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: OBSERVATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE,
FAITES
AVEC LE MICROSCOPE,
Sur un grand nombre d’Infeétes , & fur les Animalcules
qui fe trouvent dans les liqueurs préparées, & dans
celles qui ne le font pas, &c. avec la Defcription &
les Ufages des différens Microfcopes, &c.
Partie déjà publiées par feu M. Jo BL OT, Profeffeur en
Mathématiques de l’Académie de Peinture & de
Sculpture : partie rédigées fur fes Obfervarions pofté-
rieures.
Avec un grand nombre de Figures.
TOME PREMIER:
A PARIS,
Chez BRIASSON, Libraire, rue Saint Jacques, à la Science,
M. DCE; LIV.
AVEC APPROBATIONS ET PRIVILEGE DU RO,
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AVERTISSEMENT
DE L'ÉDITEUR.
Eu M. JosLor fitimprimer en 1716 fon Livre intitulé
F Defcription de plufieurs nouveaux Microfcopes , avec des
Obfervations fur une grande mulritude d'Infeëles qui naifflenr
dans les liqueurs, &c. Les applaudifflemens que reçut cet
Ouvrage , engagerent l’Auteur à continuer fes recherches
fur l’Hiftoire naturelle, & à travailler fans relâche à perfec-
tionner fes Microfcopes. Il mit par écrit fes opérations nou-
velles & fes obfervations microfcopiques ; & il efpéroit s’en
{ervir pour améliorer la feconde édition de fon Livre , qu'il
préparoit lorfque la mort l'interrompit. Les embarras qui
fuivent toûjours ces fortes d'évenemens , ont fait oublier
long-temps ce manufcrit, qui à la fin, après des traverfes
fans nombre , nous eft heureufement parvenu ; & nous avons
crû rendre un fervice important au Public , de donner nos
foins à le mettre en ordre & à le faire imprimer. Nous n’a-
vons rien ajoûté de nous à ce que l’Auteur avoit préparé.
que quelques notes dans les endroits où elles nous ont paru
néceffaires.
L’Auteur a beaucoup enrichi la partie de fes obfervations
fur les Infeétes & fur l’'Hiftoire naturelle ; il femble avoir
prévû que le temps d'écrire fur cette Science étoit arrivé :
car avant lui peu d’Auteurs parmi nous s’étoient appliqués
à cette matiere. Pour fuivre en quelque forte ce qui lui étoit
fi heureufement infpiré, & l’ordre où il nous a paru nécef-
faire de difpofer les matieres, nous avons placé dans le pre-
mier Volume toutes les obfervations fur l’Hiftoire naturelle:
& fur les Infeétes, en commençant par les animaux les plus
gros , tels que le Pou, la Puce, la Mouche, &c.
Ceux qui font bien inférieurs en petitefle , & que nous
appellons animaux microfcopiques ; parce qu'ils s'échappent à
Pœil, & qu’on ne peut les appercevoir qu'à l’aide du Mi-
crofcope, compofent la feconde partie du Tome premier.
On trouve à la fuite quelques Chapitres. fur les Plantes &c
tr
‘vj AVERTISSEMENT DE L'ÉDITEUR.
les Sels, avec les figures qui y fontrelatives, La plus grande
partie de ce Tome premier eft du manufcrit de l’Auteur , le
refte avoit paru dans fon Livre en 1716. :. -.
Le Tome fecond eft tout deftiné aux Microfcopes , à leur
ufage & à leur conftruétion ; il eft aufli divifé en deux par-
ties, & fuivi de beaucoup de figures. Il y a beaucoup de
chofes nouvellement traitées par l’Auteur , ainfi qu'au Tome
premier ; le refte avoit vù le jour avec une partie du précé-
dent Volume.
Pour conferver à M. Jogror tout ce qui lui appartient,
nous donnerons à la fuite de notre Avertiflement , celui
qu'il donna lui-même au-devant de fon Livre en 1716 ; &
nous ferons imprimer à la fuite l'Approbation dont l’Aca-
démie de Peinture & de Sculpture décora fon Livre pour
Jors.
"AVERTISSEMENT
DE L'AUTEUR.
=] NE partie de cet Ouvrage n’eit, à propre-
A ment parler, qu'une efpece de Journal
#5 des obfervations que j'ai faites fur une
ES multitude infinie de très-petits animaux,
dont la plus grande partie eft invifible à la portée
ordinaire de nos yeux... |
La facilité que j'ai trouvée dans l’ufage de mes
nouveaux Microfcopes , M'a conduit infenfiblement
plus loin que je ne penfois , & m'a fait defcendre
dans un détail dont il n’y a que ceux qui font accof-
tumés à fuivre IPNature dans fes opérations, qui
connoîtront tout le prix. Ils fçavent par expérience
que trop de négligence fur des circonftances qui ne
femblent préfenter rien de confidérable , a fouvent
privé les Phyficiens du fruit qu’ils auroient tiré d’une
plus exacte application.
J'ai ajoûté à mes obfervations des conjectures fur
les produétions des différentes efpeces de petits ani-
maux qui fe trouvent dans les liqueurs: je ne puis
applaudir à ceux qui les attribuent à la putréfaction..
vil AVERTISSEMENT
Cette opinion eft d'autant moins concevable, que ce
feroit abandonner aux irrégularités du hafard, des
Ouvrages qui fe font toûjours dans un ordre qu’on
ne peut jamais aflez admirer. J’en ai donc fubititué
une autre, qui me femble répondre nettement à la
multitude prefqu’infinie de toutes mes expériences.
On trouvera à la fuite de mes obfervations, un
traité fur la conftruétion & les ufages de plufieurs
Microfcopes plus commodes & plus parfaits qu’au-
cuns de ceux qui font venus jufqu’à préfent à ma
connoiffance. On les voit mis en perfpective fur un
grand nombre de Planches , avec les plans & les
profils qui font néceflaires pour en bien faire com-
prendre la méchanique & lufage. Il y a deux ou
trois de ces Microfcopes qui font d’une étendue pref-
qu'univerfelle, & particulierement celui qui a été
repréfenté dans les Planches 20 & 21, Tome2, fur
lequel on pourra monter en très-peu de temps &
tout de fuite , non-feulement des lentilles de différens
foyers , mais aufli de très-petits Microfcopes à deux
& à trois verres, depuis un poucê*de longueur juf-
qu'à trois, dont les plus courts ont des avantages
confidérables , comme de faire paroître les objets
dans leur fituation droite ou naturelle , en les repré-
fentant clairement & diftinétement; faifant d’ailleurs
Voffice de plufeurs loupes de différens foyers, &
tellement conftruits , que la lentille objective y de-
vient oculaire quand on veut, fans &ianger fenfible-
ment la diftance des deux verres qui le compofent ,
ni le lieu qu'ils occupent dans la monture.
Et
DSi
DE L'AUTEUR. ix
Et à ce dernier Microfcope univerfel on pourra
très-facilement & fans embarras appliquer des poif-
{ons de différentes longueurs & grofleurs | & même
de diverfes efpeces , comme des Tétards , des Gre-
nouilles , des Lamproies, des Anguiïlles , des Bro-
chetons , des Tanches , des Carpes, des Goujons ,
&c. en la queue defquels , & ailleurs, on aura le
plaifir de voir les divers mouvemens du fang dans
des vaifleaux diverfement courbés , formant entr’eux
comme des fyphons dont les branches fe rencontrent
de telle maniere, qu’elles forment tantôt un arc de
cercle, tantôt un angle droit , tantôt un obtus ou
un aigu.
On y verra de plus de deux fortes de vaifleaux de
cles très-menus & très-courts , fitués différem-
ment entre deux plus gros vaifleaux qui font paral-
leles entr'eux , de l'un defquels on voit le fang s’é-
chapper par ces vaifleaux de traverfe , pour pañler
dans l'autre à angles droits, aigus ou obtus: & il
faut remarquer qu’on ne voit dans ces vaifleaux ni
anaftomofes ni valvules qui empêchent le fang de
retourner en arriere.
Toutes ces diverfes obfervations , & plufieurs au-
tres dont je ne parle point ici, ne peuvent être con-
firmées que par un grand nombre d’expériences réi-
térées , & faites avec beaucoup de foin fur les divers
fujets dont on vient de parler ; & j’efpere que l’ufage
des Microfcopes fe répandant de plus en plus, on
découvrira par .. fuite des chofes nouvelles, & plus
fingulieres peut-être que je n’ai pû faire.
Tome I, Part, I, e
# AVERTISSEMENT
. Outre les nouveaux Microfcopes dont je parle,
je donne encore des defleins & des explications de
plufieurs autres que j'ai perfeétionnés , en étendant
leurs ufages fans en augmenter confidérablement la
dépenfe. On verra, par exemple, dans la dixieme
Planche, Tome 2 , le deflein d’un Microfcope à
tiges qui n’eft pas de mon invention ; mais les addi-
tions & les changemens que j'ai jugé à propos d'y
faire, pourront peut-être plaire à ceux qui ont quel-
qu’eftime pour cet inftrument , que nous faifons {er-
vir aux obfervations des animaux de plufieurs li-
queurs. |
En corrigeant quelques défauts des Microfcopes à
canon de verre , qui ont encore été nommés trom-
beaux, jen ai aufli étendu l’univerfalité plus loin
qu’on navoit fait jufqu’à préfent.
On parle de plus d’un petit Microfcope à trois
verres , Planche 15, Tome 2, qui peut aufli fervir
à deux verres convexes des deux côtés, en fuppri-
mant celui du milieu , avec lequel on fera , fi lon
veut, en un moment une petite lunette d’approche
qui fera paroître les objets dans leur fituation droite
ou naturelle.
Le même verre du milieu de ce Microfcope , &
fon oculaire , étant placés, comme on le dit, dans
fon lieu , ferviront à faire une petite lunette d’appro-
che qui fera voir les objets dans une fituation toute
contraire à la précédente, n’employant pour cela
que le corps du Microfcope même avec ce qu’il con-
tient ; & ce même inftrument étant monté fur un
DE L'AUTEUR x
pié qui lui convienne , pourra encore {ervir à rendre
vifibles les animaux de quelques liqueurs, & la cir-
culation du fang dans la queue & ailleurs , de tous
les poiffons qui feront d’une grandeur & d’une grof
feur commode pour être appliqués fans peine à cette
petite machine.
En expliquant les ufages de chacun des Microfco-
pes qui font repréfentés dans le Tome fecond, j'ai
dit la maniere de préparer une même chofe diffé-
remment pour y être appliquée & obfervée. Ces ré-
petitions m’ont paru nécellaires en ces endroits ,
puifqu'elles fervent à rendre lufage de ces machines
plus univerfel , & à fatisfaire ceux qui ne veulent
avoir qu'un feul Microfcope , accompagné d’une
explication fuffifamment étendue pour les inftruire
des ufages qu'ils en peuvent efpérer. |
L’Hiftoire anatomique de la plüpart des animaux
nouvellement découverts , donne lieu d’efpérer que
cet Ouvrage pourra être agréable au Public, tant
ar fa nouveauté, que par l'utilité que les Phyfi-
ciens , les Medecins , les Chirurgiens , les Anato-
miftes , les Chymiftes & d’autres perfonnes en pour-
ront retirer. D'ailleurs la partie inftructive fur les
Microfcopes & leur ufage, fera très-uttle aux Defft-
nateurs, Peintres , Graveurs , Fabricateurs d’inftru-
mens de Mathématiques ; aux Jouailliers, Lapidai-
res ; aux Médailliftes, Antiquaires ; aux Vérifica-
teurs d’écritures, Horlogeurs , Lunetiers , &c. puif-
que par le fecours des verres de nos Microfcopes,
les Artiftes dont on parle auront l’avantage de dé-
ei
xij AVERTISSEMENT
couvrir jufqu’aux moindres défauts de leurs Ouvra-
ges, & même le moyen de les éviter, ou du moins
d'approcher de plus près du point de perfection; ce
qu'ils ne pourroient faire fans ce fecours.
Je n’ai pû décrire les petits animaux qui fe trou-
vent dans toutes les infufions dont j'ai parlé, fans
leur donner des noms qui en fiflent connoître la dif-
férence. Pour cet effet j'ai cherché dans la Nature
des chofes qui me fuflent aflez connues , & qui euf-
{ent quelque rapport de reffemblance avec les poif-
fons que j'ai vûs dans mes liqueurs, pour leur don-
ner les mêmes noms qu’on a donnés à ces diverfes
chofes : mais n’ayant pas toûjours été aflez heureux
pour rencontrer de quoi me fatisfaire | fans doute
faute d’avoir une connoïffance' aflez étendue des di-
vers êtres de la Nature , j'ai été contraint de nommer
d’autres poiflons autrement , en leur donnant des
noms qui en marquaflent les inclinations particulieres,
ou leurs mouvemens les plus ordinaires : aïnfi jai
nommé les premiers Cornemulfes , Ovales , Cheniiles
aquatiques , Entonnoirs, Poules hupées,Rognons,&c.
& j'ai donné aux autres les noms d'Aveugles , de
Piroüetteurs, de Goulus , d’Incon/lans, de Bouffons,
d’Elégans, &c.
} Enfin on verra une Differtation fur la maniere dont
les objets font vüs dans les Microfcopes & dans les
lunettes d'approche, contenant plufieurs expérien-
ces nouvelles , qui donnent occafion de fe détermi-
ner en faveur de la meilleure des deux opinions
qu’on s’y propofe.
DEÉMLAUTEU R: xiij
« Je ne veux pas finir cet Avertiflement fans in-
» viter mes Lecteurs à faire avec moi la réflexion que
» l'application aux matieres traitées dans cet ouvyras
» ge, m'a occafionnée. Les plus petits ouvrages des
» mains de Dieu ne font petits que par leur peu de
» volume ; mais ils n’en font pas moins pour cela
» des preuves éclatantes de fa puifflance fuprême &
» de fa fagefle infinie. Rien n’eft petit ou grand que
>» par comparaifon ; & le moindre moucheron an-
» nonce au moins aufli énergiquement la grandeur
» de Dieu que la Baleine & l’Eléphant ; ou, sil y a
» quelque différence , elle eft à l’avantage des ani-
» malcules , dont l’organifation , aufli parfaite dans
» leur petiteffe que celle des plus gros animaux dans
» leur groffeur , étonne encore plus Pimagination».
APPROBATION de la premiere Edition.
Je Iù par l’ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Manufcrit
qui a pour titre: Deftriprions 6 ufages de plufieurs nouveaux Mi-
crofcopes , avec de nouvelles Obférvations , &c. par M. JoBLoT, Pro-
feffeur Royal en Mathématiques. Outre les nouveaux Microfcopes
que l’Auteur y décrit, 1l en perfeétionne plufieurs autres , & rapporte
quantité d’obfervations fort curieufes qu'il a faites avec beaucoup
de foin ; ainfi cet Ouvrage peut être utile & agréable au Public.
À Paris ce trentieme Novembre 1716. GAUGER.
APPROBATION DE L'ACADEMIE ROYALE
de Peinture 6 Sculpture.
Ujourd’hui Samedy cinquieme Décembre mil fept cent feize,
l’Académie s’eft affemblée à l'ordinaire pour les Conférences ;
M. JoBLoT y a apporté un Ouvrage qu’il a compofé, qui a pour
titre: Defcriptions 6 ufages de plufeurs nouveaux Microfcopes , tant
fimples que compofës, avec de nouvelles Obfervations faites fur une multi
tude innombrable d’infèüles & d'autres animaux de diverfes efpeces, qui
naiflent dans les liqueurs préparées, & dans celles qui ne le font point.
La Compagnie, après avoir écouté la leéture de la divifion de tout
l'Ouvrage , fait en deux Parties, & avoir examiné plus de trente
Planches /7-4°. remplies de Figures deffinées & gravées élégamment,
repréfentant fes nouveaux Microfcopes mis en perfpeäive , & ac-
compagnés de tous les plans & profils néceffaires pour en bien faire
comprendre la méchanique & l’ufage, a auffi remarqué que dans la
feconde Partie l’Auteur met en ufage {es nouvelles Machines, pour
faire l’hiftoire anatomique d’une multitude prefqu’infinie de très-
petits animaux qui ont été jufqu’à préfentinconnus , à caufe de leur
petitefle, & des grands défauts qui font inféparables des Microf-
copes ordinaires.
C’eft pourquoi la Compagnie ayant confideré que cet Ouvrage
pouvoit être très-agréable au Public, tant par fa nouveauté, que
par l'utilité que les Phyfciens, Medecins, Anatomiftes, Chymiites
& autres en pourroient retirer, elle à bien voulu lui accorder la
permiflion de fe fervir du Privilège que le Roi a accordé à ladite
Académie.
Fait 6 extrait par moi Secretaire de l'Académie, ce cinq Décembre
mil fèpt cent feige. Signé, TAVERNI1ER,
APPROPATION.
°A1 là par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Ouvrage
J intitulé Obférvations d’Hifloire naturelle, par P. JOBLOT, &c.
dans lequel je n’ai rien trouvé qui puifle en empêcher l’impreffon.
A Paris ce 29 O&tobre 1754. P. DEMOURS.
PRIVILEGE DU RO
Le par la grace de Dieu, Roi de France & de Navarre :
À nos amés & féaux Confaillers , les Gens tenans nos Cours
de Parlement, Maïtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel,
Grand-Confeil, Prevôt de Paris, Baillis, Sénéchaux, leurs Lieute-
nans Civils, & autres nos Jufticiers qu’il appartiendra, SALUT.
Notre amé ANTOINE-CLAUDE BRIASSON, Libraire à Paris,
ancien Adjoint de fa Communauté, nous a fait expofer qu’il defire-
roit faire imprimer & donner au Public un Ouvrage qui a pour
titre Obférvations d’Hifloire naturelle, s’il Nous plaifoit lui accorder
nos Lettres de permiflion pour ce néceflaires. À CES CAUSES,
voulant favorablement traiter l’Expofant , Nous lui avons permis
& permettons par ces Préfentes , de faire imprimer ledit Ouvrage
autant de fois que bon lui femblera ; & de le vendre, faire vendre
& débiter par tout notre Royaume pendant le tems de trois années
confécutives, à compter du jour de la date des Préfentes. Faifons
défenfes à tous Imprimeurs , Libraires & autres perfonnes, de quel-
que qualité & condition qu’elles foient , d’en introduire d’impreflion
étrangere dans aucun lieu de notre obéiffance ; à la charge que ces
Préfentes feront enresiftrées tout au long fur le Regiftre de la Com-
munauté des Imprimeurs & Libraires de Paris, dans trois mois de la
date d’icelles ; que l'impreffion dudit Ouvrage fera faite dans notre
Royaume &c non ailleurs, en bon papier & beaux cara@teres, con-
formément à la feuille imprimée , attachée pour modele fous le
contre-fcel des Préfentes ; que l’Impétrant fe conformera en tout
aux Réglemens de la Librairie , 8 notamment à celui du dixieme
Avril mil fept cent vingt-cinq ; qu'avant de l’expofer en vente, le
Manufcrit qui aura fervi de copie à l'impreffion dudit Ouvrage,
fera remis dans le même état où l’Approbation y aura été donnée,
ès mains de notre très-cher &c féal Chevalier, Chancelier de France,
le Sieur DE LAMOIGNON; & qu'il en fera enfuite remis deux
Exemplaires dans notre Bibliotheque publique , un dans celle de
notre Château du Louvre, & un dans celle de notredit très-cher &
féal Chevalier, Chancelier de France , le Sieur DE LAMOIGKON,
& un dans celle de notre très-cher & féal Chevalier, Garde des
Sceaux de France, le Sieur DE MACHAULT, Commandeur de nos
Ordres : le tout à peine de nullité des Préfentes , du contenu def-
quelles vous mandons & enjoignons de faire jouir ledit Expofant &
{es ayans caufe pleinement & paifñblement , fans fouffrir qu’il leur
foit fait aucun trouble ou empêchement. Voulons qu’à la copie des
Préfentes , qui fera imprimée tout au long au commencement ou à
la fin dudit Ouvrage, foi foit ajoûtée comme à l’original. Comman-
dons au premier notre Huïfier ou Sergent fur ce requis, de faire
pour l’exécution d’icelles tous aétes requis & néceflaires, fans de-
mander autre permiflion, & nonobftant clameur de Haro, Charte
Normande , & Lettres à ce contraires : CAR tel eft notre plaifir.
Donné à Verfailles le huitieme jour du mois de Février, l’an de
grace mil fept cent cinquante-cinq, & de notre Regne le quarantie-
me. Par le Roi, en fon Confeil. Signé PERRIN.
Regiftré fur le Regiftre XIII. de la Chambre Royale des Libraires &
Tmprimeurs de Paris, Num. 472. Fol. 363. conformément aux anciens
Réglemens ; confirmés par celui du 28 Février 1723, 4 Paris le 14
Février 1755, Signé DIDOT , Syndic.
OBSER V.:
Xvi}
_
TABLE DES CHAPITRES
DU PREMIER VOLUME.
PARTIE PREMIERE.
CHAPITRE I. loss page 1
CHAP. II. De la Mouche commune. 9
CHAP. II. Defcriprion d’une forte de Mouche qui fe voi
ordinairement fur la furface du Vin & fur celle du Vinaigre.
12
CHAP. IV. De la Licorne ornée de deux efpeces d’aigrettes.
I
CHAP. V. Des petits Papillons qu’on voit en hyver fur n.
choux de Milan. 16
CHAP. VI. De la Mite vagabonde. 19
CHAP. VIL Defcriprion d’une efpece de Mouche aquatique &
terrefire qui nage fur le dos, qui faute & marche étant hors de
: ;
eau. 22
CHAP. VIT. Defcription d’une autre efpece de Mouche aqua-
tique & terreftre.
26
CHAP. IX. Anatomie des Plantes en général. 27
CHAP. X. Des Racines des Plantes , & de leurs accroiffemens.
a
CHAP. XI Des Sels en général. 34
PARTIE SECOND E.
CHAPITRE -D Es Anguilles, Serpens ou petits Vers
que l’on trouve dans le vinaigre. page 2
CHAP.IIL. Du Vinaigre commun.
CHAP. II, Des Vinaigres compofés. 7
CHAP. IV. /Vouvelles obfervations fur les Anguilles du Vinai=
gre, faites avec le Microfcope repréfenté en la Planche fep-
8
I1emne.
Tome I. Part, I, de
XVI] TABLE
CHAP. V. Obférvations faites fur plufteurs fortes d’infufions
_ de Poivre en grains, mis à froid dans de. l’eau commune.
| 12
Du Poivre blanc. 1$
Du Poivre long. la même.
CHAP. VI. Obférvations faites durant une année entiere, de
ce qui s'eff trouvé dans une infufion à froid de Sené. 16
CHAP. VIT. De l’eau qui fe trouve dans les huitres à l’écaille ,
& de ce que l'or y appercoit en peu de jours ou d'heures après
étre ouvertes. 20
CHAP. VII. Des es d’œillets mis dans de l’eau com-
mune , chaude € froide. 27
CHAP. IX. D'une infufion à froid d’un Bouquet compofé de
rofes , d'œllets & de jaffemin. 30
CHAP. X. De l'infufion des Barbeaux ou petites fleurs bleuës
qui viennent parmi les bleds. 31
CHAP. XI. Du Thé mis en infufion. 34
CHAP. XII. Des infufions de queues de Framboifes mifes à
roid dans de l’eau commune. 35
CHAP. XIII. Des infufions de fenouil, de fauge, de melon,
de verjus, de tiges de fouci avec les fleurs.
36
CHAP. XIV. D'uneinfufion de foin nouveau mis à froid dans
de l’eau commune le 4 Juin 1711. 38
CHAP. XV. Seconde infufion de foin nouveau. 39
Troifieme expérience faite fur de femblable foin. 40
CHAP. XVI. Compofiion de plufieurs infufions mifes enfemble
dans un feul ie la même.
CHAP. XVII. On prouve dans ce Chapitre qu'il y a de très=
petits animaux qui en dévorent de plus gros. 41
Qu'il y en a de ft petits, qu'ils échappent aux meilleurs yeux
armés de Microfcopes. la même.
Qu'au bout d’un certain temps en été on découvre de petits poif.
fons dans l’eau de riviere ou dans celle de fontaine, fans s'être
corrompue. 41
2 A £
Qu’au bout de quatre heures | même en moins de temps , on
trouve plufieurs efpeces de poiffons dans l’eau que l’on donne
à boire à des oifeaux. la même.
Et enfin comment les graines & les plantes doivent être miles er
DES CHAPITRES, xjx
infufion pour produire de bons effets par rapport aux expé-
riences dont nous parlons. la même.
CHAP. XVIII. Hypothefe pour fervir à rendre raifon de la
naiffance, du progrès & de la mort des animaux que l’on ob-
ferve dans les liqueurs préparées, € dans celles qui ne le [ons
point. 44
CHAP. XIX. Continuation des expériences fur les liqueurs. 46
D'un ver de terre trouvé parmi des herbes potageres. la même.
CHAP. XX. D'une infufion de Rhubarbe. 47
CHAP. XXI. De linfufion d’un champignon mis à froid dans
* de l’eau commune. 43
CHAP. XXII Des petites fleurs colorées diverfement, qui fe
crouvent dans les prés. 49
CHAP. XXIII. Du perit bafilic qui a une odeur de citron. 54
CHAP. XXIV. D'un Jédiment de vinaigre détrempé d’eau
commune. SI
Remarques importantes. $s2
CHAP. XXV. De l'infufion des barbeaux. la même.
CHAP. XXVI. D'une infufion de foin vieux. 3
CHAP. XXVII. De l'infufion des fleurs d’un citroner. $7
CHAP. XXVIIE D'une infufion d’anémone , furnommée la
Royale. la même.
CHAP. XXIX. Des infufions de trois ne ons
d’une tige de celert, mifes à part dans divers vaifleaux de
verre. 58
CHAP. XXX. De plufieurs infufions de paille & d’épis de
bled. 65
Des Signes. 66
Des Grenades aquatiques , couronnées & barbues. 68
CHAP. XXXI. De la paille d'orge, de celle du feigle, de
celle d’avoine & du bled de Turquie ; chacune de ces chofes
miles féparément en infufion dans de l’eau commune. 71
CHAP. XXXII De l'écorce de bois de chéne qui porte le
gland , mie en infufion dans de l’eau commune. 72
CHAP. XXXIIL. Sue des Objervations faites fur la même
écorce de bois de chêne, qui étoit venu flotant fur l'eau depuis
Montarois jufqu’à Paris. 81
CHAP. XXXIV. Des nouveaux poiflons trouvés dans une
xx TABLE DES CHAPITRES.
infufion d’écorce de bois de chêne neuf. roles
CHAP. XXXV, Differtation [ur la maniere dont on appercoit
les objets qui font väs au-travers des Microfcopes G des lu-
nettes d’approche. 8s
CHAP. XXXVI. Nouvelles découvertes d'Animaux trouvés
, dans une infufion d’amadou. 96
CHAP. XXXVII. D'un Poifjon nommé Coquille ou Cy-
clope , qui s’eff vi dans la premiere infufion d’amadou.
100
CHAP. XXXVIIL. Seconde infufion d'amadou. 103
CHAP. XXXIX. D'une nouvelle Poule hupée , vüe dans une
. infufion de bois de chêne floité. 104
CHAP. XL. Des Poiffons nommés Deftouches. la même.
CHAP. XLIE Dé Poux aquatiques. 10$
CHAP. XLIT. Du Pou terreftre 6 aquatique. 108
CHAP. XLIIT. D'une apparence de Chenulle dorée, couronnée
G mafquée. 109
CHAP. XLIV. Des Doguins trouvés nageans dans une in-
fufion de paille de blé, qui y étoit en expérience depuis dix
mois ou environ. III
CHAP. XLV. Defcription de certains petits Vers rouges qui
ont été trouvés dans de l’eau de puits. 112
CHAP. XLVI. De l’Araignée aquatique. 114
CHAP. XLVII. Defcription d'un petit Infeëte des plus curieux
qui fe puiffe obferver, tant pour la diverfité des chofes qu’on y
. découvre extérieurement , que pour celles qu’on y appercoit
dans les parties tranfparentes. 116
CHAP. XLVIIL Des Sauterelles aquatiques. 116
CHAP. XLIX. Des Limas aquatiques trouvés dans une infu-
fion faite d’un bouquet compofé de plufieurs fortes de fleurs
miles dans de l’eau de riviere. 120
CHAP. L. Defcription d’un nouveau Poiffon que j'ai trouvé
dans de l’eau du baffin de S. Magloire du Fauxbourg Saint
Jacques à Paris, qu'on peut nommer Chenille aquatique.
: 121
CHAP. LI. Du Poiffon que j'ai nommé Bélier , vé dans une
eau croupie. ; nt ACTE 123
Fin de la Table des Chapitres du premier Volume.
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OBSERVATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE,
* FAITES
AVEC LE MICROSCOPE.
LR RES ER ER ER ES EE GÉRÉE GÉEÉREREÉREGE
PREMIERE PARTIE.
CHAPITRE EL
Introduëtion ou Difcours fur l'utilité des Microfcopes.
>| N des plus grands obflacles (difent les Au:
à ATAÉ] teurs du Journal des Sçavans , 1666 ) qui {e
» IA SÉÆE foit rencontré au progrès de la fcience natu-
AN &| relle , c’eft que les Anciens s'étant entiere
IS ENS] ment occupés à perfeétionner le raifonne-
» ment, ont négligé la connoïfflançe des fens , &c ont mieux
lome:l, Pare. I,
2 OBSERVATIONS
» aimé deviner la plüpart des chofes que de les voir. Cepen-
» dant comme l’ame ne connoït rien que par l’entremife des
» organes du corps , les opérations des fens ne fervent pas
» moins pour acquérir une parfaite connoiflance de la Nature,
» que celles de l’efprit ; elles font même d’autant plus nécef-
» a , que la fagefle de Dieu étant infiniment au-deflus de
» la portée de notre imagination , il eft beaucoup plus facile
» de connoître ce qu'il a fait, que de s’imaginer ce qu'il a
» voulu faire.
» Pour remédier à ce défaut les Modernes ayant travaillé
» à perfeétionner l'opération des fens , particulierement de
» celui de la vûe , qui eft le plus néceffaire de tous, comme
#ileft le plus noble, ont inventé deux fortes de lunettes ;
» le Télefcope pour approcher les objets qui font invifbles
» à caufe de leur éloignement ; & le Microfcope pour groflir
»_ ceux qui font imperceptibles à caufe de leur petitefle: &
» avec ces deux inftrumens ils ont découvert plus de chofes
» en peu d'années, que les Anciens n’avoient fait avec tous
» leurs raifonnemens pendant le cours de plufieurs fiecles.
» Par ce moyen toute la Nature nous a paru nouvelle ; car
» le Télefcope nous a fait voir dans le ciel de nouveaux mou-
» vemens, de nouvelles étoiles & de nouveaux météores ;
» & le Microfcope nous a découvert fur la terre un petit
# monde tout nouveau , & nous a fait appercevoir dans cha-
» que-chofe une infinité de petites créatures qui ne font pas
» moins admirables que toutes celles qu'on avoit connues
» jufqu’à préfent.
» L'ingénieux M. Hook ayant fait plufieurs obfervations
» très-curieufes avec l’ün & l’autre de ces inftrumens, mais
» particulierement avec le Microfcope , les a ramaflées en-
» femble , & les a communiquées au Public dans un livre
» qu'il a intitulé Micrographie , c’eft-à-dire, defcription des
-» petits corps, parce qu'il y examine principalement ce quil
:# ya de plus petit dans la Nature.
" » Il commence par la pointe d’une aiguille très-fine, qui,
-» bien qu’elle femble imperceptible , paroitavec le Microfco-
*» pe dont il s’eft fervi , large comme la quatrieme partie d’un
“» pouce. L’extrémité de cette pointe ne fe termine pas en
D'HISTOIRE NATURELLE. 3
# cone , comme l’on s’imagine ; elle n’eft pas non plus ni
# ronde ni plate, mais elle eft obrufe, inégale & irréguliere,
» & reflemble à une cheville dont on auroit rompu le bout.
» De plus fes côtés ne font pas unis, comme nos yeux nous
» les repréfentent , mais raboteux , & pleins de cavités 8
» d’éminences. n
» Il dit aufli qu'ayant confidéré avec fon Microfcope le
» tranchant d’un rafoir bien affilé, il l’a vü épais comme le
» dos d’un canif, & y a remarqué plufeurs dents : que la
» furface d’une glace de miroir bien polie, lui a paru au foleil
» pleine de raies , & compofée d’une infinité de corps iné-
» gaux qui réfléchifloient une lumiere de plufeurs couleurs
» différentes : 8 que les points les mieux faits, qui fervent
» dans les livres imprimés à la féparation des périodes , ne
» paroiflent pas plus ronds que des chataignes ; & il ne s’en
# faut pas étonner, parce que les limes , les pierres , & les
» autres chofes dont on fe fert pour polir ou pour arrondis,
» étant compofées de parties inégales , il faut néceffairement
» qu’elles laiffent aufi plufeurs inégalités fur la furface des
# corps fur lefquels elles agiflent.
» [Il a encore examiné de la toile très-fine , dont les fils aue
» travers du Microfcope lui ont paru aufli gros que des cor-
» des ; & il aobfervé que ce qui rend cestoiles deliées fitranf-
» parentes, c'eft qu'il ya entre les fils quantité de trous pref-
# que femblables aux treillis qu'on met aux jaloufies,
» Il a reconnu que les ondes qui paroïflent dans plufieurs
» étoffes de foie, viennent de ce qu'il y a dans ces étoffes
» des parties plus élevées les unes que les autres , qui caufent
# une différente réflexion de lumiere : & il a remarqué dans
» les fiphons & dans les larmes de verre, plufeurs chofes
# curieufes que l’on peut voir dans fon ouvrage , mais qu'il
» feroit trop long de rapporter ici, |
» Après avoir parlé des ouvrages de l'Art, il vient à ceux
» de la Nature , auxquels le Microfcope eft beaucoup plus
» avantageux qu'aux autres: car il y a cette différence en-
» tr'EUX , que les ouvrages de l’Art étant tobjours fort ime
» parfaits, ne veulent être vûs que de loin ; & plus on les
» confidere exatement , plus on y'trouve de défauts, Mais
À ÿ
°& OBSERVATIONS
Planche r.
» comme les ouvrages de la Nature font des effets d’une fa-
» geffe infinie , ils ne craignent point d’être examinés, &
» paroiflent toûjours d’autant plus admirables, qu’on les re-
» garde de plus près. M. Hook en donne dans fon livre plu-
» fleurs defcriptions , dont il n’y en a pas une qui ne foit fur- .
» prenante ; mais comme je ne les peux pas ici rapporter
» toutes , j'en remarquerai feulement quelques-unes des plus
» curieufes. |
1. » Il fait la defcription du pié d’une mouche : il expli-
» que pourquoi ces petits animaux peuvent fe fufpendre con-
» tre le haut d’un plancher, & fe promener ainfi fans tomber.
» Quelques - uns ont crû que leurs piés étoient pleins d’une
» humeur gluante , par le moyen de laquelle elles demeurent
» attachées à tout ce qu’elles touchent ; mais la véritable
» raifon eft, comme l'on a reconnu avec le Microfcope,
+ que les mouches ont au bout de chaque pié deux griffes
» qui entrent facilement dans les plus petits pores de toutes
» fortes de corps ; & que de plus les plantes de leurs piés font
# couvertes d’une infinité de petits poils ou pointes fembla-
» bles aux peignes des Cardeurs , avec lefquelles elles s’at-
» tachent facilement aux moindres inégalités des corps les
+» mieux polis.
2. » Il n’y a rien de fi vilain qu’un pou ; & cependant la
» maniere dont il nous eft repréfenté par le Microfcope, eft
» aufñ curieufe que cet infeéte eft hideux en lui-même. En
» voici la figure , que j'ai fait graver exaétement de la même
+ maniere que M. Hook l'a deflinée , afin de montrer préci-
» fément comme on la voit avec le Microfcope ; & ce qui
» me l’a fait particulierement choifir entre plufeurs autres,
» c’eft qu'étant la plus grande de toutes celles qui font dans
» ce livre, & ayant plus d’un demi-pié de longueur , elle
#» fait mieux voir que les autres jufqu'à quel point cet inftru-
» ment peut groflir les objets.
» Cette figure qui repréfente un pou couché fur le dos,
» 8 tenant un cheveu avec fes pattes , fait beaucoup mieux
+ comprendre que le difcours quelle eft la forme de cet in-
# feéte. Il a les yeux 2 2 placés derriere les cornes CC,
# tout au contraire des autres animaux , de peur que ; comme
D'Histrorre NATURELLE. |
» il n’a poirit de paupieres , les cheveux au-travers defquels
» il pañle , ne lui bleffaflent continuellement la vüe. A l’en-
» droit marqué £ , il femble qu'il y ait quelqu’apparence de
» mâchoires. Ses pattes font couvertes d’une écaille , comme
» celles des écrevifles , & ont deux griffes ab , avec lef-
» quelles il embraffe Le cheveu FF, lorfqu’il fe promene fur
» la tête. Il a fur la poitrine une fubftance déliée & tranfpa-
» rente , femblable à de la corne, au-travers de laquelle on
» voit que la tache blanche 77, qui eft peut-être le foie de
» cet infecte , eft agitée d'un mouvement continuel. M.
» Hook ayant enfermé dans une boiïte un de ces animaux
» pendant deux jours fans lui rien donner à manger, &
» l'ayant enfuite mis fur fa main , cet infeéte enfonça fon
» mufeau D dans la peau , fans qu’il femblât ouvrir aucune
» forte de gueule, & aufli-tôt on apperçut un petit ruifleau
» de fang qui pañloit direétement & promptement de fon
» mufeau dans fon ventre , par le moyen d’une efpece de
# pompe qui étoit à l'endroit marqué 4, & qui fembloit
» être le cœur ou le poumon. Au-travers de l’écaille de la
» poitrine on voyoit manifeftement plufeurs vaifleaux s’en-
» fler par ce fang , qui étoit porté & diftribué en diverfes
» parties. M. Hook remarque que la digeftion fe fait dans
» le corps de cet infeéte avec une merveilleufe promptitude,
» car on voyoit le fang noir & épais, lorfqu'il le fuçoit 3
» quand il étoit dans fes boyaux , il paroïfloit d’un beau rou-
» ge, & la partie qui étoit diftribuée dans les veines, étoit
» toute blanche. Il ajoûte que bien que fon mufeau D ne fût
» pas plus long que la vingt-cinquieme partie d’une ligne,
» & qu'il ne l'enfonçät pas encore tout entier dans la peau,
» néantmoins on en voyoit fortir du fang : d’où il s'enfuit
» qu'il y a du fang non-feulement dans la peau , mais même
» jufque dans la cuticule.
3. » La ftruéture de l’aiguillon d’une mouche, qui eft re-
» préfenté dans la deuxieme figure (PI. r. fig. 2.) , n’eft pas
» moins merveilleufe. Il eft compofé de deux parties , gont.
» la premiere d2 a plufieurs nœuds ou jointures f2 41, &
» outre cela plufeurs piquans pq rst, qui reflemblent par-
# faitement aux griffes d’un chat, & que la mouche étend
6 JIOBSERVATIONS
» ou reflerre quand elle veut. L'autre partie eft la pointe de
» l’aiguillon a , qui eft enfermée dans {a premiere , comme
s une épée dans fon fourreau , & qui eft auffi armée de cha:
» que côté de plufieurs griffes y x y. Ce font elles qui arré-
» tent l’aiguillon dans la plaie que la mouche a faite, & qui
» empêchent qu’elle ne le puifle retirer. Mais ce qui fait prin-
#» cipalèment la douleur , c’eft une liqueur corrofive & ve-
# néneufe qui eft renfermée dans le fourreau ; & qui étant
# pouflée dans la plaie, ronge les fibres & caufe l’inflamma-
5 TION.
4. » La feuille d’ortie a beaucoup de rapport avec l’aiguil-
» Jon ; car cet Auteur remarque qu’elle eft couverte de pi-
# quans très-aigus , dont la bafe, qui eft un petit fac ou vef-
» fie d’une fubftance flexible, & prefque de la figure d’un
» concombre fauvage , enferme une liqueur acre & vené-
» neufe ; mais la pointe eft d’une fubftance très-dure & très-
# forte, & a un trou au milieu , par lequel cette liqueur
» venéneufe fe coule dans la partie qui eft piquée , & y ex-
# cite de la douleur: ce qu’on peut aifément appercevoir
» avec un bon Microfcope, fi lon prefle du doigt le bout de
» ces piquans contre la bafe ; car pour lors au-travers de ces
» piquans, qui font tranfparens, on voit manifeftement mon-
» ter & defcendre cette liqueur , comme M. Hook affüre en
# avoir fouvent fait l'expérience.
$. » Cet Auteur ayant examiné avec le Microfcope plu-
# fieurs de fes cheveux , a trouvé qu'ils étoient tous prefque
» ronds ; que par le bout ils étoient plus gros que vers la ra-
# cine ; que depuis un bout jufqu’à l’autre ils paroiffent tranf-
» parens comme de la corne, & qu’on ne voit point de fila-
» mens dans leur racine , comme dans celle de plufeurs
» plantes. Il ajoûte qu'ils font folides, & qu'il n’y a pù dé-
» couvrir aucune cavité , non plus que dans les foies des co-
» chons ; mais que la barbe d’un chat étant coupée, a, de
» même que le fureau, une large moëlle dans le milieu,
» comme elle eft repréfentée dans la figure (PL. 1. fig. 3.)
» Le tiflu en eft néanmoins fi ferré, qu’on n’y fçauroit apper«
» cevoir aucune apparence de pores.
6: » Comme les opinions des Philofophes font fort diffés
D'Hi1sTOIRE NATURELLE.
» rentes touchant la maniere dont le feu eft produit lorfqu'om
» bat le fufil, cet Auteur a fait plufieurs expériences pour en
» reconnoître la vérité. Ayant donc à ce deflein battu le
» fufl fur une feuille de papier blanc, il a trouvé à l'endroit
»# où les étincelles étoient tombées, de petites taches noires,
# mais lumineufes ; & les ayant confidérées chacune en par-
» ticulier avec un bon Microfcope, il a reconnu que c’étoient
» de petites boules rondes & brillantes, entre lefquelles il y
+ en avoit deux différentes des autres, dont l’une étoit atta-
»chée par un bout à un perit morceau d’acier aliez long ;
» l’autre n'étoit qu'une petite lame d’acier fort déliée. Là-
» deflus cet Auteur fait plufieurs raifonnemens , & enfin il
» conclut que ces étincelles ne font autre chofe que des par-
» ticules d'acier ou de caillou qui font quelquefois feulement
»rougies , d’autres fois fondues , & fouvent même vitrifiées,
» felon les différens degrés de chaleur que le mouvement pro-
» duit: & pour confirmer cette opinion il dit qu'ayant pañlé
» la limaille d’acier fur la flamme d’une chandelle, il en vit
» tomber des particules brillantes , femblables à des étincel-
» les defufil , fi ce n’eft qu’elles étoient un peu plus groffes.
°7. » Mais il n’y a rien de plus admirable , ni qui fafle
»# mieux voir l'excellence du Microfcope , que ce que cet
» Auteur dit de la moïfiflure. On ne croiroit jamais que ce
# fût un amas de petites plantes; que toutes les chofes qui
# paroïffent moifies , fuflent autant de petits prés émaillés de
» diverfes fleurs. Cependant M. Hook aflüre qu'ayant re-
» gardé avec le Microfcope une tache de moififlure qui étoit
+ fur la couverture d’un livre, il a vù diftinétement que c’é-
» toit une touffe de fleurs , comme elle eft repréfentée par
» la figure (PI 2.) Les unes avoient des boutons ronds, &c Planche 22
» qui fembloient n'être pas ouverts; les autres étoient à demi
» épanouies : quelques-unes étoient tout-à-fait fleuries, &
»il y en avoit dont le bout paroïfloit être rompu , comme
» fi-elles euflent commencé à défleurir. Quoiqu'elles fuflent
#-très-proches les unes des autres, chacune avoit fa racine à
» part. Leurs tiges étoient rouges, longues, cylindriques,
-». & tranfparentes. Leur fubftance étoit fort tendre, & pref-
+ que femblable à celle des champignons ; car en les touchant
Planche 3.
Planche 4
HI OBSERVATIONS
» avec une épingle , elles fe rompoient facilement ; & ayant
» été mifes à la flamme de la chandelle trois ou quatre fois,
» elles demeuroient en leur entier. Pour leur odeur , elle
» étoit forte & defagréable , aüfli-bien que leur goût.
8. » La figure de la puce ayant déja été décrite par d’au-
» tres, je ne rapporterai ici que ce que M. Hook dit du ref-
» fort de fes jambes. Cet infeéte en a fix qui ont chacune
» trois jointures , dont la difpofition eft toute différente ; car
» les articles des deux jambes de devant entrent & s’enfon-
» cent entierement l’un dans l’autre: ceux des jambes du
» milieu ont leur étendue tout-à-fait féparée ; mais les jam-
» bes de derriere ont leurs articles pliés l’un fur l’autre,
» comme la jambe & la cuifle de l’homme. Quand la puce
» veut fauter, elle étend en même temps toutes fes jambes;
» & les différens articles venant à fe débander enfemble,
» comme autant de reflorts , caufent ce faut, que quelques-
» uns ont attribué à des ailes imaginaires ».
La punaife dont on voit la figure repréfentée dans la PI.
4. eft la punaife domeftique. Cet infeéte eft très-commun,
fur-tout dans les villes, parmi le petit peuple & les gens mal-
propres. Il eft connu de tout le monde par le tourment qu'il
caufe la nuit, fuçant notre fang avec une très-grande avi-
dité. La figure À repréfente la punaife vûe du côté du dos,
& la figure Z la repréfente renverfée , pour faire voir le côté
du ventre. Cet infeéte a fix pattes, qui chacune font com-
pofées de quatre articulations, dont la derniere eft terminée
par deux ongles crochus : fa tête eft ornée de deux petites
antennes qui ont aufli quatre articulations , & d’une trompe
qui eft appliquée le long de la poitrine , lorfque la punaife
ne s’en fert point pour prendre fa nourriture. Le corps, ainfi
que les antennes & les pattes, paroiflent, lorfqu’on les re-
garde avec un Microfcope , tout couverts de poils. Le corps
de cetinfeéte , fur-tout lorfque ce font des jeunes , eft affez
tranfparent pour laifler appercevoir au dedans le mouvement
périftaltique des inteftins , & des liqueurs qui paflent au-tra-
vers; ce qui préfente un fpeétacie fort agréable à examiner.
9. » C’eft une chofe furprenante de voir la quantité de
» petits pores que le Microfcope fait voir dans le charbon ;
ils
D'HISTOIRE NATURELLE: »
# ils font difpofés par ordre , & traverfent toute fa longueur ;
» de maniere qu'il n’y a point de charbon, quelque long qu'il
» foit, au-travers duquel on ne puifle aifément fouffler ; &
» fi l’on en rompt un morceau un peu court, on voit le jour
» au-travers avec le Microfcope. Leur nombre eft fi grand ,
» que dans un rang long de la dix-huitieme partie d’un pouce,
» M. Hook en a compté jufqu’à cent cinquante ; d’où il con-
* clut que dans un charbon d’un pouce de diametre il n’y en
» doit pas avoir moins de cinq millions fept cents vingt-
» quatre mille. C’eft à cette grande quantité de pores qu'il
» attribue la noirceur du charbon ; car il dit que quand un
» corps a beaucoup de pores dans lefquels la lumiere n’eff:
# point réfléchie , il paroît néceflairement noir, d'autant que
» la noirceur n’eft autre chofe qu’une privation du lumiere,
» ou un défaut de réflexion ».
CHAPITRE LE
De la Mouche commune.
A Mouche commune , dont on voit la figure dans la Planche «4
Planche $ , eft trop connue de tout le monde pouren
faire la defcription. Lorfqu’on l’examine avec un microfcope,
on y découvre des beautés infinies ; tout fon corps paroît
HE de noir & d'argent ; fa tête eft ornée de deux calottes
hémifphériques qui paroiflent compofées d’un nombre infini
de petits creux femblables à un réfeau , chacun defquels eft
un œil: ces calottes font entourées de poils qui paroïflent
d'argent. Elle a deux petites antennes, & une trompe velue
qui lui fert à prendre fa nourriture. Cette trompe fe plie en
deux parties , &Belle la renferme dans fa bouche lorfqu'elle
le veut ; l'extrémité en eft auf tranchanre qu’un couteau,
pour lui fervir à féparèr les différentes parties de fes alimens :
elle peut aufli en former une efpece de tuyau , lorfqu'elle
veut fucer les liqueurs fucrées , les fucs des fruits, ou les aus
tres liqueurs. [1 y a des efpeces de Mouches qui font plus
tranfparentes que d’autres , & dans celles-là on peur apperz
dore 1 Ram L,
#0 OBSERVATIONS
cevoir diftinétement les mouvemens des inteflins deptis
l'eftomac jufqu'à l'anus.
Leurs ailes qui font membraneufes & fortifiées par des
nervures , font aufli garnies tout autour de poils affez roides :
leurs pattes font velues , & compofées de plufieurs articles ;
l'extrémité en eft terminée par deux griffes ou ongles cro-
chus, au milieu defquels on apperçoit deux parties rondes
hériflées de petits piquans , comme la coque d’une. cha-
faigne.
lus on examinera les Mouches avec le microfcope , plus
on yadécouvrira de beautés ; je laifle aux Curieux le plaïfir
d’en faire eux-mêmes l'expérience. |
Il refte à dire quelque chofe de la facilité avec laquelle
ces Mouches marchent fur les corps polis & luifans, en
quelque fituation qu'ils fe trouvent.
Les Anciens, qui n’avoient aucune connoïffance des mi-
crofcopes ni de leurs ufages, ne pouvant examiner les par-
ties infenfibles des petits corps , fe font perfuadés que les
Mouches ne fe foûtenoient contre ces divers corps, qu'à
caufe qu’il fortoit de chacune de leurs pattes une efpece de
matiere gluante qui les y attachoïit ; mais ilsne faifoient pas
réflexion à la difficulté qu’elles auroient à les en'féparer, ni
à la grande quantité de cette matiere qu'il auroit fallu à ces
animaux pour en fournir à toutes leurs pattes, afin de la
diftribuer à chaque pas qu'ils font fur la furface de tous les
corps qu'ils parcourent. —
Cette fuppoñtion a été reçue par des Académies célebres,
fans qu’elles fe foient mifes en état de faire aucune expé-
rence qui püt les affurer d’une chofe qui étoit fi facile à
examiner.
S'il eft vrai qu'à chaque pas que fait la Mouche fur les
carreaux de verre du chaflis d’une chambsetelle y laïfle par
{es fix pattes autant de cette humeur gluante qu'il en faut
pour la foûtenir, on en doit voir une traïnée fur ces carreaux
de verre ; ce qui ne fe remarque pas, même en lobfervant
avec une loupe.
Si l’on objeéte qu’on apperçoit des taches de Mouches fur
de furface des carreaux de verre, fur celle des miroirs , &cc.
D'HISTOIRE NATURELLE. ts
& que ces taches pourroient bien être la matiere gluante que
les Mouohes y appliquent en y marchant; nous répondrons
que cette matiere que l’on voit fur les diverfes furfaces de ces
corps polis, n’eft pas ce qu'on s'imagine : au contraire, ce
ne font que des excrémens grofhers fortis des inteftins de la
Mouche ; & c’eft de quoi on pourra s’aflürer , fi l’on fuit de
vüe la marche de quelques-unes, car on verra fortir de leur
anus les excrémens dont je parle.
Si l’on objeéte encore qu'il y a aux extrémités des pattes
d’une Mouche, de très-petites pelores d’où fort la matiere
gluante qui la tient fufpendue fur les divers corps qu’elle
parcourt; nous répondrons que le microfcope ne nous fai:
fant rien découvrir de ce qu’on fuppofe, il vaut mieux penfet
que l’ufage de ces petites pelores eft d'empêcher que les
corps raboteux fur lefquels la Mouche marche , ne l'incom-
modent.
Enfin, comme il fe voit un grand nombre de petits ani-
maux qui marchent fur tous les corps polis, aux pattes def-
quels on.ne voit aucune pelote , on doit être perfuadé que
cette opinion n’a été reçue que faute d'en avoir une plus
vraiflemblable.
Maintenant fi l’on fait réflexion fur l’inégalité des parties
qui fe remarquent avec le microfcope fur la fuperficie des
corps polis, fur les éminences & fur les enfoncemens qu’on
y découvre ; fur la légéreté des Mouches, fur le nombre de
leurs pattes, fur leur grande longueur, fur la multitude des
poils qui les environnent de toutes ‘parts, & fur les petites
grifles très -aigués qui les terminent , nous aurons, ce me
femble , de quoi fatisfaire à la queftion , en difant que ces
"petites créatures appliquant, comme elles font , environ le
tiers de la longueur de leurs pattes fur la furface des corps
qu’elles parcourent , & cette longueur contenant au moins
quatre à cinq cents petits poils qui entrent dans les vuides que
laiffent entr’elles les petites éminences raboteufes des corps
fur lefquels elles marchent , cela fuffira pour faire compren-
dre que ces petits infeétes peuvent fort bien fe foûtenir par
cette difpofition méchanique , fur les corps même les plus
polis , en quelque fituation qu'ils foient. Dé
1}
Plane &
x2 È OBSERVATIONS
C HA P'PIARME "TETE
Defcription d’une forte de Moucheron qui Je voit ordinairement:
fur la furface du Vin & fur celle du Vinaigre.
I l'on faifit à la pincette un de ces petits Moucherons ,
& qu'on l’examine au microfcope monté d’une feule
lentille d'environ trois lignes de foyer, on y découvrira
non-feulement tout ce qui eft exprimé dans les deux figures
qui font repréfentées fur cette Planche , mais encore plu-
fieurs autres chofes que des defleins , quelqu'élégamment
traités qu’ils foient , ne peuvent repréfenter.
La premiere figure repréfente le Moucheron vû par le
dos , & la feconde le repréfente vû par le ventre. En le
<onfidérant d’abord , on le pourra divifer en trois principa-
les parties ; fçavoir, la tête , la poitrine, & le bas-ventre.
La tête de cet infeête eft des plus difficiles à examiner,
parce qu'étant en vie, comme il doit être pour le bien voir,
1l la remue continuellement ; & d’ailleurs elle eft compotée
de tant de parties , &c d’un arrangement fi extraordinaire,
qu’on a de la peine à les bien examiner pour en expliquer la
méchanique.
Cette tête, qui eft très-mobile , eft vûe ornée de deux
gros yeux , de deux efpeces de cornes rondes & oblongues
qui portent deux aigrettes , & d’une face des plus furpre-
nantes qui fe puiflent voir.
Sa poitrine eft chargée de fix grandes pattes & de beau-
coup de poils. -
Enfin la troifieme partie de cet infeéte eft d’une rondeur
oblongue, plus groffe par le haut qu’elle n’eft par le bas,
Voilà en gros ce que j'y ai remarqué , & voici en détail
toutes les parties extérieures qui font repréfentées dans la
premiere & féconde figure.
Les yeux de ce Moucheron font fort gros, .& bien con-
vexes; on les voit placés aux côtés de fa tête, &c autant
éloignés l’un de l’autre qu'ils le puiflent être : leurs furfaces
D'HISTOIRE NATURELLE. ‘13
-paroïflent d’un beau rouge-brun , & divifées par un grand
nombre de lignes courbes qui fe croifent en partageant cha-
que cornée en un fi grand nombre de petits rhombes ou lo-
fanges égaux entr'eux , qu'il n’eft pas poflible de les compter
exactement.
M. de Puget , dans une Differtation qu'il a faite fur l'œil
de la Mouche, nous aflure qu'il contient environ huit mille
cryftallins.
Toute la convexité de chaque cornée du Moucheron eft
parfemée d’une infinité de très-petits poils d’égale hauteur,
‘plantés très-régulierement dans les fillons ou enfoncemens
qui terminent les rhombes ou lofanges , du milieu defquels
on voit élevés les cryftallins dont je viens de parler, qui
couvrent toute la cornée de chaque œil ; & ce qu'il y a de
articulier en ceci, eft qu'on ne remarque point de fembla-
bts poils dans les fillons de l'œil de la mouche ordinaire.
Chaque œil de ce Moucheron eft vü quelquefois comme
enchâffé dans un petit bord étroit & argenté qui lui fert d’or-
nement: ce bord de l'orbite ne paroït pas toujours de cette
couleur argentée, ni diftingué du péricrène , qui eft une
membrane charnue qui fert d’enveloppe au crâne.
On ne remarque point de paupieres en ces yeux, qui
n’ont aucun mouvement ; cependant ils ne laiffent pas d’'ap-
percevoir tous les objets qui les.environnent & qui n'en font
pas trop éloignés , parce que la tête de ce petit animal tour-
nant librement fur fon col, chaque petit cryftallin faifant
l'office d’un œil, le mouvement total de la tête rend ces
objets vifibles.
On voit une partie du péricräne entre les yeux de cet in-
fette , dont le fommet eit orné de deux efpeces de cornes
rondes , oblongues , & émouflées par le bout , qui portent
chacune une efpece d’aigrette fortant du milieu de leur hau-
teur, placées l’une à droite & l’autre à gauche de ces deux
cornes , qui fe voyent terminées de même que le bout d’une
faucifle.
Sa bouche eft fort grande , & prefque toujours ouverte,
comme on le peut remarquer en la feconde figure. On en
_voit fortir comme une groffe langue qui fe fépare vers le bout
14 nÉOBSENVATIONS
en deux parties convexes par-dehors , plattes & raboteufes
en-dedans, pour entraîner plus facilement ce qu’elles peu-
vent détacher d'une partie des corps fur lefquels elles les
appliquent , pour lui fervir de nourriture. On apperçoit
quelques petits poils fur les côtés convexes de ces langues,
qui font fituées d’une maniere toute contraire à celle des au-
tres animaux ; c'eft-à-dire que leurs furfaces intérieures qui
{e joignent en fe fermant , font pofées verticalement, com-
me on le peut remarquer en la feconde figure de cette
- Planche.
Le dos de ce petit infeéte repréfente à-peu-près le derriere
d’une hotte ; il eft couvert de gros & de petits poils ; 1l pa-
roit compofé de deux parties articulées par le bas, comme
on le peut remarquer en la premiere figure.
Sa poitrine , qui fe voit en la feconde figure , a prefque la
forme d’un cœur ; elle eft munie de longs poils, & de fix
grandes pattes compofées chacune de fept pieces, & d’au-
tant d'articles ou de jointures , ornées de quantité de poils,
& d’une griffe à chacune de fes extrémités. On voit aufli
deux ailes qui ont leurs infertions au milieu de cette poitrine,
& dont Les bord$ extérieurs font munis de gros poils , & les
intérieurs de très-petits , difpofés régulierement en forme de
paliffades, pendart qu'on en remarque une infinité d’autres
qui font plantés obliquement fur la furface mince & déliée
qui forme le tiflu de l'aile, qui fe voit foûtenue d'une efpece
de charpente. , :
L’ufage de tous ces poils qui environnent l'aile de la Mou-
che, eft d'empêcher d’autres animaux d’en ruiner la ftruc-
ture , & de leur fervir de défenfe contre l’infulte de quelques
autres.
Ces petits Moucherons ne font pas toüjours exempts d’a-
voir fur leur corps d’autres plus petits infeétes qui les dévo-
rent tout vivans ; car on trouve fouvent fous les ailes d’un
miférable hanneton trente à quarante petits infeétes , qui font
comme autant de poux qui les mangent , fans qu'il puifle les
chafler de ces lieux de refuge.
La troifieme partie de ce petit Moucheron eft à-peu-près
femblable à un œuf de pigeon , étant vüe par le dos , comme
D'HISTOIRE NATURELLE. 1$
en la premiere figure. On y compte huit petites bandes de
peu delargeur , & autant d'articles qui n’environnent pas tota-
lement cette partie , mais qui finiffent après avoir couvert une
très-petite partie de fon ventre, comme on le voit dans la
figure. On voit quantité de poils rangés en ordre dans les
endroits où ces bandes font articulées ; mais on n’en remarque
point fous le ventre, à moins qu’on ne l’obferve étant éclairé
du foleil : car alors il paroît tout velu , & d’un mélange bril-
lant de diverfes couleurs.
CHAPITRE IV.
De la Licorne * ornée de deux efpeces d’aigrettes.
E petit animal terreftre ne paroît avoir environ qu’une
> ligne de longueur, étant regardé des yeux nuds ; mais
en l'examinant avec une lentille de cinq à fix lignes de foyer,
on l’apperçoit à peu-près de la groffeur que je l’ai repréfenté
dans ce deffein,
Son corps qui eft de figure ovale , eft un peu élevé au-
deflus de fix pattes très-déliées, chacune defquelles eft com-
pofée de trois articles mobiles, dont le dermier eft terminé
par deux petites pelotres & trois griffes très-fines ; ce qui
fait quil marche très-librement fur la furface plane qui eft
au fond d’un canon de verre & de même matiere, dans le-
quel je l'ai enfermé.
Tout le dos de l’animal , qui eft de couleur brune & un
peu luifant , eft rayé par des lignes un peu élevées, qui font
conduites à peu- près parallelement entr'elles depuis la tête
jufqu’à l’autre extrémité de fon corps, fans fe toucher; ce
qui donne occafion de remarquer quelques petits enfonce-
mens dans l’efpace qui {e trouve entre ces lignes.
* I part une longue trompe du milieu de fa tête , qui eft
* M. de Reaurmur appelle ce petit fait tant de tort dans les greniers où
infecre le fcarabé à tête en forme de trom-® Yonconferve des grains , eftune efpece
pes il eft connu par les Naturaliftes fous de ce genre, lequel efttrès-nombreux,
le nom de curculio. Le charanfon qui
Planche 74
6 OBSERVATIONS
aflez ferme & roide pour foûtenir elle - même deux petites
cornes, chacune defquelles eft compofée de deux articles
très - mobiles qu'on voit toûjours en mouvement , & dont
les extrémités fe trouvent ornées de deux petites houpes ou
aigrettes qui touchent tout ce que cette Licorne rencontre
dans fa marche , pendant que la trompe demeure immobile
en elle-même.
Le ventre de cet infeéte eft vü compofé de plufieurs arti-
cles formés en anneaux emboîïtés en partie les uns dans les
autres, ce qui me fait penfer qu'il a deux ailes qui couvrent
tout fon dos , d'autant plus que l’on voit une féparation au
milieu de ce dos , que j'ai marquée dans ce deflein par une
ligne plus forte qu'aucune de celles qui fe voyent à côté. On
apperçoit une efpece de pouflere blanche femée très-lésere-
ment fur le dos de cet infeéte, ce qui l'empêche de paroïtre
noir. Ïl y a lieu de croire que fa trompe eft creufe, & qu'il
ne refpire que par ce canal, qui donne un libre paflage à
l'air qui fe communique par-là dans fes poumons.
On voit deux petites éminences noires aux deux côtés de
la tête de ce petit infeéte , qu’on peut juger être fes yeux ;
{a tête eft emboitée dans fon col , qui eft fait comme un bour-
relet, un peu enfoncé dans fes épaules,
Je l'ai vû vivge au moins trois femaines , fans prendre au-
cune autre nouftiture que celle de l’air contenu dans le mi-
crofcope à tombeau qui le tenoit comme en prifon , & où
il eft mort.
CHA PTT R'E"V,
Des petits Papillons qu'on voit en hiver fur des choux de Milan:
E Papillon eft un infeëte volant, qui tire fon origine
d’une chenille ou d’un ver ; il a des piés & des ailes.
Morin , fameux Fleurifte, a obfervé avec Seaucoup d'exac-
titude durant plufeurs années , que chaque plante avoit fa
chenille & fon papillon particülier ; il en a nourri exprès un
grand nombre fous des ciochies de verre , qu'ila fait enfuite
defliner fur du vélin. Swamse
D'HisTotRe NATURELLE, 17
Swammerdam a décrit cent quatorze efheces de Papillons
de nuit, avec leurs nymphes dorées ; il y en a de toutes
unies , de velues, de colorées , & de tranfparentes : il Les
appelle en latin papilio noëlurnus où phalæna. Aldroandus en
décrit de cent dix-huit fortes. Moufet en repréfente de qua-
tre-vingts-fix fortes ; Hoefnagel, de cinquante ; Goedart, de
foixante-dix-fept fortes de ceux qui volent de jour, & huit
qui volent de nuit. Cet Auteur les a repréfentés avec des
couleurs qui imitent celles des Papillons qu’il a examinés.
Les ailes de certains Papillons font femées de très-petites
plumes , qui étant vûes des yeux nuds , paroiflent comme
une poufhiere ; & lorfqu'on examine cette poufliere au mi-
crofcope monté d’une feule lentille d'environ une ligne ou
deux, chaque petit corps paroit comme une tulipe , dont les
feuilles fe terminent en pointes.
La tête des plus gros Papillons étant dégarnie des plumes
qui la couvrent, on voit au-travers du crane le mouvement
de deux vaifleaux qui s’'approchent & qui s’éloignent l’un
de l’autre alternativement , en fe fervant d’une petite loupe
d'environ fept à huit lignes de diametre & d’autant de foyer.
Si l’on enferme une chenille dans un microfcope à canon
de verre, on aura le plaifir d’obferver que le Papillon qui en
viendra n’étoit pas feulement enfermé dans la chenille , com-
me un animal dans l’autre ; mais que la chenille eft le Papillon
même, revêtu d’une membrane qui nous le cachoit fous fes
membres. Il y a une infinité de chofes très-curieufes, & très-
différentes les unes des autres, à obferver dans ces animaux,
dont l'attention n’eft pas indifférente aux perfonnes qui ai-
ment la folitude , & à méditer fur les ouvrages du Créateur
qui les a formés.
N'ayant aucune idée d’avoir lù dans les ouvrages de Swam-
merdam ni dans ceux de Goedart, aucune chofe touchant le
Papillon dont on voit ici deux repréfentations , peut-être à
caufe du peu de groffeur qu’ils ont naturellement , je me
trouve en quelque forte obligé d’en parler, pour faire con-
noître que Morin a eu quelque raifon de dire que chaque
plante avoit fa chenille & {on Papillon particulier ; cepen-
dant 1l me femble qu'il auroit mieux fait de dire que chaque
Tome I. Part. L
Planche 8,
48 OBSERVATIONS
chenille où chaque Papillon a fa plante particuliere & fa-
vorite. | 5)
Paflons maintenant à l'explication du Papillon Milanois,,
velouté ou enfariné : chacun de ces trois noms me femble
affez lui convenir, comme il fera facile d’en juger, fi l’on fe
donne la peine de l’examiner. Le deffein qu’on en voit (PI.
8.) au-deflous de la lettre 2), le repréfente vû par le ventre;
&c celui qui fe voit au-deflous de la tête e, le fait voir par
le dos.
Dans la premiere de ces deux repréfentations on remarque
une tête dont le fommet fe voit orné de deux cornes aflez
longues 8: mobiles, compofées de plufieurs parties articu-
lées ; de deux trous qui répondent prefqu’au-deflous de ces
cornes, que je crois être fes oreilles ; de deux gros yeux irré-
gulierement terminés, & des plus enfoncés dans cette tête
que j'aye vüs jufqu'à préfent ; & enfin d’une trompe compo-
fée de plufieurs pieces mobiles , affez longues , & terminée
en pointe un peu émouflée qui defcend fur fa poitrine , d’où
Von voit partir trois grandes pattes de chaque côté , compo-
fées chacune de trois pieces articulées , & mal terminées :
tout le refte de fon corps æeft d’une rondeur oblongue. Ce
petit infeéte a quatre ailes, deux petites & deux grandes,
qui n’ont aucune tranfparence , non plus que les cornes, les
pattes, & le corps, qui n’a au plus qu'une demi- ligne de
longueur, parceque toutes ces parties-là font totalement
-couvertes d’un duvet farineux & épais , qui ne permet pas
Je paflage aux rayons de lumiere qui tombent deflus.
On peut conferver ces petits Papillons aflez long-temps ,
& même en hiver, en les mettant dans une boîte avec les
feuilles de chou qui leur fervent d’aliment. Lorfque la boîte
eft découverte, on en voit quis’envolent , maïs ils ne vont
pas loin du lieu d’où ils partent. Pour les bien examiner, if
les faut faifir au bout de la pointed'aiguille, qui fe monte fur
da machine nommée porte-pinceite , en employant un peu
d’eau gommée dans laquelle on trempe le bout ‘a cette poirt-
te d’aiguille ; laquelle étant montée au microfcope , on fe
#ervira d’une lentille d’environ trois lignes de foyer : par ce
Secours on pourra voir exaËtement toutes les parties de ce
petit animal,
D'HISTOIRE NATURELLE. T9
CHAPITRE VL
De la Mie vagabond.
Le Mite peut pañler pour un des plus petits animaux que
la fimple vüe puifle découvrir ; on la voit marcher, &
fe détourner de quelque petit corps dont on traverfe fon
chemin : par-là on juge feulement qu’elle peut avoir des
jambes & des yeux ; mais ce n’eft que par le fecours du mi-
crofcope qu’on peut exa£tement connoître toutes fes parties,
&z que c’eft une efpece d'infeétes qui fe trouvent quelquefois fi
menus, que la vüûe n’eft pas capable de les appercevoir, quoi-
que blancs, & qu'ils fe meuvent fur une furface noire. Les
œufs d’où ils font fortis font fi petits, qu’un feul ne furpañle
pas la centieme partie de celui d'une Mite ordinaire ; les
Mites mêmes d'une grandeur moyenne , & bien nourries,
n'ayant guere plus de largeur que la centieme partie d’un
pouce. Nonobftant cette extrème petitefle, notre microfcope
nous apprend que ces petits infeétes ont une figure des plus
jolies qui fe puifle voir, 8 que chacun d'eux eft muni de,
huit jambes d'une belle figure & bienproportionnées, arti-
culées & pliables en fept ou huit différens endroits, la plus
grande partie de chacune defquelles eft couverte d’écailles
tranfparentes , dont le bout inférieur eft frangé de plufieurs
etites foies , & terminées-chacune par une griffe trés-aiguë.
Le corps de la Mite ef divifé en trois parties principales :
la partie poftérieure ou le ventre 4, paroït couvert d’une f
feule écaille ; mais la région moyenne ou la poitrine eft cou-
verte de deux écailles À, C, qui coulent l’une dans l’autre ; de
maniere que la Mite s’y peut en partie retirer quand elle
veut , ainfi que fon grouin D , qui a pareillement la facilité
de fe raccourcir & s'allonger , felon qu'il fe reflerre ou qu'il
s'étend fous fa couverture , dont les parties peuvent s'enga=
gér ou rentrer les unes dans les autres, & s'en dégager.
-_ Tout fon corps eft d’une belle tranfparence ; enforte qu'é-
tant regardé à une lumiere direéte , comme on regarde les
Ci
Planche g
3 1»
Ce) | OBSERVATIONS.
objets du ciel dans une lunette d'approche, on peut apper-
cevoir divers mouvemens qui fe font dans fon corps; &
dans cette pofture toutes fes parties font plus aifées à être
élégamment repréfentées. Les écailles , principalement celle
qui couvre le derriere de l’infeéte, eft fi exaétement polie,
qu'il eft facile d’y voir l’image de tous les objets d’alentour,
qu'elle repréfente comme fait un miroir convexe. Au haut,
au bas &c en divers endroits de ce corps , on remarque quan-
tité de poils longuets & blancs, qui femblent fortir de ces
écailles , parmi lefquels il s’en voit de plus longs que n’eft
tout le corps de l’animal.
Tous ces poils font pliables , hormis feulement les deux
que l’on voit fur la partie antérieure de cet infeéte, & qui
lui fervent de cornes, ainfi qu’on le peut voir dans les figures,
dont la premiere eft le deflein d’une petite forte de Mite qui
va çà & là, & qui pour cette raifon peut être nommée Mite
vagabonde ; à la différence de quelques autres qu’on peut
nommer Mites domefhques | parce qu’elles reftent toüjours.
dans les mêmes lieux. |
La feconde figure eft la repréfentation d’une Mite fixée
fur fon dos par le moyen d’un peu d’eau gommée mife fur un
corps noir, pour faire voir de quelle façon toutes les jambes
naïflent du corps , 8e comment elles y font attachées ; &
donner le moyen d’obferver le jeu & les mouvemens admi-
rables des parties qui les compofent.
Ce petit infeéte eft très-diverfifié , non-feulement dans fa
forme , dans fa couleur, &c. mais aufli par différentes pro-
priétés conformes à la nature de la fubftance dans laquelle il
a été engendré & nourri. |
Il y en a qui font leur réfidence ordinaire fur toutes fortes
de fubftances moifes ou pourries. :
On en voit roder fur quelques matieres mifes en infufon:
dans de l’eau commune, après leurs fermentations & leurs
végétations, |
On trouve de ces infeëtes fur des tonneaux d’où il eff forti
quelques gouttes de vin, dont le féjour a donné occaïion aux
œufs que leurs meres y avoient dépofés, de s’éclorre en peu
de temps,
D'HisTorre NATURELLE. 2!
On en découvre quelquefois entte les feuillets des gros
champignons tout nouvellement tirés de terre : il s’en voit
aflez fouvent fur les taches de pourriture des vieux fruits, fur
les figues feches , fur les limas de cave : enfin on en trouve
une pépiniere avec leurs œufs fur de certains fromages, dont
je parlerai plus loin.
Si l’on fe donne la peine d'examiner quelques limas de
cave avec une petite"loupe, on les verra chargés ou cou-
verts d’un grand nombre de petites Mites qui ne les aban-
donnent qu'après leur mort. Ces Mites parcourent le corps
des limas avec beaucoup de vitefle, quoique très-vifqueux
& gluant ; & parce qu’il n’eft pas facile de les fixer pour les
bien voir, je dirai comment je m'y fuis pris afin de les exa-
miner à loifir. Pour cet effet je prends un morceau de glace
concave , ou un verre plane des deux côtés, que j’enduis
légerement d’un peu d’eau gommée , d’une confiftence aflez
épaifle pour que les Mites que je fais tomber deflus, sy
puiflent attacher : je place enfuire ce morceau de glace à un
microfcope monté d’une lentille d'environ trois lignes de
foyer ; par ce moyen je me trouve en état de voir ces petits
animaux , & de choifir ceux dont les attitudes me paroiflent
les plus propres à être repréfentées. Vous en voyez trois fur
la Planche 8. Celle qui eft au-deffous de la lettre 4, eft vûe
de front par le ventre; celle qui eft au-deflous de Z, eft
encore vüûe par le ventre, mais un peu de côté; & celle
qui fe voit au-deflous de la lettre €, eft vûüe par le dos.
Ces animaux font blancs , mais ils font trop épais pour
être tranfparens : leurs corps ñe font pas fi unis & fi luifans
que ceux des Mites précédentes. Ils ont quatre pattes à droite
&t aytant à gauche de leur petit corps, compofées chacune
de cinq membres , & d’autant d’articles ou de jointures. Ces
pattes ne font pas efpacées également ; car on voit que la
diftance des quatre premieres aux quatre autres , eft beau-
coup plus grande que n’eft celle des deux premieres aux deux
fecondes , & des deux troifiemes aux deux quatriemes.
On voit deux longs poils aux côtés de fa rête, qui peu-
vent pañler pour fes cornes , parce qu’ils font beaucoup plus
gros &c plus longs que ceux qu’on voit en petite quantité
Planche 10
Planche 114
13 FETOBSERVATIONS T
autout de fon corps. Enfin on voit encore un petit mufèau
tond , court & émouflé par le bout; mais on n'y découvre
point d'yeux. 3
Enfin les Mites dont je parle ; vivent très-long-temps de la
fubftance huileufe qui fe voit fur le corps des limas de cave;
mais dès qu’ils font morts elles les abandonnent , faute d'y
trouver de quoi fe nourrir. Il n’en eft pas de même d’un
grand nombre d’autres animaux , qui'ne font dévorés par
d’autres Mites que lorfqu’ils font morts.
On a repréfenté fur la Planche 10 une Mite de fromage ;
&c une Mite ou pou de ferin , telles qu’on les voit avec un
microfcope. Il fuffit de jetter les yeux fur cette Planche,
pour s’appercevoir de la différence qu'il y a dans la figure de
ces deux petits animaux , fans qu'il foit befoin d’en donner
une defcription plus détaillée.
CH API TR ENTTL
Defcription d’une efpece de Mouche aquatique & terreftre ; quë
nage fur le dos, qui faute & marche étant hors de l'eau *.
ETTE efpece de Mouche, qui fe pêche ordinairement
C dans des baflins de fontaine , eft des plus curieufes, &
d’une conftruétion des plus fingulieres qu’on en puifle voir.
Elle paroit aux yeux nuds avoir environ trois lignes de lon-
gueur, & une bonne ligne &c demie de largeur : fa couleur,
quoique variée, paroiït d'un verd pâle & un peu luifant : fa
tête paroït avoir plus de largeur qu’elle n’a de hauteur : on
la voit ornée de deux gros yeux qui ne font pas ronds, quoi-
que convexes : elle a fix pattes , favoir quatre petites & deux
grandes , qui lui fervent de nageoires : enfin un corps com-
pofé de plufieurs bandes articulées qui le terminent en dimi-
nuant de groffeur, & plufeurs petites mafles de poils rangés
proprement tant à droite qu’à gauche des derniers anneaux
qui terminent fon corps. Voilà en gros ce que nous avons pù
obferver fans le fecours du microfcope ; 8t voici ce qu'on
% C'eftune efpece de punaife aquatique, Notonetta Linnai, 688,
D'HisTOtRE NATURÈLLE. 2%
en peut découvrir de plus en fe fervant d’une petite loupe
d’un pouce de foyer, montée d’une maniere commode.
Comme la fituation la plus ordinaire & la plus naturelle à
cetre Mouche vûüe dans l'eau , eft d'y être prefque toûjours
couchée fur le dos, fes detix grandes pattes étendues, & fa
tête un peu plus baffle que le refte de fon corps ; & qu’elle
demeure ainfi aflezlong-temps, & bien tranquille : c’eft dans
cet état que je vais l’examiner.
Sa tête eft aflez plate ; on la voit ornée de deux gros yeux,
autant écartés l’un de l’autre qu'ils le puiffent être, & dont
les cornées paroïflent brunes : la partie du péricrane qui fé-
pare fes yeux eft bien large, &c d’un verd pâle. On apper-
çoit qu'il tombe de fa face, ou qu'il en fort, comme d’une
efpece de bouche , une trompe compofée de trois ou quatre
pieces, & d’autant d'articles qui vont diminuant de groffeur
depuis fa racine , qui paroit fort large , jufqu’à fon extrémité,
Cette même largeur femble être féparée de haut en-bas par
une groffe ligne noire , qui eft interceptée par plufieurs au-
tres lignes de même couleur. Cette trompe qui paroît immo-
bile, ne left pas toûjours; elle paroït avoir environ trois
Hgnes de longueur , étant confidérée des yeux armés de la
loupe , ou d’une lentille, qui fait voir les objets un peu plus
gros que la précédente.
- La poitrine de cette Mouche paroit par-devant tellement
unie au-deflous de fa tête, qu’elle en cache le col. Les fix
pattes dont j'ai parlé , ont leurs infertions tout le long de cette
poitrine : chacune des quatre premieres eft compolée de qua-
tre pieces & d’autant d'articles ; elles font munies de quelques
petits poils noirs, & de deux griffes de même couleur. Chaque
grande patte n’eft compofée que de trois parties, & d’autant
d'articles ; elles font munies d’un grand nombre de poils d’une
délicatefle extraordinaire : ces deux dernieres pattes n’ont
point de griffes ; aufli n’en ont-elles pas befoin, parce qu’elles
fervent de nageoires à cet infette, quine voyage dans l’eau
que par fecouffes , de maniere que fon nager n’a rien d’élé2
gant. Toutes les pattes & les nageoires fe frottent l’une l’au-
tre de temps en temps, de même que celles des Mouches ordis
aires, La premiere piece de chacune des pattes ef comme
24 OBSERVATIONS
arboutée d'une autre piece convexe extérieurement , &
longue d'environ trois lignes , fe terminant en pointe
émouflée, & s'étendant le long de la piece, fur laquelle elle
eft très-intimement attachée , & qui en femble féparée par
une ligne noire dont elle eft envifonnée. On remarque que
les deux premieres pattes fe touchent prefqu’à l’endroit de
leurs infertions , où elles font garnies de poil, ce qui ne fe
voit pas aux mêmes endroits des autres pattes.
La troifieme partie, ou le bas-ventre, nous paroît com-
pofée de huit ou neuf bandes, ou d’autant de portions d’an-
neaux qui fe terminent aux côtés du ventre, qui eft partagé
de haut en-bas en divers rangs de poils très-fins, appliqués
les uns contre les autres, paroiïflant d’une couleur dorée , &
Juifans ; formant trois petites éminences à droite & autant à
gauche ; efpacées également le long des bords du ventre de
cette Mouche, dont l'anus paroït prefque toûjours ouvert,
& comme sil en fortoit une bulle d’air; & aux côtés de cette
ouverture on voit plufeurs mafles de longs poils très-fins ;
dont l’afflemblage forme une efpece d'ornement.
Les deux griffes qui fe voyent à l'extrémité de chaque
patte fe joignent quelquefois 4 exaétement, qu’il n’y en pa-
roit qu'une feule.
Après avoir obfervé cette Mouche vüûe par le ventre, je
lai confidérée de front & par le dos , & j'ai và que les cor-
nées de fes yeux étoient compofées d’une infinité de petites
éminences , qui font comme autant de cryftallins femblables
à ceux de la Mouche ordinaire, mais en bien plus grand
nombre , & plus petits de moitié : d'où il faut conclurre que
fi les yeux de la Mouche ordinaire n contiennent environ
feize mille, au rapport de M. de Puget, ceux de cette Mou.
che aquatique en doivent contenir le double. N’eft-ce pas
là de quoi faire révolter l'imagination la plus forte ?
On voit quelques petits poils aux endroits de l'orbite, où
ces yeux font comme fertis ; mais l’on n’en découvre aucun
dans les fillonnages des cryftallins de la Mouche aquatique.
Pendant que je la tenois entre les deux premiers doigts de la
main gauche , pour en bien confidérer les yeux , je me
fentis piqué vivement de fon aiguillon , qui me caufa une
grande
«
D'HISTOIRE NATURELLE. La
grande douleur , que je fis heureufement cefler en peu de
temps, avec un peu d’efprit-de-vin que je mis deflus.
Je repris après cela cetre Mouche, que j'avois remife dans
l'eau , pour continuer à l’examiner, & j'apperçus deux pe- ”
tites ouvertures rondes un peu au-deflus de fa bouche, que
l'on peut prendre pour {es nafeaux.
On voit remuer fa tête, qui n’eft féparée de fes épaules
que par très-peu de largeur : la partie du péricrane qui ré-
pond à fon fommet, paroît blanche, & piquée de plufieurs
petits enfoncemens : fes épaules font couvertes d’une mem-
brane blanche & deliée , divifées en deux bandes infépara-
bles par une ligne courbe , concave du côté de la tête, paf
fant d’une épaule à l’autre.
Cette membrane ou cette efpece de colletparoïtun peu
tranfparent & de deux fortes de couleurs ; il eft un peu mo-
bile , & couvre le derriere de fa poitrine. Les ailes de cette
Mouche font dures &r fermes ; elles paroiffent de plufieuts
couleurs , & formentavec la bafe du collet un efpace trian-
gulaire,
La marche de cet infeête eft aflez agréable à obferver :
on voit qu'il appuie les extrémités des deux pattes de devant
fur la furface horifontale des corps qu'il parcourt : les deux
fecondes pattes font à-peu-près la même chofe ; & les deux
dernieres , qui lui fervent de nageoires , la font avancer, en
pouffant en arriere la partie de ces nageoires qui eft munie
de poils ; & lorfqu’il fe trouve fur le-dos , il fait un faut en
ouvrant quelque peu fes ailes, pour fe remettre prompte]
ment fur fes pattes.
Enfin il arrive qu’on voit quelquefois cette Mouche nager
fur le ventre, puis fe tenir comme debout & immobile la
tête hors de l’eau; ce qui eftfirare , que je ne l'ai apperçue
qu'une fois ou deux dans ces diverfes fituations. On la peut
conferver durant plus d’un mois en vie, pourvä qu'on lui
donne de nouvelle eau de temps en temps : le plus fouvent
eft le meilleur.
LOS,
Tome JL, Par, L, D
n
Planche 7,
fg. 23°
26 -.. OBSERVATIONS
CE HA PET RE VIII
Defcription d’une autre efpece de M Re aquatique G terreftre*,
CC ETTEe Mouche vüe des yeux nuds, peut avoir un
peu plus de deux lignes de longueur, & la moitié en
largeur. Sa couleur eft compofée de plufieurs efpeces de
bandes interrompues , courbes & noires, fur un fond d’un
jaune verdâtre : elle a deux gros yeux en forme de triangle
curviligne , dont les cornées font convexes , & compofées
d’un très-prand nombre de cryftallins femblables à ceux des
Mouches ordinaires , mais beaucoup plus petits & en plus
grand nombre. Le péricrane qui fépare fes yeux eft d'une
couleur blanche ; en paflant du derriere de fa tête en-devant,
on le voit defcendre & finir en pointe , d’où il fort, comme
d’une bouche , une trompe très-aigué qui tombe jufqu’en-
deçà des racines des premieres pattes de cette Mouche, qui
ne font compofées que de deux parties , de trois articles &
de deux griffes chacune.
La longueur des pattes du milieu eft au moins du double
des précédentes ; on les voit compofées de quatre grandes.
pieces munies de quelques poils , & de deux efpeces de grif
fes à chaque extrémité. Les deux dernieres pattes font plus
groffes que les précédentes ; on les voit compofées chacune
de trois pieces d’une groffe se , & de quelques poils. Tout
le corps de cette Mouche eft environné de cinq ou fix bandes
ou anneaux emboîïtés l’un dans l’autre , comme on le peut
voir dans la figure repréfentée au-deflous de la lettre 4.
Le derriere de cette Mouche fe voit environné de plu-
fieurs petits poils : étant vüe par le dos, comme on l’a re-
préfentée au-deflous de la lettre £ , on apperçoit que fes
épaules font couvertes d’une piece mobile qui joint fa tête,
& dont le bas forme un angle très-obtus. Au-deffous de cette
efpece de collet , il fe voit deux autres pieces qui en defcen-
dant forment un angle aigu. Enfin il part de deflous ces pieces:
* Autre «fpece dePunaife aquatique. Motoneéla Linnei , 689. .
D'HisToitRe NATURELLE. 27
deux ailes tachetées de plufeurs petites bandes interrompues
& noires , comme j'ai déjà dit, formant des petits arcs de
cercle dont la convexité eft tournée du côté de la tête de
cette Mouche, qui gate & faute étant hors de l’eau.
GE ELLE EEE << QT |
CHAPITRE. IX
Anatomie des Plantes en général.
« T L eft aifé de connoître (difent les Auteurs du Journal
» JL des Savans, ann. 1676 } par les nouvelles découvertes
» que l’on a faites en ce fiecle dans la Phyfique, que les An-
» ciens n'ont pas*épuifé les fecrets de la Nature, & qu'ils ne
» fe font fouvent donné la peine de connoître que ce qu’elle
» ne prenoit pas beaucoup de foin à leur cacher. Ceux qui
» nous ont parlé de Plantes , fe font contentés d’en décrire
» l'extérieur ; ils n’ont pas été jufqu'à la difleétion & à l’a-
» natomie , & ils ne fe font guere mis en peine de décou-
» vrir par la connoïffance de leurs parties intérieures & ca-
» chées , la raifon de plufieurs effets qui ne peuvent s'expli-
» quer que par ce moyen. |
» M. Grew, favant Botanifte, s’eft attaché à cela dans un
» ouvrage, qu'il appelle pour cet effet Anatomie des Plantes.
» Il y décrit toutes les parties dont elles font compofées, il
» en marque les ufages ; il rend raïifon de plufieurs chofes
» particulieres qu’il eft aifé d’obferver dans diverfes Plantes,
» & que perfonne n’avoit encore pris le foin d'expliquer : &
» parce que la méthode eft l'ame de tous les ouvrages, &
» qu'il n’eft point de plus bel ordre que celui que la Nature
» obferve en toutes chofes , cet Auteur fuit en parlant des
» Plantes , celui que la Nature garde en les formant. Ainf
» il commence par la graine, il vient enfuite à la racine, de
» la racine il pañfe à la tige; & parce que la tige poufle des
» branches , des feuilles , des fleurs & des fruits, & enfin
» d’autres graines propres à être femées , il continue & finit
» par-là fon ouvrage.
» Îl'a choïfi entre les graines une grofle feve de jardin ;
D 1j
2$ OBSERVATIONS
» comme une des plus propres à faire connoître les parties
» qui la compofent. Il les décrit toutes en particulier ; mais
» ce qu'il dit de leur ufage eft d’autant plus beau, qu'il y
» explique tous les degrés de la végétation | & toutes les
» démarches que la Nature obferve pot faire croitre & pour
» faire groffir une Plante.
1. » On y voit comment le fuc qui nourrit la feve ayant
» été renfermé dans les peaux de la feve, comme dans au-
» tant de réfervoirs où la Nature le conferve jufqu’à ce qu’elle
» en ait befoin , pafle à-travers les peaux qui enveloppent
# les deux lobes, c’eft-à-dire les deux parties qu’on voit fe
> féparer aïfément dans la feve lorfqu’elle eft encore verte,
# qui font marqués dans la figure ( ci-devant Planche 7.
» fig. 4), avec leur parenchime, par les lettres aaa ,uaa;
» & qu’ainf il n'arrive à la feve que peu-à-peu , & qu’autant
# qu’elle en a befoin , après s’y être filtré comme dans un
> coton très-fin , & s’y être fermenté, comme la biere &
# les autres liqueurs fe fermentent dans les bouteilles ou dans:
» les vaifleaux dans lefquels on les enferme. à
. .» Ce fuc ayant reçù fa derniere préparation dans le paren-
» chime, entre dans toutes les branches de la racine /éninale
» bb; & de-là continuant toûüjours fon mouvement , il va fe:
» rendre à la radicule c, dans la même partie où aboutiflent
» les groffes branches d. La radicule étant ainfi impréonée,
» devient la racine de la Plante ;. & alors la plumee, qu'on:
» nomme ainfi à caufe qu'elle reflemble à un petit bouquet
» de plume, fortant des cavités dans lefquelles elle étoit ren-
» fermée, croit à fon tour , devient la tige de la Plante, &
» ne laifle déployer & paroître les petites feuilles qui la com-
» pofent, que lorfque la feve poufle & fort de la terre. ,
» Le cours de la feve dans la racine n’eft pas moins admi-
» rable que dans le corps de la graine. Cet Auteur l'explique:
» par une circulation à-peu-près femblable à la circulation:
» du fang qui fe fait dans les animaux ; car faifant pañler ce
» fuc à-travers les infertions, pour aller de l'écorce dans la
» moëlle & de la moëlle dans l’écorce . d’où il eft chaflé-
» plus d’une fois par un nouveau füc qui y entre encore, ik
? fuppofe qu'enfin les parties crues du fuc retournent de la
D'HisToiRrE, NATURELLE 25
» même maniere de l'écorce dans la moëlle ; & que celles
» qui fe trouvent aflez volatiles n'ayant plus befoin de cir-
» culation, montent en droite ligne vers la tige de la Plante.
» Ce qu'il dit du corps Lgneux qui fe trouve dans la tige,
» eft encore particulier ; car il remarque que fes pores ne
#» paflent que fort rarement les uns dans les autres ; mais que
» s'étendant en long , ils demeurent toüjours diftingués com-
» me autant de divers petits canaux. Les uns ne font que les
» creux des fibres, dont chacune eft percée par plufieurs de
_» ces pores, jufqu'au nombre de trente, de cinquante, ou
» même de cent ; & les autres font les efpaces qui fe trou-
* vent entre les diverfes parties du bois. Aïnfi ce qu’on ap-
» pelle proprement bois dans un végétable , dans une Plante
» ou dans un arbre , n’eft autre chofe , felon cet Auteur,
» qu'une infinité de canaux fort petits, ou de fibres creufes.
» La figure qui fuit (PI. 7. fig. 5.) le fait voir aifément.
# Elle repréfente un petit morceau de tige de gloutiron exa-
» miné d'abord avec les yeux , & enfuite avec le microfcope.
‘» aa, eft la figure , telle qu'elle paroït aux yeux : #, fa gran-
» deur & fa figure , comme on le voit par le microfcope :
» cc, les infertions du parenchime de l’écorce : dd, dd, dd,
» les fibres du corps ligneux qui font diftribuées dans la tige.
» Les diverfes fortes de points noirs qui y paroiflent, mar-
» quent les différentes fortes de pores. | |
» Ceux de la moëlle, principalement dans un fureau,
» font par-tout également entre-coupés, au contraire de ceux
» du corps lpgneux. Cet Auteur avoue que M. Hook le lui a
» fait voir, & qu'il l’a pleinement convaincu que la moëlle
» n’eft autre chofe qu’un amas de plufieurs petits ouillons ,
» lefquels fe dilatent ou fe ferrent , fuivant la dilatation ou la
» compreflion du corps ligneux ; & c’eit la raifon pour
.» laquelle la moëlle n’eft pas fi large à proportion dans les
» tiges des arbres, que dans celle des autres Plantes qui
» font de même âge , parce que le corps Loneux fe trouve
» beaucoup moins dilaté dans les arbres que dans les herbes,
.» par exemple , où l’on voit que les derniers rejettons pouf-
» fent fouvent jufqu’à la peau à laquelle ils fe joignent ; &
» cette moindre dilatation du'corps ligneux dans les arbres,
30 OBSERVATIONS
# vient de ce que dans la plüpart le fuc n’eft pas fi impétueux
# ni fi fort que dans les herbes.
» [l n’y a rien de plus méprifable qu’une paille, cependant
# il n’y a je” de plus admirabie lorfqu’elle ferr encore de
» tige au blé. La defcriprion qu'on en trouve ici eft très-
» curieufe ; car l’Auteur y explique comment l'élévation de
» la tige du blé fert à mürir le fuc ; comment le peu d’épaif-
» feur de fes côtés fert à le ménager, & à en empêcher la
» trop grande diffipation ; & enfin comment la difpofition
.» de certe tige, qui eft ronde & creufe , fert à le rendre fer-
» me, & à lui donner aflez de force pour fupporter le poids
» de l'épi, de même que les nœuds, qui font encore comme
» des tamis, qui filtrent, & qui purifient le fuc lorfqu'il s’é-
» leve vers l’épi pour le nourrir.
# La Nature n'eft pas moins admirable dans la formation
» des branches qui fortent des tiges , des bourgeons & des
» nœuds. Les premieres viennent ordinairement du centre
» de la tige, & ne font que des faillies du fuc qui fe fermente
# dans la moëlle ; d’où il arrive que les Plantes qui ont moins
» de moëlle que les autres, pouffent moins de branches ou
» de plus petites ; & que celles qui n’en ont point du tout,
» ne pouflent point de branches , comme nous le voyons
» dans la tige du blé. Les bourgeons fe forment des parties
» les plus légeres & les plus volatiles de ce fuc , en partie
# par une extenfon pareille à celle de l'or qu’on tire pour
» être filé, & en partie par une dilatation femblable à celle
» de l’eau qui s'éleve en bouillons : ils s’allongent & fe dé-
# ployent à-peu-près comme une lunette d'approche ; & for-
» tant ainfi de la circonférence de la tige, ils fe changent
» peu-à-peu en branches. Mais comme toutes les parties qui
» compofent les bourgeons & les branches, font portées
# collatéralement vers la circonférence de la tige , elles ren-
# contrent celles qui s’élevent direétement vers le haut, &
# s’embarraflent fouvent enfemble : il fe forme des nœuds
# qui arrêtent encore les parties les moins fubtiles du fuc,
» & qui filtrent les autres ; de forte qu’il n’en pafle dans les
# bourgeons & dans les branches qu’autant qu’il leur en faut,
# @ dans toute la pureté néceffaire. ,
D'HISTOIRE NATURELLE, 31
» Iln’en eft pas de même a ces nœuds pierreux , dont
» lamas forme ce qu’on appelle la carriere dans les poires
» nommées .ordinairement poires d’étranguillon ; car ces
» nœuds ne font autre chofe, felon cet Auteur, que plufieurs
» parties du fuc endurcies & coagulées de la même maniere
» que celles qu’on voit fouvent dans les urines, dans les ton-
» neaux de vin, & dans plufieurs autres liqueurs, par la pré-
» cipitation que caufent quelquefois le mélange & la force
» des fucs qui fe trouvent dans le corps Lgneux & dans le
» parenchime , qui agiflent les uns fur les autres,
» Il attribue à la diverfe difpofition des fibres que la tige
» pouffe pour former les feuilles , leurs diverfes grandeurs &
» leur figure particuliere : 1l veut même que ce foit la caufe
» pour laquelle elles font plates ; & il remarque que la Na-
» ture donne à chaque bourgeon , outre les feuilles dont il
» eft compofé , plufeurs membranes qui le couvrent, &
» qu'il appelle des fur-feurlles , qui lui font fort utiles, parce
» que ne s’ouvrant que peu-à-peu , elles ne laïffent entrer
» dans le bourgeon le vent, la pluie & le foleil que par de-
» grés , & à proportion qu'il les peut fouffrir.
» En parlant des fleurs , il rend raifon pourquoi certains
» fruits, comme les pommes, les poires, &c. fe forment
» fous les fleurs ; & quelques autres , comme les cerifes,
» les abricots, &c. fe forment en-dedans. Il en attribue la
"» caufe à la folidité ou à la délicateffe de la pulpe. Les pre-
» miers ayant la pulpe fort folide , n’ont quafi rien à craindre,
» ainfi la Nature ne fe met pas beaucoup en peine de les
» mettre à couvert ; au lieu que les cerifes , les abricots &
» les autres fruits pareils fe formant au commencement du
» printemps , qui eft quelquefois aflez froid , périroient in-
» failliblement , s'ils n’étoient enveloppés dans les fleurs.
» Il explique de même PR le fruit devient générale-
» ment meilleur à manger que les autres parties des Plantes.
» Il croit que fa fituation y contribue beaucoup, parce que :
» les parties les plus groflieres du fuc demeurant dans les
- » feuilles , il n’entre dans le fruit que les plus pures & les
» plus délicates. La figure du fruit n’y eft pas non plus inu-
» tile ; car la plüpart des fruits érant ronds , ou à peu-prés »
Planche 224
32. OBSERVATIONS
» il y entre une grande quantité de fuc, qui {e trouvant éga-
»# lement répandu dans toutes les parties, s’y mürit & s’y
» purifie plus doucement & mieux qu'ailleurs ; & c’eft auffi
# pour cette raïfon qu'il marque que les fruits les plus ronds
» font les plus délicats ; que les pommes duracines & les poi-
» res de bergamote font ordinairement fort bonnes, & que
» les raifins font les plus agréables de tous les fruits ; & enfin
» ue parmi les grains de raïfin , les plus ronds font les meil-
» leurs ».
CHAPITRE X.
Des Racines des Plantes, & de leur accroiffemenr.
À. avoir donné dans le chapitre précédent une idée
générale de l’anatomie des Plantes ,#je vais dans celui-
ci entrer un peu plus particulierement dans le détail des par-
ties dont elles font compofées, & que le microfcope nous
met à portée d’appercevoir. Cet inftrument nous fert à dé-
couvrir dans les racines des plantes , les différentes parties
organiques dont elles font compofées, & au moyen def-
quelles la végétation s'opere. La Planche 1 2 repréfente une.
racine d’abfinthe , & celle d’une rave coupée tranfverfale-
ment , telles qu'on les apperçoit à la vûe fimple, figure 1 &
figure 3, TJ. Les deux quarts de cercle, figure 2 & figure 4,
repréfentent une partie des mêmes racines vûes au microfco-
pe, ou avec une forte loupe. Dans la figure 2, qui repré-
fente la racine d’abfinthe , 1°. 44 eft la peau ou membrane
extérieure qui enveloppe la racine : 2°. depuis À jufqu’à C
dans la racine d’abfinthe , eft l'écorce, qui eft une fubftance
membraneufe compofée en partie d’un grand nombre de pe-
tites véficules 8, 8, B : 3°. le bois de la racine eft toute
cette partie qu'on voitentre À & £ dans la racine de rave.
& depuis € jufqu'au centre dans la racine d’abfinthe : 4°. le.
bois de la racine eft aufli compofé de deux fubftances diffé-.
rentes, dont l’une eftligneufe, & proprementlebois£,£, E;
& l’autre parenchimeufe & femblable à celle de l'écorce,
| comme
à D'HISTOIRE NATURELLE. 33
«comme D, D, D, qui s'infere régulierement entre les por-
tions du bois. Ces différentes fubftances fe diftinguent fort
aifément dans la racine d’abfinthe; mais on ne les appercçoit
pas fi bien dans la rave & dans les autres racines : 5°. on
voit dans le bois les orifices de différens tuyaux a,a,a, qui
forment l'embouchure des conduitæ à air : 6°. depuis € juf-
qu’en £ dans la rave, on apperçoit un autre petit cercle de
“vaifleaux femblables à ceux de l'écorce : 7°. enfin depuis Æ
jufqu’au centre de la rave fe trouve la mcelle , compofée
d’une même fubftance parenchymeufe & fpongieufe , que les
veficules qui forment l'écorce & une partie du bois. Mais la
moelle n’eft pas commune à toutes les racines , on n’en ap-
‘perçoit point dans la racine d’abfinthe.
Quant à l’ufage de ces différentes parties , les veficules
qu'on voit dans l'écorce , font qu’on peut la confidérer com-
me une fubftance fpongieufe , propre à recevoir & à fucer
les parties aqueufes de la terre, qui font imprégnées du prin-
<ipe de la vie végétative. Cette eau imprégnée que boit
Jécorce , eft ce que l’on appelle /eve. La peau de la racine
{ert comme d’un filtre pour pañler la feve, & la purifier à
{on entrée dans la racine. La feve ainfi filtrée & introduite
dans la racine , fermente dans la fubftance de l'écorce, &
devient par-là plus travaillée ; elle s'infirue plus aifément
d'elle-même dans la fubftance parenchymeufe de la racine,
après quoi cette feve eft fixée , tant par l'impulfion de la
nouvelle feve, que par le mouvement des veficules tendues
du parenchyme , à entrer dans les autres parties de la racine,
& elle eft roûüjours fiitrée de plus en plus en pañlant d’une
veficule à l’autre. Cette feve ainfi diftribuée dans toute la
racine , fournit à fes parties organiques les principes de nu-
trition dont chacune a befoin ; & ainfi par l'application conf
tante de ces principes nourriflans, la racine reçoit dans cha-
cune de fes parties fon accroiflement, fa folidité , &cc.
Le même méchanifme eft continué de la racine au tronc
de la plante, pour y porter cette fubftance végérable, com-
me il eft aifé de le voir dans la Planche 13, À 1, que j'ai
tirée de l’Anatomie des Plantes du Doëteur Grew, où T
repréfente le quart d’une feétion de branche de noifertier,
Tome I, Par,
$4 OBSERVATIONS
telle qu’elle paroït à la vûe fimple. 4 G B eft une portion
de la même branche , telle qu’elle paroît au-travers d’un bon
microfcope ; 4 B en eft la peau, 48 C D l'écorce, 00 0
le parenchyme des veflies ou vaifleaux de la feve; 4 J eft un
cercle de vaifleau d’une efpece particuliere ; P P font les
conduits ordinaires de la feve ; C D F la fubftance du bois
detrois ans, À LFE le bois de deux ans, MNFEF le
bois d’un an, XX les infertions parenchymeufes , O la
moelle pleine de veficules : les parties noires font le bois fo-
lide ; le grand nombre de trous qu’on y apperçoit , font les:
embouchures des conduits à air.
La feve nourriciere monte la premiere année de la naif-
fance d’une plante , par les vaifleaux de la moelle, après
quoi la moelle devient feche , & continue toûjours à le de-
venir de plus en plus. 2°. La partie fuivante , à-travers la-
quelle la feve monte, eft le bois ; c’eft par les conduits à air
qu'elle pañle , & ce n’eft que dans la faifon du printemps.
3°. La troifieme partie par laquelle la feve monte dans la
plante, eft l'écorce, & cette opération fe fait la plus grande
partie de l’année.
Ceux qui voudront un plus grand détail fur cette matiere,
doivent confulter l'ouvrage du Doéteur Grew , dont j'ai tiré
ce que je viens de rapporter, & la ftatique des végétaux
par M. Hales.
CEE A PAL ES ROUE NULS
Des Sels en général.
P ERSONNE ne contefte, à ce que je crois, qu'ilne fe
[rencontre des Sels dans tous les corps, & que les diffé--
rentes figures & les diverfes impreflions de ces Sels occafion-
nent des changemens furprenans dans les fluides aufli- bien
que dans les folides , dans les corps animés 8 dans ceux qui
font inanimés. Les particules falines venant à frapper lse
nerfs des animaux , excitent la fenfation du goût & de l’odo-
rat; & comme la forme & le degré d’impulfon de ces Sels:
D'HISTOIRE NATURELLE. 35
fe diverffent prefqu’à l'infini, fuivant le plus ou le moins
de délicatefle des organes fur lefquels ils agiffent , il eft donc
d’une très - grande conféquence de découvrir ce que nous
pourrons fur la nature de ces Sels.
Le microfcope fait connoître que le piquant du vinaigre
eft occafionné par une multitude de Sels longs, ayant quatre
angles, qui flottent dans cette liqueur. Chacun de ces Sels
s'éleve en pyramide dans fon milieu , & il a deux bouts ex-
trèmement pointus. On ne peut pas découvrir ces Sels faci-
lement , parce qu'ils font extremement petits, à moins que
l’on n’expole à l’air une goutte ou deux de vinaigre , pour
que la plus grande partie en foit évaporée avant d’eflayer
de les examiner.
On voit dans la Planche 14, figure 1 , la figure des Sels
du vinaigre.
Si on fait infufer des yeux d’écrevifle dans le vinaigre ,
lorfque la fermentation fera ceflée, & qu’on examineles Sels,
on les trouvera tout changés ; les pointes fembleront rom-
pues , & ils paroïtront avoir différentes formes quarrées ,
telles qu'on les voit repréfentées dans la figure 2.
Les différentes efpeces de vins donnent des Sels de forme
différente ; il y en a qui reflemblent à ceux du vinaigre,
mais ils n’ont pas les pointes fi aiguës : les uns ont la forme
d’un batteau , les autres celle d’un fufeau. 11 y en a qui ref-
femblent à la navette d’un Tiflerand , d’autres font quarrés,
&tc.
On a repréfenté dans la figure 3, a, &, les Sels du fucre
candi. ,
Pour extraire les Sels des végétaux , il faut faire brüler les
bois, les branches & les feuilles de quelqu’arbre ou de quel-
que plante que ce foit, pour les réduire en cendres : on fait
enfuite pafler de l’eau au-travers de ces cendres. Cette eau
étant filtrée, on la met évaporer dans un lieu frais, & les
Sels s’y formeront fuivant leurs différentes formes.
Pour tirer les Sels des métaux & des minéraux, il faut
les faire rougir au feu & les éteindre dans l’eau ; filtrer cette
eau, la faire évaporer , & enfuite cryftallifer.
De fort jolis Sels à obferver , font ceux de la potañle d’An-
E ï
36 OBSERVATIONS
gleterre & de celle de Mofcovie ; le Sel d’abfinthe, le Sel
ou fucre de faturne , le Sel de tartre, le Sel ammoniac, le Sel
d’ambre , &c. On examinera d’abord ces Sels lorfqu'ils font
fecs, & enfuite lorfqu’on les aura fait difloudre ; pour avoir
le plaifir de les voir fe former fous les yeux.
Les Sels qu’on trouve dans tous les corps qu’on analyfe
par le feu, peuvent être confidérés comme autant de petites
chevilles ou de clous qui pénetrent & s’infinuent dans les
pores des autres corps, & qui collent enfemble leurs par-
ties : mais comme les chevilles ou les clous, lorfqu'ils font
trop gros & en trop grand nombre, fervent feulement à fé-
parer & à déchirer les parties des corps , de même les Sels
peuvent fouvent percer, divifer & difloudre , au lieu de
joindre & de raffermir. Les Sels font véritablement de fim-
ples inftrumens qui ne peuvent pas plus agir d'eux-mêmes
{ur les corps , qu’un clou ne peut agir s’il n’eft chaflé par le
marteau. Les Sels font chaffés dans les corps ou par la pref£
fion des autres corps, ou par le reflort de l'air qui agit fur
eux. De même que les Sels entrent dans les pores de tous les
corps , l’eau pareillement s’infinue dans ceux des Sels; elle
en détache les particules , les fépare, & elle les foûtient fuf-
pendues dans fes interftices ; jufqu’à ce que les particules de
l'eau fe trouvant en repos, les Sels fe précipitent & fe réu-
niflent en mafle : par ce pouvoir de diffolution qui fe trouve
daus l’eau, elle devient le véhicule des Sels , & elle les in-
troduit dans les pores des corps, où elle les abandonne pour
y agir fuivant leur deftination.
On peut aufli , par le moyen du microfcope , découvrir
quelles efpeces de Sels fe rencontrent dans les eaux minéra-
les ; ce qui peut nous faire juger dans quelles occafions ces
eaux peuvent être employées utilement.
: Les quatre efpeces de Sels fofliles les plus connus, font
le vitriol, l’alun, le falpetre , & le Sel marin, auxquels on
en peut ajoûter un cinquieme qui el moins connu, quoi-
qu'il foit plus commun qu'aucun autre; fçavoir le Sel de
chaux.
Le vitriol eft produit par des marcaflites ferrugineufes,
Lorfqu'il eft à fon point de maturité & de perfeétion , fes
D'HISTOIRE NATURELLE. 37
cryftaux font toûjours pointus à chaque bout ; ils font com-
polés de dix plans dont les côtés font inégaux , c’eft-à-dire
que les quatre plans du milieu font pentagones , & que cha-
que pointe eft compolée de trois plans triangulaires, tels
u’on les voit repréfentés dans la figure 4.
L’alun brûlé & diflous dans de Feau , que l'on fait filtrer
enfuite , donne des crityaux dont le haut & le bas font deux
plans à fix angles ; leurs côtés paroiflent compofés de ttois
plans qui ont aufñ fix angles, & de fix plans quadrangulaires,
lefquels font placés alternativement ; de forte que chaque
cryftal parfait et compoié de onze plans, fçavoir cinq fexan«
gulaires, & fix quadrangulaires , tels qu'on les voit fig. 5.
L'eau des fources falées, ou Sel gemme, donne des cryf
taux dont la forme eft parfaitement cubique : il y a un des
plans quidans le milieu paroît avoir une partie plus brillante,
comme sl y avoit quelque chofe de manque en cet endroit ;
les cinq autres côtés font blancs & folides , fig. 6.
Si l’on fait bouillir de l’eau de mer jufqu’à ficcité, & que
Pon en fafle diffoudre le Sel dans un peu d’eau , on aura aufli
des cryftaux cubiques ; mais ils ont une différence remarqua-
ble avec ceux du Sel gemme ; car dans les cryftaux du Sel
marin, tous les angles du cube paroïffent abattus, & les coins
{ont triangulaires , figure 1 1 au lieu que les cryftaux du Sel
gemme ont tous leurs angles aigus & parfaits, fig. 6.
Le nitre ou falpetre fe mer de lui-même en cryftaux qui
ont fix angles , ils font longs & déliés ; leurs côtés font des
parallélogrammes, dont un des bouts fe termine toûjours, foit
en prifme , foit en angle, fuivant la pofition des deux plans
inégaux ; l’autre bout eft toüjours raboteux , & il paroît
comme sil étoit rompu. Voyez fig. 7. a, b.
Le Sel foflile le plus général , quoique le moins connu
parmi nous, eft une efpece de Sel de chaux que l’on tire du
mortier des anciennes murailles ; fes cryftaux font longs &
déliés ; leurs côtés font formés de quatre parallélogrammes
inégaux ; un de leurs bouts eft formé de deux plans dont les
côtés font triangulaires ; l’autre bout fe termine en deux
plans quadrangulaires, quoique ces deux bouts fe trouvent
rarement fans être rompus, Il y a de ces cryftaux qui fe
38 OBSERVATIONS D'HisT. Nar.
trouvent quelquefois avoir cinq côtés; toutes les variétés
qui s’y peuvent rencontrer , font repréfentées fig. 8. a, b,
<ydije; fs, 2
Le vitriol imparfait, & qui n’a point encore acquis toute
fa perfettion , eft un Sel blanc , dont les cryftaux font des
cubes rhomboiïdes, comme on les voit repréfentés fig. 0.
Les cryftaux du Sel des fources falées , qui ne font pôint
encore à leur maturité & à leur perfeétion , font.de la forme
qui eft repréfentée dans la figure 10. a, 6, c.
Les particules de chacun de ces Sels, foit en tombant les
unes fur les autres , foit en s’uniflant fur une même bafe, fe
forment en mafles qui font toûjours invariables , & elles con-
fervent toüjours une même figure réguliere , laquelle eft par-
ticuliere à chaque différente efpece de Sel: mais lorfqu’on
veut les examiner au microfcope , il vaut mieux que les
mafles {oient plus petites , leurs figures y étant toûjours plus
parfaites & plus diftinétes. cr
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OBSER VATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE;
AVEC LE MICROSCOPE.
SECONDE PARTIE
DU TOME PREMIER.
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OBSERVATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE,
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AVEC LE MICROSCOPE.
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SECONDE PARTHE.
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CHAPITRE PREMIER.
Des Angiulles, Serpens ou petits Vers que l’on trouve
dans le vinaigre.
SO E n'eft pas d’ ‘aujourd'hui qu'on eft afluré que le
Re
up contient en été beaucoup de petites Anguilles,
a 1]
2 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
«+ mais ce n’eft que depuis l'invention du Microfcope que l'on
_ s'eft apperçü que ces Serpens * ont une queue fort aiguë ;
& c’eit ce qui a donné occafon à plufeurs perfonnes de
croire que le vinaigre ne piquoit que par l’impreflion que
ces petits animaux faifoient fur la langue : mais les diverfes
. expériences que nous avons faites fur ce fujer, nous perfua-
. ‘:,dent que ce n'eft point à ces animaux qu'il faut attribuer
” Jacidité qui fe remarque dans cette liqueur, mais feulement
à fes parties invifibles , puifque nous avons vû de bon vinai-
… gre fans Anguilles. | FH
14 “Au commencement du mois d'Avril de l’année 1680;
nous iappérçumes aucun de ces infeétes dans du vinaigre
* qui'avoit été expofé au foleil durant quelques heures.
+ Vers la fin du mois de Juin de la même année, & tout
le refte de l'été, il étroit difficile de trouver dans Paris du
vinaigre dans lequel il n’y eût point d’Anguilles ; & cela fit
que bien des gens qui les avoient vûes dans nos Microfcopes,
difcontinuerent de manger de la falade. J’avois beau leur
dire qu’elles étoient environ cent mille fois plus petites
qu'ils ne les voyoient par ces inftrumens ; que la chaleur de
l'eftomac les faifoit mourir en un inftant ; & que puifqu'ils
avoient mangé de la falade jufqu’à préfent ; fans en avoir
reffenti aucune incommodité , ils pouvoient continuer fans
danger l’ufage d'une chofe qui leur faifoit plaifir : & quoi-
que toutes ces raifons leur paruflent aflez {olides & aflez
* Les conjectures, dit un Auteur
fameux, & les hypotheles que l’on a
formées fur la produétion, la généra-
tion, la ftruéture & l’ufage de ces pe-
tits animaux, ont été aufhi differentes;
& peut-être auf éloignées de la vé-
rité , qu'aucune qui ait jamais été for-
mée par le caprice, ou embraflée par
la crédulité des hommes ; maïs ces
conjectures, cette obfcurité & ces té-
nébres ont été bannies depuis qu'on a
découvert par le fecours des Microf-
cgpes,; non-feulement que ces petits
animaux exiftent, mais encore leurs
diflérentes figures & leurs diférens
degrés de mouvement. James.
convain-
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. I. 4
convaincantes pour les tirer de l'erreur où ils étoient ; la
plüpart ne pouvoient comprendre que des ferpens qui leur
avoient paru plus gros que le doigt , & plus longs que le bras,
ne fiflent quelque mauvaife impreflion fur les membranes in-
terieures de l’eftomach.
Ce qui nous engagea à faire quelques experiences pour
feparer ces animaux d'avec le vinaigre , & le purger d'une
chofe qu’on s'imaginoit capable de nuire à la fanté.
La premiere experience que je fis fut de pañler le vinaigre
au travers d'un tamis aflez fin; mais je connus que les petites
anguilles pañloient aufli avec la liqueur.
2°. Je fis chauffer du vinaigre fur le feu fans le faire boüil-
lir ; toutes les anguilles perirent fans que la force du vinaigre
fut confiderablement diminuée. |
3°. J'expofay encore de cetre liqueur durant deux heures.
au Soleil , & la même chofe arriva , de maniere qu'au bout
de quelque tems la plus grande partie de ces animaux furent
précipitez au fond de la bouteille.
Enfin faifant pañler le vinaigre au travers d’un papier
broüillard , ou d'une chaufle , l’on aura tout d'un coup la li-
queur comme on la veut.
Les animaux dont nous parlons fe multiplient , & groffif-
fent en peu de tems jufqu’à un certain point; & on remarque
que l'air leur eft fi néceflaire , qu'on les voit s’'amañler en
beaucoup plus grand nombre vers la fuperficie de la liqueur,
que par tout ailleurs; & s'ils defcendent quelquefois au fond
du vaifleau , ils remontent bien-tôt aprés jufqu'au haut pour
y refpirer.
Si l'on prend deux bouteilles au commencement du mois
de May, & qu'on les remplifle d’un vinaigre pur , bouchant
l'une des deux bouteilles , & laiflant l’autre ouverte, on ver-
ra dans la fuite des anguilles dans celle-cy , & point dans
l'autre , au moins pendant cout le rems qu’elle aura été bien
bouchée.
Ceux qui croyent que toutes les generations fe font par
les œufs , difent qu'au commencement des chaleurs certains
petits animaux imperceptibles à nos yeux, qui volent ou na-
gent dans l'air , étant conune attirez par les parties fpiritueu-
Planche 1.
4 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
fes qui sexalent continuellement du vinaigre, laiflent tom-
ber des œufs dans cette liqueur, où recevant. une chaleur
moderée , & caufée par une douce fermentation , ils y peu-
vent éclore , & fournir ainfi en peu de tems les petits ani-
maux dont Je parle.
Cette maniere de faire naître les anguilles du vinaigre ,
ne s'accorde pas avec ce que deux de mes amis ont obfervé
dans quelques petites gouttes de vinaigre mifes dans un Mi-
crofcope ; ni avec ce que j’ay vü dans deux femblables expe-
riences , dont je parleray à la fin de cette feconde Partie,
où Je rapporte exaétement les obfervations que Jay faites fur
eux petites anguilles qui alloient & venoient dansles corps
de leurs meres.
Cela fuppofé, il ne paroît pas qu'on puifle rapporter l’ori-
gine des anguilles du vinaigre à aucune corruption qu'on
pourroit fuppofer y étre furvenuë , puifqu'on ne trouve en
cette liqueur aucun changement fenfble , foit avant ou aprés
leur naiflance.
Monfieur Amontons , de l'Academie Royale des Scien-
ces, m'apporta un jour une petite bouteille de vinaigre dif-
tilé , qui étoit d’une force extraordinaire , & qui contenoit un
nombre prodigieux de petites anguilles d'une tres -grande
vivacité. Je confervay cette liqueur durant quinze mois ou
environ , fans boucher la bouteille ; de forte que s'étant éva-
porée , il ne refta pius au fond de cette bouteille qu'un fedi-
ment fort épais, & d’une odeur affez defagréable.
Ces animaux meurent fouvent d'une efpece de paralyfie
qui attaque d’abord une partie de leurs petits corps ; fouvent
auffi on voit qu’elles en guériflent en peu de tems , particu-
lieremenc durant les chaleurs de l’efté , pourvû que la tête ne
foit pas attaquée de cette maladie.
Il eft affez rare de voir vivre ces anguilles durant une an-
néc entiere; foit parce qu'elles manquent de nourriture , foit
parce qu’elles ne refpirent pas un air aflez chaud , où elles fe
confervent bien mieux qu'elles ne font ailleurs.
En À, on voit deux de ces anguilles fisurer enfemble , de
telle maniere qu’elles s'accordent à faire des ondulations
pareilles; on en voit même quelquefois jufqu'à cinq fe mou-
voir ainf{i. M
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. I. s
En B,B,B,B, on en voit quatre autres courbées diver-
fement , & qui fe débandent avec autant de virefle que fe-
roit un reflort de pendule qu’on auroit plié de mêime qu’elles
le font. sn
En Cil s’en voit une dont la queué eft divifce en deux par-
ties ; ce qui eft firare, qu'en plus de 36. années d'obierva-
tions, je n'en ay vü que deux à la queué fourchuë.
Celle qui eft marquée D, à la bouche toute ronde de mé-
me que les précedentes , quoy qu'elles ne foient pas repre-
fentées de même. On a jugé à propos d'en varier ainf les
defleins , pour fatisfaire ceux qui fe perfuadent que ce font
veritablement des ferpens. Comme ces anguilles font d’une
vivacité extraordinaire , & qu'elles fe mouvent avec beau-
coup de vitefle , on eft oblige d'attendre qu’une bonne par-
tie de la liqueur que l’on met fur le concave de verre foit
évaporée ; afin que leur mouvement foit confiderablement
rallenti , pour appercevoir leur bouche , & plufieurs autres
circonftances particulieres qu'on remarque en ces petits
poiflons.
Le peu d’étendué qu’à cette Planche ne m'a pas permis
de les reprefenter de la grofleur ni de la longueur que Je les
ay vüés & fait voir à des perfonnes qui en ont été effrayées.
Je ne la détermine point icy cette groffeur ; car cela dépend
du foyer de la lentille dont on fe fert pour les obferver.
Quelque attention que j'aye pü donner à obferver la tête
de ces anguilles pour en découvrir les yeux, Je n’ay jamais
pô en venir à bout, foit à caufe de leur pctitefle, ou à caule
que la liqueur venant à s'épaiflir & à fe deflécher , elle les
couvre & y forme un voile qui ne permet pas qu'on les ap-
perçoive au travers : je fuis cependant tres-afluré qu'elles
en ont; car les détours qron leur voit faire pour s'éviter les
unes les autres , ne permettent pas d’en douter un moment.
Si l’on veut conferver les anguilles du vinaigre durant plus
d'un an, il faut avoir foin de remplir la bouteille où elles
font , à mefure que l’évaporation s'en fait.
Il eft tres-rare de voir dans le bon vinaigre d’autres ani-
maux mélez avec les anguilles; mais on en trouve aflez fou-
vent dans les vinaigres corrompus ou gâtez , & même en
bi)
6 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
tres-grand nombre, particulierenient fi l’on y mêle beaucoup
d'eau commune, & qu'on le garde débouché durant pe
femaines ; & ce qu'il y a de particulier à obferver eft, que fi
l'on ajoûte une tres-petite goutte de vinaigre ordinaire avec
celuy où il fe trouve de ces animaux, ceux-cy periflent en
un inftant, & les premieres anguilles fubfiftent , & même elles
paroiflent avoir plus de vigueur qu'elles n'en avoient aupa-
ravant.
On verra dans la fuite de cette feconde Partie beaucoup
d’autres anguilles , qui ont pris naïflance dans des infufions
toutes differentes les unes des autres , & qui {ont d'une autre
nature que celles du vinaigre, |
Enfin nous avons encore obfervé que les anguilles du vi-
paigre fubfiftoient dans une infufion de poivre en grain mis
dans de l’eau commune ; & que les animaux de cette infu-
fion meurent tout fubitement étant mêlez avec quelque peu
de vinaigre,
Se
C'HAP TER EM ET:
Dn vinaigre commu,
Es Vinaigriers font un fi grand myftere de la maniere
de faire le vinaigre , qu'ils ne l'enfeignent à leurs ap-
prentits qu'au bout de fept années. Peut-être fera-t’on fur-
pris de ce qu'ils en ufent ainfi , lorfqu'on fçaura le peu de
précaution qu'il faut prendre pour faire de bon vinaigre ; car
il fuffit d’'échauder un baril neuf avec de l’eau commune tou-
te boïïillante , & de mettre en fa place , le plus vite qu'il eft
offible , le meilleur vin qu'on puifle avoir , & quelque peu
de fel; car c'eft principalement de la bonté du vin que dé-
end celle du vinaigre.
11 faut obferver que le vinaigre fe perfeétionne mieux & fe
fait plus promptement quand le vaifleau eft dans un lieu
chaud & débouché , que lorfqu'on le tient bouché & dans un
lieu froid : on aura ainfi au bout d’un mois ou deux d’excel-
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. IL …
lent vinaigre ; & pour l’entretenir il faudra avoir loin de rem-
plir de bon vin le même vaifleau , à mefure que j'évaporation
ou la confommation s’en fera.
Si l'on veut que le vin s’aigrifle promptemenc, il faut met-
tre le baril dans un lieu chaud , & y mêler de tems en tems
la partie la plus claire de la lie du vin, tirée par expreflion.
Monfieur Hombert , de l'Academie Royale des Sciences,
a propofé une maniere nouvelle de faire du vinaigre avec du
bon vin, la plus prompte de toutes : elle confifte à attacher
une bouteille , ayant environ les deux tiers de fa capacité
pleine de vin, à un cliquet de moulin : les frequentes fecouf-
fes que la liqueur y reçoit brifent tellement fes principes , &
ce qui luy donnoit de la douceur , qu'elle devient en peu
d'heures un vinaigre tres-fort, qui fe garde long -tems dans
le même état.
GAP L'ÉICEN. LIT
Des cuinaigres compofex.
Ous les vinaigres compofez fe préparent , en y ajoû-
tant feulement des rofes , ou des fleurs de fureau , de
l'ail, ou de l'eftragon, &c. avec quelques clous de gerofles,
& un peu de poivre , fi on l'aime.
Cette compofition donne de l'agrément à ces vinaigres ;
mais elle ne les rend pas exempts de la produétion des an-
guilles ; tout au contraire, j'en ay plus trouvé dans ces fortes
de liqueurs compofées, que dans le vinaigre commun,
b üf
8 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
CHAPITRE IN.
Nouvelles obfervations fur les ançuilles du vinaigre ; faites
avec le Microfcope reprefenté en La Planche feptième.
E 25. Septembre 1710 , fur les neuf heures du foir, je
LL. une petite goutte de vinaigre , qui contenoit des
anguilles , fur un petit concave de verre qui fert de porte-
objet au Microfcope ; & je m'avifay de couvrir d’un petit
verre plan des deux côtez le deflus de ce concave , afin
d'empêcher l'évaporation fubite de la goutte de vinaigre ; ce
qui me réüflit parfaitement.
1°. Il fe forma d’abord au milieu du concave un petit cer-
cle d’air extrémement rond , qui n’occupoit qu'une partie
du petit enfoncement , dans lequel il ne parut aucune an-
guille.
2°, Toute la liqueur fe plaça dans une efpece de zone ;
comprife entre la circonference de cet air , & celle qui ter-.
mine le concave de verre : tous les animaux qu'on avoit mis
dans le concave, fe trouverent rangez dans cette zone com-
me dans une prifon.
3°. On apperçüt le lendemain, dans la même zone , un
grand nombre de petites boules de diverfes grofleurs , qui
paroïfloient ombrées & éclairées avec tant d'art, que plus
on les confideroit, plus on les adnuroit.
4°. La rondeur de ces boules , qui femblent être de fer ou
d'acier, paroît fi exacte , & leurs furfaces fi polies , qu'il fe-
roit impoñlible au plus habile ouvrier d'atteindre à une fi
grande juitefle. ff SE NU
Parmy toutes ces boules d'air, onen remarque qui ont
bien un pouce apparent de diametre, d’autres un demi pou-
ce; & encore de fi petites, que l’on a de la peine à les bien
diftinguer.
Quoyque ces boules n’ayent d’elles- mêmes aucune agita-
äon, on ne laifle pas d'y remarquer deux mouvemens parti-
Le à
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. IV. 5
culiers; celuy que la liqueur leur communique, & celuy qui
leur eft cauté par les allées & venuës des anguilles qui les
pouflent en les rencontrant; ce qui produit un fpectacle aflez
agréable , pour récompenfer du tems que l’on employe à les
obferver.
Les raifons de toutes ces chofes m'ont paru fi faciles à
trouver, que je n'ay pas crû les devoir rapporter. J’omet auf
plufieurs circonftances dont je ne dis rien , afin de donner
aux fpeétateurs la fatisfaétion de les découvrir.
_ Il y a cependant une remarque à faire, qui peut , ce me
femble , fervir à décider une queftion ; qui eft de fçavoir , fi
les objets que nous voyons dans tous les Microfcopes en ge-
neral , font apperçüs fimplement par une lumiere refléchie
de deflus ces objets; comme il arrive dans les Microfcopes
où l’on regarde les objets de haut en bas: ou fi on les apper-
çoit dans les Microfcopes à liqueurs , par les rayons qui les
ont traverfez fimplement , & qui paflant enfuite au travers
de la lentille , vont peindre leurs images fur la retine ; ou en-
fin fi on voit ces objets par des rayons de lumiere , qui n’ar-
sivent à l'œil qu'aprés avoir traverfé les objets, s'être reflc-
chis à la rencontre des parties folides de la lentille , & de
celles des corps qui les renvoyent à l'œil.
Pour réfoudre folidement toutes ces queftions , nous join-
drons les experiences de ce Chapitre qui les regardent avec
plufieurs autres que l'on verra à la fin de cet Ouvrage, dans
une Diflertation particuliere.
. En couvrant , comme J'ay dit, la petite goutte de vinaigre
qui fe met fur le concave , on pourra facilement tranfporter
le Microfcope ainfi préparé , & faire voir les boules d'air &
les anguilles quand on voudra.
Si pendant que l’on tient le Microfcope , & que l’on obfer-
ve ce qui s'y pañle , on vient à le tourner rondement avec les
doigts & avec aflez de vitefle , les boules d’air feront apper-
çûës s’y mouvoir d'un fens tout oppolé ; ce qui doit néceflai-
sement arriver : car puifque le volume d'air qui compofe
chaque boule , eft plus leger qu'un égal volume de la liqueur
où elle nage , il s'enfuit que ces boules d’air doivent être re-
pouflées vers le lieu d’où ce mouvement circulaire les éloi-
gnoir,
Yo DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Le tranfport qui fe fait du Microfcope , fert à multiplier
le nombre des boules , en diminuant leur grofleur par l'agi-
ration qu on leur donne.
Quand la chaleur diminué fenfiblement , on apperçoit que
le mouvement des anguilles diminué aufli ; de forte que le
matin elles fe remuent plus difficilement que vers le refte du
jour ; ce qui vient fans doute de la réfiftance des parties du
liquide où elles nagent , qui fe trouvent differemment agi-
tées en differentes parties du jour , & du plus ou du moins
de fouplefle des organes deftinces au mouvement de ces pe-
tits animaux.
Quand j'obferve dans ce Microfcope les petits globules
qu'une pierre à fufil vient d’arracher d'un morceau d'acier
par un mouvement tres- violent, ils me paroïflent clairs &
lumineux du côte qui fe prefente à mon œil , en les regardant
à la lumiere d’une chandelle, quoyqu'ils foient d'eux-mêmes
tres-opaques : d’où je conclus, que c’eft par refléxion qu'on
les voit ainfi dans ce Microfcope à liqueurs , de même qu'on
les verroit avec un Microfcope à deux ou à trois verres, s'ils
y étoient regardez comme on y regarde ordinairement les
objets.
Pour comprendre comment fe forment les globules d'air
qui s'obfervent dans la petite portion de vinaigre où fe trou-
vent les anguilles ; il fufira de remarquer que le verre plan,
& le verre concave qui.en eft couvert , ne Îe touchent pas fi
parfaitement , qu'il ne s'échape d'entreux peu à peu quel-
ques particules de la Hiqueur qui déterminent une égale quan-
tité d'air à s'infinuer dans le lieu qu'elles abandonnent ; &
cet air fe trouvant là également preflé de toutes parts , eft
contraint de prendre la figure d’une fphere , tres-petite d'a-
bord , mais qui groflic en peu de tems, par l'addition de plu-
ficurs autres qui fe joignent enfemble , par le mouvement
continuel des anguilles de ce vinaigre qui les pouffent l’une
contre l'autre , & qui fouvent eft allez confiderable pour dif-
fiper les plus gros de ces globules.
Nous n'avançons rien icy qu'on ne puifle obferver avec at-
tention ; mais 1] eft à propos d'avertir que toutes ces circonf-
ances ne fe manifeftent pas en un moment , & que ce qui ne
fe
gT AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. IV. 11
fe peut appercevoir dans un tems » fe pourra remarquer dans
un autre.
L'efpace du concave terminé par la petite circonference
de la zone , ne contient ordinairement que de l'air, dont la
figure eft ronde en un fens, & platte en un autre. Cer air
s’y enferme naturellement, en y laiflant tomber le petit ver-
re plan des deux côtez, qui fert de couvercle au concave ;
& ilne fe crouve dans le milieu ni liqueur , ni anguilles , ni
boules ; parce que cet air, par fa compreflion , les en a éloi-
gnez pour en occuper la place ; d'où il fuir que le vinaigre
qui l'environne doit comprimer ce peu d'air , & l'arrondir
comme on le voit. |
Le jour fuivant , à huit heures du matin, J'apperçüs deux
ou trois de ces anguilles dont le mouvement n'étoit pas bien
libre; leurs corps paroiïfloient roides, comme fi elles euflenc
été attaquées d'une efpece de paralyfe : enfuite la chaleur
de ma main ayant un peu échauffé Fair qui les environnoit,
& La Hiqueur où elles nageoïent ; la maladie fe difipa , elles
reprirent vigueur , & enfin on leur remarqua autant de force
& de fouplefle qu'aux autres.
J'obfervay aufli en même rems que le nombre des globules
d'air s’y écoit multiplié durant la nuit, & qu’une anguille
ayant ébranlé la plus grofle , l'avoit diflipée en des particu-
les invifibles. Une heure après il fe produifit dans la liqueur
une fort grofle boule d'air , qui comprimoit celuy qui étoit
au milieu du concave , en s y enfonçant à proportion de fa
rofleur. CN ME
Le lendemain environ à pareille heure , j'obfervai les an-
guilles qui fe tranfportoient aflez librement dans cette li-
queur , accompagnées d’une vingtaine de tres-belles boules
d'air, dont le tiers me fembloit avoir environ fept à huit li-
gnes de diametre, & les autres plus petites, ne paroiïffant
avoir au plus qu'une demie ligne chacune.
Pendant que l'on obferve toutes ces chofes à la lumiere
d'une bougie , fi l’on frappe du doigt la partie exterieure du
Microfcope qui porte les objets, on s'apperçoït fouvent qu'il
vient du dehors de tres-petites boules d'air qui s’introduifent
dans la zone , en fe gliflanc entre le porte-objet & le petig
(3
12 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES.
verre qui fert à le couvrir ; d'où l’on doit conclure qu'il fort
néceflairement de cette zone tout autant de liqueur qu'il y
entre d’air groflier. Mais fi l'on donne encore quelques pe-
tics coups à la piece du Microfcope dont Je viens de parler,
pour y faire entrer davantage d'air , il n'y en entrera pas ;
parce qu'alors tout eft plein, & qu'il faut donner le tems à
quelque nouvelle portion de la liqueur de s’évaporer, pour
faire place à de nouvel air.
Le premier & le fecond Oétobre je m'appercûs que la li-
queur s'étoit épaiflie , que l'efpace circulaire du milieu du
concave s'étoit augmenté , & que les anguilles avoient plus
de difficulté à s’y mouvoir. Le troifiéme , de cinq anguilles
qu'il y avoit encore en vie le fecond , il ne s’y en trouva plus
qu'une feule vivante , qui mourut le même jour troifiéme à
midy. Ainfi ces animaux ont demeuré en vie neuf jours du-
rant enfermez dans cette zonc.
Jay réiteré plufieurs fois ces mêmes experiences, & j'y ay
toujours remarqué à peu près les mêmes chofes. Toute la
difference la plus remarquable que j'aye obfervée dans une
même quantité de vinaigre, a été l'inégalité de tems qu’elle
a employée à s’évaporer entierement ; une de ces gouttes
ayant été évaporée en neuf jours , une autre en douze, &
une autre en quinze , felon le degré de la chaleur de l'air,
de la faïfon , & du lieu où étoir le Microfcope durant ces
experiences,
CHAPITRE.
Obférvations faites Jur plufieurs fortes d'infufions de poivre er
grain » mi à froid dans de l'eau commune.
L y a au moins trente-huit ans que Monfieur Hartfoeker
apporta, de Hollande en France , un nouveau Microf-
cope à liqueurs , monté d’une feule lentille foufflée, avec le-
quel il nous fit remarquer qu’en mettant infufer à froid des
grains de poivre noir dans de l'eau commune , on y voyoie
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. V. 1;
au bout de quelques jours un nombre innombrable de petits
animaux, qui nous ont donné occafion d'obferver pluficurs
chofes tres-fingulieres que nous n'avions point encore vüés.
Premierement, par le moyen de cette lentille de verre,
on a vü des animaux de couleur d'or pâle , à peu près de la
grandeur & de la figure qu’on les voit reprefentez dans cette
Planche , aux endroits Marquez D, DK FLO "RE. EL,
avec de petites taches plus tranfparentes que le refte de leur
corps.
2°. La figure ovale & réguliere fous laquelle ces animaux
paroiflent ordinairement , & leur mouvement rapide , ne
permettent pas de déterminer d’abord l'endroit de leur corps
où eft la tête ; mais avec un peu de patience on le découvre
bien-tôt, par la direction fuivant laquelle ils continuent à fe
mouvoir. D'ailleurs, la liqueur où ils nagent s'épaiflifiant in-
fenfiblement par l’évaporation de fes parties les plus fubriles
& les plus agitces, fait diminuer peu à peu la vitefle de ces
poiflons ; & c'eft alors que l'on peut à loilir obferver plufieurs
chofes , qui donnent occafion d'admirer la fageñle du Créa-
teur jufques dans la moindre partie des petites créatures que
nous entreprenons de décrire.
3°. On s'apperçoit que deux des animaux de cette infufion
avançant directement, l'un de À en B, & l’autre de Cen D
s'en retournant , le premier fuivant la ligne pon&tuée BE,
& le fecond de D en F.
49. Jay quelquefois obfervé que deux de ces poiflons ,
après avoir parcouru l'un la ligne G H , & l’autre la ligne
TK , laïflent entr'eux un efpace trop petit pour permettre à
un troifiéme marqué L, de le traverfer ; celuy-cy pris &
ferré contre l'un & l’autre, s’allonge en fe courbant pour {e
fauver vers M.
s°. Il y en a qui après avoir parcouru une ligne droite ;
comme NO, tournent fi vite autour du point O, où eft la
tête , que leur figure ovale femble devenir circulaire , après
quoy ils s’élancent vers p avec une promptitude extrême, Et
l'on en remarque auffi d'autres, qui après avoir parcouru une
ligne droite , femblable à QR , tournent fur leur centre de
grandeur & de pefanteur marqué R, traçant ainfi un grand
ci
Planche 2,
14 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
nombre de circonferences de cercles concentriques les unes
aux autres ; puis s élançant avec une vitefle extraordinaire ,
on les voit parcourir une autre ligne droite marquée ST.
Voilà ce que nous avons remarqué de plus confiderable dans
la premiere infufion , dans laquelle il ne paroïfloit que des
Ovales ; c'eft ainfi que je nomme ces poiflons : & voicy ce
qui nous a paru dans une feconde , obfervée avec des lentilles
travaillées à la main, & taillées au tour , qui eft la maniere
de les faire beaucoup plus parfaites que les précedentes.
La premiere figure reprefente un poiflon, que je nomme
la Poule hupée, dont la tête eft garnie de poil au lieu de plu-
mes : fon mouvement le plus ordinaire éroit circulaire. Ce
poiflon eft le feul que j'aye vû dans cette infufion, & je n’en
ay jamais apperçû de pareil dans aucune de celles que j'ay
préparées,
La feconde efpece de poiflon , reprefenté à l’endroit mar-
qué 2 , font des animaux que je nomme Cornemufes argen-
tes , & dont je parleray dans la fuite de cette Hiftoire.
La troifiéme , eft une grofle araignée aquatique , dont la
bouche s'ouvre aflez grande pour engloutir les cornemules
précedentes. :
La quatriéme figure reprefente deux de ces araignées ac-
gouplées , qui tournent enfemble fur leur centre commun de
pefanteur, ‘
La cinquiéme figure en reprefente deux autres aufli accou-
plées , mais dont le nager s’execute en ligne droite. Nous
décrirons plus exaétement ces grofles araignées aquatiques
vers la fin de cette feconde Partie, en parlant des animaux
que nous avons vüs dans une infufñon dun peu d'écorce de
bois de chêne, qui porte le gland.
La fixiéme figure reprefente un autre poiflon , dont le
corps eft à peu près femblable à la navette d’un Tiflerand,
Il à de grands poils au derriere qui luy fervent de nageoires,
Enfin au-deflous de l'endroit marqué fept, on y a repre-
fenté une fourmiliere de petits infectes de diverles figures &
groffeurs qui viennent de naître, & qui fervent ordinairement
de nourriture aux plus gros, |
gt AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. V. 15
Du poivre blanc.
D ; 4
poiflons d’une grande beauté ; mais ce ne fera peut-
être pas en aufli peu de jours que les précedens. Les grofles
cornemules de cette infufion avancent & reculent prefque
également pendant leur nager. Peu de tems avant que la li-
queur où on les voit foit totalement defléchée , on s'apper-
çoit qu'elles deviennent plus grofles qu'elles n’étoient aupa-
ravant; & dans ce moment-là on a le plaifir d'obferver un
bon nombre d'œufs dans leurs corps ;, & de remarquer qu'un
moment après qu'elle eft defléchée , leurs corps changent
tellement de forme, qu'ils ne paroiflent plus que comme une
mafle confufe , à caufe de leur grande délicatefe.
| E poivre blanc en grain mis en infufon , produira des
Du porvre long.
Ne infufon de poivre long mis en entier dans de
l'eau commune , ne donnera pas moins de fatisfaction
que les deux précedentes; car dans les premiers mois cette
infufion eft fi nette , qu'elle facilite le moyen de découvrir
jufqu’aux parties interieures des poiflons que l'on y trouve
en grande quantité : & ce qui merite quelque attention, eft
que cette infufion, ni les deux précedentes , n'exalent au-
cune mauvaife odeur, quoy qu'elles foient confervées en ex-
perience durant plus de quatorze mois. On trouve quelque-
fois dans cette infufion , un peu vieillie , des animaux que
nous avons nommez Chenilles aquatiques ; & de nouvelles an-
guilles , plus groffes & plus courtes que celles qui fe voyent
ordinairement dans le vinaigre ; mais elles n'y vivent pas fi
long-tems à beaucoup prés.
En confervant ces infufions le plus de tems qu'il eft pofli-
ble , & en les réïterant dans des faifons & dans des années :
differentes , on apperçoit des animaux differens de ceux qui
font reprefentez dans cette Planche.
Nous finirons ce Chapitre , en avertiffant que ces poiflons
foutiennent les rigueurs d'un hyver tres-rude & tres-long ,
c ü
36 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
& qu'ils fe confervent en vie au-deflous d’une glace d’envi-
ron deux lignes d'epaifleur ; car à mefure que la furface de
l'eau du vaifeau fe géle , les poiflons s'y enfoncent davan-
rage. Mais fi vous faites fondre cette glace , & que vous
gardiez cette infufion , vous y verrez ces poiflons , au bout
d'environ quinze jours d'un tems plus doux , en beaucoup
plus grand nombre qu'ils n'y étoient avant que cette eau fut
gelée.
CHAPITRE VL
Obférvations faites durant une année entiere, de ce qui s'eft
trouvé dans une infufion à froid de fené.
Nviron le 15. Juillet de l'année 1710. je mis infufer à
froid une bonne pincée de feüilles , de queuës & de
branches de fenc ; & je m'apperçûs qu'au bout d'environ huit
jours al y avoit dans cette liqueur quantité de tres -petits
corps longuets , feparez les uns des autres fans fe toucher ;
& fans avoir d'autre mouvement que celuy qu'ils pouvoient
avoir receu de la liqueur où ils étoient. Et par plufieurs obfer-
vations que jen ay faites à diverles reprifes , je me fuis per-
fuadé que ces corpufcules , que vous voyez en À de la troi-
fiéme Planche , n’étoient autre chofe que de tres-petites
parcelles de l'écorce des branches du fené, & non pas les
parties des fels contenuës dans ces chofes , comme le vouloit
un Medecin à qui je les fis voir ; parce que les fels diffous
dans autant d’eau qu'il y en avoir, ne s’y font point apper-
cevoir , non plus que les parties de l'air qui font éparfes dans
cette infufion.
Tous ces petits corps étant devenus les uns plus pefans >
par l'union de quelques autres ; les autres plus legers+, par
leur divifion ; ceux-là fe précipiterent au fond de la carafte ,
& ceux-cy monterent à la furface de l’eau, pour y compofer
une pellicule épaifle , molle & opaque, fur laquelle je vis
paroître de petits vers blancs, aflez fenfibles aux yeux nuds.
ET AQUATIQUES. SECONDE ParTie. Chap. VL j7
Environ huit jours après ces vers difparurent , & je fus
aïlez furpris d'en appercéVoir de nouveaux , beaucoup plus
petits que les premiers : ces petits vers vivoient dans la fi-
queur , & nageoientun peu au-defilous de fa furface; j'en mis
un dans un petit Microfcope monté d’une feule lentille de
deux lignes de foyer : fa longueur m'y parut d'environ neuf
lignes : il étoit compofé en partie d'onze petits anneaux : fa
tére étoit ronde à fon extrémité ; & par l’autre bout {on corps
fe terminoit quelquefois par un plan perpendiculaire à fa
longueur ; & d'autres fois, par trois petites éminences arron-
dies ; de maniere que celle du milieu avoit quelque peu plus
de faillie que les deux autres.
I] paroïfloit au- deffous de fa peau un filer tres-blanc , &
ployc; de maniere que fes deux bouts finifloient vers la queué,
d'où ils s'étendoient en droite ligne vers la tête , où ce fil
étoit recourbé.
I M, reprefente le ver , dont la tête eft en I, & le derriere
en M.
Le fil dont je viens de parler eft vü en NO; & l'on re-
marquoit qu'il s’allongeoit & fe raccourcifloit alternative-
ment ; & par ces divers mouvemens il obligeoit les anneaux
de ce ver à s'approcher, ou à s éloigner un peu les uns des
autres. |
Une partie de la liqueur s'étant évaporée pendant plu-
fieurs jours , J’augmentay le refte par l'addition d'une eau
commune , ce qui détrempa tellement la pellicule qui s’étoic
formée à la furface de l'infufon, qu’elle fe précipita quelque
tems après au fond du vaifleau , ce qui rendit l'infufion plus
belle & plus tranfparente qu’elle n'étoit auparavant ; & me
donna en même tems occafion d’obferver un nouveau fpec-
tacle , dont je vais vous parler. Trois fortes de nouveaux
poiflons fe faifoient appercevoir dans la moindre petite
goutte que je mettois au Microfcope ; fçavoir de tres-pertits ;
des moyens & des gros. D,E,F, en font les Figures. Les
gros reflembloient aflez à une Cornemufe , chacun d'eux
ayant la tête recourbée , comme vous voyez en F ; j'y remar-
quois auffi deux mouvemens differens , l'un droit & l'autre
circulaire ; celuy-cy fe faifoit pour l'ordinaire de F par P &
Planche 3.
38 Des ANIMAUX AERIENS; TERRESTRES
Q. Ces deux mouvemens qui fe fuccedoient l'un à l’autre
étoient aflez {ents pour être facilement obfervez.
Dans la fuite , je découvris une fixiéme forte de poiflon ,
mais en petite quantité, dont la figure fe voit en G: ce poif-
fon ayant aflez de refiembiance à une carpe , peut être ainfi
nommé. Son mouvement s’executoit en ferpentant , décri-
vant une ligne courbe à peu près femblable à la ligne abcd,
pour arriver de a enr, où eft la tête.
Après plufieurs jours , il parut un autre poiflon affez fem-
blable au corbillon d’un Oublieur ; fans qu’on püt deviner de
quel côté étoit la tête, finon lorfqu'on le voyoit fe mouvoir ;,
parce que les extrémitez de fa longueur étoient en cout fem-
blables en apparence.
J'ay vüs ces poiflons fous les formes reprefentées au-def-
{ous des lettres K , L : le mouvement de ces animaux s’exe-
cute par ondulation, & aflez lentement.
Tous ces animaux , excepté les vers, mouroient dés que
j enfonçois dans la goutte de liqueur qui les contenoit , le
bout d'une plume trempé dans du vinaigre ; & cette infufonr
de fené ne faifoit pas e les anguilles du vinaigre le même
effet que ce vinaigre faifoit fur celles de l’nfufion. |
Les animaux de forme ovale , & de moyenne groffeur ;
s'accouplent comme les hannetons , & étant aïnfi attachez ,
le plus fort entraîne le plus foible d'une vitefle furprenante.
Ces poiflons ne s’éloignent pas du haut de ces liqueurs ,
parce qu'ils y refpirent de tems en tems un air qui leur con-
vient, & y trouvent plus de nourriture qu'en aucun autre en-
droit du vaifleau où ils font ; & s'ils defcendent en bas, ils
n'y reftent pas long-tems. On ne peut pas douter de ce que
j'avance à l'égard des anguilles du vinaigre ; & on le peut
tres-facilement obferver dans la bouteille où elles font , avec
une loupe.
Les animaux des autres liqueurs étant trop petits pour
être ainfi apperçüûs ; je me fuis avifé d’y enfoncer un petit
tuyau capillaire , ayant pris auparavant la précaution d'en
boucher le haut avec le pouce , que j'en Gtois lorfque le bout
inferieur étoit au fond du vaifleau ; je retirois enfuite ce
£uyai , aprés l'avoir rebouché , & je -mettois fur le porre-
objet
ÈT AQUATIQUES. SECONDE Parrie. Chap. VE 14
ébjet beaucoup plus de cette liqueur qu'à l'ordinaire , prife
au fond du vaïfleau qui la contenoit ; cependant je ne voyois
dans cette groffe goutte que quatre ou cinq animaux , au lieu
que fi y ‘cufle pris autant de la même liqueur au haut du vaif-
leau , jen eufle trouvé pcut-être cent fois davantage.
L'eau tiéde ne fait pas mourir en hyver les poiilons dont
hous parlons, au contraire ils femblent s'y mouvoir beaucoup
plus librement qu'auparavant; mais lorfqu elle eftun peu plus
chaude , ils y periflent tous. Il y à donc un certain degré de
chaleur qui les fait vivre, & un autre un peu plus fort qui
les tuë.
Le j0. Janvier 1711. j'obfervay une autre forte de poifions,
qui vinrent en aflez grand nombre dans cette infufion de fe-
né, dont le nager me parut fingulier ; car en avançant di-
rcétement , ils le balançoient à droit & à gauche , de même
que feroit un petit bateau conduit par le “fl d'une eau cou-
fante, pendant qu'un homme debout au milieu de ce bateau,
panchant tantôt d'un côté & tantôt d'un autre, le feroit ba-
fancer pour fe divertir.
J'ajoûtay de l'eau commune pour la feiziéme fois, afin d'en
augmenter le volume , & d'en diminuer l’épaiffiffement ie
fournir aufli en même tems quelque nouvelle fubftance aux
animaux qui s y trouvoient.
Je vis le lendemain que ces animaux s’y mouvoient beau-
coup plus vite qu'auparavant , & fans s’y balancer ; dont la
raifon ne peut, ce me femble , être attribuée qu'au plus de
facilité que ces poiffons trouvoient à diviler ce liquide.
Ce même jour-là , & le premier Février , Je remarquay
d’autres infectes fi petits, & fe iNoUvaNs fi vite, que je n'en
pôs découvrir la figure. Peu de jours après Jy Tan d'au-
tres poiflons femblables à celuy qu on voit en H: la tête finif-
foit prefque en pointe , & fervoit de gouvernail à tout le ref-
te de fon corps , qui s’accordoit parfaitement avec elle ; en
avançant aflez lentement, pour donner la facilité d’obferver
plufieurs chofes qui féoicne trop longues à décrire.
Enfin les grandes chaleurs qui furvinrent fur la fn du mois
de Juillet 1717, durant trois ou quatre jours ; firent mourir
prefque tous les animaux de cette infufion , qui avoit été une
20 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
année enticre en experience ; & dans le tems que je la vou-
lus fapprimer , je m'avifay d'en prendre encore une fois, &
de la mertre fur le porte- objet du Microfcope dont je nv'é-
vois fervi , afin de voir s'il y auroit quelque nouveauté ; & j'y
apperçüûs un ver compofé en partie de treize à quatorze an-
neaux, femblables chacun à un bourlet.
À B, eft fa longueur apparente. À , en eft la bouche toute
ronde , d’autour de laquelle partent trois filets qui s'étendent
d'une extrémité à l’autre, & qui en s’enflant & fe défenflant
font rentrer les anneaux les uns dans les autres , des extré-
mitez à &b, vers le milieu D ; & par cette méchanique ral-
longent & raccourciflent fucceflivement le corps de cet in-
fe&e. €, marque fa longueur vüé aux yeux nuds.
GHLAPETRE VIE
De l'eau qui [e trouve dans les buiffres à l'écaille , > de ce
que l'on y apperçoit en peu de jours ow d'heures ,
après être owvertes.
N fçaic qu'il y a des huiftres de diverfes efpeces , tres-
differentes les unes des autres, tant par le goût que
par la grandeur, & la compofition du corps de ces animaux.
L'huiftre dont nous parlons icy eft un poiflon de mer qui
fe nourrit entre deux écailles ; il eft fort eftimé d'un grand
nombre de perfonnes , & on le mange tout en vie. |
Ces huiftres jettent leur fray au mois de May, c’eft-à-dire
leurs œufs , d’où les petites huiftres doivent fortir. On à re-
marqué qu'au bout de vingt-quatre heures ces petites huif-
tres avoient de l'écaille , & que les meres font malades aprés
avoir bien frayé, n'étant bien guéries que vers la fin du mois
d’Aouît {uivant.
Monfieur Mery fameux Anatomifte, premier Chirurgien
de l'Hôtel-Dieu de cette Ville, & Penfionnaire de l’Acadé-
mie Royale des Sciences , lut en public un difcours tres-cu-
sieux fur les huiftres des étangs ; mais il manque à ce difcours
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. VIL 2:
les curieufes obfervations que nous avons faites fur ces fortes
d'huiftres ou moules des étangs , ou de ceiles qu’on trouve
dans les canaux de Seaux & ailleurs.
Samedy 15. Novembre 1710. à midy, je fis ouvrir une de-
mie douzaine d'huiftres , j'en mis l'eau dans un petit vetre à
boire , & je l'y laiflay repofer environ deux heures : cette
eau me parut trouble & d'une couleur de perle fine, ou ti-
rant plutôt fur la couleur du petit lait, & un peu plus épaif-
fe , portant au nez une odeur de marée. J'en oblervay une
tres-petite goutte avec differens Microfcopes à liqueurs , &
je n'y apperçüs rien de particulier qui merite d'être dit.
Je n'y découvris rien le fecond ni le troifiéme jour ; mais
le quatriéme au foir je commençay d’y voir une aflez grande
quantité de petites huiftres , belles, tranfparentes , & dont
quelques-unes n'avoient pasun mouvement trop rapide pour
m'empêcher de voir la tête & le refte du corps. Leur grof-
feur me parut avoir fait un grand progrès en peu de tems,
par rapport à celle des animaux que j'ay obfervez dans d’au-
tres liqueurs. En voicy une reprefentée en ab cd, dont a
eft la cêre, & b cd le refte du corps, qui n'étoit pas égale-
ment tranfparent. La forme de leur corps eft changeante ;
on les voit fe plier & replier en differentes façons : leur mou-
vement eft quelquefois dire&, & d’autres fois circulaire : on
les apperçoit fouvent s'entre-choquer , & par-là interrompre
leur courfe , tres-vite en plufieurs , & moins en d’autres.
Ces animaux étoient aflez gros dés le quatriéme jour de
leur naiflance , pour fe faire voir avec un Microfcope à trois
verres d'environ quatre pouces de hauteur , dont la lentille
objeétive n'avoit pas moins de cinq lignes de foyer.
Le cinquiéme & le fixiéme jour , je vis plufeurs de ces
animaux parfaitement en repos , de forte que je les crus
morts ; mais en continuant de les obferver, je fus détrompeé,
les voyant nager avec beaucoup de vitefle , les uns allans
d'un côté & les autres d’un autre , s'entre-frolant fouvent ,
& s’arrétant quelquefois pour un moment l'un contre l'autre;
puis étant écartez par d’autres qui faifoient effort pour paf-
fer entr'eux, & changeoient de figure fuivant leur maniere
de fe rencontrer , ou le retreciflement du lieu qu'ils vouloient
traverfer. | di
Planche 4
Figure 4°
2. Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
On s’apperçoit quelquefois qu'une de ces petites huiftres
pañle fur un groupe de plufieurs autres {ans les ébranler ; ce
qui marque qu'elles n'en font pas touchées , & qu’elles font
environnces d’aflez de liqueur pour faciliter le mouvement
de celles qui nagent par-deflus.
Ces animaux s'allongent & fe raccourcifflent confiderable-
ment; & même ils s'accouplent , comme on le peut voir en
a & c: ils fe mouvent ainfi accouplez d’a vers b, & de c vers
d , long-tems avant qu'ils fe feparenc ; de forte que le plus
fort entraîne le plus foible.
Ces petits animaux tournent beaucoup plus lentement que
ne font ceux de l'infufion du poivre en grains, ni même ceux
du fené. do,
Le mouvement circulaire des petites huiftres s'execute en
deux façons toutes differentes ;la premiere les fait voir tour-
nant autour de leur centre ; & la feconde les fait paroître
tourner comme fur un point qui feroit vers l'extrémité de
leur tète.
L'eau de ces poiffons fe trouve au bout de quelques jours
d'une odeur infupportable , mais dans la fuite elle s’adoucir
confiderablement ; & parce qu’elle eft falée naturellement,
il y avoit lieu de croire qu'elle fe conferveroit long-tems ; ce
qui n'eft pas arrivé. L’experience nous a appris que la feule
odeur du vinaigre eft un poifon qui tuë ces petites huiftres.
Quoyqu'on ne puifle pas voir les yeux de ces animaux , on
peut neanmoins aflurer qu'ils apperçoivent les objets qui fe
prefentent à eux ; puifqu'on remarque certainement qu'ils
s’en écartent en fe mouvant , & qu'ils font des détours tres-
frequens pour les éviter.
Le 2r. jé mis une grofle goutte de cette liqueur fur le pot-
te-objet du Microfcope , que je portay & rapportay de for
loin durant cinq heures au moins, qu'elle employa à s'évapo-
rer entierement ; pendant ce tems-là les petites huiftres
qu'elle contenoit firent l'admiration de plufeurs perfonnes À
qui je les montray.
Le 22. au foir je trouvay cette eau plus tranfparente qu'el-
le n'avoit été cy-devant , quoy qu'elle fut devenuë plus
épaifle , du moins elle ne s’erendoit pas fi facilement fur le
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap VIH, 23
porte -objet , qu'elle faifoit auparavant.
Je m'apperçûs d’ailleurs que la même’ eau avoit perduë
cetre odeur forte & defagréable qui s’y faifoit fentir dés les
premiers Jours; que les animaux s’y étoient confiderablement
multipliez ; qu'ils fembloient être devenus un peu plus gros
qu'ils n'étoient ; & enfin il ne m'en parut plus d'accouplez.
Le lendemain 23. J'oblervay encore les mêmes chofes , à
quoy l'on peut ajoûrer ces particularitez.
Que juique icy je n'ay vû dans cette eau qu'une feule ef-
ece d'animaux , prefque tous d'une même figure, & d’une
grofleur affez uniforme, fe mouvans tous d'une maniere aflez
égale.
Comme il eft difacile de porter, avec le plus petit bout
d'une plume à écrire , un peu de l'eau où nagent ces poif-
fons, fans enlever en même rems quelque petite portion d’u-
ne legere pellicule qui fe forme dés le commencement fur
cette liqueur ; on eff tout étonné de voir que cette parcelle,
prefque infenfible aux yeux nuds, paroït dans le Microfco-
pe d'une étenduë extraordinaire ; en forte ‘qu'elle reflemble
à une grofle mañle de rocher , chargée d'une multitude ex-
traordinaire de petites crearures.
Ces animaux femblent fe plaire davantage , & trouver
fous cette pellicule une nourriture plus propre à leur tempe-
rament que par tout ailleurs , vü le nombre prodigieux que
nous y appercevons: ils y fourmillent les uns fur les autres,
de maniere que cet endroit-là devient beaucoup moins tranf-
parent que les autres.
Le Samedy 13. Decembre 1710. il étoit refté tres - peu
d'huiftres vivantes , & même elles parurent diminuées de
groffleur. Le 16. je n'y en remarquay aucune ; ainfi mes pre-
micres obfervations fur ces fortes d’animaux-là, finirent.
Mais ayant prévû ce qui devoit arriver, javois déja mis
en experience de nouvelle eau ; deux jours aprés J'apperçüs
de ces animaux tout naïflans , qui paroifloient avoir environ
deux lignes de longueur & une ligne de largeur.
Le 16. & le 17. j'apperçüs ces huiftres en plus grand nom:
bre, & j'en vis quelques-unes fous la forme d’un huit de chif-
fre : c'éroient apparemment deux petites huiftres sep
d ii}
24 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
L'augmentation du froid, l’'épaiffiflement furvenu à cette
eau par l’évaporation des parties les plus fubtiles & les plus
agitées ; Joint à cela le défaut de nourriture , les fit enfin
perir environ le 30. Janvier 1711.
Dés ce même jour je recommençay pour la troifiéme fois
une femblable experience ; mais depuis ce jour-là jufqu'au
22. Février, je n'y apperçüs rien que je n’y eufle déja remar-
qué. En voyant dans la moindre goutte de cette eau un fr
grand nombre de ces poiflons , qu'il y en avoit , je ne püs
diftinguer les uns d'avec les autres , tant cette eau en étoit
obfcurcie ; c’eft pourquoy , afin de l’éclaircir , j'y ajoûtay un
peu d'eau commune , & j'obfervay que ce mélange avoit fait
diminuer fubitement la longueur des huiftres , en les ren-
dant prefque toutes rondes; mais dans la fuite elles reprirent
leur forme ovale & leur longueur ordinaire. Durant l'efpace
de deux heures confecutives , j'appliquois fept ou huit fois
de l'eau fraîche fur le porte-objet , à mefure que la liqueur
s'évaporoit ; & J'aurois même pû continuer plus long -tems
ce manége , fi J'eufle voulu prolonger davantage la vie de
ces animaux : ainfi cette eau commune , bien loin de leur
nuire, les accommode fort. Il n'en eft pas de même du mé-
lange d'une tres-pctite goutte d’eau de l’infufñon du fené
avec celle des huiftres , qui les fait mourir en un inftant.
On remarque encore que le mélange de l'eau commune
avec celle des petites huiftres , les fait devenir plus grofles
& plus claires, pourvû qu'elle ne foit ni trop froide ni trop
chaude , ce qui les tuéroir, ou du moins arréteroit leur mou-
vement pour un tems.
Dans une femblable experience que je fs enfuite , J'ap-
perçüs une chofe finguliere que je n'avois pas encore obfer-
vée ; fçavoir , deux cornes mobiles à la tête de chacun de
ces animaux , lefquelles formoienc enfemble un croiflant ;
comme on le voit en e , & ces cornes mobiles paroïfloient
auffi quelquefois comme on les voit en d; mais elles étoient
fi courtes en de certains tems, qu'on avoit de la peine à les
voir.
Je m'avifay enfuite d'ajoûter à une goutte de l'eau des
huiftres une tres -petite goutte de vin avec le bout d'une
EY AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. VIT 25
plume , & je vis expirer ces petits animaux prefque fur Le
champ , & à mefure que le vin fe méloit avec cette eau , ou
que les animaux pañloient de l’eau dans le vin.
Le 19. Mars , dans un tems aflez chaud , je remarquay
que les petites huiftres fe manifeftoient dans leur eau beau-
coup plutôt qu’elles n'avoient fait dans les tems moins chauds;
& que quelques heures auparavant on y avoit remarqué un
grand nombre de petits corps ronds & tranfparens, qui peu-
vent paller pour les œufs de ces poiflons.
Le 29. du même mois, il paroïfloit dans cette eau tres-
peu de petites huiftres ; & quoy qu'elles fuflent devenuës
bien maigres, elles ne laifloient pas de fe mouvoir tres-vîte :
ce fut pour lors que l'on cefla de vendre dans Paris des
huiftres à l'écaille , à caufe qu'elles n'étoient plus bonnes à
manger.
Le 15. Juillec 1911. à midy , je mis dans un vaifleau de
verre de l’eau de fix à fept huiftres ; & le 16. à fept heures
du foir jy obfervay une bonne quantité de petites huiftres
nageant dans cette eau , quoyque le vaifleau eût été bouché;
ce qui femble donner occafion de penfer que ces animaux
{ont produits des œufs des huiftres mêmes , & qu’ils ne vien-
nenc pas des autres animaux qui volent ou nagent dans l'air
que nous refpirons.
Le 22, je vis dans cette même eau de deux fortes de nou-
veaux animaux , dont plufieurs me parurent de la figure &
groffeur qu'il paroît en f, s’allongeant & fe raccourciflant
alternativement d’un inftant à l’autre. Ceux de la feconde
efpece , dont un feul eft vû en &, fe mouvoient aflez lente-
ment pour qu'on pût remarquer en eux les particularitez fui-
vantes.
On apperçoit vers la tête & au derriere un mouvement
d’ondulation, dans une matiere blanche, lumineufe & tranf-
parente , laquelle étant bien confiderée , on s’apperçoit qu’-
elle eft caufce par les pattes , tant du devant que du derriere
de ces animaux. On les voit marcher fur le porte -objer du
Microfcope , fans fortir de l’eau où ils ont pris naïflance ; &
l'on remarque que les pattes de derriere ee plus longues
que celles du devant. Fay auffi vi dans le même rems, &
56 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
dans la même goutte de cette liqueur, d’autres animaux urt
peu plus gros que les anguilles du vinaigre , ayant la partie
du derriere de leur corps affez grofle & arrondie , & la tête
un peu plus longue que celle de ces anguilles : leur corps
Ctoit moins tranfparent & plus court de beaucoup que celuy
des anguilles du vinaigre. Ces nouveaux poiflons ; dont on
voir la figure enh, changent de figure à tout momens.
Leur nager s'execute afiez lentement ; le mouvement de
leur tête , qui eft plus menué de beaucoup que le refte de
jeur corps , approche aflez de celuy que J'ay remarqué dans
les vers de quelques autres liqueurs ; ils avancent & la reti-
rent alternativement, ils la portent à droit & à gauche , s’ar-
tétant tres -fouvent, comme s'ils avoient peur de quelque
objet qui traverferoit leur route. |
Le 22. Aouft je fus furpris de ne trouver plus d'huiftres
dans cette eau, ni même aucun des animaux de figure ovale ;
& ce ne fut pas manque de nourriture , puifque les dernieres
anguilles dont je viens de parler y vivoient. Enfin le 3. Sep-
tembre , à peine pouvoit-on voir deux animaux dans cette
liqueur ; ce qui me la fit abandonner. |
Le 21. Oétobre 17117. nous vimes dans de nouvelle eaw
d'huiftres , jufqu'au 4. Novembre , les animaux reprefentez:
ent Lin, 5,08 ps |
La figure m reprefente un ver, dont la tête eften pointe ;
& le derriere rond. Celles qui font en n &o, reprefentene
deux de ces vers qui fe tiennent enfemble de deux façons
differentes , le plus fort entraînant le plus foible.
En p, vous en voyez un plus gros d’un autre genre, & d’u-
ne autre figure. Enfin au-deflous de la lettre q, il y en #
deux plus petits qui fe tiennent par le bec, allant ainfi na-
geant de compagnie.
CHAP,
ET AQUATIQUES. SECONDE Parrte, Chap. VIIL 35
CHAPITRE. VLIT
Des imfufions d'œillets mis dans de l'eau commune, chaude
€ froide.
FO Er4. Juillet je mis infufer à froid dans de l’eau com-
mune-des œillets qui n’étoient pas encore épanoüis ; &
le 19. je commençay d'appercevoir de tres -petits animaux
nageant dans l’eau, dont voicy à peu prés la grofleur & la
figure apparente , marquée en B, Planche 4. Figure 2.
Quelques perfonnes prennent ordinairement les animaux
de cette grofleur pour de petites mouches ; mais c’eft une
erreur qui provient ou de ce que lextréme petitefle de ces
infeétes rend leur efpece équivoque à nos yeux ; ou de la
mauvaife figure de la lentille du Microfcope , défaut tres-
commun aux lentilles fouflées ; ou de ce qu'elle eft mal pla-
cée entre les diaphragmes ; ou enfin de ce que l’objet n’eft
pas placé au point de vüë où il faudroit qu'il fur.
Le 20. je commençay d'en appercevoir de tres-gros ; mais
en petit nombre , ayant le corps bien tranfparent , & par-
femé de petites taches , comme on le peut rémarquér en A.
Le 22. les gros me parurent plus beaux & plus longs qu'au-
paravant ; ils fe mouvoient aufli d'une maniere nouvelle.
Le 29. j'apperçüs fur la furtace de la liqueur de petits vers
blancs ; & un peu au-deflous de cette même furface , j'y vis
ün nombre extraordinaire de tres-petits animaux.
Le 1. Aouf , la mafle compofee d’une multitude prefque
infinie de ces animaux , étoit fi épaifle & fi fourmillante , qu’à
peine y pouvoit-on difcerner leur figure ; & l’on remarquoit
parmy eux quelques gros vers fous la forme reprefentée
en C.
_ Le 20. du même mois j'apperçüs dans une goutte de cette
infufion des efpeces d’anguilles , dont on voit la reprefenta-
tionen E&enF, plus grofles & plus courtes que celles qu'on
voit ordinairement dans le vinaigre; ce que je n'avois point
Ÿ
28 DES ANIMAUX AERIENS; TERRESTRES
encore vü dans aucune des infufions ou liqueurs préceden-
tes : leur mouvement s'executoit à peu prés comme celuy
des ferpens du vinaigre. Ces nouvelles anguilles paroiïflent
tres-blanches vers la tête & vers la queuë , qu’elles ont tres-
courtes; tout le refte de leur corps étant d’une couleur d’am-
bre plus ou moins claire , felon le temps qu'elles avoient de-
meurces dans cette infufion.
Le 22. j'obfervay un petit ver blanc, que j'avois pris en la
furface de cette eau, dont le corps étoit aflez tranfparent
pour me donner la facilité d’obferver au dedans de fon
corps pluficurs filets blancs , dont les deux du milieu qui
évoient un peu écartez l’un de l’autre , & paralleles entr'eux,
fe recourboient vers la tête pour s'unir à, & s'étendre juf-
qu'à l'extrémité poftericure du corps, au-delà de laquelle ils
paroiloient avancer de plus d'une ligne.
De chacun de ces filets droit & gauche , partoient de
diftance en diftance d’autres filets blancs qui defcendoient
de haut en bas, & du dos vers le ventre, où ils pouvoient fe
joindre.
Ces animaux ont auffi à la tête deux petits points noirs,
qui font de veritables yeux ; puifqu'ils fe détournent à la pre-
fence de quelques petits objets dont on fe fert pour traverfer
leur chenmun.
Au devant de la tête on remarque deux efpeces de cro-
chets, dont ils fe fervent comme d’appuis pour avancer leur
corps , par un mouvement femblable à celuy des vers que
nous voyons ordinairement fe traîner fur la terre ; car ils
n'ont point de pieds , leur corps étant diftinguez par plu-
fieurs anneaux , qui s'approchent & s’cloignent fucceflive-
ment les uns des autres, par la contraétion des fibres dont
nous avons parlé. Vous voyez la figure de cet infeéte en D.
Le dernier Aouft 1711. je vis au moins une douzaine d’an-
guilles dans une tres-petite goutte de cette infufion , bien
grofles & bien courtes , en comparaiïfon de celles du vinai-
gre , dont le mélange les fait mourir en moins de trois mi-
nutes. Et ce qu'il y a de particulier eft , que la tête de ces
nouvelles anguilles devient immobile , pendant que le refte
de leur corps fe meut encore, \
ÊT AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. VIIL 29
L’effer de ce mélange prouve , ce me femble affez , que
ces dernières anguilles font d’une efpece differente de celles
du vinaigre ; & fi cela ne fufhit pas, voicy dequoy convain-
cre parfaitement de ce que j'avance.
Prenez deux Microfcopes montez de lentilles d’un même
foyer , afin de découvrir par la vüé les differences qui fuivent.
1°. Les anguilles du vinaigre font beaucoup plus longues ,
plus dégagces , plus blanches , & plus également tranfparen-
tes dans route leur longueur , que celles qui fe trouvent dans
l'infufion d’œillets.
2°. Celles du vinaigre figurent fouvent plufieurs enfemble,
de maniere qu’elles accordent les mouvemens de leur corps
avec tant de juftefle , que les convexitez & les concavitez
des unes fe trouvent répondre exactement à celles des au-
tres, Ce qui n'arrive pas aux anguilles de l'infufion dont je
parle. .
3°. La tête des anguilles du vinaigre n’eft pas fi grofle que
celle de l'infufion d'œillets.
4°. Ces mêmes têtes different encore en autres chofes.
5°. Le mouvement de celles du vinaigre paroîc plus libre
& plus aifé , que celuy des anguilles de l'infufion d'œillets.
6°. Celles du vinaigre ne pee jamais entierement en re-
pos, qu'elles ne foient mortes; & J'en ay vû des autres y de-
meurer comme immobiles durant plus d'un quart-d’heure ,
& fe remettre enfuite dans un mouvement aflez prompt, qui
durera autant de tems que la goutte de liqueur où elles na-
geoïent demeurera à fe deflécher.
7°. Ces anguilles font beaucoup plus fenfibles au froid que
celles du vinaigre ; car quand les matinées font fraîches on
a de la peine d'en prendre ; & pour en trouver je fus obligé
de mettre au Soleil le vaifleau qui contenoit l'infufion où
elles croient, & de luy laiffer environ un quart-d’heure , aprés
quoy J'en trouvay deux tout à la fois.
Enfin lorfque les anguilles du vinaigre font mortes depuis
quelque tems , leur corps paroîc d'ordinaire comme plu-
fieurs noyaux d'olives , enfilez à peu prés comme des grains
de chapelets ; au lieu que le corps des autres anguilles m'a
toujours paru en fon entier. |
ei
8,7 à 1
lance
ÉNOULC I.
Ds
ÿ
39 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Le 14: Juillet je mis infuler dans de l’eau boüillante une
portion des mêmes æillets dont je viens de parler, dans la-
quelle je ne commençay à découvrir des animaux que le 25.
du même mois ; ils étoient tres-petits & en fort grand
nombre.
Le 29. je ne trouvay plus de petits infeétes ; mais je vis des
vers aflez fenfibles aux yeux nuds , rampans fur la furface de
l'infufion ; où il s’étoit formé une épaifleur d’une matiere
molle , mais aflez ferme pour les foutenir. La grande cha-
leur quil avoit fait durant quatre jours , fut la caufe de la
mort des premiers infeétes , ce qui m'obligea à fupprimer
certe infufion, beaucoup plutôt que je n’aurois fait fans cela.
+
CHAPITRE TOUS
D'une infufion à froid d'un bouquet compofé de rofes ,
d'œilles € de jaffémin
E 11. May 1. je nus infufer à froid , dans de l’eau
commune , un bouquet de rofes , d’œillers & de jafle-
min, coupé par morceaux, pour le faire entrer plus facile-
ment dans un petit vaifleau , tenant environ denu-feptier ,
mefure de Paris ; & je trouvay au bout de trois ou quatre
jours un grand nombre de petits animaux parmi quelques
gros : is fe multiplierent confiderablement , & donnerent
durant un mois un fpeétacle agréable à plufieurs perfonnes.
Je ferois trop long fi j'entreprenois de décrire la figure, la
couleur & les mouvemens de ces animaux ; il vaut mieux
vous laïfler la fatisfaétion de remarquer toutes ces merveilles
en les examinant comme j'ay fait. :
Je ne juge pourtant pas à propos de pañler fous filence
une forte de nouveaux animaux que je n'avois point encore
vûs , & qui commencerent à fe faire appercevoir dans cette
même liqueur le fecond jour de Septembre : c’étoit une ef-
pece de limace que je vis , en me fervant d'une lentille d’en-
viron une ligne de foyer. Toute fa longueur , dans laquelle
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. IX. 3
je diftinguay trois parties confiderables , me parut d'environ
dix à douze lignes , & fa plus grande largeur de fix à fept li-
gnes Ou environ.
= La premiere partie marquée À en eft la tête, qu'elle reti-
re & avance par fecoufles lorfqu'elle va lentement; ce qw’elle
ne fait pas lorfqu'elle nage aflez vite.
La feconde partie marquée B eft le tronc , & C reprefente
la partie du derriere , que cet animal retire fouvent , & à
l'extrémité de laquelle on apperçoit comme deux grands
pos blancs marquez D , D, qui luy fervent de nageoires.
out fon corps , qui eft blanc & tranfparent , femble n'être
qu'une mafle charnuË compofce de mufcles, & de filets pref-
que impercepribles , qui s'allongent & fe raccourciflent fi ai-
fément , que d’une forme ovale aflez longue , cet animal fe
change promptement en boule.
Il cache fouvent fes nageoires D, D fous luy, de maniere
qu'on ne les apperçoit plus, fans cefler néanmoins de nager,
Son corps ef mal terminé ,de forte qu'on le voir fouvent fous
une forme incertaine , à caufe du changement qui s'y pafle
par les divers mouvemens de fes mufcles ; & même lorfque
cette limace approche de fa fin , fa figure devient fi inégale
& fi irréguliere , qu'on ne la peut autrement exprimer que
par le deflein marqué en E, demeurant quelque rems tranf-
parente , ainfi qu'un gros grain de fable vû au Microfcope à
liqueurs , ou dans un Microfcope à plufieurs verres , en y re-
gardant comme on fait dans une lunette d'approche pour
obferver les Aftres.
CPR DRE 0€
De l'infufion des barbeaux ; ou petites fleurs bleuës qui vien-
nent parmi les bleds
E fecond Juin je mis infufer à froid , dans de l'eau
commune , les queuës d’un gros bouquet de barbeaux,
avec quelques fleurs ; & en même tems Je Jettay dans une
| € 1j
Planche 5.
PipUte ur
32 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
caraffe de verre des mêmes fleurs feules , fur lefquelles je
répandis de l'eau en fuffifante quantité. Environ douze heu-
res aprés J'apperçüs dans ces infufions des animaux de la
grofleur & de la figure qu’on les à reprelentez en F, par le
moyen d'un Microfcope , où j'avois mis une lentille d'envi-
ron une ligne de foyer. Le lendemain au foir j'y vis de qua-
tre fortes d'animaux bien tranfparens , de figure ovale , &
d'inégale grofleur , fe mouvans diverfement.
Le cinquiéme du même mois je me fervis d’une autre len-
tille, qui n'a qu'un quart de ligne de foyer , & j'apperçüs les
plus gros animaux comme en G ; mais avec beaucoup plus
de confufion que je ne les avois obfervez au travers de la
lentille précedente; ce qui arrive néceflairement , quand on
fe ferc des lentilles dont le foyer eft tres-proche de l’objet,
& par confequent fort court.
Ces gros animaux changent de figure , & même de mou-
vement en un inftant , s’allongeant & fe raccourciflant de
maniere qu'on les méconnoît d'un moment à l'autre ; ce qui
fait qu'on prend fouvent en divers tems le même animal
pour un autre.
Le 6. j'apperçüs une nouvelle cfpece d'animaux , dont
vous voyez icy toute la grofleur & la figure en H, qui s’al-
longeoit & fe raccourcifloit en nageant dans une tres-petite
goutte d’eau , fans que j'aye pü remarquer de difference en-
tre la têre & la queuë de ce poiflon, que je nomme infeéte
des barbeaux ou chabot : mais parce qu'il doit y avoir une
partie conftante où fe trouve la tête de cet animal ; je la juge
à l'extrémité qui précede ou devance toujours l’autre dans le
tranfport de tout fon corps.
Le feptiéme , j’obfervay une chofe tres-curieufe en quel-
ques-uns des plus gros ; ils avoient une figure ovale terminée
aflez irrégulierement , trainant après eux une longue queuë
d'environ deux pouces , d’une fubftance beaucoup plus blan-
che & plus tranfparente que n’eft leur corps , depuis lequel
elle s'étend directement en diminuant de groffeur, & finif-
fant comme en pointe , ainfi qu'on le peut voir reprefenté en
FH. Le bout de cette queuë, qui éft fouvent cinq ou fix fois
plus longue que le corps, eft ordinairement attachée à une
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. X. 33
mafle de la matiere grofliere de l'infufon , qui fe colle au
concave de verre où la goutte de liqueur eft en obfervation;
& alors il y a du plaifir à voir l'animal tirer cette molecule,
fans la pouvoir entraîner , comme en Ï; ce qui l'oblige à s’en
rapprocher de tems en tems à reculons , en repliant fa queué,
comme en L, qu'il redrefle en s'en écartant avec beaucou
moins de vitefle qu'il ne s'en étoic rapproché , allant d'un
mouvement aflez égal ; d’autres fois on voit cinq ou fix de
ces infectes attachez autour d’une grofle mafle qui tient fer-
mement attachée au porte-objet, dont ils fe rapprochent &
{e retirent tour à tour , comme nous venons de dire.
On obferve que durant cet exercice, il change & reprend
alternativement fa premiere figure , & que cette queué na-
turcllement droite , comme en I, reprend fa direétion , à
mefure qu'il fait des efforts pour s’écarter en droite ligne de
la mafle qui l'enchaïîne au concave de verre, & qu'il entraîne
quelquefois après luy allant direétement.
J'ay remarqué que l’exceflive chaleur de l'air en fit perir
une tres-grande quantité , & que cinq ou {ix jours après ilen
revint d'autres.
Il ne m'eft pas permis de douter , après ce que j’ay vû de
ces derniers animaux , qu'ils n'ayent des yeux , & qu'ils ne
voyent ; car on en remarque fouvent deux qui figurent en-
femble l'un proche de l’autre fans fe toucher , rournant tous
deux d’une vitefle fi grande autour d’un même centre, que
les deux , quoy qu'ovales , ne paroifloient que comme un
feul , & tout rond.
On voit au-deflous de M un petit poiflon , dont les extré-
mitez font terminées par deux furfaces planes, tellement pa-
ralleles entr’elles , qu'on n’y apperçoit rien de diftinét qui
puifle faire juger du lieu où eft fa cête : pour le connoître , il
faut obferver fon mouvement , qui s'execute en courbant
differemment tout fon corps, qui va en avant, formant des
ondulations tres-lentes; de forte qu'il fair peu de chemin en
beaucoup de‘rems,
226366
Planche 5.
Cr.
Figure 3.
34 DES ANIMAUX ÆAERIENS, TÉRRESTRES
CHAPITRE XL
Du Thé mu en infufion.
E 15. Juillet ry1r. après avoir mis dans une théhere au+
tant de ché & d'eau botüllante qu'il en falloit pour fix
grandes prifes ;j'en mis dans une caraîte de verre, d'environ
demi-feprier , les feüilles qui refterent aprés l'infufion chau-
de; & ayant rempli d'eau de fontaine le vaifleau , je laiflay
repofer cette feconde infufion qui s’en faifoit à froid : dix
jours aprés J'apperçüs dans la moindre goutte que Je pufle
prendre de cette liqueur, une fourmilliere de tres-petits ani-
maux de figure ronde , & dont le mouvement étoit tres-lent.
Quelques jours enfuite , ces petits animaux y parurent en
moindre quantité , mais beaucoup plus gros , plus clairs &
plus diftinéts qu'auparavant : leur figure etoit ovale, & com-
me onen voit un {eul reprefenté au-deflous de N. Le con-
tour apparent de leur corps paroifloit noir , & le refte tres-
blanc & tranfparent ; on les voyoit nager d’une vitefle fur-
prenante. | |
Le corps de ces infeétes étoit d’une confiftance fi délicate,
qu'ils n'ont confervé leur figure naturelle que deux ou trois
minutes aprés leur mort. |
Le 23. Septembre j'apperçüs dans la même liqueur de trois
fortes d'animaux , fçavoir de tres-petits, & en grand nom-
bre; de moyens, en moindre quantité ; & de gros encore en
plus petite ; mais ils nageoient beaucoup plus vite que les
autres. Aujourd'huy 8. Decembre il s'y en trouve encore de
tres-beaux ; & j'ay vû par hazard une grofle anguille dans
une tres-petite goutte de cette infufion; on la voit icy repre-
fentée toute entiere : elle differe des anguilles du vinaigre,
en ce que fon corps eft plus court & plus gros , & que fon
nager cft de beaucoup plus lent. :
L'infufion qu'on fait des feüilles de thé, tel qu'il vient des:
Indes , étant mifes à froid dans de l’eau commune , n'a rien:
fait voir d'extraordinaire.
CHA.
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE, Chap. XII 35
SHAPEILRE" XI
Des infufons de queuës de framboifes | mifes à froid dans
de l'eaw commune.
" ’Infufon des queués de framboifes , dans de l’eau com-
mune , eft une de celles qui n’acquiert aucune mauvai-
fe odeur , depuis le commencement jufqu'à la fin, c'eft-à-
dire durant deux mois ; cependant elle produifit en moins
de vingt-quatre heures les plus beaux animaux que l’on
puifle voir dans les liqueurs , & en tres-grand nombre ; vous
en verrez icy les Figures reprefentées en O. Ces poiffons Pa- Planche 5.
roiflent tres-blancs & tranfparens dans le commencement de Figure 4.
leur naiffance , avec de petites marques fur le corps ; plus
diaphants en des endroits qu’en d’autres : cette grande blan-
cheur fe change dans la fuite en une couleur jaunâtre | &
toujours aflez tranfparente.
On les voit s'allonger & ‘fe raccourcir , devenant ovales
ou ronds , felon qu'il leur convient , par rapport aux obfta-
cles qu'ils trouvent dans leur route. J'en ay vû fouvent deux
fe tenir enfemble comme par le bec, ainfi que font ordinai-
rement deux tourterelles , ou deux pigeons mâle & femelle
qui fe careflent; & on voyoit ces animaux fe mouvoir affez
vite , fans quitter cette attitude reprefentée en P, dans la-
quelle on les voit même jufqu'aprés leur mort.
Le premier Septembre de l’année 1711. j'en vis un groupe
de huit d'une belle couleur d'ambre , & d'une groffeur re-
marquable, figurant enfemble comme feroient plufieurs dan-
feurs qui prendroient plaifir à divertir une compagnie : dans
de certains momens ils nageoïent , & marchoient aflez len-
tement pour fe faire obferver à loifir : Je n'ay pù cependant
jufqu'icy parvenir à découvrir leurs nageoires ou leurs pat-
tes ; mais le 8. Septembre fuivant, Je vis dans cette infufion
quantité de gros animaux fans aucun petit; & parmi eux j'en
apperçüs deux ronds qui ne fe quittoienr point; l’un des deux
Planche f.
Figure f.
36 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
avançoit fur l'autre , comme font deux jettons fans être cou-
verts totalement; d’autres fois ils fe rtouchoient feulement
par leurs circonferences , tournant ainfi enfemble comme
s'ils n'en faifoient qu'un feul , tantôt en un fens & tantôt en
un autre. Enfin le 27. du même mois j’apperçüs dans cette
infufion , pour la premiere fois, des animaux femblables à
celuy qui eft reprefenté par Q, ayant une matiere tranfpa-
rente & agitée aflez regulicrement, dont je ne püs difcerner
la figure à caufe de la vitefle de fon mouvement. Cette ma-
tiere cft fituée entre le milieu du corps de lanimal , & fa
tête , qui eft immédiatement fous la lettre Q. Peut-être que
c'eft le cœur de ce nr , & que les agitations qu'on y ap-
perçoic en font le {yftole & le diaftole : ces mouvemens ne
peuvent être remarquez que dans le tems que l'animal {e
meut tout entier & tres-lentement.
LQ
CERAPIDRE AIRE
Des infufions de fenoial , de fauge , de melon, de verjus, de
uges de Joucy avec les fleurs.
E rr. Aouft 1715. je mis infufer à froid , dans de l’eau
commune , du fenoüil avec fes tiges , grofles & menues;
& le 13. enfuivant J'obfervay que dans la moindre goutte que
l'on puifle prendre de cette liqueur , on découvroit une four-
milicre compofée d'un nombre prefque innombrable de pe-
tits animaux, que nous avons reprefentez en R, parmi lef-
quels il y en avoit d’autres de figure ronde , & environ cinq
ou fix fois plus gros, |
Le 22. Aouft 1711. je mis infufer à froid des feüülles de
fauge , qui ont confervé leur odeur naturelle durant tout le
tems de leur infufon : dans l'intervalle de douze jours ou
environ , Je n'ay vû dans cette liqueur que quelques petits
animaux de la grofleur d'un grain de mullet, & une infinité
de plus petits , qui ne paroifloient que comme des points
marquez fur du papier , avec une plume à écrire taillée des
TN —
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XIII. 3
plus fine ; & un peu au-deflous de la furface de la liqueur , j'y
apperçüs de tres-perits vers blancs.
Le :8. Septembre je vis dans une goutte de cette même
eau deux fortes de petits poiflons reprefentez en S , & com-
me ils paroifloient vûs avec une lentille d’une ligne de foyer.
La goutte de liqueur venant à fe deffécher , on voit mourir
les gros avant les petits , qui prennent autour des gros des
arrangemens femblables à celuy qui {e voit icy.
Le 22. Aouft je mis infufer à froid des bayes ou fruits d'é-
pine-vinette , & au bout de vingt-quatre heures j'apperçüs
des animaux de la grofleur & figure reprefentée en T, dont
le corps étoit blanc & cranfparent; mais ils n'ont vécu que
tres-peu de tems.
Le 25. du même mois , au foir, je mis infufer à froid de
petits morceaux de la côte d’un melon, avec un peu de la
chair & de fa graine ; le lendemain au matin j'apperçus quel-
ques animaux aflez beaux & tranfparens , dont on voit la
figure en V.
Le 30. au matin je ne vis plus dans cette infufon que de
petits corps longuets , blancs & tranfparens ; comme on les
peut voir reprefentez en X , dans une goutte de la liqueur
mife au Microfcope, parmi lefquels on apperçoit d’autres
petits corps moindres que celuy qu'on voit marqué T , fans
aucun mouvement fenfible ; ce qui me fit fupprimer cette
infufon.
Ayant mis infufer le 14. Aouft des grains de verjus en
grappe , dans de l’eau commune & froide , J'y apperçüûs le
20. un grand nombre de fi petits poiflons , que je n'en pus
diftinguer la figure.
_ Le 25. du même mois j'y découvtis de deux fortes de poif-
{ons ; les uns de la figure & groffeur reprefentée en Ÿ , & les
autres fi petits , que je n'en pus voir la forme.
Le 4. Septembre je trouvay les petits animaux de ce ver-
jus confiderablement multipliéz ; & les gros augmentez de
volume : j'en vis de ronds qui paroïfloient avoir une bonne
ligne de diametre , & qui éroient joints enfemble , en for-
mant comme un 8 de chiffie, fe mouvant ainfi tantôt circu-
lairement , & tantôt en ligne droite,
fy
Figure Ca
Figure 7,
igute 8.
33 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Le 8. Septembre j'apperçüs quantité de petits vers fur une
croute formée en la furface de cette infufion, & des anguil-
les en aflez grande quantité dans une feule petite goutte de
la liqueur.
Enfin le $. Decembre Jj'apperçüs encore dans cette infu-
fion de trois ou quatre fortes de petits poiflons , de diverfes
grofleurs , de differentes figures, fe mouvans tres-lentement,
à caufe de l’épaiflifiement de la liqueur , & de l’augmenta-
tion du froid,
Le 25. Aouft 1711. je mis infufer à froid , dans de l’eau
commune , des tiges & des fleurs de foucy , & huit jours
après J'y vis de trois fortes d'animaux , donties plus petits fe
voyent reprefentez en Z Z, les feconds en &,&les derniers,
qui n'ont pà trouver de place icy , étoient de grofles anguil-
les , differentes en efpeces de celles du vinaigre , & differen-
tes aufli de celles que J'ay vüës dans l'infufion d'œillets.
Enfin le 8. Septembre je ne trouvay plus dans cette infu-
fion qu'une feule efpece de poiflon; les anguilles même é-
voient devenuéës invifibles , & l'infufion avoit acquis en peu
de jours une odeur d'urine fi forte & fi défagréable , que je
fus obligé de la fupprimer,
e
GHAPIERE: XIV.
D'une infufion de foin nouveau ; mis à froid dans de l'eau
commune ; le 4. Juin 1711.
Ette infufion de foin nouveau neft pas vingt-quatre
heures en experience , fans donner des marques avan
tageufes de ce qu'on peut voir en elle: En effet, au bout de
cinq ou fix jours on découvre dans une tres-perite goutte de
cette eau, jufqu à cinq ou fix fortes d'animaux vivans , dif-
ferens en couleur, en grofleur , en figure & en mouvement.
L’extrême délicatefle du corps de ces poiflons les fait mé-
connoître , dès qu’ils font morts , fur le porte-objet du Mi-
crofcope. | |
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XV. 39
L'odeur de cette infufion , durant les grandes chaleurs ,
eft tres-forte dans les premiers jours ; & J'ay remarqué qu’-
elle avoit un fi grand rapport avec celle des crotins du che-
val, que fans voir cette infufñon , on aflureroit que ce font
des crotins qui la caufent ; mais elle diminué en vieilliffant ;
de forte qu’elle devient dans la fuite tres-upportable.
Dans la plûpart des liqueurs que j'ay vüés, je n'y ay gué-
res trouvé de plus gros animaux , de plus tranfparens & de
plus nets, ni qui durent plus long-tems que ceux-ci ; puis
qu'au mois d'Oétobre j'y en apperçûs encore une aflez gran-
de quantité de gros & de petits,
CHAPIMIREN XV:
Seconde infufion de foin nouveau.
E 4. Octobre 1711. je mis infufer à froid , dans de l’eaw
commune , un peu de foin nouveau, dans deux diffe-
rens vaifleaux ; j'en bouchay un le mieux que je pus avec du
velin bien moüillé , & Je laïflay l'autre ouvert. Deux jours
après j'apperçüs dans l’une & dans l’autre infufion de trois
fortes d'animaux , & en aflez grand nombre : cette expe-
rience femble tres-propre pour perfuader que ces animaux
étoient produits des œufs que d'autres animaux avoient dé-
pofez fur ce foin, & non de ceux qui étoient répandus dans
l'air.
Le 10. du même mois je trouvay plus d'animaux dans une
goutte de l'infufion qui avoir été bouchée , que je n'en vis
dans une pareille quantité de celle qui ne l'étoit pas. On
peut penfer que la fermentation & l’évaporation de la li-
De débouchée , y étant devenués plus grandes qu'en celle
e l’autre , elles furent les caufes occafionnelles du plus
grand nombre de poiflons qui s'y font trouvez.
= £ i
40 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Trosfiéme experience faite [ur de fémblable foin.
E 5. O&obre je fis botüllir de femblable foin nouveau
| dans de l'eau commune, durant plus d’un quart-d’heu-
re ; Jen mis enfuice une égale quantité dans deux vaifleaux,
à peu près de même grandeur#} en bouchay un fur le champ,
& même avant que le tout fut refroidi : je laïflay l’autre dé-
couvert , & J y apperçus des animaux au bout de quelques
“Jours , & pas un dans l'infufion qui avoit été bouchée ; &
après l'avoir gardée ainfi fermée un tems confiderable pour
y trouver quelque infecte vivant, sil y en eût dû venir ; mais
n'y ayant rien trouvé , Je la laiflay enfin débouchée , & au
bout de quelques jouts J'y en rermarquay : ce qui fait com-
prendre que ces animaux avoïent pris naiflance des œufs ré-
pandus dans l'air; puifque ceux qui s'étoient pû rencontrer
fur ce foin avoient été ruinez totalement dans l’eau boüil-
lante.
2 3 7 4
CHAPITRE :.X VI
Compofition de plufieurs infufions mifes enfémble dans
ur [eul vaiffeau.
Eflez enfemble des parties à peu prés égales de l'in-
fufion de fené , de l’infufion de queuës de framboi-
boifes , de l’infufon de foin , &c. & demie heure après pre-
nez à l'ordinaire une feule petite goutte de ce mélange ,
pour la mettre fur le porte-objet du Microfcope , afin de l'y
obferver , & vous aurez le plaifir de voir dans cette goutte
de liqueur des animaux de toutes les infufions, dont vous
aurez fait le mélange. À l’occafion de cecy, il eft à propos
de remarquer que tous ces petits poifions ne fubifteront pas
ainfi dans ce mélange fi long-tems , à beaucoup prés qu'ils
auroient fait , s'ils fuflent demeurez chacun dans fa premiere
infufion, Je croy encore devoir avertir que toutes fortes
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XVIL. 41
d'infufions ne font pas propres à donner le plaifir de ce
fpedacle , vû qu'elles doivent avoir un certain rapport pour
y faire fubfifter les animaux en vie ; & c'eft ce que nous
avons fait voir dans plufieurs des Chapitres de cette feconde
Partie.
GHAPTERE XVIE
On prouve dans ce Chapitre qu'il y 4 de tres-petits animaux qui
en devorent de plus gros.
Qw'ily en a de Ji pertrs qu'ils échappent aux meilleurs yeux armez
de Microfcopes.
w'an bout d'un certain tems en cflé on découvre des petits poif-
ons dans l'eau de riviere ; on dans celle de fontaine, fans s'être
corrompuë.
Qw'au bout de quatre heures, C* même en moins de tems , on
trouve plufieurs efbeces de poiffons dans l'eau que l'on à donné à
boire à des oifeaux.
Et enfin comment les graines & les plantes doivent être mifes en
infufion , pour produire de bons effets ; par rapport aux experien-
ces dont nous parlons.
Uoyque notre vüë foit à prefent portée par les Microf-
copes aufli loin qu'elle peut aller ; & que nous ayons
comme forcé la nature à nous découvrir une grande partie
de ce quelle avoit de plus caché dans les infufions dont
nous parlons dans cette feconde Partie ; je ne doute pas
neanmoins qu'une infinité d’efpeces d'infectes , & d’autres
animaux, ne demeurent toujours invifibles , foit par le dé-
faut des inftrumens, foit par la foiblefle de nos organes, foit
par le manque d'application à fuivre & à épier ce qui fe pañle
dans une infufon; foit enfin parce qu'il eft difficile , & mé-
me impoflible de prendre avec le plus menu bout d’une plu-
me à écrire, ou autre femblable corps , de toutes les diffe-
rentes efpeces des petits animaux qui fe peuvent rencontrer
dans une infufion, Je fuis perfuadé , par ma propre expe-
Ficnce , qu'il ÿ En a qui échapent aux plus attentifs ; puif-
42 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
qu'il m'eft arrivé plufieurs fois de n’en trouver qu'un d'une
fcule efpece , dans quelque infufion particuliere.
L'on découvre , mais rarement, de tres-petits animaux
fur le poux & fur la puce ; & je ne doute pas qu'il ne s'en
puifle voir encore de bien plus petits fur le corps de ces der-
niers , qui les incommodent, & qui les devorent enfin ;com-
me je l'ay fouvent obfervé , en examinant de certaines mou-
ches qui croient mangées par des animaux environ deux
mille fois plus petits qu'elles.
Les infufions d’œillets , de queuës de framboifes , de fené ;
de tabac de toutes les fortes , font éclore les œufs d'une mul-
titude vifible d'infeétes , qui dans les premiers jours font fi
menus que l’on à de la peine à les appercevoir, quoy qu'on
fe ferve d'une lentille qui grofliffe confiderablement : & cela
nous fait penfer , qu'il peut y en avoir de fi petits dans les
liqueurs , que nous manquons de Microfcopes pour nous les
faire appercevoir ; ou plutôt, que le peu de lumiere que ces
petits animaux font capables de refléchir dans nos yeux, n'eft
pas fuffifante pour caufer un ébranlement capable de les faire
fentir.
L'eau commune expofce à l'air durant une quinzaine de
jours, d'un tems aflez temperé, nous prefente aux yeux ar-
mez d'un Microfcope quantité de petits poiflons , de grof-
feur , de figure & de mouvemens differens, qui ne fubfiftent
que tres-peu de tems, en comparaïfon de la plüpart de ceux
qui s'obfervent dans les infufons des plantes, ou dans celles
des drogues telles qu’elles puiflent être , à caufe du peu de
nourriture qu'ils y trouvent.
La même eau dont je viens de parler étant donnée à boire
aux ferins de Canarie , ou à d’autres oïfeaux, nous en pre-
fente d’un jour à l’autre : il s'y en voit fouvent de quatre à
cinq efpeces tres-differentes les uns des autres, & tres-pro-
pres à divertir agréablement le fpe&ateur ; parce qu'en un
moment il y obfervera des anguilles à peu près femblabies à
celles du vinaigre , mais plus courtes : Des limafles qui s’é-
tendent &fe raccourciffent confiderablement, en fe trainant
& s'appuyant tantôt fur la cête, & rantôc fur le derriere , où
l'on voit deux pointes faites en forme d'un foflet , avançant
aflez
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XVIL 45
affez lentement ; ce qui fournir le moyen d’obferver plufieurs
chofes aflez curieufes. D'autres fois on voit ces animaux na-
ger tres-vite, & alors ils paroïflent avoir deux têtes, qui s'é-
cartent & fe rapprochent alternativement l'une de l’autre :
leur couleur reflemble à celle de l’ambre jaune. Le contour
. du corps de ce poiflon fe voit mal terminé; il reflemble à la
mafluë d’un Géant, particulierement quand il étend quelque
peu fon corps du côté de la tête feulement.
On voit aufli dans cette même eau de petits vers longuets;
d'une apparence d'environ quatre à cinq lignes de longueur,
qui changent de figure en nagcant ; & d'autres animaux aflez
femblables à une Cornemufe : enfin j'y en ay vû encore de
figure ovale , à la referve de l'endroit où eft la tête , qui eft
un peu applatie; traînant aprés eux une longue queuë blan-
che & tranfparente , qui fe termine en une pointe tres-
aiguë.
Nous avons toujours mis les tiges des plantes, leurs feÿil-
les , leurs fleurs, & les fruits en infufñon , fans les réduire en
poudre , & fans les macerer ; parce qu'étant autrement pré-
parées & mifes en infufion, elles rendroient la liqueur Opa-
que & trop épaifle, & l'on n y pourroit rien voir de diftin&.
L'écorce des arbres fe met en infufion par petits mor-
ceaux, de même que le bois des gros arbres, & les gros fruits.
Les pepins de ces fruits, les grains de poivre , & autres cho-
{es femblables s’y mettent tout entier.
La fuie de nos cheminées, le tabac grainé, le râpé, & ce-
luy qu'on pafñle au tamis, produifent de petits animaux ; mais
on les voit fi confondus avec les menuës parcelles de tous
ces corps, qu'on n'a aucune fatisfaction des obfervations que
l'on fait fur ces poudres, |
Ec à l'égard des fucs , tant des fruits que des plantes, on
en feparera la partie la plus grofliere pour mettre le refte en
infufion dans de l'eau commune , qui les éclaircira fufifam-
ment pour y faire appercevoir fucceflivement toutes les pro-
ductions dont ces fucs feront capables.
. Les experiences précedentes me paroiflent en aflez grand
nombre , pour ofer entreprendre de jetter les fondemens
d'une nouvelle hypothéfe, qui puifle fervir à rendre raifon
5
44 Des ANfMAUX AERIENS, TERRESTRES
de tous les Phénomenes qui regardent les infeêtes , & les au-
tres animaux contenus dans les infufions précedentes ; &
même dans toutes celles que nous examinerons cy-aprés.
Hypothele pour fervir à rendre raifon de la naïffance , du pro-
grès, © de la mort des animaux que l'on obérve dans les
liquêurs préparées ; © dans celles qui ne le Jon point.
N a crû autrefois que tous les infeétes, & d’autres pe-
tits animaux s’engendroient de corruption ; mais de-
puis que pluficurs celebres Philofophes ont donnez fur cette
matiere les obfervations qu'ils ont faites avec beaucoup de
foin & d’exactitude , on eft revenu de cette erreur: Ils ont
prouvé par un grand nombre d'experiences , & par des rai-
fonnemens inconteftables , que tous les animaux , de quel-
que nature qu'ils foient , viennent des œufs. En effet, com-
ment peut-on comprendre que l’alteration & la pourriture ,
qui naïflent de la divifion & de la feparation des parties d’un
corps en d’autres parties plus petites , puiffent jamais s’ajan«
cer les unes auprès des autres, & s'unir comme il le faudroit,
pour compofer des corps vivans , qui devinflent capables de
chercher de quoy fe nourrir en marchant , en rampant &
en nageant , & même de produire leur femblable , comme
lon voit que font ceux qu'on trouve dans les infufions des
plantes ? C’eft ce que je ne penfe pas qu'un homme capable
de refléxion puifle s’imaginer , quelque effort qu'il faffe poux
en venir à bout.
Mais afin d’avoir de quoy combattre ce préjugé fi dange-
reux à la Religion , en attribuant au hazard, c'eft-à-dire , à
une caufe qui n’eft ni apparente ni néceflaire , ce qui eft aflu-
rément l'ouvrage le plus parfait d’une puiffance infinie ; il
n'y a qu'à faire attention aux experiences contenuës dans
cette Hiftoire, & aux raifonnemens qui fuivent.
La corruption n'eft pas la eaufe de la generation des pes
ET AQUATIQUES. SECONDE Panrie. Chap. XVIIL 45
tits animaux qui fe voyent, avec le Microfcope , dans l’eau
des moules , dans éelle des huiftres à l'écaille; puifqu'on les
ÿ découvre avant que ces mêmes eaux foient corrompus.
Elle n’eft pas non plus la caufe de la generation d’une in-
finité de tres-petits poiflons que nous avons vûs dans diffe-
rentes infufions ; puifque les matieres de toutes ces infufions
n'étoient point encore alrerées ni corrompuës , lorfqu'on à
comimence à les y voir. |
Si la pourriture étoit la caufe de la naïiffance des infeétes
que nous appercevons dans une feule infufion , on les y de-
vroit voir tous , dés que la matiere infufée feroit pourrie ;
ce qui n'arrive pas, puifqu'on les y voit fe fucceder les uns
aux autres durant plus de treize à quatorze mois.
Si la pourriture contribuoit à la generation des infeétes
dont nous parlons ; plus un corps feroit pourri, plus on y de-
vroit voir d'animaux ; cependant on voit arriver tout le con-
traire dans l'urine que l’on garde plufñeurs jours.” Dans une
infufion de poreaux mis dans de l'eau commune, les cham-
pignons , une coque d'œuf remplie d’eau, &c. font des cho-
les que l’on eft obligé de fupprimer en peu de jours durant
les grandes chaleurs; parce qu’elles choquent l’odorat d'une
maniere infupportable.
Le fang humain, fans aucun mélange , ayant été expolé à
l'air durant prés d'un mois , & dans un tems aflez chaud ,
n'a fait fentir qu'une odeur infupportable ; & quoyque j'aye
mis de l'eau commune dans le même vaifleau où il étoit, &
examiné ce mélange aflez de tems, je n’y ay rien vû qui m'ait
paru avoir aucune apparence de vic. ,
On peut encore ajoûter , qu'il y a des corps qui ne chan-
gent que peu ou point d'odeur ; qui fourniflent des animaux
differens les uns des autres , durant tout le tems qu'on les
garde en infufon. |
Voilà ce me femble des experiences en fuffifante quantité,
pour montrer que ni l’alteration ; ni la corruption, ni la mau-
vaife odeur , ne font point la caufe de la generation des ant-
maux , tels qu'ils puiflent être : cela fuppofé, pañons à l'éta-
bliffement d'une hyporhéfe , pour expliquer ce qui fe voit
de plus furprenant dans les infufons des plantes. Je fuppo-
8 +)
46 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES"
feray qu'il vole ou nage dans l'air voifin de la terre , un nom:
bre innombrable de tres-petits animaux de diverfes efpeces,
qui s'appliquant fur les plantes qui leur conviennent, s'y re-
pofent, y prennent quelque nourriture , & y mettent au jour
leurs petits, pendant que d’autres y dépofent des œufs , où
de nouveaux infectes font renfermez. |
Et enfin que ces mêmes animaux laïflent aufli tomber dans
l'air qu'ils parcourent, des petits & des œufs , particuliere-
ment dans les lieux où ils font arrêtez par des corpufcules
fpiritueux qui s'échapent continuellement des plantes, & ge
neralement de tous les autres corps , dont les parties ont en-
trelles quelque mouvement capable de les fubtilifer aflez
pour en faire l'évaporation.
De plus, il eft à propos de remarquer qu'une même plan-
te peut être la favorite de diverfes efpeces d'animaux , &
par-là devenir en même tems la dépofitaire des œufs & des
petits tout vivans de plufieurs efpeces d’infeétes ; d’où il fuit
que fon infufion fera fufifante pour faciliter la naiflance , &
fournir tout ce qui fera néceflaire à l’accroiflement de tous
les differens animaux que nous y appercevrons fucceflive-
ment, pendant tout le tems que durera cette infufion.
CHAPITRE XIX,
Continuation des experiences fur les Liqueurs.
D'un ver de terre trouvé parmi des herbes potageres.
T'Ay mis dans un vaifleau de verre, de figure cilindrique;
d'environ trois pouces de diametre, de l’eau commune,
& un ver qui s'étoit rencontré parmi des herbes potageres ;
long d'environ deux pouces & demi , & d’une ligne de dia
_ mette: je le changeay de vaifleau , & je luy donnay de nou-
velle eau commune. Au bout de trois femaines ou environ,
il y fit de nouveaux excremens , ce qui me fit juger qu'il
avoit trouvé dans cette eau quelque nourriture propre à le
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XIX. 47
_ faire vivre durant tout ce tems-là. Je pris alors une tres-pe-
tire goutte de cette eau; je la mis fur le porte-objet de mon
Microfcope à liqueur , & j'y vis de deux fortes de poiflons
qui nageoiïent dans ce peu d’eau ; les uns brillans , & de f-
gure ovale, n'ayant au plus qu'une demie ligne de longueur
apparente , & les autres un peu plus gros, faits comme de
petites cornemufes blanches & tranfparentes. Tous ces pe-
üts poifdons difparurent au bout de quatre ou cinq jours ;
peut-être que cela vint de ce que le ver les avoit mangez y
ou de ce qu'ils étoient morts faute d’avoir trouvé dans cette
eau de quoy fe nourrir plus long-tems. Six femaines aprés je
Jettay l’eau de ce vaifleau pour y en mettre d'autre ; trois
jours aprés j'y apperçûs de deux fortes de petits poiflons :
enfin au bout de trois mois ce ver me parut comme lié ou tors
en un feul endroit de tout fon corps, ce qui le fit mourir aprés
s'être bien tourmenté durant un jour.
Cette experience , & une feconde toute femblable , que
_ÿe fis long-tems aprés , fur un autre ver de terre de même
nature , femblent fuffire pour prouver qu'il y a des animaux
qui ne laiflent pas de vivre dans l’eau, quoy qu'ils ayent pris.
naiflance fur la terre , où ils fubfiftent ordinairement.
Voicy encore une belle experience qui prouve la même
chofe. Ayant mis de la poudre , que l'on trouve fur de cer-
tains fromages , parmy laquelle il y avoit beaucoup de mit-
€es vivantes dans de l’eau commune , je m'apperçus qu'elles
y vécurent depuis le 20. Février jufqu'au 15. Mars fuivant ,
durant lequel tems il s'y forma de trois fortes de poiflons ,
qui ne meritent pas d'être décrits.
CH A PIRE, XX
D'une infufion de Rhubarbe.
€ À Rhubarbe eft une des drogues purgatives qui de:
meure le plus de tems en infufion dans de l’eau com-
gune , fans qu on y apperçoiye aucun poiflon > NY qu'elle
5"
49 DES ANIMAUX AERTENS, TÉRRESTRES
rende aucune odeur défagréable : je l’ay obfervée durant un
mois fans y avoir vû aucune chofe de confiderable. Enfin au
bout de cinq femaines je commençay d'y remarquer une
feule forte d'animaux, qui ne merite pas que j'en fafle ane
defcription particuliere ; nous dirons feulement que le mélan-
ge d'une goutte de cette infufion , avec autant de celle du
fené , ne fait pas perir les poiflons de l’une ny de l’autre
cfpece ; & qu'au bout de quinze jours , les animaux de l’in-
fufon de la Rhubarbe fe font trouvez morts.
CHA PIRE XX SUT
De l'infufion d'un champignon, mi à froid dans de l'eau
commune.
‘Infufion à froid d’un gros champignon, produifit d’uri
jour à l’autre une multitude étonnante de tres-petits
animaux de figure ronde , de la grofleur d'un grain de na-
verte ; vüs au Microfcope , qui multiplie environ vingt-cinq
mille fois l'apparence ordinaire de ce grain.
Ee troiliéme jour de cette infufion , jy en découvris qui
étoient plus gros , & dont la tête un peu courbée fe termi-
noït en pointe , & dont cout le corps étoit aflez approchant
d'une larme de verre.
Une troifiéme efpece parut bien-tôt parmy les deux pré-
cedentes , s’y tremouffant extraordinairement fans pourtant
y parcourir plus de deux lignes apparentes de chemin ; ils
évoient de figure ovale , dont le grand diametre n’avoit au
plus que deux lignes de longueur : & une quatriéme forte fe
prefenta à mes yeux, n'ayant au plus que la douziéme partie
d'un pouce de diametre , farmant un contour parfaitement
rond en apparence.
Cette infufion devint au bout de cinq ou fix jours d’une
odeur tres-forte , & difficile à fupporter : ce fut alors qu'on
apperçut de petits moucherons s’amaffer & voltiger au-def-
fus de fa furface , où ils demeuroient aflez de cems pour y
ET AQUATIQUES. SECONDE ParTie. Chap. XXL 459
dépofer un grand nombre de tres-petits vermitleaux , qui fe
nourrifloient dans la pellicule qui s'y étoit formée.
Cette mauvaile odeur fe diflipa peu à peu : les morceaux
de champignon fe précipiterent au fond du vaiïfleau; la pel-
licule épaifie qui s’etoit formée à fa furface y tomba aufli ,
& les vers n’y parurent plus. Mais l’on continua de voir dans
une tres- petite goutte de cette infufion, de petits animaux
de figure ovale , les uns prefque en repos , & les autres En
grand mouvement. |
J'examinay ce champignon avant que de le mettre en
infufion ; je le trouvay beau, vermeil , & frais ceüilly; J'Y
apperçûs avec une loupe d’un pouce de foyer, deux petits
animaux blancs , ayant chacun pour ornement deux belles
cornes au-devant de la tête , plus longues que n'étoic le refte
de fon corps. Chacun de ces petits animaux paroifloit avoir
au plus la groffeur d'un ciron; ce qui me femble prouver
qu'il y a des animaux qui dépofent leurs petits fur des végé-
taux ; & confirmer en même tems une partie de ce que
nous ayons avancé dans notre hypothéfe.
CHAPITRE, X XI
Des petites fleurs colorées diverfement , qui [e trouvent
dans les prer:
Ï vous mettez infufer à froid , dans de l’eau commune ;
de ces menues fleurs diverfement colorées & ceüilies
dans un pré, lorfqu'elles font nouvellement épanotüies; vous
aurez dans l'infufion, au bout de quelques jours, une efpece
finguliere de poiflon qu'on peut nommer femelles , à caufe
de la reflemblance qu'il y a. On en voit un reprefenté au
haut de cette Planche , placé entre les lettres ABC; dont
je nager m'a paru aflez lent , & s’executer en dandidant,
Cette lenteur qui fe remarque en luy, nous donne occafion,
de conjeéturer que ces poiflons font tournez en forme d’une
-gourde allongée ; parce que l'apparence de leur largeur BC
so DES ANIMAUX AERIÉNS, TERRESTRES
eft toujours égale à elle-même , dans le tems que la partie
€ s'abaifle, & que B s’élevé.
Sa tête eft immédiatement au-deflous de la lettre À ; elle
s'incline vers B & vers C: elle s’allonge aufli & fe raccourcir.
On voit quelquefois tout fon corps devenir rond comme
une boule , dont la fuperficie paroît inégale & raboteufe.
Le dedans de leur corps eft marqueté de taches longuettes,
en chacune defquelles on à remarqué un mouvement pe-
riftaltique.
On voit fouvent ces animaux fe frôler les uns contre les
autres, en fe mouvant aflez lentement ; & on les apperçoit
rarement fe choquer par la tête, qu'ils dirigent durant le
nager d'une maniere tres-agréable , en s'évitant les uns les
autres , comme feroient des danfeurs figurant enfemble
dans une entrée de balet. Leur corps eft fi cranfparent qu'on
y diftingue toutes les parties interieures qui font plaiïlir à
voir , par le changement de figure & de couleur qu'on ap-
perçoit dans ces vifceres , qui brillent lorfqu’ils fe mouvent
d'une certaine maniere. Et lorfque la goutte de liqueur ;
mife fur le porte-objet du Microfcope, vient à s’épaiflir par
l'évaporation qui s’en fait, on apperçoit des agitations fur-
prenantes , qui les écartent & qui les rapprochent les uns
des autres.
Ces gros animaux paroiflent tout feuls dans le commence-
ment de l'infufñon; & ce n’eft qu’au bout d'environ quinze
jours que l’on commence d’y en appercevoir un aflez bon
nombre reprefentez en 2; ce qui eft tout le contraire de ce
que Jj'ay obfervé dans la plüpart des autres infufions , où les
petits paroïflent avant les gros.
Au bout d'un mois ou environ tous ces gros poiflons perif-
fent dans l'infufon , où l’on continuë d’obferver les petits
autant de tems , aprés quoy on n’y voit plus rien qui ait vie.
Or il eftà propos que j'avertifle que cette infufion avoit été
fcparée des fleurs , & comme tirée au clair , pour la mettre
dans un autre vaifleau , afin de la pouvoir plus facilement
tranfporter en divers endroits de cette Ville.
CHAT.
EY AOUATIQUES. SECONDE PanrrTie. Chap. XXII. sr
CHAPITRE. XXCbLL
Du petit bafilic qui a une odeur de citron,
Ous avons obfervé quelques jours aprés l’infufñon à
froid de ce bafilic , trois fortes de poiflons ; les pre-
muers font vüs au-deflous du chiffre 1; les feconds au-deflous
du chiffre 2 ; & ceux de la troifiéme cfpece font vûüs à peu
prés comme celuy que l’on a reprefenté au-deflous du chif-
fre 3. | Rte
Le nager de ce dernier poiflon s'execute en ferpentant ;
pliant & repliant fon corps diverfement , & en tout fens
L'odeur de cette infulion a quelque agrément , qui diminuë
de force de jour en jour ; & cette liqueur ne conferve fes
animaux qu'environ quinze jours ou trois femaines.
Nous avons reprefenté dans cette Planche [es poiflons
marquez quatre & cinq , qui fe font trouvez dans une infu-
fion de foin nouveau. La couleur des uns & leur figure m'o-
bligent de les nommer Cornemufes dorées ; & celles des au-
tres , Cornemufes argentées. Le poiflon marqué cinq , fera
nommé Mafluë, dont la tête eft en D.
* Ces animaux s’allongent & fe raccourciflent : ils fe plient
& replient diverfement en nageant.
CHAPIIRE XXIV.
D'un fediment de vinaigre détrempé d'eau communs.
Phinche 6.
Ç: Jon met dans le fediment du vinaigre , qui fera refté
_? dans un vaifleau après l'évaporation prefque entiere de
cette liqueur , environ dix fois autant d'éau commune que
de matiere fedimenteufe ; l’on y trouvera au bout de trois
ou quatre jours des anguilles , & une infinité d’animaux tres-
o L e: L. . . r
petits, dont la figure m'a paru incertaine , & difhcile à dé-
h
2 DES ANIMAUX AERIENS, TERRÉÊSTRES
Planches. terminer. La lettre À , du groupe marqué 6, en eft la tête:
les autres figures du même groupe font des efpeces de Cor-
nemules , découvertes dés le lendemain de cette experience.
Les anguilles de ce vinaigre d’eau n'ont paru plus grofles
que celles du vinaigre ordinaire , vûés l'une & l’autre avec
la même léntille.
Remarques smportantes.
T arrive quon mette infufer , par exemple , du foin
‘dans un vaifleau où il y avoit eu quelque tems aupara-
} vant une infufion d'une plante , ou de quelques drogues aro-
matiques tres-fortes en odeur , & que ce vaifleau n'ait pas
été bien lavé aprés cette premiere infufion , la feconde ne
scülira pas bien ; car cette feconde pourroit ne pas convenir
avec la premiere.
D'ailleurs , l’eau qu'on tire d’une fontaine de cuivre mal
étamée , ne convient pas pour bien entretenir la vie de la
plüpart des animaux de nos infufions ; parce que cette eau
acquiert par le féjour qu'elle fait dans ce vaifleau , une qua-
lité particuliere qui les empoifonne. Jay même autrefois
oùy dire à Monfieur l'Abbé Bourdelot , Medecin de Mon-
feigneur le Prince de Condé , que les eauës qui féjournoient
dans ces fontaines de cuivre mal étamées , étant bûës routes
pures, caufoient des cours de ventre.
CHAPLERE XV.
De l'infufion des Barbeaux.
E6. O&tobre 1712. je vis pour la premiere fois un non-
veau poiffon dans une infufion de barbeaux, dont la f-
Phnche EUTE marquée 7, reprefente le premier. À , marque la têce
4 de ce poiflon, B la queuë, C D Ja largeur de fon corps,
qui paroifloic divifé fuivanc fa longueur par une ligne courbe
urée de B vers À, :
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XXVI. 5;
La partie du corps de cet animal qui fe voit du côté mar-
qué C , fembloit être remplie de plufieurs petits globules ,
moins tranfparente en cet endroit que du côté marqué D.
Le col de ce poiflon qui eft fort long , fe raecourcit de tems
en tems , de même que le derriere marqué B : fon nager eft
d’une lenteur extraordinaire , ce qui me faifoit douter dans
le commencement que ce fur quelque chofe de vivant. Ce
poiflon ne dura pas plus de cinq à fix minutes en vie ; &
quoy qu'il fut difhcile d'en rencontrer dans cette infufion
où il y en avoit tres-peu ; puifqu'en cinq ou fix coups de fi-
lets, je n'en pus découvrir que deux , & je m'apperçus que
le fecond marqué 8. n’y dura en vie qu'environ autant de
tems que le premier : ce dernier me parut un peu different
du premier ; cär fon corps BC, garni de petits globules , le
rendoit moins tranfparent qu'iln'étoiten AB, & en CD.
CHAPITRE. XXVL
D'une infufion de foin vieux.
E 16. Oétobre 1712 , ayant jetté un coup de filet dans
l'infufñion d'un foin vieux , qui avoit été mis en expe-
rience le 20. Aouft précedent ; j'y trouvay des animaux de
plufieurs efpeces , parmi lefquels 1l s'en trouva de deux for-
ces qui meritent une explication particuliere , dont les moin-
dres en longueur & en grofleur paroifloient au Microfcope,
monté d’une lentille d’une ligne & demie de foyer, comme
il eft reprefenté à côté du chiffre o.
À , eft le côté où l’on appercçoit la tête, & B la queuë, qui
fe termine par deux pointes , formant une efpece de fourche
blanche & tranfparente, & donc les pointes luy fervent d’ap+
puy pour le faire avancer plus facilement , en rampant fur le
porte-objet du Microfcope où on le met. Ces animaux ont
encore une autre allure qui s'execute en nageant tres-vice ;
fans qu'on puifle s’appercevoir d'aucun raccourciflement, në
d'aucun allongement fenfible de leur corps.
hi
Figure 63
54 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Les feconds font des animaux des plus furprenans & des
plus extraordinaires que j'aye encore vûs dans les infufions
‘ des plantes , tant pour leur groffeur que pour les autres cir-
conftances qui les accompagnent: en voicy deux que J'ay re-
prefentez en 10, 10, fous deux diverfes formes marquées À C
D B,& ACEEB. L'endroit qui répond au-deflous de À en
défigne la tête , B la queué qui eft fourchuë, € le cœur qu’on
voit mouvoir régulierement, & D les inteftins de cet animal,
que J'appelleray Chenille aquatique, à caufe de quelques pe-
tits rapports de reflemblance qu'elles paroiflent avoir avec
nos chenilles terreftres, I] y en a de deux differentes cou-
leurs , les unes font blanches & tranfparentes ; les autres font
d'un jaune pâle ; celles-cy paroïflent d'ordinaire un peu plus
grofles que les autres. ,
Leur allure s’execute en appuyant les pointes B fur le por-
ce-objet du Microfcope , pour s'étendre en avant tant qu’el-
les peuvent ; puis en appuyant l'extrémité anterieure de leur
corps fur un autre endroit , elles en rapprochent le derriere,
& continuent ainfi de fe mouvoir en rampant. On les voit
fouvent s'arrêter fur un endroit du porte-objet , où fixant les
pointes B, elles allongent & raccourciflent tout le corps à
diverfes reprifes , fans changer fenfiblement le lieu où elles
appliquent ces pointes. On voit auffi quelquefois tout leur
corps fe rourner à l'entour du point B , comme un de nos fau-
teurs fait tourner tout le fien fur fa tête , en faifant mouvoir
fes pieds comme fur une circonference de cercle , dont le
gentre eft à l'endroit où eft fa tête.
Cette forte d’allure n'eft pas la feule qu'on apperçoit en
€es chenilles; elles s’élancent quelquefois avec tant de for-
ce , qu'elles parcourent en un inftanc une étenduë confidera-
ble & apparente du porte-objet, où elles nagent fans fe rac-
courcir ni s’allonger davantage qu'elles ont fait dans le mo-
ment de la premiere fecoufle,
Quand ces chenilles s'arrêtent , on apperçoit pour l'ordi-
dinaire qu’elles ouvrent nne grande bouche marquée À dans
la plus grofle des deux , dont on voit les lévres garnies de
poils qui paroïflent noirs , & mûs avec beaucoup de virefle ;
ce qui fait voir ayec étonnement que les petits poiflons , &
ÉT AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XXVI $5s
les autres corps qui fe trouvent n'être cloignez de l'ouverture
de leur bouche , que d'environ un pouce apparent, femblent
s'y précipiter.
Dans les premieres obfervations que je fis de ces chenilles,
J'apperçüs un petit corps marqué C, qui fe mouvoit aflez vite
& regulierement ; Je crüs d’abord que c’étoit un petit poiflon
encore vivant qui s'étoit Jetté dans fon eftomac ; mais en con-
tinuant mes obfervations , je fus obligé de croire que c’étoit
le cœur de la chenille, dont le mouvement égal executoit ce
qu'on nomme fiftole & diaftole.
J'apperçus aufli en même tems les inteftins de cet infe&e
marquez D , qui formoient une mafle de matiere qui étoit
dans un mouvement aflez irrégulier. Quand ces chenilles s’ar-
rondiflent , ce qu'elles font aflez rarement , & qu’elles de-
meurent ainfi quelque tems en repos, on voit briller le de-
dans de leur corps , qui paroît fouvent d'une couleur dorée
tres-belle. Il y en a d’autres qui paroiflent toutes blanches &
tranfparentes , fans qu’on puifle diftinguer les parties inte-
rieures , comme on les diftingue dans celles dont je viens de
parler, qui apparemment font les mâles , & celles-cy les fe-
melles.
Dans de certains momens on les voit avoir le derriere tout
heriflé de poils, couchez de EE en B. On les voit aufli avoir
“le corps mal terminé , & comme s'il étoit façonné en dents
de fcie. Et en examinant bien ce contour , on apperçoit que
ce font des anneaux qu'on voit rentrer les uns dans les au-
tres , & fortir enfuite avec une promptitude merveilleufe. On
apperçoit encore dans de certains momens des filets de nerfs
prefque imperceptibles, qui s'étendent de la tête à la queué
de ces chenilles , qui s'enfient & qui fe défenflent alternati-
vement dans le tems qu'elles rampent ; & font ainfi le jeu,
curieux à voir, des annçaux qui compofent en partie le corps
de ces infectes. ee
Enfin nous avons encore obfervé que le mélange des infu-
fions de foin & du celery ; dont je parleray bien-tôt, ne fai-
foient point perir les animaux de ces deux liqueurs , & que
ce compofé donne lieu à un fpeétacle tres-réjoüiffant ; puif-
que dans la moindre goutte de ce compolé le peer ÿ
i
g DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
peut découvrir en un inftant une douzaine de poiflons diffe-
rens les uns des autres, & fi curieux à voir & à obferver ,que
je ne penfe pas que le divertiflement de la Comédie , celuy
de l'Opera avec toute fa magnificence , ceux des Danfeurs
de cordes , des Sauteurs , & des combats d'animaux , que
nous voyons dans cette fuperbe Ville , doivent leur étre pré-
ferez.
Er il eft certain que l'étude de ce que nous remarquons
dans ces infufions durant une année , remplit davantage la
capacité de l'efprit ,que ne font tous les grands appareils d’un
feftin des plus magnifiques.
Voicyle deflein d'une autre efpece de chenille aquatique,
qui a été péchée dans une infufon à froid de la queuë d’un
bouquet, compofc d'œillets, de jaflemin, de tubereules , &
de quelques autres fleurs ; qui n'ayant pü trouver place dans
la fixiéme Planche , a été deflinée & gravée de route fa lon-
gueur apparente dans la cinquiéme. Celle-ci differe de la pré-
cedente ; 1°. En ce qu'elle cft beaucoup plus longue: 2°. Êue
fa queuë marquée 1 eft compolée de trois pointes, au liew
de deux. 3°. Que l'on obferve deux petits bras à côté du
cœur marqué 3, qui luy fervent d’appuis pour ramper , &
pour s’élancer quand elle veut nager ; ce que je n'ay pû re-
marquer dans l’autre. 4°. Que fes inteftins marquez 4 ne for-
ment qu'une mafle , fans aucune divifion ou feparation qui”
foit apparente.
Enfin l'on n’y découvre ni anneaux , ny filets de nerfs,
ny dents de fcie , ny poils dans la longueur de fa queuë.
Tout le refte eft icy de même que dans la chenille préce-
dente.
BT AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XXVIL 57
+ oo onu rentrant ram
CHAPITRE ”"XXVIT
De l'infufion des fleurs d'un Citronier.
E 14. Aouft 1713. un de mes Amis ayant mis infufer à
froid des fleurs d’un Citronier , dans de l’eau commu-
ne , il y apperçut de trois fortes de poiflons en peu de jours,
qui ne meritoient pas d’être reprefentez par des figures :
mais en continuant {es obfervations, il en vit d’autres qu'on
peut appeller Tortuës. En voicy une reprefentée entr, com-
me il l’a vüé. Sa tête, que l’on voit aflez large, eft bien
courte ; elle eft ornéc de deux cornes, à peu près femblables
au bois d’un cerf, & comme emboëtée dans l’une des extré-
mitez de fon corps, qui paroïfloit comme couvert d’écailles.
Sa queué eft tres-longue , & compofée de plufieurs pieces
emmanchces l’une dans l’autre ; & quoy qu'on n'ait pû dé-
couvrir de pieds ou de nageoires autour du corps de cette
tortuËë , neanmoins les divers mouvemens que l’on a obfer-
vez dans fes démarches , font aflez juger qu'elle en étoit
munie,
Planche 6.
CGÉLAPEERE XX VILE
D'une infufon d'anémone ; [urnommée la Royale.
À nature qui fe plaît à diverfifier fes productions , &
Le: fe fait admirer dans tous fes ouvrages , continué à
nous en donner des preuves dans cette infufion d’anémone , Planche 6
préparée à l'ordinaire avec de l’eau commune ; puifqu’au
bout d'environ huit jours on apperçut dans une goutte de
cette infufion un animal nouveau, de la groffeur & de la f-
gure qu'on l'a reprefenté à l'endroit de cette Planche mar-
ué 12,
Tout le deffus de fon corps eft couvert d’un beau mafqué
Planche 7.
58 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
bien formé , de figure humaine , parfaitement bien fait;
comme on en peut juger par ce deflein, où l’on voit fix pat-
tes & une queué , fortant de deffous ce mafque , qui eft cou-
ronné d'une coëffure finguliere.
On voit enfin dans cette Planche, & à côté du nombre 13;
une anguille d’une conftruétion particuliere , que je péchay
un jour dans l'eau commune qu'on avoit donné à boire de-
puis quatre heures à un de mes ferins de Canarie. Cette an-
guille paroïfloit blanche & bien tranfparente, n'ayant rien
dans l'étenduë de tout fon corps qui fut capable d'empêcher
fa parfaite diaphaneïté. Elle me parut plus grofle & plus
courte que celles du vinaigre , & d’une compofition bien dif-
ferente ; puifque fa longueur fembloit être couverte d’une
membrane tres-délice , tournée en fpirale , formant des an-
neaux qui rentroient les uns dans les autres , & qui en for-
toient avec une facilité mervcilleufe.
CHAPIFRE XXI
Des infufions de tros differentes portions d'une tige de celeri,
mifes à part dans divers vaiffeaux de verre.
E premier Novembre 1712, je pris une plante de celeri
À que je mis infufer à froid dans trois vaifleaax de verre;
anfi que nous l'allons dire : Je mis dans le premier vaifleau
une partie de la tige rompuë en petits morceaux, pour y
étre mieux rangez; je verlay par-deflus de l'eau commune };
dont j'achevay de remplir le vaifleau : je ne mis que de l’eau
commune dans le fecond vaifleau , par-deflus des feüilles
vertes de cette plante ; & dans le troifiéme vaifleau je mis
quelques morceaux de la tige de cette plante , avec des feüil-
les & de l’eau.
Le feptiéme jour de ces préparations , j’apperçüs pour Lx
premiere fois des poiflons dans chacune de ces liqueurs ; j'en:
vis de deux fortes dans le premier vaifleau , & d'une feule
efpece dans les deux autres.
Mais
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XXIX. 5
Mais un mois aprés , en examinant exatement chacune
de ces liqueurs , je remarquay que ces crois infufions conte-
noient environ dix fortes d'animaux de diverfes grofleurs ,
de diverfes figures , & de differens mouvemens, dont je
vais donner une explication particuliere; car il en eft de ce-
cy comme d'un Tableau d'hiftoire qu'un Peintre celcbre
vient d'achever, & qu'il fait voir à fes amis , qui felon le plus
ou le moins de connoïflance qu'ils ont de la Peinture , y dé-
couvrent plus ou moins de beauté. S
Ceux qui font marquez 1 & 2, {ont les plus petits ; mais
ils furpañlent en nombre ceux de toute autre efpece qui fe
trouvent dans les trois vaifleaux. Je les reprefente icy de la
figure & de la groffeur que je les ay vüs avec la lentille d’une
ligne & demie de foyer:les plus petits reflemblent à un 8 de
chiffre , quand ils font accouplez , & le plus fort des deux
entraîne , en nageant , le plus foible. neb sirre
Ceux qui font reprefentez en 2, que je nomme Cornemu-
fes, s'accouplent par le bec, qu'elles ont un peu courbé &
aflez aigu ; on voit que nonobitant cet accouplement , elles
ne laiflent pas de nager tres-vite : leur allure eft aflez agréa-
ble à voir; elles voyagent dans la goutte de liqueur en s’en-
fonçant & fe relevant alternativement , & fe tenant ainfi,, el-
les s'écartent & fe rapprochent l'une de l’autre , fans s’arré-
ter un feul moment. |
Toutes ces Cornemufes ne font pas entierement fembla-
bles ; il en eft de cela comme des animaux d'un même genre,
qui a fous luy differentes efpeces.
Les unes nagent feules avec une rapidité extraordinaire ;
pendant que d'autres avancent d'une vitefle mediocre ;, &
qu'on en voit qui vont tres - lentement : quelques autres de-
meurent aflez long-tems en repos; mais la plüpart font dans
une agitation perpetuelle. Il y en a de longues & de courtes,
de blanches argentées, de jaunes dorées, & de brunes.
Une curiofité des plus fingulicres , c’eft d'obferver ce qui
fe pañle au-dedans , & tour autour d’une mafle de matiere
formée d’une tres-perite pellicule , que les meilleurs yeux ne
cuvent découvrir fans Microfcope , & qui fe prend au ha-
zard à la furface de l'infufion , s’attachant au bout de la tige
i
Pijanche 7
60 DES ANIMAUX /AERIENS, TERRESTRES
la plus menuë d’une plume à écrire , pour. les mettre fur le
porte-objet du Microicope ; car:on y voit fourmiller tous les
animaux dont nous parlons : ils y font en fi grand nombre ;
& ils sy remuent avec tant de virefle ; qu'on à de la peine à
détourner fa vûé d’un fpeétacle fi nouveau & fi furprenant :
auf croit-on difhcilement ce que j'en dis, fi je nétois prêt
de faire obferver toutes ceschofes à ceux qui en voudroient
douter. Il s'en voit dans de certains endroits quelques-uns
d'accouplez differemment; ailléurs il y en à qui s'arrêtent
: faifant le guet comme des fenrinelles , qui femblent appré-
hender d’être furprifes , tandis que d’autres pour aller à la
découverte , s'éloignent de la mafle, puis s’en rapprochent,
comme s'ils avoient quelque chofe à faire entendre à ceux
qui.demeurent aux environs.
Onvoiti fouvenr dans une autre goutte de la même infu-
fion, prife dans un autre endroit du même vaifieau , un fpec-
tacle tout nouveau, qui donne beaucoup plus de plaifir que
l’oncn'eir a'eu auparavant. On y découvre, par exemple,
des efpeces de poiflons longs & plats, que j'appelle des fol-
les : les voicy reprefentées dans les endroits marquez 3, 3,
comme nous les avons vüëés. L'endroit de ce poiflon le plus
aigu , eft la têce ; le refte de fon corps eft tranfparent , à la
referve de quelques petites taches brunes que lon y voir en
dedans. Les changemens de poftures, & la varieté des mou
vemens que l’on remarque en ces infeétes , font beaucoup
plus de plaifir à voir, & donnent plus de fatisfaétion, que ne
feroit cout ce que l'on en pourroit lire dans une defcription
particulicre.
‘+ Dans le vaifleau où il ny a que des feüilles en infufon ;
ony découvre entr'autres animaux , des poiflons femblables
à ceux qui font exprimez dans les endroits marquez 6. On
voit immédiatement au-defous ; au-deflus , & à côté de ce
chiffre , une ouverture aflez confiderable qui paroit tantôt
ronde & tantôt ovale ; felon qu'elle fe prefente à nous. Cette
grande ouverture eft la bouche de ce poiflon, qui diminuë
fi fort dans de certains momens , qu'on ne la peut plus ap-
percevoir, Le nager de ce poiflon s'exccute en dandinant,
de forre qu'on le voit balancer , tantôt à droit, puis à gau-
ET AQUATIQUES. SECONDE ParTtE, Chap. XXIX. 6
che , fe conduifant en apparence par des mouvemens circu-
laires qu'il fait de fa tête. L'on s'apperçoit encore qu'il chan-
ge de figure en fe pliant & repliant , en s'arrondiffant tout à
coup en forme de boule, puis s allongeant tres-vite pour fe
remettre dans fon état naturel. On voit par ces deffeins qu’il
va en diminuant de grofleur depuis la téte jufqu'à la queue,
qui le plus fouvent n'eft pas terminée en pointe ; car il ref-
femble à un pain de fucre coupé vers le fomimet par un plan
parallele à fa bafe.
Ce poiflon meurt le premier de tous ceux: qui fe trouvent
dans la petite goutte de la liqueur , mife en experience fur le
porte-objet du Microfcope ; & un peu avant'que d'expirer ,
on le voit fe mettre en un petit peloton, dont la fuperficié
paroît raboteufe & inégale.
Les animaux dont je viens de parler font fi délicats , qu'ils
perdent entierement leur confiftance , dés que la goutte de
liqueur où ils nagcoient fe trouve évaporée. | di
Et quoy que tous ces poïflons nagent tres-vite dans une
étenduë qui n'a pas plus d’une ligne de diametre, & qu'ils ÿ
foient en tres-grand nombre , neanmoins les uns & les autres
s'évitent avec tant d’adrefle , qu'on n'en voit point s’eñtre-
choquer ; ce qui marque qu'ils ont des yeux. fa
Il n'en eft pas de même d’une autre efpece de poiflons';
qui fe découvrent parmy ceux dont j'ay déja parlé; & dont
la plûpart femblent n'avoir ny tête ny yeux : nous les avons
reprefentez aux éndioits Marquez 4, 4, 4; on voir leurcorps
fe terminer par une longue queuë blanche & tranfparento.
Nous fommes portez à croire que ces animaux n'ont point
d'yeux ; parce que faifant route ils n’évitent aucun des corps
qui fe trouvent dans leur chemin : on s’apperçoit qu'ils recu-
lent dés le moment qu'ils ont touché à ces obftacles ; auffi
remarque-t-on qu'ils avancent füuvent-trés-lentement , ainfi
que font les aveugles des Quinze-vingts ;lorfqu’ils marchent
dans les ruës de cette Ville , où'il y a d'ordinaire beaucoup
d'embarras. OR ES SANTE
Au bout de la queuë de ces fortes de poiflons, on y voit
fouvent une petite portion de la pellicule qui fe forme fur
la furface de linfufion d’où on les'à tirez: ils la traînent aprés
ii
6% Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES -:
eux quand elle ne ‘tient pont au porte-objet où l’on met la.
liqueur ; mais lorfqu'elle y tient de maniere que ne pouvant
l'en détacher, ils reculent vers elle tout à coup, &s en éloi-
gnent de nouveau tres-lentement.
Dans la moindre goutte de liqueur que j’aye pû prendre
dans le troifiéme vaifleau où font mêlées les feüilles , la tige
& la racine ; J'y ay trouvé une fi grande multitude de petits
animaux marquez.i , que ceux dont on a parlé cy-devant
avoient de la peine à les traverfer en nageant entr'eux. Ec
voilà ce que J'ay pü obferver depuis le commencement de
ces infufions, jufqu’au troifiéme Decembre 1712.
Trois jours aprés l'examen des experiences précedentes ;
je remarquay que tous ceux à qui J'avois fait voir une partie
des chofes que nous venons de décrire , prenoïent un plaifir
{i grand à les confiderer , qu'ils avoient peine à quitter le
Microfcope préparé d’une feule goutre de l’une ou de l’autre
des infufons du celeri, dont je viens de parler ; en forte que
pour examiner ce qu'ils appercevoient dans ces trois diffe-
rentes infufions , il auroit fuffi d’un feul Speétateur pour n'oc-
cuper durant une heure, & quelquefois plus , à préparer le
Microfcope, & à répondre aux difficultez qu'il m'auroit fait
Fhonneur de me propofer fur ce qu'il voyoit ; ce qui m'obli-
gea décpenfer à une experience que voicy; en forte que sil
arrivoit qu'elle pûr reüilir , elle feroit tres - commode pour
diminuer des deux tiers le tems qu'il falloit employer pour
obferver les infufions qui étoient dans les trois vaifleaux de
verre que je faifois voir l'une aprés l’autre ; & même pour
tranfporter dans un feul vaifleau une liqueur où il y auroit
dans la moindre goutte qu'on en puifle prendre , de toutes
les diverfes efpeces d'animaux qui feroient dans les trois in
fufions de celeri,
Pour voir fi cela réüfliroit , comme je me l'étois imaginé ;
je pris avec uné petite-cuëilliere à caffé, une portion de l'eau
de chaque infufion, que je verfay fur un linge fin mis au-def-
fus d’un petit verre pour l'y recevoir, aprés avoir traverfé les
pores de ce linge ; & immédiatement aprés je mis une petite
goutte de cette eau fur le porte-objet de mon Microfcope ;
& j'y apperçûs des animaux d’une beauté à faire plailir , &
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XXIX. €;
de toutes les efpeces que j'avois vûés dans les trois infufions
examinées féparément, à la referve de ceux en qui j'avois
obiervé une longue queuë , & que J'ay nommez Aveugles ;
dont Je ne fus pas furpris ; car cette queuë & la pellicule qui
s'y attache tres-communément , fufhfoient pour faire obfta-
cle à leur paflage , au travers des pores tres-petits du linge
dans lequel je les mettois comme dans un tamis.
Le plaifir que m'avoit d'abord caufé la reüfite de cette
experience nc dura pas long-tems, puifqu’environ trois heu-
res aprés je m'apperçüs par une feconde épreuve que pref-
que tous les poiflons de deux efpeces étoient déja morts, &
qu'il y en étoit refté tres -peu des autres à proportion de ce
qu'il y en devoit avoir. Enfin le lendemain en examinant
cette même liqueur , Je la trouvay encore dénüce d’une par-
tie de ceux qui y étoient reftez le jour précedent.
‘Je ne fuis pourtant pas faché d’avoir imaginé ce mélange ;
Car quoy qu'on ne puifle pas conferver tous les animaux qui
s'y remarquent d’abord , on ne lafle pas d’avoir bien du
plaifir à obferver le fpeétacle qu'elle nous prefente ; & l'on
peut dire qu'il en eft de cela comme d'une Piece d'anatomie
qui paroîr tres-belle , & tres-propre à faire admirer l'adreffe
de l’anatomifte, pour nous faire voir tout d'un coup des beau-
tez furprenantes , qui ne fubfiftent fouvent qu'autant de tems
qu'il en a employé dans fa préparation.
On voit encore de gros poiflons ovales, comme en$, dont
on ne peut diftinguer l'endroit où eft la tête, que par leur
divers mouvemens , à caufe de l'égalité de figure & de grof-
feur qui fe remarquent aux extrémitez du plus grand diame-
tre du profil de ces poiflons. |
Dans une feconde infufion des feüilles du celeri j'y ay vt
un nouveau poiflon, dont on voit la figure & la grofleur ap-
parente au-deflous du chiffre 7 : la tête répond au chiffre 8,
où l’on découvre comme des poils mouvans de tems en tems:
Son allure eft tres-lente , & fa figure inconitante , paroiflant
tantôt fous la forme d'une Cornemufe , & tantôt fous celle
d'un Croiffant.
On apperçoit aufli fouvent des mittes dans l’infufion de la
tige du celeri, mife fur le porte-objet du Microfcope, où
1 1
64 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
on les voit marcher d'une grande vitefle.
Dan; une troifiéme infufion de celeri je n'ay point apper-
çû tant de fortes d'animaux , qu’il y en avoit dans les deux
premieres , à caufe que les deux vaifleaux où je imis infufer
ce dernier celeri , avoient fervi à mettre en infufon de l’oi-
gnon dans l'un des deux , & un poreau dans l’autre ; quoy-
que ces deux vaifleaux euflent été bien lavez auparavant d'y
mettre le celeri.
Les poiflons , que je nomme Aveugles , ouvrent fouvent
de grandes bouches, & alors on apperçoit que tous les petits
corps , qui n'en font qu'à un pouce de diftance apparente ,
femblent s’y precipiter ; enfuite on voit qu'ils s’en écartent
par les côtez , comme fi cer animal les repoufloit avec vi-
teflc.
On voit auffi aflez fouvent qu'en quelques-uns de ces der-
nicrs poiflons , une partie de leur queuë eft tournée comme
un tire-boure.
Engre 9 & 10, on voit un autre poiflon de figure fphéroï-
de; il prend aufñli de tems en tems celle qui eft au-deflous du
chiffre 11, & d’autres fois celle que l'on voit au -deflous de
12 ; & c'eft dans cette derniere qu’on le voit commencer à fe
mouvoir d'une vicelie fi extraordinaire & fi furprenante , qu'il
n'eft pas poflible de la pouvoir exprimer ; & de tems en tems
on leur voit faire des culbutes qui ont du rapport avec quel-
ques-unes de celles que font nos Sauteurs, qui mettent leur
têtes entre leurs genotils , pour tourner en roulant fur une
fuperficie plane , où fur un chemin uni pratiqué fur ie pen+
chant d'une montagne.
Nous fimes enfuite diverfes autres infufions de celeri ;
dans lefquelles nous apperçünies quelques autres poiffons dif-
ferens des précedens : on en voit un au-deflous du chiffre 13,
qui reffemble affez à une bouteille, 3h
À l'endroit marqué 14, on y voit trois cornemufes aflez
srofles , deux defquelles paroïflent accouplées d'une autre
façon que celles qui font en 2.
Enfin au-deflous du chiffre 15, on y voit un poiffon des plus
extraordinaire que lon en puifle voir : il eft prefque tout
rond , & fon corps eft tout couvert de poils : fon mouvement
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XXX. 65
eit à peu prés femblable à celuy d’une piroüette qui tourne
fans guéres changer de lieu.
Jay remarque que l'infufion du celery fe géle plus difici-
lement que celles du foin , du poivre, des écorces de plu-
fieurs fortes de bois infufées féparément , &c. d’où l'on peut
conjeéturer que le mouvement particulier des parties de
cette eau de celery , eft plus grand que n’eft celuy de celles
des infufions dont je viens de parler.
CA PITT RE: XX.
De plufieurs infufions de paille € d'epx de bled.
Ü commencement du mois de Mars de l’année 1714 ;
je mis infufer à froid de la paille de bled & deux épis,
dans de l'eau de fontaine ; & dés le fecond jour de cette in-
fufon , j'y apperçûs des poiflons reprefentez fous le chiffre 1,
que je nomme Cornemules.
H s'y en trouva aufñli plufieurs autres femblables à celuy
qui eft marqué 2, que je nomme Uïinal, dont la bouche eft
au-deflous de la lettre À : le dedans de leurs corps étoit rem-
pli de quantité de petits corpufcules, les uns blancs & tranf-
parens , & les autres bruns. Parmi ces deux fortes de poif-
{ons , j y en apperçûs d'une troifiéme efpece , que J'ay nom-
mez Rognons argentez : on les voit reprefentez au nombre
de quatre , formant un groupe autour du chiffre 3, & rour-
nant chacun fuivant l’ordre des lectres ACB. Ils fe mouvent
aufli d'un mouvement diret & aflez lentement.
Le corps de ce poiflon eft de couleur d'argent mat ; &
quoyqu'il foit parfemé de petits corps bruns en des endroits,
& tout-à-fait opaques en d’autres , il ne laifle pas d’être aflez
tranfparent : la tête fe voit en À, le derriere en B, & fon
dos en C.
Une autre efpece de petit poiffon fe fit voir fous une for-
me ovale, de la longueur d’une ligne ou environ. Peu de
jours aprés j'y en apperçüs d'une quatriéme efpece , que j'ay
Planche #
66 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
nommé Bouteille dorée , à caufe de fa figure la plus conftan:
te , & de fa couleur.
La bouche À de ce poiflon s'applique quelquefois fur un
corps rond qui s'y attache fortement , de maniere qu'ils pa-
roïllent enfuite ne compofer qu'une mañle , qui reflemble à
une gourde figurée en 6. Et ce qu'il y a de plus furprenant ,
eft de voir ce poiffon continuer fon nager avec fa proye.
Une cinquiéme efpece de poiflon que Jay nommé Solles
dorées , à caufe de fa figure & de} fa couleur , eft vüë icy
dans toute fa longueur , qui eft tres-confiderable ; puifque
depuis fa tête'qui eft en À , jufqu'à fon autre extrémité B,
il y a environ vingt lignes : fa forme n'eft pas conftante ,
puifqu'on le voit fe raccourcir & s’allonger de moment en
moment pendant fon nager , qui s’execute tres-vite, & en
diverfes façons. |
On juge facilement que ce poiflon eft plat , à peu prés
comme une folle ; parce que durant fon nager on voit fenfi-
blement augmenter & diminuer la largeur de fon corps.
Voicy une feptiéme efpece d'infeéte que nous avons nom-
mé Aveugle , mais qui differe en quelque chofe des préce-
dens. L'endroit A défigne leur bouche , qui eft quelquefois
fi grande , qu'elle furpañle la largeur de leur corps. BC eft
la queuëé de ces poiflons , au bouc de laquelle on voit une
pellicule qu'ils traînent aprés eux.
On découvre encore de petits poifions de figure ovale ;
qu font de diverfes groffeurs , parmi lefquels il y en a qui
ont en tres-grand mouvement, pendant que d'autres fem-
blent être dans un repos fi grand , qu'on n'auroit pas de pei-
ne à croire qu'ils font morts, fi on ne les voyoit pas , comme
on fait, prendre tout à coup l'effort : vous les voyez repré:
fentez entre les queuës de deux aveugles.
Des Sygnes.
J E donne le nom de Sygnes à de certains poiflons que j'a
A A 5 = 5 5
vüs dans cette même infufion de paille ; parce que jy
= : . ; DE
trouve quelque reflemblance exterieure : en voicy trois à
côté des chiffres 8, 8,8. L'endroit À marque l'exurémité de
leur
ET AGUATIQUES SECONDE PanRTIE. Chap. XXX. 47
leur tête; B, l'extrémité de la queuë, & C, un gros ventre.
ll s’en voir fouvent de deux efpeces dans une même petite
goutte de cette infufon; les uns étant tres-tranfparens , &
les autres aflez bruns au-dedans du corps, où l'on voit leur
vifceres en mouvement. Leur nager s'execute aflez lente-
ment , & d'une maniere grave , foit en avançant, foit en re-
culant , ou en tournant.
Us retirent fouvent la tête vers l'endroit marqué 8, com-
me s'ils avoient peur de ce qu'ils apperçoivent ; En tournant
leur tête d'un côté & d'autre : j'en ay vû un dont le milieu
du corps fembloit être reflerré ou diminué de largeur.
Les poiflons 9, 9, font ceux que j’ay nommez Araignées
aquatiques , ou Goulus , & dont Je dois parler affez au long
dans le Chapitre XXXII. de cette feconde Partie.
À l'égard de celuy qui eft marqué 10, il eft le feul de fon
efpece que j'aye vû dans l'infufon de paille de bled ; fa f-
gure approche aflez de celle d’une bourfe , ou d'un pot au
lait que nos laiticres portent fur leur tête : fa bouche qui eft
fort grande , & qui fe voit ouverte , fe ferme totalement lors
qu'il s’allonge pour nager , de maniere qu'on perd de vüë fes
deux cornes, que l’on voit courbées en dedans.
Au-deflous du chiffre 11, on voit un poiflon qu'on peut
nommer la petite Solle.
1 & 14, font deux poiflons de couleur d'eau, dont le
mouvement écoit des plus lents & des plus difñciles à voir, à
caufe de leur peticefle , qui eft environ mille fois au-deffous
de celle d’un cheveu.
Enfin 13 eft un poiflon , ou plutôt un ver compofé d’un
grand nombre de tres-petits anneaux tournez fpiralement ,
& dont les extrémitez font terminées en pointes tres -lon-
gues & tres-fines. Le corps de ce ver eft prefque immobile,
c'eft pourquoy il eft befoin d'une grande attention pour le
fuivre dans fon allure ; & l’on a befoin d’un Microfcope auf
parfait que l’eft celuy dont je me fers pour cela.
Voilà tout ce qui eft contenu dans cette huitiéme Planche.
Er voicy maintenant l'explication de ce qui fe voit reprefen-
té dans la neuviéme.
Planche »,
68 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES.
] ° ._.
Des Grenades aquatiques, couronnées € barbuës.
’Ay donné le nom de Grenades aquatiques, couronnées &e
barbuës, aux poiflons que nous avons reprefenrez dans
cette Planche ; parce qu'ils m'ont paru avoir quelque reflem-
blance exterieure à ce fruit. Je commençay à les appercevoir
le matin du premier Juillet, dans une tres-petite goutte de
linfufion de paille de bled , en me fervant d'une lentille d’u-
ne ligne & demie de foyer.
Ces animaux me parurent d'une belle couleur d'ambre ;
claire & tranfparente ; ce qui me donnoit le moyen d’obfer-
ver toutes les parties intericures de ce poiflon, que j'apper-
cevois des plus brillantes que J'aye encore vüës. La diverfité
des formes fous lefquelles ce poiflon s’eft fait voir, m'oblige
de dire quelque chofe de chacune en particulier. Dans la
premiere figure on voit quatre petites éminences au-deflous
des lettres ABCD, garnies de poils, qui ne reftent pas
long-tems dans cette fituation : celle qui répond immédiate-
ment au-deflous de B, fe joint à celle qui eft marquée par À;
& celle qui eft au-deffous de C fe Joint à D, & fi intimement,
que le tout paroît alors, ainfi que cela eft vû en la deuxiéme
figure au-deflous des lettres A D. Ces éminences groflies ,
forment les lévres écartées de la bouche de ce poiflon, dont
le jeu des poils , que l’on voit mouvoir d’une maniere aflez
uniforme , oblige tous les petits corps , qui font à peu de dif-
tance de ces lévres, d'entrer dans fa bouche, & d’où la plû-
part font repouflez avec autant de virefle , qu'ils en avoient
eu pour y entrer.
Toutes les éminences marquées ABCD, de la prenuere
figure , ou les deux de la feconde , fe retirant quelque peu
vers E , découvrent une efpece de couronne à quatre poin-
tes, femblable à ce qui paroït au-deflous du chiffre 3; mais
cette couronne fe voit bien-tôt recouverte des mêmes émi-
nences À BCD, qui {ont tres-mobiles.
On apperçoit un corps en E , dans chacune de ces figu-
res, que je crois être le cœur du poiflon ; parce qu'il paroït
soujours dans un mouvement égal, & qu'on y remarque ,
ET AQUATIQUES. SECONDE Parrre. Chap. XXX. 69
comme au nôtre, un {yftole & un diaftole. Ce cœur a une
liaifon tres-étroite avec le corps marqué F, qui eft plus gros
que luy , & qui peuvent pañler pour les inteftins de cer infec-
te, qui font toujours dans un mouvement qui me paroît af-
fez régulier : & il faut obferver que cette mutuelle corref-
pondance qui eft entre le cœur & le vifcere F, vient de co
qu'il y a deux filets de nefs , ou deux petits ligamens en G,
qui vont de l'un à l’autre , comme on le peut remarquer
avec un peu d'attention.
Le cœur femble être divifé en deux lobes , que l'on apper-
çoit s'écarter & fe rapprocher lun de l’autre, en de certains
tems; ce qui pourroit bien donner occafion de penfer que ce
font les poulmons de ce poiflon qui environnent fon cœur ;
& c'eft ce que Je laifle à deviner aux fameux Medecins, & à
nos plus illuftres Anatomiftes.
Le derriere de ce poiflon paroït rond & fermé en de cer-
tains momens , & ouvert en d'autres ; & alors on apperçoit
deux petites éminences pointuës , comme on voit en H de la
premiere figure.
Jen ay vû un feul, reprefente en la quatriéme Figure, qui
avoit quatre de ces petites éminences aiguës , placées deux
d'un côté de l'anus , & deux de l'autre.
C’eft par cette ouverture que l'on voit fortir & rentrer,
avec beaucoup de virefle , une longue queuë i 1, qui eft beau-
coup plus grofle vers la racine 1, qu'elle n'eft ailleurs. L’ex-
trémité L de la queuëé de quelques-uns de ces poiflons , pa-
roît fourchuë : cette queuë eft fi blanche & fi tranfparente ,
qu'on en peut res - facilement découvrir la méchanique , &
expliquer tous les mouvemens qu'on y remarque , avec au-
tant de facilité qu'un bon Anatomifte en a pour expliquer
tous ceux que nous faifons faire volontairement à la plüpart
des parties qui compofent notre corps. Cette queuë qui eft
tres-mobile rentre totalement dans le corps de ce poiflon;
de maniere qu'y étant, les inteftins qui fonten F la cachent
entierement; d’ailleuts les petits anneaux qui [a compofent
rentrant les uns dans les autres, ne permettent pas un libre
paflage à la lumiere ; ce qui fait qu’elle n’eft plus vifible.
On voir de gros œufs attachez au derriere de cet animal ;
k à
70 DEs ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
par le moyen de quelques filets prefque imperceptibles : il y
a de ces femelles qui n'en portent qu'un, il y en a qui en
portent deux, & quelques-unes jufqu’à fix , ce qui cft aflez
rare ; & lorfqu'on y en voit tant , ils font plus petits que quand
1 y en a moins.
La queuë de ce poiflon frotte ces œufs à l'entrée & à la
fortie de fon corps, tournant de côté & d'autre avec beau-
coup de foupleffe : ces œufs paroiïflent tres-réguliers , & bien
brillans pendant qu'ils font pleins ; mais dés qu'ils font vui-
des, on les voit tout plats & fans rides , fous une forme ova-
le , plus tranfparens qu'ils ne l'etoient étant pleins; & quoy-
que vuides , les meres les portent prefque toujours attachez
en croupe , & en nageant, comme elles les portoient aupa-
ravantr : J'en ay vû un feul feparé du corps de ce poiflon, flo-
gant dans la petite goutte d’eau mile en experience fur le
porte-objet du Microfcope : cer œuf paroiïfloit immobile de
même que tout ce qui.évoit au-dedans, J’ay aufli vû deux de
ces œufs dans le corps d’un de ces poiflons , qui paroifloient
comme on les voit au-deflous des lettres GG, Fig. 6.
Ces poiflons font tres-réjoüiflans à voir , particulierement
quand ils font des culbutes , parce qu'ils les executent avec
beaucoup d'adrefle. Il s'en voit quelques-uns qui cournent
circulairement , tantôt d’un côté & tantôt d’un autre , à l’en-
tour du point F, qui eft le centre de pefanteur de l'animal.
Dés que la liqueur eft mife fur le porte-objet du Microf-
£ope , on les voit nager tres -lhibrement en avant; quelques-
uns s'arrêtent enfuite , & c'eft dans ce moment qu'ils donnent
le tems de bien obferver toutes les circonftances dont nous
parlons.
Ils fe frottent quelquefois l’un contre l’autre ; ils fe détour-
nent fans fe choquer , & on les voit éviter tout ce qui s'op-
pofe à leur chemin d'une maniere fi adroite , que bien qu’on
ne voye pas leurs yeux , on ne peut pas douter qu'ils n'en
foient munis, & de tres-bons.
De tems en tems ils appuyent le bout de leur queué fur le
porte-objet du Microfcope , & dés ce moment-là on voit
qu'ils avancent tout le corps au-delà de ce point ; qu'ils l'en
gpprochent enfuite & l'en éloignent; puis ils reprennent leur
ET AQUATIQUES. SECONDE Parrie. Chag. XXXT 1
allure ordinaire en nageant , fans qu’on puifle remarquer au-
cune patte ni aucune nagcoire autour de leur corps.
Le 22. Juillet j'apperçus , dans une goutte de l'infufion
donc je viens de parler, une chenille aquatique ; & j'ay re-
imarqué que les Grenades aquatiques dont Je finis icy l'hif-
toire , foutiennent mieux les grandes chaleurs qu'aucun des
plus gros poiflons que J'aye cy-devant obfervé dans les infu-
lions précedentes ; puifque pour l'ordinaire les gros meurent
dans ce tems-là plutôt que les petits, ce qui neft point en-
çore arrivé à ceux de cette infufon , où je viens d’en voir
jufqu'à quatre dans une tres-petite goutte , quoyque la cha:
leur foit fort grande ce jour 28. Juille.
CHAPITRE XXXL
De la paille d'orge, de celle du fécle, de celle d'avoine, €
du bled de Turquie 3 chacune de ces chofes mife feparément
en infufion dans de l'eau commune.
-
E n’ay pas rapporté dans le Chapitre précedent tout ce
a que j'ay vû dans les differentes infufions que J'ay faites de
la paille de bled ; je me fuis contenté de dire ce que j'y ay
découvert de plus remarquable , m'étant refervé d’avertir
dans celuy-cy, que l'air contient dans une faifon ce qu'il ne
contient pas dans une autre ; & que les animaux qui régnent
dans un même lieu durant une année entiere , font fouvent
differens de ceux qui s’y voyent dans un autre. Ce font ces
varietez qui occupent agréablement les perfonnes qui fe don-
nent la peine de continuer leurs obfervations , & même d'en
faire en differens lieux , confiderablement éloignez l'un de
l'autre. Par ces diverfes experiences on s’éclaircira de plu-
fieurs faits, & l'on ne fera pas furpris fi l'on ne découvre pas
toujours les mêmes chofes dont je parle, ni pourquoy on en
découvrira d'autres dans une femblable infufion dont je n'ay
rien dit; parce que les nouveaux infeétes qu'on y aura apper-
cûs me feront échapez, ou peur-être à caufe que durant la
K 11
Planche 10,
G
72 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
faifon que j'avois prife pour faire cette experience, il ne s'y
en trouva point de la même efpece.
Jay remarqué , par exemple , dans toute l'année 1714, &
dans une partie de 1515, un grand nombre de grofles arai-
gnées & de chenilles aquatiques, dans fept ou huit infufions
differentes; ce qui ne m'étoit pas encore arrivé.
Les differentes infufons à froid de paille d'orge , d’avoi-
nc, de fégle , & d'eau commune, faites féparément dans
des vaifleaux bien nets, nous ont fournies de tres-beaux
poiflons ; de même que deux autres infufions de bled de Tur-
quie faites en divers tems.
CHAPLERE XX XXL
De l'écorce de borx de chêne qui porte le eland, mife en infu
fion dans de l'ean commune.
Nviron le quinze Decembre de l'année 1714, je mis in-
fufer à froid de l'écorce de bois de chêne dans de l’eau
commune , dont Je remplis un grand verre à boire , & du-
rant l'efpace de plus d’un an j'y apperçüs fucceflivement tous
les poiflons reprefentez dans cette Planche , à chacun def-
quels Jay donné un nom particulier ; de forte que j'ay jugé
à propos de nommer le premier , la Tortuë , ou le poiflon à
la queuËë umbilicale : cet infecte s’allonge & fe raccourcir
tres-facilement ; il prend de tems en tems une figure ronde
qu'il ne conferve qu'un moment : on luy voit quelquefois ou-
vrir la bouche d'une grandeur furprenante , par rapport à la
grofleur de fon corps; & fes lévres, qui forment à peu prés
la circonference d'un cercle , font garnies de petits poils ;
dont le jeu fait plaïlir à voir , à caufe que ce mouvement par-
ticuher oblige une partie des petits corps, qui fe trouvent
correfpondre vis-à-vis de luy , d'aller fe précipiter dans fon
cftomac , où vray-femblablement la partie qui doit fervir à
le nourrir, demeure ; tandis que le refte eft vû s’en éloigner
avec vitefle. Son allure eft des plus finguliere que lon puifle
ÉT AQUATIQUES. SECONDE PARTY. Chap. XXXI 7:
voir ; VOUS en jugerez vous-même par ce que j'en vais dire :
fa queuë que l’on voit attachée à fon corps , à peu prés com-
me le cordon l'eft au nombril d’un enfant qui vient de naî-
tre , luy {ert comme d'un gouvernail pour luy procurer pref-
que tous les mouvemens qu'on luy voit faire. Cette queuë
eft fort grofle vers fa racine , & bien aiguë par {on autre ex-
trémité , où elle fe divife en deux parties encore plus aiguës,
qui fe joignent fi exaétement, qu’il femble aprés cela ne faire
plus qu'un tout fans aucune féparation.
Ïl arrive quelquefois que ce poiflon attache les bouts écar-
tez de cette queué fur le porte-objet du Microfcope; & fur
ce lieu-là il tourne tout fon corps ,en prefentant aux yeux du
Spetareur tantôt fon dos qui eft convexe , comme le deflus
de l’écaille d'une tortuë, & tantôt fon ventre qui paroït con-
cave, comme le deflous de la même écaille.
% Er il faut remarquer que l'extrémité d’en-bas de ce poif-
{on eft fi tranfparente , que fa queué eft également vûë, com
me fortant de fa partie convexe ou de la concave.
La feconde figure eft un autre poiflon à ia queuë umbilica-
le, qui ne differe du premier qu'en ce qu'il a la bouche fer-
mée , & que fa queuë paroît n'avoir aucune féparation.
Et la troifiéme reprefente encore un autre poiflon de fa
même efpece que le précedent, quoyque fous une forme un
peu differente. Ce poiflon paroît ainfi à caufe qu'il retire en
arricre la partie fuperieure de fa tête qui eft double , & dont
les deux avances , en forme de cornes , étoient entierement
couvertes.
Le quatriéme poiflon fera nommé le rat d’eau, à caufe de
quelque reffemblance qu’il a avec cet animal: fa tête paroît
fort bien marquée , & {es lévres garnies de longs poils , dont
le mouvement produit le même effet que plulieurs autres ,
dont on à parlé plus haut.
Le cinquiéme poiffon fera nommé la patte d'écrevifle , à
caufe des deux becs recourbez qu'on luy voit, dont le mou-
vement eft tres-lent , de même que l'eft celuy de tout fon
corps, qui fait tres -peu de chemin en bien du temps; ce
qui facilite le moyen de l'obferver exaétement , & de re-
marquer dans prefque toute la longueur de fon corps un aflez
74 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
bon nombre de petits globules dorez & brillans.
Le fixiéme poiflon ayant à peu prés la figure d'une mañluë,
fera ainfi nommé : fa tête eft fort grofle par rapport au refte
de fon corps qui fe termine en pointe : le dedans de fon
corps cft femé de petits grains tranfparens & opaques, qui fe
font voir diverfement felon la maniere dont ils renvoyent la
lumiere qu'ils ont reçüé.
Je nommeray celuy qui eft marqué 7 , la féve de vers à
foye ; parce que le corps de ce poiflon eft compofé de plu-
fieurs anneaux , & de plufieurs fibres longitudinales , qui fer-
vent à le faire allonger & à le raccourcir avec beaucoup de
facilité. La figure de fa tête paroît peu differente de celle de
fa queuë , & on ne la diftingue guére que par fon nager.
Le huitiéme poiflon fera nommé Spheroïde , à caufe qu'il
reflemble exterieurement à un œuf, dont les bouts font égaux
& bien arrondis. o
Sa rêce eft vûé en haut, & un peu au-deflous on y voit un
petit corps qui fe meurt tres-régulierement , ce qui me fair
penfer que ce pourroit bien être le cœur de ce poiflon ; &
plus bas on apperçoit pluficurs petits corps ronds & de di-
verfes grofleurs , qui font peur-être des œufs, que l'on voit
agitez par les divers mouvemens du poiflon, qui s’allonge &
{e raccourcit, qui fe plie & déplie diverfement en nageant.
Lorfqu'on donne quelque attention à confiderer le grand
nombre d'œufs que l’on voit dans le corps de ces poiflons ,
lon n'eft pas furpris d’un autre nombre prodigieux de ces
animaux, qui fe voit dans la moindre goutte que l'on puifle
prendre de cette infufñon , & l’on cefle par-là d'admirer cet-
te multitude étonnante qui paroît & qui difparoic en peu de
tems ; puifque l’on ceffe d'en voir de cette nature au bout
d'environ huit jours , & qu'en leur place il s’en prefente de
nouveaux aux yeux des fpeétareurs attentifs , qui n'en font
pas moins touchez qu’ils l'ont été des precedens.
En voicy de plufeurs fortes qu'on peut nommer anguilles ;
qui different entr'elles | & qui different encore de celles du
{ont
vinaigre ; en forte que l'on pourra inferer de-là que ce
des poiffons d'un même genre , & de diferentes elpeces.
Celle qui fe voit reprefentée au-deflous du chifire 9 , ma
paru
ET AQUATIQUES. SECONBE Paré. Chap. XXXIIL #+
paru blanche & tranfparente, quoyque prefque toute la lon:
gueur de fon corps fut parfemée d'un grand nombre de pe-
tits grains brillans.
Sa groffeur étoit bien confiderable , par rapport à fa lon-
gueur , qui paroifloit n'avoir au plus que deux pouces ; & la
grande viîtefle de fon mouvement, qui ne luy failoit parcou-
rir que tres-peu d’efpace en aflez de cems , marque bien en
quoy celle-cy differe des autres.
J'en ay vû deux d’une même efpece dans [a feconde infu-
fion que j'ay faite d'une femblable écorce , qui appuyoient
de tems en tems l'extrémité de leurs queuës fur le porte-ob-
jet du Microfcope , & qui faifoient autour de ces points fixes
plufieurs mouvemens aflez agréables à obferver. La longueur
o ° . , e
apparente de chacune de ces anguilles étoit d'environ deux
pouces, & la grofleur à peu prés comme celle du tuyau d’u-
ne plume de corbeau.
- Au- deflous du chiffre 10. il s’en voir une autre , dont la
longueur apparente étoit d'environ cent lignes, & fa groffeur
dans l'endroit le plus épais de tout fon corps, pouvoit étre de
quatre lignes de diametre.
Sa bouche , qu’elle ouvroit de tems en tems , paroifoit
ronde , & toute la longueur de fon corps étoit munie d'un
bon nombre de filets tres-menus qui ne fe faifoient pas voir
à tous momens ; & au lieu de ces filets on découvroit dans
d’autres tems une ligne fpirale qui occupoit une étenduë con-
fiderable de la longueur de fon corps ; ce qui fuffit pour ex-
pliquer le mouvement de cette grofle anguille , qui étoir
aflez lent pour donner le tenis de l'obferver agréablement à
la lumiere d’une chandelle , & de voir une belle varieté de
couleurs dans l'érenduë d'une partie de la longueur de fon
corps, & particulierement un rouge tres-vif tirant fur le
pourpre : mais lorfque cet animal venoit à fe raccourcir , en
rapprochant l’un de l’autre tous les contours fpiraux du filet
dont Je viens de parler ; toute cette varieté admirable de
couleurs s’efaçoit, & dans ce moment le tout devenoit brun.
Au-deffous du nombre 11, on y voit une autre anguille
d'une grande vivacité, qui plie , déplie & replie cout fon
corps en arc , fe débandant d'un fens cout contraire au pre-
36 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
mier , pour reprendre fubitement la courbure qu’elle avoit
auparavant , Continuant aïinfi ce manége fans changer que
tres-peu de place , n'en occupant qu'autant qu'il luy en falloit
pour executer fes courbures.
Le nombre 12. reprefente une groffe anguille morte de-
puis peu de tems; je l'obfervay le 9. Mars 1715. à la lumiere
d'une chandelle : fa longueur me parut d'environ fix pouces,
& fa plus grande épaifleur etoit d'environ trois lignes. Ce fut
comme par hazard que je découvris vers fa queué une petite
anguille d'environ deux pouces apparens de longueur , qui
fe tremoufloit beaucoup pour fortir du ventre de fa mere ;
mais n'en pouvant venir à bout, elle y mourut enfin. Cette
ébfervation femble fufhire , pour nous aflurer que les œufs de
ces anguilles font couvez au-dedans du corps des meres, &
qu'ilneft pas facile de parvenir à de femblables découver-
ces , à caufe de la vitefle du nager de ces poiflons ; cepen-
dant voicy un moyen für pour y arriver ; car il n’y a pour
cela qu'à attendre que la petite goutte de vinaigre foit pref-
que toutc évaporée , afin que la lenteur du mouvement des
anguilles facilite la découverte de ce qu'elles contiennent.
Ces obfervations étant faites à la lumiere d’une chandelle ,
la diftinétion de l’objet en fera plus belle qu'elle ne feroit à
celle du jour ; parce que pouvant s'appuyer fur une table, le
Microfcope en fera tenu plus ferme ; & d’ailleurs on reçoit
moins de faux rayons de lumiere , que fi l'on obfervoit ces
mêmes chofes à celle du jour,
Par ce moyen nous eûmes le plaifir d’obferver dans la fui:
te deux anguilles', durant prés de deux heures , parcourant
une étendué interieure du corps d'une même mere , où elles
alloient de la queuë vers la tête, puis revenant de-là vers la
queué.
Le 1°. poiflon ayant quelque reffemblance avec la navette
d'un Tiflerand , on luy pourra donner ce nom : fon nager
s'execute également, foit en avançant foit en reculant : lors
quil s’eft allongé on le juge avoir à peu prés deux pouces de
longueur , & environ quatre lignes de grofleur , prifes vers
le milieu de fon corps, où l'on voit d’autres petits corpufcu-
les qui femblent être des œufs, |
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XXXII.
Les extrémitez de ce poiffon fe courbent differemment , de
forte qu’elles femblent luy fervir de gouvernail, & en même
tems de nageoires.
Le 14°. poiflon peut être nommé le bec de Corbin, par rap-
port à la courbure de fa tête, qui fe termine en pointe : l'au-
tre extrémité de fon corps eft grofle & arrondie en forme
d’une larme :on voit de longs poils fous la gorge de ce poiflon
qui luy fervent de nagcoires ,en forte qu'enles remuantla re-
fiftance du liquide où il nage Le fait tourner du côté de fon dos.
Le 15° poiflon fera nommé la petite Âraignée aquarique :
la figure de ce poiflon eft femblable à un fphéroïde , fur le-
quel on remarque plufieurs lignes brunes & paralleles entr”-
elles , qui s'étendent du fens du plus grand diametre de ce
poiflon ; & entre ces lignes paralleles on y voit plufieurs cor-
pufcules plus bruns que le refte de fon corps.
J'ay aufli remarqué que les pattes du devant de fa tête
étoient plus longues que celles qui font au bout oppofe , &
que celles du milieu de lune & l'autre extrémité de tout fon
corps font plus longues que celles qui font a côté.
Le 16° reflemblant à une larme , fera nommé de ce nom :
fon corps eft uniforme & tranfparent, de maniere qu'on n'y
remarque aucune inégalité fenfible. : fon col eft long & un
peu courbé ; & fa tête qui va diminuant de grofleur , fe ter-
mine par une petite rondeur. ;
Le 17° poiflon fera nommé Limas : fa tête eft ronde, & fa
queuë aiguë : le refte de fon corps eft aflez gros par rapport à
fa longucur , qui devient plus courte dans fon allure qui pa-
roît aflez réguliere. :
Le 18° poiflon a été nommé Cheniile aquatique : il s'en
trouve de diverfes efpeces dans plufieurs infufions de plantes
toutes differentes ; & j’ay remarqué en quelques-unes que les
poils que nous avons dit ailleurs être comme plantez aux deux
lévres de cette chenille , femblent tourner dans de certains
momens , comme une molette d’éperon tourneroit en luy
donnant un coup de doigt ; & c'eft ce mouvement qui déter-
mine une partie des corps qui font d’une certaine grofleur à
fe précipiter dans fa bouche, d’où ils font enfuite chaflez en
partie, avec autant de vitefle qu'ils en avoient eu pour y ar-
river, li
78 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES:
Jay de plus obfervé deux petits corps cilindriques , longg
d'environ une ligne chacun , & d'un peu moins de groffeur,
placez l'un à droit & l’autre à gauche du corps de cette che-
nille , & immédiatement à côté de fon cœur : ces corps fer-
vent d'appuy à la partie anterieure de l'animal, pour luy don-
ner la facilité d'avancer dans le tems qu'il rampe fur le porte+
objet du Microfcope.
On a bien de la peine à découvrir ces fortes de petites
pattes , à caufe qu'elles font tres-courtes, & qu'elles font
prefque toujours fous le corps de cette chenille , ne les en
écartant que tres-rarement,
Le 19° poiflon fera nommé la grofle Araignée aquatique :
fa figure approche de celle d’un ovale ; & fa bouche un peu
enfoncée femble quelquefois fenduë jufque vers le milieu de
fon corps. Ses lévres font garnies de petits poils en mouve-
ment , dont la vitefle femble fe communiquer interieurement
à un petit corps qui eft peut-être le cœur , & les poulmons de
ce poiflon qui l'environnent.
Le derriere eft aufli garni de poils, qui femblent former
une efpece de queué ; & l’on voit immédiatement au-deflus
de l'anus , un amas brun de matiere que je crois être les ex-
cremens de ce poiflon , qui fe nourrit d’autres plus petits
poiflons , que nous avons appellez Cornemufes , & qui pa-
roiflent fe mouvoir dans leurs corps durant quelque tems.
Le refte du corps de ces araignées eft d'ordinaire rempli
de plufieurs petits corpufcules aflez irréguliers , qui peuvent
pañler pour des œufs.
On découvre aufli de ces efpeces de poiflons dans les in:
fufions que l’on prépare avec de la paille de froment , de
celle d'orge mêlée de quelques épis; dans celle que l'on fait
avec du bled de Turquie ; dans la canne d'Inde ; dans celle
du bois & de l'écorce d’acacias ; dans celle du poivre en
grains, &c. Toutes ces araignées, qui different les unes des
autres en quelque chofe , ont du poil tour autour de leurs
corps, couché un peu obliquement de la crête vers la queué;
ce qu'on peut facilement obferver avec une lentille de Mi-
crofcope d'une ligne ou environ de foyer,
Le 20° poiflon fera nommé , le poiflon à la grande gueu:
£T AQUATIQUES. SECONDE PARTIr, Chap. XXXIE 9
le ; parce que fa bouche occupe environ la moitic de toute
la longueur de fon corps : fa lévre fuperieure furpafle de
beaucoup en longueur celle de l'inferieure ; l'une & l’autre
font garnies de petits poils , & tout le dedans de fon corps
eft rempli de petits corpufcules d'inégale tranfparence : en-
fin le derriere de ce poiflon eft terminé par une queuë aflez
finguliere , & dont le mouvement eft peu fenfible.
Le 21° poiflon fera nommé l’Antonnoir , parce que fa fi-
gure la plus conftante luy reflemble : on le voit paroître icy
ous trois formes differentes ; dans celle du milieu on apper-
çoit fa bouche ouverte & ronde ; fes lévres font interieure-
ment garnies de petits poils qui fe mouvent tres-vite : fon
corps cft femé au-dedans de plüfeurs petits corps tres-irré-
guliers : fa queuë, qui eft fort longue , traîne fouvent aprés
elle une petite pellicule attachée à fon extrémité : on en voit
un fecond à gauche qui a la bouche fermée ; & un troifiéme
du côté droit dont le corps eft plus rond : fa queuë forme
dans de certains tems une efpece de tire-boure , qui ne de-
meure pas long-tems dans cet état ; car la tête de ce poifflon
s'éloignant de fon extrémité, les fpires qui paroiffent au mi-
O
lieu fe redrefient.
Le 22° poiflon , qui à la tête faite en trefle , & la queuë
fourchuë, fera nommé le Poiflon à la tête trefle , & au der-
riere fourchu : fa bouche eft tres - petite & bien ronde : la
moitié de fon corps , qui eft du côte de la tête , femble don-
ner le mouvement à tout le refte qui paroît immobile : cette
partie qui eft du côté de la tête eft plus tranfparente que
l'autre, & on l’a vû fe plier tres-facilement en tous fens.
Le 23° poiflon reprefenté en AB , fera nommé Chaufon ;
parce qu'il en a la figure , & que la courbure À C , peut paf-
fer pour l'entrée du chauflon : le dedans du corps de ce poif-
{on eft muni de plufieurs corpufcules tres-tranfparens , que
lon croit être des œufs.
Dans le tems que je me propofois de fupprimer totale-
ment cette infufion , je m'avifay d'en mettre une tres-pe-
tite goutte fur le porte -objer de mon Microfcope , croyant
que ce feroit la derniere fois que J'examinerois cette liqueur;
mais en l'y regardant je fus tout étonné d’y voir un prodige Plancherr,
li
Planche 11,
&o Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
des plus fingulier que j'aye obfervé dans toutes les infufions
précedentes.
C'étoit une efpece particuliere de chenille aquatique , &
des plus rares, n en ayant pü voir que fept ou huit en diver-
{es reprifes, durant trois jours feulement ; ce qui a fufñ pour
en faire des defleins qui occupent une Planche entiere , dans
laquelle Monfieur de Vigneux l’a reprefentée en huit formes,
differentes en quelque chofe l'une de l’autre, ainfi que nous
l'avons vüé.
À B , eit l'une des reprefentations de cette efpece de che-
nille aquatique , où l’on voit que fon corps eft compofe de
pluficurs anneaux en forme de bourlets, qui rentrent les
uns dans les autres, en s'approchant du milieu marqué C.
Ce qu'il y a de plus fingulier dans ce nouveau poiflon , eft
qu'on voit fortir de fa bouche une efpece de trompe, com-
polée de plufieurs pieces engaînées l’une dans l'autre , qui fe
découvent en A, D,H,N,R,YŸ,et&.
L'extrémité de cette trompe fe voit percée en D, en H,
enN,enŸ,ceten &, où elle cft toute ronde:elle eft refen-
duë en deux parties en R ,&en trois en À , où elles forment
deux ou trois petites éminences : en LL , on apperçoit deux
lévres garnies de poils tres- mobiles ; &en TT ,onny voit
aucun poil apparent.
Pendant que nous obfervions toutes ces chofes , nous ap-
perçümes tout d'un coup fortir du milieu de la poitrine de
cet animal une efpece de corne, reprefentée en F & en P,
dont la longueur nous parut compofée de trois efpeces de
falanges d’inégales grofleur , qui rentroient l’une dans l’au-
tre , comme font les tuyaux d’une lunette d'approche que
l'on veut raccourcir ; & cette corne mouvante décrivoit par
lune de fes extrémitez F, P, un arc de cercle , en paflant
tantôt de droit à gauche , & tantôt de gauche à droit; aprés
quoy elle difparoifloit entierement.
Nous vimes au derriere de ce poiflon deux pointes tres-
AIguËs , comme on les à marquées en Ben E ren O4"
S,enZ,& ent. Et lorfque cet animal donne à fa queué
une certaine fituation particuliere , il en découvre juiqu'à
trois , ainfi qu'on les peut voir reprefentées en E.
gr AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XXXHIL 8r
Entre RS, on apperçoit cette chenille de toute fa lon-
sueur; & en V, Ÿ et &, elle y cft vüE plus ou moins rac-
courcie,
CHAPITRE .KXXIIE
Suite des Obférvations faites fur la même écorce de bo de
chêne , qui étoit VEnu flottant [ur ! 7 depurs
Montarçu jufqu à Parss.
F° fapprimant l'infufion précedente , je confervay une
partie de l'écorce , que je fis bien fécher au feu; &
l'ayant remife en infufion dans un vaifleau de fayence bien
net , avec de l'eau de la Seine, j’apperçüs en diverfes fois,
& durant l’efpace d'environ deux mois, les nouveaux poif-
fons marquez 1, 2 & 3.
Jay nommé Gland cornu , le premier de ces poiffons , à
caufe que fa figure approche aflez de celle de ce fruit : fa
tête que l'on voit en haut eft ornée de deux efpeces de cor-
nes, longues , roides , blanches & tranfparentes , aufli-bien
que le refte de fon corps , dans lequel on n’apperçoit aucun
vifcere , ni aucune tache, le tout étant parfaitement égal ,
& l'animal dans un mouvement tres-lent.
Le fecond , que je nommeray le Piroüetteur concave &
convexe , a fon mouvement circulaire : toute fa partie con-
vexe cft garnie d'une feule rangée de poils , plus longs vers
la queuë qu'ils ne font ailleurs : le mouvement de ces poils
eft fi ne & fi particulier, qu'il fait tourner circulairement
ce poiflon , avec tant de vitefle , que les autres n’en fçau-
soient approcher durant fon piroticttement , qui dure aflez
Jong-tems.
Enfin le troifiéme poiflon fera nommé Volute , à caufe
qu'il eft courné fpiralement , de même que le reflort qui eft
renfermé dans le barillet d’une montre de poche : tout fon
corps eft attaché à une membrane tres-fine , blanche & tranf-
parente , fe terminant en pointe du côté de la tête , & fe
Planche 115
“7
E*
82 DES ANIMAUX AERIENS; TERRESTRES
mouvant circulairement avec aflez de lenteur, dont {4
raifon eft aflez évidente pour n'avoir pas befoin d’être ex-
pliquée.
CHAPETRE EXIX J'EN
Des nouveaux poiffons trouvez dans une infufion d'écorce
de boss de chêne neuf.
Nviron le 25. Decembre de l'année 1716, je mis infu-
fer à froid , dans de l'eau de riviere , pluficeurs petits
morceaux d'une écorce tres-épaifle d'une grofle bâche de
bois de chêne neuf, environ deux heures aprés j'y apperçüs
de petits poiflons , que j'ay nommez Cornemufes argentées :
& le 15. Janvier 1717. je commençay à voir dans une tres-
petite goutte de cette eau cinq ou fix nouveaux poiflons
d'un même genre ,qui me parurent aflez confiderables pour
meriter une place dans cette Hiftoire , tant à caufe de leur
couleur, de leur grofleur, figures & mouvemens differens ;
qu'à caufe qu'ils font les feuls de cette nature , que j'aye ap-
perçüs durant tout le cours de mes obfervations.
Pour éc ire l’hiftoire anatomique de ce poiflon , j'ay fait
ce que Jay pû pour trouver un nom qui luy convint ; mais
ni moy ni ceux à qui je l’ay fait voir , n'onc pü y réüfir ; la
raifon en eft, que cet infete ne conferve pas durant une
minute la même figure fous laquelle il paroïfloit un peu au-
paravant ; de forte qu'en tres - peu de tems on le voit fous
routes les diverfes formes reprefentées en cette Planche :
cependant le defir d’être , pour aïnfi dire, le parrein d'un
petit animal aufñfi rare que l'eft celuy-cy , & aufli curieux à
voir pendant fon nager, a fait que plufeurs perfonnes fe font
efforcces de le nommer; mais parce que les uns l’ont apper-
çûs d'une forme particuliere , les autres d’une autre , cela luy
a fait donner le nom de Chenille ; celuy de Chaufle où de
Chauffette , de Guêtre, ou d’Elegant : de Nañle; de poifion
à deux têres : de Cornet à bouquin ; & enfin de Rognon.
Ceux
ET AQUATIQUES. SECONDE PARTIE. Chap. XX XIV. 8;
Ceux qui l'ont vû fous la forme reprefentée en À , l'ont
appellé Chenille dorée , à caufe de la reflemblance qu'il
peut avoir avec cet animal , & de fa couleur d’ambre jaune.
On voit dans fon corps des fibres longitudinales qui s’éten-
dent d'un bout à l’autre, entre lefquelles on apperçoit de
petits corpufcules aflez irréguliers, & d'inégale grofleur , qui
font peut-être les œufs de cette chenille aquatique.
On en voit une autre en B, qui a été nommce Chauflette
ou Guêtre , dans l’une des extrémitez de laquelle J'avois bien
de la peine à déterminer l'endroit où pouvoit être la tête :
cependant comme ce poiflon faifoir fouvent voir en € , une
grande ouverture qui changeoït à tout moment de forme ;
Je crus devoir prendre cette partie-là pour la bouche de ce
poiflon , dont les lévres étoient quelquefois fi étenduës & fi
mobiles , qu'elles pouvoient luy fervir comme d’un gouver-
nail pour fe conduire en partie dans fa progreflion; je dis en
partie , parce que comme il paroît avancer & reculer égale-
ment bien, & fe tourner & retourner en fe pliant & repliant
de toutes les manieres imaginables ; cet infeéte doit avoir en
luy de quoy fatisfaire à tous ces divers mouvemens.
On remarque à l’entour de fon corps de tres-petits poils,
des plus déliez qu'on puifle voir , & dont le mouvement m'a
paru peu fenfible, à caufe de leur grande délicatefe , qui ne
permettoit pas d'en bien faire voir le jeu.
Un autre qui fe voir en D, aflez raccourci , gonflé, plié
& replié , a été nommé Cornet-à-bouquin, à caufe de la forme
particuliere qu'il a pris pour un moment. |
Celuy qui eft reprefenté en E , s'eft fait voir fous la forme
d’une Nafle , qui eft un inftrument fait d’ozier , dont on fe
fert pour prendre des poiflons. |
FGH, cft un autre poiflon , dont la partie GH reflemble
à une jambe mal faite : le milieu de fon corps paroït comme
s'il écoit noûc d'une ligature invifible. |
Au-deflous de la lettre 1, ily en a un autre qui paroît d'u-
ne grandeur extraordinaire , par rapport aux précedens: on
y apperçoit la forme d’un pied , d’une jambe & d’une cuifle
caflée : Je l'ay nommé Bouffon , à caufe qu'il femble {e plaire
dans fes divers changemens , qui s'executent avec tant de
m
84 Des ANIMAUX AËRIENS; TERRESTRES
yitefle , qu'on a eu de la peine d'en fixer une feule atritude,
Celuy qui fe voit au-deflous de la lettre K, peut être ap-
pellé la Maflué ; parce que fa bouche qui eft en bas eft tota-
lement fermée , & que fon corps eft aflez étendu & gonflé
dans fon milieu pour recevoir ce nom. On voit fes œufs que
l'on y a reprefentez par quelques petits globules un peu irré-
guliers. .
Au-deflous de l'endroit marqué L , il s’en voit un autre,
tellement courbé , que reflemblant à une faucifle pliée en
deux, on luy-a donné ce nom.
Au-deflous dés lettres M, M, on y voit deux de ces poif-
fons morts fubitement , y paroïffant {ous une forme qui ap-
proche aflez de celle d’un Rognon , & qui ne font vûs ainft,
qu'à caufe qu'ils ont été faifis dans cet état au moment de
l'évaporation totale de la liqueur où on les avoit vüs fe trai-
ner un peu avanr leur mort.
Dans l'inftant que ces fortes d'animaux ceffent de vivre,
on les voit devenir blancs & tranfparens , de jaune pâle qu'ils
étoient auparavant : la raifon en eft évidente , puis qu'elle
eft la même que celle des liqueurs qui paroïflent colorées ,
étant en gros volume , & qui ceflent de le paroître lorfqu'el-
les fe trouvent en petite quantité dans des vaifleaux de verre
de peu d’épaifleur.
N , eft encore un poiflon de même genre , qui pour la
reflemblance qu'il a avec une racine appellée Carotte , fera
nommé de ce nom.
Il s’en voit un autre en O , que j'ay nommé l’'Elegant, à
gaufe qu'il m'a paru nager avec tant de grace, & {e tranf-
porter d'une maniere f1 grave & fi mayeftueufe durant fes
divers changemens , que je n'ay pü luy refufer ce nom.
P,Q,R,S,T,V,etX, font encore des poiflons de
même nature , vüs immédiatement aprés leur mort, fous
toutes les diverfes formes exprimées au-deflous de ces mé-
mes lettres,
Enfin fous la lettre Ÿ , on y voit un poiflon d’un autre
genre , dont la forme approche aflez d’une efpece de bou-
ceille , pour luy donner ce nom, & qui en nageant parmi les
précedens , comme parmi un grand nombre d'autres , donf
ET AQUATIQUES. SECONDE ParTtE. Chap. XXXV. gs
je ne diray rien, faifoit rentrer pour un moment l'extrémité
de fon col en dedans.
Le froid s'étant augmenté confiderablement , peu de jours
aprés la naïflance de ces gros infeétes, & le vent du Nord
s'érant fait fentir de plus en plus dans l'endroit où je demeu-
re , le nombre de ces poiflons eft diminué peu à peu ; de
forte qu'au bout d'environ quinze jours j'ay ceflé d'en tirer
de cette infufion.
CEA PIERES ER X Ve
Différtation fur la mamiere dont on apperçoit les objets qui
A .
Jont wûs au travers des Microfcopes , € des
Lunettes d'approche.
Es fentimens des Philofophes fe trouvant partagez fur
la maniere dont nous appercevons les objets quand
nous les regardons au travers des Microfcopes & des Lunet-
tes d'approche; j’ay crû qu'étant muni d'un nombre fuffifant
de ces machines , je pourrois par diverfes experiences par-
venir à connoître aflez exaétement la’ matiere en contefta-
tion, & donner par-là les moyens de décider en faveur des
uns ou des autres.
Pour nous conduire avec quelque ordre dans la recherche
que nous voulons faire , il eft, ce me femble , néceflaire de
bien faire comprendre de quoy il s’agit : pour cet effet, je
diray premierement qu'en difcourant un jour avec M:° ***
fur la differente maniere de voir les objets differemment po-
fez dans les Microfcopes ; il remarquoit que dans ceux qui
font montez d’une feule lentille d’un court foyer , l’objet
étoit toujours placé entre la lumiere & l'œil; & que dans les
autres Microfcopes montez de deux ou de trois verres , lob-
jèt y évoit ordinairement fitué un peu au-delà , ou au-deffous
de la lumiere qu'il recevoit pour être renvoyée à l'œil du
Spectateur. |
- Ces obfervatiogs étant fuppofces , nous convinmes encore
m ij
86 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
que les objets opaques étoient vûüs par refléxion dans les Mi-
crofcopes à deux & à crois verres, en les y regardant de haut
en bas. Mais on ne peut pas accorder à Monfieur *** que
dans les Microfcopes à liqueurs on y apperçoive les objets
tranfparens par les rayons de lumiere qui pañlent des pores
de ces corps fur la retine, où faifanc dec impreflions ils
gonnens occafon à l'ame de les appercevoir.
I! faut avoüer que cette maniere d'expliquer lapparence
des objets tranfparens , qui font vûs dans les Microfcopes à
liqueurs, eft tres-fimple ; cependant il n’eft pas difficile d'en
démontrer la fauflete , en prouvant que la lumiere agit dans
ce dernier Microfcope de même que dans le premier ; c'eft-
à-dire , qu'elle y fait encore voir les objets par refléxion ;
mais d'une maniere un peu plus compolée : & que quand
nous recevons des rayons qui viennent à nos yeux fans s'être
refléchis , aprés avoir traverfé les pores des corps tranfpa-
rens , & des rayons refléchis tout enfemble, le corps d'où ils
Étoient partis nous en paroifloit à la verité plus clair , mais
toujours avec moins de diftinétion qu'il n’auroit paru, fi nous
n'euflions point receu de rayons , qui n'auroient fimplement
fait que traverfer les pores des corps tranfparens. Et pour
nc pas confondre les idées differentes que j’avois à l'occafion
des mots de clair & de diftinét, je les définis en cette forte,
afin d'éviter les conteftations qui pourroient naître , en les
employant cy-aprés dans mes preuves , fans avoir pris cette
précaution,
Je dis donc qu'un objet paroït feulement clair, lorfqu'il
envoye beaucoup de lumiere dans nos yeux. Qu'un objet pa-
roît diftinét , lorfque tous fes points exterieurs envoyent une
quantité fuffifante de rayons , qui s’aflemblent féparément
en autant de divers points de la retine , qu'il y en a dans
l'objet.
Et qu'un objet paroït en même tems clair & diftinét , lors
que chaque point de fa fuperficie refléchit dans l'œil le plus
de rayons de lumiere qu'il eft poffible ; & que les rayons qui
parsent de tous ces points de l'objet , fe réüniflent en autant
de divers points de la retine qui leur répondent.
Cela fuppofé , je paflay aux preuves & aux experiences
ET AQUATIQUES. SECONDE Partie. Chap. XXXIV. 87
Qui fuivent, en faifant premierement comprendre que les
rayons de lumiere qui ont fimplement traverfe les pores des
corps tranfparens , ne font pas ceux qui nous font apperce-
voir ces corps ; puifque de rels rayons ne peuvent nous faire
fentir que ce qu'ils rencontrent en leur chemin , & que ne
rencontrant que la matiere fubtile contenuë dans ces pores,
laquelle ne nous eft nullement fenfible , il s'enfuit qu'ils ne
nous fçauroient faire appercevoir aucune partie de ces corps.
2°. Quand par la fenêtre d'une chambre nous regardons
les objets de dehors au travers d’une glace de miroir qui fert
de vitre, nous ceflons de voir cette glace dés le moment que
nous nous appliquons à bien confiderer ces objets , & nous
les appercevons prefque aufli beaux & aufli diftinétemenc
qu'ils nous paroîtroient fi cette glace n'étoit pas pofée en-
tr'eux & nous ; d'où il fuit que la glace, fi elle eft bien net-
te , ninterrompt que tres-foiblement les rayons de lumiere
qui viennent des objets exterieurs ; puifqu'elle ne change
rien dans l'apparence de ces objets, fi ce n'eit qu'elle les fait
paroître en des lieux où ils ne font pas, & quelque peu plus
bruns qu'ils ne paroîtroient , fans l'interpofition de certe
vitre,
3°. Si au lieu de porter notre attention au-delà de ce ver-
fe , nous nous bornons uniquement à le confiderer ; il eft
certain qu'en l'obfervant avec application , nous pourrons
découvrir s’il a été bien adouci, s'il eft bien poli, s'il n'ya
point de rayes, s'il ne s’y trouve ni bules d'air, ni points,
ni ondes , &c. en un mot, nous y remarquerons jufques aux
moindres particularitez fenfibles.
I s’agit donc maintenant de fçavoir comment nous par-
venons à la connoiffance de toutes ces chofes; fi c’eft par le
moyen des rayons de lumiere qui nous viennent immédia-
tement des objets de dehors ; ou fi ce font d’autres rayons
de lumiere que la glace à reçüs du dedans de la chambre , &
qu'elle nous renvoye enfuite , pour nous faire diftinguer cou-
tes ces particularitez ; ou enfin fi c'eft tout enfemble de l’une
& de l’autre maniere que nous les obfervons.
1°, Ce n’eft pas par la lumiere immédiatement envoyée des
objets extericurs que J'apperçois rout ce que je remarque ,
mu]
88 Des ANIMAUX AERTENS, TERRESTRES
puifqu’en les regardant attentivement, je cefle d'appercevoir
la glace, & tout ce qu'elle contient.
2°. Ce ne font point non plus les rayons de lumiere qui
venant du Ciel, vers lequel je porte ma vûé, qui me la font
appercevoir avec fes défauts de tranfparence , puifque je ne
vois que le Ciel par cette façon de regarder.
Il en faut donc premierement conclure , que J'apperçois
cette glace par les feuls rayons de lumiere qu'elle a reçûs du
dedans de la chambre , & qu’elle refléchit enfuite dans mes
yeux , avec les modifications néceflaires pour me faire fentir
tout ce que J y diftingue.
D'ailleurs , fi pendant que je vois ainfi la glace par des
rayons refléchis du dedans de la chambre , il arrive que j'en
teçoive encore d’autres qui viennent immédiatement du
Ciel ou de quelque autre objet, ces derniers rayons ne font
qu'interrompre l'action des rayons refléchis, & m'empêchent
d'obferver ce verre aufñli exactement que je le ferois. Et Je
fuis d’ailleurs perfuadé , que s'il étoic poffible de tapifler d’un
noir parfait toute la chambre où eft cette glace, on ne pour-
roit voir du dedans de cette chambre , que les objets qui
feroient au-delà, & non la glace: car fi vous arrêtez à l'ex-
trémité d’un tuyau d'environ trois pouces de longueur , &
d'un pouce de diametre , dont le dedans foic le plus noir
qu'il eft poflible , un morceau de glace bien tranfparente ,
pendant que votre œil fera appliqué à l’autre extrémité du
même tuyau, regardant par un trou qui occupe le centre de
cette extrémité , & qui foit plus petit que l'ouverture de la
prunelle ; en forte qu'aucun rayon, sil eft poñfible, ne puifle
fe refléchir de l'interieur de ce tuyau ; vous ne diftinguerez
rien de ce verre , & votre vûë fe terminera entierement à
J'objet exterieur où vous la dirigez.
Après ces obfervations , il ne fera pas difficile d'expliquer
somiment nous voyons les objets par le moyen des Microf-
copes à un ou à plufieurs verres , ni de prouver que tous
les objets n'y font bien vûs , que par la feule lumiere ré-
ficchie.
1%, Quand au travers d’une feule lentille d'environ trois
Egnes de foyer , montée dans le Microfcope , dont voicy le
ET AQUATIQUES. SECONDE Parrse, Chap. XXXV. &o
deflein , nous regardons de haut en bas de petits objets,
comme des grains de fable répandus fur un corps noir, qui
fert de portes-objets ; il eft indubitable que nous les apper-
cevons par la lumiere que leur furface renvoye à l'œil ; &
que s'il étroit pofhble d'empêcher que les rayons qui pour-
roient les avoir penetrez, ne vinflent fe mêler fur la retine
avec les*rayons refléchis dont je parle , nous en diftingue-
tions incomparablement mieux cette fuperficie tournée de
notre côté. Et comme ces objets regardez de cette même
maniere avec un Microfcope à plufieurs verres , ne font
point apperçüs autrement, on en doit conclure, qu'ils font
toujours vûs dans de pareilles experiences , par des rayons
refléchis; ainfi que nous les verrions de nos yeux nuds, &
nullement par des rayons qui fe rompent ailleurs, que dans
les verres de ces fortes d’inftrumens.
Il refte maintenant à montrer que la même chofe arrive
quand nous regardons des objets au travers des Microfcopes
à liqueurs , tenus dans une direétion femblable à celle que
nous donnons à une Lunette d'approche , pour obferver ce
qui fe pañle dans le Ciel.
Pour cet effet , il faut fe fouvenir de ce que nous avons
dit touchant la glace de miroir appliquée à la fenêtre d’une
chambre ; fçavoir , que nous ne l’appercevons point par les
rayons qui nous viennent immédiatement des objets du de-
hors, en la traverfant fimplement ; mais par ceux qui, ayant
penetré les pores de ce verre , font retournez de la furtace
interieure de la chambre fur les endroits folides de la glace,
pour entrer dans nos yeux aprés une feconde refléxion; ainfi
les objets ou les parties de ces objets ne font point apper-
çûés dans ce Microfcope , par les rayons de lumiere qui
viennent d’abord du dehors, paflant au travers des endroits
tout tranfparens de ces corps ; mais par ceux qui ayant paflez
par ces mêmes endroits , reviennent du fond du Microfco-
pe sc'eit-à-dire , dela partie de la lentille , que l'ouverture
du diaphragme laifle découverte fur leur furface tournée de
notre côté , & s’en refléchiflenr enfuite jufqu'au fond de
Fœil, où ils peignent l'image de ces objets,
Tout cela fe peut encore confirmer par d'autres experien-
Planche #.
de ja pre
micie Pat:
tie,
so DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
ces ; en voicy une que le hazard me fit un jour naître , qui
me femble tres-propre pour montrer que nous voyons les ob-
jets dans le Microfcope à liqueurs par la feule réflexion de la
lumiere.
Un tres-petit corps opaque s'étant heureufement trouvé
dans une goutte de liqueur placée au milieu du concave cu
porte-objet de verre, fe fit voir d'une belle coulettr argenti-
ne dans une aflez grande étenduë de fa furface tournée de
mon côté ; & cette étendué ne pouvoit être vûé que par des
rayons de lunuere refléchis , pendant que les endroits qui
en étoient un peu éloignez me paroifloient tres - opaques ;
parce que la rondeur de cet objet ne permerttoit pas que la
lumiere refléchie de ces mêmes endroits ; vint vers mon
œil.
Le même hazard qui a fait trouver le corps opaque dont
je viens de parler , pofé au milieu du concave ou porte-ob-
jet, pourroit bien en faire trouver un autre dans te même
lieu , dont les parties feroient fi defunies & fi interrompuës en
fa furface , que les rayons de lumiere refléchis fur luy s’y ab-
forberoient entierement ; d'où il s’enfuivroit que n’en reve-
nant pas dans l'œil du Spcétateur , ce petit objet paroîtroit
toujours opaque. Ou enfin ce corps opaque occupant trop
d’efpace vis-à-vis de la lentille, & empêchant par-là l'entrée
des rayons de lumiere, ilne pourroit être vü.
Mais fi l'on veut faire réüflir cette experience , il n’y à
qu'à prendre une lentille d'un foyer un peu long , comme
d’un pouce , & donner au diaphragme , dont on doit la cou-
vrir , une ouverture qui furpañle celle du diametre du corps
que l'on veut obferver ; alors fi ce corps opaque eft propre à
refléchir la lumiere qu'il aura recûë fur fa furface tournée
vers nous , il ne manquera pas d'être vü.
On m'objeétera peut-être qu'en faifant rencontrer le corps
opaque vis-à-vis le milieu de la fâme d'une chandelle, on
Fy voit fi noir , que l'on ne diftingue rien du tout en fa fuper-
fcie ; ce qui ne devroit pas arriver.
J'avoué que fi le corps opaque eft trop petit, par rapport
À ja grofleur de la flâme de cette chandelle , il paroîtra noir,
3 caufe que la grande quantité de rayons de lumiere , qui
viendra
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XXXV. o1
viendra dans l'œil, fera capable d'effacer l'impreffion des
foibles rayons qu'il reçoit de l’objet que l’on veut voir.
Pour preuve inconteftable de cette vérité , fi nous pre-
nons un objet plus gros pour faire cette expérience , notre
œil recevant alors moins de rayons direéts de :a flamme de
cette chandelle , ce peu de rayons ne nous empêchera pas
de voir ce corps ; & c’eit une des principales raifons qui doit
nous obliger fouvent à diminuer l'ouverture des diaphragmes
que nous mettons fur les lentilles des microfcopes & ailleurs.
Une autre expérience qui prouve certainement que les ob-
jets , comme les anguilles du vinaigre, font vüs par la feule
réflexion de la lumiere , qui retourne du fond du microfcope
fur eux-mêmes , c’eft que fi lon applique au côté plat du
concave ou porte-objet , un diaphragme qui couvre même
une partie du concave où font ces anguilles , on ne cefle pas
pour cela de voir celles qui ne fe trouvent pas daus les rayons
de lumiere qui traverfent le milieu du concave ; & même
celles qui permettent par leur tranfparence le paffage de la
lumiere , qui fouffre réfrattion en traverfant le centre du
concave & les endroits voifins , ne paroïflent pas à beaucoup
près fi diftinétes que celles qui ne reçoivent la lumiere que
par réflexion ; & l’on eft même fouvent obligé de détourner
quelque peu le microfcope , pour ne pas recevoir dans ce
moment tant de rayons direëts qui nous empêchent de voir
l’objet Le plus diftinétement qu'il eft poflibie, quoique ces
rayOns le faflent paroître avec plus d'éclat.
Et il faut remarquer qu’en vous fervant d’une lentille d’en-
viron trois lignes de foyer, vous rendrez l'expérience dont
je viens de parler , plus fenfible que fi vous vous ferviez d’u-
ne lentille d’un foyer plus petit; à caufe que celle-ci faifant
découvrir un moindre champ que l’autre, les objets un peu
écartés du trou par où pañfe la lumiere , n’en pourroient pas
être apperçüs.
3°. Lorfqu’on obferve exaétement les plus groffes bulles
d’air formées dans la goutte de vinaigre qui occupe la con-
cavité du porte-objet, & que pour cet effet on fe fert de la
flamme d'une bougie au lieu du jour, on apperçoit l'image
en petit de cette flamme qui paroït fur la convexité de la
Tome I, Partie IL, n
e2 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
bulle d’air tournée vers nos yeux ; ce qui marque infaillible-
ment que c’eft par réflexion que nous appercevons cette pe-
tite image ;, comme nous la verrions par le réflexion de def-
fus un miroir convexe de métal. pt
. Tout au contraire on appercevra cette flamme plus grofle
au-delà de cette bulle d’air qu'on ne la vûe en-decà , parce
que la concavité du vinaigre qui touche immédiatément le
derriere de la bulle d’air ,a la propriété de faire paroître plus
groffe l'image de l’objet qui lui eft oppofé. (
4% Si lon met des grains de fable fur le verre concave du
microfcope ouvert par les côtés pour donner paflage à la
lumiere , & qu’on regarde ces objets de haut en-bas avec ce
microfcope élevé à - plomb au -deflus d’un corps qui ren-
voye à l’œil des rayons de lumiere au-travers de ce concaye,
pendant que ces mêmes grains de fable en réfléchiflent
aufli, on les verra avec moins de diftinétion qu’on ne feroit
f:.on les regardoit en mettant à la place de ce corps un mor-
ceau de drap noir aflez près du trou inférieur de ce même
inftrument ; d’où il fuit que la lumiere rompue venant à l’œil
immédiatement , après avoir fouflert. quelques réfrattions
dans ce verre concave &' dans ces grains de fable , trouble
Paétion des rayons réfléchis’, en caufant une fenfation con-
fufe de ces objets ; de même que.tout ce qui eft peint dans
un tableau bien éclairé , y eft vü avec moins de diftinétion
& de beauté qu'il ne le feroit fi les objets qui l’environnent
ne lui envoyoient pas par réflexion une partie de la lumiere
qu'ils reçoivent.
.… Enfin fi c’étoit la lumiere rompue , qui vient immédiate
ment dans l'œil du Speétateur après avoir traverfé les objets
tranfparens , qui nous lesfit voir diftinétement , il s’enfuivroit
que plus l'œil recevroit de rayons rompus , plus il décou-
viiroit de parties diftinétes dans l’objet ; & c’eft précifément.
tout le contraire de ce qui arrive , puifqu’à mefure que l’on
augmente l'ouverture abjeétive du microfcope , pour don-
ner paflage à plus de rayons de lumiere qui entrent immés.
diatement dans l'œil après avoir été rompus , plus l’objet.
paroït confus. : fs
. On objeéte que pour voir fi un verre de lunette eft bien.
ti
Vi
ET AQUATIQUES. SEC. PART, Chap. XXXV. 03
adouci, ou s’il eft bien poli, on le regarde en le plaçant en-
tre la lumiere & l'œil , & qu’ainfi nous en jugeons mieux
qu’en le regardant de toute autre mamiere ; d'où l’on veut
conclurre que nous voyons les défauts d’adoucifflement de ce
verre par la feule lumiere rompue qui vient immédiatement
dans nos yeux , après l'avoir traverfé.
Cette conféquence me paroit tirée avec un peu trop de
précipitation , & fans avoir examiné les circenftances qui
accompagnent l'expérience dont il s’agit , puifque bien loin
de faire contre nous , elle va nous fervir d’un nouveau moyen
pour combattre l'opinion en faveur de laquelle on lapporte,
en faifant comprendre qu'il n’eft pas toujours vrai de dire
que pour voir fi un verre de lunette eft aflez adouci & aflez
poli , on le place entre la lumiere & l'œil, puifque ceux qui
taillent ces verres n’ont pas befoin de les démaitiquer pour
connoître s'ils ont l’adoucifflement & le poliment requis ; ils
ne font pour cela que regarder ce verre en tournant le dos
à la lumiere , pendant qu'ils la font recevoir au verre qui eff
attaché à la molette.
. On reconnoit même encore aflez bien fi un verre de lu-
nette a les perfeétions qu’il doit avoir du côté du travail,
lorfqu'il eft détaché de deffus la molette , en le regardant
appliqué fur un morceau de drap noir , pendant qu'il reçoit
la lumiere prefqu’à-plomb , & qu’elle revient de même dans
nos yeux, ayant le dos tourné à la lumiere du jour , afin de
n’en recevoir par réflexion que de la furface du verre qu’on
examine , en le remuant doucement pendant qu’on le tient
ainfi en expérience.
Il nous refte enfin à prouver qu’en mettant le verre entre
la lumiere & l’œil , pour le regarder comme on le propofe ,
nous le voyons encore par réflexion ; car pendant que nous
l’obfervons dans cette fituation , une partie des rayons de
lumiere qui l'ont traverfé , lui eft renvoyée par les objets
qui font en-deçà , & d’où lui viennent en même temps d’au-
tres rayons ; enforte que ceux-ci & ceux-là retournent de ce
verre à nos yeux, par une feconde réflexion: É
De plus, il faut remarquer que fi dans cette expérience
nous tournons le verre que nous voulons obferver exaéte-
ni
94. DES ANIMAUX AERIENS , TERRESTRES
ment , vis-à-vis le bois d’une croifée de fenêtre , afin de rece-
voir moins de lumiere, qui fe rompt en traverfant ce verre ;
nous le verrons certainement avec plus de diftinétion que
nous ne ferions fans cette précaution.
Enfin les objets que nous appercevons par le moyen des
lunettes d'approche, ne fe voyent aufli que par la lumiere
qu'ils réfléchiflent à nos yeux ; & routes les réfraétions que
les rayons fouffrent en traverfant les verres de ces inftru-
mens , ne fervent qu’à nous augmenter l'apparence de l’ob-
jet, à nous le faire paroïître plus proche , plus gros &c plus
diftinét, mais moins clair qu'il ne paroïtroit aux yeux nuds,
& fans le fecours des lunettes. :
Nous pouvons donc maintenant conclurre que tous les
objets apperçüs , foit par les microfcopes en général , foit
par les télefcopes , ne font vüs bien diftinétement que par
les {culs rayons réfléchis.
S'il arrivoit , Monfieur , qu'après avoir examiné cette pe-
tite Diflertation vous ne fuiliez pas de mon fentiment , je
vous prie de me faire la grace de mettre par écrit ce que
vous y aurez trouvé de défeétueux , tant dans mes raifonne-
mens que dans les expériences dont je les ai accompagnés,
afin que j’eflaye fi je pourrai parvenir à rendre plus claire &
plus intelligible la matiere en conteftation.
Vous aurez aufli la bonté de nous faire comprendre , 1°.
comment , en fuivant votre hypothefe , nous voyons les
grains de fable pofés fur le porte-objet du microfcope à li-
queur , femblable à celui qui eft repréfenté en la figure , PI.
7. ci-après , Tome 2. lorfque nous les regardons de haut en-
bas. |
2°, Comment nous appercevons les mêmes grains de fable
par ce même microfcope , en lui donnant une fituation ho-
rifontale.
3°. Pourquoi nous les voyons mieux dans l’une de ces fi-
tuations que dans l’autre.
4°. Et pourquoi encore ces mêmes grains de fable paroif
fent plus bruns étant vûs dans la direétion horifontale du
microfcope , que dans fa verticale. .
ÿ”. Pourquoi il faut moins donner d'ouverture aux dia-
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XXXV. 0
hragmes des lentilles d’un court foyer, qu’à ceux des len-
tilles dont le foyer eft plus éloigné du verre.
6°. Pourquoi les plus petits animaux vifibles des liqueurs ,
& les plus petits atomes qu'on y découvre, font mieux
apperçüs lorfqu'ils font hors du rayon principal, que lorf-
qu'ils font dans ce même rayon, ou tout proche.
7°. Et pourquoi il y en a de fi petits , qu’il n’eft pas pofi-
ble de les appercevoir dans la lumiere qui les traverfe direc-
tement en paflant par l'axe de Ja vifion, ou auprès ; & qu'ils
font vüs dans l'ombre , ou hors le cône des rayons qui paf:
fent par toute l’ouverture objeétive du microfcope.
8°. Pourquoi nous n’appercevons pas le concave où porte:
objet de verre, que l’on fuppofe être des plus parfaits, avec
autant de diftinétion que nous appercevons les anguilles du
vinaigre, par exemple, qui font fur cette concavité , puifque
ce concave eft plus tranfparent que ces mêmes anguilles.
9°. Pourquoi certains corps opaques font-ils vüs dans le
microfcope à liqueur, en les y regardant comme on regar-
de dans une lunette d'approche , quoiqu'il ne pañle aucun
rayon de lumiere au-travers de ce corps.
Vous verrez; Monfieur ; qu'il #’y a aucun phénomene
contenu dans les difficultés que j'ai l'honneur de vous pro-
pofer ici, qui n'ait été réfolu ci-devant , ou qui ne le puifle
être facilement par l’hypothefe de la double réflexion des
rayons de lumiere ; & que de plus il n’eft pas néceffaire d’a-
voir recours aux réfraétions que la lumiere fouffre en les tra-
verfant , fi ce n’eft après qu'ils font réfléchis ; & enfin que
ces réfraétions font très-nuifibles en un fens, puifque les
rayons ainfi rompus ,; & reçus dans l'œil immédiatement
après, nous empêchent de voir les corps avec la même net-
teté & la même diftinétion quenous les verrions fans cela,
LS
=
e
Planche 13.
CHAPITRE XXXVI.
. Nouvelles découvertes d’ Animaux trouvés dans une infufion
d’amadou.
| Cr petit infeéte repréfenté en la figure D & EF de la
Planche 13. eft tout couvert d’une nymphe ou peau
écailleufe , que j'ai fouvent obfervé naître dans de l’eau de
pluie *, comme aufli d’étang & de riviere. Je lai nommé
Malezieu, parce que M. de Malezieu , de l’Académie Royale
des Sciences , eft le premier qui l'ait vü. Quelques -uns
croyent qu'il tire fon origine de l'eau de pluie, dans laquelle,
fi elle eft expofée quelque temps à l'air, on ne manque pas
pendant tout l'été d'en trouver une grande quantité d’une
vivacité extrème.
Cet infeéte elt tout-à-fait différent, quant à la forme, de
tous ceux que j'ai vüs , & dont le mouvement ef très - fur-
prenant : il a une fort groffe tête, à proportion de tout le
refte de fon corps : il a en plufeurs endroits du corps , des
houpes de poil placées comme on les voit dans cette figure :
il a deux cornes qui paroiffent femblables à celles d’un bœuf
tournées en-dedans , &, comme je crois, creufes, avec des
houpes de poil auffi aux bouts ; il les remuoit avec facilité
&t en tous fens : peut-être que ce font fes narines. La bouche
eft large, & femble être faite comme celle d’un crabbe ou
gamare , & par laquelle je les ai vûs fouvent fe nourrir
‘eau, ou de quelque matiere nutritive contenue en icelle.
. Jappercevois fort diftinétement au-travers de fa mem-
brane ou peau tranfparente , l'animal étant vivant, plufeurs
mouvemens divers dans la tête, dans l’eftomac & dans le
ventre , defquels je pourrai peut-être traiter plus amplement
ailleurs , pour montrer la grande utilité des microfcopes pour
découvrir la maniere d'opérer de la Nature dans les corps
des animaux , lorfqu’elle agit dans toute fa force & libre-
* Par des obfervations poftérieures on a reconnu que ce petit infecte n’eft
autre chofe que le coufin dans fon état de ver, qui eft très-commun par-tout.
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XXXVI. 097
ment ; au lieu que quand nous travaillons pour découvrir
ce qu’elle a de plus caché , en la forçant par la difle£tion de
quelqu’animal encore en vie : nous voyons à la vérité que la
Nature opere encore , mais elle eft troublée par la violence
qu’on lui fait.
La forme de ce poiflon paroït très-diftinéte par le deffein
qui eff ici repréfenté , la partie poftérieure étant compofée
de huit articles différens , qui font marqués des léttres a, b,
c,d,e,f,g,h, figure Ë. Du milieu de chaque article, &
à chaque côté, fortoient trois ou quatre poils marqués z, 1, £,
la queue féparée en deux parties de différentes façons, l’une
defquelles eft marquée 3, armée de poils, qui paroît fer-
vir de queue & de nageoires, pour faciliter &' régler les
mouvemens très-vifs de l'animal. L'autre partie 2 m'a paru
être comme le neuvieme article du corps, armée pareille-
ment de poils ; au bas de laquelle partie, marqué z,il ya
une efpece de boyau marqué #7, m, m, d’une couleur plus
obfcure, qui pafle par toute la longueur du corps de Fani-
mal , dans lequel on remarquoit une efpece de matiere noire
qui montoit & defcendoit par des mouvemens périftalriques
depuis la partie orbiculaire 7, qui me paroïfloit être fon efto-
mac, jufqu’au bout z, & de-là remontoit encore en-haut ;
lequel mouvement périftaltique j'ai pareïllement obfervé
dans un pou , dans un moucheron, & dans plufieurs autres
mouches dont les corps étoient tranfparens.
La poitrine marquée o, 0, 0, 0, étoit épaifle, courte &
tranfparente ; de façon que je voyois le cœur blanc, qui eft
aufh la couleur du fang de cet animal, comme elle left de la
plüpart des infeétes qui nagent dans l’eau. Ce cœur avoit fes
mouvemens de fiftole & de diaftole , comme l'ont un grand
nombre d’autres animaux. On y remarquoit encore plufieurs
houpes de poils en forme de petites aigrettes marquées p, p,
&c. il s’en voit de femblables fur fa tête, qui fe remarquent
aux endroits marqués s, 5, 5.
Cette rête eft large & courte, munie de deux gros yeux
noirs, marqués 7, 7°, qui ne m'ont pas paru de differentes
couleurs, comme cela eft arrivé dans la fuite ; & de deux
petites cornes À , À , dont j'ai déjà parlé,
98 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Son mouvement & fon repos fort fort particuliers & fort,
divertiflans à voir. Îls font très-différens de ceux que jai
obfervés dans beaucoup d’autres animaux ; car quand il ne
remue plus fon corps , la queue qui paroït la plus légere, &
même que l’eau dans laquelle il nage , le fait monter dans
l'inftant à la furface de l'eau dans laquelle il nage , où il fe
voit fufpendu la tête en-bas. Si par quelque vivacité il arrive
qu'il defcende plus bas que cette fuperfcie , il y remonte
bientôt après, jufqu’à ce qu'il ait la queue au-deffus de cette
furface. |
La pofture pendante de cet infeéte me fait fouvenir d’un
certain animal que j'ai vû ici à Londres, qu’on avoit apporté
de l'Amérique, qui fe tenoit aufhi fufpendu par la queue la
tête en-bas; & on difoit qu'il avoit coûtume de dormir en
cette polture , avec fes petits dans un faux- ventre ou ma-
trice que la Nature lui avoit formé pour la produétion , la
nutrition & préfervation de fes petits, dont on trouve la
defcription dans le Livre V. chap. 24. de l’Hiftoire naturelle
du Bréfil, par Pifo. |
Le mouvement de cet infecte fe faifoit la queue en-devant ;
trainant fon corps à reculons, par le mouvement çà & là de
cette houpe qui fort d’une partie de fa queue. Il avoit aufii
un autre mouvement qui avoit plus de rapport à celui de
quelques autres animaux , car il alloit la tête en-devant ; &
par le mouvement de fa bouche il avoit la facilité de def-
cendre doucement vers le fond du vaiffeau où il étoit, fe
faifant un chemin en mangeant , pour ainfi dire , l’eau. Mais
ce qui étoit plus digne d’être obfervé touchant cet infeëte,
étoit {on changement ou métamorphofe ; car en ayant gardé
plufeurs dans une phiole d’eau de pluie , dans laquelle ils
avoient été produits , j'ai trouvé , après les avoir gardés en-
viron quinze jours ou trois femaines, que plufieurs s’envo-
loient en moucherons , laïffant leurs peaux derriere eux dans
l’eau , nageant au-deflus de la furface , dans le même endroit
où ils avoient coûtume de faire leur réfidence quand ils vi-
voient encore dans l’eau, Ceci me les a fait obferver encore
avec plus de circonfpeétion, pour voir fi je ne pourrois pas
les trouver dans le moment de leur changement ; & peu de
temps
ET AQUATIQUES. SECT. PART. Chap. XXXVI. 09
temps après j'en obfervai plufieurs changés dans une forme
extraordinaire , & tout-à-fait différente de ce qu'ils étoient
auparavant ; leur corps & leur tête étant devenus beaucoup
plus gros & plus profonds , fans être plus larges , & leur
ventre ou partie poitérieure plus menue, & entourée, pour
ainfidire , au tour de ce gros corps , à-peu-près de la maniere
qu’on l'a repréfentée dans les figures 7, 4, L, de la Planche
13. La tête & les cornes nageoïent alors en-haut , & toute
la mafle de l'animal me paroifloit être devenue beaucoup
plus légere ; car après lui avoir fait peur , il s’enfonçoit au-
deflous de la furface vers le fond, en pouffant ou allongeant
promptement fa queue , de forte que le corps remontoit
avec plus de vitefle qu'il ne faifoit lorfqu’il étoit dans fa pre-
miere forme.
Fobfervois de plus fon progrès de temps en temps, & je
trouvois que fon corps augmentoit toujours ; la Nature le
préparant ainfi pour un élement plus léger . & dont il alloit
devenir habitant : car en l’obfervant avec le microfcope, je
voyois {es yeux tout-à-fait différens de ce qu'ils paroïfloient
auparavant , y remarquant plufeurs petites bofles ou émi-
nences rondes , femblables à-peu-près aux yeux d’une four-
mi. Enfin je voyois une partie de cet infeéte nager au-deflus
de la furface de l’eau , & une autre au-deflous ; & quoiqu’en
lui faifant peur il fe plongeât entierement , néantmoins il
remontoit tout aufli- tôt , fe remettant dans fa premiere fi-
tuation : & après avoir attendu encore quelque temps , je
voyoisque la tête & le corps d’un moncheron commencçoient
à paroître & à fe montrer tout-à-fait au-deflus de la furface
de l'eau, & petit - à- petit fes pattes font forties de fa nym-
phe; premierement les deux de devant , puis après les au-
tres , & enfin le corps tout entier hors de fa nymphe qu'il
laifloit dans l’eau , demeurant fur fes pattes & fur la furface
de l’eau; & petit-à-petit il commençoit à remuer, & en-
fuite on voyoit dans la phiole un moucheron parfait.
Si je fuis defcendu dans un grand détail par rapport à la
tranfmutation de plufieurs de ces petits animaux que j’ai ob-.
fervés , c’eft parce que je n’ai encore trouvé perfonne qui
Pait fait ; & parce que la chofe eft fi furprenante & fi diffé-
Torne IL. Parr, IL o
Planche 13.
100 DES ANIMAUX AERIENS , TERRESTRES
rente de la produétion ordinaire des autres animaux, que je
l'ai jugée non-feulement devoir être agréable au Lecteur ,
mais même utile & néceflaire pour perfeétionner l'Hiftoire
naturelle des Animaux.
Touchant la génération & la produétion de ces infeëtes ,
il peut arriver ou que les moucherons ayent laiflé tomber
leurs œufs.immédiatement dans l’eau , ou peut-être d’abord
dans l'air ; & que le vent & le mouvement continuel de cet
air les auroit fait voler çà & là, & retenus dans l'air pen-
ue quelque temps , & à la fin la pluie les aura fait def-
cendre. |
ECM a — 1
CHAPITRE XX XNIHTE
D'un Poiffon nomme Coquille ox Cyclope , qui s’eft vi
dans la premiere infufion d’amadou.
N AYANT encore rien vû dans la Nature qui m'ait paru
avoir quelque rapport de reflemblance avec les poif-
{ons dont j'ai parlé dans le chapitre précédent , j’ai été porté
à les nommer Malefeux , du nom de celui qui les a peut-
être le premier apperçüs en France ; & je nommerai coquilles
ou cyclopes , les feconds poiflons , que je ne commençai à:
voir qu'environ quinze jours après qu'on m'eut fait préfent
de la phiole où étoit l’infufñion d’amadou *.
Le nom de coquille ng leur convient pas mal , parce que
quand leurs queues environnent leurs têtes , ce qui leur eft
aflez ordinaire , ils en ont à-peu-près la figure, & même la
couleur. On peut auffli les nommer cyclopes , parce qu'ils pa-
roiflent n’avoir qu'un œil, tellement enfoncé dans leur tête,
qui eft tranfparente en cet endroit-là , que cet œil peut en
apparence voir à droite & à gauche , comme s'ils en avoient
deux.
La groffeur naturelle de l’un de ces poiflons regardé des
yeux nuds , approche aflez de celle d’un très-petit grain de
* Cet animal eft encore le coufin ; mais dans un état différent de celui où l'Au-
teur l'a examiné au chapitre précédent : ici il eft en nymphe.
ET AQUATIQUES. SECT. PART. Chap. XXXVII. 101
smillet ; mais en l’obfervaut avec une loupe d'environ un
pouce de foyer , il nous a paru ainfi qu’il eft repréfenté fous
les lettres F,G : & lorfque nous l'avons confidéré avec une
lentille d'environ cinq lignes de foyer , nous l'avons vû fuc-
ceflivement fous les différentes formes & grandeurs appa-
rentes qu'il a été repréfenté au-deflous des lettres 47, /, L.
Sa tête, fon col & fa poitrine fe trouvent tellement ramaf-
{és , que ces trois chofes ne paroiflent compofer qu’une feule
mafñle de matiere, fur laquelle on ne voit qu’un œil aflez gros
& noir ,environné de quelques petits poils inégalement dif-
tribués fur les bords de fes paupieres , qui paroiflent immo-
biles.
On remarque encore deux efpeces d'oreilles longues ,
rondes , & creufes comme de petits tuyaux courbés en arcs:
tout le refte de fon corps fe voit compofé de fix ou fept pie-
ces en forme d’anneaux articulés , qui vont en diminuant de
grofleur , ornés de plufieurs petites aigrettes formées de poils.
On voit encore fortir du dernier de ces anneaux deux efpe-
ces de plumes bien tranfparentes , qui fervent de nageoires
à ce poiflon, qui eft repréfenté de côté en À, vü par der-
riere ou des trois quarts en Z , & en forme de coquille au-
deflous de la lettre Z.
Nous ne dirons rien des parties contenues fous la fuperf-
cie de la nymphe écailleufe ou membraneufe de ce poiflon,
parce qu'il nous a toujours paru tellement ramafñlé , que la
lumiere ne les pouvant pénétrer , elle n’en pouvoit peindre
les images dans nos yeux. |
Les Malezieux , dont j'ai parlé ci-devant , ayant quitté
leur peau, fe font admirer fous la forme de cet infeéte , qui
ne differe pas tant du premier , que ce fecond differe du troi-
fieme dont on va parler ; car en examinant de près ce cyclo-
pe , on le voit nager la tête en- haut, pourremonter du fond
de la caraffe vers la furface de l’eau , en pouffant fa queue
avec vitefle vers le bas de l’eau , pour faire monter fa tête
en-haut.
En obfervant fon progrès de temps en temps , on s’apper-
cevoit que le volume de fon corps s’'augmentoit de plus en
plus , la Nature le préparant ainf pour luifaciliter lesmoyens
oi
#
102 Des ANIMAUX AERIENS , TERRESTRES
d’aller vivre dans un élement beaucoup plus léger , & dont
il alloit devenir l'habitant ; car en l’obfervant avec le mi-
crofcope à deux verres , on voyoit nager une partie de fon
corps au-deflus de la furface de l'eau , & une autre au def
{ous : & quoiqu’en lui faifant peur il s’enfonçât dans l’eau , on
J’'appercevoit bientôt remonter avec beaucoup plus de viteffe
qu'il ne faifoit lorfqu’il éroit dans fa premiere forme.
Enfin en continuant de l’obferver , on fut tout étonné de
voir la tête & le corps d’une petite mouche qui commença
à s'élever petit-à-petit au - deflus de la furface de l’eau , en
s’y dégageant de fa nymphe ; poufflant fes pattes de devant
au-dehors de cette peau , enfuite celle de derriere , & enfin
fon corps entier , fe difpofant petit-à-petit à prendre l’eflor
& s'envoler en Pair.
On me demandera peut-être comment il eft pofñble que
cette mouche qui a commencé à vivre dans l’eau , étant en-
veloppée de deux nymphes dont elle a fü fe débarafler , peut
après cela continuer à vivre dans l'air.
Pour répondre à cette demande , il n’y a qu’à faire réfle-
xion qu'il y a des animaux qui n’ont befoin que de peu de
nourriture pour vivre , & d'autres aufquels il en faut beau-
coup ; que ceux dont l’eftomac digere facilement & en peu
d'heures, ont befoin de beaucoup d’alimens pour les foûte-
nir , comme l’homme , le cheval, &c. tout au contraire ceux
dont l’eftomac digere difficilement en employant beaucoup
de temps , comme les marmottes, les viperes , &c. n’en ont
befoin que de peu.
Nous tirâmes un jour une vipere hors d’une groffe & large
bouteille , où elle repofoit fur un lit de fable depuis environ
fix mois , fans avoir ufé d'aucune nourriture apparente du-
rant tout ce temps-là : on la préfenta à la tête d’un chien
qu’on avoit lié fur une planche pour le difféquer , elle le
mordit à une oreille ; un moment après ce chien tomba dans
une fi grande convulfion, qu'il en mourut en un inftant. On
louvrit, & l’on trouva fon fang déjà figé dans les vaiffeaux
fanguins. Je fuis perfuadé qu’elle auroit encore vécu quel-
ques mois fans prendre d’autre nourriture. |
Îl y a un grand nombre d'autres animaux qui vivent long:
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XXXVIL 103
temps dans l'air , fans leur donner que peu ou point de nour-
riture. Une araignée que j'avois enfermée dans un microfco-
pe à canon de verre, que j'ai nommé tombeau | y a vécu
plus de quatre mois , fans y avoir pris d’autres alimens que
le fang de deux mouches ordinaires que je lui jettai en deux
différentes fois , & qu’elle piqua à la gorge après s’en être
faifie, pour en fuccer le fang feulement , car elle ne les man-
gea pas. | |
Enfin ayant appliqué plufieurs mites d’un ferin de Canarie
fur le porte-objet d’un microfcope à liqueur, & les y ayant
colées avec un peu d’eau gommée , pour les y faire tenir,
je m’apperçus qu’au bout d'environ trois moisil s’y en trouva
encore quelques-unes en vie, quoique colées fur le dos.
Ces expériences, & un grand nombre d’autres que je pour-
rois rapporter ici, s'il étoit néceffaire , prouvent qu’il y a
dans l'air, comme dans l’eau , des parties nutritives qui fet-
vent d’alimens à ces animaux ; ainfi les moucherons fortis
des nymphes qui enveloppoient les Malcfieux & les cyclo-
pes, pouvoient y vivre aufh.
Le dernier poiflon que j'ai vû dans la phiole où étoient les
Malefieux & les cyclopes , eft repréfenté fous la lettre » ;
fa figure nous a paru femblable à celle d’une poire de bon-
chrétien , couverte d’une infinité de petits poils : fa tête
étoit couronnée d’un bandeau, dont la largeur étoit termi-
née d’un côté par quelques petits ornemens , & l’on apper-
cevoit fortir de fon front plufeurs gros poils longs & tranf-
parens. Cet animal qui eft repréfenté vû par le dos, n’eft
point tranfparent : on voit à gauche de longues pattes mu-
nies de poils qui lui fervent de nageoires.
CHAPITRE XXXVIIL
Seconde infufion d’amadou,
E 18 Août de l’année 1718, je préparai une infufion de
grofle amadou ; environ 24 heures après j'y apper-
çus quelques petits animaux , dont le contour ne me paroi:
anche 13.
104 D£Es ANIMAUX AERIENS » TERRESTRES
{oit pas bien terminé : peu de jours après j’y vis des corne=
mufes blanches & tranfparentes. Le 12 Septembre il s’y
trouva un grand nombre de poiflons , que j'ai nommés enfans
en maillots, qui moururent huit jours après leur naïflance ;
en la place defquels il fuccéda beaucoup de chenilles aqua-
tiques : il y vint auf des cloportes & des fphéroiïdes , fans
aucun mouvement fenfble.
Cette infufñon , qui étoit encore en expérience le 28 No=
vembre de la même année 1718 , ne fit rien voir de plus.
Cette expérience fait voir qu’une feconde infufion de mé-
me nature que la premiere , n’aide pas toüjours à produire
les mêmes chofes : la raifon en paroîtra évidente à ceux qui
fe feront donnés la peine de lire le chapitre 18 de cette {e-
conde partie, qui eft au fol. 44.
CHAPITRE XXXIX.
D'une nouvelle Poule hupée, vie dans une infufion de bois
| de chêne flotté.
N Ous avons repréfenté un poiffon avec des ailes, dans
| dans la feconde Planche de la deuxieme partie de ce
Livre, que nous avons nommé Poule hupée. En voici une
autre que je nomme du même nom, qui na point d'ailes ;
on la voit repréfentée fous la lettre N. La premiere n’avoit
point de corps qui fût vifible ; celle-ci en a un fort gros, qui
fe termine en pointe aflez longue , & fi mobile , qu’elle fert
de gouvernail à ce poiflon pour le diriger durant fon nager,
qui m'a paru aflez élégant.
CHAPITRE XL.
Des Poiffons nommés Deftouches.
M° NSIEUR Camus Deftouches ayant eu la bonté de
m'envoyer d’une eau tirée de fon puits , après avoir
été mife dans un réfervoir de pierre, & expofée à un air
ET AQUATIQUES. SEC. Part. Chap. XL. 105
libre durant plufieurs jours, je l’examinai avec beaucoup de
plaifir, & j’eus la fatisfaétion d'y appercevoir plufieurs ani-
maux marchans, rampans & nageans , qui m'ont paru aflez
finguliers pour mériter d'être repréfentés dans cette Planche.
Je nommerai grain de mille: celui qui a été repréfenté au-
deflous de la lettre O , parce qu’il en a à-peu-près la figure
& la couleur. Il paroït aux yeux nuds environ de la ou
d’une très - petite épingle : je lai trouvé nageant de côté
parmi de petits vers rouges , dont je dois parler ci-après.
Lorfqu'on l’obferve avec une lentille d'environ cinq lignes
de foyer, & qu’on l’expofe à la lumiere du jour, de maniere
qu’elle revienne à l'œil par une fimple réflexion , on s’apper-
çoit que l'animal eft enfermé comme dans une double co-
quille, comme les moules ; qu'il a la liberté d'ouvrir & de
refermer , de même que l’on ouvre une tabatiere à charniere ;
& qu’il poufle de temps en temps de longues pattes au -de-
hors, qui fervent à le faire mouvoir fur le côté feulement,
ne l'ayant jamais vû pofé fur fon ventre, qui eft un peu cour-
be-concave ; ni fur fon dos, qui eft courbe-convexe.
Cette convexité paroiît polie & un peu luifante ; elle eft
d’un jaune-pâle , & munie de quelques petits poils aflez
éloignés les uns des autres. Cette efpece de furtout n'étant
pas tranfparent , il ne m’a pas été pofhble de pouvoir décou-
vrir la forme particuliere du poiflon ; qu’il cache de toutes
parts. Son nager n’eft pas élégant ; il ne tourne & n'avance
que par les diverfes fecoufles de fes pattes, qui font munies
de très-longs poils tranfparens , & aflez gros du côté de
leurs racines.
CHAPITRE XLI.
Des Poux aqUAtIQUES «
N découvre dans l’eau commune qui fe donne de
temps en temps aux tétarts pour leur fervir de nour-
riture , pluñeurs fortes d'animaux, parmi lefquels il s’en trou-
ve quelques-uns d’affez finguliers pour mériter que l’on en
fafle l'hiftoire anatomique,
Planche 13°
Planche 13.
106 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
Celui dont je vais parler eft de ce nombre. Sa groffeur
naturelle & ordinaire approche aflez de celle d’un ciron;
mais étant mis fur le porte-objet d’un microfcope à liqueur ,
monté de plufeurs lentilles de différens foyers , qui s’y pla-
cent l’un après l’autre , on l’apperçoit à-peu-près tel qu'il eft
vû au-deflous des lettres P, Q , À; & parce que fa figure
approche quelque peu d’un des animaux domeftiques qui
nous incommodent quelquefois , je lui donnerai le nom de
pou aquatique *, en attendant que quelque Naturalifte mieux
inftruit que je ne le fuis des différens êtres de la Nature, lui
en donne un autre qui lui convienne mieux.
Si l’on confidere ce pou couché fur le dos & tout étendu ;
ainf qu'il fe voit en À, on apperçoit que fa tête eft couron-
née de plufeurs petits globules blancs & tranfparens , qui
paroiflent comme autant de petits animaux qui s’attachent
à fon corps pour le dévorer. J'ai reconnu depuis , que ces
animaux refflemblent fort aux enronnoirs qui {fe rencontrent
dans les infufions de paille &c d’épis de blé , quoique plus
petits; & qu’au milieu il y a un petit corps noir & mobile
en lui-même , environné en partie de plufeurs globules tranf-
parens, qui femblent être attachés fur une partie de fa cir-
conférence , tandis que l’autre partie {e voit environnée de
plufieurs petits filets noirs qui le font mouvoir tour-à-tour
de différens fens.
Comme ces animaux préfentent toüjours cette tache noire
aux yeux des fpeétateurs , il y a lieu de croire que c’eft l'œil
de ce poiffon ; & parce qu'il eft tout feul, on peut nommer
cet infeéte fecond cyclope, pour le diftinguer du précédent.
On voit en celui qui eft marqué R , deux longs bras com-
pofés de plufieurs articles très-mobiles , qui font munis de
gros & de petits poils blancs & tranfparens ; & l’on apper-
çoit encore que ces bras ainf conftruits , fervent de nageoires
à ce poiflon. Prefque toute la largeur de ce petit animal pa-
roit divifée en deux parties égales par une bande un peu lar-
ge, fous laquelle & à la faveur de fa tranfparence, on dé-
couvre vers le haut un petit corps que j'ai pris pour fes pou-
* Selon la defcription de l'Auteur, je crois que c’eff l’infee que Swammer-
dam appelle pulex aquaticus arborefcens , puceron d'eau branchu.
mons ,
ET AQUATIQUES, SEC. ParT. Chap: XLI 107
mons , à caufe de deux mouvemens égaux & réglés qu’on y:
peut obferver très-diftinétement. |
À droite & à gauche de la bande dont je viens de parler ,
j'ai vû deux corps longs, de figure femblable à deux portions
de cercle aflez égales entrelles , qui fe meuvent enfemble
de haut en - bas & de bas en-haut , fans que j’aye pù d’abord
juger ce que ces corps pouvoient être ; mais en Continuant
de les obferver , j'ai remarqué que l’animal avoit aflemblé
trois jambes d'une part, & trois d’une autre part , garnies
de longs poils ; s’allongeant toutes enfemble , & fe raccour-
ciflant de même ; continuant ainfi ces divers mouvemens,
jufqu’à ce que la liqueur dans laquelle il étoit , fût entiere-
ment defléchée.
Nous avons aufli remarqué dans un autre poiflon de même
genre, mais d’une efpece affez différente du précédent , que
l'office de fes jambes étoit de fervir à le tranfporrer d’un lieu
en un autre, non en marchant, mais en nageant.
On voit le long de fon corps une efpece de boyau courbé
du côté de fa tête, dans lequel on apperçoit une matiere en
mouvement , qui va & vient en ne changeant que très-peu
de lieu : on apperçoit à côté deux autres corps aufli en
mouvement , dont l’un eft plustranfparent que l’autre.
Au-deflous de ces corps il y a deux efpeces d’ailes qui
{fe meuvent très-vire & très-régulierement , ne ceflant ce ma-
nége que quand la liqueur fe trouve totalement defléchée ;
car alors l'animal n’y pouvant faire aucune fonétion , il y
meurt collé fur le porte-objet du microfcope.
On remarque aux endroits marqués 4, 4 , comme deux
petites cornes , compofées l’une & l’autre de deux cornes
articulées de quelques petits poils à leuts extrémités.
Enfin le derriere de ce poiffon eft terminé par deux longs
poils blancs , tranfparens & mobiles , dont l’ufage m’a paru
être à-peu-près le même dans cet animal, qu’un gouvernail
eft à un vaifleau de tranfport,
Tome I. Part. IL, p
Planche 14,
108 . DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
CHAPITRE. XLII.
Du Pou terreftre 6 aquatique.
D ANS une eau prife dans le tonneau qui eft au jardin
fupérieur du Collége de Boncourt , je trouvai plu-
fieurs animaux que je n’avois point encore vüs dans les eaux
de cette nature que j’avois ci-devant examinées. Je plaçai
celui dont voici le deflein , fur le concave ou porte-objet de
verre d’un microfcope monté d’une feule lentille , dont le
foyer eft d'environ une “one & demie de longueur ; & par
ce fecours je vis cet infette à- peu-près comme je l'ai repré-
fenté au - deflous de la lettre D , & d’une couleur d’ambre
jaune peu tranfparent ; ayant la tête plus large que haute ,
& comme enchâflée dans fes épaules , qui forment une efpe-
ce de bourrelet , & tout le refte de fon corps fe voit compofé
de fept ou huit articles emboîités en partie les uns dans les
autres.
- Le devant de la tête dc cet infeéte eft orné de deux cornes
d’une longueur & d’une ftruéture des plus extraordinaires
qu’on puifle voir. Chacune de ces cornes eft compofée d’en-
viron dix à onze articles , qui femblent n’avoir entr’eux que
très-peu de liaifon : ces articles font munis & environnés de
très- petits poils. Ce qui m'a paru de très-fingulier dans la
ftruéture de ces cornes, ç’a été d’en voir les extrémités ter-
minées par des parties plus grofles & plus pefantes que ne
font celles qui les précedent.
On apperçoit deux gros yeux placés à droite & à gauche
de la tête de cet infeéte , dont la cornée eftraboteufe , & fem-
blable à celle de l’œil d’une punaife. Vous voyez cet infeéte
avec fix longues pattes très mobiles, munies de poils & ar-
mées de griftes bien aiguës , s’approchant & s’éloignant l’une
de l’autre , fuivant les divers mouvemens qu’il procure à fon
corps , tant en nageant dans l’eau, qu’en marchant fur fa
furface & ailleurs ; car il l’'abandonne quelquefois totale-
ment, pour fe promener durant quelque temps fur celle du
vaifleau qui la contient.
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XLII. 109
La trop grande épaiffeur & le peu de tranfparence du
corps de cet animal, nous ont empêché d'en pouvoir décou-
vrir les parties intérieures.
Pendant que je fus appliqué à examiner l’infe£te dont je
viens de parler , fes compagnons fe préparoient pour pafer
d’un élément aqueux dans un plus léger ; de forte qu’en paf
fant de l’eau dans l'air , & s’échappant ainfi à mes yeux , je
fus privé en peu de temps du plaïfir que je m’étois propoté
d'avoir , & de celui que j’avois deffein de procurer au Pu-
blic , par la defcription anatomique que j'en aurois pù faire,
CHAPITRE XLIIL
D'une apparence de Chenille dorée, couronnée & mafquée *.
.
P OUR continuer l'explication des chofes qui font con-
tenues dans la treiziéme Planche , nous parlerons d’une
produétion de la Nature des plus fingulieres | & des plus
curieufes à obferver : ce font trois différentes repréfenta-
tions d’une apparence de Chenille qui paroît en forme de co-
que , qui n’eft attachée que par le derriere à une petite bran-
che de fureau chargée de feuilles & de fleurs , qu’un de mes
amis fe donna la peine de m'apporter de la campagne l'été
dernier. Elle a été repréfentée en $ , ayant la tête en-haut ,
& vüe par-devant ; elle eft vûe en 7 par-deflus , ayant la
tête en- bas , & le corps un peu tourné de côté ; & on la
voit en Ÿ” de profil, pofée fur la petite branche de fureau.
On la peut nommer Chenille mafquée | parce qu'il paroît un
véritable mafque au - devant de fa tête , fur lequel on voit
comme deux yeux, un nez, un menton, un front ; maisil
n’y paroît point de bouche.
Ce mafque femble être environné d’un voile qui ne cache
aucune partie du vifage , laiffant les joues prefqu’entierement
* La Chenille que décrit ici PAu- leût gardée aflez de temps , ou qu’elle
teur, doit étre une chryfalide angulai- eût pû conferver la vie, il en auroit
re, de l’efpece de celles qui fe fufpen- vô naître un papillon.
dent par leur partie poltérieure : s’il
l'd
Hifi. nat. 1,
2. tab. 12 6
23. & hifi. pif-
cium, tab, 27.
110 DES ANIMAUX AERIENS , TERRESTRES
découvertes ; n’en cachant qu’autant qu'il faut pour enchAf-
fer ce mafque , comme on enchâfle une pierre précieufe dans
{on chaton, afin de l’y arrêter. On remarque encore à droite
&t à gauche de ce mafque | comme deux oreilles qui paroif-
fentappuyées fur ce voile , ce qui fait que le vifage eft entie-
rement découvert. Sa coeffure eft une efpece de bonnet à
deux cornes pointues , compolée de plufieurs pieces qui fe
joignent fi exaétement l’une auprès de l’autre , que leur af-
femblage n’en eft bien vü que par le fecours d’une loupe.
Le corps de cette Chenille eft compolé de fix ou fept ar-
ticles qui fe voyent un peu emboïtés l’un dans l’autre, &
diminuer de grofleur à proportion qu'ils s’'approchent de fon
extrémité. À droite & à gauche de chacun de ces articles,
on y compte douze efpeces de mammelons , fix d’un côté
&t autant de l’autre , également efpacés fur deux lignes droi-
tes qui feroient tirées de haut en-bas. Le voile ou les ailes
de l'animal , qui fervent comme de fertiflure au mafque,
defcendent le long du dos de la Chenille , & fe terminent
immédiatemeut au - deffous des trois premiers articles qui
{ont du côté de la tête.
Lorfqu’on m’apporta cette Chenille , je vis fa coeffure &
une grande partie du devant de fon corps , d’une belle cou-
leur d’or luifant : dans la fuite elle s’eft changée en celle des
feves de caffé à demi torréfié, fans avoir perdu que très-peu
Au luifant qu'on y avoit remarqué. Cette derniere couleur
eft encore changeante , à-peu-près comme elle l’étoit au
commencement , fuivant les diverfes expofitions du jour
qu'on lui faifoit recevoir.
Ou voit dans l’'Hiftoire naturelle de Jonffonus | Medecin
Angiois , des effets merveilleux de la Nature , qui font en-
core plus furprenans que tout ce que j'ai dit du poiflon maf-
qué repréfenté en la fixieme Planche de cette feconde partie,
fous le chiffre 12.
Nous avons vû une agathe aflez petite , taillée d’une for-
me un peu convexe & ronde , fervant d’une pierre précieufe
enchâffée dans le chaton d’une bague qui repréfentoit le vi-.
fage d’une Religieufe avec fon voile , d’une beauté fingu-
liere.
ET AQUATIQUES. SEC. ParT. Chap. XLIIL. 11
C’eft une chofe aflez commune , de voir des formes de
têtes différentes fur des boëtes de racines de buis, fur celles
de bois d’olivier , fur des tables de marbre , fur de certains
cailloux qu’on fcie pour faire des tables de marqueterie , &c.
& cela fuflit pour guérir l’efprit de certaines perfonnes , qui
ne veulent pas croire qu'il y ait dans la Nature des chofes qui
puiflent avoir quelque rapport de refflemblance à l’homme.
Voyez encore là-deflus ce qui eft rapporté par Jean Struys
dans fes Voyages de différens Pays.
ENTREE EME pe RER OP PLEINE
CHAPITRE. XEFV.
Des Doguins trouvés nageans dans une infufion de paille de blé,
qui étoit en expérience depuis dix mois ou environ.
Ous avonce parlé dans le trentieme chapitre de cette
N feconde partie , des animaux trouvés dans diverfes in-
fufons de paille & d’épis de blé , dont on peut voir les def-
{eins fur les Planches 8 & 9 de cette même partie ; mais nous
n'avions alors aucune connoïflance du nouveau poiflon qui
{e voit ici repréfenté au-deflous de la lettre À, que M. Ca-
mus Deftouches nomma doguin dès le moment que j’eus
l'honneur de le lui faire voir au-travers d’une lentille d’en-
viron dix lignes de foyer , par le moyen de laquelle nous
vimes fa tête comme emmanchée dans fes épaules , au-delà
defquelles il lavançoit & la retiroit fucceflivement ; il la
tournoit aufli & la mouvoit très-librement en tous fens,
remuant diverfement fes levres, qui paroifloient très-mobiles
& garnies de poils aflez courts, & dont les mouvemens
particuliers faifoient pirouetter d’autres animaux très-petits
qui fe trouvoient à portée de fa bouche , dans laquelle il en
faifoit entrer quelques-uns pour lui fervir de nourriture : fon
corps que nous appercevions aflez mal terminé & changer
fouvent de forme , nous paroifloit très-gros par rapport à fa
longueur : nous en découvrions quelques -uns qui étoient
tout tranfparens , & d’autres dont le bas-ventre étoit rempli
de petits corpufcules bruns , qui ne permettoient pas un libre
paflage à la lumiere.
Planche 134
Planche 13.
112 DES ANIMAUX AERIENS ; TERRESTRES
On apperçoit au derriere de ce poiflon deux corps longs
& ronds, qui vont en diminuant de grofleur jufqu’à fe ter-
miner en pointes aflez fines. Ces deux efpeces de queues,
qui font blanches & tranfparentes, fervent de gouvernail &
de nageoires à ce poiflon. Pendant qu’il fe tranfporte très-
vite en nageant, on voit qu'il s'arrête de temps en temps au
milieu de fa courfe pour faire pluñeurs culbutes , en faifant
paffer fon corps par-deflus fa tête d’une maniere adroite &
très-agréable à voir. ;
Je trouvai le 8 Septembre 1718, une autre efpece de
Doguins dans une vieille infufion d’un bouquet compofé
de plufeurs fleurs de différentes efpeces, qui avoit trempé
dans de l’eau de riviere dès le 25 Août 1717, qui n’ont pû
trouver de place dans cette Planche. Le corps en étoit fi
blanc & fi tranfparent , que je pouvois difcerner les mouve-
mens du cœur, des poumons, & de tout ce qui étoit con-
tenu dans la capacité du bas-ventre de cer animal. Ces der-
niers Doguins different des précédens , en ce qu'ils font plus
tranfparens ; que leurs queues font très-courtes & prefque
immobiles ; qu'ils fe meuvent très-lentement ; & enfin que
leurs bouches font plus petites de moitié que celles des pre-
miers.
CHAPITRE "XLV:
Defcription de certains petits Vers rouges qui ont été trouvés
dans de l’eau de puits.
O N voit trois de ces petits infeétes qui ont été repré-
fentés au bas de cette Planche , au-deffous des lettres
V5 Y5.Y un peu plus gros qu’on ne les a vüs des yeux nuds.
Il y en avoit de gros & de petits dans l’eau de ce puits ; les
plus gros avoient environ quatre lignes de longueur & demi-
ligne de diametre | étant vüs fans autre fecours que celui
d’une lunette à nez , dont chaque verre avoit fix pouces de
foyer. Par ce moyen je les apperçûs nager dans cette eau
d’une maniere toute extraordinaire, n’y avançant que par les
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XLV. 113
différentes fecoufles de chaque moitié de leur petit corps,
dont ils formoient un 8 de chiffre, ou une s toute femblable
à celle que je viens de repréfenter ; fe pliant & fe dé-
pliant avec tant de fouplefle & de promptitude, qu'on fe
trouvoit obligé de donner toute l'attention dont on étoit
capable , pour bien juger de la forme qu’il prenoit à chaque
moment ; & après qu'il s’étoit bienfatigué , on le voyoit def-
cendre au fond de l’eau, où il étoit vû marcher & ramper
par le moyen de quelques pattes très-courtes qu’il avoit vers
la tête & vers la queue. Mais parce que ce vers a beaucoup
de longueur par rapport à fa grofleur , il eft obligé de ram-
per après avoir marché quelque peu , & pour cela il faut
qu'il fe ferve des parties en forme d’anneaux qui font au mi-
leu de fon corps , pour fe tranfporter plus facilement d’un
lieu en un autre ; ce qu'il ne pourroit faire s’il n’employoit
que fes pattes toutes feules. J'ai trouvé la méchanique de ce
tranfport fi belle ; que j’ai crû la devoir expliquer pour la
faire comprendre ; & cela fuffit pour nous affürer qu'un feul
infeéte peut marcher, ramper & nager. Les vers de terre de
la couleur de ceux dont je viens de parler, ne font que ram-
per ; les Chenilles aquatiques rampent & nagent , & les an-
guilles du vinaigre nagent feulement.
Pendant que le ver repréfenté en cette Planche avance
fa tête & qu'il la retire , il ouvre une grande bouche bien
différente de celle des vers ordinaires , qui eft toute ronde ;
au lieu que celle de l'infeéte dont je parle , a la levre fupé-
tieure beaucoup plus longue que l’inférieure , & on les voit
l'une & l’autre munies de petits poils aflez courts. Sa tête eft
-ornée de deux petites cornes qui paroiflent émouflées par
leurs extrémités, & de deux yeux très-brillans ; le derriere
ft terminé par plufeurs efpeces de feuilles affez longues &
tranfparentes : enfin on apperçoit un ou plufieurs mufcles
«qui forment un cordon qui regne depuis fa tête jufqu’au der-
nier des anneaux qui compofent toute l'étendue de l’animal ,
à la réferve de fa tête & de fa queue.
Ces petits infeétes amaflent une efpece de fédiment qui fe
forme au fond du vaifleau où ils font ; ils s’en font un petit
‘tas qui paroït de couleur verte , dans lequel ils fe logent
Planche 14.
114 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
après s'être bien tourmentés ; & l’on remarque en la furface
extérieure de cette male, des entrées rondes qui s’y confgr-
vent , quoique la matiere qui les environne foit très-délicate.
Si on la remue en l’agitant pour l’éparpiller , & rompre ainfi
toutes leurs cellules, ces animaux [a ramaflent tout de nou-
veau en un petit peloton, pour y former de nouvelles cel-
lules dans lefquelles ils fe gliflent , & où ils demeurent au-
tant de temps qu'il leur en faut pour faire de nouveaux ef-
prits, & recommencer à nager de la même maniere que
nous l’avons décrit.
Je devrois parler ici de ce que deviennent ces infeétes , en
marquant de quelle maniere ils paroïffent fe transformer en
mouches que l’on nomme des coufins ; mais j'ai befoin pour
cela de les examiner encore , afin de ne rien avancer que de
certain fur ce changement , qui m’a paru des plus curieux
que l'on puifle voir , & même des plus furprenans.
CHAPTERE XVI
De l’Araignée aquatique.
Ve donné le nom d’Araignée aquatique au poiflon qui eft
vû repréfenté fur cette Planche au-deflous de la lettre £;
Je l'ai pêché par hafard dans une très-vieille infufion d’écorce
de bois de chêne. Son corps eft de figure ovale , & fans au-
cune apparence de tête ; on voit pourtant quelquefois remuer
de très-petits poils qui bordent fes levres , dont le mouve-
ment particulier donne occafion aux petits corps qui fe trou-
vent dans cette infufion , d'entrer dans fa bouche pour fervir
de nourriture à ce poiflon. À droite & à gauche de cette
bouche, on y voit deux petites cornes articulées & mobiles,
dont les extrémités font terminées par des efpeces de petits
poils qui forment comme des aigrettes. On lui remarque qua-
tre pattes toutes femblables à fes cornes, mais un peu plus lon-
gues & plus groffes. Ces pattes & ces cornes fervent de na-
geoires à ce poiflon , qui fe tranfporte par des fecoufles fi
promptes & tellement fuivies , qu’on a de la peine à le bien
Examiner ;
ET. AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XLVI. 115
examiner ; il faut pour cet effet attendre patiemment qu’une
grande partie de la goutte d’eau où il nage , foit prefqu’en-
tierement defléchée : alors on fe trouve en état d’en pouvoir
obferver toutes les parties dont je viens de parler , & de re-
connoître qu'il eft terminé par une efpece de queue faite de
poils.
GHAPETRE X EVILI
Defcniption d'un peut Infeëte des plus curieux qui fe paife
objerver , tant pour la diverfité des chofes qu'on y découvre
extérieurement , que pour celles qu'on y appercoit dans les
parties tranfparentes *, |
C E petit poiflon fe pêche dans nos baflins de fontaine ,
où on le voir nager parmi les têtars ; ila environ deux
lignes de longueur , & une ligne de diametre par le milieu de
fon corps. Sa conftruétion eft route finguliere ; on le voit ici
repréfenté au-deflous de la lettre À, PI. 1$ , à - peu - près
comme on l’a vù avec un petit microfcope à deux verres,
qui n’a qu'un pouce de longueur : par fon moyen on voit les
objets dans leur fituation naturelle. Le dos de cette infeëte eft
convexe , & couvert de plufieurs efpeces d’anneaux écail-
leux & mobiles. Chacune de ces écailles eft piquée de plu-
fieuts petites cavités , qui fe voyent repréfentées par des
points. Sa tête eft ornée de deux yeux noirs , de deux cor-
nes , & de deux efpeces de bras qui fe découvrent un peu
au - deflous de fes yeux : fa queue eft compofée de quatre
efpeces de nageoires , chacune defquelles eft divifée en
plufeurs articles emboïtés les uns dans les autres , & garnis
de poils aflez gros vers leurs racines : fes jambes , qui font
au nombre de cinq ou fix de chaque côté , lui fervent aufh
de nageoires, & font encore garnies de poils à-peu-près {em-
blables à ceux qui fe remarquent aux jambes d’une puce.
Outre ces parties extérieures , on apperçoit encore vers le
derriere du corps de ce poiflon , deux efpeces de bras plus
* Cet Infedte et connu fous le nom de /ci/le aquatique , ou fous celui de cre-
Yelle»
Tome TJ, Part. IT, (
116 Des ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
menus que les précédens , qui battent la mefure très-régu-
lierement & avec beaucoup de vitefle , s’accordanr entr’eux
à s'élever & à s’abaiffer , de même que cela s’obferve aux
pattes de devant d’un chien qu’on fait tenir debout , & qui a
été dreflé à faire ce petit manége. Pendant que le mouve-
ment de ces bras dure , on voit circuler l’eau qui environne
ce poiflon placé fur le porte-objet d’un microfcope , & qu’on
y laifle exprès pour l'empêcher de mourir durant le temps
. que l’on employe à l’examiner.
Planche 15.
Mais ce qui paroit de plus furprenant , c’eft de voir cir-
culer le fang de ce poiffon dans les veines & dans les arreres
des quatre nageoires qui compofent fa queue ; dans celles
des cinq ou fix pattes qui font du côté de la lentille ; dans
les vaifleaux des deux bras , lorfqu'ils ceffent de battre la
mefure ; dans les deux cornes qui font fur fatéte, & dansles
deux autres bras qui fe voyent au-deflous de fa tête. On peut
nommer ce poiflon crevette , parce qu'ilrefflemble en quelque
façon à un poiflon de mer qui eft de la longueur d’un doigt
ou environ, & à qui l’on a donné ce nom.
PCR PET EDGE
CH AP: TR E--XEVIN:
Des S'auterelles aquatiques *,
ADAME la Duchefle du Maine s'étant appliquée aux
Mathématiques & à la Phyfique d’ufage , s’eft heu-
reufement trouvée avoir beaucoup de fagacité pour les dé-
couvertes qui fe font avec le microfcope ; de forte qu’elle
s’eft fait un plaifir, après la leéture de mon Livre, de poufler
aflez loin cette matiere , pour trouver de nouveaux infeétes
dans des eaux préparées , & dans celles qui n’ont point d’autre
préparation que celle qui leur vient naturellement de l'air
par fucceflion de temps. Cette Princefle m’ayant fait l’hon-
neur de m’appeller à Sceaux , elle envoya prendre de l’eau
dans un canal. Cette eau lui ayant été apportée , elle en mit
une très-petite goutte fur le porte objet de fon microfcope
+ C’eft la nymphe de la mouche éphémere.
ET AQUATIQUES. SEC. PART, Chap. XLVIIL try
univerfel , avec autant d’adrefle que l’auroit pà faire un ex-
cellent Microfcopifte. Aufli-tôt qu'elle l’'eut porté à fon œil
& mis au point de diftinétion , elle s’écria en difant : Ex voicz
un des nouveaux que j'ai découverts ! En me préfentant Le mi-
crofcope , Son Altefle Séréniflime me pria de l’examiner, de
le defliner quand je ferois de retour à Paris , pour le faire
graver , & d'en donner une defcription de fa part à Meffieurs
de l’Académie Royale des Sciences.
J'examinai donc cetinfeéte , que je trouvai d’abord digne
d’admiration ; & parce qu'il étoit néceflaire de lui donner un
nom qui lui convint, pour en faciliter la defcription , je pris
la liberté de dire à S. A. S. que fi elle avoit pour agréable
d’en être la maraine , j'en ferois le parain ; elle me répondit,
crès-volontiers , de forte qu'il fut nommé /auterelle aquatique.
Après avoir pañlé environ deux heures à faire diverfes ex-
périences avec les microfcopes de S. A. S. je pris congé de
cette Princefle pour m'en revenir à Paris ; où j'apportai la
bouteille pleine de l’eau du canal dont je viens de parler ,
& d’un nombre fuffifant de Sauterelles aquatiques , afin de
les examiner à loifir.
Le lendemain je les mis en expérience , pour les faire
defliner par M. de Vigneux , qui les repréfenta dans les trois
différentes attitudes exprimées élégamment au - deflous des
lettres 4, B , C. La premiere de ces reprélentations la fait
voir par le dos , la tête en-haut, & pofée fur le ventre : la
feconde la fait voir de côté, le dos en-haut, & étendue de
droite à gauche : enfin celle qui eft vüe au-deflous de €,
eft couchée fur le dos, ayant la tête en-haut, & le ventre
tourné du côté du Spettateur.
Cet infeéte nous a paru avoir environ deux lignes de lon-
gueur , étant vû des yeux nuds , fans y comprendre l’éten-
due de fa queue , divifée dès fa racine en trois branches clai-
res & tranfparentes , dont chacune eft compofée de plu-
fieurs articles qui vont diminuant de grofleur depuis le
commencement jufqu’à la fin. La tête de cette efpece de
Sauterelle étant vüe de front, paroit à-peu-près femblable à
celle d’un jeune agneau ; on y voit deux gros yeux bruns ,
& fur le milieu de chaque cornée une petite tache noire ,
qi
Planche r£,
Pfanchers.
118 DES ANIMAUX AERIENS , TERRESTRES
au-deflous de laquelle il y a deux trous qui donnent pañlage
à l'air qui entre dans fes poumons. Au-deflous de ces nafeaux
on voit une petite tache noire & deux cornes , dont cha-
cune furpaile en longueur tout le corps de la Sauterelle. Ces
cornes font très-menues , bien blanches & tranfparentes ,
chacune defquelles eft compofée d’un fi grand nombre d’ar-
ticles, que je n’ai pù les compter , non - feulement à caufe
du mouvement rapide de la Sauterelle , mais auffi à caufe de
la diminution extraordinaire qu’ils ont à mefure qu'ils fe trou-
vent approcher de plus en plus de l'extrémité.
Sa bouche qui eft fort grande , reffemble aflez à celle d’un
petit agneau ; on la lui voit ouvrir & fermer de temps en
temps, remuant les levres comme pour mâcher quelque
chofe.
Son corps qui eft de couleur d’ambre jaune , eft compofé
de plufieurs pieces mobiles & écailleufes, à- pen- près fem-
blables à celles qui couvrent le dos d’un cloporte ; on y re-
marque fix pattes, chacune defquelles eft compofée de trois
piéces & d'autant d'articles très - mobiles. Ces pattes font
{uivies de dix ou douze petites rames toutes femblables à des
plumes de certainsoifeaux ; leur ufage eft de fervir au tranf-
portde ce poiffon, par le moyendes diverfes fecoufles qu’elles
donnent à l’eau qu’elles pouflent dans le temps qu'il y nage.
On voit fouvent cet Infeéte marcher au fond de l’eau, &
s'élever vers fa furface par les diverfes fecouffes qu’il lui com-
munique.
À mefure que la petite goutte d’eau qu’on a mife fur le
porte-objet du microfcope , s'évapore , elle s’y épaiflit ; &
Janimal y trouvant alors plus de réfiftance , y nage moins
vite , & donne plus de facilité de remarquer les mouvemens
des poumons étendus tout le long de fon corps : on les y voit
avec beaucoup de plaifir s’enfler & fe defenfler avec autant
de régularité qu’on en peut remarquer dans les vibrations
d’un pendule mis en mouvement.
Une feconde Sauterelle repréfentée diverfement fur cette
même Planche fous les lettres D, E , F, eft celle que M.
Paris m’apporta un jour pour l’examiner * ; elle ne fe trouve
* Celle qui eft repréfentée au-deflous de la lettre D, ft vûe par le ventre.
ET AQUATIQUES. SEC. ParT. Chap. XLVIIL 119
pour l'ordinaire que dans les baflins de jardin , où il s’en voit
de grandes , de moyennes & de petites ; les plus grandes
femblent aux yeux nuds avoir environ trois lignes de lon-
gueur: celle-ci eft une des plus petites & des plus tranf-
parentes. On s’eft fervi pour l’examiner, d’une lentille
d’une ligne & demie de foyer; fa tête eft ornée de deux
belles cornes fort longues , compofées de tant de par-
ties & de jointures, qu'il eft très -difficile d’en compter le
nombre : elles font aufli munies de poils d’un bout à l’autre.
On apperçoit au-deflous de ces cornes deux petites ouver-
tures qui peuvent pañler pour fes nafeaux ; un peu à côté on
remarque deux beaux yeux noirs: maïs fi après avoir pris
une lentille d'environ trois lignes de foyer , on incline le mi-
crofcope, afin de faire tomber les rayons de lumiere fur le
corps de l'animal, les yeux , de noirs dont ils étoient vûs
auparavant , paroitront d’un jaune-obfcur, & feront vûs
couverts de cryftallins, de même que l'œil d’un petit mou-
cheron. Son corps eft compofé d'environ dix à douze an-
neaux, qui diminuent infenfiblement de grofleur depuis la
tête jufqu’à l’autre extrémité de fon corps. Les fix pattes
dont elle eft pourvüe, font divifées chacune par trois ou qua-
tre articulations, & garnies de poils dans toutes leurs lon-
gueurs. Ces pattes ont leurs infertions dans les trois anneaux
qui font les plus proches de fa tête ; elles font chacune ter-
minées par une petite griffe qui fert à s’accrocher le long des
bords du bañin où on les pêche , comme on l’a remarqué
plufieurs fois.
À chaque jointure des anneaux , depuis le quatrieme juf-
qu’à l’onzieme inclufivement, on voit de petites nageoires
compotfées de houpes de poils qui font enfermées dans des
membranes très -fines & tranfparentes, qui fervent à fon
tranfport le plus commun, en les agitant avec une rapidité
extraord naiïre. Elle a trois longues queues qui paroif-
fent femblables à fes cornes , par le grand nombre de
pieces, d'articles & de poils qui les compofent. Sa fituation
la plus ordinaire eft d’être fur le ventre , foit qu’elle nage ou
celle qui eft repréfentée au deflous dela lettre Æ , eft vûe de côté; & celle qui
eft au deflous de la lettre F, eft vüe par le dos,
Planche 14.
120 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
qu’elle marche fur le porte-objet du microfcope ; «elle fe met
{ur le côté lorlque la goutte d’eau dans laquelle elle eft , com-
mence à fe deflécher : c'eft dans cette fituation que l’on dif-
tingue deux mâchoires , l’une fupérieure & l’autre inférieure,
qu'elle ouvre de temps en temps, ce qui donne lieu d’apper-
cevoir fes dents, & fa langue, qu'elle pouffle quelquefois
au-dehors : la circulation du fang fe voit fort bien dans fes
pattes , fes cornes & fa queue ; on la voit aufli des deux cô-
tés de {on corps.
Il eft à-propos de faire remarquer à ceux qui auront de
ces dernieres fortes de Sauterelles aquatiques , & qui feront
bien-aifes de les conferver quelque temps, qu’il ne faut point
remplir la bouteille pour fuppléer à l'évaporation qui s’en
fera, car elles mourroient peu de temps après ; il les faut
laïfler dans la même eau où elles ont été prifes , jufqu’à ce
qu'elles meurent d’elles-mêmes , ce qui arrivera au bout de
peu de jours,
CHAPITRE XLIX.
Du Limas aquatique trouvé dans une infufion faite d’un bouquet
compoé de plufieurs fortes de fleurs miles dans de l’eau
de riviere.
J ? Ar nommé le poiflon repréfenté au-deflous de la lettre 4,
limas aquatique , parce qu’il a à-peu-près la figure du limas
terreftre , & qu'il nage dans l’eau. On le voit ici étendu de
toute fa longueur, vü avec une lentille d'environ une ligne
& demie de foyer ; il paroït rond , maïs d’une rondeur iné-
gale & fort irréguliere : il eft d’une belle couleur d’ambre
jaune , plus claire vers la fuperficie de tout fon corps, qu'il
ne l’eft au milieu , où l’on voit fes vifceres un peu plus bruns.
Cet animal s’allonge & fe raccourcit fouvent dans toute
l’étendue de fon corps ; quelquefois il n'étend & ne raccour-
cit que fa partie fg h. Toute fa tête paroît brillante, & rem-
plie d’une infinité de petits corps en mouvement, que j'ai
repréfentés par des points : fa partie extérieure eft munie de
ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. XLIX. 12:
plufieurs petits corps ronds , &c de trés-petits poils que l’on
n’apperçoit qu'avec peine , quoique la lentille dont je me
fuis {ervi pour examiner le tout, augmente l'apparence de
l’objet environ cinquante-deux mille fois plus que nos yeux.
Ses levres font munies de poils , dont le mouvement rapide
oblige tous les petits corps qui n’en font éloignés que d’un
pouce ou environ, d'entrer dans fa bouche pour fervir de
nourriture à cet infette. Je nomme Zmas cet infe&te , parce
que tout fon corps eft compolé d’anneaux mufculeux qui fe
meuvent à tous les mouvemens qu'on lui voit faire.
Toute l'étendue z £ eft remplie de vifceres de ce limas,
dans lefquels on ne diftingue aucune partie qui femble être
féparée d’une autre. Le nager de ce poiffon eft fi uniforme,
qu'on n’y remarque aucune inégalité , fi ce n’eft qu'il tourne
{a têre de côté & d'autre, fuivant les divers lieux vers lef-
quels il veut fe mouvoir.
Je n'ai remarqué aucune nageoïire , aucune patte, ni
queue , ni gouvernail, qui puifle fervir à fon tran{port ; fon
mouvement n'eft ni trop lent ni trop prompt pour empêcher
de découvrir exaétement tout ce que j'en dis.
Een
CHAPIERE"T
Defcription d’un nouveau Poiffon que j'ai trouvé dans de l’eau
du baffin de S. Maglore du F' auxbourg S. Jacques à Paris,
qu'on peut nommer Chenille aquatique *.
LE nouveauPoiflon, quieft vürepréfenté au-deflous de la
Œ lettre À, eft bien différent de la feconde fauterelle aqua-
tique dont j’ai parlé dans le chapitre 47. Etant vü des veux
nuds, il femble avoir environ deux lignes de longueur ; &c lori-
qu’on l’examine avec une lentille qui a un peu moins de trois
lignes de foyer, il fe fait voir fous une longueur d'environ
trente-fix à trente-feptlignes , fans y comprendre une efpece
de queue compofée de plufieurs longs poils, & de deux efpe-
es
* C’eft le ver du coufin, dont l’Auteur a déjà parlé dans fes chap. 36 & 37 ;
lh figure en eft gravée Planche 14
Planche 14
122 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES
ces de nageoires triangulaires qu’on peut facilement remar-
quer à fes côtés. Sa rêre , qui a plus de hauteur qu’elle n’a de
largeur, eft très-mobile,tournant à droite & à gauche comme
{ur un pivot, fe voit ornée de trois grands poils, de quatre
cornes d’inégale longueur , de deux petits yeux noirs, & de
quelques petites taches de même couleur ; on la voit termi-
née par une aflez grande bouche dont les levres font mobi-
les ; la fupérieure eft couronnée des trois grands poils dont
je viens de parler , & de deux petites cornes faites de poils
très-fins , preflés les uns contre les autres, & plus larges à
leurs extrémités qu'ailleurs. Un peu en-decà de ces petites
cornes on en voit deux autfes , chacune defquelles eft com-
pofée de trois petites pieces mobiles, & d'autant d'articles
ou de jointures : chaque extrémité eft terminée par plufieurs
petits poils d’inégale longueur , qui en font l’ornement.
Un peu au-deflous de ces dernieres cornes on y apperçoit
deux petits yeux noirs, divifés, comme ceux de la fauterelle
aquatique , en un très- grand nombre de cryftallins , fans
poils & fans paupieres. On voit entre ces yeux trois petites
taches de même couleur , qui forment avec eux comme un
arc de cercle ; & au-deflous du milieu de fa concavité on en
voit une quatrieme de figure triangulaire & de même cou-
leur. | |
Sa poitrine qui eft bien ample , forme comme un gros
bourrelet , des côtés duquel , tant à droite qu’à gauche, on
voit fortir des houpes de poils d’inégales longueurs & grof-
feurs , dont les plus grands font munis d’un feul côté d’autres
poils plus petits.
Au-deffous de cette poitrine on y voit huit autres efpeces
de bourrelets irréguliers, moins hauts que larges, qui vont
en diminuant de groffeur en s’en éloïignant. À droite &c à
gauche de chaque bourrelet il y a deux petits mammelons
d'où fortent de longs poils. Enfin la derniere partie de cette
Chenille aquatique a beaucoup plus de hauteur que de lar-
pa cette partie eft terminée par quantité de poils très-
ongs , à côte defquels on voit deux efpeces de queues blan-
ches , aiguës, & fort larges vers leurs infertions , qui ref
femblent à un triangle ifofçele , dont l’angle du fommer eft
fort aigu. Le
- ET AQUATIQUES. SEC. PART. Chap. E. 123
"Le nager de cette Chenille s'exécute par les diverfes fe-
éoufles qu'elle communique à l’eau, en fe fervant du grand
nombre de poils qui l’environnent , & de deux efpeces de
nageoires qu’elle a à côté de fa queue. ,
La nymphe qui l'enveloppe totalement , eft très-fine &
bién tranfparente ; mais le milieu de route la longueur de
fon corps eft fi brun, que je n'en ai pû voir les vifceres , ni
les divers mouvemens qui s’y font. Je me fens obligé d’aver-
tir que ces fortes de Chenilles-ci font fi rares, qu'elle eft la
feule que j'aye vûe juiqu’à préfent.
PP RE PTE EPA TETE
mens
CHAPITRE LL
D'un Poiffon que jai nommé Bélier , vé dans une eau croupie *.
Ezrer eft le nom que j'ai donné au Poiflon que lon
voit repréfenté au-deflous de la lettre C ; fa tête eft
ornée de deux grandes cornes élégamment contournées ,
compotfées de plufieurs pieces bien articulées , qui diminuent
infenfiblement de grofleur ,; & qui enfin fe terminent en
pointes. On voit fortir de la partie fupérieure & inférieure
de chaque jointure, plufieurs petits poils formant entr'eux
comme des aigrettes , dont les poils qui les compofent dimi-
nuent de grofleur à mefure qu'ils fe trouvent plus éloignés de
la racine des cornes , dont le contour eft aflez agréable à la
vûe. Il fort aufli de la tête deux petites cornes qui femblent
fervir d'appuis aux deux cornes , parce qu’elles partent immé-
diatement de deflous les racines de ces mêmes cornes. Enfin
on voit partir du fommet de la tête de ce Poiflon, une ef-
pece de trompe compofée de trois pieces qui s’emboîtent
l'une dans l’autre , comme font les tuyaux d’une lunette d’ap-
proche. Cette trompe eft peut-être une bouche allongée qui
fert de conduit aux alimens de ce Poiflon , & à l'air qui eft
pouffé dans fes poumons.
Nous avons encore obfervé un très-petit corps rouge
* Je fuis porté à croire par tout ce que dit l’Auteur , que c'eft ici l'infecte dont
parle Leuwenhoeck n°. 288. Tranf. Phil. & dans la 1212, de fes Lettres.
Tome I. Part, IT.
Planche 130
24 DES ANIMAUX AERIENS, TERRESTRES, &c.
placé au milieu de la tête, entre les racines des deux grandes
cornes ; mais nous n'avons pù deviner fi ce petit corps ef le
cerveau de l'animal, qui ne paroît aux yeux nuds que de la
groffeur d’un ciron ou environ. Le corps de cetinfette, tout
petit qu'il eft , fe voit compofé d'environ onze à douze an-
neaux tellement emboîtés les uns dans les autres, que les
divers mouvemens de l’animal n’étoient point interrompus
par les poils qu’on peut remarquer fortans des parties droite
& gauche des articles de ce Poiflon.
On voit fortir une queue fourchue de la partie inférieure
du plus petit de ces anneaux , terminée par deux aigrettes
faites de plus longs poils que ne font ceux qu'on voit autour
des deux fourchons. Mais ce qu’il y aicide plus remarquable,
ce font comme deux efpeces de grapes de raifin qu’on voit at-
tachées par deux filamens un peu au-deflus de la racine de la
queue de ce Poiffon , & dont les grains font autant d'œufs
qui retardent la vitefle de fon nager , que nous avons vü
augmenter immédiatement après leur féparation.
M. Ferrand , Confeiller au Parlement de cette Ville, &
l'un des plus curieux & des plus célebres Microfcopiftes que
je connoiïfle, a vü, comme moi, cette grape fe féparer
totalement de ce Poiflon , les œufs quitterles grapes , & les
petits éclorre, qui fe mirent à nager dès le moment qu'ils
furent fortis des œufs,
Enfin on remarque un vaiffeau de couleur jaune, quiregne
tout le long du corps de ce béliér, au-dedans duquel on ap-
perçoit une matiere en mouvement , pouflée de haut en-bag
& de bas en-haut avec aflez de régularité,
Fin de la feconde Partie & du Tome premier
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Haussard Seulp
OBSER VATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE;
FAT. ES
AVEC LE MICROSCOPE,
Sur un grand nombre d'Infe@tes , & fur les Antmalcules
qui fe trouvent dans les liqueurs préparées, & dans
celles qui ne le font pas, &tc. avec la Defcription &
les Ufages des différens Microfcopes, &c.
Partie déjà publiées par feu M. Jo8Lor, Profeffeur en
Mathématiques de l’Académie de Peinture & de
Sculpture : partie rédigées fur fes Obfervations poftc-
rieures.
Avec un grand nombre de Figures.
Ge eee a eg
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LCONL'E, SE CON D:
Chez BRIASSON, Libraire, rue Saint Jacques, à la Science.
NN DOG ENV:
AVEC APPROBATIONS ET PRIVIELEGE DU ROY.
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TABLE DES CHAPITRES
DU SECOND, VOLUME,
PREMIERE PARTIE.
CHAPITRE r 1) Efcription des Microfcopes dont je me
Jus fervi. page 1
Defcription & ufage des nouveaux Microfcopes dont on peut fe
fervir à la lumiere du jour ou à celle d'une chandelle. 2
Des ufages de ce Microfcope. 6
CHAP.IL. Defcripnon d'un autre nouveau Microfcope à L-
queurs. 10
CHAP. II. Defcription d’un troifieme Microfcope à liqueurs.
12
CHAP. IV. Defcription & ufage d’un quatrième Microfcope
très-fimple. 14
CHAP. V. Conftruéion d’un cinquieme Microfcope à liqueurs ,
par le moyen duquel on pourra employer des lenilles foufflées,
& de celles qui ne le font point, depuis les plus petits | foyers
jufqu'aux plus grands. 19
CHAP. VI. Defcription d’un nouveau Microfcope à liqueurs,
d’une conftruélion fort finguliere., pour mettre en ufage les len=
alles d’un très-petit foyer. 22
CHAP. VIL. Defcription & ufage d’un nouveau Microfcope à
tiges ; très-commode pour obferver toutes fortes de petits objets,
foit de jour ou de nuit , à la lumiere d’une chandelle. 2$
Des ufages de ce Microfcope. 28
CHAP. VIIT. Defcription & ufage des Microfcopes à canon de
verre , que quelques perfonnes nomment Tombeaux ; 6 d’au-
tres, Cimeriere de divers animaux. 30
# jj
‘a TAB L'E
Défcription du fecond Microftope à canon. 31
CHAP.IX. Des ufages que l’on peut tirer des Microfcopes
dont je viens de parler. 32
CHAP. X. Defcripuion & ufage d’un très-perit Microfcope
monté d’une feule lentille. 41
CHAP. XT. Defcriprion d'un très-perir Malone a deux ver-
res , qui reprèfente les objets dans leur fituation droite & natu-
relle. 43
CHAP. XII. Defcription 6 ufage d’une nouvelle machine très-
utile aux Aantornifies AUX Deffinateurs ‘aux Graveurs,
aux Peintres qui travaillent en migniature ; Ë généralement
à tous ceux qui veulent découvrir ce que les yeux feuls ne peu-
vent appercevoir, & poulfer leurs ouvrages au point le plus
haut de perfeéon. 44
Des ufages de cette machine. 45
CHAP. XII. Explication de toutes les parties qui compofent un
Microfcope à trois verres convexes des deux côtés. 46
Explication du profil de ce Microfcope. NAT
Du foyer de chacun des trois verres de ce Microfcope, & des di-
verles diflances qui font entr'eux. 48
Des ufages que l’on peut tirer de ce Microfcope à trois verres. 48
CHAP. XIV. Defcriprion d’une petite machine nouvelle qui
contient trois fortes de ei & deux petites lunettes
d'approche. Lo)
CHAP. XV. Defcriprion d’un nouveau Microfcopeuniverfel, s 2
Des ufages de ce Microfcope univerfel. 58
De la circulation du fang, & d'une nouvelle invention pour la
faire voir dans la queue d’un petit Poiffon nommé Térard ou
Chabot. GI
Profil d’un petit Microfcope compofé de deux ou de trois lentilles
convexes des deux côtés. 63
CHAP. XVI. Autre nouveau Microfcope univerfel, 66
-DES CHAPITRES. v
CHAP. XVII. Explication d’un troifieme & dernier Microfcope
68
nouveau & univerfel.
CHAP. XVIII. Comment on doit ajufler une Lamproie, une
Anguille ou un Tétard dans un tuyau de verre , d'argent ou de
laiton. Comment on applique ces tuyaux dans la machine re-
préfentée en la PI, 21, fig. 4. Et enfin comment cette même
machine doit étre placée dans la capacité du corps de ce Mi-
crofcope. 74
Comment & fur quoë il faut faifer les poiffons dont la groffeur ne
permet pas de mettre en ufage la machine précédente. 76
Comment on pourra conferver durant plufieurs mois tous ces
poiffons. =
SEGONDE PARTIE
CHAPITRE XIX.
d Efcription & ufage. de deux nou-
P'.. veaux. Müicrofcopes univerlels à
plufieurs verres ,.& de peu de longueur. 4
CHAP. XX. Defcriprion 6 ufage d'un nouveau Microfcope
univerfel ,à deux , à'trois € à quatre verres. 9
CHAP. XXI. Des avantages qui fe nrent.de la proximité de
deux Verres d'inégales convexités | appliqués auprès de l'œil.
11
CHAP. XXII. Conffruéion d’un nouveau Microfcope à deux
| ï
verres , qui n'a qu'un pouce ou environ de lonoueur & autant
de diametre ; par le moyen duquel on pourra voir un objet très-
clairement & très-diflinélement dans fa fuuation naturelle, &
de huit groffeurs différentes , fans être oblisé d'augmenter ni
diminuer la longueur du corps de ce Microfcope. 13
CHAP. XXII. Nouvelle méthode pour monter les Microfco-
es à canon de verre. 14
CHAP. XXIV. De combien les Lenulles grofiffent. 16
CHAP. XXV. Proportions des verres du Microfcope de Mon-
feigneur le Maréchal d’Eflrées | dont les effits font très-agréa-
bles à voir, l'ayant rendu univerfel, c’eft-a-dire propre à faire
voir les petits objets ordinaires , les animaux des liqueurs ,
& La circulation du fang dans plufieurs Jortes de poiffons de
v) TABLE.DES CHAPITRES.
diverfes efpeces. 17
CHAP. XXVI. Proportions des Verres d'un petit Microfcope
qui n'a que deux pouces & demi de longueur , très-commode
pour être appliqué à notre Microfcope univerfel. 19
CHAP. XXVIT. Des Werres concaves que l’on fait fervir de
orte-objets aux Microfcopes. 22
CHAP. XXVIIL. Obyjetons 6 réponfes faites au fujet de la
nouvelle hypothefe propofée par M. Joblot au fujet de fes nou-
veaux Microfcopes | & des expériences qu’il en a faites avec
ces MT, icrofcopes, + 26
Fin de la Table des Chapitres du fecond Volume.
AVIS AU RELIEUR. ,
On placera les quatorze Planches, Tome I. Partie I. à [a fin de
cette Partie, avant la feconde Partie de ce Volume.
Les quinze Planches, Tome I. Partie IL. après cette feconde Par-
tie.
Les vingt-quatre Planches du Tome II. en une feule fois , après
le Tome fecond.
Et on obfervera toûüjours de laïffer les papiers blancs, pour que
les Figures fortent en-dehors du Livre.
ne .
OBSERVATIONS
D'HISTOIRE NATURELLE.
SECONDE PARTIE,
CONTENANT la Defcripuon & les Ufages des
différens Microfcopes.
CHAPITRE PREMIER
Déefcription des Microfcopes dont l'Auieur a fait ufage.
PRÉS avoir rapporté tout ce que j'ai obfervé
fingulier & de plus imperceptible à la, fimple vüûe
dans divers mixtes, foit folides, foit liquides, & fur-tout
-4 - Nouveaux MicroscOPEs
Planche r.
Planche 2.
les petits animaux que les yeux armés d’excellens Microf-
copes y apperçoivent, j'ai crû qu'il falloit expofer à la fuite
toutes les pieces des inftrumens que j’ai employés à ces re-
cherches.
Defcripuion 6 ufage des nouveaux Microfcopes dont on peut
Je Jervir à la lumiere du Jour ou\à celle d’une chandelle.
| HA QUE Microfcope me paroit avoir fes ufages parti- …
* culiers , de forte que je ne penfe pas qu’on én puifle
inventer aucun qui renferme feul toutes les propriétés de
eux que je vais propolfer.
En voici un qui paroît exempt des défauts qu’on remar-
que dans les autres, & plus univerfel que ceux que j'ai vûs':
{eul, il fervira à toutes les expériences qu’on fait ordinai-
rement avec beaucoup d’aûtres divetfement conftruits ; &
quoiqu'il paroïfle d’abord fort compolé , on avouëra qu'il
eft tres-fimple par rapport à la diverfité de fes effets : 1l a
même cet avantage , que l’on peut comprendre en un inf-'
tant la maniere de s’en fervir dans l'examen d’une infinité
de nouveaux objets très-agréables à la vüe, & très-propres
à prouver la: puiffance mfnie du Créateur, en expofant à
nos yeux tant d’efpeces d'animaux , qui font peut-être un
million de fois plus petits que le ciron ; que l’on peut regar-
der comme l’éléphant de la plüpart de ces infeétes.
Ce Microfcope repréfenté tout entier en À , eft compofé
de quatorze à; quinze pieces principales. : À
B, quien eff le profil, fait par la feëtion d’un plan qui
l’a divifé en ‘deux parties égales, pouf en faire voir le de-
dans , & les différentes épaifleurs des pieces qui le com-
pofent. cut
C, eft la repréfentation d’un manche qui fe monte à vis
fous le petit canon cylindrique du Microfcope ,.où l'on a
foudé une virole dans laquelle il y a un écrou , comme on
voit dans le profil B."°? °° | PE
D , eft le deffein d’une petite boëte ou porte-lentille.
Een
PREMIERE PARTIE. Chap. I. 3
E ,eneftle profil; F, l'entrée ; & G , le deflous, où ily a
un petit rebord pour fourenir un diaphragme qui doit por-
ter la lentille marquée 2.
1, cft une virole au bord fuperieur de laquelle on à refervé
une moulure pour la tenir plus facilement ; elle eft refenduë
en quatre difierens endroits également efpacez , pour faire
l'effet d'un reflort. 0 0
3, eft le plan du deflous de cette virole : fon ufage eft de
retenir la lentille qui fe met dans la boëte D ,& de l’y affermir
entre deux petits diaphragmes de plomb placez au centre.
H, eft une platine vüë par devant , au milieu de laquelle
il y a un trou de quatre lignes de diametre , pour recevoir
plufieurs boëtes l'une après l’autre , comme D, dans chacune:
defquelles il y a une lentille , dont le foyer eft different de
celuy de chacune des autres; ce qui eft tres - avantageux
pour réüflir dans les diverfes obfervations que l’on fe pro-
pofe de faire. |
1, reprefente la même platine vüé par derriere ; L, eft le
profil de la platine H, où on voit l'épaifleur de la queuë qui
y eft rivée & foutenuë par une rofette, comme on le remar-
que au bas de la platine H, où eft fon profil L.
M , eft le deflein d’un verre taillé en forme d'un quarré
long , creufe fpheriquemenc au milieu , pour porter les gout-
tes de liqueurs qu'on y met , en forte quon puifle aflez
l'approcher de la lentille. | ts 0
Ce verre M, qu'on peut nommer porte-objet , & qui doit
avoir tres-peu d'épailleur dans le. milieu , eft taillé en:bi-
feaux des deux côtez les plus longs , afin qu'il entre. jufte-
ment dans une coulifle reprefentée fur la platine N ;:& qu'il
y foit encore retenu , fi l’on veut, par un levier à reflort qui
s'appuye deflus ; ainfi qu'on le voit exprimé dans.le deflein
marqué N,& mieux encore dans fon profil P ©.
O , eft le plan tout uni du derriere de cette même pie-
ce N.
P, eft le profil du reflort de la coulifle ; où l’on fait en-
trer les portes- objets , qui doivent être differens & nom-
breux , pour faire voir en peu de tems plufieurs fortes de
chofes,
À
Nouvraux Mrcrosconrs.
Q, eft le deflein d’üne autre piece vûëé par devant, qu'on
Planche. Peut nommer porte-pincette , à caufe qu'on y en peut met-
rie plufieurs l’une après l’autre ; tenant l’une un poux, l’au-
tre une puce , &c. que l'on conduit vis-à-vis de la lentille
du Microfcope , pour y être obfervée de tous côtez, par les
Planche, Imouvemens divers de la pincette , qu'on y tourne comme
on veut; foit en l’avançant , foit en la reculant.
RS, eft le profil de la pincette qu’on voit arrêtée fur la
piece marquée Q,
« T,T,T,T, font differens defleins de plufieurs pincettes
à reflort , plus commodes que la précedente, pour pincer
facilement les petits infeétes vivans où morts qu'on y veut
attacher. X, eft la reprefentation d'une platine foudce par
le bas au petit canon cilindrique. Cette piece a deux ou-
verturcs , la plus grande eft de onze lignes de diametre; on
y voit l'autre reprefentée dans fa jufte grandeur , & dont les
ufages feront cy-après expliquez.
V, X &Z, font trois pieces qui doivent être jointes &
attachées enfemble , de chacune defquelles il faut donner
unc idée aflez claire pour en faire comprendre la méchani-
que & l'ufage.
V ,eft le deflein de la premiere des trois pieces dont je
viens de parler , vüë par devant ;elle à une ouverture ronde
de fix lignes de diametre, & trois petits écrous autour d'el-
le , également efpacez : & fur le même plan on y a rivé
deux pieces un peu élevées pour former une coulifle,
Âu derriere de cette même piece marquée par Ÿ , & touc
à l'entour de fon ouverture , on y à fait une élevation en
forme de parapet ou d’une virole épaifle d'une ligne , qui
fe loge & tourne librement dans l'ouverture ronde de la
latine X.
Cette platine X, qui eft la feconde & la plus grande des
trois pieces qui doivent être liées enfemble , a onze lignes de
diametre pour fon ouverture.
Z , eit la troifiéme qui eft toute ronde par fes bords , &
de peu d'épaifleur , aufli-bien que les deux précedentes;elle
eft vûë feurement du côté pofterieur du Microfcope , & ca-
chée du côté où font les reflorts d'acier , dont nous parle-
PREMIERE PARTIE. Chap. I. s
tons bien-tôt. L'ouverture qui eft au milieu n’a que fix li-
gnes de diametre : il y a vers le bord de cette circonference
trois petits trous qui répondent juftement aux trois écrous
de la platine V.
On a de plus pratiqué, autour de cette platine Z, & vers
le bord exterieur de fa circonference , un petit canal de
deux lignes de largeur , & de peu de profondeur , pour y
loger à des diftances égales trois petits reflorts d'acier trem-
pez , qui font fixez par un bout fur le fond de ce canal.
Cela fuppole , il faut maintenant aflembler ces trois pla-
tines ; & pour cet effet, appliquez le derriere Ÿ de la pla-
tine V fur le devant de la platine X ; & celle qui eft mar-
quée Z , fur le derriere de [a même platine X , en forte que
les reflorts la touchent , faifant aufli répondre les trois trous
de l'une aux trois trous de l’autre ; & arrêtant enluite ces
trois platines ainfi polées , avec trois petites vis , on aura le
mouvement de la piece V , doux, égal & uniforme , en forte
qu'elle demeurera fixe dans tous les endroits où il fera né-
ceflaire qu'elle refte.
& , repréfente le deflein d’une piece compofce d’un petit
canon cilindrique , d'une autre piece à coulifle , d'une virole
au-dedans de laquelle il y a un écrou pour y faire entrer à
“vis le manche qui fert à foutenir le Microfcope entier ; &
enfin d'une petite rouë marquée b, au milieu de laquelle il y
a un Écrou.
a , eft la repréfentation du profil de toutes les pieces dont
nous venons de parler dans le deflein marqué &.
c,eft le plan de la largeur du reflort attaché interieure-
ment au-dedans du canon , par le moven de deux petites
vis , dont on voit les têtes & le corps dans le profil à.
$ > 6,7; {ont trois defleins d’une même piece creufe , qui
cft faite en forme d’un parallelepipede reétangle, à laquelle
on 2 attaché un reflort qui regne le long de fa partie fupe-
ricure , comme on voit en la figure 6 , & une vis à {on extré-
mité qui entre dans lécrou de la roué b, dont l'ufage eft
d'approcher ou d’éloigner les objets de la platine H, par un
mouvement uniforme.
s & 7 font deux profils de cette même piece ; l'un de ces
À ji)
Planche 4,
E Nouveaux Microscopreé
profils marqué 7 ;' fait voir le dedans de la piece , & l’autre
qui eft reprefenté par le chiftre $, la fait voir par le côté &
par dehors, afin de voir l'épaifleur du reflort.
d , eft la reprefentation d’un gros canon , garni par de-
dans d'un tuyau de velours ou dé drap noir , & de deux
diaphragmes appliquez à fes extrémitez.
e, cft le profil de ce gros canon cilindrique : f& g, en
repréfentent les diaphragmes.
h , eft une efpece de virole ou de boëte ouverte des deux
côtez, qui fert à arrêter les diaphragmes de diverfes ouver-
tures , qui {e placent à l'extrémité objettive du gros canon,
auquel font attachez deux tenons à jour, par où pafñle une
efpece de regle à coulifle , foudée à la'partie fupericure du
petit canon &. Entre les deux tenons de ce gros canon
cilindrique , on apperçoit un petit reflort d'acier trempé,
dont l’ufage eft de rendre le mouvement du canon plus égal.
La plus grande partie des pieces de ce Microfcope fe
peut faire d'argent ou de laiton, Les portes-objets doivent
être faits de beaux morceaux de glace des plus tranfparens,
& des mieux choifis. On peut aufli en faire quelques-uns de
carton , ouvert par le milieu , ou de quelqu'autre matiere
qui convienne aux divers objets qu'on y veut mettre , com-
me aîles de mouches, plumes menues de ferins de cana-
rie ; &C. | :
Nous avons negligé de déterminer par des mefures parti-
culieres, la grandeur de chaque piece de ce Microfcope ;
parce que les Figures les repréfentent aflez bien & aflez
juite , dans les mêmes proportions que Monfieur le Febvre,
tres-habile Ingenieur pour la conftruétion des inftrumens de
Mathematiques , les a executées.
Des ufages de ce Microfcope.
E n’aurois jamais fait fi je voulois rapporter tous les ufa-
ges de ce Microfcope ; c'eft pourquoy , pour ne pas en-
trer dans-un détail trop long , je me contenteray de dire en
general, qu'on le peut employer tres- avantageufement à
l'examen des pevits animaux , de leur fang , & des autres
PREMIERE PARTIE Chap. I. e
liqueurs contenuës dans leurs differens vaifleaux ; & à la
découverte des moindres particules, tant des mineraux que
des plantes , où l’on apperçoit une infnité de chofes nou-
velles dans leurs graines , dans leurs tiges " dans leurs feüil-
les , dans leurs boutons , dans leurs fleurs; & enfin dans tou-
tes les infufions de chacune de ces parties , ou de plufieurs
enfemble , dont la moindre goutte contient fouvent une mul-
titude prodigieufe de créatures vivantes d'une petitefle qui
échape aux meilleurs yeux deftituez du fecours de l'art.
Lorfque l’on fe propofe d'examiner quelques-unes des li-
queurs dont il eft parlé dans cette Hiftoire, il faut enfoncer
le pecit bout d'un menu bâton, ou l'extrémité la plus menuë
d'une plume , jufqu'à profondeur de deux lignes au plus, &
vers les bords du vaifieau , y faifant même toucher ce bout
de plume , pour le porter enfuite chargé d’un peu de liqueur
fur le milieu du concave fait fur le porte-objet de verre en-
gagé dans la coulifle , de la piece du Microfcope marquée
N , qui eft décrite cy-devant : par ce moyen une partie du
peu de la liqueur, qui s’étoir attachée au bout de Ja plume,
coulc dans cette cavité du porte-objet, & y forme une gout-
telette du diametre d’une ligne ou environ, qui paroît au
Microfcope comme un lac d'une vafte étenduë, dans lequel
on voit nager une quantité furprenante de tres-petits poif-
fons de diverfes grofleurs , figures & mouvemens.
Nous expliquerons plus loin une nouvelle maniere d’ap-
pliquer le vinaigre fur le porte-objer du Microfcope , plus
convenable que celle-cy , parce qu'on y peut mettre tres-
facilement beaucoup plus d’anguilles ; nous dirons feulement
icy que les lentilles qui grofliflent le plus font les moins pro-
res à obferver ces infettes , à caufe que la grandeur monf-
trucufe fous laquelle ces lentilles les font paroïtre , empêche
&e les voir toutes entieres ; de forte qu'il fuffñit de les obfer-
ver avec une lentille d'environ une ligne & demie de foyer,
pourvüû qu'elle foit excellente.
Nous avons déja dit que les poux , les puces , & d’autres
animaux de pareille grofleur , pouvoient s’y obferver tout
vivans , par le moyen des pincettes qu'on ajoûtoit à la pla-
rinc marquée Q., & nommée porte-pincertes ; & nous ajoû-
À üj
Planche 2.
Planche 2.
8 Nouveaux MiIcROsSCOPESs.
tons de plus , que ces mêmes infectes peuvent être enfer-
mez en un des portes-objets de verre creufé fpheriquement,
& couvert d’une lame fort mince de verre ou de talc, afin
de les empêcher de fortir de leur prifon.
Pour faire tenir ce couvercle plat & tranfparent fur le
concave , on fe fervira d'un peu d'eau gomée , ou de la fim-
ple humidité de l’halene qu'on y pouffera de près.
On peut encore attacher ces cipeces d'intectes , comme
les mittes de fromage , les fourmis , &c. fur un petit verre
plan , ou fur un concave de même matiere , an moyen d’un
peu d'eau gomée dont on le moüille legerement avec un
pinceau , ou avec le bout du doigt.
Les cheveux, les aîles de mouches, les petites plumes
des oifcaux, &c. fe peuvent attacher à des portes-objets de
carton fin percez à Jour, qui entrent dans la coulifle de la
platine N°, où eft attaché le petit levier à reflort qui les y
fixe , pour y étre plus facilement obfervez.
Les mouches, & d’autres animaux de femblable petitefle ,
s'y peuvent obferver toutes enticres, en les traverfant d’une
aiguille , & les regardant dans cet état avec une lentille
d'un foyer proportionne au volume de ces animaux.
Les rubans & les étoffes de foye s'atrtachent en petits
morceaux à l'une des pincettes dont on a parlé , ou au bout
d'un poinçon emmanché , qui doit entrer dans le petit bras
cilindrique & creux du porte-pincette.
Les grains de fable , les petites graines, la poufliere qu'on
trouve dans les fleurs , & generalement tous les corps durs
de pareille groffeur , tranfparens ou non, s'y peuvent aufli
voir & obferver tres-exatement.
Les grains de fable y paroiïflent diverfement , felon les
differentes façons de les préparer pour les y regarder.
Premierement , on les peut répandre fur le concave ou
porte-objet , humcété fimplement de l’halene , en obfervant
de n’y en mettre qu'autant qu'il y en faut pour n'être pas les
uns fur les autres, & les regarder avec une lentille de deux
lignes de foyer feulement ; tantôt au jour, & tantôt à la lu-
miere d'une chandelle ; car de ces lumieres differentes il
naîtra differentes fenfations.
PREMIERE PARTIE. Chap. I. 9
Secondement. Si fur ces mêmes grains de fable vous y
faites tomber une petite goutte de vinaigre, dans lequel il
s’y trouve des anguilles , elles vous fourniront un nouveau
fpectacle aflez divertiflant , par rapport à l'embarras où elles
É trouvent de fe dégager d’entre les mañles de rochers for-
mées par ces grains de fable qui leur tombent fur le corps,
par les fecoufles qu’elles leur donnent , en les écartant les uns
des autres, pour fe faire un paflage libre.
TFroiliémement. Mais comme cette préparation du grais,
ou du fable mis feul fur le concave du verre, ou avec les an-
guilles , demande beaucoup d’adrefle pour éviter qu'il ne {e
faîle des rayes fur ce concave ou porte-objet , qu'il faut tâ-
cher de conferver le plus long-tems qu'il eft poflible , à caufe
de la difficulté qui fe trouve à le bien faire ; J’ay jugé à pro-
pos de chercher un autre moyen de donner le même plulir,
en évitant le danger dont je viens de parler.
Pour cet effec il n’y a qu'à fe fervir d'un porte-objet fait
d'une lame de laiton , au milieu de laquelle on fait un trou
d'une demie ligne de diametre , dans lequel vous mettrez
une petite goutte de vinaigre , que vous pourrez obferver
[e, VE
feule , ou avec les grains de fable , en les y répandant en
petite quantité.
Quatriémement. Ces grains de fable fe peuvent encore
obferver , en les mettant fur un porte-objet d’ébene noire,
fait comme une petite dame , au bord de laquelle on y a re-
fervé deux petites élevations qui les empêchent de tomber,
& un petic trou fait dans l’épafleur de cette piece, où l'on
fera entrer un manche d'argent ou de laiton , qui fervira à
la tenir comme en l'air , en le fourrant dans le bras du por-
te-pincette , & regardant ce qui fera deflus ce porte-objet
de haut en bas , comme on regarde ordinairement les mé-
mes chofes avec un Microfcope à trois verres ; puis compa-
rant cette façon de voir à la précedente , on remarquera
plufieurs circonftances qui feront peut-être le fujet d'une
differtation aflez propre pour nous inftruire de plufieurs faits
nouveaux fur l'optique.
Toutes les graines & les autres corps d’une certaine gran-
deur fe placeront de même , en obfervant de mettre fur
Planche 5.
10 Nouveaux Microscores.
une dame noire ceux qui feront blancs, & ceux qui auront
de la tranfparence , & les opaques fur une autre dame
blanche.
CHAPETRE “IT
Defcription d'un autre nouveau Microfcope à liqueurs.
NE Microfcope, quoyque de petit volume , ne laïfle pas
d’être un des plus commodes que l’on ait jufqu'à pre-
fent inventé; & principalement en ce que le porte-objet
conferve à l'égard de la lentille le même point de diftance
qui ne fe dérange pas, en y mettant de la liqueur nouvelle.
1 eft compofé d'environ quinze pieces que l'on a deflinces
{parement , afin d'en mieux faire connoître la conftruétion
& l'ufage.
La Figure À eft la repréfentation du Microfcope entier ,
compofe de toutes fes parties.
B, eft une piece d’ebene façonnée , vûé par-deflous , &
percée à jour dans fon milieu ; comme il paroît dans fon
profil D , où l'on voit un petic rebord x x, abaïflé au-def-
fous de fon plan inferieur, plus ou moins haut, felon l'épaif-
feur de la lentille qu'on y veut arrêter.
Cette piece d'ebene , dont le deflous eft vü en B, pour
exprimer non-feulement le plan qui s'applique fur la piece
marquée F, de laquelle on va parler , mais aufli la largeur
du rebord x x , celle de la virole , & l'un des deux dia-
phragmes de plomb qui doit couvrir la lentille , font ce
qu'on nomme ordinairement le porte-lentille , dont le cir:
cuit x x doit entrer avec juftefle dans l'ouverture pratiquée
en F, & s’y arrêter ainfi montée par le moyen de deux pe-
tits tenons tournans , qui fe peuvent remarquer à droit & à
auche de cette piece F.
H cft à propos d’avoir deux montures d’ébene ainfi conf-
muites , & de les garnir de lentilles d’inégales convexitez ,
pour augmenter plus ou moins l'apparence des objets.
La Figure E ou F , reprefente une plaque de laiton , aui
Le
| coit
PREMIERE PARTIE. Chap. Il. It
doit être attachée avec deux vis fur le corps du Microf-
cope , comme on le peut voir en À.
Cette même piece eft vûé en F par-deflus, & en E par le
deflous , où l'on voit le reflort courbe qui y eft attaché avec
deux petits rivez.
Ce reflort que l'on a feparé de la piece E , eft reprefenté
tout feul au-deflous de la lettre H; le corps de ce Microf-
cope , qui eft une virole de laiton affez épaifle pour pouvoir
être viflée par dehors, & avoir un écrou en dedans , eft
repréfenté par la Figure O ou N : il doit avoir deux petits
bras qui débordent la circonference de fon extrémité fupe-
ricure , pour y attacher la piece E avec deux petites vis,
comme elle paroît dans cette Figure N.
Cette même virole , au bas de laquelle on à fait une vis,
doit aufli avoir un écrou en dedans qui luy réponde, comme
on le peut remarquer dans fon profil N ; elle doit aufli avoir
deux ouvertures quarrées à fes côtez oppofez, de la largeur
chacune d'un peu plus du quart de fon circuit , pour rece-
voir la piece de laiton repréfentée en T M, qui y doit haufler
& baifler librement, lorfqu'elle eft pouflée par la piece re-
prefentée en Q, ou repoufñlée par le reflort H; & c'eft entre
cette piece & le reflort que fe place le porte -objet creufé
fpheriquement , de maniere que la concavité de ce verre
{oit tournée vers la piece R, dont je parleray bien-tôt.
La Figure Q eft une autre virole dans laquelle il y a un
écrou pour recevoir la vis de la piece ©, qui eft le corps du
Microfcope.
… Cette virole a un rebord dentelé, pour empêcher que les
doigts ne gliflent deflus en la tournant. Cette piece étant
müûé en un fens , force le reflort , & poule la plaque T M
vers F ; & par confequent approche de la lentille le porte-
objet qu'elle foutient , & qui s'éloigne au contraire de cette
même lentille , en tournant la virole Q d'un autre fens.
La Figure marquée par la lettre P , eft le profil de la vi-
role dont on vient de parler , où l'on voit un écrou en
dedans.
S, repréfente un canon cilindrique d'ébene tres-noire ,
façonné au tour & enrichi de quelques moulures , ayant en-
Planche 6€.
12 Nouveaux Microscopres.
viron vingt lignes de longueur : il eft percé à jour, d'un bout
à l’autre , pour laifler pañler la lumiere , comme on le peut
remarquer par fon profil marqué R. Il y à une vis à l’un de
fes bouts qui doit entrer dans l'écrou interieur du corps du
Microfcope , & à l’autre bout quelques moulures qui ne fer-
vent que d’ornemens , & un petit enfoncement qu'on y a
pratique , pour y arrêter un diaphragme marqué V , au mi-
lieu duquel on fait un trou plus ou moins grand , fuivant le
plus ou le moins de lumiere qu'il faut , pour bien voir les
objets qui font tout le fujet de notre attention.
Pour fe fervir de ce Microfcope, la lentille étant arrêtée
où nous avons dit qu'elle devoit l'être , & le porte-objet I
placé entre la piece T M & le reflort ; il n'y a qu'à ôter le
canon S , & dans le milieu du concave qui fe prefente ,
mettre avec le bout d'une plume un peu de la liqueur où
font les animaux que l’on veut obferver ; puis ayant remis le
canon , approcher ou éloigner le porte-objet de la lentille,
en tournant ou détournant la virole Q., jufqu'à ce qu'il foit
au foyer.
CHAPITRE Ill.
Defcription d'un troifième Microfcope à liqueurs.
, Repréfente le Microfcope tout entier vü de côté,
À B, eft le profil de ce Microfcope , fait par la feétion
d'un plan qui divife toutes fes parties en deux également ,
our en voir les diverfes épaifleurs.
” ©, ef le deflein du même Microfcope vû par-devant.
a,a,a,a, reprefentent quatre defleins du porte-lentil-
le , dans l’un defquels il eft vü de côté ; dans un autre il eft
vû par-devant ; & les deux autres en font des profils, vès
dans deux fituations differentes , l’une verticale , & l’autre
horifontale.
b, eft une platine de laiton bien dreflée des deux côtez ,
un peu recourbée par en bas , & ouverte par de haut d’un
grand trou rond où s'enchäfle le porte-lentille , qu'on y
PREMIERE PARTIE Chap. I. 13
arrête fermement par le moyen de deux petits tenons ,
rivez & mobiles au-devant de cette platine.
On a aufli rivé ou foudé au bas de cette même platine ,
une vis d'acier d'environ quinze lignes de longueur , & de
deux lignes au moins de diametre , qui s'engage à angles
droits dans l'épaifleur de cette même piece.
c,c,c,C, eft la reprefentation du profil & des plans les
plus larges d’un reflort d'acier trempé , & recourbé à peu
rés comme font les pincettes de même matiere qui fervent
à arracher le poil, & duquel les branches inégales contri-
buent à approcher & à éloigner parallelement au porte-
objet f, la platine b. Ce reflort qui n’eft attaché à aucune
des pieces du Microfcope , s’y applique pourtant tres-avan-
tageufement , comme on le va dire.
On fait entrer le bout recourbé de la branche la plus
courte de ce reflott dans une entaille ou fente faite vers
l'extrémité fuperieure de la virole , où s'engage le manche
du Microfcope. Et l’autre bout recourbé du même reflort
entre dans deux petites coches taillées aux côtez du bas de
la platine marquée b.
d,d,d, eft une feconde platine qui fait l'office d'un ref-
fort , fenduë en fa partie fuperieure , ouverte par fon milieu
d'un grand trou rond , coudée un peu au-deffous de fon
extrémité d'en-bas , où elle eft entaillée en demy cercle ,
pour embrafler la moitié du petit canon cilindrique , étant
arrêtée d’ailleurs par une vis qui fe fait voir entre les deux
canons du profil B, de tout le Microfcope.
e,Cc,e,e, reprefentent une troifiéme platine, ouverte
comme la précedente dans le milieu de fa plus large partie,
étant foudce par fa bafe à la virole qui reçoit le manche du
Microfcope.
On voit au bas de cette même platine e , un petit canon
cilindrique & creux , d'environ huic à neuf lignes de lon-
gueur , & de deux ou trois lignes au plus de diametre ; on l'y
voit appliqué à angles droits & foudé : il eft de plus traverfé
de bout en bout d'une vis attachée à la platine b.
Au derriere de la platine e , on y voit deux petits tenons
en forme de crochets , qui fervent à arrêter init le
Bi
Planche 7.
14 NôvvEaux Mrcroscores.
gros canon au bout duquel on met les diaphragmes de diver-
{es ouvertures.
f,eftle porte-objet de verre, plan d’un côté , & concave
de l’autre, pour y appliquer les liqueurs & les autres objets
que l’on veut obferver.
Ce porte-objet fe fourre entre les deux platinesd,e, de
maniere que le côté plan regarde la lentille ; & dans cette
fituation on le peut mouvoir felon le befoin.
g,S,g,cft une petite rouë dentelée , fervant d'écrou à
une vis attachée à la platine b, dont l’ufage, Joint à celuy du
reflort, eft d'approcher & de reculer la lentille de l'objet.
h,h,h,h , eft un gros canon d'ébene qui fert de dia-
phragme , & qui fe monte derriere la troifiéme platinee , à
peu près comine le couvercle d’un fucrier , fur le fucrier
même.
Des Defleins aufi corre@s & aufli élegans que le font
ceux-cy , de routes les diverfes pieces qui compofegt ce
Microfcope , ne me paroiffent pas avoir befoin d'une plus
ample explication , particulierement fi l'on fe reflouvient de
ce que nous avons déja dit de quelques pieces qui entrent
dans la compoñition des Microfcopes précedens , lefquelles
font femblables , ou ont beaucoup de rapport à celles de ce-
luy que Je viens de décrire.
CHAPITRE" IV.
Defcription € ufage d'un quatrième Microfcope tres-fimple.
BC, font les profils des crois pieces DEF, qui com-
À x le Microfcope , que Je fais ordinairement d’é-
bene.
La piece E du milieu , qu'on peut nommer le corps du
Mon , contient deux écrous, l’un fuperieur, & l'autre
inferieur , qui fe découvrent dans fon profil B , pour recevoir
les vis des pieces DF. :
C , eft le profil d'une autre piece percée à jour , {ur la-
quelle il ya une vis , & un verre qui eft concave d'un feul
PREMIERE PARTIE Chap. IV. 15
côte , dont l’ufage eft de porter les objets qu’on met deflus
pour y être obfervez. |
À , eft le profil d’une autre piece , où l’on voitune vis qui
fe monte dans l’écrou fuperieur de la piece du milieu mar-
quée B. Cette piece À peut être appellée porte -lentille ;
parce qu'on y en met une entre deux diaphragmes repre-
fentez en G,G ; & on les y fixe avec une petite virole de
hiton H, qui fait reflort.
Cette lentille Ï étant ainfi portée proche de l'œil, fait
découvrir un champ d'autant plus grand , qu’elle en eft
prés. Îl ne faut pourtant pas que ce verre foit fi proche
de l'œil, qu'il en puifle être termi par la tranfpiration de cet
organc.
Il y à un trou au-deflus du porte-objet F, d'environ une
ou deux lignes de diametre, qui permetle paflage aux rayons
de lumiere qui fervent à éclairer les objets que l’on met fur
le concave F.
Le diaphragme de laiton ou de plomb qui fe met entre
la lentille & l'œil , doit avoir une ouverture proportionnée
au foyer de cette lentille ; & il faut qu'elle foit d'autant plus
petite que la lentille aura moins de foyer.
Je mets aufli fouvent un femblable diaphragme O , au-def-
fous du concave F, & j'en proportionne l’ouverture aux ex-
periences que j'en veux faire, & au plus ou moins de foyer
de ce concave , & même à la tranfparence plus ou moins
grande des objets placez au concave F , où on les attache
differemment. Par exemple , fi vous y voulez mettre du
fable , de menues graines , ou quelques poudres tranfparen-
tes, vous les y ferez fuffifamment tenir , en humeétant de
votre haleine ce porte-objet,
Les aîles de mouches ou leurs pattes , les fourmis , les
poux , les puces , les mittes de fromage , les plus petites
plumes des oifeaux , les cheveux , &c. s y arrêtent avec un
peu d'eau gomée , ou quelque chofe d’équivalent , qu’on Y
applique en petite quantité , & aux endroits convenables.
On peut aufli enfermer des animaux vivans , comme des
mittes avec leurs œufs , entre le concave F & un verre plan
des deux côtez, qui foit de peu d'épaifleur, a
B ii
16 Nouveaux MicrRoscoOPEs.
Le fang des animaux sy met tout chaud , avec le plus
petit bout d'une plume à écrire.
Les gouttes de l'eau des huïftres à l'écaille , & toutes les
infufions qui contiennent des animaux aflez gros pour y être
vüs , s'y attachent pareiïllement d’elles-mêmes.
Les anguilles de vinaigre fe prennent & s'y mettent avec
un petit tuyau de verre en forme d’antonnoir , de la gran-
deur & de la figure qui eft icy reprefentée ; ce qui fe prati-
que tres-facilement en cette forte. J’enfonce dans le vinaigre
la partie MN de l’antonnoir, & après l'avoir pofée fur mon
concave , Jy fais defcendre la petite goutte de vinaigre
contenuë dans l'efpace MN , en boûchant la plus large ou-
verturc avec le doigt, pour prefler l'air contenu depuis L
juiqu'en M , après quoy on met ainfi ce vinaigre aflez près
de la lentille pour y voir les anguilles à loifir ; puifque cette
goutte doit être aflez grofle pour n'être évaporée qu'en une
beure ou environ dans un tems temperé.
On peut, fi l'on veut, les y conferver durant fept ou huit
jours en efté , & pendant quinze en hyver , en mettant fur le
concave où elles font un petit verre plan des deux côtez,
qui empêchera que ce peu de liqueur ne s’évapore entierc-
ment durant tout ce tems-là , & donnera lieu à un fpeétacle
des plus curieux , par les differentes chofes qu'on y verra,
& dont nous devons parler dans la fuite de cet Ouvrage.
Pour faire aufli que ce Microfcope ferve à diftinguer les
petits objets qui ne font pas tranfparens, & à les obferver
comme on le fait avec les Microfcopes à deux ou à trois
verres ; il n’y a qu'à faire une ou deux ouvertures quarrées
à côté de la piece E , qui fert de corps au Microfcope , &
mettre ces objets fur le concave, ou fur un autre porte-objet
qui leur éonviennent , tournant au jour l’une de ces ouver-
tures.
On peut tourner plufieurs pieces femblables à celle qui fe
voit marquée par F, & garnir de differens petits corps chotï-
fis tous les portes-objets comme F qui doivent les foutenir,
& être aifément fubftituez les uns aux autres, afin de faire
voir plus promptement à une ou à plufieurs perfonnes ce
qu'on y aura appliqué.
PREMIERE PARTIE. Chap. IV. 17
Ce n'eft pas une neceflité de multiplier les portes-objets,
il fufñira d'en avoir feulement deux , fçavoir un pour y fixer
le verre concave C , & l'autre marqué F, qui ait un petit
rebord pour mettre dedans plufieurs cartons fur lefquels on
aura arrête divers objets , que l'on placera l’un après l’autre
fur la piece marquée F, afin de les y obferver.
Le defir que j'ay eu de fatisfaire la curiofité de plufieurs
perfonnes de merite, & la neceflité où je me fuis trouvé de
tranfporter dans des lieux éloignez quelques-unes des infu-
fions , dont je parle dans la feconde Partie de ce Traité ,
pour y faire voir dans la moindre goutte de chacune les di-
vers animaux qu'elle contenoit, nront obligé de chercher
une invention commode pour fervir à ce tranfport.
En méditant l-deflus il fe prefenta plufieurs moyens ,
dans chacun defquels je trouvois des défauts confiderables,
qui ne me permettoient de m'en fervir , que parce que de
meilleurs me manquoient. Je defirois toujours d'en trouver
un, tel que le vaifleau où feroit la liqueur fut fort petit, &
déboûche même dans le tranfport , fans pourtant que la
liqueur qu'on y auroit mife en püt fortir d'elle-même , en
quelque fituation qu'il fe trouvât ; que ce vaifleau fût facile
à préparer , & enfin fi commode qu'avec peu’ d’adrefle on
pût facilement garnir de liqueurs les portes-objets des Mi-
crofcopes dont Je me fers.
Toutes les conditions de ce Probléme me parürent d’a-
bord tres-difficiles à remplir; & je puis aflurer qu'il n’y eût
que la nécefité où J'étois d'en venir à bout qui fut capable
de m'obliger à pourfuivre mes recherches. Et enfin je m'a-
vifay d’une machine la plus fimple & la plus aifée de routes
celles quon pourroit fabriquer pour l'ufage auquel on la
deftine. |
PQ, cft le profil d’une petite phiole de verre à long col,
faite par un Emailleur : elle a environ trois pouces de lon-
gueur , & la boule fix lignes ou environ de diametre : l’ou-
verture de l'extrémité P eft d’une bonne demie ligne , &
cela fufit pour empêcher la liqueur d'en fortir d’elle-
même.
Maintenant pour faire entrer la liqueur dans une de ces
18 Nouveaux MircroOscOpPEs.
petites machines , qu'on peut regarder comme une efpece
particuliere de Thermomérre ; il faut fourrer en dedans un
filde laiton RS, plus menu que fon ouverture , après l'avoir
moüillé dans toute fa longueur , en forte qu'y étant enfon-
cé, fon extrémite d’en-haut furpañle de deux lignes l'ouver-
ture qui eft en P , afin qu'ayant plongé le menu bout du
petit antonnoir dans la liqueur dont on veut garnir le Ther-
mométre , on porte enfuite fur lextrémité R du fil ce
même bout N par où la liqueur s’eft infinuée à la hauteur
MN , de deux ou trois lignes , de maniere que ce fil de
laiton y entre ; puis preflant du doigt l'ouverture fuperieure
de l’antonnoir , l’on fera defcendre la liqueur dans le Ther-
mométre P Q; ce qui fe réïtérera autant de fois qu’on le
jugera à propos : & ce Thermométre ainfi préparé fe pourra
tranfporter par tout.
Lorfque l’on voudra garnir d'une goutte le concave ou
porte-objet du Microfcope , il n'y aura qu'à pofer le bout P
du Thermométre dans ce concave , & envelopper fa boule
avec les doigts, afin qu'en échauffant & rarefiant quelque
peu l'air qu'elle contient, il en puifle faire fortir un peu de
liqueur. Et il faut remarquer que quand on aura mis du
vinaigre , par exemple dans l’un de ces Thermométres , il
n'y faudra pas mettre d’autre liqueur, parce que la feule
vapeur du vinaigre feroit mourir fubitement les petits infec-
tes de cette liqueur.
Enfin fi l'on veut que ces petits Thermométres fervent
pluficurs fois , il faudra en faire fortir la liqueur qui y fera
reftée après s'en être fervi durant quelque tems ; parce que
venant à s'épaiilir par l'évaporation, ce qui reftera ne man-
queroit pas “de faire une crafle aflez épaifle pour rendre
cette petite machine incapable de fervir une autre fois.
CHAP.
PREMIERE Partie. Chap. V. 19
ES
CHÉAPPATUIE NTE PANNE
Confruëfion d'un cirquiéme Microfcope à liqueurs » par le
moyen duquel on pourra employer des lentilles foufflées | >
de celles qui ne le font point ; depuis les plus petits foyers
jujqu'aux plus grands.
ff ‘E Microfcope , qui fe voit reprefenté tout entier en À,
y cft vû à peu près de la grandeur que nous l’avons
conftruit ; il eft à la verité un peu plus compofé que le pré-
cedent ; mais 1l a en récompenfe de plus grands ufages ,
comme il fera facile de le comprendre par l'explication que
nous en allons donner.
La premiere piece de cet inftrument contient deux vis;
dont les pas font égaux : elles font faites fur des cilindres de
differens diametres , comme on le peut voir dans le profil
marqué I.
Cette piece, qui cft creufée interieurement dans toute fa
hauteur , a deux diaphragmes , l'un en B & l’autre en C,
afin de ne laifler pañler que les rayons de lumiére qui la tra-
verferont direétement par le milieu de € en B.
La feconde piece marquée 2 eft cilindrique & creufe dans
toute fa hauteur , qui n’eft pas confiderable ; puifque trois
lignes au plus fuffifent pour y faire un écrou d’un pas de vis
femblable & égal à celuy de la plus petite vis de la premiere
piece fur laquelle cet écrou doit étre monté.
E, reprefente le profil d’un verre concave d’un côté , &
lat d’un autre ; fi mince à l'endroit creufé , qu'il n'y ait pas
plus d’épaifleur de verre , que la lentille la plus convexe
dont on fe fervira aura de foyer.
On attache ce verre concave , ou une feüille de talc bien
tranfparente , avec un peu d'eau gomée, en forte que le côté
plat du verre concave foit exterieur ; ainfi qu’on l'a repre-
fenté en E : il eft à propos d'avoir au moins deux pieces fem-
blables & égales à cette feconde , l’une qui porte un mor-
Planche 8.
10 Nouveaux Microscoress,
ceau de talc , & l'autre un verre plan concave , pour fervir
à diverfes experiences.
3 , eft une autre piecc cilindrique creufe , & affez haute
pour faire qu'étant montée à vis , au moyen d'un écrou
qu'on y aura formé , fa bafe L L puifle defcendre juiqu'au
dernier pas qui eft fous mm, diametre de la plus grofle vis
faite fur la premiere piece , aprés avoir monté la feconde
fur la plus petite vis qui eft au haut de cette premiere pie-
ce ; de forte qu’elle fer comme de furtout aux pieces pré-
cedentes 1. & 2.
On pratique au haut de cette piece un rebord tres-mince
& fort ouvert dans fon milieu, comme on peut voir en GG;
afin que ce peu d'épaifleur n'empêche pas d'approcher aflez
la lentille des objets que l'on voudra obferver.
La quatriéme piece eft un porte-lentille qui a peu d'é-
paifleur ; il eft percé d'un trou rond d'une grandeur conve-
nable à la lentille , & aux pieces qui luy fervent de monture.
Quand les lentilles font d’un long foyer , par exemple de
deux à trois lignes, on les y monte à peu prés comme nous
l'avons dit dans l'explication du Microfcope précedent ; &
lorfqu'elles font d’un tres-court foyer , il les faut arrêter
entre deux petites platines de laiton gratté tres-mince , ou
entre deux platines de plomb qui foient de peu d’épaifleur,
& qui fe colent l'une contre l’autre vers les bords en dedans
avec un peu d’eau gomée , ou plutôt avec de la cole dont
les Menuifiers fe fervent.
Cette monture fe doit enchâfler dans une petite piece
d'ébene tournée proprement, qui foit d’un diametre un peu
plus grand que celuy de la troifiéme piece , ainfi quon la
voit reprefentée en la quatriéme Figure , où 1, 1 marquent
les extrémitez de tout le diametre À cette piece qu'on ap-
plique à l'œil, & dont le milieu H eft l'endroit où la lentille
eft placée,
Tout cela fuppofé ; nous paflerons à l'explication des
ufages de ce Microfcope. Si l'on veut premierement exa-
müner les anguilles du vinaigre , il faudra prendre tres-peu
de certe liqueur avec la petite machine de verre faite en
forme d’antonnoir, dont on a déja parlé, & faire defcendre
--rp mie
Premiere Partie. Chap. V. 21
cette goutte dans la concavité du porte -objet de verre at-
taché à la piece 2, puis monter cette piece fur la plus petite
vis de la premiere ; enfuite on mettra le furtout par-deflus,
& au haut de celle-cy le porte-lentille marqué 4, que l’on
promenera fur G G, avec les deux premiers doigts d'une
main, tenant en même tems avec les deux doigts de l’autre
l'extrémité D D de la premiere piece , qu'on tournera d'un
coté ou d'un autre , afin de mettre les objets qui auront été
pofez dans le concave , au point de diftinétion où ils doivent
être arrêtez pour y être apperçüs comme il faut; à l’'occafion
dequoy il eft necellaire d'avertir, qu’on ne voit bien exac-
tement ces animaux , que lorfque toute la goutte de vinai-
gre eft prefque entierement évaporée , particulierement fi
l'on fe fert d'une lentille d’un tres-court foyer , à caufe de
l'extrême vicefle avec laquelle ils y nagent au commence-
ment que la liqueur eft trop fluide.
En fecond lieu , fi l'on veut examiner les animaux des
autres liqueurs , il vaut mieux fubftituer au verre concave la
piece où eft la feüille de talc, à caufe de la difficulté qu'il y
a à creufer le verre comme il le doit être , pour bien faire
ces fortes d’obfervations avec les plus petites lentilles.
D'ailleurs , comme il faut moins de liqueurs pour décou-
vrir ces derniers animaux , que pour les premiers , l’évapo-
ration s'en fera plutôt, & l’on ne tardera pas à appercevoir
ce qu'il y a de plus confiderable dans cette petite portion
de liqueur appliquée fur ce talc.
Ce Microfcope a cet avantage par-deflus les autres ;
qu'on peut en un inftant connoître exactement tous les
foyers de differentes lentilles qu'on y applique l’une aprés
l’autre ; & quoy qu'on ne l'ait imaginé que pour les obfer-
vations des liqueurs , il peut aufli fervir à examiner tous les
petits corps tranfparens ; & parce qu'on peut mouvoir aife-
ment la lentille pendant l’obfervation , on a le plufir de
fuivre un animal dans fon allure , durant tout le temps qu'il
parcourt l’étenduë de la goutte de liqueur qu'on à mule fur
le porte-objet du Microfcope.
Si l'on veut fe fervir de ce Microfcope pour examiner Îles
cheveux , les aîles de mouches , les grains de fable , les
Ci
2, Nouveaux MicroscOPEs.
mittes , &c. il faudra faire plufieurs pieces femblables à la
deuxiéme , garnie chacune d'une petite feüille de talc bien
tranfparente qui tienne en E, & attacher aufli de même
ce quon veut voir, y employant les lentilles qui convien-
vent le mieux à chacun des objets qu'on y aura attachez.
L'on {çaura au refte qu'il y a des objets qu'il faut exami-
ner à la lumiere d’une chandelle , plutôt qu'à celle du jour
pour les bien appercevoir.
Que la feconde piece de ce Microfcope doit avoir une
ouverture aflez fpacieufe pour pouvoir facilement ôter la fa-
letc que laïflent les liqueurs qu'on y avoit mifes en expe-
rience , tant fur le verre que fur le talc, ce qui s’execute en
moüillant d'un peu de falive un petit linge dont on couvre
le doigt pour détremper & efluyer ces endroits , qui doi-
vent être tres-nets avant que d'y remettre de nouvelle
liqueur.
Et qu'enfin la plüpart des pieces de ce Microfcope peu-
vent être conftruites d'argent ou de laiton, d’ébene, &c.
Pour peu que l’on fafle de réflexion fur tout ce que nous
avons dit de la conftruction & des nfages des Microfcopes,
l'on Jugera de la neceflité qu'il y a d’en avoir de plus d'une
forte , fi l'on defire de fatisfaire pleinement fa curiofité là-
deflus.
C'H'ASPITT RE ONE
Defcription d'un fixiéme Microftope à liqueurs ; d'une conf:
truëtion fort finguliere ; pour mettre en ufage
Les lentilles d'un tres-perit foyer.
| E deflein AP O, reprefente ce Microfcope tout en-
tier. :
B , eft une petite platine d'argent ou de laiton de peu
d'épaifleur , au milieu de laquelle eft un trou rond d'environ
Pianche 9. quatre lignes de diametre. |
Qn voit au haut de cette platine une petice entaille d'une |
PREMIERE PARTIE Chap. VI. 23
ligne en quarré , pour loger un tenon dont on va parler. Au
nulieu du bas de cette platine on y voit une referve longue
d'environ une ligne ou deux, & d’un peu moins de hauteur,
pour fervir en partie à fixer cette platine fur celle dont je
vais parler.
C, D, font deux diaphragmes de plomb.
E, eft une feconde platine un peu plus grande que la pré-
cedente , & de même matiere, au milieu de laquelle on a
fait une ouverture ronde égale à celle qui a été faite au mi-
lieu de la premiere ; & au-delà de fa circonference on y a
pratiqué un petit rebord creufé dans l’épaifleur de cette pla-
tine E , pour y pofer les diaphragmes € , D, comme on
pofe un tableau dans fa bordure.
On voit au fommet de cette même platine , & immedia-
tement fous la lettre E, un petit tenon qu'on peut haufler
& baifler , ou le tourner, fi on le fait autrement , pour fervir
à arrêter le haut de la premiere platine B.
Il y a encore au bas de la platine E un petit trou quarré
plus long que large , où l'on fait entrer la petite piece re-
courbce qui a été refervée à l'extrémite inferieure de la
premiere platine B ; ainfi on arrête fermement les deux dia-
phragmes C, D, & la lentille du Microfcope que l’on place
adroitement entre ces deux platines.
Cette feconde platine E , dont on voit l'épaifleur dans
fon profil au-deflous de G, eft foudée à angles droits fur
l'extrémité d’un petit canon F, qui doit couler librement &
avec juftefle dans un autre canon plus court marqué P.
Le canon F eft ouvert par-deflous dans toute fa longueur ;
afin que la vis attachée à la rouë H puifle appuyer fur la
fourchette I, qui fait reflort, & tourner en avançant & en
teculant , pendant que l’on approche de l'œil , ou qu'on en
éloigne la lentille du Microfcope. ;
À, eft une rouë au centre de laquelle on a rivé une vis
d'environ un pouce de longueur , qui fert à faire mouvoir la
platine E , que l’on peut nommer porte-lentille.
1,1, eft une piece de laiton ou d'argent, vüé de front à
droit , afin que lon en puifle découvrir la largeur ; & de
gôté à gauche, pour en faire voir l'épaifleur.
Ci :
24 Nouveaux Mrcroscores.
Cette piece eft courbée en équerres , & au-deflus de f4
courbure on a fait un écrou dans un trou rond, dont on à
retranché la partie fuperieure , pour former du refte une
efpece de fourchette qui fe voit à l'endroit marqué I, dont
on va parler.
Cette petite fourchette s'introduit par -deflous la vis R ;
qui en eft pouflée de bas en haut , à caufe du point d’appuy
qu'elle a fur le haut de la virole du manche O ; ainfi cette
fourchette fait l'office d’un reflort attaché par fon extrémité
d'en-bas, au moyen d’une petite vis qui entre dans la virole
de ce manche , à l'endroit marqué N.
Le deffein L, qui eft à gauche , eft la reprefentation d’un
porte-objet vü par derriere; & celuy qui eft du côté droit le
reprefente vû par devant.
On voit bien par ces deux figures que le verre concave
où l’on met la liqueur que l’on veut oblerver , entre à cou-
life dans une piece de laiton ou d’argent de peu d'épaifleur,
dont la conftruétion en découvre aflez la méchanique , pour
qu'on puifle fe pailer d’une explication plus étenduë que ce
que J'en viens de dire, pour en donner l'intelligence.
Ce porte-objet fe place au-devant d’une troifiéme petite
platine , au milieu de laquelle ( comme au milieu des préce-
dentes) il y à un trou rond.
Cette petite platine eft foudée fur l'extrémité exterieure
du gros canon qui fe voit immediatement au-deflous de la
lettre À, par le moyen d’une ouverture qu'on à faite à cette
platine , & de deux efpeces d'oreilles qui font reflort, com-
me on le peut facilement juger , en jetrant pour un moment
les yeux fur les endroits marquez Q,, Q,, dans le deflein qui
reprefente le porte-objet L.
On voit en Mun diaphragme façonné au tour, qui fe met
au bout exterieur du gros canon À de ce Microfcope. Il eft
bon d’en avoir de plufieurs ouvertures , parce qu'une feule Mn
ne fuffit pas toujours pour qu'on puifle bien diftinguer les
animaux de diverfes grofleurs & de diverfes tranfparences.
O , eft la reprefentation du manche qui fert à tenir le Mi-
crofcope d’une main, pendant que l’on obferve les liqueurs
qi fe mettent l'une aprés l’autre fur le porte-objet ou con-
;
PREMIERE PARTIE Chap. VIT. 25
cave de verre reprefente en L, qui s'approche de l'œil , ou
qui s'en éloigne en tournant d’un côté ou d'un autre, avec
le fecond doigt de la même main qui tient le manche du
Microfcope , la petite rouë marquée H.
Enfin il n’eft pas difficile de comprendre , que ce Microf-
cope a encore l'avantage de faire partir le porte-lentille dés
le moment que l'on commence à tourner cette rouë Éd: à
caufe que le levier Ï, pouflant continuellement la vis R de
bas en haut, elle l'empêche d’avoir d’autre jeu que celuy
dont elle à befoin pour faire le bon effet que les habiles gens
defirent icy. |
CHERAPITRE © VIT
Defcription © ufage d'un nouvean Microfcope à riges , tres-
commode pour obferver toutes fortes de perits objets , foit de
jour ou de nuit ; à la lumiere d'une chandelle.
C Ette petite machine eft faite de trois ou quatre gros
fils de laiton ou d'argent tirez à la filiere , ayant cha-
cun environ trois pouces & demi de longueur, & un peu
plus d’une ligne de diametre ; de deux doubles équerres ;
de deux petits reflorts ; de plufeurs lentilles de differens
foyers, & de quelques autres pieces dont je vais parler.
On voit ce Microfcope placé debout fur un petit pied au
milieu de cette planche , & environné des pieces qui doi-
vent l’aflortir.
La premiere tige E, E , eft refenduë pour former une
pincetre , fi commode que chacun s’en peut fervir; car en
preflant les deux petits boutons qui font rivez aux branches
de la petite pincette , elle s'ouvre facilement , & lorfque
lon cefle de les preffer , elle fe ferme d'elle-même.
La feconde tige B G eft recourbée en équerre, afin
qu'elle puifle porter d’une façon convenable les pieces que
nous avons nommées portes-lentilles , & les approcher ou
éloigner des objets que l'on veut obferver, |
Planche 1e.
26 Nouveaux MrcroscOPEs.
La troifiéme tige H H porte une pointe d’éguille à l'une
de fes extrémitez , pour fervir aux divers ufages dont je pat-
leray ci-aprés.
Chacune des doubles équerres , que l’on voit en D CD,
eft percée en crois endroits ; fçavoir , d'un trou bien rond à
chacune de fes extrémitez , & d’un autre trou aufli tres-rond
dans le milicu.
Ces équerres font adoffées l’une fur l’autre , & attachées
enfemble par le moyen d’un clou rond , fi bien rivé par fes
extrémitez , qu'on les puiflent tourner autour de ce même
clou , comme on tourne les deux jambes d’un compas autour
de celuy qui les lie enfemble.
Les deux petits reflorts courbez en façon d’un arc, font
deux pieces minces de laiton ou d'argent battuës à froid , de
la longueur de l'efpace interieur compris entre chaque dou-
ble équerre.
Ces reflorts ainfi courbez doivent être un peu creufez en
rond & en long fur leurs extrémitez pour recevoir une par-
tie des tiges , les engager en quelque façon, & les empêcher
de couler trop librement dans les yeux des équerres.
Enfin l’on pañle deux tiges , par les yeux de chacune de
ces équerres , après avoir placé entr'eux les reflorts qui doi-
vent poufler ces tiges, & compofer ainfi ce qu'on peut ap-
peller le corps du Microfcope.
Il faut maintenant parler des autres pieces qui entrent
dans la compofition de cette petite machine ; pour cet ef-
fet, nous dirons premierement que la lentille eft un petit
morceau de glace bien choifie , taillée de façon qu'elle de-
vienne tranchante par fes bords , afin que l'axe commun à
fes deux convexitez foit perpendiculaire aux furfaces con-
vexes de cette lentille.
Le porte-lentille eft une piece d'ébene , au milieu de la-
quelle on a pratiqué un trou rond , que je nomme l'orbite de
la lentille , parce qu’il la reçoit & qu'il fert à l’enchäfler ;
de même que la partie de notre crâne , nommée de ce nom,
{ert à enchâfer l'œil qui contient le criftalin, figuré de mé-
me que la lentille dont nous parlons, & qui a de femblables
proprietez,
- Le
PREMIERE PARTIE Chap. VIL 27
Le petit trou qui eft au milieu d'un diaphragme de plomb,
ou d’une autre matiere convenable , qui fe place fur la len-
tille , & dont la petite ouverture doit être tournée du côté
de l'œil , reprefente la prunelle , parce qu'elle en fait icy
l'office. bn
Le crou qui eft fait dans l’épaifleur du bord du porte-
lentille , fert à mettre le bout G recourbé de la tige BG.
Le porte-objet fimple , reprefenté en I, eft une piece d’é-
bene noire d’un côté, & blanche de l’autre, à peu prés fem-
blable à une dame à joüer , ayant autour de fa circonference
une petite élevation en forme de parapet , pour empêcher
‘que le fable , ou quelque petite graine qu'on y aura mife, ne
=
tombe de deflus. |
Cette efpece de dame eft percée dans le milieu de fon
épaifleur ; & le trou rond qu'on y a fait eft rempli d'une pe-
ute cheville de liege , pour y enfoncer la pointe d’une
groffe aiguille que l'on voit reprefentée au bout de la tige
Le porte-objet MNO, qui doit fervir à l'examen des
animaux qui fe trouvent dans les liqueurs , eft un petit
tuyau cilindrique d’un pouce ou environ de longueur , &
de huit à neuf lignes de diametre , garni comme on le va
dire.
L’une des extrémitez de ce tuyau , & la plus éloignée de
l'œil , eft bouchée d'une piece de bois dur , au milieu de la-
quelle on a fait un petit trou rond d'environ une ligne de
diametre , pour fervir de diaphragme.
On ferme aufli l'ouverture M, de ce même tuyau cilindri-
que , d'une feconde piece de bois tournée , & tellement
conftruite , que l’on puifle enchäfler dans fon milieu un petit
verre concave d’un feul côté feulement , dans le milieu du-
quel on met les liqueurs que l’on veut obferver.
Il y a un petit trou fait au-deflus de la fuperfcie cilindri-
que de ce tuyau , tellement accommodé à la groffeur de la
pointe d’aiguille qui eft enchâflé en H , qu'il puifle étre ar-
rêté fermement fur cette pointe , afin de fervir aux divers
ufages pour lefquels on deftine ces pieces.
La Figure P reprefente un diaphragme qui doit étre placé
28 NovvEraux Microscorrs.
fur les lentilles d'un long foyer , qui s'enchâffent dans des
portes-lentilles femblables à celuy qui eft marqué par F; &
on l'y fixe au moyen d'une petite virole à reflort , marquée
par la lettre Q,
Le deflein reprefenté en R eft un petit carton à jour ,
dans l'épaifleur duquel on a placé l’aîle d’une mouche, pour
faire comprendre comment on peut arrêter certains objets ,
afin qu'on les puifle facilement obferver étant placez dans la
pincerte.
S , eft un petit tuyau de verre fait en forme d’antonnoir,
our fervir comme on l’a déja dit.
EtT , eft une petite bouteille à long col , de l'ufage de
laquelle on à aufli parlé.
Des ufages de ce Microfcope.
E Microfcope , quoyque tres-fimple , ne laïffe pas d’a-
voir beaucoup d'ufagés. Il peut fervir à obferver des
animaux tres - petits , qui marchent ou qui rampent fur la
terre; & même ceux qui volent dans l'air , ou enfin qui na-
gent dans des liqueurs préparées , & dans celles qui n’ont
aucune préparation. Il fert aufli pour obferver de tres-petits
corps, dans lefquels on ne remarque aucun mouvement ap-
parent , quoyque toutes leurs parties foient dans une agita-
tion continuelle. |
Si l'on bat le fufil fur une feüille de papier blanc , & qu’on
ramafle une partie de ce qui fera tombé avec une lame de
coûreau aimantée , en obfervant ces petites particules mifes
fur un porte-objet blanc , on aura le plaifir d’y voir de pe-
cites boules d'acier tout pur , pendant que l’on en découvrira
qui font moitié acier & moitié verre ; & enfin d’autres qui
feront de verre toutes pures. Et fi l'on fe donne la peine
d'examiner le papier , les endroits où font tombées les bou-
les paroïîtront noirs & brülez. Je ne m'arrête pas icy à ren-
dre raifon de ces effets , parce qu'il eft facile de les ex-
pliquer, ,
L'aîle d'une mouche ordinaire nous manifefte des chofes
digne d’admiration, Si on l’obferve exaétement , on verra
PREMIERE PanTie Chap. VIT 25
que fes bords font garnis de deux fortes de poils roides &
aigus , artiftement rangez, & cfpacez également. Qu'elle à
des veines & des arteres, & par confequent qu'il s'y fait une
circulation de la liqueur qui les remplit. Que le tiflu fin &
délié de la membrane qui fe trouve entre ces veines & ces
arteres , cft parfemé d’un grand nombre d’autres poils plus
petits que ceux qui environnent l’aîle de la mouche ; & qu'ils
font plantez obliquement dans l'étenduë de cette membrane
d'une maniere tres-finguliere. ;
La moindre petite plume d'un oïfeau, comme par exem-
ple celle d’un ferin de Canarie , étant obfervée avec ce Mi-
crofcope monté d’une lentille d'environ deux lignes de foyer,
nous fait voir que fa compofition eft telle , que chaque petit
brin de fa barbe eft une plume toute entiere, qui a fon tuyau
& Les brins femblables à ceux de la grofle plume ; & ainfi de
fuite.
Le tiflu d’un morceau de toile , celuy des rubans de diver-
fes couleurs, & des taffetas changeans , étant bien obfervez,
il nous fera comprendre en un moment ce qui feroit devenu
peut-être le fujet d'une meditation de plufieurs années, fi
nous n'euflions employez que nos feuls yeux , pour regarder
toutes ces chofes.
Pour obferver le poux & la puce tout vivans , durant plu-
fieurs jours de fuite , il les faut pincer par la croupe avec la
pincetre à boutons ; par ce moyen on aura le plaifir d’obfer-
ver toutes les parties exterieures du corps de chacun de ces
animaux domeftiques , que l’on voit quelquefois inquietez
par d’autres animaux qui parcourent leurs corps , & qu'on
peut nommer le poux du poux, & la puce de la puce; tant
par le rapport de grofleur des uns à celle des autres , que par
la figure des petits, & celle des gros.
Les mittes de fromage & leurs œufs, les poux des ferins
de Canarie , les mittes des poires & celles des pommes un
peu vicilles , s’attachent fur un porte-objet noir avec un peu
d’eau gomée , ou avec la pointe d’une aiguille moüüillée de
cette même eau, afin de les y voir tout vivans durant plu-
fieurs jours de fuite.
Les mouches un peu grofles , & plufeurs autres animaux,
D ij
Planche 11.
Figure Lo
30 NouvEaux Microseopes.
s'empalent au moyen de la pointe d’aiguille qui eft au bout
de l'une des tiges de ce Microfcope ; & par ce moyen l’on
pourra tres-facilement en examiner toutes les parties exte-
ricures , & découvrir par-là l'erreur des Anciens , & de quel-
ques Philofophes modernes, qui fe perfuadent que les mou-
ches ne fe tiennent fufpenduës contre les corps fur lefquels
elles marchent, qu'à caufe qu'il fort continuellement de leurs
pattes une efpece d'humeur gluante qui les y attache.
Pour obferver les anguilles du vinaigre , il faut fe fervir du
petit antonnoir marqué S , afin d’en prendre un peu pour le
porter dans le concave de verre qui eft au bout du canon ci-
lindrique , qui fe monte fur la tige qui porte une pointe,
pour y être obfervé. |
Et à l'égard des autres liqueurs , on les placera l’une après
l’autre dans ce concave de verre , en prenant la précaution
de le rendre net à chaque experience que l’on voudra faire.
CHAPITRE VIII.
Défcription € ufage des Microfcopes à Canon de “verre : que
quelques perfonnes nomment Tombeaux : © d'autres,
Cimetiere de divers animaux.
Es Microfcopes , qui font au nombre de trois, & qui
ne different entr'eux que dans la facon de les monter,
font tres-commodes & tres-utils pour obferver une partie de
ce qui fe pañle tant dans les animaux vivans, que dans ceux
qui font morts, depuis la groffeur d'une puce jufqu'à celle
d'un haneton.
Le plus fimple cftcompofé de fix pieces , fçavoir d’un pied
ou bafe , d’un canon de verre , d’un couronnement, de la
piece de l'æil ou porte-lentille , d’une lentille de verre, d’u-
ne vis ou d’une petite virole pour arrêter cette lentille.
ÀABCDE, ceft le deffein de ce Microfcope entier.
À , eft l'endroit où s'applique l'œil, pour voir les objets
que l’on à mis dans ce Microicope,
PREMIERE Partie Chap. VIII. 3I
BB, reprefente la piece de l'œil , ou le porte-lentille qui
fe monte à vis dans le couronnement CC , au moyen d’un
écrou qu'on y a fait pour la recevoir.
D, eft la reprefentation du canon de verre qui eft collé ou
enchâflé par fes extrémitez dans la partie fuperieure de la
bafc EE de ce Microfcope, & dans l'inferieure du couron-
nement CC.
G , eft la lentille d’un foyer convenable à la hauteur du
canon D ; elle s’enchäfle dans une cavité pratiquée dans la
piece de l'œil B , où on l’y arrête le plus fermement qu'il
cft poflible par le moyen d’une virole H , au défaut de la-
quelle on peut employer une vis, qui fera même plus com-
mode à monter & démonter la lentille , lorfqu’il fera necef-
faire de la nettoyer.
F , eft le plan de la piece ABB, vûé par-deflus.
EtG, reprefente la lentille.
Defcription du fécord Microfcope à Canon.
me fecond Microfcope , qui eft monté d'une maniere
tres-fimple , eft compofé de fept pieces , fçavoir d’une
bafe , d’un canon de verre , d’un couronnement , de la pie-
ce de l'œil, d’une lentille , d’une virole, & d’une boëte qui
luy fert de pied.
ABCDE , eft le deffein du Microfcope tout entier, en-
vironné des pieces qui le compofent.
EE , eft la bafe de ce Microfcope , ornée au milieu de
quelques moulures , au-deflus & au-deflous defqueiles on a
reprefenté deux vis pour y monter l’étuy F, qui fe voit à
gauche du Microfcope , & dont F qui eft à fa droite en eft le
profil, pour en faire voir le dedans.
Figure &..
Planche xr.
Figure Ze
D, reprefente le canon de verre ,enchäâflé & collé par fes
extrémitez dans les cavitez pratiquées au-deflus de a bafe
EE, & au-deflous du couronnement € C ; & au haut de ce
couronnement on y à faic un écrou pour recevoir la piece de
l'œil marquée BB, qui porte la lentille.
IBB, eft le plan fuperieur de la piece de 1
r}
œil vûé par=
D ii
52 Nouveaux Microscopreé.
deflus, dont le milieu H eft occupé par la lentille , que l’on
voit feule du côté droit ; & G eft la virole qui arrête cette
lentille ; parce qu'elle eft propre à faire reflort.
La piece F, qui eft à gauche du Microfcope , eft fa boë-
te , qui luy fert auñi de bafe, pour le tenir plus facilement.
Le deflein auffi marqué F, qui fe voit du côté droit du
Microfcope , eft le profil de cette même boëte , pour en faire
voir le dedans & fon épaifleur.
Le troifiéme Men à canon eft conftruit comme le
fecond , à la referve feulement qu'il pañle une bafe viflée au
travers de la piece EE , dans laquelle on a fait un écrou ; &
c'eft fur le deflus de cette piece viflée que fe pofent les ob-
jets pour y être examinez , en hauflant ou en baïflant la vis
qui les foutient.
CHAPITRE IX.
Des ufages que l'on peut tirer des Microfcopes dont je viens
de parler.
Près avoir expliqué les diverfes manieres de monter
ÂÀ les Microfcopes à canon de verre, il faut dire quelque
chofe des principaux ufages que l'on en peut tirer ; & quoy-
que ces Microfcopes ne puiflent point fervir à voir les ani-
maux des liqueurs, on ne les doit pas negliger pour cela.
Ce que je vais dire de leurs proprietez, fervira à perfuader
de la neceflité qu'il y a de s’en fervir.
Pour obferver les petites graines des plantes, & pour en
découvrir facilement toutes les beautez , il les faut répan-
dre chacune à part fur des petits portes-objets blancs &
noirs , OÙ vous aurez mis un peu d'eau gomée pour les y at-
tacher proprement ; afin de mettre après cela ces portes-
objets l'un après l'autre fur le fond du troifiéme Microfco-
pe; car il eft tres-commode pour faire l’examen de ces grai-
nes, & d'autres petits corps femblables en groffeur que l'on
veut conferver long-tems.
NERNSSE
Premiere PanrTie Chap. IX. 33
Les poux des ferins de Canarie ;ceux des poules, les mit-
tes de fromage & leurs œufs, les petits infectes vivans , qui
font à peu près de cette grofleur , peuvent fervir à former
des groupes dans des Tableaux couverts de ces petits ani-
maux vivans ; fur chacun defquels on pourra appercevoir des
chofes furprenantes , tant dans la grofleur apparente , dans
les couleurs , figures & mouvemens des parties de ces pe-
tites creatures , que dans l'inégalité de la durée de leur vie.
On méprife ordinairement ces infeétes , & d’autres petits
animaux , que les hommes difent devoir leur naiflance à une
matiere corrompué ; mais il eft facile de montrer que ce mé-
pris eft injufte , & qu'il n'eft fondé que fur l'ignorance de la
chofe qu'on méprile , & fur le préjugé , qui fait que l’on s’i-
magine voir les corps tels qu'ils font en eux-mêmes. Il n'y a
rien de méprifable dans la nature , & tous les ouvrages de
Dieu font dignes qu'on les refpeéte & qu’on les admire ;
principalement fi l'on prend garde à la fimplicité des voyes
par lelquelles Dieu les à faits & les conferve. Les plus petits
moucherons font aufli parfaits que les animaux les plus énor-
mes : les proportions de leurs membres font aufli juftes que
celles des autres; & il femble même que Dieu ait voulu leur
donner plus d’ornemens qu'il n'en a donné aux plus gros,
afin de récompenfer par-là la petitefle de leur corps,
Ïls ent des couronnes , des aigrettes , & d’autres ajufte-
mens fur leurs têtes qui effacent tout ce que le luxe des fem-
mes peut inventer : & l’on peut dire que tous ceux qui ne fe
font encore fervis que de leurs yeux , n'ont jamais rien vü de
fi beau, de fi jufte , ni même de fi magnifique dans les Pa-
lais des plus grands Princes , que ce qu'on voit avec le Mi-
crofcope fur la tête & fur le corps d’une fimple mouche.
Il eft vray que ces chofes font tres-petites , mais elles en
font plus furprenantes, puifqu'il fe trouve tant de beautez
ramaflées dans un fi petit fujot ; & quoyqu'elles foient com-
munes , elles n'en font pas moins eftimables.
Si l'on enferme dans ce Microfcope à canon de certaines
chenilles , & qu'on les y examine durant quelque tems & à
diverfes reprifes , on les apperçoit routes veluës , & couver-
tes de longs poils brillans , de couleurs variées & difperfées
34 Nouveaux Mrcroscopes.
avec tant d'art, que ce qui nous effrayoit d'abord , fe trouve
enfuite un fujet d’admiration ; car au bout d'environ cinq ou
fix femaines on les voit quitter un charmant furtout , qui
conferve tres-lons-tems la beauté des couleurs qu'on y avoit
vüës , pour fe faire voir fous la forme de plufieurs coques à
peu prés femblables à celles des vers à foye , fans qu'on
puifle remarquer en ces coques aucun mouvement apparent :
mais au bout de quelque tems notre étonnement femble de-
voir fe redoubler , en voyant fortir de ces nouvelles prifons,
qui paroïloient bien fermées , des papillons bien aîlez &
tout vivans.
Cette métamorphofe apparente , quoyque belle , ne con-
tient pas tant de faits furprenans , que nous en avons remar-
quez durant près d’un an , à l’occafion d'un petit infecte
dont je vais parler.
Le dixiéme Juin de l’année 1692. je trouvay à terre dans
mon cabinet un petit ver, dont les diverfes formes fous lef-
quelles je le vis dans un Microfcope à canon de verre , me-
ritent bien que j'en fafle une defcription particuliere , pour
donner lieu à l'explication de tout ce que nous en dirons de
fingulier.
Ce petit ver me parut d’abord de couleur brune, tirant
fur celle d’un caffé qui n’eft pas encore aflez torrefié. Son
corps, qui avoit fix lignes de longueur & une & demie de
diametre , étoit prefque rond dans toute cette dimenfion.
-_ Il paroiïfloit compofé de onze anneaux , fans y compren-
dre la tête, ornée d'une efpece de cocluchon arondi par le
bas.
Le dernier des anneaux qui terminoit fon corps, finifloit
par deux aiguillons courts & obtus, qui reprefentoient une
queuë fourchuë.
Tous ces anneaux beaux & luifans étoient attachez à une
membrane tres-fine & blanchâtre , que fes contrattions & fes
extentions alternatives pouvoient approcher & écarter les
uns des autres , en rendant cet animal tantôt plus court &
plus gros, tantôt plus long & plus menu. |
On remarquoit trois petites pattes de chaque côté de fon
corps, & une feule griffe au bout de chacune, laquelle Étoit
d'une
PREMIERE PARTIE. Chap. IX. 35
d’une couleur d’ambre bien foncée ; celles des deux pattes
les plus proches de fa tête , luy fervoient comme de main
pour prendre fa nourriture , & pour la porter à fa bouche.
Sa tête étoit ornée de deux yeux bien noirs , placez des
deux côtez , au-devant defquels étoient plantées deux peti-
tes cornes, compofées de pluficurs articles. :
Les premiers jours que Je confideray ce petit animal, il
étoit d'une vivacité merveilleufe , faifant des fauts qui mar-
quoient beaucoup de force & de fouplefle dans le fujet qui
les executoit.
Depuis le dix Juillet jufqu'au deuxiéme de Septembre,
cet infecte en produifit dix autres tres-menus qui luy reflem-
bloient tous , & qui dés le premier moment de leur naïffance
marchoient d’une vitefle furprenante. J'en garday un en vie
durant dix jours fans luy donner aucune nourriture ; ce qui
ne paroîtra pas trop extraordinaire , lorfqu'on fçaura que fa
mere , pendant une année ou environ, n en confurma pas plus
que de la grofleur d'environ un pois.
Cer infeéte aprés avoir fait fes petits , quitta entierement
fa peau durant vingt-quatre heures , aprés quoy il parut d’u-
ne blancheur vive & plus gros qu'auparavant , marquant
même plus de force & de mouvement, qu'il n'en avoit mon-
tré depuis plufieurs Jours.
On peut dire que cette peau luy tenoit lieu de furtout
pour envelopper toutes les parties exterieures de fon corps;
puifqu'on remarquoit dans ce furtout jufqu'au moule des
yeux , des jambes & des griffes de cet animal.
J'employai aflez de tems à confiderer cet ancien fourreau,
fans pouvoir deviner comment l’infeéte avoit pü faire pour
s’en dépoüiller ; parce que ce vêtement étant tout d'une
piece , & tres-intimement appliqué fur fon corps, je ne com-
prenois pas comment cette nymphe fi irrégulere , fi fine &
fi délicate avoit pû être tirée fans fe rompre. Mais peu de
tems aprés je revins de mon étonnement , & je ceffai d’ad-
mirer cette méchanique , en découvrant fa fimplicité ; car
cette membrane venant à fe feicher , les fibres qui la com-
pofoient fe reflerrant laifferent voir tout l’artifice , qui con-
fiftoit en une fente étenduë depuis le bec de l'animal jufqu’à
7]
36 Nouveaux Mrcroscopes.
l'anus ; laquelle , à mefure que le ver en fortoit, fe refermoit
en rapprochant par le reflort de la pellicule , fes bords l’un
de l’autre , qui fe Joignoient fi juftement qu'il n’étoit pas
poflible d'y appercevoir aucune feparation.
Dés le foir même du jour que ce ver eût quitté fon fur-
tout, fa couleur me parut changée ; car de blanc qu'il étoit,
en deux jours il redevint aufli brun qu'il avoïc été ; & je luy
vis palier tout l'hyver en cet état. Il fut affez en repos durant
tout ce tems-là , ne remuant qu infenfiblement , ne mangeant
point , ni ne rendant aucun excrement vifible : mais étant
furvenu quelques beaux jours de Soleil , & l'y ayant expolé,
il commença à s’y mouvoir un peu plus qu'il ne faifoit md
ravant, & même il mangea quelque peu d’un carton qui fer-
voit de bafe ou de fond au Microfcope dans lequel je le con-
fervois.
Surala fin du mois d'Avril je ne luy remarquai, pendant
neuf jours qu'il demeura couché fur le dos , aucun figne de
vie , aprés lequel tems je fus furpris de voir qu'il travailloit
fortement à quitter un fecond furtout , qu'il poufloit tout le
long de fon corps , de la tête vers la queué , où il en refta
jufqu'au fixiéme Juin , durant lequel tems je le crus mort :
cependant le même jour au foir je m'apperçûs qu’il avoit en-
tierement quitté cette derniere peau, & qu'il paroifloit fous
une forme nouvelle, qui ne differoit pas moins de la préce-
dente , qu'un ver differe d’une mouche. En effec, le fixiéme
Juin à fept heures du matin il s’étoit métamorphofé en une
mouche tres-finguliere , ayant environ cinq lignes de lon-
gueur, & une ligne un quart de largeur par le milieu de fon
Corps.
En obfervant cette mouche, je remarquai qu'entre la tête
& fon corps il y avoit une autre partie en forme d’anneau
mobile ; que la couleur étoit differente en divers endroits du
corps ; le deflus de la tête, & cette partie en forme d’an-
neau, étant d'un rouge brun, & le refte ayant une blancheur
tirant fur le roux ; mais cette couleur blanchätre fe diflipa
en peu de tems ; car deux heures aprés le tout parut d'un
rouge brun, |
À la place des onze anneaux qui fe diftinguoient dans la
PREMIERE PanTis Chap. IX. 37
longueur du ver , on voyoîit alors tout fon corps long de huit
lignes, couvert de deux aîles fermes & dures.
Au lieu de fix pattes courtes dont j'ay parlé, on en voyoit
fix autres , chacune defquelles avoit pour le moins quatre
fois la longueur des premieres , & étoit compolée de trois
articles ; étant terminces par deux griffes aflez foibles , au
lieu d'une feule un peu forte.
Les cornes qu'il avoit au - devant des yeux étoient extré-
mement courtes , & celles d'aprés tres-longues ; en forte que
l'on y remarquoit onze articulations en chacune , dont il y
en avoit huit qui reflembloient à des grains de chapelets un
eu ovales. :
Le huitiéme Juin au matin , il me parut d'une couleur
brune , femblable à celle des féves de café bien correfées.
Le neuviéme cette couleur devint noire , & les pattes de cet
animal fe firent voir d’un rouge brun.
Enfin le treiziéme il fit paroître quelques excremens d'un
jaune pâle, au lieu que ceux du ver étoient fort bruns, les
uns & les autres aflez durs , & provenans du carton qu'il
avoit rongé , & qui failoit, comme j'ay dit, le fond du Mi-
crofcope. .
Nous finirons l'explication abregée des ufages de ce Mi-
crofcope , en ajoûtant encore , que l'on découvre fur le corps
des groffes mouches de tres-petits animaux qui les incom-
modent durant leur vie, & qui les mangent aprés leur mort :
ce qui fuffit pour faire comprendre , que ce qui arrive aux
uns peut arriver de même aux autres.
Les araignées que l’on y enferme y font leurs œufs; elles
les y ramaflent par pelotons, qu’elles enveloppent de leur
foye pour les conferver de la rigueur du tems ; elles vivent
{eules enfermées dans ce tombeau durant plus de trois mois ,
fans y prendre aucune nourriture apparente. Et fi une grofle
s’y trouve enfermée avec plufieurs petites, celles-cy en font
mangées ; ainfi l'on remarque que les unes fervent de nour-
riture aux autres.
Si vous enfermez dans ce Microfcope une groffe araignée
avec une mouche ordinaire , aufli aflez grofle , vous aurez le
paifir d'y voir la mouche dans une grande Fe ; pen-
1]
38 Nouvraux Mrcroscores.
dant que l’araignée.y demeure comme immobile , couchée
fur le dos , les pattes en l'air & écartées les unes des autres ;
attendant ainfi avec beaucoup de tranquilité que la mouche,
laflée de voltiger çà & là , luy tombe fur le corps, pour l'en:
vironner de fes pattes , la piquer à la gorge , & la faire mou-
rir fubitement , fe contentant d'en tirer le fang fans endom-
mager le refte de fon corps , qui demeure tres-long-tems
dans fon entier , & jufqu'à ce que d’autres tres-perits infectes
blancs la viennent devorer & manger en partie.
Nous ne dirons rien icy de la conftruétion de la mouche
ordinaire , ni de celle de l’araignée ; parce qu'il en a été
parlé ailleurs , & que ce Microfcope à canon ne fuffit pas
pour en faire voir aflez exactement les petites parties , qui
ont d'ailleurs été examinées avec d’autres Microfcopes , &
reprefentées élégamment par des Figures deflinées tres-cor-
rettement par Monfieur de Vigneux.
On va voir que trois differens portes-objets étant mis l'un
aprés l’autre dans un même Microfcope à canon de verre,
cauferont trois differentes fenfations d'un même objet qui y
fera placé fucceflivèment , étant regardé au travers d'une
méme lencille & d’une méme-diftance.
Premiere Obfervation.
Si dans l’un de ces Microfcopes à canon de verre, au lieu
du fond noir que l'on y met ordinairement au -deflous des
objets blancs , on en met un fait d'un morceau de glace ou
de verre un peu épais , duquel le deflous foit brute ou dépo-
li , & mis fur une bafe d’ébene noire fous le canon du Mi-
crofcope ; les objets qui feront pofez fur le côté poli de ce
morceau de glace, paroîtront comme étant en l'air, & avec
d'autant plus de relief que ce porte-objet de verre fera plus
épais , à caufe que la lumiere qui tombe fur la furface polie
du verre , qui fert de porte-objet , ne vient pas en aflez
grande quantité dans l'œil du fpeétateur , pour y faire une
impreflion afez forte, pour nous faire juger que les objets y
font placez ; & c'eft ce qui fait paroitre ces mêmes objets
gomme vüs en l'air.
LR
PREMIERE PARTIE. Chap. IX. 39
Seconde Obfervation.
Les objets blancs doivent être polez fur un fond noir ;
afin qu'en refléchiffant le moins de lumiere qu'il fera pofli-
ble , la fenfation que nous avons des blancs , n’en foit point
tant alcerce.
Troifiéme Obfervation.
_ Les objets noirs & les bruns doivent être pofez fur des
fonds blancs ; afin que les parties folides de ces corps noirs
& bruns , puiflent nous renvoyer plus de lumiere qu'elles ne
feroient s'ils étoient pofez ailleurs.
_ Ï1 fuit des mêmes experiences , qu'il n'eft pas indifferent
de préferer un fond de couleur à un autre , fi l'on veut don-
ner un grand relief aux figures peintes d’un Tableau. Un
Chrift , par exemple, qui fera peint fur la furface d'une gla-
ce de miroir, qui ne foit point étamée , étant pofce fur un
fond des plus noirs, paroîcra en l'air ; & fon relief fera vû
d'autant plus grand , que la glace, fur laquelle on aura peint
ce Chrift , aura plus d'épaifleur. |
Aprés avoir parlé des avantages confiderables qu'on peut
tirer des Microfcopes à canon, il faut aufli dire quelque
chofe des défauts qui les accompagnent ordinairement; puis
cflayer d'y remedier , afin de n'être pas privé des bons ufages
qu'on en peut faire. HT
Ces défauts font au nombre de trois ;le premier , qui n'eft
pas confiderable, vient de ce que l'ouverture de la monture,
où l'on fait un écrou , étant trop petite, par rapport à la
groffeur du canon , on a de la peine à le bien nettoyer par
dedans ; à quoy on pourra remedier , en faifant cette ouver-
ture la plus grande qu'il fera poflible ; ou bien il faudra faire
en forte que la piece entiere qui couronne le deflus du canon
puifle s'ôter & remettre quand on voudra.
Secondement. La matiere dont le canon eft fait fe trouve
quelquefois fi mauvaife, qu'elle poufle un fel au-dehors qui
Fengraifle , qui le ternit , & le rend comme félé en mille en-
E ï
46 Nouveaux Mricroscopes. |
droits ; de forte que perdant fa tranfparence , il devient, ‘|
inutile. - \ |
L'unique remede à ce défaut, eft de tâcher d'en trouver |
un autre qui convienne ; mais parce que cela eft prefque im- |
poflible , il faudra fe fervir du moyen que je vais donner
pour en faire un de carton, qui fervira comme le précedent.
Enfin , fi le canon que l’on deftine à faire un Microfcope
eft beau , & que fa monture foit faire d'un bois qui ne foit
pas bien fec , il change de figure par la fechereffe ; de rond
qu'il étoit il devient ovale , & le canon fe trouvant alors plus
preilé en des endroits qu'il n’eft en d’autres , il cafle , à
moins que fa réfiftance ne furpafle l'effort du bois qui fe ref-
férre,
Pour empêcher que les montures ordinaires ne caflent les
canons de verte, il n'y a qu'à les environner par le haut &
par le bas de deux petites bandes ou ceintures de carton fin
d'environ deux lignes de largeur , pour en coller la moitié
autour de chaque canon, laiflant déborder l’autre moitié qui
fervira d'entrée aux montures de bois, dans lefquelles on ne
l'enfoncera que tres-peu; afin que fi le bois vient à fe refler-
rer , il n'agifle que fur la moitié des petites bandes de car-
ton , qui obéïront aflez pour éviter le fracas du canon de
verre. $
Voicy deux nouvelles méthodes pour fe pañler de canon
de verre , en faifant de gros Microfcopes, dont les corps du
reront tant que l’on voudra.
La premiere de ces méthodes confifte à faire un gros tuyau
de bois ou de carton bien rond , & à l'ouvrir par un feul ou
par plufieurs endroits, pour donner un libre paflage à la lu-
nuere : puis montant ce tuyau préparé, comme fi c'étoit un
tube de verre , on aura un Microfcope , dont les ouvertures
pourront , fi on le juge à propos , être fermées par des pic-
ces de verre blanc, qu'il y faudra coller tres-proprement par
dedans.
Au lieu de ce canon rond , on peut en conftruire d’une
autre manicre , qui fera plus agréable à la vûëé , & même plus
prompte dans l’execution que la précedente. Pour cet effet,
prenez un carton fin , duquel vous couperez une bande aflez
PREMIERE PARTIE Chap. X. AI
Jongue & aflez large pour y tracer fix ou huit quarrez longs,
que vous ouvrirez par autant de petites fenêtres de même
figure , fur chacune defquelles il faudra coller en dedans des
pieces de verre blanc coupées proprement , & des plus min-
ces qu'il fera poflible de trouver , que l'on couvrira par aprés
d'un fecond carton plus petit que le premier , & ouvert de
même. Cet efpecc de canon, ou plutôt ce corps de Microf-
cope , étant ainfi préparé , il n'y aura plus qu'à tourner une
monture qui luy convienne , & l'on aura un Microfcope pref-
que parfait dans fa maniere.
GÉAA PIE RE x
L
Deftription © ufage d'un tres-petit Microfcope , monté d'une
feule lentille.
E petit Microfcope , qui n’a pas plus de neuf lignées de
hauteur , eft vû tout entier au-deffous de la lettre À,
ou de fon profil marqué B: il eft fait comme une petite boë-
te cilindrique ouverte par-deflus & par-deflous , pour donner
un libre paflage à la lumiere qui fe refléchit de l'objet que
l'on regarde au travers de la lentille, qui fe place comme on
la voit dans le profil B de ce Microfcope.
Des ufages de ce Microfcope.
Ç Ï vous obfervez un chiffre gravé fur la furface d'un ca:
chet d'argent , vous l'y verrez d’abord enfoncé , de mé-
me que nous le voyons de nos feuls yeux ; & fi l'on continuë
de le regarder fans changer de fimation, on verra ce même
chiffre d'un beau relief, éclairé & ombré du même côté que
les enfoncemens l’étoient auparavant qu'on eût la fenfation
de cette derniere apparence.
2°, Si vous continuez à obferver ce chiffre avec la même
attention que vous avez fait, ce qui vous paroïfloit de relief
deviendra enfoncé comme ilétoit auparavant, & ainfi de fuite,
Planche 12.
Figure Le
42 Nouveaux Microscopes.
30. Îl arrive fouvent qu'ayant obfervé ces chofes, fi vous
difcontinuez pour un moment, & qu'enfuite vous recommen-
ciez la même experience ; vous ferez furpris de voir que ce
chiffre , au lieu de commencer à paroître comme la premie-
re fois, c’eft-à-dire enfoncé , il paroît de relief.
4°. Si pendant que l’on eft tourné du côté que vient le
jour , on fe releve en continuant de regarder la furface du
cachet , ce qui paroifloit enfoncé femble fe relever tout à
coup , & l'ombre paroît fouvent de part & d’autre du relief;
mais {1 l’on continué d’obferver ce relief apparent, pendant
que l’on fe tourne comme il faut pour recevoir le jour du
côté droit , on voit l'ombre du côté d'où vient le jour , ce
qui ne furprend pas peu. Et au contraire l'ombre fera à gau-
che , fi le Jour donne fur le chiffre , en venant du côté
gauche. qu «à
s°. Si vous obfervez ce qui eft de relicf fur la furface d'un
loüis d'or , par exemple, vous le verrez toujours de relief
en quelque fituation que vous foyez , & de quelque jour qu'il
foit éclairé.
6°. Il y a un grand nombre de perfonnes qui obfervent les
mêmes chofes que J'ay vüës.
7°. Il y en a qui voyent toujours enfoncé ce qui l'eft effec-
tivement ; & d'autres qui apperçoivent toujours le contraire.
De toutes ces obfervations , que j’ay faites avec autant de
foins qu'il m'a été poflible, il en faut conclure que les diver-
{es fenfations que l’on à de cet objet ne font produites qu'à
l'occafion du plus ou du moins de délicarefle des filets du
nerf optique, qui font le tiflu de la Retine; puifque le moin-
dre changement qui arrive dans ces filets , eft capable de
faire changer l'apparence des concavitez du chiffre : & à l'é-
gard de ceux qui voyent toujours enfoncé , ou toujours de
relief une même chofe ; cela n'arrive qu'à caufe de la fitua-
tion conftante & uniforme qui fe trouve toujours la même
fur la Retine , pendant qu'ils regardent le chiffre.
Ï eft inutile de s'étendre davantage fur les ufages de ce
peut Microfcope ; puifqu'on peut juger , par ce que j'en
viens de rapporter, qu'il peut tres-uilement fervir à obfer-
ver tous Jes petits corps qui peuvent être tenus avec les
loigts
dd
É Yi
PREMIERE PARTIE Chap. XI. 45
gts d’une feule main , ou avec des pincettes, pendant
doi
que l’on tient le Microfcope de l’autre main.
CIM A PET TO RS XL
Défcription d'un tres-petit Microfcope à deux verres ; qui
reprefente les objets dans leur fituation droite € naturelle.
T Onficur de Puget , dont le merite eft aflez connu
A des Sçavans par les divers Ouvrages qu'il a donnez
au Public, nous aflure , dans fa premiere lettre écrite au KR.
P. Lamy Religieux Benediin , touchant les obfervations
qu'il a faites fur la ftruéture des yeux de quelques infeétes ,
en parlant des divers effets de deux Microfcopes ; “ Que
Monfieur Leevuenhoec raconte , que tous les objets qu'il
voyoit multipliez par la cornée d'une mouche , luy paroif-
foient à rebours. Les hommes, par exemple, avoient la tête
en bas & les pieds en haut ; & que cela ne fe pouvoit faire
autrement , puifque tous les objets qu'on voit au travers de
deux lentilles , paroïflent toujours renverfez.
Nous allons faire voir tout le contraire dans un Microfco-
pe à deux verres convexes, dont voicy les proportions.
AB , eft le Microfcope reprefenté dans fon entier, & à
peu prés de la longueur & de la grofleur qu'il a été executé.
C, eft la piece de l'œil, & D fon profil , où eft enchafé
le verre oculaire.
E , eft le porte-lentille, & F fon profil.
G & H, font deux viroles qui fervent à arrêter les deux
verres.
Le foyer du verre oculaire n'a que quatorze lignes ; ce-
luy de la lentille eft d’un peu plus de quatre lignes ; & la
diftance d'entre ces deux verres eft de dix lignes ; d’où il
fuit que deux lencilles femblables à celles dont je viens de
parler , & de differens foyers , étant montées dans deux
tuyaux , de maniere que l'un des deux puifle être tellement
enfoncée dans l’autre , que le foyer de l’une des lentilles
F
Plancher,
Figure 2
Planche : 3.
4 Nouveaux Mrcroseorzs,
pale au-delà du foyer de l'autre, Ces deux verres ainfi
montez compoferont un Microfcope , par le moyen duquel
on verra les objets dans leur fituation sos & naturelle.
Jen ay fait depuis plufieurs autres à deux verres plans con-
vexes ; qui font l'effet de trois Microfcopes , & de 4. Loupes.
DS
CHAPITRE XII
Defcription @ ufage d'une nouvelle Machine, tres-utile aux Ana-
tomifles , aux Definateurs, aux Graveurs, aux Peintres qui
travaillent en Mignature ; € gencralement à tous ceux qui
veulent découvrir ce que les yeux feuls ne peuvent appercevoir ;
pouffer leurs Ouvrages au point le plus baut de perfection.
B , eft le picd d'un inftrument , que je nomme Porte-
loupe , qu'on peut faire de bois & de laiton.
C D, eft un porte-objet, qui peut fe monter à vis ou au-
trement , fur la furface plane du pied À B, tellement conf-
gruit, qu'on le puifie hauffer & baïfler facilement quand on
voudra, & même le fixer où il fera befoin. |
E, eft une petite tige de laiton , élevée à plomb fur le
bord fuperieur du picd À B, d’une force & d'une hauteur
sonvenable aux differens ufages aufquels on deftine le por-
te-loupe.
F,F,F, font trois genoüils qui fe fuivent, & qui ont une
celle liaifon entr'eux, que chacun peut être mû diverfement,
pour concourir à produire enfemble un même effet.
= Âu lieu de ces genoüils , on peut faire trois efpeces de
charnieres femblables à peu prés à celles d’un compas com-
mun qui s’entrefuivent , & qui foient affermics par le moyen
de trois vis, & d'autant d’écrous.
G , eft une virole de laiton, tournée proprement, & d’u-
ne ouverture qui foit telle qu'on y puiffe enchañler juftement,
& l’une aprés l'autre , les loupes de differens foyers ; & mé-
me de petits Microfcopes à deux ou trois verres, pour fervir
à des ufages particuliers.
PraMiere Partis Chap. XII. 4
Des nfages de cette Machine.
, Reprefente un œil placé au-deflus de la Loupe que
| l'on a muife dans la virole G, regardant un petit ani-
mal pofé fur le porte-objet C D, où l’on place tout ce que
l'on veut diflequer , pour defliner d'après les préparations
qu'un habile Anatomifte aura mifes en état d'être repréfen-
tées fur le papier.
On voit bien que l'on pourra par ce moyen parvenir à
connoître la ftruéture de la peau, celle des ongles, des poils,
& la tiflure de prefque routes les membranes du corps des
animaux.
Avec ce fecours on peut entreprendre de faire l'anatomie
des gros infeétes , & de les reprefenter avec autant d'exatti-
tude , qu'on en aura employé à les bien préparer.
On déja découvert la femence de plufieurs plantes, qu’on
s’étoit perfuade , fans raifon , n'en avoir point, comme celle
de fougeres, des moufles, des truffes , &c.
On a obfervé que le fang eft compofé d’une ferofité blan-
che & tranfparente, où nagent des globules rouges de diffc-
rentes grofleurs. On l'a vû circuler diverfement dans les
vaiffeaux de plufieurs animaux vivans , & l’on à reconnu que
les veines & les arteres ne font que des tuyaux ou des fy-
phons recourbez.
La facilité que l’on aura de changer de porte -objet , de
Loupes , de Microfcopes à deux ou à trois verres, & a
fer fucceflivement differens petits Tableaux préparez, au-def-
fous de cette Loupe ou de ces Microfcopes , fourniront des
moyens nouveaux pour voir parfaitement , & en peu de
tes, une grande varicté de chofes bien differentes les unes
des autres. |
Enfin il eft facile de comprendre que cette machine ren-
ferme aufli tous les ufages des Microfcopes à canon de ver-
re; & que ces canons n'ayant pas befoin de montures , ils ne
feront pas fujets à fe rompre.
Planche 14.
46 Nouveaux Microscores.
CHAPITRE. XIE
Explication de toutes les parties qui compofent un Microfcope
à trois verres convexes , des deux côtex.
N voit d'abord dans cette Planche deux grandes Fi-
gures deflinées l’une à droite au-deflous de la lettre À,
qui repréfente l'élevation geometrale du Microfcope tout
entier ; & l’autre qui eft placée à fa gauche en eft le profil,
fait par la feétion d’un plan vertical , qu'il faut concevoir
pafler par l'axe du Microfcope, pour le feparer en deux par-
ties égales, découvrant dans l'une de fes moitiez tout le de-
dans de cette machine,
ABB, eftun bouton qui fert de couronnement au Microf-
cope.
CC, eft la piece de l'œil , dans laquelle on a fixé le verre
oculaire. |
D D, eftune autre piece , où l’on a enchaffé le verre du
milieu. Cette piece eft colée à un petit bout de tuyau, qui
porte un diaphragme à fon extrémité d’en-bas.
E, eft le corps du Micrafcope couvert de chagrin, qui fert
à recevoir le bout du tuyau colé à la piece D D.
F, eft la bafe du corps de ce Microfcope.
G, eft une bonnette ou porte-lentille , qui fe vifle fur la
bafe F, pour y demeurer fermement attachée.
H , eft une petite virole de laiton , ornée de quelques mou-
lures , foudée à un petit bras, qui eft aufli foudé au coulant
reprefenté à côté de la lettre I,
C’eft dans cette virole que l’on fait entrer-le milieu de la
bafe F, pour foutenir à plomb tout le corps du Microfcope,
F, eft le coulant qui peut être mû fur la tige d’acier L, &
demeurer à l'endroit de cette tige, où l’on voudra, par le
moyen d'un petit reflort d'acier placé entre la tige & le cou-
lant,
M, eft le petit vafe tourné, qui fert d’ornement à la tige.
enr!
PREMIERE Partie Chap. XII . 47
Immediatement au-deflus de l'endroit L, on y voit une
petite pincette à boutons marquée N.
O , eft un verre concave , pour fervir de porte-objet aux
liqueurs qu'on mettra dans fa concavité.
P , eft une efpece de porte-objet de laiton, compofé de
plufieurs pieces, tellement ajuftées les unes avec les autres,
qu'on le peut promener fur le pied du Microfcope marqué Q,
R , eft une petite boëte de laiton en forme d’une virole,
dans laquelle on met des diaphragmes de differentes ouver-
tures. :
S,S,S, font trois petites boules affaiflces , & attachées
au-deflous du pied pour luy donner plus de grace.
T, eft une platine de laiton, fur laquelle on a attaché trois
petits reflorts, qui rendent égal le mouvement du porte-ob-
jet marque P.
Explication du profil de ce Microfcope.
bb, eft le profil du bouton qui fert de couronnement
au Microfcope.
cc, cft le profil de la piece de l'œil, où l’on voit le verre
oculaire placé immediatement au-deflous du couronnement.
dd, reprefente une autre piece qui porte le verre du mi-
lieu, & qui eft attaché à un bout de tuyau, au bas duquel eft
un diaphragme. |
e , cft le corps du Microfcope , dont on voit l’épaifleur ,
que nous avons dit être couvert de chagrin, & fervir à rece-
voir le tuyau enchaflé & collé avec la piece f , qui fert de
bafe au Microfcope. -
g , eft le profil de la bonnette ou porte - lentille, qui fe
monte à vis fur le bout d’en-bas de la piece f.
h , eft le profil de la virole de laiton , foudée au bas de la
coulifle marquée 1.
l , eft un quarré ou verge d'acier, au haut de laquelle on
voit un petit vafe qui luy fert de couronnement.
- n, eft le profil d'une petite pincette à boutons.
o , eft le profil d’un verre concave , où l'on met les li-
queurs en plus grande quantité que celles qu'on met fur un
tale , où fur un verre plan.
Fu]
43 Nouveaux Mircroscores.
p, eft le porte-objet compolé , dont il a été parlé.
q> cft le profil du pied du Microfcope.
r , eft celuy de la petite boëte ou virole , qui porte les dia-
phragmes de differentes ouvertures.
S,S,S, font trois petites boules affaiflées , pour fervir d'or-
nement au pied du Microfcope.
t, eft le profil d'une petite platine de laiton attachée à
une virole , où l’on fait entrer la petite boëte marquée r.
Du foyer de chacun des troiï verres de ce Microfcope à CA des
diver(es diflances qui font entr eux.
"Oculaire , qui eft un verre convexe des deux côtez, à
huit lignes de foyer; on l'a placé au-deflous de l'œil, à
une diftance d'environ fix lignes.
Le verre du milieu, qui eft aufli convexe des deux côtez ,
a dix-huit lignes de foyer ; fa diftance de l'oculaire eft de
douze lignes.
Et la lentille , qui eft de quatre à cinq lignes de foyer, eft
placée au moins à la diftance de crente lignes du verre du
milieu ; & cette même lentille s'en peut éloigner de trente-
quatre à trente-cing lignes , fi l’on veut que ce Microfcope
fafle paroître l’objet plus gros qu'il ne fait à la moindre dif-
tance : mais il eft à propos d’avertir que l’objet ne paroîtræ
pas fi bien celairé , étant vü d’une grande diftance , que s'il
l'étoit d’une moindre.
Des nfages que l'on peut tirer de ce Microfcope à trors verres.
N confiderant , par exemple, la lettre À d’un loüis d'or
avec ce Microfcope à trois verres, dont l'effet ordinai-
re eft de faire paroïcre à la renverfe tous les objets qu'on y
obferve ; on remarque 1°. que cette lettre qui eft de relief y
paroît enfoncée.
20, Que cet effet n'arrive pas toutes les fois qu'on le de-
fire.
3°. Que fouvent en regardant cette lettre avec beaucoup
d'attention , & durant quelques momens , ce qui paroifloit
Premiere PanTis, Chap. XIII. 49
#enfoncé, paroît enfuite de relief.
4°. Qu'un certain mouvement de tête apporte quelquefois
du changement dans la maniere de voir l'objet.
5°. En faifant avancer le Microfcope fur une table, pen-
dant qu'on y regarde le lois d'or , ce qui paroïfloit de relief
s’y enfonce en apparence , & peu de tems aprés avoir été
ainfi obfervé , on apperçoit tout à coup que le relief revient.
6°. Si l'on pañle d'un côte d'une table à l’autre , on eft tout
furpris de voir que ce qui venoit de paroître en relief, paroît
canfoncé , & au contraire.
7°. Ces effets differens ne font point apperçüs de tous ceux
qui font ce petit manége , dans lequel on remarque des bi-
zarreries extraordinaires, fuivant la force ou la foiblefle des
yeux de l’obfervaceur ; car fouvent une même perfonne ap-
perçoit le même objet differemment, en le regardant tantôt
d'un œil & tantôt de l’autre, & cela fucceflivement.
8°. Il nveft arrivé quelquefois qu'ayant obfervé le relief
du loüis d’or, & l'ayant vû comme enfonce , étant d’un côté
de la table où étoit pofé le Microfcope , la même chofe m'eft
encore apparué l’étant allé obferver de l’autre côté de cette
même table.
9°. I arrive fouvent que quand on regarde l’objet tantôt
d'un œil & tantôt de l’autre, les objets qui font naturelle-
ment de relief y paroiffent creux.
10°. Un de mes amis, Officier d’artillerie , a toujours vù
enfoncé ce qui étoit de relief, quelque fituation qu'il ait pris
pour obferver la lettre À , dont nous parlons.
11°. Le même caractere alphabetique d’une piece d'argent,
produit fur mes yeux les mêmes effets que nous avons remar-
quez touchant le loüis d’or.
12°, Ïl arrive fouvent qu'en faifant une de ces obfervations;
il fuffit d'approcher ou d’éloigner l’oculaire du verre du mi-
licu , pour appercevoir un changement contraire à celuy
qu'on apperçoit auparavant.
13°. Voicy une autre experience qui n'eft pas moins cu-
ricufe que les précedentes ; elle confifte à mettre un cachet
d'argent, qui reprefente un chiffre furle porte-objet du Mi-
crofcope : ce chiffre , quoyque gravé profondement , parof-
6 Nouveaux Mircroscopes.
tra de relief & fans aucun enfoncement ; ce qui ne furprend@
pas peu.
14°. Quand j'obferve le chiffre gravé fur ce cachet, à la
lumiere d’une chandelle , vis-à-vis laquelle je fuis tourné,
je vois d’abord le creux comme il eft naturellement ; un
moment aprés je le jugerois volontiers de relief, fans chan-
ger de fituation ; mais en raïfonnant fur les ombres qui pa-
roiflent , je me trouve obligé de penfer autrement ; parce
que ces mêmes ombres me paroïflent toujours où elles doi-
vent être $ & il en eft de même des effets de la lumiere ré-
panduëé fur ce chiffre.
15°. Mais quand je releve le cachet & ma tête, pendant
que j'en obferve la furface , je vois de relief ce qui eft en-
fonce ; parce que je ne vois plus d'ombre , à caufe du peu de
lumiere que je reçois alors par la refléxion d’un bonet rouge
que J'ay fur ma tête. :
Et fi je regarde obliquement la furface de ce cachet, pen-
dant que la lumiere de la chandelle y tombe à plomb; je ne
le vois point de relief , parce que je ne reçois point de iu-
miere de fes enfoncemens.
Ceux qui préferent les Microfcopes à deux verres à celui
dont je viens de parler, n'ont qu'à fupprimer le verre du
milieu , fans y apporter d’autre changement ; fi ce n’eft que
lorfqu'il s'agira de faire voir la circulation du fang dans la
queuë d'un tétart, dans celle d’une lamproye, &c.il n’y aura
qu'à mettre une lentille objeétive d’un foyer plus court que
celle qui y eft.
CHAPITRE XIV:
Défcription d'une petite Machine nowvelle, qui contient trois
fortes de Microfcopes , € deux petices lunettes d'approche.
E deflein que l’on voit icy au-deffous de la lettre À ;
reprefente un Microfcope monté fur fon pied ; & celuy
qui eft reprefenté au-deflous de B en eft le profil, fair par
la
be.
PREMIERE PARTIE. Chap. XIV. Si
la fe&tion d’un plan vertical qui le divife de haut en bas en
deux parties égales , pour en faire voir le dedans ; par ce
moyen l'on découvre les lieux où font placez les trois verres
qui compofent le premier des trois Microfcopes.
Celuy de ces verres qui répond à côté de la lettre c, eft
un oculaire d'environ huit lignes de foyer.
Le verre du milieu , qui fe voit à côté de la lettre d, a
foixante lignes de foyer ; & la diftance d’entre ces deux ver-
res c, d , pourra être depuis fix lignes jufqu'à dix ou douze;
de forte que pour faire ce changement de diftance , il fera
à propos de monter le verre d , dans un bout de tuyau qui
puille être facilement hauflé & baïflé ; afin de l'arrêter dans
le lieu où fon effet fera le plus convenable aux obfervations
que l’on voudra faire , & de mettre un diaphragme à l’autre
bout d’en-bas de ce tuyau ; comme cela fe peut voir à côté
de la lettre f.
La lentille objeétive qui répond à côte de la lettre e, a
environ fix lignes de foyer : fa diftance ordinaire du verre du
milieu fera d'environ quarante-trois lignes. ÂAinfi s'achevera
le premier Microfcope , dont les effets ont été rapportez dans
les Chapitres précedens.
Si l'on veut maintenant faire un fecond Microfcope , dans
lequel il n’y aura que deux verres , il fufira de fupprimer
celuy du milieu marqué par la lettre d ; ce qui fe fait en ôtant
le tuyau où il eft enchaffe , laiffant feulement c , & la len-
tille-e.
Et pour faire un troifiéme Microfcope qui puifle fervir à
découvrir ce qu'il y a de plus beau & de plus fingulier dans
les liqueurs; il faudra ôter la lentille e , & mettre en fa pla-
ce une autre lentille de trois lignes au plus de foyer , en re-
glant l'ouverture de cette derniere fur ce nouveau foyer ;
ce qui n'eft pas de peu de confequence , quand on veut mé-
nager la clarté & la diftinétion , qui font deux chofes tres-
differentes , & qu'il eft néceflaire d’avoir dans tous les Mi-
crofcopes.
Si l'on veut maintenant faire une lunette d'approche , qui
fafle paroître les objets dans leur fituation naturelle , il n’y
a qu'à fupprimer la lentille marquée c , & la lentille e, puis
Plancher.
52 NouvrAux Microscores.
mettre en la place de cette derniere lentille e , un oculaire’
concave ; qui convienne à la longueur du foyer du verre d,:
qui deviendra l'objeétif de cette lunette. Et ii faut remar-
quer que le concave eft dans une partie de fa monture ,
placé dans une petite boëte pratiquée au-dedans de la foli-
dite du couronnement B g h, comme on l'y peut remar-
uer.
Enfin s’il étoit néceflaire , on pourroit encore poufler la
curiofité plus loin , & trouver dans cette machine dequoy
faire une feconde lunette d'approche , fans augmenter le
nombre des verres que nous y avons employé jufqu’à prefent,
laquelle lunette feroit paroître les objets renverfez, à limi-
ration de celles qui s'appliquent aux niveaux , aux quarts de
cercles, & à celles qui fervent aux Aftronomes pour faire les
obfervations celeftes.
Pour l'executer, iln'y auroit qu'à fe fervir de l'oculaire c,
& du verre du milieu marqué d ; & parce que cette lunette
deviendroit plus longue que la précedente, il faudroit qu'elle
contint un fecond bout de tuyau , à l’une des extrémitez du-
quel il y aura une petite monture , qui fervira à mettre l'o-
culaire marqué c.
I ne refte plus qu'à ajufter au bas de la tige du Microf-
cope une petite pincette, pour y attacher les animaux tout
vivans ; & à faire des portes-objets qui conviennent aux lir
queurs & aux autres objets qu'on veut obierver.
2
CHAPITRE ;: XV.
Déftription d'un nouveau Microfcope unrverfel , > de
Jes ufages.
O N à defiré depuis long -tems d’avoir un feul Microf-
cope qui fut portatif & univerfel, c'eft-à-dire un inf-
rument qui puifle fervir à obferver toutes fortes de petits
objets ; les durs , les mols, & tout ce qui fe peur voir dans
les liquides. En voicy un que l’on croit capable de renfer-
PréMreRE PARTIE Chap. XV. s3
fnef tous ces avantages, parce quil contient toutes les cho-
fes qui font néceflaires pour faire l'effet de plufieurs Mi-
crofcopes ; c’eft pourquoy il n’a pas été poflible d'éviter d'y
faire entrer un grand nombre de pieces tres- differentes les
unes des autres , de chacune defquelles il faut parler aflez
exactement pour en faire comprendre la méchanique & l'u-
fage. Mais afin d'entrer facilement dans ce détail, nous efti-
mons qu'il eft bon de jetter les yeux fur la premiere des
deux Figures reprefentées dans la feiziéme Planche ; qui
nous montre le Microfcopc vû par-devant , & dans une éle-
vation geometrale , de la même grandeur qu'il a été executé
par Monficur le Febvre Ingenieur en inftrumens de Mathe-
matiques ; & où l’on voit d'abord trois reflorts d'une conftruc-
tion particuliere.
Le premier de ces reflorts eft appliqué au haut de la pie-
ce marquée À , fes montans fe voyent en BB, preflant le
porte-lentille F , qui eft derriere eux.
Le fecond marqué c eft attaché en D. |
EE, font les montans du troifiéme reflort que l’on voit
attaché er H, fur une platine Ï qui eft au-delà.
Il faut premierement remarquer que les fomimets des
montans de ces trois reflorts font un peu courbez en devant
pour faciliter l'entrée de quelques pieces plattes & minces
que l'on mettra derriere eux , comme on l’expliqueta cy-
aprés. Ces trois reflorts font aufli un peu courbez vers le
milieu de leur longueur , pour faire place aux pieces qu'on
doit introduire derriere eux.
F , eftle premier des deux portes-lentilles nouveaux ;
qu'on peut nommer Eprouvette ; parce qu'il peut fervir à
éprouver de fuite des lentilles de diverfes groffleurs & de dif-
ferens foyers.
Ï , eft une piece de laiton qui fert à foutenir une partie
des pieces dont on vient de parler. Cette piece doit avoir
plus d’épaifleur que les précedentes , & s'enfoncer un peu
dans le milieu fupcrieur de la piece à coquille où elle ei
foudée. HER Te.
LL, eft un morceau de glace qui doit être des plus beaûx
& des plus cranfparens qu'on puiile trouver, au milieu du-
G i}
Planche 16,
Figure 2".
SA Nouveaux: Microscopres, !
quel on a taillé un petit concave ; pour y mettre les liqueurs
que l’on voudra obferver.
M M, eft une grande piece de laiton, au haut de laquelle
on à fait une ouverture en forme d’un quarré long , pour
faire pañler par-deflus & à couliffe le morceau de glace LL,
que nous avons appellé ailleurs porte-objet, ou porte-liqueur.
NN, eftune grande rouë à dents , qui fert à conduire la
lentille au point où elle doit être , pour qu’on puifle voir les
objets le plus diftinétement qu'il eft poflible.
O, eft une virole attachée au manche du Microfcope, au
haut de laquelle eft un écrou qui reçoit une vis d’acier fou-
déc au-deflous de la piece à coquilles , qui termine le bas du
Microfcope.
Voilà l'explication abregée de toutes les pieces vifibles de
cette premiere Figure ; & voicy celle des pieces que l’on
voit dans la feconde, qui en eft le profil.
aaa, eft le profil d'une piece courbée en équerre , dont
les dimenfions font exaétement obfervées dans cette Figure,
& dans la précedente,
b , eft le premier des trois reflorts qui font au-devant de
la premiere Figure; il n’eft pas vû dans celle-cy, à caufe de
l'épaifleur du haut de la piece 22 a, où elle s'enfonce.
c , eft le fecond reflort que l’on voit attaché en d par une
vis, & fixé en partie par unè petite pointe fichée dans la pie-
ce À de la premiere Figure , afin qu'il ne puifle tourner d'au-
cun côté.
e , eft le fommet de l’un des montans du troifiéme reflort
que l’on voit attaché en h, & s’infinuer dans un petit trou
fait au haut de la piece à coquilles.
f , eft le premier des nouveaux portes-lentilles.
I, ne la hauteur & l'épaifleur d’une platine de lai-
con , qui eft foudée par en bas dans le milieu de la piece à
oniflee qui répond au-deflus de la virole O , & qui fert à
foutenir & affermir la plus grande partie des pieces préce-
dentes. :
1, eft un verre concave ou porte-objet, taillé en bifeaux,
pour étre fermement arrêté dans une coulifle faite fur la
piece marquée m,
PREMIERE PARTIE. Chap. XV. 5
n , eft le profil d'une grande rouë à dents, & d’une vis
rivée à fon centre.
0, eft la virole qui s'attache au manche du Microfcope ,
comme il a été dit. h
p, eft une regle d'acier rivée en deux endroits de fa lar-
geur fur la piece du milieu marquée I.
Cetre regle , dont on voir icy la longueur & l’épaifleur ;
eft ouverte par le milieu en forme d’un quarré Jong qui a peu
de largeur ; & elle en doit avoir moins que le côté horifontal
de l’équerre aaa, qui luy eft parallele.
q, eft une piece façonnée proprement , au bas de laquelle
il y à un écrou par lequel on fait pañler une vis, dont le bout
r cft formé en pivot bien rond , pour être müû avec juftefle
dans un trou fait au bas d’une efpece de confole marquée t,
le haut de laquelle entre quarrément dans l'ouverture de la
regle d'acier p, & y eft fixé par le moyen d'une vis, dont la
tête fe perd dans l’épaifleur de cette regle.
Il faut maintenant remarquer que l'extrémité fuperieure
de la piece q eft en partie quarrée , & en partie viflée ; &
que celle qui eft quarrée fe termine dans l'épaifieur de la re-
gle d'acier p, où elle peut couler librement ; & ce qui eft viflé
traverfe le bras horifontal de l’équerre aa , fe terminant
comme on le voit en s, où l’on peut remarquer qu'une peti-
te rondelle de laiton en eft enfilée , & qu'on a encore mis
par-deflus une petite rouë à dents qui a un écrou à fon cen-
tre , pour ferrer cette rondelle , plus ou moins, fuivant le
befoin.
u x, eft un quatriéme reflort de laiton fermement attaché
avec deux petites vis qui entrent dans la piece marquée I.
y, eft le profil d'une piece de laiton mince , courbée &
recourbée en équerre double , pour foutenir par fon extré-
mité fupericure la virole & qui fait reflort ; parce qu’elle eft
fenduë en fa partie fuperieure , & dans laquelle on fait en-
trer le canon z noirci en dedans , & garni de diaphragmes
de diverfes ouvertures.
Voilà l'explication de toutes les parties du Microfcope vü
de côté ; & voicy celle de chacune de ces pieces deflinées à
part, & marquées de lettres femblables à celles de Figures
3 sf
56 Nouvreaux Mrcroseopes
précedentes ; afin qu'on y puifle avoir recours , fi l'on juge
que cela foit néceflaire.
Explication de tout ce qui eff contenu dans la Planche 17 5
qui a rapport avec les Figures de la précedente.
, Eft le deflein de la partie verticale du devant de la
À piece de laiton courbée en équerre ; au derriere de
laquelle , & fur fes deux montans , on à rivé une piece de
laiton mince , pour fervir d’appuy aux portes-lentilles qui
s’adoflent contre.
Mais auparavant que d'attacher cette piece, il faut avoir
creufé en talus le devant de la piece À , laïflant la partie
élevée du côté de la vis , pour loger l'extrémité de la queuë
du reflort BB, afin que fes montans approchent plus prés de
la piece mince qu'on aura rivée derriere.
Cette préparacion étant fuppolée , voicy la méthode que
lon a fuivie pour attacher les deux premiers reflorts qui font
fur le devant de ce côté de l'équerre. On y a premierement
fait deux trous qui fe voyent au bas de la queuë de cette
piece À, dont le fuperieur , qui eft un peu plus grand que
l'inferieur, fert d'écrou , & l’on à rivé un petit tenon dans
l'autre trou , le furpaflant feulement de l'épaifleur des deux
reflorts ; enfuite de cela on à encore fait deux trous ronds
au bas de chacun des deux reflorts B, C, qui conviennent
tellement aux précedens , que la queuë du premier s’appli-
quant dans la cavité faite au-deflous du milieu des montans
de la piece À , on puifle mettre par-deflus ce premier ref-
fort B , le fecond C, & attacher enfemble ces pieces avec
la vis, dont la tête paroît au-deflous de la lettre D , Figure
z. & 2. de la Planche 16.
ÉE, eft le troifiéme reflort qui s'applique & s'attache au-
devant de la piece de laiton marquée Ï.
F, eft le premier des deux portes-lentilles , où l’on voit
une tetine pour loger la lentille ; on-le fait d'une piece de
laiton gratte tres-mince, dont une moitié eft pliée fur l'autre.
G , eft le fecond porte-lentille , qui eft auffi fait de laiton
un peu plus fort que le précedent. Le deflein en fait affez
TE
ie
Premiere Panrie Chap, XV. 7
connoîtte la conftructien; il fuffira de dire, que la partie du
deflus cft de même largeur que la queuë, & que le coulant
fert à retenir la lentille en place.
LL, eff un morceau de glace , au milieu duquel on a
taillé un concave, qui fert à y retenir une petite goutte de
vinaigre , où nagent des anguilles.
On peut faire d’autres portes-objets de verre mince & de
même grandeur fans le creufer, au-devant defquels, fi la len-
tille dont on fe fervira eft d’un tres-court foyer, on mettra
les liqueurs pour les obferver.
M M ,eft une platine de laiton, où il y a une coulifle pour
recevoir les portes-objets précedens.
On en fait plufieurs autres avec du petit carton mince ;
au milieu defquels on fait une ouverture feinblable à celle
qui fe peut voir au-deflous de la lettre K, où l’on attache
des objets pour être vûs l'un aprés l'autre , avec des lentilles
de foyers convenables.
x x, eft le quatriéme reflort qui eft attaché par deux vis
derriere la pieceÏ, & immediatement au-deflus du côté ho-
sifontal de l'équerre aa a, de la feconde Figure Planche 16.
Ce reflort eft un peu courbe au fommet, pour faciliter l’en-
trée d'une platine pliée & repliée en double équerre, & il
l'eft encore par en bas, comme on le peut voir exattement
exprimé dans fon profil, Planche 16.
NN, eft je profil d'une grande roué à dents, & d'une vis
rivée à fon centre.
o , eft le deflein de la virole attachée au manche du Mi-
crofcope , au haut de laquelle on à fait un écrou pour y faire
entrer la vis qui fe voit reprefentée en o, au bas du profil,
feconde Figure de la Planche 16.
p, eft le plan fuperieur de la regle d'acier que nous avons
mis icy, pour faire voir tout ce qui n’a pü être reprefenté
dans les Figures de la Planche 16.
q: cette piece eft aflez vifible dans le profil de la Planche
16. pour n'avoir pas befoin d’une plus ample explication que
celle qui en a été donnée.
y, cft la reprefentation perfpective de la largeur d'une
piece de laiton courbée & recourbée en double équerre ,
53 Nouveaux Mircroscopes.
au fommet de laquelle on a foudé une virole marquée &.
z z, eft un canon cilindrique qui coule dans la virole &;
qui fait l'office d'un reflort. Ce canon eft garni de diaphrag-
mes , & noirci intérieurement pour en éviter le luifant.
Le deflein qui eft marqué des chiffres 1,2,3,4,5,6,7,
ft une machine particuliere à ce Microfcope , que nous
avons nommée porte-pincette. On voit qu'elle eft compofée
de fix principales pieces ; fçavoir , d'une petite pincette à
boutons marquée 1 ; d'un petit canon vê en 2 , dont l’un
des bouts eft à reflort ; d'une charniere chiffrée 3, qui tour-
ne fur une petite bande de laiton marquée 4 ; d’une tige
ronde $, qui entre dans deux petits canons 6,6, pratiquez
à l'extrémité de la piece 7 , qui doit être de laiton mince.
De forte que par cette difpolition de pieces, toutes diffe-
rentes les unes des autres , on pourra aifément mouvoir la
pincette en tous les fens que l’on voudra.
8, eft une tige de laiton , à l’un des bouts de laquelle on à
monté à vis ou autrement une pointe d'aiguille, pour fervir
aux ufages dont il fera bien-tôt parlé.
9, eft un porte-objec d’ébene, noir d’un côté & blanc de
l'autre ; il doit être fait à peu prés comme une dame à joüer,
vers la circonference de laquelle on a dû avoir refervé un
petit rebord élevé en forme de parapet , pour empêcher que
les petits corps qui fe mettront fur la furface, tant fuperieu-
re qu'inferieure , ne puiflent rouler en bas.
10 , eft le profil de ce porte-objet , où l'on voit un petit
trou rond qui fe remplit d’une cheville de liege , afin qu'en
ÿ fourrant la pointe de la tige 8 , la dame 9 y tienne atta-
chée.
Des ufages de ce Microfcope univerfel.
Ous fuppofons d’abord que cette Machine ainfi conf-
truite , foit éncore accompagnée de plufeurs lentilles
de differens foyers parfaitement bien œaillées, & bien mon-
tées dans des pieces de laiton femblables à celles qui font
reprefentées au-deflous des lettres F, G, Planche 17. aprés
quoy on fera en état de faire les experiences qui fuivent.
fai
ads
PREMIERE PARTIE Chap. XV. 59
Mais auparavant que j'entre en matiere , je me trouve
obligé d’avertir , qu'une explication par écrit, quelque am-
ple qu'elle foit , ne donnera jamais l'intelligence qu'il faut
avoir pour bien conduire toutes les pieces de ce Microfco-
pe , pour préparer les objets qu'on y peut obferver ; & qu'en
moins de deux heures de converfation avec une perfonne
qui en aura l'incelligence , on apprendra plus de chofes , que
l’on ne feroit durant huit jours , d'une leéture qui rebuteroit
ceux qui ne font pas accoûtumez à lire ces fortes d’explica-
tions ; c’eft pourquoy je ne diray précifement que ce qu'il
faudra dire pour ne point ennuyer.
Des Cartons préparez pour [érvir de portes-objets fixes.
E deffein que l’on peut voir au-deflous de la lettre K;
Planche 17, reprefente un des petits cartons, au mi-
lieu duquel on a pratiqué une ouverture ronde ou quarrée,
pour y faire répondre divers corps durs & tranfparens , com-
me des aîles de mouches, des cheveux, de tres-petites plu-
mes d’oifeaux, des tranches de bois tres-minces, &c. qu’on
y attache avec un peu d’eau gomée , ou quelque autre chofe
d'équivalent. Ces cartons étant ainfi préparez & mis de fuite
dans la piece à couliffe de la platine M M, pour y être vüs
avec des lentilles qui conviennent, divertiront agréablement
les fpeétareurs par un grand nombre d'objets tous differens
les uns des autres.
Du Porte-pincetté ; CN des pieces qui l'accompagnenr.
Etre Machine eft d'un grand ufage pour fervir avanta-
eufement aux diverfes obfervations que l’on fe propo-
fera . faire fur une infinité de petits corps durs ou mols:
fi ces corps font durs , on les attache à la pincette à boutons
marquée 1,1, Planche 17 ; s'ils font mols, comme les poux,
les puces, &c. on les pince par la croupe , pour être obfervez
toutvivans. Les mouches d'une certaine groffeur fe peuvent
empaler avec la pointe de la tige 8, qui fe monte par aprés
dans les deux petits canons 6, 6, de la platine 7. Si ce font
xPlanc. 16.
igare Ze
60 Nouvrsaux Mrcroscorss,
des poux de ferins de Canarie qu’on ait deflein d'obferver ;
on trempe la pointe de cette même tige dans un peu d’eau
gomée , aflez épaiile pour y faire tenir ces poux. On en fait
de même pour les mittes de fromage , qui paroïflent bien
differentes les unes des autres.
On peut auf enduire ia petite dame 9 de cette eau go-
mée , & répandre deflus ces petites bêtes vivantes qui s’y
attachent , & qui y demeurent en vie tres-long-tems ; & pour
les obferver fur cette dame , on fait entrer dans le trou qui
cft à fon côté la pointe qui eft.au bout de la tige 8, qui y
demeure ferme au moyen de la cheville de liege qui le rem-
plit exaétement. Les petites graines les plus menuës fe pla-
cent fur de femblables dames , blanches ou noires , fuivant
la couleur des graines qu'on y veut voir , & l'on, employe à
cet effet des lentilles convenables. Cette platine 7. fe place
au même lieu qu’eft placée ceile qui eft marquée M M, dans
la premiere Figure de la Planche 16. Et il faut remarquer que
cette picce & la pincette s'y peuvent mouvoir de haut en
bas, de bas en haut, & de côté, foit à droit, foit à gauche :
mais pour faire avancer la lentille vers l'objet , Où pour l'en
éloigner, il faut tourner la petite rouë * S d’un certain fens,
puis poufler en avant ou en arriere la partie bafle de l'équer-
re marquée a2a , l'arrétant par le moyen de cette même
rouë où l'on juge à propos de l'arrêter , prés ou loin de la
lentille fuivant fon foyer ; & pour achever de la mettre pré-
cifement au point où elle doit être pour bien voir l’objet ; il
faut appliquer l'œil tout proche de la lentille , pendant qu'on
üicnt le Microfcope d'une main ; puis faire tourner avec un
des doigts de la même main, dont on tient le Microfcope ,
la grande rouë marquée N N, à droit ou à gauche , & l’arré-
ter dans le moment que vous appercevrez l'objet le plus dif-
gintement qu'il fera pofible.
À l'imitarion des deux tiges précedentes , marquées 1. &.
8, on pourra en conftruire de diverfes fortes de même lon-
gueur & groffeur ; mais de formes toutes differentes en cha-
cunc de leurs extrémitez , fuivantle befoin que l’on en pour-
ra avoir, Par ce moyen l'on étendra l’umiverfalité de ce
porte-pincerte , & en même rems celle du Microfcope, qui
PREMIERE Paris, Chap. XV. êr
tire tous fes avantages de fa bonté, & de l’induftrie de celuy
qui s’en fert.
De l'ufage de ce Microfcope pour les liqueurs.
6: l'on veut maintenant obferver ce qui fe peut découvrir
dans une liqueur , il ny a qu'à tremper le plus petit bout
d'une plume à écrire dans une infufion de quelque plante ,
pour en moüiller le milieu du porte-objet de verre qui fera
enchafñlé dans la coulifie de la piece marquée M M, en la
premiere Figure de la Planche 16. afin de la faire répondre
vis-à-vis de la lentille qui luy conviendra , & de la mettre
au point de diftinétion. Ainfi l’on verra dans diverfes li-
queurs des animaux qui y nagent , d’autres qui y rampent &
nagent , & d'autres enfin qui y marchent & qui y nagent.
Il faut remarquer que pour mettre beaucoup d’anguilles
en experiences , il faudra employer le verre concave, & ÿ
mettre une aflez grofle goutte de vinaigre avec le petit an-
tonnoir dont nous avons parlé, dans l’ufage des Microfcopes
précedens.
De la circulation du [ang , &* d'une nouvelle invention pour
la faire voir dans la quenë d'un petit poiffon
nommé Tétart 04 Chabot.
"Une des belles découvertes que l’on ait faités dans fa
_ Medecine, eft celle de la circulation du fang , qui eft
dûë à Hervéc fameux Medecin Anglois , qui la publia en
l'année 1628. ou plutôt au Pere Frapaulo , celebre Ecrivain
de fon tems.
Quelques bons qu’ayent été les raifonnemens & les expe-
riences de ces deux fçavans Hommes , pour établir cette
opinion ; tous les vieux Doéteurs de ce tems-là s’éleverent
contre cêtte nouveauté , & firent tout ce qu'ils pürent pour
la combattre ; parce qu'ils manquoient alors d'experiences
aflez évidentes pour la preuve d’une fi belle découverte. En
voicy une qui met le fait hors de conteftation.
Pour cela, vous n’avez qu'à préparer une platine de lairois
H :ÿ
Pianchers,
6» Nouveaux MiIcrRoOscOPES.
mince , de la figure & de la grandeur qu’eft le deffein mar:
qué A BB ; préparez aufli une bande de parchemin de la
figure d'un quarré long , dont la hauteur {oit d'environ 18.
lignes , & d’une longueur fuffifante pour environner les mon-
tans BB de cette platine , & coller fes deux bouts l’un fur
l’autre : après cela collez aufli les deux extrémitez de deux
petites bandes de même matiere , d’environ trois lignes de
largeur au devant de cette piece , comme cela paroît aux
endroits c c c c, laïflant libre & dégagé tout le derriere des
bandes ; afin que le tout étant bien {ec , vous puifiez pañler
librement entre ces bandes , & le derriere de la piece de
parchemin doublée, les montans B,B, de la platine de lai-
ton A,
Àyez enfuite un petit morceau de glace de verre de peu
d’épaifleur , taillé proprement , d'environ huit lignes en
quarré , dont vous ferez entrer la moitié entre les deux côtez
d'en-bas de la machine de parchemin , dont je viens de par-
ler , pour la coller contre fa partie anterieure feulement ,
ainû qu'il paroït en D D : coupez adroitement une piece du
devant de cette machine , qui foit de la figure du tétart, &
faires que cette piece tienne par en haut , comme cela fe
voit au-deflous de la lettre E : paflez enfuite un bout de fil
à l'extrémité du bas de cette piece libre, que vous venez de
préparer , dont les bouts s'étendent à droit & à gauche,
aindi qu'il paroît en F ; en forte qu'il y en aît autant d’un cô-
té qu'il s'en trouve de l’autre ; comme on le peut remarquer
dans ce deflein,
Lorfque vous voudrez faire voir la circulation du fang dans
les veines & dans les arteres qui font en la queué d’un técart,
vous n'aurez qu’à en placer un au-deffous de la piece de par-
chemin, que vous avez feparée en partie du refte de fa ma-
chine , aprés y avoir fait plufeurs grands trous d'épingle , &
humecté d'un peu d’eau l'endroit où vous le voulez enfer-
mer , au moyen de la piece qui s’abaifle deflus , & du fil
marqué GFG, dont vous le lierez doucement , afin qu'il
puifle refpirer dans cet étar.
Cette machine étant ainfi préparée, il la faudra porter à
la place de celle qui eft marquée M M, en la Fig, 1. Planche
nee
PREMIERE, PARTIE Chap. XV. 63
16 , faifant répondre la queuë du tétart fur le verre qui eft au-
deflous, après l'avoir effuyé, l'approchant enfuite d’une len-
tille d'environ deux lignes de foyer , vous aurez le plaifir de
voir au Jour , ou à la faveur d’une chandelle allumée, le fang
ruifleler dans un aflez grand nombre de veines & d’arteres;
découvrant en même tems plufieurs autres Phénoménes aflez
curieux à obferver.
Cette nouvelle maniere d'obferver la circulation du fang,
& les animaux des liqueurs , eft préferable à toures celles où
l’on employe un miroir plan, que l’on ajufte dans une boëte
préparée à cer effet ; car le mélange qui fe fait de la lumiere
refléchie par les parties folides du devant de la glace , de
celle qui part de la furface du vif-argent mélé avec l’étain ;
& de celle de l'air qui fe trouve dans les pores de cet amal-
game, ne produit qu'une lumiere confufe , qui empêche le
fpectateur d’avoir une parfaite diftin&ion de l’objet qu'il re-
garde.
Nous fupprimons aufli la Loupe placée entre la lumiere
& l'objet , que l’on y place dans le deflein d'éclairer davan-
tage une petite étendué de la queuë du poiflon ; parce que
cette grande quantité de rayons de lumiere differemment
modifiée , bien loin d'être avantageufe dans cette occafion,
elle y nuit beaucoup , en empêchant le fpettateur d'avoir
une diftinétion parfaite de l'objet éclairé de cette maniere.
On peut aufli voir la même chofe , en découvrant un plus
grand champ , ou une plus grande étenduë de la queuë du
tétart , en fe fervant d’un petit Microfcope à deux ou à trois
verres convexes des deux côtez , dont voicy les proportions,
Profil d'un petit Microfcpe , compofe de deux ou de trois
lentilles convexes des deux côte,
N voit au haut de cette Planche le profil des trois len-
tilles HIK , qui doivent être des plus parfaites, &
montées dans le corps du Microfcope , dont le profil fait par
la feétion d’un plan, paffant par l'axe de toute fa longueur ,
eft reprefenté au bas de cette même Planche , avec les ver-
res qui le compofent,
E il
Planche: 8«
64 Nouveaux Mrcroscores,
L'oculaire marqué H , doit avoir fix lignes de foyer : fe
verre Ï du milieu fera d’un pouce ; & K , qui reprefente la
lentille , aura pour le moins deux lignes de foyer.
La diftance de l’oculaire au verre du milieu fera de quin-
ze lignes ou environ ; celle du verre du milieu à la lentille,
fera de deux pouces; & la diftance de l'œil à l'oculaire , fera
d'environ quatre lignes.
Enfin fi l’on veut faire un Microfcope à deux verres, il n’y
aura qu'à fupprimer celuy du milieu, & laifler le refte en l'é-
tat qu'il fe trouve.
Ce Microfcope à deux ou à trois verres , étant ainfi conf-
truit , s’enchaffera dans la virole reprefentée en L ; en forte
qu'il y foit fermement arrété. M eft le profil de cette virole,
qui eft un peu ouverte du fens de fa largeur , afin qu’elle fafle
l'office d'un reflort : fon épaïfleur , qui eft vüë en N , doit
être imaginée plus haute que le plan O , fur lequel fa partie
bafle eft enchafiée de dix lignes ou environ en profondeur.
Ce plan O reprefente une petite platine mince de laiton
d'environ quatorze lignes en quarré , percé au milieu d’un
trou rond qui a cinq lignes de diametre , dont l'ufage eft de
recevoir la bonnette qui fixe la lentille du Microfcope , com-
me cela fe peut remarquer au-deflous de la lettre P , qui eft
le profil de l'épaifleur de cette platine ©.
Cela étant ainfi préparé , on engagera cette platine PQ,
entre la piece À & le reflort C de la premiere Fig. Planche
16 ; par ce moyen on aura le plaïfir d’appercevoir tout ce qui
fera dans une petite goutte d’une infufion mife fur le porte-
objet du Microfcope , & d'y découvrir un champ beaucoup
plus grand que n’eft celuy que l’on découvre ordinairement
avec une feule lentille , maïs avec moins de clarté.
Ïl a encore un avantage particulier , qui eft de fervir à dé-
eouvrir les objets d’une diftance plus grande que l'on ne fe
roit avec une lentille d'un tres-court foyer.
Ce Microfcope à deux ou à trois verres, étant monté de
même que ceux qui font compofez d’autant de verres , fer-
vira aux mêmes ufages, | :
En continuant de parler des ufages du Microfcope univer-
fel, nous dirons que pouvant écarter , tant & fi peu qu'on le
PREMIERE PARTIE Chap. XV. 6s
veut, le porte-lentille de l'objet qu'on veut voir , on a la fa-
cilité de mettre en ufage des lentilles de divers foyers ; &
par confequent celuy de faire , avec cette nouvelle montu-
se, un grand nombre d'expériences qu'on ne peut pas faire
avec plufieurs autres d’une conftruttion differente.
Comme on peut approcher en un inftant la lentille de
l’objet, avant que de porter le Microfcope à l'œil, & ache-
ver de la mettre aflez prés ou afiez loin de l'objet, par le
moyen de la rouë N N, que l'on tourne avec un feul doigt
de la main qui le tient, cela donne le moyen de promener
l’objet avec l’autre main , & de découvrir toute l’étenduë de
la petite goutte d’eau mife fur le porte-objer , & en même
tems ce qu'elle contient.
Cette rouë NN, fa vis, & la piece marquée qs, dansle
profil de la Planche 16 , font que ce Microfcope à une pro-
prieté qui conffte , en ce que dans le moment que l'on com-
mence à tourner la rouë NN , la lentille part pour s’appro-
cher ou pour s'éloigner de l’objet , ce qui fait juger de fa
bonté ; car étant excellente , fon meilleur effet paroït à une
feule diftance de l’objet ; au lieu que fi elle n’étoit que me-
diocre , fon cffet fe feroic voir le même en des diftances in-
égales.
Le nouveau porte-lentille , marqué F , eft fi commode ,
qu'on peut par fon moyen employer des lentilles d’un fi court
foyer que l'on voudra , & mertre les liqueurs au devant où
au derriere du porte-objet de verre ; ce qui donne occafion
d'obferver les poiflons qui nagent dans ces liqueurs par de-
vant ou par derriere , & de découvrir s'ils rampent ou s'ils
marchent fur le porre-objet, ou enfin s'ils nagent dans l'eau
que l’on examine.
On voit bien que ce Microfcope ainfi conftruit , & accom-
pagné de toutes les pieces qui en doivent faire l’aflortiment,
eft prefque univerfel , & qu'on peut faire avec cet inftrument
soutes les experiences dont j'ay parlé dans ce Traité , à la
referve de quelques-unes qui fe font commodement avec les
Microfcopes à canons, & le porte-Loupe ; car il eft évident
qu'on ne Îe peut employer dans les diflections des petits ani-
maux vivans ou morts; quil ne peur fervir à les defliner ni à
Planche :#,
Pfancher#;
"17e
ge Nouveaux MicroOscoPEes.
les graver élégamment , ni même à les cenir enfermez du2
rant plufieurs mois dans de petites prifons bien éclairées ,
comme on fait dans les Microfcopes à tombeaux , où l'on
voit comment les uns y font leurs œufs , & d’autres leurs pe-
tits tout vivans ; comment ils sy nourriflent ; comment ils y
changent de couleur; comment ils y combattent ; & où en-
fin l’on découvre avec beaucoup de plailir plufieurs efpeces
de métamorpholes, qu’on ne fe lafle point d'admirer.
CHAPIAMRE, RIVIT
eAutre souwveau Microfcope univerfel.
Oicy un fecond Microfcope univerfel , plus fimple
que le précedent , & qui a par-deflus cela quelques
avantages qui ne s y rencontrent pas. On le voit reprefenté
dans cette dix-neuviéme Planche , en deux pofitions toutes
differentes ; la premiere , eft une élévation géometrale du
Microfcope tout entier vü par devant ; & la feconde le re-
préfente vû de côté.
Ce Microfcope étant conftruit de plufieurs pieces fembla-
bles à celles du précedent , & ces pieces ayant icy les mé-
mes ufages , nous paflerons légérement par-deflus , nous con*
tentant de nous étendre autant qu'il le faudra fur celles qui
font d’une nouvelle conftruttion , & dont les fonétions font
plus parfaites & plus commodes.
Explication de la premiere € [econde Figure, qui repréfentent le
Microfcope tout entier vi par devant € de côté ; où 1l faut re-
marquer que les groffés lettres fervent de renvoy à la premiere
Figure ; @ les petites, à la féconde.
A À;,cft une piece de laiton foudée par en bas, àune pe-
Âi: piece ronde & platte , ornée de quelques moulures
pour fervir de bafe à cette maîtrefle piece , & de couronne-
ment à la virole du manche fur laquelle elle fe monte à vis,
conume on le peut remarquer au bas de la feconde Figure.
Cette
L
PREMIERE PARTIE Chap. XVI. 67
Cette piece À À , qui reflemble en quelque façon à une
petite palette , dont les enfans fe fervent pour jouër au vo-
lant , cft nommée la maîtrefle piece ; parce qu’elle fert à
foutenir & à porter les autres parties de ce Microfcope : {a
longueur , fa largeur & fon RE font exaétement repré-
fentées dans la premiere & feconde Figure. |
b, eft un canon en forme de quarré long, repréfenté en la
feconde Figure , foudé par un bout au-deflus du milieu de la
maîtrefle piece À À , ou a a.
cc,eftunautre petit canon creux & de même figure , qui
entre juftement dans le précedent: ce petit canon eft foudé
à une petite piece de laiton marquée D ou d._
E,ouee, repréfentent une vis qui tient à la piece d , fur
laquelle tourne la rouë FF, ou f.
G,oug, eft un reflort d'acier trempé , dont le bas ef at-
taché fur la maïitrefle piece À À, ou a 4.
Le bout d’en-haut de ce reflort eft feparé en deux par-
ties , formant une efpece de fourchette platte par fes extré-
mitez , pour laïfler un paflage libre à la vis ee; de maniere
que les deux extrémitez du haut de ce reflort appuyans con-
tre le milieu de la piece marquée d , elles la pouflent conti-
nuellement en avant.
On voit en la feconde Figure , tant au-deflous de la lettre
h, qu'au-deflus di, les bouts de deux petits reflorts d’acier
placez , l'un dans le gros canon b , & l’autre dans le petit
marqué c , pour rendre uniforme le mouvement du petit
canon , & du bras horifontal de l’équerre 111 , dont on va
parler.
L,ou 111, eft une grande piece de laiton, formant une
efpece d’équerre , dont la branche horifontale eft toute fim-
ple, au lieu que fa verticale eft plus compofée. La branche
la plus fimple eft femblable à une petite regle ordinaire ,
dont toutes les furfaces oppofées font paralleles entr’elles ;
afin qu'étant ainfi d'égale épaifleur , elle puifle couler libre-
ment, & d'un mouvement égal, dans le conduit qui aura été
pratiqué au-dedans du petit canon marqué c.
La branche verticale de cette équerre eft conftruite de
pieces femblables à ceiles du Microfcope univerfei préce
68 Nouveaux Microscopres.
dent , “eprefentées dans la Planche 16. Figure r. & 2. parles
lettres A, BB, C, & expliquées dans le Chapitre XV. qui
précede celuy-cy.
MM, font deux reflorts de laiton attachez fermement
l'un à droite & l’autre à gauche , de la largeur de la piece
A À, par le moyen de deux vis dont on voit les têces , & de
deux petites goupilles invifibles , qui font rivées aux extré-
mitez d'en-bas de ces reflorts , courbez en deux fens diffe-
rens , comme on le peut remarquer en h & en m , afin de
faciliter l'entrée , & l’enfoncement des diverfes pieces qui
doivent s’'introduire derriere ces mêmes reflorts.
Au milieu de l’épaifleur , & à l'extrémité fuperieure de la
maîtrefle piece À À , ouaa, il y a une ouverture faite en
forme d'un petit quarré long , dont les moindres côtez font
également diftans de la largeur de la platine À À, dans la-
quelle on fait entrer le bras vertical d'une petite regle de
laiton d'environ vingt lignes de longueur, & de trois lignes
de largeur , pliée par le milieu pour former une équerre ,
dont le bout horifontal n porte la virole p, qui fait reflort,
dans laquelle on fair mouvoir le canon © , garni de même
que celuy du Microfcope précedent.
Les portes-lentilles , les portes -objets , les und ie
tes, &c. s'executent de même qu'ils font reprefentez dans les
Planches du premier Microfcope univerfel, & les ufages de
routes ces pieces doivent être icy les mêmes , c'eft pourquoy
nous n'en parlerons pas. |
CHAPITRE. SVTE
Explication d'un troifiéme € dernier Microfcope nowveas
€ univer[el.
HE vais finir la premiere Partie de ce Livre, par l'expli-
] cation d’un troifiéme Microfcope nouveau , & un peu
plus univerfel que le précedent , où nous n’avons employé
que des cétarçs pour faire voir la circularion du fang ; au lieu
”
PREMIERE PARTIE Chap. XVII. (D
que dans celuy-cy on y pourra ajufter des poiflons de plu:
ficurs efpeces, de differentes longueurs , & de diverfes grof-
feurs. Et parce qu'il a d’ailleurs tous les avantages du préce-
dent , on l'y doit préferer ; mais comme il contient beaucoup
de pieces qui ont un grand rapport à celles de ce Microfco+
pe-là , & qu'elles ont été expliquées dans le Chapitre préce-
dent , nous ne devons prefque parler icy que de celles qui
‘en font differentes. Et afin d’abreger cette defcription au-
tant que nous le pourrons , nous avertiflons que les grofles
lettres qui fe voyent fur les parties de ce Microfcope, repre-
fenté en la premiere Figure de la Pianche 20 , fervent de
renvoy aux petites lettres de même nom, qui font fur les
mêmes parties du profil de ce Microfcope , Figure 2 ; afin
que par ce moyen on puifle avoir une intelligence plus par-
faite de la conftruction & des ufages de toute cette machi-
ne. Mais parce que les proportions de la hauteur , de la lar-
geur, & de lépaifleur du corps de ce Microfcopes dépen-
dent de la longueur , de la largeur & de l'épaifleur des poif-
fons , dans la queuë defquels on voudra voir circuler le fang ;
cela fait qu'on ne peut déterminer toutes ces chofes qu'à peu
près , & en donner des mefures qui répondent à celles des
animaux dont le choix eft plus convenable ; & d'autant que
les petits poiflons ont la queuë plus mince & plus tranfpa-
rente que neft celle des gros, il les y faut préferer, & ré-
duire la grandeur des parties du Microfcope dans le moin-
dre volume qu'il fera poflible , afin d'en faciliter le tranf-
port.
Pour cet effet, nous avons jugé à propos de donner en-
viron huit pouces de hauteur à toute la machine; mais cette
Planche n’en ayant pas aflez pour la contenir toute entiere,
nous avons réflolu d'en marquer toutes les dimenfions par
des mefures exactes , afin que fur ce détail on la puifle faci-
lement executer. Aïnfi nous dirons que le corps du Microf-
cope eft fait de laiton ; que fa hauteur AB eft divifée en
deux parties ; que la poignée CD à quatre pouces de hau-
teur ; que fa largeur FF eft de vingt lignes , & fon épaificur
GH de treize ; que cette poignée eft creufe & de figure ci-
lindrique un peu applatie , en forte que fes extrémitez font
Li
70 Nouvraux Microscorrs.
devenuës ovales, demeurans dans les mêmes proportions cy-
deflus marquées.
La feconde partie fuperieure AT, eft faite à peu près
comme un parallelepipede reétangle , dont la hauteur à
vingt-fept lignes ; la largeur par le bas , tant du devant que
du derriere , eft de feize lignes , & par le haut des mêmes
côtez de dix-huit; & que chacun des autres plus petits cô-
tez n'a que dix lignes.
Cette même partie À I eft inégalement divifée en deux
autres ; celle de deflous a feize lignes , & celle de deflus on-
ze : les deux côtez de la premiere partie qui touchent la poi-
gnée , font ouverts ; & ceux de la feconde , qui répondent
immédiatement au-deflus , font fermez.
À peu près vers le milieu de la partie fupericure du de-
vant, & du derriere du corps du Microfcope , on y a atta-
ché deux plattes-bandes marquées 11, dans le profil Figure
2 , qui en occupent toute la largeur , & dont les extrémitez
font entaillées pour fervir de coulifle ; & au milieu de la
platte-bande du derriere du Microfcope , on y a foudé une
vis m d'environ un pouce de longueur , de deux lignes de
diametre, & d’un pas aflez gros,
Maintenant dans les entailles des deux pieces à coulifles
dont on a parlé, on y fait entrer les côtez creux d'une dou-
ble équerre oo , dont la concavité eft faite en forme d'un
quarré long.
Cette double équerre oo entre à coulifle par le devant du
Microfcope , & fes extrémitez pofterieures , qui font faites
en tenons percez, reçoivent une piece de laiton platte mar-
quée pp, qui eft retenuë par deux goupilles ; & il faut re-
marquer 1°. que la vis m dont nous venons de parler traverfe
librement le milieu de cette piece de laiton ; 2°. Que cette
piece de laiton jointe à la double équerre forment un châflis
- quarré qui environne le corps du Microfcope , & qui pourra
Être mû en avant & en arriere , pour fervir aux ufages donr
on parlera cy-après. Et enfin qu'au derriere du corps de ce
Microfcope on y a attaché un reflort d'acier marqué q, Q,
dans la feconde & troifiéme Figure , d'environ trois pouces
de longueur & de huit lignes de largeur , dont l'effet eft de
‘14
PREMIERE PARTIE Chap. XVII. 71
poufler le chäflis en arriere ; & ayant monté une rouë den-
telce r r fur cette vis m, dont le diametre exccde un peu les
côtez de la double équerre, elle fervira à poufler le châffis
d'un fens oppofe à celuy du reflort marqué Q,
Dans les deux côtez creux des pieces à coulifles , & par le
devant du corps du Microfcope, on fait entrer deux lames
d'acier ss , aux extrémitez defquelles eft rivée une piece
platte marquée T , t, Figure 1. & 2 , Planche 20. recourbée
en double équerre , comme on le voit dans le profil de la fe-
conde Figure , & dans celuy de la cinquiéme , Planche 21.
Le haut de cette partie platte , ainfi recourbée, eft com-
pofc de pieces toutes femblables à celles du haut du Microf-
cope précedent ; & ces pieces doivent avoir icy & là à peu
près les mêmes proportions & les mêmes ufages.
On voit paroître au-deflous des lettres V , V , le haut de
deux reflorts d'acier , dont les extrémitez inferieures font at-
tachées interieurement au corps du Microfcope , par le
moyen de deux vis dont les têces paroïflent en X X , & ces
reflorts font retenus fermement en la fituation qu'on les voir
par deux petits tenons, dont les bouts paroiïffent quelque peu
plus bas que ne font les têtes de ces vis.
Au deflus , & au derriere de la partie iuperieure de tout le
corps du Microfcope , on y a pratiqué, dans le milieu de fa
longueur & de fon épaifleur , une cavité reguliere d'environ
dix lignes de profondeur , de huit lignes de longueur , & d'un
peu moins d'une ligne d'épaifleur , pour y faire entrer la
queuë & d’une virole 1. qui fait reflort , & dans laquelle on
introduit le canon 2, garni de diaphragmes.
La troifiéme Figure de la 21. Planche, reprefente le Mi-
crofcope vû par derriere , & dans une élevation géometra-
ie, où l’on peut voir la hauteur de la poignée IB couverte
de chagrin , le grand reflort d'acier marqué Q, la vis qui
lattache à peu près au milieu de cette poignée , la rouë den-
telée R , montée fur la vis M qui en traverfe le milieu ; le
refte du corps du Microfcope , le derriere du canon garni
d'un diaphragme , & d'une virole qui le retient fur le bord
de ce canon; & enfin une petite partie de tout ce qui fe voit
seprefenté au-deffous de la quatriéme Fig, ÉRRÈOE 21,
uÿ
Pianche2o.
Figure 2e
72 Nouveaux Mrcroscopres.
Cette quatricme Figure reprefente une machine compo
fée d’un porte-canon z z, concave d'un côté & convexe de
l’autre : on voit au milieu un petit anneau marqué & & , que
l'on a refervé de part & d'autre de la même piece dont le
canal eft fait, fur le milieu duquel on à, attaché un reflort
d'acier trempé marqué Ï, qui fe voit terminé en Ÿ Ÿ , dont
les extrémitez fonc recourbées d’un fens contraire à celuy du
canal de laiton marqué z z qui luy répond , afin que ces deux
corps ainfi figurez concourent enfemble à retenir les tuyaux
de verre, d'argent ou de laiton, gros & menus, dans la ca-
vité defquels on introduira les poiflons qu'on y voudra
mettre.
La partie fuperieure 2 2 , de ce porte-canon, eft faite de
laiton mince , & elle eft de la même grandeur & de la même
figure que le deflein la reprefente. On y voit en haut & au
milieu une ouverture en forme d’un quarré long, fur laquelle
on poufle à coulifle un verre plan de même figure & de peu
d’épaifleur , mais un peu plus grand , taillé en bifeaux tout le
long de fes plus grands côtez.
Enfin la Figure $, qui eft au bas de la Planche 27, eft le
profil d'une piece qui tient à la platte-bande T , Fig. r. Plan-
che 20 , recourbée en double équerre , & fur le devant de
laquelle on voit deux doubles reflorts d’inégales largeur &
hauteur, derriere lefquels on introduit le porte-lentille , & l&
piece qui doit fervir à foutenir un petit Microfcope à deux
ou trois verres convexes des deux côtez , comme il a été ex-
pliqué dans l’ufage de l’un & de l'autre des deux Microfco-
pes précedens. |
Outre les pieces dont je viens de parler , qui accompa-
gnent celuy-cy , on doit encore l'aflortir d’un porte-pincet-
te, d’un porte-tétart, d’un porte-objet à coulifle , pour y
introduire des verres taillez diverfement, & d'autres portes-
objets , qui doivent fervir à des ufages differens, & dont il
a été parlé ailleurs aflez au long , pour n'avoir pas befoin
d’une plus ample explication. |
J'avertiray feulement que la curiofité & le delir de rendre
cet Ouvrage autant parfait qu'il n’a été poflible de le faire ,
m'ont engagez à rechercher les moyens de fatisfaire pleine-
PREMIERE ParTtre Chap. XVI. “3
ment ceux qui voudront fçavoir fi le fang circule d'une mé-
me maniere dans des poiflons d'une même efpece ; sil fe
meut differemment dans ceux qui font de diverfes natures ;
s’il va plus vite dans les vaifleaux des uns que dans ceux des
autres ; s’il y eft plus ou moins rouge ; fi les globules du fang
qui paflent d’une artere dans une veine , fe divifent en d’au-
tres globules plus petits ; fi toute la mañle du fang eft unifor-
me , ou fi on la voit compofce de parties hécherogenes ; fi
les arteres & les veines ne font que des tuyaux recourbez ,
comme les fyphons ; fi l'on voit le fang s'arrêter dans quel-
ques vaifleaux d'un même poiflon , pendant que fon mouve-
ment fe continué en d’autres ; fi tout le fang d'un petit poif-
fon , ou de quelque autre animal , comme d’une mitte de
ferin de Canarie, peut cefler de fe mouvoir pour quelque
tems feulement ; s'il eft plus épais en de certains poiflons
qu'en d'autres ; pourquoy il paroît blanc en quelques-uns, &
rouge en d’autres, &c. C’a donc été pour fatisfaire ceux qui
nous font l'honneur de nous propofer de femblables quef-
tions , & pour faciliter la réfolution d'un nombre prefque
infini d’autres, qui rendent la Phyfique tres -utile & tres-
agréable , que j'ay fait conftruire ce troifiéme Microfcope
univerfel, dans lequel on pourra facilement appliquer quand
on voudra , & durant toute l’année , tantôt des tétarts ou
chabots , tantôt de petites anguilles , quelquefois des lam-
proyes , d’autres fois de petites tranches ou des carpes , dans
la queuë defquelles on aura le plaifir d’obferver, comme on
le va dire , à la lumiere du jour ou à celle d’une chandelle,
toutes les chofes dont je viens de parler. Et avec ce feul Mi-
crofcope , accompagné des pieces qui doivent laflortir , on
pourra aufli faire toutes les experiences dont les deux précez
dens Microfcopes font capables, |
TA Nouveaux MicROSCOPES.
GEL API TRE CN TT
Comment on doit ajufler une Lamproye , une Anguille, on un te-
tart, dans un tuyau de verre, d'argent on de laiton. Comment
on applique ces tuyaux dans la machine reprefentée en la Plar-
che 21. Fig. 4. Et enfin comment cette même machine doit être
placée dans la capacité du corps du Microfcope.
Our cet effet prenez un de ces tuyaux, qui foit un peu
plus court que la lamproye , ou l’anguille que l’on y
voudra faire entrer, & tellement conftruit , que l’un de fes
bouts foit taillé à peu près comme celuy d’une plume à écri-
re , pendant que l'autre bout du même tuyau fe terminera
en pointe un peu émouflée & percée , afin que Fanimal qu'on
y fera entrer y puifle facilement refpirer. Il faut obferver
que le tuyau dans lequel on fera entrer le poiflon ne doit
pas être trop grand , parce qu'il en pourroit fortir de luy-
même , aprés l'y avoir fait defcendre , en commençant par
ha tête.
Cela fuppolé , arrêtez la queuë de l’animal après l'avoir
fait furpañler de quelques lignes , le bout d’en-haut du tuyau
taillé obliquement, avec un peu de papier ou de linge , que
vous ferez entrer dans ce tuyau fans beaucoup preffer la
queuë de l'animal , qu'il faudra faire répondre fur le verre à
coulifle ; enfuite de quoy il n’y aura plus qu'à mettre cette
machine, ainfi préparée , dans l’efpace vuide du corps de ce
Microfcope , en l'y arrêtant du fens qu'il faut, derriere les
reflorts d'acier que l'on voit reprefentez en V V, de la pre-
miere Fig. Planche 20. faifant encore répondre le bout de la
queuë de ce poiflon vis-à-vis la lentille que l’on mettra faci-
lement au point de diftinétion , par le moyen de la grande
rouë à dents ; alors vous aurez le plaifir d'obferver à loifir le
mouvement du fang à la lumiere du jour , ou à celle d'une
chandelle.
Je ne devrois rien dire icy de la préparation du tétart ,
parce que J'en ay parlé dans l'ufage du premier Microlcope
univeriel ,
di
PREMIERE PARTIE Chap. XVIII. 7$
univerfel, ni de plufeurs autres chofes qui ont été expli-
quées ailleurs ; cependant jc me fens obligé de parler d'une
nouvelle maniere de les faifir avec beaucoup plus de facilité
qu'on ne peut faire en fuivant la méthode précedente. Elle
confifte 1°.à prendre un tuyau de verre comme ab, qui foic
un peu plus long que n'eft le poiffon qu'on y voudra faire en-
trer , pour tailler l'extrémité b, ainfi que cela fe voit en la
Fig. 6. de la 21. Planche.
2°. De faire un autre tuyau c de, de carton ou de papier,
qui puifle entrer par le bout a du premier tuyau , afin de fer-
vir à poufler l'animal qu'on y mettra jufqu'au point où il
doit être , pour que fa queué réponde au milieu de la largeur
du verre dont il a été parlé ci-devant , afin d'y obferver le
fang en mouvement. Ces deux tuyaux doivent être ouverts
d’un bout à l'autre ; afin de donner moyen au poiflon, qui
fera placé dans le prenuer a b, d'y pouvoir men facile-
ment.
Pour l'arrêter dans ce tuyau de verre , on peut tres-utile-
ment fe fervir d'un petit morceau de linge fin & moüillé,
une partie duquel doit être dans le tuyau , l'autre partie s'y
mettra aufli après y avoir placé l'animal : enfin ce tuyau étant
ainfi préparé , on le fait entrer , comme on l'a dit, dans la
machine qui eft au-deflous de la Figure 4. Planche 21. Et
s'il arrivoit encore qu'aprés avoir ainfi faifi l'animal , il vint
à feparer fa queuë du verre fur lequel on l’avoit ajuftée , on
l'y fixeroit une feconde fois mieux qu'elle n’étoit, en appli-
quant fur fa partie la plus épaifle une petite bande étroite de
linge fin moüillé , afin qu'elle s’y attache , & qu'elle y fafle
demeurer ftable cette partie du poiflon, durant le tems des
obfervations qui s’en feront.
Cette nouvelle méthode de fixer les lamproyes, les an-
guilles , les tétarts , &c. dont la grofleur ne furpañle pas le
diametre interieur des tuyaux de verre qu'on peut faire en-
trer dans la machine dont Je viens de parler, eft préferable
à celle dont on s'eft fervi jufqu’à prefent , parce qu'elle évite
des défauts confiderables , qui naiflent de l'impoñibilité où
l'on fe trouve d’avoir des tuyaux de verre aflez minces, aflez
K
76 Nouveaux Microscopres.
tranfparens , & qui foient d’ailieurs exempts des filets qu’on.
y voit ctendus d'un bout à l’autre de leur longueur , ce qui
empêche le bon effet des meilleurs Microfcopes.
Ï ne refte plus qu'à dire comment & furquoy il faut faifir
les poiflons , dont la groffeur ne permet pas de mettre en
ufage la machine qui eft reprefentee au-deflous de la Figure
4. Planche 21. Pour cet effet, il n’y a qu'à préparer un porte-
objet de laiton , dont la hauteur & la largeur égalent celles
des poiflons qu'on y doit appliquer : pour le faire , tirez fur
un carton fin, ou fur du laiton qui foit environ de l'épaifleur
de deux cartes à Jouër , une ligne droite , longue de deux
pouces huit lignes , à l’une des extrémitez de laquelle vous
éleverez perpendiculairement une autre ligne droite d'un
pouce , afin que par ce moyen vous puifliez achever un quar-
re long , duquel vous divilerez le plus grand côté fuperieur
en deux parties égales, prenant enfuite de part & d'autre
de ce milieu deux longueurs chacune de fept lignes, & fur
leur extrémitez vous y éleverez deux perpendiculaires , cha-
cune de deux pouces fix lignes , pour terminer la hauteur
des montans du porte- objet : après cela vous prendrez à
droit & à gauche de ces montans une largeur de quatre li-
gnes au plus , & par les points qui la rermine vous tirerez
deux autres lignes paralleles aux deux précedentes.
Divilez enfuite en deux parties inégales toute la hauteur
de l’efpace qui fe trouve entre ces deux montans , qu'il fau-
dra vuider pour en ôter le fuperflu , donnant un pouce à
celle d’en-bas pour la hauteur d'un morceau de glace des
plus tranfparens qu'on pourra trouver , lequel étant taillé en
bifeaux à droit & à gauche, on le fera entrer à coulifle dans
deux rainures bien faites qui feront pratiquées dans l'épaif-
feur des montans de ce porte-objet ; & fur ce verre on def-
cendra encore à coulifle une piece de laiton d'environ qua-
tre pouces fix lignes de longueur , dont la partie qui doit
toucher le fommet du morceau de glace, & fe terminer aux
extrémitez des montans , fera plane , & le refte un peu
creux , & plus large qué la partie qui eft au - deflous ; afin
que le COrps de chaque poiflon qui ft convexe , & quil ,
PREMIERE PARTIE. Chap. XVIII. 77
faudra coucher de toute fa longueur , s'y puifle mieux ajuf-
ter qu'il ne. feroit {1 cette piece Ctoit platie dans toute fon
étendué.
En Ôtant aprés cela le fuperflu qui fe trouve à droit & à
gauche de cette nouvelle machine , on aura le porre-objet,
do les montans feront plus Fons fi l'on referve aflez de
matiere par le bas pour les terminer par deux doucines , ac-
compagnces de filets quarrez, qui leur ferviront comme de
baies, & d'un couronnement des plus gracieux qu'on puille
faire:
On voit bien que la hauteur & la largeur de toute cette
machine , doivent étre proportionnées à réclés des poiflons
qu'on y veut faifir , & que moins ils auront d'âge , plus la
queuë en fera mince & tranfparente, ce qui dates lieu d'y
obferver plus agréablement la circulation du fang , que l'on
ne feroit , fi la queuë de ces poiflons étoit plus épaille , dont
la raifon ef fi évidente que chacun la peut appercevoir, pour
peu d'attention qu'on y donne.
Cela fuppolé , lorfqu'il s'agira d'appliquer fur cette ma-
chine une tranche , une carpe, un brocheton , &c. vous n'au-
rez qu à y conchor un derces poiflons tout de fon long, en
faifant répondre fa queuë fur le milieu du morceau de gla-
ce, jettant enfuite fur la longueur de tout fon corps une pe-
üte bande de moufleline , moüillée ou non; puis arrétant le
tout avec un petit ruban étroit, vous cranfporterez le porte-
objet ainfi chargé entre les Ad brelonsda té qui fe voyent
au-deflous de V V , Figure premiere de la vingtiéme Plan-
che , pour faire vos oblervations avec des lentilles qui leur
conviennent,
Et parce que cette explication pourroit paroïtre trop dif-
ficile à comprendre , n'étant pas accompagnce d'un deflein
qui reprefente la machine dont je parle ; j ay jugé à propos
de la reprefenter icy telle que je l'ay décrite , & d'ajoûter en-
core que ABC, eft le porte-objet de laiton.
BC , les montans à rainures.
D, fe morceau.de glace taillé en bifeaux , pour entrer à
couliffe dans les rainures des montans.
FE, ft unc fcule piece de laiton qui eft plane depuis F
Pjanche22
78 Nouveaux Microscopes.
jufqu'en € , & concave depuis C jufqu’en E; & que c’eft tout
le long de cette derniere piece que l’on applique les poiflons,
en les y faififlant la tête vers E , & la queué étenduë fur le
milieu du verre marqué D.
Je crois devoir encore dire comment on pourra conferver
durant plufieurs mois les poiflons dont je viens de parler ,
afin d’en avoir toujours de plufieurs fortes, foit en efte, foit
en hyver, pour fervir à faire voir la maniere dont le fang cir-
cule dans les vaifleaux des uns & dans ceux des autres.
Les Jartes de bois un peu profondes feront tres -propres
pour y conferver les tétarts, en leur donnant tous les jours de
l'eau nouvelle , de riviere ou de fontaine. Et pour faciliter
ce changement fans les toucher , on n'aura qu'à verfer tout
ce qui fera dans la jatte, dans une pañloire de terre vernif-
fée ; afin que l'eau s'étant feparée des tétarts , on les puifle
remettre dans leur vaifleau avec de l'eau nouvelle , & quel-
ques petits morceaux de petit pain. J'en ay gardé aïnfi dans
mon Cabinet depuis le commencement de l’efté dernier juf-
qu'à prefent r. Fevrier 1718. que j’avois fait pêcher dans les
baflins des Thuilleries , & dans celuy du Jardin qui eft au
Palais de Luxembourg.
Les lamproyes ne font pas fi communes que les tétarts, il
les faut faire pêcher aflez loin de cetre Ville, & les confer-
ver dans des vaifleaux de terre ou de grais , où l’on met de
l’eau commune & du fable de riviere , dans lequel elles s'en-
foncent & s’y cachent pour quelque tems. Erquoy qu'on foit
obligé de changer d’eau aflez fouvent, parce qu'elles y trou-
vent leur nourriture, on ne l’eft pas d’en faire de même du
fable , qu'il fuffira de laver une fois ou deux durant huit jours.
Les petites tanches,, les carpes & les brochetons, fe peu-
vent conferver aflez de tems, en les mettant dans un vaif-
feau qui leur conviennent, avec autant d’eau de riviere & de
pain qu'il en faudra pour les nourrir durant deux ou crois
jours.
Fin de la premiere Partie.
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DES
MICROSCOPES.
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Tome II, Par, LL (4) |
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DESCRIPTION
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ADR.
MICROSCOPES.
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SECONDE. PARTIE.
CHAPITRE XUX:
ts PR ÉS être entré dans un aufi grand détail fur la
donner la proportion des vertes qui entrent dans
la compoftion des nouveaux Microfcopes dont je parle,
croyant en avoir aflez dit pour que les Curieux puiflent les
faire exécuter. |
fe er (4 ÿ)
a% conftruction & fur la monture des Microfcopes,
a que je l'ai fait dans les chapitres précédens , je.
S V3 me contenterai dans celui-ci & les fuivans, de
[7
Planche 23,
4 DESCRIPTION ET USAGE
Defcriprion & ufage de deux nouveaux Microfcopes univerfels
à plufieurs verres , 6 de peu de longueur.
Le premier Microfcope , qui n’a environ que deux pouces
de longueur, eft và repréfenté tout entier dans la vingt:
troifieme Planche de cette feconde Partie , au-deflous de la
lettre 4, de la longueur & de la groffeur qu'il a été exécuté.
Sa conftruétion eft telle , qu’on le peut allonger d’un pouce;
{on corps C eft un petit tuyau couvert de chagrin, & cou-
ronné d’une piece d’ébene repréfentée entre les lettres 24.
Le bas de ce tuyau couvert de chagrin, eft monté fur une.
feconde piece aufli d’ébene , marquée e, au bas de laquelle
on voit la bonnette marquée f.
. La feconde figure qui eft repréfentée au-deflous de la let-
tre 2, eft le profil de ce Microfcope fait par la fe&tion d’un
plan, qui pañlant par la longueur de fon axe , le divife en
deux parties égales pour en faire voir le dedans , où l’on peut
remarquer les épaifleurs des tuyaux ce & dd ; celles des trois
verres #, », &, qui font partie de fa compofition , & les dif-
tances qui fe trouvent entre ces mêmes verres.
La troifieme figure qui eft au-deflous de la lettre Z, eft
le profil de toutes les parties qui compofent le Microfcope,
pofées de fuite les unes au-deffus des autres, pour faire com-
prendre dans le détail comment toutes ccs pieces s’emboi-
tent l’une dans l’autre.
bb, eft la piece de l'œil , dans laquelle j'ai fait un écrou:
Æ eft un petit cylindre de bois creufé dans toute fa lon-
gueur, qui a deux vis à fes extrémités, pour y monter la
piece de l'œil 26, tantôt d’un côté & tantôt de l’autre, fui-
vant les ufages que l’on en pourra faire.
£g, h ÿ font deux verres de figure lenticulaire , taillés d’iné-
gales convexités , afin que leurs foyers foient inégaux.
m , eft une piece de bois que l’on monte à vis au bas du
cylindre À, pour y arrêter le verre . A
‘n, eft le profil du tuyau qui reçoit le petit cylindre À, &
qui fe met dans le tuyau couvert de chagrin , pour fervir à
allonger le Microfcope d'environ un pouce, quand on juge
à-propos d'augmenter la grandeur apparente des objets.
Des Microscopes. Sec. ParT. Chap. XIX.
o, eft le profil du tuyau couvert de chagrin, dans lequel
on fait entrer le haut de la piece d’ébene marquée des lettres
epe, qui fe voit immédiatement au-deflous, portant la bon-
nette ja que l’on y monte à vis, après y avoir mis une len-
tille qui eft marquée par la lettre z.
Cette piece epe doit être collée au bas du tuyau marqué o.
Comme on eft obligé d'employer des lentilles de diffé-
rens foyers , il faut aufli des bonnettes qui leur conviennent
pour y monter ces lentilles l’une après l’autre, afin de ren-
dre l'univerfalité de ce Microfcope d’une plus grande étendue
qu'il ne feroit autrement. Les lentilles les plus convexes,
comme font celles d’une ligne ou d’une demi-ligne de foyer,
y feront facilement arrêtées par le moyen d’un petit tuyau
cylindrique marqué f, ouvert dans toute fa longueur, &
dont les bords appuyant fur la lentille , l’arrêteront dans le
fond de la bonnette de maniere qu’elle s’y placera, enforte
que fon axe concourt avec les axes des autres verres.
Proportions des verres de ce Microfcope.
L’oculaire marqué # , monté dans le petit cylindre À, n’a
que neuf lignes de foyer : le verre 4 en a trente. La diftance
de la convexité extérieure de l’oculaire g à celle de l’oculaire
4, eft d'environ fept lignes. Cette diftance peut être plus
rande ou plus petite ; # elle eft plus grande, le Microfcope
fera voir les objets plus petits & plus clairs : au contraire fi
elle eft plus petite, l'objet paroïtra plus grand & moins clair ;
& s'il y a quelques défettuofités apparentes dans le verre du
milieu , la grande proximité les fera difparoître. Par ces dé-
feétuofités je n’entends pas celles qui pourroient provenir
d’une mauvaife forme qu'on auroit fait prendre à ces verres
en les taillant , mais feulement de quelques petites raies qui
s’y feroient faites en les poliffant.
Des ufages de ce Microfcope.
Premierement , cette petite machine à trois verres étant
montée d’une lentille objeétive d'environ une ligne de foyer,
{ervira à faire voir les animaux d’une liqueur deux fois plus
longs & deux fois plus larges qu’on ne les verroit avec cette
a DESCRIPTION ET USAGE
feule lentille : on les verra aufli ayant quatre fois plus de fur-
face, & huit fois plus de folidité, als 1110
2°, Le champ que nous découvrons avec ce petit Mi-
crofcope eft d’une étendue fi vafte , que l’œil a de la peine à
l’appercevoir toute entiere ; ce qui fait que les animaux des
liqueurs y nageant, l’œil les y apperçoit avec plus de fatis-
fattion qu'il ne feroit s'ils étoient vüs à l’ordinaire par une
feule lentille d'environ une ligne de foyer. COREr
_ Cette grande & vafte étendue qu’on nomme Z champ du
ÎMicrofcope , furprend tous ceux qui ont un peu de connoif-
fance de l'effet des Microfcopes ordinaires , qui font compo-
{és de trois verres, particulierement fi l’on compare la peti-
tefle de l’un avec la grandeur ‘des autres ; & ce qui mérite
d’être obfervé , eft que toute cette grande furface eft vüe par
le peu de lumiere qui traverfe le petit trou qui eft au bout
de la bonnette , qui n’a environ qu’un quart de ligne de dia-
metre. Cette petite ouverture que je fais à cette bonnette
eit fufifante pour des lentilles qui ont depuis un quart de.
ligne de foyer jufqu’à une ligne ; mais elle ne l’eft pas pour:
celles qui font au-deflus de cette longueur. …
O A
: 3°. Les anguilles du vinaigre font vûes quelquefois de la
grofleur du petit doigt , particulierement lorfque la liqueur
acheve de s’évaporer : c’eft dans ce temps-là qu’on peut re-
Marquer quelques petites anguilles en mouvement dans le
corps de leurs meres, cherchant une iffue pour en fortir.
- 4°. Les cheveux y paroiflent plus gros que les petites an-
guilles du vinaigre ; & fi on les regarde par leurs bouts bien
éclairés, on pourra découvrir les cavités &: l’épaifleur de
ces efpeces de tuyaux ; qui paroïflent d’une groffeur éton-
nante. On avertit feulement que les cheveux blonds & fé-
parés de la tête depuis long-temps , font plus propres à ma-
nifefter leurs cavités, que ceux qui font d’une autre couleur -
& nouvellement coupés. ni us
s°. Le petit tuyau cylindrique À, qui entre dans celui
qui eft marqué V, du profil quieft fous la lettre Z, s’y pou-
vant retourner bout pour bout, & les deux verres étant de
différens foyers , fourniflent un autre Microfcope qui a les
mêmes avantages que le premier dont je viens de parler ;:
mais les objets y paroiflent plus ou moins éclairés,
Î
e
Des Microscopes, SEC. ParT. Chap. XIX. #
‘6°, Si les deux verres qui font dans le petit tuyau cylin-
drique À, éroient d’égales convexités , enforte que le foyer
de l’un fût de même longueur que le foyer de l’autre, ces
deux verres produiroient un bon effet ; mais l’univerfalité
du Microfcope n’en feroit pas fi grande qu’elle ef.
. 7°. En ôtant la lentille objeétive d’une ligne dé foyer, &
mettant en fa place d’autres lentilles l’une après l’autre, qui
{oient de foyers inégaux & plus longs, on aura le plaifir de
pouvoir obferver tous les autres petits corps. |
8°. Si l’on ôte le verre du milieu.de ce Microfcope à trois
verres, on aura un autre Microfcope à deux verres.
9%. En remettant en place la lentille que l’on a ôtée, &
{upprimant l’autre, l’on aura encore un autre Microfcope à
deux verres , qui differera du précédent en ce qu’il fera voir
les objets plus ou moins grands & plus ou moins clairs.
. 109%, Le petit tuyau cylindrique À étant féparé de fon
coulant V, pourra fervir de.deux autres Microfcopes à deux
verres; & en le montant fur notre Microfcope univerfel re-
préfenté en la vingtieme Planche , par le moyen d’un porte-
lentille fait exprès, on pourra obferver un très-grand nom-
bre d'objets vivans ou morts, attachés à la pincette ou aus
trement . dans chacun defquels on verra une plus grande
étendue qu'on ne feroit avec une feule lentille. FR
_ 11%, Les cinq ou fix lentilles dont ce Microfcope doit être
aflorti, étant montées chacune à part dans autant de portes
lentilles de laiton , pourront tenir lieu d’une partie de celles
que l’on applique ordinairement au Microfcope univerfel ,
& par ce moyen en diminuer le prix. : SR
Ce n’eft pas une néceflité d’avoir un Microfcope univerlel
pour fervir de pié au petit Microfcope dont je parle, on lui
en peut conftruire un tres-fimple, d’un prix médiocre, &
l'aflortir des pieces qui font néceflaires pour le rendre com
mode, & propre à exécuter toutes les expériences que l’on
voudra faire fur les petits corps durs ou liquides, vivans ou
morts ; & examiner les divers mouvemens du fang dans-les
moindres vaifleaux d’un grand nombre d'animaux k. diverfes
efpeces, & y remarquer des chofes dignes d’admiration, : &
Ayant trouvé des avantages confidérables dans le peu de
$ DESCRIPTION ET USAGE
longueur de ce Microfcope , j'ai eflayé d’en faire un fecond
qui fe voit repréfenté en la quatrieme figure, Planche 23 ,
qui fût encore plus petit en confervant les mêmes avanta-
ges ; de forte que n'ayant que dix-huit lignes de longueur
entre l’oculaire & la lentille objeétive , il ne laifle pas de
fatisfaire pleinement les connoiffeurs.
J'ai voulu poufler la petitefle de ce petit Microfcope en-
core plus loin, & j'aitrouvé qu'on en pouvoit faire plufieurs
à trois verres de différens foyers , pour fervir feulement à
l'examen de ce qui fe trouve de plus beau dans les infufons
des plantes & dans les eaux croupies. Ce dernier petit Mi-
crofcope eft fi facile à faire, fi utile & de fi peu de dépenfe,
que j'ofe me promettre qu'il fera agréablement reçû du Pu-
. blic : l'application qu'on en pourra faire à une nouvelle.
Figure 4.
Figure 5,
monture , lui fera peut-être mériter. de tenir le premier rang
entre tous ceux qui ont été inventés jufqu’à préfent. En at-
tendant cette nouveauté , je donne ici les proportions de
deux que j'ai exécutés. L’oculaire marqué par la lettre g, a
douze lignes de foyer ; le verre du milieu marqué, n’en a
que dix ; & la lentille qui eft à côté de la lettre f, n’a qu'une
ligne de foyer : on pourra lui en donner quelque peu davan-
tage , fi l’on veut avoir plus de lumiere ou de clarté pour
examiner les animaux des liqueurs ; & lorfqu’il s’agira d’ob-
ferver d’autres objets, on pourra employer des lentilles ob-
jeétives de trois , de quatre , de cinq & de fix lignes de foyer.
La diftance des deux verres g, r, marque leur éloignement.
P roportions des verres du troufieme Microfcope repréfenté
dans le profil de la cinquieme figure.
L’oculaire de ce Microfcope a fix lignes de foyer ; il eft
marqué par la lettre f. On avertit que la diftance de l'œil à
ce verre eft très-petite.
Le verre du milieu n’a que quatre lignes de foyer : il eft
marqué de la lettre z. Ces deux verres doivent être très-pro-
ches l’un de l’autre.
Et la lentille objeétive qui fe voit à côté de la lettre x,
n'aura qu’une ligne de foyer, à la place de laquelle on pourra
en mettre d’une ligne & demie , ou de deux au plus. se
6
pes Microscorrs. Sec. PART. Chap. XIX. 9
Il eft facile de comprendre que ce dernier Microfcope ne
pourra fervir utilement que pour examiner des corps tranf-
parens , puifqu'il refteroit trop peu d’efpace entre les corps
opaques qu'on y placeroit, & la lentille objeétive marquée
z, pour que la lumiere y pût tomber & s’en réfléchir en
affez grande quantité ; & qu'après la perte qui s’en feroit
faite à la rencontre des verres du Microfcope, il en arrive
encore aflez dans l’œil du Speétateur, pour y faire une im-
preflion fuffifamment fenfible.
CHAPITRE XX.
Defcription & ufage d’un nouveau Microfcope univerfel,
à deux , à trois & à quatre verres.
’OcuLAIRE que l’on voit en À, peut avoir environ
1h feize lignes de foyer ; fa diftance à l'œil eft à-peu-près
de dix lignes.
Le verre du milieu qui fe voit en 8, PI. 24. figure 1. a
trente lignes de foyer ; fa diftance à l’oculaire eft de treize à
quatorze lignes. Ce verre eft monté dans un bout de tuyau
qui entre dans celui qui contient l’oculaire , en forte qu'on
peut l'en approcher on l’en éloigner, panr l’arrêter dans
l'endroit où l’on le jugera capable de produire le meilleur
effet qu'il fera poflible.
La lentille qui fe voit en C , peut être de trois, quatre ou
cinq lignes de foyer ; fa diftance au verre du milieu eft d’en-
viron quatre pouces neuf lignes : & parce que les deux ver-
res A, B, font montés dans un tuyau particulier qui entre
dans un plus gros & plus long , ces deux verres'peuvent être
approchés plus ou moins de la lentille C , pour faire paroître
l'objet plus ou moins gros.
Il y a deux autres petits verres repréfentés en D , PI. 24.
fig. 2. qui font montés dans une petite piece d’ébene, pour
fervir comme d’un feul oculaire , qui fe monte quand on veut
en la place de celui qui eft en 4. Ce Microfcope eft bon à
deux verres, à trois, à quatre, à cinq, & fes effers font dif-
Tome IT, Part, IL. (B)
Yo DESCRIPTION ET USAGE.
férens, felon les diverfes combinaifons qui feront faites des
mêmes verres dans les mêmes lieux qui leur feront deftinés.
1°. En fupprimant le verre du milieu & les deux oculai-
res qui tiennent enfemble, on aura un Microfcope à deux
verres qui fera paroître les objets renverfés.
2°. Si l'on tient feulement d’une main les deux oculaires qui
{ont attachés enfemble , on aura un autre Microfcope nou-
veau qui fera paroître les objets dans une fituation droite,
même de deux grandeurs inégales. Avec ce petit Microfco-
pe, qui n'a tout au plus que quatre lignes de hauteur, &
environ huit lignes de diametre , on fait des expériences
très-curieufes , & en très-crand nombre.
3°. Maintenant fi vous remettez en fa place le verre du
milieu , vous aurez un Microfcope à trois verres, qui fervira
à l'examen des corps opaques & tranfparens , à la lumiere
du jour ou à celle d’une chandelle.
4°. En fupprimant le verre du milieu & l’oculaire , puis
mettant en la place de ce dernier verre les oculaires qui tien-
nent enfemble, vous ferez un nouveau Microfcope à trois
verres, qui fera paroitre les objets d’une groffeur extraordi-
naire , avec un champ beaucoup plus grand que le précé-
dent ; & par ce moyen les animaux des liqueurs paroïtront
{e mouvoir en nageant dans un lac d’une belle & vañfte éten-
due. =
Çç°. En remettant le verre du milieu en fa place, vous au-
rez un nouveau Microfcope à quatre verres, qui fera voir
un champ de dix pouces ou environ de diametre, & les ani-
maux des liqueurs encore plus gros qu'ils n’ont paru, &
avec tout autant de diftinétion qu’il foit poffible de voir dans
une machine fi compofée. |
6°. Vous ferez deux nouveaux Microfcopes lun après
l’autre de cinq verres chacun , en laiffant les trois premiers
dans les endroits qui leur conviennent , en mettant enfuite
fur le tout les deux oculaires attachés enfemble, que l’on
retournera pour obferver un effet tout nouveau.
7°. Enfin les deux grands verres du milieu étant mis dans
ce même lieu l’un fur l’autre, feront avec la lentille un Mi-
crofcope d'environ quatre pouces de longueur, qui fera un
Des Microscopes. Sec. ParT. Chap. XX. 11
excellent effet. Ces deux verres étant de différens foyers,
feront paroitre les objets d'inégales groffeurs.
CHAPITRE XXI.
*
Des avantages qui fe tirent de la proximité de deux Verres
d’inégales convexités ; appliqués auprès de l'œil.
1 I. champ que l’on découvre de l’objet que l’on re-
garde, paroït beaucoup plus grand qu'il ne feroit,
fi ces Verres étoient placés à une plus grande diftance l’un
de l’autre : mais cette partie de l’objet eft vüe moins claire
qu'on ne la verroit, fi ces Verres étoient plus éloignés l’un
de l’autre.
2°, La lentille fe trouvant dans ce Microfcope beaucoup
plus éloignée de l’objet que ne feroit une feule lentille qui
feroit paroître l’objet aufli gros , on évite de la plonger dans
la liqueur que l’on obferve ; ce qui eft un avantage confidé-
rable.
3°. En approchant l'un de l'autre les deux oculaires , on
évite de faire voir les défauts du Verre du milieu, ce qui
n'eft pas une chofe de peu de conféquence.
4°. Cette nouvelle méthode de placer ain à très-peu de
diftance les deux Verres d’un Microfcope qui en contient
trois, a des avantages confidérables par - deflus l’ancienne.
D'abord elle raccourcit beaucoup la longueur du Microfco-
pe , dont les plus petits peuvent être utilement appliqués à
notre Microfcope univerfel ; on peut par fon moyen obfer-
ver tout ce qui fe trouve de plus remarquable dans les infu-
fions des plantes, dans les eaux croupies ; on peut voir dans
un grand nombre de poiflons qui fe trouvent nageant dans
ces eaux, non-feulement la circulation du fang , que leur
petitefle extraordinaire ne nous permet pas d’y remarquer,
mais encore le mouvement particulier d’un liquide blanc &
tranfparent, qui, quoique fans globules, peut pafler pour
le fang de ces animaux.
5°. Nous trouvons dans la conftruétion des Verres de ce
(87)
12 DESCRIPTION ET USAGE
Microfcope un autre avantage confidérable , qui eft qu'ayant
très -peu de diametre , ils fe peuvent facilement tailler au
tour , en bien moins de temps qu’on ne taille les grands Ver-
res des autres Microfcopes , & par conféquent la dépenfe
en eft bien moindre.
. 6°. D'ailleurs la monture de ces petits Microfcopes coûte
très-peu de chofe , au lieu que celle des grands revient à dix
fois davantage.
7°. Les oculaires d’en-haut d’un de ces petits Microfcopes
étant taillés de différentes convexités, auront leurs foyers
de différentes longueurs ; d’où il fuit que chacun de ces Ver-
res étant placé l'un auprès de l’autre du côté de l'œil, le
Speétateur aura deux fenfations de groffeurs différentes en la
préfence d’un même objet ; ce qui n’eft pas un avantage
qu'on doive négliger.
Par exemple, f1 le Verre 4 B , Plunche 24. fig. 3. placé
du côté de l'œil, n’a que fix lignes de foyer, & que le
Verre C D en ait neuf, il eft évident que l’objet apperçû
lui paroîtra plus grand qu'il ne feroit fi l’on retournoit la ma-
chine de maniere que le Verre C D füt placé du côté de
l'œil. Ceux à qui les élémens de l’Optique ne feront pas in-
connus , n'auront pas de peine à m’accorder ce que j'avance.
8°. On peut faire un petit Microfcope à trois Verres, qui
n'aura au plus que deux pouces de longueui , Que l’on pourra
appliquer au Microfcope univerfel , en donnant cinq lignes
de foyer au Verre oculaire, fept lignes au Verre qui eft
tourné du côté de la lentille ; & à cette lentille, depuis deux
lignes & demie de foyer jufqu’à trois ou quatre lignes, &
même davantage , fi l’on veut voir de gros objets. |
Voici d’autres Proportions.
Donnez douze lignes à l’oculaire,
Quatorze lignes au Verre du milieu,
Et fix lignes de diametre à chacun de ces Verres, la len-
tille peut être depuis trois lignes jufqu’à fix.
pes Microscopes. Sec. Part. Chap. XXI. 13
Autres Proportions.
Donnez fept lignes de foyer à l’oculaire,
Neuf lignes au Verre du milieu,
Et trois, quatre ou cinq lignes à la lentille,
Cela fera un Microfcope d'environ trois pouces.
QT
CHAPITRE XXII
Conftruthion d’un nouveau Microfcope à deux verres , qui n’a
qu'un pouce où environ de longueur & autant de diametre ;
ar le moyen duquel on pourra voir un objet très -clairement
& très- diflinélement dans [a fituation naturelle, & de huic
groffeurs différentes , fans être obligé d’auomenter ni diminuer
la longueur du corps de ce Microfcope.
OUR le conftruire, prenez deux oculaires plans con-
vexes, l’un de vingt-trois à vingt-quatre lignes de
foyer, & l’autre de dix-huit : placez-les dans une petite
boite d’ébene qui foit ouverte des deux côtés, enforte que
les convexités fe regardent ; & cette premiere difpofition
de verres fera l'office de deux Microfcopes , ou de deux
loupes de différens foyers.
Tournez Cnfuite ces mêmec srorroe do façon 5 qu'étant re
mis dans la boîte les côtés plats fe regardent, fig. $. vous
aurez deux autres Microfcopes quiiferont l’office de deux
nouvelles loupes , puifque la diftance d’entre les furfaces
planes fera diflérente de celles des deux convexités fituées
comme elles étoient en premier lieu.
Remettez après cela la iconvexité de l’un des verres en
dehors, laïffant l’autre en fa place , figure 6. vous aurez un
troifieme Microfcope , ou deux loupes qui feront paroître
l’objet d’inégale groffeur , puifque les diftances de leurs fur-
faces feront différentes de ce qu’elles étoient dans les fitua-
tions précédentes.
En fupprimant enfin l’un des deux oculaires, laiflant l’au-
tre où1left, vous aurez de quoi produire l’effet d’une feule
loupe , fig. 7. |
Planche 24:
fig. 4
14 DESCRIPTION ET USAGE
Puis Ôtant celle-ci de fa place, en mettant l’autre dans la
fienne , vous en aurez un autre qui fera un autre effet, puif-
que fon foyer eft différent de celui de l’autre verre, fig. 8.
. Voilà donc un moyen infaillible de faire paroître un objet
de huit groffeurs différentes.
J'oubliois d’avertir que la diftance d’entre le repos des
deux verres n’a tout au plus que fix lignes , & que cette dif-
tance peut être plus ou moins grande , en obfervant feule-
ment de n’éloigner ces deux verres l’un de l’autre, qu’autant
qu'il faut pour que le foyer de l’un fe trouve plus près de
l'autre verre, que n’eft la diftance de ce verre-ci à fon
foyer.
C'eft-à-dire de faire enforte que l’un des foyers pañle au-
delà du foyer de l’autre.
Sur ce fondement l’on pourra faire avec les deux oculai-
res dont nous venons de parler , tant de Microfcopes que
l’on voudra avec d’autres verres de foyers différens, qui au-
ront de femblables propriétés.
Je ne dis rien des autres avantages de ces Microfcopes,
l'expérience les fera aflez connoiître : il fuffit d’avertir feule-
ment que les trois premieres figures font voir la fituation des
verres des trois premiers articles, & que les deux autres re-
préfentent les deux verres qui fervent feuls pour les loupes.
Si les repns ou fouilluroc qui {ont dans la boîte ont trop
de diametre , il y faudra mettre des diaphragmes dont les
ouvertures foient proportionnées aux foyers des oculaires
qui feront pofés deflus ; par ce moyen l’objet qu'on voudra
examiner, en fera vù plus diftinétement qu'il ne le feroit fans
ce fecours. | |
CHAPITRE XXIIL
Nouvelle méthode pour monter les Microfcopes à canon de verre.
"EXPÉRIENCE m'ayant fait connoître qu'il étoit difhcile
de conferver long-temps un Microfcope à canon de
verre , fans avoir le chagrin de le trouver caflé au bout de
pes Microscopes. Sec. PART. Chap. XXIIL 5
quelques jours , j'ai crû qu'on pouvoit très- utilement en
conftruire de cette forte , en évitant le fracas que font les
montures ordinaires : en voici la maniere.
Préparez le canon du Microfcope que vous voulez mon-
ter, enforte que les deux ouvertures rondes fe trouvent pa-
ralleles entr’elles ; collez enfuite une bande de velin au bas
de ce canon, d'environ trois à quatre lignes de largeur, qui
en fafle le tour entier, faifant enforte qu’une moitié de la
largeur de cette bande {oit appliquée fur le canon de verre,
& l'autre moitié fur l’épaifleur du bord d’un morceau de
glace bien arrondi, pour le faire fervir de fond au canon du
Microfcope : faites faire après cela un pié d’ébene, ou de
uelqu’autre bois qui foit le plus fec qu'il fera poffible. Le
ane de ce pié doit être creufé, pour y loger feulement
l’épaifleur du morceau de glace qui fervira de bafe au canon.
Pour en faire le couronnement , voici comment il s’y faut
prendre. Préparez un cercle de bois bien fec, épais d’envi-
ron une ligne : de ce cercle ôtez-en un autre qui ait deux
lignes ou environ moins de diametre ; pofez le refte fur la
partie fupérieure du canon, & l'y collez, afin que la piece
d’ébene qui aura un écrou, fe puifle coller fur fa furface fu-
périeure , en n’embraffant feulement que l’épaifleur de la
piece platte qu’on a attachée avec la bande de parchemin.
La vis qui doit enchâffler lacnlaire, fe fera à Pardinaire , &
la plus groffe qu'il fera poñible , afin de laiffer une grande
ouverture à l'entrée du canon , pour y mettre les objets
qu'on y voudra obferver. Il eft facile de juger que ce Mi-
crofcope ainfi conftruit, pourra fubfifter très- long-temps ;
& qu'il fera facile de le nettoyer quand on voudra , tant au-
dedans qu’au-dehors , à caufe de la grande ouverture qu’on
y aura laifée libre.
Re
16 DESCRIPTION ET USAGE
CHAPITRE XXI V.
De combien les Lentilles groffiffent.
N cheveu étant appliqué fur le porte-objet d’un Mi-
crofcope , & obfervé avec une des plus petites Len-
tilles que l’on puifle travailler des deux côtés , nous avons
trouvé que fon diametre apparent étoit d'environ quinze
lignes. Cette groffeur énorme m’a donné occafon de cher-
cher combien il faudroit de ces cheveux placés à côté les
uns des autres, pour faire un corps cylindrique de quinze
lignes de diametre, & d’autant de hauteur; & j'ai trouvé
par le calcul que j'en ai fait, 71583750 lignes.
1°, Pour faire ce calcul j’ai tiré une ligne droite a &, de
quinze lignes , pour repréfenter le diametre apparent du che-
veu vû au Microfcope.
2°. J'ai examiné enfuite combien il falloit d’épaifleurs de
cheveux qui fuflent ä-peu-près d’une même groïleur, pour
occuper la longueur d’une ligne, & j'ai trouvé qu'il en fal-
loit environ 30 ; d’où j'ai conclu qu’en multipliant les 15
lignes ab par 30, on auroit 450, nombre des cheveux qu’il
faudroit pour sesuper touto la longueur a à dun cylindre ,
que je fuppofe maintenant avoir la même hauteur.
3°. Pour trouver la circonférence de ce cylindre , duquel
a b eft le diametre, je dis : Si 7 lignes de diametre donnent
22 de circonférence , combien 450 , valeur de la ligne ab?
le quatrieme terme s'eft trouvé être de 1414 lignes. J'ai en-
fuite multiplié 707, moitié de cette circonférence, par 225,
moitié du diametre ab, & j'ai trouvé 1$907$ pour la fur-
face du cercle ; laquelle étant multipliée par 450, hauteur
du cylindre ab, il eft venu 71583750 pour la folidité en-
tiere de ce cylindre.
Remarque. Plus une Lentille eft convexe , plus fon foyer
eft court; plus le foyer d’une Lentille eft court , moins il
faut lui donner d'ouverture ; moins cette Lentille a d’ouver-
ture , plus l’objet paroït obfcur : d’où il fuit néceffairement
que
Des MicroscopPes. SEC. PART. Chap. XXIV. 17
que les Lentilles qui augmentent le plus la grandeur des ob-
jets , font celles qui les rendent moins clairs.
Ainfi les Lentilles d’un foyer très-court ne font bonnes
que pour faire voir jufqu'où l’on peut pouffer l'augmentation
apparente d’un objet, & nullement pour en découvrir clai-
rement & diftinétement jufqu’aux moindres parties, parce
que l'ouverture qu'on leur donne doit être fi petite, que le
peu de lumiere qui la traverfe , ne peut l’éclairer aflez pour
fatisfaire l’Obfervateur.
De tout ce que je viens de dire on en peut conclurre que
le Microfcope monté d’une feule Lentille à la fois, & taillée
à la main, eft à-préfent au point le plus haut de perfeétion.
CHAPITRE XX V.
Proportions des Verres du Microfcope de Monfeigneur le Maré-
chal d’Eftrées , dont les effets font très-agréables à voir, l'ayant
rendu univerfel, c’eff-à-dire propre à faire voir les petits objets
ordinaires , les animaux des liqueurs , & la circulation du fang
dans plufieurs fortes de poiffons de diverfes efpeces.
E Microfcope a environ quinze pouces fix lignes de
hauteur , y Compris la mvnture , qui cit d’un bois de
gayac des plus beaux qui fe puiffent voir.
L’oculaire de ce Microfcope a environ deux pouces de
foyer ; fa diftance à l’œil eft de feize lignes. Le verre du
milieu a trois pouces fix lignes de foyer , & deux pouces fix
lignes de diametre.
Sa diftance à l’oculaire eft de quatre pouces. La lentille
peut être de quatre, de cinq ou de fix lignes de foyer. Sa
diftance au verre du milieu eft de fept pouces fix lignes.
Cette diftance peut devenir plus grande, par le moyen d’un
tuyau qui {e peut haufler & baïifler.
Lorfque ce Microfcope eft dans fa moindre hauteur, un
feul petit grain de millet y paroiït d’une longueur apparente
de quatre pouces ; & parce que fur la longueur d’un pouce
on y en peut mettre jufqu’à dix , il s'enfuit que les quatre
Tome II, Part, IL, (C)
18 DESCRIPTION ET USAGE
pouces en contiendront quarante ; lefquels étant multipliés
par ce même nombre, la furface fera de 1600, & la folidité
de 64000 : ainfi ce Microfcope fait paroître un feul grain de
millet 64000 fois plus gros que nos yeux. Mais cette grof-
{eur apparente furpañlera confidérablement ce nombre, en
l'exhauffant d'environ quinze lignes, puifqu’alors un feul
grain de millet y paroïtra fous une longueur apparente de fix
pouces, ou foixante fois la longueur du grain de millet ; d'où
il fuit que fa furface fera de 3600 fois plus grande , & que
{a folidité fera de 216000. Cette mafle apparente contiendra
donc deux cens feize mille fois celle du grain de millet vû
de nos yeux fans le fecours de ce Microfcope.
Pour faire une belle fuite d'expériences avec ce Microfco-
pe à trois verres, & pour donner aux Speétateurs une agréa-
ble idée de fon univerfalité, on pourra commencer, fi l’on
veut, à faire obferver la beauté du grez réduit en pouñliere,
que l’on verra être à-peu-près femblable à des morceaux
d’alun de roche taillés à facettes, qui paroiffent brillantes
&t colorées lorfqu’elles font expofées aux rayons du foleil.
La femence de perle, & celle des coquilles qui {e trou-
vent dans le fable de certaines rivieres & fur les bords de
quelques mers , étant mifes fur la dame-noire de ce Mi-
crofcope , on y remarque des beautés furprenantes.
Toutes les petites graines des plantes s’y peuvent obfer-
ver, pourvû que leur grofleur ne furpaile pas celle d’un grain.
de millet.
Toutes les couleurs dont les Peintres fe fervent , y peu-
vent être obfervées.
Les fleurs des plantes nous y font remarquer une infinité
de chofes que nos feuls yeux n’y apperçoivent pas.
On remarque dans les étoffes de foie , dans les rubans tif
fus d’or & d'argent , des ouvrages de l'Art & de la Nature
d’une beauté parfaite.
Les ailes des mouches & la ftruéture de la cornée font
dignes d’admiration , quand on les voit au Microfcope.
Les plumes des oïfeaux, l’écaille du ventre d’une folle,
la pouffiere que l’on fépare de l’aile d’un papillon , les che-
veux, le poil d’un rat, & une infinité d’autres petits corps,
font beaucoup de plaifir à voir,
!
Des Microscopes. Sec. Part. Chap. XXV. 19
Les moindres gouttes d’eau prifes féparément dans les di-
verfes infufions des plantes, nous préfentent un nombre
immenfe d'animaux différens qu’on y apperçoitnager, ram-
per, & marcher. |
Les eaux croupies en contiennent une grande quantité de
diverfes efpeces.
Le vinaigre de vin, celuide biere, &c. nous manifeftent
des anguilles de différentes efpeces.
La circulation du fang fe voit dans la queue d’un têtard,
dans celle d’une petite tanche , dans celle d’une carpe, dans
celle d’une petite anguille , d’une lamproie , dans le dia-
phragme d’une grenouille , &cc.
Il y a des manieres différentes de préparer toutes ces di-
verfes chofes, de les faifir, & de les appliquer au Microfcope
pour les y obferver, dont il feroit difficile de donner des
explications meilleures que celles qui font traitées au long
dans mon Livre. La fimple vûüe d’une préparation fait bien
plus d'impreflion fur l’efprit qu'un difcours par écrit n’en
peut faire , quelqu’étendu qu'il puifle être.
CHAPITRE XX VI.
Proportions des Verres d'un perir IVficrojCope qui n'a que deux
pouces & demi de longueur, très-commode pour être appliqué
à notre Microfcope univerfel.
E petit Microfcope eft compofé de trois lentilles con-
@ vexes des deux côtés, & tranchantes par les bords.
Le verre de l'œil & celui du milieu font d’une égale con-
vexité , ayant chacun dix lignes de foyer. Ces deux verres
fe touchent prefque , n’ayant entr'eux qu’un petit diaphrag-
me qui n’a pas une ligne d’épaifleur ; & la diftance du verre
{upérieur à l'œil n’eft que de trois lignes.
La lentille objeétive a trois lignes de foyer. On pourra
mettre une lentille de deux lignes & demie de foyer , ou d’un
peu moins , lorfqu’on voudra examiner les animaux des li-
queurs. Lorique l’on employera une lentille qui augmentera
(Cu)
0 DESCRIPTION ET USAGE
confidérablement la groffeur des objets, il fera plus avanta-
geux de les regarder à la lumiere d’une chandelle qu’à celle
du jour.
Proportions d’un petit Microfcope à trois verres ; de la facon
de M. Villette.
L'oculaire de ce Microfcope à cinq à fix lignes de foyer.
Le verre du milieu a douze lignes de foyer, & la lentille
deux lignes.
La diftance de l’œil à l’oculaire eft de quatre lignes.
La diftance de l’oculaire au verre du milieu, eft d'environ
quinze à feize lignes.
La diftance du verre du milieu àdla lentille, eft de vingt-
quatre à vingt-fix lignes. :
Les verres de ce Microfcope font montés dans trois
tuyaux , ce qui eft un avantage très-confidérable.
Toute la hauteur de ce Microfcope, fans y comprendre
le pié , eft d'environ trente-fix lignes.
Il y a dans le pié une petite monture qui contient deux
oculaires plans, convexes, un peu diftans l’un de l'autre ,
pour fournir plus de lumiere.
Ce Microfcope ainfi monté d’une lentille objeétive de
deux lignes de foyer feulement , ne peut fervir que pour voir
les animaux des liqueurs , à vaufe qu'il y faudroit ajoûter
une lentille de quatre à cinq lignes, pour fervir à l'examen
des autres objets, &c.
Autres proportions d’un petit Microfcope à trois verres.
Un oculaire de fix lignes de foyer,
Un verre du milieu de douze lignes,
Et une lentille de quatre lignes :
Le tout monté dans trois différens tuyaux.
Autres Proportions.
Une lentilie d'environ fept lignes de foyer,
Une autre de huit lignes , montées à quatre lignes de dif
tance l’une de l’autre*, qui étant dans un éloignement d’en-
viron trois pouces d’une petite lentille de trois ou trois &
pes Microscopes. SEC. PART. Chap. XXVI. 2r
demi-lignes de foyer, font un bon effet pour examiner les
animaux des liqueurs , & la circulation du fang.
Chacun des deux oculaires étant pris féparémént avec la
lentille objeétive , feront un bon effer.
Proportions des verres d’un Microfcope que M. le Bas à vendu
à Madame la Ducheffe du Maine , que j'ai rendu univerfel ;
de maniere qu'il peut maintenant fervir à faire voir la circu-
lation du fang dans diverfes fortes de poiffons , 6 les perits
poifons qui Je crouvent dans des infufions préparées | 6 dans
d’autres liqueurs qui ne le font point.
L'oculaire À a huit lignes de diametre : Planche 24
Sa diftance à l’œil eft de quatre lignes. fig. 19°
Le foyer de ce verre eft d'un pouce :
Sa diftance au verre du milieu eft de douze lignes. a
Le verre du milieu, 8 , a dix lignes de diametre :
Son foyer eft de feize lignes ou environ.
La diftance de la furface fupérieure du verre oculaire , à
l'inférieure du verre du milieu, eft de douze lignes. Ces deux
verres ainfñi montés, forment un Microfcope particulier qui
fait l'office de plufieurs Microfcopes, & dont M. le Bas n’a-
voit aucune connoiflance.
Depuis le verre du milieu jufqu’à la lentille €, il y a trois
pouces ouu environ 1] faur remarquer que le tuyau qui con
tient les deux oculaires, doit être hauflé & baïffé facilement,
afin de pouvoir fervir utilement à trois lentilles de différens
foyers , qui font montées dans trois différens porte-lentilles
qui fe viflent l’un après l’autre au bout d’en-bas du corps de
ce Microfcope ; & que la lentille du plus court foyer eft très-
propre pour faire voir la circulation du fang dans la queue
des térards, & dans diverfes parties de plufeurs infeétes aqua-
tiques, &c.
FU
22 DESCRIPTION ET USAGE
CHAPITRE XXVET
Des Verres concaves que l'on fait fervir de porte - objets
aux M zcrofcopes.
N fair que la néceflité occafionne fouvent les nouvel-
les inventions, & que fans elle nous ferions privés”
d'un grand nombre de belles connoiffances très-utiles & très-
agréables,
Les Microfcopes que nous avons rendus univerfels &
commodes, doivent être accompagnés d’un nombre fuff-
{ant de diverfes pieces féparées du corps, pour en rendre
l'univerfalité plus étendue , parmi lefquels il y en a deux que
plufieurs perfonnes voudroient fupprimer ; mais ne les ayant
imaginées que par une néceflité indifpenfable , je me trouve.
obligé d’en faire fentir les bons effets.
Ces nouvelles pieces font l’entonnoir ou pompe, & les
verres concaves de diverfes fphéricités.
L’entonnoir ou pompe eft un petit inftrument de verre fait
à la lampe d’Emailleur, dont le deffein fe voit répréfenté en
la PL 7. de la premiere partie de ce Livre, & fon ufage en
la page 16 de la même partie,
Le verre concave fe voit taillé diverfement , & repréfenté
fur les Planches 2, 5, 6, 7, 9,10, 17, &c. En voici quel
ques ufages.
1°. Une groffe goutte de vinaigre y peut être vüe durant
une bonne heure dans un temps aflez tempéré ; ce qui n’ar-
rive pas à la même quantité appliquée fur un verre plane,
parce qu’elle y coule & s’y étend fi confidérablement , qu’on
ne la peut obferver.
2°, Lorfqu’on met le vinaigre dans un petit concave de
verre, on a la liberté de promener le porte-objet à volonté,
fans qu'il y ait lieu d'appréhender de gâter les platines qui
le faitiffent ordinairement dans de certains Microfcopes.
3°. On pourra conferver , fi l'on veut, une goutte de
vinaigre mile dans ce concave , durant fept ou huit jours en
Des Microscopes. Sec. PART. Chap. XXVII. 23
été, & durañt quinze jours en hyver, pendant lefquels on
obfervera plufeurs circonftances très-utiles & très-curieufes,
rapportées en divers endroits de ce Livre. Ces verres con-
caves doivent être taillés diverfement , fuivant les diverfes
expériences pour lefquelles on les aura deftinés.
Si l'on veut avoir le plaïfir de découvrir d’un feul coup
d’œil toute l'étendue d’une petite goutte de vinaigre, par
exemple , qui aura été mife avec la pompe dans un de ces
concaves , 1l faut qu'il foit taillé fur une fphere ou portion de
{phere d’un petit diametre , dont le foyer foit proportionné
à celui de la lentille que l'on employera à cet effet.
Ce fpeétacle eft beaucoup plus curieux qu'il n’eft utile ;
cependant on peut découvrir dans une petite cavité qui
n'aura pas plus d’une ligne de diametre , une cinquantaine
d’anguilles, dont la moindre aura en apparence plus d’un
pouce de longueur, & dont le mouvement paroitra' fi rapide,
qu'il fera peut-être l’étonnement le plus furprenant qu’on ait
jamais eu en d’autres circonftances , quelque fingulieres
qu'elles ayent été.
Quand les concaves font d’une très-petite portion de
{phere , on ne les doit creufer qu’autant qu'il eft néceffaire
pour empêcher que la liqueur qu’on y mettra n'en puifle for-
tir; & encore afin que les animaux qui fe tranfportent vers
les bords, n’en parotffent guere anvinS Peaux que les autres,
Il y a des expériences particulieres qui obligent à les creu-
{er davantage , comme , par exemple, lorfqu’on y veut en-
fermer un animal vivant : il fuffira pour l’ufage que la boule
fur laquelle on les taillera , s’y enfonce environ d’un tiers de
{on diametre.
Les Lunetiers , qui ne raïfonnent que très-peu fur ce
qu'ils font , ne font guere propres à exécuter ces fortes de
concaves ; tout ce qui demande quelque précifion & beau-
coup de propreté , ne leur convient pas. Les mérhodes qui
{ont en ufage parmi eux, & dont ils fe fervent prefque tous,
font peu propres pour faire de beaux & de bons ouvrages ;
‘ils fe bornent à ce qui expédie , & négligent ainfi ce qui peut
tendre à acquérir de la réputation : de forte qu’on ne doit
pas être furpris fi le travail d’une vie aflez longue n’a fouvent
«
24 DESCRIPTION ET USAGE
rien ajouté aux connoiffances qu'ils ont lorfqu'ils fortent d’un
apprentiflage de plufieurs années. Un Tourneur, par exem-
ple, ne fait pas faire une vis & un écrou au bout d’un an
d’apprentiflage ; un Lunetier pendant le même temps ne fait
pas une bonne lunette à mettre fur le nez : cependant on
peut par d’autres méthodes particulieres enfeigner à l’un &
à l’autre à faire une bonne vis , un bon écrou & une bonne
lunette à nez en moins de huit jours.
Revenons à nos concaves. Sion en creufe de maniere qu'il
ne refte que très-peu d’épaiffeur entre la concavité & la fur-
face plane du verre, on aura l'avantage de pouvoir em-
ployer des lentilles d’un très-court foyer, parce qu’en met-
tant la petite goutte de liqueur au milieu du concave , & le
tournant dans le Microfcope , enforte que la furface plane
du verre {oit du côté de la lentille, cette lentille pourra
s'approcher très-proche de l’objet, fans courir le rifque de
s’y falir, puifque par ce moyen on évite de la plonger dans
la liqueur , ce qui ne doit pas être compté pour rien.
Nous avons par ce moyen l'avantage que l’on tire des
feuilles de talc, fur lefquelles on a coûtume de mettre la
liqueur, & nous évitons en même temps deux grandes in-
commodités qu’on y apperçoit en peu de temps, defquelles
tous ceux qui s’en fervent fe plaignent. La premiere eft que
ce talc eit rempli de raies ; & la feconde, qu'il ne peut fer-
vir qu'une feule fois pour voir les anguilles du vinaigre, &
guere davantage pour examiner ce qui fe trouve de confi-
dérable dans les autres liqueurs , à caufe qu’en efluyant la
crafle que les gouttes de liqueurs y laïflent, on le dépolit en
peu de temps , ce qui le rend après cela inutile.
On employe les grands concaves très-utilemeut, pour y
conferver en vie plufeurs gros animaux enfermés entre deux
concaves, ou entre un concave & un verre plan, ou enfin
dans un concave fans être couvert.
Quand les concaves à mettre le vinaigre ou quelqu’autre
liqueur , font parfaitement polis, ces liqueurs ont beaucoup
de difpofitions à fortir des cavités de ces foræs de verres ;
c'eft pourquoi il y faut apporter un remede : en voici un
parfaitement bon, par le moyen duquel on évitera ce défaut,
qui
pes Microscores. SEC. ParT. Chap. XXVIT. 24
quieft très-confidérable. Pour cela il n’y a qu’à effacer le poli
qui eft du côté du concave, en rendant brute toute la furface
qui l’environne. Pour cer eflet vous n’avez qu’à travailler ce
côté-là fur une forme platte , avec un peu d’éméril fin & de
l’eau , jufqu’à ce que le morceau de glace foit d’un grain fin
& égal, & cela fera capable d'arrêter la goutte de liqueur
que vous aurez mife dans ce concave.
On objeëte que le verre concave eft capable de changer
la forme de l’objet que l’on y met pour y être apperçà.
Képonfe. Le verre concavene change pas la forme de l’ob-
jet qu’on met deflus ; car ne fervant ici que de porte-objet,
il ne peut ni l’augmenter , ni le diminuer , ni l’eftropier, puif
que ce n’eft pas le verre concave qui le fait voir, mais feu-
lement la lentille, qui eft l’ame du Microfcope , pour ainfi
dire , à laquelle ce pouvoir eft réfervé : & fi l’on voit quel-
quefois l’objet eftropié & difforme , il en faut attribuer la
faute à la lentille qui eft mal travaillée , n’ayant ni la forme,
ni l’adouciflement , ni le poli qui lui convient pour qu’elle
produife le bon effet qu’on en pourroit defirer.
Il y a feulement une chofe à obferver , qui eft qu’une ien-
tille ne peut avoir fon foyer exaétement correfpondant à
tous les points de la furface du concave où l’on met une
goutte de liqueur ; c’eft pourquoi on eft obligé d'approcher
ou d’éloigner cette lenrille ,fivanr l'endroit du concave que
lon voudra regarder.
Lorfque l’on fe fert d’un verre plan des deux côtés, &
qu'on le promene pour découvrir toute l'étendue d’une
goutte de liqueur qu'on y aura mife en expérience , il y aura
moins à changer la diftance de la lentille, que fi l’on fe fer-
voit d’un petit concave pour cet effet, & cela fuppofe qu’on
fafle ces expériences avec une lentille d’un court foyer ; car
fi elle avoit trois ou quatre lignes de foyer, & que la goutte
de liqueur füt très-petite , il ne feroit pas néceflaire de chan-
ger la diftance de la lentille pour voir diftinétement toute
l'étendue d’une très-petite goutte de liqueur ; à caufe que
plus la lentille a de foyer , plus on découvre de champ.
Tome IT. Par, IL. (D)
16 DESCRIPTION ET USAGE
CG HA P'EFR ESCORT.
Objeëtions & réponfes faites au fujet de la nouvelle hypothefe
. propofée par L. Joblot , au fujet de fes nouveaux Microfcopes,
& des expériences qu'il a faites avec ces Microfcopes.
N peut former plufieurs difficultés contre cette hypo-
thefe : en voici une qui fe préfente d’abord à ceux
qui n’ont que peu ou point d’ufage des Microfcopes à li-
queurs.
On demande pourquoi on n’apperçoit pas les œufs & les
très-petits animaux qui ont été dépolés fur les plantes, avec
les lentilles de nos Microfcopes à liqueurs , de même qu’on
les voit dans l’eau où ces mêmes plantes ont été mifes en
infufion.
KRéponfe. Si l’on obferve les feuilles ou les fleurs d’une
plante , avant qu’on les mette en infufion, en fe fervant pour
cet effet d’une lentille d’un grand foyer , on ne pourra apper-
cevoir que les gros infeétes, ou leurs œufs qu'ils y auront
dépolés, parce que ces lentilles, qui font d’un grand foyer,
9
n cpmenent pas aflez l’apparence de l’objet ; & lorfquon
voudra effayer de voir les plus petirs, en fe fervant d’une
lentille d’un court foyer, il l'en faudra approcher de fi près,
que la monture qui enchäfle cette lentille ne permettra pas
le paflage à la lumiere ; d’où il fuit qu’on ne les pourra voir.
Pourquoi de certains corps mis en infuñon, font-ils dé-
couvrir de petits poiflons une heure ou deux après être mis
en infufion ; & que d’autres corps ne fervent à en faire voir
qu’au bout d’un temps très - confidérable ?
KRéponfe. C’eft parce que les petits animaux étoient déjà
tout vivans fur les premiers corps mis en infufion, & qu'il
n’y avoit encore ni petits ni œufs fur les feconds.
Et fi on les vouloit regarder en les expofant entre l'œil &
Ja lumiere du jour ou d’une chandele, les corps fur lefquels
font les œufs &r les petits tout vivans, n'étant pas tranfpa-
rens on ne les y pourroit voir.
Des Microscopes. Sec. PART. Chap. XXVIIL. 27
On objeële encore contre notre hypothele , que les animaux
qui volent ou nagent dans l'air, pouvant y laifler tomber
leurs œufs & leurs petits tout vivans, & cet air s'appliquant
continuellement fur la furface de la liqueur contenue dans
nos vaifleaux mis en expérience , y abandonne les œufs &
les petits. |
Réponfe. Cette opinion qui paroït d’abord affez probable,
perd toute fa vraiflemblance en l’examinant avec attention ;
car, premierement, fi elle étoit véritable , il s’enfuivroit
qu'on appercevroit toüjours les mêmes poiflons dans toutes
les infufñions, quoique différentes , & placées en un même
lieu les unes auprès des autres , puifque l'air qui tranfporte
les œufs & les petits tout vivans, n’agiroit pas moins fur la
furface de l’une de ces infufions, que fur la furface des autres.
2°. 11 s’enfuivroit encore que les poiflons de deux infu-
fions différentes qui auroient été préparées en même temps,
& mifes l’une auprès de l’autre, y devroient paroïtre à-peur-
près en un même jour, ce qu'on ne remarque pas : tout au
contraire, on obferve qu’il y ena quine fe manifeftent qu’au
bout de quinze jours , tandis que d’autres fe font voir le
même jour de la préparation.
3°. On ne devroit jamais voir d'animaux dans une infu-
fiof bouchée immédiatement après la préparation, puifque
Vair ne s’appliqueroit pas fur la furface de la matiere mife en
infufion ; ce qui eft contraire à l'expérience. Voyez le chap.
15. fur le Foin nouveau.
D'où vient que les mêmes plantes, les mêmes graines ne
produifent pas toûjours de femblables animaux ?
Réponfe. Ce ne font ni les plantes ni les graines mifes en
infufon , qui produifent les animaux que nous appercevons
dans les liqueurs ; mais ce font les meres de ces poiflons qui
nagent dans l'air qui répond au-deflus de ces infufions , où
étant attirées par les vapeurs diverfes des chofes infufées,
y pondent leurs œufs, & y dépofent même leurs petits tout
vivans.
Fin de la feconde Partie du Tome fecond.
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HR a