes s'est produit au début de
la période quaternaire, immédiatement avant le diluvium.
A vrai dire, il s’est opéré en deux reprises différentes,
pour les Alpes occidentales d'abord et le reste des Alpes
ensuite; mais nous sommes obligés ici à un très court
résumé, afin de simplifier les choses.
D'un autre côté les alluvions du Rhône sont produites
aux dépens des Alpes et des Cévènnes, c’est-à-dire aux
dépens de toutes les montagnes quilimitent son bassin de
toutes parts. Or, il est bien évident que cette destruction
incessante des montagnes ne peut s’opérer qu'à leur
détriment. Elles étaient donc autrefois beaucoup plus
hautes qu’elles ne le sont aujourd’hui. On doit même
admettre que leur destruction était beaucoup plus rapide
autrefois qu’elle ne l’est actuellement; et cela pour deux
raisons; 1° parce que les glaciers étaient beaucoup plus
étendus et plus élevés, double cause pour que leur
action érosive fût plus active; 2° parce que les pluies
étaient plus abondantes, et que les chutes d’eau étaient
à la fois plus puissantes et plus hautes que de nos jours.
Il y'avait plus de glaciers et plus d’eau: double cause
pour que les effets destructeurs exercent une érosion
plus rapide de ces montagnes. A l’époque de ces vastes
glaciers, une foule d'animaux à longs poils, spéciaux
aux pays froids, trouvaient à vivre dans nos pays, du
moins au voisinage de ces montagnes glacées. On les a
vus peu à peu disparaître complètement ou émigrer vers
le nord, au fur et à mesure de la diminution d’impor-
tance de nos glaciers. Tout cela est on ne peut plus
naturel, Or l’homme est arrivé sur la terre après le sou-
lèvement des Alpes, dans le cours de cette époque, que
les anciens géologues ont appelée la période glaciaire;
bien qu'il fit alors plus chaud et plns humide à Paris
qu'aujourd'hui, s’il faisait plus froid dans le Jura, la
Savoie, le Dauphiné, etc., en un mot dans les régions
situées autour de ces montagnes glacées.
En partant d'aujourd'hui pour remonter à l’origine de
l'homme, nons venons de voir disparaître l'ours des
Pyrénées et des Alpes. Au début de notre ère, on voyait
disparaitre l’Urus. Auparavant, c'était le Renne et le
Mammouth, qui étaient remontés vers le nord en quittant
nos pays: le Mammouth pour y périr malgré son abon-
dante fourrure.
Les hommes de l’époque des cavernes, trouvaient chez
nous deux espèces d'Ours, qui ont disparu depuis long-
temps, des Rennes et des Mammouths, sur les os des-
quels ils traçaient des dessins, des Hyènes plus fortes
que celles que nous connaissons en Algérie, et une foule
d'autres animaux qui ont disparu depuis, tels que le
Bison, le Cerf à grands bois, etc. Cependant le sol des
cavernes présente en général ces débris d'animaux à une
assez faible profondeur, au-dessous d'une ou de plusieurs
couches de stalagmites, dans une sorte d'argile ou de
terrain plus mou, qui a souvent été entrainé par les eaux
} du diluvium ou autres, On y trouve des restes de l’homme,
“LE NATURALISTE 29
ses ossements ou des débris de sa primitive industrie, :
tels que des instruments en silex, des fragments de bois
carbonisés, des ossements d'animaux sur lesquels il à
exécuté des dessins de toute nature, etc., etc. Tout
semble même indiquer que ces animaux ont vécu dans
les cavernes avant lui d’abord, et ensuite qu'il a pris leur
place, a vécu en même temps qu'eux, et qu'il les a
chassés pour se nourrir de leur chair, Tout cela est cer-
tain et ne fait l’objet d'aucun doute.
Ces premiers habitants autochtones ont dùû vivre d’abord
par familles isolées; c'étaient des chasseurs, Ensuite par
tribus, quand ïls se sont fixés au sol par des défriche-
ments, pour étendre et créer des pâturages dans les
vallées afin de nourrir des moutons et des bœufs; c’é-
taient des pasteurs. Enfin ces tribus se sont groupées de
facon à former des peuples adonnés à la culture, avec
des fermes ou métairies isolées qui ont donné naissance
à des villages et à des bourgades. C’est alors que l’on
arrive aux peuples historiques, aux Celtes etaux Gaulois,
et puis ensuite aux Belges, aux Romains et aux Francs,
qui ont successivement envahi notre pays, sans en
compter beaucoup d’autres intermédiaires, venus du
nord, de l’est, et même du midi, comme les Phéniciens,
les Ligures d'Espagne et les Grecs d’'Ionie établis à
Marseille.
Les plus anciens débris de l’homme ont été trouvés
chez nous dans les cavernes et dans les terrains d’allu-
vions, même avant le diluvium, à l'époque quaternaire,
après le soulèvement des Alpes, qui clôt l'époque ter-
taire. Or, il ne nous semble pas qu'il ait fallu beaucoup
de milliers d'années pour cela. C’est ce qui fait que nous
croyons plutôt être au delà qu’en decà de la vérité, en
disant que l’homme remonte à une dizaine de milliers
d'années, à deux mille ans près en plus ou en moins; le
soulèvement des Alpes étant antérieur à l'apparition de
l’homme, et remontant à une époque qu'il est peu néces-
saire de chercher à déterminer d'une facon précise, quel-
ques milliers d'années auparavant, peut-être.
“C’est, qu'en effet, en moins de deux mille ans, nous
voyons dans une foule d’endroits le terrain s'être surélevé
de plus de 3 mètres, alors que les débris de l’homme
primitif ne sont généralement qu'à quelques mètres de
profondeur, Sans doute une couche de stalagmites d’un
mètre d'épaisseur peut demander, dans certains cas, dix
fois plus de temps à se former qu'un mètre de terre
meuble dans les villes ou au pied d'un remblai, sur le
bord des routes. Mais en tenant compte largement de ces
conditions si différentes, nous ne croyons pas que l'ori-
gine de l’homme remonte aussi loin qu’on l’a dit depuis.
D' Boucox.
L'ACTINOMYCOSE (I)
ET SES DANGERS POUR LES TRAVAILLEURS AGRICOLES
L'actinomycose est une maladie infectieuse des ani-
maux et de l’homme, produite par le développement,
dans l’intérieur des tissus, d'un champignon dénommé
actinomyces bovis. Ce champignon se présente sous la
forme de petits grains jaune-soufre, ou brun, ou gris-
(1) Extraits d’une communication faite, par M. le docteur
Reboul, à la Société d'étude des sciences naturelles de Nimes,
perle, que le microscope décèle aisément; il se multiplie
très abondamment et presque exclusivement sur la plu-
part des céréales. C'est donc au contact des céréales, plus
particulièrement par les barbes d'orge, de seigle ou de
blé, que l’homme et les animaux s'infectent. La maladie
est fréquente chez le bœuf et la contagion par les ani-
maux est exceptionnelle,
Aïnsi l’homme ne contracte pas la maladie au contact
des animaux qui en sont atteints; il ne s’infecte pas
davantage en mangeant leur viande ou buvant leur lait;
mais la maladie pourra l’envahir s’il triture entre ses
dents des graines de céréales, s'il mâchonne par distrac-
tion des épis, s'il aspire la poussière de l'air à battre le
blé, s'il est piqué par une barbe, s'il se heurte à quelque
pierre ou tronc d'arbre sur lesquels se trouve le germe du
champignon, On considère même l’hordeum murimum,
orge des rats, comme un véhicule fréquent du parasite.
La maladie peut se montrer par suite sur les points les
plus divers : gencives, poumons, mains, etc.
L'actinomycose a été découverte en Italie chez le
bétail, et en Allemagne chez l'homme, Elle est fréquente
surtout dans ce dernier pays, mais on la rencontre à peu
près dans toutes les parties du monde. M. Reboul a
observé un premier cas d’actinomycose dans le Gard,
chez l’homme, en 1895,et a eu connaissance de plusieurs
cas sur les animaux, En France, la maladie a été observée
pour la première fois, en 1888. Mais aujourd'hui que la
maladie est mieux connue, on en découvre des cas plus
nombreux.
La contagion de l’actinomycose à l’homme par les
végétaux peut se faire par trois portes d'entrées : la peau,
la muqueuse digestive, les voies respiratoires, et les habi-
tants des campagnes sont beaucoup plus souvent atteints
que ceux des villes.
L'actinomycose constitue une maladie sérieuse; les
tumeurs qu'elle détermine sur les points envahis sont
difficiles à guérir. Parfois même la médecine est impuis-
sante. [1 importe donc de prendre des précautions en vue
d'éviter le développement et la propagation de cette
maladie. Voici à cet égard les conseils préconisés :
1° Ceux qui s’exposent aux poussières végétales des
fourrages et des céréales doivent faire des ablutions
abondantes et minutieuses ;
20 Toute excoriation, toute plaie même insignifiante
produite par des pailles ou des fragments de bois sera
traitée sérieusement et antiseptiquement ;
3° Il est important de ne pas négliger les soins hygié-
niques de la bouche et des dents;
4 IL est dangereux de se servir de pailles ou de brins
d'herbes comme cure-dents et de màchonner des pailles,
des herbes, des grains de céréales ou des morceaux de
bois ;
5° Les graines des céréales alimentaires ne seront uti-
lisées qu'après avoir été soumises à une forte chaleur du
four ou à une ébullition prolongée ;
6° La manutention des fourrages, des pailles, le bat-
tage des céréales ne doivent jamais être faits dans des
espaces confinés; on pourra, à la rigueur, protéger les
orifices bucco-naseaux au moyen d'un masque, ou tout
au moins faire des lavages abondants, à l'eau chaude,
quand on se sera exposé à ces poussières végétales ;
7e Les pièces où hangars dans lesquels on aura fait
ces travaux seront lavés au linge mouillé ou à la lance,
mais non balayés à sec.
S—
30 | LE NATURALISTE
Des accidents entomologiques
Un accident... Quel triste mot, éveillant d’imprévues
catastrophes, d'irrémédiables pertes, sans parler de
nombreuses maladresses recollées ! ce sont des insectes
perdus en cours de voyage, égarés pendant une commu-
nication. Un accident, c'est la tristesse d’une patte cas-
sée, la constatation d’un prothorax mal appliqué sur un
corps étranger ; c’est le beau Longicorne rendu disgra-
cieux par la seule absence d’une moitié d'antenne, Un
accident est un malheur... et le malheur nous poursuit
dans les accidents qui se multiplient : vous n’évitez l’un
que pour tomber dans un autre. Grâce à une attention
soutenue, aidé par une dextérité remarquable, vous
avez manié, piqué et repiqué des jours entiers de nom-
breux insectes sans aucune catastrophe, et puis vous re-
cevez une boîte contenant deux échantillons seulement ;
vous l’ouvrez : avant que rien ne soit touché il existe
déjà une cassure. Oh! la fragilité des insectes en route,
quelle mine inépuisable de désappointements contre les-
quels, hélas! la meilleure volonté ne peut rien! On a
pris, on peut prendre mille précautions, emballer soï-
gneusement dans une bonne couche de ouate, recom-
mander l’envoi, tout cela n’y fait rien quelquefois : le
funeste accident se produit encore et, au retour malheu-
reux, On pourra constater que les insectes n'ont plus leur
virginité du départ, Par contre, une autre fois, l'on se
désole en recevant un envoi mal emballé, la ficelle pen-
dante, et l’on ouvre, plein d’anxiété, pour constater...
qu'il n’y a aucun dégât. Comprenez donc quelque chose
aux mystères des voyages et du hasard! Si les accidents
sont parfois évités malgré les imprudences, il ne faut
pas conclure que les précautions sont inutiles; pour
combattre les cassures trop fréquentes, il est utile de
prendre le plus de précautions possible, soit chez soi,
soit pour les envois.
Quelques petits conseils à ce sujet ne seront pas de
trop.
Chez soi, il ne faut pas oublier les boîtes arrivées.
Conserver trop longtemps les insectes communiqués est
dangereux; à la longue, on doit s’habituer à les voir
chez soi et, de là, ensuite, à les croire siens, il n’y a
qu'un pas, franchissable malheureusement. Par négli-
gence, il ne faut pas abandonner sur un coin de rayon,
pendant des mois, sans l'ouvrir, une boite d’études, car
c'est l’'exposer à servir involontairement de nourriture
aux anthrènes funestes, rôdant sans relâche autour de
nos boites délaissées. à la recherche d’une rareté.
Pour les envois, quelques précautions sont indispen-
sables. Une des plus importantes est le collage sur le
dessus de la boîte (afin d'éviter qu’er cas de cassure les
débris ne sortent de la boite au moment de son débal-
lage), soit d’une toile gommée, soit d'une simple feuille
de papier; une très bonne précaution aussi est celle con-
sistant à placer, dans un coin de la boite, un petit tampon
de coton fixé sohdement par une épingle, ce tampon
destiné à retenir les membres cassés en route. Il est in-
dispensable de boucher tous les joints qui peuvent exis-
ter entre le liège ou la tourbe du fond et les parois des
boites car dans ces vides peuvent s’égarer des parties de
pattes ou d'antennes et même de petits insectes, Une
boite dont le papier du fond est trop perforé de trous
d’épingles ne vaut pas grand chose non plus ; ces trous
présentent des inconvénients analogues aux vides laté-
raux dont je viens de parler. Il ne faut expédier aucune
boite par la poste sans l'avoir au préalable emballée
soigneusement dans des petits copeaux, de la ouate, ete.:
un bon emballage est nécessaire pour amortir les chocs.
Ne jamais envoyer d'insectes sortant de l'ordinaire par
leur rareté sans recommander l'envoi; c’est une garantie
de plus pour leur sécurité. On peut employer par la
poste le système plus sûr d’une double boite, c'est-à-dire
envoyer la boite contenant les insectes (celle-ci plus
petite) bien ouatée, contenue dans une autre plus grande
qui, elle aussi, sera entourée de ouate au besoin. Il est
préférable d’expédier par colis postal les insectes les
plus précieux, ce mode d'expédition laissant plus de
place pour l'emballage; quant aux envois de valeur, on
a plus de sécurité encore en les expédiant avec déclara-
tion de valeur.
Dans nos relations entomologiques, il est bon de se
remémorer souvent ces sages paroles : « Ne faites pas
aux autres ce que vous ne voulez pas qu'il vous soit
fait », qui nous engagent à travailler pour les intérêts de
tous ; et nous serions même impardonnables de ne pas
être plus soigneux pour le bien d'autrui que pour le
nôtre propre. Les accidents pourront être quelquefois
évités par les précautions prises, la négligence aban-
donnée ; ne l’oublions donc pas.
En résumé, nous devons continuellement avoir à l’es-
prit la grande fragilité des insectes, agir pour éviter
cette fragilité, la combattre par tous les moyens pos-
sibles ou du moins tous ceux que nous connaissons et
que nous pouvons employer.
M. "PIc:
Élevage des oiseaux de basse-cour en Égypte
L'élevage et le commerce dela volaille se pratiquent en
grand dans toute l'Egypte. Les espèces qu'on y ren-
contre sont à peu près les mêmes que celles d'Europe.
provinces.
Les tentatives faites en vue d’acclimater dans ce pays
les types européens n’ont pas réussi; généralement, dans
le cours de la première année, les sujets importés con-
tractent de graves maladies; le choléra, la diphtérie, qui
les emportent pour la plupart.
Si, d’ailleurs, par l'exiguité de sa taille, la poule indi-
gène ne fournit qu'une faible quantité de chair, elle
rachète largement cet inconvénient par sa prodigieuse
fécondité ; ses œufs, il est vrai, sont environ la moitié de
ceux des bonnes pondeuses d'Europe.
La poule indigène couve volontiers ; l'incubation natu-
relle est la règle dans presque tous les villages où le sys-
tème des fours à incubation tend de plus en plus à dispa-
raître, excepté dans le voisinage des grandes villes, *
Ces fours peuvent contenir de 2,000 à 5,000 œufs et
fournir annuellement une dizaine de couvées.
Pour les poules, la race ordinaire, de beaucoup la plus
nombreuse, ne diffère guère de la nôtre que par sa petite
taille. Dans le Fayoum et dans la Haute-Égypte, il existe
cependant des variétés au moins aussi développées que
nos belles races de France, mais elles sont moins bonnes
pondeuses et elles restent dès lors confinées dans leurs
LE NATURALISTE 31
Arrivées à l’état de poulets de grain, c’est-a-dire à peine
grosses comme des cailles, les bêtes sont livrées à la
consommation. C’est le moment aussi où celles qu’on
garde pour la reproduction ou pour la vente ultérieure
commencent à chercher elles-mêmes leur nourriture,
car il est très rare de leur voir distribuer des aliments,
On n'’engraisse pas la volaille, les méthodes de gavage
étant absolument inconnues en Égypte.
Le prix de la volaille est fort peu élevé; il ne dépasse
guère 1 fr. la pièce et, dans les villages, il descend à Ofr. 75
et 0 fr. 60.
Il en est de même pour les œufs qui se vendent cou-
ramment dans les villages 0 f. 20 la douzaine ; le prixest
du double seulement dansles grands centres.
L'élevage de la dinde, comme celui de la poule, est
également très répandu. On rencontre les variétés à plu
mage blanc et à plumage noir; cette dernière de beau-
coup la plus nombreuse.
L'élève de cesanimaux parait être plus facile et réussit
mieux qu'en Europe. Les maladies du jeune âgesemblent
pour eux moins fréquentes. On se préoccupe rarement
de la nourriture des dindons. Sauf au moment de la
récolte du mais, époque où cette graine leur est distribuée
parcimonieusement, ils doivent chercher eux-mêmes leur
subsistance.
Les oïes domestiques sont beaucoup moins appréciées
que les poulets et les dindes, Aussi en élève-t: on très peu.
Il en est de même des canards.
Ces espèces sont les mêmes qu’en Europe. L’oie vaut
environ 3 fr, pièce et le canard de 1 fr. 50 à 2 francs.
Quant au pigeon, il est peu de contrées où il soit aussi
répandu qu'en Égypte.
On en distingue deux espèces principales ; le .pigeon
biset et le pigeon domestique, qui offre à son tour de
nombreuses variétés.
Le premier estélevé à l’état de demi-domesticité, non
pas tant pour sa chair que pour la quantité de colombine
qu'il fournit et qui est presque aussi appréciée sur le
marché égyptien que le meilleur guano ; on la paie com-
munément de 20 à 26 fr. les 100 kilogr.
Les pigeonniers qui, dans la Haute-Égypte, constituent
de véritables monuments, affectent la forme soit de tours,
soit surtout de pyramides tronquées dont les parois sont
garnies de vases oblongs en terre, superposés les uns au-
dessus des autreset s’ouvrant à l'air libre, C’est dans ces
vases que viennent nicher les pigeons. La hauteur de ces
édifices varie de 6 à 10 mètreset leur diamètre, à la base,
n’est pas inférieur à 3 mètres. Ils sont construits géné-
ralement par groupes et certains villages en comptent une
centaine.
Le pigeon vit en pleine liberté et n’entre guère dans
ces réduits que pour y passer la nuit ou pour y nicher. Il
ne reçoit aucune subsistance et se nourrit au dehers. On
ne le rencontre d’ailleurs jamais sur les marchés; c’est
un simple producteur de’ fumier.
La colombine est transportée par barques dans tout le
pays et employée comme engrais pour la canne à sucre
et les cucurbitacées, melons, concombres, pastèques, etc.
Un seul colombier peut rapporter annuellement jusqu’à
250 livres égyptiennes, soit plus de 6.000 francs.
Les pigeons domestiques dont les types sont assez nom-
breux sontles mêmes qu'en Europe. Fort peu recoivent
une ration au colombier. Seules les espèces de luxe, le
boulant, le cravaté,le pattu, le paon, etc., sont nourris
directement,
Le pigeon domestique constitue pour le fellah un des
principaux revenus de sa basse-cour, bien que son prix
soit très modique. La paire se vend environ 0 fr. 50 à
0 fr. 60 dans les villages et à peu près le double dans les
grandes villes.
LA FAUNE ANTÉ-PRIMORDIALE
Jusqu'à ces derniers temps, on n'avait pas trouvé de
restes d'êtres organisés au-dessous du terrain Cambrien.
Barrande avait donné à la faune rencontrée dans ce der-
nier terrain, faune qu'il considérait comme étant la pre-
mière apparue sur la terre, le nom de faune primordiale.
Un fait admis depuis longtemps par tous les paléon-
tologistes est que plus l’on remonte dans le passé, plus
simple est la constitution des êtres que l’on y rencontre.
Comme la faune primordiale présente une organisation
assez complexe et très diversifiée, les paléontologistes,
en se basant sur les lois de l'évolution, ont pensé
qu'elle avait dù être précédée par une autre faune à or-
ganisation moins compliquée. Pour eux les Trilobites,
les Brachiopodes et les autres espèces que l’on trouve
dans le Cambrien n'avaient pas dû apparaître subitement
sur la terre comme le pensait Barrande ; ils devaient des-
cendre d’une autre faune dont des recherches heureuses
permettraient de retrouver les restes dans les sédiments
situés au-dessous du Cambrien.
Les géologues et les paléontologistes trouvèrent, en
effet, dans le Précambrien un certain nombre d’em-
preintes qu'ils rapportèrent à des êtres vivants.
Une des premières empreintes signalées fut rencontrée
dans des cipolins du Canada. Elle fut considérée comme
un Foraminifère et désignée sous le nom d'EÉozoon cana-
dense. Bientôt après, on fit de semblables découvertes en
beaucoup de points et l’on créa un grand nombre d’es-
pèces d'Eozoon que l’on désigna, d’après leur lieu d’'ori-
gine, sous les noms d’'Eozoon canadense, E. bavaricum,
E. bohemicum, etc. De longues discussions s’élevèrent
entre les paléontologistes au sujet de l'attribution ou de
la non-attribution de ces empreintes à des êtres vivants.
Aujourd'hui, il est généralement admis que l'Eozoon est
une concrétion minérale résultant d'une action reci-
proque de la calcite, de la serpentine ou du pyroxène.
D'autres empreintes, accompagnant l’'Eozoon et rap-
portées à des Eponges, sont, comme ce dernier, reléguées
dans le règne minéral.
Les traces que M. Barrois a signalées dans le Précam-
brien de Bretagne, et que M. Cayeux attribue à des Ra-
diolaires et à des Spongiaires, pourraient bien ne pas
être d’origine organique mais de simples nodules pyri-
teux comme le soutient M. Raul.
La forme soi-disant organique, d'aspect biconique, plus
ou moins régulièrement striée, trouvée dans la Caroline
du Nord, considérée comme un Corail siliceux et appelée
Palæotrochis, n'a pas une origine animale, car elle est
incluse dans une roche volcanique acide.
Dans les quartzites précambriens du Minnesota, Win-
chell avait trouvé une empreinte ayant vaguement l’as-
pect de celle d’un Trilobite, et, à son tour, M. Van Hisey
avait rencontré des formes ayant l’apparence de la co-
quille écrasée d’un Brachiopode appelé Obolus. Après
examen sérieux, il a été démontré que la premiere n’était
32 LE NATURALISTE
pas de nature organique et que les secondes n'étaient que
de petites concrétions aplaties.
Dans les ardoises précambriennes de Momable, dans
l'ile de Terre-Neuve, M. Billings se crut sur la trace
d’être vivants par la découverte de soi-disant petits fos-
siles auxquels il donna le nom d’Aspidella terranovica;
mais celles-ci, bien qu'ayant l’aspect général d'un Chiton
ou d’une Patelle, aplatis par la pression, n'étaient que des
concrétions de vase striée par des mouvemezts méca-
niques. .
Dans les assises précambriennes du Grand Canyon, on
avait recueilli des traces ayant beaucoup de ressem-
blance avec des Stromatopores et on les avait appelées
Cryptozoon. Il n'est pas encore suffisamment démontré
que ces formes ont une origine organique.
Le même doute subsiste également pour un certain
nombre d'empreintes rencontrées un peu partout et con-
sidérées comme des traces d'êtres vivants.
Comme nous venons de le voir par la rapide revue qui
précède, l'existence d’une faune précambrienune n'avait
donc pas encore été établie d'une manière satisfaisante
jusqu'à ces derniers temps.
Aussi est-ce avec satisfaction que l'on a appris récem-
ment les belles découvertes faites dans ce sens par
M. Walcott, le savant géologue américain.
C'est surtout en Amérique que l’on avait le plus de
chances de rencontrer les restes de la faune anté-primor-
diale. L'Amérique du Nord, en effet, est, par excellence,
la région des terrains précambriens. Ceux-ci y sont très
développés et y couvrent des milliers de kilomètres carrés
sur des épaisseurs pouvantatteindre jusqu’à 15.000 mètres.
On les rencontre dans les Montagnes Rocheuses, dans la
région de Montana, dans le Texas, dansle Grand Canyon
du Colorado, dans la région du Lac Supérieur, dans l'ile
de Terre-Neuve, etc.
- Les restes d'êtres vivants que M. Walcott a recueillis
dans ces différentes régions sont nombreux mais n’ap-
partiennent qu’à un petit nombre d'espèces. Sans doute,
ils ne sont pas très bien conservés et leurs caractères gé-
nériques ne.sont pas aussi nets que ceux des fossiles
cambriens, mais cependant ils sont suffisants pour qu'on
puisse affirmer qu'ils ont appartenu à des êtres organisés
et qu'une faune anté-primordiale a existé.
La faune primordiale se compose surtout de Crustacés
du groupe des Trilobites, de Brachiopodes, de Ptéropodes,
de traces d’Annélides, etc., et il est curieux de remar-
quer que ce sont précisément des êtres appartenant à ces
anciens groupes que M. Walcott a recueillis dans le Pré-
cambrien américain.
Dans les argiles du Chuar terrane appartenant à la
série précambrienne du Grand Canyon, M. Walcott a
trouvé de nombreux corps circulaires, discoïdes et plissés
concentriquement comme si une coquille mince, délicate,
presque membraneuse, avait été comprimée entre deux
lames d’ardoise. La variabilité de ces corps lui a permis
de les considérer comme de petites coquilles appartenant
à des Brachiopodes de forme discircinoïdale auxquels il a
donné le nom de Chuaria circularis.
À côté de ces Chuaria, M. Walcott signale d’autres
empreintes dont l’une a l'apparence d’un lobe pleural de
segment de Trilobite appartenant à un genre voisin de
ceux des Obolella, Olenoides où Paradoxides et dont les
autres pourraient être rapportés avec quelque vraisem-
blance à un Ptéropode,
Mais c’est surtout dans la région de Montana, dans les
schistes marneux du Belt terrane, que M. Walcott a ren-
contré les restes les plus abondants et les mieux conservés
d'êtres organisés. Il y a recueilli de nombreuses traces
d'Annélides et des milliers de fragments de Crustacés.
Les empreintes d’Annélides se présentent sous deux
aspects différents : les unes consistent en des traces
étroites, parfois spirales, et assez semblables à celles que
des Vers, appelés Helminthoïdichnites, ont laissé dans
des schistes cambriens ‘supérieurs, notamment à Gran-
ville dans l'État de New-York; les autres consistent en
de larges tubes cylindriques identiques à ceux que
d'autres Vers, nommés Planolites, ont creusé dans cer-
taines vases arénacées du Cambrien supérieur.
Les nombreux fragments anguleux, souvent brisés,
que M. Walcott rapporte à des débris de Crustacés sont
dans un assez mauvais état de conservation, Le test, qui
paraît avoir été mince, ne présente aucune trace d’or-
nementation à sa surface; de plus, il a été plissé et
comprimé comme une feuille de papier.
Tous ces débris offrent la plus grande ressemblance
avec des portions de corps des Mérostomes surtout avec
ceux de l'Eurypterus et du Pterygotus. Les êtres aux-
quels ils appartiennent pourraient représenter la forme
ancestrale des Mérostomes dont les Trilobites ne seraient
plus qu’un rejeton, ou bien ils sont la forme ancestrale
de laquelle sont descendus les Mérostomes et les Trilo-
bites considérés alors comme deux classes distinctes.
M. Walcoot a réuni ces restes dans un seul genre, le
genre Beltina. Il y a reconnu :
Des segments du corps d’un Crustacé ;
Un fragment d'un segment du corps ou du bouclier
céphalique ;
Des fragments ayant la forme de la tête d’un Eurÿ-
pterus;
Des pattes natatoires semblables à celles de plusieurs
espèces de Mérostômes actuels;
Des rameaux mobiles sans doute attachés à un appen-
dice buccal;
Des appendices avec articulations indiquées;
Des portions d’appendices fixes avec traces de dents;
Des telsons semblables à ceux des Eurypterus;
Un telson présentant une épine dorsale, etc..
Si les représentants de la faune anté-primordiale ne
sont pas nombreux et surtout bien conservés, il faut
attribuer ce fait au métamorphisme qui, en modifiant les
roches anciennes, a fait disparaitre presque complète-
ment les fossiles qu’elles renfermaient.
Néanmoins, grâce aux très intéressantes découvertes
de M. Walcott, on peut affirmer aujourd’hui qu'une
faune anté-primordiale à existé.
Et il n’est pas impossible que l'on ne trouve encore une
faune plus ancienne que la faune anté-primordiale dans
les couches servant de soubassement au Précambrien,
puisque l’on admet généralement aujourd’hui que le ter-
rain primitif est un terrain sédimentaire métamorphosé
mécaniquement et chimiquement.
G. GARDE.
MALADIES DES PRUNIERS
Depuis l’été de 1897, on a constaté, sur les pruniers d’ente
en Lot-et-Garonne, une maladie qui amène chez ces arbres une
mortalité rapide et a produit déjà de sérieux dégâts. Jusqu'ici,
LE NATURALISTE 33
le mal ne s’est pas étendu au delà de quelques localités de
l’arrondissement de Villeneuve-sur-Lot.
Les arbres atteints périssent par le sommet des jeunes
rameaux qui perdent leurs feuilles et se dessèchent progressi-
vement. On voit apparaître en même temps un écoulement
abondant de gomme qui s'échappe en général par de petites
perforations circulaires placées à la base des bourgeons. Sur
les branches plus grosses, ces perforations aboutissent à des
galeries latérales qui sont dues à un insecte Scolyte. Les
auteurs n’ont pas rencontré l’insecte, étant donné l'époque
tardive où il leur a été donné de faire leurs investigations.
Les blessures faites par les Scolytes aux pruniers sont la cause
essentielle de cette production gommeuse qui épuise les arbres
rapidement et les fait périr.
Cependant, les Scolytes ne s’attaquent qu’à des arbres dépé-
rissants et ce n'est que par exception qu'ils envahissent des
arbres sains, lorsque, par exemple, les arbres malades où ils
s'étaient installés au début sont tout à fait morts. Il est pro-
bable que ces choses se sont passées ainsi dans le cas actuel. Il y
a, de plus, des raisons de penser que dans l’Agenais, les pru-
niers se trouvent depuis assez longtemps dans un état d’affai-
blissement qui a pu favoriser l'invasion des Scolytes. Ces
causes de dépression sont en premier lieu une mise à fruit
prématurée qui affaiblit les arbres et abrège leur existence et,
en second lieu, l'influence d’une sécheresse exagérée de l'été,
pendant plusieurs années, qui a aggravé l’état déjà précaire
d’un bon nombre d’arbres.
Le traitement préconisé comporte la destruction des insectes
et l'emploi d’une méthode rationnelle de culture et d'exploita-
tion des pruniers.
La destruction des insectes devra se faire par le feu, l'action
des substances insecticides étant, dans le cas actuel, assez
incertaine. On arrachera pendant l’hiver les arbres morts ou
dépérissants atteints par les Scolytes et on les brülera sur
place de facon à détruire les larves qui se trouvent dans les
galeries et se transformeraient en insectes parfaits à la fin du
printemps. Les petites et les moyennes branches seront entiè-
rement brülées; pour les très grosses et les troncs, on pourra
se contenter de les écorcer. Les écorces seront jetées au feu
et les corps ligneux seront grillés superficiellement. On pourra
encore les utiliser.
Au point de vue cultural, on devra s’efforcer d'assurer aux
pruniers une végétation aussi active que possible en leur pro-
diguant tous les soins requis. On ne leur ménagera pas les
engrais, azotés surtout, le fumier par exemple. On évitera, par
une taille raisonnée, de pousser à une production fruitière
excessive les arbres qui présentent le moindre symptôme de
faiblesse dans leur végétation. D'un autre côté, si l’on veut
remplacer les pruniers morts, on s’abstiendra de replanter
dans le même trou, car il est facile de comprendre que sur un
sol qui à longtemps nourri un prunier, un autre prunier ne
puisse trouver en quantité suffisante les éléments fertilisants
.
indispensables à une bonne végétation.
DESCRIPTION D'UN COLÉOPTÈRE NOUVEAU
Sandalus Bourgeoisi Thery. Longueur : 16 millimètres ;
largeur : 1 millimètres.
Entièrement noir, couvert d’une fine pubescence brune. Tête
très grossièrement ponctuée et comme corrodée avec une fine
ligne lisse sur le vertex. Mandibules pubescentes sur leur pre-
mière moitié, courbées à angle droit, lisses sur l’extrémité,
légèrement creusées en gouttière, palpes développées, à dernier
article allongé, pubescentes, yeux saillants arrondis, très fine-
ment granuleux, antennes atteignant à peine le milieu du pro-
thorax, pectinées à partir du troisième article; lamelles des
antennes de plus en plus larges en allant vers l’extrémité et
très serrées les unes contre les autres.
Prothorax très rétréci en avant, très bombé, à angles anté-
rieurs droits très abaissés, entièrement rebordé sur les côtés,
avec. les angles postérieurs arrondis garnis d’un petit tuber-
cule latéral un peu avant l’angle, sillonné dans son milieu,
impressionné au bord antérieur insinué à la base avec un lobe
médian échancré, entièrement ponctué, corrodé sur le disque.
Ecusson grand, à angles arrondis avec un petit triangle lisse
élevé au milieu, le reste finement ponctué, pubescent.
Elytres plus de cinq fois aussi longs que le prothorax, ayant
leur plus grande largeur au 1/3 postérieur, brillants quoique
couverts d’une fine pubescence, arrondis à l'épaule avec le calus
huméral assez marqué, avec un gros bourrelet saillant à la base
correspondant à la naissance des trois premières côtes internes,
arrondis à l'angle sutural, relevés en gouttière au bord interne,
à suture carcinéforme, ornés chacun sur le disque de 5 grosses
côtes lisses irrégulières dont les 3 internes seules sont bien
marquées au moins à la base; à partir du 1/3 antérieur sur ces
côtes sont réunies entre elles, par de petites côtes transverses
avec les intervalles garnis de gros points et sur les bords vus
par transparence les élytres paraissent perforés.
Dessous très pubescent, hanches épaisses, saillantes, pattes
très rugueuses, tibias finement denticulés, tarses avec les
4 premiers articles très courts, le dernier très allongé, lamelles
des tarses jaunes, parcheminées.
Ho-chan Chine un exemplaire © de ma collection o* in-
connu.
Dédié à M. Bourgeois qui m'a signalé cette espèce comme
nouvelle.
Rhizotrogus tusculus var. Fargesi Thery. Cette variété diffère
du Tusculus Buq, type par le système de coloration des élytres-
Chez le tusculus les élytres sont clairs et incolores, dans la
Variété Fargesi, ils sont d’un jaune brunâtre, ornés d’une large
bande suturale d’un brun foncé, beaucoup plus large à la base
et bordée de la même couleur. Cette variété se prend fréquem-
ment à Saint-Charles, le soir, aux premières pluies d’automne
tandis que la forme typique n’y existe pas, la femelle est exces-
sivement rare. Je dédie cette intéressante variété an comman-
dant Farges, entomologiste et archéologue bien connu.
N. B. — La couleur brune envahit quelquefois la totalité du
disque de l’élytre.
THÉRY.
MINÉRAUX NOUVEAUX
La hardystonite à été trouvée dans les mines de zinc de
Franklin Furnace (New-Jersey, États-Unis) à une pro-
fondeur de 900 pieds. On sait que ces mines sont cé-
lèbres par les nombreux minéraux qu'on y a rencontrés.
Dernièrement, indépendamment .de la hardystonite
quatre autres espèces nouvelles ont été décrites par
M. Penfeld. Leur description est donnée un peu plus
loin. La hardystonite n’a pas encore été observée en cris-
taux, mais seulement en grains arrondis qui montrent
trois clivages indiquant à l’aide des propriétés optiques
que le minéral est quadratique. Elle est blanche et pos-
sède un éclat vitreux, La double réfraction est négative.
La densité est 3.397 et la dureté intermédiaire entre célle
de la calcite et celle de la fluorine.
La composition est la suivante :
SINICE ne mnt teteuts eee sossnre ne 38,10
Oxyderde Zinc He creer. 24,30
Protoxyde de manganèse.,........... 1,50
Chaussette nee HORS 33,85
MAaPRESIE Arme eme eee do de 1,62
Sesquioxyde de fer.......... D re 0,57
Perte RER een seie teen -eies 0,52
IRotals nee eee. 100,46
C’est donc surtout un silicate de chaux et de zinc dans
lequel du zinc et du calcium sont remplacés respective-
ment en petite quantité par du manganèse et de la ma-
gnésie.
La hardystonite a été décrite par M. Wolff.
MM. $S. L. Penfield et G. H. Warren ont donné la des-
cription des quatre espèces minérales suivantes trouvées
aussi dans les mines de Franklin.
La hancockile est en masses compactes, de couleur
brunâtre ; cependant on a trouvé quelques petits cristaux,
34 LE NATURALISTE
ayant un demi millimètre de long sur un sixième de
large. Ces derniers sont associés au grenat, à l’asinite,
àla phlogopite, etc. Ils sont striés parallèlement à leur
longueur et ressemblent à des cristaux d’épidote. La res-
semblance cristallographique est très grande entre les
deux minéraux. Ils sont l’un et l’autre monocliniques et
leurs cristaux ont des angles assez voisins.
L'éclat de la hancockite est vitreux et la dureté est de
6,5 à 7. La densité est de 4,03.
La composition est très complexe, elle est voisine de
celle de la variété de l’épidote manganésifère qu’on ap-
pelle piémontite, mais une partie de la chaux est rem-
placée par de la strontiane et de l’oxyde de plomb. Une
analyse a donné 30,99 de silice, 17,89 d'alumine, 12,30 de
sesquioxyde de fer, 1,38 de sesquioxyde de manganèse,
18,47 de plomb, 2,12 de protoxyde de manganèse, 0,52 de
magnésie, 11,50 de chaux, 3,89 de strontiane, 1,62 d’eau :
Total : 100,77. I1 faut remarquer que la quantité d'eau
1,62 n’y est pas à l'état d’eau d'hydratation, mais à l'état
de protoxyle (HO).
Au chalumeau la hancockite fond en se boursouflant
et donne un globule légèrement magnétique. Avec le car-
bonate de soude on obtient sur le charbon la réaction du
plomb. Insoluble dans l’acide chlorhydrique.
La Glaucochroïite appartient à la famille du péridot.
Elle est en cristaux prismatiques et en agrégats dans une
gangue blanche qui est de la nasonite (voir plus loin la
description de ce nouveau minéral), Les cristaux isolés
atteignent au maximum, deux millimètres de longueur
tandis que les cristaux agrégés peuvent avoir un centi-
mètre. Leur dureté est voisine de celle de l’olivine, la
cassure est conchoidale et l'éclat vitreux. La couleur est
celle de l’algue-marine. La densité est de 3,407.
L'analyse a donné les résultats suivants :
SUICE Nec Re to ee core te 31,48
Protoxyde de manganèse........... SP REfS
Ghaus is nome se ne Stoie rite 28,95
Oxÿdexde plomb -e."-""1e0r ere 1,74
Totale en nere 100,17
L’oxyde de plomb étant laissé de côté on en déduit la
formule CaMnSiO. Le minéral qui se rapproche le plus
de la hancockite est la monticellite, péridot qui est un
silicate de chaux et de magnésie, Dans le premier miné-
ral la magnésie est remplacée par du manganèse.
La nasonite est massive, de couleur blanche, et à éclat
gras. Hxaminée au microscope, elle parait formée de
petites lames cristallines appartenant probablement au
système quadratique, La densité est 5,425 et la dureté
égale à celle de la fluorine. C’est un chloro-silicate de
chaux et de plomb contenant 18,5 0/0 de silice, 66 d’oxyde
de plomb, 11, de chaux et 2,80 de chlore. Il est voisin de
la ganomalite, minéral trouvé par A. E. Nordenskiold, à
Jacobsberg et à Langban en Suède.
La nasonite fond très facilement au chalumeau en don-
nant un globule semi-transparent. Il est soluble dans
l'acide chlorhydrique.
La leucophænicite n'a pas encore été trouvée en cris-
taux. Elle forme une masse cristalline à éclat et de cou-
leur pourpre, La dureté est intermédiaire entre celle de
l’apatite et celle du felspath orthose. Les propriétés
optiques montrent que le minéral est monoclinique ou
tichnique. Sa composition très complexe montre que la
leucophænicite est une humite manganésifère. Elle a la
composition suivante :
Silicer ns LESC EE IS D'OR ET 26,36
Protoxyde de manganèse............. 60,63
Oxyderde zinc free AAA 5,67
Chaux re SR TO 6 Cu e RASE 3,87
AlCallsr tre Se Se PE 0,63
Eau sheet arte tale detolete lie le SEA 2,64
Elle fond au chalumeau en donnant un globule noir
brunâtre. Soluble dans l’acide chlorhydrique.
GAUBERT.
CULTURE DU FIGUIER EN GRÈCE
Le figuier est cultivé dans toute la Grèce, mais principale-
ment dans certaines provinces méridionales du Péloponèse,
notamment dans la Messénie et dans la province de Calamata,
ainsi que dans quelques-unes des iles : Andros, Tinos et
l’Eubée.
En Messénie, le figuier est un arbre de quatre à cinq mètres
de hauteur qui vient aussi bien dans les terrains argileux et
calcaires que dans les sols sablonneux, et sur les collines aussi
bien que dans les vallées et les plaines.
Espèces de fiquiers. — Les différentes espèces de figuiers
cultivés en Messénie sont : le caprifiguier (figuier sauvage),
dont les fruits ne mürissent pas et ne sont pas mangeables.
Les caprifigues servent exclusivement à la caprification.
Ils se subdivisent en plusieurs catégories dont la meilleure
est la chliveria, petites figues de couleur miel foncé qui servent
à caprifier les figues des vergers.
Viennent ensuite les kokinokentria, les opsimokentria et les
aporokentria, ces dernières de qualité inférieure.
Figuiers cullivés. — Les figuiers cultivés se distingueut par
les dénominations suivantes :
Avgossikia (figuier d’œuf), dont les fruits ont la forme et la
grosseur d'un œuf et sont tantôt verdätres, tantôt violacés.
Ces figues sont les meilleures de Calamata ; elles se mangent
à l’état frais. La première catégorie est müre en mai; la
deuxième, qui est la moins bonne, mürit en août et sep-
tembre;
Kontroumbossikia, dont les fruits vert pâle se mangent aussi
à l’état frais;
Vouvalossikia, figues très grandes et de couleur jaunâtre;
Kokinossikia, figues petites, carminées ou violacées, très
douces et fort recherchées. Ces fruits sont consommés à l’état
frais; on les fait également sécher;
Livanossikia, figues blanches et vertes ;
Ormathossilia (figuier chapelet). C'est le figuier qui donne
presque exclusivement les bonnes figues sèches de Calamata si
connues dans le commerce. Ses figues grandes, de couleur
verte, une fois desséchées, deviennent or paille; elles ne
muürissent qu’en juillet ou août, sont beaucoup plus sucrées
mais moins succulentes et moins fraiches que les précédentes ;
c’est pourquoi elles se mangent à l’état sec.
La multiplication des figues se fait ordinairement en Mes-
sénie par boutures; elle se pratique également par la greffe,
sur des caprifigues, de figues naturelles de semence ou d’autres
variétés.
Cullure du fiquier. — En Messénie, le figuier est cultivé soit
séparément dans des vergers spéciaux, soit avec l’olivier, rare-
ment avec la vigne.
Les plantations se font ordinairement en octobre et en février
ou mars.
La culture annuelle du figuier se fait de la manière sui-
vante : À la fin d'octobre, après la chute des feuilles, on pro-
cède d’abord au déchaussement de l'arbre; autour de sa racine,
on creuse un bassin d'un diamètre de deux à trois mètres qui
est destiné à recevoir les eaux des pluies de l'automne. En
décembre ou janvier, on donne un labour, puis, au mois de
mars, un binage, en suivant une direction perpendiculaire à
celle du labour; et un mois après, soit en avril ou mai, un
hersage. Enfin, au mois de juillet, dans les terres sèches qui
se trouvent sur les collines au midi, quelques cultivateurs
LE NATURALISTE 39
buttent les racines afin de les préserver des rayons brülants
du soleil.
L'engrais n’abonde pas en Messénie, l'élevage du bétail ne
correspondant pas aux étendues cultivées; aussi le figuier n’en
recoit qu’une faible proportion. Cependant ceux qui sont cul-
tivés sur les collines sont fumés régulièrement afin de conserver
leur fécondité.
On n'émonde jamais le figuier; quelquefois seulement on le
débarrasse des branches, mais sans se servir de la serpe.
Fructification. — La fructification est très favorisée par le
climat. Presque tous les boutons à fruits se développent et
mürissent, au cours de l'été, mais successivement, les uns
après les autres. Les figues qui sont près de la base du bour-
geon sont les premières à mürir. Ainsi il arrive à l’ormathos-
sikia que les petites figues qui sont à l'extrémité des bour-
geons muürissent plus tard ou tombent avant de mürir complè-
ment. Cette fructification graduée s’observe surtout au capri-
figuier. Chez les variétés tardives, il arrive cependant que les
bourgeons à fruit n'arrivent pas à sortir à temps de leur état
embryonnaire avant l'hiver et, restant ainsi sur l'arbre, se
développent l’été suivant; les cicatrices des feuilles de l’année
précédente donnent alors naissance aux figues précoces ou
« figues fleurs », qui sont plus succulentes ordinairement que
celles de l'été et se prêtent moins bien au séchage.
Caprification. — La caprification est en usage dans toute la
Messénie et, ainsi qu'à Smyrne, elle y est considérée comme la
condition sine qua non de la culture du figuier. Et comme
plus des deux tiers des figues déja formées et développées
tombent de l’arbre, on applique ce procédé dans le but de
conserver et de faire muürir sur l'arbre le plus de fruits pos-
sible.
La caprification se fait en mai ou juin, dès qué le petit ori-
fice de la figue qui se trouve au centre de la partie opposée à
la base, c’est-à-dire l’œil, a commencé à laisser jaillir une
petite goutte de liquide dense. Alors, on accroche sur les
branches une sorte de chapelet formé de caprifigues enfilées
de jonc. Les caprifigues contiennent des insectes connus sous
le nom de cynips psenes qui en sortent et pénètrent dans la
figue par l'œil ouvert en y provoquant une irritation qui fait
attirer vers le fruit une plus grande quantité de sève. L’œil
alors se ferme petit à petit et le fruit grossit. Le danger de la
chute est ainsi écarté et un mois après la figue est müre.
La caprification n’aboutit pas si elle est faite trop tôt, quand
l’œil est encore trop serré, ou trop tard, quand il est trop
ouvert et que l4 chute de la figue est proche et imminente. Or,
comme les figues, aussi bien que les caprifiques, ne mürissent
pas en même temps, on se trouve obligé de répéter cette opé-
ration au moins trois fois afin que toutes les figues puissent
en bénéficier. Les caprifigues récemment recueillies sont con-
sidérées comme les plus efficaces, car elles contiennent encore
tous leurs insectes.
Lorsque les caprifigues sont trop chères et que la caprifica-
tion devient alors l’opération la plus coûteuse de la culture de
la figue, les cultivateurs, pour obvier à cet inconvénient,
plantent dans les vergers mêmes, et, à côté des figuiers, des
caprifiguiers d'espèces analogues pour que la caprification se
fasse d'elle-même.
Exportation. — Pendant les années 1892, 1893, 1894, 1895,
1896 et 1897 ont été exportés de Grèce 84.473.000 kilogrammes
de figues représentant une valeur totale de 16.197.000 francs,
donnant ainsi une moyenne annuelle de 1%40718.927 kilo-
grammes d’une valeur de 2.139.608 francs, soit 0 fr. 20 le kilo-
gramme.
CHRONIQUE
Nouvelle maladie de la betterave à sucre,
— Une nouvelle maladie de la betterave à sucre vient
d'être signalèe dans les environs d'Hidelsheim et de
Brunswick, dans une des régions de l'Allemagne où la
culture de cette plante a le plus d'importance.
La maladie s'attaque à la racine de la plante. Les
feuillles conservent leur apparence normale et il est im-
possible, à première vue, de distinguer les plantes at-
teintes; le siège de la maladie réside dans le tissu épider-
mique; la couche génératrice se trouve détruite et la
croissance est arrêtée aux points attaqués. La désorga-
nisation des tissus se localise en général sur une portion
annulaire s'étendant plus ou moins régulièrement sur
une partie ou sur la totalité du pourtour de la racine
dans sa région moyenne. Au-dessous et au-dessus de
cette bande, la racine continue à croître et présente par
suite un étranglement plus ou moins prononcé.
La cause de la maladie est encore inconnue: une
étude des tissus atteints a révélé la présence d’orga-
nismes divers : moisissures, bactéries, anguillules. Jus-
qu'ici il a été impossible de préciser le rôle de ces divers
agents dans la décomposition des tissus, il se pourrait
d’ailleurs que leur présence ne fût qu'une conséquence
de l’état pathologique de la racine. ;
Les germes de la maladie se conservent dans le sol et
la propagent d'une année à l’autre. On ne connait encore
aucun moyen d'arrêter les ravages causés par ce nou-
veau fléau.
Captures de Lépidoptères en France. —
M. G.-A. Poujade signale à la Société entomologique de
France, la capture des Lépidoptères (Noctuélides) sui-
vants, venus aux lumières électriques de la gare de
Chantilly :
Tapinostola Bondii Knaggs (le 5 juin 1899). Cette espèce
paraît n'avoir pas encore été prise en France ; elle est
signalée du sud de l'Angleterre et de la Grèce centrale
par Staudinger.
Hydrilla gluteosa Tr. (9 juillet 1899). Signalée du Va-
lais, de la Hongrie et de l'Ural, cette espèce a été prise
une seule fois dans Paris par M. P. Mabille.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 8janvier 1899,
— Un tremblement de terre a été ressenti le 20 dé-
cembre dernier à Francefort-sur-Meiïm. La secousse,
assez forte, s'est produite entre 8 h. 30 et 9 heures du matin à
Mayencé et à Francfort ainsi que dans différentes localités de
la province de Hesse-Rhénane et principalement à Woisenau,
Laubenheim et Bodenheim. A Grossgeran, Bischofsteim,
Konigsstälten et Ruffelsteim, la secousse a duré environ deux
secondes; sa violence a été telle que beaucoup d’habitants sont
sortis précipitamment de leurs maisons. Plusieurs toitures et
murailles ont été endommagées. La secousse ne s’est produite
que vers 8 h. 45 dans le sens vertical, à Barnheïm, faubourg de
Francfort, et n'a été remarquée que par quelques personnes
qui ont cru à un affaissement de terrain, accompagné d'une
sorte de crépitement. On n’a signalé aucun dégât.
Séance du 15 janvier 1900.
M. Pompilian communique les résultats de ses recherches
sur l’'automatisme des cellules nerveuses. L'auteur s'est
posé la question de savoir si l’activité des cellules nerveuses
36 LE NATURALISTE
est automatique ou réflexe; de l'ensemble de ses recherches
M, Pompilian croit pouvoir tirer les conclusions suivantes :
« 4° Les cellules nerveuses, du fait même qu'elles vivent et
qu’elles se nourrissent, dégagent constamment de l'énergie
nerveuse sans qu'il soit nécessaire pour cela qu’une excitation
du dehors vienne ébranler leur équilibre chimique. L'activité
nerveuse est donc automatique.
«2% L’activité nerveuse automatique varie d'intensité d'un
moment à l'autre.
«30 Les centres nerveux supérieurs exercent normalement une
influence inhibitrice sur les centres inférieurs; l’activité de ces
derniers centres se manifeste nettement après la destruction
des premiers.
«49 Il semble que, en pathologie, des faits comme les trem-
blements et les convulsions pourraient être expliqués, d'une
part, par une diminution du pouvoir inhibiteur exercé par les
centres supérieurs. cérébraux sur les centres inférieurs médul-
laires; d’autre part, par une augmentation de l’activité de ces
derniers centres. » :
M. Bleicher, professeur à l'Ecole de pharmacie de Nancy,
adresse une note sur la dénudation du plateau central de
Haye ou Forêt de Haye en Meurthe-et-Moselle. Sous le
nom de pays de Haye, on comprend une partie de la bande
calcaire oolithique couverte généralement de grandes forêts
qui borde la lisière orientale du bassin de Paris dans la région
de Nancy, et au sud comme au nord de cette ville. Le plateau
central de Haye se compose d’un soubassement marneux et fer-
rugineux appartenant au Toarcien, surmonté d’un puissant
massif de calcaire oolithique. Le bathonien remplace vers
l’ouest le bajocien, constituant ce massif oolithique; on y cons-
tate de nombreuses fissures qui renferment des blocs de fos-
siles, les uns du bathonien, les autres de l’oxfordien, d’autres
encore du corallien. Ces fossiles n'étant pas roulés, on ne peut
émettre l'hypothèse du transport de ces matériaux. Les coteaux
étant à 150 mètres au-dessus des thalwegs de la Meurthe et
de la Moselle, il a dû y avoir de grands enlèvements de roches.
On peut donc concevoir le plateau central de Haye surélevé
de 200 mètres, au minimum de toute l'épaisseur des étages
bathonien, callonien, oxfordien et corallien, et rien ne prouve
qu'il ne faille pas, plus tard, ajouter à cette liste les étages
jurassiques supérieurs. Cette épaisseur est calculée d’après les
affleurements de ces terrains aux environs de Toul et commu-
niquant directement par un plan fortement incliné avec les
Vosges, alors bien plus élevées qu'aujourd'hui. A la surface de
ce plan incliné coulaient les fleuves aux noms inconnus, qui
ont charrié les éléments arrachés aux Vosges, et, peu à peu,
aidés des mouvements dynamiques dont nous retrouvons les
traces, de la nature meuble du sol, des circonstances atmos-
phériques, ont sillonné, creusé, démantelé, à travers les âges
tertiaires, peut-être même crétacés, la couverture du plateau.
— M. le commandant Flick a étudié avec beaucoup de détails
le Priabonien, Eocène supérieur de la région de Kaïi-
rouan (lumisie). Il existe à la partie supérieure de l'Eocène
des assises à Echinolampas Perrieri. La présence de ces
assises à été constatée par l’auteur sur un certain nombre de
points nouveaux : dans la chaîne du Batène, au nord de
l'Oued-Bogal, dans la chaîne des Somaties. Mais c’est surtout
dans le Batène que les couches prennent un développement
remarquable. Le Priabonien constitue les couches supérieures
du dôme allongé qui forme le massif du Batène-el-Guern. Ce
dôme, qui a été arasé vers le nord, montre sur ce point, deux
bandes d’Eocène supérieur, entre lesquelles aflleurent les cal-
Caires de l’Eocène inférieur et moyen; ces deux bandes se réu-
missent vers le sud. Sur les flancs est et ouest du dôme, les
assises priaboniennes forment une série de synclinaux et
d’autres clinaux secondaires importants.
Séance du 22 janvier 1900,
— M. Péron a été nommé membre correspondant de l’Aca-
démie pour la section de minéralogie.
— MM. C. Bruyant et A. Euscbio ont fait des. recherches
sur Ja faune halophite de l'Auvergne. On a signalé
depuis longtemps déjà l’existence de plantes maritimes au bord
de certaines sources de l'Auvergne; le frère Héribaud a donné
l'état de cette florule à ce jour. Les auteurs ont recherché si,
dans le domaine zoologique, il n’existerait pas une localisation
analogue. A côté des formes ubiquistes, qui se rencontrent
sur les terrains salés comme ailleurs, il à étè recueilli les
espèces caractéristiques suivantes, les unes terrestres, les
autres aquatiques, Amara erythrocnemis, Pogonus halophilus,
Philydrus halophilus, Bledius spectabilis, Cyclonotum hispa-
nicun. Cette faunule paraît, jusqu'à ce jour, assez pauvre,
mais il faut remarquer que le champ de développement des
espèces halophiles, est en réalité, très restreint. Quoi qu’il en
soit, les auteurs peuvent affirmer, dès maintenant, qu'il existe
en regard de la florule halophile, une faunule halophile, bien
délimitée et caractéristique de nos eaux minérales.
— M. Camille Brunotte fait part de see observations sur les
téguments séminaux de quelques espèces du genre
Impatiens. [l à été démontré que les graines de ces plantes
sont différemment constituées chez des espèces voisines et
l'auteur a recherché si, dans les téguments qui enveloppent
l'embryon, il existait ou non, une similitude de structure. Il
existe une grande variabilité de structure dans les téguments
séminaux à la maturité, non seulement dans les graines de
plantes appartenant à une même famille, mais chez des plantes
d'un même genre et d’espèces très voisines. Il est vrai que
cette variabilité, en ce qui concerne les espèces de Balsamines
étudiées, porte surtout sur les régions externes, qui, seules,
paraissent subir des modifications dues à une adaptation spé-
ciale. L'écrasement, à la maturité de la graine, du tégument
interne, parait être un fait constant ainsi que la présence des
raphides et du mucilage, si abondant d’ailleurs dans tous les
tissus de l’appareil végétatif des Basalminées.
— M. Leclère, qui vient d'accomplir, au Tonkin et dans la
Chine méridionale, une mission de 18 mois, a pu effectuer une
exploration géologique d'environ 6.000 kilomètres de la
Chine méridionale. La série des formations sédimentaires
comprend: 1° le système archéen avec schistes, quartzites et
phyllades, le tout souvent granitisé; 20 le système dévonien, peu
développé; 3° une formation calcaire d'une immense étendue,
contenant à sa base un horizon du Dévonien supérieur, puis des
grès et schistes avec houille, et ensuite des horizons nettement
carbonifériens, permiens et même triasiques ; 4° un trias propre-
mentdit, composé d’argiles et de grès bariolés, salifères et gyp-
sifères, avec cargneules ; 5° l'étage rhétien du Tonkin,surmonté
par un calcaire dolomitique ; 6° les bassins lacustres miocènes
et quaternaires.
— M. Zoiller a étudié, les plantes fossiles de la Chine
méridionale rapportées par M. Leclère lors de son explora-
tion. La Chine renferme de nombreux gites de charbon, d’im-
portance inégale, appartenant les uns au terrain houiller, les
autres à la portioninférieure ou moyenne du terrain juras-
sique. La plupart des gîtes sur lesquels des empreintes ont pu
être récoltées, appartiennent à l’époque secondaire.
— M. W. Kilian indique la structure de la portion
méridionale de la zone du Briançonnais. La zone du
Briänçonnais peut être considérée comme l’axe d’un massifcentral
en éventail composé, encore pourvu de sa couverture sédimen-
taire ; les accidents latéraux du Briançonnais, des environs de
Guellestred, de la zone du flysch sont du même ordre que ceux
que MM. Bertrand et Rether ont fait connaître sur le bord
oriental du massif du Mont-Blanc et dans la partie voisine des
Alpes calcaires de Savoie; ils représentent simplement un
stade moins avancé de l’érosion à laquelle leur plus grande
surrection a prématurément exposé les éventails asymétriques
du Mont-Blanc et du Celneuf, ainsi que dans le massif du
Gothard, la continuation vers le nord-est de cette même zone
du Brianconnais.
— M. CI. Gaillard a découvert un Nouveau rongeur
miocène. Ce rongeur à été trouvé dans les inépuisables gise-
ments miocènes de la Grève-Saint-Alban. Cette espèce est un
Muridié qui appartient, par l’ensemble de son crâne, à la fois, à
la famille des sigmodontinés ou cricétinés: mais sa dentition
est très particulière et ne permet de le rattacher à aucun des
genres connus. L'auteur nomme ce nouveau fossile Anoma-
lomys Gaudrous.
P. Fucus,
|
LE NATURALISTE 57
LA CULTURE DU RIZ AU SIAM
Les grandes vallées des provinces méridionales et cô-
tières du royaume, inondées à certaines époques de l’an-
née par les innombrablee cours d’eau et canaux qui les
sillonnent, sont éminemment propres à la culture du riz
qui est la principale richesse du pays.
La plantation du riz exige peu de frais et des travaux
peu considérables, Les semailles se font de juin à oc-
tobre. Le riz se sème généralement à la volée dans des
petits espaces de terrains ayant la forme d’une cuvette
rectangulaire, Quand il a atteint la hauteur d’un pied, on
l'arrache et on le repique dans les rizières préparées. par
des labourages et des hersages, puis couvertes d’une
couche d’eau d’une épaisseur de quelques pouces.
Chaque tige est replantée à la main et, dans l’espace
de quelques centimétres qui entoure chacune d’elle et qui
la sépare de sa voisine, la terre est foulée aux pieds. Un
bon ouvrier plante ainsi dans sa journée un tiers d'acre(1)
de rizière.
Quelquefois le riz est semé directement dans la rizière
et ne subit pas l'opération du repiquage; mais alors il
est semé d’une facon plus régulière.
Si les pluies et le soleil arrivent à temps pour faire
germer la graine, la récolte peut se faire en octobre, no-
vembre on même décembre,
Dans certaines provinces, on fait deux récoltes : une
‘ en octobre et l’autre en janvier ou en février.
Quand l’époque de la moisson est arrivée, les hommes,
les femmes et les enfants envahisssnt les champs, cou-
pent une à une les tiges de riz qu'ils réunissent en bottes
et qu'ils lient. Si l’eau est encore stagnante dans la ri-
zière, les moissonneurs n'hésitent pas à s’enfoncer dans
l’eau et dans la vase : quelquefois ils sont même obligés
de se servir de barques ; les épis sont alors ramassés à
pleines mains et jetés en tas dans des corbeilles.
Le battage du riz rappelle beaucoup celui des blés, tel
qu’il se faisait autrefois dans nos campagnes ; le sol est
préparé de la même façon, on rase l'herbe qui le couvre,
on aplanit le terrain, on le mouille et on y répand une
couche d’un enduit fait avec de la bouse de vache et de
l’eau. Un piquet est planté au centre de cette aire et tout
autour on dispose les gerbes de riz; des bœufs ou des
buffies accouplés passent et repassent sur ces gerbes,
les piétinent pendant plusieurs heures jusqu’à ce que le
grain soit bien séparé de l’épi.
Le vannage du riz est également une opération des
plus-simples : on place le grain dans des corbeilles en
osier peu profondes dont on se sert comme de vans; le
paddy vanné est déposé dans de grandes bâches en van-
nerie recouvertes extérieurement d’une couche de vase
et sur la partie supérieure d’un couvercle en feuilles.
Le paddy est utilisé sur place ou vendu et transporté
par eau jusqu'à Bangkok. Dans le premier cas les
femmes font subir au grain une transformation qui con-
siste à écraser dans un mortier le paddy jusqu’à ce que la
graine soit séparée de l'enveloppe brune qui la recouvre.
Dans le second cas le paddy est décortiqué dans les
moulins de Bangkok.
Le rendement moyen du riz par hectare peut être éva-
lué à 3,000 kilogr,
Quant à la production totale, ellé est des plus variables
(1) L'acre vaut 40 ares 4.671.
et assez difficile à déterminer. Toutefois, en prenant pour
base le chiffre des exportations, on peut, en le doublant,
avoir approximativement celui de la production.
EXPORTATION PRODUCTION TOTALE
AO Le RATER ONE 489.124 tonnes 970.000 tonnes
ABB dec amiene 463.587 — 926.000 —
ATARI 454.193: — 908.000 —
INR OR EL TA OR DONS 130000 — 1.104.000 —
SDS ER nm be nt DADL SEL: — 1.030.000 —
Le prix du riz à une tendance à augmenter chaque
année; en 1894, il était de 93 fr. la tonne: en 1895 il
avait baissé jusqu'à 85 fr.; mais en 1896 il a atteint
120 fr. et l’année dernière 130 fr.
Ces prix payés aux exportateurs par les places étran-
gères, ne sont pas de beaucoup supérieurs à ceux del'in-
térieur sur le marché de Bangkok,
LIVRES NOUVEAUX
La nature tropicale, par J. CoNSTANTIN, maître de con-
férences à l’Ecole normale supérieure. 4 vol. in-80 de la
Bibliothèque scientifique internalionale, cart. à l'anglaise,
6 francs. Franco, 6 fr. 65.
L'importance sans cesse croissante des questions colo-
niales vient ajouter un véritable intérêt d'actualité à l'intérêt
scientifique du livre curieux que publie M. Constantin dans la
Bibliothèque scientifique internationale dirigée par M. Em. Al-
glave. L’auteur nous révèle les secrets de la végétation puis-
sante des forêts vierges, si différentes des petits bois de nos
climats, et surtout les associations de vie qui s’établissent entre
les plantes les plus différentes. Comme dans les sociétés hu-
maines, on y voit toutes les formes de la charité, du parasi-
tisme et de la solidarité. L'ouvrage se termine par l'étude scien-
tifique des légendes sur le déluge qui existent dans toutes les
religions, et il montre à quels phénomènes réels on peut les
rattacher.
Memorandum de Zoologia par CarLos E. PoRTER, direc-
teur du Musée d'Histoire Naturelle de Valparaiso (Chili).
Les traités de Zoologie en langue espagnole sont assez peu
nombreux pour que nous signalions celui-ci qui se recom-
mande par sa valeur scientifique. I1 est publié sous forme de
tableaux synoptiques, faciles à lire pour les naturalistes de
toutes les nations. L’auteur a cherché à résumer en quelques
pages et à rendre accessibles à tous les grands traités de Zoo-
logie de Perrier, Delage, Lang et d’autres, sans oublier les
applications médicales qui s’adressent plus spécialement aux
étudiants en médecine. La disposition typographique des
tableaux est très claire et les planches qui les accompagnent
facilitent singulièrement la compréhension des caractères de
chaque groupe.
Ce petit manuel (qui n’est que le prodrome d'un Cours élé-
mentaire de Zoologie en préparation), sera publié par livrai-
sons de 24 pages in-8° accompagnées chacune d'une ou deux
planches contenant un grand nombre de figures dessinées par
l’auteur. Les livraisons paraissent toutes les trois semaines au
prix de 0 fr. 60 chaque, et l'ouvrage sera terminé en 14 livrai-
sons, dont la dernière, contenant un index méthodique et un
index alphabétique, paraîtra en juillet 1900. Nous avons sous
les yeux les deux premières livraisons qui sont bien au courant
de la science et ne laissent rien à désirer sous le rapport typo-
graphique, aussi bien pour le texte que pour les planches.
Le Gérant: PAUL GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, {1.
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CI-APRES DÉSIGNÉS
(Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
S'ADRESSER A
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vitis.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata.
Agrilus cCyanescens.
— tenus.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— laricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
- — Jlentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulse.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— craccæ.
— vici®.
— flavipes.
— flayofemoratum.
— pisi:
— æneum.
— tenue.
— vOorax.
— violaceum.
— hæmatodes.
— ‘pomone.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— .,lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
— Jigustici.
LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes,
RUE
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Authonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— älnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaru!s.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arictis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberca linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica oleracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Xévroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hymènoptères.
Vespa crabrc.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopœus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossularicæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbice.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apitorme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicee.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheinatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— Cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivoreila.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor,
DU BAC, 46, PARIS
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
— viridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa.
Aphis rosæ.
— cercalis.
— fabæ.
— pruni.
— ‘persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
tilise.
—. salicis.
— persiceæ.
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora. :
— hmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Uecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
—. brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Sunulium orn. 4m.
— maculatum.
— xeptans.
Bibio Marci.
— hortulanus.
Tabanus bovinus.
Hææmatopota pluvialis.
Œstrus equi. :
- — hæmorrhoïdalis..
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
—. ‘brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus oleæ.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
29 ANNÉE.
IMITATION EXPÉRIMENTALE
DES
CHEMINÉES DE FÉES
La pluie, par le seul fait de sa chute, détermine sur le
sol un travail qui se traduit souvent par la désagrégation
des roches et par le déplacement des particules détachées.
C’est ainsi que, sur certaines substances de consistance
convenable, chaque goutte laisse une dépression dont la
forme permet d'évaluer avec beaucoup de précision la
somme d'énergie d’où elle résulte.
Le contre-moulage de pareilles empreintes se rencontre
à divers niveaux géologiques et leur découverte continue
à nous éclairer sur les conditions météorologiques des
époques passées; on sait que ces accidents peuvent être
Fig. 1. — Expérience prouvant la repro-
duction artificielle des cheminées de fées.
très aisément reproduits par l'expérience, Déjà, en 1802,
Marcel de Serres mettait sous les yeux de l’Académie des
sciences un morceau d'argile sur lequel il avait produit
des empremtes semblables à celles de la nature au moyen
d’une pluie artificielle.
J'aiexposé, dans la collection de Géologie expérimen-
tale du Muséum d'histoire naturelle, des spécimens
obtenus de la même manière et, en les préparant, j'ai
été amené à préciser les causes de déformations fré-
quentes de gouttes de pluie géologiques. 1
Il est facile de constater, en effet, que dans les cas les
plus fréquents, ces déformations tiennent à l’obliquité
avec laquelle les petites sphérules d’eau sont venues frapper
la matière plastique. Desgouttes envoyées obliquement à
l'aide de la carafe à laver les précipités, qui porte dans
les laboratoires le nom de pissette, donnent des effets
tout semblables quand on les lance convenablement à la
surface d’une argile peu Consistante.
La conclusion, c'est que les empreintes elliptiques re-
cueillies dans les couches de divers âges représentent au
propre des coups de vent géologiques et font partie d’une
véritable météorologie fossile.
Le Naluralisle, 46, rue du Bac, Paris.
de SÉRIE — N° 3 À À
15 FÉVRIER 1900
Mais le point sur lequel je me propose surtout d’ap-
peler aujourd'hui l'attention des lecteurs du Naturaliste
concerne une série d'expériences disposées spécialement
pour étudier la faculté de transport des eaux pluviaires,
c'est-à-dire tombant sur le sol, et abstraction faite de ce
qui peut avoir rapport avec leur ruissellement sous la
forme d'eaux sauvages.
Pour le réaliser, j'ai fait usage d’une pomme d'arro-
soir, toute pareille à celle que les jardiniers mettent en
œuvre et qui était rattachée à un robinet à eau par un
caoutchouc, comme le montre la figure 1 Joimte à cet
article.
Lorsqu'on fait tomber de cette façon une pluie factice
sur un mélange de particules différentes les unes des
autres par la taille, par la forme ou par le poids, on voit
tout de suite que chaque catégorie en éprouve des effets
différents. Les-petits grains légers sont emportés les pre-
miers et les plus lourds résistent le mieux. Les éclats
rocheux plats disposés horizontalement jouent le rôle de”
. — Résultat de l'expérience prouvant la reproduction artificielle des
cheminées de fées. 1/2 de la grandeur naturelle.
parapluie et se constituent très rapidement à l'état de
chapiteaux, de petits pilastres ayant avec les « chemi-
nées de fées » des analogies de forme les plus com-
plètes.
En mélangeant d’une certaine quantité de plâtre en
poudre la matière caillouteuse sur laquelle on opère, on
obtient des spécimens qui se conservent facilement, On
en verra de ce genre dans la collection de géologie expé-
rimentale exposée au Muséum d'histoire naturelle : ils
ressemblent à des miniatures des accidents naturels et
c'est ce que montre notre figure 2? qui reproduit l'un
d’entre eux.
Leur étude, qui pourrait sembler superflue à cause de
la simplicité de leur mode de production, a un grand
intérêt au point de vue de l’idée qu’il convient de se faire
du mécanisme de la dénudation subaérienne, et par
une conséquence nécessaire de celui du creusement des
vallées. C’est à ce point de vue surtout qu'il convient de
constater que les cheminées de fées ne peuvent résulter
que de pluies peu écartées de la verticale et qu'elles ne
peuvent subsister que là où les eaux de ruissellement ne
sont pas trop abondantes. Le moindre courant transversa
40 LE NATURALISTE
d’eau les désagrège et les détruit : leur présence sur les
flancs d’une série de vallons dans les pays de mon-
tagnes comme à Saint-Gervais de la Haute-Savoie, à
Ritton près de Bautzen, sur le Finisterbach; aux Ftats-
Unis, sur le Zuni-Plateau (Nouveau-Mexique), où
M. Dutton les a étudiés (1), montre avec évidence que,
contrairement à l'opinion émise si souvent, les vallées
ne sont pas l’œuvre de torrents ou de forts courants
d’eau. Elles sont le produit d’une sorte de ciselure très
délicate de la surface du sol par des eaux incapables de
transport horizontal de masses un peu considérables,
et l'on voit de tous les côtés les conséquences impor-
tantes de ces conclusions de l'expérience.
Dans un semblable cas, l'utilité de l’expérimentation
apparaît par la précision jetée sur les conditions du phé-
nomène. Tout ce qui concerne la constitution du terrain
désagrégeable est désormais défini et surtout ce qui a
trait à la forme la plus favorable du sol. Sur une sur-
face horizontale ou presque horizontale, l'effet est nul à
cause du séjour de l’eau au pied des pilastres de terre ;
sur un terrain trop incliné, les pyramides ne peuvent
persister à cause de la grande vitesse des filets d’eau
sauvage. Il faut un terme moyen et la pente d’éboulement
de matériaux meubles, de 35° à 400, parait la meilleure.
Il résulte de là aussi la notion d'une période, dans le
creusement des vallées, où la production des piliers de
terre peut se déclarer et que, par conséquent, elle carac-
térise.
C’est pour cette raison qne,dans la plupart des cas, on
ne constitue pas de cheminées de fées pour l'arrosage
d’un sol hétérogène. $i les blocs contenus ne sont pas
plats et si la pluie se fait obliquement, ou si (ce qui est
très fréquent) le sol n’a pas la cohésion nécessaire, les
blocs sont déchaussés et ils descendent verticalement
pendant que les particules fines sont tout doucement
emportées par les eaux de ruissellement.
Il suffit, comme je l'ai fait, de suivre pas à pas les
effets de cette sorte de lavage vertical, pour en voir
jailür l'explication d’une foule de phénomènes qui ont
souvent été mal compris et, par exemple, celle de la
présence de certains blocs rocheux, parfois très volumi-
neux, sur un terrain qui Contraste avec eux à tous les
points de vue.
On en a eu récemment un très remarquable exemple
dans Paris même, par la découverte, dans le pluvium de
la rue Lacépède, de gros blocs de grès faciles à identifier
avec la pierre à paver exploitée à Orsay et à Fontaine-
bleau, et qui dépend des formations pliocènes.
M.le D'Capitan en a donné un beau spécimen au
Muséum. L'étude des lieux, éclairée par les notions que
nous venons d'acquérir, démontre que ces blocs, durant
les progrès de la dénudation pluviaire, ont dù descendre
verticalement de 75 mètres environ, correspondant à
l’ablation lente et très progressive de toute la formation
des sables supérieurs, puis de celles de masses de ter-
rain de gypse, du travertin de Saint-Ouen et d’une
partie des sables moyens.
Stanislas MEUNIER.
(1) Sixth annuul Report of the geological Survey of United
States, p. 152 et suiv., 1884-1885.
ne,
nn
Les Glaréoles
MŒURS — CHASSE — UTILITÉ
Les Glaréoles sont des oiseaux assez singuliers, des
échassiers à ailes longues et à queue fourchue, dont les
formes rappellent beaucoup celles des hirondelles, Aussi
comprend-on qu’on ait pu les ranger autrefois parmi
celles-ci (1), et leur donner, en quelques pays, le nom
d'hirondelles de marais. On les a appelées dans d’autres, il
est vrai, poules des sables et perdrix de mer.
Cette divergence de l'opinion vulgaire à l'égard des
Glaréoles a eu, en quelque sorte, une répercussion dans
les méthodes. Tout en les considérant, à juste titre,
comme des échassiers, les naturalistes ont beaucoup
varié sur le rang qu'on doit leur assigner. G. Cuvier les
regardait comme « un genre diflicile à associer à d'au-
tres ». Brisson, Linné, Latham, Vieillot, Temminck,
Latreille, Lesson, Meyer et Wolf, le prince Bonaparte,
Nordmann, et j'en passe, leur ont attribué chacun une
place différente, Un aussi grand désaccord démontre
suffisamment le peu de précision qu'offrent les affinités
naturelles des Glaréoles et leur droit à former dans
l'ordre des échassiers un type à part. Peut-être pourrait-
on, cependant, comme l’a fait Schelegel, les rapprocher
des outardes et les ranger entre les courvites et les Ͼdi-
cnèmes,les Glaréoles paraissent avoir avec les coureurs
à bec largement fendu plus de rapports qu'avec les autres
échassiers (2).
Ce genre ne renferme qu’un petit nombre d'espèces
qui appartiennent aux contrées méridionales de l’ancien
monde, Deux comptent parmi les oiseaux d'Europe :
la Glaréole pratincole (Glareola pratincola) et la Glaréole
mélanoptère (Glareola melanoptera).
La Glaréole pratincole ou Glaréole à collier est un
charmant oiseau au dos d’un gris brun, à la poitrine et
au ventre blancs. La gorge d'un jaune roussâtre est
entourée d’un cercle noir qui prend naissance de chaque
côté, à la paupière inférieure et descend au-devant du
cou en forme de collier. Les rémiges et les rectrices ont
l'extrémité noire. La tête est d’un gris brun, le bec noir
avec la base et le bord libre des paupières rouges de
corail. L’œil et les pieds sont d’un brun foncé.
La Glaréole mélanoptère ressemble beaucoup à sa
congénère et porte comme elle un collier noir, mais la
tête a plus de cendré et de roux et des lorums noirs. Le
bord libre des paupières est aussi noir et le bec de même
couleur passe au jaunâtre en dessous à la base et aux
commissures.
Cette dernière espèce habite la Russie méridionale,
l'Asie Mineure, l’Arabie, et fait des apparitions en
Grèce. (ae
(1) Ces oiseaux sont bien caractérisés par un bec très court,
convexe, à mandibule supérieure courbée, plus large que haut
à la base et largement fendu jusqu’au-dessous des yeux. Les
ailes sont étroites, très longues, dépassant de beaucoup la
queue qui est fourchue, les tarses médiocrement allongés,
minces, finement réticulés sur le côté de l'articulation tibio-
tarsienne, scutellés sur le reste de leur étendue, les doigts
grèles, les ongles longs, comprimés, le médium pectiné sur son
bord interne. Le plumage ne varie point comme coloration
chez les adultes, les jeunes ont une livrée qui les distingue.
(2) Les Animaux vertébrés de l'arrondissement d'Abbeville
in Mémoires de la Société d’émulation d'Abbeville (4860), p. 321.
LE NATURALISTE A
Je ne dirai rien de la Glaréole mélanoptère que je ne
connais que pour avoir vu ses dépouilles dans les vi-
trines des musées. On m'a assuré qu'on l'avait tuée en
France, mais je ne possède aucune donnée précise qui
me permette d'affirmer l'exactitude de cette assertion.
J'ai rencontré, au contraire, assez fréquemment la
Glaréole pratincole sur les plages sablonneuses de la
Méditerranée. Elle y arrive au printemps en petites
troupes d’une vingtaine d'individus et repart vers la fin
de l’été. Dans le département de l'Aude, on voit appa-
raitre ces oiseaux sur les côtes maritimes au milieu
d'avril, ils y passent la belle saison, nichent et s'en vont
à la fin de juillet ou au commencement d'août. Dans
l'Hérault, ils arrivent aussi vers le 45 avril pour partir à
la fin de juillet, Il en est de même dans les Pyrénées-
Orientales où les Glaréoles s’établissent dans les sables
des grèves et s’y reproduisent régulièrement. Le long des
côtes du département du Gard, bordées de collines mou-
vantes, d’étangs et de marais salants, on a souvent l’oc-
casion de rencontrer des bandes de Glaréoles et d'en
trouver les œufs. On en voit presque toutes les années
dans les plaines de la Provence, et quelques couples
nichent dans les parties voisines du littoral.
Les Glaréoles ne se montrent qu'accidentellement dans
les autres régions de la France. On les a signalées jusque
dans nos départements septentrionaux. M. Marcotte fait
figurer la Glaréole pratincole dans son Catalogue des oi-
seaux de l'arrondissement d'Abbeville (1), affirmant son
passage irrégulier sur les côtes de Picardie. Il y a-quel-
ques années, j'ai vu tuer un individu isolé dans les dunes
de la baie de Somme, mais c’est un fait extrêmement
rare, et pendant quinze ans de chasse dans ces parages
je n'ai pas eu connaissance d’une autre capture.
L'habitat préferé de cet oiseau voyageur est l'Europe
méridionale et orientale, l'Asie et l'Afrique septentrio-
nales. On le trouveen Sardaigne, en Espagne, en Dal-
matie, en Grèce, en Hongrie. Beaucoup s'arrêtent en ce
dernier pays pour nicher, surtout dans la Hongrie méri-
dionale. La Glaréole se plait aussi dans les plaines qui
longent le Danube et le Volga, dans les steppes de la
Russie et de la Sibérie. Elle se fixe volontiers en nombre
considérable sur les bords des lacs du sud de la Russie et
du centre de la Sibérie. Elle arrive par grandes volées
sur les plages de la mer Noire et de la mer Caspienne,
vers la fin de mars, et y demeure jusque dans le mois de
novembre. On la rencontre encore dans l’Asie-Mineure.
Je l'ai chassée dans la Basse-ligypte, surtout à l’époque
de la crue du Nil. Elle passe alors aux environs du
Caire et vole en troupes au-dessus de la plaine inondée
des Pyramides.
J'aimais à voir les Glaréoles évoluer et se jouer dans
Pair. Leur vol ressemble très peu à celui des autres
échassiers. Par sa variété, sa souplesse, ses brusques
crochets et ses élégants détours, il rappelle plutôt les
agiles cireuits et les courbes gracieuses des hirondelles
et des sternes. Elles chassent ainsi les insectes aé-
riens, les libellules, les sauterelles. Rien de joli comme
une Glaréole poursuivant une libellule au-dessus des
jones et des roseaux d'un marais. Elle monte, descend,
rase légèrement l'extrémité des herbes aquatiques, suit
d'une aile adroite les feintes de la fugitive, puis se pré-
cipite tout à coup d'un bond rapide. On entend un ela-
(1) Hirundo pratincolina, Linné, Syslema Naturæ (1), t. 166,
p. 345.
quement sec, la belle libellule diaprée a disparu dans le
bec largement ouvert. D’autres fois elle happe en pas-
sant un insecte posé sur un brin d'herbe.
Mais c'est aux sauterelles que s’attaquent avec le plus
d'ardeur les Glaréoles. Au moment du passage de ces
orthoptères néfastes, elles les poursuivent sans reläche,
les saisissent en volant et les avalent sans les dépecer.
Jules Verreaux, qui a vu dans le sud de l'Afrique ces o1-
seaux faire une guerre acharnée aux bandes de saute-
relles, prétend qu'après avoir digéré toutes les parties
assimilables de l’insecte, ils en rejettent par défécation
l'enveloppe extérieure sans que la forme de la sauterelle
soit en rien altérée. Dans tous les cas, ils déglutissent
tout entiers les insectes qu'ils attrapent. Von der Mühle
a trouvé dans l’æsophage d'une Glaréole des coléopteres
si bien conservés qu'il a pu les placer dans sa collection.
Ils se comportent de la sorte comme l'engoulevent et
ressemblent encore à cet oiseau par leurs habitudes cré-
püusculaires. C’est le soir que les Glaréoles montrent le
plus d'activité. Elles chassent fort tard. Souvent en
Egypte, à nuit close, j'entendais encore les cris rauques
et percants qu'elles poussent en volant. Au milieu du
jour, elles dorment. Dans le temps des voyages, on les
voit se reposer, en longues files, sur le bord de la mer.
Ce n'est pas que ces oiseaux soient plus particulière-
ment attachés aux plages maritimes. Ils ne font aucune
différence entre les eaux salées et les eaux douces. Le
voisinage de l’eau ne leur est même pas indispensable,
car on les rencontre aussi bien dans les steppes et les
plaines arides, Ils aiment, cependant, à nicher près des
marais, dans les pâturages, et, comme je l'ai observé, du
moins en France et dans le nord de l'Afrique, sur les
bords de la mer et des étangs salés.
Dès que les Glaréoles sont arrivées dans les localités
où elles vont se reproduire, leurs bandes se désagrègent,
les couples-se forment et cherchent un emplacement pour
nicher. On trouve parfois plusieurs nids de Glaréoles
dans un espace assez restreint, mais non dans un voisi-
sinage immédiat : chaque couple vit à part. Les nids ne
leur coûtent pas de grands frais de construction. Une
petite excavation tapissée de chaumes et de racines leur
suffit. La femelle y dépose ordinairement quatre œufs,
quelquefois deux seulement. Ces œufs sont courts et
ventrus, d’un brun jaunâtre où d’un gris verdâtre, cou-
verts de points, de taches, de lignes entrecoupées d'un
cendré foncé d'un brun noir. Les jeunes abandonnent le
nid aussitôt après leur naissance et croissent rapidement.
Les parents leur témoignent beaucoup d'attachement, les
défendeñt avec courage et n'hésitent pas à s'élancer avec
fureur contre le chien du chasseur lui-même. Ils cher-
chent à détourner l'attention de l'ennemi en courant les
ailes pendantes, la queue étalée, avec toutes les allures
d'oiseaux blessés. Pendant ce temps, les jeunes se rasent
à terre si parfaitement qu'il est difficile de les découvrir.
Les ménages des Glaréoles sont très unis : quand on tue
l’un des époux, l’autre vient se poser à côté du cadavre
et, si le chasseur n’est pas attendri par cette preuve tou-
chante de fidélité, y tombe victime de son amour con-
jugal.
Après la saison des noces et de l'éducation des jeunes,
les Glaréoles forment, en certains pays, des bandes très
nombreuses, de plusieurs centaines d'individus qui, au
dire de Nordmann, couvrent de grandes étendues de
terrain dans les steppes et sur les grands chemins. Quand
ils n'ont pas été trop pourchassés, ces oiseaux se mon-
42 LE NATURALISTE
trent peu farouches, eton les tire facilement. A terre, ils
courent par saccades en hochant continuellement la
queue.
Les Glaréoles, intéressantes à plus d’un titre, chassent,
comme je l'ai dit, avec une activité non-pareille la saute-
relle maudite, le criquet dévastateur des cultures ; elles
mériteraient donc d’être épargnées. Malheureusement
pour elles, les Glaréoles deviennent très grasses en au-
tomne et leur chair est alors des plus succulentes. Les
Grecs en font une grande consommation. Ce n'est pas
tout. En Hongrie et en Russie, où ces oiseaux nichent
en très grande quantité, on récolte leurs œufs sans
aucun ménagement, comme en Hollande et en Belgique
ceux du vanneau. Partout l’homme semble prendre à
tâche de détruire ses plus précieux auxiliaires.
MAGAUD D'AUBUSSON.
MICROGRAPAIE
TECHNIQUE HiISTOLOGIQUE
MONTAGE DES PETITS ANIMAUX EN PRÉPARATION
(PROTOZOAIRES, VERS, ACARIENS, ETC.)
Il est des animaux qui, à cause de leur extrême peti-
tesse, ne peuvent être coupés, [Il est donc de toute utilité
de pouvoir en faire des préparations en totalité pour
l'examen microscopique. ;
Or, il n’est pas toujours facile, à cause de la grande
fragilité de ces êtres, de pouvoir les préparer de facon à
conserver leur forme aussi exactement que possible, La
plupart des Protozoaires sont dans ce cas.
L'un des meilleurs fixateurs de ces animaux est, d’une
facon générale, l'acide osmique, mais les auteurs dif-
fèrent beaucoup sur la facon d'employer ce réactif.
D'après les uns, on ne doit employer pour ces ani-
maux que l'acide osmique à 4 ou 2 0/0 au maximum. On
en verse une seule goutte sur la préparation et cela
suffit.
Suivant d’autres auteurs, l'acide osmique, même à 4 ou
2 0/0 agirait beaucoup trop brusquement et les simples va-
peurs suffisent amplement. Pour cela, on verse une goutte
d’eau contenant les protozoaires à étudier, sur une lame
bien propre, puis on retourne la lame sens dessus des-
sous. Par capillarité, la goutte de liquide reste adhérente
au-dessous de la lame. On n’a plus alors qu’à la porter à
la partie inférieure d’un flacon ouvert contenant une solu-
tion d'acide osmique et à l'y laisser plus ou moins long-
temps suivant le degré de résistance des animaux que
l’on désire fixer.
Lorsqu'on emploie l’acide osmique en solutions faibles
ou en vapeurs, il est bon, avant de monterla préparation,
de colorer les animaux, car leur grande transparence ren-
drait difficile en général l'examen microscopique.
On recommande pour cela les couleurs d’aniline, et
surtout l’hématoxyline, en solutions très faibles.
Enfin, on peut monter la préparation dans la glycérine,
en ajoutant sur la lame une goutte de ce liquide et fer-
mant avec la lamelle couvre-objet. Le lutage de la prépa-
ration est dans ce cas absolument nécessaire.
Au bout d'un certain temps, quand la glycérine a bien
pénétré les tissus des animaux fixés, un obtient une
transparence suffisante pour permettre une excellente
étude microscopique, et, grâce à la coloration, les divers
plans sont assez faciles à saisir et à délimiter.
Quelques auteurs recommandent d'employer l'acide
osmique très concentré et en excès, de facon à fixer très
énergiquement les tissus et à les colorer fortement en
noir. Ils laissent l’acide osmique en contact permanent
avec le liquide contenant les protozoaires en autrés très
petits animaux, et obtiennent ainsi, au bout d’un certain
temps, un mélange parfaitement noir.
A l’aide d’une pipette, on prend une goutte de cette
sorte de magma et on la verse sur une goutte de glycé-
rine que l’on a préalablement placée sur la lame à pré-
paration. On couvre avec une lamelle et on lute aussi
bien que possible.
Après quelques heures d'action, la glycérine rend les
animaux d’une transparence suflisante pour l'examen
microscopique.
On obtient par cette méthode des finesses de définition
qu'il est bien difficile de réaliser par d’autres procédés.
Il est bien évident qu'aucune des méthodes dont nous
venons de parler n’a rien d’absolu.
Ilne faut pas, du reste, pour une étude microscopique
quelconque se borner à un seul mode d'investigations, les
résultats d'une méthode devant toujours être sérieuse-
ment contrôlés par une autre, d'autant plus que la réus-
site dépend le plus souvent de la nature même des
animaux que l’on veut étudier et de leur réaction chi-
mique vis-à-vis des différents agents fixateurs ou colo-
rants.
L'acide osmique n'est pas le seul que l’on puisse
employer pour l'étude des Protozoaires par exemple, mais
c’est certainement l’un de ceux qui réussissent le mieux.
Pour certains Vers, on doit opérer tout autrement que
pour les Protozoaires. Nous prendrons comme exemple la
Grande Douve du foie, et nous allons indiquer comment
on peut arriver à monter un échantillon sur lame.
Après avoir recueilli dans un vase quelconque les
échantillons de Douve que l’on vient d'extraire du foie
d'un mouton, on choisit les plus petits pour en faire des
préparations.
On place ces petits échantillons entre deux lames de
verre, à plat bien entendu, et on comprime légèrement
de façon à aplatir parfaitement le vers sans cependant
détruire les tissus. On fixe les lames dans cette position
à l’aide de fils attachés aux deux extrémités et on plonge
le tout dans un réactif fixateur que l’on doit prendre
incolore autant que possible. Ceux à base de sublimé
sont en général excellents, à la condition que la propor-
tion de ce corps ne soit pas trop forte, car ce réactif
donne parfois beaucoup d’opacité.
Au bout de quelques heures, quand on juge que l'animal
est fixé, on l'enlève d’entre les lames de verre, on le lave
bien à l'alcool à 70° et on le met dans une teinture alcoo-
lique très étendue, de préférence avec des couleurs au
carmin ou à l’hématoxyline.
Quand la coloration est finie,on lave à l’alcool à 700.
A ce moment, on peut opérer de deux facons, suivant
le milieu conservateur dans lequel on veut monter Ja
pièce.
On peut prendre la glycérine et, dans ce cas, on fera
macérer les animaux dans ce réactif pendant au moins
vingt-quatre heures. Après ce temps-là, les Douves sont
|
LE NATURALISTE 43
en général devenues parfaitement transparentes, Il ne
reste plus qu’à les monter comme tout autre objet, en
ayaut soin toutefois de fabriquer des cellules à bord assez
épais pour pouvoir contenir l’animal sans le comprimer.
On ajoute de la glvcérine légèrement acide, on couvre
et on lute la préparation.
On peut aussi monter dans le baume ou le dammar,
pour cela on passe la pièce par des alcools de plus en
plus forts jusqu’à l’absolu, on éclaircit dans le xylol,
l'essence de girofle ou autre et on monte au baume ou
au dammar. J'ai obtenu ainsi des très belles préparations
et très démonstratives.
Il est alors préférable de prendre des solutions liquides
de dammar ou de baume, car elles pénètrent mieux à
travers les tissus que si elles étaient épaisses. Il faut
alors luter la préparation, ce qui est, du reste, une bonne
précaution toutes les fois que la pièce à monter est un
peu volumineuse,
Le procédé que nous venons d'indiquer pour la prépa-
ration de la Douve peut être utilisé pour la plupart des
Vers plats ou ronds, à la condition, bien entendu, d'avoir
affaire à des échantillons assez minces et assez courts
pour pouvoir entrer dans une cellule de lame porte-
objet,
Quand lés animaux à étudier sont assez petits pour
pouvoir être montés en préparation microscopique, mais
que l'enveloppe de leur corps est chitineuse ou calcaire
ou pigmentée, etc., et empêche par conséquent de voir
au travers, on doit préalablement faire agir des liquides
appropriés à chacun de ces cas, dont on trouvera l’énu-
mération au chapitre III.
Après lavage et coloration, on monte généralement
dans la glycérine.
Quand on a affaire à des objets aplatis et imputres-
- cibles, comme par exemple les ailes membraneuses de
certains coléoptères ou orthoptères, on peut faire les
préparations avec de la glycérine, ou tout simplement à
sec. Dans ce cas, on comprime l'aile entre la lame et
la lamelle et on lute les bords.
Pour les préparations des tests calcaires ou siliceux
de certains Foraminifères, il est bon de prendre un
milieu qui se solidifie de facon à empêcher ces petites
pièces de remuer constamment sous la lamelle, On
peut utiliser le baume, et dans ce cas on obtient la
déshydratation, non par l’action des alcools, mais tout
simplement par dessiccation rapide à l’étuve ou sur la
lampe. On peut aussi les monter tout simplement dans
la gélatine.
On fait une solution épaisse de gélatine dans l’eau, on
monte à chaud la préparation et en se refroidissant la
gélatine incorpore les tests de Foraminifères et les main-
tent en place sans empêcher l'examen microscopique.
Enfin, il est des tissus qui doivent être conservés dans
des liquides spéciaux, sans quoi ils s’altèrent rapidement,
se déforment et annulent, par conséquent, les préparations
que l’on à pu en faire.
Le sang des Vertébrés est un de ces tissus spéciaux.
Dès que les globules sanguins sont mis en contact
avec l'alcool ou tout autre réactif fixateur, ils se
déforment énormément et ne peuvent plus servir à des
études histologiques.
Pour leur conserver la forme la plus rapprochée de la
forme normale, on laisse tomber quelques gouttes de sang
frais dans un verre de montre dans lequel on a mis
quelques gouttes de la solution physiologique saline
(0,75 0/0 de sel marin dans l’eau distillée). On mélange
le tout légèrement, et on remplit une cellule préparée
à l’avance. Le lutage de la préparation doit être bien
hermétique, sans quoi le liquide ne tarderait pas à s’éva-
porer.
Si l'on ajoute au mélange de sang et de solution
physiologique une toute petite quantité de violet de
méthyle, les noyaux des éléments sanguins (ceux qui en
possèdent, bien entendu) se colorent énergiquement et
leur étude devient par cela même plus facile.
GRUVEL.
LES PLANTES DE FRANCE
Leurs Chenilles et leurs Papillons
ABRICONIER (Prunus armeniaca)
Abraæas grossulariata L., chenille en mai, papillon en
juillet; toute la France.
MEHLLEFEUNRILE (Achillæa millefoliun)
Cucullia tanaceti S. V., chenille en août-septembre,
papillon en septembre, juin, juillet; France centrale et
méridionale. — nyssia zonaria $S, V., chenille en mai,
juin ; papillon en avril, France centrale. — Geometra
smaragdaria F., chenille en mai, papillon em juin-juillet;
France centrale, méridionale, et orientale. Acidalia
degeneraria H., chenille en avril, juillet, papillon de maï
à août; Centre et Midi. — Aspilastes giluaria, chenille en
juin, papillon en juillet-août; par toute la France, —
Eupithecia millefoliata Rœsl., chenille en automne, pa-
pillon en mai-juin; environs de Paris. — Eupithecia
oxydata Tr., chenille en été et automne, papillon de juin
à août; France centrale et orientale.
HÉLIOHEROPE (Heliotropiun europœum)
Deiopeia pulchella L., chenille en mai, août, papillon
en juin, septembre; toute la France, — Acidaliu ostri-
naria H., chenille en mai, juillet, papillon, en juin,
août; France méridionale.
MELAMPWYERE (Melampyrum)
M. Nemorosum.— Melitæa athalia.Esp., chenille
en mai, septembre, papillon en juin, août; toute la
France.
M. Pratense. — Eupithecia plumbæata H., chenille
en juillet-août, papillon en mai-juin ; toute la France.
MOLÈNE |Verbascum)
V. Thapsus. — Gortyna flavago. S. V., chenille en
juillet sur les tiges, papillon en août-septembre: France
centrale et septentrionale, — Cucullia verbasci L., che-
nille de mai à août, papillon en avril, mai; toute la
France.
V. Blattaria, — Cucullia scrophulariæ $. V., che-
nille de mai à août, papillon en avril, mai; toute la
France.
VW. Lychnitis. — Cucullia lychnitis Ramb., chenille
en août-septembre, papillon en maï-juin; toute la France,
— Cucullia thapsiphaga Tr., chenille en juin-juillet, pa-
pillon en mai-juin, France centrale et méridionale. —
Gnophos variegata Dup., chenille en mai, papillon en
juin-juillet, France centrale, méridionale et orientale.
GOUET (Arum maculatum)
Triphæna janthina S. V., chenille en mars-avril, pa-
4 LE NATURALISTE
pillon de juin à octobre; toute la France. — Plusia mo-
desta H., chenille en avril, mai, papillon en mai-juin;
environs de Paris, département de l’Indre.
COURGE (Cururhita)
Heliothis armigera H., chenille en août-septembre,
papillon de juin à septembre ; toute la France.
ONONHS (ononis)
@. Spinosa. — Lycæna icarus Rott., chenille en
mai-juillet, papillon pendant toute la belle saison; toute
la France. — Aplecta tincta Brahm., chenille en avril,
papillon en juin-juillet; France centrale, septentrionale
et orientale. — Heliothis ononis S. V., chenille en été;
papillon en mai-juillet; Auvergne, Est. — Euclidia gly-
phica L., chenille en juin, août, septembre, papillon, en
mai-juillet-août; toute la France. — Nemoria viridata L.,
chenille en juillet, octobre, papillon en mai-juin, sep-
tembre ; toute la France. — Aplasta onoraria Fues.,
chenille en avril, septembre, papillon de mai à août;
toute la France.
©. Arvensis.— Calocampaexoletal.,chenilleenjuin-
juillet, papillon en aoùt-septembre, mars, avril; toute
la France.
O. HRBepens. — Heliothis umbra Hussi., chenille en
juillet août, papillon en mai-juin ; toute la France.
CAMPANUILE (Campanula)
€. "rachelium, — ÆEupithecin campanulata H.,
chenille en septembre-octobre, papillon de mai à août;
France centrale et méridionale.
€CORONELIELE (Coronilla)
€. Waria, — Colias hyale L., chenille en août-sep-
tembre, papillon en mai, août; toute la France. — fJles-
peria comma L., chenille en juillet, papillon en août;
toute la France, — Zygæna aphialtes L., chenille en mai-
juin, papillon en juillet; France méridionale.
€. NMfiminma Zygæna fausla L., chenille en juin,
papillon en juillet-aout; toute la Franee.
€. Enerus. — (inophos furvata K., chenille en avril,
mai, papillon en juillet; France centrale et méridionale
orientale.
Divers. — Pseudolerpna pruinata Hufn., chenille en
mai-juin, papillon en juillet; toute la France. — Fidonia
atomaria L., chenille en juin et septembre; papillon en
avril à août; toute la France.
VESCRH (Vicia)
VW. MultiMora. — Torocampa Craccæ S. V., che-
nille en juin, papillen en juillet-août; toute la France.
VW. Dumetoruwum. — Torocampa viciæ H., chenille
en mai-juin, papillon en juillet; France centrale, —
Acidalia trilineata Scop., chenille en mai, papillon en
juin; France centrale et orientale.
VW. Cracca, — Toxocampa pastinum Tr., chenille er.
mai, papillon en juin-juillet, France centrale. — Acidalia
strigilaria H., chenille en avril, mai, papillon en juin ;
toute la France.
V. Sepium, — Acidalia remutaria H., chenille en
mai-juin, papillon en mai, juillet; toute la France, —
Tephrina murinaria F., chenille au printemps et à l’au-
tomne, papillon en mai, juillet-août; toute la France.
Étude de
L’'OURS & DE LA LOUTRE
AU POINT DE VUE DES ÉTYMOLOGIES
L'ours se disait Ber, chez les Germains ; d’où son nom
Beer en allemand.
Ce mot veut dire le roi des animaux sauvages, dans les
forêts germaniques, à cause de sa force redoutable et de
ses puissantes mâchoires. Il y en avait alors de très
grands, qui avaient une tête énorme, de la largeur d’un
petit pouf de salon. Aussi, bien des noms de chefs déri-
vaient du mot ours : Bern, Bernard, Bernold, Bernaud,
d'où Bernouilli, Berneuil, etc., etc. Tous ces noms
veulent dire : le mâle, l'ours brave, l’ours hardi, bois du
mâle, bois de l'ours, ete. Pris à la lettre, le mot ber,
ours, veut dire le brillant seigneur, parmi les bêtes
fauves.
Il n’en est plus du tout de même du latin wrsus, ours.
Ici l'ours, ursus, veut dire deux choses, suivant la ma-
nière dont on interprète le mot primitif w, qui a eu suc-
cessivement cinq sens.
Ursus vient de ur-sus, sanglier à longs poils d’urus,
ou sanglier antique, ancêtre du sanglier. N'est-il pas
curieux de voir que nos ancêtres aient comparé l’ours à
un urus, où bœuf sauvage, à cause de ses longs poils,
et à un sanglier, à cause de ses formidables mâchoires,
armées de dents puissantes? On voit que la théorie de
l’évolution ne date pas d'hier, et que les admirateurs
de Darwin nous font bien rire : il n’y a rien de nouveau
sous le soleil; il n’y a que des mots nouveaux, sans une
seule idée nouvelle, Qu'est-ce que la théorie de Pasteur
au fond, sinon la théorie des microbes ?
Or, le mot microbe est venu remplacer le mot miasme,
qui avait un sens bien plus exact et d’une portée beaucoup
plus grande, En effet, les microbes ne sont jamais que
des miasmes figurés, tandis que les miasmes compre-
naient, non seulement des corps solides comme les
microbes, mais encore les corps liquides, comme les
ptomaines, leuçomaines, sepsines, etc.; les corps vola-
tils et même les corps gazeux, à la rigueur.
Or, qui nous dit qu'à côté des microbes du savant
M. Pasteur, auxquels on a été bien vite forcé de rajouter
les sepsines et autres liquides séreux du même genre, il
n'y a pas aussi des germes de maladies à l’état volatil?
Personne. On a donc plutôt perdu que gagné au change,
en abandonnant les bons vieux miasmes de nos ancêtres,
pour se cantonner pendant vingt ans aux seuls miasmes
figurés, les microbes.
De même le mot wr, parmi les cinq sens, en a un fort
important au point de vue de la cosmogonie de Laplace,
qui est vieille comme le monde, beaucoup plus ancienne,
à coup sûr, qu'Abraham, qui vivait 4,500 ans auparavant.
En effet, ses ancêtres avaient fondé la ville de Ur en
Mésopotamie, dont le sens est à la fois ville antique et
ville du feu, parce qu’on y entretenait le feu sacré sur
les autels, en l'honneur du soleil, le symbole de Dieu dans
l’univers, le soleil vivifiant, le créateur de tout ce qui
vit à la surface de notre planète. Ur veut dire primiti-
vement le feu, et il ne signifie antique que secondaire-
LE NATURALISTE 13
ment, sous prétexte que la terre était sortie du feu,
Ainsi, il y a plus de 5,500 ans, mettons 6,000 ans,
que nos pères savaient aussi bien que nous, mieux que
nous peut-être, que la terre était sortie du feu, c’est-à-
dire du soleil; car, enfin, la terre était trop grosse pour être
sortie du feu de deux cailloux tapés l’un contre l’autre.
Leur seul tort était de croire que le soleil n’était qu'une
grosse lampe à côté de ia terre; de sorte qu'ils le fai-
saient tourner comme un accessoire, autour du globe
terrestre. Tandis que c'est le soleil qui a une masse
24,000 fois plus forte que la terre, malgré sa faible den-
sité ; de sorte qu'il a un volume un million 1/3 plusgrand
que notre planète, qui est toute petite à côté de lui : un
petit ballon d'enfant, à côté d’une sphère bien plus grosse
encore que l’Are de Triomphe, placé sur la place de la
Concorde, à l’autre bout des Champs-Élysées.
Cela nous montre tout de suite une chose fort intéres-
sante, et à laquelle on semble ne pas avoir prêté l'at-
-tention qu'elle mérite. C’est que, si nos yeux étaient un
milliard de fois plus petits qu'ils ne sont, afin d’être en
rapport avec la terre réduite à un petit ballon d'enfant,
nous verrions les choses avec une dimension beaucoup
plus petite que nous ne les voyons habituellement, puis-
que de la place de la Concorde, l’Arc de Triomphe nous
parait bien plus gros encore que le soleil. Nous avions
déjà appelé l'attention sur ce point, en faisant remarquer
qu'un enfant de 90 centimètres de haut voit le grenier
d’une maison deux fois plus grand que quand il a une
taille de 1"80. Cela tient à ce que, sans s’en rendre
compte, les hommes rapportent la grandeur des corps à
leur propre compte.
Passons, maintenant, aux loutres,
On a dit que la Bièvre, à Paris, devait son nom aux
castors qui l’habitaient jadis, et que castor se dit Biber
en allemand, d'où on a fait le mot Bièvre. C’est possible,
Mais nous ne saurions trop attirer l'attention sur le
point suivant : c'est que ce n’est pas si sûr que cela. En
effet, le mot biber veut dire castor; mais il veut aussi
dire loutre, de sorte que la Bièvre pouvait tout aussi
bien être habitée par des loutres que par des castors. Il
y a même plus de probabilités en faveur des loutres,
et voici pourquoi.
Au temps de César, on appelait Bibrax, en Gaule, une
petite ville du territoire des Rèmes, qui habitaient Reims, -
précisément à cause des loutres, et non des castors, qui
habitaient et qui habitent encore dans la rivière de l’Aï-
lette qui passe à cet endroit. Du reste, 1l serait facile de
trancher la question tout de suite, en faisant remarquer
que les castors habitent les rivières et non les sources
des ruisseaux; tandis que la ville de Bibrax se trouve,
pour ainsi dire, aux sources de l’Aïlette. Ce qui nous
fait encore donner la préférence aux loutres, c’est qu'il
y en a toujours euet qu’il y en a encore dans ces parages,
à cause de la richesse de ce cours d’eau en poissons.
Au moyen-àge, on la disait fertile par sa pisrositale
uberrima : rivière très poissonneuse; ce qui explique à la
fois la présence des loutres, qui ont donné leur nom de
Biber à Bibrax, et la présence des buses, aiglettes, qui
ont donné leur nom à la rivière de l’Aïlette.
Enfin, le mot loutre, en allemand biber, de ber ours, et
bei prés, veut dire animal couvert d’une toison épaisse
comme celle de l'ours, ber en germanique. On voit donc
que cette étymologie s'applique plutôt à la loutre qu’au
castor. Certes, la fourrure du castor est aussi une des
plus estimées, aussi le nom de biber lui convient-il abso-
SR EN PU AT A M ME ES
lument. Mais il nous semble que, s’il s'était agi de
Castors et non pas de loutres, les Belges ou Gaulois du
Nord, dont dépendaient les Rèmes, n'auraient pas manqué
de faire allusion à sa queue plate si remarquable, qui lui
sert de truelle pour cimenter ses digues. C’est un si
curieux animal, qu'il semble que ce soit un assassinat
que de le tuer. D'un autre côté sa fourrure est si pré-
cieuse, que l’on aurait eu tout intérêt à respecter les
petits pour ne pas détruire la race. Bref, il devrait y en
avoir encore, s'il y en avait jamais eu; d'autant plus
qu'il y a encore des loutres.
D' BouGox.
PONTE DE TRICHOSOMA HEMIGENUM
DE GRASLIN
LÉPIDOPTÈRE DU GROUPE DES CHÉLONIDES
En mai, dès l'éclosion de l'adulte, le mâle se met en quête
d’une femelle; son vol est lourd, bas, saccadé; dès qu’il per-
coit les approches de l'une d'elles, il redouble d’activité. La
femelle presque privée d'ailes, véritable paria de la création,
reste stationnaire durant ce temps, elle aussi a senti les
efluves du reproducteur, dans cette attitude passive, elle
relève par intervalles l'extrémité de son abdomen; aussitôt les
deux sexes en contact, a lieu l’accouplement, par superposi-
tion, le mâle dessus; la copulation est longue, elle dure la
journée entière; dès la disjonction des deux conjoints, le mâle
traine une existence pénible, il est épuisé, il meurt peu de
temps après, à moins qu'il ne soit au préalable happé par l’un
des nombreux sauriens qui sont à ce moment de l’accouple-
ment si communs sur les garrigues rocailleuses des environs
de Rio où ont été faites nos observations. La femelle dès lors
fécondée, traîne son lourd abdomen tout en procédant au dépôt
de sa ponte qu’elle éparpille par paquets de dix à douze œufs
chacun, non loin, peu distants les uns des autres; elle meurt à
son tour après avoir ainsi assuré le sort de la régénération de
l'espèce et laissé à la nature le soin d’en faire éclore les germes,
mais sans espoir de voir naître, encore moins d'élever sa pos-
térité; il est vrai de dire que la jeune chenille dispose dès sa
naissance de moyens suflisants pour vivre d'elle-même sans
être tenue de se mettre sous la tutelle de parents.
Œuf. Longueur, 0 mm. 06 ; diamètre, 0 mm. 04. Suborbi--
culaire, blanchâtre, lisse et luisant, finement pointillé, à pôles
arrondis, à coquille résistante.
Quelques poils dont s’est dépilée la mère durant l'entre-
temps de la ponte ont été parsemés sur les œufs, lesquels sont
petits, étant donnée la taille de la femelle, mais ont été pondus
au nombre de plus de 150. Leur éclosion aura lieu une quinzaine
de jours après, chacun donnant naissance à une jeune chenille
vive, alerte, occupée sans perdre de temps à rechercher sa
nourriture, les feuilles des diverses plantes basses qui consti-
tuent la végétation rabougrie de nos coteaux : ce nombre
d'œufs était nécessaire pour assurer la continuité de l'espèce,
parce que dès leur troisième mue les chenilles seront poursui-
vies et traquées par des diptères du groupe des Muscides qui
déposeront sur leur corps, dans les mailles du système pileux,
des œufs desquels écloront des vers qui vivront du tissu
adipeux de la chenille; de ces vers ensuite transformés, l’éclo-
sion aura lieu en avril seulement, c'est-à-dire lorsque la che-
nille se sera transfigurée en chrysalide : ce fait de parasites
internes est particulier à beaucoup de chenilles, elles peuvent
nourris dans leur corps, tout en continuant à vivro, des para-
sites qui leur sont spécifiquement inféodés, et cela jusqu’au
moment de leur première transformation, laquelle est suivie de
mort.
Ces diptères diminueront d’une quantité sensible le nombre
des éclosions du papillon; pour y remédier, le créateur n'a pas
voulu laisser anéantir l’espèce à la conservation de laquelle il
apporte un soin jaloux, il l'a maintenue en donnant à la mère
les moyens de déposer une quantité considérable d’œufs.
Adulte. Dans les environs de Ria le papillon est introu-
vable, il se dissimule trop bien pour qu'on puisse le découvrir;
en hiver, il est possible de se procurer la chenilie, puis de
46 LE NATURALISTE
ee ———————————_——————— ——"—"—"———_ —
l'élever sans grandes difficultés; au printemps,en mars et avril,
on peut recueillir contre les pierres la chrysalide qu’il est aisé
de reconnaître à sa forme relativement petite pour une Chelo-
nide, ainsi qu’au lâche réseau qui l'enveloppe.
Capitaine XAMBEU.
Ce
CONSERVATIONS
DES
PHOTOTYPES, PHOTOCOPIES & PHOTOCALQUES
A l’un des derniers congrès internationaux de chimie
appliquée, la conservation des photographies à fait
l'objet d’une question spéciale.
M. Ch. Gravier, qui avait été chargé de présenter un
rapport sur cette question capitale, a d’abord rappelé que
MM. Davanne et Girard (1855-1864) avaient indiqué les
conditions qui permettent d'assurer la stabilité des
épreuves positives aux sels d'argent, conditions qui
demeurent toujours exactes. Une épreuve bien lavée et
fortement virée, disaient-ils, ne change pas; l’altération
n’est pas la destinée normale des épreuves ; c'est un sort
accidentel qu'il est toujours facile de leur épargner.
M. Ch. Gravier a ensuite rappelé qu'il est indispen-
sable que les surfaces sensibles qui deviendront des pho-
totypes soient, depuis l'origine de leur fabrication jus-
qu’au moment du fixage de l’image, conservées de facon
que leur sensibilité ne soit pas diminuée par le
temps; dans ce but, le mode d'emballage ne saurait être
trop soigné par les fabricants en premier lieu et, ensuite,
par les opérateurs. D'une manière générale on peut dire,
après MM. Davanne et Girard, qu'il faut, avant tout,
faire son possible pour maintenir les surfaces que l’on
veut conserver, dans une atmosphère sèche et à l'abri
des vapeurs acides, ammoniacaleset, surtout, de l’hydro-
gène sulfuré.
Pour cela, M. Gravier préconise l'emballage dans des
papiers rendus imperméables à l'aide de substances
stables, notamment la paraffine fondant à 72°.
Les phototypes à support en métal sont de deux
sortes : les images daguerriennes et les ferrotypes. Les
premières sont inaltérables si elles sont recouvertes par
un verre maintenu par une bordure qui évite le contact
de l’air ou des vapeurs oxydantes et si, à l'abri de cette
fermeture parfaite, on a eu le soin également de ne pas
les exposer au soleil ou à une chaleur dépassant celle de
nos climats pour éviter la volatilisation du mercure de
l’amalgame qui constitue en partie les blancs. Pour les
ferrotypes, il convient de les protéger par une couche de
parafline d’abord et de les recouvrir d'un verre.
Pour les prototypes dont le support est le verre, l’expé-
rience a démontré que ceux au collodion et à l’albumine
sont suffisamment protégés par les vernis durs employés;
la question n’est pas encore résolue pour ceux à la géla-
tine, Pour empêcher que la couche se fendille en se dé-
tachant du support, M. Gravier préconise encore la pa-
raffine fondant de 70° à 76°; il conseille aussi d'étudier
sous ce rapport la cérésine qui paraît avoir de nom-
breuses qualités pour cet objet.
En ce qui concerne les photocopies, l'expérience
semble pouvoir permettre d'affirmer que, lorsque la
couche sensible est constituée par des sels d'argent, les
images des phototypes qni sont obtenues par développe-
ment sont absolument stables, M. Ch. Gravier ajoute
qu'il est indispensable que l'on modifie la sous-couche
actuelle des papiers dits aristotypes et qu'on la remplace
par un autre isolant du papier pour continuer à satis-
faire les amateurs d'épreuves brillantes. La couche de
baryte que l’on emploie renferme souvent des sels de
plomb qui altèrent rapidement les images fixées. C’est,
en effet, à l'influence de cette sous-couche que l’on doit
principalement attribuer les tons jaunes ou les blancs
verdâtres, le gris bleuté des noirs, des images obtenues
sur ces papiers; celui au collodion-chlorure semble ce-
pendant résister plus longtemps que les papiers dits au
citrate. Il convient d'étudier aussi avec soin l’action des
bains combinés de fixage et de virage, auxquels semblent
dues de nombreuses altérations.
Les papiers aux sels de fer se divisent en deux caté-
gories : ceux développables dans l’eau ordinaire, connus
sous la désignation de ferro-prussiate ou papier Marion;
ceux qui nécessitent un passage d'abord dans une solu-
tion de ferro-cyanure de potassium, puis dans un bain
acidulé, dit de dégorgement; ils sont désignés sous les
noms de papier au cyanofer ou de papier Pellet. Les pre-
miers, bien enfermés dans des papiers imperméables
(paraffinés, cirés ou parcheminés) ou dans des boites
métalliques, peuvent, s'ils ne sont pas très sensibles, se
conserver environ six mois; les autres, mieux protégés
par la gomme, qui amortit leur préparation sensible, ont
donné des résultats satisfaisants après une année de fa-
brication. Il est encore prudent de ne pas atteindre ces
limites. Les papiers qui nécessitent l'emploi d'un bain
de dégagement acide exigent un lavage complet pour
éviter l'attaque de la cellulose; un bain alcalin pour
neutraliser l'acide ne peut être employé, car il jaunirait
l'image en la peroxydant.
Le papier sensible aux sels de platine se conserve un
mois au plus, enfermé dans des tubes en métal conte-
nant du chlorure de calcium. Après le développement de
l’image, on passe l'épreuve dans un bain acide; la con-
servation semble assurée jusqu’à ce jour si, par des la-
vages abondants, on enlève complètement toute trace
d’acide ; après un lavage insuffisant, on constate, après
quelques mois, que l'épreuve tombe en poussière.
Les photocopies qui utilisent les sels de chrôme sont
connues sous le nom de papier au charbon, papier Ar-
tigue. À l’état non sensible, les couches préparées se
conservent indéfiniment, si elles sont à l'abri de l’humi-
dité. Le papier sensibilisé doit être employé daus les trois
jours qui suivent sa sensibilisation, Après le dépouille-
ment de l'image, il faut enlever soigneusement par des
lavages abondants les sels chimiques renfermés dans la
couche ou dans le papier. Les colorations verdâtres des
épreuves, par simple transfert ou du papier Artigue,
sont dues à la réduction subséquente des sels ‘sensibles
non éliminés. Il convient, pour faciliter le départ de ces
sels, de passer les épreuves après le deuxième lavage
dans une eau alcaline.
En somme, il y a encore de très nombreuses questions
à résoudre dans cet ordre d'idées.
H. CoupIN.
LE NATURALISTE 41
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
Coléoptères des genres Pseudoiucane et Lucane
LUCANUS DYBOWSKYI-PARRY
Parry. Trans. Ent. Soc. London, 1873, p. 335.
JAKOWLEFF.Horæ Soc. Ent. Ross., XXX, 1896, p. 171.
Boileau,
(Bassin de l'Amour.)
Extrêmement voisin du L. Boileavi, dont 1l possede à
peu de chose près la structure, le Lucanus Dybowskyi a de
commun avec ce dernier l'absence de carène frontale,
mais il s’en distingue immédiatement parla présence d’une
échancrure aux carènes latérales ; celles-ci d’ailleurs ne
décrivent pas une courbe régulière en forme d'S, mais bien
une ligne brisée et la portion céphalique qu’elles cir-
primé, celles-ci un peu plus allongées moins convexes ei
plus rétrécies en arrière.
Quant au fond de la coloration, il est sensiblement le
même ; maisl'aspect de la tégumentation esttant soit peu
modifié en raison de l'apparence mate que donne au cor-
selet, à la tête et surtout aux mandibules, une ponctua-
tion un peu plus serrée et plus rugosiforme.
Par contre, la coloration des pattes esthien différente ;
les pattes médianes et postérieures sont, en effet, entière-
ment noires Où brunâtres,à l'exception d'un très fin Hiséré
rouge orange qui les parcourt longitudinalement en leur
milieu, et les pattes antérieures ont un fond de colora-
tion orangée qui se percoit au travers de leur teinte
brune uniforme lorsqu'onles examine attentivement; il
convient enfin de noter que l'aspect général des trois
paires de pattes est mat etsoyeux, tandis que, chez le
Luc. Boileavi, il est nettement luisant,.
Pour le reste, les parties de la bouche et les antennes
sont sensiblement analogues,
Luc. Dybowskyi-Parry. — 1, 2, 3, 4 mâles.
conscrivent est notablement plus étendue dans le sens de
la largeur.
Les mandibules ont, en outre, une structure tant soit
peu différente; elles sont, en effet, moins cylindriques,
plus longues, à direction plus rectiligne : ce n’est pas
tout : tandis que chezle Luc. Boileavi, elles s’infléchissent
insensiblement en avant à partir de la dent médiane,
elles continuent, chez le Luc. Dybowskyi, à s'étendre dans
le prolongement du corps jusque vers la hauteur de la
fourche terminale où elles s’abaissent assez brusque-
ment ; enfin la dent basilaire est plus longue et plus forte
que chez l'espèce précédente, et les dents des mandi-
bules, outre qu’elles sont plus nombreuses, générale-
ment 5 au lieu de #4, sont un peu plus robustes et plus
déprimées ; il arrive aussi fréquemment que, soit à l'une
des mandibules, soit à toutes les deux, deux dents voi-
sines soient soudées ensemble à leur base.
Le corselet et les élytres présentent également quel-
ques légères différences; celui-là est un peu plus dé-
Quant à la pubescence, elle parait être fort abondante
lorsque l'insecte est bien frais et, de plus, elle est souvent
plus blanchâtre que chez le L. Boileavi ou chez l'espèce
suivante.
J'ai eu entre les mains un assez grand nombre d'exem-
plaires provenant de régions différentes; un seul d’entre
eux qui provient de Corée, et dont je dois la communi-
cation à M. H. Boileau, porte, sur les élytres, trace de
deux carènes longitudinales à peine élevées, mais cepen-
dant assez bien visibles.
Femelle. À
Elle est très voisine de celle du L. Boileavi, mais plus
étroite ; les contours du corselet sont plus arrondis; la
tête est moins large, subconvexe, à granulation serrée,
mais peu marquée et irrégulière; les pattes sont comme
dans l'espèce précédente. Les élytres portent trace d'une
faible strie suturale.
48: LE NATURALISTE
La coloration est uniformément d’un brun rougeûtre,
plus ou moins obscur, nullement carminé ;les téguments
sont lisses ; chez les exemplaires bien fraïs,ils sont par-
tiellement recouverts d’une pubescence analogue à celle
du mâle.
La femelle du Luc.Dybowskyiest,en somme, en concor-
dance parfaite avec le mâle et fait, comme lui,le passage
entre l'espèce précédente et le L. Hopei; construite sur le
-même modèle que celle du Luc. Boileavi, mais moins
large, elle se rapproche sous ce rapport de la femelle du
RP
Lucanus Dybowskyi, femelle.
L. Hopei qui, à son tour, s'en éloigne par sa forme plus
déprimée laquelle s’exagère encore chez la femelle de la
var. maculifemoratus qui est la plus large de toutes.
L'habitat du Luc. Dybowskyi parait être assez étendu.
Je dois à l’obligeance de M. Jakowleff deux mâles et deux
femelles provenant des environs de Vladivostok, dans la
Sibérie orientale; un des spécimens que M. Boileau m'a
communiqués provient de la presqu'ile de Corée; j'en ai
vu un de Pékin dans la collection de M. l’abbé A. David;
différents exemplaires mâles figurant dansla collection de
M. R. Oberthur, portent les annotations suivantes
Daourie (fl. Amour). — Littusmaris Japon (42° lat. bor.),
Dr B. Dybowski et À. Gadlewski 1874. — Enfin, dans la
même collection, une fort belle femelle, à corselet de
même forme, mais un peu plus large que celui des femelles
sibériennes est notée comme suit : Ile Askold — 42° 1/2
lat.,1026 long. (Mandchourie), M. Zackowski 1878.
Louis PLANET.
LEPIDOPTÈRES NOUVEAUX D'ASIE
19 Oeneis (Chionobas) Elsa Auslaut.
Le mäle de cette rare et intéressante espèce, a été décrit
par nous dans le n° 19% du journal le Naluraliste en date du
1er avril 1895. Nous en possédons aujourd’hui une femelle ori-
ginaire du Tianchan oriental. Elle est entièrement semblable
à l’autre sexe, sauf que sa teinte d'un brun fauve est beaucoup
plus jaunâtre sur ses deux faces et notamment sur le dessus
des ailes antérieures. Nous dirons à cette occasion qu'Elsa,
que nous avions d’abord comparé à Bore, est beaucoup plus
voisine de Verdanda. Cependant elle se distingue d’une ma-
nière très précise de cette espèce par les caractères suivants :
Elle est plus grande, ses ailes sont plus opaques, d’un brun
fauve chez le mâle et d'un brun plus jaunâtre chez la femelle,
ainsi que nous venons de le dire. Les premières ailes sont en-
cadrées d'une bordure marginale brune qui va en s’atténuant
de l’apex à l’angle opposé; et le bord externe des secondes
ailes montre des taches semi-lunaires plus foncées. La bande
médiane du dessous ne se termine pas, comme chez Verdanda,
au bord antérieur par une pointe arrondie; elle est, au con-
traire, franchement coupée par le borä. Enfin le coude, que
forme cette bande dans son milieu, est simplement arrondi
en dehors et non terminé par cette pointe bifide, qui est carac-
téristique chez l’autre espèce. Malgré ces diflérences qui sont
importantes, Elsa et Verdanda sont des espèces voisines qui
reconnaissent peut-être une communauté d’origine.
90 Oeneis (Chionobas) Verdanda Slgr. v. Vanda Austaut.
L’Oeneis Verdanda, dont il vient d’être question, habite les
montagnes les plus élevées du district de Korla dans le Tian-
chan oriental. C’est un papillon d’un aspect décoloré comme
plusieurs de ses congénères. Le mäle est d'un brun grisâtre
livide, sans dessins bien apparents. La femelle est plus blan-
châtre. Nous avons sous les yeux un autre Chionobas, origi-
naire également du Turkestan, mais sans désignation exacte
de localité, que nous rapportons à l'espèce précitée comme
variété et que nous nommerons Vauda. Le papillon, dont il
est question, appartient au sexe mâle; il est plus foncé que le
type, d’un brun livide uniforme, sans trace de taches prémar-
ginales aux premières ailes. Celles-ci laissent apercevoir une
tache apicole noirâtre, arrondie comme chez Verdanda, plus
une seconde, plus petite, vers le bord interne. Les ailes posté-
rieures, par contre, sont dépourvues de la tache anale noire
qui s’observe chez la forme normale; leur bord marginal est
encadré de macules plus foncées. On y distingue par transpa-
rence la bande médiane du dessous qui est entièrement sem-
blable à celle de Verdanda, ainsi que les nervures qui appa-
raissent avec une teinte plus claire. En dessous, la présente
variété ressemble exactement au type, sauf que la teinte est
beaucoup plus sombre, que la bande médiane des ailes posté-
rieures est d’un brun foncé uniforme et que les nervures
tranchent très distinctement en blanchâtre sur le fond général
obscur. Nous ne connaissons pas encore la femelle de cette
nouvelle forme de Chionobas qui parait constituer une race
locale ou géographique de Verdanda.
30 Syrichthus Inachus Ménélries v. Thibelana Auslaul.
Cette Hespéride, pour laquelle il conviendrait de créer un
genre spécial, est répandue dans l'Amurland, en Mandchourie,
en Corée et dans le nord de la Chine. Elle descend aussi jus-
qu'au Thibet où elle vient d’être observée dans la région
montagneuse qui est située au nord de Ta-tsin-lou. Mais les
exemplaires de cette dernière contrée ne sont pas semblables
à ceux du sud-est de la Sibérie. Leurs ailes paraissent en
proportion plus courtes; elles sont en dessus d’un brun beau-
coup plus foncé, presque noir, avec la série des petits points
blancs qui coupe le milieu de l'aile supérieure de part en part,
plus sinuée vers le bord interne. Le dessous ne présente au-
cune trace de la nuance verdâtre qu’on observe le long de la
côte et sur une grande partie du disque de l'aile postérieure
d'Inachus. Il est d'un brun uniforme, et la double rangée, qui
précède la marge de ladite aile, est formée de taches noires
vivement bordées de chaque côté par des traits d’un blanc
presque pur. Cette variété diffère beaucoup du type par son
aspect général. Nous la désignons sous le nom de Thibetana
par allusion à son lieu d’origine.
4° Anthocharis Orientalis.
C'est une forme bien intéressante que celle dont nous don-
nons la description ci-dessous. Elle nous a été envoyée sous
le nom de Belia v. Orientalis que nous lui avons conservé et
qui n'est, sans doute, qu'une dénomination in lilteris. Elle
provient des bords de la rivière Viloni, dans le nord-est de la
Sibérie, non loin de la jonction de ce cours d’eau avec le
fleuve Léna. Au point de vue géographique, ce fait est déjà
remarquable en lui-même, car jusqu’à présent aucune Antho-
charis du groupe de Belia n'avait encore été observée dans
une latitude aussi septentrionale. Sous le rapport des carac-
tères, l'insecte dont il s'agit n’est pas moins intéressant, en
ce sens qu'il s'éloigne de Belia pour se rapprocher plutôt de
notre Insularis qui est spécial à la Corse ct à la Sardaigne.
Le sujet que nous avons sous les yeux est une femelle. Il est
plus petit qu'Insularis; ses ailes paraissent plus allongées et
plus arrondies à l’apex et à l'angle anal. Le fond des ailes est
blanc, les supérieures portent au sommet une tache apicale
noirâtre fortement sablée de blanc, à bord ou contour interne
très concave et sur laquelle on remarque une grosse tache
blanche rectangulaire à la côte, et au-dessous trois autres
plus petites, allongées jusqu’au bord externe. La macule cel-
lulaire est très étroite et réniforme. La côte est légèrement
pointillée et la base est lavée de noirätre. Les secondes ailes
LE NATURALISTE 49
sont également toutes blanches, avec la base faiblement pou-
drée de noir et de très petites taches de cette couleur à l’ex-
trémité des nervures. Les dessins sous-jacents sont visibles
par transparence. En dessous, Orientalis offre un faciès spé-
cial qui l’éloigne aussi bien d’Insularis que de Belia. Elle dif-
fère de toutes deux par la teinte verte générale des secondes
ailes qui est beaucoup plus sombre, quelque peu noirâtre par
les nervures qui sont finement écrites en jaunâtre, ainsi que
par les taches d’un blanc mat qui sont confluentes dans le
sens transversal de l’aile au lieu d'être séparées et arrondies,
formant ainsi des sortes de bandes, irrégulières à bords den-
ticulés ou découpés. Cette singulière Anthocharis, dont nous
ne connaissons qu’un unique exemplaire, nous paraît trop
différer de Belia pour qu'il soit possible de la considérer
comme une simple variété de cette espèce. Nous l’envisageons
plutôt comme une forme séparée ou indépendante, et cela
avec d'autant plus d'apparence de raison qu'aucune des va-
riétés de Belia ne dépasse vers l’Orient le centre de l’Asie,
AUSTAUT,
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 29 janvier 1900.
M. Marion, membre correspondant de l'Académie des sciences,
directeur du Musée d’histoire naturelle de Marseille, vient de
mourir. — MM. A. Armand et A. Verneuil donnent un
nouveau procédé d'extraction du caoutchoue, contenu
dans les écorces de diverses plantes et, notamment, des Lan-
dolfia. Le broyage, en milieu humide, procédant par écrase-
ment ou percussion, combinés avec l'emploi judicieux de l’eau
chaude servant à la lévigation de la masse semi-pâteuse ob-
tenue, conduit directement à l'extraction totale du caoutchouc
contenu dans les écorces, et cela sans avoir recours à aucun
réactif chimique. L'industrie pourra tirer un parti très avan-
tageux de ce nouveau mode d’extraction.
MM. Charrin et Levadité ont recherché les moyens de dé-
fense de l'organisme contre les propriétés morbi-
fiques des sécrétions glandulaires. La plupart des
sécrétions glandulaires, des sucs digestifs, en particulier,
les produits du pancréas engendrent, quand on les introduit
dans les tissus, une série de lésions;le système nerveux, plus
spécialement, subit cette influence morbifique. Or, ces prin-
cipes pancréatiques sont quotidiennement déversés dans l’in-
testin, sans provoquer, à l’état normal, le moindre accident :
de quels moyens donc dispose l'organisme pour se défendre ?
Les recherches des auteurs montrent que l’organisme est
protégé contre les attributs nuisibles de certaines sécrétions
digestives, de préférence pancréatiques, et que les modes de
protection, suivant qu'il s’agit de la partie inférieure ou su-
périeure de lintestin grêle, offrent des analogies et des diffé-
rences. En haut et en bas, ces moyens de défense résident
surtout dans l'intervention de la muqueuse, des parasites
intestinaux et peut-être du sang; mais, en haut, cette dé-
fense consiste, en outre, dans le maintien, à l’état du mucus
ou de la couche utérine, de ces sécrétions glandulaires dans
l'intérieur même du canal alimentaire, tandis qu’en bas il s’agit
d’une atténuation des propriétés morbifiques de ces produits.
M.F. Wallerant présente une note sur la mon-existence
de minéralogie du système hexagomal. Il résulte des nom-
breux exemples fournis que le système hexagonal n’existe pas
dans la nature, et que ce système n'a qu’une importance pure-
ment théorique. Dans tous les corps cristallisés, les particules
complexes sont disposées suivant les mailles d’un réseau cu-
bique ou d’un réseau pouvant se déduire de ce dernier par une
légère déformation.
M. Jules Garnier adresse une note sur la Géologie de
l'Australie occidentale. La contrée est surtout fournie de
granits en travers desquels se montrent de très longues
bandes parallèles de roches dioritiques. Ces branches ont
souvent comme élément, outre de l'amphibole hornblende et
du feldspath, de l’or en grain presque invisible. Les zones
dioritiques présentent des concentrations métalliféres formées
surtout d'or natif, de fer oxydulé, galène, etc. Les zones métal-
lifères se distinguent seulement à l’œil, de la diorite, par une
apparence pseudo-syéniteuse. Les granits,en cassant l’ensemble
des diorites, plus ou moins métallifères, se fondent souvent au
contact avec ces dernières roches, et sont, parfois, aurifères
eux-mêmes. Les diorites, de couleur très verte, et, par suite, à
base de protoxyde de fer, forment un ensemble probablement
magnétipolaire, Les eaux minéralisés pénètrent, à la longue,
dans les roches les plus compactes du granit ou de la diorite,
particulièrement dans leurs parties pépiteuses oufeldspathiques,
formant de véritables filons d’eau en mouvement.
Séance du 5 février 1900.
MM. Prillieux et Delacroix ont étudié une maladie des rai-
sins des vignes du Caucase. Les observations, faites sur
de nombreux échantillons, ne permettent pas de nier l'existence
au Caucase du véritable Black-Rot, causé par le Guignardia
Bidwellii; mais elles autorisent, du moins, à affirmer que la
maladie que l’on a appelée le Black-Rot au Caucase est, le plus
souvent, différente de celle qui, sous ce nom, a produit, tant
en Amérique qu’en France, de si grands désastres, et que les
grains de raisin atteints de cette maladie sont attaqués par un
champignon parasite du genre Guignardia, voisin de celui qui
produit le Black-Rot, mais, cependant, d’espèce différente :
le Guignardia reniformis n. s.
MM. Emile Bourquelot et H. Hérissey adressent une note
sur l'individualité de la séminase, ferment soluble, sé-
crété par les grains de légumineuse, albumen corné pendant
la germination. Les grains germés de fenugrec et de luzerne
contiennent, outre une petite quantité de diastase, une pro-
portion beaucoup plus grande d’un ferment particulier, agissant
sur les hydrates de carbone des albumens cornés des légumi-
neuses. Ce dernier ferment serait donc une espèce; comme,
d’ailleurs, il parait exister dans beaucoup de semences en ger-
mination, et que, de plus, les hydrates de carbone, qui four-
nissent des mannoses à l'hydrolyse, ontété, quelque fois, désignés
sous le nom de séminine, les auteurs proposent d'appeler ce
ferment séminase.
M. Ed. Bureau décrit la première plante fossile en-
voyée de Madagascar. M. Joly, médecin de la marine, a
fait parvenir au Muséum de Paris un petit nombre d’échan-
tillons de roches portant des empreintes de plantes suflisam-
ment nettes. C’est un schiste tendre, très noir, tachant les
doigts et le papier, qui a été recueilli sur la côte de la baie
d’Amposuidava. C’est un ÆEquiselum nouveau, auquel l’auteur
propose de donner le nom de £. Jolyi, nom qui a peut-être le
tort de ressembler un peu à celui d'E. Vaujolyi, mais qui est,
cependant, suffisamment distinct. Bien que nouvelle, elle a des
affinités nettement triasiques, et l'impression qui résulte de
son examen, vient à l'appui de l’opinion de M. Boule, qui re-
garde les schistes charbonneux du nord de Madagascar comme
assimilables aux schistes à charbon de Karoc,-dans l’Afrique
australe.
M. Bleicher continue ses études sur les phénomènes de
métamorphisme de produetion de minerai de fer,
consécutifs à la dénudation du plateau de Hay (Met.
Neo.). La dénudation du plateau s’est accompagnée et a été
suivie des phénomènes de dissolution, de substitution, du
métamorphisme des roches calcaires en particulier, de for-
mations nouvelles de minerai de fer, dont les causes doivent
être cherchées plutôt dans les circonstances géologiques qui
ont accompagné ce phénomène que dans des émissions sou-
terraines.
P. Fucus.
Le Gérant: PAUL GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 11.
50
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vitus.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata,
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— laricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— _tristis.
— Jlentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— craccæ.
— viciæ.
— flavipes.
— flavofemoratum.
— pisi.
— æneum.
— tenue.
— vorax.
— yiolaceum.
— hæmatodes.
— pomon£æ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
— Jigustici.
LE NATURALISTE
D En EPL OT ER ES PR PR
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CIAPRES DÉSIGNES
(Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
S'ADRESSER A LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes, RUE DU BAC, 46, PARIS
Otiorhynchus rancus.
—, picipes.
Lixus angustatus.
‘[ Anthonomus pomorum.
— pyri.
.— druparum.
:— ‘rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyÿx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arictis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberea linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica olcracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
—. campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— _bitterensis:
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hymènoptères.
Vespa crabrc.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopæus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia roste.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Pseudo-Névroptères.
Lophyrus pini.
—, rufus.
Cephus pygmæus.
—: compressus.
Sirex gigas. -
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbiæ.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apiforme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— aurillua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlosophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheinatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— Oornata.
Carpocoris baccarum.,
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Tvphlocyba rosæe.
— ÿiridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa,
| Aphis rosæ.
— cerealis.
— fabæ.
— pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tilite.
— salicis.
— persicæe.
—. olæe.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme,
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hæmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Sinulium ornatum.
— maculatum.
— reptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
H:ematopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis.,
— lactucæ.
Pesomya acetosa.
Psilomva rosæ.
Hylèemya coarctata.
Spiloÿrapha cerasi.
Dacus oles.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Asgromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
922% ANNÉE
2 SÉRIE — N° 3 1 2
1° MARS 1900
Méduses Fossiles
La forte teneur en eau du corps des Méduses, la déli-
catesse de celui-ci et la facilité avec laquelle ilse décom-
pose venant s'ajouter à l'absence totale de parties solides,
leur enlève toute ébauche de fossilisation; il est donc
très remarquable qu'on ait pu trouver quelques em-
preintes extérieures fossiles de ces animaux, ce qui, du
reste, n’a pu avoir lieu qu'à la faveur de circonstances
extrêmement favorables.
Ces conditions spéciales se sont rarement réalisées, et,
On ne remarque que peu de différences entre ces
divers nodules, ils sont formés d'un noyau de silice de
couleur jaune ou ocre sombre; quelques-uns sont cal-
caires et quand la matière calcaire a été dissoute et que
l'oxyde de fer s’est développé, il reste un nodule ferrugi-
neux.
Ils portent à la partie supérieure une sorte d'étoile
comptant de 4 à 7 branches, laquelle est l'empreinte des
bras buccaux de la Méduse.
En examinant le mode de vie de certaines espèces de
Méduses actuelles, on à pu expliquer la formation de ces
nodules ; les empreintes de méduses que l’on retrouve
sont l'effet du moulage des empreintes, laissées par
les Méduses vivantes sur la vase où elles vivaient. Des
expériences ont été faites à ce sujet :
Fig. 1, — Empreinte artificielle de Méduse.
jusqu’à ces dernières années, le gisement des calcaires
lithographiques de Solenhofen était le seul qui eût fourni
des Méduses fossiles.
Cependant, en 1886, dans une collection de fossiles
provenant de la vallée de Coosa (Alabama, région du sud-
ouest des Etats-Unis) se trouvaient un certain nombre de
nodules, rappelant l'aspect des oursins et portant une
sorte d'étoile de # à 7 rayons; ils étaient mélangés à des
fragments de triobites et de brachiopodes appartenant
au Cambrien moyen.
Ces nodules ont été examinés par M. Walcott au ser-
vice géologique des États-Unis, et après les avoir com-
parés aux empreintes du Cambrien et du Jurassique de
Bavière, il les a reconnus comme des empreintes de
Méduses fossiles.
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
Si l’on metune Méduse dans .un vase plein d'eau et
ayant son fond garni d'une couche de plâtre, et que l'on
fasse écouler l’eau lentement par un ajutage latéral, la
Méduse s'étale et l'on obtient sur le plâtre une empreinte
de sa face inférieure : c'est ce que montre le grand dessin.
On y voit l'empreinte des quatre bras qui se sont rétrac-
tés, les quatre pores génitaux et la bouche. Si nous fai-
sons une contre-empreinte de ce moulage, nous obte-
nons, sur une surface plane, quatre bourrelets représen-
tant les bras, ce qui donne, au nombre près, une
empreinte semblable au Brooksella alternata Walcott,
Méduse fossile du Cambrien moyen des États-Unis,
représenté sur la même planche.
Les Méduses fossiles ont donc été soit moulées dans
la vase, ou bien leur empreinte a été marquée sur la vase
22 LE NATURALISTE
comme j'ai essayé de le démontrer plus haut. Puis, cette
cavité a été remplie par des infiltrations de matières cal-
caires bientôt remplacées par de la silice. Si l'on fait
une analyse chimique de ces nodules, on voit qu'ils con-
tiennent 88,33 0/0 de silice et 3,91 0/0 de calcaire ;
quant à cette silice, elle provient de débris quartzeux ou
d'organismes siliceux comme les spicules d’éponges et
les radiolaires contenus dans la vase marine et qui
peuvent être tenus en dissolution par l’humus produit
dans la décomposition de la matière organique marine.
On peut se rendre compte du caractère et de l'habitat
de ces Méduses fossiles en examinant la vie des Diosco-
méduses appartenant au genre Cassiopée et Polyclonia,
lesquelles vivent en grand nombre sur la vase. Ces Mé-
Fig. 2.— Appareil employé pour la reproduction artificielle
des empreintes de Méduses fossiles.
duses existent dans la mer des Appalaches, le long des
côtes des États-Unis, à une faible profondeur et non
loin des rivages. Si l'on fait une coupe de ce fond de
mer, on constate une alternance de boue calcaire et
argileuse et de bancs de sable. Ces conditions sont favo-
rables au plus ou moins rapide ensevelissement des
Méduses.
L’endoderme des Méduses actuelles Polyclonia et Cas-
siopée est très résistant et supporte bien le moulage.
Elles pourraient donc être recouvertes par le sable
flottant, puis il se formerait une cavité par suite de la
décomposition de l'animal, cavité remplie ensuite par
une infiltration siliceuse ou calcaire, et l’on aurait en
définitive un nodule semblable à ceux que nous possédons.
Les Méduses fossiles ont existé depuis le Cambrien
moyen jusqu'au Crétacé.
Dans le Cambrien, les empreintes de Méduses sont
nombreuses. Le genre Brooksella alternata Walcott est
représenté en Amérique par un nodule sur lequel est
appliqué une sorte d'étoile à 6, 7 ou 12 lobes représen-
tant la trace des tentacules de la Méduse; c'est ce que
montre la figure ci-jointe, d’après un échantillon de la
galerie de Géologie du Muséum de Paris.
Le genre Laotira Walcott se rapproche de ce dernier.
Le genre Dactyloides a été rencontré dans le Cambrien
supérieur ; 1l est remarquable, parce que ses empreintes,
principalement trouvées sur des schistes, ont longtemps
été prises pour des algues; il forme une sorte d'étoile
de 5 à 7 rayons dont les extrémités sont largement ren-
flées, et qui ont un aspect assez écrasé. Un très joli
spécimen de ce genre est exposé dans la nouvelle galerie
de Paléontologie du Muséum, à la vitrine du Cambrien;
il s'agit bien là d’une empreinte de Méduse sur la vase,
laquelle s’est durcie et transformée en
schistes.
Ce n’est pas seulement en Amérique
que leCambrien contient des Méduses ;
le Dr Nathorst à trouvé des sortes de
pyramides étoilées à quatre ou cinq
lobes qu’il considère comme ayant été
produites par l'introduction d’une boue
fluide dans la cavité des Méduses. Il a
obtenu des formes semblables en mou-
lant, avec du plâtre, la cavité interne
de Méduses vivantes.
On a aussi attribué à ces animaux
les traces que l’on trouve sur des grès
et qui sont scientifiquement connues
sous le nom d'Eophytons ; ce sont sim-
plement des bourrelets grossiers en
Brooksella alternata, Walcott
(Fossile échant. du Muséum).
saillie à la surface de ces grès, et qui ont été pris tantôt
pour des empreintes de plantes, tantôt pour des pistes
d'animaux. Le D' Nathorst estime que ces trainées
auraient bien pu être faites par des Méduses,caril a réussi
à obtenir des traces semblables en faisant ramper des
Méduses sur un sol peu résistant.
Dans le terrain Jurassique, on ne trouve lés Méduses
fossiles que dans les schistes calcaires du Jurassique
supérieur de Solenhofen, à Eichstadt et Kelheïm en Ba-
vière. La vase fine, qu'était anciennement le calcaire de
Solenhofen, a gardé fidèlement l'empreinte de la Méduse
qui venait s'échouer sur le rivage de la mer Jurassique.
Ces Méduses appartiennent, d’après Haeckel, à diffé-
rents genres : Rhizostomites admirandus Hack. Rhizo-
stomites lithographicus Hack, appartenant aux Rhizosto-
mides ; KEulithoda fasciculata Hack; Semeostomite
Zitelli ; Acraspedites antiquus Hack, aux Semeostomées ;
Palægina gigantea Hack, aux Æginides; Trachyne-
mites deperditus Beyr, aux Trachymenides. À cette liste
|
D Cm
LE NATURALISTE 53
il faut encore ajouter de nombreuses empreintes de Mé-
duses mal conservées et indéterminables.
Toutes ces Méduses ont la plus grande affinité avec
leurs alliées actuelles; seule, la Palægina gigantea se
distingue des Æginides vivantes par sa taille extraordi-
naire et par la grosseur inusitée de ses huit bras. Peut-
être même cette empreinte grossière n'est-elle que celle
de la tête d’une seiche fossile.
On a encore trouvé de belles empreintes de Méduses
dans les silex remaniés de la craie de Hambourg, et Kner
a décrit quelques mauvaises empreintes de Méduses des
silex de la craie de Galicie.
Par cette courte étude, on voit comment les Méduses
nous sont parvenues à l’état fossile à travers les âges
géologiques. Combien de zoophytes, n'ayant pas laisssé
de traces, ou seulement de ces empreintes connues sous le
nom d'empreintes problématiques, vivaient dans les mers
géologiques ? Le rôle du géologue et de celui qui étudie
les restes fossiles consiste précisément à trouver la solu-
tion de ces problèmes de zoologie paléontologique.
E. MAssarT.
NOUVELLES EXPÉRIENCES
Relatives à la désinfection antiphylloxérique
DES PLANTS DE VIGNES
Ce sont, on le sait, les apports de boutures de vignes qui ont
grandement contribué à la dissémination du fléau phylloxérique.
Déjà, au début de l'invasion du vignoble français, il y a plus
de trente ans, il avait été reconnu que, partout où l'on avait
constaté les foyers phylloxériques, à l'étranger aussi bien qu'en
France, il avait été introduit des plants américains dans la
localité.
Plus récemment, en Algérie (1885), en Champagne (1890), en
Lorraine (1894), de constatations faites et vérifiées, il est tou-
jours résulté que les nouveaux foyers n'avaient pas d'autre ori-
gine que des importations de plants provenant de pays antérieu-
rement envahis.
À diverses reprises, les vignerons ont réclamé un procédé
certain pour désinfecter les plants tant français qu'américains
racinés où non racinés. Cette question est de nouveau agitée au
moment des tentatives de reconstitution en Algérie et en Cham-
pagne.
En 1887, M. G. Couanon communiquait précisément à l'Aca-
démie des sciences, en collaboration avec MM. Henneguy et
E. Salomon, le résultat d'expériences qui, s'appuyant sur les
remarquables travaux de M. Balbiani, relatifs à la résistance des
œufs du phylloxéra, établissaient que par une immersion dans
l'eau chaude à 450 à 500 c., pendant une durée de dix minutes,
on pouvait traiter préventivement les boutons non racinés.
Ces expériences ont été reprises cette année en les étendant
aux plants racinés, qui sont le plus fréquemment employés dans
la reconstitution, et aussi les plus souvent contaminés, partant
les plus infectieux.
C'est de nouveau à Thomery, chez M. E. Salomon, que les
expériences ont été faites.
Le 31 janvier, des plants de Noah racinés d'un an d'âge ont
été soumis à l'immersion dans l’eau chaude :
1° Pendant cinq minutes, un paquet de dix plants. Tempéra-
ture à l'entrée : 530 c.; à la sortie 54° €. ;
2 Pendant quatre minutes, un autre paquet de dix plants.
Température à l'entrée : 540 c.; à la sortie : 51° c.:
3° Pendant trois minutes, un autre paquet de dix plants. Tem-
pérature à l’entrée : 530 c.; à la sortie : 54° c,
À la fin des opérations, l'examen des racines semblait bien
montrer que les plants n'avaient nullement souffert,
Les paquets furent partagés par moitié.
Quinze plants (cinq, quatre, trois minutes), auxquels il fut
ajouté cinq plants témoins n'ayant pas été trempés dans l'eau
chaude, furent immédiatement plantés en serre et forcés à la
manière des vignes destinées à la production des raisins de
primeur.
Les quinze autres plants (cinq, quatre, trois minutes) furent
mis en stratification pour être plantés, aussi avec témoins, à
l'époque ordinaire des plantations à l'air libre, La plantation à
eu lieu le 5 mai.
Aussi bien, dans la serre qu'à l'air libre, le succès a été com-
plet. La reprise à été parfaite. Les vignes sont aujourd'hui très
belles et très bien constituées.
On peut donc affirmer qu'une immersion dans l'eau chaude à
53° c. pendant cinq minutes, est un moyen pratique el économi-
que pour désinfecter des plants de vignes quelconques, racines
où non racines. Insectes et œufs sont tués et les plants vivent et
végètent normalement,
EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1900
Congrès international d'anthropologie et
d'archéologie préhistorique.
Le 12e Congrès international d'anthropologie et d'archéologie
préhistorique aura lieu au palais des Congrès, à Exposition,
du 20 au 25 août 1900.
QUESTIONS PROPOSÉES PAR LE COMITÉ
I. Application de l'Anatomie comparée et de la Paléontologie
à la question de l'origine de l'homme,
Malgré la valeur des travaux déjà publiés sur la question, les
documents ne sont pas assez nombreux pour permettre d'établir où
même d'esquisser la phylogénie de l'espèce humaine. Aussi con-
vient-il de signaler toute découverte nouvelle de Lémurien ou de
Singe fossile et tous les faits anatomiques de nature à établir des
relations entre les Lémuriens, les Singes et l'Homme,
II: L'aurore du paléolithique.
Dans ces dernières années, des publications ont été consacrées
à des silex taillés provenant du Pliocène de l'Inde, de Forest bed
de Cromer,de dépôts donnés comme préglaciaires del'Angleterre,
des alluvions inférieures de Mesvinou dela vallée de la Somme,etc.
Il serait important d'examiner sices découvertes où d'autres ana-
logues, qui pourraient être communiquées, remontent à une
époque antérieure à celle des espèces dites chaudes (Hippo-
potame, Eléphant antique, Rhinocéros de Merck, etc.).
IT. Comparaison des objets d'industrie humaine {rouvés dans
les alluvions quaternaires de l'ouest de l'Europe avec les objets
analogues recueillis dans les autres pays du monde.
La découverte en Egypte et dans d'autres contrées de l'ancien
et du nouveau monde d'instruments en pierre reproduisant tout à
fait les formes des silex taillés recueillis dans les alluvions qua-
ternaires de l'Europe occidentale, soulève une question des plus
intéressantes : on doit se demander si tous ces objets sont syn-
chroniques. Pour résoudre cette question, il est nécessaire, non
seulement de comparer morphologiquement les objets dont il
s'agit, mais surtout d'établir l'âge exact des gisements nouvelle-
ment découverts.
IV. Passage du paléolithique au néolithique.
Les recherches faites au Mas-d'Azil, à Campigny, dans
l'Yonne, en Ecosse, etc., ont convaincu beaucoup d'archéologues
que le passage du paléolithique au néolithique s'est fait d’une
facon insensible. Les harpons cylindriques en bois de renne ont
été remplacés par des harpons plats en bois de cerf; des galets
en partie usés ont fait leur apparition, de même que le pic et Je
tranchet; la poterie se montrerait avant la hache polie, Ces faits
ont besoin d'être confirmés par de nouvelles observations; la
stratigraphie et la paléontologie doivent venir au Secours de
l'archéologie. Enfin, le passage a dû se faire de différentes
facons et à des époques diverses suivant les lieux. Il est donc
nécessaire de mettre en œuvre toutes les méthodes de recherches,
toutes les trouvailles nouvelles pour résoudre cette importante
question. et
V. Description des édifices sur pilotis comparables aux habita-
tions lacustres ou palalittes des Alpes, découverts dans les
diverses régions de l'Europe.
54 LE NATURALISTE
EE OEM E PR ER STI TRE EE DE TC COCO QE
En dehors de l'étude de ces édifices et des objets qui y ont
été recueillis, il serait intéressant de déterminer quelles sont les
sépultures contemporaines des habitations sur pilotis. Pour la
Suisse, en particulier, est-il possible d'établir un parallélisme
exact entre les trouvailles faites dans les lacs et sur leurs rives ?
VI. Passage du néolithique aux métaux.
Les objets en cuivre pur sont-ils assez nombreux et présen-
tent-ils des formes assez spéciales pour faire admettre l'exis-
tence d'un véritable âge du cuivre ayant précédé l’âge du bronze?
Il est à désirer que de nouvelles observations, accompagnées
d'analyses chimiques, soient apportées au Congrès.
VII. Rapports dela civilisaïion dite méditerranéenne : 1° avec
les civilisations égéenne et mycénienne ; 2° avec les civilisations
analogues de l'Europe centrale.
Il n'existe pas encore de travail d'ensemble tenant compte,
par exemple, des résultats découlant des recherches faites récem-
ment en Egypte. Le point essentiel serait de pouvoir déterminer
le centre de diffusion (européen ou asiatique) des formes imdus-
Lrielles et artistiques dont on constate l'apparition vers la fin de
l'époque néolithique.
VIII. Aire géographique, divisions et chronologie du deuxième
âge du fer.
L'aire géographique de la civilisation du deuxième äge du fer
est encore mal délimitée, en particulier vers le Sud-Ouest et le
Nord-Est. Il serait très utile d'indiquer sur une carte les stations
de cette époque. Il serait non moins utile d'apporter des obser-
vations nouvelles susceptibles de confirmer ou de modifier la
classification de Tischler. Enfin, la chronologie du deuxième
âge du fer a besoin d'être précisée pour chaque région. Ne
pourrait-on pas, dans ce but, tirer parti des trouvailles de vases
grecs à figures rouges et de monnaies gauloises ?
IX. Caractères anatomiques de l’homme primitif et des races
humaines préhistoriques.
Il convient non seulement de décrire les caractères des races
préhistoriques, mais encore de les interpréter. Tous les faits
nouveaux relatifs au Pithecanthropus, en particulier, présente-
raient un intérét considérable.
X. Survivances ethnographiques pouvant jeter quelque lumière
sur les mœurs et l’état social des populations préhistoriques.
La Mélanésie en général, l'Australie en particulier, l Amérique
du Sud, les Pays Barbaresques,'etc., ont fourni, dans ces der-
niers temps, la matière d'observations très intéressantes dans
cet ordre d'idées. Ce serait faire œuvre fort utile que de classer
et de comparer les données nouvelles ainsi recueillies.
XI. Jusqu'à quel point les analogies d'ordre archéologique ou
ethnographique peuvent-elles autoriser l'hypothèse de relations
ou de migrations préhistoriques ?
Il est indispensable de distinguer les faits qui s'expliquent par
les mêmes états sociaux ou les mêmes milieux de ceux qui sont
de nature à autoriser hypothèse d'une identité de race.
N. B. De petites vitrines seront mises pendant quelques jours
à la disposition des savants qui voudraient placer sous les yeux
des membres du Congrès les objets sur lesquels porteront leurs
communications.
MM. les Congressistes sont priés d'envoyer, avant le 4er juil-
let 1900, à M.le Dr Verneau, secrétaire général du Comité
(rue Broca, 148, à Paris), les titres de leurs communications et
de lui faire savoir s'ils ont l'intention d'exposer des objets. Ils
sont invités également à préparer à l'avance les illustrations
qu'ils voudraient voir figurer dans le Compte rendu de la XIT°
session, afin qu'aucun retard ne soit apporté à la publication du
volume.
EXCURSIONS
Le Comité d'organisation du Congrès international d'Anthro-
pologie et d'Archéologie préhistoriques de 1900 à pensé que des
excursions, qui permettraient de se rendre compte des principales
richesses archéologiques de la France, offriraient un véritable
attrait non seulement pour les savants étrangers qui assisteront
à la XIIe session, mais aussi pour beaucoup de Français. Il
serait possible d'organiser les excursions suivantes :
1° Excursions dans le centre, le sud-ouest et le sud
de la France.
(Retour par Lyon et Solutré.)
A. Ateliers néolithiques du Grand-Pressigny. Stations paléo-
lithiques et néolithiques de la Vienne. Stations et grottes paléo-
lihiques de la vallée de la Vézère. (6 jours.)
B. Musée de Toulouse. Grottes du Mas-d'Azil. Mégalithes de
Luchon. (5 jours.)
C. Causses de l'Aveyron. Gorges du Tarn. Musée de Lyon.
Station de Solutré. (6 jours.)
Retour à Paris. à
Les Congressistes pourraient prendre part à l’excursion totale
ou à une partie seulement.
20 Excursion en Bretagne.
Musées de Nantes et de Vannes. Mégalithes des environs
d’'Auray, de Carnac, de Locmariaker. Collections du Chatellier
à Pont-l'Abbé et Aveneau de la Grancière à Pontivy. Kjokken-
modding de la Torche. Camp vitrifié de Peran, près Saint-
Brieuc.
Retour à Paris,
(Durée totale de l’excursion : 6 à 8 jours.)
30 Excursion à Amiens et à Abbeville.
(Durée : 2 jours.)
49 Excursions autour de Paris.
Gisements dans les alluvions, stations, camps et fonds de
cabanes. Mégalithes.
Retour chaque soir à Paris.
Chacune de ces excursions serait dirigée par les spécialistes
connaissant le mieux les régions à parcourir. La dépense s’élé-
verait approximativement à 30 francs par jour, tous frais com-
pris.
Toutefois le Comité d'organisation ne peut encore prendre
aucun engagement ferme. Sa décision est subordonnée aux
adhésions qui lui parviendront.
Les savants qui désireraient prendre part à une ou plusieurs
excursions projetées sont priés d'en aviser, le plus tôt possible,
M. le Dr Verneau, secrétaire général, rue Broca, 148, à Paris.
Dés qu'un nombre suffisant d'adhésions auront été recueillies, un
programme détaillé sera élaboré et adressé à toutes les personnes
qui auront fait connaître leur intention de participer à l'un ou à
l'autre des voyages actuellement à l'étude. ñ
Congrès international de sylviculture.
Un Congrès international de sylviculture se tiendra à Paris, au
cours de l'Exposition universelle de 1900, dans le Palais des
Congrès; sa durée sera de quatre jours, du # au 7 juin 4900, non
compris le temps qui pourra être consacré à des excursions en
forêt.
PROGRAMME DU CONGRÈS
Ire SECTION
Économie forestière.
4° Traitement des forêts de sapin; transformation en sapinières
des taillis à faible rendement situés en régions montagneuses.
20 Conséquences physiologiques et 'culturales des éclaircies.
3° Utilité de la culture du sol dans les coupes à régénérer
(labour à la charrue, crochetages avec où sans répandage artifi-
ciel de semences).
49 Traitement des taillis sous fufaie en vue d'augmenter la pro-
duction du bois d'œuvre.
50 Déficit ou excédent de la production forestière dans les
diverses régions du globe; étude du mouvement des importations
et des exportations.
6° Législation des terrains en montagne; législation forestière
internationale.
7° Examen général, au point de vue du peuplement forestier,
des essences exotiques acchimatées ou naturalisées.
8° Stations de recherches et d'expériences; — bureaux d'infor-
mations; — utilité, programmes et résultats.
ITIe SECTION
Influence des forêts au point de vue du maintien
des terres, du régime des eaux et des phéno-
mènes météorologiques.
1° Météorologie forestière.
20 Influence des forêts sur les eaux souterraines dans les
régions de plaines.
39 Restauration des montagnes et correction des torrents.
40 Travaux de protection contre les avalanches et mesures
défensives contre les dégâts causés aux propriétés inférieures
par les eaux provenant» directement des glaciers. (Exemple
catastrophe de Saint-Gervais.)
5° Améliorations pastorales, fruitières; réglementation des
pâturages.
LE NATURALISTE 5h)
LL 5 dun een
60 Défense contre les érosions de l'Océan: voies de vidange
dans les forêts des dunes.
1° Mise en valeur, par le boisement, des ferrains incultes et
des terres épuisées.
89 Défense contre les incendies.
IIIe secriox
Application des sciences à la Sylviculture.
19 Unification internationale des mesures de cubage pour les
bois d'œuvre; forme géométrique des tiges d'arbres; procédés de
cubage.
20 Avantages comparatifs du bois et du fer (durée, conserva-
tion, ré: ce).
3° Utilisation des déchets des exploitations ; — poëles à com-
bustion lente; — distillation, fabrication d'alcool, — pâle à
papier.
49 Sols forestiers. — Cartes botanico-forestières.
59 Amélioration des transports forestiers.
Pour tout ce qui concerne le Congrès, s'adresser à M. Charle-
magne, secrétaire général, 15, rue Faraday, Paris.
LES PLANTES DE FRANCE
Leurs Chenilles et leurs Papillons
CENTAURÉE (Centaurea)
Centaurea Facea, — Melitwa cinria L., chenille
en avril, août, septembre; papillon en mai, juin, août;
toute la France, — Melitæa Phæbe $S. V., chenille en mai,
septembre; papillon de mai à juillet; toute la France, —
Nyssia zonaria S. V., chenille en mai, juin, papillon en
avril; France centrale, Alsace.
Centaurea aspera. — Acidalin alyssumata H.,
chenille en mai; papillon en mai-juin; environs de
Cannes.
Centaurea nigra. — Eupithecia satyrata H., che-
mille en septembre sur les fleurs; papillon en juin-juil-
let; Basses-Alpes, Colmar.
CAREX (Carex)
Carex riparia,— Nonagria Algæ Esp., chenille en
juillet; papillon en juillet-août; toute la France, — Apa-
rophyla australis B., chenille en mars, papillon en sep-
tembre-octobre, France. méridionale. — Calocampa ve-
tusta H., chenille en juin; papillon en septembre,
octobre, mars, avril; toute la France, — Hydrelia uncana
L., chenille en août, papillon en juin, toute la France.
— Plusia festucæ, L., chenille en juin, juillet, papillon
en août, par toute la France. — Gnophos glaucinaria H.,
chenille et papillon en juillet-août; France cent., mérid.
et Orient.
CHANVRE (Cannabis)
Cannabis sativa, — Heliothis armigera I. che-
nille en août-septembre, papillon de juin à septembre ;
toute la France,
CHARDON (Carduus)
Vanessa cardui L., chenille en juin-août; papillon
en mai, juillet, septembre; partout. — Agrotis vestigialis
Hufn., chenille en juin-juillet; papillon en août-sep-
tembre; partout.
EPILOBE (Epilobium)
Epilobium angustifolium — Deilephila vesper-
tilio Eys., vespertilioides B., epilobii Bork.. porcellus L.,
chenilles en juillet-août; papillons en juin et septembre,
Epilobium palustre, — Deilephila Galii S. V.,
elpenor L., chenilles en juillet-août; papillon en juin
et septembre; toute la France.
Epilobium roseum et montanum, — Pte-
rogon ænothæræ $S. V., chenille en juillet-août; papillon
en juin; France mérid., cent, et orient. — Cidaria sila-
ceata I., chenille de juillet et octobre; papillon de mai
à août; France cent. et sept.
SCABIEUSE (Scabiosa)
Scabiosa succisa, — Melitwa maturna L., chenille
en mai, papillon en juin, centre et nord. — Meltæa
artemis L. V., chenille en avril, juillet et septembre;
papillon en mai et août; partout. — Macroglossa fuci-
formis L., chenille en juillet; septembre, octobre;
papillon en mai et juillet, partout. — Syntomis phegea
L., chenille en mai-juin; papillon en juin-juillet; Alpes.
Calocampa vetusta H., chenille en juin; papillon en sep-
tembre, octobre, mars et avril; partout. — Eubolia plum-
baria Fab., chenille en avril et juin; papillon de mai à
août ; toute la France.
Scabiosa arvensis, — Calocampa exoleta L., che-
milles en juin-juillet; papillon en août, septembre, mars
et avril; toute la France.
Scabiosaleucanthea,— Epimecia ustulata II.,che-
mille en mai-aouût; papillon en juin-juillet; France mérid.
— Cleophana antirrhini H., chemille en juillet; papillon
en juin; centre et Midi.
Sabiosa diversa, — Acidalia degeneraria H., che-
nille en avril et juillet ; papillon de mai à août ; centre et
midi. — Fidonia atomaria, chenille en juin-septembre ;
papillon d'avril à août; toute la France, — Aspilastes
ochrearia Rossi, chenille en avrilmai; papillon en mai,
août, septembre, toute en France.
Mouron (Slellaria)
Stellacia media. — Luperina virens L., chenille
en juin; papillon en juillet; partout. — Caradrina alsines
Brh., superstes Tr., chenille en février-mars, papillon
en juin-juillet; partout. — Caradrina laraxaci H., che-
nille en février-mars, papillon de juin à septembre;
partout. — Caradrina ambigua $. V., chenille en mars,
papillon de juin à août; partout. — Mania maura L., che-
nille en avril-mai; papillon en juin-juillet, partout. —
Eupitheciu pygmæata H., chenille en juin, sur les fleurs
et les graines ; papillon en mai-juin, environ de Paris, —
Coremia ferrugata Clerck, chenille en juin, juillet, sep-
tembre, octobre ; papillon en juillet; août, mai, partout.
SUREAU (Sambucus)
Gortyna flavago S. V., chenille en juill et sur les
tiges, papillon en août-septembre; centre et Nord. —
Urapteryx sambucaria L., chenille en avril, mai; papillon
en juin, juillet, partout. — Tephrosia crepuscularia V.,
chenille en mai et septembre; papillon en mars, avril,
juin à août; partout. — Hybernia bazaria S. V., chenille
en mai; papillon d'octobre à mars; partout.
BRVYONE (Bryonia)
Hepialus humuli L., chenille en avril sur les racines;
papillons en juin et juillet; toute la France.
FOUGÈRE (Pteris)
Pteris aquilina, — Lriopus pteridei Fab., chenille
de juillet à octobre; papillon en juin et juillet; Indre,
Gironde, Doubs, Ille-et-Vilaine. — Tephrina petraria H.,
56 LE NATURALISTE
chenilles en juin et juillet; papillon en mai et juin; par-
tout.'
GARANCE (Rubia)
Rubia Himctorium, — Deilephila Gali $S. V.,
chenille en juillet-août; papillon en juin, septembre ;
partout.
Rubia peregrinma. — {oremia basochesiata Dup.,
chenille de novembre à mai; papillon de septembre à
mars ; Cannes et Hyères.
LA TERRE, SON ORIGINE, SA FIN
La terre tourne autour du soleil, parce qu'elle voudrait
tomber sur lui et qu’elle ne le peut pas, grâce à la force de
propulsion en ligne droite à travers l’espace, qui lui a été
communiquée dès l'origine de sa formation.
Si la terre était sortie de l'immense masse de feu qui cons-
tituait primitivement le soleil, comme un boulet sort d’un
canon, suivant le rayon de cette énorme masse, c'est-à-dire per-
pendiculairement à la tangente, elle aurait fait comme le boulet
que nous tirons en l'air et qui retombe sur la terre : elle serait
retombée sur le soleil, après s’en être écartée plus ou moins
loin; à moins qu'elle n'ait été lancée avec une force suflisante
pour neutraliser l’attraction du soleil et passer dans le champ
d'attraction d’une autre étoile. Mais comme la masse de feu,
dont la terre incandescente s’est détachée, tournait sur elle-
même, elle s’en est séparée grâce à cette force centrifuge, et
s'est mise à tourner autour du soleil, en s’éloignant de lui;
jusqu'au moment où elle est arrivée à la distance où elle se
trouve aujourd’hui par rapport au soleil. C'est-à-dire jusqu'au
moment où il y à eu équilibre entre l'attraction, qui tendait à
la faire retomber sur le soleil, et la force centrifuge due à sa
rotation autour de lui. Une fois ces deux forces équilibrées
entre elles il n’y avait plus de raison pour que la terre con-
tinue à s'éloigner du soleil, ni pour qu'elle s’en rapproche ni
retombe sur lui. Cela s’explique par le principe de la con-
servation de l'énergie. Une fois que la terre tourne dans son
orbite, il n’y a plus de raison pour qu'elle en sorte jamais.
Cependant, s’il y a une force capable de la détacher du soleil
et de l’amener dans son orbite actuelle, à coup sûr il y aura
un jour une autre force de réaction qui la fera plus tard
retomber sur lui; quelle que soit d’ailleurs cette réaction,
qu'elle soit médiate ou immédiate, éloignée ou rapprochée,
directe ou indirecte, peu importe.
Si le mouvement de translation en ligne droite, dont la terre
est animée, venait à disparaître, la terre tomberait sur le
soleil, en un intervalle de temps que l’on peut calculer très
exactement. Si, au contraire, l'attraction du soleil pouvait
subitement disparaître, la terre filerait immédiatement en sui-
vant la tangente à son orbite actuelle. 11 en résulte que la
force qui retient la terre dans son orbite et l'empêche de s’en
échapper, c’est l'attraction ; alors que la force qui l'empêche de
tomber sur le soleil, comme une pomme qui tombe de l'arbre,
c’est la force vive dont elle a été animée à l’instant même où
elle a été formée, au moment où elle s’est détachée du globe
de feu primitif qui lui a donné naissance.
Et remarquons bien que, de tout temps, les hommes ont fait
sortir la terre du feu. Cela est si vrai que, le mot wr, qui
existait bien des siècles avant Abraham pour exprimer l’idée
de feu, veut encore dire aujourd’hui en allemand, principe
ancien temps, origine des âges : à l’origine, la terre est sortie
d’une masse de feu, qui était le soleil avec les autres planètes
incandescentes. On voit qu’il n'y a absolument rien de nouveau
sous le soleil, et que la science d'aujourd’hui n’est qu’une
réminiscence de celle des premiers hommes. Tant il est vrai
de dire que l'intelligence humaine n’a pas varié et ne s’est pas
développée en raison de ses merveilleuses applications pra-
iiques. On a toujours su que la terre avait commencé par être
un globe de feu. Comment avaient-ils pu savoir cela? Sans
doute en étudiant de près la nature des volcans qui leur mon-
trait que la terre n’était qu’un globe de feu à peine refroidie
à sa surface. En effet, sur seize cents lieues d'épaisseur, la
terre est déjà à cent degrés à une lieue de profondeur, et à
deux mille degrés à vingt lieues de la surface du sol: reste
toujours seize cents lieues de feu, à une température bien
supérieure à celle du fer en fusion. Nous sommes sur une
sphère de feu, dont la croûte solidifiée n’a que quelques lieues
d'épaisseur, qui n’a absolument rien de comparable à l’épais-
seur de la peau d'une orange, et qu'on ne peut même pas
comparer à la fine pelure d’une pêche, c’est à peu près l’épais-
seur du tissu de soie d’un gros ballon. Et encore, il faut
admettre que cette écorce relativement si fine, offre de vastes
cavernes, d'immenses cavités irrégulièrement réparties dans
son épaisseur, qui sont plus ou moins distendues par de la
vapeur d'eau. Il suffit, en effet, de descendre dans une mine,
à quelques centaines de mètres de profondeur, pour se rendre
compte de l'immense quantité de petites veines d’eau qui
filtrent à travers l'épaisseur de la terre, et qui se réduisent en
vapeur, à une lieue de profondeur : de là la fréquence des
tremblements de terre, et le grand nombre des volcans, qui
jouent le rôle d'évents ou de soupapes de sûreté, en lançant
dans les airs jour et nuit une immense quantité de vapeur
d’eau, qui retombe ensuite en pluie sur la terre, dans la mer
ou sur les continents.
La surface de la terre se refroidit de plus en plus, avec les
milliers d'années. Nous en avons la preuve dans l'étude de la
géologie, qui nous montre que le sol de Paris, par exemple,
produisait autrefois les plantes de l’Algérie, et plus ancien-
nement encore celles des Tropiques. Si la terre tend à se
refroidir petit à petit, il arrivera un jour où la température
de 100 degrés ne se fera plus sentir qu’à deux lieues de pro-
fondeur, au lieu d'une; de sorte qu’il y aura là une immense
quantité d’eau infiltrée dans les roches, à deux lieues de pro-
fondeur au lieu d’une. Il restera donc alors, à la surface de la
terre, beaucoup moins d’eau qu'aujourd'hui, et peut être plus
du tout. Or, qui est-ce qui pourra vivre, quand il n'y aura
plus du tout d’eau sur la terre? Personne, car alors il n’y
aura plus un seul végétal, pas une herbe, pas un arbre, pas
même un seul lichen. Ce sera alors la mort et l'aridité, qui
règne actuellenent à la surface de la lune. La lune a été autre-
fois une terre comme la nôtre, avec des plantes, des animaux
et pout-être des hommes. Or, tout le monde sait ce qu’elle est
aujourdhui, une solitude glacée, sans air et sans eau; alors
qu’autrefois il y avait des mers avec des poissons, dont on
voit encore les restes et les empreintes immenses. Et encore
ne voyons-nous les traces que de ees dernières mers, alors que
les continents occupaient plus de place que l’Océan.
Dr Boucon.
a
Apparition tardive des Lampyres,
en 1899
M. S. Jourdain a communiqué a la Société entomolo-
gique de France une note sur l'apparition tardive des
Lampyres.
En Normandie, les Lampyres se montrent dans la
saison chaude, au mois d’août en particulier,
Cette année leurapparition a été beaucoup plustardive,
et ils se sont montrés surtout au mois d'octobre, époque
où la température avait conservé une douceur excep-
tionnelle,.
Mais, si leur apparition a étéretardée, ils ont, en re-
vanche, été d'une abondance remarquable.’ Ainsi, sur
le fossé d’un jardin mesurant 60 mètres, on en a, le
23 octobre, compté plus de 30, quand en temps ordinaire
on en verrait deux ou trois.
Cette anomalie paraît devoir être rapportée à cette
particularité que l'été, très chaud, a été d’une sécheresse
extraordinaire. Les pluies ne sont survenues que vers la
fin de septembre,et l’insecte,arrêté dans son évolution, à
pu enfin se développer.
Il y a peu de temps que les Lampyres ont disparu: le 9
du mois de novembre, il en a encore été recueilli deux
sur le même fossé.
LE NATURALISTE 57
REPRODUCTION À BON MARCHÉ DES DESSINS
Ce procédé, qui permet de reproduire à bon marché
des dessins ne présentant pas de demi-teintes, a fait
l'objet d'un brevet pris par M. Eugène Gay.
On recouvre au pinceau un papier glacé à dessin avec :
Gommerarabiquer fete, Men. 100 gr.
Bichromate de potasse.............. 40 »
AU E ter tee eee ete à 300 ce
Carbonate de soude... TS)
Le papier, séché,est exposé à la lumière sous le calque
ou le dessin selon la lumière et l’opacité du papier qui
porte le dessin ou le calque; cinq ou quinze minutes suf-
fisent pour l'impression. On lave alors avec une éponge
jusqu'à ce que les lignes apparaissent nettement. Puis on
essore au papier buvard et on sèche à lair libre. On
recouvre alors, à l’aide d’une éponge, avec :
Gomme laque mere" 15 gr.
Noirdenlampe ss Mere NE 10 »
Esprit-de-vin de commerce......... 150 »
et on le plonge dans un bain d'acide chlorhydrique pen-
dant vingt minutes. Le dessin apparait en noir. On lave
à l’eau pure.
H. Coupin.
Diagnoses de Coléoptères Américains et asiatiques
Trichodesma nigromaculata. Un peu allongé et peu large,
subparallèle, en majeure partie orné d’une pubescence blanche,
celle-ci maculée de noir, avec quelques poils clairs redressés.
Tête ornée d'une pubescence blanche assez fournie. Antennes
roussâtres, à deux avant derniers articles assez élargis, le ter=
minal long. Prothorax large, dilaté sur le milieu des côtés, en
majeure partie blanc, élevé sur le disque en saillie, subarrondi
au sommet et orné de poils brunâtres avec une petite tache
antérieure, de chaque côté, et presque tout le milieu de la base
noir, glabre, ces parties ornées d'une ponctuation granu-
leuse. Ecusson blanc. Elytres pas plus larges que le prothorax,
striés, les interstries ayant une ponctuation granuleuse forte;
ils sont blancs ornés des macules suivantes noires : deux an-
térieures, une troisième latérale postmédiane, enfin une tache
apicale irrégulière. Dessous du corps foncé, orné d’une pubes-
cence blanche; pattes un peu roussâtres, pubescentes.
Long. 4,5 mill. Birmanie (coll. Pic).
Espèce très particulière par sa forme et sa coloration bien
nette, à macules foncées très distinctes.
Trichodesma regale Reiïiche, des indes-Orientales, est plus
large et plus robuste, le prothorax étant muni sur le disque de
petites houpettes pileuses et orné d’une pubescence générale
claire, les élytres plus larges sont entièrement ornés de pubes-
cence dense à l'exception d’une sorte de bande médiane dé-
nudée n’atteignant pas la suture.
Long. 5,5-7 mill.
Trichodesma goyavensis. Court et large, orné d’une pubes-
cence d’un gris fauve avec quelques poils clairs dressés, à l'ex-
ception du milieu postérieur du prothorax et d'une grande
macule suturale antérieure d’un noir brunäâtre, cette dernière
plus ou moins bordée de poils foncés dressés. Antennes parais-
sant obscures. Prothorax large, élevé sur le disque en saillie
subanguleuse, nettement dilaté par côté en avant de la base,
marqué de noir brunâtre sur son milieu à partir de la saillie
et jusque sur la base. Ecusson foncé. Elytres un peu plus larges
que le prothorax, faiblement costiformes, avec les intervalles
ornés d’une ponctuation subcarrée; ils sont assez largement
ornés d’une pubescence d’un noir brunâtre étendue sur la
suture antérieurement; cette tache plus étroite en arrière et,
au-dessous de celle-ci, sont deux houpettes de poils brunâtres,
placées une de chaque côté et assez près de la suture. Dessous
du corps foncé, pubescent grisâtre ainsi que les pattes qui
sont obscures.
Long. 4,5 mill. Brésil : Goyas. (coll. Pic).
Procuré par M. Donkier, ainsi qne les autres espèces de la
même provenance. Voisin de gibbosa Say, mais bien distinct
par son dessin.
M. Pic.
Serins rouges et animaux a1binos
D'après de récents travaux, les colorations si variées
de la peau, des poils et du plumage chez les animaux
tiennent à l'alimentation. Suivant la nature des ingesta,
cette coloration se modifierait.
Darwin avait déjà cité un procédé des Indiens d'Amé-
rique pour donner aux plumes de perroquets une belle
couleur jaune; on leur arrache lesdites plumes et on
inocule dans la blessure un peu de la sécrétion laiteuse
de la peau d’un petit crapaud. Les plumes repoussent
jaunes et elles conservent cette couleur, même si on les
arrache de nouveau.
L'ingestion de certains corps chimiques modifie la
couleur des animaux, On aurait ainsi changé le plu-
mage des pigeons en leur faisant prendre, pendant la mue,
des couleurs d’aniline mélangées à des matières grasses,
Avec le méthyléosine on aurait ainsi coloré des pigeons
isabelle en beau rouge, avec le méthyl violet en bleu
éclatant (1).
La mode actuelle en Angleterre est de donner au plu-
mage des canaris une teinte orange grâce à une nourri-
ture spéciale.
On est arrivé ainsi à obtenir des canaris couleur
de cannelle. Plus cette nuance est intense, plus la va-
leur de l'oiseau augmente.
Les procédés varient, chaque éleveur a le sien qu'il
tient secret. On emploierait la racine d’orcanette, le
cloude girofle, le cachou, l'écorce de quinquina, le sang-
dragon, le bois de campêche, etc., etc.
Une alimentation spéciale peut également transformer
la couleur.
Le mais, pris pendant la mue, donne aux poulesblanches
une teinte Jaunâtre.
Le poivre de Cayenne donne aux oiseaux une colora-
tion rouge; cette couleur se fixe également sur le
jaune des œufs, Cette action serait due aux principes
colorants du poivre combinés aux matières grasses et
qui ne peuvent s'en séparer,
Le chènevis rend noirs les bouvreuils et quelques
autres OISeaux.
Les Indiens de l’Amazone,en nourrissant le perroquet
vert commun avec la graisse de gros poissons siluroides,
lui procurent de magnifiques panaches de plumes rouges
et jaunes.
On ferait même varier la couleur des papillons en
nourrissant les chenilles de plantes différentes (1)
(Koch),
Le pelage des mammifères pourrait aussi être influencé
par le genre de nourriture. Nous n'en avons pas de
(4) La Nature 1899, 6 décembre, p. 38.
(1) Voir Hérédité de DELAGE, p. 279.
38 LE NATURALISTE
Preuve directe, mais les travaux des zootechnistes nous
fournissent des arguments,
Les zootechnistes (1) distinguent en effet dans une
espèce animale comme le bœuf, le mouton, etc., deux
catégories nettement tranchées : les races rustiques et
celles améliorées.
Les races rustiques se contentent d’une alimentation
grossière peu assimilable, Elles sont maigres et très
résistantes, leur peau est épaisse, dure, très pigmentée
avec des poils gros et rudes.
Les races améliorées ne supportent qu'une alimenta-
tion choisie alibile ; elles ont une peau fine, peu pig-
mentée, une constitution lymphatique; le tissu adipeux
sous-cutané est abondant, car il est en raison inverse
de la quantité de pigment.
Les races très perfectionnées tendent à l’albinisme :
celui-ci s'accompagne d'obésité et de stérilité.
Dans une certaine mesure, le cas de l’homme ne serait
pas sans quelque analogie. Les blonds sont en général
plus lymphatiques et engraissent plus facilement que les
bruns. D' REGNAULT.
NOTE SUR LES TOURBES
Les combustibles si répandus que l'on désigne sous le
nom de tourbes résultent, comme on le sait, de l’accu-
mulation et de la transformation, sur place, de plantes
aquatiques herbacées ou ligneuses, les plus récentes vi-
vant sur les débris des plus anciennes ; l'étude de ces
débris a montré qu'ils appartenaient le plus souvent à
des plantes semblables à celles qui vivent à la surface.
À mesure que l’on s'enfonce dans l'intérieur d’une
tourbière, l’altération des tissus végétaux devient de plus
en plus complète et on arrive bientôt (60 à 80 centimètres
de profondeur) à un niveau où la composition du combus-
tible semble rester à peu près constante et constitue la
tourbe faite. Ce qui frappe dans l'examen microscopique
de la tourbe à partir de ce niveau, c’est la ténuité des
débris composés des éléments les plus résistants des végé-
taux, tels que cellules épidermiques, cellules subé-
reuses, vaisseaux ligneux, cuticules, spores, grains de
pollen, etc., tousles tissus mous ont disparu ; étant restés
en place n'ayant subi aucune trituration de la part de
corps durs, il semble que l'on devrait rencontrer des por-
tions étendues de membranes et de tissus résistants. La
propriété que possède certaines Bactériacées de dissoudre
les membranes moyennes des cellules, peut donner l’ex-
plication de cette division, sur place, qui se retrouve dans
d'autres combustibles plus anciens, tels que les Cannels
et la Houille.
Le passage de la tourbe fraîche à la tourbe faite se fait
successivement sur une épaisseur de 60 à 80 centimètres
à partir de la surface et l’on suit le degré d'altération des
tissus à mesure qu'ils s'en éloignent.
Nous pouvons prendre pour exemple, un fragment de
racime de Bouleau fig. 4 enfoui à quelques centimètres ;
les rayons cellulaires, les cellules de parenchyme ligneux
sont souvent remplis de grains d'amidon polyédriques a,
mesurant 7 à 10w, agissant encore sur la lumière
UN NN Ne ere
- (4) V. Traité de Zootechnie générale Cornevin 1891, Baïllière
p. 24, et Mélhodes praliques en zoolechnie Pacs, 1898 Carré
et Naud, p. 84.
polarisée et séparés les uns des autres par un réseau pro-
toplasmique. Leur altération commence par la perte de
erpropriété d'agir sur la lumière, propriété qui persiste
; a
Stan eease
F,:eR
ne se û
Fig. 1. — Coupe longitudinale d'une racine de Bouleau.
a, Grains d’amidon remplissant les cellules de parenchyme
ligneux.
b, Cloison oblique divisant un vaisseau ligneux suivant sa
longueur.
c, Ponctuations sur les parois cellulaires.
pour les parois des cellules ligneuses moins altérables
qui les renferment, les grains seramollissent ensuite soit
sous l'influence de quelque diastase, soit sous une in-
fluence microbienne et il ne reste de visible que le réseau
protoplasmique.
Les mailles du réseau se fluidifient à leur tourun peu
plus bas, et le produit qui se colore souvent en rouge-
brun vient tapisser d’une couche d'épaisseur variable les
parois internes des cellules; d’autres fois il se rassemble en
masses sphériques, un peu diffluentes, ou en globules à
contours bien définis, de dimensions très inégales et con-
tenus en nombre variable, dans les cellules des rayons et
Fig. 2 — Racine de Bouleau plus altérée.
Le protoplasma s'est modifié et s’est réuni, en globules variés
a; b.
du parenchyme ligneux. Ces globules ressemblent assez
à des gouttelettes'de résine colorée en rouge-brun ou bien
encore au Pseudocomis vitis.
LE NATURALISTE 59
Souvent les globules renferment des vacuoles plus ou
moins nombreuses. Si elles sont en petit nombre, elles
sont sphériques ; si au contraire elles se touchent, leur
pression mutuelle leur donne l'aspect de cellules polvé-
driques b, quelquefois elles ont fini par se réunir et le
globule prend l'aspect d'une sphère complètement creuse.
Nous attribuons la formation de ces globules à la pré-
sence du protoplasma entourant les grains d’amidon et à
celle des grains d’amidon eux-mêmes. M. Prillieux a vu
des grains d’amidon analogues s’entourer d’une mince
couche de substance gommeuse qui augmente à mesure
que les grains d’amidon diminuent de volume.
La substance de ces globules, en s’'imprégnant d'acides
tannique et ulmique si fréquents dans les tourbières
acquiert une résistance remarquable à la décomposition ;
on la retrouve intacte dans la tourbe faite, au milieu des
produits de la destruction des cellules.
Cette destructiou est due en grande partie à des Bacté-
HESCRRNS
Fig. 3.— Portion de cadre elliptique d’un vaisseau de ra-
cine de Bouleau couverte de Microcoques.
a, Membrane existant entre les épaississements rectilignes
parallèles du cadre.
b, Epaississements rectilignes recouverts comme les mem-
branes d’un nombre considérable de Microcoques.
riacées qui affectent les unes, la forme coccoide, les
autres celles de bâtonnets, de Streptocoques ou de Cla-
dothryx. Nous signalons aujourd’hui seulement les Mi-
crocoques.
Arrivées à un certain degré d’altération, les parois des
cellules et des vaisseaux n’agissent plus sur la lumière
polarisée et ne se teignent plus par le chloro-iodure de
zinc, mais elles portent à la face interne les traces nom-
breuses de Microcoques. Beaucoup de ces microorga-
nismes sont encore adhérents et mesurent 0, 5 p .
La fig. { montre en b un cadre elliptique de vaisseau
non altéré recueilli près de la surface de la tourbière ; la
figure 3 présente un cadre semblable, mais provenant
d’une couche plus profonde ; les épaississements et les
membranes qui les réunissent sont couverts de cette es-
pèce de Microcoque que nous avons désignée sous le
nom de Microcoscus paludis, var. 8 . Nous l'avons ren-
contrée également sur les membranes communes des cel-
lules ; elle aurait pour fonction de dissoudre les mem-
branes communes et certains épaississements, une autre
variété; mesurant 0,8 a 0,9 y M. paludis, var. «x, se ren-
contre également sur les parois des cellules et des vais-
seaux ; quelquefois les Cocci semblent disparaître dans la
pulpe qui les recouvre, Les fonctions de cette variété
semblent être d'attaquer les épaississements ordinaires,
mais non les ornements.
(À suivre.)
B. RENAULT,
Correspondant du ministère de l'Instructien publique.
4
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 12 février 1900.
M. Emile !Blanchard, doyen de la section de zoologie,
l'ancien professeur d'entomologie du Muséum, vient de mourir à
un âge avancé. C'était le successeur de Geoffroy Saint-Hilaire ;
il y a 35 ans qu'il était membre de l'Académie des Sciences.
M. Malaquin continue ses recherches sur l'évolution des
monstrillides, ces copépodes qui vivent en parasites chez les
annélides pendant la plus grande partie de leur existence et qui
deviennent libres à l’âge adulte. L'ontogénèse des monstrillides
présente la série des phénomènes suivants : 1° une évolution
progressive de l’œuf jusqu'à la larve nauplius, à peu près
typique du copépode; 20 une évolution régressive provoquée par
la pénétration des nauplius dans le système sanguin d'un
annélide, et qui ramène l'embryon à un état pseudoblastulaire
indifférencié; 39 un parasitisme évolutif qui comprend deux
phases : adaptation de l'embryon pseudoblastulaire indifférencié
et formation d'un deuxième stade nauplien, parasite interne
— l'évolution continue ensuite progressivement, l'ontogénèse
forme les tissus et organes de l'adulte comme dans un dévelop-
pement direct.
Animaux
PROMENÉS OU TUÉS DANS LES CIRQUES
CHEZ LES ANCIENS
Mongez a publié dans les Mémoires de l'Académie des
Inscriptions (1) une longue étude sur les animaux pro-
duits par les anciens dans les cirques ou les amphi-
théâtres, et il m'a paru curieux et utile de résumer
en quelques pages ce volumineux mémoire, tout en éli-
minant néanmoins ce qui ma paru peut-être un peu
hasardé dans les conjectures du savant académicien,
comme on le verra en ce qui concerne l'Aigle.
Julius Capitolinus, qui écrivait, sous Constantin, l'his-
toire de quelques empereurs romains et lui dédia son
ouvrage, nous dit, dans la Vie de Maxime et de Balbin
(chap, vin), que les combats des gladiateurs et les mas-
sacres d'animaux dans les jeux publics avaient eu
d'abord pour but de s'assurer une protection céleste
contre l'ennemi, et d’assouvir la soif de sang qui tour-
mente Némésis. Il ajoute que d'autres croient que « les
Romains, partant pour la guerre, avaient dû s’accou-
tumer ainsi à la vue du sang d'hommes nus combattant
et s’entre-tuant, afin que dans les batailles ils ne redou-
ro
(1) Mémoires de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres ;
Paris, t. X, 1833, pp. 360-460, in-40.
60 LE NATURALISTE
EE EE CE TE ET PSS ON
tassent pas les ennemis armés, et n'eussént horreur ni
des blessures ni du sang. »
Du reste, ce même goût pour des spectacles de ce genre
est encore aujourd'hui le nôtre. Dans la civilisation
comme ailleurs, les extrêmes se touchent : la brute con-
fine à l’homme aux sentiments élevés; aujourd'hui,
même en France, on fait combattre sous nos yeux un
taureau contre un tigre ou un lion, et surtout contre
plusieurs hommes. Du reste, comme nous le verrons
tout à l'heure, les combats de taureaux — corrida con
muerte, — ne datent pas d'aujourd'hui, et les Espagnols
auraient tort de revendiquer la paternité de ce genre de
sport. Elle appartient aux Thessaliens.
De quelle manière les anciens prenaient-ils les animaux
nécessaires pour les hécatombes du cirque? Les écrits de
Némésien, d'Oppien, de Gratien, etc., fournissent à ce
sujet des détails nombreux; deux des plus curieux
moyens mis en usage pour prendre les lions sont ceux-ci,
que citent Pline dans son Histoire naturelle (VIT,
cap. xvi) et Némésien (Cynegeticon, vers 303 et sq.) :
Pline dit : « C'était autrefois une entreprise périlleuse
que de prendre des lions,.et l'on employait principalement
les fosses creusées à ce dessein. Sous l'empire de Claude,
le hasard enseigna un moyen plus simple et bien peu
digne, ce semble, d’un animal aussi redoutable : un
berger de Gétulie arrêtait la fureur de l'animal en jetant
sur lui une draperie., On transporta bientôt dans les jeux
publics cet étonnant spectacle, et lon en croyait à peine
ses yeux en voyant un animal aussi terrible tomber sou-
dain dans une torpeur complète, pour le plus léger tissu
qu'on lui jetait sur la tête, et se laisser lier sans opposer
la moindre résistance ; sa force est, en effet, tout entière
dans ses yeux, On est, après cela, moins étonné d'ap-
prendre que Lysimaque, enfermé avec un lion par ordre
d'Alexandre, ait pu étrangler cette bête féroce. »
De son côté, Némésien dit, en parlant de la chasse en
général : «Il faut, entre autres instruments de chasse, se
pourvoir d’un cordon qui puisse entourer les grands bois,
et renfermer dans leur enceinte les animaux effrayés par
la vue des plumes qui y seront attachées ; car ces plumes,
comme les éclairs, frappent de stupeur les ours mêmes,
les plus grands sangliers, les cerfs fugitifs, les loups
hardis, et les empêchent de franchir ce léger obstacle.
Ayez soin de teindre ces plumes en couleurs différentes,
de les mêler avec des blanches et de donnér beaucoup
détendue à cet appareil. Choisissez de préférence la cou-
leur rouge. »
La glu, — généralement fatale aux oiseaux seulement,
— servait à prendre la grosse bête, comme nous l’apprend
Martial dans l’épigramme XI de son livre De Spectaculis.
« Un ours, en se roulant sur l'arène ensanglantée,
s'empêtra tellement dans la glu, que la fuite lui devint
impossible. Que les épieux luisants soient mis à l'écart
et cessent de montrer leur fer; que l’on ne voie plus voler
de javelots lancés par une main vigoureuse : que le chas-
seur aille saisir sa proie dans les airs, s’il aime à sur.
prendre les animaux des forêts en recourant à l’art de
l’oiseleur. »
Quelques récits de voyages racontent qu'aux Indes on
prendrait des tigres de cette manière, en couvrant un
grand espace de:terrains avec de larges feuilles d'arbres
engluées : au bout d’un instant, l'animal a les yeux et la
tête couverts de feuilles, et plus il se démène et veut se
frotter avec ses pattes, plus l'épaisseur de l’emplâtre
augmente...
Ceux qui se livraient à l’art de dompter les animaux,
les mansuetarii, et de se faire obéir par eux étaient tenus
en grande estime; ils laissaient volontiers supposer que
c'était au moyen des amulettes dont ils ornaient ces
animaux qu'ils les soumettaient à leur volonté; mais
c'était réellement, comme le dit Elien (Histoire des ani-
maux», livre X, ch. x), par les liens, les coups et le jeûne,
et par des aliments sucrés (1% atpogix ve nat }iu®, vois
Deopoïc,.…, Ta dE yhuxéta Tpopñ).
Les mansuetarii faisaient des choses réellement merveil-
leuses.
On vit, au théâtre, des éléphants traverser les sièges
des spectateurs en marchant sur une corde tendue, un
homme sur leur tête (Xiphilin, Histoire romaine, LXT,
XVII; — Suétone, Vie de Néron, ch. x1; — Vopiscus, Vie
de Carus, etc.); Sénèque (Lettre Lxxxv, in fine) dit : Le
plus petit Ethiopien commande à l'éléphant de se mettre
à genoux, et même de marcher surune corde. » — « On
voyait souvent des éléphants, dit Pline (VIII, un), jeter
en l'air des armes que le vent ne pouvait détourner, tant
était grande la force avec laquelle elles étaient lancées;
lutter contre les gladiateurs; danser la pyrrhique avéc
des mouvements affectés; marcher sur la corde; se
placer, comme des accouchées, dans des litières portées
par quatre autres éléphants; enfin entrer dans une salle
à manger remplie de convives, et aller s'asseoir pres
d'eux en calculant leur marche de manière à ne blesser
personne. »
D'autres éléphants traçaient avec leur trompe des
lettres sur un tableau (Pline, VIII, m1). Elien dit en avoir
été témoin (II, xt), etajouteque «les Indiens apprivoisent
si bien les lions, qu'ils les conduisent en laisse et les
emploient pour chasser les cerfs, les sangliers, les tau-
reaux et les onagres. »
J'ai déjà cité, à la monographie du lion, nombre de ces
animaux jouant dans le cirque avec des lièvres. Je rap-
pellerai cette épigramme de Martial (livre I, épig. 105) :
« Le cou du léopard se soumet au joug; le titre sup-
porte les coups de fouet, le cerf ronge un mors doré; les
ours de Libye obéissent au frein; un sanglier, pareil à
celui de Calydon, porte une muselière de pourpre; les
aurochs (bisontes) hideux trainent des chariots ; et l’élé-
phant danse à la voix de son noir maitre. En voyant ces
merveilles, quine croirait assister aux spectacles des
dieux? Voici cependant quelque chose de plus étonnant :
les lions se fatiguent de chasser les lièvres timides; ils
les lâchent, puis les reprennent; devenus maîtres de leur
proie, ils l’aiment et leur gueule lui offre une retraite
sûre; ils se plaisent à lui laisser des issues pour
s'échapper, et à contenir leurs dents pour éviter de lui
faire du mal. Une pareille clémence n’est pas un ouvrage
de l’art; mais les lions savent quel est le maître qu'ils
servent » — Délicate flatterie à l’adresse de Domilien.
D'après Mongez, « on aurait peine à croire le fait sui-
« vant, si Martial ne l’attestait deux fois : un aigle privé
« s'élevait dans les airs, portant dans ses serres un
« enfant sous le costume de Jupiter :
Æthereas aquila puerum portante per auras
Illaesum timidis unguibus hæsit onus.
Dic mihi quem portes, volucrum regina? Tonantem.
« IL est vraisemblable que cet oiseau était retenu par
un lien, comme nos ballons captifs. »
- C’est possible; mais je n'y crois pas. D'abord, cela eût
LE NATURALISTE 61
été extrémement imprudent, malgré toute la bonne
volonté de l'oiseau et son amitié pour le jeune enfant : il
eût pu éprouver soudain de la fatigue, de la frayeur, une
souffrance quelconque, et lâcher son fardeau d’une hau-
teur plus où moins considérable... Or, l'enfant n’était
as de bois... | ES :
Et ensuite, il y a mieux. L'association de ces trois vers
ferait effectivement penser qu'il s’agit ici d’un spectacle
donné au cirque où à l'amphithéâtre, dans les conditions
indiquées par le savant académicien; mais il n'en est
rien : les deux premiers vers sont le commencement
d'une épigramme qui en à huit, et que Martial intitule :
LE LION DE CÉSAR; en voici la traduction :
« Un aigle emporta jadis, à travers les airs, un enfant,
précieux fardeau que ne blessèrent point ses serres
timides (ce sont les deux vers cités; continuons :) Aujour-
d'hui les lions de César se laissent attendrir par leur
proie, et un lièvre se Joue sans péril dans l'énorme gueule
de l’un d'eux. Lequel de ces deux prodiges vous semble
le plus étonnant? L’un et l’autre décèlent ua auteur
au-dessus de tous les êtres : César a produit le second;
LE PREMIER EST L'OUVRAGE DE JUPITER. (Livre I,
épig. V1). ;
Donc, l'aigle en question était tout simplement Jupiter
métamorphosé en cet oiseau, et enlevant le jeune Gany-
mède pour en faire l’'échanson des dieux.
Le troisième vers cité par Mongez, et accolé aux deux
autres appartient à la Lv® épigramme dulivre V, qui
compte quatre vers. Les voici :
Dic mihi quem portes, volucrum regina? Tonantem.
Nulla manu quare fulmina gestat? Amat.
Quo calet igne Deus? Pueri. Cur mitis aperto.
Respicis ore Jovem? De Ganymede loquor.
« Dis-moi qui tu portes, roi des oiseaux? Le Dieu du
tonserre.
_— Pourquoi sa main n'est-elle pas armée de la foudre ?
Il est amoureux.
— Quel est l’objet de ses feux? Un enfant. — Pour-
quoi, le bec ouvert, le regardes-tu si doucement ? Je lui
parle de Ganymède. »
Comment Mongez — qui connaissait bien les deux épi-
grammes de Martial, à l’une desquelles il prenait deux
vers, et un à l’autre, — a-t-il pu s’imaginer qu'on dégui-
sait un enfant en Jupiter pour le faire enlever par un
aigle? Surtout quand, dans l’une et dans l’autre,
il s’agit de Ganymède? Dans la seconde, nous voyons
Jupiter porté par l'oiseau, comme tant d'autres divinités
sont portées par loiseau qui est leur attribut...
Il est probable que cette dernière épigramme de Mar-
tial avait pour objet un tableau, une statue, une œuvre
d'art quelconque, représentant Jupiter sur son aigle; ni
l’une ni l’autre, remarquons-le, ne se trouve dansle livre
De Spectaculis.
Il vaudrait mieux prendre au sérieux la Vie d’Esope,
dans laquelle on voit que ce dernier faire gagner un pari
au roi de Babylone Lycérus sur le roi d'Egypte Necta-
nébo, en faisant enlever par des aigles privés cinq ou six
enfants destinés à construire une maison dans les airs...
(Voyez ma monographie de l’Aigle.)
Parlons maintenant des combats d'hommes contre les
animaux, ou des animaux entre eux, ou simplement des
massacres d'animaux.
Scipion l’Africain, ayant détruit Carthage, dit Valère-
Maxime, donna au peuple romain des spectacles dans
lesquels on fit périr sous la dent des bêtes féroces les
transfuges des nations étrangères. (Faits et paroles mémo-
rables, Hv. IT, ch. vi.) Tite-Live ajoute les fuyards aux
transfuges,
Plutarque dit que les deux frères Lucius et Marcus
Lucullus firent combattre dans le cirque des éléphants
contre des taureaux, pendant leur édilité (Lucullus, II,
CXXXVI); Pline le dit aussi (VIII, vin).
Sous le consulat de Marcus Piso et de Marcus Mes-
sala (693 de Rome), Domitius Ahenobarbus, étant édile
curule, fit combattre dans le cirque cent ours de Nubie et
cent chasseurs venus d'Éthiopie (Pline, VIII, ch. xxxvi).
Marcus Æmilius Scaurus fit voir pour la première fois
aux Romains un hippopotame et cinq crocodiles, l'an 669
de Rome (85 av. J.-C.); on avait creusé une fosse, espèce
de lac (euripus) dans le cirque pour ces derniers animaux.
Il montra en même temps les ossements d'un cétacé
quelconque, que l’on disait avoir appartenu au monstre
marin à la fureur duquel avait été exposée la belle
Andromède (que tous les peintres représentent avec une
peau semée de lis, de roses et de pêches, tandis qu'elle
était bel et bien négresse, en sa qualité de fille de Céphée,
roi d'Éthiopie et de Cassiopée sa femme, deux nègres
authentiques, si leur histoire l'est).
Pline parle de ces ossements (IX, ch. v), auxquels il
donne « quarante pieds romains de longueur (environ
13 mètres), une hauteur plus grande que celle des élé-
phants indiens, avec un axe vertébral épais d'un pied
romain et demi (environ # décimètres) ». Scaurus avait
apporté ces ossements de Joppé. Pausanias ajoute à cette
fable que, près de Joppé, il y avait une fontaine dont
l'eau était rouge comme du sang, et que les gens du pays
disaient que Persée avait lavé dans cette fontaine le sang
dont le monstre blessé l'avait couvert en se débattant:
d'où la couleur rouge de l’eau. L’Arioste, trouvant cette
fable à son goût, s’en est emparé, et il fait jouer à Roland
le rôle de Persée.
Les crocodiles de Scaurus étaient sans doute appri-
voisés, car, dans le nome d’Arsinoë, beaucoup de ces ani-
maux, tenus en grande vénération, accouraient à la voix,
et prenaient à la main la nourriture qui leur était offerte
(Strabon, livre XVII).
Quant aux hippopotames, Ammien-Marcellin, qui
mourut l'an 390 de notre ère, dit (Histoire, XXII, xv) :
« On conduisit à Rome, pendant plusieurs siècles, des
hippopotames d'Égypte; à présent on n’en peut plus
trouver dans ce pays; les habitants disent que ces ani-
maux, las d’être poursuivis sans cesse, se sont retirés
vers les Biemmyes, »
Pompée, qui triompha trois fois (678, 681 et 693 de
Rome), est celui des Romains qui satisfit le plus souvent
la passion des fils de Romulus pour les spectacles du
cirque et de l’amphithéâtre.
(À suivre.) E. SANTINI DE RIOLS.
Le Gérant: Pauz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17,
62
LE NATURALISTE
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CI-APRES DÉSIGNÉS
Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
S'ADRESSER A LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes, RUE DU BAC, 46, PARIS
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vitus.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata.
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina. ;
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— Jaricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
— lentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— Craccæ.
— viciæ.
— flavipes.
— flavofemoratum.
— pisi.
— ææneum.
— tenue.
— vOrax.
— violaceum.
— hæmatodes.
— pomonæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
ligustici.
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arietis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberca linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica oleracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— _ bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Xévroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hyméènoptères.
Vespa crabrc.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopæœus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— Spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossularisæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
© — folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbi£.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apitorme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicsæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnéôphthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depresselia.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— Ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
— viridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa.
| Aphis rosæ.
— cerealis.
— fabæ.
— pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tiliæ.
— salicis.
— persicæ.
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hæmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula olcracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscala.
Sunulium ornatum.
— maculatum.
—Teptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
Hæmatopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassict.
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus olece.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
29% ANNÉE
15 MARS 1909
LES MEULIÈRES DE MONTMORENCY
La liste serait longue des hypothèses qui ont été suc-
cessivement émises pour expliquer l'origine et le mode
de formation des meulières des environs de Paris. Ces
roches constituent en effet une singularité des plus re-
marquables dans la géologie
tertiaire, et leur allure, com-
me leur composition chimi-
que, contraste incontestable-
ment avec les dépôts qui
prennent naissance sous n0S
yeux dans les bassins a-
queux. On a pensé àen faire
des productions analogues à
celles qui s'accumulent dans
le bassin des geysers, et le
Dr Eugène Robert trouverait
certainement de nouveaux
arguments à l'appui de sa
thèse, dans les caracteres
des sources siliceuses chau-
des du parc national des
États-Unis,inconnues de son
temps, et qui sont plus com-
plets que les sprudels islan-
dais. Cependant la présence
des fossiles animaux et vé-
gétaux dans les meulières,
depuis les limnées et les
planorbes jusqu'aux Chara
et} aux nénufars, empêche de croire à la haute tempé-
rature génératrice développée dans les sources chaudes,
Fig. 1. — Rognon de meulière de
près Andilly (Seine-et-Oise). 1/5 de la dimension naturelle.
roche qui les empäte et c'est aussi que, dans leurs cavités,
abondent des géodes où le quartz a parfaitement cristal-
isé, En regardant de plus près, on constate, d'un autre
côté, que la structure des meulières est plus compliquée
la carrière de la Berchère,
qu'il ne semblait de prime abord. Non seulement on y
retrouve la forme des êtres organisés qui sont devenus
fossiles, mais on y voit, de toutes parts, les inégalités sé-
dimentaires des dépôts lacustres ordinaires. L'idée qui
s'impose en conséquence,
c'est qu'elles ont pris nais-
sance dans la masse du
terrain déjà déposé, comme
les silex l'ont fait dans la
craie et que leur origine, par
conséquent, n’a rien à voir
avec les conditions des lacs
dans lesquels vivaient les
linnées et les chara,
Ce point de vue à d’au-
tant plus d'intérêt qu'il
vient cadrer avec la notion,
tous les Jours mieux acquise
de lincessante activité du
milieu géologique, de la vie
intense qui, au sein des
couches du sol, suit son
cours comme dans un tissu
organise,
Parmi les échantillons
dont l'étude est le plus pro-
pre à faire persévérer dans
cette manière de voir si
philosophiquement satisfai-
sante, Je signalerai aujourd'hui aux lecteurs du Natura-
liste ceux dont les portraits sont joints au présent article
et c'est pour, cela qu'on s'est souvent rabattu sur la | et qui, grâce à M. Hérodier, exploitant à Montmorency,
supposition de’grit-
fons siliceux froids
ou presque froids
se déversant dans
un lac quils ne
rendaient pas inha-
bitables. Cette der-
nière supposition
est un peu impru-
dente, car les lim-
nées actuelles,com-
me les Chara d'au-
jourd'hui, si analo-
gues à leurs congé-
nères tertiaires, ne
s'en accommode -
raient certainement
pas. Et c’est vaine-
ment quon à cru
lever la difficulté
avec M. Meugy en
admettant que les
meulières comme
nous les exploitons
n'étaient pas aussi riches en silice au moment de leur
dépôt let qu'elles se sont, pour ainsi dire, concentrées
par fune dissolution postérieure de calcaire.
Un fait qui domine toute cette histoire, c'est que les
fossiles sont ordinairement tout aussi siliceux que la
Le Naluraliste, 46, rue du Bac, Paris.
Fig. 2. — Rognon double de meulière de la carrière de la Berchère.
1/5 de la dimension naturelle.
et queje me plais à
remercier publi -
quement, sont ve-
nustoutrécemment
enrichir les collec-
tions géologiques
du Muséum d'his-
toire naturelle, Ces
échantillons pro-
viennent de la car-
rière de la Berchère
sur le territoire
d'Andilly (Seine-et,
Oise) et se signa-
lent, avant tout,
par la singularité
de leur forme en
méme temps que
par leur fort vo-
lume,
L'un des plus
simples est repré-
senté figure 1.C'est
un sphéroïde mesu-
rant 29 centimètres de diamètre horizontalet 30 centimètres
de diamètre vertical. On en trouve fréquemment de plus
parfaite sphéricité; mais ce sont précisément les imper-
fections qui, ici, sonti nstructives, Les principales consis-
tent en bourrelets horizontaux faisant une saillie plus
64
LE -NATURALISTE
ou moins considérable et quine sont pas très éloignés
d'être équidistants. Leur situation horizontale est - bien
celle qu'ils avaient dans la carrière et elle suffirait déjà
pour montrer qu'il faut l'attirbuer au moulage par voie
de silicification de certains incidents locaux de la strati-
d'ailleurs disposée
fication. La matière siliceuse est
Fig. 3. — Rognon triple de meulière de la carrière de
1/6 de la dimension naturelle.
en couches concentriques ayant tous les traits de
constitution d'une matière concrétionnée.
Mais ces circonstances sont affirmées d'une facon
beaucoup plus nette encore par l'échantillon représenté
figure 2 et qui consiste, comme on le voit, en deux boules
géminées. On a cassé une des boules, celle de gauche,
de facon à lui enlever
une espèce de calotte
et on a constaté alors,
outre la structure en
couches superposées
de la matière, la pré-
sence dans le nodule
de vastes cavités ren-
fermant de l'argile
analogue à celle qui
empâte les échantil-
lons dans la carrière
et quelquefois aussi,
du sable fort ressem-
blant à celui qui com-
pose le sous-sol des
exploitations et qui
aépend du niveau dit
de Fontainebleau.
Le spécimen qui
nous OCCupe à 45 cen-
TA
Fete,
Re
(san
timètres de longueur
horizontale. Sa hau-
teur verticale parle sommet de la boule de gauche est
de 2% centimètres et parle sommet de la boule de droite
restée intacte, de 21. Les deux boules sont associées à
une épaisse région stratifiée horizontalement et mon-
jont les mêmes accidents aue le nodule isolé,
la Berchère.
Enfin on a sous les veux, dans la figure 3, la repér-
sentation d'un rognon triple, formé de trois boules de
10 centimètres environ de diamètre intimement soudées
entre elles et à une zone de concrétion horizontale qui a
19 centimètres d'épaisseur.
Dans les trois'cas qui viennent d'être mentionnés, il y
a des fossiles, limnées, planorbes, etc.,
qui sont silicifiés au même titre que la
masse quiles empâte, et on ne peut
qu'être très frappé des contrastes que
les nodules présentent à cet égard avec
l'argile ambiante dans laquelle aucun
vestige fossilisé n'a jamais été rencon-
tré (1). Il est très clair que les coquilles
devaient, à l’origine, être distribuées
d'une facon uniforme dans le dépôt la-
custre, de nature argilo-calcaire, com-
posant le terrain, et la preuve,c'est que,
dans les pays où ce dépôt n’estpas sili-
cifié, et iln’en manque pas.les coquilles
aucunement
petits paquets correspondant aux no-
ne sont concentrées en
dules dans les gitesde meulières. Donc,
beaucoup de fossiles ont été dissous et
n'ont laissé aucune trace de leur pré-
sence. Mais ils n’ont été dissous qu'a-
près la réalisation du phénomène de
sihcification, et c'est ce qui nous permet
de compléter la théorie des meulières
qui, Jusqu'ici, Wa pas été tout à fait
comprise.
Tout d'abord, les vases argilo-calcaires d’un lac se sont
insérant dans leur
masse des coquilles, des bois, des fleurs de nénufar, des
tiges de chara et d’autres plantes. Plus tard, et sans
accumulées en lits horizontaux,
doute beaucoup plus tard, les eaux d'imprégnation qui cir-
culaient dans le sol se sont chargées de silice empruntée
Fig. 4.— Rognon compliqué de meulière de la carrière de la Berchère.
1/10 de la dimension naturelle.
sans doute à des amas de carapaces animales ou bien
plus vraisemblablement végétales, telles qu'en sécrètent
(1) Parfois on trouve des fossiles isolés dans l'argile qui rem-
plit des vacules des meulières; ils sont alors tout aussi silicifiées
que les meulières elles-mêmes.
LE NATURALISTE 65
les diatomées. Ces eaux, obéissant à la puissance d'attrac-
tion qui, dans tant de gisements divers, a déterminé la
production des rognons, ont silicifié lentement certains
points des couches.
Il s’est fait alors des nodules d’abord parfaitement
sphériques et qui grossirent très progressivement. Sou-
vent, des centres de productions étaient assez rapprochés
pour que leurs produits, en se développant, en soient
arrivés à se souder, et il s’est fait des géminations de
boules, des associations de trois, de quatre sphérules, des
masses tuberculeuses complexes à forme plus ou moins
bizarre, comme en présente la figure 4; enfin, des
couches, entre autres, silicifiées dans toutes leurs parties
sous la forme de plaques.
A ce moment, le terrain consistait en lits de calcaire
argilifère riche en coquilles lacustres et en débris végé-
taux, renfermant des portions silicifiées plus ou moins
importantes, caverneuses ou compactes, sphéroidales ou
étalées; disposition que nous voyons par exemple, dans
les assises du calcaire grossier de Pierrelaye prèsde Pon-
toise. Et c'est alors seulement que, par suite de modifi-
cations dans la géographie physique de la région, les
phénomènes de décalcification prirent naissance. Ces
modifications consistèrent dans la surrection du sol au-
dessus des masses aqueuses et datent d'une époque que
nous ne sommes pas à même d’assigner d’une facon cer-
taine, Alors, les eaux pluviaires chargées d'acide carbo-
nique s’introduisirent dans le sol, dévorant le calcaire là
où elles purent l’atteindre. En diverses localités, l’action
n'est encore que partielle, et c'est pour cela qu'on voit
les meulières couronner un massif calcaire lacustre
plus où moins important comme à Étampes, par exemple.
Ailleurs, tout le calcaire fut enlevé comme à Montmo-
rency, et le sol fut réduit à ses parties insolubles, nodules
de meulière empâtés dans l'argile et dans le sable. Les
coquilles, quin'avaient pas été siicifiées, furent dissoutes
avec leur gangue de carbonate calcique, et c'est ainsi que
la faune fut réduite à ce cantonnement qui semble si
bizarre dans les portions siliceuses de la formation.
Comme on le voit, les terrains de meulière méritent
d'être compris dans ceux qui présentent, au premier chef,
le facies continental, non pas comme se rapportant à
l'époque même de leur sédimentation première, mais re-
lativement aux temps où ils ont acquis leurs caractères
actuels.
[
Stanislas MEUNIER,
Animaux
PROMENÉS OU TUÉS DANS LES CIRQUES
CHEZ LES ANCIENS
(Suite.)
Il fit paraître pour la première fois un loup-cervier
(Pline, VIIT, x1Ix et xx11); cet animal venait des Gaules,
et il n'y à pas trop longtemps qu'il a disparu de l’Alle-
magne, dit Cuvier (Règne animal, 1, p. 162); du reste,
voici ce qu'on lit dans la Cosmographie du Levant, de
Thévet : « Les loups-cerviers sont trop plus cruels et
furieux que ceulx dont nous avons maintenant parlé, et
de cette espèce on en vit un en France, ny ha pas long-
tems; lequel sortant de la forest d'Orléans, au pais du
- Berry, l'an 1548, dévora plusieurs personnes, Lequel fust
tué par ung gentilhomme, huissier de la chambre du Roy
nommé Sébastien de Rabutin, signeur de Savigny. Or,
n'estoit toutefois ledit loup (comme ledit signeur m'ha
dict, moy estant à Fontainebleau, l'an 1554) semblable à
nos loups communs, mais avoit le poil tirant sur le léo-
pard. »
Ce Rabutin était l’aieul de Mme de Sévigné.
Ce fut encore dans les jeux donnés par Pompée qu’on
vit un animal appelé z#rov< par les Égyptiens, dit Pline
(VIII, xIx); « ses pieds de derrière ressemblaient aux
pieds et aux jambes de l'homme, et ses pieds de devant
à des mains. Depuis ce temps, ajoute-t-il, ces animaux
l'ont plus reparu à Rome. »
Il s’agit évidemment d’un singe quelconque.
Pompée fit aussi paraitre dans le cirque un rhinocéros
unicorne; mais On connaissait déjà cet animal, au moins :
celui à deux cornes, car Agatarchide, qui écrivait au
11° siècle avant notre ère, en parle, ainsi que plusieurs
autres auteurs.
César donna, l’an 708 de Rome {46 ans avant notre
ère), des jeux qui rivalisèrent en magnificence avec ceux
de son malheureux rival, On y vit pour la première fois
une girafe, que les Romains appelaient Camelopardalis,
chameau-panthère. Moise est le plus ancien écrivain qui
en ait parlé, du moins d’après le texte des Septante, qui
appelle Camelopardalis, girafe, l'animal désigné sous le
nom de pie) (Zemer), en hébreu (Deutéronome, NIV, v. 5).
Les Arabes nomment cet animal zerafa;les Grecs anciens,
comme les Romains, l'appelaient xaunronépèons ; les Grecs
modernes le nomment fopaors.
César fit encore combattre, pour la première fuis, dans
ses jeux des hommes et des taureaux, spectacle immé-
diatement imité en Espagne, où il est resté depuis, et
d'où il tend aujourd'hui à nous envahir. Pline dit
(VIII, xLv) : on attribue aux Thessaliens les combats
de taureaux, Montés sur des chevaux, ils poursuivent ces
animaux, et les tuent en les saisissant par les cornes et
en leur tordant le cou. Le dictateur César donna, le pre-
mier, ce spectacle à Rome. »
Dans sa Vie de Claude (ch. xx1), Suétone parle aussi de
ces sortes de jeux : « Claude fit paraitre des cavaliers
thessaliens, qui poursuivent dans les détours du cirque
des taureaux sauvages, sautent sur eux apres les avoir
fatigués, et les abattent en les saisissant par les cornes. »
En outre,César fit paraitre dans l’amphithéâtre quatre
cents lions, de la variété la plus forte; deux armées com-
posées de fantassins, de cavaliers et d’éléphants : de
chaque côté étaient 20 éléphants, 500 fantassins et 300 ca-
valiers (Suétone, Vie de César, ch. xxxIx); bêtes et gens
s’entr'égorgèrent pour la plus grande satisfaction de la
canaille romaine. Le dernier jour de son triomphe, César
se rendit dans son palais, couronné de fleurs et précédé
de plusieurs éléphants qui portaient des flambeaux.
Plus tard, Auguste fit tuer, soit dans le cirque, soit
dans le Forum,soit enfin dans les amphithéâtres, environ
3.500 animaux (Inscriptions des monuments élevés à Auguste
par la ville d'Ancyre).
Ayant, une fois, fait entrer l’eau dans le cirque de Fla-
minius, On y introduisit, par son ordre, trente-six cro-
codiles qu'on tailla en pièces (Dion, Hist. romaine) ; dans
les jeux célébrés pour la dédicace du temple de Marcellus,
commencé par César et terminé par lui, il fit tuer
cents tigres.
D'autres animaux,fort rares,étaient seuiement montrés
SIX
66
KA +
LE NATURALISTE
au peuple, promenés devant ses yeux, mais non mis à
mort: des tigres privés,des lions et des tigres attelés,etc.;
c'est ainsi que Marc-Antoine se faisait traîner dans un
char avec la comédienne Cythéris); un serpent de cin-
quante coudées(environ 25 mètres !) fut montré au peuple,
toujours par ordre d’Auguste, dans les comices, près du
Forum (Suétone, Vie d’Auguste, ch. XLI11).
L'an 759 de Rome, Germanicus fit célébrer des jeux où
combattirent un éléphant et un rhinocéros; celui-ci fut
vaincu. En 765, deux cents lions périrent dans d’autres
jeux qu'il donna. Pline dit qu’on y vit des éléphants
« se mouvoir en cadence, comme auraient pu le faire
des danseurs (VIII, 11).
En 790, dans la dédidace d’un temple à Auguste, Cali-
gula fit mettre à mort dans le cirque 400 ours et 400 tigres
(Dion, LIX, ch. vu); des chameaux attelés à des qua-
driges disputèrent le prix de la course. Ce dernier spec-
tacle fut aussi donné plus tard par Héliogabale (Lam-
pride, ch. XXHI).
Claude, ayant fait rebâtir le théâtre de Pompée,détruit
par un incendie, en fit la dédicace solennelle, et — natu-
rellement,
300 ours et 300 tigres furent mis à mort; les cavaliers
thessaliens firent une corrida de toros, mais Suétone ne
nous dit pas combien des uns et des autres restéreut sur
le terrain (Vie de Claude, ch. xxx1; Pline, VIII, xvir;
Dion, LX, vu); c'est à l’époque de ces jeux que l’on
découvrit le moyen dont j'ai parlé plus haut, de prendre
vivants les lions en leur jetant un voile sur la tête. Ce
genre de chasse fut très souvent, par la suite, représenté
dans les cirques : voilà pourtant un exercice que les
Espagnols n’ont pas eu l'idée d adopter, eux qui pré-
sentent le voile au taureau.
L'an 833 de Rome (80 de notre ère), à propos de la
dédicace du théâtre et des thermes qui portent encore
son nom, Titus donna des jeux où le nombre des ani-
maux tués (et des nt aussi) atteignit un chiffre
extraordinaire. Suétone, Eutrope et Eusèbe disent
5.000 animaux ; Dion dit 9.000 (Liv. LXVI, ch. xxv) :
Titus, dans les autres occasions, ne fit rien de
remarquable ; mais, lors de la dédicace de l’amphithéâtre
et des bains qui portent son nom,il donna des spectacles
nombreux et merveilleux.Des grues se battirent les unes
contre les autres; quatre éléphants, une foule d’autres
animaux, tant domestiques que sauvages, au nombre
d'environ neuf mille, furent égorgés, et des femmes, de
basse condition, il est vrai, aidèrent à les tuer. Beaucoup
d'hommes se firent gladiateurs; beaucoup aussi luttèrent
en troupes dans des combats sur terre et sur mer. Après
avoir tout à coup rempli d’eau cet amphithéâtre, Titus y
fit paraître des chevaux,des taureaux et d’autres animaux
apprivoisés, qu’on avait dressés à faire dans l’eau les
mêmes exercices que sur terre. Dans le bois de Caius et
de Julius, que jadis Auguste avait fait creuser pour cet
effet, il y eût, le premier jour, combat de gladiateurs et
massacre d'animaux, le lac ayant été recouvert d’un
plancher au droit des statues, et de constructions tout
alentour.Le deuxième jour, jeux du cirque.Le troisième,
combat naval de 3.000 hommes et, ensuite, combat sur
terre. Les Athéniens, ayant vaincu les Syracusains (ce
furent les noms qu’ils avaient pris pour le combat), des-
cendirent dans l'eau et emportèrent d'assaut un fort qui
y avait été construit.
€ On eut pendant CENT JOURS ces sortes de spectacles
sous les yeux... » — (Et maintenan' a tombola finale,
— les animaux participèrent à la fête :.
comme aujourdhui, d'ailleurs, cela se pratique) —
Titus donna aussi au peuple des choses utiles; il
jetait, d’un lieu élevé sur le théâtre, de petites boules de
bois portant un bon; celle-ci pour quelque comestible,
celle-là pour un vêtement, une autre pour un vase d'ar-
gent, une autre encore pour un vase d'or, pour des che-
vaux, pour des attelages, pour des troupeaux, pour ces
esclaves; ceux qui les avaient attrapées devaient les
remettre aux officiers chargés de la distribution, et rece-
voir l’objet désigné. »
Se fait-on une idée de la distribution de horions qui
avait lieu tout d’abord, pour entrer en possession de ces
bienheureuses boules? C'était encore là un spectacle
fort agréable : on s’égorgeait,on s’étranglait, on se dévo-
rait: c'était une nouvelle représentation d’un combat sur
terre, mais sans armes ostensibles, unguibus et rostris :
qu’on fasse cela de nos jours, et ce sera — en grand —
ce que vous voyez quand une bande de gamins suivent
un baptême en criant : « Vive la marraine !... » Dès
qu'une poignée de dragées ou de sous est jetée,les petits
bandits ne connaissent plus d'obstacles, et 1ls se gour-
ment comme des Romains authentiques.
Domitien donna des jeux où il fit combattre un rhino-
céros bicorne contre un ours. Martial nous en parle dans
la XXII épigramme de son livre De Spectaculis :
« Tandis que les maitres, pleins de crainte, excitent
le rhinocéros, qui rassemble pendant longtemps en lui-
même une épouvantable fureur, ils désespèrent de voir
se livrer le combat qu'ils ont annoncé. Mais enfin, la
furie qui, une première fois déjà, s'était emparée de
l'animal, éclate soudain : de sa double corne il enlève
un ours pesant, aussi facilement qu'un taureau lance
dans les airs les mannequins qu'on lui présente. »
Trajan fit célébrer des jeux qui durèrent CENT CINQ
JOURS, et pendant lesquels on tua, dit Dion (Hist. romaine,
LXVIII, xv), onze mille animaux domestiques ou sau-
vages.
Dans les jeux que célébra Hadrien, il périt en une
seule fois cent lions et cent lionnes (Spartianus, Vie
d Hadrien, ch. vin).
Sous Antonin le Pieux, on vit dans les amphithéâtres
de nouveaux animaux, non encore bien définis aujour-
d'hui : la crocuta, ou crocotta (Pline, VIII, zut et XI,
xxxvii) et le Strepsiceros. — D'après Cuvier, le Strep-
siceros serait l’antilope addax; quant à la Crocotta, ce
serait tout bonnement l’hyène grise tachetée de noir.
Dans ces mêmes jeux du pieux Antonin, on lâcha en
une seule fois dans le cirque cent lions (centum etiam
leones und missione edidit. J. Capitolinus, Vie d'Antonin
de Pieux, ch. X).
Sous l'empereur Commode, des autruches Darren
dans le cirque : il les combattait lui-même et leur coupait
la tête, qu'il présentait ensuite aux sénateurs pour les
effrayer (Hérodien, liv. 1, ch. xLvi). Cet historien ajoute :
«ces oiseaux, ayant la tête coupée, continuèrent quelque
temps leur course, comme s'ils n’eussent rien souffert
(6oun vod Bédous Eru mepueiv adrac, &s pnôèv maloÿoac). Com-
mode fit périr une foule de cerfs, de lions, de da-
mas, etc. »
Dans les jeux que donna Sévère la dixième année de
son règne, Dion dit qu’ « on y vit soixante sangliers
combattre entre eux... On avait aussi construit dans
l'amphithéâtre une vaste cage en forme de navire, dis-
posée de manière à contenir 400 bêtes féroces, et à les
laisser échapper toutes à la fois. À l'instant où cette
DE NAMUR AURESIRE 67
machine s’ouvrit, il en sortit des ours, des lions, des
lionnes, des panthères, des ours, des autruches, des
ânes sauvages et des bisons (Biscoves, des aurochs d’après
Cuvier), espèce de bœuf d'aspect et de mœurs barbares;
de sorte que l’on vit sept cents bêtes féroces et plusieurs
animaux domestiques s’entreméler dans une course
affolée et y trouver la mort; car cent de ces animaux
furent tués chacun des sept jours que durerent les fêtes
(LXX VI, c. D ».
On ne s'explique pas bien qu'il n'y ait eu que cent
bêtes tuées chaque jour; en effet, 400 bêtes féroces fu-
rent lâchées à la fois, en même temps, sans doute, que
trois cents animaux non. féroces, puisqu'il v avait en
tout 700 bêtes. Il est probable que, dès le lâchage de
tous ces êtres, ils n’attendirent pas la permission du di-
recteur des jeux pour s’entre-dévorer..….\
Gordien I fit paraitre en un seul jour dans le cirque,
dit son biographe J. Capitolin, cent tigres d'Afrique et
mille ours, Une autre fois, il donna dans le cirque une
chasse où parurent 200 chevreuils (cervi palmati), dont
quelques-uns étaient venus de la Grande-Bretagne, trente
chevaux sauvages, cent girafes, trente ânes sauvages,
cent cinquante sangliers, deux cents chamoïs (ibices) deux
cents antilopes, et trois cents autruches d'Afrique
peintes en rouge.
Après avoir vaincu l'illustre reine Zénobie, Aurélien
triompha et monta au Capitole dans un char trainé par
quatre cerfs, qu'il immola à Jupiter; vingt éléphants et
des bêtes féroces de Libye (tigres) apprivoisées le précé-
daient avec deux cents autres animaux sauvages rame-
nés de la Palestine. Il fit cadeau de tous ces animaux à
des particuliers, pour ne pas priver le Trésor de l'Etat
par l’entretien de ces bêtes. Venaient ensuite quatre
autres tigres, des girafes et des élans,
Lors de son triomphe, Probus fit dresser des arbres
dans tout le cirque, et l’on enferma dans cette forêt mille
_autruches, mille cerfs, mille sangliers, mille antilopes,
des chamois, des girafes, et une foule d’autres animaux
herbivores. Tous les spectateurs furent admis à prendre
chacun l'animal qui lui convenait...
Nous pouvons nous arrêter là. Ces quelques citations
d'auteurs anciens suffisent pour nous montrer les ra-
vages de tous genres qu’exerçait Rome sur la terre en-
tière. Le mot célèbre de Tacite : ubi solitudinem faciunt,
pacem appellant, était réellement vrai, non seulement
pour les populations libres qu'elle détruisait pour les
soumettre (éuer pour apprendre à vivre), mais même pour
les forêts qu'elle dépeuplait de leurs hôtes naturels.
En résumé, nous pouvons dresser la liste suivante des
animaux que les anciens ont montrés, promenés ou mas-
sacrés devant des foules stupides, atteintes d'une plé-
thore de civilisation confinant à la bestialité la plus
immonde et ne demandant, comme suprême bonheur,
comme idéal, que panem et circenses — du pain et du...
sang. Il était temps que les Barbares vinssent mettre un
peu de vraie civilisation parmi ces sauvages, — dévas-
tateurs et maitres du monde entier :
Ane sauvage (zèbre, onager).
Auroch.
Autruche,
Babiroussa (aper cornulus).
Chevreuil.
Chiens d'Ecosse.
. Coudous (Strepsiceros), an-
tilope addax.
Cerf. Crocodile.
Chameau. Dama (Nanguer, antilope).
Chamois. Elan.
Cheval sauvage, Éléphant.
Chèvre sauvage. ‘Girafe.
Grue.
Guépard (leo non jubalus).
Hippopotame,
Phoque.
Rhinocéros.
Sanglier.
Hyène. Serpents
Léopard. Singes.
Lièvre blanc. Tigre.
Lion. Vache de Barbarie (bubalis,
Loup-cervier. antilope.
Et le fameux OS du monstre
tué par Persée pour sauver la
belle Andromède.
Ours terrestre,
Ours marin.
Panthère.
E. SANTINI DE RIOLS.
LE CORDON DE LA LOGE DU THURICOLA
Il existe, parmi les infusoires ciliés un petit animal appelé le
Thuricola, qui présente à l'observateur quelque chose de bien
extraordinaire. Qu’on s’imagine un corps ovaleire allongé, logé
dans un petit étui transparent comme du verre, étui que l’on
appelle une logette. Cette légette a la forme d’un cylindre ou-
vert en avant et fermé en arrière comme un étui d’aiguilles à
coudre. L'animal s'insère au fond de sa logette, à l’aide d’un
pied épais et court. La logette elle-mème peut se fixer aux
plantes aquatiques ou à des débris de toute espèce résidant au
fond des eaux douces. Mais ce qu'il y a de plus curieux, c’est
que l'ouverture de la logette est munie d’une petite soupape
bien ronde, fermant exactement son orifice à l’aide d’une
petite charnière sur le côté gauche, quand on regarde l’annnal
par le dos. Or un petit cordon très mince part de la charnière
et descend à gauche, le long du corps de l'animal dans toute
son étendue, et vient s'insérer en bas au bout du corps de
l'animal, au-dessus de son gros pied court. Voici alors ce qui
arrive. Quand l'animal veut prendre l'air et chercher sa nour-
riture, il s'allonge de tout son long, en sortant une partie du
corps par l’orifice de la logette, dont il a refoulé la soupape à
gauche. Alors il agite en liberté les cils dont il est muni, pour
faire arriver jusqu'à sa bouche les particules flottant dans le
liquide. Au contraire, rentre-t-il dans sa logette en se peloton-
nant tout au fond, il se rétracte tout entier sur son pied, et par
la même occasion il ferme sans le vouloir la soupape de l'ori-
fice, en tirant inconsciemment sur le cordon.
Tandis qu'une concierge, dans sa loge à Paris, tire le cordon
pour ouvrir la porte, le Thuricola ferme la porte de sa logette
en se pelotonnant jusqu'au fond. De cette facon, ce petit animal
est à l'abri de ses nombreux ennemis, Bien plus, il peut voir,
par le verre transparent de sa logette, tout ce qui se passe
autour de lui. Si donc il voit à sa portée une proie qui le séduit,
rien n'est plus facile pour lui que de s’allonger en butiant sa
tête contre la soupape, qui s'ouvre à l'instant et lui permet de
mettre le nez dehors. Là, il fait jouer ses cils et produit dans
le liquide un courant, qui amène droit à sa bouche la nourri-
ture qu'il avait convoitée. On voit que la nature s'est montrée
une mère prévoyante, à l'égard de son enfant privilégié : il
est à l’abri dans sa coque, à moins qu'il ne s’attarde trop long-
temps le nez dehors.
Beaucoup d’autres infusoires sont logés dans des étuis ana-
logues, qui les enveloppent plus ou moins complètement; mais
le Thuricola est le seul, à notre connaissance, qui soit muni
d'une petite porte avec un cordon pour la fermer en tirant
dessus. Ce cordon fait partie de son corps au même titre que
la coque et ses autres organes. Il a sécrété sa ‘oque, comme
nous faisons pousser nos ongles et nos cheveux, c'est-à-dire
sans mème en avoir conscience. Il n'a pas plus construit son
cordon que nous ne nous sommes fabriqué nos bras ni nos
jambes. Qui donc a songé à donner à son protoplasma la pro-
priété de filer un cordon pour fermer sa petite soupape; si ce
n’est l'Auteur même de la création tout entière? Pourquoi, ce
petit être est-il privilégié sous ce rapport, au milieu de tant
d’autres qui ne le sont pas au même degré? D'autres aussi, les
Operculaires, sont munis d'un opercule; mais on ne leur à pas
encore trouvé de cordon, comme au Thuricola. D'autres encore
ont une logette, mais n’ont pas d'opercule pour la fermer, les
folliculaires par exemple. Il est vrai qu’en revanche leur logette
est souvent plus élégante ct que leur corps a lui-même une
68 LE NATURALISTE
forme plus gracieuse que celui d'une limace :
tout avoir à soi tout seul, bien entendu.
Un autre appendice bien intéressant aussi, c'est une petite
collerette que présentent les infusoires choano-flagellés, autour
de Jeur extrémité antérieure. Cette collerette, évasée en avant,
peut être comparée à un abat-jour conique renversé, au milieu
duquel part Le fouet ou le flagellum. Elle est si fine et si déli-
cate, qu’elle n’a pu être révélée qu'à l'aide d'un microscope
des plus puissants; donnant un grossissement énorme de 2000
fois en diamètre, soit de 4 millions de fois en surface! A cette
amplification démesurée, ce que l'on avait pris pour 3 petites
pointes, { médiane et 2 divergentes, représente le profil de
cet abat-jour renversé, où il manque la large ouverture évasée,
avec le flagellum central, où manque son bout terminal d'une
finesse excessive.
On comprend le rôle que joue la collerette, tout autour de
l'insertion du flagellum : elle joue le rôle d’une cuvette, dont
ies bords évasés recueillent les particules alimentaires, ame-
nées jusque là par le remous que le flagellum exerce dans le
liquide. Comprend-on ces infusoires, munis d'une assiette au-
tour de leur bouche, à l'extrémité antérieure du corps, pour
recueillir leurs aliments avant de les avaler, en les mettant à
la disposition de l'animal pour le moment où il voudra bien les
utiliser? Est-il possible de pousser plus loin la prévoyance, en
faveur d'animaux qui n'ont ni bras, ni jambes, ni même de
bouche. réelle; mais chez lesquels un flagellum, une collerette
et un protoplasma complaisant tiennent lieu de tout ce qui
pourrait leur manquer! Evidemment ce protoplasma ne pense
pas et ne s’est pas créé lui-même; pas plus que notre Thuri-
cola n'a songé à créer un cordon pour fermer la porte de sa
logette. Qui donc y a pensé pour eux, si ce n’est la nature
prévoyante, qui a donné à ce protoplasma inconscient le pou-
voir de se créer à lui-mème des organes si utiles et si merveil-
leusement appropriés à ses besoins? Et qu’est-ce que cette na-
ture prévoyante, si judicieuse et si réfléchie, si ce n'est le Créa-
teur lui-même. N'est-ce pas le cas de répéter après bien
d’autres : nalura maxime miranda in minimis. C'est dans les
petits êtres que nous avons tout lieu d’admirer la Nature. Mais
Nature n’est qu’un mot, qui nous dissimule mal son souverain
Auteur. $
Tout ce qui vit, en ce monde terrestre, ne vit que grâce aux
forces actives qui se dégagent du soleil. Enlevez le soleil, et
la terre n’est plus qu'une lune déserte, sans éclat et sans vie.
Or le soleil est une boule de feu infiniment vaste, mais ce n'est
que du feu sans intelligence par lui-même. Comment peut-il
alimenter sur la terre tant de cerveaux intelligents ? Est-ce
par une simple transformation des forces, et alors nous pla-
cons l'intelligence infiniment au-dessous de la chaleur elle-
même. Il y a donc autre chose que des forces dans l'univers, il
y a une Intelligence créatrice.
on ne peut pas
Dr Boucox.
a
DESCRIPTION DE COLÉOPTÈRES
Thaptor variegatus. Modérément allongé, foncé mais revêtu
en dessus d'une pubescence fine et couchée, variée, cette pu-
bescence faite de poils blanchätres ou jaune doré mélangés et
disposés, soit en taches, soit en lignes, avec de-ci de là quelques
parties dénudées ayant un aspect plus foncé. Prothorax nette-
ment atténué en avant, non relevé sur le bord antérieur, net-
tement sinué sur les côtés de sa base et subarqué sur le milieu.
Ecusson triangulaire, pubescent de grisâtre. Elytres un peu
plus larges que la base du prothorax, ayant les épaules élevées
et flanquées, sur leur côté interne, d'une dépression très nette
et longue, faiblement striés sur les côtés ou à l’extrémité. Des-
sous du corps densément pubescent de blanchâtre. Pattes
foncées.
Long. 4 mill. environ. Brésil : Goyas (coll. Pic).
Bien caractérisé, ainsi que les deux espèces suivantes (la
dernière aussi remarquable par sa forme plus courte) par la
pubescence.
Thaptor tessellatus. Noir, peu diminué aux deux extrémités,
et surtout en arrière, orné de macules ou fascies sinueuses
d’un brun jaunâtre (rappelant un peu par son dessin Brachy-
tarsus lessellalus Boh.) avec les pattes en partie roussâtres.
Assez voisin de forme du précédent, mais moins atténué aux
extrémités, élytres moins gibbeux, dépourvus de dépression
humérale nette.
Long. 3,7 mill. Brésil : Goyas. (coll. Pic).
Thaptor brevipennis. Relativement court et large, assez dimi-
nué aux deux extrémités, foncé mais revêtu en dessus d’une
pubescence brillante, fine et couchée, à peu près uniforme, d'un
gris jaunätre. Antennes et pattes roussäâtres. Prothorax court,
arqué en avant, vu de dessus, échancré sur les cotés de sa base
et faiblement arqué sur son milieu. Ecusson assez large.
Elytres courts, bien convexes, nettement atténués à l'extrémité,
un peu plus larges que le prothorax à la base avec les épaules
inodérément élevées et flanquées sur leur côté interne d’une
dépression moyenne, ces organes nettement striés sur les côtés.
Dessous du corps obscur, finement pubescent de gris jau-
nätre.
Long. 3,3 mill. Brésil : Goyas (coll. Pic).
Espèce, par sa forme plus courte et plus élargie sur le milieu,
bien distincte des autres espèces classées dans ce groupe, et
que je mets provisoirement dans le genre Thaplor Gorham.
M. Prc.
LES COLEOPHORA DU DORYCNIUM
Le Doryenium suffrulicosum Vill. est une plante aimée
des chercheurs de chenilles, qui ne ‘se montre jamais
ingrate et récompense toujours la peine que l’on prend à
l’examiner, Elle nourrit un nombre considérable d’es-
pèces de chenilles et, en toute saison, elle offre au chas-
seur un gibier aussi varié qu'intéressant.
Veut-on une liste de chenilles qui se trouvent, ou spé-
cialement, ou très fréquemment, sur cette légumineuse ?
Leucoph. sinapis, Thecla rubi, Lyc. ægon?, argiolus,
melanops; Ino statices (1), Zyg. sarpedon, stæchadis, la-
vandulæ, rhadamanthus, tarniolica, occitanica : Arctia
purpurata, fasciata ; Bombyx doryenii(franconica) ; Agro-
tis v.neglecta, Toxoc. craccæ, Acidalia circuitaria, calune-
taria ©; Pellonia calabraria, Croc. elinguaria, Synopsia
sociaria, Staudingeraria, Gnophos obscuraria, Eurrh.
plumistaria, Selidos. ericetaria, tæniolaria; Eubol. cata-
launaria, Scod. penulataria, conspersaria; Ligia Opacaria,
jourdanaria; Eupithecia phœniceata.
Voilà pour les macrolépidoptères. Les micros sont
moins nombreux. On peut citer :
Tortrix croceana, rusticana; Cochylis simoniana,
Gelechia lugubrella, Teleia sequax, Anacampsis bigut-
tella, Tachyptilia hirsutella; Coleophora spumosella, ono-
nidella, congeriella, acrisella, mongetella ; Butalis obscu-
rella, doryeniella.
Je connais encore quelques autres chenilles de micros
qui mangent le Doryenium; mais,n’ayant pu en obtenir le
papillon, je ne puis dire à quelles espèces elles appar-
tiennent.
On peut voir,par la liste des micros ci-dessus,quele genre
Coleophora est celui qui a le plus d'espèces sur le Dory-
enium. Je me propose de passer rapidement en revue ces
dernières, afin de montrer que, si le même végétal peut
nourrir plusieurs espèces du même genre, ces espèces
présenteront de si notables différences qu'il sera impos-
sible de les confondre,
I. — Coleophora spumosella Stgr. est un papillon de
15-17 millimètres d'envergure ; ses antennes sontblanches
(1) Quelque étrange que cela paraisse, cette chenille d‘?no
vit très réellement sur le Doryenium. Je l’y ai trouvée à
plusieurs reprises et l'en ai nourrie pendant plusieurs jours.
2 L’Acidalia submutata est aussi signalée sur le Dorycnium
par quelques auteurs, mais à tort peut-être, car je la crois
spéciale au Thymus vulgaris.
|
LE NATURALISTE 69
avec un pelit pinceau de poils jaunâtres à leur base; ses
ailes antérieures sont d'un jaune paille ou jaune d’or et
ornées de trois bandes argentées : une costale, plus
épaisse, n'atteignant pas la base de l'aile, la seconde
occupe le milieu de l'aile et s’'infléchit avant le bord
externe, la troisième est dans le pli; l’espace compris
entre la première et la seconde bande argentée forme
comme une tache allongée, cunéiforme et rembrunie; ses
ailes inférieures sont d’un gris foncé et luisant.
Sa chenille est d’un brun vineux avec la tête, l’écusson
du premier segment et les petites plaques cornées du
second, le clapet et les pattesécailleuses d'un noir luisant.
Son fourreau, fait entièrement d’un tissu et d'un enduit
gommeux que la chenille dégorge, se compose d’un étui
arrondi en dessus, caréné en dessous, recourbé en arrière
et recouvert d'une membrane parcheminée sinuée longi-
tudinalement et un peu gaufrée en avant qui rappelle
celle de la Coleophora palliatella Zk. si connue. La couleur
de ce fourreauest variable : les parties les plus anciennes
sont brunâtres, les plus récentes sont blanchâtres. Parfois,
on trouve des fourreaux presque entièrement blanchâtres
ét d’autres presque noirs.
Ces fourreaux se rencontrent dans l'Ardèche et sur le
Dorycnium et sur l'Ononis. Les feuilles minées et devenues
blanches décèlent leur présence.
Cette Coleophora est à taille en mai et juin et donne son
papillon en juillet,
Il convient de rapporter à la Col. spumosella Stgr. la
Col. ononidella Mill. dont les fourreaux, surtout au sud-
ouest de la Mrance (département des Landes), sont
presque blancs.
2. — La Coleophora congeriella Stgr.est un petit papil-
lon de dix à onze millimètres d'envergure. Ses antennes
sont annelées de brun et de blanc, avec la base garnie
de poils longs et jaunâtres; ses ailes antérieures sont
d'un jaune pâle et ornées de trois lignes argentées : la
costale s'étend depuis la base jusqu’à l’apex, la seconde,
peu marquée, occupe le milieu de l'aile, la troisième est
sur le bord interne ; ses ailes inférieures sont d’un gris
luisant; tête et thorax d’un blanc pur.
Sa chenille est d’un grisjaunâtre, avec la tête, l'écusson
du premier segment, les petites plaques cornées du
deuxième et même du troisième segment qui sont bien
distiactes et le clapet noirâtres, les pattes écailleuses
grises. Son fourreau a la forme d’un grain de céréale
avec l'extrémité bivalve un peu recourbée ; il se compose
de petites folioles de Doryenium préalablement minées,
perforées d’un côté à la base, appliquées obliquement et
ajoutées les unes aux autres alternativement de chaque
côté : quatre ou cinq folioles suffisent à ce petit fourreau.
On commence à le trouver en septembre, mais la che-
nille passe l'hiver et n’atteint tout son accroissement
qu'en mars ou avril selon les localités, et le papillon
éclôt en mai.
Cette espèce prise d’abord en Espagne comme Ja
Col. spumosella, doit se rencontrer partout où pousse le
Doryenicum suffruticosum. Cependant, jusqu'ici on ne
l'avait signalée que dans les Alpes-Maritimes. Je l'ai
trouvée plus ou moins communément dans les Pyrénées-
Orientales et dans l'Ardèche.
3. — La Coleophora acrisella Mill. est à peu près de la
taille de congeriella ; ses antennes sont blanches avec la
base garnie de poils courts, épais et blancs; ses ailes supé-
rieures sont d’an brun marron à reflets dorés avec la côte
d'un beau blanc; ses ailes inférieures sont d'un gris foncé,
luisant, tête et thorax d’un blanc pur.
Sa chenille est d’un gris jaunâtre avec la tête brun
jaunâtre, l’écusson du premier segment, les petites pla-
ques cornées des deuxième et troisième segments, le
clapet et les pattes écailleuses brun foncé ou noirâtres.
Son fourreau, arrondi en dessus, platen dessous, recourbé
en arrière et contourné sur un coté, bivalve, se compose
de huit à dix folioles préalablement minées, transpercées
d’un bord à l’autre, puis juxtaposées transversalement les
unes aux autres. C’est un singulier fourreau, car il est
peut-être le seul parmi les Coleophora à présenter une
extrémité à tendance hélicoïdale.
Cette Coleophora a été nommée acrisella par Millière,
parce qu’il pensait d’abord que sa chenille vivait sur
l’'Aster (Erigeron) acris L. En réalité, elle vit sur le
Dorycnium et elle est à taille en avril et mai. Le papillon
éclôt en juin. A-t-il deux générations? Cette question
ne me parait devoir être résolue que lorsqu'on aura
trouvé des chenilles de cette Coleophora vivant et minant
les feuilles du Doryenium en juillet et août. Il est certain
toutefois que le papillon réapparait en septembre et
peut-être plus abondamment qu'en juin. Il est aussi
commun dans l'Ardèche que dans les Alpes-Maritimes.
4. — Coleophora mongetella n. sp. Cette espèce inédite
est plus grande que les deux précédentes et mesure 13 à
14 millimètres. Les antennes sont annelées de blanc et de
brun et garnies à la base d’un petit pinceau de poils
jaunâtres; ses ailes supérieures sont d’un jaune serin
clair, un peu plus foncé cependant vers l’apex, avec une
ligne costale, une médiane, une plicale et le bord interne
d’un beau blanc, ainsi que la tête et le thorax.
La chenille qui produit ce papillon a une forme singu-
lière. On dirait une petite boule, tantles segments an-
térieurs et postérieurs sont amincis et les intermédiaires
renflés. Elle est blanche, à tête jaune de miel clair, écusson
brun clair avec des taches noirâtres au bord postérieur :
petites plaques écailleuses du deuxième segment noi-
râtres, clapet brun, pattes écailleuses blanchâtres. Vit
dans la gousse globulaire du Dorycnium suffruticosum, qui
lui sert de fourreau ; la base de la gousse porte un petit
tube de soie comme ouverture du fourreau, l’autre extré-
mité présente un petit prolongement trifide en guise de
fermeture.
Depuis un bon nombre d'années déjà, M. René Ober-
thür, en cherchant des chenilles de Zygæna occitanica en
juillet sur le Dorycnium, dans les environs de Vernet-les-
Bains (Pyrénées-Orientales) avait fréquemmentremarqué
que certaines gousses de cette papilionacée remuaient,
se déplacaient motu proprio,en un mot semblaient être
animées, J'avais trouvé moi-même de semblables gousses
à Amboulia (Pyrénées-Orientales) en juillet 1894 et, à la
forme des chenilles qui les habitaient,j'avais bien reconnu
une Coleophora, mais je n’en avais rien obtenu. C'est seu-
lement quelques années après que j'ai rencontré de nou-
veau ces graines dans l'Ardèche où j'ai pu les examiner
tout à loisir et arriver à connaitre l’évolution entière de
cette intéressante espèce.
Le papillon apparait dès queles boutons floraux se mon-
trent au sommet des pousses du Dorycnium. Les femelles
pondent sur les inflorescences. La petite chenille s’intro-
duit dans une fleur, s'en nourrit et, du calice qu’elle
tranche et détache de son pédoncule, elle se sert comme
d'un fourreau, absolument comme fait la Pfochenusa
70 LE NATURALISTE
subocellea du calice d’'Origanum, de Nepeta ou d'autre
labiée qui la nourrit.
Bientôt, les graines de Dorycnium ayant grossi, ce n’est
plus à la fleur, au tendre ovaire, que la chenille de Mon-
getella s'attaque, mais à la graine elle-même. C’est à la
base même, au pédoncule, qu’elle perce la gousse, y
introduit d’abord sa tête, puis ses trois premiers segments
et enfin tout son corps, au furet à mesure qu’elle la vide
de son contenu. Les gousses ainsi vidées sont jaunes,
tandis que les gousses intactes deviennent rougeûtres ; 11
est donc facile de reconnaitre, au simple coup d'œil, la
présence de cette chenille. Dans le courant de juilet,
parvenue à toute sa taille, elle quitte le haut de la plante,
descend jusqu'à la bifurcation des plus grosses branches,
ou bien même plus bas et près de terre, sur les vieux
pieds auxquels elle se fixe solidement par un tissu soyeux
et ressemble alors à un vieux bourgeon non développé.
Elle n’en bougera plus et attendra le retour du printemps
pour se transformer. Cette opération a lieu généralement
dans la dernière quinzaine d'avril et le papillon parait en
mai,
C’est ainsi que les choses se passent dans l'Ardèche.
Pour terminer, voici une petite clef dichotomique qui
fera connaître exactement et aisément à quelle espèce
peuvent appartenir les chenilles de Coleophora que l'on
trouve sur le Dorycnium suffruticosum (1).
1. — Fourreau sans pallium, formé de matériaux
empruntés Mau DOryCALUEM AN Aer TRE MERE 2.
Fourreau à pallium et formé d'une matière produite
par la chenille elle-même................. spumosellu.
2. — Fourreau fabriqué avec des folioles du Dory-
COLMAR rc DoAG GO DDIOS OS DER o PSS TUE 3.
Fourreau fabriqué avec la gousse... ...... mongetella.
3. — Fourreau caréné en dessous, composé de quatre
ou cinq folioles disposées obliquement..... congeriella.
Fourreau plat en dessous, composé de huit à dix
folioles disposées transversalement. ...... …...acrisella.
P. CHRÉTIEN.
UN CAS PROBABLE DE MIMÉTISME DÉFENSIF
Chez la Ranatre
On sait que d'assez nombreux Orthoptères à corps
long et cylindrique imitent, souvent d’une façon remar-
quable, tantôt des tiges vertes, tantôt des tiges dessé-
chées. Ce sont d'abord, dans la tribu des Phasmiens, les
Bacilles, tels que le Bacillus Rossii Fabr. du Midi de
l'Europe et du Nord de l'Afrique dont une figure a été
publiée en 1890 par le Naluraliste (2), les genres Bacteria
(1) J'ai omis à desseinla Coleophora Giraudi Rag., que quel-
ques auteurs font vivre sur le Dorycnium sans preuve certaine.
Ayant l’intentionde faire connaître prochainementles premiers
états de cette belle Coleophora, je me borne à dire aujourd’hui
qu’elle ne vit sûrement pas de cette papilionacée et qu'il faut
par conséquent la rayer de la liste des micros à chercher sur le
Dorycnium.
(2) Cuénor. Sur les moyens de défense des Aïrthropodes (Le
Naturaliste 12° année, 2 série, n°72, et mars 1890, page 59
fig. 4). è
Necroscia, Phibalosoma, Cyphocrana, etc., etc., desrégions
tropicales, tous désignés par les zoologues anglais sous
la dénomination de Walking-Stick (bâton marcheur);
puis, dans la tribu des Acridiens, le genre Truæalis et
les genres alliés.
L'ordre des Hémiptères renferme aussi des Insectes
qui, par leur forme linéaire, la lenteur de leur démarche
et leur coloration, se dissimulent peut-être assez bien
au milieu des végétaux. La Ranatre vulgaire, Ranatra
linearis L., rentre dans ce petit groupe.
En examinant la figure 1 où la Ranatre est représentée
se promenant paresseusement sous l’eau, au milieu de
l’enchevêtrement des plantes aquatiques et des multiples
débris que le vent chasse dans les mares et les étangs,
l’idée vient immédiatement à l'esprit que l’animal qui,
les ailes fermées, est uniformément brun, dont le corps
ressemble à une baguette et dont les pattes très grèles
doivent être presque invisibles sur un fond sombre, pré-
sente un cas de mimétisme défensif lui permettant d’é-
chapper facilement à la voracité des Poissons,
Ce qui précède n’est qu'une hypothèse; mais la Ra-
natre m'a rendu témoin d’un fait positif beaucoup plus
intéressant que je décrirai ci-dessous.
Les Orthoptères Phasmiens cités plus haut, inquiétés
par l'approche d'un ennemi ou par des secousses im-
primées à la plante qui les porte, font les morts, pre-
nant une attitude raide, de facon à ressembler encore
plus à une tige végétale ; une seule patte étendue simu-
lant parfois une petite branche latérale. Les chenilles de
Lépidoptères Phaléniens qui imitent aussi des rameaux
comme celles de l” Urapteryx sambucaria L., de l'Am-
phidasys betularia L. (1), etc.,ne cherchent pas non plus à
(1) Voyez le même article de Cuénot, déjà cité, figure 6.
LE NATURALISTE 71
fuir sion touche le végétal sur lequel elles vivent
Attachés par leurs fausses pattes postérieures, elles res-
tent dressées ; on peut couper la branche et l'emporter
sans que ces Curieux animaux changent d'attitude. Or
la Ranatre offre un phénomène analogue.
J'avais rapporté chez moi une Ranatre vivante et je
l'avais mise dans un vase contenant de l’eau. L'Insecte
se promenait lentement sur le fond.
Quelques heures après, désirant l’examiner plus atten-
tivement, je saisis délicatement la Ranatre par le milieu
du corps en arrière du thorax, au moyen d'une petite
pince. Aussitôt, l'Hémiptère prit l'attitude représentée
figure 2 : les pattes de première paire, ou pattes ravis-
seuses, accolées l’une à l’autre et étendues en avant, les
deux filets du tube respiratoire accolés aussi et étendus
en droite ligne en arrière, enfin les quatre pattes des
deuxième et troisième paires raidies et réunies en un
seul faisceau perpendiculaire à l'axe du corps.
Une personne non prévenue, un entomologiste même
n'aurait pu reconnaître immédiatement un insecte dans
ce système de baguettes ayant l'aspect d’un fragment
végétal sec.
L'animal n'ayant été ni froissé ni blessé et n'ayant
été manié que très doucement, la position qu'il donna à
ses membres ne peut être attribuée à la douleur et me
semble devoir être considérée comme une attitude mi-
métique.
Il est possible que l'observation que je viens de relater
ait déjà été faite ; je n’en ai cependant pas trouvé trace
dans les divers travaux que j'ai consultés.
F. PLATEAU.
CIMETIÈRES BE CHIENS & DE CHATS
Enterrer quelqu'un « comme un chien » équivaut à dire
que les obsèques ont été réduites à leur plus simple expression
et que le lieu de la sépulture ne brillait pas par l’éclat du
monument. C’est qu'en effet les chiens ne sont généralement
pas traités après leur mort avec autant d’égards que pendant
leur vie et plus d’un qui fut aimé par son maître à l'instar
d’un parent va pourrir dans quelque coin isolé et ignoré du
jardin. Pourquoi cette indifférence post mortem que manifeste
presque tout le monde pour les bêtes domestiques, même les
plus tendrement chéries? C'est un contraste bien curieux à
observer et qui pourrait donner matière à de longues tirades
philosophiques. Mais hic non est locus. Contentons-nous de
constater que cette indifférence n’est pas générale, du moins à
l'étranger.
À Londres, à Victoria-Gate, tout près de Hyde-Pärk où cir-
culent les plus beaux équipages de la métropole, on peut voir
un enclos d’une trentaine de mètres de longueur sur vingt-cinq
de large, qui jure un peu au milieu des belles maisons qui
l'entoure. Si vous regardez à l'intérieur ou mieux si vous y
pénétrez après avoir forcé, par votre air attendri, la consigne
du gardien, vous apercevrez une série de petites tombes coquet-
tement garnies de fleurs et souvent protégées par des saules
pleureurs, tout comme celle de Musset, saules dont la « paleur
éplorée » engage au recueillement, Cecimetière serait-il réser-
vé aux tout jeunes enfants ou même à ceux qui sont morts
avant d’avoir vu le jour? On est tenté de lo croire, mais on
est vite désillusionné quand on lit les inscriptions que portent
les pierres tombales. Une des premières sur laquelle on jette
les yeux est celle-ci :
« Chère vieille Priny! »
non loin d’une autre encore plus bizarre :
A Mandie
Une vicille amie.
qui fait pendant à cette inscription tout aussi laconique :
A Flick
Un ami fidèle.
S'adressant à des humains, ces épitaphes seraient plutôt
irrespectueuses. Elles deviennent compréhensibles lorsqu'on
sait que les restes qui reposent sous les pierres sont... des
chiens. Ce cimetière est évidemment une des curiosités de la
capitale et cependant les Anglais eux-mêmes l'ignorent, Il y a
là, rangées côte à côte, environ deux cents tombes où reposent
les compagnons adorés de quelques nobles lords ou de quelques
vieilles ladies. Les concessions en sont, paraît-il gratuites, au
moins pendant quelques années, les pierres et les inscriptions
étant seules à la charge des propriétaires (j'allais dire de la
famille !). Les inscriptions partent évidemment d’un bon natu-
rel. Pour le profane, elles paraissent plutôt cocasses. En voici
quelques-unes :
A la mémoire bien aimée
de Roby,
le carlin adoré de M. X.
mort le 20 août 1896,
à l'âge de treize mois et demi.
Sincère et dévoué jusqu'à la mort!
Pauvre Roby, mort si jeune ! qui dira jamais les causes qui
vont ravi à la tendresse de M. X.? Tu dois certainement être
jaloux de la belle sépulture de ton voisin Pompéi, auquel on
a même consacré une citation de Byron:
Pompéi
le chien favori de
MISS FLORENCE SAINT JOHN
In life the firmest friend
The first to wel come
Foremost to defend.
Le nom du propriétaire est ici écrit en grosses lettres, ce
qui, à mon avis, est du dernier mauvais goût. Il en est de
même dela suivante :
A la mémoire bénie
Du cher trésor
JOCK
Un coolie écossais
mort le 31 aout 1895,
figé de 15 ans.
Le chien le plus intelligent, dévoué, gentil,
tendre, affectueux, possédant le meilleur
caractère qui existu jamais. Adoré par son
ami dévouè et affligé. ‘
SIR H. SETON GORDON, baronnet.
Ce qui prouve qu'on peut ètre baronnet et avoir du cœur
tout de même. En passant, adressons un souvenir ému à :
Paddy
Le chien chéri de Mme Z.
N'est pas sorti de sa mémoire.
72 LE
Ainsi qu’
A notre regrelté
Spot
Notre ami
toujours regretté.
Sans oublier une chienne dont il est dit qu’
Elle apporta un rayon de soleil
Dans nos existences
Mais hélas ! elle l’emporta avec elle!
11 serait bien curieux de savoir si le rayon de soleil se trouve
toujours avec elle dans la tombe.
Souvent les épitaphes sont plus courtes. L'une d’elles est
ainsi libellée :
«€ Jacob! »
et une autre:
Chère petite Minnihin !
Je ne sais pourquoi, ces inscriptions laconiques me pa-
raissent renfermer plus que les autres un abîme de regrets !
Certains propriétaires ont des concessions à perpétuité où
l'on met les chiens au fur et à mesure de leur mort :
Cher chin-chin
et tendre Carlo!
(BILLY).
On remarque plusieurs inscriptions en français, par exemple
celle-ci :
Chère Minnie
Courageuse, sensée et de rare beauté
aimante et aimée.
Et cette autre:
A moncher Wee
«.... mes pensées.
Très fréquemment, il est fait allusion au genre de mort du
défunt :
Cher petit
Peter
qui mourut subitement...
Ce « subitement » et ces points sont tout un poème. Une
autre épitaphe dans le même genre est relative à une chatte, la
seule qui existe dans le cimetière :
En souvenir de ma chère petite
CHATTE CHINCHILLA
empoisonnée le 31 juillet!
C’est une chose terrible, même pour une chatte, que de
mourir empoisonnée !
Enfin, pour ne pas trop allonger ces citations, reproduisons
en deux, des plus cocasses que j'ai tenté vainement de com-
prendre :
TOPSI CHÉRI
L’ami le plus sûr et le plus dévoué
compagnon de sa mère,
La mère de qui ?
CHER ET AIMANT
DUKE
(Tippy)
Sa chère grand'mère !
La grand'mère de quoi ?
Cruelle énigme!
En Angleterre, d'ailleurs, il est fréquent de voir des parti-
culiers élever, dans leur propriété, des monuments à la mé-
moire de leurs chiens. C’est ainsi que, cette année même, on
vient d'achever le tombeau monumental que Gladstone avait
commandé ‘pour celui qui ne l’avait jamais quitté, un magni-
due chien qui répondait au nom de Petz. En voici l'épi-
taphe :
NATURALISTE
Petz
né à Schwalbach,
mort à Hawarden,
Fidèle jusqu'à la mort.
Cette attention n'est-elle pas curieuse de la part d’un homme
aussi occupé que l'était le Great old man ?
On sait, d’ailleurs, que lord Byron fit élever, en l'honneur
de son terre-neuve favori, Boalswain, qui l’avait suivi dans ses
voyages, un monument qui est encore l’un des ornements les
plus remarquables de Newstead. Sur cette tombe, il fit graver
ces vers :
The poor Dog ! in life the firmest friend,
The first to welcom, foremore to defend ;
Whose honest heart is still his masters’ own;
Who labours, fights, lives, breathes for him alone !
Ces vers sont précédés de l'inscription suivante (en anglais):
« Près de ce lieu sont déposés les restes d’un être qui pos-
séda la beauté sans orgueil, la force sans insolence, le courage
sans férocité, en un mot, toutes les vertus de l’homme sans
ses vices. Cet éloge, qui serait une basse flatterie, s'il était
inscrit sur des cendres humaines, n'est qu’un juste tribut à la
mémoire de Boatswain, chien qui, né à Terre-Neuve, au mois
de mai 1803, est mort à New-Abbey, le 18 novembre 1808. »
Nombreux sont d'ailleurs les littérateurs qui firent des épi-
taphes pour leurs chiens. Ainsi Alexandre Dumas qui fit ins-
crire sur la fosse de son chien: 1
Comme le grand Rantzau, d’immortelle mémoire,
Il perdit, mutilé, quoique toujours vainqueur,
La moitié de son corps dans les champs de la gloire
Et Mars ne lui laissa rien d’entier que le cœur!
Pour comprendre cette épitaphe, il faut savoir que le mal-
heureux Pritchard dont il s’agit eut, coup sur coup, trois ac-
cidents : pris dans un piège, il y laissa sa patte; un chasseur
furieux de le voir lever du gibier lui envoya une charge de
plomb qui en fit un petit Abeilard; enfin, pour comble de
guigne, un vautour Jui creva un œil.
M. Richard nous fait connaître que Juste Lipse, le célèbre
érudit du xvi® siècle, composa une longue et touchante épi-
taphe, à propos de la mort d'un de ses chiens favoris, Saphir.
En voici la traduction libre et quelque peu abrégée : « Saphir
fit les délices de Lipse. C'était un petit chien remarquable
entre tous par son intelligence, sa grâce etsa beauté. Il avait
plus de quinze ans quand il fut enlevé par un malheureux ac-
cident: il tomba dans l’eau bouillante ! Toi qui lis cette épi-
taphe, que tu sois un ami de Lipse ou que tu sois seulement
un admirateur de ce qui est élégant et gracieux — et ce petit
chien était un trésor de grâce et d'élégance! — eh bien, si tu
ne verses pas de larmes, répands du moins sur ce sol unepoi-
gnée de fleurs ! »
En Amérique, on vient d'installer un cimetière pour les
chiens près du Calvary Cemetery, aux portes de Long-Island
City. Les terrains les mieux exposés, les plus vastes sont ré-
servés aux chiens illustres ou appartenant aux grandes familles
pour les bourses modestes, il y a de petits terrains, mais pas
de fosse commune. La dame à qui est venue l'idée de ce cime-
tière a déclaré à un rédacteur du New-York Herald qu’elle
était de ceux qui croient que les chiens, les bons chiens, ont
une âme, s'ils ne devaient point survivre à cette misérable
existence, c’est que, alors, le mérite et la vertu seraient comptés
pour rien; car le plus humble caniche est infiniment meilleur
et plus affectueux que 99 0/0 des hommes. » Remarquez que
ladite dame fait allusion aux hommes et pas aux représentantes
du sexe faible.
On édifie en ce moment, tout près de Paris, dans l'ile des
Ravageurs, un cimetière pour chiens, qui, bientôt, sera aussi
luxueux que celui de Londres. On y adjoindra un four créma-
toire — excellente idée — et, pour que le caractère artiste et
sentimental des Français ne perde jamais ses droits, un musée,
véritable panthéon élevé à la gloire de la gente canine. Ce
Musée contiendra, en effet, les portraits des chiens ayant opéré
des sauvetages ou de ceux qui se seront signalés par leur
dévouement, les objets divers les concernant (médailles, col-
liers d'honneur, etc.), les tableaux consacrés aux actes accom-
plis par les chiens célébres et, en général, tout ce qui sera
susceptible de développer et d'augmenter, chez les humains, les
sentiments d'affection pourles chiens. A cet effet, il yaura aussi
peut-être, dans la salle du musée, des conférences pour les
LE NATURALISTE 13
enfants, Ce cimetière, d’ailleurs, n’est pas, comme on pourrait
le croire, sous la dépendance de la Société protectrice des ani-
maux; celle-ci, à laquelle je m'étais adressé pour avoir des
renseignements, a bien voulu me répondre « que le Conseil de
la Société, estimant que la protection s’arrétait à la mort, a
conclu qu’il n'y avait pas à donner suite au projet qui lui était
soumis ». Les fondateurs du cimetière pensent qu'il y aura
tous les ans 2.000 enfouissements de 10 à 50 francs, 415 à 100 fr.
et 25 à 500 francs: 800 chiens environ seront enterrés dans
la fosse commune gratis pro Deo.
Si on excepte la nécropole qui existait à Sceaux il ÿ a quel-
ques années, ce cimetière est une véritable nouveauté. En
France, en effet, notre sollicitude pour le meilleur ami de
l'homme ne s’étendait qu’à l'animal vivant : nous n'avions que
divers hôpitaux pour les chiens et les chats.
Le premier a été fondé par les filles de Claude Bernard, qui
voulurent expier ainsi lestortures que leur père avait fait subir
aux animaux de laboratoire dans ses recherches de physiologie.
A Colombes, elles installèrent, dans ce but, toute une maison
dont le haut était réservé aux chats et le bas aux chiens. Pour
éviter les scènes dangereuses, mâles et femelles étaient
séparées. Aujourd’hui, il y a plusieurs hôpitaux analogues à
Paris même. L'un d’éux a été créé, aux Térnes, par Mme la
baronne d'Herpent, descendante de Mirabeau et cousine de
Gyp; à l'heure actuelle, elle n’a pas sauvé moins de 2.600 chiens.
A Londres, il s’est formé aussi une ligue pour la protection
des chats abandonnés. Au n° 80 de Park-road, Hamptead, il y
a une maison de refuge entretenue par les dons des plus grands
noms d'Angleterre, entre autres la duchesse de Sutherland, la
duchesse de Bedford, lady Warwick, lady Dudley, lady Muns-
ter, etc. On y conduit les chats errants et on les soigne avec
une grande sollicitude.
Ne quittons pas cette question hospitalière sans rappeler
que, dans les Indes, il existe des hôpitaux... pour puces. Ce
sont des Hindous fanatiques qui mettent leur sang au service
de ces bestioles que Jules Renard a si bien décrites : « Des grains
de tabac à ressort. »
Mais revenons à la question des cimetières. Les chats, eux
aussi, ont eu le leur. En Egypte, à Bubastis, il y en avait de
spécialement réservés aux chats sacrés. Les fouilles que l'on y a
faites dans ces derniers temps ont permis de se rendre compte
que ces animaux appartenaient à l'espèce Felis maniculatus
— autrement dit chat ganté — qui existe encore aujourd’hui à
l’état sauvage dans le Soudan et la Nubie. Les uns étaient
enroulés seuls dans des bandelettes couvertes d'hiéroglyphes à
leur louange; d’autres avaient été embaumés en famille et une
seule enveloppe en contenait plusieurs. À Beni-Hassan, près
d'un petit temple nommé la Grotte de Diane, on rencontre
aussi beaucoup d'hypogées où ont été déposés les chats con-
sacrés à Pacht. Dans la plupart des tombeaux égyptiens, on
trouve d’ailleurs presque toujours un ou deux chats embaumés
auprès de leur maître. On sait que les Égyptiens adoraient le
chat parce qu'ils croyaient qu’Isis, pour éviter la fureur de
Typbon et des Géants, s'était dérobée à leurs recherches en
prenant la figure du chat. Ils en étaient si convaincus qu'ils
supposaient que le chat faisait autant de petits qu'il y a de
jours dans le mois lunaire. [ls admettaient aussi que les
portées augmentaient chaque fois de un à vingt-huit, ce qui
prouvait bien qu’il y avait une relation entre la lune et le chat.
Plutarque raconte cela sans rire et sans même chercher à
réfuter une pareille extravagance.
Rappelons aussi le mausolée que Mme de Lesdiguières fit
élever à sa chatte Ménine. Ce monument avait été élevé dans
le jardin de son hôtel situé rue de la Cerisaie. Il représentait
un sarcophage de marbre noir, surmonté d’une chatte, noire
aussi, reposant sur un coussin de marbre blanc. Au côté
gauche du piédestal, on lisait :
Cr Gisr
MENINE,
la plus aimable el la plus aimée de toules les chattes.
Sur l'autre face, on pouvait lire
Ci-git une chatte jolie.
Sa maitresse, qui n'aima rien,
L’aima jusques à la folie!
Pourquoi le dire? On le voit bien.
Le culte des animaux morts ne se manifeste pas seulement
par l’inhumation dans la terre. Nombre de personnes font
empailler leurs chats, chiens, singes ou oiseaux qui viennent
à passer de vie à trépas. D'autres conservent leur squelette.
Ce fut le cas du chat de Pétrarque, la seule consolation qui
lui resta, dans sa retraite d’Arqua, quand il eut perdu sa bien-
aimée Laure. Ce squelette est religieusement conservé au musée
de Padoue.
Enfin, j'ai connu, dans un village du littoral, à Saint-Vaast-
la-Hougue, un homme qui ne pouvait supporter l'idée d'en-
terrer les petits oiseaux qui, de leur vivant, faisaient sa Joie.
Lorsque l'un d'eux venait à mourir, il l'enfermait dans une
boîte de fer-blanc bien soudée et allait le jeter en pleine mer.
Comme il avait de nombreux pensionnaires, il venait souvent
nous demander d’ailer draguer en mer avec nous pour pouvoir
pratiquer sa pieuse opération. Un jour l’un de nous — un
sans-cœur évidemment — lui dit, par manière de plaisanterie
que la boite avait été ramenée avec la drague. L’amateur d’oi-
seaux faillit se trouver mal, et sa peine était si poignante que
mon camarade le fumiste en fut tout bouleversé. Laissons dor-
mir ces chers petits oiseaux au fond des mers et respectons
le culte des morts sous quelque forme qu'il se présente!
Henri Coupix.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 19 février 1900.
MM. P.-P. Dehérain et E. Demoussy ont donné dernièrement
le résultat de leurs études sur le lupin blanc; ils poursuivaient
en même temps des recherches sur la Culture des Lupins
bleus (Lupinus angustifolius). Les lupins bleus sont incapables
d'utiliser l'azote atmosphérique: par leurs propres forces et sans
aucun secours étranger. Ils peuvent acquérir un développement
normal sans porter de nodosités sur leurs racines; mais, dans ce
cas, ils semblent profiter du travail exécuté par les bactéries sur
certaines algues. Les racines des lupins bleus portent parfois des
nodosités renfermant des bactéries, qui ne travaillent pas au profit
de la légumineuse et qui paraissent vivre dans ces nodosités
bien plus en parasites qu'en associées. Outre ces bactéries, les
auteurs ont constaté l'efficacité de celles qui existent dans la
terre. Il semble que les germes de ces bactéries soient rares
dans les terres arables; de là les échecs fréquents des cultures
de lupins bleus; ils sont, au contraire, répandus dans les terres
de bruyère. On peut probablement rendre les terres arables
ordinaires aptes à cette culture en y introduisant les bactéries
efficaces.
— Une météorite est tombée le 12 mars dernier à Biur-
bole près Borga (linlande).
Le météore, dont la route peut être suivie au-dessus de toute
la Suède centrale et a été calculée par le professeur d’'astro-
nomie à l'Université de Helsingfors, A. Donner, perça en tom-
bant une couche de glace de 0",10 d'épaisseur, projetant tout
autour du trou une grande quantité d'eau et de glace, et s'en-
fonça jusqu'à une profondeur de 6 mètres dans l'argile sous-
jacenté baignée d'eau. Lors de l'extraction, qui, en raison de la
nature du terrain, présenta quelques difficultés, on constata que
le météore avait éclate en plusieurs centaines de fragments,
dont une partie se trouvait dans l'argile à quelques mètres au-
dessus de la masse principale. Le plus grand fragment pesait
83 kilogrammes lors de l'extraction, et le suivant 22 kilogrammes ;
le poids total des fragments recueillis était, lors de l'extraction,
alors qu'ils étaient encore un peu humides, d'environ 340 kilo-
grammes. Une grande partie d'entre eux sont pourvus d'une
croûte noire.
La météorite est une chondrite, dans la composition de
laquelle prédominent l'enstatite et le péridot, avec quelques rares
grains de sulfure de fer et d'autres minerais. Vue au microscope,
elle montre une structure nettement agglomérée et contient aussi
des veines de sulfure de fer. Les chondres, dont [a grandeur
varie entre 0wm,5 et 8 millimètres, sont composés principale-
ment d'enstatite disposée en tiges grossières ou en fils très
fins.
— M. Ch. Pérez a découvert en septembre dernier, aux envi-
rons de Royan, un Epicaride nouveau, parasite de Balanus
perforatus, auquel l'auteur donne le nom de Crinoniscus equi-
lans. La femelle adulte est uniquement constituée par un sac
chitineux, hyalin et turgescent, en forme d'étoile à quatre
74 LE NATURALISIE
branches, dont l'aspect rappelle un peu celui d'une fleur de lis
héraldique; elle occupe une position fixe, elle se cramponne à
la face dorsale de la balane comme une serre d'oiseau de proie.
Le mâle présente la forme crystoniscienne typique : petit clo-
porte de 1100 y de long et 450 4. de large, libre, très agile, à
yeux latéraux bien développés, à antennes de neuf articles.
M. Ch. Pérez a observé, dans la même localité, l’'Hemioniscus
balani, parasite du Balanus balanoïdes et un Hemioniscus gré-
gaire, parasite du Balanus improvisus qui parait être une espèce
nouvelle.
— M. Balland donne une note sur la Composition et la
valeur alimentaire des Mammifères, des Oiseaux et
des Reptiles. La chair des quatre quartiers des principaux
mammifères concourant à l'alimentation (äne, cheval, bœuf,
veau, chevreau, lapin, mouton et porc) a donné, les couches de
graisse étant écartées, 10 à 18 % d'eau, 0.50 à 1.25 % de ma-
tières minérales, 1:40 à 11.3 % de graisse et 3 à 3.5 % d'azote.
Le cœur, le foie, les poumons et les rognons contiennent les
mêmes quantités d'eau et d'azote que les viandes maigres. Dans
le sang de bœuf, de veau, de mouton et de porc, il y a jusqu'à
83 % d'eau, des traces de graisse et autant d'azote que dans les
viandes des quatre quartiers. Les viandes grillées ou rôties, à
poids égal, sont plus riches en principes nutritifs que les viandes
crues. Les viandes bouillies ou en ragoüt sont encore plus nour-
rissantes que les viandes crues toujours plus hydratées. La chair
des oiseaux (canard, oie, poulet) contient les mêmes éléments
nutritifs que la chair des mammifères, mais en proportion. un peu
plus élevée, car la teneur en eau se rapproche de 70 %. L'œuf
de poule dans son ensemble contient 75 % d'eau, il fournit donc
à l'alimentation 25 % de substances nutritives. Vingt œufs
représentent assez exactement la valeur alimentaire de 1 kilo-
gramme de viande; une poule, en: peu de temps, fournit donc
ainsi son poids de substances alimentaires. La chair de gre-
nouille présente exactement en eau et en matières nutritives la
composition de la sole ou du brochet.
Séance du 26 février 1900.
M. Édouard de Janczeweski donne une note sur la pluralité
de l'espèce dans le groseillier à grappes cultivé. Le
groseillier à grappes est presque toujours considéré comme des-
cendant d'une seule espèce spontanée habitant l'Europe, l'Asie
et l'Amérique du Nord, le Ribes rubrum. Il résulte des recherches
de l’auteur que les groseilliers à grappes cultivés ne descendent
pas d'une seule espèce botanique, mais, pour le moins, de trois,
sans même compter les affines. Parmi leurs ancêtres spontanés,
le vrai R. rubrum de Linné, confondu jusqu'à présent avec
d'autres espèces bien différentes, a peu participé à la population
de nos jardins. C'est le R. domeslicum de l'Europe occidentale,
espèce décrite par l’auteur, qui à donné naissance à la plupart
des variétés horticoles; sa-culture parait donc la plus ancienne
et avoir été inaugurée dans l’un de ses pays d'origine : la Grande-
Bretagne ou plutôt la France.
— MM. L. Ravaz et A. Bonnet présentent le résultat de
leurs recherches sur Ie parasitisme du Phoma reni-
formis. La maladie des raisins signalée dans les vignobles du
Caucase a été attribuée tantôt au Phoma uvicola, tantôt au
Phoma reniformis. Si les spores courtes du reniformis peuvent
être, à un examen superficiel, confondues avec les spores du
P. uvicola, elles sont incapables de produire les mêmes dégâts.
Le P. reniformis à spores normales ou courtes ne peut être la
cause première de la maladie des raisins de vigne du Caucase.
Il ne peut les envahir que lorsqu'ils sont déjà détériorés par une
cause quelconque, où lorsqu'ils sont très mûrs. Ce champignon
est loin d'envahir les organes altérés aussi vite que le Conio-
thyrium diplodiella, qui, cependant, n’est lui-même qu'un demi-
parasite. Dans toutes les expériences faites, le P. reniformis n'a
pu se développer complètement que sur les grains meurtris ou
fendus. Sur les autres organes sains, il n’a jamais produit aucune
altération. I n'est donc pas un danger pour nos vignobles, dans
lesquels il n'a d'ailleurs fait aucun mal jusqu'ici, malgré son
extrème abondance en 1891.
— M. IH. Douvillé a étudié les Fossiles rapportés de
Chine par la Mission Leclère. Ces fossiles viennent con-
firmer la grande unité géologique de la région chinoise et indo-
chinoise. Ils mettent en évidence les analogies partielles très
intéressantes avec la Perse et l'Inde à l'ouest, la Chine septen-
trionale et le Japon au nord, l'Indo-Chine et les iles de la Sonde
au sud.
P. Fucus.
OFFRES ET DEMANDES
Lot de Carabiques européens : Harpalides, Féro-
nides, Anchoménides, Bembidiides. 300 -espèces,
830 exemplaires, 4 cartons doubles, Prix. 65 francs.
Lot de Lamellicornes européens. 140 espèces,
500 exemplaires, 2 cartons doubles. Prix. 45 francs.
Lot de Clavicornes européens : Nitulides, Tro-
gositides, Colydiides, Cucujides, Lathridiides, Crypto-
phagides, Dermestides, Byrrhides, Parnides, etc.
285 espèces, 555 exemplaires, 2 cartons 33 X 22.
60 francs.
Lot de Malacodermes européens. 170 espèces,
500 exemplaires, 3 cartons. Prix...,.... 50 francs.
Lot de Ptinides et Anobiides européens. 54 es-
pèces, 178 exemplaires, 2 cartons. Prix. 28 francs.
Lot de Vésicants européens. 110 espèces, 305 exem-
plaires,2-cartons 33 X 22. Prix...... ... 50 francs.
Lot de Chrysomélides européennes : Halticides,
tn mme
Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
PICArtONS 23022 Prix 2 RE NME DMITANCSR
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Sagra à Cryptocephalus inclus. 200 espèces,
540 exemplaires, 5 cartons. Prix........ 60 francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exoti-
ques : Pachybrachrys à Zygogramma inclus. 210 es-
pèces, 680 exemplaires, 6 cartons. Prix. 60 francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Doryphora à Dorydera inclus, 329 espèces,
978 exemplaires, 9 cartons. Prix...... 140 francs.
Lot de Cassides européennes et exotiques.
65 especes,156 exemplaires,2 cartons.Prix. 5Ofrancs.
S'adresser pour les lots de Coléoptères ci-dessus à
Les Fils d'Émile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
— M. Henry Mourmant, 187, rue Solférino (Lille),
offre, contre des roches de pays étrangers, des roches
flamandes.
— La compagnie des chemins de fer de l'Ouest pour-
suivait depuis plusieurs années l'extension de ses billets
d'aller et retour; la :..sure la plus récente prise à cet
égard, appliquée depuis le 1° décembre dernier, avait à
peu près triplé le nombre des relations appelées à profi-
ter de cet avantage. Dans sa dernière séance, le Conseil
d'administration, voulant donner satisfaction aux vœux
très nombreux qui se sont manifestés à ce sujet, a dé--
cidé de soumettre à l'approbation de M. le Ministre des
travaux publics la généralisation complète des billets
d'aller et retour de toute gare à toute gare.
— M.le commandant Dupuis, 80, rue Wéry, Ixelles
(Belgique) est en possession denombreux ouvrages de pa-
léontologie de Schimper, qu'il désire échanger contre
ouvrages concernant la conchyliologie. Il offre des Co-
léoptères africains contre des coquilles africaines, de
préférence terrestres ou aquatiques.
Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE. 17,
GMT
29° ANNÉE
2% SÉRIE — N° 3 1 4
1 AVRIL 1900
LA TAILLE DES SILEX
Les premiers hommes qui ont apparu sur la terre se
sont servis, sans aucun doute pour se défendre contre
les animaux et les attaquer eux-mêmes pour se repaitre
de leur chair,de la simple branche d'arbre et du modeste
caillou: ils se servaient de l'un et de l’autre soit simple-
ment tenus à la main, soit dans des pièges plus ou moins
perfectionnés. Mais bientôt, ayant reconnu l'utilité du
coupant de certaines pierres, ils se sont mis à chercher à
donner aux silex ou autres roches quils employaient
une forme plus ou moins définie pour l'usage auquel ils
s’en servaient.
C'est dans le Miocène de Thenay que les premiers
silex provenant du travail de l’homme ont ‘été trouvés,
ce n'étaient que des morceaux informes de silex, taillés
croûte rugueuse du caillou pour protéger la main,c'est ce
qui constitue le bulbe de percussion. Ces coups de poing
étaient lourds et pesaient quelquefois un kilogramme,
mais leur poids moyen était de 425 grammes.
Pour tailler ces instruments, il est fort probable que
l'homme tenant un silex d'une main se contentait d'en
frapper les bords avec un autre caillou, de façon à en
faire sauter des éclats plus ou moins grands.
Il ne se servait pas,comme/l’ontpensé certains auteurs,
d'une sorte de ciseau en silex intermédiaire entre la pièce
frappée et le percuteur.
L'industrie de l’homme ne se contentait pas seulement
du coup de poing,mais d’une foule d'instruments en
pierre taillés qui jusqu'ici ont été méconnus et qu'à pré-
sent l’on recherche; c’est ainsi que M. Tieullen, en
France,fait une longue étude sur les moindres manifes-
tations du travail de l’homme de cette époque etarrive à
des résultats pleins d'intérêts pour la science préhisto-
LS
PS
À M \
Ja an
TN
Taille des Silex.
grossièrement sur leurs bords. Si l’on examine attentive-
ment ces échantillons, l'on y voit une action manifeste
du feu, l’homme de cette épo que le possédait et l’artisan
miocène l'employait pour éclater les pierres dont les dé-
bris lui servaient d'outils et d'armes.
Mais bientôt acquérant plus d'habileté, il ne demanda
plus au feu un travail irrégulier, et ayant remarqué que
souvent deux silex frappés l’un contre l’autre donnaient
une cassure coupante et plus facile à employer, il se ser-
vit de la percussion pour préparer ses armes. D'abord ce
furent de simples éclats, puis ils arrivèrent à donner une
forme spéciale bien connue de tous, la forme en amande
ou amygdaloïde qui constitue les haches chelléennes
ou plutôt les coups depoings,carces instruments n'étaient
pas emmanchés, mais tenus à la main. Ils ont une forme
triangulaire à bords courbes, des éclats ont été enlevés
à droite et à gauche de façon à donner un tranchant vif,
offrant dans les premiers instruments, lorsqu'on le regar-
dait sur son profil, une ligne en zigzags, mais offrant à
mesure des perfectionnements une ligne presque recti-
ligne. La partie par laquelle l’on prenait l'instrument
était beaucoup plus épaisse et offrait une partie de la
Le Naluralisle, 46, rue du Bac, Paris.
Drailr
1
Sous:
À
CZ
Z
7
Le
P
%
Meule (Age de la pierre).
rique. À l'époque acheuléenne, la forme du coup de
poing se modifie, elle devient nettement triangulaire, où
avait deux tranchants droits aulieu de tranchants ronds,
ce qui est plus avantageux pour le travail.
76 LE NATURALISTE
Notons que la forme de ces coups de poing est la
même dans toutes les parties du monde et qu'on les
trouve partout, soit à la surface du sol, soit dans les ca-
vernes, excepté dans les régions qui ont été envahies à
cette époque par les glaciers, comme en France dans la
région occupée par le glacier du Rhône, en Europe dans
le Nord de la Russie, en Scandinavie et dans le Nord de
l'Allemagne.
On utilisa bientôt les déchets de l’industrie des coups
de poing et, à l’époque Moustérienne, nous voyons appa-
raître des lames larges de forme ovalaire qui sont soi-
gneusement retouchées sur les bords, mais d’un côté seu-
lement, ce qui donne un tranchant moins fragile que
la pointe moustérienne.
Ces éclats, connus sous le nom de racloirs, servaient à
la préparation des peaux que homme, par suite du froid
très vif qui régnait en Europe, employait à se couvrir.
Tous ces outils avaient un bulbe de percussion et étaient
faits pour être tenus à la main.
L'homme allait se servir de nouveaux matériaux ; le
travail de l'os et de l’ivoire allait bientôt l’absorber et
même lui faire réaliser des conceptions artistiques d'ordre
supérieur; il allait un peu négliger la taille des silex gros-
siers et faire des types accomplis à petits éclats et à pe-
tites facettes d'un fini vraiment remarquable. Ce n'est
plus par la percussion qu'il arrive à faire ces chefs-
d'œuvre de la pierre taillée, mais par la pression exercée
sur la pièce par un autre silex,qu'il enlève ces éclats me-
nus. L'arme offre une forme spéciale dite en feuille de
laurier, On trouve à cette epoque un autre genre de tra-
vail qui est la pointe à ecrans, où à la base du silex était
ménagéeune partie pouvant She facilement s'attacher sur
la hampe ou le manche de l’arme.
Mais bientôt l'industrie de la pierre taillée tombe en
décadence :aulieu de ces pierres finement taillées, l'on ne
trouve plus que des lames qui sont planes d’un côté et
seulement taillées de l’autre ; c’est l’époque Robenhau-
sienne. L'industrie de la pierre avait à cette époque ses
ouvriers spéciaux et l’on pourrait presque dire ses com-
merçants. C’est ainsi qu'au Grand-Pressigny, Indre-et-
Loire, l’on a retrouvé la cachette d’un de ces ouvriers où
étaient empilées, à la facon des biscuits sur une assiette,
des lames toutes taillées qui attendaient sans doute le
moment pour être vendues.
L'ouvrier préparait alors un nucléus, c’est-à-dire une
sorte de prisme triangulaire en silex d’où il détachait
par pression ces longues lames qui avaient jusqu’à trente
et quarante centimètres. On trouve au Mexique égale-
ment de ces. nucléus en obsidienne avec de fort belles
lames, que l’on peut admirer au musée du Trocadéro,
A cette époque, l’homme allait encore perfectionner le
travail de la pierre, et de la pierre taillée venir à l’é-
poque de la pierre polie. Il avait sans doute remarqué le
travail fait par les eaux sur les roches, polies par l’action
du sable transporté par le courant de la rivière, et allait
appliquer ce principe au perfectionnement de son outil-
lage. Après avoir donné la forme à son instrument, il le
frottait énergiquement dans un courant d’eau, en le dis-
posant dans une rainure, avec du sable d’abord grossier,
puis de plus en plus fin, et 1l obtenait ces haches polies
qui font aujourd’hui l’ornement de nos musées,
Des populations venues à cette époque de l'Asie allaient
bientôt apporter avec elles une substance plus solide et
plus plastique, le métal, d’abord bronze, puis fer, qui
allait remplacer le travail de la pierre, et concourir ainsi
au développement de l'industrie humaine. Donnons, en
terminant, d'après M. A. de Mortillet, le tableau des di-
vers étapes de la taille des silex :
I. — Etonnement.
Eclatement par le feu (Thenaysien).
IT. — Percussion.
À. Simples éclats (Puycourmien).
B. Faces taillées (Chelléen).
C. Faces retouchées (Moustérien).
III. — Pression.
Retouches délicates (Solutréen).
IV. — Polissage.
Haches polies (Robenhausien).
À l’époque de la pierre polie, l'homme ne se contentait
pas de la chair des animaux, il était devenu pêcheur et
cultivateur; il connaissait le blé, l’avoine; et il en faisait
des galettes pour sa nourriture, il avait inventé le moulin:
primitif.
Ce n'était sans doute, au commencement, que deux
pierres informes glissant l’une sur l’autre, mais bientôt
la pierre inférieure fut creusée par suite de l'usure et la
pierre supérieure s’y emboita plus exactement. Et l’on
eut un outil perfectionné, ancêtre des meules romaines,
Cette meule acquit de petites dimensions et donna nais-
sance à un mortier, qui se Composait d'un galet roulé et
d'une pierre dont le creux avait été fait par l'usage,
comme le montre la figure dessinée d'après un échan-
üllon du Muséum. C'est dans ces mortiers que les popu-
lations préhistoriques réduisaient en poudre fine les
ocres dont 1ls se servaient pour se peindre comme les
anciens Indiens de l'Amérique du Nord. Ils se servaient
aussi de cet ocre délayé dans l’eau, pour faire des pein-
tures, primitive ébauche de l'écriture comme l’a montré
M. Piette.
E. MassarT,
Attaché au Muséum.
LES PLANTES DE FRANCE
Leurs Chenilles et leurs Papillons
ACONIT (Aconitum).
A. Napellus. — Chariclæa Delphinii L., chenille de
juin à août, papillon en mai, juin; centre et sud, — Plu-
sia moneta F., chenille en Juin, août, papillon de juillet
à septembre, toute la France.
A. Anthora. — Plusia illustris F.et uralensis Er.,
chenille en juin, papillon en juillet, Alpes.
AERELILE (Vaccinium),.
VW. myrtillus. — Lasiocampa ilicifolia L., chenille
en juin, juillet, papillon en mai; centre. — Acronycta
euphrasiæ Bkh., chenille en juin, septembre; papillon en
mai, août; ioute la France. — Hadena rectilinea Esp.,
Alpes, Vosges. — Cloantha solidaginis H., chenille en
juin, papillon en août, ouest. — ÆEpione advenaria, che-
nille en juillet, papillon en juin, juillet; partout. — Aci-
dalia contiguaria H., chenille en automne, papillon en
juin, juillet, août, France cent. orient. et méridionale,
— Fidonia brunneata Thur., chenille en mai, papillon en
août, pays de montagnes. — Eupithecia debiliata H., che-
nille en juillet, papillon en juin, centre et nord. — Ypsi-
LE NATURALISTE gli
————————_——_—— —"—"—"—"—"—"—"—"—"—"——— — — —"— — — —"— — ——————————
petes sordidata F., chenille en mai, papillon de mai à août;
toute la France, — Cidaria populata L., chenille en juin,
papillon en juillet, août ; toute la France. — Cidaria do-
tata, chenille en mai, juin, papillon en juin, juillet; toute
la France
V. uliginosum. — Anarta cordigera Thusc., che-
nille en août, papillon en mai; Savoie.
AGROSTEMME (Agrostemma).
A. dioica. — Acidalia agrostemmata Gn., chenille
en mai, papillon en juin, juillet; centre.
ACACIA (Robinia).
M. hispida. — Heliothis umbra Hof., chenille en
juilllet, août, papillon en mars, juin; toute la France.
VIPÉRINE (Echium).
E. Vulgare, — Vanessa cardui L., chenille en juin,
août, papillon en mai, juillet, septembre; toute la France.
— Euplexia lucipara L:, chenille en septembre, octobre,
papillon d'avril à août; toute la France.
E, italicum. — Stygia australis Lat., chenille en mai
(racines et tiges), papillon en juin, juillet; midi.
VIGNE (Vitis).
Dellephila celerio L., chenille en juin, juillet,
septembre, octobre, papillon en juin, septembre; midi.
— Deilephila elpenor, chemille en juillet, août; papillon
en juin, septembre; toute la France.
VÉRONIQUE (Veronica).
V. Agrestis. — Melitea dictynna Esp., chenille en
mai, papillon en juin, août; toute la France.
MHLLEUE, (Tilia).
Smerinthus tiliæ L,, chenilles de juillet à septembre,
papillon en mai, juin; toute la France. — Endromis ver-
sicolor L., chenille en juillet, papillon en mars, avril;
toute la France. — Platypteryæ sicula, chenille en mai,
juin, papillon en avril, mai; Alsace. — Pterostoma pal-
pina L., chenille en juin, août, septembre, papillon en
avril, mai, juillet, août; toute la France. — Acronycta
aceris L., chenille en juillet, août, papillon en mai, juin;
toute la France. — Acronycta alni L., chenille de juin à
août, papillon d’avril à juin; centre et est. — Asferoscopus
sphynx Hafn., chenille en mai, juin, papillon en octobre
et novembre; toute la France. — Xylina socia Hafn., che-
nille en mai, papillon en septembre, octobre, mars:
centre, sud etest. — Cidaria corylata Th., chenille d'août
à octobre, papillon en juin, juillet; centre, sud et est. —
Nyssia pomonaria H., chenille de mai à juillet, papillon
en mars; centre et est. — Les espèces suivantes se ren-
contrent dans toute la France : Tæniocampa cruda S. V.,
chenille en juin, juillet, papillon en mars, avril. — Xan-
thia citrago L., chenille en mai, juin, papillon en août,
septembre. — Eurymene dolabraria L., chenille de mai à
octobre, papillon en avril, mai, juillet. — ÆEnnomos au-
tumnaria M., chenille en juin, papillon de juillet à sep-
tembre, — Phigalia pilosaria H., chenille en mai, juin,
papillon en février et mars, — Biston hirtaria L., chenille
en août, septembre, papillon en mars, avril. — Amphi-
dasys Strataria H*, chenille de juillet à septembre, papil-
lon de mars à mai. — Amphidasys betularix L., chenille
de juillet à octobre, papillon d'avril à juillet. — Anisopte-
ryx œscularia S.V,, chenille en mai, papillon en mars. —
Cidaria literata H., chenille en mai, juillet, papillon en
juin, septembre à novembre.
S'TA'HICE (Statice).
S. limonium, — Bombyx dorycnii M. N., chenille en
juin, papillon en août, septembre; région méditerra-
néenne. — Calocampa vetusta H., chenille en juin, papil-
lon en septembre, octobre, mars, avril; toute ‘la France.
SENECÇON (Senecio).
S. Jacobea. — Euchelia jacobeæ L., chenille de
juillet à septembre, papillon en mai, juin; toute la:
France.
S. viscosus,— Heliothis peltigera S. V., chenille en
juin, juillet, papillon de mai à septembre; toute la
France.
S. nemoralis. — Hypoplectis adspersaria H., che-
nille en septembre, octobre, papillon en mai, juin; centre.
S. divers.— Plusia iotaL., chenille en avril, Juin,
papillon de mai à août; centre, est, nord. — ÆEupithecia
virgaureata Dob., chenille en septembre (fleurs); papillon
en avril; centre. — Eupithecia absinthiata L., chemille
en septembre, octobre, papillon en juin, juillet: toute la
France,
L'origine de l’homme
SA PLACE DANS LE RÈGNE ANIMAL
La question, dont j'écris l'énoncé en tête de cette étude,
est certainement une des plus sérieuses que l’on puisse se
poser. Suivant la réponse qu'on y fait, la facon d’envi-
sager le. rôle de l’homme, dans la nature, varie du
tout au tout.
D'après une conception, qui a régné pendant tout le
moyen âge et qui est encore fortement enracinée dans les
milieux les moins cultivés, l’homme est placé en dehors
et au-dessus du reste du monde animé. Dernier venu de
de la création, il en est le roi; l'univers entier a été créé
à son seul usage. C’est là un reste des conceptions an-
thropocentriques et géocentriques auxquelles la décou-
verte de la rotation de la Terre autour du Soleil est
venue‘porter un premier coup. Quand on eut vu que,
loin d'occuper le centre de l'univers, la Terre n'est qu'une
des plus petites planètes d’un système solaire perdu au
milieu de millions d’autres, il fallut bien reconnaitre que
tout n'avait pas été créé en vue de l'homme et du globe
qu'il habite.
Mais, sur la Terre elle-même, l'homme pouvait encore
se croire le maître incontesté de ce monde limité. Les
découvertes de Lamarck, de Darwin et de la pléiade de
savants qui les ont suivis vinrent, au cours de ce siècle,
détruire. cette dernière illusion. L'homme n’est qu’un
animal, plus parfait que les autres sous le rapport intel-
lectuel, moins développé que beaucoup d’entre eux au
point de vue des armes offensives et défensives, de la
rapidité à la course et de la délicatesse des organes des
sens.
On ne saurait donc plus parler d'une supériorité
absolue de l'espèce humaine sur les autres animaux : il
n'y à que des différences du plus au moins. Le sort
78 LE NATURALISTE
nous a simplement favorisés en nous donnant un cer-
veau plus parfait qu'à nos frères, dits inférieurs. Cette
“doctrine a pour conséquence que nos mépris et nos
cruautés envers les animaux ne sont,en rien, justifiées :
nous n'avons sur eux d’autres droits que ceux que peut
donner la force.
Un ouvrage récent de Haeckel (1), auquel nous ren-
voyons, pour plus de détails, nous permettra d'exposer
brièvement les preuves qui établissent, d’une façon
absolument irréfutable, la place véritable de l’homme
dans le règne animal.
Ces preuves sont de trois ordres : les premières sont
du ressort de l’anatomie et de la physiologie comparées,
Par toute son organisation, par le mode de fonctionne-
ment de tous ses organes, l'homme est un animal appar-
tenant à l'embranchement des Vertébrés, à la classe des
Mammifères et, dans celle-ci, à l’ordre des Primates. Cet
ordre comprend, avec lui, les lémuriens et les singes
véritables. L'organisme humain ne diffère que par des
points de détail de celui des singes les plus élevés, les
Anthropoides (Gorille, Chimpanzé, Ourang-Outan, Gib-
bon). [l'est donc rationnel de faire rentrer l'espèce hu-
maine dans ce groupe, et non d'en faire un règne à part,
en dehors de lanimalité, comme on le voulait autrefois.
Un second ordre d'arguments est tiré de la paléonto-
logie. Les espèces vivantes, actuellement existantes, ne
sont que les rameaux ultimes, d’une vaste floraison, qui
prit naissance au moment où notre {globe, suffisamment
refroidi, présenta des conditions compatibles avec le
développement de la vie. Ces espèces, adaptées à des
milieux et des genres d'existence les plus divers, sont
allées en se diversifiant de plus en plus. Mais, à mesure
qu’on remonte le cours des âges, on trouve, dans les
couches géologiques, ces véritables archives de la na-
ture, des formes animales de plus en plus simples et de
plus en plus semblables entre elles. L'homme lui-
même obéit à cette loi. Certains crânes de l'époque qua-
ternire — ceux de la race dite de Néanderthal — se
rapprochent beaucoup de ceux du singe. Mais, de plus,
une découverte récente, celle du Pithecanthropus
ereclus, trouvé parle Dr Dubois, dans les couches ter-
aires de Java, vient combler une des lacunes les plus
regrettables de la science, et rendre vaine une des plus
fortes vbjections des adversaires de l’évolution. Cet être,
en effet, par sa taille, sa station verticale et, surtout, par
le volume de son crâne, est exactement l'intermédiaire
tant cherché entre l’homme et le singe. C’est par une
forme analogue au Pithecanthropus que l'espèce humaine
à dû passer lorsqu'elle s’est élevée du stade simien à la
forme réeliement humaine,
Mais, dira-t-on, les espèces animales peuvent avoir,
entre elles, de nombreux points de ressemblance:cela ne
prouve pas qu'elles descendent les unes des autres. C’est
ici qu’intervient le troisième ordre de preuves: celles
tirées de l'embryologie. Tout animal parcourt, pendant
son développement embryonnaire, les stades que son
espèce a franchis, au cours de son évolution. Le fœtus
humain n'échappe pas à cette loi. ILy a un moment où il
a des arcs branchiaux, comme un poisson, une œueue
comme un mammifère quelconque. D'ailleurs, au début
du développement, les embryons de la tortue, du pou-
A 10 7
(1) E Harcxer : Etat actuel de nos connaïssances sur l'ori-
gine de l’homme, édition française. Paris, Schleicher, 1900, in-8,
62 p.
let, du chien et de l’homme ne different pas sensible-
ment l’un de l'autre. Enfin, si la plupart des organes
inutiles disparaissent au cours du développement em-
bryonnaire, un certain nombre persistent jusque chez
les adultes: ce sont les organes rudimentaires. C’est,
pour cela, que nous avons un certain muscle et une
apophyse osseuse qui sont très développés chez les Mar-
supiaux, auxquels ils servent à soutenir la poche où ils
renferment leurs petits, et qui nous sont, par contre,
absolument inutiles. De même encore, l’appendice cæcal
de l’intestin que nous avons hérité des Mammifères
inférieurs, et qui, loin de nous servir à quelque
chose, peut devenir l’occasion des accidents les plus
graves. Tous ces faits, développement embryonnaire et
persistance d'organes rudimentaires, prouvent qu'il y a
entre tous les êtres une parenté intime, que tous, y com-
pris l’homme, descendent d'une souche commune,
Enfin, il est un dernier ordre de faits qu'il faudrait étu-
dier. L'homme, pourrait-on dire, est un animal au point
de vue physique seulement; mais il se distingue de tous
les animaux au point de vue moral. Seul il possede l’in-
telligence, une âme, alors que les animaux ne sont
guidés que par l'instinct. Je me propose d'envisager ce
poiut de vue dans une série d’études sur l'instinct et
l'intelligence, avec tous les développements qu'il mérite.
Dr. L: LALoy.
Transformation de la Loupe simple
en loupe binoculaire et stéréoscopique
Par le Dr Emile Berger.
La théorie de cete loupe a été déjà exposée à l’Acadé-
mie des sciences de Paris, le 20 novembre 1899 (note
présentée par M. le professeur Lippmann). Grâce à une
action prismatique très forte, deux lentilles convexes,
inclinées l’une par rapport à lautre, donnent d’un objet
rapproché, deux images différentes, l’une pour l'œil
droit, l’autre pour l'œil gauche. Les deux images
viennent se dessiner sur deux points identiques des deux
Loupe binoculaire et stéréoscopique du Docteur Berger.
rétines et, par suite, le cerveau les percoit comme éma-
nant d’un seul objet. La différence des deux images,
aussi grande qu'elle le serait, si l’écartement pupillaire
était élargi, est cause de l’effet stéréoscopique très mar-
qué que produit la loupe.
L'appréciation du relief ne s'obtient toutefois qu'après
LE NATURALISTE 19
un certain entrainement ; en général elle atteint assez
rapidement une étonnante finesse. Cet effet stéréosco-
pique se manifeste un peu plus difficilement chez des
gens, comme les micrographes et les astronomes, qui se
servent habituellement d’un instrument monoculaire.
Par leur inclinaison, les lentilles produisent un astig-
matisme contre la règle, égale au 1/3 desdites lentilles.
Cet astigmatisme peut corriger l’astigmatisme physiolo-
gique des yeux humains, dans une proportion de 90 à
9% 0/0. Dans le cas d'une surcorrection de l’astigmatisme
de l'observateur par celui de la loupe, il suffit d'une
deuxième inclinaison de cette loupe à la verticale, pour
le diminuer dans la mesure nécessaire.
La nouvelle loupe remplace la loupe monoculaire
Observation à la loupe binoculaire stéréoscopique.
actuellement en usage. Elle en conserve le grossissement
et le foyer, agrandit le champ visuel, elle rend la vision
binoculaire aux savants, artistes et ouvriers obligés
d’être borgnes pendant leur travail. Elle produit un effet
stéréoscopique très marqué, effet si nécessaire aux tra-
vaux qui nécessitent une grande finesse d'observation
ou d'exécution. Elle supprime le surmenage de l'œil qui
travaillait seul et la fatigue de l’orbiculaire des pau-
pières de l’antre œil qui restait fermé. Elle permet l’oh-
servation de l’objet avec une très légère convergence et,
dans la plupart des cas, corrige l’astigmatisme indivi-
duel.
La nouvelle loupe binoculaire stéréoscopique trouve
son emploi dans certaines sciences (zoologie, botanique,
micrographie, etc.), dans des examens techniques
(grains, pierres précieuses), dans certains arts (gravure,
miniature), dans un certain nombre de professions et elle
sert aux malades, dont la vue est affaiblie, comme loupe
à lecture.
N. B. — Le prix de cette loupe est de 18 francs. (En
vente chez les Fils D'Emile Devyrolle, naturalistes, 46, rue
du Bac, Paris.)
LES RATS EN THESSALIE ‘
La Thessalie, province productrice de blé, souffre à peu près
à chaque récolte de déprédations causées par les rats. Ces ani-
maux descendent pendant l'été des petites collines dont toute
cette province est mamelonnée, pour se répandre dans les champs
de blé et dans les prairies. Ils se terrent dans des trous de 40 à
60 centimètres de profondeur et y construisent leurs nids avec
de la paille où de l'herbe fraiche. C'est dans ces excavations
que les femelles mettent bas leurs petits au nombre de 6 à 12
par chaque portée et ce, cinq ou six fois par an. Ces trous sont
quelquefois si rapprochés les uns des autres que la plaine
envahie présente l'aspect d'un crible. Cela arrive surtout lorsque
les familles de rats sont confondues et mêlées. Dans le cas con-
traire, les trous de chaque famille se trouvent à une certaine dis-
tance les uns des autres. Mais, dans les deux cas, les terriers
correspondent souterrainement.
Ces rats sont un véritable fléau pour les cultivateurs; ils se
multiplient avec une extrême rapidité et peuvent détruire en
quelques nuits la récolte de blé correspondant à une étendue de
plusieurs milliers de stremma (2). Ils restent cachés dans leurs
trous pendant la journée, ils en sortent la nuit venue, s'abattent
sur les épis et sur l'herbe et emportent au fond de leur trou tout
ce qu'ils ont abattu.
Tous les moyens que la science et la pratique conseillent ont
été appliqués pour les détruire; quelques-uns ont semblé réussir,
mais leur succés n'a été que partiel. On n'est jamais arrivé à
exterminer complètement ces rongeurs.
Voici les principaux moyens qui ont été employés lors de la
grande multiplication de ces animaux en 1892.
a) Les terres envahies ont été submergées artificiellement; ce
moyen est très efficace, mais le manque d'eau en quantité suffi-
sante en rend l'application difficile.
b) On posa des tuyaux de 3 à 5 centimètres de diamètre, con-
tenant une partie d'acide arsémeux et quatre parties de farine;
très peu de rats furent empoisonnés.
c) On fit venir des machines spéciales au moyen desquelles on
versait dans les trous du bisulfure de carbone. Les vapeurs pro-
duiles par celle substance tuaient les rats. Ce moyen plus effi-
cace que les précédents était très dispendieux et d'une applica-
tion peu facile.
Les cultivateurs se trouvaient donc dans la détresse, lorsque
le ministère royal de l'intérieur apprit que M. Læffler, profes-
seur d'hygiène à Greifswald, avait trouvé une lymphe détermi-
nant chez les rats une maladie contagieuse et mortelle.
Ce savant fut immédiatement appelé en Grèce pour appliquer
en Thessalie sa méthode. Arrivé à Athènes, il donna au labora-
toire microbiologique de cette ville les instructions nécessaires
pour la préparation d'une quantité de sa lymphe. Voici comment
on procède :
Dans une chaudière contenant de l’eau ordinaire, on ajoute de
la paille dans une proportion de 2 %. On fait bouillir le tout
pendant deux heures et on transvase après avoir laissé refroidir.
On ajoute ensuite, dans une proportion de 2 %, un mélange de
peptone et de sucre de raisin dissous au moyen d'un bain à
vapeur dans une petite quantité d'eau.
Le liquide obtenu de la sorte doit être trois fois cristallisé,
après quoi on le laisse refroidir; on y dissout un tube de lymphe
de M. Loœffler, et enfin on élève et on maintient le liquide à 30°
de température pendant vingt-quatre heures.
M. Léœffler se rendit en Thessalie muni de quelques centaines
d'ocques (3) de ce liquide et de quelques centaines de tubes de
sa lymphe et, arrivé à Bacrena, village près de Larissa, y com-
mença l'application de sa méthode; on faisait tremper des mor-
ceaux de pain dans le liquide raticide qu'on livrait ensuite aux
paysans et aux soldats. Ceux-ci les jetaient dans les trous des
rongeurs.
C'est ainsi que la maladie contagieuse donnée par la lymphe
de Lœffler à été communiquée aux rats. Au bout de quinze jours,
le travail destructif des animaux avait cessé dans toutes les pro-
(1) Extraits d'articles publiés dans la Revue d'agriculture
hellénique, par M. Gennadios, ancien directeur de l'agriculture
du royaume.
(2) Le stremma (100 mètres carrés).
(3) L'ocque équivaut à 1.250 grammes.
80 LE NATURALISTE
priétés où la méthode en question avait été appliquée. Les rats
ne sortaient plus la nuit de leurs trous et on en trouva un grand
nombre qui étaient morts dans les terriers ou dans le voisi-
nage. À
Cependant les rats de Thessalie n'ont pas été entièrement
détruits car il en reste toujours sur les collines et dans les terres
incultes.
NOTE SUR LE BOIS SECONDAIRE
DU
Tulipier de Virginie
Pendant le cours de nos recherches sur le Bois secondaire des
Angiospermes Dicotylédonées, indigènes et cultivées dans la
région viroise, nous avons pu étudier les caractères que présente
le bois du Tulipier de Virginie (Liriodendron tulipiferum L.),
arbre appartenant à la belle famille des Magnoliacées, introduit
à Vire vers la fin du dix-huitième siècle par un ancien garde du
corps de Stanislas, roi de Pologne.
Le Liriodendron tulipiferum L..-est originaire de l'Amérique
boréale, il peut atteindre, dans son pays natal, quarante mètres
de hauteur. Son bois blanchâtre, odorant, quoique léger et mou
vu son prompt accroissement, peut se prêter à un beau poli; de
plus, on prétend qu'il n’est pas sujet à la vermoulure.
Nous allons suivre, dans nos descriptions, l’ordre suivant
coupe transversale, coupe longiludinale langentielle et cou pe
longiludinale radiale, ce mode d’exposition nous semblant le
plus rationnel et surtout le plus compréhensible.
COUPE TRANSVERSALE
1. — Anneaux limilalifs d'accroissement annuel.
Les anneaux limilalifs d’accroissement annuel visibles à
l'œil nu sont assez régulièrement circulaires quoique n'étant pas
concentriques. L'examen microscopique montre que ces anneaux
sont constitués par une assise d'environ sept cellules à parois
très peu épaissies; ces cellules subrectangulaires sont très apla-
ties, en sorte que les côtés subperpendiculaires aux rayons
médullaires sont beaucoup plus longs que ceux qui leur sont
subparallèles, ces derniers étant très étroits.
2. — Zones ligneuses annuelles.
Les zones ligneuses annuelles, composées des bois de prin-
temps el d'aulomne, sont comprises entre deux anneaux limita-
tifs d'accroissement annuel; elles présentent des Fibres ligneuses,
des Rayons médullaires, des Vaisseaux et du Parenchyme
ligneux.
Les Fibres ligneuses sont subpolygonales où plus ou moins
arrondies, leur lumen parfois rond est très grand, leurs parois
sont peu épaissies. Ces fibres sont disposées en files radiales
irrégulières, les plus grandes ont environ quinze millièmes de
millimètre de largeur.
Les Rayons médullaires sont presque droits, assez éloignés les
uns des autres (on en compte cinq par millimètre); leur largeur
varie suivant le nombre des files qui les composent, les plus
communes de ces files ont de un à trois rangs de cellules à parois
minces radialement allongées, mais elles peuvent en avoir excep-
tionnellement plus.
Les Vaisseaux aériens ont leur ouverture ovalaire ou plus ou
moins arrondie, même subpolygonale, leurs parois sont minces,
ils sont disséminés, assez grands dans les bois de printemps et
d'automne, mais plus petits dans la partie du bois d'automne
qui se trouve près du bord externe. Ces vaisseaux sont simples
ou composés. Les vaisseaux composés se présentent souvent
accolés par deux, trois, quatre, cinq et plus ; leur direction est
généralement radiale, mais elle est aussi parfois plus ou moins
oblique où perpendiculaire relativement aux rayons médullaires:;
ces vuisseaux accolés forment aussi parfois un groupe non
linéaire d'aspect diffus touchant deux rayons médullaires.
Les vaisseaux aériens sont parfois envahis par des thylles.
Le diamètre des grands vaisseaux est d'environ cinq à six
centièmes de millimètre et celui des petits de deux à trois.
Le Parenchyme ligneux est difficile à distinguer.
COUPE TANGENTIELLE LONGITUDINALE
Les Fibres ligneuses ont une direction plus ou moins courbe
selon leur éloignement ou leur rapprochement des rayons médul-
laires et des vaisseaux.
Les Rayons médullaires présentent un profil fusiforme; ils
sont plus ou moins larges, mais leur largeur n'est ordinairement
que de trois cellules; les unes sont peu (beaucoup moins d'un
millimètre) et les autres très allongés (un peu plus d'un milli-
mètre); les cellules qui les composent ont leurs parois minces;
elles sont plus ou moins ovales. Les rayons médullaires sont
terminés à chaque extrémité par une cellule triangulaire à base
arrondie et rarement par deux cellules l’une sur l’autre.
Les Vaisseaux aériens sont ouverts ou fermés, ils sont réti-
culés, rayés à ponctuations élargies transversalement et aréo-
lées.
Le Parenchyme ligneux présente des cellules courtes et des
cellules longues souvent aplaties par le contact des vaisseaux,
ces cellules sont lignifiées à parois ordinairement minces et ornées
de petites ponctuations plus ou moins arrondies.
COUPE RADIALE LONGITUDINALE
Les Rayons médullaires, constitués par un parenchyme müri-
forme, se montrent en bandes droites transversales superposées
et parallèles, le nombre des bandes est très variable ; les cellules
de ces rayons médullaires se trouvent en communication avec
les vaisseaux par de grandes ponctuations aréolées lorsqu'elles
sont en contact.
Les cloisons transversales des vaisseaux sont ajourées en
forme d’échelles dont les échelons seraient étroits et très
espacés. j
Les échantillons dont nous nous sommes servis pour cette
étude proviennent d'un arbre cultivé depuis fort longtemps à
Vire.
Emile BazLré.
LE MICROBE DE LA PESTE
L'extrème contagiosité de la peste est connue depuis
très longtemps, à tel point que les habitants des contrées
infectées n’osaient pas approcher des morts. Pendant
l'épidémie de Florence qui tua plus de 100.000 habi-
tants, on jetait les cadavres pêle-méle dans les galeries des
Campi Santi, dans des caves ou dans ü’anciennes car-
rières afin de débarrasser au plus vite les rues et les
places publiques. Ceux qui se dévouaient pour transpor-
ter les cadavres prenaient certaines précautions, et un
tableau de Zumbo nous représente un forcat,le nez re-
couvert d'un bandeau, procédant au transport des cCa-
davres.
est seulement depuis 1894 que l’on connait le bacille
qui constitue le germe de la peste.
Ce bacille a été découvert simultanément par Yersin
et Kitasato. Il se présente sous la forme d’un bâtonnet,
court, trapu, à bouts arrondis. Lorsqu'on le traite par les
couleurs d’aniline, il se colore plus vivement aux extrémi-
tés qu’au milieu de telle sorte que le centre se présente
comme un espace clair. Le bacille de la peste, examiné
vivant, ne présente aucun mouvement. On trouve le ba-
cille de la peste, en grande abondance dans les bubons,
dans le sang, dans la rate et dans les crachats des ma-
lades atteints de peste. Ce microbe se cultive facile-
ment dans tous les milieux employés en bactériologie.
Sur la gélose il se forme des colonies ayant l’aspect de
taches opalines à bords irisés. Lorsqu'on ensemence la
gélatine par piqure, elle n’est pas liquéfiée et 1l se déve-
loppe des grains aualogues à ceux des cultures du strep-
tocoque de l’érysipèle. Les cultures sur bouillon à la sur-
face duquel on fait nager quelques gouttes de beurre ou
d'huile prennent, ainsi que l’a montré Hafkine, un aspect
LE NATURALISTE 81
tout spécial. Les bacilles forment d’abord des ilots, flot-
tants à la surface, au-dessous du beurre. De ces ilots par-
tent des prolongements verticaux qui descendent plus où
moins bas dans la profondeur du bouillon. L'aspect rap-
pelle celui des stalactites.
Les cultures du hacille pesteux,injectées sous la peau de
la souris, déterminent des lésions identiques à celles de
la peste de l’homme. La souris meurt au bout de 1 à 3
Jours.
Le bacille pesteux n’est pas détruit par les basses tem-
pératures, ce qui explique que la peste puisse se dévelop-
per dans des pays qui ont un climat très rigoureux. C’est
ainsi que des foyers pesteux importants se sont produits
dans la Transbaikalie où la température moyennne est en
hiver de — 20°. Au contraire, les températures élevées sont
mal supportées par le bacille. Une culture meurt à une
température de 58° maintenue pendant une heure. La
peste n’a jamais envahi les régions à température tropi-
cale et elle disparaît en Égypte au moment des plus
fortes chaleurs de l'été.
La découverte de Yersin et Kitasato a permis d'intro-
duire deux nouvelles méthodes dans la thérapeutique de
la peste: ce sont le sérum antipesteux de Yersin et le
vaccin de Haffkine.
La sérumthérapie de la peste, à l'aide du sérum de
Yersin, consiste à inoculer à l'homme le sérum sanguin
d'animaux immunisés. Pour obtenir le sérum, on fait à
des chevaux des injections intra-veineuses de cultures
tuées, puis de cultures vivantes. Les animaux, ainsi
. traités, deviennent malades, et il faut attendre très long-
temps (un anet demi) avant de leur prendre du sérum.
Le sérum de Versin a fourni de très beaux succès en
Chine; mais il s'est montré moins efficace dans l'Inde.
Le sérum de Yersin guérit les malades atteints de peste,
mais il peut aussi être employé comme préventif.
L'action préventive de ce sérum est indiscutable, mais
elle est de courte durée et ne dépasse pas quatorze jours.
La vaccination de Haffkine consiste à inoculer à
l’homme des cultures stérilisées du bacille de la peste.
Voici comment le médecin russe prépare son vaccin : on
ensemence un ballon de bouillon à la surface duquel on
fait flotter du beurre. Au bout d’un mois on répartit le
bouillon dans des tubes qu’on chauffe pendant une heure
à 70°. Pour vacciner on en injecte sous la peau du bras
3 centimètres cubes. La vaccination est suivie d’un fris-
son et d’une élévation de température pouvant atteindre
40°. La région inoculée se gonfle et devient douloureuse.
Ces symptômes disparaissent au bout de 24 heures.
D' BERDAL.
LES ORCHIDÉES INDIGÈNES
Sans avoir l'éclat des orchidées exotiques, celles de
notre pays n'en sont pas moins élégantes et gracieuses.
Certes, il ne faut pas chercher desfleurs qui puissent entrer
en comparaison avec celles des Cattleya, des Lycaste, des
Odontoglossum, des Vanda; mais tel Orchis, tel Ophrys,
le Sabot-de-Vénus, dans leur humilité, sont cepen-
dant bien jolis, bien dignes d’admiration. Longtemps
délaissées, les orchidées indigènes ont acquis les
faveurs de quelques amateurs, et le Comte de Paris en
avait réuni, au château d'Eu, une collection des plus in-
téressantes. Tout récemment, M. Correvon de Genève,
a publié, sous ce titre, Les Orchidées rustiques, un excel-
lent petit livre où leur nature est décrite avec soin par un
vrai connaisseur.
Sur 8.000 Orchidées environ, connues jusqu'à ce jour,
la France sert d'habitat à 77 espèces, non compris les va-
riétés, qui sont nombreuses, et les formes hybrides don!
on a fortement abusé.Il n’est pas rare de voir attribuer à
l’hybridation des variations embarrassantes, sans qu'il
soit possible d'apporter une seule preuve à l’appui de
cette opinion.
Les orchidées françaises appartiennent à 19 genres
très inégalement répartis au point de vue du nombre,
des espèces et de leur distribution géographique. Si
quelques-uns tels qu'Epipogium, Lipavis, Chamæorchis,
Cypripedium, Herminium, Goodyeru, Malaxis, Corallochiza,
Limodorum, Neotlia sont monotypes, c'est-à-dire sont re-
présentées, chez nous, par une seule espèce, il en est
d’autres, au contraire, comme les Orchis et les Ophrys, qui
sont abondamment distribués, et en forme et en nombre.
Nous ne reviendrons pas sur la conformation de la
fleur des orchidées; mais, pour bien comprendre la clas-
sification des genres et leur groupement, nous rappelle-
rons que : les orchidées sont pourvues d’une ou de deux
étamines fertiles; que les filets des étamines sont
soudés en colonne avec le style, formant ce qu'on appelle
le gynostème, l'anthère pouvant rester libre de toute at-
tache ; que le pollen forme des masses polliniques,
dénommées pollinies, de consistance variable, atténuées
ou non à leur base en un appendice, auquel on a donné
le nom de caudicule La racine peut-être formée de fibres
plus où moins nombreuses et intriquées; elle peut être
grèle,rampante, rameuse, émettant des stolons; c’est quel-
quefois un rhizome ramifié en forme de corailavec des
ramifications munies d’écailles; dans la grande majorité
des cas,elle est formée de deux tubercules, qui sont eux-
mêmes composés de plusieurs racines, soudées ensem-
ble, et auxquels on dor"* le nom, tout à fait impropre de
bulbes. Rappelous aussi qae les pseudo-bulbes des orchidées
exotiques n'ont rien à faire avec les formations bulbi-
formes, et que ce sont tout simplement des portions de
tiges, qui se sont modifiées et gonflées.
Il nous sera facile maintenant de grouperles orchidées
françaises en nous basant sur les considérations qui sui-
vent :
4° Deux étamines latérales fertiles : Cypripedium L.
20 Etamine centrale fertile.
«a Anthère distincte du gynostème, persistante; pol-
linies sans caudicule : Néottiées.
b. Anthère terminale libre et mobile, caduque; polli-
nies atténuées en caudicule : Épipogium Gmel.
c. Anthère terminale libre et mobile, persistante ou
caduque ; pollinies sans caudicule : Malaxidées.
d, Anthère continue avec le gynostème ; pollinies sans
caudicule : Ophrydées.
Les Cypripedium, les Néottiées et les Ophrydées pré-
sentent seuls de l'intérêt au point de vue cultural,
au point de vue de la grâce et de lélègance. Chez les
Malaxidées et chez l'Epipogium, 1l ne faut rechercher que
les bizarreries, la singularité du port et des caracteres
botaniques.Signalons à nos lecteurs quelques-unes de ces
plantes.
Le Cypripedium (il vaut mieux dire Cypripedilum), Cal-
ceolus L. est la perle de la flore terrestre en France; il
82 LE NATURALISTE
est, à cette dernière, ce que le Nymphéa est à la flore
aquatique. Sa grande fleur, solitaire, presque toujours à
grandes divisions d’un brun pourpré, avec son labelle en
forme de sabot, jaune taché et strié de, pourpre, en fait
un objet d’admiration; aussi comprenons-nous la joie et
l'émotion du botaniste qui se trouve tout à coup en sa
présence. Ses feuilles ne manquent pas non plus d'élé-
gance ; elles sont largement ovales, carénées et plissées,
Le Sabot de Vénus est peu répandu en France; c’est dans
le Nord-Est qu'il parait croître avec le plus de plaisir ;
dans la Haute-Marne particulièrement, aux environs
d’Arc-en-Barrois.
Dans les Néottiées, nous trouvons quelques genres in-
téressants, mais ce n’est pas là encore qu'il faut s'arrêter
si l’on veut se faire une idée de ce qu'est une Orchidée.
Signalons cependant le Cephalanthera.La souche est formée
de fibres radicales cylindriques qui rappellent celles du
Cypripedilum. Les divisions florales sont presque égales et
rapprochées; le labelle, formé de trois lobes mais non
prolongé en éperon; le gynostème allongé; l’anthère
terminale libre. Les trois espèces qui se rencontrent en
France, sont faciles à distinguer; elles croissent assez
souvent ensemble, notamment aux environs de Paris.
L'une d'elles se reconnaît de suite à ses fleurs rouges,
c’est le Cephalanthera rubra Rich.;les deux autres les ont
blanches ; mais, dansl’une, qui est de beaucoup la plus
abondante, les feuilles sont ovales, les bractées florales
foliacées égalent ou dépassent l'ovaire, toutes les divi-
sions florales sont obtuses. Cest le cas du Cephalanthera
grandiflora Bab. Dans le Cephalanthera ensifolia Rich.,les
feuilles sont linéaires, distiques, les bractées beaucoup
plus courtes que l'ovaire, les divisions florales plus petites
et dissemblables entre elles, les trois extérieures aiguës
tandis que les deux internes sont obtuses.
À ce groupe des Néottiées il faut rattacher les Spi-
ranthes, le Goodyera, les Epipactis, le Listera, le Limodo-
rum et le Neottia. Quoique ces deux derniers genres ne
présentent rien qui puisse les faire rechercher, leur bizar-
rerie mérite qu'on en dise quelques mots. Le Limodorum
abortivoum S\W., rappelle une grande asperge violette. La
tige ne présente que des écailles, les fleurs sont grandes,
dressées, violettes, disposées en grappe lâche. Quant au
Neottia Nidus-avis Rich., sa racine, formée de fibres
épaisses, intriquées en pelote, lui a valu son nom spéci-
fique. Sa tige dépourvue de feuilles, dépourvue de chlo-
rophylle, ses fleurs d’un jaune roussâtre, la teinte noi-
râtre que prennent ses organes en se desséchant, font
penser à un Orobanche.
C’est au groupe des Ophrydées que la palme doit être
réservée. Aux caractères que nous avons donnés plus
baut, il faut ajouter celui qui est tiré de la présence, à
l’origine des pollinies, d’une ou deux glandes visqueuses
appelées rétinacles quelquefois renfermées dans un
repli du stigmate qui a recu le nom de bursicule. Les
fleurs y sont fréquemment pourvues d’un éperon parfois
très allongé qui prolonge le labelle. Les racines sont tou-
jours transformées en tubercules, La présence d’un seul
rétinacle caractérise les Serapias etles Aceras. Le gymnos-
tème prolongé en bec à son sommet et l'ovaire non con-
tourné distinguent, à coup sür, le premier de ces genres
du second dans lequel, à l'ovaire contourné, s'ajoute un
gymnostème muni d'un appendice à sa partie supérieure,
Tous deux possèdent un labelle à éperon, sauf dans une
espèce, l’Aceras anthropophora R. Br.
Dans les Serapias, le labelle, d’un pourpre noir, atteint
d'assez grandes dimensions,etla fleur est pourvue de brac-
tées, quelquefois démesurément développées. Le Serapias,
cordigera L., de lOuestet du Midi, a un labelle largement
ovale, presque en cœur; le S. longipetala Poll., du Sud-
Ouest et de la région méditerranéenne, l’a lancéolé et acu-
miné ; dans le S. Lingua L. il est largement ovale etaigu.
Le $. occultata Gay n'est qu'une miniature, spéciale à la
Provence, du précédent, qui habite la même région quele
S. longipetala. Ces diverses plantes se croisent fréquem-
ment entre elles.
Dans les Aceras, nous pouvons nous trouver en pré-
sence de plantes dépourvues d'éperon. Nous avons alors
affaire à l'A. anthropophora R. Br., l'Homme pendu, à
lobes latéraux du labelle filiformes,ce qui donne à cet
organe une vague ressemblance avec les bras et les
jambes d'un homme pendu. Dans d’autres le labelle est
muni d’un éperon quiest de même longueur que l'ovaire;
c’est le cas de l'Aceras pyramidalis Reichb., dont les fleurs
d’un rose vif forment un épicompact et court. Si l’éperon
est beaucoup plus court que lPovaire nous avons en pré-
sence : l'Aceras hircina Lindi. bien reconnaissable à Ja
division moyenne du labelle atteignant jusqu'à six centi-
mètres de longueur, à la teinte verdâtre et à l’odeur de
boue de ses fleurs ; l’Aceras longibracteata Reichb., très
belle plante de Provence et de Corse, à fleurs formant
un épi très ample, rose-verdâtre, ponctuées de rouge en
dedans, pourprées et veinées de vert en dehors, à
labelle pourpre foncé, à bractées foliacées, dépassant
longuement les fleurs; l’Aceras densiflora Boiss., des
mêmes régions et des Pyrénées, mais à fleurs blanchâtres
avec le labelle rose et des bractées peu développées, dis-
posées en un épi cylindrique étroit et très serré.
Avec deux rétinacles nous trouvons les Orchis et les
Ophrys. Nombreuses sontleurs espèces, aussinous borne-
rons-nous à énumérer celles qui croissent dans le centre
de la France, la région parisienne, d’ailleurs, très bien
partagée au point de vue de l’élégance et de la beauté
des représentants. Les Orchis, à cause de l'époque de leur
floraison, sont souvent désignés sous le nom de Pente-
côtes. Rien de gracieux comme l'Orchis purpurea Huds.,
qui habite les bois ombragés, avec son casque foncé,
presque noir, son labelle blanc parsemé de houppes pur-
purines. L'Orchis simia Lam. et l'O. militaris L., ont le
casque rose cendré plus ou moins pâle avec les lobes du
labelle filiformes et courbés dans le premier, plus larges
dans le second. L'Orchis ustulata Li, avec ses fleurs
petites, d’un beau noir, en épi très serré est une minia-
ture de l'Orchis purpurea. Dans ces quatre plantes les
bractées sont plus courtes que l’ovaire. Elles sont plus
longues ou de même taille dans l'O. Morio L. à fleurs rose
pourpre, inodores, abondant, du moins, dans les lieux
sablonneux, et dans l'O, coriophora L.,de couleur rouge
sale, mêlé de vert, à odeur de punaise très accentuée, qui
recherche les prairies humides, Dans une forme de cette
plante, l'odeur rappelle celle de Ta vanille. Toutes ces
espèces ont les divisions extérieures du périanthe rap-
prochées en forme de casque. Dans celles qui suivent,
elles sont étalées ou réfléchies. C'’estlecas des Orchis Ma-
culata L. à feuilles maculées de noir et à fleurs lilacées
ou blanches avec des bractées courtes; O0, latifolia L.
pourpre foncé à longues bractées, qui ont en outre les
tubercules palmés. Les Orchis mascula L., laxiflora Lam.
et sambucina L. les ont entiers, avec les fleurs jaunes
dans le dernier, à labelle hérissé de papilles et à feuilles
larges dans le premier, à labelle non hérissé et à feuilles
LE NATURALISTE 83
étroites dans le second. On peut réunir aux Orchis, le
Platanthera bifolia Rich. à fleurs blanches très odorantes,
à long éperon filiforme arqué et les Gymnadenia. Dans
ces derniers les fleurs sont petites, à odeur d'œillet et à
long éperon dans le G. conopea R. Br.: à parfum vanillé,
à éperon beaucoup plus court dans le G, odoratissimn
Rich.
Les Ophrys, eux, n'ont pas d’éperon et leur ovaire n'est
pas tordu, ce qui les distingue génériquement des
Orchis. De plus,leur labelle présente des formes qu'on ne
retrouve nulle part ailleurs. C’est ainsi qu'on distingue
l’'Ophrys myodes Jacq. (Mouche); l'O. aranifera Huds.
(Araignée); l'O. arachnites Reich. (Frelon); l'O. apifera
Hud. (Abeille) ; l'O. Scolopax Cax. (Bécasse); O. tenthredini-
fera Willd. (Tenthrede);l’0. bombiliflora (Bombyx), etc.,
dont les désignations spéciales rappellent l'apparence
qu'on peut trouver au labelle, avec un peu de bonne
volonté. Dans d’autres espèces, le nom a été tiré du
coloris, par exemple pour les Ophrys fusca Link. et
lutea Cav.
Le Nigritella angustifolia Rich., des Alpes, appartient
encore aux Ophrydées. C’est une petite plante à fleurs
noirâtres, de très faibles dimensions, réunies en un épi
très court et pyramidal, délicieusement parfumées. Le
labelle, dans cette curieuse orchidée, est dressé et non
retombant et les rétinacles non enfermés dans une
bursicule.
Les Orchidées s’hybrident facilement et fréquemment
dans la nature, et la liste de leurs produits de croise-
ment, qui est encore loin d'être close, est déjà passa-
blement garnie.
P. HARIOT.
EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1900
Un congrès international de l'Education physique aura
lieu à Paris, au Palais des Congrès du 30 août au
4 septembre prochain. Il sera divisé en 5 sections : Philo-
sophie, Sciences biologiques appliquées, Technique, Péda-
gogie, Propagande.
Voici le programme de lasection IT sur les « Sciences
biologiques appliquées ».
1° Les sciences biologiques, en déterminant les effets
exacts de l'exercice sur le corps humain, doivent assurer
l’accord entre les moyens employés et le but de l’édu-
cation :
2° Toutes les fonctions de la vie sont solidaires et
dépendent du système nerveux. Les muscles ne sont que
des instruments commandés par les centres nerveux ;
comme conséquence en éducation, l’étude des phéno-
mènes psychiques doit être placée avant celle des autres
fonctions ;
Réaction réciproque des fonctions psychiques sur les
fonctions de la vie ;
3° Hygiène et éducation des fonctions dans leur rapport
avec l'exercice ;
Éducation des sens, des perceptions et des sensations ;
4° Lois de l’évolution des individus et des races humaines :
5° Influence de l’hérédité, des milieux, de l’alimen-
tation et du régime, de l’activité, du repos et des habi-
tudes professionnelles sur l'individu :
Limites de la modificabilité de l’individu ; types carac-
téristique, des spécialités professionnelles.
Emprunts à la zootechnie ;
6° De l'homme considéré comme producteur @'énergie :
Coefficient personnel d'énergie ; moyens de l'aug-
menter :
Formes différentes de l'énergie humaine : effort
statique et travail musculaire ; énergie nerveuse ;
Excitants de l'énergie : aliments et poisons du système
nerveux ;
Étude des procédés d'entrainement ; résultats.
7° Étude de la forme, des proportions, du volume et de la
densité du corps suivant son adaptation à un travail
donné, en particulier à la locomotion avec les mains ;
8° Parallèle des effets des exercices spontanés et des
exercices rythmés et commandés ;
9° Fatigue nerveuse et fatigue musculaire. De la
dépense nerveuse et de la dépense musculaire ; leur
équivalence.
10° Direction et utilisation de l'énergie humaine ;
Vérification de la loi du moindre effort ;
119 Mécanisme et coordination des mouvements ;
Mesure du travail mécanique et physiologique ; com-
paraison du travail dépensé dans les différents mouve-
ments ;
12° Réalisation de l'économie du travail dans les actes
de la locomotion et dans les divers mouvements profes-
sionnels ;
Influence prépondérante du rythme sur la quantité de
travail dépensé ;
130 Effets différents de l'exercice suivant la quantité
de travail dépensé, la nature des mouvements et le mode
d'exécution.
Les questions à l'ordre du jour du congrès pour les
sciences biologiques appliquées sont :
— a. Étude des réactions réciproques des phénomènes
psychiques sur les principales fonctions de la vie.
— b. Étude de la forme, des proportions, du volume et
de la densité du corps suivant son adaptation à un travail
musculaire donné.
— €, Quelle est la part de dépense nerveuse et de
dépense musculaire dans la production générale de
travail.
— d. Indiquer quelles sont les lois d'économie du
travail dans les différents actes musculaires.
LES DESMIDIÉES
Les Desmidiées constituent, après les Diatomées, la
plus jolie de toutes les familles d'algues d'eaux douces.
On les trouve dans les fossés, dans les vieilles ornières,
dans les mares d'eaux stagnantes, dans les fontaines et
dans les rivières enchevêtrées, dans le chevelu des
algues filamenteuses du groupe des Conjuguées, ou
fixées contre des corps flottants en décomposition, avec
des diatomées de toute espèce. Cette famille est très
riche en formes de toute beauté. Elle renferme une
vingtaine de genres qui se subdivisent en plusieurs cen-
taines d'espèces. Mais, sous le microscope, leur belle
teinte a un éclat qui rappelle souvent celui de l’éme-
raude. Les grains de chlorophylle où chromoleucites des
Cosmarium, par exemple, ontun éclat translucide comme
les pierres précieuses de cette couleur.
On les reconnaît tout de suite, du premier coup d'œil.
En effet, comme leur nom l'indique, les Desmidiées sont
84 LE NATURALISTE
des algues dont les cellules sont divisées en deux moitiés
symétriques, reliées entre elles par un isthme plus ou
moins étroit. Les deux divisions de la cellule desmidiée
se nomment les deux hémisomates ou demi-corps cellu-
laire. Le noyau de la cellule est dans l’isthme interposé
entre eux, etil envoie dans chacun d'eux des prolonge-
ments de protoplasma condensé, sous forme de bande-
lettes gélatineuses rayonnées.
Cette nombreuse famille se divise en deux groupes iné-
gaux : les Desmidiées filamenteuses et les Desmidiées
libres. Les premières sont formées de cellules alignées
bout à bout sur une même file, qui s’accroissent par
scissiparité, sur tous les points de leur longueur à la
fois. Elles sont enveloppées d’une gaine mucilagineuse
épaisse dans certains genres. Il est bon d’être prévenu
du fait, afin de ne pas prendre pour une Desmidiée
libre un fragment détaché d’une Desmidiée filamen-
teuse. C’est peut-être ce qui arrive pour le nouveau
genre Temperea que nous avons créé; cependant, nous
ne l’avons jamais rencontré sous forme de filament, mais
toujours à l'état de cellule libre. Ce qui nous a décidé à
le maintenir comme un genre à part, c’est la disposition
en zones de la chlorophylle, qui rappelle tout à fait ces
stries d’émail coloré de diverses nuances que l’on voit
dans les billes de verre des enfants : de là le nom de
Temperea zonata, que j'ai donné à cette curieuse espèce.
La chlorophylle présente une disposition toute spéciale
dans laplupart desgenres, quifacilite singulièrement leur
détermination. Ainsi, elle est disposée en bandes spira-
lées dans le Spirotania; tout à fait comme dans les Spi-
rogyra. Elle présente trois gros chromoleucites dans les
hémisomates de certaines Desmidiées filamenteuses et
quatre dans le Desmidium quadrangulatum. Elle est dis-
posée en longs ovoilesrayonnés,dans les Cosmarium.Bref,
chaque genre, pourrait-on dire, renferme une disposition
particulière, en ce qui concerne ses chromoleucites.
De plus, dans certains genres de la famille, on ren-
contre, aux extrémités des hémisomates, un espace clair
rempli de granulations rouges agitées de mouvement
brownien. Cette disposition est tellement constante chez
les Docidium et les Closterium, qu'on pourrait la croire
naturelle. Il en est de même chez certains Cosmarium.
Mais il y a d’autres circonstances où on voit ces granu-
lations rouges mobiles envahir tout le contenu des Cos-
marium, absolument comme le ferait un parasite. Je suis
persuadé que c'en est bien un, dans ce cas tout particu-
lier, car l’algue paraïitalors singulièrement malade. Nous
ne savons si C’est un microbe ou une espèce de champi-
gnon parasite.
Enfin la paroi des cellules présente le plus souvent des
ornements bizarres. Tantôt elle est découpée sur son
pourtour de mille façons différentes, au point de ressem-
bler à la plaque à branches multiples de commandeur
d'un ordre quelconque. Tantôt elle présente des prolon-
gements, des pointes, des perles, des épines simples ou
ramiiées. Les genres Xanthidium, Arthrodesmut, Sau-
rasirum, Cosmarium affectent de présenter ces dernières
formes. Les genres Enostrum et Microsterias offrent les
découpures les plus curieuses et affectent plus ou moins
la disposition en étoile que nous venons de signaler tout
d'abord.
Ici, comme partout ailleurs, natura non facit saltus, la
nature ne saute pas brusquement d’une forme à une
autre; mais elle passe successivement par toutes les
formes intermédiaires. Le plus fervent adepte de la
fixité des espèces devient fatalement un transformiste
convaincu, dès qu'il étudie les Desmidiées et à plus
forte raison les Diatomées. On voit toutes les transitions
possibles entre une plante qui a la forme d’une phalange
ou d’un cylindre et une autre qui a la forme d’un soleil
à rayons multipliés. Il est non seulement possible, mais
infiniment probable que les douze mille espèces de Diato-
mées dérivent d’une seule souche primitive, et que les
centaines d'espèces de Desmidiées ont pour ancêtre
commun une cellule ovale. Nous avons des raisons de
penser que ces deux familles se sont détachées des En-
glinacées, à différentes hauteurs de leur évolution. Cette
théorie rend compte d’une multitude de faits, qui seraient
incompréhensibles sans cela. On peut affirmer que les
points rouges dont nous avons signalé l'existence nor-
male chez les Closterium, par exemple, ainsi que chez
les Docidium, occupent tout à fait la même place qu'ils
occuperaient chez une Englène divisée en deux autres
par scissiparité et se tenant encore par leur extrémité
postérieure, pour former les deux hémisomates symé-
triques.
Ce sont les mêmes parasites qui s’attaquent aux En-
glèneset aux Desmidiées. Ces parasites sont des animaux
ou des champignons : des Rhizopodes, des Chytridinées
et des Ancylistées.
On trouve chez les Desmidiées une reproduction
sexuée par Conjugaison, qui à pour résultat de créer une
oospore, que l’on appelle ici une auxospore. Elle est
souvent hérissée de pointes à la surface extérieure de
son enveloppe.
D' BoUGoN.
OFFRES ET DEMANDES
A vendre.
Lot de Carabiques européens : Harpalides, Féro-
nides, Anchoménides, Bembidiides. 300 espèces,
830 exemplaires, # cartons doubles. Prix. 65 francs.
Lot de Lamellicornes européens. 140 espèces,
500 exemplaires, 2 cartons doubles. Prix. 45 francs.
Lot de Malacodermes européens. 170 espèces,
500 exemplaires, 3 cartons. Prix........ 50 francs.
Lot de Ptinides et Anobiides européens. 54 es-
pèces, 178 exemplaires, 2 cartons. Prix. 28 francs.
Lot de Vésicants européens. 110 espèces, 305 exem-
plaires, 2 cartons 33 X 22. Prix... ... : 50 francs:
Lot de Chrysomélides européennes : Halticides,
Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
D ICALLONSIS EN 22 PTS EN EE An 49 francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Sagra à Cryptocephalus inclus. 200 espèces,
540 exemplaires, 5 cartons. Prix..... ... 60 francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exoti-
ques : Pachybrachrys à Zygogramma inclus. 210 es-
pèces, 680 exemplaires, 6 cartons. Prix. 60 francs.
LE NATURALISTE 85
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Doryphora à Dorydera inclus, 329 espèces,
978 exemplaires, 9 cartons. Prix..:... 4140 francs.
Lot de Cassides européennes et exotiques.
65 espèces,156 exemplaires,2 cartons.Prix. 80 francs.
S’adresser pour les lots de Coléoptères ci-dessus à
Les Fils D'Émile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
M. R. Blanchard, professeur à la Faculté de méde-
cine de l'Université de Paris, sera très reconnaissant aux
pérsonnes qui voudront bien lui envoyer des moustiques
ou cousins. Les conserver dans l'alcool à 90°, dans des
tubes dont chacun ne contiendra que des exemplaires de
même provenance, Introduire dans chaque tube une éti-
quette en papier, sur laquelle on aura noté au crayon la
date, l'heure et le lieu de la récolte, s’il existe des fièvres
intermittentes dans la localité et éventuellement si les
insectes ont été capturés dans la chambre occupée par un
fiévreux. Dans ce dernier cas, la recherche des mous-
tiques devra être faite avec un soin tout particulier.
Cette prière s'adresse aux naturalistes francais, mais
aussi, d’une facon encore plus pressante, à ceux des pays
d'outre-mer.
Adresser les envois à M, le professeur R. Blan-
chard, 15, rue de l'École-de-Médecine, à Paris.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 5 mars 1900.
— M. Charles Déperet fait part de ses recherches sur les
Dinosauriens des étages de Rognac et de Vitrolles
du pied de la montagne Noire. M. Depéret fait connaitre
l'existence, dans le petit chainon de Saint-Chinian, de nouveaux
gisements de Dinosauriens. En réunissant les données fournies
par les découverts de Chatteron, en Provence, avec les trouvailles
récentes faites en Languedoc, on connait dès maintenant, dans
les assises fluvio-terrestres du Crétacé le plus supérieur du midi
de la France, quatre types différents des Dinosauriens. Deux
sont des Sauropodes (herbivores à os pleins) de la famille des
Morosaurides, caractérisés par la disposition procælienne de
leurs vertèbres caudales : c'est d’une part l'Hypelosaurus de
Provence, reconnaissable à ses vertèbres caudales aplaties de
haut en bas:et d’autre part le Tifanosaurus du Languedoc, dont
les vertèbres caudales, très fortement procæliennes, sont com-
primées dans le sens transverse. Un troisième type, le Drypto-
saurus de la montagne Noire,est un Théropode de la famille des
Mégalosauridés. Enfin, le quatrième, le Rhabdodon de Provence.
est un ornithopode (herbivores à os pneumatiques) voisin de
l’Iguanodon.
— M. Thouvenin s’est proposé de rechercher quelles modifi-
cations de structure peuvent se produire dans les tiges,
lorsqu'on les soumet, dans le sens longitudinal, à une
traction modérée. Les expériences ont été faites sur un cer-
tain nombre d'individus appartenant à l'espèce Zinnia elegans.
On peut conclure, pour ce qui concerne la tige de cette plante,
qu'une traction modérée amène une diminution du stéréome
péricyclique et retarde le développement des faisceaux libéro-
ligneux secondaires.
— M. Lucien Daniel a étudié les variations dans les
caractères des races de haricots sous l'influence du
greffage. La greffe entre races produit dans la descendance
des haricots trois catégories de variations, se manifestant à la
suite d’une ou de plusieurs générations : elle accentue le nanisme
et permet d’obtenir des variétés plus naines; elle amène un mé-
lange plus ou moins complet des caractères des races associées;
elle peut provoquer la production, soit d'une variété remontant,
soit d’une variété analogue à une race déjà existante. Si on com-
pare maintenant ces résultats avec ceux fournis par l'étude de la
descendance des greffons dans les choux, les navets, les carottes,
les alliaires et les arbres fruitiers, on peut dire que la greffe
amène toujours une variation dans cette descendance. Cette
variation est moins marquée dans les espèces sauvages que l'on
greffe entre elles, plus accentuée dans les plantes cultivées.
P. Fucus.
Séance du 12 mars 1900.
M. L. Guignard donne le résultat de ses recherches sur l'ap-
pareil sexuel et la double fécondation chez les tuli-
pes. Dans un même genre, certaines espèces peuvent offrir, au
point de vue de la constitution de l'appareil sexuel femelle, des
caractères assez différents de ceux qui existent dans les espèces
voisines. Le Tulipa Celsiana etle T. Sylvestris, comparés aux
nombreuses variétés horticoles du 7. (Gesneriana, en fournis-
sent un intéressant exemple. Ces deux espèces se distinguent par
la faible différenciation des cellules qui, chez les autres Angio-
spermes, forment le groupe des Synergides et de l'oosphère au
sommet du sac embryonnaire et de celui des antipodes à la base;
non seulement elles sout toutes dépourvues de membranes d’en-
veloppe, mais celles qui correspondent aux antipodes restent
dans la région centrale du sac embryonnaire. La double fécon-
dation ne s'en effectue pas moins avec les caractères essentiels
qu'on lui connait.
— MM. Em. Bourquelot et I. Hérissey ont étudié les hy-
drates de carbone de réserve des graines de Luzerne
et de Fenugree. Ces hydrates de carbone sont comme ceux
des albumens des grains de Caroubier et de Canéficier, des
mannogaloctanes. Ces hydrates diffèrent les uns des autres par
leur composition et par leurs propriétés. La seminase les hydro-
lyse les uns et les autres, en donnant naissance à des sucres
réducteurs assimilables.
— M. L. Bordas continue ses études sur l'anatomie des coléo-
ptères ; il présente une note sur les organes générateurs
males des Coléoptères à testicules composés et fas-
ciculés. Ces insectes dont les testicules sont constitués par un
grand nombre de tubes courts, tronconiques ou en forme de
masses s'ouvrant à l'extrémité élargie des canaux déférents, ap-
partiennent aux familles des Aphodicides, Coprides, Géotru-
pides, Mélolonthides, Rutélides., Lucanides, Cétonides, Chryso-
mélides, Cérambycides, etc. Dans tous les genres de ce groupe,
l'appareil générateur mäle est à peu près uniforme et comprend :
19 deux testicules formés de lobules composés chacun d'un
nombre plus où moins considérable d’ampoules spermatiques;
29 une paire de canaux déférents cylindriques et renflés sur leur
trajet pour former les vésicules séminales; 39 deux glands an-
nexes ou accessoires (sauf chez les Cétonides); 4° un conduit éja-
culateur impair sur tout son trajet et généralement dilaté à son
origine.
Séance du 19 mars 1900.
MM. L. Matruchotet M. Molliard ont observé certains phé-
momènes présentés par les noyaux chez les végé-
taux sous l'action du froid. Cette action produit des dé-
formations nucléaires qui sont en relation évidente avec la posi-
tion respective du noyau et du suc cellulaire, ainsi qu'avec
l'épaisseur de la couche protoplasmique qui sépare ces deux
éléments. Un des phénomènes les plus apparents est une orienta-
tion, généralement bipolaire, de la partie chromatique,;avec con-
densation plus ou moins complète de la chromatine dans la ré-
gion équatoriale. Sans vouloir établir d'homologie avec les figures
de karyokinèse, il est intéressant de remarquer que cette orien-
tation n'est pas sans rappeler celle qu'on observe lors de la divi-
sion indirecte du noyau.
P. Fucus.
Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17.
86
LE NATURALISTE
EE
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CI-APRES DESIGNES
Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
S'ADRESSER A LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes, RUE DU BAC, 46, PARIS
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vitis.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata.
Agrilus cyanescens.
— tenuis,
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— Jlaricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
—. lentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— . cupreus.
—. bacchus.
Apion apricans.
— craccæ.
— .viciæ.
— flavipes.
— flarofemoratum.
— pisi.
— æneum.
— tenue.
— - VOrAX.
— violaceum.
— hæmatodes.
— pomontæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pin.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
ligustici.
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomiorum.
—. pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopoli.
Aromia moschata.
| Callidium unifasciatum.
| Clytus arietis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberca linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica olcracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Névroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hyménoptères.
Vespa crabrc.
— germaniCa.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopœus spirifex.
Atta barbara.
— Structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosce.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deiïlephila elpenor.
— euphorbitæ.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apitorme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlowophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas wrossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— Ccratægana.
— rosana.
—. Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depresseila.
—. nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— Ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rose.
— viridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa.
| Aphis rosæ.
— cercalis.
— fabæ.
— pruni.
— persictæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim viuis.
— tiliæ.
— salicis.
— persicæ.
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hæmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Simulium ornatum.
— maculatum.
— reptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
Hæmatopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus oles.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— iæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
29° ANNÉE
EXAMEN DE LA MÉTÉORITE
TOMBÉE LE 12 MARS 1899
A BIERBELÉ EN FINLANDE
Le 12 mars 1899, une chute de météorite est survenue
à Bierbelé (Bjurbôle), près de Borgo, dans le golfe de
Finlande. La masse, dont le poids total est d'environ 340
kilogrammes, a ouvert, dans la couche de 70 centimètres
de glace qui couvrait la mer, un trou de 9 mètres de
diamètre et s’est enfoncée de 6 mètres dans l'argile sous-
marine. Comme on le pense, son extraction n'a pas été
une petite affaire et on ne l'a obtenue que par morceaux.
Ces spécimens, au nombre de plusieurs centaines et dont
les deux plus gros pèsent 83 et 22 kilogrammes, sont
-conservés dans les bureaux de la Commission géologi-
que de Finlande, présidée par le savant M. J.-J. Seder-
holm. Un haut personnage russe auquel j'en suis extré-
De SÉRIE —
N° 315 15 AVRIL 1900
d'arrondissement de petits fragments ; on peut les quali-
fier de dynamochondres, pour rappeler le rôle des actions
mécaniques dans leur production, D'autres sont des
résultats de groupements d'éléments cristallins, et le nom
de cristallochondres leur convient parfaitement, C’est.
parmi ces derniers que figurent les globules parfoisappe-
lés chondres hahniens, pour rappeler qu'un observateur
allemand, le Dr Hahn, les à spécialement étudiés, mais
à un point de vue spécial, aussi inexact que singulier, et
d'après lequel ces objets représenteraient des fossiles
météoritiques provenant d'éponges, de madrépores, et de
quelques autres catégories d'animaux.
Dans la météorite finlandaise, les chondres ne sont pas
en contact mutuel ; entre eux existe une substance géné-
rale, grise, finement grenue et qui fait à elle seule plus
de la moitié du poids total de la roche cosmique.
La météorite de Bierbelé est friable sous une pression
Fig. 1. (1). — Chondre de la météorite de Bierbelé, constitué de gros cristaux corrodés d'olivine et de microlithes pyroxéniques.
, Le)
Fig. 2. — Chondre de la météorite de Bierbelé renfermant des cristaux volumineux de pyroxène augite associés à des grains d'oli-
vine et à de la matière vitreuse.
mement reconnaissant à bien voulu m'en envoyer un
bon fragment qui m'a permis un examen complet.
Sur une portion de ce fragment on reconnait la croûte
noire due à l’échauffement développé par le trajet de la
météorite au travers de l’atmosphère et qui est comme
la livrée des pierres tombées du ciel. Cette croûte est
une sorte de pellicule très régulièrement étalée, avec une
épaisseur sensiblement uniforme qui n’atteint pas un
millimètre et dont la couleur tranche complètement avec
la nuance d'un gris clair, variée de taches ocreuses, de la
roche sous-jacente.
Celle-cise signale avant tout par sa structure que rend
tout à fait remarquable une multitude de petits globules
pierreux qui la fait immédiatement rapprocher de celle
des roches qualifiées d'oolithiques. Ces globules cepen-
dant n'ont aucunement la structure concentrique qui
caractérise les oolithes et on les désigne généralement
sous le nom de chondres, qui désigne d’ailleurs des objets
d'origines certainement diverses. Il y a, en effet, des
‘chondres qui ne sont que des produits de trituration et
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
un peu forte ; sous le choc d'un faible coup de marteau
elle se désagrège et on recueille, outre les fragments sub-
sistants, une poussière fine et cristalline et des globules.
La cassure montre des dépressions sphéroïdales corres-
pondantes aux places d’où les chondres se sont détachés
et souvent ces dépressions sont comme doublées d’une
petite coque qui a moulé avec délicatesse les détails de
surface des sphérules. Ceux-e1 sont remarquables par la
régularité de leur forme et les variations assez faibles de
leur diamètre, qui va de 1/2 millimètre à 2#®5, Ils don-
nent assez bien l’idée de plombs de chasse et roulent
comme ceux-ci sur la feuille de papier où on les a
recueillis.
Pour compléter les notions relatives à la structure de
la masse, il est indispensable d'y tailler des lames min-
ces et de les examiner au microscope. On y voit alors,
avant toute chose, les relations mutuelles des chondres
avec la matière générale dans laquelle ils sont empâtés.
(1) Toutes
80 diamètres.
les figures sont au grossissement uniforme de
88 LE NATURALISTE
Er
Le fait le plus saillant à cet égard, c'est que les globules
sont nettement limités, parfois même cernés sur une
plus ou moins grande étendue de leur contour par un
liseré tout à fait noir et opaque.
I1 convient d'examiner séparément la nature de la
matière générale, puis la composition des chondres, pour
chercher ensuite à quel type lithologique appartient
la météorite de Bierbelé et tenter ainsi de restaurer les
chapitres principaux de son histoire.
La matière générale dans laquelle les chondres sont
empâtés se signale au premier coup d'œil par sa transpa-
rence imparfaite et comme laiteuse, qui contraste avec
la impidité de fragments cristallins jetés sans ordre de
toutes parts. C’est la structure ordinaire de toutes ces
pierres qu’on a désignées quelque temps sous le nom peu
précis mais bien expressif de « météorites du type com-
mun ». On sait, avec certitude, à quoi elle est due depuis
qu’elle s'est trouvée imitée dans les expériences de syn-
thèse des minéraux météoritiques par voie de condensa-
tion brusque de vapeur, et il n’y aurait pas à y revenir
ici s’il ne se trouvait que quelques observateurs (1) ne la
considéraient en ce moment comme de découverte récente.
Les cristaux, d’ailleurs souvent imparfaits, qui résultent
du processus par condensation constituent une espèce
de feutre qui, par simple tassement sous son propre poids,
reproduit la structure « cataclastique », comme on dit
à présent. Il y a plus de vingt ans que je l'ai vue dans
les poussières de pyroxène magnésien de reproduction
artificielle (2).
Ajoutons que cet état clastique, qui paraît tant étonner
M. Renard, s'explique de lui-même quand on a constaté
combien les cristaux artificiels de condensation brusque
sont craquelés dans tous les sens. La moindre pression
par simple tassement dans le givre ainsi produit suffit
pour écarter les portions d’abord juxtaposées de cristaux.
Les granules de fer et les filaments métalliques, qui y
sont parfois si grêles et si longs, ne s'expliquent égale-
ment que par l’existence de solutions de continuité dans
lesquelles les alliages ont pu se concréter. Ces solutions
de continuité résultent également de fractures dynamo-
métamorphiques.
En somme, M. Renard répète une assertion que
M. Gredilla avait formulée à propos de la météorite de
Madrid et contre laquelle je me suis élevé quand cet
observateur voulait voir dans la structure dont il s’agit
la caractéristique d’un type Hthologique nouveau.
Ces remarques suffisent pour montrer combien ona
tort, comme on le fait trop souvent maintenant, de bor-
ner l'examen des météorites à leur examen microscopi-
que : on perd la notion importante de leur macrostruc-
ture.
Quant à la composition minéralogique de la matière
générale, elle résulte.du mélange de grains de péridot et
de grains de pyroxène avec une substance peu transpa-
rente, floconneuse, en partie inactive sur la lumière pola-
risée et qui parait renfermer la majeure partie de l’alu-
mine que révèlent les essais tentés sur la matière géné-
rale. On voit de divers côtés de très petits grains noirs
parfaitement opaques et qu’on peut séparer par lavage ;
ils se répartissent en plusieurs espèces, parmi lesquelles
(1) Par exemple, M. A.-F. Renard, Bull. Ac. royale de Bel-
gique, n°* 9-10, sept.-oc. 1899,
(2) Voir mon Mémoire dans le Recueil des savants étrangers,
t, XVII, n° 5, août 1880.
il faut mentionner d'abord du fer nickelé, très attirable
à l’aimant, du fer sulfuré, facile à dissoudre dans les
hydracides, et du fer chromé, très peu abondant, mais
nettement reconnaissable au chalumeau,
Les grenailles de fer sont très petites et assez écartées
les unes des autres, de sorte qu’on peut choisir aisément
dés éclats qui n’en contiennent pas du tout. On n’en voit
pas sur les cassures et elles apparaissent seulement sur
les sections polies.
Les chondres sont remarquables dans la météorite de
Bierbelé par la variété de leurs caractères. Parmi les
types à distinguer, on mentionnera d’abord des sphé-
rules (fig. 1), qui sont constitués par des cristaux d’olivine
plus ou moins corrodés, parfois très corrodés, et qui
cependant sont encore très mesurables : les faces g! et
e sont souvent prédominantes. Les couleurs de pola-
risation sont extrêmement brillantes, Les grains de
péridot sont associés ensemble et soudés par un magma
à grains très fins, en partie vitreux, mais où l'on recon-
nait aussi parfois des microlithes pyroxéniques. La forme
extérieure des chondres de cette sorte est parfois sensi-
blement sphéroïdale ; elle présente aussi de temps en
temps de très fortes irrégularités.
Dans une deuxième catégorie de chondres (fig. 2), les
cristaux d’olivine sont remplacés par des cristaux d’augite
et parfois ceux-ci peuvent être d’une très grande perfec-
tion : il en est qui occupent à eux seuls une très notable
fraction du chondre tout entier, on y voit très nettement
la forme m h! gb}. L'action sur la lumière polarisée
ne laisse non plus aucun doute sur la détermination.
Fréquemment les chondres sont formés d’enstatite,
c'est-à-dire de pyroxène orthorhombique, et ils ont alors
une structure fibreuse et rayonnée remarquable. Les
plus simples (fig. 3) montrent de fines aiguilles hyalines
3,
4
f
Fig. 3. — Chondre de la météorite de Bierhbelé constitué par
des aiguilles de bronzite (enstatite) rayonnant d'un point
situé à la périphérie du globule.
très longues et non terminées, recoupées de clivages
transversaux et irradiant en éventail de certains centres.
Le point d'irradiation est toujours à la surface ou près de
la surface du chondre, et il n’est pas rare qu'un même …
chondre présente plusieurs centres dont les aiguilles
x
LE NATURALISTE 89
s'associent de facons variées, Il arrive (fig. #) qu'au mi-
lieu d'un système d’aiguilles très concordantes, il se
montre quelque longue aiguille simple ou divisée qui
traverse sans se dévier les paquets de cristaux voisins.
Fig. 4. — Chondre de la météorite de Bierbelé formé d’ens-
tatite et présentant de longues aiguilles jetées au travers
de systèmes concordants de cristaux.
De semblables sphérules ont été concassés et on n’en
retrouve que des fragments plus ou moins anguleux.
Enfin, on trouve dans la météorite de Bierbelé et avec
abondance des chondres très finement fibreux (fig. 5) et
Fig. 5. — Chondre de la météorite de Bierbelé constitué par
un minéral fibreux de nature feldspathique.
que des essais spéciaux conduisent à reconnaitre pour
être de nature feldspathique. Leurs sections sont rare-
ment circulaires et bien plus souvent elles présentent un
contour cordiforme. Entre les nichols il se dessine sou-
vent des branches de croix noire tournante.
Quelle que soit leur nature, les divers sphérules que
nous venons d’énumérer, sont fréquemment délimités
d’une manière très nette et même pourvus, dans bien des
cas, [d’une espèce d'écorce spéciale. Souvent ils sont
comme recouverts, sur une partie plus où moins large
de leur surface, d'une mince pellicule de fer nickelé qui
s'est insinué dans un vide étroit laissé entre les chondres
et la matière générale de la météorite. Cette cancrétion
métallique s'est continuée dans les fissures des chondres
et de la gangue et jusque dans les plans de clivage de
maints Cristaux.
La densité prise à 10 degrés a été trouvée égale à 3,54;
et tous les caractères de la météorite de Bierbelé se réu-
nissent pour la faire comprendre dans le type lithologi-
que que, depuis 1870 j'ai désigné sous le nom de Montré-
Jite. Cette roche, que sa structure oolithique rend spécia-
lementremarquable, est représentée dans la collection du
Muséum par des spécimens provenant de plus de quarante
chutes différentes.
Il faut d'ailleurs rappeler que la Montréjite n’a pas
seulement été trouvée à l’état de météorite homogène,
mais aussi comme élément de météorites bréchiformes
et complexes. On citera, par exemple, les nombreuses
pierres clastiques des types dits Canellite et Banjite, et cela
suffira pour montrer que le Montréjite joue un rôle spé-
cialement important dans la géologie sidérale.
STANISLAS MEUNIER.
QUELQUES DESIDERATA
DE
L'ENSEIGNEMENT MODERNE
DES SCIENCES NATURELLES
Quand on étudie les progrès de l'esprit humain, on est
étonné de voir combien les vérités les plus simples ont
mis de temps pour se faire admettre. Le seul moyen de
connaitre la nature est de l’observer: cette vérité, dont
l'énoncé parait enfantin, ne fut reconnue qu'à une époque
tout à fait rapprochée de nous. Pendant tout le moyen
âge et la premiere partie des temps modernes, on avait
cru pouvoir remplacer l'observation par le raisonnement,
De là ces élucubrations fantaisistes, ces discussions à
perte de vue qui encombrent les rayons des bibliothèques
publiques — et les boites des bouquinistes. On concoit
qu'une pareille méthode, ne reposant sur aucune base
solide, était tout à fait incompatible avec les progrès de
la science. L'autorité d'Aristote, d'Hippocrate, de Galien
remplacçait l'étude directe de ja nature.
Dans notre siècle, au contraire, les sciences sont en-
tièrement faites d'observation et d'expérience; c’estcette
méthode nouvelle, inductive et non plus déductive, quia
permis leurs étonnants progrès. Il semblerait qu'un
changement aussi complet dans l’objet même de la
science ait dù amener une modification corrélative dans
la facon de la répandre, que l’enseignement purement
oral ait dù tendre de plus en plus à se transformer en
lecon de choses.
Certes, beaucoup à été fait dans cette voie. Partout
nous voyons s'ouvrir des laboratoires, des musées, s’or-
ganiser des excursions scientifiques, etc. Beaucoup de
professeurs, et non des moindres, mêlent à leur cours
des visites dansles galeries d'histoire naturelle ; d'autres
emmènent leurs élèves faire des promenadesscientifiques
à la campagne. Il semble cependant que bien des pro-
grès pourraient encore être faits dans cette voie. Je suis
90 LE NATURALISTE
le premier à reconnaître l'importance de l’enseignement
oral, quand il a pour but d'exposer des recherches per-
sonnelles encore inédites et quand il s'accompagne de
nombreuses présentations d'objets, ou d’expériences, de
figures, de cartes, de projections lumineuses. Quand le
professeur se contente de résumer des données contenues
dans ses ouvrages ou dans ceux des autres, son ensei-
gnement perd une grande partie de sa valeur pour deve-
nir purement livresque, sans rapport immédiat avec la
nature.
Les visites de Musées, telles que les ont comprises un
certain nombre de professeurs du Muséum, M. Bouvier
pour l’entomologie, M. Boule pour la paléontologie par
exemple, ont au contraireune grande valeur éducatrice (1).
Elles mettent l'élève ou l'amateur, qui n’ont guère tra-
vaillé que dans les livres, en contact direct avec l’objet
de leurs études, notamment avec des pièces rares qu'ils
n'auraient pas Occasion de rencontrer ou dont ils ne Com-
prendraient pas la valeur s'ils n'étaient guidés par les
explications du professeur. Cette branche d’enseigne-
ment mériterait donc d'être développée considérablement
et étendue à tous les Musées d'histoire naturelle.
Il en est de même des excursions d'histoire naturelle.
Quoi de plus utile pour le débutant que ces promenades
botaniques, entomologiques ou géologiques, où, sous la
direction de maîtres aimables, il apprend à voir et à
comprendre les objets naturels, à les déterminer, à les
récolter et à les conserver ? Combien ensuite ses prome-
nades personnelles prennent plus d'intérêt une fois qu'il
a acquis ces notions fondamentales! Ce genre d’ensei-
gnement, indispensable pour tout naturaliste qui ne
veut pas être simplement un homme de cabinet, a éga-
lement besoin de grands développements. Je n'ai jamais
compris pourquoi, par exemple, aux herborisations pu-
bliques, si bien comprises pour les phanérogames, il est
à peu près impossible de se faire déterminer un crypto-
game. Certes, les flores de Boistel, de Douin et de Cos-
tantin sont excellentes et facilitent grandement la déter-
mination des lichens,des muscinées et des champignons:
j'en parle par expérience personnelle. Il est cependant
des cas où le débutant aimerait à recourir aux conseils
d'un maitre autorisé. C’est impossible à Paris en Pétat
actuel des choses.
L’entomologie est encore plus mal enseignée sur le
terrain. Croirait-on que le Muséum n'organise qu’une
seule excursion par an, dans laquelle on est censé re-
cueillir des échantillons de tout le groupe des arthro-
podes? Il est évident que d’un enseignement aussi
écourté l'élève ne peut retirer aucune notion pratique-
ment utilisable.
Nous ne parlerons pas de la géologie, pour laquelle
aucune critique n’est à faire. Dans de nombreuses excur-
sions d’une journée, M. le professeur Stanislas Meunier
enseigne d’une façon très vivante et accessible à tous
la géologie du bassin parisien. Il fait en outre de temps
en temps des voyages de plusieurs jours dans les régions
les plus intéressantes de la France.
Mais 1l y à encore un point sur lequel je voudrais dire
quelques mots : c’est celui des rapports des trois sciences
entre elles. Chaque professeur se cantonne trop dans sa
spécialité. Ne donnerait-on pas plus de vie à ces excur-
(1) Les conférences à l'usage des voyageurs qui ont lieu tous les
printemps au Muséum d'histoire naturelle rentrent dans lemême
ordre d'idées.
sions si, au lieu de se contenter de déterminer des échan-
tillons minéralogiques ou botaniques, on nous montrait
les variations de la végétation avec la constitution géo-
logique“ du sous-sol? La présence d’une plante donnée
prouve que nous passons du calcaire à la silice, ou réci-
proquement., De même, il y a des insectes des sables,
des rochers, des bois ou des prairies, d'autres mêmes qui
annoncent la présence d'une plante tout à fait spéciale.
C’est là un ordre de recherches très intéressant à tous
les points de vue et pour lequelle débutant a besoin d’être
guidé, Or, je n'ai vu donner cet enseignement que d'une
facon tout à fait rudimentaire dans les excursions aux-
quelles j'ai assisté.
Au moment où la belle saison va commencer, où de
tous côtés on va se disperser à la recherche de la plante,
de la bête ou du minéral, il m'a paru bon de donner ces
quelques indications. Puissent-elles contribuer à donner à
l'étude de la nature sur le terrain tout le développement
bauquel elle a droit |
Dr L. LALOY.
Remèdes ignobles
Plus un remède est étrange et compliqué, mieux il
agit; les médecins ont souvent fait cette remarque qui
s'explique bien simplement : ces remèdes frappent lima-
gination du malade.
Nos pères ne se faisaient pas faute d'employer ce
mode de suggestion. Et notre ancienne pharmacopée est
remplie de remèdes ignobles ou simplement bizarres que
prescrivent encore nos sorciers de village.
Le moyen-âge a connu la viande de chien, le lait de
femme, la peau de serpent, les lézards. On faisait alors
des pilules avec les substances animales suivantes, préa-
lablement torréfiées : cheveux, urine d'homme ou d’en-
fant, cœurs des ruminants, écaille de tortue, placenta
humain, excréments d’une foule. d'animaux, peau
d'âne, trompe d’éléphant, pattes de vautour et de tigre,
vipéreset autres reptiles, crapauds, larves et cocons de
vers à SOIC.
En diverses provinces les remèdes suivants sont encore
usités :
Excréments. — On les applique sur les ulcères (Flan-
dre) et sur l’érysipèle (pays d’Alost); la fiente de caille
en poudre est donnée dans le haut mal, la fiente d’oie
blanche sert à panser les panaris, et la bouse fraîche de
vache les brüiures (Morvan).
La fiente du poulet, du canard, du dindon, est usitée
dans la pharmacopée chinoise.
Urines. — L’urine du matin lâchée à jeun sert dans la
conjonctivité. Mélangée à la sève de ficaire, elle est sou-
veraine contre les hémorroïides (Flandre). I/urine du
matin guérit les gercures des mains. A l'instar des Ro-
mains, nos paysans pansent les ulcères avec des linges
trempés dans l'urine (remède préconisé par Pline); ils
guérissent les engorgements du sein chez les nourrices
avec l'urine d'homme. Contre le mal de dents on place
sur la dent cariée de l’urine de bœuf rouge (Morvan).
Salive. — Frottez le matin à jeun les poireaux avec de
la salive, ils disparaissent au bout de neuf jours (Flan-
dre). Pour guérir les éruptions de la peau, les morsures
des insectes, les blessures, il suffit de les lécher.
LE NATURALISTE 91
Punaises. — Les anciens cotaient fort la punaise médi-
catrice. Aristophane, Aristote, Pline et Dioscoride en font
mention, ce dernier assurant que « sept punaises de lit
avalées au commencement de l’accès sont un grand re-
mède contre la fièvre quarte ».
Au siècle dernier, on avalait des punaises vives pour
faciliter l'expulsion du placenta (Lemery) (1).
Poux. — Une infusion de poux est excellente contre la
jaunisse (Piémont) (2) Un mélange de cendres et de
poux facilite l'accouchement (Russie).
Bien des sauvages, à l'instar des singes, mangent
d’ailleurs les poux par plaisir.
Cloportes. — Nos aïeux appréciaient les avantages du
cloporte thérapeutique. Considérés longtemps comme
diurétiques, les cloportes servaient encore au siècle der-
nier pour « résoudre le tartre mucilagineux du corps,
pour lever les obstructions des viscères», ete,, etc. On
en devait avaler aussi « de tout entiers », depuis quatre
jusqu'à douze, pour les cancers, Îes ulcères internes et
externes.
Araignées. — L'ingestion d'araignées facilite l’accou-
chement(Kamchatka). Pour arrêter le saignement de nez,
on avale une toile d’araignée frite dans la poële et arrosée
de vinaigre (France), La toile d’araignée a, en effet, la
réputation d'arrêter les hémorragies.
Crapauds et grenouilles. — Contre les fluxions de poi-
trine on mange une fricassée de têtards; ils tuent le mau-
vais sang comme feraient des sangsues. Le crapaud
séché et pulvérisé est excellent contre les épistaxis;
bouilli et appliqué en cataplasmes sur la figure, il fait
merveille contre l’érysipèle. |
Lézard. — Cet animal a été employé dans la pharma-
copée de tous les pays et dans tous les temps, Pline con-
seillait contre l’épilepsie un lézard éventré avec un ro-
seau ef séché ou rôti: aujourd’hui, dans le Morvan, on
fait frire le lézard et on l’absorbe en poudre contre le
haut mal; le lézard séché est encore un remède fort en
honneur chez les Chinois.
Taupe. — Elle est employée contre les maux de dents
etles coliques; brülée et réduite en cendres, elle guérit
les fistules (Morvan).
On favorise la dentition des enfants en attachant à
leur cou des colliers de peau de taupe. À certains jours
de lune, on se guérit d’une foule de maladies en étouf-
fant une taupe dans sa main (Normandie),
FELIX REGNAULT.
LES ŒUFS DE PAQUES
Il est vraiment curieux de constater que l'origine d’une
coutume aussi répandue que celle des œufs de Pâques (1)
soit pour ainsi dire inconnue. On en est réduit à cet
égard à des conjectures, à des hypothèses très différentes
les unes des autres, ainsi qu’on va le voir.
Pour certains — les plus prosaiques — l'usage en
vient de ce que les poules pondent beaucoup plus fré-
quemment avec l’arrivée des premiers effluves printa-
(1) Le mot Pâques vient de l'hébreu passar (passage), attendu
que la mort passa sur les maisons des Egyptiens et que les en-
fants d'Israël passèrent de la servitude à l'indépendance.
(1) Witkowski, Histoire des accouchements, p. 101-8.
(2) Revue des traditions populaires, 1898, p. 239.
niers. De fait, dans tous les ménages, la diminution du
prix des œufs, à partir de Pâques, est bien connue; maisde
là à y voir l'origine de la coutume des œufs de Pâques,
c’est peut-être un peu exagéré. Ça n’est cependant pas
impossible, car, autrefois, l’année commençait à Pâques
et, comme aujourd'hui, on avait l'habitude, à cette occa-
sion, de pratiquer le régime des petits cadeaux qui entre-
tiennent l'amitié. Si l’on en croit les anciens chroui-
queurs, jusqu'à Charles IV, ces cadeaux étaient presque
exclusivement des œufs bien frais, dignes, comme l’on
dit aujourd'hui, d'être mangés à la coque, C'était plutôt
modeste et, dans ce temps-là, les bijoutiers et les confi-
seurs devaient être dans le marasme.….
La chose, d'autre part, n’est pas isolée dans l’histoire,
car, 1l y a quarante siècles, les Aryas disposaient des
œufs sur l'autel de leur divinité, dès l'arrivée du prin-
temps.
La coutume des cadeaux d'œufs au jour de Pâques est
attribuée par certains à ce que les œufs étaient interdits
pendant le Carême, cruelle privation qui bouleversait
désagréablement les menus et les matières premières
des ménagères,
Il en est qui voient dans l’œuf offert le jour de Pâques
le symbole de la résurrection du Christ.
Les uns croient qu'il faut attribuer la coutume au
désir qu'avait l’Église de faire cesser chez les chrétiens
l'habitude des étrennes de janvier, prohibées et qualifiées
de « diaboliques » par le concile d'Auxerre (587).
Les autres y voient un souvenir de l’œuf rouge que
pondit, suivant Ælius Lampridius, une poulie appartenant
aux parents de l’empereur Alexandre Sévère le jour de
sa naissance.
D'autres font remonter l'usage de l’œuf de Pâques au
martyre que l’on infligeait aux chrétiens par l’ova ignita.
En somme, il est probable que l'œuf a été choisi pour
fêter à la fois l’arrivée du printemps et Pâques pour deux
raisons : l’une parce qu'il symbolise la résurrection, l’au-
tre, plus humain, parce qu'il représente un mets délicat
que l’on a plaisir à retrouver après en avoir été privé
longtemps par sa rareté et les exigences de la religion.
Selon Jacques de Fortuny (1614), l'œuf de Pâques s’ap-
pelait primitivement «l'œuf lustral» :
Car il donna l'advision
De se lustrer au jour de Pâques
Où il faut que le chrétien vaque
A servir Dieu d'un cœur lavé
Où l'ord pesché ne soit trouvé.
Aux x et xiv° siècles, les clercs des églises, les étu-
diants des universités, les plus jeunes des différents
quartiers, formant un long cortège, quétaient des œufs
par les rues, avec accompagnement de tambours et de
trompes, en chantant les Laudes de la liturgie catholi-
que. Pour agrémenter le cortège, les uns portaient des
étendards burlesques, d’autres étaient armés de lances
et de bâtons. On leur donnait des œufs durs, teints en
violet, en jaune, en bleu et surtout en rouge. Après les
avoir fait bénir, les jeunes quêteurs les donnaient en
cadeau aux enfants, aux domestiques et aux pauvres. En
certaines provinces, cette procession avait lieu le jeudi
de la mi-Carême; mais, comme on ne pouvait quêter
d'œufs, l'usage en étant interdit, on donnait en place
quelque autre denrée.
Plus tard, après la messe de Pêques, on portait des
corbeilles d'œufs peints et dorés dans le cabinet du roi.
92 LE NATURALISTE
Celui-ci les distribuait à ses courtisans. Certains de ces.
œufs étaient de vrais objets d'art. C’est ainsi que Wateau,
le charmant peintre des bergeries xvire siècle, et Lan-
cret, au coloris si brillant, aux compositions si riantes,
ne se firent aucun scrupule d'en peindre de merveilleux
pour la fille de Louis XV. On peut les voir encore
aujourd’hui, conservés qu'ils sont à la bibliothèque de
Versailles. Cette pratique prit fin en France en 1752,
mais elle subsistait encore tout récemment dans plusieurs
cours européenes, notamment en Russie, Un œufcélèbre
à ce point de vue est celui offert par un artiste parisien
au jeune roi d'Espagne Alphonse XIII. Il était en émail
blanc et à l’intérieur était gravé en caractères micros-
copiques d’une grande netteté le texte de l’évangile de la
Résurrection. Un coq automate, installé au centre de
l'œuf, chantait plusieurs airs d'opéra alors en vogue. Il
avait couté 20,000 francs à l'artiste.
Aujourd’hui, les simples œufs rouges que nos pères se
distribuaient entre eux ont vécu. Ils ont été remplacés
par de mirifiques œufs en sucre ou en chocolat. Non
content de soigner l'enveloppe, on a aussi garni l'inté-
rieur de simples bonbons ou de riches bijoux. On en est
même arrivé à supprimer l'œuf lui-même et à ne donner
que le contenu. C’est ainsi que les choses évoluent, et
l'évolution des mœurs va vite de nosjours.
En France, la coutume des œufs de Pâques est très
diversement suivie. C’estla Normandie qui l'a conservée
le plus heureusement.
Dans les derniers jours de la Semaine sainte (d’après
le Temps),les petits paysans parcourent la campagne,
chantant devant chaque maison une complainte de la
Passion, et,en terminant, gamins et paysans psalmodient
à genoux l'hymne O Crux ave! Les enfants présentent
alors une croix, entourée de fleurs nouvelles et de buis
bénit, et les habitants, après l'avoir baisée, donnent des
œufs aux petits chanteurs.
Le samedi saint, les œufs pâquerets sont, dans les cam-
pagnes,une redevance annuelle des sacristains (des sacri-
tes ou custos, comme on les nomme) et des garcons meu-
niers, qui,en allant les querir, souhaitent la bonne année.
Dans les villes, les sonneurs viennent offrir de l’eau
bénite en échange de quelque menue monnaie.
Le soir de ce jour, dans les campagnes et même des
grandes villes, comme Caen, des bandes de chanteurs
se répandent par les rues et vont chanter devantles mai-
sons la complainte suivante :
Séchez les larmes de vos yeux,
Le roi de la terre etdes cieux
Est ressuscité glorieux.
Atleluia !
Si la porte tarde à s'ouvrir, ils continuent :
Réveillez-vous, cœurs endormis,
Pour prier le doux Jésus-Christ,
Qu'il nous conduise en paradis.
Alleluia!
Donnez à ces pauvres chanteurs
Qui chantent les louanges du Seigneur :
Un jour viendra, Dieu vous l’rendra.
Alleluia !
Si les chanteurs sont de joyeux drilles, ils ajoutent :
C'n'est pas des œufs que nous d'mandons,
Mais c'est la fille de la maison;
S'il y en a deux, nous choisirons.
Alleluia !
S'ils ont recu quelque chose, ils remercient :
Nous vous r'mercions, Ô gens d'honneur,
D'avoir donné à ces chanteurs.
Un jour viendra, Dieu vous l’rendra.
Alleluia !
Mais si la porte reste close, ils se retirent en jetant ce
couplet vengeur :
Perrette a mis sa poul couver
Afin de ne rien nous donner.
Un jour viendra, l'diabl l’emportera.
Alleluia !
Le jour de Pâques, les paysans mangent à leur déjeu-
ner des œufs pâquerets, coupés en rondelles et servis dans
du lait bouilli ; de là vient peut-être le nom de «pâque-
rette » donnée à la marguerite blanche, dont la collerette
est blanche et dont le centre est jaune.
En Auvergne, nous apprend un écrivain local, on
trouve quelque chose d’analogue. Les petits paysans
s’assemblent, après les repas du soir, pendant la $Se-
maine, sainte et vont chanter de porte en porte une com-
plainte sur la Passion. Cette mélopée présente la cu-
rieuse alternance d’un couplet en français et d’un
couplet en patois du pays. Elle débute en ces termes :
La passion de Jésus-Christ
A qui voudra l'entendre,
Entendez-la, petits et grands,
En grande révérence.
C'est de la prose rythmée, qui doit remonter sans
doute aux mystères du moyen âge. Après la complainte,
le chef de bande débite un récitatif en patois pour ap-
peler l'œuf traditionnel dans la corbeille dont les chan-
teurs ont eu le soin de se munir. Suivant la fortune de
la maison, la maitresse du logis apporte un ou plusieurs
œufs, voire quelque menue monnaie, que les jeunes
Auvergnats savent estimer aussi bien que les Normands.
Lorsque la collecte a été abondante — cest le cas ha-
bituel — une partie des œufs est mise de côté pour servir
à la confection d’une gigantesque omelette, qui est man-
gée le dimanche de Quasimodo, dit Pasquette en patois.
Le surplus est mis en vente et sert à compléter le menu
de l’agape fraternelle. En patois, omelette est traduit par
« pascade, » mot qui représente une étroite parentée avec
Pâques. L'usage des œufs étant autrefois interdit pen-
dant tout le carème, on se livrait sans doute après
Pâques à de véritables orgies d’omelettes. La complainte
de la Passion est chantée, même à la veille. Mais les
jeunes citadins, dédaigneux de l’antique mélopée, ont
adopté un chant beaucoup plus moderne :
Peuple chrétien, d'un cœur contrit
Et repentant de tous nos crimes,
Adnurons de cœur et d’esprit
Jésus, l’adorable Victime,
Et contemplons avec douleur
La passion de notre Sauveur,
Ils recueillent ainsi quelque argent pour aller célébrer
la fête de Pâques dans les auberges des environs. Les
citadins ont aussi travesti la Passion campagnarde en
Passion des cordonniers. Deux disciples de saint Crépin se
narrent en patois les malheurs qui vont fondre sur eux :
Tu verras la poix geler
Et les formes se fendre,
Tu verras le cuir augmenter
Ainsi que la semence.
On la chante à la porte de boutiques bien connues.
Mais, au lieu d'œufs ou de gros sous, les artistes sont
exposés à recevoir un baquet d'eau fraîche de la part de
\
=
LE NATURALISTE 93
quelque pégan irascible, atteint dans sa dignité profes-
sionnelle.
Mais quel rapport y a-t-il entre la « semence » et les
cordonniers ? Je l’ignore.
Dans plusieurs contrés, la plupart même, il y a, au
sujet des œufs de Pâques, une coutume remontant à une
date historique peu éloignée. Telle est, par exemple, cette
vieille histoire du pays bressan : Marguerite d'Autriche,
gouvernante des Pays-Bas, avait quitté les Flandres pour
faire un pèlerinage. Arrivée au bourg, elle s'arrêta quel-
ques jours au pays de Brou, en pleine forêt, avec les
Alpes à l'horizon. Marguerite était à la fois très grande
dame et très jolie. Son séjour à Brou donna lieu à une
série de fêtes. Le lundi de Pâques, il y eut, dans la
plaine de Bourg, assemblée générale et jeux de toute
sorte. Les vieux tiraient ‘de l'arc, et la cible étant un
tonneau plein, quand une flèche perçait la barrique,
Varcher avait le droit de boire au tonneau jusqu’à merci;
les autres venaient après, Les jeunes gens et les jeunes
filles s’amusaient de leur côté. Marguerite, entourée de
châtelaines du voisinage, assistait à cette fête villageoise.
Une centaine d’œufs étaient éparpillés sur le sable et
deux garcons et deux fillettes devaient exécuter, en se
tenant par la main, une danse du pays. Ainsi le voulait
la coutume. Si ces jeunes gens dansaient sans casser les
œufs, ils étaient fiancés; la volonté même des parents
ne pouvait s'opposer à leur union.
Dans certaines localités de l'Ouest, les jeunes filles en
quête de mari ont lhabitude de cueillir, en revenant de
la messe de minuit, le jour de Noël, un petit rameau de
pommier qu’elles placent dans une fiole pleine d’eau
suspendue dans la chambre devant la fenêtre : si un seul
des boutons vient à s'épanouir avant Pâques, la fillette
à laquelle la branche appartient est sûre d’entrer en mé-
nage avant que l’année soit finie. Cela s’appelle une
Pâque fleurie. A ce propos, le regretté G. de Cherville a
conté une historiette dont nous nous en voudrions de ne
pas parler.
Donc, il y avait dans la domesticité d’un château des
environs d’Alencon une petite femme de chambre bre-
tonne, douce et pieuse, douée de toutes sortes de vertus,
mais affligée d'une bosse qui rendait son placement
assez problématique. Cependant, comme il y à un cœur
à l'envers d’une bosse, tout comme à l'envers d’un dos
plat, Ursule, c'était le nom de la Bretonne. en revenant
de l’église, profita de l'obscurité pour détacher sournoi-
sement un petit rameau sur l’un des pommiers du che-
min qu'elle suivait avec ses camarades, comptant se mé-
nager une Pâque fleurie. Malheureusement, une autre
fille, ayant surpris son secret, en régala l'office, qui ne
laissa pas échapper cette occasion de s'égayer aux dé-
pens de la pauvre bonne. On convint, entre ces mes-
sieurs et ces demoiselles, que la mystification serait com-
plète. Le samedi saint, un des aides jardiniers substitua
à la branche à demie flétrie un brin de pommier tout
constellé de fleurs rosées.
On s’était arrangé pour que la Bretonne remontât à sa
chambre pendant la journée; elle en redescendit bientôt
rayonnante, tenant son bouquet à la main et criant au
miracle. Les éclats de rire, les quolibets de ses cama-
rades lui apprirent que Pon s'était moqué de sa crédu-
lité; la pauvre enfant, confuse, tremblante, baissait la
tête pour cacher les larmes qui coulaient sur ses joues,
lorsque la châtelaine entra dans l'office. La lingère était
allée lui raconter la présomption et la naïveté de la
bonne et la dame s’était imdignée de ce jeu.
— Ursule, dit-elle à la jeune fille, pour cette fois
Pâque fleurie n'aura pas menti. Honnèête fille, vous
serez certainement une honnête femme; mais, puisque
cela ne suffit pas et qu’il faut encore une dot pour trou-
ver un mari, cette dot je vous la donne,
En même temps, ayant tortillé un billet de mille francs
autour de la tige du rameau fleuri, elle le lui tendit.
Quinze jours après, le garcon jardinier qui avait eu un
rôle actif dans la plaisanterie proposa à Ursule de
‘l’épouser; mais celle-ci acheva de mettre les rieurs de
,
son côté en en choisissant un autre.
La coutume des œufs de Pâques est très répandue à
travers le monde. Ainsi, en Perse, les «mis s’envoient
mutuellement des œufs peints et dorés; leur prix moyen
est de trois ducats d’or. Le shah en donne plus de cinq
cents dans son sérail. Les favorites les recoivent dans
de riches bassins. Chaque œuf est couvert d’or, avec
quatre miniatures plaquées sur la coquille. Remarquons,
en passant, que le jour de Pan en Perse, le Norouz, est
appelé «la fête des vêtements neufs », parce que, ce
jour, on s'habille à neuf, habitude que le moyen âge
avait transportée à Pâques. Cette coutume s’est perpétuée
en Normandie et a donné lieu au dicton: « Sile jour de
Pâques on n’étrenne rien, les pies vous crottent sur la
tétel
En Russie, Pâques est fètée d’une manière très tou-
chante que l’on devrait bien acclimater en France.
Ce jour-là, de tous les environs, arrivent dans les
villes des marchands porteurs de cages où piaillent
toutes sortes de petits oiseaux. La foule ne tarde pas à
arriver.
— À comhien tes oiseaux ?
— À quinze copecks pièce.
— Eh bien, donne-m’en cinq.
Mais que va faire ce spectateur de ses cinq oiseaux?
Il n’a pas de cage; va-t-il les mettre dans sa poche,
comme je l’ai vu faire à Paris au marché aux oiseaux ?
Point. À peine est-il en possession de son petit babil-
lard, qu'il ouvre la main et lui donne la volée.
— Sois libre, dit-il.
L'oiseau ne se le fait pas dire deux fois. Il file à tire
d’aile, bientôt suivi par ses autres compagnons de cap-
tivité que l'acheteur s’est procurés et qui s’en va le cœur
content d'avoir accompli une bonne œuvre.
Quelle que soit l’origine des coutumes de la grande fête,
on y ajoute toujours l'idée d’une grande rédemption mo-
rale : Pâques est presque synonyme de rachat et de libé-
ration. Les russes l’ont symbolisée d’une manière admi-
rable par cette coutume des oiseaux et la chose est
d'autant plus touchante que, souvent, ceux qui la pra-
tiquent sont eux-mêmes des serfs attendant leur libé-
ration.
Les Russes, d’ailleurs, ne s’en tiennent pes là. Ils se
font de nombreux cadeaux, des œufs et des bijoux. Et,
dans les maisons, c’est le moment où l’on fabrique des
babas, ainsi nommés parce qu'ils sont l’œuvre des babas
(vieilles femmes) : les ménagères sont alors autant occu-
pées que les Anglaises au moment de la confection des
Plum-poudding de Noël. Et ce n’est pas peu dire!
HENRI COUPIN.
94 LE NAT
LES ARBRES DANS LES GRANDES VILLES
La Revue scientifique a publié un curièux article sur les
plantations d'arbres dans les grandes villes, et notamment à
Paris.
Nous croyons à ce sujet pouvoir donner des renseignements
jutéressants pour les lecteurs du Natluraliste.
D'abord, c’est une erreur trop répandue de croire que ces
plantations sont nécessaires à renouveler l’air des villes en ab-
sorbant l'acide carbonique, car on pourrait ajouter que, si les
feuilles absorbent l'acide carbonique, c'est seulement pendant le
jour, sous l'influence de la lumière solaire ; de plus, les végétaux
respirent jour et nuit, comme tous les êtres vivants, en absor-
bant l'oxygène qui nous est si nécessaire. Ce sont donc les
vastes agglomérations végétales dans nos campagnes et les
grands bois qui assainissent l'air que nous respirons, en absor-
bant l'acide carbonique pour le décomposer en carbone et en
oxygène, qu'elles fixent avec la vapeur d’eau, pour en former
les substances hydrocarbonées et notamment la cellulose, qui
est la base de la charpente même des plantes.
Mais les arbres plantés dans les villes ont l'immense avantage
de nous procurer, pendant l'été, un ombrage et une fraicheur
salutaires, et non pas dangereux comme ceux des hautes mai-
sons, où on risque d'attraper des rhumatismes et des fluxions de
poitrine. En outre, cette verdure au milieu des boulevards égaie
notre vue et contente notre âne. C'est un double service, au
point de vue de l'hygiène.
‘ Tout le monde à pu constater depuis longtemps que les diffé-
rentes espèces d'arbres ne se plaisent pas à Paris aussi bien les
unes que les autres. Celles qui y poussent le mieux, ce sont les
marronniers, les platanes et les sycomores. Les ormes et sur-
tout les acacias réussissent mal. Les ormes n'ont bien réussi
qu'aux Champs-Elysées et au boulevard de la Madeleine, là où
il n'y avait pas de maisons; mais une fois qu'on a eu le malheur
de bâtir sur les boulevards, les ormes ont disparu peu à peu, et
aujourd'hui on ne voit plus que les derniers survivants des
ormes magnifiques qu'il y avait autrefois dans ces parages.
Un arbre exotique qui réussit merveilleusement bien à Paris,
c’est le vernis du Japon. Cet arbre prospère’jusqu'au beau mi-
lieu du boulevard des Italiens : c’est tout dire. Les Paulownias
ont échoué, comme on devait s’y attendre, et les tilleuls n'ont pas
été plus heureux.
En somme, les arbres qui poussent le mieux à Paris sont les
marronniers, les sycomores, les platanes et les vernis du Japon.
Les ormes, les érables et les acacias n’ont qu'une durée moyenne
de 40 à 45 ans. Pour ces arbres, il faut plus d'air et surtout
moins d'abri, avec un sol plus profond que celui de Paris. Il n’y
a guère qu'aux Champs-Elysées que l'on pourra se flaiter d'avoir
encore de beaux ormes, dans l'avenir, si toutefois on ne finit
pas par en faire des boulevards, comme on l’a déjà fait sur la
moitié de leur longueur. Quels vandales !
I n’est cependant pas difficile d’avoir de beaux arbres. En
général, pour cela, il faut deux choses : une forte épaisseur de
terre perméable aux racines, et de l’eau à une certaine profon-
deur. On peut y arriver par deux moyens bien différents. Nous
allons en citer des exemples typiques.
19 Dans les marais.
Voici un marais, comme l’étaient jadis les Champs-Elysées,
une prairie humide où poussaient des ophioglosses, au temps de
Tournefort. Accumulez-y les débris de toute espèce que l’on
retire d’une grande ville. Ajoutez-y des pierres, du sable, du
terrain à une hauteur suffisante. Vous aurez ainsi une couche
d’eau dans le fond et une épaisse couche de terrain perméable
ou meuble par-dessus. Dans ces conditions, on aura les arbres
magnifiques fque l'on voyait jadis aux Champs-Elysées, ou
même au jardin des Tuileries, qui se trouvaient dans des con-
dilions analogues; on retrouve identiquement les mêmes condi-
tions à Noyon, au cours situé entre la ville et la gare. Dans le
marais situé au confluent de la Goële et de la Verse, il y eut
d’abord un monastère, l’abbaye de Saint-Eloi. Plus tard,
Henri IV y fit élever une citadelle, avec de hauts bastions.
Grâce à toute cette terre rapportée et à l'eau du marais, on a
obtenu un terrain excellent pour les arbres, où l’on trouve des
ormes plus gros encore que ceux des Champs-Elysées.
26 Un autre moyen d’avoir de beaux arbres, dans un endroit
non marécageux, c'est de procéder tout autrement. Au lieu de
rajouter de la terre à un marais, il va falloir creuser, et voici
comment.
URALISTE
À Saint-Paul-aux-Bois, par exemple, au lieu dit l’ancien bois
de Saint-Paul, on voit des arbres qui poussent d’une singulière
façon, et qui s’y développent mal. Pourquoi cela ?
Examinons de près ce qui s'y passe, et nous ne tarderons pas
à être bientôt renseignés. Vous y plantez des arbres. Pendant
15 ans, ils croissent admirablement, en donnant les plus belles
espérances. Puis, ils ne grandissent plus, ils se contentent de
grossir un peu pendant quelques années et, au bout de 40 ou
50 ans, on les voit mourir du haut. Pourquoi donc?
Ah! c’est que, si l'on creuse un fossé de trois ou quatre pieds
de profondeur, on s'aperçoit que la couche d'argile imperméable,
qui retient les eaux, se trouve à moins de trois pieds de profon-
deur, sous une couche de deux pieds de sable et de moins d'un
pied de terre de bruyère. Il en résulte donc que le sol n’a pas
assez de profondeur pour permettre aux racines de descendre
aussi bas que descendent normalement les racines des grands
arbres. Il faut donc leur donner une terre meuble, en creusant,
dans cette couche imperméable d’argile, de longues tranchées
profondes, que l'on remplira ensuite de terre bien meuble,
avant d'y planter des arbres. Mais il faut avoir bien soin de ne
pas creuser au delà du banc d'argile, afin qu'il y ait toujours à
la base du sol une couche imperméable d'argile, qui retienne
les eaux dans la couche profonde du terrain où pénétrent les
extrémités des dernières racines.
Bref, il faut deux choses pour avoir de beaux arbres : une
couche épaisse de terrain meuble et de l'eau dans la profon-
deur.
Il va sans dire que ce que nous disons ici des arbres, en gé-
néral, ne s'appliquerait pas aux sapins qui vivent très bien
dans des conditions toutes différentes, de même que les hètres et
certaines autres essences.
Dr Boucon.
27
MŒURS ET MÉTAMORPHOSES
DU
TRACHYPHLŒUS SCABER, LINNÉ
COLÉOPTÈRES DU GROUPE DES RHYNCOPHORES
Aux premières belles journées du premier printemps,
les deux sexes se recherchent et s’accouplent; la copu-
lation terminée, le mâle meurt, la femelle recherche un
lieu propice pour le dépôt de ses œufs, le dessous d’une
pierre ou le collet de la racine de divers végétaux, et
confie à la nature le soin de les faire éclore.
Œufs. Longueur 0 mm.8, diamètre 0 mm. 2.
Allongé, subcylindrique jaunâtre, pâle, lisse etluisant,
finement pointillé, à pôles arrondis, à coquille peu résis-
tante.
Œufs pondus au nombre de huit à dix et proportion-
nés à la taille de la mère, ils éclosent une quinzaine de
jours après, et la jeune larve plonge aussitôt dans le sol
à la recherche de sa nourriture, laquelle consiste en ra-
cines de diverses plantes; durant toute la belle saison elle
progresse, change plusieurs fois de peau, puis, arrivée au
terme de son accroissement, elle présente l'aspect sui-
vant:
Larve : Longueur 4 millim., largeur À millim. 5.
Corps légèrement arqué, blanc, charnu, pubescent de
roux, convexe en dessus, un peu moins en dessous, ar-
rondi aux deux extrémités.
Téte semi-globuleuse, jaunâtre pâle, lisse et luisante,
petite, rétractile, finement ridée, avec longs poils roux
épars; épistame rougeâtre, transverse, labre à bords ci-
liés ; mândibules jaunâtres, triangulaires, à pointe noire
et bidentée; mâchoires avec labre court et palpes de deux
articles ciliés de longs poils roux; lèvre inférieure char-
nue avec palpes droits rougeâtres, bi-articulés; antennes
LE NATURALISTE 95
droites, très courtes, de deux articles peu distincts; pas de
trace d'ocelles.
Segments thoraciques au nombre de trois, charnus, blan-
châtres, s’élargissant d'avant en arrière, le premier un
peu plus large que la tête avec bord antérieur jaunâtre,
deuxième et troisième plus larges, formés de deux bour-
relets.
Segments abdominaux au nombre de neuf, forme des
précédents, les six premiers chargés de deux bourrelets,
septième et huitième lisses, sans bourrelets, neuvième
arrondi, ridé et quadrimamelonné.
Dessous blanchâtre, déprimé, avee courts poils épars,
chaque arceau formé d'un double bourrelet excepté aux
trois derniers qui sont garnis en leur milieu d’une rangée
transverse de courtes spinules,
Pattes nulles, les bourrelets en tiennent lieu. |
Stigmates très petits, peu apparents, de la couleur du
fond.
C'est en juin ainsi qu'en juillet, qu'aux environs de
Rio, dans le chevelu des racines, à une profondeur de
deux à trois centimètres, on trouve cette larve arrivée à
lPapogée de sa puissance, en compagnie d’une foule
d'autres larves radicivores comme elle ; vers la mi-juillet,
dans le milieu où elle se trouve, elle se faconne une loge
à parois lisses et aussitôt se transfigure.
Nymphe. — Longueur 3 millimètres ; largeur 2 milli-
metres.
Corps ovalaire, blanchâtre, un peu arqué; front chargé
de trois rangées de cils roux; premier segment thora-
cique tuberculeux ; segments abdominaux garnis de longs
cils, le dernier armé de deux longues spinules droites ;
deux longs cils bruns émergent du joint de l'articula-
tion de la cuisse et de la jambe destrois paires de pattes.
Adulle. Court, renflé, brun terreux, garni de très
courtes spinules : il mène une vie errante, vagabonde ;
c'est en particulier sous les toutfes d'herbes et sous les
pierres qu'on le trouve durant tout l'automne, l'hiver et
une partie du printemps; sa robe, se confondant, par
effet de mimétisme, avec la couleur des végétaux et des
pierres, lui procure une immunité relative,
Capitaine XAMBEU.
a
LES TARINS
Les Tarins, très voisins des Sizerins, sont caracté-
risés par leur bec pointu, leur forme trapue, leurs ailes
relativement longues, leur queue courte et l’agilité de
leurs mouvements.
Le Tarin commun (Chrysomitris spinus) est trop connu
pour qu'il soit utile d'en donner la description ; il habite
le nord de l'Europe : la Suède, la Norvège et la Russie
etne vient en France que lorsqu'il est chassé par les
froids rigoureux. Il arrive alors en bandes plus ou moins
nombreuses, selon les années, se dirigeant vers le Midi
et c’est depuis la fin d'octobre que les oiseleurs le pren-
nent au filet, généralement au commencement des pre-
miers froids, en même temps que les Linottes, les Char-
donnerets et les Pinsons d'Ardennes, Sa capture est
d'autant plus facile qu'il est familier, peu défiant et peu
craintif, Il recherche les forêts d'arbres verts, se nour-
rissant de graines et de bourgeons; il'est toujours en
mouvement, grimpant et se suspendant aux branches
comme les Mésanges, En captivité, il s’apprivoise facile-
mentet vit en bonne intelligence avec les autres oiseaux,
surtout avec les Serins des Canaries.
Quelques espèces de Tarins exotiques sont assez fré-
quemment importées en France :
1° Tarin jaune (Chrysomitris tristis). — Cet oiseau,
vendu parles oiïseleure sous les noms de Chardonneret
jaune, Serin d'or, Chardonneret triste, Tarin jaune et noir,
est de la grosseur de notre Tarin; son plumage est jaune
d’or, à l'exception du sommet de la tête, des ailes et de
la queue qui sont noirs.
Cette espèce habite toute l'Amérique du Nord et pen-
dant l'hiver descend en bandes considérables au Texas
et en Mexique. Audubon affirme que pendant son séjour
en Europe il croyait entendre ces Tarins lorsque le
chant de notre Chardonneret venait le frapper et que,
après son retour en Amérique, rien ne lui rappelait
mieux l’ancien monde que la voix de cet oiseau qui ré-
velilait chez lui le souvenir de l’oiseau européen,
Son nid ressemble à celui de notre Tarin; il est formé
extérieurement de morceaux de lichen d'arbres et feutré
intérieurement avec toutes les substances douces et co-
tonneuses que l'oiseau peut se procurer; il est ordinai-
rement fixé aux branches d’un pommier ou aux fortes
tiges du chanvre.
Cette espèce est fréquemment importée, mais elle est
plus délicate que notre Tarin et on n’a pu jusqu'à pré-
sent la conserver longtemps en captivité.
20 Tarin du Mexique (Chrysomitris Mexicana). — Ce
Tarin, qui est de la taille du précédent, a la poitrine et
la face inférieure du corps d’un beau jaune, le dos, les
ailes et la queue noirs, les sous-caudales brunes et le
croupion blanc; le bec est couleur de corne avec Ja
pointe noire.
Il habite tout le Mexique et la Colombie; mais il est
moins fréquemment importé que le Tarin jaune et aussi
difficile à conserver en captivité.
3° Tarin rouge à tête noire (Chrysomitris cuculluta). —
Cette espèce est vendue par les oiseleurs sous les noms
de Tarin de la Guayra, Serin à téte noire et Petit Cardinal
rouge des Indes occidentales. Son plumage est remarquable
par la vivacité des couleurs : la tête, la gorge, le cou, le
haut de la poitrine et la queue sont d’un noir foncé, le
dos, le manteau et les épaules d’un rouge-brun, les
rémiges etles couvertures noires bordées de rouge avec
une bande transversale tirant sur le jaune, le croupion,
les couvertures supérieures de la queue, la poitrine et
toute la face inférieure d'nn rouge foncé. La femelle a la
tête et la gorge d’un gris noirâtre teinté de rouge brun,
le dos, le manteau, les épaules et les ailes gris-brun,
une bande orangée traverse chaque aile, le croupion est
jaunâtre, le dessous du corps cendré avec quelques
taches d’un jaune rougeûtre.
Ce Tarin habite les Antilles, le Venezuela et le Brésil;
il se nourrit de graines de semence et d'insectes ; son
chant a une certaine ressemblance avec celui du Char-
donneret.
Importé assez rarement en Europe, il s’habitue facile-
ment à la captivité et on a pu obtenir plusieurs fois sa
reproduction: la femelle pond 3 à 4% œufs d'un blanc
bleuûtre piquetés de brun; l'incubation dure onze jours.
ALBERT GRANGER.
96 LE NATURALISTE
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
… Coléopières des genres Pseudolucane et Lucane
Afin de compléter l'étude publiée sur le genre Pseudo-
lucane, il convient de parler de deux espèces dont je ne
me suis pas occupé précédemment et qui rentrent dans
ce petit genre :
. La première, qui ne m'est connue que par une femelle
de la collection Parry, est une espèce asiatique. La
seconde, qui appartient à la faune de l'Amérique du Nord,
est connue et décrite depuis longtemps, mais avait été,
par erreur, considérée comme appartenant au genre Luca-
nus, Il s’agit du Pseudolucanus placidus.
Il importe enfin de revenir sur la femelle du Pseudolu-
canus Davidis, à laquelle la description donnée, en 1878,
dans nos Annales de la Société entomologique de France,
ne s'applique nullement.
PSEUDOLUCANUS DaAvipis. — H. Devyrolle.
Dans le premier volume de ce travail, j'ai donné pl. 2,
fig. 2, le dessin de la femelle du Pseudolucanus Davidis,
d’après un exemplaire faisant partie de la collection du
Muséum de Paris et rapporté par M. l'abbé A. David, en
même temps que deux autres mâles de la même espèce.
Cette femelle, que je croyais alors être le spécimen
type décrit et figuré, en 1878, dans nos Annales par M. I.
Deyrolle, est bien une véritable femelle de Pseudolucanus
Davidis.
Entièrement noire comme le mâle, possédant la même
tégumentation et se rapprochant de ce dernier, autant
qu'une femelle de Lucanide peut se rapprocher de l'autre
sexe, elle présente, en outre, tous les caractères spé-
ciaux aux autres femelles connues de Pseudolucanes
asiatiques, à savoir : la tête fort petite, les mandibules
déprimées, à bord interne mutique, à dent terminale
acérée, le corselet court et étroit, les élytres allongées,
amples et parallèles, enfin la massue antennaire com-
posée de quatre feuillets grêles, étroits et déprimés (dont
le premier fort petit), et plantés sur une tige rectiligne,
alors que la tige antennaire des Pseudolucanes euro-
péens et américains est toujours un peu arquée comme
celle des Lucanes vrais.
Mais si cette femelle est bien celle du Pseudolucanus
Davidis, il en est tout autrement de la femelle que M. H.
Deyrolle a figurée et décrite comme telle en 1878.
Je n'avais pas été sans remarquer que ni la figure qui
fait penser à une femelle de Lucane vrai, ni la descrip-
tion qui parle, entre autres choses, de macules jaunes
aux pattes médianes et postérieures, ne cadraient avec
le spécimen que j'avais sous les yeux; mais, convaincu
que c'était ce dernier qui avait servi à la description
originale, j'avais attribué à des inexactitudes acciden-
telles ce qui était en réalité le résultat d’une confusion
d'espèces.
Il est même très vraisemblable que j'aurais continué à
rester dans l'ignorance à ce sujet si M. R. Oberthür ne
s’en était lui-même apercu en remaniant ses Lucanides
et n'avait appelé mon attention sur ce point en me com-
muniquant la femelle incriminée, laquelle, rapportée (très
probablement de Mou-Pin), par M. l'abbé A. David, en
même temps que ses Pseudolucanus Davidis, avait été
classée, par erreur, dans la collection de Mniszech, avec
ceux des mâles de cette espèce qui étaient échus à la
collection dont il s’agit.
Il ressort, en effet, de l'examen de la femelle en ques-
tion, que’cet insecte n'est même pas un Pseudolucane,
mais bien une femelle de HLucane vrai, appartenant
incontestablement au groupe du Lucanus Delavayi, et
que, par suite, la figure et la description de M. H. Dey-
rolle, tout en étant parfaitement exactes, ne s'appliquent
pas à la femelle du Pseudolucanus Davidis.
Il convient, d’ailleurs, d'ajouter que cette confusion
était parfaitement explicanle car non seulement cette
petite femelle est en rapport de taille avec le mâle
auquel elle avait été attribuée mais, encore sa coloration,
à l'exception des macules des cuisses, est pour ainsi dire
identique.
Enfin, en 1878, aucune des autres femelles si caracté-
ristiques des Pseudoluçcanes asiatiques n’était connue,
ce qui privait le descripteur de tout terme de comparai-
son.
On verra, à son ordre, dans la suite de ce travail, sous
la rubrique : Lucanus delicatulus, ce qui à trait à la petite
femelle en question; quant à la femelle du Pseudolucanus
Davidis, sa description doit être libellée comme suit :
Coloration entièrement noire comme chez le mâle; tête
couverte d'une ponctuation fine et régulière; corselet
rebordé tout autour, lisse sur son disque, couvert en
entier d'une ponctuation visible à la loupe seulement,
plus serrée et plus forte sur le pourtour; élytres lisses,
pattes rugueuses un peu plus luisantes que le corselet.
Mandibules granulées, presque aussi longues que la
tête, falciformes, étroites, terminées en pointe très aiguë,
privées de dents à leur côté interne ; leur face supérieure
est un peu déprimée en son milieu.
Tête étroite, arrondie et épaisse, plane en son milieu ;
corselet étroit, infléchi latéralement, présentant le long
du bord antérieur, à droite et à gauche, une dépression
bien marquée ; il est, en outre, un peu rétréci en
avant et rappelle beaucoup comme conformation, celui
du mâle.
Elytres amples et nettement parallèles, pattes des
deux dernières paires grèles; tarses fins et allongés à
toutes les paires. Antennes identiques à celles du mâle
mais plus courtes.
Pubescence du sternum d’un jaune clair très pâle,
abondante et longue, mais peu serrée, visible surtout
latéralement.
Les spécimens du Muséum (207 et 14) portent lindi-
cation : Mou-Pin. A. David, 1870).
PSEUDOLUCANUS MNISZECHI. — Louis Planet.
Nova species.
Je décris sous ce nom une petite femelle de Pseudolu-
cane, à mâle inconnu, qui se trouvait.dans la collection
Parry et dont je dois la communication à M. Oberthür.
Cet insecte porte l’annotation : Ind. Or. — ? Smithii Q.
Sa conformation rappelle, en effet, beaucoup celle d'une
petite femelle de L. Smithii et bien plus encore celle de
la femelle du L. villosus, mais sa massue antennaire est
tout à fait celle d’une femelle de Pseudolucane asia-
tique.
La coloration est noire sur les mandibules, la tête, le
LE NATURALISTE 97
corselet, les pattes et les antennes; les élytres sont de la
même couleur châtain que chez les mâles du L. cervus.
Les mandibules, de la même longueur que la tête, sont
rugueuses, robustes, de section triangulaire, et parcou-
rues en leur milieu par une carène longitudinale bien
marquée. Leur dent terminale est longue et très aiguë et
leur bord interne est armé de deux dents en son milieu.
La tête est courte, large et robuste ; son bord antérieur,
sensiblement rectiligne, forme un bourrelet épais et assez
large qui s'étend sur toute sa longueur; en arrière de ce
Pseudolucanus Mniszechi ®.
bourrelet elle est déprimée jusqu'aux carènes qui sont
bien accentuées pour une femelle; toute sa surface est
fortement granuleuse; la granulation du cou est plus
faible et plus régulière.
Le corselet est entièrement rebordé et d'apparence
mate ; vu à la loupe, il apparait couvert d'une ponctua-
tion régulière et assez serrée sans être dense, un peu plus
forte et plus rapprochée latéralement.
Les élytres sont pour ainsi dire lisses.
Le dessous du corps est noir; la partie sternale est cou-
verte de poils roux assez longs.
Comme je l’ai dit précédemment le mâle, de cette
espèce n'est pas connu; à en juger par la femelle, il doit
être plus près du Pseudol. Groulti que des Pseudol. atra-
tus où Oberthuri.
CHRONIQUE
Cours di’entomologie agricole, — M. A.-L.
Clément, vice-président de la Société centrale d’apicul-
ture. fait au jardin du Luxembourg (pavillon de la Pépi-
nière), les mardis et samedis, à 10 heures du matin, un
cours d’entomologie agricole.
Le professeur traitera des caractères des insectes, or-
ganisation,mœæurs, métamorphoses,classification,chasse,
préparation ; insectes utiles, insectes nuisibles, M. E.-L.
Bouvier, professeur au Muséum d'histoire naturelle de
Paris, autorisera les personnes suivant le cours à visiter,
à des dates fixées ultérieurement,les collections entomo-
logiques du Muséum, et à prendre part aux excursions
entomologiques qui se font sous sa direction dans le
courant de la belle saison.
Utilisation de l’aloès pour la destruction
des altises en Tunisie. — Dans quelques régions
de la Tunisie, heureusement peu nombreuses, les altises
causent, certaines années, des dégâts appréciables. Il
semble résulter d'essais entrepris récemment par
M. Reynes, de Bir Touta, que les viticulteurs qui ont à
lutter contre ces insectes, appelés le.plus souvent han-
_netons verts, trouveront dans l'emploi de l’aloès un
moyen de défendre leurs vignobles attaqués. Le procédé
consiste à Incorporer aux bouillies cupriques appliquées
contre le mildew de 100 à 130 grammes d’aloës par hecto-
litre.Cette substance ne coùtant que 2 à 3 francs le kilo-
gramme à Tunis, la dépense supplémentaire par hectare
est insignifiante. Il n'existe pas de frais d'épandage,
attendu que l'on profite de l'application du traitement
contre le mildew pour épandre l’aloès sur les souches en
végétation.
LIVRES NOUVEAUX
Eléments de Paléobotanique (1), par R. ZEILLER, ingé-
nieur en chef des mines, professeur à l'Ecole nationale supé=
rieure des mines.
Il n'existait jusqu'à présent, tout au moins en langue française,
aucun ouvrage général un peu élémentaire de paléobotanique, el
ceux qui, botanistes, géologues où mineurs, sans vouloir faire
une étude spéciale et approfondie des végétaux fossiles, dési-
raient cependant s'initier à leur connaissance, dans un intérêt
scientifique ou technique, ne pouvaient recourir qu'à des ouvrages
très détaillés et volumineux, remontant, en outre, à plusieurs
années déjà et offrant par suite l'inconvénient de n'être plus, sur
beaucoup de points, en conformité avec les données actuelles de
la science.
Les inconvénients d’une semblable lacune, notamment au point
de vue de l'enseignement supérieur, avaient été plus d'une fois
signalés, et la publication des Eléments de paléobotanique a eu
pour but de la combler,
L'auteur s'est efforcé, suivant le plan adopté par lui dans les
leçons de paléontologie végétale qu’il professe à l'Ecole supé-
rieure des Mines, de présenter, sous une forme suffisamment
condensée, les résultats les plus essentiels auxquels on est au-
jourd'hui parvenu dans l'étude des plantes fossiles. Il s'est at-
taché principalement à faire connaitre, pour chacune des grandes
classes entre lesquelles se subdivise le règne végétal, les types
les plus remarquables qui la représentent à l’état fossile, en
‘insistant surtout sur les formes éteintes, sur les rapports qu'elles
ont avec les formes vivantes, dont elles se rapprochent le plus, et
en ayant soin d'indiquer les niveaux géologiques auxquels on les
rencontre. Il résume, d'ailleurs, dans un chapitre spécial, les
caractères distinctifs de la flore de chaque terrain, montrant par
quelle succession de formes on est passé peu à peu, des flores
les plus anciennes qui ont laissé leurs débris dans les couches
de l'écorce terrestre, à celles qui peuplent aujourd'hui la surface
du globe. Il examine en terminant quels enseignements il est
possible de tirer de l'étude des végétaux fossiles sur la question
des liens génétiques qui peuvent exister entre eux, sans dissi-
muler toutefois l'importance des lacunes qui existent à ce point
de vue dans nos connaissances, et la part que peut avoir l'ap-
préciation personnelle dans l'interprétation des documents re-
cueillis.
Une liste bibliographique détaillée, placée à la fin du volume,
indique les sources originales que le lecteur, désireux d’appro-
fondir davantage, peut avoir intérêt à consulter.
OFFRES ET DEMANDES
À vendre:
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Doryphora à Dorydera inclus, 329 espèces,
978 exempiaires, 9 cartons. Prix...... 410 francs.
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S'adresser pour les lots de Coléoptères ci-dessus à
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S'ADRESSER À LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes,
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vius.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata,
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum.
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— Jlaricis.
— . bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
.— Jlentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— craccæ.
— viciæ.
flavipes.
flavofemoratum.
— pisi.
— æneum.
— tenue.
— vorax.
— violaceum.
— hæmatodes.
— pomonæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
ligustici.
LE NATURALISTE
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CIAPRES DÉSIGNES
(Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
—. alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arietis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberca linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica oleracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Névroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hyméènoptères.
Vespa crabro.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopæœus spirifex.
Atta barbara.
— Sstructor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala:
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rostæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassictæ.
— rapæ.
—: napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbiæ.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apiforme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
—. neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
—. monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
RUE DU BAC, 46, PARIS
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— . Ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
— viridipes.
Psyllä pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa.
Aphis rosæ.
— cerealis.
— fabæ.
— pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tiliæ.
—. salicis.
—+ persicæ.
— :olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— h#æmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Simulium ornatum.
— maculatum.
=) Teptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
Hæmatopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— Jlactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus oleæ.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera,
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques,
29% ANNÉE
2° SÉRIE — N° 3 4 G
1°" MAI 1900
LES CHÉNES PORTE-GUI
DE LA
NORMANDIE
- «Les Druides, qui sont les prêtres et les philosophes
des Gaulois, ne pensent pas, dit Pline le Naturaliste (1),
qu'il y ait rien de plus sacré que le Gui et que l'arbre
sur lequel il croit, pourvu que ce soit le Chêne roure (2).
Aussi choisissent-ils, pour leurs sacrifices, des forêts de
Roures, et ils ne sacrifient jamais sans avoir des feuilles
Gui sur un
de cet arbre... Quand donc ils trouvent du
acte le sixième jour de la lune, parce qu’alors cet astre
est déjà dans la force de son ascendant, sans toutefois
ètre parvenu à son moyen terme, qui est un terme équi-
voque. Car il faut savoir que les Gaulois règlent par la
lune le commencement de leurs mois, de leurs années
ét de leurs siècles, et que ceux-ci ne sont que de trente
ans, Le nom dont ils appellent le Gui dans leur langue,
signifie remède universel. Lorsque les choses néces-
saires pour le sacrifice et le festin sacré sont prêtes sous
le Chêne, ils y amènent deux taureaux blancs qui n’ont
Jamais été sous le joug, et que l'on attache alors par les
cornes pour la première fois, Le prêtre, vêtu d'une robe
blanche et armé d'une serpe d'or, monte sur l'arbre et
Fig. 1. — Le Chêne porte-eni de la ferme du Bois,à Isigny-le-Buat (Manche).
Reproduction directe d'une photographie de l'auteur.
Roure, ce qui est extrêmement rare, ils le regardent
-comme un présent du ciel et comme une preuve que cet
‘arbre est le choix spécial de la Divinité, C’est pourquoi
ils cueillent le Gui avec une grande dévotion et avec de
‘grandes cérémonies, et surtout ils choisissent pour cet
*
(1) Histoire naturelle de Pline, traduile en françois, avec le
texte latin rétabli d'après les meilleures lecons manuscriltes :
“accompagnée de notes criliques pour l'éclaircissement du Lexle
el d'observalions sur les connoissances des Anciens comparées
avec les découvertes des Modernes, t. V, Paris, Desaint, 1772,
‘livre XVI, chapitre 4%, p. 629.
:- (2) Il s'agit du Chène rouvre (Quercus robur L.).
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
coupe le Gui, qui est reçu en bas dans une casaque
blanche. Ensuite ils immolent les victimes et prient
Dieu de vouloir bien leur rendre utile e profitable le
présent qu'il leur a fait, Ils croient que ce Gui donne
la fécondité à tous les animaux stériles auxquels ils en
font prendre, et que c'est un antidote contre toute sorte
de poisons, tant la superstition, le plus souvent, a d’em-
pire sur l'esprit des peuples, pour leur faire respecter les
choses les plus frivoles! »
Ce récit de Pline le Naturaliste doit-il être considéré
comme l'expression de la vérité, ou bien faut-il le relé-
guer parmi les multiples erreurs qui sont mélées à un
100 LE NATURALISTE
grand nombre de renseignements exacts, dans l'œuvre
colossale du célèbre écrivain latin? Je ne puis le dire;
cependant, il est très probable que ce récit est partielle-
ment véridique. De plus, il montre que le parasitisme
du Gui sur le Chêne est une question qui intéresse à la
fois, et grandement, la biologie et l’histoire.
I1 convient de faire remarquer que, selon Pline le Na-
turaliste, le Gui était extrêmement rare, dans les Gaules,
sur le Chêne rouvre, c’est-à-dire sur le Quercus robur L.,
que l’on a séparé en deux espèces: le Chêne à glands
pédonculés (Quercus pedunculata Ehrh.) et le Chêne à
glands sessiles (Quercus sessiliflora Sm.).
D'une part, les déboisements considérables effectués
en France depuis le commencement de l’ère chrétienne,
rendirent les Chênes porte-gui plus rares encore; mais,
d'autre part, l'augmentation probable du nombre des
oiseaux disséminateurs du Gui, par suite de l’augmen-
tation de cette plante parasite qui se développe en abon-
dance sur des arbres n’existant pas alors dans notre
pays, a pu faire diminuer un peu la rareté des Chênes
porte-gui; en conséquence, ces derniers ne sont peut-
être pas, actuellement, plus rares en France qu'ils ne
l’étaient aux temps druidiques.
Dans le quatrième fascicule de mon ouvrage sur les
vieux arbres de la Normandie, dont j'ai eu l'honneur, il
y a quelques mois, d'entretenir les lecteurs de ce
journal (1), J'ai décrit et représenté un Chêne porte-gui
tout à fait remarquable : celui de la ferme du Bois, à
Isigny-le-Buat (Manche). J'ai cru intéressant de faire
suivre cette description d'une note spéciale (2) contenant
tout ce qu'il m'a été possible de réunir, au point de vue
documentaire, sur les Chênes porte-gui de la Normandie.
C’est un résumé de cette note que je donne en ces
lignes.
Mes nombreuses recherches bibliographiques et les
renseignements qui me furent obligeamment commu-
niqués me permettent d'affirmer que la présence du Gui
de chêne est tout à fait exceptionnelle en Normandie. Je
ne puis mentionner, en effet, qu’une trentaine de sta-
tions où, depuis un demi-siècle environ, le Gui fut si-
gnalé, d'une manière certaine ou douteuse, sur des
Chênes indigènes de la province normande. Cette tren-
taine de stations se décompose de cette manière en les
cinq départements dont la réunion est, conventionnelle-
ment, appelée Normandie :
Seine-[nférieure, trois stations: Eure, sept; Calvados,
une ou plusieurs; Orne, sept ou huit, et Manche, huit,
Dans cette trentaine de stations, le Gui fut principa-
lement indiqué sur des Chênes croissant dans des bois,
ou sur des individus plus où moins isolés. Il est plus
rare encore dans les forêts, contrairement à ce que l’on
pourrait croire, Je dois ajouter que le parasitisme dont il
s’agit — également célèbre dans l’histoire et la botanique
— n'existe plus aujourd'hui dans la plupart des stations
en question.
À l’état vivant, je n'ai constaté la présence du Gui
que sur deux Chênes en Normandie : à Isigny-le-Buat,
——_—_———"—————"——]" "RE
(4) N° du 1er décembre 1899.
(2) Les Chênes porte-qui de la Normandie, avec deux plan-
ches en photocollographie, extrait du fascicule IV de mon ou-
vrage sur Les Vieux Arbres de la Normandie, étude botanico-
historique, fascicule publié dans le Bulletin de la Société des
Amis des Sciences naturelles de Rouen(2e semestre 1898); et tiro
à part, Paris, 1899, (même pagination)
arrondissement de Mortain (Manche), et à Marcilly-la-
Campagne, arrondissement d'Évreux (Eure). :
Le premier est célèbre: il se trouve à Isigny-le-Buat
ou Isigny-Pain-d’Avoine (Manche), sur la ferme du Bois,
et croît isolément dans un herbage connu sous le nom
de pré du Chêne. Cette ferme appartient à M. Henri
Foisil, conseiller général de la Manche et maire d’Isigny-
le-Buat, qui tient beaucoup à cet arbre.
J'ai étudié, le 24 avril 1898, ce Chêne porte-gui, et en
ai pris la vue photographique que reproduit la figure 4
ci-contre. Le tronc parait être plein; sa mensuration m'a
donné 5 m.37 de circonférence au disque blanc, soit à un
mètre du sol moyen. La hauteur totale de l'arbre était
de 17 m.70 environ, et je crois pouvoir dire qu'il est âgé,
actuellement, d'environ 200 à 300 ans. Cet arbre, de
l'espèce Chêne à glands pédonculés (Quercus peduncu-
lata Ehrh.), est encore vigoureux; mais des branches
sont mortes, et il dépérit visiblement.
Autrefois, des malades venaient à la ferme du Bois,
croyant aux vertus curatives du Gui de chêne, qui, in-
contestablement, n’est autre que le Gui commun, le
Viscum album L., espèce vivant en parasite sur un assez
grand nombre de végétaux.
La curiosité du Chêne en question réside tout particu-
lièrement dans les nombreuses touffes de Gui qui se sont
développées sur les branches et le tronc, et lui donnent
un intérêt tout à fait exceptionnel. Sur la figure ei-jointe,
on peut en compter une quarantaine, dont plusieurs ont
de grandes dimensions; mais toutes ne sont pas visibles
sur cette figure.
La grande rareté du Gui de chêne m'a fait retourner,
le 4tr juillet 1898, à la ferme du Bois, lorsque le Chêne
était feuillé. Grâce à l'autorisation que m’en avait obli-
geamment donnée M. Henri Foisil, j'ai fait couper une
petite branche portant une touffe de Gui, que j'ai photo-
graphiée sur place, afin d'obtenir une image représentant,
dans toute sa fraicheur, un spécimen de ce parasitisme
célèbre. La figure 2 ci-contre est la reproduction de cette
icone photographique.
L'autre Chêne porte-gui normand dont j'ai fait l'étude
se trouve à Marcilly-la-Campagne (Eure). Il est situé
dans un petit bois, parmi d’autres Chênes, au hameau
du Souchet. L'arbre ne porte qu'une touffe de Gui, d'une
certaine grosseur, fixée à un rameau petit et court, près
du tronc et dans le tiers supérieur du Chêne. Cette
touffe est du sexe femelle, et ses feuilles ont une taille
moindre que la taille ordinaire des feuilles du Gui com-
mun que l’on trouve sur d’autres arbres, fait que j'at-
tribue, au moins partiellement, à la petitesse du rameau
où elle est implantée. Le tronc du Chêne en question
m'a donné à un mètre du sol, le 4° août 4899, une cir-
conférence de 0 m.89, et je pense que l'arbre est âgé
d'environ 50 à 70 ans. Je n’ai pas recueilli de pédoncule
qui m'eût fixé sur son espèce; mais les feuilles nette-
ment pétiolées du rameau que j'en ai pris peuvent faire
croire que c’est un Chêne à glands sessiles (Quercus sessili-
fiora Sm.). Toutefois, je ne voudrais nullement affirmer
qu'il en fût ainsi. Il va sans dire que je n'ai enlevé
qu'un rameau de cette touffe, tenant absolument à
conserver in situ Ce spécimen de grand intérêt.
Le parasitisme du Gui sur le Chêne est fort intéressant
au point de vue biologique, mais je sortirais de mon
sujet si je parlais, même brièvement, de cette question
et des hypothèses qui furent émises pour expliquer la
rareté, sur le Chêne, de ce végétal parasite, qui s’im:
+ LE NATURALISTE 101
ER AUOT aa À | £
plante et se développe avec tant de facilité sur un certain
nombre d'arbres, Je me borne à dire que, jusqu'alors,
aucune de ces hypothèses ne saurait étre considérée
sont les Chènes porte-gui. Cette rareté est plus où moins
semblable dans les autres provinces de la France.
Je termine en souhaitant que les enquètes sur l'exis-
comme exprimant indubitablement la réalité, et que,
Fig. 2.
tence du Gui de chène dans notre pays nous fournissent
— Touffe femelle de Gui commun du Chêne porte-eui de la ferme du Bois.
Reproduction directe d'une photographie de l’auteur.
malgré les observations nombreuses et les multiples
expériences faites à son sujet, cette question réclame de
nouvelles observations et de nouvelles expériences.
Étant donné le nombre énorme des Chênes existant
dans la Normandie, on peut affirmer que très rares y
des renseignements précis et détaillés sur ce parasitisme,
que tenaient pour sacré nos lointains ancêtres les Gau-
lois.
Henri GADEAU DE KERVILLE.
LE BITUME EN AUVERGNE
L’Auvergne est la région francaise la plus riche en gi-
sements bitumineux.
_ Je désirerais présenter ici queiques considérations sur
les plus importants de ces gisements et exposer les usages
auxquels donne lieu l'exploitation du bitume. Enfin, j'es-
sayerais d'expliquer l’origine, si discutée, de cette subs-
tance qui commence à occuper une grande place dans
l'industrie.
Bitume et Hydrocarbures. — Le bitume est un hydro-
carbure ou carbure d'hydrogène. Les hydrocarbures sont
nombreux, On en connait à tous les états. Les uns sont
gazeux comme l’acétylène, le formène ou gazdes marais;
d’autres sont liquides comme les huiles de naphte ou
les pétroles; d’autres enfin sont visqueux ou solides
comme le bitume, l’asphalte,
On admet que les hydrocarbures dérivent les uns des
autres par une série d’oxydaiions ou de condensations.
C'est pour cette raison que les bitumes sont consi-
dérés comme des produits d'oxydätion des pétroles.
En partant de cette idée, certains ingénieurs sont arri-
vés à penser que le sous-sol de la Limagne renferme des
nappes de pétrole.
Malheureusement les différents sondages que l’on à
effectués jusqu'à présent, en vue de ces recherches, n’ont
pas donné de résultats bien satisfaisants,
L'un de ces sondages, de 200 mètres de profondeur,
pratiqué à Pont-du-Château, près des mines d’asphalte,
n’a rencontré, dans tout son parcours, que du bitume
visqueux sans aucune trace de pétrole.
Dans un autre forage, à Pont-Battu, près Riom, on
102
LE NATURALISTE
n'a trouvé pendant la traversée du calcaire de la Li-
magne, épais de 220 mètres en cet endroit, que de faibles
quantités de bitume et d'huile de pétrole. Ce n’est qu’à
265 mètres, à la base des arkoses formant le soubasse-
ment du tertiaire de la Limagne, que l’on a constaté la
présence d'un peu de pétrole.
Enfin, un troisième sondage, à Macholles, près de
Riom, a été poussé jusqu'à 1,160 mètres, et ce n’est qu'à
un seul niveau, à 985 de profondeur, que la sonde a ra-
mené de très petites quantités de bitume et de pétrole
mélangés à de l’eau salée.
Gisements. — La plupart des gisements de bitume de
l'Auvergne sont groupés dans le centre de la Limagne.
Ils sont tous situés sur des lignes de fracture de l'écorce
terrestre.
Les plus importants de ces gisements sont ceux de
l'Ecorchade, du puy de la Poix, du puy Croüel, de Pont-
du-Château, de Malintrat, de Lussat.
Le gisement de l’Ecorchade se trouve à un kilomètre
environ à l’ouest de Clermont-Ferrand, à égale distance
de Royat et de la Chamalière, En ce point, les arkoses
sont imprégnées de 5 à 9 0/0 de bitume.
Le puy de la Poix est un monticule, de quelques mètres
d'élévation, qui se trouve presque dans le centre de la
Limagne, à 5 kilomètres environ à l’est de Clermont.
Les pépérites qui le constituent sont fortement im-
prégnées de bitume, et, dans les fissures de cette même
roche, on trouve également de la calcédoine guttulaire et
de petits cristaux d’aragonite, de mésotype, de soufre.
Du centre de ce puy sort une eau minérale chargée,
entre autres substances, de bitume etd'un peu de pétrole.
Le bitume s'étale à la surface de l’eau en petits amas
globulaires autour desquels s'amasse lè pétrole.
La quantité de bitume ainsi amenée au jour par cette
source est variable, suivant la saison, mais en moyenne
elle peut être évaluée à 50 grammes par jour, soit envi-
ron 180 kilogrammes par an.
Le puy Croüelest une éminence d’une centaine de mètres
de hauteur, qui se dresse tout près du puy de la Poix.
Par places, les pépérites qui le forment sont impré-
gnées de bitume. En été, pendant les fortes chaleurs, on
voit cette substance s’étaler sur les pentes, notamment
sur le flanc oriental.
Pont-du-Château possède le plus riche des gisements
bitumineux de l'Auvergne. Le bitume ne s’y trouve pas
pur. [ imprégne un banc calcaire qu'il a transformé en
calcaire bitumineux ou asphalte.
Cette couche d’asphalte, épaisse de 7 mètres environ,
a été reconnue sur une longueur de 5 kilomètres et sur
une largeur de 1.500 mètres ; elle s'étend sous tout le
Coteau qui supporte la petite ville de Pont-du-Château.
L'exploitation de ce gisement se fait au moyen de ga-
leries dans lesquelles on arrive par un plan incliné. Le
long «les parois suinte le bitume. Il coule en véritables
filets liquides et s’accumule sur le sol en une couche
épaisse et solide que l’on utilise pour la préparation du
mastic d’asphalte.
Le calcaire asphaltique renferme de nombreuses co-
quilles d'Helix Ramondi, souvent remplies de bitume
pur ; il appartient donc aux assises supérieures de l'Oligo-
cène. :
Dans le gisement de Malintrat, situé à quelques kilo-
mètres au nord-ouest de Pont-du-Château, le bitume est
en relation avec des pépérites.
Enfin, à Lussat, autre localité proche des deux der-
nières que nous venons de citer, le bitume imprègne un
sable quartzeux.
Industrie. — De tous les gisements de bitume, un seul,
celui de Pont-du-Château, est actuellement exploité.
Dans une importante usine, bien outillée et occupant près
de 200 ouvriers, on traite journellement de grandes quan-
tités d’asphalte ou calcaire bitumeux. Cette usine livre
ses produits sous deux formes différentes: à l’état de
mastic dasphalte et à l’état de pavés d’asphalte com-
primé.
Le mastic d'asphalte est obtenu en fondant ensemble
le calcaire bitumineux, retiré de la mine de Pont-du-
Château, avec 7 0/0 de bitume pur de la Trinitad: c’est
donc un asphalte dont on a enrichi la teneur en bitume.
Pour la fabrication de ce mastic d’asphalte, on extrayait,
il y a quelques années, par lessivage à l’eau bouillante,
le bitume qui imprègne les sables quartzeux de Lussat
et les arkoses de l'Ecorchade.
On utilisait aussi, pour le même usage, le bitume qui
exsude de la brèche pépéritique de Malintrat et qui s’ac-
cumule dans la galerie qu'on avait faite pour exploiter ce
gisement.
Le mastic d’asphalte est livré au commerce sous forme
de pains cylindriques de 25 kilogrammes environ. On
l'utilise pour le dallage des trottoirs, des terrasses, ete.
Pour l’employer, on le fond, de nouveau, avec 4 à 5 0/0
de son poids pur de la Trinitad et on ajoute à la pâte
68 0/0 environ de graviers bien lavés. Le tout est brassé
vigoureusement et porté à une température voisine de
2409. À ce moment, la masse estassez fluide pour pouvoir
être étendue sur le trottoir que l’on veut enduire de cette
substance.
Les pavés d'asphalle comprimé sont fabriqués avec la
matière même que l’on retire de la mine; ils n’exigent
donc pas d’addition de bitume pur, substance toujours
tres coùteuse.
Le calcaire bitumeux est d'abord broyé, puis porté à
une température voisine de 120° pour le débarrasser de
l'humidité et des huiles légères dont il peut être impré-
gné ; enfin, il est moulé, sous une pression de 600 kilo-
grammes par centimètre carré, en pavés de formes et de
dimensions variables.
Ceux-ci sont aujourd'hui employés par un grand
nombre d’administrations, pour les trottoirs des villes,
pour les quais des gares, pour les pavages des écuries, etc.
Ces pavés d’asphalte comprimé deviennent d’un usage
de plus en plus général et tendent à remplacer comple-
tement le mastic d’asphalte. D'abord, ils n’exigent pas
pour être employés, comme le fait ce dernier, un per-
sonnel exercé et un matériel spécial. Puis, la haute pres-
sion, à laquelie ils ont été soumis les a rendus très durs
et à peu près imperméables, tandis que le mastic d’as-
phalte, absorbant jusqu'à 20 0/0 de son poids d’eau, se
désagrège assez rapidement. Enfin, ils ne sont pas glis-
sants, même quand ils sont mouillés. Bref, un grand
avenir leur est réservé, et, sous peêu, ils seront seuls
employés pour les dallages et pour les carrelages.
Origine du bitume. — Deux théories, diamétralement
opposées, sont en présence pour expliquer le mode de
formation des hydrocarbures, en général, et du bitume
en particulier.
L'une, surtout soutenue par les géologues anglais et
américains, attribue au bitume une origine organique et.
le considère comme un produit de distillation de la
houille ou de végétaux enfouis dans le sol.
LE NATURALISTE
103
Cette théorie, à la rigueur, peut être acceptée lorsque
le gisement bitumineux se trouve dans un terrain sédi-
mentaire, à proximité d’une mine de houille, mais elle
n’explique pas la présence du pétrole et du bitume dans
les terrains cristallophylliens où l’on n’a jamais constaté
la trace d'êtres vivants, ni dans les terrains sédimen-
-taires qui ne renferment pas de restes végétaux.
D'après la seconde théorie, le bitume vient de l’inté-
rieur de la terre, à la manière des eaux thermales qui
ont formé les filons métalliferes. Ce serait donc un pro-
duit éruptif, et le dégagement des hydrocarbures quel’on
constate à la fin des éruptions volcaniques est un phéno-
mène que l’on peut interpréter en faveur de cette hypo-
thèse.
Les chimistes ont essayé d'expliquer la formation des
hydrocarbures dans le sein de la terre. D’après M. Ber-
thelot, des métaux alcalins, dont on admet l’existence
dans le noyau igné, ou pyrosphère, que l'on suppose
placé au centre de notre globe, agiraient sur la vapeur
d’eau et l'acide carbonique, venus de la surface du sol
par les fissures de l'écorce terrestre, et produiraient les
pétroles et les bitumes. Ces substances résulteraient
donc d’une véritable synthèse. Et cette hypothèse est très
admissible, car on est parvenu, dans les laboratoires, à
préparer les hydrocarbures par des procédés identiques,
Le bitume, en Auvergne, n'a pas une origine organi-
que : d’abord, aucun des gisements ne se trouve en rela-
tion stratigraphique avec les bassins houillers du Plateau
Central, pas même avec celui de Brassac qui est cepen-
dant situé dans la vallée supérieure de PAllier; puis les
rares débris végétaux que renferment les terrains ter-
tiaires de la Limagne auraient été insuffisants pour
donner desi grandes quantités de cette substance.
La théorie de l’éruptivité, au contraire, s’adapte très
bien avec tous les faits observés dans l'exploitation des
divers gisements bitumineux, et c'est la seule à laquelle
l’on puisse recourir pour expliquer la manière d'être de
nos gisements de l'Auvergne.
À Pont-du-Château, c’est par trois failles, bien visibles
dans les galeries d'exploitation, que le bitume vient de
la profondeur. Le sondage de 200 mètres, qui a été fait
dans cette localité, l’a démontré, du reste, très sura-
bondamment,
Dans les points où il est associé à des projections vol-
caniques, le bitume a fait éruption par la même voie
qu'ont suivie les roches éruptives.
A l'Ecorchade, le bitume est venu de l'intérieur par
une grande faille qui n’a affecté que du granite et des
arkoses, roches absolument dépourvues de restes végé-
taux.
Ce n’est pas tout. Dans certains cas, le bitume se pré-
sente avec tous les caractères d’un produit déposé par les
eaux thermales, à la manière des filons métallifères, et
c’est ainsi qu'on l’observe au plateau de Saint-Martial,
près de la gare de Vic-le-Comte.
Ce plateau est fracturé par de nombreuses failles dont
les unes livrent passage à un grand nombre de sources
minérales, et dont les autres sont aujourd’hui remplies
par des filons. Certains de ces derniers, en général assez
minces, ont leurs parois tapissées par de la pyrite ou
sulfure de fer; intérieurement, une seconde gaine est
formée par de la barytine; enfin l’axe du filon est rempli
de bitume. N'est-ce pas une preuve évidente de l’origine
interne du bitume ?
Autre observation, également très intéressante, faite
par M. Julien, en 1877, lors dela construction du chemin
de fer de Clermont à Tulle.
Une tranchée, entre Royat et Durtol, mit à nu unfilon
de granulite dans le granite. Les salbandes de ce filon se
montrérent tapissées par un enduit de bitume de 1 à
10 millimètres d'épaisseur, et cette substance se distri-
buait en minces filets dans toutes les fissures du granite
encaissant.
On avait là encore une nouvelle preuve de l’origine
éruptive du bitume.
En résumé, nous voyons que ce produit minéral, dont
les applications industrielles vont en croissant de jour
en jour, n'offre pas seulement un intérêt spéculatif, mais
présente encore une importance considérable, au point
de vue scientifique, par les problèmes variés qu'il sou-
lève.
G. GARDE,
Préparateur de Géologie et Minéralogie
à la Faculté des sciences de Clermont.
LES TERRES ALCALINES
Quand on traverse les États-Unis dans toute leur largeur, on
arrive à des contrées déserles où ne croit qu'une végétation sin-
gulière, en raison des sels alcalins dont la terre est chargée. On
y remarque surtout les trois sels de soude suivants, en propor-
tion très variable, qui donnent à ces régions des aspects tout
différents ; d'après la prédominance de tel ou tel de ces sels, Ce
sont : 49 le sel marin ou chlorure de sodium ; 29 le sel amer ou
sulfate de soude, et 30 le sel noir ou carbonate de soude; on
verra tout à l'heure pourquoi cette dernière dénomination, car
le carbonate de soude est bien connu de tout le monde, et il n'est
pas noir. Ce dernier sel doit ici sa couleur spéciale à ce qu'il
dissout l'humus, ou terre noire qui constitue le terreau ; de sorte
qu'il forme des trainées noires étendues sur le sol, à côté des
efflorescences blanchâtres produites par les deux autres sels. Le
carbonate de soude est, en effet très hygrométrique, et il dissout
l'eau contenue dans l'humus qui la retient,
On trouve encore d'autres sels, associés en proportions varia-
bles à ceux qui précèdent : le nitrate et le phosphate de soude,
le sulfate de potasse, etc. Ces derniers sels sont favorables à la
végétation : ilen est de même du sel marin, quand il n'est pas
en trop grande abondance ; mais le sulfate et surtout le carbo-
nate de soude ne valent rien pour la plupart de nos plantes
cultivées.
Chose curieuse, ces sels ne restent pas tout le temps à la
méme place, par rapport à la surface du sol. Les alternatives de
pluie ou de sécheresse ont pour effet de les faire descendre, en
les dissolvant, dans les couches profondes du sol, où au con-
traire de les faire remonter à sa surface, sous forme d'efflores-
cences salines, étendues en nappe blanche sur le sol, au milieu
des trainées noires du carbonate associé à lhumus qui fait corps
avec lui. II y aurait donc un moyen bien simple de faire dispa-
raitre tous ces sels pour rendre le sol cultivable, si la pluie est
abondante où si on peut y amener des eaux à l'aide d'une irri-
oation suffisante : ce serait le drainage. Malheureuse-
ment ces dépôts salins se produisent précisément dans les pays
où il pleut rarement. On comprend l'efficacité du drainage, parce
que l'eau, qui a lavé ces terres et dissout les sels dont elles sont
chargées, s'échapperait ainsi par les tuyaux de drainage, et pur-
gerait le sol de toutes les parties solubles qu'il contient en excès.
Il serait toujours temps de suspendre cet écoulement; car il fini-
rait à la longue par épuiser le sol de tous les sels qu'il renferme,
bons où mauvais pour la végétation. Ce serait l'affaire de quel-
ques années seulement. a
Je ne sais si nos cultivateurs se rendent bien compte de l'effet
complexe du drainage. Sans doute dans nos contrées on ne
draine que les terrains trop humides, que l'on veut mettre en
culture en les débarrassant de leur excès d'eau. Mais aussi on
perd, par la même occasion, tous les nitrates et phosphates solu-
bles des engrais chimiques, qui n’ont pas été utilisés par la
végétation; surtout si l'année à élé pluvieuse, Tel est le grand
104
LE NATURALISTE
inconvénient du drainage, à côté de son rôle éminemment utile,
puisqu'il transforme un marais, qui ne produit que des laichés,
des corex ou des jones, en terres labourables ou en prairies fer-
iles, là où il ne poussait que des herbes coupantes où des prêles
à queue de cheval.
Mais ce qui est un mal pour nos agriculteurs est au contraire
une bénédiction pour les déserts alcalins, si on dispose d'une
suffisante quantité d'eau; puisque le drainage les lessive en
entrainant les sels nuisibles solubles, qu'elles contiennent en si
prodigieux excès. Quand on y réfléchit, on ne sait ce que lon
doit admirer le plus, de la Providence qui place toujours le
remède à côté du mal, ou de la science qui permet à l'homme de
se rendre maitre des forces inerles que la nature prévovante à
mises à sa libre disposition, pour qu'il les utilise à son profil
quand l'occasion s’en présentera. Drainez les déserts américains
ou australiens, les alkali-lands, et vous en ferez des contrées
fertiles. Sans compter qu'on peut encore utiliser la sécheresse
pour recueillir les eaux de drainage dans de vastes bassins
bétonnés, où le soleil se chargera de les évaporer, cn donnant
un abondant précipité de sels alcalins à l'état de cristaux
mélangés : sel marin, sel purgatif et sel de carbonate! Tous ces
produits ont de la valeur, et cela ne coûte que la peine de les
isoler les uns des autres.
En Australie, dans les salt-bushs, on trouve méme une herbe
succulente, fort appréciée des bestiaux, l’atriplex semibaccalum,
sorte d'arroche où Bonne-Dame, qui rappelle les herbes pota-
gères de nos aïeux. Si elle était bonne pour faire la soupe, elle
est encore meilleure pour les animaux de boucherie, qui donnent
la viande du pot au feu.
Généralement le plus nuisible de tous ces sels, c'est le carbo-
nate de soude, qui brûle les plantes et notamment le collet de la
racine, partie correspondant à la couche superficielle du sol, où
ces sels viennent affleurer parce qu'ils sont efflorescents. fes
tissus périphériques sont noircis et corrodés à ce niveau.
Ce qu'il y à de plus curieux, c’est que, si arrosage abondant
entraine les sels dans les couches profondes, un arrosage insuf-
fisant à au contraire pour effet de ramener à la surface ceux qui
étaient restés dans la profondeur du sol, en venant s'y évaporer.
Tous ces phénomènes mécaniques sont on ne peut plus simples à
comprendre, et nos connaissances en physique pouvaient nous les
faire prévoir d'avance.
La composition chimique de ces sels alcalins, leur abondance
en sulfates et leur pauvreté relative en magnésie montrent bien
qu'ils ne proviennent pas en général du dépôt d'anciennes mers ;
comme le chlorure de sodium le ferait tout d'abord supposer, à
un examen superficiel, [ls proviennent surtout de la désagréca-
tion des roches, en présence du sel marin, dans les régions où la
pluie est peu abondante; sous Pinfluence de l'acide carbonique,
de l’air et de l’eau; c'est le cas pour le carbonate de soude, par
exemple. Dans nos pays, le carbonate de soude soluble est
entrainé par les pluies, au fur et à mesure de sa production;
là-bas, le manque d'eaux pluviales le retient sur le sol. Pour y
remédier, il faut d’abord retenir l'eau qui imbibe la terre, en
s'opposant.à son évaporation rapide. On y parvient en recou-
vrant la surface du sol de feuilles, de fumier, de pierres plates,
de mottes de terre durcie, el surtout en y semant des herbes
basses à croissance rapide, formant une sorte de tapis protecteur.
De cette façon, en maintenant le sol humide, on.retient toujours
les sels au fond du terrain, pendant ce temps-là. Quant à ceux
qui existaient primitivement au-dessus du sol, en y formant une
nappe blanchâtre efflorescente, on à soin de les enlever préala-
blement à la pelle, en räclant la superficie du terrain.
On peut combattre directement le carbonate de soude, le plus
dangereux de tous, à l'aide du plâtre, qui le transforme en sul-
fate de soude, qui s'ajoute à celui préexistant déjà. Le carbonate
de chaux ainsi produit ne peut pas nuire, au contraire. Enfin on
a la ressource d'utiliser ces sols arides, en y cultivant certaines
plantes, qui y croissent plus où moins bien : outre l’atriplex ou
arroche d'Australie dont nous avons parlé et que le bétail pré-
fère ; outre le Distichlis maritima qu'il mange faute de mieux, il
y a le soleil, le topinambour, la belterave, l'asperge, le millet, le
sorgho, Palfa, l'Eiymus condensatus; sans compter le quercus
lobata, ou chêne blanc de Californie, le sycomore, l'eucalyptus,
l'érable, l'amandier, l'olivier et la vigne. Telle de ces espèces
prospère ou dépérit, suivant les proportions relatives de celui
des trois qui y prédomine : sel marin, sulfate de soude ou car-
bonate.
Dr Boucox.
L'IPÉCACUANHA
Le nom Ipécacuanha est un mot brésilien qui signifie
« racine ravée », nom justifié par les gros bourrelets que
présente la racine qui le produit. Celle-ci, réduite en
poudre, est employée en médecine pour ‘les propriétés
énergiques qu’elle doit à la présence d'un alcaloïde ap-
pelé émétine (CSI 1Az20"6).
L'Ipécacuanuha provient du Cephælis Ipecacuanha,
plante de la famille des Rubiacées. C'est un arbrisseau à
tige ascendante, sarmenteuse, de 40 à 40 centanètres de
hauteur, à feuilles opposées, ovales, lancéolées, d’un
beau vert, aux fleurs petites et blanches, groupées en un
capitule terminal pédonculé, et entouré à sa base d’un
involucre régulier de quatre feuilles. Le fruit est une baie
ovoide, noirâtre, contenant deux nucules blanchâtres, se
séparant à la maturité.
Cet arbrisseau croit dans toutes les provinces du litto-
ral du Brésil, depuis l'Atlantique jusqu'aux tropiques du
Capricorne. dans les forèts des provinces de Pernan-
bucque,de Bahia et de Rio de Janciro, la province de
Mallo Grosso sullisant à elle seule à la consommation
de presque toute l'Europe.
C’est Pisin qui, le premier, au xvr® siècle, conseilla
l'emploi de l'pécacuanha dans le traitement de la dys-
senterie, mais On apporta que peu d'attention à ses
écrits.
Le fameux remède de Talbot, le Quinquina, ayant valu
à son inventeur les faveurs du roi de France et une for-
tune considérable, séduit par cet exemple, un marchand
français, Grenier, s’associa en 4686 avec un médecin
hollandais exercant à Paris, pour exploiter l'Tpécacuanha.
Ce médecin, Adrien Helvétius, expérimenta d'abord le
nouveau remède sur des gens de basse condition, puis:
sur le Dauphin qu'il guérit d’un flux de sang.
Dès lors sa fortune fut faite, inais il en voulut garder
pour lui seul les honneurs etles profits : Grenier lui in-
tenta un proces, le perdit et, par vengeance, divulgua
le secret,
L'Ipécacuanha du commerce, où Ipécacuanha annelé,
est produit par le Cephælis Ipecacuanha. On le ren-
contre sous la forme de morceaux de 5 à 25 centimètres
de longueur, et d’une épaisseur à peu près égale à celle
d'une paille; la substance émétique existe en proportions
plus grandes dans la partie corticale. L’écorce est d'un
gris noirâtre à l'extérieur, grise à l’intérieur, dure et
cornée; la moelle est blanc jaunâtre. Sa saveur est âcre,
aromatique; son odeur forte, irritante et nauséeuse,
Une autre variété dénommée par Guibourt « Ipéca-
cuanha gris rougeñtre » est rougeâtre, moins foncée,
moins odorante et moins sapide ;,son écorce est ordinai-
rement cornée, semi-transparente, et-offre parfois des
sections mates farimeuses.
L'Ipécacuanha annelé de Guibourt, épais de 5 à 6 mil-
limètres, marqué d'anneaux peu saillants, a été considéré
comme une variété des précédents, mis cette origine
est contestée.
On trouve dans le commerce des sortes inférieures
dénommées : CIpécacuanha strié où noir », provenant du
Psychotria emetica, Rich. (Ruhiacées); « l’'Ipécacuanha
blanc où ondulé » provenant du Richardsonia Scabra.
Kunth (Rubiacées). |
LE NATURALISTE
105
Dans quelques pays on emploie, comme succédanés de
l’Ipéca, les racines de l'Euphorbia Ipécacuanha #4, de
plusieurs Tonidiums, du Gillenda trifohata Monch (Ro-
sacées), de l'Asclépias curassavica 4 (Asclépiadées), du
Cynanchum Ipécacuanha Rich, (Apocynées).
Toutes les variétés d’Ipécacuanha renferment à peu
LD)
pe
a
rl)
Q7: AVE
ES
16 0/0 dans l’Ipécacuanha fourni par le Cephælis Ipé-
cacuanha;
9 0/0 dans une variété d’Ipéca fournie par le Psycho-
tria emetica ;
60/0 dans l’Ipécacuanha amylacé fourni par le Richard-
sonia Scabra.
L'Ipecacuanha.
près les mêmes substances, mais dans des proportions
variables ; elles sont :
1° L’acide ipécacuanhique (acide voisin de l'acide gal-
lique), amer, s'oxydant à l’air avec une grande facilité,
surtout lorsqu'il est mis en présence d’alcalis;
20 L’émétine, alcaloide dont nous reparlons plus loin.
La proportion d’émétine varie avec les diverses sortes
d'ipéca ; elle est de :
L'Ipéca est un médicament irritant dont l’action est
sensible sur les muqueuses; quand sa poussière pénètre
dans les yeux, le larynx ou les bronches, elle produit des
etfets d'irritation locale très intenses et même effrayants.
La moindre poussière d’ipéca répandue dans l’atmo-
sphère cause, chez certaines personnes,des accès desuffo-
cation et d'asthme très pénibles, mais qui, heureusement,
sont passagers.
106 LE NATURALISTE
Quelques médecins attribuent ces effets à des émana-
tions spéciales de la racine d’Ipécacuanha, qui échap-
pent à nos sens et auxquelles certains sujets sont très
sensibles; il semble plutôt que ces effets soient dus à la
poudre ténue et légère que l'air tient en suspension, et
qui, étant aspirée, s'arrête dans les voies respiratoires,
se fixe sur les muqueuses et produit les divers symp-
tômes observés.
L’Ipécacuanha réduit en poudre est employé à l’exté-
rieur comme rubéfiant, et à l'intérieur comme vomitif,
dans les cas d'empoisonnement et dans tous les cas où il
est nécessaire de provoquer les vomissements. Il est
toxique à une dose qui n’a pas encore été déterminée;
son contre-poison est lPingestion d'une solution de ta-
nin au 1/10, suivie de lavages d'estomac,
Il est très utile de vérifier si la poudre d'Ipéca est de
bonne qualité; suivant le Codex, traitée par l'alcool à
70°, elle doit fournir 20 à 22 0/0 d’extrait sec. Son infu-
sion dans l’eau prend une teinte vert pomme par laddi-
tion d’un cristal transparent de sulfate ferreux.
Le principe de l’Ipécacuanha, l’émétine, qui est un al-
caloïde, a été retiré de la racine par Pelletier et Magendie
en 1817.
Pour retirer l’émétine, on épuise d’abord la racine par
l’éther qui lui enlève une matière grasse odorante, puis
par lPalcoo! bouillant. On filtre la dissolution, on ajoute
un peu d’eau et on distille l'alcool; il se sépare de la ma-
tière grasse que l’on enlève à l’aide du filtre et l’on fait
bouillir la solution aqueuse avec de la magnésie; le dépôt
magnésien est recueilli, séché et traité par l’alcool bouil-
lant qui dissout l’émétine. On décolore la solution par
agitation avec le noir animal, puis on filtre ; on précipite
ensuite l’émétine par l’ammoniaque employée en quan-
üté suffisante, On purifie complètement l'émétine en la
faisant digérer avec de l’acide sulfurique.
L'émétine se présente sous la forme d’une poudre
blanche, légèrement jaunâtre d’une saveur amère très
faible; elle ramène au bleu le papier de tournesol rougi
par un acide,
Elle est à peine soluble dans l’eau froide, très soluble
dans l’alcool, assez soluble dans la potasse et la soude
caustique, peu soluble dans lammoniaque, l’éther et les
huiles grasses,
Elle fond à 70° en prenant une teinte brune. Exposée à
l'air, elle brunit légèrement. Les acides se combinent à
elle en produisant des sels incristallisables très solubles
dans l’eau : seul, le nitrate d'émétine est peu soluble
dans ce liquide. La solution aqueuse d’émétine n’exerce
aucune action sur la lumière polarisée; la solution acide
offre une fluorescence bleue très manifeste.
Sous l'influence de l'acide azotique, l’émétine se trans-
forme en une matière jaune résineuse et en acide oxa-
lique.
Le réactif de Frœhde (qui est un mélange de 1 milli-
gramme de molyhdate de soude et de { centimètre cube
d'acide sulfurique) dissout instantanément l’émétine en
donnant naissance à une belle couleur rouge qui passe
ensuite au vert.
L’acide sulfurique pur et concentré la dissout aussi,
mais en faisant apparaître une teinte d'un vert brunâtre.
Traitée par leréactif d'Erdmann (composé d’un mélange
d'acide sulfurique et d'acide azotique), l’émétine se colore
en vert, puis passe au jaune.
Un mélange d'acide sulfurique trihydraté et d'acide
azotique, la dissout sans la colorer.
Ilest souvent nécessaire de doser la quantité d'émé-
tine contenue dans la poudre d'Ipécacuanha; on opère
cette détermination par le procédé suivant :
On épuise 15 grammes de poudre d’'Ipécacuanha à
l'aide d'alcool à 85° additionné de quelques gouttes d’a-
cide sulfurique. Lorsqu'on a obtenu 150 centimètres cubes
de liquide, on le filtre et on en prend 400 centimètres
cubes dont on chasse l'alcool par distillation. Dans la b-
queur qui reste, on verse goutte à goutte le réactif de
Mayer (formé d’iodure mercurique et de chlorure de po-
tassium) jusqu'à cessation du précipité. Le nombre de
centimètres cubes employés, multiplié par 0,0189, donne
la quantité d’émétine contenue dans les 10 grammes de
poudre d’Ipéca correspondants aux 100 centimètres cubes
de liqueur soumis à l'expérience.
L’émétineestvomitive à ladose de0,003 milligrammes,
mais on lui préfère généralement l'Ipécacuanha.
Telles sont l'histoire générale et les propriétés de ce
médicament si employé dans la médecine française.
E. MASsAT,
Attaché au Muséum de Paris.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 26 mars 1900.
Perturbations géologiques deJava.— Letremblement de
terre qui a eu lieu dans la nuit du 29 au 30 septembre 1899 ne
semble pas s'être limité aux Moluques; de fortes secousses se sont
faitsentir à Java. Le centre de cette perturbation géologique paraît
être la régence des Preangers, et notamment Soekaboemi, ville
importante située sur un des contreforts immédiats du volcan
Gedeh. Les oscillations terrestres ont été ressenties jusqu'à
Bandoeng, Garoet et même Batavia. Depuis plus d'un mois, les
secousses sont journalières et ont entrainé des dégâts. On re-
doute une forte éruption du Gedeh. On constate en même
temps à Java une sérieuse perturbation atmosphérique. La saison
des pluies 1899-1900 est fort anodine et laquantité d'eau tombée
sur les régions côtières est insignifiante comparalivement aux
années précédentes.
Sur la loi de disjonction des hybrides (M. Huco pe
Vies). — D'après des principes reconnus, les caractères spéci-
fiques des organismes sont composés d'unités bien distinctes. On
peut les étudier expérimentalement en unités soit dans des phéno-
mèênes de variabilité et de mutabilité, soit par la production des
hybrides. Dans le dernier cas, on choisit de préférence des
hybrides dont les parents ne se distinguent entre eux que par
un seul caractère (les monohybrides) où par un petit nombre
de caractères, bien délimités, et pour lesquels on ne considère
qu'une ou deux de ces unités en laissant les autres de côté. Or-
dinairement les hybrides sont décrits comme participant à la
fois des caractères du père et de la mère. Suivant l'avis de l’au-
teur, on doit admettre, pour comprendre ce fait, que les hy-
brides ont quelques-uns des caractères simples du père et
d’autres caractères également simples de la mère. Mais quand
le père et la mère ne se distinguent que sur un seul point,
l'hybride ne saurait tenir le milieu entre eux; car le caractère
simple doit être considéré comme une unité non divisible.
D'autre part, l'étude des caractères simples des hybrides peut
fournir la preuve la plus directe du principe énoncé. L'hybride
montre toujours le caractère d'un des deux parents, et cela dans
toute sa force; jamais le caractère d'un parent, manquant à
l’autre, ne se trouve réduit de moitté.
A propos desrésultats contradictoires de M. Raphaël
Dubois et de M. Vines sur la prétendue digestion chez
les Népenthès. (M. E.Couvreur).— On sait queles Népenthès
ont été longtemps regardés comme des plantes carnivores. On
admettait que le suc qui remplitles urnes de ces plantes jouit de
propriétés digestives, parce que les petits insectes tombant dans
LE NATURALISTE
107
ce liquide s’y dissolvaient partiellement. M. Raphaël Dubois, en
recueillant le liquide aseptiquement dans l'urne, a montré que,
dans ces conditions, aucune digestion ne se produit; il attribue
à une intervention microbienne les pseudo-phénomènes digestifs
de l’urne ouverte. La question du pouvoir protéolytique du H-
quide de l’urne des Népenthès était donc résolue par la néga-
tive. Cependant, récemment, M. Vines a attaqué les conclusions
de M. R. Dubois. Il a en effet, dit-il, obtenu des phénomènes de
digestion en ajoutant au liquide —, d'acide cyanhydrique, ad-
dition qui empêche l'action des ferments figurés. Deux choses
auraient dû, semble-t-il, frapper M. Vines dans ses résultats :
1° il n'obtient des phénomènes digestifs qu'avec des albumi-
noïdes crus, en l'espèce, la fibrine; 20 les phénomènes dicestifs
ne sont pas arrêtés par une température de 70°C. à 80°C. et il
est même nécessaire de porter à l'ébullition pendant quelques
instants pour détruire l'activité protéolytique. M. Couvreur
conclut que M. Vines a été induit en erreur et que c'est à tort
qu'il a conclu à l'existence d’un ferment protéolytique dans les
népenthès, parce qu'il obtenait des protéoses et même des pep-
tones, puisque sans l’adjonction d'aucun ferment M. Couvreur a
obtenu des résultats identiques.
Séance du 2? avril 1900.
Considérations sur les différences qui existent
entre la faune des Gpistobranches des côtes ovéani-
ques de Ia France et celle de nos côtes méditerra-
néennes (M. A. Vayssière) — Les Opistobranches de nos
côtes océaniques (océan Atlantique et Manche) sont, pour la
plupart, des espèces septentrionales que l'on retrouve en abon-
dance plus au Nord (côtes de l'Angleterre, de la Norvège, de la
Suède et du Danemark); les types méditerranéens sont, au con-
traire, des espèces méridionales qui, bien souvent représentées par
de rares individus le long de nos côtes, deviennent plus fré-
quentes et même abondantes dans le golfe de Naples, sur les
côtes de la Sicile et de l'Algérie. Non seulement ce sont les es-
pèces qui se trouvent ainsi localisées, mais même des genres, à
tel point que certains d’entre eux ne possèdent pas de représen-
tants dans une de ces régions.
Il n'y a guère que les espèces abyssales que l’on retrouve des
deux côtés, ces espèces ne pouvant être influencées par la petite
différence de latitude, car elles ne subissent pas les variations
de température comme les espèces côtières.
Sur un nouveau microbe pathogème, Ia bactéridie
myophage du lapin. (M. C. Puisarix). — Il existe chez le
lapin une maladie caractérisée par une mortification plus ou
moins étendue du tissu musculaire. Elle est produite par la pro
lifération d’un bacille filamenteux, aérobie, dont l'inoculation
reproduit les lésions musculaires. Il diffère du bacille de la
nécrose de Bang et du séreptothrix cuniculi de Schmort. Aussi,
à cause de sa localisation primitive dans le tissu musculaire,
qui est son milieu de culture par excellence, l’auteur lui a
donné le nom de bactéridie myophage et je propose de désigner
la maladie qu'il provoque sous le nom de myosile nécrosante.
Séance du 17 avril 1900
Recherches expérimentales sur les phénomènes
physiologiques accompagnant la chlorose chez Ia
Vigne (M. Grorces CurteL). — La chlorose se manifeste dans
la feuille malade : 1° par un affaiblissement notable de l'aclivite
respiratoire el la diminution du rapport Te des gazéchangés ;
20 par la diminution, puis la cessation de la fonction assimila-
loire : les chromoleuciles étant impuissants à l'assurer; 30 par
un très grand affaiblissement de la fonction transpiraloire.
L’altération de cette fonction qui pour la plante remplace les
organes propulseurs des liquides organiques entraine des troubles
profonds de la nutrition, en particulier la disparition de la chlo-
rophylle qui, ne trouvant plus les matériaux nécessaires à sa ré-
génération dans une sève insuffisante, disparait au fur et à me-
sure de sa destruction sous laction de la lumière, Parmi les
causes pouvant agir sur l'activité de cette fonction, nous avons
trouvé l'excès de calcaire du sol. Il en estheaucoup d'autres : excès
d'eau, conditions climatériques défavorables, etc., et qui toutes
d’ailleurs sont susceptibles d’entrainer la chlorose, si bien que
ces deux phénomènes, apparilion de la chlorose, allération de
la fonction transpiraloire, nous apparaissent indissolublement
liés, et que logiquement on peut admettre que toute cause ca-
pable de modifier l’un d'eux devra nécessairement avoir son
influence sur l’autre,
Subdivision du Sénonien du Portugal (M. Paur
CHorrar. — Au nord de Mondége, le Turonien est surmonté par
par un complexe de grès représentant le Sénoniens. 1., c'est-
à-dire comprenant le Danien. Malgré tous les points douteux
qui existent encore, on peut affirmer les faits suivants. Abs-
traction faite du gisement le plus occidental formé par un grès
franchement marin, correspondant au Campanien, ce complexe
présente, dela base au sommet, une faune saumâtre mélangée,
dans quelques niveaux, à des espèces marines et à des lits à
végétaux flottés. Au toit du tiers supérieur se trouve un banc à
faune marine contenant des Ammonites sénoniennes. Les Verté-
brés appartiennent à des types du Crétacique inférieur, du
Maestrichtien, du Danien et du Tertiaire, caractère qui se
trouve aussi bien en dessous qu'en dessus du banc à Pseudotis-
solia. Les Végétaux encore inédits, quoiqu'ils soient en partie
étudiés par M. de Saporta et M. W. de Lima, présentent le
même mélange que les Vertébrés, tandis que les mollusques
peuvent fous être rapportés au Crétacique. La fixation de l'âge
des grès de Bussaco, profondément disloqués avec le Paléo-
zoïque, fait voir que la cordillière Lusitano-Castillane est pos-
térieure à cette époque, par conséquent, que la meseta ibérique
n'est pas restée indemne dès la fin des temps paléozoïques.
OFFRES ET DEMANDES
A vendre:
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Doryphora à Dorydera inclus, 329 espèces,
978 exemplaires, 9 cartons. Prix....,.. 1410 francs.
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nides, Anchoménides, Bembhidides, 300 espèces,
830 exemplaires, 4 cartons doubles, Prix. 65 francs.
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500 exemplaires, 2 cartons doubles. Prix. 45 francs.
Lot de Malacodermes européens. 170 espèces,
500 exemplaires, 3 cartons. Prix........ 50 francs.
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pèces, 178 exemplaires, 2 cartons. Prix. 28 francs.
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plaires, 2 cartons 33 X 22. Prix......,.. 50 francs.
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Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
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Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Sagra à Cryptocephalus inclus. 200 espèces,
540 exemplaires, 5 cartons. Prix....,... 6O francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exoti-
ques : Pachybrachrys à Zygogramma inclus, 210 es-
pèces, 680 exemplaires, 6 cartons. Prix, 60 francs.
S’adresser pour les lots de Coléoptères ci-dessus à
Les Fils D'Emile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
108
LE NATURALISTE
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
Coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane
PSEUDOLUCANUS PLACIDUS — Say.
Syn.: Lucanus placidus — Say.
Say. — Journ. Ac. Phil., V, 202.
Chas. Fuchs, — Synopsis of the Lucanidæ of the United-
States.
Bulletin Brooklyn Entom. Soc., vol. V, 1882.
Syn. : L. Lentus — Castelnau. — Hist. Nal., II, p. 171.
— — Burmeister, — Handb, V, p. 356.
— — Dejean. — Cat. 3° éd., p. 198.
L. Rupricapra — Dej., loc. cit.
(Amérique boréale.)
Cet insecte, qui figure dans les catalogues au nombre
des Lucanes vrais, appartient bien plutôt au genre Pseu-
dolucane.
Sa forme courte et ramassée, ses mandibules brèves et
élargies, l'ampleur de son corselet et de ses élytres, la
conformation spéciale de sa massue antennaire, la
brièveté de ses pattes et de ses tarses, justifient bien son
classement dans ce dernier genre.
Au reste, la couleur et la contexture des téguments,
l'élargissement des pattes postérieures à leur extré-
mité et l’étroitesse de la tête de la femelle indiquent
pleinement que la véritable place de cet insecte est tout à
côté du Pseudolucanus mazama.
Seules les mandibules des grands mâles peuvent pa-
raitre un peu déconcertantes en raison de ce qu'elles sont
pluridentées, mais il convient de faire ressortir qu'elles
présentent encore bien moins d’analogie avec n'importe
quel autre type connu de mandibules de Lucanes vrais
et que, d'autre part, leur denticulation s’atténue dès que
la taille décroit, ce qui ramène la mandibule au type nor-
mal.
MALE
Coloration.
La couleur du Ps. placidus est où entièrement noire
ou rougeñtre où bien noirâtre sur la tête et le corselet,
avec les mandibules et les élytres d’un brun rouge plus
ou moins obscur.
Structure.
Les mandibules sont de la même longueur que la tête,
c'est-à-dire relativement brèves; leur courbure est
moyenne, leur inclinaison en avant nuile : leur bord
interne est pluridenté chez les spécimens de grande
taille, armé d’une seule dent et de quelques denticules
chez les exemplaires moyens; selon la règle, ces denticules
s’effacent chez les petits mâles.
La tête est assez longue, subparallèle, plus étroite que
le corselet ; la carène frontale est nulle ; les carènes laté-
rales sont larges, épaisses et arrondies, ainsi que cela se
voit, d’ailleurs, chez les autres espèces du genre; le bord
antérieur du labre est triangulaire chez les grands spéci-
mens, subrectiligne chez les autres; le corselet, médio-
crement arrondi, est très ample, presque aussi large que
les élytres, lesquelles sont elles-mêmes courtes, ova-
laires et fort larges.
Les pattes sont courtes et robustes; les antérieures, tra-
pues et à dents épaisses, ressemblent à des pattes de fe-
melles; celles du milieu sont armées de deux épines,
. mais ne présentent dans leur structure rien de particu-
lier.
Les postérieures, au contraire, étroites et même grêles
à leur naissance, vont en augmentant insensiblement de
largeur jusqu'à leur extrémité où elles présentent un
élargissement très accentué, analogue à celui qui s’ob-
serve chez le Pseudolucanus mazama.
Les pattes de la dernière paire ne possèdent qu'une
séule épine qui est située plus près de leur extrémité
que de leur base.
Cette épine, qui esthabituellementtrès faible, disparait
chez les mâles de moyenne ou de petite taille.Les anten-
nes se composent de quatre feuillets, mais les trois der-
niers seuls sont bien développés: le premier, bien plus
Pseudolucanus placidus (syn. lentus). Mäles.
court, est frèle ; lestrois suivants sont de même longueur,
avec l'intermédiaire plus mince que le précédent et que
le suivant.
La tête etle corselet présentent chez les grands mâles
un aspect un peu luisant qui s'efface plus ou moins
complètement chez les exemplaires moyens ou de petite
taille, ceux-ci ayant leurs téguments habituellement plus
ponetués, Vue à la loupe, la ponctuation des mandibules
apparaît un peu rugueuse ; celle de la tête, très dense,
mais extrêmement fine; il en est de même de celle du
corselet, avec cette différence qu'elle est un peu espacée
vers la partie médiane du disque qui présente en outre
l'indication d'une strie médiane lisse ; la ponctuation des
élytres est très dense et entremélée de strioles transver-
sales et rugosiformes qui leur donnent un aspect mat;
chez quelques individus les élytres présentent trace de
deux faibles carènes longitudinales.
En dessus, la pubescence du ‘steruum est longue et
bien fournie.
FEMELLE
La coloration est la même que chez le mâle, mais Ja
ponctuation et la granulation des téguments sont plus
fortes, particulièrement sur la tête et les élytres,
Les mandibules, plus courtes que la tête, à bord externe
arrondi et très épais, présentent une dent un peu au delà
de leur milieu et sont terminées en pointe très aiguë.
Les antennes et les pièces de la bouche sont plus pe-
LE NATURALISTE 109
tites que chez le mâle mais conformées de la même fa-
çon ; la tête est étroite mais assez longue, un peu renflée
en arrière des yeux; le corselet, les élytres et l'écusson
sont comme chez le mâle; la conformation des pattes
s’y rapporte également, mais les pattes postérieures pré-
sentent deux faibles épines au lieu d’une.
Les exemplaires figurés font partie de la collection de
M. Henri Boileau.
Le Pseudoluc. placidus parait être communément ré-
pandu dans l'Amérique du Nord; il n’est pas rare dans
nos collections européennes.
M. Wickham, de qui je tiens les renseignements que
j'ai consignés sur le Pseudol. mazama et sur le Pseudol.
capreolus, à bien voulu me fournir sur le Pseudol. pla-
cidus les indications suivantes :
« La manière de vivre de sa larve n’est pas connue.
“« L’insecte parfait se trouve communément dans les val-
« lées du Mississipi et le l'Ohio et se reçoit également de
Pseudoluc. placidus. Femelle.
« plusieurs des États de l'Est. Ses mœurs sont crépuseu-
« laires ou nocturnes etil vole souvent à la lumière comme
les autres espèces.
€ Il apparaît à la même saison que le Dama. »
Le classement de cet insecte au nombre des Pseudolu-
canes porte à trois le nombre des espèces du genre qui
vivent dans lPAmérique septentrionale, savoir : Ps.
capreolus — Ps. placidus — Ps. mazama.
La liste des Pseudolucanes actuellement connus doit
donc être établie de la facon suivante :
Pseudolucanus Davidis — IH. Devyrolle. — Chine et
Thibet. :
— Atratus — Tiope. — Népaul et Sikkim.
= Oberthüri — L. Planet. — Thibet.
— Groulti — — — Inde.
— Mniszechi — — — Inde Or,
— Placidus — Say. — Amér. du Nord.
— Mazama — Lecomte. — New-Mexico.
— Capreolus — Linné (syn. dama Fabr.). —
Amér. du Nord.
— Barbarossa — Fabricius. — Portugal, Es-
pagne et Maroc.
L. PLANET.
UN CORBEAU SUR UN ARBRE PERCHE...
M. P. Des Gouttes a envoyé l’histoire suivante à la
Revue du T.C.S. : ï
« Vraiment, en bicyclette tout arrive. L'autre jour,
vers les cinq heures du matin, je pédalais allègrement
sur la route de Bonneville, aux environs du pont sur la
Menoge. La route est bonne à cet endroit, très ouverte
et dépourvue d’ombrage. I/air était frais, le temps su-
perbe, l'allure plutôt rapide. Je portais une petite cas-
quette à visière, sur le devant de laquelle était épinglé
l'insigne du T. C.S. Tout à coup, et sans qu'aucun bruit
révélateur soit venu m'avertir, je sens ma casquette
comme arrêtée par une branche; puis, avant que j'aie le
temps de me retourner, elle se soulève et me quitte... !
J'apercois alors un gros corbeau, mal intentionné vis-à-
vis d’elle, qui l'emporte sans vergogne. Au mouvement
que je fis, reconnaissant ses torts, il se hâta de la laisser
délicatement tomber dans la poussière de la route et dis-
parut sans autre excuse, Ebahi, me demandant si j'étais
éveillé et dans mon bon sens, je fis volte-face, mis pied
à terre pour reprendre mon bien, et, ayant constaté avec
satisfaction qu'il était intact, je continuai ma route en
songeant au malheureux sort qui eüt pu échoir à mon
innocente casquette, si son ravisseur n'eût été saisi à
temps d'un salutaire remords. Mais vous avouerez que,
sur une grande route, en plein jour, voir son chef être
pris pour cible par les oiseaux de l'air, ce n’est pas banal
pour un cycliste ! (Tribune cle Genève.)
BIBLIOGRAPHIE
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rische Hühlenfauna.
Zoolog. Anzeig., 8 Janv. 1900, pp. 1-6.
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torius (Ictis) nivalis, and some of its subspecies.
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of Aculeate Hymenoptera from the oriental zoological
Region.
Tiphia brevipennis, p. 11. — Myzile ceylonica, p.18. —
Agenia diana, p. 19. — Ceropales parva, p. 20. —
Tachytes interslilialis, p. 20. — T. ceylonica, p. 21. —
T. brevipennis, p. 22. — T. aurificus, p. 23. — T ma-
culilarsis, p. 24. — Nologonia Chapinani, p. 25. —
Larra fuscinerva, p. 26. — L. iridipennis, p. 26. —
L. longicornis, p. 21. — Cœlolarra appendiculala, p.29.
— Leplolarra flavinerva, p.30. — L. longilarsis, p. 31.
— L. reliculala, p. 31.— Spanolarra rufilarsis, p. 33.
— Cratolarra femorata, p. 3%. — Odontlolarra rufivens
tris, p. 36. — Scleriphron linealipes, p. 36. — Ampulex
pilosa, p. 31. — A. pulchriceps, p. 38. — Oxybelus
ceylonicus, p. 40.
Ann. Mag. Nal. Hisl. Janv. 1900, pp. 1-41.
Le Gérant: Pauz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17.
110
S'ADRESSER À LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes, RUE DU BAC, 46, PARIS
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vitis.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata.
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum.
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— dJlaricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
— Jlentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— craccæ.
— viciæ.
— flavipes.
— flavofemoratum.
— pisi.
— æneum.
— tenue.
— VOrax.
— violaceum.
— hæmatodes.
— pomonæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
ligustici.
LE NATURALISTE
ON DEMANDE PAR QUANTITÉ LES INSECTES CI-AÂPRES DÉSIGNES
(Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arietis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberea linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica olcracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Névroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hymèmoptères.
Vespa crabrc.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopæœus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— ribis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbiæ.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apiforme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
— viridipes.
Psylla pyri.
—* buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa.
Aphis rosæ.
— cerealis.
— fabæ.
— : pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tilic.
— salicis.
— persicæ.
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hæmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Sunulium ornatum.
— maculatum.
— reptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
Hæmatopota pluvialis,
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis,
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.,
— brassicæ,
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rostæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus olesæ.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis frit.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
tt A once
19
19
e ANNÉE
2 SÉRIE — N° 3 A7
15 MAT 1900
ALPHONSE MILNE-EDWARDS
Alphonse Milne-Edwards, le savant zoologiste,de répu-
tation universelle, est mort, dans la nuit du 20 au
21 avril, au Jardin des plantes, où il habitaiten sa qua-
lité de directeur du Muséum d'histoire naturelle de Paris.
Né à Paris en 1835, il fut poussé très rapidement par
son très illustre père, Henri Milne-Edwards,dans le gout
des sciences naturelles. Dès sa prime jeunesse, il était
grand collection -
neur, surtout d’ani-
maux fossiles, et,
quoi qu'on en dise,
c'est là une excel-
lente école pour un
futur naturaliste.
En 1860, à l’âge
de vingt-cinq ans
par conséquent, il
passe le doctorat en
médecine, qu'ilavait
préparé surtout en
vue de l'étude ap-
profondie de l’hom-
me.
En 1861 ,ilestreçu
docteur ès sciences.
L'annéesuivante,
il entre au Muséum
comme faide-natu-
raliste.
Bientôt après, 1l
est reçu à l’agréga-
tion de pharmacie
(1864) et, très rapi-
dement, devient
professeur titulaire
d'histoire naturelle
à l’École de phar-
macie de Paris,
chaire qu'il ne de-
vait plus quitter
qu’à sa mort.
Au Muséum, il ne
tarda pas non plus
à être adjoint à son
père comme direc-
teur du laboratoire … À
de zoologie dépen-
danten même temps
de l'École des Hau-
tes Études.
En 1876, il succéda à son père — nommé à la Sor-
bonne — dans la chaire de zoologie (Mammifères et
Oiseaux) du Muséum qu'il conserva jusqu'à la fin de sa
vie, ne se faisant suppléer que dans de très rares occa-
sions, Sa parole claire et sa vaste érudition y attiraient
un nombreux auditoire.
Milne-Edwards est nommé ensuite membre de l’'Aca-
démie des sciences (1879), membre de l'Académie de
médecine (1885) et directeur du Muséum d'histoire natu-
relle en 1892,
Le Nuturalisle, 46, rue du Bac, Paris.
ALPHONSE MILNE-ED WARDS, Directeur du Museum de Paris
Mort le 21 avril 1990
(Reproduction d’une photographie de Eugene Pirou)
Au physique, Alphonse Milne-Edwards avait une appa-
rence chétive. Petit, maigre, fluet, il portait une tête
osseuse, au front large et à la bouche volontaire. Toute
sa personne néanmoins trahissait une force de volonté peu
commune. Et c'est d'ulleurs là un des principaux traits
de son caractère, Quand il avait résolu quelque chose, il
y arrivait per fas et nefas. Aussi était-il pour ses élèves
l'idéal du profes -
seur. Ne füt-ce qu’à
ce point de vue, il
mériterait de passer
à la postérité, les
professeurs qui
« poussent » leurs
élèves ‘devenant de
plus en plus des
rara avis, Tous ses
élèves sont arrivés,
en effet, à d’excel-
lentes positions; il
est vrai qu'il savait
les choisir.
On a eu aussi un
exemple de sa téna-
cité dans sa belle
administration du
Muséum que —mal-
gré de maigres res-
sources — il réus-
sit à embellir, tant
au point de vue des
animaux vivants
que des collections
et des laboratoires.
Bien d’autres à sa
place auraient jeté
le manche après la
cognee.
C'est à lui aussi
que l’ôn doit les ad-
mirables campagnes
du « Travalleur »
et du « Talisman »
qui marquent une
époque dans Ja
science. zoologique,
En outre du mérite
qu'il à de les avoir
bien préparées, il
a celui de les avoir
conduites à bonne fin. Si l’on songe qu'il était très sujet
au mal de mer, — ce mal affreux qui anéantit les plus
braves, — on voit quel courage il lui à fallu pour les
accompagner d'un bout à l’autre,
Au point de vue scientifique, ses travaux sont consi-
dérables. Milne-Edwards s’est beaucoup occupé des
Mammifères, des Oiseaux, des Crustacés, portant son
attention aussi bien sur les espèces vivantes que sur les
espèces fossiles, Il s’intéressait beaucoup à la géographie
en général et à la géographie zoologique et coloniale en
112 LE
particulier : c'est lui qui a organisé cet « enseignement
des voyageurs naturalistes » qui à un si grand succés.
Parmi ses ouvrages les plus importants, il faut citer :
Recherches anatomiques et paléontologiques pour servir à
l'étude des Oiseaux fossiles de la France.
Recherches zoologiques, anatomiques et paléontologiques
sur la famille des Chevrotains.
Études pour servir à l'histoire de la faune mammalogique
de la Chine.
Histoire naturelle des Mammifères et des Oiseaux de
Madagasear (en coll. avec M. À. Grandidier).
Observations sur l’organisation des Limules.
Recherches sur la faune des régions australes.
Et un très grand nombre de notes parues dans les
Annales des sciences naturelles, les Archives du Muséum,
le Bulletin du Muséum, etc.
Veuf de très bonne heure, il w’avait pas d'enfants, et,
avec lui,s’éteint malheureusement le nom des Edwards.
Il avait reporté toute son affection — qui était grande,
malgré son apparence froide (comme cela a toujours
lieu) — sur ses neveux, qui ont heureusement été auto-
risés à ajouter le nom d’'Edwards à celui non moins
illustre de Dumas. Puissent-ils être comme leur oncle
aussi dévoués à la science!
Henri COUPIN.
L'HISTOIRE NATURELLE
DANS LES VÊTEMENTS DES PREMIERS HOWMES
Aujourd'hui encore les femmes sauvages de la Nou-
velle-Calédonie, les plus rebelles à la civilisation, portent
pour tout vêtement une ceinture en fibres de Bourao,
c'est-à-dire en feuilles de Pandanus desséchées, plus ou
moins réduites à leur partie filamenteuse, C’est une sorte
de jupe, un peu courte à nos yeux, avec nos idées sur la
pudeur, mais qui leur suflit parfaitement pour éloigner
les mouches. De plus, c'est un vêtement commode,
simple et pratique à la fois, qui ne coûte pas cher et qui
n'empêche pas de se baigner dans les ruisseaux qui inter-
rompent le chemin, le long du bord de la mer, Ces
feuilles desséchées ne craignent pas l’eau, etelles gagnent
à s’effilocher à l'usage, Ce n’est pas comme notre calicot,
qu'il faut sans cesse repriser où rapiécer, pour peu que
l’on s’en serve depuis quelque temps.
Si le jupon canaque est choquant aux yeux des nou-
veaux venus, ils n'ont rien à reprocher aux sauvages;
ceux-ci ne sont-ils pas chez eux? Ce n’est pas à nous,
qui avons envahi leur île, qu’il appartient de nous cho-
quer de leurs mœurs plus qu'il ne convient : chaque pays
a ses usages. D'ailleurs,ils acceptent avec empressement
les vêtements que nous leurs offrons, en échange de leur
travail.
Paix aux hommes de bonne volonté! dit l'Écriture., Les
Anglais pudibonds leur offrent des couvertures à bon
marché, c'est-à-dire d'une qualité inférieure, qui doit leur
donner une assez piètre idée de la civilisation dont nous
sommes si fiers. Les sauvages sont comme les enfants :
ils ont de bons yeux; d’un seul coup d’œil, ils voient
beaucoup de choses à la fois. On ne les trompe jamais,
ou du moins ce n’est pas pour longtemps.
\
NATURALISTE
Avant d'en arriver aux étoffes de lin ou de coton, les
premiers hommes ont donc pu tirer des végétaux bruts
les éléments de leur habillement. D'autant plus qu'une
feuille de bananier, de l'arbre du voyageur ou d'un stre-
lotzia suflit à envelopper un homme comme un sucre
d'orge. Le premier mouton, écorché pour servir de nour-
riture, a donné une toison précieuse, qui a formé tout de
suite un manteau imperméable à la pluie, ou un vêtement
souple et relativement très chaud.
L'idée de tisser la laine a dû venir à l'esprit des pre-
miers hommes en même temps que celle de tisser les
fibres de lin ou de chanvre. Les hommes et les femmes,
groupés autour du foyer, où ils faisaient cuire leurs ali-
ments au-dessus des braises incandescentes, ont dû
remarquer bien vite la possibilité de faire des corbeilles
avec des roseaux, des lianes, des tiges flexibles d'osier,
ou des feuilles résistantes comme celles des monocotylé-
donées (lin de la Nouvelle-Zélande, palmier, dattier,
pandanus) à fibres parallèles, pour conserver les mor-
ceaux de viande cuite, qu'ils ne pouvaient consommer
en un seul repas. Quant à fabriquer des fils de laine, rien
n'est plus simple, puisqu'il suffit d’arracher la laine
d'une peau de mouton et de la rouler entre les doigts
mouillés,en ajoutant toujours un peu de laine à la suite,
et en enroulant le fil ainsi formé autour d’un petit
bâton, de facon à en faire une pelotte : on a ainsi obtenu
le premier fuseau, Ce n'est que plus tard que le rouet
aura été inventé. Cet instrument a réalisé tout de suite
un immense progrès, car il permet de fabriquer, en
quelques minutes, autant de fil qu'on en obtenait autre-
fois en une journée de travail, et un fil beaucoup plus
régulier, sous tous les rapports. Tous les enfants de ma
génération ont connu les rouets; et plusieurs d’entre nous
se sont blessés au fuseau, en l’approchant de trop près
pendant sa rotation, On sait que les rouets de nos grand-
méres sont remplacés par les filatures, actionnées par
des inachines à vapeur. Au lieu d’un fuseau, une filature
ordinaire possède 30 à 40 mille broches! Elle fabrique
en un an, à elle seule, ce que cent peuples divers n’au-
raient pas produit peut-être en un siècle! Ainsi vale
progrès : où s’arrétera-t{-il ?
Le poil de chameau a servi, de tout temps, à faire des
câbles, des cordes à puits, des longes et des traits pour
les animaux. De là le jeu de mots connu, à propos de
câble et de chameau, qui se disent tous les deux Camélos
en grec: Il est plus difficile à un chameau (câble) de
passer par le trou d’une aiguille, qu'à un riche d’entrer
dans le royaume du Ciel! Pourquoi chameau plutôt
qu'un bœuf? C’est qu'il s’agit d’un câble en poils de cha-
meau; c'est la partie prise pour le tout, par les traduc-
teurs du texte grec.
La Bible nous donne des renseignements précis sur le
costume sacerdotal du grand prêtre Aaron. On voit que
déjà, même au temps de Moïse, on savait fabriquer de
somptueuses étotfes. Les tissus indiqués sont : le lin, la
pourpre, l’écarlate et l'hyacinthe. Ces derniers tissus
sont indiqués uniquement par leur couleur; mais il est
évident qu'il s’agit ici de tissus différents de lin, et très
probablement d'étoffes de laine, et peut-être même de
coton. N'y aurait-il pas aussi de la soie? Sur un caleçon
de lin, il y avait une grande tunique de même tissu, sorte
de chemise de toile, avec une robe d'hyacinthe, et une
ceinture décorée de broderies d'or pur.
En outre, sur la robe, il y avait en arrière une sorte de
pèlerine, l'éphod, qui se reliait en avant avec le rational.
LE NATURALISTE 113
Le rational était un riche tissu carré, étalé sur la poi-
trine, de À palme, c’est-à-dire 20 centimètres environ de
côté, tant en hauteur qu'en largeur. Des anneaux d’or de
chaque côté, sur les bords de l’'éphod et du rational, réu-
nissaient ces deux parties du vêtement sacerdotal, à
l'aide de chaines d’or terminées par une agrafe et à l'aide
d'un ruban d'hyacinthe dans le bas. Le rational formait
ainsi un ample rabat, composé d'or, d'hyacinthe, de
pourpre, d'écarlate deux fois teinte et de fin lin retors,
mêlés ensemble, tissus en fils de différentes couleurs. En
outre, douze pierres précieuses différentes portaient
gravés les noms des douze tribus d'Israël :
Sardoine, topaze, émeraude,
escarboucle, saphir, jaspe, li-
gure, agathe, améthyste, chry-
solithe, onyx, béryl.
Ruben, Siméon, Dan, Juda,
Nephtali, Gad, Azer, Issachar,
Zabulon, Ephraim, Manasses,
Benjamin.
La tunique ou robe, de couleur hyacinthe, était percée
d'une ouverture pour le cou, garnie d’un riche liseré
brodé, Le bas de cette robe pontificale était garni de
grenades et de clochettes d'or, alternativement placées,
Les grenades étaient des houppes d'hyacinthe, de pourpre
et d’écarlate. Les clochettes résonnaient ensemble, à
chacun des mouvements que faisait l’officiant : ce qui
donnait à sa démarche quelque chose de tout spécial.
Enfin une tiare recouvrait sa tête. Un ruban d'hyacinthe
retenait à la tiare une lame d’or, qui recouvrait le front
de l’officiant ; sur cette lame était écrit :
« La sainteté est au Seigneur. »
On voit que, même du temps de Moïse, on savait faire
de riches costumes, avec de riches étoffes provenant des
produits du sol : bêtes, plantes et pierres ou métaux.
Dr BouGox.
PHOTOGRAPHIE SYMPATHIQUE
L'usage des encres sympathiques — amusement du
jeune âge — constitue les premières notions pratiques
de la chimie auxquelles se livre volontiers le collégien.
L’amateur photographe, encore tout vibrant de l’enthou-
siasme du néophyte, sera peut-être bien aise de savoir
que la photographie, elle aussi, peut donner lieu aux
mèmes phénomènes, et qu'une image apparait ou dispa-
rait sur une feuille de papier selon les circonstances où
elle est placée.
Faites une solution de gélatine à 3 ou 4 0/0, tiède, et
plongez-y une feuille de papier non collé. Au bout de
quelques minutes retirez-la et faites-la sécher.
D'un autre côté, préparez un bain de bichromate de
potasse à 4 ou 5 0/0, et faites-y flotter votre feuille de
papier gélatinée, en ayant bien soin qu’elle n'y soit pas
immergée, Faites sécher le papier dans l'obscurité, car
dès maintenant il est sensible à la lumière.
Ce papier étant sec, exposez-le sous un cliché négatif :
l’image se reproduira en jaune brun, et toutes les parties
colorées sont devenues insolubles dans l’eau.
Lavez d'abord l'épreuve dans l’eau froide, pour élimi-
ner le bichromate de potasse non impressionné par la
lumière: et puis dans l’eau chaude, pour dissoudre la
gélatine qui ne forme aucune partie de l'image. Quant à
celle-ci, elle apparait toujours en jaune brun.
Mais trempez le papier dans un bain d'acide sulfureux,
et il se décolore immédiatement, et, une fois sec, vous
le voyez absolument tel qu'il était avant ces opérations
successives, c'est-à-dire vierge de toute maculature, de
toute trace d'image.
Si maintenant vous le trempez dans l’eau, toutes les
parties qui n'ont pas été tannées par la gélatine insolubi-
lisée sous l'action de la lumière s’imprègnent de liquide,
le boivent, et prennent une couleur foncée, tandis que
l'image apparaît en blanc. Elle disparait quand le papie:
est sec.
A, DuMmASs.
REMPDES POPULAIRES DE NORMANDIE
Dans un récent numéro du Naturaliste (1), le Dr Félix
Regnault entretenait les lecteurs des Remèdes ignobles
encore usités aujourd'hui. Je me permettrai de com-
pléter son fort intéressant travail par l'énumération des
remèdes suivants journellement employés en Normandie,
et tout aussi ignobles :
La fiente de chat infusée dans du vin blanc sert comme
fébrifuge.
En lavant les seins d’une nouvelle accouchée avec
l'urine d’un jeune homme, on accélère la venue du lait.
L'urine d'un enfant a la même ellicacité.
L'urine de génisse guérit la phtisie,
Pour éviter les suites d’une chute, il faut couper la
queue d’un matou noir, dont on suce le sang. La fiente
du même animal mêlée à du poivre fortifie |
Un verre d'urine pris à jeun prévient la paralysie.
La fiente de poule, la plus blanche que l'on puisse
trouver, joue un rôle actif dans les cas de rage.
La matière fécale, ainsi que l'indique le D' Regnault,
est appliquée en cataplasme pour les maux de doigts et
la bouse de vache pour les dartres. Je l'ai vu également
maintes fois employer pour guérir les plaies survenues
aux chevaux à la suite d’une « {tombe » (chute).
Est-ce assez dégotûtant et répugnant ! Mais je continue.
La punaise écrasée sur du pain guérit de la punaisie
(ozène).
« Soulfrez-vous de la fièvre? Posez-vous donc une
araignée sur la poitrine, Car l'araignée mange la fièvre,
ou si vous préférez, prenez un crapaud vivant, dans son
trou, avant le lever du soleil, mettez-le entre deux linges,
le tout appliqué sur le bras jusqu'au premier frisson :
« C’est ça qui coupe la fièvre! » disent les braves gens. II
y à encore un autre procédé : n’en faut-il pas pour tous
les goûts? — Demandez un gquérisseu : quand il sera venu,
vous le verrez couper en rond une taille de pain, mordre
tout autour et faire manger ce qui reste au malade (2). »
J'ai vu à Rouen un enfant, qui, me disait-on, avait
des vers, entouré de centaines de lombrics, qui grouil-
lent autour de lui dans son lit. — Tout le monde con-
naît le pigeon vivant ouvert et posé sur la tête de l'enfant
atteint de méningite.
La jaunisse la plus rebelle disparait lorsque le patient
se frotte tous les soirs, sous les aisselles, avec deux œufs
(1) 2° série, n° 315, 15 avril 1900.
(2) En. Srauxowski. Paysages el paysans normands, 1 vol.
114
cuits dans du vinaigre, ou bien en urinant neuf jours de
suite sur une fourmilière, ou encore en trempant des
boules de gui dans l’üurine d’un petit enfant mâle et en
les posant sur le haut de la tête.
Trois, sept ou neuf poux du corps ont la même eflica-
cité. Les jeunes flles,pour se délivrer de la même maladie,
doivent pisser chaque jour sur une touffe de plantain,
jusqu’à ce que la plante périsse.
Ailleurs, on fait manger des souris au” enfants pour
les sauver de la coqueluche.
Enfin, pour la fièvre typhoïde, le paysan normand
met aux pieds du malade un morceau de foie de veau
qu'il laisse ainsi jusqu’à ce que la puanteur rende le
séjour de la chambre inhabitable.
Mais je n’en finirais pas s'il me fallait tout rapporter,
D'ailleurs, le lecteur jugera facilement, par ce que je
viens de raconter, que la médecine officielle a beaucoup
à faire encore pour détrôner les empiriques qui font
admettre, parmi le peuple des campagnes, des remèdes
aussi néfastes que répugnants et stupides.
Dr ED. SPALIKOWSKI.
SUR
l'Origine du Diluvium de la Seine
CONCLUE DE L'EXAMEN
DE SA STRUCTURE INTIME
Le grand problème du creusement des vallées, bien
plus fertile en conséquences générales qu’on ne l'aurait
supposé a priori, continue de s'éclairer et de se simpli-
fier en même temps, à mesure que la considération des
causes actuelles s'applique plus intimement à son étude;
et dans cette direction, on me permettra de considérer
comme un pas qui peut être décisif, en ce quitouchela con-
ception du rôle des rivières dans la sculpture de la croûte
terrestre, une série d'observations que je désire résumerici
très rapidement. Ce progrès consiste en notions retirées
d'un examen plus détaillé qu'on n'avait cru utile de le
faire de la structure intime du diluvium et que l’on
pourrait qualifier d’histologique.
Beaucoup d'auteurs ont parlé de cette structure, mais
il semble que très peu d’entre eux l’aient examinée de
près, pas plus d'ailleurs que la composition lithologique
de trainées caillouteuses dont on ne donne une idée
exacte dans aucun livre. Ceux-ci, en effet, répètent indé-
finiment une liste de roches extraites naguère du dilu-
vium par M. Roujou, dans laquelle il manque, on peut
le dire, précisément le point essentiel. Ce n'est pas, en
effet, le silex qui est l'élément dominant dans les graviers
de la Seine, c’est le calcaire. L'analyse donne souvent
plus de 60 % de calcaire contre 40 % de tous les autres
éléments réunis, silex, quartz, porphyre, granit et autres
roches cristallisées. M. Roujou mentionne comme très
rare un calcaire blanc saccharoïde de provenance indé-
terminée et on ne peut douter qu'il n'ait considéré, sur
leur seule apparence, comme étant du silex, tous les
graviers calcaires gris qui sont si abondants.
Pour la structure, la preuve qu'elle est mal connue
LE NATURALISTE
ressort des expressions mêmes dont les auteurs se sont
servis pour la décrire. Suivant les uns, le diluvium est
«une accumulation pêle mêle de matériaux de toutes
grosseurs, de toutes natures et de toutes provenances » ;
pour d'autres, c'est «un dépôt à allure essentiellement
torrentielle ». Il y en a qui dénient au diluvium toute
stratification, c’est-à-dire toute disposition par lits
superposés, et d’autres quile comparent aux débris accu-
mulés dans le chenal d'un égout après le passage des
eaux de chasse, Aussi n'est-ce pas tout de suite qu’on se
dit qu'il y a peut-être lieu de chercher à reconnaitre
quelques lois dans l'agencement des limons, des sables,
des graviers et des galets diluviens.
Quand cependant on s’est appliqué à cette nouvelle
étude, on est véritablement émerveillé d’un résultat
diamétralement opposé à celui qu'il semblait si inévi-
table de rencontrer, On trouve que le diluvium est
pourvu d’une structure dont la délicatesse est admirable
et dans laquelle la situation de toute particule est déter-
minée par des conditions dynamiques strictement définies
dans chaque point,
Tout d'abord, il faut remarquer que dans la très
grande majorité des grévières des environs de Paris et de la
vallée de la Seine, la masse du diluvium exploité se
divise en trois horizons superposés. Le plus inférieur
est composé de blocs et de gros galets dont le volume a
tout naturellement suscité l’idée d'en rattacher le dépôt
à des agents énergiques de transport. Le deuxième hori-
zon est formé des sables, des graviers et des galets, à peu
près ou même parfois tout à fait dépourvu de limon ; c’est
un terrain admirablement lavé et débarrassé des particules
très fines. L'horizon supérieur, au contraire, montre une
proportion d'argile plus ou moins considérable.
Or, cette différence s'explique très simplement par
l'observation des conditions diverses des différents points
d'une même vallée, Tandis que dans certains points le
cours d’eau déplace des matériaux, dans d’autres points
voisins des premiers les matériaux exondés sont soumis
à la réaction des eaux d'infiltration qui en s'y insinuant
introduit dans les profondeurs les limons d’origine at-
mosphérique en même temps qu'elle modifie plus ou
moins la structure primitive. En outre, le déplacement
des eaux sauvages, et surtout les épanchements des
inondations, en constituant par colmatage une portion
de la terre végétale, bien liée, comme on voit, au fait
même du creusement de la vallée, ce déplacement
constitue au-dessus du dépôt réellement fluviaire un
revêtement qui avec le temps peut acquérir une épais-
seur notable. Le point à retenir, c'est qu'il peut tou-
jours se constituer, à un même moment, dans le fond
d'une vallée deux catégories de dépôts : les sables char-
riés et déposés dans le lit fluviaire aux endroits d’eau
vive et les limons épanchés dans les régions d’eau morte
et dans les terres inondées en dehors du lit. Dans les
points de la vallée que le déplàcement des méandres a
laissés intacts depuis longtemps, le terrain de colmatage
peut devenir très important. Il s’épaissit à chaque inon-
dation, rappelant l'allure des alluvions actuelles de la
vallée du Nil, en dehors du lit, et dans lequel des nappes
entières de sable et même de galets sont apportées par le
déplacements des glaces d'hiver.
L'horizon moyen du diluvium, celui que nous pou-
vons regarder comme franchement fluviaire — la portion,
en un mot, dont l'exploitation est profitable, présente
dans des carrières très diverses, appartenant aux diffé-
1
|
»
LE NATURALISTE
115
rents niveaux distingués par les géologues, une structure
singulière à première vue.
Cette portion est formée d’espèces de lentilles ou
d'amandes sableuses enchevêtrées les unes dans les
autres d’une façon parfois très compliquée. Dans cha-
cune de ces amandes les éléments sableux sont disposés
eu lits parfaitement réguliers, plus ou moinsobliques, peu
ou presque horizontaux et toujours nettement parallèles
les uns aux autres, La dimension des lentilles, comme
l’inclinaison de leurs lits constitutifs varient beaucoup
d’un point à un autre et quelques-unes sont si aplaties
qu'elles figurent des couches proprement dites, mais la
structure générale en est la même sur tous les points des
carrières, quelle que soit leur orientation par rapport à la
direction de la vallée; de façon que l'inclinaison des lits
dont nous parlons est elle-même variable non seulement
par sa valeur angulaire, mais par son orientation. Par-
fois, dans le sens même de la vallée, le plongement peut
être en des points très voisins (soit à côté, soit sur la
même verticale) transversal — et aussi bien de droite à
gauche que de gauche à droite. Mais le point essentiel à
souligner, c’est que cette variabilité s'associe à une
régularité absolue et à une délicatesse extrême de struc-
ture.
Dans chaque lentille, les petits lite constitutifs
se poursuivent parfois sur des longueurs de plusieurs
mètres, se distinguant les uns des autres par de très
faibles variations dans la grosseur de leurs grains, de
telle sorte qu’on les compare tout naturellement aux lits
sableux composant les dunes. Le mécanisme de produc-
tion est le même dans les deux cas et la seule différence
est que le transport réalisé par le vent dans les dunes
est accompli par le courant d’eau dans les rivières.
Mais si la structure de chaque lentille est aisée à
expliquer, il semble en être tout autrement de celle du
terrain tout entier formé, comme on l’a dit, de lentilles
enchevêtrées ; et ici la comparaison avec les dunes ne
semble pas pouvoir nous procurer d'éclaircissement.
C’est seulement en se mettant à l’école de l'observation
des phénomènes actuels qu'on le trouve, et sa décou-
verte justifie tellement la légitimité de la doctrine ac-
tualiste, qu'on en arrive à poser en fait qu'il suffit
d'analyser l’histologie du diluvium franc pour en tirer
la démonstration complète du processus progressif et
lent du creusement tout entier de la vallée.
Voilà qui mérite d’être développé en quelques mots.
Le résultat de l’étude du diluvium se résume en ceci
qu'il représente une série très longue de remaniements
successifs, opérés dans les mêmes points par le même
cours d’eau animé suivant les moments d’une vitesse
très inégale, La cause de cette variation de vitesse sur
un même point s'explique d'ailleurs tout de suite par
l'observation contemporaine des variations de volume des
cours d’eau d’un jour à l’autre, et surtout elle résulte tout
entière de la faculté présentée par les rivières de déplacer
horizontalement leurs méandres. Il en résulte que, la
rivière se déplacant, les choses se passent comme si le
point considéré changeait de place par rapport aux
berges du cours d’eau, supposé fixe dans sa situation, Et
c’est pour rendre cette explication aussi claire que pos-
sible que nous mettons sous les yeux des lecteurs du
Naturaliste la figure jointe à cet article. Cette figure, qui
a été dessinée d’après des documents précis et spéciale-
ment d’après des photographies qu'a bien voulu prendre
pour moi,dans nos grévières, un observateur très distingué,
M. A. Dollot, correspondant du Muséum, permet véri-
tablement de suivre pas à pas l’évolution du diluvium dans
un point convenablement choisi. Par exemple, ce point,
d'abord supposé dans une anse convexe, siège d’un
alluvionnement en petits lits plus ou moins horizontaux
représenté sous le n° 1 dans la figure I, pourra être plus
tard au milieu du lit de la rivière, et alors soumis à une
érosion qui lui reprendra une partie plus ou moins con-
sidérable des dépôts précédemment accumulés, On voit
cet état réalisé dans la figure II. La forme courbe de
cette érosion, extrêmement remarquable, témoigne élo-
quemment de l'extrême délicatesse du travail dont elle
est le produit, et que prouve aussi l'observation fré-
quemment répétée à sa surface d’un lit plus ou moins
continu de graviers ou de galets représentant des maté-
rlaux trop pesants pour que le courant dénudateur ait pu
les emporter. Je répète qu'on est émerveillé, et cela dans
toute l'épaisseur du diluvium de la Seine, de la précision
des séparations réalisées successivement par les courants
d’eau.
Quoi qu'il en soit, le déplacement horizontal du fleuve
continuant, et, avec lui, le dép lacement des filets d’eau
animés de diverses vitesses, le point considéré à pu se
trouver en rapport avec de l’eau qui, loin de continuer
l'œuvre d’érosion, à au contraire apporté des maté-
riaux de sédimentation : c’est toujours péniblement, pour
ainsi dire, à bout de forces, car autrement les particules
iraient plus loin. Alors la surface courbe dont nous
venons de voir le mode de production est devenue la base
d'appui d’un système de petits lits qui n’ont aucun lien
de direction nécessaire avec celle des petits lits de l’ori-
gine. Cette fois ils peuvent être obliques, et c’est ce que
montre leur massif marqué du chiffre 2 dans la fig. III
où on les voit en discordance sur ce qui reste du dépôt 1.
Leur obliquité varierait dailleurs avec la direction de
la coupe; dans un certain sens ils pourraient être hori-
zontaux, de même qu'à la rigueur les lits du dépôt n° 1
pourraient être obliques suivant une orientation conve-
nable. Ici encore chaque feuillet de l’ensemble traduit
par la grosseur de son grain l'énergie mécanique de l’eau
qui l’a engendré,
Mais les vicissitudes locales continuant toujours au fur
et à mesure des modifications de forme du fleuve lui-
même, des érosions viennent de nouveau attaquer le
fond, mordant sur le dépôt à la production duquel nous
venons d'assister et parfois même jusqu'à celui qui le
supporte et qui de nouveau peut perdre une partie de sa
substance. La figure IV est relative à l’effet d’une
dénudatiôn survenant à ce moment, Tous les sédiments
fluviatiles pourraient ainsi disparaitre dans le point con-
sidéré, mais il arrive fréquemment qu'une portion sub-
siste et alors, par le retour de conditions convenables, une
nouvelle sédimentation se produira ; ce sera le dépôt n°3
de lafig. V, en lits inclinés tout autrement que ceux du
dépôt ne 2, Et cette sédimentation pourra "lus tard être
dénudée, comme le montre la fig. VI dont l’analogie avec
la fig. IT paraît assez caractérisée pour souligner le retour
de conditions identiques avec un fond autrement cons-
titué parce qu'il garde la trace de plusieurs phénomènes
successifs.
Nous pourrions arrêter là cette énumération de réac-
tions alternatives si nous ne pensions utile de montrer par
leur continuation comment une coupe réelle, visible à
Petit-Créteil (Seine), a pris ses caractères résumés dans
notre fig. XII. Il faut pour cela, à la suite de la disposi-
116 LE NATURALISTE
tion de Ja fig. VI, admettre la sédimentation représentée
fig. VII et qui concerne un dépôt n° # en lits inclinés à
peu près comme ceux du dépôt n° 2et sensiblement
inverses de ceux du dépôt n° 3. On y voit que, sans
l’intercalation de ce dernier, la ressemblance serait si
grande entre l'allure de celle de 2 et de celle de # qu'on
pourrait à première vue y supposer une seule formation.
Cependant, avec de l'attention, on retrouverait la ligne
d’érosion de la fig. VI jalonnée par des graviers résidus
de lavage et dont la présence a déjà été expliquée.
Le dépôt n°4 a d'ailleurs été érodé à son tour,comme le
fait voir la fig. VIII, et plus tard le dépôt n° 5 est venu
circonscrire une vraie lentille en amande résiduelle du
dépôtino 3. D'ailleurs, la dénudation réprésentée fig. X a
été suivie du dépôt n°6 qui a complété la structure lenti-
culaire si singulière de nos balastières.
Comme on le voit, cette disposition « entrelacée » du
diluvium franc, loin de supposer, comme Belgrand le
voulait, l'intervention d'agents très violents, serait évi-
demment toute brouillée par un semblable régime.
Comme on serait disposé à ne pas croire facilement
qu'un observateur ayant fait du terrain diluvien l’objet
principal de ses études ait pu formuler une semblable
opinion, on trouvera bon que j'y insiste un instant.
A la page 106 de son ouvrage sur La Seine, l'auteur,
constatant l'existence de lentilles sableuses dans ja ba-
lastière Tarsieux, à Levallois, ajoute : « Ces bancs sont
disposés en amandes; ils ont donc été amenés en masse
et dans une seule crue par des eaux qui tourbillonnaient
autour d'un axe vertical. » Un peu plus loin il ajoute que
« cette coupe fait voir que le point du lit du fleuve était
le centre d’un tourbillonnement lorsque se sont déposés
les amas de sable et de gravier », Du reste, Belgrand
parle à beaucoup de reprises (par exemple, p. 244) de vio-
lents tourbillons qui, en même temps, auraient affouillé
_le sol et déposé des sables limoneux. Il y a là une asser-
tion qui semble essentiellement contraire à l'observation
journalière : si un courant dénude, il ne sédimente pas
au même point, sauf en laissant sur place, comme nous
l'avons déjà vu, des résidus d'érosion. Il y a vraiment
contradiction entre la soustraction de matériaux relati-
vement grossiers et l'apport de matériaux plus fins. A
chaque instant et dans chaque point, la grosseur maxima
des grains arrachés par le courant érosif est rigoureuse-
ment réglée par la vitesse de l’eau, De même, en chaque
point de sédimentation, le volume des grains déposés est
exactement déterminé : il n'y a dans ces actions aucune
latitude, aucune fantaisie.
Pour nous, répétons-le, ia disposition lenticulaire du
diluvium témoigne d’une allure essentiellement tran-
quille, quoique constamment changeante, C’est exacte-
ment lallure qui existe dans le lit de toutes les rivières
actuelles, et il est facile de le constater, en temps de
basses eaux, dans des localités convenablement choisies.
Les petits lits inclinés se voient parfaitement dans les
excavations faites pour recueillir le sable actuel et j’en
ai relevé, par exemple, dans le lit de l'Allier, aux environs
de Coudes (Puy-de-Dôme), de tout à fait identiques à
ceux du diluvium.
Pour ce qui est des blocs relativement gros qui sont
parfois associés à la masse du diluvium franc, il n'y a
aucun doute qu'ils n'aient été apportés autrement que
par l’eau courante agissant seule, comme dans le cas
précédent.
Parfois ils sont des résidus, restés à peu près sur
place, de la dénudation subie par le sol sous l'influence
des divers agents de dégradation. Fréquemment aussi,
ils ont été transportés, ainsi qu’on l’a remarqué bien
des fois, par des glaces flottantes, et nous pouvons
observer le phénomène tous les hivers, chaque fois que la
rivière charrie, suivant l'expression vulgaire. Mais des
radeaux naturels constitués par les arbres arrachés des
rives avec leurs racines sont également des agents de
transport, sans parler des hommes qui, depuis le com-
mencement des temps quaternaires, ont dû jeter bien des
pierres dans la rivière, comme ils continuent de le faire
aujourd’hui.
Ce qui frappe, c’est la situation de ces blocs volumineux
par rapport aux autres éléments du diluvium et J'ai à cet
égard des documents photographiques indiscutables. Or-
dinairement, ils sont placés sur des ensembles delits min-
ces, horizontaux ou obliques, quin’ontpas été notablement
modifiés par eux, et cela encore est essentiellement diffé-
rent de l’état des choses dans les torrents, où les gros blocs
sonttoujours à la tête de trainées de matériaux plus fins,
ainsi qu'on peutle constater danslesravins des montagnes:
disposition qui s'explique d'elle-même, puisque les blocs
ont nécessairement constitué des obstacles au voisinage
desquels l'allure de l’eau rapide a été toute particulière.
La présence des gros blocs dans nos grévières conduit
d’ailleurs à faire une remarque sur la structure des ré-
sions inférieures des amas de diluvium de la Seine sur
lesquelles Belgrand à émis une opinion Si insoutenable.
Cet auteur constate que les gros galets, les blocs volumi-
neux de toutes natures, sont volontiers concentrés dans
le « gravier de fond », et il en tire des conséquences au
point de vue d’un prétendu régime spécial de l’eau au
début du remplissage de la vallée, remplissage qu'il
semble toujours porté à comparer à l’engorgement d'un
égout préalablement creusé. Frappé de l'abondance des
silex taillés de main d'homme dans cette zone, il arrive
à formuler (La Seine, p. 154) la supposition de deux dé-
luges successifs : « En effet, ajoute-t-1l, les eaux courantes
ne rassemblent jamais les objets lourds de même origine,
elles les dispersent ; les objets légers, ceux qui flottent
sur l’eau, peuvent atterrir en abondance à certains points
favorables, mais ceux qui sont entraînés en roulant au
fond avec les graviers sont dispersés comme les graviers
eux-mêmes. »
Sans discuter ces assertions, dont il serait très facile
de montrer l’inexactitude, nous réemarquerons que bien
évidemment ces régions macrolithiques du diluvium de
la Seine représentent les résidus progressivement accu-
mulés de la dénudation successive dont nous indiquions
tout à l'heure les différentes étapes. Petit à petit les par-
ties relativement fines sont emportées et les fragments
plus pesants subsistent de plus en plus seuls, Les progrès
de ce lavage expliquent la liaison si intime que tout le
monde a constatée entre les «graviers de fond » et le dilu-
vium franc ou «sables gras ». Ces mêmes progrès mani-
festent en même temps la tendance à la concentration
dans les plus bas niveaux de tout ce qui est lourd, galets,
éclats de roche, haches de pierres, gros ossements, ete.
Chaque érosion du dépôt déjà fait et qui détermine la
forme inférieure d’une lentille future peut laisser comme
trop pesants de certains matériaux et c’est pour cela que
nous avons vu des surfaces d’érosion ainsi revêtues d’une
nappe de galets. Dans les cas où le dépôt a été raviné
totalement, les galets seuls peuvent subsister sur le fond.
Dans aucun cas, à aucune époque, le courant de la
ete) VA RERA CO e067 S'EQII | EE VA AE AT mt |
PA ES EN CAPE MS PER, OR US PAPE TL CA | UPS
LE NATURALISTE 117
Seine ne semble avoir pu charrier, comme le pensait
Belgrand, les gros éléments du diluvium,
Dans les coupes offertes à notre examen par les balas-
tières, on constate que les zones qui viennent d'être
décrites sont surmontées d’une épaisseur plus ou moins
En tout cas, ces lits supérieurs ont pour nous un inté-
rêt très spécial, car ils constituent au propre la terre
végétale des plaines d'alluvion et il est fort utile de
préciser leur mode de formation, À cet égard, il importe
de remarquer que les portions limoneuses, quoique cail-
|
NS
SSE
SKA
a —
Coupes permettant de suivre l’évolution qui à amené la constitution des amas de diluvium de la Seine.
‘ Elles ont été faites d'après des photographies et des relevés sur le terrain. |
grande de sables et de graviers qui passent par en haut à
des limons sableux ou même caillouteux :1ils constituent
la zone numérotée 7 dans notre figure XII. Belgrand
leur a donné le nom de « sables de débordement », qui
peut leur convenir, quoique le mécanisme du déborde-
ment soit loin de coincider exactement avec celui que
- l’auteur suppose.
louteuses, que recouvre la terre arable se soudent par
en bas d’une façon intime avec du diluvium dépourvu
de la structure amygdaloïde et qui semble déjà indiquer
un régime différent de celui qui a présidé à l’accumula-
tion de notre « diluvium franc ».
Il est facile de s'expliquer cette circonstance en se
reportant par la pensée au voisinage du fleuve, sur la
118 LE NATURALISTE
berge convexe d’un méandre en voie de déplacement.
Les sables viennent s’y déposer de plus en plus fins à
mesure que la ligne de grande vitesse s'éloigne et les
limons s’y mélangent bientôt, constituant une avancée
progressive de la terre ferme qu'entoure la boucle de la
riviere. Celle-ci n’a pas renoncé encore à la venir sub-
merger de temps en temps. À chaque inondation elle s’y
épand, mais presque sans vitesse et seulement capable,
bien loin de l’éroder, d'y déposer de fines particules limo-
neuses : c'est le « terrain de colmatage » qui vient se su-
perposer à la nappe de sable diluvien, correspondant au
dernier régime de berge convexe,
Cette nappe de colmatage est loin d'être homogène ;
elle contient, et parfois en abondance, des sables, des
galets et même des blocs de roche plus où moins volumi-
neux. Mais cette particularité s'explique d'elle-même par
le rôle des glaces flottantes et il suffit,par exemple,d’avoir
visité la plaine d'Alfort dans des conditions convenables,
c'est-à-dire lors des inondations d'hiver, pour y avoir
observé, au moment du dégel, des plaques de glace pares-
seusement charriées dans tous les sens et éparpillant,
sur tout le fond inondé,de la boue, des sables, des pier-
railles de toutes natures qui s’incorporent bientôt dans
le sol, Alors que les travaux d’endiguement et de régu-
lation des lits n'entravaient point, comme aujourd'hui,
le phénomène, il devait se développer sur une échelle
considérable qui explique bien la constitution constatée
de l’alluvion.
En somme, on voit d'après ce qui précède que le dilu-
vium de la Seine se divise de lui-même en trois niveaux
superposés qui ont été reconnus par tous les observateurs,
mais qui, Contrairement à l'opinion que ceux-ci ont
généralement défendue, ne supposent quant à leur ori-
gine aucune condition qui ne soit actuellement réalisée,
Chacun des types continue à se produire sous nos yeux :
les graviers de fond dans les régions d’érosion active au
milieu du lit où le lavage successif des matériaux à été
poussé jusqu’à l'isolement des éléments les plus gros et
les plus pesants ; les « amandes » sableuses, limoneuses ou
callouteuses dans les divers points du lit à circulation
active; les nappes limoneuses, arénifères supérieures,
hors du lit, dans les régions accessibles aux inondations.
Ces dernières, à la faveur du déplacement des méan-
dres, peuvent, du reste, être destinées à subir les sépara-
tions de particules qui les réduiront à l’état de dépôts
francs décrits plus haut qui eux-mêmes passent peu à peu
à la condition de graviers de fond. Et l’on peut résumer
toute cette série de transformation en constatant que le
dépôt du diluvium s’est poursuivi sans interruption, avec
la même allure,pendant tout le temps du creusement de
la vallée, durant lequel il n’y a nulle part la place pour
un phénomène étranger à une lente évolution. D'un côté
nous retrouvons la même structure avec les mêmes di-
mensions, en largeur comme en épaisseur, des masses
constituantes dans le diluvium des hauts niveaux comme
au Kremlin, Gentilly, dans celui des bas niveaux comme
au Petit Créteil, et dans les dépôts actuels de la rivière ;
—et d’un autre côté nous constatons la liaison intime des
divers niveaux superposés dans la formation diluvienne,
A ce dernier égard, Belgrand (p. 108) remarque, à pro-
pos d’une sablière de Grenelle, que les zones de sable
fin, de gravier et de gros cailloux y alternent du haut en
bas de la carrière et il ajoute qu’ « il est absolument
impossible d'établir stratigraphiquemient la limite du
gravier de fond et de l’alluvion, limite qui, il faut bien
le dire, est presque toujours incertaine dans les sablières
de Paris ».
En somme, il y a dans toute cette intéressante his-
toire une simplicité etune continuité qui contrastentsin-
gulièrement avec la première conclusion d'observations
trop hâtives.Là où tout d’abord on ne voyait que des té-
moignages de courants monstrueux par leur volume et
par leur violence, nous ne trouvons au contraire que la
preuve de la longue persistance du régime encore en vi-
gueur sous nos yeux. À notre sens, l'analyse attentive
de la structure intime du diluvium suflit à elle seule et
sans le secours d'aucune autre considération pour faire
repousser toutes les hypothèses diluviennes successive-
ment présentées, même avec les modifications par les-
quelles depuis Belgrand on à essayé tant de fois de les
amender. L'histoire de la sédimentation fluviaire est une
de celles où la légitimité de la doctrine actualiste appa-
rait avec le plus d’évidence.
Stanislas MEUNIER.
HISTOIRE NATURELLE
de l’Exapate duratella v. Heyd.
(MICROLÉPIDOPTÈRE)
J'ai dit, dans mon article sur les «Mélèzes roussis » de
la vallée de la Romanche {voir le Naturaliste du 15 sep-
tembre 1899), que la chenille de l’Exapate duratella v.
Heyd., espèce considérée jusqu'à présent comme très
rare, avait contribué, dans une très large part, aux dom-
mages qu'avaient subis ces arbres en juillet dernier.
Avant done pu observer attentivement ce microlépi-
doptère et le suivre dans toute son évolution, je suis à
même maintenant de faire l'historique complet de ses
premiers états; mais, auparavant, je crois utile de parler
du papillon lui-même, car la description en a été donnée
dans une publication entomologique suisse, malheureu-
sement fort peu répandue.
1° Papillon. — Ce qui caractérise cette espèce d'Exa-
pate et la différencie à première vue de sa congénère,
Ex. congelatella CI., c'est la forme de ses ailes supérieures,
un peu étroites, allongées, quelle que soit la taille des
sujets, et leur couleur blanchâtre, tandis que l'Ex. conge-
latella à les ailes plus larges, plus arrondies; sa cou-
leur est d'un cendré rougeûtre et sa taille est générale-
ment plus petite.
L'Exap. duratella est de taille variable : 48 à 25 milli-
mètres d'envergure. Ses ailes supérieures sont d’un blan-
châtre plus ou moins assombri par des écailles brunes et
parfois ont une très légère teinte violacée; les nervures
sont ordinairement marquées par des écailles noires dans
toute leur longueur; un empâtement brun, formant tache
quadrangulaire plus ou moins bien nette, se trouve un
peu avant le milieu de l'aile et repose sur la nervure mé-
diane sans atteindre la côte; quelque stries brunes se
voient près de l’apec, et de là une bande oblique brune,
parallèle au bord externe, descend jusqu’au bord interne
sur lequel on voit encore quelques stries brunes, irré-
gulèrement espacées jusque près de la base de l'aile. Les
franges sont brunes et ont à leur base des écailles noi-
râtres formant suite aux nervures, leur extrémité est
LE NATURALISTE
119:
blanchâtre. Les ailes inférieures sont d'un gris soyeux
avec des franges grises plus claires à leur base. Antennes
brunes, palpes, tête et thorax gris foncé, pattes gris
clair.
La femelle est semi-aptère. Plus encore que le mâle,
elle est de taille très variable. Ses ailes supérieures sont
courtes, atteignant à peine la moitié de l'abdomen : lan-
céolées, hérissées de poils sur les bords et même à la sur-
face; le fond est de la couleur de celle du mâle; mais elles
sont plus assombries par les taches brunes relativement
plus grandes qui se joignent parfois de la côte au bord
interne et forment des bandes.
Les ailes inférieures, quoique Stainton et Heinemann
affirment qu'elles fassent complètement défaut chez la Q
d'Exap. congelatella, existent néanmoins chez duratella &
ainsi que je l'ai constaté sur le grand nombre de sujets
que j'ai examinés; elles sont représentées par une petite
membrane écailleuse ronde et garnie de poils sur les
bords, mais elles sont très petites et visibles seulement à
l'aide d'une forte loupe (1). Les antennes sont ciliées et
diffèrent de celles du mâle; les pattes sont plus courtes
que celles du mâle, et les cuisses ne sont pas renflées
comme celles du Das. salicellum HB.; tête et thorax gris
foncé, abdomen gris clair, terminé par des poils brun
jaunâtre.
(1) Il faut, pour trouver des analogues à ces ailes tronquées,
chercher ailleurs que parmi les tordeuses, chez lesquelles, sans
doute, on voit bien quelques femelles comme celles des tortrix
rusticana Tr., T. prodromana HB, dont les ailes subissent
quelque déformation, quelque rétrécissement; mais ce n'est pas à
comparer avec celle des Exapate. Oxypleron impar ® elle-
même est relativement normale.
Ces femelles, presque sans ailes, excitaient l'étonnement des
anciens entomologistes, comme on le voit par les épithètes qu’ils
leur accolaient : mirandum animalculum.…. miserum... fame-
licum.… Le genre Exapate seul en offre un exemple parmi les
tordeuses.
Mais, parmi les Tinéites, où l’on compte des genres entiers de
femelles complètement aptères (Talæporia, Solenobia), d’autres
où les aïles des femelles sont déformées, raccourcies, surtout les
inférieures comme certaines Gelechia, pleurota, même Symmoca,
et principalement les Megacraspedus, dont les ailes inférieures
de quelques femelles sont réduites presque à un fil, il est un
genre qui rappelle, à beaucoup d’égards, celui d'Exapate : c est le
genre Darystoma. Les ailes supérieures de la femelle ont la
méme forme et à peu près la même longueur que celles d'£xra-
pale, et les ailes inférieures, quoique un peu plus longues et
lancéolées, ne sont aussi qu'une petite membrane dépouillée
d'écailles.
A cette liste de femelles semi-aptères de tinéites, il convient
d'en ajouter une autre très curieuse qui a été découverte en
Algérie, dans les environs de Bone, par M. Al. Olivier, il y a de
cela une dizaine d'années. A cette époque, je débutais dans
l'étude des micros, et je soumis à mon regretté collègue et ami
Ragonot l'insecte que m'avait envoyé M. Olivier. Il lui était éga-
lement inconnu. La mort est venue le surprendre avant qu'il eût
eu le temps de l’étudier et, depuis, il m'a été impossible de
savoir ce qu'était devenu l'insecte. Il est certain qu’il ne se
trouve pas dans la collection léguée par Ragonot au Muséum.
Tout récemment, j'ai eu l’occasion d'en voir un nouvel exem-
plaire, capturé en Tunisie. C’est une tinéite, reconnaissable à sa
tête fort hérissé de poils, à ses palpes courts et un peu tombants;
le thorax est robuste, l’abdomen est aplati et les bords sont ca-
rénés et crénelés aux segments, rappelant l’abdomen des Aly-
chia ® avec un oviducte corné et saillant. Les ailes sont lancéo-
lées, très courtes, repliées sur l’abdomen dont elles couvrent et
dépassent à peine la moitié; elles sont noires, ayant à la base un
trait blanc et une base transversale également blanche non loin
de l’apex.
M. Al. Olivier a trouvé cet insecte courant sur un sentier et
ressemblant à s’y méprendre à un Staphylin. Nul doute qu'il ne
forme un genre nouveau, et, pour cette raison, je l'appelle Gour-
bia staphylinella.
Ce papillon commence à paraitre dès la fin de sep-
tembre et on le voit encore en novembre jusqu'aux
froids un peu sérieux.
L'accouplement se produit même en captivité; il peut
durer une dizaine d'heures. La femelle dépose ses œufs,
soit isolément, soit par petits groupes de trois ou quatre
œufs,sur les différentes parties des végétaux qui doivent
nourrir la chenille.
20 Œuf. — L'œuf d'Erap.duratella à la forme d'un petit
ellipsoïde très aplati, à coquille très mince, à surface
chiffonnée, luisante, mais sans dépressions polygonales
régulières. Sa couleur est d'abord jaune, puis devient
d'un beau rouge corail. Il reste ainsi tout l'hiver et son
éclosion a lieu lorsque la température s’est tenue au-
dessus de 40 à 12° centigrades pendant plusieurs jours
et que les bourgeons commencent à grossir et se pré-
parent à éclater, c'est-à-dire à l'entrée du printemps.
3° Chenille. — La petite chenille est médiocrement
allongée, renflée antérieurement et atténuée postérieure-
ment, de couleur jaunâtre ou orangé sale, sans ligne n1
dessins, avec verruqueux indistincts et concolores, visibles
au microscope comme une petite plaque cornée luisante,
mais de la couleur du fond; poils blonds un peu mutiques ;
tête aplatie, noire, granuleuse, luisante; écusson bru-
nâtre, pattes écailleuses noirâtres, extérieurement au
moins; clapet brun clair.
Après avoir pris quelque nourriture, elle devient ver-
dâtre, et après sa première mue, la tête, l'écusson, les
pattes écailleuses sont d’un noir luisant, et même les tra-
pézoidaux ont un petit point noir au centre et sont en-
tourés de clair; mais ce n’est qu'après la seconde ou la
troisième mue que l’on commence à voir les lignes du
dos qui s’'accentueront encore davantage dans les der-
niers àges.
Adulte, la chenille d'Evapate duratella mesure de 14 à
18 millimètres de longueur. Elle est médiocrement
allongée, un peu épaisse, légèrement atténuée en avant,
beaucoup plus en arrière; ses segments intermédiaires
sont renflés. Sa couleur varie un peu selon la plante qui
la nourrit : sur le mélèze, elle est d’un vert sombre, bien
plus foncé que le vert de celle qui vit sur les légumi-
neuses, par exemple, et qui tire un peu sur le jaunâtre,
Elle a une fine dorsale blanche qui ne se voit guère que
sur les quatre ou cinq premiers segments; les deux
autres lignes ui inserivent les trapézoidaux sont bien
plus larges et continues depuis le premier jusqu’au der-
nier segment, elles sont blanc jaunätre. Les verruqueux,
très faiblement saillants, se confondent presque avec la
couleur du fond ; ils sont cependant un peu blanchâtres,
avec un tout petit point noirâtre au milieu, portant un
poil blond assez long. Tête blanchâtre avec des mou-
chetures et des taches cunéiformes brun ferrugineux,
principalement au sommet et autour des calottes ; ocelles
noirs, épistome noirâtre en avant, antennes avec un àn-
neau noir au milieu; écusson de la couleur du fond,
divisé au milieu par la dorsale, marqué sur les côtés par
le commencement des sous-dorsales et taché de noirâtre
sur le bord postérieur; pattes écailleuses noirâtres, stig-
mates noirâtres; — ceux de la chenille d’'Ex. congelatella
sont plutôt jaunâtres.
Cette chenille vit toujours abritée sous une toile
étendue sur les feuilles plus ou moins rapprochées et
rassemblées de la plante nourricière où bien sous une
galerie soyeuse courant le long des tiges, des branches,
120
LE NATURALISTE
selon le végétal qui la nourrit (1). Car il faut dire que
cette chenille est essentiellement polyphage, attaquant
les végétaux les plus divers, tels que : lurix, cotoneaster,
onobrychis, astragalus, rosa, rubus, thalictrum, berberis,
salix, etc., etc. Elle est à taille en juillet.
Pour se transformer, elle n'observe pas toujours la
mème règle de conduite; tantôt elle reste sur la plante,
tantôt elle la quitte et descend à terre parmi les détritus
végétaux et se fabrique un curieux cocon, long, cylin-
drique et de soie blanchâtre, tout grillagé, réticulé,
cloisonné, ayant au moins le double de la longueur de
la chenille.
4° Chrysalide. — La chrysalide est remarquable, assez
allongée, subcylindrique et d’un brun noirâtre. Le dessus
du thorax présente une pièce longitudinale large faisant
saillie, carénée dans son milieu et garnie de stries trans-
versales très serrées. Le dessus de chacun des segments
abdominaux porte deux lignes saillantes serratiformes;
les dents de la ligne antérieure bien plus fortes. Ce der-
nier segment est large, arrondi et porte en dessus deux
fortes épines droites et à extrémité un peu dirigée en
avant, En outre, quelques poils assez longs, roux et tous
dirigés en arrière, se voient sur les segments abdomi-
naux, surtout en dessous.
Ce système de dents, de crochets et de poils à direc-
tions diverses, permet à la chrysalide de se mouvoir faci-
lement et dans tous les sens dans l’intérieur de son long
cocon. Elle demeure dans cet état environ six semaines
à deux mois.
La place du genre Exapate dans la classification des
microlépidoptères a donné lieu à des divergences d'opi-
nions assez étonnantes, puisque parmi les microlépi-
doptéristes les plus réputés les uns en-font un genre de
Tinéites, les autres un genre de Tordeuses.
« Hubner, dit Freyer IT, 95, hat diesen Schmetterling
(Exapate congelatella) unrrichtig unter die Wicklern
abgebilder. Seine ganze Gestalt, selbst seine Farbung
reiht 1hm am sichersten zu Salicella. » C’est catégorique.
Stainton ne l’est pas moins, puisque dans ses Tineina
(Insecta Britan., p. 11) il en fait sa première famille
(Exapatidæ) comprenant les trois genres Exapate, Dasys-
toma et Chimabacche, dont il connaissait bien cependant
la nervulation. Mais, à son époque, les nervules de l'aire
dorsale des ailes supérieures n'avaient pas l'importance
qu'elles ont acquise depuis aux yeux des classificateurs.
Heinemann ( Die Zünsler, 65) s'exprime ainsi : « Diese
Gattung (Exapate) stimmt im Rippenbau vollkommen
mit den Tortricinen uberein und ist deshalb mit Recht
von H. Schæffer mit denselben verbunden. »
On s'explique ces divergences. Le papillon d’Exapate
a un facies qui rappelle celui des Dasystoma, la femelle
surtout, et il y a des mäles de Dasystoma dont la nervu-
lation des ailes inférieures est pareille à celle des
(1) Sur le mélèze, la chenille d'Ex. duratella se tient ordinai-
rement au milieu d’une touffe d’aiguilles qu'elle mange après les
avoir maintenues par des soies tendues en tous sens, mais sans
les assembler ni les réunir en faisceaux, à condition naturelle-
ment que la chenille de Sfegan diniana Gn lui en laisse d’in-
tactes, car cette dernière espèce, qui vit en même temps ou
plutôt la précède de quelques jours sur les mélèzes, réunit les
aiguilles et en forme une sorte de tube dans lequel elle se retire
et se lient cachée, puis en dévore l'extrémité jusqu’à ce qu’elle
ne soit plus abritée. Alors, elle quitte ce tuyau et gagne un
autre toufle d’aiguilles qu'elle traite de semblable façon.
Exapate (1). On pourrait encore trouver parmi les Chima-
bacche, Semioscopis et Epigraphia d'autres points de com-
paraison et quelques caractères communs, tirés par
exemple des œufs, car l’œuf d'Exapate ne ressemble
guère à ceux des Tordeuses en général, pas plus que le
cocon, dont je ne trouve aucun analogue parmi les
Tordeuses, tandis que les Tinéites offrent plusieurs espèces
de ces cocons réticulés, ajourés.
Mais, ce qui doit surtout éloigner les Exapate des
Tinéites, c’est l'absence aux ailes supérieures de la ner-
vule 4 b dans l’aire dorsale, Par ce fait, le genre Exapate
se trouve, comme dirait Comstock, plus spécialisé,
tandis que les autres genres Dasystoma, Chimabacche, avec
lesquels ils formait la famille des Eæxapatidæ, sont more
generalized. En outre, la chrysalide, avec sa double série
de dents sur le dessus des segments abdominaux et ses
deux pointes redressées sur le dernier, prouve jusqu’à
l'évidence que c’est bien un genre de Tordeuses, voisin
du genre Sciaphila et plus spécialement du genre
Doloploca.
P. CHRÉTIEN.
Quelques mots sur le variétisme
On comprendra, je pense, la signification du mot varié-
tisme (2). Les entomologistes variétistes ont inscrit dans
leur programme d’études celle de la variété et, pour ce
motif, ceux-ci ne craignent pas à l’occasion de publier
les résultats de leurs études en nommant les variétés tout
aussi bien que les espèces. Il serait sans doute intéres-
sant de savoir quel est l’auteur qui, le premier, a nommé
une forme jugée nouvelle en la signalant simplement
comme variété. En consultant les catalogues, on constate
que les grands naturalistes fondateurs de l’entomologie,
comme Lanné, Fabricius, ete., sout inscrits comme par-
rains d’un certain nombre de variétés, mais ces variétés
ne sont que des espèces déchues, car autrefois l’impor-
tance de la variété échappait aux auteurs et tout ce qui
était alors reconnu différent était décrit comme forme
spécifique. Le progrès dans nos études à amené à recon-
naître la variété de l'espèce et à la distinguer tout
d’abord. Malgré mes recherches, je n’ai pu découvrir
quel a été le descripteur de la première variété nommée
et décrite comme telle. Gyllenhal (Insecta Suesica) et
Heer, dans son « Coleoptera Helvetica », signalent un cer-
tain nombre de variétés. Le célèbre Mulsant en a décrit
plusieurs dans ses « Longicornes, {re édition », c'est-à-dire
dès 1839, et là se sont bornées mes recherches historiques
sur ce sujet. En feuilletant les catalogues ou bouquinant
de ei de là, je me suis contenté de reconnaitre que la plu-
part des auteurs possédaient à leur actif des détermi-
nations variétistes et j'en ai conclu que les variétés
actuelles pouvaient bien avoir plus de raison d’être que
les espèces d'autrefois. :
Généralement, les entomologistes non variétistes s’abs-
(1) La nervulation de l'aile inférieure de Dasysloma salicel-
lum est variable. Souvent, on ne compte que sept nervures et
quelquefois une aile en a sept et l’autre huit. C’est ce dernier qui
doit être le nombre normal.
(2) Étant entomologiste, j'écris cet article pour les entomo-
logistes et spécialement les Coléoptéristes, mais les généralités
exprimées ici peuvent s'étendre aux différentes branches de
l'histoire naturelle.
LE NATURALISTE 421
tiennent de décrire, mais aussi de publier des réflexions
critiques ; ce sont des sages et des modestes ; mais cer-
tains autres se plaisent à dire ou écrire que la variété
est insignifiante et mérite tout au plus d’être imdiquée très
vaguement dans les ouvrages, par exemple de la façon
suivante : « Cette espèce est des plus variables et passe du
clair au foncé par toutes les transitions ». Quelles tran-
sitions? Pourquoi ne pas être plus précis, en mention-
nant avec soin les transitions, en séparant les extrêmes
tranchés des intermédiaires qui ne le sont pas? La pro-
lixité n’est pas toujours une faute. Quelques entomo-
_logistes ne veulent pas absolument comprendre le but
des noms donnés aux variétés et ces entomologistes se
montreront assez disposés cependant à décrire à l’occa-
sion des espèces basées sur des caractères insigmfiants,
espèces, bien entendu, qui ne sont réellement que des
variétés et seront reconnues comme telles à la premiere
étude sérieuse (1). À l’occasion, on ne résistera pas au
plaisir d'écrire quelques phrases lapidaires contre le
variétisme. « Exprimons le désir que ces créations nou-
velles soient plus justifiées que celles de trop nombreux
naturalistes qui démembrent à outrance les espèces sur
des distinctions parfois subtiles et bien souvent insuf-
fisantes (2). » Le variétisme, après cela, est écrasé,
anéanti, n'est-ce pas? Combien, oublieux du passé, nom-
meront à leur tour une variété! Mais on appellera celle-ci
race, pour faire croire à sa supériorité, ou pour lui
donner un cachet distinctif contre les descriptions des
auteurs qui, plus modestes d’ambition, se sont contentés
de décrire simplement des variétés. On baptisera des cas
de dimorphismes sexuels, des nigripennes, alors que la
nuance ordinaire des élytres est d’un bleu violet; mais
tout cela ne rentre pas naturellement dans le variétisme
que l’on critique... Le variétisme véritable, c'est le travail
des autres, tout ce que vous n'avez pas fait vous-même,
L'antivariétisme sans doute à du bon, mais sa tendance
exclusiviste en faveur d'autrui seulement est mauvaise;
il peut se résumer ainsi : combattre la variété chez les
autres et l’accepter pour soi à l’occasion. Pourquoi l’anti-
variétiste ne veut-il pas comprendre que la critique qu'il
fait des variétés décrites par autrui atteint la légitimité
nominale des cas de dimorphisme qu'il décrit, ou les
races qu'il nomme ? Si l'on bouquine un peu et que, sans
parti pris, on glane des faits dans l'œuvre générale de
quelqu'un qui, parfois, n’a pas craint de publier quelques
anathèmes contre les descripteurs, on sera fort étonné de
rencontrer des synonymies, des variétés nommées, etc.,
qui contribuent beaucoup à diminuer la portée des malé-
dictions lancées contre les descripteurs de variétés et
leur manière de faire. Lisons, voyons et concluons!
Ainsi, on se refusera à admettre qu'un nigrino nommé
par un variétiste militant soit intéressant; mais que ce
même nigrino soit décrit par un autre, surtout un ami,
cela changera, et à plus forte raison si cet ami lui donne
votre nom. Je connais certain Necrophorus qui serait bien
capable de donner du noir aux esprits critiques, si ceux-ci
n'avaient parfois les yeux anophtalmisés à l'avance.
(1) Je pourrais citer des exemples, mais je m'en abstiens, vou-
lant éviter les personnalités ; je vise les systèmes et leurs consé-
quences et non pas les gens; si parfois je suis forcé de rappeler
quelques extraits, je le ferai sans nommer personne et le plus
discrètement possible. Je prie tous nos collègues de comprendre
cet article tel qu’il est écrit : « pour l'instruction générale », et de
ne pas m'en vouloir quand je ne serai pas de leur avis pour com-
prendre l'entomologie.
(2) Déjà mentionné dans mes matériaux, II, 1898.
Ah! les pointes lancées par quelques-uns ne sont pas
d'un grand poids dans la balance! On peut constater
depuis quelques années une marche en avant très
accentuée du variétisme.. Et je doute que si l'intérêt de
la variété est toujours contesté par les empêécheurs de
descriptions, ceux-ci puissent persister à fermer les yeux
sur ce qui se passe. Cette marche en avant ne peut être
jugée comme un recul, c’est la route vers la lumière, vers
l'avenir, qui fera de plus en plus grande la part de la
variété au détriment de l’espèce. Cherchons dans les
nouveaux auteurs, plusieurs ont à leur actif des variétés
nommées, et, ce qui est plus caractéristique encore (on
peut s’en rendre compte en jugeant les faits sans parti
pris), le mouvement descriptif se propage dans les
sphères entomologiques plus élevées.
Je relisais dernièrement avec intérêt ce qu'écrivait, il y
a quelques années, lors de l'apparition d'un superbe
ouvrage, un de nos vétérans : « Le nombre des variétés est
réduit en général aux principales, celles qui méritent de
porter un nom, et très peu de nouvelles sont indiquées ;
par là est évitée justement cette manie déplorable et
moderne de nos pseudo-coléoptérologues qui, suivant
l'exemple de certains collectionneurs ou marchands,
surtout en Lépidoptères, croient se donner une impor-
tance en nommant à tort et à travers toutes sortes de
variations sans valeur »,
Si à cette époque les désirs des antivariétistes pou-
vaient passer pour des réalités, à présent les réalités
marcheront-elles toujours avec les désirs exprimés au-
trefois? Pour concilier le présent avec le passé, ne fau-
drait-il pas classer les variétés nommées de Coccinellidæ
ou de Meligethes dans une catégorie à part, catégorie
acceptable parce que celle-ci serait difficilement inac-
ceptée?
Un entomologiste spécialiste qui, autrefois, n'a pas
craint d'écrire qu'il ne pouvait suivre dans ses créations
de variétés à outrance le très regretté C. Rey, n’a pas
reculé tout dernièrement devant la description d’une va-
riété qu'il n’a différenciée de la forme type que par la
présence d’un {rés fin liséré noirâtre bordant le prothorax
de chaque côté. Que signifie cette dénomination ? Ou bien
cet auteur devient lui aussi variétiste, et alors il doit re-
gretter de n'avoir pas compris autrefois les créations de
Rey ou des autres...; ou bien cet auteur conserve son
opinion ancienne, légerement atténuée, et dans ce cas
quelle importance pourrons-nous accorder à de nouvelles
critiques? quelle autorité sa dénomination personnelle
laissera-t-elle aux critiques anciennes ? Si M. X... a bien
mérité de la science entomologique en décrivant une
modification quelconque basée sur un seul caractère tiré
de la coloration, pourquoi d’autres collègues n'auraient-
ils pas le même honneur dans leurs nominations de va-
riétés analogues, et même meilleures ?
Un autre auteur, qui lui aussi a mené campagne un
moment contre les descripteurs, s'est rendu célèbre par
la phrase suivante, précédant plusieurs de ses descrip-
tions : «Cette espèce n’est qu'une variété », et a combattu
ainsi lui-même ses théories par ses actes. En résumé, ce
que quelques entomologistes ont pu écrire contre le sys-
tème variétiste est bien loin de saper les assises sur les-
quelles repose ce variétisme, ou au moins a été incapable
d'entraver l’œuvre qui grandit de plus en plus impor-
tante. Queiqu'un me disait dernièrement, alors que je
lui annonçais une étude synoptique en cours de rédac-
tion : « J'espère bien que vous ne nommerez pas des
122
LE NATURALISTE
modifications insignifiantes de coloration de pattes, ab-
domen, etc., sous prétexte de décrire des variétés ». On
est bien d'accord pour reconnaitre qu'il:ne faut pas dé-
crire des modifications insignifiantes, mais où l’on ne
s'entend plus, c’est pour la signification de ce mot : insi-
gnifiant. Tel reconnait comme bons caractères des chan-
gements qu'un autre ne verra que comme des modifica-
tions accidentelles et, de cette manière différente de voir,
naissent naturellement des interprétations opposées; par-
tant de là, quelqu'un décrit avec raison et celui qui ne dé-
crit pas fait mieux encore: la conclusion découle naturel-
lement de l'opinion de celui qui la présente. Sans doute
il ne faut pas trop multiplier les variétés, mais il n’est pas
juste de les laisser complètement dans le néant des in
litteris, moins juste encore. de les critiquer lorsque le
variétisme augmente son œuvre et surtout quand on à
soi-même à son actif, ou passif si l’on préfère, des va-
riétés sexualis, ou d’autres analogues.
Le nombre des variélistes (j'étends le nom de varié-
tistes à tout collègue qui, à l’occasion, ne craindra pas de
nommer une Ou plusieurs variétés nouvelles) est grand
sous le soleil et il ne diminue pas; j'ai le plaisir d’enre-
gistrer parmi ceux-ci des savants estimés tels que M. A.
de Semenow, L. Ganglbauer, L. Bedel. Sije ne craignais
pas de paraitre trop bien informé, ou indiscret, je pour-
rais ajouter à la liste des variétistes un nom, peut-être
trop connu, celui d'un variétiste de la première heure
(sa première description est une description de variété)
et qui non seulement ne rougit pas de son passé, mais
qui, cela est plus grave, instruit par l'expérience, ne
songe pas à brüler ce qu'il a jadis publié. Pourquoi ce
variétiste convaincu changerait1l de méthode aujour-
d’hui? Pour faire mieux, insinueront quelques-uns, sans
dire exactement pourquoi. En réalité, en changeant il
n’ajouterait qu'une infime unité à une Catégorie d’ex-
ception et je ne le crois pas assez prétentieux pour se
juger capable de sortir de la généralité, pas plus du reste
que pour s’attribuer le pouvoir de faire mieux en ne
publiant pas. On peut encore, tout aussi sérieusement
qu'on l’a déjà fait, critiquer l'esprit variétiste et après
ne pas suivre dans ses actes personnels ce qu'on de-
mande aux autres; les reproches, quelques abstentions
ne détruiront pas ce qui existe : la variété et son étude
de plus en plus approfondie et populaire. Ne pas étudier
la variété, mais dans quel but? Sans doute pour revenir
au temps arriéré de 1758! N'est-il pas plus logique de
ne plus parler de l’insignifiante variété, mais d'étudier
son vaste domaine (en se spécialisant ‘s’il le faut), de
chercher à voir de plus en plus la nature complexe dans
ses œuvres variables, et tant mieux si cette étude de la
variété est faite au détriment de la valeur spécifique :
les expériences biologiques ne tendent-elles pas à prouver
que l'importance de l'espèce a été trop exagérée, où trop
exclusive, dans nos précédentes études?
Maurice Prec.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 23 avril 1900.
Hétéroplastie. M. Nicoras ArBEertr BARBIER. — Les tis-
sus d'un mammifère peuvent être remplacés par d’autres tissus
empruntés à un mammifère de la même espèce ou d’espèce
différente : Hétéroplastie. L'hétérosplatie est partielle ou to-
26 MAY 1900
tale, selon que l'on remplace une partie ou la totalité d'un
autre tissu. La structure. du tissu emprunté doit être égale à la
structure du tissu porteur. L'hétéroplastie, à l’état actuel, n'a
aucun but thérapeutique; mais c'est la méthode pour une étude
d'histophysiologie. Le sympathique ne subit pas l’hétéroplastie,
ou du moins les opérations pratiquées n'ont pas réussi. Les gan-
glions lymphatiques semblent pouvoir subir l'hétéroplastie.
L'hétéroplastie des capsules surrénales et du corps thyroïde n’a
donné que des résultats partiels. Le cerveau et la moelle épi-
mière ne supportent aucune héféroplastie. On n'a obtenu aucun
résultat en la pratiquant sur les glandes, telles que foie, glandes
salivaires, etc. Un essai d'hétéroplastie totale (glandes salivaires, -
corps thyroïde) est presque inutile. En effet, un de ces tissus
(glandes salivaires, corps thyroïde), transporté en totalité à la
place d'un autre tissu préalablement enlevé, se détruit et se
résorbe. Le sympathique intercalé entre les bouts d'un nerf
coupé ne rétablit jamais la fonction. Des fragments de pancréas
(lapin) intercalés entre les deux parties d’une glande salivaire
divisée (lapin), ou bien des fragments de capsules surrénales
(chien) intercalés entre les deux parties du corps thyroïde
divisé (chien), se détruisent, se résorbent si d'autres accidents ne
se produisent pas.
CHRONIQUE
Congrès international contre la Cochylis. —
Un grand nombre de viticulteurs étrangers, frappés des
ravages toujours croissants occasionnés par la Cochylis,
ont demandé que: cette question füt traitée avec une
ampleur qu’on ne peut lui donner dans un Congrès gé-
néral. Pour répondre à ce désir très légitime, la Station
viticole de Villefranche a cru devoir prendre l'initiative
d'organiser ce Congrès et de convoquer tous les spécia-
listes dans une région qui souffre particulièrement des
ravages de l’insecte. La date n’est pas encore définitive-
ment arrêtée : elle sera fixée entre les 25 et 30 juin,
c’est-à-dire à l'issue du Congrès international de viticul-
ture et un peu avant le Congrès international d’agricul-
ture, qui se tiendront à Paris à cette époque. Le Congrès
durera deux jours. Il aura à nommer un jury interna-
tional chargé de distribuer les récompenses accordées
par la Station viticole de Villefranche aux auteurs des
meilleurs mémoires sur la Cochylis. Ces récompenses
consistent en médailles d’or, de vermeil et d'argent, et
en ane somme de 5.000 francs qui pourra être répartie
entre les auteurs ‘de mémoires présentant un caractère
absolument original sur cette question, ou les inventeurs
d'un procédé pratique et efficace de destruction.
OFFRES ET DEMANDES
A vendre:
Lot de Chrysomélides européennes : Halticides,
Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
2'cartons 222 Prise caen ere A ONTANCss
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Sagra à Cryptocephalus inclus. 200 espèces,
540 exemplaires, 5 cartons. Prix........ 60 francs.
Lot de Chrysomélides européennes et exoti-
ques : Pachybrachrys à Zygogramma inclus. 210 es-
pèces, 680 exemplaires, 6 cartons. Prix. 6O francs
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Le Gérant: PAuLz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE. 17.
pes
2 SÉRIE — N° 318
L'OISEAU DE LA PENTECOTE
: Tout le monde sait que la Pentecôte tombe exactement
cinquante jours aprés Pâques, mais peu de personnes se
doutent que le nom de cette fête est porté par un des plus
jolis oiseaux de nos pays. L'Oiseau de la Pentecôte, comme
l'appellent les paysans, surtouten Allemagne, n’est autre
que le Loriot vulgaire des naturalistes, auquel on a donné
son surnom, très bien choisi d’ailleurs, parce que la
Pentecôte est presque exactement le moment où il nous
fait l'honneur de nous visiter. C’est, en effet, à la fin du
printemps ou au commencement de l'été qu'il arrive pour
nous quitter dès le mois d’août et aller se réchauffer dans
l'Afrique occidentale ; c'est donc un des oiseaux migra-
teurs dont les visites sont les plus courtes, puisqu'il ne
reste guère que trois où quatre mois dans nos parages,
Tout juste le temps de se faire désirer, car il est joli, le
mâtin de Loriot! Long de 27 centimètres environ, le
mâle est tout de jaune habillé, d’un joli jaune doré sur
lequel tranche agréablement le noir de jais des ailes et de
la queue, La femelle a une livrée plus modeste quoique
plus bariolée, avec son dos d'un vert de serin, son ventre
blanchâtre avec des raies longitudinales brunes au centre
des plumes, le cou gris cendré, les ailes brunes ainsi que
la queue qui se termine par un peu de jaune. Chez tous
deux, la pupille, rouge-carmin, leur donne un regard
singulier.
En somme, la couleur du Loriot est bien plus celle d’un
oiseau des Tropiques — où il passe huit mois de l'an-
née — que celle d’un oiseau de nos pays. On a besoin, a
remarqué avec juste raison Toussenel, de s’appesantir sur
cette circonstance d'habitat de prédilection pour s'expli-
quer la richesse exceptionnelle du costume de cette
espèce, qui écrase si impitoyablement les pâles habits de
nos tarins et de nos canaris, lesquels, mis en regard du
Loriot, paraissent bien moins des oiseaux jaunes que des
oiseaux atteints de jaunisse. Il est certain que le ton de
l’uniforme-jonquille ou topaze brülé du Loriot appartient
à une gamme de couleur d'un diapason plus élevé que
celle de nos brumeux climats, et qu'il nous serait com-
plètement impossible de nous procurer chez nos autres
espèces ni bleu, ni violet, ni rouge concordant avec ce
jaune-là.
Le Loriot préfère le recueillement des grands bois à la
vie remplie de périls dans la plaine. Dédaignant les forêts
de pins et de sapins dont les senteurs de résine lui sont
sans doute désagréables, il hante les bois de chênes et de
bouleaux. Il n’en sortirait même jamais si la gourman-
dise, son péché mignon, ne l’engageait à venir dans
les vergers, manger des cerises. Peu d'oiseaux — même
ces bandits de moineaux — sont aussi amateurs que lui
de ces délicieuses baies, et je ne serais même pas étonné
qu'il ne vienne chez nous que dans le but de s’en régaler.
Le Loriot et les cerises sont deux mots qui se tiennent
et tous les poètes ont fait allusion à cet amour immodéré
du premier pour les secondes :
En juin tout s'empourpre à plaisir,
Les fraises des bois et les roses:
On voit comme un rouge désir
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
1er JUIN 1900
Passer sur la face des choses.
Partout aux splendeurs des couchants
La note dominante éclate :
Trèfles incarnats dans les champs
Et pavots à fleur écarlate.
Le géranium mêle aux rougeurs
Des œillets ses rougeurs exquises ;
Les jardins sont hauts en couleurs;
Les clos sont rouges de cerises.
Et dans la chaleur de l'été
On entend là-bas, sous les vignes,
Monter le chant clair et flüuté
Du Loriot mangeur de guignes.
(André THEURIET.)
N'était l’attrait de manger des cerises, le Loriot ne
viendrait sans doute jamais dans le voisinage des habita-
tions. D'un naturel défiant et sauvage, il fuit en effet
l'homme dès qu'il l’apercoit, Comme l’a noté Naumann,
il saute et volète continuellement au milieu des arbres les
plus épais ; rarement il reste longtemps sur le même
arbre, et encore moins sur la même branche, Son agita-
tion incessante le conduit tantôt ici, tantôt là; rarement
il se penche sur les buissons peu élevés; plus rarement
encore il descend à terre, et il n'y reste que le temps
strictement nécessaire pour prendre un insecte, par
exemple. Il est courageux et querelleur et se bat conti-
nuellement avec ses semblables comme avec les autres
oiseaux. Son vol parait lourd et bruyant, mais rapide
cependant, Comme l’étourneau, il décrit de longues
courbes ou une ligne légèrement ondulée. S'il n’a qu’un
petit espace à traverser, il le fait en ligne droite, tantôt
planant, tantôt battant des ailes. Il aime à voler, à errer
de côté et d'autre ; et souvent on voit deux de ces oiseaux
se poursuivre pendant des quarts d'heure. :
Il semble se plaire à faire des niches. Quand il se sent
poursuivi, il gazouille en ricanant, puis s'envole sans
souffler mot et va chanter un peu plus loin, tandis que le
chasseur, en arrivant, trouve la place vide.
Tout le monde s'accorde à dire que le chant du Loriot
mâle est délicieux, tandis que celui de la femelle est
désagréable au premier chef. Le premier chante sans
cesse des le lever du soleil jusqu’à midi, puis il se repose
et ne reprend sa mélodie qu'au moment où le soleil dis-
parait sous l'horizon. Ses chants rappellent par la force,
l'éclat, la limpidité et la douceur ceux du merle. Son cri
d'appel est jaek, jaek ou krak; son cri d'amour est bulow.
Effrayé, il pousse des querr et des ehrr; mais, en temps
ordinaire, ses roulades ne se composent que de ditleo,
gigidaditleo. ou pipiriol. Ses noms allemands (der Pirol,
die Golddrossel, der Pfingstvogel) sont des onomatopées
de son chant.
Comme il se déplace sans cesse, il suffit à lui seul à
animer toute une forêt et c’est pour cela qu'il est partent
le bienvenu. Il détruit bien un peu trop de cerises, maïs
il chante si bien! En Allemagne, cette terre d'harmonie,
où souvent les imaginations se laissent entraîner à des
idées fantaisistes, on fait grand cas des prouesses chro-
matiques du Loriot : l'introduction de son chant habituel
est interprétée par les syllabes hi-de-lu, la première et la
dernière longues et l'intermédiaire brève. L'oiseau fait
entendre ensuite une note à demi-voix, puis s'élève tout
à coup, par une progression rapide, jusqu'à une quinte
au-dessus de la note de début pour descendre immédiate-
ment à des tons plus bas: Hi-de-lu-a-i-a! Une seconde
124
phrase musicale, de quatre ou cinq intonations qui mon-
tent et descendent brusquement, vient après, et enfin
une troisième la suit, qui n’est peut-être, selon Champ-
fleury, qu'un cri d'appel et ne se compose que de trois
sons, Dans ce singulier répertoire, que chacun peut enten-
dre à sa façon, noter ou écrire d’après sa mélographie,
les imaginations germaniques ont cru reconnaitre dans
la première phrase une certaine noblesse de caractère;
dans la seconde, un allegretto comique d’une gracieuse
familiarité, et, dans le finale, un accent de raillerie,
C’est sans doute aller bien loin ; mais, en fidèle historien,
je cite presque à la lettre ce que j’ai lu. Outre ces trois
sortes de phrases caractéristiques, si hardiment inter-
prétées, les Loriots ont une espèce de gazouillement
qu'ils entremélent d’un cri qui n’a rien de bien agréable :
Krèh-kré-é-éh! Je préfère, à cette onomatopée un peu
forcée du langage du Loriot, la naïve interprétation du
peuple d'Italie, qui croit que l’oiseau indique, par son
chant, que les figues sont müres : « Contadino à matura
lo fico ! » Hoëfer a su beaucoup mieux interpréter que ses
devanciers le son de voix que le Loriot fait entendre
d'habitude : « Il répète lui-même son nom, dit-il,
Le-lo-ri-ot, et ce chant, débité d’une voix grave et sonore,
rappelle à s’y méprendre, le chant du merle. » (Sabin
Berthelot.) En France, les paysans sont persuadués que
le chant du Loriot veut dire : Je suis le compère Loriot…
qui gobe les cerises. et laisse les noyaux.
Quant à la femelle, elle n’est pas mieux pourvue sous
le rapport du chant que du costume, Elle n’imite, en effet,
que des yo-yid-yo-6! qui ressemblent à des miaule-
ments. Hoëler compare ses sons criards et enroués à
ceux d’un chat qu'on étrangle. Il est certain, dit Champ-
fleury, qu'on ne saurait trouver un contraste plus frap-
pant entre les timbres mâle et femelle d'une même
espèce que celui qui se révèle dans les conversations
amoureuses du Loriot; on dirait un brillant virtuose
aux prises avec une ménagère acariatre.
À peine arrivés dans nos régions, les Loriots se met-
tent à construire leur nid. Celui-ci est toujours placé à la
bifurcation d’une branche d'arbre, C’est une sorte de
bourse que l'oiseau confectionne avec des feuilles à moi-
tié sèches, des brins d'herbes, des fibres d'orties, d’écorce
de bouleau, de la laine, des toiles d’araignée, ete., ma-
tériaux qu'il agglutine avec sa salive. Finalement, il ta-
pisse l’intérieur d'herbes fines, de plumes ou de laine. Le
mode d'attache aux branches est particulièrement bien
compris; les câbles qui composent la charpente du nid,
suspendu ainsi comme un hamac, sont enroulés autour
des branches, ficellés, collés les uns aux autres de
manière à en faire un tout très solide, Toussénel dit que
le nid des Loriots est une merveille d'art qui pourrait
bien mériter à ses auteurs le premier prix d'architecture
aérienne, « Je ne sais pas de nid, en effet, ajoute-t-il,
qui l'emporte sur celui du Loriot pour l'élégance de la
forme, la richesse des matériaux, la délicatesse du tra-
vailet la solidité de la bâtisse. » Le nid du Loriot est
encore plus mignon peut-être et de moindre dimension
relative que celui du Chardonneret., IL est tapissé au
dehors comme celui du Pinson d’une couche de ce lichen
argenté des arbres fruitiers qui lui donne l'air de faux
corps avec la branche qui le supporte. Mais la demeure
du Loriot est bien plus habilement dissimulée encore
que celle du Pinson. Celle du Pinson est assise sur la
branche dont elle augmente le volume, et elle appelle
les regards. Le nid du Loriot, au contraire, est fixé par
LE NATURALISTE
des attaches de liane aux deux branches d’une fourche
horizontale entre lesquelles il flotte suspendu, et dont
l'épaisseur masque une forte partie de la muraille exté-
rieure, Audubu, qui a passé des semaines entières à
regarder travailler le Loriot de Baltimun, sur un arbre
perché et à l’aide d’une longue vue, a constaté que ces
oiseaux employaient pour tisser l’étofle de leurs matelas
le même procédé que nos tisserands pour confectionner
leur toile : c'est-à-dire qu’ils commencçaient par faire
une chaîne et une trame, et que chacun des deux époux,
comprenant les avantages de la division du travail, se
chargeait de la conduite d'une des deux opérations,
non de l’autre. à
Ces deux sexes collaborent à l'édification du nid, mais
c'est à la mère qu'est dévolu le rôle de le tapisser à l'in-
térieur et d’en faire un lit bien moelleux. Elle y pond
quatre à cinq œufs; fait assez rare, les taches noires qui
ornent ceux-ci s’enlèvent facilement avec un linge
mouillé : ils déteignent. Une fois la porte achevée, le
mâle et la femelle couvent l’un après l’autre, La pre-
mière surtout déploie une grande ardeur dans sa fonc-
tion et il est même difficile de lui faire abandonner ses
œufs. « Je visitai un nid, raconte Paesler, dont je
venais de chasser la femelle, et pour en voir l’intérieur,
J'abaissai les branches sur lesquelles il reposait, La
femelle poussa un long cri, rauque, un véritable eri de
combat, s’élanca sur moi, passa tout auprès de mon
visage, et se posa sur un arbre derrière moi. Le mâle
accourut : même cri, même tentative de m’éloigner. Les
deux parents semblaient avoir pour leur progéniture le
même amour, » Au bout de quinze jours, les œufs
éclosent et, dès lors, les petits croissent rapidement,
Mais les parents ont fort à faire de rapporter de la nour-
riture à ces estomacs grandissants |
Les Loriote, à part les cerises, qui constituent plutôt
leur dessert, mangent un grand nombre d'insectes, et,
sous ce rapport, doivent être protégés. On ne peut
malheureusement les garder en captivité, car, au mo-
ment du départ de leurs semblables, c'est-à-dire le len-
demain même du solstice, ils sont pris d’une grande
surexcitation, et, presque toujours, se brisent la tête
contre les barreaux. Liberté, liberté chérie !.….
HENRI COUPIN.
L'HISTOIRE NATURELLE & L'ETHNOGRAPHIE
À L'EXPOSITION UNIVERSELLE
Il y a dans l’enceinte de l'Exposition un très grand
nombre d'éléments d’études, tant pour le naturaliste que
pour l’ethnographe. Malheureusement ils sont dispersés
dans toutes les sections; un grand nombre d’entre eux
sont même cachés dans des endroits tout à fait inat-
tendus où le public n’aurait jamais l’idée de les chercher.
Il nous à paru bon de donner à nos lecteurs une sorte de
guide qui leur permette de se reconnaître au milieu des
trésors accumulés en ce moment à Paris, Nous nous
attacherons surtout à leur signaler ces coins ignorés de
l'Exposition dont nous parlions tout à l’heure et où ils
trouveront nombre d'objets intéressants; nous ne négli-
Eee
gerons d’ailleurs pas pour cela les sections les plus en
vue et les plus fréquentées de la foule.
Il va sans dire que nous ne pouvons songer à écrire
un catalogue même succinct de tous les objets d'histoire
naturelle ou d’ethnographie exposés. Un pareil travail
nous conduirait trop loin et serait d’ailleurs sans intérêt,
car il. nous exposerait à des redites nombreuses, le même
objet se trouvant exposé dans les sections les plus di-
verses. Nous nous contenterons donc de signaler dans
chaque pavillon ou dans chaque groupe les objets les
plus dignes de remarque, ceux surtout qu'on n'a pas
occasion de trouver réunis en temps ordinaire dans les
collections. Mais une pareille énumération serait bien
sèche; aussi l’accompagnerons-nous dans la mesure du
possible de détails scientifiques ou historiques et de pho-
tographies qui faciliteront l'intelligence du texte. Ainsi
le visiteur sera plus à même de comprendre l'intérêt des
objets qui passeront sous ses yeux, et le lecteur du Natu-
raliste qui n’a pas l'intention de visiter l'Exposition s’en
consolera dans une certaine mesure en complétant ses
notions d'histoire naturelle et-d’ethnographie,
Après müre réflexion, il nous a paru préférable
d'adopter l’ordre topographique. C'est ce qui nous a em-
pêché de commencer cette série d'articles plus tôt. En
effet, afin d'éviter d’avoir à revenir sur nos pas, 1l était
nécessaire que toutes les sections fussent ouvertes au
moment de notre visite. Ainsi donc, commençant par les
Champs-Elysées, nous parcourrons successivement le
Trocadéro avec ses sections coloniales, le Champ-de-
Mars avec les expositions des établissements scienti-
fiques, les palais étrangers des bords de la Seine, et nous
terminerons par les Invalides. La minéralogie, la bota-
nique, la zoologie et l’ethnographie attireront tour à
tour nos regards. Nous espérons pouvoir dès le prochain
numéro du Naturaliste remplir la première partie de ce
programme.
LES PLANTES DE FRANCE
Leurs Chenilles et leurs Papillons
THYM (Thymus).
T. serpyllum, — Nola thymula (Mills), cheñille en
mai, papillon en mars et avril; midi. — Acidalia decorata
(B.), chenille en avril, mai, juillet, papillon de mai à
août; centre et midi. :
. vulgaris, — ÆEupithecia sextiata (Mill), chenille
en mai, dans les graines, papillon en avril; Provence, —
Calamodes occitanaria (Dup.) et Ligia jourdanaria (de
Vill.), chenille en mars, avril, papillon en août, sep-
tembre; midi, — Tephrina sentularia (Dup.), chenille en
avril sur les fleurs, papillon en septembre et octobre;
midi. — Acidalia submutata (Tr.), chenille en avril,
juillet, papillon en mai, septembre; midi, Auvergne. —
Acidalia ænata (Scop.), chenille au printemps et à l'au-
tomne, papillon en mai, août; toute la France. — Sy-
napsia sociaria (H.), chenille en avril, juillet, papillon en
mai, juin, août; centre et sud. — Hydrelia numerica (B.),
chenille au printemps et en été, papillon du printemps à
l'automne; midi. — Polia argillaceago (H.), chenille en
mars, papillon en septembre; midi.
TANAISIE (Tanacetum).
T, vulgare, — Cucullia tanaceti S. V,, chenille en
août, septembre, papillon en septembre, juin, juillet;
centre et sud.
AMANDIER (Amygdalus).
A. Communis, — Papilio podalirius (L.), chenille en
juin, septembre, papillon en mai, juillet, août; toute la
France. — Smerinthus ocellata (L.), chenille de juillet à
septembre, papillon en mai, août; toute la France.
ARGOUSIER (Hippophae).
H, Rhamnoiïides. — Deilephila hippophaes (Esp.),
chenille en juin, juillet, septembre, octobre, papillon en
juin, septembre; Dauphiné. — Synaptia sociaria (H.),
chenille en avril, juillet, papillon en mai, juin, août;
centre et sud.
TROËNE (Ligustrum).
TT. vulgare, — Sphinx ligustri (L.), chenille de juillet
à septembre, papillon en juin; toute la France. — Acro-
nycta ligustri (S. V.), chenille en juillet, papillon en mai,
juillet; partout. — Pericallia syringaria (L.), chenille en
juin, juillet, septembre, octobre, papillon de mai à août;
partout. — Ennomos fuscantaria (Han.), chenille en juillet,
papillon en septembre; centre. — Hybernia bajariaS. V.,
chenille en mai, juin, papillon d'octobre à mars; partout.
— Lubophora viretata H,, chenille en août, papillon en
juin, juillet ; centre, est, Alpes. —Selenia bilunaria (Esp.),
et Lunaria (Schif), chenille en mai, juin, août, septembre,
papillon de mars à juin, septembre; partout.
SORBIER (Sorbus).
S. aria. — Vanessa polychloros L., chenille en juin,
août, papillon de juillet à septembre; partout. — Nola
cuculatella L., chenille en mai, papillon en juin; partout,
— Lophopteryxæ cucullina $. V., chenille en août, sep-
tembre, papillon en mai, juin; toute la France, sauf le
sud. — Rumia cratægata L., chenille toute l’année, papillon
en mai, juillet, août; partout.
CHARME (Carpinus).
€. betulus. — ÆEndromis versicolor L. et Saturnia
carpini L., chenille en juillet, papillon en mars et avril;
partout. — Stauropus fagi L., chenille en août, septembre,
papillon en mai, juin; partout. — Metrocampa margari-
tata L., chenille en mai, juin, septembre, papillon en
juillet, mai, juin; centre et nord. — Ennomos erosaria
Bkh., chenille en juin, août, septembre, papillon en juin,
juillet, septembre; partout. — Ennomos angularia Bkh.,
chenille en juin, papillon de juillet à septembre; partout.
— Nyssia pomonaria H., chenille de mai à juillet, papillon
en mars; centre et est. — Boarmia repandata L., chenille
en avril, mai, août, septembre, papillon en mai, juillet;
centre et est. — Jodis lactearia L., chenille er août, sep-
tembre, papillon d'avril à juin; partout. — Asthena can-
didata Schef., chenille en avril, juillet, papillon en mai,
juin, août; partout.
ARROCHE (Atriplex).
Mamestra chenopodiphaga Rbr., chenille en mai et en
hiver, papillon au printemps et en automne ; bords Médi-
terranée. — Polia cærulescens B., chenille en décembre et
janvier, papillon en septembre et octobre; midi. — Ha-
dena chenopodii S. V., chenille de juillet à octobre, pa-
_— = 2 = ER Te DNS TT D A
es RE see RE sr
126
LE ‘NATURALISTE
pillon en mai, juillet à septembre; partout. — Hadena
atriplicis L., chenille de juillet à octobre, papillon en
jum et juillet; partout.
CYTISE (Cytisus).
Colias edusaF., chenille en août, septembre, papillon
en mai, aout; partout, —- Plusia chalcites Esp., chenille
et papillon de mai à septembre; Provence. — Amphipyra
effusa B., chenille en avril, papillon en mai, juin; midi.
— Hemerophila abruptaria Thub., chenille de mars à oc-
tobre, papillon d'avril à septembre; partout. — Hemero-
phila nycthemeraria H., chenille en mars, avril, papillon
en mai et août; midi. — Pseudoterpna pruinata Hubn.,
chenille en mai, juin, papillon en juillet; partout. —
Pseudoterpna coronillaria N., chenille en avril, mai, pa-
pillon en juin, juillet; centre et sud.
SOLANÉES
Acherontia atropos L., chenille de juillet à octobre,.
papillon en mai, septembre; partout.
SILÈNEZ (Silene).
S. inflata. — Luperina luteago $S. V., chenille en
juillet et août sur les tiges et les racines, papillon en
mai, juin, aout; centre et sud. — Dianthæcia cucubali
S. V., chenille en août, septembre, papillon de juin à
août; partout. — Calocampa exoleta L., chenille en juin,
juillet, papillon en août, septembre, mars, avril; partout.
— Acidalia luridata Zeller, chenille en mai, papillon en
juin, juillet; midi.
S., nutans., — Dianthœcia albimacula Bkh., chenille
en juin, juillet, papillon de mai à juillet; partout. — Em-
melesia hydrota Er., chenille en été et en automne, pa-
pillon en mai, juin; centre et sud, — Emmelesia deco-
lorata H., chenille en été et automne, papillon de mai à
juillet; centre, sud et est.
S. viscosa. — Dianthæcia silenes H., chenille en sep-
tembre, papillon en juin; midi.
S. niceensis. — Dianthæcia magnolii B., chenille et
papillon en juillet, août; centre.
Silene divers. — Dianthæcia carpophagya Bkh., che-
nille en été, papillon en juin et juillet; partout. — Dian-
thœcia capsincola S. V., chenille de juin à septembre,
papillon en septembre, juin à août; partout. — ljian-
thœcia filigramma Esp., chenille en août, septembre, pa-
pillon en juin, juillet; partout. — Eupithecia venosata F.,
chenille en septembre, papillon de mai à juillet; partout.
GENEVRIER (Juniperus).
3. sabina. — Xylina lapidea H., chenille en juin,
papillon de septembre à novembre; Provence. — Thera
cupressata Dup., chenille de mai à octobre, papillon en
novembre, décembre; Provence.
J. oxycedrus. — Hemerophila nycthemeraria H.,
chenille en mars, avril, papillon en mai, août; midi. —
Eupithecia oxycedrata Brub., chenille en avril, mai, no-
vembre, papillon en mars, juin, octobre; midi, est.
JF. communis, — Eupithecia helveticaria B., chenille
en octobre, papillon en mai, juin; centre, — Eupithecia
indigata H., chenille en juillet, papillon en mai, août;
centre et est. — Eupithecia sobrinata H., chenille en avril,
mai, papillon en juillet, août; partout. — Thera junipe-
rata L., chenille en juillet, août, papillon en septembre,
octobre; partout.
J. phœnica. — Eupithecia phœæniceata Rueb., che-
nille décembre à février, papillon en septembre; Pro-
vence.
LES OISEAUX NUISIBLES
LA PIE
Le troisième congrès ornithologique international de-
vant se réunir à Paris du 26 au 30 juin 1900, il ÿ a lieu
d'espérer que la quatrième section de ce congrès qui doit
spécialement étudier les questions relatives à la protec-
tion des espèces utiles à l’agriculture et à la destruction
des espèces nuisibles adoptera des mesures efficaces pour
nous délivrer des oiseaux essentiellement nuisibles, parmi
lesquels il convient de placer la pie au premier rang.
Aucun oiseau en France ne commet certainement au-
tant de dégâts que la pie, que les paysans du Sud-Ouest
nomment l'agasse et qui est l'ennemi le plus redoutable
des fermiers et des chasseurs.
« Curieuse, cancanière et voleuse, dit Toussenel, ayant
besoin de savoir tout ce qui se passe et de parler de tout,
elle commence par se choisir un poste culminant sur
quelque arbre de la grande route, poste excellent pour
se tenir au courant des nouvelles du jour et ramasser
tout ce qui tombe des voitures des passants. De ce poste
élevé elle s'éloigne peu, étant sédentaire par nature, elle
inspecte avec soin tout ce qui se passe dans la plaine.
Elle suit du regard le chasseur, écoute le bruit de son
arme et la voix de ses chiens, observe la remise de la
perdrix blessée et la place où se rase le lièvre sur ses
fins. Puis, tous les importuns partis, l'instant favorable
arrivé, elle appelle une ou deux compagnes, leur raconte
l'aventure, leur indique les lieux. Le coup monté, les
rôles distribués, toutes fondent ensemble sur la bête mise
à mal. Si elles réussissent à joindre le lièvre d’assez pres,
elles essaient de lui crever les yeux. »
Les dégâts que la pie exerce sur le gibier sont consi-
dérables : dans une propriété où je chassais fréquem-
ment, j'avais remarqué qu'une troupe de pies s’abattait
avec persistance dans des fougères sur la lisière d'un
bois; intrigué par la présence continuelle de ces oiseaux
en cet endroit, je fis de persévérantes recherches et dé-
couvris, malheureusement trop tard, un nid de perdrix
rouges dont les pies avaient déjà brisé tous les œufs. Les
cultivateurs savent combien cet oiseau saccage de mais,
de céréales, de fruits de toutes espèces, et les fermiers le
redoutent également pour la dévastation qu'il exerce
parmi les poussins vivant en liberté autour des fermes.
Malheureusement, la défiance innée chez la pie rend sa
destruction difficile : on ne peut la capturer ni par les
pièges, ni par les filets; elle se tient presque toujours au
milieu des grands espaces découverts et ne se laisse pas
approcher par les chasseurs. On la tire généralement à
l'affût le soir, à la couchée, mais elle a vite éventé le
chasseur et le lendemain ne revient plus à ce gite. On a
essayé de tirer des coups de fusil dans son nid; mais,
outre qu'il est placé à des hauteurs considérables, sa
construction le rend impénétrable; on sait, en effet, que
ce nid est placé dans la fourche de trois grosses branches à
le fond est composé de branches sèches entrecroisées et
LE NATURALISTE 127
formant autour du nid une armure de 15 à 20 centimètres
d'épaisseur sur laquelle repose une couche de terre foulée
qui durcit en séchant. Sur ce fond si solide est établi le
nid proprement dit, tissé de racines de plus en plus fines
à mesure que l’on approche du centre. Enfin, l'édifice est
surmonté d'un dôme à claire-voie formé de branches
épineuses ; la masse du nid a plus de 60 centimètres de
diamètre. On comprend facilement que le plomb des
tireurs ne peut pénétrer cette forteresse.
Toutefois, on pourrait obtenir la destruction de cette
espèce nuisible en donnant une prime aux enfants des
campagnes pour chaque œuf de pie qu'ils dénicheraient.
Un des correspondants du journal de la Société protec-
trice du gibier dans la Gironde a employé ce moyen et
obtenu d'excellents résultats : « J'ai simplement, dit-il,
songé à utiliser l’ardeur des gamins en leur offrant cinq
centimes par œuf ou petit de pie. Dans le mois de mai
et au commencement de juin 1891, et dans ma commune
seulement, j'ai détruit ainsi huit cents œufs ou petits, ce
qui m'a fait une dépense de 40 francs, que j'ai largement
gagnée dans ma basse-cour et par les perdreaux que jai
-conservés. Après la destruction de la deuxième couvée,
j'ai été surpris de ne plus voir que rarement voleter
quelques pies, elles semblaient avoir terreur de ma com-
mune. Ce n’est que l'hiver que quelques-unes sont re-
venues, mais en nombre bien moins grand que les années
précédentes. »
Il semble que le moyen fort simple que nous venons
-de citer pourrait être mis à l'essai en France; dans tous
les cas, nous espérons que le troisième congrès ornitho-
logique prendra des mesures radicales pour débarrasser
nos campagnes de ces oiseaux malfaisants.
Albert GRANGER.
LES SAUTERELLES EN ESPAGNE
Les provinces de Cadix, Séville, Huelva, Cordoue et
Alméria en Andalousie; Badajoz en Estramadure, ainsi
que Ciudad-Réal, Alicante.et Tolède,sont très éprouvées
par les sauterelles. Toutefois, les ravages ne sont pas
‘encore énormes dans l'Andalousie, à l'exception d'Almé-
ria; mais, dans les autres provinces, la situation se pré-
sente avec des caractères plus alarmants,
Siles travaux de destruction qui se poursuivent ac-
tuellement s'exécutent avec soin, il est permisde penser
que le fléau diminuera et sera complètement anéantiavec
les travaux du commencement de l'hiver.
L'emploi de la « gazoline » pour combattre les saute-
relles donne de très bons résultats.
Dès que la présence de la larve à été constatée et qu’elle
se met en mouvement, On réunit les insectes en une
masse d'une certaine épaisseur, Avec un arrosoir de
forme spéciale, on les asperge très rapidement en mar-
chant contre le vent, On jette ensuite une allumette
enflammée à l'endroit où sont tombées les premières
gouttes de gazoline, l’inflammation se propage à mesure
qu'on arrose sans qu'il se produise par volatilisation une
perte sensible de liquide.
Les oies
du Bombyx mori, du Jambonneau (pinne marine)
et de l'Araignée
Les anciens se sont fait toutes sortes d'idées sur la
sole.
Hérodote (livre IIT) parle d’une laine plus belle et plus
fine que toutes les autres, poussant sur un arbre des
Indes; d’autres auteurs répétèrent cela après lui; Théo-
: phraste avait même fait une classe spéciale d'arbres por-
tant de la laine. Cette erreur ne doit cependant pas sur-
prendre, car la grande quantité de cocons de vers à soie
dont les arbres étaient chargés dans les pays où ce ver
prospérait pouvait aisément faire croire à des boules de
laine croissant spontanément sur le végétal; d'autant
plus que les anciens ignorèrent pendant longtemps la
facon dont les indigènes utilisaient le cocon.
Virgile lui-même a dit dans les Géorgiques (livre IT) :
Quid nemora Æthiopum, molli canentia lana ?
Velleraque ut foliis depectant tenuia Seres ?
« Rappellerai-je ces arbres de l'Ethiopie, brillants d’un
tendre duvet? Ces laines délicates que le Sère enlève aux
feuilles de ses arbres? »
Plus tard, quand on découvrit le cotonnier, on crut que
les étoffes de soie provenaient de cet arbre. Néanmoins,
Aristote, le plus ancien des naturalistes dont il nous
reste des écrits, nous parle d'un insecte qui se rapproche
_ beaucoup du ver à soie; c’est en traitant des diverses
espèces de chenilles qu'il nous dit (Histoire des animaux,
iv. V, ch. xvir, $ 9) :
« D'une certaine larve qui est fort grande, et qui a de
petites cornes, qui diffère de toutes les autres, il sort, en
premier lieu, par le changement de cette larve, une che-
nille ; de cette chenille il sort un cocon, et du cocon un
nécydale (4). Il faut six mois pour ces métamorphoses
successives. Dans quelques pays, les femmes déroulent
les cocons de cet animal en les dévidant, et elles filent
ensuite cette matière. C'est Pamphile, fille-de Plateus,
dans l'ile de Cos, qui passe pour être la première qui ait
imaginé ce tissage. »
Quatre cents ans après Aristote, Pline décrit, lui aussi,
la même larve et diverses autres chenilles fabricantes de
cocons, que les femmes utilisent pour tisser des étofles,
et surtout des étoffes d’une si grande légèreté, que l'on
était surpris de voir même les hommes s'en servir :
« (Histoire naturelle, iv. XI, ch. 26.) Voici d'autres
bombyx, dont l’origine est toute différente ; ils provien-
nent d’un gros ver muni de deux cornes particulières
proéminentes. Ce ver devient d’abord chenille, puis Ce
qu'on appelle bombyle; de cet état, il passe à celui de
nécydale, et, au bout de six mois, à celui de bombyx.
« Ces insectes forment, comme les araignées, des
toiles dont on fait, pour la toilette et l'habillement des
femmes, une étoffe nommé bombycine (2). L'art de les
(1) La signification du mot nécydale, dit Barthélemy Saint-
Hilaire, est inconnue. Néanmoins, d'après l’étymologie, on peut
croire qu'il s’agit ici d’un état voisin de la mort, d'un élat d'iner-
tie complète.
(2) Ce nom a été longtemps celui de la soie.
LE NATURALISTE
dévider et d'en faire un tissu a été inventé dans l'ile de
Cos par Pamphile, fille de Plateus (1) : ne la privons pas
de la gloire d’avoir imaginé pour les femmes une étoffe
qui les montre toutes nues.
« (Chapitre XXVII).On dit qu’il naît aussi des bombyx
dans l'ile de Cos, les exhalaisons de la terre donnant la
vie aux fleurs que les pluies ont fait tomber du cyprès,
du térébenthinier, du frène, du chêne. Ce sont d’abord de
petits papillons nus; bientôt, ne pouvant supporter le
froid, ils se couvrent de poils, et se font contre l'hiver
d’épaisses tuniques, en arrachant avec les aspérités de
leurs pieds le duvet des feuilles. Ils forment un tas de ce
duvet, le cardent avec leurs ongles, le trainent entre les
branches, le rendent fin comme s'ils le travaillaient avec
un peigne, puis le roulent autour d’eux, et s'en forment
un nid qui les enveloppe.
« C’est dans cet état qu’on les prend. On les met dans
des vases de terre et on les y tient chauds, en les nour-
rissant avec du son. Alors il leur naît des plumes d’une
espèce particulière, et, quand ils en sont revêtus, on les
renvoie travailler à une nouvelle tâche.
« Leurs cocons, jetés dans l’eau, s’amollissent, puis on
les dévide sur un fuseau de jonc.
« Les hommes n’ont pas eu honte de se servir de ces
étoiles, parce qu'elles sont fort légères en été. Les mœurs
ont tellement dégénéré que, loin de porter la cuirasse,
on trouve trop lourd même un vêtement. Toutefois, nous
laissons jusqu’à présent aux femmes le bombyx d'As-
syrie. »
Pausanias, dans sa description des Jeux olympiques
(Les Eliaques), écrite quelques années après Pline, fait une
tout autre description du ver produisant la soie; il lui
donne une longueur double de celle d’un scarabée, huit
pattes, et cinq ans d'existence; il meurt alors, et l’on
tire de son ventre plusieurs pelotons de soie.
Il ajoute que ce ver est indien, et que les Grecs l’ap-
pelaient 249, mot dont Hésychius, Suidas et la plupart
des étymologistes ont dérivé le nom de Sbres, peuple des
Indes chez lequel on se convainquit, par la suite, que
naissait l’insecte. Néanmoins les Sères étaient connus
bien avant le ver donnant l’étoffe dite Serica (soie), et le
nom de cette dernière, comme du ver, viendrait plutôt du
peuple lui-même.
Clément d'Alexandrie (le Pédagogue, liv. II, ch. x),
Pollux (Onomarticon, liv. VIT, ch. xvu1), Servius (Com-
mentaire Sur le livre II des Géorgiques, ch. v, p. 120) et Ter-
tullien (Du Voile, ch. 111), qui reconnaissaient à ce ver la
même origine, paraissent mieux instruits de ses méta-
morphoses que ne l'était l'historien Pausanias. Ils diffé-
raient de nous en ce qu’ils croyaient l’insecte semblable
à une araignée, et sur l'espèce d'arbre où il prenait sa
nourriture. Plus tard, les Pères de l'Église, saint Basile
entre autres (Homélie VIII), préchant contre l'excès du
luxe, exhortaient les riches à penser plutôt au ver qui
devait leur ronger le corps qu’à celui dont ils prenaient
la substance pour s’en parer.
Cependant, même à cette époque, nombre d'auteurs
de mérite persistaient à croire et à dire que la soie pro-
venait de plantes particulières : Pomponius Mela, Silius
Italicus, Solin, Arrien, Ammien Marcelin, etc., sont de
ceux-là. Claudien,dans son Panégyrique sur le consulat de
0) Ces deux personnages, le père et la fille, sont absolument
inconnus, si ce n'est par cette particularité, rapportée par Aris-
tote et répétée par Pline.
Propinus et d'Olybrius,en parle comme du produit de cer-
taines feuilles.d’arbre : « L’auguste Proba se livre à l’al-
légresse et, d'une main savante, elle prépare la trabée
radieuse et la toge brillante, tissues des toisons que je
Sère cueille sur les arbres cotonneux et détache de la
feuille chargée de ce moelleux trésor. Le duvet, sous ses
doigts, s’allonge en fils déliés qu’elle enduit d'un or épais
et ductile (vers 177-181). »
Quant à l'écrivain grec Achille Tatius, il s'imaginait
que la soie était un fin duvet laissé sur les arbres par les
oiseaux.
Les anciens connaissaient ou croyaient distinguer
deux sortes de soies : celle qui provenait d’un ver d’As-
syrie et de l'ile de Cos, appelée par eux bombycinum, et
celle qui provenait d'un ver ou d’une plante des Indes, à
laquelle on donnait le nom de sericum ou serica.
Vers le milieu du v° siècle, l’empereur Justinien Ier,
alors en guerre avec les Perses, fit alliance avec les
Ethiopiens, et engagea leur souverain à envoyer de ses
sujets prendre des vers à soie aux Indes pour en enrichir
le commerce romain; voyez à ce sujet l'historien Procope
(De la Guerre persique, liv. I, et De la Guerre des Vandales,
liv. 11). C'est à deux moines que Procope fait honneur
de l'importation des vers à soie; il dit que ces religieux
étaient nouvellement arrivés des Indes à Constantinople,
où il suppose qu'ayant entendu parler de l'embarras
dans lequel se trouvait Justinien pour enlever aux Perses
le monopole du commerce de la soie, ils se firent pré-
senter à lui et lui proposèrent — pour se passer des
Perses — une voie plus courte que celle d’un commerce
avec les Éthiopiens : c’est-à-dire d'apprendre aux Ro-
mains à fabriquer eux-mêmes leur soie.
L'empereur, enthousiasmé, les renvoya à Serinde,
ville d’où ils arrivaient, pour y faire provision d'œufs de
vers à soie; et, de retour à Constantinople, les deux
moines firent éclore dans du fumier les œufs qu'ils
avaient rapportés ; il en sortit des vers qui furent nourris
avec des feuilles de muürier blanc, et des magnaneries
prospères furent bientôt établies.
Le même fait est rapporté par Théophane de Byzance,
avec cette différence toutefois que, au lieu de deux
moines, il fait intervenir un Persan; peut-être aussi peut-
il se faire que les deux moines, ou au moins l’un d’eux,
fussent de Perse ou d’origine persane. Mais ce que ce
dernier auteur dit d’essentiel, c’est que l'expérience fut
commencée à l'entrée du printemps, — ce qui est abso-
lument conforme à notre usage, — et que les Turcs qui,
dans la suite, s'étaient emparés des ports par lesquels
les Persans se procuraient la soie des Indes, furent très
surpris, lorsqu'ils vinrent à Constantinople, de voir la
manière dont on l’y recueillait, et dont on en faisait des
étoffes dans le pays même.
Les Égyptiens et les Hébreux connurent évidemment
la soie bien avant les sauvages habitants de la Grèce et
de l'Italie. Le mot sericum, pris adjectivement, se trouve
une fois seulement dans la Bible :
Esther, VIT, 15. — «..... et amictus serico pallio at-
que purpureo » — et couvert d'un manteau de soie et de
pourpre.
Il y est aussi pris une fois substantivement :
Ezéchiel, XXvIr, 16. — « Les Syriens ont été engagés
dans votre trafic à cause de la multitude de vos ouvrages ;
et ils ont exposé en vente dans vos marchés des perles,
de la pourpre, de petits écussons, du fin lin, de la soie, et
toutes sortes de marchandises précieuses. »
LE -NATURALISTE 129
Enfin, substantivement aussi, on trouve ce mot dans
l’Apocalypse, XVII, 12. — « Ces marchands d’or et d’ar-
gent, de pierreries et de perles, de fin lin, de pourpre, de
sote, etC. »
Terminons là cet historique du précieux tissu, en fai-
sant seulement observer qu’en France les premiers bas
de soie furent portés par Henri IT, aux noces de sa fille
et de sa sœur.
Mais il existe d'autres soies non moins précieuses, qui
ont fait les délices des raffinés de l'ancien temps, et
même du nouveau.
Divers mollusques produisent une touffe filamenteuse,
au moyen de laquelle ils fixent leur coquille sur les
roches ou aux plantes sous-marines. Au nombre de ces
coquillages sont les moules, les pernes, les tridacnes,
les marteaux, les volselles, et surtout les jambonneaux
(pinne marine, pinne noble). La soie fournie par les jam-
bonneaux est d’un vert brillant quand elle sort de l’eau;
puis, lorsqu'elle a été exposée à l'air et lavée, d’abord à
l’eau de savon, puis à l’eau pure, elle prend un aspect
légèrement brun et mordoré.
Les anciens en fabriquaient des étoffes légères et fort
chères.
Dans son Homélie VIII, Sur les riches, saint Basile, que
je citais tout à l'heure à propos du ver à soie, s'élève
contre le luxe extraordinaire des vêtements, et il dit :
« La mer leur fournit une fleur et une coquille, la pinne
marine (xivy, Aristote), dont les filaments sont plus re-
cherchés que la plus belle laine des moutons », Proccpe
(Edifices de J'ustinien, Liv. III) dit aussi : « .. Une chla-
myde faite avec la laine, non pas de celle que produisent
les brebis, mais de celle qu’on recueille dans la mer;
l'usage est d'appeler pinne marine l'animal qui produit
cette espèce de laine. »
La couleur d’or ou plutôt jaune d’or (üroyoion) de ces
filaments les faisait avidement rechercher pour en fabri-
quer des étoffes, comme le dit encore Astérius, évêque
d’Amasée au 1ve siècle (Discours sur saint Pierre et saint
Paul). Mais mieux encore : les jeunes filles s’en faisaient
des faux cheveux, des frisettes, comme nous l’apprend
Manuel Philès (1275-1340) dans son poème sur la Nature
des Animaux :
« La pinne marine porte une espèce de chevelure ex-
traordinaire qui ressemble aux toiles d’araignée; son
lustre, sa teinte agréable et sa légereté donnent aux
boucles de cheveux des jeunes filles un charme qui sé-
duit leurs amants. »
Mais les anciens n’ont pas conservé le monopole de la
fabrication de postiches ou même de vêtements avec le
byssus de ce coquillage; au xvuI° siècle on en produisait
en assez grande quantité, dont le prix était d'ailleurs fort
élevé, et qui constituaient un luxe peu accessible aux
bourses du commun. En 1754, le pape Benoit XIV recut
d’un des fabricants de ces précieux tissus une paire de
bas dont il fut ravi, car, malgré leur extraordinaire
finesse, ils préservaient ses jambes de la chaleur aussi
bien que du froid.
. Plus récemment, MM. Ternaux ont fait de ces étoffes
avec des pinnes pêchées le long des côtes de la Corse et
de la Sardaigne, et plusieurs marchands de Paris, chez
qui on pouvait les voir, les vendaient jusqu’à trois cents
francs le mètre.
Réaumur appelait ces coquillages les vers à soie de la
mer.
Aujourd’hui encore, à Tarente, à Reggio, à Palerme
et dans les environs de ces villes, on fabrique de mer-
veilleux tissus avec ce byssus; on le file au rouet, et on
en confectionne des bas, des gants, des bourses, etc. La
délicatesse de ces étofles est tellement grande, qu’une
pare de bas de femme peut tenir dans une tabatière de
moyenne dimension.
Mais ce n'est pas encore le byssus du jambonneau qui
détrônera la soie; il est un autre insecte dont le produit
a souvent fait rêver d'ingénieux novateurs, et, en 1708,
le savant Bon, président de la Cour des Comptes de
Montpellier, envoya à l’Académie des sciences des mi-
taines et des bas faits avec de la soie d’araignée.
En parlant de cet homme ingénieux, Valmont de Bo-
mare dit, dans son Dictionnaire raisonné universel d'his-
toire naturelle (Article Soie d'araignée) : « On doit, pour
ainsi dire, autant de reconnaissance aux citoyens zélés
qui, dans leurs travaux, ont tendu à l'utilité publique
sans avoir eu le bonheur d’y réussir, qu'à ceux qui, avec
lés mêmes vues, sont arrivés à leurs fins : ils ont mis
sur la voie; quelquefois, il ne faut qu'un pas de plus
pour la perfection; mais ce pas est réservé à la postérité.
M. Bon, premier président de la Chambre des Comptes
de Montpellier, a envoyé en 1708, à l'Académie des
sciences, des mitaines et des bas de soie d’araignée, Ces
ouvrages étaient aussi beaux et presque aussi forts que
les ouvrages faits avec la soie ordinaire ».
Le président Bon écrivit une brochure sur son procédé ;
elle est intitulée : Dissertation sur l'utilité de la soie des
araignées, par M. Bon, premier président à la Cour des
Comptes de Montpellier. — Montpellier, 1726, in-12. C’est
une réédition (Bibliothèque nationale : S. 11149).
Voici comment il opérait :
« Après avoir fait ramasser 12 à 13 onces de ces coques
d'araignées (Araignées communes du Midi, épéires, etc.), je
les fis bien battre pendant quelque temps avec la main
et avec un petit bâton, pour en faire sortir toute la pous-
sière; on les lava ensuite dans de l’eau tiède, jusqu’à ce
que l’eau qui en sortait füt bien nette. Après quoi, je fis
mettre à tremper ces coques dans un grand pot avec du
savon et du salpêtre, et quelques pincées de gomme
arabique; je laissai bouillir le tout à petit feu pendant
deux ou trois heures. Je fis ensuite relaver avec de l’eau
tiède toutes ces coques d'araignées pour en bien ôter
tout le savon ; je les laissai sécher pendant quelques jours,
et les fis ramollir un peu entre les doigts, pour les faire
carder plus facilement par les cardeurs ordinaires de la
soie, excepté que j'ai fait faire des cardes beaucoup plus
fines. J'ai eu par ce moyen une soie d’un gris très parti-
culier; on peut la filer aisément, et le fil qu'on en tire
est plus fort et plus fin que celui de la soie ordinaire, et
tel que vous le voyez, ce qui prouve qu'on peut s'en
servir pour toutes sortes d'ouvrages.
«.. Les coques d'araignées rendent, à proportion de
leur légèreté, plus de soie que les autres. En voici la
preuve : 13 onces en donnent près de 4 de soie nette; il
n’en faut que 3 pour faire une paire de bas au plus
grand homme ; ceux-c1 ne pèsent que 2 onces 1/4, et les
mitaines environ 3/# d’once, au lieu que les bas de
soie ordinaires pèsent 7 à 8 onces. »
Quant aux propriétés de la soie d’araignée, il s’en
explique ainsi :
« Elle fournit, en la distillant, une grande quantité
d'esprit et de sel volatil ; j'ai vu, par la comparaison que
j'en ai faite, qu'elle en donnait au moins autant que la
soie ordinaire, qui est, de tous les mixtes, celui qui en
130
LE NATURALISTE
donne le plus. Ce sel et cet esprit volatil est très actif:
il change en un beau vert d'émeraude la teinture des
fleurs de mauve; il congèle et réduit en une espèce de
neige la dissolution de sublimé corrosif », etc., etc.
Le fameux P. Jacques Vanière, l’élégant poète du
Prædium rusticum, lui adressa une églogue latine des
mieux écrites, où il le comble d’éloges ; elle se trouve
dans le petit volume où l'inventeur expose ses procédés.
En outre, dès que le bruit de cette découverte se fut
répandu, l’Impératrice, femme de Charles VI, voulut
avoir des gants de soie d’araignée ; le prince de Bruns-
wick écrivit à Bon le désir de l’auguste curieuse, et, en
moins de quinze jours, les gants furent terminés et
adressés à la souveraine. Leurs Majestés Impériales
envoyèrent à Bon une médaille d'or, qu'ils avaient fait
frapper à l’occasion de leur couronnement dans la ville
de Prague."
A la suite de l'envoi gracieux de Bon, d'une paire de
mitaines et d'une paire de bas en soie d’araignée, l’A-
cadémie des sciences pria Réaumur de faire un rapport
sur l'utilité de cette découverte et la possibilité de
lexploiter en grand. Réaumur jeta quelques gouttes
d’eau froide sur l'enthousiasme général, et celui de son
ami Bon en particulier; son rapport peut être lu dans
PHistoire de l'Académie royale des sciences, Paris, tome
de 1710, page 387, sous le titre : Examen de la soie des
Araignées ; il est du 12 novembre.
L'impossibilité de l’exploitation du procédé de Bon, ou
de tout autre semblable, résulte pour Réaumur de trois
difficultés considérables :
1° Où trouver la quantité de bestioles nécessaire pour
entreprendre sérieusement une semblable industrie ?
2° Comment se procurer, au cas où la première ques-
tion serait résolue, la nourriture nécessaire aux trou-
peaux d'araignées qu’on parviendrait à rassembler?
« Quand même, dit-il, on aurait la facilité de prendre des
mouches aussi aisément qu'on le voudrait, toutes celles
du royaume sufliraient à peine à nourrir assez d'arai-
gnées pour faire une quantité de soie peu considérable. »
— Ce qui était parfaitement exact alors, et ce qui l’est
encore aujourd'hui.
3° Ces insectes sont tellement féroces que, quoi qu’on
fasse, ils se dévorent toujours entre eux. Impossible
donc de les tenir en nombre considérable rassemblés dans
un même local,
Il ajoute : « 11 faudrait 55,296 araignées pour avoir
une livre de soie, lesquelles araignées il aurait été néces-
saire de nourrir pendant plusieurs mois séparément, » Il
disait enfin que ce n'était pas sur les coques d'araignées
qu'il fallait travailler, mais sur le produit des filières, au
fur et à mesure qu'il sortait.
Eh bien, ces travaux extraordinaires furent repris,
d’après cette indication, par plusieurs curieux, et au-
jourd'hui même nous avons des magnaneries d'araignées.
De 1777 à 1791, Raymonde-Maria de Tremeyer fit, en
Espagne, de nombreuses expériences sur la soie de
l’Epéire diadème, et réussit, avec cette substance, à fa-
briquer divers objets aussi beaux et aussi brillants que
s'ils eussent été fabriqués avec la soie du Bombyx mori
(bombyx du mürier).
Ralt, négociant anglais, avec la soie de l’Epéire dia-
dème aussi, obtint, en moins de deux heures, un fil de
6.000 mètres (six kilomètres!) obtenu à l'aide de vingt-
deux araignées : cela faisait une moyenne de 273 mètres
par bestiole.
D’Azara rapporte qu'au Paraguay il existe une arai-
gnée qui fait des cocons de 3 centimètres de diamètre,
de couleur orange, que l’on file et dont on fait des étoffes
dont la couleur est permanente.
Alcide d'Orbigny dit, dans son Voyage dans l'Amérique
méridionale, qu'il s'était fait fabriquer avec des fils
d’araignée un vêtement qui avait pu résister aux plus
fortes fatigues ; c'était un pantalon ; il rapporta même au
Muséum d'histoire naturelle des échantillons de la soie
de cette araignée.
Jadis Louis XIV aussi avait voulu avoir un habit de
cette étoffe spéciale, dont, malgré l'extrême rareté, il se
dégoûta bientôt, en raison de son peu de solidité.
Laissons de côté une foule d'essais aussitôt abandonnés
qu'entrepris, et arrivons au R. P. Chamboué, mission-
naire apostolique à Tananarive (Madagascar). Ce savant
prêtre s’est fort occupé de la soie des araignées, et sur-
tout d’une grosse espèce carnassière, l'Halabé mada-
gascariensis, et l'on peut voir le résumé de ses travaux
dans la Revue des sciences naturelles et appliquées
(n° 6, 20 mars 1892), Il reconnut que c’est après la ponte
que l’Halabé fournit la plus grande quantité de soie.
Après sa ponte dans une des cages d’études installées à
cet effet, une de ces bestioles, soumise au dévidage, lui
donna 300 mètres de fil environ, le 2 décembre; le 4 dé-
cembre, environ 300 mètres; le 6, — 450 ; le 10, — 700;
et le 12, — 150 mètres, Total: 900 mètres en 10 jours.
Une autre Halabé en donna 1.300 mètres-en 7 jours;
Une autre, 1.300 mètres en 11 jours;
Une autre enfin, près de 4.000 mètres en 27 jours.
Il examina le degré de ténuité et d’élasticité (allonge-
ment avant rupture) de ces fils; le résultat moyen des
diverses épreuves faites à une température à peu près
constante de 17, et à 68° d'humidité relative, fut que le
fil de l’Halabé pouvait, sans se rompre, supporter un
poids de 3 gr. 26 centig., et s'allonger de 12,18 0/0.
Ses essais ont été continués, dans le pays même, et
avec un outillage perfectionné qui permet d'obtenir de
magnifiques résultats. J’emprunte les détails suivants à
M. Borel de la Révolière, qui a écrit à ce sujet, dans le
Matin, une chronique remplie d'intérêt et de détails fort
curieux.
La femelle seule produit le fil; elle habite les grands
bois de l'ile, où sa toile est à l'abri des grands vents, et
s’y trouve en quantités innombrables ; néanmoins elle vit
solitaire et — comme cela a lieu chez la plupart des
espèces — le mâle ne s'approche d’elle qu'après avoir
pris toutes sortes de prudentes précautions, pour lui faire
ses offres de services, l’habitude de l’acariâtre personne
étant de le croquer sur place, si elle n’est pas d'humeur
causeuse,
A l'École professionnelle de Tananarive, où l’on fit les
premiers essais d'élevage, on avait mis 200 de ces arai-
gnées dans une caisse treillissée. Aussitôt enfermées, les
aranéides filèrent leur soie sur les parois du logis, et
bientôt le treillis fut hermétiquement clos: plus d’in-
sectes vagabonds', par conséquent, disette, famine et
égorgement général — comme le disait si bien Réaumur :
les dernières qui furent retirées de ce charnier étaient
énormes de grosseur.
L’Halabé s'éloigne rarement de son gîte et file là où
elle se trouve; c’est sans la moindre difficulté et sans
nécessaires au dévidage de la soie.
M. Jully, architecte, directeur de l'Ecole profession-
|
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LE NATURALISTE 151
nelle de Tananarive, reprit ces essais quelque temps
après le R. P. Camboué. Une machine, fabriquée à
l'École, ne donna aucun bon résultat.
M. Nogué, sous-directeur, reprit l'étude au moyen d’un
appareil perfectionné, qui se compose d’une manivelle
manœuvrée à la main et mettant en mouvement une
grande bobine placée à l'extrémité de la machine. À
l’autre bout se trouve une planche rectangulaire et ver-
ticale dans laquelle sont percées huit demi-lunes, se fer-
mant par des leviers à guillotine. Les araignées fileuses
sont mises dans ces demi-lunes, de manière que l’ab-
domen seulement soit placé du côté de la manivelle; les
huit brins qu’elles donnent, réunis par un crochet métal-
lique, viennent s’enrouler sur la bobine lorsque la
manivelle est mise en mouvement. Le fil est ensuite
doublé et tordu sur des machines ordinaires.
Les manipulations nécessitées par ces diverses opéra-
tions suffisant surtout à ternir la teinte d’or admirable
de la soie, M; Nogué créa un autre appareil, actuellement
en usage à l'Ecole, qui tord en même temps au dévi-
dage les brins fournis par douze insectes traités.
Cette torsion atteint 790 tours par mètre; l'appareil pèse
environ 60 kilos. Le fil obtenu est doublé ensuite, de sorte
que, finalement, il se compose de 24 brins.
Tous les matins, les jeunes filles chargées des machines
mettent des araignées plein un panier d’osier qu’elles
placent près d’elles, ainsi qu'un panier vide pour y mettre
les araignées après le dévidage. Elles chargent une pre-
mière fois l’appareil à l'aide de douze insectes dont elles
recueillent les brins, les réunissent dans le crochet mé-
tallique, puis mettent la bobine en mouvement à l’aide
d’une pédale. Quand une bestiole cesse de donner du fil,
elles l’enlèvent et la remplacent par une autre, sans qu'il
y aitarrêt, et ainsi de suite jusqu'à la cessation du travail,
Les aranéides dévidées sont alors remises dans une partie
du parc, et on ne les utilise pas avant une dizaine de
Jours de repos. Chacune d'elles donne trois ou quatre
cents mètres de brins, en moyenne, à chaque opération.
On à fait la comparaison des brins de soie de l’Halabé
qui ont été obtenus par le P, Camboué avec les baves du
bombyx, à la commission des soies de Lyon; en voici
les résultats, relativement aux vers à soie de France :
Titres en grammes à 500 millimètres: vers à soie, 0,918 ;
Halabés, 0,233.
Elasticité: vers à soie, 19 0/0 ; Halabés, 17 0/0.
Ténacité : vers à soie, 65 grammes ; Halabés, 66 grammes.
Diamètre du brin: vers à soie, 3,315 : Halabés, 0,065.
La couleur naturelle de la soie d'Halabé dépasse en
beauté toutes les autres. Sa nuance est tellement bril-
lante, qu’auprès d'elle l'or le plus pur pâlit. Attendons-
nous à des merveilles pour l'Exposition prochaine: on
parle déjà d’un ciel de lit éblouissant et d’étoffes qui
feront rêver bien des femmes.
E. SANTINI DE RIOLS.
L'ACTE RÉFLEXE, L'INSTINCT & LA RAISON
Une opinion encore généralement enseignée dans les
ouvrages de philosophie classique est celle-ci : l'animal
n'est guidé que par l'instinct, l'homme seul est doué de
raison. Cette théorie avait atteint son maximum d'in-
vraisemblance avec Descartes et les philosophes du
xvn* siècle, pour lesquels l'animal n’est qu'un automate.
Elle avait du reste un fondement religieux et c’est ce qui
explique qu'aujourd'hui encore elle est implicitement ou
explicitement admise par un grand nombre de nos con-
temporains. Il s’agit de placer l'homme sur un piédestal,
au-dessus et en dehors de la nature, d'en faire « limagé
de Dieu »; et pour cela on a ravalé d’autant la bête.
Comme on voit bien que les scolastiques, qui ont mis
ce néfaste système à la mode, ne s'étaient jamais donné
la peine d'observer le monde vivant!
Certes, si l’on considère l’homme de haute culture
intellectuelle et qu’on le compare à l'animal même le plus
élevé, tel que le chien, le singe ou l'éléphant, la différence
parait énorme. Il semble qu'il y ait entre ces êtres un
fossé absolument infranchissable, l’un s’occupant des
plus hautes spéculations scientifiques ou littéraires,
l’autre n'étant guidé que par les idées et les passions les
plus simples, celles qui ont pour objet la satisfaction des
besoins physiques, la reproduction, la famille ou tout au
plus le troupeau. Mais dans l'espèce humaine, combien
sont rares ceux qui s'intéressent à la recherche désin-
téressée de la vérité! Ne voyons-nous pas au contraire
nos paysans, n0s ouvriers soi-disant civilisés, de même
que la plupart des sauvages, ne songer qu’à satisfaire
leurs besoins physiques, ne s'intéresser qu'à leur
propre bonheur ou à celui de leur famille ou de leur
clan ? Il est certain qu'entre cesgens, d’une part, auxquels
tout plaisir scientifique ou esthétique est fermé, et
l'animal, d'autre part, la différence est bien faible.
D'autant plus qu'il est faux de dire que celui-ci soit abso-
lument étranger à toute recherche désintéressée. La
curiosité dont font preuve la plupart des animaux à la
vue d’un phénomène nouveau pour eux n'est-elle pas
l'embryon de la recherche scientifique? De même, on ne
saurait dénier un goût artistique très développé à ces
oiseaux d'Australie qui disposent au-devant de leur nid
une sorte de jardin orné de fleurs et d'objets brillants.
Dans bien des cas, d’ailleurs, les sons musicaux émis par
certains animaux rentrent dans la catégorie des plaisirs
esthétiques absolument désintéressés.
Si nous abandonnons ces généralités pour serrer le
problème de plus près, nous constatons que tout acte,
suivant son degré relatif de conscience ou d’automa-
tisme, fait partie d’une des divisions suivantes : il est
intellectuel, instinctif ou réflexe. Sont intellectuels tous
les actes combinés en vue d’un but à atteindre qui est
nettement percu; de plus, ces actes ont pour caractère
d’être accomplis d’une facon variable suivant les circons-
tances et les individus. Il est inutile d'insister, nous
accomplissons tous les jours des actes de ce genre.
Moins cependant qu'on ne pourrait le croire. En effet,
si l'acte est fréquemment répété, il tend à s’effacer du
champ de la conscience pour devenir automatique.
Ainsi l'habitant des grandes villes évite les voitures sans
même s'en rendre compte, tandis que le provincial,
moins accoutumé, met toute son attention pour ne pas
se faire écraser. Ainsi encore les mouvements de lécri-
ture ou du piano sont inconscients et automatiques chez
les personnes exercées, tandis qu'ils sont voulus et
dirigés par la conscience chez les débutants. On remar-
quera en mème temps que, à mesure qu'un acte sort du
champ de la conscience pour devenir automatique, son
exécution devient de plus en plus facile.
Si maintenant nous supposons qu'un acte habituel soit
très utile à la conservation de l’espèce, les individus qui
eu sont doués se perpétueront en plus grand nombre que
les autres, en vertu du principe de la sélection naturelle,
et transmettront à leurs descendants la faculté d'exécuter
automatiquement cet acte quand se présenteront les cir-
constances qui le rendent nécessaire. Nous aurons alors
affaire à l'instinct, qui n'est en somme qu'une habitude
héréditaire, ou, comme on l'a dit, une habitude de
l'espèce. L'acte instinctif est accompli automatiquement
et de la même facon par tous les individus semblables;
d'ailleurs, en tant que faculté, l'instinct apparait souvent
d'emblée sans qu'aucune éducation intervienne pour en
assurer le développement. Les actes qu'il suscite sont
accomplis alors même qu'ils ont cessé d’avoir un but,
tels les essais de construction des castors en captivité.
On a dit que l’homme n'était pas doué d’instinct. Ce-
pendant, dans au moins deux circonstances importantes
de sa vie il est guidé par une habitude héréditaire. Le
nouveau-né qui recherche le sein de sa mère est, dès sa
naissance, passé maitre en l’art de téter; s'il ne l'était
pas, l'espèce s'éteindrait. D'autre part, l'instinct sexuel
existe chez l’homme comme chez les autres animaux et
n’a en somme rien à voir avec les enjolivements que les
poètes et les psychologues ont brodés sur ce qu'ils ap-
pellent l'amour.
L'acte instinctif n’est, du reste, pas essentiellement dis-
tinct de l'acte intellectuel. Pour employer la terminologie
des philosophes, il appartient au domaine du subconscient
et non à celui de l'inconscient, c'est-à-dire que, quoique
très obscurcie, la conscience persiste et, en présence
d’un obstacle, peut être réveillée et reprendre la direction
de l’acte. Il en est, d’ailleurs, de même de l’acte habituel.
Si une circonstance imprévue se présénte, l'individu qui
marchait ou qui écrivait d’une facon tout automatique
reprend conscience de son acte et le dirige. De même,
l'animal qui accomplit une action instinctive peut, dans
la plupart des cas, interrompre le cycle des actes com-
mencés et les accommoder à des circonstances nouvelles.
C’est pourquoi, quoi qu’on en ait dit, l'instinct est per-
fectible ; nous ne citerons que le cas des animaux devenus
les commensaux de l'homme, les hirondelles et les
cigognes par exemple, qui, avant qu'il n’existât des mai-
sons, devaient construire leurs nids dans de tout autres
situations. Enfin, la variabilité des instincts est encore
prouvée par ce fait que l’on peut en créer de toutes pièces ;
témoin le chien d’arrêt,
Si nous supposons que la conscience diminue encore,
nous arrivons au domaine des actes réflexes. Une lumière
trop vive nous fait cligner des yeux, sans que la con-
science ait à intervenir. Bien plus, une grenouille déca-
pitée se déplace si on la pince, ou bien elle essuie avec
la patte gauche l'acide qu’on vient de verser sur le
membre droit. Un pigeon auquel on à enlevé le cerveau
vole à terre si on le jette d’une certaine hauteur. Et ce-
pendant, ces animaux sont, du fait de l'expérience même,
privés de toute espèce de conscience. Il y a donc chez
les êtres vivants des mécanismes tout formés qui font,
dans des circonstances données, agir l'organisme de la
facon la plus favorable à sa conservation. Cette loi est
tout à fait générale et s'étend même au règne végétal où
les feuilles, par exemple, prennent toujours la position
la plus propice à la fonction chlorophyllienne.
Mais entre l’acte purement réflexe et tout à fait incon-
scient et l’acte intellectuel le plus élevé, il y a tous les
degrés intermédiaires. Nous avons vu qu’on trouve chez
LE NATURALISTE
l'nomme les trois genres de facultés; chez l'animal, le
réflexe et l’instinct existent, cela n’est contesté par per-
sonne. Quant à l'intelligence, il suffit d'avoir vécu dans
l'intimité d'un chien ou d’un singe pour savoir que toutes
les qualités intellectuelles ou affectives de l’homme se
trouvent à l’état plus ou moins développé chez ces ani-
maux. Les ouvrages classiques de L. Büchner (Vie psy-
chique des bétes), V.. Meunier (L'avenir des espèces —
Sélection et perfectionnement animal), Romanes (L’in-
telligence des animaux), etc., fourmillent d'exemples qui
mettent ce fait absolument hors de doute. Il n’y a entre
l'homme et les autres animaux que des différences de
degré; nous le verrons dans la suite, quand nous expo-
serons les fondements anatomiques du réflexe, de l’ins-
tinct et de la raison. Mais nous avons eu en vue jusqu’à
présent les vertébrés et surtout les mammifères. Nous
aurons, avant d'aller plus loin, à étudier l'instinct chez
les insectes, qui présentent à notre observation nombre
de problèmes curieux. Ce sera l'objet de notre prochaine
étude.
Dr L. LALOY.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 30 avril.
Modifications de structure observées dans les
cellules subissänt la! fermentation propre. (L. Marru-
cuor et M. Morzrarp.) — On a donné le nom de fermentalion
propre à la fermentation alcoolique qui se produit, en dehors
de l'intervention de tout organisme étranger, dans les tissus
sucrés des êtres vivants, placés à l'abri de l'oxygène. Les
auteurs ont reconnu qne les cellules qui vivent dans ces con-
ditions subissent des modifications de structure qui peuvent
même, dans une certaine mesure, permettre de caractériser
morphologiquement le phénomène physiologique de la fer-
mentation propre. Grâce aux résultats nombreux et concor-
dants des expériences, on peut donner un critérium morpho-
logique de la fermentation propre. Toute cellule en état de
fermentation propre présente : 1° un noyau très clair; 20 de
la chromatine en faible quantité et disposée à la périphérie
du noyau; 30 un protoplasma très vacuolisé; 4° de nombreuses
gouttelettes d'huile essentielle formées à l'intérieur de ce proto-
plasma,
Les zones et les provinces botaniques de l'Afrique
occidentale française. (M. A. Cnevaier) — Par les
épaisses forêts de la Casamane, de la Bagaé et de la Volta,
la flore du Sénégal se rattache à la zone des forêts de la
région équatoriale de Afrique; par les plaines sablonneuses et
les dunes arides du Nord, elle se lie à la flore désertique du
Sahara. Entre ces deux extrêmes, la végétation présente une
variété infinie d’aspects. En allant du Nord au Sud, on observe
successivement : La zone sahélienne, caractérisée par quelques
espèces sahariennes et des espèces ligneuses peu nombreuses, de
taille souvent réduite etne formant que des taillis très peu épais.
Le sol est presque partout sablonneux etnu. La zone souda-
nienne, constituée en grande partie par des plateaux de /atérite
presque nus en saison sèche et qui deviennent en hivernage (de
juin à novembre) d’épaisses prairies ou des savanes formées de
hautes graminées et de nombreuses légumineuses. Les arbres
sont d'espèces très variées et souvent de belle taille. Ils ne
forment jamais de forêts impénétrables ou même épaisses. Ils
sont rarement enlacés par les lianes. La zone quinéenne, cons-
tituée à proximité de la côte par des terrains bas et marécageux,
souvent coupés de larges estuaires saumâtres bordés de palétu-
viers. Dans l’intérieur, le pays est souvent montagneux et cou-
vert de rivières ou de ruisseaux à courant assez rapide. Les
régions basses et les vallées sont généralement constituées par de
hautes forêts compactes ou même impénétrables lorsque les
arbres sont enlacés de lianes. Il y existe également de grandes
LE NATURALISTE 133
clairières, couvertes de hautes graminées, de rizières, de champs
de mil. Les régions montagneuses et les plateaux de latérite sont
couverts de faillis clairs et de savanes, comme dans la zone sou-
danienne. Les cours d'eau sont souvent bordés d'un épais fouillis
de végétaux, parmi lesquels dominent les Bambous, les Eleis,
les Raphia.
Sur les granites et syénites quartzifères à œgyrine,
arfvedsonite et œnigmattie de Madagasear. (M. A. La-
cRorx.) — Dans trois régions de Madagascar, très éloignées les
unes des autres : — 10 de l'Ambongo, non loin de la côte occiden-
tale de l’île et à environ 200 kilomètres au sud-sud-est de Majunga ;
20 des collines dominant la baie de Passandava, sur la côte
nord-ouest, au sud de Nossi-Bé; 3° du bassin du Mangoro, sur
le flanc oriental du massif d’Ankaratra, — se rencontrent des
syénites à feldspaths exclusivement alcalins, caractérisées par
l'existence de l’ægyrine associée à une ou à plusieurs amphiboles
sodiques; le quartz est constant, souvent même assez abondant
pour que la roche doive être considérée comme un véritable
granite, comparable au natrongrande de la région de Cris-
tiana. Ces syénites ont généralement la structure de la nordmar-
kite de M. Brügs er ; lee en diffèrent essentiellement par l'ab-
sence de mica, l'existence de l’œgyrine comme seul pyroxène.
Dans les gisements de la baie de Passandava, ces granites et
syénites alcalines. sont accompagnées de roches à néphéline
comme en Norvège; le nombre des échantillons recueillis dans
les deux autres régions est si faible qu'il n'est pas possible de
tirer de conclusion de l'absence de roches similaires dans les
collections étudiées.
Sur les fonetions de la tige cristalline des Acé-
phales. (Hexrr Courix.) — Peu d'organes ont été, autant que
la tige cristalline des Acéphales, l’objet d'hypothèses différentes.
Cette tigelle anhyste a été considérée, en effet, suivant les
auteurs, tantôt comme un appareil copulateur, tantôt comme un
organe de soutien pour la masse viscérale, un manubrium
destiné à agiter les matières nutritives contenues dans l'esto-
mac, une substance de réserve, un suc digestif, etc. Il résulte
des expériences de l’auteur que la tige cristalline des Acéphales
est un suc digestif, une sorte de comprimé de diaslases, con-
lenant beaucoup d'amylase el un peu de sucrase, le tout noyé
dans une malière muqueuse, laquelle à sans doute pour but
d'empêcher la trop rapide dilution de la tige dans l’eau de mer
contenue dans l'estomac, et peut-être aussi d'agglutiner les ma-
tières solides qui flottent dans celui-ci.
Séance du T mai 1900.
Note sur um tubercule alimentaire nouveau du
Soudan,l Ousounify (Plectranthus Coppini Cornu).M. (Maxime
Cornu.) — Au commencemen t de l’année 1894,M. Maxime Cornu
reçut de M. le D° Coppin, médecin des colonies au Soudan, un
tubercule de couleur noire, alimentaire, farineux, qu'il déclarait
analogue à la pomme de terre comme saveur. Ce tubercule dé-
signé dans le pays sous le nom d’Ousounify est cultivé et vendu
sur les marchés. Dès le premier développement, l'auteur re-
connut une labiée. — Ces tubércules de l'Ousounify sont ellip-
soides, de forme variable, plus ou moins arrondis aux deux
extrémités; ils sont de couleur noire et lisses, c’est-à-dire ni
rugueux, ni écailleux, — Ils sont sûrement d'origine cauli-
naire: ce sont des tiges modifiées, comme cela a lieu dans la
Pomme de terre et dans le Stachys tuberifera; mais dans le
Plectranthus, il n'y a aucun étranglement; le tubercule n'est
pas composé, il est en général simple, quoiqu'il puisse présen-
ter deux ou trois extrémités végétatives arrondies, lisse et non
muni d'étranglements. — Il est amylacé, ce qui le distingue du
Stachys. — Il existe donc pour les pays chauds des tubercules
alimentaires appartenant à la famille des Labiées, plus ana-
logues à la pomme de terre qu'aucun de ceux qui sont cultivés
généralement. Très faciles à cultiver et à multiplier, ils donnent
un rendement abondant; ils peuvent acquérir un très gros vo-
lume et peuvent sans doute être améliorés et sélectionnés par la
culture, — Enfin, ils admettent un climat véritablement tropical,
ce que la pomme de terre n'admet pas; ils méritent donc la plus
sérieuse attention.
Séance du 14 mai 1900.
L’assimilation chlorophyllienne chez les plantes
d’'appartement.(M. En. Griron.) — Les plantes d'appartement
n'ont pas plus que nos espèces indigènes le pouvoir de dé-
composer l'acide carbonique à une hunière très faible. Dans les
endroits peu éclairés de nos pièces, mais où l’on peut encore
-lire facilement des caractères tracés au crayon, elles n’assimilent
pas. Les minima d'intensité lumineuse auxquels la fonction
chlorophyllienne est encore capable de s'exercer sont variables
chez elles comme chez?les plantes de nos pays et de même
ordre que ceux de ces dernières; de plus, il n'y à pas de rela-
tion {nette entre ces minima et les préférences qu'elles mani-
festent pour des situalions déterminées à l'intérieur de nos
demeures. Si cependant, à des lumières peu intenses, elles
émettent parfois de l'oxygène, alors que [nos végétaux déga-
gent de l'acide carbonique, c'est que leur respiration peu
active n'arrive pas à masquer la fonction assimilatrice. Grâce à
ce faible pouvoir respiratoire, qui tient soit à leur nature propre,
soit surtout aux mauvaises conditions dans lesquelles elles ont
vécu, elles peuvent résister plus longtemps que d’autres dans
nos appartements; car alors, quand même elles n’assimileraient
que très peu ou pas du tout, elles consomment peu de matériaux
et leurs réserves s'épuisent lentement, ce qui leur permet de
végéter plus ou moins misérablement sans périr et d'attendre,
si l’on veut les régénérer, qu’elles soient exposées à nouveau
dans des conditions plus favorables à leur développement.
Séance du 21 mai 1900.
Eruption du volean Mayon, dans l'ile de Luçon. —
Ce volcan se trouve, par 1301440” de latitude Nord, au, nord-
ouest de la ville d'Albay, dans la partie sud-est de l'ile de Luçon.
Ses éruptions de 1766, 181% et 1897 ont causé de grands dégâts,
détruit plusieurs villages et fait périr un grand nombre d'habi-
tants. Le 3 mars dernier, à 2 heures du matin, une nouvelle
éruption se produisit et prit immédiatement des proportions qui
effrayèrent les populations voisines. Le volcan lançait des pierres,
une lave brûlante et des cendres qui enveloppaient d'un brouil-
lard épais, à une grande distance, la zone environnante. Le
Mayon resta en activité tout le jour suivant. L'éruption. fut
accompagnée d'une forte tourmente qui secouait les maisons
comme l'aurait fait un tremblement de terre. Cette éruption
n'ayant été précédée d'aucun phénomène précurseur, on ignore
si les habitants des villages qui longent les flancs du volcan ont
eu le temps de s'enfuir.
Remarques sur certains points de l’histoire de la
vie des organismes inférieurs. (M. J. Kunsrzer.) — S'il
est un élément dont la manière d'être primitive et le point de
départ soient obscurs, c'est sans contredit le noyau cellulaire,
Universellement répandu dans l'immense majorité des cellules
et absolument indispensable à leur existence, le corps nucléaire
semble disparaître brusquement aux confins inférieurs du règne
organique, ou, inversement, apparaitre brusquement dès “les
degrés les plus humbles de l'échelle des êtres. Il existe des ana-
logies étroites entre certains noyaux et certaines spores, de na-
ture à attirer l'attention sur des liens de parenté possibles entre
eux. S'il en était réellement ainsi, nos connaissances morpholo-
giques en subiraient un contre-coup de haute importance. Le
noyau cellulaire ne serait-il autre chose que le résultat de la
transformation d'un bourgeon sporogène, adapté à un rôle nou-
veau ? Serait-il un vestige d'un processus reproducteur détourné
de son but primitif? Une semblable hypothèse a l'avantage
d'expliquer la vitalité intense du noyau; elle rend un compte
rationnel de l'apparition d'un élément qui, jusqu'ici, ne semblait
tirer son origine d'aucun précurseur, de même qu’elle permettrait
de comprendre la constitution de certains êtres plurinucléés, en
quelque sorte, d'emblée.
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Lot de Chrysomélides européennes : Halticides,
Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
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134
LE NATURALISTE
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Ne proposer que des Insectes frais et intacts)
S'ADRESSER À LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, Naturalistes, RUE DU BAC, 46, PARIS
Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vius.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata,
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum.
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini.
— oleiperda.
Hy'urgus piniperda.
— ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
,— stenographus.
— Jlaricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
— flavimanus.
— rufimanus.
— tristis.
— Jentis.
— pallidicornis.
— nubilus.
Rhynchites betulæ.
— populi.
— betuleti.
— conicus.
— cupreus.
— bacchus.
Apion apricans.
— Craccæ.
— viciæ.
— flavipes.
— flavofemoratum.
— pisi.
— æneum.
tenue.
— VOrAX.
— violaceum.
— hæmatodes.
— pomonæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
ligustici.
Otiorhynchus rancus. .
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
—. napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arietis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberca linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica oleracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Névroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hymènoptères.
Vespa crabrc.
— germanica.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopæus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
‘| Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— Sspinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— xibis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
—. compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lépidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassicæ.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbis.
Ino pruni.
— ampelophaga.
Trochilium apiforme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella,
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Sehirus bicolor.
12 JUN 1900
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
— Ornata.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
— _viridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— lanuginosa,
Aphis rosæe.
— cercalis,
— fabæ.
— pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tiliæ.
— salicis.
— persicæ,
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hææmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
— pyri.
— brassicæ.
-Lasioptera obfuscata.
Simulium ornatum.
— maculatum.
— reptans.
Bibio Marci.
— hortulanus.
Tabanus bovinus.
Hææmatopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis,
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus olec.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis ft.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
te ni +
29e ANNÉE
LE CYGNE CHANTEUR
Description. — Mœurs.—Chasse — Migration.
Le chant du Cygne.
Les Cygnes d'Europe.
Le Cygne chanteur (Cygnus musicus), le Cygne sau-
vage (Cygnus ferus) dont il est question dans cet article,
n’est pas, comme l’a cru Buffon, l'ancêtre du Cygne
domestique. L'oiseau familier qui règne sur les pièces
d’eau de nos parcs et promène sa grâce altière sur les
bassins de nos jardins publics descend d'une autre es-
pèce (Cygnus olor), dont les réprésentants vivent, à l'état
de liberté, dans le nord de l'Europe et en Sibérie, et
visitent, dans les hivers rigoureux, les côtes maritimes
de nos départements septentrionaux. On en tire quel-
quefois sur le littoral de la Manche, mais ils s'y mon-
trent beaucoup plus rarement que le Cygne chanteur:
Celui-ci est le Cygne de la légende qui, au dire des
poètes, exhale en sons harmonieux les râles de son
agonie.
Mollia defecta modulatur carmina lingua
Cantator Cygnus funeris ipse sui.
(MARTIAL.)
Nous verrons ce qu'il faut penser de la mélodie fu-
nèbre du Cygne expirant, mais il importe de fixer avant
tout en quoi ce Cygne chanteur diffère du Cygne domes-
tique, le Cygne muet, le plus connu et le plus admiré.
Il est d’abord de taille moins forte, de formes plus
ramassées. Puis son bec est dépourvu de caroncule,
jaune à la base, noir à la pointe, tandis que celui du
Cygne domestique est rouge dans toute son étendue, à
l'exception de l'onglet, des narines et des bords des
mandibules frottés de noir, et porte en outre une pro-
tubérance frontale d’un noir profond. Ces caractères
suffisent pour qu'on ne puisse confondre les deux es-
pèces. Les allures du Cygne chanteur sont aussi un peu
dissemblables. Ses mouvements sont moins gracieux, il
nage avec moins d'élégance, son cou se recourbe avec
moins de souplesse et il lé tient presque constamment
droit et élevé. Son plumage est d’ailleurs d’un blanc pur
comme celui de son congénère, avec le sommet de la
tête et la nuque légèrement teintés de jaune.
Ce west pas seulement par ces marques extérieures
que le Cygne chanteur se distingue du Cygne domes-
tique, il s’en éloigne encore par une disposition très diffé-
rente de la trachée-artère et du sternum. Chez lui la
: trachée-artère, avant de se rendre aux poumons, forme
deux replis qui se logent dans l'épaisseur du sternum;
chez le Cygne domestique, au contraire, la trachée-
artère n'offre pas de circonvolutions et se rend directe-
: ment aux poumons, :
= Ce Cygne habite les régions du cercle arctique et cer-
taines parties de la zone tempérée de l'hémisphère bo-
réal. On le trouve jusque dans le centre de l'Asie. Mais
ce qui est surprenant, c’est que cet oiseau, qui appartient
si évidemment à la faune septentrionale, vit aussi séden-
taire en Grèce, D’après von der Müble et Lindermayer,
il niche dans les lacs de Kopai et de Likari et dans les
lacs de l'Acarnanie, au nord-ouest du golfe de Corinthe.
Toutefois sa véritable patrie est bien la zone froide de
Le Naturalisle, 46, rue du Bac, Paris.
2 SÉRIE — N° 3 1 9
15 JUIN 1900
notre hémisphère. Son aire de dispersion part de l’'Eu-
rope, s'étend dans tout le nord de l'Asie, franchit le
-détroit de Behring et aboutit dans l'Amérique septen-
trionale. En hiver il émigre. Nous le voyons alors sur
notre littoral, rarement dans l’intérieur des terres. Quel-
ques-uns s'arrètent dans nos départements méridionaux,
sur les étangs qui bordent la côte. Un plus grand nombre
se rendent dans le nord de l'Afrique, en Égypte, en Tu-
nisie, en Algérie, au Maroc. Mais la migration d'hiver la
plus importante parait s'effectuer dans la direction de
l'Est. On trouve, en effet, dans cette saison, une quan
tité considérable de ces oiseaux sur tous les lacs de la
Russie centrale, à l'embouchure des fleuves qui se dé-
versent au sud et sur les lacs salés du sud-est de l’Eu-
rope. Quand la glace commence à recouvrir les eaux où
ils se sont établis, et même souvent avant que les fortes
gelées ne soient venues les surprendre, les Cygnes, doués
de cette prescience des changements de température que
possèdent la plupart des oiseaux, abandonnent ces lieux
d'hivernage. Les uns gagnent en toute hâte la Baltique
et la mer du Nord, les autres se dirigent vers la mer
Noire, ou encore plus loin, aux rives attiédies du Sud-
Ouest. Ce que recherchent les Cygnes, c'est l'eau libre
de glace. Ainsien Islande où le courant du Gulf-Stream
et les nombreuses sources chaudes de cette ile leur mé-
nagent une suffisante quantité d’eau qui ne se congèle
jamais, tous n'éigrent pas, quelques-uns seulement se
décident à partir.
A la fin de l'hiver, les Cygnes qui ont émigré se met-
tent en route pour revenir dans les pays que la rigueur
du froid leur a fait quitter et où ils ont l'habitude de se
reproduire, Le passage de retour à lieu pour la France et
l'Europe centrale dès le milieu de février et en mars,
On les revoit le long des côtes maritimes, inais 1ls sé-
journent peu, à moins que la recrudescence du froid ne
leur fasse craindre de trouver plus au Nord les eaux en-
core prises.
Au mois de février 1895, je me trouvais en déplace-
ment de chasse dans la baie de Somme. Pendant une
quinzaine de jours, le froid fut très vif. La mer charria
des glaçons. Le flux les poussait comme un troupeau
désordonné jusqu'au fond de la baie, et la retraite du
flot les y laissait accumulés en facon de banquise. Ces
bocs irréguliérement posés les uns sur les autres et
soudés ensemble, rejoignant les deux rives ensevelies
sous une neige durcie, le ciel bas et brumeux qui s’éten-
dait sur tout ce coin de la côte picarde, tout donnait la
sensation de quelque paysage polaire subitement ap-
paru. Beaucoup d’oiseaux aquatiques, les uns arrêtés
dans leur voyage vers le Nord par le retour inopiné du
froid et obligés de rétrograder, les autres surpris sur les
lieux mêmes, erraient à l'aventure dans ces sites dé-
solés. Des oies dont j'avais vu passer les précoces ca-
ravanes quelques jours auparavant avaient interrompu
leur route pour venir chercher un refuge dans les mol-
lières des criques. Des canards, des colverts, fuyant les
étangs et les cours d’eau congelés, voletaient cà’et là,
atfamés, et à haute mer l'on voyait passer, flottant au
gré des vagues, des glacons chargés de milouins et de
siffleurs, raides et mornes, immobilisés par la gelée. Et
pourtant les chasseurs n'avaient cure de ce gibier en
détresse, car, depuis la veille, de nombreuses troupes de
Cygnes cireulaient dans la baie. Les efforts se concen-
traient à la poursuite de ces superbes oiseaux, dont la
présence insolite en telle quantité exaltait toutes les
136 LE
ardeurs. De mémoire de chasseur, disait-on, on n'avait
vu pareille affluence de Cygnes. Pour ma part, j'en
comptai trente-deux, dans une après-midi, sur un es-
pace de cinq ou six kilomètres et sur un seul côté de la
baie. Ils formaient de petits groupes de trois, cinq, sept
et huit individus. Bien que le froid et la faim les eussent
fait se départir un peu de leur prudence habituelle, trois
seulement furent abattus ce jour-là. J'en vis plusieurs
longer d'un vol bas le quai même du Crotoy,et d'autres
traverser le port à la hauteur des mâts des bateaux de
pêche, aux yeux amusés des matelots. On en tua un
grand nombre les jours suivants, un peu partout, dans
la baie, surla côte et en mer. Mais pareille aubaine est
tout à fait exceptionnelle, et dans les hivers ordinaires
on est heureux d’en rencontrer de temps en temps quel-
ques-uns.
Le chasseur entend alors, au loin, à travers la brume,
des notes flütées et percantes, qui, à distance, parais-
sent très douces — plus pleines et rudes à l'oreille à
mesure que le son se rapproche, Elles annoncent l'ar-
rivée des Cygnes. Bientôt émergent du brouillard de gros
oiseaux blancs, le cou tendu dans toute sa longueur,
les ailes largement étalées, frappant l’air à coups re-
doublés avec un bruit violent. Ils descendent sur l’eau
les ailes immobiles, la touchent obliquement et, ralentis
par leurs pattes qu'ils allongent à ce dessein, glissent
sur elle en traçant derrière eux un long sillon. Le cou
érigé, ils jettent d’abord autour d'eux des regards in-
quiets, puis, quand ils sont suffisamment rassurés, font
entendre de nouveau leur voix forte, au timbre argentin,
mais qui, de près, n'est plus aussi agréable,
Les naturalistes qui ont observé le Cygne chanteur
sont d'accord pour lui reconnaitre une voix douée d’une
certaine harmonie. Ils en ont comparé les notes chan-
tantes, les uns au son de la trompe dans le lointain,
d’autres à celui du violon, Pallas au timbre d'une clo-
chette d'argent, Schilling aux sons d’une cloche ou à
ceux d'instruments à vent. Ce dernier, le plus riche en
détails, nous fournit d'intéressantes explications.
« Lorsque, par les grands froids, dit-il, la mer est cou-
verte de glace dans les endroits non occupés par les
courants; que les Cygnes ne peuvent plus se rendre là
où l’eau peu profonde leur garde une nourriture abon-
dante et facilement accessible, alors on voit ces oiseaux
se rassembler par centaines sur les points où des cou-
rants maintiennent la mer libre, et leurs cris mélanco-
liques racontent leur triste sort; souvent alors dans
les longues soirées d'hiver, et pendant des nuits entières,
j'ai entendu leurs cris plaintifs retentir à plusieurs lieues.
On croit entendre tantôt des sons de cloche, tantôt des
sons d'instruments à vent; ces notes sont même plus
harmonieuses; provenant d'êtres animés, elles frappent
nos sens bien plus que des sons produits par un métal
inerte, C’est bien là la réalisation de la fameuse légende
du chant du Cygne; c'est en effet souvent le chant de
mort de ces superbes oiseaux. Dans les eaux profondes
où ils ont dû chercher un refuge, ils ne trouvent plus de
nourriture suffisante ; affamés, épuisés, ils n'ont plus la
force d'émigrer vers des contrées plus propices, et sou-
vent on les trouve sur la glace, morts ou à moitié morts
de faim et de froid. Jusqu'à leur trépas, ils poussentleurs
cris mélancoliques (1). »
La légende repose donc sur des faits positifs, altérés,
(1) Cité par Breun, édit. franç., Ois., t. IF, p. 725.
NATURALISTE
ei ————_—_—_—_—"—— …— ——
transformés — si délicieusement ! — par l'imagination
des poètes. En parlant des accents particuliérement mé-
lodieux que l'approche de sa mort inspirerait au Cygne,
nous savons maintenant que nous nous trompons, et
dans quelle mesure, mais les réalités s'imposent diffiei-
lement aux formes coutumières du langage. Il est pro-
bable que l’on continuera encore longtemps, en dépit
des dénégations de la science, à comparer au chant du
Cygne expirant le dernieressor du génie près de s’éteindre,
et J'avoue volontiers que je suis heureux de penser que
la Renommée, peu soucieuse de la sèche exactitude des
faits, ne cessera de proclamer, dans la suite des âges à
venir, Virgile « le Cygne de Mantoue » et notre Fénelon
«le Cygne de Cambrai », en raison de la douceur et de
la suavité de leur verbe. Le chant de mort du Cygne
qui, à proprement parler, ne chante pas, est une erreur,
mais une erreur aimable et touchante,
Malgré que cette fable ait été si souvent célébrée par
les poètes et les philosophes de l'antiquité grecque et
latine, les anciens eux-mêmes n’y croyaient pas tous.
L'opinion de Pline me parait, sur ce point, suffisamment
formelle. « Olorum morte narratur flebilis cantus; fulso, ut
arbitror aliquot experimentis (1). »
Virgile trouve que les Cygnes ont la voix rauque :
Dant sonilum rauci per stagna loquacia cyyni.
Lucrèce dit aussi:
Parvus cygni canor.
La langue latine possède même pour traduire les cris
du Cygne un mot spécial et imitatif qui n’a rien d’har-
monieux. Ovide s’en est servi dans le vers suivant :
Grus gruit inque glomis cygni prope flumina drensant.
Et c'est bien de l'espèce qui nous occupe que les an-
ciens entendaient parler, Ses blanches flottilles vo-
guaient alors, en grand nombre, sur les eaux de l'Hel-
lade, comme elles se montrent encore de nos jours sur
quelques lacs de la Grèce, et peuplaient les rivières et
les lacs de toute l’Italie, Le Cygne tuberculé, au con-
traire, y faisait des apparitions beaucoup moins fré-
quentes.
Mais, peut-on se demander, ces Cygnes dont parlent
presque à chaque page de leurs écrits les poètes grecs et
surtout latins, étaient-ils des Cygnes sauvages ou bien
des oiseaux domestiques ? En un mot, les anciens avaient-
ils domestiquéle Cygne? Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire,
qui s’est livré à des recherches sur les origines des ani-
maux domestiques me semble répondre à la question
d'une manière aussi décisive que peut le permettre le
manque de précision des textes. « Entre les nombreux
passages que j'ai examinés, dit-il, il n’en est aucun qui
ne soit, ou incontestablement applicable au Cygne sau-
vage, ou vague, et tel qu'on peut le rapporter aussi bien
à celui-ci qu'au Cygne domestique. Il en est ainsi, par
exemple, de ces innombrables allusions à la blancheur du
Cygne et à son prétendu chant de mort qui reviennent
sans cesse chez les poètes de l'antiquité. Quant aux
naturalistes, n1 Aristote n1 Pline nedisent rien du Cygne
domestique, tandis qu'ils mentionnent à chaque instant
le sauvage : ils paraissent donc n'avoir connu que celui-
ci. Bien plus, le moyen âge en est encore sur le Cygne
où en était l'antiquité : au xrn° siècle, Albertle Grand
ne fait guère lui-même que répéter et comménter ce
(1) On dit qu'au moment de mourir les Cygnes font entendre
un chant; lamentable erreur, je pense, c'est du moins ce qui
résulte pour moi de quelques expériences. (Hist. Nat., X, xxxtr.)
|
LE NATURALISTE 137
qu'avait dit Aristote. Dès la Renaissance, au contraire,
et sans qu'aucun auteur en parle comme d'une con-
quête nouvellement faite, le Cygne domestique est men-
tionné comme habituellement « nourri ès douves des
chasteaux situez en l’eau ». La domestication du Cygne
daterait-elle du moyen âge? Dans tous les'cas, il est peu
vraisemblable qu'elle ait été accomplie dans l’ouest de
l’Europe, où le Cygnus olor, souche du Cygne domes-
tique qui en conserve les caractères, se montre bien
muins communément que le Cygnus ferus (1) .»
Les anciens auraient très bien pu d'ailleurs domesti-
quer le Cygnus ferus, comme l’ont fait, depuis eux, les
Russes et, avant eux, les Égyptiens des temps pharao-
niques. C’est en effet l'espèce que l’on voit ordinairement
en Russie sur les pièces d’eau et les étangs, à l'état de
domesticité, On la préfère, à cause de sa voix, au Cygnus
olor, qui est peu recherché. Les monuments de l'antique
Égypte nous montrent souvent cet oiseau figuré dans des
scènes de basse-cour. Il n'y était pas uniquement déco-
ratif, car un personnage de l'Ancien Empire se vante
d’avoir possédé mille deux cent vingt-cinq Cygnes, ce
qui paraitrait invraisemblable pour un simple oiseau
d'agrément.
Le Cygne chanteur niche en Islande, dans le nord de
la Russie, le centre de la Sibérie, dans l'Amérique du
Nord. Nous avons vu qu'ilnichait aussi en Grèce. Quelques
couples se reproduisent de temps à autre en Allemagne,
mais ce n’est qu'une exception. Son nid est formé de
jones, de roseaux et d'autres plantes aquatiques. L'inté-
rieur est tapissé de duvet. Les œufs sont au nombre de
cinq à sept, blancs, lavés de roussâtre ou de verdâtre,
sans taches.
Je vais dire quelques mots d’une autre espèce de Cygne,
le Cygne de Bewick (Cygnus minor), qui, avec les deux
espèces précédentes, représente le genre en Europe.
Le Cygne de Bewick ou Cygne nain habite l'Islande et
la Sibérie. Il descend en hiver sur notre littoral et se
montre aussi en Angleterre, en Belgique et en Alle-
magne. On l’a tué sur l'Escaut et sur la Meuse, et assez
fréquemment sur les côtes de la Manche et du golfe de
Gascogne. On le prend quelquefois vivant dans les « fleu-
rons » de la baie de Somme. J'ai vu, il y a quelques
années, au Jardin zoologique du Bois de Boulogne, un
sujet de cette provenance. Ce Cygne fait aussi des appa-
ritions dans le midi de la France, au moment des grands
froids. On l'a tué, au mois de janvier, dans les environs
de Marseille, et M. Lacroix signale son passage dans
l'Aude, l'Hérault, les Hautes-Pyrénées, le Tarn-et-Ga-
ronne, mais il le considère, à juste titre, comme un
oiseau très rare (2).
On reconnait facilement le Cygne de Bewick à sa
petite taille et aux caractères que présente son bee.
Celui-ci est proéminent à sa base, noir depuis la pointe
jusques et y compris les narines, d'un jaune orange dans
le reste de son étendue; cette dernière couleur se re-
marque aussi sur les lorums. Son plumage est d'un
blanc très éclatant.
Le Cygne de Bewick a, comme le Cygne chanteur,
une trachée artère formant deux circonvolutions.
Ce Cygne niche en Islande. La femelle pond de cinq à
sept œufs dans un nid très vaste. Ces œufs ressemblent
(1) Acclimatation et domesticalion desanimaux uliles.p. 181.
(2) Catalogue des Oiseaux observés dans les Pyrénées fran-
- çaises el les régions limitrophes, p. 238.
beaucoup à ceux du Cygne chanteur, ils sont seulement
un peu plus petts et plus jaunètres,
Yarrell a décrit sous le nom de Cygnus immutabilis un
oiseau en tout semblable, à l’âge adulte, au Cygnus olor,
sauf les tarses, les doigts et la membrane qui les réunit,
d’un gris cendré ou verdâtre, Mais les jeunes offrent
cette particularité que leur premier duvet etleur premier
plumage sont entièrement blancs, tandis que chez le
Cygnus olor les jeunes qui viennent de naitre ont un
duvet plus où moins nuancé de brun, et cette teinte se
manifeste également sur le premier plumage.
Ce Cygne invariable n'est pourtant qu'une simple
variété du Cygnus olor. On trouve parfois dans la même
nichée des jeunes qui ont un duvet brun à côté de jeunes
au duvet entièrement blane. IL habite l'Europe septen-
trionale et se montre en bandes souvent nombreuses
dans la Baltique, sur les côtes de l'Angleterre et de la
Hollande.
C'est le « Polar Swan » (Cygne du Pôle) des fourreurs
de Londres.
Magaud D'AUBUSSON.
MALADIE BACTÉRIENNE DU MURIER
En 1898, on signalait une maladie qui, dans la région
des Basses-Alpes, atteignait, sur une longueur de quelques
centimètres, les parties terminales des rameaux de
müriers, Comme aspect, les parties atteintes semblaient
carbomisées ; comme forme, elles étaient recourbées en
crosse; puis, à quelques jours d'intervalle, toutes les
feuilles devenaient à leur tour d’un brun noir, très carac-
téristique et s’enroulaient suivant leur nervure princi-
pale. Cette affection se manifestant après les fortes pluies
des 15, 16 et 17 juin qui avaient sévi dans cette contrée,
et se trouvant nettement localisée sur chaque arbre à
quelques branches seulement (la partie du rameau infé-
rieure à la partie atteinte offrait une végétation normale),
on avait cru voir tout d’abord un phénomène physiolo-
gique résultant d’un défaut d'équilibre entre l'absorption
de l'eau par les racines et l’évaporation de la vapeur
d’eau par les parties malades des rameaux.
Ce ne fut qu'après avoir reconnu que ces caractères
correspondaient exactement à ceux qui sont indiqués par
M. Prillieux dans son traité des maladies des plantes
agricoles et des arbres fruitiers, sous la dénomination de
maladie bactérienne du mürier, et après avoir constaté
que cette maladie continuait à se développer sur d'autres
rameaux restés sains jusque-là, qu'on appela sur elle
l'attention des sériciculteurs.
D'après M. Prillieux, cette maladie serait 11 même que
celle qui fut constatée par MM. Boyer et Lambert dans
des pépinières de Jeunes müriers, maladie due à une bac-
térie qu'ils ont dénommée bacterium mori. Dans la région
on l'appelle communément maladie des branches. Déjà
aussi, M. Laurent de l’Arbousset avait signalé une
maladie qui attaquait la feuille de mürier à Gonfaron
(Var) et offrait des caractères paraissant correspondre à
ceux dont l'énumération précède.
L'année dernière cette affection atteignit de nouveau
un grand nombre de müriers cultivés dans la vallée de la
NT ne
Dee
te
LA
CET NE A
138
Durance, Et voici, à cet effet, le traitement qui a été
préconisé dans la commune de Château-Arnoux pour
enrayer le mal :
« Dès que la maladie attaque un rameau, on coupe ce
dernier à quelques centimètres au-dessous de la partie
atteinte; puis on le brüle et on termine en badigeonnant
la section de taille avec une solution de sulfate de fer à
45 0/0. »
Les branches ainsi traitées ont développé dans le cou-
rant de la même année de nouveaux bourgeons très
vigoureux. Depuis, aucune trace de maladie n'a été cons-
tatée sur ces arbres.
Cette année-ci, le mal en question semble avoir pris,
de très bonne heure, des proportions inaccoutumées;
car il est difficile, en effet, de trouver depuis le commen-
cement de mai un seul mürier ne présentant aucun
rameau atteint.
Jusqu'à présent néanmoins, le dommage causé n'est
pas appréciable, mais il est à craindre qu'à l’avenir cette
maladie prenne une grande extension; il en résulterait
alors une perte très sensible pour les propriétaires de
muüriers, la feuille ne pouvant être utilisée; en outre, la
vie de l'arbre atteint pourrait être mise en danger (1).
Le rythme dans la musique
Qu'il s'agisse de l'aboiement du chien, du chant des oiseaux
ou de la voix humaine, il y a deux choses bien distinctes à con-
sidérer dans la musique vocale où instrumentale : la tonalité ou
la hauteur du son et le rythme ou la mesure, la durée que l’on
donne à chacun de ces sons. Le rythme est peut-être encore plus
important que le ton; en effet, on ne peut pas jouer un morceau
sans mesure, tandis que l’on peut fort bien composer un morceau
de musique avec un seul ton, à la condition d'y mettre le rythme
convenable. C'est le cas, par exemple, pour le tambour, la grosse
caisse, les cymbales, le triangle et autres instruments rendant
toujours le même ton : castagnettes, tambour de basque, etc.
Bien souvent un chien, quand il aboie, donne constamment la
même note; et cependant son aboiement constitue un véritable
morceau de musique, au même titre que le chant des oiseaux, à
notes variées où non.
Il n'y a que le timbre qui diffère; mais le rythme, la mesure,
la valeur de chaque note au point de vue de la durée est bien
autre chose que le timbre, qui est simplement le caractère
propre à chaque instrument, à chaque animal, à chaque individu,
C'est le timbre différent qui fait que la clarinette donne un
autre ton que le hautbois, ou que la voix de tel chanteur ne res-
semble pas à la voix de tel autre.
Sans le rythme, le tambour ne pourrait pas jouer un morceau
de musique; grâce au rythme, au contraire, il donnera la
marche, l'assaut, la retraite, etc.; il fera des ra et des fla
plan, plan; rataplan, plan, plan, etc.
Le rythme, à lui tout seul, permet de jouer un morceau à
3 temps, de plusieurs façons différentes, tout en conservant tou-
jours les mêmes notes. Ainsi, la valse si connue de Robin des
Bois ne se ressemble pas du tout, suivant qu'on tient compte
ou qu'on ne tient pas compte des liaisons. On sait qu'elle se
compose de triolets réunis 2 à 2; et cependant elle est à 3 temps.
Il semble qu'elle ne devrait être qu'à 2 temps, et pourtant on
pourrait la jouer à 2 temps, à 3 temps, à 4 temps et à 6/4, en
tenant ou en ne tenant pas compte des liaisons. Je ne dis pas
que l’on obtiendrait autant de morceaux différents, car ce serait
: ran,
(1) D'après une communication de M. Th. Ruitre, maître chargé
de cours à l'Ecole pratique d'agriculture d'Oraison (Basses-Alpes).
LE NATURALISTE
QE
exagérer les choses ; mais je dis que l’on obtient deux morceaux
tout à fait distincts, si on la joue à 3 temps, en tenant et en ne
tenant pas compte des liaisons. Avec les liaisons, le morceau
revêt un caractère harmonieux, que l’on ne retrouve dans aucun
autre; précisément parce que, dans aucun autre morceau connu,
on n’a eu l’idée de faire ces liaisons régulières. Or, ces liaisons
lui donnent un caractère de balancement tout particulier. C’est
au point qu'il devient alors difficile, à un profane, de le battre
en mesure, parce que la liaison déroute tout à fait la mesure.
Alors que, dans certains morceaux, la mesure est si nette que
les petits enfants se mettent instinctivement à la battre sans en
avoir conscience en tressautant en cadence, alors que dans cette
valse, en retirant la liaison, la mesure apparait comme partout
ailleurs, au contraire, en la jouant comme elle est écrite, avec la
liaison voulue par l’auteur, la liaison brouille complètement la
mesure, à moins que l’on n'ait l'oreille suffisamment exercée
pour la rétablir. Évidemment, le musicien qui a sa partition
sous les yeux n'a pas de peine à la battre, surtout à 3 temps;
mais l'auditeur non prévenu éprouve une réelle difficulté à s'y
reconnaitre, à cause de la liaison.
Cela tient à ce que, dans un-triolet, on appuie ordinairement
sur la première note; dans une mesure à 3 temps composée de
6 croches, on appuie sur la première, sur la troisième et sur la
cinquième. Tandis qu'ici, à cause des triolets et de la mesure à
3 temps, on ne peut pas appuyer sur la troisième. On appuie
encore sur la première, mais on ne peut plus appuyer sur la
cinquième; ef, ce qui est bien plus fort, on appuie sur la qua-
trième ! La vérité est que, si l’on n’appuyait que sur la première
et la quatrième croches seulement, le rythme ressortirait à une
mesure à 2 temps. La mesure à 3 temps, dans ces conditions,
donne en réalité deux forts appuis, deux appuis secondaires el
deux muettes, c'est-à-dire deux notes que l'on pourrait presque
passer sous silence sans modifier le morceau, la deuxième et la
sixième, sol, mi-la-sol, etc. Voilà ce que produit une liaison à
contre-temps dans une mesure à 3 temps. Je dis à contre-temps,
puisque la liaison se fait à la moitié du second temps, c’est-à-dire
au bout d'un temps et demi ou de trois croches.
J'ai entendu jouer bien des fois cette valse, et je dois dire que
généralement on commet la fâute de ne pas faire assez ressortir
la quatrième croche, sous prétexte qu'il y à une liaison. Si l’au-
teur avait voulu marquer une aussi faible note à la quatrième
croche, il aurait réuni les six croches par une seule barre, au
lieu de les réunir trois par trois, à l’aide de deux barres, dans
chaque mesure. C’est une pure question de nuances. Sans doute,
il faut tenir compte de la liaison, mais il ne faut pas jouer le
morceau comme si les six croches étaient réunies par un trait
unique. Weber savait parfaitement ce qu'il faisait en mettant
deux traits pour composer ses triolets et en mettant une liaison
entre chaque triolet. Il voulait dire : frappez la quatrième note à
contre-temps, mais ne la frappez pas trop fort; mais surtout ne
glissez pas dessus, appuyez, sans tomber dans les excès con-
traires, en frappant fort ou en glissant légèrement.
Il en est de cela comme des dièzes et des bémols. Sur le
piano, le ré dièze et le mi bémol sont la même note; et cepen-
dant tous les musiciens savent bien que ce n’est pas la même
chose, et que ce sont là deux notes différentes.
Les naturalistes, les physiciens savent qu'il y a la différence
d'un comma entre le ré dièze et le mi bémol; de sorte que, au
point de vue scientifique, le ré dièze est plus bas que le mi
bémol. Les musiciens, au contraire, les chanteurs surtout, croient
devoir faire ie ré dièze plus élevé que le mi bémol! Cela tient à
ce que, pour éviter de faire un ré naturel, ils élèvent le ré dièze
tant qu'ils le peuvent ; au contraire, pour éviter de faire un mi
naturel, ils baissent le mi bémol de toutes leurs forces. Ils pèchent
par excès, dans la crainte de pécher par défaut; on ne peut
pas leur en faire un crime. Toutefois, il est bon de savoir qu'ils
se trompent et que le mi bémol doit étre au contraire moins bas
que le ré dièze. De même aussi les instrumentistes, dans la valse
de Robin des Bois, ont généralement le tort de ne pas appuyer
assez sur la quatrième note de chaque mesure, sous prétexte
de la liaison.
Dr Boucox.
LE
NATURALISTE
139
LES COMÉDIENS DE LA NATURE
La vie des animaux peut se résumer en trois fonctions
principales : 1° manger; 2° se reproduire; 3° se défendre
de ses ennemis. Cette dernière fonction est certainement
celle qui leur donne le plus de mal, surtout quand elle
doit se manifester d'une manière active, c'est-à-dire par
des luttes sans relâche, Heureusement pour eux, la
Nature, toujours fidèle à ses tendances économiques, à
donné à certains d’entre eux des moyens de défense pas-
sifs, bien faits par conséquent pour ménager leurs forces,
et cependant des plus efficaces. Ces moyens passifs ont
été réunis sous la dénomination de Müimétisme (de yiuoe,
comédien), mot qui veut dire que les animaux imitent le
milieu dans lequelils vivent ou copient la forme d’autres
animaux où d'objets extérieurs : tous ces procédés con-
tribuent à dissimuler l'animal; on va voir par les
exemples que nous allons citer qu’ils sont fort curieux.
L'un des exemples les plus connus de mimétisme nous
est fourni par un insecte de l'ordre des orthoptères, la
Phyllie feuille sèche, habitant des régions tropicales, Cet
insecte, qui vit sur les arbres, à une forme aplatie et ova-
laire. Les ailes, étalées à plat sur le dos, figurent abso-
lumient une feuille, portant comme celle-ci une nervure
médiane longitudinale et des nervures latérales ramifiées
et anastomosées. Lorsque l'animal est posé au milieu
des feuilles, il est impossible de le distinguer du feuil-
lage.
Non moins curieux que la Phyllie est le Collima,
papillon de Sumatra. Wallace, qui s’est occupé d'une
manière toute spéciale du mimétisme, en donne la des-
cription suivante : « Les ailes sont, en-dessus, d'une
riche couleur pourprée variée de cendré. En travers des
ailes supérieures s'étale une large bande d’un orangé
éclatant, ce qui rend cette espèce très apparente quand
elle vole. Cette espèce n’est pas rare dans les bois secs
et fourrés, et je me suis souvent efforcé d’en capturer
sans succès; Car, après avoir parcouru en volant une
courte distance, le papillon entrait dans un buisson,
parmi les feuilles mortes, et, quel que fût mon soin
à trouver sa place, je ne pouvais jamais la découvrir, à
moins qu'il ne partit à nouveau pour disparaitre bientôt
dans un endroit semblable. A la fin, je fus assez heureux
pour voir l'endroit exact où s'était posé le papillon; et,
bien que je l’eusse perdu de vue pendant quelque temps,
je découvris qu'il était fermé devant mes yeux, mais
que, dans cette position du repos, les ailes ainsi fermées, il
ressemblait à une feuille morte attachée à une petite
branche, de facon à tromper certainement même des
yeux attentivement fixés sur lui. J'en ai capturé plusieurs
spécimens au vol, et j'ai été à même de comprendre
comment cette merveilleuse ressemblance se produisait.
Les ailes supérieures sont terminées à leur extrémité par
_une fine pointe, exactement comme celle des feuilles de
beaucoup d'arbres et d’arbustes des tropiques; les ailes
inférieures, au contraire, sont plus larges et terminées
par une queue large et courte. Entre ces deux pointes
court une ligne courbe et sombre, qui représente exac-
tement lanervure médiane de la feuille, et d’où rayonnent
de chaque côté des lignes légèrement obliques qui
imitent fort bien les nervures latérales. Ces lignes se
- Yoient plus elairement sur la partie externe de la base
des ailes et sur le côté interne vers le sommet et vers le
milieu, Elles sont produites par des stries et des marques
tres communes chez des espèces voisines, mais qui Sont
modifiées et renforcées, de manière à imiter plus exac-
tement la nervulation des feuilles, La teinte de la face
inférieure varie beaucoup, mais elle est toujours de cou-
leur grisâtre ou rouge comme celle des feuilles mortes.
Cette espèce a l'habitude de rester toujours sur une petite
branche, parmi des feuilles mortes ou serrées, et, dans
cette position, les ailes fermées et pressées l’une contre
l’autre, elle présente exactement l'aspect d’une feuille de
grandeur ordinaire, légèrement arrondie et dentée, La
queue des ailes forme une tige parfaite et touche la
branche, pendant que l’insecte est supporté par les pattes
du milieu que l’on ne peut remarquer parmi les brin-
dilles qui l'entourent. La tête et les antennes sont dis-
posées entre les ailes de facon à être cachées comple-
tement; et une petite entaille, pratiquée à la base des
ailes, permet à la tête de-se retirer suffisamment. Ces
divers détails se combinent pour produire un dégui-
sement si complet et si merveilleux, que tous ceux qui
l’'observent en sont étonnés, et les habitudes de l'insecte
sont telles, qu'elles utilisent toutes ces particularités en
les rendant profitables, et cela de manière à ne laisser
aucun doute sur ce singulier cas d'imitation, qui est cer-
tainement une protection pour l'insecte. La fuite rapide
est suffisante pour le sauver des ennemis qu'il rencontre
dans son vol, mais s’il était aussi visible lorsqu'il s'arrête,
il n'échapperait pas longtemps à la destruction, à cause
des attaques des reptiles et des oiseaux insectivores qui
abondent dans les forêts des tropiques. » Personne ne
pourra nier après cette description que le mimétisme du
Collima soit grandement favorable à sa conservation.
Cette ressemblance entre les ailes et les feuilles se
rencontre aussi d'une manière très évidente chez les
Ptérochrozes et les Lasiocampes.
Dans nos pays, on trouve fréquemment dans les buis-
sons une chenille de couleur brune munie de pattes seu-
lement à l'extrémité antérieure (vraies pattes) et à
l'extrémité postérieure (pattes membraneuses). Lors-
qu’elle marche, cette chenille se fixe par ses pattes de
devant et, recourbant son corps, elle amène près de
celles-ci ses pattes de derrière. Les pattes membraneuses
s'accrochant au support, le corps s’allonge et va de nou-
veau fixer un peu plus loin ses pattes antérieures pour
recommencer le même manège. La chenille a ainsi l'air
de mesurer le terrain qu'elle parcourt ; c’est pour cela
qu’on lui a donné le nom de chenille arpenteuse. Vient-
on à secouér légèrement la branche où se trouve une de
ces chenilles, aussitôt celle-ci se campe solidement sur ses
pattes postérieures et, raidissant son corps, elle le dirige
obliquement par rapport à la branche et reste immobile.
A la voir ainsi dressée, on la prendrait absolument pour
une petite branche; ses ennemis s’y trompent certaine-
ment, car la ressemblance est si grande que, même lors-
qu'on connait la présence de la chenille, — je l'ai maintes
fois constaté, — il est difficile de la découvrir.
Un grand nombre d'Orthoptères sont très allongés et
ressemblent à des morceaux de bois, Voici quelques
renseignements donnés par M. L. Gérardin sur ces
« bâtons qui marchent ».
I1y a des Phasmides, les cyphocrânes par exemple,
qui atteignent jusqu'à vingt-sept centimètres de lon-
eueur ; aussi produisent-ils invariablement une très vive
impression sur ceux qui les observent, Cette impression
140 LE NATURALISTE
se trouve traduite dans le nom qui leur a été donné
(géoua signifie spectre ou fantôme). Les espèces du
genre phasme qui représentent les types de la famille
offrent des couleurs très hariolées. Elles vivent dans
l'Amérique du Sud et dans les iles de la Sonde; celles du
genre cyphocrâne sont aussi originaires des îles de la
Sonde ; pourtant Westwood en signale une qui vivrait au
Congo. Les Bacilles (de bacillus, baguette) ont le corps
sec, sans ailes ni épines, des antennes filiformes et des
pattes courtes. Le spectre de Rossi est une des rares
espèces européennes. Ce « bâton qui marche » habite
l'Italie et le midi de la France. Les Bactéries (Baxrnpia
bâton), très voisines des Bacilles comme forme, sont aussi
des Phasmides sans ailes. Leurs espèces extrêmement
nombreuses se rencontrent sur tous les continents dans
les parties chaudes. Le Bacteria arumatia à pour patrie
la Guadeloupe et l'Amérique inter-tropicale; elle simule
avec la plus rare perfection une longue branche d'arbre.
La Diapheromera femorata est très commune aux Etats-
Unis. On l’appelle « cheval dela sorcière » dans le Mas-
sachusetts ; « alligator des prairies » dans d'autres
Etats. Cet animal peut être exactement comparé à une
paille animée, Lorsqu'aurepos son corps grêle est accolé
à la tige d’un arbuste, lorsque ses pattes serrées contre
le corps s'étendent en avant de la tête, il est matérielle-
ment impossible de remarquer sa présence. L’œil le plus
percant ne saurait le distinguer. Au réveil, la paille
s’agit, les antennes frémissent, la bête s'éloigne rapide-
ment avec ses pattes en aiguilles à tricoter. Si c’est une
femelle chargée d'œufs, le spectacle est fort intéressant,
car l’animal se hisse en se déhanchant d’une facon véri-
tablement burlesque, craignant probablement de perdre
l'équilibre malgré la grande surface d'appui que lui four-
nissentses pattes écartées. Le Diapheroma denticrus habite
le Texas méridional ; la longueur de sou corps dépasse
souvent quinze centimètres. Il est moins fluet que le pré-
cédent, mais aussi curieux à étudier au point de vue
qui nous occupe.
D'autres espèces, plus bizarres, plus caractéristi-
ques si possible, vivent sous des cieux plus brülants.
Leur corps est d’une extrôme ténuité, renflé seulement
aux attaches des membres. Au Mexique, c’est le Phano-
cles qui mesure près de trente centimètres de longueur !
Que dire de la femelle du spectre à pattes épineuses, le
Phibalosoma acanthopus, qui réside à Java et qui est com-
plèment dépourvue d'ailes, ou de la femelle également
aptère de la Bactérie auriculée, Phibalosoma phyllo-
cephalura, qui vit dans les solitudes de l’intérieur du
Brésil? Elles comptent toutes deux une quarantaine de
centimètres de long sur trois ou quatre millimètres de
large !
Ce sont là de véritables bâtons, ou plutôt de grèles
fétus marchant, minces branches, sèches et cassantes,
perdues au milieu des végétaux qu'elles imitent aussi
bien dans leur forme que dans leur coloration! La Phi-
balosoma phyllocephalura porte à la tête une paire d’ap-
pendices fort remarquables qui s’étalent comme des
oreilles de chauve-souris, et son dos est muni, juste
entre les deux paires de pattes postérieures, d’un
aiguillon puissant dirigé vers le haut. Ces longues bêtes
sont d'une extrême indolence, malgré les ressemblances
protectrices qu'elles offrent à un si haut degré: leur
timidité est très grande. La nuit seulement elles osent
brouter les feuilles des taillis et des buissons qui les
cachent à tous les Yeux. Le jour elles restent plongées
dans un profond sommeil, gardant une immobilité par-
faite ; le vent sud les agite, mais sans les réveiller.
Toutes les formes de Phasmides que nous avons men-
tionnées jusqu'ici ressemblent à de simples baguettes
plus ou moins nues et régulières ; il y en a d’autres qui
offrent sur le corps des expansions foliacées d'un effet
véritablement étonnant. On croirait voir tantôt un
rameau portant ses feuilles, — c’est le cas des Céroys
du Nicaragua, — tantôt un fragment de tige avec des
taches de lichens entremélées d'épines, — c’est celui des
Hétéroptéryx recueillis et étudiés par Wallace à Bornéo.
Les papillons de nuit vivent pendant le jour accrochés
aux écorces des arbres. On sait que la teinte des ailes
étalées de ces insectes est toujours de couleur brune,
comme celle des écorces, et que, de plus, elles présen-
tent comme elles des marbrures plus ou moins nettes.
Signalons aussi un poisson d'aspect très étrange, le
Phylloptéryx chevalier, dont le corps verdâtre, à l’appa-
rence décharnée et pourvu de nombreuses banderoles
irrégulières, se confond absolument avec les algues
connues sous le nom de fucus, au milieu desquelles 1l
vit. Les exemples analogues abondent : citons encore le
Gastropaca quercifolia qui ressemble à des feuilles mortes,
les papillons appelés Lichénés qui ressemblent aux
lichens sur lesquels ils vivent posés, les Cryptorynchus
du Brésil qui figurent les bourgeons des plantes sur les-
quelles on les trouve, les Chlamys que l'on prendrait pour
des graines, etc. |
Une autre série de faits relatifs au mimétisme nous
est fournie par des êtres inoffensifs ayant l'aspect d'un
autre être dangereux. Ce sont là les exemples les plus
frappants du mimétisme, car les êtres qui se miment
ainsi sont d’une organisation très différente de ceux dont
ils prennent le masque. De plus, ce n'est pas là seule-
ment une ressemblance fortuite comme on pourrait en
trouver entre des êtres pris en des points différents du
globe, car les espèces dont il s’agit ici habitent les mêmes
régions et souvent partagent la même vie. Il y a en outre
ce fait général que l'espèce-copie est toujours moins abon-
dante que l'espèce dangereuse. Il est de toute évidence
que les êtres inoffensifs bénéficient de la crainte ou de
la répulsion qu'inspirent dans le même lieu les espèces
qu'ils imitent,.
Dans l'Amérique du Nord existe un magnifique
papillon de jour du groupe des Héliconides : c’est
l'Ithomia Ilerdina. Ces papillons ont de grandes ailes
décorées de briliantes couleurs; mais ils exhalent une
odeur repoussante provenant d’une liqueur fétide qui
suinte de leur corps. Par suite, le goût de leur chair
doit être très désagréable; etles oiseaux connaissent sans
doute cette particularité, car ils ne s’attaquent jamais à
eux : on chercherait vainement dansles forêts des débris
de ces papillons. Dans les mêmes forêts existent aussi
d’autres papillons appartenant à un groupe très diffé-
rent, celui des Leptalidés (Leptalis Theonæ). Les pre-
miers possèdent trois paires de pattes, tandis que les
seconds n'en ont que deux paires bien développées:
mais, malgré cette différence anatomique et quelques
autres assez peu importantes, leur ressemblance exté-
rieure est tellement remarquable qu'elle a trompé au
début des naturalistes cependant très exercés, tels que
Wallace et Bates qui confondirent pendant quelque
temps les espèces des deux groupes. Or, les Leptalidés
n'exhalent aucune odeur répugnante et, à cause de leurs
couleurs brillantes, deviendraient bientôt la proie des
nds
Été »
LE NATURALISTE 141
oiseaux. Grâce à leur ressemblance si remarquable avec
les Héliconides, ils sont dédaignés par les oiseaux, qui
ne peuvent établir la distinction.
D'autres fois, c'est l'un des sexes seulement qui est
mimé : ainsile Diadema misippus femelle est fétide comme
le Danais chrysippus; le mâle ne l’est nullement. Et l’on
voit que c’est précisément le sexe le plus utile à la con-
servation de l'espèce qui est pourvu de protection : le
mâle, une fois son rôle rempli, peut mourir; la femelle
doit au contraire subsister pour laisser muürir les œufs et
effectuer la ponte.
Un autre insecte orthoptère de nos pays, le Condiglo-
dera, est inoffensif, mais ressemble à un insecte coléop-
tère très carnassier, dont il partage l'habitat dans les
terrains sablonneux d’une bonne exposition au soleil.
Dans nos régions on rencontre aussi un grand nombre
de papillons, en particulier du genre Sésie, qui ressem-
blent d'une manière étonnante à des abeilles ou à des
guëpes : ce n’est pas sans une certaine appréhension
qu'un naturaliste même expérimenté les saisit avec les
doigts. :
De même les mouches du genre Eristale, abondantes
en été sur les fleurs, ressemblent à s'Y méprendre à des
abeilles et bénéficient sans aucun doute dela terreur que
celles-ci inspirent à leurs ennemis grâce à l'aiguillon
dangereux dont elles sont pourvues. :
Un cas plus extraordinaire de mimétisme défensif
par terrification est celui des papillons brésiliens du
genre Caligo. Dans leur position normale de repos, la
tête en bas, ces animaux ressemblent à s’y méprendre
à une tête de chouette vigilante, les veux grands ouverts;
le mimétisme est si extraordinaire que les taches ocellées
des ailes reproduisent non seulement l'œil de la chouette,
mais encore la tache lumineuse qui se produit normale-
ment sur la cornée. Nul doute que cette apparence terri-
fiante écarte de l'inoffensif papillon endormi les petits
oiseaux carnivores qui, sans cette protection, en feraient
infailliblement leur proie. (Le Dantec.)
Le cas de mimétisme le plus remarquable par son uti-
lité est peut-être celui des mouches du genre Volucelle,qui
ressemblent tellement aux bourdons, au milieu desquels
elles vivent, que ceux-ci les prennent pour des insectes
de la même espèce et se laissent duper par eux. Les
Volucelles, en effet, sous le couvertde leur déguisement,
pénètrent dans les nids des bourdons sans être recon-
nues et déposentleurs œufs au milieu des provisions que
les bourdons accumulent pour leur progéniture, Un peu
plus tard, les larves des mouches sortent et profitent de
cette nourriture, aux dépens des jeunes larves de bour-
dons qui en sont les légitimes propriétaires.
Dans l'Amérique méridionale, beaucoup de serpents
inoffensifs copient fidèlement d’autres serpents, les Elaps,
par exemple, qui sont extrèment dangereux. D’après
M. Ph. Francois, dans les récifs du corail des Nouvelles-
Hébrides, on trouve un poisson de groupe des Muré-
nides qui cohabite avec un Elaps dangeureux et lui res-
semble étonnamment.
Le savant Bates raconte qu'au Brésil une grande che-
nille lui causa une certaine frayeur par suite de sa res-
semblance avec la tête d’un serpent venimeux. On peut
dans nosrégions faire des observations analogues. C'est le
cas notamment d’une chenille, le Chærocampa elpenor, qui
possède de chaque côté du premier et du deuxième
segment abdominal de larges taches semblables à des
yeux qui r’attirent pas l'attention quand l'insecte est au
repos. Mais que la chenille vienne à être effrayée, immé-
diatement la tête rentre dans le corps, en même temps
que les taches en question donnent à la partie antérieure
l'aspect d'une tête de serpent. La simulation est si bien
faite qu’on retire vivement la main quand on veut la
saisir, Les animaux en sont aussi effrayés. Poulton
raconte qu'il offrit une chenille de cette espèce à un
lézard vert bien développé. Le lézard ne savait trop s'il
devait attaquer la chenille qui avait pris une attitude
agressive. Il s’avança bravement; mais, effrayé tout à
coup, il revint en arrière. Ce manège se renouvela plu-
sieurs fois; néanmoins, à chaque tentative, il appro-
chait un peu plus de la chenille. Encouragé par ’immo-
bilité de celle-ci, le lézard porte une dent timide dans ce
qui paraissait être la tête de la chenille.
Epouvanté de son audace, il recula vivement ; mais
voyant que l’insecte ne répondait pas à ses attaques, il
s’avança avec résolution et risqua un coup de dent plus
énergique. Après quelques morsures données avec les
mêmes précautions, le pusillanime lézard s’apercut
enfin qu'il n'avait rien à craindre et se mit à dévorer
la chenille.
La chenille du Dicranina vinula offre un phénomène
analogue. Effrayée, elle gonfle sa tête, et deux taches
noires qu'elle porte lui donnent un aspect terrifiant.
Henri COUPIN.
DESCRIPTION DU CRABIER
CRABIER DES MONTAGNES OU CRABIER DES BOIS
Nycticorax Violaceus (Linnée).
Ardea Violacea (Wilson).
OISEAU PRIS AUX ENVIRONS DE SAINT-PIERRE (MARTINIQUE)
Un blanc pur couvre le front et tout le dessus de la tête,
quelques plumes de cette même couleur finissent en pointe au
delà du vertex et peuvent se relever en huppe. Le reste de la
tête et la gorge sont d'un beau noir qui descend en pointe en
arrière du cou; il en sort quelques plumes noires et longues
d'environ dix centimètres, qui succèdent aux blanches de l'oc-
ciput; elles sont un peu plus courtes et aussi étroites. Au-dessous
de l'œil se trouve une bande blanche qui finit près de l'occiput.
Le cou est d’un cendré bleuâtre et le dessous du corps un peu
plus pâle. Cette même teinte colore le manteau où toutes les
plumes portent une raie noire le long de leur tige.
Quelques plumes très étroites partent du milieu du dos et
dépassent la queue de quelques centimètres ; une bande égale-
ment noire se trouve le long de leur tige. Le croupion est ausst
bleu cendré.
Les rémiges sont d'un noir bleuâtre et les couvertures supé-
rieures de la même teinte que le manteau; la barbe externe est
cendrée: les couvertures supérieures des rectrices sont de cette
même teinte, mais les inférieures sont grises.
Pattes d'un jaune päle; le devant du tarse et des doigts porte
une légère teinte noirâtre.
Bec noir et très robuste, du blanc au-dessous de la mandibule
inférieure. Iris rouge.
Le jeune ne porte pas de calotte blanche, celle-ci n'apparaît
qu'avec l’âge; son plumage est d'un brun roux.
Cet oiseau se nourrit d'écrevisses, de petits poissons de
rivière et surtout de crabes qu'il rencontre sur les bords des
cours d’eau. Son cri est rauque et fort.
Jen ai conservé un en volière pendant plus de six mois;
devant partir en voyage, j'ai dû l'empailler et il doit figurer dans
une collection d'oiseaux de la Martinique que j'ai envoyée à
RE RS PR ES SE AR RE ET M ITR EE RER PR RER DER RER RER RES EL ER RAS de LE CRE DEEE CEE CCE RCE ONE CR PER
142 LE NATURALISTE
l'Exposition universelle de 1900. D'abord farouche, ils’y habitua
ensuite et venait prendre sa nourriture dans mes mains.
Lorsque l'oiseau veut manger un crabe, il le saisit par une
des pinces et secoue vivement afin de la détacher du corps de
l'animal; il en fait de même pour l’autre pince et pour les pattes;
lorsqu'il les a toutes ainsi enlevées, il se redresse et frappe d'un
vigoureux coup de bec la carapace qui saute en morceaux ;
l'Ardea violacea saisit alors le corps qu'il avale aussitôt.
Quoiqu'il soit assez rare, ce petit héron parait étre sédentaire
à la Martinique.
Édouard Tours.
NOTICE SUR DEUX VARIÉTÉS INÉDITES
du PARNASSIUS APOLLO
Apollo Ober. Inversa AUSTAUT.
Parn. Apollo Var. Eiffelensis AUSTAUT.
Parn.
Le Parnassius Apollo est une espèce très variable et cette cir-
constance résulte ‘sans doute de deux causes principales : la
première, c'est que ce Parnassius est celui qui a été le mieux
observé par les entomologistes des différents pays; la seconde,
c'est qu'étant répandu pour ainsi dire sur la surface du territoire
paléarctique tout entier, il doit nécessairement subir l'influence
d'une extrême variabilité de milieux. Aussi connait-on aujour-
d'hui d'assez nombreuses variétés d'Apollo régulièrement ins-
crites dans la nomenclature, telles sont :
Variété Hesebalus, Alph. ;
_— Transhaicalensis, Ster.;
— Mongolica, Ster.:
— Uralensis, Oberth. ;
— Graslini, Oberth. ;
— Siciliæ, Oberth. ; :
Aber. Wiskitli Hon.
Variété Nevadensis, Oberth ;
Aber. Brillingeri, Rehf.
Mais toutes ces variélés ne sont pas également bien caracté-
risées et n'offrent pas, par conséquent, le même intérêt. Ainsi
les variétés Transbaicalensis, Uralensis et Graslini ne diffèrent
pas très sensiblement de la forme Hesebalus qui, du reste, est
elle-même assez variable. La V. Siciliæ, du moins dans sa
forme sexuelle femelle, la seule que nous connaissions, ne
s'éloigne guère de l'Apollo typique: il n'en est pas de même de
la variété Mongolica qui a un aspect bien spécial, ni surtout
des aberrations Wiskitti et Brittingeri qui représentent certaine-
ment des fermes extrêmes de la variabilité de l'espèce. Cette
aberration Brittingeri constitue un cas de mélanisme fort curieux
constaté chez les Apollo femelles qui habitent les montagnes
des environs de Styr en Australie. Nous lui opposons une
forme albinisante sous le nom d'Inversa, qui est entièrement
semblable à l'insecte que M. Standfuss à représenté, planche 1,
fig. 5, de son travail qui a pour titre : Experimentelle Zoolo-
gische Sludien et qui avait été obtenu artificiellement en sou-
mettant des chrysalides d'Apollo à une température relativement
élevée. Cet exemplaire, quoique du sexe femelle, offre les carac-
tères et l'aspect général d'un mâle ordinaire, d’une tonalité
même trés claire. Celui que nous possédons et qui est originaire
des Alpes du nord de l'Autriche est identique à celui du
D' Standfuss, sauf qu'il est plus grand et que ses ocelles très
développés sont largement pupillés de blanc. L’aberration dont
il s'agit se rencontre, paraït-il, accidentellement dans son lieu
d'origine, probablement pendant les années chaudes.
La seconde variété inédite d’Apollo est celle que nous
désignons ici sous le nom d'Eiffelensis. Elle est spéciale aux
montagnes des environs de Kaisereck, dans la région connue
sous le nom d’Eiflel. Cette race particulière est petite, avec la
coupe des ailes plus courte ou plus large, et tous les dessins,
notamment les bandes prémarginales, bien accusés en noir. Le
mäle est blanc, sans semis atomique très appréciable à la base
des premières ailes et avec le lavis basilaire des ailes posté-
rieures très réduit. La bande marginale est plus courte et
plus étroite que celle de Apollo typique, mais aussi beaucoup
plus chargée d’écailles obscures, ce qui la fait paraitre noirâtre.
Les ocelles sont bien cerclés de noir, carminés et largement
pupillés de blanc. Les quatre taches basilaires du dessous sont
très petites, et les deux plus basses manifestent une fendance à
l'oblitération. La femelle de cette variété est d’une teinte très
jaunâtre. La base de ses ailes est peu chargée, elle diffère de
l’autre sexe par ses prémarginales plus amples, mieux écrites et
par ses marginales obscures, noirâtres qui entourent entièrel
ment d'une manière très continue et comme d'une bande étroite
la marge des quatre ailes. Cette variété par son aspect général
diffère sensiblement de la: forme ordinaire d’Apollo et mérite,
pensons-nous, de porter un nom distinct.
AUSTAUT.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 28 mai 1900.
Les Lémuricns subfossiles de Madagascar (Guil-
laume GranniniEr). — les Lémuriens dont les ossements ont
élé, jusqu'à ce jour, trouvés à Madagascar à l'état subfossile
sont les :
Megaladapis madagascariensis (Forsyth Major). — Megala-
dapis Fitholi (Guillaume Grandidier). — Peloriadapis Edwardsi
(G. G.). — Propilhecus Verreauxi (espèce encore vivante). —
Paleopropithecus ingens (G. G.). — Lemur intermedius (Henri
Filhol). — Lemur insignis (H. F.). — Bradylemur robustus
(G. G.). — Bradylemur Baslardi(G. G.). — Dinolemur Grevei
(H. K.). — Lophiolemur Ediwardsi (H. F.). — Nesopilhecus
Roberli (F. M.). — Thaumaslolemur Grandidieri (H. F.). —
Archæolemur Majori (H. F.). — Archæolemur robustus
(G. G.). — Globilemur Flacourti (F. M.). — Paleochirogalus
Jullyi (G. G.).
Sur le rappel à la vie obtenu par la compression
rythmée du cœur (Turrien et Iarrion). — Les auteurs ont
tenté avec succès un rappel à la vie momentané obtenu par la
compression rythmée du cœur.
« Un homme de vingt-quatre ans, opéré depuis quatre jours
pour des accidents aigus d'appendicite, présentait des suites
opératoires normales, lorsqu'il fut pris d’une syncope. Ayant
constaté la cessation absolue des battements du cœur, nous
fimes d’abord de la respiration artificielle, combinée avec des
tractions rythmées de la langue. En présence de l'insuccès de
ces tentatives, l'un de nous fendit le troisième espace intercostal,
décolla le péricarde, el, saisissant la masse ventriculaire, il
pratiqua sur elle 60 à 80 compressions rythmées. Les pulsations
artérielles devinrent alors perceptibles et le patient ouvrit les
yeux, remua la tête, regarda autour de lui, reconnut son médecin ;
mais, au bout de deux ou trois minutes, le pouls faiblit, puis
s'arrêta de nouveau et ne reprit que sous l'influence de nouvelles
compressions rythmées. Ce résultat ne fut d'ailleurs que de
courte durée, et, malgré un troisième essai, il fut impossible de
rappeler le malade à la vie. »
L’autopsie montra qu'il y avait un caillot dans la branche
gauche de l'artère pulmonaire. Cette lésion a suffi sans doute
pour empêcher que la vie se maintint, de sorte que le réveil
passager obtenu dans cette circonstance reste encourageant, sans
que l'échec final défende d'espérer un meilleur succès dans des
conditions moins défavorables.
LIVRES NOUVEAUX
Anatomie et physiologie végétales, par Er. BeLzunG (1).
Les précédents ouvrages de M. Belzung, destinés aux lycées et
collèges : Cours élémentaires de Zoologie, de Géologie, de
Botanique, Anatomie el physiologie animales, Notions de Paléon-
lologie, de Géologie, sont bien connus et depuis longtemps
appréciés des professeurs et des élèves, grâce à leurs qualités
de méthode, de clarté et d'élégance, L’Analomie et physiologie
(1) 1 fort vol. in-80 de 1328 pages, avec 1700 gravures dans le
texte. Prix: 20 fr. 85 franco.
ee EN GS 69 PRE 9 Le ee [Ye mes Um Er) ES EPS E L9 D Pme PI ELISA LES NIV SES TOI ET RCIP EST EE REEES SERRES TEESETES SERRES EEE EEE IENCENR SENS SES
LE NATURALISTE 143
végétales du même auteur recevra, nous en sommes persuadés,
le même favorable accueil, Nous signalerons principalement les
chapitres relatifs à la Cellule végétale, à la Nutrition, à la
Reproduction et à la Fructification, aux Bactériacées. L'étude
de ces dernières prend, chaque jour, une importance tellement
croissante, surtout pour les espèces produisant les maladies con-
tagieuses, qu'elle justifie pleinement l'étendue des développe-
ments que l’auteur leur a consacrés.
L'ouvrage est divisé en dix parties : I"° partie, la Cellule :
— II° partie, les Tissus ; — IIIe partie, les Membres des végé-
taux. La IV* partie est relative à la Croissance ; la V*, à la
Nutrition ; la VI°, à l’Association. Dans la VIT: partie se trou-
vent groupées les connaissances essentielles relatives au Mouve-
ment et à la Sensibilité des plantes. La VIII traite de la
Reproduclion et de la Fructification. Dans ces huit parties,
l’auteur envisage plus spécialement les Plantes phanérogames.
L'étude des Plantes cryptogames forme l'objet de la IX° par-
tie. La X° est consacrée aux Fermentalions. L'ouvrage se ter-
mine enfin par une esquisse des Caraclères généraux des plantes
qui met bien en lumière l'Unité du règne végétal.
4
MOEURS ET MÉTAMORPHOSES
DU DERMESTES UNDULATUS, BRARM
COLÉOPTÈRE DU GROUPE DES DERMESTIDES
Lorsque les cadavres des petits mammifères sont sur
le point de disparaître, qu'il ne reste plus que la peau et
les os, le Dermestes undulatus vient prendre sa part de
ces derniers débris; mâle et femelle s’y rencontrent et
s’accouplent par superposition, le mâle dessus; la dis-
jonction des deux sexes accomplie, la femelle éparpille
dans ces mêmes débris une vingtaine d’œufs dont l’éclo-
sion aura lieu une quinzaine de jours après.
Œuf. Longueur : 4 millim. 5; diamètre : 0 m. 8.
Allongé, subcylindrique, blanc terne, lisse et luisant,
à pôles arrondis, à coquille assez résistante.
. La jeune larve se développe dans ce milieu nourricier,
-et lorsqu'elle est parvenue au terme de son existence
elle offre les caractères suivants :
Larve. Longueur : 12 millimètres. Largeur : 2 milli-
mètres.
Corps allongé, noirâtre, à intersections segmentaires
rougeâtres, couvert de soies inégales à base bulbeuse,
convexe en dessus, un peu moins en dessous, à région
antérieure arrondie, la postérieure subatténuée et biépi-
neuse.
Téte petite, carrée, noire, finement pointillée, couverte
de courtes soies rousses sur le disque, plus longues sur
les joues; épistoire grand, transverse; labre court,
arrondi, échancré; mandibules triangulaires, à pointe
noire et bidentée; mâchoires à lobe denté et noirâtre
avec palpes dont les trois premiers articles courts moni-
liformes, le terminal cylindrique; lèvre inférieure
bilobée, avec palpes réduits, biarticulés; antennes à
premier article annulaire, deuxième cylindrique, troi-
sième grêle, quatrième avec court article supplémen-
taire; ocelles au nombre de cinq disposés en deux ran-
gées transverses.
Segments thoraciques convexes, noirâtres, couverts de
cils dirigés en avant sur le premier segment, qui est
grand et aussi large que la tête, droits sur les deuxième
et troisième, qui sont transversalement sillonnés.
Segments abdominaux bien développés, fortement con-
vexes, transversalement striés, garnis de rangées de soies
inégales, couverts d'une plaque noire qui les recouvre
complètement, neuvième terminé par deux épines à
pointe rougeûtre ; pseudopode carné.
Pattes courtes, latérales, rougeâtres, terminées par un
court onglet noirâtre, acéré.
Stigmates petits, orbiculaires, flaves, à péritrème noi-
râtre.
Quand les vers de Diptère ont fait disparaitre des ca-
davres de mammifères ou d'oiseaux la masse charnue,
quand les Sylphes, les Nécrophores ont puisé dans ces
matières putrides, il ne reste plus que la peau et les os,
les tendons et les plumes qui sont la part des Dermesles ;
l’accouplement et la ponte se font sur le charnier même,
et cela avec une rapidité telle que dans le cours d’un seul
mois les larves sont arrivées au terme de l'accroissement
et se transforment,
Nymphe. Longueur : 7 millimètres; largeur : 3 milli-
mètres.
Corps oblong, allongé, subcoriace, blane jaunâtre, cou-
vert de longues soies rousses, convexe en dessus, subdé-
primé en dessous, arrondi à la région antérieure, la pos-
térieure atténuée et biépineuse.
La nymphe repose dans sa loge sous le couvert de sa
dépouille larvaire; elle peut imprimer à son corps de
légers mouvements défensifs; la phase nymphale a une
durée de quinze à vingt jours.
Adulte. N'est pas rare durant toute la belle saison sous
les restes abandonnés des cadavres des petits mammi-
fères, des oiseaux, des batraciens, des sauriens et des
aphidiens ; il est très agile, se dérobe par la fuite, et
comme tout ses congénères il se raidit au moment du
danger et fait le mort.
Capitaine XAMBEU.
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reohirta, p. 116, pl. I, fig. 10. — Diatlomineura minima.
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T : à ; pe — reticulatum. Allemagne: HN ANENNMEReRE 4 25
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LE NATURALISTE 145
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Pseudocechenus V. Montandoni. Carpathes......... 0 4050 — Dievicornis eStyiie.s 1.00 ne | ù RU
Plectes prometheus. Caucase.......................... 19% — V. Tyrolensis. FOR 0e En AE 2-"»
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Sphodristocarabus Bohemani. Arménie.......... na T0) =» latreillen: Suisseserteacene Sr Mt. D? 1 50
Chrysocarabus hispanus. France.................. so... D» 15 rs innel Oarpathess tr + rn » 25
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446
LE NATURALISTE
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Coléoptères.
Zabrus gibbus.
Silpha obscura.
— nigrita.
Meligethes æneus.
Byturus tomentosus.
Atomaria linearis.
Anoxia pilosa.
— villosa.
Phyllopertha horticola.
Anisoplia segetum.
— agricola.
— austriaca.
Anomala ænea.
— vius.
Cetonia morio.
— cardui.
Anthaxia quadripunctata.
Agrilus cyanescens.
— tenuis.
— augustulus.
Agriotes lineatus.
— sputator.
Lacon murinus.
Anobiums pertinax.
Apate capucina.
Sinoxylon sexdentatum.
— muricatum.
Xylopertha sinuata.
Tenebrio molitor.
Meloe variegatus.
Scolytus destructor.
— pygmæus.
— intricatus.
— rugulosus.
— pruni.
Hylesinus fraxini,
— oleiperda.
Hylurgus piniperda.
—.. ligniperda.
Hylastes ater.
Tomicus typographus.
— stenographus.
— Jaricis.
— bidens.
Bruchus pisi.
flavimanus.
rufimanus.
tristis.
lentis.
pallidicornis.
nubilus.
nchites betulæ.
populi.
betuleti.
conicus.
cupreus.
bacchus.
ion apricans. :
craccæ.
viciæ.
flavipes.
flavofemoratum.
Dis oh
— æneum.
— tenue.
\vorax.
SNA EL
a
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A
Le)
violaceum.
hæmatodes.
pomonæ.
Cneorhinus geminatus.
Brachyderes pubescens.
— lusitanicus.
Cleonus glaucus.
Barynotus obscurus.
Pissodes notatus.
— pini.
Phytonomus variabilis.
— murinus.
Phyllobius oblongus.
Otiorhynchus sulcatus.
— ligustici.
Otiorhynchus rancus.
— picipes.
Lixus angustatus.
Anthonomus pomorum.
— pyri.
— druparum.
— rubi.
Orchestes fagi.
— alnis.
Balaninus nucum.
Baridius chlorizans.
Ceutorhynchus sulcicollis.
— napi.
— assimilis.
Sitophilus orizæ.
Prionus coriaruis.
Ergates faber.
Spondylis buprestoides.
Cerambyx heros.
— scopolii.
Aromia moschata.
Callidium unifasciatum.
Clytus arictis.
Mesosa curculionides.
Lamia textor.
Saperda scalaris.
Oberea linearis.
Calamobius marginellus.
Cassida viridis.
— nebulosa.
— equestris.
Bromius vitis.
— obscurus.
Colaspidema atrum.
Haltica oleracea.
— ampelophaga.
Phyllotreta atra.
— nemorum.
Phylliodes chrysocephala.
Epilachna argus.
Lasia globosa.
Orthoptères.
Forficula auricularia.
Gryllus domesticus.
— campestris.
Œcanthus pellucens.
Ephippiger vitium.
— bitterensis.
Pachytilus migratorius.
Caloptenus italicus.
Pseudo-Névroptères.
Termes lucifugus.
— flavicollis.
Hymènoptères.
Vespa crabrc.
— germaniCa.
Polistes gallicus.
Tripoxylon figulus.
Pelopœus spirifex.
Atta barbara.
— structor.
Lasius niger.
Camponotus ligniperda.
Lasius flavus.
Hylotoma rosarum.
Athalia rosæ.
— spinarum.
Selandria morio.
Blennocampa æthiops.
Nematus ventricosus.
Emphytus grossulariæ.
Allantus marginellus.
Macrophya albicincta.
— xibis.
Lyda pyri.
— sylvatica.
— campestris.
— erythrocephala.
Lophyrus pini.
— rufus.
Cephus pygmæus.
— compressus.
Sirex gigas.
Microgaster glomeratus.
Dryophanta scutellaris.
— folii.
Biorhiza aptera.
Teras terminalis.
Rhodites rosæ.
Lé pidoptères.
Papilio machaon.
— podalirius.
Pieris brassictæe.
— rapæ.
— napi.
Deilephila elpenor.
— euphorbiæ.
Ino pruni.
— ampélophaga.
Trochilium apiforme.
Saturnia pyri.
Bombyx quercus.
— neustria.
Porthesia chrysorrhaca.
— auriflua.
Ocneria dispar.
— monacha.
Orgya antiqua.
Dasychira pudibunda.
Hepialus humuli.
Agrotis segetum.
— exclamationis.
Mamestra brassicæ.
Triphæna pronuba.
— orbona.
Phlogophora meticulosa.
Hadena oleracea.
— pisi.
— atriplicis.
Abraxas grossulariata.
Hybernia defoliaria.
— aurantiaria.
Cheimatobia brumata.
Pionea forficalis.
Galleria mellonella.
Achræa grisella.
Œnophthira pilleriana.
Tortrix viridana.
— cratægana.
— rosana.
— Holmiana.
Cochylis roserana.
Teras contaminana.
— Boscana.
Penthina prunaria.
Retinia turoniana.
— buoliana.
Grapholitha Weberiana.
— cynosbana.
— pisana.
Carpocapsa pomonella.
— funebrana.
— splendana.
Hyponomeuta podella.
— malivorella.
Tinea granella.
Sitotroga (Alucita) cerealella.
Dasycera oliviella.
Plutella porrectella.
Acrolepia assectella.
Gracilaria syringella.
Coleophora hemerobiella.
Depressaria depressella.
— nervosa.
Cerostoma persicellum.
Hémiptères.
Eurygaster maurus.
Schirus bicolor.
Œlia acumimata.
Strachia oleracea.
—. ornafa.
Carpocoris baccarum.
Zicrona cærulea.
Aphrophora spumaria.
Typhlocyba rosæ.
—. viridipes.
Psylla pyri.
— buxi.
Homotoma ficus.
Schizoneura lanigera,
— Jlanuginosa.
Aphis rosæ.
— cerealis.
— _ fabæ.
— pruni.
— persicæ.
Adelges abietis.
Rhizobius radicum.
Forda troglodytes.
Lecanim vitis.
— tilisæ.
— salicis.
— persicæ.
— olæ.
— caricæ.
Aspidiotus conchyforme.
Dactylopius citri.
— adonidum.
Thysanoptères.
Thrips cerealium.
— decora.
— hæmorrhoïdalis.
Diptères.
Tipula oleracea.
Sciara piri.
— analis.
Cecidomya tritici.
— destructor.
— nigra.
—. pyri.
— brassicæ.
Lasioptera obfuscata.
Sunulium ornatum.
— , maculatum.
— reptans.
Bibio Marci.
— hortulanus,
Tabanus bovinus.
Hsæmatopota pluvialis.
Œstrus equi.
— hæmorrhoïdalis.
Hippoderma bovis.
Cephalemya ovis.
Anthomya ceparum.
— brassicæ.
— furcata.
— radicum.
— conformis.
— lactucæ.
Pegomya acetosa.
Psilomya rosæ.
Hylemya coarctata.
Spilographa cerasi.
Dacus oleæ.
Phytomiza geniculata.
Tephritis onopordi.
Agromiza nigripes.
Platyparea pœciloptera.
Chlorops lineata.
— tæniopus.
Oscinis fnt.
Hippobosca equi.
Melophagus ovinus.
Myriapodes
Toutes espèces nommées euro-
péennes ou exotiques.
| 4
22 ANNÉE
2 SÉRIE — N° 320O
1° JUILLET 1900
L'HISTOIRE NATURELLE & L'ETHNOGRAPHIE
À L'EXPOSITION UNIVERSELLE
LES QUAIS DE LA RIVE DROITE; LES SECTIONS
ÉTRANGÈRES DU TROCGADÉRO
Nous commencerons aujourd'hui les promenades à
l'Exposition que nous avons annoncées dans le dernier
fascicule du Naturaliste. Mais, avant d'entrer, jetons un
coup d'œil sur la porte monumentale de la place de la
Concorde. On ignore généralement que
l'architecte s’est inspiré, pour son orne-
mentation ajourée d’un si curieux effet,
des squelettes treillissés des Radio-
laires et des Foraminifères, qu'il est
venu étudier à la bibliothèque du Mu-
séum,
Le seuil franchi, nous nous trou-
vons à l'Exposition d'horticulture. De
superbes collections de Conifères et de
Ithododendrons attirent nos regards
Fig. 1. — Araucaria imbricata de Californie.
Parmi les premiers, les’ plus remarquables sont ces
Sequoia, arbres géants de la Californie qui dans leur
pays natal atteignent 130 mètres de hauteur, et ces
Araucaria imbricata (fig. 1) qui, par la disposition de
leurs feuilles, rappellent les Lycopodinées et les Lépi-
dodendrées de l’époque houillère, dont les Conifères
actuelles sont issues. L’Exposition d'horticulture se
prolonge dans l'allée située entre les deux palais des
Champs-Elysées. On y trouve de beaux échantillons de
palmiers,
Avant d'arriver au pont des Invalides, à droite de la
passerelle, descendons dans un petit ravin. Nous y trou-
verons une remarquable collection de plantes aquatiques
et de celles qui affectionnent les rochers. Nous pourrons
étudier les modifications que ces deux genres de stations
si différents impriment à l'organisme végétal. Nous
remarquerons les larges feuilles flottantes et la couleur
vert gai des plantes aquatiques. Au contraire, chez celles
des localités sèches et rocheuses (fig. 2), cactus, agave,
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
Sempervivum divers, l'organisme se replie pour ainsi dire
sur lui-même pour éviter une trop grande évaporation.
Les feuilles sont souvent remplacées par des épines et la
plante entière a un aspect grisâtre et rébarbatif, Notons
que certaines Euphorbes, par exemple E, resinifera,
prennent sous l'influence de ce mode de station le port et
l'apparence générale de Cactus, plantes cependant bien
éloignées d’elles dans la classification.
Après le pont des Invalides nous trouvons le pavillon
de la ville de Paris. Ne négligeons pas d’y entrer, comme
nous pourrions être tentés de le faire, Nous y trouverons
de belles préparations de pathologie vétérinaire remarqua-
blement exécutées par la maison Deyrolle, des coupes du
sous-sol de Paris, des plans des anciennes carrières, un
panorama des champs d'épandage d'Achères, des échantil-
lons d’eau des diverses canalisations de la ville; enfin, tou-
jours au rez-de-chaussée, une très jolie collection archéo-
Fig. 2. — Groupe de plantes de localités rocheuses et sèches.
8 F
logique qui nous montre l’évolution de la bouteille, du
pichet, de la lampe à travers les âges, des armes et des ins
truments préhistoriques trouvés dansle sous-sol parisien.
Passons rapidement devant les deux palais de l’horti-
culture, dont les expositions fréquemment renouvelées
ne se prêtent pas à la description. Négligeons de même
les attractions de la rue de Paris, et arrivous au Troca-
déro. [ei, c’est surtout lethnographie qui nous arrêtera
Nous visiterons successivement les pavillons étrangers
et ceux des colonies francaises. Dans celui de l'Inde
anglaise nous jetterons un coup d'œil sur les mannequins
qui portent les uniformes de l’armée des Indes. Ces
mannequins sont des portraits. Nous remarquerons que
la plupart de ces personnages, malgré leur teint plus ou
moins foncé, sont des Aryens et que quelques-uns seu-
lemeat ont le type mongol. Les marchands indous ou cin-
ghalais postés dans les étalages sont également de race
aryenne, mais avec divers mélanges de sang jaune ou
noir, On sait, en effet, que la population primitive de l'Inde
était négroide et qu'elle a encore des représentants dans
les parties montagneuses et boisées de la péninsule et de
Ceylan. Cette population à été refoulée et métissée au
cours des âges par des invasions de blancs aryens et de
Mongols, qui ont occupé surtout le nord du pays,
148
LE NATURALISTE
Au centre du pavillon de l'Inde on remarquera une
grande vitrine renfermant des échantillons de la faune et
de la flore du pays (fig. 3). Un éléphant empaillé semble
sortir d'un fourré de bambous. Dans le voisinage, des
léopards, des sangliers, une civette, un ours, des singes
se livrent à diverses occupations, tandis que de magni-
fiques papillons butinent sur les fleurs et que de gigan-
tesques chauves-souris, des roussettes, volentdans les airs
et que sur le sol le cobra, le fameux serpent à lunettes,
NS
Re
C
OP
crustacés, des coquillages, des échinodermes attirent
notre attention; parmi ces derniers un Solaster papposus
du détroit d'Hudson, sorte d'étoile de mer à 12 branches.
Notons enfin deux jeunes autruches provenant d’un éta-
blissement voisin de Torento. C'est là un remarquable
exemple d’acclimatation d’une espèce dans un pays
bien éloigné et sous un climat bien différent de celui de
sa patrie originelle.
Dans un bâtiment annexe, nous trouvons du plomb
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A
A
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l'ig. 3. — La faune de l’Inde, animaux naturalisés (Pavillon de l'Inde",
s'apprête à s’élancer, Des vitrines plus petites, placées
sur les côtés, complètent cette remarquable collection.
Le Canada à envoyé une belle série zoologique
oiseaux divers, ours, loups, phoques, dont quelques-uns
à longue fourrure, lÿnx, loutres, gloutons arctiques,
castors, renards argentés, élans de près de 2 mètres de
hauteur au garrot. On sait qu'une espèce voisine existait
en Europe aux époques préhistoriques et qu’elle a même
été décrite par Jules César sous le nom d’Alces. Il y a
une très jolie collection ichthyologique, entr'autres le
fameux Lepidosteus, couvert de plaques émaillées et rap-
pelant par là les poissons de l’époque carbonifère. Des
argentifère, de belles plaques de mica provenant de la
province de Québec et, dans des vitrines couvertes de
forts barreaux de fer, du quartz avec des veines d’or et
de l’or d’alluvion. On sait, en effet, que le précieux métal
est exploité aussi bien dans les gisements primitifs, où il
est englobé dans le quartz, que dans les alluvions, où il
a été déposé après délitement de la roche par les agents
atmosphériques. C’est même par ces derniers gisements,
plus riches et plus faciles à exploiter, que l'extraction
commence toujours. On remonte aux veines d’origine
quand les alluvions sont épuisées.
Nous passons ensuite à l'ile Maurice où nous revoyons
ST RTE TEE CONTES CROSS DEP EN EEE CRE SRER CRUE 1
les quartz aurifères, et à l'Australie où nous sommes
encore dans le pays de l'or. Nous y retrouvons les
quartz aurifères et l'or‘d’alluvion, et de plus un autre
minerai, le telluride d'or. Nous y voyons aussi de l'or en
barre pour une valeur de près de 300.000 francs. Le
poids de ces lingots est, du reste, tel qu'il n’y a guère de
danger qu'ils soient enlevés. Au rez-de-chaussée se trou-
vent de magnifiques échantillons de bois de karri et de
Jjarrah, arbres du groupe des eucalyptus. Au premier
étage, 1l faut voir, outre les minerais d’or, une belle col-
lection d’huitres perlières, avec les appareils perfec-
tionnés (scaphandre) qui servent à les récolter. Dans
l'escalier qui réunit les deux étages du pavillon, nous
remarquons des photographies de cette malheureuse
race australienne que les Anglo-Saxons sont en train de
détruire, comme ils en ont fait disparaître tant d’autres.
Il faut voir aussi les flèches barbelées en bois et les
fameux boumerangs, ces instruments ressemblant à des
sabres en bois dont la lame serait courbée à angle obtus.
Les indigènes savent lancer cette arme de telle sorte
qu'après avoir frappé le gibier elle revienne tomber
près du chasseur. En réalité, par leurs instruments en
bois, sans armature de pierre, les Australiens se trou-
vent en quelque sorte inférieurs à nos ancêtres de
l'époque paléolithique.
Avec l'Egypte, c'est l'Orient qui nous attire. Malheu-
reusement, au moment de notre visite, rien n'était
encore prêt dans ce pavillon. Voici cependant l'orchestre
qui joue à l'entrée du théâtre : deux tambours et quatre
instruments en bois, sortes de clarinettes à sons nasil-
lards. C’est l'Orient farouche et réveur qui vit dans ces
bizarres mélopées. Comparons le type des exécutants
fellahs à celui du cicérone, très nettement sémitique. Les
Fellahs reproduisent le type des anciens Égyptiens,
resté intact malgré les invasions arabes. Quoique nous
nous soyons en général interdit tout ce qui peut ressem-
bler à une réclame en faveur d’un établissement payant,
disons cependant que le spectacle qui se joue à l’inté-
rieur du théâtre égyptien mérite d’être vu.
Reposons-nous un instant dans le jardin japonais et
Jetons un coup d'œil sur les arbres centenaires, pins et
thuyas (fig. 4) cultivés en pots et maintenus rabougris
par un art encore inexpliqué. On sait que l'idéal d’un
Japonais est d’avoir un jardin représentant en petit un
paysage très tourmenté, où des arbres échevelés bordent
des précipices en miniature.
Remontons maintenant vers le Trocadéro, passons
devant la ferme hoer et les établissements des chercheurs
d’or qui lui font une triste antithèse, et arrivons à la
belle exposition de l’Asie russe. Voici d'abord des vues
des sources de pétrole du Caucase, et des mannequins
représentant les populations si originales de la région :
Géorgien portant une outre de vin sur le dos, Avare
couvert d’une pelisse de mouton, Khevsoure revêtu
d'une armure moyenageuse. Remarquez tout près de là
les poteries en forme d'animaux et les instruments de
musique de ces peuples; et surtout jetez un coup d’œil
sur les cadres renfermant un herbier de la flore du
Caucase, sur les rocailles avec des oiseaux et sur les vi-
triues à insectes. Après avoir monté l'escalier, nous
trouvons en nous retournant un très beau groupe de
mouflons, de chamois et de vautours.
Nous voici maintenant en Asie centrale; passons rapi-
dement et arrivons à la Sibérie proprement dite, où nous
trouvons un tableau complet de la vie dans les régions
LE NATURALISTE
149
polaires, Remarquons surtout les renards blancs et le
groupe de chats-huants blancs; ce sont là des animaux
qu'on n'est pas habitué à voir dans les collections euro-
péennes. Ils sont, avec les ours blanes et le lièvre polaire,
un bon exemple de cette loi du mimétisme qui veut que,
dans un but de défense, le pelage d’un animal soit de
même couleur que le terrain où il est appelé à vivre.
Remarquons les moulages de têtes et les mannequins de
Samoyèdes et constatons que toutes ces populations de
l'extrême Nord sont de race mongole, L’ethnographie
est du reste très bien représentée dans cette galerie par
des modèles d'habitations des Ghiliaks de l'Amour et des
Aïnos de Sakhalin, par des traineaux, des vêtements et
des instruments de toutes sortes.
Ur groupe tres intéressant est celui qui représente la
danse du chamane devant un groupe de fidèles. Ce prêtre
ou sorcier est surchargé de sonnailles, de bouts de chif-
à
UE)
ae. à
de
.
v FER
CU
QUTA
Fig. 4 — Arbre nain du Japon.
fons et d’amulettes de toutes sortes; il frappe à tour de
bras sur un tambour dont la poignée porte des clochettes,
Au bruit tintamaresque qui s'ensuit, les divinités ohéis-
sent et les fidèles n’ont plus qu'à combler le sorcier de
cadeaux qu'ilest censé faire parvenir aux dieux.
Au fond de la galerie, ne négligeons pas d'entrer dans
une petite salle où se trouve un très bel herbier des en-
virons d'Akmolinsk. Enfin, dans le pavillon des apanages
impériaux, regardons les cadres d'herbiers pendus aux
murs, et surtout le magnifique bison empaillé qui se
trouve à l'entrée. On sait que cette espèce animale
autrefois répandue dans toute l'Europe n’est plus con-
servée pour les chasses du tsar que dans une forêt de la
Lithuanie. Remarquons que le bison d'Europe est plus
haut et plus élancé que son congénère d'Amérique et no-
tons que le sort des deux espèces a été à peu près le
même. Créées pour jouir des libres espaces, elles n'ont
pu résister à l’intrusion de la vie civilisée et ne sout plus
150 LE NATURALISTE
conservées que d’une façon tout artificielle. Jetons enfin
un coup d'œil sur le village russe où se trouvent réunis
de nombreux objets ethnographiques dignes d’intérêt :
costumes anciens et modernes, ustensiles de ménage,
broderies, harnais, voitures, etc.
De là nous passons à la Chine. Nous y trouvons des
modèles d'habitations et de bateaux, des armes, des
meubles en bois sculpté et une très jolie collection de
statuettes représentant les divers actes de la vie, Elle est
à rapprocher d’une collection analogue, concernant le
Japon, qui se trouve au musée d'anthropologie du Jardin
des Plantes. Un second pavillon renferme une collection
de costumes sur mannequins de grandeur naturelle.
Nous redescendons maintenant et nous jetons un coup
d'œil sur les Indes Néerlandaises. Dans le pavillon de droite
nous remarquons des pioches et des haches en fer em-
manchées sur des manches recourbés à la facon de cer-
taines pièces de l’époque du bronze, de curieuses poteries,
notamment des vases doubles communiquants, qui rap-
pellent certains objets préhistoriques d'Europe. Mais
l'objet le plus intéressant de ce pavillon est un essai de
reconstitution du Pithecanthropus erectus, ce fameux fos-
sile de Java, ancêtre présumé de l'espèce humaine. Il
est de grandeur naturelle et porte à la main des instru-
ments en bois de cerf.
Tout au pourtour de la salle règne une frise formée de
marionnettes découpées, et dans un coin est toute une
collection de ces curieux objets aux membres mobiles
qui servent à représenter des pièces de théâtre très com-
plexes. Au milieu du pavillon on voit les éléments d’un
orchestre et des mannequins de danseuses et d'acteurs.
Dans le pavillon de gauche se voient des modèles d’ha-
bitations et de fortifications, des collections d'insectes,
de bois et de minéraux. Les deux pavillons, d’un style
très curieux, ont une toiture en fibres de palmier.
Passons à travers les expositions du Transvaal et du
Portugal, non encore ouvertes au moment de notre visite,
et arrivons au pavillon des Missions catholiques. Ne nous
arrêtons pas à l'espèce de Musée de cire qui se trouve
au rez-de-chaussée, Remarquons seulement, au milieu
de cette salle, une couffa, barque ronde tressée en fibres
végétales et recouverte d'asphalte, à l'instar de l'arche de
Noé. Ces embarcations sont en usage sur le Tigre et,
pour le dire en passant, la persistance jusqu’à nos jours
de ces revêtements de bitume sur les bateaux, dont parle
déjà la Bible, prouve que la légende du déluge a pris
naissance en Mésopotamie et avait probablement pour
origine un raz de marée dans la vallée du Tigre et de
l’'Euphrate.
Au premier étage de ce pavillon se trouvent des collec-
tions d'ethnographie chinoise, turque et océanienne.
À noter dans cette dernière un manteau de chef maori
tissé en plumes noires et blanches : c'est un objet très
rare. [Il ÿ à également des colliers de coquillages et des
peignes en bois qui, par leur hauteur, rappellent les
objets analogues de l’époque du bronze.
Nous passons maintenant à l'extérieur de l'aile orien-
tale du Trocadéro; nous trouvons des habitations colo-
niales, et, dans un petit pavillon, à droite, une exposition
de divers minerais et des instruments employés par les
peuples les plus éloignés pour laver les alluvions auri-
fères, Nous laissons sur notre droite l'exposition de
Madagascar que nous réservons pour une prochaine
visite et nous pénétrons dans le palais du Trocadéro
par l'aile occidentale, celle qui se trouve en aval.
À l'entrée du Musée d’ethnographie du Trocadéro,
jetons un regard sur l'Exposition lithuanienne. Le fond est
occupé par une scène d'intérieur des plus caractéris-
tiques. Dans les vitrines et aux murs se trouvent de
remarquables travaux de broderie et d’orfèvrerie. On
sait que les Lithuaniens, autrefois rattachés à la Pologne,
sont maintenant incorporés à la Prusse et surtout à
l'empire russe, qui les opprime impitoyablement. Leur
langue, qui se rapproche davantage du sanscrit que les
autres langues indo-européennes, est frappée d'interdit.
Un grand nombre d’entre eux ont dû émigrer en Amé-
rique. Ce peuple, qui refuse obstinément de mourir,
mérite toutes nos sympathies.
Pénétrons maintenant dans la porte qui donne accès à
la classe 113, à peu près en face de la Lithuanie, et arri-
vons à la section danoise. Nous y trouverons réunies des
collections magnifiques, propriété presque exclusive du
gouvernement danois, Cette exposition mérite de tous
points d'être visitée en détail. Elle a trait aux iles Færoë,
à l'Islande et au Groenland, ces territoires colonisés depuis
plus de 1000 ans par les Scandinaves, en même temps
que l'Amérique du Nord était découverte par ces intré-
pides navigateurs. Pendant le moyen-âge, le Groenland
resta abandonné à lui-même et bientôt, la civilisation
scandinave s’atténuant insensiblement, les Eskimos en
redevinrent les maitres. En Islande, au contraire, 1l se
développa une remarquable civilisation, dont témoignent
les manuscrits et les ouvrages imprimés dans le pays,
ainsi que les ruines nombreuses qu'on y rencontre.
Quant au Groenland, soumis de nouveau à l'influence
européenne, les Danois ont eu le bon esprit d’y intro-
duire une civilisation lente, propre à conserver à la race
eskimo son caractère original.
Les objets exposés rentrent dans les catégories sui-
vantes : !
1° Plans, cartes, vues de pays, portraits des habitants.
A noter le caractère mongol du type physique des Eski-
mos.
2 Produits naturels. Belle collection de spath d'Is-
lande, peaux et crânes de phoques et de morses, d'ours
blancs, de renards, oiseaux empaillés. Dans une vitrine,
une collection d'empreintes végétales fossiles qui mon-
trent que ces régions, actuellement si déshéritées, étaient
bien plus favorisées aux époques géologiques précédentes.
3° Ethnographie et archéologie. Vêtements d'Islandais
et d'Eskimos, couverts de broderies très remarquables,
instruments de chasse et de pêche, grands filets montés
sur des fourches et servant à prendreles oiseaux marins.
Harpons groenlandais en ivoire de morse, kajaks avec
tous leurs accessoires, notamment l’outre qui sert au
pêcheur à emporter de l’eau potable et la longue lamière
de cuir qui retient le harpon; modele d’oumiak ou bateau
servant exclusivement aux femmes; traineau attelé de
chiens, En ce qui concerne l'Islande, on remarquera une
selle taillée dans une seule plaque de tourbe, et, dans
les vitrines, des serrures et des clefs entièrement en bois.
L’une des parties les plus remarquables de cette expo-
sition consiste dans les modèles d'habitations anciennes
et modernes de l'Islande. On s'arrêtera devant ces fermes
etces églises aux murs épais formés de couches de tourbe
et de pierre alternées, aux toits couverts de gazon et aux
fenêtres rares, Les petites coupoles en pierre situées à
côté des fermes servent à conserver les légumes et autres
produits alimentaires. À noter également l'abri pour les
moutons, formé de plaques de lavesuperposéesen rotonde,
PORT OT Pre:
doit
—
——
LE NATURALISTE
La salle de festin des anciens Normands retiendra aussi
l'attention, avec ses murs de tourbe et son foyer allongé
caractéristique. On a trouvé des ruines semblables non
seulement en Islande et au Groenland, mais sur la côte
occidentale de l'Amérique du Nord, à qui ces hardis
explorateurs avaient donné le nom de Vinland (terre du
vin). De même que celui de Groenland (terre verte), ces
noms prouvent qu'à l'aurore du Moyen Age toutes ces
régions étaient encore bien plus chaudes qu'aujourd'hui
et que le froid les envahit d’une facon lente et progressive.
DC LALOY.
LES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
MOIS DE
OU L’ON
L'ANNÉE
TROUVE
RE
Chenilles
Papillons
HABITAT
FRANÇAIS
PARVIFLORUS.. ....
EUROPÆUS..........
NAN US PNR ue die Are
VULGARIS... vu: de con
MARITIMUM. ....:,....
BELLIDIFOLIUM ..... ..
FRUCTICOSUM..........
CoTULA, ARVENSIS.....
Ajome
.. |Polia Argillaceago H.
.|Heliothis Peltigera S. V.
Heliothis Armigera IH.
Spintherops Cataphanes H.
Crocallis Dardoinaria Donzel.
Pseudoterpna Coronillaria H.
Acidalia Mediaria H.
Selidosema Perspersaria Dup.
Eubalia Peribolata H.
Alchemille
Melanippe Rivata I.
Alysson
Acidalia Cervantaria Mill.
Anarrhine
Hadena Treipschkei B.
Ancolic
Polia Chi L.
Ansérine
Mamestra ChenopodiphagaRbr.
Hadena Chenopodii S. V.
Hadena Sodæ Rmb.
Eupithecia Subnotata H.
Eupithecia Pumilata H. V. Pa-
rvularia H. $.
Pelurga Comitata L.
Anthémide
Cucullia Chamomillæ $S. V.
Sterrha Sacraria L.
Camptogramma Fluviata H.
Anthrisque
Nemoria Pulmentaria Gn.
Larentia Didymata L.
.|Tanagra Atrata L.
Arbousier
Charaxes Jasius L.
Boarmia Selenaria H.
Ephyra Pupillaria H.
Eupithecia Unedonata Mab.
Ulex
Mars.
Juin, juillet.
Août, septembre.
Mai.
Janvier.
Avril, mai.
Juin.
Avril (fleurs).
Novembre à avril.
Alchemilla
Juin.
Alyssium
Avril, juin.
Anarrhinuum
Jun.
Aquilegia
Mai, juin.
Chenopodium
Mai, hiver.
Juillet à octobre.
Août, septembre.
Octobre, novembre.
Janvier, février.
Septembre, octobre.
Anthemis
Juin à août.
Printemps, automne.
Février, mars.
Authriscus
Belle saison.
Mai, juin.
Mai, juillet.
Arbutus
Mars à mai.
Juin, juillet, septembre,
octobre.
Belle saison.
Octobre, nov. (fleurs).
Septembre.
Mai à septembre.
Juin à septembre.
Juillet, août.
Juin à août.
Juin, juillet.
Juillet.
Septembre.
Août, septembre.
Mai à juillet.
Mai, juillet.
Mai, août.
Juin, juillet, septembre.
Printemps, automne.
Mai, juillet, août, sept.
Mai.
Juin, juillet.
Avril, mai.
Juillet, août.
Mai à juillet.
Belle saison.
Juil, à nov., fév., mars.
Belle saison.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Mai, août, septembre.
Mai, juin, aout.
Belle saison.
Mars.
France méridionale.
Toute la France.
Basses-Alpes, Pyrénées-Orien-
tales, Auvergne.
Marseille.
Francecentrale et méridionale.
Provence, Pyrénées-Orientales.
France méridionale.
France centrale et méridionale.
Toute la France,
Cannes.
France méridionale,
Toute la France.
Méditerranée.
Toute la France.
Méditerranée.
Toute la France.
Iles de Lérins.
France centr.,sept.etorientale.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
Ardèche.
Montagnes.
Montagnes.
Provence.
Paris, Chalon-sur-Saône,
Cannes.
France centrale et méridionale.
Cannes,
LE NATURALISTE
LES TREMBLEMENTS DE TERRE EN 1899
Durant l’année 1899, les mouvements du sol que nous
désignons sous le nom de tremblements de terre ont été
assez fréquents; il n’y a heureusement pas eu de ces
catastrophes terrifiantes que l'histoire enregistre dans
ses annales et dont les populations épouvantées con-
servent le souvenir, mais des accidents nombreux et
d'une certaine gravité se sont pourtant produits, et ont
couté la vie à des centaines de victimes.
Notre vieille Europe n’a ressenti que des secousses
assez légères et sans conséquences graves.
En France, les mouvements du sol ne sont pas rares,
mais ne présentent qu'une faible intensité : la première
secousse s’est fait sentir dans la nuit du # au 5 mars, à
Barcelonnette, dans le département des Hautes-Alpes,
On peut encore ranger dans la catégorie des tremble-
ments de terre français celui qui s’est fait sentir dans le
sud de l'Alsace, le 17 février, et dont les secousses ont
été fortes dans la région de Markolsheim, dans la partie
sud des Hautes-Vosges.
Le sud de l'Italie a été quelque peu éprouvé; une se-
cousse qui n’a duré que quelques secondes a été ressentie
à Pise et à Florence dans la nuit du 27 au 28 juin; le
10 novembre, des secousses aussi légères ont été obser-
vées dans la ville de Livourne où il n’y aeu aucun dégât
matériel sérieux ; mais comme cette date du 10 novembre
coincidait avec celle prédite cette année pour la fin du
monde, il y eut une panique qui occasionna quelques
accidents parmi la partie peu éclairée et encore supers-
tiieuse de la population.
Cette crédulité qu'a rencontrée l’annonce de la fin du
monde cet hiver n’est pas digne d'un siècle aussi scien-
tifique que le nôtre.
Les Tremblements de terre en 4899, en Europe.
vers 2 h. 30 du matin, et a été suivie par un roulement
assez fort; mais il n’y à eu aucun dégât.
Dans le même mois de mars, le 23, un mouvement
analogue s'est fait sentir en Touraine.
La région de la Méditerranée a été agitée par une
secousse dans la nuit du 28 juillet, vers minuit, de Toulon
à Draguignan; mais la durée du phénomène a été très
courte, et il n’y a eu aucun accident à déplorer.
Une oscillation plus forte à été ressentie en Bretagne,
le 40 octobre, vers # heures du matin, à Quimper, à Douar-
nenez et sur tout le littoral de là baie jusqu'au cap
Sizun. Elle à duré 3 ou 4 secondes et a été accompagnée
d'un bruit souterrain d’une certaine intensité : les
meubles ont été fortement agités, dans les maisons, et
plusieurs personnes se sont réveillées.
Un département extra-continental de la France, la
Corse, a éprouvé deux secousses, dans la région de
Corté; elles ont été accompagnées d’un bruit sourd sem-
blable au roulement lointain du tonnerre; quelques mai-
sons ont été ébranlées, mais il n’y a eu aucun accident
de personnes.
C'est surtout sur le littoral du bassin méditerranéen
que les tremblements de terre ont été fréquents.
Le 16 janvier, à Santander, dans le sud de l'Espagne,
les vitres des fénêtres ont été brisées par une forte
secousse; six mois après, en août, une autre se faisait
sentir en Portugal, à Oporto.
Mais à Rome les secousses ont été plus violentes. Le
19 juillet, trois fortes secousses ont eu lieu : à 2 h. 19,
2 h. 20 et 2 h. 35; les oscillations ont été suivies d’une
forte pluie. La longue durée du phénomène a épouvanté
la population : on sentait le sol trembler sous les pas, et,
dans les rues, les réverbères oscillaient comme des ro-
seaux, Beaucoup de maisons et d’édifices ont été lézardés,
endommagés; les palais Sciarra et Chigi ont beaucoup
souffert; au Vatican également la secousse a été vio-
lente. Elle a été très forte dans la province de Rome, à
Rocca-di-Papa : plusieurs maisons ont été endomma-
gées, mais on n’a signalé aucune victime.
A Castel-Gandolfo une partie de l’église s’est écroulée;
à Marino la secousse a été très forte; elle a été légère à
Fiumicino. Aux collines du Latinium, où beaucoup de
|
LE NATURALISTE 153
Romains vont en villégiature, elle a été très forte et s’est
fait sentir sur un large rayon : c'était là le centre du phé-
nomène, À Genzano et à Civita-Lavinia quelques mai-
sons ont été lézardées; à Frascati on a ressenti deux se-
cousses très violentes : presque toutes les maisons ainsi
que les édifices publics ont été fortement endommagés.
À Monte-Compatri le tremblement de terre a causé des
dégâts à l’église et aux maisons : nombre d’entre elles
ont été lézardées, mais le mal a été très exagéré et il n’y
a pas eu de victimes.
À la même époque, au mois de juillet, l'Etna a eu une
éruption; une grande colonne de fumée et de sable s’est
élevée du cratère. On peut se demander si ce fait est en
corrélation avec le tremblement de terre assez violent
qu'on à constaté. (Chronique météorologique de la Na-
ture.)
Dans le fond de l’Adriatique, deux secousses ont eu
lieu, l’une à Laybach, dans la Carniole, le 18 janvier, à
9 h. 45 du soir, l’autre le 30 avril, vers midi, à Léoben en
Autriche, dans les Alpes de Styrie.
En Grèce, le nord du Péloponèse a été particulière-
ment éprouvé, Le 24 janvier, à Kyparissia, quelques mai-
sons se sont effondrées; le nombre des victimes a été
restreint. À la même époque, la ville de Nissi a été très
ébranlée et de nombreuses maisons ont été lézardées.
Mais, aux environs de Kyparissia, il y a eu des dégâts
considérables, et cinq villages ont été complètement
détruits.
De nouvelles secousses eurent lieu dans le Péloponèse
le 15 avril; le # mai il y eut un nouveau tremblement de
terre dans le sud-est de la même région. La ville de
Ligondista a été très endommagée, de nombreuses mai-
sons se sont écroulées,
. En Turquie, un tremblement de terre s’est fait sentir
le 22 septembre dans le village d’Aïdin et a causé la mort
de plus de cinquante personnes. :
Si nous passons au bord sud de la Méditerranée, nous
voyons que le 8 février, vers 2 heures du matin, deux
secousses ont été ressenties entre Sousse et Sfax sur la
côte tunisienne.
Quant aux autres régions du globe, nous nous borne-
rons à citer les tremblements de terre tout à fait excep-
tionnels.
Dans le nord-est de l'Inde, à Darjiling, au pied de
l'Himalaya, une forte secousse s’est fait sentir et a causé
de grands dégâts; plusieurs plantations de thé ont été
détruites. Le nombre des victimes a été de 100 à Dar-
jiing, de 200 au marché de Phul qui a été détruit par les
éboulements et de 40 à Tamsong-Bustée.
Au mois d'octobre, un tremblement de terre agitait la
côte sud de l’ile de Ceram, l’une des Moluques, et détrui-
sait complètement la ville d'Amalsei. Le nombre des
morts a été évalué à 4000 et celui des blessés à 500 pour
cette seule catastrophe.
Au Japon, il ne se passe jamais huit jours sans qu’on
sente le sol trembler sous soi; cependant un tremble-
ment de terre exceptionnel s’est produit le 6 mars; les
localités éprouvées par les terribles secousses de 1891
l’ont été de nouveau; on a signalé de nombreuses vic-
times.
Dans le centre du Mexique, une oscillation violente
qui a duré 3 minutes a eu lieu à Mexico, le 25 janvier,
vers 5 heures de l'après-midi. Plus de 200 maisons ont
été endommagées ; dix ont été complètement détruites ; il
- y a eu plus d’une centaine de blessés.
\
L'Afrique n’a pas été épargnée; un tremblement de
terre a eu lieu au Cap de Bonne-Espérance. Il a été res-
senti à Capetown le 15 septembre, à midi 25, et à Simons-
town, situé à 8 lieues plus au Sud, vers la même heure.
La secousse a duré plusieurs secondes, et a été assez vio-
lente, sur certains points, pour jeter à terre quelques
personnes. Les mouvements du sol ont été accompagnés
d'une violente dépression atmosphérique. Le dernier
tremblement de terre qui ait été digne d’être noté, au
Cap, remonte à 1857.
Quoique nous n’ayons cité que les principaux trem-
blements de terre survenus pendant le cours de l’année
1899, on constate par ce court résumé que l’activité in-
terne subsiste toujours dans notre vieille planète, et que
souvent ses réveils sont terribles.
E. Massar.
L'ACÉTYLÈNE A L’EXPOSITION UNIVERSELLE
Dans son numéro du 27 mai dernier, le journal l'Acétylène se
plaint avec raison de l'emplacement qui a été attribué à cette
branche d'industrie dans des régions inconnues de l'Esplanade
des Invalides. Il est évident qu'on n'y peut arriver qu'avec une
carte excellente, une bonne boussole ou un pilote connaissant
bien les amers de ces parages. En outre, personne ne se hasarde
à aller faire {oc toc à la solide porte de cave, de prison ou de
poudrière qui sert d'entrée à l'installation; on se figure que le
monument est une resserre d'outils ou de tonneaux d'arrosage,
ou peut-être bien un quelconque bureau administratif, et l'on
tire au large respectueusement.
Que si pourtant quelque explorateur hardi pénètre dans le
temple, «il se bouche le nez, dit notre confrère, et se sauve en
s'écriant : ça sent l'ail! »
Ces rares visiteurs sont vraiment singuliers: l’acétylène ne
sent pas l'ail; il exhalerait au contraire une vague odeur d'œufs
pourris, comme le gaz acide sulfhydrique; et sentirait-il l'ail à
plein nez que je l’en féliciterais, car j'adore cette liliacée, à
laquelle j'ai consacré un long article dans le Naturaliste. Notre
confrère rejette d'ailleurs le méfait de ces exhalaisons sur un
bar-cuisine voisin, « où mijotent, dit-il, des viandes épicées en
même temps que sont bues des liqueurs d’un goût extra-fort;
ces odeurs et ces arômes s'engouffrent dans la section, et voilà
lPexplication du phénomène ».
Que sera-ce donc, cher confrère, quand s'ouvrira l'énorme
restaurant moyen-âgeux qui couvre tout un côté de la section?
J'ai goûté à la cuisine de Mme Germaine, propriétaire du bar
en question, et j y ai vainement cherché de l'aioli où du sau-
cisson à l’ail; cuisine excellente d’ailleurs, café dont l'arôme
réveillerait Voltaire, liqueurs exquises. Quant à elle, elle ne se
plaint pas, ni ses clients non plus, de l'odeur de l’acétylène, par
la bonne raison que les appareils ne fonctionnent pas.
Donc, les visiteurs qui crient « à l'ail! » sont des intrigants;
il n'y en à ni dans la section, ni dans le bar.
Cette exposition est fort curieuse à voir; elle est située contre
la porte 27 bis, presque en face de la rue de l'Université, contre
le Ministère des affaires étrangères, près de la gare des Inva-
lides (vous y éêtes?...). L'éclairage à l'acétylène entrera dans la
pratique courante à une époque qui n'est certainement pas bien
éloignée; ce sera l'électricité des petits ménages; et il est très
regrettable qu'on ait relégué l'exposition de cette industrie dans
des terrains encombrés de simili-ruines et de prétendues recons-
titutions de l’ancien art des provinces bretonnes et berrichonnes,
où l'on n'entend, du matin au soir, qu'un épouvantable chari-
vari du cors de chasse et de binious. Ces terrains eussent pu
étre mieux utilisés.
Jusqu'à présent, dans cette partie de la classe 75, c'est une
véritable cohue de gardiens, de surveillants, d'alguazils, d’ins-
pecteurs, etc., etc., galonnés jusque dans le dos. Que diable
gardent, surveillent et inspectent tous ces gens-là? Va-t-on
bientôt amener de l'artillerie? — De public, point.
E. SanTint DE RioLs.
LES PLANTES ET LES NOMS DE LIEUX
Les noms de lieux ont un sens précis, souvent peu
connu, et dont l’origine n’ese pas toujours facile à déter-
miner. Autant il est facile de déterminer la signification
d’une localité telle que les Lilas, par exemple, autant il
peut être diflicile de reconnaître l’étymologie du village
de Cutz, jadis appelé Jérusalem, que les Arabes traduisent
dans leur langue par El Kods, la sainte, la ville sainte;
de là le nom de Couts ou Cutz, rapporté chez nous par
les Croisés, à leur retour dans nos pays.
Les plantes ont parfois donné leurs noms aux localités
où elles croïissaient en ‘abondance, tant en France qu’à
l'étranger : Rosenthal, Lilienthal, Lilacsbush, la vallée
des Roses, la vallée des Lis, le buisson des Lilas; Hei-
delberg, la montagne des Myrtilles, etc. Mais nous nous
bornerons aux localités de nos pays, le plus souvent,
A côté de localités telles que Fougères, la Fougeraie,
le clos Faverolles ou Féverolles, il en est d’autres dont
l’étymologie ne saute pas toujours aussi facilement aux
yeux. Ainsi, par exemple, Quennevière, Chenneviere,
signifie la Chanvrière, lieu planté de chanvre, qui pro-
duit la graine de chènevis. Certains endroits, appelés
la Folie, ne veulent pas toujours dire une folle exploi-
tation, mais viennent de folium, feuille, et signifient la
feuillée, sous le feuillage des arbres, la feuillade.
On est toujours très exposé à commettre des erreurs
quand on se livre à des recherches de ce genre. Ainsi la
Haie-Sainte à une signification qui peut être très dilfé-
rente de celle de La Haye, qui peut être la hague, hau-
teur fortifiée sur le bord de l’eau.
Fresne, la Fresnaye, lieu des fresnes, ne doit pas être
confondu avec la frette, le Frestoy, la Ferté, lieux jadis
entourés d’une enceinte palissadée de pieux aigus.
Le chène des partisans, le chène Herbelot, le chêne
tourteux, le chêne populeux, sont autant de noms connus
dont le sens se retrouve encore dans Caïisne, le Quesnoy,
la Chesnaie, lieux plantés de chênes ; comme Rouvres,
Rouvroy, la Rouvraie, lieux plantés de chênes rouvres,
à glands sessiles, par opposition aux chênes à glands
pédonculés.
Quiersy, Kiersy, nous paraît dérivé du celtique Kaer,
arbre, lieu boisé, ou encore de Kaer quès, bel arbre, lieu
planté de beaux arbres, d’où les Latins ont tiré le mot
quercus, chêne. Cependant il ne faudrait pas en conclure
que la province du Quercy vienne du latin quercus; car
ce mot provient de l’élision du mot Cadurci, les Cadur-
ques, nom de la peuplade gauloise qui l’occupait autre-
fois.
Le Coudray, la Coudraie signifie une plantation de
noisetiers ou cCoudriers. La Châtaigneraie, l'Aulnoie,
l'Aulnaye, se comprennent aussi aisément : lieu planté
de châtaigniers ou d’aulnes. La Pommeraye est évidem-
ment un lieu planté de pommiers. Voici maintenant des
étymologies plus délicates, d'autant plus intéressantes
qu'elles sont plus difficiles à découvrir :
Breuil, Broye, Broglie, signifie petit bois, brég oil,
Breuil par élision.
Breteuil, Breit-euil, signifie grand bois.
Moreuil nous parait se traduire par bois sombre,
comme Sombreuil, de mor, noir. Noureuil peut signifier
bois de noisettes, de faines ou de glands, Nonteuil,
LE NATURALISTE
bois marécageux, bois humide. Auteuil serait plutôt le
bois sur la hauteur. Berneuil est le bois du mâle, Bern,
de Ber, Béer, ours, le roi des animaux sauvages de nos
antiques forêts. Le pont de Lorgueil, près du canal au-
trefois, avant les travaux du canal de Saint-Quentin, est
une dégénérescence pour Longueil, long bois. Luxeuil si-
gnifie bois célèbre, plutôt que bois ensoleillé. La Pinède
est un endroit planté de pins.
On sait que Lifou-le-Grand se disait jadis Latofao ou
Locofao, lieu des hôtres, bois de hêtres, fagus. C’est
même du pluriel fagi, les hêtres, prononcé fagui par nos
ancêtres, que viennent les noms de localités telles que
Fay, Faillouel, Fayel, lieu des hêtres, bois des hêtres.
De là aussi les noms de Tarlefesse, pour Taillefesse,
Taillefays, taillis de hêtres; et de Fontaine-Belle-fesse,
Belle-fays ou fontaine des beaux hêtres. On signalait
autrefois quelques gros hêtres, qui poussaient autour de
cette source; et le dernier a été connu de la génération
qui a précédé la nôtre. Est-ce que Estay, Estouilly ne
signifieraient pas aussi lieu des hêtres, et lieu du bois
des hêtres? Nous laissons à de plus compétents que nous
le soin de résoudre cette question.
On sait que le torrent du Cédron doit son nom aux
cèdres, Cédar, qui jadis ombrageaient ses bords; de
Cédar, noir, arbre à sombre feuillage, chez les Hébreux.
La Phénicie doit peut-être aussi son nom aux dattiers
PhϾnix, qui y croissaient autrefois en grand nombre,
comme l’a dit un des collaborateurs de cette revue. Nous
pensons que ce serait plutôt l'inverse; de sorte que le
mot Phénicie viendrait lui-même de la pourpre, goé,
que l’on récoltait jadis sur ses rivages, des mollusques
du genre Murex, que l'on y rencontre principalement. Ce
mot vient lui-même des mots gevw, tuer, wovos, Carnage,
qui donnent l’idée du sang et de sa couleur rouge pour-
prée.
Le village de Presle doit son nom aux prêles qui crois-
sent dans les parages humides.
Salency parait dériver de Salicium acus, champ de
saules. On sait que c’est la patrie de saint Médard, qui y
institua le couronnement de la rosière. De là le nom de
Rosière, donné à un lieu dit; où se trouvait le fief de la
rose. Rosières-en-Santerre vient-il de roses où de ro-
seaux? Nous pencherions pour cette dernière étymologie.
En tous cas, nous la retrouvons dans la rivière de
l'Aronde, arundo, roseau en latin.
C'est du nom saule que viennent les noms de lieux
tels que la Saussaie, le Saussoy, lieu planté de saules,
salix, plante qui pousse sur le bord des eaux, al-lis en
celtique.
Jonchères, Jonquières, le Jonquoy, la Joinquière, ete.,
viennent du mot jonc, et signifient également lieu humide
où les joncs poussent tout seuls.
Le bois des Ajeux est le bois des ajoncs. Peut-être
que l’une des localités telles que Genvrvy, Genlis, etc.,
dérive aussi du mot gen, buisson, genêt, genévrier, qui a
formé ac-gen, ajonc, buisson épineux, chez nos ancêtres
gaulois.
Brières, Bruyères, de brueriæ, broussailles, signifie les
bruyères, et indique un terrain aride, provenant d’un
bois poussant sur une terre sablonneuse, mélange de
sable et de terre végétale propre à l’éclosion des bruyères.
Lespinay, Lespinoy, l'Epinoy, etc., indique un lieu
couvert jadis de plantes épineuses, telles que des ronces,
des rosiers, des prunelliers, des aubépines. Cormeilles,
Cormiers, est une localité où croissaient ces arbres drus
LE NATURALISTE 15
de la famille des Pomacées. Alise vient peut-êre aussi
des Alisiers, qui sont de la même famille; nous y trou-
vons une racine gauloise, al-tse, qui signifie boisson des
oiseaux, fruits aigrelets, comme ceux du sorbier des oi-
seaux : de sor, âpre, ou de sorbere, boire.
D' BouGox.
LA LONGUE-VUE MICROSCOPE
Ce n’est pas sous le nom de «longue-vue microscope »
que le nouvel appareil a été exécuté et décrit par M.A.Des-
champs, appareil qui a fait l’objet d’une communication
à l'Académie des sciences ; son nom véritable est le « Télé-
microscope (1) » ; mais la forme de l'appareil, son emploi,
semblent plutôt justifierle nom quenousindiquonsentitre.
C’est une véritable longue-vue qui sert non seulement
pour examiner des objets de 25 centimètres à 2 mètres,
mais même pour observer à 15 lieues en mer, et dans
Le Télémicroscope
(reproduction d'une photographie)
d'excellentes conditions; pour les objetsrapprochés jusqu'à
2 mètres par exemple, c’est une loupe à longue portée :
pour voir à 20 kilomètres, c’est une longue-vue parfaite.
À 25 centimètres de distance, le grossissement est de 12
diamètres environ, plutôt même davantage.
(1) Cet instrument est en vente chez Les Fils D'Emile Deyrolle,
* 46, rue du Bac, Paris.
©
Le Télémicroscope a un objectif formé de deux lentilles
achromatiques. Ces lentilles peuvent être plus ou moins
séparées par le jeu des tubes, la séparation augmentant
l'achromatisme. Cette distance restant cependant toujours
inférieure à la distance focale de la plus convergente, elles
continuent à agir comme une seule lentille. Un bon rap-
port entre leurs distances focales est de 25 à 18 centi-
mètres. La plus convergente, placée à l'intérieur, con-
dense le faisceau lumineux et rend plus nette l'image,
qu'elle porte renversée au delà du foyer de l'oculaire qui
la redresse. Cet oculaire est formé de quatre verres. Le
verre d'œil à été choisi aussi convergent que le permet
la netteté, qui doit être absolue. Cette convergence aug-
mente à la fois le grossissement et l'étendue du champ.
Avec lalongue-vue microscope on pourra facilement étu-
dier les mœurs des insectes sans les faire sortir de leurs
habitudes et saisir, pour ainsi dire, leur vie sur le fait.
À 30 centimètres, les moindres détails sont visibles : fa-
cettes des yeux composés, poils les plus ténus, organes
les plus minimes de l’animal ou de la plante, rien n’é-
chappe à l'œil de l'observateur armé du Télémicroscope.
Cetinstrument est appelé à aider puissamment au pro-
grès des sciences naturelles. Combien de secrets de la na-
ture, grâce à lui, seront, à l'avenir, dévoilés! Au point de
vue du pittoresque, l'instrument n’est pas moins précieux.
Nous avons sans cesse autour de nous la source des plus
douces jouissances : une fleur, une touffe de gazon, quel-
ques brins de mousse,une colonie d'insectes, une eau trans-
parente, offrent des tableaux d’une grâce, d’une fraicheur,
d'une magnificence inconnues. S'il s’agit des plantes, les
détails ressortent avec un relief merveilleux ; les couleurs
sont plus vives, le rouge plus intense, le bleu plus délicat,
le blanc plus pur. Une simple fleur de sauge des prés
porte un manteau royal de velours bleu-violet brodé de
perles d’une richesse inouie. Une araignée guettant, sai-
sissant, sucant une mouche sur une fleur est un spectacle
étonnant. Quelques mouches se délectant d’un morceau
de sucre, une fourmilière vaquant à ses multiples occu-
pations, voilà autant de spectacles merveilleux dont le
Télémicroscope permet la contemplation ; et on peut les
varier à l'infini.
Enfin, le Télémicroscope donne un tel relief, non seu-
lement aux solides objets, mais encore aux gravures, aux
photographies, qu'il peut presque tenir lieu de stéréo-
scope. On a donc dans cet instrument léger et portatif
comme un œil nouveau auquel n'échappent que les infini-
ment petits.
LES OISEAUX NUISIBLES
LE GEAI
Après la pie, le geai est assurément l’un de nos oiseaux
les plus nuisibles et dont la destruction ne saurait être
trop recommandée.
Le geai recherche les fourrés, la lisière des forêts, les
bouquets de bois et spécialement les bois de chêne. Son
cri bien connu est rauque et peut être exprimé par le
mot raek ; toujours aux aguets, il répète ce cri lorsqu'il
remarque la présence d'un chasseur où d’un chien dans
le bois qu'il habite ; à son cri, les autres geais accourent
et organisent un concert discordant ; on dit qu'il imite
156
LE NATURALISTE
aussi le chant des autres oiseaux et le miaulement du
chat. Il se nourrit de glands qu’il avale entiers pour les
ramollir dans son jabot, puis les régurgite et les fend ; il
brise méme des noisettes à vigoureux coups de bec; il
pille les champs, les jardins et les vergers qui avoisinent
les forêts, dévorant les fruits et les semences et enfouis-
sant, comme la pie, le produit de ses vols.
« Quand vous le voyez passer, dit Toussenel, au dessus
de la vallée, en automne, tenant en son bec une pomme,
une châtaigne, une noix, c’est qu'il se rend vers la
cachette qu'il a choisie pour y déposer son épargne. Cette
cachette est tantôt un vieux nid de pie ou un nid d’écu-
reuil ou bien encore quelque cavité d'arbre. Les chênes
qui poussent quelquefois dans le sein des vieux saules
proviennent des glands apportés là et, plus tard, oubliés
par le geai. »
Malheureusement il ne se borne pas à se nourrir de
fruits et de semences, c'est un destructeur d'oiseaux aussi
redoutable que la pie; il ravage également les nids de
perdrix et s'attaque surtout aux nids d'oiseaux utiles :
merles, rossignols, fauvettes, dont il brise les œufs ou
mange les petits.
« Que fait ce chevalier errant, ce rusé compagnon,
ditle naturaliste allemand Trinthammer, pendant toute
la saison des amours ? Il va d'arbre en arbre, de buisson
en buisson ; il ravage les nids, boit les œufs, dévore les
petits, déchire les jeunes qui l'ont imprudemment laissé
approcher. L'épervier, les pies-grièches sont, eux aussi,
de cruels assassins, mais aucun ne cause autant de mal
au peuple chantant de la forêt que le geai, Ce qui a
échappé à la serre de l'oiseau de proie, à la dent de la
marte ou de la belette, succombe sous sescoups. Où il se
montre, les couvées sont détruites. Le forestier, qui tient
à voir les petits oiseaux détruire les chenilles et la ver-
mine contre lesquels, seul, il serait impuissant, doit acti-
vement surveiller l’ennemi acharné de ces êtres si utiles,
le geai, et mettre un terme à ses déprédations. »
Rusé, alerte et toujours en mouvement, le geai est
assez difficile à tuer et aucun piège ne pourrait être
employé avec succès pour le capturer; on peut cependant
le tirer en se cachant et en imitant son cri ou en fixant
sur un buisson une chouette vivante ou empaillée dont
on imite la voix ; le moment le plus propice pour l'affût
du geai est le soir, lorsque ces oiseaux se réunissent en
troupes avant de chercher un refuge pour la nuit. Il est
assez difficile de détruire sa nichée, car il place son nid
sur les chênes, les châtaigniers, les hêtres, à une hauteur
d'environ huit mètres,
Le geai est heureusement moins commun que la pie,
mais il est au moins autant nuisible et mérite d'être
détruit sans pitié. Tandis que de nombreux oiseaux utiles
sont sacrifiés pour satisfaire aux usages de la mode et
parer les chapeaux de leurs dépouilles, ne devrait-on pas
employer de préférence les ailes du geai qui sont ornées
de jolies plumes bleues et remplaceraient avantageuse-
ment les ailes d’hirondelle ou de chardonneret ?
Albert GRANGER.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 11 juin 1900.
Tremblement de terre au Mexique en décem-
bre 4899. — Le 19 décembre dernier, un tremblement de
terre ouvrait une profonde crevasse à 2 milles au sud du rancho
de Cardona, à l'ouest de la capitale de l'État de Colima. Cette
crevasse ne fut découverte que récemment par un laboureur, et
l'on s’est aperçu qu'elle donnait accès dans une galerie souter-
raine continuée par toute une série d'autres galeries plus longues
et plus larges. Le sol en est formé d'une sorte de pâte minérale
solidifiée, les voûtes sont décorées de sculptures en relief. Dans
un angle d'une galerie du fond on a trouvé un monceau d’osse-
ments humains, des objets en terre cuite et beaucoup d'idoles
en pierre.
Sur les embryons du blé et de l'orge pharaoniques
(M. Edmond Ga). — Les graines répandues dans le commerce
sous le nom de blé de momie ne présentent aucune authenticité.
Tout le monde admet comme sans valeur l'expérience du comte
de Sternberg qui croyait avoir obtenu la germination de deux
grains de blé pharaonique. D'autre part, Alphonse de Candolle
ne considère pas comme impossible qu'une graine ait pu garder
pendant quarante ou cinquante siècles sa faculté germinative. Il
suppose en outre implicitement que les blés pharaoniques n'ont
pas subi de préparations leur enlevant le pouvoir germinatil
avant leur dépôt dans les hypogées. Laissant ici de côté
celte dernière question et toute autre question connexe, l'auteur
s'est proposé de vérifier, par l'examen microscopique d’un grand
nombre d'échantillons, si véritablement les grains pharaoniques
de diverses origines avaient parfois conservé une organisation
interne compatible avec la possibilité d'un réveil germinatif.
Il faut constater qu'extérieurement les grains pharaoniques sont
ordinairement d’un très bel aspect. Le seul caractère externe un
peu notoire consiste le plus souvent dans une teinte rouge bru-
nâtre déjà signalée.
En résumé, par suite des observations de M. E. Gain, il
résulte que les céréales pharaoniques, malgré leur apparence
extérieure de bonne conservation, ne possèdent plus une organi-
sation cellulaire compatible avec un réveil germinatif. Leurs
réserves sont souvent chimiquement bien conservées et utili-
sables par un germe viable, mais l'embryon à subi une trans-
formation chimique très accentuée el n'est plus viable. Cette
altération chimique indique même que la vie ralentie du grain est
abolie depuis très longtemps.
Séance du 18 juin 1900.
Sur l’hydrate de carbone de réserve de la graine
de « Trifolium repens » (M. H. [Hérissey). — A la suite de
recherches sur les albumens de plusieurs graines de Légumi-
neuses, M. Bourquelot et M. Hérissey ont montré que les
hydrates de carbone de réserve, qui entrent dans la composition
des albumens étudiés, sont constitués, au moins pour la plus
grande portion de la masse, par des mannogalactanes, c'est-à-
dire par des substances donnant à l'hydrolyse du mannose et du
galactose; il a été établi, en outre, que la digestion de ces
hydrates de carbone de réserve se fait sous l'influence d’un fer-
ment soluble appelé séminase. Les recherches effectuées sur la
graine de Trifolium repens permettent d'étendre les conclusions
relatives aux résultats qui viennent d’être mentionnés. L'hydrate
de carbone de réserve des graines de Jrifolium repens est une
mannogalaclane; cette mannogalactane se rapproche, par ses
propriétés, de celles de la Luzerne et du Fenugrec; elle est
hydrolysable par la séminase qui la transforme, au moins par-
tiellement, en sucres réducteurs assimilables,
Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE. 17.
157
NATURALISTE
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NATURALISTE
LE
7
158
—
Antennes rapprochées à leur insertion ou
légèrement écartées ; tète recouverte en
‘totalité ou en partie par un rebord très
mince du prothorax (fig. 9).. .......... VIT. LAMPYRIDES.
Antennes écartées à leur insertion ; tête
non par le rebord du prothorax.
(Res M0) Re erEeRE T eo bn don de 10
Tête plus ou moins enfoncée dans le pro- D ï ; Cd
thorax, sans cou distinct (fig. 11)..... CE
Tête séparée du prothorax par un cou distinct
(fe) ere eCE bats ae nanas OS
Prothorax presque carré, aplati ou très peu con- (NES
ne
vexe en dessus/(fig. 48)... .. dre PS
Prothorax globuleux, comme voüté d'avant se =—
en terrine (fig lé). t : = 0e)
}
Avant-dernier article des tarses
antérieurs bilobé ou échancré;
4° art.strès petit, caché dans
l’échancrure du 3° (fig. 15)...
Avant-dernier art. des tar-
ses antérieurs ni bilobé
ni échancré (fig. 16)..... CLÉRIDES.
VIII, TÉLÉPHORIDES,
12
LV. LYMEX YLONIDES,
— id à di M « és. dd satin de à Se ane dd À AS at ot à 14 AU et,
19
Corps court; pattes allongées; antennes
insérées sur le front en dedans des yeux
MALACHIIDES.
Gode MR AA A OT à ;
(incl. Dasylides)
9)
Corps allongé, cylindrique (rarement court);
antennes insérées au devant des yeux
sous le rebord du front (fig. 48)...,..... HT. PTINIDES
Tarses de 5 articles dont le pre-
nier estle plus allongé (fig. 19). IL. ANOBIIDES.
10! (incl. Sphindides.)
Tarses de 3, 4 ou 5 articles, dont le pre-
mier est le plus court (fig. 20-21). I, BOSTRICHIDES.
(incl. Lyctides et Cisides.)
CROTE 21
(A suivre.) ConsTANT HOULBERT.
(==)
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ES
(æ
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99e ANNÉE
2e SÉRIE — N° 32 1
15 JUILLET 1900
CONTRIBUTION
à l'étudede la faune dela Roumanie
. Depuis 1881 continuellement je collectionne les ani-
maux, surtout des Invertébrés, que je trouve en Molda-
vie (Roumanie), et je cherche à les déterminer moi-
même.
11 s'ensuit que, jusqu'à présent, je n'ai publié que très
peu de choses sur la faune de mon pays et que je suis
un peu devancé par d'autres naturalistes qui s'occupent
de la même faune, mais dans l’autre partie de la Rou-
manie, en Valachie. Je dois ajouter que ces derniers se
sont adressés à différentes personnes de l'étranger pour
leur faire les déterminations, ce qui facilite beaucoup la
besogne et on avance rapidement. Ainsi M. Jaquet, de
Bucharest, s’est adressé, pour lui déterminer les Myria-
podes, à M. Carl Verhoff, de. Bonne; pour les Crustacés,
à M. A. Dolfus, de Paris; pour les Aranéides, à M. P.
Pavesi, de Pavia; pourles Vers, à M. Rosa, de Turin, et
pour les Insectes, à MM. Frey-Gessener et Poncy, de
Genève.
Jusqu'à présent j'ai publié, de la faune de la Rouma-
nie, une liste de Rotifères, cueillis, étudiés et déterminés
par moi, et une liste non complète de Lépidoptères diur-
nes. Leur publication fut faite dans le Naturaliste et
dans une brochure en Roumanie.
_ Je viens de déterminer et classer, avec l’aide de M. À,
Gorescu, assistant à mon laboratoire, presque tous les
Insectes recueillis (excepté les Diptères), et je me propose
d'envoyer bientôt un mémoire à la Société zoologique,
pour les faire connaitre aux entomologistes. Un aperçu
sur l’ensemble de cette collection d’Insectes se trouve
déjà publié dans l'Annuaire de l'Université de Jassy
(1898-1899).
Pour le moment, je présente un ensemble sur la
faune carcinologique de mon pays, genres et espèces
que j'ai collectionnés, classés et déterminés avec l’aide
de Mlle Annette Fuduri, assistante au laboratoire.
Et, pour terminer, j'ajoute que j'ai,en cours de prépa-
ration, une collection assez riche d’Arachnides, de Vers
et de Protozoaires.Pourtant, quand bien même j'arriverais
à publier tout ce que j’ai amassé, il ne s'en suivra pas
que notre faune ait été complètement étudiée. Il nous
faut encore beaucoup de recherches à faire et que d’au-
tres naturalistes me viennent en aide, ne pouvant plus
continuer seul cette pénible besogne, avec toute l'ardeur
qu'elle demande et que je désire.
La faune carcinologique.
La faune carcinologique de cette partie de la Rou-
manie n'est pas si riche, vu le nombre restreint de
39 espèces que j'ai déterminées jusqu'à présent, sans
compter l’Ecrevisse et les quelques Amphipodes que j'ai
aperçus.
J'avoue que, malgré moi, j'ai été forcé de créer quel-
ques nouvelles espèces, vu les confusions des ouvrages
descriptifs.
Même je me permettrai d'observer aux personnes qui
se décident, chose fort louable, à nous donner un en-
semble, aussi complet que possible, de tout ce qui con-
Le Naluralisle, 46, rue du Bac, Paris.
cerne un groupe quelconque d'animaux, comme par
exemple les Copépodespubliés dans das Fierreich, Berlin,
1898, qu'ils nous donnent au moins une figure complète
de la faune de chaque genre et un dessin parfait de
l'organe choisi, comme ayant les caractères spécifiques.
De la manière dont ces publications sont faites, il est
certain qu’elles n'atteiguent pas le but voulu, Elles
sont plus qu'insuffisantes.
Les spécimens déterminés sont pour la plupart des
Entomostracés, spécialement des Cladocères, Ostracodes et
Copépodes. Parnn les Edriophthalmes je n’airecueilli que
quelques Isopodes. à
Je commence par ces derniers.
I. — ISOPODES.
J'ai trouvé trois genres : l’un de la famille des Asel-
lides :
Asellus aquaticus (Geofr.), espèce fort commune dans
les eaux stagnantes et dans les petits ruisseaux.
Le second de la famille des Oniscines :
Frichoniscus pusillus (Brandt), trouvé une seule fois,
dans la vallée de Viischoara (Rapedea-Jassy), au mois
d'avril 189%.
Le troisième de la même famille :
Oniscus murarius (Cur.), très commun.
ÎTI. — BRANCHIOPODES.
Nous avons trouvé le Branchipus stagnalis (Lam.) et
l’'Apus cancriformis dans les eaux stagnantes des environs
de Jassy. Je dois ajouter qu'on ne les trouve pas tou-
jours.
III. — CLADOCÉRES.
En suivant la classification de Bohuslar Hellich (1),
jJaitrouvé dans les eaux stagnantes et courantes des
environs de Jassy et d’autres localités de la Moldavie
huit genres et dix-huit espèces de Cladocères, des fa-
milles suivantes.
a) Famille Daphnidæ (Sars).
Cinq genres de cette famille :
1° Daphnia et cinq espèces :
D. pulex (Müller), fort commune danslesbassins mêmes
de la ville (Cossou).
D. magna (Strauss),tout aussi abondante que la précé-
dente et parfois les individus atteignent 5 millimètres
de diamètre.
D. longispina (Leydig) dans les mares près de la
Douane (Jassy), dans la rivièré Bahlui et dans le lac de
Cristesti (1898), surtout au mois de février.
Il y a des spécimens avec l'épine caudale plus courte,
d'autres l'ayant plus longue et jamais de la longueur de
D. longispina représenté comme type, par M. Jules Ri-
chard (2).
D. sima (Fischer), différente de Simocerhalus vetulu
de Hellich qui en fait un synonyme.
Se trouve dans le ruisseau Ciric (1889) et Bahlu
(1890).
D. Schæfferi (Baird), gros specimens fort communs. A
deux reprises, J'ai trouvé cette espèce dans un bassin
du milieu de la ville de Jassy.' Probablement ont été
(1) Die Arbeilen der Zoologischen Abtheilung : die Cladoce-
ren Bohmens. Prag, 1871.
(2) Ann. Sc. nal. Paris, t. I, 1896, fig. 8, pl. 22,
160
LÉ NATURALISTE
EEE CT ES PE = TR
disséminés à l’état d'œufs d'hiver, dont on les voit assez
souvent chargés.
20 Ceriodaphnia (Dana),une espèce :
C. reticulata (Jurine), trouvé dans une flaque d’eau,tout
en haut de Barnova, à la fin du mois de mai 1895.
3° Simocephalus (Schædler), deux espèces, et je
dois faire une variété :
S. Serrulatus (Koch), ruisseau de Ciric.
S. Vetulus (O. Fr. Müller), étang Beldimau, 28 jan-
vier 1900.
S. vetulus var. : Brandtii. L’exemplaire trouvé en jan-
vier 4899 dans l'étang de Beldimau est un Simocephalus
suivant les caractéristiques de Hellich, ressemble, seule-
ment en ce qui concerne la forme de la tête et de l'abdo-
men, au Daphnia sima de Fischer (2), espèce considérée
par Hellich comme Simocephalus vetulus (loc. cit., p. #1);
diffère de cette dernière par la conformation de la cara-
Fig. 4. — Simocephalus vetulus var. Brandtii (n. var.).
pace, ressemblant, à ce point de vue, au Daphnia Brandtii
de Fischer (loc. cit., t. V, fig. 1). Pour ces motifs, je
considère mon spécimen comme une variété du S. vetu-
lus et, pour confirmer les caractères de l’une (D. sima) et
de l'autre (D. Brandtii), je lui ai proposé le nom donné
(v. fig. 1).
4° Scapholeberis (Schœdler), une espèce :
Se. mucronata (O. Fr. Müller), trouvé au mois d'avril
au bord de l'étang de Scobälteni (Pod-Iloæi).
Dans l’eau, ces Daphnies sont d’un brun noir, assez
intense. Sous le microscope n’ont pas cette couleur. Il
est difficile de nous expliquer cette coloration.
5° Moina (Baird), deux espèces :
M. brachiata (Jurine), trouvé au mois de juillet 1890 à
Babiceni (Dep. Botochany) et au mois de janvier 1899
dans l'étang de Beldimau.
M. rectirostris (O. Fr. Müller), étang de Beldimau.
b) Famille Lyncodaphnidæ (Sars).
Deux genres :
1° Lathonura (Liljeborg), deux espèces et une va-
riété :
L. rectirostris (O. Fr. Müller),
dimau.
L. rectirostris var. : dorsispina (n. v.). L'individu trouvé
dans le même étang, au mois de juin 1898, porte en plus
des épines sur les 3/4 de larête dorsale des valves.
Comme dimensions, mes exemplaires sont bien plus pe-
tits, n'ayant que 0 c. 40 comme longueur, Pour le mo-
ment je le considère comme une variété, quoique l’en-
semble de l’organisation puisse nous permettre de le
considérer comme une nouvelle espèce.
Le naturaliste IHellich considère le Daphnia mistacina
de Fischer commeidentique à son Hathomera rectirostris.
Dans ce cas-là, les antennes de notre spécimen diffe-
rent de ceux dessinés par Fischer, n'ayant des denti-
cules qu’au bord terminal de chaque article, tandis que
Fischer en dessine plusieurs rangs sur chaque article
antennaire.
dans l'étang de Bel-
2° Macrothrix (Baird), deux espèces, dont une nou-
velle :
M. vosea (Jurine), dans l'étang de Beldimau, 28 fé-
vrier 1900. Ces individus à cette époque sont remplis
d'embryons et j'ai observé, d'une part, que les valves
sont extensibles et que l'animal les contracte en quelque
sorte, d'autre part, qu'elles se laissent distendre par les
embryons et l’animal devient fort voüté. J’ai observé
encore que le museau assez allongé de l'animal est mo-
bile.
M. magnantennulata (n.sp.). Ce sont des individus bien
plus petits que les Macrothrix en général. Ils n’ont que
tout au plus 2 millimètres comme longueur et les
antennules, assez haut fixées sur les joues de l'animal,
sont excessivement longues (9 millimètres), par rapport
au corps (fig. 2), très mobiles et paraissent formées de
deux parties : l’une basilaire, terminée par unepointe, et
l'autre terminale, par une touffe de gros bâtonnets. Ces
Fig. 2.— Tête du Macrothrix magnantennulata (n. sp.).
antennules sont si caractéristiques, que je les ai choisies
comme criterium de spécification.
c) Famille Lynceidæ (Sars).
Un seul genre et deux espèces, dont une nouvelle :
1o Chydorus (Baird).
Ch. sphæricus (O. Fr. Müller), rivière Bablui (1888),
: ruisseau Ciric (1889), lac Cristesti (1895).
Ch. elavatus (n. sp.). L’exemplaire trouvé au mois de
septembre 1888 dans la rivière Bahlui doit être considéré
comme une nouvelle espèce de Chydorus. À première
vue,il ressemble au Ch.latus, mais diffère aussi bien par la
ï taille que par la conformation du post-abdomen. Notre
| exemplaire n'a, comme longueur, que 1 millimètre et
| 9 millimètres comme hauteur. La tache oculaire plus
grande que l'œil; les griffes terminales du post-abdomen
sont très longues et non pectinées à leur base. Enfin le
post-abdomen à la forme d’une massue allongée et porte
latéralement une rangée d’épines de plus en plus courtes,
vers le talon; sur les crêtes mêmes qui bordent la face
anale de cette région, se trouvent de très petites dents.
HA)
4
PTIT NY
Fig. 3. — Chydorus clavatus(n. sp.).
ê Cette forme caractéristique de l’abdomen m'a servi
comme criterium de spécification (fig. 3).
IV. — OSTRACODES.
. Jusqu'à présent je n'ai trouvé, comme Ostracode, que
le genre Cypris de la famille des Cyprisidæ,représenté par
huit espèces dont quatre nouvelles.
ù Cypris.
19 C. aurantia (Desmarest), abondante dans la rivière
Bahlui (1889) où on la trouve même au mois de janvier.
Les individus n’ont pas la même grandeur. Il y en a
des grands et des petits.
29 C. conchacea (Desm.), surtout au mois de septembre
(1888), Bahlui (Jassy).
30 C. cribrum (n. sp.). Je l’ai trouvé au mois de sep-
tembre (1888) dans Bahlui. Comme forme générale res-
semble à l'espèce trouvée aux environs de Saint-Péters-
bourg et nommée par Fischer C. sinuata. Diffère, pre-
miérement par la couleur uniforme, terre de Sienne,
secondement par la conformation des valves qui sont
complètement criblées de petits trous, plus où moins
ronds; enfin les poils du bord des valves, largement
espacés, sous un fort grossissement se montrent distri-
_ bués, par deux, par trois, de nouveau par deux, ensuite
par un seul, pour recommencer le même cycle de dis-
LE NATURALISTE
—————————————…………——… …— —……—.——_—.————————. ——————————
161
tribution (fig. 4). Vu la manière d’être des valves, je lui
ai proposé le nom spécifique de cribrum.Comme longueur,
1 millimètre.
49 C.villosa (Desm.), très fréquent dans le lac de Cris-
testi, trouvé pour la première fois en 1891.
5° C. unidentata (n.sp.). Le spécimen ressemble comme
NRA AR RE
Fig. 4. — Cypris crbrum (n. sp.).
couleur et comme forme au C. villosa. Ressemble aussi
beaucoup à l'espèce C. pubera (Fischer), Diffère des deux
espèces citées par une bordure blanchâtre, tout le long
de la marge ventrale des valves; par le nombre de
12 pointes que les valves ont sur la bordure buccale,
contre les 6 ou 7 qu'en a le C. pubera,et à la pointe anale
des valves mon espèce porte de chaque côté une petite
touffe de poils, précédée par une pointe. Donc des carac-
tères différents de pubera de Fischer. Ces deux pointes
anales m'ont servi comme criterium de spécification
(Hg. 5).
Se trouve dans Bahlui où je l'ai trouvé premièrement
en novembre 1889.
Fig. 5. — Cypris unidentata (n. sp.).
6° C. perforata (n. sp.). Cette espèce se caractérise
par la présence, tout près de la marge des valves, en
haut comme en bas, de gros poils portés sur des petits
tubercules. Ensuite le bord dorsal et la surface des valves
sont äépourvus de poils, tandis que sur la marge ven-
trale ils portent des poils fins et rares. Enfin, outre une
fine réticulation [à la surface des valves, il y a des
perforations ovales, largement espacées , de 1à la déno-
mination spécifique que je lui ai donnée (fig. 6). Longueur,
2 millimètres. Se trouve dans Bahlui, surtout au mois de
mars 1890.
162
LE NATURALISTE
70 C. fuscata (Desmarest), Assez abondante dans le
lac de Cristesti 1898.
8° C. tridentatu (n. sp.l. Cette espèce assez voüûtée,
d'une couleur jaune pâle uniforme, velue, se caractérise
par une inflexion en dedans des marges des valves,
tout du Jong du bord supérieur (buccal); par la bosse dé-
poilue qui se trouve en arrière de l'œil, par des poils sur
des tubercules intercalés à d’autres plus fins et sans tu-
bercules, tout du long de ce bord supérieur, et à l'opposé
(bord anal), par trois dents épaisses sur chaque valve,
dont la première, à partir du bord ventral, est pointue, la
Fig. 6. — Cypris perforata (n. sp.).
seconde,intermédiaire, plus petite, et la dernière, dorsale,
plus épaisse. À partir de cette dernière, marchant vers le
bord dorsal, l’espèce porte encore dix autres dents plus
petites (fig. 7). Les poils de la surface des valves sont
alternativement distribués,
Fig. 1. — Cypris tridentata (n. sp.).
Les trois dents du bord anal m'ont servi comme ca-
ractéristique de spécification.
Trouvé au mois de mars 1892, dans un bassin, près du
muséum de Jassy.
Remarques. — Généralement au dégel et à l'automne,
on trouve presque toutes les espèces de Cypris. Plus ra-
rement pendant les grandes chaleurs. Vivent et se mul-
tiplient facilement dans les petits aquariums du labora-
toire.
(A suivre.) Dr LÉon C. Cosmovrcr.
Curiosités botaniques
Tout le monde connait l’épine-vinette, dont le nom
s'explique facilement : un buisson épineux portant des
petites baies aigrelettes, avec lesquelles on fait du vin,
si on en laisse fermenter le jus, comme on fait du vin
avec du raisin ou avec des grains de cassis. Avez-vous
déjà bu du vin d’épine-vinette ou du vin de cassis? Ce
n'est pas que cela vaille le Château-Yquem ou le Cham-
bertin, tant s’en faut; mais enfin c’est bien du vin, et un
vin qui vaut mieux que ces épouvantables liqueurs que
l’on voit vendre à Paris sous le nom de kirsch dans
certaines maisons de détail. Ces liqueurs frelatées sont
simplement du mauvais trois-six (si encore c'était du
vrai trois-six!)}, additionné d'eau et aromatisé avec
quelques gouttes d'essence de mirbane, dont nous nous
servors pour empoisonner les insectes dans nos col-
lections.
Mais pourquoi a-t-on eu l'idée de donner à l’épine-
vinette le nom de Berberis, au lieu de Spina vinifera, je
suppose? Qu'est-ce que veut dire ce mot qui rappelle
Birihi? Berberis vient de ber, ours, et beri, baie, en
gaulois, qui veut dire baie d'ours, raisin d'ours. C’est
du gaulois latinisé, car, en latin, on dirait uva ursi, pour
dire baie ou raisin d'ours. Il faut croire que les ours
étaient friands de ces petites baies, quand nous en avions
encore dans nos montagnes, La vérité est qu'ils ne se
génaient pas pour descendre de leurs montagnes et venir
dans la plaine pour dérober le véritable raisin dans nos
jardins. Les ours ont bon gout et sont très friands. A
défaut de raisin, ils mangent des baies d’épine-vinette,
sans faire de tort à personne ; car, je le répète, c’est un
fruit bien insignifiant pour faire du vin et on le laisse
perdre sans l'utiliser, les trois quarts du temps.
Voici maintenant quelque chose de bien curieux et de
bien extraordinaire, que l'histoire nous raconte sérieu-
sement, et qui nous à toujours beaucoup intrigué. Nous
pensons que nos lecteurs l’apprendront avec intérêt, car
il est connu de bien peu de personnes; cependant, il aurait
besoin d'être vérifié avant que l’on puisse y ajouter foi.
Les auteurs nous rapportent que, sous le règne de l'un
des nombreux rois de la première dynastie, qui dura
près de trois siècles et demi, on vit, une belle année, les
fruits noirs du sureau donner des grappes comme du
raisin.
Dans les pays du nord de la France, en effet, on culti-
vait autrefois la vigne sur une très grande échelle,
notamment dans le Noyonnais, qui comprenait une petite
partie des départements de l'Oise, de l’Aisne et de la
Somme, Comme le raisin ne muürissait pas très bien
tous les ans, on y ajoutait des baies de différents ar-
bustes, telles que celles de l’épine-vinette, du troëne et
surtout du sureau, et notamment de l’hyèble, qui ne
pousse pas en bois comme les autres espèces de
sureau.
Il paraît donc qu’on vit, cette année-là, les fruits du
sureau à baies noires, du Sambucus nigra et plus parti-
culièrement du Sambucus ebulus (yèble), se développer
sur une efflorescence en grappe, comme le raisin Jui-
même, au lieu d’être disposés en corymbe comme d’ha-
bitude. L'histoire ne dit pas si ces baies ont donné, avec
le jus de raisin, un vin meilleur que d'habitude; cepen-
dant elle le laisserait supposer. On comprend que ce
LE NATURALISTE 163
singulier phénomène émut tellement les populations de
nos campagnes, que les narrateurs ne manquérent pas
de signaler ce fait dans leurs écrits.
Maintenant est-ce vrai ou n'est-ce pas vrai? On com-
prend que nous ne pouvons pas le garantir plus que
cela. Cependant, il est à croire qu'il n'y a pas de fumée
sans feu, et que, s'il ne s’était rien passé d'extraordi-
naire à ce sujet, on se serait bien gardé d’en parler.
Quoi qu'il en soit, les observateurs de cette époque ont
bien certainement remarqué quelque chose qui n’était
pas habituel; et il serait intéressant, pour les personnes
qui habitent la campagne, de regarder si parfois les
diverses espèces de sureau à fruits noirs ne présente-
raient pas quelques particularités bizarres dans leur
inflorescence dans certaines années. En effet, ce qui a
été général, à une certaine époque, devrait quelquefois
s’'observer isolément dans certains cas. En cherchant
bien, on ne trouverait peut-être pas de grappes, mais on
aurait chance de découvrir autre chose, qui serait aussi
intéressant, sinon davantage encore.
Nos ancêtres ont consigné peu de faits de ce genre
dans leurs écrits dans notre pays. C’est pour cela qu'il
serait intéressant de les vérifier. N’est-il pas bien remar-
quable de voir que chaque espèce donne généralement,
non seulement les mêmes fleurs et les mêmes fruits,
mais encore constamment la même inflorescence,
c'est-à-dire toujours la même disposition des fruits entre
eux, par rapport à la tige qui les porte? Ici telle espèce
donne des fruits isolés, là elle les donne en touffes défi-
nies ou non; telle espèce les donneen grappe, telle autre
les donne en ombelle, d'autres les donnent en corymbe,
Jugez donc quelle stupeur si on voyait un jour, je sup-
pose, les grains de raisin disposés en corymbe, au lieu
d’être en grappe! Certaines gens crieraient à la fin du
monde, ou à l’arrivée prochaine d'une comète; que
sais-je encore? Que n’a-t-on pas déjà imaginé à propos
de l'influence possible, ou même impossible, exercée par
la queue d’une comète sur l'air de notre atmosphère! En
tout cas, il s’agit ici d’un fait précis. Ne pourrait-on pas
essayer de le contrôler?
D: BOUGoN.
AU SUJET D'UN MOINEAU
x
M. le capitaine Treille, de l'infanterie de marine, pu-
blie dans le « Bulletin du Muséum d'histoire naturelle de
Paris » une note assez curieuse sur un moineau arrivé à
une certaine éducation musicale. Un mâle du moineau
franc, le pierrot de nos jardins et de nos rues, tombé du
nid en août 1899, couvert de plumes, mais incapable de
prendre son essor, était recueilli par des mains chari-
tables, désireuses de lui éviter une mort cruelle sous les
dents des chats ou les pierres des enfants. Élevé facile-
ment, vite apprivoisé, Kiki (tel fut le nom de l'orphelin)
grandit loin de ses congénères, dans une chambre close,
sortant de sa cage, allant, venant dans l'appartement,
recherchant la société de ses maitres, dont il fait les
délices. Très gourmand, insolent, d'humeur détestable
et piquant dur à la moindre contrariété, on lui passe ses
défauts à cause de ses qualités musicales, qui touchent
au phénomène.
En effet, sous les premiers rayons du soleil printanier
de 1900, les maitres de Kiki le virent, avec un profond
étonnement, s’essayer à des sifflements très doux. Il
écoutait attentivement les oiseaux chanteurs voisins et
s’ingéniait, avec une patience remarquable, à reproduire
leurs chants. Peu à peu, il étendit sa gamme, on lui
serina quelques airs connus, et aujourd’hui notre maitre
Pierrot est en possession d’un répertoire assez varié, qui
cause une grande stupéfaciion à tous ses auditeurs.
Kiki commence par des gazouillements en sourdine,
qui ne sortent pas de la gorge comme le chant du tarin ;
puis il passe au doux sifflement du bouvreuil, aux trilles
du serin, pour monter au persiflage de la grive, Comme
le merle aussi, il prend de haut des bribes d'airs con-
nus. C’est un oiseau moqueur par excellence, Il est
regrettable que, depuis les beaux jours, par les fenêtres
ouvertes, il se soit mis en communication avec ses
pareils dont il connaît bien les cris et piaillements
expressifs; mais, s’il en assaisonne aujourd'hui ses
tirades, il revient bientôt à des motifs plus harmonieux
et plus agréables aux oreilles. Bien des personnes ont
été témoins, à Brest, des chants de Kiki. Perdrait-il ses
qualités s’il était transporté dans un autre milieu ? Il est
peu probable, car, comme tous les oiseaux bien soignés
en cage, il manifeste surtout son contentement et sa joie
et salue de ses chants l’eau fraichement versée, les
grains appétissants, la salade tendre, et la prison éclairée
par les chauds rayons du soleil,
PHOTOGRAPHIE
La photographie et l’étude des nuages. —
Sous ce titre, M. Jacques Boyer vient de publier un inté-
ressant opuscule où l’on trouvera l'étude scientifique des
nuages faite à l’aide de la photographie et notamment
les recherches de M. Teisserenc de Bort sur la hauteur
des hydrometènes. En ce qui concerne la photographie
proprement dite, M. Boyer dit que chaque fois qu'on a
des nuages sombres sur un fond bleu ou blanc, il n’est
pas difficile d'obtenir de bonnes épreuves avec des plaques
quelconques au gélatino-bromure d’argent et à l’aide d’un
obturateur permettant de courtes poses (1/50 à 1/100 de
seconde). D'après M. A. Angot, un excès de pose est
préférable, car il est toujours facile d'affaiblir le cliché.
Mais pour la photographie des nuages blancs et légers,
tels que les cirrus et les cirro-cumulus, lorsqu'ils se dé-
tachent sur un fond du ciel bleu clair, les difficultés com-
mencent, On peut se servir d'un écran jaune qui ne per-
met pas au bleuducield'impressionner la plaque, etenne
se servant que de plaques sensibles au jaune. M. Hilde-
brandsson, d'Upsal, employait comme écran une cuve
renfermant une solution de gomme-gutta additionnée
d'un peu de sulfate de quinine. MM. Augot et Teisse-
renc de Bort emploient le liquide suivant, indiqué par
Léon Vidal :
Sulfaté AeCUIVIE.. se... sers 175 grammes.
Bichromate de potassium....... 11 —
Acide sulfurique.............. ; 6 centigrammes,
DENON Ne le elle telele . d00 grammes.
Malheureusement, les rayons ayant à traverser des
substances d'indices de réfraction différents, l'interposi-
tion des écrans altère un peu les images, ce qui est dé-
164 LE NATURALISTE
sastreux pour des recherches précises, car les perturba-
tions sont irrégulièérement distribuées.
Une autre méthode a été signalée par M. Riggenbach,
de Bâle. Elle est basée sur le phénomène de la polarisa-
tion. La lumière bleue du ciel étant partiellement pola-
risée principalement à 90° du soleil, si on regarde le
ciel à travers un analyseur orienté de facon convenable,
on éteindra une grande partie des rayons émis par le
bleu sans diminuer notablement l'intensité des nuages.
Les contrastes sont alors plus accentués et on obtient de
belles épreuves. L'analyseur peut être un nicol ou une
glace noire faisant avec l'axe optique un angle égal à
l'angle de polarisation, La glace est supportée par une
monture qui lui permet de tourner autour de cet axe.
L'inconvénient de ce procédé réside dans ce fait que, si
on emploie le nicol, le champ est très diminué, et que si
on utilise la glace noire, sa position devant l'objectif rend
difficile l'orientation de l'appareil. En outre, ce mode
opératoire n’est pas général, puisque le degré de polari-
sation du ciel varie suivant la direction. Il donne de
bons résultats quand on opère, comme M. Riggenbach,
au sommet de montagnes élevées. Là, le ciel étant foncé,
la différence entre les actions photochimiques'des nuages
et du ciel est plus accentuée.
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
Coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane
LUCANUS vViCINUS. Hope. Hope. Catal. Luc. 1845, p. 10.
Burmeister. Handb. der Entom., vol. V, p. 527-28.
Syn. Luc. Whitei. Thomson. Cat. Luc., p. 394.
Luc. Smithii, Parry. Proc. Ent. Soc.1862, p. 1080. Parry
Trans. Ent. Soc. 1862-63, p. 416. — Catal. 1864-66,
pu 10,3pl 40h02.
Généralement désigné dans les collections sous le nom
de Smithii que lui a donné Parry, ce Lucane n'est autre
que le Luc. vicinus, ainsi que M. R. Oberthür a pu le
constater l’année dernière, à Londres, en examinant la
collection de Hope.
Ce Lucane était, au reste, voué aux changements de
noms, car Thomson lui ayant attribué dans son Cata-
logue le nom de Luc. Whitei, Parry qui, pas plus que ce
dernier, n'avait reconnu le Luc, vicinus, avait réclamé,
en termes plutôt secs, la priorité en faveur de son Luc.
Smithii.
Voici, en effet, ce qu’il dit à ce sujet dans les Trans.
Soc. of. London 1862-3, p. 446 : Remarques du major
F. I. Sidney Parry sur le Catalogue des Lucanides de
James Thomson :
« Cette nouvelle espèce avait été originairement nom-
« mée par moi-même après m'avoir été si gracieusement
« donnée par le Président de notre Société. J'en avais
« préparé une description destinée à être publiée.
« M. Thomson a montré plus de courtoisie pour
«M. Adam White qu’à mon égard. »
Il est assez difficile d’assigner une place exacte au
Luc. vicinus, mais e ne crois pas que l'opinion de Parry
qui le rapproche du villosus, « allied to L.villosus, Hope »,
soit exacle.
Ni la forme des mandibules, ni la saillie intermandi-
bulaire ne me paraissent autoriser ce rapprochement;
quant à la villosité, qui est évidemment très serrée et
abondante chez les exemplaires bien frais du Luc,vicinus,
elle ne saurait suflire; à ce compte le Luc, Hopei est tout
aussi-Villeux; je crois plutôt que la place du Luc. vicinus
est tout à côté du Luc. Cantori.
Si l’on fait, en effet, abstraction de la différence de
taille qui est considérable, on remarquera que la struc-
ture des mandibules, du labre et de l’épistome est très
voisine, et que le prothorax et les élytres présentent
également de grandes analogies avec ceux de cette der-
nière espèce; la forme même de la tête, bien que dis-
tincte, se rattache au même type; en effet, chez l’une
comme chez l’autre espèce, elle est fort étendue en -lar-
geur, affectant la forme d’un parallélogramme plus large
que long, tandis que chez les Luc. Westermanni, villosus,
lunifer, ete., elle est plus ou moins rétrécie en arrière en
forme de V.
MALE
Coloration
La couleur foncière du Luc. vicinus qui est, en entier,
d'un brun noirâtre un peu terne, plus clair et plus rou-
geâtre sur les élytres, est presque complètement dissi-
1. — Luc. vicinus
2.— Luc. vicinus - (Syn. Smithii)
(type de Parry)
mulée chez les exemplaires bien frais par une pubes-
cence d’un jaune doré, d'aspect poussiéreux, qui est
courte et très fine, mais extrêmement serrée et abon-
dante; seuls de tout le corps, les deux derniers tiers
des mandibules sont dénués de pubescence. En dessous
ce revêtement pileux est encore.plus long et plus fourni,
surtout sur la région sternale.
Les pattes sont de la même couleur que les mandi-
bules, c'est-à-dire d’un brun noirâtre; chez beaucoup
d'exemplaires la partie médiane des cuisses est un peu
plus claire et plus rougeûtre que le pourtour,
Structure
Mandibules de la même longueur que la tête et le
thorax réunis, larges et bombées à leur naissance, puis
se rétrécissant faiblement jusque vers la grosse dent
mandibulaire qui est située un peu au delà du milieu;
|
|
LE NATURALISTE 165
elles s’élargissent de nouveau après cette dent pour se
rétrécir de nouveau jusqu’à la fourche terminale qui est
très brève, peu ouverte et composée de deux dentssub-
égales et superposées.
La première portion de la mandibule est de section
triangulaire, à contours arrondis; la seconde est beau-
coup plus déprimée; chez les grands spécimens la grosse
dent des mandibules est précédée dedeux à trois faibles
denticules souvent peu distincts, Elle est suivie, vers
le milieu de la partie qui s'étend entre elle et la fourche
terminale d’une seule dent assez forte, parfois précédée
d'un petitdenticule; chezles spécimens plus petits, telsle
type de Parry (v.fig. ci-dessus) cette dispositionest moins
accentuée et donne naissance à une structure un peu dif-
férente que Parry a très bien caractérisée comme suit :
« mandibulis... ante medium lobo tridentato armatis. »
Quant au contour extérieur des mandibules, il est sen-
Lucanus vicinus
Exempl. de Pedong (collor R. Oberthür)
siblement le même que chez le Luc. Cantori;la dent infra-
mandibulaire est courte, large à sa base et subeylin-
drique à son extrémité.
La tête, bien moins plane que dans l'espèce précé-
dente, est fort large, à carène frontale étendue et élevée
mais fine, à carènes latérales un peu plus larges et bien
arrondies ; le clypeus est un peu excavé et bien plus ver-
tical que chez le Luc, Cantori; le labre a son bord anté-
rieur un peu en demi-cercle; l’épistome est très court et
de forme ogivale; l'œil est petit, dépassé par les carènes
postérieures; le prothorax, entièrement et finement
rebordé, est sinueux en avant et en arrière; il présente
en son milieu une série longitudinale peu enfoncée; son
bord postérieur est fortement rabattu latéralement sur
les élytres; ses côtés sont fortement inclinés; l'écusson
est arrondi, les élytres souvent assez parallèles, bien
arrondies en arrière, présentent, surtout lorsqu'on les
examine de biais, une dépression semblable à celle des
élytres du Luc.Lunifer, mais. cependant beaucoup moins
profonde. ‘
Les pattes sont finement granuleuses; le dernier ar-
ticle des tarses est très large.
Ainsi que l’on peut s’en rendre compte en examinant
les figures, les très petits mâles s’éloignent considé-
rablement comme aspect dela formenormale et,n’étaient
le tranchant de leurs carènes et la longueur de leurs
pattes, pourraient être assez facilement pris pour des
Pseudolucanes si l’on n'avait en mains des matériaux
suffisants pour établir le passage.
FEMELLE
La femelle du Luc, vicinus possède la même coloration
et la même pubescence que le mâle.
Les mandibules, presque aussi longues que la tête et
fort larges, sont nettement sécuriformes, à bord interne
très déprimé et tranchant, lisse sur une assez grande
surface; le restant de la mandibule est granuleux ; le
labre est assez court, en forme de triangle arrondi,
La tête est large, robuste, renflée en arrière des yeux,
Lucanus vicinus
(femelle)
assez bien détachée du corselet: les carènes sont bien
indiquées, le disque fortement rugueux; l'antenne est
plus courte que chez le mâle,mais conformée dela même
façon. Le corselet est long et large et entièrement re-
bordé ; il est situé en avant et en arrière, fortement ar-
rondi aux angles antérieurs; les élytres sont assez al-
longées et ovalaires; les pattes fortement rugueuses.
Le Luc, vicinus habite le Sikkim etle Rritish Bootang;
comme localité précise, je eiterai Maria Basti; il parait
être très répandu dans les régions où il se trouve.
Louis PLANET.
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466
LE NATURALISTE
ILES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS &
LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
CRETE TES
Arbres forestiers
Arbres fruitiers
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Cossus Ligniperda F.
Zeuzera Æsculi L.
Orgyia Gonostigma $S. V.
— Antiqua L.
Trigotephras B.
Demas Coryli L.
Liparis Dispar L
Monacha L.
CS some ls
Auriflua S. V.
Laria V., Nigrum Esp.
Dasychira Pudibunda L.
Bombyx Cratægi L.
Bombyx Neustria L.
Bombyx Quercus L.
Lasiocampa Quercifolia L.
Aglia Tau L.
Lophopteryx Camelina L.
Pygæra Bucephala L.
Acronycta Psi L.
Tridens L.
Rumicis L.
Auricoma $.
Tæniocampa Gothica L.
Cosmia ea ne IBA
Angerona Prunaria L.
Odontapera Bidentata Clerck.
Crocallis Elinguaria L.
V.
Ennomos Autumnaria Werner.
Ennomos Alniaria L.
Biston Hirtaria L.
Amphidasys Strataria Hufn.
Amphidasys Betularia L.
Boarmia Gemmaria Brahm.
Acidalia Bisetata Hufn.
Acidalhia Incanaria H.
Hybernia Marginaria Bkh.
Hybernia Defoliaria L.
Cheimatobia Brumata L.
Cidaria Siterata Hufn.
Cidaria Prunata L.
Leuconea Cratægi L.
Aglaope Infausta L.
Cossus Ligniperda F.
ZLeuzera Hecali L.
Demas Coryli L.
Liparis Dispar L.
Chrysorrhæa L,.
Auriflua $. V.
Bombyx Cratægi L.
Neustria L.
Catax L.
Lasiocampa Quercifolia L.
Saturnia Pyri S V.
Salurnia Pavonia L.
Diloba Cæruleocephala LE.
Acronycta Psi L.
Tridens L.
Tryphæna Comes H.
Angerona Prunaria L.
Nyssia Pomonaria I.
Nyssia Hispidaria F.
Amphidasys Strataria Hufn. -
Amphidasvs Betularia L.
Boarmia Gemmaria Brahm.
Numeria Pulveraria L.
Hybernia Marginaria Bkh.
Hybernia Defoliaria L.
Cheimatobia Brumata L.
Eupithecia Insigniata H.
Eupithecia Rectangulata L.
Cidaria Prunata L.
‘Mai, juillet,
MOIS DE
Chenilles
RE ————
Mai, jou (troncs).
août.
Mai, juin.
Juin, septembre.
Juillet.
Juin, juillet.
Septembre, octobre.
Mai.
Juin.
Juin.
Juin, juillet.
Juillet, août.
Juillet à octobre.
Belle saison.
Août, septembre.
Juin à septembre.
Juin, jus septembre.
Juin, juillet, octobre.
Mai, juin.
Mai, juin.
Août, septembre.
Avril, mai.
Juin.
Juin, juillet.
Août, septembre.
Juillet à septembre.
Juillet à octobre.
Mai, juin, août,
Avril à juillet.
Belle saison.
Mai, juin.
Mai. juin.
Mai.
Mai,
sept.
juillet.
Mai.
jun.
Avril, mai.
Mai, juin.
Mar, Juin (troncs).
Mai, juin (troncs).
Juin, septembre.
Juillet.
Juin.
Juin.
Mai.
Jun.
Juin.
Juin, juillet.
Août.
Juillet.
Mai.
Belle saison.
Août, septembre.
Mars, avril.
Mai.
Mai à juillet
Mai.
Juillet à septembre.
Juillet à octobre.
Mai, juin, août, sept.
Juin, ‘septembre.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai.
Juin.
Aril, mai.
Mai, juin.
L'ANNÉE
TROUVE
ES TT
Papillons
nes
Juin, juillet.
Juillet, août.
Juin, août, septembre.
Juin, juillet.
Avril, mai, juillet, août.
Juillet, août,
Juin, juillet
Mai.
Août, septembre.
Juillet.
Juillet.
Juillet.
Mars, avril.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai à août.
Mai, juin.
Avril, juin, août, sept.
Avril, mai, juillet, août.
Mars, avril, août à oct.
Juillet.
Juin, juillet.
Aril, mai,
Juillet, août.
Juillet à septembre.
Août, septembre.
Mars, avril.
Mars à mai.
Avril à Juillet.
Mai, juillet.
Mai à août.
Belle saison.
Novembre, fév., mars.
Oct., nov., fév., mars.
Novembre, décembre.
Juin, septembre, oc-
tobre, novembre.
Juillet,août,septembre.
Juin, juillet.
Juin, Juillet.
Juin, juillet.
Juillet, août,
Avril, mai, juillet, août.
Juillet, août.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Août, septembre.
Juillet.
Mai, septembre.
Juillet.
Aril, mai.
Mars, avril.
Octobre.
Mai à aout.
Mai, juin.
Juin à septembre.
Juin, juillet.
Mars.
Mars, avril.
Mars, avril, mai.
Avril à juillet.
Mai, juillet.
Avril, mai, juillet, août.
Novembre, fév., mars.
Oct., nov., fév., mars.
Novembre, décembre.
Juillet.
Juin, juillet.
Juillet à septembre.
HABITAT
FRANCAIS
Toute la France.
France méridionale.
Toute la France.
Toute la France.
France centrale et AURAS
-[Toute la France.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
France centrale
France centrale
Toute la France.
et orientale.
et orientale,
France centrale
Toute la France.
et orientale.
Doubs, Châteaudun.
Toute la France.
LE NATURALISTE
167
CREER
DE L'AABILLEMENT CHEZ LES ANCIENS
Je ne veux pas faire ici l’histoire du vêtement; trop
d'ouvrages, et d'excellents, ont été écrits sur ce sujet :
je me propose tout simplement de passer en revue, — et
alphabétiquement, — les matières premières dont les an-
ciens se sont servis pour fabriquer leurs habillements
ordinaires ou leurs vêtements de parade et de luxe.
Castor. — « Nous recherchons, dit saint Ambroise
(De la dignité du sacerdoce), les étoffes de castor et de
soie, celui-là se croit le plus distingué parmi les évêques
qui porte les vêtements les plus brillants », ete. —
Sidoine Apollinaire, évêque de Clermont-Ferrand
(ve siècle), désigne même par ce seul mot, castorinati
(vêtus de castor), les hommes qui vivaient dans le luxe
(lettre VII); depuis fort longtemps la fourrure de cet
animal était un objet de luxe fort recherché des Romains,
et les castors étaient chassés aussi bien pour leur poil
que pour leur castoréum : « Les castors du Pont, dit
Pline (Histoire naturelle, VIII, 47,et XXXII, 13), se
châtrent eux-mêmes quand le péril les presse, car ils
savent qu'on les poursuit pour leur castoréum ».
Ils étaient plus intelligents qu'aujourd'hui,
Chanvre. — Hérodote parait être le premier qui ait
parlé du chanvre, et peut-être Homère et Hésiode ne
l’ont-ils pas connu (900 ans av. J.-C.), car ces deux au-
teurs contemporains n’en parlent pas; c’est pourtant une
raison bien faible pour supposer leur ignorance à cet
égard. Hérodote (484-406 av. J.-C.) dit que ce végétal
croissait en Scythie, et que les Thraces en faisaient des
vêtements si semblables à ceux que l’on fabrique avec
le lin, qu'il fallait une bien grande expérience pour les
distinguer (liv. IV, ch. 74). Dioscoride en parle aussi
dans les chapitres 165 et 166 du livre III de sa Matière
médicale, etc.
Coton. — On lui donnait souvent le nom de laine des
arbres, mais il était plus communément appelé byssus.
Pollux (iv. VII, ch. xvu), saint Jérôme (swr Kzéchiel,
ch. xxviIn), Isidore (Origines, xIX, 27) reconnaissent le
byssus comme une espèce de lin, — et non pas comme
une étoffe teinte en pourpre, comme bien d'autres au-
teurs l'ont cru : « Byssus, dit Isidore, genus est quoddam
lini nimium candidi et mollissimi », « le byssus est un
genre de lin très blanc et très doux ». Il était d’ailleurs
connu en Égypte dès la plus haute antiquité : les ban-
delettes dont les Egyptiens entouraient les cadavres
après l’'embaumement étaient en coton, et l’on en re-
connait facilement les fibres, au microscope, de celles
du lin avec lequel il est souvent mélangé, Philostrate
(ue siècle), dans sa Vie d’Apollonius de Tyane (liv. II,
ch. 10), et Strabon (liv. IV, ch. 17) en parlent comme
d’une petite gousse chevelue croissant sur un arbuste ;
les étoffes fabriquées avec cette plante étaient réservées
aux personnages d’un rang élevé. Pline nous parle de sa
culture en Egypte, en Arabie et dans l’Inde.
. Saint Jérome regarde l'Egypte comme la véritable
patrie de cette plante : Byssus in Ægypto quam maximé
nascitur. Arrien, Méla et Tertullien disent que c'est un
lin où une laine produits par un arbrisseau de l'Inde, de
PArabie et de l'Egypte. Théophraste le décrit ainsi (His-
toire des plantes, liv. IV, ch. 9) : « L'ile de Tylus pro-
duit encore beaucoup d'arbres qui portent de la laine ; ils
ont des feuilles qui ressemblent à celles de la vigne, mais
plus petites; ils ne produisent aucun fruit qui serve à la
nourriture, Ce qui renferme la laine est de la grosseur
d'une pomme, parait au printemps, et est comprimé.
Quand cet objet est mur, il s'ouvre et la laine est en-
levée; on la recueille pour en faire des toiles, les unes
communes, les autres du plus grand prix ». Pline en
parle aussi au livre XIX, ch. 2, de son Histoire natu-
relle : « La partie supérieure de l'Egypte, dit-il, du côté
de l'Arabie, produit un petit arbrisseau nommé par
quelques-uns gossipion, et par la plupart æylon (bois),
d'où l’on appelle xylines les étoffes qui en proviennent.
Il est petit, et porte un fruit semblable à une noix
barbue; l’intérieur contient un duvet que l’on file; au-
cune étoffe n’est préférable à celle-ci pour la blancheur
et la souplesse; on en fait les vêtements favoris des
prêtres de l'Egypte », etc.
Écorces d'arbres. — Pline (XIT) parle des Indiens,
qui tiraient des arbres leurs vêtements, sans donner au-
cune explication à ce sujet. Strabon le dit aussi des Mas-
sagètes (liv. XI, ch. 8, $ 7); « faute de bêtes à laine, ils
tissent leurs vêtements avec l'écorce des arbres ». Il ne
donne non plus aucun renseignement sur la manière
dont ils s’y prenaient pour fabriquer ces étoffes. Les an-
ciens connaissaient aussi les tissus faits avec les fila-
ments du bananier, de l’aloës, de certains palmiers, etc.
Feutre. — Le feutre se fait avec de la laine ou du
poil, ou un mélange des deux, fouléet durei parle tartre,
l'acide acéteux, ete. Les anciens le fabriquaient pour em
faire des meubles ou des vêtements (Voyez plus bas, au
mot laine) et des cuirasses,
Hyacinthe, bulbes divers. — Théophraste, par-
lant des plantes à racines bulbeuses, nous dit (1. VIT,
ch. xt) : QI y en a plusieurs espèces... Celles qui diffè-
rent le plus des autres sont celles qui portent de la laine;
il y en a une espèce qui nait sur le bord de la mer, et qui
renferme un duvet sous ses premières enveloppes, entre
la partie extérieure et celle qu'on mange. On fabrique
avec ce duvet des chaussures et des vêtements, car il est
laineux; mais celui des Indes est de la nature des
poils. »
Athénée rapporte ce texte mot à mot au livre IE
ch. xxu1, de son Banquet des savants.
Pline aussi s’est approprié ce passage de Théophraste
au livre XIX, ch. x, de son Histoire naturelle.
Laine. — On a filé la laine dans les temps les plus
reculés ; la Bible en fait mention douze fois: Deutéronome,
XVII, 4; XXII, 2, — J'uges, VI, 37; — Psaumes, CXLVIN,
16:— Proverbes, xxx1, 135 — Isaïe, 1,.18; LI, 8 ; — Ezé-
chiel, XXVIL, 183; XXXIV, 3; — Daniel, VII, 9; — Osée, It, 5, 9.
Voici les divers passages de Strabon où ce géographe
nous parle de laines renommées dans l'antiquité : «Il
nous venait aussi anciennement beaucoup de tissus ef
d'étoffes de la Turdétanie. Aujourd'hui, leurs laines elles-
mêmes sont plus demandées que les laines caraxiennes ;
il est de fait qu'il n'y a rien de plus beau, et l'on
s'explique en les voyant qu'un bélier reproducteur de
Turdétanie se paie un talent iv. TT, ch. 11, 6).
.« La laine dont ils (les Gaulois) se servent pour tisser
leurs épais sayons appelés lænæ est rude, mais très
longue de poils. Les Romains réussissent pourtant, et
cela dans les parties les plus septentrionales de la Bel-
gique, à obtenir une laine passablement soyeuse en fai-
sant couvrir de peaux les brebis (Liv. IV, ch. 1v, N 3).
« La laine, la laine fine, est plus belle aux environs de
Mutine et de la rivière Seutanna que partout ailleurs; de
168
LE NATURALISTE
plus, on tire de la Ligystique et du pays des Insubres
une laine dure et grossière dont on habille presque tous
les esclaves en Italie ; quant à cette autre laine -de qua-
lité moyenne, intermédiaire, qu’on emploie principale-
ment pour fabriquer les tapis de prix, les gausapes et
autres tissus analogues, pelucheux des deux côtés ou
d'un côté seulement, c'est des environs de Patavium
(Padoue) qu'on la tire (liv. V, ch. 1, S 12).
.….. @ Le territoire de la Daunie est éminemment favo-
rable à l'élève des chevaux et des moutons ; les laines
qu’on en exporte ont moins de lustre peut-être, mais assu-
rément plus de moelleux que celles de Tarente (VI, ch. 1,
$ 9).
…. « Le territoire de Brentesium est plus fertile que
celui de Tarente ; on en vante beaucoup le miel et les
laines (VI, ch. 1m, $ 6).
.…. La Gazélonitide est une contrée fertile, où tousles
genres de culture réussissent. Ajoutons qu'elle possède
de nombreux troupeaux de moutons donnant cette laine
hypodiptère, si moelleuse et si douce, qui manque abso-
lument dans toute la Cappadoce et le Pont (XII, ch. 1m,
$ 13).
« 11 pousse aussi dans l’Inde de la laine sur certains
arbres. Il s’agit de la laine qui, au dire de Néarque, sert
à faire dans le pays ces toiles à trame si fine, si serrée,
mais que les Macédoniens employaient pour bourrer
leurs matelas et leurs selles à bâts (il s'agit du coton). »
Etc., etc.
Pline nous dit dans son Histoire naturelle (VIII, 73) :
«€ La laine la plus renommée est celle d’Apulie; en
second lieu, celle qu’on appelle laine grecque en Italie, et
ailleurs laine italienne; en troisième, lieu, la laine de
Milet. La laine d’Apulie est courte, et n’est célèbre que
pour Ja fabrication des pænula (manteaux contre la
pluie); on estime le plus celle des environs de Tarente
et de Canusium, et, en Asie, une laine de même espèce,
celle de Laodicée ; aucune laine blanche n’est préférée à
celle des environs du Pô; jusqu'à présent, aucune laine
n'a dépassé cent sesterces la livre (21 francs). »
«On ne tond pas les moutons; on a conservé dans
quelques endroits l'usage d'arracher la laine. Elle a
différentes couleurs : on n’a même pas assez de mots
pour en exprimer les variétés.
«.…... En foulant la laine on fait le feutre, étoffe qui,
imbibée de vinaigre, résiste au fer même; bien plus, la laine
résiste au feu dans le dernier apprêt qu'elle subit, car
elle sort des chaudières des dégraisseurs pour être em-
ployée à faire des matelas, invention qui, je crois, est
gauloise; du moins est-ce par des noms gaulois qu'on
distingue les différentes espèces de matelas; je ne puis
dire à quelle époque l'usage en a commencé.
« Nous avons vu nous-même des toisons, sur l'animal
vivant, teintes en pourpre, en écarlate et en violet, un
demi-pied carré de chaque, comme si la nature les pro-
duisait ainsi pour la satisfaction du luxe ».
L’expérience dont parle Pline ici fut renouvelée, en
1808, par trois savants, Huzard, Tessier et Roard: ils
plongèrent trois brebis dans une cuve de bleu,et les
enveloppèrent dans des espèces de fourreaux de toile ;
la couleur se conserva parfaitement jusqu’à la tonte. Ce
serait peut-être à ce procédé que Virgile aurait fait al-
lusion dans le vers 45 de son Eglogue IV :
Sponte suä sandyx pascentes vestiet agnos…
« Un vermillon naturel vêtira l'agneau dans les pâturages. »
Le feutre de laine est désigné par Suidas sous le nom
de nimua, et l'un en faisait déjà usage du temps de
Platon (387 av. J.-C.) : « Dieu, dit ce philosophe, pensant
que la substance osseuse était d'une nature trop sèche
et trop rigide, et que, tantôt échauffée et tantôt refroidie,
elle se carierait et corromprait bientôt la tumeur qu’elle
renferme. .., forma les chairs.... pour la préserver des
chaleurs excessives, la mettre à l'abri du froid, et,
comme le font les vêtements de feutre, la mettre à l'abri
des chutes et des coups, en cédant mollement et facile-
ment sous le choc des corps (Timée, 74). »
Au mot roc de son Lexique, Suidas dit : « On dit
AUSSI réinpa..…. — Ils portent sur la tête leurs cutrasses
feutrées (bwoaxas mnroc), dont la forme reste inaltérable
à cause de la bonté du feutre. »— Ils’agitici, ainsi que l’a
fait remarquer Juste-Lipse en commentant ce passage
du lexicographe (qui cite lui-même un autre vieil auteur
inconnu), de soldats qui, dans une marche, avaient ôté
leurs cuirasses à cause de la chaleur et la portaient sur la
tête.
Thucydide nous dit (IV, 34) : « Leurs casques (des
Lacédémoniens) ne suflisaient plus pour les garantir des
flèches qu'on leur lançait en si grande quantité, qu'ils ne
pouvaient plus regarder devant eux, » — « Ces casques,
dit un commentateur grec qui vivait entre les règnes
d'Hadrien et de Valentinien II, étaient d’étoffes de laine
feutrée, semblables à celles des plastrons que nous portons
sur la poitrine. » (Édition de Thucydide de Pappo, t. II,
part. 2, page 73.) — Les armures en feutre de laine
étaient donc communes,non seulement du temps de
Thucydide, mais encore bien plus tard, du temps de son
commentateur, qui vivait environ vers l’an 350 de notre
ère.
LIVRE NOUVEAU *
Les räcces et les peuples de la terre (1). — Eléments
d'anthropologie el d'ethnographie, par J. Deniker.
Un des traits caractéristiques de notre époque, c’est l'intérét
que provoquent dans le grand public les études concernant les
races et les peuples primitifs où même civilisés, études si étroi-
tement liées à celles des questions sociales et de la colonisa-
tion.
Cependant, on n'avait pas, jusqu'à présent, de bon résumé de
l'état actuel des sciences ethno-anthropologiques. L'ouvrage
que vient de publier l’anthropologiste bien connu, M. Deni-
ker, comble donc une véritable lacune. Le savant bibliothécaire
du Muséum. est parvenu à condenser dans un petit volume de
692 pages tout ce qu'il y a d’important à savoir en Anthropolo-
gie et en Ethnographie. Dans un langage simple et précis à la
fois, en expliquant les termes scientifiques, il traite des carac-
tères physiques de l’homme et de ses caractères linguistiques et
sociologiques (vie matérielle, vie psychique, vie familiale, vie
sociale). I! donne ensuite un aperçu des classifications et passe
en revue les races et les peuples de la terre. Les nombreuses
notes bibliographiques au bas des pages permettent à ceux qui
voudraient compléter les notions élémentaires par une étude
plus approfondie defaire un choix judicieux des ouvrages à con-
sulter. Les tables des principales mesures du corps humain, an-
nexées au volume, seront surtout appréciées par les spécialistes,
tandis qu'un index très complet facilitera à tous les recherches
à faire dans le texte. Les illustrations, pour la plupart des pho-
togravures d’après les sujets authentiques, sont choisies et
exécutées avec un grandsoin. Elles complètent d’une facon heu-
reuse cet excellent ouvrage qui devra se trouver entre les mains
de tous ceux qui, spécialistes ou non, s'intéressent à l'étude de
l'homme.
(1) 4 vol. in-f0, cartonné, avec 116 planches et figures, et
deux cartes, 12 fr. 50, franco 13 fr. 35. En vente aux bureaux
du journal, 46, rue du Bac, Paris.
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LE NATURALISTE
Ë |
|
| Prothorax ct élytres d’un ro
massue des antennes pectiné
170
Corps allongé; prothorax bleu; élytres rouges
ART) ete ds
Corps allongé ; prothorax et
élytres noirs (fig. 28.)..
Antennes de 9 articles (fig. 29).
Antennes de 10 articles (fi
Antennes de 11 articles (fig. 31
Deuxième art. des tarses beau-
coup plus long que le 3°.
g. 30 et 36).
(ig
.32)
Deuxième art. des tarses sensi-
blement égal au 3° (fig. 33)...
Massue des antennes formée d’ar-
ticles allongés en dedans(fig. 30)
Massue des antennes formée d'ar-
ticles arrondis (fig. 34).
Prothorax et élytres
noirs ; massue des
antennesformée d’art-
perfoliés (fig. 28 et
….
uge brun ;
es (fig. 30et
Psoa Herbst.
Stephanopachys PK.
(—Dinoderus.) =
Xylopertha Guér.
Hendecatomus Muls.
Sinoxylon Duft.
Bostrychus Gcof.
(= Apale Fab.)
Rhizopertha Stéph.
Stephanopachys Pk. (1)
(= Dinoderus)
(1) Ce genre est donné deux fois, parce qu'il existe des divergences de vues entre les auteurs
relativement au nombre des articles aux tarses.
Antennes qe 8 articles (fig. 37)... CD Octotemnus Mell.
(= Orophius Redt.)
9{ Antennes de 9 art. (fig. 38)....… Ennearthron Mellié.
Antennes de 10 art. (fig. 39). se 10
Jambes aplaties en lameset munies d’un sillon à ; -
oblique pour loger les tarses (fig. 40)..... Se : Xilographus Mell.
10 À
Jambes arrondies, sans sillon 1
ODITqUEr (DEA) EME Re ne à root (4
\
Troisième article des antennes plus long que ..
leo) Te dr CIS
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4 art, des antennes égal au 4 (fig. Rhopalodontus Mel
\
19
19
e ANNÉE
1° AOÛT 1900
LES PLANTES BULBEUSES DE FRANCE
LES AMARYLLIDÉES
Moins nombreuses que les Liliacées et les Orchidées,
dont nous avons parlé précédemment, les Amaryllidées
n’en sont pas moins intéressantes, et cependant la culture
les a relativement délaissées. Les Tulipes, les Jacinthes
sont toujours les plantes favorites du premier printemps
et, dèsle commencement de l’été,onlestrouve partout, au
jardin et dans l'appartement. Il n’en est pas tout à fait
de même des Narcisses qui sont délaissés chez nous,
tandis qu'en Angleterre les Daffodils sont l’objet d'un
véritable culte. Les Galanthus, les Leuvcoium, les Pancra-
tium., les Sternbergia se rencontrent de-ci de-là chez les
amateurs, mais pas aussi souvent qu’ils le méritent.
Comment distingue-t-on une Amaryllidée? Les affi-
nités ne sont intimes qu'avec les Liliacées; mais l'ovaire
est supère dans ces derniers, tandis qu'il est infère dans
les Amaryllidées, et offre de suite une différence nette-
ment marquée. Pas de confusion possible avec les Orchi-
dées. On distinguera les Iridées par leurs étamines au
nombre de trois, etleurs stigmates dilatés, pétaloides. Les
Amarylidées, en effet, ont six étamines, et les stigmates
ne présentent rien de particulier.
Quant aux genres représentés dans la flore francaise,
ils sont au nombre de cinq, naturellement répartis en
deux tribus fondées sur la présence et l'absence d’appen-
dices à la gorge du périgone :
4» Amaryllidées. — Périgone à gorge dépourvue de cou-
y 5 gorge de
ronne ou de tube pétaloide.
2e Narcissées. — Périgone muni à la gorge d’une cou-
ronne ou d'un tube pétaloide.
Au premier groupe appartiennent les Galanthus, Leu-
coium ou Sternbergia; au second les Narcissus et Pancra-
tium-Galanthus. — Le Galanthus nivalis L.,la seule es-
pèce du genre qui appartienne à la flore francaise, est bien
connu sous le nom de Perce-Neige, de Goutte-de-Lait.
C’est, en effet, une des premières fleurs qui paraissent dès
le mois de février, au commencement de mars au plus
tard. Toutle monde connait cette jolie petite fleur blanche,
solitaire, penchée, à divisions de deux sortes : les exté-
rieures, concaves, demi-étalées, entières; les intérieures,
plus courtes environ de moiué, dressées, cunéiformes,
échancrées au sommet, portant à la face externe une tache
verte en forme de croissant et à la face interne des lignes
vert jaunâtre. Le Perce-Neige croit dans l’ouest de la
France (la Normandie, la Bretagne), la Touraine, le
Sud-Ouest, les Pyrénées. Aux environs de Paris, où on
l'a indiqué, à Versailles particulièrement, il parait pro-
venir d'anciennes cultures. ï
Si le Galanthus n’a, en France, qu'un seul représentant,
le genre voisin, Leucoium, est plus riche en espèces.
On n'en signale pas moins de six qui comptent au
nombre des plantes les plus rares de notre flore et ne se
rencontrent que dans les Alpes-Maritimes, le Var ou la
Corse.
Les Leucoium se distinguent essentiellement des Ga-
tanthus par la fleur à six divisions égales, de même forme,
ovales, soudées à la base, Sur les deux espèces qui se
trouvent assez fréquemment et ne sont pas localisées,
Le Naluralisle, 46, rue du Bac, Paris.
l’une, le Leucoium vernum L., comme son nom l'indique,
fleurit à peu près à la même époque que le Galanthus;
c'est la Nivéole à fleur blanche, solitaire, qui recherche
les bois montueux de la Lorraine, de l'Alsace, des Vosges,
du Jura, de la Côte-d'Or, de la Champagne (Haute
Marne), du Dauphiné. Dernièrement on l’a découvert
dans le département de Oise.
C'est en mai et Juin que fleurit l’autre espèce, le
L. æstivum. C'est une plante dont Ja tige atteint de 3 à
5 décimètres, et porte à son sommet de trois à six fleurs,
tout à fait blanches, tandis qu’elles sont maculées de vert
au sommet dans l'espèce précédente. On rencontre le
L. œstivum dans le midi de la France, le sud-ouest et
dans le département de Loir-et-Cher, où il abonde sur
un espace très restreint, ce qui semble indiquer qu'il n’y
est que naturalisé. Présentant beaucoup d'affinités avec
le L. æstivum, le L. Hernanderii Cambess, ils’en distingue
par ses feuilles plus étroites, par ses fleurs moins nom-
breuses (i-3), de moitié plus petites, à divisions plus
étroites, nettement tachées de vert au sommet, par sa
floraison beaucoup plus précoce, qui à lieu en février.
Connu iongtemps, seulement aux Baléares et en Sar-
daigne, on l’a signalé, il y a quelques années, à Hyères et
aux environs de Bastia,
La Corse présente comme espèces qui lui sont propres
les Leucoium roseum Lois., longifolium J. Gay. La pre-
mière est nettement caractérisée par ses fleurs roses, s0-
litaires, penchées, très petites, ne dépassant pas 1 centi-
mètre de longueur, portées par une tige filiforme, haute
de 10 centimètres au plus. Quant au Leucoium longifo-
lium, il fleurit en mai et Juin, tandis que le précédent
montre ses fleurs dès le mois de février; de plus, sa taille
est au moins du double; ses fleurs, souvent au nombre
de deux, naissent dans une spathe à deux divisions; la
tige, sans être épaisse, n'est plus filiforme; enfin les
fleurs sont blanches.
Le Leucoium roseum habite la région littorale, tandis
que le L, longifolium se plait dans les lieux élevés, entre
1500 et 2000 mètres.
Dans les Alpes maritimes, dans les rochers qui s’é-
tendent entre Nice et Menton, on a chance de trouver,
en mars-août, une charmante petite amaryllidée, le
Leucoium hyemale D. C., qu'on à distrait du genre Leu-
coium, pour en faire le type d'un nouveau genre Ruminia,
qui ne semble pas avoir sa raison d’être. C'est du L. lon-
gifolium qu'il se rapproche, mais il s’en distingue bien
par ses feuilles plus larges, sa tige plus épaisse, ses pe-
doncules floraux non capillaires, sa capsule deux fois
plus grosse, oblongue-piriforme au lieu d’être sub-glo-
buleuse.Cette petite plante aurait, paraital, été retrouvée
par Fabre, dans le Vaucluse, sur les pentes nord du
mont Ventoux.
Encore à la tribu des Amarylilis appartiennent le Stern-
bergia lutea Gawl.; l'Amaryllis lutea L., qui, malgré lin-
dication donnée aux environs de Toulon ei d'Agen, ne
semble pas être d’origine française. On le cultive fré-
quemmeut dans les jardins, etil sert à faire d'élégantes
bordures qui se couvrent de fleurs jaune d'or, au mois
de septembre ou d'octobre. La fleur est grande, solitaire,
longue de # à 5 centimètres, tubuleuse, en forme d’en-
tonnoir ; les feuilles sont larges et entières,munies à leur
base d'une gaine tronquée. Cette très belle plante, qui
nous donne jusqu'à un certain point l'idée de ce que
sont les Amaryllidées exotiques, est de culture facile,
très résistante et se naturalise facilement.On l'a trouvée
LE NATURALISTE
dans ces conditions en Vendée, à l'ile de Noirmoutier.
Les trois genres dont nous venons de parler se dis-
tinguent facilement comme suit :
Strenberqia.
re É inégales (fleurs blanches), Galanthus.
S souroses. | ;
ee LE an { égales (fleurs blanches ou roses),
rie è sions. . :
érigone à dIVISIO Leucoium.
Dans le deuxième groupe, celui des Narcisses, nous ne
trouvons que deux genres : Pancratium et Narcissus.
Dans les Pancratium, plantes de la région maritime, le
périgone est en forme d’entonnoir,muni à la gorge d'une
couronne dentée, les étamines sont portées par les dents
ou par la face interne de la couronne. Ce sont des
plantes très ornementales à grandes fleurs blanches, très
odorantes, portées au nombre de 2 à 40 au sommet de
la tige; le bulbe est volumineux et peut atteindre 5 à
7 centimètres de diamètre. Des deux espèces françaises,
le Pancratium maritimum L. habite les sables de l'Océan,
la Charente-Inférieure, la Vendée, les Basses-Pyré-
nées,etc., ainsi que le littoral méditerranéen et la Corse.
Dans le P. ülyricum L.,de Corse, la tige est moins élevée,
les feuilles plus larges,les fleurs plus petites et habituel-
lement plus nombreuses (5 à 10), d’un blanc sale, à divi-
sions du limbe d’une à trois, plus larges que la couronne
dont les lobes sont lancéolés-étroits et bifides-subulés.
Les Narcisses forment un vaste genre représenté chez
nous au moins par une vingtaine d'espèces réparties en
un certain nombre de groupes, mais dont le caractère
général est d'avoir le limbe du périgone en forme de
coupe et la gorge munie d’une couronne où d'un tube
campanulé et pétaloïdé, les étamines sont insérées sur le
tube du périgone au-dessous de la couronne ou à la base
du tube. Les fleurs sont blanches ou jaunes avec la cou-
ronne diversement colorée.
Dans une section Bulbocodium, nous n'avons à inscrire
que le Narcissus Bulbocodium L. comme espèce à fleur
jaune, solitaire, à couronne très grande, conique, dépas-
sant le périgone qui est étroit. Cette jolie plante habite
les landes du sud-ouest de Bordeaux à Bayonne, l'Age-
nais, les Hautes-Pyrénées.
Une autre section a pour type le Narcissus pseuda-nar-
cissus L., l'espèce la plus commune et la plus ancienne-
ment connue, celle qui orne de ses grandes fleurs jaunes
les bois de la région parisienne dès le mois de mars. La
culture en a tiré de nombreuses formes, soit par sélection
et semis, soit par croisement avec d'autres espèces. Quoi
qu'il en soit, la fleur, dans les plants de ce groupe, est
grande, à tube ohconique, à couronne campanulée éga-
lant à peu près les divisions du périgone; les feuilles
sont larges et planes, la tige uniflore, Le N. major Cun.,
de la Provence, ne s'en distingue guère que par sa fleur
plus large, habituellement double, à couronne de même
couleur que le limbe, tandis que ce dernier, dans la pré-
cédente espèce, varie du jaune pâle au blanc, la couronne
restant toujours d’un beau jaune. Le Narcissus incompa-
rabilis Mill, est aussi du même groupe, avec des divisions
florales blanches et une couronne d'un beau jaune. Est-
il le produit du croisement du N, pseudo-narcissus avec le
N. poeticus L.? Est-il, au contraire, autonome ? Il est
diflicile d'être fixé, d'autant plus que les deux Narcisses
précités s’hybrident fréquemment. Le N. incomparabilis
a donné de nombreuses variétés horticoles, cultivées
surtout en Angleterre.
Le Narcisse des poètes, le N. poelicus L., sert de type
à une petite section caractérisée par le tube de la fleur,
étroit et très allongé avec les divisions en étoile, la cou-
ronne très courte; les fleurs solitaires, géminées ou
plus nombreuses. Le N. poeticus a la fleur grande, très
odorante, d'un beau blanc, avec la couronne jaunâtre
très courte, étalée en coupe, à bord ondulé et d’un beau
rouge. Le N. biflorus Curt. lui ressemble, mais avec la
fleur blane jaunâtre et.la couronne entièrement jaune. Il
est disséminé en France, tandis que le N. poelicus afflue
surtout dans les prairies fraiches de la région monta-
gneuse.
La jonquille caractérise un groupe à feuilles subulées
ou cylindriques, à tube floral étroit et très allongé. C’est
là qu'on trouve le N. jonquillus L. au parfum pénétrant,
souvent échappé des jardins ;le N. juncifolius Req. du
midi de la France; le N.odorus L., à fleurs grandes
comme celles du N. pseudo-narcissus et jaunes aussi; le
N. serotinus L. de Corse, blanc de neige, etc.
Avec le Narcinus Tazetta L., nous abordons la dernière
section à fleurs habituellement nombreuses : jaunes
dans le. N. chrysanthus D. C. et aureus Lois. du Var:
entièrement blanches dans le N. niveus Lois., polyan-
thos Lois., refleæus Lois.; les deux premiers de la Pro-
vence, le troisième qui n’a encore été trouvé Jusqu'à ce
jour que sur un seul point du globe, aux îles Glénans ;
blanches avec la couronne jaune dans les N. patulus Lois.
d'Hyères et Tazetta L., qui habite toutela région méditer-
ranéenne et la Corse. Ce dernier est de plus polymorphe:
c'est lui qui constitue ge Narcisse de Constantinople des
fleuristes dont on rencontre, dans les cultures, de nom-
breuses formes légitimes ou provenant de croisements.
P. HARIOT.
x
UNITÉ OU PLURALITÉ
DES RACES FRANCAISES
On connait la fameuse discussion, qui est loin d’être
terminée d’ailleurs aujourd’hui, sur le monogénisme et
le polygénisme. Je ne veux pas revenir ici sur ce débat,
bien que je n'hésite pas à me déclarer partisan convaincu
de la seconde théorie. Pour le moment, ce qui doit nous
intéresser le plus, c’est de savoir ce que deviendront, dans
un avenir plus ou moins prochain, les races qui com-
posent, dans leur ensemble, la nation francaise. C’est là
un problème d'autant plus passionnant qu'il confine de
très près à la politique, à la sociologie, et qu'il pourrait
même faire naître une doctrine nouvelle qui ne serait
autre que le pangallicisme.
Représentons-nous la France d'aujourd'hui comme un
territoire englobant dans son sein une quantité de petits
États ayant chacun leur langue (je devrais dire leur pa-
tois), leurs coutumes et même leur religion. Ces petits
États, vous les connaissez tous, ce sont certaines pro-
vinces, plus où moins éloignées de l’ancienne Ile de
France, dont les habitants restent groupés pour la défense
de leurs idées, de leurs traditions, comme aussi de leurs
aspirations. Je citerai seulement les plus importantes ou
les plus typiques : la Picardie, la Normandie, la Bre-
tagne, l'Auvergne et la Provence.
Bien qu'administrativement ces fragments de la mére
«
dun ae 26 de nl done nd. té + © médias nid)“. je
RE
LE NATURALISTE
173
patrie ne se distinguent pas des autres, il n’en est pas
moins vrai que, pour l’ethnologue, la séparation est des
plus marquées, Si, en sortant de Paris, vous pénétrez en
Normandie, en Bretagne, en Provence, je vous défie de
ne pas remarquer cette différence, non seulement en
écoutant l’idiome spécial à ces contrées, mais en obser-
vant encore les mœurs, et même en étudiant le facies des
gens.
En fondant l'unité de la patrie française, la Révolution
avait, certes, une idée généreuse, mais la réalisation en
était plus diflicile : la preuve en est que, depuis plus de
cent ans, le progrès dans certains cantons, surtout, est
nul où à peu pres, Tant qu'un peuple conserve sa langue,
il n’est pas vaincu ; tant qu’une province s'attache à son
patois, elle n’est pas assimilée; notez bien ce fait quim'a
toujours frappé. L'isolement de certains habitants ne
provient souvent que de leur langage. J'ai connu des jeunes
gens, garçons et filles, qui n’osaient quitter leur départe-
ment,craignant, d'abord, de servir de risée et des’ennuyer
de ne plus entendre le patois du pays. Les coutumes ont
la même influence. Interrogez les conscrits bretons qui
souffrent de nostalgie à Paris, trois fois sur quatre ils vous
feront invariablement lamême réponse : «Nous regrettons
la veillée, les pardons, les promenades, les danses du di-
manche, les pelerinages, etc. » La Bretagne proprement
dite ne vient qu'en second lieu.
Voyez encore les Auvergnats et Limousins, qui tra-
vaillent l'été dans la capitale ; ils ne se quittent pas du-
rant la saison, ils choisissent comme lieu de rendez-vous
tel ou tel café, tenu de préférence par un ancien pays. et
le dimanche soir on y cause, on y boit, on y danse, à
la mode de chez nous. Supprimez à ces gens leurs dis-
tractions favorites et leurs réunions habituelles, pas un
ne consentira à séjourner plus longtemps parmi les
étrangers.
En somme, la France a des colonies sur son propre sol,
et ces colonies ne sont pas à dédaigner, puisqu'elles four-
nissent le meilleur blé, le meilleur vin, souvent le plus
fort chiffre d'impôts et de bons soldats. 11 faut done mé-
nager les colons, mais aussi il faut les franciser. Di-
lemme épineux, j'en conviens.
Pour galliciser, il n'y a qu'un moyen radical : par
exemple, multiplier les écoles primaires dans les dépar-
tements arriérés, combattre à tout prix l'usage du patois,
et, je vais encore plus loin, extirper les vieilles coutumes,
Je sais que le remède est barbare, aussi suis-je certain
d'avance qu'il ne sera pas appliqué.
On a cru que l'extension des réseaux de voies ferrées
suffirait à umifierle pays : les résultats n'ont été guère sa-
- tisfaisants ; les grandes villes desservies par les chemins
de fer se sont seules modifiées; mais, dans tous les temps,
les cités n’ont-elles pas donné lexemple du progrès? En
revanche, les campagnes, les hameaux, non sillonnés par
les locomotives, sont restés isolés et, par là même, en
retard. J'ai vu des villages où l’instituteur était le seul
homme qui püt parler passablement le francais, et sou-
vent encore le magister ne se génait-il guère pour parler
patois en dehors de la classe.
Ceci ne devrait pas exister; je souhaiterais que l’insti-
tuteur ait conscience du rôle important qu'il joue, et fa-
vorise par tous les moyens en son pouvoir la divulgation
de la langue officielle.
En somme, de longues années s'écouleront encore avant
que la France présente une cohésion digne d’un grand
pays. Il faudra beaucoup d'efforts, de décrets et de lois
pour renverser les barrières qui séparent encore les pro-
vinces frontières du centre de la civilisation,et, pour cela,
il n'y a qu'à commencer, dès maintenant, la décentrali-
sation. Qu'est-il arrivé depuis un siècle? L’élite des intel-
ligences que renfermait la province a fui vers Paris. Ar-
tistes, savants, penseurs, ont déserté leur village natal,
tandis qu'au contraire leur devoir était de rester chez eux
pour se faire les apôtres du progrès, de la civilisation, de
l'instruction. On se plaint de l'ignorance des paysans,
mais l’on ne fait rien pour eux, On parle de diffusion des
services, et il n’y à que les instituteurs pour remplir cette
lourde tâche, qui exigerait le concours de milliers de
dévouements, Une société s'est fondée récemment dans
le but d’instruire les populations, en les initiant aux
secrets des sciences physiques et naturelles de l'école
primaire, mais l’apathie est si grande que la progression
est lente (1),
Tout le monde parle et personne n'agit.
Attendons-nous donc à lire longtemps encore les lé-
gendes des folkloristes, les rapports des anthropologistes
et les récits des journalistes locaux, sur les inepties cou-
tumières aux paysans ienorants, plus à plaindre qu'à
blâmer, Paris a des facultés, des cours libres, des écoles
de toutes sortes. Quelques grandes villes ont des univer-
sités, quelques autres des universités populaires, les
chefs-lieux de canton n'ont rien, et l’on s'étonne que tout
y soit ridicule!
Ce n’est pas ainsi qu'on fusionnera les races françaises,
etles savants de cabinet, qui affirment que, dans notre
pays, il n'y a plus qu'une race homogène, se trompent
grossièrement et se tromperont longtemps encore.
Dr Ed. SPALIKOWSKI.
UNE PETITE TACHE DU SOLEIL
Le soleil présentait, le jour de la Pentecôte, une toute petite
tache, située sur son bord droit. C'était une petite tache qui se
trouvait placée à une certaine distance d’une autre, 6 Jours avant,
au moment de l'éclipse du 28 mai. Cette dernière avait donc
complètement disparu, de l'autre côté du soleil, le jour de la
Pentecôte. -
IL est intéressant d'observer une tache au voisinage du bord
du soleil, car sa forme se modifie de plus en plus. De cireu-
laire qu'elle était tout d'abord, on la voit devenir elliptique ; et
cette ellipse s’amincit de plus en plus, au point de se réduire à
son diamètre vertical, quand la tache est arrivée sur le bord du
soleil, C'est la preuve matérielle, la plus évidente que l'on puisse
donner, que le soleil est une sphère et non un disque aplati.
C’est alors que l’on constate le mieux que ces taches sont
creusées dans la photosphère, qui manque à leur niveau, comme
une orange où on aurait fait un trou dans l'épaisseur de l'écorce :
on verrait alors la chair du fruit. Sur le soleil, à travers ce trou
béant, la chair du fruit parait noire. En tout cas, elle est incom-
parablement moins éclairante que la photosphère, ou écorce, qui
l'environne. Disons cependant qu'une vive lumière électrique,
placée devant le soleil et regardée à travers une lunette, parait
noire, comme les taches du soleil. De sorte qu'il pourrait bien
se faire que le fond des taches fût aussi brillant qu'une puis-
sante lumière électrique : cela ne les empêcherait pas de paraitre
chseures, par comparaison avec l'éclat de la photosphère. {
Malgré l'énorme distance qui nous sépare du soleil, puisqu'on
(4) IL s’agit de la Société pour la diffusion des sciences phy-
siques el naturelles. dont la fondation est due surtout à l'ini-
tiative généreuse et zélée de M. J. Courjault, aujourd’hui
secrétaire général de la Société. — Lui demander des rensel-
gnements à Mortiers, par Léoville (Charente-Inférieure).
174
pourrait placer près de 12.000 globes de la grosseur de la terre
entre cet astre el nous, on ne peut pas regarder le soleil dans
une lunette astronomique sans avoir la conscience que l’on se
trouve devant un globe infiniment grand, de flammes gigan-
tesques, qui est le centre d'où nous rayonne une prodigieuse
quantité de chaleur. On demeure confondu, à la pensée que la
terre n'en reçoit qu'une quantité infinitésimale, et que la presque
totalité de cette chaleur s'en va dans les espaces interplané-
taires et au-delà, pour produire évidemment des effets prodi-
gieux dont nous ignorons absolument les résultats. Evidemment
cette force n’est pas perdue. Alors à quoi peut-elle bien servir,
si l’espace ne s’échauffe pas en route?
D'un autre côté, toutes les étoiles de l'univers sont autant de
soleils, qui nous envoient aussi une certaine quantité de chaleur,
de sorte qu'il y a très. certainement échange de forces entre
notre soleil et tous les autres soleils de l'univers sans exception.
Ceux-ci ont beau ne nous envoyer chacun qu'une infime quantité
de chaleur, ils se rattrapent par leur nombre (1); de sorte qu'il
n'y à pas de raison sérieuse pour que le soleil ne reçoive pas
des autres étoiles autant de chaleur ou de force qu'il en perd.
Il peut en recevoir plus, il peut en recevoir moins; mais il est
probable, pour ne pas dire certain, que tout finit par s’équi-
librer, tôt ou tard. En effet, si par hasard il en recevait moins
qu'il n'en perd, il se refroidirait, jusqu'à ce qu'il arrive un
moment où l'équilibre entre la perte etle gain de chaleur fini-
rait par <e rétablir. Cette doctrine est consolante, et elle ne
peut que nous rassurer pleinement sur l'avenir du soleil. Si
Jamais il doit finir par se refroidir un jour, on peut être certain
qu'il aura alors récupéré d'autres forces, qui lui permettront
d'évoluer dans un autre état, sinon dans le même état qu'aujour-
d'hui.
Pour en revenir aux taches du soleil, à mesure qu'elles se
rapprochent du bord de l’astre et que leur diamètre transversal
diminue, on distingue bien mieux, en revanche, les facules qui
se développent autour d'elles. Cela tient à ce que le pourtour du
soleil nous parait plus sombre que son milieu; de sorte que les
facules, qui sont toutes blanches, nous paraissent ressortir avec
beaucoup plus d'éclat sur les bords du disque qu'en sa partie
médiane.
C’est ainsi que cette petite tache, de 4 milliniètre de diamètre,
sur un disque solaire de 20 centimètres projeté sur un écran, était
accompagnée de facules, tout autour d'elle; facules qui proje-
laient encore de magnifiques trainées à À centimètre derrière
elle. Une tache de cette dimension, malgré sa petitesse appa-
rente, est encore plus grande, en diamètre, que le rayon de la
terre. En effet, on pourrait enfiler 108 terres dans le diamètre
du soleil; de sorte qu'une tache de 1 millimètre sur 200 milli-
mètres est plus large que le rayon de la terre, qui correspon-
drait ici à un peu moins de 2 millimètres de diamètre.
Quant aux facules qui rayonnaient en arrière de la tache, à
près de 1 centimètre, on voit qu’elles s'étendaient sur le soleil sur
une longueur de 5 globes terrestres alignés les uns au bout des
autres, soit 25 en surface. Ainsi cette petite tache était envi-
ronnée de facules occupant autant de place que 20 ou 30 terres
projetées sur le soleil, de l'étendue de la nôtre. Or, on admet,
avec raison, que ces facules sont des foyers d'incandescence de
la photosphère, plus vifs que partout ailleurs. Il est donc naturel
de croire que les taches du soleil sont produites par de véritables
tourbillons, qui laissent à découvert, à leur partie centrale, la
masse située au-dessous de la photosphère,et qui nous parait
sombre en comparaison. Elles correspondent donc à des centres
d'activité physico-chimique plus grande en cet endroit que par-
tout ailleurs. Du reste, les dessins des taches du soleil montrent
bien la nature toute particulière de ces tourbillons de flammes
qui se dispersent ici pour se rejoindre là-bas, en formant des
ponts suspendus à une énorme hauteur, et en lançant des gerbes
de flammes dans certaines directions, plutôt en dedans qu’au
dehors. Ce sont des remous dans des gaz incandescents, si
toutefois on peut encore appeler gaz des flammes portées à une
telle température, où la matière doit être à un tout autre état, au-
delà de l’état gazeux. ;
Ce qui confond le plus l'imagination, c’est de penser qu'il y a
fatalement des millions d'années et de siècles que le soleil est
en aclivité, et qu'il n'y à pas de raison sérieuse pour qu’il ne se
(1) Curieux exemple de ce que peut produire un grand
nombre de petites sommes : 5.000 étudiants en droit, donnant
5 francs pour louer la robe avec laquelle ils passent leurs
examens, font gagner aux loueurs de toges 25 mille francs par
an: soit 1 million de francs en 40 ans, ou 2 millions au bout de
ce temps, avec les intérêts!
LE NATURALISTE
maintienne pas ainsi encore pendant un temps illimité. S'il
tendait à se refroidir. il semble qu’il y aurait longtemps qu'il le
serait déjà. Il est donc plus probable qu'il tend à se transformer
sans rien perdre de sa force initiale. En tout cas, nous pouvons
être complètement rassurés sur son compte, et nous ne pouvons
nous empêcher de rire quand on nous prédit son extinction pro-
chaine. Il brülera longtemps encore, et sa densité actuelle, sous
son état ultra-2azeux, à une température excessive, est pour nous
un gage certain de sa durée, à cause des forces de toute nature
qu'il tient en réserve dans sa masse si condensée. Il faut que la
pression, en son centre, dépasse tout ce que l’on peut imaginer,
pour qu'il ait une densité supérieure à celle de l'eau. Quand on
pense que, à chaque seconde, il se dégage du soleil, dans l’espace
ambiant, assez de chaleur pour donner à 69 globes terrestres
comme le nôtre autant de chaleur que la terre en reçoit du
soleil en un an, on reste confondu d’admiration devant le foyer
qui engendre, depuis tant de siècles, une aussi prodigieuse quan-
tité de chaleur, sans se refroidir sensiblement.
Peut-être qu'un jour, en se condensant de plus en plus, la
masse du soleil acquerra une telle tension dans son intérieur,
qu'une explosion formidable en sera la suite, et qu'alors on verra
une nouvelle planète se former dans l'espace, à l’aide d’une
masse de matière détachée du soleil. C’est probablement ainsi
que se sont formées celles qui existent déjà autour de lui(1).
Il semble en effet qu'il n’y ait pas de raison pour que le nombre
de nos planètes n’aille pas encore en croissant; car il est bien
évident que-leur formation n'a pas encore dit son dernier mot.
Il n’y a pas de raison pour que le soleil s'arrête dans un aussi
beau chemin : à chaque jour suffit sa peine! Il ne faudra donc
‘ pas s'étonner le jour où on apercevra une nouvelle planète
dans le ciel. Le contraire serait plutôt incompréhensible; car
rien ne reste stationnaire dans la nature que ce qui doit bientôt
décroitre et dépérir. L'âge adulte est celui de la création et de
l’enfantement. Ce n'est pas cela qui l’amoindrirait beaucoup,
bien certainement, |
Dr Boucox.
CONTRIBUTIONS
à l'étude de la faune dela Roumanie
(Suite et fin.)
V. — COPÉPODES.
Dans l'ordre des Copépodes, j'ai trouvé jusqu'à présent
quatre genres et huit espèces, représentant quatre fa-
milles.
a) Famille des Calanidi.
Genre Diaptomus avec deux espèces, dont une nou-
velle.
D. bacillifer (Kolbel). Dans l'étang de Beldimau (1899,
janvier).
D. furca (n. sp.) Trouvé dans le même étang et à la
même date. Se caractérise par son endopodite du pied
droit de la cinquième paire du ©”, qui atteint le quart du
dernier article de l'exopodite. Le crochet terminal de
l’exopodite très bossu. Les deux ranus (exp. entop.) du
pied gauche de la cinquième paire du o” ont la forme
d’une fourche,de là le nom spécifique que je lui ai donné
(fig. 1),
b) Famille des Cyclopeidi.
Genre Cyclops avec quatre espèces, dont une nou-
velle :
(1) Nous savons fort bien que celte opinion n’est pas généra-
lement admise. Mais nous croyons plus intéressant de la donner
ici, sans y attacher d’ailleurs plus d'importance qu'elle ne
mérite : rien west impossible!
LE NATURALISTE 175
€. coronatus (Claus). Assez abondante dans Bahlui
(1889, novembre).
C. Rumaniæ (n. sp.). L'espèce trouvée au mois de jan-
vier 1900, dans l'étang de Beldimau, est très petite de
taille et à premiere vue ressemble au C. affinis de
Sars. Examinée de plus près, elle montre quelques ca-
ractères du C. cauthocarpoides de Fischer. Je dois le con-
sidérer comme une autre espèce, vu les caractères spé-
ciaux qu'il en porte, La couleur corporale est d’un jaune
sale. L'œil d’un rouge foncé. La premiere paire d’an-
Fig. 1. — Diaptomus furca (n. sp.), 5° p. de pattes.
tennes assez courtes, n'ayant que sept articles. Les qua-
trième et cinquième segments thoraciques plus étroits que
les trois premiers, Latéralement le cinquième segment
porte une épine. Les pattes rudimentaires ont un article
unique, porteur de trois bourrelets, chacun avec une
soie. La soie médiane est la plus mince et de même lon-
gueur que l’interne qui est plus épaisse et poilue. La
soie externe très longue, plus forte que les deux autres,
est aussi poilue (fig. 2). La furea est environ trois fois
Fig. 2. — Diaptomus Rumaniæ (n. ep.)
plus longue que le dernier segment. Des quatre soies de
chaque branche de la furca, l’interne est plus longue
que l’externe, et des deux intermédiaires, l’interne deux
fois plus longue que l’externe. Ces deux dernières soies
sont finement plumeuses. Point d’épines latérales sur les
branches de la furca.
C. viridis (Fischer). Abondante dans l'étang de Bel-
dimau et dans d’autres localités, comme à Babiceni (Dep.
Botochang).
Cette année-ci, au mois de février, J'ai pêché deux
sortes de C. viridis : l’une ayant toutes les quatre soies
de Ja furca plumeuses et les soies intermédiaires avec
des poils uniformes: l'autre ayant,sur ces soies intermé-
diaires et à leur base, des poils longs, fins, très rares et,
à partir du milieu de leur longueur jusqu’au bout, des
poils fins, très serrés (fig. 3).
Fig. 3 et 4, — Cyclops viridis (n. var.)
Sur d’autres individus avec ce plumage, il y à en plus
et sur chaque branche de la furca une épine implantée
sur leur face dorsale, plus près de leur bout et plus en
dedans (fig. 4).
Je me demande s'il ne faut pas les considérer comme
autant de variétés du C. viridis.
C. vernalis (Fischer). Très abondante dans le lac de
Cristesti (1898).
c) Famille des Harpactides.
Un seul genre et une seule espece :
Canthocamptus staphilinus (Claus). Trouvé dans les
mois froids, dans le ruisseau Bahlui (1889) et dans l'é-
tang de Beldimau (janvier 1900).
d\ Famille Hernæoceridi.
Une seule fois, le 21 septembre 1895, j'ai trouvé un
grand nombre de Lernæocera sur le corps d’un Brochet.
L. esocina (Burm).
Ayant l’occasion de suivre le développement des œufs
de cet individu, j'ai obtenu quelques faits qui méritent
d’être décrits; ce que je ferai bientôt.
D' Léon-C, CosMovici.
LA CULTURE DU TABAC EN GRÈCE
On peut poser en principe que le climat des pays chauds con-
vient à la culture du tabac et lui donne un parfu:n exquis. Mais,
à côté du climat, la qualité du sol et des engrais employés exerce
également une énorme influence sur le produit, de même que le
choix des graines dont on compte plus de quarante espèces.
Tout terrain profond, bien ameubli, substantiel et dont le sous-
sol n’est pas humide peut convenir à cette culture et, particuliè-
rement, celui qui contient du carbonate de chaux ou de magnésie
en quantité notable, 10 à 15 p. 100 d’argile et 10 à 15 p.100 de
sable; les terres argilo-calcaires et sablo-argileuses sont égale-
ment recommandables. Ces diverses sortes de terrain se rencon-
trent dans les différentes parties de la Grèce, qui, par sa situa-
tion, appartient à la région tempérée chaude et a, par conséquent,
une période de chaleur très prolongée. Il faut également, poux
176 LE NATURALISTE
arriver à un bon résultat, que les terrains soient bien formés,
c'est-à-dire enrichis au moyen d'engrais organiques arrivés à
décomposition parfaite. I faut aussi avoir soin d'y ajouter de la
chaux ou du plâtre, de la marne ou de la craie, suivant la nature
plus ou moins argileuse du sol; la chaux et le plâtre donnant
beaucoup d'arome au tabac. Tout autant et même plus pour la
culture du tabac que pour celle des céréales et des plantes ma-
raichères, il y a lieu de recourir aux amendements qui agissent
plutôt mécaniquement que comme engrais. Il faut encore — et
c'est là un point essentiel — que Île terrain ne soit situé ni dans
un bas-fond, à cause de humidité, ni au sommet d'une colline,
à cause de la sécheresse. Quant à l'exposition, il faut choisir de
préférence le Midi,et rarement le Nord.
Les semis doivent se faire vers le 15 février au plus tard, sur
des couches tièdes ou froides recouvertes de châssis vitrés qu'on
enlève pendant le jour, suivant le temps. Six ou sept semaines
après, les plants qui auront de quatre à cinq feuilles pourront
être mis en place. Après avoir distingué les différents sols qui
peuvent convenir aux fabacs et les amendements qu'il y a lieu
d'y apporter, il est indispensable de connaître les éléments que
la terre doit tenir en réserve, c’est-à-dire les engrais qu'il est
nécessaire d'y ajouter et la proportion dans laquelle on doit les
employer.
A la suite d'analyses répétées, on connaît la composition chi-
mique du tabac; on sait que 1,000 kilogr. enlèvent au sol :
143 kilogr. d'azote.
45 kilogr. 44 d'acide phosphorique.
14 kilogr. 84 de potasse. ;
Les nitrates et sels ammoniacaux, la chaux, les phosphates,
les craies, les fumiers de ferme, les engrais animaux, le guano,
la potasse, etc., devront donc être employés suivant les circons-
tances, en ne perdant pas de vue toutefois que la combustibilité,
point essentiel dans le tabac à fumer, résulte de la présence de
la potasse.
Le terrain destiné à la culture du tabac, après avoir recu les
engrais voulus, devra être ameubli par un ou plusieurs labours
successifs. On choisira ensuite des sujets ayant quatre à cinq
feuilles, la reprise de ces plants étant plus assurée que lorsqu'ils
ont sept à huit feuilles. Le tabac se repique en lignes espacées
de 50 à 70 centimètres et les plants distribués dans les lignes,
en quinconce, sont distants de 35 à.56 centimètres; toutes les
deux lignes il est bon d'augmenter l'espacement pour permettre
de circuler dans la plantation sans l'endommager et cela pour
faire les opérations de sarclage, d'écimage et d'ébourgeonne-
ment. Si la transplantation a été bien faite, la reprise a lieu au
bout de six à huit jours. Après quinze jours, on donne une pre-
mière façon à la houc; puis une seconde quinze jours après, en
ayant soin, pendant cetintervalle de temps, d'épandre un engrais
liquide où un engrais chimique pulvérulent azoté ou potassique.
En procédant à cette seconde façon, on établit le long de chaque
ligne des plants et à 8 centimètres de celles-ci des rigoles qui
servent à irriguer par infiltration. Ce que l’on cherche dans la
culture du tabac, ce sont des feuilles grandes, pesantes et ayant
du parfum. C'est pourquoi, aussitôt que les plants ont acquis un
certain développement, on procède au pincement ou ébourgeon-
nement qui consiste à décapiter le tabac au-dessus de la huitième,
de la neuvième, de la dixième et même de la vingtième feuille.
Si on laisse aux plants un grand nombre de feuilles, on obtient
un tabac doux; si au contraire on laisse huit ou dix feuilles, on à
un produit fort. Dix jours après que la plante a été écimée, il se
forme des jets latéraux aux aisselles des feuilles; ces jets doivent
être enlevés dès leur apparition. Quelques jours après on donne,
si c'est encore possible, un coup de houe final ; ensuite on aban-
donne la plante jusqu'à sa maturité. La maturité du tabac com-
mence par les feuilles de la base et il est important de ne faire la
récolte que si le tabac est mûr, sinon il y aurait perte en poids et
en qualités aromatiques. Il semble donc qu'il faille cueillir les
feuilles au fur et à mesure de leur maturité, comme cela se fait
généralement dans ce pays et en Turquie, et ne pas couper à ras
de terre la tige des plantes avec toutes ses feuilles. Cependant il
semble préférable de faire la récolte en tiges si l’on ne veut pas
sexposer à nobtenir qu'un produit dépourvu de qualités; en
effet, le tabac, pour être parfumé et excellent, doit se dessécher
lentement, en dehors de l'influence solaire, afin que tous les sucs
se concentrent sans l'altérer. Or, dans les pays méridionaux, la
feuille de tabac est presque toujours peu épaisse, peu chargée
d’eau, et, grâce à la tige à laquelle les feuilles restent adhérentes
la dessiccation estplus lente et le produit est de meilleure qualité.
L'expérience tentée dans ces conditions à Corfou avec du
tabac d'Obourg à grandes feuilles a donné les meilleurs résul-
tats : délicieux arome et fort rendement.
C'est du reste de cette façon que procèdent les habitants de la
Virginie qui, guidés par l'expérience, font la récolte en tiges et
transportent immédiatement après la coupe les plants dans des
endroits ombragés (1).
PHOTOGRAPHIE
ÉVENTAILS PHOTOGRAPHIQUES
La photographie sur soie est certainement plus artis-
tique que celle sur papier. De plus, les clichés imprimés
faiblement sur elle facilitent la peinture à l’aquarelle. On
peut ainsi faire de charmants éventails.
Pour préparer la soie, il suffit de la saler en la plongent
dans le bain ci-dessous :
AlcookES LR EN ENTER MERE . 1000 ce
Bénjoin. MER eee aeemeterener en crot 8 gr.
Mastic-entlarmess m0 Pam CCE 5 —
Ghlorure de cadmium.-.2rreer entrer 30 —
Au bout de vingt à trente secondes, on retire la soie,
on l'éponge entre deux feuilles de papier buvard et on
laisse sécher à l'air libre. Cette soie salée se conserve
indéfiniment; on peut en préparer une grande quantité
en même temps, puis la mettre de côté à l'abri de la pous-
sière. La meilleure étoffe est la soie pure de Chine, sans
côte, où du satin de première qualité; la couleur blanche
ou crème doit être pérférée.
Pour sensibiliser, on plonge la soie salée dans une
solution de nitrate d'argent à 12 0/0. Au bout d’une
minute, on retire du bain et on fait sécher à l'obscurité.
Pour aller plus vite, on peut mettre la soie entre plu-
sieurs feuilles de papier buvard et sécher au fer chaud,
D'ailleurs, la soie, même séchée lentement, a besoin
d'un coup de fer final qui l'aplanit.
On imprime au chässis-presse beaucoup plus vigou-
reusement que s'il s'agissait d'une épreuve aristotype.
Une grande difficulté consiste à ne pas déranger la soie
quand on examine si l'impression est suffisante; le
moindre tiraillement produit un flou, Un bon procédé
pour empêcher ce déplacement consiste à coller légère-
ment la soie sur un carton mince, à son extrémité, —
ou sur toute sa surface, — avec de la gomme arabique.
Cette colle ne détériore pas la soie et se dissout dans les
eaux de lavage. &
Après l'impression, on lave l'épreuve dans cinq ou six
eaux en la laissant cinq minutes dans chaque eau. Puis
on vire comme à l'ordinaire, mais dans un bain dilué.
M. Et. Henrv, à qui nous empruntons ces détails, recom-
mande le bain ci-dessous :
Bicarbonate de soude........... SN AE L gr.
DEN NEED DS Re 0 Di 150 —
Faire dissoudre et ajouter :
Solde: chlorure dior à 10/0 ARE EeE 10 ce
(1) Extrait d’une série d'articles parus dans l'Économiste
d'Orient.
LE - NATURALISTE 177
On doit balancer la cuvette pendant tout le temps du
virage. On rince ensuite à l’eau pure et on fixe pendant
un quart d'heure dans un bain d’hyposulfite à 10 0/0.
Après le fixage, un lavage abondant de deux heures
suffit pour éliminer l'hyposulfite. Puis on suspend pour
sécher. Quand elles sont encore un peu moites, on les
repasse avec un fer chaud entre deux feuilles de papier
buvard.
Si l’on veut rehausser les épreuves d’un peu de cou-
leur, — ce qui est d’un très bon effet, — on se sert des
couleurs ordinaires à l’aquarelle qu'on emploie avec de
l’eau additionnée de 10 0/0 d’alun.
Il arrive souvent que la lumière s’infiltre pendant l'im-
pression entre la cache et le cliché. On peut enlever
complètement ces taches avec une solution diode et de
cyanure.
On fait deux solutions :
À. Solution à saturation de cyanure de potassium dans
l’eau ;
B. Solution à saturation d'iode dans l’alcool.
Pour l'usage, mélanger quatre gouttes de À et deux
gouttes de B, et appliquer ce mélange avec un petit tam-
pon d’ouate; cette solution agit très rapidement; il est
même prudent de l’étendre d’un peu d’eau.
H. Coupix.
PES GREBES
ESPÈCES FRANÇAISES
DESCRIPTION, MŒURS ET CHASSE
Les Grèbes sont habitants des lacs et des étangs, des
eaux dormantes qu’enserre une ceinture de jones et de
roseaux, des rivières au cours paresseux. Amis des eaux
douces plus que des eaux salées, ils descendent néan-
moins, en automne, le long des côtes maritimes, princi-
palement à l'embouchure des fleuves. Combien de fois les
ai-je poursuivis, en bateau, au voisinage des bancs de
Somme, dans les passes et l'intérieur de la baie! car ils
ne s’aventurent pas très loin en mer, et se tiennent or-
dinairement beaucoup plus près de la côte que les guil-
lemots et les pingouins. Le Grèbe huppé et le Jougris
sont les espèces qu'on rencontre le plus communément
dans ces parages. Leur chasse — surtout celle du Grèbe
huppé — est souvent très mouvementée, Ces oiseaux
plongent, en effet, avec une étonnante rapidité et vont
sortir parfois à une grande distance de leur point de dé-
part. Si le danger les presse, ils plongent de nouveau,
rament énergiquement sous l’eau des ailes et des pieds,
reviennent à la surface pour disparaitre encore et finissent
par ne plus montrer en dehors de l’eau que la tête ou
même seulement le bec, afin de reprendre haleine, Ils
peuvent, en outre, rester assez longtemps immergés, et
nagent avec une grande vitesse — à découvert quand
rien ne les inquiète, la moitié du corps enfoncée dans
l'eau quand ils ont quelque sujet de crainte. Comme
pour la chasse des autres plongeurs, le vent joue iei un
rôle prépondérant. Il faut donc pouvoir manœæuvrer le
bateau avec aisance, lutter de vitesse avec l'oiseau qui
cherche toujours à gagner au vent et, s’il y réussit, est à
-peu près sûr d'échapper.
peu p
Mais ce n'est pas sur les vagues de l'Océan que l’on
doit observer les mœurs et les habitudes des Grèbes,
Leur véritable patrie est, comme je l’ai dit, le lac aux
flots tranquilles qu'ils animent de leur incessante acti-
vité et dont ils sont l’ornement,
Tous les lacs de la Suisse possèdent des Grèbes, et
comme partout ailleurs on les pourchasse et on les tue.
Quand j'étais en villégiature sur les bords du lac Léman,
des chasseurs du pays me racontaient qu'on y fait au
Grèbe huppé un genre de chasse assez singulier, une
sorte de chasse à courre, car on poursuit cet oiseau, non
pour le tirer, mais pour le forcer, Les chasseurs se
servent pour cela de petits bateaux à vapeur. Dès qu'ils
apercoivent un Grèbe,ils se dirigent sur lui à toute
vitesse. L'oiseau plonge et va reparaitre plus loin, mais
le bateau l’a déjà devancé et le force à plonger de nou-
veau. En continuant longtemps ainsi, sans répit pour le
malheureux Grèbe, on finit par avoir raison de ses forces
et s’en emparer à l’aide d’une épuisette, voire à la main.
On se demandera très probablement pourquoi le Grèbe
ne se sert pas de ses ailes et ne s'envole pas pour fuir
un ennemi aussi acharné. Hélas! c'est toute une affaire
pour un Grèbe surpris de s'élever au-dessus des flots; il
n’y parvient que par des élans successifs, avec de grands
efforts, le col tendu, les pieds pendants rasant la surface
de l’eau qu'ils sillonnent d’une longue trainée d’écume.
Il se fie plus volontiers à son habileté de plongeur, à son
adresse à voler sous l’eau plus rapidement que dans
l'air, Malheureusement, en cette occurrence, 1l a compté
sans le génie inventif de l’homme, et son compte est
mauvais.
Je né connais pas d'oiseaux d’eau qui soient aussi
attachés à cet élément que les Grèbes, Tandis qu'il n’est
pas d’espèces qui ne s'arrêtent, à certains moments, sur
la terre ferme pendant un temps plus ou moins pro-
longé, les Grèbes vivent constamment sur l’eau. On peut
même dire qu'ils s’y reproduisent, car plusieurs d'entre
eux, tels que le Grèbe huppé, l'Oreillard, construisent un
nid flottant fixé aux joncs et aux roseaux, et le petit
Grèbe castagneux établit le sien sur des herbes sèches
au milieu des plantes aquatiques, le plus loin possible
du bord. Toute l’existence de ces oiseaux, de la nais-
sance à la mort, se déroule donc sur l’eau ou dans ses
profondeurs, car ils passent leur temps à nager et à
plonger. Ils n’abordent guère au rivage que lorsqu'ils y
sont rejetés par la fureur du vent ou que, blessés à l’aile,
ils s’y laissent pousser comme une barque désemparée.
Ils y viennent rarement de leur plein gré pour se reposer
et se chauffer au soleil comme font d’autres palmipèdes,
A peine les voit-on quelquefois sur la vase des marais,
cachés parmi les roseaux de la rive. Ils se reposent sur
l'eau et y dorment le bec enfoui dans les plumes du
dos. Sur le miroir uni des eaux découvertes leur corps
flotte alors dans un repos absolu, bercé légèrement par
un imperceptible clapotis.
La conformation des Grèbes est parfaitement adaptée
à leurs habitudes aquatiques. Leur tête petite, leur col
allongé et mince, leur bec pointu, leur corps cylindrique,
leurs tarses taillés en lames de couteau, déjetés en de-
hors, des doigts enveloppés d’une membrane qui déborde
en lobes sur les côtés, sont autant d'avantages qui leur
permettent de fendre les eaux avec une incroyable agi-
lité. Les pieds placés tout à fait en arrière remplissent le
double office de gouvernail et de propulseurs. Ajoutez
que, pendant l'immersion, l’action des ailes se combine
178
LE NATURALISTE ï
avec celle des jambes et donne aux Grèbes la merveil-
leuse faculté de voler sous les eaux.
Sur la terre ferme au contraire leur sort devient
lamentable. Ils ne peuvent ni se tenir debout, ni mar-
cher, ou du moins ils ne le font qu'avec une extrême
difficulté. Si l’on capture vivant un de ces oiseaux et
qu'on le pose sur le sol, on le voit se tenir d'abord
presque verticalement, le corps un peu penché en avant,
puis se mouvoir d'une allure incertaine, se balancer à
droite et à gauche pour tàcher de se maintenir en équi-
libre, chanceler et finalement tomber sur la poitrine et
le ventre. Forcés de renoncer à marcher, les Grèbes se
trainent, car, sur un terrain uni, ils ne peuvent pas non
plus prendre leur essor, et l’on sait au prix de quels
efforts ils s'élèvent au-dessus de l’eau. Mais, quand ils
ont atteint une certaine hauteur, ils volent assez facile-
ment, bien que la brièveté et l’étroitesse de leurs ailes,
relativement à la dimension et au poids de leur corps,
semblent peu favoriser l’action du vol, Leurs pattes
étendues en arrière les aident à changer de direction, et
quand ils veulent se poser, leurs courtes ailes ne leur
permettant pas de planer, ils visent obliquement la sur-
face de l’eau et s’y laissent tomber avec bruit.
Les Grèbes se nourrissent de petits poissons et de
frai, de mollusques, d'insectes, de tétards, de batraciens
et aussi de quelques végétaux aquatiques, Une habitude
qui leur est commune avec les plongeons les porte à
avaler les plumes qu'ils rencontrent sur l’eau et celles
de leur propre corps. Mais ce goût est surtout développé
chez les vieux individus et ne paraît pas exister chez les
jeunes.
Les Grèbes se marient pour la vie et les conjoints ont
l’un pour l’autre une grande affection. On les voit tou-
jours ensemble, en toutesaison. Ils gardent lesouvenir de
l’étang où ils ont aimé pour la première fois, et y revien-
nent tous les ans. Ce qu'il y a de particulier dans le nid
que font ces oiseaux, c’estqu'il n’est pas formé de plan-
tes sèches, mais bien de matériaux humides qu'ils vont
chercher au fond des marais et des étangs, de telle sorte
que leurs œufs reposent, pour ainsi dire, dans l’eau. Ils
n'apportent, du reste, aucun art dans sa construction.
C’est un assemblage désordonné de substances végétales
qui ressemble plutôt à un informe tas d'herbes qu'à un
nid, Le mâle et la femelle couvent à tour de rôle, et
quand ils quittent tous les deux, pour un temps, le nid,
ils recouvrent les œufs d’un amas de détritus végétaux
qu’ils raménent en plongeant du fond de l'eau. Les
jeunes éclosent au bout de trois semaines environ, et
dès qu'ils sont nés vont à l’eau et nagent. Les parents
leur apprennent ensuite à plonger. Quand ils ont quitté
le nid, ils n’y reviennent presque jamais, se reposent et
dorment sur le dos du père et de la mère. Comme il leur
serait difficile d'y monter, ceux-ci plongent et soulèvent
leurs petits en revenant à la surface, Veulent-ils s’en
débarrasser, ils plongent de nouveau et déposent ainsi
brusquement sur l’eau leur progéniture étonnée.
On trouve des Grèbes dans les deux hémisphères. Ils
appartiennent aux zones tempérées, Leur habitat ne
s'élève pas au Nord au-delà du 60° degré de latitude et ne
descend pas très bas vers le Sud. Les espèces que nous
voyons en France émigrent et vont pour la plupart pas-
ser l'hiver sur les lacs de l'Algérie, d’autres s'arrêtent
sur nos étangs salés du Midi. Il faut en excepter pour-
tant le Grèbecastagneux qui est sédentaire dans un grand
nombre de nos départements,
Grèbe huppé, Grand Grèbe (Podiceps cristatus). — Le
plus beau du genre sous sa parure d’amour. Il a toute la
partie supérieure du corps d’un brun lustré, un miroir
sur l'aile, les joues et la gorge blanches, le ventre d’un
blanc d'argent à reflets satinés. Ce qui le rend surtout
remarquable, c’est une superbe fraise de plumes fines et
soyeuses d’un roux ardent, lustrées de noir à leur extré-
mité. Il porte en outre.sur la tête une touffe de plumes
divisée, d'un noir brillant, simulant des cornes.
Le Grèbe huppé est de passage régulier en France en
automne et au printemps. Je l’ai rencontré sur les côtes
de Picardie vers la fin de mars et en avril et mai. Ceux
que l’on voit en mai etmême au milieu d'avril ont revêtu
leur superbe plumage de noces. Au mois de mars et
souvent au commencement d'avril, ils n’en ont encore
‘ que des parties plus ou moins développées. Lorsqu'ils
reparaissent en octobre, ils ont repris leur livrée d’au-
tomne et conservent à peine quelques traces de celle du
printemps. Il ne faut pas oublier du reste que le plumage
de ces oiseaux n’est véritablement complet qu'à l’âge de
trois ans révolus ; jusque-là la fraise et la huppe acquiè-
rent progressivement tout leur développement.
Ce Grèbe nichesur les grands étangs etles lacs entou-
rés de joncs et de roseaux. Son nid est un monceau flot-
tant d'herbes aquatiques consolidé par quelques roseaux.
La cavité très peu profonde ne semble avoir été creusée
que par le poids du corps de l'oiseau. La ponte est ordi-
nairement de quatre œufs (1) dont la couleur est d’abord
d'un blanc pur et passe ensuite au jaunâtre,
Le Grèbe huppé fait entendre, au printemps, des cris
sonores et très variés et il les répète fréquemment, mais
il reste muet au voisinage de son nid. C’est un oiseau
d'une grande prudence et le plus farouche de tous les
Grèbes. Dans sa somptueuse robe de noces, le Grand
Grèbe glisse sur les eaux avec une grâce et une majesté
égales à celles du cygne.
Grèbe jougris (Podiceps grisegena). — Ainsi nommé de
la belle teinte d’un gris bleuâtre qui décore les joues et la
gorge. Dessus de la tête noir, col roux, parties inférieu-
res du corps d’un blanc argenté, parsemées de petites
taches d’un brun cendré (2).
Ce Grèbe est de passage dans le nord et le midi de la
France, Je l’ai tiré souventle long des côtes de la Man-
che. On y tue en avril et dans la première quinzaine de
mai des sujets adultes en beau plumage. On rencontre
cependant plus fréquemment des jeunes, surtout en
automme et au commencement de l'hiver. Se chasse
comme le Grèbe huppé, mais parait un peu moins
méfiant.
Niche dans les marais, pond trois ou quatre œufs allon-
gés d’un blanc lavé de jaunâtre ou d'une lègère teinte
verdâtre. ù
Grèbe oreillard (Podiceps auritus). — C'est le Petit
\
(1) Quelquefois deux ou trois seulement, mais on en a trouvé
jusqu'à cinq. |
(2) Une variété locale, Podiceps Holbülli, qui habite les côtes
de l'Amérique septentrionale et se montre accidentellement en
Europe, diffère par des proportions plus fortes. — Podiceps lon-
gürostris Bonaparte, que l’on trouve en Sardaigne, principale-
ment dans l'étang de Tortoli, sur la côte orientale de l'ile, diffère
considérablement non seulement par les dimensions du corps, M
mais aussi par laforme du bec. Il a de grands rapports de NU
coloration avec Podiceps grisegena.
*
LE NATURALISTE
179
Grèbe cornu de Buffon(1), Podiceps cornutus de Vieillot (2),
Podiceps sclavus de Bonaparte (3). On l'a souvent con-
fondu avec l'espèce suivante, Podiceps nigricollis de Sun-
devall (4).
Joues ethaut du cou noirs, poitrine et abdomen d’un
blanc pur à reflets métalliques, avec les flancs d'un roux
marron nuancé de cendre, Son nom d'oreillard fui vient
d’une touffe de plumes rousses en arrière de chaque œil et
formant pour ainsi dire deux cornes.
Le Grèbe oreillard qui habite les contrées septentrio-
nales et orientales de l'Europe fait des apparitions assez
irrégulières dans le nord de la France, et on en tue rarce-
ment en plumage de noces. Il n’est pas plus commun
dans le Midi, peut-être moins. Il ne s'y montre guère
que pendant les hivers rigoureux et toujours en petit
nombre.
Niche dans les marais et construit un nid flottant atta-
ché aux joncs. La ponte est de trois ou quatre œufs,
allongés, d’un blanc grisâtre légèrement azuré, passant
pius tard au brun jaunâtre.
Grèbe à cou noir (Podiceps nigricollis), — Tout le cou
noir ainsi que les joues, pinceau de plumes eflilées d’un
jaune clair et roux luisant derrière chaque œil, s’épa-
nouissant sur les oreilles.
Le Grèbe à cou noir est rare dans le nord de la France
et assez commun, au contraire, dans quelques-uns de
nos départements du Midi. On le trouve, en hiver, sur le
bord de la mer et sur les étangs. Il est sédentaire dans
les départements de l'Aude, de l'Hérault, des Pyrénées-
Orientales où il niche dans les marais et sur les étangs
des côtes maritimes. Ses œufs, au nombre de trois ou
quatre, sont d’un blanc bleuàtre ou verdâtre, ou d'un
blanc lavé de brun, devenant, comme pour les autres
espèces, d'un jaune roussâtre par l'incubation.
Grèbe castagneux (Podiceps minor). — Cette petite
espèce de Grèbe est sédentaire en France, du moins dans
un grand nombre de localités, et quand il en abandonne
d'autres, c'estpour se rendre simplement dansnos marais
et sur nos étangs du Midi. Il est ainsi à la fois sédentaire
et de passage dans plusieurs de nos départements méri-
dionaux. On le trouve partout en hiver, sur les fleuves,
les rivières, les lacs, les étangs, dans les marais et au
bord de la mer, Très vif, très actif, ses évolutions sur
l’eau sont fort amusantes ; il nage avec élégance en tour-
nant sa petite tête éveillée à droite et à gauche, puis
subitement d’un mouvement brusque disparait sous l’eau
pour reparaitre un peu plus loin et recommencer le
mème manège. Il parait encore plus agile que les autres
espèces de Grèbes tant qu'il se trouve dans son élément
de prédilection, mais son vol est lourd, pénible, oscil-
lant et de courte durée. En revanche, il court assez bien
sur la terre ferme. On le rencontre souvent près des
lieux habités, dans les petits cours d’eau qui coulent au
voisinage des fermes et des hameaux. Dans mes dépla-
cements de chasse en baie de Somme, pendant les mois
d'octobre et de novembre, je l'ai surpris maintes fois
en train de plonger, à basse mer, dans les eaux peu pro-
fondes du chenal qui passe devant la maison que j'habi-
(1) PL. enl. 404, fig. 2, adulte en plumage de noces, sous le
nom de Grèbe de l'Esclavonie; 942, jeune, sous celui de Pe/it
Grèbe.
(2) Gal. des Ois., pl. 281.
(8) Cat. Parzud. (1855), p. 18.
(4) Mém. Acad. Stockholm (1848).
tais. Je le voyais nager entre deux eaux et voler litté-
ralement dans le courant.
Le castagneux niche dans nos marais au milieu des
joncs et des roseaux. Son nid négligemment construit
consiste en un monceau d'herbes excavé au sommet et
posé à fleur d’eau, ordinairement assez éloigné des rives,
mais très peu caché. La ponte est de quatre ou cinq
œufs, de forme allongée et de teintes très variables sui-
vant le degré d'incubation, Lorsqu'ils viennent d'être
pondus, ils sont d’un blanc roussâtre.
Oiseaux inoffensifs, parure des lacs et des étangs,
chair immangeable, les Grèbes devraient trouver grâce
devant le fusil du chasseur, Hélas ! il n’en est rien; leur
beau plumage aux reflets satinés, au duvet fin et serré,
que la mode fait rechercher à l’égal d’une précieuse four-
rure, leur attire de cruelles disgrâces et devient la cause
de leur perte. En certains pays, où leur nombre tente la
cupidité, on leur fait une guerre sans merci, et c’est par
milliers qu’on expédie leurs peaux lustrées au négoce des
grandes villes. L'art du pelletier transforme toutes ces
dépouilles, pour la satisfaction d’une barbare élégance,
en manchons, palatines, toques, garnitures de robes et
de manteaux. Ainsi finissent, victimes innocentes de la
coquetterie féminine, les beaux Grèbes argentés, sei-
gneurs des eaux dormantes.
Magaud D'AUBUSSON.
a
DE L'HABILLEMENT CHEZ LES ANCIENS
(Suite.)
Alexandre le Grand, Galba, etc., portaient de ces
sortes de cuirasses: Caracalla aussi : « Il était très
faible contre la fatigue, et ne pouvait supporrte ni la
chaleur mile poids de l'armure; aussi portait-il des tu-
niques à manches, faites en forme de cuirasse, de sorte
qu'il semblait armé, sans être chargé d'une armure (Dion
Casius, Histoire romaine, LXX VIIT, 3). »
César, dans les Commentaires (De la guerre civile,
III, 44), dit : « Presque tous les soldats s'étaient fait des
tuniques ou des abris avec du feutre, des couvertures
ou des peaux, pour se garantir des traits, »
Dans son Commentaire sur Suélone, Isaac Casaubon
donne à peu près la recette dont se servaient les anciens
pour communiquer au feutre de lin où de laine cette im-
pénétrabilité qui le rendait propre à la confection des
armures : « Tous les anciens, dit-il, connurent l'usage
des cuirasses de lin et de laine; ces cuirasses se confec-
tionnaient en plongeant la substance dans du vinaigre
additionné de sel, et en l’y laissant macérer. Ensuite,
on en mettait l'un sur l’autre huit ou dix doubles, que
l’on ajustait et cousait. »
Un savant gr:c moderne, qui fut membre correspon-
dant de l’Académie des Inscriptions, M. Papadopoulo-
Vretos, a fait lui-même, en 184#, l’expérience indiquée
par Casaubon : « J'ai fait macérer, ditil, du lin écru
dans du vinaigre saturé de sel; je l’ai foulé, et j'en ai
obtenu un feutre doué d'une force de résistance com-
parable à celle de la fameuse armure de Conrad de
Montferrat (Voyez Lin.), puisque ni la pointe des épées ni
les balles des armes à feu ne peuvent la percer (1). »
(1) Mém. de l'Ac.des Insc. et B.-lettres, Le série, 1844, p. 339,
180
Lièvre. — Nous voyons dans Pline qu'on avait
aussi essayé de faire des étoffes avec le poil de lièvre
(VIII, 81); « mais, au toucher, dit-il, elles ne sont pas
aussi douces qu'est la fourrure sur le dos de l'animal et
elles manquent de solidité, à cause du peu de longueur
du poil ». É
Lin. — Après une foule d’indications sur l'usage du
lin, l'époque de ses semuilles, de sa récolte, etc., etc.,
Pline dit (liv. XIX, 5) : « On a essayé aussi de teindre
le lin et de lui faire prendre les folles couleurs de nos
vêtements. Cet essai s’est fait d'abord dans la flotte
d'Alexandre le Grand, qui naviguait sur le fleuve Indus :
ses généraux et ses officiers, dans une certaine lutte,
distinguérent leurs vaisseaux par la diversité des cou-
leurs, et les rivages s'étonnèrent quand les vents en-
flérent ces voiles de nuances variées. Cléopâtre accom-
pagna Marc-Antoine à Actium avec une voile de pourpre,
et elle s'enfuit avec la même voile; c'était la marque
distinctive du vaisseau commandant. »
(Chap. 6.) « Le lin était en éstime dès le temps de la
guerre de Troie; car pourquoi ne figurerait-il pas dans
les combats, puisqu'il figure dans les naufrages? Cepen-
dant Homère témoigne que peu de guerriers portaient
des cuirasses de lin (1). »
C'est ici le lieu de parler des cuirasses de lin, comme
j'ai parlé plus haut de celles de feutre de laine.
Homère, dans son Iliade (chant IT, vers 529 et sq.),
donne à Ajax une cuirasse de lin : « Les Locriens, dit-il,
avaient à leur tête le rapide Ajax, fils d'Oilée. Il était loin
d'avoir la haute stature d'Ajax Télamonien; cependant,
malgré la petitesse de son corps, couvert d’une cuirasse
de lin Quobwprt), sa lance l'avait illustré parmi les Thes-
saliens et les Grecs. » :
Il dit aussi d'Amphius ([liade, II, v. 830) : « (les guer-
riers d’Adraste) commandés par Adraste et par Amphius,
vêtu d’une cuirasse de lin... ».
Au vi* siecle avant notre ère, les Grecs se servaient
beaucoup de cette cuirasse, comme l'indique le passage
suivant du poète Alcée, cité par Athénée : « Ma vaste
demeure est toute resplendissante d’airain; le toit est
même orné des instruments de Mars, de casques d'ai-
rain brillant, de lances, de... ; il y a aussi des cuirasses
de lin nouveau, des boucliers creux, jetés par l'ennemi
dans sa fuite (Banquet des savants. Liv. XIV, ch. 6) ».
Dans sa Cyropédie (iv. VI, ch. 1v, $ 2), Xénophon
nous dit : « Conime Abradatas allait revêtir sa cuirasse
de lin (rov xvoëv Gwpaua), ARMURE QUI ÉTAIT GÉNÉRALE-
MENT EN USAGE CHEZ LES PERSES, Panthée Jui apporta
un casque d’or. »
Dans son Anabase (IV, 3, 15), il dit encore : « Les
Chalybes, la plus belliqueuse des nations dont nous
avions traversé le territoire, en vinrent aux mains avec
nous, Ils portaient des cuirasses de lin qui descendaient
jusqu'au bas-ventre. »
Plutarque parle aussi de cette armure. Il nous dit que
le jour de la célebre bataille d'Arbelles (331 avant Jésus-
Christ) c'est-à-dire près d'un siècle après la mort de
Xénophon), Alexandre le Grand revêtit une double cui-
rasse de lin trouvée dans le butin après la bataille d'Yssus
(Vie d'Alexandre, ch. XxXx1).
Les Egyptiens se servaient également de ces armes
défensives: Hérodote décrit ainsi celle que le roi Amasis
avait envoyée en présent aux Lacédémoniens et qui fut
(1) Voyez Iliade, chant II, vers 135.
LE NATURALISTE
si célèbre dans l'antiquité : « Cette cuirasse était de lin,
mais ornée d’un grand nombre de figures d'animaux tis-
sées en or et en coton. Chaque fil de cette cuirasse
mérite en particulier notre admiration : quoique très
menus, ces fils sont cependant composés chacun de
365 autres fils, tous très distincts. Telle est aussi une
autre cuirasse dont Amasis fit don à Minerve de Linde
(Histoire, ITT, 47). »
Pline parle de cette armure au livre XIX, ch. 2
«.… En effet, avec le lin nous ne dressons pas moins de
pièges aux animaux qu'à nous-mêmes. Mais les toiles de
Cumes arrêtent les sanglicrs, et ces filets sont même
plus puissants que le tranchant du fer. Nous en avons
vu de tellement fins, qu'avec leurs cordes is passaient
par l'anneau qu'on a au doigt, et qu'un seul homme por-
tait de quoi enceindre une forêt, comme a fait, il va
peu de temps, Julius Lupus, qui est mort préfet d'Egypte:
et cela n’est pas extrêmement merveilleux. Ce qui l'est,
c'est que chaque fil était composé de 150 brins. On s'en
étonnera, si l'on ignore la euirasse d'un ancien roi
d'Egypte, nommé Amasis, que l’on montre dans l'ile de
Rhodes, au temple de Minerve, dont chaque fil est com-
posé de 365 brins. Mulianus, trois fois consul, a récem-
ment publié à Rome qu'il avait lui-même vérifié le fait,
et qu'il ne reste presque plus rien de cette cuirasse,
grâce au dommage causé par les vérifications de ce genre. »
Et le public manifeste sa mauvaise humeur quand les
gardiens des musées défendent expressément de toucher
à quoi que ce soit!
Dans le moyen-âge, cette arme défensive fut générale-
ment employée, et l'on cite surtout celle que portait
Conrad de Montferrat, beau-père de l'empereur Isaac
l'Ange, et dont la solidité était si extraordinaire qu'au-
cune arme ne pouvait la percer, Voici comment en parle
Nicetas Acominatus dans son Histoire d'Isaac l'Ange,
Liv. I, ch.8 : « Pour lui (le marquis de Montferrat), 1l com-
battait ce jour-là sans bouclier; mais il était revêtu, en
guise de cuirasse, d’une étoffe de lin trempée dans du
vinaigre et suffisamment salée. Cette étoffe avait acquis,
par le foulage dans le vinaigre saturé de sel, une telle
farce de résistance, que rien n’était plus propre à ga-
rantir des traits. Elle formait, d'ailleurs, dix-huit doubles,
que l’on pouvait compter. »
Ce dernier paragraphe, dont s'était emparé Casaubon,
comme on l'a vu plus haut, explique pleinement com-
ment on préparait les cuirasses de lin.
Le moyen est si efficace, si simple et si peu couteux,
qu'on comprend parfaitement pourquoi on ne l'emploie
pas aujourd’hui, malgré des expériences récentes et réi-
térées faites avec succès devant M. QUI-DE-DROIT.
Loutre, martre, hermine, renard, etc. — Ces
peaux servirent d'abord aux Gaulois, aux Germains, etc.
Le climat relativement chaud de la Grèce et de l'Italie
permettait aux habitants de ces contrées de se servir
presque exclusivement d’étoffes de laine ou de coton;
mais, plus tard, le luxe sut s’accommoder de ces four-
rures et les utiliser de diverses façons.
Martial, Pline, Justin, Sénèque, etc., parlent souvent
des peaux d’hermine, de martre, ete., dont les Scythes
et plusieurs autres peuples se fabriquaient des vêtements.
(A suivre.) E. SANTINI DE RIOLS.
Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17.
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29e ANNÉE
2e SÉRIE — N° 323
L'HISTOIRE NATURELLE & L'ETHNOGRAPAIE
À L'EXPOSITION UNIVERSELLE
LES COLONIES FRANÇAISES AU TROCADÉRO ;
L'EXPOSITION D'ANTHROPOLOGIE
Nous commencerons notre visite par l'Algérie, et,
avant tout, remarquons que, tandis que dans les pavil-
lons étrangers nous avions été, en général, très bien
accueillis, il n'eu a pas été précisément de même dans
la partie francaise de l'Exposition. D'une part, en effet,
malgré le règlement, ces pavillons n’ouvrent, en général,
que vers 11 heures; de sorte que, à cause de la foule qui
les envahit l'après-midi, il est à peu près impossible d'y
faire des études sérieuses. D'autre part, en ce qui con-
cerne les dessins, M. Hugard, qui avait bien voulu
se charger de cette partie de notre travail, a eu toutes
les peines du monde à lutter contre la mauvaise volonté
des surveillants. Il semble cependant qu'une publication
de ce genre devrait être vue avec bienveillance par
l'administration, car elle tend à augmenter l'intérêt
qui s’attache à nos colonies, en faisant connaitre leurs
produits.
Au point de vue de l'histoire naturelle, il convient de
remarquer dans l'exposition de l'Algérie des plants de
ramie (Bæhmeria nivea), urticacée cultivée comme
plante textile; de magnifiques troncs de thuya, des cè-
dres de l'Atlas, du jute et de l’alfa (stipa tenacissima),
graminée qu'on emploie dans la fabrication du papier. I]
y a aussi une collection minéralogique et géologique,mal-
heureusement classée d’une facon insuflisante; dans le
voisinage, de beaux échantillons de sel gemme et de
marbre. L'ethnographie est représentée par des armes,
des selles en bois de laurier-rose, des instruments de
musique. Les pièces les plus intéressantes sont celles
qui ont été rapportées d'Insalah par la mission Flamant.
On regardera aussi les portraits d'indigènes et les vues
de pays pendues aux murs. Enfin, on descendra au rez-
de-chaussée pour voir l'exposition des antiquités ro-
maines. La « rue d'Alger » est une bonne reconstitution
d'une voie urbaine d'Orient, avec ses maisons en en-
corbellement et ses boutiques étroites ouvertes au pas-
sant.
Nous commencerons la visite de l'exposition tunisienne
par la grande cour intérieure. Nous nous arréterons de-
vant les échoppes des fabricants de nattes, des ferblan-
tiers, des chaudronniere, des potiers ( et surtout devant
la grande tente où se fabriquent de magnifiques tapis
sur un métier primitif.) La « rue de Tunis » a peut-
être un caractère de vérité plus grand encore que la
«rue d'Alger ». Remarquons les types, les uns sémiti-
ques, les autres aryens, des indigènes.
Cette partie de l'Afrique a, en effet, été le rendez-vous
des races les plus diverses. C’est ce que prouve l’exposi-"
tion des antiquités placée à l'intérieur du pavillon.
Voici les apports des Carthaginoïs, avec leurs lampes en
terre de la forme la plus simple,constituée par une feuille
de poterie repliée en triangle sur les côtés, leurs bijoux
et les modèles de leurs tombeaux. A cette couche phéni-
cienne sont venues se superposer les civilisations ro-
maine, arabe et enfin française ; mais le fond de la popu-
lation, dite berber ou numide, est resté intact sous ces
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
15 AOÛT 1900
apports si divers. Occupant tout le nord de l'Afrique, de
l'Égypte aux Canaries, les Berbers se distinguent des
Arabes notamment parce qu'ils sont agriculteurs et non
pasteurs ; ils sont peut-être identiques à l’une des races
qui vivaient en Europe pendant l’âge de la pierre.
L'histoire naturelle est représentée, au pavillon de la
Tunisie, par une collection de mammifères et d'oiseaux
empaillés, par des vitrines d'insectes, des poissons, des
coquillages, des reptiles et divers minéraux. Parmi les
insectes on remarquera le fameux criquet voyageur et le
scarabée sacré, et parmi les minéraux, des échantillons
de phosphates, qui proviennent de la décomposition de
matières organiques. On y rencontre, en eflet, de nom-
breux fossiles. Il y a également dans une vitrine voi-
sine des minerais de cuivre et de zinc.
L'exposition du Sénégal nous présente, à l'extérieur,
une assez jolie collection ethnographique, et à l’intérieur
du pavillon un buisson chargé d'oiseaux avec leurs nids,
dont quelques-uns sont de construction très curieuse.
Quant aux pavillons de l'Inde francaise,qui viennent en-
suite, ils étaient encore loin d’être achevés au moment
de notre passage.
Nous continuons notre visite par le Dahomey; à l'exté-
Fig. 1. — Siège en bois sculpté d’une seule pièce, de Guézo,
roi d'Abomey.
rieur nous {trouvons une maison de pêcheur posée sur
pilotis, des cases ornées de fétiches et de grandes
pirogues creusées dans un tronc d'arbre. En haut, dans
les vitrines, notons un grand sabre pour les sacrifices
humains, à lame artistement contournée et sculptée, des
fétiches en argent d'un effet réellement artistique, la
couronne et la tiare du roi Toffa, ornées de fleurs de lis
d’or, de fabrication vraisemblablement européenne.Celle
de Behanzin, en perles de verre, à au moins un cachet
réellement original, grâce aux petits oiseaux placés au
pourtour. Tout auprès se trouve un curieux modele de
184
LE NATURALISTE
SALE ELEC à 2 2 ES MN, LI TT SE
bateau de guerre européen, en cuivre repoussé, avec
deux canons, un mât, une cheminée et deux matelots.
C’est là un curieux spécimen de l'impression produite sur
les indigènes par la vue des produits de notre civilisation.
Les tambours, les tamtams, les guitares et surtout les
superbes sièges en bois sculpté d’une seule pièce retien-
dront aussi notre attention. Nous représentons (fig. {)
celui de Guézo, huitième roi d'Abomey, qui repose sur
quatre crânes humains. Dans la vitrine du milieu, des
bracelets d’or ouverts rappellent certains modèles de
l'âge du bronze d'Europe. On y remarque également des
défenses d’éléphants sculptées en spirale. Sur un des
côtés de la même salle se trouvent de grands fétiches en
cuivre repoussé représentant des oiseaux gigantesques,
un léopard dévorant une gazelle(fig.2 et 3).Ils'sont traités
avec un art primitif d'un effet tout à fait curieux. Citons
aussi à l'extérieur de cette exposition la case fétiche ren-
fermant un arbre couvert d'oiseaux destructeurs de ser-
pents.
Dans l’exposition du Grand-Bassam,
nous sommes
Fig. 2.— Fétiches dahoméens.
attirés tout d’abord par la vitrine du milieu qui donne.
une idée tres élevée de l’art indigène. Nous y trouvons
en effet des bijoux en cuivre représentant des scorpions,
des tortues et divers motifs ornementaux. Parmi les
bijoux en or remarquons un bracelet contourné en
spirale et rappelant les torques dont s'ornaient nos
ancêtres les Gaulois. D’autres bijoux sont en fil d’or.
Remarquons aussi le tronc du roi Thiassalé, représentant
un léopard, et les idoles, Parmi celles-ci, l'une est digne
d'intérêt. C’est une tête en bois sculpté, qui porte
un casque arrondi et une armure mentonnière à
maillons serrés montant jusqu’au nez. On a trouvé des
figures semblables, en pied, aux armures complètes, dans
le Bénin. Elles attestent la hauteur à laquelle s'était élevé
l’art des armuriers et des fondeurs dans les siècles passés.
Ces figures du Bénin étaient des bas-reliefs en bronze et
ornaient les murs du palais royal à l’arrivée des
Anglais. À côté de la tête que nous représentons on
remarque une petite idole féminine à seins pendants,
couverte de tatouages, et en bas une idole à face tout-à-
fait simienne.
Dans une petite serre placée au milieu du pavillon
végètent du cacao, du café et du poivre; au-dessus on
trouve des noix de coco en voie de germination. Enfin les
murs extérieurs du pavillon portent d’intéressantes photo-
graphies d’indigènes.
L’ethnographie est très bien représentée au pavillon de
la Guinée Française. Nous y trouvons en effet toute une
collection d'instruments de musique et d'idoles en bois
sculpté, des peignes dont le manche représente une
femme, des métiers à tisser, des sabres d'exécution. On
remarquera sur une des parois le costume de féticheur,
orné de plaquettes de fer blanc de formes variées;
Fig. 3. — Fétiches dahoméens.
au-dessus se trouve un masque en bois; dessous,
deux tambours en forme de sablier et des flûtes;
sur les côtés, des guitares à une seule corde (fig. ). On
comparera cet attirail à celui du chainane sibérien que
nous avons décrit précédemment. Ce sont toujours les
mêmes procédés tintamarresques qui servent à frapper
les âmes naives.
Traversons maintenant l'allée transversale et arrivons
au palais des doriamas, où sont réunies les ‘colonies de
moindre importance. Voyons d'abord Mayotte et les
Comor esavec la vue d’une distillerie de canne à sucre. Sur
les côtés, des feuilles et des fruits de cacao. L'Océanie
nous montre la pêche des huitres perlières par des plon-
geurs indigènes. Au loin on voit déferler la mer sur le
récif de corail qui entoure toutes les îles de cette région.
Remarquons aussi les modèles de pirogues doubles ou à
balanciers en usage dans ces mers, les parures et les
portraits des Polynésiens. Cette belle race, de haute sta-
ture et de teint doré, est malheureusement en train de.
disparaitre partout où elle entre en contact avec la civili=
sation européenne. Elle appartient au tronc mongolique,
mais se rapproche par plusieurs c car actères DRASS à la 1
LE NATURALISTE 185
fois des Européens et des Indiens de l'Amérique du Sud
(Patagons). Il est possible que la partie la plus méridio-
nale de ce continent ait été peuplée par des immigrations
polynésiennes.
Avec Saint-Pierre et Miquelon nous assistons à la pêche
et à la préparation des morues et nous voyons les modèles
de bateaux employés dans ces parages. Nous revenons
au pays du soleil pour visiter la côte des Somalis. Le
panorama du désert où on construit le chemin de fer est
un des mieux réussis. Voici une civette empaillée dont
un indigène est en train de recueillir le viverreum, usité
en parfumerie. Voici les remarquables vanneries des
Danakils, leurs armes, leurs bracelets d'ivoire, et dans
un coin deux curieuses caricatures abyssines représen-
tant des dames européennes en chapeaux à fleurs et
armées de l’ombrelle. Enfin, dans le vestibule nous
voyons les mannequins de trois guerriers abyssins, dont
un général armé du bouclier et du sabre, Il y a, en
outre, une fileuse. Le type de tous ces indigènes est
remarquable par sa finesse, qui montre qu'il s’agit d'une
race toute différente des nègres.
Dans les pavillons du Tonkin il convient de regarder
une collection de statuettes en bois représentant avec
beaucoup de vérité des types populaires, des lutteurs, un
souffleur de sarbacane, un tireur d'arc, un porteur de
lanterne, etc. Arrétons-nous aussi dans les galeries, où
nous voyons des indigènes se livrer à l’exercice de leur
profession; il y a là des brodeurs et des peintres d’une
habileté surprenante.
Le pavillon de l’Indo-Chine nous présente un curieux
édenté, le pangolin, couvert de grandes écailles; on ne
voit Jamais cet animal dans les collections européennes.
De magnifiques écailles de tortue de mer, des minerais
de fer et de plomb argentifère attirent aussi notre regard.
Au dehors se trouvent des modèles d'habitations et de
pagodes et surtout trois curieuses voitures, dont l’une,
à roues pleines, pour porter les lourds fardeaux ; celle
à capote est destinée aux longs voyages et est trainée
par des buffles. Dans un autre pavillon nous trouvons
des bâts d’éléphants, des modèles de pièges à oiseaux et
à tigres et des engins de pêche. Notons les caractères de
la race annamite avec ses pommettes saillantes, sa
bouche fendue en coup de sabre, et sa taille plus petite
que celle des Chinois, mais plus élevée que celle des Ja-
ponais.
Montons maintenant à l'exposition du Cambodge. Au-
tour de la pagode sont de curieuses maisons sur pilotis,
remarquables par leurs petites dimensions. Quant à la
pagode, elle mérite d’être visitée en son entier, car elle
reproduit le type des monuments khmers taillés dans le
roc, avec de grandes figures qui se détachent à peine de
la pierre. À noter les relations de cette architecture avec
celle des temples hypogées de l'Égypte. Les Khmers sont
venus de l'Inde au Cambodge en 445 avant notre ère; ils
ont du reste subi une décadence assez rapide et les mo-
numents qu'ils ont élevés ne sont plus que des ruines. À
l'entrée de la partie inférieure de la pagode se trouve
l'exposition de la mission Pavie. Il y a là de remarquables
collections d'oiseaux et d'insectes, ainsi que les costumes
portés par les divers peuples de l’Indo-Chine.
La Nouvelle-Calédonie offrait, au moment de notre pas-
sage, un magnifique herbier accompagné d’une collection
de graines. Dans les vitrines, il faut remarquer les haches
en pierres polies; l’une d'elles est emmanchée et peut
- nous donner une idée du mode d'utilisation des instru-
ments de l’époque néolithique. Nous remarquons aussi les
minerais de nickel et de cobalt, le soufre natif, l'arbeste
et le quartz aurifère. A l'extérieur du pavillon se trouvent
des fétiches et des casse-tête canaques en bois.
Entrons à l’exposition du ministère des colonies, Nous
trouverons au fond un joli palmarium et, dans une pe-
tite serre voisine, nombre de plantes intéressantes, quin-
quina, arbre à caoutchouc (Landolphia hendelotii D. C.),
cannellier, erythroxylon coca, acajou, caféier, cocotier,
On a rarement occasion de voir végéter ces plantes à
Paris. Dans un recoin voisin de cette serre se trouvent
des armes du Haut-Oubangui, et de curieux couteaux de
jet à trois lames semi-lunaires, À noter aussi une collec-
tion de casse-tête canaques.
Le petit pavillon de la Guadeloupe nous offre une jolie
exposition zoologique : poissons, tortues de mer, crus-
tacés, oiseaux-mouches, coquillages, insectes, et de cu-
rieuses antiquités caraibes, Remarquons surtout les
armes en pierre dont certaines sont si semblables à celles
du néolithique d'Europe.
Le pavillon de la Martinique renferme de curieux
poissons, entre autres le requin-marteau, et, sous un
globe, un charmantgroupe d'oiseaux-mouches,avecleurs
nids et leurs œufs.
A la Guyane, nous trouvons de remarquables cadres
d'insectes, papillons et coléoptères de toute beauté, arai-
gnées gigantesques; des quartz et des pyrites aurifères,
de l'or natif;des armes et des instruments des indigènes;
enfin, de belles vitrines d'oiseaux, et un congouar em-
paillé.
Enfin, à la Réunion, nous admirons de belles essences
forestières, des bois de teck et de camphre, et à l’exté-
rieur nous jetons un regard curieux sur le filanzane de
la reine Ranavalo qui fut, comme on sait, internée dans
cette ile. À
Remontons maintenant vers le palais du Trocadéro
{aile Ouest) et, pour nous reposer de tout cet exotisme,
montons à l'exposition d'anthropologie, assez mal logée
dans la galerie du premier étage. Il faut traverser tout
le Musée d’ethnographie pour y parvenir. Telle qu’elle
est, cette exposition fait le plus grand honneur à ses
organisateurs. Elle nous donne, en effet, un tableau com-
plet de l’histoire de l'humanité depuis l’âge de la pierre
taillée et même depuis l’époque thenaysienne jusqu’à
l’époque mérovingienne en passant par les époques de la
pierre polie et du bronze, Parmi les pièces les plus
remarquables il faut citer tout d’abord les collections
recueillies par M. Piette dans les cavernes du sud de la
France. Voici, dans la vitrine de droite en entrant, les
cailloux coloriés du Mas d’Azil, encore sujets à bien des
controverses, et surtout les étonnantes statuettes en
ivoire représentant des femmes aux formes plantureuses.
Tout à côté se trouve une collection de têtes dechevaux,
frappantes de vérité, taillées dans des plaquettes d'os. Il
est tout à fait extraordinaire de voir que l'une de ces
plaquettes représente le squelette d'une tête de cheval.
On sait que c'est une des races les plus anciennes
d'Europe qui possédait ces remarquables dispositions
artistiques. Elles sont allées en s’affaiblissant chez leurs
descendants, comme le prouvent les statues informes
dont les moulages se trouvent à côté de cette vitrine, Ces
statues, trouvées également dans le midi de la France,
doivent être considérées comme des copies maladroites
de figures hiératiques. À noter dans le même ordre
d'idées les moulages de gravures relevées sur des dol-
186
ns 5m en, —
mens ou dans des grottes. Dans le fond de la galerie à
gauche il faut voir, dans une vitrine, une collection d’ar-
mes et d'instruments en pierre recueillie par M. À. de
Mortillet dans les environs de Vérone et à côté des pie-
ces fausses, d’une fort curieuse facture, que les ouvriers
chargés des fouilles fabriquaient et cherchaient à reven-
dre, Près de là se trouve une collection provenant de
Roumanie ; elle nous montre à côté d'instruments néoli-
thiques semblables à ceux de l'Europe occidentale des
poteries peintes qui semblent dénoter une influence orien-
tale.
Nous ne saurions trop engager à visiter cette intéres-
sante exposition. Il y a là des pièces des plus instructives
provenant de collections privées et qu'on n'aura plus
occasion de revoir réunies. Redescendons maintenant
et ressortons par une des deux portes qui traversent de
part en part le palais du Trocadéro, et montons l'escalier
qu conduit à l'exposition de Madagascar. Nous trouvons
à l'extérieur un curieux orchestre malgache jouant de la
musique européenne sous la direction d'un chef indi-
gène. Ces hommes appartiennent la plupart au type
nègre de l'ile;ils sont tout au plus métissés avec les
Hovas ou Houves de race malaise, qui occupent le pla-
teau de l’Imérina. Le teint plus clair et le nez plus fin de
quelques-uns d’entre eux semblent prouver ce métissage.
Si nous faisons le tour de cette exposition, nous trou-
vons de remarquables produits de l’industrie indigène,
sous forme de sculptures sur bois, de chaises faites d’un
seul morceau, de costumes et d'instruments humains.
L'histoire naturelle nous retiendra davantage, avec ses
cheiromys, lémurs, indris et propithecus empaillés. Par
une heureuse innovation, une carte indiquela répartition,
très limitée d’ailleurs, de chacun de ces lémuriens, Il
serait à désirer que le gouvernement prit des mesures
pour empêcher la destruction de ces espèces si intéres-
santes, qui représentent un stade par lequel ont passé les
singes et les ancêtres de l'espèce humaine, Très répan-
dus autrefois, les lémuriens se trouvent cantonnés main-
tenant à Madagascar et dans le sud-est de l'Asie. Ces
deux régions seraient, d'après Haeckel, les restes d'un
vaste continent effondré, qu'il a nommé la Lémurie.
Il faut noter aussi dans cette galerie des vitrines d’in-
sectes et de curieux nids d'oiseaux précédés d’une sorte
de corridor vertical, s’ouvrant par en bas, et tressé
d'une facon très délicate, Le nid est, du reste, couvert et,
avec son appendice, il a la forme d’un jambon suspendu
par sa partie la plus large, Au premier étage nous trou-
vons des minerais et des bois de diverses natures.
Nous continuons maintenant en passant entre l’aile
occidentale du Trocadéro et le panorama du Congo, et
uous arrivons au pavillon du Congo français. A l’extérieur
se trouvent des pièces de bois et un modèle de hutte,
qu'on regrette de voir inhabitée, Dans le pavillon lui-
même, il y a de remarquables ivoires sculptés en spi-
rale, des fétiches en bois à forme humaine, enfin un sque-
lette de jeune chimpanzé.
D' LALOY,
LE NATURALISTE
mn De
LA ELOUTRE
La premiere loutre que nous avons vue, dans notre
enfance, émergeait sa tête au milieu des roseaux, dans
la rivière de l'Aïlette, qui se jette dans l'Oise près de Mo-
nicamp. Cette rivière, parallèle à l'Aisne, reçoit, dans son
cours, des petits affluents ou rùs, dont l’un est le rü des.
Bièvres, biber, castor en allemand.
Y avait-il vraiment des castors, dans cette rivière, à
l’époque gauloise? C’est possible, mais nous croyons plu-
tôt qu'il s'agissait de loutres. Jadis l’Aïlette était riche
en poissons, piscocitate uberrima, dit un vieux moine de
l'abbaye de Nogent : de là la fréquence des loutres dans
ces parages; de là aussi la fréquence des buses, qui dis-
putent les poissons à la loutre. Or, la buse se disait ja-
dis un aile ou ailette dans le pays, et, dans notre enfance,
on disait: Oh! viens voir, j'ai découvert un nid d’aile,
pour dire un nid de buse; de là le nom de la rivière de
l’Aïlette, qui se trouve encore écrit la Lette dans cer-
taines cartes de l'état-major, et notamment dans Ja
feuille de Reims; on l’a corrigée dans Ja feuille de Sois-
sons; je ne sais si on a fait la correction dans les deux
autres feuilles, au nord des précédentes. 1/Aïlette estenef-
fet une rivière assez flexueuse, à la limite de ces quatre
feuilles, de sorte qu'on a pu faire la correction sur l’une
d'elles sans la faire dans les trois autres. Aïletteest l’abré-
viation d'aiglette, aquils, petit aigle, la buse.
Dans deux intéressants articles, parus dans le supplé-
ment du Gaulois, M. Georges Pradel a décrit, en chas-
seur, les mœurs de la loutre et les moyens de s’en em-
parer. C'est un animal pesant une vingtaine de livres,
quand il est bien développé, qui fait son terrier sous l’eau
à quelques centimètres au-dessous de sa surface, au mi-
lieu des racines des arbres du rivage, notamment des
vieux saules. Ce terrier s'appelle sa catiche.
Une personne qui a le nez fin, en se promenant sur les
bords de la rivière, ne tarde pas à sentir le poisson
pourri. Ce sont les exhalaisons émanées de la caliche de
la loutre, Il n’y a plus qu'à boucher l'entrée, qui donne
sous l’eau, avec une tarière. Alors, dit M. Pradel, on
creuse un trou, de 2 à 3 mètres de profondeur, jusqu’à ce
qu'on soit arrivé au terrier, d’où sort cette odeur fétide,
en le faisant communiquer par une rigole avec la rivière.
L'eau inonde le terrier, de sorte que la pauvre bête est
bien obligée d'en sortir, afin de ne pasêtre noyée; car les
animaux plongeurs, comme la loutre, doivent venir de
temps en temps renouveler leur provision d'air à la
surface de l’eau pour ne pas être asphyxiés par les gaz
provenant deleur propre respiration. Les loutres en effet
ont des poumons, et non pas des branchies comme les
poissons, qui passent toute leur vie dans l'eau, Une fois la
loutre sortie de sa catiche, dans le trou plein d’eau que l’on
a creusé, on n’a plus qu'à la prendre avec de fortes pinces
ou au folet, pour ne pas être mordu ni griffé, car c'est,
un animal courageux qui fait de cruelles morsures:
Cet animal est très méchant :
Quand on l'attaque, il se défend.
La loutre doit être prise avec ses petits, car ceux-ci M
s’apprivoisent très facilement. C’est l'affaire d’une hui-
taine de jours, dit un autre chasseur, M. de la Ruë. La
eux.
LE NATURALISTE 187
loutre est un animal fort utile à apprivoiser, car elle rap-
porte le poisson, absolument comme un chien de chasse
rapporte le gibier. Capturée jeune, dit M. Georges Pra-
del, à l’âge de 1 ou 2 mois, une loutre est plus facile en-
core à apprivoiser qu'un chat. Elle devient très cares-
sante ; et le nom de Mirza, une loutre que M. de la Ruë
avait apprivoisée à Corbeil, est resté légendaire. Elle pê-
chait merveilleusement. À sa mort, son propriétaire l’a
pleurée à chaudes larmes, comme nous pleurions la
mort de nos chiens de chasse, quand nous étions petits.
La mort de l’un d'eux nous a fait tant de chagrin que
nous avons juré de ne plus en avoir que quand nous se-
rions très vieux et que nous aurions chance de mourir
avant lui!
La loutre allaite ses petits, comme une chatte, pendant
2 mois seulement, vers mars ou avril. Le frai de poisson
au moment du sevrage est la nourriture préférée des
jeunes. Ensuite, ils se livrent avec passion à la chasse
aux grenouilles, tandis que la mère s'attaque furieuse-
ment aux poissons. Il va sans dire qu’on attrape la loutre
au piège ; mais il est plus intéressant de la chasser au
fusil, pour un chasseur, car cela exige plus d'adresse que
la pêche. Nous avons connu un chasseur enragé qui tirait
le poisson à balle, dans les étangs !
Voici, à ce propos, le curieux coup de fusil qu'il a fait
presque sous nos yeux, sous les yeux d’un de nos pa-
rents, qui en à été témoin, On sait que le rayon visuel
éprouve une très forte déviation dans l’eau; de sorte que,
pour tirer le poisson à balle, il faut le viser, non pas où
on le voit, mais là où il est réellement; car la balle
n'éprouve pas une déviation, dans l’eau, aussi forte que
la lumière, passant de l’air dans un autre milieu réfrin-
gent. Or donc, notre chasseur s’exercait àtirer le poisson
dans un bassin peu profond et cimenté au fond, Il tire son
coup de fusil, 11 voit le poisson mort remonter à la sur-
face, et tout à coup un canard sauvage tomber dans l’eau,
sur le poisson !
Au premier abord, il se figura que l'oiseau voulait lui
voler son gibier; mais il ne tarda pas à s’apercevoir qu'il
était mort. Il l'avait tué par ricochet. La balle, après
avoir traversé le corps de la carpe comme du papier, avait
traversé le fond du bassin, puis était remontée en l'air
avec une nouvelle force, pour frapper au hasard un mal-
heureux canard sauvage qui planait au-dessus du bassin,
en regardant le chasseur tirer ses poissons à balle, dans
le bassin du parc de son château. Ce fait extraordinaire
ne doit pas être fréquent, et il serait fâcheux que son
souvenir se perdit avec nous. Les deux témoins de ce sin-
gulier coup double sont morts, et le chasseur était
M. Adrien de Roucy, propriétaire du château de Morlin-
court, près de Noyon. On voit que nous mettons les points
sur les i. Du reste, cela peut arriver à tout le monde, il n’y
a qu’à avoir un peu de veine, En un rien de temps, on a
ainsi conquis son déjeuner à peu de frais : une carpe de
moyenne grosseur et un magnifique collier-vert ou hal-
bran.
Pour en revenir à nos loutres, elles s’apprivoisent si
bien, qu'elles accourent d’elles-mêmes au devant de leur
maitre ; elles se montrent empressées de répondre à leur
nom, montent sur son dos, se cachent dans sa poitrine
et sortent la tête de dessous ses vêtements pour lui don-
ner une caresse. Elles rapportent, font des culbutes,
grimpent sur le dos des chiens et se font porter par
Dr BouGox.
À PROPOS DE L'ARTICLE :
Curiosités botaniques
Dans le numéro du Nafuraliste (15 juillet 1900), je lis, sous
le titre « Curiosités botaniques », un article du D' Bou-
gon relatif à une forme en grappe qui aurait été obser-
vée jadis sur les inflorescences des Sambucus Nigra et
Ebulus. Je n'ai, en ce qui me concerne, et pour le moment du
moins, aucune observation personnelle à relater à ce sujet. —
Toutefois, si la forme en corymbe est la plus ordinairement
observée chez les espèces de Sambucus, elle n’est pas de règle
absolue dans ce genre. L'inflorescence en grappe se rencontre
normalement chez une espèce à fruits rouge corail, qui croit
spontanément dans les montagnes de France, notamment en
Auvergne et dans les Pyrénées, et dont le nom spécifique est tiré
de cette disposition même des fruits : S. racemosa. À défaut de
spécimen vivant où d'échantillon d’herbier, on peut voir une
belle figure coloriée de cette espèce dans les Zcones Nantarum
de Jacquin, tome I, planche 59.
La même plante est figurée dans :
1. Nouveau Duhamel, tome I, planche 56.
2. Schkuhr, Botanisches Handbuch, fig. 83.
3. Guimpel, Willdenow et Hayne. Abbildung der deulschen
Holzarten (Berlin, 1815-1820), planche 35.
4. Reichenbach, Icones Floræ germanicæ, tome XIT, planche 730.
La même disposition se retroure dans Sambucus Pubens, de
Michaux (Michaux, Flora borealis americana, tome T, page 181),
arbuste très voisin du précédent, mais qui est originaire des
montagnes d'Amérique du Nord, de la Caroline jusqu’au Canada.
— Il en serait de même d’une espèce chinoise (S. ebuloïides) qui
croit aux environs de Canton.
Quoi qu'il en soit, si la forme constatée autrefois pouvait être
positivement observée de nos jours, le cas serait très intéressant
à étudier : Les modifications subies par linflorescence des
diverses espèces du genre, l'observation des formes de retour
vers un type différent, pourraient peut-être apporter quelque
lumière sur le problème encore si obscur de l’origine des
espèces.
D: J.-MaARCEL JEANTY,
Directeur du Jardin botanique de Bordeaux.
ES
CONGRÈS GÉOLOGIQUE INTERNATIONAL DE 1900
Le comité d'organisation du congrès géologique inter-
national, qui vient de s'ouvrir sous la présidence de
M. Albert Gaudry, a publié un guide des excur-
sions qui seront dirigées en France, sous ses auspices,
par les géologues les plus autorisés.
Pour faire les honneurs de notre pays à leurs invités
étrangers, les savants français leur offrent une descrip-
tion de nos terrains et de nos paysages nationaux, sous
la forme d’un beau volume de 1032 pages, renfermant
372 figures intercalées dans le texte et accompagné de
25 planches et cartes, phototypies, lithogravures, chro-
molithographies. ù
Ce volume fournit, par le.nombre et le choix des con-
trées visitées, une description de tous les terrains du sol
francais. 11 s'adresse ainsi, non seulement aux excur-
sionnistes pour lesquels il a été écrit, mais à toutes les
bibliothèques, à tous ceux qui, à des titres divers, dési-
rent posséder un résumé des connaissances actuelles sur
la géologie de la France. Il comprend 25 notices dis-
tinctes, correspondant à autant de descriptions régio-
nales; et ces descriptions sont accompagnées d’itiné-
raires détaillés permettant au voyageur de faire 226
ournées d’excursions scientifiques en France; elles
188
LE NATURALISTE
sont le résultat de la collaboration de #3 géologues fran-
ais.
On trouvera dans ce volume le bassin de Paris avec
ses riches terrains fossilifères, les formations primaires
et secondaires du Boulonnais et de la Normandie, les
bassins tertiaires du Rhône, les volcans de la France
centrale, la curieuse région des causses et ses cavernes,
les exploitations houillères à ciel ouvert du centre de la
France, intéressantes à la fois pour l'ingénieur et le na-
turaliste.
Les divers massifs des Alpes, des Pyrénées y sont
décrits successivement; et des notices spéciales sont
consacrées à l’'Ardenne, à l’Aquitaine, à la Gironde, à
la Picardie, au Morvan, à la Mayenne, à la Bretagne, à
la Touraine, à la Montagne-Noire et à la Provence.
Faire avancer la science en faisant mieux connaitre et
mieux aimer la France, tel est le résultat que nous sou.
haitons à l'effort des géologues.
Ce guide est adressé franco à tous les membres du
congrès au prix de 10 francs, versés à M.Carez, trésorier
du congrès, 18, rue Hamelin, Paris, Il est vendu en li-
brairie au prix de 30 francs.
LA COQUE DU LEVANT
La famille des Menispermacées comprend des plantes
à fleurs unisexuées, généralement de couleur vert pâle, à
sépales et pétales semblables en apparence, disposées
en une ou plusieurs rangées, de trois ou quatre à chaque
rangée.
La Coque du Levant
Les étamines sont au nombre de six, insérées en face
des pétales ; l'ovaire est formé de trois carpelles libres
entre eux, contenant un seul ovule anatrope à l’état
adulte. À maturité, tous les ovules se transforment en
autant de drupes. Ces plantes croissent toutes dans les
régions tropicales et fournissent de nombreuses plantes |
vénéneuses; nous allons parler de l’une d'elles, l’Ana-
mirta Cocculus où Coque du Levant.
Cette hane de la famille des Menispermacées est de la
grosseur du bras, et porte de larges feuilles alternes,
épaisses et luisantes, longuement pétiolées et cordiformes
(Anamirta Cocculus).
à la base, ainsi que de belles grappes pendantes de fleurs
blanches. Les fleurs mâles offrent un calice à six divi-
sions et pas de corolle ; les étamines réunies au centre
de la fleur sont très nombreuses et monadelphes. Les
fleurs femelles sont plus petites que les fleurs mâles,
elles sont également dénuées de corolle, on y trouve six
4
LE NATURALISTE
à neuf staminodes ou étamines stériles autour du pistil
formées de trois carpelles indépendants auxquels succe -
dent autant de petites drupes réniformes presque ovoi-
des. Le péricarpe rouge et charnu contient un noyau
bivalve blanc et ligneux présentant dans son intérieur
une cavité incomplètement divisée en deux parties par
une saillie de suture sur laquelle le fruit se moule exac-
tement. Le fruit, qui est connu sous le nom de Coque du
Levant, se trouve dans le commerce sous forme d’une
petite masse de la grosseur d’une noisette desséchée,
noirâtre et rugeuse, renfermant une amande blanche
quand on ouvre ses deux valves.
Cette plante n’habite point, comme son nom pourrait
l'indiquer, l'Asie Mineure; on la trouve aux Indes, en
particulier dans le Malabar, à Ceylan, dans le Bengale
et dans les iles de la Malaisie.
La Coque du Levant a une action très puissante,grâce
aux deux alcaloides qu’elle contient. Le premier qui
est contenu dans le péricarpe est la Menispermine
(C'0H12Az0?), substance peu active. Le second se trouve
dans l’amande, c’est la Picrotoxine (C'0H601), substance
très délétère. Donnons quelques indications sur ces
deux substances.
La Menispermine a été retirée de la Coque du Levant
par Pelletier et Couerbe. Elle se présente sous forme de
prismes terminés en pyramides. Elle est insoluble dans
l’eau, soluble dans l'alcool et dans l’éther. Fond à 120
degrés ; une température plus élevée la décompose. Elle
se dissout facilement dans les acides étendus, et est
transformée par l'acide azotique en acide oxalique et en
une matière jaune résinoide ; elle forme avec l'acide sul-
furique un sel cristallisé en aiguilles prismatiques fusi-
ble à 165 degrés qui, chauffé à une température plus
élevée, se transforme en hydrogène sulfuré. Pelletier et
Couerbe ont donné à cette substance la formule rappro-
chée de C?H!2AZ0. Cette substance ne parait pas être
vénéneuse.
Pour l’extraire, on traite la Coque du Levant par l’al-
cool à 83 degrés, on distille l'alcool, on reprend lextrait
par l’eau bouillante, on filtre et par le refroidissement
la picrotoxine se dépose.
On reprend la partie insoluble par l’eau bouillante et
par l’eau acidulée et la solution est précipitée par un
alcali. Le précipité est repris par l'alcool qui enlève une
matière jaune, puis par l’éther qui, en s’évaporant, laisse
déposer la Menispermine en cristaux.
La picrotoxine s'obtient comme nous l'avons vu plus
haut, dans le premier traitement de la Coque du Levant
pour en retirer la Menispermine,
C’est une substance blanche en cristaux aiguillés en
forme de prismes quadrilatères,d'une saveur très amère.
Soluble dans 150 parties d’eau froide, 3 parties d’alcool
et 2 parties 1/2 d'éther, insoluble dans les corps gras.
L’acide sulfurique concentré la colore en rouge orangé,
acide azotique la transforme en acide oxalique; elle
est inaltérable à l'air et sans action sur les matières vé-
gétales; d’après Barth, on attribue à cette substance la
formule C'2H140ÿ, La solution alcoolique dévie à gauche
le plan de polarisation de la lumière 4 ——28 degrés.
‘C’est une substance très vénéneuse, susceptible à faible
dose de donner des vertiges et des convulsions ; 60 cen-
tigrammes suffisent pour tuer un chien.
Par suite des deux substances qu’elle contient, la
_Coque du Levant est employée à plusieurs usages.
Dans l’Inde, sa poudre, mélangée à la mie de pain,
189
sert d'appât pour le poisson : les pêcheurs jettent ce mé-
lange dans l'eau des rivières et des étangs, et les pois-
sons qui en ont mangé viennent tournoyer à la surface
où on les prend alors facilement à la main. Le grave in-
convénient de ce genre de pêche est que si le poisson
ainsi tué n’est pas immédiatement retiré de l’eau et vidé
sur le champ, le poison se répand dans sa chair qui peut
devenir un aliment dangereux pour le consommateur.
De plus, par ce procédé, le dépeuplement des rivières
d’un pays serait réalisé à brève échéance, aussi l'emploi
de la Coque du Levant a été sévèrement prohibé dans
nos pays où l’on en a interdit la vente aux droguistes
pour cet usage.
En Angleterre, certains industriels peu scrupuleux
ont utilisé l’amertume de ce fruit pour donner du goût à
la bière; on ne saurait trop condamner une pratique si
coupable, car elle constitue un danger pour la santé
publique,
La Coque du Levant,malgré ses propriétés énergiques,
n’est pas employée dans la médecine, on ne l’emploie
guère que pour l'usage externe sous forme de pommade
pour la destruction des poux. Son alcaloïde, la picro-
toxine, est employé comme un succédané de la strych-
nine et pour les mêmes usages, sous forme de gra-
nules à la dose de un à trois milligrammes par jour.
E. Massar.
© LE GROUPE DES OISEAUX NAGEURS
Les circonstances qui influent sur la distribution géo-
graphique des animaux sont multiples. Certaines tien-
nent à l’organisation de l'animal lui-même, aux moyens
de dispersion dont il dispose, aux obstacles que lui op-
pose son organisation même.
En ce qui concerne le vol des Oiseaux, nous avons
rappelé (4) qu'il existe différents degrés. Le Faucon, le
Pigeon voyageur, le Martinet tiennent le record comme
excellents voiliers; le Faisan, la Perdrix ont le vol bien
moins élevé, moins rapide et soutenu. L'Autruche, le
Nandou, le Casoar, sont trop lourds pour s'enlever du
sol à l’aide de leurs courtes ailes; sans doute derniers
débris d’un ordre de créations intermédiaires dont la
plupart des types ont disparu, ces Oiseaux imparfaits
représentent, par contre, des coureurs extrêmement ra-
pides en vue de la lutte pour l’existence.
Enfin, un habitant de la Nouvelle-Zélande, le curieux
Aptéryx, aux ailes rudimentaires et cachées sous des
plumes soyeuses à barbes déchiquetées, nous offre aussi,
sous ce rapport, un type bien imparfait dans la nature
actuelle.
Si nous examinons la faculté de natation chez les
Oiseaux, nous remarquons, Comme pour le vol, diffé-
rents degrés. Les Oiseaux nageurs se distinguent, on le
sait, par leurs pieds faits pour la natation, palmés entre
les doigts, parfois jusque près des ongles, ou seulement
garnis d'une membrane lobée plus ou moins large. Les
glandes coccygiennes (ou du croupion) qu'ils pressent à
1) Voyez nos articles : (A propos des Oiseaux », le Natura-
liste, 1898, p. 190, et « Sur la vitesse et la durée du vol des Oi-
seaux », Le Naluralisle, 1898, p. 253.
190
l’aide de leur bec, et dont ils enduisent chaque plume,
servent à les préserver de l’eau, leur duvet les garantis-
sant contre le froid,
Nous constatons d'abord que les membranes interdigi-
tales ou lobées ne caractérisent pas uniquement l’ordre
des Palmipèdes proprement dits; en second lieu, des
Oiseaux peuvent être en partie palmés, sans être pour
cela adaptés pour la natation,
Chez les Échassiers suivants : Courlis, Chevalier,
Barge, Combattant, Huïtrier, Échasse, les doigts anté-
rieurs se trouvent réunis par une membrane s'étendant
jusqu'à la ERoRe articulation des doigts (exemple :
Machetes) ou jusqu’à la seconde (exemple : Limosa). Chez
le Sanderling, tous les doigts sont très légèrement lobés.
Dans le genre Totanus, la Guignette par exemple, pour
se soustraire au chien du chasseur, se jette à l’eau et
plonge. Le T. semipalmatus, ainsi que son nom l'indique,
possède un doigt demi-palmé et l’autre réuni par un ru-
diment de A et peut se maintenir, au besoin, à
la surface de l’eau, mais toutes ces espèces ne nagent
point généralement: leurs pieds incomplètement palmés
leur donnent seulement quelque facilité pour parcourir
les lieux marécageux qu'elles fréquentent,
I. — ECHASSIERS.
A. — Mauvais nageurs.
Genres : Platalea, Recurvirostra. — Les doigts de de-
vant sont réunis Jusqu'à la seconde articulation par des
membranes plus où moins profondément découpées.
C'est pour traverser des eaux profondes ou pour échap-
per au danger que la Spatule et l’Avocotte se mettent
quelquefois à la nage
Phœnicoplerus. — Fe Flammant, dont les doigts anté-
rieurs se trouvent réunis jusqu'aux ongles par une meém-
brane découpée, ne nage pas habituellement, IL forme,
avec l'Outarde et le Phalarope, des exceptions parmi
les Échassiers qui possèdent un duvet à la base des
plumes,
B. — Nageur.
Rallus. — Grâce à ses doigts antérieurs, bordés dans
toute leur longueur d’une étroite membrane, le Râle
traverse à la nage des espaces d’eau et plonge principa-
lement quand il se sent poursuivi. =
C. — Bons nageurs.
Phalaropus. — Avec les apparences d’un Bécasseau,
le Phalarope possède les doigts bordés de lobes mem-
braneux en festons, rappelant les pieds de la Foulque.
Ce pygmée d’entre les nageurs vogue sur mer, parfois
assez loin des côtes, avec une vitesse et une grâce admi-
rables, dans les régions septentrionales qu'il habite, Il
a, comme les Oiseaux nageurs, le corps revêtu d’un
épais duvet très propre à le garantir du froid et de
l’eau.
Fulica. — Tous les doigts garnis latéralement de
membranes ou festons. Presque constamment sur l’ eau,
la Foulque nage et plonge avec une égale facilité.
Porphyrio, Gallinula. — Les doigts sont munis d'une
bordure de membranes. La Poule sultane et la Poule
d'eau nagent et plongent avec assez de vitesse sans s’é-
loigner cependant beaucoup du bord; en cas de danger,
elles restent parfois plongées et immobile avec la tête
seule hors de l’eau pour épier le chasseur. Les Poules
d'eau peuvent courir avec légèreté sur les plantes aqua-
LE NATURALISTE
tiques; émigrent aussi bien par la faculté du vol que
par celle de la natation. :
II. — PALMIPÈDES.
À. — Nageurs de surface.
Larus, Lestris, Procellaria. — Doïgts antérieurs entiè-
rement palmés. Surtout bien conformés pour le vol, le
Goéland et la Mouette, la Labbe, le Pétrel se montrent
de médiocres nageurs. Les Mouettes se reposent princi-
palement sur l’eau.
Sterna. — L’Hirondelle de mer, dont les doigts de de-
vant sont réunis par une membrane découpée, ne saisit
sa proie qu’au vol et se pose quelques moments sur
l’eau ; n'aime pas à nager.
Fregata, Phaeton, Sula, Pelecenus. — La Frégate, le
Phaéton, le Fou et le Pélican possèdent tous le doigts
réunis par une seule pièce de membrane s'étendant
jusqu'au doigt postérieur; ces différents genres représen-
tent d'assez bons nageurs, bien que la Frégate et le
Phaéton ou Paille en queue trouvent leur domaine sur-
tout dans les airs.
Cygnus, Anser. — Doigts totalement palmés chez le
Cygne et lOie, bons nageurs de surface, ne plongent
pas. Possèdent un vol élevé et puissant. Le Cygne réunit
la beauté de forme à l'élégance et à la souplesse de ses
mouvements sur l'eau,
« Le Cygne nage si vite qu’un homme marchant rapi-
dement au rivage a grand’peine à le suivre. » (Buffon.)
B. — Nageurs et plongeurs.
Plotus. — Avec tous les doigts réunis par la membrane
natatoire. L’Anhinga nage bien et se submerge souvent.
Il replie son long cou d’une facon particulière, puis le
lance dans l’eau pour darder les poissons, avec une
extrême rapidité. -
Phalacrocoron, — Membrane complète, réunissant
tous les doigts, Très bien doué sous ce rapport, le Cor-
moran plonge et nage longtemps entre deux eaux avec
une vitesse incroyable. L'on sait qu’en Extrêéme-Orient
les Cormorans « bouclés » s'élancent et plongent au si-
gnal de leur maitre qui tire profit pour sa table de l’ha-
bileté de ces Oiseaux-pêcheurs.
Mergus (en latin signifie plongeon). — Doigts de de-
vant entièrement palmés; doigt postérieur avec un rudi-
ment de membrane. Le Harle plonge jusqu’à de grandes
profondeurs et reste parfois longtemps sous l’eau; nage
très souvent tout le corps submergé, la tête seule hors
de l’eau. Le M. morganser a été désigné sous le nom de
a Castor » pour rappeler le petitmammifère bien connu.
S'aiderait pour nager sous l’eau des aïles en guise de
rames.
Anas. — Les nombreuses espèces qui se rattachent au
genre Canard ont les doigts de devant entièrement pal-
més. Elles nagent avec grâce et facilité. Divisées en
deux groupes :
1° Espèces surtout maritimes, portant un rudiment
de membrane au doigt postérieur; plongent souvent et
restent un certain temps sous l’eau, Exemples : Canards
Eïder, Milouin, Milouinan, Morillon, Nyroca, etc. L'Anas
fusca se nourrit surtout de bivolies qui gisent au oui
de la mer.
2° Espèces plutôt d'eaux douces, sans membranes au
doigt postérieur. Se submergent rarement ou lorsqu'elles
cherchent à échapper à la poursuite du chasseur. Ex. :
4
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À
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k
4
4
k
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LE NATURALISTE 18
Canard sauvage (col vert), Sarcelle, Siffleur, Pilet, Ta-
dorne. Le Chipeau qui rentre dans cette seconde caté-
gorie se montre particulièrement habile à plonger pour
éviter le coup de fusil.
Podiceps, — Chez le Grèbe, les doigts sont lobés, en-
tourés par des membranes en festons. Il nage avec une
égale facilité à la surface comme entre deux eaux et
s’aide alors des ailes dans cette dernière natation. Emigre
en suivant les cours d’eau, La fourrure si recherchée
qui garnit sa poitrine forme une surface luisante et im-
pénétrable au froid de l'air et à l'humidité de l’eau. Le
Grébe et le Plongeon — dont nous parlons ensuite —
ont les jambes placées très en arrière du corps; leurs
pieds se jettent en dehors lorsqu'ils nagent.
Colymbus .— Le genre Plongeon a les doigts antérieurs
entièrement palmés et le doigt postérieur portant une
petite membrane lâche. Il renferme, comme le nom
l'indique, des Oiseaux aquatiques au plus haut degré
qui, à l'approche du chasseur, plongent ou se submer-
gent le plus souvent, la tête seule hors de l’eau. Voya-
gent en suivant les cours d’eau et les lacs.
Alca, Uria, Mormon. — Doigts entièrement palmés.
Nageurs et plongeurs excellents, le Pingouin, le Guille-
mot, le Macareux, qui habitent principalement les ré-
gions arctiques, s’aident beaucoup des ailes pour nager
entre deux eaux. Si l’on en excepte le fameux Alca im-
pennis, maintenant éteint, dont les ailes étaient totale-
ment dépourvues de pennes propres au vol, la plupart
d’entre eux peuvent, au besoin, s'envoler de terre.
Spheniscus, Aptenodytes, Eudyptes. — Dans le groupe
des Manchots particulier aux terres australes, le Sphé-
nisque, le Manchot, le Gorfou possèdent les doigts garnis
d’une membrane complète, mais, au lieu d'ailes, des sor-
tes de moignons garnis de plumes courtes, dures, écail-
leuses qui font l’office de nageoires. Incapables de voler,
ces curieux Oiseaux ne vont à terre qu'au moment de la
ponte et de la nichée; certaines espèces, « Pingouins sau-
teurs », n'avancent sur le sol que par bonds.
F. DE SCHAECK.
LES EÉTANGS POISSONNEUX D'AUTREFOIS
PPPPPT PP PPT De
Autrefois les plus petites rivières de nos pays, des ruisseaux
de quelques lieues de longueur à peine, présentaient à leur
naissance une succession d’une demi-douzaine d'étangs artifi-
ciels, transformés en parcs à poissons, en viviers ou waresnes,
comme on disait alors. Toutes les abbayes de religieux avaient
bien soin, quand elles s'étaient installées dans une forêt déserte,
de construire ces viviers, après avoir défriché le sol et construit
les bâtiments de leur commune exploitation. Une vie régulière,
un travail incessant, leur permettait de mener à bien toutes ces
œuvres de longue haleine, de les entretenir contre les injures
du temps et de les rétablir quand elles avaient été dévastées par
le torrent des invasions et des guerres civiles ou étrangères.
Quand on pense que la seule abbaye de religieuses d'Origny-
Sainte-Benoîte a été incendiée douze fois (!) avant d’étre détruite
par la Révolution de 1789,on se demande quelle persévérance et
quelle ténacité il a fallu aux pauvres religieux pour se relever
tant de fois de leurs ruines, et pour reparaître chaque fois plus
brillants et toujours en nouveau progrès sur les autres fois.
L'homme travaillant en commun centuple ses efforts, comme
une fourmilière bouleversée, où toutes les fourmis s'unissent
courageusement, pour la reconstruire plus solidement encore.
Ces étangs artificiels, ces réserves à poissons avaient le grand
avantage de fournir aux moines un excellent aliment, pour une
partie notable de l’année, notamment pour le temps du carême,
où la terre n’a pas encore pu produire de nouveaux aliments
pour remplacer les provisions d'hiver arrivées à leur déclin. En
outre, le poisson se vendait relativement cher dans les villes
‘ voisines, et c'était une ressource précieuse pour obtenir de l'ar-
gent en échange, afin d'acheter des ornements pour leurs autels,
des matières d'or et d'argent pour leurs vases sacrés, leurs
châsses et leurs fierles ou reliquaires. Bref, le poisson était litté-
ralement une mine d'or pour les pauvres moines du bon vieux
temps, qui menaient une vie si dure. Dans certains ordres, c'é-
tait même la seule viande qu'ils pouvaient manger dans l’année,
avec celle de quelques oiseaux d’eau à chair lévère.
Rien de plus simple d'ailleurs que la construction de ces
étangs poissonneux, dans nos pays du moins. L'origine de nos
petites rivières est un ruisseau provenant de la réunion de quel-
ques sources plus où moins abondantes, qui s'échappent de terre,
au flanc de nos collines boisées. On enlevait la terre au fond de
la vallée, de chaque côté du ruisseau (quitte méme à détourner
momentanément son cours au besoin); puis on rejetait cette
terre, en contre-bas de l'étang ainsi creusé, pour former une
digue solide, puissante et large, haute de plusieurs mètres. Ces
bassins ne sont jamais trop profonds, car ils n’ont que trop de
tendance à se combler, avec le temps!
Immédiatement au-dessous de ce premier réservoir arlificiel,
on en creusait un autre, avec une digue un peu moins élevée
que la précédente, mais d'une profondeur et d'une longueur
égales au premier. Et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'on en ait une
demi-douzaine. Le creusement du premier étang facilitait singu-
lièrement le travail de tous les autres; car on pouvait, au der-
nier moment, interrompre le cours de l'eau pendant plusieurs
semaines, afin de creuser à sec, sans être géné par l’afflux de
l'eau du ruisseau. En effet, on n'avait qu'à fermer la porte du
bassin supérieur pendant la saison sèche, après l'avoir complé-
tement vidé, pour suspendre momentanément le cours de l’eau
plus bas.
Tous ces bassins communiquaient les uns avec les autres par
des écluses, où portes en bois superposées, que l'on pouvait
élever ou abaisser à volonté, à l'aide d'une crémaillère action-
née directement ou par un levier. Une fermeture absolue n'était
pas bien nécessaire; de sorte que l’on pouvait exhausser ou ré-
duire la hauteur des eaux dans chaque bassin. Cette précaution
élémentaire permettait de les mettre à sec, les uns après les
autres, afin de pouvoir les curer, quand ils finissaient par être
comblés, sous l'influence d’une abondante végétation de roseaux
et de plantes d'eau de toute espèce. Sans ce nettoyage, le plus
beau bassin se serait transformé en un marais infect, au bout
de quelques dizaines d’années seulement. Ces différents étangs
permettaient de les peupler d'espèces diverses de poissons. Il
y avait l'étang des carpes et l'étang des brochets par exemple.
Les eaux vives nourrissaient beaucoup d'anguilles, en certaines
localités, là où le ruisseau devient un rü plus important, capa-
ble d'alimenter les moulons pendant la plus grande partie de
l’année. Ce qu'il y a de remarquable, c'est que les plus petits
ruisseaux étaient parfois utilisés pour la formation de ces étangs
artificiels : tout dépendait de l’abondance de la source qui leur
donnait naissance, et de la continuité de son écoulement. L’es-
sentiel était que l'eau ne pût pas se corrompre, et pour cela
qu’elle fût suffisamment renouvelée. Quand la pente du ruisseau
était faible, on faisait ces réservoirs tout en longueur, en leur
donnant une largeur 50 ou 60 fois moindre que leur longueur ;
mais généralement ils étaient à peu près aussi larges que longs,
tantôt un peu plus longs que larges, tantôt même un peu plus
larges que longs : tout dépendait de la pente du lit du ruisseau
et de la largeur de sa vallée d’érosion.
Nous avons vu une quantité de ces anciens étangs, aujour-
d'hui abandonnés malheureusement, et comblés ou transformés
en marais, pour la plupart. Il y en avait des centaines et des
centaines dans un seul évéché, à peine aussi grand que la moitié
d'un de nos départements actuels. Tous les rûs en avaient à
leur origine, ainsi que la plupart des petits rûs qui se jettent
dans ces rûs eux-mêmes. On peut dire que tout ruisseau assez
important pour avoir un nom dans le pays, n'eût-l qu'une ou
deux lieues de long à peine, avait ainsi quelques étangs éche-
lonnés au-dessous les uns des autres, vers son origine, à un
quart de lieue de sa source, plus où moins. Rien ne serait plus
facile que de rétablir ces étangs. Mais il y à une remarque qui
a déjà frappé tous les naturalistes : c'est que généralement le
déboisement a eu pour effet de diminuer beaucoup l’abondance
de nos cours d’eau. Ainsi, par exemple, sous l'influence du déboi-
sement, si la source d'un ruisseau est peu abondante, elle se
déplace, et son origine apparaît seulement beaucoup plus bas
qu'autrefois, en aval. Si au contraire on reboise le terrain, la
source réapparaît plus haut, en amont. Cet effet si curieux est
dû à ce que les bois retiennent l'humidité à la surface du sol,
au lieu de laisser l’eau se perdre dans la profondeur, ou s’é-
couler irrégulièrement sous forme de torrent intermittent.
LE NATURALISTE
ILES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
PrsroLocHiA
CAMPESTRIS.. 2..."
CŒRULOESCENS
ABROTANUM,
ABSINTHIUM . «eee
CAMPESTRIS, A BSINTHIUM
CAMPHORATA.....,..
ABSINTHIUM
CAMPESTRIS
CAMPESTRIS...........
VULGARIS, ABSINTHIUM,
MaRITIMA
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Arbustes
Orgyia Gonostigma $. V.
Antiqua L.
Trigotephras B.
Demas Coryli L.
Liparis Dispar L.
Chrysorrhæa L.
Auriflua $. V.
Dasychira Pudibunda L.
Dasychira Fascelina L.
Bombyx Cratægi L.
Bombyx Quercus L.
Lasiocampa Quercifolia L.
Acronycta Tridens L.
Rumicis L.
Auricoma $. V.
Noctua Baja S. V.
Tæniocampa Gothica L.
Polia Flavocincta $. V.
Euplexia Lucipara L.
Erastria Deceptoria Scop.
Mania Maura L.
Angerona Prunaria L.
Odontapera Bidentata Clerck.
Crocallis Elinguaria L.
Biston Hirtaria L.
Amphidasys Strataria Hufn.
Betularia L.
Boarmia Gemmaria Brahm.
Acidalia Bisetata Hufn.
Incanaria H.
Imitaria H.
Hybernia Marginaria Bkh.
Defoliaria L.
Cheimatobia Brumata L.
Eupithecia Castigata I.
Pumilata IH,
Cidaria Siterata Hufn.
Cidaria Prunata L.
Aristoloche
.|Thais Polyxena $S. V. Var. Cas-
sandra H.
.[Thais Rumina L. V. Medesi-
caste Illig.
Armoise
Sesia Chrysidiformis, Esp.
Hadena Sociabilis,de Graslin.
Cucullia Artemisiæ Hufn.
Absinthii L.
Formosa Rogenh.
Tanaceti $S. V.
Santolinæ Rmb.
Heliothis Scutosa $. V.
Synopsia Sociaria H.
Var. Pro-
pinquaria B.
.|Boarmia Selenaria H.
Acidalia Imitaria H.
Scadiona Emucidaria Dup.
Fidonia Atomaria L.'
Eupithecia Succinturiata L.
Innotata H.
Absynthiata L.
MOIS DE L'ANNÉE
OU L'ON TROUVE
Chenilles Papillons
Mai, juillet, août.
Mai, juillet, août.
Mai, juin.
Juin, septembre.
Juillet.
Juin.
Juin.
Septembre, octobre.
Mai.
Mai.
Juin.
Juin, juilet.
Août, septembre.
Juin à septembre.
Juin, juillet,septembre.
Avril, mai.
Juin, juillet, octobre.
Mai, juin, juillet.
Septembre, octobre.
Août.
Aril, mai.
Mai.
Août, septembre.
Avril, mai.
Août, septembre.
Juillet à septembre.
Juillet à octobre.
Mai, juin, août, sept.
Avril, mai, juin, juillet.
Belle saison.
Belle saison.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai.
Août, septembre.
Septembre à octobre.
Mai, juillet.
Mai, juin.
Mai.
Mai, juin.
Avril, mai (racines).
Juin.
Août.
Automne.
Automne.
Août, septembre.
Avril, juillet.
Mai, juin, août, sept.
Avril, juillet.
Avril, Juillet.
Juin, juillet, sept., oct.
Belle saison.
Juillet à mars.
Juin, septembre.
Septembre, octobre.
Septembre, novembre,
écembre.
Septembre, octobre.
Juin, août, septembre.
Juin, août, septembre.
Juin, juillet.
Avril, mai, juillet, août.
Juillet, août.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Mai.
Août.
Août, septembre.
Juillet.
Juillet.
Mai, juin.
Avril, juin, août, sept.
Avril, mai, juillet, août.
Juillet, août.
Mars, avril, août, sep-
tembre, octobre.
Septembre, octobre.
Avril à août.
Mai, juin.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Avril, mai.
Juillet, août.
Mars, avril.
Mars, avril, mai.
Avril à juillet.
Mai, juillet.
Mai à août.
Belle saison.
Belle saison.
Novembre, fév., mars.
Oct., nov., fév., mars.
Octobre, novembre.
Mai, juin.
Avril, mai.
Juin, septembre, oc-
tobre, novembre.
Juillet à septembre.
Mars, avril.
Mai, juin.
Mai à juillet.
Juillet, août.
Avril, août.
Mai, juillet.
Mai, juillet.
Septembre, juin, juillet.
Avril, juillet.
Avril, mai, Juillet, août.
Mai, Juin, août.
Mai, juin, août.
Mai, juin, août.
Belle saison.
Juin, juillet.
Avril, mai, juillet, août.
Juillet, août.
Avril, mai, juin.
Juin, juillet.
HABITAT
FRANÇAIS
Toute la France.
France méridionale.
Toute la France.
France centr., sept. etorientale.
Toute la France.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
France méridionale, Hyères.
Languedoc, Provence, Digne.
Toute la France.
Pyrénées-Orientales.
Indre, Villers-Cotterets.
France centr. et septentrionale.
Ardèche.
France centrale et méridionale.
Pyrénées-Orientales, Montpel-
‘ lier.
France méridionale.
France centrale et méridionale.
France méridionale, Lyon,
Beaune.
Paris, Chalon-sur-Saône,
Cannes.
France centrale et méridionale.
France méridionale, Lyon.
Toute la France.
France centrale, méridionale et
orientale.
Toute la France.
Le Gérant: PAUL GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 171.
193
NATURALISTE
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29° ANNÉE
2 SÉRIE — IN° 324
1° SEPTEMBRE 1900
L’HISTOIRE NATURELLE & L'ETHNOGRAPHIE
A L'EXPOSITION UNIVERSELLE
LE CHAMP-DE-MARS
Nous continuerons notre visite par le Palais des
Forêts et de la Pêche. Nous remarquons à l'entrée des
groupes de cerfs, blaireaux, renards, loups, ours, san-
gliers empaillés, exposition del'École forestière de Nancy.
À droite se trouve la salle des pêches, avec les différents
modèles de bateaux et d’instrumentsemployés dans cette
industrie, ainsi que les costumes anciens et modernes
des pêcheurs des différentes régions.
A droite encore, dans la classe réservée aux naturalistes
et aux fourreurs, nous devons nous arrêter devant les
expositions dela maison Deyrolle, expositions à citer au
double point de vue scientifique et préparation. Nous
remarquons dans ces expositions un groupe absolument
adulte, mâle et femelle, de l'orang-outan de Bornéo.
Ces singes, de si grande taille, sont préparés d’une facon
[e) , D 5
absolument remarquable; ce sont certainement des
plus grands connus, si ce n'est même les plus grands.
En restant parmi les vertébrés, nous signalons un fort
beau chevrotain porte-musc, un grand fourmilier tama-
noir et un lion puma. Si nous remarquons les oiseaux
montés qu'expose la maison Devyrolle nous voyons une
série de raretés, le célèbre Péeridophora Alberti. le curieux
Amblyornis inornata, le rare Astrapia Splendidissima, ces
trois espèces de Nouvelle-Guinée ; ajoutez à cela des
oiseaux-mouches aussi brillants que rares. Citons encore
quelques types de reptiles et poissons, C'est parmi les
animaux invertébrés que nous pouvons aussi admirer des
espèces absolument extraordinaires. Le grand crinoïde
vivant (Metacrinus rotundus), dragué par plus de 200 me-
tres de fond, est un spécimen fort beau de ces espèces,
pendant longtemps connues seulement à l'état fossile;
les grandes éponges siliceuses du Japon, comme les
Hyalonema et le Waltheria, attirent tous les regards. Sans
passer encore en revue toutes les préparations anato-
miques et autres qu'offrent aux yeux des amateurs les ex-
positions de la maison Deyrolle, nous pouvons dire que
ces expositions réunissent tout ce qu'on peut rèver
comme animaux rares Où Curieux et d'une impeccable
préparation. Cette exposition étant unique,on nous excu-
sera de nous y être un peu trop arrêté.
Plus loin,nous voyons un groupe de pêcheurs d’épon-
ges, puis l'exposition de la station zoologique d'Endoume,
près Marseille, avec un magnifique Athrophylon arbores-
cens. Voici l'exposition des établissements ostréicoles de
Hollande.
Avec de curieux mannequins de pêcheurs, arrêtons-
nous une minute près du petit panorama suédois avec sa
forêt de pins au sol couvert de lichens, sur lequel com-
battent deux coqs de bruyère. Tout au fond de ce bâti-
ment, uous remarquons une belle collection de poissons
et d'oiseaux des États-Unis, et parmi eux un Didelphys,
un des rares marsupiaux qui ne soient pas australiens.
Il faut remarquer aussi une vitrine remplie de perles
‘produites par des Haliotis et par des mollusques d’eau
Le Naluraliste, 46, rue du Bac, Paris.
douce, du genre Unio. Certaines d’entre elles peuvent
rivaliser avec les plus belles perles de Pintadines.
Nous revenons par le côté le plus éloigné de la rivière
et nous trouvons d’abord un herbier japonais, des bois,
des oiseaux, des insectes, des coquilles et des écailles de
tortue de même provenance. Plus loin, l'administration des
eaux et forêts a exposé un herbier des plantes mellifères,
et, à côté, une collection de nids et d'œufs. Au mur se
trouvent des vues des travaux de reboisement dans les
Alpes, et, dans uue vitrine, une belle collection de fruits
de conifères indigènes et exotiques.
Si nous descendons au rez-de-chaussée, nous trouvons
des aquariums avec des truites arc-en-ciel et des carpes ;
puis, dans la section russe, un très bel herbier d’essences
forestières, avec des coupes de bois; des cadres d'in-
sectes, avec les dégâts qu'ils occasionnent dansle boiset,
à gauche, des modèles de radeaux et de grands bateaux
nommés béliana, employés sur le Volga pourtransporter
les planches. Plus loin, à droite, se trouve un herbier de
Mandchourie, et, à gauche, diverses drogues médici-
nales. Les peintures qui les surmontent sont très remar-
quables ; elles montrent les diverses races qui peuplent
l'immense empire se livrant à l'exportation de ces pro-
duits.
La Hongrie nous montre un grand paysage peuplé
d'ours, de chamois, de cerfs, de mouflons, de loups, de
lynx, de sangliers et d'oiseaux Le Canada expose de
fort beaux élans ; la Roumanie, des ours et des chats
sauvages,
Ressortons maintenant et prenons à droite de la tour
Eiffel, en tournant le dos au Trocadéro. L'EÉquateur ne
nous offre que quelques vitrines d'insectes et d'oiseaux.
Le Maroc nous rappelle la Tunisie et l'Algérie, par sa rue
étroite bordée de boutiques. Nous arrivons enfin au
palais de l'Optique qui nous offre nombre d'objets inté-
ressants: tout d’abord une série de petits panoramas
montrant la faune et la flore à chacune des époques géo-
logiques. Ces reconstitutions sont très exactes ;ilimporte
de les suivre dans l’ordre de leurs numéros, qui corres-
pondent aux différentes phases de l’histoire de la terre.
La section astronomique est des plus intéressantes: à
remarquer surtoutles magnifiques projections de la surface
lunaire, avec ses énormes cratères volcaniques et ses
vastes plaines dénommées « mers » bien qu’elles soient
privées d’eau. Chacune des exhibitions est accompagnée
d’une courte conférence qui permet de bien comprendre
le sujet. C’est, en somme, de l’excellente vulgarisation.
Entre les différentes exhibitions scientifiques sont inter-
calés des spectacles artistiques ou récréatifs, qui reposent
l'esprit.
Nous entrons ensuite au palais de droite du Champ-de-
Mars et nous montons de suite au premier étage. Le mi-
nistère de l'instruction publique y à organisé une expo-
sition des objets rapportés par les missions scienti-
fiques. Il est bon de les voir réunis avant Qu'ils soient
dispersés dans diverses collections. Voici d’abord la
mission Labbé en Asie russe. Dans une vitrine, remarquez
les modèles d'habitation des Ghiliaks de l'Amour et des
Aïnos deSachalin, et les photographies de ces deux races.
Tandis que les Ghiliaks sont de vrais Mongols, imberbes
et aux yeux bridés, les Ainos, barbus, ressemblent à des
paysans moscovites. Leur origine est tout à faitinconnue.
On sait seulement qu'ils occupaient autrefois tout l’Ar-
chipel japonais et qu'ils en ont été peu à peu refoulés par
les Japonais actuels. Leur langue et leurs mœursdiffèrent
196
complètement de celles des peuples avec lesquels ils sont
en contact. L’ours joue un grand rôle dans leurs
croyances religieuses ; et voici justement le modele de la
cage où cet animal divinisé est enfermé avant d'être
mangé. Triste fin pour un dieu!
A la face postérieure de la même vitrine, se trouve
l'exposition de la mission Versepuy en Afrique équatoriale.
Plus loin nous rencontrons celle de la mission Diguet au
Mexique. Voici des feuilles d’herbier, des vues de pays,
des portraits et des pièces ethnographiques provenant des
Indiens Huichols. Ces indigènes, qui habitent une région
difficile d'accès, dans la sier de Nayarit, ont conservé
jusqu’à nos jours leurs mœurs et une partie de leurs
croyances anciennes. Plus loin nous trouvons l’exposi-
tion de la mission Foa entre le Zambeze et le Congo. Nous
y remarquons surtout un couteau de fer, dont la lance
recourbée ressemble au boumerang des Australiens, des
monnaies formées de feuilles d’étain carrées, et, dans la
partie zoologique, une vitrine renfermant plusieurs
exemplaires de la mouche tsétsé qui, par ses piqüres
dangereuses, empêche tout élevage de bétail aans cer-
taines parties de l'Afrique,
Les grands établissements scientifiques ont exposé d'in-
téressantes collections. Arrêtons-nous surtout devant
celles de laSorbonne.Nous y trouverons un certain nombre
de vitrines disposées par M. le professeur Giard pour
montrer les phénomènes de mimétisme. Voici un rameau
qui semble porter des feuilles. En réalité, ce sont des
papillons du genre Kallima, dont la face inférieure des
ailes relevées présente une couleur et même des nerva-
tions imitant à s’y méprendre des feuilles mortes, Un
petit prolongement de l'aile représente le pétiole et vient
s'appliquer tout naturellement contre le rameau où l’ani-
mal est posé, Voici des mantides ressemblant à des
fragments de. bois sec, d’autres insectes imitent les
lichens au milieu desquels ils se perdent, d'autres sem-
blent même mimer des pierres diversement colorées ou
des graines couvertes de piquants. — À côté se trouvent
des bocaux qui nous montrent l'influence du milieu péla-
gique, du parasitisme et de la vie fixée sur la couleur et la
forme des animaux. On voit combien cette collection est
instructive : elle fait le plus grand honneur à son auteur.
Nous passons ensuite devant l'exposition des Observa-
toires, où il faut admirer de belles vues photographiques
de la surface lunaire, et nous arrivons à l'exposition
Ch. Janet. On sait que ce savant a fait de remarquables
études sur la morphologie et les mœurs des fourmis. Il
expose des fourmilières artificielles peuplées de fourmis
vivantes, de sorte quel’ignorant lui-même peut se rendre
compte de quelques-uns des traits de mœurs de ces ani-
maux. Il faut surtout signaler un nid de myrmica rubra
avec deux commensaux.L'un, platyarthrus hoffmannseggi,
est un petit crustacé terrestre blanc et aveugle qui vit
dans les fourmilières et se nourrit des substances ani-
males et végétales qu’il trouve dans les galeries. Ii se
guide au moyen de l'odorat, qui paraît très développé et
dont le siège est dans les antennes. Au contraire du
précédent, qui est presque toujours immobile, l’autre
commensal, Lepismina polypoda, est sans cesse en mou-
vement. C’est un thysanoure de couleur jaune d’or, éga-
lement aveugle. Le sens de l’odorat réside chez lui dans
les antennes et dans les trois appendices qui terminent
son corps, en arrière. D'ailleurs, c’est plutôt un‘parasite
qu’un commensal, et les fourmis le tuent si elles par-
viennent à le saisir. Cet animal profite du moment où
LE NATURALISTE
une fourmi dégorge dans la bouche d’une autre le liquide
nutritif qu’elle tient en réserve dans son jabot pour s’ap-
procher sournoisement et, relevant brusquement la tête,
saisir la gouttelette au passage et se sauver aussitôt, Il
mange d'ailleurs aussi les larves et les nymphes des
fourmis. Ces deux animaux, le crustacé etle thysanoure,
nous montrent comment la vie dans les endroits obscurs
a pour résultat la décoloration du corps et la perte de la
vue, qui ést remplacée par d’autres sens.
Dans un autre cadre, nous voyons un nid de formica
fusea entouré par une colonie de solenopsis fugaæ. C'est
là une très petite espèce de fourmi qui a l'habitude d’éta-
blir son nid contre celui d’une autre espèce. Le solenopsis
pénètre dans la fourmilière voisine par des galeries très
étroites et la pille pour dévorer les nymphes.
Le reste de cette galerie n'offre plus grand'chose d’in-
téressant, à notre point de vue spécial. Cependant, plus
loin, dans l'exposition russe des moyens de transport, nous
remarquons une collection de plantes qui poussent sur
les sols sableux de l'Asie centrale et qui sont employés
pour consolider les remblais de chemins de fer; nous y
notons surtout le curieux saxaoul (Haloxylon Ammoden-
dron), arbuste de la famille des Chénopodées, au bois dur
et aux feuilles rares, qui est un des exemples les plus
frappants de la puissance d'adaptation du règne végétal
à des conditions climatériques tout à fait défavorables.
Les endroits où pousse le saxaoul, en compagnie de deux
ou trois autres Chénopodées, du Tamarix et d’une Papi-
lionacée épineuse sont des steppes à sous-sol salé, sans
cesse balayées par le vent et sujettes à des sécheresses
de très longue durée. Ce n’est que pendant une période
très restreinte de l’année que la végétation a lieu d'une
facon active : 1l apparait de petites feuilles scarieuses,
opposées, et des fleurs sans éclat auxquelles succèdent
des fruits secs entourés des divisions du calice accres-
centes.
Nous continuons en restant toujours au premier étage,
et nous pénétrons dans la galerie des machines. Du côté
antérieur de la salle des fêtes, nous trouvons une curieuse
collection de berceaux de tout âge et de toute provenance,
de hottes pour porter les enfants, de maillots, et d’instru-
ments pour leur apprendre à marcher. À remarquer
surtout un berceau en liège, qui a été en usage dans le
Var jusque vers 1850. Traversons et passons en arrière
de la salle des fêtes. Il y a, à la section d’apiculture, de
magnifiques collections d'insectes nuisibles aux abeilles
etaux plantes en général. Tout près se trouvent des cham-
pignons parasites des autres végétaux. Le ministère de
l'agriculture a exposé des Polyporus gigantesques, qui sont
de véritables raretés.
Si nous descendons maintenant au rez-de-chaussée,
nous trouverons,dans la section d'agricullure,de curieuses
reconstitutions d'anciens intérieurs paysans, des maré-
chaleries, des ateliers de charron, des instruments ara-
toires, des pressoirs primitifs, des costumes provinciaux
curieux. C’est tout un coin de notre vieille France qui
revit là. Il y a également une collection d'instruments
préhistoriques et protohistoriques, allant du néolithique
au gallo-romain et même au mérovingien. Ils permettent
de comparer l'outillage de nos ancêtres lointains à celui
des époques plus récentes.
Notre visite aux galeries du Champ-de-Mars se termi-
nera par celles réservées aux mines, où nous remarque-
rons des minerais de divers métaux, d'intéressantes.
coupes de gisements de houille, qui montrent bien la.
LE NATURALISTE * 197
disposition ondulée des couches et leur alternance avec
des lits de grès et de calcaire, Il y a aussi quelques fos-
siles carbonifères.
Dans la partie antérieure du Champ-de-Mars, nous
trouvons le palais de la République de Saint-Marin, avec
un crâne de baleine fossile, et celui du Siam, d'une
architecture très originale et renfermant une riche col-
lection ethnographique.
Il nous faut maintenant revenir sur nos pas et par-
courir les sections comprises entre le palais des Sciences
et du Génie civil et l'avenue de Suffren.Nous y trouvons
d'abord une petite exposition de ciments de Vassy et de
Portland, avec des fossiles jurassiques, notamment une
tête d'ichthyosaure et de nombreux poissons; puis un
_petit jardin avec des cultures démontrant l’effet des en-
grais. On y voit des plantes cultivées les unes avec un
engrais complet, les autres sans azote, sans phosphate
ou sans engrais du tout. Plus loin, une manufacture
russe de caoutchoucs expose un intéressant panorama de
l'exploitation de cette substance dans une forêt vierge
de l'Amérique du Sud. Des Indiens recueillent le latex
sur les arbres, d’autres le concentrent au feu en en re-
cueillant une petite quantité au bout d’un bâton et la
présentant à la flamme. Enfin on voit arriver le bateau
qui emportera la cargaison, probablement par le fleuve
des Amazones. On verra aussi avec intérêt des échantil-
lons de caoutchouc à divers stades de fabrication.
En continuant notre route nous rencontrons le curieux
pavillon de la Corée, qui présente une remarquable col-
lection ethnographique : instruments de musique, pa-
rures, vêtements, mannequins costumés et voilés, sou-
vent coiffés de chapeaux gigantesques.Les photographies
sont très intéressantes; elles nous montrent que le type
des Coréens est très mongoloïde, mais en même temps
assez fin, surtout chez les femmes. Il rappelle celui des
Japonais, mais la taille des Coréens est plus élevée, On
sait que ce peuple à une civilisation peut-être encore plus
ancienne que celle des Chinois et qu'il n'a pas été sans
influence sur le développement de la culture japonaise.Il
est très possible que le Coréen,moinsroutinier que le Chi-
nois et moins servile imitateur que le Japonais, soit
appelé à jouer en Extrême-Orient un rôle qu'on n’au-
rait pas soupconner avant que le pays ne fût ouvert aux
étrangers.
Nous terminerons enfin notre visite au Champ-de-
Mars par la section italienne de métallurgie où se trou-
vent de beaux échantillons de soufre cristallisé et divers
autres minéraux.
D: L. LALOY.
DE L'HABILLEMENT CHEZ LES ANCIENS
(Suite.)
Oiseaux. — Sénèque, dans sa lettre XC, dit que les
sauvages cousent ensemble des plumes d'oiseaux pour
se vêtir : avium plumas in usum vestis conseruntur; c’est
aussi ce que dit Attius, cité par Cicéron, de Philoctète
- abandonné dans l’ile de Lemnos : pinnarumque contextu
corpori tegumenta faciebat.
Le pape Paul I envoya à Pépin le Bref un manteau
tout recouvert de plumes de paon (Recueil des hist. de
France, t. V, p. 503).
Peaux et cuirs. — Les peuples chasseurs — et
tous le furent plus où moins — n’eurent pas d’autres
vêtements, tout d'abord, que les peaux des animaux
qu'ils tuaient, et cela suppose même chez ces primitifs
un certain commencement de civilisation, né d’ailleurs
d'un climat parfois rigoureux. Plus tard, quand cette
civilisation eut fait des progrès dans les agglomérations
humaines, les peaux couvertes de poils furent préparées
et conservées avec plus de soin, et on les agrémenta
même de quelques objets naturels, non fabriqués, qui en
rehaussaient la beauté ou en masquaient la laideur, et
qu'ajustait la coquetterie naissante de la femme.
Du temps même de Cicéron, les Sardes portaient le
vêtement (mastruca) fait de peaux de bêtes sauvages (ex
pellibus ferarum),. |
Prudence (Sur Symmaque, liv. IT, v. 698) dit aussi, en
parlant des Gètes, qu’ils ne portaient pas d’autres vête-
ments; aujourd’hui encore, d’ailleurs, ils sont en usage
chez bien des peuples de l'extrême Nord.
Les vêtements de peaux de chèvres prenaient plus
particulièrement le nom de sisyra, sisura et sisurna; Am-
mien Marcelin dit que l’empereur Julien couchait sur un
simple tapis et sur une sisurna (livre XVI, ch. 5) : Non
e plumis..…. sed ex tapete el cicvpx quam vulgaris simpli-
citas sisurnam apellat.
La peau travaillée, le cuir plus ou moins mince et dé-
pouillé de ses poils, servait aussi de vêtement, surtout
aux gens de la campagne. Selon Hérodote et Strabon, les
ichthyophages des bords de l’Araxe s’hahillaient avec des
peaux de poissons, de cétacés, et surtout de phoques.
Nos Esquimaux en font autant aujourd'hui encore, et, de
longtemps, n'auront pas d'autres vêtements,
Pinne marine (Jambonneau, coquillages divers). —
Divers mollusques produisent une touffe filamenteuse, au
moyen de laquelle ils fixent leur coquille sur les rochers
ou aux plantes sous-marines. Au nombre de ces coquil-
lages sont les moules, les pernes, les tridacnes, les mar-
teaux, les valselles, et surtout les pinnes marines (pinnes
nobles, jambonneaux, etc.).
La soie fournie par les jambonneaux est d'un vert
brillant quand elle sort de l’eau de mer; puis, lorsqu'elle
a été exposée à l'air et lavée, d’abord à l’eau de savon,
puis à l’eau pure, elle prend un aspect légèrement brun
et mordoré,
Les anciens en fabriquaient des étoffes légères et fort
chères.
Dans son Homélie VIII, Sur les riches, saint Basile
s'élève contre le luxe extraordinaire des vêtements, etil
dit : « La mer leur fournit une fleur et une coquille, la
pinne marine, dont les filaments sont plus recherchés que
la plus fine laine des moutons. »
Procope (Edifices de Justinien, liv. III) dit aussi :
«... Une chlamyde faite avec la laine, non pas de celle
que nous produisent les brebis, mais de celle qu'on re-
cueille dans la mer; l'usage est d'appeler pinne marine »
l'animal qui produit cette espèce de laine.
La couleur d'or, ou plutôt jaune d’or (ixoyoÿon), de ces
filaments les faisait avidement rechercher pour en fa-
briquer des étoffes, comme le dit encore Astérius, évêque
d'Amasée au 1v° siècle (Discours sur saint Pierre et saint
Paul).
Mais mieux encore : les jeunesélégantes s’en faisaientdes
198
LE NATURALISTE
faux cheveux, des frisons, comme nous l’apprend Manuel
Philès (1275-1340) dans son poème sur la Nature des
animaux : « La pinne marine porte une espèce de che-
velure extraordinaire, qui ressemble aux toiles d’arai-
gnée ; son lustre, sa teinte agréable et sa légèreté
donnent aux boucles de cheveux des jeunes filles un
charme qui séduit leurs amants. »
Mais les anciens n'ont pas conservé le monopole de la
fabrication de postiches ou même de vêtements avec le
byssus de ce coquillage; au xvire siècle, on en produisait
en assez grande quantité, dont le prix était, d’ailleurs,
fort élevé, et qui constituaient un luxe peu accessible
aux bourses du commun. En 1754, le nape Benoit XIV
recut, d'un des fabricants de ces précieux tissus, une
paire de bas dont il fut ravi, car, malgré leur extraordi-
naire finesse, ils préservaient les jambes de la chaleur
aussi bien que du froid.
Plus récemment, MM. Ternaux ont fait de ces étoffes
avec des pinnes pêchées le long des côtes de la Corse et
de la Sardaigne, et plusieurs marchands de Paris, chez
qui on pouvait les voir, les vendaient jusqu’à frois
cents francs le mètre.
Réaumur appelait ces coquillages les vers à soie de la
mer.
Aujourd'hui encore, à Tarente, à Reggio, à Palerme et
dans les environs de ces villes, on fabrique de merveil-
leux tissus avec ce byssus ; on le file au rouet, et on en
confectionne des bas, des gants, des bourses, etc. La
délicatesse de ces étoffes est tellement grande qu'une
paire de bas de femme peut tenir dans une tabatière de
moyenne dimension.
Poils. — On donna le nom de cilice aux étoffes gros-
sières que les Ciliciens fabriquaient avec des poils de
chèvre et de bouc. Ils en faisaient des vêtements em-
ployés dans tout l'Orient, des tentes et des voiles de
bateaux ; les poils du chameau furent aussi employés au
même usage, et, dans le Bas-Empire, ces étoffes furent
appelées camelots. Elien (XVII, 34) dit que les riverains
de lamer Caspienne avaient une variété de chameaux
dont les poils étaient aussi doux que la fameuse laine de
Milet.
Roseaux. — On en fabriquait des nattes, des vête-
ments plus où moins fins, du papier, etc.
Soie. — Les anciens se servirent de la soie, mais ce
furent les Assyriens qui fournirent pendant longtemps
à l'Europe ces sortes d’étoffes toutes fabriquées. Les con-
quêtes d'Alexandre ayant lié l'Asie à l’Europe par un
commerce non interrompu, on vit s'établir dans l'ile de
Cos (aujourd’hui Stanko) une fabrique de tissus de soie
légers et transparents comme la gaze, que les Grecs et
les Romains payaient exactement au poids de l'or, et qui
ont donné lieu à de virulentes épigrammes contre les
femmes quine craignaient pas de paraître en public
revêtues de ces singulières étoffes.
Parlant des cocons d’où on tire la soie, Pline dit :
«L'art de les dévider et d’en faire un tissu à été inventé
dans l’ile de Cos par Pamphile, fille de Lateüs : ne la
privons pas de la gloire d'avoir inventé pour les femmes un
vétement qui les montre nues (XI, 26). »
Sparte. — Les habitants de l'Espagne méridionale
faisaient des nattes, des chaussures et les habillements
des bergers avec cette graminée, (Pline, XIX, 7.)
Tissus d'or etd’argent. — Aulivre XXXIII de son
Histoire naturelle, ch. 19, Pline dit : « On file et on tisse
l’or comme de la laine, et sans laine. Verrius nous ap-
prend que Tarquin l'Ancien (615-577 av. J.-C.) triompha
revêtu d’une tunique d’or. Pour moi, j'ai vu Agrippine,
femme de l’empereur Claude, assise à côté de lui au
spectacle d'un combat naval, et couverte d’un paluda-
mentum (vélement militaire) en or, tissé sans aucune autre
matière. »
Nos dames n’en sont pas encore là.
Hélogabale portaitune tunique semblable, dit Lampride
(Vie d'Héliogabale, XXII) : awrea omni tunica. Certains
galons, trouvés à Herculanum et à Pompéi, sont égale-
ment d’or pur, sans mélange d'aucune matière textile,
comme aussi ceux qui furent trouvés à Tournai en 1653,
dans le tombeau de Childéric Ier, Winckelmann dit que, de
son temps (milieu du xvi® siècle), on avait découvert à
Rome deux sarcophages dans lesquels il y avait des vête-
ments d'or sans aucun mélange d’autre tissu, et qu’on
avait tiré environ quatre livres d'or de celui qui fut déterré
dans la vigne du collège Clémentin.
On voit que, chez les anciens, le luxe avait atteint des
proportions inouies. Pline parle fréquemment de la
richesse des étoffes que les femmes employaient à leurs
vêtements, de la délicatesse de ces tissus, et surtout de
leur indécente transparence.
J'ai déjà cité un de ces passages au mot soie; en voici
deux autres :
(IV, ch. 20). — « L'ile de Cos, d’après Varron, a
inventé une étoffe fine pour les femmes. »
(NI, 20). — « .… Les premiers hommes qu’on y con-
naisse (dans la Scythie orientale) sont les Sères, célèbres
par la laine de leurs forêts (lasoie). Ils détachent le duvet
blanc des feuilles en l’arrosant d’eau ; puis nos femmes
exécutent le double travail de dévider et de tisser. C'est
avec des manœuvres si compliquées, c’est dans des con-
trées si lointaines, qu'on obtient ce qui permettra à la
matrone de se montrer en public avec une étoffe trans-
parente. »
Toilés peintes. — Les Egyptiens connaissaient les
procédés employés de temps immémorial par les Indiens
pour peindre les toiles de coton, et ils vendaient ces
toiles aux Grecs et aux Romains ; en lisant la description
qu'a faite incidemment Claudien de ces sortes d’étoffes
peintes et des dessins dont elles étaient ornées (Invec-
tives contre Eutrope, livre I, vers 350 et suiv.), on voit
qu’elles ressemblaient fort aux indiennes et aux perses de
n6s jours : c'étaient des enroulements bizarres, des chi-
mères, des êtres fantastiques, etc. Les dessins chinois et
japonais sont absolument dans ce genre.
Voici la traduction de ce passage :
«… Déjà la tortue vole et le vautour porte des cornes;
la mer est apte à porter des fruits, et je vais voir le dau-
phin transporté dans les forêts ; déjà les hommes s'unis-
sent aux limaçons; croyons enfin à tous les monstres
fantastiques que le pinceau du juif enfante sur les toiles
de l’Inde, »
E. SANTINI DE RIOLS.
|
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LE NATURALISTE 199
ILES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
MOIS DE L'ANNÉE |
ESPÈCES NOMS BU LER -PROUVE HABITAT ë
D'ARBRES OU PLANTES GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES FRANCAIS u
NINCETOXICUM:. -:+-...
CyNANCHICA
ODORATA EE une
CyNancuica
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Asclépiade
Abrostola Asclepiadis $S. V.
Aspérule
Chelonia Casta Esp.
Anticlea Rubidata Fab.
Camptogramma Risguata H.
Asphodèle
Aporophyla Australis B.
Polia Canescens B.
Aster
Cucullia Asteris S. V.
Anthemidis B.
Eupithecia Castigata H,
Astragale
Lycæna Alsus $. V.
Toxocampa Lusoria L,.
Aubépine
Leucona Cratægi L.
Thecla Spini S. V.
Aglaope tait L.
Imno Pruni S. V.
Nola Cuculatella L.
Bombyx Cratægi L.
Lanestris L.
Catax L.
Cilix Spinula S. V.
Diloba Cœruleocephala L.
Diphtera Ludifica L.
Asteroscopus Sphinx Hufn.
Tæniocampa Incerta Hufn.
Cerastis Spadicea Gn.
Silene $S. V.
Scopelosoma Satellita L,
Cosmia Pyralina $. V.
Miselia Oxyacanthæ L.
Chariptera Culta $. V.
Amphipyra Pyramidea L.
— Perflua F.
Epione Advenaria H.
Rumia Cratægata L.
Selenia Bilunaria Esp.
Lunaria Schiff.
Tetralunaria Hufn.
Crocallis Elinguaria L.
Boarmia Selenaria H.
Hemithea Strigata Mueller.
Fimbrialis Scop.
Acidalia Imitaria H.
Hybernia Rupicapraria H.
Bajaria S. V.
Marginaria Bkh.
Defoliaria L.
Anisopteryx Æscularia S. V.
Oporabia Dilbutata $. V.
Eupithecia Fraxinata Crewe.
Vulgata Haw.
Dodoneata Gn.
Exiguata H.
Anticlea Badiata $S. V.
Cidaria Picata H.
Cidaria Prunata L.
Chenilles
Asclepias
Juillet.
Asperula
Juin, juillet.
Août, septembre.
Août, septembre.
Asphodelns
Mars.
Mai, juin.
Aster
Juillet à septembre.
Octobre.
Août, septembre.
Astragalus
Mai, juillet.
Mai.
Cratægus
Avril, mai.
Juin, juillet.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai, juin.
Juin,
Juin.
Juin, juillet, sept., oct.
Mai.
Juin, septembre.
Mai, juin.
Juin à septembre.
Mai, juin.
Avril, mai.
Mai, juin.
Mai, Juin.
Mai, juin.
Août, septembre.
Mai.
Mai.
Juillet.
Toute l’année.
Mai, juin, août,
vembre.
no-
Avril, mai.
Juin, juillet, septembre,
octobre.
Mai.
Mai.
Belle saison.
Avril, mai.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai, juin.
Mai.
Mai, juin.
Août.
Juin, juillet.
Juin, juillet,
Septembre.
Juillet, août.
Octobre.
Mars, juin.
Papillons
Mai, juin, septembre.|Paris, Pyrénées-Orientales,
Avril, mai.
Mai à août.
Avril, mai, juillet, août.
Septembre, octobre.
Septembre, octobre.
Mai, juin, août.
Juillet, août.
Mai, juin,
Juin, août.
Juillet.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Juin, juillet,
Juin, juillet.
Juin.
Août, septembre.
Mars à mai, sept., oct.
Mai, septembre.
Avril, mai, juillet, août.
Octobre.
Mai, juillet, août.
Octobre, novembre.
Février, mars.
Septembre, oct., avril.
Septembre, octobre.
Septembre, octobre.
Juin, juillet,
Septembre, oct., nov.
Avril, juin, juillet,
Juillet.
Août.
Juin, juillet.
Mai, juillet, août,
Mars à juin, juillet, sep-
tembre.
Mai à septembre,
Mai à septembre.
Juillet, août.
Mai, juin, août.
Juin, juillet.
Juin, Juillet.
Belle saison.
Janvier, février.
Octobre à mars.
Novembre, fév., mars.
Oct., nov., fév., mars.
Mars.
Octobre, novembre.
Mai, juin.
Mai à juillet.
Mars, avril.
Mai, juin.
Mars, avril, juillet.
Mai à août.
Juillet à septembre.
France orient., mérid.et centr,
France mérid., centr. et orient.
Toute la France.
France méridionale,
France centrale.
France centr. et septentrionale,
Gironde, Cannes.
Toute la France.
Toute la France,
Indre, Basses-Alpes.
Toute la France,
France méridionale, Vosges.
France centrale et méridionale.
Toute la France,
France orientaleet occidentale,
Toute la France,
France centrale et orientale.
Toute la France.
France septentrionale,
Toute la France.
Paris, Chalon-sur-Saône,
Cannes.
Toute la France.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
France centr. et septentrionale.
Paris, Pyrénées-Orientales.
Toute la France.
France centrale, méridionale
et orientale.
Toute la France,
200
NOTE
Sur les Oiseaux de proie
OBSERVÉS
DANS LA RÉGION DE L'ESTUAIRE DE LA SOMME
Je signalerai rapidement les oiseaux de proie diurnes
et nocturnes que l’on peut rencontrer dans nos cam-
pagnes picardes de l’estuaire, soit communément, soit
rarement, soit tout à fait accidentellement. J'insisterai
davantage sur quelques espèces qui, par leur genre de
vie et la nature de leurs habitudes, sont amenées à fré-
quenter plus particulièrement la baie de la Somme ou les
marais Circonvoisins. Pour toutes les espèces néan-
moins, j'indiquerai, avec précision, les époques où s’ef-
fectuent l’arrivée et le départ de ces oiseaux dans nos
parages. C’est, au surplus, l’objet principal de ces obser-
vations recueillies pendant plusieurs années dans une
région dont la position géographique offre de grandes
ressources pour l'étude si intéressante du mouvement des
migrations, non pas seulement — comme on pourrait le
croire en raison de sa configuration spéciale — des
échassiers et des palmipèdes, mais aussi de presque
toutes nos espèces d'oiseaux migrateurs.
Nous voyons voler dans nos champs la Cresserelle
(Falco tinnunculus, Linné), assurément l'oiseau de proie
le plus répandu, qui émigre vers la fin de l'automne pour
revenir dès le milieu de mars — nous en gardons pour-
tant quelques-unes, surtout si l'hiver est doux —; la
Buse vulgaire (Buteo vulgaris, Bechstein), qui est séden-
taire, mais dont quelques individus nous quittent en
hiver, l'Epervier (Accipiter nisus, Pallas), qui niche aussi
dans nos bois. On voit des Eperviers pendant toute l’an-
née, même dans la plus mauvaise saison. Il ne nous reste
cependant que la plus faible partie de ceux que nous
avons pendant l'été. Le plus grand nombre partent à
l'approche de l'hiver. Il en passe dans les mois de no-
vembre et de décembre qui viennent du Nord et se diri-
gent vers le Sud. Ceux-ci repassent au mois de mars,
De tous nos rapaces diurnes, ces trois espèces sont de
beaucoup les plus communes.
Vient ensuite le Hobereau (Falco subbuteo, Linné), qui
n’est pas commun, mais niche cependant — notamment
dans la forêt de Crécy — sur les arbres les plus élevés.
Ce petit faucon est un grand chasseur d’alouettes : ce
gibier délicat l’attire sans doute dans nos plaines en
automne, car en été il se tient presque constamment
dans les bois. L’Emérillon (Falco lithofalco, Gmelin)
passe au printemps et à l’automne, mais en très petit
nombre. Le seul exemplaire de la faune locale que je
possède, un jeune mâle, m'a été envoyé de Cayeux-sur-
Mer et avait été tué sur les falaises d’Ault.
L’Autour (Astur palumbarius, Bechstein) niche en
petit nombre dans nos bois et émigre. Nous en voyons
surtout — qui nous arrivent du Nord — au passage d’au-
tomne.
L'Archibuse pattue (Archibuteo lagopus, Brehm), qui
habite les régions froides de l'Europe et de l'Asie, nous
visite quelquefois dans sa migration d'octobre. La Bon-
drée apivore (Pernis apivorus, Bonaparte) est également
de passage irrégulier à l'automne. Au printemps, quel-
ques couples s'arrêtent parfois dans le pays et nichent.
LE NATURALISTE
Le 24 juillet 1897, j'ai trouvé dans le grand boïs de
Verton, situé un peu au nord de la baie d’Authie, par
conséquent dans une région limitrophe de celle qui nous
occupe, un nid de Bondrée apivore. Ce nid était très ap-
parent, à une hauteur médiocre, à la première enfour-
chure d’un hêtre, et à peu de distance d’un chemin. Il
contenait deux jeunes en duvet, l’un beaucoup plus fort
que l’autre. Chez le premier, les tuyaux des plumes, des 3
ailes, des épaules et de la queue commencaient à parai-
tre ; le second, plus de la moitié moins gros, n'avait en- 4
core que du duvet. Ce duvet était entièrement blane, le
bec noir, un peu jaunâtre à la base, la cire et les pieds
jaunes d’or, plus pâles ettournant au citron chez l'oiseau
le moins avancé.
Le fondement du nid était formé de morceaux de bois
assez forts et le reste de petites branches avec leurs
feuilles ; dans le bas, elles s'étaient pourries et trans-
formées en une espèce de terreau très serré et durci.
Sur les bords du nid, j’ai trouvé une taupe et des frag-
ments plus ou moins considérables de nid de guëpes. Je
m'emparai des jeunes et le lendemain les parents furent
tués par un garde.
Le Milan royal (Milvus regalis, Brisson) est rare, Quel]-
ques sujets isolés se montrent parfois en automne et en
hiver.
D'autres rapaces diurnes font des apparitions acciden-
telles. L’Aïgle fauve (Aquila fulva, Savigny) a été tué, en
hiver, dans la forêt de Crécy et dans celle d'Eu. L’Aiïgle
tacheté (Aquila nævia, Brisson) se montre de loin en
loin, en automneet en hiver, dansles bois quiavoisinent
les côtes. Presque toujours des jeunes.
Enfin le Gerfaut islandais (Hierofalco islandicus, Brehm)
aurait été tué à Feuquières et à Oisemont. Cet oiseau,
que l’on peut considérer comme une race géographique
du Gerfaut blanc (Hierofalco candicans, Bonaparte), a
pour patrie l'Islande. Il est certain néanmoins quil
descend quelquefois dans des contrées moins septentrio-
nales.
Pour mémoire, un Gyps fauve (Gyps fulvus, G. R.
Gray), de la collection Baïllon, tué aux environs d'Ab-
beville. MN à
Parmi les oiseaux de proie nocturnes, l'Effraye (Strix
flammea, Linné) est le plus commun et le plus sédentaire
de tous nos Strigidés. La Hulotte chat-huant (Syrnium
aluco, Brehm) est également très répandue. Communs
aussi et sédentaires, le Hibou vulgaire (Otus vulgaris,
Fleming) et la Chevêche (Noctua minor, Brisson).
M. Baillon cite dans son « Catalogue » une capture de
Surnie horfang (Surnia nyctea, Keyserling et Blasius), la
grande Chouette blanche du cercle arctique, faite dans la
contrée.
PYGARGUE, — M. Marcotte donne le Pygargue ordi-
naire (Haliactus albicilla, Leach.) comme étant de pas-
sage annuel sur les côtes de Picardie. Il arriverait, selon …
cet auteur, à la fin de l’automne, pour retourner dans le
Nord en février ou au commencement de mars. 2
Les apparitions de cet oiseau sur nos côtes sont loin
d'avoir cette régularité. Pour ma part, je l’ai observé une
seule fois dans la baie de Somme. Pendant l'hiver de 1889,
un couple a séjourné une huitaine de jours à l'entrée de
la baie. Ces oiseaux s'aventuraient, à basse mer, dans
l'intérieur. Je les ai vus plusieurs fois posés sur un banc
de sable. Je ne sache pas qu’on en ait revu depuis dans |
les mêmes parages, É
D'après M. Marcotte, les deux exemplaires qui
|
|
LE NATURALISTE 201
existent dans la collection de Lamotte, aujourd’hui au
musée d’Abbeville, auraient été abattus du même coup
de fusil au moment où ils dépeçaient, en compagnie de
trois autres individus, une vache morte.
Les auteurs de l'Ornithologie européenne disent aussi
qu’en octobre et novembre le Pygargue ordinaire est de
passage régulier le long de nos côtes maritimes, surtout
entre Abbeville et Montreuil-sur-Mer, mais qu'on n'y voit
jamais que de jeunes sujets ou des individus non
adultes.
Cette assertion est inexacte, au moins en ce qui con-
cerne ces vingt dernières années. Actuellement, le pas-
sage du Pygargue sur les côtes de Picardie est au con-
traire assez irrégulier et cet oiseau y est devenu plutôt
rare.
C’est à la suite des bandes d’oies et de canards que ces
grands rapaces nous arrivent à l'automne. Ils se nourris-
sent aussi de poissons et sont habiles à les saisir dans
l’eau. En 1889, les pêcheurs de la pointe de Saint-Quentin
qui établissent des parcs sur le bord de la mer remar-
quèrent que les Pygargues dont j'ai parlé plus haut
cherchaient à les piller. Ils tirèrent sur eux des coups de
fusil sans pouvoir les atteindre, mais ils forcèrent ainsi
ces oiseaux défiants à s'éloigner.
BALBUZARD. — Le Balbuzard fluviatile (Pandion haliac-
tus, G. Cuvier) visite chaque année, à l'automne, nos
dunes et nos étangs et les bords de la Somme. Il arrive
ordinairement dès la fin du mois de septembre et en
octobre, et séjourne souvent jusqu’à l'entrée de l'hiver.
Il fréquente peu, chez nous, le bord de la mer, Il préfère
les terres basses, les marais, le voisinage des étangs et
des cours d’eau, Dans les dunes de Saint-Quentin, qui
S’étendent entre le rivage et des fonds semés de mares,
on est presque sûr d’en rencontrer en septembre, octobre
et novembre, Les gardes de la garenne m'ont apporté
plusieurs sujets tués par eux à cette époque. Ces oiseaux
sont retenus sans doute en ce lieu par l'abondance des
oiseaux de rivage qui s’y retirent aux heures de haute
mer, car si le Balbuzard est surtout ichtyophage, il ne
l’est pas exclusivement, en dépit des affirmations de
quelques auteurs. Brehm, entre autres, prétend que cet
oiseau n'a pas d'autre nourriture que le poisson. C’est
une erreur. Sur quatre individus que j'ai ouverts, deux
avaient, il est vrai, l'estomac rempli de débris de pois-:
sons, mais celui du troisième ne contenait que des lam-
beaux de chair et des plumes. Le quatrième était com-
plètement à jeun. Brehm ajoute que tous les oiseaux
aquatiques connaissent le Balbuzard et ne le redoutent
nullement, et qu'il a vu près du lac Mensaleh, dans la
basse Égypte, des Balbuzards au milieu des canards,
sans que ceux-ci parussent s'inquiéter de leur pré-
sence. Il ne m’a pas été donné d’assister à ce spec-
tacle idyllique au cours des deux voyages que j'ai faits
en Égypte. J'ai vu en hiver, sur les rives du lac Mensa-
leh, des troupes innombrables d’échassiers et de palmi-
pèdes, j'ai vu aussi des Balbuzards, mais ces derniers se
tenaient constamment au large, planant au-dessus du
lac. Il est probable que sur ces eaux poissonneuses ils
ne doivent vivre que de pêche. Dans tous les cas, s’il est
hors de contestation que le régime diététique du Balbu-
zard se compose principalement de poisson, il est hors
de doute également, comme on vient de le voir, que
l'oiseau peut quelquefois le varier en lui associant la
sauvagine, et j'ai lieu de croire que les canards du lac
: Mensaleh ne nourrissent pas à l'endroit du caractère in-
offensif et des intentions pacifiques du Balbuzard une
confiance aussi absolue que celle du naturaliste alle-
mand.
FAUCON PÈLERIN. — Le Faucon pèlerin (Falco pere-
grinus, Brisson) est de passage annuel dans la baie de
Somme, en octobre et novembre. On le rencontre même
parfois en décembre et janvier. Ilrepasse ensuite en mars,
Pendant son séjour sur nos côtes, il fait la chasse aux
canards etaux échassiers, On le voit souvent alors fondre
avec impétuosité sur une bande d’échassiers et, passant
au milieu d’un vol foudroyant, saisir avec sa serre un de
ces oiseaux.
Les chasseurs au hutteau en tuent de temps en temps
qui se précipitent sur leurs appelants (éfombis), oiseaux
empaillés ou en bois. Il y a quelques années, un pêcheur
de la côte m'apporta une vieille femelle qu'il avait tuée
le matin, au petit jour, pendant qu’elle était occupée à
dévorer un milouin pris dans un « fleuron ». L'oiseau,
solidement cramponné sur sa proie et balancé par le vent
avec le filet, tirait avidement des lambeaux de chair à
l'aide de son bec crochu. Les pêcheurs, en visitant leurs
filets à oiseaux, à l’époque du passage, trouvent assez
fréquemment des captifs en partie dévorés. Ces méfaits
doivent toujours être portés à l'actif du Pèlerin.
BusARps. — Les Busards sont, par excellence, les
oiseaux de proie des marais. L'espèce la plus répandue
dans notre région est le Busard harpaye (Circus ærugino-
sus, Savigny). Commun dans nos marais, nos prairies
humides, et sur les bords de nos étangs couverts de ro-
seaux, il y niche et se montre en toute saison. Son nid,
que j'ai trouvé plusieurs fois, est établi à terre, au milieu
des roseaux. Il est assez grossièrement construit de
joncs, de roseaux et de chaume. Les œufs, ordinairement
au nombre de quatre, sont d'un blanc légèrement azuré
et de forme arrondie.
Le Busard harpaye vit d'oiseaux aquatiques, de petits
mammifères, de grenouilles, de poissons, et pendant la
saison des amours détruit un grand nombre de couvées
d'oiseaux de marais. Nos chasseurs ont pris en haine, à
cause de ses déprédations, ce concurrent déloyal et le
servent régulièrement d'un coup de feu toutes les fois
qu'ils le croisent sur leur route.
Le Busard Saint-Martin (Circus cyaneus, Boie) est, au
contraire, assez rare dans nos marais, et s’il y niche,
ce ne serait qu'accidentellement.
Le Busard montagu ou cendré (Circus montagui, Vieil-
lot) est moins rare que l'espèce précédente. Il arrive vers
le milieu d'avril, niche, passe toute la belle saison et re-
part dans le courant de septembre.
Une espèce qui habite l'Europe orientale, ainsi que
l'Asieet l'Afrique, le Busard pâle (Cüreus pallidus, Sykes),
ferait des apparitions accidentelles dans notre région.
M. Baillon possédait dans sa collection deux sujets qui
avaient été capturés aux environs d'Abbeville.
HiBou BRACHYOTE. — Le Hibou brachyot? (Ofus bra-
chyotus, Boie), à l'époque de sa migration d'automne, en
octobre et novembre, est, chez nous, presque exclusive-
ment un oiseau de marais. Il se tient à terre, jusqu'au
milieu des jones et des roseaux, où il guette les grenouil-
les, ou bien il fait la chasse aux campagnols et aux mu-
lots. Il se laisse approcher souvent au point de partir
dans les jambes. Il y a des années où le passage est ex-
trémement abondant, d’autres années, au contraire, où
l'on en voit fort peu.
MAGAUD D’ AUBUSSON.
'
La
RÉERRE SITE
Ne meme
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202
LE NATURALISTE
LA PROPRETÉ OÙ LOGIS CHEZ LES ANIMAUX
La propreté— qu'ignore si souvent l'espèce humaine
— esttrès répandue chez les animaux et je ne serais pas
étonné si une statistique établissait qu’elle est la règle
chez eux. Elle s'y manifeste de nombreuses façons,
notamment par le soin qu'ils prennent d’entretenir l’in-
tégrité de leurs téguments et aussi par l'attention avec
laquelle ceux qui habitent un logis cherchent à ne pasle
souiller. C’est ce dernier point que, seul, nous examine-
rons dans cet article, d’après les documents rassemblés
avec le plus grand soin par le D' Paul Baillon.
Tout d’abord, c’est un fait presque général que les
animaux sortent du logis qu'ils se fabriquent ou qu'on a
mis à leur disposition pour aller déposer leurs déjections
au dehors. Les ouistitis captifs, par exemple, les en-
voient toujours au dehors de leur cage, ce qui — entre
parenthèses — n’est pas des plus agréables pour leur
propriétaire ; les chiens, dans le même but, sortent de
leur niche et le renard de sa taniere.
Le terrier du blaireau est toujours très propre. Si,
d'aventure, il aété rendu inhabitable par quelque mal-
propreté, le maître du logis déménage. On sait que le
renard a habitude de s'approprier ee terriers creusés
par d’autres animaux, et de les aménager ensuite à son
goût. Quand il veut s'établir dans le logement d’un blai-
reau, il use, dit-on, d’un moyen que lui suggère la pro-
preté bien connue de cet animal : il salit l'entrée de son
terrier. Le blaireau se hâte d'enlever cette immondice.
Le renard revient à la charge, tant et si bien que le
pauvre plantigrade finit par céder la place. En agissant
ainsi, le renard a conscience de ce qu’il fait : soumis à
de semblables répugnances, il déguerpit, lui aussi, si l'on
dépose des excréments humains à l'entrée de son terrier.
Brehm rapporte l’histoire d’une lionne du Soudan,
qu’il avait apprivoisée et à laquelle il donnait la liberté,
dès qu’on avait jeté l'ancre, sur les bords du Nil. C’était
alors, dit-il, des gambades à n’en plus finir; elle en pro-
fitait chaque fois pour satisfaire ses besoins ; car elle
aimait tellement la propreté que, pendant tout le trajet,
elle n’a jamais sali sa cage.
Les écureuils en liberté ne souillent jamais leur nid.
Il paraît en être souvent de même lorsqu'on les met
dans ces cages tournantes bien connues, M.le D' Paul
Baillon à constaté que, pour les actes de la défécation et
de la miction, ces gracieuses bêtes sortent de la boîte
en bois qui leur sert de refuge.
Le cylindre tournant, réservé à leurs ébats, reçoit
toutes les déjections. Les petites crottes tombent sur la
planchette placée en dessous. Quant à l'urine, ils la pro-
jettent avec force vers l'extérieur, à travers le grillage
métallique, tout en faisant leurs évolutions : si la petite
bête vous tourne le dos, méfiez-vous, car les rongeurs
urinent en arrière. En outre, les écureuils, lorsque la
cage est appliquée contre une muraille, ne manquent
guère de lancer le contenu de leur vessie, non pascontre
le mur, mais du côté opposé, Les campagnols communs
en captivité, d’après Lataste, ne font jamais leurs or-
dures dans leur nid et,de plus, quand ils sortent de l’eau,
pour ne pas mouiller celui-ci, ils ont la précaution de
s'essuyer le poil et de se laisser sécher.
Des faits du même ordre s’observent chez les oiseaux.
Les poules, dans le temps qu’elles couvent, vont fienter
à une grande distance.
Elles ne satisfont d’ailleurs ce besoin qu’à de rares
intervalles, et comme à la dérobée. Aussi, les matières
s'accumulent dans leur cloaque, s'y durcissent, s’y en-
duisent d’une épaisse couche de glaires blanches; et il
n’est pas une fille de basse-cour qui ne reconnaisse de
pri me abord, à son volume, à sa forme, à sa consistance
et à sa couleur, la fiente d'une couveuse. À peine éclos, l
les petits imitent la propreté de leurmère. Dans le Midi, #
les ménagères ont coutume d'enlever du nid les pre- 4
miers poussins qui ont brisé leur coquille. M. Baillon
a remarqué que ces petits êtres ne salissent jamais leur :
couchette: ils attendent pour fienter le moment où on à
le s retire pour les faire manger. Le même naturaliste Ç
parle d’un héron cendré à la disposition duquel on a ;
mis un grand bassin en zinc, où on lui donne sa nour- $
riture et où il passe à peu près tout son temps : jamais Le
cet oiseau ne fiente dans son bassin, ni sur la pelouse
qui l’avoisine.
Beaucoup d'insectes ont la propriété d'envoyer leurs
excréments au loin. On en rencontre, par exemple, chez
la chenille du saule si bien décrite par Lyonnet. Quand
une des crottes de cet insecte, naturellement dures, a été
poussée presque entièrement hors de son corps, il sait
l'élancer comme un ressort, et la faire voler jusqu'à un
pied par dessus et au delà de sa tête de sorte qu'il n’est
guère exposé à en avoir de l’incommodité,.
La chenille, avant de s'enfermer dans un cocon, a soin
de se vider, D’après Swammerdam, la larve d’un Hymé-
noptère, de la famille des Tenthrédines produit, sur les
feuilles du saule, des galles dans lesquelles, quand on
les ouvre, on trouve des tas d'ordures. Mais, lorsque ces
vers ont pris tout leur accroissement, « ils ne manquent
jamais de faire une ouverture à cette prison dans laquelle
ils se trouvent trop à l’étroit; ensuite, ils vont passer leur
derrière (sic) par le trou qu’ils ont pratiqué, afin de se
vider de leurs excréments au dehors». Une petite teigne,
mineuse des feuilles d'orme, dont la larve se fait,avec ces
feuilles, un fourreau ouvert aux deux bouts, se voit dans
la nécessité, quand elle a grandi,de se fabriquer un vête-
ment neuf. Pendant cette opération, ainsi que Réaumur
l'a observé, s’il arrive que les larves aient besoin dese vider,
«elles rentrent dans le vieux fourreau; elles font
remonter leur derrière jusqu'à son bout postérieur, qui
ne manque pas alors de s'ouvrir pour laisser sortir un
petit grain noir et dur qui est comme dardé à quelque
distance du fourreau ; elles retournent ensuite dans la
feuille qu’elles ont creusée, pour continuer leur travail ».
Une autre espèce, mineuse des feuilles du chêne, ne
garde jamais aucun excrément dans son logement. Quand
elle veut se vider, elle marche à reculons, jusqu’à ce que
l'extrémité de son abdomen soit près du bord de la
feuille, où se trouve une fente par où les crottes tombent
en dehors. Enfin,pour ne pas trop multiplier les exemples
relatifs aux insectes, nous ne citerons plus que le cas
d’une teigne, qu’on trouve dans une pomme véreuse et
qui à la précaution, avant de quitter le fruit, d’en opérer
la vidange en transportant au dehors ses excréments. «Il
vient un temps, dit Réaumur, où elle les jette au dehors
parce qu'il arrive un temps où la chenille, qui s'était
tenue vers le centre de la pomme, s'ouvre un chemin
jusqu’à sa circonférence; elle entretient ce chemin ouvert
et vient, pendant quelques jours de suite, jeter ses excré-
ments à l’endroit où 1l se termine.
LE NATURALISTE
——_——
203
Les animaux que nous venons de citer se bornaient à
jeter leurs excréments au dehors, cà et là;il en est
d’autres qui ne laissent pas ces derniers à la surface du
sol et les enfouissent dans la terre : le fait a été maintes
fois observé chez le chien, le chat, le loup, le pangolin,etc,
Cette habitude paraît cependant ne pas être normale
chez eux, mais plutôt accidentelle.
D'autres animaux déposent leurs excréments en des
endroits fixes qui peuvent passer à juste titre pour de
véritables w.-c. M. Baiïllon en cite de nombreux
exemples, nous ne retiendrons que les principaux.
Si l'on veut voir des cabinets d’aisances confortables à
l'intérieur du logis, il faut visiter la demeure d'hiver de
la marmotte vulgaire. Elle pratique un terrier profond,
formé le plus souvent de deux galeries aboutissant à une
sorte de cul-de-sac. Chaque terrier est l'ouvrage et la
propriété d'un certain nombre d'individus constitués en
société, ou du moins en famille. En hiver, le sommeil
hivernal de la marmotte s’interrompt de quinze jours en
quinze jours environ, quand la vessie, pleine d'urine,
force l'animal à s’en débarrasser. « La marmotte, dit
Saec, sort alors à moitié de sa torpeur, se rend, les yeux
en général fermés, à l’endroit qu'elle a choisi, et qui ne
change jamais, pour y laisser ses déjections, et puis
regagne paisiblement son matelas de foin, »
D'après Brehm, les huttes en dme des Ondatras, ou
rats musqués du Canada, se composent de plusieurs
galeries, ayant des destinations différentes. Quelques-
unes aboutissent à des compartiments profonds, exclusi-
vement destinés à recevoir les ordures. Si l’on en croit
le commandant Loche, le Porc-Epic est tout aussi pré-
cautionneux. « Il est nocturne et passe la journée au
fond du terrier qu’il se creuse, et qui consiste en deux
compartiments ayant la forme d’un four : l'un qu'il
habite, et qui est très propre, l’autre où il dépose ses
excréments.
La marmotte de l'Amérique est encore plus propre :
d'apres Godman, elle tient son gite dans un état remar-
quable de propreté; elle ne dépose pas ses vidanges à
l'intérieur, elle va chaque fois à quelque distance creuser
un trou d'un décimètre de profondeur, elle remet ensuite
la terre et la tasse fortement du museau,
Le blaireau creuse, près de son donjon, un comparti-
ment où les petits vont se vider, et où il enterre aussi
tous les débris de leurs repas. Le fait a été aussi cons-
taté chez des blaireaux captifs. A côté de leur première
pièce, qui leur servait de chambre à coucher, raconte
Brehm, ils en firent une autre, comme chambre de pro-
visions, et trois autres petites, où ils déposaient leurs
ordures.
En parcourant les bois taillis hantés par les lapins, on
trouve, non loin des terriers, au milieu des clairières
sablonneuses, des élévations de terrain, telles que d’an-
ciennes charbonnières, que ces animaux fréquentent
assidûment. On le reconnait sans peine aux traces nom-
breuses de leur piétinement, aux égratignures du sol, et
à la quantité de crottin qu'on y rencontre. Ces endroits
sont, à n’en pas douter, pour les lapins, de véritables
W.-c. publics.
Les lamas Guanachos ont des endroits où ils réunis-
sent leurs excréments. « J'en ai vu, dit Darwin, un tas
de huit mètres de diamètre; comme cette habitude se
rencontre chez toutes les espèces de ce genre, elle doit
être imstinctive; mais il est malaisé de penser qu’elle
‘ puisse être en quoi que ce soit utile à l'animal, bien
qu'elle le soit aux Péruviens, qui emploient ce fumier
desséché en guise de combustible. »
À cette liste déja longue, M. Baillon ajoute le porc.
« Celui-ci, dit-il, craint, lui aussi, de souiller sa couche.
En dépit des conditions déplorables où cet animal est
placé par l’homme, et des habitudes immondes qui en
résultent, l'instinct originel se fait jour encore, lorsque
les circonstances le permettent. C'est par l’effet du
hasard que j'en ai acquis autrefois la preuve. La porte
d'un toit à porcs ayant été brisée, l'hôte du logis put
vaguer à son aise dans sa loge et dans la petite cour atte-
nante, Précisément, la litière venait d'être renouvelée.
Or, pendant tout le temps que l’animal put sortir libre-
ment, c'est-à-dire pendant plusieurs jours, 1l ne man-
qua jamais d'aller déposer ses ordures dans un coin de
la cour, le plus reculé. Comme je partageais alors lopi-
nion commune,si défavorable à ces Pachydermes, ce fait
me frappa. J'en ai, depuis lors, vérifié maintes fois la
réalité. Le cochon ne se vide jamais dans son réduit
s’il peut en sortir. On m'a cité plusieurs de ces bêtes qui
préféraient souffrir de besoins non satisfaits, plutôt que
d'en venir à cette extrémité, D'ailleurs, il est facile de
s'assurer que le premier soin des porcs, quand on ouvre
la porte de leur toit est d’uriner, ce qu'ils font par jets
saccadés et longuement, preuve évidente qu'ils se sont
longtemps retenus. Un détail à noter chez ces animaux,
c'est qu'ils ne sont pas étrangers à l’arrangement de
leur couche. J'en ai vu un, qui, libre d'aller et venir,
prenait au dehors, dans sa bouche, une botte de paille,
l’'emportait sous son toit, et la disposait de son mieux
pour s'y coucher, Parfois, s’apercevant sans doute que
cette paille n'était pas assez propre, il la reprenait avec
les dents et la rapportait où il l'avait prise. »
Enfin, dans presque tous les nids, les parents enlèvent
les excréments de la progéniture, de même que les cada-
vres, les détritus et autres immondices, soit en les man-
geant, soit en les portant tout simplement au dehors.
Henri COUPIN.
GÉOLOGIE
ANCIENNETÉ DE L'HOMME
Aujourd'hui on croit communément, parmi les gens qui se
piquent d'être au courant de la science contemporaine, que
l’homme est sur la terre depuis un temps indéfini, pouvant se
chiffrer par des centaines de milliers d'années. Disons-le tout de
suite, nous croyons que c'est une grave erreur. Nous le croyons
parce que nous avons de bonnes raisons pour croire que
l'homme est beaucoup moins vieux qu'on ne le suppose, et que
la Bible, traduite d’après la version des Septante, parait être
beaucoup plus près de la vérité quand elle parle d'une douzaine
de milliers d'années.
On voit qu'il y a bien loin de ce chiffre à celui donné plus
haut, car ces deux chiffres sont dans la proportion de 4 à 25 ou
50. peut-être. Qui croire entre les deux? Le dernier. Pourquoi?
Le voici.
Pour étre sincère en ces questions, il faut être absolument
sans parti pris. Or, la première question qui se présente à nous
est celle-ci: On ne trouve guère de squelettes authenliques
remontant à plus de 2 ou 3 mille ans. Comment pourrait-on oser
affirmer avec certitude qu'un squelette trouvé dans un terrain,
qui a pu demander des centaines de milliers d'années pour se
former, se soit conservé sans altération? Il n'en est plus de
même des moulages pétrifiés, qui peuvent se conserver un
temps pour ainsi dire illimité. Or,a-t-on jamais trouvé de sque-
lette humain dans ces conditions? On voit donc que la probabi-
lité de rencontrer un crâne humain même seulement de 10 à
12 mille ans d'existence est tout ce qu'il y a au monde de plus
incertain. De sorte qu'il est toujours téméraire d'affirmer qu'un
os humain, trouvé dans un terrain aussi ancien que le tertiaire,
provient bien réellement d’un homme vivant à cette époque aussi
lointaine.
Quand on réfléchit au nombre considérable de causes maté-
rielles différentes pour lesquelles un objet fabriqué par l'homme
où même un os isolé peut se déplacer, ne serait-ce que par le jeu
des infiltrations locales, qui produisent parfois de véritables fis-
sures d'une profondeur excessive; quand on pense avec quelle
facilité elles peuvent être oblitérées par la dégradation des ter-
rains mêmes où elles se sont produites, on ne peut réellement
plus rien affirmer du tout. Aussi croyons-nous que l'on ne peut
guère espérer trouver la vérité en se basant sur des considéra-
tions aussi dangereuses, c’est-à-dire aussi sujettes à l'erreur et
surtout aussi contestables. Il est beaucoup plus simple de cher-
cher la vérité par d'autres voies plus sûres pour entrainer la
conviction.
Quand on voit l’homme préhistorique contemporain des ani-
maux, pourquoi ne pas rechercher à suivre la succession de ces
différentes espèces, afin de caractériser ces diverses catégories
d'hommes plus ou moins anciens, suivant qu'ils ont vécu avec
telle ou telle catégorie d'animaux, par exemple? Ainsi l'homme
qui est trouvé avec des débris de rennes et de mammouths, dans
notre pays, est bien évidemment un ancêtre vivant au temps de
ce que l'on a appelé la période glacière; car ces animaux n'ont
pu venir jusqu'à nous que parce qu'il y avait des glaces dans
nos régions, qui leur permettaient de trouver, dans le voisinage
des glaciers de notre pays les conditions de température voulues
pour qu’ils puissent y vivre. Il est clair que le mammouth, avec
son épaisse fourrure, est, comme l'ours, un animal des régions
froides, telles qu'on les rencontre dans les pays du Nord, ou
encore à des altitudes suffisamment élevées même dans les pays
chauds. Il en est de même pour le renne. Le renne et le mam-
mouth prouvent tout simplement que nous avions des glaciers chez
nous, dans les Pyrénées et dans les Alpes, et même sans doute
beaucoup plus loin, alors que le climat de Paris se rapprochait
de celui de la côté d'Azur: on y voyait des lauriers-roses et bien
d'autres plantes et animaux de pays plus chauds que le nôtre.
Tant qu'on n'aura pas calculé l'époque précise de la période
glacière, on ne pourra rien dire de précis sur la date de l'appa-
rition de l’homme sur la terre,
Or, la période glacière a commencé dans nos pays avec le sou-
lèvement des Pyrénées et des Alpes. L'homme est postérieur à
cette date; du moins, l'homme d'aujourd'hui, le seul que nous
ayons à considérer. Car rien ne nous permet d'affirmer qu’il n'y
en a pas eu d'autres avant lui, à d'autres époques, bien qu’on
n'ait jamais songé à l’'admettre. De ce qu'on n’a encore trouvé
aucun de ses débris, cela ne veut pas dire qu'on n’en trouvera
jamais. Mais laissons ce point intéressant de côté.
L'homme d'aujourd'hui remonte-t-il au début de la période
glacière ou plus tard? C’est ce que la géologie nous apprendra
un jour. Il semble admis que l’homme n’a paru que dans le
cours de cette période, au début ou plutôt vers le début de
l'époque quaternaire, après les singes anthropomorphes évidem-
ment.
Or, il est un point extrêmement important, sur lequel on n'a
pas assez insisté, et que nous désirerions faire ressortir ici:
c'est qu'il suffirait que les Alpes, qui s'usent tous les ans, aient
eu seulement quelques centaines de mètres de plus pour que les
glaciers se soient étendus à une très grande distance. Il ne fau-
drait pas croire par exemple que si les Alpes avaient le double
de leur hauteur actuelle, les glaciers auraient le double de leur
étendue présente; car ils seraient alors mille fois plus vastes en
surface et incomparablement plus épais encore; de sorte que leur
érosion aurait pu être dans ces conditions-là plusieurs millions
de fois plus grande autrefois qu'aujourd'hui. [l suffit de savoir
que, sous nos climats, la limite des glaciers est à tel niveau
moyen, pour que tout ce qui est au-dessus de ce niveau soit cou-
vert de neiges éternelles. Quand on songe à quel énorme volume
d'eau donnerait naissance un pareil glacier, surtout avec une
température plus élevée que celle d'aujourd'hui, entretenant un
état hygrométrique de l'air ambiant 2 ou 3 fois plus considé-
rable peut-être, on comprend alors qu'il suffit que les Alpes
aient été seulement plus hautes qu'aujourd'hui pour expliquer
l'abondance des eaux courantes qui ont raviné nos vallées
actuelles: aussi bien celle du Rhône que celles de la Seine, de
la Loire et de la Garonne. Or, que les Alpes aient été plus
hautes autrefois que de nos jours, c'est une vérité de Lapalisse,
puisque tous les ans elles perdent encore plus de 4 million de
LE NATÜRALISTE
mètres cubes, du moins tout le bassin du Rhône. Autrefois, elles
en perdaient bien plus encore qu'aujourd'hui, et cela pour deux
raisons dont les causes sont bien démontrées: 1° les pluies
étaient plus abondantes, puisque la température était plus
élevée; 2 la dégradation des montagnes était plus grande,.
puisque l'eau tombait de plus haut dans la vallée; double cause
pour que l'érosion fût, suivant les cas, 2 fois, 10 fois, 400 fois,
1.000 fois plus considérable autrefois que de nos jours. Par suite,
cette période quaternaire a pu être 500 fois plus courte peut-être
qu’on ne le pense, peut-être 100 fois, peut-être seulement 50 fois
plus courte. De sorte qu'au lieu de durer un demi-million
d'années et plus, la période quaternaire n'a peut-être duré que
10 ou 12 mille ans, du moins depuis la création de l'homme.
Dr Boucox.
LIVRES NOUVEAUX
La photographie des couleurs, par C. Rucxerr. Un beau
volume illustré de nombreuses gravures et de quatré planches
hors texte. 1 franc, franco 1 fr. 15.
Pendant de nombreuses années, on pourrait presque dire de-
puis l'heure de la découverte de Niepce et de Daguerre
(1833), une question préoccupait vivement les spécialistes : celle
de la photographie des couleurs.
Ce n'était pas tout de perfectionner le daguerréotype; la pho-
tographie ne donnait jamais que la reproduction des objetsou des
physionomies, sans cette vie que prète la couleur aux choses et
qui fait leur variété et leur charme.
Il faut lire l'excellent et substantiel petit volume que nous
donne un maitre compétent, M. C. Ruckert, dans la collection
des « Livres d'Or », pour suivre ce long effort des savants en
vue de permettre à la photographie de reproduire les couleurs.
Il y a là toute une série de chapitres fort bien documentés expo-
sant chaque tentative, chaque système employé, jusqu'aux der-
nières découvertes de M Lippmann et de MM. Lumière.
Après nous avoir donné l'historique de la question et présenté
toute la théorie, M. Ruckert nous indique les divers procédés
tour à tour employés. Voici d'abord la photographie directe des
couleurs par peinture d’une couche sensible sous l’action de la
lumière; voici la photographie indirecte des couleurs, et voici
également la synthèse temporaire, puis la synthèse durable des
couleurs. Ce volume s'ouvre par trois chapitres d'enseignement
général : notions générales sur les couleurs des corps fonda-
mentales ou dues aux interférences, et notions de photographie.
De même il se termine par quelques données sur l'application
pratique; la photographie en couleurs par impression photomé-
canique, la photogravure par le tirage des couleurs obtenu sur
une surface unie sensible. Les appareils les plus récents pour
opérer dans ce sens nous sont indiqués et décrits.
Aujourd’hui que la photographie est un art si répandu, si
utile, si charmant aussi, chacun voudra se procurer le volume
de M. Ruckert, car il sera immédiatement à même de pouvoir
accomplir ce tour de force réputé longtemps impossible : saisir
et fixer la couleur dans une image, et pouvoir reproduire cette
image à un grand nombre d'épreuves ou d'exemplaires.
Les Gaulois, leurs origines et leurs croyances.
1 volume in-18 avec gravures, 2 francs, franco 2 fr. 20.
La « Bibliothèque d'histoire et de géographie universelles »
ne pouvait faire un début plus heureux que par la publication
du remarquable petit volume que nous avons sous les yeux. Le
sujet choisi intéresse directement le public français tout entier,
et la signature de l’auteur donne au volume une grande garantie
de compétence.
M. André Lefévre est en effet un de nos maitres au renom
consacré. Il a aussi le talent de présenter la science de façon à
la rendre accessible à tous.
La France devait ouvrir naturellement la marche dans cette
bibliothèque. Les deux appellations qui désignent notre pays
— Gaule et France — se confondent encore et se trouvent justi-
fiées dans l’esprit de ses habitants, car nous sommes à la fois
les descendants des Gaulois et des Francs; ceux-là furent en
tous cas nos premiers ancêtres à côté des Ligures et des Ibères
LE NATURALISTE 2
La Gaule est sortie de ce mélange du monde celtique avec les
anciennes peuplades préhistoriques dont M. Lefèvre suit chez
nous la descendance.
Il importait de reconstituer ces archives de notre passé.
M. André Lefèvre, dans une série de chapitres pleins d’origina -
lité et d'intérêt, nous présente ce tableau d’une race. Tout était
là à reconstituer et ce petit volume si varié ne néglige pas de
nous initier à son état moral et intellectuel. Après avoir décrit
la Gaule avant César, l’auteur nous montre la guerre des Gaules
où César triomphe enlevant pour cinq siècles son indépendance
à un peuple valeureux, mais préparant ainsi son assouplisse-
ment à une grande civilisation.
Comme corollaire de cette partie historique proprement dite,
M. Lefèvre nous montre la langue gauloise et les idiomes qui y
confinent et nous retrace la si curieuse mythologie gauloise dont
nous retrouvons encore les restes dans bien des coutumes ou
superstitions locales. Puis, c’est le druidisme et le sacerdoce
gaulois qui sont évoqués, et un chapitre spécial nous offre les
origines et les croyances de la Grande-Bretagne et de l'Irlande
apparentées à notre pays.
Tel est le livre dont nous n'avons pu donner ici qu’une es-
quisse, mais qu'il faut lire comme prélude de toute histoire de
France. Le texte est orné de gravures documentaires qui repré-
sentent des armes, des médailles ou les images des dieux gau-
lois, tels que nos ancêtres les ont figurés.
ARRIVAGES
COLÉOPTÈRES DE PROVENANCES DIVERSES
S'ADRESSER A
LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, NATURALISTES
; 46, RUE DU BAC. PARIS
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— Viipunchventre. Grèce... mur... 2 »
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coquilles non fossiles.
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Elachista. Tr.
El. Hedemanni, p. 524. — El. Heringi. p. 525.
Verh. K.K, Zool. Bol. Wien. #9, 1899, pp. 523-526.
51. Ricardo (G.). Notes onthe Pangoninæ of the Family
Tabanidæ in the British Museum Collection.
Pangonia flavescens, p. 174, pl. 1, fig. 6. 6°. —Erephro-
sis auripes, p. 116, pl. l, fig. 12: — ÆE. fulviliybialis,
p. 137, pl. 4, fig. 11. — Dialomineura leucolhorax,
p. 170. pl. 1, fig. 8. — Pangonia maculala, p. 181, pl 1,
fig. 1.
Ann. Wag. Nat. Hist. Février 1900, pp. 161-182, pl. 1.
Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 17.
99e ANNÉE % SÉRIE — [N° 32%
LES PLANTES MYRAHÉCOPHILES
Les rapports des fourmis avec les plantes sont de di-
vers ordres. Il est toute une catégorie de ces hÿméno-
ptères qui empruntent aux végétaux leurs aliments : c'est
le cas des fourmis moissonneuses, connues de toute anti-
quité, dont Salomon a parlé au livre des Proverbes.
Leurs mœurs spéciales et laborieuses ont été mises en
pleine lumière, et leur vie tout entière ne laisse plus aucun
point dans l'obscurité. C’est aux graines qu'elles s’atta-
quent, et elles en font des amas qu'elles conservent dans
de véritables caves, merveilleusement disposées.
D'autres poussent encore plus loin leur industrie et
sont véritablement agricoles. Il en est ainsi de quelques
espèces américaines de Pogonomyrmez, qui cultivent une
15 SEPTEMBRE 1900
cons. » Le mimétisme irait même plus loin, et la graine
de Mélampyre désagerait une odeur de fourmi.
Des fourmis, telles que l'OŒEcodoma cephalotes, de P Amé-
rique du Sud, sont des coupeuses de feuilles. Elles s’atta-
quent surtout aux feuiiles des caféiers dont elles rava-
gent les plantations. Tantôt grimpées sur les rameaux,
elles découpent directement dansfles feuilles des mor-
ceaux semi-Ccirculaires; tantôt elles se contentent de
couper la feuille qu'elles laissent tomber au pied de
l'arbre, où des ouvrières la ramassent. On a vu des ar-
bres dépouillés, en moins d’une heure, et transformés en
véritables balais.
Ces feuilles transportées dans les fourmilières, ainsi
que certaines fleurs, servent à la confection d’un terreau
dans lequel se développent des mycéliums et de petits
champignons, qui servent à la nourriture des habitants.
Ces champignons de fourmilière se rencontrent notam-
ju
Il
j 4
Les plantes myrmécophiles. — Myrmecodia.
graminée du genre Aristida et savent la récolter en temps
voulu et en saison favorable. On a même admis, mais le
fait est jusqu’à un certain point encore douteux, que ces
insectes sèment les graines de la graminée. Il est plus
vraisemblable qu’elles se bornent à ne laisser croître que
cette seule plante autour de leurs habitations.
Tout en exerçant des ravages sur certains végétaux,
les fourmis aident à la dissémination de leurs graines.
C'est ce qui se passe pour le Melampyrum pratense, qui
croit souvent dans ces fourmilières. La graine est
blanche, luisante et rappelle un cocon renfermant sa
nymphe. «Les fourmis, dit M. Heim, se laissent
tromper à cette apparence et vont enfouir ces graines
avec le même soin qu'elles mettent à garder leurs co-
Le Naturaliste, 46, rue du Bac, Paris.
ment au Brésil, à Java, au Soudan. Nous en avons vu de
beaux spécimens, rapportés de ce dernier pays par notre
ami À. Chevalier.
Dans un cas comme dans l’autre, ces fourmis sont
nuisibles aux végétaux qu'elles attaquent. Aussi ces der-
niers sont-ils parfois adaptés pour résister. Les fruits des
Composées se défendent grâce à linvolucre des fleurs,
qui établit une barrière souvent infranchissable,
Ailleurs, c’est la fourmi qui vient en aide au végétal.
Les choses se passent ainsi notamment pour le chêne
dont les feuilles, au printemps, se recouvrent de miellée.
Les abeilles et les fourmis visitent les feuilles de cet
arbre pour la recueillir. a Il est incontestable que les ani-
maux phytophages ne peuvent s'approcher d'une plante
208
LE NATURALISTE
ainsi recouverte d'insectes venimeux, sans s'exposer à en
recevoir de nombreuses piqüres; d’où une protection
très réelle offerte à la plante par l’insecte en échange de
l'aliment qu'il recoit d'elle. » On trouvera d’intéressants
détails à ce sujet dans un mémoire de M. le D' Heïm :
Plantes et fourmis, relations biologiques. Les fourmis qui
se comportent ainsi sont utiles à l’agriculture. Ce sont
des fourmis carnassières qui détruisent des chenilles, des
sauterelles, etc.
Il est enfin un ordre tout spécial de rapports entre
fourmis et végétaux. Il s’agit des plantes dites Myrméco-
philes qui servent d’abri à ces insectes, en même temps,
souvent, qu’elles leur fournissent des aliments.
Les dispositions prises en vue d'assurer cet abri sont
très variables. Passons en revue quelques exemples.Dans
une fougère, le Polypodium nectariferum,ce sont des frondes
stériles qui ont transformé leurs sores en véritables nec-
taires qui attirent les fourmis et leur procurent un ha-
bitat assuré. ;
Dans les palmiers, dont les jeunes pousses, tendres et
sucrées, sont recherchées des animaux herbivores, la
myrmécophilie protectrice se manifeste plus sou moins
nettement. Tantôt c’est la spathe, dont la forme est apte
à servir d’abri aux insectes; tantôt les aiguillons, qui
garnissent les tiges, s’incurvant l’un vers l’autre, éta-
blissent de véritables galeries; ailleurs, c’est la ÿaine
des feuilles qui se renfle et donne naissance à une cavité
close, où les fourmis pénètrent par une ouverture qu’elles
pratiquent.
Mais tous ces dispositifs sont rudimentaires, Voyons
l’'Acacia cornigera, dont les feuilles sont munies de deux
stipules développés en épines robustes. Si on les exa-
mine de près, on voit qu'elles sont creuses. Quant aux
feuilles, elles sécrètent dans leur jeunesse un liquide
sucré et, de plus, à l'extrémité de chacune des feuilles,
se trouve une petite glande spéciale. Les fourmis sont
très friandes et du suc et des petites glandes, qu’elles
détachent et emportent. Elles se réfugient à l’intérieur
des épines qui en sont toujours pleines, assurant ainsi
un secours de chaque instant contre l'invasion des ani-
maux herbivores. Hernandez, en 1651, avait déjà re-
marqué ces curieuses dispositions.
Dans les cultures, l’Acacia cornigera n'acquiert pas les
épines dures et cornées qu'on rencontre dans la plante
sauvage. Le développement complet de ces organes ne
semble se faire que sous l'influence de l'irritation pro-
duite par les fourmis.
Dans une Verbénacée, habitée par les fourmis, le Cle-
rodendron fistulosum, les entrenœuds sont tous renflés
et, à leur sommet, se trouve une ouverture bordée par un
bourrelet saillant. Cette perforation, due primitivement
aux fourmis, semble se produire maintenant en dehors
de leur intervention. Elle est devenue héréditaire.
Si l’on admet que les Nepenthes soient des plantes car-
nivores, une espèce de ce genre, le N. bicalcarata, re-
marquable par le diphormisme de ses urnes, nous
fournit une particularité intéressante : les fourmis dé-
fendent la plante contre l'attaque des herbivores et, si
elles tombent dans le piège que leur tend l’ascidie,
leurs cadavres servent d'aliments.
Les Kibara, de la famille des Monimiacées, nous offrent
une autre singularité : les entrenœuds sont creux et
perforés ; à l’intérieur on trouve de nombreux individus
d'une cochenille qui n'a pas dù y venir d’elle-même,
mais y être transportée par les fourmis, quand elle était
jeune. Ce serait là un véritable élevage de cochenilles,
en vue de recueillir probablement un liquide sucré dont
les fourmis sont friandes.
Dans le Cecropia adenopus, Araliacée du Brésil, ce
même élevage se fait en grand, dans des chambres
formées par des disques qui découpent la tige creuse
entre deux nœuds. Dans certains Cordia, la même dispo-
sition se retrouve sur les rameaux qui portent l’inflores-
cence.
D'autres plantes hospitalières sont épiphytes et les
organes, qui servent d'habitat, se sont différenciés en
rapport mêmeavec cet épiphytisme.C'est le cas des Myr-
mecodia, rubiacées qui s’accrochent aux branches des ar-
bres, à l’aide de racines adventives. Ces plantes consis-
tent presque entièrement en gros tubercules, qui don-
nent naissance, à leur sommet, à des tiges feuillées.
Leur tissu est formé d’une série de couloirs et de gale-
ries, qui communiquent ensemble et s'ouvrent extérieu-
rement par un certain nombre d’orifices larges ou étroits.
Cette cavité est remplie de fourmis.
Rumphius, qui a, le premier,vu des Myrmecodia àJava,
croyait que le végétal tout entier était produit par les
fourmis. C'est Beccari qui les a étudiés d’une manière
précise et en a fait connaitre le développement. Pour le
célèbre explorateur, la présence des fourmis est indis-
pensable à la plante, Si ces insectes ne s’attaquent pas
à la tigelle, le végétal meurt. Les tubercules sont
des sortes de galles où de cécidies, effet de l’irritation.
Y a-t-il mutualisme, symbiose, entre l'animal et le
végétal? Les fourmis ne sont-elles que des commen-
sales? La structure de la jeune plantule doit fixer un ins-
tant notre attention : il nous faut constater que ce ne
sont pas des fourmis qui creusent la première galerie
dans le jeune tubercule. C’est le résultat d’une différen-
ciation interne. De nouvelles galeries se forment par la
suite, par un processus analogue, à mesure que ce tuber-
cule s’accroit. Les expériences de M. Treub, l’éminent
directeur du Jardin de Buitenzorg, permettent d’af-
firmer qu’à l’état adulte, certains Myrmecodia peuvent se
passer de la présence de fourmis. Il y aurait, dans cer-
tains cas, myrmécophilisme facultatif; dans d’autres, il
serait obligé. On a pu également constater que la pré-
sence d'une espèce spéciale de fourmis n’était pas néces-
saire. Des tubercules, transportés de la forêt dans un
jardin, ont été abandonnés des fourmis rouges, réoccu-
pés par des fourmis noires, et la croissance n’en à pas
moins continué.
Nous pouvons nous demander si les fourmis sont
susceptibles de pratiquer des perforations dans les tuber-
cules et d'y creuser des galeries. Le doute n’est pas
possible. Mais quel procédé emploient-elles ? Probable-
ment en détruisant la vitalité des éléments, en excrétant
un liquide corrosif. Le travail paraît se faire de l'inté-
rieur vers l'extérieur.
Les parois des galeries sont habituellement garnies de
proéminences. Pour M. Treub, ces proéminences ne sont
que des lenticelles, mettant les tissus de la plante en rap
port avec l'air atmosphérique. Pour Beccari, ce seraient
des organes d'absorption, des sortes de racines internes.
En terminant, cherchons quel est le rôle rempli par
les fourmis dans les Myrmecodia. Elles y trouvent un gite
sûr; peut-être servent-elles à débarrasser les jeunes
galeries du tissu floconneux qui gênerait la circulation
de l'air. Peut-être aussi aident-elles au transport des
graines, qui sont visqueuses. Avec Beccari, on peut encore
LE NATURALISTE 209
RE RO PU ne An CR EN ee nn Le D
admettre que l'intervention des fourmis est indispensable
à la vie de la plante, en contribuant à la formation du
tubercule, qui est un véritable réservoir à eau, sans le-
quel tous les dangers résultant de la dessiccation seraient
à redouter.
Ce que nous venons de dire des Myrmecodia s'applique
à d’autres Rubiacées, les Hydnophytum, à une Orchidée
le Grammatophyllum speciosum, à une Fougère du genre
Lecanopteris, à certaines Mélastomacées.
Dans cette dernière famille, ainsi que dans quelques
Asclépiadacées telles que Dischidia et Conchophyllum, les
feuilles se transforment aussi en ascidies, habitées par
les fourmis,
PAHARIOT:
ES
LE LANGAGE SIFFLÉ
Aujourd'hui que les moyens de locomotion sont
devenus si nombreux et si perfectionnés, il n’est pas
étonnant que la population des iles Canaries soit extré-
mement mélangée, surtout dans les villes. Mais au
xIv® siècle cet archipel était habitée par une race
d'hommes bien particuliers, connus sous le nom de
Guanches, M. le docteur Verneau, qui a fort bien étudié
ces premiers occupants du sol, est arrivé à cette conclu-
sion qu'ils doivent être regardés comme les descendants
directs de nos chasseurs de rennes de l’époque quater-
naire.
C’est au commencement du xv* siècle qu'un Normand,
Jean de Béthancourt, parti de Granville, découvrit l’ar-
chipel canarien.
Il était accompagné de deux chapelains qui, dans un
récit publié à leur retour, écrivirent, au sujet des Guan-
ches, cette phrase énigmatique : Is parlent ainsi que si
fussent sans langue et, dit-on, par decà, que un grand
prince, pour aucun méfait, leur fit tailler leur langue.
Nous reviendrons sur ce sujet tout à l'heure. Après
Béthencourt, de nombreux Européens se rendirent dans
l'archipel, et finalement celui-ci fut conquis par les Espa-
gnols. Les Guanches se défendirent énergiquement;
mais, obligés de plier, ils se réfugièrent dans les monta-
gnes, et presque tous devinrent bergers. L'apaisement
se faisant petit à petit, quelques-uns s’unirent aux Espa-
gnols, et actuellement les peuplades que l’on rencontre
doivent être considérées comme des métis, mais tout de
même descendant des Guanches dont elles ont conservé
certains traits de mœurs.
Or, il n’y a pas bien longtemps, M. Bouquet de la
Grye, envoyé en mission à Ténériffe, a constaté que
«les bergers de Gomera ont un langage sifflé qui leur
vient des Guanches; les modulations représentent des
idées et des articulations; les sons qu'ils émettent s’en-
tendent à des distances prodigieuses ».
M. Verneau a constaté qu'ils peuvent ainsi causer
entre eux à des distances de trois et même de cinq kilo-
mètres!
Y a-t-il là un mode de communication différent du
langage parlé, ou n'est-ce qu’un simple pastiche du
sifflet des titis de nos boulevards extérieurs? Dans ces
derniers temps, M. Lajard, ayant eu l’occasion d’aller
aux Canaries, à démontré que ni l’une ni l’autre de ces
deux hypothèses ne pourraient être acceptées. Il s’est
d’abord rendu compte que le sifflement en lui-même
était simplement produit, comme chez nous, par l'air
expiré fortement, soit entre les doigts, soit avec la lan-
gue. Voici, au reste, pour les personnes qui voudront se
livrer à cet intéressant exercice, les modes de sifflement
les plus fréquents qu'a pu observer M. Lajard :
« À, Avec une main. — 1° Le petit doigt. Celui-ci est
porté dans la bouche tout entier et plié sur lui-même, la
face palmaire de la main dirigée en haut, le pouce
étendu. Ce doigt forme une anse horizontale qui vient
se placer entre les dents; la partie ouverte de la courbe
est formée par la langue qui s'appuie au-dessous, lais-
sant seulement au milieu un orifice étroit pour l'échap-
pement de l'air; 2° avec l'index plié. On se sert égale-
ment de ce doigt; 3° avec l'index étendu. Le bout s’ap-
plique sur la langue, la pulpe au-dessous : l'air sort par
un léger vide ménagé d’un côté entre les incisives eupé-
rieures, la phalangette et la masse de la langue qui
forme le reste; 4° le deuxième et le quatrième doigt. Ils
viennent se toucher par l'extrémité, au milieu de la
bouche : le vent trouve sa voie entre ces doigts et la
langue, qui est en dessous.
B. Avec les deux mains. — 1° Avec un seul doigt de
chaque main. L'un et l’autre sont étendus, rectilignes et
forment un angle plus où moins aigu. Ce sont ordinai-
rement les index ou les petits doigts; 2 avec deux doigts
de chaque main, le deuxième et le troisième.
C. Avec la langue. — La langue se creuse en forme de
gouttière, les bords relevés latéralement, et s'applique
ainsi sous les incisives de la mâchoire supérieure; la
lèvre supérieure participe, dans une certaine mesure, à
ce travail; elle s’étire transversalement et s’abaisse
jusqu'au voisinage de l’orifice réservé à la sortie de l'air.
Ce procédé s'applique aux faibles distances, il me semble
moins employé que les précédents. »
Muni de ces renseignements, M. Lajard, pour étudier
ce que les sifflements en question voulaient dire, a eu
l’heureuse idée de s’assimiler le mécanisme de ce lan-
gage d’une manière complète et de siffler lui-même de
façon à tailler de petites bavettes avec les insulaires.
Bientôt on ne dira plus : siffler comme un merle, mais
comme un Canari, M. Lajard s’est de cette facon rendu
compte que le langage sifflé n’est ni un idiome spécial,
ni un sifflet qui cherche à imiter la langue espagnole
par des combinaisons plus où moins compliquées, mais
que c’est la langue espagnole elle-même dont l'intensité
est renforcée à l’aide du sifflement. Le descendant des
Guanches siffle en parlant et voilà tout! Pour des oreilles
non prévenues, le mélange du‘sifflet et de la voix est
inintelligible, mais quand on sait de quoi il retourne, on
arrive à distinguer les mots de la langue.
Le langage sifflé a l'avantage de se faire entendre à
de grandes distances, Chez nous il rendrait peut-être
d'utiles services.
Par exemple, les étudiants pourraient écouter, en
mettant le nez à leur fenêtre, les cours d’un professeur
versé dans la langue sifflée. De même un enfant, qui
s’amuserait en sortant du lycée, pourrait recevoir les
exhortations et les réprimandes de son père... siffleur
(pardon !). Mais il ne faut pas s’'illusionner, le langage
des Guanches n’est pas d’une clarté très grande, et, dans
ce vocable, un discours de M, Floquet ou de M. Legouvé
ferait le plus piteux effet! « Les phrases, dit en effet
M. Lajard, sont méconnaissables, au point que les ber-
A PR R R R S R RE ENE oet AD PS SPP EP NIS eci PT LT ER NP Po ANR alt S CRUE Li
ï
Ï
!
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210
gers eux-mêmes les plus exercés, dans leurs montagnes,
m'ont déclaré ne pouvoir pas dire tout ce qu'ils veulent,
ou plutôt ne pas pouvoir comprendre tout ce que leur
partenaire viendrait à leur dire, » Les conversations sifflées
sont donc de courte durée.
En Europe, et particulièrement à Paris, on pourrait
rapprocher des Guanches les macons et autres ouvriers
qui sifflent un air à la mode ou plus souvent (trop sou-
vent!) un verre sur le zinc, Nous ne nous y arrêterons
pas, bien entendu.
Nous devons cependant parler des voleurs, qui se
servent du sifflement comme moyen de correspondre et
de se donner des indications mutuelles sur le bourgeois
à « chouriner » ou la maison à « cambrioler ». Ils sifflent
comme les Guanches, à l’aide de leur bouche seule ou
avec leurs doigts. Quelquefois ils emploient des instru-
ments spéciaux, d’après M. Flandinette. Mais ici le son
n'entre pour rien, ni la langue française, ni même l'argot ;
ce sont des sifflements conventionnels, nullement compa-
rables par conséquent avec le langage des Canaries.
Eh bien! savez-vous maintenant quelle haute idée se
dégage de tous les faits que nous venons d'exposer briè-
vement? Non? Eh bien! M. le docteur Bordier, dans un
curieux article paru dans la Nature, par une suite de
déductions plus où moins hasardées, est arrivé à dire
que nos ancêtres très éloignés ont été d'abord des
siffleurs (pourquoi ne pas dire des serins?) et que ce
n'est que plus tard, peu à peu, qu’ils se sont transformés
en parleurs; ce n’est pas le lapin qui a commencé, c’est
le sifflet! Comme preuve matérielle {et celle-là est inté-
ressante), il rappelle qu'à Beuniquelle, station magda-
lénienne de Tarn-et-Garonne ; on a trouvé des phalanges
de rennes persées d’un trou pour siffler, il parait même
que cet instrument s’est propagé Jusqu'à l’époque des
dolmens, ainsi que le prouve une défense de sanglier
trouvée dans le dolmen de Genévrier.
Puisque nous en sommes au sifflet, terminons par une
curieuse application, à coup sûr inattendue, qu'en font
les Chinois, connus d’ailleurs pour leurs idées fantas-
ques. Les habitants de Pékin sont bien embarrassés;
voyez un peu. D'une part, ils adorent les pigeons et, de
l’autre, ils ont besoin des oiseaux de proie qui enlèvent
les immondices dont leur cité est constamment remplie.
Ils ne sont pas, les pauvres malheureux, affligés d’un
excellent conseil municipal qui, comme dans notre
bonne ville de Paris, fait nettoyer la voirie et se met
toujours aux petits soins des habitants! Mais voilà, les
aigles vont dévorer les pigeons qui font cependant si
bien. dans le paysage! Et si l’on tue les aigles, que vont
devenir les immondices? Doivent-ils sacrifier lutile à
agréable? Eh bien! ni lun ni l’autre!
Les Chinois (très roublards malgré leur aspect) adap-
tent, sur la queue des pigeons, un sifflet spécial très
léger, conru sous le nom de chao-tse, et que le vent fait
raisonner quand le pigeon fend l’espace. « La forme du
chao-tse, dit M. Martin dans la Nature, est très variable,
suivant la disposition donnée aux éléments dont il se
compose : ce sont des morceaux de roseaux juxtaposés
en manière de pipeau; quelques-uns sont faits avec une
petite courge; à l'extrémité des roseaux et sur un ou
plusieurs points de la courge est un sifflet; l'appareil
doit être assez léger pour que l'animal n’éprouve aucune
gène à porter l'instrument qui est fixé sur lui de la
manière suivante : une petite palette se détache d’un
point du chao-tse; elle se place entre les deux pennes
LE NATURALISTE sh
caudales moyennes du pigeon et, à l'aide d’un petit
bâtonnet passant par un anneau de la palette, l'instru-
ment se maintient solidement; les sifflets sont, dirigés
de telle sorte que l'air pénètre avec une force proportion-
nelle à la rapidité du vol; les sons sont eux-mêmes des
tonalités qui varient suivant les dimensions des roseaux
et des courges. » Les aigles, effrayés, paraît-il, par ce
bruit, ne touchent pas aux pigeons porteurs de chao-tse.
Dans les rues de Pékin, rien n’est plus étrange que
cette musique aérienne semblant venir des cieux. Ce
qu'il y a de vraiment curieux, c’est que, pour les Chinois,
ces sons représentent les paroles mystérieuses échappées
de la bouche des empereurs des anciennes dynasties.
Eux aussi, décidément, ils tiennent à ce que leurs ancé-
tres soient des siffleurs! Comme quoi la science et les
superstitions se rencontrent plus souvent qu'on ne serait
tenté de le croire!
HENRI COUPIN.
INFLUENCE DE L'ÉCLIPSE DU SOLEIL
SUR LES ÊTRES VIVANTS
La dernière éclipse du soleil, partielle à Paris et totale en
Espagne dans certaines localités, a permis de faire une foule
d'observations intéressantes, aussi bien sur les hommes que sur
les animaux et les végétaux.
19 Sur les hommes.
Dans une ville comme Paris, il y a eu des endroits où cette
éclipse partielle a été visible, et d’autres où elle ne l'était pas,
parce que le soleil y était masqué par des nuages pendant toute
la durée de l’éclipse. C’est ainsi que l'on pouvait la voir dans le
quartier du Panthéon, alors qu'elle était masquée complètement
dans le quartier du faubourg Montmartre. Aussi beaucoup de
gens ne se sont doutés de rien, attribuant à des brouillards l'obs-
curcissement relatif du ciel, qui l’est souvent bien davantage en-
core. N'est-on pas forcé d'allumer les lampes dans la journée, à
Paris, quand le ciel est couvert, quitte à les éteindre quand il
se découvre? Or, le jour de l’éclipse du 28 mai dernier, nous
n'avons guère eu besoin de recourir à un éclairage artificiel, bien
que la clarté du ciel ait beaucoup diminué, pour reprendre en-
suite.
Sans les journaux, bien des personnes ne se seraient même
doutées de rien, là où le ciel était voilé ; surtout à Paris, où on
s'occupe peu de ce qui se passe au-dessus des maisons. Mais en
Espagne, il en a été tout autrement. Là où l’éclipse était totale,
fout le monde a été saisi de la teinte grisâtre uniforme que
revêtaient tous les objets. Par contre, les montagnes à l'horizon
tranchaient vivement, par leur teinte foncée, sur le fond du ciel.
Aussi l’arrivée du premier rayon de soleil, au bout de quelques
moments d'attente, fut-elle saluée avec enthousiasme : c'était
comme une sorte de résurrection de la nature entière. D’invisible
et de boule noire qu'il avait été, le soleil redevenait d'une écla-
tante splendeur au fur et à mesure qu'il se dégageait de la lune
obscure qui passait devant lui, et qui nous empêchait de le voir
de la surface de la terre momentanément plongée dans une
morne tristesse. Cependant on pouvait encore lire l'heure à sa
montre. L’obscurité était moins grande que celle de la nuit éclai-
rée par la pieine lune !
20 Sur les animaux. ;
Les cogs se sont mis à chanter, au retour de la lumière du
soleil, à la fin de l’éclipse, tandis qu'au début, les poules appe-
laient leurs poussins d'un cri particulier, qui les faisait tous ac-
courir, pour se réfugier précipitamment sous les ailes de leurs
mères. Les fourmis se sont réfugiées dans leur fourmilière, en
abandonnant leurs travaux, dès le début de l'éclipse totale, pour
en ressortir dès-que le soleil a reparu avec son éclatante lu-
mière. On voit que ces animaux ont manifestement la conscience
de la diminution considérable de la lumière quise produit dans
ces circonstances. k
On a vu jusqu'à des chauves-souris quitter leurs retraites
obscures pour voler pendant les quelques secondes que le so=
Re
LE NATURALISTE 211
RSR EE D an UP RS PORN ge
leil a été caché, une minute environ, du moins en Espagne, aux
localités observées par M. Flammarion et ses collaborateurs zé-
ES
On à vu un chien tourner trois fois autour d'un arbre, ne com-
prenant rien à ce qui se passait. D’autres ont été se réfugier
auprès de leurs maitres. Un essaim d’abeilles est rentré dans sa
ruche en silence, faisant son bourdonnement habituel. Un pigeon
saisi de crainte est tombé à terre, tandis que ses compagnons
rentraient au colombier. Les oiseaux se réfugièrent dans leurs
nids, et restèrent silencieux pendant l'obscurité relative de
l'éclipse. Des cigognes sont montées sur une meule de blé, et
elles y sont restées tapies jusqu’à la fin de la totalité.
Un troupeau de moutons était.en train de paitre, près de Ciu-
dad-Real. Quand la phase totale s'est produite, cela leur a fait
une telle impression, qu’ils se sont mis à courir de tous les côtés
en manifestant un affolement tel, que les bergers ont dû les re-
tenir et les rassembler. Des poules se sont groupées en tas, les
unes contre les autres, comme si elles avaient cherché un secours
mutuel. Elles comprenaient instinctivement que l'union fait la
force.
Pendant la totalité de l'éclipse, les grillons se sont mis à
chanter, comme si c'était le soir ! Près de Cacérès, on a vu sor-
tir des hiboux, comme au crépuscule. Le Bulletin de la Société
astronomique de France entre dans de nombreux détails à ce
sujet, tous très intéressants.
3° Sur les plantes.
L'abaissement de la température joint à la diminution considé-
rable de la lumière, durant la totalité de l'éclipse, a agi sur les
feuilles de Mimosa et a fait refermer les fleurs des Onagres, des
Passiflores, des pavots de Californie (Escholtzia californica), de
l’'Oxalis Corniculata, de la Cataurea collina, de la Godetia ele-
gans, de l’Acacia, de certains Cactus, de la Manne royale, de
l’Onothera grandiflora, etc. :
Signalons comme phénomène de catalepsie le fait de quatre coqs,
qui sont restés à regarder le soleil, en tordant tous la tête à
gauche dans le même sens, sans pouvoir se détacher de la vue
de cet astre, tout en marchant lentement. C'était comique de les
voir ainsi hypnotisés.
D: Boucox.
DESCRIPTION DE COLÉOPTÈRES
DEUX PTINUS NOUVEAUX DU BRÉSIL
Depuis ma récente étude : « Contribution à l'étude des Ptinidæ
de l'Amérique centrale et méridionale » (1), j'ai reçu de MM. Les
Fils D'Emile Deyrolle, et provenant du Brésil, deux nouvelles
espèces. L'une, très voisine de a/bonotatus Pic, s'en distinguera
par le prothorax non orné de lignes blanches distinctes; l'autre,
qui doit prendre place près de inapicalis, se reconnaitra facile-
ment à ses pattes obscures, à l'absence de nombreux poils rous-
sâtres où brunätres sur le devant des élytres et à la présence de
taches apicales blanchâtres.
Voici les diagnoses de ces deux Ptinus:
Ptinus Groulti. — Peu allongé et assez large, un peu brillant,
orné de soies dressées peu longues, en partie obscures, noir à
dessins élytraux blanchâtres. Tête moyenne pubescente de gris.
Antennes modérément fortes, peu longues, foncées. Prothorax
court, presque droit sur les côtés, légèrement gibbeux sur sa
partie médiane, plus ou moins déprimé près de la base, à ponc-
tuation granuleuse ; il est noir et plus ou moins orné de poils
blanchätres sur les côtés ou sur la base. Ecusson allongé, blanc.
Elytres à épaules un peu saillantes et obliquement arrondies, à
côtés parallèles, extrémité arrondie et légèrement explanée; ils
sont noirs ornés d'une bande sinueuse ante-médiane blanchâtre
peu distincte et de deux taches postérieures de méme duvet,
l’externe placée plus en arrière; ponctuation forte avec les in-
tervalles (ou interstries) étroits, plus ou moins relevés. Pattes
plus où moins rougeâtres. Long. 3-3,3 millimètres.
À placer près de albonotalus Pic dont il se distinguera au
moins par le dessin.
Piinus obseuripes.— Assez allongé, peu large, très brillant,
orné de soies dressées obscures peu longues parsemées de quel-
ques poils longs, noir à dessins élytraux blanchâtres. Tête
longue, pubescente de gris. Antennes peu fortes et assez longues,
foncées. Prothorax brillant en arrière, très long, fortement étran-
glé près de la base, sillonné et orné de crêtes pileuses sur le
disque avec quelques poils orangés. Ecusson subtriangulaire
(1) Ann. Belg., 1900, p. 251 à 258.
blanc. Elytres à épaules droites et côtés parallèles, extrémité
arrondie à rebord roussâtre: ils sont noirs ornés d’une bande si-
nueuse anté-médiane blanchâtre remontant plus ou moins en
avant sur les côtés ou la suture et d'une fascie postmédiane
oblique et décomposée; extrémité peu distinctement ornée de ma-
cules blanchätres ; ponctuation peu forte avec les intervalles
larges. Pattes plus où moins obscures. Long. 3 millimètres.
À placer dans le voisinage de inapicalis Pic, et très recon-
naissable, entre toutes les espèces voisines, par son dessin ély-
tral en même temps que par son prothorax plus long.
M: Pic.
L'HISTOIRE NATURELLE & L'ETHNOGRAPHIE
À L'EXPOSITION UNIVERSELLE
LA RUE DES NATIONS, LES INVALIDES
Cette dernière partie de notre longue promenade pré-
sentera forcément bien des lacunes. Car, dans beaucoup
de palais étrangers, ni le naturaliste ni l’ethnographe
n’ont rien à glaner. Nous nous abstiendrons, en effet, de
toute remarque sur leur architecture, très intéressante à
plus d’un titre, mais qui nous entrainerait en dehors de
notre sujet.
Dans le pavillon affecté aux Etats-Unis (postes et
moyens de transport), nous remarquons un Curieux trai-
neau en cuir, attelé de trois chiens et conduit par un
Indien marchant sur des raquettes à neige. Il sert au
transport du courrier en hiver, dans l’État de Michigan.
Tout auprès se trouve une vieille diligence qui a été plu-
sieurs fois prise et reprise par les Indiens, et un courrier
à cheval, dont le costume pittoresque rappelle les héros
de Fenimore Cooper.
Nous passons rapidement devant le palais des Armées:
les arts meurtriers ne sont point notre fait. Cependant,
dans le pavillon militaire russe,il y a une vitrine de lépi
doptères de Sibérie.Nous arrivons au palais du Mexique,
qui nous offre dès l'entrée une magnifique collection de
cactus et d’aloès. A l’intérieur, les richesses minières
du pays sont représentées par de belles collections de
minerais d'argent, de plomb, de cuivre, par de magni-
fiques albâtres, des silicates de fer du Boléo et des chal-
copyrites irisées. Le règne animal nous offre des vitrines
de pintadines, d'oiseaux et de mammifères empaillés.
Enfin, l’ancienne civilisation aztèque est représentée par
des instruments en pierre polie, des statuettes et des
vases curieusement travaillés. As
La Serbie nous offre des minerais de cuivre, de plomh
argentifère, de mercure, d’antimoine et même du quartz
aurifère, Dans une vitrine se trouvent des instruments
préhistoriques en pierre et en bronze; dans une autre,
une collection de costumes; nous remarquons aussi un
curieux violon à une seule corde et à archet en forme de
serpent.
Au pavillon de Grèce nous trouvons de beaux échan-
tillons de marbres et des minerais d'argent du Laurium.
La Roumanie nous offre aussi une intéressante collection
minéralogique, entre autres du sel gemme de toute
beauté. Quant à la Bulgarie, son pavillon était toujours
fermé au moment de notre passage.
La Suède a envoyé une collection ethnographique très
riche. À remarquer les skys ou patins à neige et les
bâtons dont l'extrémité inférieure est entourée d’un
242 LE NATURALISTE
cercle pour ne pas enfoncer dans la neige, les mobiliers
et les costumes de paysans, les curieux instruments en
bois sculpté, les broderies des étoffes. Il y a aussi des
ateliers où travaillent des tisseuses, des brodeuses et des
orfèvres en costume national ; leurs murs sont ornés de
curieuses peintures. On s'arrêtera aussi devant les char-
mants panoramas représentant lun une nuit d'été à
Stockholm, l’autre une nuit d'hiver en Laponie; dans
celui-ci, on voit un troupeau de rennes étendus dans la
neige; le berger lapon est couché contre l’un d'eux; son
chien veille à ses côtés. C’est le grand calme de Ja nuit
arctique, sous le scintillement des étoiles, On sait que le
renne constitue la principale richesse des Lapons.Il leur
fournit son lait, sa chair pour se nourrir, sa peau pour
se vêtir et leur sert en outre de bête de trait puisqu'ils
l’attellent à leurs traineaux.Beaucoup de Lapons mènent
encore aujourd'hui une vie toute pastorale,en conduisant
leurs troupeaux d’un endroit à l’autre suivant les saisons.
D’autres s’adonnent à la pêche, ou bien ont adopté les
mœurs des Scandinaves. Au point de vue physique ils se
distinguent de ceux-c1 par leur petite taille, leurs cheveux
foncés et leur tête courte et arrondie. Les Lapons appar-
tiennent en effet au tronc mongol, qui, par ses rameaux
Samoyède, Tchouktchi, Kamtchadale et Eskimo, occupe
toute la zone arctique.
Le charmant pavillon de Monaco mérite une longue
visite. Des l'extérieur, nous trouvons une belle collection
de cactus, d’euphorbes, d’aloès et d’autres plantes
grasses; à l'intérieur, un massif de végétaux exotiques
qui prosperent sous ce climat. Voici des Anthurium à
fleurs rouges, des Platycerium, des Zamia, cycadées à
feuilles pennées du plus gracieux effet, Dans un des coins
du pavillon, il faut remarquer un très beau pied de
vanille porteur de nombreuses goussés ; dans les autres,
des aralias, des crotons, des fougères, entre autres une
sorte de scolopendre gigantesque avec ses sores linéaires.
Si nous montons au premier étage, nous trouvons les
belles collections que $S. A. le prince de Monaco a
rapportées de ses nombreux voyages, et les appareils
qui ont servi à les recueillir. Ces vitrines de Cœlentérés,
d'Echinodermes, de Mollusques, de Crustacés et de pois-
sons méritent une étude attentive. Nous ne pouvons que
citer ici quelques-unes des pièces les plus remarquables.
Voici, parmi les Echinodermes, un Pentacrinus Wyville-
Thomsoni provenant de Madère. Cet animal est un des
rares survivants de cette faune Crinoïde aux bras très
ramifiés, qui peuplait les mers paléozoïques et jurassi-
ques. La persistance de quelques-uns de ces types dans
les mers profondes nous montre qu’à ces niveaux les
conditions générales de la vie ne se sont pas beaucoup
modifiées depuis les époques géologiques anciennes.
Dans une autre vitrine, il faut voir le Lepidotenthis Gri-
maldii, c'est le seul Céphalopode à écailles connu.
L'exemplaire exposé à été trouvé aux Acores dans l’es-
tomac d’un cachalot. Notons encore un fœtus de cachalot,
qui présente déjà la conformation si remarquable du
crâne qui caractérise l’animal adulte. Enfin la faune
terrestre du Spitzberg est représentée par des oiseaux et
divers mammifères, Il y a également des échantillons
géologiques rapportés de ce dernier pays, et d’autres
provenant des grands fonds marins. Aux murs se trou-
vent des vues des pays traversés et des aquarelles de
zoologie qui font le plus grand honneur au prince et à
ses collaborateurs. Dans un coin, une vitrine contenant
des os fracturés par les balles des fusils modernes nous | de tapis et devant les reconstitutions de maisons et de
rappelle que l’amour de la science et de la paix est
encore loin d'être aussi répandu-‘dans les grands États
que dans le plus petit d’entre eux.
Avec la Finlande nous revenons aux pays du Nord.
Nous trouvons tout d’abord dans la vitrine du milieu les
nombreux fragments d’une énorme météorite tombée à
Bjurbole, le 12 mars 1899. Certains d'entre eux portent
sur une partie de leur surface une croûte noire formée
par fusion de la partie superficielle de la météorite au
moment de son passage à travers l'atmosphère terrestre.
En tombant, cette masse de pierres a creusé un trou de
3 mètres de diamètre, elle a passé à travers 070 de
glace, 1 mètre d’eau et s’est enfoncée à 6 metres sous
terre. Cette météorite est formée surtout d’enstatite et
de péridot, avec quelques granules et des veines de sul-
fure de fer. Sa structure est agglomérée.
A l'une des extrémités du pavillon se trouve une
remarquable collection d'appareils servant à la pêche,
des traineaux et des radeaux de construction primitive.
Une vitrine d'animaux empaillés contient un échantillon
du fameux lièvre polaire, qui revêt en hiver une four-
rure blanche. C'est là un remarquable cas de mimé-
tisme : cette couleur permet en effet à l'animal de mieux
se cacher dans les plaines glacées; on remarquera aussi
combien ses pattes postérieures sont larges, pour ne pas
enfoncer dans la neige. La Finlande est remarquable à
plus d'un titre, Au moment de la grande extension gla-
ciale, ce pays a été entièrement recouvert par les glaces
venues de Scandinavie, qui y ont creusé d'innombrables
dépressions actuellement transformées en lacs et qui y
ont laissé de nombreuses moraines. Un certain nombre
de cartes, dont l’une est en relief, montrent bien la
disposition de ces formations glaciaires qui sont venues
recouvrir les terrains primitifs.
D'autre part, on sait que la Finlande est occupée par
une race d'origine asiatique, les Finnois, qui s’y sont
maintenus plus purs que dans le reste de la Russie.
Soumis autrefois à la Suede, ils ont été absorbés par
l'empire moscovite qui s'était engagé à leur laisser leurs
institutions nationales. Les derniers restes de cette auto-
nomie ont été supprimés d’un trait de plume par le tsar
actuel.
Tout auprès se trouve le pavillon du Danemark, qui,
par son architecture et son ameublement, nous fait en-
trer dans l'intimité de la vie d’une famille bourgeoise de
ces pays septentrionaux.
La Norvège nous offre la collection des instruments,
désormais historiques, utilisés par Nansen dans son
héroïque exploration, Voici son traîneau, son cajak, ses
skys, le sac en fourrure qui lui servait pour dormir. Il y
a aussi une belle exposition de la faune des pays du
Nord, parmi laquelle il faut remarquer un élan. Cet
animal, autrefois répandu dans toute l'Europe, et décrit
par Jules César sous le nom d’alces, est maintenant can-
tonné dans l'extrême Nord, Il ne diffère d’ailleurs pas
sensiblement de celui que nous avons vu au Canada. À
l'étage supérieur, nous trouvons une collection de pois-
sons conservés dans l'alcool, notamment des Pleuro-
nectes portant des dessins tout à fait curieux. Il y a en
outre des Mollusques et des Crustacés. 3
Le pavillon de la Bosnie nous ramène dans les pays du
soleil. On remarquera l'influence orientale si visible
dans les objets d’'habillement et de parure; on s'arrêtera :
devant les curieux ateliers de brodeuses et de tisseuses
LE NATURALISTE 213
forges primitives. Mais surtout il convient d'admirer les
belles vitrines qui donnent une vue d'ensemble des trou-
vailles de l’âge de la pierre polie et du bronze faites
dans les célèbres stations de Boutmir et de Glasinac.
Les vitrines suivantes nous mènent au premier âge du
fer, puis à l'invasion mahométane. Il y a là une recons-
titution des inieux comprises de toute l'histoire du pays.
Enfin, à l'extérieur du pavilion, on remarquera le cha-
riot de paysan, la herse et les charrues presque entière-
ment en bois, qui sont encore en usage dans les campa-
gnes de la Bosnie.
Le pavillon persan nous intéresse surtout par la beauté
du type physique des soldats qui le gardent. Ce sont là
des Iraniens de haute taille, aux cheveux et à la mous-
tache noirs. On sait que les Persans sont mahométans,
mais qu'une partie de l’ancienne population a émigré
dans l'Inde, et y a conservé l'antique religion de Zoroastre.
Ils y constituent, sous le nom de Parsis, une colonie
très prospère.
Le Pérou a envoyé une curieuse collection ethnogra-
phique. Voici tout d’abord un canot employé par les
Indiens du lac Titicaca, qui est situé à 4.000 mètres
d'altitude, et qui était un endroit sacré à l’époque des
Incas. Ce canot rentre plutôt dans la catégorie des ra-
deaux, car il n’a pas de creux appréciable; il est formé
de deux fagots de joncs reliés ensemble; deux brassées
plus petites servent de bordage; un petit plancher, égale-
ment en jonc, sert à lui donner une surface intérieure
plate. La section du canot en son milieu serait conforme
au dessin ci-contre. Les deux extrémités vont en s’amin-
cissant, et au milieu, à l'endroit où devrait se trouver la
quille, règne un sillon longitudinal qui contribue à donner
de la stabilité à l'embarcation. La voile est également en
jonc.
Dans le voisinage, on trouve des bocaux avec des ser-
pents, et, sur une tablette, des colliers formés d’élytres
de buprestes, et des parures en plumes. Il faut noter
encore d'énormes dents de mastodontes provenant de
Loreto. On sait que tous les proboscidiens avaient dis-
paru d'Amérique avant l'apparition de l’homme. En tous
les cas, les traditions des Indiens ne font aucunement
mention de leur rencontre avec des animaux de ce
groupe. On a, cependant, voulu reconnaitre un éléphant
dans une pierre sculptée provenant d'un Mound des
Etats-Unis.
Quant aux momies accroupies, elles proviennent d’une
nécropole des Incas. On sait, en effet, que les Indiens
avaient développé au Pérou une civilisation tout à fait
remarquable, et comparable par certains points à celle
du Mexique. Comme celle-ci, elle a, du reste, entière-
ment disparu devant les envahisseurs espagnols qui n’ont
su, comme, d’ailleurs, les Anglais, que détruireet affamer
les populations indigènes qu'ils ont rencontrées.
L'esplanade des Invalides n'offre presque aucun objet
d'études digne d'attirer l'attention de l’ethnographe ou
du naturaliste. Il faut, cependant, s'arrêter devant les
reconstitutions de fermes provinciales, qui se trouvent
sur les bas-côtés de l'esplanade. La mieux réussie est,
sans contredit, celle qui concerne la Bretagne. Avec son
calvaire et sa fontaine sacrée, elle donne bien l'intuition
du caractère rêveur de la race, qui a conservé, sous un
vernis chrétien, bon nombre d'anciennes croyances
druidiques. Un menhir et un dolmen nous rappellent les
antiques races inconnues qui ont occupé ce pays et y
ont laissé tant de traces de leur passage. Les dalles en
ciment qui constituent le dolmen ont été moulées surles
pièces originales; on remarquera surtout les sculptures
qui couvrent la paroi du fondetles gravures en creux re-
présentant une hache et un quadrupède qui se trouvent
au plafond. Une partie de ces dessins est cachée par l’un
des montants, ce quiprouve qu'ils ont été exécutés lorsque
les dalles étaient encore isolées. Il en est ainsi au Dol-
Merch-Ant, dont celui-ci peut être considéré comme une
réduction. On sait que les dolmens sont des sépultures,
et qu'ils datent des époques de la pierre polie et du
bronze, Quant aux menhirs, c'étaient peut-être de gigan-
tesques cadrans solaires, destinés à indiquer par la
position et la longueur de leur ombre la date du retour
de certaines fêtes. Les monuments mégalithiques sont,
du reste, loin d’être spéciaux à la Bretagne. On les ren-
contre aussi aux Iles Britanniques, en Hollande, en
Danemark, dans le sud de l'Europe, en Palestine, en
Corse et à Chypre.
L'architecture des maisons de la petite exposition bre-
tonne et le costume des habitants attireront aussi l’atten-
tion de lPethnographe. Il y a dans une halle servant de
bazar une jeune marchande ne parlant que le breton.
Elle porte le costume des Bigoudens de Pont-Labbé,
remarquable par ses broderies voyantes. Le bonnet pré-
sente, au sommet, un petitappendice dont la forme indique
si la femme est jeune fille, mariée ou veuve. La popula-
tion de cette région se distingue de celle du reste de la
Bretagne par une petite taille, une face arrondie et
aplatie, des pommettes saillantes et un nez peu proémi-
nent. Elle représente l'élément brachycéphale venu
d'Asie à l’époque néolithique et qui, sans qu'on sache
pourquoi, s’est conservé à un degré de pureté remar-
quable dans la région de Pont-Labbé. Dans le reste de
la Bretagne et de la France, ce type est plus ou moins
marqué par l'élément dolichocéphale blond venu du Nord.
En tous les cas, la persistance d’un type physique spécial
et de coutumes particulières chez les Bigoudens est un
des faits les plus intéressants de l'anthropologie de la
Bretagne.
Un autre coin intéressant de l'exposition des Invalides
est le petit atelier de coutellerie installé à la section du
vieux Poitou. Il y a là un exemple typique d’une de ces
industries familiales qui n’ont plus persisté que d’une
facon toute sporadique en certains coins de la France.
Les métiers à tisser à main qu'on voit fonctionner dans
les galeries des Invalides rentrent dans le même ordre
d'idées.
Dans la partie étrangère, nous n'aurons que peu de
choses à glaner : une réduction d’une isba dans la sec-
tion russe. Il ya aussi dansles bas-côtés, verslarue Fabert,
quelques constructions assez intéressantes par leur style,
et un kiosque tenu par un Russe authentique, où l'on
peut déguster des produits du pays, ce qui est encore une
facon de faire de l'ethnographie comparée. C’est donc
auprès d’un verre de kvass, boisson fermentée très rafrai-
chissante obtenue avec du pain noir, que nous termine -
rons notre longue promenade.
Malgré toute notre bonne volonté, il nous à été impos-
sible d’être complet. L'éparpillement et l'extrême abon-
dance des matériaux d'une part, et d'autre part la bizar-
rerie des règlements et l'obstination de certaines sections
à rester fermées nous ont créé bien des difficultés.
Dr L. LALOY.
ne
=
214
LE NATURALISTE
LES PLANTES DE FRANCE |
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
NoL!-TANGERE.....:..
NIGRANSS SRE ne
S'AXIFRA GAME ME
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Aulre
.|Sesia Scoliformis Bkh.
— Spheciformis S. V.
Culiciformis L.
Endromis versicolor L.
Platypteryx Falcataria L.
Curvatula Bkh.
Stauropus Fagi L. |:
Notodonta Dictæoides Esp.
Dromedarius L.
Cymatophora Duplaris L.
Acronycta Cuspis H.
Leporina L.
Alni L.
Xylina Merckii Rbr.
Furcifera Hufn.
M etrocampa Margaritaria L.
Odontopera Bidentata Clerck.
Ennomos Autumnaria Werner.
Tephrosia Crepuscularia H.
Luridata Bkh.
Punctularia H.
Geometra Papilionaria L.
Todis Lactearia L.
Ephyra Orbicularia H.
Pendularia L.
Asthena Testaceata Donov.
Eupisteria Obliterata Hufn.
Cabera Pusaria L.
Macaria Notata L.
Alternaria H.
Eupithecia Exiguata H.
Ypsipetes Trifasciata Bkh.
Sordidata.
Melanthia Bicolorata Hufn.
Coremia Designata Rott.
Scotosia Sabaudiata Dup.
Balsamine
Coremia Pomæraria Ev.
Cidaria Silaceata H. ab. Ca-
pita H. $.
Bardane
Gortyna Flavago $S. V.
Polia Chi L.
Polymita L.
Plusia Moneta F.
Chrysitis L.
Boucage
Boarmia Selenaria H.
Eupithecia Pimpinellata H.
Bouleau
Thecla Betulæ I.
Pruni L:
Vanessa Antiopa L.
Smerinthus Populi L.
Sciapteron Tabaniforme Rott.
Sesia Scaliiformis Rkh.
Spheciformis $. V.
Culiciformis L.
Halias Prasinana L.
Lasiocampa Pruni L.
Betulifolia Och.
Endromis versicolor L.
Saturnia Pavonia L.
MOIS DE L'ANNÉE
OU L’ON TROUVE
Chenilles Papillons
(Alnus)
Avril, mai (troncs).
Juillet.
Mai, septembre.
Août, septembre.
Juin, octobre.
Juin, juillet,septembre.
Septembre.
Juin à octobre.
Juin à août,
Mai.
Juin.
Mai, juin, septembre.
Août, septembre.
Juin.
Mai, septembre.
Mai.
Juin.
Juin, septembre.
Août, septembre.
Juin, septembre.
Mai, juin.
Juin, septembre.
Avril, juin.
Septembre.
Mai.
Mai, juin.
Juin, septemb. octobre.
Juillet.
(Impatiens)
Mai, juin, sept., oct.
Octobre.
(Lappa)
Juillet (tiges).
Mai, juin.
Mai.
Juin, août,
Juin, juillet, septembre.
(Pimpiuella)
Juin, juillet, septembre,
octobre.
Octobre.
(Bétula)
Juin, juillet.
Mai.
Juin, août.
Juillet, sept, octobre.
Avril, mai (troncs).
Septembre, octobre.
Juin.
Août, septembre.
Juillet.
Juin.
Juin.
Mai, juin.
Mars, avril.
Avril, mai, juillet, août.
Avril, mai, juin, juillet.
Mai, juin.
Mai, juillet.
Avril à juin, août, sept.
Avril, mai, juillet, août.
Juin.
Mai, juillet, août.
Avril à juin.
Sept., oct., printemps.
Juillet, mai, juin.
Avril, mai.
Juillet à septembre.
Mars, avril, juin à août.
Juin.
HABITAT
FRANÇAIS
France centrale.
Toute la France.
France centr. et septentrionale.
Toute la France.
France centrale et orientale.
Toute la France.
France centrale et orientale.
Lyon, Pyr.-Orient., Provence.
France centrale etseptentrion.
Toute la France.
France septentrionale, Paris.
Mars à mai.
Mai, juillet.
Avril à juin.
Mai, août.
Juin, juillet,
Mai, juillet.
Mai à août.
Mai, août.
Mai à août.
Mai, juin.
Mai à juillet.
Mai à août.
Août, septembre, avril.
Avril à juillet.
Avril.
Août, septembre.
Juin, juillet, septembre.
Juillet.
Juillet, septembre.
Mai à août.
Mai, juin, août.
Juillet, août.
Août, septembre.
Juin, juillet.
Juillet, septembre.
Mai, juin, août, sept.
Juin.
Mai, juin.
Juin, juillet.
Avril, mai.
Mars, avril.
Toute la France.-
France centrale et orientale,
Toute la France.
France centr., sept. etorient.
Saône-et-Loire, Jura, Savoie,
Doubs.
Indre, Alsace, Gde-Chartreuse.
Haut-Rhin.
France centrale et septentr.
Toute Ia France.
Arras, Montpellier.
Toute la France.
Paris, Chalon-sur-Saône,
Cannes.
Paris.
Toute la Krance.
France centrale et orientale.
Toute la France.
France centrale.
Toute la France.
LE NATURALISTE Ds)
On croyait autrefois — et plusieurs personnes le
croient encore — que les perroquets comprennent ce
Le Perroquet
Le perroquet est pour ainsi dire le singe de la gent
ailée ; on l'aime — ou on le supporte — à cause de ses
allures ‘fantastiques et surtout de son habileté native et
perfective à imiter les sons, les bruits et les paroles
qu'il entend. Cet oiseau fit souvent la fortune de son
maitre, parce que le hasard avait voulu qu'il prononcât
quelques mots avec un à-propos tellement surprenant
qu'on croyait impossible que l'intelligence n'y fût pas
pour beaucoup.
Il fut apporté en Grèce, dit-on, par des Macédoniens
de l’armée d'Alexandre ; du reste, les auteurs que je vais
citer s'accordent tous à le faire originaire des Indes.
Mais si l’on en croit le Dictionnaire d'Histoire naturelle de
d'Orbigny, Homère, qui vivait 900 ans avant Jésus-
Christ, aurait connu le perroquet avant Alexandre (336 av.
J.-C.); nous lisons, en effet, à l'article Perroquet :
« Homère, dans son Odyssée, a célébré les perroquets et
le poète latin Catulle leur a consacré un grand nombre
de vers. » — J'ai eu beau compulser toute l'Odyssée, et
l’Iliade, et la Batrachomyomachie par dessus le marché, et
les Odes d’'Homère aux divers dieux et déesses : pas plus
de perroquet que dans la cage de mon serin. Quant à
Catulle, il imite le même silence. Le dictionnæare
Larousse s’est empressé d'avancer le même fait, sans
dire qu’il le tient du naturaliste en question.
On se rappelle la boutade du médecin malgré lui
Sganarelle, prescrivant du pain trempé dans du vin
pour faire- parler une fille muette, parce que, disait-il,
cette nourriture fait parler les perroquets. Sganarelle
connaissait sur le bout du doigt son Aristote, qu'il
appelle d'ailleurs à la rescousse à propos du « chapitre
des chapeaux ». En effet, dans son Histoire des animaux
(ivre VIIE, ch. x1v, $ 12), le philosophe dit « L'oiseau
de l'Inde qu'on nomme perroquet, et dont on dit qu’il a
la langue de l’homme, est un de ces oiseaux; on ne peut
le faire taire quand il a bu du vin. » — (Aristote vivait
384-322 av. J.-C.)! Il n’y a rien de nouveau sous le
soleil,
Caton d'Utique (93 ans av. J.-C.) s’écriait : « O mal-
heureuse Rome! où es-tu tombée, pour que les femmes
élèvent des chiens dans leur sein, et que les hommes
portent des perroquets sur le poing (1)! »
L'empereur Auguste aimait fort ces oiseaux ; il en
avait toujours plusieurs autour de lui,
(4) Comme aujourd’hui, les dames — ét même les hommes
(Plutarque, Vie de Périclès, ch. 1) — portaient dans leur sein
des chiens minuscules qu’ils bourraient de friandises. Un jour
César demanda à l’un de ces individus si, dans son pays, les
femmes ne faisaient pas des pelits. Ces chiens étaient ornés de
rubans et de bijoux, toujours comme aujourd'hui les chiens des
hétaires et de certaines nobles ef honnestes dames, et malheur à
l'étranger qui ne caressait pas tout d'abord le bichon chéri
(Plaute, l’Asinaire, acte 1, se. IID); les femmes et les hommes
aussi, naturellement, couchaient avec leur chien favori (Juvé-
nal, Satire VI, v.654; Properce, Élégies, liv. IV, él. IIL, v. 55 ;
Martial, Épigrammes, liv. I, épig. 110). Ce dernier à même fait
une pièce de vers où il célèbre la petite chienne Issa de son ami
: Publius.
qu'ils disent et qu'ils peuvent suivre une conversation;
nous en verrons plus loin un exemple rapporté par le che-
valier Temple. Voici ce que dit Pline à ce sujet (His-
toire naturelle, Hivre X, ch. Lvirr, K 1) :
« Les oiseaux qui imitent le mieux la voix humaine
sont les perroquets, qui suivent même une conversation.
L'Inde nous envoie cet oiseau, qu’elle appelle sitéscé; il
a tout le corps vert et seulement un collier rouge. Il
salue les empereurs et prononce les paroles qu'on lui a
apprises. Le vin surtout le met en gailé. Sa tête est aussi
dure que son bec. Quand on lui apprend à parler, on lui
frappe le bec avec une baguette de fer, autrement il ne
sent pas les coups. Lorsqu'il s'abat, il se recoit sur son
bec, il s'appuie dessus et se rend ainsi plus léger pour
ses pieds, qui sont faibles. »
On voit par cette description que, des nombreuses
espèces de perroquets que produisent les Indes, celle
qui a été d’abord connue des Grecs et des Romains est
la perruche verte à collier (Psittacus Alexandri).
Dion Chrysostome, le rhéteur (30-117 ap. J.-C.), s'était
rendu célèbre, dans sa jeunesse, en composant les éloges
du perroquet et de la puce (Philostrate, Vie des Sophistes,
livre I, ch. vi); mais Synesius prétend que ces deux dis-
cours, étant indignes du talent sérieux de Dion, ne
doivent pas lui être attribués (Synesius, Dio, p. 38).
C’est absolument comme si l’on refusait d'attribuer à
Victor Hugo la Chasse du roi Jean, et autres acrobaties
poétiques du même genre.
Voici comment Apulée (re siècle) décrit le perroquet
dans ses Florides, livre IT, ch. x11 :
« Le perroquet est un oiseau de l’fnde dont la grosseur
est, à peu de chose près, celle du pigeon; mais il n’en a
pas la couleur: ce n’est pas cette blancheur de lait ou
cette teinte bleuûtre, ou la combinaison de ces deux
nuances tantôt avec un jaune pâle, tantôt avec un gris
cendré. Le plumage du perroquet est vert depuis la nais-
sance des plumes jusqu'à l'extrémité des ailes; il n’y a
que son cou qui fasse disparate; il est entouré d’un
cercle de vermillon semblable à un collier de feu, et le
riche éclat de sa gorge brille également sur sa tête en
forme de diadème.
« Son bec est d’une dureté sans égale. Lorsque loi-
seau s'abat rapidement sur un rocher, c’est sur son bec
qu'il se reçoit comme sur une ancre ;la dureté de sa tête
est égale à celle de son bec. Quand on le force à imiter
notre voix, on le frappe sur la tête avec une petite
baguette de fer pour l'habituer à écouter son maitre:
c'est sa férule d’écolier (Aæc ferula discenti est).
« Le perroquet peut être instruit dès qu'il est éclos
jusqu'à l’âge de douze ans, sa langue ayant la souplesse
nécessaire pour se tourner dans tous les sens; mais
quand on l’a pris vieux, il est indocile et n'a plus de
mémoire.
« Le perroquet qui apprend le plus facilement à imi-
ter la voix humaine est celui qui mange des glands, et
qui compte cinq doigts aux pattes, comme l’homme, Eu
effet, cette configuration n’est pas générale à tous les per-
roquets ; mais ce qui leur est commun à tous, c’est une
langue plus épaisse que celle des autres oiseaux, et qui
leur donne plus de facilité pour articuler la voix humaine,
parce que, chez eux, le larynx est plus développé et le
palais a plus d’étendue.
216
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EE
Eee
LE NATURALISTE
AC EC ONE SSI SSSES
« Quand il a appris quelque chose, il chante, ou plu-
tôt il parle d’une manière si semblable à la nôtre, qu'à
l'entendre on croirait que c’est un homme, et qu'il faut le
voir pour reconnaitre que ce sont des efforts et non un
langage.
« Du reste, comme le corbeau, le perroquet ne pro-
nonce absolument rien que ce qu'on lui apprend.
Enseignez-lui des grossièretés, il dira des grossiéeretés.
Jour et nuit ce sera un feu roulant d'injures, qui seront
pour lui comme des vers et qu'il redira en guise de chan-
son. Quand il a débité toute sa kyrielle d’injures, il
recommence encore, et c'est toujours le même refrain.
«Si vous voulez vous débarrasser de ce langage des
halles, il faut lui couper la langue ou le renvoyer au plus
tôt dans ses forêts, »
(A suivre.) E. SANTINI DE RIOLS.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 2 juillet 1900.
Sur Ia composition de l'atbuméèn de la graine de
Févier d'Amérique (Gleditschia triacanthos L., Léqumi-
neuses) (M. Maurice Gorer). — La structure de la graine de
Févier d'Amérique est analogue à celle des graines de Canéficier
(arbre qui fournit la casse des pharmacies) et de Caroubier.
Cette. graine se compose d’un testa assez dur, d'un albumen
relativement “aboudant, fortement attaché au testa, et d’un
embryon à cotylédons foliacés. La séparation de l'albumen est
plus difficile que dans le cas) des graines de Canéficier et de
Caroubier. Pour l’effectuer, on est obligé de broyer légèrement,
à l’aide d’une pince, le testa coriace; l’eau, dans laquelle on fait
tremper les graines pendant quelques jours, pénètre alors l'al-
bumen, qui se gonfle, ce qui permet de le séparer, au moyen
d’un canif, du testa et des cotylédons, auxquels il n'adhère plus
que très légèrement. On dessèche à l’étuve à 350 l'albumen
ainsi obtenu et on le réduit en poudre grossière. Il contient
encore en moyenne 10 0/0 d'eau qu'on ne peut enlever qu’en le
maintenant pendant plusieurs heures à l'étuve à la température
de 1000. Des expériences faites, on peut conclure: en premier
lieu, que l'hydrate de carbone de réserve qui constitue la presque
totalité de l'albumen de la graine de Févier d'Amérique est,
comme celui de l'albumen des graines de Canéficier et de
Caroubier, où une mannogalactane, où un mélange de mannane
et de galactane : en effet, hydrolysé par l'acide sulfurique
étendu, cet albumen fournit environ 90 0/0 d’un mélange de
sucres réducteurs paraissant à peu près exclusivement composé
de mannose et de galactose; en second lieu, que cet hydrate de
carbone, comme celui des deux graines citées plus haut, est
hydrolysé par la séminase, c'est-à-dire par le ferment soluble
que produisent en germant les graines de légumineuses à albumen
corné.
_L'hermaphroditisme ct ia parthénogenèse chez les
Echinodermes (M. C. Vicuier). — L'hermaphroditisme a été
constaté chez toutes les Holothuries du groupe des Synaptes, où
on l’a recherché. Parmi les Stellerides il n’est connu que chez
l'Amphiura squamala et V'Asterina gibbosa. Toutefois les
Asterina de Roscoff et de Banyuls ont montré un hermaphro-
disme protandrique qui ne se retrouve pas chez les Asferina de
Naples. Il y aurait donc des différences notables suivant les
origines géographiques. Cuénot a également trouvé une seule
fois à Roscoff un Asferias glacialis hermaphrodite et capable
d'auto-fécondation. Il considère le fait comme une anomalie.
C’est ainsi que l’on doit regarder l'hermaphrodisme du Sphæ-
rechinus granularis. Car, sur le très grand nombre d'animaux
qui ont passé entre les mains de l’auteur, il n’en a été rencontré
qu'un seul, mais parfait et capable d'auto-fécondation. Il est tou-
tefois à remarquer que les larves ainsi produites étaient très
rares et présentaient dans leur développement un retard marqué
sur les larves ordinaires, Quant à la parthénogenèse, elle n'a
été signalée, jusqu'ici, que chez l'As{erina gibbosa. On peut
l’affirmer chez l’Arbacia pustulosa Gray, le Strongylocentrotus
lividus Brand et le Sphærechinus granularis A. Agassy, dont
les œufs ont été mis en culture à la station zoologique d'Alger,
avec l’aide de M. Menant.
Séance du 16 juillet 1900.
Sur les limites de possibilité du greffage chez les
végétaux (M. Lucrex Danrer). — Les Anciens ont prétendu
pouvoir, à l’aide du greffage par rapprochement, unir entre elles
les plantes les plus différentes, la Vigne, l’Olivier et le Noyer,
le Rosier et le Houx, par exemple. Les Modernes, au contraire,
affirment que les Anciens ont faiterreur. A la suite de nombreux
insuccès dans les plantes ligneuses, ils ont admis, depuis Adan-
son, le fameux principe. de la parenté botanique en fait de
greffage, d'après lequel deux plantes ne peuvent se greffer
entre elles si elles n'apparliennent pas à la même famille.
L'auteur a cette année; fait des greffes par rapprochement. Il a
opéré sur de jeunes semis, appartenant à des végétaux de
familles très éloignées. Toutes ces greffes ont réussi et donné
lieu à une soudure bien nelle el durable. Toutefois les greffes
qui sont les plus parfaites sont celles dans lesquelles l’analogie
de taille, de vigueur, de végétation est le plus marquée. De
même la question de la nature des tissus joue un grand rôle,
ainsi que les procédés de cicatrisation particuliers des plantes.
Ainsi la Tomate et le Chou, le Topinambour et la Morelle,
donnent une soudure extrêmement accusée, à cause de leur
nature très herbacée et de leur pousse rapide, tandis que l'Aster
etle Phlox un peu âgés, l’Erable et le Lilas âgés d'un an, ne se
soudent pas ou se soudent mal; l’opération ne réussit alors que
sur pousses très jeunes. Le succès des greffes par rapproche-
ment entre des plantes différentes montre de la façon la plus
évidente que Le principe de la parenté botanique ne peut
s'appliquer à la greffe par rapprochement, puisque des plantes
de familles très éloignées el d'ordres différents (Dialypélales,
Gamopétales, Apélales) peuvent s'unir entre elles.
Action de l'air see et de l'air humide sur Îles
végétaux (M. EnEennanpr). — Par rapport à l'air normal,
l'air humide : augmente et active le développement, aussi bien
de la tige que des feuilles, mais réduit le diamètre de la tige; à
tendance à exagérer la surface foliaire; atténue la quantité de
chlorophylle contenue dans les feuilles; réduit beaucoup la
production des radicelles; l'air sec: ralentit l'accroissement et.
le développement de la tige et des feuilles augmente le dia-
mètre de la tige; a tendance à diminuer Ja surface foliaire;-
augmente le nombre des radicelles.
Séance du 6 août 1900.
Sur l'origine des brèches calcaires secondaires de
l'Ariège: conséquences à en firer au point de vue de
l'âge de Ia lherzolite. (M. A. Lacroix). — Les principaux
gisements de lherzolite de l'Ariège (Lherz, vallée de Luc) se
trouvent sur la bordure septentrionale d'une bande de calcaires
secondaires traversant de l’est à l’ouest une partie de la feuille
de Foix. Ces calcaires, représentant tout le jurassique et peut-
être l'infracrétacé, sont en partie bréchiformes. Les brèches
calcaires d’âge secondaire et la brèche Jherzolitique ont
une comumne origine; elles ne se sont pas produites par sédi-
mentation, mais sont le résultat d’actions dynamiques consé-
cutives à des mouvements orogéniques. La Iherzolite a méta-
morphisé non seulement le lias, mais encore tout le jurassique
et même l'infracrétacé, si l’on admet cet âge pour les calcaires
supérieurs de Vicdessos et de Lherz. Elle n’est pas venue au
jour, mais constitue des masses intrusives, sortes de laccolites …
qui ne sont visibles que là où l’érosion les à en‘partie découpées
et dégagées du manteau de calcaires postliasiques qui les
528
recouvrait.
Séance du 20 août 1900.
Sur l'existence du Ceratitis capitata Wied. var.
hispanica de Brême, environs de Paris (M. Alfred
Grarp). — De beaux abricotiers cultivés en plein vent dans des
jardins à Courbevoie ont perdu cette année une’grande partie de.
leurs fruits à l’état vert. La récolte fut cependant moyenne et
les abricots, arrivés à maturité vers la mi-juillet, étaient d’as-
pect superbe; mais la plupart durent être jetés parce qu'ils ren-
fermaient des vers (larves de Diptères), parfois au nombre de
six à huit dans un même fruit. Ces larves appartenaient à une
mouche de la famille de Trypetidæ. Placées dans une boîte
à éclosion, elles se transformèrent rapidement en pupes dans la
terre et au bout de quinze à vingt jours me donnèrent, à mon
grand étonnement, le très joli, mais très redoutable Ceralilis capi-
tata Wied.Rapportédes Indes orientales par Daldorf, ce Diptère fut
décrit en 1826 par Wiedmann et nommé Trypela capilala (Anal.
entomol., p. 54, n° 124). Mac-Leay (Zoological Journal, t. XVI,
p- 415-482) le redécrivit en 1829 sous le nom de Ceralilis cilri-
LE NATURALISTE 217
ED ENTRE STE ON EEE SERRE APE A CEE EE ER
perda, d'après des exemplaires obtenus à Londres et provenant
de larves importées dans des oranges de Saint-Michel (Açores).
Mac-Leay établit de plus l'indentité de cette mouche avec le
Tephritis, signalé par Cattoire comme rendant impossible lob-
tention d’oranges ou de citrons mürs à l’île Maurice (Latreille,
Règne animal, p. 534). Depuis, Ceratitis capitala où sa variété
hispanica de Brême ont été dénoncés maintes fois comme nui-
sibles aux fruits du genre Citrus, aux Açores, à Madère, aux
iles du Cap-Vert, en Algérie, à Malte, dans le sud de l'Italie et
de l'Espagne, etc. Dans quelle mesure y a-t-il lieu de redouter
la propagation de Ceralitis axpitata aux environs de Paris?
Sans doute l'été que nous venons de traverser a été merveilleu-
sement favorable au développement de cette espèce méridionale,
et si son introduction date de la présente année, si elle est due à
l'importation récente de fruits infesiés venant de la région médi-
terranéenne, on peut espérer que l'hiver nous débarrassera de
cette peste. En effet, d'après les observations de S.-D. Baïirstow
(Agricultural Journal of the Cape of Good Hope, 2 nov. 1893),
le Ceralitis hiverne à l'état d’insecte parfait sous;les feuilles
mortes et autres détritus, pour recommencer à pondre au prin-
temps suivant. Il est permis de croire que, sous notre climat
plus rude, cette période d’hivernage sera défavorable au Dip-
tère. Mais il est à craindre, d'autre part, que, les conditions
ethnologiques changeant, les mœurs de l’insecte soient également
modifiées et que certains individus des générations automnales
passent l'hiver à l’état de nymphes, mieux protégées contre le
froid, pour éclore aux premières chaleurs de l’année prochaine.
Il estdonc bon de surveiller de près ce nouvel ennemi, avant qu'il
envahisse nos cultures de Montreuil, etc. Les moyens] préco-
nisés pour luttér contre Ceralilis sont: 1° la destruction des fruits
attaqués, mûrs ou non mürs, à l’aide de la chaux vive ; 2° lors -
qu'il s’agit de fruits de valeur, entourer les arbres menacés, sitôt
après la floraison, par une enveloppe complète d'étoffe légère et
transparente, telle que celle qui sert à faire les moustiquaires.
Ce procédé a donné de bons résultats au Cap de Bonne Espé-
rance, oùil a été recommandé par Lounsbury. Avant tout,
puisque l’acclimatement du Ceratilis aux environs de Paris est
démontré possible, au moins pour une année, il convient d'éviter
avec soin la présence dans le voisinage des vergers de fruits du
Midi contenant des larves de ce redoutable Diptère. Les oranges,
mandarines et citrons doivent particulièrement être suspectés et
détruits soigneusement en cas de contamination. »
« Séance du 21 août 1900.
Action de la pression totale sur l'assimilation
ehlorophyllienne (M. Jean Frieper). — Les recherches de
M. Godlewski ont établi que, dans l'air confiné, maintenu à la
pression normale, l'intensité de l'assimilation chlorophyllienne
dépend de la pression relative de l'anhydride carbonique, et
qu'elle est maxima, chez la plupart des plantes, pour une pro-
portion de ce gaz voisine de 10 pour 100. Il résulte des nom-
breuses expériences concordantes que :
3 è à É ll
1° L’abaissement de la pression lolale, même jusqu'à ni dat-
chlo-
échanges gazeux
mosphère, ne modifie pas la nature de l'assimilation
rophyllienne, le quotient résullant des
O à ae à
Jo Go restant toujours voisin de l'unilé. 2 L'intensilé
de l'assimilation chlorophyllienne diminue avec la pression,
pour les pressions inférieures à la pression normale, suivant
une loi assez régulière.
Séance du 3 septembre 1900.
Effets du travail de certains gronpes musculaires
sur d’autres groupes qui ne font aucun travail
(MM. Kronsexer et Currer). — M. Kronecker avait observé
que, dans les ascensions de montagnes qu'il faisait en vue de
s'entrainer, ses yeux, naturellement hypermétropes, le devenaient
moins; il en conclut que le travail de certains groupes muscu-
laires produit des effets qui se font sentir sur des muscles
étrangers à ce travail, M. Cutter entreprit pour éclairer ce fait
les expériences suivantes, Il rechercha ce que devenait la force
des muscles du groupe du biceps, lorsqu'il exerçait exclusive-
ment ses membres inférieurs par des courses en montagne. Ces
courses étaient graduées et consistaient en ascensions de som-
mets plus ou moins élevés. Pendant ces marches, il eut soin de
ne donner à son bras aucune fatigue, de ne pas porter de canne
‘et de ne soulever aucun objet pesant. Le résultat de ces expé-
riences à été extrêmement net. Elles ont montré : 1° que, si
le sujet, jeune et robuste, a le système musculaire affaibli par
une inaction prolongée, un exercice modéré, tel que des ascen-
sions de 300 mètres, durant de vingt-cinq à quarante minutes et
répétées une à deux fois par jour, accroissait un peu la puis-
sance musculaire du biceps; 20 que des ascensions d'une durée
de deux heures augmentaient nettement la force du biceps;
3° que des ascensions fatigantes, de 3.000 mètres de hauteur et
d'une durée de dix à quatorze heures, diminuaient la force mus-
culaire pour deux à trois jours; 4° que, le quatrième jour après
les ascensions fatigantes, la force musculaire avait beaucoup
augmenté. De ces faits, il semble qu'on puisse conclure qu'un
travail musculaire moyen fortifie même les groupes musculaires
qui ne participent pas à ce travail; cet effet est probablement
dû à un accroissement de la circulation du sang et de la lymphe;
en outre, que le travail excessif semble verser dans le sang
des substances nuisibles à l'action musculaire, et que l’élimina-
tion de ces substances est nécessaire pour que les effets favo-
rables de l'entrainement se manifestent.
OFFRES ET DEMANDES
— On demande : Pontes, larves, nymphes, et toutes
autres pièces se rapportant à l’évolution des insectes
utiles et nuisibles, sauf Lépidoptères.
— On demande des Minerais de plomb : Galène à
grandes facettes, Galène à petites facettes, Galène argen-
tifère. Donner prix par 100 kilogr,
— On demande un ouvrier ostéologiste. S’adresser à
Les Fils D'Emile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
Adresser les propositions à Les Fils d'Émile Deyrolle,
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pèces, 680 exemplaires, 6 cartons, Prix.. 60 francs.
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Le Gérant: PaAuz GROULT.
PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 11,
NATURALISTE
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Ée FPerrogquet
Dans son traité : De la nature des animaux (livre XIII,
chap. XVI), Élien dit à son tour : « Dans les Indes...
on voit, dans les maisons et les jardins, divers oiseaux
libres de tout lien et exempts de toute servitude, allant
cà et là selon leur idée et construisant leur nid où il leur
plait. Là aussi sont nourris des perroquets allant et
venant autour du roi, Et pas un [Indien ne se permet-
trait de manger un seul perroquet, quoique ces oiseaux
soient très nombreux, parce qu'ils sont réputés sacrés,
et qu’en outre le perroquet seul imite à la perfection la
voix humaine.
« (Liv. XVI, chap. 11.) — Il naît aux Indes plusieurs
oiseaux, et parmi eux les perroquets, dont je me suis
occupé plus haut; je vais compléter ce que j'en ai dit. Il
y en a trois espèces. Les uns imitent et répètent comme
des enfants tous les mots qu'ils ont appris, etils imitent
parfaitement la voix humaine et la parole; mais dans les
forêts, ils n’émettent aucun son propre; ils n’articulent
rien, ne compreunent rien et ne savent rien. »
On trouvait un certain goût à la chair du perroquet, —
sans doute parce que l'oiseau coûtait un prix élevé, — et
on le servait sur la table des gens riches ou excentriques,
Dans sa deuxième Invective contre Eutrope, Claudien
dit :
SAT Juvenes venere protervi,
Lascivi senes, quibus est insignis edendi
Gloria, corruptasque dapes variasse decorum ;
Qui ventrem invitant pretio, traduntque palato
Sidereas Junonis aves, ef, si qua loquendi
Gnara coloralis viridis defertur ab Indis,
Quæsitos trans regna cibos; quorumque profundum
Ingluviem non Ægæus, non alta Propontis,
Non freta longinquis Mæotia piscibus explent.
(V. 331-339.)
« Soudain on voits’y porter (chez Eutrope) une jeunesse
arrogante et des vieillards débauchés, qui ne connaissent
d’autres succès que ceux de la table, d'autre gloire que
celle de varier des mets empoisonnés. Ce n’est qu’à force
d'or qu'ils excitent leur appétit; ni l'oiseau radieux de
Junon, ni l'oiseau au plumage vert, habile à parler, qui
nous vient des Indes, n'échappent à leur voracité qui,
dans ses désirs, franchit les bornes mêmes de l'empire;
et les poissons de l'Egée et de la Propontide, réunis à
ceux qui peuplent les profondeurs lointaines des Palus-
Méotides, ne sauraient satisfaire leur insatiable estomac, »
Quant à Lampride, dans sa Vie d'Héliogabale, chapitre xx,
il nous dit de ce fou couronné : « … Il faisait servir aux
officiers du palais des plats immenses remplis d’entrailles
de mulets, de cervelles de phénicoptères, d'œufs de per-
drix, de têtes de perroquets, de faisans et de paons. Il
nourrissait des chiens avec des foies d’oie », ete., ete.
Il paraît que le gibier était moins rare qu'aujourd'hui.
Priscien aussi (Périégèse, vers 1033-34) parle des Indes
comme lieu d'origine du perroquet :
Psittacus hic viridis decoratus torque rubenti
Nascitur, humanæ simulat qui verbera linguæ.
« Là (dans l'Inde) naît aussi le vert perroquet, paré de
Le Naturaliste 16 rue du Bac, Paris.
1° OCTOBRE 1900
son collier de pourpre, et dont le gosier imite les éclats
de la voix humaine, »
Saint Isidore de Séville (Etymologiarum, lib. XII,
Cap. VI) nous décrit ainsi le perroquet :
« Cet oiseau nait sur les territoires des Indes; il est
vert, avec un collier pourpre, une langue épaisse et plus
large que celle des autres oiseaux, ce qui fait qu'il peut
articuler des mots de telle facon que, si on ne le voit pas,
on croit que c'est un homme qui parle.
« IL est dans sa nature de saluer, et il se sert pour cela
des mots Ave, ou yaips. De là ces deux vers :
Psittacus a vobis aliorum nomina discam :
Hinc per me didici dicere : Cæsar, ave! (1)
On voit que les anciens étaient persuadés qu'il était de
l'essence du perroquet de saluer, surtout les empereurs,
comme l’affirme Pline.
Hraban Maur, archevêque de Mayence, répète mot à
mot ce passage d’Isidore de Séville dans son ouvrage De
Universo (Hb. VIII); Hugues de Saint-Victor (1097-1140)
imite cetexemple, et n'oublie pas une virgule du passage
cité (2), dans son De bestiis et alüs rebus, lib. IIT; il y
ajoute ce que Pline et Apulée nous ont déjà appris :
«.… La durété de son bec est telle que, lorsqu'il se préci-
pite d'une grande hauteur sur les rochers, il le fait sur le
bec. Il s’étudie à parler et apprend très facilement; il
retient très bien tous les mots qu'on lui enseigne. »
Sainte Hildegarde, dans la Physica (lib. VIIT, de Avibus),
nous parle de notre oiseau en termes légèrement apoca-
lyptiques, selon son habitude d’ailleurs :
« Le perroquet est très chaud, et humide en même
temps. Il a quelque chose du vol du griffon et de la force
du lion (?); mais ni dans le vol ni dans la force il n’est
audacieux. Il connait les temps des temps (fempora tem-
porum novit, l'avenir? le passé?) et il se conduit et chante
suivant l'événement. Ses plumes sont diversement colo-
rées, suivant la chaleur de son fiel (??). Du reste, il ne
vaut rien pour la médecine, car par lui-même il n’a
aucune vertu, sa nature étant très diverse. »
Pierius Valerius, au ivre XX1I, ch. x1v, de ses Hiero-
glyphicques, nous dit que, chez les anciens, le perroquet
signifiait l Éloquence : 6
«Ien'ay rien trouvé touchant le Perroquet aux escripts
des Ægyptiens, dont l'ay appris quelque chose : mais les
autheurs des autres nations n'ont pas laissé en arrière
cest oyseau plus admirable que tous autres à contrefaire
le parler de l'homme.
« Chap. xv. Éloquence. — Car ils signifioyent par la
figure d'iceluy l'homme éloquent et disert, tel que Ciceron
dit n’auoir pas rencontré; attendu que nul animal entre
les irraisonnables n'exprime point plus distinctement les
paroles humaines que luy. Ce qu'il fait pour ce qu'il a la
langue large, charnuë, & presque semblable à celle de
l’homme. Car ceux qui l'ont estroitte ne sont pas capables
de proferer les letres. Or est-il bien vray-semblable qu’il
tenoit le premier rang entre ceux que Psaphon de Lybie
nourrissoit et dressoit, Car, bien que ce feust vn tres-
meschant homme, souillé de toutes manieres d’ordures
et pollutions, trouua neantmoins non seulement moyen
(4) « Perroquet, j'apprendrai de vous d'autres mots; je n'ai
appris que de moi-même à dire : « César, salut! » — C'est la
13° épigramme du livre XIV de Martial.
(2) Seulement, ni Maur ni Hugues ne citent le nom d’Isidore
de Séville.
Re ER SENTIER QE ESA RACE RES AIRE OT RCE SAUT SE CRE SR SR ESERNT EE ERORR EE RRERERRCE EURE R EE
220
LE NATURALISTE
de se purger d'infamie, mais de se faire aussi donner des
honneurs et tiltres diuins après sa mort. Il enferma
crant nombre d’oyseaulx en vn cabinet à l’escart, & les
appriuoisant au desceu de tout le monde, leur apprit a
gringotter en griec : Psaphon est un grant dieu. Puis,
venant à mourir, ordonna qu’aussi-tost qu'il auroit rendu
l'ame, on enfoncast les fenestres du cabinet, & par ceste
fourbe les oyseaulx s’enuolants par toute la ville & la
campagne d’alentour, chantonnants ce qu'il leur auoit
appris, aduint qu'il fut estimé Dieu, & honoré de temples
et sacrifices pour l’adorer, »
C'était excessivement adroit, convenons-en.
Plus tard, au temps des croisades, les riches barons
avaient des perroquets pour orner leur demeure solitaire ;
on leur apprenait à parler, comme on peut en juger par
cette citation de Christian von Hameln : « Je voudrais
qu'il puisse parler comme le perroquet en cage (1). »
#
# *
Naturellement, les poètes ne pouvaient négliger un
pareil thème; comme Catulle avait pleuré la mort du
moineau de sa Lesbie, Ovide décréta de déplorer la mort
d'un perroquet qu'il avait donné à l'une de ses amies.
Voici comme il s'exprime dans les Amores (lib. IT,
elegia VI) :
« Ce perroquet venu des Indes orientales (Eois Indis),
qui babillait si bien, il n'est plus! Oiseaux, arrivez en
foule à ses funérailles. Venez tous, pieux habitants des
airs; frappez-vous la poitrine de vos ailes, et, de vos
ongles aigus, sillonnez vos têtes délicates! À défaut de
pleureuses qui s’arrachent les cheveux, déchirez à l’envi
vos plumes hérissées ; à défaut des accents funèbres du
clairon, faites entendre des chants sinistres.
«Toi plus que tout autre, tourterelle chérie, exhale
tes plaintes lugubres. Toute sa vie, il fut en parfaite
intelligence avec toi, et sa fidélité à toute épreuve ne se
démentit jamais! Ce que fut le Phocéen Pylade pour son
ami Oreste, la tourterelle, tant que tu vécus, le fut pour
toi, aimable perroquet! », etce., etc.
Ovide fait ici allusion à cette croyance où l'on était
alors que certains oiseaux d'espèces différentes éprou-
vaient les uns pour les autres une vive sympathie, et
vivaient volontiers ensemble, non comme parasites, mais
en commensaux; la tourterelle et le perroquet étaient
de ceux-là; les paons et les colomhes, les merles et les
tourterelles, etc. Il le répète encore dans ses Héroïdes
(épit. xv, v. 38) :
Et niger à viridi turtur amatur ave.
Pline dit aussi (livre X, ch. xCxvI, $ 74) : « Rursus
amici pavones et columb:æ, turtures et psittaci, merulæ
et turtures »,
Autre perroquet mort, autres plaintes poétiques; c'est
Stace qui nous les fait entendre dans ses Sylves (livre IT,
Chv)E
a
LE PERROQUET D’ATEDIUS MELIOR
« Perroquet, roi des oiseaux, toi dont la voix habile
charmait ton maitre, adroit imitateur de la parole
humaine, quel destin jaloux a sitôt glacé ta langue?
Hier encore, pauvre victime sous le coup de la mort,
nous te voyions partager nos repas, recevoir le prix de tes
talents, voltiger de lit en lit pendant plus de la moitié de
—————_—_—_—_—————————_—_—_—————_—_—_—
(1) Breun, La Vie des animaux illustrée .
la nuit. Tu répondais à nos paroles, tu répétais les mots
qu'avait étudiés ta mémoire. Aujourd’hui ta voix sonore
s’est éteinte dans l'éternel silence du Léthé!.. Qu'on
cesse de me vanter l'ami de Phaéton : le cygne n'a pas
seul le don de chanter son trépas.. Ce perroquet, vert et
brillant souverain des contrées de l’Aurore, dont la beauté
défiait le favori de Junon, avec sa queue de saphirs, et
l'oiseau du Phase glacé, il n’est plus. II n’est plus, celui
qui saluait les princes et disait le nom de César! », etc.
Décidément, la qualité la plus remarquable chez le
perroquet, c'était de saluer César. Voici une pièce d’un
poète grec inconnu, Crinagoras, que je découvre dans
l’Anthologie Palatine (chapitre 1x, épigramme 562) :
« Un perroquet imitateur de la voix humaine, fuyant
les cages d’osier, vint dans un bois avec ses ailes sem-
blables aux fleurs. Il avait médité dans son cerveau le
nom de César, et sa mémoire ne l'avait pas oublié, Tous
les autres oiseaux accoururent à l’envi, cherchant qui
dirait le premier : « César, salut! » Orphée entrainait les
bêtes féroces sur les montagnes; mais toi, César, tu
vois tous les oiseaux courir sur tes pas, de leur plein
gré. » ‘
L'Anthologie latine de Burmann (tome {I, page 441)
nous offre une autre épigramme ayant notre oiseau pour
sujet; ici, c'est un perroquet qui entonne une fanfare en
son propre honneur, et qui demande à Apollon de révo-
quer ses cygnes pour lui donner leur emploi :
« Je suis né aux rivages empourprés de la terre
indienne, rendus ensuite étincelants par le mouvement
du globe (ce perroquet était bien savant!); engendré au
sein des parfums offerts aux dieux, j'ai quitté un chant
barbare pour les sons plus doux du Latium. Renvoie tes
cygnes, à dieu de Delphes, Apollon : ma voix est plus
digne que la leur de se faire entendre dans tes temples! »
Dans le célébre poème de Philomela, longtemps attribué
à Ovide à cause du nom de son auteur (Albus Ovidius
Juventinus), et qui peut être daté du IVesiècle, ilest aussi
question du perroquet et de ses saluts. Ce poème, de
70 vers hexamètres et pentamètres, est entièrement con-
sacré à la voix des animaux; voici pour le perroquet :
Psittacus humanas depromit voce loquelas,
Atque suo domino yaïpe valeque sonat.
(V. 31-32.)
« Le perroquet répète les discours de l’homme; il dit
méme à son maitre : Salut! et Adieu! »
Dans le Prologue de ses Satires (vers 8 à 15), Perse dit
encore :
Quis expedivit psittaco suum ape,
Picasque docuit verba nostra conari ?
[Corvos quis olim concavum salutare?]
Magister artis ingenique largitor
Venter, negatas artifex sequi voces.
« Qui délie la langue au perroquet pour lui faire dire
son « bonjour », et qui apprend à la pie à essayer nos
paroles? [Comme jadis à des corbeaux à saluer d’une
voix caverneuse?| Le ventre, la faim, un grand maitre,
qui fait trouver la voix refusée par la nature. »
Enfin, Castel n’a eu garde de l'oublier dans son poème
des Plantes (chant Il) :
Parmi les lataniers qu’agite le zéphire
La perruche bruyante et le lori vermeil
Sautent sous la feuillée à l’abri du soleil.
D'aras majestueux un éclatant nuage
S'abat en rayonnant et remplit le bocage.
LE NATURALISTE 224
Tantôt sur les palmiers leur bec dur et retors
Des cocos mürissant entr’ouvre les trésors,
Tantôtun ananas qui sort du sein des herbes
Rassemble autour de lui ces convives superbes.
Il est de fait que, partout où il vit, — et c'est toujours
en bandes parfois considérables, — le perroquet est con-
sidéré comme un pillard désastreux et impitoyablement
mis à mort.
En Cochinchine, quand je tenais garnison au poste de
Taÿ-Ninh, en 1868, en pleine forêt, nous avions des mil-
liers de petites perruches, grosses comme des moineaux,
qui couvraient l'abri en paillotte de notre cuisine en
plein vent, ramassaient insolemment les miettes de pain
de nos tables et picoraient les graines échappées aux
lèvres de nos chevaux, sans aucun souci des corbeaux, qui
visitaient la cuisine et dérobaient des morceaux de
viande au cuisinier annamite, ni des gypaètes qui guet-
taient, au large, quelque bonne aubaine.
Tous ces volatiles s’entendaient à merveille, aux heures
des repas, pour venir nous dire leur yaïpe. C'était la trêve
du ventre.
*
+ x
Abordons maintenant le côté anecdote; il est inépui-
sable et dénote chez le perroquet une intelligence très
remarquable. Bien entendu, ici comme partout, l’exagé-
ration de certaines histoires porte à douter de la réalité de
faits authentiques; ainsi, comme je vais le dire plus loin,
certains auteurs citent des exemples de perroquets sou-
tenant une conversation suivie avec quelqu'un; il n'y a
rien de vrai là-dedans; ou bien alors c'était une conver-
sation apprise réplique par réplique, par phrases courtes
et alternées, soigneusement classées dans la mémoire de
l'oiseau, et les personnes qui entendirent cette conversa-
tion furent tout bonnement mystifiées, Le plus souvent,
il s'agit de faits qui n'ont jamais existé, mais qui se trans-
mettent de livre en livre en s’agrémentant de quelques
détails : la Renommée, dit Virgile, vires acquirit eundo.
Très souvent, — et cela se voit tous les jours, — l'oiseau
dit une parole tellement à propos, qu’il a positivement
l'air d'être au courant de la conversation et de com-
prendre ce qui se dit autour de lui; mais c’est toujours
là un pur hasard. Un de mes amis, conseiller municipal
de Levallois-Perret, possédait un gros perroquet gris qu'il
avait raméné du Brésil, et qui bavardait en indien, en
portugais et en français, Son jeune enfant s’oubliait
quelquefois, la nuit, et obligeait sa mère à mettre les
matelas et les draps au soleil; quand le père rentrait, la
maman n'oubliait pas de lui dire : « Tu sais ? Paul a fait
pipi au lit, »
Un jour, comme nous entrions chez lui pour déjeuner,
après les premières salutations à la dame et une caresse
à l'enfant, je m'approchai du perroquet pour lui gratter
la tête, quand soudain, levant doctoralement une patte
comme pour appeler mon attention, il s'écria :
— Tu sais? Paul à fait pipi au lit!
Et précisément c'était vrai : le matelas était à la
fenêtre.
L'enfant, furieux, se précipita vers lui en disant : « Est-
ce que ça te regarde, espèce de rapporteur! »
Il était persuadé que le perroquet savait, et avait pré-
médité la délation.
Le chevalier Temple rapporte qu'un vieux perroquet
parlait réellement et répondait à toutes les questions qui
lui étaient adressées. Il parlait la langue de son pays
natal, le brésilien; le prince de Nassau se l’étant fait
apporter, comme il était accompagné de plusieurs domes-
tiques, le perroquet dit en les regardant :
— Quelle compagnie d'hommes blancs est-ce là?
On lui demanda, en lui montrant le prince, s'il le con-
naissait.
— C'est quelque général, répondit-il sur-le-champ.
— D'où viens-tu? lui demanda le prince,
— De Surinam.
— Et que fais-tu, en ce moment?
— Je garde les poulets,
Le prince s'étant mis à rire, comme si le perroquet eùt
fait un quiproquo, l'oiseau ajouta :
— Tu ris? Je puis bien les faire venir aussi!
Il contrefit le cri d’une personne appelant la volaille
et cinq ou six poulets accoururent aussitôt.
C’est idiot.
Le Père Labat, dans sa Description de l'Amérique, parle
d'un religieux dont le perroquet le suivait jusqu'à l’autel,
et se tenait pendant toute la messe sur le marchepied,
d'où il était impossible de l’arracher. Un jour que ce reli-
gieux se faisait soigner, le perroquet, croyant qu’on avait
blessé son maitre, se jeta sur le chirurgien et le mordit
cruellement à la jambe.
Même histoire : un petit Américain en avait élevé un
en Amérique. Après neuf ans d'absence, l'oiseau, trans-
porté par sa maitresse à Paris, reconnut parfaitement le
jeune homme occupé à faire des armes; s’imaginant
qu'on en voulait à la vie de son ami, le perroquet se jeta
sur son maitre d'escrime et lui enleva un morceau de
nez; il vola ensuite sur l'épaule de l'Américain, lui fit
toutes sortes de caresses et prononca plus de vingt fois
de suite son ancien petit nom d'enfant.
La sœur de Buffon avait un perroquet qui aimait tout
particulièrement la fille de cuisine. Il la suivait partout,
la cherchait dans les endroits où elle pouvait être, et
finissait toujours par la trouver; c'était alors un babil-
lage joyeux qui n'en finissait plus. S'il y avait longtemps
qu'il ne l'avait vue, il grimpait jusqu'à ses épaules, lui
faisait mille caresses et ne Ja quittait plus, quelque effort
qu'elle fit pour s'en débarrasser; si elle parvenait à
s'éloigner de lui, l'instant d'apres elle le retrouvait sur
ses pas.
Cette fille fut un jour atteinte d'un panaris, et la dou-
leur lui faisait parfois pousser des cris plaintifs; le per-
roquet ne quitta plus sa chambre; il pleurait avec elle
et exhalait les mêmes plaintes, puis il la caressait
comme pour la calmer.
« Dans une ville de Normandie, dit Lemaout, une bou-
chère battait impitoyablement tous les jours son enfant,
à peine âgé de cinq ans, L'enfant succomba sous les
mauvais traitements. La justice des hommes ne s’en
émut pas; mais un perroquet gris, qui habitait la maison
d'un cordonnier en face de celle de la bouchère, se
chargea du châtiment de cette mère dénatrrée, Il répé-
tait continuellement le cri que poussait le pauvre enfant
quand il voyait sa mére courir sur lui, la verge à la
main : « À cause de quoi? à cause de quoi? » Cette
phase était articulée par l'oiseau avec un accent si dou-
loureux et si suppliant que les passants indignés
entraient brusquement dans la boutique du cordonnier
et lui reprochaient sa barbarie.
« Le cordonnier se justifiait en montrant son perro-
quet et en racontant l'histoire de l'enfant.
« Après quelques mois, la bouchère, poursuivie par la
phrase accusatrice et par les murmures de l'opinion
publique, se vit obligée de vendre son fonds et d’aban-
donner la ville. »
Tréville rapporte un fait du même genre dans ses Mer-
veilles de l'instinct et de la nature
« Une femme napolitaine grondait et battait souvent
pour rien son petit garcon, qui se lamentait et pleurait
en désespéré. Le perroquet d’une boulangère voisine
contrefit si bien les accents douloureux de l'enfant mal-
traité, qu'un passant entra un matin dans la boutique,
et dit à la maitresse : « Il faut que vous soyez bien
méchante pour traiter de cette sorte un pauvre innocent ! »
« Riant sous cape de l’erreur : C'est vrai, dit la
boulangère; mais avancez un peu, et voyez par vous-
même le bon sujet auquel vous vous intéressez... »
«Le particulier s'avance, en effet, et aperçoit l'oiseau
vert qui, d'une voix cassante, lui dit : « Ote donc ton cha-
peau, croquant! »
Scaliger rapporte que le magnifique perroquet blanc de
Henri VIII étant tombé à l’eau, se mit à crier de toutes
ses forces : — « Un bateau! vingt livres pour un bateau ! »
Un batelier rama vigoureusement dans la direction
de la voix, et saisit par une aile le bavard, qui commen-
çait déjà à couler.
Comme il reconnut le perroquet du roi, il le porta au
palais et réclama les vingt livres promises par le favori
à plumes, Le roi trouva la somme plutôt forte. Il ques-
tionna le perroquet pour savoir si, effectivement, il s'était
engagé à la faire payer. L'oiseau, prenant alors l'air
impertinent du parfait courtisan, qui promet beaucoup
et tient rarement ses promesses, répondit d’un ton
négligé : :
— Que l'on donne quatre pences à ce maroufle !
Ne füt-ce pas une fumisterie de quelque ventriloque
présent à la scène?
Le D' Franklin cite ce fait : un superbe ara bleu
doublé de jaune vivait dans une maison où se trouvait
un enfant nommé Arthur; l'enfant allait à l'école et
revenait tous les soirs à # heures. À peine montait-il
l'escalier que l'oiseau reconnaissait le pas de son jeune
ami, et s'écriait de toutes ses forces : « Arthur! Arthur! »
L'enfant mourut et, depuis ce jour-là, le perroquet ne
prononça plus une seule fois le nom qu “l avait si souvent
au bec. — « Était-ce pour ne point affliger sa pauvre
mére?» se demande le bon docteur.
Le perroquet de la marquise de Pompadour chantait
sans se tromper ces couplets galants du cardinal de
Bernis :
Que ne suis-je la fougére
Où, sur le soir d’un beau jour,
Se repose ma bergère
Sous la garde de l'amour! (bis), etc.
Dans son Tubleuu de la nature (volume des Oiseaux),
Louis Figuier cite aussi quelques faits curieux de cer-
tains perroquets : « Au dix-septième siècle, un cardinal
paya cent écus d’or un perroquet, parce qu'il récitait cor-
rectement le Symbole des apôtres. M. de la Borde raconte
qu'il a vu un perroquet suppléer l'aumônier sur un navire:
en effet, il récitait aux matelots la prière et le rosaire.
Levaillant a entendu une perruche réciter le Pater, en se
tenant couchée sur le dos, et joignant les doigts des deux
pieds, comme nous joignons les mains dans l’action de la
prière. »
Willougby cite un perroquet qui, lorsqu’on lui disait :
LE NATURALISTE
Riez, perroquet! éclatait de rire aussitôt, et s’écriait un
instant après : Oh! le grand sot, qui me fait rire!
Le marquis de Langle dit, dans son Voyage en Espagne :
€ J'ai vu à Madrid, chez le consul d'Angleterre, un
perroquet qui à retenu une foule de choses, un nombre
incroyable de contes, d'anecdotes qu'il débite, qu'il articule
sans hésiter, Il parle espagnol, il écorche le français, il
sait quelques vers de Racine, le Benedicite et la fable du
Corbeau. Il a coûté trente louis. On ose à peine suspendre
sa cage aux fenêtres : lorsqu'il y est, qu'elles sont ou-
vertes et qu'il fait beau, ce perroquet ne cesse de parler;
il dit tout ce qu'il sait, apostrophe tous les passants
(excepté les femmes); il parle politique. En prononçant
le mot Gibraltar, il rit aux éclats; on jurerait que c'est
un homme qui rit. »
Voici maintenant un trait cité par Brehm, dans sa Vie
des animaux illustrée, et qui nous montre le perroquet
sous un jour tout nouveau :
« Un de mes amis, raconte Wood, avait un perroquet
gris qu'il laissait en liberté. Dans le jardin de son
maitre était un bouquet de rosiers entouré d’une palis-
sade et entremélé de plantes grimpantes; un couple de
pinsons y avait fait son nid, et les gens de la maison les
nourrissaient, Ce manège n'échappa pas à Polly (le per-
roquet), qui résolut de suivre ce bon exemple. Il imita à
s'y méprendre le cri d'appel du pinson, et se mit à rem-
plir de nourriture le bec des jeunes. Mais ces témoignages
d'amitié étaient trop bruyants pour les parents; effrayés
par ce grand oiseau qu'ils ne connaissaient pas, ils dis-
parurent, abandonnant leur progéniture aux tendres soins
de Polly. Celui-ci rentra moins souvent dans sa cage, il
restait jour et nuit auprès de ses enfants adoptifs et eut
la joie de les élever, Une fois qu'ils purent voler, ils se
perchaient sur la tête et sur le cou de leur père nourri-
cier qui se promenait gravement, tout fier de cette charge.
Mais, lorsque leurs ailes furent assez fortes, ils s’envoiè-
rent et disparurent.
« Le pauvre Polly en fut tout triste, mais bientôt 1l se
consola : il avait trouvé de Jeunes fauvettes orphelines;
il s'en chargea, les apporta l’une après l’autre dans sa
cage et vécut avec elles en fort bonne harmonie. »
Quelle est la durée de la vie du perroquet? Elle est à
peu près égale à celle de l’homme, Veillot dit en avoir
vu un, près de Bordeaux, âgé de 80 ans; les Mémoires de
l'Académie des sciences de Paris font mention d’un de ces
oiseaux âgé de 110 ans. D le préjugé tient beau-
coup, comme dit Chesnel, à préciser les mesures, et il
affirme que le perroquet vit cent ans el un jour, si la
maladie, les accidents, l’homme ou le persil ne viennent
abréger son existence.
À propos de persil — cet éternel et violent poison de
l'oiseau vert — je puis affirmer en avoir donné à des per-
roquets qui en mouraient si peu, que la vue seule d’une
petite brancheles attirait aux barreaux de leur cage. Par
une mauvaise curiosité d'enfant (j'avais huit ans), et pré-
cisément parce qu'on m'avait dit que le persil était fatal
à ces oiseaux, j'en donnai une brindille à un énorme ara
dont on venait de faire cadeau à mon père. Puis une
deuxième. Puis une troisième. Bref, le perroquet man-
geait toujours la moitié du persil qui entrait à la cuisine,
et la bonne était obligée de le soustraire à ma voracité
(j'étais censé le brouter moi-même). J’ai renouvelé
Perponence sur d’autres perroquets, plus tard. Ils ne
s’eri sont pas trouvés plus mal.
Que devient alors cette légende répétée à satiété de
LE NATURALISTE 293
tous les livres? Est-ce bien le persil qui fit mourir la
première victime? N'était-ce pas l'æthusa cynapium (per-
sil de chien, persil de chat, persil bâtard, petite cigué)?.….
Je sais d’ailleurs que je ne suis pas le seul à avoir fait
cette expérience; un savant médecin a fait même mieux
que cela: il a donné des décoctions de persil à des per-
roquets: ils sont encore vivants.
E. SANTINI DE RIOLS.
LES ANIMAUX A L'ATTAQUE DES SERPENTS
On se demande parfois comment il peut encore exis-
ter un seul animal, dans un pays infesté de serpents ve-
nimeux, dont la piqure est souvent mortelle à l’homme
lui-même. Or le fait s'explique au contraire fort bien, si
l'on étudie de près la manière dont s’y prennent les ani-
maux pour détruire les reptiles. Mettez par exemple une
vipère dans une petite basse-cour bien close, où l’ani-
mal ne puisse pas se cacher. Tout d'abord, on verra les
poules se sauver, en manifestant une vive frayeur, Des
petits poulets peut-être se laisseraient approcher dans
leur inexpérience, et encore! Un seul cri de la mère, à
défaut de leur propre instinct, les ferait bien vite se ré-
fugier sous ses ailes. Cependant, au bout de quelques
minutes, on voit le coq, suivi de quelques-unes de ses
poules, témoigner de moins en moins de crainte. Leurs
plumes se hérissent, le coq entonne un chant de plus en
plus audacieux, et on voit manifestement que le courage
commence à venir à l'esprit de ces pauvres bêtes. Le coq
approche, et essaie un coup de patte, Il évite avec beau-
coup de soin la tête du serpent, que celui-ci projette de
son côté, en se sauvant à chaque fois. À la fin, il fait
tant de ses longues ailes et de ses pattes qu'il étourdit
l'animal de ses cris et de ses coups, et finit par lui don-
ner un coup de bec. Quelques poules en font autant de
leur côté, et Lientôt le serpent finit par ne plus présen-
ter que des débris, dévorés avec fureur par toutes les
volailles de 11 basse-cour. Ici, ce qui préserve le coq, ce
sont surtout ses ailes, dont les longues plumes recoivent
les coups de dents du reptile, qui s'épuise en efforts im-
puissants, et qui voit le nombre de ses blessures aug-
menter de plus en plus, à chaque coup de patte ou de
bec qu’il recoit sur toutes les parties du corps.
Les porcs s'en régalent, en croquant la tête de la vi-
père avec des grognements satisfaits; après avoir posé
tout simplement la patte sur les anneaux du reptile,
pour l'empêcher de bouger. Souvent il est piqué dans sa
graisse, mais cela le laisse complètement indifférent. Il
en est de même pour les sangliers, pour lesquels tout est
bon. Pour eux, un gros serpent non venimeux, comme
un python, serait bien plus dangereux que les serpents
venimeux, généralement petits; alors qu’un gros reptile
non venimeux pourrait les étouffer en enroulant les
anneaux autour de leur corps.
Les mangoustes, malgré leur faible taille, n'hésitent
jamais à attaquer les serpents les plus venimeux, comme
les cobras, quand elles ne peuvent éviter la lutte. Evi-
demment, elles préféreraient ne pas se battre; mais
elles ne manifestent jamais la moindre crainte; tandis
. que le serpent en a une peur terrible. Il est même éton-
x
nant de voir qu'il manifeste plus de terreur à l'aspect
d'une mangouste qu’à la vue d’un homme. Du reste, tout
le monde a connu l’histoire de ce boa qui avait peur d’un
lapin, parce qu'il l’avait une fois piqué au nez avec ses
gritfes, alors que le serpent s'apprétait à l’avaler bien
tranquillement, sans penser à mal. Les animaux res-
semblent à un enfant qui, ayant avalé une arête, ne
voudrait plus jamais manger de poisson. Une bonne lecon
les dégoute pour longtemps, sinon pour toujours. Quoi
qu'il en soit, ce boa de ménagerie ne pouvait plus souf-
frir les lapins, et il en avait peur; il lui fallait des pi-
geons, des poulets ou de la volaille, pour les remplacer.
Peut-être avait-il pris goût à cette nouvelle alimentation,
Il est probable qu'à l’état sauvage les choses ne se se-
raient pas passées ainsi, et qu'il aurait fini par reprendre
goût pour les lapins.
On verra, dans la Revue Scientifique de la fin d'août,
un curieux article sur la manière dont s’y prend la
mangouste pour attaquer les reptiles venimeux des Indes.
Ses mouvements sont très vifs, elle hérisse ses longs
poils qui lui forment alors une épaisse fourrure, où se
perdent les crochets des serpents, et elle saisit leur tête
dans ses mâchoires. Seulement, comme sa bouche n'est
pas très grande, il arrive souvent que ses mâchoires
s’entrecroisent avec celles du reptile; mais elle croque
alors sa mâchoire supérieure, tandis que le reptile ne
peut pas lui croquer sa mâchoire inférieure. C’est là ce
qui donne à la mangouste un avantage décisif sur son
redoutable adversaire. Quant à être piquée par les cro-
chets du serpent, elle l’est bien parfois; mais deux
choses lui viennent en aide. D'abord, elle est déjà plus
ou moins immunisée par des piqures antérieures. En-
suite, elle trouve alors le moyen de croquer la poche à
venin, avant que le serpent n'ait eu le temps de la vider
tout entière dans sa morsure. Elle en est réduite à ava-
ler ur peu de venin; mais n’avale-t-elle pas le venin des
denx poches du serpent quand elle Jui dévore la tête
sans avoir été une seule fois piquée par lui? Autre
chose est d’avaler du venin de serpent venimeux et de le
digérer, en le décomposant dans son estomac; autre
chose est de faire passer le venin intact dans la circula-
tion par une inoculation directe, comme une piqure de
serpent. On n’a jamais vu personne incommodé pour
avoir avalé le venin d’une vipère en suçant la blessure.
Il est vrai qu'alors on en avale si peu! Mais enfin le ve-
nin ne peut pas agir de la mème facon dans l'estomac
que dans une blessure ; cela est évident. Cependant il ne
faudrait pas s’y fier, car on ne sait jamais ce qui peut
arriver. J’avalerais bien volontiers le venin contenu
dans les glandes à venin d’une vipère, oui; mais à la
condition de boire en même temps deux ou trois verres
de rhum un peu fort ou délayé avec un peu de perman-
ganate de potasse, qui détruit en partie son effet.
Bien d’autres animaux, et en particulier des oiseaux,
arrivent à détruire les serpents. Tout le monde con-
nait le serpentaire, soit pour l'avoir vu dans les ménage-
ries, soit pour en avoir entendu parler dans les livres
d'histoire naturelle,
Voici la curieuse histoire citée dans la Revue Scienti-
fique. Elle me raccommoderait avec les chats, si c'était
chose possible.
Un colon anglais aux Indes avait un chat qui faisait
la chasse aussi bien aux cobras qu'aux rats, Certain jour,
entendant un de ses enfants éclater de rire, il courut à
la salle de bain, d'où venait le bruit; et là, il découvrit
le chat qui se battait avec ce genre de serpents veni-
224
meux. Le chat était assis sur son derrière, dans latti-
tude de la boxe! C’est cela qui provoquait les éclats de
rire de l’enfant dans la piscine. Chaque fois que le cobra
jetait sa tête en avant, le chat, d’un vif coup de patte, la
rejetait de côté; et au moment où le serpent, s’efforcant
de fuir, abaissait la tête, le chat, protitant de l’occasion,
se précipitait sur le reptile et lui infligeait un bon coup
de dents, qui l’'obligeait à se mettre sur la défensive et à
relever la tête. Et ainsi de suite, jusqu’à ce que le ser-
pent füt épuisé. On voit que les animaux sont souvent
plus ingénieux que l’homme lui même, quand il s’agit de
se défendre et de sauver leur vie; car un coup de dents
du cobra aurait tué le chat instantanément, s'il avait été
atteint. Le plus joli là-dedans, c'est que le chat s’y pre-
nait de telle sorte que le serpent ne pouvait pas se sau-
ver; bien que ce ne fût pas l'envie qui lui manquût.
Dr BouGox.
Méthode employée pour combattre le phylloxera
EN ALLEMAGNE
Grâce à la surveillance de tout instant exercée par les
autorités locales, le phylloxera ne s'est attaqué, dans
ces dernières années, qu'à quelques rares vignobles
isolés soumis dès le premier moment aux mesures de
précaution préventives et répressives prévues par la con-
férence de Lausanne en 1878, et dont les décisions ont
été rendues obligatoires par le congrès international de
Berne à la date du 3 novembre 1881.
Ces mesures consistent dans l'emploi de sulfocarbure
et du pétrole dont voici l'application : on coupe jusqu'à
la racine les ceps infectés en ayant soin de les brüler
ensemble avec les échalas. Après avoir nivelé le terrain,
on creuse de mètre en mètre des trous ayant de 60 à
10 centimètres de profondeur, dans lesquels on verse du
sulfocarbure dans la proportion de 300 à 400 grammes
par mètre carré; on bouche les trous et la dernière opé-
ration consiste à arroser légèrement le sol avec du
pétrole.
Ces procédés font d’ailleurs l’objet des lois d’empire
des 6 mars 1875 et 3 juillet 1883 relatives à la recherche
des foyers phylloxérés et aux moyens propres à com-
battre le fléau.
Pour donner plus d'efficacité aux mesures prophylac-
tiques, une ordonnance impériale a institué dans chacune
des nombreuses localités riveraines du Rhin, si petite
qu'elle soit, une commission permanente composée du
maire de l’endroit, du maître d’école et d’un tonnelier
expert : cette commission est chargée de visiter périodi-
quement les. vignobles de son ressort afin de s'assurer
de leur bon état et, le cas échéant, de prendre sans
délai les mesures qu’exigent les circonstances. :
Il existe, er outre, dans toutes les villes et villages
situés sur les bords du Rhin des sociétés locales de
vignerons « Vinzervereine » qui dans leur propre intérêt
et à leurs frais surveillent les vignes avec le plus grand
soin.
Grâce à la méthode sévèrement appliquée pour com-
battre les progrès du fléau phylloxérique, l'apparition du
phylloxera n'a été que passagère dans les régions viti-
coles de Francfort et principalement dans le Rheïngau :
les dégâts commis n'auraient entrainé que des pertes
LE NATURALISTE
minimes étant donnée l’exiguité des terrains infectés. En
effet, depuis le mois d'octobre 1898, le phylloxera ne se
serait montré que dans trois petites vignes, les deux
premières situées dans l'arrondissement de Bingen
(Hesse Rhénane) et la troisième près d’Eltville dans le
Rheingau.
.
LES CHÊNES
AU POINT DE VUE FORESTIER |!)
Le genre chêne (quereus) est l’un des plus intéressants au
point de vue forestier. C'est aussi lan des plus importants du
règne végétal par le nombre de ses espèces.
Je me hâte d’ailleurs de dire que, parnu les très nombreux
chênes exotiques, très peu me paraissent mériter d'être introduits
en forêt. Nos chènes indigènes donnent en effet des produits qui
répondent à tous nos besoins. Le quercus rubra, qui est très
rustique, croit rapidement et se reproduit très bien de semences,
et le quercus paluslris, qui prend chez nous de belles dimen-
sions et fourmt un bois de bonne qualité, me paraissent, au point
de vue forestier, les plus intéressants des chênes exotiques.
J’ajoute que le quercus ilicifolia où Banisleri, qui est de petite
taille, mais très rustique, très peu exigeant au point de vue du
sol et qui se mulliplie assez loin par glands d’une façon remar-
quable, me semble pouvoir rendre des services pour le boise-
ment des sols siliceux à consolider. Le genre chêne est naturel-
lement très représenté dans les jardins botaniques.
Nous allons maintenant passer rapidement en revue les espèces
les plus répandues en suivant la classification adoptée par Ma-
thieu dans sa flore forestière et par Mouillefert dans son Traile
des arbres el arbrisseaux . ;
I. -- CnèNEs A MATURATION ANNUELLE El A FEUILLES CADUQUES
A. Espèces de l'ancien monde.
On rencontre dans la plupart des arborelum plusieurs variétés
quercus pedunculata Ehrh., entre autres : fasligiala, que l'on a
multipliée sans grande raison, à mon avis; laciniala; pur-
purea..……. Le quercus robur Wäilld. (sessiliflora Sm.) a donné
aussi naissance à quelques variétés; le quercus tozza Bosc.,
essence du sud-ouest de l'Europe, mais cette essence craint beau-
coup les grands froids du nord; Le quercus conferta Kit. (Far-
nello Ten.), espèce du sud-ouest de l’Europe, est très voisin
du précédent; il fournit, dans son pays, un bois de bonne qua-
lité. Le quercus lusilanica Lmk., dont l'aire est très étendue,
est encore plus sensible aux geléés; le quercus Mirbeckii Dur.
(chéne zeen des Arabes) remplace le chène rouvre en Algérie
et en Tunisie, où son bois et son écorce sont très estimés ; il vient
mal dans le Nord. Aussi peu rustique estle qguercus infecloria.
Oliv., petit chêne de l'Asie Mineure qui fournit la noix de galle;
On peut voir aussi, à Heidelberg et à Kew, le quercus macran-
thera Fisch. et Mey., qui habite l'Arménie et la Persé..……
B. Espèces américuines
Le quercus alba Lin., Sarg, aux feuilles lobées, pâles et
glabres en dessous, se rapproche un peu de notre pédoncule.
C'est, par ces produits, le chêne le plus important des Etats-
Unis. Chez nous, il végète assez mal, ainsi qu’on peut la cons-
tater aux Barres, où cette essence est cependant représentée par
plusieurs sujets de 12 à 15 mètres de haut sur 0 m. 30 et 0 m.40
de diamètre. Il ne mérite donc pas, à mon avis, d’être planté
dans nos forêts.
Le quercus oblusiloba Michx. (s{ellata Wang., minor Saprg.
est un arbre de deuxième grandeur, aux feuilles ordinairement
cinq-lobées, pubescentes en dessous. Ccmme le précèdent, ce
chêne se comporte assez mal dans nos pays. Le quercus macro-
carpa Michx., aux très grandes feuilles, assez profondément
sinuées, ne vient pas mieux en Europe. Ce chêne figure, comme
les deux précédents, dans tous les jardins botaniques que j'ai
visités; mais les sujets bien venant et de grande taille sont assez
rares. La variété olivæformis Torr., Sarg. (quercus olivæ-
formis Michx.), est très peu répandue .Le quercus lyrala Walt.,
Sarg., aux feuilles cunéiformes à la base, profondément cinq à
neuf-lobées, ordinairement blanc d'argent en dessous, est peu
(1) Extrait du Bulletin du ministère de l'agriculture.
LE NATURALISTE 225
rustique et par suite difficile à élever. Le quercus bicolor Willd.
(qguercus prinus tomealosa Michx.), quercus platanoides Sud-
worth., Sarg.), aux feuilles dentées ou lobées, tomenteuses et
ordinairement d’un gris blanc en dessous, ne se comporte guère
mieux. Le quercus prinus Lin., Sarg. (quercus prinus mon-
ticola Michx.), aux feuilles acuminées, dentées, vient un peu
mieux, mais redoute les grands froids. Le quercus acuminala
Sarg, (quercus prinus acuminala Michx.), aux feuilles égale-
ment acuminées, souvent d'un blanc d'argent en dessous,
est beaucoup moins commun; Le quercus prinoides Willd.,
Sarg. (quercus prinus Chinquapin Michx.), aux feuilles cunéi-
formes à la base, également d'un blanc d'argent en dessous, dif-
fère peu du précédent. é
IT. — Cnênes 4 MATURATION ANNUELLE ET A FEUILLES PERSISTANTES
A. Espèces de l'ancien monde.
Le chène vert (quercus ilex Lin.), espèce du midi de l'Europe,
a donné naissance à plusieurs variétés, nolamment : ballola,
quercus ballota Desf. Le chène-liège (quercus suber . Lin.\ est
encore moins rustique dans le Nord ; à Bonn, ilest élevé en pots.
Certains auteurs considèrent le quercus occidentalis Gay. comme
une variété à maturation bisannuelle du guercus suber.
Le quercus alnifolia Poech., petit chêne de l'ile de Chypre,
est très rare.
R. Espèces américaines.
L’arborelum de Kew possède : le quercus reticulata Humb.
et Bonpl., Sarg., aux feuilles cordiformes ; le quercus agrifolia
Nees, Sarg., aux feuilles orbiculaires; le quercus virginiana
Mill. ou quercus virens Michx., aux feuilles elliptiques; le
quercus pumila Walt.…., chênes américains dont les feuilles
persistent ordinairement jusqu à l'apparition de celles de l’année
suivante. Ces essences sont d'ailleurs peu cultivées.
TITI. — CHÊNES A MATURATION BISANNUELLE ET A FEUILLES CADUQUES
A. Espèces de l'ancien monde.
Le quercus cerris Lin. est représenté dans tous les jardins
botaniques par de nombreuses variétés, dont plusieurs sont éti-
quetées comme espèces. Les arborelum des Barres et de Kew,
les promenades de Baden, le parc de Carlsruhe, possèdent de
trés beaux sujets de cette essence, qui malheureusement est
sujette aux gélivures dans nos régions. Le quercus castaneæ-
folia C. A. Mey.(l’affarès des Kabyles) est très voisin du cerris;
c'est une essence importante en Algérie; ce chêne figure à Aschaf-
fenbourg et à Kew. Le quercus Fontanesii Guss. (quercus
pseudo-suber Santi) est aussi une espèce du midi de l'Europe
et surtout d'Algérie; il est rare dans le Nord.
Le chêne Velani, quercus Ægilops Lin., aux feuilles dentées-
serrées,' fortement tomenteuses, est un bel arbre d'Orient. Bien
qu’assez peu rustique, il vient bien aux Barres, où on peut en
avoir un bel échantillon de 15 mètres de haut sur 0 m. 45 de
diamètre, mais n'y fructifie que très rarement. Le quercus
Libani Oliv., aux feuilles rappelant en petit celles du châtaignier,
est plus résistant et pourrait peut-être donner un bois de bonne
qualité, mais les sujets de grande taille sont éncore rares dans
les cultures;
Le quercus serrata Thunb. est un petit chène japonais dont
les feuilles ressemblent beaucoup à celles du châtaignier ; il est
très rustique ;
Le quercus dentala Thunb. (quercus daymio des horticul-
teurs), aux pousses robustes et aux larges feuilles, peut être
étudié dans la plupart des arborelum, notamment aux Barres,
où il fructifie; je n'en connais pas d'échantillon de grande taille.
Un autre chêne japonais, le quercus glandulifera Blume, se
rencontre aussi dans quelques collections, en particulier aux
Barres et à Kew; il’ est toutefois moins cultivé, quoique rus-
tique.
B. Espèces américaines.
Le plus répandu des chênes américains est certainement le
quercus rubra Lin. On le trouve partout, et il n'est pas rare,
aussi bien en France qu'en Allemagne et en Angleterre, d'en
voir des sujets mesurant de 15 à 20 mètres de hauteur sur Om. 60
et plus de diamètre; l'arborelum des Barres en possède un qui a
0 m. 75 de diamètre. L'abondance et la vigueur des semis
naturels que donne aux Barres ce chêne, élevé en massif, m'au-
torise à le considérer comme naturalisé en France. Son bois ne
vaut pas ceux du rouvre et du pédonculé, mais n'en est pas moins
propre à de nombreux emplois. Aussi, par sa rusticité, par la
vigueur et la rapidité de sa croissance, par sa facilité à se régé-
nérer naturellement, le chêne rouge me paraît devoir rendre des
services, notamment pour le boisement des sols siliceux. Les
plantations qui ont été faites, aussi bien en France qu'en Alle-
magne, donnent jusqu'à présent de bons résultats. La variété
ambiqua(quercus ambiqua de Fougeroux), à écorce lisse, parait
peu distincte du type.
Le quercus coccinea Michx., Sarg., dont les feuilles sont
découpées par de larges sinus arrondis, et le quercus tinctoria
Michx (quercus velulina Willd., Sarg.), dont les feuilles
grandes ont des lobes presquefentiers, sont très voisins du quercus
rubra. Comme lui, ils figurent dans tous les arboretum que j'ai
visités et souvent en beaux échantillons; le domaine des Barres
en renferme plusieurs qui n'ont pas moins de 45 mètres de
hauteur sur Ü m. 30 à 0 m. 40 de diamètre. Ils donnent, l’un et
l’autre, un bois très analogue à celui du chêne rouge. Mais ils
croissent moins rapidement, paraissent plus exigeants au point
de vue du sol et semblent devoir se réensemencer moins facile-
ment. Le quercus palustris Michx., Sarg., dont les feuilles, pro-
fondément sinuées, présentent des lobes élargis, est, à mon avis,
plus intéressant. Très rustique, de croissance rapide fructi-
fiant régulièrement et abondamment, il est susceptible de prendre
chez nous de fort belles dimensions: l’arboretrim des Barres en
possède des échantillons remarquables, dont l’un mesure
2; mètres de hauteur sur 0 m. 60 de diamètre; le jardin de
Kew en a aussi de beaux. Il convient d’ajouter que cette essence
donne unbois de bonne qualité C'est donc, à mon avis, parmi les
chênes exotiques, nn de ceux qui méritent le plus d’être intro-
duits dans nos forêts, surtout dans les sols humides, qui lui
conviennent particulièrement.
Le quercus Calesbæi Michx., Sarg., petit arbre dont les
feuilles sinuées ont des lobes aigus, élargis, et le quercus nigra
Ling., Sarg.(quercus aquitica Michx.), aux feuilles spatulées,
glabres, sont plus rares et beaucoup moins intéressants. On
trouve la variété laurifolia du quercus aquatica, dont Michaux
et Sargent font une espèce propre. Egalement assez rare et
d'ailleurs asssez mal défini est le quercus helterophylla Michx.
f., Sarg. Le bois de cette essence est très peu connu. Le quer-
eus ferrugina Michx. (marylandica Sarg., nigra Willd.), aux
feuilles obovales, épaisses, rudes au toucher, ferrugineuses en
dessous, vient très bien aux Barres où on peut voir quelques
sujets de 20 mètres de haut sur 0 m. 35 de diamètre ; il figure
également à Aschaffenbourg, à Bonn et Kew. Malheureusement,
son bois est réputé de médiocre qualité. Le quercus falcata
Michx. (quercus cuneata Wangenh., quercus digitata Sudw.,
Sarg.), dont les feuilles pubescentes en dessous ont des lobes
allongés et ordinairement falqués, est représenté aux Barres par
un arbre de 20 mètres de hauteur sur 0 m. 65 de diamètre;
Bonn et Kew le possèdent aussi. Ce chène donne un bois ana-
logue à celui du chène rouge. Il pourrait être introduit en forêt,
à titre d'essai. La forme triloba, de Michaux, ne parait pas
devoir être distinguée du type. Le quercus ilicifolia Wangenh,
quercus Banisteri Michx., gquercus nana Sarg.), est un petit,
arbre à feuilles obovales, petites, pâles en dessous, ordinaire-
ment à cinq lobes aigus. Il est très rustique, très peu exigeant
au point de vue du sol, et ses glands petits et très abondants,
transportés assez loin par les oiseaux, réussissent parfaitement.
Ce chêne, qui peut être considéré comme naturalisé en France,
nous parait susceptible de rendre des services pour le boisement
des landes siliceuses arides. En outre, le chêne de Banister forme
des massifs peu élevés, peu accessibles, que recherche le gibier
surtout le faisan, avide de ses glands. Le quercns phellos Lin.,
Sarg , aux feuilles entières, rétrécies aux deux extrémités, gla-
bres, rappelant celles des saules, est assez répandu. Il vient
très bien dans nos pays et y prend même de fort belles dimen-
sions. Malheureusement, ce chène est sujet aux gélivures dans
le Nord. Il se comporterait probablement mieux dans le Midi, où
il pourrait être employé, à titre d'essai, pour boiser les landes
sablonneuses. Le quercus imbricaria Michx , Sarg., aux feuilles
allongées, entières comme celles du phellos, mais plus larges,
vert foncé en dessus, pubescentes en dessous, vient également
assez bien et figure dans tous les arboreltum. Mais son bois est
reputé de médiocre qualité.
Le quercus cinerea Michx. (brevifolia Sarg.), aux feuilles
entières, recouvertes en dessous d’un fomentum grisàtre, est
plus rare et du reste moins intéressant.
IV. — CHÈNE A MATURATION BISANNUELLE ET À FEUILLES PERSISTANTES
A. Espèces de l’ancien monde.
Le quercus coccifera Lin., petit arbre de la région méditer-
ranéenne, dont l'écorce fournit un tan de première qualité, est
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19
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LE NATURALISTE
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difficile à élever dans le Nord. Ce chêne a donné naissance à
plusieurs variétés dont plusieurs sont considérées par cer-
tains auteurs comme des espèces propres, en particulier : le
quercus pseudo-coccifera Desf., — le quercus Auzandei Gren.
et God., — le quereus Paleslina Kotschy. On rencontre encore,
dans quelques arboretum, à Kew par exemple, plusieurs espèces
du Japon ; quercus glabra Thunb., — quercus glauca Thunb.,
— quercus cuspidata Thunb., — quercus acula Thunb., —
quercus thalassica Hance..... Enfin, j'airemarqué à Heidelberg,
sur une des terrasses du parc du vieux château, quelques chênes
encore plus rares : quercus incana Roxb., arbre du Népaul; —
quercus dilatata Lindi., qui croit dans l'Himalaya et dont les
feuilles rappellent celles du houx; — quercus striala Sieb.,
originaire du Japon...
B. Espèces américaines.
L' arborelum de Kew possède le quercus Wislizeni D. C.,
Sarg., aux feuilles entières, et le quercus densiflora Hook. et
Arn., aux feuilles également entières, tomenteuses en dessous.
PAnpé.
LA PHOTOGRAPHIE DES OISEAUX DE COLLECTIONS
Pour photographier les oiseaux et les nids, certaines
dispositions sont à prendre.
L'essentiel est d'obtenir une bonne mise au point. Un
Oiseau, vu de face, présente des plans bien différents de
la tête à la queue, et cette différence s'accentue d’autant
plus sur l'image qu'on opère généralement à une petite
distance.
S'il s’agit d'un exemplaire isolé, on a avantage à le
placer de profil ou à peu près, pour montrer les lignes
du corps, la forme du crâne et du bee, la position des
ailes et des rémiges, la forme de ces dernières, etc...
I faut toujours beaucoup diaphragmer, quitte à poser
un peu plus longtemps, et tenir compte de l'intensité de
coloration, un plumage sombre ou à couleurs ternes né-
cessitant une plus longue durée d'exposition de la plaque
sensible qu'un plumage clair.
Si l’on veut reproduire un groupe composé du mâle et
de la femelle près du nid ou entourés de leurs jeunes,
quand plusieurs sujets se trouvent sur d'autres plans,
on a de réelles difficultés pour mettre au point, et si l'on
ne parvient pas à donner au groupe une position satis-
faisante pour opérer, il faut déplacer les sujets de leurs
supports, les ramener sur des plans suffisamment rap-
prochés et faire, au besoin, une mise au point intermé-
diaire,
On conserve au nid la position la plus avantageuse ;
pour les nids de la Mésange à longue queue ou du Tro-
slodyte, on peut montrer leur entrée latérale, et pour les
habitations en forme de coupe, Fauvettes et Chardon-
nerets, 1l est bon de faire voir les matériaux qui com-
posent l'intérieur du nid sans l'élever trop sur son sup-
port, en l'inclinant, si possible, légèrement du côté de
l'objectif.
Dans bien des cas, qu'il s'agisse de constructions
basses ou appartenant à des espèces nichant près du sol,
on peut figurer sur le même cliché les œufs dans le nid.
Autrement, pour prendre les œufs séparément, on les
dispose sur un support horizontal ou, ce qui vaut encore
mieux, vertical, en les fixant à l’aide de petites boules de
cire. Nous renvoyons à la notice sur la photographie des
échantillons
Journal (1).
Il est indispensable, pour les Oiseaux et les nids, de se
servir de très petits diaphragmes.
Quand on tient à représenter des Oiseaux percheurs
dans leur vrai milieu, on fixe du feuillage aux branches;
ou bien à l'aide de petit gravier ou de sable répandu
autour des Oiseaux de rivage, on imite, sans peine, le
bord des eaux.
On obtient plus aisément toute la netteté désirable en
prenant de petits clichés, soit réductions des objets; la
plaque 9 par 12 centimètres est d'un usage courant,
Les petits formats se prêtent, en général, mieux aux
publications, ainsi qu'aux projections, puis l'on a la res-
source de les agrandir ensuite, les amplificateurs auto-
matiques se trouvant aujourd'hui à la portée de tous.
Si l’on dispose, cependant, d'une chambre à objectif
18 par 24 centimètres, on peut reproduire sur la plaque
entière beaucoup d'espèces et leurs nids, de grandeur
naturelle. Dans ces conditions, l'emploi du verre dépoli
gradué (2), d'après M. Gustave Le Bon, pour reproductions
à taille déterminée, nous à donné les meilleurs résultats.
d'histoire naturelle, publiée dans ce
F. de SCHAECK.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance «du 10 seplembre 1900.
Sur le bois de conifères des tourbières (M. L. Gé-
NEAU DE LaAMARLIÈRE). — Dans le bois de Conifères des tour-
bières, la lame intercellulaire, formée de composés pectiques et
de lignine, reste intacte alors que la portion interne des mem-
branes des trachéides a été fortement attaquée et modifiée par
l'action microbienne. La lignine et la cellulose, décomposées pro-
bablement par l'action microbienne, ont disparu. Il ne reste
qu'une substance amorphe soluble dans la potasse, l'ammo-
niaque, etc., après l’action du chlore. Cette matière présente les
principales propriétés de la callose sans que l’on puisse affirmer
cependant qu'il y ait identité entre les deux substances.
Influence du milieu sec et du milieu humide sur la
structure des végétaux (M. Escruxarpr). — Dans une note
précédente, l’auteur a indiqué quelles sont les modifications
externes que le milieu sec et le milieu humide peuvent apporter
. dans le développement des végétaux, par rapport à l’air normal.
Le but de la présente note est de montrer quelles sont les modi-
fications que ces mêmes milieux produisent dans la structure
anatomique. ;
Par rapport à l'air normal, l'air sec à pour effet : 1° D'aug-
menter l'épaisseur de la cuticule épidermique et le nombre des
stomates; 2° de rendre plus précoce la formation du liège;
30 D’augmenter la production du tissu ligneux; de hâter la diffé-
renciation des tissus de sclérenchyme, aussi bien dans la moelle
que dans l’écorce; 40 D: provoquer dans la feuille un développe-
ment plus considérable du tissu en palissade. Dans l'air humide,
la plante présente, au contraire, une différenciation moindre que
dans l’air normal, surtout en ce qui concerne l’appareil de sou-
tien.
) Voir le Naluraliste, 1°" Janvier 1899, p. 14.
(1
(2) Voir Albert Lonpe. Aide-Mérm. prat. de phot., p. 26.
LE NATURALISTE
ILES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
ARVENSIS......... RUE
VULGARIS
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Bouleau
Platypteryx lalcataria L.
Curvatula Bkh.
Sicula $. V.
Lacertinaria.
Stauropus l'agi L.
Mætodonta Dictæa L.
Dictæoides Esp.
ZLigzag L.
Tritophus $. V.
Notondota Dromedarius L.
Bicolaria S. V.
Ptilophora Plumigera $. V.
Cymatophora Fluctuosa H.
Flavicormis L.
Acronycta Leporina L.
Megacephala $. V.
Strigcosa S. V.
Alni L.
Asteroscopus Nubeculosa Esp.
Euperia Paleacor Esp.
Xylina Furcifera Hufn.
Brephos Parthenias L.
Motha H.
Metrocampa Honoraria Schiff.
Margaritaria L.
Selenia Lunaria Schiff.
Tetralunaria Hufn.
Ennomas Alniaria L.
Amphidasys Strataria Hufn.
Betularia L.
Boarmia Repandata L.
Boarmia Consortaria F.
Tephrosia Livrieata Bkh.
Punctularia H.
Geometra Papilionaria L.
Iodis Lactearia L.
Hemithea Fimbrialis Scap.
Ephyra Porata F.
Punctaria L.
Pendularia L.
Acidalia Strigaria H.
Cabera Pusaria L.
Hybernïa Marginaria Bkh.
Defoliaria L.
Cheimatobia Boreata H.
Oporabia Autumnata B.
Melanippe Hastata L.
Coremia Designata Rott.
Cidaria Corylata Thnb.
Truncata Hufn.
Brize
Leucania Turca L.
Brôme
Eubolia Limitata Scap.
Bruyère
Saturnia Pavonia L.
Acronyeta Euphrasiæ Bkh.
Agrotis Agathina Dup.
Porphyrea S. V.
Noctua Neglecta H.
Cerastis Spadicea Gn.
Anarta Myrtilli L.
Amphipyra Effusa B.
Boarmia Cinetaria Schiff.
Acidalia Ostrinaria H.
Imitaria H.
Strenia Immorata L.
MOIS DE
OU L’ON
EE — —
Chenilles
Betula
Mai, septembre.
Mai, juin.
Juin, septembre.
Août, septembre.
Juin, septembre.
Juin, octobre.
Juin à septembre.
Juillet, septembre.
Juin, octobre.
Août, septembre.
Mai.
Mai, juin, août.
Juin, juillet, sept.
Juin à octobre.
Août, septembre.
Mai.
Juin à août.
Mai, juin.
Juin.
Juin, juillet.
Avril, août, sept., oct,
Mai, juin, septembre.
Mai, juin, août, sept,
Juin, juillet.
Juillet à septembre.
Juillet à octobre.
Avril, mai, août, sept.
Mai, août, septembre.
Mai.
Juin.
Juin, septembre. -
Août, septembre.
Mai.
Juin, septembre.
Juillet, septembre.
Juin, septembre.
Mai.
Juin, septembre.
Mai, juin.
Août.
Juin, sept., octobre.
Août à octobre.
Avril, août.
Briza
Février, mars, avril
Bromus
Avril, mai.
Erica
Juillet.
Juin, septembre.
Mai.
Mai, juin.
Avril, mai.
Mai, juin.
Eté, automne.
Avril.
Mai, juin, aout, sept.
Mai, juillet (Fleurs).
Belle saison.
Avril.
L'ANNÉE
TROUVE
Papillons
Avril, mai, juillet, août.
juil.
Avril, mai, juin,
Avril, mai.
Avril, mai, juillet, août.
Mai, juin.
Mai, juillet.
Mai, juin, août,
Mai, Juin, août.
Avril à juin, août, sept.
Mai, juin.
Juin, novembre, déc.
Juin, juill., sept., oct.
Mars, avril, août.
Mai, juillet, août.
Mai, juin, août.
Juin.
Avril à juin.
Mars à mai.
Juillet.
Sept., oct., Printemps.
Mars.
Avril.
Avril, mai, octobre.
Mai à juillet.
Mai à septembre.
Août, septembre.
Mars, avril, mai
Avril à juillet.
Mai, juillet.
Avril, juillet.
Juin.
Mars à mai.
Mai, juillet.
Avril à juin.
Juin, juillet.
Mai, août.
Juin, août.
Mai à août.
Nov., février, mars.
Oct.,
Octobre, novembre.
Novembre.
Mai, juin.
Mai, juillet, août.
Juin, juillet.
Mai à août.
Août.
Juin, Juillet, août.
Mars, avril.
Mai, août.
Juin, août, septembre.
Juin à aoûl.
Août, septembre.
Septembre, oct., avril.
Printemps, été.
Mai, juin.
Avril, mai, juillet, août.
Juin, août.
Belle saison.
Mai, juin.
sept.
nov., fév., mars.
| HABITAT
FRANCAIS
France centr.et septentrionale.
Toute la France.
Alsace, Aube.
France centrale et orientale.
Toute la France.
m me
Toute la France.
France septr., centr. et orient.
France centrale et orientale.
France septentrionale. Autun.
Re te
l'oute la France.
France centrale et septentrion.
France centrale et orientale.
France septentrionale. Alsace.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France centrale et orientale.
Toute la France.
France septentrionale, Paris.
Toute la France.
France centrale el orientale.
Toute la France,
France sept., centr. et orient.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France centr., sept. et orient.
Toute la France.
Toute la France.
Toute la France.
Toute la France.
France centr. mérid. et orient.
Toute la France.
France méridionale.
Toute la France.
France méridionale.
France centrale et méridionale
298 LE NATURALISTE
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
Coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane
DU LUCANUS DELAVAYI. — FAIRMAIRE ET DES ESPÈCES
QUI S'Y RATTACHENT
Avec le L. Lunifer, le L. Boileavi, le L. Cantori et le
Luc. Planeti considérés comme chefs de groupes, nous
avons vu une série de Lucanus, pour la majeure partie
de grande taille, d'apparence toujours robuste, possé-
dant une structure un peu spéciale et souvent assez
complexe, et dont les téguments sont fréquemment re-
couverts d'une pubescence abondante, voire même de
poils couchés, longs et serrés.
Avec le Luc. Delavayi, nous voyons apparaitre un
groupe de Lucanus de taille plus petite mais de forme
très gracieuse, et qui, malgré leurs proportions réduites,
possèdent tous, à l'exception d’un seul (le Luc. Delavayi),
de longues mandibules et un grand développement cé-
phalique.
Il convient d'ajouter que leur coloration, bien qu'en-
core sobre et un peu sévère, est moins obscure que chez
les autres Lucanus et qu’elle présente des teintes très
délicates et en harmonie parfaite avec l'élégance de ces
petits insectes.
Quant à la pubescence, elle est, pour lordinaire, fort
peu abondante, dans tous les cas à peine visible, et
comme elle se confond parfaitement avec la couleur
foncière, l’aspect de l’animal ne s’en trouve ni modifié ni
alourdi.
LUC. DELAVAYI, — Fairmaire.
Yunnan
L. Fairm. Bulletin de la Société entomol. de France,
p. XXXVII
Séance du 9 février 1887
et Ann. Soc. Ent. Belg. XXX, 1887, p. 98.
Diagnose originale.
« Luc. Delavayi, — long. 32-38 mill.,—oblongus, niti-
dus, capite prothoraceque piceis, pallido sericeis, ely-
« tris fulvis, sutura margineque infuscatis, subtus fus-
« cus, sericans, pedibus fulvo-testaceis, femoribus sub-
« tus, tibiis intus tarsisque fuscis; capite utrinque acute
« carinato, ante oculos parum angulato, antice minus
« acute carinato, mandibulis apicem versus parum den-
« tatis, prothorace linea media lævi; elytris subtilissime
« dense punctulatis. »
À l’époque où cette diagnose fut publiée, le Luc. Ober-
thuri n'étant pas connu, M. Fairmaire prit le Luc. For-
tunei comme point de comparaison de son Luc. Dela-
vayi.
« Cet insecte, dit-il, est très voisin du L, Fortunéi: il
« en diffère par la coloration claire des élytres qui sont
« plus finement ponctuées, par le corselet ayant au mi-
« lieu une ligne très lisse, etc... »
La découverte du Luc. Oberthüri — mihi, n'a fait que
confirmer tout ce qu'il y a de vrai dans cette manière
de voir qui, à première vue, pourrait surprendre, les plus
«
grands exemplaires du L. Delavayi étant d'une taille et
surtout d’un développement mandibulaire et céphalique
bien inférieurs à ceux des plus petits exemplaires connus
du L. Fortunei.
Le Luc. Delavayi, le plus petit des Lucanus connus,
est, au reste, un charmant insecte, de coloration claire
et très agréable, que l’exiguité de sa taille, le peu de
largeur de sa tête et la brièéveté de ses mandibules pour-
raient faire considérer comme la forme mineure d’une
espèce dont le grand développement serait inconnu, si le
très grand nombre d'individus qui ont été reçus en Eu-
rope et les différences insignifiantes que ces spécimens
présentent entre eux ne permettaient d'affirmer que ce
Lucane constitue bien une espèce de taille et de dévelop-
pement toujours minimes.
D'ailleurs le Luc. Oberthüri, qui, de prime abord, au-
rait pu être envisagé comme la grande forme du Luc. De-
lavayi, constitue en réalité une espèce bien distincte.
Non seulement, en effet, la couleur des pattes est d’un
rose carmin assez obscur chez le premier et d’un beau
jaune clair chez le second, mais encore la provenance
des deux espèces n'est nullement la même puisque le
Luc. Oberthüri provient de la région thibétaine de Siao-
Lou, alors que le Luc. Delavayi est originaire du Yun-
nan.
De plus, tous les exemplaires que j'ai vus de la pre-
mière de ces deux espèces étaient parfaitement frais et
aucun d’eux ne possédait la pubescence argentée très
abondante qui se constate chez les individus frais du
Luc. Delavayi.
Enfin la femelle est complètement différente; celle du
Luc. Oberthüri est, pour ainsi dire, entièrement noire,
tandis que celle du L. Delavayi a la même coloration que
le mâle; la structure de ces deux femelles n’est, d’ail-
leurs, pas la même, celle du L. Delavayi étant sensible-
ment plus parallèle et ayant son corselet bien moins ar-
rondi.
MALE
Coloration.
Les mandibules, la tête et le prothorax sont d’un brun
carminé assez clair; la base des mandibules, la tête, le
corselet et l’écusson sont couverts de poils blancs un peu
argentés, surtout abondants et bien visibles sur la tête
et sur l’écusson; le pourtour du prothorax est un peu
rembruni, presque noirâtre.
Elytres faiblement brillantes, d’un jaune paille, d’as-
pect soyeux, un peu rembruni latéralement, entourées
de tous côtés et le long de la suture d'une fine bordure
noire; ‘épipleures de la même couleur que le pourtour
des élytres. Palpes, antennes et tarses noirâtres;
cuisses d’un beau jaune paille, largement bordées de
noir; pattes de la même couleur, mais la bordure noire
n'existe que le long du bord externe. Dessous du corps
d'un brun rouge obscur plus ou moins dissimulé par la
villosité,
Structure.
Mandibules ponctuées, courtes et peu développées,
larges à la base, se rétrécissant graduellement jusqu'à
leur extrémité; elles présentent bien au delà de leur
milieu, tout près de la fourche terminale, une dent grêle
et brève, souvent précédée chez les grands spécimens.
d’une dent un peu plus étroite; les dents de la fourche:
dont la supérieure est un peu plus épaisse que l’infé-
D ET PT PETY PEN ©
LE NATURALISTE 999
rieure, sont également fort courtes; antennes longues,
grêles et élégantes; les quatre feuillets de la massue
sont grèles et allongés; palpes de longueur médiocre;
labre court, coupé carrément, un peu relevé; épistome
noir, Court, un peu incliné, en ogive large; tête assez
Fig. 1 et 2 — Luc. Delavayi — mâles
— 3 — id. id. — femelles
étroite, sans carène frontale, rétrécie en arrière; les au-
tres carènes sont étroites, tranchantes et bien indiquées;
thorax subconique, à côtés arrondis; élytres amples et
allongées; tête et corselet finement granuleux; vues à
l'œil nu, les élytres sont lisses, considérées à la loupe;
elles sont très finement ponctuées ponctuation des pattes
très faible.
; FEMELLE
L'ensemble de la coloration est le même que chez le
mâle, mais les mandibules, la tête et le corselet sont
bien plus obscurs, presque noirâtres par intervalles. La
couleur jaune des élytres est beaucoup plus rembrunie,
en particulier vers les épaules; la coloration des pattes
est la même que dans l’autre sexe,
Mandibules et tête faiblement granuleuses, cette der-
nière avec l’indication de deux carènes postérieures ar-
Fig. 4 et 5 — Luc. Oberthüri — mâles
rondies; thorax couvert d'une ponctuation fine, assez
dense latéralement, mais à peine visible à l'œil nu; ély-
tres luisantes, apparemment lisses, avec l’indication de
deux faibles côtes, couvertes, lorsqu'on les regarde à la
loupe, d'une ponctuation très fine et très espacée,
Les mandibules sont à peu près de la même longueur
que la tête, elles sont assez larges, épaisses sécuri-
formes.
La tête est petite, étroite et à peine convexe; le cor-
selet est épais, bombé, plus évasé en avarit qu'en ar-
rière, infléchi sur les côtés, avec ses bords latéraux
assez fortement relevés, surtout en avant; la sinuosité
TETE SEE OO NON ES SL TO A gs
du bord postérieur est faible, les élytres sont assez lon-
gues, ce qui les fait paraître assez étroites bien qu'en
réalité elles soient plus larges que le corselet.
LUCANUS OBERTHÜRI-MIHI
Depuis l’époque où j'ai decrit cet insecte, M. R. Ober-
thür en a reçu un lot assez considérable, comprenant des
mâles de toutes tailles et des femelles; je donne ici la
figure de deux mâles plus petits que le type, lesquels ont
été acquis de M.R. Oberthür par M. Boileau,
LOUIS PLANET.
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S'adresser pour les collec tions et lots ci-après indiqués
à Le Fils D’Emile Devyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
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Vosges de M. Silbermann. Comprenant 1.730 es-
pèces, 4.700 exemplaires renfermés dans 25 boites
doubles, en bois verni, mesurant 35 X 28 X 9.
Cette collection, formée par M. Silbermann, a servi à
établir le catalogue des Coléoptères d'Alsace et des
Vosges que cet entomologiste a publié en collaboration
avec M. Wencker, L'état de conservation des insectes
est excellent; l'étiquetage, fait très soigneusement,
donne des noms rigoureusement exacts et des rensei-
gnemeuts sur la rareté des sujets, ainsi que le nom des
plantes sur lesquelles se trouveut habituellement les
espèces. Des espaces laissés vacants permettent d'aug-
menter la collection sans lui faire subir de remaniements.
Le catalogue de Wencker et Silbermann accompagne la
chliéctiom-Prit.s ane el 500 francs.
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NATURALISTE
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29e ANNÉE
2 SÉRIE — N° 327
15 OCTOBRE 1900
REMAROUABLES NODULES DE GRÈS
Nos lecteurs ont sous les yeux (fig. 1) la vue, dessinée
d’après une photographie, des travaux exécutés, en octobre
dernier, pour dégager la gare des voyageurs à Puteaux,
et ils ne peuvent qu'être frappés des singulières masses
sphéroïdales qui y figurent de tous les côtés. L'’excavation
a été ouverte sur le flanc du coteau, dans l'épaisseur des
couches de sables, dits de Beauchamps, qui reposent dans
la région sur le calcaire grossier supérieur; les boules
pierreuses étaient noyées dans les sables et inégalement
espacées les unes des autres.
A première vue, ce sont des nodules de grès, et la
rencontre de semblables masses est si fréquente dans
de sable, pouvait les réunir en une masse cohérente. La
substance dont il s’agit est le plus ordinairement du car-
bonate de chaux ; mais elle peut être aussi de la silice,
de l’hydrate de fer et quelques autres matières encore.
Ce qui est intéressant, et ce qu'on ne peut contester,
c'est que les dissolutions, filtrant au travers des sables,
rencontrent, de temps en temps, des points qui exercent
surelles comme uneattractionirrésistible : elles y déposent
leur matière dissoute, et successivement le germe de
concrétion s'enrichit de nouveaux dépôts et grossit de
facon à acquérir parfois des dimensions très grandes. On
ne peut douter que les énormes masses dans lesquelles
sont ouvertes de grandes carrières de grès, comme à Fon-
tainebleau, par exemple, à Orsay, à Rambouillet, et
bien ailleurs, ne soient tout simplement des nodules qui
ont assez grossi, et qui résultent aussi de la soudure
de H
Fig. 1 — Concrétion gréseuse extraite du sable moyen dit de Beauchamps, lors des récents travaux de dégagement de la gare
du chemin de fer de Puteaux (Seine). D'après une photographie de M. Dollot.
les sables de tous les niveaux géologiques qu'elle ne
serait, en aucune facon, digne d’être signalée, si elle ne
s’'accompaguait, cette fois, d'une particularité tout à fait
remarquable. Il se trouve, en effet, que ces nodules,
au lieu d’être pleins, sont creux, et cela, comme je vais
essayer de le faire comprendre, complique leur histoire
d’une facon extrêmement considérable.
On admet,en effet, comme conséquence des observations
et aussi des expériences, que la constitution des nodules
ordinaires, c’est-à-dire pleins, s’est réalisée dans les
masses de sable d’une facon très simple, Ces sables, à
une époque postérieure à leur dépôt, ont été traversés
par des dissolutions variées, capables d'abandonner
une substance conjonctive qui, solicifiée entre les grains
Le Naluralisle, 15, rue du Bac, Paris.
progressive de nodules primitivement distincts. Cette
histoire est bien merveilleuse, pleine encore de détails
inexpliqués, tels que la fréquence de deux nodules de
grès superposés, entre lesquels le sable est resté parfai-
tement libre; tels que la forme cristalline propre au
carbonate de chaux, que certains nodules de grès mani-
festent d'une mamière évidente, etc. Mais le point essen-
tiel est fort compréhensible; il est, pour ainsi dire, sen-
sible aux yeux et personne ne le conteste.
Mais si nous essayons d'appliquer ces résultats à l’his-
toire des nodules creux, nous rencontrons des difficultés
spéciales.
Pour bien comprendre le problème, j'ai fait dessiner
d’après nature (fig. ?) un des nodules en question, et
23 % LE NATURALISTE
qui, grâce à la très grande amabilité de M. A. Gaudriot,
conducteur principal des ponts et chaussées, fait
maintenant partie, avec quelques autres, des collections
du Muséum. C’est, comme on le voit, une boule un peu
ovoide, dont le diamètre horizontal mesure 85 centi-
mètres, et le diamètre vertical, 67 environ; mais c'est
une boule qui comprend une simple coque de grès très
solidement cimentée et très dure, de 5 à 8 centimètres
d'épaisseur, suivant les points, et un noyau sableux tout
à fait meuble, et qui laisse sa place vide quand le tuber-
cule est brisé.
Evidemment, en présence de ces boules creuses,
l'explication de tout à l'heure ne peut pas être adoptée
sans modification, car il semblerait qu'on entre dans le
domaine de la pure métaphysique si l’on admettait, un
instant seulement, l'hypothèse d'un centre de concrétion
tout d’abord la production d’une concrétion ordinaire,
c'est-à-dire engendrée autour d'un centre, et gros-
sissant progressivement jusqu'à un certain volume. On
doit croire qu'elle est produite par une petite quantité de
matière agglutinante, et qui, le plus souvent, est du car-
bonate de chaux. À un certain moment, et par suite
d’un changement de régime et de composition des eaux
de l'infiltration, cette concrétion prend beaucoup plus
d'activité : autour d'un noyau très faiblement cimenté, il
se fait une coque d'une roche beaucoup plus riche en
ciment, et cette circonstance est de la même catégorie
que celle qui produit des zones concentriques dans un
même rognon, par exemple dans un rognon d’agate,
quoique l'effet en soit ici bien différent. Cette coque
plus cimentée, et dont le ciment peut être également du
calcaire, devient bientôt, et justement à cause de sa
Fig. 2, — Concrétion gréseuse creuse des sables moyens de Puteaux (Seine) au 1/10e de la
dimension naturelle. — Echantillons du Muséum d’histoire naturelle de Paris.
qui v'agirait qu'à distance, et qui déterminerait la préci-
pitation du calcaire, ciment des grès, à un énorme in-
tervalle tout autour de lui, mais non pas à son voisinage
immédiat.
L’embarras du théoricien parait même s’augmenter
encore quand il réfléchit que le cas des nodules de Pu-
teaux est loin d’être isolé et qu'on connait d'autres boules
creuses et présentant d'autres compositions minéralo-
giques. Il suffira de mentionner, à cause de leur célébrité
les Ætites ou Pierres d'aïgles, auxquelles tant de super-
stitions ont été rattachées, et qui consistent, comme on le
sait, en une coquille d'oxyde de fer enveloppant de toutes
parts un noyau argileux ou sableux, trop petit pour le
remplir, au point que, par l'agitation, il y ballotte comme
le battant d’un grelot
Eu étudiant ces curieuses productions, on peut, cepen-
dant, en reconstituer l’histoire, dont chaque étape se
trouve illustrée, démontrée pour ainsi dire, par des
spécimens bien connus. On arrive ainsi à admettre
richesse en carbonate de chaux, le siège d’un travail
interne de cristallisation, qui a pour effet de l’enriclur
encore, même si le liquide conjonctif cesse d'arriver, et
il doit en résulter un appauvrissement en calcaire des
régions voisines, Cette attraction du sel de chaux sur là
masse enveloppée peut contribuer à lappauvrir pro-
gressivement en ciment et à rendre au sable qui la
compose tout ou partie de sa mobilité primitive.
Dans le cas des ætites, il se passe quelque chose d'ana-
logue, mais de plus net encore, car il y a substitution
du ciment ferrugineux, ou ciment primitif, qui est de
nature toute différente. De plus, l'argile emprisonnée
peut subir un retrait consécutif à la perte d'une partie de
son eau, et dès lors, elle devient beaucoup moins volu-
mineuse que sa prison et acquiert ainsi la mobilité que
nous avons rappelée.
En tous cas, le mécanisme dont il s'agit inter ViCNÉ M
dans un grand nombre de circonstances, el c’est pour M
cela qu'il nousa paru tout à faitindiqué de le signaler IC
STANISLAS MEUNIER.
LE NATURALISTE 233
DÉSINFECTION ANTIPAYLLOKÉRIQUE DES PLANTS DE VIGNES
Ce sont, on le sait, les apports de boutures de vigne qui ont
grandement contribué à la dissémination du fléau phylloxérique.
Déjà, au début de l'invasion du vignoble français, il y a plus de
trente ans, il avait été reconnu que, partout où l’on avait cons-
taté les foyers phylloxériques, à l'étranger de même que chez
nous, des introductions de plants d'Amérique avaient été faites.
Plus récemment, en Algérie (1885), en Champagne (1890), en
Lorraine (1894), de constatations faites et vérifiées, il est tou-
jours résulté que les nouveanx foyers n'avaient pas d'autre ori-
gine que des importations malheureuses de plants provenant de
pays antérieurement envahis. À diverses reprises, les vignerons
ont réclamé un procédé certain pour désinfecter les plants, tant
français qu'américains, racinés ou non racinés. Cette question
est de nouveau agitée au moment des tentatives de reconstitution
en Algérie et en Champagne. En 1887, M. G. Couanon commu-
niquait précisément à l'Académie des sciences, en collabora-
tion avec MM. F. Henneguy et E. Salomon, le résultat d’expé-
riences qui, s'appuyant sur les remarquables. travaux de
M. Balbiani, relatifs-à la résistance des œufs du phylloxera, éta-
blissaient que, par une immersion dans l’eau chaude de 45 à
50 degrés, pendant une durée de dix minutes, on pouvait traiter
préventivement les boutures non racinées. Cette année, ces
expériences ont été reprises en les étendant aux plants racinés,
qui sont le plus fréquemment employés dans la reconstitution et
aussi lés plus souvent contaminés, partant les plus infectieux.
C'est de nouveau à Thomery, chezM. E. Salomon, qu'elles ont
été faites.
« Le 31 janvier, disent les auteurs, nous soumettions des
plants de Noah racinés, d'un an d'âge, à l'immersion dans l’eau
chaude : 1° Pendant cinq minutes, un paquet de dix plants.
Température à l'entrée : 53 degrés; à la sortie : 51 degrés;
29 Pendant quatre minutes, un autre paquet de dix plants. Tem-
pérature à l'entrée : 53 degrés; à la sortie : 51 degrés. 30 Pen-
dant trois minutes, un autre paquet de dix plants. Température
à l'entrée : 53 degrés; à la sortie : 51 degrés.
À la fin des opérations, l'examen des racines semblaït bien
montrer que les plants n'avait nullement souffert. Les paquets
furent partagés par moitié. Quinze plants (cinq, quatre, trois
minutes), auxquels il fut ajouté cinq plants témoins n'ayant pas
été trempés dans l'eau chaude, furent immédiatement plantés en
serre et forcés à la manière des vignes destinées à la produc-
tion des raisins de primeur. Les quinze autres plants (cinq,
quatre, trois minutes), furent mis en stratification pour être
plantés, aussi avec témoins, à l'époque ordinaire de la planta-
tion à l’air libre. La plantation a eu lieu lé 5 mai. Aussi bien
dans la serre qu'à l’air libre, le succès a été complet. La reprise
a été parfaite, Les vignes sont aujourd'hui très belles et très bien
constituées.
On peut donc affirmer qu'une immersion dans l’eau chaude à
53 degrés, pendant cinq minutes, est un moyen pratique et éco-
nomique pour désinfecter des plants de vignes quelconques,
racinés où non racinés. Insectes et œufs sont tués et les plants
vivent et végètent normalement. »
LES CHOTTS SALÉS DE L'ALGÉRIE
Aujourd’hui que la Tunisie est sous la dépendance de la
France, les lacs qui s'étendent de l’est à l’ouest, à partir de Ga-
bés, se trouvent tous compris dans notre domaine colonial; de
sorte que le percement du seuil de Gabès est pratiquement réa-
lisable, pour transformer la région des chotts en une mer inté-
rieure, de 100 lieues de long sur 25 lieues de large, en moyenne.
On sait que chott veut dire lac, en arabe, et qu'il y a deux
espèces bien différentes de lacs en Algérie : les chotts ou lacs
d'eau douce, situés dans la région des plateaux, entre le grand
et le moyen Atlas; et les chotts salés situés au sud du grand
Atlas, dans le nord du Sahara, à l’est de notre colonie algérienne,
jusqu'à la Méditerranée, en passant par le milieu de la Tunisie.
M. de Lesseps, avec le grand bon sens qu'on lui connait, s'é-
(1) Extrait du Bulletin du Ministère de l'agriculture.
tait vivement préoccupé de cette intéressante question. Il avait
compris en effet que le développement d’une mer intérieure, dans
la partie la plus chaude de l'Algérie, au sud de la région habi-
tée par les Européens, aurait pour effet d'amener une évapora-
tion d'eau tellement considérable qu’il en résulterait bien vite
des nuages et des pluies fertilisantes, dans ces régions arides.
Or la pluie aurait pour effet d’entretenir une abondante végéta-
tion capable de fixer les sables, et d'empêcher les dunes de s’é-
tendre plus loin. Bref, la formation d'une mer intérieure, dont
ces lacs salés ne sont que les débris (de gigantesques flaques
d'une mer intérieure ancienne, envahie par les sables sous l'in-
fluence des vents), aurait pour effet de produire successivement
de la pluie, de la végétation et l’immobilisation des sables. La
restitution de cette mer intérieure serait ainsi une bénédiction
pour notre colonie africaine.
Cela est d'autant plus facile à comprendre que tous ces lacs
salés sont à une moyenne de 20 mètres au-dessous du niveau de
la mer. Il suffirait donc de couper le seuil de Gabès par un large
canal pour que l’eau de la mer afflue dans les chotts et les fasse
déborder plus ou moins loin au nord et au sud, jusqu'à la cote
d'altitude 0, au lieu de — 20. Il en est qui sont même à plus de
38 mètres au-dessous du niveau de la mer. En certains endroits,
la mer pourrait gagner jusqu'à 4 ou 5 lieues, de chaque côté des
chotts, pour former une mer intérieure continue, avec des golfes,
des caps, des isthmes, des presqu'iles. Sans compter qu'il y a
de nombreux cours d’eau qui se jettent dans ces lacs, dont quel-
ques-uns formeraient de véritables fleuves.
Actuellement, il est vrai, quelques-uns de ces cours d'eau se
perdent dans les sables avant d'arriver aux lacs; maïs avec
l'augmentation du régimé des pluies, qui serait la conséquence
immédiate de cette mer intérieure, on ne tarderait pas à leur
voir débiter assez d’eau pour qu'ils arrivent à se jeter dans cette
ancienne mer naturelle, artificiellement restaurée.
Pour nous, il n'y a pas de doute que cette mer existait, du
temps des Carthaginois, et que ce sont des déboisements intem-
pestifs, opérés par les Romains ou par leurs successeurs, qui
ont permis aux sables du désert de prédominer sur la végéta-
tion, privée de pluie par ces déboisements. Ilen est tout à fait
de méme en Palestine, dont la terre était si fertile autrefois, et
qui a été rendue stérile par le déboisement de ses montagnes,
opéré sous la dominalion romaine. Dans ces conditions, de ré-
gulier qu'il était autrefois, le cours desrivières se transforme en
torrents, et la végétation s’appauvrit de plus eu plus, tandis que
le vent permet aux sables du désert de s'étendre de plus en plus
sur des terrains d’une fertilité proverbiale autrefois.
On frémit en pensant que des terres, aujourd'hui si arides, ont
produit jadis des grappes de raisin constituant la charge de deux
hommes! Aujourd’hui, un seul homme pourrait porter dans un
panier bien des grappes de raisin du pays de Chanaan! Or rien
ne serait plus facile, avec un peu de bonne volonté, de rendre à
ces terres appauvries leur fertilité primitive.
Pour en revenir à l'Algérie, la base de la végétation, c'est
l'eau. Or on peut se procurer de l’eau de trois facons différentes :
par des puits artésiens; par l'ensemencement de plantes appro-
priées au sol, afin d'arrêter les sables et de les recouvrir d'un
manteau de verdure quelle qu'elle puisse étre; et enfin par le
percement du rempart que ces sables ont fini par former, à l'an-
cien détroit de Gabès, par où cette mer intérieure communiquait
avec les syrtes ou golfes de la Méditerranée, à l’est de la Tunisie.
Ainsi il a suffi d’une accumulation de sables, au niveau de ce
détroit, pour empêcher le renouvellement de l’eau de la grande mer
dans la merintérieure.Celle-ci s’est évaporéeen partie,pendantque
les sables du désert,poussés par le vent,venaient combler cette mer
en certains endroits, de façon à la morceler en grands lacs salés,
ou en ces grandes flaques qu'on à nommées des chotts. Ce n’est
que grâce aux rivières descendues du grand Atlas que ces lacs
se sont conservés jusqu'à nous, dans le pitoyable état où ils se
trouvent actuellement : de grandes flaques d'une eau amère, au
milieu des sables.
Il suffirait donc d'agir en sens inverse pour rendre à ces ré-
gions leur fertilité primitive. Aujourd'hui que la Tunisie est sous
notre domination, on ne se trouve plus arrété par des considéra-
tions d’ordre politique, comme au temps de M. de Lesseps, pour
résoudre cette intéressante question. C'est à nos ingénieurs qu'il
appartient de rendre à l'Algérie la fertilité qu'elle a perdue, dans
des siècles barbares.
C’est le meilleur moyen de montrer les avantages de notre ci-
vilisation moderne sur la barbarie des temps anciens. Le Parle-
ment ne refuserait pas les quelques millions qui seraient néces-
saires pour réaliser le problème; en considération du résultat
234
considérable qui en serait la conséquence, dans un temps donné.
On verrait successivement les petits cours d’eau, qui se pertlent
actuellement dansles sables avant d'atteindre les chotts, finir par
se jeter directement dans cette mer intérieure, Ensuite on y fe-
rait aboutir les deux grands fleuves du sud de l'Algérie, qui
viennent mourir honteusement aujourd'hui dans les sables,
l'Oued-Djédi, à l'ouest, et l'Oued-frharrhar, au sud. Alors on
aurait la satisfaction de voir à Gabès le cours d’eau, dans le ca-
nal d'alimentation, changer de direction, et aller de l'Algérie
dans la Méd'terranée, aulieu d'aller en sens inverse, c'est-à-dire
de celle-ci à la mer intérieure. Enfin on ne tarderait pas à voir
les sables se fixer et se recouvrir d'une végétation de plus en
plus abondante et touffue.
Biéntôt on la verrait s'étendre au loin de plus en plus, en
même temps que le régime des pluies se modifierait à la longue.
Enfin les oasis finiraient par se joindre les unes aux autres ct
par ne plus en former qu'une seule, qui recouvrirait cette partie
du Sahara tout entière, et triplerait l'étendue de la surface cul-
tivable, dans notre grande colonie africaine. « Manent ea fata
nepotes »; telles sont les destinées réservées à nos successeurs.
Dr Boucon.
LES ÉRABLES
AU POINT DE VUE FORESTIER
Le genre érable (Acer) est certainement, parmi les feuillus,
un des plus intéressants pour le forestier. Mais, en France, les
érables exotiques sont encore peu répandus, peu connus. Il n’est
pas rare, en Allemagne et en Angleterre, de voir les érables
américains entrer dans la composition des parcs et des avenues.
Les espèces les plus cultivées sont :
Espèces de l'ancien monde, non compris le Japon.
. Nous ne parlerons pas des acer campestre Lin., plalanoides
Lin., pseudo-plalanus Lin. et monspessulanum Lin., qui sont
indigènes et suffisamment connus, ni de leurs nombreuses varié-
tés. L’acer opulifolium Will. a donné naissance à deux varié-
tés que l'on rencontre assez fréquemment dans les parcs el jar-
dins. Ce sont : l'acer neapolilanum Ten., et l’acer oblusatum
Kit. L'acer creticum Tourn., oblusilobum Sibth., est un petit
arbre dont les feuilles trilobées rappellent‘celles de l’acer mons-
pessulanum. L'acer colchicum Hartw., pictum Thunb., aux
feuilles à cinq lobes entiers, aigus, est de plus grande taille; il
est aussi plus rustique et plus décoratif. Aussi est-il relativement
commun. On confond souvent avec cette espèce l'acer Lobelii
Ten., qui croit en Italie. Egalement voisin de l’ucer colchicum
est l’acer Heldreichii Boiss., observé dans plusieurs arborelum,
notamment à Bonn et à Kew; il habite la Grèce, la Serbie.
L’acer lataricum Lin. est un petit arbre à feuilles non lobées
ou faiblement trilobées. Etant très rustique, il est assez répan-
du. Bonn et Kew possèdent une autre variété à très petites
feuilles, l'acer Semenowii Rgl. et Herd., qui croît au Turkestan.
L'acer insigne Boiss. et Buhse ou acer velulinum Boiss., érable
de Perse; l’acer hyrcanum Fisch. et Mey., essence de l'Asie
occidentale, et l'acer Volxemi Masters., qui vient dans le Cau-
case, sont beaucoup plus rares.
Espèces japonaises.
Les érables du Japon sont encore peu connus. Le plus répan-
du est l'acer palmatum Thunb., polymorphum Sieb. et Zuec.
C'est un petit arbre à feuilles très polymorphes qui a donné
naissance à une foule de variétés ornementales. L'arboreltum de
Segrez en France et celui de Kew en Angleterre possèdent un
grand nombre de ces variétés qui, dans le catalogue de Kew,
sont rangées sous trois groupes: palmatum, seplemlobum et
dissectum. Cet érable parait avoir peu d'intérêt au point de vue
forestier. L’acer japonicum Thunb. est assez voisin du précé-
dent, mais avec des feuilles plus grandes. L’acer rufinerve Sieb.
et Zucc., aux feuilles à cinq lobes dont deux très petites, forte-
ment ridées à la surface. L’acer cralægifolium Sieb, et Zucc..
aux feuilles allongées, dentées, à peine lobées, s’observe à
Darmstadt et à Kewe Kew possède aussi la variété Veitchii.
L'acer carpinifolium Sieb. et Zucc. peut être étudié à Bonn et
à Kew. L'acer diabolicum Blume, pulchrum Hort., aux feuilles
plissées à la surface, se voit à Darmstadt, à Kew et à Norbiton.
Bonn et Kew possèdent encore l’acer micranthum Sieb. et Zucc.
aux feuilles petites, ridées; l’acer nikoense Maxim., aux feuilles
LE NATURALISTE
hispides, à trois lobes entiers ; Pacer dislylum Sieb. et Zucc.
etc. :
Espèces américaines.
Le plus répandu des érables américains est certainement l'acer
dasycarpum Khrh., eriocarpum Michx., saccharinum Lin. et
Sarg., qui se recommande par sa rusticité et par la beauté de
ses feuilles profondément cinq-lobées, blanches en dessous. Cet
érable figure en échantillons de grande taille dans les prome-
nades de Baden, au « Palmen garten » de Francfort; dans les
parcs et avenues des environs de Londres. Le porc du vieux
château d'Heidelberg en possède un qui ne mesure pas moins de
0 m. 55 de diamètre. Son bois n'a pas grande valeur. L'acer wu-
brum Lin. et Sarg., aux feuilles à trois ou cinq lobes finement
dentées ou pinnalifides, est également assez commun; son bois
est de qualité supérieure à celui du précédent. L’acer sacchari-
num Wang., barbalum Saxrg., à feuilles à trois ou cinq lobes,
d'un vert Jaunâtre en dessus, d'un vert glauque en dessous, cst
une essence précieuse aux Etats-Unis par son bois qui est
recherché pour l'ébénisterie et par le sucre que l’on extrait de
sa sève. Il en est de même de sa variété nigrum, acer nigrum
Michx., dont il existe dans le jardin de l’école forestière d'As-
chaffenbourg deux beaux sujets de 20 à 25 mètres de haut sur
0 m. 40 de diamèlre. Sargent considère aussi comme une va-
rièté de l'acer barbalum Vacer grandidentatum Nutt. qui rap-
pelle un peu l'acer campestre. L'acer pensyloanicuim Lin.,
Sarg.. srialum Lmk., Michx., petit arbre à feuilles trilobées et
dont l’écorce présente des stries blanches, est assez rustique el
assez répandu. Il en est de même de l'acer macrophylluim Pursh.,
Sarg., aux larges feuilles profondément cinq-lobées. Et de l'acer
spicalum Lin., Sarg., monlanum Ait., petit arbre à feuilles non
lobées et trilobées, finement dentées. L’acer glabrum Torr.,
Sarg., petit arbre à feuilles profondément trilobées, finement
dentées, et l'acer cürcinalum Pursh., Sarg., petit arbre à
feuilles de sept à neuf lobes, sont plus rares. Enfin l'acer ne-
gundo Lin., érable à feuilles composées, est très commun par-
tout et de croissance rapide ; il a donné naissance à plusieurs
variétés ornementales.
PHOTOGRAPHIE
DÉCORATION DU CELLULOÏD ET DE L'IVOIRE
PAR LA PHOTOGRAPHIE
Nous allons indiquer un procédé pour reporter les épreuves
photographiques sur le métal, l'ivoire, le celluloïd, le bois et les
étoffes Il est dû à M. Josz (1).
On prépare une surface sur laquelle on veut obtenir l’image
photographique, en la recouvrant d'une couche mince et régulière
de vernis à base de gomme résineuse; on laisse sécher cette
couche jusqu'à ce qu’elle soit gluante au toucher. On prend une
épreuve photographique sur papier quelconque, préalablement
vernie au recto avec le même vernis. Sur l'image photographique;
on pose le côté vernis gluant, sur lequel on veut reporter l’image
photographique, et on la fait sécher pendant trois ou quatre heures
dans une étuve chauffée à 40°-450 R. On porte ensuite la plaque
ayant l'épreuve photographique dans un bain composé de :
Faure enahets EL DOMDATHIÈSS
Soude caustique...…....... TND D NES
Alcoolrectiiée term ANA 100 —
Acide tacétique terre Po
\
On laisse reposer dans ce bain pendant 15 minutes. On lave à
l’eau courante, et avec un tampon plat recouvert de feutre fin, on
frotte légèrement sur toute la surface. Le papier amolli par ce
bain se détache au fur et à mesure, laissant intacte sur la sur-
face vernie du support la couche d’albumine ou de platine ayant
porté l'épreuve photographique sur papier. On lave à l’eau cou-
rante et on plonge l'épreuve dans une solution faite avec:
}
Aluneniee
Eau:’:
15 grammes.
1.000 — À
(1) Monileur scientifique du DT QUESNEVILLE. N
D PTLSUN |
LE NATURALISTE 235
surface. On sèche à l'air et on fait subir une nouvelle pression
entre deux plaques métalliques polies pour unir la surface. Pour
obtenir le report de l’image photographique en plusieurs couleurs,
on applique les couleurs à l'huile et au siccalif, soit sur l'épreuve
photographique vernie décrite plus haut au pinceau ou à la presse
lithographique, soit en appliquant les couleurs sur la base vernie
devant recevoir l'épreuve; dans l’un ou l’autre cas, la couleur
étant séchée, on procède comme nous l'avons indiqué ci-dessus.
La Flore des Tétards de Saules
DANS LA VALLÉE DE LA SEINE
Dans la vallée de la Seine, les saules sont fréquem-
ment coupés en tête et l’on donne aux arbres, qui ont
subi cette mutilation, le nom de Tétards. Ce sont surtout
les Salin alba et fragilis qui se prêtent à cette transfor-
mation, qui facilite la poussée de nouveau rameaux utili-
sés pour faire des liens
La tête du saule têtard, souvent excavée, se remplit
de terreau, en plus ou moins grande quantité et devient
rapidement l'habitat d’un grand nombre de végétaux.
En Allemagne et en Angleterre ont été publiés plusieurs
travaux sur cette flore adventive et, en France, M. le pro-
fesseur Magnin, de la Faculté des Sciences de Besancon,
a fait connaitre la dispersion des végétaux sur les têtes
de saules de la région lyonnaise,
Dans la vallée de la Seine, nous avons, pendant de lon-
gues années, noté les plantes qui se rencontrent dans ces
conditions et la liste que nous pourrions publier, à de
rares exceptions près, s'accorde avec celle de M. le pro-
fesseur Magnin.
Et d’ailleurs ce n’est pas la liste des végétaux qui
s’accommodent de cette vie spéciale, qui est particulière-
ment intéressante, mais la facon dont ils sont arrivés sur
ces têtards, l’origine de cette végétation épiphytique, La
moindre observation montre de suite que cette origine
n'est pas la même pour toutes les plantes et que c’est
dans le mode de dispersion des graines qu’il faut en
chercher les différences.
Avec M. le professeur Magnin et les principaux
botanistes qui ont traité de ce sujet, nous adopterons la
classification suivante :
Jo Plantes à fruits charnus (ou à grosses noix), pro-
pagées par les animaux, notamment les oiseaux ;
20 Fruits pourvus d’appendices adhérents pouvant s’ac-
crocher au plumage ou à la fourrure des animaux;
3° Fruits ou graines pourvus d’appendices, ailes ou
aigrettes, facilitant la dispersion par le vent;
4° Graines légères et petites, pouvant être dissémi-
nées par le vent;
50 Fruits à mécanisme explosif, pouvant projeter les
graines à une certaine distance;
6° Moyens de dispersion médiocres ou douteux.
C’est au premier de ces modes de dispersion qu'il faut
. rapporter, dans la vallée de la Seine, la présence sur les
têtards de saules des végétaux suivants : Solanum Dul-
camara, Lonicera Xylosteum, Ribes Uva-crispa, Rubus
cæsius, Rosa canina, Ribes rubrum, etc. Les groseilliers
. sont surtout abondants. On sait que les oiseaux sont
très friands de leurs fruits, aussi n'est-il pas étonnant
qu'on le rencontre aussi fréquemment en dehors des
jardins.
À propos du groseillier à grappes, il n’est pas sans in-
térêt de faire remarquer que certains bois de la vallée de
la Seine en sont littéralement peuplés, y formant de
véritables sous-bois.
Le Rosa canina y est infiniment plus rare et nous ne
l’avons observé qu'une seule fois, le long d’un affluent de
l'Yonne, l'Armançon, près de Saint-Florentin (Yonne).
Quant à la Douce-Amère, comment se propage-t-elle ?
A-t-elle pour les oiseaux la même saveur désagréable et
nauséeuse que pour l’homme? N'est-ce pas plutôt sa
fréquence autour des saules qui est l'agent véritable de sa
dissémination et de son adaptation à la vie épiphyte ? La
même observation pourrait être faite au sujet du Lierre,
que l’on trouve quelquefois sur les saules têtards.
Le Lonicera Xylosteum est fort peu répandu et nous ne
l'avons encore constaté que sur les bords de l'Aube, près
de Bar-sur-Aube.
Dans la série des plantes à fruits accrochants, le Ga-
lium Aparine et le Galeopsis Tetrahit ne sont pas rares.
Pour le Galium,ses fruits hérissés s'accrochent facilement
au plumage ou à la fourrure des animaux; pour le
Galeopsis,ce sont probablement les deux piquants du calice
qui aident à la dissémination.
Le vent est ur important agent de propagation des
végétaux. Dans la région ivonnaise,il est!le disséminateur
de 37 espèces. Dans la vallée de la Seine, le nombre en
est moins élevé. Il nous faut citer parmi les plus intéres-
santes, le Pissenlit, le Sonchus arvensis, le Houblon,
lPOrme champêtre, l’Angelica sylvestris, etc. Dans ce
groupe,les fruits etles graines sont pourvus d'appendices,
Dans un autre,les graines sont petites et légères et c’est
leur légèreté même qui leur permet de s'envoler. Le
Mouron des oiseaux, les Orties, le Capsula Bursa-Pas-
toris, le Malachium aquaticum et le Polypodium vulgare
appartiennent à cette catégorie. Dans la région crayeuse
de la Champagne, qui se prête peu à la végétation des
Fougères, le Polypode ne se rencontre jamais que dans le
creux des saules. Dans le même pays, les Asplenium Tri-
chomane et Ruta-muraria, la Scolopendre n’habitent jamais
que les puits, où leur présence parait n'être qu'acciden-
telle, les spores étant très vraisemblablement introduites
avec les pierres, qui ont servi à établir les parois et à
murer l'intérieur.
Le mécanisme explosif des fruits permet d'expliquer
la présence du Geranium Roberlianum et des Violettes.
Quelques doutes semblent cependant exister en ce qui
concerne la Violette odorante. « Il importe de faire re-
marquer, dit M. le professeur Magnin, que la projection
des graines déterminée par le mode de déhiscence de ces
fruits n’est pas suflisante pour les porter au sommet des
saules ayant deux à trois mètres de hauteur,et qu’elle
doit être complétée par un autre moyen de transport ».
Quant aux plantes, dont le mode de dissémination
n’est pas certain, en raison de leurs moyens de disper-
sion médiocres ou douteux, c’est parmi elles qu'on trouve
le Lierre terrestre, le Ranunculus repens, le Stachys sylra-
tica et encore le Galeopsis Tetrahit que nous avons égale-
ment placé dans une autre catégorie. Il nous semble qu'on
pourrait faire entrer en ligne de compte les inondations
qui transportent les graines et les fruits tombés sur le bord
des rivières et qui, dans la vallée de la Seine, sont quei-
quefois assez considérables pour recouvrir où tout au
moins venir jusqu'au niveau des têtes de saules.
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226 ; LE NATURALISTE
Nous avons dit que l'humus s'accumulait dans les
excavations des têtards; c'est grâce à cela que les graines
peuvent germer, ce sol artificiel restant assez frais et
conservant bien l’eau nécessaire à la végétation. Souvent
même il s'établit un tapis protecteur de mousses. Les
plantes amenées ne trouvent aucune difficulté à
prospérer dans ces conditions; il n’en est pas de même
des arbres et des arbustes, dont les racines traversent
facilement la couche d’humus accumulée et arrivent au
contact des tissus du saule. Faut-il faire venir ici l’in-
tervention des Mycorhizes? La discussion nous entrai-
nerait trop loin.
L'épiphytisme peut également s'exercer sur d’autres
arbres. Nous n'avons pas fait suffisamment d'observations
à ce sujet pour pouvoir en parler. M. Magnin cite
des Peupliers, des Frênes, des Sapins, des Tilleuls, des
Chênes, des Acacias. Les Tilleuls du cours de Pontarlier,
qui n’ont jamais été étêtés, servent d'habitat à une véri-
table flore adventive qui s’est établie, tantôt à la bifurca-
tion de deux ou trois branches, tantôt dans un creux
produit par la décomposition d’une section decesbranches.
On n’a pas trouvé moins de 19 espèces, réparties entre
3 et 15 mètres de hauteur.
Nos observations portent à 28 le nombre des espèces
croissant sur les têtards de saules dans le département de
l'Aube; principalement aux environs de Méry-sur-Seine.
Toutes ces plantes se retrouvent dans la région lyonnaise,
sauf une, le Ranunculus repens que M. le Prof. Magnin n'y
a pas indiquée, Il est certain que cette flore spéciale pos-
sède des représentants plus nombreux dans notre région,
ce que de nouvelles recherches viendront confirmer.
Enuméralion des espèces obseruées.
Renonculacées. Rubiacées.
Ranunculus repens. Galium Aparine.
Crucifères. Composces.
Sonchus arvensis.
T'araxacum officinale.
Capsella Bursa-Pastoris.
Caryophyllées.
Malachium aquaticum. Solances.
Stellaria media. Solanum Dulcamara.
Violarices. Labiées.
Viola odorata. Glechoma hederacea.
Géraniacées. Stachys sylvatica.
Geranium Robertianum. Galeopsis Tetrahit.
Rosacées. Polygonées.
Rubus cæsius. Rumex obtusifolius.
Rosa canina. Ulmacées.
Ribésiacées. Ulmus campestris.
Ribes Uva-crispa. Urlicacées.
— rubrum. Humulus Lupulus.
Ombellifères. Urtica urens.
Angelica sylvestris. — dioica.
Chærophyllum tenellum. Graminées.
Araliacées.
Hedera Helix.
Caprifoliacées.
Lonicera Xylosteum.
Brachypodium sylvaticum.
Fougères.
Polypodium vulgare.
P. Harior.
LE DRESSAGE DES ANIMAUX
Quand il s'agit d'apprivoiser un animal, l'opération
est en général longue et compliquée. Il importe tout
d'abord de mettre le sujet en tel état qu'il ne pense ni à
se défendre ni à fuir. Pour cela divers procédés peuvent
être employés.
4) On fatigue outre mesure l'animal. Quand un Tar-
tare veut dresser un cheval sauvage, il monte sur son dos
et s'y maintient en une course folle jusqu'à ce qu’il soit
épuisé.
En d’autres pays, on dompte le cheval en attachant la
queue à la courroie du licol (1) et on ramène la tête contre
le flanc. Abandonné à lui-même, le cheval se met à tour-
ner jusqu’à ce qu'il tombe étourdi; alors on peut le
manier.
2) On prive l'animal de nourriture. Le maitre lui apporte
à manger, et l'animal finit par s’habituer à lui et mange
dans sa main. Ainsi on fait jeuner le faucon, et les ani-
maux des ménageries.
3) On l'affaiblit par divers moyens. On donne aux bêtes
féroces des drogues stupéfantes, des narcotiques et on
les pollue(?) (2);on les bâillonne même. .
4) Mais.au début, s'il s’agit d’un animal dangereux, le
point capital est de n'avoir pas peur de lui, mais au
contraire de l’intimider.
Le secret du dompteur est de n'avoir jamais peur, de
conserver toujours son sang-froid, de dominer les ani-
maux par le regard, la décision des mouvements,
l'énergie du geste, la parole ou le fouet.
Le dompteur aborde la cage en frappant sur les bar-
reaux un coup brutal avec son fouet, ilentre brusquement
et cingle à tort et à travers sans merci.
Si un lion menace et se prépare à attaquer, le domp-
teur doit marcher vers lui, le regarder en face, l’intimi-
der par la voix, le fouet, et enfin par es détonations du
revolver. Si l'animal voit qu'on a peur, qu'on hésite,
il attaque.
Les chutes dans la cage sont fort dangereuses, le lion
alors se précipite.
Le dompteur doit sortir à reculons sans quitter du
regard les bêtes féroces. Il y aurait de sa part une véri-
table suggestion de la peur, car plusieurs se dilatent la
pupille avec de l’atropine pour rendre le regard plus
étrange.
Il faut en rapprocher ce fait : sous l’empereur Claude,
on domptait le lion dans l'arène en lui jetant un man-
teau sur la tête, le lion privé de la vue se laissait enchai-
ner sans résistance (3).
Age. — L'animal qu'on dresse doit toujours être
jeune : un chien à l’âge de six ou huit mois, un cheval à
quatorze ou dix-sept mois.
Ce sont des lions capturés jeunes ou élevés dans les
ménageries qu'on dresse le plus souvent: ils ont tété
une chienne, on les a caressés, on s’est occupé d'eux, ils
sont moins sauvages,
D'ailleurs l'animal jeune est plus souple, il n'a point
pris d'habitudes opposées au but et qu’il faut déraciner.
Etre trop jeune serait aussi nuisible, car alors il ne com-
prend pas : toutes les punitions infligées à un chien de
deux mois ne l’empécheront pas de salir un appar-
tement (4).
Ilimporte de choisir la race qu'on veut dresser. Car
les aptitudes s’y fixent. Tout chien est sans doute assez
intelligent pour qu'on en obtienne le service que l’on
désire, mais ce sera d'autant plus difficile qu'on n'y
sera pas aidé par une prédisposition atavique.
(1) Voir la Nature, Masson édit. 1887, 1er sem., page 1.
(2) V. Dicrionnaire encyclopédique de Larousse, article Domp-
teur
(3) Voir la Nature, Masson édit. 1888, €. I, p. 81 et 153.
(4) Voir Cornevin, Zootechnie, J.-B. Baillière éditeur, p. 677.
LE- NATURALISTE 237
Les mâtins et les dogues sont chiens de garde, les
lévriers chiens de courre, les épagneuls et les braques
chiens d'arrêt, etc.
Le dressage est facile s’il s’agit de ne donner que
quelques habitudes simples à l’animal. On lui fait des
lecons de choses et on les répète assez fréquemment
pour qu'il associe une sensation perçue à un acte à
accomplir.
Il ne faut pas laisser de trop grands intervalles entre
les leçons, sinon tout serait oublié et à recommencer.
On habitue ainsi très vite le chien à ne pas toucher
aux aliments qu'on place à sa portée, à ne pas aboyer à
tort et à travers, à ne pas mordre les passants, à ne pas
chercher querelle aux autres chiens.
On accoutume le cheval à être caressé, on l’habitue à
l’attache, on lui lève le pied et on lui frappe quelques
petits coups pour le disposer à la ferrure.
On habitue même les poissons à venir manger au son
d’une clochette.
Quand on veut dresser les animaux à des actes com-
plexes, le difficile est de leur faire comprendre ce qu'on
demande.
Il faut s’armer de patience et répéter un grand nombre
de fois l’acte devant eux. Mieux vaut encore que l'acte
soit montré par un animal de même espèce.
Quand il est possible d'atteler les jeunes chevaux de
trait côte à côte avec un cheval fait, ils se modèlent sur
lui et l'éducation s’accomplit sans difficulté. On peut
encore le placer entre deux chevaux dressés.
De même pour le dressage du chien, le faire tra-
vailler avec un vieux chien dressé est une garantie de
succès.
Si l’animal est inattentif, il convient de le châtier, mais
avec modération ; sinon on ne développera en lui que la
crainte qui paralysera tous ses moyens. Il vaut mieux le
récompenser par des caresses et des friandises quand il
a obéi.
Quand les mouvements auxquels on veut habituer un
animal sont par trop complexes, il faut procéder gra-
duellement : d'abord actes simples, puis de plus en plus
compliqués.
Pour dresser un cheval de selle, on l’affuble d’abord
du harnais et on l’habitue à sentir le mors, on lui place
sur le dos un cavalier de bois aux fourches duquel
viennent aboutir les rênes et d'où partent une croupière
et des courroies : l’animal s’accoutume à se sentir touché
de divers côtés sans s’effrayer.
Puis on le dresse dehors, il trotte et galope avec le
cavalier de bois; on l’arrête, on le fait repartir.
Puis on accroche au cavalier de vieux vêtements qui
lui battent les flancs. On essaie avec un petit groom
qu'on met en selle, qu'on redescend et qu'on remonte
deux et trois fois lentement.
Pour dresser le faucon (1), on lui couvre la tête d’un
capuchon et on lui lie les pattes, puis on le fait jeuner
vingt-quatre heures, on le met sur le poing, on lui tend
un petit oiseau à manger. Peu à peu on augmente la
distance. Ensuite on porte l'oiseau attaché à la filière,
ficelle dont la longueur est ainsi graduellement aug-
mentée de 20 à 150 mètres et on lui montre le leurre
(pigeon mort) ; s’il fond dessus, on le lui enlève, mais on
(1) Nature, 1887, t. Ie, p.61; et Renicheff, L'activité des ani-
maux, Nassau, édit., 1900.
lui donne un petit morceau de viande sur le poing du
fauconnier, enfin un oiseau vivant mais aux ailes
rognées.
Ceux qui au bout de deux mois restent rebelles ne
sont pas aptes à l’affaitage; il faut au dresseur fau-
connier de la patience, de l'exactitude, de la douceur et
de l'amour de ses oiseaux.
Les dresseurs arrivent à des résultats merveilleux : les
chiens savants marchent sur lespattes de devant, gardent
l'équilibre sur une boule, font le saut périlleux, jouent
à la raquette, tiennent en équilibre une boule placée sur
un bâton horizontal, ete, (1).
On arrive à tout avec de la patience,
Dr FÉLIX REGNAULT.
LES THUYA
Les thuya sont très communs dans nos parcs et jardins ; le
public confond d’ailleurs souvent sous ce nom les libocedrus, les
biota et les chamæcyparis. Le fhuya occidentalis Lin., espèce
américaine, est le plus cultivé. Il a donné naissance à de nom-
breuses variétés ornementales que l’on peut voir dans la plupart
des jardins botaniques, entre autres : wareana où {huya cauca-
sica Hort., ellwangeriana, Spaethii, aurea, lutea... Il est très
rustique, mais n’atteint pas chez nous les dimensions qu'il pré-
sente aux Etats-Unis. Les plus beaux sujets que je connaisse ne
dépassent guère 40 mètres de hauteur; ceux qui ont été plantés
à Weinheun ont à peu près cette taille. Il convient d'ajouter que
le {huya occidentalis supporte très bien la taille et convient pour
faire des haies vives. A cette espèce, je préfère de beaucoup,
aussi bien au point de vue décoratif qu'au point de vue forestier :
le {huya gigantea Nutt., Sarg.; thuya Meuziezii Dougl., Carr.;
thuya Lobbi des horticulteurs. Il est, en effet, tout aussi rustique,
de croissance plus rapide et susceptible d'acquérir des dimen-
sions beaucoup plus belles. Cette essence est assez répandue, et
il n'est pas rare d'en voir des sujets bien venants de yrande
taille; le parc des conifères, à Heidelberg, en possède un de
25 mètres de haut sur 0 m. 40 de diamètre; l'arborelum des
Barres en à aussi de très beaux, qui donnent quelques semis
naturels, Ceux qui ont été plantés à Weinheim ont environ
15 mètres de haut et sont en bon état de végétation. C’est donc
une des essences résineuses qui me paraissent les plus dignes
d'être introduites en forêt. Elle donne d'ailleurs aux Etats-Unis
un bois léger assez estimé. Comme le {huya occidentalis, le
thuya gigantea est un magnifique arbre d'ornement; comme lui,
il a donné naissance à plusieurs variétés, notamment aurea,
aureo-variegata, pendula…. que l'on peut observer dans la plu-
part des jardins botaniques.
Le {huya plicata Don., Beissn., aux rameaux comprimés, est
de moins grande taille. Il est moins cultivé que les deux précé-
dents; je l’ai étudié à Segrez, à Carlsruhe, à Aschaffenbourg, à
Bonn et à Kew.
Assez rare aussi, bien que très rustique, est le {huya Slan-
dishi Carr., Beissn., petit arbre japonais qui rappelle en petit le
lhuyopsis dolobrata; il existe à Carlsruhe, à Heidelberg, à
Aschaffenbourg, à Bonn, où il est représenté par un sujet de
1 mètres de haut, et à Kew.
(1) Exercices de Miss Doré. Voir La Nature, 1896,t. Tor, p. 294.
RP PI RE RE RS RES EE RER Re ee du Ce De nt D 2
238
LE NATURALISTE
IES PLANTES DE FRANCE
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
oO QC OO |
ESPÈCES NOMS
D'ARBRES OU PLANTES GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Bruyère
VULEARIS INC UMEES Scodiona Belgaria H.
— Selidosema Tæniolaria H.
_ Aspilates Strigillaria H.
— Pachycnem. HippocastanariaH.
ScoPARIA, ARBOREA ...|Eupithecia Seopariata Rmb.
VULGARIS et TAe — Nanata H.
— — Goossensiata Mab.
ARBOREA eee tee = Ericcata Rmb.
= Eubolia Plumbaria F.
Buglosse
Euplexia Lucipara L.
Buis
SEMPERVIRENS . ....... Cerastis Daubei Dup.
= Polia Cærulescens B.
Buplèvre
PALCATUMS en ee Nemoria Pulmentaria Gn.
— Hemithea Fimbrialis Scop.
— Eupithecia Campanulata H. $.
Pimpinellata H.
Calamagrostide
ARENARTA NZ Su tee uit Leucania Littoralis Curtis.
Calament
NERETA Sen Tee Eupithecia Nepetata Mab.
Camphrée
MOoNTPELIACA ...,..... Agrotis Obesa B.
Canche
CŒSPITOSA TI AIRES Miana Arcuosa Haw.
Cardère
DYLVESTRIS een Cidaria Truncata Hufn.
Caryophyllées
Neuria Saponariæ Bkh.
Dianthæcia Carpophaga Bkh.
— Capsincola $.V.
CAPSULES ER Rte Emmelesia Affinitata Steph.
Hydrata Tr.
Centranthe
Ruser, Cararropa...|Polia Cœrulescens B.
Cérastie
Cétérach
OFFICINARUM,.....,... Eriapus Latreillei Dup.
Chêne
Thecla Ilicis Esp.
— Pruni L.
— Quercus L.
IDEX ANNE ER Es Smerinthus Quercus P, V.
MOIS DE L'ANNÉE
OU L'ON TROUVE
Chenilles
(Erica)
Mai.
Eté, automne.
Printemps, automne.
Octobre à février, juin.
Octobre.
Juin, octobre.
Mars, avril (fleurs).
Avril, juin.
(Anchusa)
Septembre, octobre.
(Buxus)
Mai.
Décembre, janvier.
(Buplévrum)
Belle saison.
Mai.
Septembre, octobre.
Octobre.
(Calamagrostis)
Mai, juillet.
(Calamintha)
Octobre, novembre.
(Camphorosma)
Juin, juillet.
(Aira)
Mai, juin.
(Dipsacus)
Avril, août.
Juillet, août.
Eté.
Juin à septembre.
Septembre.
Eté, automne.
(Centranthus)
Décembre, janvier.
(Cerastium:)
Juin.
(Ceterach)
Belle saison.
[((Quercus)
Mai.
Juim
Juillet à septembre.
Papillons
Juin, juillet.
Juin à septembre.
Mai, juillet, août.
Belle saison.
Avril, mai, juillet, août.
Mai, août.
Septembre, octobre.
Mai à août.
Avril à août
Novembre, décembre.
Septembre, octobre.
Belle saison.
Juin, juillet.
Mai à août.
Juillet, août.
Juin, août.
Août à octobre.
Août, septembre.
Juin, juillet.
Mai à août.
Mai à juillet.
Juin, juillet.
Septembre, juin à août.
Mai.
Mai, juin.
Septembre, octobre.
Avril, mai.
Mai, juin.
Belle saison.
Juin, juillet.
Mar.
HABITAT
FRANÇAIS
France centrale et occidentale.
France centrale et méridion.
Toute la France.
France centr., mérid. et occid.
Toute la France.
Paris.
France méridionale.
Toute la France.
Toute la France.
Montpellier.
France méridionale.
Ardèche.
Toute la France.
France centrale et méridion.
Paris.
Rivages.
France centr., mérid. et orient.
France méridionale.
Loiret, Touraine, Alsace.
Toute la France.
Toute la France.
France centrale et orientale.
France centrale et méridionale.
France méridionale.
Toute la France.
Paris.
France méridionale.
Toute la France.
France centrale et orientale.
Toute la France.
LE NATURALISTE 9239
ACADÉMIE DES SCIENCES
© Sur Ja mutabilité de l'Œnothera Lamarckiana
. (M. Hugo de Vries). — Presque toujours, les espèces à l’état
sauvage se montrent-à notre observation directe comme immua-
bles, quoique très polymorphes ; c'est-à-dire que les graines
d'un même individu peuvent reproduire toutes les formes, tandis
que, dans une espèce douée de mutabilité, il apparait des indi-
vidus ayant de nouveaux caractères, et qui, isolés, reproduisent
uniquement la forme apparue. Dans les plantes cultivées, la
mutabilité n'est ordinairement, en grande partie, qu'apparente ;
c'est plutôt un état de polymorphie qu'un phénomène de chan-
gement. Les formes vraiment changeantes de nos cultures doi-
vent presque toujours cette propriété à l'hybridation. Il est très
rare de trouver une espèce pure à l'état de mutabilité. L'Œno-
thère de Lamarck, cultivé par l’auteur depuis plus de douze
années dans un jardin d'expériences, a présenté cette mutabilité.
Elle produit constamment des formes nouvelles La plupart sont
incapables d'un développement normal et périssent bientôt sans
arriver à produire des graines; d’autres sont complètement sté-
riles. Les annotations, faites annuellement sur cette culture et
sur les semis des graines. d’un certain nombre des individus
transformés, ont conduit aux conclusions suivantes : 10 Les es-
pêces nouvelles se montrent subitement, sans intermédiaire ni
préliminaire ; individu transformé offre tous les caractères du
nouveau type, quoiqu'il soit issu lui-même de parents et de
grands-parents tout à fait normaux. 20 Les graines des individus
transformés donnent toutes le nouveau type, sans retour aux
caractères de l'O. Lamarchkiana. Elles restent fixées des leur
première apparition. On peut donc les considérer comme des
espèces nouvelles. 30 Les formes nouvelles se distinguent presque
dans tous leurs caractères de l'espèce mûre, et correspondent
par là aux petites espèces des fleuristes, et non aux variétés des
plantes cultivées. 40 Les espèces nouvelles se montrent ordinai-
rement dans un nombre assez grand d'individus, soit dans une
même génération, soit dans une série de générations. On peul
évaluer leur nombre à environ 1 à 3 pour 100. 5° Les caractères
des espèces nouvelles ne présentent aucune relation évidente
avec ceux des variations ordinaires de l’espèce mère. La muta-
bilité semble être indépendante de la variabilité.
Observations d'un boiide dans la soirée du 24 sep-
tembre 4960. (Lettre de M. Jean Mascart à M. le Secrétaire
perpétuel.)
Le lundi 2% septembre, entre les stations de Meudon et de
Bellevue, à 10 h. 6 m. 15 s. environ temps moyen de Paris, le
ciel s’étant dégagé, je fus témoin du phénomène suivant : Une
nuée lumineuse, d'aspect analogue à celui d'une nébuleuse vue
dans une lunette, apparut au sud-ouest de l'étoile & Poisson
austral pour s'étendre, en traînée curviligne, jusqu'au sud de
x Poisson austral. La tête, stellaire et très lumineuse, apparut
nettement que vers le milieu de la trajectoire et le phénomène
entier dura quatre secondes à peu près. Lors de la disparition,
il n'y eut pas d’éclatement appréciable, mais quelques éclairs
lumineux semblaient être projetés du centre. Le temps me fit
défaut pour apprécier le diamètre apparent de la tête; son éclat
était comparable à trois fois celui de Vénus, dans les meilleures
conditions, la coloration de l’ensemble étant très intense, vert
bleuâtre, un peu lavée de blanc dans la queue. La courbure de
la trajectoire était très forte, car, semblant provenir, à l'origine,
de 4 Capricorne, la disparition se faisait à l'opposé de y ou
même 1 Verseau. C‘inq minutes après, le ciel était entièrement
caché par des nuages se formant sur place, pour devenir plus
clair, mais variable, vers 10 h. 30.
Oxycelluloses du coton, du lin, du chanvre et de la
ramie. (M. Léo Vignon.)
On admet que les fibres textiles purifiées provenant du coton,
du lin, du chanvre et de la ramie sont constituées par de la
cellulose : il était intéressant de rechercher comment se compor-
tait la cellulose préparée par ces différents textiles, quand elle
est soumise à la méthode d’oxydation en vue de l'obtention de
l'oxycellulose. Il résulte des études faites par M. Léo Vignon que
les celluloses provenant du coton, du chanvre, du lin, de la
ramie donnent sensiblement les mêmes produits par oxydation.
Les différences numériques constatées entre les propriétés des
oxycelluloses obtenues sont relativement faibles, et peuvent
s'expliquer, soit par les conditions d'état physique propre à
chaque textile, soit par les condensations de la molécule
C5H10 0%), qui ne sont pas tout à fait identiques pour les
extiles considérés.
OFFRES ET DEMANDES
S’adresser pour les collections et lots ci-après indiqués
à Les Fils D'Emile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris;
Collection de Coléoptères d'Alsace et des
Vosges de M. Silbermann. Comprenant 1.730 es-
pèces, 4.700 exemplaires renfermés dans 25 boites
doubles, en bois verni, mesurant 35 X 28 X 9.
Cette collection, formée par M. Silbermann, a servi à
établir le catalogue des Coléoptères d'Alsace et des
Vosges que cet entomologiste a publié en collaboration
avec M. Wencker, L'état de conservation des insectes
est excellent; l'étiquetage, fait très soigneusement,
donne des noms rigoureusement exacts et des rensei-
gnements sur la rareté des sujets, ainsi que le nom des
plantes sur lesquelles se trouveut habituellement les
espèces. Des espaces laissés vacants permettent d'aug-
menter la collection sans lui faire subir de remaniements.
Le catalogue de Wencker et Silbermann accompagne la
collection Prix. UT RARE .::... -:B00 francs.
Coïlection de Macro- et Microlépidoptères
d'Alsace et des Vosges de M. Silbermann.
Comprenant 595 espèces, 1.123 exemplaires de
Macrolépidoptères et 84 espèces, 151 exemplaires de
Microlépidoptères, le tout enfermé dans 26 boites.
Plus le catalogue des Lépidoptères d'Alsace, par H. DE
PEYERIMHOFF.
Cette collection est identique comme boites et plan de
classification à la collection de Colécptères. Bonnes
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semble seront comptées au prix de 800 francs.
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péens. 381 espèces, 1.324 exemplaires, 19 cartons.
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inclus. 419 espèces, 1.195 exemplaires, 17 cartons,
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ropéens. 225 espèces, 806 exemplaires, 14 cartons.
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Collection de Buprestides et EHlatérides euro-
péens. 136 espèces, 403 exemplaires, 7 cartons.
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Collection de Malacodermes et Térédiles eu-
ropéens. 100 espèces, 281 exemplaires, 5 cartons.
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Collection d'Hétéroméres européens.148 espèces,
350 exemplaires, 10 cartons. Prix....,.. 40 francs.
Collection de Curculionides et Xylophages
européens. 368 espèces, 951 exemplaires, 15 cartons.
OA DS AIN NE SRE NES DA .:" 95 francs.
Collection de Longicornes européens. 173 es-
pèces, 593 exemplaires, 10 cartons. Prix. 65 francs,
240
LE NATURALISTE
Collection de Chrysomélides et Coccinellides
européennes. 362 espèces, 1.490 exemplaires, 15 car-
tons Prix us rene Nan de 75 francs.
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fermées dans des cartons presque neufs, mesurant
25 X19 X 6.
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des collections ci-dessus annoncées Environ 1 100 in-
dividus, en partie nommés, renfermés dans 14 cartons
26X 19% 6, vitrés et non vitrés. Prix... 5O francs.
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Féronides, Anchoménides, Bembidiides. 300 espèces,
830 exemplaires, 4 cartons doubles. Prix.... 50 francs.
Lot de Lamellicornes européens. 140 espèces,
500 exemplaires, 2 cartons doubles. Prix. 40Q francs.
Lot de Malacodermes européens. 170 espèces,
500 exemplaires, 3 cartons. Prix........ 40 francs.
Lot de Ptinides et Anobiides européens. 54 es.
pèces, 178 exemplaires, 2 cartons. Prix. 20 francs.
Lot de Vésicants européens. 110 espèces, 305 exem-
plaires,2.cartons33 X 22.:Prix..... %.- 5O:francs.
Lot de Chrysomélides européennes : Halticides,
Hispides, Cassides. 110 espèces, 380 exemplaires,
AUTOMNE MO) PTS RES er MS DNITANCSS
Lot de Chrysomélides européennes et exo-
tiques : Sagra à Cryptocephalus inclus. 200 espèces,
540 exemplaires, 5 cartons. Prix........ 60 francs.
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tiques : Pachybrachrys à Zygogramma inclus. 210 es-
pé:es, 680 exemplaires, 6 cartons. Prix.. 60 francs.
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65 espèces, 156 exemplaires, 2 cartons: Prix. 50 francs.
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nombre de doubles en partie nommés. Prix, 25 francs.
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plaires;"4Carton. PRIX DER EN SRE RON 10 francs.
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Reiche laissent à désirer comme classement et comme
préparation; mais elles conservent une {valeur scienti-
fique indiscutable du fait que toutes les espèces ont
servi, aux entomologistes les plus célèbres, pour la ré-
daction de leurs travaux.
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restres.
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autres pièces se rapportant à l’évolution des insectes
utles et nuisibles, sauf Lépidoptères (S'adresser aux
bureaux du journal),
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grandes facettes, Galène à petites facettes, Galène argen-
tifere. Donner prix par 100 kilogr. (S’adresser aux
bareaux du journal).
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Les Fils D'Emile Deyrolle, 46, rue du Bac, Paris.
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mensuelle d'histoire natuelle, collection complète de
1870 à 1891, soit 21 années, en feuilles, prix 45 francs.
(S'adresser aux bureaux du journal).
— À vendre, Un exemplaire du Genera des Coléoptères
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Le Gérant: PAuz GROULT.
PARIS — IMPRIMERIE F. IEVÉ, RUE CASSETTE, 11.
EP TE TEE OS Te ST TEE PT TT PE EE PE Re tt ee D de D ae De me A. PE = a eû L AIN POP E _
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29e ANNÉE 2% SÉRIE — N° 328 - 1: NOVEMBRE 1900
LE CAMPIGNIEN EN GIRONDE
STATION DU RALE
L'été dernier, au cours d'une promenade sur les
coteaux de la rive gauche de la Dordogne, dans les envi-
rons de Sainte-Foy-la-Grande (Gironde), j'eus la bonne
fortune, en passant près du village de Saint-André-
Apelles, de relever quelques traces certaines d'industrie
campignienne. Mais ce n’est que cet hiver, après de
nombreuses recherches, que je pus enfin trouver une
station de cette époque près du hameau de Râle.
La station est située sur le flanc de la colline de Saint-
André, couvre une superficie de 4,500 mètres carrés envi-
ron au nord du village du Râle, et domine la route qui
relie La Roquille au Pont de la Bauze, en bordant le
Bréjou ou ruisseau des Sandaux en cet endroit.
GÉOLOGIE
L’étage du sous-sol de la station appartient à l’ère ter-
tiaire, étage Tongrien.
Les assises visibles sur les lieux sont les suivantes en
partant de la base:
1° Mollasse sableuse du Fronsadais, sur laquelle coule
le Bréjon.
20 Au-dessus vient le calcaire lacustre de Castillon,
contenant des bancs de silex et quelques dents fossiles
que leur mauvais état de conservation rend indétermi-
nables.
L'ostréa longirostris et quelques débris de bois sili-
cifié sont les seuls fossiles caractéristiques.
La couche pleistocène, à une altitude un peu supérieure
à la station, contient de nombreux petits cailloux roulés ;
les fossiles animaux y font absolument défaut.
Avant d’entrer dans le vif de mon sujet, il n’est peut-
être pas inutile de faire, en passant, une remarque géné-
rale sur un point méconnu trop souvent.
Pour que des fouilles entreprises en un gisement préhis-
torique soient fructueuses et utiles à l’avancement de la
science, il est urgent tout d’abord de soumettre les pièces
trouvées à de minutieuses comparaisons, non seulement
avec les types classiques, mais encore avec des outils
d’époques différentes et de provenance régionale. Ainsi,
seulement, il sera possible d'arriver méthodiquement,
par des comparaisons répétées de proche en proche, à
découvrir la filiation certaine des formes etles foyers des
diverses industries préhistoriques.
Souvent aussi, lorsque le hasard nous fait découvrir,
isolés, quelques types nouveaux, on hésite à les décrire,
n'ayant pas toujours de termes de comparaison pour
baser son étude. En soi, la raison, toute logique qu'elle
paraisse, n’est pas admissible, car, il ne faut pas l'oublier,
ce n’est qu'à force de descriptions et d'observations que
l’on arrive à un résultat positif.
Une étude, négative à première vue, peut mettre des
chercheurs sur la bonne voie et provoquer des comparai-
sons d'où Jaillira la lumière.
Un silex de taille indéterminée, aussi bien qu'un
simple ossement humain, peuvent avoir leur valeur un
jour ou l’autre ; les résultats ne sont pas toujours immé-
diats. Il ne faut pas l'oublier, souvent des petites causes
‘naissent les grands effets.
Le Naturalisle, 46, rue du Rac, Paris.
Ce sont ces considérations qui me déterminent aujour-
d'hui à écrire le résultat de mes recherches; d'autant
plus, qu'à ma connaissance, c’est le premier gisement
campignien qui ait été étudié en Gironde et même dans
le sud-ouest de la France (1).
INDUSTRIE
Les différents outils que l’on rencontre dans la station,
à fleur de terre, sont éclatés dans un silex calcidomeux
blanchâtre, assez translucide, d'apparence cireuse ou
cornée, veiné parfois de rose, et d'origine locale.
Leur surface n'est pas recouverte de patine, en
revanche, presque toutes les pièces sont mordues de
petites incrustations ferrugineuses qui établissent pé-
remptoirement leur authenticité,
TRANCHETS
L'outil le plus caractéristique est le tranchet.
Sa hauteur varie entre 4 cent. minimum et 15 cent.
maximum.
L'aspect de ces pièces est très variable (fig. 1 et 2).
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Lorsqu’elles présentent un travail sur toute leur surface,
c’est ordinairement le cas des gros tranchets, il est exé-
cuté grossièrement et à grands coups (fig. 1).
Dans presque toutes les pièces, il est rare que la par-
tie abrupte de la surface du silex ne paraisse pas par
plaques (fig. 1 et 2).
Ordinairement le tranchant de l'outil est obtenu par
(1) N.-B. « En France, les départements du Midi et ceux qui
bordent nos côtes de l'Atlantique ne paraissent pas avoir encore
fourni le campignien»; ex Bulletin de l'Ecole d'Anthropologie,
année 1898, page 406. Fouille d'un fond de cabane au Campigny
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percussion transversale, déterminant une arête aiguë à
sa jonction avec le bulbe de la face opposée. |
Un tranchant émoussé ou mal obtenu est souvent re-
touché à petits coups.
Les deux types caractéristiques et extrèmes sont déter-
minés par les figures 1 et 2; entre eux se classent de
nombreuses formes intermédiaires taillées à grandes
facettes.
Le tranchet n° 1 est éclaté à grands coups dans un silex
corné, piqué de quelques concrétions ferrugineuses ; hau-
teur 15 centimètres, tranchant 7 centimètres,
De tous les tranchets que j'ai dans ma collection, c’est
le mieux taillé et, quoiqu'il n'ait pas été trouvé sur
l'emplacement même de la station, mais dans un champ
voisin à peu de distance, je le décris ici.
L'autre type de tranchet, de beaucoup le plus commun,
est représenté par la fig. 2. Dans ce dernier cas, l'outil
est plus rudimentaire ; une face est lisse et constituée
par une simple bulbe de percussion, tandis que l’autre
est fruste jusqu'à sa rencontre avec le biseau toujours
déterminé par un coup transversal. C’est, à proprement
parler, une lame hiseautée et quelquefois retouchée sur
les bords.
De cette forme on peut rapprocher une sorte de tran-
chet en éventail, à tranchant convexe, qui a pu servir de
racloir ou bien, emmancheé, être utilisé comme hachette.
Ces derniers outils sont rares :
L'arête des tranchets est tantôt très eflilée et d’autres
fois.obtuse et irrégulière.
L’usage de ces outils est douteux: certains semblent
rappeler un usage domestique, tandis que d’autres
réclament une destination plutôt guerrière. Les deuxhypo-
thèses ont peut-être chacune leur part de vérité.
GOUGES — CISEAUX
Ce qui vient d'être dit pour les tranchets convient en
général pour les gouges et ciseaux qui, à part leur forme,
ont, dans la plupart des cas, le même mode de fabrication.
Ce ne sont d'ordinaire que des biseaux éclatés dans des
lames plus ou moins retouchées.
Le tranchant de ces outils est quelquefois retaillé
comme dans les tranchets.
Leur taille varie entre 3 et 8 cent. de hauteur avec
tranchant de 1 à 5 cent. E
À la suite de ces instruments, il est utile de décrire
une pièce très Caractéristique et assez commune (fig. 3).
C’est un bloc de silex dont la base seulement a été
taillée, de manière à offrir un biseau très résistant, Ces
outils sont tous de grandes dimensions et portent à leur
partie supérieure trace de martelage.
Le silex de cette catégorie, représenté par la fig. 3,
montre à sa partie médiane une encoche évasée qui per-
met de le tenir commodément de la main gauche, tandis
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que, de la droite libre, on pouvait aisément, avec une
autre pierre, frapper dessus pour obtenir plus de force.
Les nombreuses étoilures qui couvrent la surface supé -
rieure, ainsi que l’encoche, démontrent rigoureusement
cette destination.
PICS
Ce sont des outils de taille assez forte, grossièrement
Fig. 4.
éclates et terminés en biseau, quelquefois coudée légère-
ment à la manière des leviers à ouvrir les caisses (fig, 4),
LE NATURALISTE 245
Certains spécimens sont même constitués par de simples
rognons de silex dont l'extrémité seule est biseautée.
RACLOIRS — GRATTOIRS
Les racloirs, grattoirs sont très abondants et aussi
variés par leurs formes que par leurs dimensions, On
peut les classer en deux groupes principaux :
14° Groupe paléolithique ;
20 Groupe néolithique.
1° A cette première catégorie se rattachent : Les
racloirs, de type moustérien, ainsique de larges lames
racloir, copie assez exacte des lames racloir du moustier.
Puis les grattoirs et racloirs de forme solutréenne et
magdalénienne. Grattoirs en éventail de dimensions
variables atteignant parfois jusqu’à 7 cent. de corde.
J’ai retrouvé ce dernier type, mais en plus petit, à la
station magdalénienne de Gabastou (Dordogne), On peut
ajouter à ce même groupe les encoches et grattoirs en
pointe communs au magdalénien et persistant dans le
pays jusqu’en plein néolithique. ;
2° Ce groupe comprend des grattoirs discoides de type
néolithique. Cette forme, par la suite, se retrouve en
abondance dans toute la région, associée aux haches
polies.
BURINS
Les burins sont assez grossiers et atteignent parfois
de grandes dimensions.
Les plus communs sont les burins de type moustérien,
Le burin magdalénien classique est assez rare ; on trouve
en revanche assez de pointes à extrémité en biseau déli-
cat (fig. 5) qui sont comparables et presque identiques à
des pièces semblables, de provenance magdalénienne,
trouvées à la station de Gabastou (Dordogne), où elles
sont nombreuses,
Une autre forme constante et assez caractéristique de
burin est représentée par la figure 6; c’est un outil qui
paraît avoir été assez commun. Ces dernières pièces de
dimensions variables atteignent jusqu'à 12 cent. de
long.
Des silex semblables ont été découverts, il y a quelques
années, dans un gisement d'époque douteuse situé près
du Fleix (1) (Dordogne).
Un autre burin de facies pur magdalénien est le bec de
perroquet. Celui de la fig. 7 est terminé à sa partie infé-
rieure par un grattoir.
(1) De ce gisement, deux pièces seulement m'étant parvenues,
je n'ai pu le classer. Il serait peut-être campignien ?:
AUTRES PIÈCES
En tête de cette dernière liste la pointe moustérienne
mérite à juste titre le premier rang.
Taillées plus irrégulièrement qu'à l’époque du moustier,
ces pièces très typiques n'en sont pas moins un calque
parfait de ce modèle (fig. 8).
Très remarquable aussi est le tranchoir racloir de
Fig. % et 8.
la fig. 9. — Il est souvent difficile de classer surement
un silex sous l’une ou l’autre de ces dénominations, les
deux pouvant également et indifféremment convenir à
ZX
ES e-
Fig. 9.
un même outil usité à deux fins — taillé ävec soin sur
les bords et à dos large, assurant pour la préhension un
point d'appui solide à la paume de la main.
Ce dernier caractère est particulier aux silex de cet
endroit et existe quand bien même aucun but utilitaire
ne le réclame, imprimant à l'outil un cachet bien per-
sonnel,
Malgré leur galbe particulier, ces silex, quoique taillés
en général sur les deux faces, ne sont pas sans avoir une
certaine analogie, bien qu'un peu lointaine, il est vrai,
avec lesracloirs tranchoirs moustériens, — type en demi-
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246
LE NATURALISTE
cercle, —ceux par exemple que l’onrencontre au Gendre,
près le Fleix (Dordogne).
Les perçoirs n'ont rien de caractéristique; ce sont
tantôt des lames appointées et retouchées avec soin, ou
bien de petits blocs de silex éclatés en pointe,
Certains spécimens par l'usure de leurs bords témoi-
gnent d'un long usage.
Une lame lancéolée (fig. 10), assez rare dans la station,
Fig. 10.
attire aussi l'attention, A cette forme on peut rattacher
de petits éclats retouchés (fig. 11) qui apparemment ont
dû servir de pointes de flèches.
Ajoutons, pour finir la nomenclature, une pointe
(fig. 12), sorte de lame à dos abattu et sans retouches, qui
à une grande analogie avec certaines pointes néolithiques,
abondantes sur toute la rive de la Dordogne entre
Bergerac et Libourne.
La flèche vraiment néolithique n'existe pas, mais cer-
tains types s’en rapprochent beaucoup.
En terminant, il est aussi utile de relater l'existence
Fig. 11 et 12.
d'un instrument assez rare, sorte de hache moustérienne
rudimentairement éclatée, Ne serait-ce pas la reproduc-
tion fortuite d'une forme paléolithique ? L'hypothèse n’a
rien d’invraisemblable.
COUTEAUX
Certains sont d'aspect moustérien, d'autres magdalé- -
nien ; les petits spécimens ne sont pas rares, ainsi que les
types à bords retouchés. Les lames-scies se trouvent en
assez grand nombre.
ÉCLATS DIVERS
A part ces formes voulues, il existe une foule.d’éclats
de toutes formes et de toutes dimensions aux bords
intacts où ébréchés par l'usage.
NUCLEIT
Les nuclei sont bien éclatés et témoignent, par la min-
ceur du bulbe des lames enlevées, en faveur de l’adresse
des ouvriers campigniens, qui est cependant loin
d’égaler celle des tailleurs de silex magdaléniens.
PERCUTEURS — ENCLUMES
Les percuteurs, taillés en général à grandes facettes,
n'ont rien de particulier.
Il existe aussi des enclumes, gros blocs à base plane
recouverts d’étoilures.
POTERIE
Ilne m'a été donné de trouver qu'un seul fragment de
poterie assez grossière et de couleur noirûtre.
CONCLUSION
Si maintenant on compare cette industrie à celle de la
station type du Campigny, à en juger par les figures
publiées en décembre 1898 dans le Bulletin de l'École
d'anthropologie de Paris, on ne peut que constater
l'identité de la plupart des formes, mais au Râle la taille
parait être plus grossière,
Pour lever le doute sur ce point, il faudrait comparer les
originaux. Les figures, en effet, quelle que soit l’exacti-
tude qu'on y apporte, ne peuvent remplacer les pièces
elles-mêmes dans une comparaison rigoureuse. Ce point
de détail n’en laisse pas moins subsister la similitude
générale.
Ainsi, cette nouvelle étude sur l’époque campignienne
confirme en tous points les précédentes et montre, par
son mélange simultané d'industries paléolithiques et
néolthiques, que c'est une période de transition bien
caractérisée, se rapportant, du moins dans ce cas parti-
culier, autant de l’une que de l’autre de ces formes.
En archéologie préhistorique comme en histoire natu-
relle, l'évolution est la grande loi à laquelle tout obéit.
Natura non facit saltus. L'intime parenté qui unit les
diverses industries préhistoriques et que contrôle la
paléontologie nous le démontre suflisamment ; depuis
les outils gisant à la base du pleistocène aux belles haches
polies du néolithique, il y a eu progression lente et con-
tinue.
Grâce à ces débris de primitive industrie, il nous est
permis de suivre pas à pas le développement du génie
naissant de l'humanité. Mais, me suis-je souvent
demandé, s’il a fallu à l’homme préhistorique traverser
le long espace de temps qui sépare l'Elephas antiquus du
Cerf, pour arriver à la pierre polie, et ce même homme
se révélant, dès le début du quaternaire, assez adroit pour
tailler les silex de Chelles et de Saint-Acheul, quelle
longue et obscure évolution n'a-t-il pas dü subir anté-
rieurement pour s'élever de l'embryon de l'intelligence à
ce point-là, pourtant bien rudimentaire à nos yeux de
civilisés ?
C'est à l'homme tertiaire qu'il faut remonter pour ré-
soudre le probleme. Son existence peut encore nous
être longtemps révélée, comme pour ses congénères du
quaternaire, par la présence des vestiges de son industrie.
Mais, n’arrivera-t-1l pas un moment où ses outils trop
rudimentaires ne sauraient être pereus scientifiquement ?
Ne parait-il pas en effet logique de croire, qu’au début
de l'humanité, l’homme, avant de tailler le silex et de
connaitre l'usage du feu, se soit simplement servi de ses
dents et de ses ongles et n’ait eu en fait d'outils que le
bâton ou le vulgaire caillou qui se trouvaient sous sa
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LE. NATURALISTE 247
main ? C’est dès lors à la paléontologie humaine à lever
tous les doutes.
Nos collections naissantes sont encore, il est vrai, bien
muettes sur ce point, mais il ne faut jamais désespérer:
de la longueur de l’étape on ne doit pas conclure à l'issue
du voyage.
La découverte du Pithecanthropus erectus, faite à Java
par le Dr Dubois, est un premier pas dans cette voie
difficile qui promet d'être féconde.
P. AUG. CONIL.
LE SENS MORAL CHEZ LES ANIMAUX
Les animaux ont-ils le sens moral, c'est-à-dire la notion pré-
cise du bien et du mal? L'observation répond pleinement à cette
intéressante question.
Voyez une mouche importune, que l'on chasse et qui revient à
la charge en bourdonnant (j'allais dire en bougonnant), de plus
en plus fort à mesure qu'on la chasse. Elle sait très bien qu’elle
importune; mais l’appät qui l’attire est plus fort que son bon
sens ne l'indiquerait, et elle finit par se faire écraser.
Quand des chats errent dans une cour où dans un jardin, on
peut être sûr que c'est pour commettre quelque vol, au préjudice
du propriétaire de cet immeuble. Il n’y a qu’à les regarder pour
voir qu’ils ont conscience de leurs méfaits. Tout, dans leur atti-
tude sournoise et embarrassée, montre qu'ils ont la notion du
mal qu’ils cherchent à commettre. Ils ont une mine de sacri-
pant qui s'attend à recevoir un coup de pierre ou un coup de
tique. On voit qu’ils prennent déjà leurs dispositions pour dé-
camper au premier signal. Ef même si l’on fait semblant de ne
pas les apercevoir, on voit qu'ils ne sont pas rassurés du tout,
et qu'ils ne souhaitent qu’une seule chose; c’est de vous voir
partir, afin de continuer leurs méfaits.
Je voyais dernièrement une bonne vieille maman, en province,
qui montrait à ses visiteurs une portée de six jeunes lapins nou-
veau-nés. La chatte de la maison les examinait aussi, avec des
regards flamboyants. « Méfiez-vous du chat, dis-je àla bonne
grand'mère, — Oh! me répondit-elle, il n'y à pas de danger:
Minette sait trop bien qu’elle me ferait de la peine! »
Le lendemain, on retrouvait encore le chat dans la basse-cour ;
seulement les jeunes lapins avaient disparu! Il fallait voir avec
quelle rapidité s'est enfuie cette chatte, quand on l'a appelée
dans la cabane aux lapins! Dès qu'elle a vu que les soupçons
allaient se porter sur elle, elle s’est sauvée dans le grenier, où
elle avait eu soin de cacher une partie de son larcin, qu'elle
n’avait pas encore eu le temps de dévorer.
Il y a quelques années, dans les ruines de la Cour des comptes
à Paris, nous avons aperçu plusieurs chats, Il n’y avait qu'à
regarder leur tenue embarrassée pour comprendre tout de suite
que c'étaient des maraudeurs. Mais que pouvaient-ils bien voler,
dans ces ruines? Nous levons la tête, et nous voyons des mil-
liers de petits oiseaux perchés les uns contre les autres, au som-
met de ces ruines. La crête des murs en était remplie : d’un coup
de fusil avec de la cendrée, on en aurait pu tuer une centaine,
en se mettant à longue portée, pour permettre au plomb de s’épar-
piller en tous sens. Nos chats n’attendaient qu’une chose: c’est
que ces oiseaux, en se battant et en se disputant, ne finissent par
se blesser et tomber par terre. Quelle joie alors, dans le monde
des chats! Certains d'entre eux levaient la tête en l'air, atten-
dant qu'un oiseau tombe à portée de leurs griffes. D'autres me
regardaient, avec des yeux de chats surpris au beau milieu de
leurs mauvaises actions. Oh! non, à coup sûr, ils n'avaient pas
du tout l’air d’avoir la conscience tranquille! Bien loin d’avoir
un regard angélique, ils avaient une mine de fripons s’attendant
à recevoir une bonne fessée, Leurs yeux ronds ne plaidaient pas
en leur faveur, et l’âme innocente n’a jamais fait de ces yeux-là.
Les chats sont comme les Chinois, il n'y a pas d'animal plus
traître au monde. Aussi est-il bien rare qu'un chat ne se sauve
pas, en voyant sur ma figure ce que je pense de lui: quel sour-
nois ! c'est tout au plus si sa fourrure peut le faire estimer pour
quelque chose. Sa chair en civet n'est bonne qu'avec du vin et
des oignons; et encore, à condition qu'on croie manger du lapin :
c'est la foi qui sauve ! Il est trop carnassier pour que sa chair ait
la saveur de celle des animaux herbivores. C'est un tigre mal
développé. C'est l'hypocrisie incarnée, dans sa manifestation la
plus pure et la plus complète. Chats et Chinois se ressemblent trop
pour pouvoir s'entendre mutuellement. Ils se mangent l'un Pautre,
à tout âge. Les Chinois ne laissent rien perdre ; aussi ne trouve-
t-on guère de chats errants en Chine; on leur a bientôt fait la
chasse! D'un autre côté, ceux-ci se rattrapent sur les cadavres,
soit sur les enfants abandonnés, qui n’ont pas encore été dévorés
par les porcs, soit dans les tombeaux posés au ras du sol, à tra-
vers les planches disjointes.
Les chats sauvages détruisent une innombrable quantité d’oi-
seaux, tant de jeunes que de vieux, blessés où morts. Ils mon-
tent merveilleusement aux arbres. Leur façon de grimper n'est
pas très élégante, car ils glissent à chaque instant; mais ils avan-
cent plus vite qu’ils ne reculent, et ils ne tardent pas à être
au sommet de l'arbre. De là, de branche en branche, il par-
courent les sommités des arbres de toute une forêt : gare aux
jeunes oiseaux qui piaillent dans leurs nids, en attendant la
becquée de leurs parents!
Aussi conseillons-nous de détruire les chats errants, par tous
les moyens possibles. Le chasseur qui tue un chat sauvage pré-
serve la vie de centaines et de centaines d'oiseaux de toutes tailles.
C’est le plus beau coup de fusil qu’il puisse faire dans sa journée.
On n’en tuera jamais assez; il en restera toujours trop!
Dr Boucox.
PHOTOGRAPHIE
TIRAGE INDUSTRIEL DES CLICHÉS PHOTOGRAPHIQUES
C'est un fait évident que les épreuves photographiques sont
beaucoup plus jolies et plus fines que les photogravures qu’elles
servent à faire. Malheureusement ces dernières coûtent fort bon
marché, tandis que les premières deviennent fort cher, surtout en
raison du temps que les opérateurs doivent consacrer au tirage.
C'est ce qui a donné l'idée de tirer mécaniquement les épreuves;
l’appareil existe déjà en Allemagne et en Amérique. Nul doute
que, lorsqu'il sera un peu plus perfectionné et plus connu, il
n’amène une véritable révolution dans l'illustration des livres cet
surtout des revues.
On emploie des rouleaux de papier au gélatino-bromure, de
900 mètres de long sur 0"60 de large.
Les clichés choisis, de densité égale, sont placés côte à côte
sous un plateau de verre fixé sous un tambour portant des lam-
pes à incandescence.
Tout l'appareil est placé dans une chambre éclairée à la
lumière rouge.
Les clichés étant disposés chacun avec leur cadre, on fait pas-
ser au-dessous d'eux le papier sensible. À ce moment, un déclan-
chement l’applique contre eux en même temps qu'il provoque
pendant un instant l'allumage automatique des lampes à incan-
descence.
Celles-ci s'éteignent plus où moins vite, suivant que le temps est
bien calculé à l'avance. Le rouleau se met de suite en marche et
impressionne une nouvelle bande.
Quand le rouleau est entièrement imprimé, on le transporte
dans une autre pièce où on le développe mécaniquement. Pour
cela on le fait passer dans une série de cuves qui n'a pas moins
de 30 mètres de long. La bande passe ainsi successivement dans
un bain de développement vieux, un bain neuf, de l'acide citri-
que, de Peau, de l'hyposulfite, de l’eau et de l’alun.
Finalement, le rouleau s’enroule sur des cylindres chauffés où
il se sèche rapidement. Puis les ouvriers le découpent à la main;
mais cette opération pourrait aussi sans doute se faire à la ma-
chine.
La vitesse du papier pour le développement et le fixage est de
3 mètres à la minute.
En dix heures on peut tirer 157.000 épreuves!
28
LES MOYENS DE COMBATTRE LA COCHYLIS DE LA VIGNE
PAR LES TRAITEMENTS D'HIVER
Depuis plus d’une dizaine d'années, on a constaté dans
le vignoble bordelais, comme dans d’autres régions viti-
coles de la France, une recrudescence des invasions de
la Cochylis qui était restée longtemps sans produire de
dégâts sérieux. L'intensité de ces invasions à subi pen-
dant cette période, comme il arrive toujours, des varia-
tions importantes qui sont en relation avec des condi-
tions atmosphériques plus ou moins favorables, Mais,
dans ces dernières années, on a observé une particularité
notable qui s’expliquait difficilement : tandis que le fléau
s'atténuait considérablement en certains points, il s'aggra-
vait fortement dans d’autres, souvent peu éloignés des
premiers, comme cela est arrivé en 1889, où les vignobles
situés au nord de Bordeaux ont été à peu près indemnes,
alors que ceux du sud ont été dévastés. La cause de cette
différence est dans la présence de deux insectes de pro-
priétés biologiques différentes. En effet, à côté de la
Cochylis omphuciella ou Tinea ambiguella, depuis long-
temps présente dans le Bordelais, s'est implantée récem-
ment une autre tordeuse de la grappe, lEudemis botrana,
à laquelle sont dues presque en totalité les pertes de
l’année derniere,
Les deux insectes très voisins que nous avons à Com-
battre, et que l’on peut désigner sous le nom générique
de Cochylis, sont sujets, pendant l'hiver, à des causes
naturelles de destruction qui peuvent devenir très impor-
tantes dans certaines années, comme en 1899, où les
trois quarts au moins des chrysalides formées en automne
ont péri. Il est évident qu'il faut bien se garder de
compter beaucoup sur ces influences naturelles, car on
sait qu’elles sont vite compensées par la prolifération
considérable de ces insectes. Les ichneumons et les moi-
sissures sont, en général, les deux principaux agents de
destruction naturels : pour le premier, on n’entrevoit pas
actuellement la possibilité de s'en rendre maitre, la
nature seule est capable de le faire varier dans un sens
ou dans l’autre; pour le second, il n’en est pas de même,
et l’on peut chercher à l’accentuer en propageant les
germes des moisissures parasites. Les essais dans ce sens
doivent être faits dès l'automne, afin que ces germes,
provenant de cultures artificielles, aient le temps de
s’acchimater au nouveau milieu où on les place et de se
développer ensuite pendant l'hiver en exerçant leur
action lente. Ce n’est, il est vrai, qu'un moyen indirect
dont la réussite dépend de beaucoup de circonstances,
mais ne mériterait-il qu'un rôle d'adjuvant des autres
procédés de destruction, son étude ne doit pas être
négligée.
Les moyens directs de traitement qui peuvent être
employés avec succès sont au nombre de trois : le décor-
ticage et l’ébouillantage doivent être indiqués en pre-
mière ligne; quant au badigeonnage, son étude mérite
d'être poursuivie encore; cependant, en attendant d’avoir
des résultats supérieurs à ceux obtenus, on peut faire
usage du mélange de chaux, d’huile lourde et de sulfure
de carbone, sans crainte de nuire à la plante, surtout si,
pour plus de précautions, on l'applique peu de temps
avant le réveil de la végétation.
Il n'est donc pas douteux qu'actuellement, avec les |
LE NATURALISTE
moyens que nous avons à notre disposition, on peut
arriver, par une action générale et bien comprise, à atté-
nuer, dans une large mesure, les invasions des Cochylis
à la première génération, et, par suite, à favoriser consi-
dérablement la lutte contre les générations suivantes. Il
est facile de comprendre que cette action générale est
indispensable, car, si les propriétaires qui s'appliquent à
faire des traitements d'hiver restent plus où moins
isolés, il est évident que leurs efforts n'auront que des
résultats très limités, à cause des invasions venues de
chez leurs voisins réfractaires (1).
DISPARITION DU GIBIER
DANS LE DÉPARTEMENT DE LA SEINE-INFÉRIEURE
Tous les ans, les chasseurs constatent que le gibier
dans notre département devient de plus en plus rare ; le
fait est reconnu de tous ceux qui vivent aux champs;
essayons donc de démontrer la cause de cette disparition,
nous verrons ensuite s’il n'existe pas un moyen d'y
remédier.
LA CAILLE
La caille n'habite pas chez nous l'hiver, elle émigre
vers le mois de septembre pour se rendre en troupes
nombreuses en Afrique, puis revient chez nous vers
le mois de mai. Or, c'est au moment où les cailles entrent
en France qu’elles sont capturées en masse et livrées à
la consommation.
Voici comment on s’y prend. Sur les bords de la Médi-
terranée existent de petits villages où certains habitants
savent très bien par habitude par où se fera la passée des
cailles.
Or, on dispose entre deux rochers resserrés des filets
très grands en forme de pochette où toutes les caïlles
arrivent se prendre en tas énormes; comme elles pour-
raient facilement,malgré leurs fatigues,passer au-dessus
du filet, on a soin de faire voler assez haut des cerfs-
volants ayant la forme d'oiseaux de proie ou mieux de
lancer en l’air des plaques de bois spéciales qui imitent
parfaitement l'oiseau de proie, ce qui permet avec un peu
d'habitude de diriger en quelque sorte les grands voliers
de caïlles juste dans les filets.
M. Noury, ancien directeur du Muséum d'Elbeuf,
avait rapporté d'un de ses voyages dans le Midi toute
une série très curieuse de ces plaques de bois.
Les cailles étant dans le filet, on confectionne aussitôt
des pâtés de gibier avec celles qui sont tuées sur le coup ;
les autres sont placées dans de vastes caisses plates
recouvertes de toile, pour qu’en sautant elles ne se brisent
pas le crâne, et nourries de graines,
Comme il serait impossible d'arriver à plumer en peu
de temps un nombre aussi considérable d'oiseaux, on les
garde vivants le plus longtemps possible, et celles qui
semblent le mieux survivre à cet exil sont envoyées
vivantes dans toutes les grandes épiceries de France où
il s’en vend encore d'assez grandes quantités.
Or,suivant que le coup de filet a bien ou mal réussi sur
(1) Extrait d’un rapport de M. Laborde.
LE NATURALISTE
249
les bords de la Méditerranée,nous avons ou nous n'avons
pas de cailles dans la Seine-[nférieure.
Or, cette année le coup de filet paraitavoir fort bien
réussi, car plus de vingt-cinq chasseurs à qui j'en ai
parlé et qui avaient chassé dans différentes parties du
département n'en ont presque pas tué et nous sommes
loin d’avoir toutes les cailles que nous devrions avoir.
On va peut-être m'objecter que j'exagère un peu et que
si l’ou consulte les registres de l'octroi on verra que,pour
la journée seulement de l'ouverture, il est entré à Rouen
un certain nombre de cailles; à quoi je répondrai que ce
chiffre est absolument erroné, puisque l’octroi enregistre
souvent les râles pour des cailles : deux râles que j’ai tués
et entrés à Rouen y ont été enregistrés comme cailles,
LES LAPINS
Certes,chez nous les lapins sont détruits par les bracon-
niers, qui sont arrivés à être de véritables maitres dans
l’art de la chasse; il m'arrive souvent, en me promenant
la nuit dans la campagne à la recherche d'insectes, de
rencontrer des braconniers et, j'ose le dire, j'éprouve un
plaisir très grand à causer avec eux et même à les voir
opérer.
Voici ce que l’un d'eux me disait dernièrement :
« D'abord, moi je ne braconne pas,je ne chasse pas, je
ramasse tout simplement des lapins et seulement la
veille du marché; je n’ai ni fusil,ni furet :un malheureux
sac pour les mettre, et c’est tout.
— Mais comment diable faites-vous ?
— C’est bien simple : je vais au bois dans le jour voir
où sont les terriers, je reviens tout doucement le soir à
pas de loup avec des poignées d'herbe, je bouche les ter-
riers en ayant soin d’enfoncer ma poignée d'herbe le
plus loin possible dans le trou, la longueur de mon bras
tout entier ; lorsque j’en ai bouché tous les trous, je vais
un peu plus loin dans le bois, je casse une branche et
j'en frappe partout en faisant le plus de bruit possible ;
aussitôt tous les lapins rentrent au terrier, mais ne
peuvent pénétrer jusqu'au fond, grâce à mon bouchon,
et ensuite je viens les prendre très tranquillement avec
Ja main, les uns après les autres.
« Hier encore, j'en ai pris dix-sept. »
Mais ce procédé n'est rien en comparaison de celui
dont je viens vous entretenir et qui prend des propor-
tions très grandes dans notre département.
Chaque fois qu’un petit fermier est auprès d’une
propriété riche en lapins, ou d’un bois, ou d’une forêt de
l’Etat,il peut avoir quelques pommiers ou quelques choux
mangés par les lapins du voisinage, et voici comment il
les capture.
Il entoure une partie de sa propriété avec du grillage
métallique, en ayant soin non pas de placer son grillage
tout droit, mais bien en pente en dedans de sa propriété,
si bien que les lapins peuvent y venir, mais ne peuvent
s’en aller; il pousse même la coquetterie jusqu’à enfermer
dans cet enclos quelques femelles de lapins domestiques
qui servent en quelque sorte d’appelants pour les mâles
du voisinage.
On peut voir un peu partout dans notre département
des enclos-pièges de ce genre, il y en a même de beau-
coup plus ingénieux dont je ne parle pas pour cette fois.
Or, ce sont ces braves gens qui, sans trops’en douter,
-dépeuplent nos bois et nos forêts; il est vrai qu’en
revanche ils alimentent le marché, mais, malgré tout, le
chasseur n’y trouve plus son compte.
PERDRIX
Des centaines de cultivateurs ne considèrent pas
comme un délit de chasse de tirer de temps à autre un
pauvre petit coup de fusil sur une compagnie de perdrix ;
aussi tous où presque tous le font et n’ont pas le moindre
permis de chasse, et voici comment ils opèrent.
Chaque cultivateur, au moment de la chasse, laisse
dans son champ une longue bande de terrain, de trois
ou quatre mètres de large, recouverte de trèfle ou de
sarrasin ; cette bande de terrain est généralement peu
éloignée de la ferme et autant que possible dans les envi-
rons d'une haie.
Le paysan a le soin de placer aux deux bouts de cette
réserve un écriteau : Défense de chasser, Or, tous les
chasseurs des environs effrayent les perdrix qui natu-
rellement viennent se blottir sur la bande de terre étant
unie partout et souvent trouvent là un endroit très pro-
pice pour se reposer. Mais le paysan est blotti derrière
sa haie et à chaque compagnie qui arrive une détonation
retentit : les chasseurs lui servent tout simplement de
rabatteurs ; il n’y à dans tout cela que demi-mal.
Mais la nuit venue, surtout dans les premiers moments
de l'ouverture de la chasse, les perdrix passent la nuit
en compagnie nombreuse sur ces bandes réservées, et
les braconniers n’ont plus qu'à faire usage du traîneau
pour ramasser d’un seul coup toutesles couvéesde l’année,
d'autant plus qu'un traineau de cinq mètres de long
suffit très bien pour couvrir ces bandes étroites.
Voilà en quelques mots pourquoi nous n'avons plus de
gibier; voyons maintenant comment on pourrait pro-
téger le gibier.
La géographie de notre département nous fait voir
combien il est propice à la propagation du gibier ; les
cultures correspondent bien avec l’alimention de chaque
espèce animale, et pour repeupler les chasses il suffit tout
simplement de protéger le gibier contre les braconmiers,
peut-être aussi un peu contre les chats errants.
Il serait bon qu'avec le permis de chasse il soit donné
un insigne quelconque, annuel, que le chasseur devrait
toujours porter en vue, soit à la boutonnière, soit au
chapeau.
Que les gardes champêtres soient chargés de faire dis-
paraître tous les enclos-pièges dont nous avons parlé
plus haut pour capturer les lapins.
Que des mesures soient prises dans le Midi pour sup-
primer la capture en masse des cailles et qu’enfin tout
cultivateur ne puisse mettre sur une parcelle de terrain
quelconque : Défense de chasser, sans avoir au préa-
lable acquitté un droit à la mairie de sa commune, quien
échange lui délivrerait l’écriteau.
Ces quelques arrêtés supprimeraient bien des ennuis,
bien des chicanes; tout le monde y gagnerait, chasseurs
et gibier.
Paul Noë.
LE NATURALISTE
LE TIR AU CANON CONTRE LA GRÊLE EN SUISSE
Un premier essai de tir au canon contre la grêle à eu lieu, au
mois de juillet dernier, dans le canton de Berne, à l’école d'agri-
culture de la Rütti, et les résultats ont été satisfaisants. Les
propriétaires des régions les plus ra vagées par la grêle auraient
intérêt à organiser le tir contre la grêle d'une façon assez pra-
tique pour que les frais du personnel, de surveillance, etc.,
soient réduits au minimum. Actuellement, on est encore à la
période de début; on peut donc donner à ce sujet des règles défi-
nitives. Voici cependant ce que l’on peut considérer comme
indispensable dans l’organisation en question. Il faut, pour
obtenir des résultats, grouper au minimum six ou huit stations
de tir d’un canon chacune, en tenant compte de ce fait déjà
établi qu'une station protège une surface d'environ 25 hectares.
Ces bases étant données, si dans une commune viticole par
exemple on veut organiser une défense par le tir, il faudra
diviser le vignoble en secteurs, dans chacun desquels on déter-
minera l’emplacement le plus convenable pour le canon. Chaque
canon est servi par deux hommes, l'un procédant au tir, l’autre
au chargement; on obtient ainsi un tir plus rapide, ce qui est,
parait-il, une condition de succès. Cependant, à la rigueur, un
seul homme peut suffire. Les désignations de service se font à
l'avance; on choisit comme canonniers des personnes travaillant
habituellement dans le secteur où se trouve le canon à servir.
Le plus souvent, la menace d’un orage est assez visible pour
rendre, en apparence, inutile un service de signaux d'alarme.
Cependant, comme il s’agit d'une action d'ensemble, et que, dans
une région déterminée, tout le monde doit être à son poste au
même moment, il est nécessaire de convenir d’un système de
signaux donnés par le directeur du tir. De Jour, ces signaux
sont donnés au moyen de drapeaux hissés au sommet d'un mât,
en un point déterminé et bien en vue. Les canonniers s'enga-
gent à surveiller ce mât et à se conformer aux indications
fournies par lui. Au premier signal qui est, en somme, le « garde
à vous », les hommes de service se rendent à teurs postes, mettent
leur canon en état de fonctionner et demeurent à proximité de
leur station. Un deuxième signal, donné de jour à la fois par un
drapeau convenu et par un coup de canon, appelle les canon-
niers à leurs pièces. Enfin, le poste central donne le signal de
commencer le feu en tirant lui-même deux coups de canon con-
sécutifs. Le danger conjuré, on donne le signal de cesser le feu.
De nuit les signaux se font au moyen du canon et des fusées.
Si la gréle vient à tomber, il faut continuer et même accélérer
le tir, et non l’arrêter. On le voit donc, il n'y a rien d’excep-
tionnellement compliqué dans ce fonctionnement, et si les
expériences sont favorables, ce n’est pas de ce côté que vien-
dront les difficultés (1).
/
L'ÉLEVAGE DE L'ISATIS
OU RENARD BLEU
Le Renard bleu est intéressant au double point de vue
de ses mœurs qui sont des plus cocasses, ainsi qu'on le
verra plus loin, et de sa fourrure qui, à certains mo-
ments, vaut très cher. C’est cette dernière considération
qui a engagé quelques chasseurs à en tenter l'élevage, ce
en quoi, d’ailleurs, ils ont parfaitement réussi.
Autant notre Renard est fin et rusé, autant le Renard
bleu des régions polaires est bête et peu malin. Par sa
conformation physique, cependant, il lui ressemble beau-
coup, avec un air bien moins intelligent et surtout une
toison épaisse. Les pattes courtes, le museau obtus et
fort, les oreilles petites et rondes, il n’a que 65 centime-
(1) Extrait de la Revue Suisse.
tres de long avec une queue très fournie de 33 centimè-
tres. Son pelage est blanc en hiver, de manière à se con-
fondre avec la neige environnante. En été, il est gris
avec des reflets bleutés, parfois à peine visible. I1 y a
d’ailleurs de nombreuses variétés locales ; dans certaines
régions même, le pelage change à peine dans le cours
d’une même année et reste toujours gris bleuté.
Les peaux de la variété blanche sont les plus com-
munes et ne valent que de 3 à 20 francs : on en importe
de 25 à 60.000 par an du Groenland, du Nord-Amérique
et de Sibérie. La variété bleue est beaucoup plus esti-
mée : en 1888, elles ne valaient pas moins de 300 à
350 francs ; le prix moyen des peaux d'assez belle qua-
lité est de 100 francs; on en vend en moyenne #.000 à
Londres, 1.000 à Copenhague et 2,000 à Irhit.
Le Renard bleu — souvent appelé aussi Isatis, Pessez
ou Petit-chien (chez les Russes), Aïl-tilkoc ou renard
blanc (chez les Tartares), Kyrrsa (chez les Iakoutes),
KiϾn (chez les Ostiaques), Tschitara (chez les Tun-
guses), Noga et Sellero (chez les Samoyèdes) — est
essentiellement carnivore. Il se nourrit surtout de petits
rongeurs, tels que les lemmings, des poissons rejetés
par le flot, d'œufs d'oiseaux de mer; souvent il pénètre
dans les maisons et emporte tout ce qui tombe à sa
portée. On le rencontre dans toutes les contrées polaires
et, partout, ilest détesté des habitants auxquels il fait
mille niches. Il a l'habitude de cacher les aliments qu'il
dérobe, avant de s’en repaitre, « La première impulsion
du Renard, quand on lui donne de la nourriture, raconte
le capitaine Lyon, est de la cacher aussitôt que possible,
même s'il a faim et même s'il est seul et n’a point
auprès de lui de compagnon de captivité dont la probité
pourrait lui inspirer des doutes. Dans ce cas, il fait grand
usage de la neige : rien de plus facile que de l’entasser
par-dessus la provision cachée, puis de la presser forte-
ment avec le nez, J'ai souvent observé mon Renard user
d’un stratagème ingénieux, quand il n'avait pas de
neige à sa disposition : il prenait toute sa chaine dans sa
bouche, puis l’enroulait sur elle-même soigneusement, à
terre, de manière à cacher la viande, En s’éloignant,
satisfait de la besogne accomplie, il déroulait sa chaine,
naturellement, et découvrait la viande; alors ilse remet-
tait à la besogne avec beaucoup de patience, la recom-
mençant jusqu'à cinq et six fois de suite jusqu'au moment
où, irrité de cette affaire, il finissait par se résoudre à
avaler sa proie sans l'avoir, au préalable, rendu plus
appétissante par un séjour sous terre. »
Le Renard bleu est donc un des rares carnassiers fai-
sant des provisions. Il cache dans des trous les lemmings
qu'il a tués d’un coup de dent et ne s'en repait qu’au bout
d'un certain temps. H.-W. Feiden raconte avoir ainsi .
trouvé des cachettes de 20, 30 et même 50 lemmings, À
défaut de petits rongeurs, il s’adresse à des moules d’eau
douce. ù ‘
Seul entre les canidés, il émigre en bandes nom-
breuses, presque toujours à la suite de celles des lem-
.mings, dont il fait un véritable carnage. En temps ordi-
naire, il vit un peu partout, mais souvent dans le voisi-
nage des villages; comme il ne fait de mal à personne,
on le laisse vaquer en paix, tout en l’éloignant quand il
manifeste trop de curiosité et cherche à pénétrer dans
les maisons pour y dérober quelque objet, par exemple !
un pantalon ou des chaussures, objets ne pouvant lui :
être d'aucune utilité. « Ces animaux, dit Brehm, ne
sont pas trop mal partagés sous le rapport de l’intelli-
3 E:
LE NATURALISTE 251
gence, mais ils présentent dans leurs habitudes des con-
tradictions si frappantes qu'on ne sait-souvent à quelle
opinion s'arrêter sur leur compte. Tous ceux qu'on à
observés faisaient preuve de ruse, de jugement, d'habi-
leté, et, d'un autre côté, montraient une bêtise que l’on
ne voit chez aucun autre animal, J'ai pu moi-même
m'en convaincre. À Doverspeld, mon chasseur norwé-
gien et moi, nous rencontrâämes après le coucher du
soleil un Renard bleu; nous fimes feu sept fois sur lui ;
la nuit qui tombait nous empêchant de le bien viser, nous
le manquâmes; loin de prendre la fuite, il nous suivit
encore pendant vingt minutes comme l'aurait fait un
chien bien dressé, et ce n’est que lorsque nous fùmes
“arrivés hors des rochers qu'il jugea à propos de faire
retraite ; nous lui jetâmes des pierres qui l’atteignirent,
sans lui faire activer sa marche. Mon chasseur me
raconta qu'il avait souvent attrapé avec ses mains de
ces renards qui étaient venus s’asseoir devant lui, en le
regardant avec curiosité ; une fois même, ils rongèrent la
peau de renne dans laquelle il était enveloppé; tous les
hivers ils pillaient sa cabane qui était isolée dans la mon-
tagne, et il était obligé de prendre toutes sortes de me-
sures pour se garantir de ces animaux. Il ne cite ces
faits qu’en passant, pour montrer que partout le Renard
bleu est le même. »
Steller donne des détails encore plus typiques sur les
mœurs de ce singulier animal, « Les seuls quadrupèdes,
dit-il, que l’on trouve dans la terre de Behring, ce sont
les Renards bleus qui y sont certainement arrivés
apportés par les glaces et qui, se nourrissant de ce que
la mer rejette sur la plage, s'y sont multipliés d’une
manière incroyable, Pendant le malheureux séjour que
nous y fimes, j'ai eu toute occasion d'observer les mœurs
de cet animal, qui surpasse de beaucoup notre renard en
impudence, en adresse et en ruse, Les tours qu’ils nous
ont joués ne sont comparables qu'à ceux des singes
d'Albertus Julius, à l'ile de Sarambourg. Le jour comme
la nuit, ils pénétraient dans nos habitations, y volaient
tout, même des choses dont ils ne pouvaient se servir,
des couteaux, des bâtons, des sacs, des souliers, des bas.
des bonnets, etc. Ils enlevaient de dessus nos tonneaux
de provisions un poids de plusieurs livres, et y volaient
la viande, et cela avec un tel art qu'au commencement
nous ne pensions pas à les accuser de ceslarcins. Quand
nous dépouillions un animal, nous tuions toujours deux
ou trois renards à coups de couteau, ils venaient nous
enlever la chair jusque dans nos mains. Enfouissions-
nous quelque chose, même profondément, en la revétant
de fortes pierres, ils poussaient les pierres à côté en s’ai-
dant les uns les autres; la mettions-nous sur une co-
lonne élevée, ils la minaient en dessous, la renversant.
ou bien l’un d'eux y grimpait comme un chal ou un
singe, et jetait en bas ce que nous voulions ainsi
conserver. Ë
Ils observaient toutes nos actions, nous accompa-
gnaient partout. La mer rejetait-elle un animal, ils le
dévoraient avant qu'un de nous eût eu seulement le
temps d'arriver; s'ils ne pouvaient tout manger, ils enle-
vaient le reste à nos yeux, le transportaient dans la
montagne, l'y enfouissaient sous terre; pendant ce
temps, les autres faisaient sentinelle pour signaler l'ap-
proche de l’homme. Si quelqu'un s’approchait, ils creu-
saent tout le sol, y enterraient un castor, un ours blanc,
et si bien qu’on n'en pouvait plus trouver la place, La
vaient nos bonnets, nos gants, les peaux qui nous ser-
vaient de couvertures; nous nous couchions sur les cas-
tors que nous avions abattus pour qu'ils ne vinssent pas
nous les voler, et sous nous ils leur dévoraient les en-
trailles ; nous ne nous endormions qu'avec un bâton sous
la main pour pouvoir chasser ces hôtes incommodes.
Lorsque nous faisions une halte, ils nous attendaient,
jouaient mille tours sous nos yeux, puis, s’'enhardissant
de plus en plus, s'approchaient jusqu’à ronger le cuir de
nos chaussures. Si nous nous couchions comme pour
dormir, ils venaient nous flairer au nez pour voir si nous
étions morts où non ; si nous retenions notre souffle, ils
cherchaient à mordre, A notre arrivée, ils mangèrent à
nos morts ie nez et les doigts pendant que nous creu-
sions leurs fosses; ils attaquèrent aussi nos malades et
nos blessés. Chaque matin, on les voyait courir au milieu
des phoques et des ours blancs qui étaient couchés sur
le rivage, sentir s'ils étaient morts ou endormis, et quand
ils trouvaient un cadavre, ils se mettaient aussitôt à le
dépecer. Les phoques, pendant la nuit, écrasent souvent
leurs petits : les renards le savaient bien, et tous les
matins ils allaient inspecter chacun l’un après l’autre et
enlevaient les morts.
Ils ne nous laissaient reposer ni jour ni nuit; cela nous
aigrit et nous irrita au point que nous les tuions tous,
jeunes et vieux; nous les tourmentions, les martyrisions
de toutes les manières. Le matin, en nous réveillant,
nous en avions toujours deux ou trois assommés à nos
pieds; et pendant tout mon séjour, j'en ai bien abattu
deux cents à moi seul.
Le troisième jour après mon arrivée, j'en tuai en trois
heures plus de soixante-dix dont les peaux servirent à
garnir le toit de notre cabane.
Ils sont si voraces qu'on pouvait d'une main leur
tendre un morceau de viande, et de l’autre leur donner
un coup de hache. Nous nous tenions à côté d’un ca-
davre de phoque, armés de bâtons, fermant les yeux,
faisant semblant de ne point voir; ils arrivaient aussitôt,
se mettaient à manger, et s'y laissaient assommer sans
qu'aucun essayât de fuir. Nous creusions un trou, dans
lequel nous jetions de la viande; à peine avions-nous les
talons tournés, que déjà le trou était plein de renards,
qu'il nous était facile d'assommer à coups de bâton. Nous
ne tenions aucun compte de leur belle fourrure, nous ne
les dépouillions même pas, cependant nous étions avec
eux en guerre continuelle comme avec nos plus grands
ennemis, Tous les matins, nous trainions par la queue,
devant la caserne, sur la place d'exécution, ceux que
nous avions pris vivants; aux uns on leur coupait la tête,
aux autres on leur brisait les membres, à d’autres en
core on leur crevait les yeux, où bien on les pendait
deux à deux par les pieds, et ils se mordaient alors l’un
l’autre jusqu'à la mort; on brülait les uns, on faisait
périr les autres à coups de fouet. Le plus amusant était
d'en tenir un par la queue et de la lui couper, tandis qu'il
tirait de toutes ses forces pour se sauver; il faisait alors
quelques pas, et tournait plus de vingt fois en rond.
Cela ne les éloignait cependant pas de nos habitations,
et finalement on en vit dans l’île un grand nombre sans
queue, Où Courant sur deux ou trois pattes.
Quand ils ne pouvaient se servir d’un objet nous ap-
partenant, d'un vêtement par exemple, ils urinaient
dessus, et aucun ne passait sans faire la même chose. On
peut bien conclure de cela que ces animaux ne savaient
nuit, lorsque nous dormions en plein air, ils nous enle- U pas ce que c'était que l'homme, et que la peur de
RES
De. À D PPT he dd de PL
TR OR AVS ER CORTE EEE RES RS ER SRE RE RESTE CORRE GE OS
LE -NATURALISTE
l’homme n’est pas chez les animaux un sentiment inné,
mais bien une idée acquise, »
Dans les régions tout à faif sauvages, les Renards bleus
se creusent des terriers, autant que possible abrités par
une roche. Les mères adorent leurs petits et les défen-
dent avec courage quand on veut les prendre. Mais, sou-
vent, elles ne font qu'attirer l'attention sur eux en allant
au-devant du chasseur et en aboyant comme un petit
chien. Les mâles se livrent entreeux des combats violents ;
avant d'en venir aux mains,ils miaulent, puis se jettent
l'un sur l’autre et se mordent jusqu'à ce que l’un d'eux
reste sur le carreau. Mais cela n’a lieu qu'à une période
de l'année.
On les capture à l’aide de trappes ou en les cherchant
à coup de bêche dans les couloirs qu'ils se creusent dans
la neige, Aussitôt découverts, le chasseur les saisit par
la queue et, les faisant tournoyer, leur brise la tête contre
une pierre.
C'est la célèbre société pour l'exploitation des four-
rures, l'Alaska Commercial Company, qui en a tenté l’éle-
vage, aux environs de Kadiak, dans des iles devenues
ainsi de véritables a fermes de Renards bleus ».
Les fermes, dit M. Henri de Varigny dans la Revue
sicentifique, sont très simples à la vérité.
L'élevage consiste essentiellement en ceci : que la Com-
pagnie nourrit ses renards durant la mauvaise saison;
qu'elle les protège contre leurs ennemis naturels, et ne les
capture et tue que dans les conditions qu'elle a prescrites.
Pour être en état de surveiller ses protégés, elleles place
dans des conditions telles qu'ils ne puissent se dérober,
Elle en a capturé un certain nombre sur terre ferme, et
elle en à introduit quelques couples dans un certain
nombre d’iles, où l'espèce n'existait pas auparavant, et
d’où ils ne peuvent s'échapper. Et elle pourvoit à leurs
besoins en créant des stations dans ces îles, où des
employés spéciaux vont porter des aliments destinés aux
animaux. Ces aliments consistent principalement en
poisson, frais ou desséché, ou bien conservé ‘dans
l'huile; pas de poisson salé; on croit qu'il nuirait à la
beauté de la fourrure. Ce poisson est abandonné tous les
jours de l’année aux mêmes endroits; les renards es
connaissent et viennent y chercher leur pâture, Très
ingénieusement, la Compagnie fait disposer cette nour-
riture dans des trappes qui ne sont point agencées pour
la capture. Les animaux s’habituent donc à celles-ci le
mieux du monde; ils y entrent sans aucune défiance, et le
jour où lon veut les prendre, on fait le nécessaire, on
dispose la trappe de manière qu'elle se referme, et le
tour est Joué de la manière la plus simple, Les aliments
sont donc fournis aux renards toute l’année durant: on
en donne autant qu'il en a besoin, en jugeant des exi-
gences des renards d’après la rapidité avec laquelle ils
consomment ce qui leur est offert. C’est en mai, juin,
juillet, qu'on donne le plus de provisions; car c’est le
moment dela mise-bas, et par conséquent le moment où
les femelles ont besoin de beaucoup d'aliments. Quand
le pelage est dans la condition voulue, on attrape les
renards de la manière qui vient d’être dite, en met-
tant les trappes en état de fonctionner. Les femelles sont
épargnées, pour favoriser la multiplication; elles sont
remises en liberté après avoir été marquées d’un coup
ae ciseaux dans le panache caudal; les mâles qui pré-
sentent une fourrure satisfaisante sont tués. Pourtant
on remet aussi en liberté quelques mâles particulièrement
beaux pour améliorer la race. Il convient de remarquer
que les renards ne vivent pas seulement des provisions
qui leur sont fournies. Ils se nourrissent aussi de ce
qu'ils trouvent, ce qui leur fait un menu varié. Car ils se
promènent sur le rivage et récoltent ce que la mer veut
bien leur apporter sous forme de poissons morts. Ils font
la chasse au saumon; ils suivent les ours et se repaissent
de ce que ceux-ci n'ont pas voulu ; ils donnent la chasse
aux petits rongeurs, aux souris en particulier, qui, dans
certaines iles, dans certaines fermes, ont entièrement
disparu. On ne donne pas communément aux renards les
parties les plus recherchées du poisson ; mais enfin c’est
surtout de saumon qu'ils sont nourris; des têtes, des
intérieurs, enfin tout ce qui n’est pas séché ou conservé
pour la consommation de l’homme. Il semble que tous
les renards ne sont toutefois pas également sensibles aux
bons et aux mauvais procédés de l’homme. Car, dans la
plupart des iles, il est des individus qui ne consentent
point à venir prendre les aliments que l’homme leur
distribue et qui évitent ceux-ci et les trappes, vivant
uniquement de ce qu'ils arrivent à trouver eux-mêmes.
Les renards des fermes sont assez nombreux pour qu'on
les aperçoive en se promenant; ils sont du reste curieux
et sans grande timidité. Dans une ile du détroit du Prince-
William, il y a une ferme de 50 à 60 adultes qui sont
nourris de saumon et de flétan ; inutile de leur offrir de
la morue : ils n'en veulent pas. Là, on les a habitués à
venir chercher leur pâture dans une petite maison qui
sert de trappe au moment où l’on veut les prendre, c’est-
à-dire pendant la courte période où le pelage est le plus
beau, du 20 décembre au 10 janvier à peu près. »
À l'ile Saint-Georges, on a cherché à augmenter la
quantité de Renards bleus en leur donnant de la nourri-
ture pendant la mauvaise saison où leur existence est
bien précaire. On à bien réussi en leur donnant des
biscuits additionnés d'huile de phoque, ainsi que des
cadavres entiers de phoques. Ceux-ci sont donnés sur-
tout au moment de la capture : on sait que le pelage
n'est vraiment beau que du 20 décembre au 10 janvier
environ. Un peu avant cette courte période, on les habitue
à venir se repaître en un point déterminé, où, ensuite, il
est facile de les capturer. Pour ne pas effrayer les sur-
vivants avec le sang de leurs congénères voués au trépas,
on va tuer ceux-ci dans un bateau, en mer.
HENRI COUPIN.
——
ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 15 oclobre 1900.
Sur la morphologie de l'appareil respiratoire de la
larve et de la nymphe du Bruchus ornaltus Bôhm (M. L.-G.
SEURAT). — La larve et la nymphe du Bruchus ornalus pré-
sentent dans la morphologie de l'appareil respiratoire un
certain nombre de particularités qui les distinguent très nette-
ment de celles des Curculionides : ‘ce sont la forme arrondie
des stigmates, qui sont en même nombre et placés de la même
façon que chez les Curculionides; l'existence d'un anneau pro-
thoracique complet réunissant les troncs latéraux; celle de dix
anastomoses transversales latéro-ventrales, dont trois thora-
ciques; les anastomoses latérales des troncs latéro-dorsaux
abdominaux (chez les Curculionides, ce sont les troncs latéro-
ventraux qui présentent ces cn Roses et enfin la longueur
moins grande des troncs longitudinaux latéraux, qui, chez les
Curculionides, se continuent jusque dans la région antérieure
du onzième segment du corps. Les différences sont encore plus
accentuées si l’on ne considère que les larves : les larves des
Curculionides (Calandra orizæ L., Baridius chlorizans Germ.)
n'ont pas de trachées dilatées en ampoule, et les troncs stigma-.
tiques de la neuvième paire ont une origine normale,
LE NATURALISTE 25e
»
Je
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établir le catalogue des Coléoptères d'Alsace et des
Vosges que cet entomologiste a publié en collaboration
avec M. Wencker, L'état de conservation des insectes
est excellent; l'étiquetage, fait très soigneusement,
donne des noms rigoureusement exacts et des rensei-
gnements sur la rareté des sujets, ainsi que le nom des
plantes sur lesquelles se trouvent habituellement les
espèces. Des espaces laissés vacants permettent d'aug-
menter la collection sans lui faire subir de remaniements.
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Reiche laissent à désirer comme classement et comme
préparation; mais elles conservent une valeur scienti-
fique indiscutable du fait que toutes les espèces ont
servi, aux entomologistes les plus célèbres, pour la ré-
daction de leurs travaux.
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LE NATURALISTE
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- faible courbure dirigée de droite à gau-
29° ANNÉE
9% SÉRIE — N° 329
15 NOVEMBRE 1909
OIE DOMESTIQUE A TÊTE ANOMALE
J'ai eu l’occasion d'acheter à un cultivateur, à Gom-
merville (Seine-Inférieure), près de Saint-Romain-de-
Colbose, une oie femelle dont la tête offre une curieuse
anomalie que je décris etreprésente dans cet article. Cette
Fig 4:
D
oie, qui était de la race domestique ordinaire, à plumage
gris et blanc, provenait d’une couvée éclose en mars 1899,
et composée de huit jeunes, dont les sept autres étaient
normaux.
Pendant plusieurs mois, j'ai conservé cette oiïe, la
montrant à des naturalistes, et, finale-
ment, je l’asphyxiai par le chloroforme.
Cette oie n'offrait extérieurement
aucune autre partie anomale que sa
tête, etl'examen anatomique, non minu-
tieux, que j'ai fait de son corps, ne me
révéla pas d'anomalies internes d’une
certaine importance.
Les deux figures ci-jointes sont la
reproduction directe des photographies
que j'ai prises de cette tète anomale,
et la représentent aux quatre septièmes
de la grandeur naturelle. La figure 14,
reproduction d’une photographie faite
aussitôt après la mort de l'animal,
montre la tête telle qu'elle était pen-
dant la vie. et la figure 2 représente
l'anomalie disséquée.
La tête et le bec sont très légèrement
dissymétriques par rapportau plan ver-
tical passant parleur grand axe médian.
Cette dissymétrie consiste en une très
che, de la partie antérieure du bec à la
partie postérieure de la tête.
- Sauf cette dissymétrie, la tête et la mandibule supé-
rieure sont normales. L’anomalie consiste dans la moitié
antérieure de la langue qui, au lieu de se trouver entre
Le Naturaliste, 46, rue du Race, Paris.
les deux mandibules, est logée dans une poche membra-
neuse existant au-dessous de la mandibule inférieure,
comme on le voit très nettement sur la figure 1.
Cette poche membraneuse est double, se composant
d'une poche externe constituée par l'extension de la
couche externe de la membrane reliant les deux branches
de la mandibule inférieure, et d'une poche interne formée
par la couche interne de cette mem-
brane, et renfermant la moitié anté-
rieure de Ja langue, dont le premier
üers est libre dans cette poche interne.
La poche externe, d’une teinte pâle,
est nue sur les côtés et en dessus, et
garnie, en dessous, de très courtes
plumes blanches,
Quant aux poches externe et inter-
ne, elles étaient unies par des brides
de tissu conjonctif.
De temps à autre, l'oie faisait exé-
cuter des mouvements de protraction
et de rétraction à sa langue, et par
suite à la double poche. En outre, la
conformation anomale de la partie anté-
rieurê de sa tête avait déterminé une
particularité dans sa manière de pren-
dre la nourriture, ci, pour ce faire,
elle inclinait la tête de côté.
Le figure 2 montre la partie ano-
male disséquée, la moitié antérieure
de la langue étant refoulée, avec la
poche interne, entre les deux mandi-
bules, tandis que, sous la mandibule inférieure, se voit
la poche externe qui, alors, est vide.
Il convient d'ajouter qu'il existe, à la partie antérieure
de la poche externe, une petite éminence arrondie et de
quelque dureté, sorte de kyste bien visible sur la fig. 1.
Eros?
Quant aux papilles cornées qui se trouvent aux deux
bords de la langue (fig. 2), elles existent normalement à
la langue des oies.
Dans les travaux tératologiques que j'ai consultés, je
n'ai trouvé ni la description, ni la représentation de
cette curieuse anomalie. J'ai lieu de penser qu'elle est
très rare, et je suis heureux de la faire connaitre aux
lecteurs de ce journal.
HENRI GADEAU DE KERVILLE.
LES RACES DU SÉNÉGAL ET DU SOUDAN
Voici, d'après le docteur Lasnet, médecin de première classe
des colonies, auteur d’une notice très documentée sur les races
du Sénégal, leur répartition géographique :
Maures. — Les Maures habitent la rive droite du Sénégal
depuis Bakel jusqu'à la mer; leur limite est rigoureusement fixée
au Sud par le fleuve qu'ils ne doivent pas dépasser (traité de
1858 avec Faidherbe). Ils sont divisés en un grand nombre de
tribus dont les plus bre sont : les Trarzas, les Braknas,
les Douaïchs. Les Trarzas occupent un espace d'environ 400 ki-
lomètres sur le bord du Sénégal au-dessus du Oualo; Dagana
est l’escale où ils apportent leurs marchandises. Les Bras
s'étendent sur un espace double en longueur, au nord du Dimar
et du Fouta ; leur escale est Podor. Les Douaichs occupent une
région à peu près aussi étendue au nord-est du Damga, et viennent
faire leurs échanges à Kaédi. Au nord de ces trois groupes se
trouvent les oasis de l'Adrar et du Tagant, qui entretiennent
quelques relations avec le gouvernement du Sénégal, et diffé-
rentes tribus qui viennent rarement aux escales Ouled-Nasser,
Ouled-Taïd, Ouled-Allouch, Ouled-Embareck, Sidi-Mahmoud.
Le chiffre très approximatif de la population maure est de
80.000, tous musulmans.
Peuls. — Les Peuls, Pouls, Fellahs, Foulas, Foulbès, très ré-
pandus dans l'Afrique septentrionale, forment une longue trai-
née depuis le lac Tchad jusqu'au Sénégal; ils sont épars en
tribus plus ou moins puissantes, depuis le Darfour jusqu’au
Fouta, le plus souvent très clairsemés et perdus au milieu des
races noires. Au Sénégal, ils constituent la majeure partie de la
population de la haute Casamance et de la haute Gambie, sont
mélés aux Toucouleurs dans tout le Fouta, et forment de nom-
breux groupements disséminés en pays Ouolof.
Leur population peut être estimée à 110.000, dont 80 000 sont
musulmans et les autres fétichistes.
Les Laobès, inséparables des Peuls, quoique de race diffé-
rente, sout par groupes épars au milieu des populations étran-
gères ; ils sont environ 40.000, dont la moitié sont musulmans
et les autres fétichistes.
Toucouleurs. — Les OU couleurs forment la plus grande
partie de la population du Fouta, sur le moyen Sénégal, depuis
Bakel jusqu’à Dagana ; ils occupent les provinces du Damga,
du Fouta, du Toro, du Dimar. Ils sont tous musulmans, et Et
nombre dépasse 100.000.
Mandingues. — Les Mandingues habitent les bassins de la
Casamance et de la Gambie; ils constituent la population do-
minante du Niani, du Ouli, du Tenda, du Gamon; en Casa-
mance, ils occupent le Pakao, le Boudhié, le Jacine, le Bras-
sou, le Balmadou, le Sound; on les trouve aussi dans le Bou-
ladougou et le Firdou mélangés à des Peuls, dans le Boudou
mélés aux. Saracolès et aux Ouolofs, dans le cercle de Nioro
avec des Sérères. Ils sont presque {ous musulmans.
Sarracolès. — Les Sarracolès, autrefois nombreux et puis-
sants, sont épars aujourd'hui au milieu des autres races; ils
habitent de nombreux villages sur les bords du Sénégal, entre
Kaëédi et Bakel, mais c'est entre Bakel et Bafoulabé qu’ils pré-
sentent les populations les plus pures et les plus compactes;
ils occupentles pays de Galam, Guidiaga, Guoye ; on en retrouve
également éparpillés dans le Sud, au milieu des Mandingues et
des Peuls, depuis les contreforts du Fouta-Djallon jusqu’au
Bambouk. Tous sont musulmans.
Khassonkès. — Les Khassonkès, métis de Maudés et de Peuls,
vivent dans les environs de Médine, habitent le Khasso, le Gui- :
dimaka, le Kamera, le Nadiaga; ils sont très mélangés de Sar-
racolès, Bambaras et Toucouleurs; tous sont musulmans.
Le chiffre approximatif des populations de race mandé qui
LE NATURALISTE
habitent le Sénégal jusqu'à la Falémé est AG 10.000
(Mandingues, Sarracolès ou Khassonkès).
Ouolofs. — Le pays occupé par les Ouolofs come les
provinces du Oualo, du Cayor, du Djolof et une partie du Baol.
Il est limité au nord par le Sénégal qui le sépare des Maures:
au sud, vers le cap Vert, il touche au pays des Sérères: à
l'ouest, il donne sur l’océan Atlantique, et à l’est, sur le Fouta
des Toucouleurs, couvrant un espace à peu près quadrilalère de
220 kilomètres nord-sud sur 150 kilomètres est-ouest, Dans le
Rip, le Oui, le Bambouk, en Casamance(Carabane et Sedhiou),
on trouve en outre de nombreuses agglomérations de la même
race, débris du vieil empire Djolof ou colonies de formation
récente, constituées par des traitants venus pour
échanges et installés définitivement dans le pays.
Le nombre des Ouolofs est de 440.000, dont 2 ou 3.000 sont
catholiques et tous les autres musulmans.
Sérères. — Les Sérères s'étendent au sud du Cayor, depuis
le cap Vert jusqu'à la Gambie, embrassant tout le bassin du
Saloum et une partie de celui de la Gambie. Leur territoire,
qui mesure 12.000 kilomètres carrés, comprend les régions du
Baol, du Sine et du Saloum; ils se divisent en deux grandes
fractions : les Sérènes None du cap Vert à Joal sur Ja côte et
les Sérères Sine dans le bassin du Saloum.
La population sérère est d'environ 180.000 individus, presque
tous fétichistes.
Diolas. — Les Diolas occupent la plus grande partie de la
basse Casamance entre la Gambie et le Cachéo, jusqu'au
Songrougou et à Zighinchor où commencent les Bamounkas :
au nord, Se sont en rapport avec les Mandingues de la Gambie
anglaise, au sud avec les races portugaises des Papels et des
Mandiagos, à l'est avec les Baniounkas.
Les renseignements que l'on possède sur leur nombre sont
très incomplets : on peut estimer ce nombre à près de 80.000.
dont quelques-uns sont chrétiens et tous les autres fétichistes. :
Baniounkas. — Les Baniounkas occupent les deux rives de
la Casamance, entre les Diolas à l’ouest, les Mandingues au
nord-est, les Balantes au sud-est. Ils sont environ 25.000,
dont la moitié complètement soumis aux Mandingues du Boud-
hié et du Yacine et devenus musulmans: les autres, sauf
quelques chrétiens, à Zighinchor, sont restés fétichistes.
Balantes. — Les Balantes occupent la rive gauche de la
Casamance, entre les Baniounkas à l'ouest et les Mandingues à
faire des
l'est; ils s'étendent au sud dans les hauts pays du Geba et du
Cacheo. Le chiffre approximatif de leur population est de
15.000; tous sont fétichistes.
SUR L’ABUS DES SUPPOSITIONS GLACIAIRES
EN GÉOLOGIE
La découverte, due à Agassiz et à ses collaborateurs,
que des glaciers ont agi en beaucoup de cas dans des ré-
gions d’où ils ont maintenant disparu est une des plus
belles conquêtes de la géologie : ses conséquences ont été
nombreuses et larges et ont permis de jeter du jour sur la
condition de la surface du globe à différentes époques.
Mais, comme il arrive si souvent pour les bonnes choses,
on s'est plus d'une fois laissé aller jusqu’à l'abus des
considérations glaciaires, et on n’a pas reculé devant la
supposition d’une époque, d'ailleurs récente, où la plus
grande partie des surfaces continentales auraient été
couvertes d’une calotte glacée comparable à l’Inlandsis
du Groenland, mais beaucoup plus vaste encore. Aussi
avons-nous des cartes géologiques, et par exemple celle
de la Suisse qui laissent au terrain glaciaire une surface
représentant une importante fraction de la région entière
qu'elles représentent.
Des observations que j'ai poursuivies maintenant de-=
puis plusieurs années me conduisent à protester énergi-
quement contre ces conclusions irréfléchies et à tenter de
LE NATURALISTE
257
ramener les esprits à une plus exacte interprétation des
choses.
Les arguments principaux sur lesquels on se base sur-
tout pour reconnaitre le terrain glaciaire sont de deux
catégories : d’abord la forme générale du sol, qui,suivant
l’heureuse expression de Desor, constitue un paysage
morainique, et en second lieu la présence dans les dé-
pôts superficiels de galets polis et striés associés à de la
boue et à du sable sans aucune stratification réguliere.
Au paysage morainique appartiennent ron seulement
des moraines de diverses catégories : frontales, margi-
nales, médianes, profondes, ainsi que les blocs erra-
tiques; mais des surfaces rocheuses polies, cannelées et
striées. Les stries se retrouvent donc de tous les côtés,
et Agassiz en était arrivé à dire que la découverte d’une
strie sur une pierre suffit pour en démontrer l'origine
glaciaire.
Or, il y a très certainement à faire un choix parmi
moraines frontales bien constituées comme bourrelets
barrant des vallées ne se produisent pas, à ma connais-
sance, de cette facon ; mais des amas faciles à confondre
avec les moraines latérales ou avec des moraines pro-
fondes en résultent au contraire très aisément. C’est ce
que démontre l'observation de maintes localités de mon-
tagnes ainsi que les résultats d'expériences qui ont été
naguëre décrites aux lecteurs du Naturaliste. Celles-ci,
sur lesquelles je ne veux pas revenir,ont montré non seu-
lement l’origine des placages caillouteux, pris si souvent
pour des moraines, mais celle de fragments rocheux de
toutes tailles qui peuvent prendre toute l'apparence des
blocs erratiques.
Enfin, pour ce qui concerneles stries qui, au dire d’Agas-
siz et de ses élèves, donnent aux galets de ces terrains
le caractère le plus évidemment glaciaire, je rappel-
lerai que ‘out concourt à démontrer qu'elles sont dues
à un tout autre phénomène, intimement Hé à la dénuda-
Ses
ESS
NRA
NT
Fig. 1. — Galet strié du terrain caillouteux {des Préalpes du canton de Vaud,
recueilli à Blonay, près de Vevey. 1/2 de grandeur naturelle. Collection du Muséum.
ces divers accidents, Pour ce qui est des surfaces polies,
cannelées et striées des parois et des fonds de vallées, le
plus souvent elles sont en effet glaciaires, et il n’y a
guère à en distinguer que des miroirs de failles qui sont
parfois au jour, mais qui sont d'habitude très faciles à
reconnaitre, surtout à cause de leur forte inclinaison sur
l'horizon. Des glissements de terrain en masse en ont
aussi produit quelquefois,mais le fait est exceptionnel.
Relativement.aux moraines et aux blocs erratiques, il
y à évidemment lieu d'éviter des erreurs qui ont été très
souvent commises, Il se trouve, en effet, comme j'y ai
déjà insisté, que la glace n’est pas le seul agent de trans-
port qui peut accumuler en certains points les matériaux
hétérogènes constitutifs des moraines.Les épanchements
boueux en font tout autant et dans bien des cas sur une
échelle extraordinairement considérable, et avec une fré-
quence qui fait de ce phénomène un véritable trait essen-
üel de la physiologie des chaines montagneuses. Les
tion souterraine. Sans revenir en détail sur ce point qui
m'a déjà occupé dans ce journal, il convient cependant
de résumer quelques observations tout à fait nouvelles et
qui confirment pleinement les premières.
Tout d'abord la figure 1 jointe à cet article reproduit
d'après une photographie l'apparence d’un galet calcaire
poli et strié recueilli aux pieds des Pléiades au-dessus
du village de Blonay, à # kilomètres au ncrd de Vevey.
On remarquera la prodigieuse abondance des stries et
leurs directions extrêmement variées; il faut ajouter que
toutes les faces des galets sont également polies etstriées.
D'ailleurs, tous les galets calcaires contenus dans le sol
sont semblables à celui-ci par l’état de leur surface, mais
les roches plus dures, grès, granulite, serpentine, etc.,
ne sont pas striées ou ne le sont que d'une manière {tout
à fait exceptionnelle. J'ai insisté sur l’incompatibilité de
cette ubiquité des stries sur les galets calcaires avec
l'hypothèse glaciaire, le striage par les glaciers ne pou-
258 LE NATURALISTE
vant intéresser que la très petite minorité des matériaux
constitutifs des moraines.
Les géologues suisses n’ont pas voulu accepter ma
conclusion, qui contrarie en effet les enseignements de la
carte géologique ; mais l’un des plus distingués parmi
eux, M. le D: Hans Schardt, professeur à l'Université de
Neufchâtel, a tenté de concilier les faits d'observation
avec la théorie, en émettant l'avis que les stries sont dues
à un recouvrement du terrain caillouteux sous un glacier
subitement accru et qui en a fait une moraine profonde.
Il pense qu'alors l'écrasement de la masse suffit pour
expliquer les stries. Mais, outre qu'on ne voit pas pour-
quoi le glacier aurait subi cet accroissement sans laisser
les traces (non striées en masse cette fois) de sa plus
grande extension, il est clair que l'orientation générale
des stries devrait indiquer celle de la pression supposée.
Or on vient de voir que les stries sont dans tous les sens.
D'ailleurs, la pression du terrain, aussi forte qu’on le sup-
posera, mais sans écoulement, ne saurait produire la
moindre strie et c'est ce que démontre l'expérience.
Avant d'aller plus loin, il est d’ailleurs très utile d’intro-
duire ici uneremarque qui, à elle seule, semble réduire à
néant l'hypothèse que les stries des galets calcaires sont
dues à l’action des glaciers :e estque si telle était en effet
leur origine, si par conséquent elles dataient d’une anti-
quité de quelques milliers d'années seulement, elles
auraient depuis longtemps disparu par le fait de la cor-
Fig. 2. — Tranchée ouverte suivant la ligne de plus grande pente à Brent,
sur la rive droite de la baie de Clarens, Suisse. M, mollasse d’eau douce ;
AB, région du terrain caillouteux où les galets calcaires ne sont jamais striés
et sont accompagnés de lits boueux intercalés avec des inflexions rappelant la
structure des deltas ; BC, régionou les galets calcaires très rarement striés sont
uniformément mélangés à la boue; C D, région où les galets calcaires sont
tous striés et uniformément associés à de la boue peu abondante comparati-
-vement à la région BC.
rosion réalisée par les eaux d'infiltration et qui sont
tout naturellement chargées d'acide carbonique. Ce qui
concerne les stries s'applique d’ailleurs, et a fortiori, au
poli si remarquable des galets. J'ai fait disparaitre, en
moins d'un an, le poli et la plupart des stries de galets
que j'avais abandonnés dans la terre végétale à toutes les
alternatives saisonnières. On voit donc qu'il faut chercher
ailleurs que dans le mécanisme glaciaire non seulement
la cause d’où dérivent les stries, mais encore celle qui a
déterminé le pol. C'est pour cela que j'ai développé déjà
ce résultat dans un article antérieur, que le striage des
galets calcaires non seulement dans les placages caillou-
teux des Préalpes, mais jusque dans les moraines les plus
authentiques, comme celles des Vosges et du Jura, sont
l'effet de la dénudation souterraine, et je n’aurais pas à y
revenir si je n'avais à signaler, comme confirmation des
plus précieuses, les particularités qui m'ont été offertes
récemment par une coupe rencontrée inopinément et
dont les détails principaux sont résumés par notre
figure 2.
Cette coupe a été prise sur la rive droite du torrent ap-
pelé la Baie de Clarens, qui descend du pied $S. O. du
mont Folly pour se jeter dans le lac Léman. Les travaux
de la nouvelle route qui doit joindre Blonay à Charnex
ont nécessité la coupure et l'exploitation d’un énorme
placage de terrain caillouteux auquel on a emprunté des
blocs pour les muraillements, des éclats pour le ma-
cadam et du sable pour le mortier, Ce placage a été re-
coupé en face de Brent-par une tranchée de 200 mètres
de longueur dont les parois sont très instructives.
Il se trouve en effet qu'au lieu d’intéresser le terrain
qui nous occupe, comme dans les autres localités, tan-
gentiellement au flanc des montagnes où l’on ouvre des
routes avec une déclivité aussi faible que possible, on
l'a recoupé cette fois suivant la pente du sol et il en est
résulté des enseignements très précieux.
Comme on le voit par la figure, cette ligne de pente est
très inégalement inclinée suivant les points : tandis que
de C en D'elle plonge très vite, de À en B au contraire
elle est bien moins éloignée de la direction horizontale.
Et la conséquence c’est que les eaux d'infiltration ruis-
sellent dans la masse avec une activité très inégale ici et
là et que le travail de la dénudation est très loin d’être
uniforme d’un point à l’autre.
Pendant que sur le flanc du coteau la soustraction des
poussières souterraines est très rapide et que les tasse-
ments consécutifs producteurs des stries sont continus
et étendus, — plus haut, au contraire, ce travail est très
modéré et peu sensible. Aussi, dans le
premier cas, et toutes choses égales d'ail.
leurs, voit-on la boue beaucoup moins
abondante pendant que les galets calcai-
res sont très richement striés, tandis que
dans l’autre cas on observe des interca-
lations de niveaux limoneux et un excès
de boue qui, bien loin de présenter la
structure des moraines, permet de retrou-
ver des formes de deltas superposés; en
même temps, on reconnait que les stries
font défaut à peu près complètement.
C’est au même ordre de faits qu'il faut
rattacher l'apparence nettement stratifiée
que présente de loin l’amas de terrain
caillouteux d'En-Saumont, un peu au-des-
sus de Brent, mais sur la rive gauche du torrent et que
J'ai eu l’occasion de décrire il y a déjà plusieurs années.
Tout le monde sent à quel degré ces faits, dont la vé-
rification est facile, sont incompatibles avec l’hypothèse
glaciaire et concordent au contraire avec ma nouvelle
manière de voir.
Eu effet, quelle raison pourrait-il y avoir pour que le
nombre des blocs striés, si le glacier en était l'auteur,
variât avec la distance au thalweg actuel dela vallée ?
Au contraire, en rattachant les stries à l’intensité de la
dénudation souterraine en chaque point, on aurait pu
prévoir avec précision les faits observés; car cette inten-
sité varie avec la forme du terrain en ce qui concerne le
cube de matière dont elle détermine la soustraction et,
par suite, en ce qui concerne la puissance des tasse-
ments résultants.
En somme, les arguments se multiplient si rapidement
et leur éloquence est si grande qu’on peut prévoir comme
très prochain le moment où les géologues restreindront
beaucoup la zone d'action des glaciers disparus.
STANISLAS MEUNIER.
à
L'IVRs La He Cane
RE
LE NATURALISTE 259
LA CHEMATOBIE BRUMEUSE
(Chematobia Brumosa.)
Depuis une dizaine d'années, plusieurs communes du
département de la Seine-Inférieure ayant, un grand
nombre de pommiers complètement ravagés par la che-
mille verte de la chematobie brumeuse (chematobia bru-
mata), je crois utile de faire connaître que ces chenilles
proviennent d'œufs pondus sur les branches de pom-
miers aux mois d’octobre et de novembre précédents.
Ces œufs orangés, après avoir passé l'hiver, sur les-
quels les intempéries de cette saison n’'exercent aucune
action destructive, donnent naissance, à compter de la
mi-avril jusque vers la fin de mai, à une chenille, qui
tout aussitôt se met à dévorer les bourgeons, puis les
feuilles, et s'attaque même à l'écorce, faute de mieux.
Cette chenille est, au sortir de l’œuf, d'une couleur
noire verdâtre et mesure environ { millimètre de lon-
gueur.
Après sa première mue, elle est d’un vert grisâtre, sa
tête et l’écusson de la nuque sont noirs.
Lorsqu'elle est parvenue à son entier développement,
elle mesure alors de 15 à 20 millimères de longueur. Sa
tête est d'un brun clair et luisant, sa ligne dorsale
devient fine et foncée et s’entoure de chaque côté d'une
bordure blanche. Mais elle peut varier du vert au rose,
suivant qu'elle a mangé des feuilles ou des pétales.
Les pommiers ravagés par cette chenille ont un aspect
lamentable ; complètement dénudés, ils semblent avoir
subi les atteintes d’un violent incendie.
La chenille de la chematobie continue ses dégâts avec
une voracité étonnante jusque vers le 10 juin, époque où
elle atteint son entier développement; elle se laisse alors
descendre à terre au moyen d'un fil de soie semblable à
celui d’une araignée et s'enfonce sous le gazon à une
profondeur de 5 à 6 centimètres entre les radicelles de
l'herbe; puis, après avoir changé de peau, elle se trans-
forme en une chrysalide et reste en cet état fout l'été et
une partie de l’automne.
Cette chrysalide est d’un brun jaune et armée à sa
pointe de deux petites épines tournées en dehors.
À compter du 15 octobre jusque vers le 25 novembre,
cette chrysalide donne naissance à l'insecte parfait ou
papillon. Celui-ci appartient à la famille des Phalénides.
Le mâle mesure environ 3 centimètres d'envergure, il
a les ailes supérieures grises, barrées de gris plus foncé,
et les ailes inférieures blanchâtres. Il est ailé et son seul
rôle consiste à féconder la femelle, il meurt peu de temps
après cette opération ; quant à la femelle qui est aptère et
possède deux moignons avortés et un corps énorme pro-
portionnellement à sa grosseur, elle s’'empresse de faire
l'ascension du tronc des pommiers, pour de là gagner les
branches sur lesquelles elle déposera ses œufs.
Or, le seul moyen de préserver les pommiers des
attaques des chenilles de la chematobie est d'empêcher la
femelle d'arriver aux parties branchues de l’arbre où elle
opérerait sa ponte.
AÀ cet effet, on entourera, du 15 octobre au 25 no-
vembre, le tronc des pommiers, à environ 150 du sol,
d’une bande de papier épais d’une largeur de O0m20 à
Om25, qui sera maintenue au moyen de deux bouts de
ficelle ou d’osier posés l’un à sa partie supérieure et
l’autre à sa partie inférieure, puis l'on badigeonnera
cette bande avec la composition suivante :
On place dans une casserole 400 grammes de dégras
ordinaire servant pour le graissage des essieux de voi-
tures, que l’on fait chauffer fortement pour chasser toute
l'eau qu'il contient. Il est bon d'opérer, malgré cette
petite quantité de dégras, dans une casserole de ÿ litres
à cause de l’effervescence qui se produit lorsque la
chaleur atteint une certaine élévation.
Ensuite on ajoute 400 grammes d'huile de poisson;
on remet le tout sur le feu, puis on verse peu à peu
1 kilo de colophane en poudre grossière, Aussitôt la
colophane dissoute, on retire du feu, on laisse refroidir
et le mélange peut servir le lendemain.
Par ce procédé, on opposera aux chematobies femelles
un obstacle infranchissable, dans lequel elles s'englue-
ront et trouveront la mort; mais il est nécessaire, après
cette opération, de gratter vigoureusement la partie du
tronc comprise entre le sol et la bande pour faire tomber
les œufs qu'un grand nombre de femelles pourraient y
avoir déposés, parce que les chenilles qui en écloraient
au printemps monteraient à l'arbre en passant sur la
bandelette desséchée.
Les résidus provenant du grattage devront être recueil-
lis sur une toile et brülés avec soin.
Il serait bien également de faire usage de la bande
engluée du {mai au 15 juin, époque de léclosion
des chenilles, car il pourrait se faire que quelques
femelles aient réussi à franchir l'obstacle, pour que
les chenilles qui naîtraient des œufs déposés sur les
branches par ces femelles (une femelle pond en moyenne
200 œufs) rendent inutiles les précautions prises à
l'automne précédent.
On devra donc, du 4 mai au 15 juin, secouer les
branches de pommiers aux fins de faire tomher les
chenilles que l'on recueillera dans une bâche tendue à
cet effet au pied de l'arbre; il sera alors facile de les
détruire, soit en les brülant, soit en les écrasant; les
bandes engluées auront pour but de retenir celles de ces
chenilles qui se seraient échappées et chercheraient à
regagner sur le pommier la place d'où elles sont tom-
bées.
On est sûr, en se conformant strictement aux instruc-
tions qui précèdent, d’avoir des pommiers complètement
épargnés par la chenille de la chematobie.
Ce procédé de destruction est peu coûteux, il revient
(prix de la matière et de la main-d'œuvre) à 0 fr. 15 par
arbre pour toute la période de son emploi.
PAUL NOEL.
LA GUINÉE FRANÇAISE
ET
SES PRODUITS NATURELS
Caoutchouc. — Ce produit est le plus riche de la Guinée : la
première qualité récoltée dans le pays est le Red Nigger où
caoutchouc rouge, comportant dix à douze boules au kilogr., et
valant en Europe 8 francs à 8 fr. 50 le kilogr.; viennent en-
suite le Twist, livré en boules formées de lanières enroulées (huit
à dix boules au kilogr.) et valant en Europe 7 francs à 7 fr. 50
le kilogramme; le While Nigger, plus blanc, plus humide et
moins soigné dans sa préparation que les précédents.
Amandes de palme où palmistes. — Ce sont les graines des
260
LE NATURALISTE
fruits des palmiers; la préparation, quoique peu compliquée,
en est longue; elle exige de l’espace, de la main-d'œuvre et des
soins; il en résulte une surélévation du prix de revient qui
n'est pas toujours suffisamment compensée par la valeur mar-
chande du produit sur les marchés de l'Europe. On estime que
cette valeur doit dépasser 20 francs les 100 kilogrammes pour
procurer un bénéfice.
Gomme copal. — Ce produit, vendu en Europe à raison de
2 francs à 3 fr. 25 le kilogramme, est utilisé dans la fabrication
des vernis et dans l'apprêt des tissus.
Cuirs. — Les cuirs proviennent surtout du Foulah et de la
vallée du Haut-Niger, où l'élevage est pratiqué et se développe
de jour en jour depuis la pacification du pays. Ces cuirs sont
petits, ne pèsent guère plus de 3 kilogr. 500 à 5 kilogrammes
secs, et se vendent sur le pied de 1 fr. 50 pièce environ. Ils
sont néanmoins très appréciés en Europe : 300 tonnes ont été
exportées en 1899 sur les marchés de Liverpool, de Marseille et
de Hambourg.
Sésames. — Graines oléagineuses donnant une huile très
fine, recherchée en horlogerie. Elles sont vendues en Europe,
notamment sur les marchés de Marseille et de Hambourg, 28 à
30 francs les 100 kilogrammes. L’exportation s’est élevée en
1897 à 540 tonnes. La culture des sésames, qui exige des soins,
a tendance à être délaissée par les indigènes, qui préfèrent
s'adonner à la récolte plus rémunératrice du caoutchouc.
Huile de palme. — Cette huile, préparée en Guinée par
l'ébullition, est en grande partie consommée dans le pays. Il
en a été cependant exporté 184 tonnes pendant l’année 1898 en
Europe, où ce produit est utilisé dans la savonnerie fine et
diverses autres industries, L’huile provenant de Conakry est
très appréciée sur les marchés de Hambourg et de Liverpool,
où le prix moyen de vente est d'environ 60 francs les 100 kilo-
grammes.
Arachides. — L'arachide a été peu exploitée en Guinée,
surtout dans les rivières, au cours de ces dernières années, à
cause de la qualité inférieure de la graine indigène et de l’élé-
vation des frais généraux. Des expériences tentées récemment
avec des graines importées de Gambie au Nünez ont donné
des résultats satisfaisants; 240 (onnes ont été exportées en
1897; en 1898, la récolte s’est élevée à 400 tonnes, et il est
permis d'espérer que le chiffre de la production s'élèvera cette
année à 4.200 ou 1.400 tonnes. L’arachide de Guinée est vendue
en Europe de 20 à 22 francs les 100 kilogrammes.
Cire. — Les abeilles abondent dans toute la Guinée; mais,
en général, les indigènes ignorent ou négligent l'exploitation
raisonnée de cette ressource. La préparation de la cire, livrée
aux factoreries, laisse beaucoup à désirer, et occasionne des
déchets qui pourraient être atténués dans une proportion sen-
sible. L'exportation s’est élevée, en 1898, au chiffre de
34.000 francs; le prix de vente en Europe est en moyenne de
3 francs le kilogramme.
Ivoire. — L'ivoire recueilli en Guinée est presque toujours
vert, et provient de défenses généralement de petites dimensions.
L'exportation s’est élevée, en 1898, à 3 tonnes et demie, et le
prix de vente sur le marché d'Anvers oscille entre 15 francs et
22 francs le kilogramme.
Café. — Les plantations de café se sont localisées le long de
la rivière Dubréka. Elles sont encore, d’ailleurs, dans la période
de préparation et d'essais; les résultats obtenus jusqu'ici ne
permettent pas d'espérer pour l'avenir l'extension de cette cul-
ture intéressante et un rendement avantageux. L'exportation ne
s'est élevée, en 4898, qu'à deux tonnes et demie tout au plus.
Le mil. — Vulgairement appelé sorgho, ie mil se sème en
juillet, et se récolte en novembre. Il sert exclusivement à l’ali-
mentation des indigènes, et les factoreries n'en reçoivent qu'une
quantité insignifiante. ‘
Le riz paille où riz indigène non décortiqué : est employé
pour l'alimentation des noirs qui le préfèrent au riz de l'Inde.
Il fait l’objet d'un commerce très actif dans les factoreries qui
l’échangent contre des palmistes. Il est cultivé surtout dans les
régions basses et acheté par les caravanes venant du haut Pays.
Les holas. — Les noix de kola sont l’objet d'un commerce
d'échange prospère avec le Foutah-Djallon et le Soudan. Elles
se vendent en moyenne à raison de 300 où 350 pour 5 francs ;
mais ce taux est variable, et il s'élève d’une façon très sensible
en cas de mauvaise récolte.
Or. — L'or traité en Guinée provient du Bouré et du Bam-
bouck; il se présente en bagues roulées et en petits anneaux.
Il n'en est pas exporté plus de 40 kilogrammes par an. Payé
aux indigènes 2 fr. 50, il est revendu. 3 fr. 10 le (
Europe.
gramme en
MINERAUX NOUVEAUX DU GROENLAND
M. Flink a rapporté, de son expédition géographique et
géologique au Groënland, un grand nombre de miné-
raux, parmi lesquels se trouvent un certain nombre d’es-
pèces nouvelles, Toutes ces dernières se rencontrent
dans des syénites néphéliniques, qui forment une ré-
gion assez étendue à Julianehaab. Le reste de la partie
explorée du Groënland est formée par des granites et des
gneiss, qui sont très pauvres en minéraux.
4° Carbonates. — Les minéraux nouveaux appar-
tenant à ce groupe sont au nombre de deux : la cordylite,
qui est une parisite barytique, et l’ancylite, qui est un
carbonate double de strontium et de cérium.
La cordylite a une couleur jaune pâle, est translucide
et se présente en cristaux de à X 4mm, ayant la forme
d'une massue, par suite de leur renflement à l’une de
leurs extrémités. C’est à cause de cette particularité que
le nom de cordylite a été donnée à l'espèce (de yopèdan,
massue, sceptre). Comme les cristaux de parisite, ceux
de la cordylite appartiennent au système hexagonal et
offrent ies faces du prisme qui sont très développées.
Clivage parallèle à la base du prisme.
La cordylite est optiquement négative.
La densité est de 4,31 et la dureté 4,5.
La composition estla suivante : acide carbonique, 23,47;
thorine, 0,30; oxyde de cérium, 23,72; oxyde de lan-
thane et de didyme, 25,67; oxyde ferreux, 1,43; baryte,
17,30 ; chaux, 1,91; eau, 0,80; fluor, 4,87. La formule.
Ce?2F?2BaC*O? représente la composition de ce minéral, qui
se rapproche de la parisite de Muso, Une partie de la
chaux est remplacée par de la baryte.
L'ancylile se présente en cristaux très petits, ayant des
faces courbes et offrant l’octaèdre du système ortho-
rhombique. Les cristaux montrent deux types : les uns
sont presque sphériques et atteignent à peine un demi-
millimètre de diamètre, les autres ont 4millimètres etdes
formes distinctes. Leur couleur est jaune orange, brune
ou verdatre. Ils forment souvent des croûtes verdâtres
sur du feldspath et sur de l’'œgyrine. Eclat vitreux sur les
faces et gras sur les cassures. Subtranslucide mais
transparent, en lames minces, à moins que l’échantillon
examiné ne contienne des inclusions d’œgyrine. Pas de
clivages.
Le plan des axes optiques est parallèle à la base du
prisme et la bissectrice aiguë coincide avec l’axe b. Le
minéral est positif. Densité, 3,95. Dureté, 4,5.
Une analyse a donné les résultats suivants : acide car-
bonique, 23,28; thorine, 0,20; cérite, 22,22;.oxydes de
lanthane et de didyme, 24,04; protoxyde de fer, 0,35;
strontiane, 21,03; chaux, 1,52; eau, 6,52; fluor, traces. En
négligeant le fer, la chaux et la thorine, on a la formule
4Ce(OH) CO + 3SrCO* + 33H20,
qui se rapproche de celle de la weybyeite de Brogger.
2 Silicates.— Ce sont laspodiophyllite etlatainiolite,
La spodiophyllite a l'apparence d’une chlorite: elle est
en petits cristaux atteignant un centimètre de longueur,
se chivant comme les micas, et appartenant au système
rhomboédrique. qe
Les lames de clivage sont triangulaires. La couleur
est gris de cendre.
|
|
|
LE NATURALISTE 261
La spodiophyllite est uniaxe et à double réfraction
négative faible.
Densité, 2,633;
la calcite.
La composition chimique est la suivante : silice, 53,61 ;
sesquioxyde de fer, 11,24; alumine, 4.27; protoxyde de
fer, 413; protoxyde de manganèse, 0,64; magnésie,
10,16 ; soude, 8,55 ; potasse, 7,80. Total, 100,40.
On est conduit à la formule :
(AL, Fe}? (Mg,Fe,Mn}(Na?,K?2)Si80?:
qui indique une composition voisine de celle de l'œgy-
rine.
La fainiolite est en petits cristaux, ayant la forme d’une
lame allongée. Elle appartient au groupe des micas. Les
cristaux sont souvent maclés suivant p. L'angle des axes
optiques est voisin de ne La biréfringence est faible,
Densité, 2,86 ; dureté, 2,5 à 3.
L'analyse a donné les re suivants :
alumine, 2,7; protoxyde de fer, 0,6; protoxyde de ma-
gnésium, 19,1; potasse, 11,5; soude, 1,8; lithine, 3,8;
eau, 8,7, Total, 100.
La formule est (MgOH}(K.Na,Li) S50$8 + H20
La tainiolite fond au chalumeau, en colorant la flamme
en rouge. Elle est lentement, mais complètement dé-
composée par l'acide chlorhydrique.
3° Silico-titanates. — Ceux-ci sont les plus nom-
breux.
La lorenzite se présente toujours en petits cristaux,
ayant au plus 4 millimètre de long sur 1/10 de large. Ils
appartiennent au système orthorhombique. Les cristaux
sont prismatiques, allongés suivant l’axe vertical, et ter-
minés par une pyramide.
Ils sont transparents, optiquement positifs. Le plan
des axes est parallèle à h!, L'angle des axes 2V est
de 72°.
Densité, 3,42. Dureté un peu supérieure à celle des
feldspaths.
La composition est la suivante : silice, 34,26; titane,
35,15; zircone, 11,92; coude, 17,12; potasse, 0,37.
La formule est donc Na20, 2 (Ti, Zr) O?, 28i O2,
La lorenzénite est facilement fusible au chalumeau en
donnant un globule noir et n’est soluble que dans l'acide
fluorhydrique.
Le minéral a été dédié au minéralogiste danois
J. Lorenzen.
La leucosphénite se présente en cristaux de couleur
blanche ayant la forme d’un coin et appartenant au sys-
tème monoclinique.
Les plus gros ont 5 millimetres de long sur un ou deux
de large. Ils sont aplatis suivant la base du prisme et
allongés suivant l’arête pg!. Macles fréquentes. Face d’as-
sociation suivaut p. Un cristal tourne de 180° autour de
l'axe perpendiculaire à ce plan. Clivage distinct paral-
lèlement à y!.
Optiquement négatif. La bissectrice aiguë coïncide
avec l’axe cristallographique vertical.
Densité, 3,05. Dureté un peu supérieure à celle de l’or-
those.
La composition est la suivante :
Silice, 56,94; acide titanique, 13,20; zircone,
baryte, 13,75; soude, 11,14; potasse, 0,56.
Elle est représentée par la formule
BaO, 2Na20, 2 (Ti,2r) OZ, 10,Si0?
qui est analogue à celle de la pétalite, mais il n'existe
dureté un peu supérieure à celle de
silice, 52,2;
3,50;
aucune relation cristallographique entre les deux miné-
raux.
La narsarsukite est quadratique, Les cristaux sont
aplatis ou ont presque la forme cubique. Leur couleur
est jaune de miel. Polychroique. Double réfraction posi-
tive.
La composition est la suivante :
Silice, 61,63; acide titanique, 14; sesquioxyde de
fer, 6,30; alumine, 0,28; protoxyde de manganèse, 0,47;
magnésie, 0,24; soude, 16,12; fluor, 0,71; eau, 0,29,
Négligeant le manganèse,la magnésie et l’eau, on tire
la formule
T2Si202Nañ Fer.
L'épistolite se présente en cristaux ayant la forme de
lames rectangulaires de 20mm >< {mm, de couleur blanche
et appartenant au système monoclinique. Les cristaux
sont aplatis suivant la base du prisme. Ils sont si fra-
giles qu'ils se pulvérisent entre les doigts. Il existe un
clivage suivant la face p et un autre moins parfait sui-
vant les faces du prisme.
Le plan des axes est parallèle au plan de symétrie.
Optiquement négatif. Biréfringence très forte.
Densité, 2,885. Dureté intermédiaire entre celle du
talc et celle du gypse.
La composition est la suivante :
Silice, 27, none pique, 33,56 ; acide titanique, 7,22:
protoxyde de fer, 0,20; protoxyde de manganèse, 0,30;
chaux, 0,77; ipucse, 0,13; soude, 17,59; eau, 11,01;
fluor, 1,98.
La formule 19Si0?, 4TiO?, 5Nb?05, (Ca, Mg, Fe, Mn)
O,10Na°0, 21H20, 4NaF, représente approximativement
cette composition qui n’a aucune analogie avec celle
d'un minéral connu.
M. Flink a en outre trouvé dans l's mêmes régions
d’autres espèces nouvelles : la chalcolamprite, la britholite,
l’endeiolite et la schizolite. Elles ont été décrites par Flink,
Bæggild et Winther; leur description détaillée sera
publiée dans un prochain numéro du Naturaliste.
P. GAUBERT.
LES PIERRES CREUSES DE PUTEAUX
Le remarquable article du célèbre professeur du Muséum,
M. Stanislas Meunier, sur les pierres siliceuses creusées de
trous éncrmes, comme les peules romaines, découvertes dans
les travaux d’'agrandissement de la gare de Puteaux, nous a
déterminé à prendre la plume, pour ajouter quelque chose à ses
recherches; si tant est que nous ayons à y rien ajouter qui
n'y soit déjà partiellement indiqué.
Ce qui nous frappe, c'est précisément de voir un aussi grand
nombre de pierres présentant les mêmes particularités de creu-
sement en un endroit très limité. Or il nous semble qu'il y
aurait un moyen bien simple d'expliquer à la lois ce travail
d'affouillement si singulier, et la présence d'une aussi grande
quantité de pierres creuses dans un tout petit espace.
Si l’on examine les sources de la fontaine à Ressous (1), dans
les sables supérieurs du Soissonnais, immédiatement au-
dessous et non au-dessus du calcaire grossier, comme le sont
les sables de Beauchamp, on voit ces sources sortir de terre en
cascatelles bouillonnantes, comme leur nom l'indique (fontaine à
Ressous, ressauts, ressacs), à cause de la déclivité du terrain
(1) La fontaine à Ressous est à Salency, près Noyon, lieu de
naissance de saint Médard, l'instituteur de la Rosière dans ce
grand village antique.
262 LE NATURALISTE
et de l’abondance de leurs eaux. Cette eau, chargée de sable,
agit puissamment contre tous les obstacles résistants qu'elle
rencontre sur son passage; et elle devrait finir à la longue par
creuser les roches les plus résistantes, comme les pierres silico-
calcaires. Que l'on imagine un grand nombre de ces rognons
siliceux empâtés de carbonate de chaux (il y en a beaucoup
dans les sables du Soissonnais), sur le trajet de ces violents
cours d’eau souterrains, et il sera facile de comprendre que,
avec le temps, ces rognons pourront être creusés au point de
former de grandes cavités arrondies et régulières, comparables
aux meules romaines, creusées dans les grès ou dans d’autres
roches dures, grâce à l’action continue du pilon.
Evidemment, ce n’est là qu'une des causes possibles de l’affouil-
lement des roches, et il y en a beaucoup d’autres. Ainsi M. Sta-
nislas Meunier nous montre les eaux de pluie, chargées d'acide
carbonique et d’autres acides organiques, provenant de la
décomposition des végétaux à la surface du sol et dans la pro-
fondeur de l'humus, dissolvant les bases qu'elles rencontrent
sur leur passage, carbonate de chaux, magnésie, sels de fer et
d'albumine, etc., etc.; eaux qui laissent déposer les sels qu'elles
tiennent en dissolution, au fur et à mesure qu’elles perdent
l'excès d'acide carbonique qui leur permettait de les dissoudre.
De là, ces empâtements de silice et la formation de roches
dures ou de rognons silico-calcaires, têtes de chat et autres. De
là des affaissements et des vides possibles en certains endroits,
et par suite des blocs renfermant de vastes cavités, parsemées
de géodes à leur intérieur.
Le savant professeur nous montre encore ces roches attaquées
plus tard à leur tour par d’autres eaux de composition différente,
pouvant les corroder en les dissolvant, après leur avoir donné
primilivement naissance.
À ces diverses causes, susceptibles de produire des cavités
dans des roches siliceuses artificielles, nous ajoutons l’action
mécanique des eaux souterraines, qui peuvent les creuser en
sphère sur une grande épaisseur, en grand nombre, dans un
espace relativement restreint, comme le quart d'un hectare et
même bien moins encore. Peut-être y a-t-il encore d'autres
causes qui nous échappent, et que l’on reconnailra plus tard.
Dans notre enfance, les ouvriers carriers prétendaient qu’ils
trouvaient parfois des crapauds renfermés vivants dans les
cavités naturelles de ces rognons siliceux. Le fait est vrai, et
nous avons eu occasion de l’observer nous-même; seulement
c'est l'explication qui est fausse. Ce n'est pas le crapaud qui
s’est trouvé enfermé dans la pierre, pendant sa solidification et
son empâtement par du carbonate de chaux : pour cela, il lui
aurait fallu vivre des milliers d'années sans pouvoir manger ni
respirer. Mais on voit les crapauds se réfugier sous le sable,
dans les sablières, durant la chaleur du jour, et de là se fau-
filer dans la cavité de ces rognons ouverte dans le sable.
Que les carriers fendent ces rognons siliceux en position,
in situ, et ils y verront un ou plusieurs crapauds, sans faire
attention que ces animaux y ont pénétré par en dessous.
Nous avons parfois rencontré, dans ces carrières de sable,
servant à l'extraction des têtes de chat, jusqu'à quinze crapauds,
enfouis sous le sable à une petite profondeur; surtout là où il y
avait de ces rognons laissant entre eux un certain espace vide.
Une fois même, un de ces animaux était arrivé à se blottir
dans une cavité de tête de chat ouverte par en dessous.
C'est alors que nous avons compris l'erreur des carriers, en
même temps que la justesse du fait lui-même.
Il y à toujours une part de vérité dans les erreurs des
hommes ; c'est ce qui me rassure en écrivant ces lignes, et en
en faisant une judicieuse application pour moi-même.
D' Boucox.
LE CACAO À MADAGASCAR
La culture du cacaoyer a été entreprise depuis une
douzaine d'années dans la région côtière de l'Est où le
développement de la plante s'opère dans des conditions
de vigueur remarquables. Le cacaoyer est également
cultivé avec succès à Sainte-Marie. C’est une culture
qui ne demande pour ainsi dire pas de soins et n'exige
qu'un peu de patience pour devenir très rémunératrice.
On calcule qu’un hectare planté de 600 cacaoyers
rapporte à son propriétaire environ 1.200 francs, déduc-
tion faite de tous ses frais de culture. Le cacaoyer a été
importé à Madagascar de Maurice et de la Réunion.
En raison de l'importance qu'est appelée à prendre à
Madagascar la culture du cacaoyer, nous croyons bon de
donner sur elle quelques indications complémentaires
que nous empruntons à une excellente étude sur la
question, publiée par M. Prudhomme, le distingué chef
du service de l’agriculture de la colonie, dans la Revue de
Madagascar.
Le commerce du cacao s’est développé dans une pro-
portion extraordinaire dans la deuxième partie de ce
siècle.
En France, les importations, qui ne s’élevaient, en 1850,
qu'à 2.000 kilogrammes, dépassent aujourd'hui 33 mil-
lions de kilogrammes, sur lesquels 700.000 kilogrammes
seulement nous sont fournis par nos colonies; le reste
provient du Brésil, du Venezuela et des possessions an-
glaises qui, à elles seules, nous expédient environ 7 mil-
lions de kilogrammes,
Madagascar ne produit à l'heure actuelle qu'une quan-
tité complètement négligeable de cacao; mais le régime
météorologique et la nature des terres d’une partie du
versant oriental permettent de considérer la culture du
cacaoyer comme une des plus recommandables dans
cette partie de l'ile, et d'espérer que les plantations de
ce genre y prendront un jour une extension considé-
rable, grâce au débouché qui leur est largement ouvert
en France, Les cacaoyers en rapport sont déjà nom-
breux à Madagascar. Si l’on n’exporte encore que tres
peu de cacao, c’est que la plupart des graines sont utili-
sées par les producteurs pour établir de nouvelles ca-
caoyères, ou vendues aux nouveaux colons pour com-
mencer leurs plantations.
Il existe un certain nombre d’espèces de cacaoyers,
mais la plus cultivée, et par suite la plus importante, est
le Theobroma cacao.
Le cacaoyer ne pousse que dans les régions franche-
ment tropicales, c’est-à-dire très chaudes et très hu-
mides. La température du sol ne doit pas être inférieure
à 24 ou 25 degrés, et doit rarement s’abaisser au-dessous
de 19 degrés, pour qu'il puisse se développer convena-
blement. Il exige, en outre, des chutes d’eau abondantes,
atteignant un minimum de 2 mètres à 2m. 50 par an, et .
ne peut supporter, sans les plus graves inconvénients,
des sécheresses un peu prolongées.
On ne peut guère, sans exception assez rare, planter
le cacaover au-dessus de #00 mètres d'altitude sous
l'équateur; cette limite s’abaisse naturellement au fur
et à mesure qu'on s’en éloigne. Dans ces conditions, la
culture du cacaoyer à Madagascar peut être entreprise
sur le versant Est dans une zone occupant une bande
de terre de 900 kilomètres de long, bornée à l’est par la
côte, et à l’ouest par une ligne. sensiblement parallèle
au rivage, mais ne s’élevant pas à plus de 300 mètres
de hauteur à la latitude de la baie d’Antongil, à
250 mètres sur le parallèle d'Andevorante, à 180 mètres
sur celui de Mahanoro et à 100 mètres seulement dans le
voisinage de Mananjary.
En tenant compte de ces indications, les
peuvent être sûrs d'obtenir d'excellents résultats.
colons
Rs er at da
PET, A TE EN PEN PE PP
Cu Dr te
e
LE NATURALISTE
263
LEURS PAPILLONS & LEURS CHENILLES
ESPÈCES
D'ARBRES OU PLANTES
ROBUR EN tu
SUBERP A Eee
ÎTEX, SUBER, ... 42 ee
NUSTRICA ee danse
NOMS
GÉNÉRIQUES ET SPÉCIFIQUES
Chêne
Sesia Conopiformis Esp.
— Asiliormis Rott.
— Ichneumoniformis F.
Zygæna Trifolii Esp.
Halias Prasinana L.
— Quercana S.V.
Nola Strigula S. V.
— Confusalis H. $S.
Lithosia Quadra L.
Limacodes Testudo S. V.
— Asellus $S, V.
Liparis Rubea S. V.
Cnethocampa Processionea.
Bombyx Populi L.
— Catax L.
— Rimicola $S. V.
Lasiocampa Pruni L.
— Betulifolia Rbr.
— Suberifolia Rbr.
Saturnia Pavonia L.
Platypteryx Falcataria L.
_ Curvatula Bkh.
— Sicula S. V.
— 3inaria Hufn.
— Cultraria F.
Stauropus Fagi L.
Hybocampa Milhauseri Esp.
Notodonta Tremula S. V.
— Dromedarius L.
— Chaonia L. V.
Le Querna $. V.
_ Dodonæa $. V.
— Argentina $. V.
Drynaleia Velitaris Hufn.
— Melagona Bork.
Pygæra Bucephaiaides Och.
Cymatophora Ruficollis $. V.
= Diluta $S. V.
— Flavicurnis L.
— Ridens F.
Diphtera Orion Esp.
— Ludifica L.
Acronycta Aceris L.
Asteroscopus Sphinx Hufn.
Mamestra Persicariæ L.
Tæniocampa Incesta Hufn.
— Stabilis S. V.
— Gracilis S. V.
— Miniosa S. V.
— Munda $S. V.
Tæniocampa Cruda S. V.
Orthosia Ruticilla Esp.
— Lævis H.
Anchocelis Rufina L.
Cerastis Vaccinii L.
Scopolosoma Satelliria L.
Hoporina Croceago $. V.
Euperia Paleacea Esp.
Cosmia Trapezina L.
Dicycla Oo L.
Epunda Scoriacea Esp.
Agriopis Aprilina ]:. ;
Phlogophora Meticulosa L.
Hadena Occlusa H.
— Roboris B.
— Monochroma Esp.
— Saportæ B.
— Protea $. V.
— Æruginea H.
— Convergens S. V.-
Xylina Furcifera Hnfn.
— Ornithopus Hufn.
MOIS DE
OU L’ON
Chenilles
Quercus
Avril, mai (souches).
Mai, juin.
Septembre, octobre.
Mai.
Mai, juin.
Août à octobre.
Juillet.
Juin, juillet.
Mai.
Juin.
Mai, juin.
Juin.
Août, septembre.
Juin.
Juillet.
Mai, septembre.
Mai, juin.
Juin, septembre, oct.
Août, septembre.
Juillet, août.
Juin, octobre.
Mai, juin.
Août, septembre.
Juillet à septembre.
Juillet, août.
Juillet, sept., octobre.
Juillet, septembre.
Août à octobre.
Juin, septembre, oct.
Mai, juin.
Juin, juillet, sept.
Juin, septembre.
IAoût, septembre.
[Juin, septembre.
Juillet, août.
Mai, juin.
Septembre.
Juin à septembre.
Mai, juin.
Juin, juillet.
Mai, juin.
Mai.
Mai, juin.
Juin.
Mai, juin.
Mai.
Belle saison.
Mai.
Mai, juin.
Mai.
Juin.
Mai.
Juin.
Mai.
L'ANNÉE
TROUVE
Papillons
Juin.
Juin, juillet.
Juillet.
Juin, juillet.
Mai, juin.
Juin, juillet.
Avril, juin, juillet.
Avril, juillet.
Juillet, août.
Juin, juillet.
Juin, juillet.
Août.
Octobre, nov., déc.
Mai, septembre.
Soir bre octobre.
Juin, juillet.
Avril, mai.
Août.
Mars, avril.
Avril, mai, juillet, août.
Avril à juillet.
Avril, mai.
Avril à août.
Mai, juin.
Mai.
Avril à juin, août, sept.
Avril, mai.
Juin.
Avril à juin.
Mai, septembre.
Mai à juillet.
Mai, juin.
Avril, mai, septembre.
Août à octobre.
Mars, avril, août.
Avril, mai.
Mai, juin.
Mai, juillet, août.
Mai, juin.
Octobre, novembre.
Mai, juin.
Février, mars.
Mars, avril.
Octobre.
Septembre.
Août à octobre.
Oct. à janv., mars,avril.
Septembre, octobre.
Sept., oct., mars, avril
Juillet.
Juin, juillet.
Septembre, octobre.
Avril, sept., octobre.
Belle saison.
Octobre à décembre.
Octobre.
Août, septembre.
Octobre, novembre.
Septembre, octobre.
Septembre.
Août à octobre.
Sept., oct., Printemps.
Septembre à novembre,
mars, avril.
HABITAT
FRANCAIS
Toute la France,
Paris, Alsace, Autun.
Toute la France.
Doubs.
France méridionale, Autun.
Toute la France.
France méridionale.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
Toute la France,
Alsace, Aube.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France orientale.
Toute la France.
France sept., centr. et orient.
France méridionale.
France centrale et orientale.
France centr., septr. et orient.
Toute la France.
France orientale et occiden:.
Toute la France.
France mérid. Noirmoutiers,
Paris. Saône-et-Loire.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
Montpellier.
Toute la France.
France mérid., orient. et occid.
France centrale et occidentale.
France méridionale,
France méridionale et occid.
Toute la France.
Dauphiné, Charente.
France centr. et septentrionale.
Toute la France.
A EG EL EN AR EN BR RE SL PEINE RE RE RES RES RP RE
QE ————————————————É
POISSONS FOSSILES DES ENVIRONS DE PARIS
Depuis l’époque Silurienne jusqu’à nos jours, les mers
ont été peuplées de poissons. Ces poissons, d'abord eou-
verts d'écailles épaisses, comme nacrées,ont constitué la
classe des ganoides, qui étaient enfermés dans une
véritable carapace n'ayant que peu de squelette interne.
Mais peu à peu ce squelette s'est formé, d'abord les côtes,
puis les vertèbres; pendant cette évolntion, les armures
dermiques évoluent en sens contraire : formées d'abord
d'écailles solides, elles deviennent de plus en plus minces
pour former cette croûte écailleuse qui recouvre nos
poissons actuels.
Mais malgré le grand nombre de poissons qui devaient
vivre dans les mers anciennes, et les conditions où ils
étaient pour se conserver, toute bonne fossilisation
s'étant effectuée au sein des eaux, les restes de poissons
LE NATURALISTE
RL A CO TR ES à à
que les dents palatales de certains poissons, qui ont une
forme de sphère aplatie ou de haricot, prenaient le nom
de Buffonistes, Batrachites, pierres de crapaud ou yeux
de serpent,
Dans le tertiaire des environs de Paris, c’est surtout
dans les couches du calcaire grossier que l'on trouve les
empreintes de poissons, les couches sableuses ont donné
seulement des dents dé squales. Nous allons passer en
revue les principales espèces que l’on y trouve.
Dans l’Yprésien, représenté par les sables nummutiques
du Soissonnais, dont les sables de Cuise-la-Mothe forment
le gisement principal, on trouve une raie Milyobatides
Micropleurus, dont on rencontre les plaques dentaires
des mâchoires ; ce sont des lames plates formant sur les
cûtés une sorte de mosaique. On retrouve également des
restes de piquants, qui se trouvent derrière la nageoire
dorsale. Ce sont de grands piquants plats à la partie infé-
rieure, convexes en haut et pourvus de côtes longitudi-
nales, garnis de chaque côté d'une rangée de fortes épines
Poisson du genre Labrou, en calcaire grossier de Gentilly.
sont relativement rares. C'est que les débris de poissons
sont très fragiles, si les poissons ganoïdes se sont bien
conservés, grâce à leur carapace les protégeant contre:
les chocs des sédiments, et que la plupart se sont déposés
sur des argiles qui, par suite du métamorphisme, sont
devenues des schistes comme il y a lieu de le voir pour les
Paléoniscus du Permien d'Autun.
Mais apres l’époque primaire, les débris de poissons
deviennent plus rares. Déposés sur des sédiments cal-
caires, les ossements de poissons ont été détruits; c’est ce
qui est arrivé pour le calcaire grossier des environs de
Paris, où les débris de poissons sont rares et le plus
souvent mal conservés. Au contraire, des sédiments fins
ont souvent conservé des empreintes de poissons avec
tous leurs détails. C’est ainsi que l'Eocène de Monte-
Bolca, près de Vérone (Italie), offre des empreintes de
poissons fossiles de toute beauté.
Les”"débris de poissons ont de tout temps appelé l'at-
tention des naturalistes. Bernard de Palissy (1510-1589)
examina avec attention les débris de poissons qu'il avait
à sa disposition; c'était principalement des dents de
squales, et il leur donna leur véritable place, tandis que
d’autres naturalistes de son époque les considéraient
comme des jeux de la nature et leur donnaient le nom de
Glossopètres, langue de serpent, langue de vipère, tandis
recourbées en arrière. Le Sannoisien,ou étage du Gypse,
a donné deux epèces de poissons : le Smerdis ventralis
et le Sargus Cuvieri, qui ont été trouvés à Montmartre.
Le genre Smerdis est un genre éteint. Il était constitué
par de petits poissons à tête épaisse et à grande nageoire
caudale profondément divisée; ils habitaient les eaux
saumâtres. On en rencontre de très nombreux spécimens
dans les couches gypseuses de l’Oligocène d'Aix (Bouches-
du-Rhône).
Le genre Sargus est formé de poissons de la famille
des Sparidæ, de couleur bigarrée, à écailles cténoides,
finement dentelées, portant des dents en forme de pavés.
L'étage Luttéien, ou du calcaire grossier, a fourni la
plupart des poissons que l'on recueille aux environs de
Paris.
Le G.Labrax a fourni le Labrax Major, que l’on trouve
dans le calcaire grossier de Passy et de Sevres.
L'échantillon que nous représentons provient du cal-
caire grossier de Gentilly; c'étaient des poissons d'une
assez grande taille, celui représenté dans la figure ci-
contre mesure 48 centimètres de long sur 18 centimètres
de large. Ces poissons possèdent des dents dans tout
l'intérieur de la bouche, sur les mâchoires, le palatin, le
vomer et la langue.
Les individus actuels de cette espèce vivent sur les
LE NATURALISTE 265
côtes de l'Amérique et du nord de l'Europe. Les espèces
du G. Lates ont fourni le Lates Macrurus du calcaire
grossier de Sèvres; c’étaient des poissons acanthopté-
rygiens de la famille des Perches. Les espèces actuelles
vivent dans le Nil, le Gange et les côtes de l'Australie.
Le Dentex Fanjani a été trouvé à Nanterre; c’étaient
des espèces allongées assez grandes, dont il existe encore
de nombreuses espèces actuelles,
La famille des Squamipèdes renfermait des poissons
celles du Lamna, obliques ou droites ; il y a, en outre
de la grande pointe médiane à bords tranchants et lisses,
deux petites pointes accessoires. La racine est grande et
bilobée.
Si nous voulons nous faire une idée de la faune ichtyo-
logique des environs de Paris pendant l’époque Eocène,
nous pouvons considérer cette faune comme une
faune de mer chaude; les espèces vivantes que nous
pouvons mettre en parallèle avec les espèces fossiles
Carcharodon Otodus
appendiculatus
Oxyrhina Lamna
Vanieri elegans
Dent de squale du calcaire grossier.
pourvus de couleurs magnifiques, recouverts de petites
écailles cténoides et ayant les nageoires presque entière-
ment couvertes d'écailles. Un genre de cette famille, le
genre Holacanthus, a fourni l'Holocanthus macroce-
phalus, du calcaire grossir de Châtillon, Cette espèce est
recouverte d’écailles de moyenne taille, et porte à la
nageoire dorsale 12 à 15 piquants. Le G. Holacanthus
renferme, au moins, #0 espèces vivantes, qui habitent
principalement les mers chaudes, au voisinage des récifs
de coraux. À la même famille appartient le Macrostoma
altum (Ay),du calcaire grossier de Nanterre.
Le G. Hemyrunchus est représenté par l'Hemvrunchus
Deshayesi, dont l'espèce a été établie par Agassiz sur les
magnifiques empreintes trouvées à Nanterre, et qui sont
exposées dans le vestibule de la galerie de géologie du
Muséum. Ce sont des poissons allongés et déprimés,
comprimés latéralement, au museau étiré en un long
bec, à mâchoire édentée ou à denticules très petits, à na-
geoire dorsale courant tout le long du dos et à nageoire
anale courant de l’anus à la queue.
Dans les parties sableuses du calcaire grossier on trouve
principalement des dents de squales dont plusieurs genres
habitaient la mer Eocène, qui sont faciles à distinguer
par les caractères de leurs dents.
Le G. Oxyrhina possédait des dents étroites linguli-
formes, pointues sans denticules accessoires, à racine bien
développée et plus ou moins bilobée.
Le G. Lamna avait des dents étroites et pointues à
racine bilobée portant un côté convexe et un côté aplati
avec plus ou moins de stries ; l'animal portait comme les
requins actuels plusieurs rangées de dents les unes der-
rière les autres. Il renfermait les squales les plus grands
et les plus voraces.
Dans le G.Carcharodon, les dents sont excessivement
grandes, quelquefois comme le creux de la main, trian-
gulaires, à bords latéraux, uniformément dentelées, à
racine haute et échancrée vers le milieu.
Les dents de l'Otodus sont un peu plus larges que
habitent à l'heure actuelle l'océan Indo-Pacifique, la
mer Rouge, et pour la plus petite partie le bassin de la
Méditerranée.
E. MAssaT,
Attaché au Muséum.
LIVRES NOUVEAUX
Notre Globe, par E. Sur. — Voici un livre (1) comme il
en faudrait beaucoup. Sous son titre simple, que de choses il
comporte, et, dans sa rédaction soignée, quel charme de lecture
il nous offre! De chaque page on retire un enseignemeut, et l'on
peut dire hardiment que la science déployée dans NOTRE
GLOBE par M. Sieurin, loin de nous rebuter, nous attire,
Et qu'est ce volume au fond? Rien autre chose qu'un cours
complet de géographie. Mais combien la présentation de ce sujet
est différente de celle des ouvrages analogues! On sort de là,
possédant sur LA TERRE toutes les notions souhaitables sur
notre demeure; nous en pénétrons tous les recoins. L'Origine de
la Terre suit la description brillante de son relief, avec l'ex-
plication de tout ce qui a constitué ce dernier et agit encore sur
lui. La physique du globe s’y entreméle avec sa physiologie, si
l’on peut ainsi dire. Puis ce sont les mers, les côtes, les climats,
les eaux douces, fleuves et lacs qui défilent sous nos yeux
l'avis.
Après avoir ainsi dépeint notre habitat, M. Sieurin nous
expose, avec le même attrait, la vie qui s'agite à sa surface : la
flore, la faune et enfin l'homme, les races et les peuples. L'’au-
teur, s’élevant de plus en plus dans son exposé magistral, met
ainsi l’homme en face de la Nature; il nous explique l'influence
du milieu; les étapes de l’humanité à travers les £ges viennent
alors faire le pendant aux étapes mêmes de la formation ter-
restre. C’est l’action de l’homme sur la nature, la réaction de la
nature de l’homme. Nous assistons aux incessants progrès du
génie humain arrachant ses secrets à la Terre qu'il traduit en
applhcalions qui le font paraitre comme créateur à son tour.
Le volume s'achève sur un chapitre spécial qui excitera la
curiosité de chacun; il suffit d’en énoncer le titre : « L'AVENIR
DE LA TERRE ».
Nous avons du négliger de mentionner bien des chapitres suca
(1) L vol. br. avec gravures et cartes, franco 2 fr. 20. En vente
aux bureaux du Journal.
266
LE NATURALISTE
cessifs au cours desquels bien des matières sont traitées, où rien
n'est omis: c'est le guide le plus précieux que nous puissions
avoir pour connaitre notre planète; tout y est précis, positif et
attrayant. De nombreuses gravures et deux cartes en couleurs
viennent à l'appui du texte. é
Quiconque aura lu ce livre aura beaucoup appris, car il
s'adresse à tout le monde par son prix autant que par sa clarté
d'exposition. Ajoutons que le soin apporté à l'édition ajoute
encore à ce volume que nous voudrions voir dans toutes Îles
mains.
ACADÉMIE DES SCIENCES
Sur les échanges gazeux entre les plantes entières
et l'atmosphère (Th. Schlæsing fils).
L'auteur a étudié précédemment les échanges gazeux qui s’ac-
complissent entre l'atmosphère et des plantes entières, considé-
rées pendant une période étendue de leur existence. Dans ces
études, les plantes avaient toujours été alimentées, sous le rap-
port de l'azote, avec des nitrates. C'est là un mode d’alimenta-
tion très commun dans les champs cultivés. Mais, dans bien des
sols (sols de forêts, de landes, de prairies, etc.), la nitrification n'a
pas lieu, ou n’a lieu que fort incomplètement; les nitrates sont,
par suite, absents ou rares. Les échanges gazeux des plantes
avec l’atmosphère en sont-ils modifiés? M. Schlæsing a voulu
contribuer à résoudre cette question -en examinant le cas où l'on
n'offre aux plantes, comme source d'azote, qu’un sel ammonia-
cal. Il résulte des expériences qu'on constate d'abord (ce qu'on:
savait déjà) que les plantes sont capables de s'accommoder de
l'azote ammoniacal, à peu près comme de l'azote nitrique. Le
développement des sarrasins s’est trouvé sensiblement meilleur
avec l'azote nitrique; la différence a été en sens inverse pour
les capucines. Les teneurs en azote sont du même ordre pour les
diverses plantes. Comme dans tous les essais précédents, les
plantes entières ont dégagé en volume plus d'oxygène qu'elles
n’ont décomposé d'acide carbonique. Ce fait apparait de plus en
plus comme général, et il doit étre une condition nécessaire au
maintien d’une composition fixe de notre atmosphère; car la
destruction des matières végétales, opération inverse de la syn-
thèse des plantes, consomme plus d'oxygène qu'elle ne dégage
d'acide carbonique. L’excès d'oxygène dégagé sur l'acide car-
bonique absorbé tient en particulier à la réduction des sels
minéraux tirés du sol. Quand l’'ammoniaque remplace comme
aliment azoté l'acide azotique, on doit s’attendre à voir dimi-
nuer cet excès; on constate ici le fait expérimentalement; il est
méme arrivé que l'excès d'oxygène à été très faible. Ce qui
précède met en évidence que les échanges gazeux qui accom-
pagnent la formation de la matière végétale sont en relation
avec la composition minérale des dissolutions au contact des-
quelles vivent les racines.
Cas de transformation rapide de bois en une sub-
stance semblable à un combustible fossile (M. Garth).
Il s'agit d'un morceau de bois de gaïac parfaitement sain,
qui avait été placé au fond d'une gaine en bronze, pour servir
de-pivot à une turbine donnant 112 tours par minute. Sans être
immergé nullement dans l'eau, le pivot est toujours humide,
étant placé au-dessous des orifices par lesquels l’eau s'écoule.
Après six mois de marche, l'appareil fut démonté. Le bois de
gaïac fut trouvé parfaitement intact dans le bas, mais la partie
supérieure, sur laquelle reposait l'arbre de la turbine, était
transformée en une substance noire, fendillée, se brisant facile-
ment ea petits morceaux, présentant tout à fait l'apparence de
certains combustibles minéraux. Par sa composition, de même
que par ses propriétés, le produit noir se placerait entre Îles
lignites proprement dits et les houilles les plus récentes, riches
en oxygène, dont il se rapproche déjà par son pouvoir calori-
fique. Il est intéressant de remarquer le court cspace de temps
nécessité par cette transformation, évidemment effectuée sous
l'influence de la pression et d’une élévation modérée de tempéra-
ture (provoquée par le frottement) en présence de l'humidité,
c’està-dire sous l’action des agents qu'on a l'habitude de faire
intervenir pour expliquer la transformation progressive des ma-
tières ligneuses en lignite et en houille. Et il résulte de cette
constatation que, dans des circonstances bien favorables, le
temps nécessaire pour réaliser ces modifications est beaucoup
moindre qu'on ne l’admet généralement, et peut très bien ne pas
atteindre la durée des longues périodes géologiques dont il est
généralement question.
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Vosges de M. Silbermann. Comprenant 1.730°es-
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Cette collection, formée par M. Silbermann, a servi à
établir le catalogue des Coléoptères d'Alsace et des
Vosges que cet entomologiste à publié en collaboration
avec M. Wencker. L'état de conservation des insectes
est excellent; l'étiquetage, fait très soigneusement,
donne des noms rigoureusement exacts et des rensei-
gnements sur la rareté des sujets, ainsi que le nom des
plantes sur lesquelles se trouvent habituellement les
espèces. Des espaces laissés vacants permettent d'aug-
menter la collection sans lui faire subir de remaniements.
Le catalogue de Wencker et Silbermann accompagne la
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3
29e ANNÉE
SUR UN GISEMENT DE PLANTES FOSSILES
DE L’ARGILE PLASTIQUE
AUX ENVIRONS DE PARIS
Bien que les environs de Paris aient été, au point de
vue géologique et paléontologique, explorés d’une facon
remarquablement minutieuse, bien que des hommes
comme Cuvier et Brongniart, qui publièrent en 1810 une
description géologique des environs de Paris, d’une
grande précision, dans laquelle les couches sont décrites
dans leurs détails les plus intimes, et malgré les recherches
plus récentes d'un grand nombre de savants dont plu-
sieurs dirigent, avec un zèle infatigable, depuis de nom-
breuses années, des excursions publiques du plus haut
intérêt, il est encore possible au chercheur persévérant
de trouver à glaner après cette récolte cependant si riche
de faits et d'observations, car l’activité de la vie moderne,
Fig.1.— Ficus eoce- Fig. 2. — Ficus ortho-
nica, Wat. nervis. Wat.
l'extension toujours croissante de différentes industries
qui empruntent aux entrailles de la Terre leurs matières
premières, nécessitant ainsi la multiplication des tra-
vaux, il se trouve de ce fait que des localités qui, jus-
qu'ici, n'avaient offert qu'un intérêt médiocre ou nul, se
trouvent, par suite de l'ouverture de nouvelles exploita-
tions, prendre une importance toute particulière et
dévoiler aux yeux de l'observateur des trésors ines-
pérés.
Il arrive, en effet, bien souvent, qu’une couche offrant,
dans une localité connue, certains caractères, tant au
point de vue du facies que de sa richesse en fossiles ani-
maux Ou végétaux, en montre de tout différents dans un
autre Canton. ;
Telle couche est là dépourvue de débris organiques,
qui sera très fossilifère dans une localité plus ou moins
rapprochée : c'est le cas qui se présente pour le gisement
. d'argile plastique qui fait le sujet de cet article. Nous ne
Le Naluralisle, 46, rue du Rac, Paris.
2 SÉRIE — N° 330
1°" DÉCEMBRE 1900
saurions donc trop engager les personnes qui s'occupent
de géologie à ne négliger aucune occasion de visiter,
Fig. 3.— Ficus Deshayesi. Wat.
scruter avec soin, la plus petite carrière, l'exploitation la
moins intéressante en apparence
semblant au premier abord ne
devoir présenter qu'un intérêt
médiocre, car elle peut, dans
bien des cas, sion l’étudie avec
plus d'attention, offrir, contre .
toute attente, au chercheur con-
sciencieux des trouvailles qui le
récompenseront amplement de
ses peines.
Fig.4. — Artocarpidium conocephala. Fig. 5. — Laurus excel-
Sap. lens. Wat.
C'est ainsi qu'ayant eu l’occasion de passer quelques
jours dans une petite localité des environs deVillers-Cot-
268
LE NATURALISTE
terets et qu'herborisant dans les classiques prairies maré-
cageuses de Silly-la-Poterie, nos pas furent dirigés au
hasard de la promenade vers une carrière d’où l’on
extrayait de la glaise; à première vue, rien de bien par-
Fig. 6. — Laurus regularis. Fig. 1. — Persea parisien-
Wat. sis ? Wat.
ticulier ne signalait ce gisement à l'attention du géo-
logue, on y voyait la superposition habituelle du calcaire
grossier et de l'argile plastique avec une couche de glau-
conie sableuse à dents de squales et à polyp'ers sépa-
DE Fig. 8. — Persea Brongniarti. Wat.
rant ces deux formations; disposition que l’on peut voir
à Vaugirard, à Arcueil et dans bien d’autres localités de
nos environs; mais notre attention fut attirée par des
blocs d'argile desséchée laissés là par les ouvriers et sur
lesquels on pouvait distinguer des empreintes végétales
très nettes; en regardant avec plus d'attention et ayant
brisé quelques-uns de ces blocs d'argile, nous püûmes
nous rendre compte de la richesse inattendue de ce gise-
ment; on sait, en effet, que les débris végétaux sont des
raretés en général, et que dans l'argile plastique, bien
qu'ils y fussent signalés de longue date, leur état de con-
f
r
Fig. 10. — Autre Cinna-
momum.
Fig.9. — Cinnamo-
mum Larteti. Wat.
servation est fort défectueux et rend les déterminations
excessivement douteuses, souvent même impossibles.
C’est pourquoi nous croyons devoir attirer l'attention
des personnes qui s'intéressent à cet objet sur le gise-
ment de Silly-la-Poterie, gisement situé aux confins
mêmes de la forêt de Villers-Cotterets, au-dessus de la
gare de la localité précitée.
Nous devons dire par avance que les débris végétaux
Fig. 12. — Grewia suessonensis, |
Fig.11. — Aff.Andromeda. Wat.
rencontrés dans l'argile plastique l'ont été dans les :
bancs supérieurs de cette formation constituant les :
Fausses Glaises, ou dans les couches argileuses qui sup-
portent l'argile plastique et qui appartiennent à la forma.
LE NATURALISTE 269
tion du glomérat de Meudon, formation que l’on n’observe
que dans quelques localités privilégiées, ou bien encore
dans l'étage des lignites, si développé dans le départe-
ment de l'Aisne.
On connait bien la flore des lignites du Soissonnais
par les recherches de Wattelet, maisles végétaux décrits
par cet auteur provenant des grès qui surmontent les
lignites proprement dits, dont les bancs aujourd’hui
épuisés étaient exploités à Belleu et à Pernant, près
Soissons; ces végétaux étant, par la nature de la roche
encaissante, dans de mauvaises conditions de fossilisa-
tion, il se trouve que les espèces faites par Wattelet
d'après ces échantillons sont quelquefois hasardées.
Fig. 14. — Salix ind.
Fig. 13. — $Sterculia ind.
Dans le gisement de Silly, au contraire, les feuilles se
présentent dans un très bon état. Le parenchyme lui-
même existe encore sur bon nombre des échantillons;
par conséquent la détermination est plus facile ; de plus,
ce gisement représente un horizon d'âge relativement
plus ancien et qui vient se placer entre le conglomérat
de Meudon et les fausses glaises, c’est-à-dire au niveau
exactement de l’argile plastique proprement dite.
La flore du conglomérat de Meudon n’a pas été, à ce
que nous sachions, Pobjet d’une étude spéciale, mais elle
doit offrir les plus grandes analogies avec la flore de
Sézanne, si bien décrite par M. de Saporta.
C'est donc dans cette dernière, ainsi que dans la flore
des grès supérieurs aux lignites, que nous devrons re-
chercher les analogues de nos espèces de Silly-la-Pote-
rie, qui, pour nous, sont des jalons entre les deux flores
précitées.
Nous allons essayer, d’après les matériaux que nous
avons recueillis en quelques visites à ce gisement, de
donner une idée de la flore orthrocène de Silly. Nous
donnons ci-contre les figures des espèces les plus remar-
quables.
Les Morées sont représentées par les genres Ficus et
Artocarpidium, qui nous ont fourni, le premier, trois
espèces de Ficus eocenica Wat., le F. Orthonervis Wat.
et le beau F. Deshayesi du même auteur, et, le second,
deux seulement, l’Artocarpidium Desnoyersi de Wat. et
l'A. conocephala. sap. qui se retrouve à Sézanne.
Les Laurinées semblent être plus nombreuses ; nous
avons recueilli trois Laurus,deux Persea, trois Cinnamo-
mum, Parmiles premiers nous citerons Laurus belenen-
sis Wat., L. excellens Wat., et L. regularis Wat.; les
seconds sont le Persea parisiensis de Wat, et le second,
plus douteux, le P. Brongniarti, du même. Les cinna-
momum devaient être assez nombreux; nous en avons
recueilli trois, un peut être identifié sans aucun doute
au Cinnamomum Larteti Wat.;les deux autres pour
raient peut-être donner lieu à des espèces nouvelles.
Une autre empreinte nous a semblé appartenir à
l'espèce désignée par de Saporta sous le nom de Magno-
lia inæqualis.
Enfin, nous citerons encore les genres Grerovia, Ster-
culia et Juglans, ainsi que le genre Salix dont nous
n'avons rencontré qu'un échantillon incomplet; nous
Fig. 15. — Magnolia inæqualis. Sap.
citerons enfin une fougère qui nous a paru appartenir à
Asplenium Wiegmanni, de Sézanne.
Par la liste précédente on peut se rendre compte que
c’est dans la flore des grès de Belleu que nous trouvons
le plus d'analogues aux espèces de Silly; celles qui peu-
vent être rapportées à des types de Sézanne sont beau:
coup moins nombreuses; il est vrai de dire, cependant,
que ces rapports changeraient sans doute si les espèces
du gisement de Silly étaient connues en plus grand
nombre.
Cette florule indique qu'un climat chaud et humide
devait prévaloir dans nos environs à l'époque de l'argile
plastique où la végétation était encore for: luxuriante,
bien qu'en général les formes soient moins amples que
celles conservées dans les tufs de Sézanne.
Nous ferons remarquer à ce sujet les différences qui
ont dù se produire dans les conditions climatériques
entre l’époque de l'argile plastique et celle du calcaire
grossier dont les végétaux sont tous de tailles fort exi-
guës et dénotent, suivant de Saporta, un climat très
chaud et fort sec.
Comme on peut le voir par ce qui précède, le gisement
de Silly-la-Poterie est fort intéressant et il n’est pas
270
LE NATURALISTE
douteux que des recherches attentives faites dans la
même région ne procurassent des faits intéressants et
nouveaux pour la Paléophylotogie, science malheureuse-
ment trop délaissée chez nous des personnes qui s'inté-
ressent aux études d'histoire naturelle.
Paris, 12 octobre 1900.
P.-H. FRITEL,
Attaché au Muséum de Paris.
L'EAU NATURELLE
Il est curieux de voir qu'une foule de personnes instruites se
figurent que l’eau n’est qu'une simple combinaison d'oxygène et
d'hydrogène, sans avoir seulement l'air de se douter que l’eau
naturelle n’est pas plus de l’eau chimiquement pure que le pain
n’est de la farine. Pour un peu elles diraient que l’eau est inco-
lore parce que l'oxygène et l'hydrogène le sont!
Et cependant l'eau renferme mille et mille autres choses
encore, sous une foule de formes, animées ou non. Ainsi elle
renferme des gaz, et quelquefois beaucoup. Par exemple, nos
eaux minérales de Vals renferment bien souvent plus de gaz
acide carbonique que d’eau. Elles peuvent renfermer 3, 4, 5 fois
leur volume de gaz, et plus encore. Indépendamment de ce gaz,
il yen a d’autres tels que ceux que l'on trouve dans l'air ou
dans le sein de la terre, tels que l'oxygène, l'azote, l'argon,
l'acide sulfureux, l'acide sulphydrique, etc., suivant les sources :
Barèges, par exemple; Bagnols contient particulièrement de
l'azote, en fait de gaz dissous, et nous avons la conviction que
l’on y découvrira de l’argon, quand on voudra se donner la
peine de l’y chercher. Les eaux de Bagnols de l'Orne sont
d'autant plus intéressantes qu'elles renferment de la gélose et
de la silice en quantité notable, provenant des algues d’eau
douce. La faible quantité de principes sulfureux qui les minéra-
lisent est justement due à l'action des algues sur les sulfates
des terrains qu'elles décomposent.
Du reste, dans une foule d’endroits, là où il y a des sulfates
de chaux, on obtient une eau minérale sulfureuse à l’aide des
algues qui y vivent. Les algues peuvent faire des eaux sulfu-
reuses, comme les ferments fabriquent du vinaigre ou de l’alcool,
tandis que jamais les champignons n’agissent ainsi, parce
qu'ils mourraient dans un milieu rempli de soufre, résultant du
produit de leurs décompositions. Les naturalistes savent tous
que l'eau renferme une infinité d'animaux et de plantes de toute
espèce. Ces plantes sont généralement des algues; mais il faut
bien savoir qu’il y a un petit nombre de familles de champi-
gnons capables de vivre dans l’eau: ce sont nécessairement des
champignons d'ordre inférieur. Citons entre autres quelques
Chytridinées, les Saprolégniées, etc. Nous classons aussi parmi
les champignons ces êtres singuliers que l'on avait pris pour des
animaux, des monades, connus sous les noms de Monas vinosa,
Clathrocystis, Bacterium rubescens, elc., qui sont tellement
voisins des algues que le professeur Marchand les a toujours
classés dans ce groupe, pendant que Baillon m'écrivait, encore
avant de mourir, que c'étaient des animaux! Et cependant ce
sont bien des champignons; car ils se comportent comme tels,
malgré leur pigment rouge, qui leur donne un faux air d’algues.
Par exemple, nous émettons une hypothèse quand nous admet-
tons que leur pigment rouge, identique à la phyco-érythrine,
leur a été donné pour leur permettre de vivre dans un milieu
aquatique, chargé de produits sulfureux dus à la décomposition
des sulfates par les algues d'eau douce. Ce sont ces champignons
qui colorent en rouge de sang, en rouge vineux toncé, le fonds de
nos étangs ou des fossés des fortifications anciennes. Nos
ancêtres considéraient comme des présages funestes cette trans-
formation curieuse, qui produit des eaux ensanglantées, dont
tout le sang se serait déposé au fond, sur les feuilles immergées
et tous les débris aquatiques confondus dans la vase. Ce qu'il y
de certain, c'est que les eanx de la porte du Huez, à Noyon
(porte du faubourg du Gué), furent ainsi ensanglantées,
quelques semaines avant la destruction de cette ville par les
Espagnols, qui pénétrèrent justement par cette porte. Mais
hâtons-nous de rassurer nos lecteurs, en leur disant que nous
avons vu de superbes exemples analogues, sans qu’il soit jamais
arrivé de sinistres à la suite. Un sceptique dirait que les dieux
s’en vont! La vérité est qu'il ne faut pas faire intervenir à
chaque instant le Créateur de l'univers dans les actes qui se
passent normalement dans la nature. Il lui a donné des lois,
qu'elle suit imperturbablement, et que l'homme s'applique à
étudier, afin d’en tirer profit, s’il y a moyen. Nous croyons
qu'un jour on pourra faire des eaux sulfureuses naturelles,
comme on fait de l'alcool, avec des algues d’eau douce et des
sulfates alcalins.
Mais une autre classe. de substances contenues dans l’eau
naturelle, ce sont les sels dissous, et notamment les carbonates
alcalins, qui ont une si grande importance à tant de points de vue.
Laissant de côté les eaux alcalines, dont Vichy est le type bien
connu, nous dirons que nos eaux de table en général contiennent
des carbonates de potasse et de soude en dissolution, et que ces
carbonates nous rendent les plus grands services, tant dans le
lavage du linge que dans la cuisson des légumes, tant pour les
bains de propreté que pour faciliter la digestion. L’eau distillée
est lourde et indigeste, tandis qu’une eau alcaline est légère à
l'estomac; d'autant plus qu'elle contient de l’acide carbonique en
excès, pour transformer les carbonates alcalins en bicarbonates
solubles. Il n’y a que le carbonate de chaux qui soit mauvais,
dans nos eaux de sources ; et on va bien vite comprendre pour-
quoi. Les légumes, tels que les haricots, les pois, les lentilles,
les fèves, etc., contiennent une huile en petite quantité, qui est
saponifiée par les alcalins, comme toutes les graisses possibles;
de sorte que ces légumes durcissent quand leurs acides gras
sont saponifiés par du carbonate de chaux, qui forme un savon
insoluble; tandis que les carbonates de soude et de potasse
forment des composés solubles avec ces mêmes principes hui-
leux.
Il est même bien probable que, si l’impératrice Elisabeth
d'Autriche prenait des bains d’eau distillée, c'était bien moins
pour écarter des microbes imaginaires que pour purifier des
eaux chargées de carbonate de chaux. En effet, c'eût été une
faute de distiller des eaux de bonne qualité pour prendre un
bain de propreté, attendu que ces eaux renferment des carbo-
nates de potasse et de soude, qui forment, avec les corps gras
sécrétés sur la peau par nos glandes sébacées, des savons
solubles, qui la nettoient exactement comme le ferait le meilleur
savon naturel! Faire distiller une bonne eau de source pour
prendre un bain, c'est retirer à cette eau les principes excel-
lents qu'elle contenait pour laver notre corps d’une facon com-
plète. En effet, la matière sébacée est attaquée par les alcalis,
qui s'emparent de ses acides et mettent sa glycérine en liberté.
Les alcalis forment, avec les acides gras, des savons solubles
qui se répandent, avec la glycérine qui en résulte, dans l’eau du
bain. Sans eux, on serait obligé de se laver le corps à grand
renfort de savons, trop souvent irritants pour notre peau.
D: Boucox.
MINÉRAUX NOUVEAUX
A la fin de l’article sur les minéraux nouveaux du
Groënland (1), quatre autres espèces nouvelles ont été
mentionnées. Leur composition est très complexe, à
l'exception de celle de la schizolite.
La schizolite se présente en colonnes prismatiques,dont
la couleur varie du rose au brun, par suite de l’altération
plus ou moins profonde du minéral, Elle est demi-trans-
parente et cristallise dans le système monoclinique. Les
cristaux sont allongés suivant l’arête selon laquelle se
rencontrent la base du prisme et la face produite par
troncature sur l’arête À. Il existe un clivage facile paral-
lèlement à la base p et à Al.
La densité est de 3,089 et la dureté un peu inférieure
à celle de l'orthose.
Le plan des axes optiques est dans le plan de symétrie.
La biréfringence est assez forte et l'angle des axes op-
tiques 2E est de 82°40° pour la lumière du sodium.
PANNES PTE EC APE R EEE SERRES
(4) N° du 1°r nov. 1900.
LE NATURALISTE 271
L'analyse a donné les résultats suivants : silice, 51,06;
acide titanique, 0,68; oxyde de cérium, 1,47; protoxyde
de fer, 2,79; protoxyde de manganèse, 12,90; chaux,
19,48 ; soude, 10,71; eau, 1,36. Total, 100,45.
La formule 15 (Si, Ti) 02,10 (Ca, Mn, Fe, Ce)O,4(Na,H)20
représente ces résultats,
C'est donc une pectolite manganésifère.
La chalcolamprite se présente toujours en petits cris-
taux octaédriques. dont les plus gros ont 5m de côté.
Ils ont souvent des fentes remplies d’aiguilles très fines
d'œgyrine, Leur couleur est gris foncé inclinant sur le
rouge. Les faces possèdent l'éclat métallique et offrent
des irisations rouge de cuivre et vertes. L'éclat est gras
sur la cassure. Opaque et translucide en écailles très
minces. Pas de clivages.
La densité est 3,75 et la dureté intermédiaire entre
celle de l’apatite et celle du feldspath.
La composition, qui esttrès complexe, est la suivante :
acide niobique, 59,65; silice, 10,86; acide titanique, 0,52;
zircone, 5,71; sesquioxyde de cérium, 3,41; sesquioxyde
de fer, 1,87; protoxyde de manganèse, 0,44; chaux, 9,08;
potasse, 0,38; soude, 3,99; eau, 1,79; fluor, 3.
La formule empirique
R'Nb?O6F2 + R'S103
représente les résultats de l'analyse. R” désigne les mé-
taux Ce, Fe, Mn, Ca, etc. Ce minéral appartient par con-
séquent au groupe du pyrochlore.
L'endéiolite est assez voisine du minéral précédent;
elle se montre aussi en octaèdres réguliers, implantés
sur des cristaux d’œgyrine sur lesquels ils sont fixés par
leur face octaédrique. La couleur est brun chocolat, et
celle de la poussière est gris jaunâtre. En lamelles très
minces l'endéiolite est un peu transparente et possède
alors une couleur rougeâtre. L’éclat est métallique. La
macle suivant la face de l’octaèdre {macle des spinelles),
qui n'existe pas dans les autres minéraux du groupe du
pyrochlore, est assez fréquente dans l’endéiolite. Il
n'existe pas de clivages.
La densité est de 3,44 et la dureté est à peu près égale
à celle de la fluorine.
La composition est la suivante : acide niobique, 59,93;
silice, 11,48; acide titanique, 0,76; zircone, 3,78; ses-
quioxyde de cérium, 4,43; sesquioxyde de fer, 2,81;
protoxyde de manganèse, 0,37; chaux, 7,89; potasse, 0,43;
soude, 3,58; eau, 4,14; fluor, 0,29.
La formule R'Nb?O6(HO)+ R"SiO# représente cette
composition et indique que l’endéiolite appartient comme
l'espèce précédente au groupe du pyrochlore.
La britholite appartient au système orthorhombique.
Par suite de l’existence de macles identiques à celles de
l’aragonite, les cristaux se présentent en prismes hexa-
gonaux. Ceux-ci sont formés de six individus dont les
plans des axes optiques se coupent suivant l’axe vertical
du prisme hexagonal. Pas de clivages.
Ja couleur est brune et les cristaux sont opaques,
Biréfringence faible, Cristaux optiquement négatifs.
Bissectrice aiguë parallèle à l'axe vertical, Plan des axes
optiques dans g!'. Angle des axes optiques petit.
La densité est de 4,446 et la dureté un peu moindre
que celle de l’orthose.
L'analyse a donné les résultats suivants : silice, 16,77 ;
acide phosphorique, 6,48; sesquioxydes de cérium, de
lanthane et de didyme, 60,54; sesquioxyde de fer, 0,43;
chaux, 11,28; magnésie, 0,13; soude, 1,85;
fluor, 1,33.
En supposant que l'acide phosphorique est combiné
avec le cérium, comme dans la monazite et le fluor avec
le sodium, on est conduit à la formule très complexe
3 [4S102,2(Ce, La, Di, Fe)*O3, 3(Ca, Mg) OI, O,NaF1,
eau, 1,275
2 [P20ÿ, Ce20i]
M. Flink a aussi rencontré un grand nombre d’autres
minéraux renfermant des terres rares, et en particulier
la parisite qui a une apparence, des propriétés physiques
et une composition un peu différentes de celles de la
parisite de Muso. Elle est plus réfringente, plus légère
(densité, 4,302 au lieu de 4,355). La composition de la
parisite de Nasarsuk (Groënland) est représentée par la
formule CeFCaC?206, alors que celle du même minéral
de Muso correspond à CeF?CaC30.
L’apatite yttrifère est aussi intéressante. Elle contient
3,36 d'yttria et 1,52 d'oxyde de cérium. Les cristaux
sont toujours très petits, et c’est à peine s'ils atteignent
1 millimètre, P. GAUBERT.
LES RACES DE MADAGASCAR
A l'Exposition universelle de 1900, à l'exposition de
Madagascar, existait un détachement réunissant la plu-
part des races habitant la colonie et se composant
comme suit : =
1° Hovas. —-Ce sont eux qui forment la race la plus
intelligente de Madagascar. Leur domination s’exerçait
sur une grande partie de l'ile et c'est contre leur hégé-
monie qu'a été dirigée l'expédition de 1895. Ils occupent
la province de l’Imerina dont le chef-lieu, Tananarive,
était la résidence de Ja reine, comme il est maintenant
le siège du gouvernement général.
2 Betsileo. — Les Betsileo sont aussi intelligents que
les Hovas, mais de nature moins résistante. Ils habitent
le sud du massif central dont la ville principale est Fiana-
rantsoa. Ils se livrent surtout aux travaux de culture et
au tissage des soies.
30 Siahanaka. — Les Siahanaka sont peu nombreux.
La contrée qu'ils habitent au nord du massif central, en
remontant sur Diego-Suarez, estmarécageuse etmalsaine,
Ils s'occupent de pêche et un peu d'élevage.
40 Tankarana. — Ce sont les habitants de la pointe
nord de l'ile. Ils sont denuis de longues années en contact
avec la civilisation et gardent dans la langue, les mœurs
et même le costume, les traces de l'influence laissée par
la colonisation arabe. Ils sont plutôt mous et paresseux.
3° Sakalava du nord-ouest, — Ces habitants sont aussi
très civilisés. Leur principale occupation :st la pêche.
Beaucoup d'hommes s'engagent sur les bâtiments de
guerre ou de la marine marchande. Les femmes s’occu-
pent à des travaux de vannerie. Cette population est
plutôt de mœurs dissolues.
6o Sakalava de l’ouest. — Autant les Sakalava du
nord-ouest subissent volontiers l'influence de l'Européen,
autant les Sakalava de l’ouest y sont rebelles, D’un
naturel sauvage et nomade, ils ont résisté contre nous
avec un acharnement dont on n'est venu à bout qu'après
de nombreux etsanglants combats. Aujourd’hui la région
qu'ils occupent est tout à fait calme, mais nécessite
toutefois que le vainqueur se tienne en éveil.
70 Mahafaiy. — Population occupant les vastes contrées
du sud-ouest de Madagascar, dont le centre est le port
de Tuléar. Notre installation n’est pas encore complète
dans la région et les habitants nous en sont peu connus.
Le caoutchouc s’y trouve en grande quantité.
8° Tanosy. — Les Tanosy habitent la région du sud-
est, dont la capitale est Port-Dauphiu. Ils sont, par tradi-
tion, une popalation guerrière; leurs ancêtres ont lutté
au dix-septième siècle contre notre influence, représentée
alors par Flacourt. Ils sont Jen outre bons cultivateurs.
99 Taimorona. — Ce sont des descendants directs des
Arabes. Ils occupent la côte Est, et leur capitale est
Farafangana. Travailleurs, et volontiers nomades, ils
quittent facilement leur province pour s’employer aux
travaux des routes.
10° Betsimisaraka, — Race qui s’affaiblit et décroit de
jour en jour par l’abus des alcools. Les Betsimisaraka,
qui occupent tout le reste de la côte Est, sont à la fois
pêcheurs et bücherons, suivant que leur caractère nomade
les pousse à la côte ou dans la forêt. Ils devraient vivre
heureux et prospères grâce à la fertulité de leur sol, mais
ils sont minés par leur vice d’ivrognerie qui les rend
paresseux.
119 Tambahoaka. — Petit groupe d'habitants de la
grande ile qui se sont constitué un petit fief autour de
Mananjary. Ce sont des métis provenant de l’émigration
arabe la plus récente.
IA CŒAIILILE
DANS LE DÉPARTEMENT DE LORNE
Cet oiseau, qui séjourne chez nous d'avril à septembre,
y est beaucoup moins abondant qu'autrefois, et d'année
en année les chasseurs en constatent avec regret la
diminution, M. Paul Noël vient d’en indiquer la cause :
le braconnage effréné dans le midi de la France; il aurait
pu ajouter en Italie, en Espagne et sur tout le littoral de
la Méditerranée. (E. OUSTALET : La protection des
Oiseaux, p. 25.)
Mais voici sur la dispersion actuelle des Cailles, dans
le département de l'Orne, un fait bien observé et qui
pourrait expliquer pourquoi elles sont aujourd'hui très
rares, où même inconnues, sur beaucoup de points de
la Normandie.
On n’en voit plus dans le Pays d’Auge, et elles restent
encore relativement assez communes dans les grandes
plaines du centre du département, à Alencon, Sées,
Argentan.
Quelle en est la cause ? Je l’attribue aux modifications
apportées dans les cultures depuis près de vingt-cinq ans.
Pour des raisons d'intérêt bien compris, les cultivateurs
ont à peu près complètement délaissé les céréales et
transformé leurs champs en prairies ou en herbages,
tandis que dans nos plaines on fait toujours du blé, de
l'orge, de l’avoine et du sarrasin. Or, c’est là surtout que
les Cailles se plaisent; elles nichent rarement ailleurs
que dans les blés; aux mois d'août et de septembre, elles
cherchent dans les chaumes et les sarrasins un lieu de
refuge et les graines dont elles sont friandes. Aussi
n'est-il pas surprenant que ces oiseaux aient déserté une
contrée ne leur offrant plus ni l'habitat qui leur con-
vient, ni l'alimentation qui leur est nécessaire.
|
LE NATURALISTE
Dès le siècle dernier, notre vicil auteur Magné de
Marolles avait fait des observations analogues sur le
Râle de Genêt aux environs de Carrouges. De vastes
genétraies ayant été défrichées et remplacées par des
champs de sarrasin, les Râles s’éloignèrent d’un canton
où ils ne trouvaient plus leurs retraites préférées.
A.-L. LETACQ.
Un champignon rose vénéneux
DE FRANCE (!)
Les empoisonnements par les champignons sont assez
fréquemment observés pour qu'on signale à l'attention
des cultivateurs une espèce de champignon rose dont
la confusion avec le champignon de couche peut amener
des accidents sérieux.
Il s'agit du stropharia coronilla, sur la comestibilité
duquel Ja plupart des flores sont muettes. Ce crypto-
game doit être classé parmi les champignons dangereux.
Bien que sa toxicité soit loin d'égaler celle des amanites
vénéneuses, elle est cependant suffisante pour le faire
rejeter des espèces comestibles.
Le stropharia coronilla ne peut être confondu qu'avec
le champignon rose ou psalliota campestris, dont il se
distingue assez facilement par la teinte vineuse des
lames ou feuillets, par l’adhérence assez tenace du pied
au chapeau qui empêche la séparation de celui-ci sans
déchirure des lames,contrairement à ce quise passe dans
le « vrai rose »; enfin, par la teinte ocracée du chapeau.
De plus, quand on coupe le stropharia, sa chair jaunit
légèrement, tandis que la chair du vrai champignon rose
tend à prendre le rose même des feuillets.
Voici, d’ailleurs, en regard, les divers caractères qui
permettent de différencier le « vrai rose », ou psalliota
campestris, du « faux rose », ou sfropharia coronilla :
PSALLIOTA CAMPESTRIS
blanc, ou blanc grisätre, blanc
ocracé, finement poilu, non
visqueux; diamètre variable,
pouvant atteindre d'assez
grandes dimensions. $
STROPHARIA CORONILIA
Chapeau jaune ou fauve, ou
jaune citrin pâle, quelque-
fois peu accentué au centre
avec périphérie blanche-gla-
bre, légèrement visqueux par
les temps humides. Son dia-
mètre varie de 3 à 5 centi-
mètres.
Pied pourvu d'un anneau blanc
généralement à stries viola-
cées fines.
Pied court, ne dépassant pas le
diamètre du chapeau.
pourvu d’un anneau bianc sans
stries violettes.
court, ne dépassant pas généra-
lement le diamètre du cha-
peau.
Pied blanc, légèrement et brus-
quement rétréci au-dessus de
l'anneau plutôt gréle.
Lames blanches, puis d’un rose
vineux ou roses violacées,
puis brunes violacées, jamais
franchement roses, devenant
en vieillissant brunes viola-
cées.
Lames adhérentes au pied qui
est difficilement séparable du
chapeau.
Lames. — Sont ordinairement
disposées en rayons incurvés
dans le même sens, du pied
à la périphérie.
Chair blanche, tendant à jau-
nir.
blanc, uniforme dans son dia-
mètre, ou du moins ne pré-
sentant pas de rétrécissement
brusque marqué, plutôt évais.
franchement roses (le rose peut
être plus ou moins accentué),
devenant en vieillissant brun
pourpre.
libres, c’est-à-dire non adhé-
rentes au pied qui est facile-
ment séparable du chapeau.
sont rectilignes, ou à peu près,
du pied à la périphérie.
blanche, tendant à se colorer
en rose.
(4) Communication du Ministère de l’agriculture,
LE NATURALISTE 213
APERÇU
SUR LA FLORE DU SÉNÉGAL ET DU SOUDAN
Par les épaisses forêts de la Casamance, de la Bagoé
et de la Volta, la flore du Sénégal se rattache à la zone
des forêts de la région équatoriale de l'Afrique ; par les
plaines sablonneuse et les dunes arides du Nord, elle se
lie à la flore désertique du Sahara.
À part les vallées de l'extrême sud de la colonie qui
conservent toute l’année leurs frais bouquets de palmiers
et de bambous, leurs forêts épaisses et verdoyantes aux
arbres séculaires, couverts d’orchidées et enlacés de
lianes, l'aspect général du pays est monotone et parfois
désolé pendantles six mois de la saison sèche. Des arbres
isolés, donnant une ombre légère, ou même dépourvus
de feuilles une partie de l’année, de petits buissons
épineux, quelquefois de maigres lianes aux branches
tortueuses, par places de monstrueux baobabs ou de
gigantesques ficus, des herbes sèches brûlées en beaucoup
d'endroits par les incendies de la brousse dont les lueurs
s’apercoivent de tous côtés la nuit, puis des nappes de
latérite, formant de vastes plateaux ferrugineux dénudés,
des espaces sablonneux également dépourvus d'arbres,
telle est la physionomie du Sénégal et du Soudan pen-
dant une partie de l’année.
À l’arrivée des premières pluies, en mai, au sud de la
colonie, en juillet dans l'extrême-nord, l'aspect du
paysage change immédiatement. La brousse se couvre
de graminées et s'émaille de fleurs appartenant surtout
aux familles des composées et des légumineuses ; de bril-
lantes orchidées terrestres, des aroïdes bizarres, de
Jolies plantes bulbeuses comme le crinum, d’éclatants
phryniums, des commélinées fragiles, fleurissent dans les
endroits ombragés dépourvus d'herbe, Les arbres se cou-
-vrent de nouvelles feuilles ; les fourrés de lianes sont
embaumés par les fleurs du sala ou fausse liane à caout-
chouc (Landolphia senegalensis) qui existe un peu partout,
L'indigène, indolent le reste du temps, travaille avec
activité; les chamy:, incultes une partie de l’année, sont
ensemencés et les curéales s’y développent avec une rapi-
dité prodigieuse,
En novembre, après l’hivernage, la plupart des herbes
se dessèchent ; beaucoup d'arbres perdent leurs feuilles
et achèvent de mürir leurs fruits, tandis qu’un acacia en
forme de parasol, le « Kade » (Acacia albida), qui, en
beaucoup d’endroits, forme le fond de la végétation, se
couvre de feuilles et de fleurs et constitue ainsi l’une des
nombreuses bizarreries de la flore de ces pays ; puis, la
nature reprend pour six mois encore son aspect brülé,
aride, désolé.
C'est pourtant cette saison sèche, durant les trois
premiers mois surtout, qui est la plus favorable à l'Euro-
péen. C'est celle où les grands produits, le caoutchouc,
l’arachide, la gomme, les palmistes, arrivent à nos comp-
toirs ; c'est aussi celle où nos plantes d'Europe exilées,
nos légumes de France se développent le plus vigoureu-
sement, quand on les arrose avec soin, et apportent un
appoint agréable à la nourriture du colon africain.
Il n’y à qu’une seule liane à caoutchouc depuis la côte
de la Sénégambie jusqu'à l'extrémité orientale de nos
possessions de la Haute-Volta. Cette liane est le Landol-
phia Heudelotti A. D. C., appelé toll au Sénégal, goïine au
Soudan.
Un arabe du littoral de la Sénégambie et de la Casa-
mance, le Ficus Vogelii Hook ou dob, est également
exploité, mais il ne fournit qu'un caoutchouc de qualité
inférieure.
Des expériences faites sur le latex d'une quinzaine
d'arbres ont donné des résines ayant parfois l'aspect des
guttas, mais n’en possédant pas toutes les propriétés.
Quelques-unes donnent du caoutchouc en assez grande
quantité et pourraient être utilisées dans les industries
qui n’exigent pas une substance élastique de première
qualité.
L'arachide, ou pistache de terre, constitue une des
richesses du Sénégal ; mais ce n’est pas la seule plante
donnant des matières grasses que l’on puisse exploiter.
Dans tout le Soudan moyen, on rencontre en très
grande abondance le karité ou arbre à beurre qui fournit
une graine végétale employée par les indigènes pour la
préparation de tous les mets. Son fruit ressemble à un
marron.
On a cultivé autrefois, en vue de l'exportation, le pour-
guère ou pignon d'Inde et le béref ou pastèque, qui
réussit bien.
On pourrait cultiver en beaucoup d’endroits le ricin et
les sésames.
On achète encore en Casamance les noix palmistes,
graines du palmier à huile (Elæis guineensis), dont les
régimes incisés à la base donnent le vin de palme et dont
le gros bourgeon terminal constitue un bon chou palmiste.
Les autres végétaux donnant des graines oléagineuses
sont : l’owala (Pentaclethra macrophylla Benth), bel arbre
de Casamance ; le mana (Lophira alata), dont le feuillage
ressemble à celui du karité.
Les bonnes gommes sont fournies uniquement par
l’'Acacia vereeck Guill et Perr, arbre très commun dans
tout le nord de nos possessions, depuis le Cayor et le
Sahel des Trarzas jusque bien à l’est de Tombouctou.
Les autres sécrétions gommeuses qu'on y mélange dé-
précient la qualité des gommes arabiques.
Nombreux sont les arbres du Sénégal qui laissent
exsuder de la gomme lorsqu'ils sont blessés ; on peut citer
presque toutes les légumineuses arborescentes, les mal-
vacées térébinthacées, les méliacées, etc.
Ces gommes ont des propriétés diverses. Les unes sont
presque insolubles dans l’eau et inodores, d'autres con-
tiennent des résines odorantes comme l'albarcante ou
myrrhe de Tombouctou. Il en est qui ressemblent à la
gomme adragante, d’autres ont l'aspect des gommes
copal, plusieurs pourraient probablement recevoir une
utilisation industrielle,
Le cotonnier serait rémunérateur au Sénégal et son
produit susceptible d'exportation si l’on constituait une
race bien adaptée au pays et à soie uniforme.
Ce résultat pourra être obtenu en sélectionnant les
cotonniers du Niger moyen du groupe Gossypium hirsutumn
ou en les hybridant avec les cotonniers du groupe Gos-
sypium barbadense qui semblent bien s'acchimater sur le
littoral du Sénégal.
De nombreuses plantes à filasse existent dans le pays.
Ce sont surtout des malvacées, des légumineuses, des
tiliacées ; le jute est cultivé en plusieurs endroits et
jusque dans les terres alluvionnaires de la région de
Tombouctou où il réussit bien, mais jusqu'à présent on
274
s’est contenté d'en manger les feuilles en guise d'épi-
nards.
Les Indigofera ou plantes à indigo sont nombreux au
-Sénégal et au Soudan et deux espèces sont cultivées
autour de chaque village pour l'usage tinctorial, Il faut
surtout remarquer le Lonchocarpus cyanescens où caraba,
grande liane qui croît de la Casamance au Gabon et dans
tout le sud du Soudan et qui fournit un indigo très appré-
cié des noirs.
D'autres végétaux du Sénégal donnent des couleurs
rouges, jaunes, noires, utilisées par les indigènes.
Il existe quelques petites plantations de canne à sucre
(Saccharum officinarum L.) dans la presqu'ile du Cap-Vert
et en basse Casamance. Les plantes viennent bien et
sont utilisées par les indigènes, qui en sucent le suc.
Cette culture pourrait être faite sur une vaste échelle en
beaucoup de points de la colonie, en Casamance, dans la
Volta, dans l’ancien pays de Samory, etc.
Le sorgho à sucre (Andropogon saccharatus Brot.) se
cultive dans la vallée du Niger, où l’on rencontre égale-
ment une plante, le bourgou, qui sert à fabriquer une
boisson sucrée très appréciée à Tombouctou.
C’est une véritable canne à sucre aquatique qui croît à
l'état sauvage en telle abondance qu’elle est parfois un
obstacle pour la navigation au moment de l'hivernage et
dont les indigènes tirent une mélasse et même un sucre
grossier.
L'industrie pourrait trouver là une matière première
venant sans culture en extrême abondance, et le sucre
obtenu serait facile à écouler chez les populations de
PAfrique centrale.
Le tabac réussit surtout dans la vallée du moyen Niger.
Il est très recherché des indigènes du Soudan, hommes
et femmes, qui le fument, le prisent et le mâchent.
Les céréales sont représentées par le mil, constituant,
lorsqu'il est pilé, le couscous, qui forme la base de la
nourriture du noir dans l'Afrique occidentale ; le millet,
le fonio, le riz, qui se cultive surtout en Casamance,
dans le sud des anciens Etats de Samory et dans la vallée
du Niger, près des lacs de la région de Tombouctou ; le
mais, cultivé principalement autour des habitations ; le
blé et l'orge, que l'on rencontre en petite quantité dans
la région Nord.
Comme plantes à tubercules, on peut citer le manioc,
divers ignames, les patates, dont le goût sucré fatigue
vite les Européens, les colacases ou choux caraibes,
l'oignon, l'ail et un certain nombre de plantes sauvages.
Il existe enfin un grand nombre de plantes médicinales
ou toxiques.
LA CONSERVATION DES CHENILLES
EN COLLECTION
S'il est intéressant de posséder une collection d'insectes
parfaits, il est certainement beaucoup plus intéressant
encore au point de vue biologique de posséder, dans les
collections entomologiques, auprès de l'insecte parfait,
ses œufs, sa larve, son cocon et, quand on le peut, des
spécimens de ses dégâts.
On sait depuis longtemps conserver les insectes par-
LE NATURALISTE
faits, malheureusement il n’en était pas de même des
larves où chenilles, qui se recroquevillent et brunissent en
vieillissant, à tel point qu'il est à peu près impossible de
les reconnaitre après quelques jours de dessiccation. Plu-
sieurs cependant pouvaient se conserver dans l'alcool,
dans le formol, dans le bichlorure de mercure; mais ces
produits ont le très grand défaut de détruire les couleurs
tendres, vertes, roses ou jaunes; de plus, les larves ou
chenilles velues deviennent méconnaissables dans un
de ces liquides; et c'est pour cette raison que beaucoup
d'entomologistes avaient renoncé à placer dans leur col-
lection les larves à côté des insectes parfaits.
Voici un procédé de conservation qui me donne des
résultats surprenants, et que je suis heureux de faire
connaitre aux lecteurs du Naturaliste.
Lorsque je capture une chenille ou une larve que je
désire conserver, voici comment j'opère : je coupe
d’abord de petits morceaux de papier buvard de 10 cen-
timètres de côté. Sur un de ces papiers placé sur une
table, je dépose la chenille que je désire préparer. Avec
l'index de la main gauche je lui maintiens la tête sur le
papier, et, à l’aide d'un tube de verre plein, je lui presse
l'extrémité opposée du corps, de façon à faire sortir les
déjections en même temps que l'intestin tout entier, puis,
en roulant deux ou trois fois mon tube sur la chenille,
j'arrive à la vider complètement.
Les déjections et les liquides sont absorbés au fur et
à mesure par le papier buvard; et il ne me reste plus
que la peau de cette larve.
Prenant alors un tube en verre très finement effilé par
un bout, j'enfonce ce bout dans l'intestin ressorti de la
chenille, et, à l’aide d’un peu de fil, je le noue à la partie
eflilée du tube. Il me suflit donc alors de souffler légère-
ment dans le tube pour que l'air, entrant dans la che-
nille, lui redonne sa forme primitive.
Il ne reste plus qu'à dessécher la larve ainsi gonflée
d'air, pour qu'elle garde indéfiniment sa forme et sa
couleur ; pour cela je me sers d’un appareil spécial, qui se
compose d'une lampe à alcool chauffant une petite chau-
dière de cuivre, large de 10 centimètres et profonde
de 15, A la partie supérieure se trouve un rebord qui
descend jusqu’au bas de la chaudière, de manière à rete-
nir la chaleur perdue, et permet d'obtenir une chaleur
égale dans toute la capacité de la chaudière.
Cette petite chaudière, en somme, n’est autre chose
qu'une sorte de capsule, dans le creux de laquelle
la lampe, qu'on allume au-dessous, dégage une cha-
leur assez forte pour cuire et dessécher le tégument
extérieur de Ja chenille. De petits montants sont pla-
cés pour maintenir la peau de la chenille fixée au bout
du tube dans l'espace plein d'air chaud, sans qu'il y ait
contact avec les parois de la chaudière, pendant le temps
voulu pour la dessiccation ou cuisson.
Je dois noter qu'il serait imprudent de gonfler ainsi
certaines chenilles en soufflant avec la bouche (Bombyx,
processionnea, pytiocampa, quercus, etc., etc.), parce
que les poils de ces chenilles sont très vésicants, et, en
entrant dans les chairs de la figure, provoqueraient des
éruptions, des érysipèles et pourraient occasionner des
désordres assez graves. Aussi est-il préférable d’em-
ployer, pour cette insufflation, de petites poires en caout-
chouc, analogues aux vaporisateurs usités pour la toi-
lette.
On évite ainsi les inconvénients dont je parlais tout à
l'heure. F
LE NAÂTURALISTE 275
Aussitôt que la peau de la chenille est devenue dure
et cassante, on la retire, on la pique par le milieu du
Corps avec une épingle, en ayant soin d'ajouter en-des-
sous une petite goutte de gomme arabique, de facon à
empêcher la larve de tourner autour de l’épingle ; et l’on
possède ainsi des larves et des chenilles, grosses ou
petites, velues ou non, parfaitement conservées. Pour
celles qui ont des couleurs vertes, roses ou jauues, il est
essentiel de les suspendre un peu au-dessus de l'appareil
de facon à les faire cuire très lentement pour ne pas
altérer les couleurs.
Pour conserver le plus longtemps possible les chenilles
vivantes, on se sert de sortes de cages en fine toile mé-
tallique ; on y place à l'intérieur des pots à fleurs.
Dans la terre du pot à fleurs est placée une petite
bouteille pleine d'eau, où l'on met une branche de la
plante ou de l’arbuste sur lesquels la chenille a cou-
tume de vivre. On peut ainsi avoir, pour les préparer,
des chenilles à divers âges, et, par conséquent, sous leurs
divers aspects, car les larves changent souvent même de
couleur après chaque mue; et rien n’est plus curieux que
de voir ainsi toute l’évolution de chacun de ces petits
êtres.
J'ajoute que cette collection de larves m'a permis de
faire en même temps une autre collection tout aussi
intéressante. Je veux parler des parasites des chenilles
et des larves; fréquemment, en effet, en vidant une
chenille on aperçoit dans la masse liquide qui en sort de
petites larves ayant les formes les plus bizarres et les
plus curieuses ; il y en a de courtes (Microgaster, etc.),
et d'autres qui sont deux, trois et même dix fois plus
longues que la larve qui les nourrit (Gordius aquati-
cus,etc.).
J’ai pu ainsi me procurer un assortiment très curieux
et peu connu d'insectes, la plupart du temps ignorés des
chercheurs.
Peut-être pourrait-on croire que cette collection de
larves est d'un aspect moins beau qu'une collection d’in-
sectes parfaits; c'est là une grave erreur, et il suffit de
voir quelques chenilles de Cossus ligniperda, Liparis,
salicis, et tant d’autres, pour se convaincre du con-
traire.
PAUL NOEL.
LA GUADELOUPE
ET SES PRODUIXS PRINCIPAUX
Sucre. — La principale production de la Guadeloupe est le
sucre de canne. La canne à sucre, graminée de grande taille,
dont le port ressemble un peu à celui du mais, y occupe des
milliers d'hectares; les travaux de la culture et surtout de la
récolte font vivre la plus grande partie de la population; l'ex-
traction du jus sirupeux de la plante et sa transformation en
sucre cristallisé alimentent l’activité de plusieurs usines. Cette
industrie était plus importante encore jadis, et a longtemps fait
la fortune des Antilles; le sucre de canne n'avait pas de concur-
rent sur le marché européen, et les colons réalisaient, presque
sans effort, de magnifiques bénéfices. La découverte du sucre de
betterave, l’essor presque immédiat qu'a pris cette nouvelle fa-
brication en Europe même, ont porté un coup fatal à la richesse
de nos vieilles possessions. Atteintes déjà, en 1848, par la crise
de la main-d'œuvre que détermina l’affranchissement des es-
claves, épuisées par l’abus même de la culture de la canne, elles
n'ont pas pu jusqu’à présent, et ne pourront de longtemps en-
core retrouver leur ancienne prospérité. Le mal dontelles souffrent
n'est-il pas plutôt destiné à s’aggraver ? La production du sucre
de betterave va en croissant chaque année, accentuant de plus
en plus la dépréciation d'une denrée autrefois coûteuse. Sans
doute, il est vrai, les raffineries de la métropole, qui ont besoin de
sucre de canne pour leurs opérations, assurent à nos colonies un
notable mouvement d’affaires ; sans doute, le gouvernement fran-
ais, par des mesures bienveillantes, a amené une certaine dé-
tente dans la situation : la délaxe de distance, en allégeant les
frais de transport, place le sucre colonial, sur le marché fran-
çais, à peu près dans les mêmes conditions que le sucre métro-
politain; le boni de fabrication permet à l'importateur créole
d'introduire, sous un régime de faveur, environ la cinquième par-
tie de sa production. Mais ces remèdes diminuent le mal, ils ne
le font pas disparaitre. Les Antilles françaises ne sont pas encore
acculées à la ruine comme les Antilles anglaises, leurs voisines,
où rien n'a été tenté; mais elles languissent, et le malaise éco-
nomique y est la principale cause de ces perturbations sociales
qui les ont récemment agitées.
Rhums. — Puisque la production du sucre n’est plus suffi-
samment rémunératrice et menace de le devenir de moins en
moins, il n'existe qu'une issue à la situation : produire autre
chose. Mais il n'est pas facile de modifier subitement toute l'ac-
tivité agricole d'un pays; une telle transformation demande du
temps, des capitaux : or, la misère presque générale exige des
solutions immédiates, et en même temps ne permet pas de rien
tenter de considérable. L'un des moyens les plus simples qui se
présentaient était, sans révolutionner les cultures, de fabriquer
du rhum au lieu de fabriquer du sucre; le rhum, en effet, est
d’un écoulement facile ; il se vend bien et, provenant exclusive-
ment de la fermentation du jus de canne, ne craint pas la con-
currence d’une industrie européenne rivale. Il n'y avait donc
qu'à modifier un peu l'outillage des usines, en y ajoutant des
appareils de distillation. Cette manière de procéder a donné de
bons résultats à la Martinique. Elle a moins réussi à la Guade-
loupe. Les rhums de la première de ces colonies jouissent sur
le marché français d’une réputation que les autres ne possèdent
point. La Martinique bénéficie-t-elle encore du souvenir de cette
préférence que lui accorda jadis la métropole, et qui lui valut
le nom de « la reine des Antilles »? Ou bien ses produits, grâce
à un secret de fabrication, sont-ils réellement supérieurs ? Il
n’est pas facile de trancher cette question. Mais, grâce à l'initia-
tive des distillateurs de la Guadeloupe, qui s’efforrent de ré-
pandre de plus en plus leurs marques, grâce aux progrès que
fait chaque jour leur industrie et qu'elle fera encore, grâce enfin
aux études entreprises par nos savants sur les propriétés des
diverses levures par lesquelles s'opère la fermentation des
vesous, il est à espérer que les rhums de la Guadeloupe acquer-
ront, s'ils ne les ont déjà, toutes les qualités qui font préférer des
produits d'autre origine, et prendront dans le commerce la bonne
place à laquelle is ont droit.
Cafés. — Le café tient une place importante, Il serait à sou-
haiter qu'il en obtint une plus importante encore, et que, sui-
vant les conseils de la mère patrie, les colons se décidassent ré-
solument, partout où la substitution serait possible, à étendre
cette culture en restreignant celle de la canne. Il fut un temps,
dit-on, où les planteurs, hallucinés par les bénéfices merveilleux
de la sucrerie, arrachaient leurs caféières pour semer partout le
précieux roseau; c’est le contraire qu'il faudrait aujourd’hui :
mais l'opération est moins aisée; la canne donne immédiatement
son plein rendement, tandis que le caféier demande au moins cinq
ans pour être entièrement productif. Peu de propriétaires sont
à même d'attendre aussi longtemps, et ce n'est que petit à petit
que la transformation pourra se réaliser. Tout semble d’ailleurs
inviter nos colons à porter leurs efforts dans ce sens. Sur plus
de 100 millions de kilogrammes de café consommés en France,
nos possessions nous en fournissent tout juste un million;
pourtant, les cafés des colonies françaises bénéficient à l’impor-
tation d’une détaxe considérable, bien faite pour les aider dans
la lutte contre la concurrence étrangère. Le planteur créole ré-
clame plus encore: il voudrait la franchise complète de tous
droits de douane. Nul doute qu'une pareille mesure ne soit de
pature à donner un nouvel élan à la culture du café; mais ce
qu'il faudrait surtout, c’est un peu plus de décision, un peu plus
d'initiative personnelle. L'on reconnaitra toutefois que la Gua-
deloupe occupe, à ce point de vue une place tout à fait prépon-
dérante parmi nos possessions ; sa production représente presque
les trois quarts de la production totale des colonies; la Marti-
nique même lui achète pour sa propre consommation. Il faut
276
LE NATURALISTE
dire aussi que l'excellente qualité de ses cafés leur a valu, bien
plus que leur bon marché, le succès éminent qu'ils obtiennent
partout. On peut citer les-très intéressants résultats obtenus par
M. Guesde, qui introduisit dans la colonie, en 1894, le caféier
d’Abyssinie, plus robuste et mieux adapté au climat que le ca-
féier d'Arabie, exclusivement cultivé jusque-là; là où son con-
génère souffre du soleil, il réussit parfaitement; une importante
plantation a été réalisée à la Grande-Terre (partie orientale de
l'ile) dans des régions situées à 18 mètres au-dessus du niveau
de la mer.
Cacaos. — Une autre production qui, quoique à un moindre
degré, serait susceptible de donner un regain de vitalité à notre
colonie, est celle du cacao. Cette plante précieuse existe surtout
à la Guadeloupe proprement dite (partie orientale), où elle fait
vivre un nombre appréciable d’exploitations. A la Martinique,
la culture en a été à peu près complètement délaissée: dans des
pays voisins, au contraire, notamment à la Trinidad et au Vene-
zuela, elle constitue l'un des principaux éléments de richesse.
Le cacao récolté à la Guadeloupe est de très bonne qualité.
Vanilles. — La vanille de la Guadeloupe est de qualité hors
ligne. Sur nos marchés, celle du Mexique est la plus appréciée
et se vend fort cher. Il est bon de savoir que la presque totalité
des vanilles de notre colonie est achetée par des Américains, qui
les introduisent à New-York et les revendent ensuite comme pro-
duits du Mexique : supercherie grandement préjudiciable aux
intérêts de la Guadeloupe, qui devrait pouvoir écouler directe-
ment comme siennes, et à un prixenrapport avec leur qualité, les
denrées excellentes qu'elle récolte sur son propre sol. La cul-
ture de la vanille est de celles qui, presque sans effort, peuvent
se développer d’une façon considérable. Cette odorante orchidée
pousse, en effet, dans des caféières, sans frais et, pour ainsi dire,
sans qu'il soit nécessaire de s’en occuper. Il suffirait d'assurer
des débouchés aux planteurs, pour provoquer presque immédia-
tement un accroissement corrélatif de la production.
Epices. — La petite cuture aurait encore à la Guadeloupe
un aliment facile dans les épices, girofle, cannelle, poivre, mus-
cade. L'exploitation en a été malheureusement à peu près com-
plètement délaissée,
Fruils. —— Par contre, une certaine extension a été prise, dans
les dernières années, [par le commerce des fruits frais et con-
servés, Les arbres fruitiers sont en grand nombre à la Guade-
loupe; ils poussent pour la plupart sans culture, dans toutes les
parties de l'ile. Les principaux sont le bananier, dont il existe
plusieurs variétés, le goyavier, le manguier, originaire de l'Inde,
l'ananas surtout, qui nécessite certains soins, largement compen-
sés par l'exportation considérable à laquelle il donne lieu dès à
présent. Il va sans dire que bien d’autres sortes d'arbres frui-
tiers, en dehors de celles que l’on vient d’énumérer, se ren-
contrent à la Guadeloupe: l'arbre à pain, le pommier de Cythére,
par exemple, ou des espèces plus connues encore, l'abricotier,
le citronnier, l'oranger. Ils ne donnent pas lieu à une exploitation
digne d'être signalée. On remarquera cependant, parmi les pro-
duits qui pourraient être susceptibles d'une plus grande utilisa-
tion commerciale, le shrub, vin de liqueur parfumé avec des
écorces d'oranges, dont on dit grand bien.
Bois. — La Guadeloupe est d’ailleurs féconde en richesses
naturelles, dont la plupart sont encore peu connues ou à peu
près négligées. Ses forêts constituent assurément l’une des prin-
cipales. Grâce à la splendeur invariable du climat, une végéta-
tion exubérante — arbres séculaires, troncs magnifiques, fou-
gères arborescentes, lianes enchevêétrées, fourrés impénétrables
de bambous — couvre de sa verdure perpétuelle les flancs des
märnes et des collines. Les bois d’ébénisterie, les essences pré-
cieuses s’y rencontrent en abondance. l’acajou, ce bois si es-
timé, s'y trouve communément ; on l’'emploie même à la fabrica-
tion d'objets de ménage. De même, le laurier-rose montagne,
l'ébène verte, le noyer des Antilles, très recherchés dans l’in-
dustrie du meuble, y croissent un peu partout. A citer encore le
gaiac, dont le cœur est si résistant et si dur, qu'il émousse les
meilleurs instruments; le courbaril noir et raboteux, dont le
bois résineux est excellent pour la charpente. Il n’est pas jus-
qu'aux lianes qui ne puissent fournir les éléments d'une utilisa-
tion commerciale; on en fabrique déja des cannes, et elles
pourraient être employées à la construction de meubles légers:
petits bancs, chaises de jardin, etc.
CHRONIQUE
Vente aux enchères publiques des livres
d'histoire naturelle de la bibliothèque Ch. 1
Brongniart. — Les 20, 21 et 22 décembre prochain 3
aura lieu à la maison Sylvestre, 28, rue des Bons-En- *
fants, à 8 heures très précises du soir, la vente aux k
euchères publiques dela bibliothèque de feu Ch. Bron- -
gniart, assistant au Muséum de Paris, notre regretté ‘4
collaborateur. Cette bibliothèque renferme un grand 3
nombre de bons ouvrages, notammenten ce quiconcerne : M
l’'entomologie. Ses belles recherches sur les insectes fos- 4
siles sont bien connues et tous les documents qu'il a f
consacrés à cette partie sont restés dans sa bibliothèque. 4
La vente est faite par le ministère de M° Maurice à
Delestre, commissaire priseur, assisté de Les Fils d
D'Émile Deyrolle, experts naturalistes, 46, rue du Bac,
chez lesquels se trouve le catalogue, qui sera adressé à 1
toute demande.
ACADÉMIE DES SCIENCES
La distribution des sexes dans les pontes de f
Pigeons. (M. L. Cuénot.) Le
On sait qu'à chaque ponte les Pigeons domestiques et les Co- pi
lombins exotiques donnent toujours deux œufs, qui éclosent en
même temps; une tradition très ancienne, qui remonte au moins
à Aristote, veut que ces deux œufs fournissent ordinairement,
l'un un mâle, l’autre une femelle.
Pour élucider la question, M. L. Cuénot a examiné 65 pontes
de pigeons voyageurs (C. livia); il a trouvé 17 fois deux mâles,
14 fois deux femelles et 34 fois les deux sexes. Il n’y a donc
aucune loi de distribution des sexes dans les pontes de Pigeons.
Une autre tradition attribue aux pontes bisexuées une particula- :
rité des plus curieuses : Aristote avait remarqué que c'était le 4
plus souvent le premier œuf pondu qui donne le mâle. L'auteur g
a étudié 30 pontes bisexuées, dans les conditions suivantes : les j
deux œufs, qui sont pondus à un ou deux jours d'intervalle, L:
étaient dès leur apparition marqués d’un numéro sur la coquille ;
pour reconnaitre le sexe, les jeunes étaient disséqués un ou
deux jours avant qu'ils éclosent; on ne pouvait se tromper, ni
sur le sexe, facile à reconnaître par dissection, ni sur le numéro
d'apparition de l'œuf. Or, sur les 30 pontes, le premier œuf
dans 15 cas a donné un mâle, et dans les quinze autres a donné #
une femelle. Il y a donc autant de chances pour que la première #
naissance soit male que pour qu'elle soit femelle.
Sur le parasitisme du Ximenia americana L.
(M. Edouard Heckel.) ‘2
Dans une précédente communication, M. KE. Heckel a fait con- 3
naître le singulier phénomène qui accompagne la germination,
des graines de Ximenia americana L. et qui est surtout carac-
térisé par la transformation des deux premières feuilles en o:
écailles radiciformes pénétrant par géotropisme positif dans la Ÿ
graine entre les cotylédons inclus auxquels elles s’accolent défi- :
nitivement. \ g Ô
Mais quelques nouvelles expériences sur ce parasitisme des “h
Ximenia ont démontré que cette plante, uhiquiste dans les Le
régions tropicales, ne fixe pas indifféremment ses suçoirs sur
toutes les plantes au voisinage desquelles on la place en serre
chaude.
Il résulte d'une première série d'expériences : 19 qu'une seule
espèce, parmi cinq mises en cause, a donné lieu à une manifesta-
tion évidente de parasitisme de la part du Ximenia, bien que,
dans tous les cas, les racines des deux espèces mises en pré-
sence fussent enchevètrées étroitement dans le même pot;
2° que, partout ailleurs, les suçoirs tantôt se sont formés sur les
racines de Ximenia sans se fixer sur la plante à parasiter, tantôt
ne se sont pas formés du tout.
°
LE NATURALISTE 977
Dans ce dernier cas, le développement normal des Ximenia à
semblé étroitement lié à la formation de nodosités ou tubercules
qui paraissent jouer un rôle dans la nutrition de la plante para-
site : ce rôle est à éclaircir comme la nature de ces tubercules
qu'on pourrait rapprocher de celle des tubercules de Légumi-
neuses.
Sur l’ordre de formation des éléments du cylindre
central dans la racire et la tige. (M. Gaston BoNNiIER.) —
Dans ses recherches, devenues désormais classiques,sur la symétrie
de structure des plantes vasculaires, M. Van Tieghem à déter-
miné d'une manière précise les caractères des trois membres de
la plante : racine, tige, feuille. On peut résumer dans les phrases
suivantes les conclusions de cette étude fondamentale : 1° La
racine à une symétrie vasculaire par rapport à un axe, et des
faisceaux libériens centripètes altérnant avec des faisceaux
ligneux également centripètes; 2° La tige a une symétrie vascu-
laire par rapport à un axe, et des faisceaux libéro-ligneux à
liber externe et centripète, à bois interne et centrifuge; 39 La
feuille a une symétrie vasculaire par rapport à un plan et des
faisceaux libéro-ligneux qui, dans le limbe, présentent le liber du
côté inférieur (ou externe) et le bois du côté supérieur (ou
interne). Ces trois structures sont comme imprimées par une
hérédité lointaine dans les trois membres de la plante. La crois-
sance dans des milieux différents, les adaptations spéciales, qui
modifient profondément la nature et la répartition de tous les
tissus, restent sans effet sur les lois de symétrie qui viennent
d'être énoncées. N'y a-t-il donc aucune relation entre ces trois
structures? Les fonctions générales d'absorption de la racine, de
conduction de la tige, d'assimilation et de transpiration de la
feuille sont-elles sans aucune corrélation avec ces trois disposi-
tions des tissus vasculaires? Sans vouloir résoudre, M. Gaston
Bonnier s’est proposé simplement d'exposer quelques remarques
anatomiques et physiologiques qui paraissent de nature à mettre
les chercheurs sur la voie de la solution. L'auteur ne s’est
occupé que des plantes phanérogames. Il résulte des études faites
que le cylindre central présente le même plan général de struc-
ture chez la tige et chez la racine : la constitution et l’ordre de
développement des tissus sont les mêmes pour les deux cas, La
seule différence réside, comme l’a établi M. Van Tieghem, dans
la position des pôles ligneux, qui, dans la racine, sont comme
rejetés vers la périphérie du cylindre central. Il s'ensuit que le
premier vaisseau formé près d'un pôle ligneux de la racine
prend naissance non loin de l'écorce primaire, c’est-à-dire au
voisinage de ce tissu régulateur du courant d’eau qui va des
poils absorbants aux vaisseaux ligneux. Pour se rendre compte
de cette différence, l'hypothèse la plus simple consiste à admettre
que, dans la racine, il existe une corrélation entre la disposition
du tissu vasculaire et l'absorption de l’eau par ce membre de la
plante. °
Séance du 19 novembre 1900.
Sur l'exosmose de diastases par les plantules.{Jules
Laurenr.) — Il résulte des recherches et expériences de l'au-
teur que les graines en germination peuvent répandre autour
d'elles une partie des diastases nécessaires à la digestion de
leurs réserves et utiliser ainsi certaines matières organiques in-
solubles, comme l’amidon, qui peuvent se trouver à leur portée.
Mais ce phénomène cesse avec la période de germination, et,
comme l'avait déjà montré M. Duclaux, les racines sont in-
capables dejrejeter au dehors des quantités appréciables d’amylase.
UN EXEMPLE DE LONGÉVITÉ
de Ja Graine
La graine est un être vivant.
Sa vie reste à l’état latent tant que des circonstances
particulières ne la rendent pas apparente.
Alors se produit la germination qui exige de l’eau, de
l'air et de la chaleur :
De l’eau, pour ramollir les enveloppes, faire gonfler
l'embryon et servir de véhicule aux éléments nutritifs;
De l'air, pour enlever le carbone de la graine par la
formation d'acide carbonique et faire que la fécule
devienne un aliment sucré et soluble ;
De la chaleur, pour stimuler l’action de l’eau et de
l'air.
Garantissez les graines du contact de l’air ; à cet effet,
enfermez-les dans un sac en toile, comme le font les
marchands grainiers ; elles ne germeront pas.
Mettez-les au contraire sur une éponge humide, la
germination ne tardera pas à se produire.
La terre ameublie est perméable à l’eau et à l'air.
Donc, lorsque cette terre possède une chaleur suffisante,
la graine qu'on y enfonce est en état de germer, pourvu
toutefois que l’enfoncement ne soit pas trop considérable,
car alors le milieu qui enveloppe la graine manque d’eau
et d'air, c'est-à-dire de deux agents indispensables.
Les graines perdent leur pouvoir germinatif, mais il
est difficile de préciser à quel moment. Certaines ne
peuvent germer que pendant quelques jours (Lauriers,
Pruniers) ou pendant quelques mois (Ombellifères).
D'autres conservent leur vitalité pendant deux, trois,
dix ans et plus (Légumineuses, Malvacées, Grami-
nées). Des graines de Melon germent encore au bout de
quinze ans.
On a cité des exemples de longévité extraordinaire.
Par exemple, du blé en silos, datant des Romains, a
germé 1500 ans après sa maturation.
Des haricots, que Tournefort avait placés dans son
herbier, ont été plantés avec succès après un siècle.
Des graines de Luzerne lupuline, de Bluet et d'Hélio-
trope, a dit M. Charles Desmoulins, ont été trouvées
dans des tombeaux romains remontant aux premiers
siècles de notre ère; elles ont donné naissance à des
individus dont le développement s’est effectué norma-
lement.
Lorsqu'une plante, pour végéter, exige un élément
dont le sol manque, sa graine sommeille jusqu’à ce que
l’engrais approprié décide de son évolution. C’est ainsi
qu'une prairie dépourvue de Légumineuses se couvrira
de Trefle ou de Luzerne lupuline si on y répand des
engrais chimiques.
Un labour profond, ramenant le sous-sol à la surface,
a souvent pour conséquence de modifier la composition
du tapis végétal. ,
C'est done une mauvaise pratique que d’enfouir des
plantes nuisibles approchant de leur maturité, Au pre-
mier labour, on ramène les graines à la surface et on
voit reparaitre en plus grand nombre le végétal qu’on
croyait avoir détruit.
Notre, regretté confrère et collaborateur Soulat-
Ribette a fait sur la vitalité des graines une observation
fort intéressante que nous citons textuellement :
« De 1860 à 1862, j'avais exploré avec soin tous les
étangs, mares, jones, cours d’eau, etc., de la Compagnie
de Piégut-Pluviers (Dordogne) sans y trouver la moindre
trace de Ranunculus ololeucos Lloyd (Renoncule blanche).
Aussi quelle fut ma surprise, au mois de mai 1863, de
découvrir en abondance cette belle espèce, presqu’'à
l'entrée de Piégut, dans le lit d’un étang converti en pré
depuis plus d'un siècle! L'année précédente on y avait
creusé une petite mare; la terre limoneuse qu’on avait
extraite en recouvrait les bords. Tout autour de cette
mare, On voyait maintenant une guirlande de fleurs
blanches, formée presque entièrement de R. ololeucos.
C'était magnifique.
« D'où venait cette plante? non certainement des sta-
278
LE NATURALISTE
POI ne En pin PUR EL ST EE A NE TO EE UE AE UT
tions déja connues, la distance étant trop grande, mais
du sol même où avait été creusée la mare.
Ainsi les graines de Renoncule blanche, placées en
dehors des influences atmosphériques, avaient — sans
altération — conservé pendant cent ans et plus toutes
leurs vertus végétatives, et n’attendaient qu'une occasion
favorable pour venir briller av soleil. »
On se demande quelquefois l'origine de colonies de
plantes apparaissant inopinément dans des lieux maintes
fois explorés, en tous sens et à toutes les époques, par
des botanistes expérimentés. En voilà l'explication.
Du reste, en Limousin, chaque fois qu'on remet en
culture des terrains occupés par des châtaigniers sécu-
laires, on voit apparaître les plantes accompagnant ordi-
nairement les céréales. Leurs graines avaient dormi plus
longtemps que la Belle au bois dormant et il avait fallu
l'intervention de la charrue pour les réveiller.
Ch. LE GENDRE.
L'AGRICULTURE AUX ILES PHILIPPINES
L'archipel des Philippines s'élend sur une superficie de
99 millions d'hectares, sur lesquels 3 millions à peine étaient
cultivés avant les événements de la dernière guerre, c'est-à-dire
un peu moins de la neuvième partie de ce vaste territoire.
La fertilité du sol est extraordinaire, car les conditions natu-
relles y sont très favorables à la culture. Toutes les grandes
îles qui forment l'archipel ayant une origine volcanique, les
montagnes y abondent et les cours d eau y sont nombreux ; l’ir-
rigation des plantations est donc aisée à entretenir pendant la
saison sèche, tandis que la saison des pluies assure, pendant six
mois, une aliondance d’eau très utile dans certaines régions.
Les principaux produits agricoles de l'archipel sont au nombre
de cinq : le riz, le sucre, l'abaca, le tabac et le coprah. Quant
au café, qui avait une grande importance il ya dix ans,ila
presque entièrement disparu. EDS
Le riz, qui est la base de l'alimentation des indigènes et qui
par conséquent devrait être la culture la plus étendue, ne suffit
pas à la consommation locale qui est obligée de demander aux
pays voisins le surplus nécessaire aux besoins des habitants. Il
faut rechercher la cause de cette insuffisance de production dans
la difficulté des communications qui s'oppose au transport des
produits des nombreuses régions situées loin des côtes ou des
grands cours d'eau. En raison de l'impossibilité pour les culti-
vateurs de ces parties abandonnées de l'intérieur des îles de
vendre les produits de leurs récoltes, ils renoncent à ce genre de
culture où ne plantent que le strict nécessaire à l'alimentation
des villages avoisinant leurs champs.
La culture de la canne à sucre a, de tout temps, occupé le
premier rang, etla fabrication du sucre, quelque arriérés que
fussent les procédés employés, mettait ce produit en tête des
tableaux d’exportation de ces îles. Ce sont les îles Bisayas, au
centre de lParchipel, où la culture de la canne était le plus
développée; mais depuis ces deux dernières années on constate
que la production tend plutôt à diminuer.
['abaca ou chanvre de Manille est devenu rapidement un
article d'exportation d'une très grande importance. Le sol vol-
canique de ces îles est propice au développement de cette plante;
c’est, en effet, dans les régions avoisinant les volcans en activité
ou les anciens cratères que l'on récolte les meilleures qualités
d'abaca.
Le tabac est encore une des plantes qui tiennent le premier
rang dans la production agricole de cette contrée; toutefois, au
point de vue de la qualité, il est inférièur à celui que produisent
les provinces avoisinant la Havane.
La préparation du coprah est devenue une industrie très
lucrative: aussi la culture des cocotiers et la récolte des cocos
sont-elles pour les Indiens une source de profits qu'alimentent
sans cesse les nombreuses demandes de l'étranger.
Le café avait été autrefois un des produits importants de
l'exportation, mais depuis une dizaine d'années la culture des
caféiers a diminué au point que les quantités récoltées annuelle-
ment suffisent à peine pour la consommation locale. C’est à la
suite d'une maladie dont a été atteint cet arbuste dans les pro-
vinces de j'ile de Luçon (qui produisait les meilleures qualités)
que les habitants ont peu à peu renoncé à combattre le mal et
négligé par la suite cette culture.
En dehors des productions ci-dessus énumérées, les iles cul-
tivent aussi Je maïs, le blé, le cacao, la canelle, la noix muscade,
la palate douce, la pomme de terre, les racines, le coton, etc. ;
mais tous ces produits servent à satisfaire la population locale et
ne participent pour ainsi dire pas au mouvement d'exportation
de ce pays. ©
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péens. 136 espèces, 403 exemplaires, 7 cartons.
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ropéens. 100 espèces, 281 exemplaires, 5 cartons.
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Prienee Re AS LA Moser SR DITANCS:
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européens. 368 espèces, 951 exemplaires, 15 cartons.
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pèces, 593 exemplaires, 10 cartons. Prix. 65 francs.
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‘le calice et la corolle sont
29e ANNÉE
2e SÉRIE — N° 33 1
15 DÉCEMBRE 1900
LES ÉCORCES MÉDICINALES
(L'Angusture vraie)
L’angusture vraie est une écorce employée en méde-
cine qui est fournie par deux arbres de la famille des
Rutacées, tribu des Cuspariés : le Galypea officinalis
Hancock et le Galypea Cusparia de Candolle.
Le Galypea Cusparia est un arbre majestueux de 20 à
23% mètres de haut, dont les feuilles sont formées d’un
pétiole de 30 centimètres de long, terminées par trois
folioles sessiles ovales lancéolées et très aromatiques
dont celle du milieu éga-
le la longueur du pétiole.
Les fleurs sont blanches
et l'inflorescence est une
grappe qui se trouve si-
tuée à l'extrémité des ra-
meaux.
Le Galypea officinalis
estune espède voisine de
la précédente, ou même
simplement une forme de
cette dernière plante. C'est
un arbrisseau de # à 5 me-
tres de haut dont la taille
n'excède pas 10 mètres.
Les feuilles ont trois fo-
loles oblongues et ponc-
tuées, longues de 15 à
20 centimètres,portées sur
un pétiole de même lon-
gueur. Les fleurs sont
blanches et poilues, l'in-
florescence est également
une grappe. ê
Les fleurs dans ces deux
espèces sont régulières,
présentant 5 pétales, 5 sé-
pales et 5 étamines dont
deux au moins sontstériles;
très courts, les anthères
sont simples à la base.
C’est de Humboldt et
Bompland qui, les pre-
miers, ont rapporté le Galypea Cusparia à la famille des
Rutacées en lui donnant le nom de Cusparia Febrifuga.De
Candolle lui assigna ensuite celui de Galypea Cusparia.
Baïllon, dans son dictionnaire de botanique,est revenu à
la première dénomination.
Le Galypea Cusparia forme de vastes forêts sur les
deux rives de l’Orénoque, principalement aux environs
de la ville d'Angostura (Vénézuéla). C'est du nom de
cette ville que vient celui d'angusture qui a été donné à
la plante. On transporta la culture de cet arbre dans
l'ile de la Trinité sur les côtes du Vénézuéla d’où l'écorce
fut introduite en Angleterre vers 1788.
La partie du végétal employée est, comme nous
lPavons déjà dit, l'écorce. Elle se présente dans le com-
merce sous forme de gros cylindres ou en plaques. La
face est d’un jaune verdâtre et parsemée soit de très
(alypea
Le Naturaliste, 46, rue du Rac, Paris.
L’angusture vraie
Cusparia)
petites taches blanches, soit de taches noires irrégu-
lières. La face interne s'exfolie facilement, elle est brune
et lisse, plus ou moins parsemée de petits cristaux mica-
cés et brillants d’oxalate de chaux, La cassure de
l'écorce est nette et les bords sont souvent taillés en
biseau.
On confond souvent cette écorce avec celle du vomi-
quier qui est produite par le Strychnos,un vomica de la
famille des Loganiacées qui, contenant de la strychnine
et de la brucine,est, à l'inverse de la précédente, un poison
violent. Cette écorce, que l’on nomme fausse angusture,
a la face externe rougeâtre et est couverte de verrues. La
face interne estbrune comme celle de la vraie angusture,
mais elle est striée en long. Quand l’on casse l'écorce,
les bords sont droits, la
saveur en est très amère.
L'angusture vraie est
employée sous forme de
poudre, de teinture et
d'infusion. Pour préparer
la poudre d’angusture,qui
est la préparation la plus
communément employée,
on pulvérise d’abord gros-
sièrement l'écorce, puis
on l’expose à la chaleur
dans une étuve pendant
au moins 12 heures, on
achève Ja pulvérisation
par contusion et l’on passe
la poudre au tamis de soie.
Cette poudre offre une
couleur jaunâtre analogue
à celle de la rhubarbe, une
odeur nauséuse et une
saveur amère et aroma-
tique un peu âpre, laissant
sur la langue une sensa-
tion de chaleur et de pi-
cotement.
On a substitué quelque-
fois à la poudre d’angus-
ture celle du vomiquier,
dite fausse angusture, qui
est excessivement véné-
neuse et a causé des acci:
dents graves.
On reconnait cette frau-
dé aux caractères suivants, La poudre de vomiquier est
d’un blanc jaunâtre, légèrement inodore,très amère et dé-
pourvue d’âcreté, L'infusion de cette poudre ne décolore
pas le tournesol; la potasse et le sulfate ferreux lui com-
muniquent une teinte vert bouteille, l'azotate d'argent
donne un précipité noir verdâtre, l'acide nitriaue la colore
en rouge orangé et le chlore et l’eau chlorée ne lui font
éprouver aucun changement. La poudre elle-même prend
une teinte rouge après quelques instants de contact avec
l'acide nitrique, La poudre d’angusture, elle, n'est pas
colorée par l'acide azoteux. Son infusé détruit la couleur
du tournesol, prend une teinte jaune orangé avec la po-
tasse, donne un précipité gris avec le sulfate ferreux et
est colorée en rouge foncé par l'acide nitrique, le chlore
et l’eau chlorée. Nous allons résumer dans un tableau
ces diverses réactions très importantes,
280
RÉACTIFS ANGUSTURE VOMIQUIER
Éd
Jaunâtre.
Décolorée.
Jaune orangé.
Gris.
Rouge foncé.
Rouge foncé.
Rien.
Blanc jaunâtre.
Rien.
Vert bouteille.
Vert bouteille.
Rouge orangé.
Rien.
Noir verdâtre.
Couleur.
Teinture de tournesol
Potasse.
Sulfate ferreux.
Acide nitrique.
Clore eteau chlorée.
Azotate d'argent.
Le principe de l’angusture vraie a été découvert par
Saladin et appelé Cusparin. Pour l'obtenir, on traite
l'écorce d’angusture préalablement pulvérisée par l’al-
cool absolu froid et on laisse cristalliser. On obtient une
substance non azotée neutre aux réactifs, de couleur
blanche, de saveur très amere, d’odeur nauséeuse cristal-
lisant en tétraèdres, insoluble dans léther et dans les
huiles, peu soluble dans l’eau, mais soluble dans l'alcool
fort, les acides faibles et les solutions alcalines concen-
trées, L’acide sulfurique la colore en rouge brun et le
nitrate acide de mercure en rouge pourpre. Le Cusparin
est précipité de ses solutions par la teinture de noix de
galle.
C'est comme succédané du quinquina que l’angusture
vraie a été employée, elle est stomachique, digestive et
fébrifuge, mais à un degré moindre que ce dernier. Au
commencement du siècle il était importé en Angleterre
par an 40,000 livres de cette écorce, et, en 1803, on la
payait jusqu’à 40 francs le kilog. À notre époque cette
écorce n’est que peu employée et, associée au Quassia
amara, n'entre que dans la composition d’un vin médi-
cinal. Elle a cédé le pas au quinquina et à la quinine
qui sont si communément employés äujourd’hui, mais
il était bon de rappeler l'histoire scientifique et médicale
de cet ancien médicament.
E. MAssarT.
LE DAHOMEY&SES PRODUITS
Parmi les produits d'exportation provenant de l’ex-
ploitation agricole de la colonie du Dahomey, il faut
mentionner, en premier lieu, l'huile et les amandes de
palme qui constituent, dans tout le bas Dahomey no-
tamment, la principale et pour ainsi dire l'unique ri-
chesse du pays. Dans les environs de Porto-Novo en
particulier, le palmier à huile, mieux cultivé que par-
tout ailleurs, donne des produits de qualité supérieure,
bien cotés sur les marchés d'Europe.
Il produit, dans les bonnes années, 1? à 14 régimes
de noix comptant chacun 150 noix environ; une pre-
mière récolte se fait en janvier, février, mars et avril;
une seconde, moins importante, a lieu en août et sep-
tembre. On compte environ 100 palmiers à l'hectare
donnant un rendement de # à 5 francs par an.
Les noix, une fois müres, sont récoltées et mises dans
un récipient où les indigènes les écrasent avec les pieds.
Après avoir laissé reposer douze heures, on fait bouillir
l'huile dans de grandes marmites pendant vingt-quatre
heures ; on laisse refroidir, puis on décante l’huile pure
venue à la surface et on Ja livre au commerce au prix
moyen de 5 à 6 fr. 50 la mesure de 20 litres, suivant le
cours des marchés d'Europe. L'huile est exportée dans
des futailles de 450 litres (ponchons) ayant déjà servi au
LE NATURALISTE
transport de l'alcool, ou dans des fûts spéciaux (Liver-
pool) de 750 à 800 litres.
La pulpe des noix, qui contient encore une fo pro-
portion d'huile, est utilisée par les indigènes pour la
cuisson de leurs aliments. Quant au noyau, il est d’a-
bord séché au soleil pendant plusieurs jours ; on le casse
ensuite, et on en retire l'amande qui fait l'objet d'un
commerce considérable.
Les amandes, expédiées en Europe, soit en vrac, soit
en sacs de 70 à 75 kilogrammes, valent sur place 150 à
200 francs la tonne; triturées en Europe, elles donnent
une huile abondante et le tourteau est employé pour la
nourriture des bestiaux.
Après l'huile et l'amande de palme, nous citerons :
L'arachide qui, semée en mars et avril, est récoltée en
juin et juillet. Ce produit n’est pas encore un article
d'exportation : sa valeur est de 0 fr. 30 à 0 fr. 35 le kilo-
gramme non décortiqué.
Le cacao. — Cette plante originaire du Para (Brésil) se
sème en pépinière et demande à être très arrosée. Au
bout de six mois, elle peut être transplantée à l'abri du
soleil autant que possible près d’un cours d’eau et dans
un sol humide non sujet à inondations. C’est seulement
au bout de trois années que le cacao peut commencer à
produire.
Le café. — Le café qui provient en général de Libéria
ou de San Thomé est cultivé avec soin au Dahomey, no-
tamment dans les plantations de Porto-Novo et de
Ouidah dont le nombre et l’importance augmentent
chaque jour; il est mis en pépinière pendant un an en-
viron et planté ensuite entre les mois d’avril et de juin.
Les fleurs apparaissent vers le vingtième mois, mais on
les enlève pour donner plus de force au jeune arbuste;
bien que les fruits commencent à se former dès la
deuxième année, on ne peut espérer obtenir une récolte
qu'au bout de quatre années révolues. À cette époque,
chaque pied peut donner de 1 à 3 kilogrammes nets,
vendus à raison de 2 fr. 50 à 3 francs le kilogramme.
Le caoutchouc, — Le caoutchouc est très répandu au
Dahomey, soit à l’état d'arbres, soit sous forme de
lianes, mais l'exploitation n’en est encore qu'à ses dé-
buts, Le latex, abondant, de bonne qualité et se coagu-
lant à l'air libre, est récolté principalement en septembre,
octobre et novembre, Sa valeur courante est de 5 francs:
le kilogramme.
Le coprah ou amande de coco séchée et concassée,
dont on extrait une huile employée dans la stéarinerie
et la savonnerie, n’est guère exploité au Dahomey que
depuis deux ans. Le commerce de ce produit parait
devoir se développer rapidement. Le coprah san et sec
est vendu à raison de 200 francs les 1.000 kilogrammes
et expédié sur Marseille.
Le coton. — Le coton, qui semble être d’une bonne
qualité commerciale, est cultivé surtout dans le haut
Dahomey. Semé en avril, il est récolté en décembre et
livré sans aucune préparation aux tisserands du pays.
La fibre est courte. Le prix moyen du kilogramme est
de O fr. 30.
L'indigo. — L'indigo qui se récolte dans toute la co-
lonie est très employé par les indigènes pour la teinture
de leurs vêtements; il vaut de 2 à 3 francs le kilo-
gramme.
Le karité. — L'arbre à karité pousse dense et
en très grande abondance dans le haut pays (à partir de
Savalou) où il remplace pour l’indigène, au point de vue 4
pont se sg des)
mais
«
RS EE NE 17
NN /T Mess
fl
LE. NATURALISTE 281
de l’alimentation et de l'éclairage, le fruit du palmier.
La récolte a lieu en juin, Les noirs mangent la pulpe du
fruit et conservent l'amande d’où ils tirent un corps
gras connu sous le nom de beurre de karité. Ce produit
qui fera certainement l'objet d'un commerce très impor-
tant, lorsqu'il pourra être transporté à la côte, est vendu
à peu près 1 franc le kilogramme sur les marchés indi-
gènes.
* La kola. — La kola du Dahomey se reconnait à ce que
chaque fruit, rose, rouge ou blanc, se divise en quatre ou
cinq parties. Elle est consommée sur place et coûte ac-
tuellement de 2 fr. 50 à 3 francs le kilogramme.
Le maïs. — Le maïs, blanc ou jaune, est cultivé en
grand dans toute la colonie où il sert de base à l'alimen-
tation des habitants. Les semis se font en mars, en
avril et en octobre; la récolte, presque toujours abon-
dante, a lieu en juin, juillet, décembre et janvier. Le
prix courant est de 4 à 5 francs les 100 kilogrammes,
Le manioc. — Le manioc est consommé dans une large
proportion par les indigènes; les boutures sont plantées
en mars et avril; la récolte se fait en septembre; la va-
leur est d'environ 0 fr. 10 le kilogramme.
Le mil blanc et le mil rouge sont récoltés surtout dans
le haut pays où le mil rouge notamment forme la nour-
riture à peu près exclusive des chevaux, Le mil blanc
vaut à peu près 0 fr. 05 et le rouge 0 fr. 04 le kilo-
gramme.
Le tabae en feuilles. — Le tabac, cultivé surtout aux
environs de Savalou, est de qualité assez inférieure. Les
semis ont lieu en avril et la récolte en janvier.
En feuilles, il vaut de 4 franc à 1 fr. 50 le kilo-
gramme; écrasé et mélangé avec de la potasse, il est
vendu à raison de 3 francs le kilogramme.
LES RACES DES COMORES
Géographiquement les Comores n’appartiennent ni à
Madagascar ni à l'Afrique : elles constituent un groupe
à part, ayant même une certaine originalité dans sa
flore et dans sa faune, tout en comprenant un certain
nombre des espèces des pays voisins. Toutefois, elles ont
surtout subi l'influence de Zanzibar. L'identité de race et
de religion a, en effet, créé entre les deux pays des liens
d’une solidité exceptionnelle et a donné naissance à des
relations commerciales dont l’activité déjà ancienne ne
s’est jamais ralentie.
Au point de vue des habitants, on doit considérer que
le fond de la population a été composé de Malgaches,
d'Arabes, d'anciens esclaves provenant de la côte
d'Afrique, de marchands indous, etc. Il en résulte donc
une race extraordinairement variée dans ses types, mais
ayant cependant quelques traits communs.
Les Comoriens sont de taille élevée, de teint jaunâtre;
leur front est étroit mais haut, leurs lèvres grosses sans
être bouffies, leurs cheveux crépus. La population de
l’Archipel est d'environ 80,000 âmes.
À Mayotte, l'élément malgache a dominé et les habi-
tants sont plus noirs ; dans les autres iles, le type sémi-
tique apparait davantage.
La langue des indigènes est le souahéli, idiome parlé
à Zanzibar, auquel on a adapté tant bien que mal les
caractères de l'alphabet arabe, et qui a subi, en passant
la mer, de nombreuses déformations par suite de la
diversité des races qui peuplent notre colonie.
LA SÉDIMENTATION SOUTERRAINE
Sous le nom de sédimentation souterraine, je désigne
un modespécialde constitution des couches géologiques,
qui à passé jusqu'ici à peu près inaperçu et qui Joue
cependant un rôle de grande importance dans de cer-
taines conditions. On peut le définir en disant que les
assises auxquelles il donne naissance sont constituées
par les résidus d’une dissolution partielle, qui s'opère
sous le sol, de couches préexistantes. Pour l'ordinaire,
ces couches préexistantes sont surtout calcaires et leur
résidu n’a qu’un très faible volume par rapport au leur;
l'agent de dissolution est l’eau d'infiltration, provenant
des pluies eten conséquence chargée d'acide carbonique ;
le phénomène ne peut donc guère prendre naissance que
dans le sol de régions exondées, continentales ou insu-
laires : les fonds de mer en sont préservés, Le dépôt de
ces résidus se fait successivement de haut en bas, c’est-
à-dire dans le sens inverse des sédimentations ordinaires ;
ses progrès sont accompagnés d’un affaissement général
du sol, ils s’accomplissent d’ailleurs avec une régularité
qui se traduit par la persistance d’une apparence strati-
fiée, parfaitement normale.
J’ajouterai, avant d’insister sur ces phénomènes dont
il sera aisé de faire ressortir la portée, que leur annonce
a provoqué beaucoup de résistances chez plus d’un géo-
logue, Je vais montrer que toutes les objections présen-
tées se résolvent de la manière la plus satisfaisante, et
je me flatte que la démonstration que je me propose de
faire sera complète pour tous les lecteurs.
Tout d’abord, il convient de décrire une région où le
phénomène a acquis une grande ampleur et où, par con-
séquent, on peut observer les traits les plus caractéristi-
ques des formations de sédimentation souterraine. Je
choisirai la localité de Prépotin, située à peu de distance
de Mortagne (Orne), et où j'ai eu l’occasion de faire des
études minutieuses.
Pour nous borner ici aux faits les plus essentiels, il
suffira de rappeler que la région dont il s’agit est consi-
dérée comme crétacée et que les assises de la craie turo-
niennes y sont exploitées en bien des points. La figure 1
jointe au présentarticle montre (1) comment, à Prépouin,la
colline est, sur une épaisseur de 14 mètres, composée de
couches fort régulières d'argile recouvrant des couches
de sable.
Sous la terre végétale se présente une argile à silex,
ocreuse et très impure, exactement semblable à celle
qu'on rencontre dans d'innombrables localités dont le
sol est constitué par la craie sénonienne. C'est l'argile à
silex de Dreux par exemple, et tout le monde est d’ac-
(1) Cette coupe n'est pas visible, je l’ai conclue des résultats
fournis par trois puits posés jusqu'à 15 mètres de profondeur
avec un diamètre de 4m. 50. La figure montre donc comme une
interprétation raccordant les données prouvées par les trois
points qui étaient essentiellement distants de 100 mètres envi-
ron.
282
cord maintenant pour y voir un résidu de la décalcification
subaérienne de la craie blanche. Son épaisseur est fort
variable à Prépotin; car, tandis qu'elle manque totale-
ment en certains points, elle peut ailleurs atteindre et
dépasser une puissance de 4 mètres. Elle porte dans notre
coupe le n° 6.
Au-dessous se présente une formation qui s’en distin-
gue très nettement, mais par un caractère dont l’im-
portance absolue est évidemment assez faible, par sa
couleur. C’est en effet une argile blanchâtre, et non
plus une argile ocreuse ; mais, à cela près, elle ressemble
à la couche n° 6 d’une facon très intime. C’est la même
composition générale et le même mélange avec des
LE NATURALISTE
commencent des lits sableux dont l’examen est encore
plus instructif. Ce sont d’abord des sables quartzeux qui,
en certains points (3 de la coupe), sont d’une blancheur
parfaite et se présentent comme du cristal de roche en
poudre plus ou moins mélangé demica, mais qui, en d’au-
tres points, comme 3 d et 3 e, sont plus ou moins ferru-
gin eux et même ailleurs (3 b) transformés en grès
_ocracés, désignés sous le nom de grignard. Ce qui leur
donne un intérêt très considérable, c’est que, parfois et.
spécialement en 3 c, ils sont pétris de fossiles, circons-
tance qui réclame que nous nous y arrêtions un instant.
Ces fossiles se signalent avant tout par leur apparence
corrodée, qui n'empêche pas leur détermination spéci-
Fig. 1. — Coupe du sol prise à Prépotin, près Mortagne (Orne). — No 1. Sables rouges ‘sans fossiles. — 2. Sables ocreux
avec Inoceramus problemalicus silicifiés. — 3. Sables quartzeux parfaitement blancs devenant ocreux dans la région marquée
3 a, et se cimentant en grès ferrugineux (dits grignards) en 3b; en 3 c, ils sont un peu jaunâtres et sont remplis de tests silicifiés
de l'Ostrea columba (variété gigas); ils sont jaunâtres et sans fossiles dans les parties 3 d et 3e. — 4%. Argiles parfaitement
blanches (terre de pipe) passant,en 4 a, à la nuance jaunâtre et, en 40, à une nuance rosée — 5.
Argile blanchâtre mélangée
de silex. — 6: Argile ocreuse à silex. — Echelle de 1/3000 pour les épaisseurs et de 1/30000 pour les distances horizontales.
rognons siliceux qui, ici comme plus haut, sont épuisés,
c’est-à-dire devenus spongieux par la dissolution d’une
partie de leur substance par les eaux d'infiltration. Aussi,
en présence d'une semblable identité, ne saurait-on se
refuser à voir, dans cette couche n° 5, un produit des
mêmes actions quiont déterminé la production delacouche
n°6.C’estévidemmentencoreuneassise de craie quia perdu
son calcaire, quis’est réduite à ses seules parties insolu-
bles etqui, étant moins ferrugineuse que la craie généra-
_trice de la couche 6, a donné un produit moins coloré.
Mais cette constatation a déjà de quoi contrarier bien des
préjugés. Cette deuxième argile à silex atteint 3 mètres
d'épaisseur et les dépasse même en bien des points, et
elle est réglée comme une formation normale, de sorte
qu'à l'examen ordinaire elle se présente comme plus
ancienne que la couche 6 qui repose sur elle, Et cepen-
dant son mode de génération va rigoureusement à l’en-
contre de cette interprétation ; elle n’a pu commencer à
prendre naissance,cela vasans dire,qu’après la décalcifica-
tion de la craie d’où résulte l’assise 6, et dès lors cette
argile n° 5 n'a commencé à apparaître, par isolement
progressif, qu'après la complète constitution de 6. La
couche 5, quoique plus profonde, est plus récente que la
couche 6 ; elle dérive d’une assise de craie plus ancienne
que celle qui à engendré la couche 6, et appartenant
sans doute également à l'horizon sénonien.
Mais ce n’est pas tout, et, au-dessous de ces niveaux,
fique : ce sont des tests de GryphϾa (Ostrea) columba de
la variété gigas tout à fait spéciale à certaines couches
turoniennes. En les regardant, de plus près,on reconnait
que ces valves de coquilles sont entièrement silicifiées,
ce qui suppose une modification profonde dans leur com-
position subie depuis l’époque de leur enfouissement.
Leur surface est fréquemment toute couverte de ces
tubercules aplatis,à couches concentriques, qui ont été
décrits souvent sous le nom d'Orbicules et qui manifes-
tent les traits essentiels des concrétions. Fréquemment
une valve est réduite à l’état de deux plaques siliceuses
correspondant aux deux surfaces primitives, interne et
externe, dutest et comprenant entre elles un vide qui
s’est converti parfois en véritable géode où le quartz à
cristallisé. Souvent, dans cet intervalle des deux épi-
dermes silicifiés, on observe comme des stalactites et des
stalagmites en miniature de substance quartzeuse ayant
le plus singulier effet.
Malgré son apparence stratifiée et sa richesse en fos-
siles, la formation sableuse dont je viens de donner une
si rapide description vient se ranger à son tour dans les
masses dont l’origine constitue un phénomène de sédi-
mentation souterraine : elle est le résidu pur et simple de
la décalcification lente d’une épaisse assise de craie turo-
nienne, dont les Ostrea columba,en partie silicifiées avant
la dissolution de calcaire, ont en conséquence laissé des
traces non équivoques de leur présence. Le sable quart-
\
LE NATURALISTE 283
zeux lui-même, par le mica qu'il contient en notable pro-
portion, décèle sa descendance de la craie micacée si fré-
quente à ce niveau dans cette région de la France, et il
se montre, en outre, augmenté de débris siliceux et
quartzeux concrétionnés ou cristallisés dont l’origine est
éclairée par les phénomènes de silicification constatés
tout à l'heure pour les tests de mollusques. Il suffit de
supposer que ces tests, extrémement friables, ont été
brisés par les tassements du sol pour comprendre, dans
le niveau qui nous occupe,la présence d'innombrables
grains d'apparence sableuse et qui se sont, pour ainsi dire,
constitués sur place en vertu des phénomènes que j'ai
antérieurement analysés en détail.
Comme on le voit, le sable à débris d’Ostrea columba
n’a pu se former qu'une fois isolées déjà les assises
argileuses superposées; il est donc géologiquement plus
récent qu'elles, et il faut d’autant plus y insister que
cette conséquence a provoqué des résistances chez
quelques géologues. D'abord on a dit que l'argile des
assises 4, 5 et 6 étant imperméable, l'attaque des craies
sous-jacentes par l’eau d'infiltration était impossible, et
que, par conséquent, toute la théorie sédimentaire sou-
terraine était fausse. Mais il y a simplement là une
assertion inexacte de la part de mes contradicteurs :
l'argile, malgré sa réputation, est loin d’être absolument
imperméable, et il suffit d'un temps plus ou moins long
pour que l’eau la traverse sur des épaisseurs quelconques.
C’est ce dont je me suis assuré par des expériences
spéciales répétées sur des variétés très diverses de roches
et qui mériteront une description ultérieure. Du reste, les
sortes d'argile que nous venons de citer au-dessus des
sables à Ostrea columba sont très loin de compter parmi
les plus imperméables, et la présence de rognonssiliceux
de même que celle d'innombrables grains sableux con-
tribue sans doute à leur grande porosité relative.
Du reste, on a fait beaucoup d’autres objections que
j'examinerai rapidement dans un instant, voulant d’abord
terminer la description de la coupe naturelle.
On trouve, en effet, au-dessous des sables à huitres,
l’assise n° 2 de la figure et qui a fourni quelques tests
silicifiés parfaitement reconnaissables de l’Inoceramus
problematicus, c'est-à-dire de l'un des membres les plus
caractéristiques de la faune turonienne. D’après ce que
nous venons de voir,il est évident que cette assise
résulte de la décalcification lente d’un massif de craie à
Inoceramustoute pareiïlle à celle qui est restée intacte dans
maintes contrées voisines et que cette décalcification n’a
pu se déclarer etse poursuivre qu'après la dissolution de
la craie superposée et qui renfermait les tests d’'O. co-
lumba. Le sable très stratifié qui résulte de cette opéra-
tion ne s'est isolé, n’a pris, par conséquent, son auto-
nomie stratigraphique, qu'après la constitution du sable
à Ostrea et, par conséquent, il est plus récent que les
masses qui le recouvrent : conclusion qu’il est très utile
de répéter indéfiniment,
Dans la coupe de Prepotin, on voit,au-dessous des lits
précédemment décrits et à 15 mètres au-dessous de la
surface du sol, se développer des sables rouges non fos-
siifères: c'est ce que nous trouvons de plus récent dans
le pays; ils représentent le produit de décalcification de
couches non déterminées, mais qui étaient évidemment
plus anciennes que la craie à Inoceramus. É
Tous ces détails, dans lesquels il pourrait sembler que
nous avons laissé s’introduire des redites, ne sont certes
pas de trop dans un sujet aussi nouveau que celui qui
5
nous occupe, car on lui a opposé les objections les plus
diverses et les plus imprévucs. C’est ainsi qu'un géo-
logue belge est ailé jusqu’à prétendre que les matériaux
si correctement déposés les uns sur les autres ne résul-
tent pas d'une sédimentation. Il a écrit, à propos d’un cas
comparable à celui de Prépotin et qui concerne une loca
lité où la craie grise est surmontée de dépôts tertiaires
(landéniens) : « En supposant que le landénien et le
quaternaire soient d'anciens sables calcaireux décalcifiés,
on devrait se borner à dire que le quaternaire a été
altéré avant le landénien et le landénien avant la craie
grise; mais l’ordre de formation de dépôt de sédimen-
tation de ces différentes assises est bien celui qu'indique
l'ordre de superposition de bas en haut. Si leur altéra-
tion subséquente, sous l'influence des eaux météoriques,
Fig. 2. — Reproduction expérimentale des particularités prin-
cipales de la coupe de Prépotin : sédimentation souterraine ar-
tificielle. — A, Tampon d'amiante déstiné à séparer] par un lit
perméable la portion principale d’une éprouvette à pied, de son
réservoir inférieur, — M, Mélange de carbonate de chaux préci-
pitéet de fer oxydulé en grains extrèémement fins ; les proportions
sont telles que ce mélange est gris clair. — €, Petit lit mince de
fer oxydulé provenant de la décalcification de la partie supé-
rieure de ce mélange. — D, Petit lit de grains quartzeux pro-
venant de la décalcification d'un mélange de calcaire précipité et
de sable quartzeux très fin. — «&, Petit lit de fer oxydulé très fin
provenant d’une seconde couche du mélange M, eatièrement dé-
calcifiée. — $, Sable quartzeux. — L, Liquide destiné à tra-
verser la colonne de substances superposées.
s’est faite en sens inverse, il n’y a pas lieu d'introduire
iei la notion nouvelle de sédimentation souterraine avec
succession de haut en bas. Je le répète, ü n'y a pas là
sédimentation ; on ne peut appeler sédimentation un enlève
ment de substance. » Ce sont là des critiques sans base,
car il suffit d'un instant de réflexion pour reconnaitre
qu'il n'y à aucune différence essentielle entre le cas dont
il s’agit et celui de sable siliceux, déposé actuellemen,
s
284 LE NATURALISTE
par la mer, à Dieppe (localité prise au hasard comme
exemple) au pied de la falaise crayeuse. Ce sable, lui
aussi, est un simple résidu de la craie soumise à une
altération dont l'artisan est la mer. Le déplacement de ce
résidu est horizontal, tandis que, dans le cas de la sédi-
mentation souterraine, il est vertical, mais là se borne
la différence et, dans tous les cas, il y a dépôt de résidu
sur un support sous-jacent et par conséquent sédimen-
tation.
Il m'a paru très utile de soumettre mes études sur la
sédimentation souterraine au contrôle, toujours sidécisif,
de la méthode expérimentale, et les résultats que j'ai
obtenus ont été absolument satisfaisants. Privé ici de la
place qui serait nécessaire pour la développer complète-
ment, je me bornerai à en extraire ce qui est immédia-
tement applicable aux points étudiés tout à l'heure.
La figure 2 représente l’une des très nombreuses dispo-
sitions qui ont été successivement adoptées, On y voit
une éprouvette à pied dont l’étranglement a été occupé par
un tampon d'amiante À et qui a reçu successivement :
1° une couche d’un mélange gris très clair de carbonate
de chaux précipité et de fer oxydulé très fin; 2 une
couche d'un mélange de carbonate de chaux précipité
et de très fins grains de quartz; 3° une nouvelle couche
de mélange à fer oxydulé qui vient d’être indiqué ; 4 du
sable quartzeux jusqu’au goulot. La colonne de sub-
stances diverses ainsi préparée, et qui avait été mouillée
au fur et à mesure dans toute sa hauteur, a été arrosée
par un peu d’eau aiguisée du 30° de son poids d’acide
chlorhydrique. Au bout d’un temps convenable on a vu la
portion supérieure du mélange indiqué sous le n° 3 se
limiter par en haut d’un fin liséré noir entièrement com-
posé de fer oxydulé débarrassé par dissolution du carbo-
nate de chaux auquel on l'avait mélé. L'attaque s’est
faite si doucement qu'il fallait la loupe pour apercevoir
quelques bulles d'acide carbonique se dégageant entre
les grains du sable supérieur. Au bout de cinq jours, la
couche de mélange, qui avait 2 centimètres d'épaisseur,
était entièrement réduite à un lit de 2 millimètres envi-
ron de fer oxydulé parfaitement régulier et ayant tout à
fait l'allure d'une couche qu'on aurait placée dans
l’éprouvette avant de la recouvrir du sable S. En même
temps le niveau supérieur de ce dernier sable s’est
abaissé de 18 millimètres sans perdre son horizontalité
eta maintenu par son poids la régularité du petit lit noir.
En continuant d’arroser avec de l’eau acidulée pour
remplacer la solution de chlorure de calcium qui vient
se réunir dans le réservoir inférieur de l’éprouvette et
qu'on peut évacuer par le tube de l'ouverture latérale D,
on voit le mélange de carbonate de chaux et de sable
quartzeux, numéroté tout à l'heure 2, qui commence à
s'attaquer par en haut, ce qui se reconnaît à l'apparition
d’un très mince lit de grains cristallins tranchant forte-
mentavecle blanc matdesrégionsrestéesintactes.Progres-
sivement ce lit va en s’épaississant, mais la couche qui le
fournit s’amincitet le niveau supérieur du sable S descend
peu à peu. Bientôt les 3 centimètres du mélange pri-
mitif sont réduits à { centimètre environ de grains
quartzeux marqués b sur la figure, et on voit le mélange 1
qui commence à s'attaquer de facon à se limiter par le
petit lit noir c de fer oxydulé. C’est à cet état qu'on a
arrêté l'expérience représentée.
On voit qu’un observateur non prévenu penserait que
l'éprouvette a recu les lits qu’elle contient dans un
ordre de succession représenté par la série ascendante
des lettres, c'est-à-dire M, puis c, puis b, puis à, puis Si
tandis que l'ordre d'ancienneté relative de ces petites
couches est M, S, a, b, c; ce qui est tout à fait différent
et comporte des conséquences tout autres sur les vicis-
situdes de régime que le point sédimentaire peut avoir
éprouvées.
Ces expériences, modifiées convenablement, ont permis
d'imiter un grand nombre de formes de sédimentations
souterraines et, par exemple, la disposition de certains
sables quartzeux ou phosphatés et de certaines argiles à
l'intérieur de poches ou de conduits (puits naturels, ca-
vernes, etc.), excavés dans des roches partiellement cal-
caires. Et c'est comme conséquence directe de ces résul-
tats que se sont dégagés des résultats sur l’origine de cer-
tains amas de substances exploitables telles que des lits
de rognons phosphatés (coquins des Ardennes) ou des
assises de divers fossiles désignés souvent sous le nom
anglais de bonebeds et fréquents, par exemple, dans les
régions inférieures du terrain Jurassique.
Mais il est une dernière conséquence de ces études,
beaucoup plus importante au point de vue de la géologie
générale et que je veux signaler en terminant cet article
déjà assez long. C’est la notion qui peut résulter de l’ob-
servation des sédiments souterrains en ce qui concerne
la détermination du facies continental.
On sait comment Constant Prevost, dans un mémoire
qui fiten son temps une forte impression parmi les natu-
ralistes, insista sur ce fait qu'aucune couche du sol ne
présente des preuves du régime continental, interrom-
pant le régime marin ou lacustre, c'est-à-dire aqueux.
L’illustre promoteur de la doctrine des causes actuelles
énumère les traits de la surface actuelle du sol pour
montrer quon ne les observe jamais en profondeur : ce
qui d’ailleurs pourrait s'expliquer parfois par l’écroûte-
ment que la mer fait assez ordinairement subir aux ré-
gions continentales qu’elle envahit.
Or, les observations précédentes nous montrent que le
régime continental ne se borne pas à donner à la surface
du sol un caractère particulier; il imprime souvent au
sous-sol et successivement à des profondeurs de plus en
plus grande, par les eaux météoriques qui s’y infiltrent,
des traits facilement reconnaissables et dont l’un des
plus frappants est la décalcification. Par conséquent si
l'on retrouve, à des niveaux quelconques, des assises ma-
nifestant les effets de cette soustraction du calcaire avec
concentration de résidus insolubles, on sera autorisé à y
rechercher des indices du régime continental et à en
faire des documents utilisables pour la paléogéographie.
La place me manque aujourd'hui pour développer ce
grand sujet et je dois me contenter jusqu'à nouvel ordre
de l'avoir indiqué.
Stanislas MEUNIER.
LA VANILLE A MADAGASCAR
La culture du vanillier est l’une des plus intéressantes
de ia côte Est, en raison des bénéfices élevés qu’elle pro-
cure dans l’état actuel du marché et malgré les nombreux
aléas auxquels elle est exposée certaines années. La
préparation des gousses de la précieuse orchidée, qui est
NP ES TU ee DU UE NES TU
4“
dos ne di ns a fit
LE NATURALISTE 285
chose fort délicate et nécessite l'intervention de spécia-
listes d'une expérience éprouvée, paraît avoir été heureu-
sement réalisée dans la plupart des lots exposés.
La vanille peut être cultivée avec succès dans une
grande partie du versant nord-ouest, à Nossi-Bé et les
îles voisines, dans le Sambirano et même dans la province
de Majunga.
On plante le vanillier au commencement de la saison
des pluies par boutures : il faut de deux ans et demi à
trois ans pour que les plants fleurissent ; ceux-ci donnent
trois ou quatre récoltes et meurent. La culture du vanil-
lier réclame des soins méticuleux; elle convient plus
particulièrement aux colons possédant des capitaux qui
leur permettent d'attendre les premières récoltes : elle
les rémunère ensuite largement de leurs soins et de leur
attente.
La province de Vohémar est une région où la culture
de la vanille paraît appelée à un grand avenir.
ESSAI MONOGRAPHIQUE
SUR LES
Coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane
LUCANUS PARRYI, — Henri Boileau.
Extrêmement voisin du Luc. Oberthüri, le Luc. Parryi
se distingue immédiatement de ce dernier par la colora-
tion noire de sa tête, de son corselet et de ses mandi-
bules ; il n’en est pas moins un charmant insecte auquel
cette livrée un peu obscure donne je ne sais quel cachet
qui puise son charme dans cette sévérité même.
M. Boileau, qui ale premier signalé cette gracieuse et
intéressante espèce, a bien voulu me communiquer, pour
ce travail, la description et la figure qu'il en a préparées
et qu'il destine à un ouvrage important qui doit être pu-
blié ultérieurement dans nos Annales.
© Luc. Parryi. — Insecte de taille moyenne, voisin du
« Luc. Fortunei — Parry, et, plus spécialement, du Luc.
« Oberthüri — L. Planet.
« Tête large, plane, finement granuleuse. Bord frontal
« concave, à peine sinueux, angles antérieurs saillants,
« non aigus, Yeux assez gros, à demi divisés par les
« canthus; mandibules moyennes, peu infléchies, régu-
« lièrement arquées et finement granuleuses.La dent ter-
« minale de la fourche apicale est plus longue que l’autre,
« la dent médiane est assez grêle; elle est précédée et
« suivie de plusieurs petits denticules. Le bord antérieur
« du labre forme un angle obtus, l’épistome est très bref,
. «© Antennes longues, assez fortes, dont le scape est
« moins cintré que chez le Luc. Oberthüri, Les articles
« pectinés, au nombre de quatre, sont plus développés
« que chez ce dernier.
« Leprothorax, sinueux latéralement, rétréci en avant,
« coupé presque droit en arrière, est régulièrement gra-
« nuleux ; l’écusson, arrondi, est finement ponctué.
« Les élytres, sensiblement plus courtes que chez les
« espèces affines (Oberthüri, Delavayi, etc.), sont lisses;
« l’angle huméral est épineux, la bordure latérale très
« développée.
a En dessous, l’insecte est entièrement dépoli; le men-
« ton, assez large, est assez régulièrement arrondi en
« avant; la saillie du prosternum est petite, mais bien
« marquée, elle est formée par une carène étroite, cou-
« pée droit en arrière et dont la pointe fait saillie vers
« le bas.
Fig. 1.
Luc Oberthüri, femelle.
Fig. 4.
Luc. Parryi, mâle.
« Les pattes, sur leurs fémurs, sont presque lisses;
« elles sont longues et grèles ; les tibias antérieurs, sen-
« siblement cintrés, sont armés extérieurement de dents
« assez faibles, inclinées en avant, et entre lesquelles
« existent des denticules ; les médians portent trois ou
« quatre épines aiguës, bien développées, dont les infé-
« rieures sont les plus longues ; les postérieures portent
« trois épines peu saillantes.
« L’insecte est entièrement d’un beau noir profond;
« seules les élytres portent chacune une tache oblongue,
« jaunâtre, ne couvrant guère que le tiers de leur sur-
« face,
« La femelle, encore inconnue, est probablement en-
« tièrement noire et très voisine, comme aspect, de
« celle du Luc. Oberthüri.
« Je connais deux mâles de cette espèce, rapportés
« tous deux de la Chine méridionale (Kualin) par M. de
« Latouche, lequel a bien voulu me céder le plus grand
« des deux que je décris ici. »
L'autre ©”, d'un développement mandibulaire beau-
coup moindre, présente la même coloration noire du
corps et des pattes ; les taches élytrales ne sont pas sen-
siblement plus faibles ; la structure est notablement plus
robuste que celle des Luc. Oberthüri de même dévelop-
pement.
FEMELLE
Ainsi que je l’ai dit précédemment, cette femelle dif-
fère grandement de celle du L. Delavayi; sa forme est
beaucoup plus élégante, le corselet étant bien plus large
et plus arrondi et la forme des élyÿtres plus ovalaire ; les
pattes antérieures sont puissamment armées, leurs dents
sont longues, nettement triangulaires et terminées en
pointe acérée.
La coloration est fort intéressante, car elle diffère en-
tièrement de celle du mâle; elle est, en effet, toute noire,
286 LE NATURALISTE
sauf vers l'extrémité des élytres, dont une très petite
partie apparait faiblement orangée lorsqu'on examine
l'insecte sous un certain jour.
C'est peut-être à cette espèce qu'il convient de rap
porter deux petites femelles, en tout cas voisines, que je
figure ici et qui ont une histoire assez amusante.
Rapportées toutes deux par M. l'abbé A. David, et
venant très probablement de la région de Mou-Pin, elles
s'étaient trouvées réparties, l’une dans la collection de
M. de Mniszech, l’antre dans la collection du Muséum
de Paris.
Or, la première, devenue par la suite la propriété de
M. R. Oberthür, est précisément celle que M. H. Dey-
Fig, 2 et 3. — Luc Oberthüri. femelles (?).
rolle avait, par erreur, figurée et décrite, en 1878, dans
nos Annales comme étant la femelle du Pseudoluc. Davi-
dis. ;
Quant à la seconde, elle avait été placée au Muséum
côte à côte avec le Luc, Boileavi type (le même que Parry
avait faussement pris pour un L. Dybowskyi), et je m'é-
tais, à mon tour, fourvoyé en la considérant comme une
femelle de petite taille du L. Boileavi.
Les deux femelles dont il s’agit diffèrent bien un peu
l'une de l’autre par la structure de leur corselet, mais si
l’on tient compte que leur tête a exactement la même
conformation, que leurs antennes sont identiques, que
leurs autres organes et la nature de leurs téguments ne
manifestent que les différences que peuvent présenter
deux individus distincts d’une même espèce, je ne crois
pas qu'on puisse les séparer spécifiquement.
Chez l'une comme chez l’autre de ces femelles, la tête
est courte, déprimée, très plane sur son disque, à granu-
lation fine et régulière, mais, tandis que chez la pre-
mière, le corselet est simplement rétréci en arrière, à
bord postérieur subrectiligne, il est, chez la seconde,
plus court et beaucoup plus arrondi, rappelant davantage
celui de la femelle du L. Oberthüri.
Cette seconde femelle diffère en outre de la première
par les caractères suivants : Les élytres sont moins am-
ples et plus ovalaires, les pattes postérieures sont nette-
ment arquées en dehors, la coloration est légèrement
submétallique et les macules jaunes des cuisses sont
bien plus larges et plus tranchées.
Chez l'une comme chez l’autre, le dessous du corps est
finement villeux.
L. PLANET,
CHRONIQUE mer
Destruction des souris en Suisse. — À la suite
d'hivers assez doux, les souris des champs se sont telle-
ment multipliées ces dernières années dans différentes
localités de la Suisse, et notamment dans plusieurs
communes du canton de Zurich, que les moyens ordi-
naires de défense ont été absolument insuffisants pour
arrêter leurs ravages.
Parmi les différents moyens mis en pratique pour
combattre ce véritable fléau on a eu recours de préfé-
rence à l’avoine saccharinostrychninisée qui, d’après de
nombreuses expériences, paraissait être le procédé le
meilleur et le plus simple. Son action est en effet extré-
mement rapide puisqu'au bout de vingt à trente minutes
après l’avoir répartie on peut voir des souris mortes sur
le terrain.
Pour faire la préparation, on emploie de l’avoine mon-
dée (gruau) que l’on soumet préalablement à la vapeur
surchauffée, ce qui transforme alors l’amidon en dex-
trine, Ensuite, les grains attendris sont plongés dans
une solution de strychnine fortement colorée en rouge,
puis sucrés avec de la saccharine pour masquer le gout
amer du poison, et enfin séchés.
L'application de l’avoine-poison ne se fait pas simple-
ment à la main; ceserait en effet un travail long et
pénible, car il faut se baisser constamment. Mais on a
recours à un instrument spécial appelé communément
« fusil à souris ». La partie importante de cet instrument
est la soupape qui, à chaque pression ou rotation d'un
levier, laisse tomber un certain nombre de grains em-
poisonnés : six, huit, dix. Dans le haut se trouve un ré-
servoir conique destiné à recevoir une provision d'avoine.
Munis de cet appareil, les cultivateurs, mis en ligne,
s’avancent régulièrement de facon à répandre le grain
sur le territoire au préalable délimité. Il n’est, cependant,
pas nécessaire de déposer du poison dans tous les trous
de souris, il suffit d'en déposer dans les principales en-
trées. Le canon du fusil est introduit dans le trou, on
exerce une pression ou rotation et le travail est fait.
Les rapports des communes qui ont mis en pratique
ce système en parlent d’une facon très favorable et con-
statent que c’est le moyen le meilleur et le plus efficace
qui a été employé jusqu'à présent pour la destruction
des souris.
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Consortaria F.
Tephrosia Consonaria H.
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Jodis Vernaria H.
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Phorodesma Pustulata Hufn.
Hemithea Strigata Mueller.
Ephyra Pupillaria H.
Porata F,
Punctaria L.
Trilinearia Bkh.
Asthena Candidata Schiff.
Thamnosioma Contaminaria H.
Cabera Pusaria L.
Macaria Notata L.
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Hybernia Lencophæaria $S. V.
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Marginaria Bkh.
Defoliaria L.
Anisopteryx Aescularia $S.
Aceraria S. V.
Oporabia Dilutata S. V.
Eupithecia Irriguata H.
MassiliataD.et Mill.
Coccifera Mill.
V:
Dodoneata Cn.
Phibalapterix Lupidata H.
Cidaria Siterata Hufn.
Chèvrefeuille.
Limenitis Camilla S. V.
Sibylla L.
Abbreviata Steph.
MOIS DE L'ANNÉE
OU L’ON TROUVE
Chenilles
(Quercus)
Mai.
Juin, juillet.
Mai.
Mai, juin.
Août.
Mai.
Mai, juin.
Mai.
Juillet.
Avril, août à octobre.
Mai, juin, septembre.
Mai, juin, août à octob.
Mai, juin, août, sept.
Août, septembre.
Avril, mai.
Juin.
Juin, août, septembre.
Juin.
Mai, juin.
Mai, juin, juillet.
Mai.
Juillet à septembre.
Juillet à octobre.
Avril, juillet.
Mai, juin.
Fév.,mars, juillet, août
Mai, août, septembre.
Juillet.
Mai.
Mai, septembre.
Août, septembre.
Mai.
Belle saison.
Juin, septembre.
Juillet, septembre.
Juin, septembre.
Avril, juillet.
Mai, juin, sept.octobre.
Juin, septembre.
.| Mars, avril.
Mai, Juin.
Mai.
Mai, juin.
Mai (fleurs).
Juin.
Printemps.
Mai, juillet.
(Lonicera)
Avril, mai.
Mai. .
à
Papillons
Septembre, octob.,nov.
Mars.
Avril.
Juillet.
Août.
Avril, juill. à sept.,nov.
Mai, juin.
Juillet, août.
Juillet.
Mai, juin.
Juin, juillet.
Avril, mai, octobre.
Juillet, mai, juin.
Avril, mai, juillet.
Mars à juillet, sept.
Mai à septembre.
Avril, mai.
Juillet, août.
Juillet à septembre.
Jun, juillet, septembre.
Juillet à septembre.
Octobre, novembre.
Février, mars.
Mars.
Mars, avril.
Mars à mai.
Avril à juillet.
Mai, juin, août.
Juillet, août.
Avril, septembre.
Avril, juillet,
Avril, mai.
Juin.
Mai à juillet.
Avril à juin.
Juin, juillet.
Belle saison.
Mai, août.
Avril à juin, août.
Mai, juin, août.
Juin à septembre.
Mai à août.
Mai, août.
Aout, septembre.
Février, mars.
Octobre, nov., février.
Novembre, févr.,mars.
Oct., nov.,févr., mars.
Mars.
Novembre.
Octobre, novembre,
Avril, mai.
Mars, avril.
Mars.
Mars, avril.
Septembre, nov., déc.
Juin, septembre à nov.
Juin à août.
Juin, juillet.
HABITAT
FRANCAIS
France centr., sept. et orient.
Toute la France.
France septentrionale.
Toute la France.
France méridionale, Aube.
Toute la France.
France centrale et
Toute la France.
France centrale et méridionale,
Provence.
France méridionale,
Toute la France.
méridion.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France centrale et orientale.
Toute la France.
France méridionale,
Beaune-la-Rolande.
France centrale et méridion.
Provence, Montpellier,
Toute la France.
France centr., sept. et orient.
France septentrionale, Paris.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
Lyon,
France centrale et méridionale,
Toute la France.
France centraie et orientale,
Toute la France.
France centrale et méridionale.
Toute la France.
France méridionale.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
Toute la France.
France centr., sept. et orient.
France centrale et septentrion.
France centrale et orientale.
Cannes.
Provence, Ardèche.
France centr., mérid,etorient.
France centrale et méridionale,
Toute la France.
Toute la France.
France centrale et septentrion.
QT
LE NATURALISTE, REVUE ILLUSTRÉE D£S SCIENCES NATURELLES
TABLE DES MATIÈRES
DU QUATORZIÈME VOLUME DE LA DEUXIÈME SÉRIE
1900
Mammifères, Oiseaux, Reptiles, Poissons
GÉNÉRALITÉS
Animaux promenés et tués dans les cirques chez les anciens,
B/Santini de R10]1S 7200 MSA EEE ent PS PAR ARR 59,
Au sue t/dN MON e AUS TRS RE PR
Chasse des Echassiers au Hutteau sur les grèves de la Manche,
les espèces qu'on y tue, Magaud d’Aubusson...................
Description duiGrabiers Tone been tee nee
Disparition du gibier dans le département de la Seine-Inférieure,
PAUL NO PRES Ne Cm LP en a AA ARR ETS AS
Elevage des oiseaux de basse-cour en Egypte...................
Etude de l'ours et de la loutre au point de vue des étymologies,
HD BOUSON ET M ele cela véle ere Ne Sense tan ein ete Te
La caille dans le département de l'Orne, A.-L. Letacq............
La destruction des oiseaux en Charente-Inférieure, Un abonné...
Latloutre 1DHABONRON MERS eee NE nie
antiquitérde l’homme DABougon. nee ice ere
La propreté du logis chez les animaux, H. Coupin...............
Le cygne chanteur, Magaud d’Aubusson.........................
Leïdressase-des'animaux. DriRegnaulté 0eme
Le groupe des oiseaux nageurs, De Schaeck.....................
L'élevage de l’Isatis ou renard bleu, H. Coupin..... > Eros o
eperroquel ASantini RAA res mne nr Rene BA
Le sens moral chez les animaux, D' Bougon......................
Les animaux à l’attaque des serpents, Dr Bougon...............
Fes fanmmauxiauvthéatre :HACOUpin cer eeecr cc
Lésétangsinoissonneux d'autrefois. -: ue -mmeen eueesenele
Les Glaréoles (mœurs, chasse, utilité), Magaud d'Aubusson.......
Les Grèbes, espèces francaises, description, mœurs et chasse,
Masaud id AUDUSS ON TAN TN RE eee EU
Les oiseaux nuisibles, le Geai, Albert Granger..................
Les oïseaux nuisibles, la Pie, Albert Granger...................
Les races des Comores
Losraces des Madarascan ee ee RO CET
Les races du: Sénépal-et du-Soudan.s 4.2. cree
Les Rats en Thessalie
CC CC
Arthropoiles, Mollusques, Rayonnés, etc.
GÉNÉRALITÉS
Apparition tardive des lampyres en 4899................. ......
Conservation des chenilles en collection, Paul Noël..............
Contribution à l’étude de la faune de la Roumanie (fig.),
moviei
pere Ts ten se (ef lea ele loterie siela siens epeiele to re faiel sis o 07 ele Mie lele tele le laiers
vpeneheiekeleslañorele.s ele fo lsie.e le ereretete niet ne pates ele se ee
CRC
nn eoe
COCO
sen sn stone
Lépidoptères nouveaux d’Asie, Austaut...,..........,,..,........
Les Coleophora du Dorycinum, P. Chrétien.,......" 1.0
Les moyens de combattre la cochylis de la vigne par les traite-
ments d'hIVEr.. sur meteo tee Le) DOTE NE UE T ENREE
Les Papillons et les Chenilles en Krance au mois dé janvier,
LNFUCUS RE ete site to Os DA EE
Les plantes de France, leurs Chenilles et leurs Papillons.... 925,
SRE 43, 55, 16,125, 151, 166, 199, 199, 244, 227, 238, 263,
LesiSauterelles ten Espagne tra Penee LR COUNTER RE NCENE
Méthode employée pour combattre le Phylloxéra en Allemagne...
Mœurs et métamorphoses des Brachydères lusitanicus, Cap Xam-
beu
Mœurs et métamorphoses du Dermestes undulatus, Xambeu.....
du Trachyphlœus scaber, Cap. Xambeu.
Notice sur deux variétés inédites de Parnassius apollo, Austaut...
Ponte de Trichosoma hemigenum, Cap Xambeu.................
Un cas probable de mimétisme défensif chez la Ranâtre (fig.), Pla-
LEAUS TR RER remercier eee RCE Ne TIC
PRINCIPALES ESPÈCES DÉCRITES OU CITÉES
AnODHdAeS EE... Less 158, 181 Malachides........,.. 158,
Anthocharis orientalis (n. s). 48 | Mylabrides.................
Bostrichidess-#iettetr 158,. 169, || Œdémerides "14... .P6he
Brachyderes lusitanicus..... 8 |"1Æneistelsa/{(ns)..."...#1x
Gebrionides er EPA AMÈE 157 — verdanda var. vanda
Chematobia brumosa....... 259 (DIS) en
Chydorusclavatus(n.s.) (fig.). 461 | Parnassius apollo v. inversa
CLÉS PEN ere 158, 218 EHebuSIS rare cents
Coleopnora tele reterete 68 | Pseudolucanus Mhniszechi
Cyclops viridis (fig.).,...... 175 (fig)...
Cypris cribrum (n. s.) (fig.).. 161 — placidus (fig.).
— perforata (n.s.) (fig.). 162 | Ptinides.............. 158,
— tridentata(n.s.) (fig.). 162 | Ptinus Groulti (n. s.)........
— unidentata(n.s.)(fig.). 461 — obscuripes (n. s.)....
DÉROIGÉE Mo oo cotes 157 | Sandalus Bourgeoisi (n. s.).….
Doermestes undulatus.... .. 143 | Simocephalus vetulus (fig.)..
Diaptomus furca (n.s.) (fig.). 175 | Syrichtus inachus var. thibe-
— Rumanæ (n. s.) tana (Nes) ere
(Ar NAME 175 | Tapinostola Boudii.........
Elaterides mere men 157 | Thaptor brevipennis (n. s.)..
Hydrilla gluteosa........... 35 — tesselatus (n. s.)....
Pimpyrides nee ee 158 — variegatus (n. s.)...
Lucanus cervus var. Judai- Delephorides ee tee
CUS) (AP) Re re 21 | Trachyphlœus scaber.....,.
Lucanus Dybowskyi (fig).... 47 | Trichodesma nigromaculata
— Delavagi (fig.)..... 229 a. SORA
— Oberthuri {(fig.)..., 229 — regalis goyaven-
— singularis(fig.)(n.s.). 11 DS er
— _ vicinus (fig.)....... 164 Fe hemigenum ....
Lymexylonides............. 158
Macrothrix magnantennula
(UE RE DE Et De A 160
Botanique
GÉNÉRALITÉS
Apercu sur la flore du Sénégal et du Soudan........ Shtodobarose
A propos de l'article. Curiosités botaniques, Dr J. Marcel Jeanty.
Culture "du figuier en (Grèce -crreeeteeerceLreerre tr
Curiosités botaniques, Dr Bougon.......................... DbI80
La coque du Levaut ffig.), E. Massat.................... 5590000
L’Actinomycose et ses dangers pour des travailleurs agricoles...
Pa'culturefdu Riz aus Siam eee cer ere RCE CCE CEE
La Cculture/duitabac'eniGrèce MP EME CEE ERP RER trs
La Flore de têtards de saules dans les vallées de la Seine, P. Ha-
REPTOT IR R CIN ie nee PS LES A PES SLR SE RES
La vanille à Madagascar........ CODEN Porto dons osLone
Le cacao à Madagascar.......... Se Bb Ron 0 oo naucco
D >
19
ON
LE NATURALISTE
Pre Gui (Vescum album), D' Bougon............................
PE microbe de la peste, Dr Berdal...:..4......3%.2. 2...
… Les Desmidiées, Dr Bougon........
lé
À
… L'Ipecacuanha (fig.), E
Les arbres dans les grandes villes, D' Bougon..................
Mes Chènes au point de vue forestier...:..:.:.....:...<.. one
Les Chènesporte-gui de la Normandie (fig.), H. Gadeau de Kerville.
Les écorces médicinales, l’angusture vraie (fig.) Massat...........
Les Erables au point de vue forestier...
HésiOrchidéesaindisenes, P. Hariot.:1=.::.12::.2....4..3..20..
Les plantes bulbeuses de la Flore francaise, Liliacées, Hariot.....
Les Plantes et les noms de lieux, Dr Bougon..............,......
Les Plantes bulbeuses de France, P. Hariot..
iées Plantes myrmecophiles (fig), P. Hariot.:.....:.......7....
Les Thuyas....... Mie
MA SS At ne en mere en eve RS TE
Maladie bactérienne du Mürier.....,..2. 148%. secure:
je
D
(à
(
LS
#
|
— Nouvelles expériences relatives à la désinfection antiphylloxérique
1h
ps
Al
“ Galypea cusparia (fig).......
L
« Actinomyces bovis.......... 29
24
1
MAIS SADLUNIOLS RE Net etant cms elrieis lemme lereiele ele siape »
Note sur le bois secondaire du Tulipier de Virginie, Emile Ballé.
HESÉDI AIS AT MVIBITE : 22 ie maiee cie cemaee cie spectre sie ee
Üncnampignon rose vénéneux en France....................….2
Un exemple de longévité de la graine, Ch. Le Gendre...........
PRINCIPALES ESPÈCES DÉCRITES OU CITÉES
Jpecacuanhar(figr)re is...
PATACÉ ES SEE eureen rer
Myrmecodia (fig.)...........
Psalliota campestris........
Stropharia coronilla........
Viscum album........
Amanitis musCaria.......... 2
Amaryllidéess,. si...
Araucaria imbricata (fig.)...
Dorycnium suffruticosum... 68
Géologie, Minéralogie
GÉNÉRALITÉS
Ancienneté dellPhomme,:Dr Bougon....,5.,,. tes,
Congrès géologique international de 1900........
Examen de la Météorite tombée le 12 mars 1899 à Bierbelé en
Finlande, Stanislas Meunier.........:..,...,.,,.
Géologie de l’enfouissement d’une chaussée dans le sol, D' Bou-
OP DR D AS nn te eee ae eo palat a a lerape ea 0 La ut ete
tan expérimentale des cheminées des fées (fig.), Stanislas
MEUNIER PART ane diese der eessovee ete de dr Late eee DE
DL2 Faune ante-primordiale, G. Garde...:..........,...... nee
La Sédimentation souterraine (fig.). Stanislas Meunier...........
artalle des suex (fie), Massat..............
La Terre, son origine, sa fin, D'Bougon.............,...,..,,.,
PerbitumesensAuvergne; Gr: Carder 2... 4%. eue.
Le Campignien en Gitonde, station du Rale (fig.), P. A. Conil....
Les Chotts salés de l'Algérie, Dr Bougon...............,........
Les meulières de Montmorency (fig.), Stanislas Meunier.....,..,
Les pierres creuses de Puteaux, D' Bougon........,..........,.
Mes terres alcalinessDr-Baugons.......,...,...0.., 1,0
LL
li
Les tremblements de terre en 1899 (fig.), E. Massat......,,...,..
Notetsurdles-Tourbes (fig) Renault........,,..........12.5.....
Poissons fossiles des environs de Paris (fig.), E. Massat........,
Remarquables nodules de grès (fig.), Stanislas Meunier..........
Sablière de la Beuvrière près de Béthune (fig.). H. Boursault....
Sur l'abus des suppositions glaciaires en géologie (fig.), Stanislas
NTÉUNIER SR RP Sr eee Datieaetele ne le die rente ae
£ur l’origine du Diluvium de la Seine conclue de l’examen de sa
structure intime (fiz.), Stanislas Meunier... ..... nel ne
Sur un gisement de plantes fossiles de l'argile plastique (fig.), Fri-
Al sise Tote REMONTER saurai sion cie ie ei
Transformation rapide de bois en une substance semblable à un
combustiblé fossile: (Grarth})..::.4:.5.:.:.,4....,... OO TON
PRINCIPALES ESPÈCES DÉCRITES OU CITÉES
Aneglité..i.......,........ 260 | Laurus excellens (fig.)......
Artocarpidium conocephala — regularis (fig.)......
(RAP RENAN. 267 | Leucophænicite ............
Britholite. sr: 261 127116" Leucosphéenite 2e: .1. 0.00
Chalcolamprite........ 261, 211 | Lorenzite............ JÉTBOER
Cinnamomum Larteti (fig.). 268 | Magnolia inæqualis (fig.)
Cordylite....... HABUUORE 20 2600) PNarsarsukite eee.
Endécolite............ 26121 NaASONITE Re een e
Re Epistolite RDS SPA eee au 261 Parisite.ss- secoue ee
* Fjcus eocenica (fig.)........ Persea parisiensis (fig.)...,.
+ — orthonervis (fig.)...... — Brongniarti (fig.)....
—- Deshayesi (fig.)....... 261 | Salix (fig.)..:.. nn ete evete
IE Glaucochroïte.............. 34; | Schizolite..:.........1: 261,
1h Grewia Suessonensis (fig.).. 268 Spodrophyllite ..........,..
MUHancockite:.......:........ 334) Stercuha (fo)... de
P'Hardystanite..….........….. 33 | Tamiolite..................
Fi
RER
Divers
Alphonse Milne-Edwards (fig.). Nécrologie, H. Coupin..........
Cimetières de chiens et de chats, H. Coupin:......:..,!........
Coloration. de positifs pour: projections. ............,..,,.,....
Congrès international d'anthropologie et d’archéologie préhisto-
PUR UE MR ee retira SE Done
— de:léducation physique..:...::...,....…
Conservation des phototypes, photocopies, photocalques, H. Cou-
EE LUE en UT
Eventaïls photographiques, H. Coupin...................:......
Influence de l’Eclipse du soleil sur les êtres vivants, D' Bougon..
L’acétylène à l'Exposition universelle... ......,.............:...
La photographie des Oiseaux en collection, Deschaeck...,.....
Beaumaturelle ADMBOURON Er ee Meme eee de
Le DahomMmeyetiSeSPrOdUIESE RL ses meme root
Le langage sifilé, H. Coupin
Lie tir. au canon contre la grêle en Suisse. .........7....,:.....:.
Herythmerdans la musique; DYBougon.:.... m2.
Les comédiens de la nature, H: Coupin........::..5..,.:...,,...
Bes œufs ide Paques 2 COUPIRES PR -ecee-tieeee.
Les soies du Bombyx mori, du Jambonneau et de l’Araignée,
HE NÉS SAR ARR SR SE A de Pate r delete D en en craie
L'histoire naturelle dans les vêtements des premiers hommes,
D'ÉBOUSONE M Le seems does
— et l'Ethnographio à l'Exposition universelle
de 1900, D'Laloy.. :.: 192, 141, 183:195,
Micrographie. Milieux conservateurs, lutagedes préparations, Gru-
NAN ARS dre D DE OR PTT DEL 14,
— Montage de petits animaux en préparation, Gruvel.
Photographie et étude des nuages..." 2008 dec eneunen
— sympathique Ar DUMAS ER RL ee
Ouelquesmotsisurleïvariétisme, MPic eme ae
Remédesaenobles FDEÉReonaultere + terme neue. ee
— populaires de Normandie, D'E. Spalikowski..........
Reproduction à bon marché des dessins, H. Coupin.............
Tirage industriel des clichés photographiques....,...,............
Transformation de la loupe simple en loupe binoculaire et stéréos-
CODIQUE RS RAR ue à A Re tee ie ut D
Un Corbeau sur un arbre perché....
Une petitetacheé-du soleil, DBougon:......1.;040.,..208
Chronique
Capture-de Mépidoptéres en Erance net Rene dem. nee
Congres international:contre la lCochylis.".,......1.,.. 40:
Coursidentomolosi ie aorICOle ER CNET ARE
DeStTUCtIONIdeS SOUTISNCN SUISSES re eee ee ceetdesmre en
ÉARDIDITÉTIC AVNIAITE den eme een ec ment Mae
La Musca olearia et Ja récolte des olives dans les Pouilles (Italie).
Nouvelle maladie délabetteraye asucre. , ...45....2. 27.2.
Utilisation de l’aloës pour la destruction des altises en Tunisie...
Vente aux enchères publiques des livres d'histoire naturelle de la
bibliotheque Bronentantr REC PEER ren -
Bibliographie
Académie des Sciences
Zoologie
Automatisme des cellules nerveuses RO) st a SAR
Composition et valeur alimentaire des Mammifères, Oiseaux et
Reptiles (Balland)......... 1 Mn dite OO Re Can o tt
Constitution du follicule ovarien des Reptiles (Mlle Loyez)........
289
142
97
31
204
20%
168
87
265
290
Défense de l'organisme contre les propriétés morbifiques des sé-
crétions granulaires (Charrin et Lavadite)....,.......... rss
Effets du travail de certains groupes musculaires sur d'autres
groupes qui ne font aucun travail (Kronecker et Cutter)...
Epicaride nouveau (Ch. Perez)...... inseseseseseesterseeesesee
Evolution des monstrillides (Malaquin)..........................
— sans hétérogonie d’un Angiostome de lacouleuvre à col-
Her (Ratlhet) nee er Terme eee
Existence du Ceratitis capitata v. hipaméne de Brême, environs de
Paris (Giard). LAN etienne ele Rance mena
Faune halophite de l'Auvergne (Bruyart et Eusebio).............
Hermaphroditisme et la parthénogenèse chez les Echinodermes
(Viguier) Sn ALURMAURE Rien re se eees son eneseseee nee
Hétéroplastie (N. A. Barbieri)...... ADO Lana dE on rss
Hypothèse sur la nature des conditions physiques de l'odorat
(Vaschide et Van Nielle)................... ent ani
La distribution des sexes dans les pontes de pigeons, Cuenot.....
Morphologie de l'appareil respiratoire de la larve et de la nymphe
du Bruchus ornatus (Séurat} ee SEE EE LEE
Observations sur les Péripates américains (G. L. Bouvier)...,....
Opistobranches des côtes océaniques et des côtes méditerranéennes
(A. Vayssière).......................4.44.....: note those
Organes générateurs mâles des Coléoptères et testicules composés
et fasciculés (BOrdas) ere MR ER RUIES bons ne
Sur les fonctions de la tige cristalline des acéphales (H. Coupin).
Variation du Plankton au lac Chauvet (Bruyant)................
Vie des organismes inférieurs (Kunstler)........................
Botanique
Action de l’air sec et de l'air humide sur les végétaux (Eberhardit).
— de la pression totale sur l'assimilation chlorophyllienne
(Friédel) Rene rEUr NON UD PIE bio dteaone
Appareil sexuel et la double fécondation chez les Tulipes (Gri-
ei Den DO PE DR OEM DO TN CHU CAD
non chlorophyllienne chez les plantes d'appartement
(Griton)e en REC Rennes LOE 20 UE MÉCENE DOME
Assimilation chlorophyllienne dans la lumière solaire qui a tra-
versé des feuilles (Ed. Griffon)................................
Bactéridie myophage du lapin (Phisalix)............. SAONE RE
Composition chimique d’un pigment vert de l'Amanie muscaria
— (GriMtts) PRE ARE Re eee see cseet
_ de l’albumen de la graine de Févier d'Amérique (Go-
PET) rl eee M ererte elelateneieliene ele le one eielo he cie inst
Culture ne dite sur l’adaptation des plants au climat médi-
terranéen (G. Bonnier)...........:.............4.4.
— des lupins bleus (Dehairain et Demoussy)...............
— des lupins blancs (Dchairain et Demoussÿ)...............
Echanges gazeux entre les plantes entières et l'atmosphère (Schloæ-
Sinon) Se ee Me anne ttes eee aies
Ferments ue produits pendant la germination par les graines
albumen corné (Bourquelot et Hérissey).......................
Hydrate de carbone de réserve des graines de Luzerne et de Fe-
nugrec (Bourquelot et Hérissey)...............................
Individualité de la séminase (Bourquelot et Hérissey)...... DSP U
Les zones et les provinces botaniques de l'Afrique occidentale
francaise (Chevalier) rene Re Re PR Rene RAR tee Le
Maladie desraisins des vignes du Caucase (Prillieux et Delacroix).
Modification et structure de tiges soumises à une traction modérée
(Dhouvenin) nero merde
observées dans ies cellules subissant la
fermentation propre (Matruchot et Mol-
Hard) ME rene conne erletess
Mutualité de l'Œnothera Lamare-Kiana (Hugo de Vriès)...... —
Nouveau procédé d'extraction du caoutchouc (Armand et Verneuil).
Nouvelle mucorinée pathogène (Lucet et nr Rte lle ne
Oxycellulose du coton, du lin, du chanvre_et de la ramie (Vi-
EnON) AR ae Re lee Te ee AN M CU ER Ne R re
132
239
48
12
LE NATURALISTE
Parisitisme du Phoma remiformis (Ravaz et Bonnet) /
CICCCECEC ETC ECC"
- Phénomènes présentés par les noyaux chez les végétaux sous l’ac-
tion du froid (Matruchot et Molliard)
Présence de la manno-cellulose dans les tissus ligneux des plantes
gymnospermes (G./Bertrand) PSE ER ETES EEE REER EE
Phénomènes physiologiques accompagnant la chlorose chez la
veneriGiCurtel een IT ERA EE UNE PNR TEE
Pluralité de l’espèce dans le groseillier à grappes cultivé (de Jane-
zeweski) ;
Prétendue digestion des Nepenthès (E. Couvreur)................
Rappel à la vie obtenu par la compression rythmée du cœur
Sur la loi de disjonction des hybrides (Hugo de Vriès)...........
Sur les embryons du blé et de l'orge pharaoniques (Gain)
Sur le parantisme du Ximenia americana. Heckel...:... HAS ALEA
Sur les limites de possibilité du greffage chez les végétaux (Daniel).
Sur l’exosmose de diastases Dar
Sur l’hydrate de carbone de réserve de la graine de Trifolium
repensriHérisseyionntliusela rene a RE ET CPE
Sur l’ordre de formation des éléments du cylindre central dans la
racine etla tige, (GastontBonnier)}ieeEn tte Ce ee UT
Téguments séminaux de quelques espèces du genre Impatiens
(GA Brunotte) PURES RNA AR RCA ECRIRE ES
Tubercule alimentaire nouveau du Soudan (Max Cornu)..........
Variation dans les caractères des races de haricots sous l'influence
du greffage (L. Daniel)
see e eee e eo 0 0 60 0 0 00e 0e ee ne lee) es ln lee lelntele otele sta eh ohalelole one ele
Géologie
Dénudation du plateau central de Haye (M.-et-Moselle) Bleicher.
Dinosauriens des étages de Rognac et de Vitrolles au pied de la
moniapne Noire (C#Deperet) ester MR ee CRC
Eruption du volcan Mayon dans l’ile de Lucon..................
Exploration géologique dans la Chine méridionale (Leclère)......
Fest condition de dépôt du Turonien de l’Aquitaine (Glan-
geaud) at Rene Penn Co D CPU PET TE CUT
Fossiles rapportés de Chine par la mission Leclère (Douvilli)....
Géologie de l’Australie occidentale (Garnier).,..........,.......
Clossotherium (Neomylodon) en Patagonie (Albert Gaudry)
Les lemuriens subfossiles de Madagascar
Météorite tombée à Bjurbole près Borga (Finlande)..............
Non-existence en minéralogie du système hexagonal (Walleraut).
Nouveau rongeur miocène (Gaillard)....... RDS da IS dei PO
Observation d’un bolide dans la soirée du 24 septembre 1900
(J. Mascart)
Observation sur la structure du diluvium de la Seine (S. Meunier).
Perturbatonspéolopiquesde Java tr RCE EP EEE TT
Phénomène de métamorphisme de production de minerai de fer
consécutif à la dénudation du plateau de Hay (Bleicher).......
Plants fossiles de la Chine méridionale (Zeïller).................
Première plante fossile envoyée de Madagascar (Bureau).........
Priabonien, Eocène supérieur de la région de Kairouan (Tunisie).
Structure de la portion méridionale de la zone du Brianconnais
(Kilian) sr RE er CE PT EC LC
Subdivision du Senonien du Portugal (P. Choflat)................
Sur les granites et les syenites quartzifères à œgyrine, arfnedso-
nite et œnigmathe de Madagascar (Lacroix)........:..........
Tectonique de l'extrémité septentrionale des massifs de la Char-
treusei (HR OI) 20000 NN Ne EE ee nn
Tremblement de terre au Mexique
Divers.
1% JANVIER 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
AVIS
Nous prions ceux de nc
abonnés qui ne nous ont pa
encore adressé le montai
=,
SOMMAIRE du n° 308 du 1° JANVIER 1POO :
Sablière de la Beuvrière, près de Béthune. Henri BoursauLr. — Les « Sauvages » de
Normandie. D' Ed. Spartxkowsxt. — Mœurs et Métamorphoses du Brachyderes Lus de leur abonnement pol
sitanicus Fab. coléoptère de la famille des Rhyncophores. Dæsse TamBer. — Les | 7900, de vouloir bien nous
animaux au Théâtre. Henri Courix. — Géologie de l’enfouissemsnt d'une chaussée | + : à Ë
dans le sol. D' Boucon. — Description de coléoptères nouveaux. L PLANET. — faire parvenir sans retar
Chronique. — Académie des Sciences. P. Fucus. — Micrographie technique, histo- l'échéance de Janvier étai
logique. À. GRüvEL. —- Genera illustré des Coiéoptères de France: Gonsiant Houf- plus chargée, =
BERT
ABONNEMENT ANNUEL
Payable en un mandat à l'ordre de LES FILS D'ÉMILE DEYROLLE, éditeurs, 46, rue du Bac, PARIS.
LES ABONNEMENTS PARTENT DU Il‘ DE CHAQUE MOIS
Francetl Algérie. ne 2 40 fn.» TOUSNCS A UIRES DANSE SR MD ETES
Pays compris dans l’Union postale. . , , 11 » PRIS USNUMELO ES Se 0 50
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di RER Der a
10J1j-So1pe9 9ZuINb-9JUEXI0S SA] 19 SA9IS So] 9948 fINOTI9IXO OIGNON
‘Saurif GLF tt... CR
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AP S191SP9 S104} SO] J9 SITOUT XIP 9P SI9ISPI SI047 SO, 2048 ‘INOH9IX9 9[{NOF <
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OUMOJ ÿeIIES U9 Seq np Inoo Juop ‘sdioo xnop u9 uoJuOIy e 9Jqnau 97)
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15 JANVIER 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
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SOMMAIRE «4 ° 309 d 135 JANVIER 1900 : :
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Chasse des Echassiers au Hutteau sur les grèves de la Manche : les espèces qu’on y :
y tue. Macau» d'Augusson. — Les plantes bulbeuses de la Flore française : Liliacées. de leur abonnement pou
P. Harior. — Photographie. Henri Cour. — Micrographie technique, histologique. | 7900, de vouloir bien nous 1
A. GrRuveL. — Description de coléoptères nouveaux. L. PLaner. — Le Gui, Viscum ; à
album. Dr Boucon. — Académie des Sciences, P, Fucus. — Les Papillons et les faire parvenir sans retard
Ohenilles en France au mois de janvier. P. Fucus. — Les Plantes de France, leurs | /’échéance de Janvier étan
Chenilles et leurs Papillons. Destruction des Oiseaux en Charente-Inférieure. — I ñ
Genera illustré des Coléoptères de France. Constant HourBerr. É plus chargée.
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| SOMMAIRE du n° 31O du Le FÉVR I ER 1DO0O :
Observations sur la Testudo Nigrita, Dum. Bib. E. MassarrT. — L'antiquité de l’homme.
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Dr Boucon. — L'Actinomycose et ses dangers pour les travailleurs agricoles. — Ë ’
Des accidents entomologiques. M. Pic. — Elevage des oiseaux de basse-cour en UE qe tenons bien nous le
Egypte. — La faune anté-primordiale. G. Garpe. — Maladie des Pruniers. — Des- faire parvenir sans retard,
cription d’un coléoptère nouveau A. THÉRy. — Minéraux nouveaux. GauBerr. — | /’échéance de janvier étan
Culture du Figuier en Grèce. — Chronique. — Académie des Sciences. P. Fucus. — :
La culture du Riz au Siam. — Livres nouveaux. la plus chargée.
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SOMMAIRE dun 311 du 1% FÉVRIER 1900 :
Imitation expérimentale des Cheminées de Fées. SranisLas Meunier. — Les Glaréoies, | de eur à
mœurs, Casse utilité. MaAGAuD p’AUBUssoN. — Micrographie technique, histologique k abonnement pour
A. GruveL. — Les Plantes de France, leurs chenilles et leurs papillons. — Etude de 1900, de vouloir bien nous le
l’ours et de la Loutre, au point de vue des Etymologies. — D: Boucon. — Ponte de
Trichosoma Hemigemum,de Graslin (lépidoptères du groupe des Chélonides.) Capi- faire parvenir sans retard
: taine XamBeu. — Conservation des photypes, photocopies et photocalques H. Coupin. l'éché : : dy
— Essai monographique sur les coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane. échéance de Janvier étant
| Louis PLANET. — Lépidoptères nouveaux d'Asie. AUsrauT. — Académie des Sciences. lb! 2
P. Fucus: 5 a plus chargée.
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1 France et Algérie . SU eee ALT AS AO) Lt TC) louslEs autresipays.n. se < 2 SN RS D fr >
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PARAISSANT LE 14* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SORMMAIRE dun 312 du 1°: Mars 1900 :
Méduses fossiles. E. Massar. — Nouvelles expériences relatives à la désinfection anti-
phylloxérique des plants de Vignes. — Exposition universelle de 1900. — Les Plan-
tes de France, leurs chenilles et leurs papillons. — La Terre, son origine, sa fin.
D: Boucon. — Apparition tardive des Lampyres, en 1899, — Reproduction a bon
marché des dessins H. Coupin. — Diagnoses de coléoptères Américains et asiatiques.
M. Pic. — Serins rouges et animaux albinos. D’ Recnaurr. --Note sur les tourbes.
B. RenaweT: — Académie des Seiences. P. Fucus, — Animaux promenés ou tués
| dans les Cirques, chez les Anciens. E. SaNTINI DE RioLs.
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SOMMAIRE dun 313 du 15 Mars 1900 :
Les Meulières de Montmorency. STANISLAS MEUNIER. — Animaux promenés ou tués
dans les Cirques chez les Anciens. E. Sanrini DE Rrors. — Le cordon de la loge du
Thuricola. Dr Boucon. — Description de coléoptères nouveaux M. Prec. — Les Co-
leophora du Doryenium. P. CHRÉTIEN. — Un cas probable de mimetisme défensif
chez la Ranatre. F. Prarrau. — Cimetières de chiens et de chats. Henri Courin. —
Académie des Sciences. P. Fucus. — Offres et demandes.
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PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE, CHAQUE MOIS
| Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 314 du He" Avril 1900 :
La taille des silex. E. Massar. — Les plantes de France, leurs Chenilles et leurs
papillons. — L'origine de l’homme, sa place dans le règne animal. D: L. Laroy. —
Transformation de la loupe simple en loupe binoculaire et stéréoscopique. — Les
rats en Thessalie. — Note sur le bois secondaire du Tulipier de Virginie. Emile
Bazzé. — Le microhe de la peste. D' Berpaz. — Les orchidées indigènes. P. Hartor
Exposition universelle de 1900. — Les Desmidiées. D' Boucon.— Offres et demandes.
ss — Académie des Sciences. P. Fucus.
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PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SONRLMANRE du m° S1> du 13 Avril 129OO :
Examen de la météorite tombée le 12 mars 1899 à Bierbelé en Finlande. SranisLas
Meunier. — Quelques desiderata de l’enseignement moderne des sciencences na-
turelles. D' L, Lazoy. — Remèdes ignobles. Fécix Regnauzr. — Les Œufs de
Pâques. Hexri Courin. — Les arbres dans les grandes villes. D' Boucon. — Mœurs
et métamorphoses &: Trachyphlœus scaber, Linné, coléoptères du groupe des Rhyn-
cophores. Capitaine XamBeu, — Les Tarins. Albert GRANGER. — Essai monogra
phique sur les coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane. Louis PLANETr- —
Chronique. — Livres nouveaux. — Offres et demandes.
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leur et 132 figures dans le
texte, br. 5 fr. 50, franco | J7%e
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Reptiles et Batraciens. 55 fi-
gures dans le texte, br. 2 fr.
franco 2 fr. 50; cart.
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Moliusques . Céphalopodes ,
Gasléropodes. 24 fig. dans le
texte, 19 planches, br. 4 francs,
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ciers, Bryozoaires. 15 fig. dans
le texte, 18 planches, br. 4 fr.,
franco 4 fr, 40; cart. 4.75, 20e
franco 5.20.
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délivrer, par ses gares de Paris (Saint-Lazare et
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Ces Billets sont valables un mois (non compris le
jour de la délivrance) et peuvent être prolongés d’un
nouveau mois moyennant le paiement d’un supplé-
ment de 10 0/0.
Leurs prix sont fixés comme suit :
1° Par Granville (toute l’année), 1"°classe : 67 fr. 80
— 2° classe : 44 fr, 75 — 3e classe : 33 fr. 50.
2° Par Granville et Saint-Malo (toute l’année),
re classe : 73 fr. 85 — 2° classe : 49) fr. 60° —
3e classe : 37 fr. 45, Avec excursion au Mont Saïnt-
Michel, ou inversement.
3° Par Carteret et Gorey (1°" mai au 31 octobre),
1" classe : 63 fr. 15 — 2e classe : 44 fr, 251—
3e:classe : 29)fr. 85.
49° Par Carteret et Granville (1% mai au 31 octobre),
re classe : 65 fr. 45 — 2e classe : 44 fr. 50 —
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5° Par Carteret et Saint-Malo (1er maiau 31 octobre), Mk
re classe : 71 fr. 55 — 2e classe : 49 fr. 35 —
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Michel. Itinéraire : Carteret — Jersey — Saint-Malo
— Mont Saint-Michel, ou inversement.
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l'Ouest envoie franco sur demande affranchie,
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à Paris, un Guide indiquant, pour toute la saison
d'été, les heures de départ d2s bateaux faisant le
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& 29: ANNÉE 2% SÉRIE. — N° 316
PARAISSANT LE 1" ET LE 15 DE (CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du mnm° 316 du 1° Mai 1900 :
Les Chênes porte-gui de la Normandie. Henri Gapeau De KERvVILLE. — Le Bitume en
Auvergne. G. Garpe. — Les Terres Alcalines. D'Boucon. — L'Ipécacuanha. E.
ï Massar. — Académie des sciences. — Offres et demandes. — Essai monographique
sur les coléoptères des genres Pseudolucane ,et Lucane. L. PLaNEr. — Un corbeau
sur un arbre perché... — Bibliographie.
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Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du m° 31S du 1°: Juin 1900 :
L'oiseau de la Pentecôte Hexrr Courix. — L'histoire naturelle et l'Ethnographie a
l'exposition universelle. — Les plants de France, leur Chenilles et leurs Papillons. —
Les oiseaux nuisibles. La Pie. ALBERT GRANGER. — Les sauterelles en Espagne. — Les
soies du Bombix mori, du Jambonneau (pinne marine) et de l'Araignée. E. SaNTINI
DE Riors. — L'acte réflexe, l'instinct et la raison. Dr L. LaLoy. — Academie des
sciences. Offres et demandes.
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Pays compris dans l’Union postale. . . . 11 »
15 JUIN 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 319 du 135 Juin 1900 :
Le Cygne chanteur, description, mœurs, chasse, migration; le Chant du Cygne; les cy°
gnes d'Europe. Macau» n' AuBusson. — Maladie bactérienne du mürier. — Le rythme
dans la musique. D' Bouson. — Les Comédiens dela nature. Henrt CouriN. —
Description du crabier En. Touin. — Notice sur deux variétés iné lites du Parnassius
Apollo {Parn. Apollo Aber. Inversa, Austaut et Parn. Apollo v.Eiff:lensis). AusrauT.—
Académie des Sciences. —Livres nouveaux.— Mœurs et métamorphoses du Dermestes
undulatus, coléoptère, du groupe des Dermestides. Capitaine XAmBEeu. — Biblio-
graphie. — Arrivages de coléoptères de provenances diverses. — Offres et
demandes:
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PARAISSANT LE 14* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAEIRE du n° 320 du 1° Juillet 1900 :
L'Histoire naturelle et l'Ethnographie à l'Exposition Universelle. D' L. LaLoy. — Les
plantes de France, leurs papillons et leurs chenilles. — Les tremblements de terre
en 1899. E. Massar. — L’acétylène à l'Exposition Universelle. E. SANTINI DE Rio1s.—
Les plantes et les noms de lieux. D. Boucon. — La longue-vue microscope, — Les
oiseaux nuisibles, le Geai, Albert GRANGER. — Académie des sciences. — Genera
analytique. Coléoptères de France, par Constant HouLBErT.
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15 JUILLET 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
‘SOMMAIRE du n° 321 du 1% Juillet 1900 :
Contributions à l'étude de la faune de la Roumanie. D' Léon C. Cosmovicr. — Curio-
sités botaniques. D. Boucon. — Au sujet d'un moineau. — Photographie. — Essai
monographique sur les’ Coléoptères des genres Pseudolucane et Lucane. Louis PLa-
ner. — Offres et demandes. — Les plantes de France leurs papillons et leurs che-
nilles — Delhabillement chez les anciens. E. SANTINI DE Riocs. — Livre nouveau. —
Genera analytique illustrée des Coléoptères de France, par Constant HouLgErr.
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2e SÉRIE. — N° 322
1 AOÛT 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire-de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 322 du 1° Août 1900 :
Les plantes bulbeuses de France. P. HartorT. — Unité ou pluralité des races francaises.
D: Ep. SPAzKowskI. — Une petite tache du Soleil. D'Boucon — Contributions à l’é-
© tude de la faune de la Roumanie. Léon C. Cosmovicr. — La culture du tabac en
Grèce. — Photographie: Eventails photographiques. — Les Grèbes : espèces fran-
caises, description, mœurs et chasse. MacauD D'Augusson. — De l’habillement chez
les anciens. E. Sarini De Riozs. — Genera analytique illustrée des Coléoptères de
France, par Constant HouLBert. |
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PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 323 du 15 Août 190O :
L’histoire naturelle et l’ethnographie à l’Exposition universelle. D' L. LaLoy, — La
Loutre. D' BouGon. — A propos de l’article « Curiosités botaniques ». Dr Marcez
JEANTY. — Congrès géologique international de 1900. — L: Coque du Levant.
E. Massar. — Le groupe des oiseaux nageurs. F. ne ScHAEoK. — Les étangs pois-
sonneux d'autrefois. — Les plantes de France, leurs papillons et leurs chenilles. —
Genera analytique illustré des Coléoptères de France, par Constant HouLBerr.
ABONNEMENT ANNUEL
Payable en un mandat à l'ordre de LES FILS D'EMILE DEYROLLE, éditeurs, 46, rue du Bac, PARIS,
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PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 322 du 1 Septembre 1900 :
L’histoire naturelle et l’ethnographie à l'Exposition universelle. D' L. LaLoy. — De
l’habillement chez les anciens. Æ. SanTiNI DE Riozs. — Les plantes de France, leurs
papillons et leurs chenilles. — Note sur les Oiseaux de proie observées dans la
région de l'estuaire de la Somme. Macaur Dp'AuBusson. — La propreté du logis
chez les animaux. Henri CouriN. — Géologie : Ancienneté de l’homme. D' Boucox.
— Livres nouveaux. — Arrivages de Coléoptères de provenances diverses. — Offres
et demandes. — Bibliographie.
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2 SÉRIE — N° 325 15 SEPTEMBRE 1900
PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 3224 du 135 Septembre LIL 900 :
Les plantes myrmécophiles. P. Harior. — Le langage sifilé. Henri CoupiN. — In-
fluence de l'éclipse du soleil sur les êtres vivants. D' Boucon. Description de Co-
léoptères. M. Prc. — L'histoire naturelle et l’ethnographie à l'Exposition universelle.
D: L. Lazow. — Les plantes de France, leurs papillons.et leurs chenilles. — Le Per-
roquet. E. SanriNi DE RioLs. — Académie des Sciences. — Offres et demandes. —
Genera analytique illustré des Coléoptères de France. Constant HouLrBEerr.
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Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
| SOMMAIRE du m° 326G du 1: Octobre 1900 :
Le Perroquet. E. Sanrint DE Riocs, — Les animaux à l’attaque des serpents. D: Bou-
&on. — Méthode employée pour combattre le phylloxéra en Allemagne. — Les
chênes au point de vue forestier. Parpx. — La photographie des oiseaux de collec-
tions. — F. DE ScHAEoK. — Académie des sciences. — Les plantes de France, leurs
papillons et leurs chenilles. — Essai monographique sur les coléoptères des genres
Pseudolucane et Lucanc. — Louis PLaner. — Offres et demandes, — Genera analy-
tique illustré des Coléoptères de France. Constant HourBerr.
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-Remarquables nodules de Grès. Stanislas Meunier. — Desinfection antiphylloxérique
_ des plants de vigne. — Les Chotts salés de l'Algérie. D'. Boucon. — Les Erables au
point de vue forestier. — Photographie ; décoration du celluloïd et de l'ivoire par
la photographie. — La Flore des Tétards de Saules dans la vallée de la Seine.
P. Harior. — Le dressage des animaux. D' Félix Reanauzs. — Les Thuya. — Les
plantes de France, leurs papillons et leurs chenilles. — Académie des Sciences. —
Offres et demandes. — Bibliographie- —Genera analytique illustré des Coléoptères de
France. Constant HourBerr. Î
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Pays compris dans l’Union postale. . , . 11 » ÉTÉCURNUMEÉRO Re A eee (À 50.
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PARAISSANT LE 14* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMRMANIRE du n° 32S du EL Novembre 1900 :
Le Campignien en Gironde. Aug. Conrs. — Le sens moral chez les animaux. D'. Bou-
Gon. — Photographie : Tirage industriel des clichés photographiques. — Le moyen
de combattre la cochylis de la vigne par les traitements d'hiver. — Disparition du
gibier dans le département de la Seine-Inférieure. Paul Noez. — Le tir au canon f7
contre la grêle en Suisse. — L'élevage de l'Isatis ou renard bleu. Henri Courin. — ie
Académie des Sciences. — Offres et denrandes. — Genera analytique illustré des
Coléoptères de France. Constant HourBerr. j
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Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 529 du 135 Novembre 1900 :
Oie domestique à tête anomale. Henri Gapeau ne KerviLre. — Les races du Sénégal
et du Soudan. — Sur l'abus des suppositions glaciaires en géologie, — La chematobie
brumeuse (Chematobia brumosa). Paul Noez. — La Guinée francaise et ses produits
naturels. — Minéraux nouveaux du Groenland. P. GauBerr. — Les pierres creuses
de Puteaux. D'. Boucon. — Le cacao à Madagascar. — Les plantes de France, leurs
papillons et leurs chenilles. — Poissons fossiles des environs de Paris. E. Massa. —
Livres nouveaux. — Académie des Sciences. — Offres et demandes.
: ABONNEMENT ANNUEL
Payable en un mandat à l'ordre de LES FILS D’EMILE DEYROLLE, éditeurs, 46, rue du Bac, PARIS,
LES ABONNEMENTS PARTENT DU 1°” DE CHAQUE MOIS
France et Algérie. . . . . . . . . .
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= Pour changement d'adresse, joindre O fr. 50 c. à la dernière bande.
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Adresser tout ce qui concerne la Rédaction et l'Administration aux
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46, RUE DU BAC, PARIS
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PARAISSANT LE 1* ET LE 15 DE CHAQUE MOIS
Paul GROULT, Secrétaire de la Rédaction
SOMMAIRE du n° 330 du I1’Décembre 1900 :
Sur un gisement de plantes fossiles de l'argile plastique aux environs de Paris. P. H.
Fritez. — L'eau naturelle. D'. Boucon. — Minéraux nouveaux. — Les races de
Madagascar. — La caille dans le département de l'Orne. A. L. LerAcQ. — Un cham:
pignon rose vénéneux de France. — Aperceu sur la flore du Sénégal et du Soudan. —
La conservation des chenilles en collection. Paul Nogz. — La Guadeloupe et ses
produits principaux. — Chronique. — Académie des sciences. — Un exemple de lon-
gévité de la graine. Ch. Le Genpre. — L'agriculture aux Iles Philippines. — Offres
et demandes.
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+ — La vanille à Madagascar. — Essai monographique sur les Coléoptères des genres
fi A Pseudolucane et Lucane. Louis PLANET. — Chronique. — Offres et demandes, — Les j
é plantes de France, leurs papillons et leurs chenilles. — Table des Matières du qua- : A
torzième volume de la deuxième Serie.
ABONNEMENT AMBNUEL
Payable en un mandat à l'ordre de LES FILS D'EMILE 9EYROLLE, éditeurs, 46, rue du Bac, PARIS,
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