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Full text of "Opinion de M. Du Pont, député du bailliage de Nemours, sur le revenu public produit par la vente du tabac : prononcée à l'Assemblée nationale le 23 avril 1790."

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Ca 

n 

n 


OPINION 

DE  M.  DU  PONT, 

DÉPUTÉ  DU  BAILLIAGE  DE  NEMOURS, 
SUR  LE  REVENU  PUBLIC 
PRODUIT  PAR  LA  VENTE  DU  TABAC, 
Prononcée  à l’AfTemblée  Nationale  le  23  Avril  1790. 

Messieurs^ 

Personne  ne  me  foupçoniîera  de  penfer  > 
êc  bien  moins  encore  de  vouloir  perfuader 
contre  ma  penfée , qu’un  privilège  exclufif  ne 
foit  pas  une  inftitution  très  - injufte  & très~ 
fâcheufe.  Perfonne  ne  me  foupçonnera  d’être 
un  partifan  trop  zélé  des  importions  indirectes. 

Mais,  nourri  dans  les  travaux  de  I’Adminif- 
tration  , '&  dans  robfervation  des  faits  d’après 
lefquels  011  peut  fe  déterminer  fur  les  opérations 
politiques  , j’avouerai  que  plufieurs  importions 
indiredes  confidérables  , veuant  d’être  changées 
tout-à-coup  en  impofitions  dont  la  plus  grande 
partie  font  diredes , le  plus  redoutable  des 
inconvéniens  me  paraîtrait  d’ordonner  encore  h 

A 

IBENEWBERiUf' 

. £JSfUR)f 


1 


transformation  fubite  d\me  très-forte  impofition 
indirecte  en  une  nouvelle  impofition  directe  : 
transformation  qui  d’ailleurs  ,dans  lefpèce  dont 
ii  s’agit  5 préfenterait  quelque  injufticè. 

L’impofition  du  Tabac  me  feinble  une  de 
celles  qui  doivent  être  diminuées  ou  fupprimées 
auiïi-  tôt  que  i’étàt  des  Finances  ôc  la  fupériorité 
des  revenus  fur  les  befoins  le  permettront.  Ce 
n’eft  pas  une  de  celles  qui  peuvent  être  rem- 
placées par  une  autre  impofition.  On  ne  doit 
pas  impofer  le  travail  au  foiilagement  des  fan- 
taifies  5 ôc  faire  payer  trente  millions  par  an  au 
grand  nombre  de  Citoyens  qui  ne  prennent 
point  de  tabac  , afin  de  le  procurer  à meilleur 
marché  au  petit  nombre  de  ceux  qui  en  prennent* 
car  ceux  qui  prennent  du  tabac  font  le  petit 
nombre,  puifque  la  ■contommatiori  générale  du 
Royaume  n’excède  pas  fei^e  millions  de  livres 
pefant , pour  vingt- quatre  millions  d individus 
qui  forment  la  population  des  Départemens  où 
le  privilège  exclufif  du  Tabac  eft  établi.  La 
confommation  de  ceux  qui  en  ufent  même 
modérément  „ n’eft  pas  au- défions  de  Jix  livres 
par  année;  de  forte  qui!  fe  trouve  prouvé  qu’il 
n y a pas  plus  d "un  homme  fur  neuf  qui  prenne 
du  tabac  en  France.  H en  faudrait  donc  impofer 
huit  qui  n’ont  aucun  intérêt  de  le  défit er , ôc 


3 

qui , certainement  , ne  le  défirent  pas  , pour 
faite  plaifir  a ce  neuvième , qui , en  effet , {.  eut 
Vouloir  fortement  qu’on  charge  fes  Voifins  d’im- 
pofitions  j afin  que  le  tabac  lui  coûte  moins  cher* 

Dans  le  vœu  de  huit  contre  un , 5c  d’un  contré 
huit  » quel  eft  celui  5 Melfieuts  , qui  doit  em- 
porter la  balance  ? 

Ce  qui  demeure  clair  > efl  que  les  pétitions 
de  quelques  habitans  des  Villes  5c  des  Côtes  » 
qui  font  les  principaux  preneurs  de  tabac  * ne 
doivent  pas  être  regardées  comme  le  vœu  général 
de  la  Nation. 

j’ai  dans  les  mains  une  multitude  de  délibé* 
rations  5c  de  proclamations  de  Municipalités  d’en^ 
viron  la  moitié  des  Dépàftemens  du  Royaume  * 
qui  demandent  d’être  préfervées  * âürant  qu’il  fer*, 
poffible,  de  nouvelles  importions  directes,  & qui 
préfèrent  la  confervation  de  la  forme  a duel  le  de 
l’impôt  du  Tabac.  M.  le  Contrôleur-Général  me 
les  a fait  paifer  hier  au  fou* , pour  en  faire  parc 
à M.  le  Rapporteur  , dont  il’  ignorait  la  demeure , 
5c , conjointement  avec  lui  5 au  Comité  des 
Finances. 

Le  paquet  efi:  très-confîdérabîe  ; il  eft  accom-- 
pagné  du  billet  dont  je  vais  vous  donner  le&ufe* 

« M.  le  Contrôleur-Général  a Fhonneitr.  d’en- 

A % 


4 

„ voyer  - à M.  Du  Pont  ce  qu  il  lui  a,  cto 
j3  poftibîe  de  raflTembler  d’Àrrêtés  de  de  Délibé- 
?»  rations  des  Municipalités  fur  la  perception  des 
» droits  en  général } & particulièrement  fur  la 
vente  exclufive  du  Tabac . Il  ne  doute  pas  que 
,>  le  Comité  des  Finances  & l’Aflemblée  Natio- 
& uale  ne  foient  frappés  de  Funanimité  de  toutes 
*»  les  Provinces  , & même  de  l’intérieur  de  la  Pi- 
a cardie  , pour  la  confervation  du  Tabac. 

» II  auroit  déliré  qu’il  lui  eût. été  poffîble  d’en 
faire  faire  le  catalogue,  ou  au  moins  un  extrait; 
» mais  il  a été  obligé,  faute  de  temps  , de  fe 
„ borner  à les  faire  ranger  par  ordre  alphabé- 
» tique. 

« Les  Délibérations  d’Amiens  , Bordeaux , 
„ Caen,  Châtillon-fur-Seine , Grenoble , Orléans, 
?»  Paris  , la  Guiilotière  fauxboiirg  de  Lyon  , Nar- 
» bonne.  Tours  & Valence  méritent  fur-tout 
33  de  fixer  l’attention  de  l’ÂlTemblée  Natio- 
35  nale  ». 

Mais,  Meilleurs,  quand  la  fuppreffion  de  Tim- 
pofition  aduelle  du  Tabac  ferait  plus  générale- 
ment denrée  qu’elle  ne  1 eft , il  faudrait  encore 
fe  garder  de  croire  trop  légèrement  à cette  pre- 
mière parole,  que  ceux  qui  réclament  contre  cette 
impofition  donnent  pour  Topinion  publique , 3c 


5 

qui  peut  meme  être  devenue  pendant  un  temps 
cette  opinion  dans  quelques  Provinces  , a cette 
parole  perfuaùve&  trompeufe  : Nous  aimons  mieux' 
payer  le  double . 

Ce  difeours  ^ qu’on  répète  fouvent , peut  être 
fincère  au  moment  où  il  eft  prononcé.  C’eft  îe 
cri  de  ceux  qui  font  vivement  touchés  du  mal 
préfent . 

Mais  impofez-Ies  feulement  au  quart  de  ce 
qu’ils  demandent  , ou  à la  moitié  de  ce  qu  ils 
payaient  précédemment , comme  vous  Pavez  fp.it 
pour  la  Gabelle  , 8c  bientôt  l’impôt  de  rempla- 
cement, quelque  faible  qu’il  puifTe  être , deviendra 
le  mal  préfent  contre  lequel  tous  les  murmures 
s’élèveront. 

Il  ne  faut  donc  pas  fe  borner  à confulter 
1 opinion  publique  j il  faut  la  juger  au  Tribunal 
févère  de  la  raifon. 

S’il  ne  faut  point  accorder  trop  de  confiance 
à la  promelfe  de  payer  volontairement  plus  que 
la  même  imposition,  il  faut  encore  moins  que 
PAflemblée  des  Repréfentans  de  la  Nation  s’en' 
laide  impofer  par  les  difeours  de  ceux  qui  dtfent 
que  « le  Peuple  ou  que  les  Habita  ns  de  tel  ou 
sa  tel  lieu  ne  voudront  pas  fe  prêter  à;- telle  cm 
» telle  forme  d'impefitien  ». 

A S 


- 6 

C’eft  un  des  plus  grands  délits  qu'on  ptiifle 
commettre , que  de  féduire  le  Peuple  en  lui 
perfuadant  que  la  volonté  particulière  de  quel- 
ques Citoyens  pourra  mettre  obftacle  à l’exécu- 
tion de  la  volonté  générale. 

Les  flatteurs  de  Peuples  font  auflï  méprifables 
8c  ne  font  pas  moins  dangereux  que  les  flatteurs 
de  Rois. 

La  Souveraineté  réflde  dans  le  Peuple  , fans 
doute  y mais  ce  n’eft  pas  dans  le  Peuple  de  tel 
ou  tel  Canton  ; c’eft  dans  la  volonté  générale 
de  tout  le  Peuple  du  Royaume , légalement  ex- 
primée, après  une  délibération  fuffifante  , par  fes 
Repréfentans. 

Chacun , de  cette  manière  , concourt  à la  légif- 
Jation  j il  y concourt  de  fon  defir , de  fes  lu- 
mières 8c  par  l’organe  qu’il  a choifl  : mais  quand 
l’union  générale  eft  8c  doit  être  fouveraine  > cha- 
cun en  particulier  n’eft  que  fujet  ; 8c  c’eft  ce 
refped  de  la  Société  qui  doit  être  recommandé, 
infpiré , maintenu  en  tous  lieux  , par  tous  les 
Citoyens  dignes  d’en  porter  le  nom, 

Ain  fl  , puifque  nous  reconnaiflhns  qu’il  eft 
utile  8c  néceflaite , dans  la  circonftance , de  con- 
ferver  un  revenu  fondé  fur  la  vente  du  Tabac, 
il  ne  faut  être  arrêté  par  aucune  répugnance  f 


ni  par  aucune  oppofition  particulière.  Nulle  Pro- 
vince & nulle  efpèce  de  privilège  ne  fautaient 
y mettre  obftacle,  puifqu’il  n’y  a plus  de  Pro- 
vinces , ni  de  privilèges  de  Province. 

Celles  qui  ont  le  plus  influé  fur  la  Révolution , 
la  Bretagne,  le  Dauphiné  ont  renoncé  à l’être. 

Les  Départemens  font  forcis  de  votre  geme , 
comme  Minerve  du  cerveau  de  Jupiter,  tout  ar- 
més ; ils  en  font  fortis  , en  un  feul  jour  , frétés, 
égaux  , fans  droit  d’aînefle. 

J’entends  dire  autour  de  moi , mais  l’Alface , 

maïs  la  Flandre,  mais  l'Artois? 

Où  eft  l’Artois  , Meilleurs  ? Où  eft  l’Ahace  . 
Où  eft  la  Flandre  ? 

Je  me  fouviens  confufément  qu’on  en  par  ait 
autrefois  dans  nos  livres  de  Géographie  , comme 
on  parlait  de  Nobleflé  & de  Clergé  dans  notre 
Conftitution  politique.  Rien  de  cela  nexifte 
plus.  11  ne  refte  qu’ane  France  dont. nous  fommes 
tous  les  enfans  , dont  nous  devons  tous  refpec- 

ter  les  Loix  & le  Régime. 

Celui  qui,  prétendrait  s’y  refufer  fe  déclarerait 
l’ennemi  de  la  Partie  , de  la  très-puiflante  Pa- 
trie qui  jamais  ne  fera  bravee  en  vain.  ^ 

Elle  doit  commander , & doit  être  obéie  ; car 
elle  eft  mère  & maùrefle. 

A 4 


8 

* Mais,  puisqu'elle  eft  mère  , elle  doit  comman- 
der avec  fageffe  8c  bonté.- Elle  ne  doit  & ne 
peut  erre  occupée  que  du  plus  grand  intérêt  de  tous. 

Eiie  j voudra  fans- doute,  dans  la  conjoncture  où. 
Xe  trouve  l’Etat  , ménager  autant  qu'il -fera  pofi- 
fibre  les  Proprietaires  des  terres.  Elle  craindra 
d elever  trop  rapidement  les  imppfitions  directes. 
Elle  voudra  conferver  un  revenu  qui  exifte  fur 
une  jouifiance  volontaire  , mais  elle  examinera 
wus  examinerez  pour  elle  avec  le  plus  grandi 
foin  quel  doit  ctre  le  régime  de  cette  contribution» 
La  queftion  n’eft  pas  auffi  fimple  qu’elle  le 
parait  au  premier  coup  d’œil. 

Elle  fe  divife  en  deux  grandes  branches  , fuf- 
ceptibles  chacune  de  placeurs  ramifications. 

11  faut  choifir  entre  deux  partis  principaux  : 
Chercher  le  revenu,  dans  le  Commerce  du 
Tabac  , en  fe  privant  de  fa  culture } 

Chercher  le  revenu  fur  le  Commerce  du 
Tabac  , en  permettant  fa  culture. 

Chacune  de  ces  deux  réfqlutions  comporte 
pltifieurs  régimes  différens. 

-L’un  eft  celui  qui  a été  fuivi  jufqu’à  pré- 
fent  dans  îa  plus  grande  partie  du  Royaume 
Le  Tabac  eft  acheté  pour  le  compte  de  la 
K ai  ion  par  mie  Compagnie  de  Fermiers  ou  de 


9 

RegilTèms  qui  le  font  fabriquer  , &c  qui  maîtres 
de  la  totalité  de  la  marchandife , la  vendent  au 
prix  fixé  par  la  Loi. 

Ce  régime,  fur  les  Provinces  où  il  était  établi, 
produifait  environ  trente  millions  de  revenu. 
Etendu  fur  la  totalité  du  Royaume  , il  produi- 
rait ce  revenu,  ou  meme  un  plus  confidérable, 
avec  diminution  d'un  cinquième  dans  le  prix. 

Une  autre  maniéré  de  fuivre  le  plan  qui  fup- 
pofe  la  prohibition  de  la  culture  du  Tabac, 
eonfifteiait  a faire  payer  au  Tabac  en  feuilles  un 
droit  confidérable  d’entrée  dans  le  Royaume, 
tel  par  exemple  que  de  dix,  de  quinze,  ou  même 
vingt  fols  par  livre ; 

De  faire  payer  un  droit  de  fabrication  aux 
Manufactures  de  Tabac  ; 

De  faire  payer  un  trbifièribe  droit  à feutrée 
des  Villes  ; 

Et  enfin  un  droit  de  licence  aux  Débi- 
tans. 

Un  Membre  diftiugué  de  cette  Aflèmbl'ée 
M.  le  Marquis  de  la  Fayette  } s’eft  autrefois  livré 
avec  moi  a un  travail  étendu  pour  examiner  îa 
poffibilité  de  réalifer  ce  régime;  & nous  avons 
reconnu  qü  on  ne  pourrait  parvenir  à retirer  le 
revenu  de  vingt- huit  à trente  millions  que  pro- 


dait  la  vente  du  Tabac , qu’en  portant  le  pris 
de  cette  marchandée  à cinquante- deux  fols  la. 
livre  à la  vente  en  gtos. 

Mais  ce  prix  , Meilleurs  , ne  peut  pas  être 
établi  pour  le  Tabac , fans  lever  fur  les  Con- 
fommateurs  & fur  les  plus  pauvres  Confom- 
mateurs , un  impôt  beaucoup  plus  lourd  que 
celui  qu’exigent  les  befoins  publics.  C eft  ce  qu  il 
eft  utile  que  vous  confidériez. 

Le  Tabac  fe  vend  en  onces,  en  demi  - onces  , 
en  quarts-d’once  , & ce  font  les  plus  pauvres 
Gonfommateurs  qui  l’achètent  en  fi  petite  quan- 
tité. 

Or  comme  nous  n’avons  pas  de  monnaie  au- 
delTous  d’un  liard , il  eft  nécelTaire  que  le  prix 
de  la  vente  en  détail  du  Tabac  doit  fixe  à des 
fournies  compofées  de  feize  fols  en  nombres, 
ronds.  Le  Confommateur  en  petite  mefure  ne 
peut  le  payer  qu’à  un  des  quatre  prix  de  trente- 
deux  fols'  de  quarante-huit  fols  , de  trois  livres 
quatre  fols  , ou  de  quatre  francs  la  livre  ; c eft 
à ce  dernier  prix  qu’il  l’achète  aujourd’hui , tandis 
que  la  Ferme-générale  le  vend  en  gros  pour  le 
compte  de  la  Nation  , trois  livres  dou^e  fols. 

Le  -tabac  fabriqué  revient  à-peu-  près  à vingt- 
quatre  fols  la  livre.  Ainfi  , à le  vendre  cinquante- 


1 1 

deux  fols  , iî  y aurait  à-peu-près  vingt-huit  fols 
par  livre  de  profit  j &:  le  débitant  alors  qui  le 
vendrait  trois  livres  quatre  fols  , jouirait  d en- 
viron le  quart  en  fus  du  prix  total  de  la  mar- 
çhandîfe,  bénéfice  compris. 

Il  aurait  à fon  profit  les  trois  dixièmes  de 
l’impôt  levé  fur  le  Peuple  , Sc  ce  profit  ferait 
à celui  du  Gouvernement  dans  la  proportion  de 
trois  à fept  ; certainement  ce  ferait  une  ma  ri- 
vai fe  combinaifon  d’impôt  que  celle  qui,  tous 
autres  frais  faits,  en  abandonnerait  trente  pour 
cent  au  dernier  percepteur. 

Cette  obfervation , Meilleurs , vous  offre  la 
raifon  du  prix  que  l’on  cherche  actuellement  à 
établir  dans  les  Provinces  où  l’impôt  du  Tabac  a 
fouffert  le  plus  d’atteintes , dans  la  Picardie  & 
dans  le  Boulonnais.  On  y fait  crier  dans  les 
rues  par  quelques  perfonnes  du  Peuple  3 qu’il 
faut  mettre  le  Tabac  à trente-fx  fols . Pourquoi 
ce  prix  plutôt  qu’un  autre  ? C’eft  que  ce  font 
les  Débitans  de  Tabac,  ou  ceux  qui  veulent  le 
devenir  , qui  excitent  l’infurredion  , & que  fi 
ce  prix  était  généralement  adopté  pour  le  Tabac, 
jls  feraient  allurés  de  le  vendre  en  détail  qua- 
rante-huit fols  , c’eft- à- dire  , d’avoir  pour  eux 
le  quart  du  prix  total,  ou  la  moitié  du  bénéfice 
de  la  marchandife. 


Vous  voyez  de -là,  MeUseors,  coin  ment  cm 
fomente  les  opinions  populaires,  quelles  font 
les  perfonnes  qui  le  Font,  & par  quel  intérêt 
elles  font  animées. 

Le  Tabac  élevé  au  prix  de  cinquante-deux  fols>  par 
les  quatre  impôts  dont  il  faudrait  le  charger  à 
Feutrée  du  Royaume  y à Feutrée  des  Villes , à la 
fabrication  & au  débit  , ne  pourrait  donc  être 
vendu  par  le  commerce  moins  de  trois  livres 
quatre  fols ; 

Ce  prix  , qtfon  pourrait  établir  tout  de 
même  par  une  voie  plus  limple  , ainfi  que  j’auras 
llioimeur  dé  vous  l’expofer  plus  bas  , lailferaie 
encore  un  grand  attrait  à la  contrebande  \ 6c 
comme  elle  pourrait  avoir  lieu  t 

iQ.  A rentrée  du  tabac  fabriqué;  2®.  à l’entrée 
du  tabac  en  feuilles  dans  le  Royaume  ; 3 *.  à 
Feutrée  de  l’uh  6c  de  l’autre  dans  les  Villes  ÿ 
4®.  à la  fabrication  dont  on  diiîimulerait  une 
partie  au  Régllfeur  ; 5 au  débit  que  le  prix  de  h 
licence  engagerait  placeurs  perfonnes  à faire 
fans  permiffion  , on  rifquerait  de  n’avoir  pas  avec 
sûreté  le  revenu  qu’on  aurait  voulu  fe  procurer. 
Ce  revenu  ferait  beaucoup  plus  expofé  que  lorf- 
qu’il  ne  s’agit  que  de  prévenir  l’introduéFion 
frauduleiife  , fok  du  tabac  en  feuilles,  foit  du 
tabac  fabriqué  , 6c  que  la  Nation  > joui  (Tant  feule 


M 

du  droit  de  fabriquer  ou  faire  fabriquer , a pour 
s’oppofer  aux  coiitrefa&eurs  un  très-grand  avanr 
cage. 

Examen  fait  des  deux  plans  qui  fuppofent  la 
prohibition  de  la  culture  du  Tabac,  vous  voyez. 
Meilleurs  , que  celui  qui  a été  fuivi  jufqu’à  ce  jour, 
eft  à ia-fois  le  plus  (impie  8c  le  plus  sûr.  Il  eû  en 
même-temps  le  moins  vexatoire,  car  il  n’exige  une 
furveillance  acbive  qu’à  l’entrée  du  Royaume  ^ il 
n’en  demande  qu’une  modérée  au  débit;  8c  l’autre 
demanderait  furveillance  à l’entrée  du  Royaume  , 
furveillance  à l’entrée  des  Villes,  furveillance  à 
la  fabrication , furveillance  au  débit , toutes  quatre 
difpendieufes  8c  gênantes. 

Mais  vous  n’oubliez  point.  Meilleurs,  8c  je  n’ai 
pas  oublié  non  plus,  que  je  vous  dois  l’examen 
des  autres  fyftêmes  de  revenu  public  fur  le  Tabac, 
qui  fuppofent  que  cette  plante  fera  cultivée  dans 
le  Royaume. 

C’eft  une  idée  dont  les  âmes  honnêtes  ^c  les 
efprits  éclairés  font  toujours  frappés  agréablement, 
que  celle  d’une  prohibition  de  moins. 

Perfonne  en  France  n’a  fait  fon  noviciat  en 
adminiftration  , fans  fonger  à y rétablir  la  cul- 
ture du  Tabac. 

J’ai  fouvent  cherché  , comme  un  autre,  à rendre 
l’exécution  de  cette  idée  polïible  ; en  confervant 


*4 

néanmoins  le  revenu  que  la  Nation  tire  du  Table, 
que  je  n’ofais  propofer , ni  de  fupprimec  dans 
l’écar  où  je  voyais  les  Finances  , ni  de  remplacer 
par  un  impôt  général  & régulier.  G’eft  avec  un 
extrême  regret  que  j ai  trouvé  qu’en  réfervanC 
cette  condition,  néceffaire  dans  l’état  ou  les  em- 
prunts de  la  génération  paffée  ont  réduit  la  gé- 
nération préfente  , rétabliiTement  de  la  culture 
du  Tabac  3 au-lieu  d’être  une  liberté  de  plus,  né 
ferait  que  l’inftùution  d’un,  privilège  exclulif  de 
plus  j ôc  d’un  grand  nombre  de  vexations  de  plus. 

En  effet , fi  on  kiffait  la  culture  du  Tabac  en- 
tièrement libre  à tout  le  monde  , fans  aucune 
infpe&ioii , ni  aucun  règlement  , ce  qui  eft  la 
véritable  manière  dont  une  culture  doit  être  libre  j 
êc  peut  être  appelée  telle , on  ne  tirerait  du 
Tabac  aucun  revenu  particulier.  Cette  culture 
prendrait  avec  les  autres  cultures  un  niveau  na- 
turel. Son  produit  tiendrait  la  place  d’un  autre 
produit  ; elle  pourrait  avoir  quelqu’avantage  dans 
quelques  Provinces  où  la  terre  y ferait  plus  propre; 
mais  la  totalité  de  la  valeur  du  tabac  en  feuilles 
néceffaire  à la  confommation  du  Royaume,,  n’ex- 
cédant pas  huit  à neuf  millions  , 6c  la  cubure 
du  Tabac  exigeant  des  foins  Ôc  des  travaux  multi- 
pliés 6c  difpendieux  qui  abforbent  les  cinq  dixiè- 
mes du  produit,  cette  récolte  de  neuf  millions 


1 5 

ne  pourrait  donner  plus  de  quinze  cent  mille 
francs  de  revenu.  En  fuppofant  que  cette  cul- 
ture fût  d’un  dixième  plus  avantageufe  qu’une 
autre  dans  les  lieux  où  ou  la  préférerait , Ion 
avantage  fe  réduirait  donc  à cinquante  mille  e'cus 
répandus  fur  la  totalité  du  Royaume , & qui  ne 
pourraient  payer  plus  de,  cinquante  mille  francs 
d’impoftion. 

Mais  çe  font  trente  millions  de  revenu  qu’il  s’agit 
de  procurer  à l’Etat  & d’épargner  aux  Contribuables 
par  la  vente  du  Tabac  , en  les  prenant  fur  la  fan- 
t ai  lie  de  ceux  à qui  fa  confommation  eft  précieufe. 

En  permettant  la  culture  , on  ne  pourrait  im- 
pofer  avec  juftice,  ni  avec  fagelîe,  le  Tabac  plus 
qu’une  autre  production  , ni  le  revenu  produit 
par  fa  culture  plus  qu’un  autre  revenu.  Car,  (i 
l’on  prenait  ce  parti  , ce  ne  ferait  déjà  plus  la 
liberté  de  la  culture  du  Tabac  qu’on  voudrait  éta- 
blir , ce  ferait  une  furcharge  particulière  & in- 
jufte  qu’on  voudrait  impofer  fur  ceux  qui  fe 
livreraient  à cette  culture  \ & cette  furcharge  ne 
produirait  pas  la  refïource  qu’on  y chercherait 
pour  les  Finances. 

Il  ne  peut  y avoir  aucune  raifon  d’impofer  une 
culture  dans  une  plus  forte  proportion  qu’une  autre. 

C’eft  par  leur  revenu  refpeélif  qu’on  doit  régler 
leur  impofidon  $ & dans  aucune  partie  du 


%4 

Royaume  , mille  francs  de  revenu  ne  doivent 
pas  payer  plus  que  mille  autres  francs  de  revenu, 
quelle  que  foie  leur  origine. 

Si  Ton  voulait  faire  porter  à la  culture  du  Tabac 
une  iiijpQ.fi don  plus  forte,  relativement  à fon  re- 
venu , que  celle  mife  fur  les  autres  cultures , il 
faudrait  reftraindre  fa  liberté  , & lui  donner  une 
furveil lance  particulière , pour  l’empêcher  d’é- 
dliapper  à l’impofition. 

Ain  fi  , en  bornant  la  faculté  de  cultiver  le 
Tabac  à un  certain  nombre  d’atpens , on  donne- 
rait un  privilège  exclufif  aux  Propriétaires  de  ces 
ar'pens  j tte  en  les  foumettant  à uneinquifition  par- 
ticulière , on  allierait  ce  privilège  exclufif  nuifible 
aux  autres  Citoyens , à une  fervitude  nuifible  au 
Concefiionnaire  du  privilège.  Moralement  & conf- 
mutionnelletnent,  cela  ferait  infoutenable  j fifcale- 
ment,  cela  ferait  impraticable,  ou  fans  utilité  dans 
le  cas  particulier  dont  il  s’agit. 

La  culture  du  Tabac  per  mife , trois  feules  ma- 
nières pourraient  produire  fur  elle  pour  le  fife  un 
revenu  au-defius  de  l’impôt  légitimement  dû  par 
une  culture  quelconque  en  raifon  de  fon  produit 
net.  Toutes  trois  feraient  plus  vexatoires  que  le 
régime  a&uel  5 toutes  trois  feraient  infuffifantes. 

JLa  première  ferait  d’impofer  U culture  j 

- La 


17 

La  féconds , d’impofer  la  fabrication  3c  le 
débit  j 

La  troisième,  de  réferver  a l’Etat  le  privilège 
excluSif  de  cette  fabrication.' 

Le  produit  de  quarante  mille  arpens  cultivés 
en  tabac  fuffit  à la  confommation  du  Royaume  , Sc 
même  la  furpallerait.  On  ne  pourrait  donc  cul- 
tiver plus  que  les  quarante  mille  arpens.  Car  Si 
on  le  fallait  , la  production  ferait  fans  débit  dans 
le  Royaume  ; on  ferait  réduit  à l’exportation 
pour  chercher  des  confôipmateurs  étrangers,  3c, 
nos  tabacs  ne  pourraient  foutenir  ailleurs  la  con- 
currence des  tabacs  d’Amérique,  très  - fypénçurs 
en  qualité* 

Pour  retirer  fur  quarante  mille  arpens,  par  un 
impôt  direél , trente  millions  de  revenu  public» 
il  faudrait  les  impofer  à fept  cent  cinquante  tiv. 
par  arpent  : on  fent  combien  une  telle  imposi- 
tion repouderait  la  culture  , Si  avec  quelle  faci- 
lité une  efpèce  de  culture  qui  peut  fe  faire  en 
très  - petites  parties  , au  milieu  ces  bois  & des 
rochers  , efquiver-ait  une  telle  imposition.  Il  n@ 
relierait  donc  de  la  culture  qu’on  aurait  voulu 
établir  5 que  quelques  parcelles  fugitives  êc  igno» 
liées.  L’impôt  qu’on  aurait  voulu  fonder  fur  eile  ç 

B 


iS 

fce  rendrait  rien  ; fon  excès  meme  l’empècherak 
d’être  d’aucune  relfource  à l’Etat. 

Voudrait-on  employer  le  fécond  moyen,  3c 
partager  l’impôt  entre  la  culture,  la  fabrication 
3c  le  débit  ? Si  ce  partage  était  égal  , il  faudrait 
encore  demander  deux  cent  cinquante  livres  à 
farpent  de  terre  \ ce  qui  ferait  encore  fuir  la  cul- 
ture , ce  qui  obligerait  encore  à Femprifonner 
entre  plufieurs  barrières  de  formalités  inquififo- 
riales  } 3c  il  faudrait  de  plus  trouver  entre  le  fa- 
bricant de  le  débitant  un  autre  impôt  de  ’ vingt 
à vingt- deux  fols  par  livre  pefant. 

Le  plus  (impie  bon-fens  dit  qu’il  ferait  im- 
poffible  cle  percevoir  un  tel  impôt  fur  une  fabri- 
que 3c  un  débit  diffémines  dans  le  Royaume  , 
fans  les  vibres  domiciliaires  les  plus  rigoureufes 
ôc  les  plus  multipliées , fans  un  régime  audi 
dur  3c  a u fii  minutieux  que  celui  qui  vient  d’être 
détruit,  relativement  à l’impôt  fur  les  cuirs  3c 
a l’impôt  fur  les  amidons.  Ce  régime  devrait 
augmenter  de  rigueur,  (i  l’on  voulait  alléger  1 im- 
pôt fur  la  culture  \ car  alors  il  faudrait  hanffer 
l’impôt  fur  la  fabrication  3c  fur  le  débit. 

11  ne  refee  donc  qu’une  manière  de  tenter  d e- 
tablir  un  revenu  public  approchant  de  celui  dont 
on  a befoin  fur  le  Tabac,  en  permettant  fa 


î9 

culture  ï c eft  de  referver  a î Etat  le  privilège 
exclufif  de  la  fabrication. 

Le  régime  qu’exigerait  cette  forme  eft  encore 
bien  loin  d’être  doux. 

D abord,  pour  conferver  le  privilège  exclufif 
de  la  fabrication  , il  faudrait  , comme  vous 
1 avez  déjà  remarqué  , Meilleurs  , limirer  1 éten- 
due de  la  culture ,-  afin  de  bivoir  où  prendre  la 
récolte. 

Il  faudrait  donc  donner  d’une  main  le  privi- 
lège exclufif  de  cette  culture  à un  certain  nom- 
bre de  Propriétaires  ; & c’eft  ce  privilège  exclufif 
qu’on  appellerait  liberté  de  la  culture . 

Il  faudrait  tenir  1 autre  main  perpétuellement 
étendue  fur  ces  Propriétaires  privilégiés  , pour 
mefurer  leurs  champs  , compter , phyfquement 
compter , le  nombre  des  plantes  qui  les  couvriraient, 
pefer  livre  a livre,  ces  plantes,  lors  delà  récolte 
qui  fe  fait  feuille  a feuille,  les  vifiter  & les  repefer 
a plufieurs  reprifes , depuis  le  moment  de  la  récolte 
jufqu  a celui  de  la  délivrance  au  Fabricant  pri- 
vilégié de  1 Etat , 8c  pendant  les  premières  pré- 
parations que  le  Cultivateur  lui' même  doit  donner* 

îl  faudrait  infpeéter  fans  ceffe  tous  les  champs 
du  Royaume,  pour  s’affurer  que  le  privilège  ex- 
clufîf,  donné  aux  Propriétaires  des  quarante  mille 

B 2 


lO 

jzrpèns  dé%nés  , ne,  ferait  pas  enfreint  ; & tour- 
menter juiques  dans  leurs  ni  ai  fo  ns  ces  trilles  Pri- 
vilégiés pour  s’ailurer  queux-mêmes  ne  mettraient 
point  à part,  pour  leur  jouiffance  perfonnelle  , 
ou  : pour,  vendre  à un  autre  qu’au  Régiileur, 
quelques  portions  de  leur  récoke. 

Et  , quand  on  aurait  pris  toutes  ces  précau- 
tions , elles  feraient  infuffîfantes. 

Il  y a dans  l’Homme , & plus  particulièrement 
"d a ii*s i i’ Homme  Français,  un  penchant  invinci- 
ble à ré  Filer  à l’opprefiion  individuelle  Sc  per- 
fonnelle. Une  Loi  , même  dure  , qui  embraffe 
tout  le  Monde  , eft  obère",  comme  l’empire  de 
là  néceffité.  Une  Loi  particulière  5 un  Privilège  , 
privata  Lex  , appelle  Pinfraction, 

La  culture  s’étendrait  donc  au-delà  des  qua- 
rante mille  arpens  auxquels  elle  paraîtrait  refer- 
vée-:  le  produit  des  cultures  clandeftines  fe  con- 
fondrait eufuite  avec  les  réferves  que  le*  Culti- 
vateurs autorifés  & privilégiés,  ou  leurs  nombreux 
agens,  auraient  faites  fur  leurs  récoltés,  maigre  la 
vigilance  des  Commis,  ou  par  la  connivence  que 
.L’humanité  feule  pourrait  fouvent  leur  infpirer 
car  il  ferait  fi  dur  de  faire  à un  Propriétaire  ou 
à un  Culîirweur  «a  procès  férieux  pour  quel- 


1 l 

ques  feuilles  de  tabac , fruits  de  fes  fueurs , &c 
nées  fur  fon  propre  champ  ! 

Ainfi  la  rigueur  des  Loix  ferait  rendue  il  lu- 
foire  par  la  douceur  des  mœurs  , & les  calculs 
de  Finance  feraient  trompés  : on  ne  tirerait  pas 
vingt  millions  , peut-être  pas  quinze,  peut  être  pas 
Jix , de  ces  privilèges  entalFes  fur  des  privilèges^  8c 
de  ces  vexations  accumulées  fur  des  vexations 
ou’on  aurait  ridiculement  décorées  du  titre  de  li- 
berté rendue  à la  Culture . 

Les  Habitans  des  ci-devant  Provinces , à qui 
leur  patriotifme  fait  fentir  aujourd’hui  qu’ils  ne 
peuvent  demander  la  confervation  d u n privilège  % 
une  forte  denobleffe  vis-à-vis  de  leurs  Concitoyens 
des  autres  Départemens  , un  régime  différent  de 
travail  j de  culture  & d’impofition,  & que  tout  doit 
à l’avenir  être  égal  & uniforme  dans  notre  libre 
France:  les  fîncères  Artéfiens , les  honnêtes  8c 
bons  Flamands,  les  loyaux  Aifaciens.,  qui  vou- 
draient étendre  fur  tout  le  Royaume  le  régime 
a&uel  dont  ils  éprouvent  les  ^ avantages  , ne 
remarquent  pas  que  ce  régime  n a reelle ment 
d’avantage  pour  eux  eue  parce  qu  il  n eft  pas 
celai  du  rpfte  du  Royaume  v & que  parce  qu  i! 
neff  en  aucune  manière  celui  auquel  ils  feraient 
obligés  de  fe  fou  mettre  le  jour  même  ou  exau« 

B 3. 


21' 


çant  leurs  demandes,  on  aurait  étendu  à quelques 
arpens  de  toutes  les  parties  du  Royaume  la  fa- 
culté de  prendre  part  au  privilège  exclu  hf  de  la 
culture  du  Tabac  , 8c  où  il  aurait  fallu  priver 
de  la  fabrication  de  cette  marcha ndi'fe  ceux  qui 
jouirent  aujourd’hui  fans  reftridion  de  la  liberté 
de  la  fabriquer  8c  de  la  cultiver. 

Lorfque  toutes  les  Paroi  Tes  de  la  domination 
Françaife  pourraient  demander  à cultiver  du 
Tabac,  8c  qu’il  faudrait  ne  le  permettre  à cha- 
cune d’elles  que  pour  un  certain  nombre  d’arpens 
proportionne  aux  demandes  formées  par  toutes 
les  autres  Paroi  Te  s , de  manière  qu’en  totalité 
il  n’y  eût  pas  plus  de  quarante  mille  arpens  de 
cultivés,  les  Provinces  maintenant  cultivatrices  de 
Tabac  feraient  obligées  de  réduire  extrêmement 
leur  culture.  Un  grand  nombre  de  ParoiTes  du 
Hainaut  , du  Cambrefis  , de  la  Flandre , de 
l’Artois,  de  PAlface  , de  la  Franche-Comté , ou, 
pour  mieux  parler,  des  Départemens  qui  ont  au- 
trefois été  ces  Provinces , feraient  privées  de  la 
plus  confdérable  partie  de  leurs  exploitations  ac- 
tuelles en  ce  genre.  Elles  ne  forment  guère  que 
le  dixième  du  Royaume;  elles  ne  pourraient  donc 
obtenir  la  continuation  de  la  culture  que  fur 
environ  quatre  mille  arpens  répartis  entre  les  fix 


23 

Provinces , ou  les  Départemens  dans  lefquels  elles 
ont  été  fubdivifées  ; ce  ferait  à peine  le  tiers 
de  ce  qu’elles  cultivent  aujourd’hui;  8c  les  deux 
autres  tiers  de  leur  culture  de  Tabac  feraient  donc 
abfolument  perdus  pour  les  Cultivateurs  de  ces 
Provinces. 

L’autre  tiers  ne  ferait  pas  très-alfuré. 

L’infériorité  de  qualité  dégoûterait  de  leurs 
tabacs  , quand  on  en  aurait  au  même  prix  , de 
meilleurs.  On  ne  voudrait  plus  de  tabac  d’Alface 
ni  d’Artois  , iorfqu’on  en  pourrait  avoir  de  Ton- 
neins,  de  Clairac  8c  de  Turenne.  La  Régie  fe- 
rait obligée,  pour  foutenir  fon  débit,  de  pré- 
férer les  bons  tabacs.  Elle  ferait  obligée  de  payer 
les  bons,  les  médiocres , les  mauvais  félon  leurs 
qualités  $ car  il  ne  ferait  pas  jufte  de  faire  payer 
à la  Nation  le  mauvais  tabac  comme  le  bon. 
Pour  évaluer  le  prix  , pour  faire  juftice  aux  Cul- 
tivateurs , pour  prévenir  de  leur  part  le  foupçon 
de  l’arbitraire  , pour  prévenir  de  celle  de  la  Na- 
tion le  reproche  de  prodigalité , il  faudrait  en- 
voyer à l’Etranger  , au  principal  marche  de  1 Eu- 
rope j en  Hollande  , des  échantillons  de  ces  dif- 
fère ns  tabacs , afin  de  favoir  avec  jufleffe  le  prix 
que  le  cours  du  Commerce  leur  donnerait  félon 
leur  qualité.  Alors  5 tous  les  tabacs  inferieurs  cef- 

B 4 

- ■ • -’/  • - ■ . - 


24 

feraient  de  valoir  la  peine  d'être  cultivés.  Ils!® 
font  aujourd’hui  parce  que  leur  prix  eft  exagéré  j 
8c  il  eft  exagéré  parce  que  les  Provinces  où  le 
Tabac  fé  cultive,  en  verfent  en  abondance  fur 
celles  où  le  privilège  excluftf  eft  établi. 

Les  Provinces  cultivatrices  de  tabac  fe  font 
donc  il  lof  on  fur  le  profit  qu’elles  pourraient  re- 
tirer du  régime  qu’elles  fol  licite  ne.  Cette  culture, 
diminuée  chez  elles  des  deux  tiers  dans  fa  quotité, 
8c  d’aura nt  peut-être  fur  le  prix  du  tiers  qui  fub- 
lifterait  encore  , deviendrait  pour  elles  de  nulle 
importance. 

'La  culture  du  Tabac  eft  détruite  , à compter  de 
ce  jour,  de  par  un  décret  de  la  Providence  , dans 
les  Département  Alfaciens  de  Belgiques  ^ car  ou 
elle  fera  établie  dans  tout  le  Royaume,  & alors 
ils  ne  pourront  pas  la  foutenir , ou  elle  fera 
proferite  dans  tout  îe  Royaume  , de  alors  ils  ne 
pourront  pas  la  conferver.  L’intérêt  de  ces  Dé- 
parcemens  n’entre  donc  pour  rien  dans  la  quef- 
rion  : celui  qu’ils  pouvaient  avoir  n’exifte  plus  \ ôc 
il  faut  fe  décider  pour  le  plan  qui  donnera  le 
plus  de  revenu  à l’Etat  de  qui  exigera  le  moins 
d’inquifitions  de  de  vexations*  Or  ce  plan,  ce 
parti  le  plus  produéhf  de  le  moins  vexatoire  , eft 
celui  qu’on  fuit  depuis  très-long- rems  dans  les 
neuf  dixièmes  du  Royaume. 


25 

Quelques  perfonnes  font  cependant  touchées 
d’une  confidération  : Nous  fommes  , difent-elles  9 
tributaires  de  V Amérique  pour  notre  approvifionne- 
ment  de  tabac * 

C'eft  une  chofe  fout  hngulière  que  cette  ex-' 
preflion  des  préjugés  commerciaux , &c  que  cette 
manie  des  gens  qui  voudraient  faire  un  grand 
commerce  étranger  , à la  charge  de  ne  rien  ache- 
ter à l’Etranger  • qui  confondent  un  achat  dont  on 
reçoit  la  valeur , avec  un  tribut  pour  lequel  on  ne 
reçoit  rien  ) qui  ne  favent  pas  que  l’unique  prin- 
cipe du  Commerce  eft  de  vendre  le  plus  cher  que 
la  concurrence  pnifie  le  permettre,  les  chofes 
qu’on  recueille  ou  qu’on  fabrique,  & de  fe  pour- 
voir de  celles  dont  on  a befoin  où  on  les  trouve 
à meilleur  marché  ; Sc  qui  mettent  fur-tout  une 
grande  importance  à être  payés  ou  à payer  d’une 
manière  plutôt  que  d’une  autre  : comme  h une  livre 
de  plomb  était  plus  lourde  qu’une  livre  de  plume! 
comme  fi  mille  écus  en  argent  valaient  un  fol  de 
plus  que  mille  écus  en  marchandifes  ! comme  lî 
de  l’argent  acheté  avec  des  marchandifes,  puis 
revendu  contre  d’autres  marchandifes  qui  con- 
courront à la  matfe  des  productions , ou  des 
travaux  avec  lefquels  on  rachètera  d autre  argent, 
ne  formaient  pas  la  circulation  dont  1 activité  eit 


! 


i6 

par- root  utile  8c  fert  par-tout  a unir  les  Nations , 
à faire  fubfifrer  les  Hommes  , à les  rendre  plus 
heureux  8c  meilleurs. 

Il  faut  j fans  doute,  vendre  fes  marchandées 
toutes  les  fois  qu’on  le  peut,  mais  il  ne  s’en  fuit  pas 
qu’il  ne  faille  jamais  rien  acheter  avec  l’argent 
qu’on  s’eft  procuré  en  vendant  fes  marchandées. 

Les  Américains  3 dit  - on  , ne  prennent  encore 
que  peu  de  marchandifes  françaifes. 

Quant  à nos  étoffes  , la  faute  en  eft  principa- 
lement à la  ftupidité  de  notre  Adminiftration 
commerciale,  qui  , jufqu’à  ce  jour^  n’a  fu  que 
vexer  nos  Fabriques  par  des  règîemens  inexécuta- 
bles, les  tourmenter  par  des  infpe&ions  inutiles, 
les  rançonner  par  des  droits  de  plombs  8c  de 
marques  qu’il  faut  fouvenc  aller  chercher  loin 
des  atteliers  à grands  frais;  8c  qui  n’a  encore  pu 
apprendre  à faire  les  dépeiées  néceffaires  , pour  fe 
procurer  les  machines  qui  font  fleurir  l’induflrie 
dans  un  pays  où  la  main  d’eruvre  eft  beaucoup  plus 
chère  qu’en  France,  ni  pour  acquérir  8c  multi- 
plier les  belles  races  de  beftiaux , ni  pour  en- 
courager les  Génies  inventeurs , ni  pour  récom- 
penfer  les  Cultivateurs  intelligens  8s,  les  Artiftes 
habiles.  Cette  nullité  de  viles  ceffera  ; on  doit  la  re- 
garder comme  finie  : car,  vraifemhlablement,  dans 


27 

notre  nouvelle  Conftimnon  , la  dire&ion  des 
travaux  utiles  fera  donnée  à la-capacité,  a l’aéh- 
vicé , au  zèle  patriotique  ,,  8c  Lon  n’achetera  plus  ni 
difpenfe  de  lumières , ni  privilège  exclulif  pour 
devenir  Adminiftrateur. 

Ce  changement  une  fois  confommé  dans  notre 
Adminiftration  , nos  Fabriques  ne  tarderont  pas 
à.  reprendre  la  Supériorité  qu’elles  doivent  atten- 
dre de  l’induftrie  nationale  , 8c  du  prix  modéré 
de  notre  main-d’œuvre. 

Quant  à nos  vins  8c  à nos  eaux-de-  vie  les  Amé- 
ricains en  achètent  8c  en  achèteront  de  plus  en 
plus  j a mefure  que  la  facilité  de  s’en  procurer  8c 
de  les  payer  en  tabacs , leur  fera  perdre  l’habi- 
. tude  des  vins  de  Madère,  qui  font  moins  agréa- 
bles pour  l’iifage  journalier. 

Les  Américains  prennent  de  nos  favons  \ ils 
tirent  de  France  toute  leur,  poudre  à canon,  pref- 
que  toutes  leurs  armes,  la  batifte,  les  linons,  dont 
leur  confommation  e(F  allez  considérable  \ 8c  ce 
ne  ferait  pas  un  moyen  de  les  exciter  a étendre 
leurs  achats , que  de  repouiïer  la  principale  mar- 
chandife  qu’ils  ayent  à nous  vendre. 

Les  vues  commerciales  fuffiraient  pour  nous 
rendre  très-réfervés  à tenir  une  pareille  conduite. 
Les  vues  politiques  doivent  nous  empêcher  en- 


fièrement  d’écouter  les  confeils  qui  pourraient 
nous  y porter. 

Quoique  le  progrès  général  des  îpmières  doive 
à l’avenir  éloigner  les  Anglais  de  la  guerre  , 
8c  que  Fafpeét  impofant  d’un  Etat  au  mo- 
ment où  il  vient  de  fonder  fa  Conftitution 
femble  nous  alfurer  que  la  paix  fera 

durable  , il  eft  pofiible  encore  qu’un,  relie 
ct’animofiré  de  la  part  de  nos  voifins  , ou  l’en- 
vie de  profiter  du  .défor dre  apparent  qui  ac- 
compagne toujours  une  révolution  , nous  expofe 
a quelque  attaque  de  la  part  de  l’Angleterre.  Je 
crois  que  fi  cette  attaque  a lieu  * ce  fera  la 
dernière , & que  les  deux  nations  ne  fe  me* 
foreront  plus  qu’une  fois;  mais,  fi  cette  fois 
unique  peut  arriver,  il  ne  nous  eu  pas  d’une  petite 
importance  d’avoir  les  Etats-Unis  d’Amérique 
pour  alliés  ; 6c  rien  ne  ferait  moins  propre  à 
à refierrer  les  nœuds  d’une  alliance  fi  utile , 
que  le  foin  que  nous  prendrions  de  détruire  le 
plus  important  lien  de  commerce  que  nous 
ayons  avec  ce  Peuple,  qui  nous  doit  fa  liberté, 
mais  qui  ne  fera'  cas  de  notre  affection  qu’eu 
raifon  des  avantages  ultérieurs  qu’elle  lui  pro- 
curera. 

Le  prétendu  tribut  que  nous  payons  aux 


19 

â'méuicams  , & qu’il  ne  tiendra  qu'à  nous  de 
leur  payer  totalement  en  échange  de  marchan- 
dées , dès  que  nous  aurons  pevfeâuouné  notre 
adminiftration  commerciale  , & relevé  nos  fa- 
briques , ce  prétendu  tribut  eft  donc  par  lui- 
même  une  relation  unie  , & c’eft,  de  plus  , une 
relation  qu’il  ferait  dangereux  de  rompre. 

Nous  devons  encore  conlîdérer,  relativement 
a la  liberté  individuelle  de  nos  concitoyens  , que 
la  régie  du  privilège  exclufif  de  la  fabrication 
du  Tabac  fera  beaucoup  moins  vexatoire,  beaucoup 
moins  tigoureufe  , & incomparablement  plus  fa- 
cile à foutenir , quand  la  totalité  de  l’approvifion- 
nement  fêta  mife  dans  les  Ports  de  met  entre 
les  mains  du  Régiffeur.  Une  bonne,  garde  éta- 
blie à la  frontière,  ne  lai  (1er  a plus  dans  1 in- 
térieur d’autre  police  à exercer  fur  les  citoyens 
que  celle  qui  a eu  lieu  jufqu’à  ce  jour  entre 
les  différens  Marchands  & Ârtifans  dont  h 
profefiîon  était  en  jurande:  police  fâcheufe  fans 
doute  , comme  tout  privilège  exclufif  , mais  qui 
du  moins  pourrait  être  fuivie  par  les  Tribunaux 
& dans  les  formes  de  la  juftice  ordinaire  , pour 
une  production  dont  il  n’y  aurait  dans  le  Pays 
ni  récolte  , ni  magafiu  habituel. 

Cette  régie  pourra  devenir  moins  dure  encore 


30 

ii  le  prix  de  la  marchandise  étant  baille  , la 
contrebande  devient  moins  aétive  ; & fi  pon 
eft  a duré  d’une  baiffè  fucceiîive  à raifon  de 
ce  que  l’extin&ion  des  rentes  viagères,  ou  le 
le  remboursement  des  autres  dettes,  laiflfera  des 
revenus  libres  applicables.  Sans  qu’il  Soit'be- 
Som  d’impofitions  nouvelles  , aux  dépenSes  que 
la  vente  du  Tabac  lolde  aujourd’hui. 

On  pourrait  dès  ce  jour  diminuer  d’un  cin- 
quième le  prix  du  Tabac  au  Consommateur; 
& la  diminution  de  la  contrebande , jointe  à la 
consommation  des  Provinces  exemptes  aujour- 
dhui  de  cet  impôt,  compenserait  pour  les  Fi- 
nances la  bai  (Te  du  prix,  & affinerait  au  moins 
le  môme  revenu. 

On  pourrait  enSuite  indiquer  quatre  époques 
où  le  prix  diminuerait  d’un  huitième,  & une 
cinquième  époque  où  le  privilège  Serait  anéanti. 

• La  katffe  a&uelle  du  prix,  & la  certitude  d’une 
baùTe  ’ Succeifive  & progteflîve  , rendrait  plus 
facile  1 etabhflement  de  l’uniformité  entre  les  Dé- 
parremens,  fur-tout  lorfqu’on  aurait  fait  voir  que 

la  conservation  d’une  culture  reftrainte,  limitée 
Sc  réglementée,  comme  celle  que  réclament  fix 
de  nos  anciennes  Provinces  ne  ferait  pour  elles 
prefque  d aucun  avantage,  & Soumettrait  dans 


31 

toutes  les  Paroifles  du  Royaume  tous  les  Citoyens 
à une  très- rude  inquifition. 

Quelques  autres  opérations  pourraient  encore 
adoucir  le  palPage. 

Si  la  ville  de  Strasbourg  relie  un  port  franc 
comme  le  débraie  M.  Colbert  y la  fabrication  qui 
eü:  le  plus  important  avantage  que  1 Alfacetrouve 
à fon  régime  a&uei , fe  trouverait  confervée  dans 
le  feul  point  de  cette  Province  où  elle  ait 
lieu. 

Si  l’on  adoptait  , comme  le  propofent  plufieurs 
Membres  de  l’Atfemblée , l’idée  de  laiffer  la  li- 
berté de  la  culture  , fur  la  rive  extérieure  de 
l’Alface,  de  la  Franche-Comté  &c  des  Provinces 
Beigiques , dans  la  largeur  des  trois  lieues  placées 
entre  les  deux  cordons  d’Employes,  êc  fous  la 
réferve  de  la  fabrication  pour  le  compte  de  l’Etat, 
ce  ferait  encore  un  moyen  d’accommodement  avec 
l’opinion  : moyen  qu’on  pourrait  ne  pas  regarder 
comme  un  privilège  , mais  comme  une  compen- 
fanon  de  la  gêne  que  l’établiiïement  de  la  double 
ligne  d’ Employés  des  traites  rend  inévitable  fur 
la  frontière  , ou  même  comme  un  régime  qui 
ferait  applicable  au  Royaume  entier.  Ci  i on  pou- 
vait y employer  un  auffi  grand  nombre  de  furveil™ 
lans  , & fi  fa  Conftitution  ne  s ’oppofait  pas  aux 
fondions  qu’ils  auraient  à y remplir* 


3* 

Ce  ne  font  pas  , Meilleurs , des  projets  que  je 
vous  préfente,  ce  font  des  vues  que  je  vous ex- 
pofe,  & des  considérations  que  je  vous  foumets. 

Je  m’en  rapporte  à vos  lumières  pour  les  juger, 
& je  vous  invite  à confulcer  celles  du  Comité 
d’Impofitions  , du  Comité  des  Finances  & du 
Comité  d’Agriculture  Ôc  de  Commerce  , avant 
de  prendre  un  parti  définitif. 

Trois  feules  chofes  me  font  clairement  démon- 
trées : 

L une  , qu’il  faut  , aujourd’hui , conferver  un 
revenu  fur  le  Tabac- 

L’autre  que  le  régime  de  fa  perception  doit  être 
général  & uniforme  ; 

La  troifième , que  le  prix  de  cette  marchandife 
doit  être  baifie  d’un  cinquième  dès  aujourd’hui,  en 
compenfation  de  l’extenfion  fur  tour  le  Royaume 
& continuer  de  baifier  progrefiivement  à des  épo- 
ques indiquées  par  la  libération  des  dettes  pu- 
bliques. 

Le  choix  entre  lesdiftérens  régimes, les  détails  de 
la  législation  , me  parai  fient  devoir  être  l’objet  du 
travail  de  vos  Comités  Sc  d’une  décision  ulté- 
rieure de  votre  part. 

Tel  eft  1 ’efprit  du’  Projet  de  Decret  que  j’ai 

l,knnnpnr  tinur  •-» /'> .. 


H 


PROJET  DE  DÉCRET. 


L’Assemblée  Nationale  a décrété  & décrété: 
Que  le  revenu  public  provenant  de  la  vente  du 
ï abac  j fera  confetvé^ 

Que  les  Loix  relatives  à fa  perception  & à fou 
Adminiftration  feront  rendues  générales  & 
uniformes  ? 

Qu’à  la  faveur  de  cette  uniformité , qui  em- 
braiera un  plus  grand  nombre  de  contribuables  & 
qui  teftraind'ra  la  contrebande  , le  prix  duTabac 
fera  diminués 

Qu’il  continuera  de  l’être  progreffivement  , juf- 
qu’/àr  l’entière  fuppreffion  du  Privilège,  à mefure 
que  l’extinâtion  ou  le  rembourfement  des  dettes 
publiques  laiieront  des  revenus  libres  & appli- 
cables aux  dépeufes  que  l’impôt  du  Tabac  folde 

aujourd’hui  *,  . , 

Er  que  le  Comité  de  l’Impoiîtion  fera  charge  , 
après  avoir  eonféré  avec  les  Comités  des  Ftnan 
ces,  d’Agricuiture  & de  Commerce  , de  mettre 
dans  huit  jours  au  plus  tard  fous  les  yeux  e 


/ 


54 


l’Aflemblée  j les  avantages  & les  inconvénient 
àes  différent  régimes  propres  à produire  la  recette 
actuellement  néceffaire  dans  cette  branche  de  re- 
venu, avec  l’avis  des  trois  Comités  fur  la  forme 
cL  Régie  qui  pourra  rendre  la  perception  de 
1 impôt  du  Tabac  la  plus  douce  qu’il  fera  poflî- 
ble  pour  les  contribuables , & fuffifamment  utile 
aux  Finances* 


A "'iv  ATrnvfir' D ° LT 1 N » Imprimeur  de  r’ASSEMBLÉE 
NATIONALE,  rue  du Foin-Su-Jacques , N"  jr.