MESSAGER
DES SCIENCES HISTORIQUES
. ou
ARCHIVES
DES ARTS ET DE LA BIBLIOGRAPHIE
DE BELGIQUE
LISTE DES COLLABORATEURS.
MM. P. Bergmans, Dr en philosophie et lettres, à Gand.
B-jn J. B. Béthune-de Villers, à Gand.
P. Claeys, avocat à Gand.
Emile de Borchgrave, ministre de Belgique, à Constantinople.
Le P. H. Delehaye, à Louvain.
Cte de Marsy, à Compiègne.
J. Th. de Raadt, secrétaire et membre fondateur de la Société
d'archéologie, à Bruxelles.
Fr. De Potter, homme de lettres, à Gand.
L. de Villers, conservateur des Archives de l'Etat, à Mons.
Alph. de Vlaminck, archéologue, à Bruges.
A. Du Bois, avocat et conseiller communal à Gand.
J. Felsenhart, docteur en philosophie et lettres, à Bruxelles.
Ach. Gallet-Miry, à Gand.
P. Génard, archiviste de la ville d'Anvers.
M. Heins, avocat à Gand.
H. Helbig, bibliographe, à Liège.
H. Hymans, conservateur à la Bibliothèque royale, à Bruxelles.
Baron Kervyn de Lettenhove, membre de l'Académie de Bel-
gique, à Bruxelles.
Le chanoine J. B. Lavaut, secret, et archiv. de l'Evèché, à Gand.
F. Nève, professeur à l'Université de Louvain.
J. J. E. Proost, docteur en sciences pol. et adra., à Bruxelles.
Ch. Rahlenbeek, à Bruxelles.
Van Bastelaer, président de la Société archéolog. de Gharleroi,
à Bruxelles.
D. van de Casteele, archiviste de l'Etat, à Liège.
R. Van den Berghe, attaché à la Bibliothèque, à Gand.
V. Vanderhaeghen, archiviste de la ville, à Gand.
Enw. Van Even, archiviste de la ville de Louvain.
Van Spilbeeck, Dr à Soleilmont, Gilly.
A. Verhaegen, ingénieur honoraire, archéologue, à Gand.
P. Voituron, avocat et conseiller communal, à Gand.
MESSAGER
DES
SCIENCES HISTORIQUES
ou
ARCHIVES
DES ARTS ET DE LA BIBLIOGRAPHIE
DE BELGIQUE
Recueil publié par MM. le Comte de Limburg-Stirum, Sénateur,
Docteur en droit, etc.; Ferdinand Vanderhaeghen. Bibliothécaire
de l'Université, etc.; Baron Béthune, archéologue.
Emile Varenbergh, Conseiller provincial, Membre delà Commission
de statistique, etc., Secrétaire du Comité, à Gand.
ANNÉE 1890
GAND
IMPRIMERIE ET LITHOGR. EUG. VANDERHAEGHEN
rue des Champs, 60
1890.
I ' .- ï.
1 —
NOTICE
SUR LE
LOCAL DE LA CONFRÉRIE DE SAINT-GEORGES
*
A. O-A.3^13
DE 1381 A 17901.
La gilde gantoise de Saint-Georges, la plus
grande et la plus puissante des confréries d'arba-
létriers de la Flandre, après avoir fait élever de
somptueux bâtiments pour ses réunions, ne pou-
vait se contenter des cibles et de la galerie
construites en 1440 dans la cour de l'ancienne
halle. Elle en fit établir de nouvelles plus en rap-
port avec la richesse de son local. En 1486 on
posa la première pierre d'une élégante galerie
destinée à faciliter l'accès des cibles et à mettre
les tireurs et les assistants à l'abri des flèches. La
ville intervint dans la dépense : « Item ghegheven
ten beveelne van scepenen..., dit le compte com-
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., 4e livr., 1889, p. 361.
— 2 —
mimai de 1486, int legghen van den eersten
steene van den anlegghene .van der galérien int
hof van den grooten heere Sente Jooris... » Elle
fut terminée en 1498 pour le grand tir, land-
juweel, qui eut lieu en cette année, comme nous
Fapprend le Memorie boek der stad Ghendt : « 1498.
Item, up de plaetse van sente Joorishuus tôt den
Belfroote waren gliestelt up elc ende een doelhuus
met ender scoonder alleye ghedect met scaelgien
ende also scoene ghescildert, ende die van Ber-
ghen sente Winnocx wonnen den upperprys. »
Les galeries réunissant les cibles faisaient le
plus bel ornement des lieux de tirs des gildes
d'arbalétriers. Ces confréries rivalisaient entre
elles pour la beauté et la magnificence de cette
partie de leurs locaux. Celles des arbalétriers de
Gand et de Malines étaient les plus belles. Schayes,
dans son Histoire de V Architecture en Belgique, a
donné une description de cette dernière. « Un
genre d'édifices qui, dit-il, était propre encore
aux anciennes villes de commune, c'étaient les
locaux où se réunissait la garde bourgeoise
connue sous le nom de gilde ou de serment, où
elle s'exerçait au tir et où elle avait le dépôt de
ses armes. Ils se composaient généralement d'un
grand jardin pour le tir et d'un bâtiment servant
de' lieu de réunion et d'arsenal. Le plus remar-
quable de ces établissements, avant le milieu
du XVIe siècle, paraît avoir été celui du Serment
des arbalétriers de Malines, pour le magnifique
portique que ce Serment fit construire en 1519
dans son jardin. Cette galerie, longue de 381 pieds
— 3 —
(mesure de Malin es) était portée par 68 colonnes
en pierre bleue. Au centre s'élevait un élégant
pavillon carré, percé sur ses quatre faces, de
grandes fenêtres. On admirait pour la beauté
du travail, la charpente du toit qui couvrait
ce pavillon et le portique \ » Et Fauteur cite
également la galerie de la Confrérie de Saint-
Georges à Gand.
Celle-ci surpassait en longueur et sans doute
aussi en beauté celle de Malines. Elle mesurait
1 54 pas selon Van Vaernewyck : « hebbende eene
schoone gallerye van blauwe steenen, lang van
den eenen steger tôt den anderen 154 schreden,
en doelen die bynaer de zelve lengde hebben 8. »
Sanderus dit qu'elle avait une longueur de 110 pas
et qu'elle était pavée en pierres bleues. » Domus
ampla et magnifica sub eodem Caesare, circa quam
regnorum ejus insignia quoque visuntur, con-
structa,porticum habet caeruleo lapide stratamad
passus 110 longam, è regione aedis Praetoriae \ »
De Busscher, dans sa notice sur la Confrérie de
Saint-Georges, s'exprime ainsi : « la plaine inté-
rieure, où étaient construits les berceaux, avait
450 pieds de longueur. Elle s'étendait jusqu'au
beffroi, derrière les habitations sises de face sur
la place de la maison échevinale. Au milieu de la
cour des exercices avait été bâtie en 1486-1487
parallèlement aux berceaux et sur toute leur éten-
1 A. G. B. Schayes, Histoire de l'Architecture en Belgique, t. IV,
p. 54.
1 Marc Van Vaernewyck, Historié van Belgie, t. II, p. 219.
3 Sanderus, Flandrià illustrât a, t. 1. p. 203,
— 4 —
due, une élégante galerie '. » La beauté de cette
galerie était telle que la Confrérie l'invoqua en
1670 pour obtenir des subsides de la ville, afin de
réparer les dégâts que la chute d'échafaudages
placés sur le beffroi y avait occasionnés. Elle
disait dans sa requête du 19 septembre 1670 :
« dat het beclaghelick saude wesen dat een soo
raer stuck staende int midden van de stadt, ende
wesende eene van de schoonste wercken van de
seventhien provincien, by faute van secours saude
commen ter totale ruyne 2. » Cette considération
fut d'un tel poids auprès des magistrats de la
ville, qu'à défaut de ressources pour donner à la
Confrérie un secours en argent, ils lui accordèrent
l'exemption d'un homme dans chacune des dix-huit
compagnies de la garde bourgeoise, afin de se
procurer par la vente de cette faveur les moyens
de réparer la galerie, « Schepenen van der Keure
ghesien het verdragh van myn Ed. heer den
hoogh balliu deser stede, ende sonderlynghe
regard nemende op de redenen by requeste ghe-
allegiert... consenteren dat de supplianten, omme
daermede te maecken de werken by de selve
requeste gheconcipieert, sullen moghen te kiesen
tôt eenen man uyt elcke respective compagnien
van de borgherlycke wacht deser stede, die allée -
nelyck exempt sullen wesen van de voors. per-
soenelyck borgherlycke wacht, ende contributie
1 Edm. De Busscher, La Confrérie de Saint-Georges, p. 18.
* Archives de la Confrérie, vol. 1670-1679 f° 3, à la Bibliothèque
de l'Université.
— 5 —
van diere haerlieden leven lanck gheduerende,
mits van de penninghen danof staende te proce-
deren doende rekeninghe, bewys ende reliqua '. »
La galerie, qui avait une longueur de 385 pieds,
se terminait à chaque extrémité par un escalier.
Elle reliait les cibles aux abris des tireurs. La
cour intérieure avait une étendue plus grande ;
elle dépassait d'environ 65 pieds celle de la galerie.
Aux deux côtés de l'entrée de celle-"ci, près de la
maison de la gilde, où se tenaient les tireurs, il
y avait un mur de quatre pieds de hauteur et de
huit pieds de largeur, destiné à servir d'appui
pour les arbalètes. Ces murs ont été détruits à la
fin du XVIIe siècle par les soldats logés dans le
local, pendant les guerres de cette époque 2.
La construction de la Gildehuus, de la Chapelle
et de la Galerie avait coûté de grosses sommes
d'argent, que la Confrérie fut pendant longtemps
hors d'état de payer. Elle obtint de Charles-Quint
l'autorisation d'établir une loterie dont le produit
servirait à payer ses dettes. La charte d'octroi du
13 octobre 1517, porte que « les Roy, Doyens et
proviseurs de lancienne Confrarie et Grant sere-
ment de Monseigneur Saint George en notre ville
de Gand, ... a lonneur de Dieu et Monseigneur
Saint George, aussi pour la decoracion, subside
et ayde de noz officiers et gens de loy de la ditte
ville, ont EdifFé une belle chappelle et maison
1 Archives de la Confrérie, vol. 1670-1679, f° 3, à la Bibliothèque
de l'Université.
2 Archives de la Confrérie de Saint-Georges, vol. 1690-1699,
i'° 199, à la Bibliothèque de l'Université.
— 6 —
auprès et à l'opposite de la maison esche vinale
d'icelle ville, pour en estre de tant plus tost
secouru et aydé par les notables et confrères de
la dicte Confrarie quant besoing serait. Ont aussi
commencié de faire ediffer une belle et magnifique
galerye en la Court de la dicte Confrarie, pour
mieulx hanter le jeu de l'arbalestre, lesquelles
maison et galerye leur ont cousté excessives
sommes de deniers \ »
La mauvaise situation financière de la Confrérie
à la fin du XVIIe siècle et pendant tout le XVIIIe,
l'engagea à tirer parti de la galerie de différentes
manières. Le 2 octobre 1692 elle la loua à un
commissaire des armées pour y remiser ses voi-
tures et ses chariots pendant l'hiver2. En 1698
elle proposa aux échevins de la Keure, pour éviter
la suppression dont elle était menacée, de faire
servir la galerie de halle aux toiles et de l'élargir
à cet effet du double vers la rue des Régnesses 3.
En 1737 elle revint à ce projet, qui n'avait point
été agréé, et elle proposa de nouveau d'établir une
halle aux toiles dans la Galerie, élargie cette fois
du côté opposé et reliée par un escalier à la salle
de la Confrérie de Saint-Michel, où devaient se
faire le mesurage et le timbrage des pièces de
toiles apportées au marché. Ce projet ne fut pas
plus réalisé que le précédent *. Enfin, en 1777,
1 Chartrier de la Confrérie de Saint -Georges, n° 36 aux archives de
l'État à Gand.
2 Archives de la Confrérie, vol. 1690-1699, f° 151, à la Bibliothèque.
3 Ibid., f'° 196.
* Ibid., vol. 1737-1739, f° 58.
- 7 -
la Confrérie résolut de vendre la galerie en
divers lots pour la démolir, mais cette résolution
non plus n'eut pas de suites ' . La galerie ne fut
démolie qu'en 1798 après la vente du local comme
bien national.
Les cibles qui existaient de chaque côté de la
galerie avaient à peu près la même longueur que
celle-ci, dit Marc Van Vaernewyck « en doelen die
bynaer de zelve lengde hebben. » A chaque extré-
mité se trouvaient des chambres pour abriter les
tireurs et le but, « op elc ende een doelhuus 2. »
Les cibles étaient d'inégale étendue ; celles qui se
trouvaient à l'est se nommaient les courtes cibles
{de corte doelen). Elles sont mentionnées avec leurs
chambres dans divers actes passés entre la Confré-
rie et les propriétaires des maisons situées rue
Saint-Jean, rue des Régnesses et rue Haut-port.
Dans un acte du 21 décembre 1645 au sujet de la
location par la Confrérie d'une de ces chambres à
Marc Vanden Kerchove, propriétaire de la maison
den Grooten Moor, rue Haut-port, il est dit :
« het doelhuuseken van den zelven guide, staende
achter den corten doel jeghens het huus van den
zelven Kerchove 3. » Et dans un acte du 27 juin
1736, par lequel la Confrérie donne en bail emphy-
théotique à M. Pascal -Bois de Vigne, proprié-
taire de la maison située rue Saint-Jean qui porte
1 Registre des résolutions de la Confrérie, 1734-1779, f° 158. Aux
Archives de l'État à Gand.
* Memorieboek der stad Gent, an0 1498.
3 Archives de la Confrérie, vol. 1483-1649, f° 28 à la Bibliothèque
de l'Université.
— 8 —
aujourd'hui le n° 9, un terrain longeant à l'ouest
sa maison, on lit : « sekere hunne erfve gheleghen
omtrent den corten doel al de suyt west cant, ende
den huyse van den selven Pascal ' . »
L'une des deux courtes cibles que l'on voit figu-
rer sur le plan de Sanderus, se nommait den Fyme-
leere. On trouve cette expression dans un acte
du 19 mai 1602, par lequel la Confrérie permet
à Jean Ondermaerck, propriétaire d'une maison
située rue des Régne sses, de se servir pour ses
constructions du mur de la maison appartenant à
la Confrérie dans la rue Saint-Jean et de celui de
la chambre de la cible derrière cette maison :
« t versouck van weghe Jan Ondermaerck, heur-
lieden en mede-proviseerder, proprietaris van den
huuse ghenaemt het Groen-huys, van te moghen
metsen ende temmeren in den muere, neffens zyne
erfve, van thuus van den zelven guide staende in
Sente- Janstraete,daer nu Jooris Bonnewyn, cnape
van tvoors. guide, inné es wonende, metgaeders
een deel van den muere van den doelhuus genaemt
den fymeleere daer achter staende 2. » Cette cible
était aussi désignée sous le nom de vieille cible,
den auden doel. On la trouve ainsi mentionnée dans
une résolution de la Confrérie du 5 mai 1743
concernant la cession à cens de la maison rue
Saint-Jean habitée par les faiseurs d'arbalètes de
la Confrérie, à côté de la maison de Pascal-Bois
1 Registre des résolutions de la Confrérie, de 1734 à 1779, f° 29i',
aux Archives de l'État, à Gand.
s Archives de la Confrérie, vol. 1483-1649, f° 14, à la Bibliothèque.
— 9 -
de Vigne : « te laeten verceynssen het huys daer
jeghenwoordigh in woont es Beyens boghespander
van desen guide ende den kelder met den ghevel
benevens den ancien doel ende een deel van den
grondt daer aen gheleghen ' . »
Les cibles établies à l'ouest de la galerie étaient
les longues cibles, de langen doelen. Il en est fait
mention dans un acte du 22 octobre 1617 par
lequel la Confrérie permet à Jooris de Jonckere,
propriétaire d'une maison située parade plaetse
près de la Halle, d'ouvrir une porte dans le mur
de la Cour Saint-Georges, pour avoir accès à un
puits ainsi qu'aux longues cibles : « te maken in
den muer van den guide, eene deure, omme van
d'erfve van syne huuse an dhalle, te commen ende
accès te nemen zo totten steenput, als up derfve
van den voors. guide te weten in de langhen
doelen 2. »
Aux deux extrémités se trouvaient des chambres
de cibles, doelhuusen-, l'une pour les tireurs près de
la Gildehuus, l'autre à l'étage de la maison située
rue Saint-Jean à côté de la nouvelle halle, pour
abriter la cible ou le but. Cette disposition s'ex-
plique par la différence de niveau des deux extré-
mités de la Cour Saint-Georges ; la hoogh-poorte
étant beaucoup plus élevée que la rue Saint- Jean,
il avait fallu remblayer le terrain du côté de cette
dernière rue, et la cible s'est trouvée placée plus
» Archives de la Confrérie, vol. 1740-1749, f° 25.
» Archives de la Confrérie, vol. 1483-1649, f° 22, à la Bibliothèque
de l'Université.
— 10 —
haut que le niveau de celle-ci. Le rez-de-chaussée
de la maison avait par suite l'aspect d'un souter-
rain ou d'une cave ; le premier étage était occupé
par la chambre de la longue cible, doelcamer. Un
état des revenus et des dettes de la Confrérie, de
l'année 1703, mentionne comme suit la maison
située à côté de la halle : « Item de vaulte ofte
kelder commende onder den langhen doel ten voor-
hoofde in Sente-Jansstraete neffens d'achterpoorte
van den ghulde, ghebruyckt by Pieter de Noyé \ »
Sous la doelhuus à l'autre extrémité de la longue
cible, se trouvait également une cave; elle était
à l'usage de la maison que la Confrérie possédait
sur la parade plaetse à côté de la Gildehuus,
depuis la suppression de la Jeune Confrérie. Elle
est indiquée de la manière suivante dans un compte
du maçon Abraham Kempe, concernant des tra-
vaux exécutés en 1682 dans la maison louée à
l'avocat Pyn, parade plaetse; « het maeken van
de vaulte onder den langhen doel 2. »
La longue cible fut reconstruite en 1729. La
Confrérie paya le 13 octobre de cette année au
maçon Van Merschbrugghe la somme de 4L, 6 s.,
8 g., over het maeken van den langhen doel in de
hove van den guide 3. Elle fut refaite une seconde
fois en 1791, mais alors notablement diminuée. La
Confrérie avait loué au serrurier Guersouille, qui
demeurait dans la maison située parade plaetse
1 Archives de la Confrérie, vol. 1700-1709, f° 59, à la Bibliothèque.
« Ibid., vol. 1680-1684, f° 107.
3 Ibid., vol. 1728-1729, f° 135.
— 11 —
près de la balance de la ville, le terrain de la
longue cible, depuis le mur de la cour de la nou-
velle maison construite en 1751 rue Saint-Jean
près de la halle, jusqu'à la prison communale,
pour y élever une baraque ou atelier de serrurerie.
« Item competeert aen den gilde d'huere van den
grond daer op is staende eene hauten loge teynde
den gulden hove jegens den muer van het huys
van den Gilde ende den gonnen van stadts vange-
nisse gemaeckt ende ghebruyckt gheweest by den
slotmaker Pieter Guersouille ende alsnu deszelfs
weduwe by voorwaerde ingegaen den 26 july
1772 \ » Le même terrain, d'une largeur de
76 pieds, fut cédé par bail empliythéotique du
12 mai 1791 au sculpteur Charles Van Pouckepour
y construire son atelier de sculpture . En cette année
la Confrérie fit reconstruire la cible et la doel-
camer situées à l'ouest de la galerie. La longueur
de la cible fut diminuée de plus de 150 pieds et
un nouveau but fut construit près de la maison de
Ch. Van Poucke, située Parade plaetse Q n° 283,
aujourd'hui n° 3. L'acte du 12 mai 1791 contient
la mention suivante qui fait connaître la situation
de la nouvelle doelcamer « consenteren in het
maecken van de venster commende boven zyn
achterpoortjen nevens onze nieuwe doelcamer.»
La construction de la nouvelle cible et de la
nouvelle chambre de tir coûta 1990 florins.
La cour de la Confrérie de Saint-Georges, qui
1 Archives de la Confrérie, vol. 1775-1786, f° 1, passim, à la
Bibliothèque.
- 12 -
avait une longueur de 450 pieds, se prolongeait
depuis la grande maison de la Gilde (Gildehuus)
sur la Hoogh-jworte jusqu'aux deux maisons que
la Confrérie possédait dans la rue Saint- Jean.
Entre ces deux maisons se trouvait sa porte de
derrière, « t'huus ende hof van den Guide van
Sente Jooris, » dit un acte de 1561, « ten voor-
hoofde up de Hoochpoorte neffens den jonghen-
guide van Sente Jooris an deen zijde ende Jan
Meynkin met zyne consorten an dandere, ende
uutcommende met andere hende in sente Jans-
straete ' . »
La porte de sortie que possédait la Confrérie
dans la rue Saint- Jean, était l'entrée de son local
primitif près du beffroi en 1381. On y avait accès
par plusieurs escaliers intérieurs. L'exhaussement
du terrain vers la rue Saint-Jean lors de la con-
struction des cibles et de la galerie, avait nécessité
l'établissement de ces escaliers. La pente naturelle
du terrain a été rétablie, au commencement de
ce siècle, par les acquéreurs de la partie du local
située au sud; la porte et les escaliers ont été
remplacés par une porte coclière.
La porte de derrière de la Confrérie dans la
rue Saint-Jean se trouvait près du double escalier
de la nouvelle Halle aux draps, construit en 1427 2
et démoli en 1716 3. La proximité de cette porte
et du double escalier de la Halle, est établie par
Vry huis vry erve, 1561, bl. 129.
Comptes de la ville, 1426-1427.
lbid., 1716.
— 13 —
une ordonnance des échevins de la Keure du
20 juillet 1538, qui défend de déposer des immon-
dices en cet endroit. « Dat hem niemant en ver-
voordere eeneghe vuylichede te brenghene ofte
doen brenghene titsschen der poorte van den hove
(oan Sente-Jooris) ende den steeghere van den' halle,
up ghelycke boete ' . »
De chaque côté de sa porte dans larue Saint- Jean,
la Confrérie avait une maison : Tune attenant à la
nouvelle halle et l'autre aboutissant à la maison
qui a successivement appartenu à Talboem et à
Jean Pricke, puis à F. Van de Vyvere, à Pascal-
Bois de Vigne et à Vispoel. C'étaient les anciennes
maisons de la Confrérie dans la rue Saint- Jean,
qu'elle avait abandonnées après l'acquisition de
l'ancienne halle et qu'elle donna dès lors en loca-
tion. On voit ces maisons sur le plan de Sanderus :
une grande, derrière les courtes cibles, probable-
ment l'ancienne Gildehuus, et une petite, derrière
la longue cible, près de la nouvelle halle.
En 1602, la grande maison, qui était alors très
détériorée, fut occupée par le messager, cnape, de
la Confrérie. C'est ce que dit l'acte du 19 mai de
cette année, par lequel le serment de la Gilde
accorde à Jean Ondermaerck, propriétaire d'une
maison rue de Régnesses, « van te moghen metsen
ende temmeren in den muere, neffens zyne erfve,
van thuus van den zelven guide staende in Sente-
Jansstraete, daer nu Jooris Bonnewyn cnape van
1 Chartrier de la Confrérie de Saint-Georges, n° 38, aux Archives
de l'État à Gand.
— 14 —
tvoors. guide inné es wonende '. » La Confrérie
fit restaurer cette maison et y logea son faiseur
d'arbalètes jusqu'en 1745. Avant le XVIIe siècle,
les faiseurs d'arbalètes de la Confrérie habitaient
les boutiques d'écrivains publics contruites sous
la Chapelle et réunies en une seule habitation,
auprès de laquelle on avait fait en 1582 un atelier
et une forge, eene werkcamer en eene smesse 2.
On fit les mêmes constructions près de la maison
de la rue Saint- Jean, pour qu'elle pût répondre à
sa nouvelle destination.
Nous trouvons des indications sur cette maison
dans un acte du 8 mars 1728, par lequel la Confré-
rie vend à M. Pascal-Bois de Vigne une chambrette
qui en faisait partie. Il y est dit que la Confrérie
lui vend : « Eerst een caemer van den huyse altydt
bewoont gheweest by de boghemaeckers van
t'voorzeyde guide ende noch ieghenwoordigh be-
woont wordende by desselfs weduwe, commende
ten oosten jeghens het huys van den voornomden
heer Passchal ende ten westen jeghens d'erfve ende
open plaetse van tselve huys, t'voorseyde guide
competerende, ende in welcke caemer voor daete
van de supressie van t'zelve guide ende van d'ander
dry guldens binnen dese voornomde stadt, altydt
ghestaen hebben de cassen daer inné ghesloten
ende bewaert wierden de staele boghens van de
guide broeders, ende voorder attirail tôt het
1 Archives delà Confrérie, vol. 1483-1649, f° 14, à la Bibliothèque
de l'Université.
3 Archives de la Confrérie, livre des résolutions, f° 9, à la Biblio-
thèque.
— 15 —
schieten met de selve boghens noodigh, ende ten
Tweeden een open erfve van t'voorseyde guide
ten noorden commende jeghens de voornomde
caemer, ende ten oosten jeghens den jeghenwoor-
dighen muer van den voorseyden heer Passclial. . .
op conditien. . . dat hy heer Passchal t'synen coste
sal moeten afbreken ende van nieuws opmaecken
den zymuer van de voornomde hier vooren ghe-
cedeerde ende vercochte caemer op den auden
grondt, te beginnen van jeghens het huys ofte
woonynghe van de voors. boghemaecker, midts-
gaeders den selven muer van daer alsoo voorts
stieren te noordewaerts niet alleene soo verre als
jegenwoordigh is commende het doelhuys, maer
selfs oock noch thien voeten voorder innewaerts
ten noorden, soo verre het nieuw te maecken doel-
huys sal vuytgebracht ende ghemaeckt worden ; . . .
datd'eerste contractantenophun erfve van t'voorn.
huys van de boghemaeckers sullen moeten an-
veirden ende laeten sueren den heusedrup van het
dack van de voors. ghecedeerde camer, ghelyck sy
oock het water van het dack van het smeshuys door
huntedoen maecken tusschen den voorn. nieuwen
muer by dito heer Passchal te doen maecken ende
het voors. doelhuys, sullen moeten ontfangen ; . . .
dat hy heer Passchal sal moghen laeten syncken
het vautken van het kelderken ten deele com-
mende onder de voors. ghecedeerde caemer als-
mede naer advenant oock den vloer van het selve
keldeken, behaudens t'selve vautken tsynen par-
ticulieren coste erstellende, ende oock den vloer
van t'selve kelderken midtsgaeders den vuyt ende
— 16' —
inganck alsmecle de trappen van diere zoo van
binnen als van buyten, ende aile het gonne hy heer
Passchal . . . saude moghen commen te breken soo
van daecken als mueren van denvoorseyden huyse
van de boghemaeckers, sal hy oock moeten erstel-
len t'synen koste J . »
Le restant de la petite cour de la maison des
faiseurs d'arbalètes, fut donné le 27 juin 1736, en
bail emphythéotique, à Pascal, avec obligation de
construire à ses frais un nouveau bâtiment pour
remplacer la chambrette qui lui avait été vendue
en 1728. L'acte dit : •» Te weten dat het voor-
noemde gilde aen .den gemelden Jr Pascal by
desen is ghevende in cheynse voor neghenent-
neghentigh jaeren zekere hunne erfve gheleghen
ontrent den corten doel al den suyt west cant,
ende den huyse van den selven Pascal, alsnu be-
sloten... synde voorts gheconditionneert dat den
voorn. Pascal... sal moeten doen maeken inghe-
volghe van de modelle by hem overghegheven
ende ghesien by de heeren van den ieghenwoor-
dighen eedt, eene gloriette ofte cabinet, ter
lynghde van zeven voeten ende breede soo ende
ghelyck die alsnu bevonden wort tusschen den
doel ende den muer van den huyse van den selven
Pascal '. »
Une résolution de la Confrérie en date du 5 mai
1743 complète la description de la maison rue
1 Registre BBB, f° 92*, déposé aux Archives de la ville de Gand.
5 Registre des résolutions, 1734-1779, f° 29 v, aux Archives de
l'État à Gand.
— 17 -
Saint-Jean occupée par les faiseurs d'arbalètes :
« weert gheresolveert. . . te laeten verceynssen het
huys daer jeghenwoordigh in woont es Beyens
boghespander van desen ghilde ende den kelder
met den ghevel benevens den auden doel ende
een deel van den grondt daer aen gheleglien ' . »
Cette maison était spacieuse ; elle avait une
façade du côté de la rue Saint-Jean et une autre
sur la cour Saint -Georges, une cour et des dépen-
dances, un atelier, une forge et une cave. Pressée
par le besoin d'argent, la Confrérie la donna en
location en 1745 au prix de 15 livres de gros. Elle
loua aussi séparément la cave donnant dans la
cour. L'acte de location du 1er mars 1745 à Michel
De Laet, tailleur, décrit la maison en ces termes :
« een huys, stede ende erfve het guide compe-
terende ghestaen ende gheleghen ten voorhoofde
op de Sente- Jansstraete, aen d'een syde ghehuyst
Jor Pascal en ter andere de achterpoorte van de
concherge, lest ghebruyckt gheweest by A. Beyens
boghemaecker "2. » Enfin, le procès-verbal d'adju-
dication comme bien national, du 6 germinal
an V, en donne la description suivante : « Une
maison située dans la commune de Gand rue
Saint- Jean, consistant en une boutique, trois places
en bas, trois en haut, un grenier, une cave et une
petite cour. La cave vient sous la maison à côté
appartenant à un particulier. » Elle fut adjugée
au sieur Jean-Baptiste Paulée, représentant d'une
1 Archives de la Confrérie, vol. 1740-1749, f° 25, à la Bibliothèque.
* Ibid., f° 40.
%
— 18 -
société formée à Paris pour l'acquisition de biens
nationaux.
L'ornementation de la façade latérale de la nou-
velle Halle du côté de la cour Saint-Georges a fait
croire qu'il n'y a pas eu de constructions entre ce
monument et la porte de derrière de la Confrérie
dans la rue Saint- Jean. Pour expliquer cette orne-
mentation, on a supposé qu'une rue contournant
la Halle depuis la rue Saint-Jean jusqu'à la place
échevinale avait existé jadis. Mais cette conjec-
ture est erronée. Aucun document ne mentionne
de rue en cet endroit, et le plan de Sanderus
montre qu'il n'y en avait pas. C'est contre la Halle
que se trouvaient, du côté de la place échevinale,
l'une des cibles de la Jeune Confrérie de Saint-
Georges, et, du côté de la rue Saint- Jean, la
longue cible, langen doel} de l'ancienne Confrérie.
Enfin, l'ordonnance du 20 juillet 1538, qui défen-
dait de déposer des immondices entre la porte de
la Confrérie et l'escalier de la Halle, ne se fût
point exprimée ainsi, si une rue avait séparé les
deux bâtiments.
L'ornementation de la façade latérale de la Halle
du côté de la Cour Saint-Georges, s'explique par
l'importance qu'avait au moyen âge le local de la
Confrérie des arbalétriers. Ce local était décoré
avec luxe : la maison de la Gilde, la galerie, les
cibles étaient des constructions somptueuses.il s'y
donnait des fêtes splendides. Toute la riche bour-
geoisie faisait partie des quatre confréries mili-
taires, et celle qui réunissait le plus de membres
était la Gilde de Saint-Georges. On conçoit donc
- 19 —
que la Confrérie ait stipulé ou obtenu de la com-
mune, que la façade latérale de la halle, donnant
sur sa cour, reçût quelques ornements. Cela
explique beaucoup mieux l'ornementation de la
façade latérale, que l'existence d'une rue ou d'une
ruelle autour de l'édifice.
Plusieurs dessins conservés à la Bibliothèque de
l'Université de Gand, font voir la nouvelle Halle
aux draps construite en 1427 dans la rue Saint-
Jean, et la maison attenante. L'un de ces dessins
reproduit l'aspect de la maison vers 1635. Elle
avait alors une porte étroite surmontée d'un
auvent. L'architecture indique une construction
du XVe siècle. Sa profondeur devait être petite,
car une baie, depuis longtemps bouchée, dans le
mur latéral de la Halle, se trouve à six ou sept
mètres de la façade principale ; cette circonstance
doit faire supposer que la maison voisine n'avait
que cette profondeur, à l'époque où l'édifice a été
construit.
La maison de la Confrérie, située entre la porte
de derrière de la Cour Saint-Georges et la nouvelle
halle aux draps, était composée d'un rez de
chaussée ayant issue dans la rue Saint- Jean et
d'un étage où se trouvait la chambre de la longue
cible. Cette disposition avait fait appliquer au rez-
de-chaussée, que la Confrérie donnait séparément
en location, le nom de : huuseken by forme van
eenen helder. La maison existait de cette manière
depuis l'établissement de la longue cible, c'est-à-
dire depuis 1498, date de la construction de la
galerie et des cibles. On la trouve désignée dans
— 20 —
de nombreux reçus de la taxe sur les maisons dite
huysgheld, et de la redevance pour le pavage des
rues, savoir : le 17 décembre 1678 : een huus
ghestaen ofte gheleghen onder den langen doel in
de Sinte-Jansstraete bewoont by Pieter de Noyé;
le 22 décembre 1678 : een kelder by het belfroot,
ghebruykt by Pieter de Noyé; le 25 août 1681 :
seker huys gheleghen onder de belfroyt ; le 1er août
1684 : den kelder onder het hof van Sinte-Jooris
bewoont by Pieter Noyé ; le 29 juillet 1696 : een
huys gheleghen by de schermaersschole ' .
Les états de revenus de la Confrérie de 1703
et de 1704 portent : de vaulte ofte kelder com-
mende onder den langhendoel ten voorhoofde in
Sinte-Jansstraete neffens d'achter-poorte van den
guide, ghebruykt by Pieter de Noyé 2. Un acte
d'emprunt du 15 novembre 1730, stipule que la
Confrérie donne en hypothèque deux maisons
situées rue Saint- Jean, outre sa grande maison
rue Haut-port et celle qui était située à côté sur
la parade-plaetse. Les deux maisons rue Saint-
Jean sont désignées comme suit : la première, une
maison, fonds et héritage situés derrière la grande
maison de la Confrérie, de front rue Saint- Jean,
tenant d'un côté le sieur de Pascal et de l'autre
la porte de derrière de la susdite cour de Saint-
Georges, occupée par Àrnaut Beyens, faiseur d'ar-
balètes ; la seconde, « een huys by forme van eenen
1 Archives de la Confrérie, vol. 1670-79, f05 96 et 97 ; vol. 1680-84,
i'os 1 41 et 184 ; vol. 1690-99, f° 160, à la Bibliothèque de l'Université.
* Ibid., vol. 1700-1709, f°s 59 et 68.
- 21 —
kelder staende ten voorhoofde als het voorgaende,
commende onder den langhen doel van de selve
hove, an d'een zyde strekende ieghens den huyse
de schermscholle ende ter andere de voorghemelde
acliterpoorte,bewoont by P. Steemaere, recreatief-
meester van desen guide 4 . « Les actes de location
de cette maison ou souterrain en donnent la
description suivante : « een huyseken ofte vaut-
kelder ghestaen ende ghelegen onder den langhen
doel van t'hof van t'gulde ten voorhoofde vuyt
commende in Sinte-Jansstraete 2. Enfin la façade
au-dessus de la cave est mentionnée dans le devis
pour la construction d'une chambre de mesurage
et de timbrage, qui devait faire partie du marché
aux toiles, dont l'établissement, dans la Cour
Saint-Georges, avait été projeté en 1737. Il y est
dit : « Rekeninghe van den nieuwen te maecken
bauw, om te dienen voor de seghel tafel ende
meet tafelen», commende teynden de galderye ten
voorhoofde jeghens het belfort om de saele van
het gilde van Sinte Michiel met den nieuwen te
maecken bauw Sinte-Jansstraete te connen dienen
voor de meet tafelen. Alvoren het breeken van de
aude cape met het weeren van de tieghelen... het
breeken van het metsweerk te weten den ghevel te)-
straete... Item het nieuw maecken van den ghevel
ter straete beginnende van den opercant van de
vmite 3. »
1 Archives de la Confrérie, vol. 1730-1731, f° 115.
5 Acte du 2 juillet 1741. Archives de la Confrérie, vol. 1740-49,
f° 10, à la Bibliothèque.
3 Devis du 2 octobre 1737. Archives de la Confrérie.
— 22 —
La chambre de timbrage et de mesurage des
toiles ne fut pas construite par suite de l'abandon
du projet d'établissement d'un marché dans le
local de la confrérie, mais la doelcamer de la
longue cible fut remplacée en 1451 par une maison
bâtie au-dessus du souterrain dans larue Saint-Jean.
Cette maison, nommée het nieuw hwjs, fut louée
le 21 novembre 1731 et désignée ainsi dans l'acte
de location : « het nieuw huys ende erfve gestaen
ende gelegen in de Sinte-Jansstraete uytcommende
teynden de gallerye van het hof van desen gilde1 . »
Et dans une résolution de la Confrérie en date
du 10 février 1754, concernant un emprunt de
G00 livres de gros pour payer les dettes, il est dit :
« dat de schulden voor het meesten deel resulteren
door het nieuw huys onlanghx ghemaeckt com-
mende achter den hove nevensde schermscholle2. »
Enfin, cette nouvelle maison avait une cour entourée
de murailles, sur l'emplacement delà longue cible.
Les actes de location, que nous avons cités, d'une
partie du terrain de la cour Saint-Georges, à Pierre
Guersouille en 1772 et à Charles Van Poucke en
1791 indiquent cette cour et ces murailles. Dans
le compte de la Confrérie du 5 février 1778, nous
trouvons la mention : « Item competeert aen den
gilden d'huere van den grond daer op is staende
een hauten loge teynden den gilden hove jegens
den muer van het huys van den gilden ende den
1 Archives de la Confrérie. Registre des résolutions de 1734 à
1779, f° 103t\ Aux archives de l'État à Gand.
2 Archives lie la Confrérie, vol. 1754-1759. f° 12, à la Bibliothèque.
— 23 —
gonne van stads vangenisse gemaeckt ende ghe-
bruyckt geweest by den slotmaecker Pieter Guer-
souille 4. » Et la résolution prise le 12 mai 1791
de donner ce même terrain en bail emphythéo-
tique à Charles Van Poucke, porte : « de erfve van
aen den muer van den ho f van het acliterhuys van
den Gilde tôt aen de venster van den huyse ghe-
bruyckt by sieur Guersouille 2. »
La maison avait deux portes : la première, sa
porte de sortie à la rue, était à l'extrémité de la
galerie : « liet huys ghebauwt boven den langhen
doel uytcommende met de voordeure t'eynden de
galderye 3 ; » la seconde, sa porte de derrière, don-
nait accès à la cour de la Confrérie et aux cibles.
C'est ce que nous apprend une résolution du ser-
ment de la Confrérie, en date du 26 avril 1795,
au sujet d'un différend qui avait surgi entre Pierre
Vanden Berghe, aubergiste et concierge de la
Confrérie, et Pierre de Coninck, locataire de la
nouvelle maison rue Saint- Jean. « Ten voor-
noemde daege wierd van wegen d'heer de Paepe
te kennen gegeven dat Pieter de Coninck bewoon-
der van den huyse staende t'eynden de doelen
ingevolghe syn devoir de agter deure leydende naer
de voors. doelen geslotten hield, ende dat sulks
van weghen Pieter van den Berghe hem diversche
mael met menacen wierd aengesyd dat hy de ge-
seyde deure daegelyks moeste open laeten, wierd
1 Archives de la Confrérie, vol. 1775-1786, f° 1, passim. à la
Bibliothèque.
2 Archives de la Confrérie, aux Archives de l'État à Gand.
3 Register vry huis vry erve, 1766, bl. 1.
— 24 —
geresolveert de selve deure niet alleene den ge-
heelen dag neemaer oock ende wel naementlyk
des avonds geslotten te hauden, ende waer toe
den voornoemden De Coninck tôt dies parti-
culierelyk ende voor soo veel als nood werd
gelast l . »
La maison et la cave situées dans la rue Saint-
Jean à côté de la Halle, furent vendues en 1798
comme biens nationaux. Ils sont décrits de la
manière suivante dans le procès-verbal du 10 ven-
tôse an V : « Procès verbal d'estimation d'une
maison et d'un souterrain situés rue Saint- Jean,
laquelle provient de la ci-devant Confrérie Saint-
Georges et affermée au citoyen De Coninck : une
maison en mauvais état, un jardin contenant
quatre verges, une petite cour, trois places en bas,
deux places en haut sous le toit qui est couvert
d'ardoises et un petit grenier dont le toit est
couvert en tuiles. Le souterrain, loué au citoyen
Laclus, a trois places et une petite cave 2. » Il
furent acquis le 6 germinal an V par la demoiselle
Marie Impens, religieuse urbaniste.
Paul Voitueon.
(A suivre.)
1 Registre des résolutions de la Confrérie Saint-Georges, de 1779 à
1795, f° 88», déposé aux Archives de l'État à Gand.
3 Archives de l'État à Gand.
25 —
LE COLLÈGE SAINT-NORBERT
A ROME
Pour favoriser les hautes études théologiques
des religieux de son ordre, Adrien Stalpaerts,
prélat de l'abbaye de Tongerloo, fonda le collège
Saint-Norbert à Rome.
Voici son épitaphe, qui est un juste éloge de
ses qualités :
D. 0. M.
Reverendus D. Hadrianus Stalparts
Hilvaribecanus hujus coenobii Abbas XXXVI
Hic situs est.
Qui ordinis et disciplinée observantissimus
Religiosorum et tenuioris fortunae studiosorum
Patronus niunificentissiinus
Magno suo relicto desiderio
Decessit VIII Kal. Nov.
Anno christi CIO.IOC.XXIX.
Aetatis suae LXVII, Praelaturae XX.
— 26 —
Cette fondation eut lieu dans les conditions que
nous allons raconter. Comme il avait été question,
en 1612, de donner aux Prémontrés l'église des
Saints-Pierre et Marcellin, à Rome, l'abbé Stalpaerts
pouvait en espérer la possession; deux de ses
religieux, Denis Mudzaerts, curé de Calmpthout
et Corneille Hanegraef, curé de Broecliem, s'étant
rendus à Rome, en avril 1625, à l'occasion de
Tannée jubilaire, il les chargea d'examiner les
moyens d obtenir cette église, ou du moins, un
emplacement favorable à l'érection d'un collège
et, plus tard, le cas échéant, d'un couvent. La
question devait être décidée selon le résultat des
informations prises.
Au mois d'octobre, Mudzaerts retourna à Ton-
gerloo.
Hanegraef accomplit sa mission avec un tel suc-
cès, qu'un an après, la veille de la Toussaint, trois
étudiants venaient inaugurer le nouveau collège,
en s'installant clans une maison provisoire, située
rue Beata Maria del populo. Cosmas Dillen fut
nommé président du nouvel institut. On changea
plusieurs fois de domicile, en attendant l'instal-
lation définitive.
L'abbé Stalpaerts écrivait, le jour de la Pente-
côte, 1626 : « mon âge avancé me presse d'arriver
au succès de l'entreprise. Vu mes infirmités et les
fatigues de ma charge, je ne puis plus compter
que sur bien peu d'années, je serais cependant
heureux que Dieu me permît de vivre assez, pour
voir le commencement et jouir du progrès de la
fondation. » Son désir fut accompli. Le collège
27
fut établi avant sa mort, quoique remplacement
définitif ne fût acquis que sous son successeur.
Il put, en 1626, grâce à des dons généreux,
fournir à l'œuvre plus de 43,000 florins du Rhin ;
de même en 1627. il obtint de sa parente Elisabeth
Stalpaerts, pour trois bourses d'études, 19,000 flo-
rins, et 5,500 florins pour la fondation de quatre
messes hebdomadaires, qui devaient être célébrées
dans la chapelle du collège 1 .
Le prélat, douze jours avant sa mort, le 11 oc-
tobre 1629, écrivait à C. Hanegraef, qui avait
remplacé le président C. Dillen décédé : « J'attends
avec impatience la nouvelle de votre arrivée à
Rome, et tous les détails relatifs à la chère fon-
dation. Je vous recommande tout particulièrement
la discipline religieuse et la charité fraternelle.
Mes souffrances m'interdisent d'écrire et de dicter
longtemps. Je suis pris depuis hier par la fièvre. »
Le pieux abbé avait le désir de faire participer
les autres abbayes de la circarie du Brabant, aux
avantages de l'instruction donnée dans son col-
lège, soit en y envoyant à leurs frais des étudiants,
soit en contribuant à la fondation. Il avait même
été question, au début, d'accomplir l'œuvre collec-
tivement. Ce projet n'ayant pas réussi, Stalpaerts
resta seul chargé de cette lourde tâche.
Quelques prélats cependant, ceux d'Anvers, de
Grimbergen, Averboden, Berne, Dilighem contri-
1 Nous ne faisons pas mention de sommes moins importantes,
mises plus tard, par les prélats de Tongerloo, à la disposition
du collège.
— 28 —
buèrent à l'œuvre, en versant chacun la somme de
4000 florins. Ils acquirent ainsi le droit de placer
dans l'institut un de leurs religieux, sauf les deux
dernières abbayes qui ne jouiraient de ce droit
qu'alternativement.
Un seigneur, Jean Honoré van Axel de Seny,
originaire d'Utrecht, docteur en droit civil, avo-
cat à Rome, reçut le titre de fondateur du collège,
pour avoir, par des conseils et autres actes utiles,
contribué au succès de l'œuvre. Par un acte de
donation du 27 février 1627, il mettait au service
de la fondation une somme de 4000 scudi sur la
banque du Saint-Esprit. Il en assurait encore
l'avenir par cent luoghi di monte, ou lettres de rente
de, environ, 100 scudi, sur les monts de piété. Les
sommes laissées par l'abbé Stalpaerts figuraient
dans le total des ressources susdites. Van Axel
légua, de même, tout son mobilier à l'établisse-
ment. Les clauses stipulées en faveur du nouveau
collège furent insérées dans l'acte de fondation.
Cet institut, sous le titre de collège de Saint-
Norbert, de l'ordre de Prémontré, fut annexé
sans retour à la circarie du Brabant, et fut mis
sous la direction immédiate d'un président élu
par les prélats de la circarie, mais la direction
générale devait toujours rester au prélat de Ton-
gerloo. Grâce au pouvoir que lui donnait cette
dignité, il avait le droit de nommer ou de déposer,
au besoin, le président, ainsi que le proviseur
et les autres officiers du collège. Cette autorité fut
reconnue par tous les prélats de la province, qui
l'acceptèrent sans conteste, le 12 janvier 1630, et
— 29 —
le 19 août 1657. La lettre de donation stipulait :
qu'au cas où le collège viendrait à être supprimé,
ses possessions, les sommes placées en rente lui
appartenant , devraient retourner, d'abord aux
prélats du Brabant, et h leur défaut, aux parents
de Van Axel, dont les noms étaient indiqués dans
l'acte; enfin, en troisième lieu, au Duc de Bra-
bant, toutefois avec l'obligation contractée par
chacun de ces héritiers, d'employer toutes ces
ressources à une autre fondation du même genre.
Il était de même arrêté qu'une messe anniversaire
devrait être célébrée pour le repos de l'âme du
fondateur ' .
Avec l'autorisation du Pape Urbain VIII, Hane-
graef, fit, en 1632, l'acquisition d'une maison
avec jardin. Cette propriété appartenait aux reli-
gieux de Sainte-Pudentienne, de la réforme de
Cîteaux. Elle était située 2 via Felice, entre les
Quatre Fontaines et l'église Sainte-Marie Majeure,
et leur fut payée 5,500 scudi. Les améliorations
indispensables que réclamait cette nouvelle pro-
priété, et l'arrangement d'une chapelle en l'honneur
de saint Norbert, exigèrent une dépense de 3,200
scudi (1636). Van Axel, aux derniers jours de sa
vie, voulut se réfugier dans son cher collège, où
il expira le 4 juin 1636. Par une clause particu-
lière, ce vénérable fondateur fut inhumé devant
1 Miraeus, Diplomata, IV, p. 688.
2 La maison forme aujourd'hui le coin de la rue des Quatre-
Fontaines et du Viminal; les pères de Cîteaux avaient acquis la
propriété des héritiers de Pompei de Angelis, chanoine de Sainte-
Marie Majeure.
— 30 —
le maître-autel, qui avait été consacré la veille,
jour de la fête de saint Norbert. En 1634, on
célébra un jubilé en l'honneur du fondateur de
l'ordre. A cette occasion le collège se distingua
par des solennités scientifiques et par des thèses
théologiques soutenues en public.
Une autre institution, connue sous le nom de
collège de Prusse, avait été fondée en 1631, par
Jean de Preuck, chanoine de la cathédrale d'Er-
melancl, en faveur des étudiants originaires de la
Prusse royale ou de la Prusse ducale. La réunion
de ce collège au collège Saint-Norbert, sauva sans
doute le dernier, lorsque la République française
du siècle dernier tenta de s'en saisir, comme bien
national, en vertu du traité de Campo Formio.
Un vignoble dépendant de cette maison et situé
hors la porte Pinciana, sur la colline Pariolo,
avait déjà été vendu, et le commissaire français
allait prendre possession du collège; mais le pré-
sident d'alors, Egide de Smet, adressa à Bertolio,
délégué de la République française auprès de la
République romaine, une protestation contre cet
acte de despotisme et d'injustice, au sujet d'une
fondation particulière, dont les biens devaient
retourner aux héritiers du fondateur, et qui
servait de garantie pour le collège de Prusse.
D'après ces considérants, les séquestres ne furent
pas maintenus; du moins jusqu'en 1812, le collège
resta la résidence des présidents qui étaient, en
même temps, chargés de diriger les affaires de
Tordre. On ne sait si le vignoble vendu fut restitué.
Jean Baptiste Sneyers, le dernier président,
— 31 —
mourut le 17 août 1812. Après lui, les religieux
expulsés de l'abbaye et dispersés en divers lieux,
voyaient chaque jour leurs rangs s'éclaircir, sans
pouvoir en combler les vides. La chambre aposto-
lique s'empara alors des bâtiments, et le Saint-
Siège en devint possesseur pour les céder ensuite
(1833) aux sœurs de la charité de N. S. du Cal-
vaire. Lorsqu'après l'occupation de Rome par
les Piémontais, l'Italie voulut appliquer la loi
d'incamération à l'ancien Institut Saint-Norbert,
le gouvernement Belge mit opposition à cette
prétention, en raison des droits légitimes que,
soit les parents du fondateur, soit les Prémon-
trés Belges, soit le pays lui-même, pouvaient
faire valoir sur la propriété. L'Italie se vit clans la
nécessité de faire droit à ces justes réclamations.
Entretemps le ministère conservateur, qui avait
soulevé cette question, fut remplacé par un mi-
nistère libéral.
Le Gouvernement belge, se considérant comme
successeur du Duc de Brabant, grâce aux clauses
et conditions stipulées dans l'acte de donation de
Van Axel, se rendit unique possesseur de l'Institut,
laissant à la famille du fondateur et aux autres in-
téressés la latitude de faire reconnaître et défendre
leurs droits par les tribunaux.
Du moment que les droits de la famille même
étaient méconnus, on ne sera pas surpris que
plusieurs autres conditions inscrites dans l'acte,
n'aient pas été respectées ; ainsi en arriva-t-il de
celle qui devait obliger à reverser les capitaux et
les rentes acquis à l'institut, sur un nouvel établis-
— 32 —
sèment du même genre. La totalité de la propriété
qui avait été estimée 274,000 francs, fut vendue
170,000 francs. Le contrat de cette vente fut
passé le 19 avril 1884. La minorité de la Chambre
était d'avis de différer la conclusion de cette affaire,
afin d'avoir assez de temps pour en examiner les
avantages et les inconvénients; mais la majorité
l'emporta, et l'acte de vente fut ratifié par la
chambre des représentants, le 17 mai, et par le
Sénat le 21 du même mois. Tout paraissait ter-
miné, lorsque les religieuses qui avaient été instal-
lées dans l'établissement, intentèrent un procès
aux acheteurs ', et obtinrent gain de cause, non
seulement en première instance, mais encore
devant la cour de cassation, qui décida qu'elles
devaient rester propriétaires de l'immeuble, en
vertu de la prescription. Le Gouvernement belge
fut donc obligé de rembourser les sommes reçues,
avec les intérêts. L'arrêt de la cour de cassation
fut prononcé en juillet 1887 2.
La chapelle du collège est encore aujourd'hui
dans le même état qu'au temps de l'administration
du président Meyers (1736-1738).
Dans la niche du chœur, au-dessus d'un autel
en marbre, dédié à saint Norbert, se trouve sculp-
tée l'image du fondateur de l'ordre. Le Saint est
représenté au moment où il reçoit la robe blanche
des mains de la sainte Vierge. Deux autres autels
sont placés contre les murs latéraux de la nef. Le
1 Ricotti et Cie.
5 Annales parlementaires , 1883-1884.
— 33 —
premier dédié à saint Adrien et à saint Jacques,
martyrs, se trouve du côté de l'épître; le second,
du côté de l'évangile, est consacré au B. Herman
Joseph; ils sont ornés chacun d'un tableau de
Dominique Pozzi. Le pape Benoît XIII en avait
fait la consécration, le 7 avril 1728.
On remarque encore six tableaux représentant
différentes scènes de la vie de saint Norbert ; deux
sont placés dans la nef, et quatre dans le chœur.
Le premier figure la conversion de saint Norbert.
Dans le second, il reçoit l'habit blanc des mains
de la sainte Vierge. Dans le troisième, on le voit
avec le roi Lothaire, accompagnant Innocent II,
à sa rentrée à Rome. Dans le quatrième, saint
Augustin lui donne la règle de son ordre. Ces
quatre toiles ont été peintes par Lambert Krahe
de Dusseldorf. Les deux derniers tableaux de la
nef nous mettent sous les yeux, l'un saint Norbert
prêchant à Anvers; le second, Honorius confir-
mant l'ordre des Prémontrés; ils sont l'œuvre
de Joris Nagel de Neurenberg. En dehors de ces
peintures, les parois de la nef sont ornées de
médaillons et de piliers en stuc, artistement tra-
vaillés et imitant le marbre. Toutes les décorations
et dorures ont été admirablement exécutées sous
la direction de Barigioni, architecte de la fabrique
de Saint-Pierre (1740). Au milieu du pavé en
marbre de l'église, sont dessinées et gravées les
armoiries du président, N. Meyers : au lion de
gueules, portant une branche de palmier ' .
1 Sur le sceau de N. Meyers, le champ est d'azur.
— 34 —
II
Les Présidents du collège Saint-Norbert
I. Cosmas Dillen, né àBalen, proclamé, en 1619,
licencié en théologie de l'Université de Louvain,
nommé, en 1620, curé de Tongerloo, conduisit à
Rome les premiers étudiants du collège à peine
fondé, et en fut élu président. Il mourut le 6 août
1629, à l'âge de 42 ans, et fut enterré dans l'église
de Beata Maria delV anima. D'après le nécrologe du
Collège c'était un homme d'une piété remarquable.
II. Corneille Hanegraef, originaire.de Lommel,
était curé de Broechem en 1619. C'est lui qui posa
à Rome les premières fondations de la maison
d'études et en soigna les intérêts en qualité de
proviseur, jusqu'à la fin de l'année 1627. Il devint
président deux ans plus tard, et compléta le nouvel
institut par l'aménagement de la chapelle de l'ha-
bitation, et l'acquisition d'une maison. En considé-
ration de ses éminents services, le pape Urbain VIII
lui accorda, en 1634, la dignité de protonotaire
apostolique. Il publia une vie de saint Norbert et
celle du B. Herman-Joseph. Outre ces ouvrages
écrits en langue italienne, il laissa en manuscrit,
diverses notes très importantes sur la fondation
du collège Saint-Norbert. Sa mort eut lieu dans
les plus tristes circonstances ; comme il prenait des
bains dans le Tibre, par ordonnance du médecin,
il fut entraîné par une vague, le 21 juillet 1636 et
se noya. On ne retrouva son corps qu'au bout de
- 35 -
trois jours, et on l'inhuma dans la chapelle du
collège.
III. Jean Coomans de Turnhout, au retour de
Magdebourg, où ses supérieurs l'avaient envoyé,
avec d'autres missionnaires, reprendre possession
de la prévôté de N. D., avait rempli à Tongerloo
les fonctions de prieur et de proviseur. Il succéda
à Hanegraef comme président du collège et pro-
cureur de l'ordre (1636) auprès la cour romaine.
Le pape Urbain lui donna le titre de docteur en
théologie.
Il aurait désiré consacrer ses dernières années
à la conversion de ses frères de la Saxe électorale
et de la Marche de Brandebourg, mais il n'en eut
pas le temps. Pris en Bavière d'une maladie mor-
telle, il succomba le 8 octobre 1644, à l'âge de
54 ans, et fut enterré à l'abbaye de Neustift, près
Freisingen.
IV. Siard De Smet, de Lippeloo, remplit les
fonctions de président du collège de 1644 à 1646.
Il fut honoré du titre de protonotaire apostolique
et mourut proviseur, à Tongerloo, le 20 avril 1662.
V. Corneille van Houthem, natif de Tongelre,
proclamé à Rome, le 25 octobre 1646, docteur en
théologie, dirigea l'institut Saint-Norbert jusqu'en
1660. Il fut nommé curé à Hersselt et mourut le
4 novembre 1663.
VI. Walter van Hilst, d'Hasselt, fut président
du collège de 1660 jusqu'en 1666. Devenu prévôt
du couyent le jardin fermé, à Herenthals, il mourut
le 2 septembre 1679.
VII. Eu 1666 jusqu'en 1671, et de 1673 à 1683/
— 36 —
Valère Mundelaers, né à Herenthals, bachelier en
théologie, présida le collège.
Nous ignorons le nom de celui qui le remplaça
pendant les deux années qu'il dut passer à Ton-
gerloo pour y enseigner la théologie. Ce religieux
était très érudit, pieux, simple et loyal, il était
en outre un véritable homme d'affaires. Il renonça
à sa charge en 1683 pour vivre dans la solitude du
cloître. Il mourut, le 6 août 1699, à l'âge de 73 ans.
VIII. Ignace Backx, né à Malines, frère de
Rombaut Backx, pléban de la cathédrale d'Anvers
et célèbre par ses écrits, licencié en théologie, fut
élu président du collège à Rome, en l'année 1683,
et en remplit les fonctions jusqu'en 1726. Le titre
honorifique d'abbé de Belchamps lui fut décerné
en 1697. Les chanoines réguliers de la congréga-
tion de Windesheim lui confièrent la charge de
procureur général de leur ordre.
Le collège ne fit que progresser sous sa direction,
il y ajouta plusieurs constructions et des embel-
lissements, et bâtit une maison de campagne hors
de la ville, dans le vignoble dépendant du collège.
Il mourut le 3 juillet 1726.
IX. Norbert Mattens, de Bruxelles, succéda à
Ignace Backx comme président et fut, en même
temps, nommé procureur de l'ordre. Quoiqu'il
n'ait vécu que deux ans et demi après son élection,
ses brillantes qualités et son zèle avaient été
féconds en bonnes œuvres. C'était Un homme en
même temps savant et pieux. L'annaliste de
l'ordre, C. L. Hugo, abbé d'Etival et évêque de
Ptolémaïde, annonça son décès, en faisant de lui
— 37 —
un juste éloge. Norbert Mattens avait su se conci-
lier l'estime et l'amitié intime du Pape Benoît XIII,
qui lui en donna plusieurs fois les preuves les plus
éclatantes. Il avait obtenu ainsi la confirmation
du culte de plusieurs bienheureux de l'ordre. Le
Souverain Pontife, à sa prière, consacra lui-même
la chapelle du collège, lui décerna le titre d'abbé
de Fontaine-Saint- André, donna la bénédiction
abbatiale le 21 mai 1725 et lors de sa dernière
maladie fit prendre chaque jour de ses nouvelles.
Mattens expira le dernier jour de 1728. Par les
ordres du Souverain Pontife, le corps fut exposé
revêtu des ornements pontificaux et les tentures
de deuil de la chapelle papale servirent pour la
cérémonie des obsèques.
X. Paul T'Kint, d'Alost, devint président et pro-
cureur général de l'ordre en 1729. Il remplit ces
fonctions jusqu'en 1736. Plus tard on le nomma
doyen rural et curé de Notre-Dame à Diest. Il
mourut le 1 juillet 1749, âgé de 54 ans.
XI. Il fut remplacé par Nicolas Meyers, natif
de Maaseyck, qui exerça les fonctions de président
pendant 42 ans, de 1736 à 1778. Cet humble reli-
gieux refusa le titre d'abbé de Belchamp, décli-
nant l'honneur de porter la mitre. Le collège lui
dut plusieurs embellissements artistiques et beau-
coup d'améliorations pratiques. Par ses soins, la
statue de Saint-Norbert, sculptée en marbre par
Bracci, fut placée dans la basilique de Saint-Pierre,
et l'image en fut gravée sur cuivre par P. L. Bom-
belli, à l'occasion de l'année jubilaire (1775).
XII. Égide de Smet d'Herenthout fut nommé
— 38 —
président par le prélat de Tongerloo, le 22 mars
1779, et élevé, quelques jours plus tard, à la
dignité de procureur par le Général de l'ordre.
Il arriva à Rome le 5 mai. Malgré les difficultés
des temps, il resta à son poste jusqu'à son décès,
le 2 février 1804, s'acquittant de ses doubles
fonctions avec un mérite réel, et rendant d'im-
portants services à l'église des Pays-Bas, comme
chargé des affaires des diocèses d'Anvers et de
Malines.
Waltman Van Lier et Pius Peeters, nés à Anvers,
furent les deux derniers religieux de Tongerloo
qui avaient été élèves du collège Saint-Norbert.
Arrivés à Rome, en 1793, ils en partirent en 1796.
A leur retour, ils furent emprisonnés à Cologne
pendant quelque temps par les Français en guerre
avec l'Autriche. Adrien Heylen, le savant archi-
viste, inscrit par les républicains sur la liste des
exilés, fut envoyé à Rome par ses confrères en
1801. On suppose qu'il avait reçu la mission d'y
soutenir E. De Smet et de défendre les intérêts de
l'ordre auprès du Saint-Siège. Le 1er mai 1802, il
écrivait aux siens qu'il' était en parfaite santé et
trois jours après, il n'était plus.
XIII. Jean Baptiste Sneyers, de Wickevorst,
fut le dernier des présidents du collège Saint-Nor-
bert. Novice chez les Jésuites, lors de la suppres-
sion de la Compagnie de Jésus, admis à Tongerloo,
il fut, en 1781 , envoyé à Rome, pour y achever ses
études. Son séjour s'y prolongea jusqu'à l'année
1784. Il fut tour à tour vicaire à Orp, puis secré-
taire du prélat, coadjuteur à Nieuwmoer. Lors
- 39 —
de la suppression par la République française, il
était préposé aux Archives. Par une lettre d'Haren,
datée du 4 août 1804, les régents d'alors le nom-
mèrent président du collège en même temps que
chargé d'affaires. Pendant son séjour à Rome il ne
se lassa pas de prodiguer des secours à tous ses
confrères, ainsi qu'aux catholiques" des Pays-Bas.
Il mourut à Rome, le 17 août 1812.
Nous avons fait connaître plus haut le sort
que subit le collège Saint-Norbert, après la mort
de J. B. Sneyers.
(D'après : De abdij van Tongerloo, geschiedkundige navor-
' schingen', door Fr. Waltman Van Spilbeeck, Nor-
bertijner kanunnik-regulier van Tongerloo. Lier, L.
Taymans-Nezy, 1888, vol. in-8°, 651 blz., met talrijke
plaatsneden versierd.)
I. V.'S.
— 40
LES
SEIGNEURIES DU PAYS DE MAL1NES
KEERBERGEN
ET
SES SEIGNEURS1.
Par suite de la mort de son père, Jean IV de
Cortenbach, chevalier, releva la seigneurie de
Keerbergen le 9 avril 1524 :
« Van heeren Janne van Corttenbach, riddere, die opten
negensten dagh van Apiïl anno XVCXXIIIJ aen den voirsz.
stadhondere ende mannen van leene, te wetene Rogiere van
Expoele ende Jacoppen van Asscheijde, ontfangen heeft
nair dooder handt de heerlijcheijt, hooge, middele ende
lege, van den dorpe van Keerberge met allen hueren toe-
behoorten, ende dair vuijt sijne hère vader gestorven es,
staende bij Rijmenam; onfaen voir 't heergewede thien
rijders, vz. iij lib. xv st. » (C. n° 17838).
Dans le registre féodal, établi en 1538, par Jean
de Diest, nous lisons que le chevalier Jean de Cor-
tenbach, héritier de son père Ivain, tenait en fief
en cette année du duc de Brabant, en qualité de
seigneur de Malines, la seigneurie de Keerbergen,
valant annuellement environ 200 couronnes.
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., 4e liv. 1889, p. 447.
- 41 -
Jean IV fut exécuteur testamentaire de son
parent François de Cortenbach (fils de Jean III et
de Marguerite de Ghistelles), mort le 3 septembre
1530 (Heeren v. Helmond, p. 17). Le 19 août 1536,
il figura, à Bruges, au contrat de mariage de Josse
de Cortenbach (frère dudit François) avec Catherine
de Halewijn (ib., p. 18). Il épousa Elisabeth Bauw
(Bau, Bauws etc.), riche héritière, pour laquelle il
releva le 31 mars 1513, la seigneurie des villages
de Vremde, d'Echoven et d'une partie de Mille-
ghem, 't ho f van Ghinderachter, à Vilvorde, le bien
de ten Dijcke, à Bouchout, un manoir à Haeren,
au lieu dit Ganseweijde (B. 349, p. 362), manoir
nommé, depuis, de hoeve van Cortenbach ou het
oudt casteel van Cortenbach (E. B.). Le même
jour Jean fut investi, par la mort de son frère
Guillaume, du schrijfambacht '. Le 31 du mois
suivant, il fit, pour sa femme, le relief d'une cour
censale, décrite de la façon suivante : « eenen
heerlijcken chijus mit meijer ende laten, die
kennesse hebben van erven ende onterven van
den huijsen ende goeden gelegen binnen der
stat van Lyere, tusschen de binnen ende buijten
porten, dair men gaet tôt Sinte Gommaers borre,
weert metten xxen penning van pontghelde —
jairlix iij ponden paijments ende Lxiij cap-
puijnen. » Son beau-père, Henri Bau avait relevé
1 Ce fief fut relevé successivement, le 11 octobre 1549, par Elisa-
beth Bauws, héritière de son mari Jean de C. ; le 4 novembre 1560,
par Anne de Berlo, nièce de celle-ci ; le 22 mars 1586 par Guillaume
de Merode, seigneur de Laere, en qualité d'héritier de sa mère, Aune
de Berlo, dame de Gossoncourt, veuve dp messire Richard de Merode
(B. 20 p. 166; 363 p. 134).
- 42 -
ce fief important, le 16 mai 1483, comme suc-
cesseur de son père Walter Bau, qui, lui, l'avait
reçu, le 12 juin 1467, par achat de Jacques Kerre-
man. Celui-ci l'avait possédé du chef de sa mère,
Marie de Ranst (B. 25 p. 124). Le 13 octobre 1513,
Elisabeth Bauw fut investie de terres et de bois
à Reeth et de la seigneurie de Vriessele • , à Contich
(C. 17837). Le 5 octobre 1528, Jean de Cortenbach
fit un relief pour Agnès de Berchem, fille d'Elisa-
beth de Lierre, qui était, elle, une fille naturelle de
Jean de Lierre (B. 25, p. 292). Lors du mariage de
sa nièce Anne de Berlo avec Richard de Merode,
seigneur de Gossoncourt, il dota celle-ci de terres
àDommelen (rel. du 27 mars 1530; B. 352 p. 547).
Il possédait, en outre, dans cette localité, en com-
mun avec sa femme, une propriété, comprenant
une maison, un moulin, des terres et des prairies ;
elle fut relevée, le 19 avril 1614, par messire
Guillaume van der Cluijsen (fils de Henri, seigneur
de Dommelen), pour sa mère Marie van den
Nijeuwenhuijsen (B. 371 p. 213).
Jean de Cortenbach et sa femme ne laissèrent
pas d'enfants. Ils firent leur testament le 22 dé-
cembre 1537*. Son mari étant mort le 21 août
1 Vriessele, Vriessel, Vrijsel, etc., ridderlijk hof, avec 40 à
50 bonniers de terre, avait un mayeur, des tenanciers et des hom-
mages, ces derniers au nombre de 25. Par suite de la mort d'Elisa-
beth Bau, veuve de Jean de C, seigneur de Keerbergeu, messire
Jacques de Rommerswael, seigneur de Batenbroeck (sous Waelhem),
releva ce fief, le 2 septembre 1560, avec une rente de 16 quarts de
blé, hypothéquée sur le moulin de Vrijsel (M. II, p. 89).
' D'après l' Histoire des Environs de Bruxelles, ils testèrent en faveur
de leur cousine Jeanne d'Enghien, femme de Gaspard van der Noot,
seigneur de Carloo. Marie d'Enghien, femme de Jacques de Lalaing,
— 43 —
1 549, Elisabeth Bauw reçut l'usufruit de quelques-
uns de ses biens. — Le 27 juillet 1515, elle avait
été investie d'une rente annuelle de 200 florins,
hypothéquée sur le manoir d'Opstalle (sous Rijme-
nam et Bonheijden), appartenant alors à Nicolas
Oudart, conseiller au conseil de Brabant (M. 2,
p. 35) '. Elle décéda le 2 septembre 1560 et semble
avoir été enterrée avec son premier mari, à Ma-
lines, dans l'église de Notre-Dame-au-delà-de-la-
Dyle. — Voici l'épitaphe de ces époux :
« Hier in den hooghen Choor leet begraven — den Edelen
ende wel gheboeren Heer Heer Jan van — Cortenback,
Ridder, Heer van Keerberghen, Vremde — Eechoven &ca,
sterft int Jaer ons heeren XVCXLIX — den xxi augusti.
Ende vrouwe — Elisabeth Bauw sijn wettighe huijsvrouw —
vrauwe van Vremde en Eeckhoven. Sij sterf int jaer ons
heeren XVCLX den tweeden september. »
La tombe était ornée des huit quartiers res-
pectifs des époux :
Cortenbach (les trois bandes) ;
Amstenraedt (de gueules à la croix gringolée
d'argent, chargée en cœur d'un écusson d'argent
à trois tourteaux de gueules.
Helmont (d'argent à trois pals de gueules) ;
Stakenborch (d'or à trois anilles d'azur) ;
SchoefF (d'azur à trois gerbes d'or) ;
Schoenjans (d'or à trois tours de sable) ;
van (der)Aa : échiqueté d'or et de gueules; au franc-
quartier d'argent, chargé d'une merlette de sable;
et sa sœur Jeanne, relevèrent 't hof van Ginderachter , à Vilvorde,
le 22 juin 1561 (E. B.).
1 Voyez J.-ïh. de Raadt, Quelques observations sur Nicolas
Oudart et son jeton.
- 44 -
Erpe (de sable au sautoir componé d'argent et
de gueules). —
Bauw (d'azur à la bande d'or, chargée de trois
croisettes de gueules) ;
Kerremans (d'or à trois merlettes de sable) ;
Ranst (d'argent à trois pals de gueules ; au franc-
quartier de sable chargé d'un lion d'or) ;
Boxtel (de gu. à deux fasces, ace. de huit merl.
en orle; le chef. ch. d'une aigle, le tout d'argent) ;
Edingen (Enghien : d'argent à trois fleurs de
lis de sable, au pied coupé, au franc-qu. d'Enghien) ;
Mol (de gu. à cinq losanges d'arg. aboutés et
posés en croix, cantonné de vingt billettes d'or,
cinq dans chaque canton) ;
Oysi (d'argent au croissant de gueules) ;
Vaernewijck (de sable à trois lions d'argent) \
Dans la même église, on voyait encore un autre
monument (pierre, obit ou cabinet d'armes), por-
tant ces blasons;
Cortenbach, Helmont, Schooff (écartelé de
Schoonjans), van Aa; Bau (écartelé de 3 crois-
sants, qui est Eechoven), Ranst *, Edinghen alias
Kestergaete 3, Oysy.
Les 16 quartiers qui précèdent sont basés sur les
filiations représentées aux deux pages suivantes.
1 Provincie, stad etc. v. Mechelen; B. R., C. G. manuscrit n° 1511,
p. 250. — Le manuscrit n° 1515, de la même collection, contient
également, à la page 404, une copie de l'épitaphe et des 16 quartiers.
Ici, l'écu de Stakenborch est muni d'un franc-quartier, chargé de
trois coqs, qui est Hennegrave (Rietstap, Armoriai général).
- Ranst ici : écartelé ; aux 1er et 4e, d'argent à trois pals de gueules ;
aux 2e et 3e, de gueules à deux fasces, ace. de huit merlettes en orle,
le tout d'argent.
3 Enghien, au franc-quartier d'argent chargé de 3 fleurs de lis de
sable, au pied coupé (B. R., C. G. 1511, p. 189).
— 45
» a v A so
no— , - a. s 5 «^
« « « .-2?ïe .
- s- s cl £ -~ "s — .
— Û.— .j!^ S s
Or^3?-"5eïSs£ •
.M g" -S **ll|2
-d s. a, "s s> v
-
es
2 «
o
0)
"3
43 C C
à -s
0) 43
",-3
ai
_ C «> 43
- S S C 33 -
COOg=— « ^
U 3-*- 43 63 P Oi^
,_ 03 33 ;_ __, *™ o ._
s» -3. 2. -3 £-3-3-3 — OC'
"S £"
43 3 33
-C 33 (U
=C S S oo
(D -2 ^
4
S 03 S
"" -a a>
I 03 I
C i>- ' — 3 03 "" _ 43 3
3 "T îs.:?'s"3so
4/2 '— 03 "3 S -3 23
43
—
1. — '
3 43
43 —
j 63 o
I 0)
> .-m
'J-s
43 03
C 43 43
■33 O
43
■— 43
•43— S
B -a4.
43 33 3 w
•• 03 _
43
-3 66 O. .W *S. ."S
43 1-
~4; ~
"5 S
~* '3
= =
43 "* - 13 JJ
-3 =
03 43
es
2 S
■3 o
s- S
gfi *> A CQ 63"T3
w 33
fi .*«) r" J
>-= -i= -3 =5 43
: 5 c -
! ■- _§ 3 ="
«
3-3
3 S ||-Ob-_.
03 r t
3: V.43
3 ■*.
£ ci ~ a
e '43
3 63
-< 43
,_, S
- 43 g
-= O
es .
nJ es
■' _- - ■
-Sa
03 r; o
•03 Om IN
— 03 ™
03 33 33 .
a-i~ ^
es -31 ~
03 **■»
— _ w ^
3 „ - C
O 05 O -O
- £ S S
33 '5-
•— 03 - **
03— 3 -i
-3 43 C 33
- 03 03
§3 5
3 g--
03 03 "3
'S "-"
<"_ 43
<-""" S
o S
O ■- es
0 a «
72 3 0
4
43 33
<3
43 J3
■— <
g 63-43
: 0 «
2 >• '"
as
B
03
: CO i. 3
> -3 S
■S >• °
"3 es _3
43
S
es
-3
43
S 3
» E
- 43 "Ô3
43 03
es ->
CJ'C
•43
-=
03 03
C a3
5 -
03
03
■Il
33 03
es ••
43 J3
O
OS
c
43
63
. 03
43
-a
es
-3
O
O
43
03
aa
« «3
— v
ej
S
—
es
03
—
0
C
03
—
03
03
4.
—
03
"S
4.
33
»
a
u
—
43
•-
es
c
3 5
S 3
Sh O
° —
U •
03 M
.0J~l IN
i< S •
a c» s
g es o
43 . „
03 •-
■as 3
43 "«
•43^;
3
es
sa
43
es
w
es
=
B
03
63
t-
03
-a
ô3
- 03
-B
03
C
63
03
—
3
43
-s
43 S
=: o
a»
n -
3 03
O •-
u —
33 a
43--
J es
z&
03
33 F--.
t- -13
4- .-
- — « _
3 C
es o
C 33
4,
-3
3 'S
O -33
C ^3
3 S
es
.3 3
es a"
a ^t,
43 c 00
S a q.
43 0. -
S"*04
— "êS 43
s *■ =.
es J~
03 ^ 3
S 3 O
•— 43 O-
PC "^-43
03— >-'
'.- O C
Sa g
3"d g
.3 43 03
s! 'eS 'C "" "
ft T, es es
^ -43 «— —
"S . S <43
*? s ^ 3-
43 t' es
^ 43 g_ _
"*» s .. I
* Si S •--
s Sôifi ~
~ »^«
"w • — - .
"" SS > .3
-«ta «45
S , o s«
• r — — • 43
S 63 .-.a
s «.« «
•«* >- -03 r.
5> :3-- -*■ 03
g Ss^ S
s; » £ -
- *' 3 es
•-i S
— 46
11
es >i?
43
.£.*£ S -S S
■ E E £ "3j-5
-h 2 5 -5 -S
s
03
t. o oaS
■N ;, _
O O
_ > 55 ïï ■* c o
' &= c -■ " ^ oo
■H S
« "3 -2? S S S ^ ~ ~
M
4) s; — -
-G a -o te— -S « S
O
"3 V
S- 2
2 A
E °
S a
o
c
« E
4/ 4)
> 3. ° ïî
O -
43 o
5— T3
s -s s
es ~ ... O
x "
B V
-r .« a jg s 3 a
cj ~ es ~ —
a. es j-
S uu ,.
B t« Qj 43 —
-* 43
ï-o S —
_E 43
W3
43 C
as -
s ê
_e 43 «
~ S 22 o ^
_e o i> c
- o "O «J o
.2 8 d3 «
a * ~
4) r~
tû
__ 3
o s 0 »
-3 "3 - >
a .2 -S S -"S S ■§
Si es B v 13 „ :s>
43 .. « _
.> OS — -
e co es
- — - I
a' '« -s
03
, 1/3 10 -
■ i B O ^
i 4)
2 j, « .r
72 •- 5
5.1
41 —
43
•es ^
43
■"T <u
— sa
X — .
eu ■
S a
2 œ
2 o
eS "TT
S -G
es
3 B
« O
22
-■o
ai
J3 3
6S et
u >
o m
X! —
es o
->-o
— ' E
2 X
3 «
g OC
c Q2
eu • *^
> s » e
£-= -S
° Sr re E
B-S 2?|
I a 2 |
3 " t. -û
9 s = a
J g « es
E -es
3
=2 4)
~«=
U
ej w
_T 4)
0j £ B —
"■ = es es •
es 4> S '*
UB .. aï
•4) 3 -« S
_ a-, n es
3 •— & E
u o . -; a
-4) _b -4> - m
a. £ **
3 -4S c
: E
: 3 4)
^ u
' <»
a ep-o ^«
£ c.S o
S •£ ^^ 51
"j: 3 » u
K 63 es •— "3
4> ^ 05
"«j 5 £
s s 3
* « 3
S b"°
-Su
«2~* B
-aj b 43
43 .S &
- as
43
43
•<S
_ ojj 5 "° 5 ^r S "*
„ «)*m5î «5 «2 s"*
03 (fi
•S |
43 a
^B 4)
et f~
r - o
eu
4) "r" ■•
B 43 .-
6» •/: —
o g. 5^ « « c
'j C « v"3"3 *
43 u
s .s
= 3
g-3 «^
es .;
3 . 43
43 — .
E 43 —
6BiS ^
43 i »
Ou
Sut
_ ej 3
-o S
- B
X fi;
43
-a
■~
S a
es 43 -z,
22 ta g
43 ®
«■C 02
J 43
.- j r-o
■- 03 O
c :>i
43 es H
- - -
p E f- 43 4)
=3-1 -^ B
43 43
? U »,
43 0)
es 43
"^ oT « sr — : ?
— 2 43 43 es o
1= — -a "B 22 "3
'i x u
 s*'
S "3 B
> 43
> B >
43 .5
a-3
S»
i4
3 3 B
O wo 2-3
~ (0
!i
2 i 3 S °°
g -S - '«
U V 4) -
."= 5 ^ J T -
BÏÏ
B ».
u ,
43
•-3
E ,
-a
6 :
es
,>
w ce
43 m
3
O" 03
ej - ■
es
es '
22
û S
, 43
-3
«? C-
43
es
43
U
43
S g
S s
i s,
= -2'
^ E
es
-— 43
Cj "^
CS a;
S -O
S 4) m
S -"3
■^ » <="
— U
- I- es
S S —
43
-o
43 B
1 43
> 6JB
43
Ta-
.2 43
= ?
43 .E
6B
» .43 O
J2Ï-§?g!2vlt
es
43 C
JZ B
r3
B —
a .
3; J-
(S çj
£?4= g
43 — C
* cJ 2
4) 43 —
-*-d £
u s4j
-B 43 w
U "u
.3: E g
-O O S
«g
c » 43
43 t^1—
1S 3 «S
6S.O " —
E ^ t- «O
r u o M
-o ., o. •
» r- ^ D-
43 -; es 0
**" es 43
00 J2 eS
."3! c<î t. •*
S 00 «j -
•^ o a.
4) - S û-
t; a =w^2
22
o "
g _ç -s; -43
E . 3 -
S. ^ "O S
>rf,.- s
E > Cv
t. 43 C
E — • —
4/
IN
02 ^^ *—
3 3 "S
.S? ô-
'E .- — -
V3 «3 43
B'3 O B
43 ,0 a
o 2'-■~,
ëg-S»'
43 3 2
-a s- •"
„ 43 43
B -sr— "P
* •= - s
— — X ^
3 n :(sȔ3i
4 fi.u>
" g = -s
Û2L-D .
2 S 1
22
s
43
ts
U
43
Xi
43
43
43
-a
5
43
E
os
u
es
B
43
es
43
3
T3.
3
es
22
43
43
e
"= Û
ta
3 0
E
43 es
<S
-z >
43
s »"
S".
O
3 "E
>■
« H
C/5
2 22
es
■
O •*
*j
•^
t; « i
43
es S»
a
0
— 02 -
X
«O w''*"
-es
43 X •
V E 00
43
«3
<3>
'S =S —
Sas .
2 ■-'1
es
n
S —
B
0
- Le
on
s« -
-es
~"
.0 • 4)
'3
's.
■S B c
O"
a. « o
.„
U
'.~ a es
bel
os 43 "■»
X
fl
B
BE
3
43
a » J
. co
~
~- SS es
43 e»s
-~-
• • ■•■
3 S-»
r9 "
'«B
a g c
£ > 2
'E —
■e
3 O -
3^
W-S J
n '•
a
ev 43
._ 22
e
* 2 -
3 '.
— a
«
"3 W S
0 . 5
«ï
a
z isls
< 3 M
8i
22
> fi C
< L Z
t m
0J5O>
X
43 '"'
a
O B
Cm
st
ë'sl
43
CJ
2 «^
3^ «u
4.2
3 .
--
93
—"i*
a
es
•— 43 •»
a •-
•3
es y-
43 "E
3
3
'§«1
3 °"
2ra
0 ><
—
" «S
X •"
,43 02
•43
X
43
= e't<
43 c S
* * -r-
43
43
—
III
e ~as
43
0 43 -
— 43
E^
11
es
— '
O x <S
M es
'S.
X 4) r»
=-2-
2 2-w
> - -0
E *
43 —
"3 -
;4>
43
E CB
-
3 ^ i
es S
0
> 1—
_ B
b
-s s
- 0
0
E 3 es
22 U
-
sa
w ex
rt
-0
- 47 —
Le musée royal d'antiquités et d'armures, à
Bruxelles, possède une splendide cheminée, pro-
venant de Jean de Cortenbach et d'Elisabeth
Bauw; elle est ornée, au milieu des armes de Cor-
tenbach (avec cimier), entourées d'une guirlande,
qui est tenue par des génies. Des deux côtés, on
voit un écusson en losange, parti de . Cortenbach
et de Bauw (écartelé d'Eechoven).
Le 9 novembre 15G0, Barbe de Rommerswael
et son époux, Arnould de Berlo, seigneur de
Cortenbach, furent investis, par suite de la mort
d'Elisabeth Bauw, et en vertu de leur contrat de
mariage, d'une rente hypothéquée sur les terres
de Jean van Landonck, à Reeth, et de 2 1/2 bon-
niers de terre dans cette commune (M. 2 p. 92).
Le 25 juin 1598, messire Antoine van der Gracht,
seigneur de Schardau, prêta pour Barbe le serment
du chef de ces deux fiefs. Le 22 mars 1611, elle
transporta les 2 1/2 bonniers à Jean, Henri, Pierre
et Alexandre van der Goes (M. 48 p. 166v°). Dans
l'église de Duffel, il y avait, autrefois, une verrière
aux armes de Berlo et de Berlo parti de Rom-
merswael (de gueules à deux épées d'argent,
emmanchées d'or, posées en sautoir) et portant
cette inscription :
« Alart (?) van Berlo Heer van Cortenback, 1616.
« Barbara van Romerswale vrouwe van Eechoven, Baten-
broeck, Vremde 1616 » (C. G. 1511).
Après la mort du chevalier Jean de Cortenbach i
la seigneurie de Keerbergen échut à son neveu
— 48 —
Guillaume de Berlo1, fils de Guillaume, seigneur
de Petit- Axhe, écuyer de Philippe-le-Beau , et de
Catherine de Cortenbach. Il la releva le 12 no-
vembre 1549 :
« Van Joncheer Willem van Berlo, die opten xijen dach
van novembri anno XVCXLIX nae doode vanwijlen heeren
Janne van Cortenbach, Riddere, zijnen oom, aen den voersz.
stadthoudtre ende mannen van leene, te wetene Jan van
Beeringen ende Meester Henrick Vermeere, ontfaen heeft
tôt eenen vollen leene 't dorp ende heerlicheijt van Keer-
berghen, met hooge, middele ende leeghe, met heerlijcke
chijsen, van meyere ende laten, keuren, brueken, mannen
van leene, met eenen wintmolen, ghestaen aldaer, onder
't voersz. dorp, ende allen anderen heurec toebehoirten,
in aile der vuegen ende manieren, ghelijck de voersz.
wijlen heere Jan van Cortenbach die in zijnen levene
te besitten plach; ontfaen voer 't hergeweijde iij lb. xv st. »
(C. n° 17838).
Le 2 novembre 1552, Guillaume de Berlo,
seigneur de Keerbergen, fut investi, par achat de
Thomas de Plaines, seigneur de La Roche, d'une
rente hypothéquée sur le château de Koest (B. 357
p. 280). Il posséda également la seigneurie de
1 Les Berlo, Berloo, etc., sont une ancienne et puissante famille
du village de Berloz (au pays de Liège), qu'elle possédait jadis
comme franc-alleu et où elle avait un château fort (St. Bormans,
Les seigneuries allodiales de Liège). Au traité de Fexhe, 18 juin
1316, on rencontre parmi la noblesse, Gerar de Bierloz et Rues
de Bierloux (Mgr. Namèche, Hist. de la Princip. de Liège). — Dans
les combats des d'Awans contre les de Waroux, les Berlo furent
dans le camp de ces derniers (ibid.).
4!)
Swijveghem et figure fréquemment, en dernier lieu
le 22 mars 1556, parmi les hommes de fief du pays
de Marines (C. 17839).
Sa femme était Jeanne de Merode, dame de
Pologne, vicomtesse de Looz etc., qui mourut le
25 septembre 1552 ' et fut inhumée à Muijsen sous
une pierre ornée de ses huit quartiers et de cette
épitaphe :
« Hier leet begraven Jouffïouwe Jolianna van Merode
dochter wijlen lieeren Henricx van Merode, heere van
Voelen, Braive, etc., die welcke wettighe huijsvrouwe was
van Joncheer Willem van Berlo heere van Keerberghen
ende Siviveghem ende sterf int jaer ons heeren 1552 den
25 septeniber diens siele godt ontfermen. »
Les quartiers sont :
Merode, van der Aa, Bauw, Hardumont; Mos-
male, Horyon, Boulant alias Rolle, Fexhe 2.
Ceux de son mari, dans la même ordonnance,
sont : Berlo, Houtain, Duras, Guijgoven; Corten-
bach, Berlaer, Schoof, van der Aa.
Nous donnerons aux pages suivantes les deux
tableaux généalogiques qui sont représentés par
ces quartiers :
1 D'après l'ouvrage intitulé : Geschichte der Famille Merode, par
E. Richardson (pseudonyme du comte E. de Mirbach-Harf) la femme
de Guillaume de Berlo serait morte en 1572 (I, p. 232).
* Voyez Prov., stad etc. van Mechelen, II, 407 ; C. G. 1511 p. 170,
etibid.,1515,p. 414.
— 50 —
o e
-3 a .
S «> „, s -^
«s "
c
B
2 - 5 S" cs
— rj "~ B -■. «-*
.~ — — ~ — a z
CQ ce * ï -
i o w 03
'S g g -o « T3 <u
—
-2 S ,«« 2 ? « Ô «s
-5
=
_eS
3
O
M
--a
a)
43
2F= =
i :. i .
"^ 5o
- « ■_
— - 93
lia o £;| Éc
•S ° — -s '* "
0} « «
«5
a;
fi !-<
•33 g
3 w
: n 3J! 5 63-5
;a*
2 93 43 43
S -O -2 -O
4-» (JJ ■ *>
B-S ' E
r « -es
E t. 13 -.TT>
« ?.3ï2
* ë « ~
43 3>
93 •■_ eu
-a _i a."?
es V"=, ^
;»-» a *-3 ^
i. S 1-
t- S o «
■28T3 E
H 3 -n
-S -S «
u g "
"5 E
1 1 4; 4; '
— » — 13 -s; -3 ,-S, 4; c«
ï .- 3 o 33 -* O
SC « -3 ;£ tj s 2 or" -s ■ 2 o
<D
ai
I 1) 5 S « W0!^co B O 4) 63
3 63 ai
O-:
« 2 2 S
» -a « « - - 27
o
- -
3*
=3 0
g 0) 0)
3 S"13
H - 9
rt "^ -S -s H »-
13 -43 3 -es _,
^ — w
WPS -i- » "=i ^2 fc
"3 t^S vj -Q
2^
■5 «3
— -
w 63
c2
03 g
•a; -a;
x 00
'. 1 «5
i§.i..s
2 *> ^ <
_o £ -3 -1
93 O .„
« gto
3 3 U m
2 «3 c
O 4) — w
O 5 C 63 v!
3
es
B
—
et
—
9)
.»•
B
•7"
cÀ
^
—
B
C3
^
••
B
0
C
„ C
9, O
X
O
-T
O
9}
> O
« 3
3 -3
63
—
=
'^
«3
4; 43
O 4)
C
CB
V
-e
63-3
SB 09
ce1 3
4> 43 4)
B -O -O ,-L
S P t.
w o
B PQ -03 I-» T3
3 ^ 03
p='_
S r - i =
es > o i- cj '
' - ce 3 .-'J-3--a3
'--'------■-
_3"3> 3"3CC!^^'-'
'3 H * - T r - — 4,
■Z 83 .«>S ?='"£i'=4g'
>: P.BH « « ÎT^ s, .s
.i 03 3
03 "3 ^O
93
—
O
03 _•
? 03
o —
.2T3
03 _
-3 •-
■S 3*
.S es
3 «
2-
3
S*
63 03
_Ç -B
_ O -93 '
— . w es
4> 10
2
"3
2
"3
E
3
o
c
-s
E
13
i-
es
03 rt
■o —
03 S
w es
03 (N
63«
»
s S
03
93
-, 03 ifi
— 2 n
> 3 2
es C
» O < ;
m x»
03
—
- 3 m c r*
««OC;
93 .£ ■*
1 — i. <W
«3 S 2
«■
^
-
3
bc
c
c
ei
— 1
^
93
93
—
i<i
3
O
93
s
B
.S? =
'S
CJ
co
K
^
13
—
~
-i
'>
fi
O
93
K
=
■«•
s »»
e .
s o.
03 ^
— «
93 .
3 £Û
es —
S2
.. B-
3^
B "3
«S
2
o "3
32
O
• C*
93
o es
S E
s
^S
B —
V 93
Ko.
O £2
O,™
. 0.
>~
-03 w
"5.2
- -
s
— -
B
cT.SP
ce o
E
93
63
9)
>
s
93
63
93
93
-X,
93
93
B
63
93
-PQ
93
-3
93
S
3
-2
'3
«
13
-o
93
E
S
9)
O
93
B
CS
93
3
_o
93
E
<93
3
13
O.
S
o
03
-3
o
.2 «
~ e
j s
es
ai
93
-a
es
eu
63
es
63
B
93
1 3
"3 O
3
-S
O
93
-3
=
93
03
B
3
B
-
«■S
93 a-
3 »
o2
> *
es n
ï_l 13
03 "3
"3 ..
pi
es
3 ^
13 CS
o
-
9.
"3
13 C
•S M
't g
J3 E
vi es
S ~
.es 3
"*" r h
B W
g,
1- C
rd S
- ^ r —
« fij 3 S
J s , o »
3 ê.^ O-03
63 ï e^ es
S s
~ 03 |
3_"3 "~
. 03 g ,M
- E eu
- o
-3 3 &-
E L o
= -i~ ei?
^"SS'3
. C 13
. 03 <: e- 13 3
3 « o
; O- 53J3 ûû **^
■ B . - •■ -w . _ .S
63 03 ~£ ■?- ~ *î S
13
B
» 3
52^2
93
"3
13 -j 0C
«3
— x
3
13 3
60
t r-'
" eu
00
,2 P ^ sa
g**
-, x — _
sS»«|
03 Z = es =
13 < X -
O - ' ' '
c2 03^ a
■ — H O
B ItT, • 2 H •■ 9) ~t
es ÇÇ CJ O X c--
« 2 n 3 Nta
B5 13 (. 43 03
^ 3*> 13 ?-.
3 1
- -
- 't.
63 13
3
E « ■*
O
13
7 ?
r.
«3
51
a
n
>
cj .
'3 «
3 <
J u
S
« « .
'5 § =.2
;j .C a as
u e «
c/} ta >
Ç (l'OÏ
'C ~ -S 4,
- '- —
J=C3 o15 •
« S g "S
^^ - 6
o c "a m .
^ to 3 W u
92 •
s"* s
3 » bs
a 3 u
COS.
S»— -O
-r. .
O 00
4) .—
-r ,3
O co
_2 CJ
O ~~
■fi E
a>
o ,
— "u
M
—s c
a)
jb — ^ » — 12
g -S •« - I g
- S 3, 3 3 « «
u z &£.«:§
e ?p es <L
.g . gj o rz , _
> -3 S i. -
«s
S > ©
s as
4^1
3 «t,
^ 3 3
« ajs es
■S "O
as
3
5 S
-» 3
3
■ C
i -eu
es
CCS
•_=*-•!" 3
3 5 4;
S — —
PS
: i
~ ©
^2 C 03 -^ ûj H3 _£ « Ï5 ï-
o « r. c •© — ■* *
-a
S <" J
ss E - =
~t ~-
». w O u. 3 -» 4>
c, y. . 3 © -
•i> "3 o ~
= - -a
8 - o. S.
55 3
Cy 4;
i 3
£^>
es
"O «
.. t.
M -43
Ph -
3 -
«2
g
c
3
- -
3
s c
•eu
s
,3
O
^ bB
X
3 3
~
3" es
S ~
•03
es —
S
■3
u
S-3
j.
X
1
SB
Z
E
CI
U
>
X
es '©
3
r
t-
3
> 3
3
o
O
,o
0) o
CD
as
o es
© r
93
-'
i
SE
— X
3
- 3
6S
3
~
^H
C h
r
u
ES
-
C
■3 o .s -S
3. £s -à « Ë
3 <î>
vî » "3
B o « s
» co S —
— o
5 -a?
•eu '■'
ï- -
3 j
■s g
6 E
es
-a
3
«
©
eu
-3
Cv
3
5
-c
«
en
-C
—
"3
3 ce
cj m
eu
i 3
«■S
cj S
"3 O
1. ■*
3 jj
" 0> _
'S _••
te 3
es
r- cj
= a:
c
1=
3 9)
.-S "3
3
«5
cj
-s
©
4)
ei)
"3
CJ
3
3
es
CJ
— ï
CJ
-3
es
S
s"
CJ
-S
SB
CJ
>■
•—1
r.
CJ
-a
ea
SS
■—
4)
—
C
CJ
4>
aï
4>
-3
—
3
CJ
3
.SP
'S
45
M
CJ
S
3
es
3
03
— 52 —
De Guillaume de Berlo et de Jeanne de Merode,
nous connaissons six enfants ;
1° Guillaume, seigneur de Fologne ' ;
2" Jean qui suit;
3° Marie, femme d'Englebert d'Immerseel, vi-
comte d'Alost, seigneur d'Immerseel, Wommelgem,
Itegem, ter Hameijden, Meijsse, etc., veuf en
premières noces de Jossine de Grevenbroeck. dame
de Loon-op-Zand, Bokhoven, Olmen etc. ;
4° Elisabeth, qui releva, le 9 novembre 1560,
en vertu du testament de sa grande-tante, Elisabeth
Bauw, dame d'Eechoven, la rente susmentionnée
sur Opstalle. Son oncle, messire Arnould de Berlo,
époux de Barbe de Rommerswael, prêta le serment
féodal pour elle (M. 2, p. 91);
5" Marguerite;
6U Charles de Berlo, chanoine.
Jean de Berlo précité, fut investi, le 15 janvier
1557, par indivis, pour lui et ses frères (« in bru-
derlijcken rechte ») de la haute, moyenne et basse
justice du village de Keerbergen, du moulin à vent
et de toutes les autres ap- et dépendances. Son
tuteur, messire Arnould de Berlo se constitua
homme-servant (besetman) du fief (M. 2, p. 63). Un
autre tuteur de Jean de Berlo et de ses frères et
sœurs, messire Guillaume de Merode, seigneur de
Fologne, est cité dans un acte de 1562 (B. 358,
p. 358!).
1 II paraît être ce Guilelmus Berlo, Mecliliniensls, qui fut immatri-
culé à l'Université de Louvain en février 1562 (Matricule de Louvain).
- 53 —
Le 7 du même mois, Arnould de Berlo avait
relevé pour Guillaume, Jean de Berlo et leurs sœurs,
une rente de 300 florins Carolus sur Fologne et
une autre de 60 florins sur le château de Roest
(B. 358, p. 90). Le 5 décembre 1590, la rente sur
Fologne fut portée, au nom d'une des sœurs,
Elisabeth (B. 364, p. 286).
Le 18 juillet 1573, Jean de Berlo prêta lui-
même le serinent de fidélité du chef deKeerbergen.
Il fut aussi comte d'Hozémont, seigneur de
Braives, Ciplet, Sclessin etc. Par contrat du 18
août 1577, il épousa Marie Marguerite d'Argen-
teau (Arckenteel etc.), fille « de feu noble et vaillant
seigneur Guillaume d'Argenteau, en son vivant
comte d'Esseneux , et de noble dame Jehenne
d'Autel, sa compaigne legittime douaigière d'Esse-
neux, » fille de Jean, seigneur de Vogelsang, et de
Jeanne Cottereau. Voici les huit quartiers de la
femme de Jean de Berlo :
d'Argenteau, d'Autel,
de la Malaise, de Cottereau,
d'Alsteren, de Pallant,
de Longchamps, de Wideux;
d'Argenteau porte : d'azur à la croix d'or, chargée
de 5 coquilles de gueules et accompagnée de vingt
croisettes recroisetées, au pied fiché, du second.
Jean de Berlo apporta à son mariage les châteaux
et seigneuries de Braives et de Ciplet et l'avouerie
de Moxhe et de Moxheron; Marie Marguerite
d'Argenteau : le château et seigneurie de Waije-
nesse (Waijenesse, Wadenesse, etc.), sous Rijmenam
et Bonheijden, et une rente de 300 florins, hypo-
— 54 —
théquée sur la seigneurie de Dongelberg. Moyen-
nant cette rente, que Jean cTArgenteau, seigneur
d'Esneux, leur transporta, le 21 octobre 1577, les
époux renoncèrent à tous leurs droits sur la suc-
cession des cVArgenteau. Par acte, passé, le 20 août
de la même année, au château d'Esneux, en pré-
sence du notaire Carpentary, le frère de Jean,
Guillaume de Berlo, seigneur de Fologne se porta
garant pour l'observation des stipulations du con-
trat de mariage et engagea de ce chef sa seigneurie
de Fologne. Les témoins de cet acte (qui fut enre-
gistré à la cour féodale de Brabant, le 21 octobre
suivant) furent : Florent, seigneur d'Àrgenteau,
Jean de Berlo, seigneur de Sclessin, Arnould de
Berlo, seigneur deCortenbach, et Henri d'Eijnatten,
seigneur de Bolland (B. 361, p. 451) '.
1 Le 16 uovbr. 1555, Arnould, bâtard de Berlo relève pour
Jacqueline de Berlo, femme de messire Florent d'Argenteau, par le
trépas de Marie Cottreaux, mère de celle-ci, une rente féodale
(B. 357, p. 476). Le 5 février 1557, Jean Cottreau, seigneur de
Jauche, fit en qualité de tuteur de Jean d'Argenteau, seigneur
d'Ochain (Ochem), et par achat de la sœur utérine de celui-ci, Jeanne
d'Autel (van EltereJ et de son mari, Guillaume d'Argenteau, seigneur
•lEsneux, le relief d'une rente de 100 fl. sur Gaesbeek etc. (B. 358,
p. 101). Le 23 mai 1571, Jean d'Argenteau, fils de Guillaume, comte
d'Esneux, releva, par suite de la mort de sa grand'mère, Françoise
de le Malaise-, dame de Dongelberg, les seigneuries de Dongelberg,
de Lavoir, avec le château, et un quart de la cour de Jupplieu, à
Noville-sur-Mehaigne. Jeanne d'Autel, veuve du comte d'Esneux,
fut investie de l'usufruit de ces biens (B. 361, p. 116). Le 7 juin
suivant, Jeanne et Anne d'Argenteau, filles de Jean et de Françoise
de le Malaise, reçurent l'investiture du château et d'un quart de la
dite cour de Jupplieu (ib. p. 119;. Le 2 mai 1586, Damoiseau Florent
d'Argenteau, seigneur de Strippiyny, fit le relief de ce fief (B. 363,
p. 153).
— 55 —
Quant à Braives et Ciplet et à l'avouerie cle
Moxhe et de Moxheron, une tante de Jean de
Berlo, Marguerite de Merode, les lui avait cédés,
par donation entre vifs, sous réserve d'usufruit,
et à condition que, dans le cas où Jean passerait
de vie à trépas avant la donatrice, sans laisser
d'hoirs, ces biens devraient retourner à celle-ci.
Le 4 février 1577, messire Philippe van der
Meeren, seigneur de Saventhem, mandataire de
cette dame, en avait fait investir Jean (B. 361,
p. 411).
Le 11 juillet 1584, Jean de Berlo, seigneur de
Fologne, vicomte héréditaire de Looz, comte dHozé-
mont , seigneur de Keerbergen, releva par suite
du décès de son frère Guillaume, la seigneurie
de Fologne, le hameau de ten Winckel, avec des
hommages (près deLummen),lacour de tenanciers
(laethof) de Zoelrebroeck, et le bien dit het Hel-
montsbroeck, à Oisterwijk (B. 363, p. 47); le 1er dé-
cembre suivant, il reçut quatre autres fiefs
(B. 364, p. 23).
Avant de continuer l'histoire de Keerbergen et
de ses seigneurs, il nous semble opportun d'es-
quisser à grands traits celle de "Wayenesse. Ainsi
qu'on l'a vu, cette belle propriété avait été appor-
tée à Jean de Berlo par sa femme, Marie Mar-
guerite d'Argenteau.
Elle consistait en un château et diverses terres
et avait un mayeur, des tenanciers, des hommes
de fief, des cens, pontpenninghen, keuren, etc. Le
— 56 —
premier propriétaire de Wayenesse que nous
ayons rencontré, est Jean van der Snnnen. Il le
transporta, le 11 septembre 1516, à Marguerite
de Wideux, dame dudit lieux (Widue, Widoe,
Giridoe etc.), veuve du chevalier Jean Cottreau
(Coutereau, Cotereau, Couireel etc.). Après la mort
de cette dame, sa fille, Marie Coutereau, en fit
le relief, le 5 juin 1518. Elle épousa Arnould
de Berlo, avoué de Sclessin et d'Ougrée, seigneur
d'Ongnies, comte d'Hozémont, bourgmestre de
Liège, etc., dont elle eut, entre autres, une fille,
Jacqueline, qui releva Wayenesse, le 22 avril 1556.
Son époux, messire Florent d'Argenteau, prêta le
serment de fidélité pour elle. La terre passa,
ensuite, par succession, à Jean de Berlo, seigneur
de Sclessin, frère de Jacqueline, et qui en fut
investi le 15 janvier 1557. En vertu du testament
de ce dernier, Jeanne d'Autel, dame d'Esneux,
veuve de Guillaume d'Argenteau, et sa fille Marie
Marguerite firent le relief de la propriété. Par le
mariage de cette demoiselle, la seigneurie rentra
dans la famille de Berlo i .
Jean de Berlo et Marie Marguerite d'Argen-
teau testèrent deux fois : le 15 juin 1599 devant
le notaire Lapide, à Liège, et, le 2 avril 1608,
devant maître Antoine van Etten (M. 6, p. 61).
Le 9 mars 1604, il firent un codicille (ibid. 8, p. 3).
Ils léguèrent à noble seigneur Charles de Berlo.
i C. 17838 et 17839; M. 2, p. 16, 62 et 112.
- 57 -
seigneur de Wuestwezel, à sa femme, Agathe de
Merode, et à un des fils de ceux-ci, à l'aîné ou à un
des puînés, suivant la décision des parents : 1° la
seigneuriede Keerbergen-Bollo, avec haute, moyenne
et basse justice; 2° la cour censale, dite la censé
de Helmond, sous la seigneurie de Moll; 3° deux
rentes, respectivement de 6 florins à charge des
héritiers de Philippe le Clerq, de Keerbergen, et
de 60 florins sur la seigneurie de Roost ; 4° la cour
censale de Waijenesse, avec les bois, dont une partie
appartenait aux seigneurs de Duffel et de Melroy ;
5° la grande et la petite maison, dite la maison de
Cortenbach, au marché aux grains, à Malines,
avec une part dans le tonlieu de cette ville, dont
l'autre part était perçue par la famille de Merode
de Duffel ; 6° une rente de 100 peters, due par la
corporation des brasseurs , de Malines ; 7° un sixième
des dîmes de Duffel, avec des hommages, apparte-
nant aux testateurs par indivis avec les seigneurs
de Duffel et de Melroy; 8° une rente de quatre
quarts de toassend (froment; flam. weit; allem.
Weizen). Ce legs fut fait à condition d'assigner
une rente de 6 florins pour la fondation d'une
messe chantée aux anniversaires de la mort des
testateurs et pour la distribution d'un quart de
wassend aux pauvres qui assisteraient à cette
messe. Il est stipulé, ensuite, que, au cas où Charles
de Berlo ne laisserait pas de fils légitime, les biens
devraient échoir à Jean, seigneur de Berlo, fils de
Jean et d'Anne de Blitterswijck, et à défaut d'hoirs
de celui-ci, au fils cadet de la maison de Berlo,
c'est-à-dire au cadet de la branche possédant la
— 58 -
terre de Berlo. — Dans le codicille, Jean de Berlo
exprima le désir formel que tous les biens précités
passassent à son filleul Jean, fils aîné du seigneur
de Wuestwezel et d'Agathe de Merode, et, si Jean
venait à mourir sans hoir, aux autres fils de ceux-ci
(M. 8, p. 197).
Après le décès de son époux, Marie Marguerite
d'Argenteau, comtesse-douairière d'Hozémont, fit
relever, le 26 novembre 1605, l'usufruit de la
seigneurie de Keerbergen (M. 3, p. 76). Elle fut
investie, en outre, de l'usufruit de Fologne, ten
Winckel, Helmondsbroeck, Braives, Ciplet et du
bien dit Lamendonck, à Schijndel (rel. du 2 sept.
1605, respectivement du 29 octobre 1608) (M. 3,
p. 76).
Le testament des époux donna lieu à de longs
procès. Les biens furent revendiqués, entre autres,
parles seigneurs de Grasen1 et de Mailly, du chef
de leurs femmes. Par suite d'une sentence du
conseil souverain de Brabant, du 4 décembre 1608,
François Laurenz, accompagné de Marc de Wijse,
prêtre et licencié en droit, agent de la comtesse
d'Hozémont, releva de nouveau pour cette dame la
seigneurie de Keerbergen <■< voor de geheele tocht
ende douarie van aile recht ende actie als haer
gelaten ende competerende es wt crachte van den
testament van voorsz. saliger haren man » (M. 3,
p. 76v°). Le 27 octobre 1616, Marie d'Argenteau,
dame de Fologne, Keerbergen, etc., fit constituer
1 Probablement Henri de Berlo, époux de Jeanne d'Oyenbrugge
de Duras, dame de Grasen.
— 59 —
audit de Wijse, par messire Simon van Royen,
drossard de Keerbergen, une rente de 25 florins
sur Wayenesse, et le 10 juin 1617, une autre de
15 florins (M, 5, p. 34 et 47). Le 19 juillet 1619,'
messire Jean de Trouy fit le relief de Keerbergen
« ende dat tôt behoeve van den genen die bij den
testamente van wijlen heer Jan van Berlo oft
anders bij scheijdinge ende deijlinge bevonden sal
wordden gerecht te sijne. » Lambert de Boije,
âgé de 17 ans, « laqueij van de vrouw douagiere
van Hozimont » fut constitué, homme-mortuaire
(M. 5, p. 75v°).
Marie Marguerite d'Argenteau testa le dernier
jour de février 1629 et semble être morte peu de
temps après (B. 373, p. 966).
Ce fut du temps de Jean de Berlo que l'arche-
vêque de Marines, alors le cardinal de Granvelle,
dota la chapelle des Saints Antoine et Barbe , à
Keerbergen, de fonts baptismaux. L'acte y relatif
fut donné à Bruxelles, le 16 octobre 1570. Pendant
les guerres de la fin du siècle, Keerbergen eut
fréquemment à souffrir d'invasions de troupes
et semble même avoir été le théâtre de combats
sanglants. L'église, placée à environ une demi-
lieue de la localité, fut particulièrement éprouvée.
Pillée par la soldatesque, elle fut transformée en
retranchement par le capitaine Mol (1598). Le
culte divin se célébrait alors dans la chapelle
située au milieu du village, mais elle était abso-
lument insuffisante pour contenir les fidèles, et
on était forcé de faire les- enterrements dans les
communes voisines. En 1607, il ne restait plus
60 —
de l'église que quelques ruines qui étaient occu-
pées par les troupes { ,
En vertu du testament de Jean de Berlo, messire
Charles de Berlo, comte d'Hozémont, avoué de
Sclessin et d'Ougrée (descendant à la troisième
génération de Guillaume de Berlo et de Catherine
de Cortenbach), réclama l'investiture de Keer-
bergen. Il reçut celle-ci le 4 septembre 1629 et
transporta ce fief, le même jour, à son fils aîné,
Florent, pour qui il prêta le serinent d'usage
(M. 6, p. 60v° et p. 61).
Charles de Berlo, ancien chanoine tréfoncier de
la cathédrale de Liège (reçu le 23 septembre 1585),
avait hérité de son grand-oncle, le chanoine Charles
van der Meeren, la seigneurie de Wuestwezel 2
(r. du 28 mai 1596). Il la vendit, devant les éche-
vins d'Anvers, à Guillaume Adrien de Hornes,
seigneur-banneret de Kessel, qui en fit le relief
le 7 octobre 1611 (B. 109, p. 152). Le 8 mars
1600, Charles de Berlo, seigneur de Wuestwezel et
Westdoorne, engagea à Jean van Geistlingen, de
Maeseijck, moyennant 1428 florins, monnaie de
Brabant « sijnre landen und weijden under die
justifie van Born, Obbich ende andre justifie
1 Rapports du doyen des années 1598 et 1607. Anal, pourserv. à
Vhist. ecclés. de la Belg., X, 313, 315).
2 Au sujet de Wuestwezel, il eut à soutenir un procès contre
Guillaume van der Meeren, seigneur de Saventhem (Procès 765-
1426). Pour la partie plus moderne de l'histoire de Wuestwezel,
consultez notre Notice historique sur Broechem et ses seigneurs.
— 61 —
daerumbtrent gelegen. » En outre, sa femme,
Agathe de Merode, assigna en garantie tous ses
biens (Publications de la Société hist. et arch. de
Limbourg, XX).
Son parent Antoine d'Argenteau, comte d'Es-
neux, seigneur de Dongelberg, Lavoir, etc. (fils de
Jean et de Gertrude van der Graclit, chanoinesse
de Moustier, qui était fille d'Antoine, seigneur
de Schardau, etc., et de Gertrude de Berlo), lui
disputa le château de Waijenesse. Il en obtint une
investiture, le 1er septembre 1629, en qualité d'hé-
ritier de s^, tante Marie Marguerite d'Argenteau.
Mais, comme on le verra plus tard, Waijenesse
resta à Charles de Berlo, qui le transmit à ses
héritiers (M. 6, p. 60).
Après avoir renoncé à sa prébende, Charles de
Berlo avait épousé Agathe de Mérode, qui mourut
le 10 août 1641 '. Ils eurent huit enfants :
1° Jean, filleul de Jean de Berlo, comte d'Hozé-
mont, qui lui destinait la seigneurie de Keerbergen
et d'autres biens (voyez ci-dessus) ; f jeune, avant
le 27 août 1629;
2° Florent, qui suit ;
3° Ernest, qui suivra après son frère;
4° Béatrice, chanoinesse de Munsterbilsen,
femme d'Hippolyte de Naldi;
5° Madeleine, chanoinesse de Nivelles;
6° Charles, t
7» Ferdinand, I raorts Jeunes ;
» Cette date résulte de l'acte du 12 octobr. 1G41 (M. 8, p. 3).
- 62 —
«
8° Arnould, lieutenant-colonel au service de
l'empereur.
Florent de Berlo, seigneur de Keerbergen,
Bollo, etc., par transport de son père (4 sep-
tembre 1629), paraît avoir eu pour parrain son
oncle Florent de Merode, marquis de Deynze,
baron de Duffel, etc. Il devint colonel au service
de l'empereur, membre du corps équestre du
pays de Liège et du comté de Looz (admis le
1er décembre 1639).
Le 7 septembre 1630, il constitua, en qualité
de mandataire de son père, moyennant un capital
de 1600 florins, aux dames du couvent de Tabor,
à Malines, une rente de 100 florins, en leur enga-
geant la seigneurie de Keerbergen, l'hôtel de
Cortenbach, à Malines, et les biens et seigneuries
de son père au pays de Liège ' (M. 6, p. 47). Le
29 juillet 1632, il constitua une autre rente de
200 florins, en faveur de Jean deMoor, apothicaire
à Malines, et à sa femme, Marie van der Strepen,
de qui il avait reçu la somme de 3200 florins.
Cette rente fut hypothéquée sur Keerbergen et
Bollo (M. 6, p. 97 et 105). L'acte y relatif qualifie
Florent de baron de Dougnies (qui est Ongnies),
seigneur de Keerbergen.
1 Nicolas van Ghemen, commissaire royal, et sa femme Pétronille
van Ophem, propriétaires, pour un huitième, de l'hôtel de Corten-
bach, remboursèrent ce capital le 24 février 1648. La rente fut
cassée en la cour féodale de Malines, le 24 décembre 1653 (M. 10,
p. 182).
— 63 —
Après le décès de leur père, les enfants de
Charles de Berlo, seigneur-banneret de Berlo,
seigneur de Selessin et d'Ongnies, savoir : Florent,
baron de Selessin, etc., marié à Isabelle Anne de
Cortenbach, Ernest et Béatrice, assistée de son
mari, messire Hippolyte de Naldi, procédèrent, le
28 février 1639, de concert avec leur mère, par-
devant Pierre Plenevaux, notaire de Liège, au
partage de la succession paternelle. Ernest eut
de celle-ci la seigneurie de Keerbergen-Bollo,
la part du tonlieu de Malines et la rente due par
la corporation des brasseurs de cette ville, avec
toutes les charges y rattachées. On stipula que, si
Ernest venait à mourir sans enfants, tous les
biens, devraient retourner aux autres enfants, sauf
l'usufruit pour sa femme (M. 8, p. 197). Maître
Antoine van der Hoff, homme de fief du pays de
Malines, releva Keerbergen pour Ernest, le 16 mai
suivant, en vertu d'une procuration d'Agathe de
Merode (M. 7, p. 189); il négligea, toutefois, de
déclarer à la cour féodale que cette seigneurie
constituait un hdéicommis, oubli qu'Ernest de
Berlo répara en personne le 12 décembre de la
même année. La cour enregistra la clause relative
au fidéicommis de la façon suivante : « et advenant
que ledit Seigneur vénal aller de vie a trespas sans
laisser hoirs, la dite seigneurie de Keerberch avec
ses appendices, appartenances et dépendances
retourneront à proumet de ses frers et seures ou
leurs enfans et hoirs legittimes, soit filz et
filles.... » (M. 7, p. 197).
Le 16 du même mois, Conrard van Steenwinckel
— G4
présenta à la cour féodale un instrument, passé,
le 10 novembre, au Chasteau de Sclessin en la
Sale par terre, par-devant le notaire Plenevaux,
instrument par lequel noble et illustre seigneur
Florent, baron de Berlo , seigneur de Sclessin,
Oignies etc. et sa femme, Isabelle Anne de Cor-
tenbach ' (dame de Cortenbach, fille de Guillaume
et de Marguerite van der Lippen, dite Hoen, et
qui, d'après un des manuscrits in-folio du chanoine
Hellin, aurait vendu Cortenbach au colonel S netter),
renoncèrent, pour eux et pour leurs hoirs, au profit
de leur frère et beau-frère respectif, noble géné-
reux seigneur Ernest, baron de Berloo, seigneur de
Keerenberch, Bollo, etc., à tons leurs droits sur le
ndéicommis. En garantie de cette renonciation, ils
engagèrent la totalité de leurs biens (M. 7, p. 198).
J. Th. de Raadt.
(A continuer.)
' Mariés, à Aix-la-Chapelle, le 23 septbr. 1634.
— 65 —
Anciennes Tombes et Épitaphes $
DE
L'HOSPICE DE WENNEMAER
A GAND
Sur la place Sainte-Pharaïlde, à Gand, non loin
de l'antique château des Comtes de Flandre, se
trouve une vieille maison habitée aujourd'hui en
partie par un boulanger, en partie par un auber-
.giste-marchancl de sabots. A côté de celle-ci existe
encore maintenant une porte grillée, surmontée
d'une niche vide, occupée jadis par la statue de
Saint-Laurent. Elle donnait accès à la chapelle
dédiée au dit Saint, patron de l'hospice de Wenne-
maer, et de nos jours au Marché aux Poissons.
Cette maison était connue sous plusieurs déno-
minations : Het Paradys (le Paradis), désignation
patronymique de l'hôtel; Wennemaers hospitael,
du nom de son fondateur; Hospice Saint- Laurent,
parce que ce Saint en était le patron. De ce coquet
hospice dont la reconstruction date de la fin du
— 66 —
XVIe siècle, il ne subsiste pins que la façade. Il
subit le sort de la plupart des institutions reli-
gieuses : les iconoclastes du XVIe siècle détruisirent
le couvent; les deux tombes de ses fondateurs
furent seules épargnées.
Guillaume Wennemaer , haut échevin (hoofd
sehepen) de la Keure de Gand, de concert avec sa
noble épouse Marguerite de Brune, et suivant acte
passé par devant les échevins, le Mardi après le
jour de la Magdelaine en Fan 1323, convertit son
hôtel, le Paradis, en institution de bienfaisance
pour les pauvres. Ce grand seigneur ne fut pas
longtemps témoin de l'exécution de cette bonne
œuvre. Le 5 juillet 1325, il trouva la mort dans
les rangs des Gantois qu'il commandait, tué par
Robert de Cassel, au pont de Rekeling, près de
Deynze. Sa femme prit alors le voile et devint
supérieure (meesterighe) de l'hospice qu'elle avait
aidé à fonder. Elle y vécut 27 ans donnant l'exemple
de la résignation et du dévouement.
Les Archives de la ville de Gand possèdent fort
peu de documents de ce couvent : quelques pièces
de procès, un chirographe de 1354, par lequel
Hughe Brebaert et sa mère fondent des lits à
l'hôpital dit Paradys, à Gand; un terrier du
XVIIe siècle et un registre copié de généalogies et
d'octrois. La présence de ce dernier s'explique
surtout par le fait que personne ne pouvait être
nommé gouverneur ou tuteur de cet établissement
sans être attaché par un lien de sang à la famille
du fondateur.
L'administration des Hospices civils conserve
- 67 —
dans son dépôt des manuscrits d'une grande im-
portance. Messieurs le baron de Saint-Génois des
Mottes et Van Lokeren dans leurs notices sur le
couvent de Wennemaer, publiées dans le Messager
des sciences historiques de Belgique, années 1853
page 64, 1854 page 169 et 1871 page 474, et
Kervyn de Volkaersbeke, dans son ouvrage inti-
tulé : Eglises de Gand, tome II, page 367, en ont
relaté les passages qui offraient le plus d'intérêt.
Dans un recueil d'épitaphes qui est en notre
possession, nous trouvons la description des
tombes mentionnées par les savants auteurs pré-
cités. Plusieurs inscriptions funéraires dont men-
tion n'est faite nulle part ailleurs, sont décrites
dans cet épitaphier. Ces dernières, nous semble-t-il,
figureront avec intérêt auprès de celles déjà citées
dans ces autres ouvrages.
Voor den autaer eenen metaelen sarck (portant comme
blason : parti à dextre de sinople à 10 billettes d'argent
posées 4, 3, 2, 1 et à senestre de sable à une tête de jeune
fille au naturel) :
« Hier light begraven mevrouw Margriete S'Brune, fon-
daterigghe, ende gheselnede van mher Willem Wemaere die
starf int jaer ons heeren 1352 op onsen vrauwen avont
in 7bre, welck met haer beede goeden hospitael sichtent
tamelyck beleet was by haer in den staet van habyte ende
meesterschip wel XXVIII jaer naer ser Willems doot
voorseit. »
Op den selven steen :
« Wenemars hec fossa Guillelmi continet ossa
Jura tuens villœ Gandœ pugnans cadit ille
— 68 —
Annus M. ter C bis bissenus et I per se
Migrans a venis kis, idibus in julianis
Condidit hanc edem pauperibus recreandis. »
Onder op het sweert van de effigie van mher Willem
staet :
« Horrebunt dudum reprobi me cernere nudum. »
Rontkom den sarck stont :
« Joe Margriete S'Brunen uxor Guillelmi obijt a0 1352,
ma 7bris. »
Ibidem eenen blauwen sarck :
« Desen steen is kier gkeleyt om daer onder te begraven
Joe Barbara Debins een van de vier susteren kier binnen,
ende oock andere susteren die kier naermaels in kaer stede
commen van ket selve gkeslackte, op dat kem lieden gke-
lieft, ende overleet int jaer 1482. »
De capelle van Wenemaers kospitael wederomme naer
de reconciliatie deser stede, van nieux opgkemaeckt synde,
is by de meesteriggke gkestelt dit naervolgkende epitapkie
onder twee groote metaele figueren gkestelt in den muer
van den ckoor :
« Epitapkum Generosi nobilis Guillelmi a Wedemaere
kujus domus fundatoris.
Invida virtuti mors, claris aemula factis,
Quid merui, cur me, mors violenta, prenait ?
Non ego, Gorduni sum principis arma secutus,
Inque rebellantes arma cruenta tuli.
Nonne reluctantes populos armisque frementes,
Agressus domini, quid domuisse juvat ?
Quid juvat Herculeus, me quondam viribus usum,
Spécula non potui, mors superare tua.
Ergo pio patriœ jacui inflammatus amore,
- 69 —
Vulnere confossus, Casteliane tuo,
Sed jacuisse nihil : mors omnibus equa propinquat !
Turbatur tumulus post tria secla meus.
Sacrilegi rapiunt, sparguntur busta per agros
Ossaque ; nunc sparsis ossibus urna vacat.
Origitur tumulus, surgentis imago sepulchri
Umbratenus nostri quœ simulachra tenet,
Origitur tumulus ne vana recédât in auras
Jama levis, precibus ne mea busta vacent.
Epitaphium D. et nobilis Domicelloe S'Brunen hujus
domus fundatricis et magistrœ.
Hœc ego cœlestis Paradisi nominis œdes
Delicias generi pauperibusque dedi.
Quondam etenim in terris paradisi dulce viretum
iEterni lustrans hoc meditabar opus.
Hic ego, crudeli deleto morte marito,
Cincta comas vittis planta novella fui,
Planta novella fui Paradisi primaque sacrce
Et domina et famula et fida magistra domus.
Nil nisi cœlestes spirabam vertice odores,
Solamen miseris, dux, via, vita, salus,
Vita opibus, dux consiliis, solamen in arctis,
Exemploque salus consilioque via ;
Cumque animum immitis nexosque resolveret artus
Atropos et vitœ stamina parra ferox,
Hic sacro condebar humo; rerum impia bustum
Posteritas rapuit, post tria secla, meum.
Iamque nihil restât veteris nisi imago sepulchri,
Quœ memorem, lector, te facit esse mei ! »
Onder de voorgaende figueren was 't naervolghende :
« Sépulture van mher Willem Wenemaeredie versleghen
was van Robrecht van Cassel te Reckelyn den ven july
— 70 —
a0 1325 ende van mevrouwe S'Brunen syn gheselnede die
overleet op onsen vrouwen avont iu 7bre a0 1353 ende hebben
dit Hospitael met beede haerlieder goeden ghefondeert
ende ghesticht ende mevrouwe noch 28 jaern taemelyck
beleet in habyte ende meesterigghe naer mher Willems
doot voorseit.
« Bidt over de zielen. Actum 1589. »
Neffens bet H. Sacraments huus, in een ovaele plaete, in
blau steen gbestelt (portant le blason : d'or à 2 merlettes
de sable perchées sur une branche de sinople marchant de
senestre à dextre) :
« Hier vooren light begraven den eersaemen Laureyns
van Houte fs Joos,onghehuwet,voochtvan desengodtshuuse,
heeft alhier ghefondeert dry missen ter weke, eeuwelyck
gheduerende, te weten maendagh wonsdagh ende vrydagh,
met aile jaeren alsoo langhe als hy leeft beginnende op den
xen augusti 1550 een sermoen tsiaers ende xxmi aerme-
lieden elck een wittebroot van vier groote t'stuck en n gr.
eng., ende elck een pinte wyn, ofte acht groote voor elcke
pinte, ende t'synen overlyden tselfste te doen t'elcken op
den dagh van syn jaerghetyde, mitsgaeders dry missen oock
op den selfsten dagh eeuwelyck ende erfvelyck gheduerende,
die overleet den 24 Xbre 1604.
« Bidt Godt voor de ziele. »
Daer vooren eenen blauwen sarck (blason comme le
précédent) :
« Sépulture van eersaemen Laureyns Van Haute f * Joos,
voocht van desen godtshuyse sichtent den jaere 1586 den
ixeu Xbre ende heeft dese capelle doen repareren ende laeten
wyden van eerwerdighen heer bisschop van Rurmonde heer
Willem van der Linde, tweeden bisschop van Ghendt op
— 71 -
den 25en february 1588, welcken voocht overleet den
24 Xbre 1604.
« Bidt voor de ziele. »
Voor denaultaer blauwen sarck (blason comme ci-dessus) :
« Sépulture van eersaemen Joe Cathelyne van Haute
fia Martens religieuse van desen godshuuse gheweest
73 jaeren ende t'selfe geregiert als meesterigghe den tydt
van xxini jaeren, die overleet den 15e" july 1588. Bidt voor
de ziele ende voor de andere religieusen die nu syn, ende
naer haerlieder commen sullen 1 590. »
Cette pierre tumulaire est déposée aux ruines
de l'abbaye de Saint-Bavon. Au milieu, gravées sur
cuivre, sont représentées en losange, les armoiries
de la famille van den Haute. Des deux côtés de
ces dernières figurent, taillées dans la pierre, celles
de Wennemaere et de Brune. Ce monument funé-
raire mérite une mention spéciale pour son parfait
état de conservation.
Ter syden van den aultaer aenden muer een ander
viercant steenken (blason mentionné plus haut) :
« Anno 1587 den xve mey. Hier light begraven Joe Cathe-
lyne van Haute f ia Martens religieuse ende meesterigghe
gheweest 73 jaeren, die overleet den xve july 1588. Bidt
voor de ziele. »
Dit is de deure van den graeve :
« Hier syn sesthien provengiersterigghen met dejonck-
wyfs die de viz moeten bestaen van eenigher syde, sij
hebben een caemere, een achterlinck taerwe ter weke, ende
— 72 -
vier stuyvers ende allé dry maenden acht stuyvers om
potaige, de vier nonen ofte religieusen lesen liaerlieder
seven ghetyden met pater nosters ende beloven suyverheyt.
« Daer pleghen broers te wesen maer syn afghestelt. »
Ici finissent les citations extraites du manuscrit
et par conséquent la tâche que je m'étais imposée.
Les quelques données empruntées à ce recueil
d'épitaphes sont importantes pour l'histoire de
l'hospice.
Aujourd'hui il n'existe plus qu'une seule reli-
gieuse qui faisait partie du couvent. Expulsée de
sa retraite elle demeure depuis 1866 dans une
maison de l'ancien béguinage, à Gand. Elle se
nomme Thérèse Van den Berghe mais est spéciale-
ment connue dans son voisinage sous la dénomi-
nation het begyntje van Stb Lauwereyns capellehe.
Elle a obtenu l'autorisation ecclésiastique de
conserver les reliques de Saint-Laurent. On in-
voque ce dernier pour obtenir la guérison de mala-
dies de la peau et des yeux.
Chaque année, le jour de la fête de ce Saint,
l'abbé Van Loo bénit l'eau dite de Saint-Laurent.
Robert Schoormax.
— 73 —
ARCHIVES GANTOISES1.
VI
NOTES SUR LES PAPIERS CONSERVÉS DANS LES
COMBLES DE L'HOTEL DE VILLE.
Un rapport de David 't Kint, receveur des tra-
vaux, présenté, le 17 août 1756, aux échevins de
la Keure "2, donne des renseignements précis sur
l'origine de rimmense tas d'archives conservées
au grenier de l'hôtel de ville.
A l'occasion de certaines fêtes d'inauguration,
et à d'autres moments où l'on s'était trouvé à
l'étroit, une quantité de papiers et de documents de
familles, provenant de consignations ou d'autres
sources, et qui étaient sous la garde des échevins
des Parchons, avaient été jetés dans deux salles
des combles, soit en sacs, en paquets et en coffres,
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., Ie livr., 1889, p. 77.
2 Cette pièce a été classée dans la série 97bis (histoire des Archives).
On en trouve une transcription dans le registre des résolutions
relatives aux travaux de la ville, 1755-70, f° 30.
- 74 —
soit pêle-mêle. La toiture étant en mauvais état,
ces papiers étaient devenus humides; les rats et
les souris d'autre part y avaient fait beaucoup de
dégâts. Aussi était-il devenu presque impossible
de retrouver les pièces dont on pouvait avoir
besoin, quand David 't Kint proposa de placer
des casiers dans un vestibule voûté au-dessus du
salon ' de la trésorerie, ainsi que dans la chambre
au-dessus du greffe, où l'on placerait aussi un
escalier de communication entre le premier et le
second étage. On restaurerait en même temps les
portes, les fenêtres et le toit.
Alsoo meuighvuldighe originele pampieren encle docu-
menter! raeckende différente familien, soo gheconsigneerde
als andere, oncler het bewelt van mijn edele heeren sche-
penen van Gedeele deser stadt Ghendt, ten tijde van de
inauguratie ende anderssints, met sacken, packen ende
coffers, emmers met open packen, deelen, stucken ende
brocken gheworpen syn overhoop in twee bovencamers van
het stadthuys, wanof de solders boven de selve camers syn
rot ende met deelen open liggende, waerdoor de selve
papieren ende documenten soodanich syn ghedestrueert,
gherot ende bedorven, midtsgaders geschonden van de
ratten ende muysen, waerdoor veroorsaeckt is, ende noch
voorder staet te worden, groote schaeden ende interesten
aen het publicq, als oock dat het bynaer onmogelyck is
daeruyt eenighe noodighe stucx te connen vinden. Om
' Cette petite salle ornée de peintures murales, et qui avait été
construite à mi-hauteur du vestibule au premier étage du bâtiment
qui donne sur le marché au Beurre, a été démolie en 1889 pour
faciliter les dégagements des bureaux.
— 75 —
waerinne te voorsien liebben UEden te raecle geworden,
naer visitatie door UEden commissarissen, te laeten maecken
locarissen op eenen ghevauteerden ganck boven den salon
van de tresorie, alsook op de camer boven het comptoir
van de greffie, midtsgaders van op de selve camer te
maecken eenen trap om te comen op den voorschreven
gevauteerden ganck, ende te doen de voordeze noodighe
reparatie aen de deuren, veynsters, als andersints, aile het
welck gheretardeert is om de menighvuldighe stadts-
reparatien ende wercken, ende geenen langheren uuytstel
verheeschende, versoeckt den onderschreven ontfangher
van de wercken tôt het voltrecken van aile het gone voor-
sey t UEden resolutie ende ordonnance. Desen 1 7n ougste 1756.
David 't Kindt.
Le collège autorisa les travaux proposés :
Actum int collegie den 17" ougste 1756, préside Jr Jan
Vilain, voorschepen. Ten voornoemden daeghe ghelesen
synde het voorenstaende expositief, op ailes gheleth, wierdt
gheresolveert ten effecte als daer by breeder vermelt, te
authoriseren den ontfangher van de wercken, soo wy den
selven committeren ende authoriseren by desen conforme
d'acte ut supra.
C. Goethals.
Tout récemment ces archives se trouvaient
encore dans le vestibule voûté dont il est question
plus haut, seulement tous les papiers étaient dans
le plus grand désordre et en partie pourris,
beaucoup de pièces étant littéralement collées
au dallage humide; plus une seule liasse n'était
restée complète. Des. casiers placés en 1756 on
— 76 —
ne voyait plus que les traces, très nettes, le long
des parois. Quand ces rayons ont-ils disparu?
Les plus anciens employés de l'hôtel de ville n'en
savent rien. Il est probable qu'on les aura enlevés
pour les utiliser ailleurs après qu'on eût pris en
1830 la plupart des caisses pour y mettre des
munitions '.
V. Vander Haeghen.
1 Voir Messager-, 1889, p. 344.
77 —
DEUX FONCTIONNAIRES
DE
L'ANCIEN RÉGIME
En 1709, un différend surgit entre le Clerc de
l'Assemblée des ecclésiastiques et membres de
Flandre ' et le greffier de cette assemblée, con-
seiller du roi et premier Pensionnaire de la ville
de Gand.
Le Clerc, Josse Goethals, brave et modeste ser-
viteur, avait succédé dans cette charge à son père.
C'était lui qui faisait tout le travail matériel des
Etats : copie des dépêches et résolutions, classe-
ment et conservation des papiers, des registres, et,
en général, de tous les documents concernant
l'assemblée.
Il jouissait d'un traitement de 1200 florins,
et recevait, en outre, à titre de gratification,
quelques petits émoluments.
Le greffier, Messire Thysebaert, conseiller du roi
1 C'était là le titre officiel des Etats de Flandre,
— 78 —
et premier Pensionnaire de Gand, remplissait les
fonctions d'actuaire de l'Assemblée lorsque celle-ci
se tenait à Gand, ce qui était le cas le plus
ordinaire.
C'était un gros fonctionnaire jouissant d'un
revenu considérable et d'une foule d'indemnités.
— Il voulut néanmoins encore confisquer à son
profit une pauvre somme de quinze florins que le
Clerc touchait annuellement pour le collationne-
ment des comptes.
Ce fut là l'origine de la querelle.
Un beau matin, M. le Conseiller pensionnaire
mit, sans façon, de sa propre main, en regard de
l'article du compte où émargeaient les quinze flo-
rins du Clerc « sij in het toecommende het colla-
(( tioneren en de egaleren deser rekenynghe betaelt
ce an den Pensionaris en de fsijnen proffijte uit-
« getrocken. »
Le procédé était cavalier. Le petit Clerc en
fut grandement formalisé et osa réclamer ses
émoluments.
Le gros Pensionnaire reconduisit sèchement,
lui disant qu'il était son supérieur et que, comme
tel, il avait le droit d'enlever ou de donner
à son commis tels émoluments qu'il jugerait
convenir.
Le Clerc insista, mais le Grenier le menaça de
le mettre à la porte et d'en nommer un autre à
sa place. .
C'était là une menace ridicule, car le Clerc
tenait sa nomination de l'Assemblée et prêtait
même devant celle-ci un serment au sujet de la
- 79 —
garde du secret des délibérations et autres actes
des Etats '.
Josse Goethals prit donc son recours auprès des
Etats.
L'affaire fut envoyée à la délibération des corps
principaux composant ces Etats ; ces corps étaient,
comme on le sait, les clergés et les villes de Gand
et de Bruges et le quartier du Franc de Bruges.
Sauf celui de Gand, évidemment inspiré par
son Pensionnaire, ils décidèrent que le Clerc dé-
pendait uniquement de l'Assemblée, et qu'il était
maintenu dans son emploi sa vie durant, avec tous
les émoluments qui y étaient attachés.
Certes, ce fut là un succès pour le Clerc, mais
ce fut aussi pour lui la source de déboires sans
nombre.
A partir de ce moment, l'irascible et rapace
Pensionnaire et lui vécurent comme chien et chat.
Il ne se passait pas de jour qu'il n'éclatât quelque
querelle.
Le Clerc, né malin, avait grand soin de ne pas
répondre aux injures dont l'accablait journellement
le Greffier, et se bornait toujours à se retrancher
strictement, trop strictement même, derrière ses
droits. C'était d'ailleurs là la seule vengeance qu'il
pouvait tirer des humiliations qui lui étaient
infligées. Au Clerc seul, en effet, étaient réservées,
et la garde, et la libre disposition des papiers et
1 Le principe de la publicité des actes des pouvoirs publics
n'existait pas encore ; bien au contraire, comme on le voit, le secret
était alors de rigueur.
— 80 —
archives de l'Assemblée. Lorsque le Pensionnaire
désirait consulter ces papiers — et le cas devait
être fréquent, — c'était au Clerc qu'il devait
s'adresser; or, celui-ci, il faut bien le dire, y
mettait quelque mauvais vouloir.
Cette situation ne pouvait évidemment pas
durer. Un an après, l'orage éclata.
M. le Conseiller Pensionnaire, oubliant une fois
de plus que la colère est mauvaise conseillère,
s'emporta, devant le premier échevin de Gand',
jusqu'à traiter le Clerc « d'imposteur, valschaert »
et d'autres aménités de ce genre. Il finit par em-
poigner le Clerc ... « mîj ghevende » dit celui-ci
dans sa plainte « eenen stoot met sijne 'vuijst op
« mijne borst grijpencle mij ten selven tijde vast aen
« mijnen 'justacorps . . . »
Bref, le premier échevin dut intervenir pour
faire lâcher prise au trop bouillant greffier. Après
le départ de l'échevin, son tempérament querelleur
reprenant de nouveau le dessus, il dit encore au
clerc « hadcle ick het niet gelaeten om mijn heer den
« voorscepene ick soude u eenen fletter hebben
« gegeven. »
La peur de voir ce conditionnel se transformer
en indicatif présent, fit que le Clerc se tint coi,
mais il se plaignit aux Etats. Ceux-ci firent com-
paraître devant eux les deux combattants et après
avoir entendu leurs explications, ils donnèrent de
nouveau gain de cause au Clerc.
Le belliqueux Grenier ne sachant plus à quel
1 Président des Etats de Flandre.
— 81 -
saint se vouer, s'adressa au Conseil de Flandre,
aux fins de lui faire ordonner que le Clerc devait
lui remettre les clefs du Comptoir et des archives.
Les Etats, de leur côté, décidèrent immédiate-
ment que le Clerc pouvait défendre en leur nom,
Faction qui lui était intentée et qu'il pouvait, à
cet effet, disposer d'un procureur pensionné par
la province.
Nous ne connaissons pas l'issue de ce singulier
procès, mais, dans le cours des recherches que
nous avons faites dans ces derniers temps, nous
avons trouvé que, quelques années plus tard, un
Thysebaert était premier Pensionnaire du Franc
de Bruges. Les décou venues dont nous venons de
faire le narré, ne furent sans doute pas étrangères
à ce déplacement..
Ach. Gallet-Miry.
— 82
VARIÉTÉS.
Les Loteries et les Tombolas d'autrefois. — L'usage
d'organiser des loteries ou des tombolas au profit d'une
œuvre de bienfaisance ou d'une œuvre religieuse ne date
pas d'aujourd'hui. Autrefois les confréries d'armes et les
corporations de métier recouraient souvent à ce moyen
pour se procurer les fonds nécessaires à la construction
d'un hôpital, d'un hospice ou d'une chapelle.
Il en était d'ailleurs de même des églises paroissiales
et des associations religieuses qui organisaient des loteries
pour la construction ou l'ornementation d'édifices du culte.
Ces loteries ne pouvaient se tenir qu'avec l'autorisation
du souverain. Il arrivait cependant que des autorités
locales, telles que des baillis ou des échevins, s'avisaient
de donner, même à des particuliers, la permission d'or-
ganiser des loteries ou des tombolas. Une ordonnance de
la gouvernante des Pays-Bas, Marguerite de Parme, en date
du 17 juillet 1560, rappela que les loteries ne pouvaient
être autorisées que par 'le gouvernement et uniquement
« pour églises, hospitaulx et aultres œuvres pieuses et
« publicques et que telz octroyz dépendent de l'autorité
« de sa Majesté.... »
Une autre ordonnance, rendue le 24 février 1576, punit
d'une amende de mille reaulx d'or et d'une peine subsi-
diaire, laissée au bon vouloir du juge, les contrevenants
aux édits sur les loteries.
— 83 —
La construction de la Citadelle, que Charles-Quint fit
élever en 1540 sur l'emplacement de l'abbaye de Saint-
Bavon, exigea la démolition de l'église du Saint-Sauveur.
On éleva une nouvelle église ; c'est celle qui existe encore
aujourd'hui et dont on « modernisa » la façade en 1810.
La nouvelle église n'était pas encore achevée en 1560;
les travaux avançaient même très lentement et la générosité
des fidèles n'était pas excessive « zoo wel uyt oorzaecke
« vanden voorledene dieren tyt, luttel devotie als ander-
« sins. » Afin de permettre d'achever plus rapidement
l'église, Philippe II, par un décret du 23 octobre 1560,
autorisa le curé de Saint-Sauveur à ouvrir une loterie
composée de pièces d'argenterie, de meubles et d'autres
objets.
Cette autorisation se trouve transcrite au folio 13 du
registre DD de la collection connue sous le nom de « de
« acht en veertig registers » des archives communales.
Nous n'avons rencontré aucun dossier complet d'une de
ces loteries. Ce sont toutes pièces détachées qui se trouvent
aux archives : requêtes, autorisations, listes et estimation
des prix. Parmi ces pièces, les plus intéressantes sont celles
qui donnent la description des objets offerts en prix par
les organisateurs des loteries. La valeur de ces prix était
fixée par des experts, nommés par les échevins de la Keure
ou par le grand-bailli.
Nous donnons ci-dessous deux de ces listes.
La première ne porte pas de date. D'après l'écriture et
d'après l'orthographe de la pièce, il doit être question d'une
loterie organisée à la fin du XVIe ou au commencement du
XVIIe siècle. Les prix, offerts dans cette tombola ou loterie,
consistaient uniquement en armes. Il y est question, entre
autres, de rapières de Milan, de rapières et de poignards
- 84 —
avec des ciselures en argent, de rapières damasquinées à
l'anglaise, d'espadons avec des ornements en or, de mous-
quets et d'hallebardes damasquinés ou avec des ornements
en or ou dorés.
Voici la liste de ces prix, telle qu'elle est dressée par les
experts, probablement des maîtres armuriers, Bogaert et
Juliaens, qui en fixèrent la valeur :
Dyt naer volghende is dat wy ghepresen hebben inde
loterye Lauwerens Bogaert ende Omaer Juliaens.
Ten eerste vier geschyseleerde Rapière met de poinaert
tôt xx giddens.
Item een rapier Mylaens werck verghidt tôt xv guldens.
Item acht rapieren verselverde met den poinaert al ghe-
sneden xv gulden stuc.
Item een rapier ghedamasgeneert tôt x guldens.
Item een ghedasmageneert op zyn ynghels x guldens.
Item een rapier op zyn ynghels verzelvert ende vergult
tôt xij guldens.
Item een rapier op zyn ynghels ghedamasgeneert tôt
viij guldens.
Item een rapier op zyn ynghels verzelvert tôt vj guldens.
Item ticee rapieren met pistolen tôt xx giddens.
Item twee slachsweerden vergult albeyde tôt xx guldens.
Item een albaerde met een vier roer tôt xx guldens.
Item een schoon vier roer vergult tôt xxxv giddens.
Item een vier roer tôt viij guldens.
Item een roer met een snapaen tôt xij giddens.
Item een vier roer ghebeent tôt xij guldens.
Item een vier roer tôt viij guldens.
Item twee roers met plaeten ende de laeden ghebeent tôt
xvj guldens.
Item een musschet vergult tôt xxiiiij guldens.
- 85 -
Nous possédons également une liste des prix avec leur
valeur, donnés dans une loterie organisée à la mi-carême
en 1623. Cette liste est du plus haut intérêt à cause du
nombre, de la qualité et de la valeur des objets qui y sont
portés.
Il y a d'abord une grande quantité de pièces d'argenterie
telles que des aiguières avec bassins, des gobelets à bière,
des sonnettes, des plats, des coupes, etc. Nous y trouvons
une vingtaine de glaces avec cadres en ébène ou avec cadres
dorés. Plusieurs objets en albâtre figurent aussi sur la liste
des prix. On y voit enfin des effets d'habillement tels que
des jupons des Kulclers ', des jarretières, des ceintures, des
bas, des gants, etc.
Le prix des lots était à la portée de toutes les bourses.
Il était fixé à trois gros par lot, ce qui représente à peu
près quinze centimes de notre monnaie.
La liste de ces prix a été faite en deux parties, l'une
comprenant les pièces d'argenterie, la seconde comprenant
tous les autres objets.
Dit navolghende zyn de parti/en die als prysen sullen
gheleyt icorden inde loterye die ghehanden worden sal
binnen der stede van Qhend desen halfvasten inde jaere
XVIe dry en twintich by heere ende icet toegelaten ende te
trecken elck lot ten dry grooten.
Eerst een silveren lampet met syn becken wegende x l.
vij oncen ende vyf ingelschen.
Noch sestien silveren bier croesen wegende tzaemen hondert
vier oncen ende dry ingelschen.
Noch een silvere belle met een ketelken onder ende noch
1 Le kulder ou kolder était un vêtement sans manches, qui res-
semblait à une dalmatique mais était plus court que celle-ci. Le
musée communal de Gand possède une superbe dalmatique d'un
héraut d'armes gantois du XVIe siècle.
86
een belle sonder voet ende noch een silveren kelcxken tzaemen
wegende seventhien oncen ende dry ingelschen.
Noch achtien silvere schuysen tvegende tzaemen L viij
oncen seven ingelschen.
Noch sesthien silvere schcden tvegende hondert eene ende
tachtich oncen ende thien ingelschen.
Noch dry vergulde coppen inlants werck tvegende tzaemen
xxcx oncen dry ingelschen
Voici la seconde partie de la liste des prix avec l'esti-
mation faite par un certain J. Vander Speeten :
Eerst tvoee grooten ebben spiegels
Noch dry ebben spiegels . .
Noch vyf vergulde spiegels .
Noch vier vergulde spiegels .
Noch vier cleen spiegels . .
Een groote alabastre casse .
Neghen cleen alabastre sticx
Noch vier alabastre sticxkens
Een percq stick schilderyen
xxv stacken schilderye .
Noch vier vrauice rocx .
viij cleen schilderyen . .
Ses hulders
28 paer syde causebanden
33 paer caussens . . .
24 Riemen
24 Riemen van mindere pyys
1 0 parysche porte frasen
100 prenten
100 paer hantschoenen .
100 tafelboucxkens . .
50 guldens.
36
30
12
4
24
13 » 10 st.
4
40
100
54
12
48
140
49 » 10 st.
24
14 » 8 st.
5
30
25
12 » 10 st.
Les organisateurs de ces tombolas ou de ces loteries
devaient payer une certaine somme à la chambre des
— 87 —
pauvres, ghemeenen aermen ou armen caemer. La loterie de
1623, dont nous venons de nous occuper produisit la somme
de huit livres, six escalins et huit gros, ainsi que l'indique
le livre des comptes de cette année du bureau de bien-
faisance :
Ontfaen van Sr Heynderick Dewintere de somme van
acht ponden zes schellynghen acht grooten dwelcke hy aen
den ghemeenen aermen belooft heeft te betaelen alswanneer
hy vercreghen heeft consent van Mynheeren den hoochbailliu
ende schepenen vander heure van te moghen voorstellen
eene loterye in den halfvastenen lestleden.
Den xen April 1623.
Nous avons trouvé, dans le livre des comptes de 1628,
mention d'une loterie dont les organisateurs payèrent la
somme de vingt-cinq livres au bureau de bienfaisance.
P. C.
Banquets des Echevins. — On sait qu'autrefois les
vingt-six echevins de la ville de Gand se réunissaient sou-
vent, nous pourrions dire le plus souvent possible, dans des
banquets qui se donnaient soit à l'hôtel de ville, soit dans
l'une ou l'autre grande auberge renommée pour sa cuisine
et pour sa cave. C'était la caisse communale qui pouvait
payer les frais de la plupart de ces festins.
Au nombre des plaisirs que les echevins se permettaient,
toujours avec les finances de la ville, nous devons encore
citer les représentations qu'ils se faisaient donner par les
troupes de comédiens, de danseurs de cordes, d'escamoteurs,
de montreurs de marionnettes, d'acrobates et de saltim-
banques de toutes sortes qui venaient faire un séjour plus
ou moins long à Gand. Ces représentations avaient lieu dans
- 88 —
la salle de l'hôtel de ville, située au premier étage et
convertie en dépôt d'armes ou arsenal à la fin du dix-sep-
tième siècle. De là le nom de « arsenalzaal » que cette salle
porte encore aujourd'hui.
Ces dépenses provoquaient parfois des observations de la
part des commissaires du gouvernement, chargés annuelle-
ment de vérifier les comptes de la ville. Afin de se justifier
les échevins répondaient que pour pouvoir, en connaissance
de cause, donner à ces troupes l'autorisation de jouer à
Gand il était nécessaire de savoir d'abord quel genre de
spectacle celles-ci se proposaient d'offrir au public gantois.
C'est pour ce motif que la première représentation était
ordinairement donnée en présence des échevins, de leur
famille et de quelques invités. Rien de plus juste donc,
disaient-ils, que d'en faire supporter les frais par la caisse
communale.
Cela n'était cependant pas de règle absolue. Les échevins
et le grand bailli accordaient souvent des autorisations
sans avoir vu, au préalable, les sollicitants à l'œuvre. Ce qui
n'empêchaient pas nos administrateurs communaux de se
faire offrir, pendant le séjour des acteurs à Gand, une
représentation dont la dépense était portée en compte à
la ville.
Les deux plaisirs, banquets et représentations, étaient
parfois réunis. Pendant que les échevins étaient assis
joyeusement à table, des comédiens donnaient des repré-
sentations sur une estrade dressée dans la salle de banquet.
C'est ce qui eut lieu à un banquet que les échevins
s'offrirent le 3 août 1651 dans une grande hôtellerie, nom-
mée Saint-Laurent et connue surtout pour ses repas de
noces : « het bruyloft-huus ghenaempt Sinte Laureyns. »
Cette hôtellerie était située, croyons-nous, dans la rue aux
Vaches et avait une issue dans l'avenue de la place d'Armes
( Vildersstraat).
— 89 -
Afin d'empêcher le public gantois d'entrer dans l'hôtellerie
et afin, surtout, d'éviter que les gamins ne grimpassent sur
les fenêtres pour voir ce qui se passait à l'intérieur de la
salle de banquet, huit hallebardiers étaient chargés de
monter la garde devant le «bruyloft-huus» de Saint Laurent,
Cette garde se prolongea aussi longtemps que le dîner qui
commença à deux heures de l'après midi et finit à sept-
heures du soir.
Les hallebardiers, estimant que ce service extraordinaire
méritait une indemnité, adressèrent une requête aux éche-
vins de la Retire qui, par ordonnance du 4 août 1G51, leur
accordèrent une gratification, payée naturellement par la
caisse communale, de une livre et douze escalins de gros.
Voici le texte de cette requête que rédigea et que présenta
au collège le procureur Rop :
A en myne Edele Heeren scepenen. vander Keure,
Supplierende verthooghen reverentelyck Joos Ronsse,
Lievien de Costere, Jacques Blancquaert, Gillis Dalleyn,
Cornelis de Reysere, Pieter de Cockere, Victor Pleviers ende
Jacques Noenynck hallebardiers deser stede uioe Edele
heeren goetxcillighe dienaers hoe dat zy lieden gisteren
3 deser maent by laste van uice Edele hun gheoccupeert
hebben van de tioee uren naer de noene totten zeven uren,
in het beivaeren van de deuren ende veynsters van het
bruylofthuus ghenaempt Slc Laureyns ahcaer de comme-
dianten voor uice Edele eene commedie vertoocht ende
gespeelt hebben ende alsoo sy lieden ter dier causen verdient
hebben eenen gracelicken bylech, zoo ist dat zy hemlieden tôt
uice Edele keerende.
Biddende ootmoedelick de selve beliefven hemlieden sup-
plianten ter causen voorscreven £ accorderai eenen tamelicken
bylech naer uiçe Edele heeren nobel ende bénigne discretie.
Rop, procureur.
- 90 -
En marge de cette requête des hallebardiers se trouvait
écrite l'ordonnance de paiement suivante :
« Schepenen vander Keure hebben de supplianten ter
« causen by requeste gheroert bygheleyt de somme van een
« pont twaelf scellynghen gr. ordonneerende de trésorier
« dheer Loys van Hoochbroeck heere van Axeioalle de selve
« somme van 1 lïb. 12 se. gr. aen de supplianten te betaelen
« ende sal de selve hem valideren in uytwysen syner reke-
« nynghe midis deser ende quittantie.
« Actum den 4 augusti 1651.
« VAN HOORN. »
Voici, d'après le Memorieboek der stad Gent, les noms des
vingt-six échevins, en fonctions pendant l'exercice 1651-
1652, qui s'assirent le 3 août 1651 à la table du bruyloft-
huus de Saint-Laurent :
Schepenen van der Keure.
Mher Joos Triest, ruddere, heere van Ruddershove.
Mher Jan de Grutere, ruddere, heere van Anvijn.
Joncheer van Scheynghem, heere van Wyneghem.
Joncheer Denijs van Vaerneicych, heere van Diepenbroeck.
Dheer Thomas Heylinck, heere van Sprekelen.
Joncheer Guillaume Massijn, heere van Gossengnee.
Dheer ende Meester Jan Stalins, docteur in de medecynen.
Dheer Joos Piers.
Dheer Justus Billiet.
Dheer Jacques vander Beke.
Dheer Jan van Hoorn.
Mher Franchois Odemaer.
Dheer Jacques Coornaert.
Schepenen van Ghedeele.
Joncheer Jacques le Prévost, dict de Basserode, heere van
Enghien.
— 91 -
Joncheer Jan van Wijchuns, heere van Wijchuus.
Joncheer Jan Bapt. Délia faille, heere van Barlestein.
Dheer Antheunis Gillis.
Dheer ende Meestere Frans vande Vivere, docteur.
Dheer Paulus Jacques vande Putte.
Dheer Justus vander Straten.
Mher Jan van Dale, docteur in de medecynen.
Dheer Jacques de Poillon.
Marten van Deynse.
Pauioels Dhamere.
Jan van Hauiveghem.
Philippe de la Bie.
Ces représentations dramatiques et autres, offertes aux
échevins et dont les frais étaient supportés par la caisse
communale, prirent fin en 1674, quand la salle du premier
étage de l'hôtel de ville appelée de comediante caemere, la
chambre des acteurs, fut transformée en arsenal d'armes :
« Arsenal ende Armoirie, dit l'ordonnance du 6 juin 1674,
« omme daer te legghen ende beicaeren de musquetten,
« pycken, allebarden ende sulcke andere ivaepenen deser
« stede competerende . »
Quant aux banquets, payés par la ville, il n'en fut plus
question quand le règlement du 6 novembre 1734 supprima
tous les profits dont les magistrats communaux avaient joui
jusqu'à cette époque.
Les Boucles de Souliers sous la première Répu-
blique. — Lettre inédite. — Depuis plusieurs années
déjà, l'histoire se refait complètement. On remonte aux
sources, on fouille les archives publiques et privées, on
brasse les documents inédits, et l'on projette sur les évène-
- 92 -
ments et les hommes une lumière nouvelle et définitive.
La publication des pièces officielles est loin d'être terminée.
L'ordre est à peine établi dans les archives gouvernemen-
tales. Les manuscrits des familles ont peut-être encore
plus à donner, quoiqu'il ne se passe pas de mois sans
qu'un membre de quelque illustre maison n'apporte, en un
volume de mémoires ou de correspondances, des éléments
nouveaux relativement à des questions encore pendantes.
Parmi ces œuvres se trouvent de nombreux renseignements
sur l'époque si complexe de 89.
C'est à cette même époque, dont beaucoup fêtent cette
année le centenaire, que se rapporte le document que
nous publions. Il est intéressant à divers points de vue. Sa
forme, d'un charme original, nous représente le caractère
des hommes de ces temps agités. Ses révélations consacrent
l'histoire d'une journée mémorable, et font remonter plus
haut qu'on ne le pourrait croire une institution dont la
justice a eu à s'occuper souvent en ces dernières années.
Cette lecture est donc pour l'artiste comme pour l'historien.
Insister davantage serait oublier que l'art et la science,
loin d'être incompatibles se doivent un mutuel secours,
et que l'histoire, pour se baser sur des choses mortes,
n'en est pas moins un tableau auquel on est en droit de
demander de la vie, du sentiment, C'est de cette manière
que les Goncourt la comprennent quand ils professent ne
connaître qu'imparfaitement le siècle dont il ne resterait
pas un chiffon ou un menu. — De curieux rapproche-
ments pourront encore s'établir, par la lettre suivante,
entre la première et la dernière république, et les philo-
sophes indulgents y trouveront une nouvelle occasion
de proclamer qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil.
Toute une époque revit dans ce récit, avec son esprit
ironique et hautain, sa belle fierté de race et son respect
des traditions et des hiérarchies.
— 93 —
Voici donc, ce qu'écrivait de Paris, le 25 novembre 1789,
Messire de Hault de Mégoval à son frère, le marquis de
Hault de Lassus * :
« .... La ville d'Issoudun aï'ant jugé à propos de se
« déboucler a adressé dans une petite caisse au député de
« son baillage toutes les boucles d'argent du pais pour être
« déposées sur l'autel de la nation; le député a reçu ce
« tribut en pleine assemblée. Son premier mouvement fut
« d'imiter ses commétans, de se déboucler aussitôt et de
« joindre ses boucles aux autres; ensemble et d'un même
« mouvement toute l'honorable assemblée s'est débouclée,
« les galleries en ont fait autant et tout le monde est sorti
« des états en pantoufle. Motion dans les districts, motion
« au palais Roïal, motion aux halles, motion partout ten-
« dante à proscrire les boucles d'argent et à adopter des
« boucles de cuivre qui prenant faveur sous la protection
« de la nation ont tout d'un coup monté de dix-huit sols à
« six francs. Cependant il était impossible dans une aussi
« grande ville que tout le monde fut pourvu en quatre
« heures et même qu'on seut dans tous les quartiers ce qui
« s'était passé le soir même aux états. En conséquence il y
« eut le premier soir c'est à dire hier beaucoup de monde
« en boucles d'argent ; les filoux patriotes ne l'ont pas voulu
« souffrir, ils ont débouclé tous ces prétendus aristocrates
« et par excès de zèle ils n'ont pas même voulu souffrir les
« boucles d'oreilles des femmes qu'ils ont patriotiquement
« arrachées avec une partie des oreilles ou elles pendoient
« pour être portées aux états généraux on vous imaginez
1 La maison de Hault s'iilustre du roy Hugues Capet et de ce
Sancy qui donna son nom à l'un des diamants de la couronne.
Elle compte encore des descendants en France, en Belgique
et en Amérique. Ses armes sont d'azur à trois pattes de lion
d'or. — F. V.
— 94 —
« bien qu'elles n'ont pas paru. Ces violences viennent
s d'occasionner un décret qui deftend ces voies de fait
sans trop les condamner, car il ne faut pas que le zèle se
refroidisse, et qui déclare qu'en exortant tous les citoïens
a des sacrifices l'assemblée n'a jamais prétendu obliger
personne a quitter ses boucles; on dit que ce décret qui
a ralenti l'ardeur des acheteurs de boucle de cuivre
donne lieu a un grand procès' intenté a un honorable
membre accusé d'avoir reçu d'une compagnie de fon-
deurs une grosse somme pour faire admettre les boucles
nationalles; dans la vérité c'est que deux heures après
la scène du député d'Issoudun il a paru un million de
paires de boucles en cuivre a double chasse et faites sur
le même modèle. Voila toutes mes nouvelles; on nous
casse la tête de faux bruits, par exemple on avait annoncé
une nouvelle révolution pour aujourd'hui et ce matin on
lit au coin des riïes que la scène sanglante est retardée
par l'indisposition d'un des principaux acteurs. Depuis
deux jours nos folliculaires dissent que les poissardes
sont allées à la rencontre de Mgr le Duc D'Orléans que
des gens mieux informés soutiennent devoir rester encore
longtemps à Londres »
En vérité, n'est-ce pas là un régal de lettres. La façon
cavalière et doucement dédaigneuse de traiter tout ce qui,
de quelque façon, a rapport à la république, la charmante
ironie d'un gentilhomme peu respectueux des patriotes et
de l'autel de la nation, le ton insinuant et malin dans
lequel s'exprime ce vaincu d'hier que les ridicules bassesses
du moment empêchent de croire à la réalité d'un nouveau
régime, enfin, la belle modération qui règne dans ces lignes
écrites à une époque de trouble, modération qui oppose
subtilement des gens « mieux informés » aux journalistes et
qui parle d'une révolution comme d'un spectacle théâtral?
— 95 —
tout cela est aujourd'hui d'autant plus appréciable qu'il est
devenu plus rare de le trouver.
A ces divers titres, cette lettre nous a parue digne d'être
publiée.
F. Vurgey.
Au sujet du Château des comtes a Gand. — Une
partie du Château des comtes ayant été l'objet d'une pro-
cédure en expropriation d'utilité publique, la Cour d'appel
de Gand a prononcé le 4 décembre 1889 un arrêt fixant les
indemnités dues, et dont voici le texte :
« Attendu que la contestation porte sur le montant de
l'indemnité due aux appelants par l'Etat belge à raison de
l'expropriation pour cause d'utilité publique d'une pro-
priété sise à Gand, au lieu dit : Gravenkasteel, section A,
nos 364bis, 362d, 368bis c, moitié du n° 368bis a, ayant une
contenance de 19 ares 49 centiares suivant le cadastre, mais
de 18 ares, 88 centiares, 24 millièmes seulement, d'après les
mesurages faits par les experts ;
« Attendu que cette propriété comprenant de vastes corps
de bâtiment ayant servi de filature de coton, une habitation
de concierge avec bureaux et magasins, deux cours inté-
rieures et la moitié d'une cour extérieure, fait partie d'un
enclos de forme circulaire, situé au centre de la ville et sur
l'emplacement duquel se dressait autrefois le château des
Comtes de Flandre, dont les historiens et les archéologues
font remonter l'origine aux temps légendaires de Bau-
douin-Bras-de-Fer ;
« Attendu que l'aspect actuel de cet enclos laisse à peine
soupçonner l'existence des ruines qu'il récèle ; qu'en effet
le mur extérieur de l'enceinte, avec ses tourelles, ses contre-
forts et ses créneaux est presque entièrement caché aux
regards par une suite non interrompue de maisons qui y
- 96 —
sont adossées; que les restes du donjon, de la chapelle et
du mur intérieur de l'enceinte servent d'appui et de fonda-
tion aux lourdes constructions modernes qui constituent la
filature des appelants; que le tout est couronné par les
hautes cheminées de l'usine '.
« Attendu que la vue de ces bâtiments industriels, qui
couvrent les vénérables débris du château et qui les
déshonorent, n'est point faite pour rappeler les luttes, les
triomphes et les souffrances dont ce lieu a été le théâtre
dans le cours des siècles ;
« Attendu que la propriété expropriée n'a donc actuelle-
ment aucune valeur historique, artistique ou archéologique,
appréciable en argent ; qu'une telle valeur ne pourra lui
être acquise que le jour où les ruines du château dégagées,
à grands frais, des constructions qui les enveloppent, appa-
raîtront aux yeux de tous, évoquant le souvenir des mœurs
de nos ancêtres et des événements dont ceux-ci furent les
acteurs, les témoins ou les victimes ;
« Attendu que la filature des appelants, assise sur un tertre
qui présente lui-même de grandes inégalités de niveau, est
entièrement enclavée entre les propriétés circonvoisines et
le cours d'eau : la Liève, qui coule à plus de 9 mètres en
contre-bas de ses fondations; qu'elle n'est accessible que
par une rampe partant de l'ancienne porte d'entrée du
château qui appartient à la ville de Gand, ladite rampe
ayant une longueur de 50 mètres sur 4 m. 50 centimètres
de hauteur, soit une inclinaison moyenne de 9 centimètres
par mètre; que les locaux et les installations qui datent de
1829 et ont cessé d'être en activité depuis l'année 1883, sont
disposés et distribués d'une façon irrégulière, défectueuse
et nullement en rapport avec les progrès et les exigences
actuelles de l'industrie; qu'ils ne sont d'ailleurs suscep-
1 Comparez la vue cavalière et le plan publiés dans le volume de
ce recueil de 1837.
— 97 —
tibles de recevoir avantageusement aucune destination ou
appropriation industrielle ou commerciale quelconque;
« Attendu que cet état des lieux contentieux, dûment
constaté par l'expertise judiciaire est si manifestement
incompatible avec l'attribution d'une valeur soit historique,
soit industrielle, qu'à la date du 22 mai 1885, l'auteur des
appelants livrait le château des Comtes de Flandres aux
enchères publiques, suivant un plan de lotissement et
d'utilisation qui devait entraîner la complète destruction
et des ruines et de la filature, ainsi que la transformation
de leur emplacement en un quartier moderne percé de
plusieurs rues nouvelles ;
« Attendu que ces diverses considérations concourent à
démontrer que l'indemnité due par l'Etat ne peut être
équitablement fixée dans l'espèce que sur le pied de la
valeur vénale du fonds considéré comme terrain à bâtir, et
des matériaux à provenir des constructions, sous déduction
des frais de démolition ;
« Attendu qu'au cours des négociations engagées entre
parties antérieurement à l'instance en expropriation, l'État
belge a offert aux appelants une indemnité globale de
90,000 francs ;
« Attendu qu'en regard à tous les éléments l'appréciation
produits en cause, cette somme, frais de remploi compris,
apparaît comme juste et satisfactoire ;
« Quant aux demandes d'indemnités pour frais de la mise
en vente publique du 22 mai 1885, perte de revenus, indis-
ponibilité du capital, imminence de l'expropriation, contri-
butions foncières et taxes communales ;
« Attendu que ces différents chefs de demande n'ont fait
l'objet d'aucune justification et qu'ils sont dénués de tout
fondement ;
« Par ces motifs :
« La Cour, ouï en audience publique M. l'avocat général
de Gamond, statuant sur les appels tant principaux qu'in-
7
— 98 -
rident et écartant toutes conclusions contraires, confirme le
jugement dont appel, sauf pour ce qui concerne le montant
de l'indemnité, émendant quant à ce seul point, condamne
l'État à payer aux appelants la somme de 90,000 francs,
condamne les appelants aux dépens d'appel. »
Un autographe de H. Crumpipen. — La révolution
brabançonne occupe dans les bibliothèques publiques de
notre pays une place considérable à raison surtout du
nombre incroyable de pamphlets qu'elle fit naître. Bien
des détails intéressants à connaître ont disparu de la
mémoire des hommes. L'historien de cette époque troublée
et curieuse devra s'efforcer de réunir les divers documents
épars afin de nous présenter un tableau complet d'une
époque de notre histoire qui n'a pas encore été appréciée
comme elle devrait l'être.
L'auteur de la lettre que nous publions, Henri de Crum-
pipen, était vice-président du Conseil du gouvernement
général des Pays-Bas; il fût appelé le 21 août 1791 à la
présidence du Conseil. La lettre est adressée au chevalier
Jean François Xavier Diericx, président du Conseil de
Flandre et conseiller d'Etat de Sa Majesté, Pour com-
prendre l'intérêt de cette lettre qui date des premières
heures de la restauration du Gouvernement autrichien en
Flandre, il faut se rappeler que la révolution braban-
çonne affirmée par la prise de Turnhout (26 octobre 1 789),
l'évacuation de Gand (16 novembre 1789), l'abandon de
Bruxelles (12 déc. 1789) avait pris l'apparence d'un gou-
vernement régulier, par suite de la réunion à Bruxelles
des députés de toutes les provinces situées au nord de la
Meuse. Ceux-ci avaient (11 janvier 1790) proclamé l'indé-
pendance des États Belgiques réunis. Le 20 février 1790,
Joseph II mourut. Son frère Léopold II, grand duc de
— 99 —
Toscane, fût appelé à lui succéder. Des négociations furent
habilement poursuivies à Reichenbach et à La Haye par
ses envoyés avec la Prusse, la Hollande et l'Angleterre,
pendant que ses généraux s'emparaient en quinze jours
de toutes les villes qui avaient reconnu le gouvernement
des Etats généraux. Le 25 novembre 1790, Namur capi-
tulait; le 30 novembre, les Etats généraux, après avoir
vainement discuté leur translation à Gand, désespérant du
succès, se dispersèrent. Le 2 décembre, les États de Brabant
firent leur soumission. Le 3 décembre, Bruxelles et le
7 décembre, Gand furent repris.
Le Gouvernement impérial s'efforça de réorganiser l'ad-
ministration des provinces tombée dans le plus grand
désarroi. Le comte Mercy d'Argenteau, le négociateur de
l'Empereur au congrès de La Haye, fut nommé Ministre
plénipotentiaire aux Pays-Bas et chargé de l'intérim du
Gouvernement général de la Belgique. Il ne put entrer en
fonctions et ne s'installa à Bruxelles que le 6 janvier 1791.
Entretemps, H. de Crumpipen, l'une des personnalités
les plus marquantes et l'un des hommes les plus considé-
rables de l'administration, s'occupa de réunir les diverses
cours de justice dont les membres, menacés dans leur
personne et leurs biens par les insurgés, avaient dû prendre
la fuite.
Le président du Conseil de Flandre, Jean François
Diericx, s'était retiré d'abord à Lille, puis à Ypres où habi-
tait la famille de sa femme. Il y était encore quand H. de
Crumpipen vint à Gand pour réorganiser l'administration.
A cette date les membres du Conseil de Flandre étaient
dispersés ; en effet l'arrêté par lequel le comte Mercy d'Ar-
genteau réintégra les membres du Congrès dans leurs
fonctions fut pris le 25 février 1791 '.
1 Réintégration éphémère puisque le 7 novembre 1792, par suite
de l'arrivée des troupes françaises, le Gouvernement se retira
— 100 —
De Crumpipen, en attendant l'arrivée du Gouverneur
général prenait les mesures les plus sages et les plus
énergiques pour reconstituer l'administration et surveiller
les adversaires du Gouvernement.
Après la scission survenue entre les partisans de Van
Eupen, de Vander Noot et ceux de l'avocat Vonck, celui-ci
ayant été déclaré par le Congrès révolutionnaire, traître à
la patrie, fut forcé de se réfugier à Lille. Le nouveau
Gouvernement n'était pas sans inquiétude sur les agis-
sements du chef du parti démocratique brabançon. La
lettre suivante en fait foi :
« Monsieur,
ce Sa Majesté, aiant trouvé bon de m'emploier provi-
sionellement ici, j'y suis depuis une couple de jours et
j'apprens que vous êtes à Ypres; vous connoissés Monsieur,
l'étendue de mon attachement et de mon ancienne amitié
et c'est par une suite de ces sentimens que je crois devoir
vous prévenir que vous fériés bien de vous rendre ici au
moins pour le teins de l'arrivée de son Exce M. le Comte
de Mersi qui sera tout au commencement de l'année ou
nous allons entrer, mais avant votre départ j'aurois à vous
requérir Monsieur, de Vouloir bien remplir où vous êtes un
objet qui intéresse essentiellement le service de Sa Majesté.
« Le S1' Vonck avocat devenu célèbre et chef d'un parti
connu s'est retiré à Lille et le séjour qu'il y fait ne peut pas
être indifférent pour le Gouvernement G1 quoique vous aies
quitté Lille vous êtes sûrement en moyens de savoir ce qui
s'y passe et connoissant votre zèle et votre fidélité pour la
cause de Sa Mté je dois vous requérir de vouloir bien nous
procurer sous main les notions que vous pourrés recueillir
d'abord à Rupelmonde, et puis, à peine rentré à Bruxelles, il
disparût à la suite de la défaite des Autrichiens à Fleurus
(26 juin 1794).
— 101 —
sur le compte du S1' Vonck. Il nous importerait de savoir ce
que cet avocat fait maintenant à Lille? quelles sont ses
liaisons? Ses démarches? ses relations et s'il entretient des
correspondances secrètes ou suspectes de ce pais ou avec
des membres de l'assemblée nationale, du Club des Jacobins
à Paris ou toute autre qui tenderoit à troubler de nouveau
la tranquillité publique. Je vous aurai en mon particulier
beaucoup de reconnaissance pour les soins que vous voudrés
bien vous donner à cet égard et l'objet m'en paroit si
important que je ne puis trop vous le recommander.
« J'ai l'honneur d'être avec le plus sincère attachement,
Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
« H. Cbumpipen.
« Bruxelles ce 25 Xbre 1790.
« M. Diericx, Cons1 d'Etat de S. Mté. »
Cette lettre reçue, M. J. F. Diericx rentra à Gand, reprit
sa place à la tête du Conseil de Flandre et laissa à d'autres
le soin de renseigner le Gouvernement sur les agissements
politiques de Vonck. Ce fut le vicomte du Toict, qui s'étant
glissé dans l'intimité de l'avocat bruxellois, fût l'un des
affidés que le Gouvernement employa pour surveiller Vonck
à Lille, jusqu'au moment de sa mort (1er décembre 1792).
O DE K.
Une fille de Ryhove. — M. le baron Kervyn de Letten-
hove nous a fait l'honneur de nous adresser récemment la
lettre que nous publions ci-après. M. le professeur Fredericq,
auquel nous l'avons communiquée, a bien voulu faire les
recherches nécessaires afin de compléter l'indication qui y
— 102 —
est contenue. Nous sommes heureux de pouvoir en faire
part à nos lecteurs '.
Monsieur le Directeur,
Camden, dans son Histoire de la reine Elisabeth, édition
de 1601, p. 249, rapporte que la comtesse d'Essex avait
confié des lettres d'amour, dont Elisabeth eut pu s'irriter,
à une dame belge du nom de Ryhove.
S'agit-il ici d'une fille du tribun gantois, mariée en
Angleterre ? Quel fut exactement son rôle dans les intrigues
qui précédèrent le supplice du comte d'Esssex ? La question
ne manque pas d'intérêt, et je la signale aux érudites inves-
tigations de M. Fredericq.
Recevez, etc.
Kervyn de Lettenhove.
Le passage de Camden 2, auquel M. Kervyn de Letten-
hove fait allusion, est le suivant :
« /. Daniel impostor punitur.
« Ad hanc causam etiam spectat sententia his diebus in
Caméra Stellata pronunciata ideoque minime reticenda.
« Essexiumdelitteris adulteratisconquestum fuisse supra
dixi. Hac de re diligenter inquisitum et deprehensa insignis
impostura. Comitissa ejusuxor, marito et sibi in hac turbida
tempestate timens, literulas amatorias quas ab illo accepe-
rat, in capsulam conjectas fidei Rihoviae mulierculae Bel-
gicae commisit.
« Illa domi suae occultavit ; J. Daniel, Rihoviae maritus,
forte fortuna in eas incidit, perlegit et, cum in iis aliquid
1 N D. L. R.
2 Gtjlielmtjs Camden, Rerum Anglicarum et Hibernicarum
Annales, régnante Elisabetha, ad annum 1601 (éd. de Leide 1639,
p. 816). L'édition de 1601, dont parle M. Kervyn de Lettenhove,
ne se trouve pas à la Bibliothèque de l'Université de Gand,
- 103 —
inesse observassetquod periculum comiti crearet etReginam
irritaret, ab artifice in chirographis ementiendis assimilari
curavit.
« Deinde pavidae mulieri jam puerperae denuntiavit se
in inimicorum mariti manus mox traditurum, nisi tria
millia librarum in praesentiarum numeraret. Illa, ut peri-
culum vitaret, mille centum septuaginta statim numeravit;
nec tamen autographa sed ectypa pro tan ta pecunia ab
imposture accepit, qui magna etiam pecunia pro autogra-
pbis Essexii adversarios emungere cogitarat.
« Hac de impostura illein perpetuum carcerem damnatus,
tribus librarum millibus, quarum duo Essexiae cédèrent,
mulctatus et auribus in collistrigio afiixis spectaculo expo-
situs cum hoc programmate : Falsarius et impostor im-
probas. »
Pour bien comprendre ce passage de Camden, il faut
savoir qu'il est question ici du procès du comte d'Essex, le
fameux favori d'Elisabeth, et se rappeler que le fier et
brillant gentilhomme avait encouru le ressentiment de la
vieille reine en épousant la fille de Walsingham et en
bravant la reine de toute façon.
Arrêté sur l'ordre de la souveraine, il redoutait surtout
sa jalousie d'amante. C'est pourquoi la comtesse d'Essex
avait grand intérêt à cacher les lettres d'amour que son
mari lui avait écrites, de peur qu'elles ne tombassent entre
les mains d'Elisabeth.
Le mari de la dame dépositaire, J. Daniel joua alors un
rôle infâme. Se rendant coupable du chantage le plus
odieux, il extorqua plus de mille livres à la pauvre comtesse
d'Essex et ne lui restitua même pas les pièces qu'elle avait
eu l'imprudence de confier à sa femme. Ne lui livrant que
des fac-similés habilement copiés, il garda les originaux dont
il espérait faire argent une seconde fois auprès des ennemis
— 104 -
d'Essex. Mais, traduit devant le tribunal de la Chambre
étoilée, il y fut condamné à la prison perpétuelle et à une
amende de trois mille livres, dont les deux tiers au profit de
la comtesse d'Essex. Camden ajoute qu'il fut de plus
pilorisé et eut les oreilles clouées au poteau d'infamie pen-
dant la durée de l'exposition publique.
Camden le nomme /. Daniel et appelle sa femme Rihovia
muliercula Belgica, c'est-à-dire : femme originaire des
Pays-Bas.
Pour répondre à l'une des questions posées plus haut par
M. Kervyn de Lettenhove, il suffit de transcrire les pre-
mières lignes d'un acte passé à Gand devant les échevins
de la Keure le 7 mai 1610. C'est un arrangement de famille,
réglant plusieurs successions restées en suspens. Voici le
préambule de cet acte, tiré des archives communales de
Gand, Jaerregister, Keure 1609-1610, fol. 120:
« Compareren in persoone Jo1 Phls vander Kethulle,
fs Jor Franchoys, heere van Ryhove, Volckeghem, etc. ter
eender zyde; ende Joncvrouwe Jehenne vander Kethulle,
zuster vanden voorn. Jo1' Phls, w[eduw]e van d'eer :
Jan Daniel, schiltcnape van Deresbery inden graefschappe
van Chester binnen tconinckrycke van Inghelant ter
andere, etc. »
Le /. Daniel de Camden est évidemment notre Jean
Daniel, écuyer de Deresbery au comté de Chester, le mari
de Jeanne de la Kethulle, fille du fameux François, seigneur
de Ryhove. Il résulte aussi de cet acte que Jean Daniel était
déjà mort en 1610, Jeanne de la Kethulle y étant qualifiée
de veuve.
Cet acte, sur lequel M. Adrien de la Kethulle, juge à
Gand, a appelé mon attention, tranche donc la première
question soulevée par M. Kervyn de Lettenhove. Il demande
- 105 —
aussi quel fut exactement le rôle de la fille de Ryhove dans
les intrigues qui précédèrent le supplice du comte d'Essex.
Ici j'avoue ne pouvoir répondre. Peut-être quelque lecteur
anglais du Messager, qui aurait fait une étude spéciale du
règne d'Elisabeth, pourrait-il élucider ce dernier problème.
Paul Fredericq.
L'Incendie du château de Beauraing. — D'après les
chiffres officiels que nous avons recueillis à bonne source,
le soupçon de malveillance qui avait accueilli la première
nouvelle de l'incendie du château de Beauraing ne saurait
avoir aucune espèce de consistance. Le simple exposé qui
suit suffit du reste à en faire justice ainsi que de certains
racontars hazardés qui ont pris cours dès la première heure.
Le château de Beauraing avait été incendié au siècle
dernier et reconstruit par les soins et sur les données de son
propriétaire, le duc d'Ossuna, un grand seigneur richissime,
qui y engouffra une bonne partie de ses trois cents millions.
Un mot de lui peint l'homme mieux que tout commen-
taire. Un jour on lui disait que son intendant le volait :
« Ne voyez-vous pas que ce gueux, entré chez vous sans sou
ni maille, est aujourdhui scandaleusement riche. Il est plus
que temps de lui faire rendre gorge. »
— Moi, plaider pour de l'argent? répartit le duc, les
d'Ossuna défendent leur honneur; mais leur argent!
Fi donc! »
De ce train-là, les plus grosses fortunes arrivent à leur
fin et quand le duc mourut, il ne restait guère à sa femme
qu'une pauvre trentaine de millions vinculés par les reven-
dications et les procès de la famille espagnole. La dernière
instance est pendante actuellement.
Pour faire face aux frais considérables de ces procès
— 106 —
coûteux, la duchesse d'Ossuna, aujourd'hui princesse de
Croy, eut recours à l'emprunt et signa de ce chef une obli-
gation de 2,200,000 fr. au profit d'une Société d'assurances
sur la vie, la Concordia, de Cologne. En garantie de cet
emprunt, le château fut affecté d'une première hypothèque
et le mobilier qu'il contenait, constitué en gage jusqu'à
concurrence d'une somme de 1 ,950,000 francs au profit de
la Concordia.
A la suite d'irrégularités dans le paiements des intérêts,
une poursuite en expropriation de l'immeuble hypothéqué
aboutit à la vente faite par le notaire Delporte de Bruxelles
le 24 octobre dernier ; le créancier hypothécaire se rendit
acquéreur pour la somme de huit cent cinq mille francs.
L'acquisition était fort importante déjà! Le château de
Beauraing, un palais royal, avec ses dépendances magni-
fiques, son parc superbe et ses mille hectares de terre ! Si
bien que la valeur marchande des terres aujourd'hui que
le château a été rasé par le feu, est encore estimée à
800,000 francs au bas mot.
Mais, la vente n'ayant porté que sur l'immeuble, sans
affecter le gage mobilier, et n'ayant diminué la créance que
du prix d'acquisition, il fut convenu amiablement entre la
duchesse d'Ossuna et son créancier qu'une vente aurait
lieu à Cologne par les soins de la maison Lemperts, Héberlé
et fils, de tout le mobilier donné en gage.
En exécution de cette convention, des ouvriers emballeurs
étaient venus ces jours derniers occuper le château. Ils s'y
trouvaient occupés au moment du sinistre ainsi que le
gardien, le domestique Louis ; et l'on nous assure que tous
ont eu la plus grande peine à se sauver des flammes.
Ils avaient déjà expédié un premier wagon contenant des
objets précieux qu'on évalue à une centaine de mille francs
environ. Trois autres wagons étaient prêts à partir avec
chargement complet. Ils comprenaient entre autres pièces
— 107 -
remarquables les quatre Gobelins, présent de Calderon, les
deux vases de Sèvres donnés au duc d'Ossuna par le czar de
Russie, Alexandre II, ces deux vases estimés dans le borde-
reau du gage à 180,000.
On suppose que les objets ainsi préservés représentent de
5 à 600,000 francs au moins.
Mais ce qui n'a pu être mis à l'abri et dont la perte sera
regrettée par tous les amis de l'art, c'est la galerie de
tableaux, parmi lesquels on cite deux toiles de Devos,
estimées 120,000 francs; le portrait en pied de Mme la
duchesse d'Ossuna par feu le peintre anversois Nicaise De
Keyser; celui du duc d'Ossuna par un peintre espagnol; et
nombre de curiosités, venant de toutes les Cours de l'Europe,
parmi lesquelles un buste du vieil empereur d'Allemagne
Guillaume Ier, donné par lui au duc d'Ossuna lors du
mariage de l'Empereur actuel.
La collection d'armures valait environ deux cent mille
francs. On croit qu'une bonne partie doit être au nombre
des objets emballés et préservés.
On sait que le duc d'Ossuna a été enterré avec toutes ses
décorations (il en avait pour 60,000 fr. à peu près) et avec
tous ses papiers précieux.
On a même raconté qu'à sa mort, sa veuve avait fait
murer sa chambre. Rien n'est moins exact. La chambre du
défunt a été respectée, nul n'y a pénétré, mais le mur dont
s'agit n'a jamais été qu'une barrière morale inspirée par le
respect de sa mémoire. Cependant, comme bien des papiers
avaient une haute valeur historique, une demande du gou-
vernement belge les revendiquant allait être obéie, quand le
feu s'est chargé de tout détruire. On citait notamment parmi
ces pièces la correspondance du duc avec l'ex-impératrice
des Français qui aurait, assure-t-on, présenté un très vif
intérêt.
Enfin, tout est détruit. Du superbe palais il ne reste que
les quatre murs.
— 108 —
Quant aux intérêts en jeu, la situation se règle comme
suit: la Concordia, créancière de 2,200,000 fr. et aujourd'hui
propriétaire du gage immobilier (on a prétendu qu'il y
avait eu revente au profit d'un M. Boschaert d'Anvers, c'est
inexact) se trouvera créancière du solde dépassant le prix
de son acquisition et celui de la vente à faire du gage mobi-
lier qui vient d'échapper au sinistre. Elle aura à faire valoir
ses droits pour le surplus sur l'indemnité qui sera payée
pour la perte du gage par les Compagnies d'assurances
ainsi réparties : l'Escaut et la Securitas d'Anvers ont assuré
le château pour 500,000 fr., les accessoires pour 36,000.
Quant au mobilier, il était assuré pour deux millions
200,000 francs par les Propriétaires Réunis, les Assurances
Générales et Mathieu.
Nous avons tenu à donner tous ces chiffres afin d'établir
nettement la réalité des faits et d'éviter, autant que pos-
sible, les suppositions erronnées, trop fréquentes en pareille
circonstance. (Indépendance.)
— 109 —
CHRONIQUE.
Gérard Mercator. — L'infatigable biographe de Gérard Mer-
cator, Mr le docteur J. Van Raemdonck vient de publier, dans les
Annales du cercle archéologique du pays de Waes, trois nou-
velles notices consacrées au célèbre géographe rupelmondois : La
première réduction de la grande carte de Flandre de Mercator
(gr. in-8°, 4 pp.) ; Découverte des deux premiers exemplaires
connus de la grande carte d'Europe (1S54) et de la carte des Iles
Britanniques (1564) de Gérard Mercator (gr. in-8°, 19 pp. et 1 p.
blanche], et Gérard Mercator rupelmondois et non anversois gr.
in-8°, 13 pp. et 1 p. blanche).
En voici, résumées en quelques lignes, les conclusions : I. La
première réduction connue de la grande carte de Flandre a été
éditée à Rome, par Michel Tramezini, en 1555, sous le titre de
Flandriae recens exactaque descriplio, mais sans le nom de Mer-
cator ; cette réduction a été découverte et signalée par Mr Fr. Wieser,
professeur à l'université d'Innsbruck. — IL Les deux premiers
exemplaires connus de la grande carte d'Europe (1554) et de celle
des Iles Britanniques (1564) ont été découverts, en 1889, à la
bibliothèque de la ville de Breslau, par M1' Alph. Heyer ; il serait à
désirer qu'on en publiât une reproduction phototypique. — III. C'est
à tort que Mr Wauwermans, président de la Société royale de
géographie d'Anvers, a fait naître Gérard Mercator à Anvers, dans
les discours qu'il a prononcés le 12 août 1881 et le 22 mars 1889.
L'illustre géographe n'a fait, dans la patrie d'Ortelius, qu'un court
séjour, qui ne suffit pas pour ravir à Rupelmonde une gloire dont
elle est légitimement fière.
Il faut savoir gré à Mr Van Raemdonck de se consacrer ainsi à
l'étude de la vie et des travaux de Mercator. Grâce à ses efforts et
à son zèle, il est permis d'espérer que son œuvre sera un jour menée
à bonne fin, surtout si les savants et les conservateurs de dépôts
— 110 —
publics veulent bien répondre à l'appel qu'il leur adresse et
rechercher les desiderata qu'il signale dans une liste reproduite à
la fin de sa seconde brochure. Paul Bergmans.
Registres des enquêteurs de saint Louis. — Il ne nous est
parvenu qu'une minime partie des registres où les commissaires
désignés par saint Louis pour ouvrir des enquêtes sur l'administra-
tion des officiers royaux, consignaient les plaintes qu'ils recueillaient
au cours de leur mission: il faut d'autant plus en regretter la
perte que ces registres fournissent beaucoup de renseignements sur
les événements publics, le droit féodal, l'administration et l'histoire
des familles du XIIIe siècle. Les procès-verbaux d'enquêtes concer-
nant la Normandie, le Maine, l'Anjou, la Touraine, le Poitou, la
Saintonge, l'Artois, le Vermandois et le Languedoc ont été retrouvés
partiellement à la Bibliothèque et aux Archives nationales à Paris:
ils seront probablement publiés dans le tome XXIV du Recueil des
historiens de la France. Des fragments, relatifs à la Picardie,
viennent d'en être découverts par Mr Alfred Richard, archiviste du
département de la Vienne; ce sont six feuillets qui ont servi à car-
tonner trois exemplaires de la Chrestomathie grecque, avec lexique
grec- français, parue à Paris, chez Delalain, en 1823. Mr Léopold
Delisle a signalé cette importante trouvaille à l'Académie des
inscriptions et belles lettres, dans une notice fort intéressante,
intitulée : Fragment d'un registre des enquêteurs de saint Louis
(Paris, Imprimerie nationale. 1890: in-8°, 16 pp.). Depuis, le savant
administrateur-général de la Bibliothèque nationale a été mis encore
en possession de deux feuillets du même registre, formant la cou-
verture d'un quatrième exemplaire de la Chrestomathie de 1823,
trouvé en Alsace. On peut en conclure, avec lui, que, vers 1823 ou
1824, un registre des enquêtes de saint Louis a été abandonné à des
relieurs chargés de cartonner les ouvrages classiques de la maison
Delalain, et que les librairies ou les bibliothèques pourvues des
livres qui servaient aux écoliers du temps de la Restauration, ren-
ferment des volumes couverts de fragments analogues. Il est
probable qu'il se trouve en Belgique des exemplaires de cette
Chrestomathie, et nous croyons utile d'appeler sur ce point l'atten-
tion de nos bibliothécaires et de nos bibliophiles; peut-être l'un
d'eux aura-t-il la chance de découvrir de nouveaux fragments du
précieux registre.
— 111 —
Signalons, à cette occasion, une autre notice récente de M1' Léopold
Delisle : le Formulaire de Tréguier et les écoliers bretons des Écoles
d'Orléans an commencement du XIV0 siècle (Orléans, H. Herluison,
1890; in-8°, 26 pp. et 1 f. blanc;. Dans cette curieuse communica-
tion faite à la Société archéologique et historique de l'Orléanais,
M1' Delisle analyse un recueil manuscrit de modèles de lettres,
composé au pays de Tréguier (Côtes-du-Nord) au XIVe siècle, et
acquis récemment par la Bibliothèque nationale. Il faut noter
spécialement l'emploi simultané, dans ces lettres, des termes de
Genabum et de Aurelianis pour désigner la ville d'Orléans ; c'est
une nouvelle preuve en faveur de l'identification d'Orléans avec
l'antique Genabum. Paul Bergmans.
Correspondance du comte de Mercy-Argenteau. — M* Jules
Flammermont, le savant professeur d'histoire à la Faculté des
lettres de Lille, a entrepris, avec le concours de l'éminent archiviste
autrichien, Mr le chevalier Alfred d'Arneth, la publication de la
Correspondance secrète du comte de Mercy-Argenteau avec l'empe-
reur Joseph II et le prince de Kaunitz, dans la Collection des
documents inédits relatifs à l'histoire de France, éditée par le gou-
vernement français. Le premier volume vient de paraître (Paris,
Imprimerie nationale, 1889 ; in-8°, IV, plus 495 pp. et 1 p. blanche' ;
il va du 6 décembre 1780 au 27 décembre 1785, et comprend deux
cent vingt-trois lettres, qui sont, pour la plupart, d'un haut intérêt
pour l'histoire de Joseph II et de son temps; des notes abondantes
et substantielles leur donnent un prix tout particulier. Il est bon,
croyons-nous, de signaler, dès à présent, cet important ouvrage à
ceux qui s'occupent de travaux historiques sur la fin du XVIIIe siècle,
en attendant que l'apparition du second et dernier volume, qui sera
accompagné d'une introduction de l'éditeur, permette d'en donner
un compte-rendu détaillé. Paul Bergmans.
Les sceaux par Lecoy de la Marche l . — Ce volume est aussi
intéressant par les figures que par le texte. « Vivant depuis vingt
cinq ans, dit l'auteur, au milieu du plus riche dépôt du monde,
celui des Archives nationales de France, attaché plus particulière-
1 Les sceaux par Lecoy de la Marche, Paris, Quantin, édit. —
Un vol. format charp. -- Bibl. de l'enseignement des Beaux Arts,
— 112 —
ment à la section historique, de laquelle dépend la grande collection
sigillographique qui fait l'admiration des savants, je n'ai eu pour
ainsi dire qu'à me baisser pour puiser dans ce trésor sans fond. »
Les figures qui sont excellentes, ont été exécutées d'après les
empreintes originales ou les empreintes surmoulées. On a laissé
autant que possible aux sceaux leurs dimensions naturelles. « Le
nouveau procédé employé pour ces reproductions, dit l'auteur,
participant à la l'ois de la photographie, de la gravure, de la
typographie, achève de leur donner toute la fidélité désirable. Il
est arrivé à rendre avec une précision mathématique les moindres
reliefs des empreintes de cire ou de métal et aussi leurs moindres
défectuosités. » Un grand nombre de ces figures présentent pour
"nous un intérêt particulier : nous y avons rencontré les sceaux de
Jeanne, comtesse de Flandre, des villes d'Ypres, de Saint-Omer, de
Tournai, des poissonniers de Bruges, de Philippe le Hardi, duc de
Bourgogne, de l'empereur Maximilien, etc.
« Les sceaux des villes ou des communes, dit M. Lecoy, ne se
bornent pas à nous restituer la figure de leur mayeur ou de leurs
échevins. Une autre catégorie tout aussi intéressante et plus nom-
breuse peut-être, fait revivre à nos yeux les monuments de la cité ou
son aspect général. C'est là une des sources les plus précieuses pour
l'archéologie du Moyen-Age, pour l'élude de l'architecture en
particulier; car, en admettant que ces vues d'ensemble ou de détail
ne soient pas d'une exactitude minutieuse, ce qui se comprend de
reste, elles peuvent contenir tel trait, tel ligne, tel effet capables de
nous donner une explication longtemps cherchée. Et pour combien
d'édifices ne possédons-nous, de l'ancien état de choses, aucun autre
vestige que ces petits dessins gravés d'après nature sur le bronze ou
le cuivre! » M. Lecoy de la Marche aime son sujet; et le fait aimer
et montre bien de quel secours sont les sceaux pour l'étude de l'his-
toire, en même temps que leur valeur artistique.
Van Schoonbeke en het Maagdenhuis van Antwerpen L —
M. Geudens continue la publication de monographies intéressantes
sur les établissements hospitaliers d'Anvers. Nous avons parlé déjà
1 Van Schoonbeke en het Maagdenhuis van Antwerpen, door
Ed. Geudens, archivaris bij de Burgerlijke Godshuizen, Antwerpen,
1889. 157 pp. in-8°, avec planches.
— 113 —
de son Hôpital de Saint-Julien et les Asiles de nuit à Anvers
(1888, p. 126) où l'on coupait une phalange du doigt à ceux qui,
abusant de l'hospitalité offerte, avaient prolongé leur séjour au delà
de la durée réglementaire et reparaissaient dans la ville après ban-
nissement de ce chef. Le volume que nous annonçons aujourd'hui
est enrichi de belles planches et imprimé avec élégance. Il contient
de curieux -détails sur une institution dont l'origine remonte au
XVIe siècle, sur son fondateur Van Schoonbeke, et sur les nom-
breux bienfaiteurs de l'école, où se lit encore de nos jours l'inscription
suivante :
« Ex donatione haeredum D. Gilberti de Schoonbeeck, fundo hoc
« pauperib. huius urbis pro parte legato, Joan Godev. a Grave,
« Petrus Stevens, Garolus Batkin, Philippus Leroy, Petr. de Haze,
« Guill. F., Petrus Janss. de Bisthove, huic urbi ab eleemosynis,
« deconsensu camerse S. Spirit. hune parthenona novo hoc sedificio
< ampliarunt, annis supra CID 10 CXXXIV, et XXXV. »
L'inscription entière telle qu'elle est gravée sur la pierre, ne
contient que des majuscules, ce qui tranche, quant aux particules
dans les noms propres, des questions parfois bien embarrassantes
pour les typographes.
Les recherches faites par M. Geudens dans les archives lui ont
permis de restituer au peintre Fr. Floris les tableaux conservés dans
le collection des Hospices civils et attribués à tort à P. Pourbus.
Dans un inventaire du XVIIe siècle ils sont décrits en ces termes :
« 2 Gontrefaictsels van Franchois Floris geschildert, wesende : Gille-
« bert van Schoonbeeck ende syn huisvrou Elisabeth Heyndrickx. »
Quatre siècles de gravure sur bois1. — La place que les
artistes flamands occupent dans cette belle publication est assez
considérable pour la recommander particulièrement à notre atten-
tion. Les procédés nouveaux permettent la reproduction dans la
dernière perfection d'œuvres parfois uniques ou qui n'existent qu'en
de rares exemplaires, dans quelques grands musées. La série de
pièces précieuses ainsi reproduites pour reconstituer l'histoire de
la gravure sur bois comprend, pour ne parler que des artistes
•
1 Quatre siècles de gravure sur bois, publié par Georges Hirth
et Richard Muther. — Munich et Leipsic. Hirth, Libr. édit. —
Planches in-4° avec texte en français et en allemand.
8
— 114 —
des Pays-Bas, d'excellentes œuvres de Lucas de Leyde, de Pierre
Brueghel, de Moreelse, de Van Heylen, de Christophe Jegher. Les
planches de ce dernier d'après Ruhens sont de toute beauté. Une
fois de plus nous avons lieu d'admirer la grande place qu'occupent
les artistes des Pays-Bas dans l'histoire de toute branche des Beaux
Arts avant notre profonde décadence du XVIIIe siècle.
HOBBEMA ET LES PAYSAGISTES DE SON TEMPS EN HOLLANDE1. —
Hobbema est un exemple extraordinaire de l'obscurité profonde
qui peut envelopper pendant longtemps la vie d'un grand artiste.
Dans son excellente histoire de la peinture hollandaise (1882)
H. Havard disait de lui : « Hobbema, méconnu de ses contempo-
« rains, n'a laissé chez les biographes qu'une très faible trace de son
« passage sur cette terre, dont il a été pourtant un portraitiste si
« fidèle. Il faut attendre jusqu'en 1739 pour voir son nom figurer
« sur les catalogues de vente; en 1768 ses chefs d'œuvre n'étaient
« guère prisés plus de 200 à 300 florins, et c'a été seulement de nos
« jours que justice a été rendue à son immense talent. » M. Michel
consacre à Hobbema et à ses principales œuvres *une notice
excellente, où il réunit tous les renseignements recueillis sur le
grand peintre, par les recherches des archivistes de Hollande,
l'examen des anciens catalogues de ventes, et les très rares
témoignages d'anciens auteurs hollandais. Nous y rencontrons ce
détail curieux que Hobbema, marié à Amsterdam en 1668, à l'âge de
30 ans, à l'époque où son talent est déjà développé, obtient la même
année l'emploi de jaugeur-juré de la ville pour les liquides de
provenance étrangère, et que peu de jours après ce mariage qui a
eu pour témoin J. Van Ruysdael, il comparait devant notaire pour
y passer un acte dénotant, dans l'administration de la grande cité
commerciale, des pratiques les plus étranges. Hobbema, par cet
acte reconnaît que l'emploi qui lui est échu, il le doit à l'interven-
tion d'une compagne de sa femme , comme elle domestique du
bourgmestre d'Amsterdam, et en reconnaissance de ce service, il
s'engage à payer à cette fille, tant qu'il conservera sa place, une
rente de deux cent cinquante florins par an, à moins que la béné-
ficiaire, venant aussi à se marier, ne fasse également pourvoir son
mari d'un emploi quelconque.
1 Hobbema et les paysagistes de son temps en Hollande, par
Emile Michel. —Paris, libr. de l'art. 54 pp. in-4° avec 12 gravures.
— 115 -
Les Communes françaises a l'époque des Capétiens directs1.
— La question des Commîmes françaises au moyen âge, est une
de celles qui, en ce siècle, ont le plus vivement intéressé les
historiens et le public. Elle s'impose maintenant plus que jamais
à l'attention de quinconque tient à connaître, dans son ensemble, le
développement des institutions populaires et le passé de notre démo-
cratie. L'histoire des communes françaises spécialement dans le
nord, a des rapports trop intimes avec celles des communes fla-
mandes pour que nous puissions passer sous silence les documents
qui s'y rattachent. Mais, depuis Augustin Thierry, la science a mar-
ché; l'érudition contemporaine a complété et renouvelé, en bien des
points, l'histoire dn mouvement communal. M. Luchaire a pensé
opportun et utile de mettre le public au courant, et d'exposer dans
un livre de format commode et dénué de tout appareil érudit, les
résultats nouveaux obtenus par les savants sur cet important sujet.
Dans une série de chapitres substantiels, il étudie successivement
les origines immédiates de la commune urbaine, la formation des
communes rurales, les chartes communales, l'administration de la
ville libre, son organisation militaire et financière, les partis poli-
tiques qui s'y disputent le pouvoir, et enfin ses relations avec la
féodalité, l'Église et la royauté. Nous espérons que cette synthèse
sera accueillie, comme elle le mérite, de tous ceux qui, sans avoir
le loisir de rassembler et de lire les publications des érudits, veulent
cependant en profiter.
Divers. — L'administration du Musée-Britannique a été informée
que lors des dernières fouilles, en Egypte, une importante trouvaille
a été faite.
Il s'agit d'un tombeau, que l'on prétend être celui de la reine
Cléopâtre. Il fut découvert à une profondeur de vingt-cinq pieds,
dans un appartement de dix pieds de longueur sur deux et demi de
largeur.
Le sarcophage était construit en forme de pyramide et orné
d'élégantes sculptures.
Le dit sarcophage sera ouvert en présence d'un représentant du
gouvernement égyptien.
1 Les Communes françaises, etc., par Achille Luchaire, pro-
fesseur d'histoire du moyen-âge à la faculté des lettres de Paris. —
Hachette et Cie, à Paris, 1 vol. in-8°, 299 pp.
- 116 —
— La ville d'Athènes va i*ecevoir en don du riche Athénien
Stéfanowitch un souvenir à la mémoire de lord Byron.
C'est un groupe, en marbre, qui sera achevé à Paris et entouré de
ligures allégoriques, le tout d'une valeur de plus de cent mille francs.
— On expose depuis quelque temps au Palais Rosso, à Gênes, les
tableaux offerts par la duchesse de Galliera, à sa ville natale. Dans
cette collection sont compris : une magnifique toile de Rubens,
représentant : Un Guerrier poursuivi par de mauvais génies; il est
recueilli dans le royaume de Vénus et de Bacchus et débarrassé de
son armure par l'amour ;
Un tableau d'Antoine Van Dyck : Le denier public ;
De Jean Steen : Une procession d'enfants et Un intérieur de ferme ;
Un paysage, de Ruysdael, dont Wouwerman peignit les figures;
Un paysage effet de lune,, par van Aart van der Neer.
Deux tableaux de Murillo : Saint-François qui reçoit d'un ange
les règles de son ordre et La Fuite en Egypte ;
En outre des toiles de Zurbaran, Sassoferrate, Carracci, Guido
Reni et d'autres peintres de talent.
— La vente de l'atelier de Jules Dupré qui eut lieu à Paris, le
30 janvier dernier produisit la somme de deux cent dix mille francs.
Son Retour à la ferme au soleil couchant, fut acheté par le duc
d'Aumale, pour 20,000 francs.
Son Repos de moissonneurs (1842), atteignit le prix de 4,100 francs.
Les trois arbres, environs de Ghâteauroux, 8000 francs.
Le soir au bord d'une rivière, 10,400 francs.
Sous l'ombrage Bois de l'Isle Adam , 10,100 francs ;
Pleine mer, 5,500 francs.
Les autres tableaux du maître s'élevèrent à des prix variant de
deux à treis mille francs.
Les dessins furent vendus :
Le Bûcheron de Coussac-Bonneval, 1005 et le Passage du gué,
1520 francs.
A la vente de la collection Dupré, le duc d'Aumale obtint au prix
de 40,000 francs le Concert, de Corot.
Un autre tableau de Corot : le Crépuscule, fut vendu 8,100 francs ;
Le portrait de Jamer, par Gericauld 6,000 francs.
Les toiles de Daumier : la Salle des Pas-Perdus, 1,800 francs:
l'Avocat plaidant, 1,500 et l'Antiquaire, 1,200 francs; la Plaine,
étude de Th. Rousseau, 1,400 francs.
- 117 -
— Une singulière et très importante découverte vient d'être faite
à Pompéi. A l'extérieur de la porte Stabiane, dans une couche de
cendres, on a trouvé le moule de trois cadavres et d'un arbre.
On sait que ces moules sont des empreintes vides d'objets dont le
feu a calciné et consumé la substance sans en détruire la forme,
celle-ci reste accusée avec la plus grande fidélité par les cendres qui,
l'enveloppent de toutes parts, et si on vient à verser du plâtre
dans ces boursouflures, on obtient la reproduction exacte de leur
contenu.
On a donc usé de ce procédé et on a ainsi obtenu l'empreinte de
deux cadavres d'hommes et d'un cadavre de femme. Un de ces
hommes est à genoux, tandis que l'autre est couché sur le dos. Le
corps de la femme a la tête inclinée en avant, les bras étendus.
Mais l'empreinte de l'arbre est de beaucoup la plus intéressante.
Outre l'impression du tronc, celle des feuilles et du fruit est
demeurée intacte. M. Ruggiero, directeur des fouilles de Pompéi,
examina attentivement l'arbre et reconnut qu'il appartenait à la
variété des laurus nobilis, ce végétal produit un fruit rond qui
mûrit à la fin de l'automne. M. Ruggiero, après avoir étudié la
forme et la dimension des fruits moulés, déclara qu'ils devaient être
mûrs lors de l'éruption volcanique.
Par conséquent, cette découverte prouverait que la célèbre
catastrophe de Pompéi doit prendre place non, comme on le croyait,
au mois à' août de l'année 79 du Christ, mais au mois de novembre
de la même année.
— On a vendu, dernièrement la partie la plus importante de la
collection Marquis, des bronzes d'art et d'ameublement.
Nous signalerons d'abord une magnifique pendule à cadran tour-
nant, formée d'un vase ovoïde d'ancien céladon fleuri, garni d'une
riche monture en bronze ciselé et doré, de l'époque Louis XVI,
vendue 48,100 fr. ; un très beau lustre de Boulle, à huit lumières en
bronze ciselé et doré de l'époque Louis XIV, 22,000 fr., sur une
demande de 15,000 fr. ; deux bras appliques du temps de Louis XV
en bronze ciselé et doré, 7,530 fr. ; une pendule Louis XVI, modèle
à cage en bronze doré, garni sur la face et sur les côtés de plaques
en ancienne porcelaine de Sèvres, 8,900 fr. ; une pendule Louis XVI
formée de deux sphinx en marbre blanc supportant le mouvement
et reposant sur un socle en marbre bleu turquoise, avec ornements
en bronze, 11,000 fr. ; un grand cartel Louis XVI en bronze ciselé
— ns —
,>nte d'une figurine de _ - nnant de la trompette
et tenant un médaillon qui représente Henri IV vu île profil, 5,800 Dr.
— Un curieux manuscrit a été offert, en février dernier, à l'Aoa-
mçaise, par M le comte de la Ferrière : c'est la seule copie
ristfl du Livre d€ Dépenses de la reine de Navarre Marguerite
Ingon - but de François 1- . du mois de septembre 1540 à la
fin d'août i5-n>.
L'original de ce manuscrit est conserve dans la bibliothèque du
marquis de Frotl - «ndant en ligne directe de Jehan de Frotté\
la reine Marguerite.
— Une dentelle historique. Le i oservateur du Musée du chah
\ _ . a que MM. Asther et Wertheimer lui ont
prêt-, s remarquable échantillon de dentelle en point de V<
qui exish tient en Angleterre, et qui, chose curieuse. ;
robe que Marie- Antoinette a porté le jour de ses n< -
Le volant de dentelle, en très -sure 4 mètres de 1 i g
sur Tô centime:-. - rge. Son dessin es - figures,
. x : s ai - laReii th souronne
sontconten s ns travail, fait entièrement à la main.
— 1 fctres autographes, adressées ] rNa] - au célèbre
- i Volta, viennent d'être retrouvées dans de vieux pa]
ar une fileuse de s Mandello-Lario. Cette jeune
aille à la reine qui,
en retour, lui a fcre un magnifie ssurant
~ - de lui procurer un appui plus efficace.
— M. le chanoine Meyers. cure de S.. kl _e. vient de
faire un don magnifique au - :.e la porte de H
Bruxelles:. \\ h. cadeau de la coupe en argent et or offerte
en;-' jour de l'inauguration solennelle d< - serne
du F ifiteau, à Br Iles, i ar S. M LéopoM 1-. au nom de la
- le lieutenan -_
taire et ce:- or du m se s'ag
M. M< - k grat exécuté les plans en si
romain de ce superbe édifice, et la ville de E tenu à lui
.oignex sa
e en argent massif, du
- le 16 kilogr rès d'un mètre de haut.
— 119 -
10,000 francs. Le couve: lé de la statue de l'arcl.
Saiir . jure au haut de la tour delà maison de ville.
— On a vendu, en il Hôtel Drouot, à P. r la
somme de 23,000 franc?, quatre sphinx e: -cuite, du t/-
de Louis XV.
Ce sont <1 à buste d< -entant,
dit-on, quatre favorites du :
— La Ga. le de Londres le soix;
tableaux moderr. 3e M. Henn Tate de Sireatnam.
Cette belle colle.. _ Elle
renferme deux toiles de Tadema, une de ■ -s de
Gonstaj
— La Bibliothèque royale de I d'acquérir le |
ancien livre imprimé qui ei . qui apparl-
à la collection du professeur F; Hirtb. ueil de
formules chinoises intitulé : - avec d •
- de bois qui ont dû être façonnés vers l'an 1310 •'.■
La clarté du texte et l'exécution des planci.
trésors historiques anciens indiquent que l'ouvrage a dû paraître
à une époque éloigx
— Le Louvre vient de faire une acquis
un grand triptyque flamand dont les ;
conservées, quoique fort anciennes, sont d'u:
A l'intérieur, comme sur beaucoup d- flamands de la
ne époque, sont représentés les donateur -
saint patrons. Sur la Ga -rieure di
et Eve.
Quoique l'auteur de cet ouvrage soit inconr.
ait quelque analogie entre ce chef-d'œuvre et le fameux triptyq
Van Eyck qui orne l'église Saint-Bavon à Gand.
— L>a: lartement de Seine et Marne.
Bocage, Ion vient de découvrir plusieurs habita:
Dans un atelier où la pierre était taillée l'on trouva des ciseaux.
des vilebrequins et plusieurs tessons provenant d'objets ce:
tionnés, ainsi qu'une quantité d'instruments aratoire rue:
sarcloirs, râteaux, etc., fabriqués en silex
— On signale dans la Pe. - Milan, que par suite de
circonstances fortuites l'on a découvert, à Bologne, les ruines c
- 120 —
ville étrusque. Deux larges rues rectangulaires partagent la ville
en quatre parties. Chacune de ces parties est divisée en huit blocs
à peu près d'égale grandeur : 165 mètres de longueur sur 35 à
40 mètres de largeur. Les rues principales ont des trottoirs de
5 mètres de largeur et une voie pour les véhicules, présentant les
mêmes dimensions. Les fouilles achevées l'on put contempler des
maisons ayant beaucoup de ressemblance avec les habitations ro-
maines. L'une de ces demeures, d'une largeur de 35 mètres a un
impluvium et un vaste portique incrusté de mosaïques. Près de
l'atrium l'on trouve plusieurs chambres à coucher, ayant une
superficie de 7 mètres carrés. Le tout est suivi d'un grand espace
ouvert, probablement le tablinium.
La ville est construite avec une telle régularité que l'on croit
avoir devant soi une ancienne colonie construite d'après un plan
arrêté.
Ces bâtisses semblent dater de vers le milieu du Ve siècle avant
notre ère.
— Jusqu'à ce jour l'on n'avait pu découvrir aucune des œuvres du
peintre Albert Van Ouwater, le contemporain et peut-être l'élève
de Van Dyck.
Seul l'ouvrage de Charles Van Mander le fait connaître où il
décrit de lui deux tableaux : l'Autel Romain, qui orne la grande
église de Harlem, et la Résurrection de Lazare. Cette dernière
toile se trouva parmi le butin fait par les Espagnols en 1573, lors
de la prise de Harlem. Malheureusement Van Mander ne décrit
qu'une copie où il dépeint Lazare comme une figure admirable, aux
lignes pures et d'un dessin correct. D'un côté Lazare est entouré
d'apôtres, de l'autre de gens du peuple.
La chronique artistique, de Hollande, annonce maintenant que
l'original de ce tableau fut reconnu par le Dr Schneibler dans une
collection appartenant à une famille de Gènes.
Le Dr Bode, directeur de la revue citée, est d'accord avec le
Dr Schneibler pour avancer avec certitude que c'est bien la Résur-
rection de Lazare, par Van Ouwater, que l'on a trouvée.
Lors du rappel du duc d'Albe des Pays-Bas, il vint faire un assez
long séjour à Gènes et l'on croit qu'il apporta dans cette ville la
célèbre toile de Van Ouwater. Le tableau est en parfait état de
conservation, le coloris en est frais et brillant et les lignes d'une
exquise délicatesse excitent l'admiration des connaisseurs,
Armoiries de V abbaye d'Aine-,
— 121 —
UN DERNIER MOT
CONCERNANT
LES ARMOIRIES DE L'ABBAYE D'AINE
En offrant à la Fédération historique de Bel-
gique nos nouvelles recherches sur les armoiries
de l'abbaye d'Aine, nous pensions avoir établi
notre opinion d'une manière péremptoire; et la
conclusion adoptée et votée, en faveur de notre
sentiment, par le bureau du Congrès, semblait
terminer la controverse * . Nous avions trop pré-
sumé. Pendant que plusieurs érudits, juges très
compétents, nous adressaient des félicitations et
déclaraient être de notre avis, d'autres nous
faisaient savoir qu'ils n'étaient pas entièrement
convaincus. Leurs objections ne nous paraissaient
pas détruire la valeur de nos preuves. Néanmoins
le désir de corroborer notre thèse, de façon à
satisfaire les critiques les plus exigeants, nous
décide à la reprendre.
Nous ne nous arrêterons pas au document
* lV*'Ses8ion. Charleroi,' 5 août 1888.
— 122 —
fourni par le livre assez rare, intitulé : La reigle
de Saint-Benoist illustrée de commentaires, par feu
Damp Matthias Lambert, prieur du renommé
monastère d'Aine, dédiée à Monseigneur Henry
de Yelpen1..., abbé dudit monastère. Liège, chez
Henry Hovius. L'an M.D.XCVI, in-12, 555 pp.
Sur ce titre, on voit une vignette représentant les
armoiries : fasce et trois merlettes, surmontées de
la mitre et posée sur une crosse placée transver-
salement. Au-dessous, un bistel avec une devise
un peu détériorée par le mauvais état de l'exem-
plaire; on y lit : confirma verbum.
Nous n'insistons pas sur cette preuve : elle est
identique à celle déduite de la reliure et du titre
de la Vie du bienlieureux Simon, figurée par Pierre
Fouet, le paintre de Chastelet-sur-Sambre , Vannée
du s1' 1621 î. Nous préférons exposer un argument
décisif.
Grâce à une communication privée, nous con-
naissons le sceau officiel de l'abbaye d'Aine en
1794, époque où les religieux furent expulsés de
leur monastère. Ce sceau forme un manche ou
poignée à deux mains, c'est-à-dire à double usage.
L'instrument est en argent, et offre deux estam-
pilles ou empreintes différentes. L'une représente
les armes personnelles de l'abbé Dom Herset 5 : trois
1 L'abbé Henri Vander Velpen avait pour armes personnelles :
une croix cantonnée de quatre merlettes et chargée d'un lis en cœur,
* Documents etc. de la Société arch. de Charleroi, t. XVI, p. 386.
3 Dom Norbert Herset, né à Verviers, le 1er octobre 1738, reçut la
bénédiction abbatiale le 21 novembre 1790, et mourut à Saint-Trond,
le 15 septembre 1806.
— 123 —
quinte feuilles en pal, à dextre ; une licorne grim-
pante, à Senestre, l'autre (empreinte) figure : une
fasce avec trois merlettes, sur fond d'azur : armes
que l'on rencontre sur les divers monuments cités
antérieurement.
Est-il besoin de développer les conclusions
qu'amène nécessairement cette nouvelle décou-
verte ? Nous ne le pensons pas. Quel pourrait
bien être ce deuxième cachet employé par l'abbé,
sinon celui de l'abbaye qu'il administrait ?
Avec l'intime persuasion que le doute n'est plus
possible, nous maintenons, sans crainte de nous
tromper, que l'abbaye d'Aine avait pour armes :
un écusson à la fasce accompagnée en chef de trois
merlettes.
Nous adressons l'expression de notre gratitude
à Monsieur le Docteur Gérard, de Gozée. C'est lui
qui nous a procuré la double empreinte du sceau
dont nous venons de parler, sceau appartenant à
Monsieur Alfred Riche Pouré de Noirchain.
I. Van Spilbeeck.
124 - —
NOTICE
SUR LE
LOCAL DE LA CONFRÉRIE DE SAINT-GEORGES
DE 1381 A 170e ».
A l'ouest du local de la grande et souveraine
Gilde des Arbalétriers se trouvait, de 1440 à 1567,
la petite cour de Saint-Georges, occupée par la
jeune confrérie. Cette petite cour longeait la place
de la maison échevinale derrière les maisonnettes
d'écrivains publics. Elle y avait deux entrées, l'une
près du bâtiment de l'ancienne Halle, où la jeune
confrérie avait sa Gildehuys, et l'autre près du
Beffroi, où celle-ci possédait une maison. La cible
était placée près de la tour. C'est ce que nous montre
un acte du 26 mai 1562, par lequel la jeune Gilde
permet. à Jean Pieters, propriétaire de la maison
touchant au Beffroi, de bâtir dans, le mur de la
cible, et stipule qu'il sera tenu d'ouvrir sa porte
les jours de tir pour les prix de la Ville, mais qu'il
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., Ie livr., 1890, p. 1.
- 125 —
devra la tenir fermée en toute autre circonstance,
afin que nul ne puisse pénétrer dans le local et
y causer du dommage. Kenlic zij etc. dat Lievin
De Peystere, keyser, Pieter Gilliaert, coninc
vandenjonglie guide van mynen heere den rud-
dere Sinte- Jooris , binnen desen stede, by ad vise
van mynheeren coninck, overdeken, deken ende
proviserers van den ouden ende grooten guide
van mynen heere den zelven ruddere Sinte-Jooris
ter eencler syde, ende Mr Jan Pieters ter andere,
kennende ende verclaersende de voorn. eerste
comparanten gheconsenteert hebbende ende
consenteren by desen den voorn. Mr Jan Pieters
te moghen vuytbringhen maken ende weercken
zekeren muer van de egghe van zynen achter-
ghevele van den huuse daer hy jeghewordelic
innewoont, ant beaufroit tôt in den muer van den
doelhuuse staende neffens tselfs M1' Jans huus —
Ende es ooc ghehouden ten daglie van den
schietene van den stede prysen zyne dueren open
te doen stellen ende houdene, glielyc men van
oudts gheuseert heeft, nemaar indien men anders-
sins int voors. hof schote zo es hy Mr Jan ghe-
houden de zelve dueren ghesloten te houdene ter
fine nyemandt hindese noch grief intervenire.
Ende al ditte ooc zonder by hem Mr Jan of zyne
naercommers eenich recht van proprieteite op,
an, noch in tvoorseide hof te moghen pretenderen,
niet meer by possessie dan andersins f.
1 Chartrier de la confrérie de Saint-Georges, aux archives de
l'État à Gand.
— 126 —
En 1567 la jeune confrérie cessa d'exister; elle
fut supprimée à la demande de l'ancienne. Par un
acte du 12 janvier 1567, elle fut réunie à celle-ci,
avec tous ses biens, créances et profits. « So eyst
dat commen ende ghecompareert zyn voor myne
lieeren den bailliu ende scepenen van der kuere
Franchois de Clerck, coninc, Nicolas Triest, over-
dekin van den ouden ende grooten guide
van sente Jooris, ter eender zijde, ende Gillis
Blanckaert, coninck, Claeys vander Hostijne,
dekin, enz. notabelen ende ouderlinghen van den
jonghen guide, ter ander, kennende ende ver-
claersende die van den voornoemde jonghen
guide, den voorn. ouden ende grooten guide, by
desen duechdelic ghecedeert, ghetransporteert
ende upghedreghen hebbende tvoornoemde jonghe
guide met aile den goedinghen, baten ende prou-
fijten daeran clevende ende competerende, dwelcke
die van den voorseiden ouden guide alzo accep-
teren l »
L'ancienne confrérie de Saint-Georges ne fit
pas servir le local de la jeune confrérie à l'agran-
dissement du sien ; elle en morcella le terrain et
le vendit aux propriétaires des maisons situées
sur la place de la maison échevinale, à charge de
rentes foncières. Ces ventes eurent lieu de 1567
à 1610. Elle vendit en 1586, 6 verges et 2 pieds à
Jean De Rudder, 10 verges et 12 pieds à Laurent
vander Hostyne et 5 verges à Jean vander Hostyne,
propriétaire de l'une des deux maisons qui ont
1 Chartrier de la confrérie de Saint-Georges. Archives de la ville.
— 127 —
formé la vaste habitation marquée aujourd'hui
n° 4 au marché au Beurre. Vers la même époque
elle vendit à un autre propriétaire d'une maison
voisine, dix verges et douze pieds de terrain, à la
condition de boucher la porte d'accès qui se trou-
vait dans le mur de la confrérie. « Jan vander
Beke, procureur bij schepenen van ghedeele, heeft
van de erfve, van den jonghen guide van Sinte-
Jooris was, den nombre van tien roen erfve ende
12 voeten; dies wert hij ghehauden te stoppen
ende toe te metsen de deure, staende in den
muer l » Toutes les anciennes maisonnettes
d'écrivains publics, situées sur la parade plaetse,
furent agrandies à la suite de ces acquisitions de
terrain et elles devinrent d'importantes habita-
tions qui furent occupées par des avocats et des
procureurs, à cause _ du voisinage de la maison
communale où se traitaient à cette époque la
plupart des affaires judiciaires.
En 1569, la confrérie vendit à un voisin quatre
verges et demie de terrain derrière une maison
située sur la Place de la maison échevinale près
du beffroi, à la condition qu'elle pourrait les
reprendre si plus tard la ville en avait besoin pour
agrandir le Halle : omme tuutstellen van der halle \
Cet agrandissement ne.se fit pas, mais les fon-
dements furent prolongés jusqu'auprès de la porte
de la cour de l'ancienne Halle, ce qui semble
indiquer que la reprise eut lieu.
1 Archives de la confrérie. Handtbouck van den erfelicken renten,
den ouden ende grooten guide van Sinte-Jooris toebehoorende,
s Registre actes et contrats. Keure, 1569-70, f° 108.
- 128 —
En 1610, la confrérie vendit à la. ville une
petite maison en ruines près de la Halle ; cette
maisonnette avait été jadis l'une des cibles de la
Jeune Gilde de Saint-Georges, et elle, servait depuis
la réunion de logement au messager de la première.
« Den 15 maart 1609 hebben mynen heeren van
den Eedt an Jooris Bonnewyn, cnape van tselve
guide, gheconsenteert ende gheaccordeert dat hy
thuuseken daer Lievin Hemselinc inné ghewoont
heeft staende . by tbeelfoort, ghebruucken zal tôt
wedersegs, zonder hiervoor eenigh huere te
gheven, behauden ende met conditie dat hy ende
die van zynen huuse thoff behoorelyck gaede
slaen zal '. »
De chaque côté de la maisonnette se trouvait
un terrain endos de murs que la confrérie vendit
également à la ville. « Zeker vervallen huuseken,
dit l'acte de. vente de 1610, eertyts gheweestheb-
bende een van de doelen van tjonghe guide van
Sinte- Jooris, metter erfve over beede zyden van
tselve huuseken Kggkende, beghinnende van
d'érfve van Jan Halsbrech tôt -jeghens de Halle
deser voorn. stede, emmers gelyck al tselve
tusschen mueren ghestaen endè gheleghen es "2 » .
C'est le terrain sur lequel ont été construits les
bâtiments de la balance de la ville et de la
prison communale. Il servait antérieurement de
passage pour la nouvelle halle, comme l'indique
un acte de vente de 1537 d'une maison située sur
1 Archives de la confrérie. Livre des résolutions, i'° 13v, à la
Bibliothèque.
2 Registre des actes et contrats. Keure, 1610-1611, f° 115,
— 129 —
la Place de la maison échevinale près du beffroi :
« Een huuseken up de plaetse tsepenhuuze an
deen zyde tbeelfroit, ende an dander zyde de
weduwe van Jan Steel, daer tusschen de poorte
en de ivegli van der halle strect ' .
Les murs qui séparaient le local de la grande
confrérie de Saint-Georges de celui de la .jeune,
furent conservés après les aliénations de terrains
dont nous venons de parler. La confrérie en garda
la propriété.
La Gildehwjs de la Jeune confrérie fut divisée
en deux parties ; l'une servit à agrandir la maison
de la grande confrérie et fut convertie en un
atelier et une forge pour les faiseurs d'arbalètes
qui occupèrent les chambres sous la chapelle
jusqu'en 1610; l'autre fut transformée en une
maison d'habitation et louée séparément ; c'est la
maison qui est marquée- aujourd'hui n° 2 au
Marché au Beurre. Elle fut louée successivement
jusqu'en 1743 à des procureurs et à des avocats,
parmi lesquels on trouve le procureur Brant en
1654, l'avocat Pyn en 1682 et le procureur De
Rouck en 1719. En 1743 elle devint un cabaret
tenu par la ve Jean Fleurman ; mais le bail fut
résilié peu après, sur les pressantes réclamations
de l'aubergiste-concierge de la confrérie, qui se
plaignait de la concurrence que lui faisait la
locataire. Le bail fut repris par le procureur
Elbo, ancien doyen de la confrérie.
A l'est, la cour Saint-Georges subit peu de mo-
1 Weesenboek van 1537, 1° 75.
— 130 —
difications de 1469 à 1796. Le local de la confré-
rie continua d'être borné, de ce côté, par les murs
des maisons de Groote Moor, de zwarte Moor et
de Groote Zichele, situées rue Haut-Port, par la
façade postérieure de l'ancienne maison de Van
den Eecken en 1450 et du docteur Demanet en
1780, rue des Régnesses, enfin par les murs de la
maison de Talboem en 1408 et de Pascal-Bois de
Vigne en 1728, rue Saint- Jean. L'ancienne allée
(ganglie) . de la maison de groote Loeve, donnant
dans la Ryngasse, fut convertie en jardin et louée
en 1775 à l'habitant de la maison voisine. « Wor-
dendealhieroockte kennen gegeven,dit le compte
de la confrérie du 5 février 1778, dat den eedt
op den neghensten july 1775 heeft verhuert den
grondt van den gilde liggende achter den huyse
van den canonick Clément woonende nevens
den huyse van de vrauw graevinne de Thiennes,
wesende eenen hof, voor negen achter een volgende
jaeren ten advenante van een pond vyfthien
schellingen tjaers » ». C'est sur ce terrain, incor-
poré à l'habitation formée d'une partie de l'ancien
atelier de tisserands de Jean Pricke, qu'ont été
construites les dépendances de la maison qui porte
aujourd'hui le n° 3 dans la rue des Régnesses.
En 1782 la confrérie donna en bail emphy-
théotique pour vingt-neuf ans au docteur G.
Demanet, propriétaire d'une maison rue des
Régnesses, un terrain de 441 pieds carrés, situé
1 Archives de la confrérie, vol. 1775-1786, f° 1 passim. A la
Bibliothèque de l'Université,
— 131 —
derrière sa propriété dans la cour de Saint-
Georges, pour y élever des constructions, et à la
comtesse de Thiennes, propriétaire de deux mai-
sons qui avaient fait partie de la Ciroote Zichele
dans la même rue, un terrain situé dans l'allée
(ganghè), d'une superficie de 168 pieds carrés,
également pour y faire des bâtisses ' .
De chaque côté de la cour de la confrérie de
Saint-Georges étaient plantés des tilleuls laissés
d'abord en liberté, puis conduits en espaliers.
« Ten 16 maerte 1760 is gheresolveert... van te
laeten binden de boomen staende tusschen de
twee doelen, emmers de selve leeden in forme van
wayers 2. » Une convention pour l'entretien des
tilleuls, des espaliers et des chemins entre les
cibles fut faite avec un des membres de la confré-
rie en 1765. La résolution du 24 mars de cette
année porte : « ende is den eedt geconvenieert met
sr Christoffel de Smet tôt het opleeden, snoyen
ende onderhouden van geseyde linden in behoor-
lycke forme te sullen doen en jaerlycx onderhouden
te synen coste voor de somme van seven guldens
eens jaerelycx... ende op soodanige wyse gelyck
hy als waeren confrère van den gilde ende lief-
hebber van het werck, eere ende deugt daer van
sal trachten te haelen 5. » Entre les arbres se
trouvaient des gloriettes garnies de bancs et de
tables. Une résolution du serment du 3 juillet
1 Registre aux résolutions de la confrérie, de 1779 à 1795,
fO820v et 21.
* Registre aux résolutions de la confrérie, de 1734 à 1779, f° 133.
3 Ibid,, f° 140*,
— 132 —
1735, avait ordonné au proviseur Adrien Speelman
de placer « in de respective glorietten synde in
den hove de tafels ende zedtbanke-n aldaer
noodigh 4 . >>
Sauf la construction de la nouvelle maison (het
nieuw hays) rue Saint-Jean, le local de la confrérie
de Saint-Georges ne subit point de modifications
importantes pendant les quatre siècles de son
existence. Tel qu'il avait été constitué à la fin du
XVe siècle, après les acquisitions de 1381, de
1435, de 1450, de 1469 et de 1474, nous le retrou-
vons en 1796, époque de la suppression, définitive
de la confrérie, par l'application, en notre pays,
des lois de la révolution française.
Durant sa première suppression, qui eut lieu
de 1703 à 1727, son local fut désigné pour servir
de halle aux draps .
Après les troubles qui désolèrent la ville de
Gand à la fin du XVIIe siècle, les échevins deman-
dèrent à l'autorité royale la suppression des quatre
confréries militaires, parce que, disaient-ils, elles
ne rendaient plus aucun service, et, en outre,
parce que la ville avait besoin de plusieurs locaux
nouveaux, qu'ils n'avaient pas d'argent pour en
acheter ou pour en faire construire, et que ceux
des confréries leur convenaient parfaitement. La
cour de la confrérie de Saint-Georges, située au
centre de la ville, fut indiquée comme pouvant
servir pour la halle aux draps qu'ils étaient tenus
d'établir. «Dat oock de verthoonders van weghens
1 Registre aux résolutions de la confrérie, de 1734 à 1779, f° 10T.
— 133 —
syne Majesteyt gheordonneert is eene laekenhalle
t'erigeren ofte procureren tôt vermeerderynghe
van de negotie ende manufacture!! van de wolle
laekenen, daertoe het guldenhof van Sente-Jooris,
gheleghen int midden van de stadt, ten uytersten
bequam is, ende by ghebreck van gheldt, door
de stadt gheen ander en can ghemaeckt nochte
ghevonden worden. »
Une ordonnance royale du 3 avril 1703 sup-
prima, les quatre confréries et ordonna « que la
maison de la confrérie de Saint-Georges fût
appropriée à une halle pour les manufactures des
laines au bénéfice de la fabrique de la ville. »
La ville n'avait pas la propriété des biens des
confréries. Si les échevins intervenaient dans les
actes d'acquisition ou de vente faites par celles-ci,
ce n'était qu'en leur qualité de tuteurs, « als
oppervoogliden van het Gilde ende aile andere »
dit le contrat de vente du 8 mars 1728 *. Par
l'ordonnance du 3 avril 1703, la propriété de tous
les biens, meubles et immeubles des confréries,
fut transférée à la ville, à charge de payer toutes
leurs dettes et de faire servir leurs locaux aux
usages déterminés par le souverain. Les magis-
trats communaux négligèrent cette dernière condi-
tion en ce qui concerne le local de la confrérie de
Saint-Georges. Ils n'en firent point une halle, pro-
bablement pour la même raison qui fit échouer ce
projet en 1737 : l'opposition des habitants du
Marché du Vendredi où se tenait le marché aux
1 Registre BBB, f° 92v. aux archives de la ville,
— 134 —
toiles et aux draps ; mais ils résolurent le 27 sep-
tembre 1717 d'y faire une prison. Cependant cette
résolution n'eut point de suite non plus, et ils se
bornèrent à donner en location les maisons de la
confrérie, à l'exception de la chapelle et de la
grande salle des réunions, qui furent mises au
service de la garnison. La cour fut laissée à
l'abandon pendant vingt-quatre ans. Les proprié-
taires des maisons voisines profitèrent de cet état
de choses pour commettre toute espèce d'usurpa-
tions sur le terrain qui avait appartenu à la
confrérie. Les uns ouvrirent des fenêtres dans
leurs maisons, les autres firent couler sur le terrain
les eaux de leurs toits et leurs eaux ménagères;
presque tous enfin pratiquèrent dans le mur des
portes pour avoir accès à l'ancienne plaine des
exercices de la Gilde.
Le 12 novembre 1727, un décret du souverain
rétablit la confrérie de Saint-Georges ; elle rentra
en possession de tous ses droits et privilèges, ainsi
que de tous ses meubles et immeubles qui n'avaient
point été aliénés par la ville. Cet heureux événe-
ment, elle le dut en grande partie aux démarches
actives d'un de ses membres qui jouissait d'un
grand crédit auprès du gouvernement. Ce membre
était Jean François Pascal-Bois de Vigne, le pro-
priétaire de l'ancienne maison Talboem dans la
rue Saint- Jean. Pour le récompenser, la confrérie
lui vendit le bâtiment et le terrain situés près de
la Courte cible, par l'acte du 8 mars 1728, dont
nous avons parlé. Le motif de cette vente est
relaté dans l'acte même.
— 135 —
A peine rétablie, la confrérie se hâta de
remettre de l'ordre dans ses affaires, et elle
rencontra tout d'abord les usurpations et les
empiétements commis par les voisins sur sa
propriété. Elle leur permit de conserver les
portes qu'ils avaient ouvertes sans droit et sans
autorisation de personne, mais à la condition de
payer un cens irrédimible, comme reconnaissance
de son droit et de la tolérance qu'elle leur accor-
dait. Le compte, rendu à. la confrérie par le
doyen le 15 juillet 1732, nous fait connaître ces
faits : « Doende alhier te noteren dat den pro-
cureur Jan De Gevez gheduerende suppressie
van desen gilde ende sonder consent van de
weth ofte imant anders, heeft doen maecken
een achterpoortien commende in den hove van
desen gilde, waer over hij op den sesthienden
september 1728 met den dienende eedt, volghens
resolutie staende ten boucke, gheconveniert is te
sullen betaelen tôt acht schellinghen grooten
tsjaers onlosselycken cheyns ' . » Jean De Gevez
étant resté en défaut de payer le cens convenu
et de faire faire l'annotation de la convention au
livre terrier de la Ville, fut condamné, par sen-
tence des Échevins, rendu en Chambre le 15 jan-
vier 1731 et confirmé en appel le 14 mars suivant,
à exécuter la convention, sinon à boucher la porte
qu'il avait ouverte sans droit ni titre, et à payer
de ce chef des dommages-intérêts à la confrérie.
1 Compte rendu à la confrérie de Saint-Georges le 15 juillet
1732, déposé aux Archives de la ville,
- 136 —
« Den heuverdeken, deken ende proviseerders
van den guide van den Edelen ridder Sente-Jooris,
onderhauden met den voetboge binnendeze stadt,
heesschers b'y requeste van den 17en april 1730,
ter eender syde, ende Jan de Gevez, procureur
deser caemer ende vierschaere, verweerdere, ver-
steken van furnissemente, ter andere.
« Wysen ende condemneren den verweerdere
de cheyrise-rente van acht schellinghen grooten
tsiaers by de voorseyde requeste instel van de
saecke breeder vermelt ten proffyte van shees-
scliers guide ingevolge de overeencommynghe
diesaengaende ghemaeckt, behoorelyck te reali-
seren ende affecteren op synen huyse daer by
oock gheroert ende ten landtboucke van de stede
cheynsen te doen annoteren, midtsgaders danof
aen dheesschers over te leveren acte in forma,
ende by gebreke van dien het poortien by hem
doen maecken in den muer van het voorseyde
guide ende vuytcommende op den hof te stoppen
ende den selven muer te stellen in den staet glie-
lyck hy te vooren is gheweest, ende voorts opte-
legghen ende te betaelen het verloop van den
voorseyden cheyns tsedert den eersten January
1728 tôt de effective van het voorseyde poortien
ende in al sulcke schaeden ende intresten als het
voornoemde guide door het maecken van dien
heeft gheleden ende noch staet te lyden ende in
de costen van den processe ter tauxatie. »
De semblables conventions furent faites avec
quatre autres propriétaires de maisons situées,
comme celle de Jean de Gevez, sur la Parade
— 137 — .
plaatse, et qui avaient profité comme lui de l'état
d'abandon dans lequel s'était trouvé le local de
la confrérie de Saint-Georges pour ouvrir des
portes donnant accès dans la cour de celle-ci. Ce
sont Adrien van Cotthem, la veuve Antoine
Hockaert, Adrien Wissaert et l'hôpital Wenemaer.
Le compte de 1732 contient à leur égard les
mêmes indications que celles qui concernent Jean
de Gevez.
La confrérie avait concédé antérieurement des
portes d'accès dans son local, mais par simple
tolérance et avec la faculté pour elle de les boucher
quand bon lui semblerait. Un acte du 5 février 1552
nous le montre. Dominique Everaert, propriétaire
d'une maison, située rue des Régnesses, proba-
blement celle de Jean Pricke, qui avait une porte
d'accès dans le local dès 1386 (Een huus ende
stede... in de Ryngasse, strekende met eenen
poortkine tote int scutters hof 1), demande à la
confrérie la permission d'ouvrir une autre porte
près de celle qu'il avait déjà, dans un mur situé
entre sa maison et l'ancienne cour de Saint-
Georges dans la rue Saint- Jean, à la moitié de la
distance qui séparait la chambre de la cible de sa
première porte. « Ghesien... zeker muer staende
tusschen denaudenhovevan Sente- Jooris ent'huus
van meester Dominicus Everaert, ter begheerte
ende vervolghe van den zelven Mter Dominicus,
hebbene neffens de aude poorte ende vutganck noch
een poorte ten halve van de doelhuuse ende aude
1 Registre des actes et contrats de la Keure, 1386-1387, 54v.
10
— 138 —
poorte. » La confrérie accorde son consentement à
la condition que si dans l'avenir elle y trouve
quelque inconvénient, elle pourra faire boucher la
porte sans que lui, Dominique Everaert, ou ses
successeurs puissent s'y opposer. « Soo eyst dat
Coninck, Dekens ende proviserers gheconsen-
teert hebben ende consenteeren by desen den
voernoemde M1' Dom . Everaert een uutganck ofte
poorte in den voornoemden muer drye voeten wyt
wesende, met expresse protestatie indien t'voor-
noemde guide hier naermals eenich ghebrech ofte
onghebruuck bevonde anden voorseiden uutganck
ofte poorte, ter beliefte ende begheerte van den
eedt ofte provisereers tselve bevindende, zullen
vermueghen den zelven uitganck ofte poorte weder
omme verbien ende toe doen stoppen zonder dat
hy Everaert ofte zyne naercommers... beledt ofte
upstakele zullen in contrarien vermueghen - te
doen. Waer up tselve gheconsenteert es door den
voornoemden eedt ende anderssins niet \ » La
suscription de l'acte porte : Consent van den uut-
ganck van Mr doct. Everaert int hof.
Cette expression fait voir qu'il ne s'agissait pas
de concéder un passage à travers le local de la
Confrérie, mais seulement d'y donner accès. C'est
celle qui fut toujours employée pour désigner les
issues ou portes des maisons voisines sur la cour
de Saint-Georges. Dans les actes passés par la
confrérie, dans les registres contenant les résolu-
1 Chartrier de la confrérie de Saint-Georges , n° 43, aux Archives
tfe l'État à Gand,
— 139 —
tions prises par le serment ou par la généralité
des membres, dans les actes de mutation des
propriétés riveraines, on ne trouve jamais que la
mention de portes donnant accès dans la cour de
la confrérie de Saint-Georges : poortje commende
in clen hove, uytcommende in V ho f van Sinte-Jooris-
gulde. On ne rencontre l'indication d'un droit de
passage que dans lacté du 14 mars 1458 par lequel
la confrérie vendait à Claes Van der Zickelen la-
maison de groote Loeve qu'elle avait achetée en
1450. Il y est stipulé un droit de passage au
profit de la groote Loeve et de la groote Zichele :
« voort met tween uutganghen ende inganghen
in ende deur tselve scutters hof te beeden henden
uut ende incommende1 .» Mais il est à supposer
que ce n'était que le rétablissement d'un passage
qui avait existé au profit de ces maisons à travers
la cour de l'ancienne Halle par les deux portes aux
extrémités de celle-ci, rue Haut-port et place de la
maison échevinale. Quoi qu'il en soit, le droit de
passage a disparu par l'acquisition nouvelle qu'a
faite la confrérie de la maison de groote Loeve et
son incorporation définitive dans son local.
La jeune confrérie de Saint-Georges n'accordait
non plus que par tolérance à ses voisins l'ouverture
de portes dans leurs propriétés, et seulement
pour leur donner accès à son local. La contestation
qu'elle eut avec l'un d'eux et qui fut tranchée par
une décision des échevins de la Keure du 22 avril
1474, nous le montre. <c Als van den Cornelis van
• ' Actes et contrats. Keure, 1458-59, p. 67l\
— 140 —
den Bossche, dekin van den jonglien guide van
Sinte- Jooris , dede toghen ende segghen voor
scepenen van der Kuere in Gliendt, hoe dat
Denijs vander Saren hadde beghonnen maken een
achterduere, uutcommende intscutters hof vanden
zelven guide, jn een huus dat hij nu nieuwelyncx
heeft ghedaen maken, staende up de plaetse voor
scepenenhuus van der Kuere, begheerende den
zelven Denijs bedwonghen thebbene of te latene
de duere te makene, ghemerct dat tanderen tijden
glieseyt gheiveest heeft ende gheapjpointeert hij scepe-
nen voorn1 dat tzelve guide zoude moghen doen stop>-
pen ende vermaken aile dueren, uutcommende int
zelve scutters hof, omme elken van mesvalle ende
grieve verhoet ende bewaert te zijne, daer toe de
vorn. Denijs dede verandwoorden dat hij also vêle
rechts hadde int tzelve hof te commen uut zijnen
huuse als andere diere inné commen, niet mijn
was te vreden omme dat zijne verchlieden niet
stille staen en zouden, te makene de duere ende
die terstont te stoppene toet ander stont dat
bescheeden ziin zoude int principale, so wast dat
scepenen van der Kuere voornoemt, ghehoort
hebbende de voorn. handelinghe..., appointier-
den dat de voorn. Denijs zal moghen maken de
duere, die hij heeft beghonnen maken, ende die
ghemaect zijnde, dat hij die terstont zal doen
stoppen ende dat die also bliven zal ghestopt toot
anderstont dat tusschen hem lieden bescheede zal
zijn of hij, Denijs, eenich recht heeft eenighe
duere ofte uutganc int vors. hof thebbene ' .»
» Actes et contrats. Keure, 1473-1474, f° 107,
— 141 —
La stipulation de simple tolérance d'accès au
local de la grande confrérie, se retrouve dans
l'acte du 22 octobre 1617, dont nous avons parlé.
« Hedent hebben coninc, heuverdeken ende pro-
viseerclers gheconsenteert ende gheaccordeert,
zo zy doen by dese an Jooris de Jonckere, guide
broeder van desen guide, te maken in den muer
vanden zelven guide eenedeure, omme van d'erfve
van synen huuse an dhalle, te commen ende accès
te nemen zo totten steenput, als up d'erfve vanden
voors. guide te weten in de langhen doelen, mits
by hem Jonckere de zelve deure met al datter
toebehoort doende maeken ende behoorende
sluyten tzynen coste, ooc deselve gliesloten hou-
dende alsmen in de selve doelen zoude moghen
schieten, up peine zoo verre datter eenich onghe-
rief af quame dat wesen soudé tsyn pericle ende
risque, voor welcken voors. uutganc de voorn.
Jonckere in proffyete vanden selven guide belooft
tebetaelen de somme van zesthien ponden grooten
eens... Es voorts expresselick besprocken ende
gheconditionneert zo verre naermaels den eedt
vanden selven guide verstonden de voors. deure te
doen metsen ende den uutganc te benenien, dat zij
tselve sullen vermoghen te doen doene mits tselve
gheschieden theuren coste ende hem Jonckere
alvooren restituerende de voors. zesthien ponden
grooten \ »
Les portes dont la confrérie a, par pure tolé-
* Archives de la confrérie, vol. 1483-1649, f° 22, à la Bibliothèque
de l'Université.
— 142 —
rance, autorisé l'ouverture dans les maisons
riveraines de son local, n'avaient d'autre but que
de donner l'accès de celui-ci aux personnes qui
les habitaient. Elles leur permettaient de venir
assister aux exercices et aux nombreuses fêtes
qui s'y donnaient. On sait quelle importance
avaient autrefois les exercices de tir à l'arbalète,
à l'arc et à l'arquebuse. Un édit du 6 janvier 1606
ordonnait à tous les fonctionnaires publics de la
ville, de se faire inscrire dans l'une des trois
anciennes confréries militaires. Toute la haute
bourgeoisie, faisait partie de la confrérie de Saint-
Georges. Les habitants des maisons voisines en
étaient membres, et les noms de plusieurs d'entre
eux se retrouvent sur les listes des dignitaires de
la société. Dans le local avaient lieu de superbes
fêtes, tantôt à l'occasion de la proclamation du
Roi, et alors on festivait pendant trois jours
consécutifs ; tantôt à celle des concours qui étaient
offerts aux confréries flamandes et étrangères. La
splendeur de ces fêtes leur avait mérité le nom
de landjuioeelen . Elles avaient porté au plus haut
degré la réputation d'opulence et d'urbanité de
l'ancienne et souveraine confrérie de Saint-Georges .
Cette Gilde comptait parmi ses membres presque
tous nos princes et un grand nombre d'illustres
personnages. Charles le Téméraire, Maximilien
d'Autriche, Philippe le Beau, Charles-Quint, Fer-
dinand d'Autriche , Philippe II , les Archiducs Albert
et Isabelle, Guillaume le Taciturne, le Comte d'Eg-
mont, Jacques de Luxembourg, Charles-Alexandre
de Lorraine et beaucoup d'autres encore vinrent
— 143 -
visiter son local, signer ses registres, assister à
ses fêtes ou prendre part à ses exercices. On
conçoit donc que des voisins aient demandé l'au-
torisation d'ouvrir des portes dans leurs maisons,
afin d'avoir accès au local de la confrérie, d'y
venir s'exercer au tir ou assister aux fêtes, et
que pour l'obtenir ils aient consenti à payer une
redevance annuelle. De son côté, la confrérie
faisait aisément des concessions aux proprié-
taires des maisons voisines de son local, soit
pour les engager à s'inscrire parmi ses membres,
soit pour obtenir d'eux des dons mortuaires.
C'est ainsi que nous la voyons, en 1736, consentir
à ne pas réclamer contre un empiétement sur son
terrain commis par Pascal-Bois de Vigne, à la
condition qu'il restât membre de la Gilde et qu'il
maintînt sa donation mortuaire ' .
Les habitants des maisons voisines abusèrent
souvent de l'accès au local qui leur avait été
accordé. Les uns y faisaient pénétrer des animaux
domestiques, les autres y envoyaient jouer leurs
enfants, d'autres encore y faisaient sécher leur
linge ou y déposaient des ustensiles divers. Bien
des personnes aussi profitaient de l'absence de
concierge à la porte de derrière de la confrérie
dans la rue Saint- Jean, pour s'introduire dans le
local, s'y reposer sous les arbres ou s'y livrer à des
jeux. Le concierge était chargé d'empêcher ces
abus. Tous les actes de location de la conciergerie
1 Registre aux Résolutions de la confrérie de Saint-Georges, 173-1
1779 , f° 38, aux archives de l'État à Gand.
— 144 —
lui en faisaient un devoir. Dans les autorisations
d'ouvrir des portes d'accès au local, il était dit
aussi que les voisins devaient tenir leurs portes
fermées, afin que nul ne pût pénétrer dans la cour
et y causer du dommage. Malgré toutes ces sti-
pulations les abus se commettaient, et la confrérie
dut recourir au Magistrat pour y mettre un terme.
Leséchevins, comme tuteurs des confréries, por-
tèrent, le 20 juillet 1538 ' et le 20 novembre
1751 2, des ordonnances qui défendaient aux
voisins et à toute autre personne de commettre
les abus signalés, sous peine d'amende et de
confiscation de leurs effets ou des objets intro-
duits dans le local. Le 28 mars 1773 la confrérie
résolut de tenir fermée la porte de la rue Saint-
Jean, afin que les enfants et les autres personnes ne
puissent s'introduire dans la cour. «Eodemgafden
Deken van desen gilde te kennen dat tôt het uyt-
houden soo van kinderen als andere persoonen
uyt het hof en doelen van desen gilde het absolut
conveniert dat de poorte commende naer den
cant van Sente-Jansstraete salgesloten worden \ »
Et le locataire de la maison à l'extrémité des
cibles près de la salle d'escrime (de schermschollé) ,
fut chargé de l'exécution de cette mesure *.
La confrérie de Saint-Georges cessa d'exister en
1796. Elle fut supprimée en vertu des lois des
1 Chartrier de la confrérie de Saint-Georges, n° 38, aux Archives
de l'État.
2 Registre aux résolutions de la confrérie de 1734 à 1779, f° 140v.
3 Ibid., f° 156v.
* Idem, de 1779 à 1795. f° 38v.
- 145 —
27-28 juillet 1791 et du 24 avril 1793, publiées
en Belgique. Tous ses biens furent vendus comme
biens nationaux. Le local où elle tenait ses
réunions, la cour où elle se livrait aux exercices
du tir et les maisons qu'elle possédait dans la rue
Saint- Jean, furent adjugés en divers lots à des
particuliers. Nous avons vu que le 6 germinal
an V la maison et le terrain situés rue Saint-Jean
à côté de la Halle aux draps, loués alors au sieur
G. De Coninck, ainsi que le souterrain loué au
sieur Laclus, furent adjugés à la demoiselle Marie
Impens, religieuse urbaniste, et que le même jour
la maison située à côté de la précédente et occupée
par le sieur Vlaminck, fut acquise par le sieur
Paulée. Ces deux maisons furent vendues comme
appartenant à la République française et prove-
nant de la ci-devant confrérie de Saint-Georges.
Le 21 pluviôse an VI, la République vendit à
Joseph Vanderlinden et consorts, le restant du
local de la confrérie, c'est-à-dire la maison située
rue Haut-port, les écuries et les remises, la
grande cour et la galerie. Mais les acquéreurs
n'ayant pas acquitté le prix de leur acquisition
et notamment la somme payable en numéraire,
ce dernier lot fut revendu à la folle-enchère le
3 pluviôse an IX, et adjugé au sieur Luc Van Loo
qui déclara command Jean-Baptiste VandenBerghe
et Pierre Dierickx. Peu d'années après la cour
Saint-Georges fut morcelée et vendue par ces der-
niers aux propriétaires des maisons voisines.
Il ne reste aujourd'hui du local de l'ancienne
et souveraine confrérie de Saint-Georges, dont
— 146 —
nous avons décrit l'origine, les développements
et la fin, que le bâtiment sur la rue Haut-port, où
se trouvaient la salle des réunions,. la chapelle et
la conciergerie. A part quelques détails d'orne-
mentation qui ont disparu, et notamment le bel
escalier gothique à double rampe par lequel on
montait à la salle des réunions, ce bâtiment est
resté tel qu'il était en 1477.
Paul Voitueon.
147
A PROPOS D UN RECENT TRAVAIL
SUR
Juste Lipse.
Dans le tome LXIII du Messager, pp. 133 et
suiv., a paru une intéressante étude, intitulée
dans le tiré à part : L'autobiographie de Juste Lipse,
publiée, avec une traduction française et des notes,
par PaulBergmans, docteur en philosophie et lettres
de V Université de Gand.
L'auteur y formule, dans ses notes, quelques
critiques à l'adresse de la Bibliographie Lipsienne,
l'une des monographies de la Bibliotheca Belgica.
Bien qu'il s'agisse de points assez secondaires,
nous croyons devoir donner un mot de réponse.
Nous reproduirons, autant que possible, d'abord
les passages incriminés, puis les observations de
Mr Bergmans, pour passer ensuite à notre réfu-
tation. Le lecteur pourra ainsi se rendre exac-
tement compte de ce qui a été dit départ et d'autre,
et se prononcer en connaissance de cause.
1° La note 39 du travail de Mr B. est conçue
comme suit : « Sur le séjour de Lipse à « Iéna,
— 148 —
« v. Bibliographie Lipsienne, t. I, pp. IV-VII, 250-
« 252 et 484-485 ; t. III, 363-367. Les auteurs de
« la Bibliographie Lipsienne me paraissent avoir
« négligé de relever une lettre de Juste Lipse à
« Abraham Ortelius, datée de février 1592, et
« qui donne des renseignements sur cette période
« obscure et pleine de controverses, de sa bio-
ce graphie :
(Suit la lettre in extenso).
La portée de cette observation nous échappe
absolument. Nous avons utilisé, pour ne pas dire
traduit et incorporé, la lettre en question, préci-
sément au premier endroit signalé plus haut (t. I,
pp. IV-VII). Il y a évidemment malentendu;
inutile d'insister \
Dans la description du premier recueil des
épîtres de Lipse, t. I, pp. 253 et 254, nous disons,
en analysant les lettres XL et XLV : « D'après
Eloy {Dictionnaire historique de la médecine, t. II,
p. 352), « on tâcha en vain d'attirer Victor
Ghiselin dans V Université de Leyde pour y en-
c seigner la médecine, et quoiquon lui offrît des
( appointements considérables pour rengager à s'y
( rendre, il préféra daller à Berg-Saint-Winoc,
c près de Dunkerque, où il remplit la charge de
Médecin pensionné ». Un passage de la même
c lettre [XL] à Lernutius nous fait croire au
contraire que Ghiselin a sollicité une place de
professeur à Leiden, mais que les démarches
1 Les renseignements empruntés à cette lettre occupent 5 lignes
de la p. IV, 12 de la p. V, et 7 de la p. VI.
— 149 —
faites en sa faveur ont échoué : ...De Giselini re,
omnia hactenus nequidquam, & nonnihil turbel-
larum inter Magistralum & Curatores, occasione
professoris cujusdam admissi Senatu inconsidlo...
Au surplus, dans la lettre XLV, adressée, en
date du 1er décembre 1583, à Ghiselin lui-même,
Lipse nous semble exposer les difficultés que
rencontre cette candidature : Fidem tamen
libero : & scribam ea quae ad causam tuam per-
tinent, etsi non libenter. * * diem unum Me fuit,
ego cum Mo de Victore meo, ut debui, amicè &
fortiter. Nihil peregi. Tricari Me. velle non
posse, inopiam œrarii caussa?H : & plura tegi-
menta, quœ huiusmodi mimis nunquam desunt.
* * item egit, effectu pari, nec aliud, ad extremum
quant illam de Gallo cantilenam rettulit, & medico
aidœ... Meam sententiam, contra animi mei sen-
tentiam non celo : quœ est, Nihil mouere. Suspensa
enim hîc omnia & suspecta ... »
M1' B. fait observer à ce sujet 4 : « En 1583,
Lipse fit des démarches pour faire donner à
son ami une chaire de médecine à l'université
de Leyde; mais il ne put y parvenir. H écrit à
Ghiselin en janvier 1584 : In negotio tuo, mi
Gizeline, vere & ex animo loquor, torqueor pro
uno et summo amico non posse hoc me ? Frustra
enim hactenus omnes molitiones, quamquam et
Almondium oppugnari jussimus per Grotium,
aliosque amicos... Il lui promet cependant de
continuer ses efforts : nec tamen cessamus, aut
1 P> 332 du Messager; p. 46 du tiré à part,
— 150 —
cessabimus; mais il est tellement persuadé de
leur inutilité, qu'il entreprend de consoler Ghi-
selin en lui faisant voir que la position de pro-
fesseur à Leyde n'est pas aussi brillante qu'elle
( le paraît : nec aurum utique putes esse quod
splendet. Sunt et nobis nostrœ curœ, et metus :
graviores fartasse, quo tardiores ». (Burman,
sylloge, t. I, ep. 117). « Les auteurs de la Biblio-
graphie Lipjsienne n'ont probablement pas re-
marqué cette lettre, car elle renverse ce qu'ils
( disent au sujet de cet incident (t. I, pp. 253-
254) ».
o D'après Eloy, on tâcha en vain d'attirer Victor
Ghiselin dans l'Université de Leyde pour y en-
seigner la Médecine. Quoiqu'on lui offrit des
appointements considérables pour l'engager à s'y
rendre, il préféra daller à Berg-Sainl-Winoc,
près de Dunkerque, où il remplit la charge de
Médecin pensionné » . {Dictionnaire historique
de la médecine, t. II, p. 352). Ajoutons que
Paquot est de cet avis, et semble mettre le refus
de Ghiselin sur le compte de sa fidélité à la
religion catholique (t. II, p. 132). Or une lettre
de Lipse à Lernutius analysée dans la Biblio-
graphie Lipsienne (t. I, pp. 253-254) fait croire
au contraire que Ghiselin a sollicité une place
de professeur à Leyde, et * que les démarches
faites en sa faveur ont échoué {Cent. I Miscell.,
ep. 40). Cf. Cent. I Miscell., ep. 45) ».
1 C'est nous qui soulignons, pour avoir l'occasion de renvoyer
à notre mais.
- 151 -
« La lettre reproduite par Burman, et que j'ai
« citée plus haut, me paraît prouver seulement
« que Lipse a fait des démarches en faveur de
« Ghiselin ; une autre lettre, non citée dans la
« Bibliographie Lipsienne, va nous montrer que
« Lipse les a faites spontanément : Giselini nostri
« negotium, écrit-il à Jean Douza, merito nos
« exercet. Cogitavi hoc nocte (iitcumque voluntas
« aliorum sit) retinendum eum,jam volentem, idque
« vel privatis stipendiis amicorum { . (Décades XTIX
« ad Douzam II y ep. 5). Le jam volentem indique
(( clairement que Ghiselin n'a pas accepté immé-
« diatement la proposition que lui faisaient ses
« amis, et, à fortiori, qu'il n'a pas demandé lui-
« même la place dont il s'agit. Il faut remarquer
« d'ailleurs que les auteurs de la Bibliographie
« Lipsienne n'ont exprimé leur opinion que sous
« une forme très réservée ».
Comment n'a-t-on pas vu que la phrase incri-
minée doit être mise en rapport avec ce qui pré-
cède, comme le prouvent les mots au contraire. Le
1 Nous reproduisons la suite de la lettre, comme étant un élément
important dans le débat : « Vbi conl'eremus dignius ? Ego à me dare
annuos possum, arcanè quinquaginta florenos. Spero à Plantino bis
tantum : qui libens id fecerit, ut opéra eius & consilio interdum
utatur. Per Hautenum nostrum si de domo prospici illi possit, res
in vado. Hœc in eventum scribo, si publica nihil expediatur. Quam-
quam omnino spero aliquid à prœsente Busio nos extorquere posse.
Intereà non ipse dimittendus. plura coram post reditum tuum, & cum
ipso Hauteno. Giselino ego nullum hac de re verbum : tecum prius
volui. Non tamen displiceat, si etiam tu cum eo agas ». Sans date,
mais évidemment écrite à Leiden. [Justi Lipsii epistolarum {quœ in
centuriis non extant) décades XHX..., Harderwijk, 1621, 8°.
p. XVII].
— 152 —
sens est celui-ci : Eloy prétend que Ghiselin refusa
une chaire et de gros appointements. Voici un
passage compromettant pour cette assertion, un
passage qui nous fait croire au contraire que
Ghiselin a sollicité une place, mais qu'il a subi
un échec.
Le verbe a sollicité, sans déterminatif, n'en
excluait aucun dans notre esprit, et pouvait,
d'après les nécessités, être complété par les mots :
avec acharnement, mollement, malgré soi à t instiga-
tion de ses amis, par V intermédiaire de ses amis, etc.
Le membre de phrase : mais qu'il a subi un échec,
fut remplacé par : mais que les démarches faites en
sa faveur ont échoué, paroles qui nous furent sug-
gérées par le omnia nequidquam . . . émané d'un
ami établi à Leiden même. Enfin les mots si
réservés : Le passage... nous fait croire, tenaient
compte de la possibilité d'un revirement ultérieur,
qui aurait amené la situation dépeinte par Eloy.
Monsieur Bergmans tranchant le lien qui unit
la phrase d'Eloy à la nôtre, considère celle-ci
isolément et semble croire que nous y avons établi
la situation respective de Ghiselin et de ses amis
dans cette affaire, que nous avons voulu dire :
Ghiselin conçut l'idée de solliciter une chaire,
Lipse ne fit pas spontanément ses démarches
mais à la prière de son ami, Ghiselin enfin de-
manda lui-même la place. — Telle n'a pas été
notre intention, et pour trouver tout cela dans
nos paroles, il faut un effort beaucoup plus consi-
dérable que pour comprendre ce que nous avons
voulu dire. Notre but unique était de montrer que
- 153 —
le renseignement d'Eloy était suspect. L'examen
détaillé du cas de Ghiselin ne nous regardait pas
pour le moment; il devait être réservé pour un
autre article delà Bibliotheca Belgica : la biographie
et la bibliographie de Ghiselin même. La preuve,
c'est que, pour justifier l'opinion qu'on nous prête,
nous n'avons tiré aucun parti de la lettre XLV,
beaucoup plus claire et beaucoup plus explicite.
La preuve encore c'est que nous n'avons pas
utilisé les lettres signalées par M1' B., lesquelles
font partie d'un recueil que nous avons constam-
ment employé dans le cours de notre travail.
Après ces observations préliminaires examinons
les arguments invoqués contre nous. D'après
M1' B. la première lettre qu'il reproduit renver-
serait ce que nous avons dit. Prenons que nous
ayons affirmé, sans aucune réserve, mais aussi
sans aucun commentaire : a Ghiselin a sollicité
une place à Leiden, mais les démarches faites
en sa faveur ont échoué ». Supposons même
pour un instant que nous ayons dit : « Ghiselin
a demandé lui-même une place, mais... » Par-
courons la lettre. Lipse y déplore son impuissance
à faire ce qu'il voudrait pour son ami le plus
intime. Toutes ses tentatives ont été vaines. Il
continuera cependant ses efforts, « mais il est
tellement persuadé de leur inutilité, qu'il entre-
prend cle consoler Ghiselin en lui faisant voir
que la position de professeur à Leyde n'est pas
aussi brillante qu'elle le paraît ». Y a-t-il dans
tout cela un mot qui démontre que Ghiselin n'a
pas sollicité lui-même la place, ou que les dé-
il
— 154 —
marches faites en sa faveur ont réussi ? Personne
n'oserait le soutenir. Mais alors tout ce que nous
avons avancé, si téméraire que ce soit, reste
debout et rien n'est renversé.
On pourrait nous objecter que le terme ren-
verser dépasse l'idée de M1' B., qui voulait sim-
plement dire : « Ma lettre me paraît prouver
seulement que Lipse a fait des démarches en faveur
de Ghiselin ». Cet argument n'a pas plus de valeur,
car le peu que prouve cette lettre confirme une
partie de ce que nous avons prétendu, et ce
qu'elle ne prouve pas ne saurait être invoqué
contre nous.
On pourrait encore nous répondre que les mots
entre guillemets ne sont pas directement dirigés
contre nous; qu'ils forment une simple transition
à la seconde lettre, où M1' B. croit trouver la
preuve que « Ghiselin n'a pas demandé lui-même
la place ». Aussi nous n'insistons pas, et nous
passons à la nouvelle épître.
« Le jam volentem, dit M. B., indique claire-
ment que Ghiselin n'a pas accepté immédiatement
la proposition que lui faisaient ses amis ». Par-
faitement, mais la conclusion qu'il en tire est
fausse. Une fois la proposition de Lipse acceptée,
Ghiselin ne devait pas nécessairement s'abstenir.
Il pouvait s'associer aux efforts de son patron,
avec une extrême mollesse ou avec une extrême
ardeur, d'après son tempérament. Qu'on n'oublie
pas que Ghiselin était à Leiden à l'époque de la
rédaction de cette lettre, et que Lipse (évi-
demment après l'avoir gagné à ses idées) a fait
— 155 —
des démarches restées infructueuses, à preuve les
mots utcunque voluntas aliorum sit, opposés au
fameux jam volentem. Supposer que Ghiselin, étant
à Leiden, n'a pas bougé, serait-ce plus admissible
que de croire qu'il fut présenté comme candidat
au moins à quelques-uns de ceux dont dépendait
la nomination ? Il fut certainement en rapport
avec Jean Dousa, un des trois curateurs de l'Uni-
versité. Est-ce téméraire de supposer qu'au moins
en face de celui-là, il s'est conduit en candidat ?
Mais Douza même n'est-il pas précisément un de
ce.ux qui ont inventé Ghiselin ? Pour toute réponse
nous renvoyons à deux lettres de Lipse à Ghiselin,
écrites après le séjour de celui-ci à Leiden. La
première, citée partiellement par Mr B., dit entre
autres : In negotio tuo, mi Gizeline, torqueor pro
uno & summo amico non posse hoc me ? Frustra
enim hactenus omîtes molitiones, quanquam & Almon-
dium [curatorem] oppugnari jussimus per Grotium,
aliosque amicos... Douza noster non dubie vult : sed
ut status est, sine nervis. Dans la seconde ' on lit :
De re tua quid etiam nunc scribam ? omnia circa te
tarda, non solum ipse. Nunquam vidi navem magis
obhaerentem Dousiano huicvado. Nos conamur remis
& vêtis, frustra retinet nos una Ma torpédo.
3° Dans le troisième volume de notre Biblio-
graphie Lipsienne, article : Aubert Mir^eus, vita...
Justi Lipsii..., Anvers, 1609, p. 337, nous avons
émis l'appréciation suivante : « La Vita a pour
« base l'autobiographie de Lipse adressée sous
1 Burman, Sylloge, I, p. 152,
— 156 -
forme de lettre à Jean Woverius, le jour des
cal. d'octobre 1600. ...Le Mire a conservé
autant que possible le texte littéral de la lettre,
se bornant à introduire de loin en loin quelques
réflexions de son crû ou des renseignements
supplémentaires empruntés à la correspondance
ou aux dédicaces de Lipse. Il en convient du
reste lui-même à la fin de son travail : Habes,
mi Lector... En agissant ainsi, il croyait bien
faire, mais à tort : il ne nous a fourni qu'une
biographie médiocre, où la critique historique
fait complètement défaut. F. de Reiffenberg,
pour la publication de son mémoire couronné,
a suivi un système analogue. Il a fait sien une
grande partie du texte de Le Mire, seulement
à l'encontre de ce dernier, il a dissimulé la
source ».
Mr B. (Introduction, p. 7) s'énonce au sujet de
l'autobiographie comme suit : « Les deux auteurs
(Mirseus et de Reiffenberg) ont suivi pas à pas
le texte de l'épître, en se bornant à le mettre à
la troisième personne et à intercaler quelques
détails supplémentaires ou quelques réflexions.
Mirseus en convient d'ailleurs lui-même, à la
fin de son travail : Habes , mi lector. . . De Reiffen-
berg aussi, quoi qu'en disent les auteurs de
la Bibliographie Lïpsienne, a cité la source à
laquelle il puisait » .
Notre pensée, dans notre dernière phrase, était
naturellement : « De Reiffenberg a dissimulé la
source, la provenance du texte qu'il s'est appro-
prié ». M1' B. a compris comme si nous avions
— 157 —
dit : De Reiffenberg n'a pas cité une seule fois la
Vita de Mirreus, ni dans le cours de la biographie
ni dans les notes. A notre avis, de Reiffenberg,
du moment qu'il adoptait le procédé de Mirseus,
devait faire le même aveu que lui. En ne le faisant
pas, il commit un plagiat, et c'est ce que nous
avons voulu faire entendre d'une façon discrète.
Monsieur Bergmans est moins sévère sur ce cha-
pitre. Nous craignons bien qu'en nous critiquant,
il n'ait l'air d'acquitter le coupable.
Les auteurs de la Bibliotheca Belgica.
158
LES
SEIGNEURIES DU PAYS DE MALINES
KEERBERGEN
ET
SES SEIGNEURS'.
Le 22 mai 1640, comparurent devant le notaire
Léonard van Lille, à Bruxelles, illustres, nobles et
généreuses personnes, Agathe de Merode, veuve de
Charles de Berlo, comte d'Hozémont, baron de
Berlo et de Sclessin, seigneur de Wuestwezel,
Oignies, Haut-Pré, avoué d'Ougrée ; son fils Ernest,
seigneur de Keerbergen, Bollo etc.; l'oncle de
celui-ci, Guillaume, baron de Berlo, capitaine au
service de Sa Majesté et commandant du fort de
Tolhuijs (à Schelle), d'une part; et Guillelmine du
Pin, veuve de Guillaume d'Oyenbrugge de Duras,
chevalier, baron de Meldert etc., et sa fille Anne-
Marie d'autre part, pour signer un contrat de ma-
riage entre Ernest de Berlo et Anne Marie d'Oyen-
brugge de Duras précités. Le futur apporte ses
seigneuries, la moitié du tonlieu de Malines, la
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., lre liv. 1890, p. 40.
— 159 —
rente due par la corporation des brasseurs de cette
ville, sa cour censale de Rymenam »; la cour cen-
sale de Waijenesse; un sixième des dîmes deDuffel
(appartenant par moitié au baron de Duffel) ; après
la mort de sa mère, il devra recevoir encore la
seigneurie d'Oignies, une cour censale et féodale
avec la rescherve en la Meuse, un moulin, 100 bon-
niers de terre, 80 bonniers de bois et le dixiesme
de terrage de Soille avec foule expectation des succes-
sions apparentes de ses oncles, tant paternels que
maternels. Tous ces biens, qu'il y ait, ou non, des
enfants, appartiendront, après la mort d'Ernest,
en nu-propriété à la future épouse, qui aura im-
médiatement la libre disposition des apports.
Guillaume de Berlo promet de laisser à son neveu,
après sa mort et après celle de sa femme, Susanne
Marie van Grindertalen, dans le cas où ils n'auront
pas d'enfants, sa terre de Papenhove2. L'apport de
la fiancée consiste en un capital de dix mille flo-
rins en espèces, destiné à son installation, et en
une rente de six mille florins.
Sa mère lui cède, en outre, sous réserve d'usu-
fruit, tous ces droits sur la terre souveraine des
Hayons, Belaux, Dehan et sur la terre et seigneurie
du Bancq Guillaulme 3.
1 Ces trois dernières propriétés appartenaient par indivis à Ernest
et au baron de Duffel, qui fut alors Florent de Merode.
2 Cette propriété dite « 't hof van Berlo, » d'une étendue d'en-
viron 49 bonniers, relevait de la seigneurie de Stein. Plus tard, elle
appartenait aux jésuites de Rureraonde et, à la fin du dix-huitième
siècle, au couvent de Susteren (Publ. de la Société Hist. et Archéol.
de Limbourg, XX).
3 Ce contrat est daté « Ter Caraere, 22 mai 1640. »
— 160 —
L'avocat van den Berghe, gérant dn baron
Ernest de Berlo, fit enregistrer ce contrat de
mariage à la cour féodale de Malines, le 4 juil-
let 1640 (M. 7, p. 207).
En vertu d'une procuration générale de son
mari ■ , Marie Anne d'Oyenbrugge de Duras, fit
relever, le 12 octobre 1641, par suite de la mort
d'Agathe de Merode (f 10 août), pour elle-même
et pour son époux, les biens de Keerbergen. Robert
Foucquier, avocat au grand conseil de Malines,
prêta le serment. Cet acte fut ratifié par les époux
le même jour (M. 8, p. 3).
Ernest de Berlo mourut le 23 janvier 1646. Il
est dit avoir été tué dans un duel et fut enterré
dans l'église de DufFel sous un beau monument,
orné des portraits en haut relief des deux époux.
On y voit, au pied de la statue du chevalier, un
lion, le casque, les gantelets et, sommé de la cou-
ronne dite de baron à l'antique, un écu écartelé :
au premier, d'or à deux fasces de gueules (Berlo) ;
au deuxième, fascé d'or et de sinople de six pièces
(Oyenbrugge) ; au troisième, de sable semé de
fleurs de lis d'or (Duras); au quatrième, d'or à
quatre pals de gueules, à la bordure engrêlée
d'azur (Merode).
Voici l'épitaphe et les quartiers placés sur cette
tombe :
« Ci gist noble et illustre S1' Ernest Baron de Berlo S1' de
Keremberghe, d'Oigny etc. vivant cap"e d'une coinpnie de
cuirassiers pour le service de Sa Maté aagé de 38 ans et
1 En date du 8 octobre 1641, passée devant le notaire van Lille.
— 161 -
decedé le 23 de Janvier 1646. Priez Dieu pour son ame. Et
noble et illustre Dame Marie Anne Doienbrug de Duras,
mourut sans hoirs. »
Quartiers
(1) de Berlo.
(2) Cortenbach.
(3) van der Meere.
(4) van der Noot.
(5) Locquenghien.
(6) Nieuwenhoven.
(7) van de Graclit.
(8) de Pamele.
(9) Merode.
(10) Bauw.
(11) de Coustre.
(12) de Brouchove.
(13) Cuelen bourg.
(14) de Brinen.
(15) de Alkmade.
(16) de Swieten '.
Ces 16 quartiers, qui sont ceux de l'époux,
représentent la filiation suivante :
1 Voyez C. G., manuscrit N° 1510; J. le Roy, Marchionatus ;
Aug. van den Eijnde, Inscriptions. (1) écartelé de Berlo et de
Merode; (2) les bandes ; (3) d'azur, au chef d'arg., chargé de trois
pals de gu.; (4) d'or à cinq coquilles de sa. posées en croix ; (5) d'her-
mine au lion de sinople ; (6) d'arg. à la fasce de gu., ace. en chef de
trois merlettes de sa. rangées en fasce; (7) d'arg. au chevron de gu.
ace. de trois merlettes de sa.; (8) écartelé ; aux premier et quatrième,
degu. à l'aigle d'arg.; aux deuxième et troisième, fascé d'or et de gu.
de six pièces; (9) écartelé de Merode et d'Houffalize : burelé d'az. et
d'arg., au lion de gu., cour, d'or, broch. sur le tout, acconvp. en chef
à dextre d'un écus. d'or broche; (10) comme ci-dessus; (11) degu.
au lion d'or ; (12) d'argent, au chef de gueules chargé d'un lion d'arg.,
couronné d'or ; (13) écart.; au premier et quatrième, d'or à trois rocs
d'échiquier (zuilen) degu. ; aux deuxième et troisième, d'arg. au lion
de sa.; (14) la licorne, mais passante; (15) écartelé, dans chaque
quartier un lion ; Alkmade (d'arg. au lion de sa.) écartelé de Coulster,
ou bien l'inverse; (16) de gueules à trois violons renversés d'argent
(Swieten); en cœur un écusson de... à trois chevrons (probablement
Egmont : chevronné d'or et de gueules, maison à laquelle appartenait
la mère de Jossine de Swieten). D'Oyenbrugge de Duras porte : écar-
telé d'Oyenbrugge (qui est : fascé d'or et de sinople) et de Duras.
— 162 —
9 es
o i; ■
,, «•; e « s « « ««
gna-g «
c ^ -a oj
a >, w-o
"* SLS | 5
• - o 2? =
° p s «
— » a a ïs-
g, « Jï &- "* o
S-SS-8.8*
« .i
g- «H
S «^
£J
= .A -i. « i
> j- ca — -D 3
» "- . ,„ K
- t. g «j ja c
.— à ■- ~— ■
^ «S a
— t_ > 3 ., es
C E 43 c Jï <u
■a ~ EL <u ""s
«J --i.
S |
43 J=
-s bB
43 4)
11
O
—' O
-a «^
P « u
4) ca
•43 _43
<ès ~
. X •
M 3 43
Ci -_ -"
-3 c«
_ a
43 43 Ô
|'g 43
' ■ c 'es
f) «3W
> _
43
° P
43
43 „
i -•* 43
— ca «5
j_ a • -
•* CO "43
<3 r- £_<
m 43 c
— "3 43
43 '
S l
s §
43 43 3
T3 a
s»
_43 43 £
2 43 '"
- 43
3 O
43 „
„■ 4-
i « u
a; 43 «5
O
g*-
43
.^B. O. 43 «g
IN '3 S 4.'
.. - es 'r; 43 -7.
— 9 .. 43 eu eu £ «33
*> •■ ^-£j3-CtS]43 „
a bj=43 .2 3 43 w -a bs
^•n Ï1 t- 5; fc,
~ 45 S JB t/2 «J u a ca 4)
ÏJliC •• 43 -j 73 -*
43
•a
o g o-
2 O- » 43
43
O
0 05
l 4} 1 +- *
£ « 43
53 « - S
N- 3X <— «5
3 _C
43
—
es
O
635"
s- - ï g «
r" " ; o 3 Si ^ S
43 43 Q ±2 43
i — es ?__ •_, o _s
-ëgjs
"•S -8
1 eu 1
3-5 a
O 43
o ,. 73
3 a
Jô 3 SoiSJS'B^TJ 3 54-S
43
'S 'p « « S -a c> -
v a 43
4^ 43
.S 43
43 _* .,3
-3 u 43
O G3 — 1
- -
.2 J p" «
■£,« 43 £
~ «« — T
43 43 g X
3 "3 43 3
-~-354r
a oa
43
o
o
43
—
SB t
'53 i
bB 13
es «
43 43
3 ~
es ^
S es
es O S (N
?■ U es rt
B-O „" «3
* .^ T1. —t 43
C3 O
fe o
o a 43 •_
in
43 CA
> — 4;
2 p^
fe^
CA
43
43 >■
3
43
° "O P 43
S >
es —
3 -y "™
P 3 * '—
o o'râ ® .
-O -2 ^3 S
S
es
>
43
C
c
"* 43 ' S-
3 43 „ . -g es - ..
- P 43 43 „ c
43 43 43 43
^ — ' — — T1
43
S U h 43
6B > 43 ^ „ w
4/ -*- —
3 ~
43 es
S" 3
/ —
a soe-o u
43 is
^- <**
~ 4/
es es
•es
3 ._ TJ<
43 3 in ._
43 es
S 3^ -
-3 es
" 3 3
es o
>• o ■
43 cS
CA
O
43
. 43
•43
O S OT - ■
J3 -43 in s o
i-t-S -1 43 —
es *^ aj
£^ S os
43 ~ .S « -T •' 43 'S:-'
S c S
43 -?
■a S-o
• tyj,
o « 43.2?t;
03
43
. a « » « «
5
43
43
' ' fc- 4) .' 43 43 43
43 'o-- j- — «5"3 "3 P .
P^O-43- « ^
2 -a, z ara w 43^3 5»
a c jj-o c__« 43 .a a
s 53-0 Sa ~ .v
~ .x — .r_c — 1 3 ca —
s 2 j.so
3 K -C i-n — p* — M * .
ï = XOC0g3^2
"3 W-< T3 85 Cn,Q 43
•£ 43 S
^3 8
~ X !
Ï^^
F ■ - «
EtB-^ —
»^t
0 a"
— ^- 3
t, S 0
43 -JZ i
«-0
-o^ 43
t-
a -c
in
'5 0-43
—
> -r 3
- s 0
S
PS es >
4) 4) t. ,.
CA — 3 —
K a 4) -s
43 43 £ u
I ='• —
es | ^2
> es — .-
3 3 "3 3
S
- s
it 3
a3 43
73 =
o -
es .tj
"3 3
es c_
4. -3
3 "'
là ,s
SB—
3 —
3 >
C" es
- «
43 .,
"3 eu
43 S
s a
3 4.
es -3
4J 3
CA ""Cf
ca eo ■
43 00 I*1
a . o
..05 -
3 _ P -es
(A —
u 3 •£
.3 — n
-E-"S a
a 3 _
es rK -
O
œ eu w
— es
es1 — ^
£ oW>
3 43 «5
3^-3 -~
3 4)
'i.-S
43 _-;
43 '^
* "S ™-
-3 Oi
43 ^00
■fl es "^
-la
3 3 43
O 43 .
etf
CA
43
05
a; in
-3 *~"
-^ in
43
- — '
P —
O
m
3 .• =-
4. "O .
43
05
43 '
-3
3
=s.;
rn c
.-3
43'
43
J3 -43
^3 ca
43
■o
o
43
S
43
-o
43
!=B
-s!
73
3
O
3.
-43
S
43
bB
43
43
43
43
-3
3
43
S
6B
- S
O
S
•43
O
F2
-a
43
a
o
o
43
05
43
T3
43
S
3
es
-Q
3
43
a
SB
43
05
43
-3
^3
t. 43 • -1
3 bB" 3
* S 3rJ
** /i "O .
o'fl r-43
~ ca £ ?
tu 4. —
4
b 3 . —
as o"~ 3
.us:
3 a N -
g^
C S CA 4, "-,
3 ' c 3 15° O
i" a -Si
"E 43 P 'es 51
«• -3 "3 .3 _
■ 05 CA - -
^ 43 g JS - £
^ « a3 c'
' S" 333T
.£ s ° î-3 fi
43 e o *tpS
eu s. 43 •- -a -
O g 43 - C fi
a 475-0 ° 43 •-
— - ca "O 43 43
î5 il ^ 3 —
.3 r 3 43 .- u.
■o ^ >.T3 -a --
«3i~fe X--
ào'^s a
•- — 43 -_ ■- —
s- - es Q-
S a 43 êô r.3
es g -a g.ï-S
^ - es _ .
ca 3
c
- « a .
H V S £ °« B
"5C'.OPC
r> o esCi !"
.3 es 3 rt —
•* ^ ■« S '-n t
== §2 -a .£
o ^ s ,- p r
o 43 £ S p e-.
43.S r-a 3 e
■a-S-3 g4 S
.2 " ° S o I
|Ç'g « 43 -'•5
3 § e-a « =
a h g . 3 e
■2j .- 5 «s:
.P t- 3-4.' ;3.
&-Sag>c3l
^^3S-S4'=
w H- ca ^ es
Sl <N "3 ca - ^
ÏT 2 es -43 /
O 43 fi i. - 4
> j C 3 a -
43 Q eS =
^ <S» -ri CA CA
r* ai « c
-a "a 43 eu
— 163 —
eu
49
—
a
«
eB
"d
c
»
H
C
4
- G eu ce — _s ?• r^
G ,. 3 .3 *■ ■
1.1 1:2.2.9?
g S eu^S c
A ? u; -d >• "O s
g si
a. .
§2
- 0) — S s
03 ~
-o
> s
4 -2
E 3
43 4) .' _1
43
,. 43 "O —
te 9 -3 •-
o « „, S « g
0) ï © -'
c
E
«<^ -
43 .e; Ë
"O fcL. Ç
.■S — 3 u « c
•J B T! ^ ï - O
C ^i ** .1 nï fl
_ eu eu
-a ~
ce **
eu 4>
"d "O
2 S
5 ë
«"2
•33 S
w j
m 43
~ -d
<- 3
2 o -
-2=d "
3
O 43
u s
es
-3
C es
es E
> 5
-a:
|<
« "3
< 2
— 6s
« eu
o
o Z
"3 N
3 :s>
© 3
S a
03 eu
.S, ï
OS «J
eu .-
t- "d S
4) 3 £
2 O es
4)
-O
eu
G .
G C
es 03
—s eu
i eu ' *
2 ■ 5 ^ .M «
■ f- g „ Eh
A- ^
= -a •£
tus eu S eu
es j3
3 o
3
O 43
-S =
C c
eu .=,
6B~
C OS
o eu .
03 ^ eu
S 2"°
- B 3
ja ja O — "O "r s
o
£ 43 43.*
.2 C > «->
& g O O
OS ^s o 3 eu
o t- o >
« oa — - o
03 43.
-m — .E — — 2 4) — o 4)
C 3 » O - — ■ 3 -eu tC ~© '3
s- eu
3
O
3
O
e
- eu
eu 4)
-3 î
= P
(S "O
4}
-» 2
-eu
-eu
4)
o •-
■= 43 »- ï
o
« 3
O
S ® - '
es ^j
c c :
N
S -
> — i eu es g eu
03 T3 43— 2 « -S
- -, «J — C "3 "S 43 4,
-- S » , 43 eu CS « g
>■ te "d H — O t- i- — . C
3
O
^
■ ^
c
c
eu
-3
?>
o
3
—
es
eu
9-
eu
=
PQ
x
4)
—
es
43
C
3
rt
PQ
43 ~
si'
es -
— 33-03
3 * O "S
43
—
sa
43
-43
3
3
>
es
eu
O
Si
-
43
C3J5
aT
—
é
c
43
L-
I
—
a;
^
r
•_
4i
a3
es
—
~
O. bx
c
es
_
43
te
-
, —
eu
— t
m
3
O
-M
irs
o
43
4>'
-o
3
O
2
43
O
f.
33
33
S
Q.
O
es
—
ta
u.
3
O
-3
£
4!
3
-,;
43
C eu
43 es,
sas
t- to
43 <J
-O S
II
„t3
w te
3 te
eu eu
= S
HS'Ô
43 S
s
i-j
o
2
ES
-43
■ —
S)
tn
O
a
en
te
'—
eu
—
43
S
"G
ce
O
u
O
V
_ç
e-
es
M
-
O
^
er"
00
43
—
ce
-
4^
43
u
43
43
S-
—
es
es
eu
__ l
Ï3
i
3
= 3
2. 43
- "5
S
eS S
.E
eu
>
eu 'o
3
"3 C
-c
es
eu
^^=
3
43 y
p
es 43
00
-C 3
43
O g"
.-o
43 ^
t-
-d —
3
3
43
33 —
C
2 •■
_Ùp
£.2
43 C3
'S
te
1— es
•■
. M>
43
^3
^<
3
t.
o-d
33
43
e Me
sœur
9534)
"d
-0 -i
-d
'43 g „•
■a -9 s
3
es
&bS;
< -
'^3 OS
M 3
-es CC
S 43
. S=-2
' 5 § 1
e r c
~ u .S?
te eu eu
2 . w
S 3 es
■— 1 eu —
a 43
e © S
CC SI 33
e
■§■8 a
eS 2 33
o » 3
=2 S g .
e<s
43
—
es 3-^
jelft
S» :
- eu 3 ~*
er, ^- ^ cc
©S 43 os,
"^ 43"13 -
43-d j, s
«■ 43 S-5
^ E = 2
eu es W22
8 ^ "S •
■H «"'
-- 3 n r~
■%-G S a
7 e-f s
t- rî « s
.2 -f a s^
te — » G
-33^ 33 -C
.' £ C —
£ "S « O
12 43 _Q «M
— 3 .' d
S3 C
•S 43
33
-d
S
te
43
43
es in es w
-O t~ 4) ■-
ne eu
■d -h
ce — '
S <3 G
'— 3 G
w es
es
SB
2 S
— <^ — «"
-CU 3 4-
_ *> . 3 "3
^> en
usa
31
es J2
— 164 -
Si l'on ne voit pas sur le monument les quar-
tiers de la dame, c'est que celle-ci n'en possédait
pas, sa mère Guillelmine du Pin étant de basse
extraction. Guillaume d'Oyenbrugge de Duras
(f 25 avril 1625), baron de Meldert, seigneur de
Vrolinghen, Bombroeck, Roost, des Hayons (près
de Bouillon), haut-justicier d'un tiers de la ville
d'Ypres , gouverneur de Bouillon , membre du
conseil privé et chambellan de Ferdinand de
Bavière, prince-évêque de Liège, avait épousé,
après la mort de sa femme, Anne de Corswarem,
chanoinesse de Maubeuge, la femme de chambre
de celle-ci, Guillelmine du Pin. C'est de cette
seconde alliauce qu'est issue la femme d'Ernest de
Berlo. Elle était petite-fille de Guillaume d'Oyen-
brugge-Meldert, seigneur de Vrolinghen, Bom-
broeck etc., gouverneur d'Huy, mayeur régnant
de Liège, et d'Antoinette van der Gracht '.
Plus tard, la famille chercha à dissimuler la
mésalliance avec Guillelmine du Pin, en recourant
à un moyen usité fréquemment en pareil cas : on
attribuait aux enfants de celle-ci, dans les généa-
logies respectives, différentes autres mères.
Par suite de la mort de son époux, Marie Anne
d'Oyenbrugge de Duras, fit relever, le 12 mai 1646,
la seigneurie de Keerbergen, avec ses ap- et dépen-
dances, par Jérôme del Olmo y Felices 2, major-
1 Comparez : A. Wauters, la Belgique ancienne et moderne.
'2 Par la mort de celui-ci, Jean Tavertiiers, drossard de Keer-
bergen, fut inscrit comme homme servant de ce fief, le 13 juillet
— 165 —
dôme de l'hospice royal de Malines (M. 8, p. 159).
Ernest de Berlo avait été mauvais ménager.
Quoique les époux possédassent de beaux revenus,
il laissa, après cinq années et demie de mariage,
sa jeune femme accablée de dettes.
Marie van der Piet, veuve d'Adrien Bosschaert,
à laquelle Ernest et sa femme avaient constitué
une rente de 1 50 florins sur la seigneurie de Keer-
bergen, avait réclamé en vain les arrérages de
plusieurs années. Le 2 octobre 1C43, la cour féo-
dale attribua à cette dame les revenus de Keerber-
gen jusqu'au moment où elle serait rentrée dans
son capital, avec les intérêts. La veuve de Guil-
laume, baron de Berlo, avait prêté aux époux la
somme de 23,300 florins. Par acte du 26 octobre
1644, passé devant le notaire Antoine Janssens,
on lui avait engagé la seigneurie de Keerbergen.
Cette dette fut amortie aussitôt la mort d'Ernest,
et le 12 février 1646, la cour décréta la cassation
de l'hypothèque. Un procès surgi avec l'apothicaire
de Moor, au sujet de sa rente, fut terminé par un
accord. Bientôt après, Marie Anne satisfit égale-
ment Marie van der Piet ' .
Le 8 février de la même année, elle promit,
devant le notaire Honoré van den Eijnde, à
Bruxelles, ainsi qu'à divers autres créanciers de
les indemniser dans le courant des deux premières
1669. Le 16 décembre 1688, Marie Anne d'O. de D. fit faire un
nouveau relief. Le 9 juillet 1695, Egide de Deurne, secrétaire de
Keerbergen, renouvela le serment de fidélité et le 15 juin 1697 Pierre
Hullet, drossard de Keerbergen, se constitua, homme servant.
1 M. 8, fos 52, 127, 160 et 166; M. 10, f» 189.
— 166 —
années, et leur engagea en commun sa seigneurie
de Keerbergen.
Ces créanciers étaient :
Jean de Tiras, écuyer, seigneur de Nor-
derwijk *, réclamant fl. 600 — sols
Henri le Mire, drapier, réclamant . . . » 1150 —
Jean van Baigem (sic ! lisez Beughem) °L,
marchand de draps de soie, réclamant
Augustin van Hamme, boucher, »
Maître Elie de Behault 3, »
Nicolas de Haze, marchand de bois, »
Jean le Roy, agent des héritiers de feu
maître Sébastien van Leeuw, réclamant
Sara Languebert, »
Jacques de Foccant, »
François Flavier, mercier, »
Total » 7827 18
« le tout a raison de louaige de maison, marchan-
dise, despens de bouche, de bois et façon d'habits
1 Jean de Tiras avait épousé Marguerite de Busleijden, qui était
dame de Nordenvijk, par relief du 2 janvier 1623 (M. 5, p. 127). 11
était capitaine et fut créé chevalier par lettres patentes du roi Phi-
lippe de Castille, du 5 juillet 1652 (C. G. 639, p. 169).
2 Le 3 décembre 1653, Jean van Beughem, seigneur d'Ottignies et
d'Houthem, et Augustin van Hamme, boucher, reconnurent, devant
le notaire Huart, à Bruxelles, être indemnisés du chef de leurs
créances. Ils firent casser l'hypothèque sur Keerbergen (M. 10, p. 180).
3 Elie de Behault semble appartenir à la famille de Behault, de
Mons, mais jusqu'à présent, on ignore sa filiation. Voyez Aemand de
Behault, Génèal. de la famille de Behault, et, du même auteur :
Notice concernant un acte passé le 5 avril 1499 (Ann. du Cercle arch.
de Mons, t. XIX), notice établissant que David de Behault, homme
de fief du prévôt de Mons, possédait la noblesse de race au XV» siècle,
2230
—
443
—
240
—
908
3
831
14
530
—
436
9
458
12
— 167 —
livrées et faicts pour ledict feu Illustre Seigneur
Baron et la dicte Dame sa compaigne constant son
mariage » (M. 10, p. 59).
Le 10 février 1651 , la baronne-douairière de Berlo
constitua à Henri le Mire, receveur de Bruxelles,
et à sa femme Barbe van Caverson, pour un capi-
tal de 2800 florins du Rhin qu'elle leur devait
une rente de 175 florins '. Elle leur assigna en
garantie Keerbergen et la ferme de Papenhove,
au pays d'Outremeuse, comprenant alors environ
60 bonniers de terre. Cette propriété était échue
à la baronne de Berlo, en vertu de la donation de
Guillaume de Berlo, oncle de son mari. Elle l'avait
relevée, le 10 juillet et le 19 décembre 1648,
devant la cour féodale de la baronnie de Stein
(M. 11, p. 121).
Quelques rentes hypothéquées sur Keerbergen,
savoir au profit de l'avocat Gheens, de Jacques le
Mire, de messire Antoine Ferdinand de Brouchoven
et du drossard de Keerbergen, furent remboursées
en 1663. A cette fin, il avait fallu contracter un
emprunt de 18000 florins envers les exécuteurs
testamentaires de feu Jacques Sweerts, somme qui
fut hypothéquée sur Keerbergen, à raison de 6 7*%>
taux admis généralement à cette époque (M. 12,
p. 126 et 133) 2.
1 Cet acte ne fut enregistré à la cour féodale de Malines que le
2 novembre 1658 (M. 11, p. 121).
2 Le 28 février 1648, la baronne de Berlo vendit, devant le notaire
Théodore Pietquin, de Bruxelles, à Antoinette de Hosden, douairière
du chevalier Antoine de Longueval, seigneur de Zetrud,Lumayet<\,
une censé à Meldert, dite « Herlombaerdenhoff. » Elle signa l'acte y
relatif : « Marie Ane Doijenbrughe de Duras barone de Berlo de
Keremberghe. »
— 168 —
En dépit de la renonciation de 1639, Florent
baron de Berlo et de Sclessin, etc. s'était empressé,
peu de temps après la mort de son frère Ernest,
de disputer à la veuve de celui-ci la seigneurie de
Keerbergen, en invoquant les termes du testament
de Jean de Berlo, comte d'Hozémont, du 15 juin
1599. Le 15 novembre 1647, il fit présenter à la
cour féodale de Marines un extrait de ce testament
et un autre de l'acte de partage du 28 février 1639.
Une investiture eut lieu et le fils de Florent,
Guillaume, âgé de 12 ans, fut inscrit comme homme
mortuaire du fief (M. 8, p. 197 et 201). Le procès
prit une tournure défavorable pour Florent. La
sentence de la cour, du 23 mai 1652, en faveur de
sa belle-sœur, fut confirmée en seconde instance,
le 8 novembre de l'année suivante (Procès plaides
devant la cour féod. de Brab. 820-2150).
Quoique les tentatives faites après la mort de la
comtesse d'Hozémont, née d'Argenteau, pour
recouvrer le château de Wayenesse, eussent abouti
à un échec, la famille d'Argenteau n'avait cessé de
regretter la perte de cette belle propriété. Aussitôt
la mort d'Ernest de Berlo, de nouvelles réclama-
tions surgirent, et cette fois avec plus de succès.
Les actes que nous avons pu consulter à ce sujet,
n'établissent pas si la cession eut lieu en vertu d'un
jugement ou en suite d'un arrangement à l'amiable.
Toujours est-il que le 18 septembre 1655, Jean
François d'Argenteau, comte de No ville, vicomte
de Looz, seigneur de Fologne, Braives, Ciplet,
Moumal (fils de Florent et d'Anne de Branden-
bourg, dame de la Grange), et Guillaume, baron
— 169 —
d'Argenteau, seigneur de Dongelberg, Lavoir, du
Ban-de-Sprimont etc. (fils de Jean et de sa seconde
femme Anne Patton), firent le relief de Waijenesse
(M. 10, p. 20). Ils ne conservèrent, toutefois, pas
longtemps ce fief, car, le 27 mars 1659 déjà, il le
transportèrent à messire Pierre Grijph, pour le
pupille de celui-ci, messire Jean Baptiste de Bru-
xelles, vicomte de Dormael, seigneur de Rijmenam
(M. 11, p. 154').
Le 12 janvier 1705, messire Charles de l'Escaille,
seigneur de Marez, avocat au conseil de Brabant,
vendit, en qualité de mandataire de Marie Anne
d'Oyenbrugge de Duras, comtesse deBerlo, devant
le notaire J. Neeffs, à Malines, à Marie de Gortter
(ou de Gorter, Gortere etc.), représentée par Fer-
dinand Hullet, drossard de Keerbergen, les biens
suivants : 1° la seigneurie de Keerbergen ; 2" la
cour féodale de Cruijs, « hebbende eenen schoonen
leenboeck, goedenisse ende erffenisse, grontpro-
ceduren etc. , » avec droit de tenir un mayeur,
des hommes de fief, un grenier et un leenvinder
et comprenant 7 pleins fiefs et 49 menus fiefs
{smalle leenen), d'une étendue totale de 81 bon-
niers et 3 Va journaux ; 3° la cour de tenanciers
{laethof) de Bollo, avec un mayeur, des tenanciers,
un grenier, poïitpenninghen, goeden ende ontgoeden,
groyidproceduren, etc., et 4° la cour {laethof) de
Roosendael, ayant les mêmes prérogatives.
1 Pour la partie moderne de l'histoire de Waijenesse, on pourra
consulter notre notice sur la seigneurie de Rijmenam,
— 170 —
Le prix total de cette vente était de 18702 florins.
L'hypothèque de 18000 florins, appartenant aux
héritiers Sweerts, seule charge grevant les biens,
fut diminuée par un paiement de 4458 florins 2 sols
que de l'Escaille préleva sur le prix de vente.
Comparurent, ensuite, Marie Thérèse Sweerts,
douairière de messire François de Santander —
agissant pour elle-même et pour son frère consan-
guin, mineur, messire Gaspard Alexander Sweerts,
ainsi qu'en qualité de tutrice de messire Frédéric
Albert, fils de Frédéric Sweerts et de Madeleine
de Haeze — Claire Hélène et Susanne Pétronille
Sweerts, qui déclarèrent que Marie de Gortter,
veuve Persoons, leur avait remboursé la somme de
13818 florins 18 sols, représentant le reste de leur
capital, plus les arrérages.
Cet acte fut confirmé par Charles de l'Escaille,
le 4 avril suivant, devant le même notaire, et
enregistré à la cour féodale le surlendemain. L'in-
vestiture de la veuve Persoons eut lieu le même
jour. Ce fut son fils Corneille qui prêta le serment
de fidélité pour elle (M. 18, p. 199).
L'acte de vente précité nous renseigne d'une
façon détaillée les prérogatives et les revenus de
Keerbergen. Outre la haute, moyenne et basse
juridiction, le seigneur possédait le droit de nom-
mer le drossard, le mayeur, le bourgmestre, les
échevins et autres officiers ; de planter des arbres
le long des grands chemins et sur les places vagues,
de chasser, d'avoir des tenderies à perdrix et des
garennes de lapins, de pêcher dans les limites de
la juridiction, dans la Dyle, dans le Moelebeek et
- 171 —
dans le Raem ; ses privilèges comprenaient les
amendes criminelles et civiles, la confiscation des
biens des bâtards ' et des coupables de sortilège,
les biens vacants ou lagans, aubains, mortemains
ou à faute d'héritiers, les épaves, la treune des
mouches à miel (ou découverte d'essaims) ; le droit
de lever les pontpenninghe , c'est à dire un droit de
5 °/0 sur les prix de vente de tous les biens situés
dans la juridiction et ne ressortissant pas aux
cours de tenanciers (laethoven).
Ses revenus fixes consistaient en blé, œufs,
chapons, poules et argent; les voici : a) en nature :
4 quarts de blé, 21 quarts idem, 3 muids d'avoine,
17 chapons, 153 poules, 18 œufs, 1 jaeghers de
seigle ; b) en espèces :. 10 florins 1 Va sols ; 30 de-
niers; 30 escalins; 21 deniers; 24 deniers, mon-
naie de Louvain ; 42 oude swarten ;' 7 tournoisen ;
12 '/« oude' groten ; 2 mottoenen, monnaie de Bra-
bant; lUà'antwerpensche schilt; 2 florins Guilielmus,
monnaie de Hollande. Le seigneur avait ensuite
6 heerlijke keuren et 30 swaere keuren, boven noch
mer andere gevaleerde keuren, eene van eenen mot-
1 D'après les lois de l'ancien régime, la succession des bâtards
était recueillie par le seigneur. Ce droit pouvait, toutefois, se
racheter, comme tant d'autres droits consacrés par la féodalité.
Ainsi, par lettres-patentes, .données à Bruxelles, le 11 juillet 1462,
Philippe de Bourgogne autorisa les époux Gérard van Ymmerseel,
bâtard de Jean, et Catherine Tschuckers, fille naturelle du prêtre
Mathieu Tschuckers, bien qu'étant nés « in onwittigenbedde,.... van
zunderlingen gratien ende oick overmits der sommen van hondert
vranchrijhsche croonen, » à disposer par testament de tous leurs
biens, allodiaux et féodaux, actuels et futurs, qui, à la mort desdits
époux, auraient dû échoir au duc (B. 30, p. 44).
— 172 —
toen, eene van eenen peter ende twee iecler van eenen
hollandschen gidden, uijtgaende op verschijde goe-
deren. A la kermesse de chaque année, il avait, en
outre, droit à 21 sols, 1 oort, de la part des fer-
miers possédant deux chevaux de labour ; les fer-
miers en ayant d'avantage payaient un supplé-
ment en conséquence ; la redevance de ceux qui
labouraient sans chevaux était de 10 sols, 1 oort,
9 meijten.
Il existait, dans la seigneurie, une corporation
ou ambacht nommée het schip- ofte lijntreckers
ambacht, dont les membres traînaient les bateaux
montant la Dijle, vers Aerschot, Louvain, etc.
Tous les membres libres de cette corporation
devaient au seigneur une redevance annuelle de
1 florins 10 sols; celle des mortaillables s'élevait à
12 florins. Le seigneur avait, ensuite, une part
dans les amendes imposées à certains bateliers.
Cette part était établie d'après la comptabilité de
la corporation précitée. Les doyens de celle-ci
étaient assermentés annuellement, par le drossard
de Keerbergen. Enfin, le maître de Keerbergen pré-
levait un quayage, dit amergelt {amer == quai) de
2 blancken par mille fagots (« half hout, peuters
ofte reisers; ») par 1000 « Aertschotsche mutsaert
eenen stooten ; van ieder wisse wishout, de welcke
van den amer te schepe wordt gedaen ofte geladen,
eenen halven stuijver » (M. 18, p. 199).
De ses fiefs du pays de Malines, la comtesse de
Berlo n'avait plus conservé que le moulin à vent
dans la grande bruyère de Keerbergen. Suivant
-un acte du 7 octobre 1709, passé devant le notaire
— 173 —
Pierre Hullet, à Malines, ce moulin fut acquis en
vente publique, moyennant quatre mille deux cent
florins, plus trois cent quatre-vingt-dix-neuf flo-
rins pour les surenchères, par Norbert Smekens
au nom de la veuve Persoons. Le fils de celle-ci,
Corneille Persoons, en fut investi pour sa mère
le 11 janvier 1710 (M. 21, p. 41).
Marie de-Gortter1 avait épousé successivement
Antoine Marcelis et Corneille Persoons, qui était
1 Un Jean Persoens figure comme inan van wapen dans un acte
du 12 octbr. 1416 (K. & S.). Heer Henric Persoons, probablement un
ecclésiastique, à Reeth, fut investi, le 22 mars 1472, d'une rente sur
les biens dé Jean van Berchelaer, frère de Gilles (C. 17837). Un
Pierre Persoons, releva, le 15 janvier 1531, une rente pour sa femme
Elisabeth Adriaens et les autres enfants de ses beaux-parents,
Ambroise Adriaens et Jeanne van den Lare (B. 353, p. 54). A. van
den Eijnde, dans son Tableau chronol. des êcoutètes etc. de Malines,
rapporte qu'un Adam de Gortere fut échevin de Malines, en 1398,
eh 1405 et plus tard, et qu'il y fonda, par testament du 14 novem-
bre 1411, l'hôpital des SS. Pierre et Paul. D'après le même auteur,
il aurait été receveur de Malines, en 1406 et aurait porté : d'argent
à trois chevrons de gueules, brisé en chef d'un lambel de sable.
Sur un sceau de cet Adam, nous avons, en effet, vu un écu à trois
chevrons et au lambel, en chef, brochant; cimier: une tête et col
d'aigle; supports : deux aigles (P., carton IV).
On rencontre aussi Sompeke, dit de Gortter, ou de Gortter, dit
Sompeke. Parmi les 8 quartiers sur le tombeau, au couvent des
Pauvres-Claires à Malines, de Marguerite Scoff, femme de Guillaume
de Clerc chevalier, sr de Bouvekercke, etc., écoutète de Malines,
morte le 23 août 1598, on voyait l'écu Sombeck alias Geurttere, aux
trois chevrons.
Le tombeau de l'aumônier François de Gortter, f le 7 avril 1729
et enterré à saint Rombaud, à Malines, porte d'autres armes : un
chevron accompagnée de trois annelets ; cimier : un oiseau issant
et essorant. Les de Gortter avaient des biens à Putte. Il y existait
une seigneurie, dite « 's Gortters » (voyez J. Th. de Raadt, Les
seigneuries du pays de Malines; Putte, Schrieck et Grootloo et leurs
seigneurs.
- 174 -
décédé le 1.6 mai 1702, et enterré au couvent des
Récollets, à Malines.
Le 12 juin 1716, elle transporta, moj^ennant la
somme de dix-neuf florins, à son fils Corneille et
à sa femme, Pétronille de Gortter, les seigneuries
de Keerbergen, Cruys, Bollo, Rosendael et le mou-
lin de Keerbergen (lequel elle déclare avoir acheté
de Madame Sancta de Lopez, héritière de la comtesse
de Berlo). Les époux en firent le relief le même jour
et constituèrent aussitôt à maître Jacques Gérard
Knijff ancien bourgmestre et actuellement échevin
de la ville d'Anvers, et à sa femme, Marie Agnès
Verbist, une rente à 6 '/« % (sept cent cinquante
florins), pour une somme de douze mille florins que
ceux-ci leur avaient avancée. Cette rente paraît
avoir subsisté jusqu'à l'abolition du système féodal
(M. 23, f° 25 «).
De son premier mariage, Marie de Gortter eut
une fille, Anne Marcel is, femme de George de
Croes, lequel avait relevé, le 2 mai 1710, la terre
et manoir de Vijversteijn, sous Bonheijden, pro-
priété qu'il avait achetée de la succession de mes-
sire Charles François d'Ittre de Caestre (M. 21,
p. 12). Ce de Croes eut des revers pécuniaires. Le
1 Le 19 août 1724, par suite de la mort de Marie Agnès Verbist,
son mari, créé chevalier sur ces entrefaites, et ses enfants furent
investis de cette rente; -messire Jacques Gérard Xavier Knijff fut
constitué homme-mortuaire.
Après le décès de celui-ci, Jean Corneille Persoons releva la rente
pour les héritiers (M. 27, p. 256). Le chevalier Jacques Gérard K.,
devenu, vers la fin de sa vie, prêtre et chanoine de la cathédrale
d'Anvers, la transporta, le 7 mai 1768, aux « conventuaelen van de
Spaensche Theresen op dén Rogier, » à Anvers (M. 31, p. 220).
— 175 —
11 janvier 1724, il prit un arrangement avec ces
créanciers, devant le notaire Slabbeek, à Malines.
Michel du Trieu, le principal créancier reprit
Vijversteijn, en amortissement des quinze mille
sept cent quarante-huit florins treize sols que de
Croes lui devait. Après la réalisation de ses meubles
et immeubles, celui-ci versa aux autres créanciers
40 °/0 des sommes dues, en s'engageant au paiement
du restant, tôt oetere fortune ghecomen sijnde. De
concert avec sa femme, il renonça, en outre, en
faveur de la masse, à la succession de sa belle-
mère, Marie de Gortter. Du Trieu fit le relief de
Vijversteijn le 14 février 1728, et, le 29 mai sui-
vant, l'accord précité de 1724 fut enregistré à la
cour féodale de Malines (M. 25, p. 519 et 565).
Corneille Persoons laissa un fils Jean. Corneille,
qui, le 29 juillet 1752, releva la seigneurie de
Keerbergen et le moulin à vent de cette commune
(M. 29, p. 199); il devint également seigneur de
Cruijs, Bollo et Rosendael. Il possédait à Malines
la brasserie de Wereld. Il naquit dans cette ville
et y fut baptisé, dans l'église de Notre-Dame, le
3 juillet 1704. Il eut deux femmes : 1° Anne Barbe
van Kiel, née le 4 juillet 1707, .f le 16 juillet 1757,
fille de Corneille et d'Anne Claire David (fille de
Jean et de Claire Scheppers), et petite-fille de
Pierre et de Catherine van Thielen; 2° Marie
Gertrude Dekens, morte sans postérité.
De sa première femme, il eut trois enfants :
1° Joseph Corneille et 2° Jean, nés à Malines,
— 176 —
et y baptisés à Notre-Dame, le 19 novembre 1740,
respectivement le 13 janvier 1742, et qui mou-
rurent en bas âge; 3° Marie Anne Françoise, bap-
tisée, dans la même église le 4 mai 1744.
Le 13 janvier 1764, maître Jean Baptiste Schep-
pers, fit, en qualité de tuteur de Marie Anne
Françoise Persoons, le relief de la seigneurie de
Keerbergen et du moulin à vent et opéra le trans-
fert, à charge de sa pupille, de la rente de 750 flo-
rins appartenant à la famille Knijff (M. 31, p. 49).
L'année suivante, le 11 février, la jeune dame
de Keerbergen épousa, en l'église Saint-Rombaud
de sa ville natale, Egide Joseph Antoine de Jongh,
seigneur de Daelput, licencié en droit et avocat
au grand conseil de Malines, né à Malines, le 6 et
y baptisé, en l'église Saint-Pierre, le 30 juillet 1737.
Il était fils de Jacques Robert François Joseph,
né le 3 mai 1703, f le 9 février 1763, seigneur de
Daelput, licencié en droit et greffier de la cour
féodale de Malines, et d'Anne Marguerite Estricx
(mariés à Saint-Pierre, à Malines, le 9 février 1735),
fille d'Egide et de Marguerite de Gortter ; et petit-
fils de Robert Théodore Junius, alias de Jongh1,
1 Dans un acte du 21 août 1601, il est cité comme : Robertus
Tkeodorus Junius alias de Jonge (B. 378, p. 42). Il était fils de
Pierre de Jongh ou Junius, né à Gouda, le 16 juin 1621, seigneur
de Thielen (près de Turnhout), licencié en médecine ;f à Louvain,
le 2 décembre 1686, et y enterré en l'église Sainte-Gertrude), et de
sa première femme Marie Baltus (mariés, à Louvain, église Saint-
Pierre, en 1652) ; fille de Robert, avocat, et de Marie van de Werve.
En secondes noces, ledit Pierre avait épousé Marie van Berckel
— 177 —
licencié en droit et avocat de Malines, seigneur de
Thielen (qu'il vendit), et de Pétronille van Kiel,
veuve de Jean Eggericx.
Le registre N° 51 de la cour féodale de Malines
porte, à la première page, cette inscription :
« Anno Domini 1753 opus hoc a veteri feudorum
codice renovatum, atque in duos tomos digestum
fuit sub auspiciis Péril. D. D. Joannis Francisci
Danielis Josephi Cuijpers, J. U. L., Top. de Rijme-
nara ' etc. etc locum tenentis... nec non D.
Jacobi Roberti de Jongh, J. U. L., Top. de Dael-
put, huius curiae Graphiarii. »
Outre les armes du lieutenant Cuijpers, autour
desquelles se trouvent groupées celles des familles
van der Duijnen, van den Nieuwenhuijsen, van
der Hofstadt et Hamers, on voit, au bas de la
page, les armes de Jongh : d'azur à deux croix
d'or, posées en sautoir, accompagnées, en pointe,
d'une tête de taureau d'argent, accornée du second,
posée de face ; cimier : deux plumes d'autruche
d'azur ; devise : Cruce et labore.
Le 31 mars 1787, maître de Munck, secrétaire'
de Eijmenam et notaire, releva Keerbergen avec
son moulin, en vertu d'une procuration, du 29, de
messire Egide Joseph Antoine de Jongh, seigneur
(voyez Ann. de l'Acad. d'Archéol. de Belg. II, p. 431 ; Hellin,
manuscr. in-f°, C. G , et N° 1437, ibidem). Le contrat de mariage des
époux de Jongh-Baltus avait été passé le 14 décembre 1652, devant
le notaire Gilles van der Elst. Le 17 septembre 1655, maître Petrus
Junius alias de Jonghe, baccalaureorum medicinae decanus et fiscus,
releva pour sa femme M. Baltus, par suite de la mort de sa belle-
mère, une partie de la dîme de Thielen (B. 375, p. 189).
1 Voyez notre notice précitée sur la seigneurie de Rijmenam.
— 178 —
de Daelput etc. (il avait reçu des lettres-patentes
de noblesse, datées du 26 septembre 1777), agissant
en qualité de père et tuteur de ses deux fils, pro-
créés avec Marie Anne Françoise Persoons. Celle-ci
était morte de 10 du même mois. Messire Jean
Baptiste Antoine de Jongh, l'aîné des deux frères,
âgé d'environ 22 ans, fut inscrit comme homme-
mortuaire (M. 36, p. 28). Après la mort de de Munck,
Pierre Walravens, notaire et huissier du grand
conseil de Malines, fut nommé homme-servant à la
place de celui-ci, le 11 août 1792.
Messire Jean Baptiste Antoine de Jongh, naquit
à Malines et y fut baptisé, à l'église de Notre-Dame,
de Hanswijk, le 29 décembre 1765. Il épousa, à
Bruxelles , à l'église , Sainte-Gudule , le 8 floréal
an X (le 28 avril 1802), Victoire Louise Helman,
née en 1776, décédée le 20 janvier 1857, fille de
François Aurèle Guidon, comte Helman de Ter-
Meeren, greffier du conseil de Brabant, grand-
bailli d'Alost, et de Louise Caroline Cruiripipen
(fille de Jean Henri, conseiller et secrétaire du
conseil d'État et du conseil de guerre), et petite-
fille de Philippe Joseph Hubert Helman, baron de
Ter-Meeren, seigneur du comté de Cantecrode, et
de Marie Christine van Overstraeten, dame de
Weldene et de ten Berghe.
Nous ne connaissons à ces époux qu'une fille :
Louise Marie, née, à Bruxelles, le 8 septembre 1803.
Jean Baptiste Antoine de Jongh, fut le dernier
seigneur de Keerbergen. Il mourut à Rumpst le
11 juillet 1826.
— 179 —
Son frère, Corneille Jacques, baptisé, à Malines,
à l'église de Notre-Dame de Hanswijk, le 11 sep-
tembre 1767, devint bourgmestre de Rumpst et
épousa, à Bruxelles, le 28 juillet 1820, Marguerite
Catherine Roelants, de Wijnegem, veuve de Charles
Joseph Josse, née à Seraing, le 9 septembre 1772.
Il gît à Rumpst.
J. Th. de Raadt.
(A suivre.)
— 180 —
LA REPRESSION
DU
VAGABONDAGE EN FLANDRE
AU XVIe SIÈCLE1.
Au XVIe siècle le vagabondage avait pris en
Flandre des proportions inquiétantes.
Les moyens de répression ne se firent pas
attendre et furent autrement radicaux que ceux
que l'on emploie de nos jours.
Les dépôts de mendicité et les colonies agricoles
n'étaient d'ailleurs pas encore connus.
Plusieurs ordonnances royales contenant « ar-
ticles touchant la prinse et punition des Blîtres,
Ribaux et vagabons » et aussi sur les « Blîtres,
paillars, oyseus, et vagabons, » furent publiées.
L'ordonnance du cinquième jour de novembre
1501 accorde à tous ceux qu'on appelle « Ribaux,
coquins ou Truands » un délai de huit jours pour
quitter le territoire du comté, sous peine d'être
« Placards de Flandre, Livre lr (p. 1 à 36) Edit. de 1639.
— 181 —
« pilorisez l'espace de quatre heures et après batus
« et fustiguez, et bannis à tousiours. »
Cette ordonnance resta, paraît-il, à l'état de
lettre morte, ou peu s'en faut.
Le vingt-deuxième jour de septembre 1506
parut une nouvelle ordonnance édictant des peines
plus sévères.
Elle constate que le nombre de ceux qui se livrent
à « la Bliterie et à la Truandise » était devenu
tellement considérable que « les censiers et labou-
reurs » ne pouvaient plus trouver assez de bras
pour faire « leurs labeurs et recueillir les fruits de
la terre. »
En conséquence, elle défend, sous peine d'une
amende de dix livres parisis, aux taverniers, caba-
retiers ou « hospitaliers » d'héberger les « truans,
truandes, blitres ou blî tresses », ou de leur bailler
à boire et à manger.
Les officiers de justice, eux, qui ne se souciaient
guère de saisir ces pauvres hères, dont ils ne
pouvaient tirer aucun profit, sont menacés, par
l'ordonnance de 1506, d'une amende de vingt livres
parisis, pour chaque vagabond qu'ils auront laissé
échapper.
La peine de la fustigation, déjà édictée par l'or-
donnance précédente, à charge des « blîtres et
truands » est maintenue.
Mais, pour éviter que dans les petites villes et
au plat pays, on laissât ces « coquins » impunis
faute de bourreau, les officiers et juges sont auto-
risés à faire battre et fustiger les truans ou
truandes par l'un « d'iceux truans. »
— 182 -
Le mal ne s'améliora point, au contraire. Un
placard de l'Empereur du premier jour de Juillet
1510, édicta de nouvelles mesures contre le vaga-
bondage qui ne faisait que croître et se développer.
La profession (?) offrait, semble- t-il, de bien
grands attraits, car « chascun jour plusieurs com-
« paignons de mestier (considérant la vie des dicts
« Blîtres, Truands et vagabonds) se mettent à la
« dicte Bliterye, habandonnant et delaissans leur
« dict Mestier. »
Après avoir confirmé les dispositions publiées
en 1506, le placard ordonne, que « d'oresnavant
« les dits Blîtres, Truans et coquins que seront
« bannis et corrigez auront leurs cheveulx couppez
« jusques pardessus leurs aureilles : seront publi-
« quement appelez par nom et surnoms et le lieu
« et la place dont ils sont natif, etc. »
Un nouveau placard de 1515 constate encore la
négligence des officiers de justice et élève l'amende
à leur appliquer « pour chaque, blître ou truant
qu'ils ne corrigeront » à « huict Philippus d'or. »
En 1527, on rappela de nouveau les dispositions
anciennes; en outre, la peine de la hart fut
* rendue applicable aux vagabonds qui auraient fait
quelque menace contre « le pauvre peuple. »
Le vagabondage se transformait peu à peu en bri-
gandage et les « blîtres et paillards » , se réunissant
en bandes, allaient jusqu'à contraindre «les bonnes
gens de village à leur bailler entretenement. »
Bien plus : ils faisaient des « pilleries, soulles
et excès, menaçant de brusler les maisons, etc. »
Quant aux officiers de justice chargés de la
• — 183 —
répression, non seulement ils n'appréhendaient ni
ne punissaient les « blîtres » et vagabonds, mais ils
se refusaient, de plus,- à payer l'amende de huit
Philippus .
Aussi l'Édit perpétuel de 1540 ' ne les me-
naça-t-elle plus d'une simple amende, mais de la
perte de leur office et « inhabilitation » de jamais
pouvoir avoir ou desservir office quelconque... et
avec ce d'amende arbitraire, outre les dommages
et intérêts à payer aux appréhendeurs.
Ce fut cet édit perpétuel qui interdit à tout
individu de s'aventurer hors de sa résidence en
portant « Harquebuse, colleuvrière (couleuvrine)
« ou autre Baston à feu, à peine de confiscation
« des dicts Bastons,etdix carolus d'or d'amende. »
Si le contrevenant ne pouvait payer l'amende, il
était « mis en prison trois jours, à pain et eaue
« et après, bastu de verges jusques au sang et
« pardessus ce, bannis du terroir du Juge qui en
aura faicte l'appréhension. »
Il y avait, naturellement, exception pour les
officiers de l'empereur et de ses vassaux, les
Echevins, gens de loi, les confréries d'arque-
buses, etc.
Ceux qui étaient trouvés en état de vagabon-
dage armé se voyaient non seulement appliquer
ces peines, mais, s'ils étaient en outre convaincus
d'avoir « vescu et mangé sur le Peuple » ils
1 Nous passons l'ordonnance de 1530, qui se borne, à peu de chose
près, à rappeler les anciennes dispositions et à ordonner la repu-
blication annuelle de toutes les ordonnances touchant les Blitres
et vagabonds.
— 184 —
étaient « exécutez par le Feu; » les vagabonds
non armés et convaincus du même fait étaient
exécutez par « FEspée. »
Il était ordonné aux officiers de justice de faire
usage de la question et de la torture pour en avoir
la preuve.
Les vagabonds simples pouvaient également se
voir appliquer la torture; au préalable, ils de-
vaient être déclarés oisifs; c'est-à-dire n'ayant
« aucun revenu, retenu ou service, et non exer-
ceant Mestiers. »
Chacun pouvait appréhender les vagabonds en
quelque lieu que ce fût « privilège ou non pri-
vilège. »
Enfin, l'Edit renouvelait aussi la défense aux
hôteliers, taverniers, ou autres : « de quelque
« Estât, qualité ou condition qu'ils soient » de
« recevoir loyer, soutenir, favoriser, ou receler
« aulcuns desdicts delinquans, leurs complices et
« adhérences ; » il leur était même ordonné de les
dénoncer à la Justice, sous peine « de Ban et aultre
(( correction arbitraire. »
Tout cela fut insuffisant. Le nombre des fainéants
et des vagabonds ne diminua pas.
Alors on essaya de la potence. Tous ceux qui
vivaient aux dépens du paysan, sans payer, furent
pendus en vertu de l'ordonnance de 1542.
Ensuite, le mode d'arrestation fut simplifié.
Dorénavant, on put blesser les délinquants en les
arrêtant, et la blessure pouvait même entraîner
la mort, sans que « Tarrestant » pût être inquiété.
— 185 —
Au « son de cloche » un chacun était requis de
prêter main forte aux officiers de justice pour
l'arrestation des bandes de vagabonds.
Enfin, en 1556 ', parut le Placard le plus com-
plet, et aussi le plus draconien, sur la matière.
Ce placard conçu en vingt articles, commence
par confirmer la plupart des dispositions anté-
rieures.
Il ordonne ensuite que ceux qui menaceraient
seulement l'habitant d'incendie, soit formellement,
soit à mots couverts, seraient eux-mêmes punis
par le feu.
Les fainéants, même ceux ne s'adonnant pas à
la mendicité, devaient être saisis, mis à la torture,
ou punis arbitrairement pour l'exemple des
autres (!) {ter exemple van allen andren). S'ils
• étaient étrangers, ils devaient être bannis à per-
pétuité.
Les mendiants étrangers au pays devaient le
quitter dans la huitaine, à peine de la corde ou
du bûcher.
Enfin, aucun mendiant ne pouvait aller par le
pays sous prétexte de chercher de l'ouvrage; il
était condamné à rester au lieu de son domicile,
ainsi que les impotents, les lépreux, et ceux qui
étaient incapables de gagner leur vie.
Il faut croire que l'on obtint enfin quelque
résultat, car le placard de 1556 fut le dernier
publié sur cet objet, au XVIe siècle.
Ach. Gallet-Miry.
1 Ici encore nous omettons un placard : celui de 1554 qui ne fit
que confirmer les dispositions déjà prises antérieurement,
13
— 186 —
QUELQUES NOTES
SUR
L'ANCIEN CALENDRIER FLAMAND
Jusqu'au XIVe siècle on n'avait fait usage que
de la langue latine dans les Chartres et autres
actes officiels. La langue vulgaire se développe
avec l'efflorescence des communes. C'est ainsi que.
nous avons pu constater les appellations origi-
nales des mois exposées dans cet article. Il est à
présumer que leur origine remonte à la première
formation de la langue flamande. Remarquons que
les noms donnés alors aux mois correspondent par-
faitement à leur caractère atmosphérique ; de
plus nous présentons une concordance avec les
mois de la première république française, et cela
à cause de l'intime ressemblance que nous avons
constatée entre les noms de ces derniers et presque
tous les anciens noms flamands :
Janvier.
LAUW-MAANt>, employé en 1342, voir Mémorieboek der
Stad Gent, publié par Vander Meersch.
— 187 —
Louw-maand, voir Woordenschat, de L. Meijers, 3e deel,
1745; époque du mariage.
Sneeuw-maand, mois de neige, correspond au quatrième
mois républicain de Nivôse du 21 Décembre au 19 Janvier;
traduction du mot Nivôse, voir Kramers Dictionnaire
Français-Hollandais, 1859.
Février.
Spurkelle, employé en 1317, voir de Saint-Génois, chartes
des Comtes de Flandre.
Sprokkel-maand, employé en 1340, Mémorieboek.
Schrikkel-maand, voir Meijers, appelé ainsi du jour
complémentaire qui vient en ce mois, aux années bisextiles.
Horninck, voir Meyers, époque à laquelle les cerfs
perdent leurs cornes également parce que c'est la fin des
froids; ce mot provient de hooren, ophooren, ophouden.
Regen-maand, l'avant-coureur du printemps qui sous
notre climat commence par des pluies; correspond au
cinquième mois républicain de Pluviôse du 20 janvier au
18 Février; traduction du mot Pluviôse, voir Kramers.
Mars.
Dorre-maand, mois de dessèchement. (Annuaires de
l'Académie Flamande.)
Lente-maand, mois du commencement du printemps,
d'après Meijers, Lentsen, ontlossen, ontsluiten, « omdat de
lente den winter ontlast en den somer ontsluit. » Voir aussi
le mot maanden Richelet Groot woordenboeh, de 1764.
Wind-maand, mois des vents activant le dessèchement,
d'après Meyers, et Dictionnaire teutonique de Kilian,
devrait être le mois de Novembre, cependant Kramers
traduit ce mot par ventôse, qui est évidemment le mois des
vents ; correspond au sixième mois républicain de Ventôse
du 19 Février au 20 Mars.
— 188
Avril.
Ooster-maand, d'après Meijers, provient du vieux saxon
Eoster-monath, mois d'Eoster, divinité à laquelle on offrait
spécialement des sacrifices pendant ce mois. Charlemagne
l'a également appelé ainsi, parce que c'est principalement
pendant ce mois que tombait la fête pascale et depuis lors
les peuples saxons ont conservé ce nom.
Gras-maand, voir Kilian, on sème alors le fourrage.
Spruit-maand , mois de germination; correspond au
septième mois républicain de Germinal du 21 Mars au
19 Avril; traduction du mot Germinal, voir Kramers.
Mai.
Wonne-maand, appelé ainsi par Charlemagne à cause de
son agrément. Il est d'origine saxonne, voir dictionnaire
Kilian, mentionné, et îvoordenschat de Meyer.
Bloeij-maand, mois de floraison ; voir Richelet au mot
maanden.
Bloem-maand, mois des fleurs; voir Kilian; les deux
appellations correspondent au huitième mois républicain
de Floréal du 20 Avril au 19 Mai; traduction du mot
Floréal voir Kramers.
Juin.
Bkaak-maand, voir Kilian, mois de Jachères, appelé
anciennement en Roman Geskerech ou Jiskerech (Juin-
Août).
Rooze-maand, voir Meijers, mois d'éclosion des roses.
Zomer-maand, premier mois de l'été, voir Meijers au mot
Weide-maand.
Weide-maand, ou Weede-maand, employé en 1343, voir
Mémorieboek, mois pendant lequel on met le bétail au
pâturage, voir Meijers; correspond au neuvième mois repu-
— 189 —
blicain de Prairial du 20 Mai au 18 Juin; traduction du
mot Prairial, voir Kramers.
Juillet.
Hooeij-maand, employé en 1344, voir Mémorieboeh, c'est
le premier mois des moissons pendant lequel on fait les
foins ; correspond au dixième mois républicain de Messidor
du 19 Juin au 18 Juillet; pour ce mois le législateur révo-
lutionnaire s'est sans doute souvenu du vieux mot Roman
Fénal ou Fénail, mois de la fenaison. Kramers, traduit Mes-
sidor par Oogst-maand.
Août.
Ougst-maand, employé en 1346, voir Mémorieboeh, mois
pendant lequel on fait la récolte des blés.
Bauw-maand, annuaires de l'Académie Flamande.
Warmte-maand, mois des chaleurs; correspond au
onzième mois républicain de Thermidor du 18 Août au
16 Septembre; traduction du mot Thermidor; voir Kramers.
Septembre.
Eyene-maand, Annuaires de l'Académie Flamande, mois
de la récolte de l'avoine, en latin avena.
Spelt-maand, voir Meijers, mois de la récolte de l'épaûtre.
Gerst -maand, voir Richelet au mot maanden, mois de la
récolte de l'orge.
Piet-maand ou Pett-maand, employé en 1348, voir
Mémorieboeh, mois pendant lequel on restaure les aqueducs
de ruisseaux. On appelle « Piet » dans certaines régions ces
troncs d'arbres perforés qui permettent, sous les chemins,
l'écoulement des eaux. Voir Richelet Woordenboek au mot
Pit, Pitte ; et également au mot Pit den Hollandschen Fran-
schen icoordenboeh, de Kramers.
— 190 —
HERFST-MAAND,le premier mois de l'Automne, voir Riche-
let au mot maanden.
Fruit-maand ou Vrucht-maand, mois de la cueillette
de la plupart des fruits; correspond au douzième mois
républicain de Fructidor du 18 Août au 16 Septembre, qui
était suivi de 5 jours complémentaires, que l'on appelait
sans culotides. Traduction du mot Fructidor; voir Kramers.
Octobre.
Baafmis-maand, mois de Saint-Bavon, 1329, voir Mémorie-
boek; voir plus loin les dates des jours; le premier Octobre
est la fête patronale de ce saint; ceci ne se disait sans doute
que dans les pays dont il était l'apôtre.
Rozel-maand, voir Kilian, mois du labour après la
moisson.
Zaad-maand ou Zaai-maand, mois des semailles avant
l'hiver, voir Meijers.
Wijn-maand, voir au mot précédent Meijers, mois des
vendanges; cette désignation qui aujourd'hui pour le pays
Flamand peut paraître étrange était alors parfaitement
justifiée. Déjà en 844 l'Abbaye de Saint-Pierre lez Gand,
cultivait la vigne sur les coteaux de la vallée de l'Escaut;
voir Van Lokeren chartes de l'Abbaye de Saint-rPierre 1868,
1er vol., p. 16. Cette dernière dénomination correspond au
premier mois républicain de Vendémiaire du latin Vinde-
mia, vendanges, du 22 Septembre au 21 Octobre. Traduction
du mot Vendémiaire; voir Kramers.
Novembre.
Loef-maand, Annuaires de l'Académie Flamande, mois
du semis des navets et pendant lequel on enlève la verdure
destinée au bétail.
Hore-maand, mois de boue, vient de Horo ou Héro, boue
- 191 —
fumier, voir le glossaire Flamand de l'Inventaire des Archi-
ves de Bruges.
Smeer-maand, voir Meijers : « Om dat men in deze maant
lustigh plagh te smeeren, en teeren. » On nous communique,
que ce nom pourrait provenir de l'époque des wijk ker-
missen, ou fêtes de hameaux, alors on pourrait traduire
smeeren par manger et teeren par digérer. Nous croyons
que l'on enduisait de graisse et de goudron, les maisons
alors généralement en bois, pour les préparer aux in-
tempéries de l'hiver. L'une et l'autre interprétation est
plausible.
Jacht-maand, mois de la chasse.
Slach-maand, mois de boucherie ou d'égorgement du
bétail ; voir Kilian à ce mot, « mensis jugulatorius : a
solemni jugulatione pecorum et boviun. Sax. Slacht-maen. »
Ne serait-ce pas le mois ou les anciens Germains avaient
l'habitude de faire des sacrifices à Thor; car ces sacrifices
étaient de vraies boucheries.
Nevel-maand, mois ou le ciel est couvert de brouillard,
voir Killian ; correspond au deuxième mois républicain
de Brumaire du 22 Octobre au 20 Novembre ; traduction
du mot Brumaire, voir Kramers.
Décembre.
Kerst-maand, Annuaires de l'Académie Flamande; mois
de la Naissance du Christ ou Noël.
Joel-maand, Annuaires de l'Académie Flamande ; mois
des divertissements.
Winter-maand, premier mois de l'hiver, voir Kilian,
parfois il est pris pour les mois de Novembre et de
Janvier.
Vorst-maand, voirRichelet au mot maandcn ; correspond
au troisième mois républicain de Frimaire ou mois des
frimas, saison de brouillard froid et épais qui se glace en
- 192 -
tombant, saison du grésil ; le mois républicain est du 31 No-
vembre au 20 Décembre; traduction voir Frimaire dans
Kramers.
Il est beaucoup plus rare de voir, dans les Char-
tres ou actes officiels, les jours désignés par le
quantième du mois, comme nous en avons la
coutume, que par des indications indirectes basées
sur certaines dates déterminées et connues de tous,
spécialement celle des fêtes religieuses ou des fêtes
de saints; se rapportant à ces dates, on indiquait
de combien de jours on en était éloigné dans
l'avenir ou le passé.
Nous donnons ici les principales de ces solem-
nités.
Janvier.
1er Besnijdenis (circoncision), Mémorieboek, 1428. —
6 Derthien dach (Ephipanie 13 jours après Noël), Mémorie-
boek, 1428. — 25 Sente Pauwels bekeeringe, dans un calen-
drier de 1617, déposé aux Archives de l'Etat à Gand.
Février.
2 Onservrouwendach ter Lichtmesse, Mémorieboek, 1345.
• - 22 Sente Pieters avent, Mémorieboek, 1349. — 26 Tooch
dach (présentation) calendrier de 1617 précité. — Half
sporkele, mi Février, Mémorieboek, 1300.
Mars.
25 Onservrouwen dach, Mémorieboek, 1376. — Halfmeert,
mi mars, 1314, Mémorieboek. — Goede weke, Mémorieboek,
1417. Palmzondach, Mémorieboek, 1371. — Witten donder-
dag, Mémorieboek, 1426; — goeden vrijdage, Mémorieboek
— 193 —
1426; — in de pine wouke, semaine sainte, Inventaire des
archives de la ville d'Ypres, par Diegerick, 1300. — Vasten
avont, de Saint-Génois, Inventaire des chartes des comtes
de Flandres; — groote vasten avont, Mémorieboek, 1300 ; —
half vastenen, 1452, Mémorieboek. — Paesschen, 1436,
Mémorieboek. Pour vasten avond et groote vasten avond,
il faut se rappeler qu'anciennement on jeûnait pendant
l'Avent qui était moins long que le carême.
Avril.
Ouijsdagken (Rogations), calendrier de 1617.
Mai.
Sinxendach, 1312, Mémorieboek. — Synxenweke, 1420,
Mémorieboek. — 3 Heilig cruis vindinghe, calendrier de
1617. — 25 Heiligsakramentsdach, instelling, 1320, Mémo-
rieboek, employé depuis 1322.
Juin.
24 Sente Jans ter geboorenesse, 1308, Mémorieboek,
— 29 Sente Pieters ende Sente Pauwels, 1300, Inventaire
d' Ypres.
Juillet.
2 Sente Marie visitatie, calendrier de 1617. — 16 Heilich
sacrament van Mirakele, 1369, Mémorieboek. — 22 Sente
Marie-Magdalenendach, 1387, Mémorieboek.
Août.
Iste Sente Pieter in de banden of in gansche oeste, calen-
drier 1617. — Sente Clarendach, 1413, Mémorieboek. —
15 Onser vrouwen dach in halfougst, 1301, Mémorieboek.
Septembre.
8 Onservrauwen dach , Mémorieboek, 1436. — 29 Sinte-
Michiel, Mémorieboek, 1322.
— 194 —
Octobre.
1er Sente Baéfmisse ou Baefsdaghe, de Saint-Génois, 1310,
Mémorieboek, 1329. — 18 Sinte Luucxdaghe, 1327, Inven-
taire d'Ypres.
Novembre.
1er Alderhelegemesse, 1437, Mémorieboek. — Alresinte-
dach de Saint-Génois, 1352 (Toussaint). — 2 Alderzielen-
dach, calendrier, 1617,jour des âjnes. 30 Sente Andriesavond
ou dach, 1329, Mémorieboek,
Décembre.
4 Sente Barbelé (Barbe) 1617. — 6 Sent Niclais 1450,
Mémorieboek (Nicolas). — 22, den cortsten dach, 1300,
Saint-Génois, très souvent employé. — Kersnaclit 1357. —
28 Alderkindren dach (jour des innocents), 1338, Mémo-
rieboek.
Behourdich, en 1317, premier jour du carême.
Nieuwendach, le premier en 1326.
Den anderen-dach, le deuxième, 1349.
Pour compléter ce qui précède nous avons cru
intéressant de parler ici des vacances et des con-
gés du conseil de Flandre. (Voir Annales de l'Aca-
démie d'Archéologique de Belgique, 3e série, tome 5,
4e livraison, 2e partie, p. 348).
Les séances du conseil de Flandre étaient à
l'origine au nombre de deux par jour d'une durée
d'environ de 3 heures. En été de 7 à 10 heures du
matin, en hiver de 8 à 11, et le soir de 2 % à
5 heures,.
L'ordonnance de 1522 enjoint au président de
— 195 —
se trouver au palais avant ses collègues ; ce règle-
ment fut longtemps en vigueur, il île contenait
aucune disposition relative aux vacances, elles
étaient irrégulières : de l'avis de la majorité de
ses membres, le conseil s'ajournait ordinairement
au mois d'août ou de septembre.
D après le Calendrier de 1617 cité plus haut :
les grandes vacances commencèrent le 29 juillet
et finirent le 8 septembre suivant. Les fêtes du
palais pour cette année furent : le 4 et le 12 jan-
vier ; le 5, 6 et 7 février à cause du Carnaval ; le
23 avril Saint-Georges; le 25 juillet; le 14 sep-
tembre ; le 9 octobre Saint-Denis ; le 2 novembre
jour des âmes ; le 4 décembre Sainte-Barbe ; le
14 décembre Saint-Nicaise.
Le 18 avril 1720, une résolution fut adoptée,
en vertu de laquelle une réunion extraordinaire
serait tenue en temps de session, le jeudi à
5 heures.
Au milieu du XVIIIe siècle un édit du prince
Charles de Lorraine fixe les heures d'audience,
supprime les séances du soir et détermine la durée
des vacances :
« D'après les instances faites par le conseil,
pour supprimer les séances de l'après-midi et la
nouvelle réglementation des vacances. »
« Les séances du conseil se tiendront dorénavant
depuis 8 heures jusqu'à midi le matin et une demie
heure pour l'aller et venue; cette séance de 4 et
demie heures aura lieu tous les jours ouvrables de
l'année y compris ceux d'obligation de Messes, à
la réserve seulement du mardi gras, jour des cen-
— 196 —
dres, Octave de la Fête-Dieu, et des lundis qui ne
suivent pas immédiatement quelqu'une des quatres
{sic) vacances. Les vacances de Pâques commencent
le jeudi saint et finissent à Quasimodo ; celles de
Pentecôte jusqu'à la fête de la Trinité ; celles du
mois d'août du premier de ce mois à sa fin ; celles
de Noël enfin depuis cette fête jusqu'au lendemain
de la Circoncision, sans qu'il puisse y avoir aucune
vacation plus longue. »
« Au moyen de cet arrangement viendront à
cesser toutes les ci-devant fêtes du Palais de
Justice, de même que les séances du conseil
pendant les après-midi. »
Le 24 avril 1766, pour compenser les heures
de vacances en usage ci-devant, la cour y ajoute
le jour de la Fête de Saint-Ivon, patron des avo-
cats, et les lundis du mois d'avril, mai, juin,
juillet et de septembre, pour autant que ces jours
ne suivent pas la reprise des travaux. Ce règlement
resta en vigueur jusqu'en 1789.
Wernee, de Haerne.
— 197
Quelques détails historiques
SE RAPPORTANT
A LA BATAILLE DE FLEURUS
1633.
Lorsque, au 30 août 1622, Ernest Comte de
Mansfeld eut essuyé une défaite sanglante près
de la métairie de Chessau, à Fleurus, l'histoire
nous apprend qu'il se dirigea, avec les débris de
ses troupes vers Perwez .
Partout des paysans armés se levèrent sur son
passage, pour défendre, en même temps que leurs
biens, l'accès de leur territoire \
1 A cette époque d'ailleurs toute autorité, dont le territoire était
menacé d'invasion, se tint sur la défensive. Ainsi le constatons nous
entre autres, par les extraits suivants, tirés des comptes du chapitre
noble d'Andenne :
Paie à Jean Elois, le 14 d'Apvril 1621, pour avoir esté à Namur
porter lettres à monsieur Wittembrouch pour avoir son advis
touchant les hollandais xii sous.
A Jan le flament pour avoir porté lettres à Monsieur de Wittem-
brouck le 2 de Jullet 1621 xii sous.
A un messager apportant lettres de Namur pour le chapitre.
x sous,
— 198 -
Pendant notre séjour à Namur nous avons ren-
contré, dans l'ancien protocole du notaire Berthou,
l'acte suivant, daté du 8 août 1628, où est relaté
Payé à Ambrose censier de Andenelle pour avoir cliarié vi cordes
de bois pour le président Pochet v sous.
A six soldats de la compagnie de Monsieur Grehi at esté donné
pourboire xxiiisous.
Item à quatre soldats de la compagnie de Monsieur de Blocquerie
passant par Andenne viii sous.
Item, aux soldats du prince de Barbancon qui furent logé en la
maison Catherine André • . xlviii sous.
A la femme d'Or pour porter lettres à Seilles les adverssant des
dessains des hollandais ii sous.
A sept souldats passant par icy venants de convoyé de Mastrecli
avec bonne pasporte xxi sous.
Donné à v soldats de la compagnie de Monsieur de Blocquerie, en
l'an 1G23, du temps qu'il n'y avait point de mayeur . . . xv sous.
Donné encore à six soldats de la garnison de Mastrech qui avoient
faict convoie pour sa majesté xxx sous.
A un homme qu'apportait nouvelles que les hollandais avaient
quelque dessain sur Andenne iii sous.
Paie à un messager de Dalen venant apporter nouvelles des hol-
landais sur les précédents xxv sous.
A un messager envoyé à Burdinnes pour ce subiect. . xii sous.
A Nicolas Goffart, frère du curé de Heure, homme de bonne répu-
tation", comme il appert par lettres de Monsieur de Brias, nous
advertissant que les hollandais à trois cents chevaux, entre lesquels
il y avait un sien frère, avoient pour resolution de venir à Andenne
dedans trois iours par la profonde voie proche la maison de Gorlier,
et qu'ils entreraient par la fause porte de Saint-Pierre, laquelle
gaignée, ils eussent entré en l'église par l'herbier ; et lui at esté paie
oultre ses dépens viii fi. iiii sous.
Le xiiie d'Aoust 1622 paie à Dor pour aller à Waignée afin de
scavoir nouvelles des Manfeld vi sous.
Le lendemain monsieur de Brus at envoyé messager exprès nous
advertissant qu'il voulait venir en Condros, paie .' . . xii sous.
Madame a envoyé D'or avec le dit messager pour scavoir s'il
approchoit et l'ayant fait attendre afin de scavoir quel chemin
il prennoit xi sous.
Paie à la femme D'or qu'avoit esté à Hermal exprès pour scavoir
nouvelles des hollandais qui avaient passé à , . . x sous.
— 199 —
une épisode qui se rattache à cette page historique :
« Je sousigné notaire apostollicque et impérial admis par
le conseil provincial à Namur, certifie avoir esté le jour
Paie à Dor pour aller à Namur viii sous.
Au mesme que dessus pour aller à Thisnes et à Burdinnes le
xix août 1622 xii SOus.
Le xx d'Aoust donné au laquai de Monsieur de Brias qu'apportait
nouvelles de , x SOUs.
Payé à ung messager envoyé par Monsieur le Drossart de Dalem
nous advertissant que les Hollandais marchaient, affin d'estre sur
nostre garde. . xxxi sous.
A plusieurs messagiers ayant esté tant à Namur, Thisnes, Bur-
dinnes qu'ailleurs pour scavoir nouvelles de Manfelt. iv fl. xv sous.
Exposita faict par madame Agnès de Lucquenghien, prévoste, en
l'an 1622 pour la garde
Donné à Burlen pour achapter balles et mèches . . . . vi fl.
Item pour avoir faict achapter ung tambour et racommoder le
vieux . xi fl. viii soins.
Item pour 18 livres de pouldres à xvi sous la livre et 2 livres de
mèches à 3 sous la livre, paie 14 fl. 14 s monnoye de Liège, porte
monnoye de braibant xii fl. 6 sous.
Paie pour la façon de septs cordes de bois de chesne à vi sous la
corde, menées à diverses fois 2 fl. 11 sous.
Pour le chariage desdites septs cordes de bois à xv sous la corde,
v fl. v sous.
Item paie pour trois livres de chandelles à sept sols demy la
la livre xxii sous.
Donné au chanoine d'Engis soub ung albertus pour achapter
pouldres et balles. ........... v fl. viii sous.
Item pour trois livres de chandelles au pris que dessus, xxii sous.
A Jan le flament pour avoir esté à Namur porter lettres au
président x sous.
Audit Flament pour avoir esté à Liège quérir une somme de
pouldres et cent livres des mèche, paie xxx sous.
On at paie pour la susdite tonne de pouldres et cent livres de
mèche quattre vingt et quattre florins xviii sous monnoye de Liège,
lequel argent a esté print hors du coffre de l'église . . .
Item pour mener ladite pouldre à la nef marchande paie 12 sous
liégeois faisant à nostre monnoye x sons.
Pour le paiement de la nef marchande at esté paie xvi sous
liégeois faisant ici xiii sous,
— 200 —
d'hier, conduit par Thomas Bosman et Henri] Hubotte
commis de la part des Bailly et Justice de Perwez en
Brabant, en la maison de Nicolas de Thouars escuier, bailly
Item at esté payé à luy pour le portage de ladite pouldre. ix sous.
Paye à Jan le bon Jean pour avoir faict une serrure et deux clefs,
deux bottons et une palette à lhuis là où on met la pouldre. . .
xxxv sous.
Item pour trois cordes de bois menées à diverses fois pour la
garde y comprins le talliage iii fi. iii sous.
Le v de Jullet a esté paie pour trois livres de chandelles,
xxii sous.
Item pour la casacque du tambourin paie pour sept aulnes de drap
à xxxi sous l'aulne xi fl. viii s.
Item pour soixante aulne de passement à ung patar demy l'aulne.
iiii il. xi sous.
A pierre Tichon pour la façon dudit casacque . . . xxv sous.
Pour les agrapes dudit casacque 1 sous.
Item pour trois aulnes demy de grise toile pour fourrer ledit
casacque, à vii sous l'aulne xxxivsous.
Item pour une aulne demye de changeant à xiii sous l'aulne.
xix sous.
Paie pour six livres de chandelles à six sous la livre, xxxvi sous.
Pour trois aulne de crouge suillich pour faire la custode de
lenseigne .• xxxvi sous.
Donné a Burlen pour donnera Pierre Fossion et Halison, à bon
compte sur ce qu'ils ont ouvré aux bailles .... xiiii fi. viii s.
Paie encore audit Halison et Pierre Fossion pour avoir faict les
barrières xiv fi.
A Jean Grégoire pour avoir faict les fosses pour planter les
barrières xvi sous.
Au serrurier pour avoir faict les serrures desdites barrières.
vii fi. iv sous.
Audit Jan le bon Jean pour avoir mis deux platinnes de fer, une
à la barrière au prez des dames, l'aultre à la barrière propre la
maison Philippes de Grosse xx sous.
Le 29 août 1624 donné à Anthoine Thomas et au petit Anthoine
pour deux nuicts qu'ils ont faict la garde sur la thour . xxiv sous.
Item à Henri Michiel et Lambert Sandre pour auoir faict la
gardes deux nuicts cliascun xxiv sous.
— 201 —
do Waseiges, où luy fut fait vision et lecture de plusieurs
lettres et missives tant du gouverneur d'Emerickque ', que
de Son Excellence le comte Albert, marquis de Berghe
Payé à Phillippe Cramillion pour avoir ouvry et fermé les portes
des encloistres tant du temps qu'on faisait le garde que des Mansfelds.
ii fl. x sous.
Le xv de Jullet 1624 paie au jardinier deux tonnes de cervoise,
données aux manants quand ils'out passé monstre . . . . vii fl.
Le 20 mars 1624 paie 13 pots de cervoise qu'on at beu à une
allarme qu'on fist par nuict xvi sous.
Payé à Jean le bon Jean pour avoir racommodé un musquet qui
reculait xii sous.
A Gilles Sacré pour avoir trois fois nettoyé les six mousquets et
mit une palette, ung verint et gravé dessus Ste-Begge
v fl. xiii sous.
Payé à Guilleaume Sacré pour avoir nettoyé en l'an 1623 lesdits
musquets ..'... xlviii sous.
Donner à l'horlogier Piette en Octobre 1623 pour avoir démonté
et racommodé l'horloge iii fl.
Donner en l'an 1624 à 33 soldats pour rafrechir, ayant bon passe-
port xviii sous.
Paye au petit Antoine, le 30 may 1624, pour avoir esté a Bruzelles
pensant trouver Mr de Groesbech, pour solliciter le congé d'obtenir
sauvegarde de Hollande iii fl.
Au mois de may 1624 paie à Lambert Sandre pour avoir logé
trois soldats Italiens -:.... xxv sous.
Envoyer le 7 de fer 1625 ung saulmont à Monsieur de Witembruch,
affind'estre exempte des soldats, lequel coûtait . . . . . iii fl.
Paie à un messagier envoyer le xvie de décembre 1624 pour
Monsieur de Wittembruch affm que nous eussions à estre sur nos
garde x sous.
A un messagier envoyé le 29 janvier 1625 par ledit monsieur de
Wittembruch nous advertissant que l'armée s'assembloit [a Bouge.
vi sous.
Le 15 de mars 1625 donné à dix soldats pour rafrechir, le chanoine
Boyettemane avoir leu leurs passeporte xxx sous *.
1 Otton de Gendt, seigneur de Diede, connu notamment par la
prise de Wezel (1629).
* Comptes rendus par la Doyenne du Chapitre noble d'Andenne, des
années 1621-23, aux Archives de l'État, à Namur,
14
— 202 —
baron dudit Perwez ' et entre autres trois duclit gouverneur
signées Robert Van Gisfen, la première dattée du xiiiie may,
la seconde du viiie juin et la iiiedu xix° juillet en ce présent
an xvie vint huit. Après laquelle lecture ledit sieur Thouars
at ouvertement confessé/ et de fait la chose est toute congnue
et manifeste à un chacun/ que c'estoit luy qui conduisoit
les paysans del son office lorsque le vint neufiesme août
xvic vint deux, par ordre du gouverneur de cette ville de
Namur, il fut rencontré sur la haute chaussée au lieu dit
la double croix proche Perwez, des troubles2 de l'armée
du comte de Mansfeld, immédiatement après la bataille de
Chessaux lez Flerus. Auquel lieu de la double croix la plus
grande partie desdits paysans, furent d'abord tuez, et la
reste/ qui s'étaient retiré deans une grande prairie reclose
de vuifve haies/ prise à mercy et prisonière et peu après
relaxée au moien de chascun trois escus d'or qu'ils pro-
mettaient payer pour ranchons, levans az cette fin les dois
en forme de serment, et pourquoy ledit Thouars aussy pri-
sonier se rendoit plege et hostagere pour eulx. Se fait,
aiant icelluy suivit l'armée deux nuites, saurait finallement
laissé dévaller de son cheval et se sauver au travers de
l'armée faisant minne de rechercher son cheval, et aiant
au surplus icelluy Thouars, bien expressément dénié d'avoir
supprimé le nom de Henry Guillaume de Williquet bailly
de Perwez, comme n'aiant cognoissance d'icelluy, moins
se reclame des Seigneurs de Berghe ses maîtres, mais bien
qu'estant en croupe du cheval dudit s1' Giffen et recogneu
dudit conte Mansfelt et se mit en cognoissance d'icelluy de
ce qu'il avoit esté maistre d'hostel du conte de Berlaymont,
1 Nous ne possédons aucun renseignement sur cet Albert, marquia
de Berghe, qui ne figure pas que nous sachions dans les notes
généalogiques publiées sur la famille de Glymes à laquelle ledit
Albert paraît appartenir.
2 Lisez : troupes.
— 203 -
gouverneur de Luxembourg ' où ledit conte Mansfelt estoit
bien cogneu et fréquentait le plus souvent en la maison
d'icelluy conte. Ayant aussy ledit Thouars confessé (comme
la vérité est) qu'il est flamen naturel et que au jour dudit
rencontre, il avoit un beuffe parmenté d'or, le pourpoin de
beuftin broudé de cantille et les hautes chausses rouges
semblablement pasmentée et telz que ledit gouverneur
d'Emerickque veut abusivement depintre. Ledit bailly de
Perwez attestant en outre, que aians lesdis deux commis
de Perwez fait tous devoirs d'induire ledit Thouars à faire
en sorte que lesdis paysans relaxer pryassent auditt gou-
verneur d'Emerickque les cinc cens escus d'or par luy
prétenduz, il l'at entièrement refusez, disant ny estre nul-
lement obligé et en estre quitte par l'eschappatoir qu'il ait
fait des mains de ses ennemis. En tesmoing de quoy aie
signé cette audit Namur le ve aoust 1 628.
Protocole du Notaire Berthou, liasse n° 116, aux
Archives de l'État à Namur.
Nous eussions voulu compléter le récit des faits
se rapportant à la triste aventure guerrière du
bailli Nicolas de Thouars et en éclaircir divers
passages obscurs, mais nos recherches à ce sujet
n'ont point abouti. Toutefois nous avons recueilli
quelques renseignements utiles touchant Nicolas
de Thouars Tun des personnages marquants de la
pièce qui nous occupe. Ainsi trouvons nous, sous
1 Florent Comte de Berlaymont d'abord chanoine tréfoncier de
la cathédrale Saint-Lambert à Liège, embrassa ensuite la carrière
des armes. En 1576 il se rallia, avec les autres membres de sa
famille, au parti des Etats-généraux, pour s'unir à Don Juan, lorsque
ce dernier prit le gouvernement général du pays après avoir publié
VEdit perpétuel.
— 204 —
la date du 24 mars 1626, une condamnation volon-
taire * par laquelle Nicolas de Thouars s'engage
à solder, endéans les quatre mois, une somme de
150 florins pour location d'une maison tenue
naguère par feu Jean de Thouars, son frère, en
son vivant capitaine au service des Archiducs
Albert et Isabelle. Cette somme était due à Messire
Guillaume de Patin, seigneur de Linsmeau, qui,
à défaut de payement, avait actionné Nicolas de
Thouars devant le souverain bailliage de Namur.
Condamné de plus aux frais de l'action judiciaire
il fut taxé de ce chef, le 1 août 1626, à « 24 florins
xi s. vi* d. de 40 gros, monnaie de flandre, la
livre. »
Si de ce qui précède on peut conclure que Nicolas
de Thouars était dur à la détente, peut-être fau-
drait-il arguer de la sentence, résumée ci-après,
que ses procédés provoquaient j>arfois de grandes
colères chez ceux qui traitaient affaire avec lui..
Toujours voyons nous le conseil provincial rendre,
le 17 juillet 1627 2, un jugement, concluant à
50 florins d'amende, contre son beau-frère Phi-
lippe d'Avin, écuyer, seigneur de Burdinne, pour
l'avoir frappé au visage « d'un soufflet à sang
« coulant et le renversé dudit coup par terre. »
Le jugement ne mentionne pas la cause de ces
actes de violence mais il est permis de supposer
qu'une question d'intérêts communs soulevée à
1 Registre n° 327, Sentences du souverain bailliage, aux archives
de l'État, à Namur.
s Registre précité.
— 205 —
propos de l'héritage de Jean de Thouars, cité plus
haut, n'y fut pas étrangère.
Abandonnons forcément le bailli Nicolas de
Thouars pour faire connaître un autre document
ayant encore rapport à la bataille de Fleurus
(1622) et dont la teneur suit :
A Messeigneurs du Conseil de Namur,
Remonstre humblement Jean Baptiste de Mynetz, escuyr,
bailly de Viesville, qu'estans certains juifs eschappez des
troupes de Mansfeld, et tombez es mains de quelques
soldats de l'armée de Gonsalve qui les vouloient saccager,
comme les recognoissans pour ennemis, ils furent rescourus
et sauvez par Gérard Morteauwe, Jean WallerancÇ Josse N.,
Thomas Perpette, Jean et Nicolas Queban, frères, François
Renotte et Michel Obelet tous mannans de Fleurus. Les-
quelz ne sachans comme ilz se debvoient gouverner allen-
droict desdis juifs, ilz s'addressèrent audit rencontrant, le
priant de les vouloir secourir de son conseil et que pour ce
regarcf, ilz luy promectoient part égalle à chascun d'eulx
de tout ce qu'ilz auroient desditz juifs pour leur avoir
sauvé la vie, comme dit est, laquelle promesse fut par eulx
faicte au commencement de septembre dernier. Et voyant
que ceste affaire trainoit à la longue et qu'il y couroit
des grands frais, n'ayants aulcuns moyens d'y satitfaire
les susdits Nicolas et Jean Queban, Michel Obelet, Thomas
Perpète et François Renotte auroient convenu et accordé
*avec ledit remontrant qu'en les deschargeant de toutes
fâcheries, poursuytte et despens, et leur donnant, à chascun
deulx, vingt patagons, ilz cédoient audit remontrant le
surplus qui poroit provenir desditz juifs, ainsy que par
l'accord du xiiiie et xviie d'octobre dernier, signé de leur
mains et par tesmoins y prêsentz, ici joinct peut apparoir,
mais estant ledit affaire par la conduicte et partie aux frais
— 206 —
duclit remonstrant venu à bon port et yssue, les prénommez
de Flerus prétendent foustrer ledit remontrant tant de la
part accordée égallement avec eulx que du fruict et effect
du prédit accord fait le xiiiie d'octobre dernier, et lever au
desceu d'icelluy remonstrant tous les derniers consignez
au pouvoir de Philippe de Ponty seigneur de Fumai, bailly
dudit Flerus, cause que pour à ce obvier, le remonstrant
rethire vers vos seigneuries, suppliant le pourveoir de voz
lettres d'adjournement avec clause d'arrest sur lesditz
deniers, attendu que la plus part d'iceulx icy dénommez
sont insolvens et desnué de moyens. Sy ferez, etc.
(Signé) Habdy, 1622 ».
Quoique d'un moindre intérêt la pièce repro-
duite ci-dessus, présente cependant certains points
de connexité avec la précédente. C'est à ce titre
que nous la publions, regrettant de ne pouvoir,
faute de renseignements complémentaires, y ajou-
ter des explications précises.
DÉ VAX DE CASTEELE,
Conservateur des Archives de l'État, à Liègre.
7 O
1 Liasse aux requêtes du Conseil Provincial, année 1622, aux
Archives de l'P^tat, à Namur.
— 207 -
A PROPOS
DE LA
Restauration du Château des Comtes
o«a*)X(î>30-
Au moment où une Commission, animée d'un
sentiment digne d'éloges, s'apprête de commun
accord avec le Gouvernement et l'Administration
communale de la ville de Gand, à faire restaurer
l'antique château des Comtes de Flandre, il n'est
pas sans quelque intérêt de dire un mot de l'ori-
gine et de l'existence de deux piliers, surmontés
de statues, placés anciennement à l'entrée de
l'hôtel de nos princes.
La Commission a décidé de rétablir ou tout au
moins d'essayer de remettre l'état des choses tel
qu'il était en 1280.
Ces deux monuments, la statue du Prince-Car-
dinal Ferdinand Albert et celle du roi Philippe IV,
ne figureront plus dans le projet de restauration,
puisque l'année de leur construction est de beau-
coup postérieure à cette date.
Devant l'ancienne porte d'entrée du château,
conservée encore de nos jours, on remarquait des
deux côtés un petit mur d'appui très peu élevé et
— 208 —
long d'environ un mètre et demi1. En 1635, le
Prince-Cardinal devait faire sa Joyeuse Entrée en
notre bonne ville de Gancl. Les habitants organi-
sèrent à cet effet des fêtes publiques. L'admi-
nistration du Vieubourg de son côté décréta
qu'une porte triomphale serait construite devant
le château ; mais vu le manque de temps (overmits
de corthede van tyde) ce plan fut abandonné. On
résolut alors, pour faire honneur à ce haut per-
sonnage, de placer sur les piliers se trouvant à
l'entrée du château vis-à-vis de celle du roi 2 (te
maken personnaigen up de pilaren vande casteele).
Elles ne furent pas longtemps debout. Les intem-
péries de l'air, la mauvaise qualité de la pierre, le
défaut de construction furent autant de causes
de ruine. En 1770, le collège fut averti par son
grenier, Bauwens, que ces piliers menaçaient de
s'effondrer, Après mûre délibération, il fut dé-
cidé qu'avant de prendre une décision défini-
tive, le greffier-rapporteur s'informerait si l'entre-
tien de ces piliers était de la compétence de
l'administration du Vieubourg 5. Cette dernière
question fut tranchée dans la séance du 23 fé-
vrier 1770. M. Bauwens conclut à l'affirmative,
s'appuyant sur la résolution de 1635 et sur les
dépenses faites par le collège pour leur construc-
tion. A l'appui de son dire, il cite deux extraits
des comptes des années 1635, constatant les paie-
ments faits à cette époque à Jacques Cocx et à
1 Résolutions du Vieubourg , n° 195, f° 1.
* Id., n° 262, f° 80.
3 Id., f° 92 v°. •
— 209 —
Guillaume Veerman pour la confection et le place-
ment des deux statues. Il allègue en outre qu'en
1730 ces piliers avaient déjà été restaurés et que
les frais occasionnés par ces travaux étaient portés
en compte à l'administration du Vieubourg. Le
collège persuadé par ces allégations se décida à
demander la démolition de ces monuments. L'en-
tretien leur en incombait, nous venons de le voir;
néanmoins ils ne pouvaient démolir ces statues
sans l'autorisation du prince, puisqu'elles étaient
considérées comme vieux monuments (door dien
dat het syn oude monumenten). Crest pourquoi le
Conseil du Vieubourg après avoir entendu la décla-
ration du maître maçon, Jean Bte Simoens, invo-
quant l'impossibilité de la restauration, prit dans
sa séance du 2 mars la décision d'en référer à
Sa Majesté l'Impératrice \ Le pensionnaire van
Yperseele, et le greffier, furent chargés de rédiger
la requête que nous reproduisons ci-après : .
Madame,
Le magistrat de la châtellenie du Vieubourg de Gand a
l'honneur de représenter à Votre Majesté qu'à l'occasion de
l'entrée du Prince Ferdinand, Cardinal infant d'Espagne
dans la ville de Gand, leurs prédécesseurs ont fait construire
en 1635 deux piliés ou piédestals devant la grande porte
du château des Comtes, où le Conseil de Flandres et le
Vieubourg tiennent leur assemblée sur lesquelles lors ont
été posés les statues du Roi Philippe quatre et du Prince
Cardinal susdit; on a eu soin de tems à autre de faire
réparer ces piédestals, qui à présent menacent journalière-
1 Résolutions du Vieubourg, n° 262, i'° 95 v°.
— 210 —
ment ruine, sans pouvoir être restaurées, étant de tout
côtés hors de leur centre, comme les déclarent les experts
à ce assumés, ajoutants en oultre que la chaux et les pierres
se trouvent presque entièrement consumés et les statues si
défigurées par les injures de l'air et la mollesse des pierres
dont ils sont construits qu'il ne leur reste plus la moindre
ressemblance; le danger éminent de leur ruine et les mal-
heurs qu'elle pourroit causer, a porté le Conseil en Flandre
à nous recommander d'y pouvoir, or, comme il n'y a d'autre
moyen qu'en ôtant les piliés avec leurs représentations,
qui, quoique directement construits par la châtellenie des
remonstrants pourroient pas moins être considérés pour des
anciens monuments publics, nous avons trouvé convenir
d'y porter le moindre changement sans la connoissance et
agréation préalable de votre majesté, àquel effet nous pren-
nons votre très humble recours vers elle
afin que son bon plaisir soit d'agréer que les remonstrants
fassent ôter les dits piliers et statues y dressés.
C'est la grâce, etc.
C'est en vain que nous avons cherché la réponse
à cette lettre; mais nous pouvons conclure que
la démolition en avait été autorisée, vu que dans
la séance du 6 avril, le collège, après exhibition
de deux modèles de piliers, faite par M. Van
Yperseele, décide de charger de cette affaire le
conseiller de Coninck. Ce dernier s'aboucha avec
Simoens, maître maçon, pour la reconstruction
de ces monuments (nopende de plaetse als de
hooghte te stellen ende t'eynden dies daervan
rapport doen aen het collegie).
Des statues, on n'en parle plus. Leur restaura-
tion étant impossible, elles auront été détruites.
Robert Schooeman.
— 211 -
VARIÉTÉS,
Origine du marché aux fleurs de la place d'Armes. —
Un horticulteur gantois, peintre et marchand de
tableaux. — Un jardinier gantois, nommé Antoine Ver-
stuyft, se rendit un dimanche matin du mois de juin de
l'année 1772 au marché aux Oiseaux avec quelques plantes
et quelques pots de fleurs qu'il exposa en vente.
Verstuyft avait acheté ces fleurs au jardinier de la
famille Borluut. Celui-ci jouissait d'une certaine noto-
riété à Gand où il était généralement connu sous le nom
familier de Tieste van Borluufs, c'est-à-dire Baptiste de
chez Borluut.
Cette première tentative ayant pleinement réussi, Antoine
Verstuyft, ou plutôt Tontje comme on l'appelait ordinai-
rement, revint les dimanches suivants, augmentant chaque
fois l'assortissement des produits horticoles qu'il offrait en
vente aux promeneurs et aux amateurs. Mais au lieu de
retourner au marché aux Oiseaux, il se plaça sur le Kouter
où un simple banc de pierre lui servit à étaler sa mar-
chandise.
Verstuyft trouva bientôt de nombreux imitateurs. Plu-
sieurs jardiniers de la ville et des environs vinrent s'établir
aussi, tous les dimanches, à la place d'Armes, les uns
exposant leurs fleurs et leurs plantes sur les bancs ou les
plaçant simplement à terre, les autres les étalant sur leurs
charrettes ou sur leurs modestes brouettes.
— 212 —
C'est donc de l'année 1772 que date l'origine du marché
aux fleurs qui se tient le dimanche, pendant la plus grande
partie de l'année, sur la place d'Armes.
• Quand on compare les brillantes expositions de fleurs,
de plantes et d'arbustes qu'il nous est donné, deux fois par
semaine, d'admirer aujourd'hui à la place d'Armes avec ce
qu'étaient les simples et primitifs étalages d'autrefois, on
reste frappé de l'extension considérable que le commerce
horticole a pris dans la ville de Gand. Au train dont vont
les choses, la place d'Armes ne suffira bientôt plus à nos
horticulteurs pour y exposer en vente les produits, si riches
et si variés, de leurs serres et de leurs jardins.
Un almanach flamand, qui parut à Gand en 1816 sous le
titre de « Het verheerlyht Vlàenderen of den vlaemschen
Hovenier, » publia toute une série d'éphémérides concernant
l'agriculture et l'horticulture. Il mentionne l'origine du
marché aux fleurs de la place d'Armes dans les termes
suivants :
« Bat Tontje Verstuyft de eerste reys op den Vogelmerkt
« in Juny stond met een vente van zes potjens Balsaminen,
« die Tieste van Borluuts hem verhogt hadde, en eenige
« struykskens kassamven 44 jaren. »
L'auteur des éphémérides a mis en note : Oorsprong van
den zondayschen Bloem-merht, origine du marché aux fleurs
des dimanches.
Tout l'étalage du jardinier Verstuyft consistait donc en*
six pots de balsamines et quelques plants de pâquerettes
doubles.
Le portrait de Tone Verstuyft, fait au pastel en 1775, se
trouvait conservé dans une de nos familles d'horticulteurs
gantois. Lors de la grande exposition quinquennale de
1888, organisée par la Société royale d'Horticulture et de
— 213 —
Botanique de Gand, ce portrait orna les murs de la salle
de Frascati ', où il faisait pendant au portrait, également
au pastel, du jardinier Van Cassel un des trente-quatre
fondateurs de cette puissante association.
Verstuyft est représenté en costume de travail et appuyé
sur sa bêche. Au bas du portrait est écrit : « Aen zynen
« vriend Tone Verstuyft opgedraeghen door Nicolaes
« Lefeber. — 1 775. » Offert à son ami Tone Verstuyft par
Nicolas Lefeber.
. Dans le Wegwyzer de 1775 nous trouvons à la page 114,
sous la rubrique Schilders, le nom de Lefeber qui demeurait
alors près du pont de Saint-Gilles. Nicolas Lefeber figura
pour la première fois en 1 760 sur le registre de la corpo-
ration des peintres, de Neerynghe van de fynschilders,
beelthauicers, glaesemaeckers ende andere litten daer onder
sorterende.
Un horticulteur gantois du nom de Willem Lefeber
demeurait en 1740 dans la rue du Repentir, près du couvent
des Chartreux, omirent de Chartreusen by het Ossenhooft in
't Beramo, comme nous l'apprend une annonce de la
Gazette van Gendt par laquelle il fait savoir qu'il tiendra
une vente publique d'anémones, de renoncules, d'hyacinthes
et de tulipes.
Le peintre Nicolas Lefeber était, à n'en pas douter, fils
de Willem Lefeber et avait comme lui la passion des fleurs,
qu'il continua de cultiver dans la maison paternelle de la
rue du Repentir. Cela est certain quand, on considère que
le pont de Saint-Gilles aboutit à la rue du Repentir et est
situé, comme celle-ci, à proximité du couvent des Chartreux.
1 On se rappellera qu'à cette exposition on éleva une construction
qui représentait l'intérieur de l'estaminet Frascati, à la Coupure,
où la société fut fondée en 1808. Dans cette salle on plaça sur des
tables un exemplaire de chacune des plantes qui avaient paru à la
première exposition, tenue par la société au mois de février 1809,
— 214 —
Il s'agit donc dans la Gazette van Ghendt de 1740 et dans
le Wegivyzer de 1775 d'une seule et même habitation.
Nicolas Lefeber, voulant rendre hommage à son collègue
en horticulture Tontje Verstuyft, fit le portrait au pastel
que nous avons vu à l'exposition de ] 888 et qui n'est pas
sans mérite.
Dans le Wegwyzer de 1783 Lefeber figure aussi comme
marchand de tableaux, koopman in schilderyen, demeurant
au Meerhem. On sait que le nom de Meerhem est donné
à un quartier de la ville qui comprend, entre autres, la rue
du Repentir, la rue des Chartreux et le pont de Saint-Gilles.
P. C.
L'Arbre de la liberté a Gand. — Cet arbre était un
chêne qui fut planté sur le marché du Vendredi, le 26 no-
vembre 1792 % par quelques paysans qui l'avaient trans-
porté en ville. Le bonnet jacobin fut posé au sommet par
les nommés Pierre Ameels et N. Schits, ferblantier. Les
militaires et la canaille qui se trouvaient à cette solennité
auguste, dansèrent autour de ce symbole de la liberté
française ; on peut dire que la joie de cette fête fut partagée
par des gens parfaitement égaux, avec cette remarque essen-
tielle que, parmi eux, il n'y avait pas un seul honnête
homme. Comme on craignit que certaines gens, surtout
ceux qui avaient quelque chose à perdre et qui réfléchis-
saient sur les mœurs et les discours des chefs militaires,
1 Le soir de ce jour, on pilla la maison de l'apothicaire De Bruicker,
marché aux Herhes. 11 circulait, ce soir, une fausse patrouille très
nombreuse, composée de Belges et parmi laquelle se trouvait un
nommé Biscop, fils d'un médecin. Cette patrouille qui ne savait pas
le mot, et n'avait d'autre but que le désordre, fut désarmée par la
patrouille des Français, près du Vieux-Bourg.
— 215 —
auraient pu appliquer à cet arbre le texte de l'Evangile :
omnis arbor qui non fert fructum bonum excidetur et in
ignem mittetur, on jugea à propos d'y poster plusieurs
sentinelles qui assurèrent plus d'une fois avoir entendu de
très près le sifflement de balles de fusil. Ce furent ces
sifflements et quelques mauvais propos qu'on lâchait dans-
les cabarets qui obligèrent de conserver ces sentinelles
jusqu'au 21 décembre ; ce jour, le maréchal Ferrand les fit
retirer en annonçant, dans une proclamation, qu'il étoit
vraiment honteux d'avoir mis si longtems des gardes pour
veiller le saint arbre de la Liberté, qu'il se flattoit que tout le
monde lui auroit porté le plus profond respect, en auto-
risant chacun d'assassiner impunément tous ceux qui
auroient tenté de lui porter la moindre atteinte.
Chevalier J.-F.-X. Diericx.
La Statue de Charles-Quint. — A peine entrés dans
la ville de Gand, les Français signalèrent leur saint zèle
pour la liberté et l'égalité en détruisant toutes les armoiries
qui se trouvaient dans les églises et sur quelques maisons.
La statue de Charles-Quint devait subir le même sort, car
l'égalité devait s'établir avec effet rétroactif. Cependant, la
populace même, accoutumée de voir cette statue dont elle
n'avait point sujet de se plaindre, hésitait à le faire et
paraissait effrayée d'y porter les mains, lorsque, à l'insti-
gation des héros de la liberté, les nommés Jean Vande
Vivre, maçon, Tuytens, cordonnier, De Vos et Van de
Wandel, tailleur, parvinrent à faire tomber la statue de la
colonne sur laquelle elle se trouvait. Le premier pas fait,
la libre canaille s'en empara et la traîna par les carrefours
de la ville, en l'insultant de la manière la plus dégoûtante.
A ces horreurs succédèrent des indignités d'un autre
— 216 —
genre : il fallait détruire la superbe colonne qui servait de
piédestal. Mais comment ébranler, comment renverser ce
colosse? Le génie gordun aidé de celui des Jacobins français
ne pouvait se trouver en disette d'expédients. Le fameux
aristocrate nommé Vos, charpentier, demeurant au marché
du Vendredi, vint offrir des instruments et des cordes ; on
y attela des chevaux, et, en moins d'une demi-heure, on
parvint à briser un des plus beaux monuments de la Flandre.
Les fils de Claes Vande Vivre s'emparèrent du plomb qu'ils
avaient arraché du piédestal et le vendirent à un marchand
de cuivre qui demeurait au marché du Vendredi, aen het
Metershais.
Chevalier J.-F.-X. Diericx.
Jacob Hessels. — La pièce suivante a été extraite du
registre intitulé : « Resolutiën van den Hove, 1679-1737,
fol. 155, » faisant partie des archives de l'ancien Conseil de
Flandre, aux archives de l'État à Gand. Elle concerne le
fameux Jacob Hessels, membre du conseil des troubles, plus
tard Conseiller du Roi à Gand, pendu par les gantois révol-
tés, à Westrem St-Denis, le 4 octobre 1 578.
On sait que les restes de cet infortuné furent exhumés
sept ans après et transportés solennellement en l'église
Saint-Michel à Gand, où on lui érigea un monument
funèbre. L'auteur anonyme de l'Elogium martyrium ain-
plissimi nobilissimique viri Jacobi Hessellii, etc., raconte
que lors de l'exhumation, le cadavre de Hessels fut trouvé
en parfait état de conservation; on considéra la chose
comme un miracle et on alla même jusqu'à réclamer plus
tard pour lui les honneurs de la béatification.
Voici la pièce que nous communiquons aux amis de l'his-
toire, où Ton verra qu'un siècle après il fut réellement
— 217 —
encore question de provoquer pour Hessels l'intervention
du Saint-Siège en vue de sa béatification :
« Le xxix d'Avril 1678 le seigneur Jacques Félix Coninck,
conseiller de ce conseil, a déclaré et promis de donner sa
pinture excellente du dernier jugement pour estre mise et
colloquée avec ses armes dans la chapelle de cette court,
aussy tost que feu le conseiller Jacques Van Hessele,
exécuté par la corde pour la religion seroit béatifié par le
Saint-Seige. Faict en présence des soubsigniez président,
conseiller, greniers et notaire du dict conseil, et estoit
signé : L. Errembault, L. Triest, P. Stauthals, C. Reninghe,
B. Van Overwaele, A. J. Helias, J. de Vriese ende V. Lijnde.
Laquelle donation ie soubsigné a accepté au nom du
conseil. Actum le jour, mois et au susdit et estoit signé
L. Errembault.
Hedent den sesden 7briR 1715 is aen den onderschreven
ter handt ghestelt uyt het sterfhuys van wijlent den pré-
sident Errembault de nevensgaende origineele acte van
gifte mette acceptatie van deselve in den naeme vanden
hove, dewelcke den onderschreven van syn devoir gheacht
heeft thove te presenteren omme daervan te disponeren soo
tselve sal believen t'ordonneeren ende was onderteeckent
Fiscael.
Sij gheenregistreert ende het origineel bewaert inde
fiscaele camer, actum 6 september 1715 ende was onder-
teeckent. delà Court.
Ordonnances de Louis de Nevers, comte de Flandre,
RELATIVES A LA FABRICATION DES DRAPS- On connaît
l'importance que la fabrication des draps et le commerce
15
— 218 —
de la laine ont eue, au moyen-âge, en Belgique et notam-
ment dans quelques villes de Flandre; mais les conditions
du travail sont moins connues; les Keures de nos métiers
contiennent sur ce point de précieuses indications; en
attendant qu'on les ait publiées, il ne sera pas sans intérêt
de faire connaître de quelle manière le souverain y inter-
venait dans les moments de crise.
Deux des ordonnances que nous publions sont relatives
au prix de la main-d'œuvre des ouvriers foulons, au
XIVe siècle, à Termonde et à Hulst ; elles accordent toutes
les deux une augmentation de salaire, mais il y est expres-
sément stipulé que ce n'était que jusqu'à révocation; on
peut donc considérer ces mesures comme temporaires.
La draperie fut pendant longtemps l'industrie la plus
considérable de Termonde ; elle y était, comme le dit une
ordonnance du duc de Bourgogne, de l'année 1441, la prin-
cipale ressource de la ville ; mais au XVe siècle cette
industrie y était à son déclin, ainsi que le constate une
autre ordonnance de 1427 ; on y attribue cette décadence,
ainsi que celle du commerce des cervoises de Harlem, aux
guerres de Hollande et de Zélande, et à la mutation du
cours des monnaies '. Cette ordonnance du duc avait
pour but d'autoriser la ville à prendre des mesures pour
remédier au triste état de ses finances.
Au XIVe siècle la draperie avait déjà subi une crise; le
comte de Flandre dit dans son ordonnance, qu'ayant appris
que les foulons de Termonde étaient dans une situation
si pénible qu'ils pouvaient à peine suffire à leurs besoins
par leur salaire, et à se procurer des moyens d'existence
à cause de la cherté des vivres, il a cru nécessaire de fixer
le salaire des foulons à raison de 9 escalins par. par pièce
1 Y. Annales du Cercle archéologique de Termonde, année 1870,
p. 219 et 234.
— 219 —
de drap qu'ils fouleront; mais cette augmentation ne leur
est accordée que jusqu'à révocation, et sans vouloir retirer
l'accord conclu avec les drapiers et saufs les privilèges de
ceux-ci.
Lettre van den lone vander volrien van Denremonde :
« Wy Lodewyck, grave van Vlaenderen, van Nevers en van
Rethelt, doen te wetene... om dat coiïien es t'onser kenessen
dat onse poort van Denremonde, daer wy nieuwinghe toe
commen siin als heere, dat de goede liede van der volrien
van onser voorseide poort so cranken ende cleenen loen
hadde van den lakenen te vollene, dat sy hem daerup niet
mochten noch hare leeftocht hebben naer den dieren tiden
dat nu ziin. Dat wy aensiende de vorseide dinghen ende de
aermoede van hemlieden, hebben, als hère, ute onser her-
licheit om weldoen ende ute gratien gheordonneert en
gheseit, segghen ende ordeneren, dat de volrés vorseid
zullen hebben van nu voort van elken stryptenlakene te
vollene nçghen scellinghe par. Vlaendersce munte, ende
van andren werke in 't avenant, dit ghedurende tôt onsen
wederoupene dat daerof gheordeneert zal ziin hiernaer,
naer dat de tyt dan wesen zal. Ende es te verstane, dat wy
dit aldus te deser tyt gheordeneert ende gheseit hebben
niet wedersegghende den drapeniers van onser voorseide
poort ende bi den redenen vorseid emmer niet te breken
wesende de beseghelte ende acort gemaect voor dese tyt
tusschen den drapeniers ende der volrien vorseid, ende
behauden haren anderen bezeghelten ende vriheden die zy
hebben als verre als sy sculdich syn te hebbene, ende zy
redenlic zyn. In orconscepen ghegheven den vii dach van
septembre in 't jaer M.CCC.LVI.
« Bi min hère in sirten raed daer ghi en waert.
« (S.) H. Vliederbeke '. »
1 Cartulaire de Louis de Nevers, p, 109 v°.
— 220 —
L'ordonnance du comte relative aux foulons de la ville
de Hulst fut donnée l'année suivante (1357); elle se fonde
également sur la cherté des vivres ; elle augmente de 2 gros
le prix de la main-d'œuvre par pièce de drap teint avec de
la garance, et elle le fixe à 1 f > gros ; pour les autres draps
l'augmentation sera à l'avenant. Il y est ajouté que cette
ordonnance a été prise du consentement de la Loi de la
ville, qui avait jugé que cette mesure serait avantageuse
à l'industrie de la draperie.
« Wy Lodewyc... doen te weten allen lieden, dat wy ute
specialre gratien, aensiende dat aile dinghen zere verdiert
zyn, ten nerenster supplicatien van onsen lieden van der
volrien van Hulste, hebben gheconsenteert ende consen-
teren bi desen lettre, dat de volres van Hulste vorseid
voortaen heffen ende nemen zullen van arbeitslone van
meederode lakene te volne, twee groote meer dan zy ghe-
daen hebben tote nu toe; dats te wetene, dan zy te voren
derof nemen xiiii gr. ; dat zy nu hebben zullen van elken
lakene xvi gr., ende van allen andren lakene ende sticwerke
in't avenant; dit ghedurende tôt onser wederroupen; ende
de vorseide gratie hebben wy ghedaen den vors. volres
emmer bi also dat onser wet van Hulst profitelic dunct om
d'behout van harer draperie.
« Ghegheven te Ghent den xi dach van September in't
jaer LVII ». »
En 1356 paraît une nouvelle ordonnance du comte sur
la même matière, elle avait sans doute été portée à la suite
de revendications injustes de la part des drapiers d'Ypres,
contre ceux de Roulers ; car le comte déclare que cette der-
nière ville n'est pas comprise dans le rayon de trois milles
1 Curt. de Louis de Nevers, p. 113.
— 221 —
autour cTYpres clans lequel la fabrication des draps était
soumise à certaines mesures restrictives,, notamment pour
la longueur et la largeur des pièces. L'ordonnance du comte
indique ces restrictions qui étaient mentionnées dans les
privilèges accordés aux drapiers de cette ville.
Lettre van dien van Roeselare dat zy niet begrepen ziin
in de lettre van de draperie van der stede van Ypre.
« Lodewyc, grave van Vlaenderen, by die gratien Godt
hertoghe van Brabant, grave van Nevers, van Rethel ende
heere van Machline, allen den glienen die dese lettren
zullen zien ende hoeren lesene salut. Als wy by zekeren
zaken hebben • ghegheven ende ghewilckeurt onser stede
Ypre in vryheden, dat niemene wonende iof wesende bin
dryen milen naer onser vorseide stede van Ypre omme-
gaende, zal moglien drapieren eeneghe lakene langhere dan
achte ende dartich allen lanc ende neghen vierendeel
breet, ende eene half autret ; ende aile lakenen die zy maken
ende drapieren so lanc ofte der ondere bin der vorseide
dryen milen zullen moeten hebben lysten van vier ende
twintich draden uit xii rieden, einmer twee dumen breet
liggliende in den vout ' ; ende dat oec niemene bin den vor-
seide dryen milen ommegaende sal moghen houden staende
reeke langhere noch breedere dan vorseit es; en wie dat
bevonden ware clat hy de contrarie dade, zoude verbeuren
t'onsen bouf de lakenen ende daertoe vyftich ponden pa-
risis telker waerf, alsoet de vorseide dinghen met andren
poincten staen ghescreven claerlick in de letteren die wy
onser vorseide stede derof ghegheven hebben. Weten aile
lieden dat onse meeninghe niet es dat in de vorseide
1 II s'agit sans doute ici de la chambre de la maison qui porto
encore actuellement eu Westflaudre le nom de volte, et qui est
placée au dessus de la cave, et ailleurs en Flandre, tout, voûte.
— 222 —
dinghen begrepen zy de poort van Roesselare noch derin
ghehouden, raaer liebben de vorseide poort van Roesselare
van al tal utegheleyt, staende onghehouden in de vorseide.
dinghen, als by expresse wel verclaert staet in de lettren van
der vorseide vryliede. In orsconscepe ghegheven te Brugghe
den xviii dacli in Laumaent in't jaer LVI (1356 i).
Dans un moment où la question du travail occupe une si
grande place dans les préoccupations du monde industriel,
il n'est peut-être pas sans intérêt de connaître à quelles
mesures on recourait jadis en cas de crise. L'intervention du
souverain en pareilles circonstances ne doit pas nous sur-
prendre, car l'industrie des villes, grâces aux privilèges
accordés aux métiers, était fortement protégée. Ce système
économique, qui était né des circonstances, devait à certains
moments amener des crises industrielles; celles-ci ont peut-
être dans maintes circonstances été la cause des troubles
qui ont désolé la Flandre, notamment au XIVe siècle, et
ont fini, la guerre aidant, par y ruiner l'industrie. Celle-ci
se transporta ailleurs, grâces à l'émigration et aux bannis-
sements qui ont décimé la population. L. St.
Observation' d'un physicien au sujet de la conserva-
tion des tableaux sur toile. — M. le professeur de
l'Université de Gand, G. vander Mensbrugghe, publie, dans
les Bulletins de V Académie royale de Belgique (XXIV, n° 2)
une note sur la condensation de la vapeur d'eau dans les
espaces capillaires. Dans les faits qu'il cite comme preuves
de l'influence des espaces capillaires sur cette condensation,
nous relevons les lignes suivantes, dignes de l'attention de
1 Cart. de Louis de Nevers, p. 109.
- 223 —
ceux qui s'intéressent à la conservation des chefs-d'œuvre
de la peinture :
« ... Je rappellerai, dit le savant professeur, que les toiles
peintes se détériorent bien plus sur la face postérieure,
formée par un tissu offrant mille et mille espaces capil-
laires, que sur la face peinte et recouverte d'un vernis. La
théorie indique qu'avant d'exposer des tableaux dans des
musées, dans des églises, etc., il faudrait prendre des pré-
cautions qu'on néglige généralement. Pour empêcher
l'altération très lente, mais continue, que produit l'humidité
dans le tissu des toiles peintes, il serait extrêmement utile
de vernir la face postérieure, préalablement séchée, et de
remplir ainsi tous les petits espaces de la matière textile.
Si l'on ne peut vernir la face postérieure sans modifier les
teintes du tableau, il faut au moins recouvrir cette face
d'un autre tissu rendu imperméable. Je n'hésite pas à
conclure que cette précaution permettrait de maintenir
pendant très longtemps les toiles peintes en bon état de
conservation. — Ce qui confirme complètement, selon moi,
la justesse de cette conclusion, c'est que parmi les tissus
qui ont résisté le mieux aux injures du temps, on peut
citer les minces bandelettes qui entourent la tête des
momies égyptiennes embaumées, et qui offrent encore de
la cohésion après que les cadavres exposés à l'air sont
tombés en poussière. Ces bandelettes sont empreignées, en
effet, d'une espèce de résine que les anciens Égyptiens
désignaient sous le nom de commi... » D.
Vente de porcelaines en 1788. — « Notte l d'une partie
de très fine Porcelaine de Saxe ou de Dresde, qui se vendra
publiquement au plus offrant le 29 décembre 1788 et jour
1 Copie textuelle.
— 224 —
suivant dans la maison de M. Lixson, estimateur, rue
Feronstrêe, près de St-Georges à Liège. On peut venir voir
les Porcelaines, quatre jours avant, dans la ditte maison. Le
payement doit se faire d'abord comptant et l'on suivra
dans la vente les numéros selon leur rang, en commençant
par n° 1 et finissant par n° 75. »
N° 1 à 4. — 4 Tasses à chocolat, avec des chiffres, abords
dorés, adjugés à M. Sauvage fl. 16-10
N» 5. — Une tabattière ovale avec le portrait d'une Paï-
sanne-en dedans, adj. à M. Deprez » 12-15
N»6. — Une autre quarrée avec des païsages en dedans,
adj. à M. Deprez » 8-10
N° 7. — Une moyenne jatte à ponche cicelée bleue, adj.
à M. Deprez » I5rl0
j^o 8. — Deux figures représentai les Enfans de Jardi-
niers, adj. à M. Sauvage » 20-00
N° 9. — Une soupière avec son couvercle et sa soucoupe
à fleurs en couleurs, bord brun, adj . à Mme Lasseuse . •> 16-10
N° 10. — Une grande tasse à bouillon à bord doré, adj.
à M. le comte de Videu » 7-00
N° 11. — Une autre haute avec couvercle idem, adj. à
M. le chanoine Delchef ...» 8-00
N° 12 à 15. — 4 Tasses à chocolat, avec des chiffres, à
bord doré, adj. à M. Sauvage » 24-00
N° 16. — Une grande jatte à ponche fleurs en couleur
bord doré, adj. à M. le comte de Videu ..... » 41-00
N° 17. — Une cuiller à ponche y accordant, idem bord
doré, adj. à M. le comte de Videu » 8-00
N° 18. — Un chien bien fine, adj. à M. Lixson pro Mr de
Loets de Trixhe ' » 23-00
N° 19. — Une grande tasse à bouillon ou à chocolat avec
couvercle à bord doré dentelle, adj. à M. Leduc apot. » 8-10
N° 20. — Une autre à bord de guirlande doré avec cou-
vercle, adj. à M. Leduc apot » 7-00
1 Woot de Trixhe.
— 225 —
N° 21 à 24. — 4 Tasses à chocolat à chiffres avec cou-
vercles bord doré, adj. à M. Leduc apot fl. 26-00
N° 25. — Un service complet de table, de 24 assiettes à
soupe et 72 autres assiettes, 14 plats ronds de diffé-
rentes grandeurs de n° 1 à 4, 2 grandes et 2 petites
terrines avec leurs soucoxipes, 4 moyennes et 4 petites
saladier es, 4 plats ovals pour le rôti, 2 saucières, 2 go-
dets à beur avec leurs soucoupes, 2 coupe beur et
6 salières, le tout, ozier nouveau à fleurs naturels en
couleur et bord doré, adj. à M. Boulanger, prélocuteur » 680-00
N° 26. — Une déjeuné renfermé dans un écrin consistant
en un plateau, un pot à thé, un pot à lait, 2 tasses,
2 cuillers et un sucrier, avec des figures pastorales des
plus fines, abord dentelle doré, adj. à M. Deprez . » 150-00
N°27. —Une grande pendule à répétition, avec Cupidon
et un aigle à coté, Jupiter au dessus et piédestal de
2 figures, représentantes Vulcain et le Tems, adj. à
M. Sauvage • » 230-00
Total de la première page . . fi. 1302-15
N° 28. — 5 groupes de 2 figures chacune, avec des orne -
mens de dentelles, représentantes les 5 sens, adj. à
M. Libert fl. 230-00
N° 29. — Un service complet à caffé, consistant en un pot
à caffé, un à thé, avec sa soucoupe et un pot à lait, un
sucrier, une boite à thé, un godet, 12 tasses à caffé et
6 tasses à chocolat, avec des peintures fines en cou-
leurs, représentans différentes chasses, à bord doré
dentelle, adj. à M. deLoets de Trixhe, tréfoncier . . » 280-00
N° 30. — Un groupe de 3 figures représentant Annette et
Lubin, adj. à M. de Loets de Trixhe, tréfoncier. . . » 41-00
N° 31. — Une grande tabattière quarrée avec un pot à
bouquets en dedans, adj. à M. Deprez » 5-10
N° 32. — Une autre petite avec des fruits en dehors, adj .
à M. le chanoine Delchef » 4-00
N° 33. — Une grande jatte à ponche, cicelée bleue, adj.
à M. le bourgmestre de Chestret » 28-00
N° 34 à 35. — 4 Cuillers à thé » 1-15
N° 36. — 2 Figures représentans des Enfants de jar-
diniers, adj. à M. le comte de Videu » 20-00
- 226 —
N° 37. — 12 Feuilles moyennes de chêne pour dessert, à
fleurs en couleurs, bord doré, adj. à M. Boulanger . . fl. 15-10
N° 38. — 12 autres petites idem, adj. à M. le bourgmestre •
deChestret » 7-00
N° 39 à 44. — 6 Tasses à chocolat, avec des chiffres, à
bord doré, adj. à M. Hotchamps . . . . . . . . » 32-10
N° 45 à 48. — 4 autres avec couvercles idem, adj. à
Mme Lassence » 31-00
N° 49. — Une grande tasse à bouillon ou à chocolat avec
son couvercle, à bord doré en forme de guirlande, adj.
à M. Sauvage » 11-05
N° 50. — Une autre idem à bord doré dentelle, adj. à
M. Sauvage. ...;... » 9-15
N°51. — Une petite soupière avec son couvercle et sa
soucoupe avec des feuilles gravées en or et à bord doré,
adj. à M. Lenaerts » 30-10
N° 52. — Une grande jatte à ponche lisse bleue, adj. à'
M.Ae chanoine Delchef » 31-00
N° 53. — Une ditte moyenne, adj. à M. Delchef capitaine » 15-00
N° 54. — Une grande tasse à bouillon à bord doré, adj.
à M. le comte de Videux " 8-10
N° 55. — Une petite soupière avec son couvercle et sa
soucoupe à fleurs en couleurs, bord brun, adj. à
M. Sauvage " 17"10
N° 56 à 58. — 3 Tasses à chocolat, à chiffres, avec cou-
vercles à bord doré, adj. à M. Sauvage .... . » 16-10
Total de la deuxième page . . fl. 836-05
N° 59 à 63. — 5 dites sans couvercles, idem, adj. à
M. Destrivaux fl. 22-00
N° 64. —2 Cuillers à thé, adj. à M. deChestret ...» 2-00
N° 65. — Un complet service à caffé, mêmes pièces que
sous n° 29, avec des oiseaux Indiens en couleurs, à bord
doré, adj. à M. Duguet » 165-00
N° 66. — 12 Feuilles de chêne moyennes pour dessert, à
fleurs en couleurs, bord doré, adj. à Mme Lassence . . » 14-00
N° 67. — Un complet service à caffé renfermé dans un
écrin, mêmes pièces que sous n° 29, avec verd mosaïque
et des païsages en couleurs peinture fine, à bord doré,
adj. à M. Deprez . «225-00
— 227 —
N°68. — 2 Figures représentais desenfans de jardiniers,
adj. à M. le comte de Videu fl. 20-00
N° 69. — Une grande jatte à ponche, avec des fleurs na-
turels en couleurs, à bord doré, adj. à M. Deprez . . » 42-00
N° 70 à 75. — 6 Tasses à chocolat, avec des chiffres, à
bord doré, adj. à Mme Kempeners ......... 30-10
Total de la troisième page . ~ fl. 520-10
Ce que j'atteste J. J. Richard nottaire.
Première page . . fl. 1302-15
Deuxième page. . ». 836-05
Troisième page. . » 520-10
~~ fl. 2659-10*
DÉ VAN DE CASTEELE.
Rapport sur le projet de restauration de la Halle
aux draps a Gand, présenté au conseil communal par
M. Wagener. — « Messieurs, à plusieurs reprises déjà il a
été question, au sein du conseil, de la restauration de notre
Halle aux draps, qui date de la première moitié du 15e siècle,
dont la façade gothique est aujourd'hui dans un état de
délabrement lamentable, et qui, lorsqu'elle sera remise en
état, comptera parmi les monuments les plus intéressants
de l'architecture civile en Belgique.
« Un premier crédit de 10,000 francs a été inscrit à cet
effet au budget de 1889. Un deuxième crédit de même im-
portance figure au budget de l'année courante. Le moment
est venu de mettre la main à l'œuvre: Si on ne l'a pas fait
plus tôt, c'est que la restauration d'un édifice comme la
Halle aux draps, qui a subi dans la suite des temps des
modifications considérables, soulève de nombreuses et im-
portantes questions d'archéologie, qui ne doivent être
résolues qu'avec maturité.
1 Protocole du notaire Richard aux archives de l'État à, Liège.
— 228 —
« La commission locale des monuments a été chargée par
le collège d'étudier ces difficiles questions et je considère
comme un devoir de déclarer ici que cette commission s'est
acquittée de la tâche qui lui avait été confiée avec un zèle
et un talent auxquels il serait injuste de ne pas rendre
hommage.
« Deux de ses membres, MM. De Waele et Van Assche
ont, de commun accord, en renonçant généreusement à toute
rémunération de ce chef, élaboré un projet de restauration
(plans et devis) qui, après avoir provoqué, au sein de la
commission locale, une discussion approfondie, a été soumis
à l'avis de la commission royale des monuments. Celle-ci,
tout en faisant un éloge mérité du projet, a présenté plu-
sieurs observations, qui ont donné lieu à un nouvel examen
et à de nouvelles discussions.
« Je ne crois pas devoir entrer dans le détail de cette
laborieuse instruction. Qu'il me suffise de dire que, sur deux
points notamment, se sont produites d'assez notables diver-
gences d'opinion. ,
« L'escalier extérieur conduisant au perron doit-il être à
simple ou à double volée ? La solution de cette question
dépendait en grande partie du point de savoir s'il fallait
éclairer par une large fenêtre, donnant sur la rue, la galerie
voûtée qui longe la demeure de M. Voituron. Si cette
fenêtre était nécessaire, l'escalier à simple volée s'imposait,
et c'est cette solution qui fut d'abord adoptée. Mais des
recherches ultérieures démontrèrent que dans la construc-
tion primitive la galerie voûtée mentionnée ci-dessus était
éclairée dans toute sa longueur par des fenêtres latérales.
Dès lors la large fenêtre prévue dans la façade devenait
inutile.
« D'un autre côté, il fut constaté par des fouilles que
l'escalier conduisant jadis au perron se composait d'une
double volée. A la suite de ces deux constatations, le doute
— 229 —
n'était plus permis, et le double escalier fut admis aussi
bien par la commission locale que par la commission royale
des monuments. C'est cet escalier qui figure sur le plan
soumis à votre approbation.
« Une deuxième question était celle de savoir si les
corniches supérieures des tourelles d'angle avaient été sur-
montées autrefois d'une balustrade à jour.
« Cette question fut soulevée d'abord par la Commission
royale des monuments, dont l'attention s'était portée sur la
grande saillie de ces corniches.
« Elle émit l'idée que des recherches faites sur la tablette
supérieure faciliteraient la solution du problème. Ces recher-
ches eurent lieu, mais n'aboutirent à aucun résultat décisif.
On plaça alors un simulacre de galerie à jour à la naissance
des tourelles.
« La commission locale des monuments fut d'avis qu'il y
avait lieu d'adopter cette balustrade, tout en réservant la
question de savoir si elle serait ornée d'arcatures ogivées,
de rosaces ou de quelque autre décoration, en harmonie
avec le style de l'édifice.
« C'est avec ces modifications, concernant l'escalier exté-
rieur et les. corniches des tourelles d'angle, que le projet
élaboré par MM. De Waele et Van Assche fut soumis aux
délibérations de vos commissions des travaux, des beaux-
arts et des finances, dans leur séance du 30 avril dernier.
« L'ensemble du projet a reçu l'entière approbation de
vos commissions réunies. Un seul point a été réservé, à la
suite d'un assez long échange de vues. C'est celui qui
concerne la balustrade à placer éventuellement sur les
corniches des tourelles d'angle.
« Un membre a combattu énergiquement cette balus-
trade.
« En effet, a-t-il dit, quelque légère et peu élevée qu'on
la fasse, elle détruirait le caractère de simplicité du monu-
— 230 —
ment, et ferait disparaître le motif de décoration emprunté
aux créneaux et aux mâchicoulis que l'architecte de 1424 a
adopté. Il n'y a rien clans l'ornementation de la façade qui
appelle des galeries aux tourelles. L'architecte a évidem-
ment exclu à dessein la richesse de décoration en vogue à
cette époque, comme contraire à la destination du monu-
ment. Il a poursuivi la simplicité et l'élégance des lignes.
Vouloir imiter, dans la restauration, les galeries des tou-
relles des hôtels de ville de Bruxelles, de Louvain et
d'Audenarde, ce serait, d'après l'honorable membre, com-
mettre une faute. •
« Les galeries de ces tourelles sont en rapport avec
l'ornementation des façades, elles reproduisent des motifs
décoratifs existant aux corniches, aux cordons et aux
fenêtres. Mais nulle part on ne trouve dans la façade de
notre Halle aux draps des motifs pouvant servir au dessin
d'une balustrade.
« D'ailleurs la corniche de ces tourelles n'a pas été faite
pour recevoir une balustrade. Elle n'est pas pleine, comme
le serait la plate-forme d'une galerie ; elle est découpée en
forme de créneaux. L'architecte a voulu donner plus de
légèreté aux tourelles, en découpant de cette façon la cor-
niche. Devant chaque pan de l'hexagone des tourelles, il a
placé un petit avant-corps à moulures, laissant entr'eux un
espace vide, comme le feraient des mâchicoulis. On ne
saurait faire une galerie sans remplir ces vides, c'est-à-dire
sans détruire l'œuvre de l'architecte.
« On a objecté à l'honorable membre que les corbeaux,
destinés à recevoir des crochets, qui se trouvent aux arrêtes
du toit des tourelles ne descendent pas jusqu'au bas, ce qui-
semble indiquer que la partie inférieure devait être cachée
par la balustrade d'une galerie. Il a été répondu en sub-
stance que cette circonstance ne saurait infirmer la preuve
contraire, qui résulte des ouvertures de la corniche et que
l'induction que l'on fait est loin d'être certaine.
— 231 —
« Une galerie ajourée n'aurait pas caché entièrement le
bas du toit des tourelles, de sorte que l'existence d'une
balustrade n'eût pas empêché d'y mettre des crochets.
« En somme, a dit l'honorable membre, des galeries aux
tourelles alourdiraient l'aspect général du monument et
seraient contraires à l'intention de l'architecte, manifestée
par les ouvertures pratiquées dans les corniches.
« Vos commissions, tout en applaudissant hautement à
la restauration projetée, se sont ralliées à l'idée qu'il y avait
lieu de laisser provisoirement ouverte cette question spéciale,
en attendant d'autres éléments d'appréciation.
« Je ne crois pas néanmoins me tromper en affirmant
que l'impression des membres de vos commissions réunies
a été généralement peu favorable à la galerie projetée.
« Le devis estimatif joint au dossier prévoit une dépense
totale defr. 39,136,01.
« Le Gouvernement et la Province ayant promis d'inter-
venir respectivement dans cette dépense pour 9,784 fr. (soit
un quart de la dépense totale) et 6,000 fr. la somme restant
à charge de la ville sera de fr. 23,352,01, à répartir sur
plusieurs exercices.
« J'ai donc l'honneur de vous proposer, Messieurs, au
nom de vos commissions réunies, d'approuver le plan et le
devis de la restauration de la Halle aux draps, tels qu'ils
vous sont soumis, sauf à se prononcer ultérieurement sur la
convenance de placer une balustrade sur les corniches supé-
rieures des tourelles d'angle.
« Ainsi arrêté par vos commissions des travaux, des
beaux-arts et des finances, en séance du 30 avril dernier
(1890). » -
— 232 I—
CHRONIQUE.
La Bataille de Courtrai. — Dans une communication à la
Commission royale d'histoire, La version flamande et la version
fî'ançaise de la bataille de Courtrai (Bruxelles, F. Hayez, 1890 ;
in-8°, 42 pp. et 1 f. bl.), Mr Henri Pirenne, professeur d'histoire du
moyen-âge et d'histoire nationale à l'Université de Gand, étudie les
différentes traditions qui se sont formées, de bonne heure, sur la
bataille de Courtrai. Grâce au mémoire de Moke (1851), ainsi qu'à
la publication de différentes chroniques et des comptes communaux
de la ville de Bruges, on connaît enfin exactement la journée du
11 juillet 1302, dont le général Kôhler a récemment esquissé la
physionomie réelle [Die Entwickelung des Kriegsicesens und der
Kriegfiihrung in der Ritterzeit, t. II, 1886), mais qui avait été si
longtemps altérée par la légende. .
Dès les premières années du XIVe siècle, en effet, on voit se
former deux versions nettement distinctes : la version flamande
(dans les Annales Gandenses, probablement rédigées par un frère
mineur de Gand, le Spieghel Historiael de Louis van Velthem et
la continuation de la Genealogia comitum Flandriae, écrite au
monastère de Clairmarais), caractérisée par une tendance à sup-
primer les conditions désavantageuses dans lesquelles se trouvaient
les Français et à attribuer la victoire uniquement à l'héroïsme des
.milices communales, — et la version française (dans les chroniques
de l'orléanais Guillaume Guiart et de Geoffroy de Paris, et dans le
Récit anonyme de la guerre entre Philippe le Bel et Guy de Dam-
pierre, publié, en 1865, par De Smet), qui veut expliquer la défaite
d'une manière honorable pour les vaincus, soit par la perfidie des
Flamands, soit par une ruse de De Coninc, soit encore par les deux
moyens combinés [Récits d'un bourgeois de Yalenciennes). La
— 233 —
version française se répandit rapidement en Europe, non seulement
en Allemagne, où elle fut introduite par Ottokar de Styrie dans sa
Steirische Reimchronik, et en Italie, où on la retrouve dans
Ylstoria fiorentina de Villani, mais encore dans les Pays-Bas, où
on la voit envahir successivement le comté de Hollande Guillaume
Procurator;, le pays de Liège Hocsem, Jean d'Outremeuse), le comté
de Hainaut Gilles le Muisisj, et enfin la Flandre elle-même, où elle
fut adoptée, sous l'influence du parti aristocratique, tant par l'histo-
riugraphie latine et romane (Istore et chroniques de Flandre,
Chronique de Berne), que par les chroniqueurs flamands Jean de
Dixmude). « L'introduction du récit du bourgeois de Yalenciennes
dans la chronique de Jean de Dixmude consacre le triomphe définitif
de la version française en Flandre sur la version nationale. Celle-ci,
désormais, jusqu'à notre siècle, restera ignorée. L'Excellente Gronijke
et Despars reproduisent tous deux le récit de Jean; Meyer le com-
bine avec les données de Villani. Depuis, la plupart des modernes
n'ont guère fait que le répéter. C'est lui que l'on trouve aujourd'hui
encore dans presque tous les manuels d'histoire nationale; c'est lui
enfin que la peinture et la gravure flamandes ont popularisé de
nos jours. »
Celte succincte analyse aura suffisamment montré l'intérêt que
présente l'étude de Mr Pirenne ; ajoutons qu'elle est faite avec cet
esprit critique, cette acribie qui caractérisent les travaux du sagace
auteur de la Constitution de la ville de Binant, et qui le placent
déjà parmi les meilleurs de nos jeunes historiens nationaux.
Paul Bergmans.
Littérature latine et histoire du moyen-age. — Sous ce titre,
Mr Léopold Delisle publie un recueil de petites notes historiques
destinées à servir de modèles aux correspondants du ministère de
l'instruction publique et des beaux-arts de France, qui adressent des
communications au Comité des travaux historiques et scientifiques
(Paris, Ern. Leroux, 1890; in-8°, 2 ff. non cotés, 116 pp. et 1 pi.).
Ces correspondants ont pour mission : 1) de répondre aux questions
posées dans les enquêtes scientifiques ouvertes et encouragées par
l'administration; 2) de fournir des renseignements et des documents
pour les publications entreprises aux frais ou sous les auspices du
ministère ; 3) d'informer le comité de toutes les nouvelles qui mé-
ritent d'être portées à la connaissance des historiens et des archéo-
10
— 234 —
logues ; 4) de communiquer les trouvailles et les observations qui
peuvent servir au progrès des sciences historiques ou archéologiques
et dont le caractère n'est pas exclusivement local1. Gomme il est
impossible de leur donner des règles suffisamment précises sur la
nature et le mode de leurs communications, M1' Léopold Delisle,
président de la section d'histoire et de philologie, a réuni une
cinquantaine d'exemples variés, où il montre comment il convient
de préparer pour l'impression les documents destinés au comité, en
en donnant une copie aussi exacte que possible et en les accom-
pagnant d'un commentaire sobre mais substantiel. Personne mieux
que lui n'était à même de faire ce guide de l'érudit, et la lecture et
l'étude de son recueil ne seront pas moins prolitables aux travailleurs
belges qu'à leurs confrères français pour qui il a été écrit. Le
volume offre, d'ailleurs, un intérêt historique intrinsèque par la
nature des pièces qui y sont publiées et dont quelques-unes inté-
ressent notre histoire, telles que les nos 14 (pp. 29-31 : Éloge de la
Flandre, par Pierre le Peintre, XIIe siècle) et 23 (pp. 50-51 :
Relation de la bataille de Bowoines).
Paul Bergmans.
Le Précepteur de Philippe IL — 11 existe en Italie une coutume
charmante : au jour des noces, on offre aux jeunes époux quelques
pages spécialement écrites à cette occasion. Quand l'auteur est un
savant, c'est une petite monographie qui éclaire un point d'histoire
ou d'archéologie, ou même un problème scientifique, et l'hommage
personnel devient ainsi un utile appoint à la science. Mr Charles
Ruelensaeu l'heureuse idée de transplanter chez nous cette habitude,
et il vient de publier, à l'occasion du mariage d'un de ses collègues
à la bibliothèque royale de Bruxelles, M1' Louis Paris, Une lettre du
précepteur de Philippe II (Bruxelles [imp. P. Weissenbruch], 1890;
in-8°, 23 pp. et 1 p. bl.). Dans cette missive datée de Madrid, le
21 mars 1541, et dont la bibliothèque royale possède l'original, le
docteur Juan Martinez Siliceo, qui était chargé de l'éducation lit-
téraire de Philippe II, écrit à Charles-Quint que le jeune prince fait
de grands progrès dans l'étude des lettres et qu'il lit la Bible avec
1 Ce programme devrait être adopté par notre Commission royale
d'histoire, qui ne pourrait que gagner à étendre ainsi sa sphère
d'action.
— 235 —
une grande application. C'est un document à ajouter à la corres-
pondance de Siliceo déjà publiée par Modesto Lafuente, dans le
tome XII de son Histnria gênerai de Espana.
Paul Bergmans.
Le prix des tableaux. — A l'hôtel Drouot on a vendu les tableaux
modernes formant la collection de M. Ch. Bonnemaison-Rascle. Les
tableaux de Corot se vendent de plus en plus cher. Une petite toile
mesurant 41 centimètres en hauteur sur 54 centimètres en largeur et
représentant un effet du matin, sur une demande de 12,000 francs, a
été poussée à 16,500 francs. Deux autres études de Corot, Paysage,
effet du soir, 2,600 francs, et Étude de femme, 2,500 francs. Les
oeuvres de Claude Monet n'atteignent pas encore les enchères élevées
que les enthousiastes des impressionnistes avaient prédites il y a
quelques années. La Seine à Yeriheuil, effet du matin et effet de
neige, qui mesuraient près de 1 mètre en largeur, ont obtenu le
premier 1,750 francs et le second 1,020 francs.
Cette vente comprenait également seize œuvres par Jongkind.
Les tableaux de ce peintre n'ont plus obtenu les prix atteints à la
vente Bascle, faite il y a quelques années à l'hôtel Drouot.
Signalons parmi ceux-ci : Canal en Hollande, clair de lune.
2,150 francs; Canal en Hollande, soleil couchant, 2,150 francs;
Embouchure de la Meuse à Maassluis, 2,000 francs; Canal à
Amsterdam, 1,220 francs sur une demande de 2,000 francs; Canal
en Hollande, clair de lune, 1,900 francs sur une demande de
2,500 francs; Clair de lune en Hollande, sur une demande de
4,000 francs est tombé à 1,750 francs; le Pont d'Arcole, soleil
couchant, 2,500 francs sur une demande de 3,000 francs. Cette vente,
qui comprenait trente-neuf tableaux, a produit soixante mille francs
environ.
L' Angélus de Millet. — Voici l'épilogue de l'affaire du tableau
de YAngelus. M. Antonin Proust écrit à M. Hebrard, directeur
du Temps :
Paris, ce 16 juillet 1889.
Mon cher Ami,
Le Temps me fait demander ce matin comment la législature a
pris fin sans que le projet déposé par le gouvernement pour l'acqui-
sition de VA)igelus soit venu en discussion ?
La procédure parlementaire n'a pas permis, parait-il, de mettre ce
— 236 —
projet à l'ordre du jour assez tôt pour que le Sénat pût le discuter,
s'il y avait lieu.
Le projet a donc été retiré, et Y Angélus appartient aujourd'hui
à l'Amérique.
J'accepte le fait sans amertume, mais non sans regret en gardant
la plus vive gratitude à ceux qui ont tenté avec moi de retenir en
France le chef-d'œuvre de Millet.
Nous étions vingt-huit 'Français, Russes et Danois — une triple
alliance — qui nous étions coalisés pour que V Angélus restât
au Louvre.
Nous avons échoué.
Ce sont ces mêmes Américains qui ont pris récemment l'initiative
d'honorer Barye par un monument, qui vont honorer Millet dans sa
plus belle œuvre, dans cette œuvre qui n'est pas seulement une
peinture admirable, qui est encore l'une des conceptions les plus
élevées de la pensée française. Ce sont eux qui vont posséder ce
symbole de notre vieille Europe, où le travail est glorifié sous sa
forme la plus rude, avec la foi religieuse, et traduite dans sa ferveur
la plus naïve.
Quand Y Angélus nous a été adjugé au milieu d'une véritable
explosion de patriotisme — sur ce point on n'a rien exagéré — les
Américains sont venus séance tenante nous déclarer qu'ils s'étaient
arrêtés par égard pour la France ; mais qu'ils demandaient, dans le
cas où l'État français ne deviendrait pas propriétaire de Y Angélus,
que la toile leur fût cédée au prix d'adjudication.
Je leur adresse à nouveau aujourd'hui, au nom de mes amis et au
mien, l'expression de mes plus vifs remerciements pour cet acte de
courtoisie, et je les avise que Y Angélus est la propriété de Y American
Art association.
Croyez, mon cher ami, à mes sentiments dévoués.
Antonin Proust.
Les gravures. — On a vendu vers la fin d'avril, à l'hôtel Drouot,
une très importante collection d'estampes de l'école française du
XVIIIe siècle imprimées en noir et en couleur. Les trois premières
vacations ont produit 82,537 francs.
Signalons parmi les principales enchères : une épreuve de la plus
grande rareté de la Promenade publique, par Debucourt, estampe
en couleur aux initiales D. B. et la date 1792 dans le bas de la
— 237 -
gravure à droite, adjugée 6,300 francs. La même estampe en noir,
du même état que la précédente, ayant une très grande marge,
seule épreuve en cet état connue jusqu'à ce jour, vendue 5,000 francs.
Parmi les autres estampes par Debucourt : une suite complète de
52 pièces en couleur reliées en un volume in-4°, 2,450 francs ; deux
pièces faisant pendant, la Rose-la Main, 1788, épreuves en couleur,
2,300 francs ; les deux baisers, très belles épreuves en couleur,
1,750 francs; le Menuet de la mariée, 1786, épreuve de la plus
grande rareté, ayant toutes lettres, en couleur, 1,410 francs ; pro-
menade de la galerie du Palais- Royal, 1787, en couleur, 1,100 francs;
l'Escalade ou les adieux du matin, Heur et malheur ou la Cruche
cassée, deux pièces faisant pendant, en couleur, 1,280 francs.
Parmi les autres pièces : Galerie des modes et costumes français,
ouvrage commencé en 1778, dessinés d'après nature par Leclerc,
Desrais, Martin, Simonet, Watteau fils et de Saint-Aubin, gravés
par Dupin, Voysard, Patas, Leroy, Pelicier, Bacquoy et Lebeau.
Ouvrage en deux parties, auquel il manque six planches dans la
première et cinquante-deux dans la seconde, et dont une centaine de
pièces sont remontées et plusieurs sont coloriées, recueil très difficile
à rencontrer aussi complet, 3,770 francs. Le cabinet des modes et les
modes nouvelles à Paris, chez Buisson, libraire, 1785. Ce livre, des
plus intéressant au point de vue des costumes, commence le 15 no-
vembre 1785 et continue jusqu'au 20 février 1793; il contient trois
cent cinquante-quatre planches de costumes et est aussi très rare ;
il a été vendu 2,600 francs. Journal des dames et des modes, par
P. de Lamesangère, de l'année 1796 à 1838, malgré les planches
manquantes, très rare à rencontrer, avec une suite de trois mille
cinq cents planches de costumes, vendu 2,500 francs.
Le catalogue de cette vente comprenait 1935 numéros.
Collection d'antiquités. — L'Empereur d'Allemagne, Guil-
laume II, vient d'acheter à M. Ehlingensberg, sa précieuse collée tien
d'antiquités trouvées dans des tertres près de Reichenhall et qui
datent des IVe et Ve siècles de notre ère. Elles furent découvertes de
1885 à 1888 et rangées scientifiquement. Cette collection, la plus
complète en son genre, sera ajoutée au musée de Berlin.
Beaux-Arts. — Le musée royal de peinture de Bruxelles vient
de faire, à la fin d'avril, l'acquisition d'un chef-d'œuvre de tout
premier ordre: la célèbre toile de Rubens. représentant quatre têtes
- 238 —
de nègres, qui fit jadis partie de la collection Demidoff, pour passer
ensuite dans différentes galeries, et qui séjourna longtemps à Flo-
rence. On peut affirmer sans crainte que c'est un des plus brillants
morceaux que nous ait laissé l'illustre maitre anversois.
L'État a obtenu ce joyau, pour le prix, relativement modique,
de 80,000 francs. La toile sera bientôt exposée dans la galerie
ancienne, au palais des Beaux-Arts, rue de la Régence.
Antérieurement à celle-là, le musée a fait encore quelques acqui-
sitions : une nature morte, sujet de chasse, de Van Aalst; un
De Heem, représentant des fruits, des fleurs et des accessoires ; un
Abraham Mignon, des oiseaux morts et un coq pendu par la patte.
Ces trois tableaux provenant de la collection Du Bus de Gisegnies.
Enfin le gouvernement a acquis ces jours-ci, pour le musée
moderne, un tableau de M. Hens, exposé au Cei'cle artistique et
représentant une vue du Congo, et, à l'exposition des portraits de
maitres du siècle, deux toiles de von Lembach, le portrait de
Mgr. Strossmeyer et celui du chanoine Dollinger.
Lettre de Marie Stuart. — La plus belle collection particulière
d'autographes, lettres et manuscrits en Angleterre est probablement
celle formée par M. Alfred Morrison, possesseur d'une immense
fortune. La pièce la plus précieuse de cette superbe collection est
une lettre écrite par Marie Stuart, le matin de son exécution.
L'infortunée reine d'Ecosse écrit ce jour là trois lettres : une au
Pape, une au roi de France et une troisième à son oncle le cardinal
de Guise.
Sa lettre au Pape est toujours conservée parmi les trésors du
Vatican; celle adressée au roi de France a été détruite avec d'autres
papiers de ce monarque, mais celle au cardinal archevêque a été
gardée dans un monastère à Guise.
Il y a quelques années, les moines de ce couvent constatèrent avec
stupeur que la lettre avait disparu de leurs archives. Il était évident
qu'un voleur s'en était emparé, mais qui était le coupable ? On
n'avait aucun indice et plus jamais on n'entendit parler de la relique
perdue.
Longtemps après, un homme d'assez mauvaise mine vint offrir
à M. Morrison la précieuse lettre; celui-ci, transporté mais dissi-
mulant sa joie de pouvoir s'assurer une pièce d'une telle valeur en
demande le prix. Mille guinées ;25,000 francs) dit l'homme. Je
— 239 —
connais la valeur de la lettre et ne la laisserai pas moins. Ce prix
est exorbitant, fit l'amateur. Jamais je ne donnerai un prix aussi
extravagant, vous pouvez emporter votre lettre. Ce que l'homme fit.
Mais après son départ commencèrent les regrets de M. Morrison,
qui se reprocha de ne pas avoir parlementé pour obtenir le trésor
à un prix moindre : si un autre collectionneur s'en emparait ! Si,
par un malheur quelconque la lettre était détruite ! La vie devint
pour lui un véritable fardeau. Quinze jours plus tard, une femme
pauvrement vêtue était introduite dans le cabinet de M. Morrison,
lui disant que son mari l'attendait dans un cab à la porte et que
s'il n'obtenait pas les 1000 liv. st. il détruirait immédiatement
la lettre.
Le collectionneur ne résista pas à cette menace, il signa un chèque
de 1000 liv. st. et le porta à l'homme en échange de la précieuse
lettre. Il ne la céderait aujourd'hui pour n'importe quelle somme.
M. J. S. Dewey, le plus grand marchand d'autographes de Londres,
à qui on demandait à quel prix il estimait la lettre de Marie Stuart,
a répondu : On ne peut en déterminer la valeur, pour un collec-
tionneur, c'est un trésor sans prix.
Meubles de prix. — Dans une vente qui s'est faite à Paris d'un
mobilier ancien, deux meubles à hauteur d'appui, du temps de
Louis XV, en bois laqué bleu, ornés de plaques en porcelaine de
Sèvres ancienne et pâte tendre, ont été adjugés 115,000 francs. Ces
meubles, œuvres de l'ébéniste Burb, ont appartenu au ministre de
la marine, garde des sceaux, le comte de Machault. Une commode
du temps de Louis XV, en laque de Goromandel, ornée de person-
nages en couleur sur fond noir, 13,300 francs ; une jardinière en
ancienne porcelaine de Sèvres, pâte tendre, 4,000 francs.
Commission pour la publication des anciennes lois et ordon-
nances. — Traduction des ordonnances. — Nous voyons par le
procès-verbal de la séance de la commission du 16 juin 1890, inséré
au Moniteur belge du 9 juillet, que le tome VII des ordonnances
des Pays-Bas autrichiens dont la publication a été confiée à M. Jules
Delecourt, est sur le point d'être terminé et s'arrêtera aux ordon-
nances du mois de décembre 1755. Ce volume contenant quelques
textes flamands, la commission a été appelée à délibérer au sujet de
la traduction de ces textes. Il a semblé que la traduction n'était pas
indispensable, et que l'utilité n'en était pas compensée par les retards
— 240 —
que ce travail causerait et par la dépense. Un volume de 200 feuilles,
coûte pour la traduction seule, 9600 francs. Le procès-verbal porte :
« La commission, après discussion décide que dorénavant on ne
publiera plus de traductions à la suite de chaque volume, sauf à
examiner, à la fin de chaque série s'il sera utile de publier un volume
consacré exclusivement aux traductions. Les mots flamands qui
présenteraient des difficultés réelles pourront être expliqués en
note. » D.
Copernic et Galilée devant l'Université de Louvain *. —
Chapitre intéressant de l'histoire du haut enseignement en Bel-
gique au XVIIe siècle. Van Velden avait annoncé qu'à l'occasion des
exercices commandés par les statuts de la faculté il développerait
devant ses élèves cette thèse : Indubitable est le système de Copernic
touchant le mouvement des planètes autour du soleil; et parmi les
planètes, c'est à bon droit qu'on place la Terre. Défense fut faite
au jeune professeur de maintenir sa thèse ; des collègues furent
délégués pour obtenir sa soumission. Il passa outre, fut condamné
à l'amende, en appela au Conseil de Brabant. Mais le jurisconsulte
De Decker et le professeur de philosophie Melis travaillèrent à
Bruxelles à retirer la cause des mains du conseil; le nonce Jules
Piazza intervint et les efforts réussirent. L'affaire fut retirée des
mains du conseil de Brabant pour passer complètement sous la
juridiction de l'Université. Van Velden fit sa soumission, fut absous
après retractation et réintégré dans ses fonctions. Nous trouvons
encore dans une thèse soutenue en 1625, devant Van Velden, pré^
sidant la séance, l'affirmation du mouvement des planètes autour du
soleil, mais on affecte de ne plus parler de la terre, cause de tous les
embarras. Van Velden était âgé de quarante trois ans lorsque, en
récompense de sa soumission, la faculté des arts le nomma chanoine
de la cathédrale de Liège. M. Stevart a recueilli la plupart de ces
faits dans des manuscrits provenant de l'ancienne Université sup-
primée, et qui furent acquis par l'Etat, pour la bibliothèque royale,
à la mort de Mgr. De Ram. D.
1 A. Stevart, Copernic et Galilée devant V Université de Lou-
vain. — Procès Van Velden. — Verviers. Bibliothèque Gilon,.
108 pages.
— 241 —
LE BOURREAU DE GAND
Le rôle, réservé au bourreau dans notre an-
cienne organisation judiciaire, était des plus con-
sidérables, tant à raison du grand nombre do
cas dans lesquels son ministère était requis qu'a
raison de la variété infinie des peines qu'il devait
appliquer.
Les juges criminels avaient une grande latitude
clans la façon de punir les coupables. Le ch< H- de
la peine ou, pour parler plus exactement -du
supplice à infliger aux condamnés était dans la
plupart des cas laissé à l'appréciation et à l'esprit
inventif des magistrats. Tel juge se bornait à
condamner l'accusé à mort. Tel autre, au contraire,
avant d'envoyer le condamné à la potence, au
billot ou au bûcher ordonnait qu'on lui fît endurer
toutes sortes de tourments. Le sort du misérable,
livré à la justice criminelle, dépendait donc en-
tièrement du caprice ou du bon vouloir des
magistrats devant lesquels il devait comparaître.
Les anciennes lois et ordonnances, émanées de
nos souverains, consacraient toutes cette faculté
absolue laissée aux échevins dans le choix des
17
-.
— 242 -
peines et dans la façon de les appliquer. On sait
qu'à Gand la justice civile et la justice criminelle
étaient rendues par les magistrats ou conseillers
communaux qu'on désignait sous le nom d'éche-
vins de la Keure.
Dans la charte de confirmation des droits, cou-
tumes et franchises des Gantois octroyée en 1191
par la comtesse de Flandre, Mathilde de Portugal,
veuve de Philippe d'Alsace, nous trouvons déjà
l'expression : « sicut scabinis rationabile videbitur. »
L'article premier de l'ordonnance du 28 juin 1483
sur l'adultère et le blasphème se termine comme
suit : ce ende wey%t hi meer verioonnen, zulke zwaer-
« dere pugnitie dan voorseyt es als scepenen redelic
« dincken sal. » La concession Caroline du 30 avril
1540 renferme des expressions analogues telles
que celle de « arbitralycker ghepugnierd worden na
« heysch van de stieke. »
Cet usage faisait tellement partie des mœurs
judiciaires d'autrefois que jusqu'à la fin du siècle
dernier les expressions de style « up arbitraire
« correctie, » « up correctie van schepenen, » « als
n hemlieden redelic dincken sal, » « zulcke andre
« pugnitie als scepenen dincken zal daertoe die-
« nende, » etc., se rencontraient habituellement
dans les actes, ordonnances ou arrêtés, émanant
de nos magistrats communaux gantois. On insérait
ces formules jusque dans les simples mesures de
police, prises en cas d'un grand concours de monde
dans les rues de la ville, par exemple à l'occasion
d'une cavalcade, d'une procession, de l'entrée
d'un prince ou d'un grand personnage.
— 243 —
C'est cette extrême latitude, laissée aux juges,
qui explique la variété des peines appliquées aux
condamnés avec un raffinement de froide cruauté
dont on ne se fait plus d'idée aujourd'hui. Ces
épouvantables spectacles d'êtres humains, torturés
et martyrisés, ne prirent complètement fin que
sous le règne de l'empereur Joseph II.
On comprend que dans ces circonstances et en
présence du grand nombre de méfaits, punissables
de la peine de mort, l'office de bourreau était loin
de constituer une sinécure et que les occasions
d'exercer ses sinistres fonctions ne lui faisaient
pas défaut.
Voici par exemple le récit d'une exécution qui
eut lieu le 26 janvier 1563 et à laquelle présida
maître Jean du Mont, bourreau de la ville de Gand,
assisté de ses aides. Il s'agit de trois voleurs qui
furent brûlés vifs, après avoir enduré les supplices
les plus épouvantables. Ces supplices ne sont in-
scrits dans aucune loi ni dans aucune ordonnance ;
ils sont uniquement dus à l'imagination « als sce-
« penen redelic duncken sal, » des juges qui pro-
noncèrent la sentence et en ordonnèrent l'exé-
cution.
Deux des condamnés furent placés sur un gril
et attachés, dos à dos, avec des chaines à une barre
en fer. Un feu violent fut allumé sous le gril.
Au-dessus de la tête des condamnés se trouvait
fixé un tonneau, percé de trous et dans lequel on
avait mis de la paille, de la poix et du goudron.
On mit le feu à ce tonneau de façon à ce que la
poix et le goudron fondus se déversassent en
- 244 —
gouttes brûlantes sur le corps nu des suppliciés.
Ce n'était pas encore assez. Tout cet appareil
de torture, c'est-à-dire le gril, la barre de fer et le
tonneau, était fixé à une espèce de grue. On faisait
mouvoir cette grue et les deux misérables étaient
hissés à quelques pieds de hauteur d'où on les
laissait retomber dans le feu jusqu'à ce qu'ils
fussent complètement brûlés.
Le supplice du troisième condamné, pour être
moins raffiné, n'en fut pas moins terrible. On
l'attacha à un poteau, entouré de bottes de paille,
auxquelles on mit le feu. Afin de faire durer les
souffrances de ce malheureux, la paille était placée
à quelques pieds du poteau. On comprend faci-
lement qu'il fallut un temps assez long avant que
le patient ne succombât à cette épouvantable
torture.
Le récit de cette exécution est consigné dans le
Memorieboek der stad Gent, anno 1563 :
... ende den xxv jen Lauwe waren de twee ghestelt op
eenen yzeren rooster aan eenen yzeren staeke met ketenen,
rugghe tegen rugghe ghebonden, ende onder den voor-
noeinden roostere was groot vier ghemaeckt ende boven
haerlieden kooft eene tonne vul stroo, peck ende terre, daer
inné veel gaten waren daer 't zelve peck duere op huer-
lieder liji' drupte, ende de voornoemde roostere was met
eender wippe upghehaelt ende alsoo weder neder ghelaten
tôt zy levende verberrendt waren, ende de derde was
levende ghestelt aen eenen staecke ende rontomme hem
stroo ghestelt vier voeten van hem, ende alsoo levende
verbrant.
— 215 —
Nous pourrions multiplier ces exemples. Nous
avons uniquement cité celui-ci, que nous avons
pris au hasard, pour préciser dès le début de cette
étude le pouvoir discrétionnaire, dont jouissaient
autrefois les juges criminels dans le choix et dans
l'application de la peine, et pour montrer égale-
ment toute l'importance du rôle que jouait le
bourreau clans l'exécution des condamnés.
Il ne faut pas croire que c'était pour le simple
plaisir de voir souffrir leurs semblables que les
juges appliquaient des peines aussi cruelles. La
vue des supplices, qu'on faisait endurer aux
condamnés, devait, dans l'esprit des magistrats
de cette époque, servir d'exemple et inspirer une
crainte salutaire, à ceux qui seraient tentés de
commettre quelque méfait.
C'était une règle qu'on appliquait — ■ bien sou-
vent à regret — et dont on ne pouvait pas se
départir. Marcus van Vaernewijck, dans ses
Beroerlicken Tyden, exprime l'horreur que lui
inspire le spectacle continuel des tortures infli-
gées à ceux qui avaient embrassé les croyances
nouvelles. Il regrette que la justice soit obligée
de recourir à des mesures aussi cruelles, mais,
dit-il, c'est le seul moyen d'extirper l'hérésie. Les
magistrats, qui condamnaient au dernier supplice
pour des crimes ordinaires, tels que le vol et le
meurtre, tenaient le même langage que le chro- "
niqueur gantois.
Jusque vers le milieu du quinzième siècle, le
bourreau portait à Gand le nom de scharpcoc ou
— 246 —
simplement Coc. Les comptes de la ville le dési-
gnent toujours sous cette dénomination.
Item Pieterkin Philips koc van Artevelde van i zweerde
ii vrancke Item doe hi doere af sneet xii gr.
(Comptes de 1382-1383; f° 249 v°.)
Item ghegheven Pieter Acken coc vander stede van dat
hy int Pelleryn stelde ende uut slouck ii se. gr.
(Comptes de 1431-1432 folio 278 v°.)
Item meester Cornelis de Meersman scarpeoe van dat hy
vut laste van scepenen viii persoonen te dieverssche waerf-
ten ghesmeten ende ghegheesselt heeft met roeden vut deser
stede van elcken v gr. comt iij se. iiij den. gr.
(Comptes de 1481-1482 folio 81 v°.)
Plus tard, les actes officiels, tels que les comptes,
les nominations, les ordonnances, désignèrent le
bourreau sous les divers noms de Scherprechtere,
Justicier; criminele Officier, Officier criminel; Offi-
cier van de hooghe justicie, Officier de la haute
justice ; Dienere vanden zweerde van der justicie,
Serviteur du glaive de la justice; Justicier van den
zweerde, Justicier du glaive; Officier van den
hooghen ivercke-, Officier des hautes-œuvres, etc.
On le nommait aussi parfois Hanghman du verbe
hanghen pendre.
Le mot Beul, bourreau, ne figure jamais dans
les pièces officielles. Cette expression était consi-
dérée comme trop injurieuse pour pouvoir être
appliquée à un fonctionnaire placé sous la haute
protection du prince souverain.
- 247 —
NOMINATION. - SERMENT. - EXAMEN
Le bourreau était nommé, à Gand, par les
échevins de la Keure, à l'intervention du grand-
bailli. Le plus ancien acte de nomination d'un
officier de justice que nous ayons rencontré date
du 3 juin 1542.11 confère ces fonctions à un certain
Mathieu du Mont, natif des environs de Lille.
Cet acte, ou plutôt cette convention, est trans-
crite au Registre B. B. folio 299 de la collection
dite des quarante-sept registres de nos archives
communales. A cause de son ancienneté et des
détails qu'elle renferme, nous croyons devoir
reproduire cette pièce en entier :
Contrakt van den Scerprechtere,
Scepenen van der Kuere, met advise ende by promotien
van Edelen ende weerden heer, Mer Franchois vander
Gràcht, hoochbaillin van der voornoemde stede, hebben
gheconvenieert ende gbecontracteert met meester Mathys
du Mont, geboren van Wembresy by Ryssele, omuie te
wezene sceerprechtere ende officier van der hooghen
weercke, up den sallaris hier naer volghende. Te wetene
dat by jaerlix hebben ende ontfaen zal van stede weghe in
pensioene twaelf ponden grooten.
Item voor tschoonmacken van den messe, alzo dickwille
als hy hem binnen dezer stede metten selven executie doen
zal twaelf grooten, ende als hy daermede executie buuten
doen zal vier grooten.
Item de zelve sceerprechtere wert ghehouden te leverene
— 248 —
in den pynkeldere als yemaent overgheleyt wert de keers-
sen, daervoren hy hebben zal voor eenen steen keerssen van
elcken overgheleeden ter examen tien grooten.
Item zal oocjaerlicx hebben een alfiast turfven vierdeput,
thulpen synder berrynghe.
Item zal noch hebben ende behouden zulcke habyten
ende cleedren als de pacienten an hebben zullen in vier-
schaeren, ende verwezen werden.
Ende omme te obvierene ende remedierene de onghe-
reghelthede, die de voorgaende officiers gheuseert hebben
ten poortere ende eldere binnen der voornoemde stede int
exigeeren ende ontfaen van eyeren, freuyt ofte ahderen
zaken in wat manieren dat zy, ende daeruppe order ende
pollicie ghestelt te werdene ten ghernstichede vanden ghe-
meenen inwonenden ende andre van buten ter maert com-
mende ende voor de redemptie van dien zal jaerlix hebben
vander stede weghe voor al drye ponden gr. zonder meer.
Item en boven al tghene voorseit zal hebben van sheeren
weghe ter causen van zyn exploicten ende executien die hy
doen zal dezer stede, naer costume ende buten volghende
dordonnantie ende placcart vander K. Majt.
Bovendien en zal de zelve sceerprechtere niet vermoghen
buten der stede te gaene zonder tconsent van myn heeren
voornomt.
Up al welcke conditien, bespreken ende gaigen de voor-
nomde meester Mathys tzelve officie gheaccepteert, ende
by eede belooft heeft ghetrauwelic texercerene. Volghende
welcken myn heeren voornomd hem uit officie gheandveert
hebben ende andveerden, hem by dezen verbiedende den
voornomde sallaris ofte eenich poiint van dieren texederene
in eenegher manieren up sceerpelic ghepugniert te zyne
ende van zynder officie ghepriveert te zyne indient myn-
heeren beliefde.
Actum den derden in wedenmaent xvc twee en veertich.
— 249 —
A la suite de cette nomination se trouve inscrite
dans le même registre, le serment que prêta
l'exécuteur des hautes-œuvres, Maître Mathieu
du Mont :
Dat zweerdi officier ende sceerprechtere dezer stede van
Ghendt te zyne der K. Majt, onsen souverainen heere grave
van Vlaenderen, heere ende der wet goet ghetrauwelic te
bedienene ende exercerene, up de gaigen ende sallaris met
u by scepenen gheconveniert, zonder die texcederene in
eenegher manieren tsecret van scepenen so wel int examen
als eldre, daert u kennelic wezen sal te hebene. Ende voorts
al te doene dat een rechtveerdich officier en scerprechtere
deser stede schuldich es ende behoort te doene.
Alzo moet u god lielpen ende al zyn heleghen.
Déjà en 1513 le bourreau était placé sous la
protection spéciale du souverain. Des pénalités
sévères étaient édictées contre ceux qui seraient
tentés d'injurier ou de molester ce fonctionnaire.
Un édit, transcrit au registre G., folio 211, et im-
primé dans le premier volume des Placcards de
Flandre, fut rendu sur la matière le 6 avril 1513.
Voici à quelle occasion.
Le bourreau de Malines, chargé de faire une
exécution capitale, s'y prit d'une façon si mala-
droite qu'il dut recommencer à plusieurs reprises
avant de parvenir à trancher la tête du condamné.
Cet horrible spectacle souleva l'indignation du
public qui assistait à l'exécution. Des cris de mort
retentirent et les spectateurs se saisirent du bour-
reau qu'ils accablèrent de coups de pierre et de
— 250 —
coups de bâton à tel point que, quelques jours
après, ils succomba à ses blessures.
C'est pour éviter le renouvellement de ces
scènes de violence, qui d'ailleurs n'étaient pas
isolées, que fut rendu le décret de 1513 portant
en tête dans le registre G. : « Van den hanghman
« scerprechtere, hoe hem de prime neempt in zyne
« protectie ende sauvegarde. »
Nous avons encore rencontré d'autres décrets
et ordonnances du prince souverain ou des éclie-
vins dans lesquels, à propos des fonctions du
bourreau, on rappelait que cet officier de justice
était placé sous la protection particulière de
l'autorité.
Il arrivait bien souvent que les échevins de la
Heure et le grand-bailli, avant de nommer défini-
tivement un postulant à la place vacante d'officier
criminel, le soumettaient à une espèce de stage, qui
durait parfois plusieurs mois, et lui faisaient passer
un véritable examen public. Tel fut, notamment
le cas pour le bourreau Jean Franck, nommé le
16 novembre 1669 en remplacement de maître
Jean van Wassembruch, appelé aux fonctions
d'officier criminel à Anvers.
Jean Franck, bourreau de Duinkerke, adressa
une première requête aux échevins de la Keure et
au grand-bailli le 22 juillet 1669. Il fait valoir,
pour obtenir cette place, qu'il exerce les fonctions
d'officier criminel dès son jeune âge et qu'il a
déjà fait un grand nombre d'exécutions aussi bien
par la corde et par le glaive que de toute autre
— 251 —
façon. . . « van joncoo afgheexerceert synde hebbende
« ghedaen vêle executien soo metten sweerde, koorde
« als andersints »
A l'appui de sa demande il joint à sa requête
sa nomination de bourreau à Duinkerke lui
octroyée le 8 mai 1668. Malgré l'habileté avec
laquelle il avait rempli ses fonctions à Duinkerke
et malgré les bons renseignements recueillis sur
son compte, Franck ne fut pas nommé définiti-
vement. Il fut agréé comme bourreau provisoire
et soumis à un stage de six mois:
Au mois de novembre suivant il adressa aux
échevins de la Keure et au grand-bailli une nou-
velle requête ainsi conçue :
Aen myne Eclele Heeren Hoockbailliu ende Scke-
penen vander Keure der stede van Ghendt.
Supplierende vertoont met aile respect ende reverentie
Meester Joannes Franck dat uwe Edelen de goetliey t hebben
gkekadt van op syne supplicatie ende bede hem suppliant
an te nemen vc-or sckerpreekter ofte officier crimineel deser
stede voor den tyt van een kalfjaer by vorme van preuve
oinme naerket volcommen van de eerste justitie voorderte
disponeren op syn versouck ten begkinne gkedaen van
gkeadmitteert te worden als sckerpreekter ad vitam synde
aen uwe Edele ende een Igkelick kennelick dat den sup-
pliant keeft volcommen ende ter executie gkeleyt de sen-
tentie geprononckiert ten last van Jan Lancksweert sonder
jactantie gkesprocken met soo groote promptitude ende
abilliteyt als den act saude mogken verkeesscke tôt satis-
factie soo ky betrauw van uwe Edele de welcke daeruytte
kebben kunnen jugieren dat inden suppliant concurreren
de qualiteyten gkerequireert in eenen sckerpreekter.
— 252 —
Biddende by dieu dat Uwe Edele believen den suppliant
t'admiteren als scherprechter ad vïtam oj) de gaisen, prof-
fyten ende emolumenten daertoe staende ende ghelyck syne
voorsaeten in offitie hebben ghenoten ende gheproffyteert,
twelcke doende, etc.
Ce ne fut qu'au bout de quatre mois, comme on
le voit par le contenu de sa requête, que se pré-
senta pour Franck une véritable et sérieuse occa-
sion de donner au public et aux autorités un
échantillon de son savoir-faire.
Un boulanger, nommé Caerel Jan Lancksweert,
avait assassiné sa femme. Le crime commis, il
s'était enfui à Liège où on l'arrêta et d'où on le
reconduisit à Gand.
Maître Franck soumit d'abord Lancksweert à
la torture, ce qu'il fit avec tant d'habileté que
l'assassin se reconnut coupable dès la première
séance. Le 9 novembre 1660, les échevins de la
Keure condamnèrent Lancksweert à être traîné sur
une claie depuis la prison du Sausselet au marché
aux Grains (remplacée en 1717 par le Pakhuis)
jusqu'au marché du Vendredi. Le bourreau devait
l'étendre, les bras et les jambes écartés, sur une
croix en bois placée sur l'échafaud. Après lui avoir
brisé les membres avec une barre de fer, Franck
devait lui couper la gorge. C'est ce que porte la
sentence :
Omme aldaer op een schavot u lichaem levendich op een
dweers hauten cruys gheraebraekt midtsgaeders met een
scherp snydende mes uwe keele afghesneden te worden
datter de dood naer volgbt.
— 253 —
L'exécution de Lancksweert eut lieu, ainsi que
cela se pratiquait d'habitude, le jour même du
prononcé du jugement de condamnation.
Maître Jean Franck se tira de sa rude et difficile
besogne à la satisfaction aussi bien du public que
des échevins de la Keure et du grand-bailli. Il fat
nommé bourreau de la ville de Gand le jour même
de la présentation de sa seconde requête, c'est-à-
dire le 16 novembre 1669.
L'acte de nomination porte qu'il est appelé aux
fonctions d'officier criminel aux fins d'exécuter et
d'accomplir la justice à charge des malfaiteurs,
« omme te executeren ende volbrynghen de justifie
« tôt laste van de kwaeddoeners . »
Cet acte constitue en même temps pour lui un
diplôme de capacité et un certificat de moralité,
car les échevins y insèrent la constatation suivante :
Naer dat sy ghesien hebben de executie by hem ghedaen
in den persoon van Jan Caerel Lancksweert oock ancler-
sints gbeinformeert syncle van syne neerstigheyt ende ghe-
traivwigheyt.
Ce Jean Franck avait exercé les fonctions de
bourreau à Courtrai de 1658 à 1668 et à Duin-
kerke depuis le 8 mai 1668. Il mourut le 3 juin
1716 après avoir été exécuteur des hautes-œuvres
pendant près de soixante ans.
Le bourreau n'avait pas de suppléant, c'est-à-
dire un aide chargé de le remplacer en cas d'ab-
sence ou de maladie. Les aides devaient seulement,
- 254 —
comme leur nom l'indique, l'assister dans l'accom-
plissement de ses fonctions. En cas d'empêche-
ment, c'était un officier criminel d'une autre ville
qui venait faire à Gand les exécutions capitales et
autres. Nous avons trouvé dans les comptes com-
munaux qu'en 1481 le bourreau d'Anvers vint
exécuter les sentences criminelles en l'absence du
titulaire Cornelis de Meersman, et qu'en 1506,
pendant la maladie du bourreau de Gand, Willem
Hoedeman, ce fut celui de Bruges qui vint le rem-
placer. Ce Willem Hoedeman eut pour successeur,
l'année suivante, Wisselt Gheertz.
Item ghegheven ten beveelne van scepenen meester Chris-
tiaen dienare vanden zweerde valider justitie van Andwer- ,
pen van diveersche examen ende executien by hem binnen
deser stede ghedaen inde absencie van meester Cornelis
dienare van den zweerde van dezer voorseyde stede naer
tverclaers vander cedulle. Actum viij january anno lxxxi ij
lib. ij se. viij den. gr.
(Comptes de la ville, année 1481-1482, f°283.)
Item betaelt den voornomde meester Jaspaert Tsaep
scharpeoe van Brugghe als hier ontboden zynde inde ab-
sentie van Meester Willem Scharp coc cleser stede midts
zynder cranchede ende impotentien als hier gherecht heb-
bende eenen Bastiaen Lagache metten zweerde ende mette
rade midts dat mynen heere de hooch-bailliu boven dese
somme betaelt heeft tordinaire daer toe staende comt naer
tinhauden van de cedulle xvi se. iiij den gr.
(Comptes de la ville, année 1506-1507 f° 71.)
Le bourreau de Bruges, dont il est ici question
et qui s'appelait Gaspard Tsaep ou Saerp, fut
nommé en la même qualité à Gand en 1508.
— 255 -
Nous venons de dire que le bourreau n'avait pas
de suppléant et qu'en cas de nécessité il se faisait
remplacer par un de ses confrères. Il y a mieux :
en 1538, le bourreau de Gand, maître Nicolas
Bertram, fit remplir son office par un magistrat,
lequel certes ne s'attendait pas le matin, en quit-
tant son habitation, à remplir pendant la journée
les fonctions d'exécuter des hautes-œuvres.
Le 6 juillet 1538 le bourreau venait de décapiter
un condamné dont le corps devait, après l'exé-
cution, être placé sur la roue, puis être traîné
sur une claie et exposé hors la porte du Sas à
l'endroit usité. L'exécution terminée, des difficul-
tés, dont nous ignorons le motif, s'élevèrent entre
le bourreau et le procureur général du conseil de
Flandre. Maître Bertram, à la suite de ce conflit,
refusa ses services au procureur général, qui fut
obligé de placer lui-même, avec l'assistance de
ses huissiers et de ses messagers, le corps du déca-
pité sur la roue. Ce fait est relaté dans le Memorie-
boeck, anno 1538 :
Den vjen July was by clheeren van den rade onthooft een
patient ter plaetse ghecostumeert, ende daer viel questie
tusschen den procureur-generael ende den hangmeester dat
hy hem ontseyde breeder dienst, so dat de procureur met
zyne hussiers ende messagiers het lichaem selve up het rat
rechten moest.
Il est fort probable qu'avant d'en venir à cette
extrémité le procureur général se sera adressé à
quelques assistants pour les engager à placer le
— 256 —
corps sur la roue. Le refus de ceux-ci l'aura forcé
de remplir lui-même cette répugnante besogne.
Les gens de mauvaise vie, les vagabonds et
les autres individus de la même espèce étaient
expulsés de la ville, après avoir été au préalable
frappés de verges. Dans les localités où il n'y
avait pas de bourreau ou bien quand celui-ci était
trop occupé, on choisissait parmi ces coquins
l'un d'eux qui devait appliquer à ses compagnons
la peine des verges. Les placcards du 22 septembre
1506 et du 22 décembre 1515 « toucant les Blitres,
Paillars, Oyseus et Vagabonds » s'expriment
comme suit :
Punition quant le bourreau ne sera à la main.
Et à cause que sus le plat pays et aussi en plusieurs
villes privilegees, l'on ne peult souuêt recouurer de Hault-
justicier sans grans coustz, parquoy lesdicts blitres, coquins,
truans, et autres semblables ayans mesusé et fourfaict,
demeurêt impunis : nous voulons et ordonnés que d'ore-
nauant es Villes et lieux ou n'y aura de Hault-justicier, les
officiers d'icelluy lieu seront tenuz de faire battre et
fustiguer de verges, et autremêt corriger lesdicts Blitres,
Coquins, Truans et leurs consors ayans mesusé, par l'un
d'eulx que lesdicts officiers clioiserôt, sans pour ceste cause
faire aulcune depence et différer à faire la dicte correction *
par faulte dudit Hault-justicier.
Le placcard ne dit pas ce que le magistrat
devait faire dans le cas où le « Blitre, Coquin ou
Truan, » chargé de fustiger ses compagnons, refu-
— 257 —
sait de se charger de cette besogne pour laquelle
il ne recevait aucune rénumération.
Il existe une croyance populaire d'après laquelle
les fonctions de bourreau étaient autrefois héré-
ditaires dans la même famille de telle sorte que le
fils était obligé, sans pouvoir s'y refuser, de succé-
der à son père. Cette obligation n'a jamais existé
du moins à Grand.
Nous avons vérifié dans les registres des comp-
tes communaux les noms de tous les bourreaux ■
qui ont fonctionné à Gand depuis 1314, date du
plus ancien de ces registres, jusqu'en 1794. Nous
n'avons trouvé que deux exemples de bourreaux,
portant le même nom, qui se sont succédé.
Mathias du Mont, qui fut en fonctions de 1542
à 1556, eut pour successeur Jean du Mont. Encore
ignorons-nous si Jean du Mont était bien le fils
de Mathias auquel il succéda, -du reste; de son
plein gré.
Jean du Mont, qui exerça de 1556 à 1582, est
parfois désigné dans les comptes communaux sous
le nom flamand de Jan vanden Berghe.
Plus tard nous rencontrons Jacques Boitquin,
qui fut exécuteur des hautes-œuvres de la ville de
Gand depuis 1717 jusqu'en 1750 et auquel succéda
Jean Baptiste Boitquin. Celui-ci resta en fonctions
de 1750 à 1764.
Il est plus que probable que Jean Baptiste Boit-
quin était le fils de Jacques. Nous avons lieu de le
supposer, parce qu'au siècle dernier la famille
Boitquin a fourni plusieurs bourreaux à la justice
18 .
— 258 —
criminelle. Outre les deux Boitquin, que nous
venons de citer, il y eut encore un troisième,
Henri Boitquin, qui fut appelé aux fonctions
de bourreau de Gand en 1784.
Cet Henri Boitquin, dans sa requête aux ma-
gistrats, dit qu'il est fils de Pierre Boitquin exé-
cuteur des hautes-œuvres à Bruges. Nous avons
encore rencontré un Frans Boitquin qui fut
scherprechter de Bruges vers le milieu' du dix-
huitième siècle.
Voilà donc cinq bourreaux, portant le nom de
Boitquin et remplissant ces fonctions à Gand et à
Bruges au siècle dernier. Il faut supposer que tous
les membres de cette famille avaient la vocation
et se destinaient, dès leur jeune âge, à devenir un
jour exécuteurs des hautes-œuvres.
Nous avons dit, en commençant, que les fonc-
tions de maître des hautes-œuvres étaient loin de
constituer une sinécure. Cela fut surtout vrai
pendant l'époque agitée des troubles religieux du
seizième siècle. Les exécutions capitales, pronon-
cées presque toutes pour crime d'hérésie, « ter
<c causen der feijte vander ghueserie ou ter causen
« van heresyen, » se succédaient d'une façon épou-
vantable.
Marcus van Vaernewijck, dans le dixième livre
de ses Beroerlicke Tyden (volume 4, page 281), fait
l'énumération des échafauds, potences, chaudières,
fournaises, billots (vleeschblock) placés dans les
différents quartiers de la ville de Gand. Elle a,
— 259 —
dit-il, l'aspect d'un abattoir d êtres humains :
« zoo dattet scheen, dat die sladt van Ghendt ghe-
« worden was een slachhuus der menschen. » Ces
mots, qu'il écrivait au mois d'octobre 1567, se
justifiaient par les spectacles dont il était jour-
nellement témoin. Il raconte, entre autres (vo-
lume 4 pages 302 et ss.) que le 30 mars 1567
il assista en une matinée à onze exécutions qui
eurent lieu, par la potence et par le feu, sur la
place Sainte-Pharaïlde. Sept condamnés, dont cinq
pour crime d'hérésie, furent pendus; les quatre
autres, qui étaient des anabaptistes, furent brûlés
vifs.
Van Vaernewijck parle avec indignation de l'at-
titude des soldats espagnols qui entouraient les
potences et les brasiers et qui lançaient des mor-
ceaux de bois sur le corps des malheureux patients.
Ce fut le bourreau Jan du Mont qui fit cette
série d'exécutions.
Nous venons de traiter de la nomination du
bourreau. Voici un cas de destitution d'un bour-
reau lequel fut en outre condamné à êrte battu de
verges et banni de la ville de Gand.
Hans Jonckert, nommé en 1591 aux fonctions
de maître des hautes-œuvres, n'avait pas une
conduite exemplaire. Grand amateur du beau sexe,
coureur de tripots et batailleur, il avait fréquem-
ment à subir les admonestations du grand-bailli
et des échevins. Il finit par lasser la patience des
magistrats qui se décidèrent à le faire comparaître
devant eux.
— 260 —
On reprochait à Jonckert, qui avait- femme et
enfants, d'entretenir des relations coupables avec
d'autres femmes dont; quelques-unes étaient éga-
lement mariées.
Ses fonctions de bourreau l'appelaient à chaque
instant dans les prisons. Il en profita pour faire
évader de la prison de la cour ecclésiastique une
femme qui y était détenue et. sur laquelle il avait
jeté son dévolu.
Enfin il s'introduisit, un jour, de force et l'épée
à la main dans la maison d'une veuve qu'il accabla
de mauvais traitements.
Tels étaient les faits dont il eut à répondre
devant le tribunal criminel des échevins de la
Heure. Ceux-ci le condamnèrent, le 11, février
1594, à être battu publiquement de verges et à
être banni pendant dix ans de la ville de Gand et
de la Flandre. Ce jugement, transcit dans le Bouc
van den Crisme de 1593-1598 (folio 4 r°), relate
comme suit les faits qui motivèrent la condam-
nation de Hans Jonckert.
Omme clieswille dat gliy Hans Jonckert officier criniineel
deser stede van Ghendt hoe ghy anders ghenaempt ofte
ghebynaempt zyt Ulieden vervoordert hebt wesende in
huwelijcke staete met dry diversche vrouwe persoonen soo
ghehuwde als onghehuwde te nemen vleeselycke conver-
satie daerby committerende crijni vande adultère ende
bovendien uut de vanghenesse vanden gheestelycken hof
met behendigheyt te licbten seker meysse gbenaempt Tanne
aldaer gbedetineert op pretext van haer te koraen besiene
daerby committerende vangbenes braecke waermede niet
te vrede en wesende maer vallende van dien einde int
— 201 —
anclere u soo vergeten hebt dat gy by avoncle ende ontyde
met titgetrockene rapière fortse ende ghewelt ghedaen hebt
up sekere huys yan eene wedewe alwaer ghy naer lanck
ruinoer ingelaten synde ghy de selve ghesleghen ende ghe-
tracteerd hebt dat sy ten laste ter eerde ghevallen is daerby
committerende publijck ghewelt met wapenen aile welcke
saken niet lydelick en syn sonder groote ende exemplare
punitie schepenen vander Keure deser stede van Ghendt
up ailes ghelet hebbende en namenlyck up uwe confessie
condempneren u alhier in opene camere ten aensiene van
eener gelycke met scherpe roeden ghegheesselt te worden
up u bloot lyff totten bloede bannen u vorts uut deser stede
ende lande van Ylaenderen ten tyt van thien jaeren up pêne
vàn hergheesselinghe ende ter eewighen ban van te ruymen
deser stede binnen sonneschyne ende tlandt van Ylaen-
deren binnen derden daeghe aldus gheprononcheert den
xj february 151)4.
Hans Jonckert dut subir en public la peine des
verges qu'il avait si souvent appliquée lui-même.
Les échevins de la Keure s'étaient montrés, nous
semble-t-il, excessivement indulgents à l'égard de
l'officier criminel. Si tout autre que Monsieur de
Gand avait commis une partie seulement des faits
énumérés dans le jugement de condamnation, on
n'aurait pas hésité un seul instant à le pendre
haut et court ou à lui trancher la tête.
Il eut pour successeur Laureyns Pot, qui ne
resta que quelques mois en fonctions et fut rem-
placé à son tour en 1594 par Bauduyn Walspeck.
Le bourreau, dont le traitement était entiè-
rement à charge de la ville de Gand qui le nom-
— 262 —
mait, devait, outre les jugements des échevins de
la Keure, exécuter encore les arrêts du conseil de
Flandre. Nous ne ferons pas de différence, dans
la suite de cette étude, entre les sentences cri-
minelles rendues par ces deux cours de justice.
Prosper Claeys.
(A suivre.)
— 263
ANALECTES BELGIQUES.
I.
LES ARCHIVES DE FLANDRE,
Mémoire inédit de Pn.-J. de Neny. '
Le mémoire que nous publions aujourd'hui, fait
partie des papiers du chevalier Jean-François-
Xavier Dierickx, qui fut longtemps avocat fiscal
au Conseil de Flandre '. Il lui fut envoyé, en
1763, par le comte Patrice-François de Neny,
chef et président du Conseil privé, avec la lettre
suivante :
Brusselles, le 20 juillet 1763.
Vous recevrez dans ce paquet, Monsieur, une dépêche de
S. A. R. qui vous informe d'une commission donnée à mon
fils, relativement aux papiers qui ont composé l'ancien
Archive de Flandre. Mais, pour que vous soiez instruit de
1 Ces papiers sont actuellement conservés à la bibliothèque de
l'Université de Gand {Documents divers).
— 264 —
•
quoi il s'agit, je vous communique confidemment le mé-
moire ci joint, que mon fils a présenté à Son Excellence, en
conséquence de l'examen qu'il a été chargé de faire des
inventaires. Je vous prie de vouloir bien me le renvoier,
lorsque vous en aurez fait usage, et de me marquer, en
même tems, quand il vous sera commode que mon fils se
rende à GancT. Je suppose que l'inspection sommaire qu'il
doit prendre, ne laissera pas que de l'occuper trois ou
quatre jours, et j'espère que vous pourrez lui donner un
commis qui soit en état de l'aider dans ses recherches. Je
m'en remets néanmoins bien volontiers, et à tous égards,
à la manière dont vous jugerez à propos de diriger cette
besogne.
J'ai l'honneur d'être avec une parfaite considération,
Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
[Signé) Neny.
Le chevalier Diericx répondit aussitôt qu'il se
mettait tout à la disposition du fils du chef-prési-
dent : « Je tâcherai », dit-il dans sa lettre, datée
du 23 juillet, « je tâcherai de procurer à monsieur
votre fils toutes les facilités qui dépendront de
moi; et, pour l'aider dans ses recherches, je lui
procurerai aussi un commis capable. Quant au
tems qui seroit le plus commode pour se rendre
à Gand, en cas que cette besogne ne presse point,
je le prierois de la différer jusqu'au mois de sep-
tembre prochain, parce que nous sommes à la
veille de nos grandes vacances, que j'avais déjà
destiné d'emploier en grande partie à des vaca-
tions hors de la ville. Si, cependant, la besogne
presse, je remettrai mes affaires à un autre tems,
pour me trouver en ville pendant que monsieur
- 265 —
votre fils y vaquera, le priant de prendre son
logement chez moi, et d'être persuadé que je serai
très flatté de lui pouvoir rendre toutes [sic] les
services qui dépendront de moi, et auxquelles il
me voudra bien emploier. » Le 29 juillet, Neny
remercia Diericx de ses offres obligeantes ; il l'in-
forma que la commission dont son fils avait été
chargé n'était nullement pressante, et que rien
ne s'opposait, par conséquent, à ce que son voyage
fût remis au mois de septembre.
Les archives dont il s'agit ici, sont celles qui
sont connues sous le nom d'archives du château
de Rupelmonde, et dont les débris sont conservés
aujourd'hui dans le dépôt d'archives de la pro-
vince de la Flandre Orientale, à Gand. Dans une
notice historique sur ces archives, Jules de Saint-
Génois s'exprime ainsi : « De 1717 à 1765, il n'est
plus fait mention de l'ancienne trésorerie des
chartes. A cette époque, le comte de Neny, fils
du comte Patrice de Neny, chef président du
Conseil privé, fut chargé par l'Impératrice de
visiter les archives de Rupelmonde et de faire un
rapport à ce sujet. Malheureusement ce rapport,
qui doit avoir été fort intéressant, ne se trouve
pas aux archives générales du royaume '. » Le
1 Messager des sciences, 1831, p. 219. J. de Saint-Génois ajoute :
« En 1770, le célèbre jui'isconsulte Pl'effel vint examiner ces titres
au nom du roi de France, avec le conseiller de Wynants. Ce dernier,
autorisé par le gouvernement autrichien, délivra à Pfeffel, sous ré-
cépissé, un grand nombre de pièces réclamées par la France... »
Nous avons découvert également, parmi les nombreuses pièces
manuscrites conservées à la bibliothèque de l'Université de Gand
266
mémoire préliminaire que nous avons retrouvé
pourra suppléer, du moins en partie, à ce rapport
qui paraît perdu.
Comme on a pu le voir, c'est en 1763, et non
en 1765, que Philippe-Joseph de Neny fut chargé
(Documents divers, v° Archives), la lettre suivante adressée au
Conseil de Flandre, et relative à la mission de Pfeffel :
L'Impératrice, douairière et reine :
Très cher, chers et féaux. Sur le compte qui nous a été rendu
de votre lettre du 4 décembre de l'année dernière, nous vous faisons
la présente pour vous dire que le comte de Wynants, notre com-
missaire pour l'exécution de l'article 38 du traité du 16 mai pré-
cédent, qui doit bientôt se rendre à Gand avec le sieur Pfeffel,
commissaire du roi très chrétien, y procédera à l'exécution dudit
traité, en tant qu'il peut être relatif aux papiers du dépôt d'état,
nommé improprement Archive de Flandre, d'après l'inventaire qui
en a été formé par nos ordres en 1763.
Pour ce qui concerne les papiers des autres dépôts qui pourroient
être dans le cas de devoir être remis à la France, c'est notre inten-
tion que les deux commissaires y aient accès, à l'intervention de
notre conseiller fiscal, comme cela s'est pratiqué déjà de la part de
la France dans les dépôts de Metz et de Nancy.
Quant aux papiers des dépôts de Lille et de Douay, que la
France doit nous remettre, cette restitution va se faire incessam-
ment, d'après les principes arrêtés par le traité du 16 mai de l'année
dernière.
Au surplus, nous n'avons vu qu'avec surprise que le Bailli de
notre chambre légale ait pu avancer, comme il l'a fait par sa décla-
ration du 9 novembre, jointe à votre lettre, que, par le traité d'Aix-
la-Chapelle de 1748, qu'il dit être inconnu dans la Flandre, la
couronne de France nous auroit cédé le village de Watou, tandis
qu'il ne devoit pas ignorer que cette terre est passée sous notre
domination en vertu des traités d'Utrecht, de Ratstadt et de Baden.
Nous lui ferons connoitre nos intentions sur cette erreur, par le
canal de votre chambre des comptes. A tant, très cher, chers et
féaux, Dieu vous ait en sa sainte garde.
De Bruxelles, le 20 janvier 1770; paraphé Ne. vt.Plus bas étoit :
par ordonnance de Sa Majesté, signé De Reul.
— 267 —
de sa mission. Déjà en 17G2, Marie-Thérèse avait
écrit à la chambre fiscale de Flandre :
L'Impératrice Reine,
Cher et féal. Nous désirons que vous nous informiez inces-
samment :
1° De l'endroit où se trouvent actuellement les archives
de Flandre, déposées ci-devant au château de Rupelmonde;
2° Dans quel état sont ces archives ; si elles sont arran-
gées en bon ordre, et d'une manière qu'on peut facilement
trouver les papiers, d'après les indications de l'inventaire ;
3° Vous Nous envoyerez des copies authentiques des
commissions de tous les gardes ou trésoriers de ces mêmes
Archives qui pourront se trouver dans les actes, depuis le
commencement du règne de l'empereur Charles V.
. A tant, cher et féal, Dieu vous ait en sa sainte garde.
Brusselles, le 1 mai 1762. Ne. v*.
Par ordonnance de Sa Majesté,
P.Maeia.
A la suite de cette demande, Diericx avait écrit
la lettre suivante, que nous publions d'après sa
minute autographe *, et à laquelle Ph.-J. de Neny
fait allusion dans son mémoire :
Messeigneurs,
Ensuite des ordres de VV. SS. du premier de ce mois,
j'ai l'honneur de les informer que les archives de Flandre,
déposées ci-devant au château de Rupelmonde, se trouvent
1 Sur la marge supérieure, nous lisons cette note curieuse :
Fait des recherches, 6 heures f. 9.00
Former cotte [?], 2 heures ........ » 3.00
Mise au nette grosse 4 feuilles. » 1.10
Copies autentiques jointes grosses 22 feuilles . » 4.08
f. 18.08
-— 268 —
actuellement au Conseil en Flandre, dans une chambre
communément ditte la chambre des fiscaux, où ils [sic]
ont été transportés du nouveau château de Gand, par
ordre du gouvernement et à la poursuite des conseillers
fiscaux, en l'an 1715.
Ces archives y sont très mal arrangées, placées en partie
dans des tiroires [?] ou lyaittes [sic] de bois, et partie en des
coffres et liasses. Elles sont confondues ensemble, de sorte
qu'on ne peut plus facilement trouver les papiers d'après
les indications de l'inventaire. Je crois même qu'il y a une
grande partie qui y manque, car j'ai trouvé souvent, en y
faisant des recherches, que les étiquets [sic] ne contenoient
plus les pièces spécifiées par l'inventaire que le président de
Pattin a fait remettre le... [15 avril 1762, au secrétaire du
Conseil privé, à Bruxelles].
Le clerc juré de la greffe du Conseil, Grimberghen, qui y
est en fonction depuis cinquante ans ou environ, m'a dit
que, de sa connoissance, les fiscaux y ont souvent fait des
recherches, et envoyé, par ordres du gouvernement, des
actes à Bruxelles; ce qui, suivant la tradition, doit également
[être] arrivé avant son tems; mais comme ils n'ont pas tenu
note de ce qu'ils en tiroient et qu'ils n'observoient point
l'exactitude requise pour remettre les autres dans l'ordre de
l'inventaire, VV. SS. pourront facilement juger de l'état
dans lequel ces archives se trouvent actuellement l.
Ces archives y sont placées en fort mauvais ordre,
confondues et éparpillées ensemble, telles qu'elles se trou-
voient au nouveau château de Gand, en l'an 1715. J'ai
observé qu'il y... 2 reste cependant encore plusieurs pièces
curieuses et intéressantes, non seulement par rapport à leur
antiquité, mais à cause de la matière dont elles traittent.
1 Passage biffé sur la minute.
2 Passage biffé, sans importance.
— . 209 —
Je crois même que ce seroit une chose à désirer pour le
service de S. M. que ces pièces seroient bien arrangées et
inventoriées par ordre des matières et, nommément, qu'à
X avenir, elles y seroient conservées 'par un officier en titre,
tel que V objet par oit requérir '.
Quant aux commissions des gardes ou trésoriers de ces
mêmes archives, j'ai parcourra tous les registres des com-
missions et patentes du Conseil, et je n'y ai trouvé que les
deux commissions ci-jointes en copies autentiques.
Parmi quoi, espérant d'avoir satisfait aux ordres de
W. SS., j'ai l'honneur d'être d'un très profond respect,
Messieurs,
De VV. SS. illustrimimes,
Le très humble et très obéissant serviteur,
Le conseiller fiscal de S. M. au Conseil de Flandre.
Gand, ce 13 may 1762.
Patente de trésorier des chartes de Flandre, du 14 d'aoust
1532, en faveur de messire Guillaume de Waele, seigneur
d'Axpoele. fo 77 r°.
Patente de trésorier des Chartres de Flandre, en faveur
de messire Louis Errenbault, écuier, seigneur de Dudseele,
en la place de messire Jean-Baptiste Maes, chevalier de
l'ordre de Saint- Jacques, dernier possesseur dudit état;
7 mars 1668. fo 249 r°.
1 Passage biffé sur la minute.
— 270 —
MÉMOIRE SUR LES CHARTRES DE FLANDRE.
Les Chartres de Flandre ont été déposées et
gardées pendant longues années au château de
Rupelmonde, dont il ne reste plus que les ruines.
Pendant les troubles des Païs-Bas ' , ces Chartres
furent transportées à Gand et déposées partie
dans une sale qui étoit audessus de celle où s'as-
sembloit le chapitre de la cathédrale, et partie
dans la tour du beffroy.
En 1594, le roy Philippe II jugea à propos de
les faire tirer de là, et les fit déposer dans une sale
qu'on venoit de construire exprès au nouveau
château de Gand, c'est à dire dans la citadelle.
Cette opération fut exécutée par Conrad Schetz
de Grobbendonck, conseiller au Conseil des
finances 2, par un conseiller du Conseil de Flandre
et par un conseiller maître de la Chambre des
comptes de Lille, à l'intervention de plusieurs
membres du Magistrat de Gand, tous spécialement
commis pour cet effect par le gouvernement. Ces
commissaires eurent ordre de revoir les anciens
inventaires, de constater Tétat des papiers, d'ano-
ter ceux qui étoient perdus ou égarés, et ensuite
de remettre à messire Jehan de Riehardot, conseiller
1 Voyez les lettres patentes datées de Brusselles, le 30 mars 1594,
insérées dans l'inventaire [note de Neny].
2 Conrad Schets de Grobbendonck était fils du célèbre Gaspard
Schets de Grobbendonck et de Catherine d'Ursel ; ayant pris le
nom et les armes d'Ursene ou Ursel, il devint la tige des ducs
d'Ursel actuels.
— 271 —
des Conseils cVétat et privé et président d'Artois, ou
à son command ', tous les actes qui constituoient
les Chartres de Flandre, moiennant son reçu au
bas de l'inventaire.
Tout cela fut exécuté, et le nouveau dépôt au
château de Gand subsister [sic] jusqu'en 1678,
ainsi qu'on le dira ci-après.
Du reste, les archives de Flandre ont toujours
été sous la garde d'un trésorier particulier. Voici
la liste de ceux qui ont rempli cette place depuis
le commencement du règne de Charles-Quint, pour
autant qu'on a pu le découvrir par les comptes des
domaines d'Oostflandre, reposant en la Chambre
des comptes de Lille et par d'autres actes.
Guillaume de Waele, chevalier, seigneur d'Ap-
poel [Axpoele] et de Hansbeke, conseiller au
Conseil en Flandre ; il fut pourvu de la place de
trésorier, ou garde-chartres de Flandre, par lettres
patentes de Charles, prince d'Espaigne, du 10 août
1515, sur 1-a résignation qu'en auroit faite l'au-
diencier Philippe Henneton [Haneton] * en mains
1 Les passages en italique sont ceux qui 9ont soulignés dans
le texte.
2 Philippe Haneton avait été nommé trésorier et garde des chartes
de Flandre en 1506. Voir la notice que Mr Emile Varenbergh a
consacrée à ce personnage dans la Biographie nationale, t. VIII
(1884-1885), col. 682-684. Voici la liste de ses prédécesseurs, d'après
la notice de J. de Saint-Génois : Jacques de Libaufosse (1357) ;
Pierre Blanchet (c. 1387); Thierry Gherbode (1399-1421); Jean
de la Kéthulle (1433); Georges d'Oostende; Barthélémy Trottin
(1482-1488) et Philippe Numan (1485-1489). Il est probable que ces
deux derniers personnages exercèrent quelque temps ensemble la
fonction de garde des chartes de Flandre, de même que Pierre
Blanchet et Thierry Gherbode.
— 272 —
du seigneur d'Escaubecque, chanselier. Le garde
des Chartres fut chargé de faire son serment entre
les mains du même chevalier, qui devoit aussi le
mettre en possession de son office. Ses gages
étoient de J? 120 par an.
Par lettres patentes du 15 septembre de la même
année, Jean Caulier et Antoine de Monteneije,
seigneur de Marque, conseillers et maîtres des
requêtes de l'hôtel, furent commis, avec un auditeur
et un greffier de la Chambre des comptes, à l'effect
de recevoir de l'audiencier Henneton les Chartres
de Flandre avec leurs inventaires et les clés, pour
remettre ensuite le tout à Guillaume de Waele.
Charles Boisot, conseiller des Conseils d'état et
privé, succéda immédiatement à Guillaume de
Waele. Boisot, qui était à la suite de l'empereur
Charles V, en Allemagne ', étoit mort à Ratis-
bonne, en 1546 2. Viglius d'Aytta, conseiller au
Conseil privé, lui succéda dans la place de garde
de Chartres de Flandre, et la conserva étant chef
et président, et ne s'en démit qu'en 1550, lors
qu'il demanda et obtient [sic] la place de maître
des registres de Hollande, vaccante par la mort de
Vincent Cornelissen, trésorier général des finances.
Hermès de Wingene [ou Winghe], conseiller au
1 Analecta belgica, tome I, page 26 [note de Neny].
2 Charles Boisot, qui n'est pas cité dans la. Biographie nationale,
fut nommé membre du grand Conseil, à Malines, le 27 décembre
1531 ; en 1538, il fut appelé à siéger au Conseil d'état et au Conseil
privé, où il se distingua de manière à être choisi pour présider le
Conseil des affaires des Pays-Bas, à Madrid. 11 se trouvait, le 20 sep-
tembre 1546, au camp de Neubourg, et c'est là qu'il fut attaqué de
la dyssenterie dont il mourut à Ratisbonne, où il avait été transporté.
— 273 —
Conseil privé, lui succéda dans celle de garde des
chartres de Flandre.
Par une commission de l'empereur de l'an 1551 ' ,
Philibert de Brusselles, conseiller au Conseil privé,
fut chargé de se transporter au château de Rupel-
monde, d'y recevoir de Viglius les chartres, les
inventaires et les clefs, et de les remettre à Hermès
de Wingene.
Celui-ci fut remplacé, en 1574, par le docteur
Louis Del Rio.
Gherolff [?] Vanderhaegen lui succéda en 1579.
Dans les comptes de 1582, on trouve Louis
Hueriblock, trésorier des chartres de Flandre.
En 1583, Jean de Richardot, président du
Conseil d'Artois, qui garda cette place pendant
qu'il étoit chef et président, et jusques à sa mort
arrivée en 1609.
Depuis lors, jusques en 1627, les comptes ne
présentent aucun paiement de gages au trésorier
des chartres de Flandre, ce qui fait présumer que
l'emploi étoit demeuré vaccant.
Dans les comptes de 1630, on trouve le paie-
ment des gages de trésorier des chartres de Flandre,
pour trois années, à Jean-Baptiste Maes, conseiller
au Conseil des finances, fils du chef et président
de ce nom, qui avoit été pourvu, en 1627, de lomce
de trésorier des chartres ; il mourut en 1667.
Par lettres patentes datées de Brusselles, le
7 mars 1668, Louis d'Errembault, seigneur de
1 Le 17 avril 1552, d'après la notice de J. Britz sur Philibert de
Bruxelles, dans la Biographie nationale, t. III (1872), col. 118.
19
— 274 —
Dudzeele, premier conseiller au grand Conseil,
fut établi conseiller-trésorier et garde des Chartres
de Flandre, à la place de Jean-Baptiste Maes, et
prêta son serment le 10 du même mois, entre les
mains du chef et président [Charles de] Hovyne.
Lors de la prise de Gand par les François, en 1678,
Errembault étoit président du Conseil de Flandre.
L'inquiétude de son esprit- lui avoit attiré diverses
affaires désagréables et [il] finit par s'attacher au
service de Louis XIV, qui le fit président du Conseil
souverain de Tournay. Il paroit que, depuis lui,
personne n'a été garde des Chartres en titre ' .
En 1762, le gouvernement voulant être instruit
de l'état de ces Chartres, on commença par or-
donner au président du Conseil de Flandre d'en
envoier l'inventaire au chef et président ; ce qui fut
exécuté, moiennant un reçu qui [sic] en donna
l'un des secrétaires du Conseil privé 2.
1 Voir la notice que Mr Emile de Borcbgrave a consacrée à ce
personnage dans la Biographie nationale, t. VI (1S78), col. 6S5-G93.
2 Voici le procès-verbal de cette remise :
Op den 2e" maerte 1762, gedraegen ten huyze van den heere
président vijf registers van de archiven, te weten eenen geschreven
op parchemijn, ende vier andere gebonden in leer. •
Het registre gescbreven op parchemijn, bij ordre van den heere
président, gebonden in een envelope, is door dessell's ordre, door
Grimberghe, op den 7e11 april 1762, gegeven in handen van den
raedsheer de Geus, om naer Brussel mede te draegen, ende te behan-
digen in de chancellerie van privëen Raedt, synde de resterende
boecken wederom ten fiscaele comptoir beweght.
Copie van récépissé.
Le soussigné, secrétaire de Sa Majesté en son Conseil privé,
déclare d'avoir reçu de Mr l'avocat au grand Conseil Sporenbourgh,
l'inventaire des Chartres de Flandres, conservées ci-devant au
château de Rupclmonde, envoyé audit Conseil privé par Mr le vi-
— 275 —
Il forme Ain très gros volume en vélin, qui com-
prend la collection de différens inventaires faits en
différens tems, à commencer avec celui dressé en
l'an 1387 [1388, n. st.] par Pierre Blanchet,
conseiller et maître de requêtes de l'hôtel, et par
Thierry de Gerbode, secrétaire de Philippe le
Hardi, duc de Bourgogne, comte de Flandre \
On voit par ces inventaires que les papiers qui
constituoient le dépôt nommé les archives de
Flandre, formoient un assemblage d'une multitude
d'actes aussi intéressans que curieux.
On y trouve, entre autres, tous les traités
d'alliance, de pais et de commerce des anciens
comtes de Flandre et des princes des maisons de
Bourgogne et d'Autriche, ainsi que leurs traités
de mariage et ceux de leurs enfans, avec les négo-
ciations y relatives ;
Le partage des états et la maison d'Autriche
comte de Patin,, président du Conseil en Flandres, en conséquence
des ordres de S. M.
FaitàBrusselles, le 15 d'avril 1762.
Signé P. Maria.
1 « Appréciant l'importance de la trésorerie des chartes et l'utilité
qu'il en pouvait tirer pour le soutien de ses droits, il [Philippe le
Hardi] nomma, le 30 septembre 1399, Gherbode garde de ses
archives en Flandre, Artois, Rhételois, Limbourg, Outremeuse et
Brabant, au traitement de 300 francs d'or, avec la ville de Lille pour
résidence... Jean sans Peur le confirma dans cette charge, le 9 août
1405, et Philippe le Bon en 1419. Gherbode a laissé un Mémorial,
conservé aux Archives de l'État, à Bruxelles, commençant en 1402,
finissant en 1414, et indiquant les pièces qui, dans cet intervalle,
furent distraites par lui de la trésorerie des chartes, d'après les
ordres du duc de Bourgogne ». Biograpliie nationale, t. VII (1880-
1883), col. 712, v° Thierry Gherbode (notice de Mr Emile de Borch-
grave).
— 270 —
entre l'empereur Charles V et de [sic] l'infant
Ferdinand, son frère, conclu à Brusselles, le 7 fé-
vrier 1522;
Les droits de la maison d'Autriche sur le duché
de Bourgogne; les affaires publiques des pro-
vinces des Pays-Bas avant qu'elles ne fussent
unies ;
La fameuse contestation entre les maisons de
Dampierre et d'Avesne sur la succession aux
comptes [comtés] de Flandre, de Hainaut, de Hol-
lande et de Zeelande ;
L'incorporation de différentes grandes terres à
la Flandre, telles que les pais de Terremonde et
de Waes ;
La division de la Flandre en impériale et fran-
çoise ;
Les contestations relatives à la féodalité de
cette province envers la France ;
La féodalité des provinces de Namur envers la
Plandre ;
L'achat de la seigneurie de Malines et de la ville
d'Anvers par les comtes de Flandre ;
Beaucoup d'actes concernant la Franche-Comté,
les châtellenies de Lille, Douay et d'Orchies, la
seigneurie de Tournay, les terres de Mortagne et
de Saint-Amand, la prévôté de Valenciennes, les
villes de l'Artois; les limites avec la Zeelande, etc.;
Les actes concernant la dissolution du mariage
de Henri VIII, roy d'Angleterre, et de Catherine
d'Arragon ;
La fondation et la consistance des dignités et
bénéfices ecclésiastiques ;
Plusieurs bulles des papes et, nommément, pour
— 277 —
lever des décimes sur le clergé à l'occasion des
guerres contre les Turcs ;
Nombre d'actes sur les droits de la puissance
souveraine relativement aux affaires ecclésias-
tiques ;
Les révoltes des villes de Flandre et les traités
de conciliation;
Le meurtre de Jean-sans-Peur et la réparation
qu'en fit Charles VIII, roy de France;
Les affaires du fameux connétable de Saint-Pol
et la confiscation de ses biens ;
Les droits de la jurisdiction des Templiers et la
donation de quelques-uns de leurs biens aux frères
de l'hôpital de Saint-Jean (aujourd'hui chevaliers
de Malte) ;
En un mot, une multitude de correspondances,
d'actes, de traités, presque tous en orriginal [sic],
et qui sont d'une si grande importance que ce
dépôt étoit vraisemblablement le plus précieux
qu'il y eût en Europe.
Ce coup-d'œil général fait apercevoir que le
dépôt qualifié improprement de Chartres de Flandre
étoit véritablement un archive d'état ; ce que l'on
reconnoît encore par le rang et la qualité de
quelques-uns de ceux qui en ont eu la garde.
Il conste par les inventaires que ces papiers
étoient rangés dans différentes armoires, layettes,
chaisses [caisses] ou coffres, dont la plupart étoient
distingués par une marque particulière, telle qu'un
poisson, une boutteille, un peigne, un étrille, etc.
L'ordre n'étoit ni juste ni méthodique ; car il y a
telle caisse qui renfermoit un traité, tandis que
les actes relatifs à la négociation de ce même
— 278 —
traité ou sa ratification se trouvoit [sic] dans un
autre.
Du reste, les François, possesseurs de Gand
en 1678, enlevèrent du château une partie des
archives, et le président Errembault emporta pa-
reillement, de son côté, divers papiers, tant du
dépôt du château que des archives du Conseil de
Flandre.
Les premiers furent transportés d'abord à la
Chambre des comptes de Lille, et les autres y
furent transportés de même dans la suite, à la
mort du président Errembault.
Les ministres du roy catholique au Congrès de
Nimègue, étant informés de ces procédés, ils in-
sistèrent sur la restitution des papiers et, confor-
mément à leur demande, il fut stipulé, art. 20 du
traité de paix conclu dans cette ville en 1678,
« que tous les papiers, lettres et documens concer-
« nant les païs, terres et seigneuries qui seront
« cédées et restituées aux deux rois, seroient four-
ce nis et délivrés de bonne foy de part et d'autre
« dans trois mois après que les ratifications du
« traité auroient été échangées, en quelques lieux
« que lesdits papiers et documens se puissent
» trouver, même ceux qui auroient été enlevés de la
« citadelle de Gand et de la Chambre des comptes
« de Lille. »
Cette stipulation fut répétée et renouvellée
encore dans les mêmes termes, art. 16 du traité
de Riswick de 1697.'
Il est apparent qu'on en espéra l'exécution en
1700; car, dans un acte du 29 mars de cette
année, par lequel l'électeur de Bavière commit le
— 279 —
secrétaire du Conseil privé, Le Roy, à l'effect d'aller
recevoir les papiers qui dévoient être rendus en
conséquence du traité de Reswick, il est dit que
le marquis de Forcy avoit déclaré à l'ambassadeur
du roy catholique que le roy très chrétien avoit
déjà donné l'ordre pour que lesdits papiers fassent
délivrés. Mais il n'en est rien résulté, non plus que
de la réclamation de ces mêmes papiers que firent
les commissaires de l'empereur Charles VI aux
conférences de Lille,- parmi mémoire du 18 jan-
vier 1717.
Depuis lors, il n'en a plus été question,' sauf
que le chef et président en parla, pendant sa mis-
sion à Paris, en 1752, à feu M. de Sechelle, alors,
intendant de Lille.
11 n'y a plus de papiers aujourd'hui au château
de Gand; ceux qui y étoient demeurés furent
transportés, en 1715, à la chambre fiscale du
Conseil de Flandre par les ordres du gouverne-
ment et à la diligence des conseillers fiscaux.
Le conseiller fiscal actuel Diericx, de qui on
tient cette particularité, ajoute dans une lettre du
13 mai 1762 « que les papiers sont placés en
« partie dans des layettes et partie dans des
« coffres, qu'ils sont très mal arrangés et confon-
« dus ensemble, de sorte qu'on ne peut plus les
« trouver d'après les indications de l'inventaire;
« qu'une grande partie des actes spécifiés dans
« l'inventaire manque; que, dans les liasses éti-
« quettées, on trouve souvent des papiers qui
« n'ont rien de commun avec l'annonce de l'éti-
« quette; que, cependant, il reste encore plusieurs
« pièces curieuses et intéressantes, non seulement
— 280 —
« par rapport à leur antiquité, mais à cause de
« la matière; et il croit que ce seroit une chose
« à désirer pour le service de S. M. qu'elles
« fussent arrangées et inventoriées par ordre des
« matières. »
Il résulte de ce tableau que nous ignorons ce qui
nous reste des débris de l'ancien archive de Flandre,
que nous ignorons également quelles sont les pièces
que les François ont enlevées ; que les anciens in-
ventaires sont devenus totalement inutiles pour
la recherche des actes; en un mot, que tout est
dans les ténèbres et dans la confusion.
Il est probable que les François possèdent les
actes les plus essentiels, car feu M. Jean Godefroy,
directeur des archives de la Chambre des comptes
de Lille, homme d'une [sic] mérite distingué, en a
publié un grand nombre dans l'édition des Mé-
moires de Commines faite par ses soins chez
Coppens, à Brusselles, en 1723 '.
On croit communément, tant dans les Païs Bas
qu'en France, que ces actes font partie des archives
de la Chambre des comptes de Lille; mais c'est un
[sic] erreur, caries chambres des comptes, dans leur
principe, n'ont pas été destinées à être le dépôt
des monumens qui regardent les affaires d'état,
quoiqu'on y enregistroit les traités de pais, comme
on les enregistroit aussi au grand Conseil de
Malines et aux parlemens de France 2.
1 V. Ferd. Vander Haeghen, Th.-J.-I. Arnold et R. Vanden
Berghe, Bibliotheca belgica, C. 202.
2 Extrait des Mémoires sur l'intendance de Flandre, imprimés à
Brusselles en 1738, page 35 : « Les titres et registres de la chambre
— 281 —
On a vu ci-dessus que c'est par hazard que les
actes dont il s'agit se trouvent à la Chambre des
comptes de Lille, sur le môme pied que les archives
du Conseil d'état des Pais Bas ont été transportés,
en 1744, à la Chambre des comptes de Brusselles,
en vertu d'une disposition spéciale du gouverne-
ment, parce qu'elles se trouvoient dans un mauvais
emplacement à la fausse porte de Namur, aujour-
d'hui démoulie [sic].
Quoiqu'il en soit, nous n'avons pas renoncé au
droit de revendiquer les papiers dont il s'agit,
droit qui appartient incontestablement à S. M.,
en vertu des traités de Nimègue et de Eeswick,
confirmés par les traités subséquens.
On pourra le faire valoir lorsqu'on reprendra la
négociation entamée à Paris, en 1752, sur toutes
les contestations en général ; mais, en attendant,
il paroit n'être point indifférent d envoier quel-
qu'un à Gand, pour jetter un coup d'œil sur les
papiers de l'ancien archive éparpillés dans la
chambre fiscale, et examiner s'il en reste d'inter-
ressans, surtout relativement aux négociations,
traités d'alliance, de mariage, de paix et de com-
merce, ainsi qu'aux affaires avec la cour de Rome
et autres matières d'état.
Celui que S. A. R. trouvera bon de donner cette
« des comptes ne sont pas les seuls qui y sont renfermés (dans
« l'hôtel de la chambre à Lille) on y a mis encore les Chartres du
« pays, qui sont dans un lieu séparé que l'on nomme, pour ce sujet,
« \3Ltour des chartres ; il faudroit entrer dans le détail de presque
« tous les titres qui y sont pour en connoitre l'importance ; il suffit
« de dire qu'il y a 14 à 15 milles orriginaux [sic] ou copies auten-
tiques. » [note de Neny].
— 282 -
commission devra, d'après les notions qu'il aura
prises sur les lieux, s'expliquer nommément sur
l'importance, le volume et la quantité des actes
qu'il jugera mériter les attentions du gouverne-
ment, de même que sur la question s'il convient
ou pas de les faire transporter à Brusselles, afin
d'y être inventoriés et gardés, soit dans un dépôt
séparé sous un trésorier particulier, soit dans le
dépôt général des archives du Conseil d'état.
La décision de ce dernier point dépendra de la
quantité d'actes qui nous reste et de la conve-
nance qu'il pourroit y avoir à les tenir séparés,
dans la vue de les réunir un jour, soit avec la
totalité, ou, du moins, avec une partie de ceux qui
ont été enlevés par les François.
Brusselles, le 10 juillet 1763, étoit signé Phi.
Jo. de Neny.
Nous n'avons guère de renseignements sur l'au-
teur de ce mémoire, Philippe- Joseph de Neny, qui
fut grand bailli et président des Etats de Tournai
et du Tournaisis et qui se rendit plus tard à Paris.
Lorsque la révolution française éclata, il ouvrit
une librairie près du palais de l'Institut, pour
échapper à la proscription. Il se trouvait encore
à Paris, en 1807; car nous le voyons assister, le
8 octobre de cette année, à une réunion d'artistes
belges présidée par Charles Van Hulthem ' .
Paul Bekgmans.
(A continuer.)
1 V. Annuaire de l'Académie royale de Bruxelles, 1835, p. 89.
283
LES
SEIGNEURIES DU PAYS DE MALINES
KEERBERGEN
ET
SES SEIGNEURS
^oC-51(Ç>»-
NOTICE HISTORIQUE SUR LE VILLAGE.
Au commencement du XIIe siècle, il existait, à
Keerbergen, une chapelle qui relevait du monas-
tère de Bornhem. L'appauvrissement de cette
abbaye obligea son abbé Siegfried à supplier
l'évêque de Cambrai de la soumettre au puissant
couvent d'Afflighem. Compatissant à la misère
des religieux de Bornhem (desolationi condolentes),
l'évêque Burchard annexa leur abbaye à celle
d'Afflighem, par diplôme de l'année 1120. Il y
joignit les appendances de Bornhem à Havesledunc
(de nos jours Xattenhaesdonck, à Hingene) et
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor., 2me liv. 1S90, p. 158.
— 284 —
"Ring en, de même que les chapelles de Keréberga
et de Rimenham (Rijmenam), avec les alleux et
autres possessions y rattachés, et les autels de
Meerbeek et de Beijssem. A l'occasion de cette
cession, l'évêque abolit la règle de Saint- Augustin
qui avait été suivie à T3ornhem. Aux termes du
diplôme, cette abbaye était alors presque réduite
à néant (fere ad nihilum redacta).
A la suite d'une requête de la comtesse Clé-
mence de Flandre, cette cession fut ratifiée par le
pape Calixte II, frère de cette princesse '.
L'ancienne église de Keerbergen, qui se trouvait
près de la Dyle, nous l'avons dit, fut complè-
tement détruite par le feu, dans les guerres qui
dévastèrent les Pays-Bas, au commencement du
XVIIe siècle. L'église actuelle provient d'agran-
dissements successifs de la chapelle consacrée
aux S. S. Antoine et Barbe, chapelle qui avait
été dotée de fonts baptismaux en 1570 2. Le
chœur date de 1752 et le clocher de 1764. L'édi-
fice, sans style, dont l'intérieur n'est pas dépourvu
de charme, a un extérieur des plus insignifiants.
Du mobilier de l'ancien temple, on n'a retrouvé
dans les ruines qu'une sonnette portant cette
inscription : Loft gode van al. Ghegooten in
't jaer M.D.L.I, et un encensoir en cuivre, de
forme hexagonale, dont chacune des six faces est
percée de deux fenêtres et d'un œil-de-bœuf.
Le 24 septembre 1659, Claude Humbloet coula,
1 Miraeos, Opéra diplomatica , I, p. 170 et 171.
s Messager des sciences historiques, 1890, p. 59. Comp. Van
Gestel, Historia archiepiscopatus mechliniensis .
— 285 —
au cimetière de Boort-Meerbeek, trois cloches,
l'une pour cette dernière paroisse, les deux autres
pour Keerbergen. Sur la plus grande de celles-ci,
pesant 497 livres, on lisait : Sancte Michel ora
pro nobis, in Keerbergen; sur la plus petite,
d'un poids de 334 livres : Sancte Antoni ora
pro nobis in Keerbergen. Elles furent bénies le
26 septembre.
En 1764, on en commanda une nouvelle, qui est
la petite cloche actuelle. Elle mesure 0,78 mètre
de haut et porte : „ Andréa s van den Gheijn me
fudit Lovanii anno 1764. Son bord est assez
détérioré ; cela fait supposer qu'on l'a ôtée pendant
l'invasion des Français, qui, on le sait, se plai-
saient à détruire toutes les cloches dont ils pou-
vaient s emparer. Sur la grande cloche, haute de
0,93 mètre, on lit : Andréas van den Gheijn me
fudit Lovanii anno 1819. Jacobus Evariste Beke
Antwerpiensis pastor in Keerbergen. Justin Fr.
BOUJOZ MEIJER EN PETER. DoROTHÉ AuGUSTINE
Cammaerts meter. Glm. Verlinden Fabrieck-
meester. Henri Claes en Jan Van der Roost,
kerkmeesters.
Au-dessus du maître-autel, il y a un tableau
peint par Verreijdt ' en 1843 ; c'est une représen-
tation des disciples d'Emmaûs, à table avec le
Christ, sans valeur artistique. Dans la boiserie du
chœur, on trouve, à droite, sculptée en relief,
la Justice, et, à gauche, David jouant de la harpe.
i Et non pas Verzijl, version erronée d'une brochure dont noue
allons parler plus loin.
— 286 —
Le banc de communion en chêne, bien travaillé
à jour, fut achevé en 1792 : il présente, au milieu,
T Agneau sur la Croix, et, sur les côtés, deux
anges. C'est l'œuvre du sculpteur S. van Geel, à
Malines, qui toucha pour son travail 250 florins
et 18 sous.
Les confessionnaux, en chêne, sont surmontés des
bustes de Madeleine et de Saint-Pierre. La chaire
de vérité est belle. Deux escaliers y montent. Elle
est placée sous un dais octogone dont deux anges
relèvent les draperies. Sur cette chaire, on voit,
très finement sculpté en haut-relief, Saint- Antoine
en prières devant un crucifix, et ayant son com-
pagnon à ses pieds. Elle repose sur un bloc repré-
sentant une grotte. A l'entrée de celle-ci est couché
un taureau ; à droite de la grotte se tient l'archange
Michel, patron de l'église, levant la main vers le
ciel, et ordonnant à l'évêque de Siponto, placé à
sa gauche, de bâtir une église. Cette sculpture
représente l'apparition de Saint-Michel sur le
montGargano, en Italie, prodige dont le souvenir
est célébré par l'église le 8 mai.
Bans une brochure, publiée, en 1861, par J. B.
van den Bruel, curé de Haecht ', nous avons
1 Beschrijf der Dorpen van het kanton Haecht, etc. (Louvain,
chez C. J. Fonteijn). Cette brochure est très rare. Il convient de
ne s'en servir qu'avec la plus grande circonspection : elle fourmille
d'inexactitudes dont un grand nombre sont, apparemment, dea
fautes d'impression. C'est ainsi cpie des époux Catherine de Berlaer
et Jean de Cortenbach, on a fait Katharina van Rillaer et Joannes
— 287 — .
trouvé une liste des curés de Keerbergen. Grâce
à M. le chanoine Bogaerts, archiviste de l'archi-
diocèse de Malines, dont l'extrême obligeance ne
se dément jamais, nous sommes à môme de rec-
tifier cette liste en plusieurs endroits et de la com-
pléter par quelques noms et des détails biogra-
phiques.
Le premier curé connu de Keerbergen, c'est
Jean Boels; on le cite en 1467 (ailleurs en 156.).
Jean Achelpoel y était curé en 1569. Après lui,
nous trouvons Christophe Schroots, puis Chris-
tophe Cuppens, qui resta en fonctions jusqu'en
1597. Il eut pour remplaçant Henri Hoolaerts, ou
Holartius, curé jusqu'en 1603. De son temps,
l'église servit de camp retranché aux troupes, et
il dut faire les offices dans la chapelle. En 1604,
André Cocx et ensuite un religieux, célestin
d'Héverlé, nommé Chrétien (van) Eermeghem ou
Vermeersch, desservirent provisoirement la cure.
Ce dernier fut nommé curé l'année suivante, mais
quitta la paroisse en 1606, pour passer à Rijme-
nam. Son successeur, Henri Lijsbrechts, décéda
en 1607. On nomma à sa place Émérique van
Cappelhof ou Capelhovius. En 1637, est signalé
Symphorien (alias Louis) van der Linden, qui
paraît avoir été desservant ad intérim jusqu'en
1641. Guillaume Lanen fut investi de la cure
l'année suivante; il la conserva jusqu'en 1668,
Cortenback; Ivain de Cortenbach, est devenu Verwuns van Corten-
back; le nom du peintre Verreijdt, auteur du tableau du maître-
autel, est tronqué en Verzeijl; le bameau de Kortewelvaart est
transformé en ruisseau du nom de Kortenelvaert, et ainsi de suite,
— 288 —
année de sa mort. Après lui, Adrien Heijlen prit
possession de la paroisse et l'administra jusqu'au
8 janvier 1695. Il décéda en 1722 et fut inhumé
dans le chœur de l'église. Sa place avait été
donnée à Florent Couplet, licencié en théologie,
qui fut nommé en 1700, à Puers, et le 11 octobre
1707, curé de Sainte-Catherine, à Malines. Sa suc-
cession à Keerbergen avait été recueillie, en 1701,
par Pierre Goossens, curé jusqu'à sa mort, qui eut
lieu le 29 avril 1704. Sa dépouille mortelle fut
déposée dans le chœur de l'église.
Les fonctions sacerdotales furent alors exercées
par Edmond Britsens, natif de Lierre, qui avait
été, depuis douze années, curé à Holsbeek. Il
mourut le 13 avril 1716, âgé de 52 ans, et fut
inhumé dans le chœur. Son successeur, Théodore
(van) Pioelen, décéda en fonctions le 18 novembre
1728. L'année suivante fut nommé curé de Keer-
bergen Pierre Aerts, né en 1693, qui avait été
pendant trois années, curé à Hauwaert, et pen-
dant cinq années, curé à Cortenaeken. La mort
mit un terme à sa carrière le 17 mai 1744.
Jean Muls fut mis en possession de la cure, peu
après; il trépassa le 3 mars 1760, à l'âge de 48 ans.
Les épitaphes de ces deux derniers se voyaient,
autrefois, au chœur de l'église.
Jean Chrysostome Deckers, devenu curé en
1760, décéda le 28 janvier suivant; on conféra sa
place, en la même année, à Louis de Bisc(h)op,
qui mourut le 7 avril 1773. Le 24 juin de la même
année, Jacques Bernard Schepens, natif de Hau-
tem-Saint-Liévin, devint curé de Keerbergen; il
— 289 —
mourut, eu l'exercice de ses fonctions, le 20 dé-
cembre 1799.
Au commencement du nouveau siècle, la paroisse
fut desservie, pendant 18 mois, par J. C. van
Hamme, qui se retira à Crainhem où il finit ses
jours. Après lui, Charles Sixte Fransman, né à
Ninove, remplit les fonctions de curé pendant
deux ans et douze jours. Il fut nommé successi-
vement, curé à Dieghem (1803), curé à Lembecq
(en 1812) et doyen du district de Hal. Il passa de
vie à trépas le 18 août 1818, âgé de 48 ans.
Son remplaçant fut Guillaume Beijer, natif de
Parc, près de Louvain, curé à Helderghem (district
d'Alost), en 1773, et chanoine de la cathédrale de
Bruges, en 1791. La mort l'enleva le 28 mai 1806.
Jean François de Prêter, originaire de Rillaer,
d'abord vicaire à Aerschot, devint curé à Keer-
bergen le 2 du mois suivant; il mourut tel le
10 septembre 1814. A celui-ci succéda, 19 jours
après, Jean François Neijs, né, en 1766, dans le
même village que le précédant, depuis 1802 curé
à Beggijnendijck. La mort l'arracha à ses parois-
siens de Keerbergen le 18 novembre 1818.
Sa place fut attribuée à Jacques Evariste Beke ;
né à Anvers, le 17 février 1791. Ce nouveau curé
avait déjà été vicaire à Keerbergen et à Diest,
puis chapelain à Assént. Il fut appelé à la cure
d'Oeleghem en septembre 1822 et y mourut le
4 avril 1867. Guillaume Poncelet, né à Diest, le
13 octobre 1790, vicaire à Sempst, depuis 1813,
fut nommé curé à Keerbergen le 31 octobre 1822.
11 prit possession de sa place quatre jours après et
décéda le 20 mai 1859.
20
— 290 —
Le 24 du mois suivant, Corneille van Horck, né
à Duffel en 1811, vicaire à Wilsele, depuis le
14 août 1839, lui succéda et desservit Keerbergen
jusqu'au 22 août 1872, jour de sa mort.
Les pierres tombales de ces deux derniers se
trouvent au cimetière du village.
Depuis le 21 septembre 1872, les fonctions
sacerdotales ont été exercées par Victor Jacques
Verhaegen. Ce curé naquit à Wuestwezel, le
9 juillet 1824. Sacré prêtre le 20 décembre 1851,
il devint, successivement, coadjuteur à Kiezeghem
(1852), vicaire à Lillo (1854) et vicaire à Vorsse-
laer (1860).
Keerbergen était compris, autrefois, dans le
quartier de Hoogstraten.
Lorsque, en 1521, Charles-Quint fit faire, dans
le Brabant, une levée de 12000 hommes, pour sa
guerre contre François Ier, le quartier de Hoog-
straten eut à fournir, au marquisat d'Anvers,
un contingent de 232 hommes, calculés sur 1624
foyers . Keerbergen , qui était évalué alors à
75 foyers, dut donc intervenir, proportionnelle-
ment pour 10 9/\o hommes. La part que le village
eut à payer, à la même époque, dans les contri-
butions ordinaires {gewoone beden) imputées au
quartier de Hoogstraten, s'élevait à 310 livres.
Pour l'évaluation des foyers, on semble s'être
basé sur un recensement de la fin du siècle précé-
dent. Dans la première moitié de ce siècle, le
village avait eu une importance bien plus consi-
dérable ; il résulte, en effet, d'un recensement fait,
— 291 —
en 1435, dans les neuf quartiers du marquisat,
que Keerbergen représentait, alors, 136 foyers —
ce que nous estimons à environ 900 habitants —
et qu'il y avait treize pauvres à charge de la
commune \
Au XVIe siècle, époque tragique par excellence,
notre village fut terriblement éprouvé par les
guerres qui ensanglantèrent les Pays-Bas.
Après avoir assiégé en vain Anvers, le redou-
table Martin de Rossum, seigneur de Poederoeijen,
s'était jeté sur Lierre et, là, la garnison lui avait
fait une réception telle qu'il avait dû renoncer à
s'emparer de la place. Sa retraite fut désastreuse
pour la contrée qu'il eut à traverser : la sol-
datesque répandit l'épouvante sur son passage. Les
bourgs de Duffel et de Waelhem, avec l'abbaye de
Roosendael, furent réduits en ruines. Malines fut
menacé; beaucoup de villages, dont Schrieck,
Keerbergen et Wespelaer, furent pillés, d'autres
mis à feu et à sang.
Le 7 juillet 1578, l'armée des États-Généraux
établit son camp dans la bruyère entre Lierre et
Herenthals. De là, pour se procurer des vivres, les
troupes firent des incursions dans les localités
voisines, y pillèrent les habitations et détrui-
sirent les récoltes. Les malheureux campagnards
se réfugièrent, en grand nombre, avec leur bétail,
derrière les remparts de Lierre ; la plupart des ani-
1 Mertens et Tores, Geschiedenis van Antwerpen (1845), t. I,
pp. 453 et suivantes.
- 292 —
maux y moururent faute de fourrage. Le 23 juillet,
le camp fut transféré à Keerbergen, qui eut parti-
culièrement à souffrir. A quelques jours de là fut
livrée la fameuse bataille de Rijmenam, où Tannée
des États - Généraux l'emporta sur Don Juan
d'Autriche qui était venu l'attaquer (1er août) \
En 1774 eut lieu à Keerbergen l'exécution de
l'archer Jean Jacques d'Arbusier, condamné à
avoir la tête tranchée. Le maître des hautes-œuvres
de Bruxelles, s'étant fait remplacer par son fils
dont il avait garanti l'adresse dans cette sinistre
besogne, l'exécution fut si meurtrière qu'après le
premier coup manqué, le bourreau improvisé et un
de ses aides durent venir plusieurs fois à la charge
pour séparer la tête du corps, ce qui fit frémir tous
les spectateurs A la suite d'une plainte du dros-
sard, le Conseil privé présenta, de ce chef, une
requête au gouverneur général pour que celui-ci
enjoignît au magistrat de Bruxelles une plus grande
circonspection dans le choix du bourreau \
En 1346 et 1376, les échevins de Keerbergen
portaient dans leur sceau un écu à trois pals;
légende : f S... Scabinokum de Keerberghe 5.
Il ne nous a, malheureusement, pas été donné
de rencontrer d'autres sceaux scabinaux de notre
1 Comp. Van Lom, Beschrijving der Stad Lier, et Anton Berg-
mann, Geschiedenis der Stad Lier.
2 Ces détails résultent d'un document. communiqué, par M. Fr.
De Fotter, dans le Messager des sciences historiques, 1889, p. 475.
3 Archives de l'église des SS. Michel et Ondule ; chartes, liasses
342 et 345.
— 293 —
village. A l'instar des magistrats de la plupart
des localités de la région, ceux de Keerbergen
adoptèrent sans doute, à tour de rôle, les ar-
moiries des familles qui exercèrent la juridiction
de l'endroit.
De nos jours, Keerbergen ne possède pas d'em-
blèmes héraldiques. Si la commune désirait en
demander au gouvernement, nous l'engagerions
à revendiquer ceux qui figurent sur les deux
sceaux dont nous venons de parler. C'est l'écu des
Berthout, dits de Berlaer, seigneurs de Helmond,
et, au témoignage d'un contemporain, le héraut
d'armes Gelre, les émaux de ces armoiries sont
gueules sur argent. Pour l'adoption, ou mieux dit,
la reprise de ces armoiries, il importe peu que
d'autres communes, telles que Berchem, Niel, etc.,
les aient déjà faites leurs. Il n'y a,' à notre sens,
aucun inconvénient à ce que plusieurs localités
portent, sans marques distinctives, les armoiries
de leurs anciens seigneurs communs '.
Voici les bourgmestres de Keerbergen depuis
l'abolition de l'ancien régime : Thijs, Bosmans,
1 A ce propos, remarquons, toutefois, que les armes de Niel
doivent leur origine à la famille de Berchem. Dé même que les Ber-
laer, celle-ci était issue de la maison des Berthout et portait, comme
ceux-là, les trois pals de gueules sur champ d'argent, tandis que les
branches de Malines, de Duffel, et d'autres, avaient le champ d'or.
On peut donc dire que Keerbergen, Niel et Berchem ont obéi, jadis,
à la même famille. Quant au rattachement des Berchem à la branche
principale, nous renvoyons nos lecteurs à notre notice intitulée :
Niel en zijne Heeren (Dietsche Warande, 1889).
— 294 —
Boujoz (1819-26); J. Claes (1826-30); J. van Lan-
gendonck (1830-52); Jos. Cloetens (1852-55);
P. Coremans (faisant fonctions 1855-58); le doc-
teur Fr. Michiels (1858-68); P. Coremans (1868-
70); E. van Langendonck (1870-85); J. Fr. Geens
(1885-89); J. C. Vervloesem (depuis 1889).
Le village de Keerbergen appartient, de nos
jours, au canton de Haecht. Il est situé sur la rive
droite de laDyle. Son territoire, d'une étendue de
1841 hectares, est arrosé encore par le ruisseau
dit Groote beek. Il comprend les hameaux de Keer-
bergen, Stuivenberg, Kerkeberg, Kassestraat,
Heidekant, Heide, Loozenhoek, Grootloo, Peer-
venshoek, Zeept, Papenstraat, Wolvenberg, Kruis
et Kortewelvaart.
Il existe, à Keerbergen, une brasserie, installée,
près de' la Dyle, dans un établissement où il y
avait eu, jusque dans les derniers temps, une
meunerie et une huilerie. L'extraction de sable,
pratiquée, autrefois, sur une grande échelle, y a
diminué considérablement, depuis qu'on exploite
en grand les sablières de la Campine. Une autre
industrie du village, très florissante il y a quelque
vingt ans, a complètement disparu; nous voulons
parler de celle des saucisses dites de Boulogne. On
a abandonné également la fabrication des briques.
Le commerce de bois à brûler et de bois de
construction est, à peu près, le seul de la commune.
La chaussée de Keerbergen à Haecht a été
construite en 1860 ; celle qui relie le village à Ma-
lines date de 1868.
- 295 —
C'est à Keerbergen qu'on trouve le terrain le
plus aride de la province de Brabant, mais, à
côté de parties absolument stériles, on trouve
des champs très fertiles, surtout le long des cours
d'eau. Une grande partie du territoire est couverte
de sapinières. On y voit de nombreuses collines
sablonneuses où le sapin des dunes pousse vigou-
reusement. Les principaux produits de l'agricul-
ture sont les asperges et les pois. Un des plus gros
propriétaires de l'endroit, feu M. Florimond van
Langendonck, avait réussi à créer de belles sapi-
nières dans des terrains autrefois tout à fait in-
cultes, au moyen d'un engrais spécial, de toute
première qualité, à ce qu'on nous dit : cet engrais
se composait, en majeure partie, de cadavres de
vieux chevaux qu'il achetait en grandes quantités.
Depuis quelques années, la prospérité publique
paraît diminuer à Keerbergen, comme dans la
plupart des communes .qui ne sont pas desservies
par le chemin de fer ' .
J. Th. de Raadt.
1 II nous reste à remercier bien sincèrement, notre honorable
ami, M. Paul Notelteirs, et MM. les docteurs Thijs, à Bruxelles, et
Roex, à Keerbergen, des renseignements qu'ils ont bien voulu nous
donner si obligeamment pour le présent travail.
296 -
ADDENDA ET CORRIGENDA.
1889, p. 87. Egide Berthout (Ier), à la-Barbe, et
quelques-uns de ses descendants étaient co-sei-
gneurs de Duffel, Waelhem et Gheel. Dans une
charte de 1265, le second de ses fils, Ludovicus
de Berlaer et son cousin Henricus de Duffele se
qualifient, de milites, dicti Bertholdi, domini de
Ghela. Les droits de Louis, ou de ses héritiers, sur
ces trois seigneuries semblent avoir été rachetés
peu après; elles l'étaient en 1275. '
Egide Ier, était seigneur de Berlaer. Se nommant
Gilles Berthaus de Berlar, nobles hom, il donna en
1227, une dîme à Slijpe as nonains de lordene des
Cystials dou cloistre deles Waleem (Roosendael),
establit en Voneur sainte Marie, u ausijai mises mes
filles a servir Dieu et se très bone eureuse mère.
Cette donation fut faite del consentement me feme
et mes fins, et, en vertu d'une autorisation accor-
dée, en septembre 1226, par noble home Willaume,
chastelain de Saint-Omer, suzerain d'Egide du chef
de cette dîme 2.
P. 95. Louis Berthout, dit de Berlaer, seigneur
de ce lieu, de Keerbergen, Grammines, etc., mort
entre 1268 et 1271, fit son testament en juin 1266.
Il appert de ce document intéressant qu'outre
1 Voyez J. Th. de Raadt, Duffel, Gheel en hunne heeren (Kem-
pisch Muséum, t. I, p. 7-10).
2 Analectes pour servir à l'histoire ecclésiastique de la Belgique,
IIe série, V, 1888, p. 5.
— 297 —
Egide II, Louis et Godefroid, Egide Ier, avait
laissé encore deux autres fils, savoir Walter et
Jean, et que le testateur avait procréé, avec son
amie Gine, deux fils naturels, Gossuin et Jean.
Cette concubine vivait encore au moment du testa-
ment. Louis II exprime le désir d'être enterré
dans l'abbaye de Saint-Bernard (à Hemixem) à
laquelle il lègue, entre autres, son cheval et ses
armes.
Pour exécuteurs de ses dernières volontés, il
désigne Walter Berthout (VI), seigneur de Malines,
l'abbé et le prieur de Saint-Bernard. Sa femme,
Sophie (de Gavre), appose son sceau à ce testament.
Nous ne croyons pas pouvoir mieux faire que
de publier in extenso cette curieuse pièce, et ce
d'autant plus que des testaments de cette époque
reculée sont extrêmement rares.
La voici :
In nomine sancte et individue trinitatis, patris et filii et
spiritus sancti amen. Ego Ludovicus dictus Bertouth adhuc
sanus et incolumis et mentis mee compos, de consilio pro-
borum virorum ob remedium anime mee condidi testa-
mentum meura in hune modum : in primis auto m lego et
assigno quadraginta libéras lovanenses, recipiendas annua-
tim de redditibus meis in Gela, Lichterth, Verla, Rethia,
ad restitutionem eorum que minus iuste acquisivi, volens
et finaliter statuens, ut hères meus post obitum meum de
predictis quadraginta liberis nichil percipiat donec pre-
dicta minus iuste acquisita fuerint fideliter et integraliter
persoluta. Item lego Gosuino, filio meo, ducentas libéras
lovanenses, vel viginti libéras annuatim, donec summa dicte
pecunie eidem Gosuino plenarie fuerit persoluta, ita cum
— 298 —
quodsummaducentarum liberaram per receptionem earun-
dem viginti liberarum non minuatur; item fratri suo
Johanni sexaginta libéras vel sex libéras annuatim; item
Gine, matri sue, decem libéras; item Waltero, fratri meo,
centum libéras, vel decem libéras annuatim; fratri suo
Johanni quinquaginta libéras, vel quinque libéras annua-
tim; hiis omnibus est annexa conditio supradicta; item
fratri meo Godefrido viginti libéras; item nepti mee
Mabilie ' decem libéras; item Beatrici begine sex libéras;
item Egido Clavigero, quatuor libéras; Waltero ftlio ma-
gistri (!) très libéras; Gerardo coco très libéras; pistori
quadraginta solidos; Clinchamero quadraginta solidos !
Clinchamero jnniori xx solidos, tribus convenientibus
cursoribus cnilibet viginti solidos; item monasterio loci
Sancti Bernardi equum meum cum armis quia ibidem elegi
et eligo meam sepulturam; item lego conventui eiusdem
loci quadraginta solidos annui census recipiendos annuatim
in parochia de Conthecha, in loco qui dicitur Reeth, pro
anniversario meo, ibidem anno quolibet faciendo, ut de
eisdem annuaria pitantia ipsi conventui ministretur. Item
apud Vallem Rosarum decem libéras; item fratribus mino-
ribus in Machlinia hospitali domus leporosorum ad men-
sam Sancti spiritus venerabilibus beginis eiusdem loci
cuilibet quadraginta solidos; ad fabricant ecclesie beati
Rumoldi Albis duabus eiusdem ville cuilibet viginti soli-
dos ; item Augustinis ibidem decem solidos ; Domino Hen-
rico de Surs decem solidos; item in eadem villa ad paro-
chiam béate Marie mense sancti spiritus viginti solidos;
duabus reclusis ibidem cuilibet quinque solidos; item recluse
iuxta capellam beati Rumoldi decem solidos; recluse béate
Katherine V solidos; item recluse de Dufflis V solidos; item
1 Cette Mabilia pourrait bien être une fille de Rasse de Gavre,
seigneur de Liedekerke, beau-frère du testateur, et qui est dite avoir
épousé Gérolphe Bette, seigneur de Westacker.
— 209 -
apud Neckerspole ad cappellamam quadraginta solidos;
ita ibidem ad mensam Sancti spiritus quadraginta solidos
et recluse decem solidos; item apud Rimenam, Kerberga,
Berzela, Itegem, Berlar, apud Sanctam Mariam in Wavera
et apud Sanctum Nicliolaum apud q.uamlibet istarum villa-
rum très libras pauperibus ibidem distribuendas; item apud
Scelle, Nile, Gela, Rétbie, Verla, Lichterth, Brechthe,
cuilibet xx solidos simili modo pauperibus distribuendos
et apud Contliecha, Dufflis, Walem xx solidos similiter;
item iu Antwerpia predicatoribus bospitali Domui leporo-
sorum et in curia pauperibus beginis; item ad mensam
Sancti spiritus cuilibet xx solidos; item in Lijra ad mensam
sancti spiritus bospitalis beginis cuilibet xx solidos;
apud Nazareth xl solidos; apud Leliendale xx solidos; item
lego viginti libéras lovanenses per Abbatem et priorem loci
sancti Bernardi religiosis in universis locis commorantibus
prout eis visum fuerit distribuendas. Ego autem predicte
mee restitutionis, assignationis et distributionis executores
et distributores constituo virum nobilem Dominum Walte-
rum Bertbout, Dominum de Machlinia, Abbatem et prio-
rem loci Sancti Bernardi, ut ipsi et que premissa sunt ad
honorem dei et anime mee salutem exequantur fideliter
cum effectu. Et ut omnia et singula prenotata finna per-
maneant et inconvulsa, ego presens scriptum sigilli mei
munimine una cum sigillis Domine Sophie, uxoris mee
W. Berthout, domini mei predicti, et Abbatis loci Sancti
Bernardi duxi roborandum. Actum Anno Domini M0 CC°
sexagesimo sexto, mense junio '.
Ce document établit donc, entre autres, qu'en
1266 Reeth était encore un hameau de Contich.
1 Original sur parchemin ; les sceaux sont tombés ; chartes de l'ab-
baye de St-Bernard ; liasse n° 978.
— 300 —
P. 96, note 1. Au sujet de Henri Bebbeken,
dont le sceau porte : S. Henri B'taut...sire dou
Boskibl, nous avons écrit : « Il est dit avoir été fils
de Jacques.,. » Cest Butkens qui lui donne pour
père ce Jacques, qui épousa N. et après fut cha-
noine et Archidiacre à Tournai/, et mourut en 1275,
et pour grands-parents Henri Berthout, seigneur
de Duffel, Gheel, etc., et dame Béatrice. Le savant
prieur de Saint-Sauveur a versé dans une erreur
en établissant cette filiation. Depuis l'impression
de la première partie de notre travail, nous avons
trouvé un document qui nous permet de rectifier
cette erreur. Par cette pièce, le seigneur de Ma-
rines nomme Henricus dictas Bebbeken : primo-
genitus Henrici, fratris nostri, bone memorie. Or,
ce seigneur de Marines est Walter VI, surnommé
le Grand, et son frère Henri est l'ancien châtelain
de Mons. Le qualificatif de primogenitus, attribué
à Bebbeken, constitue, à notre avis, la preuve que
celui-ci était un fils légitime. De quel mariage de
son père est-il issu ? Il ne semble pas être né de
Sara,. fille de Henri, châtelain de Mons, et première
femme connue de Henri Berthout, puisque, dès
1267, et môme du vivant de ce dernier, nous
voyons Englebert d'Enghien, en possession de la.
châtellenie de Mons ' . Peut-être était-il un fils de
1 Ce détail nous a été' communiqué par M. Ernest Matthieu, le
savant secrétaire du Cercle archéologique d'Enghien. C'est encore
M. Matthieu qui nous a fait connaître le nom de la première femme
de Henri Berthout et du père de cette dame, que Butkens, et d'autres,
disent erronément fille de Gossuin, châtelain de Mons (Cartul. de
Vabbaye d'Aine ; n° 348, Archives de l'État, à Mons). Dans un travail
qu'il prépare sur la châtellenie de Mons, M. Matthieu publiera de
nombreux détails sur ces personnages.
— 301 —
Béatrice de Marbais dont le frère fit avec Walter VI
un contrat relatif à une alliance de cette Béatrice
avec Henri Berthout, alors veuf de la dite Sara ?
P. 98-104. Jean Berthout (Ier) et sa femme Marie
(de Mortagne) vendirent, en mai 1271, à l'abbaye
de Saint-Bernard, imam hovam terre silam in paro-
chia de Gheijle (Gheel), que vocatur hova de Pou-
derle,et qui avait une étendue de 10 bonniers, ainsi
qu'un bonnier enclavé dans les biens qui avaient
appartenu à Daniel de Busche A .
P. 106. En 1333, des donredaechs naer heeliken
Paeschen, Béatrice de Boechoud, fille mien eens
edels mans mijns heeren Jans Berthouts diemen Met
van Berlaer, céda, de laveu de son mari, Egide,
seigneur de Boechoud, au chevalier Gérard de Hof-
stade plusieurs rentes, en l'acquittant d'un cens
qu'il lui devait de ses biens à Berentrode (à Bon-
heijden) et de Rijmenam, tenus en fief de Mar-
guerite de Gueldre (fille aînée du comte Renaud et
de Sophie Berthout) 2.
P. 105-106. Le vendredi après Pâques, 1380,
Jean de Kuijc, fils du feu chevalier Jean, reconnaît
avoir reçu de l'abbaye de Saint- Trond une pension
viagère ; il fait sceller sa déclaration par Jean van
Berlaer, mijnen oem, et par Gijlijs van Berlaer,
mijnen neve. Les sceaux de ceux-ci portent chacun
un écu à trois pals \
1 Chartes de l'abbaye de Saint-Bernard, provenant de la vente de
Craene d'Heijsselaer, n° 10 (Archives générales du royaume).
2 Copie d'un cartulaire en possession de M, de Bertouch, Veneur
de la Cour de S. M. le Roi de Danemark, à Malines.
3 Ch. Piot, Cartulaire de l'abbaye de Saint-Trond, II, p. 90. Les
— 302 —
P. 189-195. Jean Berthout II, seigneur de Nec-
kerspoel, Wavre-Notre-Dame, ter Hameijden (à
Gestel), etc., adopta une singulière brisure, dont
la pareille ne se rencontrera peut-être plus : son
écu, aux trois pals, porte un franc-quartier chargé
d'un cavalier, galoppant à sénestre, brandissant
un glaive et armé d'un bouclier, lequel bouclier
est surchargé d'une croix. Cette croix est l'em-
blème héraldique de la maison de Mortagne, à
laquelle appartenait la mère du personnage ' .
P. 451. A la suite de nos observations sur la
naissance de Catherine, fille de Jean IV de Berlaer,
seigneur de Helmond et de Keerbergen, M. Aug.
Sassen, le savant archiviste de la ville de Helmond,
a fait, sur la mère de cette dame, Marguerite
Uijten Veehuijse '\ des recherches dont il a consi-
gné le résultat dans un article publié dans son
excellent Jaarboekje voor Noordbrabantsche geschie-
denis, etc. (II, 1890, à Helmond). Dans une série
de documents de 1416 à 1420, cette Marguerite
figure seule, sans époux, et M. Sassen se rallie
entièrement aux conclusions que nous avons tirées
des termes du testament de Jean IV. Il est donc
établi que Catherine a été légitimée au mariage
de ses parents et que ce mariage a été conclu
Cuijk scellaient de deux fasces, accompagnées de 8 merlettes, ran-
gées 3, 2, 3 (et non 3, 3, 2 comme nous l'avons dit par suite d'une
erreur de plume) .
1 Ce sceau a été reproduit par Butkens. Le carton II, du fonds de
la commanderie de Pitzenbourg, en contient plusieurs originaux de
1296 et 1298.
3 Veenhuijse, p. 207, est une faute d'impression.
— 303 —
postérieurement à la confection du testament.
M. Sassen, qui fait connaître, de plus, d'intéres-
sants détails sur la descendance illégitime de Jean
de Berlaer, nous apprend encore que Hubrecht
Utenvehuze est nommé, dans un acte de 1427,
Hubrecht Peterzoon van Lieshout, et que sa fille
Marguerite figure aussi sous le nom van Boeschot
gheseijt van Stahenborch. Cette diversité de noms
s'explique par les différentes propriétés de cette
famille. Lieshout, Boeschot et Stakenborch portent
tous : d'or à trois anilles d'azur.
P. 453. En 1317, Louis de Liere, provisor infir-
marie debilium beghinarwn extra curtim Machli-
niensem, transporte à Egide de Barlaer : duas
caméras dicte infirmarie cnm fundo et attinentiis
suis, sise dans la Ser Loens strate ' .
Nobilis et generosus ac honestus vir Egidius de
Berlaer, major et justiciarius, est cité dans une
charte de l'abbaye de Saint-Michel, du 7 mars
1444 2.
1890, p. 172-175. Les archives générales du
royaume possèdent de Corneille Persoons un aveu,
relatif à ses seigneuries de Keerbergen, Bolloo et
Roosendael; à cette pièce est annexée une copie
des lettres-patentes, du 16 février 1718, par les-
quelles l'empereur Charles autorise Corneille Per-
soons, père du déclarant, à renouveler le livre
censal de ces seigneuries et, à cet effet, à se faire
1 Cartulaire de Saint-Michel, n° 77, f, f° 13,
2 Ibidem, d, f° 235.
304
remettre une déclaration par quiconque lui doit
des cens. '
Voici les noms de famille cités dans le présent
travail :
Aa.
Berckel.
Brienen.
Absolons.
Berckelaer.
B ri m eu.
Achclpoel.
Berghes.
Bronkhorst.
Adelijcn.
Bering(h)en.
Brouchoven.
Adriaens.
Berlaer.
Broyés.
Aerts.
Berlo.
Bruel.
Alkmade.
Berthout.
Bruggen.
Alsleren.
Beugliem.
Bruxelles.
Amstenraedt.
Beyer.
Busleijden.
Arbusier.
Biest.
Caestre.
Argenteau.
Bisc(b)op.
Calstert.
Armenlières.
Blitterswijck.
Calstren.
Assche.
Boestel.
Cammaerts.
Assclieijde.
Boels.
Cappelhof.
Asten.
Boesehot.
Cartils.
Autel.
Bollo.
Carpentary.
Auvergne.
Bonté.
Caudenberghe
Avesnes.
Borelit.
Caverson.
Bailleul.
Boschhuij.sen.
Claes.
Ballaer.
Bosschaert.
Clercq.
Baltus.
Bossche.
Cleijmans.
Barbençon.
Bosmans.
Clinchamer.
Barres.
Botier.
Cloetens.
Batenburg.
Bouchout.
Clusis.
Bau(w).
Boujoz.
Cluijsen.
Bcbbeken.
Bourbon.
Cocq. "
Becke.
Bourgogne.
Cocx.
Beersel.
Boije.
Coekelberg.
Behault.
Brabant.
Coloma.
Beke.
Brandenbourg.
Coremans.
BentJieim.
Bran t.
Corswarem.
Berchem.
Bréda.
Cortenbach.
1 C'est ce qu'on appelait des lettres de terrier (Aveux et dénom-
brements de la cour féodale de Brabant, n° 7011).
305
Cotrel.
Cottreau.
Couplet.
Coucy.
Crainhem.
Croes.
Croy.
Grumpipen.
Culembourg.
(kipere.
Cuppens.
Cuijçk.
Cuijpers.
Dave.
David.
Deckers.
Dekens.
Diest.
Dinther.
Dittersbeke.
Donck.
Doncker.
Dongelbergh.
Dorae.
Dreux.
Duffel.
Duras.
Duijnen.
Ee
Eechoven.
Eermeghem.
Eggericx.
Egmont.
Eken.
Elst.
Elteren.
Enghien.
Erpe.
Escaille.
Estor.
Eslricx.
Etten.
Eijcken.
Eijnatten.
Eijnde.
Expoele.
Felices.
Fexhe.
Flandre.
Flavier.
Foccant.
Fosseux.
Foucquier.
France.
Fransman.
Frederichs.
Gavre.
G(h)eel.
G(h)eens.
Geistlingen.
Ghein.
Ghemen.
G lien t.
Ghete.
Gheijer.
Ghistelles.
Gindertalen.
Goes.
Goossens.
Gorl(t)er(e).
Gracht.
Grammines.
Granvelle.
Grevenbroeck.
Grimberghe.
Gruijthuijse.
Gueldre.
Guidoe.
Guines.
Guijgoven.
Haecht.
Ha'e)ze.
Hainaut.
Halewijn.
Halle.
Halmale,
H amers.
Hameijde.
Hninme.
Hardumont.
Heinsberg.
Helbeke.
Helman.
Helmond.
Helt.
Hemixem.
Hennegrave.
Herlaer.
Heitoghe.
Héverlé.
Hcijlen.
Hinckaert.
Hoen.
Hoir.
Hol'stadt.
Hoolaerts.
Horck.
Hornes.
Hoijsscliot.
Horricke.
Horyon.
Hosdcn.
Hou tain.
Huait.
Hullet.
Humbloet.
Huijn.
Immerseel.
litre.
Janssens.
Jauche.
Jongh.
Josse.
Juliers.
Junius.
Keerbergen.
Kecrman.
Kerreman(s).
Kerman(s).
21
306 —
Kcrsbeck.
Merode.
Ponte.
Kesterbeke.
Meroijen.
Prant.
Kiel.
Michiels.
Pretere.
Knijll".
Mierle.
Pynnock.
Lalaing.
Millenberge.
Quaderebbe.
Lamberts.
Mire(lej.
Raduaerd.
Lambroeck.
Mol.
Randerode.
Landonck.
Mims.
Ranst.
Lanen.
Montfort.
Reijers.
Langendonck.
Moor.
Reijnen.
Lariguebert.
Moiïalmé.
Rhétel.
Lantwijck.
Mortagne.
Rivieren.
Lapide.
Moumal 'e .
Rochefort.
Laurenz.
Muls.
Roelants.
Le(e).
Munck.
Roelen.
Leefdael.
Naldi.
Roley.
Lceuw.
Nattines.
Rommerswael.
Liedekerke.
Neeffs.
Roosc.
Lierre.
Neijs.
Roost.
Lieshout.
Nieuwenboven.
Rossum.
Ligne.
Nieuwenhuijsen.
Rotselaer.
Lille.
Noot.
Rover.
Linden.
Oisy.
Roy(le)
Linter,.
Olmen.
Rijcke.
Lippen.
Olmo.
Rijn.
Locquenghien.
Ophem.
Saint-Géry.
Longchamps.
Orléans.
Saint-Omer.
Loofenne.
Os.
Sallaert('tj.
Lopez.
Oudart.
Santander.
Lu.
Overstraeten.
Scheppers.
Lijnken.
Oijenbrugge.
Schoofff).
Lijsbrechts.
Pallant.
Scolaster.
Maelstede.
Pamele.
Schoonjans.
Malaise.
Papenbroeck.
Schoonvorst.
Marbais.
Persoons.
Schooten.
Marcelis.
Piel.
Schroots.
Marck.
Pietershem.
Scluns.
Meercn.
Pietquin.
Seborg.
Meerhem.
Pin.
Smets.
Meeuwe.
Plaines.
Snoy.
Megen.
Plenevaux.
Sombeck.
Meldert.
Poederlé,
Spierinck.
Melun,
Poncelet.
Spierinck v. Roegen.
— 307
Staden.
Stakenborch.
Steenhuys.
Steenwinckel.
Stokelmans.
Strepen.
Sunnen.
Sweerts.
Swieten.
Taije.
Tliielen.
Thijs.
Tilborg.
Tiras.
Trieu.
Trou y.
Tschuckers.
Tulle.
Utenhove.
Uyien Veehuijse.
Vaernewijck.
Veehuijse.
Verbist.
Verdun.
Verhaegen.
Verlinden.
Vermeeren.
Vermeersch.
Verreijdt.
Vervloesem.
Vijanden.
Vleeschouwer.
Vriessele.
Vucht.
Waghemans.
Walhain.
Walraven.
Wanghe.
Wavre.
Wavrin.
Weilhusen.
Werve.
Wideux.
Wilmaerts.
Wincester.
Wissenack.
Witthem.
Wijse.
Ymmerseel.
York.
Zevenborn.
Zubborch.
— 308
LA
TRANSPOSITION DU CLAVIER
PAR
JEAN GALLE
K>26-16Ô5
-<>0<S*=K>-
Les instruments à clavier qui, dès le XVP siècle
avaient acquis en Belgique, et notamment à
Anvers, une haute renommée, subirent depuis les
transformations les plus diverses et les plus heu-
reuses. Bien des perfections restent encore à
atteindre. Parmi celles-ci nos facteurs modernes
ont cherché à résoudre le problème de la trans-
position du clavier, dont on avait fait des essais
avant eux. C'est ainsi que nous venons de dé-
couvrir un acte notarié du 18 novembre 1626
constatant pareille invention.
En voici la teneur :
« Pardevant moi notaire soubescrit et les tesmoins embas
« dénommés comparant honorable Sr Jean Galle d'une, et
« maistre André Séverin maistre organiste d'autre part, ont
« conceu, fait et arresté le contract suijvant: Scavoir ledit
— 309 —
« S1' Galle enseignera audit maistre André la façon de faire
« orgues positives, régales es\jpinettes et clavis] l , lesquelles
« par son invention se pourront haulser et abaisser, s'accor-
« dantes à tout s tons avec une harmonie meilleure qxCà
« Vordinaire, pouvant commencer UT par tout l'octave,
« lesquelles ledit maistre André organiste pourrat faire
« et [vendre] ou débiter par tout le pays de Liège, tant
« seulement à l'exclusion de tous autres qui en voudroient
« entreprendre, aux conditions suivantes :
« Premier que ledit maistre André ne pourrat apprendre
« ou déceler à personne que ce soit le secret tant de
« l'accorde ny [de la] façon de rehaussement des tons qui
« sont de son invention, à peine de le pouvoir rechercher
« pour [tout] domeage qu'il en pourroit avoir.
« Second, que ledit maistre André ne pourrat contracter
« au.... pour faire ou faire faire tels susdits instruments
« [sans] le congé ou permission dudit Galle ou quelcque
« commis....
« Troisième, que ledit maistre André rendrat ou paierat
« audit Galle la taxe qu'ils pourront entre eulx s'accorder ;
« s'il entreprendrait quelcque pièce que ce soit
« maistre André n'y trouvoit aucun proufit sera tenu de ne
« point besoigner pour ledit Sr Galle.
« Quattrième, qu'aussy avec la permission dudit Sr Galle
« ou de son commis et pas autrement, le susdit maistre
« André pourra faire et débiter ou vendre tels dits instru-
« ments hors le Pays de Liège.
« Cincquième ledit S1' Galle s'obligerat, comme il s'oblige
« réciproquement, de ne passer aucune permission à proffit
« d'autre qu'au susdit maistre André le pouvoir de tra-
ce vailler, vendre, ny débiter tels instruments de son inven-
1 Quelques lacunes existent dans cet acte par suite de son mauvais
état.
— 310 —
« tion dans le Pays ou diocèse de Liège ne soit par le consent
« duditmaistre André; et cas advenant que quelcque estran-
« ger vende ens ledit Pays de Liège, iceux instruments
« seront confiscables à leur prolïit. Advenant que ledit
« maistre André fust défaillant ou contrevenant aux de-
« vises et conditions susdittes ou partie d'icelles, ledit
« sr Galle poudrât calenger et confisquer tels Instrumens,
« ou pourat retirer de maistre André la valeur d'iceux,
« selon qu'il les avoit vendu sans en ce observer aucunne
« solemnité de justice, comme en la meilleure forme etc.;
« tout quoi etc., fait en la maison de moy notaire sous la
« paroiche Saint Servais, présents illecque honorable Jean
« de Slyns bourgeois de Liège et Jean Veris tesmoins, le
« diex huictiemme de Novembre an mil siex cent vinte
« siex. »
(Signé) Jean Galle, Jean de Slyns tesmoins ;
Jean Veris tesmoin, André Séverin '.
André Severin, qualifié ici d'organiste, est le
facteur d'orgues, cité par de Becdelièvre . Natif de
Maastricht, il s'établit à Liège où il décéda Fan
1673. Il y fut enterré sous les orgues de l'Église
Saint- Jacques. Ces orgues, ouvrage d'André
Séverin, passaient pour être les meilleures de
Liège.
Jean Galle s'était donc adressé à un facteur
estimé, mais celui-ci paraît avoir renoncé à l'ex-
ploitation de l'invention du premier, car sept ans
plus tard Galle vint à conclure un autre contrat
avec un nommé Jacques Boesman, sur lequel nous
1 Reg. 3889. Protocole du notaire Martin Veris — 1603-1639
aux archives de l'État, à Liège.
— 311
n'avons aucun renseignement. Ce contrat, daté du
3 septembre 1633, offre plus d'intérêt encore que
le précédent, comme on en jugera par sa lecture.
« Ce jourd'huy vint troisiesme de septembre, an mil siex
« cent trente trois, pardevant moy notaire et les tesm oings
« embas dénommés, comparant honorable Jean Galle d'une,
« et le S1' Jacque Boesman d'aultre parte, ont conceu, faict
« et aresté le contract suivant, scavoir : que le sieur Jean
« Galle enseignera au dit Monsieur Boesman la façon de
« faire orgues positives, régales, espinettes et clavis, lesquels
« par son invention se pouront haulser ou abaisser de demi,
« de un, ou de plusieurs tons avec parfaite harmonye cro-
« matique, contenant environ le f plus des concordances
« qu'en la musicque ordinaire; pouvant commencer UT par
« tout avec les tons et semitons tousjours égaux, et la façon
« d? agencez lesdits tons au monocorde et aux tuiaux avec
« bouchons coidants, pour accorder tant à sa nouvelle façon
« tous les instruments susdit, comme à la façon ordinaire,
« et de plus la façon de former le clavis universel avec lequel
« on pourat exercer les trois genres de musicque, scavoir :
« la diatonicque, la chromaticque et Venarmonicque, en
« leur extrême perfection. Mais iceluy clavier aura 18 ou
« 19 touches en un octave, au lieu que V accord ordinaire
« ne contient que douse touches, mais iceluy a ceste imper-
« fection qu'on ne le peut hauser ni abaisser, comme pour
« Vapproprier à touttes sortes de voix, comme la nouvelle
« invention, et la pratique en sera sans comparaison plus
« difficile.
« Lesquels Monsieur Boesman poura faire, vendre et
« débiter par tout le royaulme de France par l'espace
« d'autant d'années que s'extendent les privilèges que
« Galle en pourat obtenir, commençant à compter du jour
« du contract, et point ailleurs à l'exclusion de tous autres
— 312 —
« qu'en voudroient entreprendre, excepté que l'inventeur
« se réserve à soy la distribution, es mêmes lieux, des sem-
« blables instrument qui seront faicts par ses domestiques
« avec les conditions suivantes.
« 1° que pour chasque jeu d'orgues positives, regales*
« espinettes ou claviers, esquels Monsieur Bosman appli-
« quera la susditte invention, sera obligé de payer à
« l'Inventeur Galle ou ses représentants cinque rixdallers
« et autant à l 'advenant pour chasque demi jeu sçavoir
« 2 i rixd.
« 2° Que si outre les registres des Jeux susdits Monsieur
« Bosman venast à appliquer autres registres entiers ou
« demi selon que Galle luy enseignera, afin de causer de la
« variation es jeux susdits, comme pour les faire sonner
« 4~5 l ou une quinte plus hault ou plus bas que le fut le
« jeu avant d'ajouter [la] ditte application, pour chasque tel
« registre il sera obligé de payer de même à l'advenant des
« jeux; c'est à dire pour chasque registre entier qui sera en
« l'instrument il payera 5 rixd. et 2 \ rixd. pour chasque
« demi registre.
« 3° Que ledit Monsieur Bosman ne pourat aprendre ou
« déceler à personne que ce soit le secret de ceste harmonye,
« soit pour travailler dedans ou dehors sa maison, à peine
« de pouvoir rechercher pour le dommage et préjudice que
« l'inventeur en pouroit recepvoir, encor que ce fut pour
« transporter l'invention en des pais esloignés ne soit par
« le consentement de Galle ou de ses représentants et
« commis.
« 4° Que le dit Monsieur Boesman sera tenu de rendre
« compte à Galle, touttefois et quant il sera par luy semonce,
« pour le payement de la taxe entre eux accordée, soit pour
« instruments nouveaux ou pour avoir racommodé des vieux
« selon l'invention de l'accord nouveau.
« 5° Que Monsieur Boesman ne pourat distribuer et
— 313 —
« vendre aucun instruments faict à l'accorde nouveau de
« Galle avant que l'année entier soit écoulée, afin que des
« autres ne viennent cà descouvrir son secret, et par ce
« moyen empescher ses privilèges qu'il prétend avoir par
« tout.
« 6° Que nul instrument du nouveau accord pourat
« estre distribué par Monsieur Boesman sans estre marqué
« par la marque de Galle.
« 7° Que les six premiers instruments que Monsieur
« Bosman fera, soit positive, régal ou autre seront vendu
« à l'Inventeur et point à autres afin que personne n'en
« puis distribuer au paradvant de l'Inventeur.
« 8° Que si Monsieur Bosman ne trouvoit du profnt
« raisonable par ceste invention, sera en liberté de ne
« point besogner et délaisser entièrement l'Invention que
« Galle luy aurat suggéré, renonçant audit contracte sans
« jamais le pouvoir mettre en œuvre ny pour soi, ni pour
« autre, ni le taire contrefaire ou déguiser par addition du
« plus ou du moins.
« 9° L'Inventeur Jean Galle réciproquement, s'oblige de
« ne passer aulcune permission ni semblable contracte à
« personne d'autre qu'au susdit Monsieur Boesman de
« pouvoir travailler, vendre ou débiter tels instruments de
« son invention dans ledit Royaume de France, ne soit par
« le consentement dudit Bosman.
« 10° Cas advenant toutteffois qu'on recognut que Mon-
« sieur Bosman ne voulust faire travailler ou ne fust bastant
« pour pouvoir fournir à la grande quantité qu'on en
« désireroit, alors Galle pourat faire suppléer ce défaut
« par d'autres, y employant qui bon luy semblera.
« 11° Que si quelqu'estranger ou autre particulier en
« voulust vendre dans ledit Royaume, iceux seront confis-
« qués au profit d'eux deux et selon les taxes ou mulctes
« des privilèges qu'on aurat pour ce obtenu.
— 314 —
« Advenant que Monsieur Bosman fust défaillant ou
« contrevenant aux devises et conditions susdittes, l'In-
« venteur ou ses représentants pouront calenger et confis-
« quer tels Instruments, on poura retirer la valeur d'iceux,
« selon qu'il les auroit vendu sur tous ses biens, tant
« meubles qu'immeubles, sans en ce observer aucune solem-
« nité de justice comme en la meilleure forme etc. Surtout
« quoi etc. Fait et passé en la maison de moi notaire soubz
« la paroische Saint Servais en Liège, présents illecque le
« sieur Charle Boesmans, Georges de Bonselle, tesmoins
« huchêes et appeliez. »
(Signé) Jean Galle, Jacque Boesmans, Charle
Boesmans *.
Il est à regretter qu'aucune pièce ne nous ren-
seigne sur la fabrication de l'instrument inventé
par Jean Galle. Nous ne connaissons rien non plus
au sujet des résultats obtenus.
Quant à la personne de l'inventeur nous pensons,
sauf preuve contraire, qu'il s'agit ici de Galle ou
Galleit, Gallaeus (Jean) mathématicien qui naquit
à Liège % dans la seconde moitié du XVIe siècle.
« Sa famille — lit-on dans la Biographie nationale
— était d'origine montoise. Il devint architecte
habile, mais appliqua particulièrement ses con-
naissances et son expérience aux constructions
militaires, ce qui lui valut d'être nommé, par
l'Archiduc Albert, directeur des forteresses de la
Belgique.
1 Registre précité, ibidem.
* La date de sa naissance n'a pu être retrouvée parmi les anciens
registres paroissiaux de la ville de Liège. Voir pour son mariage la
note 2 à la fin de présent article.
— 315 —
« Il n'en attacha pas moins de prix aux études
élémentaires. Foppens cite de lui un abrégé de la
science des nombres... Il s'en trouve une édition
française dans le fonds Capitaine (Bibliothèque de
Liège) : Nouveau Epitome d'arithmétique, par I. G.
Liège... C'est un essai de simplification des calculs
par lemploi de dix bâtons faisant l'office des dix
doigts de la main, la plus naturelle de toutes les
machines à compter. »
Ces derniers détails révèlent déjà chez Jean
Galle, un esprit inventif, mis grandement au jour
par les documents qui précèdent.
La transposition du clavier étant à justesse
mathématique, Jean Galle s'y trouvait dans son
élément. Peut-être lui-même avait-il quelques
connaissances musicales, ce qu'on pourrait sup-
poser en rappelant notamment que François
Galle ', l'un de ces ancêtres — - croyons-nous, —
fut un compositeur habile.
Ainsi que la plupart des inventeurs, Jean Galle
ne fut pas riche, les contrats précités le prouvent,
mais comme eux il voulut acquérir de la fortune.
Tout en cherchant à exploiter son instrument
relatif à la transposition du clavier, il avait solli-
cité de S. A. S. de Liège une commission de surin-
tendant des minéraux au pays de Liège. Cette
commission obtenue, l'inventeur étudia les pro-
cédés métallurgiques employés jusqu'alors, et
trouva bientôt moyen de les perfectionner. Au
moins il crut avoir découvert une nouvelle mé-
1 Né à Mons vers le milieu du xvie siècle.
— 316 —
thode pour « connaître, tirer, fondre, séparer en
affinnant les métaux et minéraux les uns arrière
des autres, d'après ce que nous apprend un contrat
passé, le 14 août 1628, entre lui et Guillaume de
Schoefft, son bailleur de fonds et son associé dans
l'exploitation de l'invention précitée. Ce contrat
ne nous donne nullement le secret de Jean
Galle et nous ignorons s'il profita jamais à l'in-
dustrie.
Nous en faisons suivre ici le texte :
« L'an de nativité de nostre Seigneur mil siex cent vingt
huict, au mois d'aoust le 14me jour, personnellement sont
constitués pardevant moy notaire subsigné et des tes-
moings cy embas dénommés, honorable homme Jean
Galle et noble homme Mr Guilliaume de Schoefft d'autre
part; lequel Sr Jean Galle, en suite de la commission à
luy donné par S. A. Séreme de Liège, de la surintendance
des minéraux, scavoir : d'or, argent argenture, alun,
cuivre, estain, plomb, chalminne, sel et autres extants
par tout le païs et Eveché de Liège, at contracté comme
par ceste il contracte par association avec soy, avec
Mr Schoefft susdit aux devises et conditions suivantes :
retenant ledit S1' Galle le pouvoir de contracter avec
d'autres à son bon plaisir, cas advenant toutefois que
pour certaines causes Monsieur Schoeff ne les puis mettre
en oeuvre ou bien y vacquer, ce que ne pourat faire
Monsieur Schoeff sans le gré et consentement dudit
Sr Galle; sçavoir que ledit Galle monstrera et apprendrat
au dit Monsieur Schoeff susdit sa façon secrète et inven-
tion à cognoistre, tirer, fondre séparer en affinant lesdits
métaux et minéraux, les uns arrière des autres de façon
telle qu'on en pourat calculer le profit qu'on en deveroit
tirer si on les mettoit en œuvre pour les practiquer et
— 317 —
« fondre en grand volume ; et d'aultre costé le dit Monsieur
« Schoeff susdit fournirat à touttes despences, frais et tra-
ct vailles nécessaires tant à la recherche d'iceux comme à
« la fabricque des forneaux, huisinnes, ustensiles et ouvriers,
« et rendrat audit S1 Galle la moitié parte de tous profits
« et émolument qu'en proviendront, libres et francs au
« dessus des susdittes dépences qui seront déduyttes tant
« de tout ce qu'il besoignerat en cestuy païs de Liège
« qu'es tous autres païs, et provinces que ce soit, cas
« advenant qu'on y puisse travailler; de tout quoy, Monsieur
« Schoeff en tiendra notule et registre pertinent hors
« duquel ledit Galle puis voir et scavoir tout et quante
« fois il voudrat le besoigne et profit qu'il en serat fait,
« pour de ce en recueillir et recevoir son dit contingent;
« et comme iceluy Sr Galle at promis et promet en foy
« d'homme de bien d'apprendre audit Monsieur Schoeff
« fidèlement son dit secret et invention, réciproquement
« Monsieur Schoeff at promis et promet solennellement
« et en foy d'homme de bien de reveller audit S1' Galle
« tout ce qu'il discouvrirat des minéraux tant au pais de
« Liège qu'ailleurs, et de ne point apprendre lesdittes
« affaires à personne quelque soit qui pouroit porter pré-
« judice directement ou indirectement audit S1' Galle tant
« en pays estrangers comme en cestui de Liège, ne soit
« que par le consentement dudit Galle, cela soit accordé,
« obligeant ledit Monsieur Schoeff envers ledit S1' Galle
« pour l'accomplissement des devises et conditions, retenues
« et promesses sa foy, ensemble tous ses biens meubles et
« immeubles présents et futures pour à fault du prenais en
« tout ou en partie se pouvoir à iceux reprendre par un
« adjour de quinzaine quant aux immeubles, et quant aux
« meubles par touttes voyes qu'il trouverat convenir, comme
« réciproquement le Sr Jean Galle oblige tous ses biens
« meubles et immeubles de maintenir le susdit contrat
— . 318 —
« comme dessus, et pour le premis renouveler et réalizer
« pardevant touttes justices où besoing sera, iceux contrac-
« tans ont constitué, comme ils constituent par cette, tous
« porteurs de ceste et chacun d'eux in solidum. Et ce
« contract aurat effect si longtemps que Monsieur Schoeff
« ou ses héritiers et représentants tireront profit des dittes
« minières. Surtout quoi etc. Ainsi fait en la maison d'ho-
« norable Jean de Salme, beau père ' dudit S1' Galle, sous
« la paroiche Saint Servais, présents illecque Jean Veris et
« Jean Thonon serviteur audit S1' Galle tesmoins assumés
« et requis. »
(Signé) Guillaume de Schoefft, Jean Galle 2.
Tel est le Jean Galle dont nous venons com-
pléter la biographie en mettant au jour des
documents qui touchent, les deux premiers à l'his-
toire musicale, le dernier à celle de l'industrie
liégeoise.
DÉ VAN DE CASTEELE.
1 La date de son mariage nous est inconnue. Marié à Marie de
Salme, fille de Jean, il en eut : Ferdinand, né le 24 juin 1621 ; Jean,
né le 24 juin 1624 ; Ernest, né le 17 avril 1629 ; Guillaume, né le
27 octobre 1631 et François, né le 12 octobre 1633. — (Registres
paroissiaux de N. D. aux fonts à l'Hôtel de ville de Liège).
2 Registre .précité, ibidem.
— 319
L'ADMINISTRATION PROVINCIALE
eist f Hi a. nxr id iel e
Sous les périodes espagnole et autrichienne,
(Les États de Flandre.)
La forme sociale et politique dans laquelle un peuple
peut entrer et rester n'est pas livrée à son arbitraire,
mais déterminée par son caractère et son passé...
Si nous parvenons à trouver la nôtre, ce ne sera
qu'en nous étudiant nous mêmes, et plus nous
saurons précisément ce que nous sommes, plus nous
démêlerons sûrement ce qui nous convient....
(H. Taine, Les origines de la France contem-
poraine. L'ancien régime.)
INTRODUCTION,
Aperçu sur l'origine et la composition des États de Flandre
jusqu'à la période espagnole.
L'origine des États de Flandre est restée jusqu'à
présent assez obscure.
Raepsaet ' et Zaman 2 la font remonter à une
1 Raepsaet, Œuvres complètes, tome II, p. 35 à 51.
* Zaman, Exposition des trois États du pays de Flandre, p. 18.
— 320 —
époque très ancienne, voire jusqu'avant les pre-
miers temps de l'invasion romaine.
D'autres historiens, tels que Warnkoenig ' assi-
gnent à cette origine une date beaucoup plus
récente. D'après ces derniers, les États n'auraient
pris naissance qu'au XVe siècle, à la suite des rela-
tions créées entre les communes par le « Trans-
port de Flandre 2. »
D'autres encore, tels que M. Gilliodts van
Severen, le savant conservateur des Archives
de la ville de Bruges, rapportent l'origine des
États à Y Assemblée des Ëchevins de Flandre, du
XIIe siècle 3.
On voit que les opinions émises sur la question
de l'origine des États de Flandre sont assez
divergentes.
Selon nous, la question demeure ouverte, aucun
de ces auteurs ne nous paraissant avoir justifié,
d'une façon irréfutable, sa manière de voir.
Cependant, tout bien examiné, il semble que
l'on doive pencher plutôt vers l'opinion de ceux
qui donnent aux États une origine antérieure au
XVe ou au XIVe siècles.
On entendait, en effet, par assemblée des États,
1 Warnkoenig, Histoire de Flandre, traduction de Gheldolf.
2 Le premier Transport de Flandre ou cadastre fixant la cote à
payer par chaque communauté, par cent livres, fut dressé, en 1309,
à la suite du traité d'Athies (juin 1305). On verra que ces Transports
— il y en eut plusieurs — constituèrent plus tard, les matricules au
moyen desquelles on pouvait connaître la cote à payer par chaque
collège, dans les aides ou subsides accordés au Prince.
3 Gilliodts Van Severen, Inventaire des archives de la ville de
Bruges. Section I. — Inventaire des Chartes, tome IV, p. 271.
— 321 —
la réunion des délégués des trois états de la popu-
lation : clergé, noblesse et tiers.
Or. il semble résulter de' divers actes ' que ces
trois états, donc les États, pourrait-on dire, étaient
convoqués et se réunissaient déjà bien antérieure-
ment aux époques précitées.
Évidemment, ces assemblées anciennes n'étaient
pas celles des XIVe et XVe siècles. Mais, ce n'est
pas, semble-t-il, parce que leurs réunions étaient,
peut-être, moins fréquentes, leurs attributions et
leur composition un peu différentes, que l'on pour-
rait soutenir qu'elles ne constituèrent pas l'ori-
gine du pouvoir provincial en Flandre.
Dans le cours de ce travail, on trouvera encore
quelques faits qui militent en faveur de cette thèse.
Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas la prétention
de trancher cette question qui d'ailleurs ne rentre
pas dans le cadre de cette étude.
Si dans l'Assemblée des Échevins de Flandre, on
ne peut trouver l'origine des États, on peut y
1 « L'existence des trois états de Flandre paraît remonter au
« XIe siècle, car Robert le Frison lut admis au Gouvernement en
« 1071, du consentement des prélats, des nobles et des communes »
( Defacqz, Ancien droit belgiqne, tome II).
En 1030, il y eut une assemblée tenue par le comte Baudouin à
Bergues Saint Winox pour pacifier la Flandre. Cette assemblée était
composée, selon Oudeglierst, de tous les princes, prélats et>autres
des Etats (Raepsaet loc. cit. p. 90-91), etc.
Enfin, il est à remarquer que l'ancien droit germanique donne
à tous les hommes libres (vrijen) le droit de participer aux délibé-
rations concernant les affaires publiques.
22 ■
— 322 —
trouver, du moins, celle de l'élément principal de
ceux-ci, c'est à dire l'origine des Quatre Membres.
Ce point a été développé par M. Gilliodts van
Severen ', et il semble devoir être exposé ici.
Il faut se rappeler qu'il y avait anciennement
en Flandre, trois grandes villes2, Gand, Bruges et
Ypres, auxquelles toutes les autres étaient subor-
données, et que, pour cette raison, on nommait
les chefs villes.
Warnkoenig 5 a indiqué l'origine de cette supé-
riorité : « Comme les villes de création plus
« récente, dit-il, furent organisées sur le modèle
« des anciennes dont elles reçurent le droit et les
« privilèges, il fut statué expressément que les
« échevins des petites villes, de nouvelle date,
« devraient prendre conseil, dans tous les cas
« douteux, non décidés formellement par leur
« heure, d'une autre ville, comme de leur chief
« (haer hoofd). L'exercice de ce recours s'appelle
« dans le français des anciens diplômes, aller à
« Iiïef(h chef) ou à chief de sens. »
La prépotence des chefs villes fut d'ailleurs
consacrée, dans la suite, par d'autres causes encore
que nous tâcherons d'exposer dans le cours de
cette étude.
Or, l'Assemblée des Échevins de Flandre, se
composait d'échevins de ces trois chefs villes.
Yoici comment M. Vanden Peereboom (Des cours
1 Loc. cit.
2 Et plus anciennement encore, cinq : Gand, Bruges, Ypres, Lille
et Douai.
3 Loc. cit., tome II, p. 287.
— 323 -
de Justice, p. 25) définit cette institution : « L'As-
« semblée des Échevins de Flandre paraît avoir
« été instituée avant tout pour sauvegarder les
« prérogatives des lois locales, la dignité et la
« souveraineté des échevins-juges, enfin pour
« statuer sur les conflits, soit entre les bonnes
« villes, soit même entre ces cités et le seigneur
« du pays. »
Cette assemblée, on le voit, était alors, avant
tout, une sorte de haute institution judiciaire.
Le même auteur en arrive à se demander ensuite
(p. 29) : « Si les Quatre Membres, plus tard les
« États de Flandre, ne doivent pas leur origine
« à - l'assemblée des Échevins de Flandre du
« XIIe siècle, et si ce jury ne se transforma pas
« peu à peu en corps administratif. »
M. Gilliodts résoud affirmativement cette
question.
Et cela est possible, mais il faut cependant ne
pas perdre de vue qu'à cette époque, les pouvoirs
administratif et judiciaire étaient dans la plus par-
faite confusion.
Quoiqu'il en fût, nous ne pourrions y voir, répé-
tons-le, que l'origine d'un élément des futurs
États : les Quatre Membres.
En tout cas, à partir du commencement du
XIVe siècle, nous possédons des données plus pré'
cises, et nous pouvons constater que des assem-
blées appelées Parlements s'occupaient alors déjà
très activement de l'administration du pays.
Ces Parlements se composaient de deux élé-
ments : le Comte (ou ses conseillers) et les conseils
— 324 —
des chefs villes; un troisième élément, celui des
moindres villes, venait parfois s'y ajouter, mais
il est certain qu'il n'eut jamais que voix consulta-
tive dans ces assemblées '.
Cette composition résulte, à l'évidence, de tous
les comptes de cette époque. On y emploie l'ex-
pression « Parlement daer de Raed van Vlaenderen
was, » seule, ou associée à celle-ci « melten raede
van de 3 steden van Vlaenderen » ou encore « daer
de steden van Vlaenderen waren. »
Les formules « Parlement daer de- Raed van
Vlaenderen tvas » et « Parlement daer de steden
van Vlaenderen waren » sont donc synonymes,
chacune d'elles contenant seulement un des élé-
ments des Parlements, sans, pour cela, exclure
l'autre.
Au surplus, cette manière de voir est absolu-
ment confirmée par un document irrécusable repris
par A.'E. Gheldolf ■ et dans lequel il est reconnu
par Philippe de Tinette et Jean de Namur, le
8 mai 1305, « Ke de tant de tans qui peust sou-
venir toutes les besoignes ke li Conte de flandres
qui par le tans ont estei, touchant communaument
lestât don pays, li dit Conte les ont traitiet et ordenei
1 N. De Pauw et J. Vuylsteke, De rekeningen der stacl Gent, tweede
deel fp. 482 et suiv.).
Gilliodts, loc. cit., pp. 269-270, 293-294.
C. d'Ypres, 1336-37. 27 août 1337.
C. de Gand, 1314 f° 18, 2°; f° 20, 2°;' 1321 f° 78, 2°; 1332 f° 20;
1330 f» 50, etc.
Zaman, loc. cit., p. 51.
2 Histoire administrative et constitutionnelle des villes et châtelle-
nies d'Ypres, etc., d'après Warnkoenig, p. 445.
— 325 —
•
par les boines villes de li conteit. Et cliouke par l<>
seigneur et les dites boines villes a estei ordenei,
gêner aument il convint ke che fuist tenu et wardei
par toute le conteit... »
Cette charte donne donc aux Parlements « toutes
les besoignes touchant communaument Testât dou
pays » et un mémoire de ceux d'Ypres relaté
dans une sentence de Philippe le Bon, en date du
17 juin 1436 ' , exposant les attributions des Parle-
ments, dit qu'ils avaient « le Gouvernement et
« Régime tant en consentement d'aides et subven-
« tions comme en service d'armes et autrement. »
Ce qui équivaut à dire qu'ils constituaient, en réa-
lité, les pouvoirs législatif et administratif du pays.
Légalement, le Comte ne pouvait rien sans
l'assentiment des Parlements.
La solution des difficultés qui pouvaient surgir
entre l'une des villes et les autres, ou entre le
Comte et l'une des villes, nous est donnée par une
charte de Philippe de Tinette du 12 avril 1304 :
« reconnissons que nous avons entendu, entendons et
créons... selonc lor anchienne coustume, ke se aucuns
debas sourdoit dou seigneur de flandres contre le
corps daucunes des chiunc boines villes de flandres.
C'est a savoir de Gand, de bruges, de ypre, de lylle
et de doivay, u conte ns, u debas meust dou corps de
lune des chiunc boines villes a lautre,. — , ke les
autres quatre boines villes ont, et doivent ami)' de
droit, le connissanche de celi cause, et le jugement et
en doit li plaidies iestre demenies et traities, en lune
1 Zaman, loc. cit., p. 95.
— 326 —
des chiunc boines villes devant dites, a le semonse de
nous u de no liutenant ' . »
Les Parlements se maintinrent durant tout le
XIV*' siècle et l'examen des comptes des chefs-
villes prouve qu'ils eurent des réunions très fré-
quentes, surtout à dater de l'époque d'Artevelde.
Ils se réunissaient dans différentes localités; il en
fut tenu à Gand, Bruges, Ypres, Roulers, Ursel,
Deynze, Termonde, Eecloo, Maie, Courtrai, etc. \
On connaît le grand rôle que remplirent ces
assemblées où les trois chefs villes, comme on
vient de le voir, furent absolument prépondérantes.
Elles interviennent alors, nous venons de le
dire, dans toutes les affaires de politique intérieure
ou extérieure du pays et c'est à cette époque que
l'on voit conclure des conventions et des traités
avec les souverains étrangers, au nom « des bon-
ce nés gens des villes, des châtellenies et territoires
« de tout le commun pays de Flandre 5. »
Dans ce siècle de souveraineté des communes,
la représentation du clergé et de la noblesse a
donc subi une véritable interruption.
En consultant les comptes, on ne trouve, en
effet, qu'une seule trace de l'intervention de la
noblesse et une du clergé, dans ces assemblées,
et, encore, était-ce pour délibérer sur des ma-
1 Waenkoenig, Yprcs, loc. cit., p. 442.
2 Cf. comptes de l'époque dans l'Inventaire cité de Gilliodts.
Cf. également de Pauw et Vuylsteke, loc. cit. Cependant, à partir
de l'année 1362, les Parlements se tinrent surtout à Gand et sem-
blèrent vouloir se fixer dans cette ville (Gilliodts).
3 Gilliodts, loc. cit., p. 288, 289.
— 327 —
tières qui intéressaient tout spécialement » ces
deux ordres.
C'est vers cette époque, c'est-à-dire vers la fin
du XIV' siècle, qu'un quatrième élément vient se
placer à côté des trois chefs-villes : le Franc de
Bruges composé exclusivement de nobles et d'ecclé-
siastiques "2.
Il est assez difficile de fixer, d'une façon exacte,
la date de l'adjonction du Franc de Bruges aux
trois autres chefs collèges de Flandre.
Oudegherst 3 reporte la date de l'accession du
Franc à l'année 1348, en laquelle fut conclu à
Bruges, par Louis de Maie, un traité dans lequel
il est fait mention du Franc comme quatrième chef
collège.
Zaman* fixe cette date seulement à l'année 1405.
Enfin, l'Inventaire de M. Gilliodts mentionne
une série d'actes dans lesquels on voit le Franc
intervenir à titre égal et à côté des trois chefs
villes. Tous ces actes ont été passés de 1350 à 1365
et de 1378 à 1387. Cependant, d'après le même
auteur, ce ne fut qu'en l'année 1392 que le Franc
obtint son admission définitive '\
Cette élévation du Franc au rang de quatrième
chef collège de Flandre souleva de Imposition de
1 Voir compte Gand de 1316 1° 47, 2°; et celui de 1323-24
f° 69, 2°.
2 Gilliodts, loc. cit., p. 302.
3 Id.,id., p. 295.
* Loc. cit., p. 70.
5 Gilliodts, loc. cit., p. 314.
— 328 —
la part des trois grandes villes qui, jusque là,
avaient été seules en possession du pouvoir. Ceux
de Bruges surtout protestèrent vivement contre
cette intrusion du Franc, et le Duc deBoureroarne —
qui d'ailleurs favorisait cette ancienne châtellenie
noble, dans laquelle il voyait un contre-poids à la
puissance de l'élément communal — rendit, le
17 août 1411, une sentence par laquelle les fran-
chostes étaient confirmés dans la possession de
leur prérogative ' .
Le 11 février 1436, nouvelle sentence portant
confirmation de celle de 1411 et rendue en suite
des réclamations de ceux d'Ypres ".
Jusqu'à l'époque de l'admission du Franc en
qualité de quatrième chef collège, il n'est pas
question des Quatre Membres, ni même de Membres
de Flandre (Leden van Vlaenderen).
A la fin du XIVe siècle, les comptes portent
encore « de ghedeputeerden van Gendt, Brugge,
Ypere, en de van den Vrijen, » et l'expression
« de vier leden » ne paraît pas même encore
être née.
C'est dans le compte du Franc de 1399-1400
qu'on la rencontre pour la première fois 3.
Ce sont d'ailleurs, à n'en pas douter, les quatre
chefs collèges qui ont commencé' à se qualifier
eux-mêmes de Quatre Membres de Flandre, car ce
1 Gilliodts, loc. cit., p. 316 (Arch. État à Bruges, Roodenbouc,
f° 107, n° 2).
2 Gilliodts, loc. cit., p. 316.
3 Id., id., loc. cit., p. 315.
— 329 -
n'est que bien plus tard qu'on trouve cette expres-
sion dans les actes du pouvoir central. — Aiusi,
pour ne citer qu'un exemple, tandis que le compte
de Bruges de 1408-1409 ' porte : « Den xij c " dach
« van september lier Aernoud Reyphin ende Victor
« Van Leffxnghe , ghesend te Gliend omme met
« gaders den anderen drien leden van den lande
« etc., » la charte du 20 juillet 1408, par laquelle
le duc Jean de Bourgogne nomme des députés
pour reviser le Transport ou cadastre de Flandre '2,
ne fait pas emploi de cette expression et porte
encore, connue antérieurement : « les députez de
« par nos bonnes villes Gand, Bruges, Ypre et de
« nostre ter rouer du Franc etc. »
En tout cas, à partir de cette époque, on em-
ploie couramment, dans tous les comptes, l'expres-
sions : les Quatre Membres. On peut donc dire que
cette dénomination est née au commencement du
XVe siècle \
M. Gilliodts van Severen observe que, pour
ainsi dire, dès l'époque de l'érection du Franc
comme quatrième Membre, il n'est plus question
de Parlements, mais d'assemblées des Quatre
Membres de Flandre.
Observons aussi que cette érection correspond
à peu près avec l'avènement des ducs de Bour-
gogne; on peut y voir, de la part de ceux-ci,
une tendance à aristocratiser les assemblées du
XIVe siècle et à porter ainsi un dernier coup à la
i Gilliodts, loc. cit., p. 34.
2 Voir ce document Gilliodts, loc. cit., p. 20 à 22.
3 Cf. Zaman, loc. cit.
— 330 —
puissance des communes qui était alors à son
déclin '.
Et, en effet, l'introduction des éléments exclu-
sivement nobles et ecclésiastiques du Franc dut
altérer le caractère profondément démocratique
de l'institution.
M. Gilliodts expose cette transformation 2 en
ces termes : « L'ancienne châtellenie (du Franc),
« dit-il, leur donnait (aux ducs) une base d'op-
« position contre les principes de la démocratie
« des communes. Cette réforme constitutionnelle
« altéra profondément le caractère national,* les
« mœurs et jusqu'à la langue du peuple en éprou-
« vèrent l'atteinte.
« Sous cette pression croissante », ajoute M.
Gilliodts, « les États composés désormais des
« Quatre Membres s'organisèrent et se parta-
« gèrent en trois ordres : le clergé, la noblesse
« et le tiers. »
En ce qui nous concerne, nous croyons plutôt
que les Quatre Membres faisaient partie intégrante
des Etats et y représentaient le tiers.
On trouve, en effet, dès lors, alternativement
mentionnés dans les libellés des comptes du
XVe siècle, les Quatre Membres seuls ou les Quatre
Membres avec le Clergé et la Noblesse.
Voici, à titre d'exemples, quelques extraits des
comptes de Bruges 3. C. 1414-15, f" 63, n° 1. Ben
1 Au sujet de la politique des ducs de Bourgogne, voir, entre
autres, Kebvyn, Hist. de Flandre, III, p. 192, et P. Fredericq, Essai
sur le rôle politique et social des ducs de Bourgogne dans les Pays-Bas.
2 Loc. cit., p. 315.
3 Gilliodts, loc. cit., p. 327 à 329.
331 —
andren dach van september Janne Dreling ghesendt
ter Sluus metgaders den ghedeputeerden van den
andren drien leden van den lande van Vlaendren
teenre dachuaert .
F0 63, n° 5. Item es te wetene aïs de ghedepu-
teerde van den drien staten van den lande van
Vlaendren gheweist hadden voor Atrecht, ter dach-
naerd van den Coninc onsen souverainen heere
ende onsen geduchten heere van Guyenne daulphin
van Vyanois zinen zone, daer den paeys van dies
de coninc voorseit mest paeijt gheweist hadde up onsen
gheduchten heere ende prinche, gesloten ivas, etc.
F° 64, n° 3. « Den xxvijstp" dach van september
Janne Bortoen (etc.), ghesend te Ghend an onsen ghe-
duchten heere ende prinche die de ghedeputeerde van
den viere leden van den lande van Vlaendren om-
boden hadde bi hem te commene, aldaer deselue
onse gheduchte heere ende prinche dede verversschen
ende versouken te hebbene van zinen voorseiden
lande de subventie van Cm guldine penninghe zilvre
munte van Vlaendren
C. 1415, f° 64, n° 4. Den xvjston dach van sep-
tember Jacob Breydel, Joos De Muntere etc ghesendt
te Ghend teenre dachvaerd van den viere leden van
Vlaendren, dienende omme oner een te draghene
ende te taxeerne up tghemeene land, de costen bi den
drien staten te wetene prelaten, edele ende
viere leden ghedaen in den name van den ghe-
meenen lande jnt tstic van den traittiete van paeyse,
van dat onse gheduchte heere ende prinche gheweist
hadde \ etc. »
1 Voir encore comptes même année, f° 67 n° 2, 69v n° 4 et compte
de. 1413, 63v n° 4 (Gilliodts, loc. cit., p. 264). Dans ce dernier, il est
— 332 -
Ces extraits montrent, semble-t-il, que les
Quatre Membres étaient seuls convoqués lorsqu'il
s'agissait de questions d'administration courante,
spécialement de questions financières, et que le
clergé et la noblesse n'intervenaient surtout que
dans les grandes circonstances, comme par exemple,
lorsqu'il s'agissait de résoudre des questions de
haute politique, et notamment celles concernant la
politique extérieure.
Dès lors, les Quatre Membres étaient naturelle-
ment assez souvent convoqués, tandis que le cas
devait être, au contraire, assez rare pour les deux
autres états.
En tout cas, nous croyons que, sous les ducs
de Bourgogne, les états ecclésiastique et noble
avaient repris leur place à l'assemblée des États,
en admettant que, sous le règne des communes,
ils eussent dû momentanément l'abandonner.
Le système des trois états, avec intervention
limitée de deux de ces états, le cjergé et la noblesse,
se maintint pendant tout le règne des ducs de
Bourgogne.
Il sera intéressant, pensons-nous, de reproduire
ici, comme preuves à l'appui, quelques documents
très caractéristiques ' .
Voici, par exemple, une lettre écrite par le Chan-
celier de Flandre, au nom du duc de Bourgogne,
fait mention des trois états et il ne s'agissait cependant que d'un
subside à accorder au Prince.
1 Ces documents ont déjà été publiés par M. Gachard dans sa
Collection de documents inédits, mais ils nous paraissent indispen-
sables pour compléter cette introduction.
— 333 —
an Magistrat d'Ypres, et portant convocation à
une Assemblée des Quatre Membres qui devait se
tenir à Bruges, le 18 Novembre 1467.
« De par le Duc de Bourgoingne, etc. Très
chiers et bien amez, affin de mettre bon ordre et
c remède à ce que nos ordonnances faictes sur le
fait de nos monnoyes soient entretenues et gar-
dées, comme le voulons et désirons, nous avons
( ordonné aulcuns de par nous pour estre en
nostre ville de Bruges le xviij jour de ce présent
( mois, pour communiquier avecq vous et les
aidtres membres de nostre pays de Flandres
( touchant cette matière, et y mettre bonne et
ferme provision. Sy vous mandons expressé-
ment que, aux jour et lieu dessusdits, vous
envoyez et ordonnez aulcuns vos députez à tout
c povoir souffissant pour conclure et arrester ce
< que sera advisé pour le bien de la dite matere,
et gardez que n'y faictes faulte, comment qu'il
soit. Très chiers et bien amez, le Saint esperit
( soit garde de vous, Escript le viij jour de
novembre iiij lxvij.
• « De Molesmes. »
Voici encore la suscription d'une lettre adressée
aux Quatre Membres et concernant également les
monnaies et le service des fiefvés : A nos très chiers
et bien amez les bourgmaistres, eschevins et
conseil de nos villes de Gand, Bruges. Yppre, et
terroir du Franc, .représentant les quatre mem-
bres de nostre pays de Flandres - .
1 Gachard, Collect. de documents inédits,}). 172.
— 334 —
Le chancelier des ducs de Bourgogne corres-
pondait parfois personnellement avec les Etats ou
les Quatre Membres, et les appelait alors « mes
« très chiers seigneurs et especiaulx amis les
« les députez des Quatre Membres du pays de
« Flandres \
Le 19 décembre 1467, le Duc convoqua les Quatre
Membres à « Tenremonde « (Termonde) » « pour
« oyr aulcunes remonstrances et requestes que
« voulons faire à nostre dit pays, et avons inten-
« cion d'estre eu nostre personne au dit Tenre-
« monde etc. » On comprend que le noble Duc
se soit dérangé lorsqu'on apprend qu'il demanda
aux Quatre Membres une aide d'un million de
ridders de 48 gros pièce, à payer en neuf ans.
La réponse des Quatre Membres, de tout point
favorable à cette demande, fut portée à la connais-
sance du Duc, le 20 février 1468, dans des termes
où l'obséquiosité descend jusqu'à la platitude :
« Notre très redoubté seigneur et prince, nous
« nous recommandons à vostre très liaulte no-
ce blesse et très bénigne grâce tant et sy très
« humblement comme plus povons ; et vous plaise
« savoir nostre très redoubté seigneur et prince
« que etc ce que vous nostre tre redoubté
« seigneur et prince, signifions par ces présentes,
« en vous suppliant en toute humilité qu'il nous
« plaise de vostre très bénigne grâce etc. » Le
reste est à l'avenant 2.
Il est vrai de dire que Charles le Téméraire le
1 Gachard, Collect. de documents inédits, p. 174.
3 Gachard, loc. cit., p. 194.
— 335 —
prenait de très haut avec les Etats et, comme
c'était un prince très paissant, on jugea sans doute
qu'il eût été dangereux de lui résister.
On peut voir encore, dans les documents ' ci-
après, le manque d'égards, pour ne rien dire de
plus, avec lequel Charles le Téméraire traitait ses
« très chiers et bien amez » des Etats.
En 1470, les Quatre Membres s'avisèrent de faire
quelques remontrances au Duc au sujet d'une aide
de 120,000 écus qu'il avait demandée à tous ses
pays.
La réponse du Téméraire ne se fit pas attendre.
Elle fut donnée — dit la relation — « après une
brieve retraicte du Duc » à Mtre Jean Sersanders,
pensionnaire de G and, qui, en cette qualité, avait
porté la parole au nom des Quatre Membres. On
y trouve des violences de langage comme celles-ci :
« Vous faictes ceste demande par soubtivité et
« malice... et avez vous (vous avez) testes fla-
« mengues si grosses et si dures... et veul bien
« que vous le sachiez, je pourverrez bien à vos
« testes et entre vous, Flamengs, avecq vous
« dures testes, avez tous jours comtempné ou
« hay vostre prince, car, quant ilz n'estoient
« point bien puissant, vous les comptempnastes,
« et, quand ilz éstoient puissans et que vous ne
« leur povoyés rien faire vous les haystes
« car ce seroit comme du pot et du voyre :
« comment que le voyre se heurte o pot, tondis
« se rompt etc 2. »
1 Gachard, toc. cit., p. Iô4i
2 Gachard, toc. cit. (p. 219 et suiv.).
— 336 —
De peur sans doute que le « pot » ne rompît le
« voyre, » les Quatre Membres s'empressèrent
d'accorder l'aide demandée.
Peu d'années après, en 1475, le Duc fit assem-
bler les trois États à Bruges, et leur tint un
long discours pour se plaindre de l'abandon dans
lequel ces trois États l'avaient laissé au siège
de Neuss '. Après avoir exposé tous ses griefs
contre les Etats, le Duc conclut : « ...Puisque ses
dits subgectz avoient mis en nonchaloir estre
gouverné soubz lui comme enffans soubz père,
c au moyen de quoy ils pourroient estre exhere-
dez, comme le filz des biens de son père pour
ses démérites, ils seroient gouvernez et vive-
roient doresenavant soubz lui comme subgectz
soubz leur seigneur, au plaisir (de Dieu?) son
c créateur de qui, et non d'autruy, il tient sa
dite seigneurie, et demourerait prince tant que
x à Dieu plaira, maigre la barbe de tous ceulx à
qui il en desplairoit, dont il ne faisoit point de
( doubte, car Dieu lui en avoit bien donné la
puissance et la manière et ne conseilloit point de
l'expérimenter. »
Il finit par exhorter chacun des ordres à part ;
premièrement aux prelatz, il leur commanda,
en nom d'eulx et pour les autres prelatz absens,
que doresenavant il obéissent diligemment, et
sans dissimulacions quelconques, à ses lettres,
mandemens et ordonnances, sur paine de perdre
et confisquier envers lui tout leur temporel » et
1 Gachakd, loc. cit. (p. 249 et suiv.).
— 337 —
parlant aux nobles, « il leur commanda aussi faire
pareillement, sur leurs testes et sur peine de
c confisquier de tout ce qu'ilz tenoient de lui, et
de tous leurs biens meubles et immeubles et de
leurs héritiers, pour iceulx estre appliquiez à
son demaine; et parlant aux Députez du troi-
sième estât, dist par telle façon : Et vous men-
geurs des bonnes villes, faictes pareillement
quant à l'obéissance de mes commandemens,
< lettres et ordonnances, et qui seront expédiez
par mon chancellier, sur vos testes, et sur con-
( fiscacion de tous voz biens, ensemble tous voz
previleges, drois, franchises, libertez, costumes
et usaiges. »
Ce ne furent pas les trois États qui répondirent
à cette semonce, mais les Députés des Quatre Mem-
bres « pour et au nom du pays de Flandres sur ce
que depuis nagaires il vous a plu (au Duc) pro-
poser et déclarer aux députez des trois estas de
:< vostre dit pays, etc. »
La noblesse et le clergé se désintéressaient donc
même des affaires sur lesquelles ils étaient appelés
à se prononcer.
On a déjà vu, qu'en matière d'aides et de sub-
sides, ces deux ordres n'étaient pas convoqués;
ils ne participaient d'ailleurs pas dans le payement.
Le passage suivant de la réponse susvisée des
Quatre Membres confirme encore, qu'en cette
matière, ceux-ci représentaient seuls le pays de
Flandre : « Or est ainsi que feu de très noble
« mémoire, monseigneur le duc Philippe, vostre
« père, et tous voz autres très nobles progeni-
•23
— 338 —
« teurs, ont délaissée le dit pays en la franchise
« et liberté telle, que ilz ne fissent oncqnes, par
« rigueur, ne execucion, ne autrement, les sub-
« gectz de vostre dit payer aucune somme de
a deniers ne autre charge, sans consentement
a préalable des Quatre Membres de vostre dit pays
« pour et au nom des manans et hàbitans dicelui
« pays, etc. »
Et comme, ainsi qu'on vient de le voir, par les
documents ci-dessus reproduits, les deux premiers
ordres, clergé et noblesse, se désintéressaient de
la plupart des autres matières qu'on leur soumet-
tait, et s'en déchargeaient volontiers sur les Quatre
Membres ' , on peut en conclure que ceux-ci con-
stituèrent, en fait, sous les ducs de Bourgogne, à
eux seuls, les États de Flandre.
Lorsque, par suite de l'alliance de Marie de
Bourgogne avec Maximilien d'Autriche, le Comté
de Flandre devint, pour ainsi dire, une simple
province, les questions politiques ne furent plus
guère soumises aux États. Ceux-ci descendirent,
dès lors, peu à peu, au rang d'États provinciaux 2.
Le clergé et la noblesse se désintéressèrent na-
turellement de plus en plus des affaires. Ils n'y
avaient d'ailleurs aucun intérêt, le principal pou-
voir des États consistant dans l'octroi des aides et
* Voir encore à ce propos : Oachard : Loc. cit., p. 254 (note). Les
trois états étaient assemblés àGand, par ordre du Duc, et « ils char-
« gèrent les Quatre Membres d'en conférer avec les commis du Duc
« et d'y résoudre. »
2 On sait que la première assemblée des Etats Généraux, dans
notre pays, date de l'époque des Ducs de Bourgogne.
— 339 —
subsides au souverain, dans le payement desquels
le clergé et la noblesse n'intervenaient pas.
Les Quatre Membres conservèrent donc la pré-
rogative de représenter les Etats de Flandre
jusque sous le régime espagnol, c'est-à-dire jusqu'à
la fin du règne de Charles V.
Ce fut vers cette époque qu'ils durent partager
le pouvoir provincial avec le clergé — on verra
ci-après dans quelles circonstances — et ce fut
ainsi que naquit « l'Assemblée des Députés des Ecclé-
siastiques et Membres de Flandres, » laquelle se
maintint pendant toute la période espagnole, et
durant la période autrichienne, jusqu'en l'année
1754. — En cette dernière année, l'institution
subit une nouvelle transformation et devint
« V Assemblée de la province de Flandres » ou
encore « l'Assemblée des Ecclésiastiques, Villes,
Pays, châtellenies . Métiers et Districts du Pays et
Comté de Flandres. »
C'est l'organisation de ces institutions que
nous nous sommes proposé d'exposer d'une façon
quelque peu détaillée.
Ach. Gallet-Miry.
(A suivre.)
340 —
VARIETES,
Chanteurs publics au XVIe siècle. — Parmi les chan-
teurs publics qui, pendant la seconde moitié du XVIe siècle,
exercèrent leur art sur les places publiques de la ville de
Gand le plus célèbre est, sans contredit, le poète et drama-
turge Jean Onghena. Son répertoire se composait princi-
palement de chansons politiques, dirigées contre l'Espagne
et contre l'inquisition. Tous les chroniqueurs de cette
époque parlent de ce personnage qui jouissait d'une grande
notoriété à Gand.
Durant le cours de sa carrière de poète et de chanson-
nier populaire, ' il fut plusieurs fois avisé par les échevins
qu'il eût à se montrer plus circonspect dans le choix de ses
couplets. Dans le Criminele Boeck de 1 564 nous trouvons
relaté un avertissement de ce genre, rédigé comme suit :
« Den 16 november 1564 es by schepene interdictie ghe-
« daen meester Johan Onghenae meer eenighe refereynen of
« liedekens te maecken ofte by ander ghemaeckt te zegghene
« ofte uitteghevene in eenighe verselschappe oft andersins
« die eenighe onstichticheyt ofte scandcd maecke saude
« tippene arbitraire. »
Jean Onghena, qui avait adopté les idées de la réforme,
fut arrêté à Anvers au mois de mai 1567. Le 30 juin on le
transporta à Gand et le 2 août 1567 il fut pendu à une
— 341 -
des potences dressées devant la prison du Sausselet au
marché aux Grains.
Le Memorieboeck der stad Ghent de l'année 1 567 dit :
« Den lesten Juny was Jan Onghena met vier officiers
« ende vier hallebardiers van A ntwerpen binnen deser stede
« ghebrocht, ende den >jnt Ougste was hy up den Coorenaert
« ghehanghen. »
Dans le Dagboek des frères Van Campene, publié par
M. F. De Potter, cette exécution est racontée dans les
ternies suivants :
« Ougstmaend. — Den IIe" smorgens voor de noenent es
« ande galghe ofte potente staende upden Coornaert ghe-
« hangen de voornoemde M'' Jan die in zijnen tijdt heeft
« gheiveest een fray componist inde Vlaemsche Rhetorijke
« dichtende menich reféreyn bemindt van edele ende on-
« edele omme syne sonderlinghe gratie van refereynen ende
« ghenouchte die hy hadde inde zelve; hy heeft hier voort/jts
« ghemaect een reféreyn van aile de eloosters deser stede,
« voaghende by manière van huwelicke de monijeken metten
« nonnen ofte religieusen.... »
Jan Vanclevivere en parle également dans sa Chronijcke
van Ghendt ainsi que pater de Jonghe dans ses Gendsche
Geschiedenissen.
Marcus van Vaernewijck, dans le septième livre de ses
Beroerlijcke Tijden cite un certain Liévin vander Venne,
messager et facteur de la chambre de rhétorique gantoise
Maria feeren. Ce vander Venne fut arrêté le 6 mars 1567,
sur le marché du Vendredi, pour avoir chanté des couplets
et débité des pièces allégoriques dirigés contre la religion
et le clergé catholiques : « ...zechioorden ende cluchten, en
« bysonder van eenen rhetoryckelicken droom, die hy plach
« onder tvolch te zegghen in taveeme, icelchen droom meester
— 342 —
« Jan Onghena ghemaect hadde, ludende schimpich ofte
« spottichjeghen die geestelicheyi ende dierghelijcke.... »
L'auteur de ces farces et de ce songe, ainsi que le dit
van Vaernewijck, était encore Jan Onghena.
Dans le Crimineele Boeck de 150(3-1 567 il est fait mention
au folio 37 de deux chanteurs de rue qui furent bannis de
la ville de Gand pour avoir fait entendre sur le marché aux
Grains des couplets inconvenants :
« Franc, vanden Broucke van Nieukercke en de Jan vander
« Donckt fs Jans gheboren van Keyghem by Dixmude beede
« zanghers zyn den 15 augustus 1566 uutgheseyt uut dese
« stede ende den schependom van dicn den tijd van eene
« jaere upde geesselynghe ter causen van diversche schan-
« daleuse liedekens by hemlieden hedent upden coorenaert
« ghesonghen. »
L'instruction de cette affaire ne prit pas beaucoup de
temps. Il résulte des ternies de la sentence que vander
Donckt et vanden Broucke furent condamnés au banisse-
ment le jour même où on les arrêta, tandis qu'ils chantaient
en public quelques schandaleuse liedekens de leur réper-
toire. S'ils s'avisaient de rentrer à Gand avant d'avoir
purgé leur condamnation, la peine des verges devait leur
être appliquée.
Il arrivait fréquemment que les échevins de la Keure,
usant d'indulgence, se bornaient à admonester les délin-
quants, en les engageant à ne plus recommencer sous peine
d'être bannis et punis arbitrairement selon les circon-
stances.
Dans le registre criminel de 1581-1583 se trouve trans-
crit, au folio 29 v°, l'acte d'accusation dressé contre un
— 343 —
certain Hector de Clercq, de Wervicq, chanteur de profes-
sion, hem occuperende int synghen van liedehens :
« Accusatie
« Hector de Clerck van Werveyck hem occuperende int
« synghen van liedeckens verclaert niet nieer te misdoene int
« singhen van gunnen, hem confesant heeft biddende om
« gracia. Ghevraegt, seght niet te toeten ivie hem de liede-
« kens ghegheven heeft luydende een nieu Uedeken opde
« wyse : och edele maecht van Ghendt erbaer etc.
« hendt naederhandt dat hy deselve heeft doen prenten endc
« dat hy selve de tioee clauselen byghevoucht heeft te weten
« het eene beghinnende NU CAN elc ZIEN voor ooghe en het
« andere naervolghende elc iieeft nu wel zijn BURSE
« GHEVULT. »
Il est probable que les couplets, chantés par Hector
de Clercq, n'avaient rien de subversif, car il fut relâché
après qu'il eut promis de ne plus débiter ses couplets en
public à moins d'en avoir obtenu l'autorisation des échevins.
Cette décision des échevins de la Keure est inscrite en
marge de l'acte d'accusation.
« Gheslaect up verbant dat hy niet meer liedehens zinghen
« zal ten zy met exprès consent heere ende xoet up arbitraire
« correctie mits betaelende zyne vangeniscosten.
« Actum den xv januari 1582. »
Une décision analogue se rencontre dans le registre
criminel de 1588-1501 au folio 18 v°. Il s'agit d'un individu,
nommé Jan de Duutschere, qui fut également reLâché de
la prison :
« Schepenen slaechen van vanghenisse Jan de Duutschere
« midts hem binnen dese stede draeghende in aile stillicheyt
344 —
« ende stellen zulcken orcler in zyn huis dat men aldaer
« gheene verboden liedehens ofte andere refereynen ontstich-
« tent de passanten uppene indien te contraren geschiede
« van uute stadt ghebannen te zyn ende arbitrairlich ghe-
« corrigeert te ivorden naer bevindt van den sticke. »
« Actum desenvij april 1589. »
Du texte de cette décision il semble résulter que ce Jan
de Duutschere était un cabaretier ou un boutiquier et que
c'était dans son établissement, dont les portes ou les fenêtres
étaient ouvertes, que l'on chantait ces Liedehens ou ces
Refereynen qui blessaient les oreilles des passants. Les
échevins ajoutent que si pareils faits se renouvellent il sera
banni de la ville et puni arbitrairement selon la gravité des
circonstances.
Beaucoup de ces Liedehens et Refereynen ont été,
comme cela se fait encore aujourd'hui, imprimés sur des
feuilles volantes qu'on ornait parfois d'une vignette sur
bois. Les chansons d'Hector de Clerck et celles de Jan
Onghena ont été imprimées, ainsi qu'il résulte des textes
que nous venons de citer.
A notre connaissance aucun exemplaire de ces couplets
n'est parvenu jusqu'à nous.
P. C.
PÉNALITÉ CURIEUSE POUR FRAUDE INDUSTRIELLE. — Tel
est le titre d'un rapport adressé, le 20 juillet 1809, au préfet
du département de l'Escaut, d'Houdetot, par Norbert Cor-
nelissen qui était à cette époque chef de bureau h l'hôtel de
ville. Il avait la police administrative dans ses attributions.
Voici ce rapport qui est transcrit dans un registre déposé
- 343
aux archives communales el renfermant plusieurs docu-
ments du même genre.
« Parmi les pièces de toile envoyées au marché de Grand,
«" on en a découvert une qui était l'ouvrage d'un fourbe
« consommé. En la mesurant du côté où il est d'usage de
« la mesurer, c'est-à-dire par dessus, elle avait cinq mètres
« de plus que lorsqu'on la mesurait par dessous. Une
« fourberie aussi déloyale et faite pour discréditer notre
« marché devait être punie sévèrement. Aussi au lieu de la
« suspendre à la tourelle du marché conformément aux
« anciens règlements remis en vigueur, M. l'adjoint Ver-
ce heggen, chargé de la police des marchés, de l'avis de la
« commission des marchands de toile a fait élever au
« milieu de la place une perche de 50 pieds.de haut, Après
« avoir été lacérée et déchiquetée publiquement, la pièce,
« qui est de la longueur d'environ 100 mètres, a été hissée
« de manière que la moitié en resta étalée aux pieds et
« la fraude put être appréciée de tous les marchands
« et tisserands.
« Elle sera exposée ainsi pendant trois vendredis et
« ensuite confisquée au profit d'un hospice. Un écriteau
« indique la nature de la fraude et celle de la peine ainsi
« que le nom du tisserand et celui de sa commune. »
Le marché aux toiles, qui se tenait autrefois, chaque
semaine, au marché du Vendredi, était un des plus im-
portants du pays. Toutes les toiles, présentées en vente,
devaient être soumises à la vérification des mesureurs jurés
de la ville. Après constatation de la largeur de la pièce de
toile par les mesureurs, d'autres employés nommés Zege-
laers y apposaient une marque aux armes de la ville. La
couleur et la dimension de cette marque variait d'après
la largeur de la pièce. Le vendeur payait un liard pour
chaque mesurage.
— 346 -
Cette double opération du mesurage de la pièce de toile
et de l'apposition du sceau de la ville se faisait sur deux
longues tables placées devant les maisons touchant à la
tourelle.
Cinq lignes de banquettes en bois, d'un demi-pied de
hauteur à peu près, étaient rangées sur toute la longueur
du marché du Vendredi. Les paysans, les facteurs et les
tisserands, de Zandslieden, Kutsers ende Wevers,$e tenaient
devant ces banquettes sur lesquelles étaient exposées les
pièces de toile présentées en vente. Ces pièces devaient
être placées perpendiculairement et de façon à ce que la
marque, apposée par les Zegelaers, fut bien visible.
Quand une pièce de toile était vendue, vendeur et ache-
teur se rendaient dans la grande salle du Lakenmetershuis
où l'on en mesurait la longueur. Trois espèces d'employés
procédaient à cette opération : les Trekhers qui étiraient et
étendaient la pièce de toile, les Meters qui la mesuraient et
les Opbinders qui la remettaient en rouleau.
Le Meter recevait deux, trois ou quatre liards suivant la
longueur de la pièce, le Trekher et le Opbinder en rece-
vaient chacun deux.
En cas de fraude, c'est-à-dire si le marchand essayait de
faire passer sa pièce de toile comme étant d'une qualité
supérieure à celle qu'elle avait réellement ou si la partie
intérieure était fabriquée avec du fil de moindre qualité
que la partie extérieure ou bien encore si' la largeur était
moindre à l'intérieur de la pièce qu'aux extrémités (c'est la
fraude dont parle N. Cornelissen), dans tous ces cas la pièce
était confisquée au profit des pauvres.
Le corps du délit était de plus, pendant deux jours de
marché consécutifs, pendu à la tourelle du marché du
vendredi avec une inscription mentionnant le nom et le
domicile du vendeur : « met ordonnantie, dit l'article
« XLIII du règlement sur les toiles du 12 mai 1 786, v an het
— 347 —
« zelve ttcee volgende Merkt-Dagen uyt te hangen aen het
« Torreken op den Vrydag-Merkt met inscriptie van den
« Naem ende Woonplaetse van den Verkooper. »
Cette exposition publique était, à n'en pas douter, une
peine beaucoup plus efficace que la confiscation de la pièce
de toile trouvée en défaut.
Tous les anciens règlements locaux sur les ventes et sur
les marchés furent abolis lors de l'annexion de notre pays
à la France à la fin du siècle dernier. On maintint cepen-
dant l'usage de pendre à la tourelle du marché du Vendredi
les pièces de toile auxquelles le vendeur avait attribué
frauduleusement une largeur ou une qualité qu'elles
n'avaient pas.
C'est cet usage que Norbert Cornelissen rappelle dans
son rapport au préfet d'Houdetot du 20 juillet 1809. Seule-
ment, dans le cas cité par ce rapport, la pièce de toile au
lieu d'être attachée à la tourelle fut lacérée et pendue à
une perche de cinquante pieds de hauteur.
P. C.
Note sur un manuscrit des Archives du chapitre de
Pise. — Les Archives Capitulaires de Pise ne sont pas
publiques, mais elles sont très accessibles. En ce qui me
concerne, grâce à la bienveillance du comte Clémente Lupi,
le savant archiviste de l'Archivio di Stato de Pise, j'y ai été
récemment admis sans difficultés. Je terminais les recherches
spéciales qui m'avaient attiré dans ces archives, lorsque le
vénérable chanoine-archiviste me mit entre les mains un
manuscrit sur lequel il appela mon attention.
C'est un petit in-4° recouvert d'une reliure du XVe siècle
en cuir gaufré. Il est en parchemin et comporte 31 feuillets
d'une très belle écriture de la fin du XIVe siècle, avec
lettres ornées.
— 348 —
Dans le haut du feuillet P on lit ce titre en rouge :
Ordinarium tenendum in capella. Le manuscrit en effet
contient le règlement d'une chapelle. Mais cette chapelle
n'a rien à voir avec la Primatiale de Pise, comme on l'a cru
longtemps à Pise, puisqu'il s'agit, à n'en pouvoir douter,
de la chapelle de Philippe-le-Hardi, duc de Bourgogne et
comte de Flandre.
L1 'Ordinarium occupe les 26 premiers feuillets du manus-
crit; il est en latin. En 27a, de la même main que ce qui
précède, on lit : c'est V ordenance que mons. le duc de Bour-
goingne veult que soit tenue en sa chapelle. Premièrement
. que le service dyvin soit bien h'onnorablement fais par
chappelains, clers et sommelliers de sa chapelle etc. Cette
Ordenance est tout entière écrite en français. Elle est
beaucoup plus courte que Vordinarium, mais elle est aussi
beaucoup plus intéressante; car tandis que Vordinarium
règle tout' ce qui concerne les messes et offices, Yordenance
s'occupe des chapelains, fixe leur nombre, détermine leurs
gages etc. Uordenance se termine ainsi sur le feuillet 30a :
Item doit li sires touz les jours dire ses heures à Vusage
des seigneurs de France, et avoir de ses reliques sur son
siège, et estre tous jours à genoulz à son service apoyez sur
son siège.
Item se doit li sires confesser à toutes les grans festes de
l'an et à les Nostre-Dames, et recevoir le corps Jhesu-Crist.
Item montent les gaiges et la pencion pour les chapelains
et clers vj mille et vjc frans pour Vannée de quatre-vins-
et xvj.
En 301' recommence un ordinarium en latin qui débute
ainsi : Sabbato in Adventu Domini, vespere et missa
ordinata cum ceteris aliis sabbatis et dominicis de Adventu.
Ce second ordinarium est très abrégé puisqu'il n'occupe
que les feuillets, 30 et 31 derniers du manuscrit.
Le temps dont je disposais à Pise ne m'a pas permis de
— 349 —
prendre sur le manuscrit- dont je viens de parler des notes
bien longues. Mais je crois en avoir pris assez pour avoir le
droit de signaler un manuscrit que vraisemblablement peu
d'érudits doivent s'attendre à rencontrer dans les archives
capitulaires de Pise. Comment ces ordonnances pour la
chapelle de Philippe-le-Hardi sont-elles aujourd'hui dans
ces archives? Pour répondre à cette question je ne puis
qu'émettre une hypothèse. On jugera de sa vraisemblance.
En 1409 un concile fut tenu à Pise et le pape y vint. Or,
dans cette même année, le pape concéda au duc de Bour-
gogne Jean-Sans-Peur toute une série de privilèges. Les
bulles qu'il donna alors sont conservées aujourd'hui aux
archives de la Côte-d'Qr à Dijon (B. 11G18). Est-il interdit
de supposer que Jean-Sans-Peur, à l'appui de la demande
introduite auprès du Saint-Père pour obtenir les privilèges
en question, lui a fait remettre, entre autres pièces, un
exemplaire du règlement de sa chapelle, règlement qui
attestait la piété des ducs de Bourgogne et leur souci des
choses de la religion ? En admettant cette hypothèse on
s'explique naturellement la présence dans les Archives
capitulaires de Pise du très curieux petit manuscrit qui fait
l'objet de cette note. Il y sera resté (peut-être avec d'autres
documents) après la clôture du concile de Pise et le départ
du Souverain Pontife.
Armand d'Herbomez.
Le baron Jean- Charles- Antoine de Saint-Génois. -
Dans une étude sur l'immunité parlementaire sous l'ancien
régime {Belgique judiciaire, 1890, n°21) M. le comte Oswald
de Kerchove raconte la singulière aventure du baron
J.-Ch.-A. de Saint-Génois qui, habitant Gand, y fut sur
l'ordre des échevins, colloque comme aliéné au couvent
des frères Cellites, puis, après quatre ans de détention et,
— 350 —
dit-on, de traitements les pins durs et les plus inhumains,
s'échappa en février 1768, pour aller à Mons siéger comme
membre de la noblesse aux États du Hainaut, convoqués à
cette date. A la nouvelle de l'évasion, son curateur Goethals
obtint du magistrat de Gand, un jugement ordonnant l'ar-
restation, et, du Conseil du Hainaut, des lettres d'attache
ou de pareatis, pour l'exécution dans le Hainaut. De Saint-
Génois fut en conséquence saisi à Mons et ramené chez les
Cellites. Mais le duc d'Arenberg, lieutenant-gouverneur et
grand-bailli du Hainaut, dénonça l'arrestation à la dépu-
tation des États, qui s'en émut et adressa au gouverneur-
général Charles de Lorraine ses plaintes « de la violence
pratiquée sur de Saint-Génois contre la sûreté et privilège
des États. » On contestait d'ailleurs que les mesures de
rigueur prises contre de Saint-Génois fussent justifiées par
son état mental. Pendant les travaux législatifs et autres —
c'est la représentation de la députation des États qui nous
l'apprend — « de Saint-Génois opina sur les subsides et
« assista à toutes les délibérations avec tout l'esprit et le
« jugement possible. Il était d'un caractère doux et d'une
« conversation intéressante, d'une vertu constatée par sa
« régularité à tous les offices de l'Église, vérité que les
« députés de la noblesse peuvent affirmer pour en avoir été
« les témoins pendant quatre jours... » Ce n'est pas de nos
jours seulement qu'on rencontre les appréciations les plus
contradictoires sur l'état mental des personnes : pour que
la ressemblance des temps fût complète, il eût fallu le
témoignage de médecins de Mons attestant que le baron de
Saint-Génois était parfaitement sain d'esprit, et celui de
médecins de Gand, le déclarant complètement fou. Mais il
ne paraît pas que, dans son court séjour à Mons, le baron
ait eu de rapports avec la faculté. « Quelle confusion,
« disaient les députés dans leur requête à Charles de
« Lorraine, quelle confusion pour un corps d'État, d'être
— 351 —
« témoin d'une telle violence à l'égard d'un de ses mem-
« bres, dont ils connaissent l'exacte probité et le jugement
« solide! Un pareil procédé n'est-il pas contraire au droit
« des gens, aux privilèges et constitution de tous les États
« policés ? »
L'affaire fut communiquée au Conseil privé, qui demanda
des renseignements aux échevins de la Keure de Gand et au
Conseil du Hainaut, reçut de longs mémoires, — les éche-
vins y reprochaient à de Saint-Génois ses prodigalités —
instruisit toute l'affaire, et émit l'avis que ceux qui sont
convoqués à l'assemblée des Etats d'une province, jouissent
du bénéfice de sauf-conduit ou de l'immunité d'arrêt, parce
qu'ils y sont convoqués pour choses concernant le bien public
et par les ordres de l'autorité supérieure; qu'en vertu du
privilège du sauf-conduit on aurait dû laisser au baron de
Saint-Génois, après la dissolution de l'assemblée, un temps
moral pour rentrer à Gand, et que c'était au Conseil du
Hainaut à faire sentir aux députés du magistrat de Gand
qui sollicitaient des lettres d'attache, l'obstacle tiré de la
circonstance relative à l'assemblée générale des États.
Les principales pièces relatives à ce singulier conflit et
que M. de Kerchove a résumées, sont conservées dans les
archives du Conseil privé, si riches en précieux documents.
D.
DU CALCUL DE CERTAINS DELAIS, EN LANGUE FLAMANDE. —
Les Flamands ont eu anciennement, dans l'indication de
courts délais, une supériorité sur les Français et Wallons,
une précision plus mathématique, que l'influence des habi-
tudes et de la langue française leur fait perdre, et dont il
est intéressant de relever les traces dans les anciens actes.
En France le mot de quinzaine correspond à l'idée de
deux semaines, quoique semaine vienne de sept, et que
- 352 —
quinze ne soit pas exactement le double de sept. L'on a
possédé, dans l'ancienne langue, le mot plus exact de qua-
torzaine, mais il s'est complètement perdu. « On a appelé
« qûatorzaine en fait de criées, porte un ancien diction-
ce naire de jurisprudence, les publications de biens saisis
« réellement, lesquelles on est obligé de faire par quatre
« dimanches, de qûatorzaine en qûatorzaine... » Aujouiv
d'hui l'on dirait moins exactement, pour exprimer la même
idée : de quinzaine en quinzaine, en comptant chaque fois,
pour trouver quinze jours, le jour qui est le point de départ
du délai, et celui où le délai expire, c'est-à-dire dans le cas
prévu, pour trouver quinze, trois dimanches, outre douze
jours de semaines autres que les dimanches. Il semble qu'en
deux quinzaines on doive avoir trente jours. Or, l'on en a
que vingt-huit, ou tout au plus, vingt-neuf si l'on commet
encore l'erreur de comprendre dans le-calcul du délai le
clies a quo. On trouve la même erreur chez les Français
dans l'emploi du mot huitaine. « Cette cause est remise à
huitaine» se dit communément pour signifier qu'elle est
remise d'une semaine ; devant les tribunaux deux remises à
huitaine équivalent à une remise à quinzaine; elles con-
duisent au même jour, quoique quinze ne soit pas plus le
double de huit que de sept.
Les dictionnaires français-allemands traduisent quinzaine
par zeit von 14 Tagen, durée de quatorze jours, et ce qui est
communément appelé quinze jours en langue française, est
quatorze en flamand. Qu'une affaire soit « remise à quin-
zaine » par un tribunal en Flandre cela se traduit entre
flamands par veertien dagen uitstel. Les pénalités mêmes
que le tribunal, dans la délibération entre magistrats, fixe
à quinze jours de prison, se réduisent immanquablement a
quatorze jours, veertien dagen gevang, si le président pro-
nonce la condamnation en langue flamande.
Que les Flamands aient conservé dans leur langue des
— 353 —
traces d'un calcul plus exact des délais que les Français,
cela ne doit pas nous étonner. Dans les plus anciens monu-
ments du droit flamand, les courts délais sont fixés de
manière à éliminer tout danger d'erreur, toute obscurité :
l'on indique le nombre de nuits qui sépareront l'un fait de
l'autre. La coutume de Gand, homologuée en 1563, pour ne
citer qu'un des monuments les moins anciens, porte encore
trace de ce mode de calculer les délais, à l'article 19 de la
rubrique XXIV : ...van den vierden ghenachte, à partir de
la quatrième nuit, ou nuitée. On trouve dans het Gends
Charter- Boekje du chevalier Diericx, en note de la page 38,
une charte de 1366, où nous lisons : ...Ende van désen voor-
seiden coepe... waren ghedaen drie xvettelyke sondaegsche
ghebode van XI III nachten te XI III nachten... ce qui se
dirait aujourd'hui en langage moderne par ces mots : « Et
de l'achat qui précède furent faites trois publications
légales, trois dimanches, de quinzaine en quinzaine. » Le
Flamand du moyen-âge se traduit mot à mot par « ...trois
publications de dimanches, de quatorze nuits en quatorze
nuits » ce qui fixait le délai sans incertitude aucune.
De même, dans la loi Salique, dans celle des Ripuaires,
dans les Capitulaires de Charlemagne, les courts délais sont
calculés par nuits : Prima mannitio super noctes VII
secunda super XI V, tertiu super XXI (Capit. Lib. VI, c. 21 2).
Voilà l'équivalent de nos remises à huitaine, à quinzaine, à
trois semaines. On lit dans la Lex A lamannorum tit. XXX VI :
Ipsum placitum fiât de sabbato in sabbatum, aut quale die
cornes aut centenarius vohœrit, a septem in septem noctes.
Au même texte, il est parlé de quatorze nuits pour le délai
double. Les barbares n'ont jamais vu dans quinze le double
soit de sept, soit de huit, ils n'ont jamais pris quinzaine
pour deux semaines ou deux huitaines. C'est une supé-
riorité que nous leur devons reconnaître, et elle date de
bien loin. Leur mode de fixation des délais n'est qu'une
24
— 354
suite de la coutume déjà observée chez les Germains par
Tacite, de Moribus Germanorum cap. XI : Née dierum
numerum ut nos, sed nnctium imputant : ils ne comptent
pas comme nous par jours, mais par le nombre de nuits.
De même les sourds-muets entre'enx, dans leur langue par
signes, pour indiquer qu'une chose se fera dans un certain
nombre de jours, font le signe qui indique la nuit ou le
sommeil, et élèvent ensuite autant de doigts qu'il faut
dormir de fois; si pour une remise à huitaine on leur mon-
trait huit doigts, on les tromperait de vingt-quatre heures.
Et les jeunes pensionnaires, à l'approche des vacances,
décomptent par nuits la durée de temps qui les sépare du
jour où ils recouvreront la liberté. Il y aurait à vérifier si
les sauvages ne comptent pas de même.
D.
Une lettre de Marie de Bourgogne, au Parlement
de Malines. — Lorsque Charles le Téméraire fut tombé à
Nancy (5 janvier 1477), sa femme et sa fille restèrent long-
temps sans avoir de ses nouvelles. Le 15, elles ignoraient
encore l'issue fatale de l'expédition de Lorraine. Cela res-
sort des lettres qu'elles envoyèrent ce jour-là aux « gens
des comptes » à Malines, pour les engager à « entendre et
vacquer a lentretenement de la dicte Chambre et y faire
les audicions des comptes des receveurs particuliers et
toutes autres choses, etc. » Par post-scriptum, elles priaient
le président de la chambre des comptes de se rendre
auprès d'elles à Gand avant la fin du mois. Cette lettre a été
retrouvée aux archives du département du Nord et publiée
par Le Glay, dans ses Analectes historiques (1838), p. 161.
Marguerite d'York et Marie de Bourgogne envoyèrent le
même jour une lettre identique aux gens du Parlement de
Malines, pour les engager à « entendre et vacquer a lad-
— 355 —
ministration et entretenement de Injustice souveraine « et
le premier président reçut une invitation semblable à celle
que recevait le président de la Chambre des comptes.
Les deux lettres auront été dictées en môme temps, car
leur orthographe présente de nombreuses différences. La
comparaison des deux pièces nous a aussi permis de fixer le
texte de la première phrase des deux lettres, dont Le Glay
n'avait pu lire les derniers' mots '.
Le post-scriptum est d'une autre main que la lettre. Les
deux princesses ont signé elles-mêmes.
Cette lettre se trouve actuellement avec d'autres lettres
adressées au Grand Conseil des ducs de Bourgogne, au Par-
lement de Malines, au Grand Conseil de Malines, aux ducs,
aux chanceliers, etc., dans le premier registre de la Cor-
respondance du Grand Conseil de Malines (f° 1 lbis), aux
Archives Générales du Royaume à Bruxelles.
J. Feederichs.
« De par la duchesse et Marie de Bourgoigne,
« Très chiers et bien amez. Vous savez assez la dure
« fortune naguaires advenue a Monseigneur, dont sommes
« en si grand regret et desplaisance que plus ne pourrions,
« comme raison est et bien estre devons. Et combien que
« par plusieurs nouvelles, que avons de divers costez, nous
« entendons et espérons que grâces a Dieu il est en vie
« et sancte et qu'il est plus apparant qu'il est hors des
« mains de ses ennemis en lieu seur que autrement, dont
« nous rendons louanges a Dieu, lui supplians de tout
« nostre coeur que ainsi puisse estre. Touteffbis pour ce
« que a cause de l'incertaineté du lieu ou est sa très noble
« personne, dont espérons brief estre acertences, aucuns
1 Le Glay avait lu : « que plus ne pourrions comme raison est et
que bien estre de nous (sic) ». 11 faut lire : <• que plus ne pourrions.
comme raison est, et que liien estre devons. »
— "356 —
murmures se pourroient ensuir, il nous a semble estre
nécessaire d'entretenir la justice entre les pays et subjets
bien et doulcement et ainsi que l'on a accoustume par
cydevant. Et pour ce estre prenons devers vous et vous
prions et requérons que vueillies entendre et vacquer
songneusement a l'administration et entretenement de
la justice souveraine, ainsi que avez fait jusques a ores,
enquoy faisant nous sommes certaines que ly ferez très
grant service, car le plus grant désir qu'il ait c'est d'entre-
tenir sa court de parlement en vigueur. A quoy aussi de
nostre part nous tiendrons la main de nostre povoir et en
tous evenemens. Sy vous y vueillies employer, comme en
vous avons la parfaite fiance. Très chiers et bien amez,
nostre seigneur soit garde de vous.
« Escript à Gand le xvme de janvier.
« Très chiers et bien amez. Nous desirons que vous, pre-
« mier président de la court de parlement, venez devers
« nous en ceste ville de Gand et que y soiez endedans le
« derrenier jour de ce mois en délaissant le second presi-
« dent et les autres dudit parlement besoignes es affaires
« d'icelui jusques a vostre retour.
« Margarete, Marie. »
La suscription porte : A nos très chiers et bien amez les
gens tenans la court de parlement de Monseigneur à
Malines '.
Albert, comte de Berg, marquis de Berg-op-Zoom. —
Dans sa notice fort intéressante, intitulée : Quelques détails
1 La table des matières placée à la fin .du registre d'où est extrait
cette lettre porte, à tort, que cette lettre fut adressée au Grand
Conseil. Cette institution, qui est essentiellement différente du Par-
lement, est continuellement confondue avec ce dernier par le plus
grand nombre de nos historiens.
— 357 —
historiques se rapportant à la bataille de Fleurus •', M. D.
Van de Casteele dit (p. 202, note 1), à propos de Son
Excellence le comte Albert, marquis de Berghe, baron de
. Perioez : Nous ne possédons aucun renseignement sur cet
Albert, marquis de Berghe, qui ne figure pas que nous
sachions dans" les notes généalogiques publiées sur la famille
de Glymes à laquelle ledit A Ibert parait appartenir.
Je suis heureux de pouvoir renseigner M. Van de Casteele.
Le marquis Albert n'était pas un Glimes. Il appartenait à
la maison de Polanen qui avait remplacé son nom patrony-
mique par celui de sa terre de Behg Çs Heerenberg), une
des quatre antiques seigneuries à bannière du comté de
Zutphen, érigée en comté, en faveur d'Oswald de Polanen,
par l'empereur Frédéric III, en vertu de lettres-patentes
données à Aix-la-Chapelle, le 10 avril 1486 2.
Les Polanen, comtes de Berg — dont les possessions
passèrent plus tard aux princes de Hohenzollern — por-
taient les armes des anciens sires de Berg, telles qu'on les
trouve peintes dans le précieux Wapenboeck de Gelre
(XIVe siècle), savoir : d'argent au lion de gueules, couronné,
armé et lampassê d'or; à la bordure de sable, chargée de
onze besantsd'or; casque couronné; cimier : un vol 3.
L'église de Hunsel (Limbourg hollandais) possède dans
son trésor un calice, en argent doré, sur lequel -on voit le
jeune Albert de Berg, en prières, accompagné d'un Père
Jésuite. L'inscription de cette pièce d'orfèvrerie nous fait
1 Messager des sciences historiques, 1890, p. 197-206.
2 Chinel, Regesta des rômischen Kaisers Friedrich III.
3 Bibliothèque royale, à Bruxelles, section des manuscrits
nos 15652-6. Le lion peint par Gelée n'est toutefois pas lampassê.
Quant au cimier, le Wapenboeck le représente, non colorié, c'est-à-
dire, d'argent; des armoriaux plus modernes le blasonneut d'or.
Gelre aurait-il négligé de colorier le vol? Ailleurs, nous avons
démontré quelques oublis analogues de notre roi d'armes.
— 358 —
connaître les parents du personnage : Donum iLLmi comitis
Frederici van den Bergh et Franciscae de Ra ve-
nelles conjugum, Alberto — meritissimo filio, ob
sanitatem restitutam ' .
En 1626, Albert épousa sa cousine Marie Elisabeth, tille
du comte Herman de Berg et de Marie Mencie de Witthem,
qui, elle, était une des trois filles de Jean de Witthem,
baron de Bautersem, grand veneur de Brabant, et de
Marguerite de Merode, l'opulente héritière des maisons de
Merocle et de Glimes-Berghes(-op-Zoom).
Dans un acte du 23 août 1641, il est qualifié de comte de
de Berg, baron de Boxmeer, seigneur de Bijlant, Haeps,
Dixmude, et capitaine des hallebardiers de Son Altesse à
Bruxelles 2.
Après la mort de sa femme '1632), la succession de cette
dame lui fut disputée par Ernestine de Witthem, tante de
celle ci et femme de Claude François de Cusance, baron de
Bel voir. Le procès pendait encore en 1640, mais, peu de
temps après, le marquisat' de Berg-op-Zoom fut cédé par
Ernestine au comte Albert, et celui-ci en reçut l'investiture
le 23 août 1641 3. Cette cession avait eu pour cause un
projet d'union entre Albert et la fille de son adversaire,
Madeleine de Cusance, union qui fut conclue le 17 du
mois suivant.
Plusieurs enfants en naquirent.
J'ignore la date de la mort d'Albert de Berg. Toujours
est-il qu'elle arriva entre le 12 juillet 1656, jour où il testa,
1 Ladite église a acheté ce calice au commencement de notre
siècle. Inutile d'ajouter que l'inscription de cette pièce ne constitue
pas la seule preuve de la filiation du comte Albert.
- Cour féodale de Brabant, reg. n" 148, f° 16G (Archives générales
du royaume). La baronnie de Perwez provenait de la succession des
Merode.
3 Ibidem, f° 166.
-- 350 -
et le 10 février 1657, jour où sa veuve Madeleine, comtesse
régente de Berg, marquise de Berg-op-Zoom, fit opérer un
relief pour le second de ses fils, Oswald Albert François1.
Celui-ci devint comte de Berg, marquis de Berg-op-Zoom,
comte de Walhain, etc. Il fut le dernier hoir mâle de sa
maison.
Dans ma notice sur les seigneuries de Duffel et Gheel 2, je
ferai connaître plus de détails sur les faits et les person-
nages que je viens de citer.
J. Th. de Raadt.
Registre crcviinel de Douai (1581-1584). ■- Parmi les
manuscrits de la collection Diericx, que Mine la C1,
douairière de Kercliove de Dentergliem a offerts récem-
ment à la bibliothèque de l'Université de Gand, se trouve
un registre, qui présente un certain intérêt pour notre
histoire de la fin du XVIe siècle. C'est le Criminelen bouck
van Dovay (1581-1584).
On sait que, le 16 décembre 1579, le conseil de Flandre,
qui siégeait à Gand, fut obligé de se transporter à Douai
par suite de la domination Calviniste qui s'était établie
dans cette première ville; il n'y revint que le 20 décembre
1584. Ce sont les interrogatoires faits par les membres du
conseil de Flandre, lors de sa résidence à Douai, qui nous
ont été conservés par le « criminelen bouck van Dovay. »
Le registre, dont les premiers feuillets ont été malheu-
reusement fort endommagés, servira sans aucun doute à
faire connaître un nombre assez grand de détails sur cette
période intéressante, qui suivit la paix de religion d'Anvers
(1579). Nous y trouvons entre autres quelques renseigue-
1 Cour féodale de Brabant, reg. 11° 375, i'° 217.
2 Cette notice est en voie de publication dans le Kempisch Muséum
(chez J. Splichal, à ïurnhout).
— 360 —
ments sur des cas de personnes soupçonnées d'avoir pro-
noncé des paroles malveillantes à l'égard du culte catholique
et d'avoir essayé de soustraire des fidèles à la religion
catholique romaine. On lit par exemple au folio 29r. qu'un
certain Antheunis de Zayere a été accusé « ghehouden
hehbende eeneghe hereticque of séditieuse proposten, oock
ghesocht of ghepoocht yemant te diverteren van dezelve
catholique religie of ghesocht yemant te meslieden '»,
H. Y AN DER LlNDEX.
Interrogatoires au sujet de propos hérétiques, 1 583.
— Un registre criminel (1581-84) du Conseil de Flandre
siégeant à Douai, récemment offert à la bibliothèque de
l'Université de Gand, par madame la comtesse de Kerchove
de Denterghem, ne contient aucune condamnation à mort.
Mais on y trouve des interrogatoires à charge des person-
nages suivants accusés d'avoir tenu des propos contraires à
la religion : Antheunis de Zaeyere, fils de Jean, âgé de
53 ans, Jean Stalin, âgé de 44 ans, tous deux habitant
Bourbourg, Jean de Cupere, âgé de 33 ans, receveur de la
châtellenie de Bourbourg, et Franchoys van der Woestynen
dit Braxken.
L'odyssée de ce dernier ne manque pas d'intérêt. Sa femme
Jacquemyne Gillekens, était veuve de Michel de Millandre.
Celui-ci habitait Kieseghem quand il fut appelé à Aude-
naerde après la prise de cette ville par Blommaert (1572)
pour y faire des mèches (lonten). Appréhendé quelque
temps après à Ostende, il fut brûlé vif. Franc, van der
Woestynen avait recherché en mariage la veuve et l'avait
épousée à Wesel. Les nouveaux époux habitèrent cette
' Cf. ff. 4, 4v., 23, 30, 31, 46, 102.
— 861 —
localité pendant deux ans; on les trouve ensuite à Fles-
singue et à Middelbourg. Après la pacification de Grand,
ils revinrent à Audenaerde, où ils séjournèrent jusqu'à la
soumission de cette dernière ville au prince de Parme
(8 juillet 1582).
Ayant alors subi un emprisonnement de sept mois, parce
qu'il ne pouvait payer sa quote, F. van der Woestynen alla
se fixer à Tournai avec sa femme, en mai 1583. Ils s'étaient
en ce moment réconciliés avec l'église et confessés au curé
de Painele qui les avait mariés, tout en ajournant à la
Pentecôte l'administration du Saint-Sacrement de l'autel.
L'abjuration de van der Woestynen était-elle sincère?
Toujours est-il que sur ces entrefaites il fut arrêté à
Tournai. Furieux, il blessa l'huissier du conseil de Flandre,
Servaes Tinctoris, chargé de le conduire avec des soldats à
Douai, parce que, disait-il, « il se veoit trompé et que ledict
blessé au lieu de le mener parler à sa femme le menoit
ailleurs et au. bout de sa vie ».
Interrogé à Douai au sujet de certains propos contre la
religion qui lui étaient attribués, il nia avoir mal parlé
du Saint-Sacrement ou de la religion catholique en général ;
il avoua cependant qu'ayant été emprisonné pendant sept
mois à Audenaerde avec des partisans de la nouvelle reli-
gion, un mot ou deux contre la foi avait pu lui échapper :
« De voornoemde Franchois ghevraecht upt Ie article van
de voors. ampliatie, ontkent eeneghe propoosten oft blam-
matie ghehouden thebbene jeghens de heleghe sacramenten
oft andersins jeghens de catholicque religie, dat hem nu
eenichsins ghediencken zoude, anders' of breedere dat hy
te vooren verclaert heeft, hoewel alzo hy in vanghenesse
tAudenarde gheleghen heeft zevene maenden lanck, zowel
met eeneghe van de nieuwe religie als andere, dat wel
mochte gheschiet zyn dat hy altemets een woorclt of twee
uuyt lichtveerdigheyt zoude ghesproken hebben metten
— 362 —
ândere jeghens de catholicque religie, zonder dat hem
eeniclisins gliedieiict van wat propost of jeghens wat poinct
van tgheloofve dat tselve zoude gheweest hebben. Blyfvende
in de selve denegatie nietjeghenstaende hein by de procu-
reur gênerai annegheseyt wierdt ter contrarien te blyckene
tzynen laste » .
Il dut reconnaître qu'il avait parlé quelquefois en faveur
des gueux :
« Niet wetende ooc of hy zoude gheargueert hebben voor
de zyde van de ghuesen, ten waere altemet uuyt lichtver-
dicheyt, meenende aldaer vry te zyne ende niet te inoghen
messeghen ».
Il avait remis l'un de ses livres au curé de Pamele :
« Ghevraecht voorts of hy gheene verboden boucken
onder hem ghehadt en heeft tzindert de reductie van de
voors. stede van Aaidenaerde, seght onder hem ghehadt
thebbene een cleen bouxken int vlaemsche, inlioudende de
evangelien ende epistelen van den jaere, twelcke hy den
pastere van Pamele overgaf, dies by hem ghelast zyndë in
den tyt dat hy hem prepareerde totte reconciliatie metter
heylegher keerçke, de welcke behouden heeft onder hem
tzelve bouxken zonder hem dien wederomme te gheven,
sulx hy ghevanghen ooc zeght van hem niet gheheescht
thebbene, ende ooc niet te wetene waer tvoorseide bouxken
gheprent was, hem nochtans denckende dat achter stondt :
cum gratia et privilegio, niet wetende by wien ».
Très compromettante fut sa réponse au sujet d'un psautier
contenant un catéchisme de la nouvelle religion qu'il avait
gardé en sa possession :
« Ghevraecht voorts of hy gheen andere verboden
bouxken ghehadt en heeft tzindert der voorseide reductie,
kendt noch ghehadt thebbene een spalmebouxken (sic) met
— 363 -
oon glieluwe parcheynen convertorie of dexsele, daerinne
ooc, zoot liem dyenct, begrepen was een catéchisme up do
nieuwe religie mette noten van de voysen, onde dat liy den
voornoemden bouck ghehouden heeft ende laest ghelaten
heeft tzynen huuse te Doornycke, alst hy ghevanghen
wierdt, kennende tvoorseide boucxken (hem ghetoocht
synde) tzelve te wesene by hem inneghehouden ; ende dat
' hy tzelve den voors. pasteur niet overghegheven noch ghe-
toocht en heeft, nietjeghenstaende hy hem ghelast hadde
aile zyne boucken over te gheven, omme altemet wat inné
te lesen, zo hy altemet ghedaen heeft, maer niet vêle tsindert
de voorseide reductie. Twelcke hy seght hem leet te zyne.
Endetgheenevoorschreven den ghevanghen ghelesenzynde,
heeft hier by ghepersisteert ende desen onderteeckent :
by my Feanch. van dee Wostynen.
Cet interrogatoire eut lieu le 27 juin 1583. Deux jours
plus tard, le prisonnier fut trouvé mort dans sa cellule.
Une enquête qui eut lieu immédiatement prouva qu'il
s'était suicidé par strangulation. Il avait dit à un cabaretier
qui lui avait apporté à boire « qu'il y avoit mauvaises
« nouvelles pour luy et qu'on lui ramentenoit des choses
« passées plus de vingt ans et qu'il doubtoit qu'on luy
« feroit coupper le point et par apprez mourir ».
La déposition du geôlier porte qu' « il ne s'est jammais
« appercheu que ledict Franchois fust aulcunement débile
« d'esprit, ayant au contraire trouvé tousiours de bon
« propos, ayant entre autres choses déclaré au dit déposant
« que si falloit qu'il enduroit la mort, requerroit d'avoir
« quelque bon confesseur fiameng pour mourir catholi-
« quement et aultrement qu'il n'avoit vescu ».
Chose curieuse, les zélés magistrats continuèrent à s'in-
former des opinions du défunt. Le 6 juillet ils cherchèrent
à obtenir des aveux de la veuve, qui nia énergiquement les
— 364 —
propos hérétiques attribués à son mari ; elle déclara de plus
qu'elle ne savait ni lire ni écrire.
Vient enfin un assez long interrogatoire relatif à un
hochepot contenant de la viande de veau, des prunes et
des raisins secs (hutsepot van calfvleesch met pruimen ende
rozynen) et que la dite femme avait servi à son mari par
mégarde un samedi, jour maigre, peu avant de s'embarquer
pour Tournai. Elle ne put dire si celui-ci en avait mangé ;
en tout cas le curé de Melden, qui était présent, ne s'était
pas montré scandalisé; le hochepot, prêt depuis le lundi,
devait être emporté sur le bateau, et elle l'avait servi parce
qu'il était sur le point de se gâter.
V. V. H.
Sentence capitale rendue contre un hérétique en
1582. - - On sait qu'il n'y eut qu'un petit nombre de per-
sonnes condamnées à mort pour hérésie pendant les années
1578-1584. Les recueils protestants ne renseignent même
aucun nom pour l'année 1582. La sentence capitale contre
Jehan de Lattére que nous reproduisons ici est donc restée
inconnue :
« Veu le procès criminel faict par j ustice allencontre de
Jehan de Lattere, prisonier cy présent, chergé et convaincu
d'avoir en contrevenant à sa promesse et protestation de
vivere et morir comme fils de Ste Eglise, faicte à ce siège le
XXIXe de janvier LXII, tenu plussieurs propos scandaleux
tant contre les personnes ecclésiasticques que contre la
messe et S* Sacrament de l'Eucharistie, contendu de séduire
et attirer plussieurs personnes à tenir de la religion nou-
velle, et à ces fins présenté livres qu'il disoit venir d'Angle-
terre, ensemble tenu plussieurs aultres propos de mauvaise
édification, signament contre la personne de Sa Majesté, et
d'avoir tasché durant son emprisonnement envoyer lettres
— 305 —
aux rebelles tenans party contraire à Sadite Majesté,
homme séditieux et perturbateur du repos publicque, le
tout directement contre la pacification de Gand, traicté
d'Arras et repos publicque. Les informations préparatoires,
interrogatoires, confession et dénégations dudict prisonnier,
récolemens et confrontations des tesmoings contre luy oys,
la conclusion contre luy prinse par le soubzbailli et celle
en droict, messieurs, maieur et eschevins de ceste ville de
Saint Orner eu sur ce conseil et advis, ont, pour lesdits cas
et aultres aparans par ledict procès, condempné et con-
dempnent le dict prisonnier au dernier supplice par la
corde, déclarans ses biens confisquez là où il appartiendra,
sur lesquels se prendront les mises et fraiz de justice. Pro-
nunchié en jugement le vendredy dernier d'aoust XV0
quatre vingtz et deux ».
En marge : « Ceste sentence a esté confirmé par le conseil
d'Arthois sur appel qu'en avoit interjecté le condemné. »
Plus bas : « Sy gheregistreert. Actum XXIIII de septemb*
XVCLXX1I' ».
V. V. H.
Une lettre de Conscience a P.- A. Lentz. — Au cours
de recherches que j'avais entreprises pour rédiger une
notice biographique sur l'historien Pierre-Albert Lentz,
qui fut professeur à l'Université de Gand, de 1837 à 1872,
M1' Albert Lentz, son fils, a bien voulu me communiquer
une lettre écrite en français par Henri Conscience à l'auteur
1 Le texte de ce document se trouve en copie dans un recueil de
pièces relatives au conseil de Flandre conservé aux archives de la
ville de Gand (série 5, n° 2).
— 3GG —
de Jacques Van Artevelde, en lui envoyant un exemplaire
de son roman historique du même titre :
Anvers, ce ' Mars 1849.
Monsieur P.- A. Lentz, professeur ordinaire à
V Université de Gand.
Monsieur le Professeur,
Veuillez agréer un exemplaire, sur fort papier, de mon
ouvrage Jacob Van Artevelde, comme un faible témoignage
de ma reconnaissance de votre accueil si affable et si
généreux.
Vous verrez à la page xxi de la préface, que j'ai reconnu
publiquement la dette que votre obligeance m'a fait con-
tracter envers vous 2 ; et vous pouvez apprécier combien
1 Date laissée en blanc.
2 Voici ce passage :
« Het ware licht voor Artevelde's tydvak, de echte wreker der
nagedachtenis des Gentschen Burgers, is de heer Lenz, prol'essor
by de Hoogeschool te Gent, die de herstelling van Artevelde's roem-
ryke nagedachtenis, om zoo te zeggen, tôt doel van zijn leven ver-
kozen heeft.
« Op de Archieven ten Stadshuize van Gent berusten_de oorspron-
kelyke Gemeenterekeningen van Artevelde's leeftyd. Deze stukken,
ofschoon niet volledig, schynen aen de waekzaemheid der ver-
volgers van Artevelde's roem ontsnapt te zyn.
« Daer de Gentscbe Burger, als Opperbooldman, eene jaerwedde
van de stad genoot en men hem reiskosten betaelde zoo baest by
buiten den omvang der Gemeente iets te verrigten had, staen zyne
daden, bewegingen, zendingen en ontvangene bevelen, byna dag
voor dag, in deze kostbare oorkonden aengeteekend. Men meldt,
waer hy ging, met wien by reisde, welken last bem was opgelegd
en wat by uitvoerde. Daerin vindt men, even nauwkeurig, elke
verandering in het Bestuer der Gemeente aengeduid.
« Voor deze getuigenis, zoo belangloos, zoo onwetend zelfs, door
de stadsontvangers neergesebreven, alleenlyk om de uitgaven te
bewyzen, moeten aile valscbbeden en lasterlyke aentygingen der
verleide g^scbiedscbryvers ondenloen.
v De heer Lenz heeft niet al leen deze rekeningen allen doorwroet
— 367 —
'ai tenu à ne pas m'écarter de vos opinions, en sachant
que votre esquisse des six premiers mois de l'administration
d'Artevelde • m'a permis de citer votre nom au moins qua-
rante fois, cà l'appui de ce que j'avance dans le cours de
mon ouvrage.
J'ose espérer, Monsieur, que vous jugerez ce travail avec
indulgence et que, si par ignorance je m'étais, dans les
détails, écarté de la vérité historique, telle que vous seul
êtes à même de la connaître, vous aurez la bonté de vous,
souvenir que l'on doit accorder quelque tolérance au poëte
et au romancier.
en tôt in het diepste vergeleken; maer hy heeft daerenboven nog,
tôt de verdediging der dierbare nagedachtenis des helds, een wapen-
huis van eenige duizende bewysstukken met groote kosten en moeite
verzameld. Hij is in de archieven van Parys en Ryssel het spoor der
waerheid over Artevelde gaen opzoeken ; en wacht slechts eene
gelegenbeid, om in Engeland de laetste bouwstoffen te vinden voor
het voltrekken der schitterende eerezuil, die hy den grootsten
vlaemschen Burger opregten vvil.
« Zyn aenzienlyk werk zal volgens aenkondiging, omtrent
1500 bladzyden groot zyn; en, dewyl het slechts over een beperkt
tydvak handelen moet, kan men zich daerby een gedacht van de
uitgebreidheid des onderzoeks en de menigvuldigheid der bewyzen
vormen. Slechts na de uitgaef van dit werk, zal Artevelde's nage-
dachtenis gewroken zijn.
« De heer Lenz heeft den schryver dezes met uitnemende gul-
hartigheid onthaeld, en zich, als een edelmoedig vaderlandsvriend,
verblyd dat nog anderen tôt de herstelling van zyn lievelingsbeeld
wilden werkzaein zyn. Hy heeft ons, vêle uren lang, de uitzigten
uit zyne opzoekingen gevolgd, medegedeeld ; ons te regt gewezen
waer wy dwaelden, en, door zyne diepe kennis van het onderwerp,
onze overtuiging gevestigd, waer zy nog op onzekere gronden
wankelde.
« De heer Lenz ontvange daer voor on zen innigsten dank ! »
Hendrik Conscience, Jacob Van Artevelde (Antwerpen, J.-E.
Buschmann, 1849), t. I, pp. XXI-XXI1.
1 P.- A. Lenz, Jacques Van Artevelde. Histoire des six premiers
mois de son administration, Gancl, C. AnnootBraeckman, s. d.
(1837) ; in-8". Extrait des Nouvelles archives historiques, philoso-
phiques et littéraires, t. I, pp. 2G1-310.
— 3G8 —
Puisse l'effort consciencieux que j'ai fait pour contribuer
à l'illustration de votre héros m'être un nouveau titre à
votre estime et à votre amitié.
Votre serviteur très reconnaissant et très dévoué,
Conscience.
L'exemplaire dont il s'agit porte la dédicacé suivante :
Betoys van byzondere hoogachting en erkentenis voor ge-
notene diensten tôt den opstel dezes icerks, den heere
Pr Lenz door den schryver aengeboden. Antwerpen, den
17 Meert 1849. Conscience.
Paul Bergmans.
309 —
CHRONIQUE.
Beaux Arts. — Le prix des tableaux. — On a vendu, le 14 mai
«
1890, à la galerie de la rue de Sèze à Paris la collection de tableaux
modernes appartenant à M. de Porto.
Cette adjudication a produit 300,510 francs. Le tableau le plus
important, 1814, par Meissonier, sur une demande de 125,000 francs
et sur une mise à prix de 30,000 francs par enchères de 5,000 francs,
est rapidement arrivé à 131,000 francs.
Ce tableau est une répétition avec variante du 1814 appartenant à
M. Delahante et qu'on a vu à l'Exposition universelle. Le tableau do
M. Delahante est de beaucoup supérieur à celui vendu le. 14 mai, et
comme fini et comme importance.
Signalons parmi les autres enchères le Hallebardier, par Meis-
sonier, demande 30,000 francs, vendu 29,000 francs.
Coutances, étdde par Corot, demande 6,000 fr., adjugé 6,(300 francs.
Après l'Orage, par le même, 6,700 francs sur une appréciation
de 7,000 francs. •
Bords de l'Oise, étude par Daubigny, demande 10,000 francs,
payé 9,500 francs.
L'Ile des Amours, par Diaz, 17,500 francs sur une demande
de 20,000 francs.
Ophélie, par le même, vendu 4,400 francs, sur une appréciation
de 7,000 francs.
Paysage, étude par Jules Dupré, 4,100 francs sur une demande
de 3,000 francs.
L'Enlèvement, du même, 7,500 francs.
Charles Jacque, Berger et son troupeau, 5,000 francs sur une
demande de 4,500 francs.
Th. Rousseau, Les Marais, démandé 18,000 francs, adjugé
16,200 francs.
25
— 370 —
Pêcheur levant ses filets, par le même, 27,400 francs sur une
demande de 25,000 francs.
La Confidence, par Roybet, demandé 8,000 fr., vendu 6,800 francs.
Ziem, La Douane, 6,000 fr., sur une appréciation de 4,500 francs.
— Le département de la sculpture du Louvre, au Musée moderne,
vient de s'enrichir d'une très intéressante pièce du XVIrne siècle.
C'est une statue de la Vierge que l'on s'accorde à attribuer à Germain
Pilon. Elle provient du château d'Ecouen et avait été déposée en 1815
en même temps que douze médaillons en marbre représentant des
figures d'apôtres, dans l'église Notre-Dame de Versailles, par le
comte de Pradel, alors ministre de la maison du roi.
Ce chef-d'œuvre était resté jusqu'à ces derniers temps dans une
chapelle de cette église, connu seulement de quelques amateurs et
des fidèles qui lui avaient voué un culte particulier.
Le Ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts vient
d'ordonner son transfert au Louvre : il a décidé en même temps
qu'un moulage de cette statue serait accordé à titre de compensation
au conseil de fabrique de Notre-Dame de Versailles, ainsi qu'une
des meilleures œuvres de Demesmay, le sculpteur mort récemment :
La Vierge et l'Enfant Jésus.
Ce groupe était depuis de longues années relégué dans un atelier
du dépôt des marbres.
— En grattant l'épais badigeon qui recouvrait les murs de l'an-
cienne église de Damme près de Bruges, on a découvert des pein-
tures à la détrempe.
Voici ce qui résulte du rapport de M. Naert, architecte, inspecteur
provincial à la Commission des Monuments :
Sous certaines fenêtres des chapelles latérales de l'église de
Damme règne une suite d'arcatures en plein cintre.
En grattant le badigeonnage d'une de ces parties on a mis à nu
des restants de fresques très détériorées.
Sous une arcade, on voit un Evêque: sous la seconde, un Pape,
sous la troisième un personnage qu'on suppose être saint Norbert ;
sous les trois ou quatre arcs suivants, se remarque saint Martin à
cheval coupant son manteau.
Le crépis de la partie inférieure du mur étant enlevé depuis long-
temps, il ne reste plus que les bustes des personnages. L'église de
Damme ayant été agrandie au XIVme siècle, ces peintures datent
probablement de cette époque.
— 371 -
On suppose que l'église a été polychromée entièrement. On fera
des recherches pour retrouver ce qui pourrait en exister encore.
— Des fouilles importantes faites ces jours-ci à Saint-Cénery-le-
Géret, dans l'Orne, sur l'emplacement des tours du vieux château,
ont amené la découverte d'une chapelle souterraine, composée de
plusieurs caveaux, où l'on a trouvé une trentaine de squelettes, un
monceau de têtes coupées, des poteries, des pierres sculptées et un
assez grand nombre de pièces de monnaie à l'effigie de Charles V et
de Charles VII. Ces fouilles se poursuivent avec activité, car on a
reconnu que la chapelle mise à jour avait plusieurs étages.
— Une découverte intéressante vient d'être faite dans la rivière
du Cher, à Valette (Loir-et-Cher). Il s'agit d'une barque faite d'un
seul morceau, ayant 6 mètres de longueur sur 70 centimètres de
largeur. Cette barque, dont l'origine préhistorique n'est pas dou-
teuse, a été creusée dans un chêne avec un outil tranchant dont on
aperçoit encore les traces. Les deux extrémités, taillées en biseau,
sont relevées ; le fond, consolidé par deux contreforts réservés dans
la masse, est perforé de trois trous hermétiquement bouchés au
moyen de chevilles en bois.
— Les fouilles que, sur les indications très précises de M. Doppler,
archiviste de la ville, on vient de faire dans l'église de Saint-Servais,
à Maastricht, sont couronnées d'un plein succès.
On vient de déterrer le sarcophage de l'évêque Saint-Monulphe, le
fondateur et l'architecte de notre antique collégiale, mort vers l'an
599 et enterré au milieu de l'église.
Le sarcophage, en pierre de sable, mesurant 2m07 de long, 0m67 de
hauteur 0m74 de large à la tête, et 0m53 de haut sur 0m42 de large
aux pieds, est d'une conservation parfaite. L'épaisseur des parois
toutefois, n'est que de sept centimètres.
A la base, il est de cinq centimètres plus court qu'à la partie
supérieure; cette différence réside dans l'inclinaison de la paroi infé-
rieure, la paroi supérieure de même que les parois latérales étant
verticales.
Les côtés de la tête et des pieds du sarcophage sont ornés de zig-
zags et de figures méandriques d'un dessin tellement barbare et
rudimentaire, qu'à eux seuls ils donneraient une preuve irrécusable
de la haute antiquité du monument.
Seul le couvercle, haut de 0m40 à sa partie supérieure, convexe et
— 372 —
évidé, est brisé en différents morceaux, dont la moitié a été retrouvée
en place et pourra être rajustée et restaurée.
Quoique le lieu de la sépulture primitive de Saint-Monulphe fût
de tout temps connu, de même que le transfert de ses reliques dans
l'autel de la crypte en l'an 1039, l'honneur revient à l'infatigable
chercheur M. Doppler, d'avoir indiqué avec une entière certitude,
que, d'après les actes capitulaires de 1622 et 1628, lors de l'exhuma-
tion des reliques et de la démolition de l'autel, le sarcophage avait
été enterré et devait se trouver sous la grande pierre commémora-
tive au milieu de l'église.
C'est là que nous venons de mettre au jour le vénérable monument,
qui dans la grande niche à côté de l'autel de la crypte trouvera sa
place définitive, mieux appropriée à son caractère éminement sacré
et à sa haute valeur archéologique.
Une inscription lapidaire mentionnera les déplacements successifs.
Un second cercueil vient d'être découvert à côté de celui de
l'Évêque Saint-Monulphe. -Il n'y a aucun doute, que ce soit celui de
son successeur sur le siège épiscopal de Maestricht, Saint-Gontulphe,
qui, selon la tradition historique, fut enterré à côté de son prédé-
cesseur, et dont la fête patronale se célèbre le même jour de l'année.
(Courrier de la Meuse.)
— Herman Kestner, petit-fils de Werther's Lotte, vient de mourir,
à Hanovre, à l'âge de 80 ans. Archéologue et cultivant lui-même les
Beaux-Arts, il fit don, en 1884, à la ville de Hanovre des antiquités
romaines et italiennes qu'il avait héritées de son oncle, ministre-
résident de Hanovre à Rome.
Il ajouta un capital pour l'entretien de la précieuse collection.
Ces objets d'art réunis au cabinet Euleman forment le Kestner-
museum.
Herman Kestner avait reçu le titre honorifique de bourgeois de
sa ville natale et jusqu'à la fin de sa vie il s'occupa de ses études
favorites sur les antiquités. Son costume et ses allures lui donnaient
l'extérieur d'un homme de l'ancien temps.
— La famille de Rothschild a fait acheter à Petersboroug la
fameuse horloge historique fabriquée par Louis XYI. Cette horloge,
que les propriétaires de Milton-Hall, dans Northamptonshire»
s'étaient transmis de génération en génération a été adjugée aux
Rothschild pour la bagatelle de 30,000 livres sterling, soit 840,000 fr.
Cette pendule historique, qui a 14 pieds de hauteur, avait été
offerte jadis en cadeau de noces à la comtesse Fitzwilliam.
373 —
La diplomatie française et la succession-' d'Espagne, par
A. Legrelle1. —On sait que la succession au trône d'Espagne a
donné lieu à de nombreux démêlés, dont l'histoire occupe une longue
période d'années, féconde en péripéties de la plus haute portée.
C'est sur cette question si importante, qualifiée par Mignet :
l'événement le plus considérable dans le siècle le plus célèbre, que
M. Legrelle se propose d'écrire quatre volumes dont nous donnons
à l'avance le canevas. Le premier est tout entier consacré au
premier dés trois traités de partage, celui que Louis XIV conclut
avec l'Autriche en 1668, ainsi qu'au progrès de la mésintelligence
fatale qui le rendit caduc de très bonne heure. Le second volume
traitera du second tyaité de partage, le premier de ceux que la
France signa avec l'Angleterre et la Hollande, le 11 octobre 169s, et
s'étendra jusqu'à la catastrophe imprévue qui en empêcha l'exécu-
tion. Un troisième volume correspondra au troisième traité de
partage, celui du 25 mars 1700, concerté entre les trois mêmes puis-
sances et annulé en fait, d'abord par le testament de Charles II, pris,
par l'acceptation de ce testament au nom du duc d'Anjou. Dans un
dernier tome intitulé « solution » on verra les négociations qui
nouèrent et dénomVent la coalition de 1701, pour aboutir aux traités
d'Utrecht, de Radstadt et de Bade, base de l'équilibre européen
pendant une grande partie du XVIIIe siècle.
Nous avons le premier volume sous les yeux. L'auteur dans son
introduction nous donne la bibliographie raisonnée des sources et
des ouvrages qui traitent de la succession d'Espagne. Il en entré-
prend ensuite l'histoire diplomatique, 'racontant dans les détails,
l'origne du conflit, le non-paiement de la dot de la femme de
Louis XIV, qui devait annuler la renonciation de celle-ci à tous ses
droits. La naissance d'un héritier au roi d'Espagne paraissat devoir
changer ces dispositions, mais, dit l'auteur « la question de la succes-
sion d'Espagne naquit au moment même où la naissance de l'en fan I,
Carlos semblait précisément en prévenir l'éclosion, et ce fut avec
lui qu'elle rentre de plain pied dans l'histoire, pour n'en sortir, pour
son malheur, que fort longtemps après lui. » Louis XIV se trouve
1 La diplomatie française et la succession d'Espagne, t. I ; Le
premier traité de partage (1659-1697), par A. Legrelle, docteur
ès-lettres. Gand, imprimerie de Dullé-Plus; Paris, librairie Cotillon.
18S8.
— 374 -
vers les Pays-Bas, vers l'Autriche, vers n'importe qui; l'Espagne
refuse d'annuler la renonciation, le roi de France s'entend avec la
Hollande, et règle avec elle un traité de partage des Pays-Bas, qui
effraie sa partenaire. Nous entrons alors dans une nouvelle phase, et
la question de l'hérédité des Pays-Bas se sépare donc de la succession
d'Espagne. Philippe IV mort, Louis XIV conclut le fameux traité de
partage avec l'Autriche et s'empare de la Flandre, que le traité
d'Aix-la-Chapelle lui conserve.
M. Legrelle passe après cela aux suites du traité de partage et à la
guerre avec la Hollande qui eut pour conséquence la paix de
Nimègue. Nous assistons ensuite aux critiques relatives à l'éléva-
tion et au mariage de l'électeur de Bavière»; puis vient la ligne
d'Augsbourg contre la France, la guerre qui s'en suivit, la nouvelle
renonciation de Louis XIV, et la paix de Ryswyck.
M. Legrelle suit pas à pas le travail de la diplomatie, cite et repro-
duit de nombreux documents dans le cours de son ouvrage, et
entr'autres instruments imprimés dans l'Appendice, nous trouvons
le traité de partage avec l'Autriche, rédigé en latin, qui pour nous
a le plus d'intérêt.
La mine qu'exploite M. Legrelle est féconde, et il traite son
sujet en homme qui le possède ; nous lui souhaitons de mener à bien
sa vaste entreprise.
Emile V.
Académie royale de Belgique. — Concours pour 1891. —
Première question. — « Quelle a été en Flandre, avant l'avènement
de Guy de Dampierre, l'influence politique des grandes villes, et de
quelle manière s'est-elle exercée ? »
Deuxième question. — « Faire l'histoire de la littérature française
en Belgique, de 1815 à 1830. »
Troisième question. — « Quel est l'effet des impôts de consom-
mation sur la valeur vénale des produits imposés? En d'autres
termes, dans quelle mesure ce genre d'impôts pèse-t-il sur le consom-
mateur?
« Exposer et discuter, à l'aide de documents statistiques, les
résultats des expériences récemment faites à cet égard en divers
pays, et plus spécialement en Belgique. »
Quatrième question. — « On demande une étude critique sur les
Vies de saints de l'époque carlovingienne, depuis Pépin le Bref
jusqu'à la fin du Xe siècle.
— 375 —
L'auteur ne s'attachera qu'aux Vies présentant un intérêt histo-
rique. »
Cinquième question. — « Faire, d'après les résultats de la gram-
maire comparée, une étude sur le redoublement dans les thèmes
verbaux et nominaux du grec et du latin. »
Sixième question. — « On demande une étude sur les divers
systèmes pénitentiaires modernes considérés au point de vue de la
théorie pénale et des résultats obtenus. »
Septième question. — « On demande une étude sur les mystiques
des anciens Pays-Bas (y compris la principauté de Liège), avant la
réforme religieuse du XVIe siècle : leur- propagande, leurs œuvres,
leur influence sociale et politique. »
Les concurrents accorderont une attention toute particulière à
Jean Ruysbroeck.
Mille francs pour la septième question et huit cents francs pour
chacune des autres questions.
Les mémoires en français, en flamand ou en latin devront être
adressés, avant le 1er février 1891, à M. J. Liagre, au Palais des
Académies.
Concours pour 1892. — Première question. — « Apprécier d'une
façon critique et scientifique l'influence exercée par la littérature
française sur les poètes néerlandais des XIII0 et XIV0 siècles. »
Deuxième question. — « Étude sur les humouristes et les pamphlé-
taires en langue française en Belgique, de 1800 à 1848. »
Troisième question. — « Étudier au point de vue historique et au
point de vue dogmatique, la nature et les effets des traités de garantie,
et spécialement des traités qui ont pour objet la garantie, par un ou
plusieurs États, du territoire, de l'indépendance, de la neutralité d'un
autre État. s>
Quatrième question. — « Montrer comment l'Espagne, par sa diplo-
matie et par ses armées, a combattu la politique de la France aux
Pays-Bas, de 1635 à 1700. »
Cinquième question. — « Exposer, d'après l'ensemble des textes,
quelle était la position des comtes dans le royaume franc, depuis Glovis
jusqu'au traité de Verdun ; établir leurs rapports avec le roi, avec le
clergé et avec la population germanique et gallo-romane. »
Sixième question. — « Faire l'histoire et la statistique des caisses
d'épargne en Belgique. Exposer leurs diverses opérations et les résul-
tats obtenus, surtout au point de vue de la classe ouvrière. »
— 370 —
Mille francs, pour la troisième et la sizième question, et six cents
francs pour chacune des quatre autres questions.
Les mémoires devront être adressés, avant le 1er février 1892, à
M. J. Liagre, secrétaire perpétuel, au palais des Académies.
Prix Teirlinck. — « Faire l'histoire de la prose néerlandaise avant
Marnix de Sainte- Aldegonde. » Prix : mille francs. — Le terme expi-
rera le lor février 1891.
Prix De Keyn. — La Classe des lettres rappelle que la « première
période du sixième concours annuel » pour les prix Joseph De Keyn
sera close le 31 décembre 1890.
' Cette période, consacrée à l'enseignement du premier degré, com-
prend les ouvrages d'instruction, ou d'éducation primaire.
Prix de Stassart. — « Notice » consacrée à la vie et aux travaux
de « Lambert Lombard, » peintre et architecte à Liège (1506-1566).
Prix : mille francs. — Le délai expirera le 1er février 1892.
Grand prix de Stassart. — « Faire l'histoire du conseil privé aux
Pays-Bas, à partir de son origine jusqu'en 1794 ; examiner les attri-
butions de ce corps, ses prérogatives et sa compétence en matière
politique, d'administration et dejustice. » Prix : trois mille francs. —
Le délai expirera le 1er f éviter 1894.
Prix de Saint-Génois. — Mémoire en flamand sur : « Caractériser
l'influence exercée par la Pléiade française sur les poètes néerlandais
du XVIe et du XVIIe siècle. » Prix : mille francs. — Le délai expirera
le 1er février 1897.
Prix de Littérature flamande dit Antoon Bergmann. — « His-
toire, en néerlandais, d'une ville ou d'une commune de la province
de Brabant (arrondissement de Nivelles excepté) et comptant au
moins « cinq mille » habitants. Pz"ix : mille francs. — Délai: 1er fé-
vrier 1897.
Prix Castiau. — La quatrième période du prix sera close le
31 décembre 1892.
« Sur les moyens d'améliorer la condition morale, intellectuelle et
physique des classes pauvres. » Prix : mille francs. — Délai : 31 dé-
cembre 1892.
377 —
Le Psautier de Guy de Dampierre,
XIIIe SIECLE
Le psautier classé sous le n° 10607, à la Biblio-
thèque de Bourgogne, provient de l'ancienne mai-
son des Jésuites à Anvers, ainsi que cela résulte
d'une indication manuscrite faite sur le premier
folio ' .
Ce psautier 2 contient 244 folios. L'écriture
gothique est très mignonne d'aspect et fort régu-
lière. Il est regrettable qu'un relieur maladroit de
la fin du XVIe siècle ait jugé à propos de rogner ce
manuscrit au point d'empiéter sur plusieurs mar-
ges, qui se distinguent par leur décoration pitto-
resque. Le manuscrit conserve encore plusieurs
morceaux de crêpe syrien3 qui ont servi de gardes
aux enluminures.
* Domus prof. S. J. Antv.
* Par testament du 15 avril 1299. Archives départementales du
Nord, Fonds de la chambre des comptes de Lille : B 433, n° 4181.
Guy remet ses joyaux entre les mains de ses exécuteurs testamen-
taires. Mais il y a lieu de remarquer qu'il n'est pas fait mention
de manuscrits.
3 Je connais plusieurs exemples de l'emploi du crêpe comme
garde. Le Glossaire de Gay mentionne p. 494 un exemple curieux
2Q
— 378 —
A quelle époque remonte cet intéressant chef-
d'œuvre ?
Les auteurs du catalogue des manuscrits de la
Bibliothèque royale lui assignent le deuxième tiers
du XIIIe siècle. Mais les constatations que j'ai
été amené à faire, ne me permettent pas d'adopter
ce classement. Il faut donner à ce manuscrit une
date plus récente, ainsi que le lecteur pourra bien-
tôt s'en convaincre.
Les éléments fournis par la paléographie sont
insuffisants pour arriver à la détermination de
l'époque où il a été fait, tandis que le costume
civil, les motifs architectoniques trahissent la
seconde moitié du XIIIe siècle; la pièce de ren-
fort aux genoux qu'on remarque dans le costume
de plusieurs guerriers annonce un progrès dans
l'armement, lequel recevra plus tard un accroisse-
ment typique par l'adjonction de l'ailette. Mais il
n'y a là toutefois aucun indice qui date le manus-
crit d'une façon précise.
Par bonheur, les écus armoriés qui rehaussent
les enluminures, fournissent des renseignements
précis, tant sur le manuscrit en lui-même, que
sur son ancien propriétaire l .
Les extrémités de la miniature du folio 7 v° sont
occupées par des médaillons circulaires inscri-
de crêpe polychrome appartenant à la bible de Théodulfe, conservée
au Puy ; le fragment de feu M. le chanoine Van Drivai reproduit
dans l'ouvrage précité et qui est daté du XIIIe siècle se présente
avec le même aspect que celui du psautier de Guy de Dampierre.
J'avais déjà signalé, dans une communication faite le 16 juin 1888,
le nom du propriétaire du manuscrit.
» Voir Annales de la Société d'Archéologie de Bruxelles, t. II, p. 74,
— 379 —
vant des écus armoriés appartenant à la famille
comtale de Flandre. Étant donné que le manus-
crit remonte certainement à la seconde moitié du
XIIIe siècle, il n'a pu appartenir qu'à Guy de
Dampierre, comme on pourra s'en rendre compte
par les armoiries ci-dessous décrites :
1 . de Flandre plein d'or au lion de sable ;
2. de Flandre brisé d'un lambel de gueules;
3 . de Flandre brisé d'un bâton de gueules ;
4. de Flandre brisé d'une bordure engrêlée de
gueules ;
Puis au folio 8 verso : de Flandre couronné de
gueules en signe de brisure.
L'écu n° 1 appartient à Guy, comte de Flandre;
l'écu n° 2 à Robert de Béthune, son fils aîné; l'écu
n° 3 à Guillaume, frère de Robert; l'écu n° 4 à
Baudoin frère de Robert et de Guillaume; l'écu
n° 1 du folio 8 à Jean de Namur, frère des princes
ci-dessus mentionnés.
Au folio 84 verso, on retrouve les armes de Guy
entre celles de ses deux fils Robert et Guillaume.
Comme on le peut voir, l'enlumineur a observé
rigoureusement l'ordre des naissances dans le pla-
cement des armoiries. Cette scrupuleuse exacti-
tude permet de supposer que le livre a été fait sur
commande, car aucun détail n'a été omis.
La concordance des armoiries du psautier avec
celles des sceaux des personnages précités est par-
faite.
On m'objectera peut-être que cette concordance
ne pourrait être qu'apparente puisque les anciens
sceaux n'indiquent pas les émaux. Une telle coïn-
— 380 —
cidence, il faut en convenir, serait tout au moins
étrange.
M. Van Malderghem ' a étudié un rôle d'armes
de la fin du XIIIe siècle, renfermant des éléments
qui dissipent les doutes qu'on serait tenté d'élever
sur cette question.
Le manuscrit est postérieur à 1280, car il ne
contient pas les armoiries de la comtesse Mar-
guerite qui y auraient certainement figuré, et
antérieur à 1298, date de l'avènement de Jean de
Dampierre à la couronne comtale de Namur. A
cette occasion, il surbaissa ses armes d'un bâton
de gueules.
Un autre événement historique ne permet peut-
être pas de faire remonter la confection du manus-
crit antérieurement à la date de 1297. En effet,
cette année fut marquée par la canonisation de
Louis IX par le pape Boniface VIII. Or l'omission
du nom du saint roi de France dans le calendrier
me semblerait au moins surprenante.
En effet, ce calendrier appartient au Nord de la
France actuelle, et peut être à la contrée de Saint-
Omer, car on y retrouve le nom de divers saints
locaux, tels que : Saint-Berthin, Saint-Vinocq et
naturellement Saint-Omer.
D'autre part saint Louis n'était pas inconnu
dans cette contrée. En effet, il était venu en pèle-
rinage au sanctuaire de N.-Dame des Miracles à
1 M. Van Malderghem fera bientôt connaître ce précieux docu-
ment ; je saisis l'occasion de remercier le savant héraldiste pour
les renseignements qu'il m'a fournis. J'ai reçu également d'utiles
données de MM. les comtes Th. de Limburg Stirum et M. Maurin
de Nahuys, je les prie d'agréer l'expression sincère de ma gratitude,
— 381 —
Saint-Omer, ainsi que le rappelle une inscription
moderne de la cathédrale de cette cité ' . L'enlumi-
neur, selon toute vraisemblance, ne devait pas
être bien éloigné du manuscripteur clerc ou laïque.
Or cet ingénieux artiste paraît très bien connaître
les ordres mendiants. Dans son illustration si variée
je rencontre un trait charmant de la légende du
patriarche d'Assise : saint François prêchant à
des cigognes. Étant donné que Louis IX apparte-
nait au Tiers- Ordre franciscain, nul doute que le
copiste se fut dispensé d'inscrire le nom du pieux
monarque dans le calendrier. Plus loin, on peut
voir une prieure dominicaine.
Si l'enlumineur a représenté fidèlement les cos-
tumes militaires, il a dû le faire antérieurement
à l'apparition de l'ailette 2. Car on ne voit aucune
1 La tradition d'une visite de saint Louis au sanctuaire de Notre-
Dame des Miracles est très vivace, mais on ignore sur quel fait
précis, elle s'appuie. On lit cependant dans un manuel de dévotion
pour le pèlerinage, le passage suivant : L'on est heureux d'avoir
retrouvé la preuve écrite que Louis IX vint avec sa pieuse Mère, la
Reine Blanche, vénérer Notre-Dame des Miracles de Saint-Omer en
1231 et que le saint roi y retourna à deux époques ultérieures. »
Les documents, les pièces écrites font défaut. Il est à remarquer
cependant que le soubassement du portail intérieur du transept sud
de la cathédrale est décoré d'un semis de lis et de tours, et cette
circonstance est de l'avis de feu M. L. Deschamps de Pas pour
beaucoup dans la tradition qui vient d'être mentionnée.
Un doyen de la cathédrale Saint-Omer a fait placer de nos jours
dans le portail précité une inscription rappelant la visite de la Reine
Blanche et de saint Louis.
2 Les ailettes figurent dès 1280 sur le sceau de Jean Ier de Brabant.
Voir Costumes militaires belges, par Van Vinckeroy.
D'après De May, Le costume au moyen-âge d'après les sceaux ,
p. 127, l'ailette paraît pour la première fois sur le sceau de Pierre
de Chambly en 1294, et se répète sur ceux d'Othon, comte d'Artois,
en 1302, etc.
. — 382 —
trace de cette pièce de renfort dans la représen-
tation de plusieurs chevaliers. L'ailette ne semble
pas antérieure aux vingt dernières années du
XIIIe siècle. Je m'empresse d'ajouter qu'on aurait
tort d'attacher trop d'importance à ce fait. En
effet, les artistes n'ont pas toujours été d'une
rigueur extrême dans la représentation du cos-
tume. Outre que plusieurs copiaient leurs prédé-
cesseurs, d'autres se sont répétés sans tenir compte
des progrès de l'armement chez leurs contem-
porains.
Mais les données fournies par l'histoire de l'hé-
raldique permettent de fixer, à quelques années
près, l'exécution du psautier.
Il remonte au laps de temps compris entre les
années 1280, date de la mort de Marguerite de
Constantinople, et 1298, époque de l'avènement
de Jean de Dampierre, comme comte de Namur.
L'enlumineur du psautier est inconnu; mais
n'est-on pas en droit de le considérer comme appar-
tenant à cette pléiade d'artistes du Nord de la
France, qui unissaient déjà l'humour des Fla-
mands, au style, cet apanage du génie français?
Du reste le calendrier permet de supposer que
le manuscrit a vu le jour dans nos contrées, ou
dans les pays limitrophes qui faisaient naguère
partie de la Belgique. Je relève dans les litanies
et le calendrier, les noms des saints suivants :
Lambert, Christophe, Quentin, Nicaise, Biaise,
Amand, Nicolas, Remtj, Germain, Vaast, Vinnocq,
Berlin, etc.
— 383
II
Avant d'aborder la description du manuscrit,
il y a lieu d'observer qu'il ne constitue pas un livre
d'heures, mais un psautier proprement dit auquel
a été joint le Magnificat, le Nunc demittis le sym-
bole de Saint-Athanase : quicumque vult salvns esse
ante omnia opus est ut teneat catholicam fidem et
enfin les litanies des saints.
Les miniatures ayant trait à la vie de J.-C. sont
placées au commencement du livre en manière
d'album pieux. Elles ne pouvaient être dissémi-
nées, car elles ne commentaient pas le texte,
tandis que dans un livre d'heures, les « histoires »
qui retracent la vie de J.-C. ou des saints, se
trouvent en face de la prière ou de l'office qui leur
est propre.
Dans la plupart des psautiers et des autres
livres liturgiques, la miniature est un écho du
texte; dans le présent manuscrit, je trouve seule-
ment deux reproductions de sujets traditionnels :
le fol muni de son inséparable marotte en regard
du psaume, commençant par les mots : Insipiens
dixit in corde suo non est Deus. Une lettrine nous
montre, au psaume débutant par les mots Cantate
Domino canticum novum, des prêtres revêtus de
chapes et chantant.
Le Calendrier. — Les illustrations des calen-
driers des livres d'heures constituent un des objets
les plus intéressants que le moyen- âge nous ait
— 384 —
légués. Elles apparaissent tout d'abord, sous leur
forme fort laconique : un ou deux personnages
dans un médaillon ou sous une arcature à fond
d'or. Plus tard ce modeste décor sera abandonné
pour faire place à une ébauche de paysage; la
perspective à peine pressentie, s'accuse timide-
ment, puis s'affirme avec un certain éclat. Le
XIVe siècle s'est à peine écoulé que des artistes
tels que Pol de Limbourg et ses frères créeront
des paysages se recommandant par des qualités
les plus sérieuses.
Mais il sera réservé aux artistes de Gand et de
Bruges et en particulier aux Horenbout et aux
Bening de multiplier avec une fécondité qui dé-
concerte des sujets de genre pris sur le vif.
Janvier. — Un homme tourne le dos à l'âtre égayé par
un feu des plus vifs. Il emplit une coupe sans pied; en
dehors de la pièce, un tonneau est placé sur un chantier.
Voilà une image très nette de bien-être matériel. C'est bien
le dos au feu et le ventre à table qui caractérise le penchant
intime de l'homme pour ses aises... et les satisfactions des
sens.
Février. — Une femme tenant un cierge debout devant
un prie Dieu. Allusion à la fête de la Chandeleur.
Mars. — Un homme émonde un arbre.
Avril. — Un homme tient des fleurs dans chaque main.
Plus tard cette simple indication sera remplacée par une
scène favorite à l'art médiéviste. Un damoiseau et une
damoiselle seront en train de faire la cueillette des pre-
mières fleurs tout en devisant; sur d'autres miniatures, on
les voit, les fleurs en main, former un couple charmant.
Mai. — Voici le chasseur sur un cheval gris pommelé ;
- 385 -
plus loin ses deux chiens l'un blanc, l'autre rouge ver-
millon. Il agite ses gants dans la direction d'un faucon qui
fond sur une spatule.
Juin. — Un bûcheron portant un fagot. La hache est
encore au pied du tronc, l'arbre conserve un rameau.
Juillet. — Un homme fauche l'herbe à l'aide de la grande
faux encore en usage de nos jours.
Août. — Un moissonneur se sert de la faucille pour cou-
per des épis de seigle qui dépassent de beaucoup sa stature.
Septembre. — Un semeur.
Octobre. — Un homme foule le raisin dans une cuve,
tandis qu'un vigneron cueille des grappes qui se trouvent
suspendues au-dessus de la tête de son compagnon de
travail.
Novembre. — Un homme monté sur un chêne abat des
glands qui sitôt tombés sont mangés par deux porcs. Un
porcher, un gros bâton à la main s'apprête à lancer celui-ci
dans les branches de l'arbre.
Décembre. — Un homme abat avec une cognée un porc
couché devant lui.
Toutes les miniatures à pleine page se pré-
sentent entourées d'un cadre orné de feuillages,
aux quatre extrémités duquel sont placés des
médaillons, posés en saillie, et contenant un écu
armorié.
Une arcature simple ou double reposant sur des
colonnettes couronne chaque scène ; de petites
tours, des édicules peints en vert, en vermillon, etc. ,
s'appuient sur les rampants du gable.
Toutes les miniatures à pleine page sont peintes
sur lamelle d'or ; le champ de quelques-unes d'entre-
elles est agrémenté d'un losange ou d'un quadrillé
très légèrement traités.
- 386 —
1. L' Annonciation. — Une colonne supportant une
double arcature sépare l'ange de la Vierge. Celui-ci à
gauche, debout, tient un philactère vide ; Marie également
debout fait un geste d'étonnement. Le saint Esprit sous la
forme d'une colombe plane au-dessus de sa tête.
2. La Nativité. — La Vierge est représentée assise dans
son lit, tenant l'enfant Jésus sur ses genoux. Saint Joseph,
un vieillard à barbe blanche, coiffé du chapeau pointu tradi-
tionnel, sommeille appuyé sur son bâton. Un ange se dirige
vers la Vierge. Dans le fond, au dessus de la crèche vide,
posée sur un mur peu élevé se trouvent le bœuf et l'âne;
une courtine relevée est attachée sur le côté.
3. Naissance du Christ annoncé aux 'pasteurs. — Un ange
nimbé, tenant un philactère vide, s'adresse à un berger
assis et s'appuyant sur son bâton ; en face, se trouve un
autre pasteur, monté sur des échasses très basses et retenus
aux jambes par des lanières; il tient une cornemuse dont il
se dispose à jouer.
Entre les deux personnages est assis un chien de berger,
d'un dessin correct, mais... peint en vermillon. A l'avant-
plan défile le troupeau composé d'un bélier, de moutons,
de chèvres. L'enlumineur, comme on pourra le voir à la
planche ci-jointe, n'a pas tenu compte de la taille des divers
animaux, tandis qu'il en a très bien observé le caractère.
4. IS Adoration des Mages. — H y a ici deux scènes par-
faitement distinctes, mais le miniaturiste n'a pas commis la
moindre confusion. Un ange montre à deux Mages, l'étoile
qui doit les guider. Le troisième Mage, un vieillard chauve
à barbe grise, le genou en terre, baise le pied de l'enfant
Jésus qui tient en main un panier dont il vient de lui faire
don. La Vierge a la tête ceinte d'une couronne ; elle porte
un robe de drap d'or. C'est une des scènes les mieux inter-
prétées du Psautier.
5. Massacre des innocents. — Dans un cadre orné d'une
>
T.
H
SB
C
-
K
n
o
-
-
00
©
r
CD
•a
23
C
<-*
rb"
*i
Cl
CD
0
e
*<
a
CD
0
03
CD
0)
X
V)
o
HT
— 387 —
double arcature trilobée, on voit Hérode couronné, et assis
sur son trône, le pied sur un escabeau. Un soldat, tient en
main l'enfant qu'il vient d'arracher à sa mère. Celle-ci dans
son désespoir, a saisi l'extrémité du glaive, mais le soldat la
repousse du pied. Derrière lui, un bourreau vient d'embro-
cher un enfant et en tient un autre dans les plis de son
vêtement. Une mère prosternée contre terre couvre de ses
baisers le corps de son nourrisson.
6. Grand B., appartenant au commencement du psaume.
Beatus vir qui non abiit in consilio impiorum.
Dans la première boucle de la lettre est représentée la
fuite en Egypte. La sainte Vierge qui est nimbée dépose
un baiser sur l'enfant Jésus. Saint Joseph coiffé du bonnet
pointu, guide la mère et l'enfant. Dans la boucle d'en-bas,
J.-C. monté sur un âne fait son entrée à Jérusalem. A la
porte on voit un homme qui étend sa tunique et on en aper-
çoit un autre sur un arbre.
Dans les rinceaux qui se déroulent ornés eux-mêmes de
ci de là de têtes en guise de nœuds, on est tout étonné
d'apercevoir un écureuil qui a l'air de s'entretenir avec un
héraut; plus loin c'est un chien blanc, puis un petit monstre
à figure humaine coiffé d'une mitre. En bas du folio, le
peintre a mis en face deux petits bonhommes, la rondache
au bras, l'épée au poing et prêts à s'élancer l'un contre
l'autre.
Folio 43. — A l'endroit débutant par un D. (Dominus
illuminatio meà), l'enlumineur nous montre un soldat s'ap-
prêtant à trancher la tête à saint J. -Baptiste, qui est h
genoux sur le seuil de la prison. Dans l'encadrement pit-
toresque de cette page apparaissent Hérode... plus bas
Salomé jouant de la harpe, et enfin sa mère Hérodiade.
Folio 44. — La flagellation. — Miniature à pleine page.
J.-O. attaché à la colonne sur laquelle repose la double
arcature de l'encadrement. Un nègre au sourire cruel et un
— 388 —
bourreau au visage blanc le frappent de verges. Le type du
nègre est particulièrement bien observé.
Folio 65. — Dans l'intérieur d'un grand D, on aperçoit
saint Martin sur un cheval gris pommelé, coupant son
manteau pour le donner à un mendiant.
Un D. Dixit insipiens (ps. III), est représenté par le
martyre de saint Pierre, la tête en bas. On y remarque
également un nègre.
Folio 83 présente une lettrine fort curieuse qui renferme
peut-être une allusion plus ou moins directe au texte. Dans
une lettre quid gloriaris in malicia qui potens es in iniqui-
tate : Un roi s'entretient avec un monstre ventru, dont le
corps est peint en vermillon et la tête... en bleu. Serait-ce
là une allusion au texte précité ?
Folio 103. — Lettrine. Martyre de saint Laurent. Celui-ci
est étendu sur le gril. Un feu très vif enveloppe ses mem-
bres. Deux bourreaux au regard torve s'aidant de deux
fourches empêchent la victime de se soulever de son lit de
torture.
Folio 104. — Grand M. — Notre Seigneur tenant la croix
de la résurrection apparaît à Marie-Madeleine. Le jardin
où d'après la tradition la scène s'est passée est indiqué par
un arbre.
Folio 128. — Grande miniature. — Notre Seigneur s'ap-
puyant sur la croix de la résurrection, marchant sur la tête
du monstre infernal, emmène des limbes, lésâmes des justes.
On aperçoit dans le nombre Adam et Eve. Deux diables
peints en couleurs voyantes, armés d'un double croc, se
tiennent au rez-de-chaussée et à l'étage du castel infernal.
Cette petite scène est dessinée avec autant de verve que
d'énergie.
Dans un grand E initial. Exultate Domino deo adjutore
nostro. Trois juifs lapident saint Etienne. En dessous on
aperçoit Saul qui tient les habits des bourreaux.
É
f|t!' |
ç MES* g «s
c
S,
O
7;
X
•i-H
C5
Q
T3
>>
0
a)
o
-t->
CO
03
Dh
<D
o
r.
co
P
a
j
M
D
O
K
O
W
U
z
w
5
c
c
■<
en
co
— 389 —
Folio 149. — Grande miniature. — Saint Thomas ù
genoux tenant un livre, met la main dans le côté de J.-C
qui tient la croix de la résurrection.
Cantate Domino canticum novum trois prêtres chantent
au lutrin ; voir notre planche.
Folio 175. — Grande miniature. — Ascension sous une
arcade trilobée, la sainte Vierge au milieu des apôtres.
Parmi les assistants règne le plus vif émoi, à la vue de J.-C.
dont le corps disparaît enveloppé par la nue.
Folio 174. — Lettre D. — Dixit Dominus domino meo.
Néron fait décapiter saint Paul.
Beaucoup de psaumes commencent par des let-
trines de moyenne grandeur qui contiennent des
têtes d'hommes, de femmes, de guerriers, de saints ;
et dans un tout autre ordre d'idées des têtes d'ani-
maux, d'oiseaux, et de monstres fantastiques. Les
plus petites lettrines n'ont qu'un demi centimètre
carré.
Les encadrements sont d'un pittoresque et d'une
variété vraiment incroyable. D'abord ils n'affectent
aucune forme régulière, si j'en excepte toutefois
les miniatures à pleine page. Ils sont le fruit d'une
imagination fertile, aimant l'imprévu, variant et
multipliant les lettrines, les exécutant avec un
humour intarissable et une habileté peu commune.
Dans ces mille et une bagatelles, si je puis ainsi
parler, on ne se heurte pas à des redites. La même
idée apparaîtra vingt fois mais toujours sous un
aspect nouveau.
L'enlumineur accroche quelque monstre au corps
d'une lettrine ; la queue prend des proportions
considérables, et s'agrémente à son tour de têtes
— 390 —
étranges. Parfois les appendices de ces bizarres
lettrines s'animent d'une vie fantastique. Ici, c'est
un couple amoureux métamorphosé en monstres.
Ils n'ont retenu de leur précédent état qu'un frais
et charmant visage. Là le diable entre en scène,
brandissant son croc terrible, à la recherche d'une
victime, quœrens quem devoret!
Dans les enroulements des lettrines et les marges
des folios, s'agite tout un inonde, empruntant
son existence à la légende, aux circonstances de
la vie journalière, aux aventures de la chasse,
aux hasards de la guerre et surtout à la fantaisie
de l'artiste, toujours féconde en invention et en
caprices. Ce manuscrit nous offre le sincère reflet,
dans sa forme minuscule et naïve, de la vie et des
conceptions fabuleuses de la seconde moitié du
XIIIe siècle.
Joseph Destrée.
(A suivre.)
391 —
LE BOURREAU DE GAND
II
APPLICATION DE LA TORTURE
Le bourreau n'était pas seulement chargé de
procéder aux exécutions capitales ; c'était encore
à lui qu'incombait la mission de soumettre les
accusés à la torture. Aussi, avions-nous raison de
dire, au début de cette étude, qu'autrefois l'office
de bourreau était loin de constituer une sinécure.
L'accusé qui ne voulait pas reconnaître les faits
mis à sa charge et entraînant la peine capitale, ou
bien qui refusait de nommer ses complices, devait
inévitablement subir la question ou la torture. Les
supplices, que le bourreau lui faisait endurer, se
renouvelaient plusieurs fois à des jours ou à des
semaines d'intervalle jusqu'à ce qu'enfin le patient,
brisé par la douleur et les privations, se reconnût
coupable d'un crime qu'il n'avait peut-être pas
1 Suite. Voir Messager des Sciences histor,, 3e livr., 1890, p. 241,
— 392 —
commis. Wielant, dans sa Practijcke Criminele, dit
à cet égard :
Want dicwils bevonden es datte de patienten, uijt despa-
ratien ende uijt pijnen, liever hebbende te sterven dan de
pijne te verdragene, gekent hebben 't gunt dat zij noeijt
gedaen en hebben.
Il est vrai que l'accusé ne pouvait être soumis
une seconde fois à la torture que si de nouvelles
présomptions s'élevaient contre lui. Mais il n'y
avait là aucune garantie sérieuse pour l'accusé
puisque c'était le juge, chargé de faire appliquer
la torture, qui décidait en même temps du point
de savoir s'il y avait de nouvelles présomptions de
culpabilité.
C'était encore le pouvoir discrétionnaire du juge
qui décidait si les faits, mis à charge de l'inculpé,
rentraient dans la catégorie de ceux pour la
preuve desquels l'application de la torture était
requise. Wielant dit à ce sujet :
Oft de inditien, suspitien oft presumptien suffisant zijn
oni de banck, licht naectelijk inde discretie ende de con-
sientie vanden juge, ende is gheen regele noch leeringe
daerinne gegeven.
Nous avons déjà vu que le juge criminel avait
une latitude absolue dans le choix des supplices
à infliger aux malheureux, condamnés à la peine
capitale ou à une peine corporelle quelconque. La
même latitude lui était laissée dans l'application
de la torture. Ce pouvoir nous paraît d'autant plus
exorbitant aujourd'hui que bien des faits, tombant
sous l'application des lois pénales de ce temps, ne
— 393 —
sont nullement repréhensibles à nos yeux. Citons
encore le criminaliste gantois :
De pijnen ende tormenten worden gedaen met coorden
ende men vint niet in redite dat rnen se anders doen mach,
maer, naer de costume, worden zij diverselyck gedaen, niet
alleenlijck met coorden, maer oock met watere, met azijue,
met viere ende andersins, ter ordinantie vanden juge,' naer
de gelegentheijt van den persoone ende qualiteijt van den
persoone.
Outre les enfants en dessous de quatorze ans,
les fous et les femmes enceintes, il y avait encore
certaines personnes qu'à raison des fonctions dont
elles étaient revêtues on ne soumettait pas à la
torture, à moins toutefois qu'il ne s'agît du crime
de lèse-majesté et de haute trahison. Wielant
énumère ces personnes dans le chapitre XL de sa
Practijcke Criminele.
Les citations, que nous avons empruntées à Phi-
lippe Wielant, sont extraites des chapitres XXXV,
XXXVI, XXXVII et XL de l'ouvrage de ce savant
criminaliste. La Société des bibliophiles flamands
confia en 1872 à M. Aug. Orts le soin de publier le
Practijcke Criminele de Wielant.
Même en cas de flagrant délit, ou quand les faits
étaient clairement démontrés par les dépositions
des témoins, on soumettait encore l'accusé à la
torture, afin d'obtenir son aveu. C'est ce que Josse
Damhouder écrit au chapitre XXXVIII de son
Practijcke ende handbouck in criminele zaeken :
Zy useren in vêle plaetsen in Vlaenderen den patient die
by oirconde oft andersints duechdelicke venvonnen is, soo
— 394 —
dickwylst en soo langhe te pynene ende herpynene, totdat
hy tstick ghekent heeft.
Il n'est pas question ici, comme dans Wielant,
de nouvelles présomptions à apporter pour sou-
mettre l'accusé plusieurs fois à la torture.
La torture était infligée au condamné par le
bourreau, assisté de ses aides, en présence du
grand-bailli ou de son délégué, d'un ou de plusieurs
échevins de la Retire et d'un secrétaire. La coutume
de Gand, à l'article 5 de la rubrique XI, est ainsi
conçue :
Als men ter banck gaen ende torture doen wilt, zo ghe-
schiet 't zelve ten byzyne van den hoochbailliu, onderbailliu
ende van den collège van scepenen, ten minste zevene, met
huerlieden pensionarissen ende secretarissen ende zulcke
dienaers als 't den bailliu belieft.
Les prescriptions de cet article 5 n'étaient pas
suivies dans la pratique. Dans la chambre de tor-
ture, in den Pijnkeldere, se trouvaient ordinaire-
ment, outre le bourreau et le grand-bailli ou son
délégué, un échevin de la Heure et un secrétaire.
Quand la torture était appliquée en exécution d'un
arrêt du conseil de Flandre, au lieu d'un échevin
de la Keure, c'était un membre de ce corps judi-
ciaire qui était présent dans le Pijnkelder.
Fort peu des procès- verbaux, tenus par les
secrétaires des échevins de la Keure dans la
- 395 —
chambre de torture, sont parvenus jusqu'à nous.
On en trouve quelques-uns, antérieurs au dix-sep-
tième siècle, insérés dans le criemboeck en même
temps que le jugement de condamnation. Ceux,
qui ont été conservés isolément aux archives com-
munales, sont en très petit nombre et ne vont
guère que de 1625 à 1711. A-t-on détruit ou
déplacé les autres, c'est ce qu'il est impossible
d'établir.
Le même fait se produit, d'ailleurs, pour les pro-
cès-verbaux tenus par les secrétaires du Conseil de
Flandre. Là aussi les procès-verbaux des interro-
gatoires des inculpés, soumis à la torture, sont en
fort petit nombre.
Ces quelques procès-verbaux nous ont donc été
de peu de secours pour indiquer les diverses
variétés de tourments que le bonrreau appliquait
à Gand aux accusés qu'il devait soumettre à la
torture .
Il est presque toujours question dans ces procès-
verbaux de la question par l'eau, et d'un autre
supplice consistant à étendre les inculpés sur un
chevalet, à leur attacher les bras sur le dos et à y
pendre des poids en fer.
Voici comment ces tortures sont décrites som-
mairement dans l'interrogatoire qu'on faisait subir
à l'accusé.
Procès-verbal du 15 octobre 1630 :
Water ghegoten zynde zoo inden mont als op net herte
persisteert als voren.
Voor de tweede mael zulck noch gedaen zynde ontkent
als voren.
— 396 —
De derde mael waeter ghegoten zynde ende teecken
ghedaen liebbende omme te sprecken persisteert als boven.
Procès-verbal du 30 avril 16G4 :
De voornomde Adriaen de Jode ontcleedt wesende ende
glieset up den voornomde drypickele metten ordinairen
halsbant aanden hais ende syne twee beenen opgliebonden
aan de twee pickels van den voornomde drypickele oock
liebbende syne ooglien verblindt met eenen snuytdoeck
ende een hanghende ghewichte gebonden aen zyne handen
achter op synen rugghe.
Dans un procès-verbal du 17 octobre 1630 le
patient, après la troisième épreuve par l'eau, se
reconnaît coupable. Mais peu après il retracte
ses aveux en disant que c'est la douleur qui les lui
a arrachés « heeft ghekendt door de pyne zonder te
« weten ivat hy heeft ghekendt. » On le soumet à une
quatrième application de cet épouvantable sup-
plice et vaincu de nouveau par la douleur, l'accusé
se reconnaît une seconde fois coupable.
Et c'était sur de pareils aveux, à tous moments
retractés, que dans bien des cas les juges criminels
se fondaient pour envoyer les accusés au dernier
supplice.
Dans le Practijcke ende handbouck in criminele
zaeken de Josse Damhouder (édition de Louvain,
1545), se trouve une gravure sur bois représentant
des patients soumis à la question de l'eau. Ils sont
liés sur un banc et le bourreau leur verse de la
main droite de l'eau dans la bouche tandis que de
la main gauche il leur tient les narines fermées.
En général on plaçait un linge mouillé sur la
— 397 —
figure da patient. Ce linge l'empêchait de respirer
par les narines et laissait couler l'eau dans la
bouche. L'eau se remplaçait parfois par de l'huile
ou du vinaigre.
On y voit également une gravure représentant
l'accusé attaché, par les mains et par les pieds,
à des anneaux fixés dans la muraille et le corps
suspendu. Il a les jambes, les cuisses, la poitrine
et la tête entourées de cordes à nœuds que le bour-
reau tord, au moyen d'un bâton, de façon à les
faire entrer dans les chairs du patient. Ce supplice
par la corde à nœuds était connu sous le nom de
den Patemoster, le chapelet.
Outre les échevins de la Heure ou les membres
du conseil de Flandre, le grand-bailli, le secrétaire
et le bourreau, un médecin assistait également à
l'application de la torture. Ce médecin était chargé
de veiller à ce que le bourreau ne mit pas la vie du
patient en danger. Il devait aussi panser immé-
diatement les blessures dans le cas où celles-ci
auraient été de nature à mettre l'accusé en danger
de mort. Si l'excès de la douleur faisait perdre
connaissance au patient, que torturait le bourreau,
le médecin lui administrait un cordial pour le
remettre. Une fois revenu à lui, le malheureux
était de nouveau livré au bourreau qui continuait
sur son corps sa sinistre besogne.
Quand le patient, le corps gonflé d'eau ou cou-
vert de blessures, sortait des mains de l'exécuteur
des hautes-œuvres, il était reconduit en prison. Le
— 398 —
médecin, qui avait assisté à l'application de la
torture, venait soigner l'accusé et le guérir de ses
blessures ou tout au moins remettre celui-ci sur
pied de façon qu'il fût en état de supporter une
seconde fois et plus les atrocités nécessitées par
l'instruction de la cause.
Dans les comptes de dépenses de la prison
du Chastelette (archives communales, portefeuille
119bis, n° 1) figurent les états d'honoraires et de
débours, payés aux médecins-chirurgiens chargés
de soigner les accusés qui avaient été soumis à
la torture. Voici, à titre de curiosité, quelques
articles de l'état présenté par maître Jean d'Hondt
pour soins donnés, pendant les années 1613, 1614
et 1615, à des accusés qui avaient passé, dans le
Pijnkelder, entre les mains d'Abraham Balthazar,
exécuteur des hautes-œuvres de la ville de G and :
Specificatie vande gequetste die ic Meester Jan D'hont
ghecureert hebbe inde vanghenesse van de Chastelette
deser stede glieduerende den tydt van ontrent twee jaeren
beghinnende anno 1613 metgaders van aile de medicanien-
ten by my daertoe ghelevert.-
Den 25 november 1613 hebbe ic noeh ghemeestert Jan Hans
van de quetsueren by hem up den pynbanck ghecreghen in
twaelf diveersche partyen van syn lichaeui ende daertoe
ghevacheert den tydt van vyf weken metgaders ghelevert
aile de medicamenten daertoe van noode xxxix se. gr.
Den 14 der selve maent july 1614 hebbe ghecureert Jan
de Ruysschere vande quetsuren by hem van ghelycken up
de pynbanck in thien partyen ghecreghen ende hebbe hem
ghefrequenteert den tydt van eene maendt ende de bequaeme
medicamente daertoe ghelevert xxxiiii se. gr.
Item van de 6 may 1615 voorts den tydt van veerthien
— 309 —
daghen gheoccupeert int meesteren ende ghenesen van
quetsueren by Lieven Bollaert up den pynbanck in vier
plaetsen gliecreghen ende daertoe gliolevert de bequaeme
medicamenten xiiii se. gr.
Item den 22 jnny noch in handen ghehadt ende ghecu-
reert binnen den tydt van veertien daghen den selve Lieven
Bollaert vande quetsueren by hem in elf plaetsen up den
pynbanck gliecreghen ende daertoe ghelevert de noodelycke
medicamenten xiiii se. gr.
Ten selve daghehebbeienoch in handen ghehadt Johanne
Vauquet ende haer ghenesen vande quetsueren by haer up
de pynbanck in elf plaetsen gliecreghen ende daertoe ghele-
vert de noodtsaeckelycke medicamenten hope haer teene-
maele te ghenesen binnen twaelf daghen comt xii se. gr.
Ces blessures provenaient ordinairement soit
des coups de verges ou de lanières en cuir, soit de
la pression du Paternostèr, soit des entailles faites
dans la chair avec des pinces en fer, soit du collier
à pointes mis autour du cou.
Le bourreau, Abraham Balthazar, en fonctions
à cette époque, n'y allait pas de main morte. Nous
voyons en effet par les articles du compte, cités
plus haut, que ces malheureux, sur le corps des-
quels il s'était livré à son épouvantable besogne,
devaient souvent recevoir pendant plusieurs
semaines les soins du médecin-chirurgien.
Les deux articles de ce compte, relatifs au trai-
tement d'un certain Liévin Bollaert, nous four-
nissent l'exemple d'un accusé soumis plusieurs fois
à la torture. Le 6 mai 1615 il fut confié une pre-
mière fois aux « bons soins » de maître Abraham
Balthazar. Quand les blessures furent jugées suffi-
— 400 —
samment guéries, il fut soumis le 22 juin suivant
une seconde fois à la torture. Il reçut alors onze
blessures pour lesquelles le médecin-chirurgien
D'Hondt le soigna pendant quinze jours.
Le praticien D'Hondt n'était pas seulement
chargé de traiter les accusés, que le bourreau
Abraham Balthazar avait soumis à la torture, il *
devait également soigner tous les prisonniers du
Chastelette, malades et blessés. Dans l'état des
honoraires et débours, que nous venons de citer,
se trouve un article qui nous montre de quelle
façon barbare on traitait les gens, innocents ou
coupables, qui tombaient entre les mains de la
justice.
Il s'agit dans cet article d'un certain Jan
Symoens, blessé aux pieds et aux mains par les
cordes dont on l'avait entouré pour le conduire à
la prison du Chastelette :
Den 25 november 1613 hebbe icke ghecureert Jan Sy-
moens, den welcke alsdoen alhier in stede ghebrocht ende
ghecoort ende ghebonden in vanghenesse vande voor-
noemde Chastelette gherecommandeert wierdt ende deur
de groote forse van tbinden vande selve coorden in handen
ende voeten ghequetst was hebbende daartoe gbevachiert
den tydt van vyf daghen, ende medecamenten daertoe be-
hoefvende gelevert, comt v se. gr.
Dans deux comptes, présentés aux échevins de
la Keure par le bourreau Jean Franck , nous avons
rencontré des indications très précieuses sur le
temps que durait parfois la mise à la torture.
Un certain Pieter van Hoye fut, en 1711, sou-
— 401 —
mis à la question depuis cinq heures de l'après-
midi jusqu'à quatre heures du matin. Il y eut
probablement des intervalles, pendant lesquels les
juges procédaient à l'interrogatoire de van Hoye
et à la rédaction du procès-verbal. Il est en effet
impossible qu'une créature humaine eut pu sup-
porter pendant onze heures consécutives, sans
succomber, les tourments qu'on faisait endurer
aux accusés qui étaient « inde torture ghestelt. »
Voici, pris au hasard, trois articles de ces
comptes :
Item clen 26 maerte 1699 inde torture gestelt savonts ten
negen uren tôt ten een uren den persoon van Helena Maria
van Hele, compt £ 0-3-4.
Item den 24 september 1700 inde torture ghestelt tsa-
vons ten neghen uren ende gheseten tôt smorghens ten vier
uren den persoon van Jacobus Bruijn, compt £ 0-3-4.
Item den 9 maerte 1711 Pieter van Hoye inde torture
ghestelt van savons ten vyf uren tôt smorgens ten vier
uren, compt £ 0-5-0.
Les articles, que nous venons de citer, se rap-
portent à des cas où la torture était appliquée
pendant la nuit.
Il y avait à Gand trois endroits, Pijnkelders, où
l'on soumettait les accusés à la torture : l'hôtel de
ville, le château des comtes et la prison du Chas-
telette.
Au mois de novembre 1631 les membres du
Conseil privé firent aux échevins des observations
au sujet de cette chambre de torture de l'hôtel de
ville. Le Conseil privé demanda au Magistrat de
— 402 —
Gancl pourquoi celui-ci ne continuait pas, comme
par le passé, à se servir de la chambre de torture
du château des comtes où siégeait le Conseil de
Flandre. Ces observations furent présentées à l'oc-
casion de la mise à la torture de Joacliim Pyn,
poursuivi du chef de trahison.
Ce Joachim Pyn, qu'on désigne aussi sous le nom
de Josse Pyn, fut exécuté au marché du Vendredi
après que le bourreau lui eut coupé le poing. Sa
tête fut placée sur une tige en fer fixée dans un
bastion, appelé le Begghijnen Turre, près du Rabot.
Ce bastion, depuis nommé Joos Pynshoofd, fut
démoli en 1811.
Les échevins, par lettre du 10 novembre 1631,
répondirent que de tous temps la ville de Gand
avait eu une chambre de torture à la maison com-
munale. Ils terminent ainsi leur réponse :
... oultre qu'entendons que noz prédécesseurs en loy de
tous temps immémoriaulx se sont serviz d'un banc de tor-
ture en la maison eschevinale de ceste ville en certain lieu
qui pour le présent encore se nomme la cave de torture
qu'avons faict accommoder pour y appliquer à la question
les déliquans ainsy qu'en usent toutes aultres villes et chas-
tellenies subalternes de ceste province et mesmes tous sei-
gneurs ayans liaul te justice si comme par exemple en ceste
ville ceulx du Vieubourg et sainct Pierre ausquels saubz
correction ne debvons céder ains plustost estre préférez en
authoritê et faict de justice pour estre magistrat d'une
cliiefve ville représentant le premier collège des estats de
ceste province, et comme ne pouvons bonnement com-
prendre les raisons qui peuvent avoir meu nos devanciers
de quicter leur ancliien lieu de torture et suivre celuy du
- 403 —
dict chasteau parmy tant d'jnconimoditez et distance des
lieux en temps de pluyc et orage oultre plusieurs aultres
jnconvéniens que ce changement leur a apporté et à tous
leurs successeurs et qu'jl n'apperrera qu' jcelluy ait esté
iutroduict par quelque juste raison de forfaicture ou aultre
supplions vos sries qu'en levant l'jnhibition portée au dernier
membre de ladicte lettre, nous soit consente en tant que
besoin est d'avoir une place, lieu et banc de torture pour
y applicquer toute sorte de délinquans qu'à ce par nous
seront condamnez. Et moyennant ce finissant la présente
par noz humbles recommandations aux bonnes grâces de
vos srie", prions Dieu.
Messeigneurs Vous donner en santé longue et heureuse
vie. De Gand le xe novembre 1631.
De vos sries
Très humbles serviteurs
Les Eschevins et conseil de la ville de Gand,
A. Van Luythem.
La lettre du conseil privé se trouve aux archives
communales série 102, n° 5, Decreten, Adverten-
tien et la réponse des échevins série 3 n° 15,
Geschreven Brieven .
Où se trouvait le Pijnkelder de l'hôtel de ville?
La tradition le place dans la cave, située sous la
salle où se réunissent actuellement les commis-
sions. On entrait dans cette cave par un réduit
donnant sur la cour intérieure de l'hôtel de ville.
Dans ce réduit existe un escalier de douze
marches aboutissant à un couloir. A l'extrémité
de ce couloir se trouve, de chaque côté, une petite
salle voûtée clans laquelle on descend par trois
marches. On y enfermait probablement les accusés
avant de les conduire dans le Pijnkelder.
— 404 -
Des lieux d'aisance étaient établis dans l'une de
ces salles; dans l'autre il y avait une cheminée
avec un gril en fer. Dans cette seconde salle était
pratiquée une ouverture, munie d'épais barreaux,
donnant sur le réduit qui servait d'entrée.
Sur les murs de chacune de ces espèces de salles
d'attente, les prisonniers avaient gravé des ins-
criptions et des dessins de toutes sortes dont quel-
ques-uns se distinguent par leur obscénité.
Au bout de ce couloir on descend encore sept
marches et on arrive dans la cave connue sous le
nom de Pijnkelder. Cette cave a une superficie de
huit mètres sur quatre. Dans trois des quatre coins
on voit des élévations en maçonnerie, pouvant
servir de sièges. Au-dessus de ces espèces de sièges
on remarque encore dans la muraille les débris
des anneaux ou des crochets auxquels on fixait les
liens, servant à attacher les accusés pendant qu'on
procédait à leur interrogatoire.
L'expression « de tous temps immémoriaulx, »
dont les échevins se servent en 1631, vient égale-
ment confirmer l'opinion que cette cave est le Pijn-
kelder ou « cave de torture » qui fait l'objet de la
correspondance que nous avons citée plus haut.
Cette cave, en effet, appartient à la partie la plus
ancienne de l'hôtel de ville et est de beaucoup
antérieure aux constructions qui la surmontent.
Nous ignorons si le Pijnkelder, de l'hôtel de ville
fut maintenu. Dans les procès-verbaux on se
borne à dire actum in den Pijnkelder sans indiquer
de quelle chambre de torture il est question.
— 405 —
Une nouvelle chambre de torture fut construite;
clans le château des comtes peu après la publica-
tion de l'ordonnance sur le crime de lèse-majesté
Voici à quelle occasion.
Par son ordonnance du 30 avril 1545, l'em-
pereur Charles-Quint, dans le but d'arriver plus
promptement et plus facilement à « l'extirpation
« de la mauldicte secte luthérienne et aultres sem-
« blables répugnantes à notre saincte foy, » donna
aux échevins de la ville de Gand « la cognoissance
« du crime de lèse-majesté divine et procéder
« contre les transgressions de nos ordonnances
« publiées pour la conservation de nostre saincte
« religion. »
C'est à la suite de cette ordonnance que les
échevins de la Keure, s'attendant à un surcroît de
besogne, firent construire aux frais de la ville une
nouvelle chambre de torture dans le château des
comtes.
La manière dont ce local était construit est
décrite dans le registre k. k. folio 324ro sous le
titre de « De manière hoe men den nieuwen pijn-
« keldere maken zonde in sgravensteen. » La
chambre de torture avait quatorze pieds carrés.
Sa hauteur était de vingt pieds. On y arrivait par
un couloir ou portail de douze pieds de longueur
et de six pieds de largeur. Il y avait aussi un petit
réduit dans lequel probablement on enfermait
l'accusé avant de l'introduire dans le Pijnkelder.
Au milieu du Pijnkelder se trouvait, sous le banc
de torture, une rigole en pierre dans laquelle on
laissait couler l'eau dont on s'était servi pour
— 406 —
mettre le patient à la question ou pour enlever le
sang qui couvrait le parquet.
Daar moet ooc in clen prjnkelder daar de banck staen sal
een gote ligghen van witte gotesteenen twee voeten lanc
ende thende van dien eenen put ghedolven ende ghemetst
dry voeten diepen ende vier voeten vierkant omme twaeter
inné te sueren.
La construction de ce Pijnkelder, qui fut inau-
gurée par le Scherprechter , maître Mathias du
Mont, coûta quarante livres de gros. Nous igno-
rons dans quelle partie du château des comtes il
était situé.
Pendant les troubles religieux du seizième
siècle, il arrivait aussi que des personnes, accusées
du crime d'hérésie, fussent enfermées à la cita-
delle que Charles-Quint avait fait construire sur
l'emplacement de l'abbaye de Saint-Bavon, dé-
molie par son ordre en 1540.
Dans cette citadelle il y avait un Pijnkelder
où l'on soumettait les prisonniers à la question.
Marcus van Vaernewyck, dans le troisième livre
de ses Beroerlicke Tijden, rapporte qu'on y emmena
le 4 septembre 1566 six prisonniers auxquels le
bourreau de Gand, maître Jean du Mont, fit subir
la torture.
Voici comment ce fait est raconté par l'historien
gantois :
Up den zelven dach, ooc naar noene was den hoogbaliu
int nieuw casteel ghereden ende schepenen vander Keure,
— 407 —
metghaders de secretarisscn ende den scheerprechter ghyn-
ghen ooc daar, maar up verscheeden tijden endc bij par-
tijen,om dat men te min up letton zoude; maar tvolc creech
de spuere ende quamen hooren ende zien wat daar te doen
was; want sy presumeerde dat men ter scheerpe exame
ghijnck ende zeker ghevangenen ter tortuere oft pijne
brachte, te weten eenige vande voornoemde zesse, die daar
in ghevanghen gheleet waren.
Une autre indication, que nous fournissent les
comptes du bourreau Jean Franck, cités plus haut,
c'est qu'on appliquait également la torture clans
le local où siégeait la Cour de la Prévôté, het gees-
telijk hof. Ce local était situé dans la rue du Bas-
Escaut.
Item den 28 february 1711 tanneken de Smet ter torture
ghestelt van s'avonts ten acht uren tôt smorgens ten twee
uren gedaen ten geestelycken hove, comt £ 0-5-0.
Cette tanneken de Smet était, sans doute, pour-
suivie pour crime de sorcellerie et soumise de ce
chef à la juridiction de la Cour de la Prévôté.
Contrairement à Y usage, on a désigné ici l'en-
droit, gedaen ten geestelijchen hove, où la torture
fut appliquée. Nous croyons que cette désignation
a été ajoutée parce que la Prévôté devait rem-
bourser à la ville de Gand les sommes payées au
bourreau, mettant à la torture les accusés compa-
raissant devant ce tribunal ecclésiastique.
La prison du Sausselet ou Chastelette, dons nous
avons parlé tantôt, fut construite en 1296 en rem-
placement d'une autre située rue Haut-Port. Elle
fut démolie en 1528 et sur son emplacement on
— 408 —
construisit une nouvelle prison ayant quatre-vingt
pieds de largeur sur quarante de profondeur.
En 1716 la prison du Chastelette, qui était une
propriété de l'État, fut vendue à la ville de Gand
pour la somme de neuf mille florins. Le Sansselet
fut abattu et remplacé par le bâtiment qui s'y
trouve encore aujourd'hui. C'est dans ce bâtiment,
nommé Pakhuis, qu'on établit les bureaux pour
la perception des impôts communaux ' .
Depuis 171 G la torture fut toujours appliquée*
dans le Pijnkelder du château des Comtes. Il est
possible qu'on l'appliqua encore dans une des'
caves de l'hôtel de ville, mais nous n'avons aucune
donnée précise à cet égard.
Malgré la présence du médecin-chirurgien, qui
devait veiller à ce que l'exécuteur des hautes
œuvres ne mit pas en danger la vie de l'accusé
soumis à la torture, il arrivait parfois que des
patients succombassent aux tourments qu'on leur
avait fait endurer.
Le Memorieboek der stad Gendt cite le cas d'un
individu qui mourut en 1585 des suites de la tor-
ture. Il s'agit d'un certain Michiel Asaert, accusé
d'avoir assassiné une femme qui demeurait en face
de sa maison. Cette femme avait été en réalité
tuée par le fils de Asaert.
Michel Asaert fut soumis plusieurs fois à la
question, ghetortureert , in de poleye gelianghen
1 Pages d'histoire locale gantoise, — Troisième série.
— 409 —
ende ghegeesselt, à tel point qu'il ne ressemblait
plus à une créature vivante, zoo dat tusschen de
doot ende hem niet en icas. Cette victime des actes
de violence, exercés sur son corps par le bour-
reau Hubert Baens, mourut au château des comtes
deux jours après avoir subi la torture pour la der-
nière fois.
Le véritable assassin, le fils Frans Asaert, fut
brûlé vif quelques jours plus tard.
La même année 1585 nous voyons appliquer à
G and un genre de torture des plus épouvantables
et qu'on n'avait jamais pratiqué jusque là. On
empêcha de dormir, pendant huit jours consécu-
tifs, un individu accusé de complicité de meurtre.
Maître Hubert Baens, exécuteur des hautes-
œuvres, lui mit au cou un collier ou carcan avec
des pointes en fer. Ces pointes entraient dans
la chair du prisonnier au moindre mouvement et
l'empêchaient naturellement de se livrer au som-
meil. Au bout de huit jours de ce supplice intolé-
rable, ce malheureux, qu'on avait surveillé tout le
temps, fut relâché. .
Cet événement dut causer une certaine émotion
à cette époque, car il est relaté comme suit dans
le Memorieboek de l'année 1586 :
Item, in de maendt apiïl 1586 was op de heerlicheyt van
Nevele verbrant eenen jonghman die in 't jaer 1582 sijn
eyghen oom vermoort hadde ende corts daernaer was zync
complice (zoo men zeyde) genaempt Adriaen Ronsse, daer
omme ter scherper torture ghebrocht, maer en kende niet;
ende zekeren tijt daer naer wiert hy met eenen yseren hals-
bant met yseren pinnen die in dcn hais staken, aclit daghen
28
— 410 —
lanck in een camerken achter in de vanghenesse van
't Gravencasteel daer hy zat, ende stont de voornoemde
acht daglien lanck zonder slapen; want hy aile nachten
ende daghen versch volck hadde die hem waecten, ende niet
en lieten slapen ende op den selven vrijdach naer noene,
wiert hy liber ende los ontsleghen; insglielijcx is noynt
ghesien gheweest.
Quand l'accusé, soumis à la torture, s'évanouis-
sait ou tout au moins commençait à perdre ses
forces, on lui faisait prendre un cordial pour le
ranimer. Ce cordial consistait le plus souvent en
quelques gorgées de vin chaud. Les magistrats et
les médecins, qui assistaient aux opérations, pro-
fitaient de l'occasion pour prendre également un
verre de vin. Quant au bourreau et à ses aides, ils
devaient se contenter d'une modeste cruche de
bière. On servait également un repas à ceux-ci
quand ils passaient une partie de la journée à
remplir leurs fonctions dans le Pijnkelder.
Nous n'avons pas trouvé d'état détaillé de ces
dépenses pour vin, bière et victuailles dans les
comptes de la ville de Gand ou dans les pièces
justificatives du trésorier. Ces dépenses figuraient
en un seul poste dans les frais de justice. Mais
nous avons vu un état de débours de cette espèce,
faits en 1746 par le concierge de l'hôtel-de- ville
de Bruges où se trouvait la chambre de torture '.
Cet état est assez curieux, par les détails qu'il
renferme, pour être donné en entier. Il nous montre
1 Ce document appartient à la Bibliothèque de la ville et de
l'Université de Gand,
— 411 —
un des aspects cle la vie judiciaire d'autrefois qu'il
est bon de rappeler.
Ghelevert bij Jacques Gadeijne coneliiergc van het
stadthuijs van Brugge by ordre van dheer ende
meester maerten Willems greffier crimineel der
selve stadt soo int doen van torture als justitie
soo volght.
Alvooren den 21 en maerte 1740 synde torture ghelevert
een bottel wàrme wyn voor den patient . 0 » 3 » G
eod. twee bottels bourgogne wyn voor
den selven heer ende de doctoors. ... 0 » 1 1 » 8
voor den scherpreghter en s' heerens
dienaers seven stoopen bier 0 » 4 » 8
voor heure van bedde en sarge. ... 0 » 10 » 0
voor het ontbyt van den patient en
s' heerens dienaers met leveringe van ses
cannen bier 0 » 6 » 0
voor het middaghs en avontmael van de
selve met leveringhe van bier 0 » 15 » 10
den 22e torture alsvooren een bottel
warme wyn 0 » 3 » 6
twee bottels bourgogne wyn voor de doc-
toors 0 » 11 » 8
ses stoop bier voor de dienaers. ... 0 » 4 » 0
voor bedde en sarge 0 » 4 » 0
voor ontbyt van den patient ende sheeren
dienaers met bier 0 » 4 » 0
voor het noen en avontmael van de selve
met bier 0 » 17 » 4
24en int prepareeren vande torture een
pinte wyn voor den patient en seven stoop
bier voor de dienaars 0» 5 » 10
een bottel bourgogne wyn en caffée . . 0 » 7 » 10
— 412 —
29en dito int preparéren vande torture
een pinte wyn voor den patient en dry
stoopen bier voor de dienaeren .... 0 » 3 » 2
eod. dry bottels bourgogne voor myn-
heer den burgm. Delacoste den heer greffier
ende doctoors 0 » 17 » 6
tse" . . Lb. 6 » 10 » 6
L'ordonnance de paiement, signée par J. van
Zuylen van Nyevelt, J. J. Pardo et de Trenicourt,
porte la date du 28 septembre 1746.
Ce compte nous apprend que le patient, avant
d'être soumis à la torture, recevait une pinte de
vin. Quant aux autorités judiciaires et aux mé-
decins, ils avaient une préférence marquée pour le
vin de Bourgogne.
On voit encore par ce compte que dans la
chambre de torture il y avait un lit (peclde en sargè)
sur lequel on faisait reposer le patient quand,
vaincu par la douleur, ses forces commençaient à
l'abandonner. C'était également sur ce lit qu'on
déposait l'accusé quand on suspendait un instant
les tourments pour lui faire subir un nouvel inter-
rogatoire. Aussi clans les actes de procédure crimi-
nelle en France trouve-t-on souvent les expres-
sions : « Mis sur le matelas, l'accusé réitère son
aveu,, ou retracte, etc. »
Le bourreau, dont il est question dans l'état
présenté par le concierge de l'hôtel de ville de
Bruges, est ce Frans Boitquin dont nous avons
parlé au chapitre précédent.
— 413 —
Dans le premier fascicule de ses Mélanges sur
la ville d'Ypres, M. l'archiviste Diegerick donne
plusieurs extraits du compte de 1606, rensei-
gnant les sommes payées pour le Bourgogne,
le Bordeaux,, le vin blanc et la bière anglaise,
consommés par les échevins durant la mise à la
torture d'une certaine Prontkgen de Witte, accusée
du crime de sorcellerie. Voici deux articles de ce
compte :
Betaelt Guillaume de Smet, schepene, in remboursement
van x lb. xviiij s. by hem verschoten, van vier stoopen rooden
wyn gehaelt ten huze van Jan Robaeis, metsgaders xxvj s.
van twee ponden castaignen met twee stoopen engels bier
ghehaelt te Pter Hugues ghedurende t' examen van Prontk-
gen de Witte xij lb. iiij s.
• Gherembourseert Mter Roelant Carpentier, greffier ende
pensionnaris dezer stede, van vier stoopen witten most te
x 1. vj s. par. den stoop, op zynen namen ghehaelt int Pauw-
ken, mitgaders vier stoopen rooden wyn ende eenen stoop
inghels bier in St-Omaers, ten verzoucke van myne heeren
Yoogbt ende Schepenen, ghedurende t'examineren ende
bewaren van Prontkgen de Witte gheexecuteert met den
viere om tcryme van tooverye den 20 mye 1606 xjx lb. xvij s.
Les échevins yprois, afin d'avoir le gosier sec et
d'être par conséquent mieux disposés à boire,
mangeaient quelques livres de marrons pendant les
opérations de la torture. Voir donner la question
était donc un passe-temps que les magistrats se
rendaient le plus agréable possible.
Quel spectacle terrifiant et digne d'inspirer
l'imagination du peintre, du dramaturge ou du
— 414 —
romancier, que la vue de ce sombre Pijnkelder
éclairé à la lueur vacillante des chandelles, dans
lequel échevins, grand-bailli et médecins se rafraî-
chissaient en buvant de la bière ou dégustaient les
crus de la Bourgogne et du Bordelais pendant que
le misérable patient criait et se tordait de dou-
leur sous la main du Scherprechter entouré de ses
aides !
Le Stoop, dont il est question dans le compte de
la ville d'Ypres, vaut à peu près deux litres. Les
échevins consommaient donc, pendant ces deux
séances, seize litres de vin rouge, huit litres de
vin blanc (most) et six litres de bière anglaise. La
livre Parisis valait dix sous ou nonante centimes
de notre monnaie.
Aux archives communales de Gand, il existe un
dossier très volumineux et un registre spécial con-
cernant le procès bien connu de Mast et Danneels,
exécutés à Gand le 8 décembre 1763. Ces malfai-
teurs avaient assassiné, à coups de marteau, un
certain Daniel van Beveren et sa sœur Anne-
Cathérine, ainsi que trois sœurs, nommées Van
Haute. Ces cinq personnes habitaient la rue des
Tonneliers, située derrière le couvent des Carmes
chaussés (aujourd'hui musée communal), rue longue
des Pierres et appelée à cette époque Lieve Vrouwe
Broedersstraetje .
Malgré les preuves certaines de culpabilité, les
échevins de la Kenre ordonnèrent, le 25 novembre,
de mettre Mast et Danneels à la question, afin d'ap-
prendre de leur bouche toutes les circonstances du
— 415 —
crime. On décida aussi que pour l'application de la
torture, maître Jean Boitquin, bourreau de Gand,
serait assisté de son confrère de Bruxelles.
Un détail qui mérite d'être relevé. Dans la lettre,
adressée aux autorités communales de Bruxelles,
les échevins gantois , en sollicitant le concours
de l'exécuteur des hautes -œuvres brabançon, de-
mandent que celui-ci soit porteur de ses instru-
ments pour permettre d'en comparer le poids avec
celui de ceux employés à Gand.
.... ende dat hy saude medegebracht liebben aile de usten-
cielen daertoe noodigh omme te sien of die swaerder waeren
als de gonne van Ghendt....
Les échevins, qui assistèrent à la question,
étaient présidés par le Voorschepen Vilain XIIII.
Le conseiller pensionnaire Vander Weerden pro-
cédait à l'interrogatoire des accusés.
Mast et Danneels furent introduits le 28 no-
vembre 1763, à trois heures de l'après-midi, dans
le Pijnkelder. Quand Danneels vit les instruments
de torture rangés dans la salle, la peur le saisit et
il fit immédiatement les aveux les plus complets.
Il y avait d'ailleurs de quoi être effrayé quand on
lit le passage suivant du procès-verbal :
Den verweerdere gheleyt synde in de pynkaemere ahvaer
het vier ontstoken, den halsband gespannen ende den dry-
pickel in gereedthey t ghebraecht met de voordere accessoiren
voor het scherpexamen.
— 416 —
Il n'en fut pas de même de Mast. Celui-ci entra
en ricanant clans le Pijnkelder et s'y livra, en
attendant la torture, à des plaisanteries lesquelles
sont: soigneusement rapportées dans le procès-
verbal.
Mast persistant à nier, Téchevin-président Vi-
lain XIIII ordonna à Jean-Baptiste Boitquin de
commencer son office. Le bourreau de Gand, assisté
de son confrère de Bruxelles, se saisit de l'accusé,
le déshabilla et le plaça sur le trépied, drypickel,
près du feu. Il était alors trois heures et quafcfc-.
Enfin Boitquin lui mit les cordes à nœuds, pater-
noster, et les tordit de façon à les faire entrer dans
les chairs déjà entamées par le feu ardent près
duquel le patient était placé.
Quatre minutes avant quatre heures et demie,
dit le procès-verbal, Mast s'écria : laet my los, laet
my los, ick zal ailes zeggen; déliez-moi, déliez -moi,
je dirai tout. Les bourreaux avaient tellement serré
les cordes à nœuds que le poignet droit de Mast
était presque arraché.
La lecture des pièces cle ce dossier, qui renferme
un des rares procès-verbaux de la torture, est fort
intéressante et en même temps très instructive.
Elle nous fournit un tableau complet des mœurs
judiciaires et de la procédure criminelle de ce
temps, depuis la découverte de l'assassinat jusqu'à
l'exécution des coupables par la main du bourreau.
Le procès-verbal de l'interrogatoire de Mast est
surtout curieux en ce qu'il donne,- pour ainsi dire
minute par minute, l'attitude de l'accusé et la
série graduée des tourments que le bourreau de
— 417 —
Gand et celai de Bruxelles lui firent endurer pen-
dant plus d'une heure.
Nous parlerons dans un autre ckagitre de l'exé-
cution de ces deux criminels. «
Nous laissons de côté les particularités relatives
à la question, appliquée aux femmes accusées de
sorcellerie. Ce sujet sortant de notre cadre, nous
nous bornerons à dire que le bourreau ne soumet-
tait la victime à la torture qu'après lui avoir versé
dans la bouche un verre de vin frelaté, destiné à lui
faire cracher le démon réfugié dans son corps.
C'est à l'empereur d'Autriche, Joseph II, qu'on
doit la suppression définitive de la torture. Plu-
sieurs fois déjà le gouvernement autrichien avait
essayé de la supprimer ^ou tout au moins d'y
apporter des adoucissements.
Une première fois, en 1728, le gouvernement
de l'empereur Charles VI envoya une circulaire
aux conseillers fiscaux des conseils de justice pour
demander leur avis sur l'abolition de la torture.
En 1765, Charles de Lorraine, gouverneur-général
des Pays-Bas autrichiens, demanda aux conseils
de justice s'il ne conviendrait pas de supprimer la
torture et la marque. Il renouvela sa tentative
en 1771 et invita de plus le Conseil privé à donner
son avis sur cette suppression.
La magistrature tenait à conserver la torture.
Aussi toutes les réponses furent-elles généralement
défavorables à la suppression de ce mode de
— 418 —
preuve. Le Conseil de Flandre, que Charles de
Lorraine avait consulté en 1765, 1766, 1777 et
1778, ou bien laissait les lettres du gouverneur-
général sans réponse, ou bien leur donnait une
réponse évasive.
Joseph II coupa court à ces résistances des
corps judiciaires. Par l'article LXIII de l'édit du
3 avril 1787, sur la réorganisation de la justice
dans les Pays-Bas, l'empereur supprima purement
et simplement la torture. Cet édit, qui fut imprimé
à Gand chez Pierre-François de Goesin, est inti-
tulé :
Edict van den Keyser ende Koninck, voor de kervor-
minge van de Justitie binnen de Nederlanden van den
3 april 1787.
L'article LXIII est rédigé comme suit :
Wy hebben afgeschaft in aile de geiïchten van onse voor-
seyde Nederlandtsche Provincien het gebruyck van de pyn-
banck ofte torture1.
C'est dans le même édit que Joseph II établit
les trois degrés de juridiction : première instance,
appel et révision ou cassation. Il avait institué à
Gand un tribunal de première instance qui com-
prenait toutes les communes, sauf deux, faisant
encore aujourd'hui partie de notre arrondissement
judiciaire.
L'édit de 1787, en supprimant la torture, ré-
duisit fortement les occupations du bourreau.
1 Bibliographie gantoise F. Vandek Haeghen, vol. IV, p. 256.
- 419 —
Maître Jean Hamel, alors en fonctions à Gand, ne
conserva plus que les exécutions capitales, que
l'emploi de la guillotine allait bientôt simplifier
considérablement .
Aussi les représentants du gouvernement fran-
çais près des armées du Nord et de Sambre et
Meuse enfonçaient-ils une porte ouverte quand,
dans leur proclamation au peuple belge, datée de
Bruxelles le 27 brumaire an 111(17 décembre 1794),
ils inscrivaient :
A rticle premier. — La Torture est abolie.
Prospee Claeys.
(A suivre.)
420
AXALECTES BELGIQUES'.
IL
JEAN-FRANÇOIS DE LOS RIO S,
Libraire anversois établi à Lyon s.
Jean-François de Los Rios naquit à Anvers,
sur la paroisse Saint-Jacques, où il fut tenu sur
les fonts baptismaux, le 23 janvier 1727. par
François-Dominique Lievens et Jeanne-Catherine
Torremans. Il était fils de Paul de Los Rios et de
Marie-Catherine Lodewvckx . A l'en croire, il des-
cendait d'une noble famille espagnole qui s'était
4 Suite. Voir Messager des sciences histor., 3? livr.. 1S0O. p. 263.
2 \ oyez sur ce personuage, outre ses œuvres : J.-M. Quéraed.
La France littéraire, t. Y'(1S33). p. 302. — Michaud. Biographe
universelle, t. LXXII (1843), pp. 108-109. — Le bibliophile belge,
t. H (1S45). pp. 395-300 (article Je Fr. de Reiffenberg). — Hœfee.
Xoiu-elle biographie générale, t. XXXI (1S62), col. 607: etc. J'ai
ajouté aux données contenues dans ces sources, les renseignements
nouveaux qu'il m'a été possible de trouver, tels que les dates
exactes de l'état-civil de Fr. de Los fiios, la description précise de
ses œuvres, etc.. ainsi que ceux que m'a obligeamment fournis
M' Aimé Yingtrinier, bibliothécaire de la grande bibliothèque de la
ville de Lvon.
— 421 —
établie à Anvers pendant que les Pays-Bas se
trouvaient sous la domination de l'Espagne. Il
embrassa d'abord la carrière militaire, et servit
dans le régiment de Los Eios, à la tête duquel
se trouvait un de ses parents qui était, en même
temps, gouverneur de la petite ville d'Ath; mais
il le quitta le lendemain de la bataille de Fonte-
noy,et se rendit à Paris, où il arriva le 18 mai 1745.
Il entra comme commis de magasin, c'est à dire
comme « petit valet de messieurs les commis »,
chez un libraire de la rue Saint-Sévérin, Gabriel
Valeire :
Ma chambre à coucher, nous raconte-t-il clans ses Œuvres
publiées en 1789, était dans le coin d'un grenier au sixième
étage, où il n'y avait pas plus de jour qu'au fond d'une
cave, parce que douze rangs de bouquins bouchaient les
fenêtres depuis plus de 30 ans. Un jour, je proposai à
M. Valeire que, s'il voulait me donner son agrément, je
trouverais moyen de placer ses quatre mille bouquins poul-
ies faire circuler dans le commerce; il me donna plein
pouvoir de faire ce que je voudrais, et qu'il s'en rapportait
à tout ce que je ferais à cet objet. La veille de la Pentecôte,
je disposai trois grandes balles, dans chacune desquelles je
mis deux cent volumes, que je fis porter la seconde fête sur
le quai de la Ferraille, prenant avec moi deux petits
Savoyards. Comme je ne voulais être connu de personne,
j'endossai une vieille veste et une robe-de-chambre qui me
tombait jusqu'au gras de jambe, toute en guenilles; mon
visage machuré d'encre d'imprimerie, et la tête couverte
d'un vieux morceau de chapeau que mes cheveux passaient
de tous côtés. Sur les neuf heures du matin, je commençai
à crier à haute voix : à six sols, à choisir dans la balle, à
six sols, à six sols. Vers le midi, mon commerce prit une
— 422 —
tournure avantageuse, car l'argent me venait de tous côtés.
A deux heures après-midi, la vieille Jeanneton, cuisinière
de M. Valeire, m'apporta ma soupe dans une marmite
de fer que je posai sur une des balles vide : j'invitai mes
deux petits commis savoyards à dîner avec moi, et nous
mangeâmes notre soupe avec des cuillers de bois ; parta-
geant ensuite notre morceau de bouilli entre les trois, nous
dînâmes aussi bien que chez Mde. Lipine, où l'on payait
24 sols par repas. A cinq heures du soir, je finis ma troi-
sième et dernière balle; je payai mes commis, et le produit
fut de 180 livres. Je continuai ce commerce les fêtes et
dimanches, jusqu'à la fin du mois de juin, et je vendis, dans
cet espace de temps, pour 19G4 liv.
Sur la fin du mois de juillet, M. Valeire père, voulant
me récompenser des fatigues que j'avais eues en vendant
ses bouquins sur le quai de la Ferraille, fit appeler son
tailleur et lui donna un habit noir qui avait été fait en
1707, pour le jour de ses noces : le tailleur me prit mesure
et me rendit mon habit le 15 août, jour de l'Assomption de
la Vierge. La veille, M. Valeire me fit présent d'une per-
ruque bien étoffée, et je mis le chapeau sous le bras ; chacun
me regardait et plusieurs me riaient au nez. Le même jour
après midi, en passant dans la rue du Roule, j'entrai au
café de l'Étoile et j'en demandai une tasse; le garçon qui
me servit fit un éclat de rire si fort que son café rejaillit
sur une table de marbre. Je crois que c'était par rapport
à ma perruque, qui était en effet ridicule, car elle couvrait
mes épaules des deux côtés. La galerie quitta les jeux de
cartes, de dames, etc. et chacun me regardait; l'un me
demandait si mon grand-père était médecin à Paris, que
cette grande perruque n'était pas de mon âge; un autre
s'approchant me demande si j'avais acheté une charge de
conseiller au parlement d'Angleterre; un troisième vint se
mettre près de moi et me dit : je crois, mon cher ami,
— 423 —
que notre gros Thomas1 vous a cédé une de ses perruques
neuves Toutes ces questions me déplaisaient; je me lève
brusquement, je sors ma filoche, alors garnie de 3 livr.
17 sols, je paie ma tasse, et je quitte cette société, très
mécontent d'y être entré. En passant près de la rue de la
Ferronnerie, je vis, sous une porte cocliére, un homme qui
vendait plusieurs effets de rencontre; il se trouvait parmi
quatre perruques à bourse; je lui proposai un échange, et
nous convînmes que je lui céderais la mienne avec six sols
de retour, contre la plus belle des quatre. Depuis ce
temps-là, j'ai toujours observé de me coiffer à la française.
Après avoir débité les bouquins de son patron
sur le quai de la Ferraille, Los Rios acheta des
marionnettes avec un certain Jean-Samuel Caillier,
de Genève, mais un orage dispersa ses acteurs à
la première représentation, qui eut lieu au port
Saint-Paul. Pour surcroît de malheur, le commis-
saire de police les confisqua, faisant défense à leur
imprésario de continuer à jouer sans permission
en règle, sous peine de trois mois de prison au
Châtelet. Mais donnons lui encore la parole :
L'on a bien raison de dire que, lorsque l'on est jeune, on
fait des folies: chacun a ses passions ; les uns aiment les jeux,
les autres le vin, les autres les femmes, etc. La mienne était
d'aller aux fêtes des villages ; la danse, le violon, les petites
comédies et les parades de Nicolet aux boulevards, avaient
des attraits pour moi ; mais la plus forte était celle des
chevaux. Dans le même temps, je fis connaissance avec Jean
Samuel Caillier, de Genève ; il était à peu près de mon âge
1 Le gros Thomas était connu au Pont-Neuf pour un des plus
habiles arracheurs de dents de son siècle. [Xote de Los Rios].
_ 424 —
et je l'aimais véritablement; il était gai et farceur. Quelques
jours après, en passant à la foire SMrermain, mes regards
s'attachèrent sur une boutique supérieurement bien étalée
et garnie de toutes sortes de marchandises très riches, parmi
lesquelles j'aperçus un jeu de marionnettes au nombre de
dix figures bien habillées, avec des ressorts très bien faits
qui faisaient mouvoir avec aisance toutes les parties du
corps à droite et à gauche. Je les marchandai. On m'en
demanda 60 liv.; j'en offris 48, et j'en restai propriétaire à
ce prix. Pendant plusieurs semaines, je m'exerçai seul;
mais le hasard m'ayant fait connaître le sieur Malloit,
fameux joueur de marionnettes, qui a eu l'honneur de
représenter plusieurs fois dans le parc de Versailles, il me
donna douze leçons, pour le prix de 24 liv.; et, bientôt, je fis
des progrès qui me mirent en état de représenter publique-
ment. Un dimanche que le temps me parut assez beau pour
m'éloigner de la rue S'-Sévérin, je fis porter ma petite bou-
tique au port SVPaul ; Caillier sonnait de la trompette et
vendait des petits livres de calcul à six sols la pièce, qui ne
lui coûtaient que 24 s. la douzaine. Après les vêpres, nous
eûmes plus de six cent spectateurs sans compter les enfants ;
mais, sur les quatre heures, il survint un ouragan si horrible
que la poussière aveuglait le public; l'on voyait voltiger
de côté et d'autre les chapeaux et les coiffes des femmes.
Ma baraque fut renversée dans la Seine; je tombai par les
degrés et je me retins à la chaîne; mais je perdis deux de
mes meilleures marionnettes, qui étaient mon arlequin et
M. l'abbé, qui furent noyés sans ressource. Caillier se
blessa un peu en roulant contre des tonneaux ; son chapeau
fut perdu, son habit taché et sa trompette bossuée. Dans
ce moment malheureux, le guet vint à nous, nous arrêta, et
nous conduisit chez M. Danthon, commissaire, rue S'-Paul,
qui nous interrogea et nous demanda à voir le certificat et
la permission de M. le lieutenant général de police. Après"
avoir exposé nos raisons, il nous dit de nous retirer, nous
— 425 —
défendit de jouer en public sous peine de trois mois de
prison au Châtelet. II prit nos noms et notre demeure. Les
marionnettes furent portées au bureau général de police,
où elles sont restées plus de quatre mois ; elles ne m'ont été
rendues que par la protection de M. Dupuis, directeur de
l'imprimerie royale du Louvre. Je rencontrais souvent,
dans les rues de Paris, des hommes habillés de noir avec
un bout de mousseline blanche sur les manches ; je me fis
expliquer la raison de cette cérémonie; l'on me répondit
que ces particuliers avaient perdu quelques uns de leurs
parents ou amis, et que, pour marquer les regrets que leur
causait cette mort, ils s'habillaient de cette manière. Moi
qui regrettais toujours la perte de mon arlequin et de mon
cher abbé, je n'eus rien de plus pressé que de porter mon
habit noir chez le tailleur pour faire mettre des pleureuses.
Tour 36 s. je fis acquisition d'une épée à poignée noire de
rencontre. Le premier dimanche que je portai le grand
deuil , je rencontrai M. Lamelle, fondeur de caractères
et M. Vincent, libraire-imprimeur, qui me demandèrent
quelles étaient les personnes de ma famille que j'avais per-
dues; je leur répondis, d'un air triste et d'un ton lugubre,
que c'étaient deux personnes à qui j'étais très attaché. Ils
me consolèrent le mieux qu'ils purent, et je continuai à
porter le deuil, pendant six semaines, à l'honneur de
l'arlequin de mes marionnettes.
Après sa rencontre avec le guet, Los Rios se le
tint, sans doute, pour dit, et revint à la boutique
de la rue Saint-Sévérin. Quoiqu'il en soit, en 1750,
nous le retrouvons à Rome, où il fait la connais-
sance d'un bouquiniste établi au bas des degrés
du Vatican :
Gabriel Badetto, surnommé Gamba Corta, né à Frescaii.
en 1690, d'un honnête valet de pied du cardinal Azolini,
29
— 420 —
et d'une discrète sage-femme, était un petit homme aussi
contrefait que la nature en eût produit jusqu'au moment
où j'eus le bonheur de le connaître : une bosse qui s'élevait
sur son épaule gauche, laissait à peine entrevoir le sommet
de sa tête; il n'en était pas de même de ses jambes, qui, par
l'énormité de leur longueur, faisaient les deux tiers de sa
stature, mais dont Tune, beaucoup plus courte que l'autre,
l'obligeait à porter un talon de bois de la hauteur de six
pouces. Comme il est d'usage établi entre les gens à talents
de se visiter les uns les autres, je ne manquai pas, dès le
lendemain de mon arrivée, de me rendre au bas des degrés,
où cet homme illustre faisait sa résidence journalière, et là
je le suppliai très humblement de vouloir bien m'accorder
sa protection ; il me la promit le plus gracieusement du
monde et sans me faire valeter, ainsi que cela se pratique
chez les grands. Il m'occupa tout de suite à l'arrangement
d'un cabinet de livres anciens dont il était chargé de faire
la vente, préférablement à des libraires en titre, qui s'y
seraient moins entendu que lui. Après m'en être acquitté à
sa satisfaction, il me récompensa généreusement et me
procura la connaissance d'un de ses amis, qui ne se pro-
posait pas moins, disait-il, que de faire ma fortune ; et, sur
la bonne opinion qu'il avait conçue de mon savoir, il voulut
bien me confier une petite balle contenant des almanachs,
des petits livres de prières, des cantiques; il y joignait, par
un excès de confiance dont je me souviendrai éternelle-
ment, des images enluminées, des chapelets, des rosaires,
des agnus dei, des médailles bénites et des étuis de bois de
Ste Luce ; la facture générale de cette pacotille se montait
à 14 liv. 8 s. 6 cl. Ce crédit me fut d'autant plus agréable
que je venais de faire un long voyage, et que, dans la
crainte de fatiguer les chevaux de poste, ou de priver
d'honnêtes gens des places qu'ils auraient pu occuper dans
les voitures publiques, j'avais fait ce voyage cà pied ; ce qui
— 427 —
n'empêcha pas qu'à mon arrivée à Rome, tout mon avoir
ne fût réduit à 21 s.; encore aurais-je été bien éloigné de
ce degré d'opulence, si, en passant à Bologne, je n'y eusse
vendu une paire de boucles d'argent, seul reste de mon
ancienne splendeur, dont le produit me suffît jusqu'à mon
arrivée à Rome. Je fut installé et reçu marchand sans
apprentissage, ni brevet de maîtrise; au moyen de quoi,
j'eus la liberté d'entrer, non seulement dans lés cafés et
autres lieux publics, comme corridors, cloîtres, galères, etc.
mais encore jusque dans l'intérieur des palais des cardi-
naux, où tout m'était ouvert, excepté les cuisines et les
salles à manger. Quoi qu'il en soit, ce commerce devint
fatigant et ennuyeux par l'obligation où j'étais de courir
les rues comme un chien qui a perdu son maître, et ne
contribua pas peu à me dégoûter du séjour de Rome,
quoique j'y eusse vendu, pendant l'espace de sept semaines,
pour environ 400 liv., dont la moitié était pur bénéfice.
Déterminé à partir, je vendis mon fonds de magasin à
un autre marchand colporteur qui s'en accommoda; au
moyen de quoi je retournai en France, six mois après en
être parti.
Son humeur vagabonde ne lui permit pas de
rester longtemps en France, et c'est alors que
peuvent se placer les voyages en Angleterre et
dans les Pays-Bas dont il parle dans ses Œuvres.
Il admire les larges rues de Londres, leur anima-
tion, le nombre incroyable de voitures qu'on. y voit
circuler journellement et qu'il n'évalue pas à moins
de 60,000 ; il est frappé de la richesse des étalages '
1 Tous les étrangers qui viennent à Londres, dit-il, sont singulière-
ment surpris de voir les richesses étalées sur le devant des boutiques,
qui sont toutes vitrées, afin que l'air ni la poussière ne puissent les
— 428 —
des magasins, ainsi que de la propreté des femmes
anglaises'; l'église Saint-Paul, à son avis, dépasse
en beauté celle de Saint-Pierre, à Rome; enfin les
élégants cottages des environs de Londres lui
paraissent fort agréables. C'est là que lui arrive
une plaisante mésaventure, qu'il raconte en ces
termes :
Environ a cinq lieues de Londres, il y a un vjllage dont
les maisons sont bâties dans le goût des bâtiments chinois.
Elles sont carrées, de 80 pieds environ, et sont percées,
dans les quatre faces par quantité de croisées, de sorte que,
s'il pleut, grêle, ou s'il fait quelque mauvais temps d'un
côté, on le ferme et l'on ouvre de l'autre. La curiosité
m'excita à m'y rendre. Je partis de Londres le 8 mai avant
midi; j'avais pour tout équipage une canne à la main; la
route est belle et fréquentée, mais, sur les deux heures
après midi, il survint une pluie si abondante, accompagnée
de tonnerres et d'éclairs, que je ne savais si je devais périr
ce jour-là. Je vis devant moi un chariot à 4 roues, attelé
gâter. Il y a des boutiques d'orfèvres qui ont pour six millions de
marchandises fabriquées. Ce n'est qu'à Londres que l'on se sert de
tasses et de cafetières en or. Les boucles de souliers et de jarre-
tières y sont assez communes; on en fait beaucoup usage. Les hor-
logers tiennent aussi un rang assez distingué. Un seul magasin, près
la place Carrée, contient pour un million de montres fabriquées.
Celles entourées de diamants sont souvent du prix de 7 à 8 livres.
1 Voici le jugement qu'il porte sur les femmes anglaises :
Les femmes anglaises, sans être jolies, sont bien faites ; elles ont
la peau très blanche ; mais peu de gorge ; on attribue ce défaut au
climat du pays et au reflux de la mer; leur habillement est très
modeste et peu dispendieux, surtout leur coiffure qui ne consiste
qu'en un chapeau d'étoffe de soie orné d'un simple ruban. Elles ont
toujours du beau linge fin et bien blanc. Ce que j'ai remarqué, c'est
que le faste règne dans les appartements, et qu'elles se piquent de
propreté dans la batterie de cuisine; les carreaux des appartements,
les lits et autres meubles sont aussi brillants que l'acier poli.
- 429 -
de trois chevaux, et chargé de deux grandes et longues
cages ; ce chariot avait conduit au marché de Londres des
agneaux et des moutons. Le voiturier me demanda si je
voulais entrer dans une des cages pour me garantir du
mauvais temps. J'acceptai la proposition, et je m'étendis
sur les paquets, provisions etc., dont il était chargé par
des particuliers de la campagne. La douceur de cette voi-
ture m'excita à un profond sommeil jusqu'à 6 heures du
soir. Quelle fut ma surprise de me voir, à mon réveil,
enfermé dans une cage et remisé à la cour, sous un hangar,
et de ne voir ni chevaux, ni voiturier; ce dernier était
déjà parti pour faire emplette de bestiaux dans le voisi-
nage, et il avait emporté la clef de la cage. Quel embarras
pour moi ! de me trouver enfermé dans une cage et privé
de ma liberté dans un pays étranger ! Je fis du bruit contre
les barreaux avec mon couteau ; une servante vint dans la
cour, et surprise de voir un être vivant dans la cage, elle
crut que quelque mouton s'était métamorphosé eh homme.
Elle sortit en fermant la porte, et, en moins de 4 minutes,
je vis autour de la cage plus de 20 personnes; c'étaient
des servantes, des valets d'écurie et des enfants ; chacun
faisait des éclats de rire; les enfants dansaient de joie de
me voir; un moment après, vint M. le curé, ou autrement
le ministre, avec madame son épouse, qui parlait français
parce qu'elle avait demeuré à Dunkerque. Je lui fis part de
mon aventure, et, dans le moment, elle donna ordre à son
valet de couper quatre barreaux, ce qui me procura ma
liberté ; elle me pria d'entrer chez le notaire, qui était le
juge du village ; je lui montrai mon portefeuille : il n'y avait
que des lettres que j'avais reçues à Paris, de plusieurs
maisons, concernant les affaires de mon commerce de
librairie ; et il me fit conduire dans une bonne auberge. Le
lendemain, sur les sept heures du matin, comme je me
promenais dans le village en fumant une pipe, comme à
mon ordinaire, quantité d'enfants vinrent autour de moi,
- 430 —
criant à haute voix en patois anglais : bon jour, bon jour,
l'agneau de la cage. Un bourgeois qui se promenait sur sa
terrasse, ne sachant pourquoi les enfans criaient toujours :
l'agneau de la cage, me demanda de -quoi il était question.
Je lui rendis compte du fait ; il se mit à rire et me fit entrer
chez lui, où il y avait une société très honnête : heureuse-
ment pour moi qu'il s'y trouva un officier qui avoit fait le
voyage d'Espagne, et qui connaissait la famille de Los Rios ;
je fus accueilli dans ce cercle, où je passai la journée. Le
lendemain 10, un de ces messieurs retournait à Londres
pour affaires ; il me fit l'honneur de me donner une place
dans sa voiture, et nous arrivâmes avant l'entrée de la
comédie.
Los Rios s'intéresse naturellement à ce qui
concerne sa profession. Aussi nous décrit-il avec
soin le cabinet littéraire qu'il a vu à Londres :
Ce cabinet appartient à Corneille Lyck, et il est composé
de deux grandes salles : dans la première, on trouve environ
2000 volumes en romans, voyages et quelques autres livres
nouveaux; dans la seconde, environ 180 estampes sous verre
à cadres dorés, au bas desquels il y a une carte avec le prix.
Les tables sont couvertes des papiers, nouvelles, etc., et
on y trouve constamment une assemblée de négociants et
autres personnes qui viennent y lire. Le catalogue des
livres du cabinet est sur la table; les abonnés peuvent
demander ceux qu'ils jugent à propos, mais il ne leur est
pas permis de les sortir du cabinet. L'abonnement est de
40 liv. par année.
Laissons lui encore raconter l'aventure qui lui
arriva dans un café de Londres :
Après avoir parcouru la ville, l'espace de quatre heures,
fatigué par le pavé et la multitude de voitures, j'entrai dans
- 431 -
un café, où je restai quelques moments en silence. Le garçon
cafetier vint à moi, et me demanda ce qui pourrait me faire
plaisir; et, voyant que j'étais étranger, il me demanda de
quel pays j'étais. Comme le Français n'est pas véritable-
ment ami de l'Anglais, je me dis Hollandais, parce que
cette langue m'est assez familière. Dans l'instant, le cercle
en fut instruit; un jeune homme d'environ 20 ans vint
s'asseoir auprès de moi, et me dit en hollandais, d'un air
gracieux : bonjour M. le pays. En moins d'un quart d'heure,
nous fîmes connaissance ; c'était le fils d'un fameux libraire
d'Amsterdam, appelé Vander Aa. Pendant deux jours, nous
parcourûmes la ville, et il m'introduisit dans plusieurs
maisons honnêtes.
Los Rios semble avoir résumé ses impressions
sur l'Angleterre dans les lignes suivantes :
Ce royaume est le Pérou de l'Europe, le plus beau séjour
pour ceux qui veulent vivre en liberté. Les Anglais sont
naturellement très fiers ; ils méprisent la mort comme
s'ils étaient sans religion. La fortune y distribue ses grâces
à pleines mains ; les talents et les prix y sont plus communs
que dans d'autres royaumes. Il ne manque à cette nation
que de la politesse; elle est jalouse de ses droits ; les lords
y sont regardés comme des princes; quarante personnes
de leur état font vivre journellement plus de quatre mille
ouvriers, surtout pour les équipages; leurs chevaux sont
superbes, et surpassent ceux de France. Les femmes sont
assez jolies, et infiniment plus polies et plus honnêtes que
les hommes. Les Français ne sont pas aimés en Angleterre,
s'ils ne jouissent de richesses pour faire de la dépense.
Dans les Pays-Bas, il voit, en passant, l'immense
volière que le fils d'un riche banquier anver-
sois, Louis Van Kessel, s'était fait construire près
- 432 —
d'Anvers, et qui n'avait pas moins de quatre vingt
quatre pieds de long, sur dix-neuf de large et
quarante de haut :
On a raison de dire que chaque homme a sa passion
particulière. Le fils de Louis Van Kessel, banquier de la
ville d'Anvers, fit bâtir dans sa maison de campagne, près
de la ville, une volière de 84 pieds de longueur sur 19 de
large et 40 d'hauteur. L'artiste a employé trente-quatre
milliers de fer, y compris le fil d'archal qui est entre les
barreaux : en été, on y voit près de deux mille oiseaux de
différentes espèces; il y a plus de soixante arbres à fruits ;
deux fontaines d'où découle sans cesse de l'eau très claire ;
il y a plus de quatre-vingts poules ou volailles de différentes
espèces, ainsi que des oiseaux étrangers. Les carnassiers
sont enfermés dans des cages de fer; on leur donne à
manger de la viande et des oiseaux crevés. Cette volière
est gouvernée par deux domestiques ; et, lorsque la famille
Van Kessel est au château, l'après-midi, on ouvre la bar-
rière ; les dames et autres entrent dans la volière, où ils
prennent le café. Les étrangers peuvent voir publiquement
cette volière en entrant au château.
Plus tard, Los Rios se rend en Hollande; en
revenant d'Amsterdam, au mois d'août 1776, il est
nommé membre correspondant d'une Académie de
belle humeur, siégeant à Berg-op-Zoom, et où
n'étaient admis que de joyeux compères qui se
réunissaient pour manger, boire et plaisanter :
Dans le mois d'août 177G, en venant d'Amsterdam, et
passant à Berg-op-Zoom pour prendre la voiture d'Anvers,
je vis au dessus d'une porte ces mots en lettres d'or :
Académie de belle humeur. J'étais curieux de savoir en
quoi consistaient ses instituts et son exercice : le hasard
— 433 -
me servit très bien, car la personne à laquelle je m'adressai,
se trouva être un des membres de cette académie, et il
m'invita à me rendre l'après-midi à leur assemblée, qui
se tient dans une grande salle éclairée par 12 croisées;
elle peut contenir au moins quarante personnes. On n'y
lit ni papiers, ni mémoires ;' on n'y récite aucun discours
de réception; on n'y reçoit que les confrères .de bonne
humeur et d'un caractère gai, pour se plaisanter les uns
et les autres, des diseurs de bons mots, etc. Par leurs
instituts, il est défendu de parler des affaires de famille,
et de critiquer son prochain sur sa bonne ou mauvaise
conduite. L'assemblée de la grande chambre commença
à quatre heures après midi, et finit à huit. A 6 heures, le
concierge sonna une petite cloche; alors le chef de l'aca-
démie sortit de la salle, et tous les confrères après lui ;
on entra dans un salon orné d'une tapisserie et d'un beau
plafond peint et vernis, et on trouva une table servie de
plusieurs plats, savoir : un gros jambon de Mayence, un
pâté froid, deux plats de poisson salé, des figues, des
raisins de Calabre, et de la pâtisserie : pendant ce goûter,
un 'de ces messieurs m'entreprit, et bientôt il eut à son
secours trois à quatre de ses confrères. On me plaisantait
très finement ; je leur répondais par quelques petits traits
de ma façon ; dans le moment, on ordonna de boire à ma
santé, et on me traita en qualité de confrère correspondant
de l'académie de Berg-op-Zoom.
Nota. — Cette académie tient son assemblée tous les
jeudis de la semaine. Les confrères sont libres de venir
ou non, il n'y a point d'amende pour celui qui manque;
l'entrée de chaque confrère, les jours d'assemblée, est de
deux escalins, qui font 28 sols de France; sur quoi le
concierge est obligé de fournir le goûter. Suivant leurs
instituts, le membre doit régaler toute la société, composée
ordinairement de 40 personnes, le jour anniversaire de sa
— 434 —
naissance. Cette journée lui coûte 15 à 1G florins de Hol-
lande, qui peuvent valoir 33 liv. de France. Ces fêtes
arrivent souvent, car elles se répètent 3 ou 4 fois par mois.
On peut attacher à ce voyage, ses observations
sur les mœurs des Juifs d'Amsterdam, sur la
banque de cette ville, sur l'imprimerie en Hol-
lande et sur les curiosités d'Anvers.
En 1766, celui qu'on a pu appeler à juste titre
le Guzman d'Alfarache de la librairie vint se fixer
à Lyon, où il resta jusqu'à 1794, s'adonnant au
commerce de vieux livres, dont il publia de nom-
breux catalogues à prix marqués. En 1789, il en
comptait environ 150, clans une petite note auto-
biographique qu'il avait rédigée pour le diction-
naire historique imprimé par les frères Bruyset,
à Lyon, et dont voici le texte :
DeLosRios (François), né à Anvers, en 1728, d'une famille
distinguée d'Espagne, libraire à Lyon. Son principal com-
merce était celui des vieux livres : il avait un caractère
gai, toujours content de son état et laborieux ; il ne connais-
sait point ses ennemis, ou, du moins, il les ignorait. Nous
avons de lui 150 catalogues de ventes publiques ou autres
dont il était chargé, avec quelques notes remarquables sur
les livres rares et souvent des préfaces extravagantes, d'un
style baroque, qui ont amusé quelques moments les ap-
prentis philosophes ou les hommes de la petite littérature.
Les gens de lettres, dit-il ailleurs,
m'ont honoré jusque présent de leur confiance, et ils
trouveront chez moi, en tout temps, des livres rares et
singuliers, dignes d'embellir leurs bibliothèques. Je les ai
— 435 —
prévenus que je n'étais ni homme de lettres, ni philosophe,
ni même français, et que je ne possédais d'autre connais-
sance que celle d'adorer l'Etre suprême, vivre en bonne
union avec les hommes, et vendre mes livres un peu plus
qu'ils ne m'ont coûté. Ils sont convenus du fait, et leur
complaisance m'a fait pardonner quelques fautes d'ortho-
graphe, tant dans le passé que pour le présent et l'avenir.
Nous sommes loin de la biographie Micliaud qui
fait de notre bouquiniste « l'un des libraires les
plus érudits de son temps ».
En septembre 1794, Los Rios vendit son fonds à
Antoine Lafarge et entra, comme commis, dans la
maison Périsse. Vers la fin de sa vie, il se retira
à Marines, où il passa ses dernières années dans un
état voisin de la misère. Il était devenu totalement
aveugle depuis trois ou quatre ans, quand il mou-
rut, le 24 novembre 1820, âgé de quatre vingt
treize ans et dix mois, laissant son mince patri-
moine à sa nièce, Marie- Catherine de Los Rios de
Brun.
Comme- on a déjà pu s'en apercevoir, François
de Los Rios était, dans toute la force du terme,
ce qu'on appelle un original. La bibliothèque qu'il
s'était formée à sa campagne, n'était composée
que d'une quarantaine de volumes d'anas, de re-
cueils de bons mots, qui lui fournissaient, dit-il,
une source intarissable d'amusement, et devenaient
par là une espèce d'élixir de gaîté. Son meilleur
ami était son cheval, à qui il dédia ses Œuvres,
en lui disant : « Votre sagesse , votre prudence, et
votre fidélité sont les objets qui m'engagent à
— 436 —
vous témoigner ma juste reconnaissance : depuis
que nous sommes associés dans le commerce, grâce
au Seigneur , aucune mauvaise affaire n'a été
contractée, ni accident de banqueroute, ce qui est
assez rare dans ce siècle. Je vous aime, vous êtes
mon ami, et je suis le vôtre; agréez donc ce recueil
où l'on parle de vous; voyez et lisez-le... ». Dans
la préface même de ce recueil, Los Rios annonce
que le prospectus en sera lancé, non par le moyen
des journaux et autres écrits périodiques, mais par
le moyen d'une montgolfière qui s'élèvera dans les
airs, et fera tomber sur l'Europe une pluie d'an-
nonces et d'avis :
Il n'est plus nécessaire de faire annoncer les livres
nouveaux par des journaux, ou autres ouvrages périodi-
ques; l'invention des ballons de M. Montgolfier nous a fait
connaître leur utilité. Celui que Ton doit construire pour
mon usage partira au plus tard le 32 du mois passé. Je ne
doute pas qu'il ne mérite l'attention du public ; je préviens
qu'en huit minutes il montera 150 toises ; une bombe rem-
plie d'artifice fera un éclat qui, par son mouvement, sera
entendu jusqu'au Pérou; et, avant que l'air inflammable
en soit éteint, ce globe se partagera en deux, et inondera
une grande partie de l'Europe des avis et des annonces
de mon recueil. Nous prions les nations étrangères de le
faire traduire en différentes langues à leur usage, afin
que personne n'ignore combien de belles bibliothèques
resteraient imparfaites, si on négligeait d'y joindre le
recueil de mes productions.
Aussi n'est-ce pas sans raison qu'en tête de ce
bizarre volume, où des souvenirs de voyage cou-
doient des notes sur les imprimeurs célèbres, des
— 437 —
anecdotes, des descriptions de tonte espèce, des
réflexions philosophiques, et jusqu'à des observa-
tions sur la manière de conserver sa santé, il a
placé ce laconique avertissement :
A quelque coin de singularité que je sois marqué, je ne
saurais m'imaginer qu'il me soit défendu de m'amuser
quelquefois, et, en même temps, d'amuser les autres, fût-
ce à mes dépens. C'est ce que je, vais tâcher de faire, et
pour cet effet, j'entre en matière sans allonger le préambule.
Los Pàos parle volontiers de sa profession, et on
sent qu'il l'aime; mais, qnoi qu'en ait dit la Biogra-
phie universelle, les renseignements qu'il donne sur
les origines de l'imprimerie et les imprimeurs cé-
lèbres des Pays-Bas, de France, d'Angleterre et
d'Italie ne montrent pas qu'il ait été très instruit
de rhistoire de l'art typographique. Citons, à titre
de curiosité, sa notice sur quelques imprimeurs
célèbres :
Alde, de Venise, était un des plus savants imprimeurs de
Tltalie, et sa réputation ne mourra jamais; il a mérité, par
sa douceur et sa bonté envers ses ouvriers, une place distin-
guée-entre les bienfaiteurs du genre humain. Il a légué, par
son testament, 500 liv. à chacun de ses ouvriers.
Frobenius, savant imprimeur de Bâle, était si bon et si
honnête envers ses ouvriers, que, tous les 3 mois, il leur
donnait un jour de récréation dans sa maison de campagne :
on servait un repas dont il faisait lui-même les honneurs.
Il est certain que, depuis, que l'imprimerie existe, jamais
libraire en Europe n'a autant travaillé ; car, dans l'espace de
54 ans, il a fait paraître 340 volumes de différents ouvrages
in-folio, et près de 700 volumes, tant in-quarto qu'in-8°et
— 438 -
iii-12°. Il n'est donc point étonnant si toutes les biblio-
thèques de France, d'Allemagne, d'Angleterre, et surtout
chez les moines, sont si inondées de ces livres, et qu'on les
vende aujourd'hui pour faire des cornets à tabac.
Martin Ulrique, fameux imprimeur de Paris, sous le
règne de Louis onze, fit imprimer le Spéculum Rodigi
Zamoziensis episcopi* . Ce livre est d'une rareté singulière.
J'en ai vu un exemplaire chez les capucins à Turin, et un
autre au Vatican, à Rome.
Robert Etienne, aussi célèbre imprimeur de Paris, mort
à Lyon en 1520. Les ouvrages sortis de ses presses, en grec
et en latin, seront toujours recherchés à cause de leur
beauté et de leur correction fidèle et sans errata; il était
très instruit et accueilli dans les sociétés des gens de
lettres.
Baltazard Munier, libraire de Wittenberg en 1581, fut
nommé commandant de la ville, et a occupé cette place
l'espace de 33 ans. Il fut très-regretté de ses concitoyens.
Nicolas Vandevelde, d'Amsterdam, fut nommé en 1612,
par les élus, à la charge de premier président des états,
trésorier de la banque d'Amsterdam, et chef des hôpitaux
de la même ville. En 1626, milord Kelt épousa sa fille,
avec douze cent mille livres de France de dot.
Plantin, libraire-imprimeur d'Anvers en 1571, occupa
14 ans la place de commandant de la ville. En 1583, il fut
chargé par la cour d'Espagne de plusieurs négociations
importantes concernant les Provinces-Unies.
1 II serait trop long de relever les erreurs qui fourmillent dans
cette notice de Los Rios. Bornons-nous à faire remarquer qu'il
s'agit ici du Spéculum vitce humance de Rodriguez ou Sanchez de
Arevalo, évèque de Zamora, imprimé à Paris, en 1475, par Martin
Crantz, Ulric Gering et Michel Friburger.
— 43!) —
Nicolas Blaisii , libraire-imprimeur de Venise, fut
nommé par la république, en 1630, ambassadeurs la cour à
Vienne. Il était bon politique et avait un génie pénétrant.
Au retour de son ambassade, la république lui fitfrapper
une médaille d'or au coin de la ville , avec le portrait
du doge.
Les frères Verdussen, imprimeurs-libraires d'Anvers,
ont acquis une réputation très distinguée par la beauté
de leurs éditions en rouge et noir, et ont été appelés dans
les charges les plus honorables, comme celles d'échevins,
trésoriers de la ville, etc.
Les frères de Tournes, une des plus anciennes et des
plus illustres familles de Genève : depuis 1320, ils ont été
honorés, et ont occupé les premières places dans la magis-
trature de la République. En 1503, Jean de Tournes, l'un
des frères, vint à Lyon pour y fixer son établissement de
librairie ; et, en 1507, le premier ouvrage qui sortit de ses
presses fut les fables d'Esope, latin-français, in-18°, avec
des petites figures en bois ; ce fut alors que Louis XII fit
spn entrée à Lyon. Jean de Tournes présenta au prince
un exemplaire de son livre, et le Prince accorda sa pro-
tection à lui et à ses descendants. Cette maison célèbre
a existé plus de deux siècles dans cette ville, faisant tous
les ans pour plus d'un million d'affaires, tant en Allemagne
qu'en Italie, Espagne et Portugal. En 1780, ils ont cédé leur
commerce à MM. Piestre et de Lamollière, leurs élèves,
qui ont augmenté ce commerce d'une imprimerie que l'on
peut regarder comme la plus belle de Lyon, ayant 8 presses
sur la même ligne; la salle est éclairée par quantité de
croisées. L'on y occupe journellement au moins 40 per-
sonnes. Le catalogue de leur fonds de librairie est un
vol. in-8° de près de 600 pages, et contient plus de cinq
mille articles dont ils possèdent, pour la plupart, un grand
nombre d'exemplaires.
— 440 —
Jean Baskerville, célèbre imprimeur-libraire de Bir-
mingham, en Angleterre, mort en 1775, âgé de 00 ans.
Personne avant lui n'avait porté si loin la perfection de
son art : les éditions sorties de ses presses sont de la
plus grande beauté, surtout celle de Virgile, in-4°, et de
l'Arioste, 4 vol. in-S°, dont quelques exemplaires sont tirés
sur grand papier; ce sont des chef-d'œuvres de typo-
graphie. Il gravait et fondait lui-même ses caractères-
il est aussi l'inventeur d'une nouvelle manière de fabri-
quer le papier, qui ressemble à de l'étoffe de soie ; mais il
n'a jamais voulu communiquer son secret à personne. Une
partie de ses caractères sont passés à la Société typogra-
phique de Kehl, près de Strasbourg, qui s'en est servi à
donner plusieurs éditions de Voltaire, tant in-8" qu'in-12°,
dont il a paru jusqu'à présent 51 volumes. Baskerville
jouissait d'une haute considération ; il a eu l'honneur de
loger chez lui, pendant 12 jours, monseigneur le duc de
Cumberland et l'archevêque de Cantorbéry; et, lorsqu'il
venait à Londres, il lui était défendu de loger autre part
qu'à la cour.
Gabriel Martin, libraire de Paris, mort en 1761, avait
une grande connaissance des livres, et possédait l'art de
disposer une bibliothèque. Il était en correspondance avec
les plus célèbres bibliothécaires de l'Europe, et consultait
sans cesse les gens de lettres. Les amateurs conservent
les catalogues faits par lui des ventes publiques dont il
était chargé, et les mettent au rang des bons livres,
surtout ceux de Collert, de Bulteau, de Boisier, de Dufay,
de Hoym, de Rothelin, de Brochard, de la comtesse de
Verne, de Bellanger, de Boze, etc.
Jacob Martens, un des premiers imprimeurs de Louvain,
vint, en 1534, s'établir à Anvers, avec la réputation d'un
homme savant et honnête. Les livres sortis de ses presses
— 441 —
ont presque tous eu le sort d'être vendus à la beurrière,
aussi bien que deux petits volumes de chansons dont il
était l'auteur, qui ont eu le même sort. On peut comparer
cet imprimeur et ses ouvrages à ceux sortis de la plume
du sieur Los Rios, libraire à Lyon.
Je pourrais encore faire mention d'une infinité d'hom-
mes célèbres dans l'imprimerie et librairie, tant à Paris
qu'à Lyon. Cette dernière ville surtout, toujours attentive
à honorer les talents, en a souvent appelé aux charges
municipales, aussi bien qu'à l'administration de ses deux
hôpitaux; tels sont les Rouville, les Cardon, les Vincent, les
Anisson, les Posuel, les Valfray, les Périsse, les Regnault,
les Bruyset, etc.
Sa Bibliographie instructive (1777) est une œuvre
médiocre, dont les notes sont peu importantes, et
qui n'a guère d'intérêt que comme document sur
le prix des livres. La plupart des ouvrages qui y
sont décrits provenaient de la bibliothèque des
jésuites de Lyon, dont Los Rios avait fait l'acqui-
sition en 1768, ainsi que des bibliothèques des
jésuites de Tournon et de Mâcon et des collections
des abbés Piole et Gindre.
Malgré mes recherches, je n'ai pu trouver de
Los Rios que les deux ouvrages dont il a déjà été
question, et dont voici la description bibliogra-
phique exacte :
I.
BIBLIOGRAPHIE || INSTRUCTIVE, || OU || NOTICE || De
quelques Livres rares, Singuliers & || difficiles à trouver, avec
des Notes || historiques, pour connoître & dij-\\tinguer les diffé-
rentes Editions, || & leur valeur dans le commerce; || difpofce par
FRANÇOIS DE LOS-||RIOS, Libraire à Lyon. || 3 liv. broché. ||
30
— 442 —
A AVIGNON, || Chez FRANÇOIS SEGUIN, Imprimeur. || A
LYON, || Chez l'Auteur. || M. DCC. L XXVII. ||
In-8°, XVI pp. pour le titre, l'avertissement et la table des
auteurs, 207 pp. de texte et 1 p. blanche. Avec un portrait en maniçre
noire, profil adroite; un cadre ovale contient l'inscription : François
de Los-Rios, né à Anvers en 1728 [sic], libraire a Lyon depuis 1766 '.
[Bibl. Université de Gand, Hist., n°928].
II.
ŒUVRES || DE || FRANÇOIS DE LOS-RIOS, || Libraire de
Lyon. || CONTENANT || Plufieurs defcriptions & obfervations \\
fur des objets curieux ou particuliers, aventures, voyages, &c.\\
| Fleuron].
A LONDRES, || chez MOLINI, Libraire de l'Académie. || 1789. ||
In-12°, IV et VIII pp. pour le titre et la table des matières,
173 pp. de texte et 1 p. blanche. L'adresse est fausse, selon l'usage
de l'époque pour les livres de cette nature. Le recueil de Los Rios a
sans doute été imprimé à Paris ou à Lyon.
[Bibliothèque royale de Bruxelles, fonds Van Hul-
them,n° 14413].
La France littéraire mentionne encore les deux
œuvres suivantes de François de Los Rios :
III.
Petite bibliothèque amusante, ou recueil de pièces choisies. —
London, printed for S.Crowder,C.Ware andPayne [Lyon], 1781;
2 vol. in-16°.
D'après l'analyse que Breghot du Lut en donne dans ses
Mélanges biographiques et littéraires (1828), ce recueil contient
plusieurs pièces reproduites dans les Œuvres. A la fin de la
seconde partie, se trouve une lettre de l'auteur à Mr G. de B.,
où Los-Rios engage ce dernier à inviter l'auteur des Mémoires et
1 Outre ce portrait, la grande bibliothèque de la ville de Lyon
possède encoi'e un portrait de Los Rios, sans nom d'auteur, qui n'en
est, sans doute, qu'une variante : médaillon, avec des livres sur une
plinthe ; profil à droite ; in-8°.
— 443 —
aventures de don Louis de Guevarra, dont il avait paru deux
volumes, à lui demander, à lui, Los-Rios, d'y ajouter un troisième
volume. J.-S. Ersch cite de la Petite bibliothèque amusante une
édition de Lyon, 17GG.
IV.
La science de la librairie, à V usage des élèves de cet état.
Enfin, d'après une note, qui se trouve à la suite
de la table des matières des Œuvres, mais d'appa-
rence assez fallacieuse, Los Rios aurait aussi écrit
les trois pièces suivantes :
V.
Arlequin libraire-bouquiniste-brocanteur, tend, achète et par-
court les bibliothèques des villes et des campagnes, comédie en
prose et en un acte.
VI.
Le Maréchal -ferrant aux prises avec un célèbre médecin, dis-
pidant une cause de maladies de l'ïiomme et du cheval, comédie
en un acte.
Dans cette pièce, Los-Rios mettait sans doute en scène ce maré-
chal-ferrant de La Guillotière, Pierre Brakman, qui l'avait sauvé,
en 1774, d'une maladie dont la Faculté n'avait pu venir à bout.
VII.
Les fêtes extravagantes des guinguettes aux environs de Lon-
dres, comédie en un acte.
C'est par erreur que J.-S. Ersch lui attribue
plusieurs romans; il s'agit probablement des pro-
ductions de sa parente, Charlotte-Marie de Los
Rios, qui fut maîtresse de pension, et écrivit des
romans à l'usage de la jeunesse '.
Paul Bergman s.
(A continuer).
1 Cf. Biographie nationale, t. V (187G), col. 4G3, v° De Los Rios,
— 444 —
L'ADMINISTRATION PROVINCIALE
ZEIST FLAUDRE
Sous les périodes espagnole et autrichienne1,
(Les États de Flandre.)
La forme sociale et politique dans laquelle un peuple
peut entrer et rester n'est pas livrée à son arbitraire,
mais déterminée par son caractère et son passé...
Si nous parvenons à trouver la nôtre, ce ne sera
qu'en nous étudiant nous mêmes, et plus nous
saurons précisément ce que nous sommes, plus nous
démêlerons sûrement ce qui nous convient....
(H. Taise. Les origines de la France contem-
poraine. L'ancien régime.)
CHAPITRE I.
LES ÉTATS DE FLANDRE JUSQU'EN 1754.
TITRE I.
ÉVOLUTION DE L'ANCIEN POUVOIR PROVINCIAL EN FLANDRE.
Le pouvoir placé à la tête de chaque province
des anciens Pays-Bas était, comme on sait, un corps
représentatif et délibératif, connu, d'une façon
générale, sous le nom d'États provinciaux2.
1 Suite. — Voir Mess, des Sciences histor., 3e liv. 1890, p. 319.
8 La dénomination sous laquelle furent connus les États de
Flandre a quelque peu varié.
Jusque vers la fin du XVIe siècde, il n'est question, dans les docu-
— 445 —
Nous avons examiné brièvement, les origines
de cette institution en Flandre, et les transforma-
tions qu'elle subit jusqu'au commencement du
régime espagnol.
En dépit de toutes ces transformations, les États
de Flandre constituèrent toujours le premier pou-
voir de la province. Cette vérité résulte déjà de ce
qui précède et ressortira plus clairement encore de
ce qui va suivre.
On a vu quelle était la jouissance des anciens
Parlements, on les a vu participer à tous les actes
de la politique intérieure et même à ceux de la
politique extérieure du pays.
Sous les ducs de Bourgogne, ou tout au moins
jusque vers la seconde moitié du XVe siècle, les
ments publiés que des Quatre Membres et Estais du pays et conté de
Flandres * .
En 1599 seulement apparaît la dénomination : les Ecclésiastiques
et Quatre Membres de Flayidres **.
Au XVIIe siècle on emploie tantôt cette dernière dénomination,
tantôt celle-ci : les Estats du pays et conté de Flandres, ou encore :
les Estats de la province de Flandres **'.
A partir de la fin du XVIIe siècle et jusqu'en 1754, le titre de
cette assemblée ne varia plus et fut le suivant : les Ecclésiastiques et
Membres de Flandre [de Geestelijcke en de Ledenvan Vlaendren).
Disons enfin que les pièces de cette dernière époque émanant du
pouvoir central portaient généralement la suscription passablement
longue que voici : A très révérends Pères en Dieu, vénérables nobles,
très chers et bien amez, chers et bien amez, les ecclésiastiques,
nobles, membres et Députez des villes et chastellenies subalternes du
Pays et comté de Flandres représentant les Estats d'icelluy Pays ou
leurs Députez.
* Archives communales de Gand. Inventaire général Ml, série 91 1.
** Idem.
*** Idem.
446 —
États, où les Quatre Membres étaient prédomi-
nants, sont encore en plein exercice de leur puis-
sance ',
Ce fut la belle époque des États, mais malheu-
reusement, elle ne dura guère. On a vu, en effet,
de quelle rude façon ils furent traités , dans la
suite, par Charles le Téméraire, et comment ils se
conduisirent à l'égard de ce prince.
Loin de nous, la pensée de nier que le seul fait
d'oser concevoir de la résistance aux ordres du
puissant duc, ne dénotât encore chez eux le senti-
ment d'une certaine force; mais, il est évident,
d'autre part, que la promptitude avec laquelle ils
s'inclinèrent prouve que leur résistance ne s'ap-
puyait plus, dès lors, sur des bases bien sérieuses
et que, de cette époque déjà, date la décadence de
leur ancien pouvoir.
1 Le 5 février 1408, les États réunis à Gand, correspondent avec
les ambassadeurs anglais, à Calais (Gilliodts, loc. cit., p. 38).
« A cette époque (même auteur, p. 263), les États de Flandre
« composés des Quatre Membres — Gand, Bruges, Ypres et le
« Franc — continuaient à tenir leurs séances à Gand, et s'y établis-
« saient pour ainsi dire en permanence.
« Peu à peu ils avaient entrepris la direction de toutes les affaires
« générales intéressant le pays; ils étaient devenus une véritable
« puissance avec laquelle les ducs devaient compter.
« Ce n'était plus là un simple corps consultatif appelé à émettre
« des vœux sans sanction. Ils formaient un corps délibérant, et leurs
« décisions avaient la force qui s'attache à l'expression régulière et
>. légale de la volonté du peuple.
« Les relations extérieures les préoccupaient à un même degré que
« l'administration intérieure... En un mot, s'il nous est permis
« d'introduire à cette époque éloignée notre langage moderne, nous
« dirons qu'ils avaient jeté les premières bases du système représen-
« tatif. »
— 447 —
Notons, du reste, qu'antérieurement aux ducs
de Bourgogne, la Flandre n'était, à proprement
parler, pas une province, mais un véritable État,
dans lequel les Parlements étaient quasi souve-
rains. Mais, la « provincialisation » — s'il nous est
permis d'employer ce mot — des petits États, consé-
quence naturelle de la formation des grands, com-
mence à l'époque des ducs, et s'achève, en Flandre,
par la réunion du comté à la couronne d'Autriche.
Les États du pays devinrent, dès lors, sinon en
droit, du moins en fait, peu à peu, de simples
États provinciaux.
Dans la suite, le pouvoir central s'établit de plus
en plus solidement et s'appliqua constamment à
limiter le cercle d'attributions des États, aux
intérêts économiques de la province.
De là, le pouvoir provincial.
On aura remarqué ' que l'on peut distinguer
deux grandes étapes dans l'évolution du pouvoir
provincial en Flandre.
La première comprend une période d'oligarchie
des grandes villes; elle commence, pour ainsi dire,
à l'origine de l'institution et se maintient jusqu'en
1754.
Sous l'influence des idées de cette époque, et
aussi par raison politique, une réforme radicale eut
lieu en cette année : les petites villes et le plat
pays acquirent une part dans le pouvoir provincial.
Voici comment ce pouvoir est défini par un
homme politique du XVIIIe siècle, le comte de
1 Voir l'Introduction.
— 448 -
Neny, chef et président du Conseil privé, dans ses
Mémoires historiques et politiques sur les Pays-Bas
autrichiens '.
« Le pouvoir des États, dit-il, doit être borné au
« droit de consentir aux impositions et à une ad-
« ministration économique sans juridiction, sans
« aucune attribution de la puissance publique, car
« ils ne sont que les représentants du corps des
« sujets : les tributs qu'ils lèvent sur les peuples
« sont des fonds appartenant au Souverain, impo-
« ses en vertu de leur consentement, mais par l'au-
« torité du Souverain, sans laquelle nulle espèce
« d'impôt n'est légitime. »
Telles étaient les idées que l'on avait, vers la fin
du XVIir siècle, dans les sphères gouvernemen-
tales, au sujet du pouvoir provincial.
Cependant, qu'on ne s'y trompe pas, ce pouvoir
« borné au droit de consentir des impositions »
avait, dans la pratique, les conséquences les plus
graves. En effet, le souverain ne pouvait évidem-
ment gouverner sans argent, et, comme les États
n'accordaient celui-ci que sous certaines conditions,
il s'en suivait que le pouvoir des États, quoique
bien restreint dans les derniers temps, surtout
comparativement à ce qu'il avait été, constituait
encore toujours une puissance assez considérable,
soit pour empêcher, le cas échéant, le Souverain
de prendre une mesure arbitraire, soit pour lui
imposer des réformes ou des améliorations dans
toutes les branches du gouvernement.
1 Tome II, p. 153.
- 440 -
TITRE IL
COMPOSITION DES ÉTATS.
Les États se composaient de deux éléments bien
distincts : l'élément délibératif et l'élément consul-
tatif.
Les chefs-villes, et, plus tard, le clergé, consti-
tuaient le premier; la noblesse, pendant quelques
temps, et les villes, châtellenies, métiers et districts,
constituaient le second.
L'élément délibératif avait ses représentants à
l'Assemblée de la Députation ' tandis que l'élément
consultatif n'en avait pas.
8 1.
l'élément délibératif.
Le Clergé.
D'après Zaman2, le clergé ne commença d'en-
voyer des députés aux États — c'est-à-dire qu'il
n'y acquit voix délibérative — que dans la seconde
moitié du XVIe siècle.
« Vers l'an 1551, dit cet auteur, on accorda un
« subside considérable ; pour le pouvoir païer on
1 On verra plus loin ce que fût ce Collège.
s Loc. cit., p. 89. On fait naturellement abstraction des faits qui se
sont passés antérieurement à la période espagnole.
— 450 -
« mit des accises ou impositions sur plusieurs
« espèces de consomption et autrement, et on
« créa des Rentes, lesquels on affecta sur le revenu
« de ces accises '. Par l'accord de ce subside, les
« Quatre Membres eurent la collecte et la direction
« de ces accises, d'où l'Assemblée de leurs Députez
« devint plus fréquente. Et comme le clergé avait
« consenti de païer aussi ces impositions 2 il joignit
« ses Députez à ceux des Quatre Membres, d'où
« est venu l'Assemblée qu'on appelle celle des
« Députez des Ecclésiastiques et Membres... «
Cela dura ainsi, d'après le même auteur, jus-
qu'en 1576; mais, dit-il, à cette époque, la. reli-
gion réformée ayant pris le dessus en Flandre, le
clergé fut exclu des États. Toutefois, les Membres
daignaient lui reconnaître, de temps à autre", voix
consultative.
Telle est la version de Zaman ; il est regrettable
que, suivant son habitude, cet auteur n'indique
pas les sources où il a puisé.
S'il faut en croire un Mémoire rédigé par le
baron de Thysebaert, premier pensionnaire de la
ville de Gand, en 1719 3, les choses ne se seraient
pas absolument passées ainsi.
On verra plus loin, la véritable cause de l'éta-
blissement des impôts dont parle Zaman.
1 Voir plus loin le véritable motif de l'établissement de ces impôts.
5 On doit observer ici que les subsides si considérables accordés
alors devaient servir à subvenir aux frais entraînés parles guerres de
religion de cette époque, et que le clergé eu consentant à intervenir,
stipula que son intervention cesserait à partir du rétablissement de
la paix religieuse. Cela résulte de divers actes d'accord.
3 Bibliothèque de l'Université de Gand. Collection de documents
citée.
— 451 —
Antérieurement, à rétablissement de ces impôts,
le clergé n'intervenait pas dans le payement des
subsides qui se levaient d'après le Transport sur
lequel le clergé ne figurait pas.
A partir de Tannée 1543, le Transport ne servit
plus à la levée du subside.
Depuis cette époque, jusqu'en 1G31, des impôts
furent établis à cette fin, et le clergé contribua,
comme tout le monde du reste, dans le payement
de ces impôts. Mais on ne songea pas pour cela à
faire rentrer le clergé aux États ': « le tout s'est
« présenté et fait, dit l'auteur du Mémoire, de la
« part et à la réquisition des Quatre Membres,
« sans qu'il y soit entre venu aucun consentement
« des Ecclésiastiques (p. 3). »
Les Ecclésiastiques (comme les nobles) s'en
plaignirent et demandèrent à n'être soumis à l'im-
pôt que de « leur préalable aveu et consentement. »
Leur demande fut rejetée ; tout au plus obtinrent-
ils que trois Députés de leur ordre pussent assister
à l'audition des comptes de l'accord fait par les
Membres de Flandre (décret du 10 février 1551).
Durant la période des troubles, le clergé paya
assez volontiers l'impôt pour procurer au gouver-
nement espagnol les moyens de détruire la réforme
dans les Pays-Bas.
Mais, en 1593, les Ecclésiastiques refusèrent
même de donner l'avis qui leur avait été demandé
par les Membres sur l'octroi d'un subside. Ils
prétendirent alors qu'il ne suffisait plus de les
consulter, mais qu'ils avaient le droit de faire
partie de l'Assemblée de la Députation, en d'autres
- 452 --
termes, comme nous l'avons déjà vu, d'avoir voix
délibérative.
A cette époque cependant, les Quatre Membres
furent encore autorisés à passer outre à ce refus.
C'est alors que le clergé « forma un débat contre
les Quatre Membres » qui fut envoyé le 12 octo-
bre 1596 au Grand Conseil, lequel décida par
arrêt du 5 du mois de novembre suivant « qu'en
« toutes convocations et assemblées qui se feront
« pour le fait des aj^des et autrement, èsquelles
« les supplians seront appelles, leur sera donné la
« place que leur qualité et dignité le requiert,
« et selon qu'avant les troubles dernières a été
« observé ' . »
Ce serait trop s'avancer que de conclure de cet
arrêt que le clergé avait obtenu gain de cause, car,
comme nous venons de le dire, nous n'avons trouvé
avant « les troubles » que le décret du 10 février
1551 qui n'accorde au clergé que le droit d'assister
à Y audition des comptes de V accord fait par les
Membres, ce qui, on en conviendra, est tout autre
chose que d'obtenir le droit de faire partie de la
Députation et d'avoir voix délibérative.
On tarda encore quelques années d'ailleurs avant
d'admettre les prétentions du clergé, et ce ne fut
qu'à partir de l'an 1616 2 et après divers arran-
gements, que cet état acquit définitivement voix
délibérative et fut régulièrement représenté à
l'Assemblée de la Députation.
1 Placards de Flandre, Ve livre, p. 335.
2 Wynants dit 1610 (Mémoires contenant des notions générales de
tout ce qui concerne le Gouvernement des Pays-Bas, formées en
1730. Biblioth. de l'Université de Gand, manuscrit n° 142).
- 453 —
L'ordre ecclésiastique avait clans l'Assemblée
une voix collective \
Il formait dans chacun des deux diocèses un
corps composé de l'évêque, des abbés des monas-
tères et des chapitres de chanoines. Les réunions
de ces deux corps avaient lieu dans les palais épis-
copaux et les résolutions s'y prenaient à la plura-
lité des voix 2.
Ils pouvaient envoyer à l'Assemblée de la Dépu-
tation deux ou trois députés au plus 3. En fait, ils
n'en envoyèrent jamais que deux.
Le clergé tenait le premier rang dans les États l.
Telle était la loi, mais en fait, ceux de Gand pré-
tendirent ne pas lui être inférieur et soutinrent
toujours qu'ils constituaient le premier Membre de
Flandre, à preuve, disaient-ils, entre autres, que
les députés de Gand « signent en parallèle avec
a ceux des ecclésiastiques, le membre de Bruges,
« sous la signature des ecclésiastiques, et ceux du
« Franc, sous la signature des députés de Gand5. »
1 Sentence du 5 novembre 1596 et décret du 20 mars 1597 (Plac.
de Flandre, Ve livre, p. 335-336).
* Archives communales de Gand, Inventaire cité, série91;l et 91 2.
Au XVIIe siècle les réunions de tout le clergé de Flandre avaient
lieu dans le palais de l'évêque de Bruges (Archives État-Gand,
reg. 567, f° 20).
3 Décret du 20 mars 1597 cité.
4 Idem, voir aussi Raepsaet, loc. cit., p. 31.
8 Archives communales de Gand, Inventaire cité, série 91/9. Voir
aussi le Mémoire du baron Thysebaert où l'on conteste formellement
la prééminence du clergé. Voici enfin un extrait d'un document de
l'année 1594 : « Jehan Douchet, huissier d'armes du grand conseil
de Sa Majesté, déclare d'avoir fait commandement comme je fais par
cestes à messires les Echevins de la ville de Gand, comme premier
membre du pays de Flandres, représentant aussy les aultres trois
membres des Etats du dit pays de Flandre, etc. »
— 454 —
Enfin, la composition de Tordre ecclésiastique
varia quelque peu , selon les époques.
Sous Charles Quint, il se composait de cinq
évêques, trente-deux abbés, six prévôts, cinq
prieurs, etc. (Wielandt {loc. cit.), en donne la
nomenclature complète.)
Au XVIIe siècle, Tordre ecclésiastique aux États
se composait des évêques de Gand et de Bruges, de
dix^neuf abbés et de quatorze chapitres.
Dans la première moitié du XVIIIe siècle la repré-
sentation ecclésiastique ne comptait plus que les
deux évêques de Gand et de Bruges, onze abbés et
onze chapitres.
En 1775 ', la composition était la suivante :
Clergé de Gand, Tévêque, les abbayes de Saint-
Pierre, d'Eenaeme, Ninove, Tronchiennes , Bau-
deloo et Waerschoot; les chapitres de Saint-Bavon,
Sainte-Pharaïlde, Notre Dame de Courtrai, Notre
Dame de Termonde, Saint-Sauveur (Harlebeke),
Saint-Martin (Alost) et Saint-Hermès (Renaix). —
Clergé' de Bruges, Tévêque, les abbayes d'Ouder-
burgh (Oudenbourg) , Saint- André, des Dunes,
d'Eeckhaute (Bruges) ; et les chapitres de Saint-
Donat, Notre Dame, Saint-Sauveur (Bruges) et
Saint-Pierre (Thourout).
Antérieurement, il y eut aussi les abbayes de
Saint- Adrien (Grammont), de Loo, de Saint- Winox
(Berghes), Saint-Jean du Mont (Ypres); Waestene;
Zonnebeke, les prévôtés d'Eversham, de Worme-
zele, et de Watene (Watou), etc.
1 Mémoire n° 47U (Archives État- Gand).
— 455 —
Les Membres.
La représentation la pins importante était, sans
contredit, celle des villes on Membres. Elle se com-
posait des villes de Gand, Bruges et Ypres, ainsi
que du Franc de Bruges .
La ville d' Ypres ne fut représentée que jusqu'en
1678. Après le traité de Nimègue, du 17 septembre
1678, Ypres fut cédée à la France, et après la
rétrocession de cette ville à la Maison d'Autriche,
elle ne fut plus représentée aux États.
Chacune des chefs-villes ayant une voix décisive,
leur représentation était prépondérante aux États,
puisqu'elles disposaient, après 1678, de trois voix
sur quatre et, auparavant, de quatre voix sur cinq.
Nous avons déjà montré, d'après Warnkoenig,
que la cause première de cette prépondérance des
grandes villes ou chefs-villes sur le plat pays, rési-
dait dans l'ancienne organisation judiciaire qui
rendait les communes du plat pays justiciables de
leur chef-ville.
Mais, d'autres causes encore assurèrent la pré-
potence de celles-ci.
Ces causes peuvent être divisées en trois caté-
gories principales : militaires , commerciales et
financières.
Au point de vue militaire, les chefs-villes avaient,
selon l'expression de Zaman (loc. cit., p. 78, IX),
la direction « d'Armes et de Guerre. » Le môme
auteur donne des considérations très intéressantes
à ce sujet et publie une a ordonnance sur le fait de
Guerre pour le Membre de Gand » (p. 78 à 83),
— 456 —
La puissance commerciale des Membres, qui fut
la source de leur puissance financière, était, comme
on sait, extrêmement considérable.
Elle puisait son origine dans les Hanses. Les
chefs-villes furent d'abord affiliées à la Hanse de
Londres et ensuite à la Hanse teutonique. Cette affi-
liation les mettaient — on a déjà pu le constater
— en rapports diplomatiques directs avec les États
voisins. On sait aussi que la Hanse avait une marine
marchande et militaire. Ceux de Bruges et du
Franc en avaient la direction.
Cette marine était fortement organisée et eut
des fastes remarquables.
Ainsi, « en 1422, la Hanse put rassembler 240 na-
vires et 12,000 hommes pour combattre le roi de
■Suède, et, un demi siècle après, elle déclara la guerre
aux Anglais, se saisit de leurs vaisseaux sur toutes
les mers et fit plusieurs descentes sur leurs côtes ' . »
On conçoit combien une telle puissance à l'exté-
rieur devait avoir son contre coup sur la politique
intérieure du pays. Aussi, avons-nous eu déjà l'oc-
casion de montrer que les Quatre Membres me-
nèrent, à un moment donné, pour ainsi dire seuls,
toutes les affaires politiques du Comté, tant inté-
rieures qu'extérieures.
Mais, ces deux premières causes ne doivent
cependant être envisagées que comme ayant établi,
à l'origine, la supériorité des Membres. A l'époque
où nous sommes parvenus, elles ne sont plus qu'un
souvenir.
La cause principale, et qui dura pendant pres-
{ La Belgique actuelle au point de vue commercial, colonial et
militaire, 2" édition, 1889 (passage extrait de Strada).
— 457 —
que tout l'ancien régime, était la grande richesse
des chefs- villes qui payaient, et de beaucoup, la
plus forte part contributive dans les subsides.
On sait déjà que chaque ville, châtellenie, métier,
pays ou district , contribuait aux subsides pour
une cote proportionnelle établie par le cadastre ou
Transport.
Or, d'après le premier Transport, qui date de
l'année 1309, les trois chefs-villes Gand, Bruges et
Ypres, intervenaient dans le subside pour environ
40 p. c. — H y a lieu de noter, qu'à cette époque, le
Franc, qui payait, à lui seul, 14 p. c. du subside,
n'était pas encore le quatrième Membre de Flandre.
En 1408, on dressa un nouveau Transport,
« pour ce que depuis le dit viel transport (celui
« de 1309) ordonne plusieurs des villes et parroces
« et partie des chastellenies de nostre dit pays
« deuers les marches de la mer sont tellement
« apouries et les aucunes du tout noyées et jnun-
« dees de la diète mer et les autres diminuées, et
« en voie de desercion tant par le fait dicelle mer,
« comme par le fait des commotions qui ont este
« derrenierement en nostre dit pays de Flandres,
« et autrement en pluiseurs manières, que celles
« ne pourroient en aucune manière selon le dit
« viel transport supporter ne paier leur porcion
« du dit ayde, aincois en seroient du tout désert
« et mis a destruction etc. ' »
1 Les députés des Quatre Membres de Flandre qui préparèrent le
nouveau Transport de 1408 s'assemblèrent à Oudenbourg et reçurent,
à titre de frais de séjour, une somme équivalant, savoir pour les
chevaliers ou nobles, à 4 francs par jour, pour les autres, à 3 francs
par jour (Gilliopts, Invent. cité, p, 20).
31
— 458 —
Les cotes réunies des quatre chefs collèges for-
maient, d'après ce Transport de Tannée 1408,
50 p. c. du montant du subside.
Un troisième cadastre fut dressé en 1517 ' , et un
quatrième, le dernier de juillet 1631. Celui-ci resta
en vigueur jusqu'en 1794.
D'après le Transport de 1631, les chefs collèges,
réduits de nouveau à trois, à partir de 1678, par
suite de la cession d'Ypres à la. France, ne payaient
plus guère qu'un peu au-delà du quart du subside2.
On vient donc de voir que, jusque dans la
1 Le Transport de 1517 ne put jamais être sérieusement appliqué.
Un placard du 23 août 1550 en décide la revision. Ce placard constate
que l'on a dû faire des remises du quart, du tiers, voire de la
moitié sur le montant des cotes à payer par les collèges d'après le
Transport de 1517. On verra plus loin (titre IV), pour quelles raisons
le nouveau Transport ordonné par l'édit de 1550 ne fut dressé
qu'en 1G31. On devait tenir compte, dit le placard de 1550, notam-
ment du revenu que chaque ville retirait de l'accise sur le vin et la
bière, de l'étendue territoriale de la ville, de la valeur locativ'e des
terrains, de la situation des villes, du nombre des maisons sises dans
chaque ville, du nombre des moulins, du nombre de personnes
exerçant les métiers de charron, forgeron, scieur, drapier, tisserand,
menuisier, etc. (Voir Placards de Flandre, livre III, p. 372 et suiv.).
2 D'après le Transport de 1631 :
Le Franc payait 9 livres pour 100 livres.
Gand » 6 1.14 s. 9 d. pour 100 livres.
Bruges » 5 1. » »
Ypres » 2 1. 1 s. 10 '/a d. »
(Placards de Flandre, livre III, p. 378 et suiv.)
En 1692, les États accordent un subside de 1,315,000 florins.
La ville de Gand y contribue en fait pour 88,598-2-6.
» Bruges » » 65,750-0-0.
Le pays du Franc » » 118,350-0-0.
En 1694, accord d'un subside de 400,000 florins.
La ville de Gand contribue pour 50,389-0-0.
» Bruges » » 37,370-0-0.
Le pays du Franc » » 67.190-0-0.
— 4.7) —
seconde moitié du XVIIe siècle, les Quatre Membres
payaient à eux seuls la moitié du revenu que le
Souverain tirait de la Flandre1. A partir de cette
époque, ils paient encore toujours plus du quart de
ce revenu.
Cette grande puissance financière fit que les
princes eurent constamment toutes sortes d'égards
pour les Membres et laissèrent acquérir à ceux-ci,
au détriment de la noblesse et des villes subal-
ternes, une très grande influence. Et ce, d'autant
plus, que les dispositions de Tétat ecclésiastique
n'étaient guère favorables au payement des aides
et subsides. Nous avons déjà vu, en effet, que le
clergé ne commença à payer sa part que lors des
guerres de religion qui désolèrent les Pays-Bas au
XVIe siècle. Après le rétablissement de la paix
religieuse, il continua (sauf une petite interruption)
à payer sa cote, mais en ayant toujours soin de
faire des réserves, portant « qu'il n'était pas impo-
sable, qu'il devait être exempt de toute charge,
1 Et comme la Flambe contribuait pour plus du quart dans les
charges demandées aux Pays-Bas, il s'en suivait que, à un moment
donné, les quatre chefs collèges fournissaient à eux seuls la huitième
partie du revenu total des Pays-Bas.
La Flandre était d'ailleurs la plus belle et la plus riche province
de l'époque : .... » Aucune des autres provinces dû Pays-Bas encore
« soumises à l'Auguste Maison d'Autriche ne pouvant être comparée
« à la partie de la Flandre qu'elle y possède actuellement, ni pour la
« multiplicité, ni pour la variété, ni pour l'importance des adminis-
« trations.... La Flandre Orientale laquelle quoique très démembrée
« forme encore telle qu'elle est la plus belle et la plus riche province
« des Pays-Bas. » (Rapport sur l'état des administrations de la
Flandre Orientale, de la Flandre rétrocédée et de Tournai et Tour-
nesis, rédigé en 1777 par l'auditeur Mcller. — Archives du royaume.
Inventaire des registres de la Jointe des administrations. Iteg. 144.)
— 460 —
mais qu'il consentait cependant, sans toutefois
vouloir engager l'avenir, à payer sa part dans le
subside demandé à la province, par pur esprit de
conciliation et par dévouement au service du
Prince. »
Cela n'était guère rassurant pour celui-ci qui ne
pouvait donc positivement compter que sur les
Membres.
Les motifs de la prépondérance des Quatre Mem-
bres étant exposés, voyons maintenant quelle était
leur constitution.
C'était la grande commune ou large conseil qui,
dans chaque chef- ville, formait le second ordre des
États de la province.
La composition de ces larges conseils qui consti-
tuaient la représentation du « tiers, » variait de
l'une ville à l'autre.
A Gand, il était appelé « la Collace » et se com-
posait, depuis 1540 : 1° des échevins sortis de la
dernière loi ' ; 2" de quarante-deux notables dési-
gnés par le Magistrat et tirés en nombre égal des
sept paroisses2.
A Bruges, il se composait de trois membres :
1° les anciens bourgmestres; 2° les anciens éche-
vins et conseillers 3; 3° les doyens des métiers, au
1 11 y avait, comme on sait, à Gand vingt-six échevins (treize de
la Keure et treize des Parchons).
1 Concession Caroline de 1540. — Une ordonnance du 26 fé-
vrier 1759 {Placards de Flandre, livre V, p. 490) décida que doré-
navant les quarante-deux notables formeraient seuls la Collace.
3 11 y avait à Bruges un bourgmestre, des échevins et douze éche-
vins; un bourgmestre de la commune et douze conseillers.
— 4G1 —
nombre de trente-quatre, réunis aux six chefs-
hommes ou capitaines des portes ' .
A Ypres, ce qu'on appelait la grande commune,
était formée de six chambres ou collèges. Le pre-
mier collège était le Magistrat renforcé des treize
conseillers (raeden van de camere); le deuxième
était celui des vingt-sept conseillers (raeden seven
en twintig) ; le troisième, celui des quinze notables
(notabele poorters) ; le quatrième, celui de la dra-
perie (cinq membres) ; le cinquième, celui de la
sayetterie (cinq membres); et le sixième, celui du
négoce commun (de gemeene neirynghe), composé
de dix gouverneurs des métiers.
La généralité du Franc était représentée par
trois Membres : 1" les nobles et notables dont le
nombre était indéterminé ; 2° les seigneuries vas-
sales qui se subdivisaient en seigneuries contri-
buantes et appendantes ; leur nombre variait éga-
lement2, et 3° les chefs hommes des seigneuries
de la Keure 5. Chacun de ces trois Membres avait
une voix.
Le Magistrat du Franc émettait un avis sur les
propositions ; cet avis était communiqué à la Géné-
ralité qui était convoquée et assemblée par les
soins du Magistrat1.
1 Précis du régime municipal, par Gachard, p. 56. — Essai sur le
droit communal, par Giron, p. 35.
3 En 1775, par exemple, il y avait vingt-quatre seigneuries appen-
dantes ; il y eut de six à dix seigneuries contribuantes.
3 Le nombre de paroisses de la Keure s'élevait à 67.
1 Ce magistrat était composé de quatre bourgmestres renouvelé
tous les ans, de vingt-huit échevins nommés à vie, de douze pension-
naires et de deux greffiers {Recueil et sommaire Déduction du gou-
vernement des Païs-'Bas, etc. Bibliotb. univ. de Gand; man. n° 425).
— 462 —
Chacune des trois chefs-villes et la communauté
du Franc, envoyait un Député à l'Assemblée de la
Députation qui représentait les États.
§2.
l'élément consultatif.
Les autres villes, châtellenies, métiers, pays et
districts, que l'on appelait les « subalternes » fai-
saient aussi partie des États. Mais le pouvoir de
ces « subalternes » ou « moindres villes » fut ré-
duit, du moins jusqu'en 1754, à l'émission d'un
simple avis sur toutes les demandes ou proposi-
tions faites par le Gouvernement. Elles ne pou-
vaient même, conformément à une ordonnance de
1542, s'entendre pour faire accorder leurs avis,
tandis que la même ordonnance chargeait les dé-
putés des Quatre Membres qui siégeaient, comme
anciennement, en permanence, ou peu s'en fallait,
de faire « la despeche de la réponse générale ou
« de dresser l'acte d'accord du subside'. »
Les « subalternes » réclamèrent, à différentes
reprises, leur voix délibérative ou décisive aux
États. La question ne fut tranchée définitivement,
et en leur faveur, qu'en 1754. Jusque-là, elle ne
l'avait été que provisoirement, par l'arrêté provi-
sionnel des archiducs Albert et Isabelle de Tan 1614,
1 C'est là, semble-t-il, l'origine ou plutôt la reconnaissance offi-
cielle de l'Assemblée de la Députation ou de la Députation perma-
nente des États.
— 4G3 -
lequel maintenait d'ailleurs le statu quo. — Voici,
en effet, ce que porte l'article premier de cet
arrêté : « Premièrement, sur ce que les Députez
desdits villes et châtellenies subalternes prétendent
d'avoir voix décisive avec les dits Ecclésiastiques
et Quatre Membres de nostre pays de Flandres, ou
bien avec le Membre particulier soubz lequel elles
ressortissent. Nous entendons que ceux des dits
Villes et châtellenies subalternes se devront contenter
quant à présent de donner par escrit leur a ris et
opinions délibératives sur les jjrojjosilions qui se
feront aux dits Ecclésiastiques et Quatre Membres »
et l'article II porte : « Sur lesquelles propositions
et avis iceux Ecclésiastiques et Quatre Membres
prendront les résolutions qu'ils trouveront convenir
à pluralité de voix etc. »
Zaman (toc. cit., p. 2 A3) qui plaidait la cause des
subalternes, conclut de ce texte « que générale-
ment toutes les villes , Pays et chastellenies de
Flandres qu'on est accoutumé de mander aux
assemblées pour entendre les propositions, ont
chacun leur voix délibérative à l'égard des affaires
de la Province, et des accords des subsides; mais
que les Ecclésiastiques, les quatre Communautez,
qu'on appelle les Quatre Membres, peuvent à la
pluralité des voix entre eux donner la voix déci-
sive, quand les voix délibératives des villes et
châtellenies sont également, ou pour la plupart,
discordantes et non conciliables : vu que sans cela
il est évident, que l'on n'a point besoin de voix
décisive. Il est notoire qu'on appelle une voix
délibérative, lorsqu'on a droit de dire dans une
— 464 —
assemblée, dans une délibération ou dans un juge-
ment, son avis ou opinion, et qu'il y est compté
parmi les suffrages : et qu'on appelle, au cas susdit,
une voix décisive sur des voix délibératives, un
avis ou opinion par lequel on décide, résoud ou
prononce en dernier ressort sur les avis délibératif s
contraires ou differens, ou du moins pour 'la plus
partie. »
Ces considérations sont très justes, mais elles
n'enlèvent rien, à notre sens, au caractère de subor-
dination du plat pays à l'égard des chefs commu-
nautés.
Quant à la noblesse, nous avons vu, qu'à l'ori-
gine, et pour certaines affaires de grande impor-
tance, les nobles étaient convoqués aux États.
Nous avons vu aussi qu'ils s'abstinrent généra-
lement d'user de cette prérogative préférant s'en
décharger sur les Quatre Membres.
Les Nobles d'ailleurs, on le sait déjà, ne furent,
pour ainsi dire, jamais convoqués pour les ques-
tions de finances et de subsides (lesquelles consti-
tuaient, comme on le verra, les attributions essen-
tielles des États), et cette exclusion s'explique tout
naturellement, si Ton se rappelle que Tordre noble
étant, à l'origine, exempt des charges et tailles,
n'avait, à cette époque, aucun intérêt à paraître
dans ces assemblées.
Mais, d'autre part, on s'explique tout aussi bien
les réclamations que les nobles firent valoir plus
tard, lorsque les souverains commençant à se
passer de leurs services militaires, ils perdirent
peu à peu le privilège de l'exemption des autres
— 465 —
charges. Zaman (toc. cit., p. 128) rapporte que, déjà
en 1477, une partie de la noblesse dut payer su
part dans le subside : n'étaient exempts que" ceux
d'entre les nobles qui, à cause de leurs fiefs,
étaient encore astreints au service militaire. Sous
Charles Quint, on n'employa plus guère dans les
armées que des mercenaires, et, à partir de cette
époque, la noblesse, presque toute entière, se trouva
astreinte à participer au payement des impôts pré-
levés alors en vue des subsides à accorder au Sou-
verain par les États.
Ses intérêts se trouvant ainsi engagés, elle
commença, dès lors, à demander de pouvoir inter-
venir dans l'assemblée des États pour les questions
d'aides ou d'impôts.
Cette demande était naturelle et légitime, et il y
fut fait droit, du moins en partie : désormais les
nobles eurent voix consultative aux États ' .
Malheureusement pour eux, ils négligèrent
encore l'exercice de ce droit, déjà si restreint, et
s'abstinrent, le plus souvent, d'envoyer l'avis qui
leur était demandé. C'est ainsi que clans maint
acte d'accord de subside, et, entre autres, dans
celui du subside consenti en 1594"2, il est constaté
que les Quatre Membres ont demandé l'avis des
1 Wielandt, parlant des États de Flandre, cite l'ordre noble
comme « le second estât de Flandres, » « les États de l'Église »
étant les premiers, mais il n'entre dans aucun détail . On sait qu'il
écrivait sous la minorité de Charles-Quint {Recueil des Chroniques
de Flandre, publiées sous la direction de la Commission royale
d'histoire par J. J. Desmet, tome IV, Bruxelles, Haye/., 1865).
2 Archives communales de Gand, Inv. cité, série 91/1.
— 4fi6 —
nobles et que « trois ou quatre » de ceux-ci seule-
ment ont répondu.
Mais, il faut dire aussi que, de leur côté, les
Quatre Membres négligaient assez souvent de de-
mander cet avis, à telles enseignes qu'un décret
du 20 mars 1597 ' dut les rappeler à l'observance
des « anciennes formes. »
Malgré cela, on persista dans les anciens erre-
ments, et nous ne voyons plus que les nobles aient
été encore consultés en matière d'aides ou d'im-
pôts, dès les premières années du XVIIe siècle. Ils
introduisirent même de ce chef, en 1628 2, auprès
du Grand Conseil, un procès qui, il est vrai, ne
reçut jamais de solution 5.
Néanmoins, il n'est pas absolument exact de
1 On trouvera plus loin le texte de ce décret, extrêmement impor-
tant en cette matière.
2 En 1737, il y eut un essai de rétablissement de la noblesse
comme troisième ordre des États ; ce rétablissement ne dura pas. Il
disparut avec le retour du gouvernement autrichien.
Les nobles furent admis à siéger à l'Assemblée — par délibérations
des corps principaux — le 23 mai 1787. Ils furent placés à côté du
clergé. Les quatre délégués de la noblesse furent : le comte Charles
de Lichtervelde deuxième Béer de Flandre, le marquis Charles de
Khodes, le comte Emmanuel d'Hane de Leeuwerghem et le vicomte
Philippe Vilain XIIII.
Le guidon héréditaire ou le premier Béer de Flandre convoquait
les nobles pour prendre résolution sur ce qui concernait les inaugu-
rations. (Voir divers documents déposés à la Bibliothèque de l'Uni-
versité de Gand, v° Etats de Flandre.)
3 Wynants l'avait prévu. « Il y a » dit-il « procès pendant au
Grand Conseil depuis nonante ans ou environs intenté sur le nom
de la Noblesse contre les Membres, lequel, selon les apparences,
restera indécis par une raison de politique » (Mémoires contenant
des notions générales de tout ce qui concerne le Gouvernement
des Pays Bas formées en 1730. Bibliothèque de l'Université de Gand,
manuscrit n° 142).
— 407 —
dire, comme quelques-uns l'ont fait, que les nobles
ne faisaient pas partie des États. Il est vrai qu'ils
ne furent jamais admis aux délibérations et encore
tenons-nous que la légalité de cette exclusion était
très contestable, mais ils furent toujours convo-
qués, comme second ordre des États, dans les
occasions d'apparat, comme par exemple, à l'inau-
guration d'un Souverain <.
Une liste des nobles faisant partie des Etats a
d'ailleurs toujours existé, et nous croyons intéres-
sant de reproduire en note" les noms de ceux qui
figuraient sur la liste servant aux convocations,
en 1590, ainsi que la liste de ceux qui furent convo-
qués pour l'inauguration de l'impératrice Marie-
Thérèse, comme comtesse de Flandre.
Ach. Galle t-Miby.
(A suivre.)
1 .... « A l'égard de la Flandre » dit le conseiller Wynants, je
« tiens que du passé son État étoit aussi formé de trois classes,
« plusieurs pièces anciennes en font preuve... quand et comment
« la Noblesse de Flandres a cessé de concourir comme seconde
« classe aux États de Flandres n'est pas facile à déterrer...
« Cependant la Noblesse est convoquée et concoure encore au-
« jourd'hui à toutes les inaugurations » (Mémoires cités).
2 Note IV.
— 468
VARIETES,
Les gamins au siècle dernier. — Troubles a l'aca-
démie eu 1768. — Le peintre gantois Philippe Charles
Marissal fonda, en 1751, l'académie de peinture, de dessin
et d'architecture. Les leçons se donnèrent à l'origine dans
le local de l'ancienne confrérie des arquebusiers de Saint-
Antoine, situé passage de la Lieve (Lievegang) converti,
depuis la fin du siècle dernier, en refuge pour les vieilles
femmes, entretenues par les hospices civils de notre ville.
L'année suivante, le siège de l'académie fut transféré à
l'hôtel de ville, dans la salle connue aujourd'hui sous le
nom de salle du trône.
En 1756 les cours se donnèrent dans les salles du second
étage du Pakhuis, au marché aux Grains, où l'académie
resta jusqu'en l'année 1797. Depuis lors l'académie occupe
les bâtiments de l'ancien couvent des Augustins,dans les-
quels était autrefois le collège pour jeunes gens tenu par
ces religieux.
Jusqu'en 1797 l'académie de Gand, tout en jouissant de
certaines faveurs de la part du gouvernement et de la ville,
était un établissement privé dont les ressources consistaient
dans les rétributions payées par les membres protecteurs.
Il paraît que dans les premières années on avait quelque
peine à maintenir la discipline parmi la jeunesse turbulente
qui fréquentait les cours.
— 469 —
Outre les élèves suivant régulièrement les leçons, il y
avait ce que nous pourrions nommer des élèves volontaires,
qui assistaient aux cours en simples spectateurs. Ce Boni
ces derniers qui se rendirent coupables des actes de gami-
nerie et de violence, dont le directeur se plaint dans la
requête qu'il adressa le 1er décembre 17G8 aux échevins de
la Keure.
Le texte de cette requête nous montre que le respect de
l'autorité et la crainte des punitions étaient choses incon-
nues chez une bonne partie de la jeunesse gantoise de ce
temps. C'est un petit tableau de mœurs qui ne manque pas
d'originalité.
« A en myne Edele heeren Schepenen vander Keure der
stadt Qhendt sapplierende verthoont Philip Carel Marissal
binnen Qhendt als Directeur der Académie van schilder en
bauivconst opgerecht binnen de selve stadt onder de protectie
van syne Konincklycke Prins Carel van Loreynen &a mits-
gaeders die van uwe Edele heeren.
» Dat nu sedert eenighe avonden de selve académie soo-
daenigh is gestoort ende geturbeert geiceest door menighvid-
dighe ongeschoefte jonckheydt ofte om beter te segghen
straetjongens, de welcke op het pretext van te commen sien
teeckenen dichicils op de selve académie getolereert ende ver-
draeghen syn geioeest , maerom hunne petulantien, stooringen
ende onbeschaemtheden aldaer begaen daer af syn ghehauden
door eenen persoon ter desen oorsaecke aen de deure gestelt
ende hunne stautigheyt soo verre laeten gaen dat sy den
inganck geioeygert synde hun op den voornoemden persoon
ofte deurwachter alsoock op sommige aendere discipelen der
voorseyde académie hunne vraeke willende uytieercken de
selve hebben aengerandt ende geslaegen naer het rcelcke,
geensins door hunne voorige stautigheyt voldaen synde,
hebben sy hun geadviseert in troepen naer de selve académie
tîcee daeghen daernaer synde maendagh gepasseert den
— 470 —
acht en tiointigsten der voorleden maent november xoederom
te heeren met een onbekent insigt, maer den voorseyden
deurxoachter cddaer niet vindende, den xoelchen uyt vreese
cddaer niet en heeft duvven blyven, syn sy aile te saement
turmatim met groot geschreeuw, geiooel ende gedruys onder
ende boven geloopen, niet beschaemt synde van op menigvid-
dige plaetsen onbehoorelycke vuyligheden te doen maer oock
met de selve de muren te behladen ende de trappen te besmeu-
ren, hun voorders verstaudende 't sy met steenen, stocken
ofte andere instrumenten de lampen op de selve trappen
hangende uyt te doen ende af te smytcn, aile het toelcke nu
verricht synde, hebben sy op de passagie van de trappen een
eydel vat gestelt waer do or den eersten afkomende gemah-
helyck (van licht niet voorsien synde) een groot ongeluck
soude connen gehadt hebben soo het byna gebeurt is.
» Het toelcke aile de oorsaecke is dat den supliant om
buyten peryckelen te syn deicelcke door sidcke artlistigheydt
souden connen veroorsaeckt xoorden sigh gedioongen heeft
gevonden sedert dien dagh de geivoonelycke avont-lessen te
interromperen ende syn recours tôt uioe Edele heeren te
nemen.
» De selve biddende gedient te xoesen tôt meerdere securi-
teyt van clese publiecque plaetse ende de persoonen die de
selve frequenteren Y sy aldaer eenighe stadtssoldaeten van
ten alf vyf uren te ordonneren ofte op aendere manieren
daer inné te voorsien soo het aen uice Edelheden sal geraedt-
sam duncken.
» f xcelcke doende &a
» VAN BOTERDAELE proc. »
On voit, par les termes de cette requête, combien la
conduite de la jeunesse gantoise était turbulente et gros-
sière. Les Straetjongens, signalés dans la plainte adressée
aux échevins de la Heure, maltraitaient le concierge et les
élèves de l'académie, souillaient les escaliers et les murs du
- 471 —
Pahhuis, brisaient les lampes, se livraient enfin à (1rs actes
de violence et de désordre tellement graves que Marissal fui
obligé de suspendre les cours et de fermer momentanémenl
l'établissement dont il avait la direction.
Ces troubles ne prirent fin que quand l'autorité commu-
nale eut envoyé sur les lieux une escouade de soldats de la
ville, chargés de protéger les élèves et les professeurs et
d'appréhender au corps les perturbateurs.
Ces soldats, nommés Stadts wackende Mannen, formaient
une compagnie de septante hommes commandés par un
capitaine et placés sous la surveillance des deux sergents-
majors de la ville. Leur uniforme se composait d'un habit et
d'un gilet de drap gris avec collet et parements noirs, de
culottes également de drap gris, d'un tricorne noir avec
galon blanc et d'une paire de guêtres en toile blanche. Us
étaient armés d'Un fusil et d'un sabre.
Les Stadts waehende Mannen remplacèrent les compa-
gnies bourgeoises, supprimées en 1752. P. C.
Les chanteurs publics sous l'empire. — Nous avons
montré dernièrement comment, au XVIe siècle, on agissait
avec les chanteurs publics qui se permettaient d'attaquer,
dans leur couplets, les autorités civiles et religieuses. Voici
maintenant à quel régime on les soumit deux siècles et
demi plus tard.
Sous le premier empire des chanteurs de rue, dans le
genre de ceux que nous voyons encore aujourd'hui exercer
leur profession sur le marché du Vendredi, s'apitoyaient le
plus souvent dans leurs complaintes sur le malheureux sort
réservé aux conscrits flamands, forcés de quitter leur pays
pour aller se battre et mourir loin de leur famille et de leur,
amis. Ces chansons, dans lesquelles on dépeignait les hor-
— 472 —
reurs de la guerre, semblaient à l'autorité impériale Je
nature à jeter le discrédit sur le gouvernement français.
Pour mettre un terme à ce qu'on considérait comme une
dangereuse propagande, le Préfet de l'Escaut, d'Houdetot,
ordonna aux chanteurs publics du département de déposer
leurs couplets à la mairie de Gand, où on avait soin de dé-
truire toutes les chansons flamandes renfermant la moindre
allusion désobligeante à l'adresse du régime auquel notre
pays était soumis.
Les employés du troisième bureau de la mairie, placé sous
la direction de Norbert Cornelissen, qui étaient chargés d'exa-
miner ces chansons, avaient trouvé mieux. Ils faisaient de la
propagande impériale en forçant ces musiciens ambulants
à chanter des couplets flamands, célébrant le bonheur sans
pareil de servir dans les régiments français et vouant au
mépris public le conscrit assez peu soucieux de la gloire
des armes pour oser déserter les drapeaux ou se soustraire
au service militaire.
Cornelissen adressa à ce sujet au préfet un rapport, tran-
scrit dans le registre d'où nous avons extrait le récit de la
punition infligée, sous l'empire, aux marchands de toile qui
trompaient les acheteurs sur la qualité et le métrage des
pièces vendues.
Cerapport, qui nous fait connaître une particularité des
mœurs administratives de cette époque, nous a paru inté-
ressant à reproduire. Le voici textuellement tel que nous le
trouvons dans ce registre à la date du 5-6 octobre 1809.
« Du 5 au 6 octobre 1809.
» On croirait qu'il n'y a que trois moyens de parler au
» public : la chaire, le barreau et le théâtre. La police sait
» d'avance ce qui va se dire au théâtre et elle élague tout
» ce qui peut paraître dangereux. L'avocat qui dit des
» choses inconvenantes est rappelé à l'ordre. Quand l'évêque
— 473 —
» est dans les principes du gouvernement il peut savoir
» assez vite ce qui s'y prêche de contraire.
» On ne songe guère aux chansonniers qui sont très-
» nombreux dans ce pays et toujours entourés de quan-
» tités d'oisifs attroupés autour d'un tableau, car on dirait
» que fidèles aux préceptes d'Horace ces troubadours ambu-
» lants savent que ce qui frappe les yeux agit mieux sur
» l'esprit que ce qui ne lui parvient que par les oreilles.
» Ces chansonniers peuvent être très-dangereux en ce
» qu'ils chantent quelquefois les malheurs de la guerre,
» ceux des conscrits et généralement tout ce qui tend à
» faire voir trop clairement la misère des temps.
» J'ignore si la police dans d'autres villes est assez scru-
» pilleuse en examinant les productions de ces chanson-
» niers, mais ici je les défie de tromper le 3e bureau de la
» mairie auquel ils soumettent leurs chansons. A force d'en
» enlever des paquets entiers, on est parvenu depuis 4 à
» 5 ans non seulement à rendre nos chansonniers plus cir-
» conspects, mais même à donner aux chansons une direc-
» tion telle que le gouvernement ne pourrait en désirer
» une autre.
» M. le préfet qui a peut-être lu les chansons n'a peut-
» être aucune idée des chants guerriers des Tyrtées de la
» Flandre ; il doit me pardonner, dans un moment de loisir,
» de lui en mettre un essai sous les yeux :
CHANSON DE NOS COURAGEUX GARDES NATIONAUX.
Belle amante reveille-toi
Le jour paraît
Je dois partir ;
Leve-toi bien vite
Nous devons aller marcher
Vers les rivages de Neptune
Et nous deffendre
Comme Gardes nationaux.
:■■■
— 474 —
Nous volons avec courage
Vers les champs de Mars
Nos gages sont bons
24 sols du pays
Nous ne devons avoir soin de rien :
Et puis encore de la viande et du pain.
On ne doit nous donner aucun crédit,
Nous n'avons besoins de rien.
Nous n'économisons rien pour nos héritiers
Çà l'hôte ! encore du vin
Qu'avec notre maîtresse
Nous soyons encore joyeux !
Nous devons avant tout régaler
Toutes nos maîtresses
Cela nous fera songer longtemps
Aux gardes nationaux.
Que l'ennemi vienne nous attaquer
Sur les rivages de Neptune
Cela ne nous ennuyera pas
Nous sommes des gardes nationaux.
COMPLAINTE D'UN DÉSERTEUR.
Amis, écoutez ma complainte
Ce qui m'est arrivé
C'est triste pour qui le voit et l'entend
Comment dans ma jeunesse
En l'an VIII je tombai dans le sort.
Par des insinuations perfides
Je me mis helas o grand Dieu
A déserter de Bruxelles.
Quand je vins chez moi
Mes parents, frères et sœurs et amis
Ne me voulurent pas accueillir
Je ne trouvai nulle part de la consolation
J'errai toute la nuit
D'ici à là chez mes voisins.
Mais le matin quand le jour parut
Tout le monde me ferma la porte.
- 475 —
J'allai chez les jeunes filles
Que j'avais fréquentées ;
Mais elles ne firent aucune attention à moi
Lorsqu'elles virent mon uni l'orme
Toutes dirent, Jeannot tu es déserteur
Nous devons fuir ta compagnie
Tu nous causerais des dangers
Jamais tu ne peux épouser une fille.
Je devais dormir au milieu des champs
Personne ne voulait m'héberger
Songez à ma position
Lorsque j'ai déserté
Je m'écriai au milieu de mon chagrin
Oh Dieu ! Si je pouvais rejoindre mon régiment
Je ne serais plus malheureux
Je suis comme un lièvre dans les bois.
Je suis parti pour Gahd
Où je me suis rendu aux autorités
Je fus dirigé sur mon régiment
Je jouis ici d'une vie plus heureuse
Jeunes gens je vous le conseille
Lorsque vous devez porter les armes
Ne désertez jamais
La vie d'un déserteur est à plaindre.
» Qu'on se figure un chansonnier entouré les vendredis
» et les dimanches successivement de plusieurs centaines
» d'auditeurs, les plus part gens de la campagne, qu'on se le
» figure chantant avec une voix de stentor et dans le patois
» le plus trivial et qu'on juge de l'impression qu'il doit faire,
» soit en bien, soit en mal est un objet que la police ne doit
» pas négliger. »
Plusieurs chansons flamandes, du genre de celles tra-
duites dans ce rapport, font partie de la collection gantoise
à la bibliothèque de la ville et de l'université.
Ces musiciens ambulants parcouraient donc la ville et la
— 47G —
campagne célébrant sur tous les tons « le plaisir d'être
soldat, » ainsi que le chantait encore quinze ans plus tard
le sous-lieutenant Georges Brown de La Dame blanche.
Pendant ce temps les femmes des habitants de Gand,
enrôlés dans la Garde nationale et absents de la ville,
assiégeaient la mairie pour toucher l'indemnité à laquelle
elles avaient droit mais qu'on négligeait de leur payer. Cet
incident fait l'objet du rapport suivant de Norbert Corne-
lissen, portant la date du 19-20 octobre 1809 et transcrit
dans le même registre :
« Ces femmes, mères et épouses, remplissent tous les
» jours la maison de ville en demandant à grands cris
» l'indemnité qu'elles doivent avoir du chef de leurs époux,
» gardes nationaux et cette cohue offre quelque chose de
» triste et de pénible. Il y a dans tout cela quelque chose
» d'embrouillé où je n'entends rien.
» Sous le rapport de l'ordre et de la police, ces rassem-
» blements tumultueux peuvent devenir dangereux. On
» paye difficilement ces femmes de raisons. Il leur faut de
» l'argent et pour venir chercher quelques francs qu'elles
» ne reçoivent pas elles sont de huit à dix jours sans s'oc-
» cuper de leur travail. » P. C.
Commerce de tableaux de maîtres anciens, a Gand,
au commencement du XVIIIe siècle. — François- Jacques
Vanden Berghe et Gilles Vander Vennet, son cousin, étaient
associés pour le commerce de tableaux, qu'ils faisaient de
compte à demi, à Gand, à partir de novembre 1705. C'est ce
que nous apprennent un compte et diverses autres pièces
récemment trouvés à l'hôtel-de-ville de Gand, parmi des
papiers de rebut provenant de liquidations de faillites, de
successions en déshérence, etc. Ces pièces mériteraient une
- 477 -
publication intégrale; nous en prenons quelques extraits
qui suffiront pour en signaler l'importance.
« Sr Oillis Vander Vennet is vertrocken naer Parys den
21 9ber 1 705, met de volgende stucken competerende d'heer
Frans Jaques Vanden Berghe, soo volght, ende gcdestineert
ofte aengenoemen in companieby denbovenz .Sr Gillis Vander
Vennet op de pryzen gelyck volght :
Nous trouvons dans rénumération de ces tableaux un
portrait de Zabagh, par Van Dyck, et « een stuck van
Rubens zynde D^orville met syne huysvrouioe » le tout évalué
cent vingt livres, argent de change. Une chasse aux tigres
de Van Dyck est évaluée £ 100. Un tableau de Rubens
« het Vagevierken l » est acquis en échange d'un paysage de
Berchem, d'un tableau de De Wit et Teniers et d'une troi-
sième pièce. Nous trouvons dans le même relevé : een stuck
synde een meideken van den fluioeelen Breughel £ 80, et
diverses autres pièces de De Neef, de Breughel, de Milet, etc.
A Van Biesum, à Rotterdam, est vendu au prix de
1715 florins « een stuck van Rubbens, synde de zalige sielen2.»
— Item een portrait synde eenen geestelyken van Rubbens,
tôt Antioerpen gecocht, au prix de £ 2-11-5.
Le 26 mai 1707, envoi est fait à Van Biesum, à Rotter-
dam, de différents tableaux, la plupart tirés de Paris,
parmi lesquels :
2 stucken van Beneditto Castigniole £ 300
Item een stuck van Albano » 400
Item ttoee stukken van Salvator Rosa . ...» 40
Twee Bourdons, Lasarus ende David . . . • » 120
Dans un compte de débours se trouve une dépense de trois
livres pour port d'un envoi en France, évalué à quatre cents
« Max Rooses, dans l'œuvre de Rubens. en cours de publication,
ne renseigne d'autre Purgatoire de Rubens qu'un grand tableau de la
cathédrale de Tournai.
» Comparez Max Rooses, n° 94, t. I, p. 111.
— 478 -
livres de change, et d'autres sommes pour ports de caisses
venues de Paris.
Dans un compte de recettes de 1709, nous rencontrons
un genre de diminutif que la langue française ne possède
point. On y renseigne comme vendu à J. de Saedelaer : een
cleyn wauvermanneken gecomen van Parys; de plus ver-
cocht aen eenen franschman van Parys ticee stuxkens, het
eene van broecler van Wauvermans ende het ander van
Ostade, Peerdekens, H saemen seven ponden wisselgelt.
Au même compte , le tableau Vénus et Adonis , de
Rubens, est renseigné comme vendu à Bruxelles au prix
de mille florins de change1. Un autre tableau de Vénus et
Adonis, de Lievens, évaluée cent florins de change, figure
dans une liste de tableaux restés en indivis, ainsi que des
œuvres de Poelenburg, de Rom haut {een Luitspeelder), de
Wouvermans, de Feyt, de De Brauwer (n. 74. een Brau-
werken, fl. 100) et d'autres.
Dans une liste de tableaux que l'associé Vander Vennet
emporte à Paris, en 1710, avec évaluation donnée par lui,
se trouvent une Susanne, de Rubens (fl. 120) 2; plusieurs
Poelenburgh (Loth et ses filles, fl. 200 ; Des nymphes au
bain, fl. 300) ; un Paul Bri-1 (fl. 500) ; une chasse au faucon,
de Wouvermans (fi. 900), etc.
Puis, nous rencontrons un « Mémoire des tableaux
laissez entre les mains de M. de Laporte appartenant à
Messieurs Vanden Berghe et Vandervene (sic). » La pièce
est datée de Paris, 4 octobre 1710 et signée de Laporte 3.
1 S'agit-il du tableau qui fait aujourd'hui partie de la collection de
l'Hermitage à Saint-Pétersbourg, et qui a été gravé par Tassaert,
lorsqu'il appartenait au comte Cobenzl? (voir Max Rooses, n° 691,
t. II, p. 176).
2 Sujet traité souvent par Rubens (voir Max Rooses, nos 131 à 136).
3 « Charpentier ordinaire des bâtiments 'du Roy » d'après une
autre pièce.
— 470 —
Le n° 1 est « un tableau de Van Dyck, représentant une
descente de croix, emborduré, f. 8000; » le n° 3 « un por-
trait du dict, représentant luy mesme avec un soleil, f. 900; »
le n°4 « un autre du dict, représentant le Sr Zabacq, f. 500; »
len° 6 est « un tableau du Poussin, représentant Bersabé et
David, f.2000 ; » le n° 9 « une Vierge, de Raphaël, de sa pre-
mière manière, f. G00. » C'est de ce même tableau, semble-
t-il, qu'il est dit dans une pièce suivante : « compt van
Morts'' Beaucamp, eersten dansmeester van den honinck. »
Le dernier n° de cette liste est « La Magdeleine chez le
farisien de M. Jouvenet, f. 300. »
Le 18 novembre 1711 est dressée une liste de tableaux
achetés et négociés, y est-il dit, par Vander Vennet, à Paris,
pour l'association, et point encore arrivés (à Gand). Nous y
trouvons : de noodt Gods van Van Dyck comende van den
ducd'Aumont, lequel est vendu à Van Biesum, avec une
sainte Justine de Paul Véronèse, provenant du duc d'Or-
léans, au prix de 10,000 florins de Hollande. Un portrait de
Van Dyck, par lui-même « met eene sonneblomme » est
échangé contre un tableau de Jacques Bassan ; un autre
portrait par Van Dyck, représentant un bourgmestre jus-
qu'aux genoux, est évalué fl. 900. Nous y trouvons encore :
« een stuck van Paido Veronese, de famille van Darius ende
Trhimphe van Alexander, compt van Monsr Burin (?) in de
Louvre, fl. 1500.
Le 19 décembre 1711, Vander Vennet part pour la Hol-
lande, emportant plusieurs tableaux, parmi lesquels des
Teniers, un Van Baelen et Breughel, un Gérard Dow ; sans
indication dans cette liste, de sujets, de dimensions, ni de
prix.
Dans une autre liste, reparaissent le portrait de Dorville
et de sa femme par Rubens, évalué <à f. 1200, le portrait de
Zabagh, par Van Dyck, à f. 800 ; la chasse aux tigres, de
Van Dyck, à f. 1500.
— 4S0 —
Nous avons enfin une reconnaissance émanée de Van
Biesum qu'il a « van den heer Vanden Berghe gecogt een
stuck van A. Van Dyck synde de Grafleging, ende een stuck
van Paulo Verones, saemen f. 10,000. »
Le 22 septembre 1714, un sieur Germain écrit de Paris
que Vander Vennet vient d'y faire un troc d'une douzaine
de tableaux de conséquence. Us auraient été déjà envoyés
par bateau « n'estoit que la mort du Roy a causé un peu
« d'embarras chez monsieur de Gourville où sont les
« tableaux... et comme Mons. de Gourville vient souvent
« chez luy avec nombre de gens de qualité, monsieur
« Tebout n'est pas bien aise que quand le maistre y est, l'on
« travaille à tout cela... »
Au revers de cette lettre se lit un « Second Mémoire des
tableaux que le Sr Vandre Vene a acquis à Paris. » Pour cette
seule fois nous avons, en même temps, le sujet, les dimen-
sions et des évaluations : « un tableau de Valentin repré-
sentant la prison de saint Pierre de cinq pieds et clemy de
long sur quatre et demy de haut, f. 600. Quatre tableaux
du Gouarchin (sic), représentant les quatre pères de l'église
de quatre pieds et demy sur trois pieds et demy de haut,
f. 1600, etc.
En juillet 1716 Germain écrit à Vanden Berghe pour se
plaindre de n'avoir pas reçu payement de Vander Vennet,
et Vanden Berghe annote sur la lettre que le 26 juillet 1716
il a envoyé deux lettres de change de f . 3000.
Enfin une vente publique de tableaux et de curiosités a
lieu à Gand, à la requête de Vanden Berghe, en mai 1727.
On n'en a malheureusement que les noms des adjudicataires
et les prix, sans description des tableaux.
D.
— 4SI —
Tableaux de Rubens, évalués a Gand en 1668.
« Gheestimeert deu iiiien 10briB 1668 ten sterfhuyze van
dheer Jacques Stoop de naervolgendè schilderyen :
1. Rubens : Alvooren de verryssenisse
van de salighe ff 150 (116-13-4)
2. Rubens : Den val van onzaelighe
sielen » 50 (51)
3. Rubens : Den Hertog van Ferrera
in wapenen » 50 (20)
4. Rubens : Den Hertog van Saocen. . » 34
5. Rubens : Een cleynverrysenishen . » 15
G. Den Satyr van Van Dyck. ...» 12
Puis différents tableaux de Brouwer, de Langen Jan, de
Snaeyers, de Achtschellinck, etc. »
Les chiffres que nous avons mis entre parenthèses sont
écrits au-dessus de ceux de l'évaluation, qui sont barr<
peut-être sont ils les chiffres de vente.
Le document dont ces lignes sont extraites, provient de
papiers de rebut de l'hôtel-de-ville, récemment triés ; il a
été déposé avec d'autres, dont nous parlons plus haut, à la
Bibliothèque de l'Université. D.
Monnaies circulant en 1818. — On ne se fait guère,
de nos jours, une idée des complications de compte et des
pertes de temps qui devaient résulter, à une époque encore
peu éloignée de nous, des variétés nombreuses de monnaies
d'origine diverse, ayant cours en notre pays. Et si l'on
voulait approximativement connaître en quelle proportion
les diverses monnaies se rencontraient dans la circulatipn,
les documents manqueraient pour établir à cet égard un
jugement quelconque. Il nous est tombé sous la main des
relevés de caisse hebdomadaires, faits par un percepteur de
— 482 -
droits de barrière à Saint-Gilles (Brabant) en 1818. Il nous
a paru intéressant d'en reproduire deux ci-dessous, par
le.squels se peut voir en quelle proportion les monnaies
modernes et les monnaies anciennes concouraient dans les
payements, et combien, parmi celles-ci, il se trouvait d'es-
pèces différentes :
In francs 256-00
Een louis 23-55
13 palms 75-40
ôhalfidem 13-75
In schellingen 265-50
In luyckx schellingen 13-44
Een vierde ducaton 1-57
Indecims 20-00
669-21
22 november 1818.
In francs 353-00
12 palms 69-60
9halfiedem 24-75
In schellingen 201-75
3 vierdens ducaton 4-71
In luyckx schellingen 21-84
Indecims 12-00
687-65
29 november 1818.
D'après ce relevé, notre percepteur recevait des louis,
des pièces de cinq francs, de deux francs, d'un franc, d'un
demi franc, toutes comprises sans doute sous l'expression
in francs; — des pièces valant fr. 5,60 et qu'il appelle
palms (couronnes?) — des pièces qu'il appelle halve palms
et dont deux ne valaient pas un entier puisqu'il les compte
à fr. 2,75; — des escalins de Brabant, ayant encore une
valeur de 0,75; — des escalins de Liège de 0,56; — des
— 483 —
quarts de ducatons de fr. l,r>7; enfin les décimes et demi-
décimes de la République qui ont eu cours en France jusqu'à
l'émission de la monnaie de bronze actuelle. - - Nous nous
étonnons de ne pas rencontrer dans ces relevés, ni lès pla-
quettes, anciens liards du pays valant deux centimes, ni la
pièce d'un centime de la République. — Peu d'années plus
tard les comptes devaient se compliquer des nouvelles mon-
naies du royaume des Pays-Bas (voir la loi du 28 sept. 1S1G,
et le tarif annexé à l'arrêté royal du 8 déc. 1824).
Bibliothèque des écrivains de la Compagnie deJésis.
par le P. Carlos Sommervogel. Bruxelles, 1800. In- 1 -,
vol. I. — Il existe un certain nombre de recueils bibliogra-
phiques se rapportant aux ordres religieux. Presque tous,
quoique de mérite différent, fournissent, avec plus ou moins
d'exactitude, des renseignements utiles. La plupart pré-
sentent ce défaut capital de donner uniquement en latin, et
en abrégé, les titres de livres écrits en français, en néerlan-
dais, en allemand et en d'autres langues. Ce procédé déroute
l'homme d'étude et l'oblige souvent à faire des recherches
longues et fastidieuses.
Les ouvrages de Quétif et Échard, de L. Wadding, de
Cosme de Villiers, de N. de Tombeur sont d'excellents
livres et leur réputation est parfaitement justifiée. Les
publierait-on dans les mêmes conditions aujourd'hui ?
La bibliographie sérieuse a d'autres exigences au
XIXe siècle. Il n'est plus permis de modifier l'orthographe
d'un titre de livre, encore moins de le traduire. Les ren-
seignements doivent être précis, ne laisser place à aucun
doute. L'indication du format et du nombre des pages
contribuent à donner une idée de l'importance du livre
signalé; on ne peut omettre ces détails. Il est encore néces-
saire de fournir la liste des diverses éditions d'un ouvrage,
en déterminant en quoi elles se distinguent/
- 484 —
Quand il s'agit, comme pour les jésuites, d'un nombre
prodigieux d'écrivains, dont les œuvres ont été imprimées
dans tous les pays et dans toutes les langues du monde,
et qui ont traité des sujets embrassant l'universalité des
connaissances humaines, on comprend aisément combien
l'exécution d'une bibliographie de cette nature suppose de
travail opiniâtre et de recherches ardues. Pour oser entre-
prendre un ouvrage, ayant de telles proportions, il faut
joindre la persévérance à l'érudition la plus étendue ; il faut,
en outre, pouvoir compter sur des aides officieux dans toutes
les localités du globe terrestre.
Les PP. Aug. et Al. de Backer avaient réalisé, en grande
partie, le programme de ce monument littéraire. La lre édi-
tion de leur Bibliothèque des écrivains de la Compagnie de
Jésus, en 7 vol. in-8°, fit sensation ; aussi fut-elle rapidement
épuisée. La 2e édition, en 3 vol. in-folio, très augmentée,
parut dix ans après. On la considérait, à bon droit, comme
une œuvre du plus grand mérite, comme une édition défi-
nitive.
Cependant un travail aussi vaste devait nécessairement
présenter quelques lacunes. A qui allait être réservé le soin
de les combler ?
Le P. Carlos Sommervogel, qui avait déjà été le principal
collaborateur des PP. de Backer, entreprit courageusement
cette tâche, ce labeur ingrat. Tout d'abord, il commença par
établir la liste des auteurs anonymes et pseudonymes; puis,
il reprit, un à un, les milliers d'articles de cet immense
répertoire. Il puisa à de nouvelles sources, fit des recherches
minutieuses dans les dépôts d'archives, dépouilla les revues
et les journaux périodiques, les inventaires de toutes les
bibliothèques publiques et privées, fit des démarches, person-
nellement ou par correspondance, partout où il y avait
espoir de trouver la rectification d'une erreur ou quelque
renseignement inédit, et, après 14 à 15 années de patientes
— 435 —
recherches, de travail incessant, il est parvenu, avec ce flair
de bibliophile qui lui est particulier, à édifier le monument
bibliographique dont le 1er volume vient de paraître. Cette
nouvelle édition dépasse de beaucoup, en méthode, eu ponc-
tualité, en valeur et en science, l'œuvre des PP. de Backer,
laquelle était déjà elle-même supérieure à toutes les biblio-
graphies d'ordres religieux.
Puisse l'exemple donné par le P. Sommervogel porter
fruit. A quand de nouvelles éditions, plus conformes à la
science moderne, desBibliothccae des PP. dominicains, béné-
dictins, franciscains et augustins ?
Feed. Vander Haeghen.
Le récit tragique de l'attentat énorme et exé-
crable DONT L'IDÉE SEULE FAIT FRÉMIR LES ANGES ET LES
hommes, commis par trois soldats de la garnison de
Luxembourg, qui ont fait servir la sainte Eucharistie
au sacrilège'. — Trois impies, quoique catholiques
(soldats du régiment du prince Salm Salin, général d'artil-
lerie) avides d'argent pour fournir au jeu et à la débauche,
vers la Toussaint de l'an 1748, tinrent assemblée pour
trouver moyen de conjurer le démon de leur en procurer
pour cette fin.
Le premier, plus entendu, mais bien éloigné des voies
droites, prononça : qu'il falloit pour cet effet se servir d'une
hostie consacrée. Mais les circonstances sacrilèges dont il
accompagna le récit qu'il leur fit, ne pouvant qu'inspirer
de l'horreur à tout le monde, on juge à propos de les sup-
primer icy. (Il ajouta qu'il avait eu cette cognaissance,
qu'on peut traiter de mystère infernal et diabolique, d'une
1 Archives du Grand-Duché de Luxembourg. — Couvent du
Saint-Esprit. — Chronique.
— 486 —
femme.) Les deux antres, animés par ce récit à mettre ce
moyen en œuvre pour se procurer de l'argent, contestèrent
ensemble comment ils s'y prendraient pour exécuter leur
abominable projet.
L'un offre à conjurer le diable pourvu que l'autre luy
fournisse la sainte hostie. Celui-cy, l'animant au crime, se
confesse le dimanche suivant et ayant communié dans
l'église des RR. PP. Jésuites, met la sainte hostie dans un
mouchoir et la présente à son compagnon. Celui-cy l'ayant
reçue, ils s'en vont ensemble le même soir dans un jardin
écarté pour y faire leurs sortilèges. Celui qui avait la sainte
hostie l'attache à une arbre avec deux épingles. A ce spec-
tacle son compagnon frémit d'horreur. L'autre, le voyant
saisi de crainte, le renvoie pour exécuter librement son
dessein diabolique. Il prend une troisième épingle et perce
deux fois la sainte hostie, disant à chaque fois : si tu es le
vrai Dieu, commande au diable de nous apporter de V argent.
Mais comme le mal ne produit jamais de bien et qu'on
ne peut, se promettre les faveurs de Dieu ny ses dons,-
qu'autant qu'ils contribuent à notre salut et que nous
sommes disposés à en profiter par nos humbles prières, son
horrible dessein échoua. Il rappelle donc son compagnon
disant que, pour cette fois, tout était manqué; il reprend la
sainte hostie, et l'ayant mise dans une de ses poches, ils
s'en retournent aux casernes et vont prendre leur repos, si
cependant on en peut goûter dans un si affreux état. En
effet celui qui avait la sainte hostie, voulant dormir, il
s'imaginait voir le Saint-Esprit remplir la chambre, accom-
pagné d'une troupe innombrable d'anges voltigeant autour
de luy. De telles pensées et un tel spectacle auraient dû le
faire rentrer en luy-même, mais un pécheur, une fois
endurci dans le crime, ne tient plus aucun compte, dit
l'Ecriture, des saintes inspirations, et rien n'est capable de
le toucher.
— 487 —
Ces impies se rendent donc le lendemain au même
endroit pour recommencer leur barbare projet; niais le
premier n'ayant pu réussir le jour précédent, c'est à vous,
dit-il h son compagnon, à éprouver à présent. Celui-ci
témoigna la même répugnance que le jour précédent,
d'hazarder un pareil attentat. Enfin, après quelques délibé-
rations sur ce qu'ils avaient à faire, ils conclurent que le
dernier ayant déjà reçu l'hostie en communiant, à la solli-
citation de l'autre, l'avalerait sur le champ, et la luy pré-
senta avec l'épingle dont iU'avait attachée.
Mais comme, selon l'Évangile, rien de si caché qui
n'éclate enfin, leur propre conscience les accusant, dévoila
leur crime. Caïn, après son meurtre, errait par les cam-
pagnes en vagabond incapable de repos; et l'auteur du
sortilège qui avait percé la sainte hostie, était si agité des
remords que, transi de frayeur, il déclara son crime à un
autre soldat qui, par un coup de Providence, aigri contre le
coupable, le dénonça à un bas-officier, qui en informa ses
supérieurs.
M. le baron de Kessel, colonel du régiment, très zélé pour
la gloire de Dieu, fit mettre tous les dénoncés aux fers. On
tint conseil de guerre, et après une exacte recherche et de
longues informations, on parvint à la connaissance de toutes
les circonstances du crime, et les scélérats furent condamnés
à mort par un arrêt solemnel.
Celui qui avait suggéré cet énorme attentat, fut condamné
à perdre la vie par le glaive et les deux autres par le feu,
avec cette circonstance qu'on coupa le poing droit à celui
qui avait percé la sainte hostie.
On leur annonça sans délai la sentence. Le Dieu des
miséricordes qui ne souhaite la perte du pécheur, fit assez
cognaître par l'exemple de ces scélérats, que quelque
infâme que soit le pécheur il ne doit jamais désespérer de
ses bontés. Il toucha si fortement les cœurs de ces malheu-
reux, qu'ils se soumirent de plein gré aune mort si cruelle,
— 488 —
après s'y être disposés par une entière confession de toute
leur vie. Plus l'heure du supplice approchait, plus ils
s'exhortaient à le subir avec patience.
Le 16 janvier ils furent conduits au lieu du supplice;
en passant près de l'église des KR. PP. de la Compagnie de
Jésus, ils firent respectueusement amende honorable, qu'ils
renouvelèrent encore avant que d'être exécutes, à haute
voix, en présence de tous les spectateurs.
On commença l'exécution par celui qui devait être déca-
pité. Mais, Dieu le permettant peut-être ainsy pour le faire
souffrir davantage et pour une plus parfaite pénitence, le
bourreau manqua son coup. Le patient ne laissa échapper
aucune plainte : mais, fermant les yeux pour signe de la
douleur qu'il souffrait, il attendit avec patience le second
coup qui luy ôta la vie.
Ensuite on coupa le poing à l'autre, qui ne se plaignit pas
de ce tourment. Après quoi on les conduisit tous deux sur le
bûcher où ils furent attachés séparément à des poteaux.
Mais au grand étonnement de tout le monde il arriva que
celui à qui on avait coupé le poing, étant mal lié, gémit
fort longtemps dans les flammes où cependant, sans autre
plainte, il réclamait son confesseur, et presque à demi brûlé
il sauta hors des flammes, demandant par grâce d'être
étranglé, mais inutilement ; il fut de nouveau précipité dans
les flammes, la tête en bas, où il expira d'abord, en pro-
nonçant les saints noms de Jésus, Marie et Joseph.
Fasse le Ciel que la gloire de Dieu soit réparée par le
supplice des coupables.
Toute la ville, non contente de cette exécution, pour
réparer la gloire de Dieu si indignement flétrie, résolut
d'indiquer une procession des plus lugubre, mais en même
temps des plus solemnelle, quoiqu'il survînt une grosse
pluie.
Cependant Son Excellence le comte de Neipperg, mare-
— 489 —
chai des armées de Sa Majesté impériale et royale, gouver-
neur de cette ville, M. le Président avec le Conseil, les
Révérendissimes abbés de Saint-Maximin et de Munster
avec tout le clergé régulier et séculier, M. le comte de
Chanclos, général d'artillerie, tout l'état-major, toute la
garnison sous les armes, la noblesse de l'un et dé L'autre
sexe, le magistrat avec toute la bourgeoisie, les écoliers du
collège conduits par leurs régens assistèrent à cette pro-
cession, partie en flambeaux, d'autres portant des cierges,
tous avec une dévotion sensible.
Cet acte de religion annoncé la veille et le lendemain par
le son de toutes les cloches de la ville, commença le 21 jan-
vier vers les sept heures et demie du matin, dans l'église de
la Compagnie de Jésus, où tout le monde se rendit. Là se fit
la première amende honorable par le R. P. recteur en aube
déliée et portant une corde au col.
De là on marcha, flambeaux éteints, vers l'endroit de la
profanation. On récita dans la route les sept psaumes
pénitentiaux, tous les assistants marquant l'horreur qu'ils
avaient d'un crime, si noir par leurs larmes et leur silence.
Le Vénérable étant exposé dans l'endroit de la profana-
tion, le Révérend abbé de Munster fit amende honorable au
nom de la ville et de tout le Duché. L'arbre fut déraciné et
porté par deux prêtres au couvent des Dames du Saint-
Esprit.
On planta une croix au même lieu. De là la procession
continua sa marche au son des trompettes, des tambours,
des timballes et de toutes les cloches de la ville vers l'église
des Révérends Pères Récollets où on la termina par une
grande messe, chantée par le Rissime abbé de Saint-Maximin,
suivie de la bénédiction du Très Saint-Sacrement.
Ainsi tout la ville de Luxembourg s'est signalée pour
réparer l'honneur et la gloire du Tout-Puissant (pie des
scélérats avaient entrepris de flétrir...
33
— 490 —
Notre église n'a jamais été plus magnifiquement et plus
richement ornée et parée jusques à la voûte, et on n'a
jamais vu tant de noblesses et de monde qu'en cette occa-
sion, chacun son flambeau à la main, ce qui donna tant de
fumée que l'on ne voyait point de vitres.
On assure que l'arbre si solennellement transporté, a été,
par ordre des supérieurs ecclésiastiques, réduit en cendres
et enseveli dans les tombes de notre église *. D.
Le théatke de Lille. — Dès 1351, on trouve des rhéto-
riciens établis à Lille, où ils jouent La fieste [fuite] des
enfans Aymery de Narbonne et le jeu de Sainte-Catherine.
Des documents épars 2 permettent de reconstituer leur his-
toire depuis le XIVe siècle jusqu'à la fin du XVIe, époque
à laquelle ils disparaissent à la suite de plusieurs édits du
Magistrat. Au XVIIe siècle, on connaît plusieurs pièces
représentées par les élèves du collège des jésuites. Il est à
souhaiter que quelque érudit lillois combine les documents
que l'on possède sur ce sujet, et fouille, dans le même sens,
1 L'usage d'inhumer daus les églises a existé jusque sous Joseph II,
et était cause d'émanations pestilentielles. Comparez Belgique judi-
ciaire, 1864, p. 113.
9 Les Annales et le Bulletin du Comité flamand de France ren-
ferment de nombreux articles sur les chambres de rhétorique de la
Flandre française, ainsi que les Archives historiques et littéraires du
Nord delà France, publiées par A. Le Roy et A. Dinaux. Il importe
également de consulter les excellents travaux de Mr L. Petit de
Julleville sur l'histoire du théâtre français au moyen-âge. Sur Lille,
en particulier, voir : De La Fons-Mélicocq, Les ménestrels de Lille
aux "Xl Ve-X VIe siècles (Archives historiques et littéraires du Nord
de la France, 3e série, t. V, pp. 57-67) ; — G. Jouvenel, Lettre au
président Yiglius, touchant les rhétoriques qu'on avait voulu faire
à Lille, 2 août 1561 (Compte-rendu des séances de la Commission
royale d'histoire, 3e série, t. IV, pp. 392-394) ; — sur le théâtre de
Lille au XVIIe siècle : Edm. Vander Straeten, La musique aux Pays-
Bas, t. III, pp. 116-118; — etc.
— 491 —
les archives de Lille ; il y a certainement là matière à une
monographie d'un sérieux intérêt. Mr Léon Lefebvre nous
paraît tout désigné pour s'acquitter de cette tâche, lui qui
a déjà publié plusieurs notes sur le théâtre de Lille au
XVIIIe et au XIX*" siècles : Tahna dans le Nord; note sur
sa famille; Véchauffourée des chasseurs de la Vendée (Lille,
imp. Lefebvre-Ducrocq, 1888; pet. in-8°, IV-33 pp. et
3 pp» bl.); Le théâtre de Lille il y a cent ans (Lille, imp.
Lefebvre-Ducrocq, 1889; pet. in-8°, 4G pp. et 3 pp. bl.);
Un chapitre de Thistoire du théâtre de Lille (Lille, imp.
Lefebvre-Ducrocq, 1890 ; pet. in-8°, 94 pp. et 1 f. bl:) ;
Souvenirs de théâtre d'un Lillois (Lille, imp. Lefebvre-
Ducrocq, 1890; pet. in-8°, VIII-124 pp. et 2 ff. bl.). Ce
sont d'utiles contributions, non seulement à l'histoire de
Lille, mais encore à l'histoire générale de l'art dramatique.
On y trouve, en effet, des renseignements sur beaucoup d'ar-
tistes célèbres qui ont passé par la capitale de la Flandre
française. Ceux qui s'intéressent à l'histoire du théâtre à
Gand, en particulier, liront avec plaisir des détails curieux
sur l'exploitation de Mme Denarelle, qui dirigea concurrem-
ment les scènes de Gand et de Lille, à la fin du XVIIIe siècle1.
Mr Lefebvre a trouvé dans le journal lillois, Les Feuilles
des Flandres, un avis concernant le théâtre de la confrérie
Saint-Sébastien ; en voici la reproduction, d'après la-copie
qu'il a bien voulu m'envoyer :
« Le Serment de Saint-Sébastien de la ville de Gand,
dans la Flandre autrichienne, donne avis que le privilège
de la direction du Théâtre de cette ville, pour la présente
année 1787, est vacant. On exige de celui qui désirera
1 V. sur l'incident Pécinadé {Le théâtre de Lille il y a cent ans,
p. 7), le document tiré de la correspondance du Magistrat de Gand,
que j'ai publié dans le Guide musical, 1887, n° 37. Le comédien
Henry, dont j'ai donné, au même endroit, une lettre fort curieuse,
doit, sans doute, être identifié avec celui qui est mentionné dans le
même opuscule (p. 19).
— 492 —
obtenir cette Direction, qui est très avantageuse, qu'il
puisse prouver sa capacité pour conduire une Troupe et
choisir de bons sujets qui réunissent les trois genres : la
Tragédie, la Comédie et l'Opéra. — On pourra s'adresser
personnellement ou par lettre à M. le Doyen dudit Serment
à Gand. Il y a toujours six mois d'abonnement pendant
l'hiver, qui commencent dès les premiers jours d'octobre.
Le Directeur, pour cet abonnement qui peut rapporter
3000 livres de France par mois, est obligé de donner
12 représentations, qui sont fixées tous les dimanches,
mardis et jeudis, et il lui est libre de faire représenter tous
les samedis par abonnement suspendu qui, joint à la recette
journalière, rapporte au moins tous les mois 4000 livres
tournois. Ces 7000 livres de recette sont assurées, et c'est
le moins qu'on puisse la fixer, car il est de fait notoire qu'il
y a des Directeurs qui ont fait 60,000 livres pendant les
six mois. » Paul Bergmans.
Encore les armoiries de l'Abbaye d'Alne. — Dans
la deuxième livraison du Messager des Sciences historiques l
M. van Spilbeeck affirme que les armes propres ou locales
de la ci-devant abbaye d'Alne consistaient en une fasce
d'argent avec trois merlettes en chef, sur fond d'azur.
A l'appui de son allégation, il invoque, outre une gravure
du XVIe siècle et un dessin de 1621, le cachet de Dom
Norbert Herset, dernier abbé de ce monastère, qui fut,
on le sait, incendié, en 1794, par les troupes de la Répu-
blique, sous la conduite d'un soldat de fortune qui portait
à juste titre le surnom de Charbonnier.
Nous avons sous la main les éléments nécessaires pour
confirmer l'allégation de M. Van Spilbeeck. Nous allons
les faire connaître aux lecteurs du Messager.
> Année 1890, p. 121.
- 493 -
L'ancienne Université de Lonvain possédait un collège
des humanités appelé le Collège de la Sainte -Trinité
(actuellement le Collège de MM. les Josephites). Chaque
année les livres à offrir en prix aux élèves de cet établisse-
ment étaient donnés par le chef de l'une ou l'autre de nos
grandes abbayes ou par un haut dignitaire ecclésiastique,
prévôt de chapitre ou doyen de ville. Le donnateur, qu'on
qualifiait de Mécène, venait ordinairement présider la
distribution des prix qui réunissait les membres de l'Uni-
versité et la bonne compagnie Louvaniste, et qui était
toujours précédée d'une représentation théâtrale.
Or, en 1734 le Mécène de Vannée du Collège delà Sainte-
Trinité, était Dom Barthélémy Louant, abbé d'Aine.
Les livres à être donnés en prix furent reliés en veau aux
armes de l'abbaye.
Nous possédons, dans notre Bibliothèque particulière,
un de ces volumes. Il porte le titre suivant : Histoire
de la vie et des miracles de Jésus- Christ, tiré de l'histoire
de l'ancien et du nouveau Testament par le R. P. D.
Augustin Calmet, abbé de Saint-Léopold de Nancy. A
Bruxelles, chez Simon t'Serstevens, imprimeur près les RR.
PP. Dominicains, 1721, in-12°.
Sur l'une des feuilles de garde de ce volume se trouve
l'inscription suivante :
Ex munificentia Amplissimi ac Reverendissimi Domini
Bartholomsei Louant, celeberrimi Monasterii de Alna
Abbatis dignissimi. In minori figura octavo Carolo vander
Haert, Lovaniensi, in Oymnasio SS. Trinitatis Lovanii,
hac 30 augusti 1734.
La reliure porte sur le plat les armes de l'abbaye d'Aine
frappées en or. L'écusson, de forme ovale, se trouve dans
un cartouche en style Louis XV, surmonté d'une mitre
et d'une crosse. C'est une fasce accompagnée en chef de
trois merlettes. L'inscription porte : Abb. B. M. de At.x j
— 494 —
(Abbatia Beatœ Matrice, de Alna). Les émaux ne sont pas
marqués.
Entre la feuille de garde et le titre du livre on a collé
une gravure du XVIIe siècle, pliée en quatre. La planche
a 23 centimètres de hauteur et 25 de largeur. Cette planche
offre également les armoiries de l'abbaye d'Aine. Dans le
ciel on voit la Sainte-Trinité : à droite Dieu le père por-
tant le globe, à gauche Dieu le fils tenant la croix; au
milieu le Saint-Esprit sous la forme de la colombe. Une
légende porte : S. Trinitas Benedixit. Les armes d'Aine
occupent en quelque sorte le centre de la planche. L'écus-
son se trouve dans un cartouche du XVIIe siècle, lequel
est orné au haut comme au bas d'une tête d'ange ailée.
Sur la tête d'ange, au haut du cartouche, se trouve une
église couronnée d'une flèche très élevée. A droite de
l'écusson on observe saint Landelin, fondateur d'Aine, en
habit de Bénédictin , tenant la main droite à l'église et
portant dans la main gauche la crosse abbatiale. A gauche
on remarque saint Bernard, en habit de l'ordre de Citeaux,
touchant de la main gauche la susdite église et tenant la
crosse de la main droite. Une légende explique la présence
de ces deux saints : Has JEdes S. Landelinus fundavit, —
S. Bernardus acquisivit. Ces figures ont 10 centimètres
de hauteur. L'écusson est chargé d'une fasce accompagnée
en chef de trois merlettes. La devise, qui se trouve au bas
de l'écusson, est : Mansnete liber aliter.
La planche est signée : Michel van Lochutn, fecit. Ce
graveur, élève d'Abraham van Meerel, en 1613, travailla
à Anvers en 1621. Notre planche fut probablement gravée
pour servir d'entêté et d'illustration d'un poème en l'hon-
neur de l'abbé d'Aine. Elle fut exécutée sous la prélature
de Dom Edmond Jouvent, élu le 23 février 1622, mort en
octobre 1655.
Louvain, 28 septembre 1890.
Ed. Van Even.
495 —
CHRONIQUE.
Tapisseries anciennes.- — M. Soil, avocat à Tournai, a publié dans
les Bulletins delà Gilde de Saint-Thomas et Saint-Luc (Bull. XXII;
des notes sur de vieilles tapisseries conservées en Allemagne, à
Quedlinhurg, Halberstadt, Rostock, Goslar, Brunswick et Ilildes-
heim. Ces tapisseries de la plus haute ancienneté, car elles appar-
tiennent au XII0 et au XIII0 siècles, sont extrêmement intéressantes.
La notice est accompagnée de quatre planches et de deux gravures
dans le texte. Les quatre planches sont : 1° un fragment de tapisserie
de la cathédrale d'Halberstadt, représentant le Christ enseignant,
entouré d'archanges et d'apôtres ; 2° un fragment de la tapisserie do
l'histoire d'Abraham, encore à la cathédrale d'Halberstadt; 3" la
tapisserie dite du philosophe, à la même église; 4° une tapisserie à
l'aiguille, devant d'autel, encore à la même église.
Nous devons également à M. Soil une notice-catalogue du Musée
de peinture et du Musée archéologique de Tournai, inaugurés tous
deux le 14 septembre 1890, où les remarques historiques valent au
moins autant que la nomenclature des objets exposés.
Emile V.
Jacob van Ruysdael et les paysagistes de l'école de Harlem ' .
— M. Michel nous donne, sous ce titre, une suite intéressante à son
étude consacrée à Hobbema et les paysagistes de son temps en Hol-
lande (voir plus haut p. 114). < Des documents nouveaux, dit-il, dus
pour la plupart aux heureuses découvertes faites dans les archives
par M. A. Bredius, nous ont permis de déterminer la filiation
jusqu'ici assez embrouillée des membres de la famille Ruysdael, et
i Emile Michel, Jacob van Ruysdael et les paysagistes de l'école
de Harlem (avec 21 gravures). (Paris, Librairie de l'Art, petit in- 1 »,
92 pp.)
— 496 —
d'établir entre les divers artistes qu'elle a produits-, des distinctions
qu'il est désormais possible de justifier. En même temps des voyages
réitérés.entrepris pour visiter la plupart des musées et des collections
privées de l'Europe, nous ont mis à même de connaître les principales
œuvres du grand paysagiste ; nous avons pu, grâce à des excursions
plus fréquentes encore en Hollande, et à des séjours prolongés dans .
la campagne de Harlem, retrouver quelques-uns des lieux où il a
travaillé et qui lui ont fourni ses meilleures inspirations. » Les
premières pages sont consacrées à l'école de Harlem et aux prédé-
cesseurs de Ruysdael. Parmi ceux-ci, Van Goyen arrête le plus
longtemps l'auteur, qui décrit admirablement son talent : « Le ciel
et l'eau lui fournissent de précieuses ressources pour exprimer la
poésie propre à son pays, celle de l'espace et des jeux de la lumière
qui en modifient à chaque instant les aspects. D'ordinaire le ciel
remplit les trois quarts des tableaux de Van Goyen et parfois même
cette proportion est dépassée. Au-dessous de ces grands ciels où se
meut la troupe légère des nuages, l'eau des fleuves ou des canaux
réfléchit leurs formes et leur fait écho... » C'est principalement dans
les grands cours d'eau qu'excelle Van Goyen et qu'il montre toute
son originalité ; en ces sortes de sujets il est maître, il n'a point été
dépassé, et jamais il n'en a été traité en meilleurs termes que par
M. Michel.
Jacob Ruysdael naquit à Harlem en 1628 ou 1629, c'est-à-dire
trois ou quatre ans après la date adoptée jusqu'ici. On a, dans un
acte du 9 juin 1661, sa propre déclaration au sujet de son âge : il se
déclarait âgé de 32 ans. Salomon van Ruysdael, que l'on considérait
autrefois comme son frère aine, était son oncle et passe pour avoir
été son maître. Ses premiers paysages offrent en général des motifs
très simples, pris aux environs de Harlem. Dans la maturité de son
talent, il doit avoir visité la Norwège, dont le peintre Everdingen
faisait alors connaître la beauté. « Sans vouloir égaler à ses paysages
hollandais les cascades et les motifs norvégiens de Ruysdael, nous
trouvons dans ces tableaux, dit M. Michel, une précision de détails,
une variété et un sentiment poétique qui rendent ces interprétations
de la nature supérieures à celles qu'Everdingen nous a données.
Gomment avec sa sincérité si scrupuleuse, le maître aurait-il ainsi
multiplié les images d'un pays qu'il n'aurait point vu?... Peut-être
à raison du peu de succès qu'obtenaient près de ses contemporains
ses premiers ouvrages, se décida-t-il à chercher au milieu d'une
— 497 -
nature plus accidentée, des sujets qui auraient plus de chance de
leur plaire... » Malgré son grand talent, sauf Hobbema, il n'eut. pas
d'élèves. Ses tableaux n'étaient guère recherchés de son temps. Tel
d'entr'eux, une Marine qu'il aurait de son vivant cédée pour 15 ou
20 florins, se vendait, à Amsterdam, 200 florins cent ans après sa
mort, 4000 francs en 1824, 9000 en 1829 et, mise aux enchères
aujourd'hui, atteindrait, dit M. Michel, trois fois ce chiffre. J. Ruys-
dael passa les dernières années de sa vie dans une extrême détresse.
Les membres de la secte des mennonites"à laquelle il appartenait, le
firent admettre dans un hospice de sa ville natale en se cotisant pour
payer sa pension. Il y mourut en 1682.
Au sujet d'un ouvrage de De Wulf sur les coiti meb de
Flandre. — Nous lisons dans une pièce qui repose aux archives du
Conseil de Flandre à Gand, qu'en i769 certain Philippe De Wulf,
pensionnaire de la ville d'Ostende, disait avoir besoin « de tous les
« décrets interprétatifs rendus sur les coutumes de Flandres > pour
les insérer dans un ouvrage qu'il se proposait de publier sous le titre
de « Concordance et discordance générale sur toutes les coutumes
« décrétées de la Flandre, avec observations de droit et de pratique. »
Nulle part nous ne trouvons trace de cet ouvrage, qui n'a point été
publié. S'il existait en manuscrit dans quelque dépôt public ou
quelque collection privée, comme il n'est pas impossible, il méri-
terait peut-être, pour les renseignements ou les documents recueillis,
l'attention de la Commission chargée de la publication de nos an-
ciennes coutumes.
Ce Philippe De Wulf est probablement le même que Jacques
Philippe De Wulf, auteur de YIndex des cinq livres des Placards
de Flandre, imprimé à Gand chez Goesin en 1766. D.
Ventes. — On a vendu récemment à la galerie de la rue de Sèze, la
collection de tableaux de M. E.May. Cette vente a produit 500,060 fr.
Il y a eu des enchères extraordinairement élevées. Signalons parmi
les Corot : Le Pont Saint-A.nge à Rome, mesurant 32 centimètres en
hauteur sur 45 en largeur, a été poussé à 21,100 francs; La Femme
du Pêcheur, mesurant 23 centimètres en hauteur sur 35 en largeur,
adjugé 13,700 francs; La Rochelle, hauteur 26 centimètres, largeur
39 centimètres, 12,100 francs; Le Cabaret, hauteur 23 centimètres,
largeur 35 centimètres, vendu 15,700 francs; Dunherque, hauteur
32 centimètres, largeur 45 centimètres, 6,600 francs; Saint- G cor y? s
*
— 498 —
hauteur 28 centimètres, largeur 40 centimètres, vendu 5,100 francs ;
Gênes, 700.0 francs ; Le Palais des papes à Avignon, 7,100 francs ;
La Seine à Rouen, 7,000 francs; Saintry, 12,000 francs; Lac de Ge-
nève, vendu 10,000 francs ; Port de Bordeaux, 10,100 francs ;
Environs de Saint Malo, 5,800 francs; Grand Canal à Venise,
10,200 francs ; L'Entrée du village, 10,500 francs; Marine, 10, 100 fr.;
Comme on peut le voir par les quelques mesures données tous ces
tableaux de Corot sont de très petites dimensions. C'est la première
fois, qu'on voit des œuvres de cette importance de ce maître obtenir
des prix aussi élevés.
Des pastels de J. I. Millet se sont également bien vendus. Le
Vigneron, vendu 17,600 fr. ; Berger et son troupeau, pastel qui
avait été payé 400 fr., à Millet, a été adjugé 29,600 fr.; La Fin de la
journée, adjugé 25,000 fr. ; la Plaine, 8,900 fr. ; la Méridienne,
11,300 fr., ce pastel avait été payé 250 fr., à Millet; Gardeuse d'oies,
7,350 fr. ; Les défricheurs, 4,400 fr., le Chat,- 4,950 fr.
Signalons parmi les autres œuvres : l'Absinthe, par Béraud,
3,150 fr.; La Vieille Route, par Cazin adjugé 5,900 fr.; Effet de lune,
par le même 5,100 fr. ; L'Étang, par le même, 6,300 fr. ; Théocrite,
5,900 fr. ; Cabanes : Clair de Lune, 3,200 fr. ; Marais en Hollande,
3.150 fr. Toutes ces œuvres de Cazin ont dépassé les estimations de
l'expert. Un petit tableau, par Degas, Leçon au foyer, a été payé
8000 fr. ; Répétition d'un ballet sur la scène, pastel de Degas a été
payé 8,400 fr.; Femme à la guitare, par Manet, 3,000 fr. ; Une
minuscule étude, par Meissonier, mesurant 8 centimètres sur 6, a
été payée 5,500 fr. Les œuvres de Claude Monet n'obtiennent pas
encore des enchères bien élevées : La Roche-Guyon, 1,250 fr. ;
Bateaux en Hollande, 1,500 fr. ; La Seine à Vetheuil, 1,750 fr. ;
Bateaux de plaisance, 1,880 fr.'; Le Déjeuner, œuvre assez impor-
tante par Raffaeli, 2,100 fr.
Cette collection comprenait également quelques tableaux anciens :
Vue de Venise, par Canalette, 7,000 fr. ; Portrait d'un pasteur
protestant, par P. de Champaigne, 7,000 fr. ; la Marchande de
poissons, 11,000 fr. ; Portrait d'homme, par Hans Holbein, 13,000 fr. ;
Portrait d'un magistrat, par Largillière, 4,300 ; Portrait de Van
Goyen, 7,200 fr.
— Le 13 juin 1890 a eu lieu à la galerie Sedelmeyer à Paris, la
vente aux enchères de la belle collection Prosper Crabbe ; cette
vente a produit 1,589,900 francs. Voici quelques enchères :
Tableaux modernes : Delacroix, Chasse au tigre, 76,000 francs ;
— 499 —
Corot, Le Matin, 63,000 francs ; le Soir, 60,0^0 francs; Diaz, Les
Mendiantes, 27,500 francs ; J. Dupré,- La Forêt, 25,000 francs ;
Fromentin, Une halte de cavaliers, 42,000 francs ; Moissonier, Le
Guide, 177,000 francs; Le Billet doux, 43,500 francs : Molière lisant,
35,000 francs ; Millet, Une famille de paysans, 20,500 francs ; La
plaine de Barbison, 13,600 francs; Stevens, Ophélie, 29,100 francs;
Fédora, 15,000 francs; Le Masque japonais, 15,000 francs ; Troyon,
Le Garde-chasse et ses chiens, 40,000 francs; Dipurt i»>nr le
marché, 65,000 francs; La Vache blanche, 85,000 francs.
Tableaux anciens : Rembrandt, Portrait d'un amiral, 10(>.r»< '< >
francs; Frans Hais, Le Joueur de violon, 46,500 francs; Nattier,
Portrait de Mme de Flesselles, 75,000 francs ; Largillière, Bossuet et
le grand Dauphin, 20,000 francs; Paul Potter, Les Pourceaux,
32,200 francs ; Rubens, La Sainte Famille, 112,000 francs; Portrait
de dame, 25,000 francs; Le martyre de Saint-Liévin, 27,500 francs;
Greuze, Tête déjeune Fille, 17,500 francs ; Guard, La fête de Bucen-
taure, 16,000 francs, etc.
— A la vente des tableaux du duc de Somerset, la Ferme, de
Paul Potter, a été adjugée 6090 livres sterling.
— Le 8 juillet 1890, plusieurs tableaux de Courbet vendus à
Bruxelles ont rapporté 40,000 francs.
La Vague, 15,000 fi\, adjugé à M. Otelet; Un Portrait de Juliette,
10,000 fr., à M. Vermeulen ; La Roche, 10,000 fr., à M. Yermeulen ;
La Dormeuse, 5,000 fr., à M. Rolan.
— Lors de fouilles faites près de la cathédrale de Vérone, pour la
construction d'un égoùt, on a trouvé une grande statue de Minerve^
en marbre blanc, entière et en parfait état de conservation.
500
NÉCROLOGIE.
._.(■<-
M. Mergaert, artiste-peintre, né à Handzame, est mort à Bruges
en janvier 1890. Il fit ses premières études à l'école de dessin de
Roulers, sous la direction de Horrie Deckmyn. Plus tard il remporta
le prix de Rome et après avoir fait de nombreux voyages se fixa
définitivement à Bruges. Mergaert excellait à peindre des portraits.
Sa grande toile, représentant les Martyrs chrétiens au Colysée de
Rome, qui lui valut tant d'éloges et les félicitations de Gallait, appar-
tient à l'église de son village natal.
Noterman (Zacharie), né à Gand, est mort à Paris au mois de jan-
vier 1890, à l'âge de soixante-dix ans. Ses tableautins qui représen-
taient le plus souvent des scènes de la vie des animaux,' surtout des
singes, ou des sujets du genre amusant, ont eu en leur temps une
grande vogue.
Capeinick. (Jean), le peintre de fleurs gantois, bien connu, est mort
à Schaerbeek lez Bruxelles, le 11 février 1890, à l'âge de cinquante-
deux ans.
de Haerne (Mgr Désiré), né à Ypres le 4 juillet 1804, d'une ancienne
famille de l'Artois, est décédé à Bruxelles le 22 mars 1890. Il fit ses
humanités dans sa ville natale, puis sortit du séminaire de Gand à
dix-neuf ans, pour devenir successivement professeur aux collèges de
Gand, de Gourtrai et de Roulers, et vicaire à Moorslede. A l'âge de
vingt-six ans, il fut député par Roulers au Congrès national, et fut
ensuite élu repi'ésentant. En 1833, il résigna son mandat, pour
fonder avec d'autres prêtres, un collège à Gourtrai. En 1844, Courtrai
l'élut membre de la Chambre des représentants. Il occupa ce poste
jusqu'à sa mort. Mgr de Haerne était non seulement un politique
éminent mais un homme de bien; pendant sa longue carrière, il
s'occupa de toutes les questions d'intérêt intellectuel et matériel, et
— 501 -
il se dévoua à l'œuvre de l'instruction des sourds-muets, 11 pai'vin!
à fonder des asiles pour eux tant en Belgique qu'aux Indes, en Ai
terre et en Amérique. A part de nombreux écrits de polémique dans
les journaux conservateurs des premières années qui suivirent la
Révolution belge de 1830, Mgr de Haerne écrivit plusieurs ouvra
de linguistique, et fut dans ces dernières années collaborateur actif
du Messager. Mgr de Haerne était chanoine titulaire de Bruges,
docteur en théologie, prélat domestique de S. S., grand cordon do
l'ordre de Léopold, décoré de plusieurs autres ordres.
Le comte Borluut d'Hoogstraete (Melchior), est décédé à Gand
le 15 avril 1890. En lui s'éteint une des plus anciennes famill
noh*e Flandre, dont le nom figure avec éclat dans l'histoire nationale.
Son ancêtre Jean Borluut commandait le contingent gantois à la
célèbre bataille des Éperons d'or en 1302.
Le chanoine Van Weddingen, aumônier de la Cour, philosophe
et poète, membre de l'Académie royale de Belgique, né à Wetteren,
est mort à Bruxelles le 7 août 1890, à l'âge de quarante-neuf ans.
Verlat (Charles), peintre, directeur de l'Académie de Beaux- Arts
à Anvers, est mort au mois d'octobre, à l'âge de soixante-six ans,
dans cette ville où il est né. Élève de De Keyser, il cultiva dès
l'âgé de dix-sept ans tous les genres et eût beaucoup de succès.
En 1847, il alla à Paris où il resta environ vingt ans. Pendant plusieurs
années il fut professeur de peinture et directeur de l'Académie de
Weimar, et dirigea l'Académie d'Anvers depuis sa réorganisation
en 1885. Citons parmi ses œuvres : Gérard Dow dans l'atelier de
Rembrant, Godefroide Bouillon à l'assaut de Jérusalem, des Buffles,
des Renards, Chien et Chat, Un Loup, Une Sainte Famille, Un
Jour de Deuil, Barabas, Repos de la Sainte Famille.
ScHELER'Aug.) le Dr, professeur à l'Université de Bruxelles, biblio-
thécaire du comte de Flandre, né le 5 avril 1819 dans le canton de
Saint-Gall, en Suisse, est mort à Bruxelles à la fin de novembre 1890-
Il fit ses études en Allemagne, et vint en Belgique vers 1839. C'était
lin linguiste fort distingué ; il laisse entre autres : Essai linguistique
sur les éléments germaniques du dictionnaire français ; Diction-
naire d'étymologie française. Il était membre de l'Académie royale
de Belgique.
Ruelens (Ch.),un des conservateurs de la Bibliothèque royale, est
décédé inopinément au mois de décembre 1890. Né à Molenbeek le
— 502 —
22 mai 1820, il était attaché à la bibliothèque depuis le 31 dé-
cembre 1850 et spécialement chargé des manuscrits. M. Ruelens
possédait une mémoire extraordinaire ; il parlait et il écrivait
plusieurs langues. Il était très érudit et très savant, son ouvrage
Annales Plantiniennes en collaboration avec De Backer en est une
preuve. Il y a deux ans, il fut chargé d'aller en Angleterre avec
M. le baron Kervyn de Lettenhove pour y acquérir les fameux
codices que renfermait la riche et précieuse- bibliothèque de sir
Philips, bibliophile célèbre mort à Cheltenham. Ce voyage le
fatigua beaucoup et ébranla sa santé qui depuis ne s'est jamais
remise. Il avait passé par le journalisme et fut chroniqueur à
l' Universel en 1860 sous la rédaction en chef du baron de Haulleville ;
il passa au Courrier de Bruxelles où il publia pendant plusieurs
années des Menus-propos hebdomadaires sous le pseudonyme de
Zozime.
Feue sa femme, Louisa Stappaerts, a publié divers romans élégam-
ment écrits sous le pneudonyme de Caroline Gravière.
Dupont (Auguste), pianiste de talent et compositeur, est mort à
Bruxelles au mois de décembre 1890, à l'âge de soixante-trois ans.
Robert, artiste peintre, gendre de Madou, est mort à Bruxelles le
13 décembre 1890; il était né à Trazegnies le 27 février 1817.
Il peignit avec succès le portrait et l'histoire. Il y a de lui au Musée
de Bruxelles Charles Quint au monastère de Saint-Just.
Lambeaux (Jules), jeune peintre de talent, qui avait commencé à
s"affirmer à l'Exposition universelle de Paris et au dernier Salon de
Gand, est mort subitement dans son atelier. Il était âgé de trente-
deux ans.
Dôllinger (Johan-Jozef-Ignaz), fameux théologien et historien
allemand, né à Bamberg en 1799, est mort à Munich le 10 janvier 1890.
L'abbé Ducrost, chanoine d'Autun, professeur de géologie à Lyon,
connu par ses importants travaux sur les temps préhistoriques, est
mort au mois de janvier à l'âge de cinquante-six ans.
Salviati (Antonio), le restaurateur de l'industrie verrière à Venise,
est mort en cette ville, en février 1890, à l'âge de soixante-quatorze
ans. D'abord avocat, il s'adonna ensuite au travail du verre, et spé-
cialement de la mosaïque, genre XVIe et XVIIe siècle, et établit une
verrerie à Murano près de Venise.
— 503 —
Deschamps de Pas (Louis-François-Joseph', ingénieur en chef
honoraire des ponts et chaussées, né à Saint-Omer en 1816, y mourut
le 1er mars 1890; membre correspondant de l'Institut et d'un grand
nombre de commissions scientifiques, il était également secrétaire-
général de la Société des Antiquaires de la Morinie et a laissé
travaux assez nombreux sur l'histoire, l'archéologie et la numisma-
tique, entre autres une histoire de Saint-Omer.
Ambert (le général Joachim-Marie, baron', né en 1804, mort à
Paris le 31 mars 1890, s'est fait connaître par de nombreux ouvrages,
tant sur les sciences historiques que sur l'art militaire.
Le Dr Campbell (Marinus-Andreas-Gerardus', directeur de la
Bibliothèque royale de la Haye, est mort à l'âge de soixante-et-onze
ans, au mois d'avril 1890. C'était un bibliophile des plus distingués.
Robert Henry (Joseph), peintre très distingué, né à Cologne, de
parents français en 1797, est mort à Paris le 5 mai 1890. Élève de
Girodet, de Gros et de Vernet, il devint lui-même chef d'école. 11 a
été directeur de l'École des Beaux-Arts à Paris et de l'Académie de
France, à Rome. Il y a de ses travaux à Versailles, au Luxem-
bourg, etc.
L'Épinois (Henri-Charles-Ernest de Buchère, comte de), écrivain
français, né à Senots (Oise) en 1831, est mort à Cadenel (Hérault), le
15 juillet 1S90. Ancien élève de l'École des Chartes, il classa les
archives de Compiègne et publia de nombreux travaux (v. P'olybi-
blion, 1890, p. 175).
Toulmouche (Auguste), peintre de genre, né à Nantes en 1829, est
mort à Paris le 16 octobre 1890. Ses tableaux sont très appréciés; il
a plusieurs fois exposé au Salon de Gand.
Schliemann, le célèbre archéologue, est mort tin décembre 1890,
à Naples, où il passait pour se rendre en Grèce. Il était né en 1822
à New-Buckow, dans le Mecklembourg-Schwerin ; il quitta le com-
merce qu'il avait d'abord exercé et s'engagea, à Hambourg, comme
mousse à bord d'un bâtiment en partance pour le Venezuela. Ce
bâtiment échoua sur les côtes de l'île de Texel; Schliemann malade,
fut recueilli à l'hôpital d'Amsterdam, et entra, après sa guérison,
dans une grande maison de commerce de celte ville. Tout en
s'acquittant des devoirs de sa profession, il apprit les langues
anglaise, française, hollandaise, espagnole, italienne, russe, et fut
— 504 —
envoyé comme représentant de sa maison à Saint-Pétersbourg, où il
fit fortune en peu de temps.
Ses fonctions l'amenèrent à faire de nombreux voyages en Suède,
en Danemark, en Italie, en Egypte, en Syrie et en Grèce. Ces
voyages, et la connaissance qu'il avait acquise de la langue grecque,
éveillèrent de plus en plus sa curiosité et la tournèrent vers les
choses de l'antiquité et, en particulier, de l'antiquité grecque. Il
quitta de nouveau le commerce, cette fois pour se consacrer tout
entier aux études et aux voyages. Après avoir fait le tour du monde,
il visita Corfou, Ithaque, la Morée et les côtes de l' Asie-Mineure. Là,
il voua toute son attention et toutes ses recherches au théâtre des
luttes des héros d'Homère.
Ce fut à ses frais, en compagnie de sa femme, une Grecque, et à la
tète de cent cinquante ouvriers qu'il étudia, de 1870 à 1882, le terrain
d'Hissarlik et y retrouva les vestiges de six villes superposées. Il
crut avoir découvert les restes de l'antique Uion dans la seconde de
ces ruines amoncelées. Il envoya à Berlin les trésors archéologiques
qu'il y mit au jour; ils y formèrent la section du musée ethnogra-
phique qui porte actuellement son nom.
En 1876, il découvrit les restes de l'Acropole de Mycène ; en 1881
et en 1885, ceux de Tyr. En 1871, il s'était établi à demeure à Athènes.
Il a décrit ses voyages et ses découvertes dans plusieurs ouvrages
qui portent les noms des villes et des pays qui ont été l'objet de ses
recherches et de ses fouilles.
Il laisse deux enfants, Agamemnon et Clytemnestre1.
1 Voir la biographie de Schliemann dans le Messager 1888, par
Rahlenbeck.
— 505
TABLE DES MATIÈRES,
ANNEE 1890.
NOTICES ET DISSERTATIONS.
Notice sur le local de la Confrérie de Saint-Georges à Gand, de
1381 à 1796. — Par Paul Voituron 1,124
Le collège Saint-Norbert à Rome. — Par I. V. S 25
Les Seigneuries du pays de Malines ; Keerbergen et ses Sei-
gneurs. — Par J. Th. de Raadt 40,158,283
Anciennes Tombes et Épitaphes de l'Hospice de Wennemaer
à Gand. — Tar Robert Schoorman 65
Archives gantoises. — VI. — Notes sur les papiers conservés
dans les combles de l'hôtel de ville. — Par V. Vander
Haeghen 73
Deux fonctionnaires de l'ancien régime. — Par Gallet-Miry. 77
Un dernier mot concernant les armoiries de l'abbaye d'Aine.
— Par I. Van Spilbeeck 121
A propos d'un récent travail sur Juste Lipse. — Par les
auteurs de la Bibliotheca Belgica 147
La répression du vagabondage en Flandre au XVIe siècle. —
Par Gallet-Miry 180
Quelques notes sur l'ancien calendrier flamand. — Par Werner
de Haerne 186
Quelques détails historiques se rapportant à la bataille de
Fleurus, 1622. — Par Dés. van de Casteele 197
A propos de la restauration du château des Comtes. — Par
Robert Schoorman 207
Le Bourreau de Gand. — Par Prosper Claeys. . . . 241, 391
— 506 —
Analectes belgiques. — Par Paul Bergmans 263,420
La transposition du clavier par Jean Galle — 1626-1635. —
Par D. van de (Jasteele 308
L'administration provinciale en Flandre, sous les périodes
espagnole et autrichienne. — Par Gallet-Miry . . . 319, 444
Le Psautier de Guy de Dampierre. — XIIIe siècle. — Par
Joseph Destrée 377
VARIETES.
Les Loteries et les Tombolas, d'autrefois. — Par P. C. . . . 82
Banquets des Echevins. — Par P. C . 87
Les Boucles de Souliers sous la première République. — Lettre
inédite. — Par F. Vcrgey 91
Au sujet du Château des Comtes à Gand 95
Un autographe de H. Crumpipen. — Par Cte de K 98
Une fille de Ryhove. — Par Paul Fredericq 101
L'incendie du château de Beauraing. — (Indépendance.) . . 105
Origine du marché aux fleurs de la place d'Armes. — Un horti-
culteur gantois, peintre et marchand de tableaux. — Par P. C. 21 1
L'arbre de la liberté à Gand. — Par chev. J.-F.-X. Diericx. 214
La statue de Charles -Quint. — Par chev. J.-F.-X. Diericx . 215
Jacobs Hessels 216
Ordonnances de Louis de Nevers, comte de Flandre, relatives
à la fabrication des draps. — Par L. St 217
Observation d'un physicien au sujet de la conservation des
tableaux sur toile. — Par 0 222
Vente de porcelaines en 1788. — Par Dés. van de Casteele . 223
Rapport sur le projet de restauration de la Halle aux draps à
Gand, présenté au conseil communal par M. Wagener . . 227
Chanteurs publics au XVI0 siècle. — Par P. C. 340
Pénalité curieuse pour fraude industrielle. — Par P. C. . . 344
Note sur un manuscrit des Archives du Chapitre de Pise. —
Par Armand d'Herbomez 347
Le baron Jean-Charles-Antoine de Saint-Génois. — Par D. . 349
Du calcul de certains délais, en langue flamande. — Par D. . 351
Une lettre de Marie de Bourgogne, au Parlement de Malines. 354
Albert, comte de Berg, marquis de Berg-op-Zoom. — Par
J. Th. de Raadt 356
Registre criminel de Douai (1531-1534). — Par H. van der
Linden 359
Interrogatoires au sujet de propos hérétiques, 1583. — Par
V. V. H. . 360
— 507 —
Sentence capitale rendue contre un hérétique en 1582. — Par
V. V. H 364
Une lettre de Conscience à P. -A. Lentz. — Par Paul Berg-
mans 3G5
Les gamins au siècle dernier. — Troubles à l'académie en 1768.
— Par P. C . . . . . . .408
Les chanteurs publics sous l'empire. — Par P. C 471
Commerce de. tableaux de maîtres anciens, à Gand, au commen-
cement du XVIII» siècle. — Par D 476
Tableaux de Rubens, évalués à Gand en 1668. — Par D. . . 481
Monnaies circulant en 1818. — Par D 481
Bibliothèque des écrivains de la Compagnie de Jésus, par le
P. Carlos Sommervogel. — Par F. Vander Haeghen . . . 483
« Le récit tragique de l'attentat énorme et exécrable dont l'idée
seul fait frémir les anges et les hommes, commis par trois
soldats de la garnison de Luxembourg, qui ont fait servir la
sainte Euchariste au sacrilège. » — Par D 485
Le théâtre de Lille. — Par Paul Bergmans 490
Encore les armoiries de l'abbaye d'Aine. — Par Ed. Van Even 492
CHRONIQUE.
Gérard Mercator. — Par Paul Bergmans 109
Registres des enquêteurs de saint Louis . — Par Paul Bergmans 1 10
Correspondance du comte de Mercy-Argenteau. — Par Paul
Bergmans • 111
Les sceaux par Lecoy de la Marche ..111
Van Schooubeke en h et Maagdenhuis van Anhverpen . . . 112
Quatre siècles de gravure sur bois 113
Hobbema et les paysagistes de son temps en Hollande . . . 114
Les Communes françaises à l'époque des Capétiens directs. . 115
Divers 115
La bataille de Courtrai. —Par Paul Bergmans 232
Littérature latine et histoire du moyen-âge. — Par Paul
Bergmans 233
Le précepteur de Philippe IL — Par Paul Bergmans . . . 234
Le prix des tableaux 235
L'angelus de Millet 23o
Les gravures 236
• Collection d'antiquités 237
Beaux-Arts -°'
Lettre de Marie Stuart 238
Meubles de prix 2^9
— 508 —
Commission pour la publication des anciennes lois et ordon-
nances. — Traduction des ordonnances. — Par D. . . . 239
Copernic et Galilée devant l'Université de Louvain. — Par D. 210
Beaux-Arts. — Le prix des tableaux 369
La diplomatie française et la succession d'Espagne, par A. Le-
grelle. — Par Emile V 373
Académie royale de Belgique. — Concours pour 1891 . . . 374
Tapisseries anciennes. — Par Emile V 495
Jacob van Ruysdael et les paysagistes de l'école de Harlem. —
Par D 495
Au sujet d'un ouvrage de De Wulf sur les coutumes de Flandre 497
Ventes ..." 497
NECROLOGIE.
M. Mergaert 500
Noterman (Zacliarie) . . 500
Capeinick (Jean) 500
de Haerne (Mgr Désiré) 500
Borluut d'Hoogstraete (comte Melchior) 501
Van Weddingen (chanoine) 501
Verlat (Charles) 501
Scheler (Aug.) le Dr 501
Ruelens(Ch.) 501
Dupont (Auguste) 502
Robert 502
Lambeaux (Jules) 502
Dôllinger (Johan-Jozef-Ignaz) 502
Ducrost(abbé) 502
Salviati (Antonio) 502
Deschamps de Pas (Louis-François-Joseph) 503
Ambert (le général Joachim-Marie, baron) 503
Le Dr Campbell (Marinus-Andreas-Gerardus) 503
Robert Henry (Joseph) 503
L'Épinois (tlenri-Charles-Ernest de Buchère) comte de . . . 503
Toulmouche (Auguste) 503
Schliemann 503
ï*l»nclies.
Le local de la Confrérie de Saint-Georges à Gand 1
Armoiries de l'abbaye d'Aine 121
Le Psautier de Guy de Dampierre. XIIIe siècle (2 planches) 386, 389
ETTY CENTER L
3 3125 00676 6006
NRARY
•