PRES
[e 4
©
+—
=
©
©
|
St
©
>
L
an
ol
«oO
e
(=
e)
O'REÉECFNE
DÉCOUVERTES
AUX MODERNES.
AROUM EF PR EMILE
Oudiis ap Hubv itavôs est auvfnraobxs 16 œua
[A ‘“ L , >
À TEAUGQITAI TV TÉXYNY , GAN @ya7nTèv 6s
…. 7 4 rs » € ,
TONNDIS ETUI T@ TaV Eurporder oi jeTé TE Ta
/ 3 /
TaparauBavovTes UT œUYTEAÉTLIMÉV MOTE
aurir. GALEN. in Aphorif. 1, L. x.
OR LCI NE
DES
DÉCOUVERTES
AUTUTIRIE B'UNÉNE:S
AUX MODERNES,
Où lon démontre que nos plus célébres Philofophes
ont puifé la plupart de leurs connoiffances dans les
Ouvrages des Anciens : & que pluñeurs vérités
importantes fur la Religion ont été connues des
Sages du Paganifme.
P4r M. DUTENS, de la Société Royale de Londres,
& de l'Académie des Infcriptions & Belles-Lertres de Paris.
SNE? COL NOR EMTEC DUIPTE T'OLNS
confidérablement augmentée.
TOM EXP RE MI ER
EE
ALP SORTIES.
Chez la Veuve DUucHESNE, rue S. Jacques, au-deflous
de la Fontaine S. Benoît, au Temple du Goût.
RER RS M
Ce mn me ce De ee ee
1,7 PAR D IH CE © PACS Feb 08 Ge ds D
AVEC APPROBATION, ZT FPRIVILEGE DU ROZ,
Digitized by the Internet Archive
in 2009 with funding from
University of Ottawa
http://www.archive.org/details/originedesdcou01dute
SON EXCPELENCE
Monsieur S. DE M.
&cc.. &c. Ce
J E voulois publier hautement tous
ce que je dois à votre Proteclion gé-
néreufe ; mais le refpect que j'ai pour
votre volonté, m’impofe Le filence. Tel
eft votre caractere, MONSIEUR:
auffi ardent à faire le bien que f[or-
gneux à le cacher, vous ne voulez
a uif
ÉaP I TURSE,
recuerllir d'autre fruit de vos bienfaits
que le plaifir fecret d’avoir fait des
heureux. C’efl pour obéir à vos ordres
que j’omets 1CI votre nom ; Mais après
ce que je viens de dire, pourroit-1Ë
étre zonoré de ceux qui ont le bon-
hkeur de vous connoîrre ?
Je fuis avec Le plus profond ref-
pet, @ la plus vive reconnorffance ,
MONSIEUR,
DE vOTRE EXCELLENCE
Le très humble, très obéiffant
& crès obligé ferviteur ,
L. Durens.
A Londres , ce 15 Janvier 1766.
Se TT à
PRET A GE.
J E n'ai pas befoin de faire une lon-
gue Préface pour inftruire le Lecteur
de l’ordre & de la difpofition que jai
obfervés dans cet Ouvrage , & de ce
qu'il eft néceffaire de favoir pour en
retirer quelque utilité. La Table géné-
rale des Chapitres & des Setions, fera
voir d’un coup-d’œil la difpofition que
j'ai fuivie; & l'introduction mettra le
Lecteur au fait du but que je me fuis
propofé.
Je préviendrai feulement en deux
mots que je nai rien voulu avancer
dont je ne pufle apporter des preuves
qui me paruflent fufhfantes pour ap-
puyer ce que j'avançois ; ce qui ma
fait prendre le parti de citer exacte-
ment dans les langues originales les
paffages des Anciens, fur lefquels j'ai
a LV
viij PRÉFACE.
fondé mes affertions ; & j'ai toujours
eu foin de rendre dans la fuite du dif-
cours le fens exact de lAuteur que
je cite , lorfque je n’ai pas donné la
traduction littérale des pañlages cités.
Ceux qui feront curieux d'examiner
certaines chofes plus fcrupuleufement,
feront bien aifes de trouver fous leurs
yeux les propres termes des différents
Auteurs raflemblés fous un même point
de vue, & de pouvoir juger par eux-
mêmes de la folidité de ce que l’on
avance, fans être obligés de faire pour
cela de grandes recherches. Faurois
pu rapporter un plus grand nombre
d’autorités fur plufieurs points particu-
culiers; mais je me fuis contenté de
choilir les principales, & d'indiquer
les autres. J'ai cité avec la plus grande
exactitude. On trouvera après la Pré-
face un Catalogue des éditions parti-
PRÉFAGE ix
culieres des principaux Auteurs dont
j'ai fait ufage.
J'ofe croire que cette entreprife
aura du moins le mérite d'être nou-
velle dans fon genre, & dans la ma-
niere dont elle eft exécutée ; car
quoiqu'il y ait des ouvrages qui peu-
vent avoir quelque chofe de commun
avec le titre de celui-ci, il ny en a
cependant aucun qui lui refflemble
dans le deffein , l'ordre & la maniere
avec laquelle il eft traité. Le Parallele
des Anciens & des Modernes de M.
Perrault; L'Effai du [avoir des An-
ciens & des Modernes, par M. le
Chevalier Temple; & la Digreffion
fur les Anciens & les Modernes , par
M. de Fontenelle , font plutôt de belles
déclamations fans preuves de ce que
l'on y foutient , que des ouvrages pro-
pres à porter la conviétion avec eux,
x PRÉFACE.
Quant à Polydore Viroile, De rerum
znventoribus , V Auteur s’eft arrêté fur
tant de fubtilités, a omis tant de cho-
fes importantes, & a été d’ailleurs fi
peu exact dans fes recherches & fes
citations, que, quoique je l’aie confulté
quelquefois , je puis affurer qu'il ne
m'a pas été de la moindre utilité ; de
forte que je n'ai vu que l’ouvrage d’A/-
meloveenr , intitulé, {nvenra Nov-An-
tiqua, qui ait rempli fur la Médecine
l'objet que je me fuis propofé fur tou-
tes les autres connoiflances; mais on
voit que cela ne fait qu'une petite par-
tie de cette entreprife. Il y a aufli un
autre livre de George Pafchius, De
novis enventis , dont le titre feul fait
voir que fon but étoit différent du
mien, & la letture de fon ouvrage
fufñit pour achever de le perfuader.
Je ne dois pas pañler fous filence
PV ÉEAICIE. sj
un ouvrage Anglois de M. Wotton,
publié en 1674, 1697, & en 1705,
avec des additions , intitulé Refle-
xrons upon ancient & modern lear-
zing ; l'Auteur fe propofe pour but
d'y faire l’office de médiateur entre le
Chevalier Temple & M. Perrault, &
penche cependant toujours en faveur
des Modernes. Je dois dire aufli quel-
que chofe d’un autre livre dont on
pourroit m'accufer d’avoir ignoré l’e-
xiftence, fi je n’en parlois pas ici; c’eft
V'Origine ancienne de la Phyfique nou-
velle du P. Regnault, ouvrage fans
plan, fans méthode, fans liaifon ;
l'Auteur cite fouvent d’une maniere
peu exacte ou infidelle ; il avance plu-
fieurs chofes fans les prouver ; il en
omet plus qu'il n’en rapporte ; 1l fe
trompe jufques dans l’expofition mé-
me des principes des Auteurs dont il
xi) PÉRAÉSE JAACÉE
parle , & tronque fouvent leurs paf-
fages pour les ramener à fon fens.
Enfin fon livre n’eft qu'un amas in-
forme , indigefte & très imparfait, de
paflages mal coufus, 8 mal cités : tous
ceux qui le connoïflent s'accordent
unanimement à porter le même juge-
ment.
Enfin je crois devoir informer ici
le Leteur de mon véritable fentiment
fur la queftion fi long-temps agitée,
à l'égard de la préférence que l’on doit
donner aux Modernes ou aux Anciens.
Il me paroït qu'il feroit autant injufte
de ne rien louer & ne rien admirer
qui ne fente l’antiquité , que de mé-
prifer tout ce qui vient d'elle, & de
n’adopter que ce que l’on tient des Mo-
dernes. Je ne dis pas que nous devions
accorder une foumiflion tellement
aveugle aux premiers Philofophes,
DORÉ FACE xii)
qu’elle nous les fafle juger exempts
d'erreurs , recevoir leurs fentiments
avec une entiere docilité, confidérer
leurs obfcurités comme des oracles
dignes que l'on prenne tout le foin
poñlble .pour les interprêter, & nous
fafle ainfi négliger des recherches plus
utiles. Non, perfonne ne doute qu'é-
tant hommes, ils fe feront fouvenc,
- 8 même grofliérement trompés, &
qu'ils ont du payer ce tribut indif-
penfable à l'humanité ; mais aufli ne
doit-on pas fe laifler tellement empor-
cer par l'amour de la nouveauté que,
méprifant ce qui vient des Anciens,
on dédaigne de s'attacher à tout ce
qui n’eft pas de la produttion des Mo-
dernes, & l’on refufe d'accorder fon
fuffrage à des fentiments fur lefquels
plufeurs fiecles fe feront écoulés.
Si l'on pefe route chofe dans une
XIV PRÉFACE.
jufte balance, on conviendra que, fi
les Anciens ont été quelquefois dans
de grandes erreurs, ils ont aufli fou-
vent enfeigné de grandes vérités ;
mais il faut penfer comme Horace,
qui recommande de ze pornt être blefjé
de quelques défauts légers dans des ou-
vrages qui brilient d ailleurs par de
grandes beautés :
Verum ubi plura nitent in carmine, non ego paucis
Offendar maculis...... (a).
Les Modernes ont certainement mé-
rité beaucoup , & n'ont pas peu tra-
vaillé à l'avancement des fciences par
un grand nombre de découvertes in-
génieufes; mais on ne peut nier aufli
que les Anciens ne leur aient frayé le
chemin dans lequel ils avancent à pré-
fent plus facilement à grands pas. Les
(a) Horat, ars Poet, vers 350 & 351.
PRÉFACE. XV
premiers ont fait plufeurs découver-
tes auxquelles 1l a été aifé d'ajouter
enfuite quelque chofe; & l’on peut
dire encore à cet égard ce que Quin-
tilien difoit 1l ya 1700 ans : L’anui-
quiié nous a tellement inftruits par [es
exemples G [es grands maîtres, que
nous ne pouvions naître dans un fiecle
plus heureux que celur que nos an-
cêtres ont pris tant de foin d’éclai-
rer (a). Ce feroit donc une ingrati-
tude de refufer à nos maîtres les élo-
ges qui leur font dus ; comme ce fe-
roit une marque d'envie de ne pas ac-
corder aux Modernes toutes les louan-
ges qu'ils méritent à fi jufte vitre ; il
(a) Tot nos præceptoribus , tot exemplis inftruxit
antiquitas, ut poflit videri nulla forte nafcendi ætas
felicior, quam noitra, cui docendæ priores elabo-
raverunt. Quint. Infhturiones oratorte , libro 12,
caput 11.
xv) P'R'PF'A CIE
faut rendre juftice des deux côtés, &
ne pas donner tout à un âge, & rien
à l’autre.
Dans la comparaifon que lon fait
ordinairement du mérite des Anciens
&c des Modernes, on doit fur-tout
diftinguer les arts & les fciences, qui
exigent principalement une longue
expérience & un long ufage pour être
perfeétionnés , d'avec ceux qui dépen-
dent uniquement du talent & du gé-
nie. Il n’eft pas douteux que les con-
noiflances du preimier genre, par la
fuite des fiecles , ont été de plus en
plus augmentées & portées prefque
au dernier degré de perfeétion par
les Modernes qui, à cet égard, peu-
vent être jugés l'emporter fur les An-
ciens ; à quoi l’art de l'imprimerie, &
plufieurs autres découvertes n’ont ce-
pendant pas peu contribué : on fait
que
PARA ETALC E. XVi)
que les Aftronomes de nos jours en-
tendent beaucoup mieux la nature des
aftres, & tout le {yftême planétaire,
qu'Hipparque, Prolomée , ou qui que
ce foit des Anciens ; mais on doute
qu'ils euflent été plus loin fans le fe-
cours des télefcopes. Les Modernes
ont perfettionné à la vérité l’art de la
navigation; ils ont été jufqu’à décou-
vrir de nouveaux mondes ; mais, fans
laide de la bouflole , l'Amérique nous
feroit encore probablement inconnue.
Ainfi de longues obfervations , des ex-
périences fouvent répétées, ont ame-
né les Arts, la Botanique, l'Anato-
mie, la Chirurgie , au degré de per-
feétion où nous les voyons aujourd’hui:
plufieurs fecrets de la Nature, qu'un
âge feul n’avoit pas fufñi pour péné-
trer , ont été dévoilés par une fuccef-
B
avi DPR ÉVPIA CI El
fion de plufeurs fiecles. La morale
même a été perfeétionnée par la reli-
gion chrétienne; la philofophie, peu
à peu, a pris une nouvelle face; &
les frivolités , les queftions puériles &
futiles de l’école en ont enfin été ban-
nies par les efforts réitérés des la
Ramée , des Bacon, des Gañlendi ,
des Defcartes , des Newton , des
s'Gravefande, des Leibnitz & des
Wolf.
Je confens donc volontiers à accor-
der aux Modernes tous les avantages
que je viens de déauire 1ci; mais il
ne faut pas non plus enlever aux An-
ciens la part qu'ils ont à l'avancement
de ces mêmes connoïiflances , par Îa
peine qu'ils ont prife à nous en frayer
le chemin. Bien plus , il ne faut pas
coujours prendre pour des découvertes
. : cts ol A
PRÉFACE. xix
des Modernes plufñeurs chofes qui ont
- été réellement connues aux Anciens,
ou inventées par eux, ou fur elquelles
ils ont du moins répandu un très grand
jour ; & 1l faut encore faire attention
que la plupart des découvertes fi ad-
murables & fi utiles dont notre age
fe gloriñie, comme l'imprimerie, la
poudre à canon, la bouflole , les té-
lefcopes, &c, n’ont pas été la produc-
tion de génies -philofophiques , mais
l'effet d’un pur hafard, ou de l’expé-
rience de quelques artifans ignorants.
C'eft principalement afin de mettre
dans tout fon jour cette premiere vé-
rité de la part qu’ont les Anciens à
nos connotffances , & meme a ce que
les Modernes appellent découvertes ,
que jai entrepris cet Ouvrage, pour
lequel j'ofe efpérer du Public toute
bij
RUN PAROE NE PACE:
l'indulgence que peuvent mériter des
efforts plus animés par l’amour de la
vérité que par tout autre motif.
Xxÿ.
AVERTISSEMENT
fur cette feconde Édition.
L ES additions, faites dans cette nou.
velle édition, confiftent principale-
ment en un Chapitre entier fur la CAy-
mie des Anciens ; un autre fur la Mu-
fique , la Pernture & la Sculpture ; des
Recherches fur les T'élefcopes & les
Microfcopes ; fur la Perfpective ; les
Miroirs ardents d’Archimede ; & plu.
fieurs autres trop longues à détailler.
J'ai ajouté aufli une Table des ma-
uieres , que le nombre & la variété
des fujets rendoient néceflaire ; & j'ai
profité des confeils de mes amis, &
des indications qui m'ont été commu
niquées , pour rendre cet Ouvrage
plus digne de l'accueil favorable dont
le Public avoit honoré.
* bi
XxX1V
L'HLeS RE
Des principaux Auteurs cités dans cet
Ouvrage , & des éditions dont où
s’eft ferv.
Les chiffres romains indiquent les volumes , & les
chiffres arabes les pages.
Abulpharace. Hiftor. Dynaîi. Il, 192.
Achiles Tatius. 1, 250.
Aa eruditor, 1, 45,1, çr.
Ælianus. Var. hiftor. #rgentorati, 1713 ; 8%
Lino G R2s2c 02120256
Agathias. De imperio & rebus Juftiniani,
Parif. 1660, fol. II, 54.
Agrippa { Cornelius) Il, 82.
Albertus mag. 1, 292.
Alcinous. De Doctrina Platonis, ’ener.
TS2LS 0
Âlexander Aphrodis. Quæft. natural. 1, 153,
292.
Alhazen. Opera, 1572, fol. IL. 142.
Almeloveen:
DES AUTEURS. XXV
ÂAlmeloveen. Inventa novantiq. Amflelod,
664 ftnass IL 6) re
Ammian. Marcell. Parif. 1681, fol.1,136,
248; 270
Ammon, In Boethium , II, 255,
Anthemius Trallianus. ep mapad'oËoy ueyæ-
snuæru. Cod. mf. in Bibliothecâ regia Pa-
riféenfi , N°. 2861.11, 71, 170-176.
Antoniana Margarit. à Gomez Pereyra. Ma-
criti ,1749 , fol. Il, 284.
Apollonius Rhodius. 4rgonaut. N , 187.
Apuleius. Edit. Aldi, J’ener. 1521, 8°. HE,
Re OS TS 7e
Archimeaïis. Opera græc. lat. Bafileæ, 1544;
fal2 1,210, ;72$% 31102!
Ariftophanes.], 276,11, 157,182,183.
Ariftoteles. Edit. Duval, Parif. 1629.2 vol.
HAL hs oies us ro
46, 54, 60,72,119,128,13$; 139»
140,143, 144, 145, 150, 191, 156,
1608168; 197: A91, 101,206, 217,
212 232, 239 , 250, 260, 262,267,
276 3 178,280 , 293 , 304. IH, 12, 57,
64, 65 ; 67, 95, 98,99, 103, 195 3
XXV} CATALOGUE
100% LIO NLIO II T. T0 SL EG ;S.T 201
127.5 12944129 020.171, ENSSES7e
257, 249 249 f25411270,2008 208
290 , 293 » 295 : 296,302, 312 336%
Arnobius. Ï, 297.
Aftruc. De Morbis vener. Venet. 1748 , 2
vol. 4°. IT , 90.
Athenæus. Lugdun , 1657, 2 vol. fol. I,
250: 1L;49,63%2385243.
Averroës. In Ariftot. Vener, 1552, fol. I,
195 19È3 19:
Auguftæ hiftor. Scriptores. IT, 54.
Auguftinus ( San@us ). Edit. monach. bene-
di&in. Parif. 1679, fol. 1,18,24,8$,
216. 11,113% 214,205 ,287 12808
Aulus Gell. Lipfiæ, 1762,2 vol. 8°. I, 188,
1 /2:06223 2933326
Aulus Hirtius. De bello Alexandrino. If,200..
Aurelius Cafliodorus. IT , 249.
Aufonius. Epigram. II, 320. :
B.
Bacon ( Roger ). Opus majus, edit. Doétoris
Jebb. Lond. 1733, fol. I], 140,145.
DES AUTEURS. XxvÏ}
Barra ( Pierre ). Hippocrate, de la circulation
du fang, &c. Lyon, 1682,1in12, 1,6.
Barrow. IL , 192.
Bartholin ( Thomas ). Epift. med. IT, 42.
Bécearta. LL) 277.
Berkeley. Treatife concerning the principles
of human Knowledge. Lond. 1634, 8°.
F 60:
Bernard. Mémoire fur la Chirurgie des an-
ciens. Il, 20.
Biblia. I ,98, 304.11, 43 ,44,46,48,58,
68, 845:1035 197 > 1515289:312.
Bibliotheca Patr. Lugd. 1677. 27 vol. fol.
Il, 372,
Bochart. Phaleg. & Chanaan. IT, 43.
Boerhaave. Eléments de Chymie , par Ala-
HA, 97. Ils 46, 47, 702
Boethius, Il, 79.
Bontekoe. De vitæ humanæ fanitate. IT, ç.
Borrichius. De fapient. Egyprior. IL, 46 »
76.
Brucker. Hift. crit.philofoph. Auguft. Vindel.
1743, 5 vol. 4°. & Hiftor. de Ideis , 1bid.
XxV11) CATALOGUE
1723,8°.1,23,24,55, 86, 97, 98,
134, 135. |
Buddæus. Compend. hiftor. philof. Hale;
1732 3.8 12806:
Buffon. Ï , 117,118, 120.
Burmann. Düiffertatio de Jove defcenfore ,
Trajecti ad Rhen. 1700 , 4°. 1, 300.
e
Cæfalpinus. Quæftion. peripatetic. & medic
Veneto, 4" 25,24, 105.
Czæfaris Commentar. I , 283.
Camerarius. De fexu plantar. IT, 121.
Cartefius. Edit. Blaeu, Amflel. 1692. 1,123
0.106, 201,278. 1:77 265.
Caflint.’1, 282:
Celfus. IT, 68.
Cenforinus. De die natal, 1763, 89. F,
169:, 272.11; 188:
Chalcidius. 1,172, 250.
Châtelet (Mad. du }. Inftitutions de Phy-
fique, E, 84.
DES AUTEURS. XXIX
Cicero. Edit. Elzev. 1, 24, 38,241, 47,
60, 67: 895 100513651130", 24035232 ,
216, 250h-2$k 270012034298,
27952005 310
Ghudianus. Lou. 11,66, 123,246.
Clemens Alexandr. Parif. 1641, fol.I, 47;
113,206 ,162.11,48,184,301.
Clericus (Daniel). Hift. medic. IT, 96.
Clericus ( Joannes). Oper. philof. I, 36.
Colonne. Principes de la nature. [, 194.
Columella. IT, 81.
: Commentarii S. R. Gottingenfis , T. I. ann.
1751.Gotting. 1752, 4 Vol. 4°.
Corringius. De fapientià Egyptior. IL, sr.
Copernic. I, 175 , 205.
Cudworth. Syftéma intelleét. II, 302.
D.
Dickinfon. Phyfica vetus & vera. Lond.
1722-4218. 1127
Dictionnaire de Bayle. Amflerd. 1740, 4
vol. fol. 1, 8ç5 ,191. IL, 286.
Dio Caflius. Hift. Rom. Hannovie , 1606, fol.
X, 295 3300. Il, 75,83,231.
XXX CATALOGUE
Diodorus .Siculus. Hannovie , 1604. Edir,
Wechel. 2 vol. fol. 1,135, 236. I, 45,
481, SG DL ST SN SBSTSLANART 2 T4
Diogenes Laertius. Amflelod. 1692 , 2 vol.
4%. Ji8, rt Des HAN 24 SALAC
13,53 8995189, 290,196; 203 207,
2E$,207,:232,0246 526 IIS 261%,5272
274,276. 1k80!,:18% 1189 190210,
Diophantes. Quæft. arifthmet. IT, 192.
Diofcorides. Apud Hæred. Wechel. 1598,
6 9,.60./62: 68,
E;
Edward (Bernard). Epift. ad Hutington,
Lond. 1704, 8°. I, 137.
Encyclopédie. I, 238, 276. !1, 76.
Epicharmus. 1, 47.
Eifchenbac. De Poefi Orphica.. Noribers.
1702, 4%
Eufebius. Præparat. Evangel. Parif. fol.I,
6020712135: 231:202,.278: 1laitor,
306.
DES AUTEURS. XXX}
Euftathius. Comment. in Homer. Rome,
1542, 4 vol. fol. I, 300. IL, 81, 179.
F2
Fabricius. Biblioth. græc. 14 vol. 1705-28,
ARS 36 202288 cr
Falconet. Traité des Fievres, 1723. IL, 6.
Fénelon. Vie des Philofophes. I, 141.
Flavius Vopifcus. In hiftor. Auguft. fcripr.
Lupd. Bat. 1671, 2 vol. 8°. IL, 54,55,
S7-
Formey, Recherches fur les éléments de La
matiere , in 12. |, 49.
Freind. Hiftor. medic. II , 26.
Frerer. I, 105, 556.
IS
LG.
Galeni opera. Edit. Junt. Vener. 1576, 7
voléfol. 141245 179 3133! ,.230%1246
262,104. 192. 12, 24,28, 583 59,
61, 62,66 ,68 , 88,96, 177; 3 5 6e
XXxi) CATALOGUE
Galilée. Difcorfi è dimoftrazioni mathemas
tiche. Leyde. Elzev. 1638, 49°. 1, 146 ,
172:
Gaflendi. Lugdun. 1658 ,6 vol. fol. 1, 24,
49, 194,292.
Gefner (Jo. Mathias). “Yuxa} Yrmoupdris.
Gotting. 1737, 4°. N,108 , 110.
Grævius. De Philofoph. veterum. F, 128.
Gtruter. Fax artium liberali. II, 82.
Greaves , Profeffor Oxonienfis. De defcrip-
tione pyramid.Egypt.mifcellaneous works.
on a737.)2Nol SIL 75:
Gregori. Elementa aftron. phyfic. & geo-
metr. Î; 106. 172.
EE
Haller. Method. ftud. med. IT, 21.
Harvey. De generat. animal. I, 24. Il, 97,
Havercamp. De numifmat. contorniat, I,
146.
Heïfter (Laurent). An circulus:fanguinis
veteribus
k
Des AUTEURS. XXX11)
veteribus incoonitus fuit. He/mflaiii
1 2 0 D | TR
Heliodorus. Ethiopica. Il, 53.
Hermias. Irifio Gentilium. I, 6o, 87.
Herodotus. Edit. H. Steph. 1591, fol, II,
8 6OSLIZ.
Herwartus.Ethnicæ theolooiæ myfteria.16 2 3.
L, 294.
Hefodus. Patayii ,1747 , 8°. 11, 301.
Hefychius. Lexicon græc. I, 191.
]
Hieroclcs. In carm. aur. Pythag. Canrabris.
170004, ZGT,
Idem. De providentia , &c.
Hippocrates Cous. Edit. Linden. Leyde.
260%, 2v0l. 8%: 1, 118-119 20, LE,
1785 9%10,19, 6r,69 67 Ras
97: 104% 107. MIO SATL , 1194 327
Hiftoire de l’Académie , IL, 213.
Hiftoire de l’Académie des Infcriptions , I,
216.
Homerus. Il, 58.
Horatiusnt, 135-113 238 ;250.
Hotringer.Bibliographia Phyfco-facra. If, 5.
Huetiana. IL, 250.
XXXIV CATALOGVE
Hyginus. Fabulæ. I, 81.
J.
Jamblicus. De Myft. Esypt. & de vit Pytha-
vor. 473 107$ 172 0224 11 190
22202374 2005 208 3e
Joannes Antiochenus. II, 83.
Joannes Saresburienfis. II, 75.
Ifdori Hifpalenfis. 1685.1, 295.11, 75.
Introduzione allo ftudio della Religione del
PGerdil. Tarn, "276541, 89504,
Julius Africanus. II, 85.
Julius Maternus Firmicus. De Mathefi. IT.
4
K.
Kepler. Harmonices mundi, |
Lintyz. 1619. fol. |
Idem. De AE Augsbourpg, fige, 258.
1619, 4 :
Jdem. Epitome aftron. Franc-
fort,163$ ,inr2.
DES AUTEURS XXXV
Kircher. Ars magna lucis &
umbræ / om 1646, fol. 1, 294.
Tdem. Opus Magneticum. I ,166.
Kurella. Fafcicul. differt.medic. Berlin 1754,
8°..11; 26:
Ee
Lactantius. Parif. 1748, 2 vol. 4°.1, 260,
263-1021, 183, 218. 4, à
Lambasccius. Prodrom hift. litterariæ. Fran-
cofares s710 3 fol L,,32 3 15 all 170.
Lébaitz 446,82: 100 225. Ul:, 160;
REC
Lemery. 1, 277.
Lindanus. Hippocrates de circulatione fan-
guinis. Leyde,1650. 11, 6.
LinnϾus. Philofophia Botanica. Wienne ,
ms Du 120.
Locke. Sur l’Entendement humain. Lond.
1706 , fol. 1, 20.
Longinus. De Sublimi. Edit, Pearce. I, x1.
Lucanus. 11,235.
XXXV) C'A'T'AIL O G'U'E
Lucianus. Parif. 1615 , fol. I, 250,268. II,
+ 'TSO , 177.
Lucretius. In ufum Delphini, Parif. 1680,
4%: 1,69, 70;7n5725107 135; 141,
1485 168518501048 TON STOCLNAS ;
260,268, 290, 303. Il, 297.
M.
Maclaurin. Découvertes philofophiques de
Newton ,4°.1, 172.
Macrobius. Patavii , 1736 ,8°. 1,169 ,172,
214, 260. IL, 99,188, 246 , 285.
Mairan. De l’Aurore boréale. I, 276.
Mallebranche. 1,31, 51,148.
Manget. Bibliorheque chy-
mique, 1152776377:
Tdem.'Theatrum Anatom. \
Manilius. 1,180, 302. IT, 40.
Marcus. Græcus, Cod. Mf. in Biblioth.
Regiâ Parif. Il, 86.
Marpure. Hift. mufic. Berlin, 1759, 42. ÏE,
2515 258.
Marfilius Ficinus. Opera. Parif.1641, 2 voi.
fol. I ,95 , 96,115.
DES AUTEURS. XXXVIÿ
Martialis. Il, 77 , 79, 219.
Martianus Capella. Satyric. Edit. Grotii.
Ecydentioo Gt, 2048, 247526r;,
26
Mathiolus. In Diofcoridem. II, 183.
Maximus Tyrius. Zugduni, 1630, SE,
278: 11/5327:
Mémoires de l’Académie de BR JESES
—— Des Infcriptions. [, ro$ ,156. IL, 248,
Des Sciences li276 277 282.
Menagius. In D. Laertium.I, 252.
Mefué. Vener. 1581. IL, 88.
Metius ( Adrianus). Geometr. praétic. IF,
I1GE.
Müifcellanea. Naturæ Curiofor. IT, 127.
Montucla. Hifloire des Mathémat. Parif.
17553 2%ol 4%1,167, \282N 0 ;4809,
190.
Morell. Médailles des douze Empereurs Ro-
mains. 3 T.fol. Amflel. 1752. IL, 246,
Morhoff. 1,77, 78.
Mufchenbroeck. Effais de Phyfique. Leyde.
2 vol. 4°. IT, 294.
G ii}
XXX VII) CATALOGUE
Maofici antiqui. ‘Edit. Meibomu , 4°. If,
241, 242,295
N.
Needham. Ob'ervations Microfcopiques.
Parif 1750;in124 03020 2.12#5M24,
1241, 4298
Nemefus In bibliotheca Patrum. 1, 24.
Nepos{(-Coënelias.); 1j 15543238.
Newton. Principia, Amflel 1723 , 4°. 1,197.
Idem. Ovptica. Edit. Patravina.
Nicander. Edit. Colon.1s 30 , 4°. IT, 111.
Nicomachus l 36,1r72400, 188,3288,,
DAT
Nues. Algebra, Hifpanicè. Anewerp.15 67:
IT, 194.
oO
Oracula Chaldæorum. I, 33.
Origenes. Philofophumena. Parif.1733 , fol.
RS IN IAE OZ, O2: 2175 2208
2,2, 27252304
Orpheus. Edit. Lipfenf. 89.11, 184, 301.
DES AUTEURS. XXXIX
Oughtrede. Clavis arithmetica. Oxford,
1667 8°. 11, 193:
Ovidius. I, 297 , 298. II. 248.
P.
Pancirole. De rebus deperditis , latinè Arr-
berg. 1612, 2 vol. 8°. Et Iralicè , J’ener,
1612 4%. L292.
Pappus. Colleét. mathemat. Bonon. 1660,
fol. 1, -191:,240.
Pardies. De la connoiffance des bêtes. 4m/f£.
ya cam. ll 290:
Patin (Carolus ). Circulationem veteribus
fuiffe cognitam. Patav.168 ,4°. 1], 6.
Patin (Guy). Lettres. I ,60, 353.
Paul Lucas. Itinerarium. Il, 57.
Paufanias. Edit. Wechel, NW, 230.
Pemberton. Introduction à la Philofophie de
Newton. I ,162.
Pererius. De, rerum naturalium principiis.
Parif,1679 ,4°.1, 145.
Petronius Arbiter. Satyxic. Blaeu , 1669, 82.
1, 73 > 80.
xl CATALOoGUS=s
Petrus Damianus. Epift. I, 75.
. Philo Judæus. Francofurti, 1691, fol. I , 48.
Philoponus. , 20, 202. IN ,:190.
Philoftrate. Lipfie , 1709. 11,84,8$,150:
244.
Photius. Bibliotheca. Rothomagi , 1653. 15 0
308.
Plato. Edit. Serran, 1578, 3 vol. fol. I,27,
29, 40, 41, 49, 673 9$ 127» 128,
P29 M7 56 HSSISA7LS F96 5 197198:
foo vai 2602 P2CaINb 627.
2090206 M3 rr1%628 68 698 TI24
140 SE88., 2371320083 2433 240128,
28212924 2930208, 03: 306 309%
316,318 ,320, 323324, 325; 3513
332, 3335334 335> 336.
Plautus. 1, 294.
Plinius. Hiftor. natur. 1553, fol. 1, 167;
LAVE SN DATE TO 276 203.3
287: 203; 205, 2962M098 30011551,
535 56, 58,150, 60, 64,65, 66,70,
FUEL 70 s EPA HAO ASS TI 07 MAT,
212, 213420732206 226, 229% 2313
232, 233223$ 22495220
DES AUTEURS. xl;
Plotinus. Gr. lat. Bafilee , 1580 , foi. 1,97,
1142136231." 0328.
Plutarchus. Gr. lat. Edit. Xyland. Franco-
furti, 1620, 2 vol. fol. 1, 21, 6o, 67,
97, 109 SMÉPR.< 113 F114 "180, VF26,
TOURS ESS RAS T4, 160 162,
163 164167 1721079, 1013182 3 103,
194 ; 196. 203,206 ,:207j 208 22IE 3
PA BTS ; 217.4 120 ,5 22412300)
RAD PASS 201620293254. 2023
264: 272,278 3 20012831) 207 2913
297 308-111: 1423.95 102 ,-1LI, 140,
ISO T0 7 T9OMZ IN 21/ 52225284, 2/4;
283,254, 293, 299 3 303 ; 322.
Pollux. Onomalticon gr. lat. 4mflelod. 1706 ,
2 vol. fol. I[ , 13, 244, 254.
Polybius. 1, 135.
Pomponius Mela. IT, 212,213.
Porphyrius. I. 47. IT, 285.
Proclus. In Fimæum , græc, Pafileæ, 1534,
fOl,53: 214, 232, 249) 2N0FÈ1,138,
67 NM00, 191,209. 310:
Idem. In Parmenidem. Cod. mf. in Biblioth-
Harleianâ , N°. $671, fol. 1,35.
xlij CATALOGUE
Procopius. Il, 70.
Pfellus. Expofit. dogmat. Chaldæot. I, 32;
GI:
Prolomæus. Almageft. &c. Bafilee, 1541»
fol. Le 180 10243 2247.
Q.
Quæftion. Alnetan. Huetii. If, 308.
Quingilianus. I], 236.
R.
Rhodiginus. Lectiones antiq. Francofurti ;
1666 , fol.:l 187.
Riccioli. Almageft. IT, 186.
Roffi. Admiranda veter. fcriptor. veftigia.
Host:
Ruffus Ephefñus, De Partibus corp. human.
Lond. 1726 ,4%,.11 3:27.
Ruyfch ( Frédéric). Anatom. chirurg. 4
Hlér dia Al 436:
S,
Salluft, Crifp. EI, 136.
DES AUTEURS. xliüj
Salluftius. Sophifta de Diis & Mundo. Opuf.
mythol. T. Gale. Ami. 1688 , 89.11, 324.
Salmafius. In Solinum. 1, 60, 80.
Scheuzer. Phyfique facrée. IH, $.
Scipio Aquilianus. De placitis Philofophor.
Ed. Bruckeri. Lipfie, 1756 ,4°. 1,93.
Scotus ( Dunfius ). 1, 152.
Seneca. Edit. Plantini. Antwerp. 1615 , fol.
P5t272 1885 2355 -15052386 "242% 2067,
2741, 2705 2ARS208 3084 RS 135 60%
64,90, 113,217, 223,247 ; 312 3 397-
« Sennert. IF, 48.
Server (Michel). IN ,1$, 25.
Sextus Empericus. Gr. lat. Lipfie , 1718 , fol.
I1,23,54,55>56,5864,69,72,73;
745.755 705 77 >8S » 87, 915132:138 ;
143,110 Il, 141; 291.
s Gravefande. Introdu&t. à la Philofoph. de
Newton. Parif. 1747. 1,141.
Simplicius. In Ariftotel.
de Animi.
In Phyfcos. 1514531935: 20
De Caœlo.' (rsetis , 324°
In Epictetum.
xliv CaTAtocuez
Stanley. Hiftory of Philofophy. Lond. 1743:
F122%0724
Steuchus Eugubinus. De perenni Philofo-
phia. Bafileæ , 1542, 8°, 1, 312, 335e
Stillingfleet. Origines facræ. IT, 335.
Stobœus. Eclogæ Phyficæ , gr. lat. Aurelie
Allobrogum ; 1609 , fol. 1, 86,98 ,128,
131 x 1415143 .:282:-:104%! F0, 20,
207.5/120%#2405021,+ 2627 262, 264%
2675273, 274. IL, 299.
Strabo. Gr. lat. Amftelod. :707, 2 vol. fol.
L,:138,22:6.11,46,:126; 187 ,211,,212,
214, 216247.
Suetonius. Il, 231,23$ , 246.
Suidas. Lexicon gr. lat. Cantabrig. 170$ , %
voLfolk:L..2 57 46: 7e
pa
Tachenius ( Otto). Hippocrates Chymic:
16638. Il,61,62. |
Tertulianus. Parif. 1616 , fol. Il, 58,114;
24% |
Themiftius. I, 20. IL, 84
DES AUTEURS. xlv
Theon Smyrnæus. Cod. mf. I, 190, 191,
192, 239
Theophraftus. Gr.lat. Lugd. Bar. 1619, fol.
H,e56V 24; 132:
Thomas Aquin.I,195.1I , 280.
Titus Livius. [,297, 299.
Tobias Andreas, Epift. 1682. I, sr.
Tournefort. Eléments de Botanique. Parif.
1694, 3 vol. 8°. IH, 122.
Tranfactions Philof. II, $ , 137.
Tzetzès. Chiliad, Il, 71, 166, 167, 182,
2, 252
V.
Vaillant. De Struéturâ florum. Lugd. Batay.
1720, 4% Mr
Valerius Flaccus. II, 82.
Valerius Maxim. Lugd. Batay. 1655 ,89°.1,
300. Il ,190.
Varro.l, 297 :298.1l,67. 244
Vereres Mathematici. Edit. Thevenot. Parif:
1693 , fol.Ï , 264. 11,85.
Viroilius. I, 151. IL, Sr,
xlv] CATALOGUE
Vitellio. Tepi OTTIMNS , five de naturà visûüs.
Noribero. 1$5$1, fol. Il, 176.
Vitruvius. Edit, Elzev. 4mnftclod. 1649 , fol
L 1161, 214, 240811150085, 6),
80, 150.5 4697211901. 2108)2265:225 3
SAS:
Voyage de l'Amérique, par Champlain. IX,
82.
Voflius. Variæ obfervationes
De Origine Idololatriæ,
De Viribus Rythmi.
W.
Wallis. Edit. 1699. 1, 172: II, 158, 161,
192:
Walterus (Godofredus ). Sepulchra eleatica,
1,98.
Warlitz. De Valetudine Senum.IT, 5.
Winkelmann. Remarques fur l’Hiftoire de
PArts4,. disait
Witlius. Mifcellanea facra. IT, 5.
Wolfius. Edit Genevenfis , 1747 , s vol. 4°,
Wotton. Réflexions on ancient, and mo-
dern learning. 8°. 1694. II, 15.
DES AUTEURS. xlvi}
7;
Zimmerman. De l'Expérience. Parif. 3 vol.
in 12.
Zonaras. Annales. Venetiis, 1729, 2 vol.
fol, 1L,, 178. L
Zozime. De Panoplis. Cod; mf. In Biblio-
checä Regiâ Parif. mepi dpyatur | à taire.
IL, 65.
EE D Cm
T'A'BIL'E
DES, DEVIS O0 NS
PREMIERE .PAR ELLE,
Contenant l’Introduëtion & les fentiments de
Defcartes , Mallebranche, Locke, &c. fur
les Idées, l'Art de penfer ; les Qualires
fenfibles.
Ivrronucrion.
CHAPITRE I. Méthode de Defcartes, &
fa Logique. Principes de Locke.
CHAP. II. Idées innées de Defcartes, de
Leibnitz, tirées de Platon, Héraclite,
Pythagore, & des Chaldéens. Syftème de
Mallebranche,puifé dans la même fource,
& dans Sr. Auguftin.
CHAP. IL, Des qualités fenfbles.
SECONDE
DES DIVISIONS. xlix
SECONDE PARTIE;
Contenant les Syflémes de Leibnitz , de
Buffon, Néedham , & les Vérités concer=
nant la Phyfique générale & l Aflronomie.
CHAP. I. Syftème de Leibniz.
CHAP. IT. Nature animée. Comparaifon du
Syftème de M. de Buffon avec celui d’A-
naxagore , d'Empedocle , & de quelques
autres Anciens.
CHAP.IIL. Nature active & animée. Syftèrne
de Néedham.
CHAP. IV. Philofophie corpufculaire , &
divifibilité de la matiere à l'infini.
CHAP. V. Du mouvement; de l'accéléras
tion du mouvement; de la pefanteur ou
de la chüte des corps graves.
CHAP. VI. Pefanteur univerfelle , force
centrifuge & centripete. Loix des mou-
vements des Planetes, fuivant leur dif-
tance du centre commun.
CHAP. VIL Voie lactée ; fyftèmes folaires ;
ou pluralité des Mondes ; Satellites , Tour:
billons.
d
1 TABLE
CHAP. VII. De la Lumiere & des Couù-
leurs,
CHAP. IX. Syftème de Copernic ; mouve-
ment de la terre autour du Soleil; Anti-,
podes.
CHAP. X. Des Télefcopes.
CHAP. XI. Révolution des Planctes fur
elles-mèmes.
CHAP. XII. Des Cometes.
CHAP. XII. De la Lune.
CHAP. XIV. De l'Ether; de l'Air, de fa
pefanteur & de fon élafticité.
CHAP. XV. Du Tonnere & des tremble-
ments de terre ; de la vertu magnétique ;
du flux & reflux ; de léleétricité ; de la
fource des Fleuves.
TROISIEME PARTIE,
Concernant la Médecine, l’Anatomie, La
Chirurgie , la Chymie, la Génération , le
fexe des Plantes , les Vibrations du Pen-
dule , la Réfraëlion de la Lumiere , la Perf-
‘‘vecive, la Quadrature du Cercle, les Mi-
DES DIVISIONS. ft
roirs ardents , les Découvertes particulieres
de outlques Anciens, la Méchanique, la
Scuipture , la Peinture, la Mufique.
CHAP. I. Delacirculation du Sang.& des
Trompes de Fallope.
CHAP. Il. De la Chirurgie des Anciens.
CHAP. I. De la Chymie des Anciens.
CHAP. IV. De la Génération par les Œufs,
& des Animalcules.
CHAP. V. Syftème fexuel des Plantes.
CHAP. VI. Ifochronifme des vibrations du
Pendule ; de la Réfraction de lalumiere,
& de la Réfraction aftronomique. Gran-
deut des Aftres. Perfpective.
CHAP. VIT. Quadrature du Cercle.
CHAP. VIII. Miroirs ardents d’Archimede.,
CHAP. IX. De plufeurs découvertes des.
Anciens dans les Mathématiques , l’Af-
tronomie , &cc.
CHAP. X. D'’Archimede ; de la Méchani-
que des Anciens , & de leur Architecture 3,
des Microfccpes,, &c.
CHAP. XI. De quelques particularités fu
di
lij F'ABEr.
la Sculpture & la Peinture ; & l'origine
de la Muñque.
QUATRIEME PARTIE,
De Dieu; de l’Ame ; du Temps ; de l’Ef-
pace ; de la formation du Monde ,& de la
création de la Matiere. Optimifme ; ori-
gine du Mal ; Péché originel. Conclufion.
CHAP. I. De Dieu.
CHAP. II De l’Ame.
CHAP. II. Du Temps & de l'Efpace.
CHAP. IV. De Îa création du Monde &
de la Matiere.
CHAP. V. Syfême de Eeibnitz fur lOp.
timifme & l'origine du Mal.
CHAP. VI. Péché originel connu des An-
ciens,
Conclufion & récapitulation de tout FOu-
vrages |
Fin de la Table.
CORRECTIONS ET ADDITIONS
ESSENTIELLES,
Tome I.
P AGE 33, li. 18 , rooms , Lifez, mayraus,
Page 35, lg. 8,zavroius, Lif. mavroiu. “
Ibid à lg. 13, 7700 æI A lif, rumsSes,
Hhid, lig. 14,74, if. zip
Ibid, lig. 13 , amas, lf. m4.
Page 36, lig. 19 , ra dla, ajoutez, ravre.
Page 113, lig. 13, koQmanue , lof. tk0Q ane,
Page 144, à la fin du chapitre des Cometes, ajoutez:
Er pour appuyer cette aflertion du témoignage d'un
des plus habiles Aftronomes de ce fiecle, M. de la
Lande dit-fui-même qu'on ne peut rien ajouter à
ce que Séneque à dit fur la nature de ces pla
netes (1).
Note.
(1) Obfervation de M. de la Lande fur Pline, à
a fin de la traduction de cet Auteur, en François,
Paris, 1771, 1 vol. pag. 382, fol. 2.
Page 249, Uig. pénule, nüu, lif. oe.
Tome II.
Page 16, lig. 22, Ronburghe, lif. Roxburghe.
Page 18, lig. 10, cos, Lif. os.
Page 19, lig. 6, continenfa quæ, Lif. continens aquæ,
Page 10, lig. 1$,tatnm, if. tantum.
dbid, Lig,17,fit, dif. fit
Hv CrhOR RE CTI OAN:S
Page 26, lig. 12, Rurella, if: Kurella.
Page 17, à la fin de la note, ajoutez , qui cite ces
paflages de différents Auteurs :
ahmSS œuuvés TE À) ryvaurVes | Tès ps ThhoTipO TES à
mnoisrépo TE dud'ois. Hippocr.
Th pirpey Ty d'ixoxmo. Praxagoras & Philotimus,
spray sepaias. Dioclès Caryftius.
dr mexrére, Eudemus.
armoGuris , exQious Ts érps. Pollux, Oribafius,
rhs Üstuas Tus duzpous. Ariftot.
Sans parler d’Aëcius & d’Avicenne , qui ont même
énoncé les fonctions de ces trompes.
Page $1, lig. s , flreort, lif, reflort.
Page 99, à la fin de la note (1), ajoutez: Du refte
voyez dans Manger, Théatr. anatom. L. I,
part. 2, chap. 3, pag. 124 & fuiv. les idées qu’on
a eues de toute antiquité fur Ha génération par les
œufs. Ce qu'il rapporte eft digne d’étre tu.
Page 153, à la fin de la Perfpe@tive , ajoutez : Arif-
tote a été le premier qui ait propofé le problème
touchant fa rondeur de l’image du foleil , formée
par les rayons qui paflent par un trou quarré où
triangulaire. Vers le milieu du 15° fiecle, Marolles
avoir dir à ce fujet que le trou quarré efl le fommes
de deux cônes de lumiere , dont l'un a le foleil pour
bafè, & l'autre l'image réfléchie. Là-deflus M. de
Montucla attribue à Marolles tout l'honneur de la
fotution de ce problême , autrefois, dit-il, pro-
polé, à la vérité, par Ariftote, mais dont cet an=
É TVA D DITION & h
cien Philofophe avoit mal rendu compte, f:lon
Ton ordinaire. C'eft avec regret que je me trouve
obligé de relever quelques méprifes aflez confidé-
tables dans lefquelles eft tombé M. de Montucla,
dont je refpecte d’ailleurs les connoïflances & le
jugement. Premiérement, par fa maniere de fap-
porter Le problème d’Ariftote, il paroït que M. de
Montucla, non-feulement n’avoit pas confulté le
texte grec, mais n’avoit pas même fait attention
à la traduction latine qui l'accompagne , en forte
que j'ai peine à concevoir d'ou il a tiré ce pro-
bléme d’Ariftote, tel qu’il le produit, & encore
moins où il a trouvé la folution obfcure qu'il at-
tribue à ce Philofophe. La queftion que fe fair.
Ariftote eft celle-ci : Pourquoi les rayons du foleil,
en paflant par un trou quarré, ne forment pas une
figure rectiligne ? Er M, de Montucla, au lieu de
ceci, lui fait fubftituer une queftion tout-à-fait
différente, relativement à une éclipfe partieile du
foleil: Pourquot fes rayons , en paflant par un trou
guarré , donnent la figure exaile de la partie de fon
difque, qui n’eff pas encore obfcurcie ? Or iln’ya
pas un mot de tout cela dans Ariftote. M. de Mon-
tucla avance enfuite que les Philofophes, ayant
défefpéré de pouvoir donner la folution de ce pro-
blême, s’étoient reftreints à dire avec Ariftote, que
da lumiere [e réfléchiffoit naturellement en rond , ou
prenoit la forme de l'affre de la lumiere ,auffitôt qu'elle
avoit furmonté les obflacles qui s'eppofoient à fon
1j CORRECTIONS ET ADDITIONS.
palage. Et c’eft encore ce dont Ariftote ne dit pas
un mot. Ce grand Philofophe donne au contraire
deux folutions de fon problème , dont la premiere
eft le fondement de celle que l’on appelle mal-à-
propos la découverte de Marolles. Afin de mettre
le Lecteur en état de décider fi j'ai relevé à tort
M. de Montucla, voici une traduétion littérale du
paflage d’Ariftote, qui contient la premiere folu-
tion du Problème. Pourquoi le foleil, paffant par
un trou quarré , ne prend point une forme reéliligne
mais orbiculaire , comme lorfqu’il luit à travers une
grille ? Seroit.ce parceque la réflexion de l'image fe
fait par un cône dont la bafe eff dans une forme
ronde (1)? Ceci peut fervir à confirmer ce que
j'ai toujours avancé, que l’on rend rarement juf-
tice aux Anciens, foit parcequ'on ñéglige de les
connoître, ou faute de les entendre. Dans ce paf-
fage, par exemple , la verfion latine eft incorrecte
& ambigue. Le mot xäws s’y trouvant rendu par
turbo , ce qui répand de la confufion fur Le fens de
l’Auteur, & eftropie tout-a-fait fon idée.
(1) Ariftot. Problem. 15. Seét. $. p. 173. Aix ri &
gaues din Tov rerperhepey dxor , x evbirypeuue mois Th
qhuare, dE xxAoS, ojos Ey Tals prVtrn 3 à 67 4 ras
éVeor tunlaris xvos st 3 T8 OE «dv xüxAoS ÿ Buris,
Page 173, lig. 16, yorncomer , lif. voir
Page 22s He ne Eee ICS à
Ibid, lig. 22, rubefcunt, Zif. hebefcunt,
Ibid, lie, 23, fardus, /f. furdus.
RECHERCHÈS
RECHERCHES
1 SUR
L'ORIGINE DES DÉCOUVERTES
ATÉTRETIBIUMELENS
AUX MODERNES.
PREMIERE PARTIE,
GCrOPNTRENNEAENIFTE
L'INTRODUCTION ET LES SENTIMENTS DE
Descartes, MaALLEBRANCHE , Locke,
&c. fur les Idées, l'Art de penfer, les
Qualités fenfibles.
Tome I. À
AR EE D d PU ne 7
: 4 ur 4 par ASS
rs TTL 6. Mie Su PAST M :
ch Au RC UR LA At an EX )
Micro + A # Mr se RE
7 ” 2 A ee
Im
Lu
u La
"af .
Ne
(3 eat
1° TA
sun kitat dà
x
+ RATE
BRL NU
j we É e
h (os \ ons pa re Ph iv: Wie "
Hah Qu à
«i : Lou
Matt (Eu Hu 4
< 1490) VA M a s£ |
En ne nets ne one Eee
PNTROD'UCTION.
I. L E s hommes font fouvent extrèmes dans
leurs pañlions, & encore plus dans leurs opi
nions ; ils paflent fubirement de l'amour à la
haine , de la louange au blâme à Pégard des
mèmes objets, & le plus fouvent fans pou-
voir fe rendre compte à eux-mêmes des mo-
tifs qui les déterminent à ces grands change-
ments.
2. Le fujet, que j'entreprends de traiter,
fournit une preuve frappante de cette vérité.
Pendant deux mille ans , les philofophes an-
ciens ont été en poffeflion de l’eftime géné-
rale & quelquefois aveugle des hommes ;
c’étoient des oracles que l’on écoutoit avec
la plus grande vénération, & dont on refpec-
toit Les obfcurités mêmes, que l’on regardoit
comme des fanctuaires facrés, où il n’étoit
pas donné à tous les efprits de pouvoir péné-
trer : un épfe dixir de Pythagore, d’Ariftote,
ou de quelque autre grand philofophe fufti-
foit pour trancher les plus fortes difficultés ;
le vulgaire des favants baifloit la tère & s’en
contentoit. On s’en tenoit là, & ces difpo-
NET 4
Inconftance
des hommes
dans leursju-
gements.
Révolu-
tion dans les
fciences.
4 IN TR:ODUCEIO:N.
fitions fi foumifes n’étoient guere propres à
avancer les progrèsdenosconnoiffances. Aufli
les beaux génies, qui ont été fi bien récom-
penfes de leurs travaux, par le titre à jamais
glorieux de reftaurateurs des fciences, fenti-
rent-ils bien la dureté d’un tel efclavage. Le
peuple philofophe tenta de fecouer le joug
d'Ariftote , à peu près dans le temps que le
peuple chrétien commençoit à fe lafler de
celui de Rome : l'effort de Pefprit humain
vers fa liberté, devint ainfi général ; & il
arriva alors ce qui doit arriver dans toutes
les entreprifes des hommes , on ne marqua
pas affez juftement les limites où 1l étoit à
propos de s'arrêter , on les franchit des deux
côtés. Le prétexte de fe délivrer de la fervi-
tude d’Ariftore, & des autres grands maîtres,
à qui on devoit tant, dégénéra en ingratitu-
de & en injuftice à leur égard ; de mème que
le prétexte de fe retirer des entraves de Ro-
me dégénéra peu à peu, parmi les beaux ef-
prits du fiecle , en efprit de libertinage &
d’impièté : le fuccès des philofophes moder-
nes fut enfin femblable à celui des grands
conquérants ; fe voyant vainqueurs, ils s’en-
INTRODUCTION. s
richirent des dépouilles des vaincus; & au
lieu de fuivre l'exemple de ces grands hom-
mes, dont les longues études , le travail afli-
du, & les méditations profondes , avoient
tellement enrichi les fciences , ils fe conten-
terent le plus fouvent de prendre chez eux
le fonds fur lequei ils éleverent enfuite leurs
édifices : & cette viétoire , qui devoit être
utile à la perfection de lefprit humain, fi
lon avoit apporté plus de candeur dans la
réforme , peut lui devenir pernicieufe , en
continuant fur les principes que l’on femble
être difpofé à fuivre.
3. On convient de toute l’importance du
fervice que les orands hommes , qui fe font
élevés depuis deux fecles, ont rendu à la
république des lettres ; & leur fuccès juftifie
aflez leur conduite. Aufli n’eft-ce pas des
Cardan , des Bacon, des Galilée, des Def.
cartes ; des Newton & des Leibnitz dont je
veux parler ici; non: ces héros de la républi-
que des lettres avoient trop de mérite pour
ne pas connoître celui des anciens; ils leur
rendoient juftice, & fe regardoient comme
leurs difcipies : je parle ici de ces demi-fa-
A iij
Grandshom-
mes parmi les
modernes ,
admirateurs
des anciens.
Raïfons d’a-
voit recours
aux anciens.
6 INTRODUCTION.
vants qui, ne pouvant tirer de leur propre
fonds de quoi fe faire un nom , vont em-
prunter de ceux qu'ils affectent de dénigrer,
les richeffes dont ils fe parent, & taifent avec
ingratitude ce qu'ils doivent à leurs bienfai-
teurs.
4. On fent tout le prix de la méthode in-
troduite par les modernes dans la philofo-
phie de nos jours ; 1l n’eft pas douteux que
l'efprit analytique & géométrique, qui regne
dans leur maniere de procéder , n'ait beau-
coup contribué à perfectionner les fciences ,
& il feroit à fouhaiter que l’on ne s’en écartât
jamais : mais on a befoiïn pour cela de guides
fûrs, & quels meilleurs guides peut-on fui-
vie que ceux que nous voyons être arrivés
long-temps avant nous au but où nous nous
propofons d'aller ? Nous pouvons nous con
vaincre que les grandes vérités de fyftèmes,
reçues avec tant d’applaudifiement depuis
deux fiecles , avoient déja été connues, &
enfeignées par Pythagore , Platon , Ariftote
& Plutarque ; & nous devons penfer qu'ils
favoient démontrer ces mêmes vérités, quoi-
que les raifonnements fur lefquels une partie
INTRODUCTION. 7
de leurs démonftrations étoit fondée, ne
foient pas parvenus jufqu’à nous; car, fi dans
les écrits qui font échappés aux injures du
temps, on trouve une foule d'exemples qui
mettent hors de doute la profondeur de leurs
méditations, & la jufteffe de leur dialectique
pour expofer leurs découvertes, il eft trop
jufte de croire qu’ils ont employé les mêmes
foins , & la même force de raifonnement
pour appuyer les autres vérités que nous
trouvons fimplement énoncées dans ceux
de leurs écrits que nous connoiflons. Certe
conjecture eft d'autant plus naturelle , que
parmi les titres qui nous ont été confervés de
ces ouvrages qui ont péri, on en trouve plu-
fieurs qui traitoient de ces mêmes fujers qui
ne font qu'énoncés dans leurs autres écrits;
d’où il eft naturel de penfer que l’on y eût
trouvé les démonftrations qui nous man-
quent de ces vérités. Ils jugeoient fans doute
inutile de les répéter , après en avoir parlé
en plufieurs autres livres, auxquels ils ren-
voient fort fouvent, & dont Diogène Laërce,
Suidas & d’autres anciens nous ont confervé
lestitres, quifuffifent feuls pour nous donner
A iv
Leur faga-
cité.
8 INTRODUCTION.
une idée de la grandeur de notre perte (1).
s. Il eft à remarquer aufli que ces grands
hommes, par l'effort feul de leur raifon ,
avoient acquis des connoiflances que toutes
nos expériences , faites avec le fecours des
inftruments que le hafard nous a procurés,
n’ont fervi qu’à confirmer. Sans l’aide du té-
lefcope (2) Démocrite avoit connu & enfei-
gné que la voie latée étoit un affemblage
d'étoiles innombrables qui échappoient à
notre vue, & dont la clarté réunie produi-
foit dans le ciel cette biancheur que nous de-
fignons par ce nom ; & 1l attribuoit la caufe
des taches obfervées dans la lune à la hauteur
exceffive de fes montagnes, & à la profondeur
de fes vallées: il eft vrai que les modernes ont
été plus loin, & qu'ils ont trouvé les moyens
(1) Entre mille preuves que je pourrois alléguer ,
je ne ferai attention qu'aux titres des deux ouvrages
de Démocrite , par lefquels feuls il paroît avoir été
l'inventeur de la do&rine élémentaire für Les contaits
des cercles & des fpheres , & fur les lignes irration-
nelles & Les folides. Diogenes Laërtius in Democrit.
Led. 47.
(2) Vid. not. ad fe&, 131, p. 205.
INTRODUCTION. 9
de mefurer la hauteur de ces mèmies monta-
gnes ; mais encore une fois , il femble que le
raifonnement de Démocrite à ces égards étoit
celui d’un grand génie , au lieu que les opé-
rations des modernes ne font que laborieufes
& méchaniques : d’ailleurs, comme dit Sé-
nèque, ad inquifitionem tantorum , ætas una
non fufficic ; nous avons de plus fur les an-
ciens l'avantage d’avoir pu travailler fur le
cannevas qu'ils nous ont fourni.
G. Si l'exemple que je viens de rapporter
eft propre à donner du poids à mon fenti-
ment, que fera-ce donc, fi je puis faire voir,
comme je l’efpere , qu’i/ n’eft prefque pas une
des découvertes attribuées aux modernes ; qui
n'ait été , non feulement connue des anciens ,
mais même appuyée par de folides raifonne-
ments ?
7. Je ne veux pas parler des vérités difhici1-
les à appercevoir dans leurs ouvrages, & que
lon n’y trouve que parceque l’on eft détermi-
nc à les y trouver : je laiffe ce foin aux zéles
commentateurs ; il convient à leur fuperfti-
tieufe admiration pour leurs auteurs. Mais je
veux parler de ces vérités qui doivent frap-
Entreprife
de l’Auteur.
Son impat-
tialité.
But qu’il fe
propofe,
10 INTRODUCTION.
per tout efprit attentif : de celles que New-
ton, Defcartes & Leibnitz y ont vues, & que
tout génie impartial & appliqué y trouvera
aufli bien qu'eux.
8. Si je réuflis dans l’exécution de cette
entreprife , j'efpere parvenir à mon but, qui
eft de recommander moins de prévention
contre les anciens qui ont formé ces mo-
dernes que nous admirons aveuglément,
comme s'ils ne brilloient pas de la lumiere
empruntée de ces illuftres maîtres. Mais
quand même je ne pourrois pas m’affurer
entiérement du fuccès de mon entreprife, la
candeur & l'exactitude avec laquelle je me
propofe de la fuivre , me répondent du moins
de l'approbation des favants , dans la tenta-
tive que je fais de reftituer à ces premiers phi-
lofophes une partie de la gloire qui leur eft
difputée ; & la maniere dont j’expoferai leurs
opinions , en rapportant fcrupuleufement
leurs propres termes , rendra la queftion fas
cile à décider.
+
RECHERCHES
SUR
L'ORIGINE DES DÉCOUVERTES
ATTRIBUÉES
AUX MODERNES.
PREMIERE PARTIE
CHAPITRE PREMIER.
Méthode de DESCARTES , & fa Logique :
Art de penfer de LOCKE.
E À . Syflêmes de
9. Duvrs plus d’un fécle , quelques pme, Pen
mes célebres ont propofé, fur la logique &la Mallebran-
; 2. SET £ che, Leibnitz
métaphyfique , des idées qui ont paru nou- 8 Locke,puie
es çuez cs
velles, Defcartes, Leibnitz, Mallebranche& anciens.
Logique de
Defcartes.
Premiere
Regle.
12 L'AOYCMITO AU E.
Locke ont été regardés comme des innova-
teurs en ces fciences, quoiqu'ils n’aient rien
avancé qui ne fe trouve aufli clairement ex-
pliqué dans les ouvrages des anciens que
dans leurs propres écrits, comme il eft aifé
d’en juger après un long examen de leurs
principes rapprochés & comparés enfemble.
10. Avant que d'admettre aucune métho-
de, Defcartes pofe (1) pour premier princi-
pe, qu'une fois dans la vie, celui qui cherche
la vérité, doit , autant qu’il eft poffible , dou-
ter de tout ; & enfuite 1l propofe quatre régles
principales, dans lefquelles confifte toute fa
logique (2).
11. : La premiere eft de ne recevoir ja-
» mais aucune chofe pour vraie, qu'on ne la
» connoifle évidemment être telle, c’eft-à-
» dire, d'éviter foigneufement la précipita-
» tion, & de ne comprendre rien de plus en
(x) Cartefii principiorum Philof[orhiæe pars E.
Je sT
(2) Cartefit Differtatio de Methodo , feët, 2, p. 7;
Ed. Amflerd. 1692, in-4. apu& Blaeu.
DE DESCARTES, 13
» fes jugements, que ce qui fe préfente fi
» clairement à l’efprit, qu'on n'ait aucune
» occafion de la mettre en doute.
12. » La feconde, de divifer chacune des
» difficultés qu'on examine, en autant de
» parties qu'il fe peut, & qu'il eft requis de
» les réfoudre.
13. » La troifieme, de conduire par ordre
» fes penfées, en commencant par les objets
» les plus fimples & les plus aifés à connoi-
”» [re, pour monter, peu à peu , comme par
» degrés , jufqu'à la connoiffance des plus
» compofés , & fuppofant même de l’ordre
» entre ceux qui ne fe précedent point na-
» turellement les uns les autres.
14. » La quatrieme, de faire par-tout des
Ÿ
dénombrements fi entiers (1), & des re-
» vues fi générales, qu'on fe puiffe affurer
» de ne rien omettre «.
(1) Arf. Analyt. Pofler. lib, 2, c. 14, p. 174.
Oùro pes où RadiQrre ési else re oùd es repair las.
Ac fingula quidem ita perfequendo , facilè eric videre
nùm prætermittatur quidpiam. Vid. ad finem hujufdem
Sapitis , p, 176. A, lin. 9 feq.
Seconde
Regle,
Troilieme
Regie.
Quartrieme
Regle.
indiquées
dans Arif-
totc.
14 Étror er o0E
15 Sans avoir recours aux fceptiques pour
y trouver ce doute, & cette circonfpection fi
vantée en Defcartes, on voit dans Ariftote
ce premier principe clairement énoncé, &
fortement recommande, par les mêmes rai-
fons qu’allegue Defcartes. » Celui, dit Arif-
» tote (1), qui cherche à s’inftruire, doit pre-
» miérement favoir douter ; Ze doute de l’ef-
(1) ANATKH œps Th imiénrouuém émise ms 9iiv
e ” = \ KE » # ” = ” \ +
ApRes , ape Toy » Trépl @y Top AT I d'a TR: TOY, Tavla dE ÊS1y
dca mejl dury dAAUS mA iQori TUES | MY EL TI UpIS Tor a
LA ” ! ” \ D » A nl
Tux avor ZpaTOy ZT'OPEMIPUELEVOY, E çt de TOIS LUF OPAT 0 Govnout-
vis mpoïpyoo To d'amopüru anüs. H' ap Üsepo tumopie,
Aüris Ta mpôrepoy émopouivar Eçi* Aüey d° oùx Esiy dyrconræ
ro d'erusr, ADN 4 Tüs davias dmopiu d'ynoi roro épi Ted
mpaypales.
Ad illam, quæ quæritur, fcientiam necefle eft,
imprimis nos percurrere , de quibus primo dubitan-
dum eff. Hæc autem funt, & quæcunque de eis aliter
exiftimarunt , & fi quid ultrà hæc prætermiflum fit.
Eft autem opere pretium aliquid facultatis habere vo-
lentibus , benè dubitare. Nam pofterior facultas , folu-
tio eorum eff , qua antè dubitata fuerunt. Solvere au-
tem non eff, cùm nodus ignoretur : [ed intelleétäs haft-
tatio , manifefium hoc de te facir. Metaphyfic. lib, 2 ,
cap. 1, pag. 858. E.
DE DESCARTES. 1$
» prit conduit à manifefler la vérité «. Et un
peu plus loin : » Quiconque cherche la vérités
» fans commencer à douter de tout , eft f[em-
A dti Vus d'ucyepeias releogpetroy mrérus mpôriper , Toëran
TE XAen , # die To Toùs Cyroèvras PAT] To darrogirat
2 L { Ts 12 1 Ce 1 , 27 \ \
FOOTOY | OHLOIGUS Ei@i TOis A0 du Bad iQ dryvooïrt | Kj Æp°S
# ss 7 \ \ 1 4 D] \ / .
TOUTUS , oùd fé GOTE TO Qnlopesvor EVONXE) f Fn » YUOTKEAN
ro yue TÉAes Toru piy êv d'inoy, TS CE xaNDS TrpONTUp=
1 4 À / a 7 LL \ à: / \ €
xort, E ri d'e Lenrioy avwryxn EXEN ZpoS TO XpIVEI , TOY WIR
» / \ = 2 / / » / LA
ayTid 20v #y Ty auQurenTouvrey ÀcyQY GxYXOOTE TANT ON.
Quare omnes primo difficultates fpeculari par ef,
ê& horum gratià , & proptereà quôd illi, qui quærunt,
nifi primo dubitent , fimiles illis funt , qui quonam ire
oporteat , ignorant : & ad hæc neque utrum invene-
rint quod quæritur , an non , cognofcere poffunt.
Finis etenim his quidem non eft manifeftus : i//i au-
tem, qui anteà dubitaverit , patefcir. Item, melius
fe habere necefle eft illum ad judicandum , qui tan-
quam adverfarios | omnes utrinque rationes oppofi-
tas audiat, id. p. 859. À.
Tlegi vyœp roëray émévr@v | où jiôvo) XAMEMOY To EÜMopAT EL
TS dnleias , GAN où0t ro dianopirus Tü Aôyw badioy xu-
Aüs.
De his enim omnibus non mod invenire veritatem
dificile , verum neque bené ratione dubitare facile
eft. id. P- 860. À,
Méthode de
Defcartes.
16 MIE TEL Où b‘E
» biable à quelqu'un qui marche [ans favoir où
» il va ; & qui, ne connoiflant point le but
où 1l fe propofe d'aller, ne peut favoir s’il
» y arrivera où non; au lieu que celui quia
»# fu douter, trouve enfin le but où il doit
”
C2
» S'ANTÊTEL «4
16. Le mème auteur, parlant de la mé-
thode que l’on doitobferver dans le raifon-
nement, enfeigne à commencer toujours par
les chofes les plus évidentes, & les plus con-
nues, & à répandre du jour jufque dans les élé-
ments , & dans les principes des chofes les plus
obfcures, en les divifant, & les définiffant avec
foin (1) : en quoi il femble que Defcartes ait
/ \ 2/ , el el \ 72
(1) (Tore yop oiouede ywconev Exasoy , CTay Ta œirix
L]
/ \ u NAN er SPA \ = . 3
More TE TpÈTE , N) TOUS CPAS TOUS MPÔTOS , 1 MEXCA
= / 2 et « = \ / > / 1
TOY goiEiey ) à OV 67 y T#S REC Quotuws EmISHUYS CH
! / 0 \ LU / ! Ni >
Trio more g doi ru me Tus dpyus. IliQuxe de tx
Je ! CT SUR OTES x , > À \ ’
Toy yragsuortsor suis y où cs 4jj cupestpar | mi Ta cupi=
” Ÿ id ! / \
sex TA Qios | 1] YNOgAHUTEg. . à « + à AIGTEP GYAYXY TOY
/ es LA 2 nu > r: \ ne à
TROMOY TUTO MOOWYEW EL TOY MraQEEpar uv TA Qoots. +...
ini Ta Es 7 QÜrtu 1 YIOLAMATEe ; V'5ee v
ÉmE Tu capes TA Quoi 4 YINGAUWTEG . «à: À 5609
\ » Z. LA / \ Lod L : \
dE éx ToUTEy YIETAI VOCAUE TU Sy , 1 &i dpyal,
à ” n \ » ! Jar \ > €
lupodrt Tavra, Aio fx ray auloñcu , Emi T& Hu Exaçæ
ed exp
di Ze give,
LA
adopté
DIEU DE SICIARUT ES. 17
adopté jufqu’à fa maniere de s’exprimer.
17. Defcartes étoit perfuadé qu'il avoit
découvert le premier larme la plus propre à
battre en ruine le’grand boulevard du fcep-
ticifme, en déduifant du doute mème une vé-
rité fondamentale ; & il croyoit avoir formé
le premier ce fyllogifme ; Je doute [ou je
penjt, ] donc je fuis. En effet, on lui a long-
temps attribué l'honneur de cet argument,
qui fe trouve cependant dans S. Aucuftin.
Je ne vois pas, difoit ce grand homme, ce
Tunc enim putamus unumquodque cognofcere ,
cum caufas primas noverimus , & principia prima ,
& ufque ad elementa ; perfpicuur eft, hic quoque
tentandum , ut primüm definiantur ea, quæ ad prin-
cipia naturalis fcientiæ pertinent. Naturaliter autem
conftituta eft via ab ïis, quæ funt nobis notiora, &
clariora , ad ca, quæ funt clariora, & notiora na-
turâ......Quare necefle eft hoc modo progredi,
nimirüm ex iis, quæ naturà quidem funt obfcurio-
ra...... Deinde ïis, qui hæc dividunt , ex ipfis
elementa & principia innotefcunt. Idcirco ab univerfa-
libus ad fingularia progredi oporter. Ariflor. Phyfic.
Aufcultat. lib. 1. de methodo hujus libri, tom. 1,
2-31. AG B,
Tome I. B
Argument
de Defcartes :
Je penft donc
Je fuis ; pris
de faint Au-
guftin.
18 D RL INNGIL BLUES
qu'il y a de ft redoutable dans le doute des Aca-
démiciens ; car ils ont beau dire que je puis me
éromper ; fi je me trompe, j en conclus que je
Jfuis : car celui qui n'efl pas, ne peut pas fe
tromper ; & par cela même que je me trompes
je fens queje fuis (x).
Principes de
Locke , les
mêmes que
ceux d’Arif-
tore.
18. Tout ce qu’a dit Locke, dans fon Ef°
fai far l’entendement humain , a été le fruit
d’une obfervation exacte des principes des
anciens , entre autres, d'Âriftote , lequel te-
noit que toutes nos idées venoient originai-
tement des fens, & difoit qu'un aveugle ne
pouvoit avoir l’idée des couleurs (2), ni un
fourd la notion du bruit : il établifoit les
fens pour juge de la vérité, quant aux opé-
(1) Mihi effe, idque noffe, & amare, certiffimum
eft. Nulla in his veris Academicorum arsumenta for-
mido , dicentium : Quid fi falleris ? Si enim fallor,
Jfum : nam qui non eff, utique nec falli poteff, ac per
hoc [um , fi fallor. Quo argumento ufus quoque eft
aliis locis. Augufl. de Lib. arbit. lib, 2 , c. 3, & idem
de Civir, Dei, lib. 11, c. 26.
(2) Arifloteles Phyfic, Aufeulr, lib. 2 ,c, 1 ,tom,1,;
pe 328.8,
ù E 1 OC & 19
rations de l'imagination ; & l’entendement,
par rapport aux chofes qui regardent la regle
de notre vie , & la morale : & il a jerié les
premiers fondements de cet axiome céle-
bre des Péripatéticiens , qu’{/ n’y a rien dans
l'efprit qui n’y foit entré par les [ens ; lequel
eft une conféquence de plufieurs endroits dif-
férents de fes ouvrages (1). Mais fur-tout
(1) Ex fenfu memoria ; ex memorià experientia ;
ex multis experimentis in unum collectis exfurgic
univerfale , quod apprehendit intelle@us, ex quo
aliquid concludit diévow, Arifloteles Analyuic.-Pofte-
rior, lib, 2, Traéfatus 4 , cap. 19, vel ultim.p. 199,
C. D. E. & feq. Edit, Duval. 1619. Vide & Averroëm
in hunc locum.. .. Et Diogeres Laertius in Ariflotelem,
lib. 5 ; Jeë&, 29.
» Jl eft bon de remarquer ici, que cet axiome de
» l’école péripatéticienne, nihïl elf in inrelleclu quod
» non prids fuerit in fenfu , n’eft point d’Ariftote,
» comme on le croit ordinairement, ni même de fes
» plus anciens commentateurs : c’eft un des axiomes
» introduits par les fcholaftiques , & appuyé princi-
» palement fur le paflage précédent , & fur lé dernier
» chapitre du fecond Livre d'Ariftote de änimä. A la
» fuite du paflage rapporté dans cette note, fe trouve
B i
Locke com-
paré avec les
Stoïciens.
20 FR TI NNCIT PNE S
Locke a puife chez les Stoïciens ce qui fait
le fond de fon fyftème : une courte expoli-
tion des deux fentiments fufhira pour en con-
vaincre le lecteur.
19. Le philofophe Anglois fait, des fen-
fations , les matériaux dont la réflexion fe
fert pour compofer les notions de lame : les
fenfations chez lui font des idées fimples,
dont la réflexion forme les idées complexes ;
c’eft là le fondement de fon livre, dans le-
quel , il eft vrai, qu'il a répandu un grand
jour fur la maniere dont nous acquérons nos
idées, & fur leur affociation ; maisil eft clair
aufli, pat tout ce que Sextus Empiricus, Plu-
tarque & DiogeneLaërce nous ontconfervé de
la doctrine des Stoïciens , qu'ils raifonnoient
de la mème maniere que Locke à fait de nos
jours; & on peut juger, par ce qu’en dit Plu-
tarque, que fi tout ce qu'ils’ont écrit fur ce
» feulement cette expreflion : itaque nec infunt def
» niti habitus ; nec fiunt ex aliis hatitibus notioribus ,
» fed ex fenfu ». Wid. Philopon.ir hunclocum, p. 149,
col, 1. Themiflium in eund. loc, cap. 35 6 37.
DE LOCK: ES 21
fujet (dans les ouvrages dont il ne nous refte
que les titres) étoit parvenu jufqu’à nous,
nous n’aurions pas eu befoin de l'ouvrage de
Locke. » Le fond de la doëtrine de Zénon
» & de fon école fur la logique, étoit que,
» toutes nos notions nous viennent des
» fens (1). L’efprit de l’homme, à fa naif-
tn)
(1) Oi Eroinai Quri , O'rey yes © @yIpomos | Eyes
TD yuounoy pégos vhs Vuxns , üorep xéprus èpys cils
dmoypaQur. tis Toro piuy ixasm Toy baby ivaroypéqilat,
Tipôres de 0 Très dyeypagns vpomos , à du rüv diyrtan.
AioTavapzevar mas Tios , oo Atuxo) , dmerdorlos due , prune
» . 4 \ hi 7 x = / / \
ÉVOUTIY" O7CY d'e opoElC £15 TO AMI HAIHHGI EVOVT GE , TOTE QuTiy
Bus Euler fume ap êst To Toy ououd av Ado,
Tôv OÙ éwañv ai pr Quoinas yholei «aa Toùs éivypeevous
rpomous | 94 umlecmres" ai de dy di jnilipus Mid'urnæ-
! \rs / . 2 \ ca C4 Col /
Mas, Ag ETIMEREIGS" AUTEAI PLV QÙV | EVIL x 0) |&i 2050),
sxtuar dE x mpoarÿes. © de Aoyos, nef” D mporæyopeuo-
pda Doyinoi , Ex Toy mpohrYeor œupen Ampiues Aéyéles ,
ne rm porn odouddu, Es dE véque Qularpa dix
/ es !
Yelus Aor/1xo” Lao.
Stoïci dicunt : Quum natus fuerit homo , is prin-
cipem anime partem veluti chartam habet , -in quà
uis aliquid exarare conetur ; adedque in illà animæ
q D
parte unamquamque notionem à fe compararaëm in
exibit, Primus verd ejufmodi fcripuionis, vel feri«
B li]
22 PiR'INOCEIUR Ets
» fance, eft femblable, difoient les Stot-
» ciens , au papier blanc difpofé à recevoir
» tout ce que l’on veut y écrire ; les premieres
» impreflions qu'il reçoit, lui viennent des
» fens; les objets font-ils éloignés, la mc-
» moire fert à retenir ces impreffions ; la ré-
» pétition de ces mèmes impreflions fait l’ex-
——
bendi modus eft i/le , qui per fenfus efficitur. Qui
enim objeétum aliquod fentiunt, ut album , illo
fublato , vel recedente , ejus adhuc memoriam ha-
bent : quüm ve-0 plures ejufmodi memorie formé inter
Jele fimiles efformate fuerint , tunc Stoëci nos experi-
mentum habere dicunt ; experimentum enim ef? mulii-
tudo no‘ionum plurium form& fimilium. Notionum:
verd phyficæ quidem juxta prædiétos modos fiunt ,
folo fenfuum naturæque præfidio, fine arte; aliæ
ver doétrinà , ftudioque , vel induftrià noftrà com-
parantur. Jtaque he quidem notiones folum vocantur ;
alla vero anticipationes etiam , vel prenotiones dicun-
tur, Ratio vero , propter quam rationales vocamur,
ex anticipationibus perfici, five compleri dicirur in
primo feptenario, primis nempè feptem ætatis annis,
Notio vero , mentifque conceptus eft imago cogiratio-
nis, quæ ab animali rationis compote producatur.
Plutarcus de Placitis Philofoph. lib. 4, c. 11. Vide
& Diog. Laerr, lib, 7, fe& 51, 52,53, 54.
r
me /LioyciK\E 23
» périence. Les notions font de deux genres,
» naturelles & artificielles ; les naturelles
» font les vérités qui ont leur fource dans les
fenfations , ou font acquifes par les fens;
Ë
è
c’eft pourquoi ils les appelloient auffi anti:
» cipations : les notions artificielles fonc pro:
duites par la réflexion de lefprit, dans des
» êtres doués de raifon «.
Ce pañfage , & plufeurs autres que je rap-
porte ci-deffous, tirés d'Origene (1), de Sex:
tus Empiricus (2), de Diogene, de Laërce (3)
ÿ
(1)....Stoicorum, qui fublatis à medio naturis
intelligentibus , contendunt : quidquid intelligitar,
fenfu intelligi , & nihil efle in int Ueëlu quod à jenfu
non pendeat Aiduoe nalanautarour ra nalanaubaenee ,
x) mare ndlr Gplader rüv idyesur, Origen. contra
Celfum , (16. 7, feët. 37. Stanley, Hifl. Philo/oph,
Edic. latin. tom, 2 , p.157, col, 1.
(2) Omnis enim intelligentia oritur à fenfu , &c.
Sextus Empir. adverfus Marhemat. lib. 8, fe, 6,
P. 467, 468. feq. lib: 3, Jié. ao, p. 3173 dib.9 3
feët. 393 eg. p. 625, & adverf. Ethic, lib. 1x, feët,
250, P. 734:
(3) Diogen. Laërt. in Zenone , lib.7, fil. 52:93.
Brucher, 10m. , p.916.
B iv
14 PERNTONOCAL M Es
& de Saint Auguftin (1), peuvent fervir à
tracer la véritable origine du principe : Qw’1/
n'y a rien duns l’entendement qui n’y [oit entre
par les fens ; & je ne fais comment il eft ar-
rivé qu'on l’a de tout temps attribué entiére-
ment à Ariftore & à fon Ecole, plurôt qu'aux
Stoïciens & aux Epicuriens (2), chez qui il
fe trouve beaucoup plus clairement indiqué.
Cette erreur eft fi généralement reçue que
plufieurs Savants n’ont fait aucune difficulté
de citer l’axiome mème, comme fe trouvant
en propres termes dans Ariftote (3); en quoi
(1) Stoïci dialeétam à corporis fenfibus ducendam
putaverunt. S. Auguff. de Civ. Dei, lib, 8, c. 7...
Nemefius de natur& hominis , c. 6.
(2) Namque omnis ratio à fenfibus pendet : z&s
yep Aoyos dm duourta Yplarei. Diogenes Laërtius,
Ub. 10, feét. 32, 6 ultrà : namque & mentis atten-
tiones omnes à fenfibus manant , &c. Gaffendi in hunc
locum , tom. $ , Oper. p.8, col. 1, & p.48, col. 2.
Vid. & Cic. de finibus , lib. 2,c. 19 , p. 1004. Quid-
quid porrû animo cernimus , id omne oritur à fenfi-
bus. Brucher , tom. 1, p. 1257.
(3) Gafendi Oper. tom. $ , p.49, col. 2. Har-
vaius in Prafatione ad lib, de Gencratione animalium.
Dis LiOoiCciRE, 2$
j'ai reconnu , après les recherches les plus
exactes , qu'ils s’étoient trompés pour avoir
négligé de confulter l'original.
Idées innées
de Piaton ,
adop: ées par
Deicarres
Leibnitz,
&
26 LD'ÉES 1 N N'ÉE'S
—
CPIT OA PO STORAN EU PEL
Idées innées de DESCARTES € de LEIB-
NITZ , tirées de: PLATON, HÉRACLITE,
Pyrmacore, & des Chaldéens. Syfléme de
MALLEBRANCHE , puifé dans la même
Jource, & dans S. Avcusrtin.
208 L ES idés innées des premieres vérités,
défendues par Defcartes & Leibnitz, & qui
ont élevé des difputes fi vives & fi fubrile-
ment difcutées FER les métap hyfciens de
puifé leur origine dans Platon,
nl
ÿ
+
}
|
s
! 1
fource féconde des
ce fiecle, ont
vérités 1e plus fublimes
pour un efprit attentif, Ce a philofophe,
qui a mérité Le furnom de divin, parcequ’il a
le mieux parlé de la Divinité, avoit cepen-
dant un fentiment erroné & particulier fur
Porigine de l'ame, » qu'il difoit être émanée
» de l’eflence divine où elle s’étoit imbue de
» la connoiffance des idées; mais qu'ayant
» péché elle étoit déchue de fon premier état,
» & avoit été condamnée à demeurer unie au
Le Satin
TT TT gl OP SE SET EE ET
RS Te rte CLS Enr D
DE) "PE A1 TIOUN. 27
» corps , dans lequel elle étoit retenue com-
» me dans une prifon (1); & que l'oubli de
» fes premieres idées éroit la fuite néceffaire
» de cette peine : ilajoutoit que l'avantage de
» la philofophie étoit de réparer cetre perte,
» en ramenant l’efprit peu à peu à fes pre-
» mieres connoiflances ; & que cela ne pou-
» voit s’accomplir qu'en l’'accoutumant com-
» me par degrés à connoitre fes propres idées,
» & , par un reflouvenir complet , à com-
» prendre fa propre eflence , & la vraie ef-
» fence des chofes «, De ce premier principe
de lémanation divine de l'ame dans la philo-
fophie de Platon, il s’enfuivoit donc natu-
rellement que l’ame (2) avoit eu autrefois en
(1) Animus gravi farcinä preffus , explicari cupit,
& reverti ad alia , quorum fuit ; nam corpus hoc
animi pondus, ac pœna eft; premente illo urgetur,
in vinculis eft, nifi acceffit philofophia , & illum
refpirare rerum naturæ fpeétaculo juflit , & à terrenis
dimifit ad divina. Hæc libertas ejus eft , hæc evaga-
tio. Subducit interim fe cuftodiæ , in quà tenetur, &
cœlo reficitur. Senece Epif. 65, p.494. B.
(2) Are où à oh dSérales rt cou, À AUS Ye
28 LDÉES: INNÉES
elle-mème les connoiffances de toutes cho=
fes; & qu’elle avoit encore confervé la fa-
culté de fe rappeller fon origine immortelle ,
& fes premieres connoiffances. Defcartes &
Leibnitz ont raifonné de la même maniere,
en admettant des vérités éternelles & pre-
mieres , imprimées en nos ames; ... ils ont
————
yonie , % topguiie , 0 Ta ifade, #) ra à &dov, x) male
Aphuële , oÙx is ©, Ti èu peuadmney. . . .. Are ap Täs
Qirios amérys ovyleis oùrns | 494 peuaSyavies Tres Vuyis
ämaile , éd one, À por évauwnnla (0 dt mdr
xahoÿow adpomo ) Tanne male alor Gvvpély | téy Tis
ddpties 4 , 1 ph émoxaun Crlèv ro yap Cle deg
To pda | @végevmris ono ts. Plato in Menone,
tom, 2, p. 81. Quuüm igitur animus immortalis fit,
& fepenumerd redivivus exiflerit, eaque , quæ hic
fant , & apud inferos viderit, nihil unquam rerum
eft, quas non didicerit.... Quum enim univerfa
natura uno quodam, cognatoque gencre continca-
tur, & omnia animus didicerit, nihil impedit ho-
minem uno quodam in memoriam revocara ( quod
difciplinam vocant ) omnia cætera invenire , fi quis
virili animo fuerit, nec inveftigando defatifcat. Nam
invefligare , & difcere omninô eff reminifceniia. Confer,
p. 35, n Epimonide , tvm. 2, p. 974, & in Phad,
10m. 3, P. 249 à UbE: Toro ésir évépeyeis Extiror , &
DAET (PPLUANE ON: 28
fubftitué la préexiftence & la création des
ames à leur émanation de la Divinité , en-
feignée par Platon ; & ils ont défendu ce fyf-
tème avec les mèmes raifons , dont s'étoit
fervi Platon, & qui paroiffent être puifées
dans cet auteur mème.
mor ide) pur n Vox courpuItüire ra a. Hoc eff
recordatio illarum rerum , quas olim vidit animus nofier
cum DEo profeitus.
Et à l’occafion du mot cu in Cratylo, tom.1,
pag. 400. Kai Zfuæ Tuts Qurn dulo (sue) tive ris
duvis, ds riJagmtins à r@ vo mraporrt. Nam fepulcrum
animæ corpus effe aiunt quidam , tanquam ad hoc
quidem tempus anima fit in corpore fepulta. Et peu
après : Aoxobos pilou por pére bide oi Gui Orge
rüro ro ovoue , os dixm Odoions ris Vuyñs, &v d'h
evene O'id'uri roro dE zrspiGo nor een = 07 ruÿrres, à ET ua
zuplou cinove ele où Ts Vuyis Troèro adro , Grmtp évouu=
Gerai, Eos dy ixrion Tu iQurousve, To rèuæ Videntur
tamen mihi Orphæi ftudiofi , iftius vocabuli origi-
nem optimè notafle , videlicet, ut fignificetur anima
pœnas pendere , & quidem explicari, quà de caufà
pœnas pendat. Animam igitur, quafi vallum, clauf-
trumque, carceris fcilicet imaginem , hoc corpus
circumferre , ut ip{a fervetur, ac proinde illud ipfum
animæ efle corpus, quod præ fe fert voçgabulum ,
doncec quæ debet anima plené in corpore perfolverit,
Syflême de
Mallebran-
che fur les
idées , puifé
chez les Chal-
déens , dans
Plaron, &c.
Expofition
du {yftême de
Mallebran-
cne.
30 IDÉES 1NNÉES
21. Mallebranche parut enfuite fur les
rangs pour défendre les principes de Defcar-
tes, & s’engagea lui-même à foutenir une
opinion fur la nature des idées, qui étonna
tous les efprits par une fingularité apparente,
que l’on traita ptefque d’extravagance, quoi-
que ce philofophe n’eût cependant rien avan-
cé qui ne puifle s'appuyer fur l'autorité des
plus beaux génies de l'antiquité , tels que Py-
thagore , Parménides, Héraclite, Démocrite,
Platon & Saint Auguftin ; fans faire mention
de l’école Chaldéenne , d’où l'opinion du
P. Mallebranche femble être premiérement
dérivée. |
22. Dans lé feconde partie de la Recher-
che de la vérité, cer auteur célebre , après
avoir défini l’idée , l’objet immédiat ou le plus
proche de l'efprit , quand il appercoit quelque
objet , démontre la réalité de l’exiftence des
idées, en faifant voir qu’elles ont des proprié-
tés ; ce qui ne peut jamais arriver au ncant, qui
n’a point de propriété: 1l diftingue enfuite les
fentiments d'avec les idées ; il examine les
cinq différentes manieres dont l’efprit peut
PER NOTES D PORN NS DUT UE
DE MALLEBRANCHE. 3t
voir les objets de dehors ; 1l réfute les quatre
premieres, pour établir la cinquieme, qui
eft celle qu’il foutient être la feule conforme
à la raifon, & qu'il expofe, en difant quil
eft abfolument néceffaire que Dieu ait en lui-
mème les idées de tous les êtres qu’il a créés,
puifqu'autrement il n’auroit pas pu les pro-
duire : il ajoute qu’il faut de plus favoir que
Dieu eft étroitement uni à nos ames par fa
préfence ; de forte qu’on peut dire qu’il ef le
lieu des efprits , de même que les efpaces
font dans un fens le lieu des corps; & il en
conclut, que l’efprit peut connoïtre ce qu'il
y a dans Dieu qui repréfente les êtres créés,
fuppofé que Dieu veuille bien fe communi-
quer à nous de cette maniere; ce qu’il prouve
enfuite par des raifons qui ne font plus de ce
fujet. Et, dans fes Entretiens métaphyft-
ques (1), il fait remarquer que Dieu , ou la
raifon univerfelle , renferme les idées qui
nous éclairent , & que les ouvrages de Dieu
ayant été formés fur ces idées, on ne peut
(1) Troifieme Entretien, Seét, IL,
Mallebran-
che autorifé
des anciens.
Doétrine des
Chaldéens
fur les idées.
82 IDÉES INNÉES
mieux faire que de les contempler pour dé-
couvrir la nature & les propriétés des êtres
créés.
23. On a commencé par traiter Mallebran-
che de vifionnaire, pour avoir avancé ces fen-
timents, quoiqu'il les eût accompagnés des
preuves les plus judicieufes & les plus foli-
des que puifle fournir la métaphyfque , &
on n’a point fongé à l’accufer de plagiat,
quoique fon fyftème, & fa maniere de le
prouver , fe trouvaffent à la lettre dans les
auteurs anciens que je viens de nommer.
24. Pour mieux juftifier la vérité de ce que
j'avance ici, je commencerai par rapporter la
doctrine des Chaldéens (1), laquelle paroit
peut-être expofer moins clairement ce fyftè-
(1) l'dtus de vopaiGours voy per ras rod males éwoius , vüv
dÉ roùs maSéhou Doyous Qurixoès gg duxinois xgf voñlois ,
vo OÙ ras témpquivas ray olay ünapésis, Ideas cenfent
( Chaldæi) modo Patris cogitationes , modo univerfi
tationes naturales , animales & intelleétuales, modo
etiam abftractas à rebus fubftantias. Pjellus in breyr
dogmatum Chaldaicorum expofitione. Extat apud
Lambeccium in Prodrom, Hiffor, liter. p, 115, in. 9.
me ;
CHEZ LES ANCIENS. 33
me; mais cela doit être plutôt attribué à l’é-
loignement du temps & au peu de fragments
qui nous reftent de leurs écrits, qu’à toute
autre raïfon ; & afin de les rapprocher dé
nous en partie, voyons ce qu’en dit Proclus,
qui éroit plus à portée que nous de les en-
tendre. Voici les (1) vers que cet auteur rap-
(1) Noès Tlapos épici@noe vonras éxuñri Boni
TlapeuopQous idtus | muyus à mo pus éncrlèca
E’Éog gr mralpoder yap Env ovnn TE, Téos re.
Mens Patris ftriduit, intelligens indefeflo confilio
Omniformes ideas ; fonte 1erd ab uno evolantes
Exilierunt ; à Patre enim erac & confilium, & finis.
Oracula Chaldæzorum , v. 100.
ADDX mine , Vopo mupi munies ,
Eis d)das votpus | xoTUA ap dvaË monvuspQe
Degidyner vorpor réroy GQDilor , où tale xiopr,
Lys Emirates popQhs, va de nos iQarIn
Toloicus 1d'eœus EL CLATIEVOS , à puis Zyyn. EC,
Sed divifæ funt , intelle@tualem ignem forte naûæ,
Jn alias intelleétuales , mundo enim Rex multiformi
Propofuit rntellelualem typum , incorruptibilem ,
non ordine ,
Veftigium properans formæ , prout mundus adparuit
Omnigenis ideis donatus, quarum unus fons. &c.
V. 10f+
Tome I, G
54 PDÉES. ENINEÉUENS
porte ; & après avoir cité ces fragments, qu'il
regarde comme des oracles des dieux, 1l dir:
» Les dieux déclarent ici où fe trouve l’exif-
» rence des idées ; quel eft ce Dieu qui en eft
» la fource unique ; comment le monde a été
» formé d’après leur modele ; 6 comment elles
» font la fource de toutes chofes : d’autres
» pourront découvrir de profondes vérités
» dans leurs recherches fur ces notions divi-
» nes; pour nous, il nous fuffit d’y voir que
» les dieux eux-mêmes ratifient les contem-
» plations de Platon , en donnant le nom d’i-
» dées à ces caufes intelleüluelles ; & en afhr-
» mant qu’elles [ont l’archétype du monde, &
#” la penfée du Pere ; qu’elles réfident en effer
» dans l'intelligence du Pere , & procedent de
Nosuever Luyfes *X rapedey votouri x) aûrai ,
Bovais aQYtyxloirt xivoëpeeve | @sE verras.
Intelletæ ideæ à Patre intelligunt & ipfæ,
Confiliis ineffabilibus motæ, ut intelligentes.
Ve 117
* Sur le mot l'vylec, voyez Petri Lambeccii Prodrom. Hifle
liter. p, 108 à la marge, Lib. 1. ç, 7,
CHEZ LES ANCIENS. 3$
» lui pour concourir à la formation du MOr=
» de (1).
€ J = 27 e
(1) At robrur eEiQnas oi becs # mou Tor id't5v n urosa-
\ , € *
is, ng4 ris Ve ésiv © rhv y aolay rs puias miesty er. Kaï
dr US in TAS MYYAS TUUTYE Zrpotirs ro mhnos. Kai mas 0 x6r=
pos dd'ypuoipyiler ad dures , 494 071 xplixei malüy trs
TOY XOTUX OV UF MAÉ TOY » Ÿ GTI acul VoEegi HOT TAY UTILE,
Kaï orr muloias nul ras idiclyres ti, Ko mod y ris
de me Ta tényuriy Toy Beilay rouler veyuarüy EuTivas
” x Y … e
bewpareer. ADX& y To yep rordbrey , v Tao ærapoil | Aym Toy,
NL aie ’ ” = / € ou
Ori 494 où ect ais T0 mAwraus Emibonais , éuapripnrur,
» ! \ \ / Ù \ »
T'deas rt xaherules vus votpus ravlas airias Kai xur das
rumoddoi roy morgso turovrts, E'i roi rùy 44 où Aoyos ma our
AUS MIS TH EPA TOTU MOYEN , 2 oi copoi mes avlay
ES mharay | zUŸwr/c Gp QE > ci Oeoy Toù
CUVMET UT ON ; ; VoCas , op@Evs , 4; ci Bec TouTois
e > \ # re
érapyüs Ecaflopice | cum Qegilistey ro roQisi# dv Aérya,
. EPL SE = » » / È] e »
las u® sav] EyhEy Evo , évo € ÉMIS HpLOVILOY , av) évyles
_. \ e : < ,
Acyolar. ZaxQus yap oi becs Epixarw L os EWOlXS ToU Tales
SAN / + Te CS / / A je /
tri. Mévours jap Ev Taus vañcert rod mulegs , 1) ds me gEproilas
h \ 02 V4 à) 4 7 \ # € /
ARS Thy Toù moruou O'ypoupyias. P'obyris yap ss 4 æpood'os
or , 194 às magepeopQos tri, Ales un mévroy TÈv preas ay
/ \ » 1 \ € CE ne / >
miepeoura ras dirias, Kai @s do Toy myyaiey ide»
GRAS FRA dur I ui nale pr xyp@T dpusvet Th TOd
Y » 2 A]
norpou d'ypuouyyies. À meograropiuoiles ousnverw torciiett , 54
« \ C2 / 7 Se =
os yenilus ray dieser es. Proclus , tertio in Parme
nidem libro, MS. inbibliorhecä Harlaiana , n°, 5671»
C 1j
Nombres de
Pythagore ,
les mêmes
que les idées
q
de Platon.
36 IDÉES 1NNÉES
25. Quant au fentiment de la fecte [rali-
que , il eft affez généralement reconnu de
tous Les favants que Pythagore & tous fes dif-
ciples ont prefque entendu la même chofe
par les nombres , que ce que Platon a enfer-
gné fur les idées. M. Bruker a mis cette
queftion hors de doute dans la favante hif-
toire qu’il a écrite des idées, & dans plufieurs
endroits de fon excellent ouvrage fur lhif-
coire de la philofophie. Il fait voir que les
Pythagoriciens s’exprimoient, à l'égard des
nombres , dans les termes mêmes employés
par Platon ; il les appelloient 74 üyrws üvra,
reyerà exiflentia (1); c’étoient les feuls êtres
fol. p. 126. Vid. Fabric. bibl. gr. tom. 8 , p. s30.
Fragmentum ex illo Commentario produxit Clericus
Not. in Oracul. Chaldaor. v. 100 , tom. 2 , Oper.
Philofoph. p. 361 ; federrorem commifit in citatione.
(1) Ta ous we, ra nala, 30 orales ds: diurenoïyle
éy rü xooua , 9) oùdrole rod eiveu Elise | oO im Gex.
rar” dy y Tu AE | 4g4 Gy raw perouriay ExrTey XoiTey :
F ouonwubs lo anouévar , To dE ri Aéyélei, 494 èsh
Reverà exiftentia, quæque fecundum idem , ac eo-
dem femper modo funt perfecta , & nunquam, ne
CHEZ LES, ANCIENS. 37
‘qui exiffaffent.... véritablement , éternelle.
ment immobiles ; ils les regardoient comme
des êtres incorporels , & par qui les autres
êtres participoient à l’exiftence.
26. Héraclite adopta les premiers princi-
pes des Pythagoriciens, & les expofa d’une ma-
niere plus claire & plus fyftémarique ; 1l di-
foit (1), que tout dans la nature étant dans
minimo quidem temporis momento , immutantur.
Hæc vero efle expertia materiæ , ac quorum per par-
ticipationem cætera , quæ æquivoce dicuntur efle ,
funt ac dicuntur : ut ex Pythagorà habet Nicomachus
in Theologumenis Arithmeticts.
(1) ZEuéen n ep À UdVoy d'oba rois timodet , dix Ta
mue mepi annSies | rois H'egrAcileios Acyois | @s may
rar À cuQyley des parler | üe Hmip imishun Tios sai, nf
Qovaris , éréegs dei Tuas Qous es , map ras did yles 7
gsvolres" où yap tive peoïlas imiolnem. ADN 0 pi Toxeg-
zys Ta xaŸodov où poensa mois, oùOt Tous ogarpous. Oi dk
Exôpires , 1 Ta rule , oflav idtus megrwyopeurer" bis
cuééeues dulois eo ra avla Aoyo , male idtus ea À
xu%onou neyouwar. Contigit vero opinio de ideis , illis,
qui proptereà quod de veritate perfuafi eflent , adhæ-
ferant Heracliti placitis, quôd finfibilia omnia femper
fluane. Quôd fi igitur fcientia alicujus rei vel pru
dentia fit , oportere alias quoque exiflere naturas pers
C ui
Opinion
d'Héraclire,
Démocrite a
précédé Mal-
lebranche en
fon fyltême ,
fuivant Bay-
le.
38 IDÉES INNÉES
un changement perpétuel , il devoit y avoir
des êtres permanents, [ur la connoiffance def-
quels toute la fcience fût fondée, & qui devoient
Jervir à régler notre jugement fur Les chofes [en-
Jibles & changeantes.
27. Démocrite enfeigna aufli l’exiffence
des idées univerfelles des chofes ; qu’il croyoit
être participantes de la Divinité ; d’où elles
étoient émanées (1). M. Bayle (art. DEmo-
CRITE , 2016 p.), en comparant le fentiment
manentes prater fenfibiles. Non enim fluentium dari
fcientiam. Verüm Socrates quidem univerfalia non
feparata pofuit, neque etiam definitiones. IIli verd
fepararunt , ac ejufmodi ( univerfalia ) ideas entium
appellarunt. Quarè ferè accidit eis eâdem ratione , ut
omnium , quæ univerfaliter dicuntur , idea fint. Ariflo-
teles metaphyf. L. XI. c. 4, p. 957.
(1) Democritus tüm cenfet , imagines divinitate
præditas inefle univerfitati rerum ; tum principia ,
mentes que, quæ funt in eodem univerfo , Deos effe
dicit; tum animantes imagines, quæ vel prodeffe
folent , vel nocere ; tüum ingentes quafdam imagi-
es, tantas que , ut or mundum complec-
tantur , extrinfecus. Crc. de natur& Deor, lib, E,
fe, 165 , p. 200.
CHEZ LES ANCIENS. 339
de Démocrite avec le fyftème de Mallebran-
che, s'exprime en ces rermes: » Prenez bien
» garde que Démocrite enfeignoit que les
» images des objets font des émanations de
» Dieu , & font elles-mêmes un dieu ; & que
» l’idée actuelle de notre ame eft un dieu ; y
» a-t-1l bien loin de cette penfée à dire que
» nos idées fontren Dieu , comme le P. Mal-
» lebranche l’a dit, & qu’elles ne peuvent
» être une modification d’un efprit créé ? ne
» s’enfuit-il pas de là que nos idées font Dieu
» Jui-mème? « Non, pourroit répondre un
Mallebranchifte à M. Bayle ; la conféquence
que vous tirez ici contre le P. Mallebranche
n’eft ni jufte, ni néceffaire. Dire que Dieu
nous communique les idées qui font en lui,
n’eft pas dire que nos idées font Dieu lui-
même ; ce font toujours les idées éternelles de
Dieu, que nous appercevons ; & quand nous
les appellons nos idées , nous parlons ainfi
abufivement, pour dire la maniere dont nous
contemplons ou concevons les idées que Dieu
nous communique. Mais ce n’eft point ici
le lieu de défendre Mallebranche, il fufhir à
C iv
Doctrine de
Plaron fur les
idées.
40 IDÉES INNÉES
mon fujet de repréfenter l’analogie de fes
principes avec ceux des anciens.
23. Paffons à Platon , celui de tous les
philofophes qui, pour avoir le mieux expli-
qué & détaillé ce fyflème, a mérité d’en être
regardé comme Île premicr auteur. » Platon
» donnoit l'appellation d'idées à des fubftan-
» ces éternelles, intelligentes, qui éroient,
» à l'égard des dicux, les formes exemplaires
» de tout ce qui avoit été créé, & à l'égard
» des homines l’objet de toute la fcience, &
» de leur contemplation pour apprendre à
» connoîïtre les chofes fenfibles. Le mon-
» de /1) avoit toujours ex1fté, fuivant Pla-
(1) To de intoxemléor mepi vod ( xormov) | ærpos mrorip 9
P margderyuéray 0 reilaveusves duroy àmtipy@Qero" OT og
mpos To aol Taurt , 19 druirus yo, n pos To yéyoves*
& péey d'u vues Est 0Ùe D xorpes , 0TE d'mpuovpyos dryabos ,
d'énor, ds mpos ro did'ior tonemer. Eid'e (0 und eimeiv ren Begue )
epos ro yeyos. Tail dŸ cugés | ori pos ro ider,
Illud confiderandum eft de univerfo, ad quod
exemplar opifex illud fit architectatus, effeceritque,
an ad illud, quod earum eft rerum , quæ eodem
modo femper habent , quod femper unum, & idem
eft fui fimile, an ad id, quod generatum , ortumque
CHEZ LES ANCIENS. 41
» ton, dans les idées de Dieu , lequel ayant
» enfin déterminé de le faire exifter tel que
» nous le voyons , le créa fur ces exemplai-
» res éternels, & forma le monde fenfible
» fur l’image du monde intellectuel «. Cicé-
ron , parlant de ce fentiment de Platon,
dic(1): » qu'il appelle les formes des cho-
» fes idées ; qu'il n’accorde point qu’elles
diximus. Atqui fi pulcher eft hic mundus, fi bonus
eft ejus opifex, perfpicuum eft , ipfum ad fempiter-
num illud exemplar refpexiffe , fin minus, (quod diétu
quidem nefas eft ) generatum exemplar fibi propo-
fuit. At quilibet fanè perfpexerit , fempiternum exem-
plar fibi propofuifle. Plato in Timao, tom. 3 , p.18.
Et in eodem Dialogo : opuonoynleor sbar ro nale ravle
bo ados | dyewrlor, 2 due gr, oùo* €is tælo tird eg opee-
vor Do AANoTEy | oùre duo is &GAAo molor , doggilor dE, #)
das évæicOnlor roro, © d'u vonris inner émirxemiw. Necefle
eft, efle fpeciem , quæ femper eadem fit, fine ortu,
atque interitu , quæ nec in fe accipiat quidpiam
aliud aliundè , nec ipfa procedat ad aliud quidpiam,
fenfuque corporis nullo percipiatur ; atque hoc eft,
quod ad folam intelligentiam pertinet.
(1) Has rerum formas appellat ideas Plato , eafque
gigni negat , & ait femper efle, ac ratione, & intelli-
gentia contineri, Cic, de Orat. N°. 10.
Occafon de
cette opinion
chez Platon,
S. Anguftin
a fuivi Pla-
ton, & Mal-
lebranche les
a copiés LOus
deux.
42 IDÉES INNÉES
» aient été produites , mais qu’il leur donne
» une exiftence éternelle, & les fait réfider
» dans la raifon & l’intelligence de Dieu «.
29. Nous venons de voir, en expofant
le fentiment d'Héraclite , ce qui pouvoit
avoir porté Platon à adopter cette doétrine.
Admettant comme lui la fluétuation perpé-
tuelle des chofes fenfibles, il fentoit que les
fondements de la fcience ne pouvoient fub-
fifter , s'ils n’étoient établis fur des êtres réels
& permanents, qui puflent être l’objet cer-
rain de nos connoiffances, & que l’efprit
devoit confulter , pour connoître les chofes
fenfibles. On voir bien, par les paffages cités
de Platon , que c’étoit là clairement fa pen-
fée , & il fufhit de les mettre fous les yeux
pour faire voir que Mallebranche à puifé
dans cet auteur tout ce qu’il a dir fur ce fujer
dans fa Recherche de la vérité, & fes Entre-
tiens métaphyfiques.
30. Je ne rapporterai plus qu’un paffage de
faint Auguftin, qui donnera la plus grande
évidence à cette affertion, & fera voir que
c'eft à grand tort que les Théologiens fe font
CHEZ LES ANCIENS. 43
récriés contre Mallebranche, pour avoir fou-
tenu un fentiment qu’ils accufoient d’impiété
en lui, fans jamais penfer à faire la même
imputation aux auteurs originaux qu’il avoit
copiés. On verra par ce paffage que, felon
faint Auguftin , /es idées fon éternelles & im-
muables ; qu’elles font les exemplaires ou les
archétypes des créatures ; enfin qu’elles font
en Dieu: en quoi il différoit de Platon qui
les féparoit de l’effence divine ; & on jugera
aifément du rapport parfait qui fe trouve
entre ce faint Pere & le philofophe mo-
derne (1).
(1) Ideas Plato primus appellaffe perhibetur : non
tamen , fi hoc nomen antequam ipfe inftitueret, non
erant quas ideas vocavit, vel à nullo erant intelle&tæ.
Nam non eft verifimile , fapientes aut nullos fuifle
ante Platonem ; aut iftas , quas Plato ideas vocat,
quæcunque res fint, non intellexifle. Siquidem in eis
tanta vis conftituitur , ut nifi his intellcétis fapiens
efle nemo poffit. . . . Sed rem videamus, quæ maximè
confideranda eft , atque nofcenda. . .. Sunt idea prin-
cipales formæ quædam , vel rationes rerum fhabiles ,
atque incommutabiles , quæ ipfæ formatæ non funt,
ac per hoc æterne , ac femper eodem modo fefc ha-
Leibnitz eft
de Pavis du
P.Mällebran-
che,
44 IDÉES INNÉES
31. Leibnitz étoit un peu de l'avis du P.
Mallebranche (1), & il étroit affez naturel
qu’il le füt , ayant adopté les mêmes prin-
cipes de Pythagore , de Parmenide & de Pla-
ton , comme nous Le ferons voir en paflant de
bentes, quæ in diviné intelligentiä continentur. Et
cüm ipfæ neque oriantur, neque intereant , fécundèm
eas tamen formari dicitur omne , quod oriri, vel interire
poteff. ... Quod fi re@é dici , vel credi non poteft,
Deum irrationabiliter omnia condidiffe , reftat, ut
omnia ratione fint condita. Nec eâdem ratione homo,
quà equus : hoc enim abfurdum eft exiftimare. Sin-
gula igitur propriis funt creata rationibus. Has au-
tem rationes ubi arbitrandum eft efle , nifi ex ipf&
mente creatoris ? Non enim extra fe quidquam pofi-
tum intuebatur, ut fecundum id conftituerit , quod
conftitucbat: nam hoc opinari facrilegum eft. Quod
fi kæ rerum omnium creandarum , creatarumve rationes
in divind mente continentur , neque in divinä mente
quidquam , nifi æternum, atque incommutabile,
poteft efle, atque has rationes principales appellat
Plato : non folim funt idee , fed ipfa vera funt , quia
atérne funt , & ciufmodi, atque 2ncommutabiles ma-
nent; quarwm participatione fit , ut fit quidquid ef,
quomodD eff. S. Auguf. lib. 83, quafi. 46.
(1) Non tamen difplicuit in totum Mallebranchii
CHEZ LES ÂNCIENS. 45
la métaphyfique à la phyfique ; il fuffira de
dire ici qu'il entendoit par fes monades(1)/es
êtres véritablement exiftants ; des fubftances
Jimples ; images éternelles des chofes univer-
félles.
opinio magno philofopho G. G. Leïbnitio, qui in
meditationibus de veris, & falfis ideis, A&is Erudir.
1634, menf. Nov. p. $41, infertis, eam, ait, ft fano
fenfu intelligatur , non omnind fpernendam elfe, ita
zamen , ut præter illud , quod in Deo videmus , neceffe
fit, nos quoque habere ideas proprias , id eff, non quafi
icunculas quafdam , [ed affeitiones , five modificationes
mentis noffre refpondentes ad id ipfum , quod in Dea
perciperemus. Brucke , p. 1166.
(1) In Epift, ad Hanfchii Traëtatum de Enthufiaf-
mo Platonico. Et fimulacra univerfitatis. Ta olus tÿla,
fubftantias fimplices , Deum , animas, mentes.
Les qualités
fenfbles re-
connues des
anciens, pour
avoir toute
leur exiftence
dans l'ame.
46 DEs QUALITÉS
CHA P'ITIReE DEL
Des Qualités [:nfibles.
32.[ n'y a point de partie de la philofophie
qui ait fait moins de progrès chez le vul-
gaire que celle qui, traitant des qualités fen-
fibles , les bannit entiérement des corps pour
les faire réfider dans l’efprit. Les plus cé-
lebres philofophes de l'antiquité ont reconnu
cette vérité qui naïfloit naturellement des
principes de leur philofophie, & dont ils dé-
duifoient les mèmes conféquences. Démo-
crite, Socrate , Ariftippe , chef de la fecte cy-
rénaïque , Platon , Epicure & Lucrece ont
dit clairement que le froid , la chaleur , les
odeurs & les couleurs n’étoient que des fen-
fations excitées dans notre ame, par la diffé-
rente opération des corps qui nous environ-
nent , fur chacun de nos fens ; & 1l eft aifé de
faire voir qu'Ariftore même étoit de l’opi-
nion (1), que les qualités fenfibles exiflent
(1) Arifl. Problem, 33, fe, 11; p.741, tom. 2.
SH NU SLL/B IL ETS 47
dans l’ame , quoique, pat fa maniere obfcure
de s'expliquer là-deffus , & fes qualités oc-
cultes , il ait donné fujet de croire qu’il pen-
foit autrement; 1l n’y a que les fcholaftiques,
que je fache , qui aient pofitivement cru &
enfeigné que les qualités fenfibles exiftoient
dans les corps comme dans les efprits, &
qu'il y avoit dans les corps lumineux , par
exemple , la même chofe que ce qui eft
en nous quand nous voyons la lumiere. Et
comme la philofophie fcholaftique s’étoit
emparée pendant quelques fiecles de tous
les efprits , lorfque Defcartes, & Malle-
branche après lui, fe font élevés contre un
préjugé aufli répandu , & qu'ils fe font donné
Senfus ab intelligentià fejunétus laborem velut infen-
fibilem habet , unde diétum : mens vidit, mens audit.
Noïs opé | x) voùs dxouet, Et de fenfu & fenfili, c.1, p.665.
Non anima ipfa in oculi extremo, fed in parte interna
exiftit. — Wid. lib, 2 de animé, cap. 12, p. 647,
tom. 2. Et Epicharmum in Clem. Alex, Strom, lib. 2,
P- 369, vide & Jamblichum de vitä Pythagore , c. 32,
P. 192: Ciceron. Edit. Elzevir, p. 1057, col.1,
lin, 14 6 feg. Porphyr. de vité Pythagore , p. 45.
48 Ds 1Quraira TÉ s
beaucoup de foins pour tirer le vulgaire des
philofophes de l'erreur grofliere où 1l fe trou
voit plongé à cet égard, on ne s’eft point
apperçu qu'ils ne faifoient que renouveller
les même vérités qu’avoient enfeignées Dé-
mocrite , Platon, Ariftippe & Sextus Empi-
ricus , & appuyées des mêmes arguments
qu'avoient employés ces philofophes, quoi-
que quelquefois étendus davantage; onen a
fait vout l'honneur à ces modernes , parce-
qu'ils ont beaucoup crié contre l'erreur ;
comme fi elle eùt été univerfelle; & on n’a
pas daigné approfondir fi en effet 1l en étoit
ainfi. Car pour peu qu’on eût fait attention
à ce qu'ont dit les anciens fur cette matiere,
& qu’on eût confulté leurs écrits, on auroit
trouvé que quelques-uns , comme les Ciré-
naïques, les Pyrrhoniftes, & d’autres, non
feulement n’admetroient dans les corps au-
cune faculté d’exciter en nous des fenfations,
mais même qu'ils mettoient quelquefois en
doute l’exiftence des corps ; doute qui a paru
fi extravagant à notre fiecle , lorfque le P.
Mallebranche l’a avancé, & quieftcependanr
aflez
SE INT SE D ILES S. 49
affez fondé felon les regles de la bonne lo-
gique. Cette négligence à vérifier l’origine
de nos connoiflances , n’éroit cependant pas
générale : Gaffendi (1) avoit publié un traité
fur les qualités fenfibles, & il avoir donné
aufli un abrégé de la philofophie des Pyrrho-
niftes fur ce fujet, avant que Defcartes eût
encote entrepris de la traiter comme il la
fait depuis ; de forte que parmi les modernes
mêmes , Defcartes n’eft pas le premier qui
ait clairement diftingué les propriétés de l’ef-
prit d'avec celles du corps, comme plufieurs
favants paroiflent encore le croire (2), &
quant aux anciens, une courte expofition de
ce qu'ont dit Defcartes & Mallebranche fur
cette diftinétion fi effentielle, comparée avec
ce que les anciens en ont enfeigné , mettra
bientôt le leéteur en état de décider à qui
cette découverte doit être attribuée,
(1) Gaffendi de fine logic, p. 71 & 372 & feg. Oper.
tom. 1. Lugdun, 1658. fol.
(2) Formey , Recherches fur Les éléments de La ma-
tiere , in-12, p. 8, © quelques autres,
Tome I, D
Opinion de
Defcartes fur
ce fujet.
Sol: D'Eis 1Q:UPANLIT T É s
33. Defcartes commence par remarquer
qu'il n’y a perfonne qui ne foit accoutumé
dès fon enfance à envifager les chofes fen-
fibles comme exiftantes hors de fon efprit,
& ayant une reffemblance avec les fenfations
ou les perceptions qu’il en a; de façon que
voyant la couleur , par exemple, d’un objer,
nous penfons voir quelque chofe hors de
nous, & femblable à l’idée que nous éprou-
vons alors de la couleur ; & par cetre habi-
tude à en juger ain, nous n'avons jamais le
moindre doute à cet égard. Il en eft ainfi de
toutes nos fenfations (1); car quoique nous
ne penfions pas qu’elles foient hors de nous,
nous ne les regardons pas ordinairement
comte exiftantes feulement dans notre ef-
prit, mais bien dans notre main , notre pied,
ou dans toute autre partie de notre corps ; il
n'eft pas plus certain cependant que la dou-
leur que nous reflentons , comme étant par
exemple dans le pied , n’eft pas quelque chofe
(1) Defcartes Principiorum Philofophiæ pars 1,
Jet. 66; Blaeu, Amfi, 1692, ine4,
DUR NISSIVB /L CES S. si
hors de notre efprit exiftant dans le pied,
qu’il ne l’eft que la lumiere que nous apper-
cevons (comme dans le foleil ) exifte en cet
aftre, & non dans notre efprit : mais tous les
deux font des préjugés de notre enfance: ainfi
nous difons que nousappercevons les couleurs
ou que nous fentons les odeurs dans les objets,
lorfque nous devrions dire qu’il y a quelque
chofe dans les objets qui produit en nous ces
fenfations. Les principales caufes de nos er-
reurs viennent donc des préjugés de notre
enfance, dont nous ne pouvons pas aifément
nous délivrer dans un âge plus avancé.
34. Mallebranche faifit cette idée de Def-
cartes, & l’étendit même davantage. Dans
fon ouvrage célebre de a Recherche de la vé-
rité , il commence (1) par chercher la fource
de nos erreurs dans l’abus que nous faifons de
notre liberté, & dans la précipitation de nos
jugements ; de façon que nos fens, dit-il, ne
nous jetteroient point dans l’erreur, fi nous
(1) Mallebranche , Recherche de la vérité, Liv. 1,
chap. 5.
Di
Mallebran-
The traite cet-
te matiere
avec beau-
coup de clars
tés
2 20 DES IOUALUTÉS
ne nous fervions point de leur rapport pour
juger des chofes avec trop de précipitation.
Par exemple , quand on voit de la lunuere,
il eft très certain qu’on voit de la lumiere ;
quand on fent de la chaleur, on ne fe
trompe point de croire qu’on fent de la cha-
leur ; mais on fe trompe quand on juge
que la chaleur & les odeurs que l’on fent
font hors de lame qui les fent, Il combat
enfuite les erreurs qui viennent de nos juge-
ments : 1l dépouille les corps des qualités
fenfibles , & enfeigne comment l'ame & le
corps contribuent à la produétion ce nos fen-
fations , & comment nous les accompa-
gnons toujours de faux jugements. Il blîme
ceux qui jugent toujours des objets par les
fenfations qu'ils excitent en eux, & par rap-
port à leurs propres fens ; au lieu que les fens
étant différents dans tous les hommes , ils
devroient juger différemment de ce qui les
affecte, & ne pas définir ces objets par les
fenfations qu’ils en ont ; autrement ils parle-
ront toujours fans s'entendre, & mettront de
la confufion par-tout.
S'EUN STABLE Es. 53
35. Si nous examinons à préfent tout ce
que les anciens ont enfeigné fur ce fujet ,
nous ferons furpris de la clarté avec laquelle
ils fe font expliqués, & nous ne pourrons pas
comprendre que l’on aitregardé comme nou-
velles, des opinions expofées dans leurs écrits
avec tant de force & de précifion. On ne peut
pas même dire que les modernes aient donné
un tour nouveau à ces opinions, car 1ls n'ont
fait que raifonner fur les mêmes principes,
& employer les mêmes comparaifons qu'ont
apportées les anciens pour les foutenir.
36. Démocrite eft le premier qui ait dé-
pouille les corps des qualités fenfibles , quoi-
qu'il ne foit pas le premier auteur (1) de la
philofophie des corpufcules , fur laquelle
cette diftinction eft fondée. Ce grand homme,
n'admettant pas pour tous principes les atomes
& le vuide, différoit de tous ceux qui l’a-
voient précédé dans cette opinion, en ce
(1) » Leucippe l’avoit précédé en cela, & (fuivant
» Poflidonius & Strabon )} Mofchus , Phénicien, qui
» vivoit avant la guerre de Troyes, avoit jeté les
* premiers fondements de cette philofophie »,
D iij
Les modet-
nesn’ontrien
dit de nou-
veau à ce fu-
jet
Opinion de
Démocrire
fur les quali-
tés fenfibles,
SALOPES: Qu AL ÉTÉ S
qu'il difoit que les atômes éroient deftitués
de toutes qualités ; en quoi il a été fuivi par
Epicure. Il dérivoir ces qualités du différent
ordre & de la différente difpofition des atomes
entre eux, ainfi que de leur différente figure,
qu'il difoit être la caufe de tous les change-
ments qui arrivent dans la nature ; les uns
étoient ronds, les autres angulaires , d’autres
droits, pointus , crochus, &c. » Ainfi ces
» premiers éléments des chofes n’ayant en
» eux n1 blancheur , ni noirceur naturelle,
» nidouceur, ni amertume, ni chaleur, ni
» ni froid, ni aucune autre qualité , il s’en-
» fuivoit que la couleur, par exemple, étroit
» dans l'opinion (1), ou dans la perception
(1) Vide mentem Democriti in Arifiotele , Metaphyf.
Z 1, c. 4, 1m Laertio, L. 9, feit. 4ç , in Seflo Empi-
rico , l. 1, feéf. 114. Amuoxpilos us mowlilus ixGundy*
De Quri voue durs, vope bspueor, &ilin dE éroux x) xevar,
Democritus qualitates ejecit ; dicitenim: d//poficione
calidum , & frigidum ; verè, & realiter verd, atomi,
& vacuum ; »#» , opinione , ex atomorum difpof-
tione, ortä, dulceeft, & amarum; opinione frigi-
dum , & calidum ; opinione calor ; irsÿ verè autert
—
GIE UNIS RE R7LCE, S. $5
» que nousenavons, ainfi que l’amertume
» & la douceur , lefquelles exiftent dans
» notre opinion , fuivant la maniere difté-
» rente dont nous fommes affeétés (1) par
» les corps qui nous environnent , rien
» n'étant de fa nature ou jaune, ou blanc, ou
» rouge ; doux ou amer ». Il alloit plus loin,
El
il indiquoit quelle efpece d’atômes devoit
produire telles ou telles fenfations ; les
atomes ronds, par exemple, donnoient le
goût de la douceur ; les atomes pointus &
crochus un goût piquant ; les corps qui
aroux | & inane. Quæ autem exiftimantur ( v0e4/Céle )
& reputantur fenfilia, ea non funt reveràa xa &nn-
Sete, Sola autem funt atoma, & inane. Nour autem
eleganter dicit , non tantum, quod reales effe quali-
tates plerique putent , & opinione fibi entia vera fin-
gant , fed quod atomi quoque ita difponantur ( x-
mew), ut indè hujufmodi opinio exfurgat, Clariff.
Brucker , Hifi. Crivic. Philof. tom. 1, p. 1191 & feg.
(1) E‘vye où pers peer Quoun ever alu, æagx Vo mas
Eco cop , xaGamep 0 Auraiapyos. Siquidém nonnulli
putant eam (animam) nihil efle aliud , quam ali-
quo modo affeétum corpus, ficut Dicæarchus, Sexvus
Empiricus ad Mathem, lib. 7, Jet. 349.
Div
Sextus Em-
piricus fur
Démocrite.
56 .: Des QUALITÉ Ss
étoient compofés de parties angulaires & plus
groflieres , s'introduifant difficilement dans
les pores, produifoient la fenfation défa-
gréable de amertume & de l’aigreur , &c. en
quoi les Newtoniens l’ont imité, en voulant
donner l’explicatiôn de la nature différente
des corps (1).
37. Sextus Empiricus, expofant la doétrine
de Démocrite, dit » que les qualités fenfi-
» bles(2),felon ce philofophe,n’avoient de réa-
œ 4
(1) Voyez ci-après feit. 43.
/ € … De
(2) Amuoreslos OÙ | ore puir voip Ta Qaoueæ Tais
s / /
cuQirirt, 30 roro Aéyeu pnde Quina xala dAdEY ,
/ x m7 e
SAr& por rule d'obus" daydts d'e ty rois oùriy ÜTépyuv , TS
drouous eivei 1j xevér. Nôpeo vyup, Qnri, Yon, ) veus
à) / PAT ki Ÿ \ / Je 2% a
TTIxpOY , yat ÉPkO » You UZCpOY ’ Vo 22 2 91 £TEN £
3/ N nie , 1 7 Û / x
drop , 19 neo mtp vapiQiles pév cites, xt O'obadere ra
\ : f À \ oi \ \
mine, oùx Est de nola ahiQuay rare. AG Ta roux
, ALP N \ ,» à " , / «
prôoy , mai To xexov, E'y OÙ rois xogluÿlypiois | xæintp Ürtyn-
7 à Lg > / / À / LA , ” 5
géves Tais aiyrert ro xpéros This misews vais , cdd tr
ee / / \ € n ne
To) ivpirxtræi roëro xala nadGay, Quoi Vap, pis dE Tà
\ 5/ A \
gr toi , oO œrpexts ouviques | péleminle de xolæ Te
/ / \ /
g@poilos Agir , Au imuoio lo , rat dÿlisneagoy la.
J .\ \ rs « IL
Kaj mæu , Quoi, éTen pv vèy o74 ojoy Exusoy &s , # où
#50, où cuituey, moe d'idinalar.
SEINS NRL ES s7
» lité que dans l’opinion de ceux qui en étoient
» différemment affeités ; que c’étoit dans cette
» affection que confifloit le doux & l’amer , le
» chaud & le froid ; & qu’ainfi nous ne nous
» crompions pas en difant que nous [entions
» telles impreffions ; mais que nous ne pou-
» vions en rien conclure [ur la difpofition des
» objets extérieurs ».
Democritus autem ea quidem tollit , qua apparent
fenfibus , & ex is dicit nthil verè apparere , fed folèm
ex opinione : verum autem efle in iis, quæ funt,
&ffe atomos , & inane. Lege enim ef}, inquit, dulce,
& lege amarum : lege calidum , & lege frigidum : lege
color : veré autem atoma , & inane. Que itaque effe
exiflimantur , & reputantur fenfilia , ea non funt re-
verà, Sola autem funt atoma & inane. In confirma-
toriis itidem , quamvis fit pollicitus , fe fenfibus
vin , fidemque attributurum , nihilominus invenitur
cos condemnate. MVos autem, inquit, re ipfà quidem
rihil vert intelligimus , fed quod nobis fe objicit ex
affectione corporis , & eorum, quæ ingrediuntur , &
ex adverfo obfiftunt. Et rursus: quod verè quidem
nos quale fit, vel non fit unumquodque , neutiquam
intelligimus , multis modis eft declaratum. Sexrus
Empiricus , p. 399.
58 Des QuALITÉSs
Protagorssa 38. Protagoras , difciple de Démocrite ;
nn difoit que l’homme (1) étoit la feule regle de
l'opinion de = . se vs
lon er <outes les chofes qui font ; que toute leur exiften
pen des ce étoit dans l’impreffion feule qu’elles faifoiene
Jur les hommes , de façon que ce qui n’étoit
point appercu n'avoir aucune exiflence (2).
Ain il porta encore plus loin que Démocrite
les conféquences de fon fyftème ; car ad-
mettant ,avec fon maitre , dans les corps, les
changements perpétuels qui faifoient queles
chofes n’étoient pas long-temps les mêmes,
(1) Kai o Ipalaryésgs de Roëniles male xpnéler sivet
, \ T4 . M \ «1 € # e AS , C1
pérog roy érJpemor pes oilar | às ts 7 OÙ oùx clan,
ds oùx Esi° éregr ue Atyar ro xeilneav. Protagoras quo-
que vult omnium ypmuére rerum menfuram efle ho-
minem: entium , ut funt : non entium ut non funt:
menfuram quidem appellans criterium. dem Pyr-
rhon. Hypotypos, lib. 1, feéf. 216.
(2) Toëles roi, xaT &vler, F ovlar relire © Spa
. / \ 1 1 ” > à / \Y 4
mes mule yap Ta Qanouert Trois GYDpURUIS | Hg EI. Tæ
À perde À parer Qarouese , 00 tsn. EÎt erco, fe-
eundüm ipfum , homo criterium rerum , quæ funt.
Omnia enim , que apparent hominibus , etiam funt :
qua autem nulli hominum apparent , ne [unt quidem.
Idem ibid. feët, 119,
SENSIBLES. s°
il en conclut que rout ce que nous voyons ,
que nous entendons , ou que nous touchons , n'é-
toit ainft que dans notre maniere de l’apperce-
voir, & que la feule regle véritable [crirerium]
des chofes éroit dans la perception que l’hom-
me en avoit. Je laiffe à juger au lecteur fi certe
maniere de s'expliquer de Protagoras ne peut
pas avoir donné à Berkley l’idée du fyftème
qu'il a fubtilement défendu de nos jours, &
dans lequel il foutient qu’il n’exiffe, des objets
extérieurs , que les qualités fenfibles appercues
par notre efprit, & que conféquemment tout
exifte dans notre efprit ; qu'il ne fauroit y
avoir d'autre fubfiratum , ou foutien de ces
qualités , que les efprits dans lefquels elles
exiftent, non par maniere de mode ou de
proprieté, mais comme une chofe appercue dans
celui qui l’apperçoit. Cette opinion , qui a
paru fi étrange & fi inouie à tout le monde ,
eft cependant clairement contenue dans les
paffages que je viens de citer, & dans ceux
que j'indiquerai ci-deflous (1).
——
(1) Plato in Theatheto, p. 152 & eg. Confer.
Ariftippe a
parlé fur les
jones fen-
ibles , com-
me Defcertes
& Maïileoran-
che ont fait
après lui.
éé PES Quart rés
39. Je reviens à Defcartes & à Mallebran-
che, & je rapporterai ici les fentiments d’A-
riftippe , difciple de Socrate fur le fujet en
queftion, Il femble entendre parler ces deux
philofophes modernes, lorfqu’on voit Arif-
tippe recommander à l’homme »d’être en
» garde fur le rapport de fes fens , lui
» difant qu'ils ne l’informent pas touiours
» de la vérité ; que nous n’appercevons pas
» les objets extérieurs tels qu'ils font, mais
» feulement la maniere différente dont ils
» nous affectent ; que nous ne favons pas de
» quelle couleur ou de quelle odeur font tels
Cratyl.... Ariflotel. Metaphyfic. lib. 3 , c. 6. lib. 10,
cap. 6..., Cicéron, Academicarum Quaffionum, L. 4,
Jfeët. 256, p. 36.... Eufebii Prapar. lib. 14, c. 210...
Hermias , trrifio Gentil, fe&t. 9. Voici un paffage de
Berkley qui préfente une conformité parfaire avec la
maniere de s'exprimer de Protagoras : The feveral
bodies then that compofe the frame of the world have
not any fubfiflence without a mind: their rss is to
be perceived or k1own; and as long as they are not
perceived by me, or any other thinking BEING , they
have no shadow of exiflence at all. Berkley , Prin
ciples of human knowledge.
BUE ML SL BH )E ES. 61
» cofps, mais feulement de quelle maniere
» nous en fommes affectés ; que nous ne pou-
» vons pas comprendre les objets en eux-mê-
» mes, mais que nous jugeons feulement des
» impreffions qu’ils font en nous: ainfi c’eft le
» jugement que nous prononçons fur la na-
» ture des objets extérieurs , qui eft la caufe
» de nos erreurs ; c’eft pourquoi, fi nous ap-
» percevons une tour (1) qui paroifle ronde,
(1) Ei yap d'une megrmimloilos fuir megaQigoès | trip ou
H9Ÿ KEXNATHLENO , Ty pv air dhnI Ds TuroQui Déryovres ,
megraroQainoes de ox Eüvris ort sRoylU os & mrüpyes ist,
n de xémy téxhaçes, ru man rù airby Quilérmale Bebaodetr.
Ta d éxles crus yen | ouonoytin ox Sthouri &AN ©
ixlvus irroes , 4g4 To ropouQes nexleo | où immer , oùde
roger, las dpt ro seyylon ai , 494 To rxæmicTai T#y
SV, 05 cnanmar, où seyy[cro dvaryxn Toy FUpyoY HÉVEWe
To yo dduor 1Q 65 mérode 4 is, xeA@TUEIOY ES, À
amy de, d@ #s To d'une, oùx rl XELRAT EM,
Quippè, imagine nobis oblatà rotundà , aut frac-
à, dicunt Epicurii fenfum verè informari , non fi-
nunt tamen dicerenos, turrim efle rotundam , aut
remum infraétum reverà : equidem affectiones eorum
vifa confirmant ; externa ita habere , ut vifa nobis
funt , non fatentur. Sed ut Cyrenaici equari fe, &
é2 DES Q'uArtTTÉs
» Où une rame qui paroiffe brifée dans l'eau ,
» nous pouvons bien dire que nos fens nous
# font ce rapport; mais nous ne devons pas
parietari dicunt , de equo, & pariete nihil affirmant:
fic etiam dicendum eft rotundari , aut obliquari vifum
Epicureis , non interim neceffe turrim elfe rotundam ,
autremuin fraëtum ip[um dicere. Quippè fimulacrum,
quod vifum adficit, fraétum eft ; remus à quo id
fertur, nequaquam. Plutarc. ady, Colotem , tom, 2,
pe 1121. 4, BC.
Où Aéyourt ro éxles ere Bepu, AA To ty œdr4 médis
yéyoe rowodro. Gp où rænlér to Tr Aéryouers épi râs yivoius ,
Dri To enros où Quriy tive yAUxd | rudes OÙ Ti, 1 niv
areph dulyr yeyorties roro: à dÙ Aéyar dJp or: Qailu-
ctey Aeubanuv , & de drdpares ich ph aidée , mode
Egs ras dpopues 3 où zrape À Aeyorlar raumrunud % Qaile-
iay Aube | ti dE raumino ol, pin mogramQairee:
Fm Cu, no or cle gyforor, ANG riQailarue mes dus,
0 rinaua olegylurouides yep; w Alu, Qére ris. G2N
éyo Tà müpye mort} Var , 10 Ts nômys dames, àropu-
voguer , Thv pv ebdtiæn tivas , To de mrondyavor. Entives
men vyyès pret, To dons, x ro Gaia, mhtor dE où ts
Opodo HT Et.
Cirenaïci id, quod extra eft, non dicunt effe cali-
dum, fed in ipfo fenfu aiunt calidam extitifle affec-
tionem : nonne idem eft cum co , quod de guftatu
SÆ N SI LES. 6;
» dire que la tour que nous voyons dans l’é-
» loignement, foit ronde ; ou que la rame
» que nous voyons dans l’eau, foit brifée ;
» mais avec Ariftippe & la feéte Cyrénaïque,
» il faut dire que nous éprouvons la modifi-
» cation caufée dans notre ame par la ron-
» deur de la tour, & par le brifement de la
» rame ; mais il n’eft ni néceffaire ni poflible
>» pour cela que la tour foit ronde, ou la rame
» brifée, puifqu’en effet une tour quarrée
» nous paroïît fouvent ronde , à quelque dif-
dicitur , quandÔ rem externam non affirmant effe dul-
cem, guftatum autem dulcedine affeétum fuifle fa-
tentur ? Et qui dicit imaginem fe hominis percepifle,
an autem externum illud homo fit fe non fentire :
unde anfam naétus eft ? nonne hi præbuerunt , qui
dicunt curvum , aut teres fibi vifum efle oblatum ;
fenfum autem non hoc etiam pronunciare , rem,
confpeéta quæ fit, efle curvam , aut teretem , fed
cfigiem quandam ejus talem extitifle > Atqui, dixerit
meherculè aliquis. Aggreflus ego ad turrim , aut
remum tangens , pronunciabo hunc rectum, illam
multangulam efle : ille etiam, fi proximè adftet,
videri fibi ita , & apparere duntaxat, nihil amplius
fatcbitur. Idem ibid,
Suite du fen-
timent d’A-
riftippe.
Cu DES COURANTES
» tance , & un bâton droit nous paroït tou-
» jours brifé dans l’eau ».
40. Ariftippe difoit encore » qu’il n'y avoit
» rien dans les hommes qui püt juger de la
» vérité des chofes ; mais qu'ils impofoient
» des noms communs à leur jugement: car
» tous parlent de la blancheur & de la dou-
» ceur; mais ils n’ont rien de commun à quoi
Ÿ
ils puiffent rapporter avec certitude les im-
» preflions de douceur & de blancheur. Cha-
» cun juge de fes propres affections; & per-
» fonne ne peut dire que la fenfation (1) qu'il
V4 5 N / # me / A À
(1) EvQer 00 xearnenoy Qurir cire xouoy Spa ray | ôvo-
« \ / 4 L \ \ 1
para Où xowx ride rois mpluari, Acuxoy puis jap TE, #04
\ ” ” : \ \ \ L/4 / ,
JAUXU HOAOUTE MOIS TIAYTES" XOIVOY de ri Aeuxoy > À YAUXU oux
14 \ / LA LA \ A
éxourn. E’xaclos yap rod idiw madous élinaucanlar, ro 0?
02 \ \ CRE / > vu /
si roro ro mados dm) Meuxod tyyiverey duo, x rd mias,
\ / Nitro / \ \ n / \
en &vad ELoHEVOS TO ExEiyoU, pe eos de mood médous mE2À
éd n / T: : 7 \ à el Vs \ n
queues mywoutrou , meogmilés 6e To EVE , OTI TO poli Toioy
) jo 5 To mapolèri Qaiveres, Téye up iyè
Dasouevoy, Toi x) To maperlart @ . Taxe yap ty
NEA) / Ë LOT AE D 0
HF OUT &@ QUYXEXEAUO! ; (214 AEUXOIVEOT EI UTO TOY EGONTEY AR9IT-
+ \ 1) / L \ ”
mimlores | Éripgs OÙ oTU xaTETHEULOMEH) EE TA CAT,
e 04 / 2 PUS \ !
dos eripus Auridie" où méilus oùy ronéy icle ro Quiout-
: à K \ AÏ «1 ! \ ! n 3 QYA
gene qu, Ka ors Ta ovri megé ras Afupopqus ris éiQy-
/ Ê] € / / / #7,
rias xalarxivns | oÙx GuiTes LOUER à RO ho) im TE
» éprouve,
SENS LS L ENS; 65
s éprouve , quand il voit un objet blanc, eft
» la même que celle qu’éprouve fon voifin ,
» en regardant le mème objet; & puifqu'il
\
ileeréler | 35 QYaneicrlar , À À rule Qiow diaxcutras
De yap mo To evo , oi pen éyesvripes , oi dt Qox-
rids, où de neuxailixds magouri , orTus tinos io ) rois
talu Quow dasauevos | mage rar diipeggr À aiShreor zu
TATAEUM | h drairos mo Tu dulèr xwaco AN éTipas
pen To DEUxoy , éTEpas dE ro LA 970 ; uh ocuuTus d'E roy
pohaQTuhuo. &ole roue pes utis boule rides vois mocry-
part, man de ye Eye 10e,
Undè nec cricerium dar: omnibus hominibus commune
affirmant Cyrenaici, poni autem nomina communia
judiciis, Nam album quidem, & dulce vocant omnes
communiter : commune autem aliquid album , aut
dulce non habent. Unufquifque enim apprehendit pro-
priam affeétionem. An autem eodem modo ipfe & pro.
ximus ex albo afficiatur , neque ipfe poteft dicere , ut
qui proximi non percipiat affeétionem : neque pro-
ximus, ut qui affectionem illius non percipit. Cum
autem pulla fit nobis communis affetio , temerarium
eff dicere id, quod mihi tale videtur, tale etiam videri
vicino, Nam fortafsé quidem ego ita fum compofitus,
ut album mihi videatur hoc, quod extrinfecüs mihi
fe offert. Alter autem fic conftitutum habet fenfum,
ut aliter afficiatur. Non eft ergo omnino commune
Tome LI. LR E
66 D:Es QuaAziTÉés
» n’y a point d'affections qui nous foienr
» communes à tous , c'eft une témérité
» de dire que ce qui me paroit de telle ma-
» niere , paroit de mème à celui qui eft près
» de moi; car je puis être conftitué de façon
» que tels objets qui s'offrent à mes yeux,
me paroiflent blancs, pendant qu’ils paroî-
w
v
» tront jaunes à un homme qui fera conftitué
» d’une autre maniere; ce qui eft manifefte
» dans ceux qui ont la jaunifle, ou une oph-
id , quod nobis apparet. Quod autem reverà propter
diverfas fenf£s conflitutiones , non fimiliter, & codem
modo afficimur, movemutrque , per/picuum eff in ts,
qui regio morbo , vel ophthalmia laborant , & iniis,
qui affecte funt fecundèm naturam. Quomodo enim ex
eâdem te alii quidem ita afficiuntur, ac fi luridum ,
alii rubrum , alii ac fi album intuerentur , ita etiam
credibile eft eos, qui fecundum naturam funt affedi,
propter diverfam fenfuum conflitutionem ab ïifdem rebus
non moveri fimiliter : fed aliter quidem eum, qui
glaucis, aliter, qui cæruleis, aliter denique eum, ,
qui nigris eft oculis. Quo fit, ut rebus quidem com-
munia nomina imponamus , proprias autem habea-
mus affectiones. Sextus Empiricus , adv. Math, L, 7,
Jet. 195$; p. 410.
SRE UN? SIN L LE 6 67
» thalmie, ou qui étantconftitués par leur na.
» ture de quelque autre maniere, ne peuvent
» pas recevoir les mèmes imprefhions, par la
» raifon de la différente conftitution de leurs
» fens. Ainfi celui qui a les yeux plus gros, ver-
» ra les objets d’une grandeur différente de ce-
» Jui qui les a plus petits; celui qui a les yeux
» bleusies verra d’uneautre couleur que celui
» qui les a gris : d’où vient que nous donnons
» des noms communs aux chofes, parceque
» nous en jugeons par nos propres affections.
41. Platon aufi a clairement diftingué,
d’après Protagoras , entre les qualités fen-
fibles & les objets extérieurs qui les occa-
fionnent ; il obferve que le même vent (1)
», , 34 À , rs mm 2 ns « \ ©
(1) A oùx éviore mysoïlos dyeuou rod durer | © peiy pv
CA e à 1 \ ce A ci} e Q 1 !
plyo1 3 0 de où > Hg4 0 HE) YpEua , 0 dE cDod pu ; TTOTEE 9)
ay vôre duo ÉQ teurs ro mue, Quyp, à où juge
Pérou 3 à musee rh Tlporarycpe , or ri puey pryaèvrt ,
duypor, ra dt pen , cu.
Nonne eodem aliquandÔ vento flante noftrûm qui-
dem aus friget , alius non; ille quidem lenicer,
ille vehementer ? Utrüm igitur ftatuerimus ventum
in fe ipfo tunc frigidum , an non frigidum ? an potius
E ij
Platon a auf.
fi diftingué
entre les qua-
lités fenfibles
& les objets
qui les cau-
{ent,
Straton a-
voir aufli la
même penfée,
68 DES OUALITÉS
paroït froid à lun & chaud à un autre, petit
à celui ci & violent à celui-là ; & qu'il rez
faut pas conclure que le vent en lui-même foit
froid ou chaud en même temps , mais dire avec
Protagoras que c’efl pour celui qui fent le
chaud qu’il eft chaud, &c.
42. Straton, célebre Péripatéticien, regar-
doit les fenfations comme des modifica-
tions de l'ame, er laquelle elles avoient toute
leur exiflence ; & dans les parties affeëtées (1) :
ou bien, felon quelques auteurs, 1l faifoit
Protagoræ credemus , ei quidem | qui frigeat ; frigi-
dum , qui non, nec idem ? Flato in Theatheto ,tom.1,
PTS As 15318 1645 16 645: ES 7e
(1) Erparay 30 ra may rés Vuyis | 499 ras aiOuous
b TD gycuouxd , ok à rois memodori roms cuis, iv
yep Tabry aude Ti drouon | comp mi Owdv , 494
éDyuèv | 20 bormrtp tmi @vdpélor , 1 d'env.
Strato tum pañliones animæ , tum fenfus etiant,
in principe {olüm parte , non in affeétis locis , confifiere
ait. Siquidem in ipfà, tolerantia reperitur : ut in
gravibus , ac dolorificis rebus , ut in fortibus etiam
ac timidis viris obfervatur. Plutarch, de Placitis
Philofoph. lib. 4, c. 23. Cic, Edit. Elzey. p. 1057,
col. 1, lin. 14 @ feg.
SPL NS .SÈ IS A ILE Si 6
les fens , les miniftres de l’ame (1), par le
moyen defquels elle exerçoit fes facultés.
43. Je pañle à Epicure , dont Lucrece nous
a tranfmis la philofophie en fi beaux vers , &
dont Plutarque , & fur-tout Diogene de
Laërce, ont expofé la doctrine avec tant d’e-
xactitude. Ce philofophe , admettant les
principes de Démocrite , en tiroit aufli les
conféquences toutes naturelles (2), »que les
» atomes font tous de la mème nature, &
(1) Ko où pois Mingépes dun À aire, ds à mAciss ,
où dE dulw ee ras duTurtis , UTP did Two 72 a
aidrlnpior mpoxümlourar. is sais spé Erpérar re à Quri-
205 , k94 Abyrid'ypros.
Et alii quidem eam differre à fenfibus, ut plures:
alii autem eam efle fenfus, & per fenfuum inftru-
menta tanquam per quædam foramina profpicere, &
fe exercere. Cujus feétæ auctor fuit Strato Phyficus ,
& Ænefidemus. Sextus ÆEmpiricus adv., Mathem.
lib. 7, Jet. 350,
(2) Verüum, opinor, ita eft : funs quadam corpora ;
quorum
Concurfus, motus , ordo , pofitura , figure
Efficiunt ignes ; mutatoque ordine mutant
Naturam ; neque funt igni fimulata , neque ulle
E iij
Expofition
de l'opinion
d’Epicure.
70 DEs QUuALITÉS
5
»
23
»
2
2
»
3
”
Lo
3
qu'ils ne different qu’en figure, en gran-
deur , en pefanteur, & dans toutes Îles
chofes qui ont du rapport avec ces pre-
mieres propriétés , comme la rondeur , la
grofleur , &c. car la coûleur, dir-il, le
froid , la chaleur , & les autres qualités
fenfibles ne font pas inhérentes dans les
atomes : mais le réfultat de leur affemblage
& de leur différence vient de la différence
de leur grandeur , de leur figure & de leur
arrangement ; de façon que tel nombre
Prætereà rei, quæ corpora mittere poflit
Senfibus , & noftros adje@tu tangere taus.
Tit. Lucretit Cari Lib, 1, verf. 685
Præterea, quoniam nequeunt fine luce colores
Effe , neque in lucem exiftunt primordia rerum ,
Scire licet, quam fint nullo velata colore,
Qualis enim cæcis poterit color effe tenebris,
Lumine qui mutatur in ipfo, propterea quod
Re&à, aut obliquà percuflus luce refuloet ?
Pluma columbarum quo paéo in fole videtur.
Lib. 2, v. 794.
Sed ne fortè putes folo fpoliata colore
Corpora prima manere : etiam fecreta teporis
Sunt, ac frigoris omnin , calidique vaporis ÿ
Et fonitu fterila.. ...., v. 841:
S EN SAR LÉE 6: 71
» d’atomes dans tel ordre donne une fenfa-
» tion, & dans tel autre nombre & telle
» combinaifon différente , ils donnent une
» autre fenfation ; mais leur nature premiere
» refte toujours la même , à caufe qu’étant
» folides & fimples il n’émane rien d’eux (1):
» autrement la nature n’auroit point de fon-
» dements ftables & certains ; & c’eft de cette
» permanence conftante des propriétés effen-
» tielles aux atômes ou à la matiere, que
» naïffent les différentes fenfations , que les
» mêmes objets produifent dans les animaux
» de différentes efpeces, & dans les hommes
» d’une conftitution différente : car chacun
» a dans les organes de fa vue, de fon ouie
» & de fes autres fens, une multitude innom-
» brable de pores de différente grandeur, &
» dans une différente fituation , lefquels ont
» une proportion & une aptitude particuliere
» recevoir les petitscorpufcules (1), lefquels
(1) Nec jaciunt ullum proprio de corpore odorem.
Idem lib. 1 , v. 844
(2) Ergo ubi quod fuave ef aliis , aliis fit amarum,
Ilis, queis fuave eft, Iæviflima corpora debent
E iv
Conformité
du raifonnc-
ment de Def
cartes & de
Mallebran-
che avec ce-
Jui des Fpicu-
tiens,
72 DEs QUALITÉS
» s'introduifent aifément dans quelques-uns,
» difficilement dans les autres , fuivant leur
» analogie avec ces pores, & cette différente
Le
> contexture des parties dans lefquelles ils
s
» doivent produire par conféquent diffé
CI
» rentes impreffions ».
44. Ainfiles fens ne nous trompent point,
parcequ’ils ne jugent point de la nature des
chofes , mais 1ls nous font donnés pour nous
inftruire des rapports qu'ont les corps qui
nous environnent avec le nôtre propre, &
pour le bien-être de notre vie ; d’où l’on voit
que les fenfations font toujours vraies (1),
arme
Contrectabiliter caulas intrare palati :.
At contra, quibus eft eadem res intus acerba,
Afpera nimirum penetrant , hamataque fauces.
Ta. HAE yes
Vid. Se, 36. « Démocrite réduifoit toutes les
» fenfations à un feul fens ; il difoit que toutes les
» qualités fenfibles font rangibles , où appartiennent
» au toucher». Ariflotel. de fenfu & fenfili, c. 4,
p. 669. E. & Stanley Hifl, Philof, p. 528, col. 2.
(1) Doore où macer ai Qarlariar Games, © ae: Aeyou,
ER ergd omnis phantaña vera , nec ratione deftitui-
SUEFNUSR EN BIENS. 73
mais que ce font les jugements que nous por-
tons fur Les objets , qui font quelquefois faux ;
& cela fuivant que nous ajoutons ou retran-
chons des objets, caufes extérieures de nos
fenfations. » Que fi quelques-uns fe croient
3
12
trompés (1) par la différence des phéno-
» menes qui ont leur origine dans le même
» objet ; comme par exemple , parcequ'un
» corps, vu de près , leur paroîtra d’une telle
» couleur ; & que, vu de loin, il leur re-
» préfentera une autre couleur ; ils fe jettent
» eux-mêmes dans l'erreur , en ce qu'ils
» jugent que de ces deux phénomenes l’un
» cit vrai, & l’autre eft illufoire : car alors
ur hæc fententia. Sextus Empiric. adv. Mathem.
lib. 7, Jet. 203, 104 & feq. p. 412, 413, 414.
(1) E’éerara de inos 4 À taQopor À mo rod rod ai y=
rad, olo opgloù | d'oxuriy megrminluy Quilariüv, 24 %y à
É?AAOe guy : p GRR 0 EpL0Y > 4 dddas mus &enarypéro Qu -
dde ! DRUL .
vera To vmoxeiusro, Nonnullos autem decipit diverfitas
viforum , five phantafarum , quæ videntur offerri
ab eodem fenfili, verbi gratià ab afpeétabili ; ita ut
videatur fubjeétum alterius coloris , aut alterius f-
guræ , aut aliquo alio modo mutatum, Îdem ibid,
74 Des QUALITES
» 1ls forment un faux jugement , ne confidé-
» rant pas aflez la nature des chofes ; & ils
» devroientau contraire conclure que la cou-
» leur qu'ils apperçoivent dans l’objet vu de
» près, eftune ; & celle qu'ils apperçoivent
» dans le mème objet vu de loin, eft une
» autre couleur ; toutes deux changées par la
» diftance différente , à laquelle elles fonc
» vues, & produifant deux fenfations qui
» ne font pas la mème, mais qui n’en pré-
» fentent pas moins ce qu’elles font vérita-
» blement ; d’où vient aufli que ce n’eft pas
» le fon même (x) qui eft dans l’airain frappé,
vw
vw
> \ à et \ 4 el SIN D
(1) Ov yap OAo opéras To sepepeor | ve Emi T° Ggcilav
, 2 \ \ LA ee / ne \
ao ET a Toy À6yoy , GG TO ypopie TO sepéevtou. Tou dE
« / \ rs » € > Ml © "m € f a 8 » ,
MPSHGTOS ; TO ME ES EM @Ulo) TOU SEpEUMOU ; HAJUMEp EE
La \ ms / LA / \
roy ouxeyyès | © x Toù péloicu dasnares , PAEmOUE&O" Ta
o \ = / : 03 > eo / € /
D éxlos rod sepemviou , ny Tois IQEbRs Tom Ürroxelpuevor ,
/ 2 WN = > nm / ! mn (M
LATE ET TOY EX puuxpo) nsneuros Becpoupsevor, Toro dE
Ed 2 4 N :2/ / 07
& Ta pra téannarTopever » 494 1) oy &v40 EXOLEYOY au à
/ ! € Url \ /
raasry va) (dort Qayraciey , omoioy © Guro ar HE
(I) . d æ / # € J / /
UTOXEITO" OYMEP QUV TROY OUTE Y EV TE) HPOURLEIN YAAXUUOUTE
\ 3 / 5 € > ” / ” J 2,427
Pay téaxoleTa | OÙTE 9 € TU GOUUTI TOU KEXÇNYOTOS y CP 4
mooominloure 7% Euilipe aiQnre , © &s oùdvis Quoi Ta
SEINS) BI LUES. 75
» ou la voix mème de celui qui chante,
» que l’on entend , mais feulement le
» fon de l’un ou de l’autre agiffant fur l’o-
» retlle ; car la mème chofe ne peut pas être
» en deux lieux différents à la fois ; & comme
° / 2 , 1 ” æ > / > /
Gmoshuaros puxpas @movoile Qavis | Vendus dx , Emtirip
40 be À / / / Le
duveyryos EAJay ds pelbos Tavrys Ginaubarrer" orus oùx
72 \ ! el » Fa \ À
dy droga ed ee rhv OÙ, or Ex pan) pity ditsiue-
\ € L / / PE A ” / \
Tes pexpoy op Toy müpyo, © spoyyUAo" Ex dE TS üryyès ,
\
/
pige # TÉTP&" Vo.
‘ Non enim totum perfpicitur folidum , ut exempli
caufà verba faciamus de afpeétabilibus , fed color
folidi. Color autem alius eft in ipfo folido, atque
adeo in iis, quæ ex propinquo cernuntur , & ex me-
diocri intervallo. Alius extra folidum , & in locis
ulterioribus fe offerens , ficut in iis, quæ ex longo
cernuntur intervallo ; hic nempè intercedente diftan-
tià mutatus, & propriam fufcipiens figuram , tale
reddit vifum , quale ipfum quoque reverà oculis fub-
jicitur,. QuomodÔ ero0 neque vox exauditur, qua ef
in ære, quod pulfatur : neque qua in ore ejus , qui eff
vociferatus , fed quæ in noffrum fenfnm incurrit : &
quomodd nemo dicit eum , qui parvam ex intervallo
audit vocem , falsà audire , quoniam quùm prope vene-
FO NNVRPES MONUTAËLNTT ES
» un homme ne dit pas qu'il entend faux,
» parcequ'un fon qui ne le frappera que foi-
» blement à une grande diftance, le frappera
» plus fortement s’il s'approche de l’endroir
» d'où partira ce fon ; de même nous ne pou-
» VOnS pas dire que notre vue nous faffe illu-
» fion, parceque de loin nous aurons vu une
» tour petite & ronde, laquelle, en nous
» en approchant , nous paroïîtra enfuite
» grande & quarrée ; car la repréfentation
» plus ou moins srande de l’objet naît de la
» différence plus ou moins grande de l’angle
» formé dans notre œil, lequel eftoccafionné
» par la différence de la diftance dans la-
» quelle nous voyons l’objet. En un mot, le
» propre des fens eft de repréfenter les objets
tels qu'ils nous frappent , & non pas de
1
vw
Ÿ
w
» juger de ce qu'ils font ; c’eft pourquoi nos
rit, eam percipit tanquam majorem: ta nec vifum fall:
dixerim , quod ex longo intervallo parvam videat
currim , @ rotundam ; ex propinquo autermt majorerm
& quadratam, Idem ibid,
?
SUET NP SCI B: LES. m7
» fenfations font toujours vraies, & l'erreur
» eft feulement dans nos jugements (1).
45. Je me fuis étendu davantage fur ce
fujet , parcequ'il eft plus propre que tout
autre à prouver la vérité de ma propofition ;
Que les modernes [e font fouvent enrichis des
dépouilles des Anciens , fans leur en faire
honneur comme ils le devoient. On a beau-
coup loué avec raifon Defcartes & Malle-
branche d’avoir traité cette matiere avec
tant de pénétration & de fagacité. Mais
1l me femble qu'ils n’ont guere dit rien de
(1) Airis dE id dmipye rod mrmpovros prose | 194
pores duluy GlrauGanda , oo popmoles, oùyi de ro
unpirus , ort nn pie ist ro eSude, dnno de ro iySad'e
dmoxtiueo) duomp ai per Qailarier dix Tadre mére éiri
dnydis, CAN ai d'obas eiyor rue duiQopar, ToûTay rep oi pie
fou dns , di de deud's,
Proprium autem fenfus eft, id folum apprehen-
dere, quod eft præfens , & quod ipfum movet,
verbi caufà colorem : non autem difcernere qudd
aliud eft quod hîc , aliud vero , quod hîc oculis fub-
jicitur. Qamobrem phantafia quidem propterea funt
omnes vera ; fed opiniones habent aliquam differentiam,
Idem ibid,
Conféquen-
ce tirée de ce
qui a été dit
jufqu’ici.
Li
78 Des QUALITÉS SENSIBLES.
plus que ce qui en avoit été dit avant eux
par les anciens philofophes dont je viens de
rapporter les propres termes.
Fin de la premiere Partie.
SH CO N°'D'ET PA'RMNRUNE
CONTENANT
LES Syflêmes de LEIBNITZ , de BUFFON,
NEEDHAM ; 6 les Vérités concernant la
Phyfique générale & l'Aftronomie.
SECONDE
S£
DER
SECONDE PARTIE.
CHAPITRE PREMIER.
Syfléme de LEIBNITZ.
46. À Près avoir examiné les connoiflances
que les anciens avoient dans la logique & la
métaphyfique , nous paflerons à confidérer
avec la même impartialité les vérités qu'ils
ont connues dans la phyfque générale &
particuliere, dans l’aftronomie , les mathé-
matiques , la méchanique , & les autres
fciences.
47. Quoiqu'il paroiïfle y avoir un trajet
confidérable à faire pour pañler de la méta-
phyfique à la phyfique , on apperçoit ce-
pendant dans le fyftème de M. de Leibnitz
une idée bien propre à former la tranfition
la plus naturelle de cette fcience à l’autre,
& à donner en même temps une preuve
Tome I. F
Tranfirion.
Phyfique de
Leibnig.
Son fyfième
examiné ail-
leurs plus
amplement,
Raïfon de
l'étendue
dans les êtres
fimples.
82 SES É NC
bien frappante du fentiment que je cherche
à établir ici.
48. L'occafion que j'ai eue d’examiner
avec attention ce fyftème , me mettra dans la
nécefhité de répéter ce que jen ai dit ailleurs
(1)3 mais la chofe eft inévitable : il eft diff-
cile de préfenter la mème vérité fous deux
faces différentes ; & il eft tout à fait inutile,
quelquefois mème dangereux de le faire.
Ainfi, tranquille à cet égard , j’entre en ma-
tiere , en expofant briévement le fentiment
de M. de Leibnitz.
49. Fondés fur le principe (2) de la raifon
fufifante , employé long-temps auparavant
par Archimede , les Leibnitiens cherchent
la raifon pourquoi les corps font étendus en
longueur , largeur & profondeur, & fou-
(1) Dans la Préface du fecond volume des Œuvres
de Leibnitz , que j'ai fait imprimer en 6 vol. 1n-4°,
à Geneve chez les freres de Tournes.
(2) Hippocrate le Médecin avoit aufli connu ce
principe dans toute fon étendue. Voyez M. Lefebvre,
Introduét, au Traité de l'Expérience de M, Zimmer-
manne ‘
DELETBNTTZ. 8;
tiennent que pour trouver l’origine de cette
étendue , il en faut venir à quelque chofe de
non étendu , & qui n’ait point de parties, à
des êtres fimples enfin ; de fotte que les êtres
étendus n’exifteront que parcequ’il y aura des
êtres fimples. Et après avoir établi la néceflité
de ces êtres fimples, ils cherchent à faire
comprendre de cette maniere comment l’idée
de l'étendue peut en réfulrer.
so. Si nous penfons , difent-ils , à deux
êtres fimples , comme exiftants enfémble ,
quoique diftinés l’un de l’autre, nous les
plaçons dans notre efprit, l’un hors de l’autre,
& les concevons aïnfi comme quelque chofe
d’étendu & de compofé ; car l'étendue n’eft
autre chofe qu’une multiplication continuée
que nous concevons comme étendue: ou
bien on peut concevoir les êtres fimples
comme ayant des rapports éntre eux, quant
à leur état interne ; rapports qui conftituent
un certain ordre dans lequel ils exiftent; &
cet ordre de chofes coexiftantes & liées en-
femble , fans que noûs puiflions favoir dif-
tinétement comment elles font liées, nous
Fij
Comment:
les êtres {im-
ples peuvent
donner l’idée
de l'étendue.
84 SYSTÈME
occafionne l’idée confufe d’où naît le phéno-
mene de l'étendue (1). Cela paroït allez con-
féquent, & n’en eft cependant pas plus com-
préhenfible ; mais en convenant de cette vé-
rité, on eft forcé d'admirer la beauté du gé-
nie de celui qui a femblé pafler les limites de
l’entendement humain ; & qui, le flambeau
à la main, a marché à pas hardis & sûrs dans
les fentiers obfcurs de la métaphyfique. Mais
il neit pas mal à propos de remarquer 1c1
qu'une des principales caufes de la gloire de
Leibnitz a été fon attachement pour les an-
ciens, qu'il a toujours pris pour fes guides,
& reconnus pour fes maîtres.
(1) » Ainfi, dit Madame du Chätelet, ( Inffiturions
phyfiques ; p. 149) » fi nous pouvions voir tout ce
æ qui compofe l’étenduz, cette apparence d’étendue
» qui tombe fous nos fens, difparoïitroit , & notre
# ame n’appercevroit que des êtres fimples, exiftants
» les uns hors des autres, de même que fi nous dif-
y
> tinguions toutes les petites portions de matiere
» différemment mues , qui compofent un portrait , ce
> portrait, qui n’eft qu'un phénomene , difparoi-
v
4
> tXOÏt pour nous »,
DE LEIBNITZ. 85
51. Les fondements de fon fyftème avoient
été en effec pofés depuis long-temps par Py-
thagore (1) & fes difciples; & on en trouve
aufli des traces dans Straton de Lampfaque ,
qui fuccéda à Théophrafte dans le Lycée (2),
dans les opinions de Démocrite (3), dans
Platon & fon école , & dans Sextus Empiri-
cus (4). Ce dernier a même fourni des argu-
ments entiers à Leibnitz pour établir /a ne-
ceffité de chercher la raifon des compofts dans
les êtres qui ne le fuffent pas (s) , comme on
le fera voir un peu plus bas; Stobée cite un
(1) Voyez Edmund. Dickhinfon Phylica ver, &
vera. Lond. 1702, c. 4, feël. 9, p. 32.
(2) Voyez Ciceron. de Nat. Deor. lib. x, c. 13.
(3) Bayle, Di&, Hifi. art. Démocrire, note P.
& arr. ÉPicuRE, note F. Voyez auffi faint Auguflir ,
Epifi. 56.
(4) Sextus Empiricus, Pyrrhon. Hypotypos, L 3,
c. 18, p.164: & adversis Phyficos, lib. 10, c.4,
P.674& 675, &c. Ed. 7 Leipfick, 1718.
(s) » Le révérend pere Gerdil, précepteur de Son
» Alteffe Royale le Prince de Piémont , à écrit en
» italien un livre rempli de jugement & d’érudirion,
»- intitulé : Introduzione allo fludio della relisione ;
F iij
Ce fyfiême
a éré fondé
par les an-
ciens,
S6 S'yYASLT ÉVM'E
paffage de Moderatus Gaditanus , Pythago-
ricien , lequel, parlant des nombres de Py-
thagore , dit: Les nombres font , pour ainfi
dire , un affemblage de monades , une progref-
Sion de la multitude, qui part de la monade,
& y trouve fa derniere raifon ; en remontant
à fa fource (1).
s2. Et plus loin le même auteur ajoute :
(2) Pythagore s’eft appliqué avec foin à la
» Turin, 175$, in 4. dans lequel il traite favam-
» ment, p. 272 6 fuiv. de l'accord qui fe trouve
» entre le fyftème de Leibnitz & celui de Pythagore ».
Voyez aufli Buddeï Compendium Hiftoria Philofo-
phiæ cum notis Walchii. Hala, 1731 , in 8. pages
168, 199,284, 285$, 496, 497.
Bruckeri Hifior. critica Philof. tom. 1 ; p.1049,
10$0, 1086 , &c.
(1) Est dt denQuos , de rûmu umtiv, cusmua poadey,
3 megroNruos AM , éme pores dpyapeires | 1 vero
douos sis poadu nalanninar. Eft autem numerus , ut
ita dicam, monadum congeries, vel progreffus mul-
titudinis à monade incipiens, & regrefho in eamdem
definens. Scobaus Eclog. Phyfic. lib. x , c. 2, p. 3.
(1) Tuwy0egs HE SY garaud æepi Toùs GRATOS iLeh=
\
cale, ras ve Ton Géer yairus &iye dis denQuais , 9 T
DE LEIBNITZ. 85
fcience des nombres , auxquels il rapportoit
la génération des animaux ; & Hernuas, ex-
pofant la doëtrine des Pythagoriciens, dit(1)
que felon eux , /a monade , ou l’être fimple ;
étoir l'origine & le principe de toutes chofes.
s3+ Mais la conformité du fyftème de
Pythagore & de celui de notre auteur , ne
paroïît nulle part fi clairement , que dans
le pañlage fuivant de Sextus Empiricus (2) :
sigey Tus méplodos, Pythagoras magno ftudio circa
numeros verfatus eft, ad quos & animalium ortus,
& fiderum circuitus retulit. Siobaus Eclog. Phyfic.
IAE PRE IE PE
(1) Apun Ÿ males n prorns | in de onnérar éulas, À
ix FT depui , Tu sortie yiere. Monas initium om-
nium , à cujus figuris, & numeris elementa fiunt.
Hermias Irris. P hilof. Gentil, Set, 16.
(2) Oùros dE dis où arigi mo Zapuor TluSwyopar, toxévey
rap Aéryourt Toùs Draoroporlas HT IUS A rois Ztpé 26yo F0—
vouuevos, @s yép croi mpüro rus Mfus téeraGourw" îx
EAP) 1% o Acyos | 44 Em x uAAaGGY ai MËus, mpu-
To œuémlovrar us cvnnaGas" ix yap ounnzGer Tu soie
Ts Éyyegpuaro Quris évevoutrer | ep éxtiver parer d'iE=
para" oùre dei Quris ci ærépi Tloderyéogy , Tobs ovrws Que
nos | T& mp voù males murales, & mpérros tétlaQn,
F iv
Argument
des Pythago-
riciens dans
Sextus Empi-
ricus,
s8 SLYUS ÉTÉ É .M
» Les Pythagoriciens, dit-il, enfeignent que
» ceux qui s’adonnent à l'étude de la philo-
» fophie , imitent ceux qui compofent un
cs The ro my naubavt Ty évéhur, To per oùr QolropEo y
Ebær Xérye ray Cho dpyn , dQériner mrés si. II yap
To Qanomercy, tE éQardy oQiau cuusada" ro 0 éx Tivey
cuvssüs | oùx Est Gp , GAA& To éxéo AUTO) cusarIxô.
Ge 494 Ta Qouvaptve , où fyréoy dpyuus Eivas © OX, dn2&
\ \ / cl > ! EX / /
Ta ovsalina Ÿ Povopeivey œarep oùxeTi nv Qauvousre, Tosvuv
2
&d'ynous | 494 dQuréis vaidulo ras Ÿ char dpyés. Kai 0
xonës, Où yap érouons Uuaroïles | À opolopepeias | 4 0"/xaus ,
>\ = \ / LA oo 3! ,”/ Un \ el
n xoy@s voyre roule méilay 7 bilay éppev, mi pu xalap-
lucas, mÿ dr d'émico. n pièy yap Gd'inous vouiCourw sive
JC - Yap fe d |
ras dpyus , deoiles draspiqoiler 7 d* cupalines role
ras ravras | diaminlournw. © yap F aile cœuxle arpoy=
” N \ NAN / 5/ \ mm
yére Ta voyre | 2) Gdnne coule, oùro 1 Ÿ ofla cw-
/ / C2 \ » / (el \ \ J L \ \
pérer apyuy d'é ra érépale , 4 nue Royer. Qs yap ru
” / 02 Ê » € , \ L
Ths Mbcos Sole oÙx cici Abus 5 o9T& Agÿ4 TE TU COHUTEY
goiyéie oùx 51 copale. H'ra dé conala QuAs Tuyyaæver,
n droualx, Ab méilus tsw école.
Dicunt enim eos , qui verè, & fincerè philofo-
phantur, effe fimiles iis, qui laborant in contexendà
oratione. Quomodo enim hi primum diétiones exa-
minant ; ex dictionibus enim conftat oratio : & quo-
niam ex fyllabis diétiones, primum confiderant fyl-
labas : cumque fyllabæ refolvantur ex literis , five
DE LL E DDBÈNA T 7. 89
» difcours : ceux ci confiderent premiere-
» ment les phrafes qui compofent ce difcours,
» enfuite les mots qui compofentces phrafes;
elementis vocis literatæ , de illis primum fcrutantur :
ita dicunt Pythagorei, oportere veros phyficos de
univerfitate fcrutantes, in primis examinare in quæ-
nam refolvatur univerfitas. Atqui quod apparet qui-
dem , dicere effe principium univerforum , eft quo-
dammodo non phyficum. Quidquid enim apparet,
conffare debet ex iis, qua non apparent. Quod autem ex
aliquibus conftar , non eft principium, fed id, quod
illud ipfum conftituit. Undè etiam ea, quæ apparent,
non funt dicenda rerum univerfarum principia, fed
ca, quæ funt conftituentia apparentium , neutiquam
ipfa apparentia. Obfcura ergd , & non apparentia po-
fuerunt eorum , quæ funt, principia. Neque hoc
communi omnes ratione. Qui enim dixerunt atomos,
vel fimilares partes, aut moleculas, aut communiter
corpora , quæ cadunt fub intelligentiam , efle rerum
omnium principia , aliquà quidem ex parte fe rectè
gefferunt , aliquà verd lapf funt. Nam quatenüs qui-
dem obfcura, & non apparentia dixerunt efle princi-
pia, reété in eo verfantur: quatenus autem ea fuppo-
nunt corporea, labuntur. Quomodo enim à corpori-
bus, quæ percipiuntur intelligentià, & non funt evi-
dentia » præceduntur corpora fenflia ; ia oportet ab
90 S'rHsS HT EME
» & comme les mots font compofés de fyl-
» Jabes, ils examinent aufli les fyllabes, juf-
» qu'à ce qu'ils arrivent enfin à l’examen des
» lettres dont ces fyllabes font compofées,
» & qui font comme les premiers éléments
» du difcouts; de mème les Pythagoriciens
» difent que les vrais phyficiens doivent s’ap-
» pliquer à la recherche des premiers élé-
» ments qui compofent cet univers. Or il
» feroit indigne d’un fage phyficien de dire
» que ce qui tombe fous les fens , puilfe
» être le principe de toutes chofes; car ce
» qui tombe fous les fens doit trouver fon
» origine dans quelque chofe qui ne tombe
» pas fous les fens; ce qui a fa confiftance
» de quelque chofe , ne pouvant pas être lui-
» même un principe , mais bien ce qu: confti-
» tue la chofe, Ceux qui ont avancé que les
zncorporeis pracedi etiam corpora, qua percipiuntur intel=
ligentiâ, & merito. Quomodo enim elementa diétionis
non funt diétiones; zta etiam elementa corporum non
funt corpora, Aut verd oportet ea effe corpora , aut
incorporea. Quamobrem funt omnind incorporea. Sextus
Empiricus , loeo citato , p. 674, 675.
DE LEIBNITZ. o1
» atômes , les parties fimilaires , les molé-
» cules , ou ces corps qui ne font que du ref-
» fort de l’incelligence, éroient les premiers
» éléments de toutes chofes, oncdit vrai dans
» un fens, & fe font trompés dans un autre ;
» 1ls ont dit vrai, en ce qu’ils ont reconnu
» pour principe quelque chofe qui ne tombe
» pas fous les fens , mais ils fe font trompés
» en ce qu’ils ont cru ces principes corporels;
» car comme les corps, qui ne tombent point
» fousles fens, précedent les corps fenfibles,
» ils font aufli précédés de quelque chofe qui
» n'eft pas de leur nature ; & de même que
» les éléments d’un difcours ne font pas un
» difcours, ainfi les éléments des corps ne
» font pas des corps. Et s’il eft néceffaire
» qu'ils doivent être corporels , ou incorpo-
» rels , 1l s’enfuivra donc qu'ils font incor-
» porels ».
$4. Et continuant le même argument,
il conclut ainf: » ou les principes (1) qui
en Qt, Ne do L
(1) H°roe où copalé 51 rù ausalinx dur, 5 deà-
male. x) capale piy ox n Uimotes , irtt d'oicu xéxiras
Suite du
même afgu-
ment.
92 S'Y ST Ê ME
» conftituent toutes chofes, font corporels ;
» ou bien ils font incorporels ; mais on ne
» peut pas dire qu’ils foient corporels , parce-
» qu'autrement il faudroit remonter à d’au-
» tres corps, d'où ils tiraffent leur origine, &
» continuant ainfi à l'infini , refter toujours
» fans principe. Il n’y a donc point d’autre
» moyen de réfoudre la queftion, qu’en di-
» fant que Îles corps font compofés de prin-
» cipes qui ne font pas des corps, & qui ne
» peuvent être compris que par l’efprit; ce
qu'Epicure a reconnu , lorfqu'il a dit que
> par les idées de la figure, de la grandeur,
vw
vw
2
copoale Xéyuy sat cusalixt, 4g obrus éis Gregor Fpoeat-
voirys Ts émiolas, Gvapyoy Vie To mé. Aumera pe
Déryen , ?E doœudrer tive Th cosari Ÿ vonlor couérar
«! x > LA La , / \ E] { /
G7Ep 494 E Tixoup gs œuonoyyrt, Qaras xaTo dde gur0y =
/ \ ! \ 500 / \ / \ =
pures Te, 210 peyédous | 2 @lilumius , x) Faggus , To cèue
og. AAN 071 drouwrous sives ei ras àpas À hoye
Goplav couarer, in Hpyeiver cuuQas.
Aut ergd funt corpora , quæ ea conftituunt , aut
incorporea. Et corpora quidem non dixerimus , quo-
niam oportebit dicere, etiam illa confiftere à corpo-
ribus: & ita in infinitum procedente cogitatione ;
DE LEIBNITZ. 93
» de la réfiftance & de la pefanteur , nous
» acquérions l’idée du corps (1).
$5- Scipio Aquilianus, traitant de l’opi-
nion d’Alcmæon , Pythagoricien , fur les
principes des chofes, la réduit à ce fyllogif
me (2) : » ce qui précede les corps dans l’ordre
» de la nature, eft le principe des corps; les
» nombres font dans ce cas : donc les nom-
» bres font les principes des corps : on dé-
» montre ainfi la feconde propofition de ce
> fyftème. De deux chofes, la premiere eft
celle qui peut fe concevoir fans l’autre,
2
ë
» quand l’autre au contraire ne peut être con-
————
effe univerfitatem principii expertem. Reftat ergd,
ut dicatur, ex éncorporeis conflitui corpora , quæ per-
cipiuntur intelligentiä : quod etiam confeflus eft Epi-
curus dicens per congeriem figure , 6 magnitudinis, 6
refiflentia , & gravitatis , intelligentiä percipi corpus.
Atque quod incorporea quidem oporteat efle princi-
pia corporum intelligibilium, ex his eft perfpicuum.
Idem , ibid.
(1) Voyez la note (1) de la fection 76 fur le fyf-
sème de M. Necdham.
(2) Scipio Aquilianus de Placitis Philofophorum
Syllogifme
d’£lcmæon
fut la nature
des corps.
94 D'UUS T'E ME
» çue fans elle : or les nombres peuvent être
» conçus indépendamment des corps; mais
» les corps ne peuvent être conçus fans les
» nombres; donclesnombres fontantérieuts
» aux corps dans l’ordre de la nature». Ce
qui exprime aflez clairément le fentiment de
Pythagore , qui étoit, qu’antérieument à l’e-
xiftence des corps on devoit concevoir des
êtres qui n’étoient pas des corps, qu’il difoit
être les nombres , auxquels il accordoit à peu
près les mêmes propriétés que (1) Leibnitz
donne aux êtres fimples où monades. Marfile
ante Ariflctelem, cap. 20, page 118. Editio clariffimi
Bruckeri , Lipfie , 1756. » Ce livre étoit très rare
# avant que M. Brucker eût travaillé à en donner
» une nouvelle édition qui commence à être difficile
æ à trouver, ayant été enlevée prefque fur lechamp.
2:
L
Scipio Aquilianus en avoit fait un ouvrage fort
» Curieux ; mais il s'étoit trompé fouvent, & pa-
» roifloit n'avoir pas affez entendu quelques-uns des
anciens. M. Brucker , par fes judicieufes & fa-
2
LA
» vantes notes , l’a rendu un livre fort utile pour
» l'intelligence des anciens philofophes.
(1) Voyez le Livre du P. Gerdil à l'endroit cité cr-
devant , © aux pages fuivantes.
DE LEIBNITZ. 95
Ficin attribue à Plaron la mème idée, &
donne ainfi la fubftance de l'opinion de ce
Philofophe.
56. » Les genres de tous les compofés fe ré-
» duifent à quelque chofe qui (1), dans fon
» genre, n’eft pas compofé , comme les di-
» menfions au ffyne , lequel n’eft pas com-
» pofé de dimenfions ; les nombres fe ré-
» duifent à l’unité qui n’eft pas compofée de
» nombres, & les éléments enfin trouvent
» leur derniere raifon dans quelque chofe
» qui n’admet point de mélange des élé-
» ments». Le paffage de Platon, fur lequel
Ficin fonde fon argument, me paroït être
celui que je vais rapporter en note (2), &
(1) Genera compofitarum rerum omnium reducurñtur
ad aliquid , quod in eo genere non ef compofitum ; ut
dimenfiones ad fignum , quod ex dimenfionibus non
componitur ; numeri ad unitatem , quæ non fit ex
numeris ; & elementa ad id , quod ex elementis non
mifcetur. Marfilius Ficinus in Platonis Timaum
P. 397, tom. 2. Éd. Parif. 1641 , 2 vol in-fol.
(2) Tv oilas à voir par Klaus mrpornnes ; AexTéoy Jus
sen. Tovra de mopalor ep de, x) up, 494 dp3 © YF;
Sentiment
de Platon fur
le même fu-
jet.
96 SY SMÉÈME
qui en effet a beaucoup d’analogie avec la
maniere de raifonner de M. de Leibnitz.
Expliquépar 57 Mais Platon lui-même n’a pas expli-
Marfile Fi-
én que plus clairement & plus briévement fon
fyftème, que Marfile Ficin (1) le faiten ce
peu de mots: /es compofés fe réduifen: en
êtres fimples ; & la multitude des êtres fimples
Je réduit dans les plus fimples des êtres : on
voit ici les compofés de Leibnitz réduits en
êtres fimples, qui trouvent la raifon ou la
fource de icur exiftence, en Dieu. +
capole male cale yeyor Tor dÙ Emishpuns teur érdyns
Tus rs fuPegrs Qirius durias mparas merad onu. Rerum
omnium, quæ exiftunt , cui intellisendi vim ineffe
ftatuendum fit, animus dicendus eft ; at inconfpica-
bilis ille eft ; ignis autem , & aqua , & aër, & terra,
corpora ommia funt confpicabilia. Verum neceffe ef? ,
atis, qui fcientie , intelligentisque fludiofus eft , fa-
pientis , fagacifque naturæ caufas primas perfequatur,
&c. Platonis Timæus in oper. Platon. Edit. Henr,
Steph. 3 vol. fol, pag. 46. D.E. ver. Serrant. Vid,
thid, p. 47. B. C. D. |
(1) Compofita in fimplicia refolvuntur , fimplicia
mulia in unum fimplicifimum. Marflius Ficinus in
Plotinum , Énn.s , L$,c.19,p.718 ,tom, 2.
55.
DE LErBNrT7Z. 97
58. Plotin lui-même a pofé, en plufieurs
endroits (1) de fes Ennéades , les principes
de cette opinion ; & fon habile commenta-
teur, en fuivant fes traces, ne manque ja-
mais de revenir à ce fens dans toutes les oc-
cafions que lui donne le texte de fon auteur,
qui s’'énonce dans un endroit en ces termes
(2) : » I doit y avoir pour principe ou /x-
» -flratum des corps , quelque chofe qui ne
» foit pas corps » Ajoutez , à tous ces paf-
fages , Plutarque parlant d'Héraclite (3),
deux paffages de Stobée citant Épicure (4),
(1) Ennead, 2, lib. 4 , cap. 1 € 6. Brucker. t, 2.
Hifi. Cric. Philof. p. 419 , 410,
(2) Ors pur où dei rois céporiy Émonelurver etes GAAa
o zup dile, &c. Oportet corporibus aliquid efle fub-
jeum , quod aliud quiddam fit præter corpora. Plo-
tinus Ennead. 2 ,1.4,c. 5 & 6, &c. p. 162. C. Edit,
Bafil. 15380. :
(3) H'ecraures Vuyuarié Tux avis, À duepn Uurdryéls
Heraclitus etiam ramenta quædam minima, par-
tiumque expertia introducit, Plutarch. de Placiris
Philof. l.1,c. 13. ddeml,1,1,16, de Thalete, &
Pythagoreis,
(4) Emixouges émepiayuile eve ra céuale , 1) pale 0
Tome I. G
Opinion de
Plotin.& paf
{ages d’Héra-
chite , d’Epi-
cure , &Cs
Tentative
d’un favant
d'Allemagne
pour rappro-
cher l'eibnirz
de Parméni-
des.
98 S'YSTÉME
Xénocrate (1) & Diodore, qui font très bien
à notre fujer, & les pañlages de l'Ecriture
cités ci-deffous (2).
$9. Avant de quitter ce fujet, je remar-
querai encore qu’un favant d'Allemagne (3)
a effayé de démontrer que la do&rine des
monades prenoit fa fource dans la philofo.
phie de Parménides : fur quoi M. Brucker
(4) remarque qu'il n’a pas réufli dans fon
entreprife, & que la doétrine, qu’il donne
comme les fentiments de cet ancien philo-
aüna, ra de 8 Eneivav ouyraiuala, Lagos te. Epicurus
comprehendi corpora negabat, ac prima quidem affe-
rebat eff fimp'icia, de his autem compofita gravitatem
habere. Stobaus Eclog. P hyf p. 33.
(1). Etoxsalys , x Aud'upes Gutpn Tu Déyise pi ofla.
Xenocrates & Diodorus minima partibus carere dixé-
runt. Srober Eclog. lhyf.p. 33. Geneve, 1609. fol.
(2) Manus tua, quæ creavit orbem terrarum ex
materiâ invijé , lib Sapent. c. 11, v. 18 Et faine
Paul aux Hébr, c. 11, v. 3. Et Machub, lib. 2 ,c, 7,
Y. 18.
(+) Godofr. Walterus in fepulchris Éleaticis , c.3,
Jeët. 6, p. 17 6 Jeq.
(4) Hifforia Critica P hilofophie , tom. x, p, 1166.
DE LEIBN1iTZ. 99
fophe , lui appartient moins qu'à Platon.
Cette derniere remarque eft très jufte ; mais
que ce foient les fentiments de Parménides
ou de Platon que le favant Allemand ait ex-
pofés , 1l fufhit à mon fujet qu'ils foient de
l'un ou de l’autre pour ne pas les paffer fous
filence, & faire voir l’analogie que leurs
idées avoient avec notre célebre moderne,
lequel déclaroit luimême dans toutes les
occafions , qu'il avoit puifé plufeurs de fes
idées dans Platon (1), & définiffoit fes mo-
nades , de même que Platon fes idées,
(1) » Un de mes amis m'a affuré qu'il tenoit de La
# bouche même d'un favant d'Italie, qu'étant allé
5 à Hanovre pour fatisfaire au defir qu'il avoit de
» connoître M. Leibniez , il fut pendant trois fe-
5 maines avec lui, & qu’en fe féparant, ce grand
» homme lui dit: Monfieur, vous m'avez fait la
» grace de me dire fouvent que je fais quelque chofe ;
#» hé bien ! Je veux vous füire voir les 'ources où j'ai
» puifé tout ce que j'ai appris: & la-deflus pfenant
» l'étranger par da main , ül le fit pafler dans fon
» cabinet, où il lui montra pour touslivres, Platon,
» Ariftote , Plurarque , Sexcus Empiricus , Euclides ,
» Archimedes , Pline , Séneque & Cicéron.
G ij
100 SR A UE CAE QE
Tæ ovros ôvra , les êtres véritablement (1) exif-
tants. Voici la maniere dont l’auteur en quef-
tion préfente les opinions de Parménides ,
dans lefquelles il trouve tant d’analogie avec
le fyftème des monades.
I. L’exiftence differe de l'effence des
chofes (2).
II. L’effence des chofes qui exiftent ef
hors de ces chofes mêmes.
HI. 11 y a dans la nature des êtres fembla-
bles, & d’autres diffemblables.
IV. Ceux qui font femblables font con-
çus exifter tous dans le même état d’ef-
fence.
(1) Suas enim monadas efle rà ovras ovre , fubftan-
tias fimplices, Deum , animas, & mentes, fimu-
lacra univerfitatis , ait ër Epifi. Hanfchir de Enthus.
Platonico.
Un autre principe de Leibnitz étoit qu'il n’y
avoit pas deux chofes femblables dans la nature, Ce
qu’il devoit à Cicéron, Quæft. Acad. lib, 4, c. 17.
(2) I. Exiftentia differt ab effentià rerum.
II. Eflentia rerum exiftentium extra illas eft.
XII. Sunt quædam res fimiles , quedam diflimiles,
DE LEIBNITZ. IOH
V. Toutes les chofes exiftantes fe ré-
duifent à certaines clafles & idées détermi-
nces.
VI. Toutes les idées ont leur exiftence
dans l’Ur , qui eft Dieu ; d’où vient que
tout eft un.
VII. La fcience confifte dans la connoif-
fance des efpeces, & non pas des indivi-
dus.
VIII. Elle differe des chofes exiftantes.
IX. Les idées étant en Dieu , échappent à
la connoiffance des hommes.
X. De là vient que l’homme ne conçoit
rien parfaitement.
IV. Quæ fimiles funt, eodem effentiæ conceptu
comprehenduntur.
V. Omnes res referuntur ad certas clafles, & ideas,
VI. Omnes ideæ in uno exiftunt , in Deo ; hine
omnia unum funt.
VII. Scientia non eft notitia fingularium , fed fpe=
cierum.
VIN. Differt illa à rebus exiftentibus.
IX. Cüm hæ ideæ in Deo fint , ided latent homi-
nm
G iij
102 SYSTÈME DE LEIBNITZ.
XI. Les notions de lefprit font comme les
ombres ou les images des idées.
X. Hinc homini incomprehenfbilia funt omnia,
XI. Notiones mentis idearum umbræ funt, & ima+
gines,
GA PE RE ic E
NATURE ANIMÉE.
Comparaifon du Syfléme de M. DE BUFFON
avec celui D'ANAXAGORE , D'EMPÉ-
DOCLE , & de quelques autres Anciens.
60. in fens toute la délicateffe du fujet que
j'entreprends de traiter : mon deffein eft de
faire voir que le fond de la théorie du fyftème
de M. de Buffon fur la matiere univerfelle ,
la génération & la nutrition , a tant de ref.
femblance avec tout ce qu’en ont enfeigné
Anaxagore , Empédocle , & quelques autres
Anciens, qu'il eft difficile , après avoir.com-
paré les opinions de ces illuftres philofophes
avec celles du célebre Moderne, de ne pas
penfer que fes idées ont tiré leur origine de
cette premiere école ; d’autant plus qu'il pa-
roit que M. de Buffon les a lus avec atren-
tion , & qu'il fait apprécier leur mérite. Ce-
pendant comme il ne fait pas fouvent ufage
G iv
Syftème de
M. de Buf-
fon , compa-
té avec les
fentiments
d’Anaxago-
re, Empédo-
cle, &c.
fo4 N AR TU RE
de leur autorité pour appuyer fes fentiments,
on pourroit être porté à croire que ma con-
jeture n’eft pas fondée, ou que M. de Buffon
lui mème ne s’eft pas apperçu de l’analogie
qui regne par-tout entre fon fyftème & celui
des Anciens : je nai autre chofe à répondre
à cela, finon que le lecteur lui-même pourra
décider là deflus, lorfqu’il aura examiné la
maniere dont je vais expofer la queftion;
mais en attendant , il eft bon d’obferver
qu'on ne peut pas conclure, de ce que M. de
Buffon ne s'appuie pas toujours de l'autorité
des Anciens, qu’il n’a pas toujours connu ce
qu'ils ont penfé, & encore moins que, sil
les a étudiés , 1l n’a pas entrevu la confor-
mité de leurs fentiments avec les fiens.
Je fais cette obfervation avec d'autant moins
de répugnance, que je ne penfe pas que ce
que j'avance ici doive ou puiffe diminuer en
aucune maniere la gloire de cet habile écri-
vain , qui aura toujours le mérite d’avoir
faifi avec la plus grande fagacité les prin-
cipes des philofophes Grecs , & d’avoir fait
ANIMÉE. 10$
revivre leurs raifonnements , dont les in-
jures du temps avoient détruit la plus grande
partie.
61. Il me femble, en fuivant l’idée d’un
habile homme de nos jours (1}, que le ref-
taurateur du fyftème de quelque grand
homme , dont le fond ne s’entrevoit que par
quelques fragments qui nous auront été con-
fervés de fes écrits, peut être juftement com-
paré à un habile fculpreur qui, trouvant
un bufte rompu de Phidias , ou de tout autre
fameux artifte de l’antiquité , pourroit,
avec le fecours de fon génie & des con-
noiffances qu’il a dans fon art, juger exacte-
ment , par ce feul morceau, de tous les rap-
ports que doivent avoir entre eux les mem-
bres qui appartenoient à ce bufte ; détermi-
ner les juftes proportions au bufte rompu,
les travailler , les joindre , & en former une
ftatue auffi parfaite , qu'il y a apparence que
l'auroit été celle dont ce buüfte faifoit la prin-
(1) M. de Freret , Mémoires de l'Académie des
infcriptions & Belles-Lettres, tome 18, p. 1134
Comparai-
fon fur le mé-
rite des Mo-
dernes & ce-
lui des An-
ciens,
Expofition
du {yième
d’Anaxagore.
106 NATURE
cipale partie : le mérite d’un tel artifte mo-
derne mériteroir fans doute de grandséloges;
mais la gloire de l’ancien artifte feroit tou-
jours au-deffus de la fienne , parceque l’on
doit fentir que les idées des proportions de
ces membres ajoutés feroient puifées dans
celles que lui auroit fournies le bufte rompu.
11 cft aifé d'appliquer cette comparaifon aux
philofophes modernes, dont quelques uns
des plus célebres, bien loin de chercher à fe
défendre d’avoir emprunté leurs opinions des
Anciens, ont été fouvent les premiers à le
déclarer; ce dont Defcartes (1) & les princi-
paux Newioniens (2) nous fourniflent des
exemples frappants & dignes d’être imités.
62. Diogene de Laërce , Plurarque &
Ariftote nous apprennent qu'Anaxagore
(1) Nec me primum u!larum opinionum invento+
rem effle jaéto ; fed tanrüum me illas pro meis adop-
tafle , qudd mihi eas ratio perfuafiffet. Defcartes,
de Me:hodo , p. 47. Edie, Amfler. 1692. Typis Blaeu,
tom, .
(2) Greçorit Prefat, Aftron. Phyf. & Geomer.
Elemene.
ANIMÉE. 107
croyoit que les corps étoient compofés de
petites particules femblables ou homogenes;
que ces corps admettoient cependant un mé-
lange de petites particules hétérogenes , ou
d'autre efpece ; mais qu'il fuffifoit pour
conftituer un corps d’une efpece particuliere,
qu'il füt compofé d’un plus grand nombre de
petites particules femblables & conftituanres
de cette efpece. Les différents corps étoient
différents amas de particules femblables entre
elles, quoique diffemblables relativement
aux particules d’un autre corps, ou amas de
petites particules d’une efpece différente ; 1l
croyoit, par exemple (1), que le fang étoit
(:) Nunc & Anaxagoræ fcrutemur Homæomeriam ,
uam Græci memorant, nec noftrà dicere linguä
Concedit nobis patrii fermonis egeftas.
Sed tamen ipfam rem facile eft exponere verbis.
Principium rerum quam dicit Homæomeriam ;
Offa videlicet è pauxillis, atque minutis
Vifceribus vifcus gigni ; fanguemque creari,
Sanguinis inter fe multis coëuntibu” gurtis:
Ex aurique putat micis confiftere pofle
Ayrum, & de terris terram concrefcere parvis;
108 N ALT À & #
formé de plufeurs gouttes ou particules, dont
chacune étoit du fang ; qu’un os étoit formé
de plufieurs petits os qui, par leur extrème
petitefle , fe déroboient à notre vue ; &
c'étoit cette fimilitude de parties qu’il appel-
loit éucmuepésas , fimilaritates. Ainfi, felon
ce philofophe , 1l n’y avoit point de généra-
tion ni de corruption , point de naiflance ni
de mort, proprement dites ; la génération
de chaque efpece n’étant que l’affemblage de
plufeurs petites particules conftituantes de
certe efpece; & la deftrudtion d'un corps
n'étant que la défunion de plufeurs petits
corps de la même efpece, lefquels, confervant
toujours une tendance naturelle à fe rejoin-
dre , reproduifent enfuite , par leur réunion
avec d’autres particules fimilaires , d’autres
corps de la même efpece. La végétation & la
nutrition étoient les principaux moyens em-
ployés par la Nature pour la reproduction
Ignibus ex ignem ; humorem ex humoribus effc.
Cætera confimili fingit ratione , puratque.
Lucretius, L, x, v, 8304
AN NT M LÉ El 109
des tres : ainfi Les différents fucs de la terre
étant compofcs d’un mélange de petites par-
ticules innombrables , conftituant les difé-
rentes parties d’un arbre, ou d’une fleur,
par exemple, prenoient , fuivant les loix de
la Nature , différents arrangements ; &, par
le mouvement qui leur étoit imprimé, fui-
voient leur cours jufqu’à ce qu’étant arrivés
aux endroits qui leur étoient propres & defti-
nés , ils s’y arrétoient pour contribuer , pat
leur affemblage , à la formation de toutes les
différentes parties de cet arbre , ou de cette
fleur ; de façon que plufieurs petites feuilles
imperceptibles formoient les feuilles que
nous appercevons ; plufieurs petit fruits for-
moient les fruits que nous mangeons (1), &
(1) TpoQur yo mporQipoutde dm , Hay pond , oloy
\ U E4 \ € / ° \,3 / 02
Toy Ayurlptioy pro | ro Ud' ap mhoïles" Ko4 x TabTys The
7 1 # » re > V2
TpoQhs TpéPeras Jué , QAEU , éplnpie , ex , 05% , 44 Tœ
\ [4 / s / € / 2 «! 2
Aura popie, Toirar oùy yuwomévay , ouonoy#leoy toi, o7e ë
2 La 22 , \ , re
Th ThQn Th moorQeoquem male est ra le, 1 x Ty
U LA Sr, 15 JE PES 2 3/
Day mule abkeros | © ty Exeivn Est ri TRoQA mocau , aiwailes
\ : PT, Fra d 7 1
Jolies | 494 vépar , Kg 850 , x} dhAGY FT & ny À0ya
fcopra pige, Ov ya dé méile ii rh aiQyri évéye ,
ii IN À Œ Um æ
ainfi du refte. Il en étoit de mème, fuivant
ce philofophe, de la nutrition des animaux :
le pain que nousmangeons, & les autres ali-
mens que nous prenons, fe convertiffent,
dans fon fyftème, en cheveux, en veines,
en arteres, en nerfs, & en toutes les autres
parties de notre corps, parcequ'il y a dans
ces aliments les parties conftituantes du fang,
or aplos , ny To Vd'wp radre xlurnivuot , GAN ty roërois
Ë5i Ayo Deopnra mopsm. Am rod cbr oproie To puépy civas €
TD TRIQÙ Tus yenauérois | opolusins aùras ixdert | ©
dpvas À Glory azriQiralo 1 Tus pri ouooutpties , ban To
dE mou éfrioy , Toy vo roy ra mule d'ilakauer. Apxé-
ras dE orus.
Os mile ppiuale 5, v8s de adra d'ipe, © Dexôpnre.
Itraque , dicebat ille | fimplicem , atque uniformem
cibum fumimus , ut triticeum panem , bibentes aquam ;
atque ex loc cibo capillus , vena , arteria , nervt,
offa , cateraque corporis partes nutriuntur. Quimque
bæc fiant , neque tamen ex sihilo produci poflint,
fatendum eff, qudd in [umpto cibo res omnes reperiun-
tur, atque ex is, quæ infunt, omnia augentur ;
atque proindè /# eJufmodi cibo funt partes ; fanguinis
procreatrices ; five gignendo fanguini accommodate ,
nervorumque fimiliter, & offium, aliorumque partes ,
À NIM É E. Tii
des nerfs, des os, des cheveux, &c. lef-
quelles, fe réuniffant les unesaux autres, fe
fonr appercevoir enfuite par leur affemblage,
au lieu qu’elles fe dérobent auparavant à nos
fens par leur infinie petireffe.
63. Empédocle à aufli reconnu les mêmes
principes fur la nutrition des animaux, qu'il
difoit (1) fe faire de La fubftance des aliments
_—__—_—————
quæ menti confpicuæ fin. Neque enim omnia ad
fenfum revocare oportet , quod nimirum panis , &
aqua ifta efformet ; fed in iftis potius partes funt,
quæ mente percipi, comprehendique poffint, Ex eo
quod igitur in cibo fint partes fimiles illis, quæ in
copore gencrantur , partes illas fimilares vocavit,
rerumque principia efle dixit. Ac fimilares quidem
partes , materiam ; mentem vero , quæ omnia dif-
pofuit , efficientem caufam efle putavit. Sic enim
exorditur.
Simul res omnes erant; mens verd ipfas diremit,
atque difpofuir,
Plutarch. de Placitis Philofoph. Lib. 1, c. 3.
(1) E'umidonnnes rpigeau pes ra Qoe diù Thy Ümosuri
Todd oxsiou , ælkeoQe de di ray mupouriu rod Cepreod.
Empedocles ait animalia nutriri quidem ex accom-
modatr , fibique convenientis cibi fubflanuié ; ex caloris
Sentiment
d'Empédocle
fur la nutri-
tion.
Autre fenti-
ment du mèê-
me philofo-
pue fur Îles
éléments de
la matiere,
112 IN LA GTR UER LÉ
propres & accommodés à la maniere de l'ami
mal.
64. Le même Empédocle enfeignoit que
la matiere avoit pour principe une force inhé-
rente & vivante, un feu fubril & actif, qui
mettoit tout en mouvement (1); ce que M.
de Buffon appelle autrement matiere orga-
nique toujours alive, Où matiere organique
animée ; & » cette matiere, chez Empédocle,
» étoit divifée en quatre éléments, entre
» lefquels il y avoit une liaifon qui les unif-
» foit, & une difcorde qui les divifoir, &
» dont les petites parties s’attiroient mutuel- :
autem acceflu , fivè præfentià augeri Plur. de Placit.
Philo/. lib. $ , c. 27. Hippocrate regardoit le feu élé-
mentaire comme le principe de la végétation M. Le-
febvre rapporte les expériences de Jallabert & Nollet
pour prouver la vérité de cette opinion. /ntrod. &
L'Expéri On voit par cette Introduétion combien
Hippocrate connoifloit diftinétement tous les prin-
cipes de la phyfique moderne, & même delachymie;
& que tout ce que l’on a dit de vrai depuis lui
fur les caufes de la compofition & de la décompot-
sion des corps, fe trouve dans fes écrits.
(1) Origines Philofoph, c. 4.
» lement
A NIMÉE, 113
> lement , ou fe repoufloient les unes les
» autres (1); ce qui faifoit que rien ne pé-
» rifloit , mais que tout étoit dans une per-
» pétuelle viciflitude dans la Nature » : d’où
il s'enfuit que dans le fyftème d'Empédocle,
comme dans celui d’Anaxagore , il n’y avoit
point de vie où de mort proprement dites,
mais que les gflences des chofes confiftoient
dans ce principe actif d’où elles étoient éma-
nées (2), & dans lequel elles fe réduifoiene
ou fe décompofoient en dernier reflort.
(1) A0 de ras ipéo. Queis cdd tr bou éméÿlar
Oynlav | add ris cuhouiyen Cayéraio rEeury.
An povor palis Te, itnnakis Te puryé lo
Es, Queris de polos oouailer évIparurir,
Jam quod naturam mortales nomine dicunt,
Hoc nihil eft ; neque enim mortem Natura, vel
ortum
Humano præbet generi ; nam mixtio tantüm,
Mixtorumque fubeft quædam fecretio rebus ;
Idque homines vulgo Naturam dicere fuerunt.
Plutarch. de Placit. Philof, L 1, c. 30.
(2) Où mapemiumouar x) roy E’umidonnia , ds Qurixäs
drus vhs muilay dvanrVeus péular, d5 Erouims TArÉ
ds Ta To mupis abri PL
Tome I. H
Autte fenti-
ment du mèê-
me fur la gé-
nÉrAtIONs
Opinion de
Plotin fur
Pafinilation
des parties
dans la nutri-
tion,
114 IN SAT QU PR 4
65. Empédocle avoit encore fur la géné-
ration un fentiment que M. de Buffon a {ui-
vi, & qu'il a prefque exprimé dans les mêmes
termes, lorfqu'il dit que les liqueurs fémi-
nales des deux f[exes contiennent toutes les mo-
lécules analogues au corps de l’animal ; & né-
ceffaires à fa reproduition (1).
66. Plotin, fuivant l’idéeyd'Empédocle,
a recherché quelle pouvoit être la raifon de
cette fympathie & de cette attraction dans la
Nature , &1l la trouve dans une harmonie &
une affimilation de parties (2) , qui les porte à
Admitto etiam Empedoclem , qui admodum natu-
raliter univerforum meminit inftaurationis , quod
fcilicet aliquando futura fit mutatio in ignis eflen-
tiam. Clement. Alexandr. ffromatum, 1. $ ,p. $9s.
(1) Empedocles guidem divul{a effe fobolis membra
aïebat , ut in femane alia , alia in maris femine con-
tinerentur : Galen. de femine, lib. 2, c. 3.
Vid. etiam Galen. hiftor. Philof. cap. de femine ;
& Plutarch. de Placit. lib. 1, cap, à.
(2) Tas dt yorleius müs ; h Tü cuuruduia , 5) rà miQu-
xhes cuxQaviay eve Quoiav , 454 ballurw évuolav 1) 75 À
dupe À mod momie Es à Goo œulenoler 1 yep
endes pygeaméne GA | AmoMhE ÉAxeTEI | 20 onlebiler
ANIMÉ E. t1$
fe lier enfemble lorfqw’elles [e rencontrent , ou
à fe repouffer lorfqu’elles font diffemblables ;
1l dit que c’eft la varieté de ces affimilations
qui concourt à la formation de l’animal ; & il
appelle cette liaifon & cette défunion la
force magique de l'univers: & fon habile
interprete , Marfile Ficin, expliquant le fens
de ce pañlage , dit que Les différentes parties
de chaque animal (1) ont une vertu attraétive
“en elles , au moyen de quoi elles s’approprient
ao) à Ouh payde , 4 à 7 mari QUe | 1) ro viros
ab,
Magicos verd attra@us quânam ratione fieri dices
mus ? Profeéto ex confenfione quâdam rerum in pa-
tiendo ; ac lege quâdam naturæ faciente , ut snter
fimilia quidem concordia fit, inter diffimilia vero dif-
cordia : item virium multarum varietate in unum
animal conferentium. Etenim nullo alio machinante
multa ritu quodam magico attrahuntur ; veraque vis
magica , eft amicitia in univetfo , rursufque difcor-
dia. Plotini Ennead. 4. l. 4, p. 434.
(1) Animalis quodlibet membrum habet vim ad
attrahendam portionem propriam alimenti ; venæ ad
fanguinem , arteriæ ad fpiritum , tefticuli ad femen,
Marfil, Ficini in Plotini Enn. 4, l. 4. capitulo 40.
H ij
Expoftion
du fyftème de
M. de Buf-
fon,
t16 N A7 UUR 4
des portions d'aliments qui leur conviennent
davantage.
67. Venons à préfent au fyftème de M. de
Buffon, qui fera d’autant plus aifé à expofer ,
que je me fervirai de fes propres termes. Cet
illuftre écrivain penfe , avec Anaxagore,
qu'il y a dans Îa nature une matiere com-
mune aux animaux & aux végétaux , qui
fert à la nutrition & au développement de
tout ce qui vit & végere; & avec Plotin,
que cette matiere peut opérer la nutrition &
le développement, en s’aflimilant à chaque
partie du corps de l'animal ou du végétal,
& en pénétrant intimement la forme de ces
parties , qu'il appelle le moule intérieur.
Cette matiere nutritive & produétive eft uni-
verfellement répandue par-tout, & compo-
fée de particules organiques toujours actives,
tendantes fans celle à l’organifation, & pre-
nant d’elles-mèmes des formes différentes,
fuivant les circonftances ; de forte que,
comme Anaxagore , 1l n’y a point de germes
préexiftants , point de germes contenus à
l'infini les uns dans les autres, mais une ma-
ANIMÉE. Va 7
tiere ofganique toujours aétive , toujours
prête à fe mouler , à s’affimiler, & à pro-
duire des êtres femblables à ceux qui la re-
goivent : les efpeces d'animaux ou de végé-
taux ne peuvent donc jamais s’épuifer d’eux-
mêmes ; tant qu'il fubfftera des individus,
lefpece fera toujours toute neuve: elle l’eft
autant aujourd’hui qu’elle l’étoit au commen-
cement, & toutes fubfifteront d’elles-mèmes,
tant qu'elles ne feront pas anéanties par la
volonté du Créateur. Il s'enfuit de ces prin-
cipes , que la génération & la corruption ne
font que la différente affociation ou défunion
des parties femblables , lefquelles , après la
décompofition d’un corps animal ou végétal,
peuvent fervir à reproduire un autre corps
de la mème efpece , pourvu , felon M. de Buf-
fon , que ces petites parties conftituantes
rencontrent un lieu convenable au dévelop-
pement de ce qui doit en réfulter pour la gé-
ration de l'animal , ou qu’elles paffent par le
moule intérieur de l’animal ou du végétal,
& s’affimilent aux différentes parties, en pé-
nétrant intimement l'intérieur ; & c’eft en
H iij
Autre prin-
cipe de M.de
Bufon dans
Hippocrate ,
Pythagore &
Ariftore.
118 NATURE
cette derniere condition feulement que con-
fifte la différence entre les opinions des An-
ciens que je viens de rapporter , & la théorie
de M. de Buffon. Celui ci croit que les par-
ues fimilaires & organiques ne deviennent
fpécifiques qu'après s'être aflimilées aux diffé-
rentes parties du corps qu’elles doivent com-
pofer ; au lieu qu’Anaxagore les croyoit tou-
jours fpécifiques, & ne penfoit pas qu’elles
euflent befoin de pénétrer la forme des par-
tes pour s’y affimiler (1).
68. Un autre princine de M. de Buffon ef
que lorfque cette ratiere nutritive eft plus
abondante qu’il ne faut pour nourrir & déve-
lopper le corps animal ou végétal, ele ef
renvoyée de toutes les parties du corps dans
(1) Il paroît même qu’'Hippocrate penfoit comme
Anaxagore. E‘cégre de is &yOpamoy prépea entr , Chu Ghœv
o f P (REPECE? > 2
9’ , \ + « . .
Exale oüypurw æupos 10 Los. Jrrepunt in homirem
partes partium , totæ totarum, &c. L. 1 de Diætà.
C'étoit , fuivant lui, en vertu de leur affinité que
ces parties totales & fimilaires ouéregm» s'attiroient
pour fe rendre à leur place convenable. Ibid. feët. 4,
p. 9. Edir, Foëf, & fe&. 3, p. 33, lin. 38. id, p. 19,
lin. 294
ANIMÉ E. 119
ar ou plufteurs réfervoirs , fous la forme d’une
liqueur ; qui eft la liqueur [eéminale des deux
Jexes ; lefquelles , mèlées enfemble, contri-
buent à la formation du fœtus qui devient
male ou femelle, fuivant que la femence
du mâle ou de la femelle abonde le plus en
molécules organiques ; & reflemble au pere
ou à la mere, fuivant la différente combinai-
fon de ces deux femences. On trouve encore
l'origine de cette idée dans les paffages de Pye
thagore & d’Ariftote ,rapportés ci-deflous (1);
(1) Dao, o7i Très aipalirës dy dy mipirloua TpoQis,
To cmipuu , rés mi ma quipy Om idoutms TEAcUTuIas.
Conftat femen ele fuperfluitatem fanguinei aliment,
qua pofimodim in membra digeritur. Ariftotel. de ge-
neratione animal. lb. 1 , c. 19, p. 1063. E.
Amporeiles àQ char À cola 5 À rvewlara ppav,
oo) T cpu, 650 , K) ay. :
Democritus ab omnibus precipuis corporis pariibus
femen derivari credit , ut ofibus , carne, venis. Gal.
Hiftoria philofophica de femine, Bafil. 1538. pars
quarta, p.435 ; lin. 48, 49. Vid. Hippocrat. de ge-
nituré.
» Dans le même chapitre il rapporte un fentiment
» de Pythagore qui eft précifément exprimé comme
H iv
Sentiment
fur les deux
fyftêèmes.
120 NATURE
& dans Hippocrate cité par M. de Buffon
même (1).
69. Ce feroit m’écarter de mon but que
de prétendre apprécier ici le mérite de l’un
ou de l’autre fyftème ; il eft fuffifamment
rempli fi j'en ai fait voir l’analogie. Il femble
que tous deux ont leur mérite, & que tous
deux font les productions de très beaux gé-
nies ; celui d’Anaxagore a plus d'inconvé-
ments, & n’étoit pas appuyé fur les expe-
riences exactes & laborieufes qui foutiennent
celui de M. de Buffon ; mais 1l faut avouer
auf que le philofophe Grec avoit beaucoup
fait d’avoir imaginé les principes qu'a fuivi le
» celui de M. de Buffon, qui fait provenir /a femence
5 d'une matiere nutritive furabondante ; femen nutri-
menti partem quamdam fuperabundantem efle.
Et Plutarchus de Placitis Philof. lib. $ , c. 3. Py-
thagoras femen efle dixit alimenti fuperfluitatem ,
mepirloue ris Tpopas.
Voyez aufli un peu plus haut , p. 110, & Hippo-
crate , de geniturä , Gc. 1. 1 de Diera.
(1) Page 141 du 3°. tome de l'Hiftoire Naturelle ,
édit. in-12.
AUNC ET MIE E 121
philofophe moderne ; & que l'avantage que
l'un 2 eu d’avoir pu faire ufage du microf.
cope, ne doit pas, dans un parallele, tour-
ner au défavantage de l’autre; on verra ce-
pendant ciaprès (1) que les Anciens n’ont
pas toujours été dépourvus de fecours de
cette efpece.
Je paffe à l’examen d’un autre fyftème qui
n’eft pas moins délicat que celui que je quitte
ici, & dont on trouve également des traces
chez les Anciens.
(1) A l'avant dernier chapitre de la 3°. partie.
Expofcion
du fyftème
de M. Nced-
ham.
122 LUN'AUTIO RE) ACTIVE
COLA PR APRRE CEE LE
Nature ailive & animée. Syfléme de
M. NEEDHAM.
70. A PRÈS une longue fuite d'expériences
microfcopiques , M. Needham (1) aremarqué
qu’elles conduifoient toutes à faire voir (2)
que les fubftances animales & végétales font
originairement les mêmes ; qu’elles fe con-
vertiffent l’une en l’autre réciproquement
par un changement fort aifé ; qu’elles fe dé-
compofent en un nombre infini de zoo-
(1) » M'étant trouvé un jour avec M. Needham , &
> parlant de fon fyftême , il a faifi cette occafion de
v
» s'expliquer fur quelques expreflions de fon livre,
» auxquelles il fe plaint que l’on n’a pas donné l’in-
» terprétation la plus jufte & ‘la plus naturelle ; &
» il a defiré que je lui donnafle le moyen de le faire,
» en inférant ici les deux ou trois notes fuivantes.
(2) Obfervations Microfcopiques. Paris , 17ç0.
in-12. pages 271, 241,242 319, 320,267, 2693
270 5 320 » 335» 3775 379 > 382
nn —
EUT OA N IIM É LÉ, Hg
phytes (1) qui, fe réfolvant, donnent toutes
les différentes efpeces d’animaux microfco-
piques communs, lefquels, après un certain
temps , deviennent immobiles , fe réfolvent
encore , & donnent des zoophytes ou des
animaux d’une efpece inférieure ; que les
animalcules fpermatiques ont la même pro-
pricté de fe réfoudre , &, dans leur décom-
pofition , de donner des animaux plus petits
jufqu’à ce qu’enfinils échappent entiérement
à la force des meilleures lentilles. L'auteur
des obfervations croit qu'il eft probable de là
(1) » Nommés ainfi , parcequ'ils doivent leur ori-
» gine à des plantes microfcopiques dont ils font vi-
» fiblement le produit. On les partage en deux
» clafles ; ceux qui ont un principe de fpontanéité;
» & les autres qui font fimplement vitaux. Cette
» vitalité eft précifément la même chofe que l’irrita-
» bilité de Haller, & dépend du même principe , à
» l'exclufion de tout fentiment & de toute fponta-
» néité, Ce même principe vient d'être découvert
» tout récemment , & obfervé par un Naturalifte de
Florence dans quelques fleurs, qui font les parties
génératrices , & les plus exaltées des plantes.
n Note de M, Needham.
2
Ü
u
L9
Suite de la
même opi-
nion.
Suite du
même fyfté-
Mme,
TA UMNETURE ACTIVE
que toute fubftance animale ou végétale
avance autant qu’elle peut dans fa réfolu-
tion, pour retourner pat degrés à des prin=
cipes communs à tous les corps, & qui font
une efpece univerfelle.
71. L'auteur infinue enfuite que dans la
décompofition les corps fe fubtilifent relle-
ment, que la réfiftance diminue toujours,
& que ladivité motrice augmente propor-
tionnément ; qu'après avoir paf]e la ligne de
fpontanéité , le mouvement fe fimplifie jufqu'&
devenir purement ofcillatoire , avec différents
degrés de viteffe , & que parconfequent la ma-
tiere doit être confidérée comme paffant con-
cinuellement d’un état à un autre , & confli-
tuant des éléments de plus en plus aëlifs.
72. Un peu après 1l n’héfite plus à croire
qu’à mefure que la matiere fe décompofe, elle
fe fubrilife , & que la vitefle des corps de-
vient plus grande à proportion que les corps
font plus petits ; 1l avoit dit que toute com-
binaifon phyfique (ou matérielle) pouvoit fe
réduire en derniere raifon à des agents fim-
ples , tels que la réfiftance & le mouve-
EUAUQAUN EME 42
ment {1); que l’idée de l'étendue n’eft que
leffer des actions fimultanées ; que la réff-
tance & l’activité motrice (2) font un réful-
tat d'actions fimples ; & enfin qu'un nombre
d'agents fimples & inétendus peuvent con-
courir à nous donner l’idée d’une combinai-
fon étendue , divifible & fubftantielle : 1! dit
enfuite que les principes de la matiere font
des fubftances dans lefquelles l’effence , l’e-
xiftence & l’action fe terminent en dernieres
raifons , qu’i/ y a des principes actifs dans
l'univers qui produifent de leur propre nature
le mouvement (3): enfin il conclut par dire
que la matiere, portée jufqu’à fes premiers
a
(1) »C'eft-à-dire , doués par la Divinité des prin-
» cipes de la réfiftance & du mouvement. Note de
» M, Necdham.
(2) » En concret , telles que nous les voyons dans
» les effers qu'elles produifent. Du même.
(3) » Mais toujours indépendamment de la Divi-
» nité qui les a créés ainfi, comme il a donné à
» l'ame des bêtes le principe du fentiment, & à
» l'ame de l’homme la puiffance de la raifon. Mais
# çe principe de pur mouvement ne renferme auçun
Comparai-
fon de ce fy-
flème avec
les opinions
de Pythagore
& de Flacon;
156 NATURE ACTIVE
principes , n'eft plus une mafñle inactive; mais
qu'elle devient aühvité réfiflante , mouvante ou
vitale ; dont chaque portion eft fenfble (1) :
& dans un autre endroit il dit que la vitalité
eft fenfible dans chaque particule, & qu’enfin
il y a une aëlivité pofitive dans la matiere.
73. Si lon compare à préfent ce fyftème
avec la doctrine de quelques Anciens, on y
découvrira aifément une conformité frap-
pante. Pythagore & Platon (2) enfeignoient
que tout étoit animé dans la Nature , & que
la matiere avoit en elle-même un principe de
mouvement & de repos qui la tenoit fans ceffe
en action; ce qui n’eft autre chofe , dans le
fyftème de M. Needham, que la force active
» fentiment , aucune fpontanéité , aucune volonté,
» Il agit quand il eft dégagé de la réfiftance qui eft
» comme fon antagonifte ; & comme un reflort, il
» fe déploie fans cefle , & de plus en plus démontre
2 fa force au dehors , à mefure que la réfiftance di-
» minue, toujours actif & toujours agiffant, Vote
» de M. Necdham.
(x) » Dont chaque portion participe felon fa na«
» ture. Du même.
(2) Diogenes Laert. lib, 8, feif, 25, Plutarch. de
Placitis Pilof, Lib. 2, c. 3.
POPAAPNIUMÉE %}r
combinée avec la force de réfiftance.
74. Les Pythagoriciens (1) croyoient que
le Monde étoit animé, qu'il y avoit un prin-
cipe de vitalité infus dans toute la Nature ,
qui s’étendoit non feulement au regne ani-
mal (2), mais aufli pafloit dans le regne vé-
(1) À œoeuuike do duvapeus | dpyas xwariar. Cui
(Natura fcil. ) duas potentias immifcuit, motuum
principia. Timaus Locrenf. tom. 3... Platonis Edir.
Sreph. p. 94. D. & 95. E. 96. À.
(2) » Epicure enfeignoit aufli la même doctrine
» fur la génération, & ( comme M. Necdham, )
» difoit avec Anaxagore & Euripide, que rien ne
# meurt dans la Nature,
Of mipi E miroupgr tx piluGongs ris dANiney yet Qu Ta
Goa ds 194 Avakeryoogs | xg4 Edearid ns" birxu undt,
pélanciboutve de dnn0 ps dnno, poppus td'uës. Epicurei
animalia ex mutuä in fefe mutatione nata putarunt:
quod Anaxagoras etiam , & Euripides exiftimavit,
inquiens : Nihil moritur , fed aliud in aliud conver-
fum formas varias oftendit. Plutarch. de Placitis
Philof. lib. $ , cap. 19. Aucun Ancien n’a mieux dé-
veloppé cette idée qu'Hippocrate. De Diatä. 1.1,
fe&. 4, p. 8. edit. Foëf. Voyez l’ordre que M. Le-
fevre a donné aux idées d'Hippocr. Introd. au Traité
de l'Expéri, de M, Zimmermann , p. 31, 34:
&c des autres
Pythagori-
ciens.
Principes de
la Nature
ebez Platon.
i28 NATURE ACTIVE
gétal par une génération conftanre & fuccef-
five ; ils connoifloient une force produétive ;
principe aülif dans la matiere ; qui pénétroit
tout & mettoit tout en mouvement , & qui
étoit l'ame du monde , ou la force imprimée
par Dieu dans la Nature (1).
75. Et c’eft ce que M. Necdham appelle
les principes atlifs dans l’univers qui produi
(1) H° Qiois apyn muvirtos , 494 sértos : Natura
principium mots , ac quictis. $zobaus Eclog. Phyf.
db. 1, p.29.
» Ariftote en donne la même définition, /ib. 24
5 Phyfic. cap. 1, feit. 3 & 4.
O' dt 50 Gos 2) votre 20 dpéln medio, x) mpercilieus
dus ropoles , &s d'érmorry # dpéoure dp£ouéve ruyeshrale,
Deus autem & ortu , & virtute priorem antiquiorem-
que genuit animum und! , eumque ut Dominum,
atque imperantem obedienti præfecit corpori. Pla«
conis Timaus, p: 34. C.
Quemadmodum Deus fuà virtute creaflet Natu-
ram , ita & ipfa Natura, velut Dea quædam , crea-
tum illum ordinem , atque poteftati fuæ relitum,
efficax gubernaret. Grævius de philofoph. veter.
pag. $69.
Plato in Theeteto, p.152, D. 153. 4, som. 1.
fent
PPT AAN IMIÉ E. 453
fent de leur propre nature le mouvement (1);
ou la vitalité fenfible dans chaque particule;
aéhivité mouvante ou réfiftante, que Platon afli-
gnoit aufli à la matiere, comme un principe (2)
aékif, qui étoit au commencement dans un
(1) » Defcartes prétend que Dieu a mis tout en mou
» vement dans l'univers, en imprimant dans le com-
»°mencement une certaine quantité déterminée de
» mouvement qui fe communique de corps en corps
>» fans foufrir de diminution : Mallebranche dit que
» Dieu, toujours agiflant, produit à chaque inftant
» la quantité de mouvement qui eft néceflaire : pour
» moi, je ne vois rien de contraire à la religion, en
» admettant des agents fimples , doués des deux
» principes de réfiftance & de mouvement en eux-
» mêmes ; comme on dit que l’ame des bêtes eft un
» agent fimple , doué de Ja faculté de fentir ; & celle
5 de l'homme un étré fimple, doué de la puiffance de
» taifonner. Note de M. Necdham.
(2) Ana nouer mAeumehns, x94 dréxles , sis Tébw
adTa hyayey éx Ths dTabius fryyréieros Enéivo Torod méÿls
por,
Sed quod immoderatè, & inordinatè fluduaret ,
id ex inordinato in ordinem adduxit; ratus ordinem
perturbatione omnino efle meliorem, Platon, Timeus,
p. 30, A.1tom. 3,
Tome I, I
Suite du fen-
timent de
Platon , &
belle expref-
fion d'Epicu-
Ie,
130 : IN'ATUREnACTIWVE
mouvement indéterminé & défordonné, &
qui, à la formation du Monde , fut ré-
glé par Dieu, & dirigé fuivant des loix conf-
tantes; & ce grand philofophe difoit poli-
tivement que Dieu n’avoit point rendu la
matiere oifive & inactive , mais qu'il avoit
feulement empèché qu’elle ne für agitée
aveuglément.
76. Si M. Needham dit que toute combi-
naifon phyfique peut fe réduire en dernier
reflort à des agents fimples , doués de réff-
tance & de mouvement ; que l’idée de l’é-
tendue n’eft que l'effet des actions fimulta-
nées; & qu'un nombre d'agents fimples &
indivifibles peuvent concourir à nous donner
l’idée d’une combinaifon étendue , divifble
& fubftantielle ; Platon , long-temps aupa-
ravant , avoit clairement diftingué avec les
philofophes de fon temps la matiere dont les
corps font compofés, d'avec cescorps mêmes ;
il remarquoit une différence eflentielle entre
la matiere produétive de tous les corps , &
les corps qui en étoient produits. Srobée ,
expliquant le fentiment de Platon, convient
HE TT OM NTM EN. ‘#ii
bien que la matiere eft corporelle (1), mais
il avertit en mème cemps de prendre garde
de la confondre avec les corps, parcequ’elle
eft deftituée , dit-il, des qualités effentielles
aux corps, comme la figure , la pefanteur,
la légéreté, &c. quoiqu'elle en ait l'eflence,
(1) Erudn d 5 pue Queis, xer” tmialxy ITAëlanes ,
aÿneh Tis se xoioias 2 sartus, oÙre d'u x) xioïpevoy # VAN
\ \ La 1 1 \ \ cu e € \ ; , La
“ur Toy b0uoy Aôryoy , oùrEe xarTw To £i0 os" # Hey Yup œvei=
\ er > \ CR >, \ \
dtos, ro de tidos dt, 494 n put où chum, cuuarixn d+,
To OÙ nadamak droualer où couale dE Ty am Qarw,
» el ? ! € n A* n \ / à) /
ouy, o7t où {roy dsteo a 0XE FT treps Fupio IUSUTENY >
GNN or © moAGy GAY dmoAImETE K@T& Te LOloy Aoyor,
& Ts capmeris UTERYE anpolirgod , xpameles , Bapérules ;
#ovQo]yros , us murss molëriles # mororhlos.
Cüm fit autem Natura, ex mente Platonis, prin.
cipium motüs, ac quietis, neque fuà profeéto naturà,
neque fecundüm formam movetur materia. Nam ut
illa formä caret , ita hæc: & ut illa non corpuseft,
fed corporea , ia hac prorsès incorporea. Negatur
autem corpus effe materia , non tam quôd intervallis
corporeis careat, quam quod aliis quoque multis
ad corpus pertinentibus per fe deflituatur, ut figurä ,
colore, gravitate , levitate , 6 omni denique qualitate,
& quantitate, Stobæus , Eclog, Phyfic. lib. 1, c.14,
P. 29.
Lij
Opinion de
quelques An
ciens fur la
génération.
132 NATURE ACTIVE
c’elt-à-dire , l'aptitude au mouvement, à la
divifbilité, & à recevoir différentes formes;
& un autre grand philofophe Grec a aufli dit
prefque dans les mêmes termes dont fe fert
M. Necdham, que /es idees de force, de
réfiftance & de pefanteur concourent à nous
donner l’idée des corps (r).
77. Pythagore , Platon & Ariftote ont eu
fur la génération un fentiment auquel fe
rapporte bien évidemment ce que M. Need-
ham a paru avoir écrit de nouveau li-deffus.
Celui-ci dit que la premiere bafe de la végé-
tation , ou le germe primitif , eft formé tout-
à-coup & déterminé fpécifiquement, & que
c’eft un premier point d’aétion qui commence
Q , \ € , 2 re
(1) O5 # éme or Aéy1 6 E’riroupos ; To COAC VOEI .
aur Emobvderw perde | #4) œuuares , 1 dlilmias #
Bépous | tx un Olay coparuy Pidberai To 0 cèum voi,
Unde etiam cum dicit Epicurus intelligendum effe cor-
pus ex compofitione magnitudinis , & figure , € refiflen-
tia ; © ponderis, urget ut is , que non funt corpora
éntelligamus id quod eff corpus. Sextus Empiricus,
adverf. phyfic. lib. 10, feë. 240 ; p. 673. Voyez
la fin de la fe, 5 4 de cet ouvrage,
ÉNPUAIN FMIÉUE 43
\
à végérer, dès que la chaleur concourt à
ajouter à la force expanfive. Or , n'eft-ce
pas ce que ces anciens philofophes vouloient
faire comprendre , lorfqu'ils difoient que la
force de la femence étoit incorporelle , &
agifloit (1) fur les corps aufli bien que l’ef-
prit ? Démocrite & Straton s’expliquotent là-
deffus avec encore plus d'énergie, lorfqu'ils
difoient que la force étoit /piritueufe & fe
convertiffoit en corps (2).
783. Je ne finirois point fi j’entreprenois
d'examiner tous les fyftèmes des Modernes
(1) HuSaæyopas , Tara, A'easéleans éramoler pv éivey
ru dvauus To cmipuales, üomtp voïy roy aware" ramell-
ny de Ty Um TH 7 POLE OUEN. Erparay , # Ayuoôresros ê
TH À dyepasy cou Tia TIxh. yap.
Pythagoras, Plato, Ariftoteles feminis quidem vim
incorpoream effe arbitrantur | ficuti mentem , quæ
corpus movet ; materiem vero , quæ profundatur ,
corporcam. Strato , & Democritus zp/am quoque vim
corpus efle, cüm fpiritualis illa fit. Plutarch. de Pla-
citis Philof, b. $ , c. 4, p. 126.
(2) Democritus & Strato vim quoque corpus efle
contendunt , fpiritus cum fit, Galeni Hifloria Philo-
fophica, cap, de femine,
l ii
Spinofa ,
Hobbes &
quelques au,
tres ont re-
nouvellé les
opinions des
Anciens,
134 NATURE ACTIVE
qui ont pris leur origine dans les écrits des
Anciens ; il me fuffit d’avoir démontré cette
aflertion par l'exemple des deux fyftèmes qui
fe montrent le plus avec quelque apparence
de nouveauté. [1 me feroit également aife de
faire voir que le fpinofifme a eu fa fource
dans l’école Eléatique ; que Xénophane &
Zénon d’Elée en ont femé les premiers ger-
mes, & que les anciens Perfans, partie des
Indiens, & une fete de Chinois avoient
enfeigné depuis plufieurs fiecles cette doc-
trine impie & contradictoire. Je pourrois
auffi faire voir aifément que dans la Morale
& la Politique , les plus célebres Modernes
n'ont rien dit de nouveau ; que celui dont
les fentiments ont furpris davantage, Hobbes
mème , n'a rien avancé qu'il n'ait trouvé chez
les anciens philofophes Grecs ou Latins, fur-
tout dans la philofophie d’'Epicure (2); que
(1) Wide Brucker. Hif. Cris. Phil. tom. $ , p. 180.
(2) Spartani primam honefti partem ponentes in
patriæ fuæ utilitate , jus aliud nec noverant, nec
dicebant, quam unde Spartam putabant augeri pofle;
HAT AN IDIMÉ UE... 3
Montefquieu a puifé chez les anciens les
principes de fon fyftème de l'influence des
climats [ur les mœurs & les gouvernements (1) ;
& que Machiavel a tiré d'Ariftote cette Poli-
tique dont on à fait tout l'honneur à la force
de fon génie (2). Mais ces difcuflions me mé-
unde honefta iis videri, quæ fuavia funt ; jufta,
quæ utilia. Plurarch. in Age/ilao ad finem, Tom. 1,
p. 617. D. Voyez aufli fur ce fujet Lucrece , Liv. $,
v. 800. Horace, liv. 1, fatyre 3, v. 99. Diodoæ
dé Sicile, l1y- 1, c. 8. Cicér, Pro. P.Sextio, et. 42,
p. 504. Kai To d'xaioy éiver #94 To uigpoy où Pots, dnnx
vw. Juftumque & turpe non naturà conftare , fed
lege. Sic philofophatus eft Archelaüs, tefte Laërtio.
— Vid, & Brucker, tom. t,p. $21, feét. 12, &im-
primis Cornelii Nepotis Imperator. Vitas , totà præ-
fatione.
(1) Polybe , lib. 4, p.290. E. dit » que le climat
» forme les mœurs des nations aufli bien que leur
» couleur »; & Cicéron , de Naturâ Deorum, lib. 2,
n°. 16, que » plus l'air eft pur & fubtil , & plus les
» têtes font fpirituelles.
(2) Ariftot. Politic. lib. $ , ubi quomodo confer-
vari poflit tyrannis , iniquus dominatus docetur.
Etlib.7, c. 2, declarat eundem fcopum , quo utile
honefto præfertur , jam fuo tempore quafdam fibi
Ji
?
136 NATURE ACTIVE ET ANIMÉE.
neroient trop loin, & je me hâte d'entrer
dans un autre champ qui ne me fournira pas
moins que celui que je laiffe un grand nom-
bre de témoignages pour appuyer le fenti-
ment que je défends.
præfixifle refpublicas. — Ammian. Marcellin. de
Bello Romanor. cum Valentin. Saxon. & Saluft. in
Jugurthà , de deditione Capfx oppid. Numidiæ,
» Les différences les moins fenfibles entre les ver-
» tus & les vices , font judicieufement expofées dans
o
> la morale d’Ariftote , & les pafions admirable-
2
ÿ
ment décrites dans fa rhétorique. Le Cyrus de XE-
2
Ôo
nophon eft la meilleure école d’un grand Prince ;
2
ÿ
les caracteres de Théophraîte font peints avec la
>
©
plus grande vérité ; Tacite a mieux jugé qu'aucun
» autre écrivain les actions des grands hommes ; &
» les devoirs de l'homme, dans la vie civile, ne peu-
y
» vent pas être mieux détaillés qu'ils le font dans le
# livre de Cicéron de Officiis.
ES TEE
CAE A PTMR EL. TIV.
Philofophie corpufculaire , & divifibilité de
la matiere à l'infini.
79. On n'ignore pas que la philofophie
corpufculaire , par le moyen de laquelle les
phyfciens de nos jours expliquent tout ce
qui fe pafle dans la nature , a été renouvellée,
d’après Epicure , par le célebre Gaflendi; &
d'après Leucippe , Démocrite & Epicure,
par Newton & fes difciples. Ces deux il-
luftres modernes ont , à l’imitation de ces
anciens philofophes, cherché les raifons du
changement continuel qui arrive aux corps,
dans la différente figure & la différente gran-
deur des petits corpufcules , qu’ils difent être
les uns petits & ronds , d'autres angulaires,
crochus, plats ; les uns polis, & les autres
grofliers &#aboteux ; & que par leur diffé-
rente jonction ou féparation , & par leurs
arrangements variés, 1ls conftituent toutes
les différences que nous obfervons dans les
corps. Il a déja été remarqué que l’on peut
Leucippe ,
Démocrite &
Epicure , au-
teurs de la
philofophie
corpulculai-
re.
138 PHiLosoPrHIE
placer plus haut que Démocrite l’origine de
la philofophie corpufculaire | en semontant
jufqu’à Mofchus (1) le Phénicien , qui a le
premier établi la philofophie des atomes ou
des corpufcules ; car quoi qu’en dife un au-
teur moderne,il n’y a point de différence entre
ces deux principes, & on en tire les mêmes
conféquences ; avec cette différence feule,
qu'il ne paroït pas que l'Ecole Phénicienne
admit l’indivifibilité de ces atomes , au lieu
que Leucippe, Démocrite & Epicure , au
contraire , foutenoinet que les atomes ne
pouvoient être divifés ; parceque, quoiqu'ils
puffent être conçus avoir des parties, il ne
falloit pas entendre qu'elles pullent jamais
être défunies : autrement, difoient-ils, 1l
n'y auroit point de principes fermes dans la
nature ; mais les atomes peuvent être conçus
divifbles par l’entendement, l'extrème CO=
héfion de leurs parties les rendantindivifibles
par l'effort d’une puiffance naturelle quelle
qu'elle foit.
(1) Sextus Empiricus , lib. 9 , adver. Mathem,
fe&t. 363. Strabo , li. 16, p. 757.
CoRPUSCULAIRE, &C. 139
So. Les Cartéfiens, les Newtoniens, &
nombre de philofophes dans tous les fiecles,
(1) ont admis la divifibilité de la matiere à
l'infini, & Ariftote a traité ce fujet en auf
grand métaphyficien (2) qu’en habile mathé-
(1) Où «mo Ocrew , 2 UuSayepou madyrx copare ,
#94 Tpoile ds Grupo à ras Guepf Isa | 1 jun tie dru-
eg iv rw row. Thaletis, atque Pythagoræ fecta.
tores corpora perpeflioni obnoxia , & in infinitum
quoque divifbilia dixerunt , vel atomos, five par-
tium expertia corpora confiftere , neque divifionem
in illis in infinitum abire pofñle, Plutarch. de Placir.
Philof. lib, x, c. 16.
(1) Ev dé rà cuxye msi per ntiog pion , SX dx
Beeyax , anna duëuu, In continuo autem infunt
quidem infinita dimidia , non tamen actu, fed po-
teftate. Ariflotel. opera, tom. 1 , p. 414, E. 425. À,
Natural. aufcutt. lib, 8, c. 12. Vid. imprimis Arifto-
telem de lineis infecabilibus.
A'exçolenns duées pehv ds amupor coule ruyre eve,
alerte de d'au.
Ariftoteles autem exiftimavit corporea potentià
quidem in infinitum dividi pofle, aëtu vero nequa-
quam. Plutarch. de Placit. Philof. Ub. 1, c. 16.
Édque etiam interire ( corpora) non in nihilum,
fed in fuas partes, quæ infinitè fecari ac dividi poflint,
Divifbiliré
de la matiere
à l'infini,
Maniere de
s’exprimer
d’Anaxago-
re ;
140 Divis:rBgiLiré
maticien ; aufli je ne veux pas parler de cecte
queftion comme étant nouvelle, mais feu
lement préfenter ici une propofñtion, avan-
cée là-deflus par les Newtoniens, quiaparu
nouvelle, & qu'Anaxagore avoit cependant
exprimée prefque dans les mèmes termes.
81. Les Newtoniens difent » qu’une par-
» celle de matiere étant donnée auffi petite
» que l’on voudra, & un efpace quelconque
» borné , quelque grand qu'il foit , étant
» aufli donné , 1l eft poflible que cette parti-
» cule divifée s’étende fur tout cet efpace ,
» & le couvre , en forte qu’il n’y ait aucun
w
» pore dont le diametre furpaffe la plus petite
» ligne donnée », & Anaxagore avoit dit (2)
que chaque corps , quel qu'il für, étoit divi-
fible à l'infini : en forte qu’un agent qui fe-
cum fit nihil omnino in rerum naturà minimum ;
quod dividi nequeat. Quæ autem moveantur, om-
nia intervallis moveri : quæ intervalla item infinité
dividi poflint. Cicero Academic. lib. primus , fe&. 7,
p'o74% 0002,
(1) Ariflorel, Phyf. aufcule, lib. 3 , c, 4, P. 3433
tom. I, :
DE LA MATIERE. 141
roit affez fubtil pour divifer fufñfamment le
pied d’un ciron, pourroit en tirer des parties
pour couvrir entiérement cent mille millions
de cieux (1), fans qu'il pût jamais épuifer
les parties qui refteroient à divifer, vu qu'il
en refteroit toujours une infinité : & Démo-
crite en deux mots a exprimé la même pro-
pofition , en difant qu'il étoit pofjible de
faire un monde avec un atôme (2). |
82. Chryfippe donnoit aufli une idée aflez
bien exprimée de ce fentiment (3), lorfqu'il
foutenoit qu’une goutte de vin pouvoit être
(1) Fénélon , Wie des philofophes dans Anaxagore.
Lucret. lib. 1 , v. 844. Origenis philofoph. c. 8.
Quin & carum minutioribus attribuit infinitatem.
(2) Auoxeñles Quoi à vveToy cive x0TLLIGIUS Dep EL)
ärouer. Democritus exiftimat fieri pofle, ur mundum
perficiar atomus. Stobæus Eclog. Phyf. lib, 1, p. 33,
lin. 9, vid. s’Gravefande , tom. 1 , p. 9.
(3) Nihil impedire quominus una vini flilla cum
20t0 permifceatur mari....& un peu plus haut: Sz
gutta unica in mare inciderit , per totum mifcebitur
oceanum , ac Atlanticum mare: non fummam attin-
gens fuperficiem , fed ufquequaque per profundum,
in longum , larèque diffufa .., Chryfippus vero dicic
Et de Chry-
fippe.
142 Divis. DE LA MATIERE.
divifée en une affez orande quantité de pat-
ties, pour que chacune put être mêlée avec
toutes les petites particules d’eau qui font
dans l'océan ; & 1l difoit aufli qu’i/ »°y avoit
point de quantité, de quelque grandeur qu’elle
fét; qui ne pât être égalée par la plus petite
quantité donnée.
elfe quippiam majus , quod tamen non excedat minorem
quantitatem, Plutarch. ady, Stoicos , tom. 2 , p. 1078.
Æ, 1080. C. D,
CAHLIAPHE TR E :°Y.
Du mouvement ; de l’accélération du mou-
yement ; de la pefanteur ou de la chüte des
corps graves.
83. Lzs anciens définiffoient le mouve-
ment comme les modernes , un changement
de lieu (1), ou le paffage d’un lieu à un
autre (2); ils connoifloient l'accélération de
la defcente des corps dans leur chüte (3):
mais ils n’avoient pas fu, à la vérité , en
(1) Koyzw d°éives Ques Xpérirmos pélatonn xarx Témo.
Chryfippus motum dicit loci mutationem. Sto8.
Eclog. Phyf. lib. 1 , p. 41.
(2) Es où ol ( ximais) ar roùs d'oynalinois ,
au hy Témo Ex Tom mrippépeilei To xoumsror , rot 225
cArle , n xarû piess. Et isitur hic, fecundum dog-
maticos , per quem de loco in locum tranfit id , quod
movetur , aut totum , aut ejus pars. Sextus Empi-
ricus in Pyrrhon. Hypotypos. lib. 3, c. 8, fit. 64.
(3) Déon de mimipgoutm uélaGonn , oo To vriuQousver
te Vorou is byluar | #4g4 To duEuvoueror tx puxpornles tis
HéyEdos , 2 To Qepopevor og #) yap Todro rJitre mode
ra. Omnis autem mutatio finita eft fané ; Id enixa
Définition
du mouve-
ment; & fon
accélération.
144 Du MouvEMENT, &c.
déterminer les loix, quoiqu'ils ne fuffent
cependant pas loin d’en connoitre la caufe.
C’étoit un axiome d’Ariftote & des Périparc-
ticiens, qu'un corps acquéroit d'autant plus
de mouvement , qu’il s’éloignoit davantage du
\
lieu d’où il avoit commence de tomber (1);
quod fanatur , ex morbo it ad fanitatem: 6 id,
quod accrefcit , è guantitate parvä ad magnum accedit :
& id ergo quod fertur legem ecandem fubit : Etenim
hoc ex loco in locum eundo fit. Ariflotel, de cælo.
lib: x © 0c, 8, p; 443
(1) Au ro mu mp Carlo Giles , x 4 mé yA
sis Toy eûrns romoy | où0e Oäroy &y mpes TD Tu ÉQioero,
ci 7j Liu, 9 79 ee SAiVa" male yap ro Bureau mropia-
Tépo yrpoue Brad'üreeo Qipera. Jonis major & terra
etiam major & celerius femper proprium locum petit,
neque porro celerius prope finem pergerct, fi vi,
exclufioneque moveretur. Omnia namque quæ ita
moventur , quüm longius ab co, quod vim attélit,
diftant ; tardius moventur. Lib, de Cœlo 1, c. 8,
P.444. A.tom.1, © p. 443 ad finem.
Celeris quid movetur quo magis ab eo loco recedir,
à quo movert cœpit. Ariflor. Phyfic. aufcule, lib! 7,
P: 405, 407. lib. 8, p. 426. lib: 4, c. 6. Voyéz fur-
tout la derniere note de ce chapitre. Le paflage du
huitieme livre de la Phyfique d’Ariftote, ch. 14,
mais
Du MouvEMENT, &c. 145
raais ils ignoroient que cette augmentation
de la viteffe des corps dans leur chüte für
uniforme , & que l’accroiffément des efpaces
parcourus fe fit fuivant la progreflion des
nombres impairs, 1,3, $, 7, &c.
84 Deux erreurs, dans lefquelles étoit
Âriftote à ce fujet, s'oppofoient à ce qu'il
püt parvenir à découvrir la vérité : l’une
étoit qu'il fuppofoit deux appétrits différents
dans les corps ; un dans les corps pefants,
qui les faifoit tendre au centre de la terre,
& un appétit dans les corps légers , qui les
éloignoit de ce centre (1) : l’autre erreur
eft ainfi: Quoniam omnia , quo longids diflant ab eo
guod quiefcit , ed celerius feruntur , p. 427 ad finem.
Vid. Pererii de rerum naturalium principiis , Edit:
Paris, in-4. 1679 ,p. 738 & f2q. Simplicius, p.469,
470. Idem Simplic. text. 61$, Phyfic. com. 47,
rcfert obfervationes duas Stratonis Lampfaceni ad
confirmandam hanc propoftionem,
\ " US 1» ral! ci CAT Cr,
(1) To ra y# pu ore ox ty[vlipo n roù pécou , Für
Pépedeu. ro de müp, com dy re wo, ti à dmtios #v, Gr
pes dv Hu n Tegurus , 494 To Êpos , 44 n xowPorys. ds
op Tù naralepa Tayuräri érépoy , Tà Repas &v TAN ,
Tome I, k$
Erreurs d'A-
riftote à ce
fujet.
146 Du MouvEemEenNT,&c.
étroit de penfer que les différents corps torn-
boient dans le même milieu avec une vitefle
proportionnelle à leurs maffes (1) ; au lieu
que la réfiftance des milieux eft la feule raifon
de cette différence (2); de forte que, fuppo-
oÙrus ei Umeipos #v M Tobrou tmidois | 44 n Ths Taxulares
émis dmEpes & 4,
Terra namque, & ignis quo propinquiora funt
locis fuis, illa quidem medio , ignis vero fupero
loco , ed celerius porro feruntur. Quod fi infinitus
effet fuperus locus, infinita nimirum & celeritas
effet : & fi celeritas infinita eflet, & gravitas etiam,
& levitas infinita effet. Nam ut id, quod inferius
pergeret, celeritate differens, gravitate celere eft: fic
fi infinita effet hujus accretio , & incrementum fanè
celeritatis infinitum etiam effet, Ariffotel. de cœlo,
Lib. C8 ps 443 tes aNVid bia ssde
clore sp. 48 DE:
(1) To yap raxos t&u mo moi tnërlovos | ps To rod
gsidovos | às To puéidor cum mpos ro taarlo, Celeritas
enim minoris ad celeritatem majorisita fefe habebic,
ut majus corpus fe habet ad minus. Ariflor, de cœlo,
Hbra) este, P476.
(2) Tolta la refiftenza del mezzo, tutti i mobili
fi moverebbero con i medefimi gradi di velocirà,
Galileus Dialog, 1 ,p. 74.
Du MouvEMENT, &c. 147
fant qu'ils rombaflent dans un milieu qui
n'oppoferoit point de réfiftance , dans le
vuide , par exemple, les corps les plus lé-
gers tomberoient alors avec la même vitefle
que les plus pefants , comme on l’a obfervé
depuis le fiecle dernier avec le fecours de la
machine pneumatique , dans laquelle le
papier, la plume & l’or tombent avec une
viteffe égale.
85. Mais fi Ariftote ignoroit que la ré-
fiftance des milieux , dans lefquels les corps
tombent , étoit la caufe de la différence qui
fe trouve dans le temps de leur chüte; sil
ignoroit que , dans le vuide, les corps les
plus inéocaux en pefanteur , comme le duvet
& l'or, devoient tomber avec une égale
vitefle ; rous les anciens ne l’ont pas ignoré.
Lucrece , inftruit dans les principes de Dé-
mocrite & d’Epicure , avoit connu cette
vérité, & l’avoit foutenue par des argu-
ments qui feroient honneur au phyficien
le plus expérimenté de nos jours. » Il
» CIOyOIt que n’y ayant rien dans le vui-
K ij
Raiïfon de
la différence
de la chüûte
des corps ,
connue des
anciens.
148 Du MouvEeMmMEnNT, &c.
» de (1) qui püt retarder le mouvement des
» corps, il étoit néceffaire que les plus Ié-
» gers tombaflent dans une vitefle égale avec
» Les plus pefants ; que là où 1l n’y a point
» de réfiftance , Les corps doivent fe mouvoir
(1) Quod fi forté aliquis credit graviora potefle
Corpora ; quo citius reétum per inane feruntur,
Incidere & fupero levioribus , atque ita plagas
Gignere , quæ poflint genitales reddere motus;
Avius à vera longè ratione recedit.
Nam per aquas quacumque cadunt ; atque aëra
deorsüm ,
Haec pro ponderibus cafus celerare neceffe eff ;
Proptereà quia corpus aqua , naturaque tenuis
Aëêris haud poffunt aquè rem quamque morari ,
Sed citiès cedunt gravioribus exuperata.
At contra nulli de nullà parte, neque ullo
Tempore inane poteft vacuum fubfiftere rei,
Quin , fua quod natura petit , concedere pergar,
Omnia quapropter debent per inane quietum ,
Atque ponderibus non aquis concita ferri.
Haud igitur poterunt levioribus incidere un-
quam É
Ex fupero graviora ; neque idtus gignere per fe,
Qui varient motus , per quos natura gerat res.
Lucretius, Lib, 2, v. 225 © feg.
Du MouTEMENT,&C. 149
» toujours en temps égaux ; que la chofe
» feroit différente dans des milieux qui op-
» poferoient une différente réfiftance aux
» corps dans leur chüte ; il allegue lä-deffus
» les raifons mêmes tirées des expériences
» qui ont porté Galilée à fonder fa théorie ;
»1l dit que la différence des vitelfes doit
» être plus grande dans les milieux qui op-
» pofent une plus grande réfiftance; & que
» l'air & l’eau , réfiftant différemment aux
» corps , font la caufe qu’ils tombent dans
» ces milieux avec une vitefle différente ».
86. On voit que les anciens connoifloient
donc l'accélération du mouvement dans les
corps, & la raifon de la différence de leur
chüte ; on voit encore qu’ils connoifloient
la caufe du mouvement accéléré , & que
parmi les différentes opinions agitées fur
cette queftion , celle d’Atiftote n’eft peut-
être pas la moins probable. Ce philofophe
croyoit en effet que le premier effort de mou-
vement , imprimé à un corps, agifloit à
chaque inftant fur lui, & augmentoit à cha-
que inftant fa vitefle ; de forte que les diffc-
K ii
Caufe du
mouvement
accéléré, dans
Atiftote ;
15o Du MouvEemEenT,&c.
rents degrés de vitefle que ce corps acqué-
roit dans chaque moment de fa chüte ,
étoient la caufe de l'accélération continuelle
de fon mouvement (1). 47 difoir qu'il y avoit
une force qui agiffoit fur les corps pefants , &
les déterminoit à defcendre (2) ; & cette force,
(1) Al yès ua nn xo4 xexbmme. Semiper enim
fimul movec & movit. Arif. Phyf. lib. 7, cap.6,
p. 406. C.
(2) E'rei dé ro Te Bapos tu Tux loc, aŸ y Qépi-
TL LÈTO , 1 TE outyh mpes To ph darrädai , Tara
d'u mpos AAA euuEAAEN. tè yap irepGaxXy 4 dois
où Rapous Ts tv TO cueyéi , mpes Ti Ciara , 3) Ty
d'uperty, Biécerar xéra Oärlar.
Cum autem & pondus aliquas habeat vires , quibus
deorsäm fertur, & continua fimili modo , ut non
difrumpantur , hæc inter fefe conferre oportet. Si
vires enim ponderis, eas vires, quæ in continuo
funt ad difruptionem , divifionemque, exfuperent,
vim inferet ipfum grave , celeritfque deorsüm feretur.
Ariftot. de cœlo , lib. 4, ad finem, p. 493. Et de
cœlo, lib. 3, c. 2, p. 476, ad finem capit. » Cette
» idée d’Ariftote eft clairement expliquée dans la
» Section vingrieme de fes Quafliones Mechanica,
» P. 1 92, 1193, en ces termes »: {p/um grave ipfa
Ju motione vim acquirit | & qu plis movetur, ed
Du MouvEMENT,&C. 151
felon lui, étoit la gravité naturelle qui les
porte vers le centre de la terre ; & il fuppo-
foir qu’à cette premiere caufe fe joignoient
pendant la chüûte d’un corps de nouveaux
efforts de la même caufe, qui lui imprimoient
de nouvelles forces à chaque inflant différent ,
& accéléroient ainfi fa defcente.
87. C'étoit là fans doute le fentiment
d’Ariftote , qui a été interpreté de la maniere
que je viens de l’expofer par le plus habile
de fes commentateurs (1), & par tous ceux
plis gravitatis affumit. To Rap Th Toù Eapous xivyri
Aapouves panno momo 4 npeoïy , BC. comme à dit
un poëte , de la renommée :
Mobilitate viget | virefque acquirit eundo.
Virg. Æneid. lib. 4, vers. 175.
(1) Velocitas propria unicuique motui fequitur
exceflum motoris fuper potentiam moti. ÆAverroës
Comment. in Phyficos ; lib. , text. 35 , p.152. Ve-
locitas motüs eft ex potenti& motoris , & ex augmento
Juper potentiam mot. Idem in cœlum, /, 3 ,text.217,
p.91. Vid. Averrois opera Edit. Venet. apud Junras ,
Ann, 1552. Vide imprimis Ariflotel, Phyf. L. 7, 0.6,
p.406. C. Cum autem id quod movet , aliquid fem
per moveat, & inaliquo , ut ufque ad aliquid : dico
K iv
Expliquée
par Averroës,
& dans Scor.
152 Du MouvemEenT,&c.
qui ont examiné avec attention les principes
de ce philofophe (1) ; entre autres Jean Duns,
dit Scot, qui vivoit au treizieme fiecle, &c
fon interprete le P. Ferrari (2).
auteminaliquo, quia in tempore movet ; ufque ad
aliud vero, quia per quantam aliquam longitudi-
nem : femper enim fimul movet & movit : quapropter
eric quantum quiddam , quod motum eft & in quanto,
& Jeg. Voyez auf les notes a & b , Set, 8$ de cet
Ouvrage.
(1) Joannts Dunfii Scoti , opera in 12 tom. in-fol.
Lugduni 1639.
(2) Communis demum Peripateticorum opinio ,
quam nos amplectimur , accelerationis illius caufam
in impetu acquifito conftituit : quia per motum efñ-
citur in gravi major femper , ac major impetus ufque
ad terminum accelerationis: qui impetus gravitatem
auget, ac motum proindè magis accelerat. Veteris ,
& recentioris Philofophie dogmata Joannis Dunfi:
Scoti doitrinis accommodata , fludio Anton: Ferrari,
Veneriis 1757, 3 vol. in-12.
» Il y a plufeurs paffages dans Simplicius , qui
» donnent clairement ce fens que l’on attribue aux
» Péripatéticiens, entre autres font les fuivants.
Er de Quoi ( AXend'egs ), 2 à TA Rapiril xura
Qériy ésuy site HUTE à à à à CVAOYO MRAVUL TUE HAT rè
Du MouvEMENT,&C. 153
Laggs daube. ....Si gravitati fecundum naturam
eft effe deorsüm ... rationabile eft , ea ( fc. corpora}
appofitionem aliquam , & additionem fecundim gravi-
tatem accipere. Simplicius de cœlo , /:b. 1 , comm. 86,
col. 2, Idem, p.61. Edit. Aldi.
Tapôregg Qhéles êni ro nur... d'ynoy or die mpoy-
y Faggus rayireeo Guru, Idem p. 62.
Et Paulo poft , p. 92, col. 1. Citius feruntur cor-
pora deorsum..... propter appofitionem gravitatis.
Vide quoque Alexandrum Aphrodifæum in Quæft.
Natural,
Gravitation
univerfelle,
154 P\E.S AN 4TIEIÙ R
€ H APE RE: VE
Pefanteur univerfelle ; force centri-
pete Ë centrifuge.
Loix des mouvements des Planctes ; fuivane
leur diflance du centre commun.
ge (a Hcrouiles Modernes fe flattent
d'avoir un avantage marqué , s’imaginant
avoir les premiers découvert le principe de
la gravitation univerfelle, qu'ils regardent
comme une vérité qui avoit été inconnue aux
Anciens. Il eft cependant aifé de faire voir
qu'ils n’ont fait que fuivre les traces de ces
anciens philofophes , en partant du même
principe , & guidés par les mêmes raifonne-
ments. Il eft vrai que les modernes ont dé-
montré clairement les loix de cette gravita-
tion univerfelle , & qu'ils les ont expliquées
avec cette clarté & cette précifion qui carac-
térife le génie de ce fiecle & du fiecle pañlé ;
UNIVERSELLE,&CC. fs
mais aufli c’eft tout ce qu'ils ont fait à cet
égard , fans y avoir rien ajouté.
89. En faifant la moindre attention aux
connoïffances des Anciens, on trouve qu'ils
n'ignoroient pas la gravitation univerfelle ,
& qu'ils favoient de plus que le mouvement
curviligne , fuivant lequel les aftres dé-
crivent leur cours , eft le réfultat de la com-
binaifon des deux forces des mouvements
auxquels ils font aflujettis: du mouvement
reétiligne , & de celui de la ligne perpendi-
culaire , dont l'effet combiné doit les obliger
à parcourir une ligne courbe.
90. Ils ont connu les raifons de ces deux
mouvements , ou de ces deux forces contrai-
res, qui tiennent les planeres dans leurs
orbes ; & ils s’'étoient expliqués li-deffus
comme ont fait après eux les Modernes , à
lexception feulement des termes de cenrri-
pete & de centrifuge , dont ils avoient cepen-
dant donné tout l'équivalent.
91. Ils connoifloient aufi l'inégalité du
cours des planetes , ils l'attribuoient à la
varicté de leur pefanteur réciproque, & à
Pefanteur &
mouvement
de proje&ion
combinés
dans le cours
des aftres.
Ces deux
forces ont
été connues
des Anciens;
ainfi que la
loi du quarré
des diftances.
Syftème
d'Empédo-
cles.
LS 6 PE NS ARN IT ME IUTR
leurs diftances proportionnelles entre elles ;
ou, ce qui eft la même chofe , & añn de
l'exprimer dans les termes confacrés par les
philofophes modernes , ils connoifloient la
loi de la raifon inverfe du quarré de la diftance
au centre de révolution.
92. Je n'infifterai pas beaucoup fur le
fyftème d'Empédocles , dans lequel on a cru
entrevoir le fond du fyftème Newtonien ;
on prétend (1) que fous le nom d’amour il a
voulu défigner une loi , une force qui portoit
les parties de la matiere à s’unir entre elles,
& à laquelle 1l ne manque que le nom d’at-
iraction; on veut aufli que par le nom de
difcorde il ait prétendu défigner une autre
force qui contraignoit ces mêmes parties à
s'éloigner les unes des autres, & que M. New-
ton appelle une force d'écartement. Je veux
bien croire que l’on puiffe réduire le fyftème
de Newton à ces deux principes ; mais comme
(1) M. Fréret de l'Académie des Infcriptions &
Belles-Lettres , Mèm. de l'Acad. vol. 18, p. 1014
Ariflot, de Cœlo, lib.-3,c,2,p, 475 in fine.
UINMEVÉER SE LLE NE. 157
ils paroiffent expofés d’une maniere trop
vague & trop générale , & que nous ne man-
quons pas de témoignages plus précis & plus
authentiques pour appuyer le fujer en quef-
tion , je laifle Empédocles, pour m'arrèter
fur les paflages qui mériteront davantage
notre attention.
93. Les Pythagoriciens & les Platoniciens,
traitant de la création du monde, ont fenti
la néceflité d'admettre l’effet des deux forces
de projection & de pefanteur , afin de pou-
voir rendre raifon des révolutions des pla-
netes. Timée de Locres (1), parlant de l’ame
(1) À mortpuée do duausis , dpyus awarios , Täs re
Téva | 494 Tüs Th Ertpo. hoyar Où ot muvris Évri xeT
deAduus dpuoxes cuyxExpguuEv às oYOS HAT prof
d'aupre mûr imisèpes, @s jun dyvorir 16 dv à dure 497
à éy TUVES HE.
Cui ( Natura fcilicet) duas potentias immifcuit ,
motuum principia , ejufdem videlicet , & alterius, Hæ
autem omnes rationes funt contemperatæ ad numeros
harmonicos : quas & ipfe rationes opifex congruenter
diftinxit, certis fcientiæ aufpiciis : ut quidem mini-
mè inçcogniturm efle poflit , çx quibus hæç mundi
Les Pytha-
goriciens &c
les Platoni-
ciens ont
connu les
deux forces
de projetion
& de pefan-
teur,
Platon a en-
feigné clai-
rement cette
doftrine,
LSOUDEPENS AN DE 'U'R
du monde, qui met toute la nature en mou-
vement , dit que Dieu lavoir douée de deux
forces , lefquelles étoient combinées fuivane
certaines proportions numériques.
94. Platon, qui à fuivi Timée dans fa
philofophie naturelle , dit clairement que
Dieu avoit imprimé aux aftres (1) /e mouve-
ment qui leur étoit le plus propre ; ce qui ne
peut être que le mouvement rectiligne qui
les fait tendre vers le centre de l’univers , ou
la pefanteur ; & qu’enfuite, par une impul-
fion latérale , ce mouvement avoit été changé
en circulaire : & Diogene de Laërce, faifant
anima fit conftituta. Timæus Locrenfis, Plato, Edir.
Steph. p. 9$ , 96.
(1) Kémen À érévudp évrd, ri 78 comes üimsiur….
(& pauld poft). Ad dy xarx ravre ty ro duro, co
b durd mecrayayéy duro raie xün)Am nwéiæs spePo-
PATTA
Motum enim dedit cœlo , eum qui corport fit aptiffi-
mus (i.e. direétum.)....]Itaque unà converfione,
atque eâdem , ipfe circum fe torquetur, & vertitur.
Platonis Timius , p. 34. À,
Cœloque folivago, & volubili, & in orbem in-
citato complexus cit, p. 34. Voyez aufli page 36.
UNIVERSELLE, @C. }$9
vraifemblablement allufion à ce paflage de
Platon, dit qu'au commencement les corps
de cet univers étoient agités tumultueufe-
ment , & d’un mouvement défordonné, mais
que Dieu régla leur cours enfuite par des loix
naturelles & proportionnelles (1).
95: Anaxagore , cité par Diogene de
Laërce (2), étant interrogé fur la raifon qui
retenoit les corps céleftes dans leur orbite
maloré leur pefanteur , répondit que /a ra-
pidité de leur cours les confervoit en cer état ;
& que fi ce mouvement violent venoit à fe relä-
cher , l'équilibre étant rompu, toute la ma-
chine du monde viendroit à fe bouleverfer.
(1) Porro ifta quidem primo tumultuario, &
inordinato motu agitari : at poftquam mundum conf-
tituere cœperunt ex rationibus inficis , debitum ordi-
nem & mundum à Deo accepiffe. Diog. Laërt. /ib. 3,
Jet. 76, 77.
(2) Ti cpodhe dt mtendire cuesévat | 5) dveIerre
alex Sie, Silenus in primo hiftoriarum auéor
eft , Anaxagoram dixifle , cœlum omne vehementi
circuitu conflare , alias remifione lapfurum Diog.
Laërt, in Anaxag. Lib, 2, feét, 12.
Expreffion
remarquable
d’Anaxago-
Les
Gravitation
wniverfelle ,
forces cen-
tripete &
sentrifuge
connues de
Plutarque,
\,
\
Go NAME IS) AUN,T EUR
96. Plutarque , qui a connu prefque toutes
les vérités brillantes de l’aftronomie , a aufli
entrevu la force réciproque qui fait graviter
les planetes les unes fur les autres; » & après
» avoir entrepris d'expliquer la raifon de la
» tendance des corps terreftres vers laterre,
» il en cherche l’origine dans une attraëlion
» réciproque entre tous les corps , qui eft caufe
» que la terre fait graviter vers elle les corps
» cerrejtres , de même que le [oleil & la lune
…
» font graviter vers leurs corps toutes les par-
wties qui leur appartiennent ; & , par une
» force attraîlive , les retiennent dans leur
» fphere particuliere (1) » : ilapplique enfuite
(1) Kai vor ye à ma due Eubends dis ro dure cunéuet,
# mpos To œbrod puéroy dyrepides mars Tois peoplois, oÙy ©
pére ocre rod mavris 4 yh MAS, à @s oo , cixtlureral
mépn adras ol Tœ Ecpn° #% TÉLUEAO içi À pemoÿTe :
où TA TH perorylos pos TOY HOTEL , &dn& pos Th y
XOW@NAS RS À) œupiQuias rois MOTTOUEVIS WTA ,. Eire
man nalaQipoméris, ds yap 6 HAS Es Eaurey imispéQu ra
pépn 6 dv cuEsyxt, À 9 YA Toy AMQoy DT me gryrale O'e-
Mere...) Qépe pes éxcivar.
At enim , fi omne corpus grave eddem fertur, &
ad centrum fuum omuibus partibus vergit ; terra non
CES
UNIVERSELLE, @&€ 161
ces phénomenes particuliers à d’autres plus
ut centrum univerfi potius , guäm totum , fibi omnia
gravia ; ut fuas partes , vindicabit. Argumentum ....
erit vergentium , quibus non medium mundi eft caufa
fuorum momertorur , fed cognatio cum terrä , à
quà vi repulfa , rurfum ad eam fe conferunt. Sicui
enim fol omnes partes , ex quibus conflat, ad fè con:
vertit : & lapidem terra , ut fibt convenientem accipit..s
6 fert ad eum. Plutarch. de facie in orbe luna , p. 924.
D. E. » On attribue un principe femblable aux
» Mages Perfans & aux Chaldéens ; cuura$ cvs rois
» xéro». Pfell, Declarario Dogmatic. Chaldaic. Ergo
potius ea ratio nobis conftabit quod fervor , quem:
admodum omnes res evocat , & ad fe ducit...eadem
ratione folis impetus vehemens , radiis trigoni for-
mà porrectis ; infequentes flellas ad fe perducir, &
antecurrentes veluti refrenando retinendoque non pati-
bur progredr, fed ad Je cogit regrédi. Vitruv, lib. 9,
C. 4, p. 187:
Sed curfus , diverfitates , alritudinifque caufas,
confiftendi , retrogradiendique atque incedendi om-
nibus fupradictis importat radius folis affulgens, qui
cas percutiens , aut in fublime tollit, aut in profun-
dum deprimit , aut in latitudinem declinare, aut
retrogradare facit. Martiani Capelle fatyricon. Edit:
Grotii ,; Lugd. Bat, 1599. 89. lib. 8, ad änem;,
P- 300.
Tome I, L
LG 2 MPINE /s DAUIN TE IU MR
généraux ; & , de ce qui arrive fur notre
globe , il déduit, en pofant le même principe ,
route qui doit arriver dans les autres corps
célefes refpeclivement à chacun en particulier ,
& les confidere enfuite dans le rapport qu'ils
doivent avoir , fuivant ce principe, les uns
relativement aux autres (1). Il éclaircir ce
rapport général par l'exemple de ce aui arrive
à notre lune dans fa révolution autour de la
terre; & il la compare à une pierre dans une
fronde , laquelle éprouve deux forces à la fois ;
la force du mouvement de projection qui la
porteroit à s'éloigner , fi elle n’étoit retenue
par le bras qui agite la fronde , & qui eft la
force centrale , laquelle , combinée avec la
force de projection , lui fait parcourir un
(1) H° 7e pes rh yh À Wa cuvaieris | À obsais
DOyyEiTe 7» TbO7OY ; a HE Ta Éxé cuuriroyre 7rpos
Ze , Uxos tew. Eorum , qua hic funt , comparatio,
& confliturio , refpeëtu terra , ducit nos ad intelligen-
tiam modi, quo ea, qua ad lunam iffhic accidunt,
permanere fit probabile, Plutarch. de facie in orbe lune ,
p. 924. F, » Voy. Pemberton , Introduéf, à La Philos
#& fophie de Newton, p. 20 & 21.
UNIVERSELLE, &C. 463
cercle (x) : il parle encore , dans un autre
endroit , de cette force inhérente dans les
corps , c’eft-à-dire ; dans la terre , & dans
les autres planetes ; pour attirer vers elles tous
les corps qui leur font fubordonnés (21) ; de
*
(1) Kai roi Th pe Eenins LS ue mes To ph mot à
xMTIS &uTh , Hg To fbuOes Ths miéhuyar/is à Gomtp orav
ras o@ed'orms érideiler ras 2ure@opis UT lg 4 n6-
220 mendmris. Aiqui luna auxilio ëft, ne cadat motus ,
id : Frs 4
& ejus impetus : quomodo que fundis impofita in orbem
rotata delabi non finuntur. Plutarch. de facie in orbe
dune , p.913, C.
» A £ ” N « MEL \ 1. a NL
(2) Er yap omorovoily | 29 © Ti y Emros wma roi »ér=
Te Ts yAs , die tous cdd és Tod néepen xäTE pipes”
> UT LEE Diesel V5 > ] Fe e ne
CA OO y n YN 3 y TA EMI VAS, HA TOY ANAUS TR
To RÉVTPO TEEN | À Depixéiuere , GO INT, x4TO
peoror ov Ey , To drépélor cypexior txiivo , à pos mére dili-
méQer Th To roruo Qirn Gveryraior, trye dn To xTw
1 À [74 \ / > # 4 » 1 À
mpos To co are or dvrixure. Ko où rodro por 72
rome | GAAG #) Th dirie Éménaurt ra Raph, Où My
d'élgo ralaÿiém 22 Qplas cop pr yep o0'ey ist xar0,
4 e La AS . -
pos © mére To de drame , oÙle tes , üÿle (Bolnoy-
/ 1 v e! } AC \
Tai Torabtm Et À vegas ose mule xalaleiver iQ Eavro
À pi GUTo cut.
Si enim quidquid quocumque modo extra centrum
terræ cft , dici oportet fupra efle, nulla pars mundi
L ij
Et de Lu-
crece.
164 APE SA AUN. TUE EDR
forte qu'il eft impofhible de ne pas reconi-
noître dans tous les paffages que nous venons
de citer fur ce fujet, une force centripete
qui fait cendre les planetes vers leur centre
commun, & une force centrifuge qui les en
éloigne & Les retient dans leur orbite.
97. Nous venons donc de voir que les
Anciens ont attribué aux corps céleftes une
pefanteur vers un centre commun de leur
mouvement, & une gravité réciproque entre
infra eric: fed fuprà fuerit & terra , & omnia, qux
ei incumbunt , & fimpliciter quodvis corpus centro
circumpofitum : infra autem unicum illud corporis
puntum , atque hoc necefle erit omni mundi naturæ
opponi : quandd fuperüm naturæ ratione invicem
opponuntur. Neque hoc dumtaxar eft in hac re ab-
furdum : fed caufam quoque gravia perdunt, ob
quam deorsüm vergant , atque ferantur, cüm nullum
fit infra corpus , ad quod moveantut. Nam guod
corporeum non eff , id neque probabile eff, neque ipfs
volunt , tanté effe vi praditum , ut omnta ad fe trahat ,
6 circa fe contineat. Plutarch. de facie in orbe lune,
P-926. A. Vid. & Plutarch. de oraculorum defe&tu ,
p- 424. Eta la page 425 , depuis la ligne 27 & quivis,
&c. jufqu’à la ligne 41, & cohibere,
UNIVERSELLE, &C. 165$
eux. Lucrece avoit bien compris cette véri-
té, quoiqu'il en tirat la conféquence hardie,
qu'il n’y avoit point de centre commun dans
univers, mais que l’efpace infini étoitrem-
pli d’une infinité de mondes femblables au
nôtre; car, difoit-il, fi les corps céleftes
étoient portés vers un centre commun, &
n'étoient pas retenus vers une autre puif-
fance agifflante extérieurement fur eux en
vertu de la mème force attraétive , 1l y au-
roit Jong-temps qu'ils fe feroient rappro-
chés & fe feroient réunis à leur centre de gra-
vité commun , comme tombant vers le lieu
le plus bas, & n’auroient alors formé qu’une
mafle infinie & inactive (1).
98. Il paroït encore que les Anciens fa-
(1) Præterea fpatium fummaï totius omne
Undique fi inclufum certis confifteret oris ,
Finitumque foret, jam copia materiaï
Undique ponderibus folidis confluxit ad imum,
Nec foret omnind cœlum, neque lumina folis;
Quippe ubi materies omnis cumulata jaceret
Ex infinito jam tempore fubfidendo.
Lucr, lib. 1, v. 983
L üj
Attra&tion
proportion-
née à la ma{
fe des corps
Eoi de la
faifon invet-
fe du quarté
des difances,
connue des
Anciens.
DOGUNIE SUROIN TT EVU À
voient auff bien que les Modernes, que cette
gravitation n'avoit point fa caufe dans une
force qu'ils s'imaginaflent réfider dans le
centre de la terre, vers laquelle tendoient
tous les corps ; leurs idées li-deffus étoient
plus philofophiques ; & l’on voit aifément
par les paflages que je viens de rapporter aux
trois premieres notes de la feétion 96e. , que
cette force étoit diffufe dans toute la matiere
du globe terreftre , & compofée des forces de
toutes les différentes parties de la matiere de
notre globe.
99. Il refte à examiner fi les Anciens ont
connu quelles étoient les loix fuivant lef-
quelles la force de gravitation agifloit fur
les corps céleftes, & s'ils croyoient qu’elles
fuffent en raifon de leurs mafles , & fuivant
la proportion de leurs diftances. Il eft cer-
tain que les Anciens n’ignoroient pas que le
cours des aftres fe faifoit fuivant des pro-
portions conftantes & inaltérables, & qu'ils
» Démocrite penfoit la même chofe , felon Arif-
“tote, de Generat, lib, 2, c. 8.
UNIVERSELLE, &C. 167
avoient différentes opinions fur la nature de
ces proportions (1). Les uns les cherchoient
dans la différente mafle de la matiere dont
ils étoient compofés , & d’autres dans leurs
différents intervalles. Lucrece, après Démo-
crite & Âriftote , penfoit que /a gravité des
corps étoit proportionnelle à la quantité de
matiere dont ces corps étoient compofës (2) ;
(1) Ke ro ris pit à Taxes Toy mhavauétioy cQute
pay, Ts OÙ no à Tois émoshuariw , or OÙ, ëy rois
peyéren Ÿ dsipv, à dt dryay éxezeoiy d'oxdèvres | ty rais
À émtaixdoy À LprETpois Cloïes ras dhonpeéres dyahoyias.
Et vero nonnulli in celeritatibus errantium globo-
rum , alitin intervallis potiis , quidam in magnitu-
dinibus flellarum , aliique fubtiliffimam fibi rationem
fecuti qui videntur , in epicyclorum diametris pro-
portiones iftas quærunt. Plutarch. de anima procrea=
tione , p. 1028. À. B. Jamblich. de vite Pythag. p. 52,
MAC. a T7:
Voyez Montucla, Hifi. de Mathem, t. 1, p. 270.
(2) Montucla, Hiff. des Mathém. tom. 3 , p. 143,
dit: Nous favons que Démocrite difoit que les atômes
pefoient plus les uns que les autres à proportion de
leur mafle , & il cite Ariftote de Gener. anim. L, 1,
c, 8 : il doit y avoir une erreur dans cette citation.
» M, Montucla aura voulu parler de l'ouvrage
L 1v
Expliquée
dans Plutar-
que, Pline,
Macrobe &
£enforinus.
VOS OPNE Ss'AINCTIE UK
& de très habiles Newtoniens, qui devotens
ètre le plus intéreflés à conferver à leur
maitre la gloire d’avoir découvert le premier
les vérités qui font le principal ornement de
fon fyftème , ont été les premiers à indiquer
ja fource où elles paroïffoient avoir été pui-
fées. Il eft vrai qu'il à fallu coute la pénétra-
tion & la fagacité de favants tels que New-
ton, Grégori & Maclaurin , pour apperce-
voir & découvrir la loi inverfe du quarré des
diftances (que Pythagore avoit enfeignée)
dans le peu de fragments qui nous ont été
£ranfmis de fa doctrine ; mais 1l n’en eft pas
moins vrai qu'elle s’y trouve , puifque les
Newtoniens mêmes en conviennent, & font
les premiers à s'appuyer de l'autorité de Py-
thagore pour donner du poids à leur fyftème.
100. Plutarque eft, de tous les philofc-
phes qui ont parlé de Pythagore, celui qui
———
» d’Ariftote de generatione , & corruptione | dans
2
» lequel fe trouve ce paffage. Kai roi Baplrepoy ye xaræ
en ÙmQgun Quoi sat Amuoreilos Exasoy édauprar,
Democritus atomorum quodque per exceffionem gra-
vius effe afferir, Lib, 2, c. 8, p. s10, tom. 1. R.
UNIVERSELLE, &C. 169
groit le plus en état de faifr les idées de ce
grand homme ; aufli les a-t-1l expliquées (1)
mieux que perfonne. Pline , Macrobe &
Cenforinus (2), ont aufli parlé de l’harmo-
nie que Pythagore avoit obfervé regner dans
le cours des planetes ; Plutarque lui a fait
dire qu’il eft vraifembable que Zes corps des
afîres , les diflances , les intervalles des fphe-
res , les viteffes de leur cours & de leurs révo-
lutions font proportionnelles entre elles ; & par
(1) »Les paffages de Plutarque , de Pline , Ma-
+ crobe & Cenforinus , dans lefquels cette vérité fe
ÿ
v
trouve enveloppée , font trop longs, trop diffus
» & embarraflés pour pouvoir être rapportés en note;
» c’eft pourquoi je me fuis contenté de les citer
» exactement un peu plus bas , & de rapporter la
3
La
maniere dont les Newtoniens eux-mêmes les ont
» entendus.
Ÿ
(2) Macrob, in fomnium Scipionis , lib.2,c. 1;
& lib.1, c. 19.
Cenforinus de die natal, cap. 10 , 11 & 13.
Plin. lib. 2, c. 22. Voyez tome 2 de cet Ouvr.
Ja troilieme part. ch, 10, Jet, 244.
#70 | UE S: AN: TUE U'R
rapport au total de l'univers (1). Et Grégori «
été porté à convenir qu'il étoit évident , à un
efprit attentif, que ce grand homme avoit
entendu que la gravitation des planetes vers
le foleil étoit en raifon réciproque de leurs
diftances de cet aftre ; & cer illuftre Mo-
Cr) 'omtp où 6 Tous émirpirous | 2 mpuolious , 39 Oran
is Adyous CET & To Loya Ts Aipas 2. € 7 ALLIE
xai rois xonAGus , myenoies és ( di pie ap dune na
TOUTE TUpÉT pas yEyovevær pos PAPE pHxeot : Lai Tu
es, mhr OX Gpponar txcivgy mt may QOcylar Cempeir) urws
cos quiy oi ui Ta copole Toy dstpor, nai Tu dns
pare Ta ixnoy , Lai TU Ty TA mteAPopÈ , Gomtp
dpye à Térarypévos ge Epérpos mpos GANG HA MS
ro on. Sicutigitur, qui proportiones fefquitertias ,
fefquiplas, atque duplas quærat in jugo lyræ, teftu-
dine , & clavis, ridiculus fit: (nam quin & hæc
debeant inter fe longitudinem , & craflitiem habere
proportione aptam, dubium non eft : cüm interim
harmonia in fidium fit confideranda fonis) 114 pro=
babile eff etiam corpora ffellarum , intervalla circulo-
rum , converfonum celeritates , tanquam inffrumenta
re&o ordine difpofita , fuam habere cüm inter fe, tim
ad totam compagem univerfs proportionem. Plutarchus
de animæ procreatione , p. 1030. C.
on
MNCNMERSELEE IEC FO
derne , fuivi de Maclaurin , fait parler ainf
Pancien philofophe.
101. » Une corde de mufique , dit Py-
» thagore , donne les mêmes fons qu’une
» autre corde dont la longueur eft double ,
» lorfque la tenfion ou la force avec laquelle
» la derniere eft tendue, eft quadruple; &
» la gravité d’une planete eft quadruple de la
s» gravité d’une autre ; qui eff à une diflance
» double. En général, pour qu'une corde de
» mufique puifle devenir à l’uniffon d’une
» corde plus courte de même efpece, fa ten-
» fion doit être augmentée dans la mème
» proportion que le quarré de fa longueur eft
» plus grand ; & afin que la gravite d’une
» planete devienne égale à celle d’une autre pla-
» nete plus proche du foleil , elle doit étre aup-
» mentée à proportion que le quarré de fa dif-
» tance au foleil eft plus grand. Si donc nous
» fuppofons des cordes de mufique cendues du
» foleil à chaque planete ; pour que ces cordes
» devinffent à l’uniflon , i/faudroir auomenter
» ou diminuer leur tenfion dans les mêmes pro-
» portions qui feroient neceffaires pour rendre
Sentiment
de Pythago-
re , fuivanc
Grégori &
Maclaurin,
Juftice ren-
due à Platon
par Galilée.
9 2URRPE VS ANNE EVUUTR
» les gravités des planetes égales. C’eft de la
» fimilitude de ces rapports que Pythagore
» à tiré fa doctrine de l'harmonie des fphe-
» Tes (1) LE
102. Je ne dois pas oublier , avant de
finir ce chapitre , de rapporter un paflage de
Galilée, par lequel il reconnoïît devoir à
(1) Gregorit , Afironomiz Elementa ; & Maclau-
rin, Syflêmes des philofophes , dans un difcours préli-
minaire à la philofophie de Newton, p. 32. Wallis,
tom. 3, p.138 & 150. Plutarch. de anima procrea
tione, t. 2 , p. 1017 6 feq. Vide & Macrobium 1
fomnium Scipionis , L.2, c. 1 Plin. Hif. Nat.
l2,c. 22... Plutarch. de facie in orbe luna , p. 9214.
D. E. 6 923. lin. 32 de vi centrifugä… Corfin. in
Plutarch. de Placiris Philofoph. Differt. 2 ,p. 47, so
& 1. Et tandem Plutarch. tom. 2, p. 1028. 4. B.
129 B. C. De anima procreatione, Er verà, 6:c, toute
la page , & fur-tout pag. 1030. B. Prifci porro Theo
logi , &c. jufqu’à la fin du Livre... Cenforinum de die
natali, cap. 10 & 13. Jamblich. de vita Pythagor.
c.11,p.5$52, $3. Nicomach. Harmonic, lib. 1, p. 6.
Platon. lib, 7. Republ. p. s30. Chalcidius in Timeum,
p.307, 313. Edit. Fabric. Kepler Harmonices Munde ,
Bb: SR cs Aù
nt —
DNINERSEMLE, RC: :
Platon fa premiere idée fur la maniere de
déterminer comment les différents degrès de
virefle ont dü produire les mouvements uni1-
formes dans la revolution des corps céleftes :
il fuppofe » que Platon, ayant imaginé (1)
» qu'aucun mobile n’avoit pu pafler du repos
(x) Platone avendo per avventura avuto concetto
non potere alcun mobile paffare dalla quiete ad alcun
determinato grado di velocitàa , nel quale ei debba
poi equabilmente perpetuarfi, fe non col pañfare per
tutti gli altri gradi di velocità minori, o vogliam
dire di tardita maggiori , che tra l’aflegnato grado ;,
e l’altiffimo di tardita , cioè della quiete, incercedo-
no; difle, che Iddio dopo avere creati i corpi mo-
bili celefti, par affegnar loro quelle velocità , colle
quali poi doveffero con moto circolare equabile per-
petuamente muoverfi , gli fece, partendofi loro dalla
quiete , muovere per determinati fpazit di quel moto
naturale , e per linea retta fecondo’ 1 quale noi fenfa-
tamente veggiamo i noftri mobili muoverfi dallo
ftato di quiete accelerandofi fucceflivamente. Æ fog-
giunfe , che avendogli fatto guadagnar quel grado,
nel quale gli piacque che poi doveflero mantenerfi
perpetuamente, converte il moto loro retto in circolare;
11 quale folo & atto a confervarfi equabile, rigiran-
dofi fempre fenza allontanarfi o avvicinarfi a qual-
DŒUNPENE :S LANNMEUNE AU !K
»
5?
2)
L 22
2
vs”
2
»
5
3
2
2
v
L22
3
2
v
2
»
à aucun degré déterminé de vitefle , dans
lequel il a dû enfuite fe perpétuer dans
une égalité conftante , à moins que d’avoir
paité auparavant par tous les autres degrés
de moindre vitefle, ou de plus grand retar-
dement ; 1} en conclut que Dieu, après
avoir créé les corps céleftes , voulant leur
aligner enfuite ce degré de viîtefle, dans
lequel 1l vouloit qu’ils duffent fe mouvoir
continuellement , 1l leur imprima, en les
tirant du repos , une force qui leur fit par-
courir des efpaces déterminés, fuivant le
mouvement naturel & reciligne , felon
lequel nous voyons nos mobiles partir du
repos & continuer à fe mouvoir dans un
mouvement fucceflivement accéléré ; &1l
ajoute que les ayant fait arriver à ce degré
de mouvement , dans lequel il vouloit
qu'ils fe maintinffent perpétuellement , 1l
conveïtit alors leur premier mouvement
che prefiflo termine da eff defiderato. Galilei Dif-
corfi ; 6 dimofirazioni matematiche , edit. Leida,
1638. Elzev. in-4. p. 254.
UNIVERSELLE,&C. 17%
»<en un mouvement circulaire , lequel eft
» le feul qui puiffe fe conferver uniforme,
» & faire que ces corps tournent fans cefle,
» fans s'éloigner ou s'approcher du terme
” fixe De
103. Cet aveu de Galilée eft d'autant
plus remarquable , qu'il part d’un génie
inventeur, & qui a le moins dû fa célé-
brité aux fecours des Anciens; car tel eft le
propre des grands hommes , de s’arroger le
moins qu’il eft pofible un mérite auquel ils
croient n'avoir pas tout le droit de pré-
tendre : les deux plus grands philofophes
modernes , Galilée & Newton , viennent
de nous en fournir des exemples qui ne
feront jamais fuivis que par les génies de
leur claffe (1).
(1) » L'aveu de Copernic, dans fa Préface adreffée
» au Pape Paul III, peut fervir detroifieme exemple,
» & confirmer en même temps la vérité du fenti-
» ment de ceux qui foutiennent l'utilité de l'étude
» des Anciens». Voici les paroles de ce grand
homme : Reperi apud Ciceronem Nicetam fenfiffe
Défintéreffe.
ment naturel
aux grands
hommes.
176 PESANT. UNIVERSELLE, &C.
terram moveri,.....indè igitur occaffonem naëlus j
cœpi 6 ego de terræ mobilitate cogitare. Voyez La
premiere note de la conclufion de cet ouvrage, &
les notes la féction 62.
CHAPITRE
CR PETRE WI TL
Voie laitée ; fyflêmes folaires ; ou pluralité
des Mondes ; Satellites | Tourbillons.
104. Carre zone lumineufe & blanchitre,
qu'on voit au firmament parmi les étoiles
fixes , a dû fixer de bonne heure l'attention
des Anciens, & leur faire avancer beaucoup
de conjectures fur ce qui pouvoit l’occafion-
ner ; &1l n'eft pas douteux qu'ayant propofé
différentes opinions là-deflus , plufieurs doi-
vent nous paroître faulles , puifqu’il n’y en a
qu'une feule qui puiffe étre vraie ; mais tel
doit être le fort des génies les plus éclairés de
tous les âges, & fur-routdes âges les plusrecu-
lés. Une fuite de fiecles écoulés après la décou-
verte de quelque grande vérité, fait qu’on
s’y familiarife ; qu’elle eft regardée comme
fi fimple & fi facile , qu'on eft tout étonné
que de grands hommes aient héfité fur des
chofes connues à nos enfants; & nous ne
faifons pas réflexion qu’un jour viendra peut-
être où les idées de Locke & de Leibnitz,
Tome I, M
Réflexions
fur la fitua-
tion des An-
ciens par rap-
port aux Mo-
dernes.
158250 TE PILMANCUTNÈNE.
celles des Newtoniens fur l’attraétion, &
& des autres phyficiens fur d’autres fujets,
feront regardées par notre poftérité comme
des chofes tout aifées , fur lefquelles on
s'étonnera que d’aufli grands hommes que
ceux qu'a produit notre fiecle , aient pu
s’arrèter long-remps. Si un feul de nous leur
paroît avoir entrevu la vérité fur les points
difcutés à préfent, combien leur paroïtront
avoir avancé des rèveries ! Heureux encore fi,
parmi tant de différentes opinions, quelques-
unes fe trouvent être vraies; car ce n’eft pas
peu pour les hommes qu’il y en ait de temps
en temps un qui marche d’un pas sür dans
les fentiers où tous les autres s’égarent. Cela
arrive quelquefois aux Modernes , on en
convient; mais cela arrivoit de même aux
Anciens : la vérité brilloit fouvent à travers
l'obfcurité dont leurs connoiffances étoient
enveloppées ; plufeurs fe trompoient dans
leurs conjectures ; un ou deux leur mon-
troient la route qu’ils devoient tenir, & c’eft
tout ce à quoi nous nous attendons des lu
mieres de notre fiecle éclairé.
MIONE ADAGTÉE 699
105. La voie ladtée & les étoiles fixes
avoient été un fujet de recherches pour plu
fieurs philofophes : les Pythagoriciens di-
foient , fur la caufe de la premiere , que le
foleil avoit fuivi une fois ce fentier, & y
avoit laiffé cette trace de blancheur que nous
y obfervons ; les Péripatéticiens ont dit après
Ariftote que la voie la@ée étoit formée par
une exhalaifon fufpendue en l'air : ils fe
font trompés fans doute, j'en conviens ; mais
tous ne fe font pas trompés. Démocrite, fans
télefcope {1), avoit dit , avant Galilée, que
cette partie du ciel, que nous nommons la voie
lailée ; contenoit une quantité innombrable
d'étoiles fixes ; dont le mélange confus de lu-
miere occafionnoit cette blancheur que nous dé-
Jignons ainft : ou bien, pour le dire dans les
mêmes termes que rapporte Plutarque (2),
que c’étoit /a clarté réunie d’un grand nombre
d'étoiles.
(1) Vid, Not. (a) ad feët. 131.
(2) Ammorgilos mord | #94 puxpüv | Hg ou ùy dstpav
ryuQaliCopeve MDARROIS uYaUr/ er peoy did ‘Th 7UxywT y,
Democritus exiftimavit viam la@team efle plurium ,
M ij
Sentiments
des Anciens
fur la voie
laûée.
Sut les étoi-
les fixes & la
pluralité des
Mondes.
196 AWG DEN ALI AUCITÉE FE
106. Les Anciens n’étoient pas moins
éclairés que nous fur la nature des étoiles
fixes ; il n’y a que fort peu de temps, que les
Modernes ont enfin adopté les idées de ces
grands maitres à ce fujet , après les avoir re-
jetées pendant plufeurs fiecles. Ce feroit à
piéfent une erreur en bonne philofophie de
douter que les étoiles ne foient autant de fo-
leils comme le nôtre , qui ont probablement
leurs planetes, lefquelles accompliffent des
révolutions autour d’eux , & forment des
fyftèmes folaires plus ou moins femblables
au nôtre. Tous les philofophes admettent à
préfent ce fyftème, fondé fur les raifonne-
ments les plus folides de l’aftronomie , fur
l'idée la plus fublime de la Divinité , & qui
& exiguarum , fibique cohærentium fteflarum fplen-
dorem, quæ fefe invicem ob denfitatem fibi vicinam
illuminent. Plutarch. de Placir. Gb. 3, cap. 1.
An major denfà ftellarum turba coronà
Contexit flammas , & craflo lumine candet,
Et fulgore nitet collato clarior orbis.
Manilius affronom. lib. 1 , c. 9, v. 753. Ptolo-
maus , lib, 8, c. 2.
WOrBILAGTEE ar
tend le plus à manifefter fa gloire : les efprits
les moins philofophes commencent même à
fe familiarifer avec cette idée ; graces à l’é-
légant ouvrage de M. de Fontenelle fur ce
fujet.
107. Cette opinion de la pluralité des
Mondes fut donc enfeignée généralement
parles anciens philofophes Grecs. Plutarque,
après lavoir expofée , difoit » qu’il étoit
» bien éloigné de la condamner , & qu'il
» trouvoit très probable qu'il y eüt une quan-
» tité innombrable , quoique déterminée,
» de Mondes comme le nôtre (1), chacun
(1) Eye dE mp psy dpi repas oëx y mêle Miqu-
piraiuemy o7t roro Tyy de moe paty Eves ÿ où pen
émépous | AN oesruérous mANTU , Tidepémv d'obay , cùd'e-
rieur Exeor dnoyaleegr ryduæ, Ego autem de numero
mundorum , quod fint tot, numquam fanè conten-
derim ; eam vero fententiam , quæ plures uno mun-
dos, non tamen infinitos, fed numero determina-
tos facit, neutram iftarum abfurdiorem cenfeo. P/u-
tarch. opera , p. 430 in libro de Oraculorum defeitu.
Vide quoque Plutarchum , tom. 2 , oper. p. 938,
D. de facie in orbe luna.
M iij
Opinion de
Plutarque fur
ce point.
Celle d’A-
ñhaximene.
Opinion de
la Sete Ita-
lique.
15: MOôrE Al CTÉE.
» d'eux ayant une terre , une mer & un
s ciel fi},
103. Anaximene eft un des premiers qui
ait enfeisné cette doctrine ; 1l croyoit que
les #10. les étoient des males immenfes de feu
autour d:fquelles certains corps terreftres que
nous ne pouvions appercevoir , accompliffoient
des revolurions périodiques (21); on voit qu’il
enten.loit par ces corps terreftres , qui tour-
noient autour de ces maïes de feu, des pla-
netes comme les nôtres, fubordonnées à un
foleil, & formant avec lui un fyftème folaire.
109. Anaximene tenoit ceci de Thalès;
& cette opinion pañla de la Sete Ionique à
\
(1) H° yap à éxdso y © lunaosa 1) ovegnes xurtlay
zur Quow &s megrnxu. Plutarch. de oracul. defeëlu ,
P: 415.
(2) Avekubns opus pts rh Quoi Ÿ spa , mrapeysiy
de run 20 yen coule couripiPepoueve Toûros | docailæ,
Anaximenes igneam judicavit effe ftellarum naturam,
fed permifta quædam ipfs terrena corpora ( circum
iMas verfantia ) non afpectabilia. Srobaus | Eclog.
Phyf. Lx, p, 53.
Morr LAGCTÉE 93
la fecte Iralique , qui croyoit (1) que
chaque étoile étoit un Monde qui avoit un
foleil & fes planetes , & étoit placée dans un
efpace immenfe qu'ils appelloient lécher.
110. Héraclide & tous les Pythagoriciens
enfeignoient de mème que chaque étoile étoit
un Monde , ou un [yflême folaire , qui étoit
compofé ; comme le nôtre, d’un foleil & de
planetes , auxquelles ils paroifloient même
accorder un air , une atmofphere ; qui les
environnoient , G& un fluide appellé éther,
dans lequel elles étoient foutenues (2). Cette
(1) E’xasor % dctpay nome dmapye , yhy mipéyoïla ,
dseg Te, 494 ex , ty To émis tes. Credebat,
flellam quamvis mundum elfe , terramque & aftra &
aëéra continere , & infinito in æthere collocari. Plu-
tarch. de Placitis , L2, 0.13 & 30.
(2) H'egxnudys , 2 où IluSaryoptior , txaçor À àstpév
xp Üraper , YA Zipiepole , dipa TE, À diVéey, à TD
drug aidtes. Taïra de ra d'éyale ty rois O'pQixois Qt-
pere xorpomebr rap tease) Toy dstpar. E'mixoupes évo
émoyiéoxa Torey , iyoueves rod id'efouéa, Heraclides ,
& Pythagorici quodliber fidus mundum effe dixerunt ,
qui in infinito æthere terram , aëra, & æthera conti-
ncat, Eadem vero dogmata in orphicis, vel Orphei
M iv
Opinion
d'Héraclide
& des autres
Pythagori-
ciens.
184 4 VOTE LAGRÉE
méme opinion paroit avoir mème encore une
origine plus ancienne ; on en trouve des
traces Jufques dans les vers d’Orphée , qui
vivoit du temps de la guerre de Troye, &
qui avoit enfeigné la pluralité des Mondes,
qu'Épicure regardoit aufli comme probable.
Sentiment lil. Origenes, dans fes Philo/ophume-
de Démocrite
fur le même
fujer.
na ; traite amplement (1) de l'opinion de
carminibus efferuntur : Orphici enim quamlibet flel'am
in mundum efformanr. Epicurus nihil iftorum repro-
bat, illi, quod fieri poteft, infiftens. Plurarch. de
Placitis. Phil. L, 2, c. 13 ad finem. Eufeb., Prapar.
Evang. lib. 15, c. 30.
(1) Ampous de ever zéruovs | og peryiQu d'aQénoilas"
21 & / cn see NA RTE S
y TITI de psiQo + C7 CLS x €) TITI mAIQ' EVA GE
en LA 74 \ à / \ 27 \ / 7 D
F uompay ance Ta diesquale, x 7} pee mheous | Th dE
roùs de ner. QSeioeey
én@rlous , 10 mods peir vécut,
d% aüroës tm dinar mpormimlorlas, elver de tyious xocuous
tomuovs Cour , 2 Qurév , 2 mavres vypèv. Toù de 7rüp
gp roopov mpoTipoy Thv y Tv cpoy ya ever dE
7 pi TEE) xÈTO : émeile Toy Hauoy, træ Tods dmaaveis
AT. . A “ / ON ST NI ,’ FA Ê
CAR Tous € males (42 CUTOUS EXCEEV 4Toy LATE ax.
paQus À ôomor Los dy pyntre d'Unler ad Ti mporhagee
Gaves.
Infinitos effe , & magnitudine inæquales mundos,
A « . .
nonnullos ut fole , fic lunà deftitutos : in quibufdam
MOLESMAGTÉE Us
Démocrite , & dit qu'il enfeignoit qu’il
» y avoit une quantité innombrable de
« Mondes, inégaux en grandeur , & dif-
» férents dans le nombre de leurs planetes ;
» plus ou moins grands que le nôtre, à des
» diftances inégales les uns des autres ; il
» difoit que quelques-uns étoient habités
» pat des animaux, dont il ne définifloit
» point la nature; que quelques-uns n’a-
» voient ni animaux ni planetes, ni rien de
». ce que nous obfervons fur notre globe »;
utrumque majorem noftris, & in aliis plures : inæ-
qualia inter fe mundorum effe intervalla, & plures
alicubi , alibi pauciores. Hos augefcere , illos in
vigore efle , vergere quofdam ad interitum ; & hîc
quidem nafci, illic vero deficere. Interitum alteri
ab altero afferri impingendo. Efle inter cæteros,
qui careant animantibus, & plantis, & omni hu-
more. In hoc autem noftro mundo terram aftris
priorem emerfifle ; lunam fede infimam , folem ultra
hanc proximum , flellas fixas remotiflimas. Neque
parem planetis inter fe altitudinem. Florere mundum,
ufque dum foris incrementi nihil adipifci poflit am-
plius. Origenes in Philofophumenis , c, 13. Lucrer,
lib, 2, v, 1069 , 1080.
Trait d’Ale-
xandre à cet
égard.
Autres Phi-
lofoplies qui
ont cru Îa
méme chofe,
186. NN x = NINALCTEÉ À:
car ce génie vraiment philofophique conce-
voit que la différente nature des globes
entrainoit néceflairement d’autres efpeces
d'êtres pour les habiter.
112. Cette opinion de Démocrite donna
lieu à Alexandre de découvrir de bonne
heure fon ambition démefurée. Elien rap-
porte ( ) que ce jeune prince ayant entendu
dire ce que Démocrite enfeignoit de la plu-
ralité des Mondes, il fe mit à pleurer,
s'afligeant de ce qu'il n’en avoit pas encore
conquis un feul.
t13. Il paroit qu'Ariftote a cru aufli la
mème chofe, ainfi qu'Alcinoüs le Platoni-
cien, & Louis Cœlius de Rovigo attribue à
Plotin d’avoir aufli admis cette opinion,
(1) Où yo d'u draps mien Euavro | pen YeAEr
ir Anéosd po To immo, Eye dmipous dxolay eat Tous
zorpous Aéryoïlos Angoxpirou à rois cuyfpéumarn , 00e malo,
und k rod tes, 4} xo1v0) pol av. æoroy dE im CAP? Anpé-
xeñlos yat à aûres , Ti dé 1 Xéye 3 & épryov TobTo he
Non poffum mihi ipfi imperare , quominus rideam
Alexandrum Philippi filium. Siquidem quum audirér
Democritum in quibufdam libris infinitos mundos
ViohÆ }LACTÉE #87
fur ce qu'il dit que la terre , comparée (r)
à tout le refte de l’univers , eft comme le
moindre des aftres.
114. C’etoit fans doute en conféquence
d’une telle idée que Phavorinus fondoit fa
conjecture bien remarquable fur la poffibilité
qu'il y eùt d’autres planetes que celles que
nous connoiffons. » Il s’étonnoit que l’on
# admit comme une chofe certaine qu'il n’y
» avoit pas d’autres étoiles errantes, ou pla-
» netes , que celles que les Chaldéens
avoient obfervées. Il penfoit , pour lui,
ÿ
conftituere , indoluit , quod ipfe nondum unius
dominium teneret, Quantüm verd eum deriferit De-
mocritus , quid opus eft referre? quum hoc fuerit
ei confuetum, & proprium. Æ/ian. Var. Hifi.
(r) Hic enim, ficuti accepimus , & meminit in
libris de Cœlo & Mundo Ariftoreles , terram è ftellis
unam efle prædicabat : quod in commentatione de
Platonis do@rinä comprobat Alcinoüs , & forrè fig-
nificavit Plotinus, ubi ait , terram , fi univer{o
comparetur , cfle veluti punétum , vel quafi ftellam
quamdam , minimam reliquarum. Lud. Cœlius
Rhodiginus, L.1,c.4,p. 13, 14. Vid. Arifl, de
Cœlo , l2,6c,14, ad finem.
Phavorinus
femble indi.
quer les Sa
tellites des
netes.
18300 x E DA C'TE E.
» que leur nombre étoit plus confidérable
» que le vulgaire ne le croyoit, & qu’elles fe
» déroboient jufqu’alors à notre vue»; en
quoi il a eu probablement en vue les fatel-
lites que l’ufage du télefcope nous a enfuite
fait connoître , & qu’il étoit beau à Phavo-
rinus d’avoir fuppofés, & d’en avoir , pour
ainfi dire , annoncé la découverte (1). Sé-
neque raportte encore une opinion femblable
de Démocrite, qui, dans un Traité fur les
planetes, dont il ne nous refte que le titre,
fuppofoit qu'il y avoit un plus grand nombre
de planetes que celles qui s'offrent à notre
vue, quoiqu'il n’en indiquat ni les noms ni
le nombre (2).
(1) Prætereà mirabatur (Phavorinus) id cuiquam
pro percepto liquere , ftellas iftas, quas à Chaldæis,
& Babyloniis, five Ægyptiis obfervatas ferunt ( quas
multi erraticas, Nigidius errones vocat) non efle
plures , quàm vulod dicerentur. Pofle enim fieri
exiftimabat, ur @& alii quidam planete effent. .. neque
eos tamen homines cernere poffint. Aulus Gellius, Z. 14,
CAS 2
(2) Democritus quoque, fubtiliffimus antiquorum
MO NE HAÎIGTÉ E: 9
115. Quoique l’on ne regarde pas les
tourbillons de Defcartes comme un fyftème
fondé fur des principes folides, cependant
comme il a quelque chofe d’ingénieux & de
brillant, & qu'il a été reçu d’abord avec
beaucoup d’applaudiffements , 1l mérite
d’être mis au rang des opinions qui font hon-
neur aux Modernes , ou plutôt qui font hon-
neur aux Anciens, chez lefquels, malgré
toute l'apparence de nouveauté que porte
avec foi ce fyftème, il paroït avoir été puifé.
En effet, Leucippe, & après lui Démocrite,
avoient enfeigné » que (2) le mouvement &
omnium , fufpicari ait fe, plures effe ftellas quæ
currant : fed nec numerum illarum pofuit, nec no-
mina , nondum comprehenfis quinque fiderum curfi-
bus. Senec. Quaff. lib. 7, c. 3. Diog. Laërt. lib. 9,
fect. 46.
(1) Dear de rois noruous oula" Qipeoi rar” ëmore-
pr ie Thés améipo mod copale , maloiu rois JU 3
sis péya eo, Grp adpaoevle d'in émepyabedat puiar ,
24 y mporxpolole 7 mailod'ards xuxroluse , Aaxpi-
ET Lapis Te uote pes Tu puit, iroppoman dE dix ro
07 / 22
aides pri dueuéior mas mipQige a , Tu pr Ana
Tourbillons
de Defcartes,
connus des
Anciens
4
TOO MNMO TE LA CTE E
» la formation des corps céleftes avoient été
» produits par une quantité infinie d’atômes
» de toutes fortes de figures, qui, s'étant
» rencontrés & accrochés enfemble, for-
» mercnt des tourbillons, lefquels, venant
» à s’agiter & à tournoyer en tous fens , les
» corps fubrils , qui en faifoient partie, s'é-
» chapperent vers les bornes de la circonfé-
» rence de ces tourbiilons ; & les autres,
NN dE aber / SIN \
dope cie To go nevoy aomip diilropeve" Ta de Aura cup
f \ 4 / D x 22
HRENEN | Hy TELATAEXO MEN cuyxalarpéyev ŒAAYAE | KIA TOI
22 / ! 02 NS e € / : !
TE mporoy césqua aPougoud' és. roro de oioy Uéra dQisæ ai ,
/ Due ni cs / s DS / \ ae /
ateniçoile ty caurd) maÿlox copola à@y nur Th TS rs
\ ! \ ! e !
Amor yiear roy méeié duie,
/ /
évripurw megad wougva ,
s | 5 \ 2 = 4 nn 4 «
UPPEOVT Y CR CUVE &V ZOT émiVæuriy TS d'ivys. ê cv1a
Vos Th D , cumuler À iwxSélay Emi To péro.
SE LEAR / \ / ce ei 5 4 \
dUTOY TE AAA To MEptEoile | oo) pére , veu ar
\ ON À CRI G- LA di / LEA 1e
TAY ÉMEXPUTIV T ECOTEY FOOT OV e un 76 Pepoprevoy OUTOY y
ëv émfaion, raÿre imxräQuur.
Sic auter fieri mundos : ex infinito per abfciffionem ,
multa corpora, figuris omnigena , in magnum vacuum
ferri, eaque in unum coaëla unam vertiginem efficere ,
\ . . .
fecundum quam offendere , ac circumvolvi modis
omnibus , atque ita difcerni, ut feorsum fimilia,
quæ funt fui fimilia , petant. Cæterüum æquilibria
MOLEÉ LAGCTÉE #9i
» moins fubtils , (parties d’un élément plus
» groflier) refterent vers le centre , & for-
» merent des concrétions fphériques , qui
» font les planetes , la terre & Le foleil : ils
» difoient que ces tourbillons étoient tous
» emportés par la rapidité d’une matiere
» fluide, dont la terre étroit le centre; &
» que chaque aftre fe mouvoit avec d'autant
cüm ob mulritudinem minimè tam circumferri poflint,
exilia quidem ad exterius vacuum contendere velut dif-
fültantia : catera confiflere, & innexa , atque in fe
implicata invicem concurrere , atque primam quandant
concretionem efficere rotundam. Hanc autem veluti
membranam abfiftere | continentem in fe omnigena
corpora , quæ dum fecundum medii reluétationem
circumvolvuntur , tenuem per gyrum membranulam
fieri , juxta vertiginis tra@tum contiguis corporibus
femper confluentibus : Atque ita fieri terram , dùm
Junéla manent , quæ ad medium ferebantur. Ypfumque
rursus continentem , membranæ inftar, augeri juxtà
externorum influentiam corporum , & cm vertigine
fertur quacunque artigerit , ea acquirere, Diog. Laërt.
Lo ,fe&. 31 © feg. & feét. 44.
Vide & Hefychium in Leucippo. Voyez Bayle,
aïticle LEUCIPPE.
192, IWNOLE, LA CT É
. . »* / . À
» moins de violence, qu’il étoit plus près
» du centre : 1ls difoient encore que la vi-
» teffle avec laquelle ces tourbillons tour-
21
» noient , faifoit que le plus rapide & le
Ë
plus fort entraïînoit avec lui les autres
“
» COrps où planetes qui fe trouvoient enga-
# gées dans fon voifinage , & fe les appro-
>» prioit TA
aumeprin- 116. Le premier de ces deux philofophes
É A . ; “pe
cipe de Def- paroît aufli avoir connu le grand principe de
cartes ,; CON- 22
nu de Leu- Defcartes, que es corps qui tournent tendent
CIPPEe PE ;
à s'éloigner du centre , & à s’en échapper par
la tangente.
CHAPITRE
GAHUX PE STRE SV LI L
De la Lumiere & des Couleurs,
Pr7. Le {vftème fi merveilleux de lana-
lyfe des différentes couleurs qui compofent
la lumiere, fufhroit pour établir à jamais la
gloire du chevalier Newton, & faire feul lé
loge de la fagacité extraordinaire de ce grand
homme. Cette découverte fembloit par fon
importance être réfervée à un age où la phi-
lofophie füt dans toute fa maturité ; cepen-
dant 1l s’eft trouvé des hommes célebres
parmi les premiers philofophes , dont le g6
nie n’a pas eu befoin de l’expérience de plu
fieurs fiecles pour fe former, & qui en ont
donné des preuves frappantes dès la naïffance
des fciences. Pythagore & Platon font de ce
nombre. Il paroït que le premier, & fes dif-
ciples après lui, ont eu connoïflance de la
caufe des couleurs ; 1ls ont enfeigné gw’elles
n'étoient autre chofe qu'une réflexion de la
lumiere, modifiée de différentes manieres (1) ;
E’ 1 , / 1 \ \ \
(1) E repos xara vioy Gxrivay tirngari , per Thy wpos
Tome LI, N
Sentimetit
des Pythago-
riciens fur les
couleurs,
1941 JE LA ÉUVMIERE
ce qu’un auteur moderne (en expliquant ce
fentiment des Pythagoriciens) interprete :
une lumiere qui [2 réfléchit avec plus ou moins
de vivacité , & forme par-la les fenfations des
diverfes couleurs (1). Ces mêmes philofophes
de l’école de Pythagore, rendoient raifon de
la différence des couleurs , en les faifant naître
d’un mélange des éléments de la lumiere (2) >
& dépouillant les atômes , ou Les petites par-
ticules de la lumiere , de toute couleur natu-
To DmOXEUEO SAT TAN ÜmospéPoury pes Ty CU.
Alii (i. e. Pythagorici ) videre nos arbitrantur prop-
‘ ter quorundam radiorum incurfum , qui poftquam
objeûæ rei infixi funt , rursus ad vifum convertan-
tur. Plutach. de Placit. philofoph. L 4, c. 13. Sto-
baus Ecl. Phyf. p. 35. Ariftarchus colores efle lucere
än fubjeétas res incidentem.
(1) Colonne, Principes de la nature , tome x
»
P: 210.
(2) Tas D dupoegs Ta MPOUÉTOY Tape TÜs mix
pibus À sosie. Colorumque difcrimina ex variis ele-
mentorum mixturis oriti, Plutarch. ibid. lib.x, c. fe
Gaflendi, Epic. Philo. Syntag. c. 15, p. 21, col, 2.
Ariftotel. de Gen. & Corrup. lib. c. 2, p. 496. E,
Eucretius , de nat, rer, Uib, 2, V, 754 3 794
ET DES COULEURS. 195
relle , ils enfeignoient que les fenfations de
toutes les couleurs étoient produites en nous par
les différents mouvements excités dans les or-
ganes de notre vue (1). |
118. L'école de Platon ne contribua pas
peu à l’avancement de l'optique par la dé-
couverte importante qu'elle fit: Que /a lu-
miere fe propage en lignes droites ; & que les
Proindè colore cave contingas femina rerum.
..... at variis funt prædita formis
E quibus omnigenos gignunt , variantque colores.
Vid: & Diogen. de Laërt. /18. 10, feët. 44 totâ. Ex-
ponit locum citatum Ariftorelis Thomas in Comm.
fuis in lib. de Gener. & Corrupt. Éb.1,p.4,col.7,
& Averroës in eund, loc, p. 156, col. 1,
(1) Où dE ra roue mére und y Expos | 1E émoios
Où noyer Goporüy rus didyrus ÜmoDasours ylyw a moi
rilas. Alii cunctas atomos colore carere, de quibuf-
dam autem qualitatis expertibus ratione contemplan-
dis qualitates fenfus moventes exiftere, Srobæus
Eclog. Phyf. lib. 1, p. 35.
Claudian. in Panegyride de Confulatu Mallii Theo=
doreti , v. 105.
Sitne color proprius rerum , lucifne repulf&
ÆEludant aciem, |
Ni;
Platon pa-
foît avoir
connu la thé-
orie Newtro-
nienne des
couleurs,
196 DE LA LUMIERE
angles d'incidence font égaux aux angles de
réflexion (1). Platon mème femble avoir en-
revu le fyftème du chevalier Newton fur les
couleurs , lorfqu’il dit qu’elles font l'effet de
la lumiere renvoyée par les corps , laquelle
a de petites particules proportionnées à lor-
gane de la vue (2). Le pañlage précédent &
(1) Qui (colores ) quoniam quodam gignuntur
luminis i@u. Lucret, lib. 2, v. 807.
(2) Iaëroy Qhoya àmo À couérav, cousreg ôcre
éxgoiruy mp rw oJw. Plato colores efle fulgorem à
corporibus exeuntem partes vifui commenfuratas ha-
bentem , dixit. Plutarch. de Placitis Philof. lib, x,
CDS LS S De 3 2
À! Liuroila per pas inndéraue | Qhoya À coparay
ExASUY GToppeouray | OÙ compETog poert Exouray mpes
æiOyrw. Eft autem color nihil alind , quam fulgor à
fingulis corporibus defluens , partes habens vifui ad
fentiendum accommodatas. Platonis Timæus , £. 3,
p. 67. C. Vid. & Plaronem in Menone , t.2, p.76,
C. D. Efle quafdam defluxiones rerum & meatus in
quos & per quos illæ defluxiones manent.... e deflu-
xionibus autem alias quidem meatuum nonnullis
convenire , alias vero majores , five minores efle.
Vid. imprimis eundem Philofophum in Thæetet, t. 1,
P-156, © notam in Margine,
ET DES COULEURS. 197
celui-cicontiennent ces principes de M. New-
ton (1): » Que les différentes fenfations de
» chaque couleur particuliere font excitées
» en nous par la différence de la groffeur
» des petites particules de lumiere, dont
» chaque rayon eft formé; lefquelles petites
» particules donnent l'idée des diverfes cou-
» leurs, fuivant la vibration plus ou moins
» vive avec laquelle nos organes en font
» affectés »? Le mème plulofophe a été plus
Join ; il eft entré dans le détail de la com-
pofition des couleurs (2) ; 1l a été jufqu’à re-
chercher quelles étoient celles qui devoient
(1) Oprices , lib, 3 , quaft. 13 , 6 pag. 46. Edit.
Patav. in Definitione , lib. 1, part. 1.
(2) Thv d° ééuréegs Qopur | 494 yévaus mupes Éripau mrpor=
r 7 \ 2) 1 \ cŸ 1 on » 4 2 \
IF IGUT OV K, © IEKPIYOUTEN TH) CNW MEXEA T OMHUTAY, AUTOS
Te À QYaruby rus dubsdos Rile dde 1 Thraurey…,
D TO pe txrnd res murs , olov dm dseyms.... mruÿlo-
d'andy ty Th xUxATE TAUTN YMYYÉYOY LPOUATOY | parprropu
\ \ \ / 1 \ d\ C9 » /
vus pe To médos mportimoue, ro dé roro dmtpyaCoptr,
Dam TE 4gf cTiACoY imavoudræuer,
Motionem vero acutiorem , generifque alterius
ignis , incidentem , difcernentemque vifum ad ocue
N ii
198 DE LA LUMIERE
provenir du mélange des différents rayons dont
la lumiere eff compofee (1) ; & il ajoute enfuite
ce qui peut être regardé comme le plus grand
éloge qui ait jamais été fait du chevalier
Newton: » Oui , s’écrioit ce beau génie de
l'Antiquité ; ff quelqu'un entreprenoit jamais
de rendre raifon ; par de curieufes recherches,
de ce méchanifme admirable , il feroit bien
voir par-là qu’il ignore entiérement la diffé-
rence qu'il y a entre le pouvoir de l'homme &
le pouvoir de Dieu: car Dieu peut ; il ejt
los ufque, ipforumque oculorum quaf divortia,
atque meatus vi compellentem. ....£t quüm unus
quidem ignis velut à corufcatione quädam exilit...
mulriplices in hâc agitatione colores exiftunt, illara-
que affetionem cotufcationem , fi emicationem vo-
camus : illud vero , quod cam efficit , fplendidum ,
_atque corufcum. Îdem ibid. & pag. 68. À. B.
(1) Epodps dé dy pére Dsuxd 7e 209% | Ghonsyon
opDuver dE, oruy Torais paepymévis xavéit Te, pénAoy
ovyxea 9 péna up de, Éaÿld re 2 Quad xpartt yiy-
vera Qui dE, Aeuxod TE 2) peénonos" To dE Gyüm , Aeuxo
LOS peprypérow Daprpw de, Durs Eve, 44 és
pénoy malaxops Euro, sua ppoue dmoleriran xumvoù
dE AcuxD xepgEo , Vheuxor" Zuppod dE Era ; mpéTiore
Plat, Tim, tom, 3, p.68. BC,
ET DES COULEURS. 199
vrai , faire un mélange de plufieurs chofes en
une , & il peut enfuite les [éparer comme il lui
plait , parcequ'il fait tout , & peut tout en
même temps ; mais il n'y a point d'homme au-
jourd’hui, & il n'y en aura peut-être jamais
qui puif]e venir à bout d'accomplir deux chofes,
auffi difficiles (1). Quel éloge que ces paroles
dans la bouche d’un philofophe tel que Pla-
ton, & quelle gloire pour celui qui a entre-
pris avec fuccès de démontrer des chofes qui
paroifloient impraticables à ce prince des
(1) Ei de ris roëray tpy» cxonoiueres Rauyor nuubérot,
To Ths Gyporiys 44 Ueias Quetos myvencus ay ty diapos"
or Éeos pair Tu monnt is à Éuryucçaniet | 9j mad ÀE
és tis more Can ixayos | @s ÉMISAUENS ue Ka]
duurcs pére dE codes odtriex ToiTuy ixæyss cùrt
se dy, oùr éirulQis mor sui.
Quod fi quis hæc ita ratione confideraverit, ut
re ip{à experimentum capere velit, ille nimirum hu-
manæ , & divinx naturæ difcrimen ignoraverit.
Deum videlicet multa in unum commifcere , & rursis
ex uno in multa poffe diffolvere ; quippe qui id ipfum €
fciat, & poffit : mortalium autem hominum nemo
neque hoc tempore, neque in pofterum , alterutrum
queat. Plar, Timaus, p. 68. D,
N iv
Syftème de
Defcarres fur
la p'opaga-
tion de la lu-
micre.
200 De LA LUMIERE
philofophes ! mais aufli quelle grandeur de
génie , quelle pénétration dans les fecrets
les plus intimes de la Nature, que celle qui
a fait dire à Platon tout ce que nous venons
de rapporter fur la nature de la théorie des
couleurs , dans un temps où la philofophic
étoit encore à peine fortie de fon enfance!
19. Quoique le fyftème de Defcartes fur
la propagation de la lumiere en un inftant
ne foit gueres reçu à préfent de la plupart
des philofophes , depuis que MM. Caflini
& Romer ont découvert que fon mouvement.
étoit progreflif ; cependant , comme ce fyf-
tème a prévalu pendant long temps , & que
l’on en fit alors tout l'honneur à Defcartes,
1] n’eft pas mal-à-propos de faire voir en peu
de mots qu'il avoit puifé cette idée dans
Ariftore & fes commentateurs. Le fentiment
du philofophe moderne eft, que la lumiere
n’eft autre chofe que lation d'une matiere
fubtile fur les organes de la vue ; cette ma-
tiere fubuile étant fuppofée remplir tous les
efpaces, depuis le foleil jufqu'à nous , la
premiere de ces petites parties de la macicre
ET DES COULEURS. 2ot
érant preflée par le foleil, & ne pouvant
céder fans que toutes les autres ne cedent
an même inftant , tous ces globules, qui
font contigus depuis nos yeux jufqu’au fo-
lil, où ils font agités & frappés, ne peu-
vent que nous communiquer fon mouve-
ment en un inftant. Pour rendre la chofe
plus fenfible , Defcartes fe fert de la com-
paraïfon d’un baton (1), lequel ne peut être
preffé & pouflé d’une ligne de diftance , fans
que l’autre bout, qui eft continu, ne foit
preflé également. Quiconque voudra fe don-
ner la peine de lire avec attention ce qu'A-
riftore a dit fur la lumiere, & ne pas s’en
rapporter aux interprétations ridicules que
quelques-uns ont faites de fes paroles, verra
clairement qu'il n’étoit pas fi éloigné qu’on
le penfe de la vérité ; il la définit l'aéfior
l'une matiere Jubtile ; pure & homogene (2) ;
(x) Defcartes, Dioptrique, ch. 1 , feët. 3.
(2) Ariftotel. de Animà, L6. 2, cap. 7, p. 638.
ts de isuw y énpyue ro dimQanis. & Stobæus Eclog,
lhyfc. Lib, 1, p. 35. Ariftotel, dicit lumen efle,
\
202 DE LA LUMIERE
& Philoponus , voulant expliquer la ma-
niere dont fe fait cette action , fe fert de
l'exemple d’une corde extrémement longue,
laquelle , fi quelqu'un la tire par une de fes
extrémités, fera mue dans le même inftant
à l’extrémité oppofce à caufe de la continuité
de fes parties (1). Il compare dans le même
endroit le foleil à l’homme qui remue la
corde , la matiere à la corde , & l’action
momentanée au mouvement de cette corde,
Simplicius , dans fon Commentaire fur le
même paffage d’Ariftote , emploie précifé-
ment l’idée du mouvement d’un bâton pour
exprimer comment la lumiere , prefice par
le foleil, doit agir dans le même inftant fur
ere
ap es dique a Taper 10 œuryñ. Et Origenes , c. 2,
Philofophum. p. 881, lin, 8. re d* Qurés pépn noïgor
TUD.
(1) Philoponus de Animä , lb. 2, text. 69,
p.123, col. à. Quemadmodüm fi quis funis longi
& extenfi fummum moverit, totus funis fine ten-
pore movetur , éxpows , propter païrtium continci=
tiam.
ET DES COULEURS, 3203
les organes de la vue (1). Cette comparaifon
du bâton , pour donner l’idée de la viteffe
avec laquelle fe communique la Iumiere,
paroît avoir été employée premiérement par
Chryfppe (2).
(1) KaSémp 0 popNrs Toy Dior dre Ts Jupes xivo-
pos. Simplicius de Animà, Lib. 2,text. 74 ,p. 37.
Edit. Ali.
(2) Ds dix Baxrpizs oùy rod ru Ylos dépes To Pere
pay évwyyewe. Diogenes Laërt. Lib. 7 , feét, 15.
Vid. 6 Plutarch, de Placiris Philof. lib. 4 , cap. 15.
Conduite
des Moder-
nes à l'égard
des Anciens,
304 Suvis ir ÊMrE
CS TEST APL REP LT PRO RIRE LE
RE me em de TNT
nes. à
DEEE]
GEL ATP EMSRAES EX,
Syfléme de COPERNIC; mouvement de la
terre autour du foleil; Antipodes,
120. V6: c1 encore quelques autres vérités
jadis enfeignées par les Anciens, & enfin
adoptées par les Modernes , après avoir
éprouvé le fort de beaucoup d’autres, &
avoir été hautement rejerées & condamnées,
Le mouvement de la terre autour du foleil,
& les antipodes ont été connus de bonne
heure, & prefque toujours reçus avec mé-
pris, ou tournés en ridicule, & ces opinions
ont été quelquefois mème dangereufes à
ceux qui les ont foutenues. Toutes deux ce-
pendant font à préfent confirmées & généra-
lement approuvées ; & nous rétabhffons ainfi
peu à peu depuis deux fiecles les opinions
les plus célebres , fans cependant diminuer
le motns du monde de cette affectation de
méconnoitre des vérités ou des opinions que
nous devons à ceux qui les ont enfeignées
les premiers,
DETGCGOrPERNIC. 206$
121. Le fyftème du monde le plus raifon-
nable , & le plus conforme à routes les ob-
fervations , eft fans doute celui de Co-
pernic , qui place le foleil au centre du
monde , les étoiles fixes aux extrémités ,
& fait mouvoir la terre & les autres pla-
netes dans cet efpace qui eft entre les
étoiles fixes & ces planetes; & qui attribue
à la terre non feulement un mouvement
diurne autour de fon propre axe , mais en-
core un mouvement annuel. Ce fyftème eft
le plus fimple, & explique le mieux tous
les phénomenes des planetes , & fur-tout
les ftations , les rétrogradations & les direc-
tions de Mars , Jupiter & Saturne; & cna
lieu d’être fupris qu’un fyftème fi clairement
enfeigné par les Anciens, ait pris fon nom
d’un philofophe moderne. Pythagore, Phi-
lolaus, Nicétas de Syracufe , Platon, Arif-
tarque, & plufieurs autres parmi les Anciens,
ont, en mille endroits, parlé de cette opi-
mon: Diogene de Laërce , Plutarque &
Stobée nous ont tranfmis avec précifion
leurs idées l-deflus ; & fi on ne l'a pas
Le Syftème
de Copernic
appartient
aux Ancicn£s
Pythagore
paroit être le
premier qui
l'ait enfeigné.
106 SV $S MIE É
admis plutôt, cela ne doit s’attribuer qu'à
la force du préjugé qui, nous faifant toujours
décider de la nature des chofes fur les appa-
rences, nous a toujours éloignés d’un fyf-
tème qui eft plus du reffort de la raifon que
de celui de nos fens, au témoignage def-
quels il fe refufe.
122. Pythagore croyoit que la terre étoit
mobile, & n'occupoit point le centre du
monde , mais qu'elle avoit un mouvement
circulaire autour de la révion du feu (1),
(1) HoSaryopixoi ray 5 hr, are dxivile , oÙre y mtru Ts
ZripiQopès oûray , dAAX nn} épi To Hp diwpouuéy, QÛTE
rpualéres , 0e mporey ro Lomme propiay vrépyew. Py-
thagorei terram non putant immobilem , neque me=
diam tenere regionem globi , fed effe in gyrum circum
ignem fufpenfam , neque numerari inter Elementa
Mundi præcipua , & prima. Plutarchi opera tom. 1 ,
D. 67. D. in Numä, Vid, eundem de Placitis Philofo-
phorum lib. 3, cap. 13. Clem. Alex. Strom. lib. s,
P-5565; & Ariflotel, de cælo. lib. 2 , c. 13 6 14. Theon
Smyrnæus ait tradi ab Eudemo in hiftoriä aftrologicà
Anaximandrum invenifle ; ors ëse y% peeréopos © xweirae
mrigh To rod nomma pére, Quod Terra fit in fublimi
pendens & moveatur circa mundi medium,
Die OOIPERNIIC. 2èf
par laquelle il entendoit le foleil , & formoit
ainfi les jours & les nuits. On dit que Py-
thagore avoit appris cette doctrine chez les
Egyptiens , qui repréfentoient le foleil fous
l'emblème d’un efcarbot, parcequ'il pafle fix
mois fous la terre , & les fix autres mois au-
deffus ; ou bien parcequ'ils avoient obfervé
que cet infecte forme une boule de fes excré-
ments, & fe couchant enfuite fur le dos,
fait mouvoir avec fes pattes cette boule en
cercle autour de lui.
123. Quelques-uns, entre autres Dio-
gene de Laërce, attribuent cette opinion à
Philolaüs (1) , difciple de Pythagore: mais
il paroïît qu’il n’a eu que le mérite de lavoir
divulguée le premier , ainfi que plufieurs
(1) Donc y mixe mepQped er men ro mp, rar
æinhou AoËo | opoilperus io, #3 oem. Philolaüs opi-
natur Terram in orbem circa mundanum ignem per obli-
quum circulum ( i. e. Zodiacum ) circumferri infiar
Jolis & lune. Stobæus, p. sr, Ecl. Phyf. lib. 1.
Plutarch. de Placitis , lib. 3, c. 11 © 13. Vid. &
Diogenem Laërtium | lib, 8 , feë, 85. Eufcb. Prepar,
ÆEvangelic, p. $19,
Philolaïüs l’a
fait
tre .
connoi-
Sentiment
de Timée de
Locres, d’A-
riftarque &
de Séleucus.
208 S y SRÉNN E
autres opinions de fon école ; car Eufebe
affirme expreffément que Philolaüs avoit le
premier expofé par écrit le fyftème de Py-
thagore. Philolaüs ajoutoit que la terre par-
couroit un cercle oblique, par lequel il en-
tendoit le zodiaque (1).
124. Plutarque femble infinuer que Ti-
mée de Locres , auf difciple de Pythagore ;
avoit eu la mème opinion ; & que lorfqu'il
difoit que les planetes éroient animées , &
qu'il les appelloit les différentes mefures
du temps , il ne vouloit rien dire de plus,
finon (2) » que le foleil , la lune & les autres
(1) Dep Ty Aobwow roù Coduwxod nuxnon du” ou Qépéle
Dokolepois o #uos È are d\ opoPogiar © Tporix dv muxney, P lu«
tarch. de Placitis Philofoph. Kb ac. "23:
(2) Dos eye ras dugis à 6 Téuouss ts Te ya © TEAM ;
# Tù ha ora opyavæ pou capital 5 TOTEQ IV CÙTUS
Enie Th VA Gomip MO, 1 EM , À) TOS ÉTÉ mh&*
VÉTUS ÿ OÙs Gpyave xporeu | it TUS TOJMUS ; FR OTNYOPEUE 3
# Eds Ty ya Aouevv épi To Me muray mono Teréry
pévor , ph puma œuveçomérn , 494 Hévourey | GAÂX 5pe-
Porto | 3 dveAoupérgy votiv 3 @s Use gr Apisæpyos , #) Zé=
Deuxos | amd tirer.
Quomodo ait Timæus animas in terram, Lunam,
planetes
DEC 6 P'ERIN'I €. ‘469
» planetes fervoient à mefurér le temps par
» leurs révolutions , & que laterre ne devoit
» pas être imaginée toujours ftable dans le
» même lieu, mais mobilé & dans un mou-
» vement circulaire, comme Ariftarque de
» Samos & Séleucus l'ont enfeigné depuis.
125. Cet Ariftarque de Samos vivoit en-
viron trois cents ans avant Jefus-Chrift, &
fut un des principaux défenfeurs de l'opinion
du mouvement de la terre. Archimede,
dans fon livre de Arenario ; nous apprend
» qu'Ariftarque , écrivant fur ce fujer contre
» quelques philofophes de fon temps, avoit
» placé le foleil immobile dans le centre
» d’un orbite qu'il faifoit parcourir à la terrre
& quæ alia funt inftrumenta temporis, difperfas efle 2
An hoc modo moveri ftatuebat terram, quo folem,
lunam , & quinque planetas, quos converfionum
caufà appellat inftrumenta temporis ? & oportuit
terram devin@tam circa axem univerfi, non ira fabri-
catam intelligi , ut uno consenta loco maneret , fed que
converteretur , & circumageretur ? ut poftmodo Ariftar-
chus, & Seleucus oftenderunt. Plurarch. tom, 2,
P. 1006. . à
Tome I, O
Expoñition
du fentiment
d’Ariltarque.
Pañlage de
Plutarque fur
Ariftarque ,
qui doit être
corrigé.
210 SYY:S;:T ËÊ M E
» pat un mouvement circulaire (1) » 3 &
Sextus Empiricus cite aufli Ariftarque comme
un de ceux qui ont foutenu principalement
cette opinion (2).
126. Jl y a aufli un autre paflage dans
Plutarque, par lequel il paroît que Cléan-
the accufoit Ariftarque d’impiété & d’irréli-
gion, de ce qu'il troubloit Le repos de Vefta
(1) Taëra yap à ras yezQontrus magxs M Aspgnce
yor Aunpoiras Aersapees à Zauios , ümodériéy Tuer
Eten yexQus | ty ais | tx TD Ümontuevay cuueaiet T
xômpoy monaTrärio hpÿp To vor cipuevou. Y'rolEley D rœ
pis dspay , À Toy ao pre xp" ray dE yo mter=
Pipe eg mipi Toy av | rare nindou mepaQéqeier , 6 si
ë pére To d'ou xauves. Id eft, Friderico Comman-
dino interprete: Hæcigitur in iis, quæ ab Aftrolo-
gis fcripta funt, red2rguens Ariftarchus Samius ,
pofitiones quafdam edidit ; ex quibus fequitur mun-
dum proximé diéti mundi multiplicem efle. Ponit
enim ftellas inerrantes atque folem immobiles per-
manere: terram 1plam circumferri ctrca folem , fecun<
dim circumferentiam circuli, qui efl in medio eurfu
conflitutus. Meminit Archimedes in Pfamnite, p.
120.
(2) Où ye pen Tu To normou ximon GwéAorts , Th à
ya away d'bdrmles | ds oi mp Apisapço Ta) Mady«
D'ELÉ O PERINU C. “VE
& des Dieux Lares de l'univers, parcequ'il
vouloit rendre raifon des phénomenes qui
arrivent dans le cours des planetes, en en-
feignant que le ciel ou le firmament où font
placées les étoiles fixes, étoir immobile, & que
la terre parcouroit un orbite circulaire fur une
ligne oblique , & accomplifloit en même
temps un mouvement de rotation fur fon
axe 3 fur quoi il faut obferver qu'il y a une
faute dans le texte de Plutarque que tous les
commentateurs conviennent qu’il faut corri-
ger en lifant C/éanthe , au lieu où l’on lit
Ariflarque (1).
pailinor où mwndaïlag vosir poor, Tour Érepor eives Aenréor À
xpovor, #} où TAUTOY TŸ TO xoTuou xivATEE,
li quidem certè , qui mundi motum fuftulerunt,
terram autem moveri funt opinati, ut Ariftarchus Ma-
thematicus , nihil hoc obftat, quominuüs tempus
mente concipiant. Aliud ergo dicendum eft efle rem-
pus; & non idem, quod motus mundi. Sextus Em-
piricus , p. 663, fe&. 174.
(1) Mo, dre, ©” rüy pu xpirin per dotétias iray-
yuinne" Gp Apirapyes il d'éi KA To Eduoy àre-
Guias meoxantiar vos EAAmes , @s xpalu To) u6po
7h Ésiur , O7 Qanolue code drap irapèro , men T ces
O i
Platon dans
{a visillefle
adopte l’opi-
nion du mou-
vement de Ja
terre,
212 SiYéstT Ê ME
127. Théophrafte, cité par Plutarque ;
a écrit dans une hiftoire de l’aftronomie qui
n'eft point parvenue jufqu’à nous, que Pla-
ton , qui avoit toujours enfeigné que le fo-
leil tournoit autour de la terre , revint de
cette erreur dans un âge plus avancé , & fe
repentit de n'avoir pas placé le foleil dans
le centre du monde, comme le lieu qui con-
venoit le plus à cer aftre ; & d'y avoir placé
la terre (1) contre l'ordre le plus naturel :
voy droliepuos | téenirle dou de zur AoËod ôxAG0 Tv Var,
ue ygf are Tor aùris box O'wouutiy, Heus tu , ins
quit, noli nos impietatis reos facere , eo patto,
quo Ariftarchus putavit Cisanthem Samium violatæ
Religionis à Græcis dcbuifle poftulari , tanquam fi
univerfi Lares , Veftamque Îoco moviflet : quod is
homo conatus ea, quæ in cœlo apparent tutari certis
ratiocinationibus, pofuiffet cœlum quiefcere, serram
per obliquum evolvi circulum , & circa fuum verfar:
interim axem. Plutarchus de facie in orbe lunæ , p.
92: 9250
(1) Oxopeusos dE 5
! el LA e 3 / » DA 2 n \
YEVORLEY D plope Ace aS oO FT Q QTAHKOUGEY Cr] ovl4 Th 71 TAY
ZRQTISOPE TA Hérou mperQulspss
gérmw 3002 To murs. Theophraftus porro etiam id
narrat , Platonem jam natu grandem pœnitentié fuiffe
DE COPERNIC. 213
& il n’eft pas étonnant que Platon foit revenu
à cette opinion , en ayant été imbu de bonne
heure dans les écoles de deux célebres Pytha-
goriciens , Archytas de Tarente, & Timée
de Locres , comme on le voit dans l'apologie
des chrétiens par faint Jérome contre Rufin.
Et l’on voit dans Cicéron , qu'Héraclide de
Pont, autre Pythagoricien , avoit aufli main-
tenu cette opinion (1). Je ne dois pas pañler
duëlum | qudd terram in medio univerfi non f[uo loce
collocavifet, Plutarch. oper. tom. 2, p. 1006. C.
= Tadre de 494 Daëdrane Quart mpirevrm yevpluor das -
voGQou mepi Th yès , Os ty tips LOpe xudESDoNS | Th à
péT ê AVEAGT ATH) ÉTÉ pa Tu pr Ton FR OTALAUTE. Eadem
Platonem volunt jam fenem fenfifle de terra , alio
eam loco reponentem , medium vero domicilium alter
cuipiam attribuifle præcellentiori. dem in vit Nu-
me,
Vide & Eufebium , Prep. Evang. lib. 15 , cap. 8...
Plotin, Ennead. 2. lib. 2, c. 1. Corfin. in Plutarch. de
Placitis Philof. Differt. 2 , p. 31.
(1) Cur Plato Ægyptum peragravit ut à facer-
dotibus barbaris numeros & cæleftia acciperet ? Cur
poft Tarentum ad Architam ? Cur ad cæreros Pytha-
gorcos , Echecratem, Timæum , Acrionem Locros,
O ii
Antipodes
connus
de
blufieurs an-
ciens
fophes.
philo-
214 S'y STÊME
fous filence , que le fyftème aftronomique
de Tycho Brahé avoit été connu de Vi-
tuve (1), ainfi que le cours de Vénus &
de Mercure autour du foleil.
128. L'opinion que la terre étoit ronde ,
habitée en tous fens , & que par conféquent
il y avoit des Antipodes dont les pieds
éroient oppofés aux nôtres, eft encore une
des plus anciennes vérités enfeignées en phi-
lofophie. Diogene de Laërce dit, dans un
endroit de fon hiftoire, que Platon ctoit le
premier qui eùt nommé Antipodes les habi-
rants de la terre qui nous font oppoñfés. I ne
ut cum Socratem exprefliflet, adjungeret Pythago-
reorum difciplinam , eaque, quæ Socrates repudia-
bat addifceret. Cicero de finibus bonorum & malorum ,
lib. $, p. 1049 , col. 2.
H'egxrsid Ys pit où Ôo Zola TabTyy éero zh d'eau
sivoy xvxno rw ya. Proclus in Timaum, pa2or,
lin. 48.
(1) Witruvius, lib. 9, c. 4, p. 184, lin. 15, &
186, lin. 7. Macrobius in fomnium Scipionem, lib. 1,
€. 19, p.93, circulus , &c. Martianus Capella de
nuptiis ; lib, 8, cap. 288, 289,
DE COPERNIC. 215
veut pas dire que Platon ait enfeigné le pre-
mier cette opinion , mais feulement qu'il a
le premier employé le mot d’Anripodes ; car
dans un autre endroit , le mème Diogene de
Laërce cite Pythagore comme auteur de cette
opinion (1). Plutarque a aufi un paffage la-
deffus (2) , par lequel il paroït que c’étoit un
point difcuté de fon temps. Lucrece &
(1) Kai mpôros iy Quorcpie dilirodus dvépare (TIaé-
za). Plato primus in Philofophià nominavit Anti-
podas. Diog. Laërt. lib. 3, ©. 24.
ToVaydeus Qios eve ANimodus ; #gf Tè ip x470@ ,
éxavus do. Pythagoras dixit effe autem Antipodas ,
nobifque obverfa veftigia premere. Diog. Laërt,
TENTE
(2) EX yep ion Alimodes mpiy (éomtp tiot Déyaurt)
TS VIS Tù HÉTO mtenuxoiTts , ouai pot ixtavs Grpnoovs
eva @euisoxhtos. Si funt, quod nonnulli aiurit , An-
tipodes inferiorem terræ partem verfis adverfas noftra
veftigiis incolentes , ne illis quidem puro inauditum
efle Themiftoclem. Plutarch, de Herodoti maligni
late , tom, 2 , p. 869. C.
S. Auguft. de Civitate Dei , lib. 16, c. 9.
Lucretius, lib. 1, v. 1061 & Jeg.
Plin, lib, 2,0, 65.
O iv
Erreur au fu-
jet de l’évé-
que Virgile.
Sphéricité
de la terre
prouvée par
les Anciens.
216 Sas LE ÎMIE
Pline, qui combattent ce fentiment, ainfi
que faint Auouftin , fervent aufli à faire
voir que de leur temps il devoit avoir pré-
valu,
129. Je ne parle point ici de la condam-
nation de l’évêque Virgile par le Pape Za-
charie pour avoir enfeigné qu'il y eût des
Anupodes, parceque l’on s’eft trompé fur ce
fair; & que le Pape Zacharie ne parloit,
dans la lettre qu’il écrivoit à faint Boniface
fur ce fujet, que de ceux qui foutenoient
qu'il y avoit un autre monde que le nôtre,
un autre foleil , une autre lune, &c.
130. Quant aux preuves que les Anciens
apportoient de la fphéricité de la terre , elles
étoient les mèmes dont les Modernes font
encore ufage. Pline obfervoit à ce fujet que
la terre ; que l’on avoit perdue de vue fur le
pont d’un vaiffeau , s’appercevoit encore du
haut du mât de ce vaifleau ; & de là il con-
cluoit que la terre étoit ronde. Ariftote avoit
tiré La mème conféquence de ce que dans une
éclipfe de lune, l’ombre de la terre [fe mon-
troir circulaire fur le difaue de cette planete ;
DECACORPIERINUTIC. 257
& de ce qu’en voyageant vers le Midi, on
découvroit de nouvelles étoiles ; & qu’alors
celles qui paroiffoient êtge au zénith chan-
geoient de fituation par rapport au voya-
geur (1).
(1). Plin. Hift Natur. lib.1,c. 64, 65, p. 106,
lin. 6. ÆAriflotel, de Cæœlo, lib. 2, c. 14 ad fin. lib.
p. 471. E. Orivenis Philofoph. in Anaxemand. c. 6,
p. 885, lin. 51 & 12. — Diog. Laërt. lib 2 , c. 1.
Plutarch. de Placuis Philofoph. lib. 3, c. 10 & 12.
» Leucippe donnoit à la terre la figure d’une fphere
» applatic. Laërc. lib. 9 , fe, 21 de Parmenide.
Des Télef-
copes des An-
ciense
218 Des TÉLErsCOrPESs.
Co A DoEBr EX.
Des Télefcopes.
13%, Dixs ta premiere édition de cet ou-
vrage j'avois omis de traiter le fujet des té-
lefcopes, Je craignois de me trop avancer en
difant qu'ils étoient connus avant le com-
mencement du dix-feptieme fiecle (1). Mais
il me femble que, fans mériter l'imputation
d'une trop grande partialité , 1l eft permis
d'examiner jufqu'à quel point les Anciens
ont porté leurs connoiffances à cet égard.
En n’envifageant cette queftion que felon
(1) Metius d'Alcmaër en Hollande, obfervant
des écoliers qui fe fervoient du deffus de leurs écri-
toires comme de tubes, & qui ayant mis des mor-
ceaux de glace au bout de ces efpeces de tubes,
étoient fort étonnés de voir les objets rapprochés
d'eux , il profita de cette obfervation , & inventa
les lunettes d'approche, dont il préfenta la premiere
en 1609 aux Etars Généraux. Galilée , quelques an-
nées après, perfectionna cette découverte.
Des TÉLESCOPES., 219
la fignification propre du mottélefcope, elle
feroit bientôt décidée , parcequ'il eit certain
qu’on trouve chez les Anciens des pañlages
où ils traitent des moyens de voir de loin ;
mais 4l faut examiner la nature de ces
moyens , & l’ufage & les applications qu'ils
en faifoient,
Quand nous n'’aurions d'autre lumiere
pour nous guider dans cette recherche que
celle des connoïflances de Démocrite , elle
ferviroit déja à nous faire voir qu'il devoit
avoir eu des moyens d'aider la vue pour lui
découvrir des vérités aftronomiques qu’il en-
feignoit de fon temps. Ce grand obfervateur
de la nature , attribuoit les taches de la lune
aux ombres formées par la hauteur exceflive
de fes montagnes ; & quoiqu'il fe trompât
fur l'effet, & qu’il foit plus naturel de cher-
cher la raifon de ces taches, ou dans la pro-
fondeur & létendye des cavernes qui ab-
forbent les rayons du foleil , ou bien dans
de vaftes mers qui ne peuvent pas véfléchir
une lumiere aufli vive que les autres parties
plus opaques de cette planete , cependant il
Démocrite.
220. DES TÉLESCOPES.
enfeignoit l’exiftence des montagnes de la
lune (1, & il difoit de plus que la voie
laétée contenoit une quantité innombrable
d'étoiles fixes, dont le mélange confus de
lumiere occafionnoit cette blancheur que
nous défignons ainfi ; enfin que c’étoit la
clarté réunie d’un grand nombre d’étoiles
(2). Avant que j’euffe connu les paflages des
Anciens , qui me donnent lieu de croire
qu'ils avoient des fecours pour la vue, j’a-
vois attribué à la fagacité d’efprit de Démo-
crite des conjectures aufli heureufes ; mais
puifqu'il paroît , par ce que je vais dire, que
de fon temps on pouvoit avoir des lunettes
d'approche, il eft plus naturel de penfer qu'il
en avoit fait ufage, que d’attribuer ces dé-
couvertes à une pénétration d’efprit qui
fembleroit trop étonnante.
(r) Srobæus Eclog. Phyf. lib. 1, p. 60, lin. 46.
Amuoreiles émoniaque ti drA5r à dur utpor dvéyun
yap duTuy uv Hg VETas.
(2) Plutarch. de Placir, Philof. Gb, 3, c 2.
Ampoxeilos meAnay 499 puxpar , 1 Ego dstphv cupQu lu
Goo axas cuavyarmoy dix Th mÜMOTU
Des TÉLESCOPES. 21
Âriftote eft le premier écrivain chez qui
j'aie trouvé des traces de la connoiffance
qu'ont eu les Anciens des moyens d’aflifter
la vue. Il donne mème les principes de ces
connoiflances , qu'il tire de la différente
formation des yeux. Il avoit obfervé que
ceux qui avoit les yeux à fleur de tête ne
voyent pas de loin, & qu’au contraire ceux
qui avoient les yeux enfoncés appercevoient
les objets à une plus grande diftance, parce-
que , difoit-il , les rayons vifuels dans ceux-
ci font moins difperfés, & fe continuent en
droite ligne jufqu’à l'objet. Je traduis ici
xnnru par rayon vifuel, quoique proprement
il fignifie mouvement (1. e. de la ligne vi-
fuelle). En effet, on voit qu'Ariftote em-
ploie ce même mot un peu plus loin dans le
fens que je lui donne, lorfqu'il dit qu’er fe
Servant d’un tube ; il y a moins de difperfion
du xwpns , (c’eft-à-dire des rayons vifuels),
qui partent de l’objet pour venir à l'œil ,
Th à7rd ro épouérer xwhses. Entaifonnant donc
d’après fon principe , Ariftote jugeoit qu’en
ifolant l'objet que l’on vouloit obferver , &
Ariftote.
222 Des TÉLESCOPES.
en interceptant la trop grande lumiere qui
éblouifloit la vue, on pouvoit découvrir les
objets à une plus grande diftance ; il en
allegue pour exemple l'obfervation déja con-
nue de fon temps, que du fonds d’un puits
(que l’on peur confidérer comme la lunerte
primitive) on voyoit les étoiles en plein
midi ; ce que l’on fait bien n'avoir lieu que
dans cette circonftance , ou avec laide d’un
télefcope, comme il lobferve lui-même; ou
bien, dit-il, en regardant à travers un tube,
Ce tube dont il parle eft l'enfance du télef-
cope. Il jugeo’t même que plus on prolon-
geroit ce tube, & plus on rapprocheroit l’ob-
jet, & il en répete la raïifon qu'il trouve
ètre dans la moindre difperfion des rayons
vifuels venant de objet (x).
(1) Ariftoteles de Generat. Animal. lib. $, c. 14
Ailes yèp 080 opèr | dv per, ro moppaer d'u ovæy" àÿ
, ro rés diiQopis 071 pause opouéror d'u avcdas,
radre O'e où ua cuueæive rois évréis. 6 "Jp vres tard -
prés Th xtion, 4 dv uxoy Bitrar , Tüs pis duos
pôs ddr Hier Ge para xphé xpomarar , oVerat dE
He e 2 ° Li »
mopjade, où yo tx épryuéray 5 Quartier ilole astexs
2
Des TÉLESCOPES. 213
Je n'entre point dans la queftion de favoir
s'il y avoit des verres à ces tubes; ce qu'il eft
néceflaire cependant d'admettre, fi l’on croit
qu'ils rapprochaflent l’objet, comme le dit
clairement Ariftote. Je veux bien encore ne
pas infifter fur deux paffages de Plurarque &
de Jamblique , qui indiquent à la vérité des
fecours pour la vue, mais non pas avec aflez
de précifion pour en pouvoir inférer la pro-
pofition en queftion. Le premier dit qu’Ar-
! cire ® A ,e ce #
éy TA muse 'ynovori port... To dE moppade 0% 494
AY y "A fe € L A <)it
Th mo Thy mophoder oguloy éQuidar mari | n leris
Ê] ! ” \ \ \ «
diria Ÿ 0QSanur. Ta pis rap L£0Q7 au cûx Evom 7roppa=
\' Li \ -J4 \_ “ar U LA e
be, Ta de tvros Eyovre Te opuole ty ol élue cparire
<n TP A \ \ / A! /
F mopjote , die To Th wow pu cum tis Ga
L \ 1 ” \) \ 2 .
Ms, GRAU ivdumope, éuder ap d'uQése To HéyEn Er,
o / eo 34 11 1 UA \ LEA \
QUE) TES QuUrl, TA Ty CI ébieveu, À Un 1 TI mp9
<s od 14
FO oupoloy , arxd'umpm Darlo deryen mpormir le
. « ! 7 \ ÉE CA rex n \
TOÏS OPOLEVOIS à #7 TI T@ 7OppWTE 0pAY , à To TY dm À
* / 4 27 € 1 N LA \ 4 4 /
SpOHLEYOY HAATER GpAY. 0pL0l0S À déryen 2 hr Vu 7ÿ rire
« EN ul jvc ” 4 \ Jse Se » CE, re
OPA. HAMNTE pr où EWpGTO Gy T4 MO)DOTE) | Et mo TAS
s! / TE \ e / Ce:4 f
Veos Es œuexn #v mpes To cpopsboy ojoy duos. où D) à
à) / « { £ a LA) ns. - ; à \ « 4
ŒAUËo n ximicis do oparbr, di Et ph, GrwmEp &y
» ! 32 / / AU ; l \ tse
ÉFIRAÉO) GMEYY | TOTAÜTE GYLYKA GHCACESEQOY TA MODHTE
te “ ” ELL ets 1 \ EU cs s
PRET, 3 THE (Er T opera dinDopas E5 T0) MUTAI GNT In
Plutarque &
Jamblique.
Strabon.
224 Des l'ÉLESCOPES.
chimede fut rencontré portant à Marcellus
des inftruments de mathématique dont il fe
fervoit pour accommoder à la vue la grandeur
du foleil (1). Jamblique dit que Pythagore
avoir effayé de trouver des fecours pour aug-
menter l’ouie , comme on avoit pour la vue
le compas , la regle , & mème le diorrpas (2).
Les traducteurs ont rendu ce mot par equerre
ou guadrant ; mais il me femble qu’un tube,
à travers lequel on regarde, eft la fignifica- :
tion la plus propre au fens de la phrafe , & à
l'étymologie du mot, & qu'il doit fe rendre
ainfi, quoiqu’on n’en puifle pas encore tirer
aucune induction bien claire de l’ufage du
télefcope tel que nous l'avons aujourd’hui.
Mais je ne puis m'empêcher de m'’arrèrer
min
(1) Plutarch. Vità Marcelli , edit. Steph, 8°.
P. 562. KoiQoïle pes MapxéA or dvrd ro paiualirdy
épyéver | cuioSyex | #) cQuieys , Kg YONES , ais tvag=
porle To Toù mio peiyedos Gps TA CY , SOGTIOTRI . » à
arexlever,
(2) Jamblichus de Vità Pythasor. Edit. Amftel.
4% 1707 » P. 97. Oiev n per is dia roù d'ubareu,
x) dix Ted xuvons , à vn Aie dix Liomlexs Eye
fur
Des TÉLESCOPES, 922$
fur une expreflion de Strabon , qui eft fi
clairement l'explication de la caufe des effets
du télefcope , que je ne fais comment on
peut entendre autrement, que par-la, ce qu'a
voulu dire cer écrivain {1 exact d’ailleurs. En
parlant de l’obfervation , qu'il dit fe frire
en mer de la grandeur apparente du dia-
metre du foleil à l’horifon , qui furpaffe celle
qu'il a lorfqu'il eft plus élevé, il en rend
raifon , parcequ'il eft apperçu, dit-1l, à
travers le milieu épais des vapeurs qui s’é-
levent de Océan, comme lorfqu'il eft vu
à travers les nuages , ou bien, ajoute t-il,
comme lorfque nous regardons à travers un
tube ; les rayons étant brifes nous font ap-
percevoir les objets plus grands (1). Or il eft
certain que les rayons brifés fuppofent ici
une réfraction des rayons pat le moyen d’un
verre ; car en regardant à travers un tube
(r) Strabo , edit. Amft. lib. 3 , c. 138. Aie dù
roëray &s 4’ durer xnouem Th CV mherurious de
ALL T Tüs Quilarixs.
Tome I. P
216 ‘Des TÉLESCOPES.
fans verre , il ne peut y avoir de réfraction
des rayons de la lumiere, & par conféquent
l'objet , quoique vu d’une maniere plus dif-
tincte, ne fera pas vu plus grand. C’eft ce-
pendant ce que Strabon dit pofitivement
être le cas, lorfqu’il veut éclaircir le phéno-
mene en queftion , en difant que c’eft le
même effet que l’on remarque en regardant
à travers les tubes qui , au moyen des rayons
brifés , font que l’œil recoit les images des
objets plus larges. En comparant ce paffage
de Strabon avec les connoiffances aftrono-
miques que Démocrite fembloit avoir ac-
_quifes, & qui paroïffent tellement dépendre
du télefcope, il eft difficile de s’empècher de
ctoire que les Anciens n’euflent quelque
idée de l’ufage du télefcope, quoiqu'il ne
füt pas connu généralement ; en forte qu’a-
vec tant d’autres connoiflances , dont l’exif-
tence , parmi les Anciens , eft à préfent dé-
montrée , telle que celle du miroir d’Archi-
mede & autres, cet ufage, par les malheurs
des temps, a été négligé , & enfeveli enfuite
dans l'oubli.
Des TÉLESCOPES. 227
Je ne dois pas omettre ici que Mabillon,
dans fon voyage d'Italie, dit avoir vu à la
tère d'un manufcrit du treizieme fiecle une
figure qu'il rapporte , repréfentant Prolomée
qui contemple les étoiles avec un tube com-
pofé de plufeurs différentes pieces ; mais il
n'eft pas poflible de juger fi cette lunette
avoit des verres. On voit cependant qu’elle
eft compofée de plufieurs pieces. Ceux dont
parle Strabon au plurier , pouvoient bien
être de même.
Pij
Mabillon,
Conjeûutes
des Anciens
fur la rota-
tion des af-
tres, confir-
mées par les
obfervations
des Moder-
Nes.
228 RÉVOLUTION
G'H A. PT EN UX I.
Révolution des Planetes fur elles-mêmes.
132; L'urivrré dont l'invention des té-
lefcopes a été dans les obfervations aftrono-
miques des Modernes , s’eft mamifeftce fur-
tout dans la découverte de la rotation des
aftres fur eux-mèmes , fondée fur la révolu-
tion périodique des taches remarquées fur
leur difque ; de forte que chaque planete a
deux révolutions , fuivant l’une defquelles
elle tourne autour d’un centre commun avec
les autres planetes , & tournant de plus fur
fon axe, accomplit encore une autre révo-
lution fur fon centre. Mais tout ce que les
Modernes ont dit là-deflus , n’a fervi qu'à
confirmer aux Anciens la gloire d’avoir décou-
vert cette vérité avec le fecours feul du rai-
fonnement. Les Modernes font en cela, à
l'égard des Anciens , ce que les philofophes
François ont été à l'égard de Newton; tous
les travaux qu'ils ont éprouvés dans les voya-
D ESs PLANETES. 229
ges qu’ils ont entrepris aux poles & fous l’é-
quateur , pour déterminer la figure de la
terre , n'ont fervi qu'à confirmer les idées
que Newton avoit avancées fur ce fujet,
fans fortir de fon cabinet ; & nous avons
éprouvé de mème que la plupart de nos ex-
periences ont fervi, & fervent encore quel-
quefois , à appuyer les conjeétures fi raifon-
nables des Anciens , quoiqu'il foit arrivé
fouvent que quelques-unes mêmes de celles
qui fe trouvent à préfent généralement re-
connues , aient été auparavant décriées :
nous venons d’en voir des exemples dans les
chapitres précédents, & celui-ci nous en
fournit encore un qui n’eft pas moins digne
de rematque.
133. Quels que fuffent les arguments fur
lefquels les Anciens fondoient leur théorie,
il eft certain qu’ils ont connu clairement la
révolution des planetes fur leur axe. Deux cé.
lebres Pythagoriciens , Héraclides de Pont &
Ecphantus, ont enfeigné de très bonne heure,
cette vérité, & fe fervoient d’une comparai-
fon des plus analogues pour faire comprendre
P ii
Expofition
des fenti-
ments d'Hé-
raclides , Ec-
phantus &
Platon,
236 | AMEN OLA TI ON
leur idée là deffüs , en difant que la terre
tournoit d’occident en orient, ex forme d’une
roue (1) qui tourne fur fon axe ; ou fon centre ;
& Platon, étendant cette vérité plus loin
qu’à la terre , accordoit aufli ce mouvement
particulier au foleil & aux autres planetes ;
& fuivant Atticus le Platonicien, qui expofe
fa penfée là-deffus: » à ce mouvement com-
» mun, qui porte tous les aftres tant fixes
» qu'errants à faire leur révolution autour de
PI
» leur orbite , 1l en ajoutoit un autre accom-
» modé à leur figure fphérique, qui les fai-
«
(1) H'egnauidys à Tlolxis 39 ExQulos o TloVæyopelos
or pr Th av à où uv ye milaGalixds | Tegcoù dix
mConruémw àmo dura tx évalorus épi To io adrñs
«51e 9v.
Heraclides Ponticus, & Ecphantus Pythagoreus
movent quidem & ipfi quoque tellurem , non ita
tamen , ut ipfa de loco in locum transferatur , fed
ut inflar rote revinétla ab occafu in ortum circa centrum
fuum torqueatur. Plutarch. de Placitis, lib, 3 ,c. 13...
Galen. Hift. Philof. p. 8. Tu d? fr pico roouou #1
sde mp ro dulas xélegr os pes éuxleam, Orisenis phi-
lofophum , ©. 15.
DES PEAINMENTES. 234
» foit mouvoir chacun fur leur centre parti-
» culier , pendant qu'ils accomplifloient leur
» révolution générale autour de leur or-
” bite (1).
134. Plotin confirme aufli ce fentiment de
Platon (2); & parlant de lui, 1l dit qu'outre
la grande révolution générale des aftres,
” e \ \ en / en >
(1). Etre o pet mpos Ths xon xwnoet Ÿ spy x #9
» ” , ; 4 à / PA / rs 7 €!
& rais cQaiogus Evded euros xwdvrey males où dstpes | 04 TE
; ” Ne / Oo EA >" / 3
CTAONES Hg4 GO AAMVAMEVOI, #j ÉTEOZY ŒÜTOIS XIVYTIY ÉTO—
AN
Nd'wrty
LA 3 n / 1 / \ NA
céxouray ar Th Quoet rod copalos. cOaiparoi 7) ES »
À #» d'n # dos tas cire cuuS-Grxe ; 20 7po-
tixoTus oQaiearny dy TH KIT) EXUSOS XIOÏTO MECAO OU
pevos.
Prætereà ad communem illum motum , quo fuis
in orbibus illigata fidera moveantur , tam fixa,
quam errantia, fuum quibufque Plato , ac proprium
alterum adjungit : qui etiam uti & præftantiflimus
idem fit, & cum illorum corporum naturâ conjunc-
tiffimus. Globofa enim illa quum fint , jure vo/ubili
quodam , 6 in orbem incitato motu fingula moveantur,
Eufebius , Præpar. Evang. lib. 15, c. 8, ex Attico
Platonico ita Platonis fententiam expreflit,
(2) Kai Inérar de rois Gspgis où poroy Th pui Taù
CAO cPaieaxny wii, GAAG 13 Extsw dIdurt T# épi To
#19 ar, Plato verd fideribus non folum fphæri-
P iv
Témoignage
de Plotin.
Sentiment
de !icétas de
Syracufe.
232 RÉVOLUTION
Platon penfoit qu’ils en accompl'ffloient une
autre particuliere autour de leur centre.
135. Cicéron attribue la même opinion à
Nicétas de Syracufe , & cite Théophrafte
pour garant de ce qu'il avance (r): c’eft le
cum motum unà cum univerfo tribuit , fed unicuique
etiam motum circa proprium centrum concedit. Ploti-
nus... lib: 2. Ennead. 2,1 C2.
(1) Nicetas Syracufius, ut ait Theophraftus,
cœlum , folem , lunam, ftellas , fupera denique
omnia ftare cenfet , neque præter terram rem ullam
in mundo moveri: que cèm circum axem fe fummä
celeritate convertat | & torqueat , eadem effici omnia,
guafi flante terrä cœlum moveretur. Atque hoc etiam
Platonem in Timæo dicere quidam arbitrantur , fed
pauld obfcurius. Cicero, Acad. Quaff Lib. 4, p.993.
Ty dt... tiouuerm de mp mo dia mrayros arch reraryptt-
yoy , Qiharæ + À Heavy 0v JUXTOS TE x jusegs ELLAATATS.
Terram altricem noftram quæ trajeéto axe fuftine-
tur , diei noctifque effectricem. Platonis Timaus ,
p. 40. Cicero in Plaionis Timaum five de univerfitate,
in fragmentis, p. 1327, col. 6. Proclus in Timaeum,
p.280, 281,282, 283. Arifloteles de Cælo, lib.1,
G. 13; pe 465. E. 466. D. & c. 14, in principio.
Diog. Laërr, lib, 8, fe@. 85. Voyez la note à la
feét. 103.
DES PLANETES. 233
mème que Diogene de Laërce appelle autre-
ment Hycétas, lequel croyoit que la terre [e
mouvoit avec une extrême viteffe fur fon axe
propre ; & rendoit raifon des phénomenes qui
arrivent dans les cieux par ce mouvement de la
terre,
Les Moder-
nesn’ontrien
dit fur lesco-
metes,que les
anciensn’euf-
fent enfeigné
âvant eux.
234 Des CoMETEs.
a ÉCEE
CRE A CP LORS EX LT
Des Cometes.
136. LE n'y a point de penfée affez bizarre
qui n'ait été hazardée dans les différents
âges, pour rendre raifon de la nature’des
cometes & de l'irrégularité de leur couts;
même encore au fiecle dernier, Képler &
Hévélius avoient avancé des conjectures tout-
à-fait extravagantes fur la caufe de ces phé-
nomenes. M. Caflini & le chevalier Newton
après lui, ont enfin fixé les fentiments des
philofophes par les obfervations & les calculs
les plus exa@s , ou, pour mieux dire, ils
ont ramené les efprits à s'arrêter fur ce qu'en
avoient déja dit les Chaldéens , les Egyp-
tiens, Anaxagore, Démocrire , Pythagore,
Hippocrate de Chio, Séneque , Apollonius-
Myndius, & Artémidore ; ils ont donné la
même définition de la nature de ces aftres,
avancé les mêmes raifons de la rareté de
leur apparition , & fe font excufés de n’en
Des COMETES. 235
avoir pas donné une théorie plus exaéte dans
les mêmes termes que l’avoit déja fait Sé-
neque. Ce philofophe avoit déja dit qu'il ne
fufhifoit pas, pour fixer cette théorie, de
pouvoir rafflembler toutes les obfervations
faites fur le retour des anciennes cometes,
parceque la rareté de leur apparition n’en
avoit pas encore fourni une quantité néceffaire
pour déterminer ft elles avoient un cours régu-
lier ou non , mais que les Grecs ; qui avoient
depuis peu fait cette remarque ; s’appliquoient
à faire des recherches fur cet objet (1).
(1) Neceffarium eft autem, veteres orius cometa-
rum habere colleflos. Deprehendi enim propter rarira-
tem eorum curfus adhuc non potefl , nec explorari an
vices fervent, & illos ad fuum diem certus ordo pro-
ducat : nova hæc cœleftium obfervatio eft, & nuper
in græciam inveda. Seneca, Natur. Quaft, lib. 7,
feët. 2. Et un peu plus loin :
Ad tantorum inquifitioncm ætas una non fuffcit.
» Leibnitz difoit de même au commencement de
» ce fiecle dans une lettre au Pere Des Boffes : La
» doctrine des cometes eft encore affez obfcure ; la
» poftérité en jugera mieux que nous après un grand
> nombre d’obfervations.
u
Connoiffan-
ces des Chal-
déens & des
Egypriens fur
les cometes.
236 DEs CoMETES.
137. Séneque, dans le même endroit (1),
rapporte que les Chaldéens mertoient les co-
metes au rang des planetes ; & Diodore de
Sicile, écrivant l’hiftoire des connoiffances
des Esyptiens, les loue fur leur application
à l'étude des aftres & de leur cours, fur lef-
quels il dit » qu’ils avoient recueilli des ob-
» fervations très anciennes & très exactes,
» par le moyen defquelles ils étoient en état
» de connoître leurs mouvements divers,
» leurs orbites, leurs flations, &c. & 1l
» ajoute qu'ils pouvoient aufli annoncer les
» tremblements de terre, les inondations
» (2), & Les retours mêmes des cometes.
(1) Cometas in numero ftellarum errantium poni
à Chaldæiïs , tenerique curfus eorum. Senec. fecunda
Natur. c. 3. » Et un peu plus haut , dans la même
» feion» : Democritus . ... fufpicari ait fe, plures
ftellas effe quæ currant ; fed nec numerum iilarum
pofuit, nec nomina , nondum comprehenfis quinque
fiderum curfibus.
\ ; ; a! / / t en
(2) Kes map Aryurlios ærapalnpacées Tueur ci T
74 / \ \ LÉ \ \ \S7 ; \
eL5 p@y rues TE , x HWATEIS # TOs CHU EXO QY avoryCKQuS
Ê * " Ê ” 7 LA
#5 2rby anisuy Ta mu Quaërlouriy | Ex Tai XpoYON
Des COMETES. 237
138. Ariftote , expofant les opinions d'A-
naxagore & de Démocrite, dit que le pre-
IC opLEvys rap aùrois Ths ipi radre omoud's, TÜSs TE
ZhAYAT AY GS Epay 2DHTEUS , #) mreenod'ous | Ko4 sUeAY pos , oùx
nryaxis OÙ apr QYopus ; roëvelloy morvraprias | tri Ye
yorous xobùs GYJpémos | Y Éorxiuariy éropivas aporyprui
youri” elrpuous TE, # xalaxAurpeous » #94 LOT OY as puy
émilous , # male rx rois monnois dd'veros Eye d'oxiile
Ty ÉMPOTW , Ex MONA Hpoyou magglnpareus VEVSALES 5
AR9YVÉ TROT.
Nam Ægyptii accuratiffimè fiderum conflitutio-
nem, & motum obfervant , & defcriptiones fingu-
lorum per incredibilem annorum numerum cufto-
diunt; cüm ab antiquiflimis indè temporibus hoc
apud cos ftudium certatim fit agitatum. Planerarum
etiam motus , & circuitus, & ftationes, nec rard
frugum calamitatem , aut exuberantiam, morbofque
promifcuè vel hominibus , vel pecoribus incurfuros
præfignificant. Terræ quoque tremores , & diluvia ,
ortufque cometarum , & quorumcunque cognitio hu-
manam excedere faculratem vulgo putatur, ex longi
temporis obfervatione prænofcunt. Diodor. Sicul.
Bibliotheca Hiflorica , tom. 1, pag. 73 , 6 pag. 116.
» parlant des Chaldéens , il dit que»: Cometarum
quoque exortus ab his denunciari ; &10om.2,p. 365:
ingens enim fax per multas noctes ardere in cœla
Sentiment
d'Anaxagore
& de Démo-
crite.
Opinions ti-
dicules de Ké-
pler & d'Hé-
vélius, moins
éclairés à cet
érard que Py-
f que F y
thagore,
238 Des CoMETESs.
mier croyoit que les cometes étoient un af-
femblage de plufieurs aftres errants qui, par
leur approximation & la réunion de leur lu-
miete , fe rendoient vifibles à nous.
139. Cette idée n’étoit pas encore bien
philofophique , mais elle l’étoit cependant
plus que celle de quelques grands philofo-
phes modernes , comme Képler & Hévélius,
qui vouloient qu’elles fe formaffent dans
l'air comme les poiffons dans l’eau. Pycha-
gore (1), à peu près dans le même temps
vifa eft.... nonnulli inter Phyficos facis hujus or-
tum naturalibus caufis tribuunt , & id genus oftenta
definito tempore neceflitate quâdam fieri affeverant,
& de his celebres in Babilonià Chaldæos , & aftrolo-
gos ceteros cffata tam certa edere ut nihil omnino
aberrent , quos non mirari aiunt fi quid horum fiat ,
fed potius fi non eveniat. Propterea quod fuos qua-
que habeant circuitus , & perpetuis motibus , curfi-
bufque definitis, omnia peragantur. » Séneque, au
liv. 7, c. 3 des Quefl. Natur. confirme cette con-
noiffance chez les Chaldéens ».
(1) Voyez Encyclopédie, article Comete. Képler,
iv. 3, de Cometis. Epitom. Aftron. Kepleri, Hv.1,
€ 1, p. ss & $s7, lin. 36.
Des CoMETESs. 239
qu’Anaxagore, avoit, fuivant le rapport d’A-
riftote , enfeigné une opinion digne du fiecle
le plus éclairé, car il regardoir les comeres
comme des afîres qui avoient un cours réglé
autour du foleil, & qui ne paroiffoient que
dans certaines parties de leurs orbites, &
après un temps confidérable ; & l'erreur dans
laquelle tombe Ariftote en voulant expli-
quer le fentiment de Pythagore par une
comparaifon faite avec la planete de Mer-
cure, ne doit point être imputée à l'Ecole
Pythagoricienne (1). Ariftote rapporte aufli
(1) Avakaryoegs psy où , ng4 Anuoresles Quriy cire rods
LA / 4 re CN} el \ \ /
xopATas cuuDary À mhay pla CSEPAY ; OTUY , die ro mure
9er, d'obort bryléww drama, T d° Irauxdy ins , À
xadouuivey Tluaryoniar , ve Derouri aôroy eivet À mhailav
dstpoy | Grau dix monAod TE sypoveu Ty Quilariuy &ôrod
7 \ A CE ON SN / «| a 4 \ \
SE, 4j TH Umpeoñmy Emi puxpoy | Cmtp uni x) 7spi
Toy To) Epuoi dstog. dit D To puxpoy rau ea, TONAUS
éxheime Qartis | üst dix xporo Qaivsoas mon, apg my»
cias de rorois 5) oi mp Toy Ixwroxpéry ro XKv, #4 To
catyru dl Aiyiro émiQuræilo.
Anaxagoras igitur , atque Democritus, cometas
cfle aflerunt ftellarum errantium coapparitionem ,
quia quum proprius accefferint , fefe tangere mutud
Stobéé ex-
pofe le fenti-
ment de Py-
thagore.
240 DEs CoMETEs.
les témoignages d’Hippocrate de Chio &
d'Æfchylus , pour appuyer cette opinion.
140. Stobée (1) expofe le fentiment de
videntur. At eorum nonnulli, qui Italiam habitant,
Pythagoreïque vocitantur , comcten è ftellis errantibus
unam effe dicunt : verm , non nifi longo interpofita
tempore comparere in cœlo , & parüm ab fole digredi :
id , quod etiam Mercurii ftellæ obvenit. Nam quia
non admodum ab fole recedit, fæpè cum fe vifendam
præftare deberet, occultatur. Proindè non n'f} longo
cempore interjeëto cernt folet. Hippocrates autem ille
Chius , & ejus difcipulus Æfchylus, non fecus quam
hi dixêre. Ariflotelis opera , tom. 1, p.534, lib. 1,
meteorol, c, 6.
(1) Tôv HuSæyoptiar rite psy dsteg Quoi eve To #0
pra , © ox ai Qauouéray | dix dE ruos ogaomévo
apéro mtenoNmäs dvélexnoiler, P'ythagorei partim ftellas
faciunt cometas, quæ non femper , éd certo temporis
ambitu , appareant, Stobæus , p. 62. Eclog Phyf.
lib, 1. & p. 63, de opinione Chaldæorum: Chaldæi
fic de cometis fentiunt : alias præterea, ultra plane-
tas , effe ftellas , quæ aliquandiu quidem lateant,
quoniam longè fint à nobis remotæ , nonnunquam
autem inferius delara appareant , ita re exigente ;
cafque cometas ab iis vocari, qui nefciunt ipfas
quoque ftellas efle , evanefcere autem videri, cum
Pythagore
Des CoMEtes. 241
Pythagore dans les mêmes termes qu’Arif-
tore , quoiqu'un peu plus clairement, & 1l
dit que les Pyrhagoriciens croyoient que les
cometes étoient des aftres errants , qui ne paroif-
Joient que dans un certain temps de leur cours.
141. Séneque fur-tout, plus que tout
autre , a parlé en vrai Philofophe fur ce fu-
jet. Il expofe dans le feptieme Livre de fes
Queflions Naturelles routes les différentes
opinions fur les cometes, & 1l paroït adop-
ter celle d’Artémidore, qui croyoit » qu'il
» y avoit une quantité innombrable de co-
» metes, lefquelles, à caufe de la poftion
» de leurs orbites , né pouvoient pas tou-
in fuam regionem , in ætheris profundum, velut in
maris fundum pifces, referantur. Vid. Pln. Hifi,
Natur. lib. 2, c. 24, p. 89, lin. 20; c.2$ , p.90,
lin. 20, & annot. Vid. & Plutarch. de Placuis,
lib @e2.
Stellas effe quafdam cæteris fimiles, quarum ortus,
obitufque, quibus fint temporibus præftituti, huma-
nis mentibus ignorari. Ammian, Marcellin, lib, 25,
P. 441.
1ome LI, ‘Q
Beau paflage
de Séneque.
242 DEs CoMETESs.
» jours être obfervées , & ne fe laifloient
» voit que lorfqu’elles arrivoient à une des
» extrémités de ces orbites (1) ». Il raifonne
enfuire là-deffus avec autant d'élégance que
de folidité : » pourquoi s'étonner , dit il,
» que les cometes , qui s'offrent fi rarement
(1) Znnumerabiles ferri per occultum , aut propter
obfcuritatem luminis nobis ignotas , aut propter cir=
culorum pofitionem talem , ut tm demüm , cm ad
extremam eorum venêre , vifantur.. .. Quid ergd mi-
ramur, cometas, tam rarum mundi fpeëlaculum , non-
dùm teneri legibus certis ; nec initia illorum , finefque
notefcere , quorum ex ingentibus intervallis recurfus
eff? ... Veniet tempus, quo ifta, quæ nunc latent,
in lucem dies extrahat, & longioris ævi diligentia ;
ad inquifitionem tantorum ætas una non fuflicit, ut
tota cœlo vacet. Quid, quod tam paucos annos,
inter ftudia, ac vitia, non æquà portione dividi-
mus ? Itaque per fuccefhones iftas longas explicabun-
tur. Veniet tempus, quo pofteri noftri tam aperta
nos nefcifle mirentur. Sereca, Natural. Queft. 1. 7,
Cr TRIILSe
Ego non exiftimo cometen fubitaneum ignem,
fed inter aterna opera nature. Id, lib. c, 122.
”
-
L2]
Des CoMETESs. 243
en fpeétacle au monde, ne foient pas en-
core foumifes à des regles certaines, &
que nous n’ayons pas encore pu connoître
& déterminer où commence & finit la
marche de ces affres , auf] anciens que
l'univers ; & dont les retours font dans
d’auffi grands intervalles ? Il viendra un
temps , s’écrie-t-1l avec une efpece d’en-
choufiafme , où la poftérité s’étonnera que
nous ayons ignoré des chofes fi évidentes,
& ce qui nous eft obfcur à préfent, pa-
roitra dans un grand jour par la fuite des
fiecles & l’induftrie de nos defcendants ;
mais peu d'années , partagées entre l’é-
tude & les paflions , ne fufhfent pas
pour des recherches fi importantes , &
pour apprendre à connoitre la nature des
cieux.
142. En jetant le yeux fur les divers paf-
fages qu’on vient de rapporter , on eft obligé
de convenir que les Modernes ont trouvé
dans les écrits des Anciens ce que l’on a dit
de folide depuis quelque temps concernant
Qi
Les Moder-
Nes n’ont rien
dir fur les
cometes que
d’après les
Anciens,
244 DEs COMETES.
les cometes : ils y ont feulement ajouté les
connoiflances que leur a fourni l’obferva-
tion, que Séneque avoit déja jugée néceffaire,
& qu'une longue fuite de fiecles feulement
pouvoit leur procurer.
CHAPITRE" KXTITL
De la Lune.
143: Lx lune nous offre encore un champ
où les Anciens ont eu occafion de donner
des preuves de leur fagacité ; ils ont connu
de bonne heure qu’elle n’avoit point une lu-
miere propre ; mais qu'elle ne brilloit que par
Za lumiere du foleil qu’elle réfléchiffoit. C’étoit
le fentiment d’Anaxagore , après Thalès, &
celui d'Empédocles (1) , qui concluoit de
(1) Aronsimiler row ro ro E’pmed'exXcous | dvaxnaret
TU To #Aiou pos Th Emmy vie y roy ei Taie Qariresoy
dm" aùrhs. oJe où0e Cepeey, cdd Aaumper dQinréirey pos
Gus , domtp hy tinos , téarVius 499 pires Quroy yeusme
pvns.
Relinquitur ergo Empedoclis fententiam efle ve-
ram: nempè reflexione luminis folaris ad lunam,
hic ab illà res illuminari. Undè fit, ut neque calidum,
neque fplendidum ad nos lumen perveniat : quod futu-
rum videbatur , fi inflammatio , & permixtio lumi-
nis fieret, Plutarch, de facie in orbe lune, tom, 2,
P- 929. E.
Ta re ccm Veud'oDun no dm» To mAloy Qurite ai,
Anaximandrum putaffe lunam falfo Iumine fucere,
Q üj
Lune illumi-
née par le fo-
leil ; vérité
connue des
Anciens,
Raifons de
croire la lune
habitée,
246 DE LA Lune.
cette réflexion de la lumiere , qu’elle nous
en arrivoit moins vive, & que c’étoit la rai-
fon pour laquelle la chaleur de cette lumiere
n'éroit point fenfible; ce que les expériences
faites fur la réunion des rayons de dumiere
de la lune , à l’aide du miroir ardent , ont
confirmé depuis peu : car il n’a jamais été pof-
fible, malgré toute la force des miroirs , de
produire la moindre chaleur fenfible par la
réunion de ces rayons.
144. Toutes les obfervations des Mo-
dernes tendent à nous perfuader que la lune
a une atmofphere , quoiqu’extrèmement
rate, Dans une éclipfe totale de foleil on
remarque autour du difque de la lune une
lueur claire & large , parallele à la circonfé-
rence , & devenant plus rare à proportion
qu’elle en eft plus éloignée ; ce qui ne peut
ètre que l'effet d’un fluide comme l'air qui
& à fole illuftrari. Diog. Laërt. in Anaximand. L, 2.
Voyez aufli Laërt. in Zenon. lib. 7 , fe. 145.
Vitruv. lib. 9 , c. 4. Plin. lib. 2, c. 9. Galen. de
diebus decretoriis , lib. 3. Cicero in fomnio Scipionis.
DE LA Lune. 247
nous environne , & qui, à caufe de fa pe-
fanteur & de fon élafticité , eft plus denfe en
bas & plus raréfñié en haut. D'ailleurs on ob-
ferve aifément, avec le télefcope, des parties
plus élevées & plus éclairées les unes que les
autres dans la lune, que l’on juge être des
montagnes que l’on a mème trouvé le moyen
de mefurer. On remarque aufli d’autres par-
ties plus baffes & moins éclairées, formées
par l'élévation de ces montagnes ; enfin on
obferve d’autres parties qui , réfléchiffant
moins de lumiere , & préfentant une furface
toujours également unie , font jugées être
de grands amas d’eaux : & de ce qu'il y a
dans la lune de l’eau , une atmofphere , des
montagnes, des vallées, on conclut qu’il doit
y avoir de la pluie, de la neige , & tous les
autres météores qui font la fuite naturelle de
ces fuppofitions ; on en conclut aufli que les
idées que nous avons de la fagefle de Dieu,
veulent qu’il yait placé des êtres, quels qu’ils
foient, qui puiflent habiter cette planete,
afin que toutes ces chofes n’y foient pas en
pure perte.
Q iv
Sagacité des
Anciens dans
Jeurs conjec-
tures.
Ils croyoient
la pluralité
des Mondes.
Sentiment
d’'Orphée fur
la lune.
248 DE La Luxe,
145. Les Anciens, qui, dit-on, n’avoient.
pas de télefcopes, fuppléoient au défaut de cet
inftrument par une pénétration d’efpritextra-
ordinaire ; ils avoient tiré toutes ces confc-
quences avant les Modernes, fans avoir eu
pour les aider tous les movens que nous
avons de nous affermir dans nos conjeétures,
& avoient découvert, avec les yeux de l’ef-
prit, ce que les télefcopes nous ont fait voir
depuis avec les yeux du corps.
146. Nous voyons par quelques fragments
de leurs écrits, qui nous ontété confervés,
qu'ils faifñ{foient d'une maniere bien fublime
& bien digne de la grandeur de Dieu, les
vues de cet être fuprème fur la deftination
des planetes , & de cette multitude d'étoiles
placées dans les firmament ; nous avons déja
vu qu'ils les regardoient comme autant de
foleils , autour defquels des planetes, comme
celles de notre fyftème folaire , faifoient
leurs révolutions : ils alloient plus loin; ils
foutenoient que ces planetes étoient habi-
tées par des êtres dont ils ne défnifioient
point la nature , mais qu'ils difoient ne le
DE LA LUNE. 249
céder ni en beauté ni en grandeur aux nôtres.
Orphée eft l’auteur le plus ancien dont on
nous ait confervé l'opinion fur ce fujet :
Proclus , dans fon Commentaire fur Timée,
rapporte (1) trois vers de cet ancien philo-
fophe , dans lefquels il dit pofitivement que
la lune étoir une rerre comme la nôtre qui avoit
Jes montagnes , [es vallées , &cc.
147. Pythagore , qui a fuivi Orphée dans
plufieurs de fes opinions, a aufli enfeigné (2)
(x) Micaro d Gnnm yaiay émaoglor, 4 Te cé
Adardlor xn4Qovi émipSavrr de re pen,
H° zo0AN op ya, monN dseæ , mont pEAa eg.
Struxit autem aliam terram immenfam , quam
felenem
Immortales vocant : Homines autem, lunam,
Quæ multos montes habet, multas urbes, mulras
domos.
Proclus de Orpheo , lib. 4, in Timaum, p.154,
lin, 6; 283, lin, 11 ; @ lib. $ , p. 292, lin. 14.
: / / , A / ni \
(2) Of HuSuyopeior yen d'y Quint ray eau, dit Te
DéepuxEi Te rar , KUTUMEp Th map Mu YA, piQort
déois, 1 Quiois nano, sivet D mrelexaid examrariont Ta
&a airs ha 7ÿ dau, Pythagorici lunam ideo ter-
Feam apparere exiftimant , quod ipfa , ficuti tellus
Opinion de
Pythagore ,
2$0 DE LA Luxe.
que la lune étoit une terre femblable à lanôtre,
habitée par des animaux , dont il ne détermi-
noit point la nature , quoiqu'il crüt qu'ils
étoient plus grands & plus beaux que ceux
qui habitent notre globe, & qu'il ne les ima-
ginat pas fujets aux mêmes infirmités. C’eft
aufli le fentiment que Cicéron a attribué à
Démocrite , dont, voulant expliquer Popi-
nion , 1l dit que fuivant fon fyflème , Quin-
à nobis incolitur , ab animalibus majoribus , plan-
tifque pulchrioribus circumhabitetur. Quindecim
nempè vicibus animalia, quæ in illà funt, vi noftris
præftare, nihilque fuperflui, vel excrementi emit-
tere. Plutarch. de Placit. Philof. Lib. 2 ,; c. 230.
Cicer. Acad. Quæft. lib. 4, p. 984, col. 1.
Vid. & Platonis Timaum , p. 42, lin, 39 ,t. 3...
Chalcidium in Timaum, feët. 198 , p. 350... Macro-
bium in fomnium Scipion, lib. 1, c. 11. Platon. in
Phedro , p.146 , 247... Ariflor. de cœlo , lib. 2,
c. 13,6 ibi Simplicium….. Procli in Timaum , p.11,
260, 324 & 348. Lucian, p. 377, 381, de ver. hift.
pars. 1. Laëtant. inffitut, divin. lib. 3, c. 22. De Xe-
nophane & Stoïcis. -- Athenaus , lib. 2 , p. 57. F.
Achil, Tatius in Aratum. -- Ariflotel, de motu animal,
C. 43 Pe 703 ; Lin. 4, tOM, I.
DE LA Lune. 251
tus Luctatius Catulus, par exemple, pouvoit
être multiplié à l'infini dans l'infinité des
Mondes.
148. Il me feroit facile de multiplier ici
les citations par une foule de paflages , qui
feroient voir que cette opinion étoit fort com-
mune parmi les anciens philofophes ; mais
je me contenterai de renvoyer aux fources
indiquées ci-deflous (1) : je ne veux cepen-
dant pas omettre de rapporter un paflage de
Stobée (2) bien remarquable, dans lequel il
(1) Avabarsopus Eneye rh de reAmmy oixnres bye, dAAX
&) DoQus , 1 Qéeyyyas. Anaxagoras diccbat Iunam
habitacula in fe habere , & colles, & valles. Sro-
bœus Eclog. Phyf. lib. 1, p. 59. Edit. Genev. 1609.
fol. Suidas in voce époroephe, ... Diog, Laërt. lib. 2,
Jea. 8.
Vid. Platonem in apolosiä Socratis, Edit. Henrici
Stephani 1578, 3 vol. fol. p.26 , tom. 1.
Habitari ait Xenophanes in lunà , eamque efle
terram multarum Urbium & Montium. Cicero, Aca-
demic. Quaflion, lib. 2, p. 31. Edit. Rob. Steph.
Panif. 1573.
(1) Aumereslos émooxiarpa 71% dUmnav tv durÿ pepa,
dreryun À éorn Guen xd vémus. Democritus umbram fu-
& de plu-
fieurs autres
philofophes
de l'antiqui-
té,
252 DE LA Lune,
expofe l'opinion de Démocrite fur la nature
de la lune & la caufe des taches que nous
voyons fur le difque de cette planete.
149. Ce grand philofophe imaginoit que
ces taches n'étoient autre chofe que des ombres
danslalune. formées par la hauteur exceflive des montagnes
qu’il croyoit être dans la lune , & qui, inter-
ceprant le paffage de la lumiere dans les par-
ties moins élevées de cette planete, ou les
vallées , formoient ces ombres ou ces taches
que nous obfervons. Plutarque alla encore
plus loin , & conjeétura que la lune devoit
avoir en fon fein des mers & des cavernes
profondes (1) ; il appuyoit fes conjectures
fur les mêmes fondements qui foutiennent
blimiorum ejus partium , quandoquidem valles, &
montes habeat. Stobæus , Eclos. Phyf. lib. 1, p. 60,
lin. 46.
Vid. Origen. Philof. c. 13.... Ælian. Var. Hift.
lib. 4, c. 29. Menagium ad Laërt. lib, 9 , feit. 44.
Et Plutarch. de facie in orbe lunæ , p. 930, lin. 32.
dicit [unam multas habere inæqualirates, afperitates
multas.
(1) Dicit enim eam quæ vocatur facies, fimulacra
DE LA Luxe. 253
celles des Modernes, & il difoit que les
grandes ombres que lon appercoit fur le
difque de cette planete, étoient caufées par
de vafles mers qui ne pouvoient pas réfléchir
une lumiere aufli vive que les autres parties
plus opaques de cette planete ; ox par des
cavernes extrémement étendues & profondes ,
dans lefquelles les rayons du foleil étoient ab-
Jorbés ; ce qui devoit occafionner ces ombres
ou obfcurités que nous appellons les taches
de la lune (1); & Xenophanes difoit que ces
cavernes immenfes étoient habitées par un
autre genre d'hommes qui y vivoient de la
effe & imagines magni maris in lunà apparentes,
Plutarch. de facie in orbe luna , p. 920.F.
(1) Quôd ad faciem attinet in lunà apparentem,
ficut noftra terra finus habet quofdam magnos , ita
cenfemus lunam quoque profunditatibus & rupturis
magnis efle apertam , aquam aut aërem caliginofum
continentibus. dem 1bid. p. 935$. C. Dixit Xenopha-
nes intra concavum lunæ finum , efle aliam terram ;
& ibi aliud genus hominum. Simili modo vivere, quo
nos in hâc cerrà vivimus. Laétanr. lib. 3 infltur,
divin, ©, 22.
Queftion
fur la lune,
agitée par
Plutarque.
254 DE LA LUNE.
même maniere que nous vivons fur cette
terre.
150. Il paroït par un endroit de Plu-
tarque (1) que l’on agitoit déja de fon
temps Ja queftion de favoir sil y avoit
dans la lune des exhalaifons ou des vapeurs
qui s’élevaffent au-deflus de fa furface, & y
occafionnaflent de la pluie & d’autres mé-
téores ; 1] penchoït lui même pour ceux qui
foutenoient la négative, & croyoit que la
lune devoit être tellement échauffée par la
conftante demeure des rayons du foleil fur fa
\ r 22 / f .
(1) Mn Bpexoméms ris ces & cadem pag. lin. 6.
] n » re ; > LA r G f
H'7ov TOS il TS cEAMYS cix0s € d'od ire Éeperus UTOUE=
LA CES. \ 2 "es? ! / 3
JEU) TOUS EXGSOU HAT HVE | TO) HAIOU ZPOS XOATETOY ŒU-
CRE) / 4 (Le sf 5 Lx À V4
TOIS ÉQUFLEVOU | Ho4 FAPIGOYTOS | OTAY N ZTONTÉANNOS 3 ZE
\ \ \ + # C e \ 2 /
paré Ye puy Ko4 En , 2% CHepous | @v upis OÛTE EVE“
CE ; ml
gis Quruv £g 4 » CUTE CoTpia VEvopEvOIs
z LE LÉ
> AMAXEYOY EXEI
/ # X ! f 02
avonIier conserve | dix Éepuoryra | x} Aenloryræ rod
! \ n 1. CA \ C \ !
mepéxoilos. de ap trade ri por Tu rat d'éxery
\ / / 7 LA
TOUS /DIGUS | 7 ÉVAVTIOUS MEUU@VES ŒAN’, « «à “dn, X} Téhoy
cl e Lu ENS TY 3 J Y É u
EXOY UT HOUPOTHTOS © amp | EXQEU/E TV CUSATI TŒUTH ,
La
#; ZUXIWTI,
An credibile eft, eos, qui in lunä funt, quet-
DE LA LuNE. 255
furface , qu’il n’étoit pas poflible que toute
l'humidité n’en für féchée, & qu'il püt y
avoir encore de quoi fournir matiere à de
nouvelles vapeurs : il en concluoit qu'il n'y
avoit ni nuages, ni pluies, ni vents, par
conféquent point de plantes ou d'animaux ,
& cette raifon eft encore la mème qui eft al-
léguée par ceux des Modernes qui veulent
s’oppofer à lopinion que la lune foit habi-
tée : au lieu que la feule conféquence né-
ceflaire que l’on devroit tirer de ces difhicul-
tés, feroit que les êtres qui habiteroient
cette planete devroient être différents de
annis duodecim perferre poffe folftitia fingulis men-
fibus , fole in plenilunio fupra capita eorum infiften-
te? Jam flatus , nubes , imbrefque ( fine quibus
neque nafci, neque natæ durare poflunt plantæ) ibi
coïre , ne cogitari quidem poteft , in tanto calore,
tant tenuitate ambientis, quando ne apud nos qui-
dem altorum montium vertices feris iftis adverfifque
tanguntur tempeftatibus : fed aër ibi jam tenuis,
motuque ob levitatem fuo præditus , coitionem
iftam, & denfationem effugit. Plutarch, tom. 2,
P. 938. C.
256 DE LA Luxe.
ceux qui habitent la nôtre, & accommodés,
pat leur conftirution , à la différence du cli-
mat, & de la nature des planetes qu’ils ha-
biteroient. Quoi qu’il en foit, il paroït par
ce paffage que cette opinion avoit déja, du
temps de Plutarque , fes partifans qui n’e-
toient pas moins féconds que nous en con-
jeétures pour la foutenir ; mais il eft indiffé-
rent qu’elle füt défendue ou combattue par ce
philofophe , pourvu qu'il foit évident qu’elle
ait été connue alors.
CHAPITRE
CHA PTT RE XI V.
De l’Ether ; de l'Air ; de [a pefanteur & de
fon élaflicité,
Te L:s Modernes entendent par l’éther
un fluide très rare, ou un fluide au-deffus
de l’atmofphere, & qui le pénetre ; infini-
ment plus fubtil que l'air que nous refpi-
rons ; d’une étendue immenfe , dans la-
quelle les corps céleftes font portés ; qui rem-
plit tous les efpaces où ils font leur cours, &
fe laifle traverfer fans aucune réfiftance fen-
fible. L’exiftence d’un tel fluide eft générale-
ment reconnue, quoique plufieurs auteurs,
parmi les modernes mêmes , different fur fa
nature. Les uns le fuppofent être une forte
d’air plus pur que celui qui environne notre
globe: d’autres foutiennent , avec M. Hom-
berg , que c’eft une fubftance d’une nature
approchante de celle du feu, qui émane du
foleil & de toutes les autres étoiles fixes :
d’autres enfin en font un fluide d’une na-
Tome L. R
Sentiment
des Modernes
fur l’éther,
Les Anciens
en ont eu la
même idée.
Opinion des
Stoïciense
28 TOME, L'ÉT HER S
ture particuliere , fui generis , dont toutes
les parties font d’une petitefle qui excede
même celle de la lumiere ; & ils difent que
cette exceflive petitelle de fes parties peut
contribuer à la grandeur de la force par la-
quelle ces parties peuvent tendre à s'éloigner
les unes des autres, & contribuer à produire
cette force de preflion & d’écartement, qui
eft, felon eux, la caufe de la plupart des
phénomenes qui arrivent dans la Nature, &
qui, par la fubtilité extrème de fes parties,
pénetre intimement tous les corps : ce der-
nier fentiment eft celui de M. Newton, de
Locke, & de leurs fectateurs.
152. Quel que foit celui de ces fen-
timents que l’on adopte fur l’exiftence &
la nature de l’éther , on en trouvera l’ori-
gine dans ce que les Anciens ont dit fur ce
fujet.
153. Les Stoïciens, premiérement, en-
feignoient qu'il y avoit ur feu fubril &
a@if , répandu par - tout lunivers , dont
toutes les parties étoient produites , foure-
DE ME PAITR cc ‘652
nues , confervées enfemble par la force de
cette fubftance éthérée (1), qui embrafloit
(1) Reftat ultimus, & à domiciliis noftris altifi-
mus , omnia cingens , & coërcens cœli complexus,
qui idem æther vocatur , extrema ora , & determi-
natio Mundi : in quo cum admirabilitate maximä
igneæ formæ curfus ordinatos definiunt. Cicero de
Natur& Deorum , lib. 1 , fe. 146 , p. 215.
Et pag. 1214, feët. 132. Hunc ( aërem) rursus
ample@itur immenfus æther , qui conftat ex altiffi-
mis ignibus.
Et pag. 118 , fe. 175. Quem complexa fumma
pars cœli, quæ æthra dicitur, & fuum retinet ardoe
rem tenuem , & nullà admixtione concretum , &
cum aëris extremitate conjungitur. In æthere autem
aftra volvuntur , quæ fe, & nixu fuo globata conti-
nent, & formà ipfa figuräque fua momenta fuften-
tant. Sunt enim rotunda, quibus formis, ut antè
dixifle videor , minimè noceri poteft : funt autem
ftellæ naturà flammezx : quocirca terræ, maris, aqua-
rum vaporibus aluntur his , qui à fole ex agris tepe-
faûis , & ex aquis excitantur , quibus altæ , reno-
vatæque ftellæ , atque omnis æther refundunt eadem,
& rurfum trahunt indidem , nihil ut ferè intereat ,
aut admodum paulum , quod Aftrorum ignis, &
ætherjs flamma confumat,
R ij
De Pytha-
gore & d’A-
naxagore.
266 ., NE, IL'IEXT EtKS
tous les cieux, dans laquelle les corps cé-
leftes accomplifoient leurs révolutions, & à
laquelle ils donnoient le nom d’éther.
154. Ariftote , expliquant le fentiment
de Pythagore fur lécher , l'attribue aufli à
ÂAnaxagore (1), & dit qu'il croyoit que les
cfpaces les plus reculés du Monde étoient
(1) © À Acyepluos aidyp, manu AnQE Th me gr1-
yopiar , Wv AvaËay00xs puiv rd zupi TaToy yhra ar pro
d'oxti crues. Nam quem vocamus æthera, antiquam
fibi adoptavit appellationem , quam Anaxagoras
idem , quod ignis vocabulum fignificare putafle
mihi videtur. Ariflor. tom. 1. Meteor. lib. 1 , c. 3,
p. s30. En effet, c’eft un mot chaldéen d’origine,
qui fignifie /e feu.
Vide etiam Ariflot. de Mundo.
Lucretium , lib, $ , v. 499 , co, sort.
Tére D do mAmgy æupes tas, xémehos Thy txEt Ov
en, Tex nadeiy tvopure" Toro piev épdds VOITAS. Quippè
qui & fuperas Mundi partes igne plenasefle, & vim,
quæ inibi effet , æthera vocare cenfuit : quod quidem
adprobè fecit : (& paulo poff ; ) quod enim fupero in
loco confiftit, & ad lunæ globum ufque porrigitur
corpus effe diverfum ab igne, & aëre dicimus. Arifl
Meteor., lib, 1 , €. 3.
DEanmA ar. ec 261
remplis d’une fubftance échérée, que les phi-
lofophes de fon temps appelloient éther, &
laquelle Anaxagore paroifloit avoir conçu
être un feu fubuil & actif ; & le mème Arif-
tote, dans un autre endroit, entend par
éther un cinquieme élément pur & inaltérable,
principe aélif & vivifiant dans la Nature,
différent de l'air & du feu.
155. Pythagore , fuivant Diogene de
Laërce (1) & Hiérocles, difoit que l’air qui
environne notre terre étoit impur , hétéro-
gene, mais que l'air qui étoit au-deffus étoit
pur , fain & homogene ; &il l'appelloit léñer
libre , dégagé de toute matiere [enfible ou ma-
tiere célefle, aui pénetre librement les pores
de tous les corps ; comme celle dont les
Newtoniens rempliffent les efpaces parcou-
rus par les aftres qui les traverfent fans
réfiftance fenfible. Et Empédocles , l’un des
plus célebres difciples de Pythagore, eit cité
(1) Diogen. Laëre. lib. 8, fe. 26 , 27.
Hierocles in aurea carmina, p. 229. Edit, Cantabr.
1709 , in-8,
"
R iij
Sentiment
de Pythagore
expofé par
Hiérocles,
Sentiment
de Platon.
262 DE. L'ETKHER;
par Plutarque & faint Clément d'Alexandrie
comme admettant une fubftance éthérée ,
qui rempliffoit tous les efpaces, & conte-
noit en foi tous les corps de l'univers, &
qu’il appelloit aufli du nom de Titan & de
Jupiter (1).
156. Platon , parlant de lair dans fon
Timée , le diftingue en deux efpeces ; l’un
groflier & rempli de vapeurs (2), qui eft
celui que nous refpirons ; & l’autre plus [ub-
(x) Tèié 7e, % mores monvxiuar, HO drypes dp,
Tiré , 10° dump, cprylor mp xixno araile.
Tellus, atque mare exundans , atque humidus
aens
Titan , atque æther, qui cunéta adftringit in
orbem.
De athere omnia continente 6 confiringente Em-
pedoclis, Clem. Alex. lib. $. spou : pag. $7o.
Plutarch, de Placitis Philof. lib. 2, c. 13.
Galen. Hifi. Philof. c. 13..,.. Stobaus , Eclog.
Phyfic. lb. , p.53, 4
Eujeb. Præparat, Evang. cap. 30.
(2) Es ro éveyésulor imixam ap nadoluers. AËris
limpidiffima fan@iffimaque pars æther nuncupatur.
Plato, in Timao , p. 58.
DA EUET PAUTUR LC, Vos
til , appellé l’éther ; dans lequel les corps cé-
lefles font plongés (1) , & où ils accompliffent
leurs révolutions.
157. La nature de l'air n’étoit pas moins
connue des Anciens que celle de l’éther ; ils
le regardoient comme un men/fruum général,
contenant toutes les parties volatiles de tous
les êtres de la Nature , lefquelles étant
agitées & différemment combinées dans fon
fein , produifoient cette variété de fermen-
tations , de météores , de tempêtes, & tous
les autres effets que nous obfervons. Ils con-
noifloient fa pefanteur , quoiqu'ils nous
aient tranfmis peu d'expériences là-deflus.
Ariftote (2) paroït n'avoir pas ignoré cette
a \ — o Æ
(1) Adrm dé 7 ya naSupay ty xuSapn «a Ta
» æ NT AE Var à di >Q/ > / \
degra , iv Dai ist Tu dsex , vw Qu uidteg ovquaCe rois
monnois À me Tu rule tiuYorey Aéyuv, EC. Ipfam
Nature de
l'air, fa pe-
fanteur , {on
reflort & [on
élafticité ; fu-
fils à vent;
nature & pro=
priétés du
feu.
vero terram puram in puro fitam efle cœlo , in quo
quidem funt aftra , & quod eorum quamplurimi,
qui his de rebus verba facere folent , ætherem nun-
cupant. Plato in Phadone ejus , p. 109.
(2). Er à dure D xépe male Laggs Eu, ma
AUS | 494 0 Mg œmpéior DE Cri EAuG mAcior à miépurnpiées
R iv
262- . De Et ENT H ER
qualité de l'air ; il parle d’une veflie remplie
d’air , qui pefoit davantage qu’une veffie vuide
d’air : Plutarque & Stobée le cirent, comme
ayant enfeigné que l'air cenoit un milieu
entre la terre & le feu , quant à [a pefanteur ;
& ce mème Philofophe, traitant de la refpi-
ration, rapporte l'opinion d’'Empédocles qui
en attribuoit la caufe au poids de l'air , le-
quel , par fa preffion , s’infinuoit avec force
dans les poumons. Plutarque parle aufli dans
les mêmes termes du fentiment d'Afclépiades
éruis , To xe03. In fuà enim regione omnia gravita-
tem habent , præter ignem , & aër ipfe : fignum au-
tem eft , utrem inflatum plus ponderis, quam va-
cuum habere, Ariflot. de cœlo , lib. 4 ,c.1,p.490,
tom. 1. Vid. & Stobaum Eclog. Phyf. p. 31, lin. 28.
Plutarch. de Placit. lib. 1, c. 12.-- Ana@ péy apyet
Eggs 070 ouh miour tri Tphuala mu. Sed ipfam
aëris ingrefli per denfa foramina moles arcet, &c.
Empedocles citat. ab Ariffotel. in lib. de refpiratione,
C. 7. — Ipes roro Z@Y To Urw UMOLEVOY Bapirile rod
euros (Gps) élertirQéperer. Plutarch. de Placie. lib, 4,
c. 22.-- Galen. Hiflor. Philof. de Refpir. aëris ingre-
dientis Ponderi cedens. -- » Pour les fufils à vent,
» voyez Philon de Byzance ir Veter, Mathemat, p. 77.
DPPENME PE TRS OC. Es
touchant la refpiration , & lui fait dire entre
autres chofes, que l'air extérieur eft porté
avec force dans la poitrine par fa pefanteur. X]
nous refte un Traité d'Héron d'Alexandrie,
intitulé Spiritalia ; dans lequel il applique
fans cefle l'élafticité de Pair à produire les
effets les plus propres à nous convaincre
qu'il la connoifloit parfaitement; &, ce qui
paroitra encore plus furprenant, c’eft que
Créfibius avoit, fur ce principe de l’élaflicité
de l'air ; imaginé les fufils à vent que nous
regardons comme une invention moderne.
Philon de Byzance nous donne la defcrip-
tion la plus exacte & la plus détaillée de
cette curieufe machine , qui étoit fondée fur
la propriété que l'air a de fe condenfer , &
dont la conftruétion étoit telle , que la force :
de cet élément étoit ménagée & appliquée de
maniere à pouvoir lancer des pierres à une
grande diftance, Il paroït aufli que Séneque
avoit eu connoiffance de la pefanteur de cet
élément , de fon reffort & de fon élafticité ;
car il décrit Les efforts que l'air fait conftam-
ment pour s'étendre lorfqu’il eft refferré ; &il
Nature du
feu.
266 DE ,L'ETHE RS
dit qu’il a la propriété de fe condenfer & de fe
faire jour à travers les obflacles qui s’oppofent
à fon paffage (1).
Les fentiments le plus généralement reçus
fur la nature du feu & fur fes propriétés, fe
trouvent encore clairement expofés dans Pla-
ton, Stobée , Ariftore & Lucrece. Le pre-
mier dit que le feu naït du mouvement, &
qu'il eft l'effet de l'agitation & de la friion
des petites parties des corps (2), Ariftote
(1) Ex his gravitatem aëris fieri, deindè folvi
impetu , cum quæ denfa fteterant, ut eft neceffe ,
extenuata nituntur in ampliorem locum. ... Habet
ergo aliquam vim talem aër , & ideo modo fpiffatfe,
mod expandit, & purgat : alias contrahit , alias
diducit , ac differt, Senec. Quaflion. Natural, lib. s,
ds 06:
(2) To Dà Ceppror re 409 mp o d'n 4gÿ TERRE VENË #4
imiregmiue , éuro yenäre êx Qopäs 2 rpiViws. roïro dt
2VYTiS, 4 vx, Gurer yeious æuges 3 Motum nimirum efh-
cere ut illud quod efle & fieri videatur , fit & fiat;
quicrem verd , ut res minimé exiflant , id eft, inte-
reant. Calidum enim & ignis qui alia quidem & ge-
nerat & fummo imperio adminiftrat, ipfe generatur ex
latione & attritione: illud autem nihil aliud eit quam
D'E VELUX TR éc. ! 267
parle de quelques philofophes de fon temps
qui enfeignoient que la flamme n’étoit autre
chofe que ces corpufcules dans un mouve-
ment très rapide , qui fe fuccédoient conti-
nuellement ïes uns aux autres ; que le feu
éroit compofé de petits corps de figure pyra-
midale , dont les angles étant tranchants,
nous piquoient en entrant dans nos pores,
& fondoient les métaux en s’infinuant en
eux. Ce que Defcartes a répété après lui (1).
motus ; nonne hoc eft generandi ignis principium ?
Platon. tom. 1 ,p. 153. A. in Thæeter. Vid. & Sto-
baum , Eclog. Phyf. p. 43.
Quelques Chymiftes modernes prétendent rendre
raifon de la continuité de la flamme , en difant que
c'eft à l’eau même , ou à l'humidité qui s'échappe
des corps en combuftion , qu'’eft dû ce phénomene:
mais fi c’eft une humidité qui eft le véhicule des par-
ticules ignées, elle peut aufli bien, & peut-être plutôt,
venir de l’air. Ainfi ce fentiment n’eft encore qu’une
opinion qui d’ailleurs ne dit rien de plus que le fen-
timent que préfente Ariftote,
(1) Ariflor. tom. 1 , de cœlo, lib. 3, c. 8, p. 480,
lin. 10, 483. D. 484. A
263 DELETHER; DE L'AIR, &c.
Démonax a dir que le feu pefoit (1) ; Lucrece
lui attribue cette propriété, & dir que fi le
feu paroït tendre toujours à s'élever , c'eft
qu'il y eft contraint par une caufe étrangere,
& que la preflion de l'air, qui réfifte au
poids de la flamme, eft ce qui le fait mon-
ter (2).
(1) Luciant Demonax , p. $53. C. D.
(2) Sic igitur debent fammæ quoque pofie per auras
Aëris expreflæ furfüum fuccedere, quanquam
Pondera, quantum in fe eft, deorfum deducere
pugnent.
Lucretius , lib. 2, v, 183 ufque ad 103.
SR
Ch PARSE -R-E,:.X.V.
Du Tonnerre & des tremblements de terre ; de
la vertu magnétique ; du fiux & reflux ; de
la Jource des Fleuves.
158. JE palfe à quelques articles de phyfique
particuliere, fur lefquels je tâcherai de faire
voir en peu de mots la conformité des idées
des Anciens avec celles de quelques-uns de
nos plus célebres Philofophes. II femble que
les caufes du tonnerre , des tremblements de
terre , de la force attractive dans la pierre
d’aimant, du flux & reflux des eaux de la
mer, & du retour des fleuves à leur fource,
n'aient pas été cachées aux premiers ; & ce
p'a pas été leur faute fi on n’a pas adopté les
fentiments qu'ils ont enfeignés de bonne
heure fur ces matieres, & fi l’on n’y eft re-
venu que long-remps après. On ne doit pas
leur objeéter la-deffus qu'il y avoit tant de
différentes opinions parmi eux fur chacun de
ces points, qu'il eût été difficile de favoir à
laquelle fe tenir, à moins que l’on ne con-
vienne aufli que la même objection peut fe
La diverfité
des opinions
parmi les An-
ciens n’eft pas
un fujet de rϾ
proche.
Différentes
opinions des
Modernes fur
la caufe du
tonnerre.
270 Du TonNNERRE.,
faire avec autant de raifon fur la diverfité
d'opinions qui regne également parmi nous
dans plufieurs queftions. I1 n’y a pas long-
temps qu'il y avoit deux ou trois fentiments
oppofés à celui de M. Newton fur les cou-
leurs ; mais cela n’a pas empèché que fon
fyftème n'ait triomphé , & qu’il n’ait la gloire
d’avoir propofé ce que nous connoiffons de
plus folide là-deffus. Nous devons juger avec
la même impartialité des vérités que nous
trouvons répandues dans les écrits des An-
ciens ; & un petit nombre d’erreurs avancées
par quelques - uns , ne doit pas nuire à
l'établiffement des vérités enfeignées par les
autres.
159. On eft partagé entre deux opinions
parmi les Modernes fur la caufe du tonnerre:
l’une , qu'il eft produit par une exhalaifon
enflammée, qui fait des efforts pour fortir de
la nuée où elle eft enfermée ; & l’autre, que
le tonnerre eft occafionné par le choc de deux
nuées , dont l’une venant à fe condenfer &
fe précipiter fur une autre nuée inférieure ,
fait une preflion confidérable fur l'air qui eft
Du ToNNERRE. 271
entre les deux, lequel , trouvant alors de
l’obftacle à fon paffage, fe dilate avec force,
*& produit un bruit éclatant par le choc de
l'air extérieur. Cette derniere explication eft
de Defcartes, & a trouvé moins de parti-
fans. La premiere & la plus fuivie eft celle
des Newtoniens. Je ne m’arrête point ici fur
une troifieme de M. Franklin, par laquelle
on fait voir que la matiere qui produit le ton-
nerre pourroit bien être la même que celle
qui eft la caufe de Péleétricité , parcequ’elle
eft encore conteftée , quoiqu’elle foit la plus
vraifemblable , & qu’elle ait l'avantage fur
les autres d’être appuyée fur des expériences
très ingénicufes ; & fi d’ailleurs elle eft,
comme je le penfe, la mieux fondée, elle
fera confidérée à la fin de ce chapitre.
160. Ainfi de ces deux fentiments des
Anciens , que les deux célebres Modernes
ont adoptés , l'explication de Defcartes ap-
partient entiérement à Ariftote , lequel , cité
par Plutarque (1), dit que /e tonnerre eff
(1) Aearortays , 16 drtumudoras x) Ta roule yiveey
Sentiment
d’Ariftote &
d’Anaxagore,
le même que
celui de Def-
cartes.
272 Du ToNNERRE.
caufe par une exhalaifon feèche , qui, ve-
nant à fe précipiter fur une nuée humide ,
cherche avec violence à s’ouvrir un paffage ; &
produit par cet effet un bruit éclatant. Anaxa-
gore rapporte l'effet du tonnerre à la même
caufe.
Autresopi- 161. Tous les autres pañlages , qui fe
ne trouvent en foule chez les Anciens , fur la
ccns caufe de la formation du tonnerre, contien-
tiennent clairement les mêmes raifons allé-
guces par les Newroniens , & quelquefois
réuniflent les deux fentiments qui partagent
les Modernes. ,
Leucippeæ 162. Leucippe & route la Sete Eléatique
Démocite. difoient que le connerre étoit produit par unè
Th Enpas. cru oùr évléyn patv 79 dypà, maogéidQyres O* rh
CT Tr pr maçglpie 2 Ti prés roy doper rs Por
Ts yes , Th de téuÿe vas Empornlos | Th ésegrw.
Ariftoteles ifta quoque ex aridà exhalatione fieri
exiftimavit. Itaque quum arida exhalatio in humi-
dam exhalationem inciderit , fibique violenter exi-
tum quærit, attritu quidem , ac difciflione nubis,
tonitru fragor efficitur. Plur. de Plac. lib. 3 , c. 3...
Laëre, lib, 2, fefl. 9, origines in Anaxag.
exhalaifon
Du TONNERRE. 473
exhalaifon enflammée , qui ; renfermée dans
la nuée , faifoit un effort violent pour en for-
tir (1). Démocrite dit que le tonnerre étroit
l'effet d’un mélange de diverfes parties vola-
tiles qui précipitoient en bas la nuée qui les
contenoit, & par ce mouvement violent les
faifoit enflammer.
163. Séneque l’attribuoit à une exhalaifon
feche & fulphureufe qui s’élevoit de la terre,
& qu'il appelle l’aliment de la foudre, le-
quel, venant à fe fubuilifer & à s’échauff:r en
1 \ \ 2 / 2 a
(1) Aymoxerros | Regrrns pe éx uyxpesoiles you ou
\ [4 \ ‘£ \ re
TO GEehiAyDes aÜTO VEPos TPS TN XAT& Dopay ixbiaGopers.
ayyoy dE | OTuy éx x ŸafuTEpa j Aenlaréoos , êee
HEDOUVOY QE , OTOV Ex HU TUPOTEPAY , Kg ACHIATEPAY , ea
/ \ ù ! me 2 \ G L
AGTEQOY TE, H4 HURVAHANOY | YAYYTIMOY TOU UPS n Porx
Lorie
Leucippus ignem denfiffimis nubibus interceptum
violenter excidentem tonitru credit efficere. Demo-
critus tonitru quidem inæqualem mixtionem , quæ
nubem , quà continetur , deorfüum protrudat. . ...
Fulmen autem motum violentum puriorum , atque
æquabiliorum ignis efhcientium. Srobaus , p. 64,
65.
Tome I. S
Opinion de
Séneque.
Sentiment
des Stoïciens.
274 Du TONNERRE.
l'air, produifoit enfuite une éruption vio-
lente (1).
164. Les Stoïciens diftinguoient deux
chofes dans le tonnerre, l’effet du tonnerre
même , ou la foudre, & le bruit qu'ils appel-
loient proprement le tonnerre (2) ; Ze ron-
nerre étoit ; felon eux , occafionné par le choc
(1) E terrà pars ficca, & fumida efflatur, ful-
minibus alimentum in aëre; fi attenuatur , fimul
ficcatur , & calet, & modd univerfam eruptionem
facit. Seneca , Quaft. Natural. lib. 2 , c. 54.
(2) Xpérimmos dcparu | the Div ixlesGouerar | à
prunes àmo mupalos | Poor de eives roy roûray ÿoper.
Œua ps yiynQe , jus dt oùx aqua aidawar dix Ta
Tûs duos élvrtegy eve ru cexeis. oruy d° y ro mueupales
Pope cpodpariex yevire 1 mupéd ys , KEÇyuVOY GMT Ta,
Chryfippus fulgur quidem nubium extritarum ,
vel fpiritu raptarum inflammationem ponebat , to-
nitru autem fonitum : quæ quamvis fimul fiant, non
tamen fimul à nobis fentir:, quod auditu fit vifus
acutior , cüm porro fpiritus violentior atque igneus
extiterit , fulmen gigni. Stobæus , Eclog. Phyf.
Ub.1, p. 66.
Voy. auffi Diog, Laërt, liv, 7, feéf, 154, Zeno.
Du TONNERRE. 275
des nues ; & la foudre étoit l’inflammation
des parties volariles contenues dans les nues,
& laquelle étoit occafionnée par le choc : &
Chryfppe enfeignoit que l'éclair étoit pro-
duit par l’inflammation des nuées qui, em-
portées par les vents , venoient à fe choquer;
& que le tonnerre étoit le bruit qu’elles fai-
foient en fe rencontrant : il ajoutoit que,
quoique ces deux effets fuffent fimultanées,
nous appercevions l'éclair avant d'entendre
le bruit, parceque la vue eft plus prompte
que l’ouie (1).
165. Enfin Ariftophane, dans fa coméaie
des nuées , introduit Socrate fatisfaifanc la
curiofité d’un de fes difciples fur Le caufe du
tonnerre ; & lui difant qu’elle confiftoit dans
l'air renfermé dans une nuée , lequel, venant
à fe dilater , la rompoit avec effort , & , cho-
(1) Où Zroixor Eporrhv Fe GU'/HpaUT 420) Pay , dSCSTUY
à cha ix mapyrpiVens, Stoïci tonitru quidem opi-
nantut efle collifionem nubium , fulgur verd accen-
fionem ex attritu genitam. Plurarch. de Placir.
Philof, lib. 3 , c. 3. Diogen. lib, 7 , p.154.
Si
Opinion de
Socrate, cité
par Arifto-
phane.
Aurote bo-
ttale.
276 Du TONNERRE.
quant avec violence l'air extérieur ; s’enflams
moit & produifoit un grand bruit en fortant (1).
L’aurore boréale a été aufli obfervée par les
Anciens, qui en ont expliqué différemment
la caufe; & je ne fais fi celle qu'ils allé-
ur ue
guoient n'étoit pas aufli probable que celles
qu'ont derniérement produite quelques ha-
biles phyficiens de nos jours (2).
(1) Orer us adras dreuos Enprs pileondeus xalaxnucd7 ,
Edo , airus Gp xç1y Qure xamu0" 0m ava[xys
Préas aùrus kw Qeéra cobugoy , dix Tu muxrorrle,
Y'70 rod porto w , # TAs pus à ares Eavroy xulurnier.
Quando ventus ficcus in ipfas fubve@us , ibique
Inclufus fuerit 3 tunc ipfas, ceu veficam, inflat:
& actus
Vi nubem perrumpit : & extra violento cum
impete fertur ,
Propter craflitiem , atque à ftridore, & vi fefe-
met adurit.
Ariflophan. in nubibus , aët. 1, fc. 4, p 755.
(2) Encyclopédie , tom. 1, p. 884. Mairan,
Traité de l'aurore boréale, fuite des Mémoires de
l'Académie des Sciences, année 1731, p. 137 & feq. --
Arifiotel, -- Meteor. lib. 1, c. 4 & 5. -- Plin. Hifi.
Natur, lib. 2, c. 26. Senec, Queft. Natur, lib. x,
Cire
DEs TREMBLEMENTS 277
166. Il n’y a qu’une opinion fur la caufe
des tremblements de terre , laquelle mérite
d’être confidérée ; c’eft celle qui eftalléguée
par les Cartéfiens, les Newtoniens, & tous
les habiles phyfciens (1). Ils l'attribuent à ce
que la terre renferme en fon fein des caver-
nes d’une étendue confidérable , qui font
quelquefois remplies d’épaiffes exhalaïfons ,
femblables à la fumée d’une chandelle qu’on
vient d’éteindre, laquelle eft facile à s’en-
flammer ; & qui venant en effet à s’agiter & à
prendre feu, échauffent l’air concentré & con-
denfé dans cette caverne , & le dilatent à un
degré fi confidérable , que ne trouvant point
d'iflue pour fortir , il faut néceffairement
qu’il rompe les barrieres qui le retiennent ;
ce qui ne peut fe faire fans agiter auparavant
la terre des environs par des fecoufles ter-
(1) » M. Lémery a propofé une autre opinion fur
» les tremblements de terre, & en a produit fur fes
» principes un artificiel ». Voyez Mémoires de l’ A.
démie , 1700 , p. st, 52. D'autres foutiennent que
l'életricité en eft la vraie caufe , entre autres Je
P. Becçaria.
S üij
Caufe des
tremblemens
de terre, don-
née par les
Modernes ;
. Par Atiftote ;
278 Des TREMBLEMENTS
ribles, & produire tous les autres effets qui
en font une fuite naturelle.
167. Cette mème raifon avoit déja été
donnée par Ariftote & par Séneque, pour
rendre compte de la caufe de ces funeftes
événements. Le premier , après avoir réfuré
ceux qui foutenoient que la terre où l’eau
produifoient les tremblements de terre, pro-
pofe fon opinion: qu'ils étoienr occafionnés
par l'air (1} renfermé dans les entrailles de la
terre, lequel faifoit [es efforts pour en fortir;
& 1l obferve qu’à l'approche d'un tremble-
LA
(1) Oùx av où 0d ep | oùDt ÿ% crie 4, 2) mue,
TP AIWotOS , 6T@y tra TIY1 éviy ro fée Grau en, As
dipoiles vmeie d mheso, #) méyiro Ÿ ctucmar. ausÿie
D re 1 dvadueiaos , GxGauQU GS iTi To TO TÀ op
rs Goya. &se Nico blue, h to oui mère.
Igitur neque aqua , neque terra caufa tremoris
efle poteft, fed fpiritus , ubi fcilicet quod extra
exhalat, intro fuit. Undè fit, ut plurimi, maxi-
mique terræ motus cœlo tranquillo fiant. Nam exha-
latio , quæ continens , ac perpetua exiflit, ut pluri-
muüm initii motum feétari folet. Quarè tota fimul ,
aut intro, aut extra contendit. Ari/lot, opera , tom. 1,
lib, 2. Meteorol. c. 8 ,p. 567. A.
DE TERRE. 279
ment de terre , Le temps ef? ordinairement
très calme, parcequ'une plus grande quantité
d'air qui devoit agirer l'air extérieur ; fe
trouve alors retenue dans les entrailles de la
cerre.
168. Séneque eft encore plus précis ; on
croiroit entendre parler un phyficien de ce
fiecle ; il fuppofe que /a terre cache en plu-
Jieurs parties de fon féin des feux fouterrains ,
qui , venant à s’allumer , doivent néceffaire-
ment agicer les vapeurs confidérables enfermées
dans ces cavernes ; lefquelles , ne trouvant
point d’iffue pour fortir, font des efforts ex-
traordinaires , & rompent enfin ce qui fait ob=
flacle à leur paflage ; & il dit encore que fi
ces efforts ne font pas affez puiflants pour
brifer les barrieres qui retiennent ces vapeurs
agitées & dilatées, elles ne produifent alors
que de foibles tremblements & des mugifle-
ments fans aucune fuite ficheufe (1).
(1) Quidam ignibus quidem affignant hunc tre-
morem (terræ ) ; nam cüm pluribus locis ferveant ,
nccefle cft ingentem vaporem fine exitu volvant ,
S iv
Et par Sé-
neque,
Du flux &
reflux de la
mer.
Opinion de
Defcaries.
280 Divx: EL vi x
169. De toutes les explications que l’on
a entrepris de donner fur ce qui occafionne
le flux & reflux de la mer, la plus fimple &
la plus ingénieufe , quoique contredite en-
fuite par l’obfervation , eft celle de Defcartes
qui fuppofe un tourbillon de matiere fubrile
& d’une figure elliptique , lequel environne
notre globe , & le preffe de tous côtés. La
lune, felon ce philofophe, nage dans ce
tourbillon elliptique, & lorfqu’elle fe trouve
dans la partie la plusalongée , elle faitmoins
d'impreffion fur la matiere éthérée qui envi-
ronne la terre; mais lofqu’elle eft dans la
partie la plus étroite de ce tourbillon (1),
qui vi fua fpiritum intendit: & fi acrius inflitit,
oppofita diffundit : fi vero remiflior fuit, nihil am-
plius , quâm mover. Senec. lib. 6, c. 11 & 12. Plin.
Hift. Natur, Hib. 1, c. 79, 80,-81, 82, 83. Ariflor.
lib. 2. Mereor. c. 8, p.68.-- Ammian, Marcellin.
lib. 22. — Eufeb. de Prapar. Evans. lib. 10, c. 3.
Eicero de Divin. lib. 2, p. 1168, col. 1, fe@. 13.
Maximus Tyrius , ferm. 19, p. 2216.
(1) Cartefii Principia Philofoph. Part, 4, p.158,
159. Voy, la fig.
EU NRAE TT 5. 0 x. 285
elle caufe une impreflion fur l’armofphere
dont les eaux doivent fur-tout fe reflentir ;
& 1l appuie cette explication par la remarque
que le flux de la mer fuit ordinairement lir-
régularité du cours de la lune.
170. L'autre opinion fur la caufe du flux
& reflux eft plus exactement conforme aux
obfervations , & donnée par Képler & le
Chevalier Newton. Elle eft fondée fur l’hy-
pothefe , que la lune attire les eaux de la
mer , de façon que leur pefanteur fur la rerre
doit diminuer lorfque cette planete fe trouve
être directement au-deflus des eaux; & la
pefanteur des eaux collatérales doit augmen-
ter leur preflion fur la terre, & faire élever
par conféquent les eaux dans Le point corref-
pondant de l’hémifphere oppofé à la lune.
L'action du foleil , dans ce fyftème , concourt
aufli avec celle de la lune dans la caufe des
marées ; elles y font plus ou moins fortes,
fuivant la différente fituation refpective de
ces deux aftres qui, lorfqu’ils font en con-
jonction , agiffent de concert pour élever
davantage les eaux du mème côté ; & quand
Opinion
de Képler &
du Chevalier
Newton.
Opinions de
Pychéas & de
Séleucus,
282 DU, Lu
ils font en oppolition , produifent à peu près
également le même effet en conflant davan-
tage les eaux de la mer dans les deux hémif-
pheres oppofés ; de forte que quand la lune
eft en quadrature avec le foleil, Le flux étant
caufé par la différence de ces deux forces,
dont l’une abaiffe pendant que l’autre éleve,
il doit être moindre que lorfqu’elles agiffent
enfemble ; & le flux varie ainf fuivant les
différentes pofitions de ces deux aftres.
171. L’explication des Cartéfiens a été
indiquée par Pytheas de Marfeille {1) , qui
(1) Hudtæs o Maorandrns Tÿ mhnpoatt TÂs CES Tas
mhquuiegs vivo, rh À pudou Tus éuréridus.
Pytheas Maflilienfis ait incremento quidem lunæ
acceflus fieri, decremento receflus. Pur. de Placitis,
Bb) 32 CT.
Ce Pytheas étoït le même que celui dont Srrabon,
lib.2,c.23, rapporte une obfervation célebre tou-
chant la proportion de l'ombre du foleil à la lon-
gueur d’un ftyle au temps du folftice. Voyez Caffini,
Origine du progrès de l'Affronomie , p. 11 des Mé-
moires de l’Académie des Sciences, tom, 8. Montu-
cla ,tom. 1,p. 209, & plus loin, feét. 257, note (a).
Eadem node accidit ut effet luna plena , quæ ma-
EE MEN EE Ut x: | 1208
avoit obfervé que les marées fuivoient les
inégalités du cours de la lune dans leur ac-
croiffement & leur décroiffement ; & Séleucus
d'Erythrée , le Mathématicien (1), ( qui ac-
tribuoir à la terre un mouvement de rotation)
xpliquoit aufli la caufe des marées par /a
force du tourbillon de la terre ; combinée avec
le mouvement de la lune.
172. L’explication de Pline (2) a plus de
ritimos æftus maximos in Oceano efficere confuevit.
Cafaris Comment. lib. 4. Cicero de Natur. Deor. lib. 2,
p. 1127, fe. 20. Senec. de Provid. c. 1.
(1) Zéros o muSyuuliés auèy 3 ares rh yD, dire
ones aûras 77 din Qhéi , 2 TA xWTE , TA Esp TH
Tis rEhVYS.
Seleucus Mathematicus (movens & ipfe Tellurem)
ait ipfius vertigini, & motut , luna converfionem ad-
verfari. Spiritu vero aut vento , inter utrumque.
Corpus , in contrarias partes reflexo , atque in Ât-
Janticum Pelagus incidente , mare ipfum facili ratio-
ne ab illo agitari.. dem ibid.
(2) Pluribus quidem modis, verdm caufa in fole,
lunâque. Bis’inter duos exortus lun& affiuunt, bifque
remeant , vicenis quatérnifque fempér horis. Et pri-
mum attollente fe cum cà muündo ihtuméfcentes,
Pline avoit
allégué la n'é-
me çaule que
le chevalier
Newton.
=
284 DU ELA +
rapport avec celle du Chevalier Newton,
M. de la Lande , l’un des plus habiles aftro-
nomes de notre fiecle , eft de l'opinion ,
» que Pline, dans le paffage que je vais rap-
» porter , fait une defcription très exacte des
» phénomenes des marées ; la caufe même,
» dit-il, y eft énoncée d’une maniere très
» conforme à ce que les phyficiens adoptent
mox à meridiano cœli faftigio vergente in occafum,
refidentes : rurfufque ab occafu fubter cœli ima , &
metidiano contraria accedente , inundantes : hinc
donec iterum exoriatur , fe forbentes. Nec unquam
codem tempore , quo pridiè, reflui , ut ancillante
fidere , trahenteque f:cum avido hauflu maria, & afli-
dué aliundè, quam pridiè, exoriente: paribus tamen
intervallis reciproci , fenifque femper horis , non
cujufque diei , aut noûtis , aut loci, fed æquinoctia-
libus : ideôque inæquales vulgarium horarum fpatio ;
utcumque plares in cas aut diei, aut noctis, illarum
menfuræ cadunt , & æquinoëtio tantüum pares ubi-
que.
Quippè modici novà ad dividuam æftus, pleniore
ab eà exundant , plenâque maximè fervent : indè
mirefcunt. Pares ad feptimam primis. Iterumque alio
latere dividuà augentur. Z coitu folis pares, Plané
EAN RAENE f UUX. | 728%
» aujourd'hui : on y voit l'attraction lunaire,
» 8: mème la différence de l'apogée au péri-
» gée, qui eft une fuite de l’attraétion (1).
» Ce grand Naturalifte prétendoit donc que
» le foleil & la lune avoient réciproque-
# ment part à la caufe des marées, & après
» une fuite d’obfervations de plufieurs an-
câdem Aquilonià , & à terris longius recedente mi-
tiores, quäm cum in auftros digrefla , propiore nifu
vim fuam exercer. Per oétonos quoque annos ad prin=
cipia motus, & paria incrementa centefimo lunz
revocantur ambitu , augente ea cuncta folis annuis
caufis , duobus æquinoétiis maximè tumentes , &
autumnali amplius quàm verno. Inanes vero brumà,
& magis folftitio. Nec tamen in ipfis, quos dixi,
temporum articulis, fed paucis poft diebus, ficuti
neque in plenä , aut noviflimà, fed poftea : nec fta-
tim ut lunam mundus oftendat, occultetque , aut
mediä plagà declinet, verdm duabus ferè horis aqui-
noëlialibus ferits ; tardiore femper ad terras omnium
que geruntur in cœlo, effeélu cadente , quam vifu.
Plni:, Hift. Natural. lib. 2, c. 97 , p.27, 28.
(1) Obfervations fur Pline par M. de la Lande, «
la fin du premier volume de la traduction, p. 383,
col. 1.
Moyen de
calmer les
flots de la
mer avec de
lnuile,
1286 Dour: É EL ù &
» nées , il avoit remarqué que la lune
» agifloit plus fortement fur les eaux lorf-
» qu’elle étoit plus voifine de la terre, &
» que l'effet de fon aétion n’étoit fenfbie
» pour nous que quelque temps après que
» la lune avoit agi, vu l'intervalle qu'il doit
y avoir entre la caufe qui fe paffe dans les
» cieux , & les effets qui en réfultent fur la
» terre ». Aufli remarque-t-on que les eaux,
qui ont la force d'inertie, ne perdent pas
tout d’un coup le mouvement qu’elles ont
recu dans la conjonction de la lune avec le
foleil , & que cette force qu’elles ont com-
mencé à acquérir peu-à-peu avant laconjonc-
tion , & qui les a oblivées de s'élever , les
conferve encore dans cette élévation, mème
après la conjonction.
IL n’eft pas hors de propos de remarquer
ici que Pline, Ariftote & Plutarque avoient
fait mention de l’ufage de calmer la mer
agitée avec de Phuile, renouvellé par M.
Franklin. Pline va plus loin ; il dit que
les plongeurs s’en fervoient pour calmer la
mer , & donner plus de tranfparence aux
s
2
EUR MEME LyUCR. | 289
eaux (1). Plutarque en parle aufli (2) d’après
Ariftote (3), & trous deux en donnent la
même faifon , répétée par M. Franklin,
que l'huile , en fe répandant fur un efpace
fort étendu de la mer, formoit une furface
unie qui donnoit moins de prife aux vents,
& prévenoit la trop grande agitation des
flots.
173. Il eft peu de chofes qui aient plus
(1) Omne ( mare) oleo tranquillari ; € ob id urinan-
tes ore fpargere , quoniam mitiget naturam afperam ,
lucemque deportet, Plin. lib. 1 , ch. 103 & 48.
(2) Plutarchus , Quæft. Natur. $. fe. 12. Aie re
ras banarins énain nalappavontns yierou xalaQavux 454
van ; moriggr (os A'exsorians Quoi) To mue Ths eo
iles éroudane , à zut many dde éno ;
(3) Ariftote , dans fes Problèmes, parle plufieurs
fois de la maniere de rendre l’eau de la mer plus
tranfparente par le moyen de l'huile, & même de
l'ufage qu’en faifoient les plongeurs ; mais je n'ai
point trouvé dans aucun de fes ouvrages le paf-
fage auquel Plutarque fait allufon. Il eft très pro-
bable qu'il aura exifté dans quelqu'un des ouvrages
qui nous manquent de lui, & qui exiftoient du temps
de Plutarque.
Vertus de
laimant , ex-
pliquées par
les
ngs ;
Moder-
-
288 Déui ET 6 À
fixé l'attention des phyficiens, & avec moins
de fuccès, que les propriétés admirables de
l'aimant ; on a hafardé de tout temps diffé-
rentes penfées pour rendre raifon des effets
curieux de cette pierre métallique. Prefque
toutes s'accordent à fuppofer pour caufe
principale , des corpufcules particuliers qui
circulent fans cefle autour & à travers de
l'aimant, & un tourbillon de la même ma-
tiere que celle qui circule autour, & à travers
de la terre. Sur ces fuppolitions , les philo-
fophes modernes, & fur tout Defcartes & fes
difciples, ont dit que l’aimant a deux poles
comme la terre ; & que cette matiere mag-
nétique , qui circule autour & fort d’un des
poles de cette pierre pour rentrer par l’autre,
caufe cette impulfon qui unit le fer avec
Paimant, dont les petits corpufcules ont une
analogie avec les pores du fer qui leur
donne fur ce corps la prife que leur peu
d’affinité avec les pores des autres corps ne
leur permet pas d’avoir. C’eft jufqu'ici tout
ce qu'on a dit de plus raifonnable fur la vertu
magnétique , & c'eft ce qu’en avoient déja
dit les Anciens. 174.
DE L'AIMANT. 289
174. Cette force d'impulfion qui unit le
fer à l’aimant, & les autres corps à l’ambre,
a été connue par Platon, qui la diftingue
même par la force attractive qu’il nie êtie la
caufe véritable (1). Ce philofophe appelloit
l'aimant pierre Herculienne , parcequ’eile
s’affujertit le fer qui dompte toutes chofes.
175. Lucrece avoit aufli connu la caufe
de la propriété de cette pierre , & a fans
doute fourni à Defcartes l’idée de fon expli-
cation ; 1l admettoit en effet » un tourbillon
(1) Ta davuadoute mexlpes mtex vhs tb | 5
H'egracior Aiay , mélur Toiloy GAxY péiy oùx Es oùdert
murt. To de noey tive und | mtex@ Sun Te wbrà roïræ
tis GRANGE, TOTE OWMEANOUEVE | À) CUYXCMOMEE PIS TH
évray , &C.
Quæ de fuccino admirabilia commemorantur ,
nimirum de illà vi attrahendi, quam in ipfo inefle
dicunt, & de Herculeis lapidibus, reverà omnium
illorum nullus fit attraétus unquam. Quèm nullum
autem fit vacuum , & hac ipfa fefe mutud ultro , cirrd-
que impellant , & düm res fingulæ vel difcernuntur ,
vel excernuntur , in fuas quafque fedes variè com-
meent , &c. Plato in Timæo ,p. 80. C, Tom. 3. Hippo-
crate avoit méme connu la vertu de l’aimant avant
Platon. De his qua uterum non gerunt ; circà finem.
Tome I.
Connuei de
Platon.
Explication
de Lucrece &
de Flurarque,
la même que
celle des Mo-
dernes,
290 DE LA VERTU
» de corpufcules ou de matiere magnétique ,
» circulant fans ceffe autour de l’aimant , &
» qui chafloit l'air qui fe trouvoit entre le
» fer & cette pierre: l'air , chaffé de l’efpace
» qui fépare ces deux corps, forme un vuide,
» dit ce philofophe , lequel, n’oppofant plus
» aucune réfiftance à l’approche du fer, ce
dernier eft porté par une force impulfive,
» ou l'air, qui le pouffe par derriere , & eft
» obligé par-là de rendre avec impétuofité
» vers l’aimant , & de s'unir à lui (1) ». Plu-
tarque eft aufli du même fenriment ; il di-
foit » que l’ambre n’attiroit rien de ce qu’on
ë
» lui préfentoit , non plus que laimant :
» cette pierre, felon lui, jette hors de foi
» une matiere, laquelle chaffe l'air voifin,
(1) Principio fluere lapide hoc permulta neceffe eft
Semina ; fivè æftum qui difcutit aëra plagis,
Inter qui lapidem , ferrumque eft cüumque lo-
catus.
Continuo fit, uti qui poft eft cumque locatus
AëËr , à tergo quañ provehat, atque propellat :
Trudit , & impellit , quafi navim , velaque
ventus, (
Lucretius , lib, 6 , v. 1000.
MAGNÉTIQUE. 291
».&c forme par-là un vuide ; cet air chaffé
» poule l'air qui eft devant lui, lequel, en
» circulant, revient fur le lieu vuide, &,
» par une force impulfive , oblige le fer
» qu'il rencontre à fe porter vers l’aimant.
» ]l fe propofe enfuite une difficulté; favoir
» pourquoi le tourbillon qui circule autour
» de laimant ne poufle pas le bois où la
» pierre , mais feulement le fer; & il y ré-
» pond , comme Defcartes, que /es pores
» du fer ayant plus d’analogie aux particules
» du tourbillon qui circule autour de l’ai-
» mant , cette affinité leur donne fur le fer
» une prife qu'elles n’ont pas [ur les autres
» corps ,; dans les pores defquels elles ne ren-
» contrent pas la même analogie (a).
(1) Eleétrum nihil attrahit eorum quæ ei appofita
funt , neque Heracleus lapis. Sed lapis hic halitus
emittit graves, quibus continens aër impulfus , eum
qui ante fe eft trudit , ifque in orbem agitatus, ac
ad vacuum revertens locum , vi unà trahit ferrum.…
Cur vero neque lapidem aër , neque lignum , fed
ferrum modo ad Heracleum promovet lapidem ? quia
ferrum habet meatus quofdam , & tranfitus, atque
Tij
Quelques
auteurs pré-
tendent que
les Anciens
ont connu la
bouflole & la
déclinaifon
de l'aiguille
aimantéc.
292 DE LA VERTU
176. Comme je n’entreprends point de
faire ici une déclaration inutile en faveur
des Anciens , je pañle fous filence tout ce
que plufeuts auteurs ont rapporté de leur
connoiffance des autres propriétés de l’ai-
mant, & fur-tout de celle de la direction
vers le pole feptentrional (1), par le fecours
afperitates , quæ ob inæqualitatem aëri proportione
refpondent , quibus efficitur ut non elabatur aër ,
fed fedibus quibufdam receptus, cüm in id ad lapi-
dem revertens incidat , unà fecum rapiat , atque per-
ferat. Plutarch. Platonic. Quaff. tom. 2 , p. 1005.
C. D.
Alexander Aphrodifæus , Quæftion. Natural, lib.
2,C. 23, citat opinionem Empedoclis exiftimantie
defluxus quofdam corpufculorum tm ex magnete , tùm
ex ferro fieri, 6 effe in utroque poros fibi mutud com-
menfuratos. Subjungit etiam opinionem Democriti,
idem referentis ad effluxiones atomorum. Vid. & Gaf-
fendi opera, tom. 2, p. 108, col. 2. Galen. de
Natural. faculr. lib. 1, c, 14.
(1) Albert. Magn. opera, tom. 2, in lib. de Mie
neralibus, Traétat. 3,c. 6, p. 243, col. 2. Adhuüc
autem Ariftoteles in lib. de Lapidibus dicit : angulus
magnetis cujufdam eft , cujus virtus apprehendendi
MAGNÉTIQUE. 293
de laquelle on prétend qu'ils avoient entre-
pris de longues navigations : l’on veut que
les Egyptiens , les Phéniciens & les Cartha-
ginoïs n'aient pas ignoré cette direction de
laimant, & qu'ils aient employé la bouflole
pour fe guider dans leurs longs voyages de
mer ; mais qu’enfuite l’ufage s’en foit perdu ,
de même que la maniere de teindre en pour-
pre , connue des Anciens (1), leur art de
broder , leur maniere de faire la brique & le
ferrum eft ad zoron, hoc eft feptentrionalem : &
hoc utuntur naute : angulus verd alius magnetis illi
oppofitus trahit ad aphron, id eft polum meridio-
nalem: & fi approximes ferrum verfüs angulum
zoron , convertit fe ferrum ad zoron: & fi ad oppo-
fitum angulum approximes , convertit fe direéte ad
aphron. Vid. & Albertum Mag. de metallis, Lib. 1,
tra. 3, cap. 6, & Ariflotel, de Lapidibus.
(1) On peut déterminer exaétement la vraie cau-
leur de pourpre des Anciens , en faifant attention à
deux paflages de Pline, dans lefquels il dit que tous
les efforts des Tyriens & des Phéniciens tendoient à
ce que leur couleur de pourpre approchät de celle de
l’améthifte orientale. Plin, Hiff, Narur. lib. 9 ,c, 38
& 415 & lib. 37, cap. 9.
T iij
Matiere
éle&rique
connue de
Anciens,
294 DE LA VERTU
ciment qui réfiftoient à toutes les injures de
l'air & du temps. Le Jéfuite Pinéda , Efpa-
gnol, & Kircher même, ont prétendu que
Salomon avoit aïfli connu la bouflole, &
que fes fujets s’en étoient fervis pour aller à
la terre d’'Ophir. On allegue mème un paf-
fage de Plaute 1), dans lequel on veut qu'il
ait eu deffein de parler de la bouffole ; mais
je renonce à feconder les vues de ces auteurs
fur cette particularité, ne trouvant aucun
paflage précis chez les Anciens qui puifle
appuyer leurs prétentions (2).
177. On aura peine à croire que la véri-
table caufe de l'électricité ait été connue des
(1) Hüc fecundus ventus nunc eft ; cape modo Vor-
foriam ,
Stafime ; cape Vorforiam , recipe te ad Herum.
In Mercatore , A&, $ , Scen. 2, & in Trinummo.
Kircher de opere magnetico , part. 1.
Herwartus , admiranda Ethnice Theolog. Myferia.
Ann. 1623. Fabric. Bibl, antiq. p. 975.
(2) »On peut confulter Pancirole de Rebus deper=
» ditis fur les connoiffances des Anciens que nous
» ignorons encore à préfent ; entre autres au Livre
MAGNÉTIQUE. 295$
Anciens ; cependant on la trouve indiquée
dans l'ouvrage fur l’ame du Monde de Ti-
mée de Locres , qui eft un des premiers mo-
numents de la philofophie ancienne. Les
fentiments des phyficiens modernes font par-
tagés , 1l eft vrai, fur ce point ; mais c’eft
plutôt dans la maniere différente d'expliquer
les caufes & les directions des mouvements
différents de la matiere électrique , que fur
la caufe de l'électricité; ils ne difent point
en quoi confifte l’effence de cette matiere;
ils ne la définiflent que par fes propriétés, &
n'en expliquent que les effets, mais tous
cependant conviennent qu'il exifte une r1a-
tiere électrique très fluide & très fubrile,
raflemblée autour des corps électrifés, &
qui , par fes mouvements, eft la caufe des
effets de l'électricité que nous appercevons,
» premier, chap. 1, 35, 36, 39, fur la couleur
» pourpre , la du&tilité du verre, & les effets de la
» mufique ancienne». Voy. fur-tout Dion. Caffium,
Hiflor. in Tiber. lib. 57 , p. 617. E. Plinium. lib, 36,
6.216, &c. lfidorum , de Originib. lib, 16 , c. 15,
pour la ductilité du verre,
T iv
Ele&ricité
telative au
tonnerre ,
connue des
AncKns.
296 DE L'ÉLecrriciré.
lorfqu’apres avoir été chaffée par le frotte-
ment (ou toute autre caufe) des corps élec-
trifés , elle y rentre avec force , & entraine
avec elle les petits corps qui fe trouvent dans
fon tourbillon ; or , c’eft précifément ce
qu'en dit Timée, lorfque, voulant rendre
raifon de la propriété de l’ambre d’attirer les
corps , 1l dit que c’eft parcequ’il fort de
Pambre une matiere fubtile ( ou un efprit,
myedua) par le moyen de laquelle il attire à&
foi d’autres corps (1).
178. Quant à la matiere électrique, ana-
logue au tonnerre , il me paroït que les
Anciens en ont eu connoiffance. Numa, qui
étoit inftruit dans toute la fcience des Pytha-
goriciens, & qui étroit bon naturalifte &
phyficien, connoitloit aufli la maniere d’atti-
rer la foudre du ciel, fans doute par le
moyen d’une barre de fer électrique. Ce
(1) To d YAexTpor txxpAQEyTos Tod mrebprulas avenaueu=
ses To polo rue : Succinum vero , excreto fpiritu,
fufcipit fimile corpus. Timée de Locres , Edit. Sera
rani, p. 102. À. Plin. lib, 37, ç. 3, de fuccino,
DE DÉPECERICITÉ. 297
Prince profitoit de la fupériorité de fes lu-
mieres pour conduire plus facilement un
peuple ignorant , en rapportant fes con-
noiflances des forces de la nature à des rits
religieux qui fembloient lui donner une cor-
refpondance avec le ciel. Plufeurs auteurs
ont rapporté le fait relatif à Numa , comme
faifant partie d’une cérémonie religieufe,
parcequ’ils la fuppofoient telle (1) ; mais on
fait que la plupart des myfteres parmi les
Prètres Esyptiens, (d’où Numa dérivoir fes
connoïffances par le moyen de Pythagore )
n’étoient que le voile dont ils couvroient
les fciences, & qu'être initié dans leurs
myfteres étoit être inftruit dans ces fciences
qu'ils cultivoient. De là on donnoit à Jupi-
ter le furnom d’Flicius , ou Jupiter Elec-
zrique , le confidérant comme la foudre per-
fonnifiée , & qui fe laifloit attirer fur la
(1) Varron , lib. $ , de linguä latin. -- Arnob,
lib. 5. Tit-Liv. lib. 1 , c. 10. Ovid. lib. 3 , Faft,
vw. 328. Plutarch. in Numä, Edit. Henr, Steph. p. 1218.
Valerius Antias, cité par Arnobe,
208 Dé, L'ÉLECQTRrCITÉ
terre par la vertu de certaines formules &
pratiques myftérieufes. Car Jupiter Elicius
ne fignifie autre chofe que Jupiter fufcep-
tible d’actraétion , Elicius venant d’Elicere ,
fuivant Ovide & Varron (1) Plutarque s’eft
écarté de cette interprétation ; mais l’auto-
tité d'un auteur Grec n’eft d'aucun poids
contre celle de plufieurs auteurs Latins, en
fait d'étymologie de la langue latine. Pline
rapporte aufli qu’au moyen de certains facri-
fices & de certaines formules o7 pouvoir for=
cer la foudre à defendre ; 1 dit qu'une an-
cienne tradition portoit que cela étoit pra-
tiqué en Hétrurie chez les Volfiniens. Il cite
Lucius Pifon , écrivain d’un grand poids,
comme rapportant le fait de Numa , &
comme ajoutant que Tullus Hoffilius ; pour
s'être écarté du rit prefcrit dans l’imitation de
(x),Ovid. lib.”3.5'v. 428.
Eliciunt cœlo te, Jupiter; unde minores
Nunc quoque te celebrant , Eliciumque vocant.
Et Varron, lib. $, dit que Jupiter Elicius eft nommé
ainf , ab eliciendo five extrahendo.
DE L'ÉLECTRICITÉ. 299
cette pratique myflérieufe , avoit été lui-même
foudroyé (1) ; fait attefté non feulement par
Lucius Pifon , mais encore par Tite-Live
qui en donne ce détail curieux : Le Roi
Tuilus Hoftilius ayant trouvé dans les com-
mentaires du Numa , qu’il y étoit fait mention
de certains facrifices folemnels , mais occultes ;
faits par Numa à JurITER ÉLICIEN , on ra-
conte qu’il fe renferma fecretement pour pra-
tiquer cette opération religieufe ; mais que le
rit prefcrit n'ayant pas été obfervé, foit à
lentrée ; foit durant le cours de certe céré-
monie , lui-même © toute [a maifon furent
confumés par la foudre (1). Voici l'expérience
(1) Plin. lib. 1, c. 53, de fulminis evocandis,
Vel cogi fulmina , vel impetrari . . .. evocatum & à
Porfenna ; & ante eum à Numa fæpius hoc fa@ita-
tum ; quod imitatum parum ritè Tullum Hoftilium
ictum fulmine.
(2) ie Liv. Nbr; 20. EI2ev. Edit p.'4s.
Ipfum Regem ( Tullum ) tradunt volventem com-
mentarios Numhæ , cum ibi quædam occulta folem-
nia facrificia Jovi Elicio faéta inveniflet , operatum
his facris fe abdidiffe : fed non ritè initum aut cura-
tum hoc facrum efle,,...& fulmine ipfum cum
oo: D'EÉMÉLECFRICITÉ
de faire defcendre la foudre du ciel , connue
fans doute par Numa & autres, mais dont
Tullus fut la vidtime ; comme de nos jours
un Phyficien (pour avoir voulu la tenter
avec trop peu de précaution ) fut foudroyé en
éleérifant une nuée. Enfin on peut conjectu-
rer de tout ceci, que les Anciens connoif-
foient un procédé pour faire defcendre le
feu du ciel en terre; ce qui ne fauroit être
qu'un procédé électrique. On connoît plu-
fieurs médailles frappées fous Antonin ,
domo conflagrafle. Ce qui s'accorde avec le récit
qu'en fait Plutarque in Numä. Valer. Maxim.lib. 3,
C. 2.4Ex..r , 46. Dion.dib.3%"6cc.:& Plin.-répere
encore le même fait au lib. 28, cap. 4. L. Pifo pri-
mo annalium autor eft, Tullum Hoftilium Regem
ex Numæ libris eodem , quo illum, facrificio Jovem
Cœlo devocare conatum , quoniam parum ritè quæ-
dam fecifler, fulmine iétum,
(1) Voyez une favante Differtation de Burman fur
Jupiter xelaarss. Utrecht, 1700, 4°. Vid. Paufa-
nias in El'acis , lib. $ ,c. 14. ubi Rom. Amafæus in-
terpres: non alieno nomine Efic:um dicere poflemus.
Etymologic. magn. voce xaleiarnys ; & Euftath, in
Odyff. N. v. 110.
Dr pÉÉECERICITÉ., 308
Marc Aurele , Comode, & les Philippes,
par la ville de Cyrrhus , où Jupiter eft repré”
fenté avec la foudre , 8& nommé xara/Garne,
defcenfor ; qui répond au Jupiter Elicius des
Latins. Une perfonne digne de foi n'a afluré
qu'il s’'étoit trouvé derniérement une mé-
daille latine avec la légende Jupiter Elicius ,
repréfentant Jupiter en haut, la foudre à la
main, & au bas un homme dirigeant un cerf-
volant ; ce qui eft un procédé au moyen
duquel on peut élé@rifer une nuce, & en
üurer du feu.
179. Les fentiments font encore partagés
parmi les Modernes fur la raifon pourquoi
Si les Fleu-
ves retout-
nent à leurs
les fleuves , fe rendant conftamment à la fources:
mer , ne grofliffent pas tellement le volume
de fes eaux, qu'ils aient déja rempli fon lit :
une des principales folutions de cette diffi-
culte , eft que ces fleuves retournent à leur
fource par des paflages fouterrains, ou des
canaux que la Nature a pratiqués pour cet
effet; & qu'il y a entre la mer & les fources
des rivieres, des fleuves & des fontaines,
une circulation analogue à celle qui fe
Cette quef-
tion agitée
parmi les An-
ciens.
302 DE LA Source
fait du fang dans le corps humain (1j.
" 180. Cette explication de l'origine des
fleuves & la comparaifon même de leur cir-
culation eft prife de Séneque , qui rend
compte non feulement de la raifon pourquoi
ils ne rempliffent pas le lit de la mer, parce-
qu'ils retournent à leurs fources par des
routes fecrettes , pratiquées par la Nature ;
mais ajoute encore que la raifon pour la-
quelle l’eau des fontaines & des rivieres ne
(1) On peut faire mention ici de la connoiffance
qu'avoient les Anciens des moyens de faire des jets
d’eau , fi bien décrits par Manilius, lib. 4, v. 259.
Ille quoque inflexà fontem qui projicit urnà,
Cognatas cribuit juvenilis aquarius artes ;
Cernere fub terris undas , inducere terris,
Ipfaque converfis afpergere fluétibus aftra.
Le verfeau, ce figne qui, penché fur fon urne,
en fait fortir des torrents impétueux , influe fur les
avantages que nous procure la conduite des eaux :
c’eft à lui que nous devons l’art de connoître les
fources cachées dans le fein de laterre, & c’eft lui
qui nous apprend à les élever à fa furface , & à les
élancer vers les cieux, ou elles femblent fe mêler
avec les aftres,
De Sol AbEU VHS: 301
conferve point l’'amertume qu’elle devroit
tirer de fon origine, vient de ce qu’elle eft
filtrée dans le grand circuit qu’elle parcourt
fous terre , par des fentiers fi détournés &
fi variés, & à travers tant d’efpeces de ter-
roirs différents, qu'il n’eft pas poflible qu’elle
ne s’y dépouille de amertume de fon goût,
& ne fe tranfmette à fa fource dans le mème
degré de pureté qu’elle en étoit partie (1).
181. L’Eccléfiafte à aufli un pallage au-
tant élégant que philofophique fur le même
(1) Terra quidquid aquarum emifit , rurfus acci-
pit: & ob hoc, maria non crefcere : occulto enim
itinere fubit terras , & palam venit, fecreto rever-
titur , colaturque in tranfitu mare : quod per multi-
plices anfraétus terrarum verberatum, amaritudinem
ponit , & pravitatem faporis in tantà foli varietate
exuit , & in finceram aquam tranfit. Senec. Quefl.
Natural, lib. 3 ,c.$ & rs.
Partim quod fubter per terras diditur omnes.
Percolatur enim virus , retroque remanat
Materies humoris , & ad caput amnibus omnis
Convenit ; indè fuper terras fluit agmine dulct,
Qui via feta femel liquido pede detulit undas.
Lucr, lib, $, v. 169.
Sentiment
de l'Eccléfiaf-
te.
304 DE LA SOURCE DES FLEUVES.
fujet, & dit à peu près la même chofe en:
peu de mots. » Les fleuves entrent dans la
» mer, & la mer ne regorge pas; ils re-
» viennent à la fource d’où 1ls étoient
» partis pour recommencer de nouveau leur
» cours (1).
a © Dh pm Los (a)
Donne op Sn: ND HN D
.n5S D'ov 0ù où DS:
Omnia flumina intrant in mare , & mare non
redundat : ad locum unde exeunt flumina , rever
tuntur , ut iterum fluant, Ecclefiaff. c. 1 , v. 7.
Origen. Philofophum , c. 8. De Anaxagorä , p. 887.
D. Arifior. de meteor. lib, 1, c. 13, p. 545 » 546.
Fin du premier Volume.
ET UP ve MCE JPes