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LES PAMA88IEN8
DE LA
FAUNE PALÉARCTIQUE
PAR
JULES LEON AUSTAUT.
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LEIPZIG,
EKNST HEYNE
1889.
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Imprimerie: Grimme 4' Tromel, Leipzig.
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Préface.
Avant d'aborder l'histoire des Parnassiens si intéressante à
des titres divers, nous croyons devoir consigner ici, sous forme
de préface, quelques considérations préliminaires qui ne seront
pas sans utilité pour le lecteur. En effet nous devons expliquer
d'abord le titre que nous avons attribué à cette étude, et ensuite
en préciser la portée.
Le terme nouveau de Faime Paléarctique qui est encore peu
usité, signifie l'ensemble des êtres organiques qui habitent le
territoire de l'ancien pôle ou les contrées qui gravitent autour
de cet axe de notre globe; il correspond à une notion très
scientifique qui est fondée sur l'analogie que l'observation a cru
reconnaître parmi les formes animales qui peuplent ces vastes
régions.
En effet, la vie organique ne se manifeste pas d'une manière
uniforme à la surface de notre planète. Chaque milieu distinct,
chaque station gi'Ographique renferment des types particuliers qui
leur sont propres; mais à côté de ces formes spéciales il en est
d'autres, en grand nombre, qui sont communes à d'autres milieux
dont les conditions climatériques ne sont pas sensiblement diffé-
rentes, et qui s'étendent parfois à de vastes étendues de pays.
Ce sont ces formes quelquefois partout identiques à elles
mêmes, le plus souvent modifiées par l'influence des stations
1
2
qu'elles fréquentent qui donnent la tonalité à la physionomie d'une
Faune et servent d'indices ou de points de repère pour préciser
les limites de son étendue.
C'est ainsi que beaucoup de lépidoptères de l'Europe pro-
prement dite sont dispersés bien au delà des frontières artificielles
que nos systèmes géographiques ou politiques ont assignées à cette
partie de l'ancien monde. Un grand nombre de nos Lycaenides, de
nos Argynnis, de nos Satyrides et nos trois espèces de Parnassius
s'étendent sur la plus grande partie du continent du nord de
l'Asie; et si cette immense région renferme, parmi les genres que
nous venons de citer, des espèces inconnues à l'Europe, elles sont ce-
pendant si voisines de celles-ci qu'il est impossible de les en séparer
sans tomber dans l'arbitraire. Cette analogie est même si grande,
que l'on est tenté de se demander si les formes étrangères ne
sont pas simplement nos propres types qui auraient subi des
travestissements dus à d'autres influences physiques et climatériques.
Autrefois les auteurs en écrivant soit sur l'ensemble de la Faune
Européenne, soit sur certains de ses genres particuliers ne tenaient
aucun compte de cette grande loi de l'analogie qui rapproche les races
et les espèces, parceque l'expérience n'avait pas encore rassemblé
des faits suffisamment nombreux pour arriver à cet égard à des
données scientifiques et rationelles. L'on ne connaissait guère,
avant le premier tiers de ce siècle, que les papillons strictement
européens; ceux des pays limitrophes avaient été jusqu'alors si
non entièrement méconnus, du moins fort mal étudiés; et dans
tous les cas les espèces propres aux contrées mystérieuses de
l'Asie centrale et orientale restaient encore à découvrir.
Par la force des choses, les traités d'Entomologie ne pouvaient
embrasser que les types rigoureusement spéciaux à notre vieille
Europe; et c'est dans ce cercle restreint que pouvaient s'exercer
— 3 —
seulement les investigations des premiers naturalistes. Ce n'est
que plus tard, lorsque les sciences naturelles eurent pris un plus
grand essor, que leur champ d'observation s'est élargi; mais de
cette plus grande extension acquise par l'expérience, est résulté
un revirement complet dans les idées qui avaient été admises
jusqu'alors sur la constitution des différentes faunes de notre
globe. Grâce aux grandes facilités dont nous disposons dans nos
moyens de commumcation, les voyages se sont multipliés dans
une proportion sans cesse croissante, et la connaissance des pro-
ductions de la nature a retiré de ce fait un immense profit.
Des contrées entières, absolument fermées à l'accès des Européens,
ont livré leurs trésors à des savants éclairés et intrépides.
La Sibérie, le Turkestan, les contrées montagneuses de la
Perse et de la Chine ont été soigneusement explorés par ces hardis
pionniers de la science qui ont rapporté des leurs voyages une
foule d'espèces inconnues jusqu'alors; et ce n'est pas sans étonne-
ment que l'on a pu constater l'analogie souvent intime de ces
types lointains avec les formes qui nous sont familières.
La limite arbitraire que Ton avait coutume de tracer entre
l'Europe et l'Asie, au point de vue de leurs productions organiques,
n'avait par conséquent plus de raison d'être et les naturalistes ont
compris, avec un accord presque unanime, qu'il convenait de rat-
tacher à notre faune d'Europe tous ces territoires de l'Orient dont
les formes animales sont si voisines de celles que nous observons
autour de nous.
C'est le docteur Staudinger, de Dresde, qui a introduit l'un
des premiers la loi de l'analogie dans le groupement et la dé-
lunitation des faunes, au moins en ce qui concerne l'ordre des
lépidoptères. Dans la préface du grand Catalogue méthodique
qu'il publia en 1871 sur ces insectes, il énumère les contrées
1*
— 4 —
adjacentes à l'Europe qui doivent, à son avis, être comprises dans
notre propre faune, et il prend pour base d'appréciation une pro-
portion de 60% d'espèces strictement européennes dans l'ensemble
des types observés.
A la faveur de ce principe, l'on doit considérer comme faisant
partie intégrante de notre faune tout le nord de l'Afrique; c'est
à dire le Maroc, l'Algérie, la Tunisie et peut-être la Tripolitaine
depuis le grand désert du Sahara au sud -et la vallée du Nil
à l'est jusqu'au littoral de la Méditerranée. En dépassant ces
limites méridionales on pénètre dans la faune africaine, et l'on
rencontre une prédominance évidente de lépidoptères exotiques qui
n'ont plus de rapports intimes avec ceux d'Europe. L'Asie mi-
neure, le nord et le centre de la Perse, le Turkestan jusqu'au
pied de la chaîne de l'Himalaya, la Sibérie toute entière jusqu'à
l'embouchure du fleuve Amour avec l'immense chaîne de l'Altaï
font également partie de notre faune; et cela est si vrai, que
l'Asie centrale parait être le berceau d'où sont issues beaucoup
de nos espèces. La limite méridionale de ce vaste territoire fau-
nique semble se confondre en Orient avec les déserts de l'Arabie,
ceux du sud de la Perse et les steppes incultes du Gobi dans
les pays des Mongols, au delà desquels il existe une prépondérance
de types franchement exotiques qui servent de prélude à la faune
indo-australienne. Quant à ses limites septentrionales, elles ne
paraissent pas exister à proprement parler; le pôle boréal tout
entier avec les contrées voisines appartiennent très certainement
au territoire dont il s'agit, depuis les rivages de la Scandinavie
et de la Sibérie jusque vers le Canada dans l'Amérique du Nord.
On comprend que lorsqu'on prend pour objectif, une étendue
de pays aussi vaste que celle que nous venons de circonscrire,
le terme de faune européenne ne puisse plus lui être appliqué
— 5 —
puisque l'Europe proprement dite n'en constitue que la partie la
moins importante. Voilà pourquoi les naturalistes ont senti la né-
cessité de recourir à une expression nouvelle qui fut mieux appro-
priée à l'objet qu'il s'agissait de définir. La qualification de
territoire Paléarctique en d'Asiatico-Européen répand bien mieux
à cette conception nouvelle, puisque l'une et l'autre éveillent dans
l'esprit une idée exacte de la situation et des limites d'une telle
région. Aussi les adopterons nous exclusivement dans le cours
de ce livre, et nous attribuerons à chacune d'elles une valeur
égale. Voilà ce que nous avions à dire sur le titre du présent
ouvrage. Le lecteur comprendra maintenant que nous lui soumet-
tons une étude d'ensemble sur tous les Parnassiens qui habitent
le continent européen et tout le nord-est de l'Asie avec les res-
trictions qui ont été posées ci-dessus et il aura lieu de remar-
quer que ces papillons si intéressants sont encore plus asiatiques
qu'indigènes.
Il ne nous reste plus qu'à dire quelques mots de la portée
de ce travail, et du motif qui nous a engagé à le rédiger.
Les renseignements que nous livrons aux Lépidoptéristes ne
sont pas absolument nouveaux; car nous n'avons aucune espèce
inédite à leur présenter; et les documents qui intéressent les
Parnassiens sont répandus dans un grand nombre de publications,
dont quelques unes sont déjà fort anciennes, Linné, Esper, Godard,
Duponchel et presque tous les auteurs modernes ont en effet
décrit et figuré les trois Parnassiens les plus anciennement connus,
c'est à dire ceux qui habitent presque tous les pays d'Europe; mais
il n'en est pas de même des formes asiatiques qui sont de beau-
coup les plus remarquables. Celles-ci ne sont signalées que
dans des ouvrages particuliers, rares ou difficiles à consulter.
Parmi ces derniers nous devons mentionner d'abord le traité de
— 6 —
Fischer de Waldheim sur les Lépidoptères de la Russie, celui de
Ménétriès qui a pour titre ,,Enumeratio corporum musei
Petropolitani" et surtout le grand ouvrage d'Herrich-Schaffer
(Systematische Bearbeitung der Schmetterlinge von
Europa) dans lequel ont été figurés tous les Parnassius sibériens
découverts à partir de 1843 jusqu'en 1856. Pour se faire une
idée exacte de l'ensemble de ce beau genre, il faudrait encore
consulter les descriptions de MMrs. Eversmann et Nordmann, deux
auteurs distingués de la Russie, lesquelles ont été insérées à
différentes époques dans le Bulletin de la Société impériale
des Naturalistes de Moscou; et pour les découvertes plus ré-
centes, les Annales des sociétés entomologiques de Berlin
et de Stettin, les mémoires du grand duc Romanoff, les relations
des explorations de Mr. Alpheraki dans la Songarie et de Mr.
Fedtschensko dans le Turkestan. Tous ces documents dont la con-
naissance serait pourtant indispensable aux entomologistes qui
voudraient étudier d'une manière complète les insectes qui nous
occupent, sont, comme on le voit, fort nombreux et d'un abord
peu facile; de sorte que nous avons pensé que ce serait rendre
un service aux amateurs de la science et leur aplanir bien des
obstacles, que de condenser en un traité spécial tout ce qui intéresse
nos Parnassiens. C'est surtout cette dernière considération qui
nous a engagé à publier le présent travail. Cependant nous ne
nous sommes pas borné à établir une simple compilation qui
n'aurait eu qu'un mérite relativement médiocre. Nous nous sommes
appliqué à étudier d'après nature presque toutes les espèces ac-
tuellement connues. Notre collection est très riche en insectes
de ce beau genre; nous les possédons à peu près tous, en plusieurs
exemplaires, de sorte que nous avons pu nous livrer sur leur
compte à une étude comparative suffisamment approfondie. Nous
avons essayé en outre de répartir les espèces suivant une classi-
fication naturelle que nous avons basée sur la forme de la poche
cornée si curieuse qui garnit l'extrémité de l'abdomen du sexe
femelle et dont les caractères nous ont paru offrir une grande
fixité. C'est par conséquent aussi le résultat de nos observations
personnelles que nous soumettons à l'appréciation des Lépidoptéristes,
et nous avons jugé à propos de l'appuyer de bonnes figures que
nous avons dessinées nous môme d'après les exemplaires que
renferme notre collection.
Nous pourrions terminer ici cette préface qui est suffisamment
explicite sur l'économie et le but de cette étude; cependant nous
croyons devoir exprimer ici notre avis sur une question très grave
par elle même et qui intéresse le sujet que nous allons traiter;
nous voulons parler de la valeur plus ou moins réelle de la no-
tion que nous nous formons sur les espèces en général.
Journellement des discussions et des polémiques sont engagées
sur le point de savoir si telle forme organique est ou n'est pas
une espèce séparée; et le peu d'accord qui règne parmi les con-
clusions est une preuve, ou que cette question est difficile à ré-
soudre, ou qu'elle est envisagée d'un point de vue inexact.
Qu'est-ce donc que l'espèce, que sont ces formes animales ou
végétales auxquelles nous imposons cette qualification? Essayons
d'expliquer à notre tour les idées que nous professons à cet égard.
A l'origine de la science entomologique on ne connaissait
que bien peu de papillons; les naturalistes ne pouvaient observer
que ceux qui se trouvaient à leur portée, c'est à dire les espèces
vulgaires, bien tranchées les unes des autres et ne donnant nulle-
ment matière à confusion. Puis, l'observation ayant élargi peu
à peu son cercle d'action, une foule de types nouveaux sont venus
s'intercaler entre les précédents de manière à former des séries
plus ou moins continues. Des formes opposées ou au moins soli-
taires en apparence ont été reliées entre elles par de nombreux
termes transitoires; et cette liaison est devenue si intime de
nos jours, que pour un grand nombre d'espèces, considérées autre-
fois comme très distinctes, la science en est arrivée à se demander
s'il existe parmi elles des démarcations sérieuses. En ce qui
concerne les Parnassiens que nous avons plus particulièrement en
vue, on ne connaissait pendant fort longtemps que nos trois types
européens: Apollo, Delius et Mnemosyne. Les naturalistes ne se
doutaient guère qu'il arriverait un jour où plus de cinquante
formes inconnues enrichiraient la nomenclature de ces insectes.
Ce résultat a été atteint en partie par un certain nombre de
savants russes qui avaient plus de facilités que d'autres pour
diriger des investigations dans les parties asiatiques de leur empire.
Parmi les explorateurs qui enrichirent la série des Parnassiens,
on peut citer les voyageurs Wosnesensky et Motchulsky qui
visitèrent la Sibérie boréale et orientale, MMrs. Maack et Eadde
qui parcoururent les provinces de l'Amour, au nord de la Chine ;
le docteur Stubbendorf qui collectionna des papillons dans la
Sibérie centrale, et surtous les chasseurs du docteur Staudinger,
lesquels, dans ces dernières années, enrichirent les espèces de ce
beau genre à la suite des explorations qu'ils dirigèrent en Songarie
et dans le Turkestan. Mais toutes ces découvertes, tout en
élargissant le champ de nos connaissances entomologiques eurent
pour conséquence de rendre la distinction des espèces beaucoup
moins aisée.
En effet, il est une remarque qui saute vivement aux yeux
dans l'étude des lépidoptères, c'est que plus les genres son
nombreux en espèces, et plus celles-ci sont voisines les unes des
autres; et cette vérité est surtout évidente dans les groupes
— 9 —
naturels, parce que dans ce cas les types spécifiques ne peuvent
varier que dans une mesure très faible, et selon des caractères
à peine appréciables. Ainsi les Colias, les Lycaena parmi les
diurnes, les Sesia, les Zygaena, les Cucullia etc. parmi les noc-
turnes offrent des exemples frappants de la liaison étroite qui
règne parmi les espèces des genres bien homogènes, et cette
analogie extrême s'observe également chez nos Parnassiens. Ces
insectes effectivement, à part quelques formes un peu plus tran-
chées que les autres, paraissent construits sur un même plan et
prétendent un faciès général presque invariable. Leurs ailes d'un
blanc plus ou moins pur ou jaunâtre sont marquées de taches
noires et rouges qui ne varient guère d'un type à l'autre que
par l'intensité de l'accentuation, ce qui détermine nécessairement
de grandes similitudes dans les aspects de ces papillons. Apollo
et Delius par exemple sont deux espèces bien tranchées qu'il est
impossible de confondre; cependant si l'on pénètre en Asie on
trouve toute une série des formes analogues qui viennent combler
l'intervalle qui parait exister entre ces deux espèces européennes.
C'est d'abord Nomion et Actius, dont certaines races locales res-
semblent à quelques formes particulières d' Apollo. Puis autour
de Delius viennent se grouper, Intermedius et Sedakovii, Discobolus
et ses variétés, Rhodius, Romanovi et Honrathi, dont les femelles
sont souvent à peine discernables de certains exemplaires du type
de nos régions. Les espèces du groupe de Delphius sont surtout
très rapprochées, car elles présentent des spécimens, qu'il est
presque impossible de déterminer avec assurance. En résumé,
quand on examine attentivement une nombreuse suite de Par-
nassius représentt'e par une quantité suffisante de sujets, on
constate sans difficulté l'existence de cette liaison dont nous ve-
nons de parler; et si l'on fait intervenir les exemplaires aberrants
— 10 — •
qui sont beaucoup plus répandus dans la nature que dans les
collections, on est amené à conclure que les espèces sont reliées
entre elles par une foule de termes transitoires qui s'entrecroisent
dans des directions multiples.
Que devient dans cette condition notre idée de l'espèce?
Les anciens naturalistes après avoir observé la fixité plus
apparente que réelle qui préside à la perpétuité des êtres organisés,
ont supposé que la nature engendre les animaux et les plantes
suivant un certain nombre de plans absolument invariables.
Tout animal et toute plante leur paraissaient issus d'un moule
fixe et inaltérable au même titre que des médailles qui perpétuent
l'empressite des coins qui ont servi à les frapper. Ces moules
et ces coins étaient considérés comme les types indélébiles des
espèces. Plus tard lorsque les savants se furent apperçus que
les mêmes êtres sont susceptibles de varier, ils adoptèrent une
opinion différente; ils allèrent même jusqu'à accorder à cette
mobilité de forme dans les êtres organisés une progression illimitée
en l'expliquant par l'influence des temps et des milieux.
Bien que chacune de ces doctrines renferme une certaine part
de vérité, puisque en définitive l'observation nous prouve qu'il y a
daijs la reproduction des êtres vivants une fixité relative, tempérée
néanmoins par la variation, nous ne croyons pas que ni l'une ni
l'autre puissent expliquer ce qu'est l'espèce. Ce qui nous fortifie
dans cette opinion, c'est que nous ne voyons nulle part chez ces
espèces considérées, soit comme immuables soit comme variables,
de critériums infaillibles à l'aide desquels nous puissions les dif-
férencier d'une manière absolue. Les caractères dissemblables
sont sans doute nombreux parmi les types opposés, mais quand
on envisage toutes les formes mitoyennes et le plus grand nombre
possible des sujets de chacune d'elles, on reconnaît qu'il n'y a
— Il —
aucun signe qui ne soit sujet à varier; tous deviennent cliangeants
et mobiles, les différences se comblent insensiblement, de sorte
que chaque terme de cette série devient forcément une transition
entre ceux qui le précèdent et ceux qui le suivent. Après un
tel examen on perd nécessairement une grande partie de cette
assurance qui nous porte instinctivement à envisager les espèces
comme indépendantes les unes des autres.
D'un autre côté certains caractères qui sont jugés suffisants
pour distinguer entre eux des Parnassiens, des Colias ou des
Cucullia par exemple, perdraient toute valeur si on les appliquait
à des genres composés d'espèces moins homogènes, soit à des
Pieris ou à des Vanessa. Il y a bien moins de différence en effet
entre les Colias Edusa et Myrmidone qu'entre les différentes
formes que peut revêtir notre Vanessa Urticae sous des noms
particuliers. Or, si les caractères spécifiques étaient fondés dans
la nature d'une manière absolue, il est évident qu'ils conser-
veraient toujous la même signification, et q'une même somme
de différences observées parmis les êtres serait aussi un indice
infaillible de la diversité de leur nature.
Les espèces telles que nous avons l'habitude de nous les
représenter ne correspondent pas par conséquent à des entités ob-
jectives, c'est à dire à des êtres existant hors de nous. Mais que
sont elles alors? De simples créations de l'esprit, des produits
factices de notre intelligence qui éprouve un besoin impérieux
de classer ses idées en catégories séparées afin d'arriver à les
connaître avec exactitude et avec méthode.
Quand par exemple nous observons un animal et une plante,
nous apercevons deux idées très distinctes et nous en saisissons
immédiatement les différences d'abord par une intention très
simple et ensuite par un procédé réflexe. Nous reconnaissons
— 12 —
que run s'agite par des mouvements volontaires, et qu'entre autres
attributs il est doué de sensibilité et d'instinct; que l'autre, bien
qu'animé par un principe vital analogue, est dépourvu de toute
spontanéité et — comme frappé d'inertie. Voici par conséquent deux
catégories d'organismes bien distincts dans lesquels nous répartissons
tous les êtres vivants que nous observons, selon leur participation
plus ou moins évidente — avec l'un ou l'autre de ces deux types.
Cette distinction est le premier élément de toute classification
naturelle; elle aboutit à un dernier — terme qui est l'espèce.
En effet, à mesure que l'on s'appesantit d'avantage sur les ana-
logies et sur les dissemblances des individus, ou est conduit à
les grouper en catégories nouvelles, subordonnées hiérarchiquement
les unes aux autres. De l'idée primitive d'animal naissent suc-
cessivement celles d'articulés — d'insectes, de Lépidoptères, d' Acha-
linoptères ou de Diurnes, de Papilionides, de Parnassius; et quand
l'analyse semble être arrivée à sa dernière limite, l'esprit s'arrête
à l'idée d'espèce qui ne contient plus pour ainsi dire que des
éléments numériques ou des individualités identiques. Mais en
réalité cette divisibilité des formes animales n'a pas de bornes
précises. Car au dessous des espèces il existe des variétés in-
nombrables, des races locales, des types géographiques qui tendent
à fusionner les espèces les unes aux autres et leur enlèvent toute
fixité. Dans nos Parnassiens par exemple Staudingeri et Del-
phius étaient considérés comme des formes indépendantes. Ce-
pendant la découverte ultérieure de Namanganus, Transiens et
Infernalis a jeté du doute sur cette question. Or il est évident
que si l'observation, au lieu d'être restreinte au petit nombre
d'exemplaires que l'on possède de ces papillons, pouvait s'étendre
à une grande quantité de sujets récoltés un peu partout; si mieux
encore elle pouvait embrasser tous les individus qui vivent à un
— 13 —
moment donné sur les différents points de leur habitat, les Lépi-
doptéristes constateraient l'existence parmi les types que nous
venons de nommer d'un tel nombre de termes transitoires entre-
croisés dans tous les sens qu'il leur serait impossible de les
classer. Hé bien ce qui est vrai pour nos Parnassiens l'est aussi
pour tous les autres lépidoptères en général. Les espèces, primitive-
ment très distinctes, parceque le nombre en était fort réduit,
sont devenues d'autant plus voisines que l'expérience nous a fait
connaître un plus grand nombre de ces termes de passage. C'est
que les différences qui existent parmi les êtres organisés dépassent
de beaucoup le niveau des espèces; elles n'expirent que quand
de subdivisions en subdivisions on aboutit aux individus. La
notion spécifique n'est donc qu'une simple abstraction de l'esprit,
une de ces idées générales dont il ne peut se passer parce qu'elle
est sa méthode et comme le ressort de son intelligence. Nous
appliquons du reste cette notion à tous les objets de nos connais-
sances, et à des êtres réels ou fictifs qui n'ont aucun rapport ni
avec les animaux ni avec les plantes. En Chimie, par exemple
nous répartissons les corps inorganiques en substances simples et
en substances composées; les simples, en métalloides et en métaux
et ces derniers, en véritables espèces telles que le soufre, le fer,
le plomb, le carbone; les composées nous les divisons d'après
leurs caractères en oxydes, en acides, en sels qui contiennent à
leur tour des éléments spécifiques; enfin nous introduisons la
même méthode de différentiation des caractères dans toutes nos
idées usuelles. Celle d'une fleur n'est pas la même que celle
d'un astre et parmi ces fleurs nous distinguons des roses,
des œillets, des renoncules, des pervenches dont les espèces
peuvent être variées à l'infini suivant des points de me fort
divers.
— u —
Ce n'est pas que nous soyons porté à nier l'existence de
ces caractères à l'aide desquels nous définissons les espèces;
car par le fait même que ces signes sont un objet direct de notre
intelligence, ils ont une réalité chez les êtres qui en sont revêtus;
mais nous soutenons que le groupement de ces caractères qui
constitue la base de l'idée de l'espèce est un produit factice de
l'esprit auquel rien ne répond dans le monde extérieur.
Nous concluerons donc de tous les raisonnements qui pré-
cèdent qu'il ne faut pas attacher à la notion dont il s'agit une
signification qu elle ne saurait avoir, ni la considérer comme si
elle était l'expression d'une réalité absolue et indépendante de
notre puissance intellectuelle, parcequ'elle n'est au fond qu'une
conception subjective et nominale, un moyen artificiel d'arriver
à la connaissance exacte des faits individuels.
C'est pour cette raison que nous posons personnellement les
plus grandes restrictions à la valeur que l'on attache généralement
à cette idée; et nous voudrions qu'à l'expression d'espèce fut sub-
stituée celle de forme qui comporte un sens moins absolu ou
moins positif.
Selon nos principes, tout type organique qui se perpétue
avec des caractères constants est une espèce distincte dans le sens
qui vient d'être expliqué; et nous ne nous préoccupons pas de savoir
si cette forme est indépendante par elle même, ou si elle est
dérivée d'autres formes voisines. Cette question préoccupe bien des
esprits, mais elle ne saurait modifier à notre avis la valeur des
caractères réputés spécifiques. Il est évident en effet que les
milieux influent sur la constitution et la physionomie des êtres
vivants et que leurs signes distinctifs sont susceptibles de s'altérer
et de se transformer. C'est même à la faveur de ce genre d'in-
fluences que les types organiques ont éprouvé les travestissements
— lo-
que nous constatons aujourd'hui, et sont arrivés à former des es-
pèces nouvelles. Des individus semblables, dispersés dans des
stations fort différentes au point de vue des conditions physiques,
ont parcouru des évolutions dissemblables et acquis des caractères
nouveaux qui ont fini par se fixer par l'hérédité. Mais cette origine
qui est probablement celle de presque toutes nos formes analogues
ne change rien à la valeur de leurs caractères lorsqu'ils sont
dûement constatés.
En résumé les espèces sont des êtres abstraits dont l'existence
ne réside que dans nos idées, leurs limites sont par conséquent
également idéales et sujettes à varier dans la proportion de nos
idées, selon que celles-ci acquièrent par l'observation plus de
perfection et plus d'étendue.
Dans le cours de ces études nous emploierons néanmoins
le terme d'espèce pour ne pas déroger à l'usage; mais nous le
rendrons synonyme de forme, c'est à dire qu'il exprimera la ré-
union de tous les individus dont la somme des caractères analo-
giques qu'ils offrent par rapport à un type invariable est plus
grande que celle qu'ils peuvent présenter avec d'autres formes; et
nous n'attribuerons la qualification de variété qu'à des individus
déjà compris dans la catégorie précédente, mais dont la similitude
avec la forme typique est moins grande, sans qu'il soit possible ce-
pendant de rapporter ces individus à d'autres formes ni convenable
de les ériger en types séparés.
I.
Caractères physiques et organiques des
Parnassiens.
Les Parnassiens constituent un genre très naturel parmi la
grande légion des papillons diurnes; et nous examinerons dans
le chapitre suivant la place qu'il convient de leur assigner dans
cette nombreuse famille. Disons en attendant qu'ils offrent tous un
faciès spécial et très caractéristique qui permet de les reconnaître
à première vue. Leurs ailes, en dessus, sont toujours blanches
ou un peu jaunâtres avec un certain nombre de taches rouges
et noires dont la disposition est très uniforme. Ces dessins ne
varient que par leur accentuation qui est plus ou moins prononcée,
suivant les espèces. Sur les premières ailes on remarque d'abord
deux grosses taches noires, fort vives, situées à la suite l'une de
l'autre vers le bord antérieur et distancées par la couleur blanche
du fond. Ce sont les taches discoïdales, ainsi nommés parce
qu'elles remplissent une partie de la place qu'occupe cette cellule;
puis un peu plus vers le sommet, existent deux ou trois autres
taches, plus petites, de la même couleur que les précédentes, et
disposées dans un sens perpendiculaire au bord antérieur de l'aile.
Ce sont les taches costales. Elles sont généralement toutes noires
comme chez Apollo, Nomion, Actius etc.; mais souvent aussi
leur centre est pupille de rouge ainsi qu'on le constate chez
— 17 —
Delius, Apollonius, Discobolus et d'autres espèces. En se di-
rigeant toujours vers le limbe de l'aile, on découvre ensuite
une suite d'arceaux plus ou moins flexueux, plus ou moins continus,
quelquefois ponctiformes, qui s'étendent depuis la côte jusque vers
le bord interne, et que nous désignons sous le nom de bande
antémarginale. 11 ne reste plus ensuite à considérer que le limbe
proprement dit qui est plus ou moins élargi surtout vers Tapex,
d'un aspect diaphane et parsemé de fines écailles noirâtres, puis
une autre tache noire (l'interne) qui se trouve placée vers le bord
de ce nom et dont le centre est souvent aussi pupille de rouge.
Les ailes inférieures de nos insectes offrent une disposition
de dessins un peu différente. Le bord abdominal est toujours
largement lavé de noir depuis la base jusque vers l'angle anal;
et cette teinte forme ordinairement un angle saillant dont le
sommet plus ou moins recourbé entoure l'extrémité de la cellule
discoïdale. Deux ocelles rouges, pupillées ou non de blanc plus
ou moins pur et toujours largement cerclées de noir profond,
occupent les régions moyennes de l'aile. L'une, la supérieure,
est placée entre la nervure costale et le premier rameau de la
médiane; l'autre est disposée entre les deuxième et troisième
branches qui naissent de cette médiane. L'angle anal est égale-
ment occupé par deux taches noires contigues, solitaires ou réunies,
et dont le centre est lavé de rouge chez certaines espèces, surtout
chez les individus du sexe femelle. Une bande antémarginale
qui correspond à celle des supérieures, flexueuse ou très grosse-
ment ponctiforme, précède le bord externe lequel est tantôt vierge
de tous dessins, et d'autres fois fortement estompé d'écaillés noirâtres
à l'intersection des nervures.
Si Ton examine la face opposée à celle dont il vient d'être
question, on trouve qu'elle est à peu près la reproduction fidèle
2
— 18 —
de l'autre; seulement les dessins sont moins accentués et le ton
des couleurs moins vif, parce que ces dessins et ces nuances ne sont
produites que par la transparence de ceux du dessus. Cette face
est en effet pour ainsi dire dépourvue d'écaillés, et reflète beau-
coup mieux que l'autre l'aspect vitré de la membrane. Cependant
chez un grand nombre d'espèces il existe de ce côté des ailes
inférieures, et tout contre la base, des taches rouges superposées
l'une à l'autre et bordées plus ou moins largement de noir,
dont la disposition et l'ampleur varient suivant la nature de
chaque type.
Voici pour l'aspect physique des ailes. Sous le rapport
organique, il convient d'ajouter qu'elles sont toujours entières,
que leurs bords ne présentent jamais ni dentelures ni appendices
caudiformes, que leurs contours sont bien arrondis. Les su-
périeures affectent la forme subtriangulaire avec l'apex peu saillant;
les inférieures sont un peu elliptiques avec l'angle anal faiblement
indiqué. Le bord abdominal est toujours évidé, de manière à
laisser l'abdomen entièrement libre, lorsque l'insecte relève ses ailes
verticalement pendant la position du repos. Les cellules discoï-
dales sont toujours fermées, et la nervure médiane de chaque
aile est divisée en quatre branches équidistantes. Les nervures
du reste sont très apparentes, assez saillantes, ordinairement de
la couleur du fond, excepté chez certaines espèces telles que
Eversmanni, Wosnesenskyi, Felderi et notre Mnemosyne, où elles
sont colorées en noir.
Remarquons encore, pour compléter tout ce qui intéresse ces
organes, que les ailes des Parnassiens présentent une structure
particulière qu'on ne retrouve pas chez les autres Diurnes. En
effet l'attouchement leur fait rendre un bruissement sonore ana-
logue à celui que produirait le frôlement d'une feuille mince de
— 19 —
parchemin, ce qui tient sans doute à ce que la double membrane
qui constitue le corps des ailes de ces insectes est plus résistante
et plus cornée que celle des autres papillons.
La tête des Parnassiens est de médiocre grandeur, et leurs
yeux, relativement petits, sont saillants et un peu ovalaires dans
le sens vertical. Cette partie supporte les antennes et les palpes.
Ceux-ci sont proéminents, dirigés obliquement de bas en haut,
et dépassent légèrement le niveau de la tête; ils sont comprimés
de chaque côté, et sont formés par la réunion de trois articles
distincts dont le premier est arqué, le second droit et le troisième
de forme linéaire. Ces organes sont revêtus de longs poils soyeux
qui forment aussi sur le devant de la tête, entre les deux yeux,
une sorte de toupet frontal.
Les antennes, relativement courtes par rapport à la dimension
du corps, se trouvent composées d'une tige très distinctement
articulée que surmonte une massue ovalaire qui n'est jamais ni
arquée, ni déprimée; elle est terminée elle-même par une sorte
d'aiguillon très fin et très court. Un examen superficiel permet
de reconnaître que ces appendices, auxquels on attribue des fonc-
tions spéciales telles que l'odorat ou le toucher, n'offrent pas de
caractères uniformes chez toutes les espèces. Les unes, et ce sont
les plus nombreuses, ont des antennes dont la tige est annelée
de blanc grisâtre et de noir (Apollo, Delius, Discobolus etc.),
avec la massue seule toute noire ; chez les autres, l'antenne toute
«ntière est d'un noir uniforme.
Les figures 5, 6, 7 et 8 de notre planche 1 représentent
ces appendices grossis des Parnassius Apollo, Apollonius, Mne-
mosyne et Delphius. Elles permettent d'apprécier la différence
que nous venons de signaler. Mais la comparaison de ces figures
fait ressortir en outre que ces organes varient quant à leur forme.
2*
— 20 —
Ceux dont la tige est entrecoupée offrent toujours une massue
brusquement renflée dont la type est invariable; au contraire
chez les espèces dont les antennes sont entièrement noires, la
massue est tantôt très forte comme chez Apollonius (fig. 6), fusi-
forme comme chez notre Mnemosyne, ou insensiblement fondue
avec le corps de la tige, ainsi qu'on l'observe dans les espèces
qui viennent se grouper autour de Delphius (fig. 8).
Le corps des Parnassiens est généralement épais et un peu
trapu, ce qui provient en partie de la pilosité abondante qui le
recouvre. Le thorax n'offre rien de remarquable, si ce n'est qu'il
porte à sa partie antérieure de longs poils qui entourent la tête
comme d'un collier. Les pattes, qui s'insèrent à cette partie,
sont semblables dans les deux sexes, et toutes également propres
à la marche. Les tibias de la première paire sont armés dans
leur milieu d'une forte épine; ceux de la dernière paire sont au
contraire munies à leur extrémité de deux éperons ou ergots; et
les tarses des six pattes sont terminés par un crochet bifide bien
développé dont les branches pendant la vie de l'insecte sont pro-
bablement mobiles dans le sens horizontal, car parmi les sujets
desséchés il en est chez lesquels ces branches sont divergentes
ou réunies l'une contre l'autre.
En poursuivant l'analyse des caractères extérieurs, il y a
encore lieu de remarquer que l'abdomen de ces papillons est plus
ou moins claviforme, c'est à dire légèrement renflé vers l'extrémité
libre et un peu arqué de haut en bas; que celui des mâles,
pourvu d'une forte pince anale écailleuse, est toujours beaucoup
plus velu que celui des femelles surtout en dessous; enfin que
l'abdomen de ces dernières est armé vers son extrémité
inférieure d'un appareil spécial qui a reçu le nom de poche
cornée.
— 21 —
Cet organe mérite tout particulièrement de fixer l'attention
des entomologistes, non seulement parce que sa structure est
curieuse et fort variée dans un genre d'insectes aussi homogènes
que celui qui nous occupe, mais encore parce qu'elle peut servir
de base, ainsi que nous le verrons plus loin, à une classification
méthodique des espèces.
Arrêtons-nous un instant pour étudier les différentes formes
que peut revêtir cet étrange appareil.
Si nous considérons d'abord les espèces qui gravitent autour
d'Apollo, de Delius et de Discobolus, nous trouvons que la poche
dont il s'agit consiste en une caverne ovalaire, un peu déprimée
latéralement, et dont les bords supérieurs sont soudés à la face
ventrale des segments de l'abdomen. Cette cavité est close de
tous côtés, excepté à sa partie postérieure où existe une ouverture
oblongue, limitée en haut par l'abdomen, latéralement par les
parois tranchantes de la caverne, et en bas par un prolongement
de celle-ci qui fait saillie sous la forme d'une spatule arrondie
ou aiguë. Du milieu du côté opposé à celui de l'ouverture nait
une lame mince qui s'appuie sur la poche d'une part, et va s'unir
ensuite aux segments abdominaux en présentant un bord libre
tranchant et plus ou moins arrondi. Cette pièce se nomme la
carène et varie beaucoup plus que la caverne elle-même. Chez
Delius elle est plus longue que chez Apollo; celle de la forme
Iiitermedius est au contraire plus courte et plus large. Disco-
bolus et Apollonius ont des carènes très développées, mais leur
extrémité supérieure n'aboutit pas jusqu'à l'abdomen. Les fig. 1,
3, 5, 7 de la planche 2 et 1, 3, 5 de la planche 3 font res-
sortir par comparaison toutes les différences que nous signalons
ici. Les fig. 7 et 8 de la planche 3 se rapportent à Tenedius
dont la femelle est douée d'un appareil tout spécial. Cette caverne
— 22 —
est arrondie, large, étalée, à bord libre un peu bilobé; mais elle
ne porte nulle trace de carène. Par contre elle est unie à sa partie
supérieure à un limbe prolongé en deux appendices saillants, du-
quel nait une sorte diaphragme interne terminé lui-même par
deux pointes aiguës qui font saillie dans la caverne. Les poches
de toutes ces espèces sont d'un brun corné plus ou moins foncé
qui tourne parfois au noirâtre comme chez Bremeri.
Il existe un autre grand groupe de Parnassiens dont les
poches sont au contraire blanchâtres, mais dont la structure est
toute différente de celles que nous avons analysées jusqu'ici. Tels
sont les Parnassius Clarius, Eversmanni, Wosnesenskyi, Mnemosyne
et ses variétés, chez lesquels l'appendice dont il s'agit acquiert
souvent un grand développement. Mais on ne remarque plus ici
la carène tranchante qui caractérise les formes similaires d'ApoUo,
ni le limbe bifide spécial à Tenedius. La poche consiste dans
une caverne simple, ovoide, allongée, plus ou moins atténuée à
sa partie antérieure, et dont les parois latérales sont soudées de
chaque côté de l'abdomen. L'ouverture est spacieuse et affleure
à peu près au niveau de l'oviducte. Ces poches varient du reste
sous le rapport de leurs formes et de leurs grandeurs pro-
portionnelles suivant les espèces. Celle de la variété Minima de
Nordmanni (pi. 5. fig. 1, 2) est très courte et brusquement
tronquée. Celles de notre Mnemosyne et de sa variété Nubi-
losus (pi. 4. fig. 1, 2, 3, 4) sont beaucoup plus allongées et ré-
gulièrement convexes. Chez Eversmanni (fig. 5, 6) elle est plus
ceintrée, subitement atténuée en avant sous forme de pointe
recourbée; tandis que la poche de Clarius (fig. 7, 8) qui
est plus longue que celles des autres espèces, présente un
double étranglement en avant et vers le milieu de son
parcours.
— 23 — »
Delphiiis, Staudingeri et les types similaires possèdent des
appareils dont la structure eut encore toute différente de celle
que nous avons étudiée jusqu'ici. Chez ces espèces les poches,
de couleur jaunâtre, consistent en une sorte de ceinture qui
entoure les derniers segments abdominaux comme d'un anneau
plat; elle s'élargit ensuite en dessous sous forme d'un appendice
enroulé, bilobé et creusé inférieurement d'un sillon assez profond.
Les fig. 5, 6, 7, 8 de la planche 5 représentent très exactement
l'aspect de cette pièce si curieuse que est vue dans différentes
positions.
Enfin le Parnassius Charltonius, nous offre un exemple
unique d'une caverne spiriforme également dépourvue de carène,
laquelle, comme profil, a beaucoup d'analogie avec une corne
épaisse, brièvement enroulée sur elle-même. Elle communique
au dehors par une ouverture plus large que longue, ovalaire, qui
est presque entièrement dissimulée sous l'abdomen. Sur la face
dorsale de cet organe existe en outre un sillon large et peu
profond qui le divise en deux parties symétriques.
Tous ces détails que nous venons d'exposer permettent de
juger que les Parnassiens sont des insectes bien intéressants au
point de vue organique; car parmi tous les lépidoptères ils ont
le privilège presqu' exclusif d'être munis de cette poche curieuse.
Toutefois n'oublions pas d'ajouter que toutes les femelles n'en
sont pas également pourvues. On rencontre en effet dans l'état
de nature, et par suite dans les collections, beaucoup d'exemplaires
qui n'en montrent aucune trace; et l'observation semble avoir
démontré que cet appendice ne se développe qu'après le rapproche-
ment des sexes, sans doute parce qu'il est appelé à jouer un rôle
important, soit dans le phénomène de la ponte, soit comme organe
protecteur des anifs. Nous pensons néanmoins que la caverne
24 —
<lont il s'agit préexiste déjà à racconplement en tant qu'orga-
nisme distinct, et que cet acte physiologique n'exerce d'autre in-
fluence sur elle que de déterminer son apparition à l'extérieur
du corps. Il serait facile de vérifier l'exactitude de cette hypo-
thèse en disséquant des femelles vierges et vivantes encore
dépourvues de leur appareil. Cette expérience aurait en outre
l'avantage de nous révéler ce qu'est cet organisme lorsqu'il est en-
core, comme nous le supposons, replié dans la cavité abdominale;
mais nous n'avons pas trouvé jusqu'à présent la facilité de la
réaliser.
Toutefois en examinant attentivement le revers du corps de
deux femelles vierges de Delius qui figurent dans notre collection,
nous avons remarqué, après avoir opéré l'ablation des poils qui
sont si abondants sur cette partie du corps, et dissimulé sous
un segment plus saillant que les autres, un ensemble de pièces
cornées, brillantes, rendues difformes par la dessication, que nous
considérons comme les éléments enpore impliqués de la poche,
lesquels se seraient sans doute normalement développés, si l'acte
de la fécondation était intervenu. Nous ne donnons ces indications
•qu'à titre de conjecture, car cette question est loin d'être éclaircie,
mais par cela même qu'elle est obscure, elle mériterait de faire
l'objet de recherches plus approfondies.
Il est impossible de caractériser un genre d'insectes avec
une précision suffisante, si l'on ne tient compte de la période
d'évolution qui précède l'état parfait. Malheureusement, à part
notre vulgaire Apollo, on ne sait presque rien des premiers états
des Parnassiens. Cette pénurie de renseignements s'explique par
la manière spéciale de vivre de ces papillons, dont les chenilles
se tiennent cachées à une très grande altitude dans le voisinage
des neiges perpétuelles. On a découvert cependant depuis peu
— 25 —
de temps les larves de Deliiis et de Mnemosyne et tout récem-
ment celle d'Apollonius dans les steppes de l'Asie centrale; mais
nous ne possédons personnellement aucune indication précise sur
ces trois dernières espèces. Nous serons donc obligé de puiser nos
caractères génériques sur la seule chenille d'ApoUo dont les
autres ne peuvent manquer d'être fort voisines.
Cette larve (pi. 1, fig. 1) est grosse, cylindrique et légère-
ment atténuée à ses deux extrémités. Ses anneaux sont séparés
par des incisions profondes, et supportent des points saillants
disposés en séries régulières et Animent pilifères; le premier en
outre est armé d'un tentacule charnu, disposé en forme de Y,
que la larve fait surgir et rentrer à volonté. C'est là sans doute
un moyen de défense ou de protection que la nature à concédé
à ces faibles bestioles pour les mettre à l'abri des atteintes de
leurs ennemis, mais sur le rôle duquel on n'est pas encore suf-
fisament fixé. C'est au détriment des Crassula et des Saxifrages
qui végètent dans les régions alpines que la chenille d'Apollo
se nourrit. Au moment de sa métamorphose, elle enroule à l'aide
de fils de soie une ou plusieurs feuilles de ces plantes dont elle
constitue une sorte de cocon, à l'intérieur duquel elle se trans-
forme en chrysalide (fig. 3). Celle-ci (fig. 2) conserve attachée
à sa partie anale la peau de la larve qui est plissée sous forme
de pelote; elle est d'abord d'un jaune un peu rougeâtre; mais
bientôt elle se recouvre d'une efflorescence pruineuse qui rappelle
celle des chrysalides des Catocala; quant à sa forme elle est
cylindrico-conique un peu contractée inférieurement avec la partie
thoracique arrondie à la manière de certains Bombycides.
II.
Situation des Parncassiens dans la série des
Lépidoptères; rapports qu'ils entretiennent
avec les genres limitrophes.
Linné, le grand naturaliste suédois, qui le premier assujettit
les êtres vivants à une nomenclature vraiment scientifique, par-
tageait les lépidoptères en trois genres principaux qu'il désignait
sous les noms de Papillons, de Sphinx et de Phalènes. Dans
le premier de ces grands groupes figuraient en bloc toutes les
espèces que nous qualifions aujourd'hui du nom de Diurnes, et
par conséquent aussi les Parnassiens.
Plus tard Latreille, tout en adoptant cette méthode comme
base de ses traveaux, s'appliqua à subdiviser les genres linnéens
en d'assez nombreuses coupes secondaires, et c'est lui qui créea
pour les insectes qui nous occupent le genre Parnassius, dans
son „Histoire naturelle des Crustacés et des Insectes,
tome XIV page 110 de l'édition de 1805." Fabricius et
Ochsenheimer ne modifièrent pas profondément la nomenclature
qu'ils trouvèrent établie; ils se bornèrent à créer de nouvelles
subdivisions parmi les anciennes, et à opérer un certain nombre
de transpositions. Les Parnassiens passèrent ainsi du genre qui
leur avait été assigné par Latreille dans celui des Doritis, et la
position de ces insectes ne fut plus modifiée jusqu'aux grands
— 27 —
traveaux de Boisduval. Cet excellent auteur revisa complètement
les diverses classifications adoptées par ses devanciers en leur
donnant des assises plus rationelles. Il répartit l'ordre des Lé-
pidoptères en deux sous-ordres, en Rhopalocères et en Hétérocères,
d'après la forme des antennes ; et il établit parmi chacun de ces
grands groupes un certain nombre de familles naturelles. Les
Rhopalocères qui correspondent aux anciens Diurnes de Latreille
et au genre Papilio de Linné, furent partagés en trois sections
les Succincti, les Suspens! et les Involuti, selon la mode
d'attache des chrysalides, c'est à dire suivant qu'elles sont fixées
par la queue et par un lieu transversal, ou simplement suspendues
par la partie anale, ou enfin enroulées entre des feuilles. Chaque
section à son tour fut divisée en tribus particulières. Celle des
Succincti fut répartie en Papilionides, en Piérides, en
Lycaenides et eu Erycinides d'après des particularités orga-
niques tirées tout à la fois des larves, des nymphes et de l'insecte
parfait. Boisduval classa nos Parnassiens dans la tribu des
Papilionides ; ils les réintégra dans le genre qui avait été primi-
tivement fondé pour eux par Latreille, tandis qu'il réserva celui
des Doritis d'Ochsenheimer à une seule espèce asiatique (Apollina)
dont les caractères diffèrent sensiblement de ceux des vrais Parnassiens.
Ces derniers, en effet, à part le régime de leurs chrysalides
appartiennent réellement à cette famille. Ils ont, ainsi qu'on
l'a vu plus haut, le bord abdominal des secondes ailes toujours
évidé de manière à laisser libre l'abdomen dans l'état de repos;
les cellules discoïdales sont fermées; la nervure médiane offre
quatre branches très distinctes; les tibias antérieurs sont armés
vers leur milieu d'une forte épine, et les postérieurs d'une paire
d'éperons, caractères que l'on retrouve sans exception chez toutes
les espèces de cette tribu.
Papilionides
— 28 —
Mais comme les Papilionides comprennent un certain nombre
de genres très différents, il ne sera pas sans intérêt de faire
ressortir les analogies et les dissemblances que nos Parnassiens
peuvent offrir avec chacun de ces genres limitrophes. Cette revue
comparative nous indiquera en outre la place que ces papillons
doivent occuper dans la série. Si l'on élimine les genres exo-
tiques des Teinopalpus, Ornithoptera, Euryades, Ar-
mandia et Se ricin us qui gravitent autour de nos Thais et de
nos Papilio, la tribu des Papilionides Paléarctiques se compose
des genres suivants:
Papilio
Luehdorfia
Thais
Ismene
Doritis
Parnassius
Le premier, celui des Papilio, n'offre que des rapports gé-
néraux et lointains avec celui que nous avons en vue. Les
nombreuses espèces qu'il renferme ont la tête grosse, les palpes,
très courts et squameux, sont appliqués contre le front et ne dé-
passent pas le niveau des yeux. Les antennes, fort longues, ont
leur massue recourbée de bas en haut. Le corps de ces insectes
est moins velu et leurs ailes, toujours abondamment chargées
d'écaillés, ont des angles aigus, des contours dentés et sont par-
fois munies d'appendices caudiformes.
L'unique espèce sibérienne (Puziloi, Ersch.) qui constitue'
le genre Luehdorfia, est plus voisine des Parnassiens que les
Papilio, par son corps court et recouvert de longs poils, par la
lame cornée qui termine l'abdomen du sexe femelle et qui rappelle
sous une autre forme la caverne d'Apollo. Mais la massue des
— 29 —
antennes de ce papillon est contractée, et les palpes, enfouis
dans une bourre soyeuse, sont peu distincts. Par les dessins et
la coupe, cette espèce est analogue à certains Papilio, tandis que
la texture mince de ses ailes, le contour denté des inférieures, la
forme et la bréiveté des antennes la rapprochent plutôt des Thais.
Ces derniers ont bien la coupe des Parnassiens. Leurs ailes un
peu allongées offrent des angles arrondis; mais les postérieures sont
toujours dentées et ces organes, régulièrement chargés d'écaillés,
offrent des dessins caractéristiques bien tranchés. Les palpes des Thais
sont du reste beaucoup plus allongés que ceux des Parnassiens,
leur corps plus grêle est constamment tacheté de dessins fauves
et blancs ; enfin l'absence de toute poche ventrale et la forme re-
courbée de la massue des antennes ne perniettent pas de confondre
deux genres si différents à tous égards.
C'est avec les Ismene et les Doritis que nos papillons offrent
de prime abord le plus d'analogie. Le premier de ces deux groupes
ne renferme qu'une seule espèce (Helios,Nick.) du Turkestan et le se-
cond également une forme unique (Apollina, Boisd.) de l'Asie mineure.
Ce Helios possède des ailes entières, sans dentelures au bord
externe des inférieures, et ses dessins rappellent beaucoup ceux
des Parnassiens. On remarque sur les antérieures des taches dis-
coïdales, costales et internes et sur les inférieures deux petites
ocelles à la place qu'elles occupent chez l'ApoUo. Cependant cette
ressemblance ne réside que dans l'aspect; car le corps de Helios
est glabre, ses palpes sont très courts et ses antennes, plus courtes
encore, sont terminées par une massue aplatie et légèrement creusée
en cuillère. Enfin les ailes de ce papillon sont bien écaillées et
la poche fait défaut chez le sexe femelle.
Le genre Doritis de Boisduval est par conséquent le seul
parmi tous ceux que renferme la tribu des Papilionides qui pré-
— 30 —
sente des rapports évidents avec celui des Parnassiens. En effet
les ailes d'Apollinus, dont tous les contours sont bien arrondis, possè-
dent à un haut point cette consistance parcheminée qui est si
remarquable chez les espèces voisines d'ApoUo. Elles sont aussi
partiellement dénudées au bord externe en dessus, et presque
totalement sur toute la surface opposée. Le corps de ce papillon
est en outre recouvert d'une pilosité abondante. Mais ce qui
distingue cependant ces deux genres assurément voisins, c'est
que les antennes des Doritis ressemblent à celles des Thais, et
que l'abdomen du sexe femelle est dépourvu de la poche cornée-
qui caractérise les congénères d'Apollo.
Les Parnassiens rappellent aussi une autre coupe générique,
mais d'origine exotique, celle des Eurycus qui renferme deux
espèces de la Nouvelle-Hollande (Cressida, Fabr. et Harmonia, Fabr.)
dont les ailes ont également une consistance parcheminée et sont
en partie dénudées d'écaillés. Toutefois la forme de ces organes
est différente, l'abdomen de ces insectes est à peine velu et la
tête avec ses gros yeux et ses palpes courts appliqués contre
le front, ressemble beaucoup à celle des Papilio. Enfin la caverne
ventrale est absente.
En résumé c'est par le genre Ismene et surtout par celui
des Doritis que nos Parnassiens se lient avec les autres groupes
de la famille des Papilionides, parmi lesquels ils occupent une
situation bien à part, en raison de la consistance toute spéciale
de leurs ailes et de l'existence de l'appendice anal chez les
femelles.
Néanmoins bien que ces insectes soient définitivement fixés
dans cette tribu, ils offrent aussi certains traits de ressemblance
avec les Piérides qui font suite aux Papilionides dans notre
nomenclature, et dont les ailes offrent toujours des contours bien
— 31 —
arrondis. Parmi les genres de cette nouvelle famille se trouve
en première ligne celui des Aporia de Hubner (Leuconea, Duponchel)
dont les espèces, très peu nombreuses, se distinguent de celles
des groupes limitrophes par des antennes toutes noires, longues,
à massue très fiisiforme, des ailes un peu papyracées, légèrement
diaphanes, dénudées partiellement au sommet des supérieures en
dessus chez les femelles, ainsi que sur la plus grande partie
de la face opposée. Ces organes sont en outre d'un blanc uni-
forme sur lequel les franges et les nervures tranchent très vive-
ment en noir.
Notre Leuconea Crataegi d'Europe rappelle beaucoup l'aspect
des Parnassiens du groupe de Mnemosyne chez lesquels les ocelles
rouges si caractéristiques ont disparu; et cette analogie que nous
signalons ici est surtout frappante entre le Paru. Stubbendorfii
et l'Aporia ou Leuconea Hippia, des provinces de l'Amour, qui
l'un et l'autre ont des nervures fortement estompées de noir.
Si on remonte jusqu'aux premiers états, on trouve que les
papillons dont nous étudions les relations organiques ne diffèrent
pas aussi sensiblement des autres genres de leur tribu qu'à l'état
parfait. On ne connaît d'une manière bien exacte que les chenilles
des Papilio et des Thais. Celles de ces derniers sont cylindriques,
épaisses, assez courtes, leur corps est couvert d'épines hérissées
de poils. Leur tête est petite, arrondie et fortement comprimée
en avant. La larve d'Apollo, la seule que nous connaissions,
est plus allongée, simplement garnie de courtes éminences un
peu velues, et sa tête n'est pas non plus aplatie sur le devant.
Quant aux larves des Papilio, elles présentent entre elles moins
d'homogénéité dans leurs formes que celles des Thais, et sont par
conséquent plus variables. On sait que ce genre si riche comprend
plus de trois cents espèces distinctes répandues sur toute la sur-
— 32 —
face du globe. Les unes ressemblent à notre Machaon et à notre
Podalirius; d'autres imitent certaines espèces de Danais, d'Acraea
ou même d'Heliconides. On comprend dès lors que les chenilles
d'insectes aussi disparates doivent éprouver elles-mêmes de grandes
modifications dans leur aspect. Un grand nombre d'entre elles est
hérissé de proéminences charnues; d'autres, telles que la larve
de Machaon, sont toutes unies; et c'est avec cette dernière forme
que la chenille d'Apollo offre le plus de similitude.
La dissemblance est plus accentuée entre les chrysalides des
différents genres des Papilionides. Celles des Papilio proprement
dits ont le front bifide et une saillie anguleuse sur le milieu du
thorax. Les nymphes des Thais sont plus sveltes, plus allongées,
plus cylindriques, sans proéminence thoracique, mais leur tête est
prolongée en une sorte de bec saillant. Les unes et les autres
sont attachées aux tiges des plantes nourricières par la queue et
par un lieu transversal.
Rien de semblable ne s'observe chez la nymphe d'Apollo
dont l'aspect trapu et les angles arrondis font plutôt songer aux
formes qui sont familières aux Nocturnes et surtout à certains
Bombycides. 11 y a jusqu'à la poussière bleuâtre dont son en-
veloppe est recouverte qui rappelle une particularité identique
qui existe chez les chrysalides de Catocala.
Enfin si l'on considère que ce nymphe est renfermée
dans un cocon soyeux et léger tissé entre les feuilles, on
trouvera qu'elle offre, en même temps qu'une analogie lointaine
avec les Hétérocères, beaucoup de traits de ressemblance avec
celles des Hespérides, où ce régime est caractéristique et qui
ont été désignées pour cette raison sous le nom d'Involuti, c'est
à dire d'Enroulés.
m.
Classification des Parnassiens en groupes
naturels.
La tâche du classificateur, d'après les considérations que
nous avons émises dans la préface au sujet de l'espèce, est com-
posée de deux parties distinctes. Elle consiste d'abord à diviser
les êtres organisés en catégories séparées selon les dissemblances
qu'ils présentent; puis à les réunir de nouveau en groupes plus
ou moins connexes d'après les analogies que l'observation fait
ressortir.
C'est par conséquent à l'aide d'un procédé tout à la fois
d'analyse et de synthèse que nous parvenons à classer les
animaux et les plantes, c'est à dire à assigner à chacun d'eux
une situation bien définie parmi nos idées. Cette méthode a
nécessairement pour effet de disposer les espèces en une série
continue et rectiligne.
En effet, lorsque le naturaliste a réparti par exemple les
lépidoptères en Hétérocères et en Rhopalocères, et ceux-ci
en subdivisions secondaires: en Papilionides, en Piérides, en
Nymphalides etc., il se trouve dans l'obligation de disposer
chacune de ces familles dans une suite quelconque. L'une doit
forcément précéder toutes les autres, et celles-ci ne peuvent
manquer de suivre dans un ordre déterminé.
3
— 34 —
C'est encore l'analogie des caractères qui vient dans ce cas
en aide au classificateur. Mais hâtons-nous de dire que ce guide
fait souvent défaut, et que la place que doit occuper tel groupe
dans la série est plus ou moins arbitraire, en ce sens qu'elle n'est
indiquée par aucune raison déterminante. Par exemple, dans la sub-
division primordiale des papillons enHétérocères et en Khophalo-
cères, il serait assez difficile de dire pourquoi il convient d'assigner
la première place à ceux-ci plutôt qu'à ceux-là, puisque ni l'un ni
l'autre de ces grands groupes n'offrent de liaison particulièrement
intime avec les autres ordres d'insectes qui précèdent ou qui
suivent les lépidoptères dans la série entomologique. 11 en est
encore de même de la situation respective des tribus, des familles
et même des genres. C'est ainsi que certains auteurs ouvrent
la légion des Hétérocères par les Sphingides, qui suivent
immédiatement les Hespérides de la division des Rhophalo-
cères; d'autres parles Sesiides ou les Zygaenides. Le passage
des Borabycides se poursuit avantageusement, suivant certains
classificateurs, par les Noctuides; tandis que cette transition
pourrait s'effectuer aussi bien par les Phalènides.
La divergence de vue est encore plus grande dans le groupe-
ment réciproque des genres d'une même famille; et elle se
manifeste surtout lorsqu'on pénètre jusqu'aux espèces propre-
ment dites.
Quand on étudie attentivement la subordination de ces
dernières, on remarque effectivement bien vite qu'il est impossible
d'établir parmi elles une hiérarchie régulière et continue, et qu'il
existe dans leur sein un certain nombre de types qui sont à peu près
également bien placés partout où on les dispose. Ainsi, pour ne citer
qu'un exemple choisi dans les Parnassiens, Charltonius ne se lie avec
aucun de ses congénères, si ce n'est avec ceux du groupe de Delphius.
— 35 —
Ces dernières espèces sont bien séparées, soitdes types voisins d'Apollo,
soit de ceux de Mnemosyne. 11 en est de môme de Teuedius qui n'a
de rapports intimes avec aucune autre forme de ce beau genre.
C'est que la méthode," en vertu de laquelle nous coordonnons les
genres et les espèces, est plus ou moins artificielle; elle présente
le double défaut de ne pouvoir embrasser toutes les formes
existantes dont la connaissance serait pourtant nécessaire pour
bien constituer une série progressive, et de suivre une direction
rectiligne qui n'est pas le procédé que suit la nature dans l'en-
cliainement des êtres vivants.
Du moment que l'espèce n'est, ainsi que nous l'avons dit
au début, qu'une idée abstraite de l'esprit, et qu'il ne peut exister
hors de nous que des individus plus ou moins similaires, il faut
s'attendre à ce que les ressemblances des êtres irradient dans
toutes sortes de directions; et dans le fait, l'examen attentif des
genres nombreux fait ressortir, que presque toutes les espèces
pivotent pour ainsi dire les unes autour des autres par des
caractères dont l'équivalence est manifeste.
Voilà pourquoi il est impossible de ranger les êtres organisés,
et spécialement les papillons, dans une suite bien continue; et
pourquoi aussi les meilleurs systèmes de classification offrent des
défectuosités irrémédiables qui tiennent à la nature des choses.
Mais, si la méthode en série linéaire n'est pas celle que suit
la nature, elle est du moins la seule que nous puissions adopter,
parce qu'il n'est pas en notre pouvoir de suivre ces enchaînements
en nombre pour ainsi dire infini que présentent les êtres vivants
dans leurs rapports mutuels. D'ailleurs, fussions-nous capables
de les embrasser tous, et de les suivre dans toutes leurs ramifi-
cations, nous manquerions de moyens pratiques de les exprimer;
et ce genre de connaissances n'exercerait par cela même aucune
3*
— 36 —
influence utile sur nos nomenclatures. On comprendra par conséquent,
après ce que nous venons de dire, qu'il convient toujours de faire
des restrictions sur la valeur des classifications en général; mais ces
réserves ne peuvent en aucun cas empêcher le naturaliste d'établir des
systèmes qui sont en quelque sorte les cadres obligés de la science.
Cela posé, nous allons essayer de subdiviser méthodiquement
le genre Parnassius qui fait l'objet de cette étude, et de répartir
ses intéressantes espèces en groupes naturels.
Un travail analogue à celui que nous allons proposer a déjà
été tenté par Ménétriès, le savant directeur du Musée de St.Péters-
bourg, en 1855, mais sans grand succès à notre avis.
Nous trouvons en effet dans l'ouvrage qu'il a publié sous
le titre d'Enumeratio corporum animalium Musei Petro-
po lit a ni et qui est rédigé sous forme de catalogue, un essai de
classification de tous les Parnassiens connus de son temps. Pour
établir ses groupements, l'auteur dont il s'agit s'est fondé sur
les taches rouges qui existent à la base du revers des secondes
ailes d'un grand nombre d'espèces de ce genre, ainsi que sur
la présence ou l'absence des ocelles sur les mêmes ailes. Voici de
quelle manière les Parnassiens 'sont répartis dans ce catalogue:
Apollo, Linné.
var. Hesebolus, Nordm.
Apollonius, Evers.
Nomion, Pisch.
Phoebus, Prun. (Delius, Esp.)
Sedakovii, Mén.
Intermedius, Mén.
Clodius, Mén.
Eversmanni, Mén.
Wosnesenskii, Mén.
V Division.
Taches rouges à la base des ailes
inférieures en dessous
— 37 —
2^ Division.
Point de taches rouges à la base
des ailes inférieures en dessous . . | '^l^.rius, Lvers.
1 Nordmanni, Méii.
Ailes sans aucune tache rouge | Mnemosyne, Linné.
I Stiibbendorfii, Mén.
En parcourant le tableau qui précède, on se rend facilement
compte que le rapprochement des espèces qui y figurent est tout-à-fait
artificiel, et qu'il présente, par conséquent, le grand inconvénient d'unir
entre elles des formes bien séparées. Ainsi, en réalité, lesParn.Evers-
m an ni et Wosnesenskii n'ont que des rapports généraux avec les
espèces de la série Apollo-Nomion-lntermedius; tandis qu'au
point de vue organique, ils sont très proches parents de Clarius
et de Nordmanni, lesquels eux-mêmes ne diffèrent pas très sen-
siblement de Mnemosyne et de Stubbendorfii. Ces taches
rouges à la l»ase du dessous des ailes inférieures n'offrent par
conséquent aucune valeur sérieuse; elles ont même le tort grave
d'être inconstantes. En effet, du temps de notre auteur, on ne
possédait de toute une série de Parnassiens que le seul Delphius
que Ménétriès ne mentionne même pas, et autour duquel sont
venu se grouper successivement Staudingeri, Transiens,
Namanganus et Cardinal, qui sont si voisins entre eux qu'il
est souvent difficile de différencier certains exemplaires de ces
espèces. Delphius, dans sa forme typique, est privé de taches
rouges aux ailes inférieures, et devrait rentrer dans la deuxième
division du tableau ci-dessus; mais sa variété Infernalis possède
à cette place deux macules bien accentuées. Il en est de même
de Namanganus et de Cardinal, qu'il faudrait séparer de
Delphius et classer dans la première division, si l'on voulait
rester dans la logique des caractères.
— 38 —
Enfin chez Staudingeri les taches rouges en question,
généralement absentes, sont cependant parfois bien indiquées,
circonstance qui placerait le classificateur dans la nécessité de ré-
partir les exemplaires d'une même espèce en deux catégories diffé-
rentes et opposées l'une à l'autre.
En écartant ces caractères comme absolument insuffisants,
on pourrait essayer de classer les Parnassiens d'après la couleur
de leurs antennes. Nous avons vu plus haut que ces organes
sont tantôt entièrement noirs, et tantôt entrecoupés de zones
blanches parallèles. Si l'on réunissait toutes les espèces qui
présentent ces particularités, on pourrait établir ainsi deux groupes
bien tranchés; mais cette répartition serait purement artificielle,
et n'exprimerait pas les relations naturelles des espèces. Dans
l'un par exemple on trouverait côte à côte: Apollonius, Hon-
rathi, Bremeri, Tenedius, Eversmanni, Wosnesenskii,
et tous les types voisins de Delphius et de Mnemosyne, c'est à
dire les formes les plus opposées du genre Parnassius. La struc-
ture de la massue n'offre pas non plus de points de repère satis-
faisants, parce que le développement de cette partie de l'antenne,
bien que variable suivant certains groupes d'espèces, n'est pas
toujours appréciable.
Après avoir examiné avec soin les divers caractères que
peuvent présenter c6s papillons, nous n'avons trouvé de constance
et de valeur vraiment scientifique que dans ceux qui sont inhérents
à la poche cornée du sexe femelle. Nous avons déjà étudié dans
le chapitre précédent l'organisation de cet appareil si curieux, et
nous avons suivi la transformation qu'il éprouve chez les différents
types de la série. Faisons rémarquer qu'en ce qui conerne les
espèces de la Faune Paléarctique, les seules dont nous nous occu-
pons dans ce travail, cette variation peut se réduire à cinq plans
absolument invariables dans leurs grandes lignes; et que chez
les mêmes espèces la poche dont il s'agit a aussi une forme
toujours indentique.
1"^ Dans le premier cas, cette poche est enroulée sur elle
même sous forme de corne et ne présente ni appendice, ni carène,
mais au contraire un sillon médian large et peu profond.
2«- Dans le second cas, elle offre la configuration d'un
anneau qui entoure le dernier segment abdominal, et qui se dé-
veloppe inférieurement en un appendice bifide, creusé en gouttière
sur ses côtés, et sillonné dans son milieu.
3^- Dans le troisième plan, elle consiste en une caverne
sous-jacente, soudée aux parois ventrales, un peu déprimée sur
les côtés. Sa partie antérieure qui est arrondie se trouve munie
d'une carène tranchante plus ou moins développée; tandis que la
partie postérieure, du côté de l'ouverture, est prolongée en une
languette aiguë ou ovalaire.
4^ Elle consiste encore en une poche spacieuse, arrondie,
sans carène, que recouvre un limbe horizontal saillant et pro-
fondément bifide.
5« Enfin dans le dernier type, elle se compose d'une caverne
volumineuse, plus ou moins allongée, généralement atténuée à sa
partie antérieure, sans carène ni appendices et qui présente deux
orifices opposés.
Le tableau que nous avons tracé plus loin, indique la ré-
partition des différentes espèces de Parnassiens dans chacun de
ces groupes naturels, auxquels nous avons imposé des dénominations
qui rappellent le caractère prédominant de l'appareil (|ui sert de
base à cette classification. Nous avons subdivisé en outre deux de
ces groupes en sections secondaires, qui sont fondées sur des signes
plus artificiels et de moindre valeur. C'est ainsi que le 3^ groupe
— 40 —
comprend deux sections, dont Tune renferme toutes les espèces
dont la tige des antennes est franchement entrecoupée de blanc,
et l'autre contient toutes les formes chez lesquelles ces organes
sont entièrement noirs.
Le 5^ groupe, malgré la forme si caractéristique de sa caverne,
présente cependant des types d'aspect un peu disparate que nous
avons dès lors jugé à propos de répartir aussi en sections secon-
daires. Ainsi, Clarius et Nordmanui n'ont pas de taches rouges
basilaires sur le revers des ailes inférieures; mais ils possèdent
des ocelles normalement développées. Eversmanni, Wosne-
senskii et Pelderi sont munis h la fois d'ocelles et de taches
basilaires; tandis que les unes et les autres font défaut chez
notre Mnemosyne et ses formes dérivées. Il y a donc lieu,
pensons-nous, de classer ces dernières espèces en trois petits
groupes subordonnés au groupe principal, afin de mieux faire
ressortir leurs rapports réciproques.
L'ensemble de tous ces caractères se trouve par conséquent
exprimé dans le tableau que nous proposons ci-dessous.
Tableau de classification des espèces du genre Parnassius.
P Groupe
(Cornuti).
Poche enroulée sur elle
même, sans carène ni
appendice, mais marquée
au contraire d'un sillon
médian large et peu pro-
fond. Antennes noires.
Voir la suite d'autre part.
Charltonius, Gray.
— 41 —
2« Groupe
(Cincti).
Poche cornée disposée
en anneau entourant
complètement l'abdo-
men, et se prolongeant en
dessous en un lobe bifide,
horizontal, enroulé de
chaque côté, et creusé
d'un sillon profond.
Antennes noires.
Namanganus, Stgr.
Delphi us, Eversm.
var. Infernalis, Stgr.
ab. Styx, Stgr.
Transiens, Stgr.
Staudingcri, Baug Haas.
Cardinal, Grumm.
3^ Groupe
(Carinati).
Poche cornée dépri-
mée latéralement,
munie à sa partie
antérieured'une forte
carène, et à sa pos-
térieure d'une lame
saillante, horizon-
tale, aiguë ou ar-
rondie. Antennes de
couleur variable.
Tiges des antennes
entrecoupées de noir.
Tige des antennes en-
tièrement noire.
Apollo, Linné.
var. Hesebolus, Nord.
Nomion, Fischer.
Actius, Evers.
Romanovi, Stgr.
Rhodius, Honrath.
Insignis, Stgr.
Discobolus, Alph.
var. Minor, Stgr.
ab. Nigricaus, Stgr.
Delius, Esp.
var. Intermedius, Mén.
? var. Sedakovii, Mén.
Honrathi, Stgr.
Bremeri, Brera.
? var, Graeseri, Honrath.
Apollonius, Evers.
ab. Flavomaculata, Stgr.
42 —
5® Groupe
(Ventricosi).
Poche blanchâtre,
spacieuse, à 2 ouver-
tures opposées, sans
carène ni appendices.
Antennes noires.
Eversmanni, Mén.
var. Thor, Edw.
Wosnesenskii, Mén.
Felderi, Brem.
Clarius, Evers.
var. Dentata, Stgr.
Nordmanni, Nord,
var. Minima, Honrath.
4** Groupe (Limbati).
Poche très grande, arrondie, sans carène, mais
recouverte supérieurement d'un limbe bilobé. { -Leûedius, Lvers.
Antennes noires.
Des taches basilaires
et des ocelles rouges
aux ailes inférieures.
Vestiture du corps jaune.
Point des taches ba-
silaires aux ailes in-
férieures, mais seule-
ment des ocelles. Vesti-
ture du corps grise.
Mnemosyne, Linné.
? var. Gigantea, Stgr.
? var. Nubilosus, Christ.
Stubbendorfii, Mén.
Nous devons encore ajouter quelques mots sur l'arrangement
que nous avons adopté en ce qui concerne les groupes et les espèces
de notre classification.
Nous avons placé en tête de la série, et dans le premier
groupe, Charltonius qu'il eut été difficile de bien localiser ailleurs.
En effet ce papillon a un aspect à part parmi les Parnassiens,
par l'ocelle inférieure qui a acquis un développement considérable
et qui se trouve située beaucoup plus près du bord que chez n'im-
porte quelle autre espèce. En outre, tout contre ce bord, existe
une rangée de cinq taches noires, arrondies, vivement pupillées de
bleu qui rapelle une disposition analogue qu'on remarque dans
le Doritis Apollinus. Par la facture des ailes supérieures, ce
Charltonius ressemble cependant à Delphius ou mieux à Staudingeri,
Point des taches basi-
laires ni d'ocelles.
— 43 —
et c'est pourquoi nous avons placé dans le second groupe les
espèces voisines de ces deux derniers types. Elles s'enchainent
du reste fort bien entre elles et dans l'ordre où nous les avons
disposées.
Entre le 2^ et le 3^ groupe il existe une solution de conti-
nuité de formes évidente; car aucune espèce du premier ne se lie
avec l'une quelconque du second. Cette lacune provient sans
doute de ce qu'il y a dans la nature bien des espèces encore
inobservées qui viendront plus tard la combler et ménager les
transitions de la série.
Mais dans la division des Carinati on reconnaît une grande
homogénéité d'aspect. Depuis Apollo jusqu'à Honrathi, la va-
riation des caractères est fort bien observée par une succession
de termes presque continus. Les Parnassius Bremeri, Graeseri
et Apollonius sont seuls un peu dissemblables. Les deux premiers,
à cause de leurs franges et de leurs nervures noires, tendent à
se rapprocher des Ventricosi où ces caractères sont tout-à-fait
prédominants; et la seconde, par les gros points noirs et solitaires
qui remplacent sur les quatre ailes les antémarginales flexueuses des
Carinati, et le rétrécissement considérable de la partie dénudée
du sommet des supérieures, rapelle un peu le Tenedius qui
possède aussi ces caractères et qui constitue à lui seul le groupe
des Limbati.
Ce dernier papillon interrompt également l'harmonie de la
série, et ne s'unit, par conséquent, pas non plus très bien avec
les espèces des groupes limitrophes.
Eversmanni, Wosnesenskii et Felderi qui commencent
la 5* subdivision conservent des rapports évidents avec les Cari-
et les Limbati auxquels ils font suite, par leurs ocelles et leurs
taches basilaires rouges bordées de noir. Ces basilaires s'oblitèrent
— 44 —
cependant chez Clariiis et Nordmanni, et on arrive enfin aux
formes qui gravitent autour de Mnemosyne et à Stubbendorfii,
lesquelles ne possèdent plus ni ces taches, ni ces ocelles qui
sont si remarquables et si constantes parmi les Parnassiens.
Ces dernières espèces terminent la série et constituent, ainsi que
nous l'avons déjà signalé plus haut, un acheminement vers le
genre Aporia (Leuconea) de la famille des Piérides.
En résumé, la classification nouvelle que nous proposons,
malgré certains défauts qui sont inhérents à tous les systèmes,
et qui proviennent surtout de ce que nous ne connaissons pas
encore tous les êtres qui sont répandus dans la nature, présente
cependant, croyons-nous, l'avantage de disposer de la manière
la moins artificielle les espèces si remarquable d'un genre tout-
à-fait priviligé parmi les papillons diurnes.
IV.
Distribution géographique des Parnassiens à la
surface du territoire de la Faune Paléarctique.
Lorsqu'on envisage l'ensemble des lépidoptères qui habitent
un grand territoire faunique, tel que celui que nous avons pris
pour objectif, il se dégage de cette étude un fait général fort
important: îi savoir que les espèces d'un même genre, et souvent
les genres d'une même famille, sont très inégalement répartis
sur la surface de ce territoire. En effet, il y a des espèces qui
sont exclusivement propres aux pays méridionaux; d'autres ne
fréquentent que les régions tempérées et même les climats glacés
qui avoisinent les pôles. Certains papillons qui sont communs
sur un point quelconque de l'Europe ne se retrouvent plus sous
la latitude équivalente du continent asiatique. Les êtres organisés
sont donc distribués suivant la longitude et la latitude des lieux;
et les lois qui président à cette dispersion, s'appliquent à l'immense
généralité des formes; elles ne souffrent d'exceptions qu'eu faveur
de quelques types cosmopolites qui paraissent être indifférents sur
le choix des milieux.
Il existe deux grandes causes qui expliquent le phénomène que nous
venons de signaler; la première, c'est que les insectes, et tout spéciale-
ment les papillons, se nourrissant dans les deux grands états qu'ils sont
— 46 —
susceptibles de revêtir au détriment du règne végétal, il est
naturel que leur répartition soit liée à celle des plantes, et en
subisse les diverses fluctuations. En outre, comme l'extension
des plantes à la surface du globe est elle-même subordonnée
aux variations des climats, il est évident que l'habitat des lépi-
doptères est réglé, en dernière analyse, par des conditions de
température; et que les stations géographiques dont le climat est
à peu près identique, contiennent aussi les mêmes espèces ou des
espèces au moins très voisines.
Si la surface des continents était comprise dans un plan sphérique
parfait, il est certain que les faits observés seraient d'accord avec les
données de cette théorie ; mais, en réalité, les choses ne se passent pas
ainsi. Toutes les terres un peu étendues sont formées d'un mélange
de grandes dépressions et de plateaux élevés. De hautes montagnes,
séparées par des vallées profondes, les sillonnent en tous sens, et
constituent des milieux très divers qui doivent nécessairement
exercer une action puissante sur la physionomie de la vie orga-
nique. Les espèces, quoique habitant sous une même latitude,
varieront par conséquent, en proportion des changements que tous
ces grands accidents du sol auront introduits dans le climat
normal. Il y a lieu de tenir compte aussi de la configuration
des continents et de leur situation par rapport aux mers qui les
entourent. Les îles d'un archipel, par exemple, sont plus chaudes
et ont une température plus constante que les grandes régions
continentales qui se trouvent situées sur le même parallèle; et
parmi celles-ci, les zones voisines du littoral sont notoirement
privilégiées, comparativement aux lieux situés à l'intérieur; parce que
la température de l'océan, en raison de sa nature, est moins
variable et plus douce que celle de la partie superficielle de la
croûte terrestre.
— 47 ~
Les variations si nombreuses et en apparence inexplicables
que l'on reconnait dans la répartition des espèces, résultent de
l'action simultanée des causes générales que nous venons d'indiquer.
Cependant, ces causes éprouvent des modifications importantes, par
suite de deux faits particuliers qui influent d'une manière tout-à-
fait spéciale sur la physionomie des faunes paléarctiques. Nous
voulons parler de l'existence d'un des deux pôles du froid au nord
de l'Asie, et de la grande altitude de la partie moyenne de ce
continent.
11 est un fait bien dûment constaté par l'expérience, c'est
que le pôle boréal astronomique, c'est à dire l'extrémité de l'axe
terrestre dan§ cet hémisphère, n'est pas, ainsi que cela devrait
être en théorie, le point du globe où la température est la plus
basse. Le lieu le plus froid de l'ancien monde est situé au con-
traire à peu près au centre du groupe d'îles que les géographes
désignent sous le nom de Nouvelle Sibérie ou Archipel de Liaghoff,
au nord-est de l'embouchure du fleuve Lena. La température
moyenne de ce point est environ de — 20*^, tandis que celle du
pôle peut être évaluée seulement à quelques degrés au dessous
de 0. Ce lieu étant situé sous le 77e degré de latitude boréale,
il résulte de cette circonstance, au point de vue climatérique,
que toutes les contrées de l'Asie, qui sont voisines de- ce pôle
du froid, subissent des conditions de température analogues à celles
qu'elles éprouveraient si elles étaient disposées autour du pôle
astronomique lui-même, dans l'hypothèse que celui-ci soit eff"ec-
tivement le lieu le plus froid de la terre; c'est à dire que l'eifet
frigorifique produit sur ces contrées est le même que si elles
étaient relevées in latitude de 23 degrés environ, par rapport aux
régions plus éloignées qui ne sont guère influencées par le voisinage
du pôle du froid. Ainsi la température moyenne de la ville de
— 48 —
Jakoutsk, par exemple, qui est située sur le même parallèle que
Saint-Pétersbourg, n'est égalée en Europe que par celle qui règne
dans le centre de la Nouvelle-Zemble; et le climat de la Daourie,
par 55 degrés de latitude, équivaut à celui delaLapponie par 65 degrés;
et ainsi des autres points des deux continents européen et asiatique
comparés les uns aux autres. Les lignes isothermes, qui en théorie
devraient se confondre avec les parallèles géographiques, s'abaissent
par conséquent vers l'équateur en passant d'Europe en Asie; et
cette circonstance exerce, comme on le conçoit sans peine, une
influence considérable sur la répartition des espèces sous une
même latitude. Aussi, voyons-nous qu'en général les papillons
qui sont communs à ces deux grands continents, descendent beau-
coup plus bas à mesure qu'on s'avance d'avantage vers l'Orient;
et qu'en suivant un même parallèle, le 50^ par exemple, on
trouve en Mantchourie des espèces qu'il faudrait aller chercher
en Europe jusqu'en Finlande et dans la Russie septentrionale.
L'altitude des lieux exerce une influence encore plus directe
et plus saisissante sur la physiognomie des faunes en général;
et voilà pourquoi les lépidoptères du centre de l'Asie ont tant
de ressemblance avec ceux du nord, parce que ce pays est très
élevé, et en conformité parfaite par sa température avec les lati-
tudes froides des régions boréales.
Dans les pays accidentés, on ne rencontre les espèces qui sont
propres aux grandes plaines que jusqu'à un niveau qui varie de
400 à 600 mètres d'altitude. Mais à mesure qu'on s'élève vers
de plus grandes hauteurs, la faune se modifie; des formes parti-
culières se succèdent les unes aux autres, jusqu'aux points cul-
minants et aux neiges perpétuelles où l'épanouissement de la vie
devient impossible. Ce fait est bien connu de tous les entomolo-
gistes qui savent fort bien qu'il faut aller recueillir certaines
— 49 —
espèces à une altitude déterminée. Or la cause (jui a réparti
les insectes selon l'altitude des milieux, est la même que celle
qui les a dispersés suivant les diff(''rentes latitudes. C'est encore
ici une question de température.
En effet, l'observation démontre que pour un même lieu la
température décroit en moyenne d'un degré pour chaque distance
de 200 mètres parcourue en altitude, et que ce rapport ne subit
pas de grandes variations dans des stations fort éloignées. D'après
ce principe, un plateau dont le niveau est élevé de 2000 mètres
au dessus d'une grande plaine, doit présenter une diiférence de
10 degrés en moins, par rapport à la température qui règne à sa
base; ce qui revient à dire, que le climat moyen du plateau dont il
s'agit, correspond à celui d'une latitude beaucoup plus septentrionale.
11 n'est donc pas étonnant que les animaux des lieux élev('S, et
surtout les insectes qui sont si sensibles aux influences atmo-
sphériques, ressemblent beaucoup plus à ceux des pays boréaux
qu'aux formes qui sont particulières à leur propre latitude.
Cependant, l'analogie qui existe entre les formes des hautes
montagnes et celles des contrées du nord, est loin d'être complète,
comme on devrait s'y attendre d'après les raisonnements théoriques.
Sur aucun point culminant des alpes du centre de l'Europe, par
exemple, on ne constate la présence des espèces qui sont exclusive-
ment propres aux climats correspondants du nord; et cette dissem-
blance ne peut être expliquée que par la difterencci de la pression
atmosphérique qui caractérise l'inégalité des altitudes. Ettective-
ment, le développement des êtres vivants n'est pas seulement
subordonné à une somme plus ou moins grande de chaleur qui
leur est sans doute nécessaire, il est encore soumis à l'action
de la pesanteur qui règle ses conditions. De même que dans
nos mers, certains poissons et beaucoup d'invertébrés ne peuvent
4
— 50 —
vivre qu'à de grandes profondeurs, et sous le poids énorme de
la masse des couches de l'océan, tandis que d'autres espèces se
plaisent sur le rivage et presque à fleur d'eau; de même aussi
un grand nombre d'insectes aériens, et surtout les papillons,
trouvent les conditions favorables à leur existence, les uns dans
les basses plaines sous la pression de toute la colonne atmosphé-
rique, et d'autres dans un air léger et raréfié.
Telles sont les causes principales qui modifient plus ou moins
profondément la physionomie des êtres vivants qui sont répandus
à la surface du globe. On comprendra maintenant pourquoi les
animaux qui habitent sous une même latitude sont parfois si
dissemblables entre eux, et pour quelle raison les Parnassiens, ces
papillons des régions froides, descendent, à la faveur des accidents
de terrain, jusque sous les climats chauds de l'Asie. Ces espèces
du reste sont dispersées sur l'étendue du territoire paléarctique
selon la latitude, la longitude et l'altitude des lieux. Les unes
sont groupées autour du pôle du froid; d'autres fréquentent des
stations plus méridionales, telles que le centre de l'Asie et même
l'Indoustan et le Thibet. Mais ces papillons sont surtout mon-
tagnards; ils n'habitent généralement que les lieux élevés, à partir
de 1000 à 1500 mètres d'altitude, jusqu'au niveau des neiges
éternelles ; c'est à dire à un point où le développement de la \ie
devient impossible. Cependant lorsqu'on considère les Parnassiens
à ce point de vue, on constate parmi leurs différentes formes
des changements des mœurs très grands qui sont sans doute
le résultat des différences qui existent dans le tempérament de
chaque espèce. Par exemple, dans les alpes de la France et de
la Suisse, là où cohabitent Apollo, Delius et Mnemosyne, c'est
toujours le premier qui descend plus bas vers les plaines; puis
vient Delius, et enfin Mnemosyne qui atteint les stations culminantes.
— 51 —
Sous le rapport de la latitude, les lieux d'habitation des
Parnassiens sont d'autant moins élevés qu'ils sont situés plus
au nord. Ainsi notre Mnemosyne, qui monte sur le sommet des
alpes du centre de l'Europe, fréquente au contraire déjà les
collines dans la Scandinavie et dans le gouvernement d'Archangel.
En Asie, tandis que Delphius ne vole pas au dessous de 2500 à
3000 mètres dans le Ïian-Cban, Tenedius, Eversmanni et Stubbeu-
dorfii ont été rencontrés dans la Sibérie centrale, sur les bords
de la rivière Tongouska, à une altitude très faible. Ces différences
de séjour doivent être attribuées eu partie aux mœurs qui ne sont
pas les mêmes chez toutes les espèces, mais aussi à ce fait, que la
limite des zones tout à fait inhabitables s'abaisse d'autant plus que
l'on s'avance d'avantage vers le nord, et surtout vers ce point de l'an-
cien continent que nous avons signalé comme étant le pôle du froid.
Si on considère l'ensemble de tous les Parnassiens connus,
y compris ceux qui sont (étrangers à la Faune Paléarctique, on
constate que ces papillons sont répandus d'une manière générale,
d'abord dans toute l'Europe proprement dite, puis en Asie, depuis
les régions circumpolaires jusqu'aux latitudes chaudes de l'Indoustan,
du Thibet et de la Chine; enfin dans l'Amérique septentrionale,
à partir de la province d'Alaska jusqu'aux Etats-Unis et à l'ex-
trémité de la Californie. L'Europe est le moins bien partagé de
ces trois grands continents, car elle ne nourrit que les espèces
les plus anciennement connues: ApoUo, Delius et Mnemosyne.
La première habite à peu près tous les pays qui s'étendent de-
puis la Suède et la Norvège jusqu'aux rivages de la Méditerranée,
à l'exception toutefois de l'Angleterre, dans laquelle l'existence
d'aucun Parnassien n'a encore été constatée. Elle s'étend ensuite
dans toute la Russie centrale, franchit les monts Ourals et le Caucase,
€t vient expirer, du moins dans sa forme typique, vers la chaîne de
4*
— 52 —
l'Altai et aux premiers contreforts des alpes du Turkestan. Delius
est plus spécial aux montagnes du centre de l'Europe; il n'avance
pas autant qu'Apollo, ni vers le nord, ni vers le sud; mais il
traverse toute la région moyenne de l'Asie jusqu'au Kamtschatka,
après avoir éprouvé dans ces stations orientales des modifications
importantes dans ses caractères. Mnemosyne suit à peu près
le même parcours que l'espèce précédente; cependant elle avance
plus vers le nord, en Scandinavie et dans la Kussie septentrionale
où elle est fort répandue. Toutefois, en pénétrant en Asie, dans
la Perse boréale et dans la Turcomanie, elle change d'aspect;
elle constitue dans ces pays des races particulières qui sont peut-
être de véritables espèces.
Mais c'est le continent asiatique qui est la vraie patrie de
nos Parnassiens. Ce vaste territoire est traversé dans sa partie
moyenne par une suite non interrompue de hautes montagnes et de
plateaux élevés qui commencent au Taurus, et aboutissent au
détroit de Behring. D'autres chaînes très importantes se greffent
sur celles-ci et se dirigent vers le nord et vers le sud. De
l'autre côté des Dardannelles, on trouve le massif montueux qui
couvre toute l'Anatolie et qui se lie au Caucase, à l'Arrarat, aux
alpes de la Perse boréale. Puis viennent les deux grandes chaînes
de rindou-Kho et de l'Asferah-Dag qui traversent le sud du Tur-
kestan jusqu'au Belour-Dag; la série se continue ensuite par
le Tian-Chan, entre la Songarie et la Chine, et par la chaîne de
l'Altai qui sépare la Sibérie de la Mongolie. Ce massif se dirige
vers l'est, passe en Daourie oii il projette des rameaux importants
dans l'Amurland, remonte ensuite vers le nord dans la Sibérie
proprement dite, et va expirer à l'extrémité de la presqu'île des
Tchouktchis. C'est sur les croupes de cette immense massif
montagneux que sont répandus la majeure partie des Parnassiens
— 53 —
asiatiques; les espèces s'y présentent nombreuses, et se remplacent
successivement à mesure qu'on se dirige vers l'Orient.
Sur les hauts sommets du Caucase, on rencontre d'abord
Nordmanni et sa forme plus réduite désignée sous le nom de
variété Minima. L'habitat de ces papillons est très restreint,
car il ne dépasse pas les limites strictes du Caucase qui est fré-
quenté aussi par Apollo, sa variété Hesebolus, Delius et Mnemo-
syne. Les montagnes de la Perse, situées au sud de la Mer
Caspienne, nourrissent, outre les trois premiers types que nous
venons de nommer, la forme si curieuse connue sous le nom de
Nubilosus, que certains entomologistes considèrent comme une
simple race géographique de Mnemosyne, mais qui est peut-être
une espèce séparée. Plus loin, dans le Turkestan, apparaît en
même temps qu'une autre forme remarquable de Mnemosyne,
toute une suite nombreuse de Parnassiens variés. D'abord, dans
les alpes de Samarkand et de Bokara, on trouve à différentes
hauteurs, en même temps qu'lntermedius, Actius et Honrathi.
Cette dernière espèce est spéciale à ces montagnes; mais l'autre
se répand plus au nord, dans le Tian-Chan et la Songarie.
Romanovi et Khodius, puis Discobolus et ses variétés Minor et
Nigricans, volent dans les montagnes du Kokand; les deux pre-
miers sont confinés dans celles du sud, tandis que le troisième
remonte jusqu'à Ala-tau et à Lepsa, après avoir traversé tout
le Tian-Chan. Le bel Apollonius se trouve également répandu
sur diffé'ronts points de ces contrées, aussi bien dans les alpes
que dans les steppes. Mais n'oublions surtout pas de signaler
les espèces du groupe des Cincti qui, dans l'état actuel de nos
connaissances, sont spéciales au Turkestan. Ces papillons habitent
d'ordinaire les points culminants et ne descendent pas au dessous
de 2500 mètres. Staudingeri fréquente les montagnes de Bokara
— 54 —
et de Kokand; le rare et superbe Cardinal, celles de Samar-
kand. Namanganus a été trouvé dans les alpes de Naman-
gan, tandis que Delphius et ses variétés Infernalis et Styx
sont répandus dans tout le Tian-Chan jusqu'à Tarbagatai, à la
naissance de l'Altai. Au sud de la Turcomanie, à l'intersection
du Belour-Dag et des premières croupes de l'Himalaya, se trouve
un vaste plateau, recouvert de neiges et de glaces perpétuelles,
d'une altitude qui dépasse 4500 mètres. C'est le Pamir qui est
la patrie de Transiens si voisin de Delphius et de Staudingeri,
et du rare et superbe Charltonius. Cette dernière espèce descend
aussi vers le sud-est jusqu'à Yarkand, dans la Tartarie chinoise.
La chaîne de l'Altai fait suite aux montagnes peu élevées
du pays des Kirghises; elle s'unit au système du Tian-Chan, vers
les sources de l'Irtyche, continue son cours vers l'est, et va
aboutir aux alpes de la Daourie et aux monts Stannovoï qui se
perdent au nord du Kamtschatka, vers le détroit de Behring. Ce
massif constitue, à lui seul, plus de la moitié de l'immense déve-
loppement montagneux qui traverse le centre de l'Asie, d'une
extrémité à l'autre, dans la direction moyenne du sud-ouest au
nord-est. Il est aussi très riche en Parnassiens ; mais les espèces qui
s'y montrent sont bien différentes de celles qui fréquentent les parties
occidentales ou plus méridionales de cette chaîne. A Tarbagatai,
où expirent les derniers représentants de Delphius, on rencontre
dans toutes les montagnes qui s'étendent de ce point jusqu'aux
approches du lac Baikal, Clarius et sa variété Dentata. Ces pa-
pillons volent concurremment avec Hesebolus et Intermedius.
Sedakovii habite les hauteurs des environs d'Irkutsk. Nomion et
Stubbendorfii sont très abondamment répandus sur les croupes
de la Daourie; ils habitent aussi plus au sud toutes les montagnes
de l'Amurland qui nourrissent deux formes tout à fait locales:
00 —
le Parn. Bremeri, disséminé un peu partout, et le rare et beau
Parn. Felderi qui est confiné sur un ou deux points du centre
de cette région. En Daourie on rencontre aussi, avec le Parn.
Graeseri qui n'est peut-être qu'une race géographique de Bremeri,
une autre forme très tranchée de tous les Parnassiens (Tenedius),
qui appartient plus spécialement aux latitudes froides, car l'habitat
de ce papillon se prolonge du côte du nord-ouest dans la Sibérie
centrale, jusqu'aux bords de la rivière Tongouska.
Si l'on se dirige ensuite plus vers le nord, on rencontre,
dans les montagnes et dans les déserts qui se trouvent situés
entre Ockotsk et Jakoutsk, les très rares Parn. Wosnesenskii et
Eversmanni. La première de ces deux espèces semble être spé-
ciale à ces contrées orientales, et il est probable qu'elle habite
toute la péninsule des Tchouktchis jusqu'aux rivages de l'Océan
Glacial et une partie du Kamtchatka; la seconde est plutôt propre
à la Sibérie centrale, c'est-à-dire aux contrées comprises entre
Kansk et Jakoutsk.
L'Amérique russe, ou le gouvernement d'Alaska, est située à
l'est de la Sibérie dont elle n'est séparée que par le détroit de
Behring. Cette province est encore très pou connue au point de
vue de ses productions naturelles; néanmoins on y a constaté la
présence de deux Parnassiens: le Nomion qui est commun dans
tout l'Amurland, et l'espèce publiée par Mr. Edwards sous le nom
de Thor qui est voisine d'Eversmanni et de Wosnesenskii.
Le territoire de la Faune Paléarctique s'étend à toutes les
régions américaines que baigne l'Océan Glacial, la baie d'Hudson
et la mer de Baffin ; il couvre une grande partie de la Nouvelle
Bretagne jusque vers le Canada, puis le Labrador et tout le Groen-
land. Nous connaissons un certain nombre de lépidoptères «lui sont
propres à ces pays lointains, et qui ressemblent beaucoup à des.
— 56 —
espèces équivalentes de la Sibérie, telles que des Oeneïs (CMonobas),
des Lycaena, des Erebia, mais pas un seul Parnassius. Pour re-
trouver des insectes de ce genre, il faut franchir les limites de
notre faune, et pénétrer plus au sud dans les montagnes Eocheuses,
où vole le Parn. Smintheus, et dans les alpes de la Californie
et du Colorado, où habite le Parn. Clodius qui est si voisin du
Clarius de l'Altai, et sa variété Ménétrièsii. Mais ces espèces
sont exotiques et nous ne les mentionnons que pour mémoire. Il en
est de même des autres Parnassiens qui sont répandus sur les
hauts sommets de l'Indo-Chine et du Thibet. Ces espèces offrent,
il est vrai, beaucoup d'analogie avec celles du Turkestan; mais,
comme elles appartiennent à des contrées que leur physiognomie
organique place en dehors du territoire paléarctique, nous ne les
signalons dans ce chapitre que pour donner une idée exacte de
l'aire de dispersion de toutes les formes qui entrent dans ce
genre de papillon si remarquable.
Nous ajouterons donc, dans ce but, que la chaîne de l'Himalaya
qui prend naissance au Belour-Dag, est habitée par une dizaine
de Parnassiens qui sont propres à ces montagnes. Dans les
provinces de Lahoul et de Ladack qui confinent le Turkestan,
nous trouvons d'abord deux formes répandues sur le Pamir et
le Kokand: les Parn. Charltonius et Ehodius; puis Hardwickii et
sa variété Charino; Acco, Simo, Himalayensis, Stoliczkanus du
groupe de Delphius; et plus au sud, Jacquemouti et sa variété
Sikkimensis qui est la forme la plus méridionale des Parnassiens
de l'ancien monde. A l'est, Imperator, qui rappelle aussi par
certains dessins le Delphius du Tian-Chan, est localisé sur les
montagnes du Thibet. Enfin dans les régions élevées de la Chine,
au nord de Pékin, il convient encore de signaler le Parn. Davidis
qui ressemble à certains égards au Nomion de l'Amurland.
— 57 —
Dans le cours de cette énumération géographique nous n'avons
mentionné aucun point de la Sibérie septentrionale, c'est à dire
de cette zone immense de pays qui s'étend le long de la mer
polaire, depuis le territoire des Samoyèdes jusqu'au delà de l'em-
bouchure du Kolima. Dans l'état actuel de nos connaissances
entomologiques, elle ne paraît donner asile à aucun Parnassien,
car nul de ces insectes n'a encore été signalé dans ces terres
désolées par le voisinage du pôle du froid. Cependant, cette pénurie
est peut-être plus apparente que réelle; elle dépend plutôt d'un
manque d'informations que de l'infécondité de la nature qui se plaît
au contraire à répandre les êtres vivants dans tous les milieux imagi-
nables. En effet, beaucoup de Parnassiens aiment à fréquenter la
proximité des neiges perpétuelles des hautes montagnes; ils descendent
aussi d'autant plus bas vers les plaines que les limites de ces neiges
s'abaissent d'avantage, par suite de l'exposition de plus en plus septen-
trionale des stations géographiques. C'est pour cette raison sans
doute, ainsi que nous l'avons déjà dit plus haut, qu'Eversmanni
a été trouvé au centre de la Sibérie, à une très faible altitude.
Il est par conséquent permis de penser que si des explorations
étaient poussées jusque vers le rivage de la Mer Glaciale, elles
amèneraient la découverte de nouvelles espèces qui viendraient,
très probablement, se grouper autour de Tenedius, d'Eversmanni
et de Wosnesenskii (lui sont les Parnassiens les plus septentrionaux
que l'on connaît aujourd'hui.
Voici ce que nous avions à dire sur la distribution géo-
graphi(iue de ces intéressants papillons. Afin de résumer les
renseignements ((ui sont exposés dans les pages de ce chapitre,
nous avons dressé les deux tableaux suivants qui présentent, sous
une forme synoptique, l'aire de dispersion de toutes les espèces
actuellement connues. Le premier, qui seul intéresse cette étude,
— 58 —
Tableau synoptique de la distribution géographique des Par-
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17 var. Minor, Stgr.
18 ab. Nigricans, Stgr.
19 Delius, Esp.
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21 Sedakovii, Mén.
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24 Graeseri, Honr.
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25 Apollonius, Eversm.
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32 Clarius, Eversm.
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34 Nordmanni, Mén.
35 var. Minima, Honr.
36 Mnemosyne, Lin.
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38 var. Nubilosus, Christ.
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39 Stubbendorfii, Mén.
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à la surface du territoire de la Faune Paléarctique.
pays
de dispersion.
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Tableau synoptique de la distribution topographique des Parnassiens
étrangers au territoire de la Faune Paléarctique.
Désignation
des
espèces.
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Asie.
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— 61 —
se rapporte aux différents types de la Faune Paléarctique, telle
que nous l'avons définie au début; le second, dressé à titre de
simple renseignement complémentaire, ne concerne que les espèces
exotiques dont nous avons déjà fait mention.
L'inspection du premier des deux tableaux que nous avons
établis ci-dessus, fait ressortir plusieurs indications utiles sur les-
quelles il convient de s'arrêter un instant. Elle nous apprend
d'abord, ce que nous avons déjà fait observer, que l'Asie est la
véritable patrie des Parnassiens, puisque ce continent recèle à lui
seul 35 formes différentes, sur les 39 qui ont été observées sur
toute l'étendue du territoire paléarctique. Mais la répartition
de toutes ces espèces ou variétés entre les différentes contrées
asiatiques présente de grandes variations. Le pays le plus riche-
ment doté est sans contredit le Turkestan qui est habité par 16
types bien caractérisés; puis vient la Songarie qui en possède 11.
La Sibérie toute entière renferme 12 formes distinctes de ces
papillons qui se trouvent confinées en majeure partie dans sa
région orientale (Daourie et Amurland). Le Caucase ne nourrit
que 6 Parnassiens, et la Perse boréale, dans l'état actuel de nos
connaissances, n'est habitée que par le seul Nubilosus.
En réunissant la Songarie au Turkestan, dont elle n'est
séparée par aucune limite naturelle, on forme ainsi une vaste
contrée dont la partie alpine est fréquentée par 22 formes de
Parnassiens; de même que la Sibérie orientale contient 10 types
distincts de ces papillons, si l'on rattache l'une à l'autre la Da-
ourie, la province montueuse de l'Amour, et les gouvernements
d'Irkutsk et d'Ockotsk quant à leurs parties alpines. Ces deux
vastes régions sont par conséquent, de tous les lieux de l'Asie,
celles qui possMent spécifiquement et numériquement le plus
grand nombre de ces insectes. D'un autre côté, si l'on considère
— 62 —
les Parnassiens au point de vue des caractères organiques qui
nous ont servi de base pour les répartir en groupes naturels,
on trouve que tous ceux qui appartiennent à la section des Cincti,
sont exclusivement confinés dans la Turcomanie, et que ce pays
est aussi le berceau de la grande majorité des Carinati qui non
seulement sont plus nombreux là que partout ailleurs, mais qui
présentent encore entre leurs différentes formes une grande homo-
généité. En effet, à part Apollo, Delius et les types dérivés de
ces deux espèces qui sont pour ainsi dire cosmopolites, tous les
autres Parnassiens caractérisés par la forme carénée de leur poche
ventrale, ne dépassent guère les limites du Turkestan et de la
Songarie. Il n'y a d'exception à établir à cet égard qu'en faveur
de Nomion, de Bremeri et de Graeseri qui sont propres à la
Sibérie orientale, et dont l'aire de dispersion est indépendant de
celui des Carinati de la Turcomanie. L'Amurland, la Daourie
et les pays limitrophes paraissent par contre être le siège de
prédilection des espèces du groupe des Ventricosi. Effectivement
dans toutes les montagnes qui s'étendent entre Irkutsk, Ockotsk
et les limites de la Mandchourie on ne trouve, outre les trois
Carinati que nous venons de nommer, que des représentants de
notre 5® groupe qui se distinguent par la poche blanchâtre et volumi-
neuse de leurs femelles. Il n'yaqueMnemosyne et ses formes dérivées
qui sont répandues sur une grande surface du territoire paléarctique,
etNordmanni qui se trouve relégué sur les hauts sommets du Caucase.
Or, en retranchant de l'ensemble de ces deux faunes locales
ces espèces cosmopolites qui se répandent bien au delà de leurs
limites, et en comparant entre elles toutes les autres formes,
on arrive à acquérir la conviction, qu'à l'origine, les Parnassiens
ont été groupés autour de deux centres principaux de création
qui paraissent avoir coïncidé avec les lieux qui leur servent
— 63 —
encore aujourd'hui de berceau, c'est à dire avec la Sibérie orientale
et la Turcomanie. L'Asie centrale a reçu en partage toutes les
espèces du groupe des Cincti et la majeure partie de celles des
Carinati, tandis que quelques types seulement de ce dernier groupe,
l'unique espèce des Limbati et presque tous les Ventricosi ont été
affectés aux montagnes du nord-est. Mais cette fixation qui ré-
sulte de l'examen des faits contemporains, a du subir de grandes
modifications avant d'arriver à l'état où nous la voyons aujourd'hui.
Un certain nombre de types ont du s'éloigner peu à peu de leur
lieu d'origine, sous l'influence de conditions physiques qui favori-
saient leur migration.
Cette dispersion a du s'effectuer par les espèces d'un tem-
pérament nomade en s'accomodant facilement des changements
de milieux; tandis que les formes sédentaires ou rebelles aux
modifications climatériques sont restées à peu près confinées dans
les montagnes où elles avaient fait leur première apparition.
C'est ce qui explique pourquoi certaines espèces sont communes
à de grandes étendues de pays, pendant que d'autres sont fixées
à des stations fort restreintes. La cause la plus puissante qui
ait présidé à la dispersion des Parnassiens, réside, selon toute
probabilité, dans les conditions physiques spéciales qu'ont
éprouvées l'Europe et le nord de l'Asie, à une époque géolo-
gique qui a suivi sans doute de très près l'apparition de ces
insectes.
Ces papillons, ne pouvant vivre que dans des lieux élevés
ou sous des latitudes relativement froides, n'ont du commencer
à exister que lorsque le grand système montagneux qui traverse
le continent asiatique du sud-ouest au nord-est a été formé,
c'est à dire vers le fin de la période tertiaire qui a également
vu surgir le massif alpin du centre de l'Europe.
— 64 —
Avant cette phase géologique, en effet, les êtres organiques
de rhémisphère nord de l'ancien monde se développaient sous
un climat très chaud, ainsi que le prouve la présence dans les
steppes glacés de la Sibérie de nombreux débris d'Eléphants,
de Khinocéros, de Tapirs qui ne peuvent plus vivre de nos jours
que dans les plaines torrides de l'Inde.
Nos Parnassiens n'auraient pu évidemment s'accomoder des
conditions vitales qui régnaient alors sous les latitudes boréales,
et qui étaient si différentes de celles qui sont nécessaires à leur
tempérament. Leurs espèces, par conséquent, n'ont du se montrer
qu'après les derniers grands soulèvements qui ont dessiné le relief
de l'Asie centrale, et aux approches de la période glaciaire qui a
clos ' le cycle géologique ancien. Peut-être même que ces pa-
pillons, de même que les Oeneïs (Chionobas) et certains Colias,
remontent directement à cette période. Quoi qu'il en soit de ce
dernier point, on sait qu'à ce moment de l'histoire de la terre
un refroidissement subit et considérable a profondément diversifié
les climats qui auparavant étaient à peu près uniformes sur toute
la surface du globe. De grandes accumulations de neige ont
envahi toutes les montagnes de notre hémisphère, et des glaciers,
de formation récente, ont pu, grâce à l'abaissement général de
la température, descendre jusque dans les grandes plaines. C'est
de cette époque que date l'existence du pôle du froid vers les
rivages de la Sibérie, et le climat rigoureux qui sévit encore sur
cette contrée; c'est aussi à partir de ce moment que les Parnas-
siens ont du effectuer partiellement des migrations qui en ont
dispersé quelques uns jusqu'en Europe. Effectivement, si l'Asie
centrale est, ainsi que tout semble le prouver, l'un des deux
grands berceaux de ces insectes, il faut bien admettre que nos
espèces européennes sont issues de cette origine. Confinés
— 65 —
primitivement dans les alpes, ils sont descendus peu à peu vers
les vallées dont la température et la flore s'étaient mises à l'unisson
de celles des montagnes. C'est sans doute ainsi que Hesebolus
et Intermedius ont pu gagner successivement l'Occident où ils se
sont fixés avec des caractères nouveaux dus à l'influence d'autres
milieux, et que Stubbendovfii, Tenedius et Eversmanni ont pu
s'avancer jusque dans les plaines de la Sibérie centrale, et peut-
être même jusqu'aux rives de la Mer Glaciale où on les découvrira
un jour sous des aspects différents. Il est probable que les
Parnassiens formaient pendant l'époque glaciaire un des princi-
paux éléments de la Faune Lépidoptérologique. Leurs espèces
devaient être largement répandues un peu partout, aussi bien
sur les hauteurs que dans les grandes vallées.
Toutefois, après un long intervalle qu'il est impossible
d'apprécier avec précision, la température du territoire palé-
arctique s'est insensiblement relevée, par suite de la cessation
de la cause géologique qui avait déterminé son abaissement subit.
Ce nouveau phénomène a du changer la distribution topographique
de nos Parnassiens qui se sont retirés peu à peu vers les hautes
montagnes ou sous les latitudes froides du nord, c'est-à dire
dans les lieux mêmes qu'ils fréquentent aujourd'hui.
V.
Catalogue raisonné et descriptif des Parnassiens
de la Faune Paléarctique.
Après les considérations générales que nous avons émises
dans la première partie des ces études sur les caractères orga-
niques des Parnassiens, leurs rapports génériques avec les autres
groupes de la grande famille des Papilionides et leur répartition
à la surface du territoire paléarctique, il nous reste à exposer
leurs caractères spécifiques, c'est-à dire à faire connaître ces
différents signes par lesquels les espèces et les variétés diffèrent
les unes des. autres. Ce genre de connaissances se réduit, en
somme, à une question de comparaison à établir parmi les races
ou les espèces; et bien que l'inspection des planches fournisse
au lecteur des éléments sérieux d'appréciation à cet égard, nous
entrerons cependant à propos de chaque type particulier dans
des descriptions aussi exactes que possible, afin de diriger
l'attention et de mieux faire ressortir les caractères qui distin-
guent chaque espèce. En outre, nous rapporterons toutes les in-
dications qui sont de nature à intéresser tous les types que
nous décrirons, telles que la synonymie des noms qui leur ont été
imposés par les auteurs, la mention des ouvrages dans lesquels
ils ont été publiés, l'époque de leur découverte, ainsi que l'énu-
mération des lieux où leur présence a été constatée d'une manière
— G7 —
authentique. Ces données compléteront l'histoire particulière
de chaque espèce. Enfin, comme plan, nous adopterons celui qui
résulte de la classification que nous avons établie dans le
troisième chapitre de ce travail.
F Groupe — Cornuti.
Paruassius Cliarltonins, Gray var. Priuceps, Honratli.
Hoiirath. Berliner Entomologische Zeitschrift, 1887, page 351.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 16, fig. 1 et 2 (cj et $).
Ce groupe ne renferme qu'une seule espèce absolument
remarquable à tous les points de vue. Elle est à peu près de
la taille de nos grands exemplaires d'Apollo, mais ses ailes sont
proportionnellement plus allongées, les supérieures plus aiguës
à l'apex, et les inférieures plus étendues dans la direction du
bord externe qui est très régulièrement arrondi. A part la gran-
deur, ce papillon pourtant n'offre aucun rapport avec son con-
génère d'Europe; il ressemble plutôt aux formes du groupe des
Cincti, et notamment au Staudingeri de la province de Samarkand.
Sa teinte générale est d'un blanc à peine jaunâtre sur lequel
les deux taches discoïdales des ailes supérieures, grosses et rectan-
gulaires, tranchent vivement en noir. Ces taches s'appuient pres-
que sur le pointillé de la base et se confondent avec celui
de la côte. Puis viennent les costales qui sont réunies en une
bande anguleuse qui s'arrête brusquement à la seconde branche
de la nervure médiane, et l'antémarginale qui descend jusqu'au
bord interne. Ces deux bandes, d'une direction sensiblement
parallèle, font un angle très saillant vers la première branche
5*
— 68 —
de la dite nervure. Le bord externe est occupé par la
marginale qui est obscure, étroite et presque partout d'égale
largeur. La tache interne est un peu vague, semi-lunaire,
et les nervures du disque sont légèrement ombrées d'atomes
noirâtres.
Les ailes inférieures offrent une disposition de dessins qu'on
ne retrouve chez aucun autre Parnassien. Les ocelles rouges
sont d'abord plus éloignées de la cellule discoïdale que chez
n'importe quelle espèce. La supérieure consiste seulement en un
gros point noir triangulaire, à peine marqué de quelques écailles
carminées dans son centre; tandis que l'inférieure, transversale-
ment oblongiie, semble être formée, à cause de sa dimension
considérable, de deux ocelles réunies et soudées l'une à l'autre.
En effet, elle porte deux pupilles blanches nettement séparées
par la nervure qui traverse cette partie de l'aile; et le cercle noir,
qui n'est épaissi que du côté interne, fait également une saillie
vers le centre de l'ocelle, comme s'il tendait à la diviser. La
tache anale, transverse et étroite, est marquée d'un point rouge
à son extrémité; elle est suivie d'une autre petite macule noire
faiblement pupillée de rouge. Enfin, ce qui frappe encore l'atten-
tion, c'est la rangée de cinq gros points noirs, ovalaires, largement
lavés de bleu cendré qui reposent sur une bande brune assez
large qui court parallèlement au bord externe. Ajoutons encore
qu'il existe deux semis d'atomes obscurs: l'un, qui offre la forme
d'une tache ovale, entre la base et l'ocelle supérieure ; et l'autre,
d'apparence linéaire, a une tendance à relier les ocelles entre elles.
Quant au limbe proprement dit, il est blanc de même que la
frange; mais il est précédé d'une série de petits traits bruns
(jui suivent la direction du bord de l'aile. Le lavis noir est
médiocrement développé chez cette espèce; il ne forme pas
— 69 —
de crochet saillant qui ordinairement entoure plus ou moins
l'extrémité de la cellule discoïdale des Parnassiens.
Le dessous de Charltonius est semblable au dessus. On
remarque toutefois sur cette face, à la base des ailes inférieures
trois taches contigues, cunéiformes, d'un brun grisâtre, teintées
de blanc et de rose pâle en leur milieu, et arrêtées du côté
extérieur par un trait brun, large et mal défini. Le lavis ab-
dominal est aussi plus étendu de ce côté, car il entoure com-
plètement le bas de la cellule où il forme un crochet très accusé.
Les ocelles sont en outre plus largement pupillées de blanc et
leur couleur tire plutôt sur le rouge vineux. Les antennes de
ce Parnassien sont uniformément noires, de même que son corps
qui est pourvu en dessous d'une pilosité blanche abondante. Les
palpes et les pattes sont aussi de cette dernière nuance.
Cette description ne s'applique qu'au mâle que nous avons
Hguré pi. 16, fig. 1. La femelle (fig. 2) est un peu différente.
Elle se distingue de l'autre sexe par l'agrandissement des ocelles
et de la tache anale qui est vivement carminée. L'abdomen, totale-
ment dépourvu en dessus de pilosité, est d'un noir mat, finement
■chagriné de blanc, avec toutes les incisions dessinées en blanc pur.
Quant à la poche cornée, elle consiste, ainsi que le représente
notre figure (pi. 5, fig. 3, 4), en une sorte de corne large, épaisse,
de couleur testacée, enroulée sous l'abdomen d'arrière en avant.
L'orifice ovalaire se trouve presque entièrement dissimulé sous
un pinceau anal de poils gris; et sur la région dorsale de cet
appareil existe un sillon large et peu profond.
Par les dessins de ses ailes supérieures, ce papillon offre,
avons-nous dit, une certaine ressemblance avec Staudingeri. En
effet, la disposition des taches et des lignes est à peu près sem-
blable chez ces deux espèces. Cependant la bande marginale de
— 70 —
Charltonius, d'une largeur uniforme, descend beaucoup plus bas,
c'est-à-dire jusqu'à l'angle interne; l'anténaarginale est plus fine
et plus flexueuse, les discoïdales plus épaisses et le semis noirâtre
de la base, quoique très léger, est plus développé que chez la
forme comparative. Cependant les caractères qu'on remarque
aux ailes inférieures, éloignent tout à fait ces deux espèces l'une
de l'autre; non seulement à cause de la forme et de la position
des ocelles qui sont uniques chez Charltonius, mais encore en
raison des cinq gros points noirs lavés de bleu pâle qui donnent
un aspect si particulier à ce Parnassien et qui n'existent pa&
chez Staudingeri.
Notre forme rappelle aussi vaguement un type asiatique du
Thibet que Mr. Charles Oberthur a figuré dans ses Etudes
d'Entomologie, (9« livraison, pi. 1, fig. 4), sous le nom d'Impe-
rator. Mais cette ressemblance n'est que lointaine, elle ne porte
que sur les ailes supérieures qui sont dessinées de part et d'autre
comme celles de Delphius dans leur ensemble; car, quant aux
ailes inférieures, elles sont tout à fait dissemblables. Les ocelles
d'Imperator sont normales, et les deux taches noires teintées de
bleu qui existent vers l'angle anal de cette espèce, se rapprochent
plutôt, par leur disposition, de celles qui ornent les ailes de
Staudingeri ou des espèces limitrophes. Charltonius est par
conséquent un type bien tranché dont la position est solitaire
dans la série des Parnassiens.
C'est en 1852 que le type de ce superbe papillon, dont la
description aura lieu à la fin de cet ouvrage, a été publié pour
la première fois par Gray, dans son Catalogue des Lépidoptères
du Musée de Londres, à la suite d'une exploration que le Major
anglais Charlton avait dirigée dans les hautes alpes des environs
de Lapsang, où il avait recueilli seulement quelques femelles. Deux
— 71 —
autres femelles furent découvertes plus tard par le docteur Stoliczka
à Karabu, dans les mêmes parties de la chaîne de l'Himalaya,
à 4300 mètres d'élévation. Cette espèce fut reprise ensuite par
Mr. Lionel de Nicéville au passage de Baralacha, dans la pro-
vince de Lahoul, en un très petit nombre d'exemplaires, et à une
altitude de -ITOO mètres. Ce magnifique Parnassien n'avait plus
été revu pendant de longues années, lorsque Grum-Grshimaïlo
et les chasseurs du docteur Staudinger, de Dresde, rencontrèrent
la variété Princeps en Août sur le plateau de Transalai, à l'ex-
trémité sud-est du Turkestan.
2® Groupe — Cincti.
Parnassius Delphins, Eversmanu.
Eversmann. Bulletin de la Société impériale des naturalistes de Moscou,
pag. 541, pi. 7, fig. a, b (année 1843).
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung etc. 63b — 639.
Staudinger. Catalogue 1871, N°- 19.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 17, fig. 1 (S)-
Le groupe des Cincti est un des plus naturels parmi les
Parnassiens, non seulement à cause de la forme de la poche
cornée des femelles qui ne varie guère d'une espèce à l'autre,
mais encore par l'aspect général de l'insecte qui est particulier.
Chez tous ces papillons, en effet, les taches costales sont toujours
réunies en une bande courte et épaisse qui se soude à l'interne
par un semis noirâtre; et l'antémarginale des ailes inférieures,
d'abord flexueuse au bord antérieur, se termine à l'angle annl
par 2 à 4 gros points arrondis et solitaires.
— 72 —
On ne connaissait pendant fort longtemps, comme représentant
de ce groupe, que le Delphius d'Eversmann. Mais, à la suite
des explorations qui ont été entreprises récemment dans TAsie
centrale, d'autres espèces remarquables, exclusivement propres
aux hautes montagnes du Turkestan, sont venu se ranger autour
de cette forme unique. DelpMus est en quelque sorte le type
naturel des Cincti, et c'est par lui que nous commencerons l'étude
des espèces de ce groupe remarquable.
Le papillon dont il s'agit est ordinairement d'assez petite
taille, et ses ailes sont si rembrunies qu'il est assez difficile de
décider si ce sont les parties foncées ou les parties claires qui
constituent la tonalité du fond. En adoptant cette dernière vue,
il convient de dire que la teinte générale de Delphius est d'un
blanc jaunâtre très accusé sur lequel les dessins noirs tranchent
un peu mollement. Aux ailes supérieures les discoïdales sont
larges et arrondies, les costales forment au delà de la cellule
une bande épaisse et convexe qui se prolonge ensuite vaguement
jusqu'à la tache interne qui est elle-même mal définie et d'une
direction oblique par rapport au bord interne. Le sablé noirâtre
de la base est très développé, et va rejoindre sous la nervure
médiane celui qui occupe le disque de l'aile. On remarque en
outre l'antémarginale qui est formée d'une suite d'arceaux semilu-
naires bien continus, et la marginale qui descend régulièrement
depuis l'apex à l'angle interne.
La tonalité des ailes inférieures de Delphius est plus jau-
nâtre, parce que les parties claires y dominent d'avantage; on y
aperçoit d'abord la marginale obscure qui occupe tout le limbe,
depuis le bord costal jusqu'à l'angle anal où elle aboutit en
pointe mince et fine; puis l'antémarginale qui consiste en une
suite de 4 arceaux très flexueux et continus, lesquels sont suivis
— 73 —
par deux points noirs arrondis et parfois pupilles de bleurâtre.
Les ocelles sont petites, d'un rouge pâle, et .largement cerclées de
noir profond. Quant au lavis de la base, il s'étend jusqu'à la
tache anale transverse, et entoure complètement la cellule discoïdale
en projetant des rayons courts vers le bord libre de l'aile.
La face inférieure de ce Parnassien est la reproduction exacte
du dessus, avec cette différence toutefois, que les teintes sont plus
efl'acées, et qu'il existe de ce côté à la base des ailes inférieures,
trois taches contigues plus foncées que le reste du lavis ab-
dominal. Les antennes et le corps de cette espèce sont noirs, et
la pilosité qui recouvre le thorax ainsi que l'abdomen est un
peu jaunâtre.
Cette description qui intéresse les deux sexes, lesquels ne
diffèrent pas sensiblement l'un de l'autre, s'applique à la forme
typique d'Eversmann qui est généralement obscure; mais il existe
certaines races locales dont la tonalité des dessins est presque
grisâtre, et qui ont un aspect terne et décoloré. Chez quelques
sujets le lavis noir abdominal couvre quelques fois toute la cel-
lule, sans atteindre toutefois les ocelles qui restent bien dégagées
et sans perdre la forme dentelée de son contour extérieur. Les
ocelles elles-mêmes ont un aspect variable; elles deviennent sou-
vent presque ponctiformes et plus franchement carminées; d'autres
fois elles s'élargissent et passent au jaune plus ou moins pur.
Delphius est par conséquent une espèce très variable; et ce fait
n'a pas lieu de surprendre, lorsqu'on sait que ce papillon est
répandu sur une grande superficie de pays et habite des milieux
fort divers.
Les premiers exemplaires de ce Parnassien, ceux qui ont
servi de type aux figures d'Eversmann, ont été découverts à
Tarbagataî, à l'extrémité ouest de l'Altai, à une altitude de
— 74 —
3000 mètres. Les frères Haberhauer en prirent d'autres dans
les montagnes d'Ala-Tau qui sont situées plus au sud; et Mr. Al-
pheraki rencontra cette espèce, quoique isolément, dans toutes
les alpes du Tian-Chan au dessus de 3000 mètres. Elle vole
en Juillet et en Août dans des sites arrides et dans le voisinage
des glaciers et des neiges perpétuelles.
Variété Infernalis, Stgr.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitschrift, page 195.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 17, fig. 2 (cj).
Nous venons de dire que Delphius est une espèce variable.
En effet ce Parnassien change d'aspect suivaat les localités; et
dans une même station, on trouve des exemplaires fort différent»
qui se relient les uns aux autres par des passages ininterrompus.
Cette variation s'observe surtout dans l'intensité et dans l'ampleur
des taches et des dessins noirs. Les sujets originaires de la
Songarie représentent en général la forme normale; mais dans
le Turkestan, dans les hautes montagnes des environs d'Ocks,
on rencontre une race à part un peu plus développée que le typa
d'Ala-Tau et dont les dessins, beaucoup plus vifs, ont une ten-
dance à l'envahissement. Ces exemplaires offrent un aspect assez
particulier pour que le docteur Staudinger ait cru devoir les dé-
signer sous une appellation distincte.
La figure 2 de notre planche 17 représente un sujet
mâle d'Infernalis, originaire du lieu que nous venons d'indiquer;
et comme le Delphius de la dite planche (fig. 1) se rapporte
déjà à un exemplaire mélanien très prononcé, la comparaison de
ces deux papillons fera ressortir les différences qui existent entre
la forme typique et sa variété.
^0 —
On remarque d'abord, qu'outre sa taille qui est un peu
supérieure à celle de Delphius, Infernalis s'en distingue encore
par l'allongement de ses ailes et par le contour du bord externe
des antérieures qui est plus droit; les bandes transverses sont
aussi beaucoup plus larges et moins bien arrêtées ; l'antémarginale,
par suite de ce fait, est moins flexeuse du côté externe et d'une
direction plus droite. Le lavis noir de la base des ailes in-
férieures s'étend jusqu'aux ocelles carminées qu'il englobe en
partie, et son contour extérieur ne reproduit pas ces rayonnements
qui sont si constants chez la forme ordinaire. Enfin à la base
du revers des mêmes ailes, existent deux taches rouges fort nettes
et vaguement bordées de noir profond. Ce dernier caractère
n'existe pas non plus chez le sexe correspondant de Delphius.
Ajoutons pourtant que cette forme Infernalis varie elle-même
dans une assez large mesure et qu'elle se relie au type par des
termes mitoyens.
C'est en 1882 que Mr. Haberhauer découvrit cet intéressant
papillon dans le Turkestan à une grande altitude (3500 mètres);
et Mr. Ruckbeil le captura également deux ans plus tard dans
le district de Kouldja avec l'aberration suivante.
Aberration Stjx^ Staudinger.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitschrift, page 196.
C'est la forme la plus obscure que Delphius soit susceptible de
revêtir; car chez les exemplaires affectés de ce cas de mélanisme,
la couleur jaunâtre du fond a presque entièrement disparu sous
un semis d'atomes foncés qui recouvre toute l'aile supérieure.
La teinte claire n'est plus guère apparente qu'à la côte et vers
— 76 —
l'entourage des taches discoïdales ; par ailleurs l'aile est d'un noir
presque uniforme et un peu diaphane. Le lavis ^basilaire des
secondes ailes est ici encore plus étendu que chez Infernalis;
il est tellement développé que chez certains sujets il absorbe la
couleur jaunâtre du disque. Cette forme, qui n'est en somme
qu'un terme extrême de variation, rappelle un peu l'aberration
Nigricans de Discobolus dont nous aurons lieu de parler dans
la suite, avec cette diiférence toutefois, que le mélanisme de Styx
atteint les deux sexes, tandis qu'il n'a été observé jusqu'à présent
que parmi les femelles de l'espèce congénère. Comme nous venons
de le dire précédemment, cette aberration remarquable vole
concurremment avec Infernalis sur certains points des alpes de
Kouldja. Elle passe à cette dernière forme ainsi qu'à celle deDelphius
par des transitions qui sont l'indice d'une communauté d'origine.
Paruassius Namaugrauns, Standiuger.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitsclirift, pages 196, 197.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 17, fig. 3 (<?).
D'après tout ce que nous avons exposé sur les rapports qui
unissent entre elles les diverses espèces du présent groupe, il
faut s'attendre à rencontrer parmi elles une grande similitude.
En effet, elle est parfois si intime qu'elle jette de l'incertitude
sur la signification des caractères spécifiques, et qu'elle enlève
au classificateur toute base d'appréciation sérieuse. Ce cas se
produit chez Namanganus que les entomologistes allemands con-
sidèrent comme une simple race de Delphius, tandis que nous
pensons au contraire, après mûr examen, qu'il constitue une es-
pèce à part, mais intermédiaire entre la précédente et Staudingeri.
— 77 —
Nous basons notre opinion sur ce fait que, quel que soit l'aspect
sous lequel se présente la forme d'Eversmann, malgré même le
mélanisme qui l'atteint souvent, il est toujours possible de la
reconnaître à la bande marginale des ailes postérieures qui aboutit
toujours jusqu'à l'angle anal et aux deux taches noires solitaires
qui occupent le voisinage de cet angle, caractères qu'on ne re-
trouve jamais chez Namanganus, pas plus que chez Staudingeri
et chez Cardinal.
Quoi qu'il en soit de cette vue que nous croyons exacte,
voici en quoi ce papillon diffère de la forme précédemment
décrite. Il est plus grand que Delphius dont il a la coupe,
et ses ailes sont d'un beau blanc mat qui fait vivement ressortir
les dessins noirs, lesquels, aux supérieures, sont à peu près dis-
posés comme chez l'espèce comparative. Cependant l'antémarginale
est plus fine, la marginale plus étroite, surtout aux approches de
l'angle interne; et la tache qui occupe le bord de ce nom, est
aussi plus nette et plus épaisse. Aux inférieures les ocelles
d'un rouge vif ont acquis un grand développement, et le cercle
noir qui les entoure est très fin. La tache anale, grande et
transverse, est également lavée de rouge, circonstance qui ne se
retrouve chez aucune forme de Delphius. Enfin le lavis basilaire,
d'un noir intense, a le même contour et la même ampleur que
celui qu'on remarque chez certains Delphius dont la cellule est
entièrement recouverte. Mais ce qui sépare surtout ce Parnassien
du précédent, c'est la structure des bandes marginale et anté-
marginale. Celle-ci commence à la côte par deux arceaux épais,
et se continue ensuite par 4 gros points bien détachés dont
les deux inférieurs sont situés plus près du bord et en dehors
de l'allignement commun. Celle-là est plus étroite que celle de
Delphius et elle expire assez brusquement bien avant d'atteindre
— 78 —
l'angle anal. Disons encore que la base des ailes inférieures de
Namanganus est marquée en dessous de deux taches rouges un
peu plus larges que celles d'Infernalis, également bordées de noir,
mais suivies d'une éclaircie blanchâtre qui se détache nettement
du fond noirâtre du lavis.
Si l'on compare, d'un autre côté, ce Parnassien avec Stau-
dingeri, on reconnaît du premier abord qu'il contraste avec ce
dernier, par la teinte blanche de ses ailes, par la forme de l'anté-
marginale qui est moins brusquement sinuée et moins rétrécie vers
l'intersection qu'elle fait avec la seconde branche de la nervure
médiane, par l'ampleur remarquable du lavis basilaire et par
l'acroissement inusité des ocelles et de la tache rouge anale.
La marginale des ailes inférieures a bien, il est vrai, le même
aspect chez notre espèce que celle de Staudingeri; mais, par
contre, l'antémarginale est autrement dessinée, ainsi qu'il est facile
de s'en convaincre, en rapprochant entre elles les figures 3 et 1
des planches 17 et 18 qui représentent des exemplaires mâles de
ces deux papillons.
En résumé, cet intéressant Parnassien, dont nous ne connaissons
pas la femelle, est intermédiaire, ainsi que nous l'avons déjà fait
observer, entre Delphius et Staudingeri. Il tient du premier par
ses ailes rembrunies et par l'extension inusitée du lavis de la
base; il se rapproche du second par la disposition de certains
dessins, et notamment de ceux qui avoisinent le bord externe
des ailes postérieures; mais il est bien séparé toutefois de l'un
et de l'autre, au moins dans sa forme typique, par sa grande
taille, par sa couleur, par l'agencement des 4 gros points noirs
des ailes inférieures, et par les caractères particuliers des ocelles
et de la tache de l'angle anal. Ces caractères, qui sont très
constants, empêcheront par conséquent de confondre Namanganus
— 79 —
avec aucun de ses deux congénères, bien que certains de ces
exemplaires soient parfois aussi obscurs que la variété Infernalis,
tandis que d'autres se rapprochent plutôt de quelques formes
particulières de Staudingeri.
C'est Mr. Haberhauer qui découvrit cette belle espèce sur
les alpes de Namangan, dans le Turkestan russe, en 1884, d'où
le nom scientifique sous lequel elle a été publiée par le savant
lépidoptériste de Dresde.
Faruassins Staadîngeri, Bang Haas.
Bang Haas, Ueber einige Pariiassius Central -Asieiis (Berliner Entomo-
logische Zeitschrift, Bd. XXVI 1882, Heft 1, pages 163, 164, pi. 2,
fig. 8 S, fig. 8. 8a $).
Austaut. Les Parnassiens, pi. 18, fig. 1 et 2 (cJ et Ç).
Ce Parnassien qui, comme tous les Cincti, est originaire
du Turkestan, ressemble également beaucoup à Delphius. Ce-
pendant il est toujours facile de le différencier de cette dernière
espèce par un ensemble de caractères précis que nous allons
énumérer.
On remarque tout d'abord que les ailes de Staudingeri sont
proportionellement plus courtes que celles de Delphius; que leur
teinte générale est plus claire et leurs dessins plus nets et plus
accentués. Si l'on compare ensuite ces deux papillons, mâle à
mâle, on trouve que Staudingeri a les taches discoïdales coupées
plus carrément, et que la bande formée par la réunion des macules
costales est plus étroite et plus courte. Elle s'arrête vers la
seconde branche de la nervure médiane, et ne se relie à la tache
interne, qui est disposée en croissant, que par un léger semis
d'atomes noirâtres. Cette partie du disque de l'autre espèce est
toujours fortement rembrunie. L'antémarginale de Staudingeri
— 80 —
est aussi plus sinuée à la place où s'arrête la costale, et ellfr
éprouve, dans cet endroit, un rétrécissement très sensible. La
bande obscure qui suit le limbe est plus étroite que celle de
Delphius, et ne descend pas, comme c'est le cas chez cette der-
nière espèce, jusqu'à l'angle opposé au sommet. La dissemblance
entre ces deux papillons est encore plus grande aux ailes in-
férieures. On remarque immédiatement que le lavis de la base
est moins développé; il n'entoure jamais toute la cellule dis-
coïdale, et ne projette, dans aucun cas, vers les bords de l'aile
ces rayons noirs et courts qui sont si constants chez Delphius.
Les ocelles sont aussi plus grandes et plus vives. Quant au
bord marginal, il est seulement obscurci depuis la côte jusque
vers le milieu, et la bande qui lui succède à l'intérieur et qui
chez l'espèce voisine est formée d'une suite de quatre arceaux
flexueux et continus, parait au contraire constituée ici par la
réunion de quatre taches confuses qui se fondent l'une dans
l'autre. Il existe à leur suite deux grandes macules noires
isolées, analogues à celles qu'on observe chez Delphius; mais
elles sont beaucoup plus grosses, plus allongées, et aboutissent
plus près du bord de l'aile.
La femelle de Staudingeri est d'un ton moins jaunâtre
que le mâle. Elle ne diffère, en somme, de l'autre sexe que par
l'élargissement des dessins et des ocelles, par l'obscurcissement
du disque et par l'existence, à la base du revers des ailes
inférieures, de deux ou trois taches rougeâtres un peu vagues et
mal arrêtées. Ces taches font quelques fois entièrement défaut,
ce qui est le cas de l'exemplaire que nous avons représenté
planche 18, fig. 2.
En général ce type, par son aspect, est bien séparé de la
forme congénère. 11 a quelque chose de plus robuste; ses ailes
— 81 —
sont plus claires et moins diaphanes, les dessins noirs ont plus
de précision et plus de vivacité; et la différence des caractères
qui existent aux bords externes, saute vivement aux yeux.
Il n'y a rien de particulier à relever quant aux antennes
et au corps qui ont la même nuance à peu près que les parties
correspondantes de Delphius. 11 convient cependant encore
d'ajouter que Staudiugeri varie quoique dans une limite beau-
coup plus restreinte que l'espèce comparative. Certains exem-
plaires n'offrent presque pas de trace de pupillation obscure sur
le disque des ailes supérieures; d'autres ont, au contraire, cette
partie très chargée d'écaillés noirâtres. Les ocelles varient en
dimension et en éclat, et le rouge tire parfois sur le jaunâtre
comme c'est du reste aussi le cas de Delphius.
C'est aussi Mr. Haberhauer qui a découvert ce Parnassien
dans les alpes situées au sud de Samarkand où il vole en certain
nombre, depuis la fin de Juin jusqu'au commencement d'Août;
il a été retrouvé plus tard sur plusieurs points de celles de la
province de Kokand, mais toujours à une altitude supérieure à
2500 mètres.
Parimssins Transieus, Staudinger.
Staudinger. In litteris.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 18, tig. 3 {(^).
Mr. Staudinger nous a envoyé cette année, sous ce nom et
comme variété de l'espèce précédente, un Parnassien mâle fort
curieux que ses chasseurs avaient récolté depuis peu de temps
sur les hauts plateaux du Pamir, en compagnie du magnifique
Charltonius et de très beaux Colias.
Quand on n'examine ce papillon nouveau que sommairement,
on lui trouve, en effet, beaucoup de ressemblance avec Staudingeri,
6
— R9
à cause du ton jaunâtre clair de ses ailes qui sont courtes en
proportion de leur largeur, et de la réduction du lavis basilaire
qui ne couvre pas toute retendue de la discoïdale. Cependant,
si l'on poursuit la comparaison plus à fond, on découvre une suite
de caractères qui ne permettent guère, à notre avis, de rattacher
ces deux formes l'une à l'autre. Sous le rapport de la coupe,
le bord externe des ailes supérieures est plus droit et l'apex
plus aigu chez Transiens que chez Staudingeri; puis, au point
de vue des dessins, les discoïdales, la costale et l'antémarginale
sont aussi plus étroites et plus fines que celles du type prétendu.
La marginale obscure qui tire sur le brun ardoisé, descend en
outre avec une largeur plus grande et à peu près égale jusqu'à
l'angle interne. Cette bande de l'aile inférieure est presque
semblable à celle de Delphius, c'est à dire qu'elle est dentelée
du côté intérieur et qu'elle aboutit en pointe fine jusqu'au bord
abdominal. L'antémarginale qui lui succède, consiste en une série
de quatre arceaux petits, pontiformes, détachés les uns des autres,
auxquels font suite deux taches arrondies moins développées que
celles qui occupent la même place de l'aile de Staudingeri.
Les ocelles plutôt jaunâtres que rouges, sont relativement aussi
grandes que celles de Namanganus; mais elles sont un peu
anguleuses et bien cerclées de noir. Enfin elles sont reliées
deux à deux par une barre fine et obscure qu'on observe ce-
pendant accidentellement chez Staudingeri.
L'aspect général de Transiens, quand on analyse les détails,
est donc très différent de celui de l'espèce précitée. Ce papillon
nous paraît au contraire plus voisin de Delphius, dont il possède
le trait le plus saillant, c'est-à-dire l'élargissement et la longueur
des marginales qui bordent les quatre ailes. Cependant, à cause
de sa coupe, de la clarté de sa teinte et surtout de l'aspect
— 83 —
ponctiforme de rantémarginale des ailes inférieures et de celui
du lavis basilaire qui est relativement si réduit. Nous pensons
que ce Parnassien doit constistuer une espèce à part, mais vrai-
ment intermédiaire entre Staudingeri et Delphius. Si cette
opinion ne pouvait prévaloir, il serait plus juste alors de
rattacher Transiens à cette dernière forme, d'en faire une race
albine qui représenterait un degré extrême de variation dia-
métralement opposé à ceux que nous connaissons sous le nom
de Styx et d'Infernalis.
Le dessous de cette nouvelle espèce dont nous ne possédons
que le sexe mâle, reproduit exactement les particularités qui sont
propres au dessus, avec cette différence, que le contour inférieur
du lavis qui est à peu près entier sur l'autre face, affecte ici
au contraire une disposition franchement rayonnante.
Les antennes et le corps sont noirs, comme c'est le cas chez
toutes les espèces du présent groupe; mais la pilosité qui recouvre
le thorax et l'abdomen, est beaucoup plus jaunâtre dans Transiens
que dans les formes voisines.
Nous avons déjà dit que cet intéressant Parnassien a été
découvert sur le Pamir. Ajoutons encore qu'il vole à une alti-
tude qui ne s'abaisse guère au dessous de 4000 mètres.
Paruassius Cardiual, Grum*Grsliiinaïlo.
Staudinger. In litteris.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 19, flg. 1 (^).
Cette superbe espèce, la plus belle et la plus méritante de
toutes celles du groupe des Cincti, a été découverte sur les hautes
alpes qui sont situées au sud de Samarkand par Mr. Grum-
Grshimaïlo, l'un des explorateurs les plus distingués de la Russie.
— 84 —
Elle est également voisine de Staudingeri, dont elle possède la
taille; mais la nuance de ses ailes qui est plus franchement jaune
et à peu près aussi prononcée que celle de l'Ismene Helios, de
même que l'élargissement considérable de leurs dessins, donnent
à ce papillon un aspect bien différent. Les parties obscures ont
acquis chez Cardinal une telle extension, qu'il serait peut-être
plus juste de dire que c'est le noir qui constitue la teinte domi-
nante du fond. Quoiqu'il en soit, voici quels sont les traits
caractéristiques de cette remarquable nouveauté. D'abord le
sablé de la base des ailes supérieures est très développé; il couvre
presque toute cette partie jusqu'aux approches de la discoïdale
inférieure, sauf cependant le voisinage du bord interne, où la
nuance jaune subsiste sous la forme d'un trait épais, mais mal
arrêté. La costale et l'antémarginale très élargies, se fondent
sur le disque au dessous de la première branche de la nervure
médiane. L'une descend régulièrement jusqu'au bord opposé à
la côte; l'autre aboutit obliquement à la tache interne qui est
large, rectangulaire et tout-à-fait fondue dans l'entourage obscur.
Ces deux bandes laissent paraître entre elles, vers le bord in-
terne, le fond clair de l'aile qui offre l'aspect de deux taches
jaunâtres, superposées l'une à l'autre, mais séparées par le noir
d'une nervure qui les divise. La marginale est aussi étroite
que celle de Staudingeri; et elle expire, comme chez cette der-
nière espèce, avant de parvenir à l'angle interne.
11 résulte de cette disposition, et lorsqu'on examine la fig. 1
de la planche 19, que l'aile supérieure de ce Parnassien paraît
entièrement noirâtre, à l'exception d'un certain nombre de taches
d'un jaune clair qui se trouvent disposées de la manière suivante:
une très petite entre la discoïdale inférieure et la base et située
au dessus du trait clair dont il a été parlé; une autre plus
— 85 —
grande entre les discoïdales, dans la cellule même qui porte ce
nom; deux groupes formant chacun une sorte de bande courbe
entre la cellule et la marginale; une rangée de macules vague-
ment arrondies, disposée parallèlement au bord extérieur; et enfin
deux taches placées l'une au dessus de l'autre dans le voisinage
du bord interne.
Les ailes postérieures de Cardinal sont relativement plus
claires. Le lavis basilaire d'un noir très vif est un peu plus large
que celui de la forme voisine; il absorbe la tache anale qui n'est
indiquée que par un point rouge; mais il ne couvre pas toute
la superficie de la cellule. Les ocelles d'une dimension con-
sidérable sont d'un rouge orangé uniforme et le cercle noir qui
les entoure est très épais. Ces taches sont reliées l'une à l'autre
par une barre épaisse très noire, véritable bande qui semble être
un crochet ascendant formé par le lavis.
L'antémarginale de cette espèce offre beaucoup d'analogie
avec celle de Staudingeri. Cependant sa naissance à la côte est
moins pontiforme; elle commence par un trait droit, oblique, se
continue par deux arceaux au centre, desquels existe un gros
point vague, et se termine vers l'angle anal par deux taches
solitaires plus arrondies que celles de l'espèce comparative.
Quant à la marginale, elle est à peine indiquée par une ombre
très étroite qui précède la frange dans la première moitié
de l'aile.
Les dessins du dessous sont à peu près identiques à ceux
de la face opposée. Cependant, de ce côté, les ocelles dont le
rouge est plus carminé, sont très distinctement lavées de blanc
dans leur centre; la tache anale transverse est plus grande, plus
rouge; et il existe en outre à la base trois macules de cette
couleur dont l'inférieure repose sur une éclaircie blanchâtre qui
— 86 —
simule la forme d'un L dont les branches s'appuient contre le
bord de l'aile et la tache anale.
Les antennes et le corps du papillon dont il s'agit sont
noirs; ses pattes, de même que la vestiture qui garnit le thorax
et l'abdomen tirent un peu sur le jaune.
En résumé, ce beau Parnassien est une espèce très distincte
de Staudingeri avec lequel il ne pourra être confondu, à cause
de l'élargissement de ses dessins, de l'ampleur de ses ocelles,
de l'existence de ses basilaires rouges et de l'aspect particulier,
du bord externe de ses ailes inférieures.
Nous ne connaissons que le sexe mâle de cette espèce qui
est sans aucun doute une des plus belles découvertes qui aient
été faites pendant ces dernières années dans l'Asie centrale.
3® Groupe — Carinati.
Paniassius Apollo, Liuué.
Linné. Systenia naturae (année 1758), 10"= édition, 465.
Fabricius. Entomologia Systematica (année 1793), 11, 268.
Esper. Die Schmetterlinge, 2, 1.
Hiibner. Sammlung Europaeischer Schmettevlinge, 396, 397, 730, 731,
Ochsenheimer. Die Schmetterlinge von Europa, 1, 2, 133.
Godart. Histoire naturelle des Papillons de France, II, 1.
Freyer. 601.
Boisduval. Species général, 1, page 395, N°- 1.
Staudinger. Catalogue 1870, N"- 13.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 7, fig. 1 (cj).
Apollo est le type naturel des Carinati; c'est en outre un
des Parnassiens les plus anciennement connus, puisque sa publi-
— 87 —
cation remonte jusqu'au temps de Linné. Cependant, malgré cette
origine si reculée et la vulgarité qui s'est emparée fatalement
de cette espèce, elle n'a rien perdu du prestige qui lui revient
à bon droit; car elle ne cesse de figurer parmi les papillons
les plus gracieux et les plus distingués de l'Europe propre-
ment dite.
Nous nous abstiendrons d'entrer dans des descriptions mi-
nutieuses au sujet de cette forme que tout le monde connaît.
Nous préférons renvoj-er les entomologistes à leur propre collection,
et au besoin à la fig. 1 de notre planche 7 qui représente un
mâle de grande taille, originaire des alpes de la Suisse. Nous
de.vons dire cependant que ce Parnassien est sujet à varier, tant
pour son envergure que pour l'aspect général et l'accentuation plus
ou moins grande de certains dessins; mais que ces différences
n'offrent pas assez de stabilité pour servir de base à l'établisse-
ment de races séparées. La bande antémarginale des quatre ailes
est notamment plus ou moins bien accusée; et l'on trouve, quand
on considère une nombreuse suite d'exemplaires, toutes les transi-
tions depuis l'état d'une ligne un peu vague et indécise jusqu'à
celui d'une bande continue de taches noires et fort vives. Le
rouge des ocelles ([ui sont généralement bien pupillées de blanc,
est aussi plus ou moins intense. Ordinairement, il est d'un ton
carminé; mais il passe aussi au jaunâtre et même au jaune pur
chez une race spéciale aux montagnes de la Sierra-Nevada de
l'Andalousie.
L'Apollo est répandu d'une manière générale sur tout le
continent européen, à l'exclusion toutefois des îles britanniques où
ni ce Parnassien ni aucun autre n'ont jamais été rencontrés. Cette
exception singulière vient ronfirmer, à notre avis, l'opinion que
vous avons émise précédemment sur la cause de dispersion de?.
insectes de ce genre pendant la phase géologique dite glaciaire.
A cette époque, en effet, l'Angleterre se trouvait déjà séparée du
continent par la Manche; de sorte que ni Apollo, ni Delius, ni
Mnemosyne, alors largement répandus jusque dans les plaines,
n'ont pu pénétrer jusqu'aux rivages britanniques. C'est ce qui
explique pourquoi cette grande île, malgré son climat si favorable
aux mœurs des Parnassiens, ne nourrit pourtant sur ses montagnes
aucune de leurs espèces.
Au nord, Apollo s'étend dans toute la péninsule Scandinave
ainsi que sur les collines de la Russie centrale. Au sud, il pénètre
jusqu'en Andalousie, ainsi que nous l'avons remarqué plus haut,
en Grèce, en Asie mineure où Lederer l'a rencontré à plus de
2000 mètres d'altitude sur les hautes montagnes de l'Arménie.
A l'est, ce Parnassien franchit l'Oural, se répand sur les monts
des Kirghises et va expérir dans sa forme normale aux contre-
forts de la chaîne de l'Altai.
En ce qui concerne spécialement la France, l' Apollo habite
toute la région de l'est, depuis les ballons d'Alsace dans les
Vosges, jusqu'aux Basses-Alpes, en passant par le Jura; il fré-
quente aussi l'Auvergne, les Cevennes et les Pyrénées. En général,
cette espèce ne se tient pas à de grandes hauteurs, et le niveau
moyen de ses stations s'abaisse d'autant plus que la latitude
des lieux est plus septentrionale.
Variété Hesebolus, ^ordmauu.
Nordmann. Bulletin de la Société impériale des naturalistes de Moscou
(année 1851), II, pgae 245 S'
Staudinger. Catalogue 1870, N°- 13. var. A.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 6, fig. 1 c^, 2 Ç.
— 89 —
Variété Sibirica, Nordiiiaun.
Nordmann. Bulletin de la Société etc., 11, 1 Ç.
Nous venons de dire qu'ApoUo est une espèce très variable.
Cependant les modifications qu'elle est susceptible de contracter,
sont circonscrites par des limites assez restreintes, du moins en
Europe. La Sibérie et l'Asie centrale, au contraire, nourrissent
un type particulier et très tranché de celui que nous voyons
voler autour de nous, non seulement par la taille qui excède de
près d'un tiers celle de nos plus grands exemplaires, mais encore
par un aspect tout différent. Cette variété remarquable qui a été
publiée en 1851 par Nordmann sous le nom de Hesebolus pour
le mâle et de Sibirica pour la femelle, a les ailes en général
plus blanches que celles du type. La marginale très transparente
est plus courte, elle s'arrête en pointe vers la deuxième branche
de la nervure médiane, et l'antémarginale n'est indiquée à la côte
que par deux ou trois arceaux assez vagues; tandis que l'une et
l'autre de ces bandes sont toujours bien dessinées chez Apollo.
Les autres taches noires sont grosses, vives et bien arrêtées;
celle du bord interne est coupée carrément. Les ailes inférieures
de Hesebolus sont entièrement blanches et ne présentent aucun
vestige de l'antémarginale qui règne le long du bord externe
chez notre espèce; et par cette particularité, cette variété asiatique
offre un peu l'aspect de Delius mâle qui est lui aussi privé de
cette bande obscure. Enfin les ocelles, grandes, d'un rouge vif,
sont largement encadrées de noir. Le corps de ce papillon, parmi
tous les sujets que nous avons sous les yeux, est recouvert d'un
duvet plus fauve, plus jaunâtre que celui de la forme typique.
Cette description ne concerne que le mâle qui ne varie pas
beaucoup. L'aspect de la femelle est plus mobile. Certains
— 90 —
exemplaires diffèrent à peine du sexe correspondant d'Apollo, si
ce n'est par la taille qui est toujours supérieure; d'autres, d'une
teinte sale -jaunâtre, sont fortement rembrunis; leurs bandes
sont dans ce cas vivement dessinées, et le disque des ailes
supérieures est largement lavé d'écaillés noirâtres. Quant à la
poche abdominale, elle offre à peu près la même structure que
celle d'Apollo qui se trouve représentée de face et de profil sous
les N°^ 1 et 2 de la planche 3 de ces études.
La variété Hesebolus est une forme essentiellement asiatique
qui se trouve répandue sur bien des points de ce vaste continent.
Elle a été rencontrée sur les crêtes de l'Oural central et septen-
trional; elle habite aussi tout le Tian-Chan où Mr. Alpheraki ^a^
capturée un peu partout, depuis le mois de Mai jusqu'en Août,
à une altitude variable entre 1200 et 3000 mètres; elle passe
ensuite dans les alpes de l'Ala-Tau, longe toute la crête de l'Altai
jusque dans la Sibérie orientale, sans offrir de variations notables
sur cet immense parcours. En somme, cette race particulière
remplace en Asie l'Apollo d'Europe.
Nous croyons devoir mentionner ici un Parnassien mâle très
remarquable que Mr. Alpheraki signale à notre attention dans
son ouvrage „Lépidoptères du district de Kouldja", et
qu'il croit être un hybride entre la présente variété Hesebolus
et le type qu'il a nommé Discobolus. Cet exemplaire unique
qui mesure 77 millimètres d'envergure, a les ailes aussi blanches
que la race sibérienne d'Apollo; et les supérieures offrent égale-
ment le même aspect, sauf cependant que leur tache interne est
vaguement pupille de rouge. Mais les ailes inférieures, paraît-il,
rapellent tout-à-fait celles de Discobolus par la double tache anale
qui est grosse, ronde et très noire, ainsi que par la bande anté-
marginale qui est formée d'une série de gros points détachés.
— 91 —
L'auteur ne nous dit pas si la marginale de cet exemplaire
est aussi obscure que celle qui caractérise la forme typique du
Tian-Chan; mais, malgré Tominion de ce détail, il est probable,
en effet, que le papillon dont il s'agit est le produit d'un croise-
ment naturel entre Discobolus et Hesebolus, parce qu'il ne peut
être rapporté à aucun autre type connu. Cette opinion paraît
d'autant plus vraisemblable, que Mr. Alpheraki a constaté lui-
même dans le cours de ses explorations le fait d'un accouplement
adultérin entre les deux espèces précitées.
Ce curieux métis a été capturé à 2200 mètres d'altitude,
sur un haut plateau situé dans le voisinage de la rivière Archane.
Parnassius Nomion, Fischer.
Fischer de Waldheim. Entomologie de la Russie (année 1823), II,
page 242, pi. 6.
Boisduval. Species Général, page 397, No. 2.
Duponchel. 1, 43, 1.
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung, 316, 409, 410.
Staudinger. Catalogue 1871, N»- 14.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 12, fig. 2 (c^^).
Ce qui frappe tout d'abord l'attention quand on compare
cette espèce à ses similiaires et surtout à Apollo dans le voisi-
nage duquel elle vient naturellement se placer, c'est sa grande
taille, l'ampleur de ses ailes et la vivacité des taches et des
dessins dont elles sont ornées. En effet, Nomion est ordinairement
plus grand qu'Apollo; ses ailes sont relativement beaucoup plus
larges et le contour externe des supérieures est aussi mieux arrondi.
Les taches noires qu'on remarque sur ces organes sont fort grosses,
d'un noir profond; et celle qui occupe le bord interne, se trouve
vaguement pupillée de rouge. L'antémarginale, très vive et formée
— 92 —
d'une suite d'arceaux épais et bien liés entre eux, offre à peu
près la même disposition que celle de notre espèce française;
c'est-à-dire qu'elle coupe l'aile depuis la côte jusqu'au bord in-
terne, mais elle est beaucoup mieux marquée. La marginale,
uu peu transparente, est également bien indiquée; mais à l'Iuverse
de celle d'Apollo, elle est limitée à l'extérieur par une frange
très blanche, largement entrecoupée de noir à l'intersection de
toutes les nervures. Enfin un semis d'écaillés noirâtres obscurcit
plus ou moins complètement le disque de l'aile à la place où
s'épanouit la nervure médiane.
Les ailes inférieures de Nomion présentent les mêmes dessins
généraux. L'antémarginale y est également très apparente et tou-
jours beaucoup plus que celle d'Apollo, mais la marginale n'est
pas uniformément obscure; elle consiste en une suite continue
de taches semilunaires qui viennent aboutir jusqu'aux franges
de part et d'autre de l'intersection des nervures.
Les ocelles sont larges, carminées et très franchement pu-
pillées de blanc. Le cercle noir et épais qui les entoure, contribue
à leur donner beaucoup d'éclat. Une autre tache rouge, mais
bien moins vive que les précédentes, se remarque en outre contre
la base.
Ainsi qu'on le remarque chez la grande majorité des Parnassiens,
le bord abdominal est lavé d'une teinte noire un peu sablée
d'atomes grisâtres; elle est analogue à celle qui existe chez notre
espèce, mais elle est mieux accentuée, et le crochet qu'elle forme
à sa partie inférieure est plus saillant, car il remonte le long
de la cellule discoïdale qu'il entoure en partie.
Le corps -de Nomion n'est pas uniformément noir; il est re-
couvert d'un duvet jaunâtre très court et d'une sorte de poussière
écailleuse qui lui donne un aspect farineux. Quant aux antennes.
— 93 —
elles sont très vivement entrecoupées, et leur massue est d'un
noir profond.
La face inférieure de ce Parnassien reproduit avec moins
de vivacité les dessins du dessus. Mais on remanfue que de ce côté
les ocelles sont plus largement lavées de blanc et qu'il existe
quatre taches basilaires rouges, très vivement bordées de noir,
mais dont les deux supérieures seules sont bien saturées en
couleur, les autres étant ordinairement plus ou moins obscurcies
par un semis d'écaillés noirâtres.
Cette description ne concerne (jue le mâle. La femelle se
distingue de l'autre sexe par un aspect plus rembruni, par l'élar-
gissement de tous les dessins et par la présence de macules
rouges sur les taches interne et anale; son abdomen est large-
ment dénudé et la poche cornée qu'il supporte, est très voisine
de celle d'Apolio et de la plupart des Carinati.
Le Nomion est un Parnassien fort variable; quoique ses
ailes affectent d'ordinaire un ton d'un blanc presque pur, on
trouve certains exemplaires qui sont plus franchement jaunâtres.
L'ampleur des bandes transverses varie aussi, bien qu'elles soient
cependant toujours franchement accusées; et le sablé noirâtre
«lui recouvre le disf|ue des ailes supérieures s'atténue quelques
fois au point de disparaître chez certains sujets d'un ton très clair.
Cette espèce, l'une des plus anciennement connues parmi
celles de l'Asie, appartient ù la faune du sud-est du continent
sibérien. Selon Ménétriès on commence à la rencontrer sur
les montagnes qui dominent Irkutsck et Kiachtka; elle passe
ensuite dans le territoire situé au nord du lac Haikal dans le
voisinage de l'Ussuri, et devient très fréquente dans toutes les
régions alpines (ju'arrose l'Amour. Il est probable qu'elle descend
jusque sur les alpes du nord de la Chine. Sa présence a été
— 94
également signalée dans les possessions russes de l'Amérique
du Nord (gouvernement d'Alaska) et selon Mr. Boisduval elle
habiterait aussi les montagnes de la Californie.
Parnassius Acthis, Eversuiauu.
Eversmann. Bulletin de la Société impériale des naturalistes de Moscou
(année 1843), III, 540, pi. 9, fig. 2 a, b.
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung, 634, 635.
Staudinger. Catalogue, N°- 18.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 10, fig. 2 (S).
Actius est intermédiaire entre Apollo et Nomion, il présente
par conséquent un mélange des caractères qui sont propres à ces
deux espèces. Néanmoins, il est plus voisin du premier que du
second; voilà pourquoi nous le comparerons de préférence à notre
forme française.
11 est d'abord beaucoup plus petit qu' Apollo, et ses ailes
sont proportionellement plus courtes. Le bord externe des supé-
rieures est plus droit, ce qui donne à l'apex un contour moins
arrondi. Les taches que portent ces organes, sont bien indiquées
et surtout celles qui couvrent en partie la cellule discoïdale; tandis
que l'interne au contraire est plus réduite que chez les espèces
comparatives et ne présente jamais de trace d'écaillés rouges
dans son centre. Mais, le signe le plus distinctif du Parnassien
dont il s'agit, réside dans l'aspect des bandes marginale et anté-
marginale. La première, assez fortement rembrunie, est étroite
et ne descend à partir de l'apex que jusque vers la troisième
branche de la nervure médiane; et la seconde, de la même lon-
gueur, est formée d'une suite de 5 ou 6 points irréguliers,
disjoints qui s'arrêtent vers le milieu du disque de l'aile.
— 95 —
Ces deux bandes sont au contraire beaucoup plus larges et bien
mieux accusées chez ApoUo et chez Nomion où elles atteignent
le bord interne.
Les ailes inférieures d'Actius sont dessinées à peu près
comme celles de notre espèce française; on y relève cependant
les différences suivantes: Les franges (c'est aussi le cas des ailes
antérieures) sont nettement entrecoupées de noir à l'extrémité
des nervures, sans l'être toutefois aussi largement que celles de
Nomion. L'antémarginale est plutôt ponctiforme que flexueuse; les
ocelles, assez petites, sont d'un rouge un peu pâle, mais très
grossement cerclées de noir. Le lavis de la base est plus épais
et plus étendu que celui d'Apollo; il rappelle plutôt celui de
Nomion; c'est-à-dire qu'il couvre une partie de la cellule dis-
coïdale au bas de laquelle il forme un crochet très saillant.
Aucun caractère important n'est à relever sur la face inférieure
de ce papillon, si ce n'est cependant que les quatre taches basi-
laires sont d'un rouge fort pâle, qu'elles sont très largement
bordées de noir et que les deux plus basses sont ordinairement
oblitérées par un semis d'écaillés ol)Scures.
Ce Parnassien dont nous ne connaissons que le sexe mâle,
est ordinairement d'un blanc presque pur. Nous avons cependant
sous les yeux un exemplaire d'un ton un peu jaunâtre et dont
les dessins sont aussi un peu plus épais que d'ordinaire, ce qui
prouve que l'espèce est susceptible de varier.
Actius, de tout temps, a été considéré comme une grande
rareté; car, pendant près de trente ans, on ne connaissait guère
de cette espèce que les exemplaires que Mr. Schrenck avait dé-
couverts en 1842 sur les sommets élevés qui dominent la ville
de Tarbagatai; mais les nombreuses explorations qui ont été
dirigées ces dernières années dans les différentes parties du
— 96 —
Turkestan russe, ont singulièrement multiplié les stations que
fréquente ce Parnassien. C'est ainsi qu'il a été rencontré suc-
cessivement dans les alpes d'Ala-Tau par Mr. Haberhauer, dans
celles de la grande chaine du Tian-Chan par Mr. Alpheraki qui
nous apprend que ce papillon vole de préférence sur les montagnes
situées au nord du grand plateau Jouldousse (district de Kouldja)
à une très grande altitude et dans des lieux arrides où croissent
des Saxifraga. Il habite aussi les montagnes de Hazreth, au sud
de Samarkand, celles d'Osch dans l'Alai-Pamir (province de
Kokand); et Mr. Grum-Grrshimaïlo a signalé sa présence dans
les alpes du Transalai près de Karajetin. Actius par conséquent
est moins rare qu'on ne le pensait, puisqu'il est largement ré-
pandu dans tout le Turkestan et sur toutes les alpes de la
Songarie jusqu'à la naissance de la chaine de l'Altai.
Paruassins Rhodîns, Uonrath.
Honrath. Ueber eiiie Lokalform des Parn. Actius (Berliner Entomologische
Zeitschrift, Bd. XXVI, 1882. Heft 1, page 178, pi. 2, fîg. 6 (?.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 9, fig. 1 ((?), fig 2 (Ç).
Nous avons reçu sous ce nom (in litteris) du savant lépi-
doptériste de Dresde et comme variété d' Actius deux paires d'un
Parnassien découvert il y a quelques années déjà dans l'Asie
centrale, lequel offre effectivement au premier abord une certaine
ressemblance avec l'espèce que nous venons de décrire. Cependant,
quand on compare attentivement ces deux formes l'une à l'autre
et mâle à mâle, on découvre immédiatement entre elles des diffé-
rences notables et trop importantes, selon-nous, pour n'être l'in-
dice que d'une simple variation.
— 97 —
En effet, bien que ces deux types de papillons aient la même
taille et un aspect fort approchant, ils s'éloignent l'un de l'autre
par un ensemble de caractères précis que nous allons résumer.
Les ailes supérieures de Rhodius sont plus arrondies au sommet
et au bord externe; la marginale est plus large; elle descend
régulièrement depuis l'apex jusqu'à l'angle opposé. L'anté-
marginale est composée d'une suite de chevrons assez fins, aigus
et continus qui règne depuis la côte où elle n'est pas sinuée
jusque tout près du bord interne. La tache noire voisine de ce
dernier est marquée de rouge de même que les macules costales.
La dissemblance est toute aussi grande aux ailes inférieures,
car la bande antémarginale est plus fine et plus continue que
celle d'Actius; le limbe qui précède les franges, est plus obscurci,
le lavis basilaire moins élargi que celui de cette dernière espèce,
est plus sablé d'écaillés blanchâtres; les ocelles réunies deux-à-
deux par un trait noirâtre sont plus vives; enfin il existe à la
base de Rhodius une tache rouge très distincte qu'on ne remarque
jamais chez son type prétendu.
La comparaison du dessous fait ressortir en outre des
caractères précédents une disposition spéciale des taches basilaires
lesquelles, bien saturées toutes les quatre et finement bordées de
noir, sont aussi plus ramassées sur elles-mêmes et les deux ma-
cules anales, toutes uniformes de l'autre côté, sont ici bien
marquées de rouge.
La femelle de ce Parnassien ne diffère guère du mâle si ce
n'est par la marginale des ailes inférieures qui est plus rem-
brunie chez ce sexe et forme une bande très distincte, et par la
pupille rouge qui occupe le centre des macules anales. Ajoutons
que la poche cornée de cette espèce (voir pi. 2, fig. 5 et 6) est
brune, fortement comprimée latéralement avec une carène très
7
— 98 —
longuement atténuée en avant et qui ne dépasse pas le niveau
de la caverne.
C'est un entomologiste allemand, Mr. Edouard G. Honrath, de
Berlin, qui a publié Rhodius dans la revue scientifique mentionnée
eu tête de cet article; mais, lorsqu'on se reporte à la fig. 2 de
la pi. 6 du recueil dont il s'agit, laquelle représente avec une
grande perfection un mâle de ce Parnassien nouveau, on remarque
immédiatement qu'il n'y a pas identité entre le type que nous
venons de décrire et celui de cette figure. Celle-ci reproduit, il est
vrai, la tache rouge si caractéristique qui existe à la base des
secondes ailes du Rhodius de Staudinger; mais elle ne porte
aucune trace de celles qui saturent si franchement les costales
et l'interne de cette même forme. Du reste les marginales su-
périeures sont beaucoup plus étroites et les antémarginales des
quatre ailes au contraire plus épaisses chez l'exemplaire de la
Berliner Entomologische Zeitschrift que chez ceux de
notre collection, et le ton des ailes est aussi plus jaunâtre. Ces
dissemblances nous inclinent à penser que ces deux formes de
Parnassiens ne sont pas les mêmes, et que si l'on considère, en
vertu du principe de la priorité, comme étant le véritable Rhodius
le type de Mr. Honrath, il faut admettre que celui du docteur
Staudinger en est distinct au moins à titre de variété qu'il serait
utile dès lors de désigner sous un nom spécial. Cette opinion
nous paraît d'autant mieux fondée, que le spécimen qui a servi,
de modèle à l'entomologiste de Berlin est originaire de Ladack
(Himalaya), tandis que nos exemplaires proviennent du Turkestan.
Ceux-ci constitueraient donc, à notre avis, une forme géographique
constante du Rhodius de l'Indoustan.
A propos de cette espèce, Mr. Honrath se livre à des con-
sidérations tout-à-fait inattendues et fort étranges sur la parenté
— 99 —
de certains Parnassiens; il affirme non seulement l'identité spéci-
fique de Rhodius et d'Actius sous prétexte qu'il existe dans la
nature des exemplaires formant transition entre ces types opposés,
mais il soutient encore que les Parn. Jacquemontii, Boisd. et
Epaphus, Oberthur (Jacquemontii, Gray), ne sont eux-mêmes
que de simples variétés géographiques d'Actius qui serait ainsi
susceptible d'éprouver des modifications profondes. Nous n'avons
pas à nous occuper de ces deux espèces qui ne font pas partie
de la Faune Paléarctique. Nous ferons remarquer pourtant que
l'une et l'autre sont absolument distinctes de l'Actius d'Evers-
mann dont elles diff'èrent beaucoup plus que Rhodius lui-même,
et que si l'on entre dans cette voie d'assimilation excessive
il n'y a aucune raison de ne pas rattacher à la forme de la
Songarie, et Discobolus avec ses variétés, et Insignis, et Romanovi,
voire même Honrathi, chez lesquels avec de la bonne volonté
il serait facile de retrouver certains traits de parenté plus ou
moins lointains avec Actius.
S'il était permis, sous prétexte de transitions, d'identifier
des types aussi éloignés, il est bien peu d'espèces qui résisteraient
à la critique, et cela dans tous les genres de Lépidoptères.
La nature, en effet, dans l'enchaînement des êtres organisés,
procède toujours par transitions; elle relie entre elles les formes
extrêmes par une série de termes mitoyens en vertu de la
continuité qui est sa loi la plus générale, de sorte que si l'on
se croyait autorisé à réunir sous la notion commune de l'espèce
tous les êtres que la nature n'a pas brusquement séparés,
on introduirait en zoologie une sorte de Panthéisme qui
aboutirait fatalement à la négation de l'espèce, comme il peut
se réduire dans le domaine des idées pures à la négation des
individus.
7*
— 100 —
Rappelons ici ce que nous avons exposé dans notre préface
que la notion de l'espèce ne répond pas à un être réel et absolu,
qu'elle est une simple conception subjective de l'esprit basée sur
l'empirisme, et qui nous sert à parvenir à la connaissance claire
et exacte de nos idées sensibles, notamment de celles qui concernent
les individualités. Assimiler dans ces conditions telle forme spé-
ciale à telle autre, c'est constater simplement leur degré d'analogie,
mais ce n'est pas résoudre la question de leur filiation qui n'existe
au fond que dans nos idées.
Le Parnassius Rhodius a été découvert dans les alpes
d'Alai (province de Kokand), où il vole avec son congénère
Insignis. Le type de la Berliner Zeitschrift est propre au con-
traire, ainsi que nous l'avons déjà dit, aux hautes montagnes
des environs de Ladack, (Himalaya).
Farnassins Discoboliis, Alpheraky.
Alpheraky. Corybas var. Discobolus: Lépidoptères du district de
Kouldja, tome 1, pages 16 à 18 (année 1881).
Staudinger. Ueber einige Parnassius Central- Asiens (Berliner Entomo-
logische Zeitschrift 1882. Bd. XXVI, pi. 1, fig. 1).
id. Corybas var. Tianchanica (in litteris).
Austaut. Les Parnassiens, pi. 7, fig. 2 cj, fig. 3 Ç,
Les premiers exemplaires de cette espèce qui aient paru
au jour, sont ceux que Mr. Haberhauer recueillit en nombre, en
1878, dans les montagnes d'Ala-Tau et qui seront décrits plus
loin sous le nom de variété Minor. Mr. Staudinger les répandit
d'abord dans les collections comme Corybas, parce qu'il les croyait
identiques à l'espèce si douteuse que Fischer de Waldheim localise
dans le Kamtchatka et qui n'a jamais été reprise par personne.
Plus tard, Mr. Erschofif, de St. Pétersbourg, attribua le même
— 101 —
nom de Corybas à une autre forme actuellement connue sous
terme de Honrathi, Stgr. que Mr. Fedtschenko avait rapportée
du Turkestan; et Mr. Alpheraky assimila également au Corybas,
mais à titre de variété et sous le nom de Discobolus, un Par-
nassien voisin des exemplaires d'Ala-Tau qu'il avait rencontré
dans les montagnes du Tian-Chan. Le vocable de Fischer ayant
été écarté définitivement, non seulement parce que l'espèce qu'il
représente n'est identique à aucune des formes de l'Asie centrale,
mais encore parce qu'il est à peu près universellement reconnu
qu'elle est fictive, le nom de Discobolus revient de droit au type
du Tian-Chan aussi bien que celui de l'Ala-Tau dont il ne diffère
pas très sensiblement.
Quoi qu'il en soit des fluctuations qu'a éprouvées la dé-
termination du Parnassien dont il s'agit, il n'en est pas moins
vrai que la forme que nous a fait connaître l'explorateur du
district de Kouldja, constitue une espèce bien distincte de ses
autres congénères.
Comme taille, ce papillon est à peu près aussi grand que
notre Apollo; mais ses ailes sont en proportion moins allongées
et le bord externe des supérieures est plus droit. Ces organes,
chez les mâles, sont d'un ton jaunâtre très prononcé et se trou-
vent rembrunis par un semis d'écaillés noirâtres qui s'accumulent
surtout sur la région du disque et à la base; leurs taches sont
larges et vives, les deux costales et l'interne ont leur centre lavé
de rouge. L'antémarginale, un peu sinuée par en haut, est poncti-
forme et légèrement diffuse; par contre, la marginale est régulière-
ment obscurcie depuis l'apex jusqu'à l'angle opposé. Cette bande
a le même aspect aux ailes inférieures, c'est-à-dire qu'elle occupe
d'une manière continue tout le bord externe; l'antémarginale qui
lui succède est formée d'une suite de gros points irréguliers et
— 102 —
disjoints. On remarque en outre que les ocelles très grandes et
largement cerclées de noir, sont d'un carmin fort vif et à peine
pupillées de blanc, que le lavis basilaire très noir entoure presque
complètement la cellule discoïdale et qu'il s'étend jusqu'aux taches
anales qui sont formées de deux très gros points noirs à peu près
contigus.
Le dessous de Discobolus ne présente aucune particularité
remarquable, si ce n'est que les ocelles y sont largement teintées
de blanc, les anales marquées de rouge, et les basilaires circon-
scrites à l'extérieur par des traits noirs et diffus.
La femelle de ce Parnassien, lorsqu'on ne tient pas compte
des exemplaires plus ou moins aberrants qui sont cependant
nombreux, est presque semblable au mâle; elle n'en diffère que
par une taille un peu plus grande, par la macule rouge qui
orne l'une des deux taches anales, par le ton plus obscurci de
ses ailes, et surtout par la présence de la poche cornée qui est
formée sur le même plan que celle d'Apollo. Toutefois, quand
on compare cet organe chez ces deux espèces (voir pi. 2, fig. 3, 4
et pi. 3, fig. 1, 2), on constate que la caverne de Discobolus
est plus allongée, et que sa carène, fort large et saillante, n'est
pas soudée à sa partie antérieure contre les segments de l'abdomen.
Par cette particularité, cette poche est aussi très analogue à celle
d'Apollonius représentée pi. 2, fig. 1, 2. Les femelles du reste,
sont fort variables; les unes sont un peu ternes et grisâtres;
d'autres sont très largement sablées d'écaillés noires et se relient
par des transitions nombreuses à l'aberration Nigricans dont il
sera question ci-dessous et qui constitue un cas de mélanisme
remarquable.
La forme typique de Discobolus paraît être tout- à -fait
spéciale aux montagnes du Tian-Chan où Mr. Alpheraky l'a
103
rencontrée un peu partout à une altitude moyenne de 1200 à
1800 mètres. Elle commence à voler en Mai et continue à pa-
raître une grande partie de l'année.
Aberration $ Nigricans, Staudinger.
Staudinger. Ueber eiuige Parnassius etc. (Berliner Entomologische Zeit-
schrift, pi. 1. fig. 2, 2 a Ç.)
Alpheraky. Corybas var. Discobolus. Lépidoptères du district de
Kouldja, tome 1, pages 16 à 18.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 8, fig. 3 Ç.
Nous venons de dire que la femelle de Discobolus a des
caractères fort inconstants en ce sens qu'elle manifeste une ten-
dance à l'obscurcissement. En effet, on trouve dans les montagnes
de Kouldja une forme de ce sexe qui est presque entièrement
noire, et dont il serait difficile de reconnaître l'identité, si ces
exemplaires mélaniens n'étaient rattachés au type normal par
des passages graduels.
L'aberration dont il s'agit se distingue des sujets ordinaires
de nuance foncée par l'aspect un peu diaphane de ses ailes et
par l'intensité tout-à-fait inusitée, du semis d'écaillés noires qui
recouvrent presque complètement ces organes. Cet envahissement
a pour effet d'oblitérer la couleur jaunâtre du fond qui ne sub-
siste plus guère aux ailes supérieures qu'entre les taches dis-
coïdales et les costales, et aux inférieures dans l'entourage
extérieur de la cellule; chez quelques exemplaires on distingue
encore à peine la trace des bandes transverses; mais il en est
d'autres où tout indice de ces dessins a disparu. Quant aux
taches rouges, elles paraissent plus élargies que celles des femelle?
typiques, et c'est notamment le cas des ocelles t|ui acquièrent
— 104 —
parfois une ampleur anormale, et dont la forme est un peu allongée
dans le sens des nervures. Les taches anales, fort larges, sont
ordinairement pupillées de carmin, et les franges des quatre ailes
qui sont obscurément entrecoupées chez le type paraissent ici
d'un noir uniforme.
Ces caractères toutefois n'offrent pas de fixité, car on ren-
contre dans la nature des individus plus ou moins obscurs qui
unissent cette aberration à la forme normale. C'est cependant
avec raison, pensons-nous, qu'elle a été désignée sous un nom
spécial.
Mr. Alpheraky à qui nous sommes redivables de ce beau
Parnassien, nous apprend aussi qu'il vole dans le Tian-Chan
concurremment avec le type, mais qu'on cesse de le trouver dès
qu'on dépasse une altitude moyenne de 2000 mètres.
Variété Minor, Staudinger.
Staudinger. Ueber einige Parnassius etc. (Berliner Entomologische Zeit-
schrift, 1882, pi. 1, fig. 3 S)-
id. Corybas (in litteris).
Alpheraky. Corybas var. Discobolus. Lépidoptères du district de
Kouldja, tome 1, pages 16 à 18.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 8, fig. 1 S, ^g- 2 $..
C'est la forme de Discobolus la plus anciennement connue
que Mr. Haberhauer découvrit en 1878 dans les montagnes d'Ala-
Tau (Songarie), qu'il retrouva en 1881 sur les hauts sommets
des alpes de Hazreth (province de Samarkand), et que le docteur
Staudinger répandit d'abord dans les collections sous le nom de
Corybas, Fischer. Les deux exemplaires de notre planche 8 qui
sont originaires de cette dernière localité, sont en tous points
semblables à la grande forme de Kouldja décrite ci-dessus, sauf
— 105 —
en ce qui concerne la taille qui se trouve réduite de près d'un
tiers. La couleur jaunâtre du fond, l'aspect des bandes trans-
verses, sont absolument identiques de part et d'autre; mais les
spécimens d'Ala-Tau, si l'on s'en rapporte à la figure de la
Berliner Entomologische Zeitschrift qui représente un mâle de
cette provenance, paraissent un peu différents de ceux de Hazreth.
En effet, leur teinte dominante est plutôt grise que jaunâtre, les
ailes sont plus largement sablées de noir, les antémarginales
plus dilatées et plus continues, notamment celles des inférieures
qui sont formées d'une suite de très gros points triangulaires. Ce
type, par son faciès, rappelle vaguement le Paru. Insignis, Stgr.
dont il sera question ci-dessous et que les entomologistes alle-
mands considèrent aussi comme une race locale de Discobolus.
La variété Minor, à part son envergure et le rétrécissement
relatif de ses ocelles, ne s'écarte par conséquent de l'espèce
typique par aucun caractère positif; et nous pensons qu'elle ne
constitue en somme qu'une forme alpine du Discobolus ordinaire,
ee qui expliquerait l'amoindrissement de sa taille. Cette opinion
du reste semble être confirmée par Mr. Alpheraky qui nous
apprend que les trois types ({u'offre ce Parnassien se rencontrent
habituellement dans tout le Tian-Chan, mais à des altitudes di-
verses; que la grande forme (Discobolus), caractérisée par l'am-
pleur de ses ailes, l'éclat et l'élargissement de ses ocelles, n'habite
qu'à une hauteur de 1200 à 1800 mètres avec l'aberration Nigricans;
et qu'à partir de 2000 mètres on ne trouve plus (lu'une forme
réduite un peu terne qui paraît semblable à celle d'Ala-ïau.
Il y a donc, au moins dans les montagnes do Kouldja, une sorte
de superposition de deux races, dont la ligne de démarcation est
très appréciable et que l'on ne peut expliquer que par une diffé-
rence d'altitude des lieux; et pour ce qui concerne les exemplaires
— 106 —
d'Ala-Tau, aussi bien que ceux du Turkestan méridional, ils parais-
sent avoir été recueillis à une hauteur au moins aussi considérable
que celle qui sert dans le Tian-Chan de limite inférieure à la petite
forme de ce Parnassien, mais ils ne semblent pas cohabiter avec
l'espèce typique dans ces deux stations opposées de l'Asie centrale.
Farnassîus Iiisiguis, Staudinger.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitung, page 194.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 14, fig. 1 (S).
Nous plaçons ici à la suite des variétés de Discobolus un
Parnassien fort remarquable qui a été découvert dans les
alpes du Transalai, situées au nord du plateau de Pamir et qui
nous a été envoyé d'Allemagne, comme étant une race géogra-
phique de l'espèce précitée.
Ce papillon dont nous avons sous les yeux deux exemplaires
mâle et femelle d'une grande fraîcheur, vient en effet se ranger,
par ses affinités, à côté de la forme du Tian-Chan à laquelle
il convient dès lors de le comparer; mais tandis que Discobolus
se distingue toujours, même dans les variétés qu'il affecte, par
la couleur franchement jaunâtre du fond, Insignis au contraire
est d'un blanc pur, bien que ses ailes soient largement re-
couvertes d'une poussière écailleuse noirâtre. La coupe de ces
dernières est aussi un peu différente. Ces organes paraissent
en proportion plus courts que ceux de l'espèce comparative, et
c'est notamment le cas des inférieurs, dont le contour est moins
arrondi et qui sont prolongés dans la direction de l'angle anal.
La bande antémarginale supérieure, très continue d'un bord à l'autre
à peu près comme celle qu'on remarque chezHonrathi ou chezEhodius,
est formée d'une suite de chevrons aigus qui se touchent et qui
— 107 —
déterminent avant la marginale une bande blanche fortement
dentée. Les costales et l'interne, à l'instar de celles de Discobolus,
sont très visiblement lavées de rouge dans leur centre; mais il
existe chez Insignis, vers la base et sous là discoïdale inférieure,
une macule noire assez large et un peu vaguement circonscrite qui
n'est reproduite ni chez la forme comparative, ni chez aucun autre
Parnassien. Mais c'est surtout dans la disposition des dessins
des ailes inférieures que résident les caractères les plus saillants
de cette intéressante nouveauté. En effet, le lavis basilaire très
noir y est fort développé; il descend d'une part jusqu'à l'angle
anal où il catoie une tache arrondie et entoure de l'autre toute
la périphérie de la cellule. L'antémarginale est formée d'une
série de grosses macules noires, triangulaires, un peu confluentes
par en haut, mais très nettement détachées les unes des autres
dans son parcour inférieur. Enfin la marginale est moins bien
accusée que celle de Discobolus, car cette partie de l'aile est
seulement estompée d'écaillés obscures.
Si l'on examine le dessous du papillon dont il s'agit, on
remarque, en outre des particularités que nous venons de relater,
que les basilaires rouges sont plus petites et plus serrées que
celles de la forme du Tian-Chan, et que les lignes noires qui
les circonscrivent en dehors ont aussi plus de finesse et de précision.
La femelle d'Insignis serait tout-à-fait semblable au mâle,
si CQ n'était sa teinte rembrunie, l'élargissement de ses dessins
et notamment de la bande antémarginale des secondes ailes dont
les taches triangulaires sont encore plus grosses que celles de
l'autre sexe, ainsi que les taches anales dont le centre est pu-
pille de rouge. L'exemplaire ({ue nous avons sous les yeux, étant
vierge, ne possède pas de poche cornée; mais cet appareil doit
être fort voisin de relui des autres Carinati.
— 108 —
Il résulte de cette analyse que cet intéressant Parnassien
est une forme bien tranchée de son congénère Discobolus avec
lequel il ne pourra être confondu, malgré les transitions qu'il
peut présenter dans la nature, à cause de sa teinte blanche, de
la structure de ses bandes transverses et de la disposition des
basilaires du dessous. On pourrait aussi comparer ce papillon
à Honrathi dont les ailes sont également d'un blanc pur; mais
outre que cette dernière espèce se distingue suffisamment des
formes voisines, comme on le verra plus loin, par ses antennes
uniformément noires, et par les taches rouges qui existent à la
base et à l'angle anal de ses ailes inférieures, elle possède des
marginales flexueuses qui lui donnent un tout autre aspect.
Si l'on tient compte de toutes ces dissemblances, on arrivera
à cette conclusion qu'Insignis est une espèce suffisamment dis-
tincte de celle du Tian-Chan à laquelle pourtant les entomologistes
allemands la rapportent à titre de simple variété.
Parnassins Honrathi, Staudiu^er.
Staudingev. Ueber einige Parnassius etc. (Berliner Entomologische Zeit-
schrift, Bd. XXVI, 1882. pages 161, 162, pi. 1, fig. 4 (J, 5, 5a $).
Erschoff. Corybas. Lepidoptera collecta in expeditione Turkestani, duce
Fedtschenko, pi. 1 fig. ], 2 Ç.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 10, fig. 1 S, pl- H, fig- 2 Ç.
Bien que ce Parnassien se rapproche par la couleur de ses
antennes d'Apollonius et de Bremeri avec lesquels il forme un
petit groupe artificiel dans la section des Carinati, nous le rap-
procherons néanmoins, pour les besoins de nos descriptions, de
Discobolus avec lequel, par l'ensemble de ses caractères, il offre
beaucoup d'affinité à première vue. En effet, la taille et la coupe
— 109 —
sont à peu près les mêmes chez ces deux espèces, mais si on compare
attentivement entre eux deux sujets mâles, on relève aisément les diffé-
rences suivantes : La teinte des ailes de Honrathi, assez largement
sablées d'écaillés noires principalement à la base et sur le disque,
est d'abord d'un blanc à peu près pur. Aux antérieures, les costales et
l'interne portent dans leur centre des taches rouges plus larges et
plus vives que celles de Discobolus; la marginale est plus obscurcie
et mieux arrêtée du côte interne, tandis que l'antémarginale, non
sinuée dans son parcours supérieur, est formée non de taches
disjointes, mais d'une succession d'arceaux épais et bien continus.
Cette bande est surtout fortement accusée aux ailes postérieures
avec des caractères qui n'existent jamais chez l'espèce similaire.
Les ocelles que portent ces organes, très franchement pupillées
de blanc toutes deux et largement cerclées de noir, sont aussi
d'un carmin plus intense. Les anales consistent en deux grosses
macules inégales, contigues, dont la plus extérieure est toujours
lavée de rouge. Quant au lavis abdominal, il est fort développé,
d'un noir intense et légèrement sablé de blanc. Il s'appuie à la
base sur une macule carminée qu'on n'aperçoit jamais chez
Discobolus, entoure ensuite tout-à-fait la cellule discoïdale au
bas de laquelle il affecte un contour denté, et n'aboutit pas jus-
qu'aux anales desquelles il reste séparé par la couleur blanche
du fond.
En dessous, les taches basilaires sont en outre moins espacées
que celles de l'espèce voisine et les traits noirs qui les limitent
du côté extérieur sont plus vifs et plus précis.
La femelle de cet intéressant Parnassien est à peu près
semblable au mâle, cependant ses ocelles ont plus d'ampleur et
sa teinte est généralement plus sombre. L'exemplaire que nous
avons figuré sur notre planche 10, appartient, par exception,
— 110 —
à un type relativement peu chargé. Du reste, ce papillon paraît
éprouver des variations au moins en ce qui concerne les femelles,
car celle que Mr. Erschoif a fait représenter dans l'ouvrage cité
en tête, est très fortement rembrunie, et elle manque aussi de la
tache rouge de la base dont il a été question ci-dessus et que l'ar-
tiste a sans doute oublié de reproduire. Cette tendance à l'obscur-
cissement nous fait supposer que ce papillon passe à une forme méla-
nienne, analogue à celle de l'espèce du Tian-Chan, que l'on décou-
vrira probablement un jour dans des stations encore inexplorées.
Ajoutons encore que les antennes, les pattes, les franges et
toute la face inférieure de l'abdomen de ïïourathi sont entièrement
noires; et si on combine ces caractères importants à ceux que nous
venons de mentionner, on trouvera qu'ils sont plus que suffisants
pour séparer ce Parnassien des formes qui lui ressemblent le
plus, aussi bien de Discobolus que d'Insigois avec lequel il
n'offre également d'autre rapport que celui qui résulte de la
blancheur de ses ailes.
C'est Mr. Fedtschenko, un explorateur russe très distingué,
qui découvrit les premiers exemplaires de ce beau Parnassien
dans le Turkestan, à Kulbasin, près de Sangi-Djuman, en Mai,
et à Kuli-Kalan, dans le district de Zarafshan, en Juin, à une
altitude de 2300 mètres environ, lesquels exemplaires furent
assimilés, à tort par Mr. Erschoff au très problématique Corybas
de Fischer.
Plus tard, en 1881, Mr. Haberhauer le retrouva en Juin
dans la partie méridionale de la province de Samarkand, sur
les alpes de Hazreth où cette espèce vole peu nombreuse à une
élévation de 2500 mètres avec la variété Minor de Discobolus.
— 111 —
Paniassius Romauovi, Grniii-Grsliimaïlo.
Grura-Grshimaïlo. In litteris.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 10, fig. 3 (type) et pi. 11, fig. 1 (var.) S-
Nous avons reçu sous ce nom du docteur Staudinger, et
comme étant originaire du Transalai situé au nord-est du pla-
teau de Pamir, un Parnassien mâle fort remarquable dont la
place est également très proche de celle de Discobolus et d'Insiguis
et qui ressemble aussi à certains égards à l'Actius d'Eversmann.
Ce papillon dont l'envergure est aussi grande que celle de Nomion,
se fait remarquer par ses ailes très claires et d'un blanc à peu
près pur, les supérieures seules étant un peu teintées de jaunâtre.
Les taches noires ordinaires sont grosses et vives, l'interne est
très largement marquée de rouge et même beaucoup plus que chez
n'importe quelle autre espèce; les costales au nombre de trois,
(deux grosses et une troisième plus petite intermédiaire), le sont
également; la plus basse est en outre accompagnée d'une petite
tache noire. Mais c'est surtout dans la forme des deux bandes
transversales que résident les caractères spécifiques de cette nou-
velle espèce. En effet, l'antémarginale, sinuée vers la côte,
consiste en une suite de taches irrégulières et disjointes qui se
perdent vers le milieu du disque de l'aile; et quant à la mar-
ginale, elle est relativement étroite et se termine en pointe obtuse
avant de parvenir à l'angle opposé au sommet; une frange blanche
très distinctement entrecoupée de noir à l'intersection des nervures
la limite du côté extérieur. Aux secondes ailes le lavis basilaire,
très large, est un peu grisâtre; il forme vers le bord antérieur
une saillie bien prononcée, pénètre ensuite dans la cellule qu'il
contourne par en bas sous forme de crochet, et n'aboutit pas
tout-à-fait jusqu'aux anales qui sont formées de trois taches
— 112 —
inégales et un peu arrondies. Les ocelles plus élargies encore
que celles de Discobolus et d'un rouge pourpré, sont vivement
cerclées; l'inférieure est pupillée de rose pale; la supérieure au
contraire est uniforme, mais l'anneau qui l'entoure est prolongé
par en bas en un gros trait noire virguliforme dont la pointe
est dirigée vers le bord externe de l'aile.
L'antémarginale est ponctiforme comme celle d'Insignis; cepen-
dant les taches triangulaires qui la composent sont en proportion
plus petites et mieux détachées les unes des autres ; la marginale
qui la suit est aussi à peu près dessinée comme celle de cette
dernière espèce, c'est-à-dire qu'elle est simplement lavée d'écaillés
obscures.
Le dessous de ce beau papillon reproduit le dessus avec
des nuances plus ternes comme c'est le cas de tous les Parnas-
siens; toutefois, les basilaires arrêtées par des lignes noires pré-
cises qui existent sur cette face, le lavis blanc du centre des
ocelles et l'aspect spécial des taches anales qui simulent de
petites ocelles qui se trouvent allignées entre la grande et le
bord abdominal, contribuent à donner à l'aile inférieure beaucoup
de vivacité de ce côté.
Nous n'avons connu d'abord cette espèce que par le mâle
unique que nous venons de décrire et qui est bien typique; mais
notre savant correspondent de Dresde nous a adressé depuis un
autre mâle du même Parnassien, récueilli dans une station plus
méridionale (premiers contreforts du Pamir) et qui diffère un peu
de la forme précédente.
En effet, cet exemplaire, plus petit que l'autre, a les quatre ailes
entièrement blanches; les ocelles plus réduites sont aveugles en
dessus; les taches noires de la ligne antémarginale inférieure
sont plus fines. Mais le caractère le plus important de cette
— 113 —
race consiste dans l'aspect des deux bandes transverses des ailes
supérieures; car la marginale, plus large que celle de l'autre
type, descend aussi plus bas jusqu'à l'angle interne, et celle
qui lui succède, d'abord flexueuse vers la côte, devient ensuite
franchement ponctiforme et aboutit presque jusqu'au bord
intérieur.
Ce papillon rappelle un peu Rhodius dont il diffère
cependant par plusieures particularités, et notamment par
la taille et par l'absence de la tache rouge qui existe
toujours à la base des ailes inférieures de cette dernière
espèce.
L'autre forme, c'est-à-dire le vrai Romanovi, ressemblerait
plutôt, malgré sa très grande envergure, à l'Actius d'Eversmann.
C'est même comme variété de cette dernière espèce qu'elle nous
a été adressée par le docteur Staudinger. En effet, abstraction
faite de la dimension respective des ocelles, les ailes inférieures
de ces deux papillons se ressemblent beaucoup en dessus, sur-
tout en ce qui concerne les dessins marginaux qui sont seulement
plus élargis chez Romanovi. Les bandes transverses des ailes
antérieures sont aussi à peu près dessinées chez cette dernière
espèce comme celles de l'Actius. Toutefois, il est impossible,
selon nous, d'assimiler ces deux Parnassiens l'un à l'autre,
à cause des larges taches rouges qui couvrent le centre des cos-
tales et de l'interne de cette forme nouvelle du Transalai, les-
quelles n'existent jamais chez celle d'Eversmann. En somme,
ce papillon constitue une espèce bien à part qui relie entre eux:
Discobolus, Insignis, Actius et Rhodius.
— 114 —
Parnassius Delius, Esper.
Esper. Die Schmetterlinge, 115, 5 (année 1790).
Ochsenheimer. Die Schmetterlinge von Europa, 1, 2, 136.
Hiibner. Sammlung etc., 649—652, 684, 685.
Herrich-Schaeffer. 317, 318. (an var. Intermedius, Mén. ??)
Staudinger. Catalogue, N°- 17.
Phoebus.
de Prunner. Lepidoptera Pedemontana, 69 (année 1798).
Hûbner. Sammlung etc., 567, 568.
Godart. Histoire naturelle des Papillons de France, 11, 2.
Boisduval. Speciès général, 1, pag. 398, N°- 3.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 13, fig. 1 S, fig- 2 $ (Delius).
Nous ne décrirons pas en détail cette espèce bien connue
de tous les entomologistes; nous dirons seulement qu'elle est
sujette à varier, quoique dans des proportions moindres que sa
voisine Apollo. On trouve en effet des exemplaires mâles dont
la tache interne est complètement absente; d'autres l'ont bien
marquée. Les macules costales sont aussi plus ou moins large-
ment pupillées de rouge. Certains types, celui des Basses- Alpes
par exemple, ont la frange des ailes supérieures d'un gris jaunâtre
uniforme, tandis que chez ceux de la Suisse cette partie est entre-
coupée de brun à l'intersection des nervures dans le voisinage de
l'apex. Les ailes postérieures sont toujours d'un blanc jaunâtre
bien prononcé. On n'y distingue aucune trace ni de la margi-
nale ni de l'antémarginale qui sous des aspects très diversifiés
existent chez la grande majorité des Parnassiens.
La femelle de Delius varie cependant beaucoup plus que
le mâle et elle a une tendance très marquée, au moins dans
les alpes de la Suisse, à contracter un certain degré de mélanisme.
Ce sexe est en outre toujours muni aux ailes postérieures des
— 115 —
bandes qui font absolument défaut à l'autre; de sorte que cette
espèce est certainement du nombre des Parnassiens dont la
différence sexuelle est la plus tranchée. D'un autre côté, il est
un fait très digne d'être remarqué, c'est que Delius dont le mâle
est si distinct des formes congénères, se lie pour ainsi dire à des
espèces qui en sont spécifiquement bien éloignées, telles que
Discobolus, Rhodius et Honrathi, surtout lorsqu'on considère les
types foncés et aberrants qui se rencontrent assez souvent dans
la nature.
L'habitat du papillon dont il s'agit est beaucoup plus
restreint que celui d'Apollo. Il ne fréquente que le massif
alpin du centre de l'Europe, sans s'étendre aussi loin ni vers le
nord ni vers le midi que l'espèce voisine; il franchit cependant
les crêtes du Caucase et se répand de là sur les monts des
Kirghises jusqu'à l'Altai où il est remplacé par la variété Tnter-
medius dont il sera question ci-après.
En France, on rencontre Delius dans les montagnes de la
Savoie, sur celles des Basses-Alpes, mais il ne paraît habiter ni
les Cevennes, ni la chaine des Pyrénées.
Variété Intermedius, Ménétriès,
Ménétriès. Enumeratio corporum aninialium Musei Petropolitani, page 72
(année 1855).
id. Schrancks Reisen im Araurland, page 30.
Staudinger. Catalogue N°- 17, var. a.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 12, fig. 1 (J, 3^^ (type), pi. 11, fig. 3 (variété).
Ce Parnassien a été considéré pendant fort longtemps par
plusieurs auteurs, et surtout par Ménétriès qui le premier nous
l'a fait connaître, comme une espèce bien distincte de Delius;
— 116 —
mais il est reconnu à présent qu'il n'en constitue qu'une simple
variété asiatique.
On arrive à se former cette conviction, lorsqu'on a sous les
yeux beaucoup d'exemplaires d'origines différentes parmi lesquels
on constate des passages manifestes vers notre forme d'Europe.
Intermedius est généralement plus petit que Delius. Les
ailes du mâle sont en dessus d'un blanc mat et non jaunâtres.
Leurs dessins sont disposés à peu près comme ceux du type;
cependant les deux bandes transverses des supérieures descendent
toujours plus bas, c'est-à-dire jusqu'à la proximité du bord interne,
et les franges sont nettement entrecoupées de noir. Le rouge
de toutes les taches est beaucoup plus pâle, les ocelles sont plus
petites, et la plus basse de celles-ci se trouve le plus souvent
réduite à un gros point à peine écaillé de rougeâtre dans son
centre. Les basilaires du dessous sont petites, plutôt jaunâtres
que rouges, et à peine limitées du côté extérieur par de fins
traits noirs.
La femelle de ce papillon serait encore plus voisine de celle
de notre type, si ce n'était qu'elle est également blanchâtre, que ses
bandes transverses sont plus fortement accusées et que la nuance
de ses ocelles est d'un carmin fort pâle. Les costales sont en
outre reliées à l'interne par une bande régulière et obscure;
le lavis basilaire, plus large et plus foncé que celui de Delius,
forme mieux le crochet au dessous de la cellule. Enfin la poche
abdominale (pi. 2, fig. 7 et 8), relativement plus large que longue,
se termine en une languette un peu redressée et sa carène fort
courte est très saillante.
Cette forme blanche d'Intermedius se rencontre dans presque
toute la Sibérie méridionale, depuis les crêtes de l'Oural supérieur
jusqu'aux montagnes du Kamtchatka, en passant par l'immense
— 117 —
chaîne de l'Altai d'où sont originaires les exemplaires de notre
planche 12. Dans le Turkestan on rencontre une race un peu
différente de celle que nous venons de décrire. Le mâle, seul
sexe que nous connaissions de cette forme (pi. 11, fig. 3), est
un peu plus grand que celui de la Sibérie et pas tout-à-fait
autant que notre Delius typique. Sa teinte fortement jaunâtre
contraste vivement avec la nuance albine de la race plus septen-
trionale. La tache interne est bien marquée et les ocelles, ce-
pendant d'un rouge fort pâle, sont aussi plus élargies que celles
de rintermedius de Ménétriès. Cependant ce papillon, malgré sa
différence d'aspect, appartient bien réellement à cette variété,
car la marginale et l'antémarginale de ses ailes antérieures
descendent presque jusqu'au bord opposé à la côte ce qui n'est
jamais le cas du type européen. Cet exemplaire est sans doute
le représentant d'une race locale ou géographique qui relie dans
le Turkestan l'Intermedius du nord de l'Asie au Delius de nos
contrées européennes.
Paruassius Delius, Esper var. Sedakovii, Ménétriès.
Ménétriès. Enumeratio corporum Musei Petropolitani, pages 71, 72, pi. 1,
lig. 1 c^ (année 1855).
Staudinger. Catalogue, N°- 17, var. l».
Austaut. Les Parnassiens, pi. 9, fig. 3 c^.
Nous devons avouer que ce Parnassien ne nous est connu
que par la figure et par la description que nous en a données
l'auteur du catalogue du musée de St. Pétersbourg; et de même
que nous avons été obligé de recourir pour la confection de
notre planche au dessin de cet auteur, nous ne pouvons mieux
faire que de transcrire aussi ci-après sa diagnose, sauf à la faire
— 118 —
suivre de certaines considérations toutes personnelles. Voici par
conséquent en quels termes s'exprime Ménétriès pages 71, 72 de
l'ouvrage relaté en tête de cet article:
» Cette espèce est plus petite que tous les exemplaires dePhoebus«
»(Delius) que j'ai sous les yeux.«
»Les ailes sont blanches, n'étant transparentes que vers le«
»sommet et jusqu'à la moitié du bord externe des supérieures ; «
«celles-ci sont marquées de noir à peu près comme celles du Phoebus,«
»mais sans trace de rouge. Les ailes postérieures ont leur bord«
» interne très largement lavé de noir, la tache antérieure (ocelle) «
»est très petite, rouge et bordée d'une ligne noire; la tache postérieure*
» n'est en dessus qu'un petit point noir, mais en dessous elle est très«
» faiblement marquée d'orange clair dans son milieu, la frange est«
»liséréc de noir aux ailes supérieures seulement; les quatre taches «
» rouges de la base inférieure en dessous sont comme chez le«
»Phoebus. Le corps est couvert de longs poils d'un jaune verdâtre,*
»très touffus en dessous. La poche de la femelle est large, courte, «
» brusquement rétrécie vers l'extrémité qui est arrondie; elle ne«
» présente pas de carène.»
» Cette espèce se rapproche un peu du Parnassius Tenedius, «
»Eversmann; mais elle n'a pas cette rangée de taches noires qui«
» traverse les quatre ailes. «
» Serait-ce une variété du Phoebus?, je ne le crois pas. — «
»Elle nous a été envoyée d'Irkutsk par feu Mr. Sedakoff à qui«
»je l'ai dédiée. «
Ce papillon paraît en effet d'un blanc aussi pur que celui
qui caractérise l'Intermedius de la Sibérie auquel il ressemble
à première vue. Cependant, si l'on s'en rapporte à la figure de
Ménétriès dont l'exactitude est confirmée par la description, on
trouve que le papillon qu'elle représente, d'une taille très exiguë,
a les costales entièrement noires et que ses deux bandes trans-
— 119 —
verses, la marginale et Tante'marginale, sont fort courtes et moins
bien marquées que celle du Delius typique. La petitesse des
ocelles est peut-être un signe variable et sans grande importance;
mais si l'on tient compte de ce fait que la frange des ailes
supérieures est toute noire chez Sedakovii tandis qu'elle est tou-
jours très visiblement entrecoupée chez toutes les formes d'Inter-
medius, on sera tout disposé à considérer ce petit Parnassien
comme une variété suffisamment tranchée.
On peut s'étonner dès lors que le docteur Staudinger lui
dénie le droit de porter un nom spécial. En effet, dans son
grand catalogue cet auteur place Sedakovii comme variété de
Delius; mais il a soin d'ajouter, à la suite de la citation icono-
graphique qui concerne ce papillon, la mention suivante: Vix
nomen conservandum. Nous pensons aux contraire, qu'espèce
distincte ou variété locale, ce Parnassien mérite le droit de cité
dans la nomenclature, parce qu'il nous pai:^ît trop tranché dlnter-
medius, et que s'il n'est une forme absolument indépendante de
Delius, au moins doit-il constituer celle que les entomolo-
gistes allemands désignent d'ordinaire sous le terme de Species
Darwiniana.
La connaissance de la femelle aurait contribué pour une large
part à résoudre cette question; malheureusement Ménétriès s'est
dispensé de la décrire; cependant ce qu'il dit de la poche cornée
qui est privée de toute carène? et bien arrondie à son
extrémité postérieure, nous laisse entrevoir chez ce sexe des
dissemblances au moins organiques par rapport aux parties
similaires de Delius et de sa variété asiatique.
— 120 —
Paruassius ÂpollouiuS) Eversuiaun.
Eversraann. Bulletin de la Société impériale des Naturalistes de Moscou,
m, 71, pi. 3, fig. 1 et 2 (année 1847),
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung, 636, 637.
Staudinger. Catalogue 1871, N»- 16.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 15, fig. 1 St fig- 2 Ç.
La plupart des Parnassiens du groupe des Carinati est
caractérisée par leurs antennes dont la tige est alternativement
annelé de blanc et de noir. La présente espèce de même que
les deux suivantes ainsi que Hourathi dont il a déjà été question
plus haut, sont les seules qui fassent exception à cette règle; leurs
antennes sont d'un noir uniforme, et voilà pourquoi nous les avons
comprises dans un petit groupe particulier.
Apollonius est sans aucun doute la plus remarquable d'entre
elles. Ce papillon du reste est parfaitement tranché de ses
congénères; il ne ressemble à aucun si ce n'est peut-être à
Tenedius dont il est pourtant très distinct à tous égards. Sous
le rapport de la taille, il atteint à peu près l'envergure de notre
Apollo. Les ailes du mâle, bien chargées d'écaillés, sont d'un
beau blanc mat. On y distingue, aux supérieures: une marginale
assez diaphane et très étroite qui n'aboutit que jusque vers le
milieu du bord externe, les discoïdales qui sont grosses et très
noires, deux costales et l'interne de couleur rouge et vivement
cerclées de noir, enfin l'antémarginale qui consiste chez cette
espèce en une rangée de huit gros points de cette dernière
couleur, un peu cunéiformes, laquelle traverse l'aile d'un bord
à l'autre.
Les ailes inférieures sont également d'un blanc très uni-
forme; on y remarque les dessins suivants: D'abord une tache
rouge à la base, puis le lavis noir qui s'étend le long du bord
— 121 —
abdominal, sans atteindre les deux annales qui sont arrondies,
ni former de crocher à l'extrémité de la cellule; enfin les ocelles
bien cerclées dont la supérieure est arrondie, tandis que l'autre
affecte la forme d'un ovale tronqué. La marginale fait absolu-
ment défaut chez ce papillon, mais par contre Tantémarginale
est bien indiquée et elle consiste, comme aux organes supérieurs,
en une suite de six gros points noirs solitaires.
Le dessous du mâle d'Apollonius est analogue au dessus.
Il convient pourtant de faire remarquer que les ocelles sur cette
face sont plus largement lavées de blanc, et de signaler surtout
l'aspect tout-à-fait spécial des basilaires. Il n'y a parmi ces
dernières que les deux supérieures qui soient franchement rouges;
elles paraissent former une tache unique limitée en dehors par
un gros trait noir flexueux; la troisième est oblitérée par une
sorte de sablé obscur; et la dernière est à peine indiquée par un
léger semis d'atomes rougeâtres disposé le long du bord abdominal.
Enfin à l'extrémité de la cellule, de même qu'entre la première
ocelle et la base, existent encore deux petites taches sombres
assez mal définies.
Ce Parnassien possède, comme nous l'avons dit, des antennes
toutes noires; son corps est revêtu d'un pilosité grisâtre et une
sorte de poussière squarameuse d'un jaune fort pâle en recouvre
la partie inférieure et les côtés.
La femelle d'Apollonius est sensiblement différente du mâle;
ses ailes sont obscurcies, principalement à la base et sur le disque,
par des écailles noires qui dessinent d'une manière un peu vague
les bandes marginales; les taches se trouvent généralement plus
élargies et il existe, entre l'anale (|ui est pupillée de rouge et
l'ocelle inférieure, trois gros points ovalaires formant série. Le
lavis basilaire est en outre plus vague et plus réduit. Le dessous
— 122 —
de ce sexe reproduit le dessus, avec cette différence que l'aile
inférieure est plus claire et plus uniforme que sur la face opposée.
Quant à la poche cornée de cette espèce (pi. 2, fig. 1, 2), elle
est assez semblable à celle d'Apollo; cependant la caverne est
plus comprimée latéralement; et la carène, large mais peu saillante,
n'est pas soudée à son extrémité antérieure contre la paroi de
l'abdomen.
De même qu'Actius, ce remarquable papillon est resté pen-
dant fort longtemps une très grande rareté, et ce n'est que depuis
les explorations qui ont été dirigées récemment dans l'Asie centrale,
qu'il s'est répandu dans les collections. Les premiers exemplaires,
ceux qui ont servi de types aux figures d'Eversmann, ont été
découverts en Juin dans les montagnes de la Songarie. Beau-
coup plus tard, les chasseurs du docteur Staudinger ont rencontré
cette espèce en certain nombre sur les alpes duFerganah(Turkestan),
pendant que Mr. Fedtschenko n'en trouva qu'une seule femelle
sur les bords du lac Kouli-Kalane à 3000 mètres d'altitude
dans la même région. Mr. Alpheraky recueillit également ce
Parnassien dans le district de Kouldja, sur les bords de l'Ili, à
Khouir-Souimoune, mais à une hauteur de 700 mètres seulement.
Dans cette dernière localité, Apollonius paraît fréquenter de pré-
férence des salines oii croissent abondamment des Salsola qui
servent selon toute apparence de nourriture à sa chenille, et son
apparition a lieu en Mars et eu Avril. Le type de ces diverses
contrées ne semble du reste pas être tout-à-fait identique; car
cet habile explorateur nous apprend que les exemplaires du Tur-
kestan, (Ferganah), ont l'apex des ailes supérieures plus aigu,
les franges toutes blanches et les ocelles d'un carmin fort vif;
tandis que chez les sujets de Kouldja l'apex est plus arrondi,
la frange nettement entrecoupée de gris sombre et le rouge des
— 123 —
ocelles beaucoup plus pâle. Les exemplaires que nous avons
sous les yeux sont originaires du Tian-Chan; ils proviennent
sans doute des chasses de Mr. Alpheraky et présentent en effet
les caractères que cet entomologiste leur attribue; mais nous ne
connaissons pas le type du Ferganah, de sorte que nous ne pou-
vons dire s'il y a lieu d'établir pour ces deux formes des races
séparées. A Kouldja, Apollonius vole déjà en Mars et Avril;
dans le Turkestan, au contraire, il ne commence à paraître qu'en
Juillet. Ne serait-ce pas là l'indice d'une double génération qui
expliquerait jusqu'à un certain point la différence d'aspect que
nous venons de signaler; ou bien ces changements dans les
caractères de l'insecte et dans son apparition dépendent-ils de
la différence d'altitude des milieux fréquentés? C'est un point
qu'il est encore difficile d'élucider dans l'état actuel de nos con-
naissances.
Aberration Flavomacnlata, Staudinger.
Staudinger. In litteris.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 15, fig. 3 Ç.
L'Apollonius du Tian-Chan se distingue, comme on vient
de le voir, de celui du Turkestan proprement dit par la teinte
très pâle de ses ocelles. Le rouge de ces taches passe en effet
parfois au jaunâtre, et même dans certains cas au jaune d'ocre
plus ou moins foncé ou au jaune tout-à-fait pur. La femelle
que nous avons représentée pi. 15, fig. 3, appartient à cette
dernière forme. Elle ne diffère du reste en aucune manière du
type normal de Kouldja, si ce n'est peut-être par une teinte
générale un peu plus rembrunie. Cette variété, dont la cause
dépend sans doute d'influences locales, rappelle un cas analogue
— 124 —
que nous avons constaté chez notre ApoUo dont les ocelles ont
aussi une tendance à devenir jaunâtres, et qui deviennent même
d'un jaune bien franc chez une petite race dont nous avons sig-
nalé la présence en Andalousie. Les deux sexes de quelques
autres Parnassiens présentent du reste cette curieuse variation
quoique à un degré moins prononcé; mais nous ignorons si elle
affecte aussi le mâle d'Apollonius, ni si elle a été constatée ailleurs
que dans le Tian-Chan.
Faruassius Bremeri, Bremer.
Breraer. Lepidopteren Ost-Sibiriens, page 6, pi. 1, fig. 3 et 4 (année 1864).
(Mémoires de TAcadem. impér. de St. Pétersbourg.)
Staudinger. Catalogue 1871, N"- 15.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 14, fig. 2 S (type), fig. 3 S (variété).
Cette espèce dont nous ne connaissons que le sexe mâle,
paraît établir, du moins en apparence, un passage assez naturel
entre les Parnassiens Carinati et ceux du groupe des Ventricosi.
En effet, à l'instar de ces derniers, Bremeri possède des nervures
et des franges d'un noir uniforme; mais à cause de la structure
de la poche de la femelle qui est très voisine de celle de notre
Apollo, le papillon dont il s'agit, doit figurer dans le groupe que
nous décrivons.
Sa taille égale est à peu près celle de Delius, mais
il n'offre avec cette espèce aucune autre analogie. Le ton
de ses ailes est d'un blanc vif, un peu jaunâtre qui laisse
vivement ressortir en noir profond les franges et toutes les ner-
vures. La tache discoïdale inférieure, un peu grêle, n'atteint pas
la grosse branche de la médiane; la supérieure, au contraire, touche
cette nervure et affecte la forme d'un croissant épais que surmonte
— 125 —
en outre une macule noire transversale dirigée un peu vers la
base. Les costales consistent en deux arceaux fins et disjoints.
L'antémarginale, très flexueuse ;\ la côte et quelque peu épaisse,
descend jusqu'au delà de la troisième branche de la médiane;
enfin la marginale, bien sablée d'écaillés obscures et assez large,
occupe presque tout le limbe depuis l'apex jusqu'à l'angle opposé.
Si l'on examine les ailes inférieures de ce Parnassien, on
trouve qu'elles portent à leur base une tache rouge comme
Apollonius; puis on aperçoit le lavis d'un noir profond qui occupe
tout le bord abdominal en formant un crochet sous la cellule,
il expire vers la tache anale qui est noire également, étroite,
allongée et d'une direction très oblique par rapport à celle du bord.
Les ocelles sont petites, un peu ovoïdes, d'un carmin foncé et
largement cerclées; les inférieures s'appuient en outre sur une
petite tache noire analogue à celle qui existe chez plusieures
autres espèces. Quant aux nervures et aux franges, elles sont
d'un noir intense, ainsi que nous l'avons déjà fait observer; mais
celles des ailes inférieures semblent éprouver une dilatation
apparente vers l'extrémité du limbe, parce qu'à cette place
elles sont ombrées de part et d'autre d'un semis d'atomes noirs
qui s'élargit vers les franges. Cette disposition se retrouve re-
produite d'une manière à peu près identique chez le Parnassius
Stubbendorfii que nous aurons occasion d'étudier plus loin.
Le dessous de Bremeri reproduit exactement le dessus; toutefois
on remarque que sur cette face les ocelles sont plus larges, d'un ton plus
pâle et plus finement entourées que sur le côté opposé. Il existe
aussi à la base des ailes inférieures quatre petites taches d'un rouge
vermillon, très serrées les unes contre les autres et légèrement bordées
de noir. Enfin le lavis basilaire, beaucoup moins obscur que de l'autre
côté, est lavé de jaunâtre sous la cellule et le long du bord abdominal.
— 126 —
Cette espèce est certainement sujette à varier dans d'assez
grandes proportions, car la description qui précède et qui est
faite d'après deux exemplaires originaires du centre de l'Amurland,
ne s'applique pas à un autre spécimen qui provient du nord de
cette région. Les ailes de cette autre forme que nous avons
représentée pi. 14, fig. 3 sont d'un blanc plus mat, c'est-à-dire
non jaunâtre. La tache anale et celle du bord interne font
complètement défaut. L'antémarginale des supérieures qui est
si bien dessinée chez le type, se trouve réduite ici à deux légers
arceaux qu'on aperçoit à la côte; et la marginale, moins large
et moins longue, présente du côté extérieur et immédiatement
avant les franges une série des taches blanchâtres qui sont
disposées entre les nervures. Le lavis basilaire dessine aussi
moins bien le crochet en dessus, tandis que sur la face opposée
il n'est pas teinté de jaunâtre.
Cette forme, par certains de ses caractères et aussi en
raison de son habitat plus septentrional, paraît constituer une
transition entre le Bremeri typique et Graeseri dont il sera
question ci-dessous. Ajoutons encore que les antennes de ces
deux races sont entièrement noires que le corps très noir
aussi est recouvert d'une abondante pilosité grisâtre; et que
la poche du sexe femelle (voir pi. 3, fig. 5 et 6) dont nous
avons pu nous procurer un très bon dessin, ressemble beau-
coup à celle d'Apollo ou mieux encore à celle de Delius. Elle
n'en diffère que par sa couleur qui est d'un brun noirâtre, par
la dimension de sa caverne qui est plus considérable, ainsi que
par la forme de sa carène qui est moins saillante et moins sinuée.
C'est Mr. Radde qui découvrit ce Parnassien très tranché
de ses congénères à Raddefskaïa, dans le cours des explorations
qu'il dirigea dans l'Amurland en 1863; mais il habite beaucoup
— 127 —
d'autres stations de cette vaste région, car on l'a rencontré de-
puis cette époque sur presque toutes les alpes que traverse le
fleuve Amour. Cette espèce vole assez fréquemment depuis le
commencement de Mai jusque vers la fin de Juin.
Parnassins Graeseri, Uourath.
Honrath. Berliuer Eutomologische Zeitschrift, page 272, pi. VIII,
fig. 1 a, b, c (année 1885).
Austaut. Les Parnassiens, pi. 19, fig. 3 i.
Mr. Staudinger prétend que ce Parnassien n'est au fond
qu'une simple variété géographique du précédent. Cependant
nous devons avouer que nous éprouvons quelque répugnance à
adopter cet avis, quelque compétent qu'il soit, parce que des
différences, trop importantes selon nous, semblent séparer ce
papillon du Bremeri typique.
En effet Graeseri, dont nous ne possédons malheureusement
que le sexe mâle, présente d'abord une coupe un peu différente de
celle du type prétendu; ses quatre ailes sont proportionnellement
plus longues et notamment les inférieures dont la projection est
dirigée plutôt dans le sens du bord externe que dans celui de
l'angle anal; puis leur couleur est d'un blanc parfaitement pur;
et il n'existe même aucun autre Parnassien dont la nuance du fond
soit aussi franche, ni aussi vive. Si maintenant on compare les
dessins entre eux, on trouve que, quant au dessus, les ailes
supérieures de Graeseri sont idus largement sablées à la base,
que la discoïdale inférieure, bien arrondie, ne touche aucune des
deux nervures de la cellule, et que l'autre est dépourvue en dessus
de la macule transversale qui fait saillie vers la base chez l'autre
espèce. La tache interne, quoique petite, est très nette et bien ronde.
— 128 —
Les costales sont formées non d'une suite d'arceaux fins et dé-
liés, mais de taches noires et continues, dont la plus élevée est
très distinctement pupillée de carmin. Enfin l'antémarginale,
à peine sinuée à sa naissance, descend bien plus près du bord
interne que chez la forme comparative. Quant à la marginale,
elle est à peine indiquée par une ombre vague qui s'étend à l'ex-
trême limite du limbe entre l'apex est le milieu du bord externe.
Les ailes inférieures de notre papillon portent à leur base
une petite tache rouge identique à celle de Bremeri et le lavis
noir qui lui succède par en bas, est aussi dessiné comme celui de
cette espèce. Cependant les ocelles ont plus d'ampleur, les anales
affectent la forme de deux points détachés et les nervures sont
moins fortement ombrées de noir vers l'extrémité de l'aile. Un
autre caractère des plus frappants de ce curieux Parnassien et
qui fait absolument défaut à son congénère, consiste dans la
rangée de grosses taches grisâtres, solitaires qui occupe la place
habituelle de l'antémarginale. Ces taches, dessinées en triangles
allongés ou plutôt en fers de lance, diminuent de grosseur depuis
le milieu de leur parcours, jusqu'au bord antérieur d'une part
et à l'angle anal de l'autre.
Toutes ces particularités sont reproduites sur le dessous;
mais on remarque encore que de ce côté l'une des deux taches
anales est marquée de rouge, et que le lavis basilaire est d'un
gris uniforme et non teinté de jaunâtre comme c'est le cas de
Bremeri.
En résumé, le papillon qui nous occupe, est bien distinct
de la forme typique qui est figurée pi. 14, fig. 2. Il se
rapproche un peu par la couleur de celui que nous avons re-
présenté sous le N"- 3 de la dite planche, comme variété de
Bremeri. Cet exemplaire est d'un blanc mat et sa marginale
— 129 —
se trouve aussi fort réduite. Cependant il est à remarquer que
cette variété se distingue de la forme normale par Téffacement
presque complet de lantémarginale, tandis que ce dessin est
toujours largement accusé chez Graeseri, avec répétition sur les
ailes inférieures d'une bande équivalente, mais maculaire.
Cette circonstance que le Bremeri typique manifeste plutôt
une tendance à l'oblitération de ses bandes transverses, tandis que
chez Graeseri ce dessin est exagéré dans un sens particulier,
semble confirmer l'opinion que nous avons émise au début,
à savoir que ces deux papillons constituent des espèces distinctes,
quoique fort analogues.
Cette intéressante nouveauté a été découverte en 1884 dans
les alpes de la Daourie au nord de l'Amurland près de Pochrofka
à 1500mètres d'altitude par un entomologiste allemand, Mr.Graeser,
à qui elle a été dédiée.
4® Groupe, Limbati.
Farnassius Teuedius, Eversuiauii.
Eversmanii. Bulletin de la Société impériale des Naturalistes de Moscou,
II, page 621 (année 1851).
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung etc., 632, 633.
Staudingcr. Catalogue 1871, N"- 22.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 13, fig. 3 ^.
Le groupe des Limbati ne renferme jusqu'à présent que le
seul Parnassius Tenedius, petite espèce fort remarquable et bien
tranchée de tous ses congénères. C'est pourtant avec Apollonius
qu'elle offre le plus d'affinité à cause de l'aspect tout-ù-fait
ponctiforme de ses bandes antémarginales; mais elle est Iteaucoup
9
— 130 —
plus petite que lui et ses ailes antérieures ne présentent aucune
trace de la ponctuation rouge qui est si caractéristique chez
l'espèce du Turkestan. Comme taille Tenedius possède à peu près
l'envergure de notre Mnemosyne. Ses ailes un peu allongées et
d'un blanc mat légèrement teinté de jaune verdâtre pâle sur
le disque, laissent apercevoir aux supérieures les dessins suivants
d'un noir fort vif; 1° les deux discoïdales dont l'inférieure un
peu triangulaire, n'atteint pas jusqu'à la nervure médiane, tandis
que la suivante, de forme hémisphérique, embrasse toute l'ex-
trémité de la cellule. Cette tache se confond par en haut avec
une autre macule transversale, analogue à celle d'Apollonius mais
mieux prononcée, 2° les costales au nombre de trois, qui figurent
une sorte de bande courte et étroite, divisée seulement par le
blanc des nervures; enfin 3° l'antémarginale qui consiste comme
chez Apollonius en une suite de 7 ou 8 gros points noirs ir-
réguliers, bien détachés les uns des autres, à l'exception toutefois
des trois qui sont voisins de la côte, lesquels sont très franche-
ment confluents. La tache interne fait défaut, et la marginale
peu diaphane et grisâtre, se trouve réduite à une ombre qui règne
depuis le sommet jusqu'à la seconde branche de la médiane où
elle expire en pointe.
Ajoutons que la frange de ce Parnassien est d'un blanc
uniforme, mais qu'elle est précédée par un liséré noir très fin
qui n'aboutit pas jusqu'à l'apex. Ce liséré n'existe pas aux ailes
inférieures, et ces organes ne présentent pas non plus la moindre
trace de marginale; mais l'antémarginale y est bien indiquée par
une rangée de 5 points solitaires et plus ou moins triangulaires.
Puis viennent les deux ocelles très petites d'un jaune ocracé pâle
et largement cerclées de noir, le lavis abdominal qui s'étend de-
puis la base où il supporte une petite tache jaune très distincte,
— 131 —
jusqu'à l'angle anal sans former de crochet sous la cellule; enfin
deux autres petites taches noires situées l'une entre les ocelles et
l'autre sur le milieu du contour supérieur de la discoïdale. L'anale
est absente; mais on distingue, entre la place qu'elle occupe habi-
tuellement et l'ocelle inférieure, deux ou trois points jaunâtres
entourés de gris pâle qui ne sont que la reproduction par trans-
parence des dessins qui existent sur la face opposée.
Le dessous de Tenedius mérite d'être décrit à part, car
on y remarque quelques caractères particuliers. Les ailes anté-
rieures laissent mieux apercevoir de ce côté la teinte légèrement
verdâtre que nous avons signalée. Les costales sont bien détachées
les unes des autres et la plus basse est pupillée de jaune, ce qui
ferait supposer que dans certains cas celles du dessus le sont
aussi. L'antémarginale est reproduite par 4 points noirs aux-
quels succède vers la côte une ombre grise continue, mais peu
distincte.
Le fond des ailes postérieures est d'un blanc pur sur lequel
toutes les nervures se détachent d'une manière très apparente
en gris jaunâtre. L'antémarginale et les ocelles sont écrites
comme sur la face opposée; mais il existe de ce côté deux petites
taches anales noirâtres superposées, et entre celles-ci et l'ocelle
inférieure se trouvent allignés les trois points jaunes entourés de
noir qu'on distinguait en dessus par transparence.
Quant aux basilaires, elles offrent un aspect caractéristique
qu'on ne retrouve chez aucun autre Parnassien. Elles sont blanches
et réunies, pour ainsi dire, en une tache unique arrêtée à la base
par une teinte grise, et limitée du côté extérieur par un trait
noir très flexueux.
Pour finir la diagnose de cet intéressant Parnassien, il ne
reste plus qu'à ajouter aux caractères qui précèdent que les
— 132 —
antennes et le corps sont d'un noir profond, mais que celui-ci
est recouvert d'une abondante pilosité grisâtre.
Nous ne connaissons pas la femelle de Tenedius que nous
soupçonnons de présenter des différences sexuelles très marquées.
Nous avons cependant pu nous procurer un très bon dessin de
sa poche, et c'est l'examen de cet appareil qui nous a permis
de créer en faveur de ce papillon le groupe des Limbati dont
il est l'unique représentant. Cette poche (pi. 3, fig. 7, 8),
aperçue de profil et de face, comme toutes celles que nous avons
dessinées, consiste en une vaste caverne arrondie en dessous et
un peu bilobée à son extrémité libre; elle est dépourvue de toute
carène, mais elle est recouverte par en haut d'une sorte de
limbe profondément bifide et très saillant.
Pendant bien des années on ne possédait de ce Parnassien
que les quelques exemplaires typiques que Mr. Eversmann nous a
fait connaître en 1851 et qui lui furent envoyés du gouvernement
d'Trkutsk. Mais peu à peu cette rare espèce a été retrouvée sur
différents points du continent sibérien. C'est ainsi que Ménétriès
la signale à Olekminsk, sur les bords de la Lena; elle a été
capturée aussi dans le voisinage de la rivière Zeya et près de
Schitka en Daourie.
En 1873 elle a été rencontrée sur les bords de la rivière
Tongouska, en pleine Sibérie centrale, (mois de Juillet), et récem-
ment sur différents points de l'Altai oriental où elle vole en
Avril et Mai.
L'aire de dispersion de Tenedius est par conséquent fort étendu;
c'est un des Parnassiens qui s'avance le plus vers le nord où
ses stations s'abaissent peu à peu au niveau des plaines.
— 133 —
5® Groupe, Ventricosi.
Paruassius Evcrsiiianni, Ménétriès.
Ménétriès. Enumeiatio corporum animalium Musei Petropolitani, page 73
et 74, pi. 1, fig. 2 J (année 1855).
Staudinger. Catalogue 1871, N°- 20.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 20, fig. 2 S-
Nous ne possédons pas en collection le mâle de cette superbe
et rarissime espèce et nous sommes obligé, pour lui accorder la
place qu'elle mérite d'occuper dans cette étude, de recourir à
l'ouvrage de Ménétriès cité en tête auquel du reste nous avons
également emprunté la figure 2 de notre vingtième planche.
Nous rapporterons par conséquent ci-dessous la diagnose que le
savant directeur du Musée de Saint-Pétersbourg nous a donnée
lui-même de ce papillon.
Voici comment il s'exprime à la page 73 de son catalogue:
»Cette belle espèce est un peu plus petite que la Mnemosyne,«
»dout elle a la forme. «
«Les quatre ailes eut les nervures noires et bien marquées,»
»et la frange est lisérée de noir profond. Les premières sont trans-«
» parentes et saupoudrées d'atomes noirâtres, qui, à la base de«
»ces mêmes ailes, sont de moitié mélangés d'atomes jaunâtres. Sur«
»la cellule discoïdale se dessinent trois taches noires, dont la plus«
«proche de la base limite les atomes bicolores dont nous avons parlé;*
»la seconde est la plus étroite dans son milieu; enfin la troisième*
»ou la plus externe, a la forme d'un carré long; ensuite on compte*
«trois bandes formées de taches d'un beau jaune citron, dont ]'ex-«
» terne est composée de huit petites taches hémisphériques, disposées*
«parallèlement au bord externe; la seconde bande, parallèle à la«
«première, compte neuf taches dont les trois avant-dernières sont*
— 134 —
»les plus grandes; enfin la troisième bande, de six taches, est plus«
» fortement sinnée, et entoure complètement la cellule discoïdale.«
» Toutes ces taches sont séparées par les nervures noires. «
»Les ailes inférieures sont d'un beau jaune citron, ayant chacune «
»deux taches (les ocelles), placées comme chez le Phoebus (Delius), mais«
»plus petites, d'un noir foncé, dont l'antérieure pupillée de rouge «
» carmin, et l'inférieure seulement saupoudrée de carmin. Le bord«
»interne est pointillé de noir profond; enfin à l'angle anal se voit«
»une tache noire et transversale.*
»Le dessous des quatre ailes est luisant et présente les mêmes «
»dessins qu'en dessus, mais seulement moins marqués; de plus à la«
sbase des ailes inférieures on voit premièrement un point noir bien<t
»marqué, puis au dessous et dans la cellule discoïdale une tache«
»d'un rouge carmin bordée extérieurement d'un trait noir, et enfin«
»plus bas, une autre tache parallèle.*
»La tête entre les yeux, et le corselet sont couverts de longs*
»poils d'un jaune roussâtre; le corps est garni de poils jaunâtres*
»plus longs et plus abondants en dessous.*
»D'après un seul exemplaire mâle, envoyé de Kansk. par Mr.*
»le docteur Stubbendorf; je me suis fait un devoir de dédier cette*
» espèce à Mr. le professeur Eversmann, le premier lépidoptérologue*
»de Kussie.*
Lorsqu'on se reporte à la fig. 2 de la planche 1 de
l'ouvrage de Ménétriès, on trouve que la description qui précède,
est fort bien faite ; elle fait ressortir avec précision les caractères
qui distinguent ce remarquable papillon. Cependant l'inspection
de cette figure permet d'ajouter à la diagnose qu'on vient de lire
les observations suivantes:
De tous les Parnassiens connus, Eversmanni est certainement
le seul dont les ailes soient aussi vivement colorées en jaune.
Quelques espèces, telles que Delphius, Transiens et surtout
— 135 —
Cardinal offrent, il est vrai, une tendance marquée à passer au
jaunâtre; mais cette nuance est peu tranchée, toujours un peu
incertaine, et l'on peut dire d'une manière générale que les ailes
des Parnassiens sont caractérisées par leur teinte blanche plus
ou moins pure. Celui qui nous occupe, fait donc franchement
exception à la règle. C'est sans doute cette circonstance qui a
fait émettre au docteur Staudinger, dans son grand catalogue de
1871, et au N^- 20 qu'il consacre à ce Papillon, un doute sur
la constance de cette couleur jaune si prononcée.
En effet, après avoir mentionné à la suite du nom de
l'espèce l'indication iconographique de Ménétriès, il la fait suivre
entre parenthèse de l'observation suivante (Aberratio flava?),
ce qui ferait supposer qu'Eversmanni mâle est quelquefois moms
éclatant ou beaucoup plus pâle que ne le comporte la figure de
l'entomologiste de Saint-Pétersbourg. Nous ne connaissons pour
notre compte personnel d'autre forme de cette espèce que celle
de Ménétriès; mais en supposant qu'il en existe, il nous semble
que c'est bien à cette race d'un jaune citronné que revient la
qualification de typique par droit de priorité. En effet, la con-
sécration des espèces, considérées comme types, ne dépend pas
de l'abondance plus ou moins grande de la forme sous laquelle
elles sont ordinairement observées, mais bien de la priorité de leur
découverte. Or, d'après ce principe, il est évident que le papillon
que Ménétriès a eu sous les yeux, est le véritable Eversmanni
à la suite duquel viendront se ranger, comme des variétés ou
des races locales, toutes les autres formes que peut affecter
ce Parnassien, si elles sont suffisamment distinctes du type
primitif.
Il est à remarquer, en second lieu, que les dessins obscurs
des ailes supérieures sont, chez l'espèce qui nous occupe, d'une
— 136 —
teinte absolument uniforme; c'est à dire qu'aucun ne tranche
sur les autres par une plus grande vivacité. Ce fait est précisé-
ment l'inverse de celui qui s'observe chez tous les autres Par-
nassiens que nous avons étudiés jusqu'ici, lesquels possèdent sur
ces organes des dessins de tonalité différente. Leurs taches dis-
coïdales, l'interne et parfois les costales sont toujours plus noires
et plus épaisses que leurs bandes transverses, tandis qu'ici, au
contraire, toutes ces taches sont d'un gris noirâtre un peu nébuleux
qui contribue à donner aux ailes supérieures de ce papillon la
transparence qui le caractérise.
Quant aux inférieures, elles n'offrent pas de trace de margi-
nale ni d'antémarginale; leur bord externe est vierge de tout
dessin; et, sous ce rapport, Eversmanni présente des rapports
évidents avec le Clarius typique de la chaîne de l'Altai.
Nous dirons dans l'article suivant ce que nous pensons de
la femelle de ce Parnassien. Rappelions ici pour terminer que
le mâle figuré par Ménétriès, a été découvert à Kansk, dans la
Sibérie centrale, et ajoutons qu'il est probable que cette rare
espèce s'avance encore plus loin vers le nord. Nous avons
appris également qu'elle a été retrouvée il y a quelques années
à Nikolaiefsk, en Daourie, par un entomologiste allemand,
Mr. Graeser; mais nous ignorons si les quelques exemplaires
qui ont été rapportés de ces contrées orientales se rapportent
exactement au type de Kansk, ou s'ils forment, comme cela
nous semble fort probable, une race à part, en raison du grand
éloignement de ces deux stations géographiques.
— 137 —
Parnassius Wosneseuskii, Eversmanu.
Ménétriès. Enumeratio corporum animaliuni Musei Petropolitani, pages 74
et 75, pi. 1, tig. o "^^ (année 1855).
Staudinger, Catalogue 1871, N»- 20 (Eveismanni '+ ?V).
Austaut. Les Parnassiens, pi. 20, fig. 3 Ç (type) et pi. 21, fig. o '+ (variété).
Ce papillon est si voisin d'Eversmanni que le docteur Stau-
dinger l'a assimilé dans son grand catalogue, quoique avec un
certain doute, à cette espèce dont il représenterait le sexe femelle.
Nous exprimerons plus loins notre avis sur cette opinion. Mais
auparavant, nous croyons devoir transcrire ici la diagnose que
Ménétriès nous a donné de ce Parnassien, afin de permettre
au lecteur d'apprécier en pleine connaissance de cause le degré
d'analogie ou de dissemblance qu'il peut laisser paraître avec
la forme congénère. Voici par conséquent ce qu'on lit à la page 7-4
de l'ouvrage mentionné dans notre synonymie.
Cette espèce est très voisine du P. Eversmanni, surtout par
ses ailes supérieures, et pourrait bien n'être que la femelle; mais
dans le doute, je préfère la décrire séparément, les ailes inférieures
m'ayant offert des caractères trop marqués pour être attribués à une
simple différence sexuelle.
Elle est un peu plus petite que le P. Muemosyne; les quatre
ailes ont leurs nervures noires bien marquées et liserées également
de noir.
En dessus, les ailes supérieures présentent absolument les mêmes
dessins que l'on remarque chez le P. Eversmanni, mais qui sont d'un
blanc sale à peine jaunâtre. Les ailes inférieures sont de cette
dernière teinte; sur le milieu du bord antérieur se voit une tache
d'un rouge cinabre pâle (l'ocelle), étroitement bordée d'atomes noirs;
une pareille tache, et un peu plus grande, est située à l'extrémité
de la cellule discoïdale; une large bande d'atomes noirs part do cette
tache et atteint le bord abdominal; et sur cette bande entre le bord
— 138 —
interne et la dernière nervure, se remarque une petite tache ovale
ainsi qu'une autre à côté plus grande et en croissant séparée de cette
dernière par la nervure; ces deux taches sont d'un rouge cinabre,
entourées de noir. Le bord interne est comme chez l'espèce voisine,
pointillé de noir profond; cette teinte remplit tout l'espace jusqu'au
bord interne de la cellule discoïdale; enfin tout le long du bord
postérieur se dessine une bande de six chevrons étroits, formés
d'atomes noirs.
En dessous, les quatre ailes sont luisantes et présentent le même
dessin qu'en dessus ; si ce n'est qu'aux ailes inférieures, les quatre ocelles
d'un rouge cinabre sont un peu plus grandes, et cela aux dépens de
leur bordure noire, ayant leur milieu largement pupille de blanc;
à la base de ces ailes sont quatre taches de la même teinte, également
blanches intérieurement, liserées de noir extérieurement et séparées
l'une de l'autre par une nervure noire: la 1® est posée sur le bord
antérieur et est la plus petite, la 2® est presque carrée; la 3^, la
plus grande, s'allonge jusqu'à la moitié de la cellule discoïdale; et
la 4® descend d'avantage et est très étroite à sa base.
Le corps est noir, garni de poils peu fournis en dessus et plus
serrés en dessous ; entre les antennes et la partie antérieure du corselet,
les poils sont serrés et roussâtres; de chaque côté de la poitrine les
poils sont longs et touffus ; le dernier anneau de l'abdomen est frangé
de jaune vif en dessus.
La femelle, le seul sexe que nous possédions, a une poche très
grande, à peu près comme celle du P. Mnemosyne, d'un blanc sale
avec un sillon longitudinal en dessous et un autre de chaque côté.
Cette poche s'arrondit à l'extrémité.
Cet exemplaire a été rapporté d'Ochotsk par Mr. Wosnesenski.
Si, 'après avoir lu la description qui précède, on compare
entre elles les figures 2 et 3 de notre vingtième planche, les-
quelles représentent l'Eversmanni mâle et le Wosnesenskii fe-
melle et dont la dernière a été également extraite avec fidélité
— 139 —
de. l'ouvrage de Ménétriès, on trouve en effet que ces deux
papillons présentent de notables différences. D'abord l'espèce
originaire d'Ochotsk est franchement blanche, et c'est à peine,
si elle est teintée d'un jaunâtre fort douteux; puis, malgré la
grande analogie qui règne de part et d'autre entre les dessins
des ailes supérieures, on aperçoit immédiatement que les ocelles
de ce Parnassien, très élargies toutes deux, sont teintées d'un
rouge à peine naissant de même que le centre de l'anale; que
cette dernière tache se relie à l'ocelle inférieure par une large
barre noirâtre; enfin que le bord externe de l'aile est occupé
dans tout son parcours par une ligne marginale formée d'une
suite de chevrons continus. Le revers de Wosnesenskii montre
en outre quatre taches basilaires blanchâtres, également bien
écrites, et disposées comme celles des Carinati en général; chez
Eversmanni, au contraire, les ocelles sont réduites, le bord extérieur
est vierge de tout dessin; et cette espèce ne possède en dessous
que deux basilaires d'un carmin foncé, l'une dans la cellule, et
l'autre disposée le long du bord abdominal. Ces différences
réunies contribuent à donner aux deux papillons dont il s'agit
un aspect très particulier.
Nous avons sous les yeux un autre Parnassien qui nous
a été envoyé par Mr. Ernst Heyne, l'entomologiste si obligeant
de Leipzig, comme étant une femelle d'Eversmanni, mais que
nous rapportons sans hésitation au "Wosnesenskii de Ménétriès,
bien qu'il ne soit pas absolument conforme à la figure de cet
auteur. Cet exemplaire qui se trouve reproduit sur notre
planche 21, fig. 3, présente en ett'et quelcjues caractères spéciaux,
tout en conservant cepandent les signes essentiels qui appar-
tiennent au type. 11 est d'abord beaucoup plus grand que ce
dernier, car sa taille égale au moins celle de Clarius; puis
— 140 —
ses ailes supérieures, quoique peu chargées d'écaillés et à demi
transparentes, sont plus rembrunies, et par conséquent, les taches
blanchâtres disposées en séries transverses se trouvent plus ré-
duites. Les ailes inférieures, d'un blanc sale, sont dessinées
comme celles de la figure de Ménétriès; les ocelles sont pourtant
plus vivement circonscrites, la ligne marginale dentée est mieux
marquée; l'anale est teintée de blanchâtre au lieu de rose; et la
barre qui la relie à l'ocelle inférieure, est plus étroite ou plus fine.
Sur la face inférieure de ce papillon l'anale est lavée de rose pâle
comme chez l'exemplaire d'Ochotsk; mais les basilaires sont plus
allongées, plus blanches et moins largement circonscrites de noir. On
peut aussi vérifier sur cette femelle ce que l'auteur de la diagnose
affirme de la vestiture du corps de son Wosnesenskii. En effet, la
tête est entourée d'un collier de poils roux lesquels deviennent plus
denses, plus longs et plus jaunâtres sur la poitrine. L'abdomen,
dégarni de pilosité et d'un noir luisant, est frangé sur ses côtés
de même que sur le dessus du dernier segment de jaune vif.
Mais ce sujet, extrêmement intéressant parce qu'il se présente
comme une variété, ne possède pas sa poche anale. En raison
de sa grande fraîcheur nous le supposons vierge, de sorte que
l'appareil sexuel ne s'est pas développé. Il eut été très im-
portant de pouvoir constater si cette caverne que l'entomologiste
russe compare à celle de notre Mnemosyne porte une triple sillon
longitudinal à sa surface, ou si elle ressemble plutôt à celle que
nous avons reproduite pi. 4, fig. 5 et 6 d'après un dessin qui
nous a été envoyé. L'examen de ces figures ne fait apercevoir
aucune trace des sillons dont il s'agit; et la poche qu'elles re-
présentent s'éloigne aussi, comme forme, de celle de Mnemosyne
(pi. 4, fig. 3, 4) qui apparaît plus spacieuse, plus trapue et
beaucoup moins atténuée à sa partie antérieure. Il est vrai
— 141 —
" que le dessin des figures 5 et 6 nous a été communiqué comme
étant celui de la pocbe d'Eversmanni, probablement de la femelle
jaune qui se rapporte au mâle citronné de la Sibérie centrale,
ce qui tendrait déjà à prouver, si cette dernière hypothèse est
exacte, que les deux formes Eversmanni et Wosnesenskii ne sont
pas absolument les mêmes, puisqu'elles différeraient par des carac-
tères organiques en même temps que par leur aspect physique.
Tl résulte de la comparaison que nous venons d'établir entre
le Wosnesenskii de notre collection et celui de Ménétriès, que
cette espèce est sujette à varier, tout en conservant cependant ses
principaux traits distinctifs, c'est-à-dire sa couleur blanche et
les dessins caractéristiques de ses ailes. Mais que convient-il de
conclure de ce fait ainsi que des différences qui existent entre
ce Parnassien et le véritable Eversmanni? Ces deux papillons
forment-ils chacun une espèce indépendante; l'un n'est-il qu'une
modification géographique de l'autre, ou bien ne constituent-ils
qu'une seule espèce représentée par deux sexes différents? Cette
question est assez difficile à résoudre, parce que les données qui
pourraient l'éclaicir sont encore insuffisantes. Nous ne croyons
pas cependant qu'il y ait une identité absolue entre ces deux
formes de Parnassiens, et nous sommes de l'avis de l'entomologiste
russe, lorsqu'il pense que les différences observées sont plus que
sexuelles. Cette opinion, du reste, paraît avoir été adoptée par
des auteurs compétents, et entre autres par Mr. Charles Oberthur
qui considère également le Wosnesenskii de Ménétriès comme
une variété blanche et peu obscure de l'Eversmanni^
Ce savant lépidoptériste possède du reste une paire de ce dernier
papillon qui est originaire de Jakoutsk, ce qui prouve qu'il 'existe
une femelle qui, par sa teinte jaune, est en rapport avec le mâle
typique de Kansk.
— 142 —
Sans aller jusqu'à séparer spécifiquement les deux formes
dont nous étudions les relations, il est permis au moins de les
distinguer comme races locales. D'après cette manière de voir,
l'espèce typique caractérisée par sa couleur d'un jaune vif, par
l'intensité du carmin de ses ocelles et par l'absence de la ligne
marginale des ailes inférieures, représenterait une forme qui est
propre au centre de la Sibérie où elle fréquente de très faibles
altitudes; tandis que le Wosnesenskii, remarquable par sa teinte
blanche, par l'élargissement de ses ocelles dont le rouge s'est
étiolé et par la marginale si vivement accusée, constituerait une
variété orientale et peut-être plus alpine de la forme précédente.
Si cette hypothèse est exacte, il doit exister dans le nord-est
de la Sibérie des mâles atteints d'albinisme et offrant les carac-
tères principaux de la femelle figurée par Ménétriès, mais nous
ne possédons aucune indication précise à cet égard. Nous devons
toutefois rapporter ici qu'un lépidoptériste très distingué, Mr.
Edwards, a publié en 1881, dans la revue scientifique intitulée
Papilio (volume 1, page 2), la description d'un mâle d'Evers-
manni originaire des bords du fleuve Yukon dans la province
d'Alaska (Amérique Russe). Cet exemplaire que l'auteur désigne
sous le nom de Thor, différerait sensiblement de la forme de
Kansk par plusieurs caractères importants, et notamment par sa
couleur d'un blanc sale analogue à celle de Clarius. Ce Parnassien
peut-il être rapporté à Wosnesenskii, ou constitue-t-il une nou-
velle race distincte de celle-ci? C'est ce que nous ne pouvons
décider en l'absence de la figure. Cependant, ce fait semblerait
prouver que l'Eversmanni manifeste une tendance à blanchir
à mesure qu'il s'étend depuis le centre de la Sibérie vers
des régions de plus en plus orientales, et viendrait appuyer
l'opinion que nous avons émise plus haut, à savoir que ces
— 143 —
deux papillons ne sont pas les formes sexuelles d'un seul et
même type.
En résumé, Wosnesenskii est à nos yeux une variété locale
d'Eversmanni. Ces deux Parnassiens offrent les mêmes rapports
que ceux qui régnent entre le Clarius typique et sa variété
Dentata, mais quant aux dessins seulement, car la différence qui
existe entre les deux formes deMénétriès, est encore compliquée d'une
question d'albinisme qui tend à les éloigner d'avantage l'une de l'autre.
Ajoutons, pour finir l'histoire de cette rare espèce, quelques
mots sur sa distribution géographique. L'auteur de la diagnose
nous apprend que l'exemplaire typique qu'il nous a fait connaître
a été rapporté d'Ochotsk par le voyageur russe Wosnesenski
à qui ce papillon a été dédié. Quelques années plus tard, une
autre femelle a été recueillie non loin de la rivière Outchour
par le professeur Pavlofski, au cours d'une exploration que ce
savant dirigea en 1858 dans le gouvernement de Jakoutsk pour
le compte de l'Académie impériale.
Le spécimen varié de notre collection est originaire des
montagnes situées au nord-est d'Ochotsk. Ce Parnassien paraît
par conséquent être propre à la partie alpine et déserte du nord-
est de la Sibérie; et nous supposons qu'il s'étend dans toute la
péninsule de Tchoutchis au nord du Kamtchatka.
Paruassins Felderi, Bremer.
Bremer. Lepidoptereii Ost-Sibiriens, page 6, pi. 1, fig. 5 (année 1864).
Staudinger. Catalogue 1871, N»- 21.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 19, fig. 2 ■$.
Les entomologistes qui ne connaîtraient cette espèce que
par la mention que le docteur Staudinger lui a consacrée au
— U4 —
1^°- 21 de son catalogue général, supposeraient nécessairement
qu'elle est très voisine d'Eversmanni, puisque ce savant ajoute
à la citation iconographique qui concerne ce Parnassien, les mots
suivants: num precedentis (Eversmanni) varietas? A cette
époque, l'auteur du catalogue ne connaissait que la figure de Bremer,
et son opinion a varié depuis qu'il a pu étudier en nature l'in-
secte dont il s'agit. Dans le fait, Felderi est une forme bien
tranchée non seulement d'Eversmanni, mais encore de tous ses
autres congénères. C'est pourtant dans le voisinage de cette
espèce qu'il convient de la placer, d'abord parce que les nervures
et les franges de ses ailes sont d'un noir profond, et ensuite
à cause de la pilosité d'un beau jaune qui recouvre son corps.
Ce Parnassien est de grande taille. Son envergure atteint
celle de nos plus forts exemplaires d'Apollo; mais sa coupe est
bien différente de celle de cette espèce. Ses ailes sont plus
allongées, le sommet des supérieures est plus aigu et leur bord
externe plus droit; les inférieures, aussi longues que les précé-
dentes, présentent un limbe très convexe et bien arrondi. Leur
nuance est d'un blanc jaunâtre; mais les écailles de ce papillon
sont si fines et si peu serrées qu'il paraît toujours plus ou moins
transparent, même lorsque les exemplaires sont bien frais comme
celui que nous avons sous les yeux. — Cette particularité à la-
quelle il convient encore d'ajouter la pâleur et l'uniformité de
tous les dessins noirs des ailes supérieures, est une analogie
de plus qui rapproche cette espèce de l'Eversmanni qui possède
aussi ces caractères. Cependant, les dessins sont plus simples
et moins compliqués chez Felderi que ceux de la forme com-
parative. On n'aperçoit guère en effet sur les ailes antérieures
du Parnassien qui nous occupe que les taches suivants: 1^ deux
discoïdales étroites coupant la cellule de part et d'autre,
— 145 —
2® une tache interne allongée verticalement et concave sur ses
grands côtés, 3^ deux ou trois macules vagues, indécises à la
place des costales, 4° une antémarginale fine, peu indiquée et qui
n'aboutit pas jusqu'au bord interne; et 5^ enfin la marginale
proprement dite, qui s'allonge sous forme de bande étroite depuis
l'apex jusqu'à la 4'^ branche de la médiane. La base et la côte
sont en outre largement recouvertes d'un léger semis noirâtre.
L'aile inférieure présente des dessins encore beaucoup plus simples,
car on n'y aperçoit nulle trace de bandes transverses. Les seules
taches qui en rompent l'uniformité, sont deux très petites ocelles
et le lavis abdominal. La plus élevée des ocelles consiste en
un point d'un carmin fort vif, largement cerclé de noir profond,
tandis que l'autre est réduite à une simple accumulation d'écaillés
obscures. Quant au lavis, il est à peu près normalement déve-
loppé; mais il offre des particularités qu'on ne retrouve chez
aucun autre Parnassien. Au lieu de naître à la côte de l'aile,
il ne commence à se former qu'à partir de la grosse nervure qui
ferme par en haut la cellule; il s'étend ensuite tout le long
du bord jusqu'à l'angle anal où il aboutit à une autre tache
étroite, allongée et un peu concave; et dans ce parcours il laisse
apparaître trois éclaircies blanches disposées, l'une à la base
de la cellule, et les autres entre celle-ci et le bord abdominal.
Le dessous de Felderi est la reproduction à peu près exacte
du dessus; mais cette face est presque totalement dégarnie
d'écaillés et présente par conséquent un aspect vitré des plus
prononcés. Cependant de ce côté les ocelles ont un peu plus
d'ampleur: la supérieure est pupillée de blanc et l'inférieure
de quelques écailles rouges; les éclaircies du lavis sont plus
agrandies et faiblement ('caillées de carmin de même que
la tache anale. Enfin, la base de l'aile et tout le bord abdominal
10
— 146 —
se trouvent revêtus d'un fin duvet jaunâtre qui devient très
apparent lorsque le rayon visuel en effleure obliquement la
surface.
Pour terminer cette description, il ne nous reste plus qu'à
énumérer les principaux caractères qui intéressent le corps de ce
remarquable papillon. Ses antennes, ses pattes et son abdomen
sont d'un noir uniforme; mais cette couleur est masquée en
partie par une abondante pilosité d'un beau jaune d'or qui est
surtout très développée autour de la tête où elle forme une sorte
de collier, de chaque côté de la poitrine, et sur toute la face
inférieure de l'abdomen. Le dessus de celui-ci est noir; les poils
qui le recouvrent, moins longs et moins serrés, sont d'un gris
roussâtre, mais ses incisions latérales sont frangées d'un jaune
d'or très vif. Ces divers caractères s'observent également chez
les deux espèces que nous avons décrites plus haut avec lesquelles
celle-ci forme un petit groupe très naturel; mais la couleur
jaune est ici beaucoup plus intense et se trouve poussée, pour
ainsi dire, jusqu'à l'exagération.
Nous avons dit que Felderi est voisin d'Eversmanni et de
Wosnesenskii. En effet, ce papillon tient au premier par le
limbe de ses ailes postérieures qui est vierge de tous dessins, et
par la tendance de ses ocelles à se rétrécir; il possède du second
la teinte blanchâtre, la grande transparence de ses ailes et la
couleur noire de leurs franges et de leurs nervures. Cependant,
il est parfaitement distinct de tous deux par la taille et par
des détails de dessins si importants qu'il est inutile d'en faire
ressortir les différences. Il est encore un autre Parnassien dont
l'aile supérieure évoque par son aspect le souvenir de la présente
espèce, c'est Stubbendorfii qui est le commensal de Felderi
dans certains points de l'Amurland. Cette petite espèce, aux
— 147 —
ailes hyalines et nervurées de noir, possède aussi des dessins
presque oblitérés et disposés à peu près de la même manière;
toutefois elle est dépourvue d'ocelles et se rapproche d'avantage
de notre Mnemosyne. L'analogie que nous signalons n'est par
conséquent que lointaine; mais elle prouve que parfois la nature
se plaît à reproduire une certaine similitude parmi des êtres
très distincts auxquels elle a assigné les mêmes conditions
d'existence.
Ce beau et rare Parnassien, dont la femelle nous est encore
inconnue, possède un habitat des plus restreints. Découvert
en 1863 par Mr. Eadde, sur les montagnes de Bureija, il a été
retrouvé plus tard sur celles de Kaddefskaia. C'est une espèce
spéciale aux alpes du centre de l'Amurland où elle vole très peu
nombreuse dans le courant du mois de Juillet.
Faruassias Clarius, Eversiiianu.
Eversmann. Bulletin de la Société impériale des Naturalistes de Moscou,
pi. 9, fig. 1, a, b, c, page 539.
Herrich-Schaeffer. Systeraatische Bearbeitung etc. 628 — 631.
Staudinger. Catalogue 1871, N°- 23.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 20, fig. 1 S-
Cette espèce possède à peu près la taille de notre Delius,
mais tous ses caractères tendent à la rapprocher des trois formes
que nous avons décrites précédemment. Le mâle, seul sexe que
nous connaissions, est d'un blanc sale un peu jaunâtre sur lequel
les franges et les nervures ressortent en brun pâle. Les dis-
coïdales des ailes supérieures sont grosses et très noires; les
costales qui leur succèdent, très confluentes, imitent une sorte
de bande courbe et anguleuse du côté extérieur, laquelle s'arrête
10*
— 148 —
brusquement à la seconde branche de la nervure médiane;
l'antémarginale, bien continue et un peu dentée en dehors, ex-
pire avant d'atteindre le bord interne ; enfin une marginale, assez
large et d'un aspect vitré, occupe tout le bord de l'aile depuis
le sommet jusqu'à l'angle qui lui est opposé. Cette espèce n'offre
qu'une très petite tache interne plus ou moins marquée et qui
consiste dans un simple groupement d'écaillés noires.
Les ailes inférieures de ce Parnassien présentent un dessin
fort simple. On y distingue d'abord deux ocelles bien cerclées,
d'un rouge orangé un peu terne et sans trace de pupillation
blanche dans leur centre, puis deux anales consécutives, assez
fines, enfin le lavis abdominal qui s'étend depuis la base jus-
qu'aux taches précédentes, après avoir dessiné un crochet sous
la cellule. Il n'existe sur ces organes, ainsi que le montre notre
figure, aucune trace des bandes transverses qui sont si constantes
chez la plupart des espèces de ce genre.
Le dessous de Clarius reproduit très exactement les dessins
de la face opposée, mais avec des nuances fort pâles et un reflet
vitré des plus prononcés. On ne retrouve de ce côté le moindre
vestige des basilaires rouges que nous avons signalées chez pres-
que tous les Parnassiens que nous avons étudiés jusqu'à présent;
et pour cette raison, Clarius constitue une transition évidente
entre les Ventricosi qui possèdent ces taches, tels qu'Evers-
manni, et les différentes formes du groupe de Mnemosyne chez
lesquelles ces taches font toujours défaut.
Ce papillon, malgré son aspect plus robuste, ressemble aussi
beaucoup au Nordmanni du Caucase chez lequel les basilaires
sont complètement absentes, mais qui possède pourtant des ocelles
normalement développées; enfin, à part la taille, la couleur du
fond et le peu d'extension des dessins noirs des ailes supérieures.
— 149 —
Clarius montre des rapports manifestes avec l'Eversmanni de Méné-
triès, à cause des franges et des nervures qui sont plus obscures
que la teinte générale, et de l'absence des bandes transverses
des ailes postérieures. Par sa couleur d'un blanc jaunâtre sale,
ce Parnassien se rapproche aussi de Wosnesenskii; et nous verrons
qu'il se lie plus particulièrement à cette espèce par la variété
Dentata dont il sera question ci-dessous.
Clarius, dans sa forme typique, a été découvert, il y a déjà
de nombreuses années, par Mr. Schrenck, sur les alpes de Tarbagatai
qui sont proches des sources de l'Irtyche; il a été repris plus
tard à Ustkamenogorsk, dans la chaîne de TAltai, ainsi que sur
d'autres points de ce vaste système de montagnes. Ce Parnassien
semble être propre à cette région, car il n'a été rencontré ni
dans le Tian-Chan qui est situé au sud-ouest de cette chaîne,
ni sur les alpes de TAmurland, à l'est de la Sibérie.
Tariété Dentata, Standîuger.
Staudinger. In litteris.
Âustaut. Les Parnassiens, pi. 21, fig. 1 ^, fig. 2 $.
Mr. Haberhauer découvrit il y a quelque temps dans le
cours d'explorations qu'il dirigea dans les montagnes de Saisan
qui sont, comme on le sait, dans une situation plus méridionale
que celles de Tarbagatai, une nouvelle forme de Clarius laquelle
diffère assez du type de l'Altai pour mériter de porter un nom
distinct. Ce papillon offre la môme taille et la même teinte d'un blanc
jaunâtre qui sont propres ;i l'espèce décrite par Eversmann; mais
ses dessins sont généralement plus élargis, et ils présentent en outre
des particularités qu'on ne retrouve pas chez le Clarius sibérien.
— 150 —
Le mâle de cette variété que nous avons représenté pi. 21, fig. 1,
montre des taches costales bien confluentes et très épaisses qui
aboutissent jusqu'à l'interne par un semis continue d'écaillés
noires; puis le crochet du lavis abdominal, quoique très fin,
remonte aussi d'avantage vers le bord supérieur de la cellule
des secondes ailes. L'anale est formée par la réunion de plusieures
macules confluentes qui affectent dans leur ensemble l'apparence
d'un zig-zag dont le centre est distinctement écaillé de rouge;
enfin, et c'est là le caractère le plus important, il existe chez
cette race, tout le long du bord extérieur, une ligne antémarginale,
fine, noirâtre et très dentée dont les angles saillants vont aboutir
jusqu'aux franges, à l'intersection de celles-ci et des nervures.
Cette ligne s'appuie intérieurement sur une zone ombrée assez
peu définie.
Ne connaissant pas la femelle du vrai Clarius, nous ne
pouvons faire ressortir les dissemblances qui peuvent exister
entre elle et sa variété; néanmoins, la femelle de Dentata diffère
du mâle par l'aspect plus diaphane de ses ailes, par l'élargisse-
ment plus considérable de l'anale qui est plus vivement carminée
et qui tend à s'unir à l'ocelle inférieure, mais surtout par la
bande qui relie les costales à l'interne, laquelle offre une am-
pleur inusitée. On remarque en outre que les ocelles sont reliées
deux à deux par un trait fin et noirâtre.
Le dessous de ce Parnassien est absolument identique au
dessus, à part le reflet très vitré qui est spécial à cette face.
Les antennes, le corps et la vestiture qui le recouvre, ne sont pas
différents de ceux du Clarius ordinaire. Mais nous devons insister
ici sur la forme si remarquable de la poche sexuelle de Dentata,
laquelle ne diffère probablement pas d'une manière bien sensible
de celle de la race de l'Altai. Cet appareil que nous avons
— 151 —
dessiné pi. 4, fig. 7 et 8, possède les caractères généraux qui
sont propres au groupe des Ventricosi; c'est-ù-dire qu'il consiste
dans une caverne blanchâtre spacieuse sous jacente, dépourvue
d'appendices accessoires, mais proportiouellement plus volumineuse
et surtout plus allongée que celle des formes congénères. Sa partie
antérieure, bien détachée de l'abdomen, est terminée par une ouver-
ture arrondie à bords réfléchis, et on remarque que sa surface
est divisée en deux parties à peu près égales par un étranglement
transversal très apparent.
Nous avons dit plus haut que Clarius, malgré une grande
différence d'aspect, présente une affinité évidente avec l'Eversmanni
de Ménétriès, La variété qui nous occupe se lie au contraire
plutôt avec le Wosnesenskii du même auteur. En effet, les points
de ressemblance sont nombreux entre ces deux papillons, ainsi que
l'on peut s'en convaincre en comparant l'une à l'autre les fig. 2
et 3 de la planche 2 1 , ainsi que la fig. 3 de la vingtième planche.
La nuance du fond est à peu près la même de part et d'autre.
L'antémarginale des ailes postérieures consiste également dans
les deux cas en une ligne fine et dentée; l'analogie serait même
encore plus grande, si l'aile supérieure de Dentata était aussi
obscurcie à la base et sur le disque que celle de l'espèce sibérienne,
Cependant, malgré ce degré de similitude, les caractères diffé-
rentiels parmi lesquels il convient de citer la présence ou l'ab-
sence des basilaires, demeurent trop marqués pour qu'il soit
permis d'émettre des doutes sur l'indépendance respective de ces
deux Parnassiens.
— 152 —
Paruassius Nordmanui, Méuétriès var. Miuima, Houratli.
Honrath. Berliner Entomologische Zeitschrift, page 272, pi. 8, fig. 2, 2a
(année 1885),
Austaut. Les Parnassiens, pi. 22, fig. 1, 2 {S et 5).
Nous ne connaissons pas la forme typique de ce Parnassien
qui a été décrite et figurée par Nordmann en 1851 dans le bulletin
de la Société impériale des Naturalistes de Moscou. Nous savons
seulement qu'elle est propre aux hautes alpes du Daghestan et
à celles de la Géorgie et qu'elle doit être très voisine du Clarius
de l'Altai, puisque Mr. Herrich-Schaeffer, dans son grand ouvrage
sur les papillons d'Europe, a confondu avec cette dernière espèce
des exemplaires de Nordmanni parfaitement typiques. L'expédition
russe qui explora le Caucase il y a quelques années, découvrit
sur les très hautes montagnes qui avoisinent Bazardjusi et à plus
de. 4000 mètres d'altitude une variété particulière de ce Parnassien,
laquelle a été publiée sous le nom de Minima par Mr. Edouard G.
Honrath, de Berlin.
Cette forme dont nous avons sous les yeux de fort beaux
exemplaires des deux sexes, est en effet très petite; son envergure
ne dépasse pas celle des sujets ordinaires de notre Pieris Rapae;
elle est par conséquent beaucoup plus réduite que Mnemosyne
dont elle possède du reste la coupe et avec laquelle elle offre
aussi beaucoup de ressemblance.
Les ailes du mâle sont d'un beau blanc mat à peine grisâtre,
sur lequel les nervures et les franges ne se détachent nullement
ni en brun ni en noir, ainsi que c'est le cas de toutes les espèces
du présent groupe. Les discoïdales, grosses et arrondies, occupent
toute la largeur de la cellule; la côte et la base sont fortement
lavées d'écaillés obscures; les costales, bien confluentes, forment
une sorte de crochet épais et court qui n'atteint pas la première
— 153 —
branche de la médiane. La tache interne affecte la forme d'un
croissant un peu vague et oblicfue, dont la convexité se trouve
tournée en dehors; enfin les deux bandes transverses, la marginale
et l'antémarginale, sont tout-à-fait conflueutes et constituent par
leur réunion une sorte d'ombre apicale très large, assez diaphane,
qui se perd avant d'aboutir à l'angle externe. Toutefois, avec
de l'attention, on découvre dans cette ombre une série de petites
taches blanchâtres fort vagues, disposée parallèlement au bord,
laquelle représente une trace de la nuance du fond qui sépare
toujours chez les Parnassiens les bandes transversales.
Les ailes inférieures de cette variété sont uniformément
blanches. On y distingue d'abord le lavis abdominal qui est
très noir et qui s'étend depuis la base jusqu'à l'angle anal, après
avoir fait un crochet peu saillant sous la cellule, puis les deux
ocelles d'un jaune ocracé qu'entoure un cercle large mais peu
régulier et dont l'inférieure est appuyée par en bas sur une
tache noire; enfin une marginale grisâtre, étroite, peu définie, la-
quelle, à l'inverse de celle qui existe chez les autres espèces,
part de l'angle anal et va expirer en se rétrécissant vers le milieu
du bord externe.
La femelle de ce petit Parnassien n'est pas sensiblement
différente du mâle; ses dessins sont cependant un peu plus
élargis et notamment la tache interne qui s'unit par un semis
écailleux au sablé de la base; puis le lavis des ailes postérieures
envahit davantage la cellule et forme au dessous de son extrémité
un crochet plus proéminent; enfin l'angle anal est occupé par
une tache noire transverse dont il n'existe aucune trace chez
l'autre sexe.
Le dessous de ce papillon, à part la dégradation des teintes
qui lui sont propres, est la reproduction exacte du dessus. La
— 154 —
similitude est même d'autant plus grande que l'aile inférieure
de Minima n'est marquée, comme c'est aussi le cas de Clarius,
d'aucune tache basilaire rouge. Le lavis est simplement plus pâle
que sur la face opposée. Les antennes et le corps sont noirs.
Celui du mâle est recouvert d'une vestiture grisâtre très abon-
dante, l'abdomen de la femelle au contraire est presque complète-
ment dénudé et d'un noir brillant; mais le collier de poils qui
entoure la tête, est assez touffu et d'un gris rougeâtre.
La poche cornée du Parnassien dont il s'agit, offre une forme
très particulière; elle est beaucoup plus courte que celle des
autres Ventricosi et à peu près aussi large que longue. L'examen
des fig. 1 et 2 de notre pi. 5 permet de constater ce carac-
tère. Il nous montre que cette caverne, de couleur blanche, est
brusquement atténuée à sa partie antérieure dont les bords, com-
plètement détachés de l'abdomen, se réfléchissent en dehors et
que la section de son ouverture postérieure est verticale par
rapport à l'axe du corps, à peu près comme celle de notre
Mnemosyne.
Du reste, c'est bien avec cette espèce que Minima offre
la plus grande somme d'analogie, à part cependant sa parenté
évidente avec le Clarius typique de l'Altai. En effet, son aile
supérieure est à peu près dessinée comme celle de notre forme
française; ses taches présentent ime disposition presque semblable
et notamment l'ombre apicale qui résulte de la fusion des deux
bandes transverses. Il n'y a que les ailes inférieures qui soient
disparates chez ces deux papillons, à cause de la présence ou de
l'absence des ocelles; et par ce dernier caractère, Minima
constitue un passage naturel entre les Parnassiens du groupe
d'Eversmanni et de Clarius et ceux qui gravitent autour de
Mnemosyne.
— 155 —
Parnassins Mueinosyue, Linné.
Linné. Systeraa Naturae, X, 269.
Fabricius. Entomologia Systematica, II, 269.
Esper. Die Schmetterlinge, 2, 2, 3.
Hiibner. Sammlung europiiischer Schmetterlinge, 398-
Ochsenheimer. Die Schmetterlinge von Europa, 1, 2, 139.
Godard. Histoire naturelle des Papillons de France, II, 2, 3.
Boisduval. Speciès général, I, p. 401, N"- 7.
Staudinger. Catalogue 1871, N"- 23.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 23, fig. 1, 2 (cj et Ç).
Mnemosyne est une espèce déjà fort ancienne, puisque c'est
Linné qui nous la fit connaître dans son grand traité d'Histoire
naturelle qui a pour titre: Systema Naturae. Depuis cette
époque reculée, ce papillon a été décrit et figuré par presque
tous les entomologistes qui se sont occupés de lépidoptères; et
c'est ce qui explique la longueur des citations iconographiques
qui précèdent, bien que nous n'ayons rapporté que les plus
importantes d'entre elles. C'est pour cette raison que nous
n'entrerons pas au sujet de ce Parnassien dans une description
méthodique. Nous devons cependant consigner ici quelques
considérations sur les variations qu'il est sujet à éprouver,
lesquelles, il est vrai, sont circonscrites dans des limites assez
étroites.
Dans la plupart des ces observés, les deux bandes trans verses
des ailes supérieures se fondent l'une dans l'autre pour former
une ombre apicale fort large et presque semblable à celle que
nous avons signalée chez la forme précédente. Cependant ils exis-
tent certains exemplaires dont cette partie est coupée par une
rangée de taches blanchâtres, très vagues, disposées parallèlement
au bord extérieur. Les ocelles proprement dites, sont toujours
absentes et se trouvent remplacées par une et (luelque fois par
— 156 —
deux taches noires dont l'inférieure, qui est la plus constante,
s'appuie immédiatement contre la cellule. Les costales, l'interne
et l'anale font ordinairement défaut au mâle de Mnemosyne et
ne sont bien marquées que chez la femelle. L'aile inférieure de
celle-ci montre aussi dans certains cas la trace d'une ligne anté-
marginale dentée analogue à celle qui existe chez la variété Nubilosus
représentée sous le N°- 1 de la pi. 24, mais elle est toujours
un peu douteuse.
L'abdomen de ce sexe est presque vierge de pilosité; il est
d'un noir brillant et supporte par en bas une poche blanche,
assez volumineuse, à surface régulièrement convexe, et dont
le plan de l'ouverture est dans une situation verticale par
rapport à l'axe du corps. Les points d'intersection de cette
poche et de l'abdomen sont occupés par une ligne de taches
jaunes, plus ou moins développées et plus ou moins vives selon
les sujets (voir pi. 4, 3 et 4).
Mnemosyne est répandue d'une manière générale dans les
montagnes de presque toute l'Europe, à l'exception toutefois des
régions polaires proprement dites et de l'Angleterre où aucun
Parnassien n'a encore été rencontré. Elle fréquente le centre et
le nord de la Russie (gouvernement d'Archangel), la Suède et
la Norvège où le niveau de son habitat est relativement très bas;
puis le grand massif alpin du centre du continent européen: la Suisse,
la Styrie, l'Autriche, la Bavière, la Forêt Hercynienne et le Danemark.
Au sud, on la retrouve sur les montagnes de l'Italie, aux environs
de Naples, dans la Sicile et sur celles de la Grèce. A l'est, ce
Parnassien franchit la chaîne de l'Oural pour se répandre dans
le pays des Kirghises, dans la Sibérie occidentale, sur le Caucase
d'où il se déverse sur les cimes élevées du grand massif du
Taurus. Mais il s'arrête aux frontières de la Perse et aux hauts
— 157 —
plateaux de l'Asie centrale où il est remplacé par les deux formes
spéciales dont il est question ci-après.
En France, l'habitat de Mnemosyne est plus restreint que
celui d'Apollo. Ce papillon ne se rencontre en Juin et Juillet,
suivant les altitudes, que dans les alpes de Savoie, dans les
Basses-Alpes, en Auvergne et aussi sur plusieurs points de la
chaîne des Pyrénées, notamment au pic de Gavarnie. Cette espèce
est généralement très abondante là où on la rencontre.
Farnassiiis Mnemosyne, Linné yar. Nnbilosns, Christoph.
Staudinger. In litteris.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 23, fig. 3 (J et pL 24, fig. 1 Ç.
Nous avons reçu sous ce nom, du docteur Staudinger,
plusieurs exemplaires des deux sexes d'un Parnassien très in-
téressant que ce savant nous a adressé comme variété locale de la
Mnemosyne. Dans le fait, ces papillons sont très voisins de cette
espèce, tant pour la taille que pour l'aspect général; et il pourrait
se faire que cette opinion fut bien fondée. Il serait possible ce-
pendant, selon les idées que nous professons sur la valeur si
hypothétique de la notion de l'espèce, que le papillon dont il s'agit
ici ainsi que le suivant, fussent réellement distincts de notre forme
européenne. On sait, du reste, combien les différents types de ce
genre sont voisins les uns des autres, et sur quels faibles indices
reposent souvent les différenciations spécifiques.
Quoi qu'il en soit de cette vue, les ailes du mâle de Nubi-
losus paraissent être d'abord proportionnellement plus courtes que
celles de la forme congénère; et leurs franges sont plutôt grises
que noires, bien que les nervures soient très foncées. La tache
discoïdale inférieure descend jusqu'à la nervure médiane, ce qui
— 158 —
n'est le cas d'aucune des Muemosyiie que nous avons sous les
yeux, tandis que la supérieure supporte encore une macule trans-
versale qui la fait confluer jusqu'au sablé de la côte. Les cos-
tales sont visibles sous la forme d'un petit arc, et l'extrémité
de l'aile présente un aspect particulier. Cette partie, en effet,
n'est pas occupée par une ombre apicale unique, mais bien par
une double bande transverse écrite comme celle des Parnassiens
ordinaires, c'est-à-dire une antémarginale très distincte et une
marginale qui descend moins bas que le dessin équivalent de
Mnemosyne.
L'aile inférieure de tous nos exemplaires mâles est plus
chargée que celle du même sexe de l'espèce comparative, et elle
ressemble plutôt à l'aile de la femelle de cette dernière. Il existe
d'abord une petite tache noire un peu vague vers le bord an-
térieur, puis une autre plus grande à l'extrémité de la cellule,
et enfin une troisième qui couvre l'angle anal et se relie à la
précédente par une liture d'atomes foncés. Tous ces dessins
sont encore mieux marqués chez la femelle; et la différence
sexuelle est plus prononcée dans Nubilosus que dans Mnemosyne.
Les bandes transverses des ailes supérieures sont plus larges
chez ce sexe que chez l'autre, et aboutissent toutes deux jusqu'au
bord opposé à la côte. L'interne est représentée par une tache
allongée qui conflue vers la base; enfin le limbe de l'aile pos-
térieure est occupée par une ligne dentée analogue à celle de
Wosnesenskii et de Dentata, mais moins vivement écrite.
La poche cornée (pi. 4, fig. 1 et 2), de ce papillon n'est pas
identique du reste à celle de notre Mnemosyne européenne; elle
est moins trapue, plus atténuée à sa partie antérieure et le plan
de la section de son ouverture a une direction plus oblique que
celle du type congénère.
— lâij —
Quant aux antennes et au corps, ils ne diffèrent en rien
de ceux de notre espèce.
Nubilosus est propre aux hautes montagnes de la Perse
boréale, où il remplace entièrement la forme d'Europe; cepen-
dant le docteur Staiidinger nous apprend que les Mnemosyne
du ïaurus et celles de la Grèce présentent certaines particularités
de dessins fort voisines de celles du type asiatique; et c'est sans
doute cette circonstance qui a porté ce savant à réunir cette
forme orientale à la nôtre.
Parnassîus Mnemosyne, Linné var. Oi^antea, Staudinger.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitschrift, pages 197 et 198.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 24, fig. 2, 3 (cj Ç).
Ce Parnassien est également considéré par la plupart des
entomologistes allemands comme une variété géographique de
Mnemosyne, et il faut convenir que, selon cette vue, il justifie
pleinement la dénomination qui lui a été imposée en raison de
sa grande taille. 11 est assez voisin de Nubilosus, et ressemble
aussi a certains égards à Stubbendorfii de la Sibérie orientale.
Son envergure varie de 55 à 60 millimètres, c'est-à-dire qu'elle
atteint celle des petits exemplaires d'ApoUo. Ses ailes se font
également remarquer par leur brièveté relative; mais leurs franges
et leurs nervures sont d'un noir profond. En comparant le mâle
de ce papillon avec celui de la forme précédemment décrite,
on trouve que les discoïdales des ailes supérieures sont plus larges
et plus arrondies, que les costales forment un crochet plus court
et plus épais, que l'interne qui fait défaut chez Nubilosus, est
toujours indiquée par un semis écailleux, et que l'extrémité de
l'aile est occupée par une ombre apicale fort développée que ne
— 160 —
diversifie aucune tache blanche. Les dessins des ailes postérieures
de Gigantea offrent la même disposition que ceux de Nubilosus
avec plus d'ampleur cependant. On remarque pourtant que toutes
les nervures sont ombrées de noir vers leur extrémité, et que
le bord externe lui-même de l'aile est largement mais assez
vaguement rembruni par une poussière écailleuse de cette cou-
leur. Cette double circonstance contribue à donner au Parnassien
dont il s'agit un aspect particulier qui le différencie à première
vue des deux types précédents.
La femelle se distingue du mâle d'abord par l'apparence
plus diaphane de ses ailes, puis par l'élargissement de toutes
les taches en général et surtout de celles qui occupent l'angle
anal et la place de l'ocelle inférieure, lesquelles par leur fusion
constituent une véritable bande sinueuse et grossement dentée
sur ses bords. L'ombre apicale descend en outre aussi plus bas,
c'est-à-dire jusqu'à l'angle externe.
Le type que nous venons de décrire est répandu, depuis
la fin de Mai jusqu'en Juillet, sur presque toutes les alpes du
Turkestan. Il a été rencontré par Mr. Haberhauer à des alti-
tudes diverses dans les montagnes d'Ochs, d'Usgent et dans celles
de Namangan. 11 habite aussi les alpes de Samarkand, mais
il présente dans cette dernière station quelques modifications
particulières, tout en conservant cependant ses caractères essen-
tiels, c'est-à-dire sa grande taille et l'obscurcissement des ner-
vures et du bord marginal de ses ailes postérieures. Deux
exemplaires en effet de cette origine que nous avons sous les
yeux, laissent apercevoir dans l'ombre apicale une rangée de taches
blanchâtres analogues à celles qui sont si constantes chez Nubilosus ;
et ces deux sujets appartiennent probablement à une race secondaire
qui relie dans ces lieux la forme du Turkestan à celle de la Perse boréale.
— 161 —
Nous ne connaissons pas la configuration de la poche cornée
de la femelle de Gigantea, l'unique exemplaire de ce sexe que
nous possédons étant vierge. Il eut été intéressant pourtant de
comparer les caractères de cet appareil avec ceux des organes
similaires de Mnemosyne et de Nubilosus; car ce parallèle
pourrait fournir, selon nous, des indications utiles pour trancher
la question de parenté qui semble exister entre le type Mnemosyne
et sa prétendue variété.
Faroassius Stiibbeudorfli, Ménétriès.
Mené tri es. Description des Insectes recueillis par fen Lehraann (Mémoires
de l'Académie de St. Pétersbourg, page 57, pi. 6, fig. 2 [année 1848J.)
Herrich-Schaeffer. Systematische Bearbeitung etc., 640.
Staudinger. Catalogue 1871, N»- 26.
Ménétriès. Mnemosyne var. Immaculata. Bulletin de la classe des
sciences physiques de l'Académie, V, N°- 17.
Austaut. Les Parnassiens, pi. 22, fig. 3 S-
Cette espèce avait été rapportée dans le principe par Ménétriès
à notre Mnemosyne; puis elle a été décrite et figurée comme forme
indépendante dans les relations que cet auteur publia en 1848
sur les insectes recueillis en Sibérie par Mr. Lehmann.
Ce Papillon est effectivement voisin de son congénère d'Eu-
rope, et on pourrait le caractériser sommairement en disant qu'il a
l'aspect d'une grande Mnemosyne dont les dessins seraient à peu
près complètement effacés et les nervures plus fortement noir-
cies, il se rapproche aussi des deux types précédents, et surtout
de Gigantea, par le sablé noirâtre qui estompe le limbe des ailes
postérieures. Stubbendorfii comparé à Mnemosyne, est un peu
plus grand que cette dernière; ses ailes ont la même coupe, et
les franges qui les entourent sont également noires, mais d'une
11
— 162 —
tonalité plus intense. Les deux discoïdales sont vaguement indi-
quées par un semis écailleux grisâtre; la supérieure qui est
la plus développée, ferme étroitement la cellule, mais la seconde
ne consiste qu'en quelques granulations obscures qui n'atteignent
pas la nervure médiane. Les costales sont absentes; par contre
il existe chez cette espèce une antémarginale, peu définie il est
vrai, qui s'arrête vers le milieu de l'aile. Quant à la marginale,
elle est étroite et ne descend pas jusqu'à l'angle externe. Tous
ces dessins sont diffus, d'une teinte effacée et uniforme qui rappelle
un peu le faciès que nous avons signalé chez Felderi.
L'aile inférieure de Stubbendorfii n'est marquée d'aucune
tache, si ce n'est du lavis abdominal qui est plus vif que celui
de Mnemosyne. Leurs nervures sont assez largement ombrées
vers l'extrémité du limbe par une poussière écailleuse foncée
qui obscurcit aussi le limbe lui-même. Cette particularité s'observe
également, ainsi qu'on la vu plus haut, chez Gigantea, mais à
un degré plus prononcé. Ajoutons que le dessous de cette es-
pèce est semblable ou dessus, à part le lavis abdominal qui se
trouve recouvert de ce côté d'un fin duvet jaunâtre, et que les
caractères qui intéressent le corps et les antennes, sont presque
identiques à ceux des types limitrophes.
Il résulte de cette description que ce Parnassien, dont nous
ne connaissons que le sexe mâle, offre de grands rapports avec
les formes qui précèdent. Par la dilatation apparente de l'ex-
trémité de ses nervures et le sablé qui règne le long du limbe
de ses ailes postérieures, il se rapproche de la Gigantea du
Turkestan. La série de taches blanches qui existe entre les
deux bandes transverses de ses ailes supérieures, lui donne
au contraire une certaine ressemblance avec le Nubilosus de
la Perse; tandis que par l'oblitération des taches ordinaires et
— 163 —
par la texture plus ■ hyaline des ailes, ce papillon s'éloigne
franchement de l'une et l'autre de ces deux formes. En résumé,
Stubbendorfii est un type diamétralement opposé à ceux de l'Asie
centrale et c'est notre Mnemosyne européenne qui paraît relier
entre elles ces formes extrêmes.
C'est le voyageur russe Lehmann qui découvrit ce Parnassien
à Kansk, (Sibérie centrale), qui est aussi la patrie d'Eversmanni.
Plus tard, Mr. Kadde le retrouva sur différents points des alpes
de la Daourie. Ce papillon a été recueilli également dans l'île
Askold qui est située sur les côtes de la Mantchourie; mais
il est surtout très fréquent pendant les mois de Mai et de Juin
dans presque toutes les montagnes de l'Amurland. C'est par
conséquent une des espèces les plus caractéristiques de la Faune
de la Sibérie centrale-orientale.
Fin.
Jules Léon Austaut.
11'
Supplément.
Avant -propos.
La plus grande partie de ce livre se trouvait déjà rédigée,
lorsque nous avons obtenu de différentes sources des documents
nouveaux, assez nombreux et variés, concernant l'histoire des
Parnassiens et dont nous ne pouvions nous dispenser de tenir
un compte exact, sous peine de nous exposer au grave incon-
vénient de présenter aux Lépidoptéristes une Monographie in-
complète et par conséquent défectueuse.
Parmi ces matériaux d'étude, nous devons citer d'abord
plusieurs femelles d'espèces déjà décrites dans le corps de cet
ouvrage sous le sexe mâle, et dont nous devons la connaissance
ù l'intervention si obligeante de Mr. Heyne; puis quelques types
nouveaux, tels que la variété Alpina d'Apollonius, le Parnassius
Sirao de Gray, espèce déjà fort ancienne, laquelle connue jusqu'à
présent pour habiter les cimes élevées de l'Himalaya, et considérée
par conséquent comme d'origine exotique, a été retrouvée tout
récemment sous une forme spéciale dans l'Asie centrale, à l'in-
térieur des limites de la Faune Paléarctique.
Enfin Mr. Edouard G.Honrath, le savantLépidoptériste de Berlin,
qui possède une si grande compétence en matière de Parnassius,
ayant appris tardivement (|ue nous préparions la publication de
cette étude, a bien voulu ouvrir en notre faveur les trésors de
sa riche collection, avec un empressement dont nous lui témoignons-
— 168 —
ici notre sincère reconnaissance. Il a mis à notre disposition un
certain nombre de types absolument remarquables parmi lesquels
il en est plusieurs dont il est l'auteur; et c'est ainsi que le cadre
de cet ouvrage s'est élargi dans des proportions aussi importantes
qu'imprévues.
Nous avons réuni par conséquent tous ces documents nou-
veaux en un corps spécial qui ne pouvait être présenté que sous
la forme d'un supplément; et nous l'avons appuyé de huit planches
complémentaires, exécutées avec le plus grand soin, lesquelles
viendront éclairer, ainsi que cela est si désirable en entomologie,
le développement de la partie descriptive.
Faruassius Wosnesenskii, Ménétriès.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément pi. I, fig. 3 et 4.).
Nous croyons devoir profiter de l'occasion de ce supplément
pour revenir sur le compte de cette espèce. Elle est en effet
si intéressante, soit par sa rareté extrême, soit par le doute qui
subsiste encore sur sa parenté avec le véritable Eversmanni, que
les considérations nouvelles que nous allons exposer ne seront pas
superflues. Nous avons obtenu tout récemment de Mr. Erust
Heyne, l'obligeant naturaliste que tous les lépidoptéristes con-
naissent, un deuxième exemplaire de ce Parnassien, également
du sexe femelle comme celui que nous avons déjà figuré, mais
qui offre l'avantage sur ce dernier d'être muni de sa poche cornée.
Cette circonstance nous permet d'abord de reproduire par le dessin
l'aspect de cet appareil, puis de confirmer l'opinion que nous avons
émise plus haut: à savoir que le Wosnesenskii et l'Eversmanni
de Ménétriès ne sont pas absolument les mêmes papillons. En
effet, en comparant les figures des poches de ces espèces, celle
que nous avons déjà donnée et celle que nous publions maintenant,
on trouve que l'organe de notre Wosnesenskii est beaucoup plus
court que celui de l'espèce congénère. Vue de profil, la caverne
dont il s'agit ici est plus large que longue, peu ou point sinuée
à sa partie antérieure; tandis que celle d'Eversmanni est très al-
longée et son contour externe fortement creusé vers le premier tiers
de son étendue. Comme forme générale, cette poche ressemble
— 170 —
à certains égards à celle de notre Mnemosyne. A cause de sa
brièveté, elle offre aussi quelque rapport avec celle de la variété
Minima de Nordmanni ; mais elle diffère cependant de toutes deux
parce qu'elle est plus comprimée latéralement, et que l'extrémité
inférieure de son ouverture est plus saillante. Le spécimen typique
de notre figure (pi. I, fig. 3 et 4) est d'un blanc roussâtre sale
comme le dit Ménétriès à propos de l'organe de son Wosnesenskii,
ou plutôt d'une teinte cornée tirant sur le jaune. En examinant
attentivement la convexité de sa surface inférieure, on y découvre
la trace d'un sillon médian longitudinal, ainsi que l'indique l'au-
teur précité; mais il ne semble pas exister de sillons latéraux;
et nous ne pouvons pas juger non plus si la poche d'Eversmanni
que nous ne connaissons que par le dessin qui nous a été com-
muniqué et que nous avons fidèlement reproduit, manifeste aussi
ce caractère.
L'exemplaire de Wosnesenskii que nous avons figuré dans
le cours de ce livre, est originaire, ainsi que nous l'avons indiqué,
du district d'Ochotsk, voisin du Kamtchatka. Celui dont il s'agit
aujourd'hui, a pour patrie la portion de la chaîne des monts
Stanovoï qui s'étend au nord-est de l'Amurland. Mais malgré
la différence qui existe dans la latitude de l'habitat de ces pa-
pillons, leur aspect est le même. La teinte d'un blanc sale
à peine jaunâtre, la disposition et l'accentuation des dessins sont
identiques de part et d'autre. Cependant les ocelles du spécimen
de la Daourie sont moins développées que celles du type d'Ochotsk
et leur couleur, de même que celle des taches basilaires du dessous,
est un peu plus rosée.
Cette femelle provient d'un entomologiste allemand, grand
amateur de Parnassiens, Mr. Graeser, de Hambourg, qui n'a pu
réunir, dans le cours d'une lointaine exploration entreprise dans
— 171 —
les régions inhospitalières qui sont disposées au nord de la pro-
vince de l'Amour, qu'une dizaine d'exemplaires de cette rare espèce.
Cet amateur en possède aussi le sexe mâle ; et Mr. Ernst Heyne
qui l'a vu dans sa collection, nous à assuré qu'il est à peine
plus jaunâtre que la femelle, et dans tous les cas, beaucoup
moins que ne le comporte la figure pourtant très exacte que
Ménétriès nous a donnée de son Eversmanni dans son ouvrage
Enuraeratio corporum animalium Musei Petropolitani,
pi. 1, fig. 2. Cette circonstance achève, nous semble-t-il, de
prouver que les Parnassius Eversmanni et Wosnesenskii sont des
types bien séparés, si non des espèces tout-à-fait distinctes. Le
premier représente une race d'un jaune bien prononcé qui est
propre aux régions centrales et peut-être septentrionales de la
Sibérie; le second est à nos yeux une modification géographique
plus blanche, plus terne de la précédente, mais remarquable par
l'accentuation de la ligne dentée qui règne tout le long du bord
marginal des secondes ailes. C'est, en un mot, une forme
orientale qui s'étend au Kamtchatka, et peut-être de là jusqu'aux
steppes glacés de l'Amérique russe.
Ajoutons pour finir, que ce Wosnesenskii est très certaine-
ment un des Parnassiens les plus fragiles et les plus délicats.
Ses ailes, fort minces, sont si peu chargées d'écaillés, quoique
fraîches, qu'elles sont luisantes et permettent de lire par trans-
parence l'inscription de l'étiquette fixée à la tige de Tépingle.
Le dessous est absolument dénudé et possède un reflet vitré plus
intense que celui de n'importe quelle autre espèce. 11 semble
que le climat boréal et rigoureux qu'habite ce curieux papillon, soit
un obstacle au développement normal des écailles ou plumules
qui oft'rent naturellement chez les Parnassiens une tendance évi-
dente à disparaître.
— 172 —
Farnassîns Graeseri, Honratli.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément pi. I, fig. 1 et 2; et pi. II, fig. 1).
Cette intéressante espèce a été dédiée par Mr. Ed. G. Honrath,
•de Berlin, à Mr. Graeser, le zélé Lépidoptériste dont nous venons
de parler, lequel l'avait obtenue en assez grand nombre des
régions septentrionales de l'Amurland. Jusqu'à présent, nous ne
■connaissons que le sexe mâle de ce Parnassien. Sa femelle est
réputée fort rare; et comme nous avons pu obtenir de Mr. Ernst
Heyne un très bel exemplaire de ce sexe, nous nous empressons
de lui accorder la place qu'il mérite d'occuper dans cette étude.
Graeseri est bien certainement de tous les Parnassiens celui
•qui manifeste la plus grande somme de différences sexuelles;
et si l'on n'était guidé dans la comparaison par certains indices
caractéristiques, il serait bien difficile d'assimiler avec certitude
l'une des formes sexuelles à l'autre. C'est ainsi que les nervures
et les franges de la femelle dont il s'agit sont bien écrites en
noir; que la base de l'aile inférieure porte une tache rouge
en dessus, et que les quatre macules basilaires du revers sont
vives, fort nettes et très finement bordées de noir; mais par
ailleurs, l'aspect est absolument dissemblable. Le fond des
quatre ailes qui est d'un blanc si pur chez le mâle, est ici
d'une teinte grisâtre assez terne, étant aspergé largement d'écaillés
noirâtres. Les discoïdales, l'interne et les costales apparaissent
fort élargies. Ces dernières en outre sont bien lavées de rouge
pâle ; les unes et les autres (les costales et l'interne), sont réunies
par un semis noirâtre épais qui forme une véritable bande mé-
diane qui se projette un peu de chaque côté par diffusion
le long des nervures. Les ocelles des ailes postérieures sont
— 173 —
bien élargies, d'un ronge vif, finement cerclées de noir et sans
pupilles blanches, ni en dessus ni en dessous. La basilaire est
supportée en outre, du moins chez l'exemplaire que nous avons
sous les yeux, par une autre tache d'un rouge sombre et noirâtre
qui occupe toute la largeur de la cellule discoïdale. Mais ce-
qui éloigne surtout cette femelle de l'autre sexe, c'est l'ampleur
d'une large bande marginale qui termine les quatre ailes, et
la grande netteté des antémarginales qui sont épaisses, bien
continues et à peine un peu dentées du côté extérieur. On sait^
que ces deux derniers dessins manquent à peu près complètement
chez le mâle de Graeseri, ou sont pour le moins tout autre-
ment disposés. La marginale n'existe en effet chez ce sexe qu'à
l'état de vestige au sommet des ailes supérieures ; l'antémarginale
est flexueuse sur ces mêmes organes; et aux ailes postérieures,
où la marginale est tout-à fait nulle, elle n'apparait que sous
la forme de quelques grosses taches solitaires dessinées en fer
de lance et d'un gris fort pâle. Le dessous du papillon que
nous décrivons, est semblable au dessus, si ce n'est cependant
que les deux taches anales, uniformément noires de l'autre côté^
sont ici largement pupillées de rouge.
Le spécimen de notre figure, (pi. I, fig. 1 et 2), possède un
appareil sexuel bien conservé qui diffère du tout au tout de celui
du Parnassius Bremeri que nous avons déjà représenté, et auquel
le docteur Staudinger rapporte le Graeseri à titre de simple
variété. Cette poche, d'un brun de bistre un peu violacé, est
petite, très courte, assez fortement comprimée dans la partie
moyenne de son ouverture. La carène qui n'affleure pas au
niveau inférieur de la caverne, est à peine saillante; et la lan-
guette, très recourbée vers l'oviducte, est mince, étroite et
denticulée à son extrémité. On sait (jue la poche du liremeri
— 174 —
typique est beaucoup plus spacieuse, plus allongée, à carène
très saillante, à languette droite et bien allongée; enfin que
l'ensemble de cet appareil se rapproche beaucoup plus de celui
d'Apollo ou de Delius que de celui de toute autre espèce.
Comme nous attachons une grande importance à la valeur des
caractères que présente l'organe sexuel des Parrfassiens, au point de
vue de la différenciation spécifique, nous pensons que Graeseri est
une espèce à part et très distincte, aussi bien de Bremeri avec
lequel elle a pourtant de grands rapports, que de toutes les
autres formes congénères du groupe des Carinati.
Farnassius Insignis, Staudinger.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. II, fig. 2 Ç).
Ce Parnassien est, comme on le sait, le très proche parent
du Discobolus du Tian-Chan, dont il possède l'aspect rembruni.
Cependant les arceaux qui constituent la bande antémarginale
des ailes supérieures sont plus continus et plus profondément
dentés que ceux de la forme voisine; et, quant aux ailes pos-
térieures, cette même bande qui est d'abord assez bien liée vers
la côté, se prolonge ensuite en une série de grosses taches
triangulaires bien détachées les unes des autres.
La femelle que nous figurons dans ce supplément, est fort
semblable à l'autre sexe; elle s'en éloigne toutefois par un ton
encore plus obscur, par l'accentuation plus vive de tous les dessins,
et surtout par l'aspect du bord externe des secondes ailes qui est
plus largement recouvert d'écaillés noirâtres que celui du mâle.
Il existe ici une véritable bande marginale analogue à celle que
l'on observe chez la femelle de Discobolus. On retrouve aux
— 175 —
ailes supérieures, entre la tache interne et la base, la macule
noire que nous a déjà offerte le mâle et qui semble être un
des caractères de cette espèce, car ce détail fait entièrement défaut
chez tous les Discobolus que nous avons sous les yeux. Enfin,
la femelle d'Insignis se fait remarquer encore par la pupille rouge
qui occupe le centre de sa tache anale laquelle est toujours d'un
noir uniforme chez l'autre sexe.
L'exemplaire qui a servi de type à notre figure est vierge
et par conséquent dépourvu de sa poche cornée. Il eut été
intéressant de comparer la forme de cet organe avec celle de
l'appareil similaire de Discobolus; car nous pensons que ce
parallèle aurait contribué à trancher définitivement la question
de savoir, si Insignis doit être ou non spécifiquement distingué
de son congénère du Tian-Chan.
Parnassins Teuedius, Eyersiuaun.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. I, fig. 5 et 6, et pi. II, fig. 3 Ç).
De tout temps, Tenedius a été considéré comme une grande
rareté; et ce n'est guère que depuis quelques années que cette petite
espèce s'est répandue dans les collections, à la suite d'explorations qui
ont été dirigées en Daourie d'où elle a été rapportée à différentes re-
prises. La femelle cependant est toujours restée fort rare; et cette
circonstance tient sans doute à ce fait qui se remarque du reste
chez d'autres lépidoptères, que ce sexe est beaucoup moins ré-
pandu que l'autre dans l'état de nature.
Quoi qu'il en soit, nous nous empressons de figurer cette
femelle que peu d'entomologistes connaissent, parce qu'elle est
très sensiblement différente du mâle, et qu'elle nous permettra
— 176 —
de décrire avec plus d'exactitude la structure si curieuse de son
appareil sexuel.
Ses ailes en général sont moins blanches, c'est à dire plus
obscurcies que celles du mâle, et notamment les supérieures dont
le disque est un peu sablé; elles sont en outre moins bien
chargées d'écaillés, ce qui leur communique un aspect légèrement
hyalin. Si l'on compare ensuite de part et d'autre les dessins
de la face supérieure, on remarque que la bande marginale des
premières ailes de cette femelle est large, fortement ombrée et
bien continue depuis le sommet jusqu'à l'angle opposé; que
l'antémarginale, formée d'une suite de gros points cunéiformes
comme dans l'autre sexe, repose ici sur une bande grisâtre un
peu vague, il est vrai, mais cependant bien indiquée; enfin,
qu'il existe une grosse tache interne noire, disposée en croissant,
au dessus de laquelle se trouve une deuxième tache d'un noir
moins vif qui se relie, chez certains sujets naturellement plus
obscurs, aux costales par un semis bien prononcé. Ces costales,
du reste, sont ordinairement marquées de deux petites macules
jaunâtres qui occupent la place ordinaire.
Les taches triangulaires qui composent l'antémarginale des
ailes postérieures, sont plus élargies chez la femelle que chez
le mâle de Tenedius; elles sont suivies en outre, tout contre
le limbe, d'une ligne grise, étroite, un peu interrompue à l'inter-
section des nervures dont il n'existe pas le moindre vestige chez
l'autre sexe; enfin, les ocelles d'un jaune rougeâtre pâle sont
plus développées; et il existe, sous la plus inférieure des deux,
trois taches supplémentaires analogues aux ocelles elles-mêmes
et qui sont allignées dans la direction de l'angle anal.
Le dessous des ailes antérieures de cette femelle est plus
terne et beaucoup plus luisant que la face opposée; celui des
— 177 —
ailes postérieures est d'un blanc moins grisâtre; mais les nervures
s'y trouvent plus fortement ombrées de gris jaunâtre que celles
de l'aile équivalente de l'autre sexe. Les ocelles et les taches
ont le même aspect qu'en dessus. Cependant les basilaires,
presque blanches chez le mâle, sont, dans le cas dont il s'agit,
plus franchement lavées de jaune pâle.
Nous avons déjà figuré l'organe sexuel si curieux de Tenedius
dans le cours de cet ouvrage. Nous croyons néanmoins devoir
en donner ici une nouvelle reproduction, parce que notre figure
primitive a été faite d'après un simple dessin qui nous avait été
obligeamment communiqué, mais qui était peu exact et surtout
mal colorié. Nous profitons par conséquent de l'occasion qui
s'offre ici pour réparer cette inexactitude.
La poche de ce Parnassien, vue à la loupe de profil et
de face, consiste, ainsi que le représentent les fig. 5 et 6 de
notre planche I, en une pièce principale qui affecte la forme
d'une lame cornée, mince, dressée presque perpendiculairement
à l'axe du corps, très concave en dessous, fort convexe en dessus,
dont les bords latéraux constituent une sorte d'arrêté épaissie et
obtuse, mais dont le bord inférieur est réfléchi en un limbe
horizontal à contour un peu denticulé. Cette lame qui est
soudée contre les derniers segments abdominaux, donne naissance
à son point d'insertion à un second limbe étendu horizontalement
tout autour de la partie anale et un peu évidé en son milieu;
enfin une troisième pièce surgit entre les deux précédentes et se
dirige d'arrière en avant sous la forme d'une languette étroite
et légèrement infléchie à son extrémité libre. Ces diff'érentes
parties sont d'un blanc assez pur, et non d'un brun foncé comme
le comporte notre première figure, à l'exception des arrêtes laté-
rales de la lame principale quï sont franchement jaunâtres.
12
— 178 —
Cet appareil diffère par conséquent beaucoup de celui des autres
Parnassiens, en ce sens qu'au lieu de figurer une caverne creuse
et plus ou moins formée comme celle des Carinati, des Ventricosi
et même des Cornuti, elle présente au contraire une pièce princi-
pale à surface convexe, n'ayant aucun rapport avec le réceptacle
des espèces congénère?.
Parnassins Apollonins, Eversiiiann var. Âlpina, Staiidinger.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitschrift, page 49 (année 1887).
Austaiit, Les Parnassiens (Supplément, pi. III, fig. 1 S)-
Ce beau Parnassien affecte deux formes bien distinctes.
L'une, la typique, est caractérisée par la teinte pâle de ses
ocelles, par la finesse relative des taches noires submarginales
et par le faible développement du lavis basilaire des ailes pos-
térieures. C'est le type qu'Eversmann a publié dans le bulletin
de la Société impériale des Naturalistes de Moscou en 1847, et
qu'il localise dans la Songarie. C'est lui également que Mr.
Alpheraky a retrouvé plus tard dans les montagnes du Tian-Chan,
aux environs de Kouldja, à une altitude relativement très faible.
Nous-même, nous l'avons reproduit sur les planches précédentes
de ce livre, d'après des exemplaires qui proviennent de cette
dernière origine. Mais ce papillon, ainsi que nous l'avons déjà
dit, se répand aussi plus au sud dans le Turkestan proprement
dit où les chasseurs du docteur Staudinger l'ont capturé sur
les alpes de Marghélan, (province de Ferganah), à une altitude
beaucoup plus grande que celle que cette espèce paraît fréquenter
en Songarie, et qui n'est pas inférieure à 2000 ou 2500 mètres.
Une telle différence d'habitat influe d'une manière sensible sur
— 179 —
l'aspect de l'insecte dont il s'agit, si toutefois il nous est permis
d'en juger avec assez d'exactitude d'après un seul exemplaire
de cette dernière provenance que Mr. Staudinger nous a envoyé
récemment sous le nom de variété Alpina. En effet, en comparant
ce sujet, qui est un mâle, à ceux du Tian-Chan, on relève chez
lui les dissemblances suivantes: Ses ailes supérieures paraissent
d'al)ord être plus pointues à l'apex, puis la teinte blanche générale
est plus Aive et plus pure. Les huit taches noires qui composent
l'antémarginale des dites ailes sont plus grosses; et les trois
premières, à partir de la côte, sont fondues ou réunies en une
sorte de bande assez large et régulière. Ces taches, au contraire,
sont toujours petites et bien séparées chez l'Apollonius typique.
Les costales, très noires et intimement unies par une macule
intermédiaire, sont faiblement pupillées de carmin, de même que
celle qui occupe le voisinage du bord interne. Enfin la base
de l'aile de notre Parnassien, et surtout la côte, sont largement
sablées d'écaillés obscures. Cette accumulation détermine même
une espèce de trait noir qui encadre la côte depuis la costale
supérieure jusqu'au sommet. Il convient de remarquer encore
que la bande marginale, déjà si réduite à l'ordinaire, est ici
à peine indiquée à l'apex par un léger obscurcissement, et que
le disque sous la nervure médiane est parsemé d'écaillés grises,
mais peu serrées.
Aux secondes ailes les taches antémarginales offrent, comme
les précédentes, une plus grande extension. Mais la basilaire et
les ocelles d'un carmin très vif, et ces dernières sans pupilles
blanches, sont par opposition plus réduites que celles du type.
Le lavis abdominal, d'un noir très foncé, est au contraire beau-
coup plus prolongé; il aboutit jusqu'à la tache anale dont le
centre est obscurément marqué de rouge. Ce lavis manifeste
12*
— 180 —
une tendance à former im crochet sous la cellule discoïdale, et
peut-être existe-t-il chez certains sujets plus chargés que celui
(|ue nous avons sous les yeux. Enfin, la première branche de
la nervure sous-costale est assez fortement ombrée de noir dans
la dernière moitié de son parcours.
La face inférieure d'Alpina reproduit ces diverses particularités.
Toutes les taches rouges ordinaires y sont fort vives, notamment
celles de la base qui se trouvent circonscrites en dehors par des
traits noirs très épais. Les deux premières de ces taches sont
bien saturées, la troisième est uniformément noirâtre, la quatrième
n'est rouge que vers son extrémité inférieure; elle est suivie,
après le gros trait qui la limite, d'un espace d'un gris fuligineux
qui s'arrête à la grosse macule anale. Enfin, on n'aperçoit chez
Alpina aucune des deux taches noires un peu vagues qui
existent chez Apollonius, d'une part à l'extrémité de la cellule
discoïdale, et de l'autre entre l'ocelle supérieure et la base de l'aile.
Le corps de même que les pattes de cette nouvelle forme,
sont plus obscurs que ceux du type, et l'abdomen n'est pas
recouvert latéralement de cette poussière squammeuse jaunâtre
qu'on observe d'ordinaire chez celui-ci.
En somme, toutes ces différences communiquent à ce joli
Parnassien un aspect bien particulier; et c'est avec un grand
à propos que le savant Lépidoptériste de Dresde l'a désigné
sous un nom spécial. Nous n'en connaissons pas encore la fe-
melle; mais il paraîtrait, d'après ce que nous a appris Mr. Heyne,
que quoique plus blanche que celle de l'Apollonius ordinaire, elle en
est cependant moins bien distincte que le sexe mâle qui semble-
rait dès lors être plus sensible aux influences locales qui dé-
terminent ce genre de variations.
— 181 —
Paruassius Honrathi, Staudin^cr.
A us tau t. Les Parnassiens (Supplément, pi. III, fig. 2).
Bien que nous ayons déjà décrit et figuré les deux formes
sexuelles typiques de ce remarquable papillon, nous croyons devoir
lui accorder une nouvelle place dans ce supplément, afin d'en
faire connaître à nos lecteurs une variété qui diffère d'une manière
assez notable du type que nous avons reproduit. Cette modification
nous est fournie par un exemplaire du sexe mâle qui est originaire
de l'Asie centrale (montagnes du sud de la province de Samarkand),
comme les spécimens qui ont servi d'objectif à nos précédentes
figures, mais (jui s'éloigne de ces derniers par une teinte plus
claire, c'est-à-dire par la légèreté du semis écailleux qui rem-
brunit ordinairement le disque des quatre ailes dans le voisinage
des bandes transverses, et aussi par ses franges qui sont très
nettement entrecoupées de blanc partout, tandis qu'elles se mon-
trent d'un brun noirâtre uniforme chez l'espèce normale.
Puis, la comparaison fait encore ressortir que les quatre
marginales offrent une largeur bien moindre, notamment aux
ailes postérieures où elles aboutissent à peine à l'angle anal.
L'antémarginale supérieure est à peu près aussi continue
(jue celle de la forme connue; mais elle est moins droite, en ce
sens (|u'elle présente entre la 1""'' et la 2« branche de la nervure
médiane un retrait analogue à celui qu'on observe chez d'autres
espèces telles que Nomion, Fisch., par exemple. L'antémarginale
inférieure est moins bien continue; les arceaux qui la composent
sont détachés les uns des autres, et affectent plutôt l'aspect de
taches analogues à celles que montrent certains exemplaires de
Discobolus, ou mieux encore le Rhodius du Turkestan. Cependant
malgré toutes ces différences, cette variété appartient bien réelle-
— 182 —
ment à Honrathi, car elle possède de cette dernière espèce la
teinte blanche, l'aspect des ocelles qui sont très largement
pupillées de blanc, la tache basilaire rouge du dessus des se-
condes ailes et surtout, détail tout-à-fait caractéristique, la cou-
leur noire des antennes, des pattes, et de la face inférieure
du corps tout entier.
Il résulte de ce cette comparaison que Honrathi est sujet
à varier, et que ce Parnassien présente, soit accidentellement,
soit d'une manière constante, une forme un peu plus albine que
celle qui lui est ordinaire.
Farnassins Stubl)endorfli, Ménétriès.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. I, fig. 7 et 8 et pi. IV, fig. 3 Ç).
Nous donnons ici la figure et la description de la femelle
de Stubbendorfii que le défaut d'éléments nous a empêché de
produire à leur place naturelle. Ce sexe diffère surtout de l'autre
par un aspect plus grêle et plus délicat qui provient de ce que
les ailes, très peu chargées d'écaillés, même en dessus, sont
presque transparentes. Leurs teinte dominante est d'un blanc
jaunâtre nébuleux sur lequel les nervures se détachent fine-
ment en noir. Les taches discoïdales sont peu apparentes et
très réduites; mais par contre, l'antémarginale, quoique indécise,
descend depuis la côte jusque tout près du bord interne. On sait
que cette bande s'arrête déjà chez le mâle au niveau de la deu-
xième branche de la nervure médiane. La marginale n'apparaît
que comme une ombre fort vague qui obscurcit légèrement le
sommet. Les ailes postérieures ne comportent d'autres dessins
que le lavis noir de la base qui est plus réduit que celui
du mâle. Il s'étend le long du bord abdominal jusqu'aux
— 183 -
approches de l'angle anal qu'il u'atteint pas cependant, et borde
ensuite de part et d'autre la souche de la nervure médiane.
L'intervalle laissé libre par ces deux sortes de branches, est
rempli par la couleur du fond. 11 est à remarquer aussi que
les ombres noirâtres qui estompent si distinctement l'extrémité
de toutes les nervures de l'autre sexe, font ici complètement défaut;
de sorte que des deux formes sexuelles de cette espèce, celle que
nous décrivons est la moins chargée, contrairement à ce qui existe
chez Mnemosyne et ses variétés asiatiques Nubilosus et Gigantea.
Quand au corps, il est d'un noir luisant, presque entièrement
dégarni en dessus. La tête est entourée d'un large collier
de poils roux et un duvet jaunâtre garnit le dessous ainsi que
les côtés de la poitrine.
La poche cornée de Stubbendorfii que nous avons représentée
pi. I, fig. 7 et 8 consiste, comme celles de toutes les espèces
du groupe des Ventricosi, en une caverne spacieuse, sans carène
ni appendices, assez longue et atténuée en avant. Sous le rapport
de la forme, cette caverne ressemble plutôt à celle de Nubilosus,
bien qu'elle soit moins évidée en dessous que celle-ci, qu'à celle
de notre Mnemosyne qui est plus courte et plus large; mais elle
diffère de toutes deux parce qu'elle est plus comprimée sur les
côtes et qu'elle est bicolore. En effet, le premier tiers environ
de sa surface est d'un blanc presque pur, tandis que le reste
de son étendue est largement lavé de brun clair testacé jusqu'à
l'ouverture dont la partie inférieure fait une saillie très avancée.
Les caractères si tranchés que présente cette poche, ne permet-
tent pas d'assimiler Stubbendorfii à aucune autre forme de sa
congénère Mnemosyne.
- 184 —
Parnassius Simo, Gray var. Simonius, Staudiugor.
Staudinger. Stettiner Entomologische Zeitschrift (année 1889).
A us tau t. Les Parnassiens (Supplément, pl.I, fig.9etl0, etpl.FV.fig. let2cî$)•
Gray a figuré et décrit en 1852 dans son Catalogue
of Lepidopterous Insects, pi. 12, fig. 3 et 4, sous le nom
de Simo une forme nouvelle de Parnassius qui avait été découverte
depuis peu de temps aux environs de Ladack, dans cette partie
de la grande chaîne de l'Himalaya qui sépare l'Indoustan du
Thibet. Depuis cette époque déjà reculée, cette espèce était
toujours demeurée fort rare et pour ainsi dire introuvable.
On ne la connaissait guère que par la publication de l'auteur
anglais; et aujourd'hui même la plupart des entomologistes ne
possèdent à son sujet d'autre source d'information que celle-là.
Nous n'avons jamais vu le Parnassius Simo qui est du reste
exotique, mais nous venons de recevoir de Mr. Staudinger une
remarquable petite espèce qui a été découverte l'année dernière
sur les cimes neigeuses les plus élevées de la chaîne des monts
Belour, dans le Turkestan, sous une latitude plus septentrionale
que celle de Ladack, et comprise par conséquent dans les limites
du Territoire Paléarctique. Il paraît que cette nouveauté est
fort voisine de l'espèce de Gray, puisque le savant qui nous l'a
adressée, en a fait, sous le nom de Simonius, une simple variété
dans la revue entomologique transcrite en tête de cet article.
Quelle que soit l'opinion que l'on puisse se former à cet égard,
nous nous empressons d'accorder à cet hôte nouveau de notre
faune, la place distinguée qui lui convient dans notre monographie.
Ce Simonius dont nous avons sous les yeux un (^ et une 9
bien conservés, attire l'attention par sa petitesse et par un faciès
particulier qui lui assignent une place à part dans la série des
— 185 —
Parnassiens. L'envergure du mâle atteint à peine celle des exem-
plaires les plus réduits de la variété Minima de Nordmanni qui
était jusqu'à présent la forme la plus exiguë parmi toutes celles
qui sont actuellement connues. Ses ailes, relativement peu
chargées d'écaillés et un peu luisantes sur le dis(jue en dessus,
sont d'un blanc grisâtre terne qui laisse ressortir toutes les ner-
vures en brun foncé. Aux supérieures dont l'apex est sensible-
ment aigu, on distingue deux discoïdales bien marquées, assez
larges, dont l'inférieure affecte la forme d'un rectangle concave
sur ses grandes côtes, tandis que l'autre, évasée du côté de
la cellule, est arrondie à l'extrémité opposée. Ces deux taches
s'appuient contre le sablé de la côte qui est épais et bien
continu depuis la base jusqu'au sommet.
Les costales qui leur succèdent, figurent une sorte d'arc
arrondi et denticulé extérieurement; elles se relient par en bas,
à l'aide d'un léger semis écailleux, à la tache interne qui est
disposée en croissant. L'antémarginale, bien élargie à la côte,
est continue, légèrement flexueuse et finement terminée en pointe
au bord interne. Enfin toute l'extrémité de l'aile est occupée
par une marginale étroite qui s'appuie contre des franges d'un
gris blanchâtre uniforme.
Aux ailes postérieures, on distingue d'abord deux très petites
ocelles dont l'inférieure ne consiste qu'en un point noir; l'autre
est entourée d'un cercle très fin de cette couleur, mais son centre
est d'un blanc à peine jaunâtre au lieu d'être rouge comme c'est
le cas ordinaire chez les espèces de ce genre. Puis on aperçoit
le lavis abdominal qui prend naissance à la base, s'étend dans
la cellule au dessous de laquelle il fait un crochet, et couvre
ensuite tout le bord jusqu'à l'angle anal dans le voisinage duquel
existe une petite tache ronde. Quant aux deux bandes transverses,
— 186 —
elles présentent un aspect très caractéristique. L'antémarginale
consiste eu une suite de taches irrégulières, inégalement grosses,
disjointes, dont la série est surtout interrompue à la rencontre
de la deuxième branche de la nervure sous-costale, par suite
d'un retrait qu'éprouvent les deux premières macules par rapport
à l'allignement commun. La marginale ne forme pas une bande
proprement dite; elle est remplacée par une liséré étroit, noirâtre,
qui précède les franges à peu près comme chez la femelle de
Tenedius. Le dessous de Simonius reproduit les dessins du
dessus, mais avec des teintes confuses et presque effacées.
L'aile inférieure pourtant présente un aspect différent de celui
de la face opposée. Toute sa surface est d'un gris jaunâtre
fuligineux, depuis la base jusqu'à la bande antémarginale; tandis
que le bord externe où l'on n'aperçoit plus de trace de liséré,
est lavé de blanc presque pur. Cette double teinte fait un con-
traste dont nous ne connaissons aucun autre exemple chez les
Parnassiens. Sur le fond nébuleux dont il vient d'être question,
se détachent à peine les deux ocelles dont l'inférieure est visible-
ment pupillée, ainsi que trois taches basilaires d'un gris bmn
obscur, dont les deux plus basses sont un peu lavées de jaune
rougeâtre très pâle. Le corps de ce curieux papillon est entière-
ment noir, mais sa face ventrale est recouverte d'une pilosité grise
abondante. Les pattes, les palpes, le toupet frontal sont égale-
ment gris, de même que la tige des antennes que termine une
longue massue d'un noir profond. Ce n'est que par des particu-
larités légères que les deux sexes de cette espèce diffèrent l'un de
l'autre. La femelle est un peu plus grande que le mâle ; le semis obscur
qui relie les costales à la tache interne, offre plus d'épaisseur, et forme
plutôt sur cette partie de l'aile une véritable bande continue ; l'ocelle
inférieure est pupillée de blanc et suivie dans la cellule adjacente
— 187 —
d'un point noir; enfin le limbe blanc marginal du dessous offre une
plus grande largeur. Tous les autres caractères sont identiques.
On éprouve une certaine hésitation, lorsque on cherche à
assigner une place convenable à ce petit papillon dans la série
des autres espèces. Il présente au premier abord quelque ressem-
blance avec la femelle de Tenedius; mais il manifeste aussi de
l'analogie avec les types voisins de Delphius. Cependant Simonius
n'appartient ni au groupe des Limbati, ni à celui des Cincti,
à cause de la forme spéciale de sa poche cornée. En effet, cet
appareil (pi. I, fig. 9 et 10) d'une petitesse extrême, caché en outre
par la pilosité ventrale, consiste en une sorte de valve épaisse,
d'un brun noir brillant, qui surgit au dessous d'un bourrelet
plus clair que forme le segment abdominal qui lui donne naissance.
Sa surface, légèrement convexe et creusée d'un sillon médian
large et court vers son point d'insertion, est presque appliquée
contre l'abdomen. Son extrémité postérieure un peu arrondie, ménage
une ouverture étroite, déprimée, qui donne accès à une caverne
exiguë. Cette singulière structure dont nous ne possédons aucun
autre exemple, et qui semble être presque un cas de développement
incomplet, nécessite, à notre avis, la création d'un groupe nouveau
parmi les Parnassiens; nous le désignons ici sous le nom de Valvati
à cause de la forme si caractéristique de l'organe sexuel, en faisant
remarquer qu'aucune autre espèce Paléarctique ne saurait y être
comprise parmi toutes celles que nous connaissons aujourd'hui.
Mr. Staudinger, en nous adressant la curieuse nouveauté dont
il s'agit, nous a assuré qu'il n'a pu en obtenir qu'un très petit nombre
d'exemplaires, et que son habitat est des plus restreints. Simonius
unit par conséquent à un intérêt de premier ordre, le mérite de
figurer parmi les Parnassiens les plus rares du centre de l'Asie.
— 188 —
Parnassius Charltonins, Gray.
Gray. Cat. Lep. Brit. Mus., page 77, pi. XII, fig. 7 S (année 1852).
Moore. Yarkand-Mission Lepidopt., page 5, pi. I, fig. 3 $.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. V, fig. 1 et 2, cj Ç).
Mr. Staudinger a répandu dans les collections sous le nom
de Charltonius un Parnassien remarquable, originaire des hautes
alpes d'Alai, lequel cependant est loin d'être semblable à celui
que MMrs. Gray et Moore ont figuré dans les deux ouvrages
mentionnés ci-dessus. Aussi Mr. Ed. G. Honrath a-t-il eu
grandement raison de distinguer par un terme spécial, celui de
Princeps, cette race nouvelle du Turkestan qu'on ne saurait
confondre, même à première vue, avec l'ancienne espèce typique
laquelle, comme on le sait, reconnaît pour patrie les cimes élevées
de l'Himalaya dans la province de Lahoul.
Le vrai Charltonius, en raison de son habitat, appartient à la
grande Faune Indo- Australienne, et devrait être considéré par consé-
quent comme exotique. Cependant, le savant Lépidoptériste de Ber-
lin que nous venons de nommer, ayant bien voulu nous adresser
en communication, avec une extrême obligeance dont nous lui
témoignons ici nos sincères remerciements, une fort belle paire
de ce Parnassien, nous lui accorderons avec empressement une
place dans notre supplément, afin que l'on puisse juger, en pleine
connaissance de cause, des différences notables qui séparent le type
de sa variété.
L'espèce de Gray, sous ses deux formes sexuelles, est d'abord
plus jaunâtre et plus rembrunie que la race du Turkestan, sur-
tout en ce qui concerne le mâle. Puis, en analysant le détail
des dessins de ce dernier, quant au dessus, on trouve que les
taches noires sont plus épaisses, que la bande marginale des ailes
— 189 —
antérieures est plus large, circonstance qui restreint sensiblement
l'espèce clair qui se trouve compris entre cette bande et l'anté-
marginale. La base est plus fortement sablée, et il existe à
la place de la tache interne, sous la nervure médiane, une très
large macule, dessinée en triangle irrégulier qui paraît confluer
tout-à-fait avec la discoïdale inférieure, est s'unir ensuite à la
tache costale par une traînée d'écaillés noirâtres. L'existence
de cette grosse macule communique à Charltonius un aspect
tout différent de celui de Princeps, chez lequel elle ne s'observe
qu'à l'état rudimentaire.
Aux ailes postérieures du type dont il s'agit, le lavis basilaire
est mieux prononcé; l'ocelle inférieure est plus petite, plus ar-
rondie, plus pâle et marquée d'une seule pupille blanche. La
tache anale sans trace de rouge, n'est pas suivie vers l'ocelle
d'une seconde petite tache intermédiaire; enfin le bord externe
de l'aile possède un aspect tout autre que celui de la variété.
Il est doué d'abord d'un reflet hyalin bien prononcé; puis son
liseré marginal obscur est plus continu et à peine interrompu
à l'intersection des nervures; la bande antémarginale d'un brun
grisâtre sur laquelle reposent les taches noires pupillées de bleu
est plus sinuée, plus dilatée sous l'ocelle inférieure parce que
les S"^ et 4^ de ces taches sont beaucoup plus développées que
les trois autres qui occupent le même alignement. Chez Princeps,
au contraire, toutes ces taches rondes sont d'égale grosseur, et
la l)ande qu'elles couvrent en partie, offre une largeur partout
uniforme.
La femelle de Charltonius présente absolument les mêmes
caractères en dessus que l'autre sexe, avec cette différence
cependant que ses dessins sont plus ternes, que le ton général
est un peu moins jaunâtre et que la grande macule triangulaire
— 190 —
du bord interne des premières ailes est plus réduite, tout en
étant néanmoins beaucoup mieux accusée que celle du Princeps.
La poche cornée offre également la même structure que celle
de cette dernière race, bien qu'elle soit d'une couleur beau-
coup plus brune, notamment vers l'extrémité qui avoisine
l'ouverture.
Quant au dessous de ce beau Parnassien, il diffère encore
de sa variété Princeps, en outre des particularités que nous ve-
nons de relater et qui se trouvent intégralement reproduites sur
cette face, parce que ses ailes sont en général beaucoup plus
luisantes, moins blanchâtres, plus nébuleuses; que le lavis basi-
laire est plus étendu, plus obscur; enfin que le rouge pâle
des ocelles a passé au brun grisâtre fort terne.
Nous lisons sur l'étiquette qui accompagne les exemplaires
que nous avons sous les yeux, que cette belle paire de Parnassien
a été capturée le 22 Juillet 1879 à Koksir, province de Lahoul,
probablement à une très grande altitude que cette espèce semble
affectionner particulièrement.
Relatons en passant que Charltonius présente parfois, quoi-
que très rarement, des aberrations accidentelles. C'est ainsi que
Mr. Grum-Grshimaïlo a capturé dans l'Asie centrale un exem-
plaire de cette espèce, chez lequel les ocelles rouges ont com-
plètement disparu et la rangée antémarginale de taches noires
pupillées de bleu se trouve à peine indiquée. Selon Mr. Honrath,
cet effacement de dessins communiquerait à ce sujet aberrant
ime certaine ressemblance avec le Parnassius Stubbendorfii de
Ménétriès.
— 191 —
Paruassius Àpollo, Linué var. Hesebolus, Nordmanu.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pL VI, fig. 1, 2 Ç).
Mr. Honrath ayant appris que nous mettions la dernière
main à cette étude, a bien voulu nous faciliter les moyens de
la compléter, et il nous a communiqué à cet effet plusieurs
Parnassiens curieux ou remarquables qui figurent dans sa collec-
tion, et qu'il n'a pas craint de soumettre aux incertitudes d'un
long vo3'age afin d'en faire bénéficier ce supplément.
Ce sont d'abord deux femelles tout-à-fait typiques de la
variété Hesebolus de notre Apollo, puis deux aberrations nouvelles
et constantes de Mnemosyne et de Stubbendorfii que ce Lépi-
doptériste a publiées récemment en Allemagne; enfin trois exem-
plaires aberrants de Delius qui figurent sans aucun doute parmi
les anomalies les plus extraordinaires qu'on ait jamais constatées
chez cette espèce. Nous comprimons à Mr. Honrath toute notre
gratitude pour ces précieux éléments d'information, et nous leur
consacrerons à chacun un article distinct et autant que possible
une place sur nos planches.
La femelle d'Hesebolus que nous avons figurée précédemment,
planche 6, fig. 2, n'est pas tout-à-fait typique; elle appartient
au contraire à l'une des formes les moins obscures que présente
cette variété, et constitue un terme évident de transition vers
l'Apollo européen. Les sujets de Mr. Honrath sont parfaite-
ment caractérisés; ils représentent un type très pur, mais
il ne sont pas semblables; aussi les décrirons -nous suc-
cessivement.
Chez le premier (Supplément, pi. VI, fig. 1) qui est originaire
de la chaîne de l'Altai, la surface presque toute entière des ailes
supérieures, est fortement aspergée d'écaillés noirâtres qui leur
— 192 —
donnent un aspect d'un gris foncé nébuleux, sur lequel les taches
ordinaires de grosseur normale et les bandes transverses ne
tranchent plus que d'une manière assez molle, n'étant que très
vaguement entourées par un reste des parties claires du fond.
Les ailes postérieures possèdent un faciès assez analogue; elles
paraissent également très rembrunies, parce que l'antémarginale
est formée de grosses taches confluentes, est que toute la pé-
riphérie du bord externe est couverte par une véritable bande
marginale peu large mais bien continue, et assez semblable à celle
qu'on remarque chez d'autres espèces telles que Discobolus. Les
ocelles d'un rouge un peu pâle sont très dilatées, largement lavées
de blanc sale, et réunies deux à deux par une barre d'écaillés
obscures. La plus basse des deux anales est marquée de rouge
dans son centre.
Le second exemplaire qui provient des environs de Kouldja
dans le Tian-Chan, établit un contraste frappant avec celui dont
il vient d'être question, par la teinte jaunâtre bien prononcée
de toutes ses parties claires, et notamment de celles des ailes
supérieures. Les taches ordinaires de ces ailes ont acquis une
extension inusitée et sont d'un noir profond; elles tranchent
assez bien sur l'entourage du disque qui est moins obscurci que
celui du spécimen précédent. La marginale et l'antémarginale
sont presque confondues en une bande unique très large, ou ne
sont séparées, tout au plus, que par une rangée de légères
ponctuations jaunâtres.
Quant aux ailes postérieures, elles ont à peu près le même
aspect général que celui de la race sibérienne, cependant les
ocelles, largement cerclées de noir, sont d'un rouge plus intense,
et le lavis basilaire est plus étendu, car il couvre presque toute
la superficie de la cellule discoïdale.
— 193 -
Le dessous de ces deux papillons reproduit très exactement
les différents caractères qui sont propres à l'autre face.
Nous savions déjà par Mr. Alpheraky que la femelle
d'Hesebolus est ordinairement richement colorée dans les mon-
tagnes du Tian-Chan; mais nous doutons beaucoup qu'elle puisse
l'être d'avantage que le superbe exemplaire (|ui fait l'olijet de
cet article.
Paruassins ApoIIo, Linné.
Austaat. Les Parnassiens (Supplément, pL VII, fig. 1 Ç).
Paruassins Apollo, Linné (Aberration).
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. VII. tig. 2 Ç).
Avant de passer à l'analyse des autres formes curieuses
que contenait l'envoi qui nous a été si obligeamment adressé,
nous emprunterons à la Berlinor Entomologische Zeitschrift de
l'année 1888 un Parnassien extrêmement remarquable que Mr.
Honrath a mentionné et figuré dans cette revue, (Heft II,
page 496, pi. VII, fig. 4), comme étant une aberration acci-
dentelle d'Apollo. L'exemplaire dont il s'agit est une femelle ;
il a été capturé, nous dit l'auteur, il y a environ 25 ans par
Madame Ignace Lachner, de Darmstadt, dans l'île Gothland, sur
les côtes de la Suède.
Parmi les cas si rares d'aberration que présentent parfois
les Parnassiens, celui dont nous avons à nous occuper ici, figure
certainement au nombre des plus étonnants. Les anomalie.'j
qu'offre ce singulier papillon, surtout sur ses ailes postérieures,
justifient pleinement le prix élevé auquel un entomologiste dis-
13
— 194 —
tiugué de TAllemange, Mr. Wiskott, de Breslau, Va acquis
pour sa collection qui est non seulement très riche en espèces
de la Faune Paléarctique, mais encore la plus remarquable en
ce qui concerne les hermaphrodites (plus de 100!), les hybrides,
monstruosités et aberrations. Bien que la figure de la revue alle-
mande ait été faite d'après la nature, Mr. Honrath et Mr. Wiskott
la considèrent comme un peu inexacte, mais grâce à l'obligeance
de ce dernier entomologiste, il nous est possible de la reproduire
avec une fidélité parfaite sur notre planche VII. Nous lui
opposons un exemplaire typique d'Apollo originaire de la Suisse
et du même sexe, afin de mieux faire ressortir l'intensité des
caractères anormaux.
Le ton général de ce superbe insecte est en dessus d'un
jaune soufre pâle qui contraste avec la teinte blanche du bord
marginal des ailes supérieures, lequel, contrairement à ce qui
existe chez tous les autres Parnassiens, semble être ni diaphane,
ni chargé d'écaillés obscures. La base de ces mêmes ailes est
fortement sablée; et les taches ordinaires, (discoïdales, costales
et internes), sont bien élargies, un peu vaguement arrêtées comme
celles de la forme sibérienne Hesebolus. Le bord marginal de
l'aile postérieure est assez normalement dessiné; il ne diffère pas
d'une manière bien appréciable de celui de l'exemplaire typique
que nous avons figuré sur la même planche; mais la facture de
tous les autres dessins est très profondément altérée. C'est ainsi
que les deux ocelles, reliées entre elles par une barre noirâtre,
ont contracté un élargissement extraordinaire; elles sont bien
saturées, mais mollement lavées de blanc; l'inférieure touche
presque la cellule discoïdale, et la supérieure conflue vers la
base en affectant la forme d'une ellipse subaigue à l'une de ses
extrémités. Les deux anales, fort grosses et vivement saturées
— 195 —
de rouge, s'unissent à l'ocelle inférieure par une troisième tache
noire intermédiaire; enfin, le lavis ordinaire de la base couvre
les deux tiers de la surface de la cellule, sous la forme d'une
grosse tache oblongue marquée de rouge dans son milieu; mais
il ne s'étend nullement le long du bord abdominal ainsi que
c'est la règle invariable chez les Parnassiens.
Le dessous de ce merveilleux papillon est tout-à-fait l'équi-
valent de la face opposée; les seules particularités qui méritent
d'être relevées de ce côté, consistent en ce que les ocelles et
même les anales au nombre de trois, sont bien pupillées
de blanc, et que les basilaires offrent une plus grande ex-
tension que d'habitude. La quatrième, à partir de la côte,
est surtout fort longue; elle aboutit jusqu'au cercle noir de
la tache anale, tandis que chez toutes les formes normales
des Parnassiens elle en est longuement séparée par la couleur
du fond.
Mr. Honrath, dans son article, fait très judicieusement ob-
server que chez les femelles des espèces de ce genre, les parties
rouges manifestent en général une tendance assez prononcée
à l'élargissement; mais que l'on connaît cependant bien peu
de cas où cette tendance arrive à atteindre un degré aussi
considérable. Il compare l'exemplaire dont il s'agit à la femelle
de Delius que Meyer-Dûr a reproduite en 1851 dans son ou-
vrage qui a pour titre: Les Papillons de la Suisse, et sur-
tout au très problématique Corybas de Fischer qui n'est pro-
bablement, lui aussi, qu'une aberration locale de Delius, spéciale
aux régions inhospitalières du Kamtschatka,
13^
— 196 —
Parnassius Stiibbeudorfli, Méuétriès ab. Melauophia, Hourath.
Honrath. Berliner Eiitoraologische Zeitschrift, Bd. XXIX, Heft II, page 274
(année 1885).
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. VIII, fig. 1 Ç).
Le Parnassius Stubbendorfii est répandu, ainsi que nous
l'avons indiqué à l'article que nous avons consacré à cette es-
pèce, sur la plupart des régions orientales et méridionales du
continent sibérien; et dans ce vaste parcours le sexe mâle ne
paraît pas éprouver de variations bien appréciables. Il n'en
est pas de même de la femelle qui se présente parfois sans
des dehors très opposés. Nous n'en voulons pour preuve que
la remarquable aberration que Mr. Honrath a publiée en 1885
sous le nom de Melanophia, et qui diffère tellement du type
courant, que l'on serait facilement tenté de lui attribuer une
importance spécifique. Tandis que les femelles qui proviennent
du centre et du midi de l'Amurland sont blanches, et ressemblent
aux mâles en tous points, sauf que le lavis basilaire semble être
ordinairement plus réduit et l'antémarginale des ailes supérieures
mieux indiquée, celles de la Daourie manifestent, au contraire,
une tendance à l'obscurcissement qui dégénère en un mélanisme
complet.
Ce cas extrême se trouve réalisé chez un bel exemplaire
que nous avons sous les yeux et dont les deux faces opposées
des quatre ailes sont d'un gris nébuleux noirâtre très diaphane
qui ne permet plus de distinguer les dessins ordinaires. Les
supérieures sont absolument uniformes; et quant aux inférieures,
on n'aperçoit un vestige de la couleur blanche du fond que dans
l'intérieur de la cellule discoïdale et sur l'espace du bord an-
térieur qui est situé immédiatement au dessus. Le lavis de
— 197 —
la base ressort à peine dans une teinte plus foncée sur cet
entourage obscur.
Cette forme si remarquable, et qui justifie si bien son nom,
a été découverte en 1883 par MMrs. Louis Graeser et Dieckmann
dans les montagnes de Nickolajefsk, (province de Transbaikalie),
où elle vole abondamment vers la fin du mois de Juin. Elle
semble constituer dans cette station sibérienne une race constante
et locale qui n'affecte toutefois que le sexe femelle.
Parnassius Mueiiiosyiie, Liuué ab. Slelaina, Honratli.
Honiath. Berliner Eiitomologische Zeitschrift, Bd. XXIX, Heft II, page 273
(année 1885).
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. VIII, fig. 3 Ç).
Cette singulière variété qui mérite de figurer, comme im-
portance, en tête de toutes celles qui sont issues de notre
Mnemosyne, est tout-à-fait l'équivalent de la forme dont nous
venons de nous occuper; mais elle appartient sans aucun doute
à notre espèce d'Europe, ainsi qu'en font foi son origine et ses
caractères. Ses ailes antérieures sont de ce même gris noirâtre
transparent qui est propre à Melanophia sur lequel on aperçoit
toutefois les deux taches discoïdales assez foncées, opaques, et
vaguement entourées de blanchâtre dans leur partie supérieure.
Cette couleur primitive est plus apparente aux ailes postérieures
où elle couvre le disque, depuis la côte jusqu'un peu au delà
de la cellule, à partir de laquelle elle se fond insensiblement
avec le semis obscur qui recouvre tout le reste de l'aile. On
distingue cependant, avec de l'attention, vers le limbe une trace
d'une bande antémarginale très mollement accusée. Les taches
noires ordinaires sont également assez bien visibles sur ce fond
— 198 —
général si rembruni; mais elles offrent plus d'ampleur que celles
de la Mnemosyne typique, surtout la grande macule qui tient
la place de l'ocelle inférieure, laquelle s'unit au lavis ainsi qu'à
l'anale absolument comme chez la variété asiatique Gigantea.
Un tel rapprochement entre des papillons d'origines si différentes,
n'est pas la moindre des singularités que présente cette curieuse
nouveauté.
Mr. Honrath nous apprend que les mâles que l'on capture
en même temps que ces femelles si foncées, possèdent ordinaire-
ment un aspect normal; mais que cependant chez certains exem-
plaires le bord marginal des secondes ailes est plus ou moins
sablé d'écaillés noirâtres, d'une manière analogue sans doute à
celle que l'on constate chez la variété asiatique que nous venons
de rappeler.
Cette Melaina si remarquable à des titres divers, a été
découverte par un entomologiste zélé de Berlin, Mr. le docteur
Streckfuss, qui la rencontra pendant deux années consécutives
sur la déclivité de la route qui aboutit de Kotzbach à Pleckenpass,
dans un site absolument unique. Elle volait assez communément
dans cette partie de la Carinthie vers la fin de Juin, à une altitude
de 1300 mètres environ, de concert avec l'Argynnis Paphia ab.
Valesina qui est affectée elle aussi d'un mélanisme si prononcé.
Faruassîus Graeseri, Houratli.
Honrath. Berliner Entomologische Zeitschrift, Bd.XXIX, Heft II, pages 272,
273, pi. VIII, fig. 1, lb(î, la, lc$ (année 1885). Formes typiques.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. VIII, fig. 2 Ç typique).
C'est à Mr. Edouard G. Honrath que revient le mérite de
nous avoir fait connaître ce beau Parnassien qui appartient
- 199
exclusivement à la Faune de la Transbaikalie. Nous en avons
successivement décrit et figuré les deux sexes, d'abord dans
le corps de cet ouvrage, puis dans le présent supplément; mais
la femelle que nous avons représentée n'est pas tout-à-fait
typique; elle appartient au contraire à une race un peu aber-
rante; de sorte que nous avons cru devoir lui opposer un bon
dessin d'un superbe exemplaire que Mr. Honrath a eu l'obligeance
de nous soumettre, et qui représente dans toute sa pureté la vraie
forme de cette espèce aA'ec des caractères peut-être même un peu
exagérés.
En comparant ce papillon avec celui de notre planche II,
on trouve qu'il en diffère au premier abord, quant au dessus,
par sa teinte générale d'un jaunâtre assez vif qui est plus
prononcée que celle de tous les autres Parnassiens, si l'on en
excepte toutefois l'Eversmanni cf typique de Ménétriès et le su-
perbe Cardinal, par l'accentuation plus grande des marginales et
antémarginales des quatre ailes, enfin par l'ampleur et l'intensité
des taches rouges et des ocelles. Les costales de l'aile antérieure
sont au nombre de quatre, inégalement grandes, mais toutes bien
saturées; la tache interne fort vive et très nette est aussi mar-
quée de rouge dans son milieu; et les unes et les autres sont
reliées par une liture noire mieux définie que celle de la femelle
déjà figurée. On remarque, en outre, que les anales de l'aile
postérieure sont pupillées de carmin, et que la tache rouge qui
occupe l'intérieur de la cellule, immédiatement au dessous de la
basilaire ordinaire, est beaucoup plus vive et mieux écrite.
Toutes ces dissemblances se reproduisent sur la face opposée
dans la mesure qui s'observe habituellement de ce côté.
Il résulte de ce rapprochement que la femelle de Graeseri
est sujette à varier. C'est ainsi (\u>' les deux exemplaires figurés
— 200 —
par l'auteur sur la planche VIII de la Berliner Entomologische
Zeitschrift sont moins jaunâtres que celui que nous venons d'ana-
lyser; leurs bandes transverses n'offrent pas la même netteté.
Le type le, plus obscur sur le disque des premières ailes, ne
montre que deux costales rouges séparées par la couleur du fond;
et celui représenté sous le N° la, en général plus clair que
l'autre, laisse apercevoir quatre costales pourprées comme le
spécimen que nous avons sous les yeux.
Quant au type de notre planche II, il est assez obscur,
d'un blanc très franc mais un peu terne; ses macules rouges
sont plus réduites, moins éclatantes; l'aspect général est différent
de celui des exemplaires précédents ; aussi ce papillon appartient-il
à une race accidentelle qui est moins fréquente que celle qui est
en question.
Mr. Honrath nous informe dans l'article descriptif qu'il a
consacré à Graeseri que ce Parnassien a été découvert par
Mr. Louis Graeser, de Hambourg, en 1884 aux environs de
Pochrofka, dans l'Apfelgebirge, (Jablotschnoi Gorja), sur des
montagnes d'une altitude moyenne de 1600 mètres qui sont
situées entre le lac Baikal et le fleuve Amour. L'espèce s'y
montrait assez nombreuse dans le courant de Juillet.
Parnassius Delius, Esper (Aberrations S et $).
Parmi les Parnassiens qui nous ont été communiqués avec
une si grande obligeance par l'habile Lépidoptériste de Berlin,
se trouvaient trois aberrations de Delius qui méritent d'autant
plus les honneurs de la publication, qu'ils sont d'une singularité
tout-à-fait exceptionnelle, et qu'il est assez rare d'avoir la bonne
— 201 —
fortune de pouvoir signaler des anomalies dans ce genre de pa-
pillons. Aussi, nous empressons-nous de leur accorder une place
dans cette étude à l'intérêt de laquelle ils contribueront très
certainement pour une bonne part.
1"^ Exemplaire.
C'est un mâle d'une taille un peu au dessous de la moyenne,
chez lequel l'antémarginale des premières ailes est très étroite
et surtout très courte, puisqu'elle s'arrête déjà à la dernière
ramification de la nervure sous-costale, tandis que celle du type
normal descend jusque vers la seconde branche de la médiane.
La côte ne porte que deux costales noires, bien espacées, dont
l'inférieure est très petite; et le bord interne est vierge de sa
tache ordinaire. Le rouge a totalement disparu aux secondes
ailes où les ocelles sont remplacées par deux gros points
irrégulièrement arrondis d'un noir profond. Le revers des ailes
antérieures est semblable au dessus; sur celui des postérieures
on voit reparaître la forme ordinaire des ocelles qui sont petites,
faiblement saturées de rouge vif, mais entièrement privées de
pupilles blanches. Par opposition, les basilaires ont perdu leur
couleur purpurine dont il ne reste tout au plus qu'un vestige
au milieu de celle qui touche le bord costal.
On sait que les mâles des Parnassiens manifestent parfois
une tendlince à l'amoindrissement des ocelles qui apparaît d'une
façon plus ou moins normale chez certaines formes telles qu'Inter-
medius, Felderi, Simonius; mais jusqu'à présent aucun cas ana-
logue n'avait encore été signalé, pensons-nous, parmi les exem-
plaires du Delius typique auquel celui qui nous occupe appartient
incontestablement.
— 202 —
2® Exemplaire.
Ce spécimen est du sexe femelle; il est d'un aspect assez
normal, bien que ses ailes soient en proportion plus allongées
que celles du type ordinaire. Les taches ainsi que les bandes
transverses sont bien écrites; et l'intérieur des costales au nombre
de trois est vivement saturé de rouge. L'anomalie ne s'observe
qu'aux ailes postérieures; elle consiste dans ce fait que les
ocelles sont reliées deux à deux, d'une manière bien similaire
de chaque côté, par un gros trait cunéiforme d'un noir intense
dont l'extrémité la plus épaisse s'appuie contre l'ocelle supérieure.
Le rouge de celle-ci paraît se répandre quelque peu par infiltration
dans la base de ce trait, surtout à l'aile droite en dessus, et
en dessous aux deux ailes qui reproduisent de ce côté cette
bizarre anomalie.
Bien des Parnassiens d'espèces différentes, et surtout Cardinal,
montrent ce même trait sous des formes assez variées; mais au-
cune femelle de Delius n'en a manifesté encore un degré aussi
excessif.
3® Exemplaire.
C'est aussi une femelle d'assez petite taille, d'une coupe
encore plus élancée que celle de l'aberration précédente, et qui
est tout-à-fait singulière à cause du mélanisme dont elle est
atteinte. La couleur du fond des ailes supérieures est d'un
jaune ocracé pâle qui n'est bien indiqué que dans l'entourage
des taches discoïdales, et dans l'espace compris entre celles-ci
et les costales ; par ailleurs toute la surface de l'aile est obscurcie
par un épais semis écailleux d'un brun nébuleux jaunâtre qui
oblitère les bandes transverses. La tache interne, d'un noir
uniforme, est très large, mais un peu diffuse.
— 203 —
Les ailes postérieures dout la nuance jaune est plus légère,
paraissent moins anormales, bien que tout le bord extérieur depuis
la région occupée par les ocelles soit beaucoup plus obscur que
celui des Delius les plus foncés. Cette belle aberration, d'après
l'étiquette qui est fixée à l'épingle, provient de Méran dans
le Tyrol. Elle rappelle jusqu'à un certain point l'aberration
Nigricans de Discobolus qui est pourtant plus noire, plus dia-
phane, mais moins jaunâtre que le précieux sujet que nous avons
sous les j^eux.
Parnassins Romauovi, twruni-Grsliimaïlo.
Austaut. Les Parnassiens (Supplément, pi. V, fig. 3 $ et pi. VII, fig. 3, 4,
poche cornée).
Nous donnons ici la description et la figure de la femelle
du Parnassius Romanovi que nous ne connaissions pas encore
au moment de la rédaction de l'article que nous avons consacré
plus haut à cette espèce. L'exemplaire bien conservé que nous
avons sous les yeux, se rapporte très exactement au mâle typique
que nous avons déjà représenté. Comme lui, il est de grande
taille, d'un blanc à peine jaunâtre, avec le disque des quatre
ailes fort clair; de sorte que la différence sexuelle ne paraît pas
se traduire chez cette espèce par l'obscurcissement plus ou moins
considérable qui est ordinaire chez la plus part des autres. Elle
consiste principalement en ce que les bandes transverses sont
mieux marquées.
L'antémarginale des ailes antérieures qui est composée d'une
suite de gros points assez vagues, ainsi que le marginale, descen-
dent plus bas, c'est-à-dire jusque près du bord interne. Aux ailes
postérieures, ces mêmes bandes se reproduisent également avec des
— 204 —
caractères un peu différents; Tune borde très étroitement le
limbe, depuis le bord antérieur jusqu'à l'angle anal où elle finit
en pointe, et l'autre est formée de taches triangulaires beaucoup
plus dilatées que celles de l'autre sexe. La plus basse des deux
grosses macules anales est distinctement pupillée de rouge, et
toutes deux sont assez bien séparées par la couleur blanche du
fond du lavis basilaire qui est plus réduit inférieurement que
celui du mâle et aussi plus grisâtre. Ces divers caractères
se retrouvent sur la face opposée, mais avec quelques modifi-
cations qui portent principalement sur les taches rouges qui sont
beaucoup plus pâles de ce côté, presque blanchâtres, surtout
les basilaires qui montrent une tendance à être oblitérées par
le sablé obscur qui couvre cette partie de l'aile.
L'exemplaire dont il s'agit est pourvu de sa poche cornée,
ce qui nous permet de la reproduire et de la comparer à celle
des autres espèces du groupe des Carinati. La; caverne du pré-
sent Parnassien, d'une couleur d'un brun bistré, est relativement
courte, un peu comprimée sur les côtés, notamment sur les bords
de l'ouverture. La languette qui la termine est coupée en tri-
angle brusquement tronqué à l'une de ses extrémités; et la carène
bien saillante, d'un profil arrondi, soudée en outre antérieurement
aux segments abdominaux, atteint à peine le niveau inférieur de
la caverne. La forme de cet appareil est assez voisine de celle
de la poche du Khodius du Turkestan; mais elle est moins
allongée, plus trapue, et sa spatule ou languette n'est pas ter-
minée en pointe comme celle de cette dernière espèce.
Le mâle de Romanovi que nous avons figuré est originaire
des alpes d'Alai; la femelle en question provient des montagnes
du Neu-Margellan; et malgré cette différence d'origine, son
aspect est presque semblable à celui de cet exemplaire. On peut
205
supposer dès lors que la présente espèce ne varie pas dans une
bien grande mesure.
Faruassius Illustris, Gruin-Orshiiuaïlo.
Nous avons obtenu en communication, au dernier moment,
de Mr. Heyne, l'obligeant éditeur de ce livre, deux Parnassiens
réputés nouveaux qu'il s'est empressé de soumettre à notre appré-
ciation, afin d'en enrichir ces études.
Le premier qui porte le nom d'IUustris, appartient à notre
groupe des Cincti, et vient par conséquent se placer à côté de
Delphius et de ses congénères; il est particulièrement voisin de
la forme que Mr. Staudinger a publiée sous le nom de Transiens;
et cette analogie est même si grande qu'il nous a été impossible
d'apercevoir des caractères bien appréciables, à l'aide desquels
on pourrait diiférencier ces deux types de papillons.
En effet, les ailes antérieures de cet Illustris qui est une
femelle, sont un peu pointues à l'apex comme celles de l'espèce
à laquelle nous le comparons; puis les quatre marginales offrent
la même couleur d'un gris brun ardoisé diaphane qui est spéciale
à Transiens. Les taches ordinaires de même que les antémargi-
nales affectent une forme identique, et se détachent très nettement
du fond général jaunâtre lequel n'est obscurci par aucun semis
écailleux. Il n'y a que la marginale antérieure qui soit un peu
plus étroite chez ce sujet litigieux que chez l'autre espèce, cir-
constance ayant pour effet d'élargir d'autant les taches maculaires
jaunâtres qui succèdent à cette bande vers l'intérieur; et quant
à la postérieure, elle n'aboutit pas à l'angle anal en pointe aussi
fine que d'habitude; elle se termine au contraire par deux petites
taches ovalaires, disjointes, placées au dessous des macules rondes
— 206 —
pupillées de bleuâtre qui font partie de rantémarginale. Ces
dissemblances sont tellement légères, qu'il ne nous paraît pas
possible de les prendre en sérieuse considération ; et nous pensons
que cette forme réputée nouvelle doit se rapporter à celle du
Pamir déjà nommée dont elle n'est pas même susceptible de
constituer une race locale distincte. Le nom d'IUustris devra
par conséquent, nous semble-t-il, être placé en synonymie sous
celui de Transiens.
Fariiassius Superbns, Grum-Orsliimaïlo.
Grum-Grshimaïlo. Mémoires sur les Lépidoptères parRomanoff, l^volume.
Le second Parnassien qui nous a été soumis sous le nom
de Superbus, en deux exemplaires mâles d'une grande fraîcheur,
ressemble beaucoup à Insignis, Stgr., dont il ne nous paraît pas
être spécifiquement distinct. Il en a la taille, la coupe et l'aspect
général; cependant ses ailes sont plus claires, et leur couleur
blanche qui approche de celle de la neige est absolument pure.
De tous les Parnassiens que nous connaissons, il n'en est pas
un qui soit doué d'un éclat aussi vif.
En comparant ce Superbus à Insignis, sous le rapport de
l'accentuation des dessins, on remarque d'abord que les macules
rouges des costales et de l'interne offrent une tendance évidente
à disparaître. Chez l'un des deux sujets que nous avons sous
les yeux, elles sont réduites à l'état de vestige; chez l'autre, elles
sont même totalement absentes. La tache qui existe sous la dis-
coïdale inférieure d'Insignis, dans le voisinage de la base et du
bord interne, manque en outre tout- à-fait; et le disque de l'aile
supérieure n'est pas aussi obscurci par le semis écailleux habituel.
— 207 —
Les franges sont également plus blanches et très finement entre-
coupées de noir.
Quant aux ailes postérieures de ce joli Parnassien, l'anté-
marginale est formée de taches moins triangulaires et plus
continues que celles du type; les deux premières, à partir de
la côte, paraissent plus déliées; les ocelles bien saturées et toutes
deux non pupillées de blanc, sont très largement cerclées de noir;
enfin le lavis basilaire, très chargé en couleur et moins étendu,
n'entoure pas aussi complètement la cellule discoïdale surtout
par en haut.
Il résulte de ce parallèle que Superbus, quoique produisant
une impression particulière à première vue, ne diffère pourtant
d'Insignis que par des caractères assez légers qui ne sont pas
suffisants pour le distinguer spécifiquement de cette espèce.
Il ne constitue tout au plus qu'une race locale plus éclatante
que ce type, chez laquelle les taches rouges des ailes antérieures
sont en voie de décroissance et qui peut à la rigueur conserver
son nom.
En raison de cette grande similitude, le Parnassien dont
il s'agit n'offrirait pas un intérêt considérable, si, d'un autre
côté, il ne tendait à confirmer l'opinion que nous avons émise
plus haut, à savoir qu'Insignis, au lieu de se rapprocher de Disco-
bolus comme d'un type primordial, s'en éloigne au contraire
d'une manière visible, pour former une espèce à part dans le
sens que nous attachons à ce mot.
Les deux exemplaires que nous venons d'analyser et dont
nous n'avons pu obtenir l'indication précise du lieu d'origine,
ont été capturés, nous mande Mr. Heyne, dans les alpes du sud-
est du Turkestan, probablement sur le vaste plateau du Transalai,
à une altitude qui varie de 2700 à 3800 mètres.
— 208 —
Qu'on nous permette de saisir l'occasion qui s'offre naturelle-
ment ici pour faire remarquer, une fois de plus, combien l'assi-
milation des différentes formes de Parnassien les unes aux autres
est précaire et entourée d'obscurité.
Ainsi, selon la plupart des entomologistes d'Allemagne,
Insignis devrait être considéré comme une simple variété de
Discobolus, en raison des rapports qui unissent ces deux types
en apparence. Cependant Mr. Grum-Gishimaïlo découvre in-
opinément une forme nouvelle qui, bien que fort approchante
d'Insignis, s'éloigne pourtant encore plus franchement que celui-ci
de l'espèce du Tian-Chan pour se rapprocher au contraire de
certaines races d'Actius.
Komanovi que Mr. Staudinger avait d'abord assimilé à ce
dernier Parnassien, a obtenu depuis de la part de ce savant un
brevet d'indépendance; tandis que d'autres auteurs le rattachent
au même Discobolus déjà nommé. De semblables divergences
de vue se sont manifestées en ce qui concerne Rhodius qui,
à part la tache basilaire rouge des ailes postérieures, ressemble
beaucoup aux espèces précitées, et même à d'autres qui s'étendent
en dehors des limites du territoire Paléarctique. Enfin, nous avons
déjà signalé que les divers types du groupe des Cincti, c'est-à-
dire ceux qui gravitent autour de Delphius, passent pour ainsi
dire les uns aux autres par des termes d'une continuité presque
parfaite.
Dans ces conditions ne serait-il pas plus sage et plus pra-
tique, en égard aux données encore si incomplètes de l'observation,
de reserver tout jugement définitif et absolu sur le degré de
parenté qui règne parmi tous ses membres d'une même famille?
Comment, du reste, saurons-nous jamais avec une certitude par-
faite que tel type constant et bien défini n'est qu'une modification
— 209 —
géographique de tel autre; que tous deux sont le même être qui
se présente sous des aspects divers? Est-ce par l'analogie des
caractères? Mais, si nous avons recours à ce guide, nous nous
exposerons à de singulières méprises. La nature est pleine de ces
analogies apparentes ou réelles qui ne sont qu'une manifestation
extérieure d'une loi générale qui régit toute chose: la continuité.
En suivant cette voie, nous arriverons fatalement, et peu à peu,
à identifier tout ce qui n'est pas absolument disparate, à réunir
sous une notion commune tous les êtres organisés auxquels la
nature n'a pas imprimé de différences profondes, et qui pour être
très voisins sous le rapport de l'aspect physique, n'en sont pas
moins séparés par leur tempérament, leurs mœurs, leur instinct.
Finalement, en fait d'espèces, nos nomenclatures ne renfermeront
plus que les formes extrêmes ou opposées qui auront résisté aux
atteintes de cette sorte de synthèse.
L'assimilation poussée à ces limites, constitue à nos yeux
un danger réel qui menace nos méthodes modernes; et pour
éviter cet excès, il n'y a de meilleur moyen, croyons-nous, que
de revenir aux préceptes d'une saine philosophie qui ne peut
découvrir dans la notion de l'espèce considérée en général qu'un
procédé purement subjectif, dont l'esprit humain fait usage pour
arriver à distinguer et à classer ses idées.
Parnassius Delpliius, Eversinanii var. Albnlns, Ilonratli.
H 0 n r a t h. Berliner Entomologische Zeitschrift, 1 889, pi . Il, fig. 1 , page 161.
La science ne s'arrête jamais dans sa marche progressive;
et quelle que soit l'époque choisie par un auteur pour entreprendre
l'histoire d'un genre déterminé d'êtres organisés, son savoir se
trouve nécessairement mis en défaut, parce qu'au moment même
u
— 210 —
où l'auteur écrit son livre, les découvertes suivent leur cours et
fournissent à l'étude des matériaux sans cesse renouvelés. C'est
ainsi que pendant que nous mettions la dernière mains au présent
ouvrage, un Parnassien nouveau venait d'être découvert dans les
montagnes si fertiles de l'Asie centrale; et cette circonstance
nous oblige à ne pas passer sous silence cet hôte de notre
faune. Nous lui faisons un accueil d'autant plus empressé, que
c'est à Mr. Honrath que nous devons la connaissance de cette
nouveauté, et que ce savant Lépidoptériste a poussé l'obligeance
au point de nous en réserver la primeur, le papillon dont il s'agit
n'étant pas encore publié au moment où nous écrivons ces lignes.
C'est sous le nom d'Albulus qu'il sera figuré dans la Berliner
Entomologische Zeitschrift; et nous ne pouvons mieux faire, en
attendant, que de transcrire ci-après sa diagnose que Mr. Hon-
rath a bien voulu nous adresser avec une amabilité vraiment
extrême. Voici par conséquent en quels termes cet auteur
caractérise ce nouveau Parnassien:
»La variété Albulus est la plus grande de toutes les formes de«
»DelpMus actuellement connues, car son envergure atteint 33-35 milli-«
» mètres. Sa tonalité dépourvue d'écaillés obscures est très claire»
» comme celle de Staudingeri, Bang Haas; ses dessins noirs sont ex-«
»trêmement réduits, de sorte que cette forme est en effet la plus blanche «
»que l'on ait encore constatée chez Delphius.«
»L'antémarginale des ailes antérieures est indiquée par une«
» rangée de petits points noirâtres, faiblement écrits lorsqu'ils ne sont*
»pas tout-à-fait absents. La tache discoïdale inférieure, vers la base,«
»est généralement très réduite et souvent presqu'entièrement effacée. «
»La costale, bien isolée, ne s'allonge jamais sous forme de bande vers«
»le bord interne, ainsi qu'on le remarque chez Delphius et ses autres*
» variétés. L'antémarginale manque tout-à-fait aux ailes postérieures*
»de cette nouvelle race. Sa place n'est marquée vers le bord que«
— 211 —
»par 2 ou 3 petits points parfois à peine visibles ou même absents; mais*
»les deux taches bleues vers l'angle anal sont presque toujours bien accu-«
^se'es, entoure'es de noir quelquefois seulement dans leur moitié' inférieure. «
»Le bord diaphane (la marginale) des 4 ailes d'Albulus est plus étroit*
»que celui de Delphius et de toutes les formes voisines; les ocelles*
»sont grandes, géne'ralement d'une couleur rouge qui passe parfois*
»à la nuance orangée, sans pupilles blanches et finement cerclées*
»de noir; enfin une troisième tache allongée existe souvent à l'angle*
»anal. Ces ocelles sont pupillées de blanc sur le revers; et la base*
^est marquée de ce côté de 2 ou 3 taches rouges.*
»Le mâle d'Albulus paraît varier. Chez un sujet de ma collée-*
»tion le cercle- noir des ocelles est très élargi et il réduit beaucoup*
»la surface de la tache rouge; l'ocelle supérieure de cet exemplaire*
»est très petite en dessus. La troisième ocelle de l'angle anal n'est*
» indiquée que par un semis noirâtre. Au dessous, toute la couleur*
» rouge est disparue, même chez les basilaires, c'est seulement l'ocelle*
» supérieure qui est ornée de cette couleur.*
» Quant au sexe femelle, il diffère à peine de l'autre sous le*
» rapport de la tonalité et de l'accentuation des dessins, circonstance*
»assez caractéristique; et la tige des antennes est encore plus jau-«
»nâtre ici que chez les autres formes de Delphius.*
» C'est Mr. Jos. Haberhauer qui découvrit récemment cette remar-*
»quable variété vers la fin de Juillet, dans la partie des alpes d'Alai*
»qui sont situées à l'est d'Ochs, à une altitude d'environ 3600 mètres.*
»Elle volait dans des sites déserts, recouverts de neiges perpétuelles,*
»où la végétation ne peut plus se manifester que par ses représentants
les plus dégradés.*
Ne connaissant pas de \âsu ce curieux Parnassien, nous n'ajoute-
rons rien à la description si exacte qui précède, si ce n'est que tout
en étant bien tranché des formes voisines de Delphius, Albulus
nous paraît offrir une certaine analogie avec Transiens, Stgr.,
qui est également caractérisé par le ton si clair de ses ailes.
u*
— 212 —
Cousidérations
sur les cas d'hybridation observés chez les Paniassier.s.
La question du croisement entre les espèces animales et
végétales a été mise depuis un certain nombre d'années à l'ordre
du jour par beaucoup de naturalistes; elle préoccupe pour des
motifs divers l'esprit des savants; nous avons pensé par consé-
quent que nous ne pouvions donner une meilleure terminaison
à ce livre, que de consacrer ses dernières pages à l'étude de cet
intéressant problème, en tant qu'il se rapporte au genre d'insectes
dont nous avons écrit l'histoire.
En général, la constation des phénomènes d'hybridation parmi
les lépidoptères ne remonte pas à une époque bien reculée,
puisque les hybrides les plus anciennement connus, tels que nos
Deilephila Vespertilioïdes et Epilobii, ont été considérés dans
le principe par les premiers auteurs qui nous les ont fait
connaître comme des espèces absolument indépendantes. Plus
tard, lorsque le fait du croisement entre papillons voisins eut été
constaté d'une manière authentique, on essaya d'obtenir les mêmes
résultats par des voies factices ou artificielles. On rapprocha en
capitivité certaines formes qui paraissaient devoir s'accoupler
plus facilement que d'autres; et c'est ainsi que l'on obtint, l'art
et la patience aidant, des métis fort remarquables dans les genres
Smerinthus, Saturnia, Ocnogyna et d'autres encore.
Ces faits, produits en dehors des conditions naturelles, ne
constituent en définitive que de simples expériences qui prouvent
la possibilité du croisement entre certaines espèces similaires;
mais ils devaient incliner à penser que cette possibilité se réalise
quelques fois spontanément sur le grand théâtre de la vie.
— 213 —
Cette prévision s'est trouvée justifiée. L'observation, dirigée
dans cette voie nouvelle, a démontré de nos jours, par un grand
nombre des témoignages sur la valeur desquels on ne saurait
élever le moindre doute, que beaucoup de papillons d'un même
genre s'accouplent effectivement en toute liberté dans l'état
de nature. Nous -même, pour ne citer que des exemples
qui nous sont personnels, nous avons remarqué en diverses
circonstances in copula: Lycaena Astrache et Icarus, Bellar-
gus et Aegon, Zygaena Filipendulae et Transalpina, Achilleae et
Pilosellae etc.
Que peuvent être les produits de tels rapprochements ad-
ultérins, si non des termes mitoyens entre les facteurs qui ont
concouru à les engendrer, c'est-à-dire des formes absolument
intermédiaires, réunissant dans leur type, et selon une certaine
mesure, les caractères de leurs parents. C'est probablement
à une telle origine qu'il convient de rapporter beaucoup d'exem-
plaires prétendus aberrants que l'on rencontre accidentellement
dans la nature et qui font le désespoir des classificateurs, parce
qu'ils ne peuvent être assimilés à aucune forme normale déjà
régulièrement classée.
Le premier d'exemple d'hybridation qui ait été signalé
parmi les Parnassiens et que nous avons déjà relaté plus haut,
a été constaté par Mr. Alpheraky dans les montagnes du district
de Kouldja. Cet habile et intrépide explorateur a surpris pour
ainsi dire la nature sur le fait; il a vu un mâle d'Apollo
var. Hesebolus accouplé à une femelle de Discobolus; et comme
témoignage de la fécondité d'un tel rapprochement, il a capturé,
sur les lieux mêmes où cette observation avait été faite, un Par-
nassien d'aspect fort singulier et tout-à-fait intermédiaire entre
les deux espt-ce? précitées.
— 214 —
D'un autre côté, Mr. Grum-Grshimaïlo a aperçu dans les
hautes alpes d'Alai le Parnassius Delphius en commerce adultérin
avec la belle variété Princeps du Parnassius Charltonius. Ces
deux cas sont les seuls jusqu'à présent qui aient été constatés
directement, et pour ainsi dire en flagrant délit; mais il est
évident qu'ils doivent se réaliser bien plus souvent dans
la nature, si l'on tient compte de cette circonstance, que
les observations dirigées dans un tel but ne s'exercent que
très rarement et le plus souvent dans des conditions défectueuses.
Pourtant, d'autres faits intimement liés à l'importante
question que nous développons ici, ont été indiqués par diffé-
rents auteurs, et notamment par Mr. Edouard G. Honrath.
Ce Lépidoptériste qui a acquis une grande compétence en ma-
tière de Parnassiens, et dont l'opinion est par conséquent pré-
pondérante, a consigné dans la Berliner Entomologische Zeitschrift
une série de remarques qui tendent toutes à prouver que les
exemples de croisement entre les espèces de ce genre si in-
téressant de papillons sont beaucoup plus fréquents qu'on ne
l'a cru jusqu' aujourd'hui. Cet avis s'impose en quelque sorte
lorsqu'on examine attentivement ce problème. En effet, l'hybri-
dation étant chez les animaux une dérogation à la loi d'instinct
qui ne détermine la propension sexuelle que chez les individus
d'une même espèce, ce n'est jamais que par hasard que l'on arrive
à constater sur le vif les infractions accidentelles commises à cette
loi; tandis qu'il est plus aisé de remarquer les produits assez
nombreux qui résultent de ces sortes d'erreurs naturelles. L'acte
de l'hybridation, en supposant qu'il soit toujours fécond, doit être
infinément plus rare que les hybrides eux-mêmes.
Mais là où les idées de cet habile auteur prennent un tour
tout-à-fait inattendu et deviennent par conséquent très intéressantes,
— 215 —
c'est lorsqu'il avance que les signes caractéristiques qui révèlent
chez les Parnassiens l'origine du croisement pourraient bien
résider, non dans les travestissements des dessins généraux
des ailes, mais dans les changements que subit l'aspect normal
des antennes.
Cette opinion a été inspirée à l'auteur par ce fait assez
singulier en effet, qu'il est extrêmement rare de rencontrer dans
la nature des sujets portant sur leurs ailes l'empreinte de ca-
ractères incontestables d'hybridation, et cela dans les lieux mêmes
où cependant les accouplements adultérins ont été constatés.
Comme témoignages versant à l'appui de la probabilité de
ses vues, Mr. Honrath allègue les faits suivants:
1'') Deux exemplaires d'un Parnassien de grande taille,
presque semblables à Nomion sous le rapport du faciès, mais
pourvus d'antennes d'un noir absolument uniforme comme celles
par exemple de Graeseri. Ces papillons ont été capturés par
Mr. Graeser lui-même à Pochrofka dans l'Amurland, au commen-
cement de Juin, ii une époque où les Parnassius Graeseri qui
habitent cette station sont tout-à-fait passés, et avant l'apparition
du vrai Nomion qui ne fut trouvé que quinze jours plus tard.
Selon l'auteur, les papillons dont il s'agit, seraient le produit
d'un croisement entre les deux espèces précitées, avec d'autant
plus apparence de raison, que l'époque de leur évolution est
intermédiaire entre celles de ces espèces, et que les femelles de
l'une ont fort bien pu se rapprocher des mâles de l'autre.
2®) Un autre sujet semblable aux précédents qui fut re-
cueilli avec Nomion à Bikim par les frères Dorries.
3*^) Plusieurs Apollo capturés pendant le courant d'une seule
année, en 1887, dans la vallée du Muhlwald, dans le Tyrol, à
1 200 mètres d'altitude, pa r un entomologiste de Berlin, Mr. Streckfuss,
— 216 —
et dont la tige des antennes est vivement annelée de noir comme
celle de Delius qui volait du reste simultanément avec l'autre
espèce.
4^) Deux autres Parnassiens du sexe mâle, figurant dans
la collection de Mr. Grum-Grshimaïlo de St. Pétersbourg, les-
quels, fort voisins comme aspect de Rhodius qu'ils excèdent
cependant de beaucoup par la taille, possèdent des antennes
semblables à celles d'Apollonius. L'auteur pense également que
ces sujets litigieux pourraient bien être des hybrides entre ces
deux formes.
Telles sont les vues émises et les faits articulés par le savant
Lépidoptériste de Berlin. Que peut on maintenant en conclure?
Il convient d'abord de faire observer qu'il serait peut-être
bien téméraire de formuler, dans l'état actuel de nos connaissances,
un jugement absolu sur cette importante question qui n'a pas
encore reçu une préparation suffisante. La science des hybrides
chez les lépidoptères ne date que d'hier. L'expérience n'a pu
s'exercer jusqu'à présent que sur un nombre relativement très
restreint de cas isolés qui n'offrent pas assez de surface pour
servir de base à une règle générale. Les faits acquis dans le
passé, nous avaient habitués à ne voir dans les métis que des
produits plus ou moins intermédiaires entre les facteurs qui ont
concouru à leur donner l'existence. C'est ainsi que Deilephila
Vespertilioïdes ressemble à ses parents, aux Dell. Vespertilio
et Hippophaës; qu'Epilobii tient autant de caractères du même
Vespertilio que d'Euporbiae; qu'Hybridus est une transition évi-
dente entre Populi et Ocellata, et ainsi des quelques autres
métis que l'on connaît. Pourquoi n'en serait-il pas de même
des Parnassiens? Pourquoi chacune des espèces intervenant dans
la production d'un hybride n'imprimerait-elle pas à celui-ci des
— 217 —
signes certains et indélébiles d'une origine mixte? pourquoi enfin,
ainsi que le pense Mr. Hourath, le concours de l'un des parents
a-t-il été pour ainsi dire exclusif, au point de communiquer
au produit tous ses caractères, tandis que la part de l'autre
s'est bornée à modifier seulement l'aspect des antennes? C'est
là que gît l'obscurité de la question; et l'inégalité évidente de
conditions qui existe entre les anciens cas et ceux qui nous sont
nouvellement proposés, constitue certainement la principale diffi-
culté à ce que ces vues soient partagées sous restriction. Cette
obscurité peut cependant être éclaircie jusqu'à un certain point.
Il est possible d'expliquer cette inégalité, en admettant que
chez les Parnassiens, lors de l'acte du croisement, la résistance
à sortir des voies naturelles est respectivement très inégale
qu'elle varie selon les espèces; que chez certaines d'entre elles
elle s'équilibre d'une manière à peu près égale, tandis que
chez d'autres, elle est tout-à-fait prépondérante. Le résultat
final, c'est-à-dire Tbybride lui-même, variera dans cette hypo-
thèse en proportion de la résistence réciproque des parents;
c'est-à-dire, que ses caractères seront déterminés par la résul-
tante des deux forces opposées.
Cette interprétation concilierait les faits observés; elle ex-
pliquerait pourquoi le métis capturé dans le Tian-Chan est à peu
près intermédiaire entre Discobolus et Hesebolus; tandis que chez
les autres cas proposés le travestissement n'a pu s'exercer que
sur des parties aussi peu importantes que les antennes.
On sait que ces organes no varient jamais chez les mêmes
espèces de Parnassiens; de sorte ({ue pour se rendre un compte
exact des modifications qu'ils présentent cependant chez les sujets
litigieux que nous avons analysés plus haut, on se trouverait
dans la nécessité d'accorder à ces changements une valeur spéci-
— 218 —
fique, et de considérer les exemplaires qui en sont atteints comme
des représentants de vraies espèces encore inédites.
Or, la rareté même de ces cas excluant cette dernière hypo-
thèse, où lui donnant pour le moins une grande invraisemblance,
il ne reste, s'emble-t-il, d'autre alternative que d'entrer dans
les vues de notre auteur, c'est-à-dire de classer ces Parnassiens
anormaux parmi la catégorie des hybrides.
Telle paraît être la conclusion de ce chapitre. Nous n'osons
cependant pas la formuler avec une complète assurance. Cette
question nous paraît si délicate et encore tellement entourée
d'incertitude, qu'une affirmation positive dans un sens quelcon-
que serait assurément prématurée. Elle ne nous semble pas
encore arrivée à une maturité suffisante qu'elle n'atteindra qu'à
la suite de nombreuses observations effectuées surtout sur le
théâtre même de la nature.
Cependant, nous devons faire remarquer que parmi les élé-
ments de tout problème du genre de celui que nous venons de
développer, il existe toujours certaines données maîtresses qui
exercent une influence parfois décisive sur la solution encore
à intervenir; et nous devons reconnaître que si les vues de notre
honorable et savant auteur par analyse desquelles nous terminons
les dernières pages de ce livre, n'ont pas encore répandu une
lumière complète sur la question si importante de l'hybridation
des Parnassiens, elles l'éclairent pourtant d'un jour tout-à-fait
nouveau, auquel il est peut-être réservé de nous dévoiler plus
tard la vérité toute entière.
Fin.
Jules Léon Austaut.
Table des Matières.
Pages
Préface 1
Avant-propos du Supplément , 168
I. Caractères physiques et organiques des Parnassiens .... 16
II. Situation des Parnassiens dans la série des Lépidoptères . . 26
III. Classification des Parnassiens en groupes naturels .... 33
Tableau de classification -iO
IV. Distribution géographique des Parnassiens 45
Tableau synoptique des espèces de la Faune Paléarctique . . 58
id. id. exotiques 60
V. Catalogue raisonné et descriptif des espèces 66
Parnassius Actius, Eversm 94
id. Albulus, Honr 209
id. Alpinus, Stgr 178
id. Apollo, Lin 86, 193
id. Apollo, Lin. Aberration . . 193
id. Apollonius, Eversm 120
id. Bremeri, Brera 124
id. Cardinal, Gruni 83
id. Charltonius, Gray 188
id. Clarius, Nordni 147
id. Delius, Esp 114
id. Delius, Esp. Aberrations 200
id. Delphius, Eversm 71
id. Dentata, Stgr 149
id. Discobolus, Alph 100
id. Eversraanni, Mén 133
id. Felderi, Brera 143
id. Flavomaculata, Stgr 123
— 220 —
Pages
Parnassius Gigantea, Stgr 159
id. Graeseri, Honr 127, 173, 198
id. Hesebolus, Nordin 88, 191
id. Hoiirathi, Stgr 108, 181
id. Illustris, Grum 205
id. Immaciilata, Mén 161
id. Infernalis, Stgr 74
id. Insignis, Stgr 106, 175
id. Iiitermedius, Mén 115
id. Melaina, Honr 197
id. Melanophia, Honr 196
id. Minima, Honr 152
id. Minor, Stgr 104
id. Mnemosyue, Lin 155
id. Namanganus, Stgr 76
id. Nigricans, Stgr 103
id. Nomion, Fisch 91
id. Nubilosus, Christ 157
id. Phoehus, Boisd 114
id. Princeps, Honr 67
id. Khodius, Honr 96
id. Eomanovi, Grum 111, 203
id. Sedakovii, Mén 117
id. Sihirka, Nordm 88
id. Simonius, Stgr 184
id. Staudingeri, Bang Haas 79
id. Stubbendorfii, Mén 161, 182
id. Stys, Stgr 75
id. Superbus, Grum 206
id. Tenedius, Eversm 129, 176
id. Tianchanica, Stgr 100
id. Transiens, Stgr 81
id. Wosnesenskii, Mén 137, 170
Considérations sur les cas d'hybridation observés chez les Parnassiens 212
Légende
des planches par ordre alphabétique des espèces.
Parnassius Actius, Everni
id. Alpinus, Stgr
id. Apollo, Lin |
id. Apollo, Lin. Aberration .
id. Apollonius, Eversm. . .
id. Bremeri, Breni. { ^^. ,^ , '
{ vanete
id. Cardinal, Grum
id. Charltonius, Gray . . .
id. Clarius, Nordm
id. Delius, Esp
id. Delphius, Eversm. . . .
id. Dentata, Stgr
id. Discobolus, Alph. . . .
id. Eversmanni, Mén. . . .
id. Felderi, Brem
id. Flavomaculata, Stgr. . .
id. Gigantea, Stgr
id. Graeseri, Honr
id. Hesebolus, Nordm. . . . |
Insectes parfaits
Poches
cornées
pi. 1 fig.
pi.
fig.
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id. Insignis, Stgr.
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Melaina, Honr
Melanophia, Honr. . .
Minima, Honr
Minor, Stgr
Mnemosyne, Lin. . . .
Namanganus, Stgr. . . .
Nigricans, Stgr
Nomion, Fisch
Nubilosus, Christ, . . .
Princeps, Honr
Khodius, Honr
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Eomanovi, Grum. l variété (J
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Sedakovii, Mén. . . .
Simonius, Stgr. . . .
Staudingeri, Bang Haas
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Tenedius, Eversm.
Transiens, Stgr. .
Wosnesenskii, Mén. l ^^. ,, ,
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Page
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qui est vue
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elles sont
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hérisssées
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id.
cette nymphe
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13 degrés
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13
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id.
ou s'accomodant
id.
66
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connaître les
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sont venues
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sont caractérisées
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donnée
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ils existent
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il existe
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connaissions
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173
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id.
Alpina
id.
Alpinî/s
id.
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16
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Leurs teinte
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Leur teinte
id.
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17
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Quand au corps
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Quant au corps
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id.
13
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Nous comjjrimons
id.
Nous exprimons
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d'après nature
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tous ces membres
PI. 1.
1,
z.
5.
.^««tt»
8.
Fig. 1. 2. n. Chonillo, Chrysalide et Cocon du Parnassius ÂpoUo, Liiiné.
Fig. 4. Tentacule rctractile grossiedo la clionillo du Paru. Âpollo, Linné.
Fig. 5. Antenne grossie du Paru. Apollo, l.iiinô.
Fig. 6. Antenne grossie du Parn. Apollonius, Kvorsniann.
Fig. 7. Antenne grossie du Parn. Muemosyne, LinnO.
Fig. 8. Antenne grossie du Parn. Delphius, Eversniann.
PI. 2.
3.
T
8.
g
Fig. 1. J. l'urii. Apollonius, Evorsm. Fig. 3. 4. Para. Discobolus, Alph.
Fig. 5. 0. l'arii. Rhodiiis, Jlonr. Fig. 7. 8. Parn. var. Intermedins, Méii.
t.
PI. 3,
t
^^^^^^
8.
Fig. 1. 2. r;iiii. Apollo, Lin. Fig. :?. 4. rarn. Delliis, Fs]).
Fig. 5. 6. Paru. Bremeri, Brem. Fig. 7. 8. Parti. Tenedias, IJvorsni.
1.
l'I. 4.
3.
Z.
9
«
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§
8.
'ig. 1.2. Paru. Mnemosyne, I-in. var. Nnbilosiis, Clirist. Fig. 3.4. Parn. Mnemosyne, l/in.
Fig. 5. G. Pani. Everemanni , Mon. Fig. 7. S. Parti. Clarins, Eversin.
PL 6
1.
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WB^
(|g5^<o^
8.
tB'C
Fig. l. 2. Parn. Nordmanni, Mt3n. var. Minima, lloiir.
Fig. 3. 4. Paru. Charltonius, Gray var. Princeps, Hoiir.
Fig. 5. (). Parn. Standinsruri, Baiig Haas (profil et face).
FifT. 7. H. I';irii. StaU(liiig;ori, l'.aiif,' flaas dlossous ot dossu.s).
PI. 6
Pig. 1. 2. Paru. ApoUo, Lin. var. Hesebolos, Nurdm. 6 +
PI. 7.
Fig. 1. Parn. Apollo, Lin. 3
Fig. 2. 3. Tarn. Discobola8, Alph. S î
PL a
Fig. 1. 2. Pain. Discobolus, Alph. var. Minor, Stgr. S $
Fig. 3. Parn. Discobolus, Alph. var. $ Nigricans, Stgr.
J'i. 0.
Fig. 1. 2. Farn. Rhodiiis, Ilonr. S 2
Fig. 3. Parti. Delius, Esp. var. Sedakovii , Mén. ^
PI. 10.
^^cv--
Fig. 1. Pam. Honrathi, Stgr. rf Fig. 2. Paru. Actins, Eversm. ^
Fig. .3. Pam. Bomanovi, Grum. S
PI. 11.
Pig. 1. Parn. Romanovi, Grum. var. <^ Fig. 2. Paru. Honrathi, Stgr. Ç
Fig. 3. Paru. Delins, Esp. var. Intormedius , Mén. S du Turkestan.
PI. 12.
Fig. 1. 3. Pain. Delius, Ksp. var. Interniedius, Mén. cî ?
Fig. 2. l'arn. Noinion, Fisch. S
PI. 13.
Fig. 1. 2. Parn. Dellus, Esp. S+ Pig- 3. Paru. Tonedius, Ever.sin. S
PI. 14.
Fi^'. I. P:ini. Insigrnis, Stgr. S Fig. 2. Paru. Bremeri, Brom. S
Fig. 3. Pari). Bremeri, Brom. var. (S
PI. li
Fi^. 1. 2. Paru. Âpollonins, Evorsm, S ?
Fig. .'i. Paru. Apollonius, Kvorsm. al). Flavomaculata , Stgr. V
PL 16.
Fig. 1. 2. Parn. Charltonius, Gray var. Prlnceps, Uonr. i^
PI. 17.
Fig. 1. Parn. Delphius, Evorsm. S
Fig. 2. Pam. Delphius, Eversm. var. Infernalis, Stgr. cî
Fig. 3. Paru. Namanganus, Stgr. S
PI. 18.
Fig. 1. 2. Para. Standingeri , Bang Haas 6 2
Fig. 3. Parn. TraDSlenB, Stgr. cî
PI. 10.
Fig. 1. Paru. Cardinal, Grum. S Fig. 2. Para. Pelderl, Breiu. S
Fig. 3. Parn. Graeserl, Honr. S
PI. 20.
Fig. 1. Pam. Clarios, Eversm. 3 Fig. 2. Tarn. Eversraaiini, Mén. S
Fig. 3. Parn. Wogncscnskil, Mon. type 2
PI. 21.
Fip. 1. 2. Parn. Clarins, Kvorsin. var. Dentata, stt,'r. çj î
Fig. 3. Parn. Wosnesenskii , Méii. var. '+
PI. 22.
Fig. 1. 2. Parn. Nordmannl, Mén. var. Hinima, Uonr. 6 9
Fig. 3. Paru. Stubbendortli , Mén 6
PI. 23.
Fig. 1. 2. Paru. Mnemosyne, Lin. S^
Fig. 3. Paru. Mnemoayne, Lin. var. Nabilosos, Christ, c^
PI. 24
Fig. 1. Parn. Mnemosyne, Lin. var. Nabilosns, Christ. $
Fig. 2. 3. Parn. Mnemosyne, Lin. var. Gigantea, Stgr, (J?
I.
Supplément.
n.
6.
T.
10.
8.
Fig. 1. 2. l'ani. (.îraeseri, Honr. Fig. :{. 4. Pain. WosneseDSkii, W-n.
Pig. 5. 6. Paru. Tenedius, Kversiii. Fig. 7. 8. Paru Stubbendorfli, Meti.
Fig. 0. 10. Parn. Simo, Gray var- Siinonius, Stgr.
PI. II.
,' '>
ï o
P^if,'. 1. l';irn. Graeseri, ilonr. (varir-t»' hlanchn» +
Fig. 2. Parn. Insig^nis, Stgr. + Fig. '•\. Vwxw. Tenedius, Kver.sni. v
l'i. m.
Fig. 1. Paru Ai)()lloniiis, Kversni. vur. Alpinus, ïStgr. c'
Fig. 2. P.irn. Hourathi, Stgr v.-ir c^
IV
/
o
A
#
Fig. 1. 2. Pani. Simo. (Iniy var. Simonins. Stgr. -? y
Kig. 3. Parn. Stnbbendorfii, Mi-n V
n. V
Fig. l. li. l'uni. Charltonius, Gray 6 2 Fig. :{. Parn. Romanovi, Cnim. ^
ri. VI.
Paru. ApoUo, \Àn. var. Hesebolus, Nonlni
Fig. 1. type + lAltui). Fig- -• type + (Koiildjai.
IM. Vil.
(^.
(
Fig. ]. P:ini. Apollo, Lin. '^ Fig. 2. Paru. Apollo, l.iii. v;.!
Fig. :i. 4. Paru. Koinauovi, Gruiii. (l'odie cormoi.
n. VI IL
T\g. 1. Pan; Stiibbendorlii, .Mi n. \:\\. Melanoijhia, Hoiii.
V\g. 'J. l'arii. Graescri, llnnr. ^
Fig. A. l'arn. Mnemosyne, i/m. vai. Molaina, llonr.
Jalci L4oD Aaatnut, BnllPiçard» , •/«■Mi'm » yxinlufr,
H. Brabnndt, Leipzig, liihuji,, ,1,1,1: Àng Kilrtb . LvipilK. tm/.riu.fiU
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