Skip to main content

Full text of "Mithridate, tragédie"

See other formats


Google 



This is a digital copy of a book thaï was prcscrvod for générations on library shelves before it was carefully scanned by Google as part of a project 

to make the world's bocks discoverablc online. 

It has survived long enough for the copyright to expire and the book to enter the public domain. A public domain book is one that was never subject 

to copyright or whose légal copyright term has expired. Whether a book is in the public domain may vary country to country. Public domain books 

are our gateways to the past, representing a wealth of history, culture and knowledge that's often difficult to discover. 

Marks, notations and other maiginalia présent in the original volume will appear in this file - a reminder of this book's long journcy from the 

publisher to a library and finally to you. 

Usage guidelines 

Google is proud to partner with libraries to digitize public domain materials and make them widely accessible. Public domain books belong to the 
public and we are merely their custodians. Nevertheless, this work is expensive, so in order to keep providing this resource, we hâve taken steps to 
prcvcnt abuse by commercial parties, including placing lechnical restrictions on automated querying. 
We also ask that you: 

+ Make non-commercial use of the files We designed Google Book Search for use by individuals, and we request that you use thèse files for 
Personal, non-commercial purposes. 

+ Refrain fivm automated querying Do nol send automated queries of any sort to Google's System: If you are conducting research on machine 
translation, optical character récognition or other areas where access to a laige amount of text is helpful, please contact us. We encourage the 
use of public domain materials for thèse purposes and may be able to help. 

+ Maintain attributionTht GoogX'S "watermark" you see on each file is essential for informingpcoplcabout this project and helping them find 
additional materials through Google Book Search. Please do not remove it. 

+ Keep it légal Whatever your use, remember that you are lesponsible for ensuring that what you are doing is légal. Do not assume that just 
because we believe a book is in the public domain for users in the United States, that the work is also in the public domain for users in other 
countiies. Whether a book is still in copyright varies from country to country, and we can'l offer guidance on whether any spécifie use of 
any spécifie book is allowed. Please do not assume that a book's appearance in Google Book Search means it can be used in any manner 
anywhere in the world. Copyright infringement liabili^ can be quite severe. 

About Google Book Search 

Google's mission is to organize the world's information and to make it universally accessible and useful. Google Book Search helps rcaders 
discover the world's books while helping authors and publishers reach new audiences. You can search through the full icxi of ihis book on the web 

at |http: //books. google .com/l 



Google 



A propos de ce livre 

Ceci est une copie numérique d'un ouvrage conservé depuis des générations dans les rayonnages d'une bibliothèque avant d'être numérisé avec 

précaution par Google dans le cadre d'un projet visant à permettre aux internautes de découvrir l'ensemble du patrimoine littéraire mondial en 

ligne. 

Ce livre étant relativement ancien, il n'est plus protégé par la loi sur les droits d'auteur et appartient à présent au domaine public. L'expression 

"appartenir au domaine public" signifie que le livre en question n'a jamais été soumis aux droits d'auteur ou que ses droits légaux sont arrivés à 

expiration. Les conditions requises pour qu'un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d'un pays à l'autre. Les livres libres de droit sont 

autant de liens avec le passé. Ils sont les témoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont 

trop souvent difficilement accessibles au public. 

Les notes de bas de page et autres annotations en maige du texte présentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir 

du long chemin parcouru par l'ouvrage depuis la maison d'édition en passant par la bibliothèque pour finalement se retrouver entre vos mains. 

Consignes d'utilisation 

Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliothèques à la numérisation des ouvrages apparienani au domaine public et de les rendre 
ainsi accessibles à tous. Ces livres sont en effet la propriété de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine. 
Il s'agit toutefois d'un projet coûteux. Par conséquent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inépuisables, nous avons pris les 
dispositions nécessaires afin de prévenir les éventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des 
contraintes techniques relatives aux requêtes automatisées. 
Nous vous demandons également de: 

+ Ne pas utiliser les fichiers à des fins commerciales Nous avons conçu le programme Google Recherche de Livres à l'usage des particuliers. 
Nous vous demandons donc d'utiliser uniquement ces fichiers à des fins personnelles. Ils ne sauraient en effet être employés dans un 
quelconque but commercial. 

+ Ne pas procéder à des requêtes automatisées N'envoyez aucune requête automatisée quelle qu'elle soit au système Google. Si vous effectuez 
des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caractères ou tout autre domaine nécessitant de disposer 
d'importantes quantités de texte, n'hésitez pas à nous contacter Nous encourageons pour la réalisation de ce type de travaux l'utilisation des 
ouvrages et documents appartenant au domaine public et serions heureux de vous être utile. 

+ Ne pas supprimer l'attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet 
et leur permettre d'accéder à davantage de documents par l'intermédiaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en 
aucun cas. 

+ Rester dans la légalité Quelle que soit l'utilisation que vous comptez faire des fichiers, n'oubliez pas qu'il est de votre responsabilité de 
veiller à respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public américain, n'en déduisez pas pour autant qu'il en va de même dans 
les autres pays. La durée légale des droits d'auteur d'un livre varie d'un pays à l'autre. Nous ne sommes donc pas en mesure de répertorier 
les ouvrages dont l'utilisation est autorisée et ceux dont elle ne l'est pas. Ne croyez pas que le simple fait d'afficher un livre sur Google 
Recherche de Livres signifie que celui-ci peut être utilisé de quelque façon que ce soit dans le monde entier. La condamnation à laquelle vous 
vous exposeriez en cas de violation des droits d'auteur peut être sévère. 

A propos du service Google Recherche de Livres 

En favorisant la recherche et l'accès à un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le français, Google souhaite 
contribuer à promouvoir la diversité culturelle grâce à Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet 
aux internautes de découvrir le patrimoine littéraire mondial, tout en aidant les auteurs et les éditeurs à élargir leur public. Vous pouvez effectuer 
des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l'adresse fhttp: //book s .google . coïrïl 



^du 



CT 



lGnii.2Sù.-7é,2 






ri^ •'\\ 






Isl 



Q 



m 



m 

i 
1 
1 
i 
§ 
i 



m 

i 
il 



i 

i 

i 
1 



Harvard Collège 
Library 



!mÎ 



FROM THE LIBRARY OF 

PAUL HENRY KELSEY 

Clui o< 1902 
THB GIFT OF 

Mrs. PAUL H. KELSEY 
July 2, 1936 



m 

1 

§ 
1 



m 

1 
1 
1 
1 
1 
1 
1 
1 
1 
1 

m 



là) 



^I^m^gl^lMI^I^I^MUMl 



(al 




3 2044 102 862 588 



MITHRIDATE 



MITHRIDATE 



TRAGÉDIE 



PAR 

JEAN RACINE 



EDITED WITH INTRODUCTION, NOTES, AND 

VOCABULARY 



BY 



LEO EICH LEWIS, A.M. 

A880CIATE PB0FES80R OF MODERN 
LANGUAGE8 IN TUPT8 COLLEGE 



BENJ. H. SANBORN & CO. 

CHICAGO NEW YORK BOSTON 

1921 






HARVARD COLLEGE LIBRARY 
FROW THE LIBRARY OF 
PAUL H. KELSEY 
JULY2, 1936 



Copyright, 1921, 
Bt BENJ. h. SANBORN & CO. 



* J. S. Cushing Co. — Berwick & Smith Co. 
Norwood, Mass., U.S. A. 



PREFATORY 

The Editor is not without hope that others may ooncur in 
his opinion that Mithridate is by far the best play with which to 
begin the study of Racine With American students. Having 
many times found, during the past twenty-five years, that this 
play enlists, in higher degree than Andromaqy£f BrUannicuSy 
Iphigénie, Phèdre, or Athalie, the interest of his classes, he makes 
bold to provide what has hitherto been lacking, an édition with 
English annotations. 

It is perhaps true that Mithridate is, for Frenchmen, less 
compelling than any of thèse five other tragédies ; and, as editors 
are likely to make their choice of texts in accordance with French 
opinion, Mithridate has naturally been neglected. But we mnst 
remember that the viewpoint of the French critic is the resuit 
of years of expérience and tradition, and that even an apprécia- 
tion of that viewpoint — to say nothing of an appréciation of 
what Frenchmen find in French tragedy — can be attained only 
by long and intimate study, including a period of résidence in 
France and steady frequenting of the theater. We may there- 
fore frankly disregard French refinements of distinction in pre- 
senting Mithridate in an American édition, especially as the 
play has a wholly respectable record of "town*' performances 
during the two hundred and three years preceding 1870: 472 
performances of Mithridate, as against 717, 611, 733, 792, and 
398 of the five other plays above named. And, as to this record, 
it is ifurther to be observed that, in times of revolutionary activ- 
ity, Mithridate has always been neglected, and sometimes even 
suppressed. 

In reading the play with American students, the Editor has 
met only one diffîculty. Mithridates had ambitions as td the 
conquest of the world. The great scène which opens Act 3 
has seemed so improbable to students that the instructor had to 

V 



VI PREFATORY 

give his best efforts to the justification of that scène — not 
always with complète success, of course. But récent e vents 
hâve brought universal knowledge of national ambitions. Inci- 
dentally, too, the events hâve made generally familiar localities 
hitherto little known. The instructor will no longer hâve to 
labor on the dramatic or the geographical détails of the career 
of Mithridates. 

As a possible first Racine play to be read, Mithridate has been 
given a "practical" treatment. Scholarship is présent in this 
édition only by reflection or refraction of the briUiant hght shed 
upon the play by many commentators. The édition of N. M. 
Bernardin, published by Delagrave, has been liberally drawn 
upon for conmients. Except for the oi spellings, the Grands 
Ecrivains édition of Mesnard has been foUowed as to text. That 
édition and the commentaries of Labbé, Lanson, Kastan, and 
Schûtz hâve been consulted throughout, and other critiques 
and annotated éditions hâve been used for référence and cita- 
tion. The Editor hopes that he has not so overladen the notes 
with "practical" things as to vitiate the édition for use, in 
supplementary or review study, by more advanced students 
of the poet. In this connection attention is called to the quota- 
tions from several critiques which make the substance of the 
Introduction. 

ConventionaUties of the classic diction are treated in notes, 
and référence to the more important is made in the Vocabulary. 
The Vocabulary itself is not restricted to the meanings which 
are to be used in translation of text and French passages of the 
notes. It thus affords opportunity to train the student in mak- 
ing a choice of meaning, as practical préparation for the use of a 
dictionary, if the instructor finds it impossible to insist on the 
use of one at the time when this play is being read. 

Other considérations hâve prompted the Editor to give ampli- 
tude to the Vocabulary. Translating classic French is always 
largely an exercise in diction. As sentences must often be treated 
as wholes, the rôle of the individual word must be variable. The 
basic idea of a word — which is supposed always to be included in 
our Vocabulary — must necessarily be in a good translation ; 



PREFATORY VU 

but it may happen that no ^spécifie translation of the word itself 
will be there. A nonn may be "covered" by an adjective, or 
vice versa ; an adjective may appear in adverbial form ; auxil- 
iaries may appear as adverbial phrases ; connectives inay become 
requisite or superfluous; and so forth. From time to time, in 
the notes, the student is reminded of the incidental values of 
translation from works like those of Racine. Some instructors 
regard such works as nearly équivalent to the Latin classics in 
offering material to develop the student's ability to use his mother 
tongue. 

Studies in diction may become burdensome to the beginner; 
but no play excels Mithridate in the vitality of its interest for 
the average American youth and, consequently, in the steady 
incentive it offers to self-improvement in English style. 

There are three English spellings of the name of the chief 
personage in Racine's play: Mithridates, Mithredates, Mith- 
radates. The first is traditional; the second, occasional; the 
third, formai. It happens, however, that the theoretical justi- 
fication of the third spelling is incomplète, or possibly even 
fanciful. There has seemed to be no cogent reason, in pre- 
paring this édition, for throwing an incompletely authorized 
English spelling continually into contrast with the only authorized ' 
French spelling. The traditional English form has therefore 
been used throughout the notps. 

There may of course be occasion to correct, in later éditions, 
errors in text or notes. There certainly would hâve been, but 
for the attention given to the page proofs by the Editor's former 
coUeague, Philip M. Hayden, of Columbia University. 

TuFTs Collège, Massachusetts 
December, 1920 



CONTENTS 

PAGll 

Bacinb FrorUispiece 

Prefatoby V 

Introduction ix 

Vie de Racine. Person ix 

Théâtre du Marais — Elévation (iU.) . . . . z 
Théâtre du Marais — Interior (ill.) .... xi 

Summary of the Life of Racine . xvii 

Sources of Information conceming Racine and his Plays . xviii 

Form and Verse in French Tragedy xx 

Sélections from Historians andX^ritics xxvi 

Racine, Dramatiste et Poète. Fagiiet .... xxvi 

Les Ennemis de Racine au XVII" Siècle. Brunetière . xxvii 

Théâtre Français — Elévation (ttt.) xxviii 

Théâtre Français — Interior (ill.) xxix 

Le Système Dramatique de Racine. LinlUhajc , xxx 

Théâtre de l'Hôtel de Bourgogne {iU.) .... xxxii 

Racine et Shakespeare. Brunetière .... xxxiii 

Shakespeare and Racine. Strachey .... xxxiv 

Le Mithridate de Racine: Conférence Faite au Théâtre 

de rOdéon. Bernardin xxxvii 

Mithridate : Tragédie en Cinq Actes 1673 .... 1 

Mithridates Eupator (iU.) 2 

Préface 3 

Text and Notes 11 

MUe Clairon (Ul.) 30 

Baron (iU.) 44 

Monime and Mithridates (iU.) 56 

Map including Colchis and Rome 70 

Phamaces, Mithridates, and Xiphares (ill.) ... 77 

Facsimile of a Page of MithridaU 85 

Panticapœum (ill.) 94 

Rachel (iU.) 108 

Rachel as Monime (iU.) 120 

The Death of Mithridates (Ul) 132 

Appendix : Some Vulnérable Points in Mithridate . .135 

VOCABULART 137 

Some Proper Nouns and Adjectives 138 

Vooabulary 139 

• •• 

vm 



INTKODUCTION 

VIE DE RACINE 

Jean Racine naquit le 21 décembre 1639, à la Ferté-Milon, d'une 
famille appartenant à cette ^bourgeoisie distinguée où se recrutait 
alors la noblesse nouvelle. C'était Tannée même où Corneille 
dédiait sa tragédie d'Horace à Richelieu; c'était aussi Tannée 
de Cinna, Louis XIV avait im an. 

Encore enfant, Racine eut le malheur de perdre son père et 
sa mère : son père était contrôleur du grenier à sel de la Ferté- 
Milon; sa mère était fille d'un procureur du roi aux eaux et 
forêts de Villers-Cotterets. Le jeune orphelin grandit sous la 
tutelle de son aïeul paternel, et peu après de la veuve de celui-ci. 
Le soin de ses études le fit envoyer d'abord à Beauvais, où il 
devint élève du collège, puis à Port-Royal des Champs, où il 
continua et termina ses études de la façon la plus brillante. 

Port-Royal était ime abbaye appartenant à l'ordre de Cîteaux 
et dont la fondation remontait au commencement du XIIP siècle. 
Mais à cette abbaye était joint un collège justement célèbre, 
tant par les maîtres qui y donnèrent l'enseignement, les Lancelot, 
les Amauld, les Nicole, que par les illustres élèves qui y reçurent 
l'instruction. 

Grâce à son intelligence supérieure et à sa remarquable ardeur 
pour l'étude. Racine, à l'âge de seize ans, lisait dans leur langue 
Sophocle, Euripide, Thucydide, Démosthène, à plus forte raison 
les écrivains de Rome, parmi lesquels Cicéron, son auteur favori. 

Sa vocation de poète se révéla de bonne heure et s'affermit par 
d'heureux essais. A l'occasion du mariage du roi avec l'infante 
d'Espagne Marie-Thérèse, il composa ime ode allégorique qui 
lui valut les suffrages des arbitres de la littérature, ainsi qu'une 
gratification royale de cent louis. 

Toutefois la poésie n'était pas im métier, et l'insuffisance de 
son patrimoine faisait une obligation à Racine de se procurer 

iz 



XU INTRODUCTION 

de sa jeunesse, dans un pamphlet qui fait plus d'honneur à son 
esprit qu'à son cœur. 

Deux ans après Alexandre, en 1667, Racine fait paraître son 
premier réel chef-d'œuvre, Andromagy^, qu'il dédiait à la jeune 
et célèbre Henriette d'Angleterre, duchesse d'Orléans. 

La même année, hélas! ComeiUe, en pleine décadence, 
donnait Attila} La rivalité entre les deux poètes se terminait 
par le triomphe complet de Racine: peinture des passions, 
connaissance approfondie du cœur humain, science consonunée 
de l'art dramatique, enfin style enchanteur, tels sont désormais 
les titres de Racine à l'admiration. 

La même année 1668 vit paraître les Plaideurs, qui n'eurent 
qu'un médiocre succès, et Britannicus, qui fut, selon Voltaire, 
la pièce des connaisseurs. Avec Britannicus, Racine atteint 
la pleine maturité de son génie : vigueur de la conception fonda- 
mentale, régularité infaillible du plan, justesse des caractères, 
vérité et profondeur des vues politiques et morales, perfection 
suprême de l'exécution, voilà ce qui éclate dans cette pièce. 

Après ce tableau historique et dramatique. Racine, pour com- 
plaire aux désirs d'Henriette d'Angleterre, exposa sur le théâtre 
les adieux et la séparation de Titus et de Bérénice (1670). Le 
piquant de la chose est que la princesse, qui voyait dans ce sujet 
une allusion à des faits contemporains, l'avait donné à traiter, 
simultanément et à l'insu l'un de l'autre, à Corneille et à Racine. 
L'avantage resta incontestablement à ce dernier. Le prince 
de Condé, juge délicat des ouvrages de l'esprit, avait pour 
Bérénice une estime toute particulière. 

Avec Bajazet (1672), Racine, par une exception unique, 
s'adresse cette fois à l'histoire contemporaine. Il pénètre dans 
ce mystérieux sérail de Constantinople, et, à force d'intuition 
ingénieuse, en tire une peinture iorte et vraisemblable. 

* It was this weak tragedy of Corneîlle's, coming after hisAgésUaa, 
that suggested to Boileau the cruel but famous epigram : 

Après r « Agésilas » , 

Hélas ! 
Mais après 1' « Attila » , 

Holà ! 



INTRODUCTION Xlll 

C^est Tépoque vraiment féconde de la carrière dramatique 
de Racine et ses chefs-d'œuvre se succèdent sans interruption. 
En 1673, Mithridate ; en 1674, Iphigénie, 

Des titres si multipliés lui avaient ouvert" depuis quelque 
temps les portes de l'Académie. Il y fut admis le même jour 
que Fléchier (12 janvier 1673). Son discours ne fut pas im 
succès: il prononça, à voix basse, un remerciement des plus 
courts et qui fut à peine entendu. 

Quatre ans après cette malencontreuse harangue de réception, 
Racine, qui n'avait jamais laissé im si grand intervalle entre 
ses pièces, donna la dernière de ses tragédies profanes (1677). 

Le poète était à l'apogée de sa gloire : depuis Andromaque il 
avait marché de succès en succès; Phèdre est encore un de ses 
chefs-d'œuvre. Mais il s'était formé contre lui ime cabale 
formidable, dont les chefs s'assemblaient à l'hôtel de Bouillon. 
Ils s'avisèrent d'ime nouvelle ruse, qui leur coûia, disait Boileau, 
quinze mille livres, et qui consista à retenir les premières loges 
pour les six premières représentations de l'une et de l'autre 
pièce, et par conséquent ces loges étaient vides et remplies quand 
on voulait, et de qui l'on voulait. 

Le coup était trop rude pour la susceptibilitéMe Racine. Avoir 
fait la Phèdre^ la pièce la plus tragique qu'on ait vue au théâtre, 
comme le dit Voltaire, et voir cette pièce mal accueillie, tandis 
que celle de Pradon était portée aux nues : c'en était trop 1 
Depuis quelque temps d'ailleurs, im changement s'était opéré 
peu à peu dans les idées de Racine sur le monde et sur le théâtre. 
L'éducation religieuse de ses premières années reprenait le 
dessus; il s'était réconcilié avec- les solitaires de Port-Royal; 
de sorte que l'influence de la religion, secondée encore par l'in- 
justice des hommes à l'égard de son dernier chef-d'œuvre, lui 
fit prendre la résolution grave, et à jamais regrettable pour la 
scène française, de renoncer au théâtre. Racine n'avait que 
trente-huit ans ! 

Dès lors une existence nouvelle commence pour le poète. 
Dans la ferveur de son zèle, il avait voulu d'abord se faire char- 
treux : par un changement moins radical, il se contenta de se 
marier (1* juin 1677), et épousa la fille d'un trésorier de France 



XIV mTRODUCTION 

d'Amiens, Catherine Romanet, qui fut la meilleure des épouses 
et des mères de famille. Détail domestique et qui a son intérêt : 
Racine, loin d'avoir acquis l'aisance par ses travaux littéraires, 
était absolument sans fortune. Aujourd'hui, on s'enrichit avec 
des pièces éphémères et pour la plupart sans valeur: l'auteur 
d* Andromaque^ de BritannicuSj de Phèdre et de tant d'autres 
chefs-d'œuvre, vivait surtout des libéralités royales. La grati- 
fication de 600 livres, qui lui avait été accordée autrefois pour 
la pièce la Renommée aux M lises, lui avait été continuée à titre 
de pension, puis portée à 1200, puis à 1500, enfin à 2000. En 
outre, Colbert avait gratifié Racine d'une charge de trésorier 
de France à Moulins. Plus tard, il fut créé historiographe du 
Roi, avec Boileau pour collaborateur, et à cette charge était 
attachée ime pension de 4000 livrel, distincte des 2000 qu'il 
recevait à titfe d'homme de lettres. 

Racine prit fort au sérieux ses nouvelles fonctions. Son fils nous 
atteste que, toutes les fois qu'il pouvait s'échapper de Versailles, 
il venait s'enfermer d'ans son cabinet, où il employait son temps 
à travailler à l'histoire du roi, qu'il ne perdait jamais de vue. 

Quelle était la valeur de ces compositions historiques ? Racine, 
après avoir donné à la France un Euripide, devait-il lui donner 
im Tite-Live? Il est difficile de le décider, tous les papiers 
de Racine ayant été consumés dans un incendie, à Saint-Cloud, 
le 13 janvier 1726, dans la maison de l'historiographe Valincour. 
On \ peut douter toutefois qu'il fût possible à un poète de génie, 
écrivant une histoire officielle, commandée et payée par le plus 
vaniteux des monarques absolus, de faire une œuvre véritable- 
ment historique et d'y parier d'avance le langage de la postérité. 

Racine trouva le temps encore d'écrire un Abrégé de V histoire 
de Port-Royal, dont Boileau a fait un éloge sans réserve, et dont 
les traits sont la sincérité du fond, la droiture et l'égalité du 
jugement, la> clarté et le naturel. 

Tel est aussi le caractère des lettres que l'on a conservées de 
Racine et qu'il adressait soit à Boileau, son ami de quarante 
années, soit à son fils. C'est là surtout qu'on trouve et qu'on 
peut apprécier l'homme, le père de famille^ Racine avait les 
goûts simples et bourgeois. Il ne tenait qu'à lui d'être l'orne- 



INTRODUCTION XV 

ment des plus brillantes fêtes, et de vivre dans la compagnie 
des seigneurs et des princes sur le pied de la plus haute faveur ; 
il avait tout pour y réussir: taille avantageuse, démarche 
noble, extérieur imposant, sans parler des qualités de son esprit. 
Louis XIV, suffrage bien flatteur, cita un jour la figure de Racine 
comme l'une des plus belles de la cour. Sa voix était nette, 
harmonieuse, bien timbrée, et il excellait dans la déclamation. 
Il fut, dans cet art, le maître de la Champmeslé et de Baron. 
Il possédait un esprit aimable et d'une ressource infinie dans 
la conversation. Son entretien était délicat, solide, d'une 
politesse «exquise. Mais à toutes les splendeurs du monde il 
préféra la simplicité de la vie domestique; aux banquets les 
plus splendides, la table de famille où ses nombreux enfants*"^ 
étaient assis autour de leur mère et de lui. 

Son génie dramatique sommeillait depuis douze années, lorsque 
Mme de Maintenon lui fit un appel qui valut deux chefs-d'œuvre 
,de plus à la littérature française : Esther et Aihalie. 

On sent, en comparant ces deux pièces à leurs aînées, quelle 
transformation profonde s'est opérée dans l'esprit, dans les 
habitudes, dans le génie de l'auteur. L'influence de son évolu- 
tion religieuse, de ses lectures, des livres sacrés surtout, s'y 
manifeste hautement, non seulement par le choix des sujets, 
mais par l'inspiration générale. 

EstheTy en 1689, fut représentée à Saint-Cyr, où Mme de 
Maintenon, cette femme distinguée, qui n'avait pas oublié sa 
propre jeunesse délaissée et pauvre, avait recueilli et élevait 
des jeunes filles nobles et sans fortune. Cette éducation, toute 
chrétienne, n'excluait pas pour cela les agréments et les talents 
du monde. En vue de les former à une prononciation nette 
et facile, comme aussi à la grâce et à l'aisance de la démarche, 
on avait imaginé de leur faire déclamer des vers et même repré- 
senter des pièces profanes. Mais Mme de Maintenon trouva 
qu'elles avaient beauœup trop bien joué V Andromaquey et s'adressa 
à Racine pour leur composer des pièces inoffensives, c'est-à-dire 
des tragédies sacrées. Aihalie est de 1691 ; mais, dans l'inter- 

' Il eut sept enfants : deux fils et cinq filles. Le dernier, Louis 
Racine, est l'auteur des poèmes de la Religion et de la Grâce. 



XVI ^ INTRODUCTION 

valle, des scruples religieux étaient venus encore à Mme de 
Maintenon sur le danger possible de ces pièces pour la modestie 
de ses élèves de Saint-Cyr. Athalie fut donc jouée, non point 
dans une fête, à Saint-Cyr, avec appareil théâtral, mais une 
fois ou deux, à Versailles, dans une chambre, et par les jeunes 
pensionnaires, qui ne changèrent même pas d'habit. 

Après Athalie y Racine renonça de plus en plus à la poésie, 
pour se confiner dans les pratiques de la plus sévère piété. Il 
s'efforçait aussi, comme historiographe, à reconnaître la faveur 
marquée et les libéralités du roi. Car, indépendamment des 
pensions, dont le chiffre était, pour l'époque, considérable, il 
reçut plusieurs fois sur la cassette royale des gratifications im- 
portantes, en une seule fois, par exemple (1688), mille louis. 
En outre, en 1690, il était pourvu d'une charge de gentilhomme 
ordinaire de Sa Majesté, ce qui lui donnait ses entrées et un 
appartement au château. 

Au comble de la faveur, il eut le malheur, probablement à 
la prière de Mme de Maintenon, de composer un mémoire sur 
les malheurs du temps causés par les calamités de la guerre, 
sur les misères de la France épuisée et aux abois. La pièce 
tomba entre les mains de Louis XIV, qui voulut en savoir l'auteur, 
et qui ne lui pardonna pas. 

Cette disgrâce, toute morale d'ailleurs, affecta péniblement 
Racine et ne contribua pas peu à aggraver le mal intérieur, un 
abcès du foie, par lequel il était miné depuis quelque ^mps. 
Il languit encore quelque temps, et mourut le 21 avril 1699, à 
l'âge de cinquante^neuf ans. 

Par un pieux sentiment de reconnaissance et d'attachement 
d'outre-tombe pour les maîtres qui l'avaient élevé, il voulut 
être inhumé à Port-Royal des Champs, auprès des solitaires 
pour lesquels il avait conservé un véritable culte. 

Après la destruction brutale de Port-Royal par Louis XIV, 
le corps de Racine fut transporté à Paris, dans l'église de Saint- 
Étienne du Mont, et placé à côté de celui de Pascal. Une 
épitaphe latine, composée par Boileau, se lit encore aujourd'hui 
sur le tombeau de Racine. 

ÉsaLE Perbon : Édition de Britannicus. 



SUMMARY OF THE LIFE OF RACINE 

Jean Racine, bom 1639, the year in which Ck>meîlle produced 
his celebrated tragédies of Horace and Cînna — Of middle-class 
f amily — Chief éducation at the f amous school of Port-Royal 
des Champs — Brilliant student of the classics, especially Greek 
— An ode composed on the occasion of the marriage of Louis 
XIV (a year older than Racine) draws attention to the poet's 
talent — Family influences lead Racine toward a priestly career ; 
chance tums him aside from it — First tragedy, presented by 
Molière^s company, La Thébaide ou les Frères ennemis, 1664 — 
Second tragedy, Alexandre^ played December 4, 1666, by Molière's 
Company, and two weeks later by a rival company, becomes 
the cause of an estrangement between Racine and Molière — 
Estrangement from Corneille and from his former teachers, due 
to comments on Racine's work and choice of career — First 
, genuine masterpiece, Andromaqyjef 1667 — Of secondary im- 
portance, the farce, Les Plaideurs, 1668, his only non-tragic 
play — BritannicuSf 1668 — Bérénice, 1670, marks the éclipse 
of Corneille by Racine — Bajazet, 1672 — MUhridate, 1673 — 
Member of French Academy, 1673 — Iphigénie, 1674 — Phèdre, 
his last secular tragedy, 1677 — Definite public effort to dis- 
crédit Racine, by the Hôtel de Bouillon group — Racine's own 
ideas are changing — At the âge of thirty-eight he renounces 
the théâtre, and renews relations with his religious teachers of 
Port-Royal — Marriage, 1677 — Varions govemmental appoint- 
ments and émoluments, including that of Historiographer to 
the King — A f ew poems on imaginative and religious subjects 
— Madame de Maintenon induces Racine to write a sacred 
trajgedy {Esiher, 1689) for the young ladies of the Saint-Cyr 
School — A second, the renowned Aihcdie, 1691 — Racine falls 
into disfavor with the King because of a pamphlet conceming 
the disastrous économie results of Louis XIV's campaigns — 
Unhappy closing years — Death, 1699. 

xvii 



SOURCES OF INFORMATION CONCERNING RACINE 

AND HIS PLAYS 

Every history of French Literature contains, of course, an 
account of Racine's works, with an estimate of their absolute 
and comparative values ; and also gives, at greater or less length, 
biographical facts. One of the "standard" spécimens of lack 
of appréciation of Racine will be found in Saintsbury's Short 
History of French Literature (Macmillan). Of the French treat- 
ises, those of Lintilhac, Brunetière, Faguet, and Lanson may 
be mentioned as among the more récent. 

There seems to be no volume devoted solely to Racine which 
French critics concur in approving unqualifiedly. Larroumet's 
book, in the séries of Grands Écrivains français, is perhaps most 
generally recommended. For the student who knows several 
of Racine's plays, the Monceaux Racine^ in the Collection des 
classiques populaires, will be of great service, as it contains illu- 
minating analyses of the individual plays and is rich in clarified 
statements of comparison, not only of the plays with one another 
but also of Racine with other authors. For any student, the 
concluding chapters of the Monceaux book contain material of 
gênerai value, from which knowledge may be gained without 
acquaintance with more than one spécimen of Racine's tragédies. 

It would appear that the author who knows most about Ra- 
cine's Mithridate is N. M. Bernardin (1856-1915). His research 
in the field of classic and pre-classic French drama has yielded 
new material in great quantity and of great value. His édition 
of Racine, and of the individual plays, published by Delagrave, 
may be regarded as authoritative, in that nothing is included 
which has not had careful vérification by a specialist who is 
directly in touch with the best sources. His volume Devant le 
Rideau shows the highest skill in the popularization of the résulta 
of académie research in varions fields, and includes two masterly 
cmférences on Racine, one of which we print (page xxxvii ff.). 

xviii 



INTRODUCTION XIX 

Several school éditions of Mithridate for French and Grerman 
students are mentioned in our Préface. The présent édition 
is believed to be the first for English-speaking students. 

Brunetière, in his Manuel de V histoire de la littérature française, 
gives the f oUowing summary of sources : 

La Correspondance de Ro^ney notamment avec Boileau, dans 
la plupart des éditions des Œiwres ; — Louis Racine, Mémoires 
sur la vie de son père, 1747 ; — Sainte-Beuve, dans son Port 
Royal, livre VI, chap. 10 et 11 ; — Paul Mesnard, Notice bio- 
graphique, en tête de son édition des Œuvres. 

Saint-Évremond, Dissertation sur V Alexandre, 1670 ; — Longe- 
pierre, ParaUèle de CorneiUe et de Racine, dans Baillet, Juge- 
ments des savants, édition de 1722, t. V, n° 1553 [Le morceau est 
de 1686] ; — La Bruyère, dans ses Caractères, 1688 ; — Fontenelle, 
ParaUèle de Corneille et de Racine, 1693 ; — abbé Granet, Recueil 
de plusieurs dissertations sur les tragédies de Corneille et de Ro/cme, 
1740 [contenant entre autres la Dissertation de Saint-Évremond 
et la ParaMle de Longepierre] ; les frères Parfaict, Histoire du 
théâtre français, 1734-1749, t. IX, X, XI, XII ; — Stendhal, 
Racine et Shakespeare, 1823 et 1825 ; — A. Vinet, les Poètes 
français du siècle de Louis XIV, cours de 1844r-1845; Paris, 
1861 ; — Sainte-Beuve, Portraits littéraires, 1830 ; et Nouveaux 
lundis, t. III, 1862, et t. X, 1866 ; — Taine, Essais de critique 
et d'histoire, 1858 ; — F. Deltour, les Ennemis de Ra^ne au xmÀfi 
siècle, Paris, 1859 ; — P. Robert, la Poétique de Racine, Paris, 
1890 ; — F. Brunetière, Histoire et littérature, t. II ; Études 
critiquas, t. I ; et les Époques du théâtre français, 1893 ; — J. 
Lemaitre, Impressions de théâtre, 1886-1896. 

Marty-Laveaux, Lexique de la langue de Racine, Paris, 1873, 
au tome VIII de l'édition Mesnard. 



FORM AND VERSE IN FRENCH TRAGEDY 

The extemal characterîstics of a work of art are not, generally, 
of prime importance in determining its worth. Thèse charac- 
teristics may, however, delay appréciation by the inexperienced 
observer; for he, of course, cannot promptly separate the vital 
from the extemal, the umversal from the local, substance from 
manner. It is therefore probably désirable to point out certain 
features of the French tragedy. For this art-form, though in 
its inhérent essence necessanly similar to ail types of tragedy, 
is, in that which first engages the attention of reader or spectator, 
quite différent from the English tragedy. 

French tragedy is of the type known as classic ; English tragedy 
is gothic. We offer thèse terms without fiuiiher immédiate 
définition, and, indeed, do not expect to define the second. We 
take for granted that the student is primarily interested in leam- 
îng about French tragedy, and will be better served by a brief 
description and the reading of a représentative work. We 
refrain, too, from giving reasons for the différences between the 
classic and gothic types, as that would présuppose acquaintance 
with some médiéval works which influenced English tragedy 
but failed to influence French tragedy. 

In the first place, French tragedy ils "classic*' because its 
authors observe the "three unities" — the imity of time, the 
unity of place, the unity of action. Aristotle (384-322 b.c.) 
discovered thèse pnnciples to be observed by the Greek 'drama- 
tists. The scholars of the Renaissance attributed to the Uteral 
observance of thèse principles more importance than did Aris- 
totle, and the three imities were accepted by French authors 
as cardinal principles of dramatic construction. The imity 
of time requires that the supposed time of a play be as nearly 
as possible equal to the real time of performance, certainly never 
more than one day; the unity of place, that the whole play 

XX 



INTRODUCTION XXI 

take place in the same édifice, or, at any rate, in the same city. 
The most important of the unities, that of action, prohibits ail 
''side issues" which might draw attention from the main action 
or plot. Shakespeare's King Lear, with its several stories driven 
abreast, so to speak, through the play, is one of the best spéci- 
mens of the gothic drama's disregard of the principle of the unity 
of action. We see, in the préface to Miihridate, that Racine 
takes occasion to specify what taction of his tragedy is, either 
f orestalling or replying to criticism as to the complexity of his 
plot. 

The observance of thèse unities makes the French tragedy 
always the swift présentation of a climax — une crise. In order 
that the preliminary incidents and states of mind of the chief 
personages may speedily be made known to the audience, every 
principal character is provided with a "confidant" or friend, 
in conversation with whom he may make the necessary record 
or révélation. Ail of Racine's eleven tragédies begin with such 
a conversation. 

Thèse confidants hâve another raison d^être. It is a principle 
of the French tragedy that no scènes or deeds of violent char- 
acter shall be enacted on the stage. Such events must therefore 
be recounted; and it very frequently happens — as in Act 5, 
Scène 4, of MithridaU — that thèse récitals are assigned to one 
of the confidants. 

French tragedy has many long speeches — Hrades, as they 
are called, even when they are not at ail tirades, in the English 
sensé of the word. As Mithridate has one of the longest in dra- 
màtic literature, it may not be out of place to give one reason — 
and probably the most important — why a French audience has 
no inhérent aversion to lengthy speeches. 

The French language is loved, by those bom to it, with a 
wealth and depth of affection which very few individuals of the 
English-speaking races seem to hâve for their language. That 
affection, doubtless innate in the great majority of cases, is 
fostered by intensive training in ail schools, public and private, 
through the years of childhood and youth. This training indudes 
not only thorough drill in speaking and writing, but also study 



XXll INTRODUCTION 

of literary works far more extensively and carefully than is 
gênerai in English-speaking countries. Frenchmen hâve been, 
by nature and cultivation, distinctly provincial as to language, 
for many générations. The fact that French has been the inter- 
national language has reUeved them of the necessity of studying 
foreign tongues. As a resuit of habit and aptitude, then, there 
îs, in France, an interest in the spoken word which most English- 
speaking persons can never understand and which, let it be 
said, the French do not expect other races to understand. But 
precisely that interest, with the résultant pure, rich, varied 
delight which masterly or charming diction can give a French 
listener, is a chief reason for that characteristic of French tragedy 
which has given it its réputation for monotony — the long speech. 
The same reason has much to do with what seems to the for- 
eigner to be the inexpUcable prevalenee and vitality of the Alex- 
andrine line, which, in the words of Pope as applied to the Alex- 
andrine in English verse, ''like a wounded snake drags its slow 
length along.^' If the French language were a stréssed language, 
the words of Pope would of course hâve applied to it as well as 
to English. But, in French, there is no specified stress on any 
syllable of any word, or, indeed, on any word. If there is a 
stress, it is likely, in speech, to be on the final syllable ; but one 
has merely to sing the Marseillaise to become convinced that 
accents are not merely unprescribed, but may even come on 
articles, démonstrative adjectives, or prépositions in a manner 
which would be monstrous in EngUsh song. For instance : 

Que veut cette horde d'esctoves, 
De traîtres, de rois conjurés? 
Pour qui ces ignobles entraves, 
Ces fers dès longtemps préparés? 

The Marseillaise may not be very good poetry; but any verse 
will serve to show so fundamental a fact. 

In a word, French poetry is not made up of feet but of syllables ; 
and the unstressed language lends itself to whatever rh3rthmical 
treatment may seem fit. There are no dactyls, anapests, 
trochées, spondées, iambuses, etc., as there are no prescribed 



INTRODUCTION xxiii 

accents in the French language out of which to manufacture 
them. Otherwise stated, things which présuppose regularly 
recurring accents cannot exist where there are no regularly recur- 
ring accents. 

Under thèse circumstances, it is not difficult to understand 
why twelve should be the standard number of syllables in the 
most used f orm of French verse ; for twelve is the most variously 
divisible of the small numbers. To give only the most regular 
arrangements of its components, we can hâve: six 2's; four 
3's; three 4's; two 6's; 2, 4, 2, 4; 4, 2, 4, 2; 2, 4, 4, 2; 4, 2, 2, 
4 ; 3, 3, 4, 2 ; 4, 2, 3, 3 ; 2, 4, 3, 3 ; 3, 3, 2, 4. Hère are at once 
twelve possibilities of grouping syllables in a twelve-syllable 
line. With such possibUities of varied grouping, there is perma^ 
nent freedom from monotony in the French Alexandrine. 

It is not our purpose to write at length on this subject, con^ 
cemgig which, by the way, no non-Frenchman is likely to dare 
claim exhaustive knowledge. But one mày readily gather the 
basic f acts of versenstructure by observing a f ew Unes. 

813 C'est I là I qu'en | ar | ri | vant || plus | qu'en | tout | le | che | 

min, 

814 Vous I trou | ve | rez j par | tout || Thor | reur | du | nom | ro | 

main, 

815 Et I la I tris | te I | ta | lie |! en | cor | tou I te | f u | man | te 

816 Des I feux | qu'a | rai | lu | mé || sa 1 11 | ber | té | mou | ran | 

XiQ ... 

827 Que | dis- | je? En | quel | é | tat || croy | ez- | vous | la | sur | 

pren j dre? 

828 Vi I da I de I lé I gi I ons !| qui | la ! puis | sent | dé | fen | dre ... 

483 Sei | gneur, | de | puis | huit | jours || Tim { pa | ti | ent | Phar | 

ua I ce 

484 A I bor | da | le | pre | mier || au | pied | de | cet | te I pla | ce, . . 

445 Les | cris | que | les | ro | chers || ren | voy | aient | plus | af | 

freux, 

446 En I fin I tou I te I l'hor | reur || d'un | corn | bat | té | né | 

breux . . . 

We find in 813-816 alternate pairs of lines contaîning respec- 
tively 12 and 13 syllables. Thèse are typical for the whole play. 



SELECTIONS FROM HISTORIANS AND CRITICS 

Racine, Dramatiste et Poète 

C'était le plus adroit et le plus sûr des ouvriers dramatiques ; 
mais ce travail de disposition et d'ajustage, on ne s'en apercevait 
point, on en jouissait sans s'en apercevoir, parce que, secret 
qui n'est pas à la portée de beaucoup, Racine le faisait oublier 
à mesure, le recouvrait en quelque sorte par le charme du dis- 
cours, l'émotion du dialogue, la poésie répandue partout. C'était 
un dramatiste uni inséparablement à un poète, sans que l'un 
fît jamais tort à l'autre, sans que celui-ci rougît de celui-là, 
et sans que celui-là persuadât jamais à l'autre qu'il était inutile. 

Car il est incroyable à quel point Racine fut poète . . . 

Cet homme étonnant par les dons multipliés du génie, drama- 
tiste, moraliste, poète, le tout également, et le tout, sinon sans 
application, du moins sans effort, donne l'idée la plus voisine de 
l'idée de perfection qu'on puisse avoir. 

Si l'on cherche où est sa faiblesse, on croit le trouver et aussitôt 
on est réfuté au moment même que l'on l'incrimine. Si l'on 
est tenté de trouver que ses personnages d'hommes pâlissent 
un peu auprès de ses personnages de femmes, aussitôt l'on songe 
à Néron, à Narcisse, à Acomat, à Joad, sans compter Oreste, 
sans compter Mithridate. — Si l'on songe que, peut-être, encore 
que ses vers soient merveilleux, sa période poétique est im peu 
maigre et manque d'ampleur, tout de suite revient à votre 
oreille l'admirable phrase oratoire, pittoresque et musicale: 
« Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle » ou : « De cette 
nuit, Phénice, as-tu vu la splendeur? » — Si l'on se dit que la 
tragédie historique et politique de Corneille avait je ne sais 
quelle grandeur imposante et solidité monumentale que n'a 
peut-être pas la tragédie romanesque de Racine, Britannicua et 
Athalie nous reviennent immédiatement en mémoire. Racine 

xxvi 



INTRODUCTION XXVU 

a réponse à tout, excepté au reproche qu'on peut lui faire d'avoir 
abandonné trop tôt l'art dramatique pour n'y revenir qu'à la 
fin de sa vie. 

Emile Fagubt : Histoire de la littérature française. 

Les 'Ennemis de Racine att XVIP Siècle 

Je ne crois pas que jamais un grand homme ait traîné derrière 
soi plus d'ennemis que Racine. De nos jours même, l'espèce 
n'en est pas rare, et vous en connaissez plus de vingt qui le 
discutent comme ils feraient un contemporain, avec le même 
entrain d'animosité personnelle: c'est la preuve, n'en doutez 
pas, qu'il est toujours vivant et bien vivant. Grands dieux! 
préservez ceux que nous aimons et que nous admirons de la paix 
du silence. . . . 

ComeiUe s'était formé à l'école du génie latin, Racine se forma 
à l'école du génie grec. De là chez Corneille ce penchant à 
la déclamation, quelquefois à l'enflure; de là chez Racine au 
contraire ce goût de l'extrême noblesse dans l'extrême simplicité. 
De là chez Corneille ce goût des actions implexes, où l'épisode 
complique l'épisode, où l'intrigue renaît en quelque sorte d'elle- 
même au moment que l'on croyait toucher le dénouement; de 
là cette respectueuse admiration de Racine pour la simplicité 
presque nue de l'antique. Il a plusieurs fois, en termes presque 
semblables, insisté sur cette simplicité. . . . 

Pénétrons en effet plus avant dans le théâtre de Racine ; voici 
bien d'autres différences encore. « J'ai cru, disait Corneille, 
que l'amour était une passion chargé de trop de faiblesse pour 
être dominante dans une pièce héroïque. J'aime qu'elle y serve 
d'ornement et non pas de corps, et que les grandes âmes ne la 
laissent agir qu'autant qu'elle est compatible avec de plus nobles 
impressions. » Racine a cru précisément le contraire. Il 
rompt avec la tradition des « pièces héroïques » ; et, de cette 
même passion de l'amour que Corneille subordonnait sévère- 
ment à l'honneur, comme dans le Cid, au patriotisme, comme 
dans Horace, à la passion politique, comme dans Cinna, Racine 
fait le ressort agissant de son théâtre. Puisqu'il n'y a pas une 
histoire de la littérature où la remarque n'ait été faite et que 



i! 

s 



INTRODUCTION xxlx 

personne jusqu'ici ne s'est avisé de contester à Racine la gloire 
d'avoir été, a'il en fut, le peintre des passions de l'amour, il est 
inutile d'insiater. Je ferai seulement observer que par là, comme 
par la qualité de la langue et ta simplicité de l'action, Racine 
se rapprochait de la réalité, c'est-à-dire de la vie 



. . . Rares sont les Rodrigue, et rares les Polyeucte. Encore, 
n l'on a par hasard cette gloire d'être Polyeucte ou Rodrigue, 
ne l'eat-on qu'une fois dans sa vie, par le privilège d'une situation 
singulière, dans les conditions qui ne se produisent pas deux fois 
les mêmes; mais on est Bérénice, et Roxane, et Phèdre, du jour 
que l'on a rencontré Titus, Bajazet, Hippolyte, on l'est pour 
toujours, et, si l'on n'en vit pas, on en meurt. Changes les 
noms, c'est une histoire vulgaire, c'est notre histoire ^ tous. 



XXX INTRODUCTION 

Roxane assassinait hier le Bajazet qui la trompait, et s'asphyxiait 
sur son cadavre. Phèdre se jettera demain dans la Seine, et, 
tous les jours, sous toutes les latitudes, il y a quelque Titus qui 
brise €t broie le cœur de quelque Bérénice. . . . Puisse la 
mémoire de Racine pardonner ces comparaisons presque irrespec- 
tueuses! ... Je crois cependant que dans le temps où nous 
sommes c'est montrer, plus clairement que de toute autre manière, 
ce qu'il y a, dans^ cette poésie pénétrante et dans ce drame que 
l'on ose bien qualifier d'artificiel, de vide et de froidy non seule- 
ment d'observation et de connaissance du cœur humain, mais 
de réaUté. . . . 

Que maintenant Racine, dans les luttes qu'il soutint, n'ait 
pas toujours fait preuve de patience et de modération, il peut 
être pénible, mais il est loyal de l'avouer. On regrettera tou- 
jours, pour la dignité des lettres et l'honneur d'irn grand nom, 
qu'il ait si cruellement maltraité Corneille, comme on regrett^era 
toujours que, après avoir en quelque façon débuté sous les aus- 
pices de MoUère, il se soit brouillé brusquement et sans juste 
cause avec lui. Je voudrais pourtant que l'on fût équitable 
et que l'on divisât les reproches. . . . 

Ferdinand Brunetière : Études critiques sur l'histoire 

de la littérature françaisey 
première série. 

Le Système Dramatique de Racine 

Dans le théâtre de Racine nous retrouverons ce personnage 
central qui donne le branle à toute l'action, et dont les passions 
agissent «avamment sur les autres et sur lui-même, par voie 
de réaction bu de suggestion, comme disent les psychologues. 
Ce sont : Narcisse, dans Britannicus ; Titus, dans Bérénice ; 
Atalide, dans Bajazet ; Mithridate ; Agamemnon, dans Iphi- 
génie ; Phèdre ; Mardochée, dans Esther ; Joad, après Dieu, 
dans Athalie. La savante simplicité de ce mécanisme passionnel 
permet à Racine de donner à l'action une crise, suivant un mot 
lumineux, attribué couramment à Goethe ou à Napoléon I®", 
mais dont l'honneur revient à Diderot. Cette « violence des 



INTRODUCTION XXXI 

passions », où Racine voit un élément essentiel de la tragédie, 
lui facilite singulièrement cette liaison des scènes à laquelle il 
attachait tant de prix qu'après l'avoir obtenue dans son canevas 
il s'écriait, au dire de son fils: « Ma tragédie est faite ». Rien 
ne lui était plus aisé dès lors que de se conformer à toutes les 
règles, chères à son ami Boileau, qui dérivent de l'unité d'action 
et de la vraisemblance. Ces règles se trouvaient même si 
naturellement adaptées à sa conception de la tragédie qu'il 
pouvait prendre à leur endroit le ton détaché de Molière, comme 
il fait dans certaines préfaces. 

L'intérêt étant soutenu jusqu'au bout par ce jeu dés passions, 
il n'avait plus à s'embarrasser d'incidents plus ou moins sur- 
prenants, de caractères plus ou moins extraordinaires. Il 
pouvait s'attacher à réaliser cette simplicité et cette continuité 
d'action « qui a été si fort du goût des anciens », de Sophocle 
à Klaute, et « faire quelque chose de rien », suivant sa formule 
favorite, comme dans Bérénice. Il pouvait peindre les hommes 
tels qu'ils sont, et se tenir si près de la vie que toutes ses tragédies 
profanes se ramènent au fond,^ le plus aisément du moîide, à 
la réalité quotidienne des crim^es passionnels qui défrayent les 
faits divers de nos journaux. Aussi certains de ces 'procédés 
scéniques se confondent-ils avec ^ ceux de la comédie, comme 
lorsque Néron épie l'entretien de Britannicus et de Junie, ou 
lorsque Mithridaté fait avouer son amour à Monime par ime 
ruse identique à celle dont Harpagon avait usé envers son fils. 
Mais quel art il met à transposer ces effets dans le domaine 
tragique, à imprégner tout de « cette tristesse majestueuse » :^ 
où il voit l'essence de la tragédie, qui dispense « même de sang 
et de morts », et suffit à nous inspirer, en conformité avec la 
Poétique d'Aristote, ces sentiments que son ami et conseiller 
Boileau définissait « une douce terreur, une pitié charmante » ! 
Avec quelle aisance les ornements de l'histoire et de la politique, 
comme dans Britannicus et Mithridaté ; ou ceux de la poésie 
antique, comme dans Iphigénie ou Phèdre ; ou la sublimité 
même des psaumes, dans Esther et Athalie^ viennent s'ajuster aux 
sujets sans les masquer, et épurer toutes ces réaUtés dramatiques 
«n les reculant dans le temps et en les grandissant dans l'histoire. 



INTRODUCTION 



.- La Comédie f ronfaise, 6v Ariine Housmye 

j WmcB 



INTRODUCTION XXxiii 

Joignons-y cette « élégance de l'expression )i, dont il fait le 
troisième soutien de l'action tragique après « la violence des 
passions et la beauté des sentiments ». C'est bien l'élégance 
qui est caractéristique de ce style, dont les défauts sont si excu- 
sables et consistent uniquement dans l'emploi de cette termino- 
logie amoureuse qui était alors de mode et de règle. Cette élé- 
gance consiste essentiellement dans im choix harmonieux des 
mots, si éloigné du cliquetis des antithèses et du fracas oratoire 
qu'il Ta fait accuser en tout temps d'être familier^ bourgeois, 
alors qu'il est au contraire un incomparable écrivain, non seule- 
ment par l'ingéniosité perpétuelle avec laquelle il allie les mots, 
pour créer l'expression, mais par le bonheur de ces alliances. 
Et ce bonheur est si grand qu'on en jouit sans les remarquer, 
ce qui est le comble de l'art et la dernière caractéristique de cet 
harmonieux génie. 

Eugène Lintilhac: LiUéraiure françaisey IL 

Racine et Shakespeare 

Mais faisons un dernier pas, rétrécissons encore le cercle, 
enfermons-nous maintenant entre les bornes d'im seul art, d'un 
même genre dans cet art, et demandons-nous ce qu'il peut y 
avoir de vraiment comparable entre le génie de l'auteur de 
Macbeth ou d^HamUt et le génie de l'auteur d* Andromagiie et 
de Phèdre? Je réponds tout de suite qu'il n'y a rien, absolu- 
ment rien, ce qui s'appelle rien, et — s'il m'est permis de jouer 
ainsi sur les mots — que Shakespeare et Racine ne peuvent être 
comparés qu'en ce qu'ils ont justement d'incomparable. Car, 
ayant reçu l'un et l'autre le don du théâtre, et l'un et l'autre 
ayant pratiqué le même art, ils ne sont, celui-là Shakespeare, et 
celui-ci Racine, qu'en raison de l'idée très diverse qu'ils se sont 
faite chacun de son art, et parce qu'ils ont eu l'im et l'autre du 
théâtre une conception tout individuelle, Shakespeare toute 
shakespearienne et Racine toute racinienne. Que si donc vous 
croyez découvrir entre eux quelque autre chose de commim que 
ce qu'ils ont de différent, vous vous tromperez, sans aucun doute ; 
et ce quelque chose pourra bien leur appartenir en tant 



XXxiv INTRODUCTION 

qu'hommes, mais non pas en tant que Shakespeare et Racine, 
c'est-à-dire non pas à titre d'hommes de génie. Ce qu'il y a 
de plus assurément caractéristique du génie, c'est sa différence 
ou, si vous l'aimez mieux, son individuaUté, son originalité, sa 
singularité, — ingeniunij — dans le sens primitif du mot, son 
idiosyncrasie, les aptitudes congénitales qui le distinguent ou 
plutôt qui l'isolent parmi tous ceux qui sembleraient d'abord 
posséder les mêmes aptitudes, tout ce qui fait enfin qu'il ne s'est 
rencontré qu'im Shakespeare ou qu'im Racine et qu'il ne s'en 
rencontrera pas un second. Le propre du génie, c'est d'être 
individuel, comme le propre de son œuvre est d'être irrecom- 
mençahUy et contre cet individualisme du génie, comme contre 
cette singularité de son œuvre, sont venues et viendront toujours 
se heurter — pour s 'y briser — toutes les théories que l'on essaiera 
d'en donner. 

Ferdinand Brunetiêre : Histoire et littératurej II, cha- 
pitre sur le Génie dans Vart, 

Shakespeare and Racine 

Englishmen hâve always loved Molière. It is hardly an 
exaggeration to say that they hâve always detested Racine. 
English critics, from Dryden to Matthew Arnold, hâve steadily 
refused to allow him a place among the great writers of the 
world; and the ordinary English reader of to-day probably 
thinks of him — if he thinks of him at ail — as a dull, frigid, 
conventional writer, who went out of fashion with full-bottomed 
wigs and never wrote a line of true poetry. Yet in, France 
Racine has been the object of almost universal admiration ; his 
plays still hold the stage and draw forth the talents of the great- 
est actors; and there can be no doubt that it is the name of 
Racine that would first rise to the lips of an educated French- 
man if he were asked to sélect the one consummate master from 
among ail the writers of his race. . . . 

English dramatic literature is, of course, dominated by Shake- 
speare ; and it is almost inévitable that an EngUsh reader should 
measure the value of other poetic drama by the standards 
which Shakespeare has already implanted in his mind. . . . 



INTRODUCTION XXXV 

Racine's principles were, in fact, the direct op^site of Shake- 
speare's. ''Compréhension" ^ might be taken as the watch- 
word of the Elizabethans ; Racine's was "concentration." His 
great aim was to produce, not an extraordinary nor a complex 
work of art, but a flawless one ; he wished to be ail matter and 
no impertinency. His conception of a drama was of something 
swift, simple, inévitable; an action taken at the crisis, with 
no redundancies however interesting, no complications however 
suggestive, no irrelevances however beautiful — but plain, in- 
tense, vigorous, and splendid with nothing but its own essential 
force. Nor can there be any doubt that Racine's view of what 
a drama should be has been justified by the subséquent history 
of the stage. The Elizabethan tradition has died out — or 
rather it has lef t the theater, and become absorbed in the modem 
novel ; and it is the drama- of crisis — such as Racine conceived 
it — which is now the accepted model of what a stage-play 
should be. And, in this connection, we may notice an old 
controversy, which stiU occasionally raises its head in the waste 
places of criticism — the question of the three unities. In this 
controversy both sides hâve been content to repeat arguments 
which are in reality irrelevant and futile. It is irrelevant to 
consider whether the unities were or were not prescribed by 
Âristotle ; and it is futile to ask whether the sensé of probability 
is or is not more shocked by the scenic représentation of an action 
of thirty-six hours than by one of twenty-four. The value of 
the unities does not dépend either upon their traditional au- 
thority or — to use the French expression — upon their vrai- 
semblance. Their true importance lies simply in their being a 
powerful means towards concentration. Thus it is clear that 
in an absolute sensé they are neither good nor bad ; their good- 
ness or badness dépends upon the kind of resuit which the 
dramatist is aiming at. If he wishes to produce a drama of 
the Elizabethan type — a drama of compréhension — which 
shall include as much as possible of the varied manifestations 
of human life, then obviously the observance of the imities 
must exercise a restricting and narrowing influence which would 

1 In the sensé of " comprehensiveness." — Ed. 



XXXVl INTRODUCTION 

be quite out of place. On the other hand, in a drama of crisis 
they are not only useful but almost inévitable. If a crisis is 
to be a real crisiSj^ it must not drag on indefinitely; it must 
not last for more than a few hours, or — to put a rough limit 
— for more than a single day ; in fact, the unity of time must 
be preserved. Again, if the action is to pass quickly, it must 
pass in' one place, for there wiU be no time for the movement 
of the characters elsewhere; thus the unity of place becomes a 
necessity. Finally, if the mind is to be concentrated to the full 
upon a particular crisis, it must not be distracted by the side 
issues; the event, and nothing but the event, must be dis- 
played; in other words, the dramatist will not succeed in his 
object unless he employs the imity of action. . . . 

Singleness of purpose is the dominating characteristic of the 
French classical drama, and of Racine's in particular ; and this 
singleness shows itself not only in the action and its accessories, 
but in the whole tone of the pièce. Unity of tone is, in fact, a 
more important élément in a play than any other imity. To 
obtain it Racine and his school avoided both the extrême con- 
trasts and the displays of physical action which the Elizabethans 
delighted in. The mixture of comedy and tragedy was abhorrent 
to Racine, not because it was bad in itself, but because it must 
hâve shattered the unity of his tone; and for the same reason 
he preferred not to produce before the audience the most excit- 
ing and disturbing circimistances of his plots, but to présent 
them indirectly, by means of description. Now it is clear that 
the great danger lying before a dramatist who employs thèse 
methods is the danger of dullness. Unity of tone is an excellent 
thîng, but if the tone is a tedious one, it is better to avoid it. 
Unfortunately Racine's successors in Classical Tragedy did not 
realize this truth. They did not imderstand the difficult art of 
keeping interest alive without variety of mood, and consequently 
their works are now almost unreadable. The truth is that they 
were deluded by the apparent ease with which Racine accom- 
plished this difficult task. Having inherited his manner, they 
were content ; they f orgot that there was something else which 
they had not inherited — his genius. . . . 

G. L. Strachey : Landmarks in French Literature, 



LE MITHRIDATE DE RACINE 
CONFÉRENCE FAITE AU THÉÂTRE DE L'ODÉON 

PAR 

N. M. Bernardin 

Mesdabaes et Messieurs, 

En 1693, un neveu de Corneille, Bernard de Fontenelle, de 
l'Académie Française, ne craignait pas d'écrire : « Le tendre 
et le gracieux de Racine se trouvent quelquefois dans Corneille : 
le grand Corneille ne se trouve jamais dans Racine. » Ne voyez 
pas. Messieurs, dans ce jugement si dur pour Racine la partialité 
intéressée d'un neveu pour im oncle illustre ; Fontenelle n'a fait 
là qu'exprimer ime opinion alors courante. Au lendemain 
d^Andromaqiiej Racine avait été classé, non sans raisons d'aiUeurs, 
parmi les tendres j et, dès lors, en cette qualité de tendre, on s'obs- 
tinait injustement à lui refuser la force et la grandeur. Il en 
souffrait, le poète au cœur tellement sensible que la moindre 
critique lui causait plus de chagrin que toutes les louanges ne 
lui faisaient de plaisir; il éprouvait une irritation secrète à 
n'entendre jamais vanter que sa douceur et sa grâce, alors qu'il 
avait pourtant conscience d'avoir, dans Néron, représenté avec 
ime beUe énergie im monstre naissant, d'avoir gravé d'un burin 
aussi vigoureux que celui de Tacite le portrait de l'ambitieuse 
Agrippine, enfin d'avoir, dans l'admirable personnage du vizir 
Acomat, mis. à la scène un politique aussi consommé que pou- 
vaient l'être tous ceux de Corneille. Il voulut péremptoire- 
ment prouver qu'il était, lui aussi, capable de force et de grandeur ; 
et l'on vit alors un spectacle au premier abord surprenant, bien 
qu'il n'ait pas, en réalité, lieu d'étonner beaucoup ceux qui con- 
naissent la vanité délicate des poètes : ComeiUe, jaloux des succès 
du jeime et brillant rival, pour les tendres tragédies duquel le 

xxxvii 



^^ 



XXXVUl INTRODUCTION 

public délaissait ses drames héroïques, venait d'abandonner sa 
manière pour s'essayer dans celle de son émule et d'écrire dans 
Psyché une scène exquisement racinienne ; un an après, Racine, 
désireux de montrer que, lui aussi, il pouvait peindre des héros 
et exciter l'admiration, entreprenait une tragédie purement 
cornélienne, et dans tout le feu de la composition, il déclamait 
sous les arbres des Tuileries ses couplets belliqueux d'une voix 
si claironnante que tous les ouvriers, laissant là leurs outils, 
accouraient autour de lui, craignant que ce ne fût encore quelque 
fou qui s'allait jeter dans le bassin. 

Racine a-t-il réussi aussi complètement dans sa tentative que 
Corneille avait fait dans la sienne? Messieurs, la prévention 
seule a pu le nier. 

Très sagement, le jeune poète avait renoncé à prendre pour 
héros ces rudes Romains de la vieille Rome, dont l'âme semblait 
être passée dans le grand Corneille, et qu'il eût été par trop 
téméraire de vouloir faire parler après lui ; il était allé chercher 
ses personnages dans cet Orient cruel et sanguinaire, mais tou- 
jours prestigieux, où Corneille avait trouvé déjà sa Rodogune 
et son Nicomède ; et, plus heureux même que son illustre de- 
vancier, au lieu de princes oubliés ou obscurs, qu'il fallut par 
un habile anachronisme éclairer du rayonnement de la gloire 
d'Hannibal, il avait rencontré un roi fameux, Mithridate, dont 
le nom avait jadis rempli le monde, et dont la mémoire venait 
d'être as^z récemment rappelée au public français par deux 
œuvres littéraires: en 1635 en effet, grâce à un rôle très beau 
et à une situation des plus dramatiques, la Mort de Mithridate 
de La Calprenède avait obtenu un succès que n'avait point 
fait oublier celui de la Mariamne, ni même celui du Cid ; et, 
en 1648, le roman de Mithridate par le jeune Rolland Le Vayer 
de Boutigny avait plu assez pour qu'il ait dû être réimprimé 
quelques années après. C'est un grand avantage pour un poète 
dramatique de mettre à la scène des personnages et des événe- 
ments familiers au public: de combien d'explications et de 
préparations il se voit du coup dispensé ! Comme ses inten- 
tions sont mieux comprises ! Et comme son œuvre gagné en 
force en même temps qu'elle gagne en rapidité ! 



INTRODUCTION XXXIX 

Mais ce qui â ^rtout déterminé Racine dans le choix de son 
sujet, c'est que, voulant faire grand, il trouvait en Mithridate 
un héros gigantesque, colossal jusque dans le crime, nature à 
la fois sauvage et généreuse, qui soulève l'horreur et inspire 
l'admiration, véritable personnage d'épopée, qui joint à l'in- 
domptable courage d'Achille la prudente dissimulation d'Ulysse, 
capable d'intéresser par sa valeur, capable d'intéresser par son 
malheur, figure bien faite, en vérité, pour éveiller la curiosité 
' d'im psychologue et pour tenter un auteur dramatique. 

Perses d'origine, puisqu'ils descendaient de l'un des com- 
pagnons de Darius, les rois de Cappadoce, ancêtres de Mithri- 
date, s'étaient unis souvent à des Macédoniennes, en sorte que 
la race avait fini par associer au tempérament asiatique l'esprit 
des Hellènes. Le père de notre Mithridate, Mithridate Philo- 
pator, semble avoir été déjà hanté de rêves ambitieux, que 
voudra réaliser son fils. Il périt assassiné, sans doute sur Tordre 
de sa femme et à l'instigation de Rome. 

Précisément, à la même époque, Antiochus, roi de Sjrrie, con- 
traignait à s'empoisonner sa mère Cléopâtre, qui (vous vous 
rappelez la Rodogune de ComeiUe) avait voulu l'empoisonner 
lui-même, après avoir déjà tué son mari et son fils aîné. Le 
héros de Racine, Mithridate Eupator, alors âgé de douze ans, 
songea que sa mère était parente de Cléopâtre, et, se dérobant 
prudemment aux baisers et aux caresses de la veuve inconsolable, 
•il se retira dans le fond le plus reculé des bois. Il y vécut long- 
temps, chassant les bêtes fauves à coups de fièches, ou luttant 
avec elles corps à corps et les étouffant dans ses bras herculéens. 
Au bout de sept années, il revint à Sinope, embrassa très tendre- 
ment sa chère mère, puis, toujoiu*s prudent, l'enferma dans une 
forteresse. 

Il fut bientôt adoré de tous ses sujets, asiatiques et grecs: 
sa taille et sa force frappaient de stupeur les Orientaux ; sa 
beauté ravissait les Hellènes, ces Hellènes qui avaient divinisé 
rharmonieuse perfection des formes humaines. Les Asiatiques 
ne se lassaient pas d'admirer cet adolescent agile et robuste, 
qui sautait à cheval tout armé, ce cavaUer infatigable, qui, tel 
un centaure, semblait ne faire qu'un avec sa monture, ce cocher 



xl INTRODUCTION 

habile et fort, capable de conduire un char attelé de seize chevaux ; 
ils ouvraient des yeux émerveillés devant son appétit prodigieux, 
qu'eût envié Louis XIV lui-même, et c'est peut-être pour s'être 
trop extasiée devant son insatiable époux, certain jour où il 
remporta le premier prix dans im concours de voracité, que la 
reine Laodice mit au monde une fille qui avait, à chaque mâ- 
choire, une double rangée de dents. De leur côté, les Grecs 
reconnaissaient en Mithridate un des leurs à son esprit délié 
et subtil, à son intelligence ouverte, à son goût pour les sciences 
et pour les lettres, pour la philosophie et pour la musique, à 
sa curiosité pour les œuvres d'art et pour les bibelots historiques, 
comme nous dirions aujourd'hui. Aux Asiatiques et aux Grecs 
il imposait également par la splendeur de son faste oriental, par 
la somptuosité de ses mobiUers, par l'éblouissement des pierres 
précieuses qui paraient ses armes et sa tiare. Tous aussi étaient 
gagnés par les élans de sa générosité et par sa grandeur d'âme, 
et rien ne lui avait conciUé le cœur de ses soldats comme de 
l'entendre parler à chacim d'eux la langue de son pays, alors 
qu'étaient si nombreux les peuples qui composaient son armée. 
Mais tous redoutaient, d'autre part, son orgueil démesuré et 
les éclats effrayants de sa colère ; de sorte que, dix fois vaincu, 
a pourra longtemps encore maintenu- son autorité par la terreur. 

Du jour où il avait senti qu'il obtiendrait tout de ses sujets, 
parce qu'il était à la fois admiré, aimé et craint, Mithridate 
avait repris les rêves ambitieux de son père. Puisque dans 
ses veines coulait le sang des Grecs uni à celui des Perses, pour- 
quoi ne pourrait-il pas réussir dans le grand dessein que la mort 
avait empêché Alexandre d'accomplir? Pourquoi ne par- 
viendrait-il pas à réunir sous le même sceptre la Grèce et l'Asie, 
à fondre les deux civiUsations et à fonder une sorte d'empire 
d'Orient? Il semble bien que le projet ne fût pas chimérique, 
puisque l'empire d'Orient devait naître plus tard du démembre- 
ment de la puissance romaine. 

Sans retard, Mithridate se mit à l'œuvre, et il travailla si 
bien qu'au bout de quelques mois la mer Noire n'était plus 
qu'im lac mithridatique, et que le petit roi de la Cappadoce 
pontique était devenu le grand roi de Pont, le roi de la mer. 



INTRODUCTION xli 

De ces agrandissements Rome ne s'était pas d'abord inquiétée : 
parmi les sénateurs, les uns n'avaient pas encore ouvert les 
yeux ; Mithridate avait su fermer les yeux des autres avec des 
pièces d'or. Quand la République Romaine envoya enfin des 
légions contre le roi de Pont, il les défit successivement, et, 
enhardi par ses victoires, déjà maître de toute l'Asie Mineure, 
il résolut de frapper un coup terrible. Considérant comme un 
danger permanent pour lui la présence dans ses États de 80.000 
Romains, banquiers ou marchands, qui pouvaient devenir des 
espions, Mithridate les fit massacrer tous le même jour; puis 
il déclara leurs biens confisqués et exempta pour cinq ans de 
tout tribut l'Asie reconnaissante. 

Ce fut, d'un bout à l'autre de l'Italie, un long cri d'horreur 
et d'épouvante. Rome comprenait enfin que, depuis Hannibçd, 
elle n'avait pas eu en face d^'elle un ennemi aussi audacieux et 
aussi redoutable: si elle voulait 'être sûre de vivre, il fallait 
que Mithridate pérît; il fallait que l'aigle romaine rejetât 
sanglant et inanimé sur le sol le vautour qui lui osait disputer 
sa proie; et, sans hésiter, pour subvenir aux frais d'une lutte 
acharnée, la République vendit les terrains sacrés qui dépendaient 
du Capitole. 

Alors commence une guerre sans trêve, ime guerre inexpiable, 
dans laquelle Mithridate déploie ime énergie surhumaine et 
ime activité véritablement napoléonienne. Il tient tête à Sylla, 
à Lucullus, à Pompée, et dans la rage même de la défaite il 
semble puiser des forces nouvelles. Cependant, con^me souvent 
il a soudoyé la trahison à Rome, il la craint partout autour de 
lui: sur son lit reposent toujours à ses côtés son carquois et 
son arc ; et, pour se préserver des poisons de la Colchide, célèbres 
depuis l'antique Médée, il a étudié la toxicologie et inventé un 
antidote. Qu'il ait été composé, suivant la recette que Pline 
l'Ancien prétend avoir vue écrite de la main de Mithridate lui- 
mâne, avec deux figues, deux noix sèches et vingt feuilles de 
rue, broyées selon l'art et saupoudrées de sel; ou que, comme 
d'autres le prétendent, le roi de Pont ait cherché l'immunité 
contre tous les poisons dans l'absorption quotidienne de sang 
de canards nourris de toutes les herbes vénéneuses: toujours 



xlii INTRODUCTION 

est-il que l'antiquité a cru tous les poisons réellement sans force 
contre Mithridate, et que La Calprenède et Racine ont pu 
tirer de cette opinion un effet dramatique au dernier acte de 
leurs tragédies. Mais tant de précautions ne suffisent point 
encore à Mithridate; il y joint des châtiments impitoyables, 
qui seront des exemples : sur de simples soupçons, il fait mettre 
à mort sa première femme, Laodice, et plusieurs de ses fils, 
Ariarathe, Mithridate, Macharès, Xipharès même, dont le seul 
crime est d'avoir pour mère la coupable Stratonice. Le roi de 
Pont est la terreur de l'Asie, comme il est la terreur de Rome. 

Cependant la Fortune est femme et n'aime pas les vieillards. 
Près de l'Euphrate^ dans une surprise de nuit, admirablement 
dépeinte par Racine, Pompée a mis en déroute l'armée de Mithri- 
date: l'Asie est perdue pour le vieux roi. Il fuit; mais son 
cœur jaloux ne peut supporter la pensée que, s'il meurt, les 
femmes qu'il a aimées appartiendront à d'autres : comme preuve 
suprême de sa tendresse, il fait porter aux reines l'ordre de 
mourir; et, tandis qu'il remonte vers le Caucase, la Milésienne 
Monime, qui a vainement tenté de se pendre à l'aide de son 
trop fragile bandeau royal en gaze de Tarente, partage fraternelle- 
ment avec la Grecque Bérénice une coupe empoisonnée. 

Une barque a conduit dans la Chersonèse Taurique, aujourd'hui 
la Crimée, Mithridate vaincu, mais indomptable. Il rassemble 
les derniers débris de son armée, il convoque ses alliés, et leur 
expose im projet follement héroïque : comme Hannibal à travers 
l'Espagne et la Gaule, il veut à travers l'Orient se ruer sur l'Italie, 
et, déUvrant partout sur son passage les peuples qui frémissent 
sous le joug romain, fondre avec eux sur Rome par les sommets 
des Alpes, 

. . . par le chemin des aigles, 

comme disait jadis im poète dans un beau drame ici même plus 
de cent fois applaudi.^ Mais Mithridate est le seul que les 
défaites n'ont pas découragé, le seul dont la haine entretient 
Paudace toujours renaissante. Ses soldats sont las d'im demi- 
siècle de batailles : ils hésitent à le suivre encore, et Phamace, 

* M. François Coppée, dans Severo ToreUi. 



INTRODUCTION xliii 

le plus cher de ses enfants, conspire contre lui. Ce fut la plus 
grande douleur du vieux roi; elle l'atteignit au plus profond 
du cœur, car il se flattait de léguer à son fils sa haine de Rome 
et de revivre en sa fougueuse jeunesse. Mithridate pleura, et, 
pour la première et la dernière fois de sa vie, Mjthridate par- 
donna. Quelques jours après, l'ingrat Phamace soulevait contre 
im père si généreux son armée révoltée, et l'assiégeait dans la 
forteresse de Panticapée. Pour ne pas tomber aux mains du 
traître, et qui sait? peut-être poui* lui épargner im parricide, 
Mithridate se fit percer le cœur par le Gaulois Bituit. Rome, 
par des actions de grâces pubUques, remercia les dieux de cette 
mort, comme elle eût fait d'une victoire ; mais Pompée s'honora 
en honorant la dépouille de son glorieux ennemi : il voulut que 
le corps da Mithridate, du géant qui avait, un moment, disputé 
à Rome l'empire de l'univers, reposât à Sinope, auprès de ceux 
de ses ancêtres, dans la sépulture des rois. ^ 

Tel était. Messieurs, le héros que Racine avait trouvé dans 4r 
l'histoire. • Comment l'allait-il présenter au théâtre? 

Il y a plusieurs manières de concevoir le drame historique. 

Le poète peut, suivant pas à pas l'histoire, découper en scènes 
les événements divers qui forment comme la trame de la vie de 
son héros, et les f^ire passer dans leur succession chronologique 
devant les yeux des spectateurs. C'est alors, à vrai dire, de 
l'histoire dialoguée plutôt qu'un drame ; et, forcément, il manque . 
presque toujours à une œuvre de ce genre l'unité d'action, sans 
laquelle risque de rester froide la tragédie la plus éloquente. 
C'est le système qu'a suivi Shakespeare dans ses drames his- 
toriques ; et il a beau les avoir rendus vivants par l'étonnante 
vérité de sa psychologie, ses plus fervents admirateurs eux- 
mêmes nous accorderont bien que, s'il eût écrit seulement ses 
drames historiques, Shakespeare ne serait pas l'étonnant poète 
dramatique qu'il est, c'est-à-dire peut-être le plus grand de tous. 
Ce système d'ailleurs ne pouvait convenir à la tragédie fran- 
çaise, qui est, comme son aïeule la tragédie grecque, une crise 
rapide. I 

Un autre système consiste, en découpant une action unique 
dans l'histoire, à reconstituer fidèlement par des détails typiques, 



xliv INTRODUCTION 

par des usages choisis avec habileté, par des décors curieusement 
exacts, par des costumes scrupuleusement copiés, enfin par 
tous les accessoires, le milieu historique dans lequel doit évoluer 
cette action. Effort louable assurément, dont le résultat charme 
l'œil, amuse l'esprit, et même aide l'intelligence à comprendre 
les sentiments particuliers qui animent une époque. Ce sera 
le système romantique, et je ne veux point nier qu'il n'ait du 
bon. Le tort de l'école romantique sera de regarder comme le 
principal ce qui ne doit être que secondaire, d'abuser de la couleur 
locale, d'allonger démesurément ses œuvres par des épisodes 
pittoresques, mais inutiles au développement de l'action, et de 
créer ainsi un genre qui sera à la tragédie classique à peu près 
ce que la comédie de mœurs est à la comédie de caractère. Con- 
çue encore dans cet esprit, la Martyre de M. Richepin, vous 
vous en souvenez, piqua quelques jours la curiosité des spec- 
tateurs par la variété amusante des épisodes et par les ingénieuses 
trouvailles de la mise en scène ; je doute qu'on la reprenne, tandis 
que sera jouée toujours et toujours touchera les cœurs cette 
tragédie de caractère qui s'appelle Polyeucte, 

C'est que, dans ce chef-d'œuvre, le grand Corneille a voulu 
non pas simplement mettre en dialogue les Actes des SairUs, 
ou restituer le mobiHer, le costume et les usages d'une époque, 
mais en retrouver l'âme. Concentrant et résumant toutes ses 
observations de mœurs en un petit nombre de personnages in- 
dispensables à l'action, son art plus élevé a fait de chacim d'eux 
le type vivant et dramatique de toute une classe de la société 
romaine au temps des persécutions; et du seul conflit de ces 
caractères natiu^llement opposés, du seul choc de ces âmes 
ennemies, il a su produire les situations et les péripéties. 

C'est également une tragédie de caractère que Racine a voulu 
faire et a faite dans Mithridate. Ne lui reprochons donc pas, 
avec le Mercure galant^ de n'avoir pris à l'histoire que des noms 
seulement : narrer les événements n'était point son objet ; parmi 
tous ceux que lui présentait l'histoire, il a fait un choix raisonné, 
et ceux qu'il a choisis, il les a groupés, usant de la liberté juste- 
ment réclamée par les poètes, dans l'ordre répondant le mieux 
à son dessein, qui était de nous montrer l'indomptable courage 



INTRODUCTION xlv 

du vieux roi et sa haine inassouvie contre Rome. De même, 
le plus réfléchi des poètes n'a employé la couleur locale qu'avec 
une extrême discrétion, parce que pour lui elle était non un but, 
mais un moyen, et il n'a peint de quelques touches rapides 
l'époque et le milieu que pour mieux faire comprendre la finesse, 
la dissimulation et aussi la jalousie terrible du despote oriental. 
Ainsi dans Mithridate l'historien et le peintre sont, comme il 
convenait, restés subordonnés au psychologue dramatique, et 
les faits et la couleur locale n'y servent qu'à mettre dans son 
vrai jour l'âme du principal personnage, en laquelle se joue 
véritablement la tragédie. 

A ce personnage d'épopée Racine a su conserver sa grandeur 
plus qu'humaine. L'unité de temps l'obligeant à ne nous 
montrer son héros qu'au moment même où il va mourir, c'est 
un fugitif qu'il nous présente ; mais quel fugitif que ce glorieux 
vaincu ! Si trente diadèmes ne cachent plus ses cheveux blancs, 
le malheur l'a sacré, et, devant lui, s'incline le respect du monde 
ému. Dans sa défaite irréparable, l'héroïque vieillard épouvante 
encore cette Rome à laquelle, seul, il a tenu tête durant quarante 
années. 

Et je ne sais pas, dans tout le théâtre politique de Corneille, 
une scène plus puissante, plus héroïque, plus admirable que 
ceUe où Mithridate, rejeté par le naufrage de sa fortune sur les 
rochers, perdus aux confins du monde, de la Chersonèsé Taurique, 
expose ardemment à ses fils étonnés son dessein d'aller attaquer 
son ennemi sur son propre sol : 

Marchons ; et dans son sein rejetons cette guerre 
Que sa fureur envoie aux deux bouts de la terre . . . 
Jamais on ne vaincra les Romains que dans Rome. 

D'un bout à l'autre de ce long couplet de cent vers, qui est 
une pure merveille de l'art le plus accompli, et dans lequel la 
passion a déterminé et réglé non seulement tous les mouvements 
oratoires, mais jusqu'aux coupes mêmes des vers, on voit flamber 
cette haine, qui brûlait déjà dans la première œuvre dramatique 
du tendre Racine, les Frères ennemis. L'aveuglant sur la té- 
mérité, sur la folie de son entreprise chimérique, la fureur de 



Xlvi INTRODUCTION 

Mithridate n'admet pas d'obstacles : elle les nie ou elle les brise. 
Plus de deux cents lieues séparent le port de Njonphée des 
bouches du Danube: qu'importe? Mithridate commande aux 
vents complaisants d'y pousser sa flotte en deux jours. De là 
ses soldats exténués n'auront pas, pour gagner Rome, moins 
de sept cents lieues à franchir à travers des pays hérissés de 
montagnes ou sillonnés de rivières; qu'importe? Mithridate 
veut qu'ils fournissent en moins de cent jours cette énorme 
marche : 

Je vous rends dans trois mois au pied du Capitole ; 

et, sa passion s'exaltant à mesure qu'il parle, il voit déjà sur 
son chemin, accourant pour grossir les rangs de son armée, 
Daces, Pannoniens, Germains, Espagnols, Gaulois; il voit 
dans l'Italie même les alliés de Rome -se soulevant contre elle 
à son approche ; il se voit lui-même arrivant à la tête du monde 
coalisé devant les murs de Rome vide de Romains, et jetant 
siu* le Capitole la torche vengeresse de l'univers; et, comme 
déjà ce rêve est devenu une réaUté pour sa passion exaspérée, 
c'est à Rome qu'il ordonne à son fils de lui faire parvenir la 
nouvelle de ses victoires en Asie. En vérité, dans ce morceau 
superbe, celui qu'on appelle toujours le Raphaël de notre poésie 
dramatique s'en est montré, pour un moment, le Michel-Ange, 
et Racine est bien l'égal de Corneille. 

Mais, quelque grand que paraisse ici Mithridate, il va se 
dresser plus grand encore au dernier acte. Abandonné, trahi, 
le héros a songé d'abord au suicide ; il a renoncé bientôt à cette 
mort inutile pour chercher 

... un trépas plus funeste aux Romains. 
Il parle ; et, défiant leurs nombreuses cohortes, 
Du palais, à ces mots, il fait ouvrir les portes. 
A l'aspect de ce front, dont la noble fureur 
Tant de fois dans leurs rangs répandit la terreur, 
Vous les eussiez vus tous, retournant en arrière, 
Laisser entre eux et nous une large carrière ; 
Et déjà quelques-uns couraient épouvantés 
Jusque dans les vaisseaux qui les ont apportés. 



INTRODUCTION xlvii 

Il semble ici vraiment que Racine ait oublié qu'il écrivait une 
tragédie; il semble qu'il ait voulu, embouchant la trompette 
épique, faire entendre un chant d'Homère: tels fuyaient vers 
leur ville les Troyens éperdus à la seule vue d'Achille enfin sorti 
de sa tente. 

Mais la haine de Rome n'est pas l'unique sentiment qui anime 
l'âme de Mithridate; le personnage de Racine est beaucoup 
plus complexe. D'ailleurs, pour qu'il y eût drame, il fallait, 
de toute nécessité, qu'il y eût lutte entre deux passions opposées. 
Or, ime seule passion était capable de balancer, un moment, la 
haine dans le cœur du vieux roi, l'amour : non pas, bien entendu, 
l'amour calme, l'amour notarié de notre climat tempéré et de 
notre civilisation réfrigérante, mais ime de ces passions impé- 
tueuses et fougueuses qui, sous le ciel ardent de l'Asie Mineure, 
lancent encore sur sa proie comme une bête fauve im homme 
robuste et sain; un amour de jeune mâle dans un cœur sénile; 
un amour qui enflammerait le despote de tous les désirs et qui 
torturerait le vieillard de toutes les jalousies. Et cet amour, 
en même temps qu'il créerait le conflit de passions d'où naîtrait 
la crise, fournirait au poète l'intrigue que ne lui donnait pas le 
sujet, et le personnage de femme qui lui manquait. La tragédie 
de Mithridate est donc, d'après un procédé que nous retrouvons 
dans presque toutes les tragédies de Racine, composée d'une 
partie historique et d'une partie romanesque adroitement et 
étroitement soudées l'ime à l'autre. 

Expliquer et excuser l'odieuse trahison de Phamace par une 
rivalité amoureuse, c'était la première idée qui devait venir à 
Racine. Mais, parmi toutes les épouses et toutes les concubines 
du vieux roi, laquelle choisir pour qu'elle brûlât d'un égal amour 
le cœur du père et celui du fils? Celle qui était présente à 
l'agonie de Mithridate, c'était la fidèle Hypsicratée, ime femme 
toute virile, que le roi appelait en riant Hypsicratès, et qui avait 
bravement suivi partout son maître, dans ses batailles, dans ses 
déroutes, jusque dans la barque emportant sa fortune; Hypsi- 
cratée^ qu'au dénouement shakespearien de sa tragédie La 
Calprenède avait assise morte sur le trône royal à côté de Mithri- 
date mort. Mais cette amazone, toute dévouée d'ailleurs à 



xlviii ESTTRODUCTION 

Mithridate, n'était point pour plaire à Racine, comme elle aurait 
plu sans doute à Corneille, et, d'autre part, le contraste lui 
paraissait nécessaire d'une douce et blanche figure de jeune 
fille avec ces rudes visages, tout^ bronzés par 1^ guerre. Il prit 
dQnc la Milésienne Monime, parce qu'elle semblait la plus 
vertueuse de toutes les épouses de Mithridate, ayant repoussé 
son amour tant qu'il ne lui eut pas envoyé le bandeau royal et 
le titre de reine. 

Les raisons mêmes qui dictaient à Racine ce choix rendaient 
impossible que Monime fût éprise du traître Phamace; et du 
reste, dans ce cas, la haine de Mithridate contre Rome et sa 
jalousie contre son fils se fussent liguées, au lieu de se combattre. 
Il fallait donc donner à Mithridate un autre fils, animé de la 
même haine que lui et, comme lui, redouté de Rome, mais égale- 
ment amoureux de Monime et aimé, pour sa vertu, de cette 
vertueuse princesse. Pour ce faire, Racine a dû imaginer un 
petit roman, et j'accorde qu'il n'a pas eu beaucoup de peine à 
l'inventer, car il l'a pris tout simplement dans V Avare de Mo^ère, 
où Harpagon, Cléante et Mariane se trouvaient exactement 
dans la situation où il va mettre Mithridate, Xipharès et 
Monime. 

Xipharès, dont Racine a prolongé la vie comme il a prolongé 
celle de Monime, a rencontré dans Ephèse et aimé la belle 
Monime, qui, de son côté, a éprouvé pour le prince une estime 
bien voisine de l'amour. Mais Mithridate l'a vue à son tour, 
et il lui a envoyé son diadème. La jeune Grecque, remplie 
d'admiration pour le héros, s'est inclinée avec respect, et, re- 
foulant au fond de son cœur des sentiments d'ailleurs inavoués, 
elle est venue à la cour, déjà déclarée reine, mais sans que le 
mariage ait été célébré; elle n'est donc encore qu'^accordée au 
roi, situation assez fréquente dans les cours européennes aux 
XVI® et XVII* siècles. Ce fut, quelque temps, à peu près celle 
de'. Marie Stuart à la cour de France; c'est celle où Racine 
avait déjà placé Hermione dans Andromaqtiej celle où Pradon 
aura la sottise de placer Phèdre dans sa ridicule tragédie. Mais 
autant l'idée d'inceste était nécessaire dans Phèdrey autant elle 
devait être écartée de MUhridate, et cet ingénieux arrangement 



INTRODUCTION xlix 

a permis au poète de concilier à Monime et à Xipharès toute 
notre sympathie. 

Voilà donc trouvés les quatre personnages de la pièce : Mithri- 
date, ses deux fils, qui tous deux lui ressemblent, Phamace par 
ses brutalités et par ses perfidies, Xipharès, au contraire, par 
son courage, par sa fierté, par sa haine de Rome ; enfin la femme 
dont ils sont épris tous trois, Monime. 

Voyons maintenant comment Racine, qui attachait à ses 
plans tant d'importance que, le plan fait, une tragédie dont il 
n'avait pas encore écrit un seul vers lui semblait finie, voyons, 
dis-je, comment Racine a noué ici les différents fils qui forment 
Tintrigue, Qt comment n a conduit Taction. 

Les deux premiers actes, qui sont d'exposition, paraissent un 
peu froids et valent surtout par la délicatesse des sentiments 
et par l'élégance du style. 

Au bruit que, pour cacher sa fuite, Mîthridate a fait répandre 
de sa mort, ses deux fils sont accourus à Nymphée, où déjà 
avait été amenée Monime. Xipharès décla^ à la reine un 
amour, qu'il peut maintenant lui déclarer sans crime, et Monime 
laisse entrevoir le secret de son cœur. Mais, tatidis que Phamace 
et Xipharès se disputent la jeune fille en sa présence, un coup de 
théâtre se produit, qui les plonge tous trois dans la stupeur; 
la suivante Phasdime accourt : 

Princes, toute la mer est de vaisseaux couverte, 
Et bientôt, démentant le faux bruit de sa mort, 
Mithridate lui-même arrive dans le port. 

Monime se retire aussitôt, et Phamace, épouvanté, presse 
son frère de s'assurer avec lui de la forteresse pour se mettre 
à l'abri des vengeances de Mithridate. Repoussé avec indigna- 
tion par Xipharès, il lui demande au moins de lui garder le 
secret, comme il taira lui-même le secret de Xipharès et celui 
de Monime, qu'il a deviné. 

Grâce au gouverneur de la ville, Arbate, auquel Xipharès 
vient de sauver la vie, les Soupçons jaloux de Mithridate, con- 
firmés par la répugnance manifeste que témoigne Monime à 
le suivre à l'autel, se portent d'abord sur le seul Phamace, et, 



1 INTRODUCTION 

pour les éclaircir, il a recours à cette dissimulation tout orientale, 
qui est l'autre face de son caractère que le po^te voulait montrer, 
et dont Pharnace a tant raison de redouter les trompeuses 
adresses. 

Dès lors, la tragédie va marcher d'un pas rapide à la catas- 
trophe par une succession de scènes émouvantes et dramatiques. 

Pour surprendre le secret de Pharnace, le vieux roi se sert 
habilement de son grand projet d'invasion de l'Italie; de sorte 
que, au moment même où il semble tout ejitier à l'enthousiasme 
de cette héroïque entreprise, le rusé monarque prépare et tend 
le piège où va tomber Pharnace: il ordonne à son fils de se 
rendre immédiatement auprès du roi des Parthes, pour cimenter, 
en épousant sa fille, l'alliance que viennent de conclure les deux 
royaumes: et comme l'amoureux Pharnace refuse de s'éloigner 
de Monime, Mithridate -en fureur le fait aussitôt arrêter. Se 
croyant trahi par son frère, Pharnace trahit à son tour Xipharès, 
et se venge par ce vers, qui produit une péripétie^ terrible : 

Il aime aussi la reine, et même en est aimé. 

En vain, Mithridate veut se persuader qu'une si horrible 
trahison est impossible; la jalousie est entrée dans son cœur 
et le ronge. Elle lui inspire une nouvelle ruse, que des critiques 
solennels, mais d'esprit étroit, ont proclamée jadis indigne de 
la tragédie: Mithridate déclare à Monime qu'il la cède à Xi- 
pharès, afin de lire par sa réponse jusqu'au fond de son cœur. 
Et, sans doute, c'est là un moyen de comédie : Molière ne nous 
avait-il pas déjà montré Harpagon offrant Mariane à son fils, 
afin de découvrir par là ses véritables sentiments pour la jeune 
fille? Mais que nous importe, si la vérité des caractères est 
conservée, et surtout si l'unité d'impression n'est pas détruite? 
Orgon se cache sous la table pour écouter Elmire et Tartuffe : 
moyen de comédie, qui fait rire. Néron se cache derrière une 
tapisserie pour écouter Junie et Britannicus: qui songe cette 
fois à rire dans la salle, où le public sent bien qu'im mot échappé 
à Junie peut être l'arrêt de mort de Son amant? De même, ici, 
les spectateurs, instruits par avance que le roi ne songe à rien 
moins qu'au meurtre de son fils, suivent, d'un cœur palpitant, 



INTRODUCTION li 

les incertitudes dramatiques de Monime; partagée entre la 
crainte de laisser échapper le bonheur qui lui est offert et celle 
de faire tomber par une parole imprudente la tête de son cher 
Xipharès. Dans cette scène tragique, née d'un moyen de 
comédie, la terreur grandit de réplique en réplique jusqu'au 
vers célèbre de Monime : 

Nous nous aimions . . . Seigneur, vous changez de visage ! 

Et ceux-là ont bien certainement contribué à discréditer la 
tragédie, qui n'ont pas voulu lui permettre de s'humaniser 
ainsi et de descendre quelquefois de ses hauteurs de convention 
pour se rapprocher de la vérité et de la vie. 

Toilà donc l'action nouée, comme il convient, à la fin du 
troisième acte; le quatrième va nous montrer la crise pour 
laquelle le drame a été composé. Elle est présentée dans un 
admirable monologue, qui rappelle, par les indécisions pas- 
sionnées de Mithridate, le monologue fameux d'Auguste au 
quatrième acte de Cinna. La colère, la pitié, l'amour, la raison 
se livrent une lutte éminemment dramatique dans l'âme déchirée 
du vieux roi. Il se résout sans peine à condamner Phamace. 
Mais tuera-t-il celle qu'il adore? Immolera-t-il l'ingrat Xipha- 
rès? Son amour outragé dit: oui; mais sa haine inassouvie 
dit: non; car Rome craint Xipharès; Xipharès peut venger 
son père ! Douloureux problème, dont son cœur troublé cherche, 
en vain, la solution. 

Mais voici qu'Arbate pénètre auprès du roi: Phamace a 
séduit ses gardes, révolté l'armée, et l'on a vu Xipharès, suivi 
d'im gros d'amis, se mêler aux rebelles. Mithridate n'hésite 
plus: il frappera de sa propre main ses deux fils coupables au 
milieu des mutins consternés. Soudain accourt éperdu un 
« domestique », Arcas : une flotte romaine est en train de dé- 
barquer une armée sous les murs de la place ! Mithridate se 
jette sur son casque avec un cri terrible : « Les Romains ! » 
Et, se penchant vers Arcas, tandis que le rideau tombe, il pro- 
nonce à voix basse quelques mots par lesquels on devine qu'il 
•décide du sort de Monime. Fin d'acte d'une beauté supérieure, 
une des plus mouvementées et des plus émouvantes que Racine 



lii INTRODUCTION 

ait écrites, et dans laquelle, avec un art merveilleux, le poète a 
su faire condamner par Mithridate les deux personnages sym- 
pathiques, sans détruire l'intérêt et l'admiration que nous devons, 
comme ses victimes elles-mêmes, conserver pour le héros. 

Le cinquième acte est, jusqu'à la dernière scène, digne du 
quatrième, et les coups de théâtre ne s'y succèdent pas moins 
rapidement. Monime croit Xipharès mort, et veut mourir. 
Tandis qu'elle se lamente au milieu de ses femmes, qui l'oQt 
empêchée de se tuer, Arcas lui apporte, au nom du roi, une 
coupe de poison. Monime salue la mort comme une délivrance ; 
mais, au moment où elle approche le breuvage de ses lèvres 
avides, Arbate entre en courant et lui arrache des mains la coupe 
mortelle: Xipharès vit; il est toujoiu-s resté fidèle, et Mithri- 
date mourant, mais victorieux grâce à son fils, a révoqué l'arrêt 
qui condamnait la reine î Et voici que le héros paraît lui- 
même, soutenu par des gardes, tout couvert de sang et ne respirant 
plus que par un ultime effort de sa haine. Il doit à Xipharès 
cette joie suprême que ses derniers regards aient vu fuir les 
Romains ; en récompense, il lui donne Monime ; puis il lui 
lègue le soin de sa vengeance, et, l'attirant sur son cœur, il 
semble vouloir faire passer en lui, dans un baiser, sa haine im- 
mortelle : 

Venez, et recevez l'âme de Mithridate. 

Il faut bien le dire, la scène finale est la moins bonne de la 
tragédie, et, malgré la grandeur et la beauté de la dernière idée, 
je ne suis pas autrement surpris que ce dénouement ait paru à 
quelques personnes « misérable » et que le Mercure galant ait 
ironiquement proposé la mort du roi barbare pour exemple 
« à nos princes les plus chrétiens. » Sans doute, le pardon de 
Mithridate est dans la vérité du caractère tel que Fa conçu 
Racine, et même, par quelques détails habilement placés, le 
poète a su y préparer les esprits ; mais il a eu le tort grave de 
n'y pas prédisposer les cœurs. Les spectateurs ont bien entendu 
le politique parler de sa haine contre Rome ; mais ils ont vu et 
plaint le vieillard déchiré par la jalousie, de sorte que le héros 
du drame historique a été relégué par eux au second plan dès 



ESTTRODUCTION liii 

l'instant que le héros du drame domestique eut touché leur 
sensibilité. Et l'art même avec lequel Racine a peint les vio- 
lences de cette passion sémle s'est retourné contre lui. Après 
les grands éclats du quatrième acte, le public s'étonne de voir 
cet amour si furieux céder devant im sentiment qui peut, en 
effet, être plus puissant, mais dans lequel il est moins facile 
pour lui d'entrer, parce que cC/sentiment est tout exceptionnel, 
et l'impression dernière est im certain désappointement pour 
l'auditoire, qui se demande pourquoi Racine a employé un si 
grand moyen, puisqu'il devait produire un si petit résultat. La 
disproportion entre les moyens et les effets, voilà la plaie secrète 
dont souffre cette belle tragédie, et c'est pour s'en être, avec 
le temps, mieux rendu compte, que la postérité n'a plus pour 
elle l'engouement des contemporains ; « MUhridate est ime 
pièce charmante, écrivait la marquise de Sévigné. On y pleure ; 
on y est dans une continuelle admiration. On la voit trente 
fois, on la trouve plus belle la trentième X[ue la première. » Si 
elle l'avait vue trente et une fois, peut-être la spirituelle marquise, 
qui d'ailleurs n'aimait tant MUhridate que parce que Racine s'y 
est modelé sur son cher Corneille, aurait-elle fini par s'apercevoir 
de ce défaut capital, qui, malgré tant de beautés, nous empêche 
aujourd'hui de placer MUhridate à côté d^Andromaque, de BrUan^ 
nicus et de Phèdre, et le laisse au second rang des tragédies de 
Racine, avec Iphigénie et Bajazet, malheureusement gâtés aussi 
par une faute analogue. 

Il faut bien le dire également, la partie romanesque de MUhri- 
daie, qui, dans sa fraîcheur première, a séduit et charmé la ville 
et la cour, nous parait aujourd'hui par endroits cruellement 
démodée. Mais est-ce la faute du poète? Tous les huit ou 
dix ans, le jeune premier change d'aspect au théâtre. Combien 
ses transformations ont été nombreuses rien que dans notre 
siècle! Ce fut d'abord un poète phtisique, la mode voulant 
aldrs que cette épithète fût inséparable de ce substantif ; puis, 
à l'époque romantique, un bâtard révolté contre la société; 
vers la fin du règne bourgeois de Louis-Philippe, je lis sur sa 
carte : « ingénieur, ancien élève de l'École Polsrtechnique » ; 
pendant le second Empire, il apparaît irrésistible sous l'uni- 



liv INTRODUCTION 

forme d'un capitaine de dragons ; dans notre république démo- 
cratique, les auteurs ont présenté successivement à la sympathie 
des jeunes premières et du public l'artiste épris de l'idéal et 
l'énergique maître de forges ; je crois bien, — et je n'ai garde 
de m'en plaindre, — que nous commençons maintenant la série 
des explorateiu's. Eh bien, au siècle de Louis XIV, le type du 
jeune premier, c'était le marquis, dont la comédie ridiculisait 
la frivolité, mais dont la tragédie exaltait la bravoure héroïque. 
C'était d'ailleurs dans un habit de marquis à peine modifié que 
les acteiu's jouaient le Bellérophon de Quinault, comme le Mithri- 
date de Racine; et le palais, grec ou oriental, dans lequel ils 
parlaient, était, tout comme les salons de Saint-Cloud et de 
Versailles, décoré de guéridons d'argent, de vases de fleurs et 
de girandoles de cristal. Le langage de ces Asiatiques et de 
ces Hellènes eût donc juré avec cette décoration, -comme avec 
leurs costjmies, s'il n'eût pas été le langage tendre et galant 
des soupirants et des « mourants », qui donnaient le ton à Paris 
dans les ruelles à la mode. Xipharès, aujourd'hui, nous paraîi 
trop souvent un précieux; autre, il eût semblé d'une brutalité 
insoutenable aux lecteurs de M"^ de Scudéry et de M°^« de La 
Fayette. Que les transformations du goût et de la mode ne 
nous rendent donc point injustes en reprochant à Racine d'avoir 
été de son temps, et que le vain plaisir de la critique ne nous 
ôte pas celui d'être touchés de très belles choses ! 

Fermons bien plutôt volontairement les yeux sur les petits 
défauts de MithridaUj et laissons-nous prendre tout entiers aux 
grandes beautés de cette tragédie. Admirons les beautés cor- 
néhennes du principal rôle, qui ont fait de cette pièce la pièce 
préférée de quelques gens qui, sans doute, s'y connaissaient en 
grandeur, car on les nomme Louis le Grand, Catherine la Grande 
et le grand Empereur ; mais admirons plus encore peut-être 
les beautés exclusivement raciniennes de ce rôle, délicieux et 
difficile entre tous à jouer, de Monime, fleur charmante de 'la 
Grèce, qui languit et pâlit sous le ciel briuneux de la Tauride. 

De moi, je n'hésite point à dire que ce personnage du second 
plan suffirait seul pour assurer à la tragédie de Mithridate l'im- 
mortalité: car Monime, avec sa résignation mélancoUque, sa 



INTRODUCTION 



Iv 



grâce chaste, sa sensibilité délicate, sa fière pudeur, son senti- 
ment profond du devoir et sa fermeté modeste, dans laquelle 
on sent ime résolution aussi inébranlable que celle des plus 
véhémentes héroïnes de Corneille, Monime est peut-être la 
plus adorable, la plus exquise, la plus harmonieuse des prin- 
cesses de notre .divin Racine; et, pour symboliser son génie, 
c'est elle que je demanderais au statuaire de sculpter dans la 
blanche pureté d'un marbre hellénique. 



MITHRIDATE 

TRAGÉDIE EN CINQ ACTES 

1673 



Seinac/i, nfler an anoient Jnedallian 

MlIHRIDATEa ËUPATOB, SbVBNTU KiNO 
OF POMIUB 



PREFACE* 

Il n'y a guère de nom plus connu que celui de Mithri- 
date. Sa vie et sa mort font une partie considérable 
de rhistoire romaine. Et sans compter les victoires 
qu'il a remportées, on peut dire que ses seules défaites 
ont fait presque toute la gloire de trois des plus grands 5 
capitaines de la république : c'est à savoir, de Sylla, de 
Lucullus, et de Pompée. • Ainsi je ne pense pas qu'il 
soit besoin de citer ici mes auteurs. Car, excepté quel- 
que événement que j'ai un peu rapproché par le droit 
que donne la poésie, tout le monde reconnaîtra aisé- lo 
ment que j'ai suivi l'histoire avec beaucoup de fidélité. 
En effet, il n'y a guère d'actions éclatantes dans la vie de 
Mithridate qui n'aient trouvé place dans ma tragédie. 
J'y ai inséré tout ce qui pouvait mettre en jour les 
mœurs et les sentiments de ce prince, je veux dire sa 15 
haine violente contre les Romains, son grand courage, sa 
finesse, sa dissimulation, et enfin cette jalousie qui lui 

I . The Mithridate of the play is Mithridates (or Mithradates) 
seventh king of Pontus, sumamed Eupator, ** bom of a noble sire." 
He reignedfrom 120 to 60 b.c. Cicero, in his Academica II y 1, 
calls Mithridates the greatest king since Alexander. 
6. c'est à savoir : old expression for à savoir. 

10. que donne la poésie : for instance, Monime and Xiphares, 
according to history, died earlier than Mithridates. 

17. sa dissimulation : Bernardin remarks : '' Ainsi, c'est 
bien à dessein . . . que Racine met dans sa bouche ces paroles 
perfides qui abusent la fière et loyale Monime." 

* Many of the notes to the Préface présuppose the reading of the play. 

3 



4 PRÉFACE 

était si naturelle, et qui a tant de fois coûté la vie à ses 
maîtresses. La seule chose qui pourrait n'être pas 

20 aussi connue que le reste, c'est le dessein que je lui fais 
prendre de passer dans Pltalie. Comme ce dessein 
m'a fourni une des scènes qui ont le plus réussi dans ma 
tragédie, je crois que le plaisir du lecteur pourra re- 
doubler, quand il verra que presque tous les historiens 

25 ont dit ce que je fais dire ici à Mithridate. 

Florus, Plutarque et Dion Cassius nomment les pays 
par où il devait passer. Appien d'Alexandrie entre 
plus dans le détail. Et après avoir marqué les faciUtés 
et les secours que Mithridate espérait trouver dans sa 

30 marche, il ajoute que ce projet fut le prétexte dont 
Phamace se servit pour faire révolter toute l'armée, 
et que les soldats, effrayés de l'entreprise de son père, 
la regardèrent comme le désespoir d'un prince qui ne 
cherchait qu'à périr avec éclat. 

20. je lui fais prendre : See note on Une 726 of the play. 

25. je fais dire à Mithridate : same construction as in Une 20. 

26. Florus Uved in the second century, a.d., and was the 
author of a résumé of Roman history ; Plutarch, a Greek his- 
torian and moralist, Uved from about 45 to 125 a.d., and is the 
author of a celebrated séries of Lives ; Dion Cassius, bom at 
Nicœa in Bithyuia about 155 a.d., wrote in Greek a Roman 
History of great value ; Appian of Alexandria also Uved in the 
second century and wrote a Roman History in which he grouped 
facts according to nations. 

28. les facilités : Note how much nearer to its derivative 
meaning this word was than it now is. Apparently th*e only 
single-word rendering into English is the rarely used facilitations. 
It is better, probably, to render the whole phrase somewhat as 
foUows : After having indicaied the things which Miihridates 
hoped wovld facilitate or even aid his expédition, . . . 



PRÉFACE 5 

Ainsi elle fut en partie cause de sa mort, qui est 35 
l'action de ma tragédie. J'ai encore lié ce dessein de 
plus ptèa à mon sujet. Je m'en suis servi pour faire 
connaître à Mithridate les secrets sentiments de ses 
deux fils. On ne peut prendre trop de précaution 
pour ne rien mettre sur le théâtre qui ne soit très 40 
nécessaire. Et les plus belles scènes sont en danger 
d'ennuyer, du moment qu'on les peut séparer de 
l'action, et qu'elles l'interrompent au lieu de la conduire 
vers sa fin. 

Voici la réflexion que fait Dion Cassius sur ce dessein 45 
de Mithridate: «Cet honmie était véritablement né 
pour entreprendre de grandes choses. Comme il avait 
souvent éprouvé la bonne et la mauvaise fortune, il 
ne croyait rien au-dessus de ses espérances et de son 
audace, et mesiu'ait ses desseins bien plus à la grandeur 60 
de son courage qu'au mauvais état de ses affaires; 
bien résolu, si son entreprise ne réussissait point, de 
faire une fin, digne d'un grand roi, et de s'ensevelir 
lui-même sous les ruines de son empire, plutôt que de 
vivre dans l'obscurité et dans la bassesse. » 65 

J'ai choisi Monime entre les femmes que Mithri- 
date a aimées. Il paratt que c'est celle de toutes qui 
a été la plus vertueuse, et qu'il a aimée le plus tendre- 

35. gui est Taction de ma tragédie : We make référence, m 
due course, to this remark. Radne is hère arguing for the con- 
formity of his play to the " unity of action." 

37. pour faire connaitre k Mithridate : same construction as 
lines 20 and 25. 

44. The préface of the first édition ended hère. Bernardin 
thinks that Racine may hâve added the rest in response to certain 
criticisms as to his fideUty to history. 



6 PRÉFACE 

ment. Plutarque semble avoir pris plaisir à décrire 

60 le malheur et les sentiments de cette princesse. C'est 
lui qui m'a donné Tidée de Monime ; et c'est erf partie 
sur la peinture qu'il en a faite que j 'ai fondé un caractère 
que je puis dire qui n'a point déplu. Le lecteur trou- 
vera bon que je rapporte ses paroles telles qu'Amiot 

65 les a traduites. Car elles ont une grâce dans le vieux 
style de ce traducteur, que je ne crois point pouvoir 
égaler dans notre langue moderne : 

«Cette-cy estoit fort renommée entre les Grecs, 
pour ce que quelques sollicitations que luy sceust faire 

70 le Roy en estant amoureux, jamais ne voulut entendre 
à toutes ses poursuites jusqu'à ce qu'il y eust accord 
de mariage passé entre eux, et qu'il luy eust envoyé 
le diadème ou bandeau royal, et appellée royne. La 
pauvre dame, depuis que ce roy l'eust espousée, avoit 

75 vécu en grande déplaisance, ne faisant continuellement 
autre chose que de plorer la malheureuse beauté de 
son corps, laquelle, au lieu d'un mary, luy avoit donné 
un maistre, et au lieu de compagnie conjugale, et que 
doit avoir une dame d'honneur, luy avoit baillé une 

80 garde et garnison d'hommes barbares, qui la tenoient 
comme prisonnière loin du doux païs de la Grèce, en 

63. que je puis dire qui n'a point déplu : The construction is 
. odd, but quite clear. Racine's claim for himself is very safely 
modest. Monime is now famous as one of the most exquisite of 
dramatic créations. 

68-g4. The student will find little diflSculty in the old orthog- 
raphy. One of the best principles to foUow is the simple : When 
in doubt, pronounce. We give a few helps on modem spellings, 
forms, and meanings : 68, cette-cy, ceUe-d; 69, sceust, sût; 73, 
rojrne, reine; 76, plorer, pleurer; 80, baillé, donné; 81, pals, paya; 



PRÉFACE 7 

lieu où elle n'avoit qu'un songe et une ombre de biens ; 
et au contraire avoit réellement perdu les véritables, 
dont elle jouissoit au pais de sa naissance. Et quand 
Bachilides fut arrivé devers elle, et luy eut fait com-85 
mandement de par le Roy qu'elle eust à mourir, adonc 
elle s'arracha d'alentour de la teste son bandeau royal ; 
et se le nouant alentour du col, s'en pendit. Mais le 
bandeau ne fut pas assez fort, et se rompit inconti- 
' nent. Et lors elle se prit à dire : « maudit et mal- 90 
« heureux tissu, ne mfe serviras-tu point au moins à 
« ce triste service ? » En disant ces paroles, elle le 
jetta contre terre, crachant dessus, et tendit la gorge à 
Bachilides.)) 

Xipharès était fils de Mithridate et d'une de ses 95 
femmes qui se nommait Stratonice. Elle livra aux 
Romains une place de grande importance, où étaient 
les trésors de Mithridate, pour mettre son fils Xipharès 
dans les bonnes grâces de Pompée. Il y a des historiens 
qui prétendent que Mithridate fit mourir ce jeune loo 
prince, pour se venger de la perfidie de sa mère. 

Je ne dis rien de Pharnace. Car qui ne sait pas que 
ce fut lui qui souleva contre "Mithridate ce qui lui 
restait de troupes, et qui força ce prince à se vouloir 

86, adonc, donc (alors) ; 89, incontinent, aussUôt. The author 
quoted is Jacques Amyot (1513-1593), translater of Plutarch 
and other ancient writers, called "one of the creators of the 
beautiful language of the sixteenth century." 

103. ce qui lui restait de troupes is also the French of today, 
and the construction is therefore specially worth noting. 

104. vouloir : At varions points in the notes, the meanings of 
vouloir will be treated. Hère it means to try. What would be 
the place of se in the sentence as written by a modem author? 



8 PRÉFACE 

• 

105 empoisonner, et à se passer son épée au travers du 

corps pour ne pas tomber entre les mains de ses ennemis ? 

C'est ce même Pharnace qui fut vaincu depuis par Jules 

César, et qui fut tué ensuite dans une autre bataille. 

io6. pour ne pas tomber : Note the place of the négative, as 
in the usage of our own day also. 
107. par Jules César : See 1691, n. 



MITHRIDATE 



ACTEURS 

MiTHRiDATE, Foi de Pont et de quantité d'autres royaumes 

MoNiME, accordée ^ avec Mithridate, et déjà déclarée reine 

Pharnace, 1 

^ ^ f fils de Mithridate, mais de différentes mères 

X1PHARES3 J 

Arbate, confident de Mithridate, et gouverneur de la place de 
Nymphée 

PHiBDiME, confidente de Monime 

Arcas, domestique de Mithridate 

Gardes* 

La scène est à Nymphée* port de mer sur le Bosphore Cimmérien, 

dans la Taurique Chersonèse.* 



^ accordée avec : affianced to. 

' Gardes : The text also implies the présence of attendants of 
Monime in some of the scènes. 

• Nymphée : in the Chersonesus, between Theodosia and Pan- 
ticapseum. According to Dion Cassius, it was in Panticapseum 
that Mithridates died. 

* Taurique Chersonèse : The modem order would be the re- 
verse. The location is the Crimea of our day, and the Cimmerian 
Bosporus is the Strait of Kertch or Yenikale. See the map. 

10 



ACTE PREMIER 

SCÈNE I 

XIPHARÊS, ARBATE 

XlPHABÈS 

On nous faisait, Arbate, un fidèle rapport : 

Rome en effet triomphe, et Mithridate est mort. 

Les Romains, vers TEuphraté, ont attaqué mon père. 

Et trompé dans la nuit sa prudence ordinaire. 

Après un long combat, tout son camp dispersé 

Dans la foule des morts, en fuyant, Ta laissé; 

Et j'ai su qu'un soldat dans les mains de Pompée 

Avec son diadème a remis son épée. 

Ainsi ce roi, qui seul a durant quarante ans 

2. en effet : None of the customary translations wiU fit the 
situation. Use : in tnUh, or in very trtUh. 

3. vers : près de, 

4. ordinaire : customary. 

5. camp hère means army. 

6. dans . . . laissé : fled and left him, etc. Note that 00- 
ordinates with and are good in Eo^Ush and likely to be bad in 
French. How does one say : He came and told me thatf 

7. su : leamed, Not so, in modem French, except for the 
past definite of savoir. Cf. Nous sûmes que vous y étiez. 

8. remis : remettre is the regular modem prose word for hand 
over or deliver. 

9. Historical accuracy would subtract ten years from Racine^s 
forty^ but Racine had good contemporary authority. 

11 



12 MITHRIDATB 

10 Lassé tout ce que Rome eut de chefs importants^ 
Et qui dans TOrient balançant la fortune, 
Vengeait de tous lés rois la querelle commune, 
Meurt, et laisse après lui, pour venger son trépas, 
Deux fils infortunés qui ne s'accordent pas. 

Arbatb 

15 Vous, Seigneur ! Quoi? l'ardeur de régner en «a place 
Rend déjà Xipharès ennemi de Pharnace? 

XlPHARÈS 

Non, je ne prétends point, cher Arbate, à ce prix 
D'un malheureux empire acheter le débris. 

10. Note the separableness of de. Cf. II n'a rien dit d'intéres- 
sant. Lanson mentions Oppius, Claudius, Valerius Flaccus, 
FJmbria, Sylla, Lucullus, ai^d Pompey as among those whom 
Mithridates had defeated. 

12. It is important that the reader of French verse be always 
ready for the transfer of a prepositional phrase. Those with de 
are often deceptive. 

14. s'accordent: The translator mnst be as ready with the 
reciprocal phrase each other, one another^ as with the reflexive 
Ûiemselves. Note also that, in translating into French, Vun 
Vautre, etc., are rarely necessary. 

15. Seigneur : Your Highness or Prince. Discrétion must be 
exercised in the translation of Seigneur, and Madame. — en will 
often be found in seventeenth century French where modem 
usage would call for à or dans. 

17. It is well never to use the word prétend for prétendre^ 
Claim, intend are often good ; the former generally for modem 
prose, the latter generally for verse. — prix : A versatile word, 
rarely to be translated as literally as price. Prize, premiumy 
reward are some of its meanings. Bernardin gives as his interpré- 
tation au prix d'une rivaliié fratricide, which makes easier a literal 



ACTE I, SCÈNE I 13 

Je sais en lui des ans respecter l'avantage ; 

Et content des Etats marqués pour mon partage, 20 

Je verrai sans regret tomber entre ses mains 

Tout ce que lui promet l'amitié des Romains. 

Arbate 

L'amitié des Romains ! Le fils de Mithridate, 
Seigneur ! Est-il bien vrai? 

XlPHARÈS 

N'en doute point, Arbate. 
Phamace, dès longtemps tout Romain dans le cœur, 25 
Attend tout maintenant de Rome et du vainqueur. 

translation of prix. lines 17-18 give good opportunity for re- 
phrasîng. Certainly the débris of an unfartunate empire is undesir- 
able. Empire means svxiyj power^ as often as empire, 

19. Phamaces is about thirty years old; Xipharès younger. 
In this and the foregoing lines, note the transfer of the de phrase. 

20. content : The French editor cails spécial attention to the 
fact that this means conterUed; conversely, the English reader 
must note that content generally means glad, happy. Content de 
hère is équivalent to the modem rhe contentant de; and mon par- 
tage would now be m>a part^ that is, my share. 

22. que : Often lines are deceptive for those who fail to take que 
as an accusative. The inversion is in accord with the gênerai 
principle of construction of the French sentence : the longer mem- 
ber last. In other wonds, this inversion is not because of poetic 
style, but is the customary prose construction. Cf. Dites-moi 
ce qu'en pense votre ami. 

23-24. It is worth noting that thèse exclamations tell us more 
about the situation than we might gain from several lines of nar- 
rative or argument. 

25-26. The appearance of tout in différent sensés has been 
criticized. Has great expectations might be a good rendering of 
attend tout. 



14 MITHRIDATE 

Et moi, plus que jamais à mon père fidèle, 
Je consenre aux Romains une haine ûnmortelle. 
Cependant et ma haine et ses prétentions 
30 Sont les moindres sujets de nos divisions. 

Arbatb 
Et quel autre intérêt contre lui vous anime? 

XlPHARÈS 

Je m'en vais t'étonner. Cette belle Monime, 

Qui du Roi notre père attira tous les vœux, 

Dont Phamace, après lui, se déclare amoureux . . . 

Arbate 
35 Hé bien. Seigneur? 

XlPHARÈS 

Je l'aime, et ne veux plus m'en taire, 
Puisqu'enfin pour rival je n'ai plus que mon frère. 

31. intérêt: raison, cause, toute chose touchant à la personne 
de , , . 

32. je m'en vais t' étonner : s'en aller, as an auxiliary, has no 
appréciable significance beyond aller. Some critics hâve said 
that oUer would be préférable hère. 

33. qui . . . vœux : vœux is one of sevéral words (^ke jours, 
courage) which the reader of French verse needs to " standardize " 
in his mind. It means frayer {s), désire, affection, love. Note the 
transfer of the de phrase. 

34* après lui : This " filler " of the line offers a good problem 
of rendering into English. 

35. m^en taire : préserve silence as to it. 

36. plus que : note that ne serves as first half of both of thèse 
négatives. One can easily be deceived into trying to make plus 
que mean more than. 



ACTE I, SCÈNE I 16 

Tu ne t'attendais pas sans doute à ce discours ; 

Mais ce n'est point, Arbate, un secret de deux jours. 

Cet amour s'est longtemps accru dans le silence. 

Que n'en puis-je à tes yeux marquer la violence, 40 

Et mes premiers soupirs, et mes derniers ennuis? 

Mais en l'état funeste où nous sommes réduits, 

Ce n'est guère le temps d'occuper ma mémoire 

A rappeler le cours d'une amoureuse histoire. 

Qu'il te suffise donc, pour me justifier, * 45 

Que je vis, que j'aimai la Reine le premier; 

Que mon père ignorait jusqu'au nom de Monime, 

Quand je conçus pour elle un amour légitime. 

37. sans dottte : A literal rendering of this phrase is nearly 
always undesirable. It bas two meanings : (1) certainlj/ ; 
(2) prohably. One should choose from thèse iûstead of using 
the literal but equivocal without dovbt or dovbtless, 

40. qtte ... : an exclamatory question ; also a good prob- 
lem of rendering (including line 41), probably in affirmative 
form. 

41. ennuis: tourment, souffrance, affliction. Thewordisnow 
much milder in significance than in 1675. 

42. In prose en may not be used when there is a definite 
article. — où : a clear-cut spécimen of this adverb-pronoun as 
the datîvç of the relative. 

45. The French language, generally more careful than the 
English, has its own very few flagrant carelessnesses. One of 
them concems the relation of infinitive (including participial) 
clauses to the subject or object of the sentence. In line 45 it is 
obvions that *' Let it suffice you, to justify me, that I saw . . " 
is not the meaning, if we hold to English principles of expression. 
In a word, the reader of French chooses his own subject for the 
clause. Occasionally a French sentence of this kind is actually 
obscure. In line 45 there is no obscurity, only a good oppor- 
timity to be careful as to English phraseology. 



16 MITHRIPATE 

Il la vit. Mais au lieu d^offrir à ses beautés 
60 Un hymen, et des vœux dignes d'être écoutés, 

Il crut que, sans prétendre une plus haute gloire, 

Ellç lui céderait une indigne victoire. 

Tu sais par quels efforts il tenta sa vertu. 

Et que lassé d'avoir vainement combattu, 
65 Absent, mais toujours plein de son amour extrême. 

Il lui fit par tes mains porter son diadème. 

Juge de mes douleurs, quand des bruits trop certains 

M'annoncèrent du Roi l'amour et les desseins ; 

49-56. Xiphares does not follow the adage de mortuis nil 
nisi bonum, but the record of Mithridates was perhaps too well 
known t(\ make considerate treatment necessary. At any rate, 
the French commentators remark that the court of Louis XIV 
had no occasion to be shocked. 

50. Note the necessity of re-phrasing. See note on line 33. 
V0W8 worthy to he listened to would be a group of parallel words, 
not a translation. 

51. There is opportunity hère to note the force of the past 
defînite, but the observation of the point is not so essentîal hère 
as in many other connections. — The student should regard as a 
curiosity this usage of prétendre with a direct object. Prétendre 
à was gênerai, even in Racine's time. Avoiding literalness and 
direct paraphrase, we may translate : he thought that she might 
renounce cdl claim to hecome hia gueen and consent to beœme his 
companion. — See note on Une 45. English usage will not permit 
the placing of the subject after the infinitive phrase. 

53. il . . . vertu : he tried to make her yield to htm. — History, 
or legend, has it that he actually tried to buy Monime as a slave. 

54. que ... : The change of construction is old-fashioned 
diction. 

55. extrême : Literalness is undesirable, especially as the 
' Word is, for French readers, somewhat manneristic. Use great. 

In other cases, after the Latin dérivation, tUmost may serve. 
58. Again the transfer of the de phrase. 



ACTE I, SCÈNE I 17 

Quand je sus qu'à son lit Monime réservée 

Avait pris, avec toi, le chemin de Nymphée ! eo 

Hélas ! ce fut encor dans ce temps odieux 
Qu'aux offres des Romains ma mère ouvrit les yeux ; 
Ou pour venger sa foi par cet hjrmen trompée, 
Ou ménageant pour moi la faveur de Pompée, * 

Elle trahit mon père, et rendit aux Romains 65 

La place et les trésors confiés en ses mains. 
Quel devins-je au récit du crime de ma mère ! 
Je ne regardai plus mon rival dans mon père ; 
J'oubliai mon amour par le sien traversé : 
Je n'eus devant les yeux que mon père offensé. 70 

J'attaquai les Romains ; et ma mère éperdue 
Me vit, en reprenant cette place rendue, 

59. See note on Une 7. Hère we hâve the modem French 
usage, by which je sus means exclusively- / leamedy Ifound ovt, — 
à . . . réservée : as his affianced bride; a seventeenth century 
mannerîsm met nowadays, in English, only in légal phraseology. 

60. de means tOj not only hère, but in modem prose usage, 
with chemin, voyage,^etc. 

62. ouvrit les yeux : aUowed hersdf to be influenced. 

63. That is, Stratonice was arbitrarîly divorced by Mithri- 
dates. 

63-64. As to versification, the fact that moi of ^64 rhymes 
with foi of 63 is, from the French standpoint, a fault. 

66. place: place forte; en is old-fashioned for d. 

67. quel is an interesting Latinism, and makes a good problem 
of re-phrasing. Note that an exclamatory positive in French is 
very often to be made an exclamatory négative in EngUsh. See 
40, n. 

70. mon père ojffensé : V offense faite à mon père. 

72. rendue : Lanson calls attention to Racine's skill in the 
use of adjectives, which often makes them equal in force to whole 
sentences. He cites Unes 5, 28, 48, 77, 86, 126. 



18 MITHRIDATB 

A mille coups mortels contre eux me dévouer, 
Et chercher, en mourant, à la désavouer. 

75 L'Euxin, depuis ce temps, fut libre, et Test encore ; 
Et des rives de Pont aux rives du Bosphore, 
Tout reconnut mon père, et ses heureux vaisseaux 
N'eurent plus d'ennemis que les vents et les eaux. 
Je voulais faire plus. Je prétendais, Arbate, 

80 Moi-même à son secours m'avancer vers TEuphrate. 
Je fus soudain frappé du bruit de son trépas. 
Au milieu de mes pleurs, je ne le cèle pas, 
Monime, qu'en tes mains mon \)ère avait laissée, 
Avec tous ses attraits revint en ma pensée. 

86 Que dis-je? en ce malheur je tremblai pour ses jours ; 
Je redoutai du Roi les cruelles amours. 

73. A literal parallel is worthless as a rendering. A French 
commentator remarks that m^exposer would be more exact but 
less expressive than me dévouer. 

74. la : Stratonice. 

75. fut : Observe the excellent example of past definite usage, 
which, this time, one may recognize by translating pecame, giving 
depuis the force of dès. 

77. Retaining the force of the past definite, translate : my 
father's sway hecame universally reœgnized . . . 

78. n'et^ent plus d'ennemis que may be rendered ceased to 
hâve any other enemies than . . . This " rendering by reversai " 
is again commented on at Une 374. In Une 78 mère grammat- 
ical requirements reverse one of the négatives in English. 

79. Note the transition to the imperfect, and the retum to 
the past definite in Une 81. 

85. que dis-je? The student may well adopt nay^ moref 
as the staple rendering of this locution. — joiu's : a regular word 
for vie in French verse. 

86. Can the English be quite forceful without re-phrasing 
this Une, and adding, perhaps, the possible resvlt of, or its equiv- 



ACTE I, SCÈNE I 19 

Tu sais combien de fois ses jalouses tendresses 

Ont pris soin d'assurer la mort de ses maîtresses. 

Je volai vers Nymphée ; et mes tristes regards 

Rencontrèrent Pharnace au pied de ses remparts. 90 

J'en conçus, je l'avoue, un présage funeste. 

Tu nous reçus tous deux, et tu sais tout le reste. 

Pharnace, en ses desseins toujours impétueux, 

Ne dissimula point ses vœux présomptueux. 

De mon père à la Reine il conta la disgrâce, 95 

L'assura de sa mort, et s'offrit en sa place. 

Comme il le dit, Arbate, il veut l'exécuter. 

aient? Lanson suggests for cruelles amours : la cruelle façon 
d^aimer, Ja cruauté que le rai portait dans ses amours. 

87. ses jalouses tendresses : The fîrst good spécimen, in 
this play, of the commonest conventional metonymy of French 
classic verse. One may deal mechanically with it thns : hsj 
hecause of his jealous fondness, and then re-phrase into acceptable 
style. The principle of translation is : Use a personal subject 
and a fitting prepositional phrase. Dramatically, this allusion 
prépares for an important incident of Act 5. 

89. Following out the principle mentioned in note on Une 87, 
one says, mechanically : /, luith sad looks, heheld ... ; then, re-. 
phrasing, Iioas saddened hy the sight of Phamaces ... or Ifound, 
to my sorrow, Phamaces . . . 

90. A good problem of re-phrasing. 

94. ne dissimula point : mode no secret of . . vœux : we 

see how true it is that this noun may embody any one of several 
meanings of the verb vouloir ; hère, plan, intention. Observe the 
plural, though the English is singular. Vœu (singular) means vow 
or pledge. 

95. disgrâce : catastrophe. Labbé interprets mortf and makes 
référence to Une 295. The Uteral English is rarely apt in tragedy, 
and not very often in prose. 

97. le bas no spécifie antécédent, but refers in gênerai to the 
plans of Phamaces. 



20 MITHRIDATE 

Mais enfin, à mon tour, je prétends éclater. 

Autant que mon amour respecta la puissance 
100 D'im père, à qui je fus dévoué dès Tenfance, 

Autant ce même amour, maintenant révolté, 

De ce nouveau rival brave l'autorité. 

Ou Monime, à ma flamme elle-même contraire, 

Condamnera l'aveu que je prétends lui faire ; 
105 Ou bien, quelques malheurs qu'il en puisse avenir, 

Ce n'est que par ma mort qu'on la peut obtenir. 
Voilà tous les secrets que je voulais t'apprendre. 

C'est à toi de choisir quel parti tu dois prendre. 

Qui des deux te parait plus digne de ta foi, 
110 L'esclave des Romains, ou le fils de ton roi. 

Fier de leur amitié, Pharnace croit peut-être 

Commander dans Nymphée, et me parler en maître. 

Mais ici mon pouvoir ne connaît point le sien : 

98. éclater : make known what haa thua far been concealed; 
literally, to hurst, burstforth. 

99-102. Autant que . . . autant ... : As . . , so now . . . 

100. Xiphares still kept his admiration for the heroic qualities 
bf Mithridates, notwithstanding faults which were only too 
obvious. 

103-105. Note that bien often intensifies a word or phrase, but 
sometimes îb represented in English by an intonation rather than 
a word. One may regularly avoid saying indeed for bien unless 
the sensé clearly demands it. Cf. Il le fera bien pour vous .... 
il se peut bien que votre ami l'ait dit. 

105. avenir : advenir, . 

109. foi : aUegiance, 

iio. Excellent as an argument and as a dramatic Une. 

112. en midtre : the regular prose construction, at variance 
with the English. As to dans NymphéCy see Une 836, n. 

113. BiU hère my power dœs not reœgnize his, first mechanically 



ACTE I, SCÈNE I 21 

Le Pont est son partage, et Colchos est le mien ; 

Et l'on sait que toujours la Çolchide et ses princes 115 

Ont compté ce Bosphore au rang de leurs provinces. 

ÀRBATE 

Commandez-moi, Seigneur. Si j'ai quelque pouvoir, 

Mon choix est déjà fait, je ferai mon devoir. 

Avec le même zèle, avec la même audace 

Que je servais le père et gardais cette place 120 

Et contre votre frère, et même contre vous, 

Après la mort du Roi, je vous sers contre tous. 

Sans vous, ne sais-je pas que ma mort assurée, 

De Phamace en ces Ueux allait suivre l'entrée? 

Sais-je pas que mon sang, par ses mains répandu, 125 

Eût souillé ce rempart contre lui défendu? 

re-phrased (/,. in my potoeTf do not at aU recognize his pawer), be- 
comes : BiU I am rvler hère, and dedine to recognize his atUhority 
in any respect. 

114. Colchos : Racine is apparently inaccurate, but merely 
repeats the inaccuracy of earlier writers. There never was )& 
région or state named Colchos. Çolchide is Colchis. As to pro- 
nunciation, Çolchide is regular, with soft ch, Colchos irregular, 
with hard ch (that is, kol-koss) . 

116. le Bosphore is really a strait ; but Racine makes it mean 
a région. 

120. que : avec lesqiiels ; a common usage in Racine's time. 
— place is not place. Cf. line 66. 

123. sans : The translater who regularly says mthmU for 
sans is on a par with the one who regularly says alivays for 
toujours. 

124. Transfer of de phrase. 

125. The omission of ne is an unimportant curiosity of style, 
but hère, a neat touch of vividness. 



22 MITHRIDATE 

< Assurez-vous du cœur et du choix de la Reine. 
^ Du reste, ou mon crédit n'est plus qu'une ombre vaine, 
Ou Pharhace, laissant le Bosphore en vos mains, 
130 Ira jouir ailleurs des bontés des Romains. 

XlPHARÈS 

Que ne devrai-je point à cette ardeur extrême ! 

Mais on vient. Cours, ami : c'est Monime elle-même. 

SCENE II 

MONIME, XlPHARÈS 

Monime 

Seigneur, je viens à vous. Car enfin aujourd'hui. 
Si vous m'abandonnez, quel sera mon appui? 
135 Sans parents, sans amis, désolée et craintive. 
Reine longtemps de nom, mais en effet captive, 
Et veuve maintenant sans avoir eu d'époux, 
Seigneur, de mes malheurs ce sont là les plus doux. 
Je tremble à vous nommer l'ennemi qui m'opprime, 

127. la Reine : Monime. 

123. du reste : Labbé explains as follows : Que Xipharès 
s'assure de Tamour de Monime ; Arbate fait soû affaire du reste, 
c'est-à-dire de la garde du Bosphore et de la place de Nymphée. 
It is to be observed that plus que is not the équivalent of more 
tkan. 

130. There is a dash of comedy in the gruff irony of Arbates. 

131. See, as to exclamation, 67, n. 

134. quel is richer than qui ; but still who. 
136. en effet : en realité. See also 2, n. 
139. à vous nommer : Observe that this is not de vous nommer, 
which would mean / am, afraid to name to you ; but is practically 



ACTE I, SCÈNE II 23 

J'espère toutefois qu'un cœur si magnanime * 140 

Ne sacrifiera point les pleurs des malheureux 

Aux intérêts du sang qui vous unit tous deux. 

Vous devez à ces mots reconnaître Phamace. 

C'est lui, Seigneur, c'est lui dont la coupable audace 

Veut, la force à la main, m'attacher à son sort 145 

Par un hymen pour moi plus cruel que la mort. 

Sous quel astre ennemi faut-il que je sois née? 

Au joug d'im autre hymen sans amour destinée, 

A peine je suis libre et goûte quelque paix. 

Qu'il faut que je me livre à tout ce que je hais. 150 

Peut-être je devrais, plus humble en ma misère. 

Me souvenir du moins que je parle à son frère. 

Mais, soit raison, destin, soit que ma haine en lui 

Confonde les Romains dont il cherche l'appui, 

Jamais hymen, formé sous le plus noir auspice, 155 

De l'hymen que je crains n'égala le supplice. 

Et si Monime en pleurs ne vous peut émouvoir. 

Si je n'ai plus pour mdi que mon seul désespoir, 

identical with the English at naming to you, Lanson speaks of it 
as less " heavy " than en vous nommant. 

148. sans amour : Uwdess. 

149-1 5 1 . In prose today à peine and peut-être, at the beginning 
of the sentence, would necessitate interrogative order, — suis-je 
and devraiS'je. 

150. qu' : when. Tout ce que je hais is a simple problem in 
re-phrasing. Lanson paraphrases : ce qy/e je hais le plus au 
monde. 

I53~i54- Racine is hère strikingly cogent in language and 
idea. The English rendering will require more words. 

156. For the last time, attention is called to the tranafer of 
the de phrase. Even the novice will now be familiar with this 
oft-used device of French verse style. 



24 MITHRIDATE 

Au pied du même autel où je suis attendue, 
160 Seigneur, vous me verrez, à moi-même rendue, 
Percer ce triste cœur qu'on yeut tyranniser. 
Et dont jamais encor je n'ai pu disposer. 

XlPHARÈS 

Madame, assurez-vous de mon obéissance ; 
Vous avez dans ces lieux une entière puissance. 
i65Phamace ira, s'il veut, se faire craindre ailleurs. 
Mais vous ne savez pas encor tous vos malheurs. 

MONIME 

Hé ! quel nouveau malheur peut affliger Monime, 
Seigneur? 

XlPHARÈS 

Si vous aimer c'est faire im si grand crime, 
Phamace n'en est pas seul coupable aujourd'hui ; 
170 Et je suis mille fois plus criminel que lui. 

Monime 
Vous ! 

XlPHARÈS 

Mettez ce malheur au rang des plus f unesjbes ; 
Attestez, s'il le faut, les puissances célestes 

i6o. rendue : surrendered ; but re-phrasing is of course 
necessary. 

163. Madame : Princess, — assurez-vous : soyez assurée, 
165. Xiphares talks after the manner of Arbates in line 130. 

171. The vous of Monime is a fine dramatic stroke of Racine 
and is a problem for the actress. She must show her joy to the 
spectator, yet conceal it f rom Xiphares. — mettez au rang de : 
count among. 

172. attestez : prenez à témoin. 



ACTE I, SCÈNE II 



25 



Contre un sang malheureux, né pour vous tourmenter, 

Père, enfants animés à vous persécuter. 

Mais avec quelque ennui que vous puissiez apprendre 175 

Cet amour criminel qui vient de vous surprendre. 

Jamais tous vos malheurs ne sauraient approcher 

Des maux que j'ai sou&erts en le voulant cacher. 

Ne croyez point pourtant que, semblable à Pharnace, 

Je vous serve aujourd'hui pour me mettre en sa place, iso 

Vous vqulez être à vous, j'en ai donné ma foi. 

Et vous ne dépendrez ni de lui ni de moi. 

Mais, quand je vous aurai pleinement satisfaite, 

En quels lieux avez-vous éhoisi votre retraite? 

Sera-ce loin. Madame, ou près de mes États? 185 

Me sera-t-il permis d'y conduire vos pas? 

Verrez-vous d'un même œil le crime et l'innocence? 

En fuyant mon rival, fuirez-vous ma présence? 

Pour prix d'avoir si bien secondé vos souhaits, 

Faudra-t-il me résoudre à ne vous voir jamais? 190 

MONIMB 

Ah! que m'apprenez-vous? 



173. tourmenter : donner la torture. Sang sometimes means 
sorij sometimes racej sometimes rdationahip, as well as other 
similar words. 

175. ennui : douLewr — an earlier meaning. Cf. 41, n. 

178. voulant : attempt to is one of the commonest meanings 
of vouloir, 

181. j'en ai donné ma foi : je Vax promis. 

187. But, as Labbé remarks, line 170 reads : Et je suis mille 
fois plus criminel que lui. A topic for class discussion : Is 
Xiphares inconsistent in Unes 170 and 187? 



26 MITHRIDATE 



XlPHARES 



Hé quoi ? belle Monime, 
Si le temps peut donner quelque droit légitime, 
Faut-il vous dire ici que le prèmier de tous 
Je vous vis, je formai le dessein d^être à vous, 

195 Quand vos charmes naissants, inconnus à mon père, 
N'avaieYit encor paru qu^aux yeux de votre mère? 
.Ah ! si par mon devoir forcé de vous quitter. 
Tout mon amour alors ne put pas éclater. 
Ne vous souvient-il plus, sans compter tout le reste, 

200 Combien je me plaignis de ce devoir funeste? 

Ne vous souvient-il plus, en quittant vos beaux yeux, 
Quelle vive douleur attendrit mes adieux? 
Je m'en souviens tout seul. Avouez-le, Madame, 
Je vous rappelle un songe effacé de votre âme. 

206 Tandis que loin de vous, sans espoir de retour, 
Je nourrissais encore un malheureux amour. 
Contente, et résolue à Thymen de mon père. 
Tous les malheurs du fils ne vous affligeaient guère. 

Monime 
Hélas! 

198. éclater : se manifester évidemment. 

,201. vos beaux yeux is a bit of the affected diction of the 
period of Louis XIV. This affectation (called préciosité) is 
satirized in Molière's Les Précieuses Ridicules and Les Femmes 
Savantes. It is not unlike the euphi^sm of the Elizabethan 
Age. Beaux yeux means f>eauty or beavMful woman. In the 
présent passage your heautijui self or you^ fait Princess, may be 
used. 

203. Monime seems to hâve turned away and to be giving no 
sign of interest in the avowal of Xiphares. 



ACTE I, SCÈNE II 27 

XlPHARÈS 

Avez-vous plaint un moment mes ennuis? 

MONIME 

Prince . . . n'abusez point de Tétat où je suis. 210 

XlPHARÈS 

En abuser, 6 ciel ! quand je cours vous défendre, 
Sans vous demander rien,, sans oser rien prétendre ; 
Que vous dirai-je enfin? lorsque je vous promets 
De vous mettre en état de ne me voir jamais ! 

MONIME 

C'est me promettre plus que vous ne sauriez faire. 215 

XlPHARÈS 

Quoi? malgré mes serments, vous croyez le contraire? 
Vous croyez qu'abusant dç mon autorité. 
Je prétends attenter à votre liberté? 

213. que vous dirai-je enfin? îs only a more intensive que 
dia-je? Cf. Une 85. 

215-222. Line 215 seems to hâve a bit of coquetry in it. At 
any rate, it provokes a storm. ThB covert yet clear avowal of 
lines 220-222 is charming, but not unique. In Racine's Phèdre j 
Act 2, Scène 3, Aricia says to Hippolytus : v 

J'accepte tous les dons que vous voulez me faire. 

Mais cet empire enfin si grand, si glorieux, 

N'est pas de vos présents le plus cher à mes yeux. 

As to translation of line 215, note that sentences beginning with 
c*e8t plus infinitive should be made personal ; thus : you are 
promising fne more than . . . 



28 MITHRIDATE 

On vient, Madame,, on vient. Expliquez-vous, de 

grâce. 
Un mot. 

MONIME 

220 Défendez-moi des fureurs de Pharnaee. 

Pour me faire. Seigneur, consentir à vous voir 
Vous n'aurez pas besoin d'un injuste pouvoir. 



Ah! Madame . . . 



XlPHARÈS 
MoNIME 

Seigneur, vous voyez votre frère. 



SCÈNE III 

MONIME, PHARNACE, XlPHARÈS 

Pharnace 

Jusques à quand. Madame, attendrez-vous moh père? 
226 Des témoins de sa mort viennent à tous moments 

Condamner votre doute et vos retardements. 

Venez, fuyez l'aspect de ce climat sauvage. 

Qui ne parle à vos yeux^que d'un triste esclavage. 

Un peuple obéissant vous attend à genoux, 
230 Sous im ciel plus heureux et plus digne de vous. 

Le Pont vous reconnaît dès longtemps pour sa reine : 

Vous en portez encor la marque souveraine ; 

Et ce bandeau royal fut mis sur votre front 

219. de grâce : I beg you, 
232. en : de reine. 



ACTE I, SCÈNE III 29 

Comme \m gage assuré de l'empire de Pont. 

Maître de cet État que mon père me laisse, 235 

Madame, c'est à moi d^accomplir sa promesse. 

Mais il faut, croyez-moi, sans attendre plus tard. 

Ainsi que notre hymen presser notre départ. 

Nos intérêts communs et mon cœur le demandent. 

Prêts à vous recevoir, mes vaisseaux vous attendent, 240 

Et du pied de Tautel vous y pouvez monter. 

Souveraine des mers qui vous doivent porter. 

MONIME 

Seigneur, taiit de bontés ont lieu de me confondre. 
Mais, puisque le temps presse,, et qu'il faut vous 

répondre, 
Puis-je, laissant la feinte et les déguisements, 245 

Vous découvrir ici mes secrets sentiments? 



Vous pouvez tout. 



Pharnacb 



MONIME 



Je crois que je vous suis connue. 
Êphèse est mon pays ; mais je suis descendue 
D'aïeux, ou rois. Seigneur, ou héros, qu'autrefois 
Leur vertu, chez les Grecs, mit au-dessus des rois. 26O 

Mithridate me vit. Êphèse, et l'Ionie, 
A son heureux empire était alors unie. 

243. ont lieu de : may wéll» 

247. The Unes 247-266 make a good memory sélection ; also, 
in quite différent style, Unes 831-842. 

250. vertu : qualities of heart and mind, not moral goodness. 



MITHRIDATB 



Ftom: La Comédie Françiiite. (-a Ldite 

Mlle Clairon (1724-1803) 
Reputed to bave beeo the beat iaterpretor of the r&le of Mouiine. 



ACTE I, SCÈNE III 31 

Il daigna m^envoyer ce gage de sa foi. 

Ce fut pour ma famille une suprême loi : 

Il fallut obéir. Esclave couronnée, 255 

Je partis pour l'hymen où j'étais destinée. 

Le Roi, qui m'attendait au sein de ses États, 

Vit emporter ailleurs ses desseins et ses pas. 

Et tandis que la guerre occupait son courage. 

M'envoya dans ces lieux éloignés de l'orage. 26O 

J'y vins : j'y suis encor. Mais cependant. Seigneur, 

Mon père paya cher ce dangereux honneur. 

Et les Romains vainqueurs, pour première victime. 

Prirent Philopœmen, le père de Monime. 

Sous ce titre funeste il se vit immoler ; 265 

Et c'est de quoi. Seigneur, j'ai voulu vous parler. 

Quelque juste fureur dont je sois animée. 

Je ne puis point à Rome opposer une armée ; 

Inutile témoin de tous ses attentats. 

Je n'ai pour ùie venger ni sceptre ni soldats ; 270 

Enfin, je n'ai qu'un coeur. Tout ce que je puis faire, 

256. où : only avquél would be possible in prose. 

258. emporter is reflexive (passive) in meaning ; but, in seven- 
teenth century usage, when dépendent on. a verb of causation or 
perception, the active form served. 

259. Just as ses heaiLx yeux means, in classic verse, the heautiJuL 
wornarij so son courage means the brave man ; or, indeed, one 
may say the woman and the man. In the présent instance, the 
pronoun him is nearly, if not quite, a sufficient translation. 

262. l'honneur de voir sa fiMe reine. 

264. History belies Racine as to Philopœmen. 

265. sous : à cause de. 

266. This line is in response to a gesture ôf impatience on the 
part of Pharnaces. 

269. inutile témoin : témoin impuissant. 



32 MITHRIDATE 

C'est de garder la foi que je dois à mon père, 

De ne point dans son sang aller tremper mes mains 

En épousant en vous Tallié des Romains. 

Pharnace 

275 Que parlez-vous de Rome et de son alliance? 
Pourquoi tout ce discom^ et cette déJËance? 
Qui vous dit qu'avec eux je prétends m'allier? 

MONIMB 

Mais vous-même, Seigneur, pouvez-vous le nier? 
Conament m'offririez-vous l'entrée et la couronne 
280 D'un pays que partout leur armée environne, 
Si le traité secret qui vous lie aux Romains 
Ne vous en assurait l'empire et les chemins? 

Pharnace 

De mes intentions je pourrais vous instruire, 
Et je sais les raisons que j'aurais à vous dire, 
285 Si, laissant en effet les vains déguisements. 
Vous m'aviez expliqué vos secrets sentiments. 
Mais enfin je commence, après tant de traverses, 

275. Note that que parlez-vous? does not mean what are 
you sayingf Cf. Une 40. 

276. One of the commonest mistakes made by EngUsh readers 
is to translate défiance as défiance, 

282. Note the omission of the second négation in the si clause. 
As to empire, see note on Une 17. Princess Monime argues ably. 
Labbé calls attention to the beautiful balance of the long sentence, 
and the symmetry of entrée and couronne with empire and chemins. 

287. traverses : tumings, torttumanesses, Said to be the only 
case of the use of the word, in this sensé, an3rwhere in French 
Uterature. Traverse ordinarily means obstadCi untoward incident. 



ACTE I, SCÈNE III 33 

Madame, à rassembler vos excuses diverse^ ; 

Je croîs voir Vintérêt que vous voulez celer, 

Et qu'un autre qu'un père ici vous fait parler. 290 

XlPHARÈS 

Quel que soit l'intérêt qui fait parler la Reine, 

La réponse. Seigneur, doit-elle être incertaine? 

Et contre les Romains votre ressentiment 

Doit-il pour éclater balancer un moment. 

Quoi? nous aurons d'un père entendu la disgrâce, 295 

Et lents à le venger, prompts à remplir sa place. 

Nous mettrons notre honneur et son sang en oubli ? 

Il est mort : savons-nous s'il est enseveli? 

Qui sait si dans le temps que votre âme empressée 

Forme d'un doux hymen l'agréable pensée, 300 

Ce roi, que l'Orient tout plein de ses exploits . 

Peut nonuner justement le dernier de ses rois. 

Dans ses propres États privé de sépulture. 

Ou couché sans honneur dans une foule obscure. 

N'accuse point le ciel qui le laisse outrager, 305 

Et des indignes fils qui n'osent le venger? 

288. rassembler : to coôrdinatej to get the hearing (or per- 
spective) of. 

295. entendu : appris, — disgrâce : cf. line 95. 

297. nous mettrons ... en oubli : we skall forget. 

304. couché : lying. Note that this past participle is the 
regular usage in French ; as, for instance, in such phrases as 
appuyé au mur, penché à la fenêtre. 

306.. There has been much discussion about the deà, irregular 
for d^ in this partitive. Some hâve thought the reading should 
be ses; others, deux. The best authority seems to support the 
présent reading as irregular but forceful. 



34 MITHRIDATE 

Ah ! ne languissons plus dans un coin du Bosphore. 
Si dans tout Tunivers quelque roi Ubre encore, 
Parthe, Scythe ou Sarmate, aime sa Uberté, 
310 Voilà nos aUiés : marchons de ce côté. 
Vivons, ou périssons dignes de Mithridate ; 
Et songeons bien plutôt, quelque amour qui nous 

flatte, 
A défendre du joug et nous et nos États, 
Qu'à contraindre des cœurs qui ne se donnent pas. 

Pharnace 

31511 sait vos sentiments. Me trompais-je. Madame? 
Voilà cet intérêt si puissant sur votre âme. 
Ce père, ces Romains que vous me reprochez. 

^ XlPHARÈS 

J'ignore de son cœur les sentiments cachés ; 
Mais je m'y soumettrais sans vouloir rien prétendre, 
320 Si, comme vous. Seigneur, je croyais les entendre. 

Pharnace 

Vous feriez bien ; et moi, je fais ce que je doi : 
Votre exemple n'est pas une règle pour moi. 

XlPHARÈS 

Toutefois en ces lieux je ne connais personne 
Qui ne doive imiter l'exemple que je donne. 

315. Phamaces doesn't even answer Xiphares. 

321. doi : dois. A " rhyme for the eye " with moi ; how- 
ever, not a poetic license, but a return to the original form. 

324. doive : subjunctive in relative clause with restricted 
antécédent. 



ACTE I, SCÈNE IV 36 

Pharnace 
Vous pourriez à Colchos vous expliquer ainsi. 325 

XlPHARÈS 

Je le puis à Colchos, et je la puis ici. 

Pharnace 
Ici? Vous y pourriez rencontrer votre perte ... 

SCÈNE IV 
MONIME, PHARNACE, XlPHARÈS, PH^EDlME 

PHiEDIME 

Princes, toute la mer est de vaisseaux couverte ; 
Et bientôt, démentant le faux bruit de sa mort, 
Mithridate lui-même arrive dans le port. 330 

MONIME 

Mithridate ! 

XlPHARÈS 

Mon père ! 

• — 

Pharnace 

Ah ! que viens-je d'entendre? 

PHiEDIME 

Quelques vaisseaux légers sont venus nous l'apprendre : 
C'est lui-même ; et déjà, pressé de son devoir, 
Arbate loin du bord l'est allé recevoir. 

327. y does not mean Ûvere, bût &2/ doing that. 

333. pressé : not merely hastened but urged on. 

334. What would be the prose order of this Une? 



y 



36 . MITHRIDATE 

XlPHARÈS, à Monime 

336 Qu'avons-nous fait ? 

Monime, à Xiphaxès 

Adieu, PHnce. Quelle nouvelle ! 

SCÈNE V 

PHARNACE, XIPHARÈS 

Pharnace 

Mithridate revient? Ah ! fortune cruelle ! 

Ma vie et mon amour tous deux courent hasard. 

Les Romains que j'attends arriveront trop tard. 

(A Xipharès) 

Comment faire? J'entends que votre cœur soupire, 
340 Et j'ai conçu l'adieu qu'elle vient de vous dire. 
Prince ; mais ce discours demande un autre temps : 

335. This brief scène bas often been praised for its fitness, 
effectiveness, and exécution. Tbat its climax should be a pair 
of BotU) voce exclamations is one of its most striking features. 
Labbé remarks that Monime does not meet XipHares again 
except at the summons of Mithridates. The Grands Écrivains 
édition bas the stage direction à Xipharès, but not the à Monime. 

337. courent hasard : sont en péril. A rare usage. 

339. j'entends is not / hear, but what? 

340. conçu : compris. So in Racine's BritanniciLS (Une 1026) : 
Je conçois vos bontés par ses remercîments^ 

Madame: . . ., 
where the situation is not dissimilar. 

■ 

341. ce discours : le discours sur ce sujet. In earlier éditions 
Racine had, for line 341 : 

Mais nous en parlerons peut-être en d'autres temps. , 



ACTE I, SCÈNE V 37 

Nous avons aujourd'hui des soins plus importants. 

Mithridate revient, peut-être inexorable : 

Plus il est malheureux, plus il est redoutable. 

Le péril est pressant plus que vous ne pensez. 346 

Nous sommes criminels, et vous le connaissez. 

Rarement Tamitié désarme sa colère ; 

Ses propres fils n'ont point de juge plus sévère ; 

Et nous Tavons vu même à ses cruels soupçons 

Sacrifier deux fils pour de moindres raisons. 360 

Craignons pour vous, pour moi, pour la Reine elle-même : 

Je la plains d'autant plus que Mithridate l'aime. 

Amant avec transport, mais jaloux sans retour, 

Sa haine va toujours plus loin que son amour. 

Ne vous assurez point sur l'amour qu'il vous porte : 366 

Sa jalouse fureur n'en sera que plus forte. 

Songez-y. Vous avez la faveur des soldats. 

Et j'aurai des secours que je n'explique pas. 

342. soins : scmcis. 

345. Pleonastic ne in the secoiid half of a statement of com- 
parison. 

347. Tamitié : affection. — sa : d Mithridate. 

350. Vérification of this is not complète. But Racine ac- 
cepted history current in his own day ; and Mithridates did 
other deeds of cruel anger, if not precisely the double tragedy 
hère mentiohed. 

353. Several editors prefer aimant; but Racine's text is not 
doubted. Jaloux sans retour is a problem of re-phrasing. 

355. ne vous assurez point sur : ne prenez point confiance dans. 

356. en : on that account — a common meaning, in prose or 
verse. 

357. songez-y : consider well. 

358. He does not need to explain ; Xiphares knows, and 
Phamaces knows that Xiphares knows. ' 



38 MITHRIDATE 

M'en croirez-vous? Courons assurer notre grâce : 
360 Rendons-nous, vous et moi, maîtres de cette place ; 
Et faisons qu'à ses fils il ne puisse dicter 
. Que les conditions qu'ils voudront accepter. 

XlPHARÈS 

Je sais quel est mon crime, et je connais mon père ; 
Et j'ai par-dessus vous le crime de ma mère ; 
366 Mais, quelque amour encor qui me pût éblouir. 
Quand mon père paraît, je ne sais qu'obéir. 

Pharnacb 

Soyons-nous donc au moins fidèles l'un à l'autre : 
Vous savez mon secret, j'ai pénétré le vôtre. 
Le Roi, toujours fertile en dangereux détours, 
370 S'armera contre nous de nos moindres discours. 
Vous savez sa coutume, et sous quelles tendresses 
Sa haine sait cacher ses trompeuses adresses. 

359. m'en croirez-vous? literally, wHX y ou not bdieve me in 
ihe matterf Translate : tuUl you not take my advicef 

361. The carelessness as to the référence of il reminds one 
of Corneille; but perhaps there is a dramatic refinement in 
Phamaces' avoidance of naming Mithridates. 

. 364. par-dessus vous : de plus que vous, outre ce que vous 
avez, Par-des8iL8 is not ordinarily used with persons. 

365. pût : subjunctive in concessive clause. 

367. Worthy of careful observation as to construction. The 
nous is a reciprocal pronoun, though there is no reflexive verb 
' s'être, 

372. sa haine : mechanically, he^ in his hatred. This Une 
is a préparation for certain incidents in Act 3. — adresses : the 
plural is old-fashioned. 



JlCTE I, SCÎXÏ T 39 



ATlfiTiR. PiiîaqiiT Jt iam. jf marjûie sor vot pis. 
•en obâasKin ne ncns xmiusgians pas. 



ctf tiie ** <ararfc^ * xosùuMs^ uf 3^?vBiiie SE. unàesaJoât TTmwàtrmBi 
î« te* IBE fliitazryiB&. «nHriif' or suinjainiiii: iieesi7ve&. is liit csat 

TTitrr. •• TÎifia »> çxinc " : *' 1 dr nnr aern- ' msy bt 
tiiXE. *' I difier.' in oTL xzficr i: cDftr«a: »f ovwtafl: ]f^ si fEBod 
tamnslKtimi.. Of « m w »- ode- hiëj revenu: ^àiE- jsroceaB : bm siixh- 
taooiF of *HffMTi>npK sK* î^iBL. ioimc in '«îis ** imÀEZing i:nr 3¥^ 



ACTE SECOND 
SCÈNE I 

MONIME, PHiEDIME 
PHiEDIMB 

376 Quoi? VOUS êtes ici quand Mithridate arrive, 
Quand, pour le recevoir, chacun court sur la rive? 
Que faites-vous. Madame? et quel ressouvenir 
Tout à coup vous arrête, et vous fait revenir ? 
N'offenserez-vous point un roi qui vous adore, 

380 Qui presque votre époux . . . 

MONIME 

Il ne Test pas encore, 
Phœdime ; et jusque-là je crois que mon devoir 
Est de l'attendre ici, sans l'aller recevoir. 

PHjEDIME 

Mais ce n'est point, Madame, un amant ordinaire. 
Songez qu'à ce grand roi promise par un père, 
386 Vous avez de ses feux un gage solennel, 

Qu'il peut, quand il voudra, confirmer à l'autel. 
Croyez-moi, montrez-vous, venez à sa rencontre. 

377. ressouvenir is an old word, now wholly in disnse. It 
means more than souvenir. Translate : inward prompUng, 
382. sans : not to. 
385. feux : love. 

40 



ACTE II, SCÈNE I 41 

MONIME 

Regarde en quel état tu veux que je me montre. 

Vois ce visage en pleurs ; et loin de le chercher, 

Dis-moi plutôt, dis-moi que je m'aille cacher. 390 

PHiGDIME 

Que dites-vous? Dieux ! 

MoNIME 

Ah ! retour qui me tue ! 
Malheureuse ! comment paraîtrai-je à sa vue, 
Son diadème au front, et dans le fond du cœur, 
Phœdime ... Tu m'entends, et tu vois ma rougeur. 

Ph-edime 

Ainsi vous retombez dans les mêmes alarmes 396 

Qui vous ont dans la Grèce arraché tant de larmes? 
' Et toujours Xipharès revient vous traverser? ^ 

MONIME 

Mon malheur est plus grand que tu ne peux penser. 
Xipharès ne s'offrait alors à ma mémoire 
Que tout plein de vertus, que tout brillant de gloire ; 400 
Et je ne savais pas que pour moi plein de feux, 
Xipharès des mortels fût le plus amoureux. 

389. The le is careless ; yet îts référence is of course unmis- 
takable. 

391. retour qui me tue must be completely re-phrased. One 
might say How can I live^ and meet himf 

397. traverser is exceptional, meaning, hère, diaturh. 

398. Same construction as Une 345. 

402. fût : subjunctive after verb of saying or thinking used 
negatively. 



42 MITHRIDATE 

Ph^dime 
Il vous aime, Madame? et ce héros aimable ... 

MONIME 

Est aussi malheureux que je suis misérable. 
405 II m'adore, Phaedime ; et les mêmes douleurs 
Qui m'affigeaient ici le tourmentaient ailleurs. 

Ph.«dime 

Sait-il en sa faveur jusqu'où va votre estime? 
Sait-il que vous Taimez ? 

MONIME 

Il l'ignore, Phsedime. 
Les Dieux m'ont secourue ; et mon cœur affermi 
410 N'a rien dit, ou du moins n'a parlé qu'à demi. 
Hélas ! si tu savais, pour garder le silence, 
Combien ce triste cœur s'est fait de violence ! 
Quels assauts, quels combats j'ai tantôt soutenus ! 

404 if. The French editors note the weakness of this scène. 
Some call it pur remplissage. Lanson remarks that misérable 
and malheureux are identical in meaning. 

407. estime : We shall be approximatîng the mannerism of 
the seventeenth century as to estime for amour by usîng the Eng- 
lish regard, (rften suggestive of a deeper feeling. 

408-4x2. This attempt at self-deceptîon has been called a 
blemish ; but is it not pardonable, since Monime is summoning 
courage to act as though what she is now saying were true, and 
as though she had not said (Une 335) : Qu'avons-nous fait? 

413. tantôt ! Like tout à Vheure, tantôt covers a brief period 
of the past and of the future. Hence jv>st now or very soon are 
translations for it. 



ACTE II, SCÈNE II 43 

Phsedime, si je puis, je ne le verrai plus. 

Malgré tous les efforts que je pourrais lîie faire, 416 

Je verrais ses douleurs, je ne pourrais me taire.. 

Il viendra^ malgré moi, m'arracher cet aveu. 

Mais n'importe, s'il m'aime, il ëïi jouira peu ; 

Je lui vendrai si cher ce bonheur qu'il ignore, 

Qu'il vaudrait mieux pour lui qu'il l'ignorât encore. 420 






V 



Phsedime 
On vient. Que faites-vous. Madame? 

; ,, MONIMB 

-^' ' Je ne puis. 

Je ne paraîtrai poiîit dans le trouble où je suis. 

SCÈNE II 

mithridAte, pharnace, xipharès, arbate, 

Gardes 

MiTHRIDATE 

Princes, quelques raisons que vous me puissiez dire, 

Votre devoir ici n'a point dû vous conduire, 

Ni vous faire quitter, en de si grands besoins, 426 

Vous le Pont, vous Colchos, confiés à vos soins. 

Mais vous avez pour juge un père qui vous aime. 

Vous avez cru des bruits que j'ai semés moi-même; 

Je vous crois innocents, puisque vous le voulez, 

415. me for sur moi. 

423. Note construction, cf. Vocabulary and Pr^ace, 1. 69. 

424. n'a point dû : n* aurait point dû. * 
429. voulez : will hâve it so. Ungracious, but not un- 

characteristic Another phase of meaning of the versatile vouUnr, 



MITHRIDATE 



. From: La Camidit Pranfaite. bu Loties 

Baron 
Pupil of Molière ; also trained by Radue for the r&le of Mitbridato. 



ACTE II, SCÈNE III 45 

Et je rends grâce au ciel qui nous a rassemblés. 430 

Tout vaincu que je suis, et voisin du naufrage, 
Je médite un dessein digne de mon courage. 
Vous en serez tantôt instruits plus amplement. 
Allez, et laissez-moi reposer un moment. 



SCÈNE III 
MITHRIDATE, ARBATE 

MiTHRIDATE 

Enfin, après un an, tu me revois, Arbate, 436 

Non plus, comme autrefois, cet heureux Mithridate 

Qui de Rome toujours balançant le destin, 

Tenais entre elle et moi l'univers incertain. 

Je suis vaincu. Pompée a saisi l'avantage 

D'une nuit qui laissait peu de place au courage. 440 

Mes soldats presque nus, dans l'ombre intimidés. 

Les rangs de toutes parts mal pris et mal gardés, 

•Le désordre partout redoublant les alarmes. 

Nous-mêmes contre nous tournant nos propres armes, 

431. tout vaincu que je suis : The tout is a particle rather 
than a genuine adverb in this locution, as it is in toict en plus the 
gerundive. Hence it may be represented by a tone of voice rather 
than a word. 

432. digne de mon courage : worthy of me — a complète 
renderin^ of this phrase. See note on lihe 259. 

437. balançant : pesant dans la balance d'un poids égal d . . . 

441-446. Note that there is no indepencfent predicate verb 
in this enumeration of détails. 

442. les rangs . . . gardés : wUh Unes everywhere iU fonned 
and unsteadUy maintained. 



1 



46 MITHRIDATE 

446 Les cris que les rochers renvoyaient plus affreux, 
Enfin toute l'horreur d'un combat ténébreux : 
Que pouvait la valeur dans ce trouble funeste ? 
Les uns sont morts, la fuite a sauvé tout le reste ; 
Et je ne dois la vie, en ce commun effroi, 

450 Qu'au bruit de mon trépas que je laisse après moi. 
Quelque temps inconnu, j'ai traversé le Phase ; 
Et de là, pénétrant jusqu'au pied du Caucase, 
Bientôt 'dans des vaisseaux sur l'Euxin préparés, 
J'ai rejoint de mon camp les restes séparés. 

465 Vçilà par quels malheurs poussé dans le Bosphore, 
J'y trouvé des malheurs qui m'attendaient encore. 
Toujours du même amour tu me vois enflammé : 
Ce cœur nourri de sang, et de guerre affamé. 
Malgré le faix des ans et du sort qui m'opprime, 

460 Traîne partout l'amour qui l'attache à Monime, 
Et n'a point d'ennemis qui lui soient odieux 
Plus que deux fils ingrats que je trouve en ces Ueux. 

Arbate 
Deux fils. Seigneur? 

MiTHRIDATE 

Écoute. A travers ma colère. 
Je veux bien distinguer Xipharès de son frère. 
465 Je sais que de tout temps à mes ordres soumis, 
Il hait autant que moi nos communs ennemis ; 

446. combat ténébreiix : a fight in the dark. 
451. le Phase : See List of Proper Names. 
459. faix : hurden — antiquated ; but porte-faix still lives. 
462. plusque : this time more . . . than . . ., though after 
ne. See Une 128. 



ACTE II, SCÈNE III 47 

Et j'ai vu sa valeur, à me plaire attachée, 
Justifier pour lui ma tendresse cachée. 
Je sais même, je sais avec quel désespoir, 
A tout autre intérêt préférant son devoir, 470 

Il courut démentir ime mère infidèle. 
Et tira de son crime une gloire nouvelle ; 
Et' je ne puis encor ni n'oserais penser 
Que ce fils si fidèle ait voulu m'ofifenser. 
Mais tous deux en ces lieux que pouvaient-ils attendre? 476 
L'un et Tautre à la Reine ont-ils osé prét€indre? 
Avec qui semble-t-elle en secret s'accorder? 
Moi-même de quel œil dois-je ici l'aborder? 
^ Parle. Quelque désir qiii m'entraîne auprès d'elle. 
Il me faut de leurs cœurs rendre un compte fidèle. 480 

Qu'est-ce qui s'est passé? Qu'as-tu vu? Que sais-tu? 
Depuis quel temps, pourquoi, comment t'es-tu rendu? 

467. attachée : uniquement occupée de. 

468. ma tendresse cachée bas, according to Bernardin, not 
its literal meaning, but equals ma préférence secrète. 

472. son : à sa mJère. 

474. ait : same construction as Une 402. 

476. à la Reine . . . prétendre : Hère we bave prétendre in 
tbe phase wbicb gave tbe Englisb prétention its meaning. Aspire 
to the harid of^ or a similar phrase, may be tbe key to a translation. 

478. œil frequently offers difficulty as to Englisb renderiiig, 
thougb its meaning is rarely obscure. In what spirit ought I to 
greet herf would be a good rendering, since dois bad, at the time, 
the force now expressed only by devrais. On what terms ought I 
to mset her f or What shovld he my attitude of mind in greeting her f 
may serve as alternative suggestions. 

479. entraine is subjunctive, thougb the form does not show it, 
482. commenta es-tu rendu? comment as-tu ouvert aux princes 

les portes de Nymphéeî 



48 MITHRIDATE 

Arbate 

Seigneur, depuis huit jours Timpatient Phamace 
Aborda le premier au pied de cette place, 

485 Et de votre trépas autorisant le briiit, 

Dans ces murs aussitôt voulut être introduit. 
Je ne m'arrêtai point à ce bruit téméraire ; 
Et je n'écoutais rien, si le prince son frère, 
Bien moins par ses discours. Seigneur, que par ses 
pleurs, 

490 Ne m'eût, en arrivant, confirmé vos malheurs. 

MiTHRIDATE 

Enfin que firent-ils? 

Arbate 

Phamace entrait à peine 
Qu'il courut de ses feux entretenir la Reine, 
Et s'offrir d'assurer par un hymen prochain 
Le bandeau qu'elle avait reçu de votre main. 

485. autorisant : not avihorizing, but giving avthoriiaJtwe 
veHficaiion io, Labbé paraphrases : donnant du crédit' au bruU 
de votre mort. 

487. bruit téméraire : rumeur douteuse, répandue et crue trop 
légèrement. Téméraire signifies hère not hold, but rash. 

488. Vivid imperfect, to be translated by the compound of 
the conditional. 

492. Phâmaces later thinks that Xiphares has given this in- 
formation to Mithridates. 

493. s'offrir was sometimes followed by d, sometimes by de. — 
assurer : to place forever on her forehead. 



ACTE II, SCÈNE III 49 

MiTHRIDATE 

Traître ! sans lui donner le loisir de répandre 495 

Les pleurs que son amour aurait dus à ma cendre ! 
Et son frère? 

Arbate 

Son frère, au moins jusqu'à Ce jour, 
Seigneur, dans ses desseins n'a point marqué d'amour ; 
Et toujours avec vous son cœur d'intelligence 
N'a semblé respirer que guerre et que vengeance. 600 

MiTHRIDATE 

Mais encor quel dessein le conduisait ici? 

Arbate 
Seigneur, vous en serez tôt ou tard éclaircî. 

MiTHRIDATE 

Parle, je te l'ordonne, et je veux tout apprendre. 

Arbate 
Seigneur, jusqu'à ce jour, ce que j'ai pu comprendre, 

496. dus à ma cendre : Ail commentators agrée that Racine's 
discrimination was dull at this point. The idea is ridiculous. 
Luckily lines 493-496 may be eut without breaking the continuity 
of the scène. 

497. au moins jusqu'à ce jour : Arbates, or rather Racine is 
clever hère. Arbates protects Xiphares without lying. 

499. d'intelligence : in sympathyf in accord. 

501-508. The clevemess continues. In telling, apparently 
under compulsibn, what might offend Mithridates, the more im- 
portant matter is quite lost sight of . 



50 MITHRIDATE 

605 Ce prince a cru pouvoir, après votre trépas, 
Compter cette province au rang de ses États; 
Et, sans connaître ici de lois que son courage. 
Il venait par la force appuyer son partage. 

MiTHRIDATE 

Ah ! c'est le moindre prix qu'il se doit proposer, 

610 Si le ciel de mon sort me laisse disposer. 

Oui, je respire, Arbate, et ma joie est extrême. 
Je tremblais, je Tavoue, et pour un fils que j'aime. 
Et pour moi qui craignais de perdre un tel appui. 
Et d'avoir à co^lbatt^e im rival tel que lui. 

615 Que Phamace m'offense, il .offre à ma colère 
Un rival dès longtemps soigneux de me déplaire. 
Qui toujours des Romains admirateur secret. 
Ne s'est jamais contre eux déclaré qu'à regret. 
Et s'il faut que pour lui Monime prévenue 

620 Ait pu porter ailleurs une amour qui m'est due. 
Malheur au criminel qui vient me la ravir. 
Et qui m'ose offenser et n'ose me servir ! 
L'aime-t-elle? 

505. The line should hâve c^est que at the beginnhig to be 
perfectly grammatical. The ellipsis is admired by some editors. 

507. Another ellipsis, and a common one, for d'autres lois 
que. 

508. appuyer son partage : défendre, protéger sa part, son lot. 

509. se proposer : avoir en mie. 

515. que with the subjonctive equals si with the indicative. 

519. pour lui . . . prévenue : kindly disposed toward Mm, 

520. .amour as a singular is regularly masculine. 

522. n'ose me servir : Labbé paraphrases : assez lÂche pour 
n^oser s'unir à moi contre les Romains. 



ACTE II, SCÈNE IV 51 

Arbate 
Seigneur, je vois venir la Reine. 

MiTHRIDATE 

Dieux, qui voyez ici mon amour et ma haine, 
Épargnez mes lïialheurs, et daignez empêcher 525 

Que je ne trouve encor c^ux que je vais chercher. 
Arbate, c'est assez : qu'on me laisse avec elle. 

SCÈNE IV 
MITHRIDATE, MONIME 

MiTHRIDATE 

Madame, enfin le ciel près de vou^ me rappelle, 

Et, secondant du moins mes plus tendres souhaits. 

Vous rend à mon amour plus belle que jamais. 530 

Je ne m'attendais pas que de notre hyménée 

Je dusse voir si tard arriver la journée. 

Ni qu'en vous retrouvant, mon funeste retour 

Fît voir mon infortune, et non pas mon' amour. 

C'est pourtant ^et amour, qui de tant de retraites 535 

Ne me laisse choisir que les lieux où vous êtes ; 

Et les plus grands malheurs pourront me sembler doux. 

Si ma présence ici n'en est point un pour vous. 

525. épargnez mes malheurs : syare me y in my misfortunes ; * 
apare my unhappy self. 

526. empêcher, whether positive or négative, requires pleonas- 
tic ne in the dépendent clause. 

530. This Une does not mean renders you m^ore heaiUifiU to 
me, your lover ^ ihan ever. What does it mean? 



52 MITHRIDATE 

C'est vous en dire assez, si vous voulez m'entendre. 
540 Vous devez à ce jour dès longtemps vous attendre ;• 

Et vous portez, Madame, un gage de ma foi 

Qui vous dit tous les jours que vous êtes à moi. 

Allons donc assurer cette foi mutuelle. 

Ma gloire loin d'ici vous et moi nous appelle ; 
545 Et sans perdre un moment pour ce noble dessein, 

Aujourd'hui votre époux, il faut partir demain. 

^ • MONIME 

Seigneur, vous pouvez tout. Ceux par qui je respire 
Vous ont cédé sur moi leur souverain empire ; 
Et, quand vous userez de ce droit tout-puissant, 
550 Je ne vous répondrai qu'en vous obéissant. 

MiTHRIDATE 

Ainsi, prête à subir un joug qui vous opprime. 
Vous n'allez à l'autel que comme une victime ; 

r 539. c'est vous en dire assez : c^est with an infinitive as 
predicate nominative, should always be given a personal form 
in translation. / need say no more, if you are not unvnlling ta 
gel my meaning. See Une 215. 

543. assurer : render inviolable. 

544. ma gloire is a common phrase in French classic verse. 
Its exact me,aning is : considération for my réputation. Such a 
prosaic phrase will rarely or ne ver fit the style. ' Hère glory calla 
ttë far from hère would do, but would disregard the ma. By add- 
ing not only m£ but also youj the missing élément would be sup- 
plied. But, in continuing the passage, the phrase pour ce noble 
dessein would offer difficulty. The whole passage might hâve 
to be recast to secure a good English version. 

546. Lanson, commenting on the strongly elliptical construc- 
tion, paraphrases : je vous épouse aujourd'hui^ nous partons demain, 

547. par qui je respire : who gave me life. 



ACTE II. SCÈNE IV 53 

Et moii tjo-an d'un cœur qui se refuse au mien, 

Même en vous possédant je ne vous devrai rien. 

Ah ! Madame, est-ce là de quoi me satisfaire? 666 

Faut-il que désormais, renonçant à vous plaire, 

Je ne prétende plus qu'à vous tyranniser? ^ 

Mes malheurs, en un mot, me font-ils mépriser? 

Ah! pour tenter encor de' nouvelles conquêtes, 

Quand je ne verrais pas des routes toutes prêtes, 660 

Quand le sort ennemi m'aurait jeté plus bas, 

Vaincu, persécuté, sans /secours, sans États, 

Errant de mers en mers, et moins roi que pirate. 

Conservant pour tous biens le nom de Mithridate, 

Apprenez que, suivi d'un nom si glorieux, 565 

Partout de l'univers j'attacherais les yeux ; 

Et qu'il n'est point de rois, s'ils sont dignes de l'être, 

Qui, sur le trône assis, n'enviassent peut-être 

Au-dessus de leur gloire un naufrage élevé, 

557. je ne prétende plus qu'à vous tyranniser : / can hope 
to he henceforth only your master. 

558. The Une serves as a genuinely touching transition to a 
fine passage (55^570) conceming which Geoffroy has written : 
Ici commence une magnifique période de douze vers enchaînés 
l'un à l'autre avec un art admirable : période presque unique 
dans notre poésie, chef-d'œuvre d'harmonie et d'éloquence, qui 
montre ce que peut la langue française entre les mains d'un homme 
de génie. 

560. quand with conditional is merely a more intensive protasis 
than «i^ with the imperf ect — even if , . . 

569. au-dessus de leur gloire un naufrage élevé ... : No 
superlative of praise can be too strong in admiration of this Une. 
Geoffroy's enthusiasm is outdone by that of du Cerceau : Ces 
expressions figurées ont d'abord quelque chose qui éblouit, et 
l'on ne se donne pas la peine de les examiner, parce qu'on les 





'A 


MITHRIDATB 





54 

570 Que Rome, et quarante ans ont à peine achevé. 

Vous-même, d^un autre œil me verriez-vous, Madame, 
Si ces Grecs vos aïeux revivaient dans votre âme? 
Et puisqu^il faut enfin que je sois votre époux. 
N'était-il pas plus noble, et plus digne de vous, 

675 De joindre à ce devoir votre propre suffrage. 
D'opposer votre estime au destin qui m'outrage, 
Et de me rassurer, en flattant ma douleur. 
Contre la défiance attachée au malheur? 
Hé quoi? n'avez-vous rien, Madame, à me répondre? 

580 Tout mon empressement ne sert qu'à vous confondre. 
Vous demeurez muette ; et loin de me parler. 
Je vois, malgré vos soins, vos pleurs prêts à couler. 

devine plutôt qu'on ne les entend. Mais, quand on y regarde 
de près, on s'aperçoit qu'il serait assez difficile d'en faire une 
analyse logique. — The fact is that line 569 stretches the French 
language beyond the limit of clarity which is its idéal. The 
English reader might say that Racine becomes temporarily 
Shakespearean in diction. A modemist might find in the Mithri- 
dates of Racine a prototype of the Superman. AU will recognize 
the dazzling dramatic splendor of this tirade. • 

574. n'était-il pas . . .: n^auraitril pas été . . ., as in line 488. 

576. outrage and its derivatives connoted, in Racine's time, 
exce8§ of violence or injustice. Nowadays the maximum meaning 
is insuU. 

577. flattant : The English literal équivalent is rarely dé- 
sirable. A basic meaning is to deal gently loith, which fits hère 
well. Mechanically, ma douleur is me, in my grief. 

578. défiance is not défiance. Cf. line 276. — attachée : qui 
s^attaxihe. 

579. hé quoi I how nowf 

581. A literal translation will obviously not do. Note that 
the construction, from the English standpoint — and, indeed, 
from the French standpoint of today — is loose. 



ACTE 11, SCÈNE IV 55 



MONIME 



v/ 



Moi, Seigneur? Je n'ai point de lannes à répandre. 
J'obéis. N'est-ce pas assez me faire entendre? 
Et ne suffit-il pas . . . 

MiTHRIDATE 

Non, ce n'est pas assez. 535 

Je vous entends ici mieux que vous ne pensez. 
Je vois qu'on m^a dit vrai. Ma juste jalousie 
Par vos propres discours est trop bien éclaircie. 
Je vois qu'un fils perfide, épris de vos beautés. 
Vous a parlé d'amour, et que vous l'écoutez. 590 

Je vous jette pour lui dans des craintes nouvelles. 
Mais il jouira peu de vos pleurs infidèles, 
Madame ; et désormais tout est sourd à mes lois, 
Ou bien vous l'avez vu pour la dernière fois. 
Appelez Xipharès. 

584. See no,te to line 539. Translate : Am I not making my- 
self dearly understoodf 

585. The outburst of Mîthridates (Non, ce n'est pas assez) 
and the tense and rapid development to the climax (Appelez 
Xipharès) ; the frenzied anxiety of Monime's rejoinder ; the 
crashing release àt the line Xipharès n'a point trahi son père — 
thèse things display dramatic strength, resourcefulness^ and in- 
ventiveness which no reader should fail to observe. The student 
who seeks to establish distinctions between the genius of the 
dramatist and that of the novelist may well ponder this 
passage. 

593. tout est sourd à mes lois : Labbé paraphrases : à moins 
que tous mes soldais ne me refusent Vohéissancef je punirai ce fils 
perfide. 



MITHRIDATE 



ACTE II, SCÈNE V 57 

MONIME 

. Ah! que voulez-vbus faire? 595 

Xipharès . . . 

MiTHRIDATE 

Xipharès n'a point trahi son père. 
Vous vous pressez en vain de le désavouer ; 
Et ma tendre amitié ne peut que s'en louer. 
Ma honte en serait moindre, ainsi que votre crime, 
Si ce fils en effet digne de votre estime 600 

A quelque amour encore avait pu vous forcer. 
Mais qu'un traître, qui n'est hardi qu'à m'offense^*. 
De qui nulle vertu n'accompagne l'audace, 
Que Pharnace, en un mot, ait pu prendre ma place? 
Qu'il soit aimé. Madame, et que je sois haï? 606 -^ 

SCÈNE V 

MltHRIDATE, MONIME, XIPHARÈS 

^ MiTHRIDATE 

Venez, mon fils, venez, votre père est trahi. 
Un fils audacieux insulte à ma ruine, 

598. Andy as I am so fond of him^ I am only too glad to find 
his conduct praiseworthy: 

60a. qui n'est hardi, qu'à m'ôffenser : perhaps, whose only 
hravery ia hraving his father. 

604-5. l'he question marks at the end of thèse Unes hâve been 
discarded in later éditions. Labbé and others hâve a comma 
after Une 604 and dots after 605. Elsewhere in this play we find 
question marks where exclamation marks might seem more fitting. 

607. Note, the différence between insulter {to insuit) and 



58 MITHRIDATE 

Traverse mes desseins, m'outrage, m'assassine, 
Aime la Reine enfi^i, lui plaît, et me ravit 

610 Un cœur que son devoir à moi seul asservit. 

Heureux pourtant, heureux que dans cette disgrâce 
Je ne puisse accuser que la main de Pharnace ; 
Qu'une mère infidèle, un frère audacieux 
Vous présentent en vain leur exemple odieux ! 

615 Oui, naon fils, c'est vous seul sur qui je me repose. 
Vous seul qu'aux grands desseins que mon cœur se 

propose 
J'ai choisi dès longtemps pour digne compagnon, 
L'héritier de mon sceptre, et surtout de mon nom. 
Pharnace, en ce moment, et ma flamme offensée 

620 Ne peuvent pas tout seuls occuper ma pensée. 
D'un voyage important les soins et les apprêts" 
Mes vaisseaux qu'à partir il faut tenir tout prêts, 
Mes soldats dont je veux tenter la complaisance. 
Dans ce même moment demandent ma présence. 

625 Vous cependant ici veillez pour mon repos; 
D'un rival insolent arrêtez les complots. 
Ne quittez point la Reine ; et s'il se peut, vous-même 
Rendez-la moins contraire aux vœux d'un roi qui l'aime. 
Détournez-la, mon fils, d'un choix injurieux. 

insulter à {to déride) . Translate : heaps infamy on me in my 
wretchedness. 

608. m'assassine : deals me a mortal hlow. 

609. lui plaît : wina her heart. 
611. See Une 95. 

619. ma flamme offensée : Voffense faite à ma flamme.- Cf. 
Une 70. 

623. complaisance : obédience, wiUingness, 
629. injurieux : déshonorant. 



ACTE II, SCÈNE VI 59 

Juge sans intérêt, vous la convaincrez mieux. 630 

En un mot, c'est assez éprouver ma faiblesse : 
Qu'elle ne pousse point cette même tendresse. 
Que sais-je? à des fureurs dont mon cœur outragé 
Ne se repentirait qu'après s'être vengé. 

SCÈNE VI 

MONIME, XIPHARÈS ^ 

XlPHARÈS 

Que dirai-je, Madame? et comment dois-je entendre 635 
Cet ordre, ce discours que je ne puis comprendre? 
Serait-il vrai, grands Dieux ! que trop aimé de vous, 
Pharnace eût en effet mérité ce courroux? 
Phamace aurait-il part à ce désordre extrême? . 

MoNIME 

Pharnace? O ciel! Pharnace? Ah! qu'entends-je 

moi-même? 64C 

Ce n'est donc pas assez que ce funeste jour 
A tout ce que j'aimais m'arrache sans retour, 

6bo. Of course juge is not a verb. 

631. éprouver : meUre à V épreuve. Remember the point 
made at Unes 215, 539, and 584. 

633. que sais-je? is not que dis-je? A good translation is 
generally " what shall I say? '' But that rendering will be 
needed in 635. Hence translate who knows f 

637. serait-il vrai? is the conditional of surprised question, 
with regular présent translation, can it he true? 

639. aurait-il part : aeraiUil pour quelque chose dans , , ,? 
Tbk is the ordinary raeaning of this phrase with Racine. 



60 MITHEIDATE 

Et que de mon devoir esclave infortunée, 
A d'éternels ennuis je me voie enchaînée? 

646 II faut qu'on joigne encor Toutrage à mes douleurs I 
A l'amour de Pharnace on impute mes pleurs ! 
Malgré toute ma haine, on veut qu'il m'ait su plaire ! 
Je le pardonne au Roi, qu'aveugle sa colère, 
Et qui de mes secrets ne peut être éclairci. 

660 Mais vous. Seigneur, .mais vous, me traitez-vous ainsi? 

XlPHARÈS 

Ah ! Madame, excusez un amant qui s'égare. 
Qui lui-même, lié par un devoir barbare. 
Se voit prêt de tout perdre, et n'ose se venger. 
Mais des fureurs du Roi que puis-je enfin juger? 
665 II se plaint qu'à ses vœux un autre amour s'oppose. 
Quel heureux criminel en peut être la cause? 
Qui? Parlez. 

MONIME 

Vous cherchez. Prince, à vous tourmenter. 
Plaignez votre malheur, sans vouloir l'augmenter. 

646. de : /or. 

647. on veut qu' : people insist on beUeving^ people mU hâve 
U that . . . This is the same vouloir as in line 429. 

648. Observe the case of qu'. , 

650. traitez-vous : The mental phase is regularly dominant 
in traiter. Translate : la this your opinion of met 

651. s'égare : ia seeking light, 

652. barbare : crud. 

653. prêt de : sur le point de, 

656. The line has been called vapid. It is certainly hard to 
tum it into English which does not sound vapid. 

658. sans vouloir : withovi trying ; or perhaps it is better to 
make a new sentence : Do not try , , , 



ACTE II, SCÈNE VI 



61 



XlPHARÈS 

Je sais trop quel tourment je m'apprête moi-même. 

C'est peu de voir un père épouser ce que j'aime : 660 

Voir encore im rival honoré de vos pleurs, 

Sans doute c'est pour moi le comble des malheurs ; 

Mais dans mon désespoir je cherche à les accroître. 

Madame, par pitié, faites-le-moi connaître. 

Quel est-il, cet amant? Qui dois-je soupçonner? 666 

MONIME 

Avez-vous tant de peine à vous l'imaginer? 

Tantôt, quand je fuyais ime injuste contraint^, 

A qui contre Pharnace ai-je adressé ma plainte? 

Sous quel appui tantôt mon cœur s'est-il jeté? 

Quel amour ai-je enfin sans colère écouté? 670 

XlPHARÈS 

ciel ! Quoi? je serais ce bienheureux coupable 
Que vous avez pu voir d'un regard favorable? 
Vos pleurs pour Xipharès auraient daigné couler? 

66o. c'est peu de ... : Sentences beginning thus are often 
difficult to transfer to English. The French construction is 
particularly effective. Following is a sketch of this sentence : 
To see my fcUher marry the ohject of my love is but a slight mis- 
fortune ; to see, in addition, a rival honored by your tender affection 
is indeed the dimax of misfortunes for me ; but, plunged in despair, 

1 perversely seek to make my unhappiness stiU greater. 

664. le : him. The spelling of the last word was, in Racine's 
time, connaître. Modem actors use the modem pronunciation, 
disregardîng oral rhyme. 

670. enfin : to speak plainly, to sum up. 

671. je serais : This is the '^ conditional of surprîsed ques- 
tion " in déclarative form. Cf. Unes 637, 639 ; also 673. 



> 



\ 
\ 



62 MITHRIDATB 

MONIME 

Oui, Prince, il n'est plus temps de le dissimuler : 

675 Ma douleur pour se taire a trop de violence. 
Un rigoureux devoir me condamne au silence ; 
Mais il faut bien enfin, malgré ses dures lois. 
Parier pour la première et la dernière fois. 
Vous m'aimez dès longtemps. Une égale tendresse 

680 Pour vous, depuis longtemps, m'afflige et m'intéresse. 
Songez depuis quel jour ces funestes appas 
Firent naître un amour qu'ils ne méritaient pas ; 
Rappelez un espoir qui ne vous dura guère. 
Le trouble où vous jeta l'amour de votre père, 

685 Le tourment de me perdre et de le voir hem'eux. 
Les rigueurs d'un devoir contraire à tous nos vœux : 
Vous n'en sauriez. Seigneur, retracer la mémoire. 
Ni conter vos malheurs, sans conter mon histoire ; 
Et lorsque ce matin j'en écoutais le com's, 

690 Mon cœur vous répondait tous vos mêmes discours. 
Inutile, ou plutôt funeste sympathie ! 

674. The final direct, simple avowal is of overwhelming effect, 
even though so surely coming. This scène is said to hâve been 
one of the greatest of the celebrated actress Rachel (1820- 
1858). 

683. rappelez : rappelez à votre souvenir. 

684. This time de is not for but of. 

687. Hold rigoronsly to the translation cannot for the con- 
ditional of savoir without second négation. If the second néga- 
tion is used, translate in full and literaUy. For instance, je ne 
sawnais vous le dire means / cannot tell you. 

687. This tirade of Monime is one of the most famous in 
French dramatic literature for its beauty of sentiment, as that 
of Mithridates (551-582) is for its elemental force and pathos. 



ACTE II. SCÈNE VI 



63 



Trop parfaite union par le sort démentie ! 

Ah ! par quel soin cruel le ciel avait-il joint 

Deux cœurs que Tun pour l'autre il ne destinait point? 

Car quel que soit vers vous le penchant qui m'attire, 695 

Je vous le dis, Seigneur, pour ne plus vous le dire, 

Ma gloire me rappelle et m'entraîne à l'autel, 

Où je vais vous jurer un silence éternel. 

J'entends, vous gémissez; mais telle est ma misère. 

Je ne suis point à vous, je' suis à votre père. 700 

Dans ce dessein, vous-même, il faut me soutenir, 

Et de mon faible cœur m'aider à vous bannir. 

J'attends du moins, j'attends de votre complaisance 

Que désormais partout vous fuirez ma présence. 

J'en viens de dire assez pour vous persuader 705 

Que j'ai trop de raisons de vous le commander. 

Mais après ce moment, si ce cœur magnanime 

D'un véritable amour a brûlé pour Monime, 

Je ne reconnais plus la foi de vos discours 

Qu'au soin que vous prendrez de m'éviter toujours. 710 



y 



j 



692. démentie : annuUed. 

697. ma gloire : As rema^ked at Une 544, this staple phrase 
of French classic verse is difficult to set in English. Translate : 
/ shaU heed duiy's imperious caU and shaU go to the oZtor — or 
some similar paraphrase. 

700. Racine's son insisted that" the reading should be Je ne 
8ui8 point à moi, even though Racine himself failed to correct 
the vous in the earliest éditions. Editors agrée that the change 
may be désirable, but none are inclined to make it. 

703. de votre complaisance : Phrase it : that y ou wiU he 
considerate enough to . . . 

705. j'en viens de dire : What would be the modem prose 
order of words? 

709. la foi : la smcérité. — vos discours : whai you hâve said. 



64 MITHRIDATE 

XlPHARÊS 

Quelle marque, grands Dieux ! d'un amour déplorable ! 

Combien en un moment heureux et misérable ! 

De quel comble de gloire et de félicités 

Dans quel abîme affreux vous me précipitez ! 
715 Quoi? j'aurai pu toucher un cœur comme le vôtre? 

Vous aurez pu m'aimer? et cependant uii autre 

Possédera ce cœur dont j'attirais les vœux? 

Père injuste, cruel, mais d'ailleurs malheureux ! . . . , 
* Vous voulez que je fuie et que je vous évite? 
720 Et cependant le Roi m'attache à votre suite. 

Que dira-t-il? 

MONIME 

N'importe, il me faut obéir. 
Inventez des raisons qui puissent l'éblouir. 
D'un héros tel que vous c'est là l'effort suprême : 
Cherchez, Prince, cherchez, pour vous trahir vous- 
même, ' 

7x3. comble : pinnaclef height, 

715. The j'aurai is a form of the future of probability. Cf. 
U sera malade {h^ is prohahly ill) . But in the présent instance, 
the word prohahly is not pertinent. Translate by the présent. 

718. mais d'ailleurs malheureux is obviously weak. 

721. This interview has striking similarities with that between 
Severus and Pauline in Act II, Scène 4, of Comeille's Polyeuctey 
produced thirty years earlier. 

722. rébloidr : le rendre aveugle. 

723. One commentator with a sensé of humor has remarked 
that this Une, unless separated by a pause from the preceding, 
will make Monime seem to regard clevemess in prévarication as 
the suprême achievement of a hero such as Xiphares. 



ACTE II, SCÈNE VI 65 

■ • 

Tout ce que, pour jouir de leurs contentements, 725 

L'amour fait inventer aux vulgaires amants. 

Enfin je me connais, il y va de ma vie. 

De mes faibles eflforts ma vertu se défie. 

Je sais qu'en vous voyant, un tendre souvenir 

Peut m'arracher du cœiir quelque indigne soupir ; . 730 

Que je verrai mon âme, en secret déchirée, 

Revoler vers le bien dont elle est séparée. 

Mais je sais bien aussi que s'il dépend de vous 

De me faire chérir un souvenir si doux, 

Vous n'empêcherez pas que ma gloire ofifensée 735 

N'en pimisse aussitôt la coupable pensée ; 

Que ma main dans mon cœur ne vous aille chercher, 

Pour y laver ma honte, et vous en arracher. 

Que dis-je? En ce moment, le dernier qui nous reste, 

Je me sens arrêter par un plaisir funeste. , 740 

725. pour jouir de leurs tontentexnents : to attain their happi- 
ness, • m 

726. With a verb denoting causation or perception, of two 
substantive éléments which would naturally be in the accusative, 
the one which is the subject of the infinitive is put in the dative ; 
hence, everything which love makes ordinary lovera invent, 

727. enfin : and then, then too. 

732. le bien : the trea^surey the joy^ the dear one. 
735. ma gloire o£fensée : /, shaMered in my sélf-reapectf or 
some similar rendering. 

736-737. Cf. Hiie 526 as to ne. 

739. que dis-j®? The customary Nay, more! (cf. Une 85) 
will not quite serve hère. Some other phrase of self-interruption 
like But stay ! might replace it. 

740. funeste : haneful, rather than fatal^ is a goôd staple 
translation of this adjective, which is of fréquent occurrence in 
French classic verse. FatefiU, ominovsy sinister, hoding iU are 



66 MITHRIDATE 

Plus je vous parle, et plus, trop faible que je suis, 
Je cherche à prolonger le péril que je fuis. 
Il faut pourtant, il faut se faire violence ; 
Et sans perdre en adieux un reste de constance, 
746 Je fuis. Souvenez-vous, Prince, de m'éviter, 
Et méritez les pleurs que vous m'allez coûter. 

XlPHARÈS ^ 

Ah, Madame . . . Elle fuit, et ne veut plus m'entendre. 
Malheureux Xipharès, quel parti dois-tu prendre? 
On t'aime, on te bannit : toi-même tu vois bien 
760 Que ton propre devoir s'accorde avec le sien. 
Cours par un prompt trépas abréger ton supplice. 
Toutefois attendons que son sort s'éclaircisse ; 
Et s'il faut qu'un rival la ravisse à ma foi, 
Du moins, en expirant, ne la cédons qu'au Roi. ^ 

other possibilities. The parallel line in the Corneille scène 

is : 

Un je ne sais quel charme encor vers vous m'emporte. 

741. The et is archaic : the longer I speak to y ou, the more do 
1 seetv ... 

744. constance : fortitude. 

748. quel parti dois-tu pi^ndfe? where Iws dutyf what ought 
you to do? The phraseology of this scène is curiously like that 
of Corneille's Polyeucte, Act 2, Scène 2. 



ACTE TROISIÈME ^ 

SCÈNE I 

MITHRIDATE, PHARNACE, XIPHARÊS 

MlTHBIDATE 

Approchez, mes enfants. Enfin Theure est venue 756 

Qu'il faut que mon secret éclate à votre vue. 
A mes nobles projets je vois tout conspirer ; 
Il ne me reste plus qu'à vous les déclarer. 

Je fuis : ainsi le veut la fortune ennemie. 
Mais vous savez trop bien Thistoire de ma vie 760 

Pour croire que longtemps soigneux de me cacher, 
J'attende en ces déserts qu'on me vienne chercher. 
La guerre a ses faveurs, ainsi que ses disgrâces. 
Déjà plus d'une fois, retournant sur mes traces, 
Tandis que l'ennemi, par ma fuite trompé, 765 

Tenait après son char un vain peuple occupé, 
Et gravant en airain ses frêles avantages, 

762. attende: in the subjunctive because the form of state- 
ment makes croire, in meaning, a négative "verb of saying or 
thinking." 

763. faveurs ; disgrâces : victories ; defeata, 

765. The allusion is true to history. 

766. char : triiimphal chariot. A translation will not be easy 
to phrase even though the meaning is clear. 

767. The référence is to the brazen tablets on the Capitol at 
Rome. — frêles : peu durables. 

67 



68 MITHRIDATE 

De mes Ëtats conquis enchaînait les images, 
Le Bosphore m'a vu, par de nouveaux apprêts, 

770 Ramener la terreur du fond de ses marais, 
Et chassant les Romains de PAsie étonnée. 
Renverser en un jour l'ouvrage d'une année. 
D'autres temps, d'autres soins. L'Orient accablé 
Ne peut plus soutenir leur effort redoublé. 

776 II voit plus que jamais ses campagnes couvertes 
De Romains que la guerre enrichit de nos pertes. 
Des biens des nations ravisseurs altérés. 
Le bruit de nos trésors les a tous attirés : 
Us y courent en foule ; et, jaloux l'un de l'autre, 

780 Désertent leur pays pour inonder le nôtre. 
Moi seul je leur résiste. Ou lassés, ou soumis, 
Ma fimeste amitié pèse à tous mes amis : 
Chacim à ce fardeau veut dérober sa tête. 
Le grand nom de Pompée assure sa conquête : 

786 C'est l'effroi de l'Asie ; et loin de l'y chercher, 
C'est à Rome, mes jSls, que je prétends marcher. 
Ce dessein vous surprend ; et vous croyez peut-être 
Que le seul désespoir aujourd'hui le fait naître. 

768. On days of triumph, statues representing subjugated 
countries and rivers of conquered lands were carried through 
the streets of Rome. 

771. étonnée : épcmvantée, 

773. The modem form {avives temps y avives soins) sounds 
more old-fashioned than that of Racine. — This speech is one of 
the longest in French dramatic literature, and, says Bernardin, 
perhaps the richest in matter. 

782. pèse à : est un fardeau pour. 

785. C does not mean it. If in doubt as to why, review the 
syntax of the démonstratives. 



ACTE III, SCÈNE I 69 

J'excuse votre erreur ; et, pour être approuvés, 

De semblables projets veulent être achevés. 790 

Ne vous figurez point que de cette contrée 
Par d'éternels remparts Rome soit séparée. 
Je sais tous les chemins par où je dois passer ; 
Et si la mort bientôt ne mç vient traverser, 
Sans reculer plus loin Teffet de ma parole, 795 

Je vous rends dans trois mois au pied* du Capitole. 
Doutez-vous que TEuxin ne me porte en deux jours 
Aux Ueux où le Danube y vient finir son cours? 
Que du Scythe avec moi l'alliance jurée 
De l'Europe en ces lieux ne me livre l'entrée? 800 

Recueilli dans leurs ports, accru de leurs soldats. 
Nous verrons notre camp grossir à chaque pas. 
Daces, Pannoniens, la fière Germanie, 
Tous n'attendent qu'un chef contre la tyrannie. 
Vous avez vu l'Espagne, et surtout les Gaulois, 805 

Contre ces mêmes murs qu'ils ont pris autrefois 
Exciter ma vengeance, et jusque dans la Grèce, 
Par des ambassadeurs accuser ma paresse. 

795. l'effet : la réalisatiorif l'accomplissement. 

796. je vous rends dans trois mois : je v(ms aurai conduits 
dans trois mois. 

797. The plan of Mithrîdates was physically impossible. It 
would take him ten days to reach the mouth of the Danube f rom 
the Bay of Kaffa, and at least six months to reach Rome. ' Racine's 
son stated, with rather doubtful cogency, that the poet intended 
to show that Mithridates was blinded by passion, hence full of 
rash hopes. 

803. fière : farouche j qui ne se laisse pas apprivoiser f ni 
dompter. The Dacians and Pannonians occupied what is now 
Roumania, Transylvania, and Hungary. 



70 



MITHRIDATE 




ACTE III, SCÈNE l 71 

Ils savent que sur eux prêt à se déborder, 

Ce torrent, s'il m'entraîne, ira tout inonder ; sio 

Et vous les verrez tous, prévenant son ravage, 

Guider dans l'Italie et suivre mon passage. 

C'est là qu'en arrivant, plus qu'en tout le chemin, 
Vous trouverez partout l'horreur du nom romain. 
Et la triste ItaUe encor toute fumante 815 

Des feux qu'a rallumés sa liberté mourante. 
Non, Princes, ce n'est point au bout de l'univers 
Que Rome fait sentir tout le poids de ses fers ; 
Et de près inspirant les haines les plus fortes. 
Tes plus grands ennemis, Rome, sont à tes portes. 820 

Ah ! s'ils ont pu choisir pour leur libérateur 
Spartacus, un esclave, un vil gladiateur. 
S'ils suivent au combat des brigands qui les vengent, 
De quelle noble ardeur pensez-vous qu'ils se rangent 
Sous les drapeaux d'un roi longtemps victorieux, 825 

Qui voit jusqu'à Cyrus remonter ses aïeux? 
Que dis-je? En quel état croyez-vous la surprendre? 
Vide de légions qui la puissent défendre. 
Tandis que tout s'occupe à me persécuter. 
Leurs femmes, leurs enfants pourront-ils m'arrêter? 830 

Marchons ; et dans son sein rejetons cette guerre 
Que sa fureur envoie aux deux bouts de la terre. 
Attaquons dans leurs murs ces conquérants si fiers ; 
Qu'ils tremblent, à leur tour, pour leurs propres foyers. ^ 

Sog. se déborder is old-fashioned, in the reflexive form. 

8i2. The overweening pride of Mithridates is remarked upon 
by Bernardin. The allied races are io come to meet him and 
guide him to Italy ; but, in Italy, his army will be in the lead. 

822. The vil gladiateur, Spartacus, was active about 70 b.c. 

833-834. The rhyme is not good. 



72 MITHRIDATE 

835 Annibal Ta prédit, croyonsnen ce grand homme, 
<r Jamais on ne vaincra les Romains que dans Rome. 
V Noyons-la dans son sang justement répandu. 

Brûlons ce Capitole où j'étais attendu. 

Détruisons ses honneurs, et faisons disparaître 
840 La honte de cent rois, et la mienne peut-être ; 

Et la flamme à la main effaçons tous ces noms 

Que Rome y consacrait à d'étemels affronts. 
Voilà Tambition dont mon âme est saisie. 

Ne croyez point pourtant qu'éloigné de l'Asie 
845 J'en laisse les Romains tranquilles possesseurs. 

Je sais où je lui dois trouver des défenseurs 

Je veux que d'ennemis partout enveloppée, 

Rome rappelle en vain le secours de Pompée. 

Le Parthe, des Romains comme moi la terreur, 
860 Consent de succéder à ma juste fureur"; 

Près d'imir avec moi sa haine et sa famille, 

835. en : in the maUer; but thèse exact words need not be in 
the rendering. 

836. Note that it is dans Rome for the ancient city, but à 
Rome for the modem. See also dans Nymphée^ Une 112. 

838. attendu : that is, as a captive. 

839. honneurs : omementSy titres de gUnrey trophées. 

840. It is quite possible that, at the report of the death of 
Mithridates, Rome had aiready inscribed his name on the airain 

' orgueUleux of which the poet speaks. 
843. saisie : occupée, possédée. 

849. le Parthe : le roi des Parthes. 

850. The Une is not quite clear. Succéder, in its conmion 
meaning, would seem to imply that the plan conceming Phamaces 
is not to be carried out. Bernardin proposes : Consent d* entrer 
dans (de s'unir à) ma juste fureur. In modem diction it would 
be consent à. 



ACTE III, SCÈNE I 73 

n me demande un fils pour époux à sa fille. 

Cet honneur vous regarde, et j'ai fait choix de vous, 

Pharnace : allez, soyez ce bienheureux époux. 

Demain, sans différer, je prétends que TAurore 855 

Découvre mes vaisseaux déjà loin du Bosphore. 

Vous que rien n'y retient, partez dès ce moment. 

Et méritez mon choix par votre empressement. 

Achevez cet hymen ; et repassant TEuphrate, 

Faites voir à l'Asie un autre Mithridate. seo 

Que nos tyrans communs en pâlissent d'effroi. 

Et que le bruit à Rome en vienne jusqu'à moi. 

Pharnace 

Seigneur, je ne vous puis déguiser ma surprise. 

J'écoute avec transport cette grande entreprise ; 

Je l'admire ; et jamais un plus hardi dessein 865 

Ne mit à des vaincus les armes à la main. 

Siutout j'admire en vous ce cœur infatigable 

Qui semble s'affermir sous le faix qui l'accable. 

Mais si j'ose parler avec sincérité, 

r 

En êtes-vous réduit à cette extrémité? 870 

Pourquoi tenter si loin des courses inutiles, 

Quand vos États encor vous offrent tant d'asiles. 

Et vouloir affronter des travaux infinis, 

Dignes plutôt d'un chef de malheureux bannis 

Que d'un roi qui naguère, avec quelque apparence, 875 

De Faurore au couchant portait son espérance, 

Fondait sur trente États son trône florissant, 

866. vaincus : Phamaces does not hesitate to use terms that 
make Mithridates wince. 

873. travaux : foHgtieSf dangers. 



74 MITHRIDATE 

Dont le débris est même un empire puissant? 

Vous seul, Seigneur, vous seul, après quarante années, 

880 Pouvez encor lutter contre les destinées. 
Implacable ennemi de Rome et du repos, 
Comptez-vous vos soldats pour autant de héros? 
Pensez-vous que ces cœurs, tremblants de leur défaite, 
Fatigués d'une longue et pénible retraite, 

886 Cherchent avidement sous un ciel étranger 
La mort, et le travail pire que le danger? 
Vaincus plus d'une fois aux yeux de la patrie, 
Soutiendrdht-ils ailleurs un vainqueur en furie? 
Sera-t-il moins terrible, et le vaincront-ils mieux 

890 Dans le sein de sa ville, à Paspect de ses dieux? 

Le Parthe vous recherche et vous demande un 
' gendre. 
Mais ce Parthe, Seigneur, ardent à nous défendre 
Lorsque tout Tunivers semblait nous protéger, 
D'un gejidre sans appui voudra-t-il se charger? u^.1^ 

896 M'en irai-je moi seul, rebut de la fortune, ^ 
Essuyer l'inconstance au rarthe si conmiune ; 
Et peut-être, pour fruit d'un téméraire amour, 
Exposer votre nom au mépris de sa cour? 
Du moins, s'il faut céder, si contre notre usage 

900 II faut d'un suppUant emprunter le visage, 

Sans m'envoyer du Parthe embrasser les genoux. 
Sans vous-même implorer des rois moindres que 

vous. 
Ne pourrions-nous pas prendre une plus sûre voie? 

883. de : par suite de. 

886. travail : peine, fatigue. 

896. si commune : si accoutumée, si habituéUe. 



ACTE III, SCÈNE I 75 

Jetons-nous dans les bras qu'on nous tend avec joie. 
Rome en votre faveur, facile à s'apaiser ... 906 

XlPHARÈS T~ 

V 
Rome, mon frère ! ciel ! qu'osez-vous proposer? 

Vous voulez que le Roi s'abaisse et s'hiunilie? 

Qu'il démente en un jour tout le cours de sa vie? 

Qu'il se fie aux Romains, et subisse des lois 

Dont il a quarante ans défendu tous les Rois? 9io 

Continuez, Seigneur : tout vaincu que vpus êtes, 

La guerre, les périls sont vos seules retraites. 

Rome poursuit en vous im ennemi fatal. 

Plus conjuré contre elle et plus craint qu'Annibal. 

Tout couvert de son sang, quoi que vous puissiez faire, 915 

N'en attendez jamais qu'une paix sanguinaire. 

Telle qu'en un seul jour un ordre de vos mains 

La donna dans l'Asie à cent mille Romains. 

Toutefois épargnez votre tête sacrée. 

Vous-même n'allez point, de contrée en contrée, 920 

Montrer aux nations Mithridate détruit, 

Et de votre grand nom diminuer le bruit. ., 

905. facile à s'apaiser : qui a' apaisera facilement, 

913. un ennemi fatal : un ennemi que le destin lui impose, un 

ennemi qui ne peui-^tre qu* ennemi, 

9x4. conjuré has been criticized as inept hère. Apparently 

it means : dangerous a^ a ploUer, 

918. Mithridates gave secret orders that on a certain day ail 
Italians in hk kingdom, including women and children, should 
be slaugHtered : some say 80,000 ; others 150,000. 

919. Lanson paraphrases : Épargnez votre tête, car elle est 
sacrée. 

9aa. bruit : écUU, retentissement, gloire, renommée. 



78 mithridat;e 

MiTHRIDATB 

Ma volonté, Prince, vous doit suffire. 
960 Obéissez. C'est trop vous le faire redire. 

Pharnace 

Seigneur, si pour vous plaire il ne faut que périr, 
Plus ardent qu'aucun autre on m'y verra courir. 
Combattant à vos yeux, permettez que je meure. 

MiTHRIDATE 

Je/ vous ai commandé de partir tout à l'heure ; 
965 Mais après ce moment . . . Prince, vous lïi'entendez, 
Et vous êtes perdu si vous me répondez. 

Pharnace 

Dussiez-vous présenter mille morts à ma vue, 
Je ne saurais chercher une fille inconnue. 
Ma vie est en vos mains. 

MiTHRIDATE 

Ah ! c'est où je t'attends. 

960. Make it persônal. Cf. Une 539. 

964. tout à rheure : sur V heure, aussitôt. See Une 413, n.; 
and note that this Umt à Vheure îs old-fashioned in that it means 
<U once instead of very soon. 

965. entendez : comprenez. 

969. Ahl c'est où je t'attends : Note the change to the 
singular, the electric effect of which is not even mentîoned by 
the French annotators, so obvions is it to the French reader. 
The wrathful Mithridates uses everyday speech : ThaVs vShai 



ACTE III, SCÈNE I 79 

Tu ne saurais partir, perfide, et je t^entends. 970 

Je sais pourquoi tu fuis Thymen où je t'envoie : 

Il te fâche en ces lieux d'abandonner ta proie ; 

Monime te retient. Ton amour criminel 

Prétendait Farracher à Thymen paternel. 

Ni l'ardeur dont tu sais que je l'ai recherchée, 975 

Ni déjà sur son front ma couronne attachée, 

Ni cet asile même où je la fais garder. 

Ni mon juste courroux n'ont pu t'intimider. 

Traître, pour les Romains tes lâches complaisances 

N'étaient pas à mes yeux d'assez noires offenses : ^ ggo 

Il te manquait encor ces perfides amours 

Pour être le supplice et l'horreur de mes jours. 

Loin de t'en repentir, je vois sur ton visage 

Que ta confusion ne part que de ta rage : 

Il te tarde déjà qu'échappé de mes mains 985 

Tu ne coures me perdre, et me vendre aux Romains. 

Mais avant que partir, je me ferai justice : 

Je te l'ai dit. Holà ! gardes. 

/ tlumght y ou were coming to. Geoffroy says : C'est ce choc 
des trois caractères qui distingue cet entretien de Mithridate 
avec ses enfants des autres grandes scènes connues au théâtre, et 
qui lui assure le premier rang comme conception théâtral. 

970. entends : see Une 965. 

973. Phamaces thinks that Xiphares has betrayed him. 

978. ont : excellent example of the use of a plural verb with 
ni . . . ni . . . 

982. le supplice : le cruel tourment. 

987. avant que partir is old-fashioned for avant de -partir y 
whîch latter construction dates, however, from about 1725. As 
to je me ferai justice, see Une 1035 and Vocabulary. 

988. In the Grands Écrivains édition, the Holà I gardes is a 
part of Scène II. 



80 MITHRIDATE 

SCÈNE II 
<\ MITHRIDATE, PHARNACE, XIPHARÊS, Gardes 

MiTHRIDATE 

Qu'on le saississe. 
Oui, lui-même, Pharnace. Allez, et de ce pas 
990 Qu'enfermé dans la tour on ne le quitte pas. 

Pharnace 

Hé bien ! sans me parer d'une innocence vaine 
Il est vrai, mon amour mérite votre haine. 
J'aime : l'on vous a fait un fidèle récit. 
Mais Xipharès, Seigneur, ne vous a pas tout dit. 
995 C'est le moindre secret qu'il pouvait vous apprendre ; 
Et ce fils fidèle a dû vous faire entendre 
Que des mêmes ardeurs dès longtemps enflanmié. 
Il aime aussi la Reine, et même en est aimé. 

SCÈNE III 

MITHRIDATE, XIPHARES 

Xipharès 

Seigneur, le croirez-vous qu'un dessein si coupable . . . 

989. The guards hesitate to lay hands on the heir apparent. 
995. One would say, in prose, le moindre deè secrets, 

998. The last five words of Phamaces are aimed with deadly 
effectiveness at the insanely jealous heart of Mithridates. Line 
1000 shows how fully the crafty old king has command of himself . 

999. The le is redundant, but is commonly used for rhetorical 
intensity by Racine. 



ACTE III, SCÈNE IV 81 



MiTHRIDATB 



Mon fils, je sais de quoi votre frère est capable. looô 

Me préserve le ciel de soupçonner jamais 

Que d'un prix si cruel vous payez mes bienfaits, 

Qu'un filç qui fut toujours le bonheur de ma vie 

Ait pu percer ce cœur qu'un père lui confie ! 

Je ne le croirai point. Allez : loia d'y songer, loos 

Je ne vais désormais penser qu'à nous venger. 



SCENE IV 

MITHRIDATE 

Je ne le croirai point? Vain espoir qui me flatte ! 
Tu ne le crois que trop, malheureux Mithridate. 
' Xipharès mon rival? et d'accord avec lui 
La Reine aurait osé me tromper aujourd'hui? loio 

Quoi? de quelque côté que je tourne la vue, 

1002-04. payez . . ., ait pu percer ... : The possibilities of 
gharp distinction between indicative and subjimctive are probably 
no better éxemplified anywhere than hère. The student must 
not forget that the hortatory subjimctive préserve has no in- 
fluence as to the later subjimctive. There is no such thing as 
" subjimctive by attraction " in French ; nor does indirect dis- 
course ever hâve any other manifestation in French than in 
the order of words. Some think that payez should be payiez, 

1005. le : U, 

1007. qui me flatte : in full, which spares my feelings. Com- 
pare : " Lay the flattering unction to my soûl." If we use Eliaa- 
bethan diction, empty^ flattering hope .' is a possible rendering. 

loio. Cf., as to mode usage, Une 671. 



82 MITHRIDATE 

La foi de tous les cœurs est pour moi disparue ? 

Tout m'abandonne ailleurs? tout me trahit ici? 

Phamace, amis, maîtresse ; et toi, mon fils, aussi? 
1015 Toi de qui la vertu consolant ma disgrâce . . 

Mais ne connais-je pas le perfide Pharnace? 

Quelle faiblesse à moi d'en croire un furieux 

Qu'arme contre son frère un courroux envieux. 

Ou dont le désespoir me troublant par des fables, 
1020 Grossit, pour se sauver, le nombre des coupables ! 

Non, ne Ten croyons point ; et, sans trop nous presser, 

I0I2. foi : fidélité, bonne foi. The inversion of the de plirase 
is hère so violent that one French editor thinks it wise to wam 
Freiyîh collegians of it. Disparaître may take avoir or être as an . 
auxiliary. There is a distinction, however, in that the être usage 
records the resnlt of action, while the avoir usage records action. 

1014. maîtresse : affianced bride. — et toi, mon fils, aussi? 
How like Et tu. Brute ! the original of which, by the way, was ■ 
Tu quoque, fili ! as current in Racine's day ! 

1015. de qui could be only dont in modem prose. — disgrâce : 
See note on Une 95. 

1017. en : See line 835, n. 

1018. The reader who is deceived, for the fraction of a second, 
by the order of words in this line, should strenuously review the 
subject of relative pronouns. 

1019. troublant : confusing, stirring up. It is good policy 
never to translate trouble or troubler by the English parallel. Cf. 
the proverb : Eau trouble, pêche claire, and observe that trouble 
is the opposite of claire — hence roily, not choppy. — dont le 
désespoir : who, in his despair. 

102 1. le : him. Cf. Une 1005. Hère the en settles the 
question. Above, usage only détermines the meaning ; though 
Unes 1008 and 1009 make évidence for the non-French reader. — 
sans trop nous presser : The order is correct also for modem 
prose ; trop is a semi-conjunctive. 



ACTE III, SCÈNE IV 83 

Voyons, examinons. Mais par où commencer? 

Qui m'en éclaircira? quels témoins? quel indice? . . ,. 

Le ciel en ce moment m'inspire un artifice. 

Qu'on appelle la Reine. Oui, sans aller plus loin, 1025 

Je veux Touïr. Mon choix s'arrête à ce témoin. 

L'amour avidement croit tout ce qui le flatte. 

Qui peut de son vainqueur mieux parler que l'ingrate? 

Voyons qui son amour accusera des deux. 

S'il n'est digne de moi, le piège est digne d'eux. 1030 

Trompons qui nous trahit ; et pour connaître un traître, 

Il n'est point de moyens . . . Mais je la vois paraître : 

Feignons ; et de son cœur, d'un^ vain espoir flatté. 

Par un mensonge adroit tirons la vérité. 



1022. par où commencer is good modem French usage also. 

1023. en : inthe maUer. 

1025. qu'on appelle la Reine is spoken to a slave or guard 
who is in attendance. 

1026. mon choix s'arrête à ce témoin: la Reine est le témoin 
que je me décide à interroger. 

1027. ' flatte : wanle to believe. 

1029. Interesting violation of the " longer member last " 
principle of order. 

1030. Clever self-exculpation ; quite worthy of Mithridatea, 
and a product of Racine's virile dramatic imagination. 

103 1. The omission of the antécédent démonstrative (hère, 
cdui) is many times more common in French than in English. 
Cf. " Who runs may read." 

1034. A comment of the ceiebrated playgoer Sarcey fat the 
âge of fifty-two) in Le Temps of February 14, 1879 : Mithridate 
se rencontre avec Harpagon dans le choix de la ruse. £h ! mais, 
c'est que tous les deux ont soixante ans. L'un est un usurier, et 
l'autre un grand roi ; la différence est grande, la distance énorme ; 
mais tous deux sont des vieillards amoureux, et c'est pour cela 
qu'ils s'avisent du même stratagème. 



y 



84 MITHRIDATE 

SCÈNE V 

MITHRIDATE, MONIME 

MiTHRIDATE 

1036 Enfin j'ouvre les yeux, et je me fais justice. 
•C'est faire à vos beautés un triste sacrifice, 
Que de vous présenter. Madame, avec ma foi, 
Tout l'âge et le malheur que je traîne avec moi. 
Jusqu'ici la fortune et la victoire mêmes 

1040 Cachaient mes cheveux blancs sous trente diadèmes. 
Mais ce temps-là n'est plus. Je régnais, et je fuis. 
Mes ans se sont accrus ; mes honneurs sont détruits ; 

1035. j'ouvre les yeux : je me rends à V évidence. — je me fais 
Justice : je me rends justice. See Une 987 and Vocabulary. 

1036. Change the impersonal construction to personal. Cf. 
Unes 539 and 960. 

1037. que îs the ^' sign-post " que^ pointing out the subject ; 
de is the concomitant of the infinitive. For additional examples 
of.the sign-post que^ see the note on Une 1048. — foi : Urne. In 
Ënglish we say to présent a persan with something — which is faire 
cadeau de quelque chose à quelqu'un. Hence avec in this Une must 
be rendered together withj or the sentence must be recast as to 
order of phrases. 

1039. mêmes appUes to victoire only. It is an adverb, with 
an s added by conventionality of verse orthography. 

1041. The power of tenses is great in French. Je régnais, et 
je fuis : / was a hing ; naw I am a fugitive. The historian 
Mignet fumished an idéal spécimen of richness of tense effect 
in his chapter on La chute de Robespierre : On observait encore 
quelques formes ; on les supprima . . Les accusés avaient 
des défenseurs ; ils n'en eurent plus ... On les jugeait in- 
dividueUement ; on les jugea en masse. 



Facsimilb or a page of Mitbhidatb pbom thb last 

EDITION PUBLISHED DURINO THB LIFE or BaCINE 



86 , MITHRIDATE 

Et mon front, dépouillé d'un si noble avantage, 

Du temps, qui Ta flétri, laisse voir tout Toutrage. 
1045 D'ailleurs mille desseins partagent mes esprits : 

D'un camp prêt à partir vous entendez les cris ; 

Sortant de mes vaisseaux, il faut que j'y remonte. 

Quel temps pour un hymen qu'une fuite si prompte. 

Madame ! Et de quel front vous unir à mon sort, 
1060 Quand je ne cherche plus que la guerre et la mort? 

Cessez pourtant, cessez de prétendre à Pharnace. 

Quand je me fais justice, il faut qu'on se la fasse. 

1043. avantage is a weak word, eay the French commentators. 
Translate: distinction. 

1044. There never was a finer statement about baldness or 
grayness. Racine came to it again in AthaliSj Act 2, Scène 5 : 

Pour réparer des ans l'irréparable outrage. 

1045. esprks : The plural is poetic usage. Lanson in- 
terprets : V attention j V effort ou V activité de Vintdligence. 

1047. The French is vivid ; but a literal translation will not 
be. Revise so as to give vividness. 

1048. qu'une fuite : the sign-post que^ placed before the 
subject when it is not in the subject's place, or is next another 
substantive, or is complicated. The translation of the sign-post 
que, if there is any translation, is namely. Cf. Qu'est-ce que 
c'est que cela? C'est une belle chose que de garder le secret. 
C'est une chose sérieuse que la mort. C'est un excellent meuble 
qu'un fauteuil. 

1049. de quel front : avec quelle impudence oser. — mon sort : 
after canvassing the various meanings of this word, will not me 
or myself turn out to be the best translation, unless we make 
vous, on the other hand, equal to votre sort. 

1052. Detaching justice from fais justice and giving it a strict 
pronominal représentative in la, is forced usage. Literalness will 
hardly do hère ; but something like m,ake concessions to prindple 
will serve. 



ACTE III, SCÈNE V 87 

Je ne souffrirai point que ce fils odieux, 

Que je viens pour jamais de bannir de mes yeux, 

Possédant une amour qui me fut déniée, 1055 

Vous fasse des Romains devenir Talliée. 

Mon trône vous est dû. Loin de m'en repentir, 

Je vous y place même, avant que de partir, 

Pourvu que vous vouliez qu'ime main qui m*est chère. 

Un fils, le digne objet de Tamour de son père, 106O 

Xipharès, en un mot, devenant votre époux, 

Me venge de Pharnace, et m'acquitte envers vous. 

MONIME 

Xipharès ! lui. Seigneur? 

MiTHRIDATB 

Oui, lui-même. Madame. 
D'où peut naître à ce nom le trouble de votre âme? 
Contre un si juste choix qui peut vous révolter? 1065 

Est-ce quelque mépris qu'on ne puisse dompter? 
Je le répète encor : c'est un autre moi-même, 

1055. déniée is old-fashioned ; refusée should be mentally 
substituted by the English speaker. 

1057. mo^ trône vous est dû is a little problem in non-literal- 
ness. 

1058. avant que de partir is old-fashioned for avant de 'partir. 
See another archaic usage in line 987. Most éditions hâve no 
comma after même. 

1059. main : A case of metônymy, unacceptable to French 
critics, and obviously calling, in translation, for substitution of 

the possessor. ^ 

1064. trouble : Cf. line 1019. 

1065. qui is old-fashioned for gtCestrce qui, 
X066. mépris : répidaion, dégoût. 



90 - MITHRIDATE 



MONIME 



En quelle extrémité, Seigneur, suis-je réduite? 
Mais enfin je vous crois, et je ne puis penser 
Qu'à feindre si longtemps vpus puissiez vous forcer. 
Les Dieux me sont témoins qu'à vous plaire bornée 

1100 Mon âme à tout son sort s'était abandonnée. 
Mais si quelque faiblesse avait pu m'alarmer, 
Si de tous ses efforts mon cœur a dû s'armer, 
Ne croyez point. Seigneur, qu'auteur de mes alarmes, 
Pharnace m'ait jamais coûté les moindres larmes. 

1105 Ce fils victorieux que vous favorisez, 

Cette vivante image en qui vous vous plaisez, 
Cet ennemi de Rome, et cet autre vous-même. 
Enfin ce Xipharès que vous voulez que j'aime . . . 



MiTHRIDATE 

Vous l'aimez ? 

MoNIME 

Si le sort ne m'eût donnée à vous, 
1110 Mon bonhieur dépendait de l'avoir pour époux. . 

1096. It is réduire à in Une 870 ; daTis was aiso used in Racine's 
time. . 

1099. bornée : ne s' écartant pas du sain de. 

1104. Tears are, throughout French poetry, the sign or em- 
bodiment of deep émotion. The corresponding English word 
should rarely be tears. 

1 105-7. Rereadlines 1067-70. 

II 10. dépendre de with an infinitive is rare. 



ACTE III, SCÈNE VI 91 

Avant que votre amour m'eût envoyé ce gage, 
Nous nous- aimions. . . . Seigneur, vous changez de 
visage. 

MiTHRIDATB 

Non, Madame. . Il suffit. Je vais vous Tenvoyer. 
Allez. Le temps est cher. Il le faut employer. 
Je vois qu'à m'obéir vous êtes disposée. iii5 

Je suis content. 



A^ 



MoNlME, en s'en allant 
O ciel ! me serais-je abusée? 

SCÈNE VI 

MITHRIDATE 

Ils s'aiment. C'est ainsi qu'on se jouait de nous. 
Ah ! fils ingrat. Tu vas me répondre pour tous. 

iiii. votre amour: mechanically, y ou in your love; re- 
phrased, the translation may be: hefore your affection had prompted 
you ta send . . . — ce gage is le bandeau royal. 

II 12. vous changez de visage : you change color. Thereisan 
anecdote about this Une which is so amusing that it bas been 
assîgned to more than one occasion. Beaubourg, whose histrionic 
career extended from 1691 io 1718, was extremely homely. He 
played Mithridates " opposite " the celebrated Adrienne Le- 
couvreur (1692-1730). At on^ performance, after the words 
Vous changez de visage, there was a cry from the pit : Laissez^ 
faire ! 

III 3-1 6. Note the brief, trenchant utterances of Mithri- 
dates as he tries to conceal the most violent of bis émotions. 

11 17. ils s'aiment : Bernardin says : C'est moins un cri 
qu'un rugissement. 

11 18. me répondre pour : pay the debt of. 



92 MITHRIDATE 

Tu périrai. Je sais combien ta renommée 
1120 Et tes fausses vertus ont séduit mon armée. 
Perfide, je te veux porter des coups certains : 
Il faut, pour te mieux perdre, écarter les mutins, 
Et faisant à mes yeux partir les plus rebelles. 
Ne garder près de moi que des troupes fidèles. 
1125 Allons. Mais, sans montrer un visage offensé, 
' Dissimulons encor, comme j'ai commencé. 

1125. Deal with sans carefully, perhaps to the extent of 
making a sentence out of the dépendent clause. 



ACTE QUATRIÈME 

SCÈNE I 

I 

MONIME, PHiEDIME 

MONIME 

Phsedime, au nom des Dieux, fais ce que je désire : 

Va voir ce qui se passe, et reviens me le dire. 

Je ne sais ; mais mon cœur ne se peut rassurer. 

Mille soupçons affreux viennent me déchirer. 1130 

Que tarde Xipharès? et d'où vient qu'il diffère 

A seconder des vœux qu'autorise son père? 

Son père, en me quittant, me Fallait envoyer. 

Mais il feignait peut-être : il fallait tout nier. 

Le Roi feignait? Et moi, découvrant ma pensée ... 1135 

O Dieux, en ce péril m'auriez- vous délaissée? 

Et se pourrait-il bien qu'à son ressentiment 

Mon amour indiscret eût livré mon amant? 

Quoi, Prince? quand, tout plein de ton amour extrême, 

Pour savoir mon secret tu me pressais toi-même, 1140 

1x31. que : pourquoi. — diffère : with this verb either à or de 
could be uaed in Racine's time. Racine preferred différer à. 

X132. seconder : servir de second à une personne ^ d* appui à 
une chose. See Vocabulary. 

1 134. il fallait tout nier : Cf. Unes 488 and 574. Labbé takes 
pains to wam French collegians that this means f aurais dû tout 
nier. 

X137. pourrait-il : Cf. Une 637. 

1x39. See Une 55 and note. 

93 



MITHRIDATE 



IsJ 



''11 
Il . 



f -i-3 



ACTE IV, SCÈNE I 95 

Mes refus trop cruels vingt fois te Font caché ; 

Je t'ai même pimi de Tavoir arraché ; 

Et quand de toi peut-être un père se défie, 

Que dis-je? quand peut-être il y va de ta vie, 

Je parle ; et trop facile à me laisser tromper, 1145 

Je lui marque le cœur où sa main doit frapper. 

I ... 

Ph^dime 

Ah ! traitez-le, Madame, avec plus de justice : 

Un grand roi descend-il jusqu'à cet artifice? 

A prendre ce détour qui Taurait pu forcer? 

Sans murmure, à l'autel vous l'alliez devancer. ngo 

Voulait-il perdre un fils qu'il aime avec tendresse? 

Jusqu'ici les effets secondent sa promesse : 

Madame, il^vous disait qu'un important dessein. 

Malgré lui, le forçait à vous quitter demain ; 

Ce seul dessein l'occupe ; et hâtant son voyage, 1155 

Lui-même ordonne tout, présent sur le rivage. 

Ses vaisseaux en tous lieux se chargent de soldats, 

Et partout Xipharès accompagne ses pas. 

D'un rival en fureur est-ce là la conduite? 

Et voit-on ses discours démentis par la suite? neo 

1142. How had she " punished " him? 

1144. que dis-je : Cf. line 85. 

1148. Labbé says : Mithridate est grand par sa haine des 
Romains et misérable par son amour pour Monime. — What 
does he mean by misérable f 

1153. secondent : hère in the old-fashioned sensé of suivre ; 
les effets is, hère, almost facts, Labbé shows the value of " ren- 
dering by reversai '' by paraphrasing : Les effets ne 'démentent 
'point sa promesse. Lanson suggests : sont d'accord avec. 

1160. la suite : the event. 



98 MITHRIDATE 

MONIME 

Qu'entends-je? On me disait . . . Hélas! ils m'ont 
trahie. 

XlPHARÈS 

1185 Madame, je ne sais quel ennemi couvert, 
Révélant nos secrets, vous trahit, et nie perd. 
JViais le Roi, qui tantôt n'en croyait point Pharnace, 
Maintenant dans nos cœurs sait tout ce qui se passe. 
Il feint, il me caresse, et cache son dessein ; 

1190 Mais moi, qui dès Tenfance élevé dans son sein, 
De tous ses mouvements ai trop d'intelligence. 
J'ai lu dans ses regards sa prochaine vengeance. 
Il presse, il fait partir tous ceux dont mon malheur 
Pourrait à la révolte exciter la douleur. 

1195 De ges fausses bontés j'ai connu la contrainte. 
Un mot même d'Arbate a confirmé ma crainte, 
Il a su m'aborder ; et les larmes aux yeux : 
(( On sait tout, m'a-t-il dit : sauvez-vous de ces lieux.» 
Ce mot m'a fait frémir du péril de ma reine, 

11 84. A note of Louis Racine : Quelle peinture de passion! 
Tous mots entre-coupés ; et, par un reste de respect, elle ne 
nomme pas le traître. Elle dit au pluriel : Ils m'ont trahie! 

11 85. couvert : poetic for caché ; but the English covert will 
do. 

11 90. dans son sein : in close intimacy with him. 

1191. mouvements means motions or emo^toTis. Which hère? 
— trop ... : ordy too much ... 

1195. Tai deviné h. violence qu'il se faisait à lui-même pour 
me m>ontrer des bontés. 

1197. il a su : il a, sans éveiUer de soupçons j trouvé le moyen 
de , . . 



ACTE IV, SCÈNE II 99 

Et ce cher intérêt est le seul qui m'amène, 1200 

Je vous crains pour vous-même ; et je viens à genoux 

Vous prier, ma Princesse, et vous fléchir pour vous. 

Vous dépendez ici d'une main violente, 

Que le sang le plus cher rarement épouvante ; 

Et je n'ose vous dire à quelle cruauté 1205 

Mithridate jaloux s'est souvent emporté. 

Peut-être c'est moi seul que sa fureur menace ; 

Peut-êtrç, en me perdant, il veut vous faire grâce. 

Daignez, au nom des Dieux, daignez en profiter ; 

Par de nouveaux refus n'allez point l'irriter. 1210 

Moins vous l'aimez, et plus tâchez de lui complaire ; 

Feignez, efforcez-vous : songez qu'il est mon père. 

Vivez ; et permettez que dans tous mes malheurs 

Je puisse à votre amour ne coûter que des pleurs. 

MONIME 

Ah ! je vous ai perdu I 

XlPHARÈS 

Généreuse Monime, 1215 

Ne vous imputez point le malheur qui m'opprime. 

1200. ce cher intérêt is a geniiine problem in re-phrasing. 

1201. je vous crains pour vous-même : He fears that Monime 
will bring death to herself by refusing to marry Mithridates. 

1202. ma Princesse : Labbé makes thèse words the occasion 
for a protest against the dictum that princesse in Trench tragedy 
suggests the langage de la galanterie of the seventeenth century. 

121 1. moins ... et plus ... : Cf. Une 741. 

1212. songez qu'il est mon père : It is the faithfnl son, rather 
than the lover, who speaks. Songez has hère, as sb generally in 
everyday modem French, the meaning bear in mindf hâve in mind. 

1215. -^1 j® vo}ï& ai perdu : Note of Bernardin : Monime 



100 ( MITHRIDATE 

Votre seule bonté n'est point ce qui me nuit : 
Je suis un malheureux que le destin poursuit ; 
C'est lui qui m'a ravi l'amitié de mon père, 
1220 Qui le fit mon rival, qui révolta ma mère, 
Et vient de susciter, dans ce moment affreux. 
Un secret ennemi pour nous trahir tous deux. 

MONIME 

Hé quoi? cet ennemi, vous l'ignorez encore? 

XlPHARÈS 

Pour surcroît de douleur, Madame, je l'ignore. 
1225 Heureux si je pouvais, avant que m'immoler, 
Percer le traître cœur qui m'a pu déceler ! 

MoNIME 

Hé bien ! Seigneur, il faut vous le faire connaître. 
Ne cherchez point ailleurs cet ennemi, ce traître ; 

n'a pas la force d'en dire plus long ; c'est une explosion de 
douleur ; et la Reine s'arrête, suffoquée par l'émotion. — The 
English reader must bear in mind that perdu does not mean, 
hère, lost. — Labbé exclaims : Comme ce cri est naturel ! et 
quelle perfection dans le rôle de Monime ! 

12x8. poursuit: persécutes. Both words corne from the Latin 
perseqiuyr. 

1219. c^est lui : c'est le destin, 

1221. dans ce moment affreux is a good spécimen of pure 
filling. Such a phrase (known in the critic's jargon as une 
cheville) is occasionally met in the French Alexandrine, when a 
one-and-a-half-Une thought must fill a couplet. Racine has 
not many such cases. The second half of Une 199 is another 
good example of a cheville. 

.1226. déceler : découvrir, dénoncer. 



ACTE IV, SCÈNE II 101 

Frappez : aucun respect ne vous doit retenir. 

J'ai tout fait ; et c'est moi que vous devez punir. 1230 

X1PHARÈ8 
Vous ! 

MONIME 

Ah ! si vous saviez, Prince, avec quelle adresse 
Le cruel est venu surprendre ma tendresse ! 
Quelle amitié sincère il affectait pour vous ! 
Content, s'il vous voyait devenir mon époux ! 
Qui n'aurait cru . . .? Mais non, mon amour plus 

timide 1235 

Devait moins vous livrer à sa bonté perfide. 
Les Dieux qui m'inspiraient, et que j'ai mal suivis, 
M'ont fait taire trois fois par de secrets avis. 
J'ai dû continuer; j'ai dû dans tout le reste . . . 
Que sais-je enfin? j'ai dû vous être moins funeste ; 1240 

laag. respect : égards considération^ 

lasa. surprendre : découvrir le secret de. 

ia33. amitié is not friendship. Cf. Une 347. 

lass. plus timide : moins confiant. Rendering by reversai. 

lajô. devait : aurait dû ; but still the English phrasing of 
the passage will not be easy. 

1338. trois fois : The're are, at the utmost, only two réticences, 
said Mlle Clairon, famous in the rôle of Monime. Racine shows 
unmistakably only one, at Une 1073. Line 1083 could probably 
be counted as another. Mlle Clairon made a third with a jeu 
de visage at Unes 1087-1088. 

ia39. j'ai dû : f aurais dûy this time in the non>continuous ' 
sensé. At this definite tirnsy in this particular case, I ov^fU to hâve, 
etc. The development of devoir in its ougfU phases has taken 
away some possibiUties of tense distinction which existed in 
Racine's time. 



102 MITHRIDATE 

J^ai dû craindre du Roi les dons empoisonnés, 
Et je m'en punirai, si vous me pardonnez. 

XlPHARÈS 

Quoi? Madame, c'est vous, c'est Tamour qui m'expose? 

Mon malheur est parti d'une si belle cause ? 

1245 Trop d'amour a trahi nos secrets amoureux ? 

Et vous vous excusez de m'avoir fait heureux? 

Que voudrais-je de plus? glorieux et fidèle. 

Je meurs. Un autre sort au trône vous appelle. 

Consentez-y, Madame ; et, sans plus résister 

1250 Achevez un hymen qui vous y fait monter. 

• » 

MONIME 

Quoi? vous me demandez que j'épouse un barbare 
Dont l'odieux amour pour jamais nous sépare? 

XlPHARÊS 

Songez que ce matin, soumise à ses souhaits. 
Vous deviez l'épouser, et ne me voir jamais. 

MoNIME 

1256 Et connaissais-je alors toute sa barbarie? 

Ne voudriez-vous point qu'approuvant sa furie, ' 
Après vous avoir vu tout percé de ses coups, 
Je suivisse à l'autel un tyrannique époux, 
Et que dans une main de votre sang fumante 

1260 J'allasse mettre, hélas ! la main de votre amante? 

1243- expose : note that the literal équivalent will not do. 

1247. glorieux : fier. A trifle, perhaps more than a trifle, 
vapid. 

1248. sort : destin. 



ACTE IV, SCÈNE IV 103 

Allez : de ses fureurs songez à vous garder, 
Sans perdre ici le temps à me persuader ; 
Le ciel m'inspirera quel parti je dois prendre. 
Que serait-ce, grands Dieux! s'il venait vous sur- 
prendre? 
Que dis-je? On vient. Allez. Courez. Vivez enfin ; 1265 
Et du moins attendez quel sera mon destin. A^ 

SCÈNE III 

MONIME, PHiEDIME 

Ph.«dime 

Madame, à quels périls il exposait sa vie ! 
C'est le Roi. 

MONIME 

Cours Taider à cacher sa sortie. 
Va, ne le quitte point ; et qu'il se garde bien 
^'ordonner de son sort, sans être instruit du mien. 1270 

SCÈNE TV 
MITHRIDATE, MONIME 

MiTHRIDATE 

Allons, Madame, allons. Une raison secrète 

1262. à would be de nowadays. 

1265. Bernardin remarks that the conclusion of this scène 
redeems it of its languor. 

1271. An amusing anecdote about Scène 4 : La scène 
dramatique qui commence ici fut un jour égayée à Lille de la 
façon la plus bizarre. Ducormier, qui jouait le roi de Pont, 



104 MITHRIDATE 

Me fait quitter ces lieux et hâter ma retraite. 
Tandis que mes soldats, prêts à suivre leur roi, 
Rentrent dans mes vaisseaux pour partir avec moi, 
1275 Venez, et qu'à Tautel ma promesse accomplie 
Par des nœuds éternels Tun à Tautre nous lie. 

MONIME 

Nous, Seigneur? 

MiTHRIDATB 

Quoi? Madame, osez-vous balancer? 

MONIME 

Et ne m'avez-vous pas défendu d'y penser? 

était très gros, et il faisait très chaud. En quittant la scèney 
il déposait sa large perruque, pour revêtir un petit bonnet blanc, 
qui étanchait sa sueur. Il entra, par distraction, au IV® acte, 
dans ce costume peu tragique. L'hilarité de la salle fut partagée 
par Monime, qui dut se couvrir le visage du mouchoir dont elle 
s'était armée pour un plus dramatique usage. — Mademoiselle, 
s'écrie Ducormier, cela est de la dernière indécence ! — Ce qui 
est de la dernière indécence, répondit la princesse, c'est le bonnet 
de nuit avec lequel vous venez me conduire à l'autel. Mithri- 
date, qui tenait de la main droite un gigantesque chapeau, porte 
à sa tête la main gauche, et «Pardon, Messieurs, dit-il au par- 
terre, je vois maintenant que c'est moi qui suis un sot.» 

1272. ma retraite : mon départ. 

1273. prêts à suivre leur roi : A French student would perhaps 
not hesitate to use the verb bluffer in commenting on this passage, 
since Yankee slang is sometimes less shocking when taken over 
into the French language. (See the Larousse Cyclopedias.) 
Mithridates talks quite otherwise (1120-1124) when speaking to 
himself. 

1278. d'y penser : de penser à nCunir à voua. 



ACTE IV, SCÈNE IV 105 

MiTHRIDATE 

J'eus mes raisons alors : oublions-les, Madame. 

Ne songez maintenant qu'à répondre à ma flamme. 128O 

Songez que votre cœur est un bien qui m'est dû. 

MONIME 

r 

Hé !. pourquoi donc, Seigneur, me l'avez-vous rendu? 

MiTHRIDATE 

Quoi? pour un fils ingrat toujours préoccupée, 
Vous croiriez . . . 

MONIME 

Quoi? Seigneur, vous m'auriez donc trcnnpée! 

MiTHRIDATE 

Perfide ! il vous sied bien de tenir ce discours, i285 

Vous qui gardant au cœur d'infidèles amours, 

Quand je vous élevais au comble de la gloire, 

M'avez des trahisons préparé la plus noire ! 

Ne vous souvient-il plus, cœur ingrat et sans foi. 

Plus que tous les Romains conjuré contre moi, 1290 

De quel rang glorieux j'ai bien voulu descendre, 

Pour vous porter au trône où vous n'osiez prétendre? 

Ne me regardez point vaincu, persécuté : 

1280. répondre à ma flamme must be considerately dealt 
with. 

1282. rendu : Cf. Byron : Give, O give me back my heart! 

1283. préoccupée pour . . .: V esprit prévenu en faveur de . . . 

1284. croiriez . . . auriez ... : Cf. Une 671. 
X290. conjuré : See line 914 and note. 



106 MITHRIDATE 

^ Revoyez-moi vainqueur, et partout redouté. 

^ 1295 Songez de quelle ardeur dans Éphèse adorée, 

Aux filles de cent rois je vous ai préférée ; 

Et négligeant pour vous tant d'heureux alliés, 

Quelle foule d'États je mettais à vos pieds. 

Ah ! si d'un autre amour le penchant invincible 
1300 Dès lors à mes bontés vous rendait insensible, 

Pourquoi chercher si loin un odieux époux? 

Avant que de partir, pourquoi vous taisiez-vous? 

Attendiez-vous, pour faire im aveu si funeste, 

Que le sort ennemi m'eût ravi tout le reste, 
1305 Et que de toutes parts me voyant accabler. 

J'eusse en vous le seul bien qui me pût consoler? 

Cependant, quand je veux oubUer cet outrage. 

Et cacher à mon cœur cette funeste image. 

Vous osez à mes yeux rappeler le passé, 
1310 Vous m'accusez encor, quand je suis offense. 

Je vois que pour un traître un fol espoir vous flatte. 

A quelle épreuve, ô ciel, réduis- tu Mithridate ? 

Par quel charme secret laissé-je retenir 

Ce courroux si sévère et si prompt à punir? 
1316 Profitez du moment que mon amour vous donne : 

Pour la dernière fois, venez, je vous l'ordonne. 

1297. négligeant : That is to say, ne cherchant pas une reine 
chez eux, — heureux : ^i eussent été heureux d* allier leur maison 
à la mienne. 

1310. offensé is not ojBfended. 

131 X. flatte : Some French commentators remark that this 
Word is hère for rhjrme's sake. If it is forced in French, we may 
expect trouble in the English version. 

13 13. par quel charme : par quel effet surnaturel^ qui tient du 
sortilège. 



ACTE IV, SCÈNE IV 107 

N'attirez point sur vous des périls superflus, 
Pour un fils insolent que vous ne verrez plus. 
Sans vous parer pour lui d'une foi qui m'est due, 
Perdez-en la mémoire, aussi bien que la vue ; 1320 

Et désormais sensible à ma seule bonté, 
Méritez le pardon qui vous est présenté. 

MONIME 

Je n'ai point oublié quelle reconnaissance, 

Seigneur, m'a dû ranger sous votre obéissance. 

Quelque rang où jadis soient montés mes aïeux, 1326 

Leur gloire de si loin n'éblouit point mes yeux. , 

Je songe avec respect de combien je suis née 

Au-dessous des grandeurs d'un si noble hyménée ; 

Et malgré mon penchant et mes premiers desseins 

Pour im fils, après vous le plus grand des himiains, 1330 

Du jour que sur mon front on mit ce diadème. 

Je renonçai. Seigneur, à ce prince, à moi-même. 

Tous deux d'intelligence à nous sacrifier, 

13 19. sans vous parer : sans faire parade. Translate : Do 
not . . ., btU ... 

1320. Racine stretched the French language when he wrote 
perdre la vue as a corrélative of perdre la mémoire. Labbé para- 
phrases the Une : perdez de souvenir le Xipharès que vous ne 
verrez plus. 

1321. sensible à : émue dey touchée par. 

1326. Monime exécutes a discreet counter-boast which wholly 
invalidâtes Mithridates' original (1291-1292). 

1327. de of degree of différence ; literally, hy. Of course the 
passage must be re-phrased. 

1330. après vous is so neat and so French that it does,not 
seem petty. 

1333. A genuine " ablative absolute." 



T 



110 MITHRIDATE 

Qui s'est acquis sur moi ce cruel avantage, 

Et qui me préparant un éternel ennui, 

M'a fait rougir d'un feu qui n'était pas pour lui.. 



MiTHRIDATE 

1355 C'est donc votre réponses? et sans plus me complaire. 
Vous refusez l'honneur que je voulais vous faire ? 
Pensez-y bien. J'attends, pour me déterminer. 

MONIME 

Non, Seigneur, vainement vous croyez m'étonner. 

Je vous connais : je sais tout ce que je m'apprête, 
1360 Et je vois quels malheurs j'assemble sur ma tête ; 

Mais le dessein est pris : rien ne peut m'ébranler. 

Jugez-en, puisque ainsi je vous ose parler, 

Et m'emporte au delà de cette modestie 

Dont jusqu'à ce moment je n'étais point sortie. ; A^o 
1365 Vous vous êtes servi de ma funeste main jV^'^ \\ 

Pour mettre à votre fils un poi^ard dans le sein. 

De ses feux innocents j'ai trahi le mystère ; 

1358. m'étonner : me faire peur, me glacer d'effroi. 

1361. Lanson says, concerning this scène : Ce que Monime 
a d'original, c'est cette obstination douce et fière, sans éclat, sans 
tapage, sans révolte, mais aussi sans défaillance et sans peur. Ce 
n'est pas ime héroine ; c'est l'honnête femme qui suit son devoir 
simplement et modestement, sans dire une parole plus haut que 
l'autre, et qui ne craint pas moins le bruit que le mal ... Il 
n'y a pas de scène, dans tout le théâtre de Racine, qui prouve 
d'une plus sensible façon quelle connaissance fine et profonde 
il avait du cœur féminin. 

1365. funeste : Labbé offers the foUowing : Dans son sens 
exact, funeste signifie qui cause la mort ou qui présage la mort. 



ACTE IV, SCÈNE V 111 

Et quand il n'en perdrait que Tamour de son père, 

n en mourra, Seigneur. Ma foi ni mon amour 

Ne seront point le prix d'un si cruel détour. • 1370 

Après cela, jugez. Perdez une rebelle ; 

Armez-vous du pouvoir qu'on vous donna sur elle : 

J'attendrai mon arrêt ; vous pouvez commander. 

Tout ce qu'en vous quittant j'ose vous demander, 

Croyez (à la vertu je dois cette justice) 1376 

Que je vous trahis seule, et n'ai point de complice ; 

Et que d'un plein succès vos vœux seraient suivis 

Si j'en croyais. Seigneur, les vœux de votre fils. 

SCÈNE V 

MITHRIDATE 

Elle me quitte ! Et moi, dans un lâche silence. 

Je semble de sa fuite approuver l'insolence? laso 

Peu s'en faut que mon cœur, penchant de son côté, 

Ne me condamne encor de trop de cruauté? 

Qui suis-je? Est-ce Monime? Et suis-je Mithridate? 

Non, non, plus de pardon, plus d'amour pour l'ingrate. 

1368. quand il n'en perdrait : Cf. Une 560. — The en hère an4 
the en in the following Une count for something, each in its way. 

1370. seront is another striking case of plural verb with ni. 

1371. perdez : Jaitea périr, 

1381. peu s'en faut que : The fuU prose form is il s'en faut 
de peu que. A curious '* high " idiom. Literally, there is litUe 
lacking to itaelf in the maUer ; practically, one embodies an almost 
in the sentence. 

1382. Some editors put an exclamation mark at the end. 
1384. How would one say in French, ** more pardon, more 

love " ? 



112 MITHRIDATE 

1385 Ma colère revient, et je me reconnais. 

Immolons, en partant, trois ingrats à la fois. 

Je vais à Ronle, et c^est par de tels sacrifices 

Qu'il faut à ma fureur rendre les Dieux propices. 

Je le dois, je le puis ; ils n'ont plus de support : 
1390 Les plus séditieux sont déjà loin du bord. 

Sans distinguer entre eux qui je hais ou qui j'aime, 

Allons, et commençons par Xipharès lui-même. 
Mais quelle est ma fureur? et qu'est-ce que je dis? 

Tu vas sacrifier . . . qui? malheureux! Ton fils? 
1395 Un fils que Rome craint? qui peut venger son père? 

Pourquoi répandre un sang qui m'est si nécessaire? 

Ah ! dans l'état funeste où ma chute m'a mis. 

Est-ce que mon malheur m'a laissé trop d'amiô? 

Songeons plutôt, songeons à gagner sa tendresse : 
1400 J^ai besoin d'un vengeur, et non d'une maîtresse. 

Quoi? ne vaut-il pas mieux, puisqu'il faut m'en priver, 

La céder à ce fils que je veux conserver? 

Cédons-la. Vains efforts, qui ne font que m'instruire 

Des faiblesses d'un cœur qui cherche à se séduire ! 
1405 Je brûle, je l'adore ; et loin de la bannir . . . 

Ah ! c'est un crime encor dont je la veux punir. 

Quelle pitié retient mes sentiments timides? 

N'en ai-je pas déjà puni de moins perfides? 

O Monime ! ô mon fils ! Inutile courroux ! 
1410 Et vous, heureux Romains, quel triomphe pour vous, 

1385. As to rhyme, cf. 664, n. 

1389. support is poetic for appui j soutien. 

1395. This line foreshadows the dénouement. 

1400. maîtresse : wije. 

1404. se séduire : se tromper^ s'égarer luir^même. 



ACTE IV, SCÈNE VI 113 

Si vous saviez ma honte, et qu^un avis fidèle 
De mes lâches combats vous portât la nouvelle 
Quoi ? des phis chères mains craignant les trahisons, 
J'ai pris soin de m'armer contre tous les poisons ; 
J'ai su, par une longue et pénible industrie, 1415 

Des plus mortels venins prévenir la furie. 
Ah ! qu'il eût mieux valu, plus sage et plus heureux, 
Et repoussant les traits d'un amour dangereux. 
Ne pas laisser rempUr d'ardeurs empoisonnées 
Un cœur déjà glacé par le froid des années ! 1420 

De ce trouble fatal par où dois-je sortir? 

SCÈNE VI 
MITHRIDATE, ARBATE 

Arbatb 

Seigneur, tous vos soldats refusent de partir. 
Phamace les retient, Pharnace leur révèle 
Que vous cherchez à Rome une guerre nouvelle. 

MiTHRIDATE 

Phamace? 

141 1. The conjunction qtie (sometimes called the '' blanket 
conjunction " of the French language) is used to maintain in 
force many conjunctions and conjunctional adverbs, and takes 
the respective mode ; except that, when it représenta «t, it takes 
the subjunctive. 

1414. So say the ancient historians. 

1421. Labbé remarks : Le flux et reflux de pensées, qui 
constitue ce monologue, véritable tempête sous un crâne, le 
laisse à la fin aussi flottant et aussi indécis qu'au début. 



114 MITHRIDATE 

Arbate 

1425 II a séduit ses gardes les premiers ; 

Et le seul nom de Rome étonne les plus fiers. 

De mille affreux périls ils se forment l'image. 

Les uns avec transport embrassent le rivage ; 

Les autres, qui partaient, s^'élancent dans les flots, 
1430 Ou présentent leurs dards aux yeux des matelots. 

Le désordre est partout ; et loin de nous entendre, 

Ils demandent la paix, et parlent de se rendre. 

Pharnaee est à leur tête ; et flattant leurs souhaits, 

De la part des Romains il leur promet la paix. 

MiTHRIDATE 

1435 Ah ! le traître ! Courez. Qu'on appelle son frère ; 
Qu'il me suive, qu'il vienne au secours de son père. 

Arbate 

J'ignore son dessein ; mais un soudain transport 
L'a déjà fait descendre et courir vers le port ; 

1425-26. Another case of imperfect rhyming, like 833-834. 

1426. le seul nom de Rome : the mère name Rome, The de 
is the quotation mark de ; also known as the de of apposition. 

1428. embrassent le rivage is traditional for refusent de 
partir, 

1430. présentent leurs dards pour les forcer à revenir au 
rivage. 

1435-36. . . . son frère . . . son père : besides making good 
rhjHDoies, thèse words give a human touch which bas the dramatic 
eflfectiveness of other cases of avoidance of names elsewhere in 
the play. 

1437. transport : impulse. 



ACTE IV, SCÈNE VII 115 

Et Ton dit que suivi d'un gros d'amis fidèles, 

On Ta vu se mêler au milieu des rebelles. 1440 

C'est tout ce que j'en sais. 

MiTHRIDATE 

Ah ! qu'est-ce que j'entends? 
Perfides, ma vengeance a tardé trop longtenîps. 
Mais je ne vous crains point. Malgré leur insolence. 
Les mutins n'oseraient soutenir ma présence. 
Je ne Veux que les voir ; je ne veux qu'à leurs yeux 1445 
Inmaoler de ma main deux fils audacieux. 



SCÈNE VII 
MITHRIDATE, ARBATE, ARCAS 

Arcas 

Seigneur, tout est perdu. Les rebelles, Pharnace, 
Les Romains sont en foule autour de cette place. 

MiTHRIDATE 

Les Romains ! 

Arcas 

De Romains le rivage est chargé, 
Et bientôt dans ces murs vous êtes assiégé. 1450 

1439. un gros : une troupe. 

1440-41. Arbates probably thinks that Xiphares also has 
deserted ; but he restricts his statements to uncolored informa- 
tion. Mithridates promptly attributes a motive to Xiphares. 

1444. ma présence : ma vue^ mon aspect. 

1449. Les Romains I Among the stage traditions of Mithri- 



118 MITHRIDATE 

Dans la confusion que nous venons^d^entendre, 
Les yeux peuvent-ils pas aisément se méprendre? 
D'abord, vous le savez, un bruit injurieux 
1470 Le rangeait, du 'parti d'un camp séditieux ; 

Maintenant on vous dit que ces mêmes rebelles 
Ont tourné contre lui leurs armes criminelles. 
Jugez de Tun par Tautre, et daignez écouter . . . 

MONIMB 

Xipharès ne vit plus, il n'en faut point douter. 

1475 L'événement n'a point démenti mon attente. 
Quand je n'en aurais pas la nouvelle sanglante, 
Il est mort ; et j'en ai pour garants trop certains 
Son courage et son nom trop suspects aux Romains. 
Ah ! que d'un si beau sang dès longtemps altérée 

1480 Rome tient maintenant sa victoire assurée ! 
Quel ennemi son bras leur allait opposer ! 
Mais sur qui, malheureuse, oses-tu t'excuser? 
Quoi? tu ne veux pas voir que c'est toi qui l'opprimes, 
Et dans tous ses malheurs reconnaître tes crimes? 

1485 De combien d'assassins l'avais-je enveloppé ! 

1467. Lanson paraphrases : Dans la confusion des événements 
dont nous venons d'entendre le récit 

1468. Another case of the suppression of ne, very common in 
the seventeenth century. 

1473. jugez de l'un par l'autre : jugez de Vun de ces bruits 
par Vautre. 

1475. n'a point démenti : a été conforme à. 

1476. quand with the conditional equaling si with imperfect 
indicative or subjunctive. 

1482. Monime npbraids herself. 

1483. l'opprimes : V accables j le perds, le fais périr. 



ACTE V, SCÈNE I 119 

Comment à tant de coups serait-il échappé? 

Il évitait en vain les Romains et son frère : 

Ne le livrais-je pas aux fureurs de son père? 

C'est moi qui les rendant Tun de l'autre jaloux, 

Vins allimier le feu qui les embrase tous, 1490 

Tison de la discorde, et fatale furie, 

Que le démon de Rome a formée et nourrie. 

Et je vis? Et j'attends que de leur sang baigné, 

Pharnace des Romains revienne accompagné? 

Qu'il étale à mes yeux sa parricide joie? * 1495 

La mort au désespoir ouvre plus d'une voie : 

Oui, \;ruelles, en vain vos injustes secours 

Me ferment du tombeau les chemins les plus courts. 

Je trouverai la mort jusque dans vos bras même. 

Et toi, fatal tissu, malheureux diadème, isoo 

1487. il évitait : There is more in this than a plain imperfect. 
What? 

1491. A Une worthy, in its thought and expression, of an epic 
or tragedy of the ancient classic period. 

1492. le démon de Rome : Another appositional de — the 
démon Rome, 

1497. cruelles : Apparently Phœdime is not the only at- 
tendant. 

1499. même.: The omission of the s is fréquent in poetry, to 
meet requirements of versification and of rhyme for the eye. A 
similar omission is occasionally met in prose. Cf. lines 1039-40. 

1500. Monime is at the height of tragic frenzy, the develop- 
ment of which is a characteristic feature of the closing scènes of 
a tragedy. A great tragedy may be said always to lead to a 
situation in which the tragic passion is so absorbing {hat the 
personage becomes embodied passion ; when the passion is so 
closely knit that it is incapable of being " tom to tatters " — 
except by a bungling actor. — malheureux diadème : the ex- 
pression is Plutarch's, cited by Racine in his préface. 



MITHRIDATE 



Racubl as MoNiUK 



ACTE V, SCÈNE II 121 

Instrument et témoin de toutes mes douleurs, 

Bandeau, que mille fois j'ai trempé de mes pleurs, 

Au moins, en terminant ma vie et mon supplice. 

Ne pouvais-tu me rendre un funeste service? 

A mes tristes regards, va, cesse de t'offrir : 150S^ 

D'autres armes sans toi sauront me secourir ; 

Et périsse le jour et la main meurtrière 

Qui jadis sur mon front t'attacha la première ! 

PHiEDIME 

On vient, Madame, on vient ; et j'espère qu'Arcas, 

Pour bannir vos frayeurs porte vers vous ses pas. 1510 



SCENE II 
MONIME, PHiEDIME, ARCAS 

MONIME 

En est-ce fait, Arcas? et le cruel Phamace . . . 

Arcas 

Ne me demandez rien de tout ce qui se passe, 
Madame : on m'a chargé d'un plus funeste emploi ; 
Et ce poison vous dit la volonté du Rot 

1503. ma vie et mon supplice : la vie qui est pour moi un 
supplice. 

151 1. En est-ce fait? Isitallover? 

1513. funeste : See Une 1365, n. ; also the gênerai comment 
in line 740, n. 



122 MITHRIDATE . 

PHiEDIME 

Malheureuse princesse ! 

MONIME 

• ^ 

1515 Ah ! quel comble de joie ! 

Donnez. Dites, Arcas, au Roi qui me Tenvoie 
Que de tous les présents que m*a faits sa bonté, 
Je reçois le plus cher et le plus, souhaité. 
A la fin je respire ; et le ciel me délivre 

1520 Des secours importuns qui me forçaient de vivre. 
Maîtresse de moi-même, il veut bien qu'une fois 
Je puisse de mon sort disposer à mon choix. 

?H.«DIME 

Hélas ! 

MoNIME 

Retiens tes cris ; et par d'indignes larmes, 
De cet heureux moment ne trouble point les charmes. 

1525 Si tu m'aimais, Phaedime, il fallait me pleurer 
Quand d'im titre funeste on me vint honorer. 
Et lorsque m'arrachant du doux sein de la Grèce, 
Dans ce climat barbare on traîna ta maîtresse. 
Retourne maintenant chez ces peuples heureux ; 

1530 Et si mon nom encor s'est conservé chez eux, 

1520. Either /orcer à or forcer de was possible in Racine's day. 
152^32. Cf. Othello's thought, at a similar moment ; 

... I pray you, in your letters, 

When you shall thèse milucky deeds relate, 

Speak of me as I am ; nothing extenuate, 

Nor set down aught in malice ; then must you speak 

Of one that loved not wisely but too well. 



ACTE V. SCÈXE «II 123 

DîsJeur ce que tu vois ; et de, toute ma gloire, 
Phaedime, conte-leur la malheureuse histxHie. 
Et tCM, qui de ce cceur, dont tu fus adoré. 
Par un jidoux destin fus toujours séparé. 
Héros, avec qui, même en terminant ma vie, 1535 

Je n'ose en un tombeau demander d*étre unie, 
Reçois ce sacrifice ; et puisse en ce moment 
Ce poison expier le sang de mon amant ! 



SCENE III 
MONIAfE, ARBATE, PH^DIME, ARCAS 

A^ffiATE 

Arrêtez! arrêtez! 

Abcas 

Que faites-vous, Arbate? 

Arbate 
Arrêtez ! j'accomplis Tordre de Mithridate. 1540 

MONIME 

Ah? laissez-moi ... 

Arbate, jetant le poison 

Cessez, vous dis-jej et laissez-moi, 
Madame, exécuter les volontés du Roi. 

153 1. ma gloire : perhaps my career, or dU aboui me. But 
the pathos of this simple utterance défies embodiment in a trans- 
lation. 

'$33* ^^ ^If • • • • ^^^ thinks of Xiphares as dead. 



124 MITHRIDATE 

Vivez. Et vous, Arcas, du succès de mon zèle 
Courez à Mithridate apprendre la nouvelle. 

SCÈNE IV 

MONIME, ARBATE, PHiEDIME 
MONIME 

1545 Ah! trop cruel Arbate, à quoi m'exposez-vous? 
Est-ce qu'on croit encor mon supplice trop doux? 
Et le Roi, m*enviant une mort si soudaine, 
Veut-il plus d'un trépas pour contenter sa haine? 

Arbate 

Vous l'allez voir paraître ; et j*ose m'assurer 
1550 Que vous-même avec moi vous allez le pleiu^r. 

MoNIME 

Quoi? le Roi . . . 

Arbate 

Le Roi touche à son heure dernière, 
Madame, et ne voit plus qu'un reste de lumière. 
Je l'ai laissé sanglant, porté par des soldats ; 
Et Xipharès en pleurs accompagne leurs pas. 

1544. Racine «abandons history from hère on. 

1547. m'enviant : hère, me refusant. 

1548. plus d'un trépas is a bold thought — as if to die onoe 
were not enough. Was it a Frenchman who said,. during the 
Worid War of 1914-18 : ^* What a pity a man has only one life 
to give for his country !"? Compare also the dying words of 
Nathan Haie. 

1554. leurs pas : thenu. 



ACTE V, SCÈNE IV 125 

MONIME 

Xipharès ! Ah ! grands Dieux ! Je doute si je veille, 1665 
Et n'ose qu'en tremblant en croire mon oreille. 
Xipharès vit encor? Xipharès, que mes pleurs . . . 

Arbate 

Il vit chargé de gloire, accablé de douleurs. 

De sa mort en ces lieux la nouvelle semée 

Ne vous a pas vous seule et sans cause alarmée. i5ôO 

Les Romains, qui partout Tappuyaient par des cris, 

Ont par ce bruit fatal glacé tous les esprits. 

Le Roi, trompé lui-même, en a versé des larmes ; 

Et désormais certain du malheur de ses armes, 

Par un rebelle fils de toutes parts pressa, 1666 

Sans espoir de secours tout prêt d'être forcé. 

Et voyant pour surcroît de douleur et de haine. 

Parmi ses étendards porter Taigle romaine. 

Il n'a plus aspiré qu'à s'ouvrir des chemins 

Pour éviter l'affront de tomber dans leurs mains. 1570 

D'abord il a tenté les atteintes mortelles 
Des poisons que lui-même a crus les plus fidèles ; 
Il les a trouvés tous sans force et sans vertu. 

• 

1561. Tappuyaient : appuyaient la nouvelle de la mort de 
Xipharès. 

1566. forcé : pris de force. Notice that it is prêt and not 
près; and yet the résultant meaning is the same. 

1569. des chemins : Labbé interpréta as des chemins vers la 
mort, 

1571. atteintes : coups. 

1573. Cf. the légal phrase, doubtless hailing from Norman 
Prench : "... it shall remain in full force and virtue." — vertu: 
force, énergie^ propriété. 



126 MITHRIDATE 

« Vain secours, a-t-il dit, que j'ai trop combattu ! 

1576 Contre tous les poisons soigneux de me défendre, 
J'ai perdu tout le fruit que j'en pouvais attendre. 
Essayons maintenant des secours plus certains^ 
Et cherchons un trépas plus funeste aux Romains.» 
Il parle ; et défiant leurs nombreuses cohortes, 

1580 Du palais, à ces mots, il fait ouvrir les portes. 
A Taspect de ce front dont la noble fureur 
Tant de fois dans leurs rangs répandit la terreur, - 
Vous les eussiez vus tous, retournant en arrière. 
Laisser entre eux et nous une large carrière ; 

1585 Et déjà quelques-uns couraient épouvantés 
Jusque dans les vaisseaux qui les ont apportés. 
Mais, le dirai-je! ô ciel ! rassurés par Pharnace, 
Et la honte en leurs cœurs réveillant leur audace, 
Ils reprennent courage, ils attaquent le Roi, 

1590 Qu'un reste de soldats défendait avec moi. 
^ Qui pourrait exprimer par quels faits incroyables. 

Quels coups, accompagnés de regards effroyables. 
Son bras, se signalant poiir la dernière fois, 
A de ce grand héros terminé les exploits? 

1595 Enfin las, et couvert de sang et de poussière,. 
Il s'était fait de morts une noble barrière. 
Un autre bataillon s'est avancé vers nous ; 
Les Romains, pour le joindre, ont suspendu leurs coups. 
Ils voulaient tous ensemble accabler Mithridate. 

I57Q« il parle : This is not the only epic touch in this récital. 

1588. An " ablative absolute." 

1591. Labbé remarks : Faits a ici le sens de gestes dans Tex- 
pression les chansons de gestes. Il signifie donc exploits ^ haïUs 
faits f faits d'arnies. 

1597. It is probably Xiphares who was approaching. 



ACTE V, SCÈNE IV 127 ' 

Mais lui : « C'en est assez, m'a-t-il dit, cher Arbate ; " leoo 

Le sang et la fureur m'emportent trop avant. 

Ne livrons pas surtout Mithridate vivant.» 

Aussitôt dans son sein il plonge son épée. 

Mais la mort fuit encor sa grande âme trompée. 

Ce héros dans mes bras est tombé tout sanglant, I605 

Faible, et qui s'irritait contre un trépas si lent ; 

Et se plaignant à moi de ce reste de vie. 

Il soulevait encor sa main appesantie ; 

Et marquant à mon bras la place de son cœur, 

Semblait d'un coup plus sûr implorer la faveur. I610 

Tandis que possédé de ma douleur extrême. 

Je songe bien plutôt à me percer moi-même, 

De grands cris ont soudain attiré mes regards. 

J'ai vu, qui l'aurait cru? j'ai vu de toutes parts 

Vaincus et renversés les Romains et Pharnace, I615 

Fuyant vers leurs vaisseaux abandonner la place ; 

Et le vainqueur vers nous s'avançant de plus près, 

A mes yeux éperdus a montré Xipharès. 

MONIMB 

Juste ciel ! 

Arbate 

Xipharès, toujours resté fidèle, 
Et qu'au fort du combat ifne troupe rebelle, I620 

1609. Appian relates an incident on which Racine improves 
somewhat in making the appeal a mute one. 

161 1. possédé : occupé totU entier de. . 

1618. montré : The force of the statement dépends partly 
on the plain active meaning of montré, which can hardly be kept 
in an English version. — éperdus : troublés par V émotion. 

1620. au fort : au milieu, au cœur même. 



128 MITHRIDATE 

Par ordre de son frère, avait enveloppé, 
Mais qui d'entre leurs bras à la fin échappé, 
Forçant les plus mutins, et regagnant le reste, 
Heureux et plein de joie en ce moment funeste, 

1625 A travers mille morts, ardent, victorieux, 
S'était fait vers son père \m chemin glorieux. 
Jugez de quelle horreur cette joie est suivie. 
Son bras aux pieds du Roi Fallait jeter sans vie : 
Mais on court, on s'oppose à son emportement. 

1630 Le Roi m'a regardé dans ce triste moment, 

Et m'a dit, d'une voix qu'il poussait avec peine : 
« S'il en est temps encor, cours, et sauve la Reiùe.n 
Ces mots m'ont fait trembler pour vous, pour Xipharès : 
J'ai craint, j'ai soup)çonné quelques .ordres secrets. 

1635 Tout lassé que j'étais, ma frayeur et mon zèle 
M'ont donné pour courir une force nouvelle ; 
Et malgré nos malheurs, je me tiens trop heureux 
D'avoir paré le coup qui vous perdait tous deux. 

MONIME 

Ah ! que de tant d'horreurs justement étonnée',^ 
1640 Je plains de ce grand roi la triste destinée ! 

1623. regagnant : ramenant àda bonne cause, au parti du roi. 

1624. en' ce moment funeste : Another cheville , as in line 
1221 ; see also line 1630. 

163 1. poussait is net a common expression in this connection. 

1638. Too often long récitals are addressed to actors who hâve 
no vital interest in the events. The présent case is idéal as to 
the direct bearing of the recounted f acts upon the f ate of the chief 
listener. — qui vous perdait : qui vous aurait perdus — as in 
several previous cases of imperfect for compound of conditional. 



ACTE V, SCÈNE V 129 

Hélas ! et plût aux Dieux qu'à son sort inhumain 
Moi-même j'eusse pu ne point prêter la main, 
Et que simple témoin du malheur qui l'accable, 
Je le pusse pleurer sans en être coupable ! 
Il vient. Quel nouveau trouble excite en mes esprits 1645 
' Le sang du père, ô ciel ! et les larmes du fils ! 



SCENE V 

MITHRIDATE, MONIME, XIPHARÈS, ARBATE, 
ARCAS, Gardes, qui soutiennent Mithridate 

MoNlME 

Ah ! que vois-je, Seigneur, et quel sort est le vôtre ! 

Mithridate 

Cessez et retenez vos larmes l'un et l'autre. 

(En montrant Xipharès) 
Mon sort de sa tendresse et de Votre amitié 
Veut d'autres sentiments que ceux de la pitié ; leso 

Et ma gloire, plutôt digne d'être admirée, 
Ne doit point par des pleurs être déshonorée. 

1641. îtiliitmaiii : cmel. ^ 

^ 1642. Labbé regards prêter la main as an inept expression. 
He says ; Monime ne peut s'accuser d'avoir prêté la main à 
la mort de Mithridate. Elle n'y a contribué que malgré elle, 
par Tamour qu'elle a inspiré à Pharnace, amour qui lui a toujours 
fait horreur. Prêter la main indique une compUcité volontaire, 
qui n'existe pas ici. 

1645. excite : The singular verb is not uncommon when 
there is an enumeration of subjects. — esprits : The plural use 
is poetic. 



13Cr MITHRIDATE 

J'ai vengé Tunivers autant que je Tai pu : 
La mort djans ce projet m'a seule interrompu. 

1656 Ennemi des Romains et de la tyrannie, 
Je n'ai point de leur joug subi l'ignominie ; 
Et j'ose me flatter qu'entre les noms fameux 
Qu'une pareille haine a signalés contre eux, 
Nul ne leur a plus fait acheter la victoire, 

1660 Ni de jours malheureux plus rempli leur histoire.; 
Le ciel n'a pas voulu qu'achevant mon dessein, 
Rome en cendre me vît expirer dans son sein. 
Mais au moins quelque joie en mourant me console : 
J'expire environné d'ennemis que j'immole ; 

1665 Dans leur sang odieux j'ai pu tremper mes mains, 
Et mes derniers regards ont vu fuir les Romains. 

A mon fils Xipharès je dois cette fortune : 
Il épargne à ma mort leur présence importune. 
, Que ne puis-je payer ce service important 

1670 De tout ce que mon trône eut de plus éclatant ! 
Mais vous me tenez lieu d'empire, de couronne ; 
Vous seule me restez : souffrez que je vous donne, 
Madame ; et tous ces voeux que j'exigeais de vous, 
Mon cœur pour Xipharès vous les demande tous. 

1653. The simple yet s^lendid virility of this Une has few 
parallels in literature. Let us remember that world is generally 
an all-sufficient rendering of univers. Conceming Unes 1653 to 
1668 Labbé says : Mais les seize vers qui suivent égalent tout 
ce que l'épopée ou la tragédie ont produit de plus vigoureux. 

1658. sigAalés : rendus illustrerai. 

1660. The dies nef asti of the Roman calendar included tbose 
on which great defeats had occurred. 

1670. Cf. Une 10. 



ACTE V, SCÈNE V 131 

MONIME 

Vivez, Seigneur, vivez, pour le bonheur du monde, 1675 

Et pour sa liberté, qui sur vous seul se fonde ; 
Vivez pour triompher d'un ennemi vaincu, 
Pour venger . . . 

MiTHRIDATB 

C'en est fait, Madame, et j'ai vécu. 
Mon fils, songez à vous. Gardez-vous dé prétendre 
Que de tant d'ennemis vous puissiez vous défendre. 168O 
Bientôt tous les Romains,, de leur honte irrités. 
Viendront ici sur vous fondre de tous côtés. 
Ne perdez point le temps que vous laisse leiu* fuite 
A rendre à mon tombeau de§ soins dont je vous quitte. 
Tant de Romains sans vie,, en cent Ueux dispersés, 1685 

SuflBsent à ma cendre et l'honorent assez. 
Cachez-leur pour un temps vos noms et votre vie. 
Allez, réservez-vous . . . 

XlPHARÈS 

Moi, Seigneur, que je fuie? 
Que Phamace impuni, les Romains triomphants, 
N'éprouvent pas bientôt . . . 

MiTHRIDATE 

Non, je vous le défends. 1690 
Tôt ou tard il faudra que Pharnace périsse.^ 
Fiez-vous aux Romains du soin de son suppUce. 

1684. dont je vous quitte is old-fashîoned for dont je vous tiens 
quittes. 

1691. Phamaces was defeated by Csesar, who reported the 
event in the celebrated despatch : Veni, vidi, vici, but the death 
of Pharnaces came in a later battle. 



APPENDIX 

SOME VULNERABLE POINTS IN MITHRIDATE 

It bas been said that every truly great work bas the power 
to inake us forget ail else while we are pa3ring attention to it. 
Tested on this basis, MithrideUe is, in a few not imimportant 
détails, vulnérable — in the eyes of a Frenchman who knows 
bis classics. And we may perhaps find, in the observation of 
thèse points, a tangible reason why the play is not universally 
ranked among the greatest of French tragédies. 

In the tragedy of Phèdre, the father's unexpected retum, after 
there is reason to be jealous of his son, makes a parallel with 
the situation in Mithridate. The Hippolyte of Phèdre and 
Xipharès are similar characters, and Hippolyte, certainly some- 
what superior as a dramatic création, is made unique as a dramatic 
figure by — the récit de Théramène, which every schoolboy in 
France knows by heart. Thus Xipharès cannot quite make us 
forget Hippolyte. 

The sixth scène of the second act ,of Mithridate bas some 
parallehsms with the fourth scène of the second act of Comeille's 
Polyeucte. The Corneille scène is superb both in novelty and 
in poignancy. Racine makes us remember it rather than for- 
get it. 

The brutal demand of Mithridate that Monime accompany 
him to the altar cannot fail to bring to mind the richly motivated 
demand of Pyrrhus upon Andromaque in Racine 's earUest mas- 
terpieqe; and Andromaque offers the unforgettable personality 
of Hermione. 

Monime's défiance of Mithridate, splendid as it is, can never 
whoUy blot from the memory that wonderful scène in which 
Junie braves Néron in Britannicus. 

If we add to thèse things the fact that the quasi-melodramatic 
ending clouds the purity of the tragic essence of Mithridate, 

135 



136 APPENDIX 

we hâve probably ennmerated ail its weaknesses that claim 
notice. At various points in the notes we bave called attention 
to some of tbe features which give it exalted rank as a dramatic 
masterpiece. Even granting that there are vital points of supe- 
riority in a few other tragédies, there still remains the possibiUty 
of argmng that Miihridate is uniquely great in as many respects 
as any play in the French classic repertory. 



VOCABULARY 



/' 



SOME OF THE ,PROPER NOUNS AND ADJECTIVES 
USED IN THE PLAY, WITH THEIR ORDINARY 
ENGLISH EQUIVALENTS 



Annibal 


=Hannibal 


lonie 


»Ionia 


Arbate 


=Arbates 


Mithridate 


— Mithridates 


Arcas 


= Arcas 


Monime 


= Monime or Monima 


Bosphore 


«Bosporus 


Nymphéa 


«Njrmphœa 


Capitole 


«Capitol 


Paiinonien 


=Pannonian 


Chersonèsc 


)=Chersonesu8 


Parthe 


= Parthian 


[pr. kèr-siMièz] ^ 


Phœdinie 


«PhflRdime or Phanlima 


Cimmérien 


«Cimmerian 


Phamace 


«Phamaces 


Colchide 


=ColohiR« 


Phase 


«Phasis* (River) 


Cyrus 


= Cyrus 


Pompée 


=Pompey 


Daces 


= Dacians 


Pont 


=Pontus 


éphèse 


«Ephesus 


Sarmate 


=Sarmatian 


Espagne 


=Spain 


Scythe 


=Scythian 


Euphrate 


=Euphrates 


Spartacus 


== Spartacus 


Eiudn 


sEuxine 


Taurique 


=Tauric 


[pr. euh^n (nasal) ] ^ 


Xipharès 


= Xipharès 


Gaulois 


=Gaiil(s) 







The pronunciation of every French word but two in the list 
foUows the regular rules, except that a final s in the name of a 
peraon is sharply soimded. As to the pronunciation of the English 
forms, the instructor will perhaps hâve a préférence as to the 
use of the English or the Continental pronimciation of the names 
which hâve not been thoroughly anglicized by gênerai use. If 
an English pronimciation is adopted, probably the latinized f orms 
Monima and Phœdima will be preferred, as the long e, parallel 
with the Greek 17, makes a not exactly euphonious ending. 

* In interpreting the indications of pronunciation, apply French, not Einglish, 
rules as to individual letters. Thus the eu of Euxin has the sonnd of eu in eux, 

* The Modem Mingrelia, at the extrême eastem tip of the Black Sea. 

> The modem Rion, which rises in the Caucaaus and empties into the Blaok 
Sea. 

138 



VOCABULARY 



(PRÉFACE, TEXT, AND NOTES) 



à to, at, in, by, for, f rom, of 
abaisser to humble, bring down, 

lower 
abandonner ta abandon, for- 

sake, giv# up; s' — to give 

oneself Vp, yield 
abime m* abyss 
aborder to approach, accost, 

address, land 
abfiger to abridge, shorten, eut 

off, eut short 
absent absent 
abuser to doceiye, delude; — 

de to take (unfaii) advantage 

of 
accabler to overwhebn, erush, 

overpower, affliet 
accent m. aecent 
accepter to aceept 
accompagner to aceompany, go 

with 
accomplir to aceomplish, fulfil 
accomplissement m. aeeom- 

plishment 
accord m. accord, agreement, 

concord, keeping; d' — in 

agreement, agreed 
accordé affianced 



accorder to accord, grant, af 
fiance; s' — to exist in 
harmony, be friendly or in 
agreement, hâve an under- 
standing 

accoutumé aceustomed 

accroître to increase; s' — to 
grow (in size or number) 

accuser to accuse, give definite 
outline to 

acheter to buy, purchase 

achever to finish, complète, 
hâve done with 

acquérir to acquire, gain 

acquitter to acquit, fulfil ; s^en 
— to fulfil an obligation 

action /. action {See note to 
l. 35 of Pr^ace) 

activité/, activity 

adieu f arewell 

admirable admirable 

admirateur m. admirer 

admirer to admire, wonder at 

adorer to adore 

adresse /. skiU, clevemess, ad- 
dress, adroitness 

adresser to address, direct; 
s' — à to tum to, apply to, 
communicate with 

adroit élever, skilful, adroit 



139 



140 



VOCABULARY 



advenir to happen 

s'affaiblir to become weaker, 

weaken, lessen 
affaire /. business, enterprise; 

faire son — de to take 

charge of 
affamé de eager for, hungry for, 

thirsting for 
affecter to affect, show osten- 

tatiously, appear to hâve 
affermir to strengthen, make 

firm ; s' — to become stronger 

or firmer 
affliction/, affliction, wo^ 
affliger to afflict, distress, make 

sorrowful 
affreux frightful, terrifying, 

atrocious, awful 
affront m. affront, insuit 
affronter to affront, face, defy 
ftge m. âge 
agréable agreeable, pleasing, 

full of grâce or grâces 
ah ! oh ! 

aider to aid, assist 
aïeul m. {}, aïeule ; yl. aïeux) 

ancestor, forefather 
aigle m. eagle 
ailleurs elsewhere; d' — be- 

sides, moreover 
aimable amiable, worthy of 

being loved 
aimer to love, care for, be glad 
ainsi thus, so, like this; — 

que as well as 
airain m. bronze 
aisé easy, ready 



ajouter to add 

alarme /. alarm, trouble, di»- 
turbance, uprising ; also 
plural restlessness, anxiety 

alarmer to alarm 

alentour around, about 

aller to go; il y va de . . ., 
. . . is at stake, . . . is in 
the balance; s'en — to go 
away, go, be going 

alliance/, alliance 

allié ally 

allier to ally 

allumer to kindle, light, arouse, 
stir up, cause 

alors then 

altéré de eager for, thirsty for 

amant m. lover, suitor 

ambassadeur m. ambassador 

ambition/, ambition 

àmef. soûl, mind, heart 

amener to bring in, on, hither, 
thither ; to bring, lead in 

ami m. friend 

amitié /. affection, fondness, 
love, friendship (See 347) 

amour m. (pi. also /.) love, affec- 
tion, passion 

amoureux (/. -euse) in love 
(.See 1034) 

amplement fully, in détail 

an m. year 

analyse/, analysis 

animer to inspire, animate, ex- 
cite, make eager 

année/, year 

annoncer to announce, proclaim 



VOCABUIARY 



141 



to api)ea8e, make 
fnendly^ soothe, calm (See 
905) 

apercevoir {modem s'apercevoir 
de) to peroeive 

appareil m. display, préparation, 
equipment, fumishings {See 
954) 

apparence/, appearanoe, reason- 
ableness {See 875) 

appas m. pi. channs 

appeler to call, appeal, summon 

appesantir to make heavy, make 
dull, impair 

apporter to bnng 

apprendre to leam, teach, in- 
fonn, tell, let know 

apprêter to prépare, make 
ready; s' — to be prepared, 
be made ready, be in course 
of préparation 

apprêts m. pi. préparations 

apprivoiser to tame 

approcher to bring near, move 
near, be like, resemble 

approuver to approve 

apptd m. support, prop, protec- 
tion, protector, aid 

appuyer to support, assist, lay 
stress upon, emphasize 

après after, second to, after- 
wards; d' — according tp; 
— que after 

ardent ardent, fiery, fervid, 
fervent, eager, earnest, vé- 
hément, violent, intense, 
vivid, sanguine, spirited 



ardeur /. ardor, fire, fervor, 

eai^emess, véhémence, spiiit, 

leal, courage, k>ve, passion 
arme m. arm, weapon 
armée/, army 
armer to arm, equip 
arracher (à) to pluck out or 

away, tear out or away, 

wrest, wring, extort, rescue, 

snatch 
arrêt m. decree, judgment, 

sentence, décision 
arrêter to stop, stay, delay, 

obstruct, prevent, decree, 

décide ; s' — à to confine one- 

self to, stop at 
arrière : en — backward 
arriver to arrive, take place, 

happen 
art m. art 
artifice m. artifice, craft, deoeit, 

trickery, cunning, guile 
Asie/. Asia 
asile m. asylum, refuge, shelter, 

home, retreat 
aspect m. aspect, sight, view 
aspirer to long, yearn, aim 
assassin m. murderer, assassin 
assassiner to assassinate; to 

worry, plague 
assaut m. assault, storm, shock, 

attack, onset, struggle 
assembler to assemble, gather 
asservir to subject, subdue, 

master, hold in subjection 
assez enough, sufficiently, 

rather, very, well enough 



142 



VOCABULARY 



assiéger to besiege, beset 
assis (Jrom asseoir) seated, 

confirmed, settled 
assuré assured, steady, firm, 
certain, secure, confident, 
bold, confirmed, guaranteed, 
sure {See 163) 
assurer, to make certain, make 
confident, assure, make sure, 
insure, fortify, strengthen ; 
s' — to assure oneself, make 
sure, beUeve with oertainty, 
maintain; s' — sur to rely 
upon, count upon 
astre m. star, fate, fortime 
attacher to attach, join; to 
fasten, tie, bind, absorb, 
attract, fix, make fond of; 
s' — to apply oneself, en- 
deavor 
attaquer to attack, assault 
atteinte/, attack, injury, hann, 

effect 
attendre to wait, wait for, 
await, delay, expect, look 
for; s* — à (ce que) to ex- 
pect, be prepared for (See 
26) 
attendrir to affect, move 
attentat m. attack, crime, mis- 

deed, outrage 
attente/, hope, expectation 
attenter à to make an attempt 

upon, attack 
attention/, attention 
attester to attest, call upon, 
call to witness 



attirer to attract, draw, bring 

down, win over, entice, excite 
attrait m. charm, attraction, 

attractiveness 
aucun no, none, any; ne . . . 

— , — . . . ne . . . no, none 
audace /. boldness, audadty, 

daring 
audacieux au^acious, bold, dar- 
ing 
au-dessous de below, inferior 

to, beneath 
au-dessus de above, superior 

to ; élevé — far above 
augmenter to augment, in- 

crease, heighten; s' — to 

increase, grow 
aujourd'hui today, now . 
auprès de beside, compared 

with, with 
aurore/, dawn, east 
auspice m. augury, foreboding ; 

prophet; pi, auspices 
aussi also, as, so, thus, therefore 
aussitôt inmiediately, there- 

upon, directly 
autant as much, so much, so 

many, as many; d' — plus 

so much the more, ail the 

more so 
autel m. altar, temple, sacred 

place 
auteur m. author, source, cause, 

Creator 
autoriser to strengthen, give 

authority to, warrant, sanc- 
tion 



VX:iîSL~"~.\ST 



î*3^ 



jinumcL jCiiss 



: Iii^àl— ^c 





s — ÎO 






gain, siqKiîonty 
crée with, akngvîth 
avenir to happen, resoh 
avenir m. future 
aveu avowal, oonfessioii, al- 

legianœ 
aveus^e blind; en — blindly, 

like a blind man 
aveus^er to blind, daule 
avide (de) eager (for) 
avidement eagerly 
avis m. waming, news, oounsel, 

opinion 
s^aviser to hâve an idea, hâve 

it occur to one 
avoir to hâve; — beau . . . 

to . . . in vain ; il y a there 

is, there are ; ago 
avouer to admit, confess, ac- 

knowledge 

B 

baigner to bathe, drench, welter 
balancer to waver, hesitate, 



runpMf 

bass es s » /^ K>>^UiMxïis^ hui^ut^^ 

bataille/, biittli^ 

bataillon m. hAtta)h\i\ 

beau, bel (/. baUt) l>«^^utif\il^ 

fine, noMo ; a^rt^ . . . h^ 

... in \*)ùn 
beaucoup muoh, n\M\Y 
beauté /, iHHmiy 
besoin m. ntHni, t>xi)xt^)u\v, mum"» 

gency; avoir dt U\ nt^otti 

hâve n(H>d of 
bien woU, very, vory imiohi 

vory groai, far, cl^^wrly, 

suroly, at loaNi, iiultnul, \WV' 

haps, «von, iiIho ; hé wt^ll ; 

ou — or oIhc 
bien m. good, ihing, poHNtiNMiotii 

bleflfling, irciMiirn, propnrty 
bienfait m. kitMlnciNn, fnvur, gift< 
bientôt Hoon, at otum 
bizarre odd, Hirangn, pmHiliac, 

capriciou» 



144 



VOCABULARY 



blanc (/. blanche) white 

bon good, virtuous, goodly 

bonheur m. happiness 

bonnet m. cap 

bonté /. favor, kindness, good- 
ness, merit 

bord m. shore, strand, border 

borner to restrict, restrain, con- 
fine 

bouche/, mouth, lips 

bout m. end, extremity ; pousser 
à — to drive to extremities 

bras m. arm 

braver to brave, defy 

brigand m. brigand 

briller to shine, sparkle, flash 

bruit m. report, renown, famé, 
noise, stir, sensation 

brûler to bum, consume, glow, 
be on fire, be ardently in love 



cacher to conceal, hide; se — 

to prétend, dissimulate, deny, 

conceal 
cadeau m. gift 
calmer to calm, quiet, still 
camp m. camp, army 
campagne /. country, région, 

field 
capable capable 
capitaine m. captain 
captif m. (/. captive) captive 
car for, because 
caractère m. character 
caresser to caress, fondle, fawn 

upon, make much of 



carrière /. career, scope, free 

space 
casque m. helmet 
Caucase m. Caucasus 
cause /. cause ; à — de because 

of 
causer to cause 
ce this, that, it, he, she, thèse, 

those, they; — qui, — que 

that which, what, which 
céder to 3âeld, give up, give in, 

grant, resign, give way 
cela that, this, it 
celer to conceal, hide 
céleste celestial, divine 
celui (/. celle) that, the one, 

he, she ; ci this one, the 

latter; ;là that one, the 

former; ceux (/. celles) 

those, etc. 
cendre m. ashes, inemory (of a 

deceased person) 
cent hundred, a himdred 
cependant however, yet, still, 

nevertheless, meanwhile 
certain certain, assured, sure 
cesser to cease, stop 
chacun each, each one, everyone 
changer to change; — de 

face to change, take on a new 

aspect 
chapeau m. hat 
char m. chariot 
charger to charge, biu*den, load, 

conmiission, instruct; se — 

de to take upon oneself, 

undertake 



VOCABULARY 



145 



charme m. cbarm, spell, en- 

chantment 
chasser to drive away, hunt 
chaud warm 
chef m. chief 

chef-d'œuvre m. masterpiece 
chemin m. way, road (de to) 

(SeeGO) 
cher dear, precious 
chercher to seek, look for, seek 

out, try 
chérir to chensh, love 
cheveu m. haïr 
cheville /. plug, pin 
chez at the house of, in, among, 

with, in the land of 
choc m. clash, shock 
choisir to choose, sélect 
choix m. choice, sélection, will 
chose /. thing, matter ; Quelque 

— something ; quelque — de 

grand something great 
chute/, fall, downfall, failure 
ciel (pi. cieux) m. heaven, sky, 

gods 
citer to cite, quote from, name 
climat m. climate, région 
cœur m. heart, courage 
cohorte/, cohort, troop, band 
coin tn. corner, nook 
col, cou m. neck 
colère /. wrath, ire, rage, anger 
combat m. combat, fight, battle 
combattre to combat, fight 

against, oppose, contest 
combien (de) how much, how 

many 



comble m. top, height, smnmit, 

acme, climax, consummation 
commandement m. command 
commander to order, command, 

bid, enjoin upon, control 
comme as, as it were, as well 

as, how 
commencer to commence, begin 
comment how 
commun common, ordinary, 

well-known, mutual 
compagnie /. company, com- 

-panionship 
compagnon m. companion, 

friend, fellow 
complaire to please, gratify, 

humor 
complaisance /. complaisance, 

goodness, kindness, conde- 

scension, courtesy, com- 

pliance 
compléter to complète, fill out 

the détails of 
complice m. /. accomplioe, con- 

federate 
complicité/, complicity 
complot' m. plot, plotting, con- 

spiracy 
comprendre to understand, com- 

prehend, comprise, take in 
compte m. account, reckpning; 

se rendre — to grasp, under- 

staiid 
conception/, conception 
concevoir to conceive, imagine, 

think, feel, understand, com- 

prehend 



146 



VOCABULARY 



condamner to condemn, dis- 
approve, censure, blâme, pro- 
nounce the doom of 

condition/, condition 

conduire to conduct, guide, 
lead, take, bringj convey 

conduite /. care, charge, direc- 
tion, disposition, arrange- 
ment, plan 

confesser to confess, avow 

confiance/, confidence 

confiant confiding 

confident m. (/. confidente) con- 
fidant 

confier to confide, trust, entrust 

confirmer to confirm, strengthen, 
ratify, sanction, prove 

confondre to confound, blend, 
make a confusion of , mingle, 
mix, overpower, amaze, 
abash, perplex, confuse 

se conformer à to conform to, 
follow 

confusion /. embarrassment, 
mortification, confusion 

conjugal conjugal 

conjuré conspiring, leagued, 
inimical, sworn ; as noun m. 
conspirator 

conjurer to conspire, beseech 

connaissance /. knowledge, ac- 
quaintance ; pi. acquire- 
ments, accomplishments 

connaître ' to know, be ac- 
quainted with, recognize 

conquérant m. conqueror 

conquête/, conquest 



consacrer to consecrate, dedi- 

cate, appropriate 
consentir to consent, approve 
conserver to préserve, save 
considérable worthy of con- 
sidération, important 
considération /. considération, 

respect 
consoler to console 
conspirer to conspire, plot, 

concur 
constance /. constancy, fideUty 
constituer to constitute 
content content, happy, satis- 

fied (See20) 
contentement m. pleasure, 

happiness, gratification 
contenter to satisfy, content^ 

please 
conter to relate, recount 
continuellement continuaUy 
continuer to continue 
contraindre to constrain, force, 

hold in restreint, restrain 
contrainte /. constraint, com- 

pulsion, forcedness, restraint 
contraire contrary, opposed, 

différent ; au — on the con- 
trary 
contre against, opposed to 
contrée/, country, land, région, 

district 
contribuer to contribute 
convaincre to convince, con- 

vict, win over 
convenir to befit, be fitting 
corps m. body , 



VOCABULARY 



147 



cortège m. procession, parade 
côté m. side, direction; du — 

de toward; de tous les -—rs 

in every direction 
couchant m, evening, west 
coucher to lay, couch ; couché 

lying 
couler to flow, be shed 
coup m. blow, stroke, thrust, 

deed, trick, act, accident, 

time ; tout à — suddenly 
coupable guilty, criminal 
cour /. court; faire la — to 

pay court 
courage m. courage, heart, 

man, person, self (See 33 

and 259) 
courir to run, hasten, go about 
couronne/, crown 
couronner to crown 
courroux m. anger, wrath, ire, 

rage, fury, indignation 
cours m. course, récital 
course /. course, joumey, er- 

rand, incursion 
coûter to cost 
coutume/, custom, habit 
couvert covered, covert, con- 

cealed ; à — secure, safe 
couvrir to cover 
cracher to spit 
craindre to fear, be afraid, 

dread 
crainte /. fear, dread 
craintif timid, fearful 
crflne m. cranium 
crédit m. influence, réputation. 



esteem, standing, crédit, 

credence 
cri m. cry, outcry 
crime m. crime 
criminel m. criminal 
croire to beliéve, think, expect, 

take the advice of ; en — à 

to take the word of 
croître to grow, increase 
cruauté/, cruelty, harshness 



daigner to deign, grant, conde- 
scend 

dame/, lady 

danger m. danger 

dangereux dangerous 

dans in, into, to, at (See 15) 

Danube m. the Danube (River) 

dard m. dart, spear, arrow 

de of, from, to, by, with, for, 
in, than, some, any 

se déborder to overflow, over- 
run, pour forth, break out 

débris m. (generaUy pi.) ruins, 
remuants 

début m. beginning 

déceler to reveal, betray, be 
f aise to 

déchirer to tear, rend, mangle, 
mutilate, torture, harrow, 
tear in pièces (See 1458) 

décider to décide, persuade, con- 
vince; se — to résolve, décide 

déclarer to déclare, proclaim, 
reveal; se — to make a 
déclaration, take sides 



148 



VOCABULARY 



découvrir to uncover, disclose, 

reveal, discover 
décrire to describè 
dédain m. disdain, scom, dis- 
regard 
défaillance/, weakening 
défaite /. defeat, disaster, rout, 

overthrow, destruction 
défendre to défend, forbid; se 

— , to resist, draw back 
défenseur m. defender, advo- 

cate, counsel 
défiance /. distrust, suspicion, 

jealousy, caution 
défier to defy, brave, challenge ; 

se — de to distrust, suspect 
dégoût m. disgust 
déguisement m. disguise, de- 

ceit, concealment 
déguiser to disguise, deceive, 

conceal 
déjà already 
delà: au — de beyond, in 

excess of 
délaisser to forsake, désert, 

abandon 
délivrer to deliver, free, rescue, 

release 
demain tomorrow 
demander to ask for, demand 
démentir to contradict, belie, 

disown, deny, baffle, annul 
demeurer to remain, réside, 

live, be 
demi : à — half , by halves 
démon m. démon, devil, fiend 
dénier to refuse 



dénoncer to denounce, accuse 
openly, name as culprit 

départ m. departiu-e 

dépendre to be dépendent upon, 
be subject to, be controlled by 

dépens : aux — de at the ex- 
pense of, giving up, renounc- 
ing 

déplaire to displease, offend 

déplaisance /. unhappiness, dis- 
gust with Uf e 

déplorable déplorable, lament- 
able, sad 

déposer to. set down 

dépouiller to despoil, rob, plun- 
der, deprive 

depuis since; — quel temps 
howlong; — que since (See 
75) 

dernier last 

dérober to steal, divest, pro- 
tect, shelter, shield, conceal 

dès from, even from, from the 
very, at the very 

désarmer to disarm, appease 

désavouer to disavow, disown, 
repudiate 

descendre to descend, corne or 
go down, enter, make a 
descent 

désert m. désert, waste place 

déserter to désert, leave 

désespoir m. despair 

déshonorant insulting, humiliat- 
ing 

déshonorer to dishonor 

désir m. désire 



VOCABULARY 



149 



désirer to désire, wish 

désolé desolate, disconsolate, 
distressed, grieved 

désordre m. disorder, perturba- 
tion, agitation 

désormais henoeforth, hereafter 

dessein m. plan, design, purpose 

dessous below 

dessus above ; la thereupon, 

then ; par above, beyond 

destin m. destiny, fate, lot, 
doom, career, course, life 

destinée /. destiny, fate 

destiner to destine, doom, in- 
tend, design, appoint, assign, 
reserve, prépare, dévote 

détail m. détail 

se déterminer to décide, make 
a décision 

détour m. évasion, subterfuge, 
trick, tum 

détourner to divert, deter, dis- 
suade 

détruire to destroy, strike down, 
demolish, overthrow 

deux two ; tous — both 

devancer to précède, anticipate, 
forestall 

devant before, in the sight of ; 
— que before 

devenir to become, be, prove; 
ce qu'il devient what becomes 
of him 

devers toward 

deviner to guess at, divine 

devoir m. duty, obligation, re- 
spect 



devoir to o^e, be due, be des- 

tined to, belong, cdso various 

renderings vnth must, ought, 

should 
dévorer to devour, consume 
dévoué devoted, faithful 
dévouer to dévote, sacrifice 
diadème m. diadem 
dicter to dictate 
dies nefasti {Latin m. pZ.) evil 

dajrs, days of suspended civic 

life 
dieu m. god 
différence/, différence 
différent différent 
différer to postpone, delay, put 

off 
difficile difficult, hard to please 
digne worthy, dignified, deserv- 

ing 
diminuer to diminish, lessen 
dire to say, tell, mean ; vouloir 
' — to mean; on le dit it is 

said, they say 
discours m. what one says, 

words 
disgrâce /. defeat, misfortune, 

reverse, affliction 
disparaître to disappear 
disperser to disperse, scatter 
disposé disposed, ready, willing, 

arranged in proper disposition 
disposer de to hâve at com- 

mand, shape, control 
dissimuler to dissemble, con- 

ceal, feign not to notice, 

pass over (See 94) 



150 



VOCABULARY 



distance/. cUëtance 

distinguer to distinguish, sepa- 
rate 

distraction /. inadvertence, 
absent-mindedness 

divers différent 

division /. disagreement, dis- 
pute, quarrel, division 

dix ten 

domestique domestic 

dompter to conquer, overcome, 
subdue 

don m. gift, présent 

donc then, theref ore, pray , please 

donner to give, fumish 

dont whose, from which, with 
which, in which 

douceur /. gentleness, modéra- 
tion 

douleur/, grief, sorrow 

doute m. doubt; sans — cer- 
tainly, indeed, probably 

douter to doubt, hâve doubt, 
question 

douteux doubtf ul 

doux (/. douce) pleasing, agree- 
able, welcome, sweet, gentle 

douze twelve 

dramatique dramatic 

drapeau m. flag, banner, stand- 
ard 

droit m. right, claim 

dur hard, harsh, difBcult 

durable durable, lasting 

durant during 

durer to last 

dureté /. harshneas 



E 

eau/, water 

éblouir to dazzle, daze, confuse, 
charm 

ébranler to shake, disturb, 
imsettle, agitate, move 

écarter to put aside, drive 
away, dismiss, get rid of, 
divert, exclude; s' — to 
go aside, diverge, départ 

échapper to escape, make one^s 
escape, get away; s* — to 
escape 

éclaircir to lighten up, en- 
light^n, inform, brighten, ex- 
plain, clear up, clear away 

éclat m, outburst, ^plendor, 
glory, Ught, flash, glitter 

éclatant brilliant, dazzling, vivid 

éclater to burst forth, break 
out, speak plainly, become 
évident, shine forth, be re- 
vealed, be illustrious, appear, 
be displayed, corne to Mfjbt, 
show; faire — to disclose, 
discover 

écouter to halen, listen to 

s'écrier to exclaim 

écrivain m. writer 

effacer to efface, blot out, 
obliterate, forget, remove, 
outshine, éclipse 

effet m. effect, resuit, réalisation, 
carrying out; en — indeed, 
really, in fact, to be sure 

s'efforcer to make efforts, strive, 
exert oneself 



VOCABOART 



KM 



■t. £i|g|il, Icnor, 



êgÊÏ eqn&l, aîmilu-; — à tfae 







égaler to eqoal, be od a par 

with 
^^■rd m. regard, cs fa s c m 
égarer to lead astray; s' — to 

lose one's way, wander 
égayer to make amusing, make 

gay, piovoke to langht>ftr 
s'élancer to rush, i^unge, launch 

oneself 
élevé elevated, lofty, subliine 
élever to raiae, exalt, elevate, 

erect, rear, bring up, nur- 

ture ; s' — to ariae, rise 
elle she, it ; ^même heraelf, 

itself 
éloigné apart, far 
éloigner to remove, banish, put 

far (from) 
éloquence/, éloquence 
embraser to enkindle, inflame, 

set on fire 
embrassement m. embraoe, kiss 
embrasser to embraoe, take in, 

encompass, include, take up 
émotion /. émotion 
émouvoir to move, touch, stir 

up, arouse; s' — to be 

aroused, be moved 
empêcher to prevent, impede 



■ 

I 

. empoisonaer lo pobon, <MM^ 
I nipl> envmoiu 

e mp ot t emeat ai. outbursi^ p«i»» 
sion, frenty, vkileiife^ wiMK 
ness, transport 

emporter to canry awxy, re« 
move, transport, b^ar away» 
sweep away, tum, niaste^r, 
take possession of; t' — to 
beoome angry; V — to pro- 
vail, wtn, be master 

empressé eager, sealoua, ardent 

empressement m. eagernesa» 
aeal, ardor 

emprunter to borrow, take from 

en prep. in, into, by, whilo, 
on, as a, like a 

en pron, of it, of them, from it, 
from them, eic,; by it, by 
him, etc, ; some, any, in the 
matter, therefor, thereby 

enchainer to enohain, f et ter, 
shackle, bind, connoct closely 

encore still, more, again, too, 
then, yet; — un coup onoe 
more, yet again 

endroit m. place, passage 

énergie /. enorgy 

enfance/, childhood, infanoy 

enfant m. /. child 



152 



VOCABULARY 



enfermer to lock up; s' — to 

be shut up, be locked up, 

withdraw, seclude oneself 
enfin finally, at last, then, after 

ail, in a word, in short, at ail 

events 
enflammé on fire, glowing, 

f ervid, fervent 
ennemi m. enemy; as adjec- 

tive inimical, unfriendly 
ennui m. sadness, grief, suffer- 

ing, vexation, distress, sorrow, 

woe, trouble (See 41 and 

175) 
ennuyer to weary, bore 
énorme enormous 
enrichir to enrich 
ensemble together 
ensevelir to bury, plunge, ab- 

sorb 
ensuite afterward, then 
entendre to hear, understand, 

see the significance of , listen 

to; faire — to give to 

understand, let know . (See 

295) 
entier entire, whole; tout — 

entire, entirely, altogether 
entrailles/, pi. entrails; feeling 
entraîner to çarry away, impel, 

captivate, lead away, allure 
entre between, among, into 
entre-coupé interrupted 
entrée/, entrance, admittance 
entreprendre to undertake 
entreprise /. enterprise, under- 

taking 



entrer to enter, corne, go or 
come into 

entretenir to sustain, préserve; 
s' — to hold converse, talk 
together 

entretien m. interview, dis- 
course, talk, conversation, 
subject of conversation, main- 
tenance, support 

envelopper to envelop, sur- 
round, hem in, enclose 

envers toward, over against 

envier to envy, covet, grudge, 
wish for " (See 1547) 

envieux envions 

environner to sm-round 

envoyer to send, address 

épargner to spare, hâve con- 
sidération for 

épée/. sword 

éperdu distracted, bewildered, 
dismayed, desperate, dis- 
traught 

épopée /. epic poem, epic 
poetry 

épouser to marry, wed, espouse 

épouvanter to terrify, frighten, 
horrify 

époux m. husband 

épreuve /, test, proof , trial 

épris captivated, fascinated, 
smitten, enamored 

éprouver to test, try, undergo, 
leam (by expérience) ^ ex- 
périence 

errant wandering, rambling, 
without purpose 



VOCABULâRY 



153 



esdaTe ot. /. slave ; as 
tite slavîsh, servfle, ^oo- 

tspérmMMcef. hape, expectatâon 

e^érer tohope 

e^oir m. hope 

e^rit m. mîml, attentioii, ^writ. 

intdligenœ, wit, aaœs (See 

1645) 
essayer to tiy, attoiipt; s* — 

to try aoé's ddll, put one's 

strength to the.test 
essayer to undeiigp, expensace, 

enoounto*, put up wîth, en- 
dure, dry, wipe away 
estime /. esteem, ocHisideration 
et and; — ... — • • -i both 

. . . and . . . 
et tu. Brute ! (Latin) thou too, 

Brutus! 
étaler to display 
étancher to stanch, stop, quench 
état m. state, condition, case, 

way; en — de able, in a 

position to 
État m. state, country, lealm 
s'éteindre to be extinguished, 

die out, become extinct 
étendard m. standard, flag, 

banner 
étemel etemal, everlasting, un- 

ceasing 
étonner to astonish, daiint, 

confuse, frighten, startle, 

stun 



to suffocaite, 
extinguish, 
put an end to 
é ti aggc t forcMsn; os 



être to be ; — à to bekmg to ; 

c'est-è-dire that is; il est 

tbeie is, th»e are 
Europe/. Eun^pe 
éTeOlcr to avaken, aroose 
éTénement m. e^mt, oecur- 

rmce, issue, &kd, lesuh, oom- 

I^ticHi, outoome 
é^denmient (pnmounce tke 

siflable dem as da, uUkovi 

nasaUty) evidently, deariy, 

with deamess 
é^dence/. évidence 
éviter to avoid, shun, évade, 

élude, escape 
exact exact 
examiner to examine, scruti- 

nixe 
exciter to excite, incite, uige, 

inspirit, arouse, stimulate, 

cause, provoke 
excusiè/. excuse 
excuser to excuse, forgive; 

s' — to exculpate oneself, 

throw the blâme, etc. 
exécuter to exécute, carry into 

effect 
exécution /. exécution 
exemple m. example 
exiger to exact, demand, re- 

quire 
exister to exîst 



154 



VOCABULARY 



expier to expiate, atone for, 
pay the penalty of 

expirer to expire, die, die out, 
run out 

expliquer to explain, account 
for; s' — to explain one's 

• intentions, speak out clearly 

exploit exploit, deed of valor, 
feat 

explosion /. explosion 

exposer to expose, lay before; 
s* — to expose oneself 

expression /. expression 

exprimer to express 

extrême extrême, great, exces- 
sive, utmost (See 55) 

extrémité /. extremity, last re- 
sort 



fable /. fiction, untruth, fable, 
story, taie, plot, talk, laugh- 
ing-stock 
fftcher to anger, irritate 
facile easy 

facilement with ease, easily 
facilités /. pL helps, aids (See 

Pr^ace 28) 
façon fashion, way 
faible weak, little, slight 
faiblesse /. weakness, foible, 

failing 
faire to make, do, let, cause, 
hâve, create, form, act, ac- 
complish^ show, play (a part) ; 
se — to make (for) oneself, 
be; — croire to persuade, 



prétend, give; se — jour 

to see hght, break through, 

find a way ; c'en est fait it is 

ail over, 'tis done 
fait m. fact, deed; tout à — 

altogether, completely, per^ 

fectlv 
faix m. biu-den, weight, load 
falloir to be necessary, be essen- 

tial; various renderings with 

must, hâve to, be obliged to, 

need 
famille /. f amily 
fardeau m. biu-den, charge, en- 

cumbrance 
farouche wild, stem, intract- 

able, unbending, savage, 

severe, fierce, timid 
fatal fatal, fateful, ominous, 

unfortunate, unlucky, sub- 

ject to fate 
fatigue /. fatigue 
fauteuil m. armchair 
faux (/. fausse) false 
faux-fuyant m. shift, évasion 
faveur /. favor, good fortune, 

behalf 
favorable favorable, happy 
favoriser to favor, be favorable 

to 
feindre to feign, dissemble, pré- 
tend 
feinte /. feint, pretence, sham, 

dissimulation 
félicité /. happiness, felicily 
féminin féminine 
femme /. woman, wife 



TOCABCLàBT 



ISS 



fctmerto 
fers ai. pL 



nwR on^ font* 
fetlas. flétrir to blîslht^ vitlnr 



capthrîty, bond? 
fertile, fertile, frmftful 
f eit ai. fire, love, affedmi. 



iwl n, wsve» 
flottiBt: floftln^ 



dUo Mùk ' wm^enng 



piwral 
fidèle faîtIifDl, eouBUnt; as 

noun fahhfiil oœ 
fidélité/, fiddity, constançy 
fier Cf. fière) {Moiid, fasuglity, 

hi^b-spîrited, bcdd, deter- 

mined, intr^nd 
se fier à to trust, hâve oqd- 

fidenoe in 
figuré figurative 
se figurer to imagine, fancy, 

suppose, picture to oneself 
fille/, dau^ter, girl 
fils m. son 
fin fine, refined 
fin /. end; à la — at last, 

finally 
finesse/, clevemess, adroitness, 

subtlety, keenness, cunning 
finir to finish, end, bring to an 

end 
flamme /. flame, love, affection, 

passion, torch 
flatter to flatter, delight, soothe, 

delude, charm, beguile, hold 

out hopes; se — to pride 

oneself, congratulate oneself 
fléchir to bend, subdue, move, 



finx et t^Êba m. ebb and flow 
foi/, faith, love, vow, promise, 

honor, faithfulness» rdia-^ 

bility, tnith, nwl (Sfit 109 

and 181) 
fois /. time; deux — twke; 

à la — at tbe same lime 
fond m. depth, essnice, botiom» 

background 
fonder to f ound, base 
fondre to melt, f ail away, faU» 

pounce, rush, descend 
force /. force, power 
forcer to force, break into, <a^ 

tuie, oompd, oblige 
forme/, form 
fort m. height, dimax, fort 
fort strong, very 
fortune /. fortune, sucœss, 

happiness 
fou, fol (/. folle) foolish, insane 
foule/, crowd, mob, multitude, 

host 
fournir to f umish 
foyer m. hearth, home 
français French 
frapper to strike, smitOi. im« 

press, afflict 
fratricide f ratricidal 



156 



VOCABULARY 



frayeur/, terror, frîght 

frêle frail, weak, inconâiderable 

frémir to shudder, quiver, 

tremble 
frère m, brother 
froid cold, cool, iinfriendiy, un- 

impassioned, indiffèrent 
front m. forehead, brow, counte- 

nancei daring, self-justifîca- 

tien 
fruit m. fruit, reward, benefit, 

resuit 
fuir to flee, désert, évade, avoid, 

leave 
fuite/, flight, subterfuge 
fumer to smoke, reek 
funeste fatal, baneful, blight- 

ing, disastrous, melancholy, 

sad, hopeless, tragic 
fureur /. fury, rage, passion, 

madness 
furie /. fury, mad rage 
furieux furious, raging, in a 

fury 



gage m. pledge, sign, token, 
mark, proof, promise, as- 
surance, security 

gagner to gain, win, obtain, 
win over, attain to, overtake, 
take possession of 

galanterie /. gallantry, affected 
politeness 

garant m. guaranty, authority, 
proof 

garde/, guard 



garder to guard, protect, dé- 
fend, watch over, keep, pré- 
serve, maintain, reserve ; 
se — de to take care not to, 
beware of 

garnison/, garrison 

gauche left 

gémir to sigh, groan, moan, 
lament, repine 

gendre m. son-in-law 

généreux magnanimous, noble, 
generous, great-hearted 

génie m. genius 

genou m. knee 

Germanie /. Germany 

gigantesque gigantic 

glacer to freeze, ehill, paralyze, 
dampen the ardor of 

gladiateur m. gladiator 

gloire /. glory, career, réputa- 
tion, famé, pride, name, self- 
respect 

glorieux proud, blest, blessed, 
rejoicing, glorious 

gorge/, throajb 

goûter to enjoy, hâve delight 
in, taste, expérience 

gouverneur m. govemor, tutor, 
preceptor 

grftce /. pardon, favor, indul- 
gence, forgiveness, mercy, 
thanks be; rendre — s to 
give thanks; de — pray, 
I beg you 

grand great 

graver to engrave, carve, im- 
press, eut, stamp 



157 



vint koiiMw! 



STOS M. maâs, mob, group 




not verr mucfa or many, 
not TOT Ions, bsai^dly 

gnecre/. war 

guider to guide 



(tli=aspîrateh) 

luantnâ (/. habitndle) habituai 

f haine/, hatred, hâte 

thair to hâte, detest, not to 

care for 
fhardi bold, daring 
harmonie/, harmony 
fhasard m. chance, danger, risk 
fhâter to hasten, hurry, force 
fhé (modem eh) an intensire of 

other exdamatary words tchich 

it précèdes 
fhélas I alas ! 
héritier m. heir 
héroïne/, heroine 
fhéros m. hero 
heure /. hour, time; tout à 

r — immediately (modem re- 

cently, soon) 
heureux happy, glad, favorable, 

fortimate, lucky, pleasing, 

successful 
hilarité /. hilarity, loud laughter 
histoire /. history, story, matter 



brrdL vonlky, uiw^t 
konear ^^W $S9' 

milîatioii 
tkoateiiz v/ , koaliMse^ Kuwàl-' 

îating^ shameful^ huniilnlvdii 

adiamed 
hamm / hotror; Èiin — lo 

fiU with honmr 
thuit eîght 
humain human 

humain m. human being, mm 
humble humble, meek 
humilier to humiliate, humhl» 
hymen m. màniag^, wedlock 
hyménée / 9a9he as hymrai 



ici hère ; jusqu* — till now 

idée/ idea, notion, conception 

ignominie/ ignominy, humilia- 
tion 

ignorer not to know, to be un« 
aware of , be ignorant of 

illustre illustrions, famous 

image / image, picture, idea, 
likeness, imagination 

imaginer to imagine, contrive 

imiter to imitate 

immoler to immolate, saorifioe, 
slay, put to death 

immortel immortal, everlasting 

impatient impatient 



158 



VOCABULARY 



impétueux (/. -ueuse) impetu- 

ous, violent 
impétuosité/, impetuousness 
implacable implacable, inex- 
orable, stem, unforgiving 
implorer to implore, ask favors 

of 
importance/, importance 
important important 
importer to matter ; n'importe 

it matters not; qu'importe 

what matters it? 
importun burdensome, trouble- 

some, obtrusive, unwelcome 
impuissant impotent, powerless 

(>Sec269) 
impuni unpunished 
imposer to impose, be impos- 

ing 
impudence /. impudence 
imputer to impute, attribute, 

ascribe 
incertain uncertain, ^constant 
Inconnu unknown 
Inconstance /. infidelity, fickle- 

ness, untrustworthiness 
incontinent immediately {ar- 

choie; see note to Préface 

68 Jf) 
incroyable incredible 
indécence /. indecency, impro- 

priety 
indécis undecided 
indice m. indication, évidence 
indigne unworthy, undeserved, 

base 
indiquer to indicate 



indiscret indiscreet 
individuellement individually 
industrie /. industry 
inexorable inexorable, implac- 
able, merciless 
infatigable indefatigable, tire- 

less 
infidèle faithless ; as noun m, /. 

f aithless one 
infini infinité 
infortune/, misfortune 
infortuné grief-stricken, imfor- 

tunate 
ingrat ungratef ul ; as noun un- 

grateful one, ingrate 
inhumain inhuman, cruel, hard- 

hearted; as noun heartless 

one 
injure /. insuit, wrong, injury, 

outrage, taunt 
injurieux insulting, humiliating, 

slanderous 
injuste unjust 
innocence /. innocence, sim- 

plicity 
innocent innocent 
inonder to inundate, overflow 
insensible indiffèrent, unmoved 
insérer to insert 
insolence /. insolence, boldness, 

hardihood 
insolent insolent 
inspirer to inspire, prompt, 

arouse, cause 
instruire to instruct, teach 
instrument m. instrument 
insulter à (See 607) 



VOCABULARY 



159 



Intelligence /. intelligence, 

knowledge ; understanding ; 

d* — in agreement {See 499) 
intention/, intention 
s'intéresser à to take an in- 

terest in, pléad for 
intérêt m. self-interest, bias, 

considération, love, care 
interroger to question, interro- 

gâte 
interrompre to interrupt, break 
intimider to intimidate 
introduire to admit, bring in, 

permit to enter 
inutile useless, superfluous, 

fruitless, idle (See 269) 
inventer to invent 
invincible invincible 

* 

irréparable irréparable 

irriter to stir up, excite, anger, 

irritate, incense, aggravate 
ItaKe /. Italy 



jadis once, formerly, long ago, 

of old 
jalousie/, jealousy 
jaloux jeaJous 
jamais, ever, never ; à — , pour 

— for ever ; ne . . . — never 
jeter to throw, cast, let fall, 

launch 
jeu m. play 
jeune young 
joie /. joy, pleasure 
joindre to join, miite, bring 

together 



jouer to play; se — de to 

trick, deceive 
joug m. yoke, burden, oppression 
jouir de to enjoy, hâve the use 

or enjoyment of,. possess, 

reap the benefits of 
jour m. day; pi. life; un — 

some day; se faire — to 

break through, find a way 

(See 85) 
journée /. day 
juge m. judge 
juger de to judge, imagine, 

think, deem, be sure, imagine 
jurer to swear, résolve, protest 
jusque (s) even; jusqu'à as 

far as, imtil, to; jusqu'où 

how far 
juste just, apt 

justement justly, with reason 
justice /. justice ; se faire — 

to take the law unto one's 

own hands, atone for earlier 

errors, recognize one's mis- 

takes (also se rendre — ) 
justificatif docmnentary, formai 
justifier justify (See 930) 



là there, in that; dessus 

thereup'on, then 
lâche cowardly, dastardly; as 

noun coward, dastard 
laisser to leave, let, allow, hâve, 

cause 
langage m. language, manner 

of speech 



160 



VOCABULARY 



langue /. language, tongue 

languir to languish 

large broad, spacious 

larmes/, pi. tears 

las (/. lasse) tired, weary, 

fatigued 
lassé sated, wearied, languid, 

tired 
lasser to tire, weary, fatigue 
laver to wash, wash away 
le article the, his, her, their, etc. ; 

pron. it, so 
lecteur m. reader 
léger light, swif t 
légèrement lightly, readily 
légion /. légion 
légitime legitimate, honorable, 

righteous 
lent slow, sluggish 
leur to them, them, their; le 

— theirs 

libérateur m. liberator ; as adj. 

liberating, redeeming 
liberté /. Uberty 
libre f ree 
lien m. bond, tie 
lier to bind, tie, associate, 

unité 
lieu m. place ; au — de instead 

of 
lire read 

lit m. bed, marriage 
livrer to give up, give over, 

betray, deliver, abandon ; se 

— to yield, surrender 
logique logical 

loi /. law (See 507) 



loin far 

loisir m. leisure 

long long 

longtemps long, a long time 

lors then 

lorsque when 

lot m. lot, share, portion 

se louer de to be satisfied with, 

be gratified at, congratulate 

oneself upon 
loyal true-hearted, unsuspicious 
lueur /. hght, gleam, glimmer ; 

à la — by the Hght 
lui he, him, to him, to her 
lumière /. Ught ; information ; 

pi. inteUigence 
lutter to strive, struggle, fight 

M 

Madame (See 15 and 163) 
magnanime magnanimous, con- 

siderate 
magnifique magnificent 
main /. hand ; à — forte ^ith 

violence 
maintenant now 
mais but, why, corne 
maison /. house, f amily 
maître m. master 
maîtresse /. mistress, loved one, 

sweetheart 
mal badly, amiss, with diffîculty 
mal m. evil, woe, grievance 
malgré in spite of , despite 
malheur m. misfortune (See 

525) 
malheureux unfortunate, un- 



VOCABULA.RT 



161 



happy ; as noun unfortunate 

one, wretch 
manifester to manifest 
manquer to be lacking, lack, 

miss, faîl 
marais m. marah 
marche /. march, progress 
marcher to go, go on, prooeed 
înari m. husband 
mariage m. marriage 
marque/, sign, indication, mark, 

stamp, token 
marquer to show, mark, indi- 

cate, designate 
masse : en — in the maas, in a 

body 
matelot m. sailor 
matin m. moming 
méditer to meditate 
se mêler to mingle 
même even, same, -self, very 
mémoire /. memory, recollec- 
tion 
menacer to threaten, menace 
ménager to temper, procure, 

bring about, spare, make the 

most of, treat with regard, 

humor 
mensonge m. he, falsehood 
se méprendre to make a mi»- 

take, err 
mépris m. scom, despite, con- 

tempt, slight, disregard 
mépriser to scom, despise, con- 

temn, disregard 
mer/, sea 
mère /. mother 



, mériter to merit, de6eiire« eam 
Imessieangentleium 
[mesurer to measure, make 

graduai 
mettre to put, set, bring, lay, 

thrust ; — en Jour to make 

prominent, bring out 
meuble m. pièce of fumiture 
meurtrier murderous, fatal, 

deadly 
mien mine 

mieux better ; le — best 
milieu m. middle ; au — in the 

midst, among 
mille thousand, a thousand, 

many 
misérable misérable, wretched, 

unhappy 
misère/, misery 
moderne modem 
modestement modestly 
modestie/, modesty 
mœurs /. pi. morals, mannerSi 

characteristics, character • 
moi me, I 
moindre less, smaller ; le — the 

lesser, the least 
moins less ; au — at least ; du 

— at least ; à — que unless 
mois m. month 
moment m. moment 
monde m. world, earth, people, 

Society, crowd; tout le — 

everybody 
monologue m. monologue 
monter to go up, get into, go • 

aboard, ascend, attatn 



162 



VOCABULARY 



montrer to show; se — to 
appear 

mort/, death 

mort dead ; also as noun 

mortel mortal 

mortuis : de — nil nisi bonimi 
{Latin) of the dead nothing 
but good, speak only good of 
the dead 

mot m. Word 

mouchoir m. handkerchief 

mourant âying ; also as noun 

mourir to die; faire — to put 
to death 

mouvement m. motion, émo- 
tion, impulse, movement, mo- 
tive 

moyen ni. means 

muet mute, dumb, silent 

mur m. wall 

murmure m, murmur, com- 
plaint 

mutin m. mutinous 

mutuel mutual, conunon 

mystère m. mystery, secret, 
secrecy 

N 

naguère not long ago, lately, 

formerly 
naissance /. birth, beginning 
naissant nascent, budding 
naître to be bom, come to life, 
spring up, begin, arise ; faire 
— to bring into being, cause 
nation/, nation 
naturel, natural; as noun m. 



naturalness, nature, disposi- 
tion, character 
naufrage m, shipwreck, disafiter, 

hulk 
ne: — ... pas not; — . . . 

aucun no, not any; — . . . 

guère scarcely, hardly; — 

. . . jamais never; — . . . 

que only, except; — . . . 

rien nothing; — ... plus 

no longer, no more 
nécessaire necessary 
négliger to neglect, overlook, 

f orget, delay, put off 
ni neither, nor; — ... — 

neither . . . nor 
nier to deny 
noble noble 

nœud m. bond, knot, tie 
noir black, ominous, dark 
nom m. name 
nombre m. number 
nombreux numerous, many 
nommer to name, elect 
non no, not ; — pas not 
notre our 
nôtre: le — ours; des — s 

of our party or group 
nouer to tie, knot 
nourrir to nourish, cherish, 

feed, supply, fill 
nous we, us, ourselves, each 

other 
nouveau, nouvel (/. nouvelle) 

new, fresh, additional, dif- 
férent ; de — again 
nouvelle /. news 



VOCABULARY 



163 



noyer to drown, bathe ; se . — 

to plungBi drown, be plunged 
nu naked, bare, unvamished 
nuire to injure, harm 
nuit/, night 
nul no; . . . ne . . . — , — 

. . . ne ... — no 
nullement not at ail, by no 

means (also toith a preceding 

ne) . 



6 0! oh! 

obéir à to obey 

obéissance/, obédience 

objet m. object 

obscur obscure, dark, unknown, 

lowly 
obscurité /. obscurity 
observer to observe, consider, 

oontemplate 
obstacle m. obstacle, impedi- 

ment, hindranoe 
obstination/, obstinacy 
obstiné obstinate, persistent 
occuper to occupy, busy, fill, 

engage attention 
odieux hateful, hated, odious 
œil m. eye, look (As to plural 

yeux see 62 and 201) 
offense /. insuit, anger, wrong 
offenser to insuit, anger, offend 
offre f. ofiFer 
offrir to oflFer; s' — to présent 

oneself , appear, offer oneself 
ombre /. shadow, shade, sem- 

blance 



on one, we, they, people 
opposer to oppose; s* — to 

' interpose, stand in the way 
opprimer to oppress, bring sad- 

ness to, grieve, overcome, do 

away with 
orage m. storm, tempest, strife 
ordinaire ordinary 
ordonner to order, prescribe, 

decree, dispose, command ; 

— de to décide upon, make 

a décision conceming 
ordre. m. order, orders, com- 
mand, regularity 
oreille /. ear 
orgueilleux proud, haughty ; 

as noun proud one, proud man 
Orient m. Orient, the East 
original original 
ornement m. omament 
oser to dare, be so bold. as to 
ou or ; — ... — • • •» either 

... or ... ; — bien or else 
où where, to or at or in which, 

when; jusqu' — how far; 

par — which way, through 

which 
oubli m. obUvion, forgetfulness 
oublier to forget 
oui yes 

ouïr to hear (archaic) 
outrage m. insuit, outrage, 

abuse, offence, ravages 
outrager to insuit, outrage, 

offend, abuse, shock, hu- 

miliate 
outre beyond, in addition to 



164 



VOCABULARY 



ouvrage m. work 
ouvrir to open, disclose; s' — 
to open, make révélations 



paix/, peace 

palais m. palace 

pfllir to grow pale, blench 

par through, by, with; de — 

in the name of 
parade /. parade, show, display 
paraître to appear, seem 
parce que because 
par-dessus above, beyond, in 

addition to 
pardon m. pardon, forgiveness 
pardonner à to pardon, forgive 
parent m, parent, relative 
parer to adom, make display; 

to parry, ward off 
paresse /. idleness, sloth, slug- 

gishness 
parfait perfect, finished 
parler to speak; entendre — 

to hear, hear of , hear about 
parmi among, amidst 
parole /. word 
parricide parricidal, murderous ; 

as noun parricide, murderer, 

murder 
part /. share, direction, side, 

part 
partage m. share, lot, portion, 

inheritance 
partager to hâve a share in, 

divide into shares, divide 

between 



parterre pit (of a théâtre) 

parti m. part, décision, side(s), 

cause, party 
partie /. part 
partir to leave, départ, go 

away, go 
partout everywhere, on ail sides 
pas : ne ... — , — ... ne . . ., 

not 
pas m. step, action; de ce — 

at once 
passage m. passage, way 
passé m. past 
passer to pass, go on, surpass; 

se — to go on, take place; 

se — de to get along with- 

out 
passion/, passion 
paternel paternal, fatherly 
patrie /. country, f atherland 
pauvre poor 
payer to pay, reward 
pays m. country 
péché m. sin, fault 
pêche /. fishing 
peindre to paint, depict, por- 

tray, picture 
peine /. trouble, suffering, pun- 

ishment, pain, tonnent, dis- 

tress, penalty, diflSculty; à 

— scarcely 
peinture /. picture, dépicting, 

portrayal 
penchant m. fondness, inclina- 
tion, propensity 
pencher to incline, lean, vergei 

be indined 



VOCABULART 



165 



pendre to hang 

pénétrer to penetrate, see 

through, discover, fathom 
pénible painful, difficulté la- 

borious 
pensée /. thought 
penser to think, believe 
percer to pierce, stab, corne 

through, corne to view 
perdre to lose, destroy, be the 

ruin of, waste, spoil, throw 

away, cause the death of , put 

to death 
père m. father 
perfection/, perfection 
. perfide perfidious; as noun 

traitor, tràitress, perfidious 

one 
péril m. péril, danger 
période /. period, passage 
périr to perish, die 
permettre to permit, allow 
perruque /. wig, periwig 
persécuter to persécute, tor- 

ment 
personne /. person, individual ; 

nobody 
persuader to persuade 
perte /. loss, destruction, death, 

ruin 
peser to weigh, press, hang 

heavy, burden 
petit little 
peu little, few; pour — que 

. . ., if . . . onlyaUttle . . . 
peuple m, people, tribe, race 



peur/, fear 

peut-être perhaps, mayhap 

pièce/, pièce 

pied m. foot 

piège m. snare, trap, net 

pirate m. pirate 

pire worse ; le — the worst 

pitié /. pity 

place /. fort, place, stead, 

stronghold, room, oppor- 

tunity, space 
plaindre to pity, commiserate ; 

se — de to complain of, find 

fault with 
plainte/, complaint 
plaire to please, be pleasing, 

win the affection of; se — 

à to take pleasure in 
plaisir m. pleasure 
plein full, filled with 
pleur m. tear 
pleurer to weep, weep for, be- 

wail 
plonger to plunge, dive, thrust, 

immerse 
pluriel m. pliu-al 
plus more; — ... — . . ., 

the more . . . the more ... ; 

d'autant — ... que . . ., 

so much the more ... in 

that ... ; de — moreover ; 

ne . . . — no more, no 

longer ; non — neither 
plutôt rather, sooner 
poésie/, poetry 
poids m. weight, heaviness, 

oppressiveness 



166 



VOCABULARY 



poignard m. dagger, poniard 
point m. point, degree; ne 

... — not at ail 
poison m. poison 
pompe /. pomp, magnificence, 

solenmity 
port m. port, harbor, refuge 
porte/, door, gâte 
porter to carry, bring, bear, 

direct, tum, move, prompt; 

— des coups to deal blows 
portrait m. portrait 
posséder to possess, be a master 

of , be conversant with 
possesseur m. possessor 
pour for, to, in order to, as, 

as a ^ 
pourquoi why 
poursuivre to pursue, go on, 

persécute, oppress, follow, 

proceed with 
pourtant however, still, yet 
pousser to urge, drive, incite, 

impel, utter, push, carry, 

extend, crowd, deal 
poussière/, dust 
pouvoir to be able ; various 

renderings with can, may, 

possible, possibly, perhaps 
pouvoir m. power 
précaution/, précaution 
précieux precious, artificial, af- 

fected 
préciosité /. affectation, euphu- 

ism 
précipiter to precipitate, hurl, 

dash, plunge 



prédire to predict, foretell 

préférence/, préférence 

préférer to prefer 

premier first, early 

prendre to take, assmne, take 
on, capture, seize ; à tout — 
on the whole,* taken as a 
whole; se — à to begin to, 
to . . . forthwith 

préoccuper to preoocupy, en- 
gage, engross 

préparer to prépare, make 
ready, hâve in store 

près : de — from near at hand ; 
— de near, near to, almost 

présage m. présage, omen 

présager to présage, foreshadow 

présence/, présence 

présomptueux (f. -ueuse) pre- 
simiptuous, presuming, over- 
weening 

présent at hand, présent, before 
me, you, etc. 

présent m. présent, gift 

présenter to présent 

presque almost, nearly 

pressant urgent, pressing 

presser to press, hasten, urge, 
drive, incite, press, quicken, 
impel, oppress, be insistent 

prêt ready 

prétendre to claim, intend, pré- 
sume, assert, contend, main- 
tain, expect, inspire, think, 
seek, demand, wish, mean 

prétention /. claim, intention, 
aspiration, ambition 



x^ 












to profit 
profood prof ound, deep 
proie/, prey, booty 
pfo jet Project, pinpoee, plin 
pfoloogcr prokMig, drag out 
promesse/, promise 
pramettfe to promise 
prompt prompt, lesdy 
proposer to propose ; se — to 

think of doing, plan, intend, 

hope for, hope 
propre own, calculated, adapted, 

proper 
propriété /. property, fitness 
protéger to protect 
prouver to prove 
province /. province 
prudence/, prudence, caution 
puisque since 
puissance/, power, might, force, 

weight 



»" 



■nmsKvty 

ntutok ^irwK^ Vw^\v ^^i^l% 
s^ InUt» VwNUs W>>iis ^^N 

. . . — t>«ily 

OtMlqae sMue» any» a tw^r^aii^i 

everj —»..%«! wUh'U« 

evw, wKat«ver 
qadquefois smnHimMi 
qadqu*tta soine tm<^ ; pi. qusl« 

ques uns some, a f «»w 
querelle/, quarrf^, caum^ 
qui who, whom, which; {»lm 

rare or arcHnit) what 
qidtter to loave, ahaïuion, ft>r« 

sake, deaert, diM|HM)NO with 
quoi what, which ; ds wliortw 

with, wherewithal, oooanioi) ; 

— quewhatevfr (no/ quoique, 

which see) ; • - qu'il stl soit 

however that iiiay hti 
quoique although, though 



168 



VOCABULARY 



race /. race, kindred 
rage /. rage, f ury 
raison /. reason, motive, argu- 
ment 
rallumer to kindle, rekindle, 

revive; se — to revive, 

break out again 
ramener to bring on, bring 

back 
rang m. rank, row, station; 

au — de among 
ranger to range, set, place, 

bring, array, rank, draw up; 

se — to submit, affiliatè 
rappeler to recall, call back; 

se — to recall, remember 
rapport m. report, récital 
rapporter to bring back 
rapprocher to bring near, bring 

together 
rarement rarely 
rassembler to assemble, imite, 

bring together again, mass, 

mnster, gather, group 
rassurer to encourage, reassure, 

comfort, cheer, tranquiUize 
ravage m. ravage, ravages, 

bUght 
ravhr to rob, rescue, charm, 

delight, enrapture, wrest, 

take, snatch 
ravisseur ravisher, spoiler, spo- 

liator, abductor 
réalisation/. reaUzation 
réalité /. reality 



rebelle rebeUious, refractory, 

indiffèrent 
rebut m. outcast, rejected one 
recevoir to receive, take, admit, 

accept 
rechercher to seek, seek the 

love or friendship of , woo 
récit m. récital, report, story 
reconnaissance /. gratitude, 

récognition 
reconnaître to recognize, iden- 

tify, reconnoiter, repay, re- 

ward ; se — to repent, to ac- 

knowledge, get one's bearings 
recueillir to gather, reap, shelter 
reculer to defer, delay, retard, 

recoil, shrink from, draw 

back; se — to withdraw, 

recoil 
redire to repeat, rehearse 
redoubler to increase, redouble 
redoutable redoubtable, dread- 

ful 
redouter to fear, dread 
réduire to reduce, destroy, 

force, ovemile, bring 
réellement really 
réflection/. reflection 
refus m. refusai 
refuser to refuse 
regagner to regain, win back, 

win over 
regard m. aspect, glance 
regarder to look at, hâve to do 

with, look, consider, examine, 

contemplate, regard, look 

upon, concem 



TOCABUIARY 



i«d 



f€^é regolated 

régner to ragzi^ mie, hold 
siray 

regret m- regret ; â — regret- 
fully, witli regret 

r^retter to regret 

rente/, queen 

rejeter to reject, cast out, dé- 
cline 

rejoindre to îoîn, oTertake, 
unité, biing together, rejoin 

remarquable remarkable 

remerrîmoits m. pi. thanks 

remettre to give back, restore, 
trust to, leave it to 

remonter to gp back, remount, 
reêmbark, reascend, rise agaiu 

rempart m. rampart, wall 

remplir to fîll, fulfil, complète 

remplissage m. filling, padding 

remporter une victoire to win a 
victory 

renaître to be bom again, rise 
again, come to life again, 
spring up again " 

rencontre /. meeting; venir à 
sa — to come to meet him ' 
or her 

rencontrer to meet, come upon, , 
find; se — to meet one 
another, be of the same mind 

rendre to give back, render, 
bring, restore, betake, make, 
give up, hand over, pay, de- 
liver; se — to surrender, 
yield 



/. waiown. }vrs)o«wd 

gjory, famé, repatation 
reDoaccr à to re»ouiwi^ gixy 

up 
rentier to go back hoin^^ retum 

alxiaid ship, retuïti> go b*ck> 

conïe back, be restowd^ <x>itt^ 

again 
renverser to *o\x^rtum, o\Tr* 

thiow, defeat> imhu^ W;îi% 

down 
renvoyer to s»end back, ^^kI 

:iway, disnùss 
répandre to spread, shcd, sscat- 

ter, ix>ur forth, pix>(>agHt^, 

distribute, spill, diffuse 
réparer to repair 
repasser to re(>a;^, cro^s i\giùn 
se repentir to rejwnt 
répéter to roiH\it 
répondre à to ans\\Tr, conform 

to ; répondre de to ans^w^r for» 

warrant, guaraiiteo, stand 

security for 
réponse/. ros{X)iise, anst^Tr 
repos m. repose, peaco, quiet 
reposer to repose, rost; se — 

sur to rely upon 
repousser to repulso, spiirii, n»- 

joct 
reprendre to tako back, ro- 

simie, regain, blâme 
reprocher to reproach, bliuno; 

— quelque chose à quelqu'un 

to reproach someono witli 

something 
république /. republic 



170 



VOCABULARY 



répulsion /. repulsion, répug- 
nance 
réserver to reserve, keep back 
résister to resist 
se résoudre to résolve, décide, 

intend, be resolved, make up 

one's mind 
respect m. respect, révérence, 

esteem 
respecter to respect, révérence, 

hâve respect for, esteem 
respirer to breathe, be re- 

iieved, hâve the breath of 

life, live 
ressentiment m. resentment, 

animosity, feeling, memory 
ressouvenir m. recollection, 

memory {See 377) 
reste m. remainder, rest, rem- 

nant, last, relie, what is 

left 
rester to remain, be left ; il me 

reste I hâve left 
retardement m. delay, postpone- 

ment 
retenir to retain, detain, re- 

strain 
retentissement m. resounding, 

notability, notoriety 
retomber to fall back, meet 

disaster again, fall 
retour m. return, change ; sans 

— irrevocably, irretrievably, 

incurably 
retotimer to return, gô back 
retracer to retrace, remind of 
retraite/, retreat, refuge 



retrouver to find, meet again, 
recover 

réussir to succeed, be successful 

réveiller to reawaken, awaken 

révéler to reveal 

revenir to return, come back, 
corne again 

revêtir to put on, don 

revivre to revive, come to life 
again, live again 

revoir to see, see again, see once 
more 

revoler to hasten back, fly 
back, return 

révolte /. open rébellion, revolt, 
disgust 

révolter to drive to revolt, re- 
volt, excite, arouse, disgust 

ridicule ridiculous 

nen nothing, anything; ne 
. . . — , — . . . ne . . ., noth- 
ing 

rigoureux rigorous, strong, sé- 
vère 

rigueur /. severity, rigor, ci*u- 
elty, repuise, disfavor 

rivage m. shore, strand 

rival rival ; also as noun 

rivalité/, rivalry 

rive /. bank, shore 

rocher m. rock 

roi m. king 

rôle m. rôle, part 

romain Roman; also as noun; 
les Romains m. the Romans 

Rome/. Rome 

rougeur/, redness, blushes 



VOCABULARY 



171 



rougir to blush, redden, be 

ashamed 
route /. road, way 
royal royal 

royaume m. realm, kingdom 
rugissement m. bellowing 
ruine /. disaster, humiliation, 

min, downfall 
rumeur/, rumor 
ruse /. ruse, trick 



sacré sacred, consecrated 

sacrifice m. sacrifice 

sacrifier to sacrifice 

sage wise 

saisir to seize, lay hold of, 

impress 
salle /. hall, meeting-place, 

audience 
sang m. blood, race, family 
sanglant bloody, bleeding, 

blood-stained, stained with 

blood, reeking 
sanguinaire sanguinary, mur- 

derous 
sans without, but for ; — que 

without 
satisfaire to satisfy, comply 

with the wishes of 
sauvage savage, wild, un- 

civilized 
sauver to save; se — to es- 
cape, be ofï, fiy, hasten away 
savant wise; — m. scholar, 

leamed man 
savoir to know, know how, be 



able, succeed in, contrive, 

manage ; à — to wit, namely 
scène/, scène, stage 
sceptre m. sceptre 
second (pronounce cas g) 

second 
seconder {pronounce c os g) to 

support, aid, follow up, fur- 

ther, act according to, not 

to belie 
secours m. aid, assistance, rehef 
secret m. secret, secrecy 
séditieux séditions, mutinous, 

rebellions 
séduire to seduce, lead astray, 

deceive, delude, beguile 
seigneur m. lord ; Seigneur my 

lord, Your Highness, Yoiu* 

Majesty 
sein m. bosom, midst 
seize sixteen 
semblable à similar, like 
sembler to seem 
semer to sow, strew, give out, 

spread 
sens m. sensé, direction 
sensation/, sensation 
sensible appréciative, sensi- 

tive, susceptible, tender, af- 

fected, impressed 
sentiment m. sentiment, con- 

sciousness 
sentir to f eel, know, sensé, savor 

of 
séparer to separate; se — to 

separate, part 
sépulture/, burial 



172 



VOCABULARY 



serment m., oath, pledge, vow, 

promise 
service m. service 
servile servile, subject 
servir to serve, be subservient 
seul only, sole, alonë, mère, 

single; tout — quite alone, by 

oneself ; un — a single one 
sévère severe, strict, stern 
si if, so, whether, such 
il sied it befits (front the archaic 

verb seoir) 
sien his, hers; les — s his 

family dr party or soldiers 
signaler to signalize, emphasize, 

make prominent, cUstinguish 
signifier to signify, show, mean 
silence m. silence 
simple simple 
simplement simply 
sincère sincère 
sincérité/, sincerity 
soigneux careful, considerate 
soin m. care, zeal, eagemess, 

effort, task, considération, 

honor, attention, solicitude 
soixante sixty 
soldat m. soldier 
solennel (pronounce so-la-nel) 

solemn, formai, sacred 
sollicitation /. solicitation 
songe m. dreàm, vision 
songer to bear in mind, not for- 

get, try to find a way, think 
sort m. fate, lot, life, career, 

fortmie, existence 
sortilège m. witchcraft 



sortir to go out, corne ont, 
leave, départ, escape, go on, 
émerge, fall, rise 

sot m. fool, idiot 

sotto voce (Italian) in an under- 
tone, under one's breath 

souci m. care 

soudain immediately, suddenly 

souffrance /. suffering 

souffrir to snffer, endure, 
undergo, grant, permit 

souhait m. wish, désire, hope 

souiller to sully 

soulever to raise, arouse, raise 
up, stir up, call up, excite to 
revolt ; se — to rise in revolt 

souihettre to submit, be sub- 
missive 

soumis obedient, submissive, 
hmnble 

soupçon m. suspicion 

soupçonner to suspect, be sus- 
picions of 

soupir m. sigh, sighing, love 

sourd dull, imresponsive, slug- 
gish ^ 

sous under, beneath, subordi- 
nate to 

soutenir to sustain, bear, sup- 
port, hold upright, maintain, 
(re)afl5rm, uphold, endure, 
keep up 

soutien m. support 

souvenir m. memory, recollec- 
tion, mémento, reminder 

se souvenir de to remember; 
il me souvient I remember 



VOCABULARY 



173 



souvent often 

souverain m. sovereign, most 

important, controlling 
stratagème m. stratagem, trick, 

device 
style m. style 
subir to undergo, not object, 

accept submissively, suffer, 

bear 
succès m. success, resuit, out- 

come, effect 
sueur/, perspiration 
su&e to suffice, be enough 
suffoquer to suffocate 
suffrage m. support, acceptance, 

concurrence, voice, approba- 
tion, vote(s) 
suite /. séquence, suite, event, 

resuit, retinue, attendants ; 

par — de as a resuit of 
suivre to follow, come after, 

go after 
sujet m. subject, cause, matter, 

thème, reason, subject matter 
superflu superfluous, useless, 

fruitlçss 
supplice m. pain, punishment, 

torture, exécution, death 
support m. support, coopération, 

backing 
supprimer to suppress, lea^.'e 

out 
suprême suprême ^ 

sur on, upon, above, over, 

about, from, in, against 
sûr sure, certain, assured 
surcroît m. increase, overplus 



stimaturel supernatural 
surprendre to surprise, take 

unawares, outmanœuvre 
surprise /. surprise 
surtout above ail, especially 
susciter to arouse, raise up, 

excite 
suspect {pronounce sus-pek) sus- 

picious, suspected 
suspendre to suspend, inter- 

rupt, stop 
sympathie /. sympathy, inclina^ 

tion 



tache/, stain, dishonor 

tâcher to try, attempt, endeavor 

se taire to be silent, not to 

object, hold one's peace, be 

still, remain silent 
tandis que whilst, whereas 
tant so much, so many, such, as 

much, so often ; — soit peu 

(be it) ever so little 
tantôt just now (See 413) 
tapage m. noise, fuss, racket 
tard late, long 
tarder, to delay, be slow ; il me 

tarde de I am eager to, I 

long to 
tel such 
téméraire bold, daring, rash, 

brazen 
témoin m. witness 
tempête/, tempest, storm 
temps m. time ; depuis quel — 

how long 



174 



VOCABULARY 



tendre tender, affectionate, af- 

fecting 
tendre to stretch, tend, bend 
tendresse /. tendemess, affec- 
tion, love 
ténébreux dark, in the dark 
tenu* to hold, hâve, take, con- 

sider, owe 
tenter to try, test, (at)tempt 
terminer to terminate, end 
terre /. land, earth, world 
terreur/, terror, fright 
terrible terrible 
tête/, head, beginning 
théâtral dramatic, theatrîcal 
théâtre m. théâtre, dramatic 

work(s), stage ' 
timide timid 

tirer to draw, elicit, dérive 
tison m. firebrand 
tissu m. tifisue, fabric, texture, 

cloth, gauze 
titre m. title, right ; à quel — 

by what right 
tombeau m. tomb, grave, 

sepulchre 
tomber to fall, drop 
ton thy, thine, your 
torrent m. torrent 
torture/, torture 
tôt soon 
touchant touching, affecting ; 

— à concerning, about 
toucher to touch, move, affect, 

concem, arouse 
toujours ever, forever, con- 

tinually, still, always 



tour m. tum; à mon — in 

my turn, mjrself; — à — 

altemating, each in his or 

its tum, one after another 
tour/, tower 
tourment m. torment, torture, 

distress 
tourmenter to torment, torture, 

pain, distress 
tout ail, quite; tous deux 

both ; puissant ail power- 

ful; — à l'heure soon. just 

now ; — m. the whole, ail 
toutefois nevertheless, however 
trace /. trace, mark, sign ; sur 

leur — in their footsteps 
traducteur m. translator 
traduire to translate 
tragédie/, tragedy 
tragique tragic, dramatic 
trahir to betray, be false to, 

abandon, behe, go contrary 

to, frustrate, reveal 
trahison/, treason 
traîner to drag, bear, carry 

about, draw, draw along, 

draw in, trail 
trait m. arrow, dart, boit, 

touch, characteristic, feature, 

trait, flash 
traité m. treaty 
traiter to treat, regard, hold in 

disesteem 
traître m. traitor 
tranquille tranquil, unmoved, 

without anxiety, at ease, 

undisturbed 



VOCABULARY 



175 



transport m. rapture, delight, 
émotion, transport, outbreak, 
outburst, passion, ecstasy, 
frenzy 

travail m. work, effort, achieve- 
ment 

travailler to^work, toil 

travers: a — amidst, across; 
au — through, across 

traverse /. (See 287) 

traverser to go counter to, 
thwart, trouble, cross, tra- 
verse, go through 

trembler to tremble, be anxious 

tremper to dip, wet, moisten, 
temper 

trente thirty 

trépas m. death 

très very, much 

trésor m. treasure 

triomphant triimiphant 

triomphe m. triimiph 

triompher to triimiph 

triste sad, melancholy, gloomy, 
dreary 

trois three 

tromper to deceive, betray ; se 
— to be mistaken 

trompeur deceptive, tricky, de- 
lusive, beguiling, deceiving 

trône m. throne 

trop too, too much, too many, 
too well, full well, too great, 
only too Well; c'en est — 
this is too much, you go too 
far 

trophée m. trophy 



trouble m. confusion, embarrass- 
ment, émotion, excitement, 
turmoil, trouble, agitation 

troubler to disturb, confuse, 
agitate, trouble 

troupe /. troop ; pZ. troops 

trouver to find, consider, think ; 
se — to be 

tu quoque, fili ! {Latin) thou 
also, my son ! 

tuer to kill, slay, blast 

tyran m. tyrant 

tyrannie/, tyranny 

tyrannique tyrannical 

tyranniser to tyrannize 

U 

un a, one, some j V — et l'autre 
both; r — à l'autre to each 
other f also les uns, etc. 

union/, union 

unique sole, single, only, unique 

uniquement solely, exclusively 

unir to unité, bring together, 
join 

univers m. world, earth, imi- 
verse 

usage m. usage, use, custom 

usurier m. usurer 

utile useful 



vain idle, empty, frivolous, 

foolish, in vain 
vaincre to conquer, overcome, 

vanquish, subdue 
vainement vainly, in vain 



176 



VOCABULARY 



vainqueur m. conqueror 
vaisseau m. ship, vessel, war- 

ship 
valeur/, valor,. strength, worth 
veiller to watch, be watchful 
vendre to sell 
vengeance/, vengeance 
venger to avenge 
vengeur m. avenger 
veni, vidi, vici (Latin) I came, 

I saw, I conquered 
venin m. poison, venom 
venir to corne ; — à to happen 

to; — de to hâve just; 

faire — to summon, send for 
vent m. wind 
véritable true, real 
véritablement truly, in truth, 

as a matter of fact, really 
vérité/, truth 
vers toward, towards 
vers m. verse. Une 
verser to pour out, shed, spill 
vertu virtue, effect, honor 
vertueux virtuous, strong 
veuve/, widow 
victime /. victim 
victoire/, victory 
victorieux victorious 
vide empty 
vie /. hfe {See 85) 
vieillard m. old man 
vif lively, keen 
vigoureux vigorous 
ville /. city, town 
vingt twenty 
violence /. violence 



violent violent 

visage m. face, countenance 

vivre to live 

vœu m. wish, vow, prayer, de- 
sire; pi. vœux love, heart, 
affection 

voici hère is, hère are 

voie/, way 

voilà there is, there are, that 
is, those are, ago 

voir to see, look upon 

voisin near by, close to, near 
to, neighboring, near 

voix/, voice 

voler to fly, hasten 

volontaire voluntary 

volonté/, will, wish, désire 

votre your ; le vôtre yours 

vouloir to wish, will, insist, 
try to, begin to, be willing, 
like, ask, admit, consent, 
mean, be resolved, require; 
— dire to mean; en — à 
to be vexed with, hâve a, 
grudge against 

voyage m. voyage, journey, trip 

vrai true, real 

vue/, sight, view, eyes 

vulgaire vulgar, ordinary, com- 
mon, imdistinguished 



y to it, in it, there, hère, at it, 
upon it, thither 



zèle m. zeal 



This book should be retumed to 
the Iiibrary on or before the last date 
stamped below. 

A fine of five cents a day is incurred 
by retaining it beyond the speoified 
time. 

Please retum promptly.