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PENSÉES DE MARC-AURÈLE
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d'Auguste COUAT
ÉDITÉE PAU
Paul FOURNIER
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Bordeaux. Imprimerie (J. Goi \<>i ilhoi . rue Guiraude, 9-1 1
PENSÉES
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M AROVI RÈLE
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d'Auguste COUAT
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Paul FOURNIER
M M MU ni CONFÉRENCES A LA FACULTÉ DES LETTRES Dl r.'i m \ i.m-i m' Dl BORDE AU!
BIBLIOTHÈQUES *
Bordeaux :
FERET & FILS, ÉDITEURS, i5, COURS DE L'INTENDANCE
Lyon : Henri GEORG, 36-4% passage de l'Hôtbl-Dieu
Marseille: Paul RUAT, 54, rue Paradis Montpellier: C. GOULET, j. Grard'Rue
Toulouse : Edouard PRIVAT, ù. rle des Arts
Paris :
A. FOISTEMOliNG, Libraire des Écoles françaises d' Athènes et dl Home
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IVERTISSEMEN1
I e livre ésl l'édition d'une traduction donl l'auteui i i
manuscrits. L'un Ml & peu près complet : il \ mampi
ou trois pensées entières, et, ci el là, une phrase dan rpsou j
la lin des paragraphes, .ni\ passages douteux donl le tradu< leoi i
désespéré d'abord, et à l;» place «I» ^*|u<'U il avait parlai- nui : inin
telligible. i Le nombre el l'importance dei corrections, de
entières bouleversées el complètement refaites attestent le loin qu
lionne M. Coual à cette première Forme de ion oeuvre
critiques, les traits, 1rs points d'interrogation dans les iimi-. -. ou,
dans le texte, de vastes ratures -.m- correction correspondant
variantes entre lesquelles il resterait à prendre parti, témoignent qu'il
n'en était pourtant point satisfait, et semblent réclamer une revision.
Le second manuscrit de M. Couat est constitué par des feuilles
volantes; il commence au second livre et ne contient guère plu- d'un<*
moitié de l'ouvrage. La netteté de ces pages écrites sans rature, l*al
dance des notes qui discutent le texte grec et défendent l'interprétation
adoptée (l'autre manuscrit ne contient pas de notes), et l'interruption
même de la traduction au début du livre I\ ne permettent pas de
douter que ce travail ne soit la revision du précédent. Ici, M. Couat.
pour un temps au moins, a fixé sa pensée et rejeté truite variante :
aucun signe dans la marge n'indique le besoin ou l'idée d'une
retouche. Malgré tout, il n'est pas présumable que M. Couat eût porté
sans les revoir ces pages à l'imprimeur, et qu'il eût, sans les modifier
encore en maint endroit, signé le bon à tirer. D'abord, il reste aussi
dans ce second manuscrit quelques vides à combler: ensuite, on y
retrouve intacts des passages qui avaient été condamnés dans la pre-
mière traduction : ou bien c'est une rédaction qui avait été sacrifiée à
une autre et qui reparaît, sans qu'on aperçoive les raisons de ce retour
de faveur; ou bien c'est une phrase entièrement neuve, qui peut-être
vaut mieux que les deux ou trois variantes du premier manuscrit, —
et les supprime, — qui peut-être n'est qu'une variante de plus*. Sans
doute, le progrès, dans l'ensemble, est manifeste : on trouve pourtant
dans le brouillon, écrite au crayon ou d'une encre plus fraîche, telle
1. Cf. infra IV. 3i et la note.
(J BIBLI01 m v»i i Di 9 i m\ ERS1 rÉ8 Dl MIDI ■
retouche qui est la bonne, <ii < } u i doit être postérieure à la seconde
rédaction de la traduction des Pensées,
\\i\>\ Le premier manuscrit es! le seul pour une moitié <!<' l'ouvrage;
pour l'autre moitié, il n'est pas annulé par le second. Il fallait encore
tenir compte d'un troisième document, daté de l'année même de la
mort de M. (louai (1898): un Lexique dea principaux termes philoso-
phiques des Stoïciens, dont il n'a pas eu le temps de B.e servir lui-
même, et qu'il s'était constitué à l'aide de certains travaux d'autruii
de nature diverse et de valeur inégale, comme La traduction du Manuel
(T Épie tète par Thurot et la Philosophie der Griechen de Zeller.
Cet état des manuscrits et ces notes annexes fixaient La tâche de
L'éditeur. Tant qu'il s'est agi de choisir l'une de trois variantes entre
lesquelles le traducteur avait hésité, le lexique, d'une part, et, de
L'autre, l'interprétation du même mot en d'autres parties de l'ouvrage
ont pu suflire à trancher la question. On a pu ainsi espérer un moment
mettre d'accord entre elles sur le sens du même terme les diverses
pages de la traduction : quand ce terme est to r^'s^r.y.cv, il est parfois
impossible et il est toujours pénible, dans un livre écrit en bon fran-
çais, net, bref et aisé, de substituer aux mots: a raison, volonté ou
conscience, » le « principe dirigeant », qui devait pourtant prévaloir.
11 était beaucoup plus hasardeux encore de prétendre combler les vides
des manuscrits et traduire les passages qui avaient paru inintelligibles
à M. Gouat. Mais, le plus souvent, la difficulté pouvait être résolue
par une correction du texte grec. Le premier, M. Gouat avait plus
d'une fois préféré à la vulgate les conjectures de divers éditeurs de
Marc-Aurèle. Il en avait fait lui-même plusieurs, qu'il indique dans
les notes de son second manuscrit, ou qu'il est facile de retrouver
sous la traduction des derniers livres k A son exemple, on a essayé,
quand l'ingéniosité des Gasaubon, des Gataker, des Goraï et des Stich
n'y avait pas suffi, d'amender, pour le traduire, le texte traditionnel
des Pensées.
Restent les passages de la traduction que M. Couat avait condamnés
de lui-même, sans avoir eu le loisir de les reprendre. Autant de cruces
pour l'éditeur. Il fallait d'abord comprendre la signification du trait
marginal ou de la rature : était-ce le texte grec qui avait paru contes-
table au traducteur? était-ce le premier sens qu'il lui avait trouvé? ou
bien était-il mécontent d'une locution, d'un tour de phrase? s'était-il
attardé à la recherche d'un effet? Les corrections qu'il a pu achever
montrent à quel point il était soucieux de l'allure de son style : ce n'est
pas seulement le sens de l'auteur grec, c'est le ton même qu'il voulait
rendre. Une traduction qui avait précédé la sienne, et dont la grandi-
loquence n'est pas le moindre défaut, lui fut sans doute bien utile en
1. [Exemple: la correction de rt ji.fi v en orrt[i5v à la pensée XII, 3i.
Il I >l M \ I.' \ I l.l I I
le mettant con tamnienl en gard< i >ntn uni I
m, i|. in. h e i i ii«»i> oratoire il pensai) d lilL m que Ui Hdéli
plai an< e du tradu< teui limitât, que lui impose i
même de i I ingu< el pu plu que I bonn< \>- h<-i ron il m- •■ ;
soucié de reproduire I attitude ex! i allun \w-tw «t la
marche . de son autrui uve< un. il do( il qu D
traiter dans son II le inflnitil en ub tre
en parasite el i isqm r de donnei dai radu< tion i helléni n
plus usuel »'i l«* i»iu simple poui un elTel de tyl< I
ainsi dire à sa demande, on i i liflé l«« ir.-idm -i i« «h •!< «••ii.i
i donl le sens d'ailleui n'étail pa douteu
donner à 1 - 1 rédaction nouvelle les qualités «le limplicité el d
(juil avail reconnues dans l< le Marc tarile el roulai)
dans ^<>ii français. Il esl arrivé d'ailleurs, que, désespérant de Caire
mieui que Lui, même lorsqu'il ra condaum<\ <»u roi
condamné, En revanche, on n'a pas hésité à Caire de lions qu'il
ne demandait pas, mais qui semblaient nécessaires, lorsqi cm
rencontrer un texte, ou un sous, ou un t< »n r plus satisfaisant que le
sien. On les a faites avec discrétion el Bans vanité en i onsidérant que
M. (louât n'avait pu ni terminer s<»u œuvre ni la revoir, et en se
donnant toujours les raisons qui l'eussent pu convaincre. On s sur-
tout cherché à mettre la traduction d'accord avec elle-même, et 1
la faire profiter dos travaux plus récents.
Le livre se présentera muni de notes nombreuses, et souvent fort
étendues, dont la minorité appartiennent à M. (louât. Soit qu'elles
défendent son interprétation, soit qu'elles justifient l'intervention de
l'éditeur 3, elles ajoutent à l'ouvrage lui-même un commentaire continu
et aussi long que lui. Klles discutent ou tentent de préciser le texte, le
sens des termes techniques, parfois la doctrine. Elles affirment, à chaque
page, Tintention dans laquelle M. Couat avait entrepris son œuvre : ce
travail ne sera sans doute pas la traduction critique qu'il avait rêvé de
faire; mais ce sera, comme il Ta voulu, une traduction critique.
i. Michaut, Les Pensées, traduction (Fontemoing, 1901), p. vin.
2. Comparez chez M. Michaut et chez Pierron ou Aug. Couat la traduction
pensées 1, 3, 16 et 17; VI, 6; VIII, :?<>, etc.
3. En dessous du texte qui donnera la correction ou le choix.de L'éditeur, <>n trou
vera dans les notes la leçon de M. Couat entre guillemets el précédée du mot : Couat;
Les variantes également entre guillemets et annoncées par l'abréviation : Var. — Les
notes de l'éditeur ont été encadrées dans des crochets droits ([ ]). qui permettras! de
les distinguer aisément de celles de M. Couat. Les mêmes signes n'ont été introduits
dans le corps du texte que pour indiquer les additions au manuscrit, et à défaut d'une
note correspondante. — Nous avons conservé de loin en loin dans le texte un point
d'interrogation entre parenthèses, par lequel M. Couat indiquait qu'il était peu satis-
fait de sa traduction ou de la leçon traduite, et qui, imprimé, signifiera, en outre, qu'on
n'a pas cherche ou qu'on n'a pas trouvé la correction désirée.
Sauf indication spéciale, le texte traduit est celui de la seconde édition de M. Stich
(Teubner, 1903).
S l'.ll'.l l< » | m Oi | |i|v LM\IIMl|'s hl Miui
Tout en traduisant Marc-Aurèle, M. Gouaf annotait la Cité de Dieu
et les Pensées de Pascal. Quçl livre devait sortir (le ces méditation
de ces recherches? Le travail est assez avancé pour <jifon en pui>-e
apercevoir le dessein; il esl trop Fragmentaire pour qu'on le publie.
Les unies <lr cette traduction auront permis du moins de sauver une
partie de l'étude que M. Couat avait consacrée à ces trois grandes
âmes, de même lignée, dont l'une fut pourtant l'âme d'un païen, l'autre
celle d'un saint et la dernière celle d'un hérétique. \ sa traduction cl
à sa critique du texte des Pensées, il avait entrepris de joindre, en effet .
une critique de la doctrine : bien que ce commentaire moral, limité au
second livre de Marc-Aurèle, tienne beaucoup moins de place dans les
papiers de M. Couat que ceux des Pensées de Pascal et de la Cité de
Dieu, on pourra, d'après lui, s'imaginer ce qu'est le reste, sinon ce
qu'eut été le tout.
Pour M. Couat, s'il ne put accomplir son dessein, apparemment il
ne perdit pas sa peine. Il vécut ses dernières années dans l'intimité
de l'empereur stoïcien, écoutant le discours en douze livres qu'il se
tient à lui-même, et apprenant de lui les derniers secrets de cet art de
\ivre qui est la sagesse. Comme les Pensées, sa traduction des Pensées
a le caractère d'un testament. Le disciple, en effet, fut jusqu'au bout
fidèle à la doctrine. Lorsque, à la veille de la mort, il négligeait son
mal et travaillait en pleine douleur, il est permis de croire qu'il enten-
dait ces encouragements d'une voix familière : « Tu n'es qu'une petite
âme portant un cadavre... Le mal est dans ton jugement... Épicure
malade ne s'entretenait pas des souffrances du corps et ne permettait
pas aux médecins de se flatter de leur importance... Beaucoup de
grains d'encens sont déposés sur le même autel; l'un y tombe plus
tôt. l'autre plus tard : il n'y a là aucune différence. »
P. F.
PENSÉES DE MARC- tURÈLE
U\ RE PREMIER
1
Mon grand père Vérua m'a laissé1 l'exemple de l'honi
et de la patience.
2
Celui de qui je liens la vie3 m'a laissé la réputation el le
souvenir de sa modestie e1 <!<' sa Fermeté.
3
Ma mère m'a appris la piété et la libéralité, L'éloignemenl
pour le mal, et même pour l'idée de faire du mal. Elle m'a
appris, en outre, à être frugal et à m'abstenir d'un train de rie
luxueux.
4
Mon bisaïeul3 m'a appris à ne pas fréquenter lea écoles publi-
ques, mais a suivre chez moi les leeons de bons maîtres e! à
comprendre qu'il ne faut épargner pour cela aucune dépense
5
Mon gouverneur m'a appris à ne me passionner ni pour le>
Verts ni pour les Bleus'1, ni pour les Petits ni pour les Loi
i. [Ce verbe et les synonymes qu'on en trouvera au début J. toutes les pens
de ce livre l,r ont été ajoutés par le traducteur. Ici. MaroAurèle récapitule en style de
comptable des dettes que nous n'avons pas coutume d'inscrire dans nos c tmptes :
w Reçu de mon aïeul, ceci; de mon père, cela; tant de ma mère, et tant de
bisaïeul.» If. Couat a dû désespérer, >'il conservait en français un tour aussi hardi,
de donner une traduction lisible des plus Longues pensées du livre. L'effort a été
tenté par M. Michaut.]
a. [Annius Vérus, que le jeune Marc peruit avant de L'avoir pu bien connaître.
:>. [Catilius Sévérus, consulaire.]
4. [Couleurs des cochers du cirque, et nom- de Leurs partisans.
IO BIBLI0THÈQU1 DES UNIVERSITÉS Dl midi
Boucliers, mais à supporter la Fatigue, à avoir peu de besoins,
à travailler de mes mains, à ne pas multiplier les affaires', à
Fermer l'oreille aux délateurs.
6
Diognèlc m'a appris à ne pas m'empresser pour des choses
Frivoles, à me défier de ee que les charlatans el les imposteurs
racontent sur les incantations magiques, les évocations de
démons et autres choses du même genre; à ne pas élever des
cailles et à ne pas niYbahir sur ce genre d'occupation; à sup-
porter la franchise, à -apprendre la philosophie. Il m'a fait
suivre les leçons d'abord de Bacchius, puis de Tandaside et
de Marcien; il m'a appris tout enfant à écrire des dialogues
et a aimer le grabat, la couverture et toutes les prescriptions
de la discipline hellénique.
Rusticus m'a fait comprendre que j'avais besoin de redresser
et de former mon caractère; il m'a appris à ne pas me laisser
entraîner à limitation de la propagande des sophistes, à ne
pas écrire sur les sciences, à ne pas composer des exhortations
dialoguées, à ne pas essayer de frapper l'imagination en affec-
tant une activité intempérante2; il m'a détourné de la rhéto-
rique, de la composition poétique, du bel esprit; il m'a enseigné
à ne pas me promener dans ma maison vêtu d'une longue
robe, et à dédaigner toute ostentation de ce genre; à écrire des
lettres simples, comme celle qu'il écrivit lui-même de Sinuessa
à ma mère ; à me montrer facile et prêt à une réconciliation
avec ceux qui, après m'avoir offensé, manifestaient l'intention
de revenir à moi ; à lire de très près et à ne pas me contenter
d'un examen sommaire: à ne pas acquiescer trop vite à l'opi-
nion de ceux qui parlent beaucoup; c'est à lui, enfin, que je
dois d'avoir eu dans les mains les Commentaires d'Épictète,
qu'il avait dans sa bibliothèque, et qu'il m'a prêtés.
i. [Var. : g à ne pas m'occuper des affaires d'autrui,» — ee qui est la traduction de
Picrron. Le mot grec rsl de sens douteux.)
2. [On traduit ici la conjecture de Xylander: EvepYYjTixov.]
PI II 11
8
Vpolloniu m .1 en oigne i avoii de opinion libi e . n<
ci réfléchie •• ne r< gai der jam peu que lutre
chose que la i al on h demain i i toi^joui le m( me au mi
des douleurs lea plui vive devanl la perte d un enfanl dan
andea maladiei i al vu en lui l'exemple s Ivanl d un
homme .« la foii trèa renne el trèa doui ne Impatient
jamais lorsqu'il enseignait, el considérant .» coup h\ comme
le moindre < l « * ses avants ipérience pi mnelle
et l'habileté avec laquelle il lavait transmetti
m'a appris qu'il fallait accueillir les bienfaits qn >ien(
nous faire no8 amis, Bans engager notre liberté et sans i
montrer insensibles par nos refus.
9
De Sextusj'ai appris la bienveillance; il [n'a donné l'exemple
d'une maison administrée paternellement et la notion d'une
vie conforme à la nature; il m'a montré la gravité sans fard,
l'attention vigilante aux intérêts <!<• ses amis, la patience à
supporter les ignorants el ceux qui opinent sans examen ,
Son humeur était égale avec tous, au point qu'aucune Batterie
n'avait la douceur de sa conversation, el que ceux qui en
jouissaient n'avaient jamais plus de respect pour lui qu'à ce
moment-là. Avec une intelligence compréhensive el métho-
dique, il découvrait et classait les principes nécessaires à la
conduite de la vie; il ne laissait jamais paraître ni colère ni
aucune autre passion, étant à la fois très Impassible et très
tendre; il aimait qu'on parlât bien de lui. mais sans faire de
bruit-; il avait de l'érudition sans en faire étalage.
10
Alexandre le grammairien m'a donné l'exemple de la modé-
ration dans la correction des fautes; il s'abstenait de reprendre
i. [M. Couat traduit ici la conjecture de Gataker.]
?.. [Var. : « il aimait à donner la louange, 1 1 1 a i > discrète, a — J'aurais sdmia cette
traduction si la phrase s'était trouvée dans la première partie de la pensée. Ici. il ne
s'agit plus de l'affabilité de Sextus, niais de son intelligence, de *a modération el de
sa discrétion. Sans doute, les dictionnaires n'attribuent à eî^ïjpiov qu'un sens actif.
Mais cet adjectif, au neutre, est assez rar«> : et il peut avoir eu aussi, comme beaucoup
d'adjectifs composés, un sens passif.]
\'2 BIBLIOTHBQUI D1 iS UNIVERSITES M MIDI
avec dureté ceux qui laissaient échapper un barbarisme,
un solécisme, un sou \icieu\; il se bornait à leur montrer
habilement ce qu'il Fallait dire, en ayant l'air de répondre,
[de confirmer, de discuter non sur le mot lui-même, mais
sur l'objet eu question, ou par toute autre adroite suggestion
H
Ponton m'a appris tout ce que la tyrannie a de méchanceté.
de duplicité et d'h\ pocrisie : et combien peu de cœur, en
somme, ont ces gens que nous appelons patriciens.
12
Alexandre le Platonicien m'a appris à ne pas dire souvent
cl sans nécessité, et à ne pas écrire dans une lettre : « Je n'ai
pas le temps, » afin d'écarter sans cesse par ce moyen, et en
alléguant des affaires pressantes, tous les devoirs que m'impo-
sent mes relations vis-à-vis de ceux qui vivent autour de moi.
13
Je tiens de Catulus que, loin de dédaigner les reproches
dr ses amis, même mal fondés, il faut en faire son profit et
reprendre l'ancienne intimité; qu'il faut dire volontiers du
bien de ses maîtres, comme le faisaient, dit-on, Domitius et
Athénodote, et aimer ses enfants d'un amour sincère.
14
De mon livre Sévérus j'ai appris l'amour de mes proches,
l'amour de la vérité, l'amour de la justice; par lui j'ai connu
Thraséas, Helvidius, Caton, Dion, Brutus; j'ai eu l'idée d'un
gouvernement fondé sur la loi et sur l'égalité des droits de
tous les citoyens, d'une royauté respectueuse avant tout de
la liberté des sujets; par lui encore j'ai appris comment on
honore sans défaillance et toujours avec la même ardeur la
philosophie, comment on est toujours généreux, libéral, plein
d'espérance, confiant dans l'affection de ses amis, franc à
l'égard de tous ceux à qui l'on a à faire des reproches, sans
que nos amis aient à se demander : « Que veut-il? que ne
veut-il pas!» » mais de manière a le leur faire voir clairement.
i . i M v i ; i i I l li
15
Mjmiihi- m .1 iiioiili . < Miiini' ni - .11 . I im.mIi | d( 'i III
s.uh que rien puisse noui faii < i hangei il m a I
fermeté dam loutei les circonstance pénibh el particule
remenl dans les maladies; la modération la dou< I la
dignité «lu caractère] la bonne bumeui dans I
menl «lu travail « l « * chaque jour. Toul i« monde était
que ^;i parole exprimai! loujou I qui 1 1 qu il
faisait ci, ut bien fait; il De s'étonnait de rien3 dc m troublai!
pas], n'avaitjamais ni précipitation, ni indolence, ni eml
il ne se hissait pas abattre, ne montrai! pas un risage t * » i j f
à tour jovial1, ou irrité el défianl : il était bienfaisant, pitoyable
el sincère; on \<>>ait en lui une droiture naturelle el non
apprise9. Jamais personne n'aurait craint d'être méprisé par
lui ni n'aurait osé se supposer supérieur k lui; il avait, enfin,
de l'enjouement et <le la grâce.
16
Voici les vertus dont mon père 3 m'a légué l'exemple : la
mansuétude, rattachement inébranlable aux opinions réflé
chics, le dédain dc la vaine gloire et des vains honneurs,
l'assiduité au travail; il était prêt à écouter tous «eux u,ui
avaient à lui dire quelque chose d'utile à la communauté];
?ien ne pouvait le détourner de récompenser chacun >elon
mérite; il savait à quel moment il fallait tendre sa volonté
ou lui donner du relâche; il avait renoncé à l'amour des
jeunes garçons; bien qu'aimant la société, il permettait à ses
amis de manquer un de ses repas î. et ne les obligeait pas à
i. [(louai: <( il n'était pas tour à leur abattu ou joyeux. ■ — Le m« • t que donnent
en ce passage les manuscrits doit être un barbarisme. Sans douta faut-il lire ici, avec
Gataker, Tipo^ffca^po;. C'est la même êpithète qui, dan* le> Thalysies de Théocrik
(vers 19), qualifie le sourire de Lycidas.j
3. [Cf. infra III, 5 (fin), et VU, ia.]
S. [Son père adoptif, Antonin le Pieux, A son père, \nnius \ érus, Marc-Aurèle a
consacré la pensée 2.]
'1. [Gouat : « malgré son affabilité, il n'admettait pas toujour> ses ami> à dîner avec
lui, ni ne les obligeait... » — Le mot xoiwvcnQpoffuvY), selon Pierron. ne se rencontra
que dans ce passage. D'après son étymologie, il semble signifier : esprit de solidarité;
par suite : esprit d'égalité ou d'équité: ou bien, selon la plupart des commentateur- :
.civilitas, affabilité, dil M. (louât: — un sens t<»ut différent, el qui ne semble pas
l\ BIBLIOTHÈQUE DES UNIVERSITÉS i-i MIDI
l'accompagner dans ses voyages. Ceux que des obligations
quelconques avaient éloignés de lui l<i retrouvaient toujours
le même; dans les délibération?, il cherchait attentivement
el avec persévérance le parti à prendre, au lieu d'éviter toute
peine1 en se contentant de ses premières impressions. Il ri;iit
fidèle à ses amis sans manifester ni lassitude ni engouement;
en toute occasion, il était maître de lui et d'humeur sereine.
Il prévoyait el réglait d'avance les plus petites choses, sans
faire d'embarras; il arrêtait les acclamations et les Batteries
dont il était l'objet. Kconome des biens de l'empire, il réglait
avec vigilance les dépenses des chorégies et ne craignait pas
d'en être blâmé. Il n'avait aucune superstition à l'égard des
Dieux, et, à l'égard des hommes, il ne cherchait point à plaire
à la foule et à se rendre populaire; en tout, il était sobre,
ferme, sans affecter le manque de goût et sans se montrer
avide de nouveautés. 11 usait sans vanité et sans façon des
biens qui contribuent a la douceur de la vie, et que la fortune3
prodigue en abondance. Il s'en servait [naturellement] quand
ils se présentaient et n'en éprouvait pas le besoin quand il
ne les avait pas. Nul n'aurait pu dire de lui qu'il fût un
sophiste, un goujat, ou un pédant. On voyait en lui un homme
s'accorder avec le contexte, est celui qu'ont accepte Pierron et Barthélémy- Sain t-
Hilaire, après Xylander : « le zèle du bien public.» C'est le contexte, en effet, qui seul
peut fixer le sens de xoivovovjfioffuvT). Un détail qu'on juge à l'ordinaire insignifiant,
la ponctuation traditionnelle, — celle que paraît bien exiger le rythme du discours,
l'équilibre des phrases, — prend ici une importance décisive : au cours de cette phrase,
limitée par deux points en haut, il n'y a pas de ponctuation secondaire, pas de virgule
entre les deux y. ai. Cela implique que le premier signilie : « et à la fois; » ou, en d'au-
tres termes, que le second est l'équivalent de te xoi; ou, en d'autres termes encore,
qu'il y a une certaine opposition entre les deux mérites que cette phrase attribue à
Antonin, et que cette opposition même est méritoire. La traduction de ce passage
devait donc commencer par le mot « malgré», ou toute autre formule concessive.
Par malheur, le sens du mot qui s'oppose à xotvovoYyiO(Tvvt) est ambigu. Chez le
même auteur, sçi£<r6ac, construit avec le datif d'un nom de personne et un infinitif, a
les deux sens d'ordonner (Electre, mi) et d'autoriser (Philoctète, 619). Ces deux sens,
en eux-mêmes assez différents, peuvent devenir tout à fait contraires (défendre de
faire... et autoriser à ne pas faire...) quand la proposition qui suit èçt'eofat est néga-
tive. C'est le cas ici. Dans les deux propositions négatives qui achèvent la phrase,
M. Couat me semble avoir successivement donné les deux sens à lyitatou. J'ai cru
qu'il fallait choisir, et que la présence de l'adverbe èicavacyxeç ne permettait pas
d'hésiter. Tandis que M. Couat, adoptant d'abord pour èçieoOat le sens d'« ordonner»,
traduisait xotvovov)(i00uvi] par « affabilité », j'ai traduit le verbe par « autoriser »,
et conséquemment le substantif par « goût de la société ».]
1. [Aug. Couat traduit ici la conjecture de Stich : dcXX' outot icpooticéarrr).]
2. [Cf. infra II, 3, dernière note.]
i i • i i in M il i ,
iiiùi . complet upëi leui • la flattai le cap
affaii e 6t celle de autn i 'iii •■ il honoi ail l<
philosophai quant aui autre il le traita!
nuis .m i m m lai lei enti alnei pai eux il
facile el aimable sans ex< h il avait >in d< .«
personnej sans être trop attaché •• la \ le ni
foire beau, el sans se néglij er pour autant I U &ce •■
lance, il n'eul recours que trè i aremenl < la \ni
s'abstint de remèdes e1 d'onguents, tvanl tout, il l'eflb
Bans envie devant ceux qui possédaient une (acuité éminente,
telle que la puissance de la parole, la connaissance de i
dea mœurs ou toute autre science; il s'intéressait 1 eus et
veillait à ce que chacun eûl la renommée que lui méritait
sa supériorité spéciale, agissant totgours conformément • I -
tradition des ancêtres, il ne s'appliquait j» n avoir Tau
Il n'aimait pas à changer de place et à s'agiter; il séjournait
volontiers dans les mêmes lieui et s'attachait aux mêmes
objets. \piv< des crises de maux de tête, il revenait dispos,
avec la même ardeur, à ses occupations accoutumées. Il avait
fort peu de secrets, et ce n'était jamais qu'à propos des affaires
publiques. 11 était prudent et mesure dans l'organisation dé-
telés, la construction des édifices et les distributions faites an
peuple et autres choses semblables. Il considérait le devoir à
remplir, et non la gloire à retirer de ses actes1. Il n'aimait pas
à se baigner à une heure indue; il n'était ni grand bâtisseur,
ni curieux de mets rares, ni attentif au tissu et à la couleur
de ses vêtements, ou à la beauté de ses esclaves. iLe plus
souvent, même à Lanuvium. il portait le vêtement de Lorium,
qu'il avait fait venir de sa maison d'en bas. \ Tusculum, il
empruntait son manteau2;] tout son train de vie était de la
i. [On a admis ici la conjecture de Stich. Remarquer que ce- deux plu
reprennent L'éloge d'une qualité déjà louée une page plus liant : 1 des biens
de L'empire, il réglait avec vigilance les dépens - - chorégîes et ne craignait pas
d'en être blâmé. »]
2. Ces deux phrases manquent daus le cahier d'Auguste eouat. Le texte est très
incertain, les manuscrits inintelligibles. Selon Saum<< là le passage le plus
corrompu de toutes les Pensées. Pour la seconde phrase, j'ai adopté la lecture de
Coraï, qui diffère assez peu du texte des manuscrits (zz/.;r,Tt ou parvoVn, au lieu de
•usÀojvy; et zasaiToOasvo; pour TrapaiTo-juivo) â>;). Pour la première j'ai pensé faire
e minimum de corrections en lisant : Tr, à~b Atop-o-j ttoat. sraxOeurq ixb t?; y.i-o
il» B1BLIOTUÈQUI L>ES UNIVERSITÉS Dl MIDI
même simplicité. Il n > avait dans bca manières rien de dur.
d'inconvenant, ni de violent, rien dont on pûl dire: - Il en
sue1;» au contraire, il examinait chaque chose séparément,
comme & loisir, sans précipitation, avec méthode, avec force,
et de la façon la mieux appropriée. On aurait pu lui appliquer
ce qu'on rapporte de Sociale, qu'il pouvait aussi bien s'abs
tenir que jouir (le (oui ce dont la plupart des hommes onl
tant de peine à se priver, et dont ils jouissent avec si peu de
retenue. Woir la force de se contenir et de se priver dans les
deux cas esi la marque d'une âme bien équilibrée et invincible,
telle que parut la sienne pendant la maladie de Maximus3.
17
Voici, enfin, ce que je dois aux Dieux: j'ai eu de bons
aïeuls, de bons parents, une bonne sœur, de bons maîtres;
mes familiers, mes parents, mes amis ont presque tous élé
bons. Je ne me suis jamais laissé aller à manquer de tact
avec aucun d'entre cu\, bien que je fusse d'un tempérament
à le faire, à l'occasion; la bonté des Dieux n'a pas permis
le concours de circonstances où j'aurais commis cette faute.
Grâce à eux, je n'ai pas été trop longtemps élevé par la
concubine de mon grand-père, j'ai conservé la fleur de ma
jeunesse; loin de devenir homme avant le temps, j'ai même
différé au delà. J'ai eu pour maître et pour père un homme
qui devait me corriger de tout orgueil et me mettre dans
l'esprit qu'il est possible de vivre dans une cour sans a\oir
besoin de gardes du corps, de vêtements éclatants, de torches,
de statues 3 et de tout cet appareil pompeux; qu'on peut, au
contraire, s'y réduire presque au train d'un simple particu
lier, sans être pour cola plus humble et plus lâche en face
des devoirs qu'impose le gouvernement de l'État. J'ai eu un
frère dont l'exemple pouvait m'exciler à me surveiller moi
sicauXsco;, y. a». &v iv Aavouêta), tv. noXkâ. — Loriuin, une simple maison de campagne,
était aux portes de Rome (à douze milles), dans la plaine : c'est là que mourut Antoiiin.
La ville de Lanuvium, sa patrie, était voisine. Tusculum se trouvait dans la montafrnp. |
t. |Couat : «il y a là trop de sueur, » — mots ensuite effacés au crayon. J
2. [Voir infra (VI, 3o) un second portrait d'Antonin.]
o. [Avec Iforus, M. Couat ;• considéré rotôvoé tivwn comme une glose, <>l supprimé
ces mots dans sa traduction.]
l'KS i i m m \i. i i
même, el < i > i ■ me chai mail pai • «i i i lendi
m enfant . n'onl été ni dépoui \ u d inlelli
faits* .!<• m ,u pai Fail de trop rapide pi o lan la 1 hét
ri que, la composition poétique el d auti i ic tquel
je me serais peul être attaché I j'aral i ntl que
i bien. Je me luis hâté d'assurei • me p I
honneurs qu'ils paraissaient désirer, el je ne lei al pa la
languir dans l'espérance que, puisqu il- étaient jeun<
je le Ferais plus lard. ( \ I au aux Dieux qu< |
connu Apollonius, Rusticus, Maximus. Je nu Fait, i
les connaissant, une idée claire et n que c'esl que
vivre conformément à le nature, et, autant que cela dépendait
des Dieux, de leurs dons, des conceptions el des inspira
lions-* qui me venaient d'eux, rien ne m'a dès lors empêché
de vivre conformément à la nature. si j '> ai manqué en
quelque chose, c'esl par ma propre faute, c'esl pour n'avoir
pas observé les recommandations, el pour ainsi dire l'ensei
gnemenl des Dieux. C'est grâce à eux que mon corps a
résisté si longtemps à la vie que je mène, que je n'ai touché
ni à Bénédicta ni à Theodotus, et que, Baisi tard par les
passions de l'amour, je m'en suis guéri. J'ai été parfois irrité
contre Rusticus, mais je ne suis jamais allé jusqu'à des actes
dont je me serais repenti. Ma mère, qui devait mourir jeune,
i. [Plus haut (S 5), le mol rpoçeiç était traduit par : r. »]
•2. [Ces mots traduisent Littéralement L'expression grecque:
xài rcoXXaxiç, Laquelle ne paraît pas apportée tir L'école. Dans Lait
« expérience » (epLiretpîot) Le retour fréquent de la même
KoXXotxiç). De même, la périphrase pavradÔ^vai s pourrait bien être la traduc
Lion eu Langue courante île la v.y.-y.Wrll:; des Stoïciens, >i du moins on veut s'en tenir
à la définition qu'en donne Gicéron | Lcad. I. xi, ii): Zeno...
adjungebat fidem... Lis solum, quae propriam quandam haberent declarationem
(IvapY&ç) earum rerum quae viderentur; id autem visum... cun tum jam et
adprobatum esset (on appelait ropcctTâOeaiç cet assentiment), comprehensionem apj
labat. » — Le mot -/aTâ/.r/V.: ne se rencontre qu'une fois dans Les Pensées (VI, 3o),
en un passage où il est difficile de distinguer l'acception philosophique du -
vulgaire. On remarquera que Marc-Aurèle a évité l'usage de certains term< - trop
spécialement stoïciens (par exemple : çavraffta -/.xTx/.r.-T'.y.r. /. ^t*.
oL-KOTzpor^'tiivy., y., t. X.), bien lIue l'occasion ne lui ait pas manqué d
— Sur certaines questions, on le verra se séparer de l'école, ou hésiter à repon
et avouer franchement ses doutes (infra, II, io; l\ . u, efc. I. On N<ùt ici que sa façon
de parler — ou, plus proprement, >a terminologie — n'est pas moins indépendante
que sa pensée.]
3. [M.Couat traduit ainsi l'ingénieuse conjecture de Casaubon : Èmicvoiatç. — A vrai
dire, il était difficile de saisir une différence de sens réelle et nette entre ouVatJ -
et È7UVOtOUÇ.]
A. COUAT-P. FOURRIER. ■ 3
18 mnu<>Tiii:<H | DBfl imwi.mii- Dl mim
a habité avec moi pendant ses dernières années. Toutes les
lois que j'ai voulu venir on aide à un pauvre ou à un homme
ayant quelque besoin, jamais je n'ai entendu objecter que
je n'avais pas d'argent pour le secourir. Je n'ai jamais eu
moi même besoin de recourir à un autre pour l<k même objet.
Je dois aussi aux Dieux d'avoir eu une femme si douce, si
tendre, si simple; d'avoir trouvé facilement pour mes enfanté
les meilleurs des maîtres. Des songes m'ont, comme un
Oracle ' , révélé des remèdes contre mes indispositions et parti-
culièrement contre les crachements de sang et les vertif
et cela à Gaète. Quand j'ai été séduit par la philosophie, je rie
suis pas tombé dans les mains d'un sophiste, je ne me suis
pas appesanti à déchiffrer les écrivains, à décomposer des
syllogismes, à étudier les phénomènes célestes 2. Je n'aurais
jamais eu tant de bonheurs sans l'assistance des Dieux et de
la Bonne-Fortune3.
Écrit chez les Quades, sur les bords du Granua,
LIVRE II
Se dire à soi-même, dès le matin 4 : je vais me rencontrer
avec un fâcheux, un ingrat, un insolent, un fourbe, un
envieux, un égoïste. Ils ont tous ces vices par suite de leur
i. [M. Couat a adopté ici le texte de l'édition de Lyon (1626) : w<77tsp xpippov. Le
texte des manuscrits : o)<77Up */prl<r-'j, oblige (en modifiant d'ailleurs l'orthographe du
mot : Xpr,<7r,) à supposer l'existence d'une ville ou d'un bourg inconnu : Chrèse. Si
on l'adopte, on devra supprimer dans cette traduction les mots : « comme un oracle »,
et, après : « à Gaète », ajouter : « comme à Chrèse. » — Une autre conjecture est celle de
Saumaise, adoptée par Stich : u>; 7rspr/pî<raL Traduction: «Des songes m'ont révélé
le remède... et cela à Gaète: j'ai eu dès lors recours aux onguents.» — Outre ces
diverses corrections au texte de cette phrase, il en est une que les principaux éditeurs
et traducteurs de Marc-Aurèle ont jugée indispensable, celle de xat tojto-j en xai
TOÛTO.]
•j. [Cette étude était pourtant en honneur dans la secte stoïcienne (cf. Zeller, die
Phil. der Gr.} III 3, p. 19^. Marc-Aurèle, qui croyait aux songes, et sans doute aussi
aux oracles (cf. la note précédente — et la dernière phrase de la pensée IX, 27), se
désintéressait ou se défiait- il de la «divination»?]
3. Cf. infra la dernière note à la pensée II, 3.
4. L'examen de conscience dans Marc-Aurèle. C'est le matin, en se levant, qu'il
examine les actes qu'il aura à accomplir dans la journée, et qu'il prend des résolutions
morales.
Il M l.l I I
i ii anc€ «lu Ihch ri du m. il Mai moi qui il axai
nature du bien, qui • > d'êto beau e( i elle du mal, qui
d'être laid, el celle <!<• l'homme \ Icieun lui m< m<
qu'il ii Ih même 01 Igine que moi, <pi U est i a non du m<
sang ni de la même semence, mai de le ml me int II
et qu'il est comme moi en p< l< >n d une parcelle d( li
divinité, je ne pjiia recevoii aucun lorl de oei homi urcc
qu'aucun d'eux ne pourra me déshon* |e ne puii non
plus ni m'irrlter contre nn Frère ni m'éloigner de lui1. N^
sommes nés pour l'action en commun, comme les pieds, les
mains, les paupières, les rangées des dents d'en baul ei Heu
bas, \-ir l(VS uns contre les autres esl contraire à la nature,
cl c'est agir les uns contre les autres que de s'indij I de
se détourner9.
Qu'est-ce donc que ceci, qui constitue mon être? De li
chair, un souille, le principe dirigeant. Laisse 12 tous lc>
livres; cesse de te disperser. Cela ne t'appartient plus ;. Mais,
comme si tu étais sur le point de mourir, méprise la chair;
ce n'est que du sang, des os, un tissu fragile de nerfs, de
veines et d'artères. Et vois ce qu'est ce souille : du vent, qui
n'est pas toujours le même, mais qu'à tout moment tu rejettes
pour l'aspirer de nouveau. Reste donc le principe dirigeant '*.
i. J'ai traduil la correction très plausible de Stich : otiré^eoSoci butoO.
2. Trois choses dans cette pensée : i° l'examen de conscience et l'acte de bon
propos; a0 l'identité de la vertu et de la science; 3° l'unité de l'être et d»; l'intelligence.
Plus l'idée de la solidarité.
3. [Couat : u Ne te disperse plus... » Var. : « Ne te tourmente plus... n Manque une
phrase. En note: «Le sens ordinaire de cr-àpia'., dans Mare-Aurèle, esl plut'
» semble : se tourmenter — que : se disperser. On pourra lire d'ailleurs à la tin de la
» pensée suivante : Renonce à la soif des livres pour ne pas mourir en murmurant. —
» Oj osooTat n'est pas clair; il doit s'expliquer par le iXXà qui suit : - mme
» si cela t'appartenait, mais comme si tu allais mourir. >»] — [Mais n
synonyme de {xr.xÉTi cttiio, qu'on trouve à la iV pensée du livre 111 . Auj. Couat y a
traduit jirjxé-i nXotvô par : « ne te disperse plus.» Les mots qui luirent (o
jjlsXXî'.; : tu n'as plus le temps) expliqueraient : où 8£ôotou« Sans doute, les mots :
<( Cela ne t'appartient plus» traduisent plutôt ouxéxt BIÔotcm qne nu; mais,
après (xr(x£Tt, était-il bien utile de répéter ï-\ } Le sens que je donne au parfait
ôéSoxat est d'ailleurs autorisé par la tradition des meilleurs écrivains (cf. Platon,
Banquet, i83 B).]
l\. [Var. : «La volonté.» — L'interprétation du mot r.ysaov.xbv parait avoir ici un
moment embarrassé Aug. Couat, qui, dans son manuscrit, a laissé subsister le mot :
« volonté » à côté de la correction en : « principe dirigeant. » Cette dernière traduction
20 BIBUOTHEQU1 DBfi UNIVERSITÉS 0\ MIDI
I 1 1 bien, réfléchis: tu es vieux; ne le laisse pas s'asservir,
ne le laisse pas se mouvoir capricieusement el céder à des
impulsion^ égoïstes, QC l<' hiissc pus muniiinvr contre ton SOrl
présent et redouter1 ton sort à venir
Ce «pu* Ton! les Dieux est plein de leur providence. Ce que
fail la Fortune3 ne se produit pas hors de la nature, hors de
la trame et de l'enchaînement i\r* choses que règle la Provi
dence; tout découle de là. Ajoutons \ la nécessité et l'utilité
de l'ensemble <lr l'univers dont tu es une partie. Or, ce que
comporte la nature du tout, et ce qui sert à la conserver, est
hou pour chaque partie de cette nature. Les transformations
des éléments aussi bien que celles des composés contribuent
à conserver l'univers. Que ces dogmes 4 te suffisent pour
toujours 5. Repousse la soif des livres, pour mourir sans
murmurer, mais avec tranquillité, en remerciant les Dieux
du fond du cœur6.
est celle que donne du mot r^ixovtxov le lexique qu'il s'était composé avant de com-
mencer la revision de son livre. C'est la seule qu'il adopte pour certains passages
(par exemple, V, 26; VI, 8; Vil, 33; VIII, l\S). Ailleurs, surtout aux livres IX et XI.
il avait préféré les mots : «âme» et ((conscience». Voir à ce sujet deux notes, l'une
à la 2 2° pensée du livre IX, l'autre à la 3° du livre XII. — Au livre VI (pensée 8), on
trouvera une définition du « principe dirigeant » : définition partielle, ou trop
concise, qui le résume en la volonté. Voir la note à ce texte.]
1. aTToo'jeaôai et les autres composés de O'jsaOai n'ont pas de sens: uTioosÎTai ou
'J7;oos''<Ta<T0a,., conjectures de Coraï et de Gataker, valent mieux. C'est évidemment
l'idée de crainte qui doit être exprimée dans ce mot.
2. Composition de l'homme: <rapxioc, 7cv£0[ia ou nveupLOtTiov, tjy£[jlovix6v. — Idée
stoïcienne et chrétienne du mépris de la chair et de la brièveté de la vie. Idée de
l'indépendance de la volonté et de la résignation au destin, — je traduis àxoivwvrjxo;
par égoïste. Ce mot signifie exactement : « ce qui n'est pas conforme au bien de la
communauté des hommes. » C'est donc encore l'idée de solidarité. Indépendance et
solidarité, opposition constante de l'individu et de ce qui l'entoure, et en même
temps nécessité pour l'individu de n'agir que pour le bien de la communauté, cette
antithèse se retrouve sans cesse dans Marc-Aurèle. Comment concilie- 1 -il les deux
termes?
3. [Couat : « le hasard. » — Voir la dernière note à cette pensée.]
4. [Couat : « principes.»]
5. el ôoYfiaTa £<jti donné par A et D ne se comprend pas. J'adopte à et ôoyfxara
£(itu>, qui est la vulgate.
6. Singulière métaphysique, où l'on parait admettre simultanément la Providence,
Le hasard, la nécessité unis pour conserver L'univers, c'est-à-dire la nature, au moyen
de lois conçues en vue de son utilité. [Mais, en réalité, Marc-Aurèle n'admet pas le
hasard; surtout il ne peut admettre celle hypothèse — qui est épicurienne — en
même temps que celle de la Providence. Le mot vjyr, a pu être employé, en deux sens
d'ailleurs très différents, par les Épicuriens comme par Marc-Aurèle : c'est que les Épi-
curiens et Marc-Aurèle ne parlent pas la même langue. Ce mot ne se rencontre que
Il 1)1 \î\
Rappelle i«»i députa combien de lemp lu diffi
.1 . < héoncefl ii icdea pai le I >iem tu n'a p indu II *
enfin <|u<' lu <' |iiiiiih - quel esl cel univers <l«»ui lu bii
partie; quel est l'ordonnateur de l'univen donl tu et une
• in, million ; que la dui i enfei mée dan
minées, si lu n'emploie! pas ce lemp •< le procura U
il disparaîtra, lu disparaîtrai aussi, el il ne
iv\ tendra plus ■
\ chaque heure du jour applique fortement la réflexion,
comme un Romain el comme un homme, •• n mplir ta
fonctions exactement, avec sériera el sincérité, avec charité,
six fois dans oel ouvrage. On en peul rendre compte les ih I mme
l*i l'ail aussi M. Michaul dans m note préliminaire { p. vn et \ mi ». une incertitnd
une défaillance de la pensée de Marc lurèle. \ la dernière ligne du Ih re l. il df
manifestement la Bonne Fortune, à qui l'empereur rend grâces, ainsi qu'aui
dieux, lien esl de même Ici : ces deux mots, taol, --'y//,. *etrouvenl rapprochés dai
Pensées, — comme en tète des actes publics. Puisque le Stoïcien esl pieux, poui
refuserait -il son culte à Tyché? A la lin «lu premier tiers de la p* nsée I. i( . le mot
T'j-/r( pourrai! être remplacé par Zeuç; peut-être n') faut-il voir aussi qu'une façon de
parler, n'impliquant pas une conception philosophique détermina ment
un sens vulgaire, nullement métaphysique, qu'il convient de donner au p
rôyaiç, employé à côté de avu.çopat< (MI. 27). Dans le coun de la 11" p
livre [II, il est vrai, le mol se trouve au singulier, el employé comme nom commun,
en regard de (nSvreufc (rencontre), qui éveille plutôt l'idée de hasard que celle de
Providence; mais le sens général de la phrase, Le voisinage d'une autre proposition
qui concerne les Dieux attestent que T>/r, là encore est — comme le déclare d'ail!
à propos d'antres textes, Simplicius, cité par Zeller (III 3, p. i">s. note 1) — Quelque
chose de Oeîov xot\ ôatpoviov, bref, l'équivalent d'et(iapu.évi|. — Enfin, il faut, si l'on
accepte le texte traditionnel, qui est contestable, Interpréter de la mi m I"
même mot au début de la dernière pensée de ce deuxième Livre.
Ici, la traduction de ?jyrt par << hasard »> est impossible, non seulement parce
qu'elle introduirait dans la pensée la contradiction accusée par M. Couat, mai- sur-
tout parce que cette contradiction serait inutile : soumettre le hasard aux I
nature et à la Providence, c'est le nier aussitôt nommé. En quelque parti.- que O
des Pensées, l'hypothèse du hasard est condamnée par tous I s où Marc- turèle,
en nous posant sous quatre ou cinq formes diverses le même dilemme, bous oblige à
prendre parti contre elle: ou les atomes — ou la nature (\, 6; XI. 18); ou les at
— ou les Dieux (VIII, 17); ou les atomes — ou la Providence (IV, 3)j ou le hasard —
ou la Providence (XII, i4 et 2.'\). La pensée a8 du livre IX oppose la commune doc-
trine des atomes et du hasard au Stoïcisme, doctrine de la nature universelle 1
dieux. Il est remarquable que, dans toutes ces antithèses, le •• hasard • est exprima
an autre mot que r>/r( (soit yupu.be elxdîoç, soit Ênt-ruy/a, soit l\uh .?).]
1. aviOi; oOx k'EsdToa donné par A et D peut s'expliquer. — qÇerai, donné par Gata-
ker, est préférable.
Exhortation à la sagesse, nécessité de connaître la raison des choses, brièveté de
la vie.
22 BIHLIOTHÈQUE DES UNIVERSITES DU MIDI
suivant la liberté1 el la justice; débarrasse-toi de toute autre
représentation^. Tu > réussiras si lu accomplis chacune de tes
actions comme la dernière de ta vie, te délivrant ainsi de toute
légèreté, de toute répugnance passionnelle3 pour tes comman-
dements de la raison; tu seras libre d'hypocrisie, de l'amour-
propre, de la mauvaise humeur vis à vis de la destinée.
Tu vois le peu d'obstacles qu'il suffit de vaincre pour vivre
une vie au cours régulier et pareille à celle des Dieux; les
Dieux, en effet, ne demanderont pas autre chose à celui qui
observera ces règles.
6
Tu t'es outragée*, tu t'es outragée toi-même, ô mon âme,
mais tu n'auras plus l'occasion de t'honorer toi-même, car
noire vie à tous est courte. La tienne est presque achevée
sans que tu te sois respectée, parce que lu as mis ton
bonheur dans les âmes des autres 5.
Tu es distrait par les incidents extérieurs c; donne-toi le
loisir de toujours ajouter quelque chose à ta connaissance du
i. [Par liberté entendre, suivant l'usage ordinaire de Marc-Aurèle et les indica-
tions de la phrase suivante, la raison affranchie des passions.]
a. [Couat : <( idée. »]
3. [Couat : «instinctive.)) Le mot contesté, £(jnra8T)ç, est un dérivé de iraOo;, et
7iâ6o; était précisément défini par Zenon âppirj.... a7tst6r(; tw alpouvxi Xoy<*>
(Stobée, II, 166), On retrouve dans cette définition les termes mêmes de la pensée II, 5
de Marc-Aurèle. La différence qu'établissent les stoïciens entre Vinstinct et la passion
est capitale. Cf. infra III, 16, 3m* note.]
l\. J'ai adopté la leçon: Oêptse;, au lieu de: O'êpi'e, le texte étant manifestement
altéré; il y a opposition entre les deux parties de la phrase, et l'impératif préféré
par M. Pierron n'a guère de sens. Je ne suis d'ailleurs pas satisfait de cette leçon,
l'imparfait me paraissant ici peu à sa place. Faut-il lire : uopi<ja;? (Voir infra, II, 16,
une pensée commençant par : v6pi'Çei Éa'jrn.v r, i^ux*)*) — [Var. : « avilie. »]
5. C'est ici l'Empereur qui parle; exhortation à remplir son devoir, avec un
accent profondément pénétré, sans autre considération que le souci d'être pur. Culte
de l'âme individuelle considérée comme une parcelle de la divinité.
6. [Var : « Que les incidents extérieurs ne te distraient pas. » — Cette variante, ou
plutôt cette correction (car l'autre texte est raturé), est défendue, dans le manuscrit
d'Aug. Couat, par la note suivante : « i;spi(X7tà xi ce. Telle est la leçon de tous les ma-
» nuscrits. Elle est possible. Ce qui m'a déterminé à préférer l'impératif : fi-rj rapiaTtaTO)
» de, déjà proposé par Gataker, c'est le xat qui suit, donné dans A, et les impératifs
» de la seconde proposition. Le sens est beaucoup plus net et les deux phrases se
» tiennent mieux. » — C'est précisément le xai donné dans A qui me semblerait con-
damner la conjecture de Gataker : après (xr(, on attend non pas xaî, mais aX).à. Dans D,
la copule manque. C'est le texte de D qu'avait d'abord traduit Aug. Couat, et que,
malgré ses scrupules, j'ai préféré.!
PI ( ii Dl M m U m il i i
bien h oesse <!<• l'étourdir en i aln. Pn loi n on)
d'une autre caui e d'aï i eui < i I folie que de -•• fotigui i
dans 1,1 \ le, .m ai olr un bul où dii ig< r tout endant
de notre Ime et toutes noi id exception
8
On trouverait difficilement quelqu'un <|ui loil malheurevu
pour ne pas examiner <•<> qui se passe dans I Ime dei auta
mais rv[\\ qui ne suivent pas avec attention les mouvements
de leur propre rime sont fatalement malheureux.
9
Se rappeler toujours m>\ : quelle est la nature de Puniven
e1 quelle cs\ ta mienne? qu'est relie ci par rapport i la pre-
mière? quelle partie de quel tout est elle? Et ceci : nul ne peut
t'empêoher d'agir toujours et de parler conformément .x« la
nature dont tu es une partie*.
10
C'est en philosophe que Théophraste, comparant entre elles
les fautes et les jugeant comme le ferait le sens commun*,
i. [Var. : « Les hommes avancés en Age s'égarent eux-mêmes chms leurs ictei j
qu'ils n'ont pas un but vers lequel ils dirigent toutes leurs tendances, et conduisent
une fois pour toutes leurs idées. »]
q. Précepte capital des Stoïciens.
3. [Qu'on me permette de signaler la locution *Otvortpov <7,jyxp''vstv, que M. Couat
traduit par: «juger suivant le sens commun.» Rapprochée de etVotrîftK, «'H'' pe«1
surprendre d'abord, si Ton pense au mépris de l'humanité commune qu'affrétaient
les Stoïciens, à leur division des hommes en deux ou troi^ I une multitude de
fous, à leurs paradoxes qui sont autant de défis portés au bon sens. C'est pourtant
avec raison qu'on a rendu à cette pensée le premier mot (fitaoéftsç) que deux des
meilleurs manuscrits avaient attribué à la précédente; et je ne pense point qu'il
y ait lieu ici de corriger le texte traditionnel et d'y substituer la conjecture qu'on
devine (car ils ne nous l'indiquent pas) sous le français de Barthélémy Saint-Hilaire
et de M. Michaut. « La hiérarchie la plus claire qu'on ait jamais donnée » ne traduit
pas : w: à'v ti< xoivotîcov Ta ToiaOxa ffvptp(vstt.
En dehors de cette pensée, et sans compter un passade où j'ai cru pouvoir le réta-
blir par conjecture (cf. infra VIII, 4i), xotvoTtfxrv est encore employé deux fois par
Marc-Aurèle, les deux fois (IV, 20; VI, 45) au sens que M. Couat lui attribue ici: la
traduction même de M. Michaut en peut faire foi. Ce n'est nullement une expression
dédaigneuse. C'est l'adjectif »ou.mxbv qui, dans les Pensées, oppose une opinion
vulgaire à une opinion philosophique (IV, 3, 36); encore vulgaire ne signifie-t-il pas :
inutile (IV, 5o), et ne signifie-t-il même pas toujours : sot (I\, 3). Sans doute, cette
modération de langage, ou, plus précisément, cette atténuation d'une expression
injurieuse, n'est pas habituelle au Stoïcisme: sans doute c'est une marque de la bien-
veillance de Marc-Aurèle pour le genre humain : et l'on pourrait croire que, comme
M BIBLIOTHÈQUE DES UNIVEHSITÉS ni midi
déclare les infractions de la concupiscence plus graves que
celles de la colère. L'homme irrité agit sous l'effet d'une
certaine douleur qui contracte secrètement son âme et le
détourne de la raison; celui qui pèche par concupiscence
est esclave du plaisir; il esl évidemment plus déréglé cl plus
efféminé. Théophraste disait doue avec raison et en vrai
philosophe que la faute accompagnée de plaisir mérite d'être
plus sévèrement reprochée que celle qui vient de la douleur.
Bref, dans un cas. le coupable esl comme victime d'une
injustice, et c'est la douleur qui le force à se mettre en colère;
dans l'autre, il court de son plein gré à l'injustice et se haie
d'agir pour satisfaire sa concupiscence.
11
L'idée que tu peux des maintenant sortir de la vie doit
inspirer tous tes actes, toutes tes paroles, toutes tes pensées.
S'en aller d'au milieu des hommes n'a rien de terrible, si les
Dieux existent, car ils ne sauraient te faire tomber dans le mal.
Si, au contraire, ils n'existent pas, ou s'ils n'ont aucun souci
des choses humaines, que t'importe i de vivre dans un monde1
vide de Dieux, vide de providence? Mais, certes, ils existent,
ils ont souci des choses humaines, et ils ont donné à l'homme
plein pouvoir d'éviter le mal véritable2; s'il y avait quelque
parfois î&umxov est adouci par le contexte, xotvoTcpov lui-même, dans les Pensées,
n'est jamais qu'une litote ou qu'une locution polie. Mais, sans Invoquer le sens
étymologique et l'usage qui a dû opposer formellement xoivoTepov à lo'.umxov, comme
xoivy; à !o:a, qu'il sutïise de rappeler ici l'importance accordée par les Stoïciens au
consentement universel, et le caractère de certitude qu'ils reconnaissaient aux xotvon
ëvvoi&i (Zeller, l. L, p. 7^ sqq.)«
11 suit de là que, s'il y a des contradictions dans la philosophie Stoïcienne, il n'y
en a pas, du moins théoriquement, pour les Stoïciens, entre la philosophie et le sens
commun; qu'il était de bonne guerre pour un adversaire du Portique, ou permis à
un dissident d'en appeler de cette philosophie au sens commun, et que Marc-Aurèle
a pu, en conformité avec la doctrine de Zenon et de Ghrysippe, comme d'Épictète,
apprécier la même théorie par les deux mots: cpiAocôcpo); et xotvûTSpov. Ce qui est ici
original et admirable, c'est l'indépendance philosophique et la sincérité de l'auteur
des Pensées. Cette théorie qu'il défend ne lui a pas été enseignée par ses maîtres
préférés, car elle est d'un Péripatéticien et contredit formellement la thèse stoïcienne,
présentée par Stobée comme par Ciçéron, de l'égalité des fautes: Crescere bonorum
fidem non putamus (De Finibus, III, i/j, 48); — iràvxcdv iz xwv àjxapT^fAaTwv i'arwv ovtcov
(Eehgae, 11, 23G).|
1. [Conjecture de Nauck ou de Coraï.J
2. [Ce mal véritable, que nous aurions plein pouvoir d'éviter, c'est le mal moral.
Marc-Aurèle pense si peu à le nier qu'à l'avant-dernière ligne de cette pensée il
oppose les bons aux méchants. Le mal moral ne dépend donc que de l'homme, n'est
Il NSl'l l>l M Ul< l I
autre mal <|u<' celui là, N^ I auraienl prévu ol auraient I
sorte que l'homme pûl | Loi^joui on j»i 6 ci \ i
donc' <•<• qui ne rend pai I homme plui mauvaii pourrai) il
rendre ^.i \i<- plua mauvaise ' il m e I pu po )hl< que la nal
.le l'unis ris ;iil n- h i COlt tfOIl illél •<! U 'M , "'i pai I
ou .'i bon escienl , maU par impui ance à prévenli
une Injustice; il n'esl pai possible <j"<- pai impui
par maladresse elle se soil trompée à ce poinl en laissant h
biens et] les maux arriver < ' u' . « h • 1 1 h ■ n i el indistinctement
bons ri aux méchants. La morl el la vie, la renomi
l'obscurité, la peine el !<■ plaisir, la richesse el la pauvr<
arrivent également aux bons <ii aux méchants, mais ces « ho
ne SOnt ni belles r i i laide-. Ce 116 SOnl «loue ni des l»i<n> ni
des maux j.
12
Gomme tout s'évanouit vite, l«'> corps eux mêmes dans
l'univers, et dans la durée leur mémoire! Que valent toutes
Imputable qu'à lui : î~' aOxô) te k&v. Cette doctrine était déjà celle de Cléanthe
[Hymne, v. i5 sqq.) :
0'j't£ y.aT' QttOépiON Oslov ic6Xo? ovV h
ti)«t)v oTioTa '>i^o-j(7t xaxofc T^ZTipr.i'.v aw'ai;.
Kilo attribue à L'homme une Liberté qu'il ett dilVnil - r i r- î 1 î ♦ -r- a\ee In |
puissance du principe directeur du monde et avee l<" déterminisme universel | \ i
Vil. g, etc.), et qui est tout juste le contraire de l'axoXovôfa kot< II
note), c'est-à-dire de la liberté du stoïcien. Pourquoi avons- nous aussi La Liberté de
mal faire? C'est que nous n'aurions pas l'autre, >i non- D'avions pas celle-là, el que le
mal même est nécessaire à la perfection du monde (x«\ rôti
VI. .'12). Et pourquoi la liberté de mal faire n'est-elle pas la liberté? Parce qu'elle est
contraire à la raison (infra VI, S, en note), c'est-à-dire à la volonté de notre nature
(infra IV, 49 et les notes); — en d'autres termes, que, la raison seule étant te propre
de L'homme, la liberté pour l'homme, c'est seulement L'indépendance de si raison; —
et parce que, si mal disposé qu'on soit, si prêt à détruire l'ordre du monde | VI, |a :
xai 6 ji£fj.cpojx£vo:, xoù 6 àvxioaivs'.v -îipcôpisvo:), on se leurre, en tin de compte. >i L'on
s'imagine pouvoir rien contre lui.]
1. [Gouat : «Mais comment. » — J'ai craint que cette traduction ne marquât
assez nettement la suite du sens. « Ce qui ne rend pas l'homme plus main
tout ce qui n'est pas le mal moral, tout ce qui, pour Marc-Aurèle, n'est pas le mal,
et à peu près tout ce que communément on nomme les maux. Cette p
Marc-Aurèle est toute une théodicée. Elle affirme la Providence et s'efforce de
répondre à l'objection traditionnelle qu'on lui adresse en raison de ces trois faits : l-
mal moral, le mal physique et le divorce de la justice et du bonheur.]
2. Différence entre le point de vue spiritualiste et le point de vue stoïcien. Le Spiri-
tualisme corrige les injustices de la vie par le postulat à l'immortalité; le Stoïcien les
corrige en les regardant comme négligeables. On résout la question du bonheur en
faisant consister dans la vertu et en niant le reste.
l6 BIBLIOTHÈQUE DB8 LMVEitSl JT> D1 MIDI
les choses sensibles, même celles qui nous séduisent le plus
par 1rs attraits du plaisir, ou qui nous éloignent par la crainte
de la douleur, ou que l'orgueil célèbre à grand bruit I Comme
elles sont insignifiantes, méprisables, ralgaires, périssables,
mortes même! Voilà ce que notre intelligence doit s'appliquer
à reconnaître. Que sonl ils ceux dont les opinions el les
paroles donnent1 la renommée? Qu'est ce que la mort? Si on
la considère [seule,] en elle-même, si l'analyse de la réflexion
dissipe tous les fantômes que nous apercevons en elle% on
n'y verra rien qu'un acte de la nature. Il n'\ a <pfun pelit
enfant qui puisse craindre un acte de la nature, et la mort
est non seulement un de ces actes, mais encore c'est un acte
qui lui est utile. Gomment3 l'homme touche-t-il à la divinité,
par quelle partie de lui-même, et dans quelles dispositions 4
faut-il que soit [à ce moment] cette partie de l'homme?
13
Il n'y a rien de plus malheureux que celui qui promène
sa pensée sur tout ce qui l'entoure, qui fouille, comme dit
le poète5, les choses souterraines, qui épie les preuves de ce
qui se passe dans l'âme de son prochain, et qui ne s'aperçoit
pas qu'il lui suffirait de rester en contact avec le génie qui
est au dedans de lui-même, et de le servir sincèrement.
Servir ce génie, c'est se conserver pur de toute passion, de
toute erreur, de toute mauvaise humeur contre ce qui nous
vient des Dieux ou des hommes. Nous devons respecter ce qui
nous vient des Dieux à cause de leur haute sagesse 6, et aimer
i. [Le mot a disparu du texte grec.]
2. [Couat : « si on soumet à l'analyse de la réflexion ce fantôme. »]
3. Il y a une solution de continuité plus apparente que réelle entre la phrase irw;
oLTizz-toLi et les précédentes. Tout ce morceau dépend d'un verbe sous-entendu : « examine,
cherche,» qui gouverne le premier et le dernier ruo;. Apres avoir vu combien la vie
était vaine, l'homme doit chercher ce qui le rattache à Dieu.
/*. 7rtb; s/ri 8iotxéijtai. — Le sens de cette proposition ne me paraît pas douteux, mais
un des deux verbes ïyr, Siaxsr/rai fait double emploi et rend le passage obscur : ïy^
est sans doute une glose.
5. [Pindare, dans Platon (Théétète, i;3 E)j.
6. [Couat : « à cause de leur perfection. » — Ce mot ne m'a pas semblé traduire
avec une précision suffisante le grec ocpsi-rj. D'autre part, je n'ai pu écrire ici le mot
« vertu » : je craignais de ne point m'entendre avec le lecteur. Ce que nous appelons
vertu est quelque chose d'humain : l'àpîTr, des Stoïciens est presque surhumaine; c'est
un idéal qu'on n'atteint guère; Caton mourant déclare que c'est un leurre. C'est par
lis m ni M \ p.- \ i , • i I l
œ <|ui nous \ lent dei homnv de l<
nous, ou pai tbil «ii i\ "ii |>il ir di' li i j i
du bien <>u «lu mal oe n'esl p n effet, une moindre
Infirmité que celle < i • j i noui em| Je di tinguci l< blan<
et le noir ■ .
14
Quand même tu devrais \i\r<' trois [fois] mi il 1 1 autan)
de fois <li\ mille, rappelle toi eependanl ceci pei onne ne
perd que le moment «le vie «ju'il est en train <!«• vivra» et *
\ii un autre que celui <|u'M perd. L'existence la plus Ion
est dono au même point que la plus courte. Le présent est
i pour tous, dono Le moment qui passe est égal pour tous .
H par suite o€ que nous perdons nous apparaît comme impei
ceptible, Nul ne peut, en effet, perdre ni le passé ni l'avenir;
qui lui enlèverait ce qu'il ne possède pas? Rappelle toi donc
ces deux points : d'ahonl, les choses, de toute éternité, sont
pareilles et tournent dans le même cercle. Qu'importe donc
de voir les mêmes choses pendant cent ans ou deux cents,
ou pendant un temps infini? En second lieu, l'homme qui
jouit de la plus grande longévité et celui qui est condamné i
la mort la plus prompte perdent une durée égale. Le moment
présent est le seul, en effet, dont l'un et l'autre puissent être
un véritable abus de langage qu'un Stoïcien nous recommande la pratiqua de l'àf
cotte pratique n'est qu'une tentative, ou cette àssTr, n'est qu'un à peu pfès; '.-t. -i
Ton veut, notre « vertu ». Mais quand on parle du sage un des dieux, comme ici. le
mot doit être entendu à la lettre; je m'en suis rapporté à la définition qu'en donne
Cicéron dans les Tiisculanes (IV, i5, 34): ipsa virtus brevinime recta ratio dici /
— et à l'attestation du Pseudo-Plutarque (v. Horn. 1 3 4 > : o1 ukv o\n It'.k/.v. tt-, -
TÎOsvTat sv tt) àuaOîta. La «haute sagesse» est la conformité avec la raison; si
distincte qu'elle soit de la dureté ou de l'indifférence, elle n'implique pas un mou-
vement du cœur: telle sera la vertu des Dieux.]
1. Admirable pensée, mais dans laquelle le Stoïcien s'excepte des autres hou.
et s'attribue la connaissance du bien et du mal que les autres n'ont pas.
2. [Couat : «bien que le passé ne le soit pas, » et, en note : « J'ai adopté la 1
» vulgaire: st xoi to ir:oXX'j{j.îvov oOx Ttov, au lieu de xaî 70 kkoXX^ '. adopté
» par Gataker et par Siich. El manque dans les manuscrits Art D, mais ils donnent
» oOx que Gataker change en ouv. Le sens qu'il propose par ce changement : « le passé
»est égal aussi,» est moins clair que celui de la leçon courante. Le raisonnement --t
celui-ci : « Le passé a beau être long, il n'en est pas moins imperceptible, car nous ne
» perdons ni le passé ni l'avenir, nous ne perdons que le présent: le pas*é est donc
» comme s'il n'existait pas. » — La leçon vulgaire semble inadmissible : après d /a.,
la négation est {ir,, et non aux (Koch-RoulT, Grammaire grecque, $ 11A). La traduction
de to àuoXX'jtxîvov, qui est un participe présent, par: « le passé » e>t aussi tr. -
tarble. J'ai donc cru pouvoir adopter la correction de Gataker]
28 BIBLIOTHEQUE DBfl [JHIVERSITÉS Dl MIDI
privés, car c'esl le seul qu'ils possèdent, el ce que Ton ne
possède point, on ne pciil |);is le perdre '.
15
«Que tout n'est qu'opinion.» La pensée du cyniques Monimos
es! évidente, el son utilité évidente aussi, pourvu que Ion en
relire, dans la limite de Ce qu'elle a de \ rai. la leeon salulaii
16
L'âme humaine s'avilit*, d'abord lorsqu'autanl qu'il est en
elle, elle sort comme un abcès du corps du mondes : s'im-
patienter contre quoi que ce soit qui arrive, c'est [en effet]
sortir de la nature qui embrasse comme autant de parties
d'elle-même toutes les natures particulières. En second lieu,
quand elle se détourne d'un homme ou môme se porte
contre lui dans l'intention de lui nuire, \insi font les âmes des
gens irascibles. Elle s'avilit en troisième lieu quand elle se
laisse vaincre par le plaisir ou la douleur. En quatrième lieu,
quand elle feint, quand ses actions ou ses paroles sont arti-
ficieuses et mensongères. Cinquièmement, quand ses actions
i. Ici, Marc-Aurèle s'évertue à se prouver que la vie n'est rien. Il la décompose
en ses instants, en oubliant la conscience qui les relie entre eux et nous les fait
vivre tous à la fois. Ressemblance avec le Christianisme, perpétuelle exhortation à
mépriser la vie. Mais ce dernier a une espérance ultérieure. Le Stoïcien accepte la
vie et la quitte avec la môme sérénité. Mais pourquoi est-elle? Il ne s'en préoccupa
pas. — [« Nous sommes nés pour l'action en commun)) (II, i). — Le stoïcisme ne se
préoccupe pas des limites de la vie humaine, parce que l'homme n'est pas indépendant
du monde, vivant éternel et unique; et il n'a pas à rendre compte de la vie, puisque
la vie, pour lui, c'est l'absolu.]
2. [Conjecture de Reiske.]
3. Dans le monde des phénomènes gouverné par une Providence, où tout est
toujours la même chose et où la vie de l'homme, phénomène comme les autres, ne
compte pour rien, à quoi servent la raison, la sagesse, le bien, sinon à se montrer?
— [Ils font la beauté du monde; ce ne sont pas des «opinions ». — La « leçon salu-
taire» que renferme la pensée de Monimos, c'est Marc-Aurèle lui-même qui la tire au
livre IV (S 7). — Ce qui est excessif, c'est-à-dire faux en elle, c'est le mot « tout ».]
t\. [Var. : « se déshonore. )> Elle s'avilit au point de se faire esclave. On sait que la
liberté pour un stoïcien, c'est seulement la liberté de la raison.]
5. [Couat : « elle se retranche de l'univers et en devient comme une excroissance. »
— Il y a dans le texte grec deux mots synonymes : oLTiôvzr^y. */a\ ?0jj.a, qui auraient
pu être traduits par : un apostume et une excroissance. Mais il y a aussi dans le
texte grec un jeu de mots entre ctTZO(rxrt[LOL et à-noc-Tas».:, qu'on aurait pu conserver
en latin (abseessus, abscedere), mais qui ne peut passer aussi aisément en français.
Or, il se trouve que la suite du sens est surtout dans ce jeu de mots. Une allité-
ration comme celle que je hasarde plus bas (IV, 29 et la note) pour représenter en
français la même rencontre (abcès, sécession) n'est utile et possible que lorsque les
deux mots sont voisins. J'ai joué ici sur le sens du verbe « sortir » ; dans cette traduc-
tion le jeu de mots de Marc-Aurèle paraîtra sans doute bien atténué : j'en ai gardé ce
que j'ai pu.]
ri s i i m m ■• i - \ i i ii
ou ses impulsion! n nui aucun bul quand i lie empl(
énergie au hasard el an iiite, landl qu 11 faudrait dii i
noa acte le plu In > nifianl en i lie d un< Bn ( h . la Dn
d'animaux raisonnablei e I de mil re la rai ion el la ! bli<
dans la oité par la plus antique de « on Ululions ».
17
Qu'es) oe que la durée de la vie de l'homme? I n point*
s,, substance? I n écoulemenl 9a ensibilité esl confuse i
parties qui composent son corps sonl exjx ■ pourrii ion
âme es! un tourbillon; son destin esl obscur, la renomnr*
incertaine. En résumé, toul esl vain; le corps esl une eau qui
coule; l'âme un songe, une fumée; la vie n'es! qu'une guen
un séjour en pays étranger; la gloire posthume, c'esl l'oubli.
Qu'est ce qui peu! donc nous conduire dans ce vo
La philosophie seule. Elle consiste à conserver noti aie
intérieur exempt de toul affront et de toute souillure, sup
rieur aux plaisirs el aux peines; à ne rien faire au hasard,
à ne jamais mentir ni feindre; à ne dépendre en rien de i
que les autres peuvent faire ou ne pas faire. Il faut, en outi
accepter ce qui nous arrive, la pari qui nous est allrihu
comme venant d'où nous sommes venus non- mêmes. Sur
tout il faut attendre la mort avec sérénité, comme n'étant
pas autre chose que la dissolution des éléments dont chaque
être vivant esl composé. Et s'il n'x a rien d'extraordinaire pour
chacun de ces éléments dans leurs perpétuelles métamorphoses,
pourquoi verrait-on d'un mauvais œil la métamorphose et la
dissolution de leur tout? Elle a lieu conformément à la nature,
et rien de ce qui est conforme à la nature n'est mauvais
Écrit à Garnuntum.
i. Toujours cette idée d'unité et d'harmonie, non pas futures mais actuelle-,
éternelles, qui sont leur but à elles-mêmes et pour lesquelles L'homme doit tout faire.
Tout ce qui tend à détruire cette harmonie est un mal. bien que ce mal lui-même,
étant prévu à l'avance, en fasse partie. Colère, m , irn.tle\ion, autant de
causes de désordre.
■j. [Couat : « le hasard. » — Sur le sens de --j'/rt, cf. II. 3. dernière note. L>- texl
d'ailleurs douteux, le meilleur manuscrit portant deux fois 'l'jyrit au lieu de i.
~jyrt... ou v*x* el tytxn.]
3. Cette pensée, écrite à un moment décisif de la vie morale, est un sursum corda;
et c'est le dernier mot du Stoïcisme. Toute sa thèse repose sur un postulat, qui
3o ÎHMI.IOIIIMM I DBS r \l\l UHIl's 1)1 MIDI
LIVRE III
Il ne Faul pas réfléchir seulement à ceci qur là vie -<i
dépense chaque jour4 el qu'il nous en reste une partie de
plus en plus petite. Réfléchissons en nuire que, si nous vivons
longtemps, nous ne sommes pas sûrs que notre pensée, égale
à elle même, suffise toujours à comprendre la vérité el à se
pénétrer de la doctrine qui nous conduit à l'expérience des
choses divines cl humaines. Si notre esprit commence à dérai-
sonner, nous pourrons toujours respirer, prendre des aliments,
avoir des représentations et des tendances, [etc.,J mais ce qui
s'éteint d'abord en nous, c'est le pouvoir de nous gouverner
nous-mêmes, d'appliquer exactement et dans toutes leurs
nuances i les règles du devoir, d'analyser nos impressions 3,
de considérer s'il est temps de nous donner congé de la vie, et
de résoudre tant de questions qui exigent une raison exercée.
Hâtons -nous donc, non seulement parce qu'à chaque instant
nous nous rapprochons de la mort, mais parce que l'intel-
ligence de la suite des choses cesse en nous avant tout
le reste.
Observez encore ceci : toute chose que produit la nature,
quoi qui vienne à se produire en elle, garde même en cela
revient souvent dans les Pensées : la nature est bonne. Cependant l'objection est
prévue, au moins en partie : Marc-Aurèle y a répondu ailleurs (II, n) en disant
que, si les Dieux sont mauvais, la vie n'est rien pour nous. Cela suffit sans doute
— et encore! — à nous faire, de toute façon, mépriser la vie. Mais quelle est, dans
le doute, la raison d'être honnête? Uniquement le sentiment de l'amour -propre.
i . L'interprétation de ce passage a été déterminée par une phrase de la pensée VI, 26,
où se retrouvent les mêmes termes : uav xa6r,xov l\ àpiOjxcbv tiv&v <rjfX7rXy;poûTai. [On
peut aussi rapprocher de ce passage un texte de Cicéron {De Officiis, III, i4), où parmi
les xaOr.xovxa (officia) est distingué le xaTopOoïtxa (rectum) : illud autem officium, quod
rectum appellant, perfectum atque absolutum est} et, ut iidem dicunt, omnes numéros habet...
On remarquera : i° que les derniers mots de la citation traduisent exactement le toO;
àpiOuLo-j; àxpiêoOv de Marc-Aurèle; 20 que cette expression devait être usuelle dans
l'école, comme en témoignent les mots: ut iidem dicunt;Z° que le mot xaTopôwfia,
dont la définition nous est donnée ici, et sans doute aussi ailleurs (cf., par exemple, III,
12). n'appartient pas au vocabulaire des Pensées.]
3. [Var. : «les apparences.»]
I • I I I I . I I . I ■ • ' I I I
je ne sais quelle el quel attrait P u la
«m ..m du pain i d Fail é< tatei « ei tain< pari bien q
01 1 \ .1 lien) en quelque 01 le 1 1 >nl 1 q
de la Fabrication, elle ne déplaisent pa 1 ll< donm al \
lablemenl em \r <i<i mangi 1 Uuai encoi 1
leur pleine maturité, 1e Fendent. ( ►uand l« olh • lombenl
de l'arbre el sonl près de pourrir, elle mil une <!»•
beauté propre. \ oyei lei épi a iui b< pai leui pofd
\c sol, le plissenienl de ll'OIll du UOU, I • ' ' < i m m ■ qui COUle
de 1,-1 gueule du sanglier el beaucoup d'autrei 1 b
oônsidércea en elles mêmes, ellea lonl loin d'être bel! mail
par cela seul qu'elles accompagnenl le développement dea
créations de La nature, elles > ajoutent un ornement el un
attrait. Il suffi! de sentir et de comprendre un peu profon
dément la vie de l'univers pour trouver en presque loua lea
phénomènes qui la manifestent el même qui raccompagnent
un accord qui a bien son charme9. linsi noua verrons de
véritables gueules béantes de hèles féroces avec autant de
plaisir que les représentations qu'en donnent les peintrei
les sculpteurs; nous pourrons, avec l'œil du sage, reconnaître
dans la vieille femme et dans le vieillard, comme la grâce dans
l'adolescent, la beauté de ce qui esl arrivé ;» son achèvement.
11 y a beaucoup d'autres faits semblables qui ne persuaderont
pas tout le monde et que comprendra seul celui qui
vraiment familiarise avec la nature et a\ec ses œuvre
1. [Couat : <( les produits de la nature ont quelque chose d'agréable et d'attrayant
jusque dans les imperfections qui sont la conséquence de leur développement, n —
J'ai tenu à conserver dans le français la répétition qui est dans le texte ^rrec :
£7ityiv6}X£va-.. y.vofjivoi;. J'ai voulu aussi, en renonçant au mot: r< imperfections, a
éviter de préciser une expression que Marc-Aurèle a choisie vague J'ai cherché en
français un neutre pour rendre ici le neutre grec. — Voir la note suivante.]
a. [Couat: « pour que les phénomènes qui l'accompagnent nous paraissent avoir
eu eux un charme particulier. » — Cette fin de phrase ne tradui>ait ni rçaSâv, ni xof,
ni la préposition sw contenue dans <rjv{<r:acTf)a'.. Les leçons des manuscrit
idTxaOai, et, à plus forte raison, le barbarisme arwSuevfoTocofai sont inadmissibles;
j'ai accueilli la conjecture de Reiske : vr, Aîa, que j'ai traduite par o bien», comme
Tito; par: uson». — De la traduction de M. Couat j'ai cependant gardé les termes
essentiels : « les phénomènes qui l'accompagnent. » Pas plus que lui, je n'ai voulu
admettre ici les mots : «accident, accidentel, >> qu'ont introduits soit dans cette phra>e,
soit dans la première de la pensée, Pierron, Barthéleuiy-Saint-llilaire et M. Miehaut,
parce que ces termes peuvent paraître impliquer la notion de hasard. J'aurai,
d'ailleurs, l'occasion (infra, V, a3) de préciser le sens du mot: (ruu£otivovta. — La
restriction marquée par le mot <r/sôov (presque) est à noter : parmi les Stoïciens;
Marc-Aurèle n'est pas un intransigeant.]
32 BIBLIOTHEQUE DBS LJNIYER8ITÉS J>i IOD1
Hippocrate, après avoir guéri beaucoup de maladies, tomba
lui même malade el mourut. Les Chaldéens prédirent La mort
de beaucoup de gens; puis la destinée les prit à leur tour.
Alexandre, Pompée, Caius César, après avoir détruit tant
de villes de fond en comble et défait en bataille rangée tant
de milliers de cavaliers et dé fantassins, sortirent eux mêmes
un jour de la vie. Heraclite, qui fil tant de raisonnements
sur la nature et sur l'embrasement du monde, devint hydro
pique, se lil enduire de fiente et mourut. La vermine a tué
Démocrite; une autre vermine lua Socratc. Qu'est-ce donc?
Tu t'es embarqué, tu as pris Ja liaule mer, tu as fait la
traversée; débarque. Est-ce pour vivre une autre vie? Là-bas
non plus, rien n'est vide de Dieux. Est-ce pour ne plus rien
sentir? Tu cesseras donc d'être en proie à la douleur et au
plaisir; d'être l'esclave de ce vase d'autant plus méprisable
que ce qui lui est soumis lui est supérieur1; ceci, en effet,
s'appelle raison et dieu intérieur 2; cela n'est que de la terre
et du sang 3.
4
Ne consume pas le temps qui te reste à vivre en des
idées & qui concernent les autres, sans que tu puisses les
1 . y] 7ïepÎEffTi to \)Tzrtpzzo\>v. — Ce passage difficile a été interprété de plusieurs façons.
L'auteur fait ici une comparaison entre le corps et L'âme. 11 vient de dire: « le corps
est d'autant plus vil...;)) on attend donc le second terme de la comparaison. Le sens
général de ce second terme est indiqué par les mots to CiftqpeToOv, qui se rapportent
évidemment à L'âme opposée au corps, et la phrase se complète naturellement ainsi :
«que ce qui lui est soumis (au corps) vaut mieux que lui.» On doit donc laisser
intacts les mots nepieort to CiCY)pexoOv, qui sont dans tou< Les manuscrits, sauf D. 11 ne
reste à examiner que la conjonction \ qui ne peut marquer le rapport des deux phrases.
C'est là que se trouve la faute, et il est possible de la corriger en substituant à \ le
corrélatif de TOffOUTtd. J'adopte donc la correction 5<rq>, déjà proposée par Casaubon,
et j'écrirai tocto'jtm -/. t. a. oato r^ltaxi to ôirfjpetoOV. Le texte de Stich : r.rcsp eœti to
OttTjperoûv, bien ([ne confirmé par le manuscrit D, ne me parait pas intelligible.
2. [Couat : «est intelligence et essence divine. » Voir plus bas (V, 27 et en note)
la définition du dieu intérieur ou génie. Ne pas oublier que, pour les Stoïciens,
raison et génie sont matière — plus subtile sans doute et plus pure que la terre et le
sang — mais matière aussi.]
3. [Yar. : «l'autre n'est que terre et impureté.*. — AOOpo; signifie, en effet, sang
impur, sang mêlé de terre. Il était inutile, dans la traduction, d'exprimer deux fois
l'idée de terre; et il était préférable de donner du même mot déjà rencontré (II, 2)
et traduit par sang, une interprétation unique.]
[\. [Couat : «pensées.»]
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rappoi lei .'■ l'utilit énéral Pu auti e oh< i
in i Cn pi i\ ei ' <" l€ i" é( «coupant de « e qu< rail un U I
pourquoi, el de ce <iM ■' dil ' ' ,l'' ' ' T1 •' i" " ■ ' ' &
prépai a, el de loul i <* qui ne ai I <iu •• I|',,J ' lourdii en "
détournant de veiller Bur le prin< Ipe qui nou dirige II fi
d.i ii s l'enchaînement de lei représentation évite) le capri
la ivi\ olité al surtout l'indi ci i lion al la naA ban< eU il i
l'habituer à d'avoir dans l'esprit que <l< repré entationi U ll<
que si l'on te demandai! soudain : • \ quoi pen 1 1 von tu
pilier- Immédiatement répondre avec Franchise \
.i cela, o Unsi l'on verrai! clairement que loul en loi i n
plicité, bienveillance, que tout > porte la marque d'un êta
sociable, éloigné des plaisirs ou même simplement des repn
sentations8 mensongères de la volupté, de la jalousie, de l'envii
du Boupçon e! de loul ce don! on rougirait de dire qu'on j
pensait. Un homme d'un tel caractère, qui l'applique Bans
délai i'i être vertueux, es! comme un prêtre el un ministre
dos Dieux; il écoute le génie qui habite en lui même et qui
préserve l'homme de la souillure du plaisir, de la blessure d<
douleurs, du contact de toute insolence, du sentiment de toute
méchanceté; qui fait de lui l'athlète de la lutte la plus glorieui
celle dont l'objet est d'être invulnérable aux passions, parce
qu'il s'est profondément imbu de justice et que de toute son âme
il accueille tout ce qui lui arrive et toute pari qui lui est faite.
Ce génie l'empêche enfin de s'occuper à tout propos, et sans
nécessité pressante et d'intérêt général, de ce qu'un autre peut
dire, faire ou penser?. Il n'accomplit d'autre action que celle
qui lui est propre, et sans cesse médite sur le rôle qui lui
i. [Couat : «tu t'en priverais;» et, en note: « "Hto: yop kaaov tpyou 77: cr. Ce
passage a été très discuté; Gataker le modifie complètement. Boot change
rfir,. Je crois que le texte des manuscrits e:*t intelligible et doit être conservé. •]
2. to'jt£(77i pavraÇâpievoç. — TojT£œt'. est évidemment impropre, et je crois qu'il faut
lire simplement toOtq.
3. [Var. : « Notre volonté. » Autre var. : « Notre propre raison. >> — Cf. infra VI, 8.
et la note.]
h. [Couat : « pensées. »]
5. [lbid.]
6. [Couat: «pensées voluptueuses.)) — Pour la distinction de pavraoici et de
çàvTaa-ua, cf. infra 111, n, 4e note.]
7. [Surtout de ce que cet autre peut faire contre lui. dire ou penser de lui : ri
o'èpsî tic r, àicoXvtyeTai wepi kutoû, r, xpâ&i xorc'aùroO, duô' 1:; vous ftàÀXerat I \. n).]
A. COUAT-P. FOLRMER. 3
;;r, BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS DU MIDI
tracé <l;m> hi trame de l'univers; celle action, il la dorme
belle1, et il est persuade que ce rôle es! hou. En effet, la
destinée impartie à chacun est influencée par l'ensemble des
choses el influe à son lour sur elles*. Il se rappelle que tous
les êtres raisonnables son! unis par an lien de parenté et que,
s'il esl dans la nature humaine de s'intéresser aux hommes, il
i. [Gouat: «Il oe t'inquiète que de diriger sa propre activité el sans cesse médite
sur le rôle qui lui eafl tracé dans La trame des loia de l'univers; il fait en wrte
que celle activité soit utile. » — « Utile » ne traduit pas xsa£; dana la première
proposition, c'est [&évov et non \l6vol que M. Couai a lu : deux méprises dont Tune
est facilement réparable, mais dont l'autre décèle peut-être une erreur plus
gTave, portant sur toute une phrase. Prix- en soi, L'interprétation que If. Couat
propose des mots 7:00; èvépyetav î'/Etv («mettre en œuvre, faire agir, diriger ») est,
Bans doute, fort plausible; on pourrait même la préférer à la traduction courante,
qui fait de L'expression grecque une périphrase neuve ou rare de même sens que le
verbe èvspyetv: en effet, pour la concision, la simplicité et la clarté du discours, il
semble qu'un seul mot, ce verbe, eut mieux valu. — Mais la traduction du verbe irpô<
ÈvipyE'.av ïypw entraîne celle de son régime, le possessif neutre :à UcuTOtf. On
«applique son activité à ses affaires» (Pierron), «à sa vie» (Michaul), on accomplit
telles actions, — mais on met en œuvre ses facultés, on dirige son activité. Or, des mots
action et activité, il n'en est qu'un, le premier, qui puisse être ici qualifie par le mot
<( seule ». Quand j'écris (pie le sage « n'accomplit pas d'autre action que celle qui lui
est propre », je laisse entendre que le vulgaire s'occupe, comme on dit vulgairement,
(l<s affaires d'autrui; et cela est d'accord avec le sens général de la pensée; c'est L'idée
même de la seconde phrase; enfin, c'est au même sens qu'aboutit la traduction de
M. Couat, qui implique la correction de fj.ôva. — Au contraire, si j'accepte l'autre
interprétation de upoç ivipysiav Ê**/eiv, en rendant à (xova sa valeur et sa place dans la
phrase, et si j'écris que le sage « ne songe à diriger que sa propre activité», n'en
conclura-t-on pas que Marc-Aurèle reproche au vulgaire (ioitoTr(:) d'entreprendre sur
lu liberté d'autrui? Or, Marc-Aurèle a dit, une ligne plus haut, çavTaÇôjJLevov, mais
n<m pas xeXauovra, ou xtoXuovra.
Par contre, j'ai emprunté à M. Couat son procédé de traduction de :à Ixuxov. C'est
une sérieuse difficulté de trouver un nom abstrait assez vague et assez précis pour
traduire le neutre du texte grec. Le mot c< affaires » (Pierron) ne peut être qualifié par
xaXà; le mot « vie » (Michaut) est cherché un peu loin. A l'exemple de M. Couat, j'ai
tiré le régime du verbe lui-même.
Enfin, j'ai voulu donner à ma traduction un tour tel que le sage ne pût passer
pour égoïste. On se souviendra que « l'action qui nous est propre » est celle de l'être
raisonnable et sociable.]
2. r( yàp !xà<7To>.-. enjveptçêpeTOU' Te y.ai eruvepLçépei. — Cette phrase a donné lieu à
des discussions d'autant plus longues que les deux verbes employés ici par Marc-Aurèle
ne se trouvent nulle part ailleurs. Il n'y a pas d'autre moyen de les expliquer que de
chercher comment cette phrase se rattache a la préeédente et de prendre ces deux
mots dans le sens indiqué par les prépositions dont ils se composent. L'idée exprimée
dans la phrase précédente est que la destinée de chacun est prévue par les lois qui
régissent l'ensemble des choses, sans que pour cela son activité cesse d'être libre. La
phrase que nous examinons vient à l'appui de cette idée, comme le prouve la conjonc-
tion yâp. D'autre part, le verbe composé duvsjiçlpsiv à Tactil ou au passif doit exprimer
L'idée d'apporter, de concert avec d'autres, quelque chose dans un lieu quelconque, ou
dans une entreprise quelconque, ou, en meilleur français et plus brièvement, L'idée
de contribuer à quelque chose. Le philosophe veut donc dire que la destinée de chacun
est le résultat de l'apport de toutes les destinées particulières qui constituent l'en-
semble du monde, et qu'à son tour elle apporte dans cet ensemble sa propre impul-
sion. Entre l'individu et le monde il y a échange et réciprocité d'action. Cette idée est
tout à fait conforme à la doctrine stoïcienne.
i i m ni m \ n» \ i m i i
,,,■ foui pai cependant allai h< i l I opinion de loul i
mal seulement à l'opinion de « eux qui vivenl a >nf5 >i m
,, 1,1 nature ( fuanl •< ceux qui ne t Ivenl pa II n oui
jamais ce qu'ils sonl chei i u i el au dehoi p< ndanl la nu
,i pendanl le jour, ce qu'ils \ aleal el dan quelle i ompi
Hi se souillent. Il ne tienl donc au< un < ompte d( I
de tels hommes qui tic i eu ni même pai à être « tntenl
d'eux même
5
N'agis jamais à contre cœur, ni en égol ite oi
légèreté, ni avec distraction1; n'enjolive ta pei d'aucun
ornement, sois sobre de paroles el d'acte Que la divinl
qui est en i<>i ail à gouverner un être viril, mûri pai I
dévoué ii la cité, un Romain», un empereur, qui s'esl dii
pliné lui-même, comme s'il attendait le signal qui l<* rap
pellera de la vie sans déchirement, sans <|uil demande de
serments à personne, sans qu'il ail besoin d'un témoin . Il
i. [Var. : « sous L'empire de la passion. »]
a. [Ces! il seconde fois (cf. II. 5) que Marc-Aurèle se tait gloii
à ce titre, s'excite à la vertu, a La tradition romaine, écril Renan M ' li
fin du monde antique, p. "û I, fui un dogme pour Lui, o II eut i les pi !
el porta à « l'excès... l'espril conservateur ". C'est comme Romain, par exemple, qu'il
ta ou laissa poursuivre les chrétiens; comme Romain et comme sage, qu'il !• -
déjà condamnes dans sa conscience. Si La fin de cette phrase loue, comme il
semblé, les morts discrètes et silencieuses, elle censure du mon >up n< >o seulemenl
la dernière heure du lâche qu'il faut rassurer et celle de Sénèque qui fait «les
discours, mais aussi L'obstination (icoperraÇiv : X.I, 3) et la frénésie des martyrs.
Rapproches de cette pensée celle (XI, 3) où Marc-Aurèle nomme et juge Les chi
vous y trouverez la même idée et des expressions synonymes. Ici : ï
sxfruxo;, cpaiopôv, fjir.Ts (laptupoc 8e6(&evoç, «sans légèreté, sans déchirement,
sereine, sans avoir besoin d'un témoin ; » — là : XsXo*
ixpaytoôtoç, «après réflexion, ôlre prêt, avec gravité, sans étalage tragique.»]
3. [Ce passage est interprété de plus d'une manière, et L'on ne peut affirmer
qu'aucune soit la bonne. — Couat: «sans qu'il soit nécessaire den nir à aucun
serment ni à aucun témoin. » C'est peut-être la traduction exacte du lais
qu'ont voulu dire Marc-Aurèle, puis M. Couat? — \ ar : sans qu'il soit nécess de
prendre les dieux ni les hommes à témoin. » On voudrait, >i clail hrase et
si naturelle la suite du sens, que le mot 6pxo; (serment) admîl l'interprétation du
traducteur. L'homme qui se lie par serment et L'agonisant qui - 01
prennent tous deux Le ciel à témoin; mais un serment n'es! pas une supplication. —
Pierron, qui traduit fidèlement Spxou (sois <• un homme prêt à quitter sans regret la
vie. et dont la parole n'a besoin ni de l'appui d'un serment ni du témoignage de
personne »), et M. Michauf, dont la phrase ambiguë parait exprimer le même - n-que
celle de Pierron, introduisent dans la suite des conseils que se donne Marc-Aurèle une
idée imprévue, qui reste isolée, et ne s'aperçoivent pas que L*asyndète de la phrase (où
est la copule — xa\ ou 5è — que Pierron traduit par cl?) rend plus intolérable encore
L'asyndète du sens. — Barthélémy -Sain t-Hilaire prétend faire sortir la mélaph
BIBLIOTHÈQUE DB9 DHIVERSITÉS DU MIDI
faut avoir1 une âme sereine qui n'ail besoin d'aucun secours
extérieur ni de cette tranquillité qui vient des autres. II faut
être droit, non redressé9.
6
Si tu trouves dans la vie humaine quelque chose de meilleur
(juc la justice, la vérité, la tempérance 3, le courage; quelque
chose, en un mol, de meilleur qu'une intelligence assez forte
pour se suffire à elle même, en dirigeant tes actes suivant la
raison [droite], et pour te faire accepter la part qui t'est attri
huée, sans que tu aies eu à la choisir, par la destinée; si, dis-je,
tu vois quelque chose de meilleur que cela, tourne-toi de ce
côté de toute ton âme, et jouis de ce souverain bien que tu
auras découvert. Mais si tu n'aperçois rien de meilleur que le
génie'» qui habite en toi, qui a rangé à l'obéissance ses propres
penchants, qui fait la critique de ses représentations5 et s'est
qui transparaît sous les mots 0Lv3.Tzzy.y6-0; (discipliné) et otvaxXtjTtxov (signal); il
entend par cipxo; le «serment militaire» et traduit ainsi: «comme un guerrier
... toujours prêt..., sans avoir besoin ni de prêter serment ni d'être surveillé par qui
que ce soit. » Ces derniers mots faussent évidemment le sens du texte grec. « Témoin »
et «surveillant» ne sont pas synonymes; jjiàprjp n'appartient pas à la terminologie
militaire. Peut-on, d'autre part, admettre entre les mots 8pxo; et fiàpTup la rupture
d'une métaphore qui se suivrait et se tiendrait depuis ocvaTEra/oro; ? Il est donc vrai-
semblable qu'opxoc nc signifie point ici le serment du soldat. — D'accord avec
M. Gouat, j'ai considéré la proposition fiTjre 5pxou ÔEOfjisvo;... comme le développement
du mot ejX'jto; : l'absence de toute liaison entre ce mot et cette proposition m'y
contraignait, à ce qu'il m'a semblé. Mais, d'accord avec les autres traducteurs, j'ai
restitué à opxo; son sens usuel. De quels serments peut donc avoir besoin un mori-
bond qui n'est pas prêt (|xy) sù'X-jto;)? Sans doute, de serments qui le rassurent et qui
l'abusent : serments de complaisance ou de pitié; vains serments qui n'engagent
personne; serments du médecin, des proches, des amis.]
i. èv Sa xh çaiSpdv. — Le texte est évidemment altéré, et plusieurs corrections peuvent
être proposées. Mais le sens n'est pas douteux. J'ai traduit comme s'il y avait à peu
près : èv oi croc etto) to cpatopôv, — ou ïxi ok xtX. La correction evt ou eveori indiquée par
Gataker, sans qu'il l'ait proposée formellement, ne me parait pas bonne. La phrase
èv oï v.t).. continue celle qui précède et n'en est pas une conséquence. Pierron traduit :
« c'est là qu'on trouve, » etc. Cette traduction est illogique.
3. [Cf. infra VII, 13, et la note. — Ainsi était Maximus (cf. supra I, i5).]
3. [Couat : « sagesse. » — Infra V, 13, il a lui aussi traduit aw^poTjvr, par « tem-
pérance ».]
k. [Ce « génie », tel que Marc-Aurèle le définit plus bas (V, 27), c'est notre «prin-
cipe dirigeant». Sur les rapports du principe dirigeant avec les penchants ou mouve-
ments de l'àme (opfxat) et ses représentations (^avra?:*-.), cf. deux notes aux pensées
IV, 32, et VI, 8.]
5. [Couat : « qui surveille ses pensées. » — Cf. infra XI, 16 : « aucune chose ne met
en nous l'opinion que nous en avons...; c'est nous qui créons les jugements que nous
portons sur elles, et qui les gravons pour ainsi dire en nous-mêmes, quand nous
pourrions ne pas le faire, ou, si nous le faisons par mégarde, les effacer. »]
Il > Il Dl M M'. • \î l'.l I I
,ii i ai hé oomme disait 8o< i ■ •'■ > la pa • de I
ieii . qui ■'■• I ouml lui m^ni.- ,m\ I lieu* • i qui
;mi\ bommea | il tu trouve U »ul le n le petite) in prix à*
de oe génie, ne te lai le jamal ln< linei ni détoui nei rei i «
chose, ne laisse i< ohamp libte à i len qui pu
d'honorer avant toul ce bien ipécial qui e I tien \ oc bien
oonforme à la raison al au lervice de la cité . rien d'étrai
u a le droil de faire obstacle, pai exemple la louanj
hommes, le pom oir, la richi te plaisii toul joui
sances peuvent paraître s'accorder un moment avec lui, n
elles l'asservissent tout & coup et ('égarent, roi donc, je le
répète, choisis librement et simplement ce qui vaut mieui
et restes > attaché. • Mais ce qui vaut mieux, i est l'uti
— Au point de vue de l'être raisonnable, oui, l'utile; et pour-
suis le. Mais l'utile au regard de l'animal? J'attends la preuve,
et t'engage à veiller Bans orgueil sur ton jugement I : tâche
seulement de ne point te tromper dans ton examen.
i. [Gouat : «aux passions des sens. » — Qctat< n'est point xâOo; I
(III, i6, y noie) nommonl passion (icaOoç) un mouvement déraisonnable de i
Comme rétablit le présent texte (cf. encore \. i6, i* note; VII, 55: Ta; a
ittfottc)j la icctoïc est un état du corps qui s'oppose (VI, Si; l\. 16) I I ! i 1 >r«-
(7ipi;t; ou èvlpysix) de la raison. Il arrive d'ailleurs dans cet ouvrage - i ;
(VII, 66 ; l\, ii) — crue ~ôl()o; tienne lieu de lestent ; mai- la récipr «que n'est |
Ici, L'opposition «-le la pavroteia à l'ateOifrucv] iceiatc (cf. infra III. i
avant -dernière note) est celle des sensations surtout représentatives aui lensationa
surtout affectives, ces dernières étant d'ailleurs disti n_
a. [àvuxaOr.tfOa'. yàp ko Xoytxâj xafc Koitfrtx^ iyadô. — Dotijuxâ est la 1
manuscrits; elle est peu claire, et je préfère rcoXtTtxô», adopté par Gataker et bien plus
conforme à la doctrine de Marc-Aurèle, qui rapproche souvent les deux mots la
et TroX'.Tixo;. Ce rapprochement est particulièrement à remarquer [d'abord] à la
seconde pensée du livre X, où l'auteur développe le même point, l'opposition entre
ce qui est utile selon la nature raisonnable et ce qui L'est selon la nature anim
« sari ôs to loy.Y.bv s-jO-j; xfltt icoXtTtxô'v ; o [puis à la lin de la .'iV pensée du livr \ !
où il reprend encore une fois sa théorie de l'utile fê bcaorai ce xarà t- i
ia'jroO xaxadxs-j^v xa: pwtV f, ok sur, cp-ja-'.; XoYtxv) xafc KoXrrtx
3. [Gouat : «le souverain bien. » — Mêmes mots changés à la phrase suivante. J'ai
tenu à conserver en français le comparatif (to xpeîvcov, et non to xpiorov |du t
Il n'y a jamais, veut dire ici Marc-Aurèle, que deux partis à prendre.]
4. [Gouat : « Montre-nous la chose, et préserve ton jugement de tonte vanité. » —
Nous donnons ici au verbe Gtiro$aivea6at le sens qu'il a d'ordinaire chez Marc-Aurèle
(cf. VII, 33; VIII, 28; IX, i5). Le paragraphe suivant et deux textes déjà cites (VI, 44;
X, 2) peuvent servir au commentaire de cette fin de pensée; ils affirment que cela
seulement qui est utile à l'homme en tant qu'être raisonnable est bien. Mais entre ce
qui est utile à l'homme en tant qu'animal et le bien, on ne peut établir ( àhcof
une identité. Qui affirme cette identité se trompe (qu'il y prenne garde : t ./ *tt£ tt,v
xpi<nv); — et, vraiment, il ne se flatte point (arroçtoç). Enfin, il peut être malaisé
de déterminer (èÇeracw icoietaOai) à coup sûr (ocaçatâç) ce qui est utile à l'animal,
comme le sage dit à coup sur ce qui est utile à l'être raisonnable.]
BIDLIOI ni <H i DES I M\ ER81 i ES Dl MIDI
N'honore jamais comme l'étant utile ce qui te forcerait
à violer la parole donnée, à déserter l'honneur, à haïr, à
soupçonner, à maudire, à Feindre, à désirer quoi (pie ce
soi! que tu aies besoin de cacher derrière des murs ou
des rideaux. Celui qui préfère à tout sa raison1, son génie
et la célébration des mystères de la vertu3 de son génie,
ne fait pas de tragédie3, ne se lamente pas, n'a besoin ni de
la solitude ni de la multitude; il vivra, chose essentielle,
sans chercher ni fuir la vie; peu lui importe que son âme
soit plus ou moins longtemps enfermée dans la prison du
corps; faut-il la quitter dès maintenant, il s'en ira sans
déchirement, comme s'il accomplissait toute autre action
conforme à l'honneur et à la bienséance ; pendant toute sa
vie il ne s'est gardé que d'une chose : de s'égarer en des
pensées étrangères à l'être raisonnable et sociable '*.
8
Dans la pensée de l'homme qui s'est mortifié et purifié, il
n'y a rien de gangrené, rien de souillé, rien qui suppure
en dessous. Sa vie n'est jamais incomplète : quand le destin
la lui prend à l'improviste, il ne ressemble pas à l'acteur
tragique qui n'a pas encore achevé de jouer son drame jus
qu'au bout. Rien en lui n'est servile ni affecté ; il n'est ni
attaché à rien ni violemment séparé de rien; il n'a à répondre
de rien, à se cacher de rien.
i. [Couat : « son intelligence. »]
3. [Sur le sens de la « vertu » attribuée au « dieu intérieur », cf. supra p. aG, note 6
(rectifiée aux Addenda).]
3. [Il ne s'agit peut-être pas simplement ici, comme traduit Pierron, de « lamen-
tations tragiques ». Le mot aTpaywSa); désigne dans les Pensées la simplicité de
manières d'Antonio (I, iG), ou oppose la mort tranquille du sage (XI, 3) au martyre
théâtral des chrétiens. Il est donc possible que « la tragédie» (entendez : le manque
de simplicité) s'oppose ici aux ((lamentations» comme deux excès entre lesquels est
la vertu, — comme l'amour de la solitude et celui de la foule, pour reprendre les
mots mêmes de Marc-Aurèle.]
/». [Couat : ac'est que sa pensée fût dans des dispositions qui ne conviendraient
pas... » — Sur le sens de tgotit,, cf. infra VII, 16, a* note.]
| | N I I t • I M \l.' M I I I I
9
Cultiva en i<»i la faculté de |ngei C'est le polnl
tu na veux plui que le principe qui la dirl e idmcllc un ji
ment en déaaccoi d ai ec la hatui a el a \ e< la « on tituti* m de
l'être raisonnable, Or cette conatitution luppoaa qu'on na pn
cipite pii^ s<>ii jugement) qu on l'accommoda ave< b bomma
el qu'on obéit aux l tieui
10
Meta donc (!<• côte tout l<4 reate el lieni t'en leulemenl >
ces quelques pointa. Rappelle-toi en outra que chacun na
vit que le moment présent, qui eal Imperceptible; loul le n
ou ;i été vécu «mi esl dans l'inconnu. Petil est donc l'instant
que chacun vil, petit nu^>i rv coin <lc la terre ou il \il. petite
enfin la renommée la pins longue qu'on laisse après soi,
cette renommée se transmet par <l<^ hommes chétifs qui
doivent bientôt mourir et qui ne se connaissent même pas
eux-mêmes et ne connaissent certainement pas celui qui
mort autrefois '».
11
Aux préceptes déjà exposés ajoutez-en un encore : détermi
ner toujours et décrire l'objet de toute représentation qui
s'offre"* à l'esprit, afin de le voir à part et à nu, tel qu'il est
i. [Var. : ((de concevoir des opinions. » — Celte « faculté de juger rrauj
ûuvapu;) n'est autre que le « principe directeur » Lui-même. Ailleurs, M arc- iurèle l*t
appelé to xaTaXr(7iTtx6v, et d'autres Stoïciens to 8iavo7itm6v el - infra
IV, 22, et la note.]
2. [Gouat : «L'essentiel est que ton jugement cesse d'être dans ta rail —
Jusqu'au dernier mot, cette traduction est littérale : dans celle que je lui lubsti
le mot ((admette» ne traduit qu'approximativement Èyyivr/rxi. J'ai fait pourtant la
substitution, pour donner ici encore de vjycuovixov l'interprétation qu'on ■ admise
partout ailleurs (cf. en effet supra II, 2, et la 2e note; cf. pourtant infra IV, 22, en
note), puis pour supprimer de la version française une répétition (« raison... r
nable ») qui n'est pas dans le texte urée, enfin pour rendre plus sensible le rapport
de cette pensée avec la première du livre IV, qui la complète, et où l'on rencontre
une expression équivalente: «quand notre maître intérieur est d'accord
nature... »]
3. [«Parère Deo libertas est»: cette obéissance est la liberté pour le Stoïcien. —
Cf. infra des expressions synonymes : V, 27 : ruÇrp Osoî; ; VII, 5? : il-i'.br^ Okô.]
4. [Gouat : « et qui ne connaissent ni eux-mêmes ni celui qui est mort autrefois. »]
5. [Couat : «l'idée de toute chose qui se présente. » — Voir la V note de la
pensée.]
4o BIBLIOTHEQUE DES UlflYBBSITÉS Dl midi
en son fond matériel, tout entier et sous toutes ses faces1,
el de se dire son nom et le nom des éléments don! il
se compose el dans lesquels il se résoudra /Tuien n'est mieux
fait pour élever l'àme que de pouvoir définir avec méthode
et suivant la vérité/ chacun des objets qu'on rencontre dans
la vie^yque de le regarder toujours de façon à comprendre
ce qu'est l'ensemble auquel il appartient et de quelle utilité il
i. [Couat : «afin d'en bien voir la nature et L'essence vraie, séparée de tout le resta. »
— Je me suis expliqué ailleurs (IV, ai, dernière note; V, 23, r° et a* notes)
sur l'interprétation du mol oûefa: substance ou matière, pour le Stoïcisme, c'est
tout un. — Je ne Die point qu'aura ne soit parfois dans Marc-Aurèle, et dans des
ées qui rappellent celle-ci, comme un raccourci de l'expression xixh *a9' xuré,
qu'à l'occasion il ne suffise à exprimer le fond des choses, la « nature» intime des
êtres, et ne se puisse traduire par « en soi » (cf. infra XII, 39 : exaixov 8t 5Xou mtxh
xi èdT'.v ôp&v; — XII, 18 : xi ètxiv otjtô èxetvo xb t^,v eavrafffav aot nrotoOv); mais je ne
pense pas qu'il en aille de même ici, parce que yjjjwov n'y pourrait rien ajouter au
sens d'a-JTo ainsi compris, et parce qu'aucun nom ou pronom n'y soutient celui-ci,
comme font sxeîvo et exocttov aux pensées 18 et ag du livre XII : aOxô, à mon sens,
n'est point ici l'épithète de précision ou d'insistance qui fait valoir dans la phrase
un autre mot; ce n'est que le régime du verbe, aussi indispensable qu'insignifiant.
Non pas id ipsnm, mais id. — Les mots xax' ovefatv se joignent naturellement à ôirotov.
'Orcolov xax' o-jffiav (= quel en son fond matériel) précise et traduit l'expression
usuelle ottoÏov xaO' avxô (= quel en son fond) dans le langage d'une secte qui réduit
tout en matière, même la force, le principe efficient et formel des choses, l'àme des
êtres, la loi ou la «raison » incluse dans les germes (cf. la définition de la a raison
séminale» donnée par Chrysippe, dans Diogène Laërce, VII, i5q: «en tant que
matière, un souffie, — KveOjia xax' ouatatv»). On devra négliger, pour comprendre
cette formule, la distinction des deux principes, matériels l'un et l'autre, que les
Stoïciens apercevaient en tout objet, ou, comme ils disaient, en toute détermination
de la matière, et que l'auteur des Pensées, en maint passage où il indique sa méthode
(IV, ai; VII, 39; XII, 10, 18, 39, etc.), nous invite à toujours séparer: le principe
déterminant (a'.xt'a, uoiov) et la matière déterminée ; on devra oublier surtout que,
par opposition à celui-là, celle-ci s'appelle simplement et proprement matière (vXij,
o-jffca); — et, de fait, étant instable et inerte, elle ne saurait être désignée plus préci-
sément. Ici, il n'y a point de terme antithétique qui limite l'acception d'o j<jîa.
Les traducteurs français de Marc-Aurèle s'accordent à réunir les mots xax' ouoïav
yjuivôv, que tous ils interprètent à peu près de même (Pierron : « en soi et dans son
essence;» Barthélemy-Saint-IIilaire : «dans son essence nue;» Couat: «la nature
et l'essence vraie; » Michaut : «en son essence nue»). Sans doute, le mot «essence »
se rattache étymologiquement au verbe «être» comme oùtfta à elvai : mais une
équivalence étymologique n'est pas une traduction. Il est, d'ailleurs, inutile et
hasardeux d'introduire un nom tel qu'« essence » dans la terminologie stoïcienne.
C'est dépayser le lecteur. Si, par aventure, il était tenté de chercher en cette pensée
l'opposition du principe efficient et de la matière, ce terme étrange ne pourrait-il
pas signifier pour lui précisément le contraire dVj<xta ? L'adjectif voisin (nue, fU|i.v6v)
aiderait au contresens : lui-même, en effet, Marc-Aurèle a qualifié ainsi l'âme
qu'enveloppe le corps (IX, 34; X, 1), le principe efficient dont la matière n'est que
le vase impur ou l'écorce (XII, a et 8 : yvjxvà xwv pXotfb* ôôâo-aaOai xa a'.xiajor;).
Mais il suffit de substituer dans cette dernière phrase le mot propre à la métaphore,
— oCciûv à cpAoïcîiv, — pour établir l'absurdité de la locution xax' ovxn'av yv|tvév.
Comment préciser le sens du mot yujxvov, ainsi isolé dans la phrase? Quel régime
inexprimé, autre que xf,ç o-jffi'a;, imaginer à côté de lui? J'ai cité tous les textes des
Pensées où se rencontre cet adjectif. Ils ne nous éclairent pas. Mais les exemples qui,
à la pensée VI, i3, expliquent le verbe à7ioy*j(xvoCv expliqueront aussi bien vu|&vov
Il n II I)| M Mo M 1.1 II ',|
esl pour ci en lamble . quel ssl i >n pi I \ pai i epp -i I
.m i pai rappoi I à l'homme, i itoyen de la ifc ti|
loutei les -"'i re oité i ml « >mme le mal on quf< ' il
quoi eal il comp ombien de lampe <i«»ii il durai « el
que je me représente en oc moœenl } de quelle rarta al Je
besoin vie-à \ il de lui douoeui , coui ncërit
simplicité, force d'âme, <'(<•. ' Il faul <1<>im §e «in,- .. pro|
1. 1 Mettra "n- 1 h. i >■ .i nu, i . t i lie tient de i.i i..
de l'orgueil, de notre Imagination «i de n ti it< i pp iti i.i p.-n-.v
\ Il . i ait ui< ! ' iliom
qui précèdent
L'Interprétation <ir» m«>t> i|ui suivent < -t molni certaine on peut presque
! le plus vague dei neuti
celui que loi il.uiiii' liait \ u r . I«- . n un lutn ;
option ordinaire de Sic a le pensée XII, i) H reut d
rément », ou « en taisant L'analyse». Enfin, les mots p.u\. ut pi
rentraient, vit qu'on h ,., un.' expn ision Irrédu Ubl . - U q .
en Si' cî).(i)v (mais alon i pretque Inutil ime de I «lin-
que j'accepterais à la rigueur lei diveraei traductions que m m ont doi
d'SXov Si1 u'tuvt cir.çy.ixivf,»;, Htuf pourtant celle de M . Ifichaul lalité
de la totalité des choses »), qui confond $Xa el
autres : la définition, la description de l'objet, la distinction de ses éléments,
lise tion dans l'univers, tout cela Implique «une analyse minutieuse 't compli
c'est-à-dire une analyse (&rnpï)|jiv6>;) qui ne néglige aucun
(Si* oacov), et nous permet d'atteindre l'objet mAme «!<• notre repré* ntation d
partie, mais tout entier (ô'aov). Cette dernière interprétation <t celle que j'ai impi
ci-dessus, qui ne diffèrent que par la traduction de S»)pï)uiv«aç, mr lombleiit garanties
pour le reste par deux lignes de la pensée VI, i3, la même i laquelle je demaj
tout à l'heure l'explication de yvpivév: « xaScxvouusvat on! aou
S ts(iOÛe«C Si1 a à t ai v, <o<tte opiv xtX. >>]
i. [Couat : « pour lui »]
a. [xo*jto, to tt(v povtarfarv ao: vCv tco'.oOv. — Voilà une définition précise du mot
çav-caoTov, employé au début de cette pensée (cf. la ir# note). Bile était courante dans
l'école, et on la retrouve dans les fragments de Cbrysippe (Zeiler, PkiL der Gr..
1113, p. y i , n. 3). Quand nous sommes dupes d'une illusion, que l'objet de notre
représentation n'est pas réel, celle-ci ne se nomme plus poevroato, mai- povra
Tel parait être du moins l'usage de Marc-Aurèle (cf. Pensées, III. \ : XI, 19): d's
Stoïciens, plus subtils, ont désigné parle mot ^àvTacaa l'objet de la représentation
qui nous abuse, bien que dépourvu de réalité, et l'ont ainsi distingué de cette repré-
sentation même, qu'ils appelaient çavraoT'-xo < /.-lier, /. /., p. 71, n. 3).
J'ai traduit vb tt(v çavracriav aotoùv par: « ï objet de la représentation. Litté-
ralement, cette expression signitie : « ee qui provoque la représentation. » Le verbe
TToioô a exactement la même valeur ici que dans l'expression k61 -> (bellurn
moveo), que les grammairiens distinguent si soigneusement de -
(bellurn gero).]
3. [Couat: ((force d'âme, et le reste»?
On peut considérer tout ce qui précède cette phrase comme un développement des
dernières lignes de la pensée 17-1S du livre XII. Les quatre questions que Marc-
Aurèle s'y pose à propos de chaque objet, et qui s'y résument chacune en un mot
(aiViov, CX'.xov, àvaçopâ, /sovq;), ce sont des phrases qui les expriment ici. — Pour
le principe efficient (aiT:ov\ ou détermination, ou qualité -\ \ .\ et pour la sub-
stance (o'j(r:a), ou matière (ûXtj)i dont les noms, au lieu de - ser dans une
antithèse, sont réunis dans une expression i/j-roîov -/.a: qui n'exprime
(cf. la 2' note à cette même pensée) que le produit de ces deux facteurs, la phrase
ia hihi.i(hiii;oi i. ih.s i m\ i asi rés DU midi
de chaque chose : ceci me vient de Dieu; ceci est le résultat '
de l'entre-croisement des faits el de leur rencontre dans la
trame ourdie [el tissée] par la Fortune2; ceci me vient d'un
compagnon de tribu, d'un parent, d'un associé qui ne sail
pas ce qu'il doit faire conformément à la nature. Mais moi je
le sais; aussi je le traite avec bienveillance et justice, suivant
la loi naturelle de la solidarité. Je m'applique en même temps
à assigner leur véritable prix aux choses indifférentes.
12
Si tu fais l'œuvre du moment présent, suivant la droite
raison, avec zèle, avec énergie, avec douceur, sans te laisser
détourner par rien d'accessoire, mais en conservant ton génie
pur comme s'il te fallait déjà le rendre; si tu t'attaches à cela,
sans rien attendre et sans rien fuir, te contentant d'agir dans
le moment présent d'après la nature et d'observer courageu-
qui les désigne et qui se répète, à quelques lignes de distance, en termes presque
identiques (êx ti'vwv GvyxixpiTQLt..., k% J>v ouvexplOï)...), est sans doute assez vague;
mais quant au principe que Marc-Aurèle nomme àvaçopâ (littéralement : rapport)
et que nous traduisons assez librement (voir le livre XII) par les mots de « fin » ou de
((cause finale», c'est peut-être ici (des mots ôicoup tivi tw y.6cfjia) = «ce qu'est Pen-
semble auquel il appartient » jusqu'à iïxjTzzp olxfatt eioiv = « sont comme les maisons»)
qu'on en trouverait la définition la plus exacte. C'est d'abord le rapport des choses
à l'univers, — un rapport de finalité, sans doute, s'il est vrai que les choses soient
faites pour l'univers ; mais c'est ensuite le rapport assez différent des choses à l'homme,
citoyen de ce môme univers en qui il trouve également sa fin.
La présente phrase et celles qui suivent expriment le rapport inverse, — celui de
l'homme aux choses, — qui se déduit naturellement de tout ce qui précède. On n'en
trouvera pas l'équivalent à la pensée XII, 17-18, — à laquelle ce texte peut ainsi
servir à la fois de paraphrase ou de commentaire, et de conclusion.]
1. [M. Couat semble avoir oublié ici un mot: truXXtj^tv, qui signifie d'ordinaire
« groupement par tirage au sort », ou simplement « réunion fortuite », et qui a pu
sembler étrange chez Marc-Aurèle. On a proposé de lire (T'Jwyjo-iv. Cependant, on admet
bien tu^yj dans la môme phrase (cf. la note suivante). Évidemment, les deux sens
de ces deux mots — qu'il faut savoir entendre — doivent confiner. Pour un Stoïcien,
G'jkXt^'.z signifiera à peu près « la réunion dans un même destin ». On a vu, à la fin
du livre I, Marc-Aurèle rendre grâces aux Dieux et à la Bonne Fortune, c'est-à-dire
à la Providence; les Stoïciens peuvent adorer la Providence sous le nom de cette autre
déesse, la Parque (otjXXyjÇiç est un mot de même famille que Aot/e<ti;) qui tient le fil
de nos destinées. Plus bas (IV, 34), c'est à Clotho (dont le nom se retrouve ici dans
Le mot crovaXtoOiç) que Marc-Aurèle nous engage à nous abandonner. — Il était
difficile de rendre le mot lui-même que M. Couat parait avoir négligé : j'en ai mis
l'équivalent dans la phrase, une ligne plus loin.]
2. [La Fortune, et non le hasard. 11 s'agit ici de la divinité nommée à la dernière
ligne du livre I, et qui, pour les Stoïciens, s'identifiait avec l'sVapufvr, (Zeller, III \
p. i58, n. 2). Sur l'emploi du mot tu^ij dans les Pensées, cf. supra II, 3, dernière note.]
pi n 1 1 i.i m \i.< m ni 1 1
sèment l,i \ éi ii. dan i< moindre i» ai oie Ul M\ i
( m, personne ne i>(,ni t'en empé< b
13
De même que les médecin onl loi^joui t leur port
appareils el des Instruments p<>nr i< - inh-i \<-nIh,ms miIh
de inrinr ;iie toqjOUrS & tfl «Il |" I itiOH les <J< l pour
connaître les choses divines h humaines el accompli] tes
moindres arlcs en le r.ippelii ni le lien <|ni le- unil let m
aui autres. Tu ne mèneras à bien aucune affaire humaine lani
l,i rapporter aui choses <li\in<^ l, el réciproquement.
14
Ne te disperse pins ; in n'auras !<■ temps de lire » ni tes propi
mémoires, ni l'histoire de l'ancienne Rome el de la («i
ni les extraits d'auteurs que tu avais résen es pour la vieille!
hâte-toi donc vers le but, renonce au* vaines espérai]
aide-toi toi-même si tu as souci de toi, tandis que tu le peux
encore.
15
On ne sait pas [tout] ce que signifient les verbes voler,
semer, acheter, être en repos 6, voir ce qu'il faut faire:
n'est pas avec les yeux mais avec une autre vue que l'on
s'en rend compte.
16
Corps, âme, raison" : au corps les sensations *, à Târne
i. [Définition du xatopOtotia. Gomment ce mot ne se rencontre-t-il pas dai-
Pensées? Cf. III, i, en note; III, 16, note finale.]
2. [Couat : « les jugements qui te permettent de connaître: trine. >>]
3. [Couat : « les uns. » — Le lapsus est évident.]
4. Var. : «Tu ne feras bien rien de ce qui touche aux hommes -311- le rapporter
à Dieu. »]
5. [Cf. supra II, f>, et la 1" note (p. 19, n. 3).]
0. [Voir dans Zeller (Phil.der G/\, III s, p. n5, note-jï un sens proprement stoïcien
du verbe f(7»r/â^stv dans l'expression Àoyo: T^-j/i^ov.]
7. [Voir cette note à la suite des Pensées, où nous avons du la rapporter.]
8. [Sur l'attribution, constante dans les Pensées, de la sensation au corps,
cf. infra V, 26, avant-dernière note.]
14 BIBU01 HÈQ1 E DES I M\ BBS] 1 Ê8 Dl .midi
instincts el ses mouvements1, à la raison les jugements3.
Recevoir les représentations par empreinte3, même le bétail
en est capable; rire tiré en sens divers par l'instinct est aussi
un privilège des bêtes fauves*, des androgynes, d'un Phalaris,
d'un Néron : accomplir sous la conduite <lc la raison l'acte
qu'on juge convenable-» n'es! étranger ni à ceux qui ne
i. [Gouat : u tendances, s \ rar. : << Impulsions Instinctives, n — \ vrai dire, il n'y
i pas en français de traduction littérale du mol 6puV). Stobée (Bel., Il, 160) le définit:
joyx -y^/r,::-: :-.. Quelques lignes plus loin, il oppose L'6pu.j) des êtres raisonnables
a celle des êtres sam raison, el parmi les variétés de Is première, il compte la volonté
(poyXr4«ji;) el la volonté réfléchie i ottpseiç); il dit aussi qu'on appelle spuat en parti-
culier les tendances < :;<; ip\Lr^i%r\) et les désirs (opou<n;?). Le sens du mot est don-
lendn : il désigne à la fois, si l'on excepte la sensation, tous les faits affectifs
et de volonté; el la définition très générale qu'en donne Stobée : « un mouvement
(ou un élan.' de l'Ame vers un objet» serait inexacte si elle était plus précise.
En soi, l'ép|AT) n'est donc point mauvaise. Sa qualité dépend de la nature du juge-
ment qu'elle Implique. C'est ainsi que l'ôpfU) que provoque un jugement irréllédii
peut être une passion (ttocOo:) : is eftet ro TcàOoç rfjç ôpjjif,; è<m, dit Zenon dans Stobée
(Bel., II, i64). Car, bien que déraisonnable (ttocOo; ô' thaï paew ôvjlt.v icXsovàÇovarav xài
KICEiOtj ko Ktpoûvrt >.ôyo) r( xtvr.Tiv 'V-r/r,; uapà puatv, continue Stobée), la passion n'en
est pas inoins en nous une œuvre du principe directeur (cf. deux notes plus liaut
et I\ . sa, en note): aussi n'appartient-elle qu'à l'homme. 11 y aurait donc finalement
au moins trois grands types d'optiat : celles des bêtes; celles des « égarés » (VI, sa),
ou de ceux dont la raison se tourne contre elle-même; celles de l'homme de bien,
dont l'âme n'a que des mouvements conformes à sa nature, et dont la «vertu consiste
en l'absence de passions» (Pseudo Plutarque, Vie d'Homère, i34).]
a. [Var. : «les croyances réfléchies. » — Voir la note finale.]
3. [Couat : « recevoir les empreintes des choses par la perception. » — Je dois
a M. Hamelin la traduction que j'ai admise. — Les mots nmoOefac ?avraanxa>; (qu'on
retrouvera plus bas, VI, 16) rappellent la définition que cite Plutarque (comm. not., 67),
sans doute d'après Cléanthe ou Zenon : çocvraffia ruirwartç èv «Jnmj. L'àme, ou plutôt
le principe directeur (infraV, 26, 6e note; XI, 20, note finale), est comparée à une
cire molle où la sensation s'imprime comme un sceau. Malgré la critique de
Chrysippe (Sextus Empiricus, adv. Mathem. VII, 229 : le débat est résumé dans Zeller,
Phil. der Gr., III 3, p. 72, note 4), cette métaphore trop précise, qui ne permet pas de
comprendre que l'àme puisse recevoir deux ou plusieurs impressions à la fois, avait
survécu et gardé faveur parmi les Stoïciens. Le mot plus abstrait et plus exact,
bepoiWiç, que Chrysippe avait substitué à Turccoen;, et qui rappelle, d'ailleurs,
IV/./.01W1; d'Aristote, n'est employé qu'une fois dans les Pensées (IV, 3g), où il
s'applique au corps et aux antécédents physiologiques de la représentation.
Juste ou non, la métaphore de Zenon et de Marc-Aurèle sépare nettement la
représentation de la sensation. L'une est l'empreinte, l'autre le cachet. C'est l'enten-
dement qui reçoit la représentation, c'est du corps qu'elle lui vient. Autrement dit,
l'explication de la pavracia que contiennent les mots ruicoûofat pavraoTtxûc la ratta-
che à l'atffOrjai; comme un effet à sa cause : mais la proposition voisine atofiaxo,-
ouaôVjaei; la situe en un monde différent]
a. [Couat : «appartient même à la brute; être tiré en sens divers par l'instinct est
aussi un privilège des bêtes.» — Cette traduction, qui n'est conforme nia l'étymologie
ni a l'usage des mots, a été désavouée, en quelque sorte, par If. Couat, dans les autres
passages où il a retrouvé (IV, 28; VI, 16) les poTxr.ixara en face des Oqpfa. Là, il a écrit
« animaux domestiques et animaux sauvages », ou bien « bestial » pour (3o?y.r,fjLaT«j6E:,
et « sauvage » pour G/jsuoge:.]
5. [Je choisis ici la seconde version de M. Couat. qui suit le texte traditionnel : je
me suis borné à y corriger « intelligence » en «raison». La phrase ainsi traduite
— to... xbv voOv r,Y£(iôva s*/âiv lui :a patvéffceva /.aOr./.ovxa — a été reportée parGataker
quatre lignes plus loin, après la proposition xo iciôv saxi toy àyaOoC. Dans la note
I»KW i i * !'• MAI m i i i i
oroionl p&i -"i\ Dieux ni i <<u\ <jui trahii cnl i- lu ,
m ,i œoi qui o enl loul faii •• une foii la poi ta foi on b
061 facultél appai licnnenl 111^ -. ii ii \ <Iin <-i | u
ikiiiiiik' quel *'si donc !<• bien propre i I homme rerl
i d'aimer al d'aocueillir oe qui lui ai rire, loul i e qui toi me
la trame <i<% la destint I de ne | tuillt i l< ; énic qui
habita dans ta poitrine <!<• ne pas se i troublai pai la
foule «les Impreaaiona sensibles 3, mais de demeura lerein,
modestemenl soumis ■> Dieu, saiu jamaii rien dire conti
mérité, sans jamais i i«*n faire contre la justice. En rain, fou-
les hommes se défient «le lui parce que son existence est
simple, pudique, tranquille; il ne s'indigne contre personne
et ne 86 détourne pas de l«i roule qui l«' COnduil .'m terme de
la vie, vers lequel nous devons non- avancer purs, calmes,
détachés de tout, en libre accord avec noire destin e
LIVRE IV
1
Quand notre maître intérieur est d'accord avec la nature,
les événements de la vie le trouvent dispose à se plier facile
finale, j'examinerai les raisons et les avantages d'un déplacement mie, pai
du texte, je me suis à mou lour efforcé d'éviter. M. Couat déclare en note
« rallié qu'après beaucoup d'hésitations à la leçon des manuscrits».]
i. [ Var. : ((qui se livrent à tous les excès. >» — Des deui façons, If. Coual i traduit
la conjecture de Coraï: -âv irtoOv koio'jvwv. Le texte des manuscrits ne donn
7ioio"jvt(ov. La chute des mois précédents s'expliquerait par leur ressembla
phique avec le début de celui qui reste,]
2. [Dans la phrase que nous ont transmise les manuscrits : il o
7:pb; xà etpquiva, Xombv to -o'.ov iori toO àyaOoC /:)...., L'opposition des mots rà
et Xoiirov me choque autant que M. Stich. Ce dernier, au lieu de :à Xo ; Irait
pouvoir lire soit ^xllx rcâvra, soit :aO:a -ivia. El nous le voudrions comme lui,
si la paléographie s'y prêtait suffisamment. Il parait plus simple de supprim
en supposant Xoixà écrit dans l'archétype à la lin et au-d ssous d'une Ligne, et par
suite copié deux fois, légèrement modifié la seconde. On peut aussi imputera l'auteur
lui-même, qui aurait réellement écrit aoittov, en lui donnant le sens de < donc,
alors», une négligence de style dont il n'est pas coutumier. Quoi qu'il en soit. -.x
)>o'.7rà, râXXût r.xv-x et -xï-x ~x^-:x ne pourraient avoir ici que la me - _ lification.
A la différence du français, le grec et le latin disent volontiers - : . ■ par
opposition à ce qui suit. — On comprend de même que dans la proposition
sort npoz -rà elp^txsvx le pronom sous-entendu au datif qu'il faut rétablir pour l'inter-
préter (a-JT(o) désigne l'homme de bien, dont il n'a pas encore été parle.]
3. [Couat : « de ses perceptions. »]
'\. [Voir cette note à la suite des Pensées, où nous avons dû la rapporter.]
J6 BIBLIOTHEQUE DES I M \ i.hm 1 l'.s DU MIDI
nient à ce qui lui est donné et à ce qui est possible. Il ne
préfère aucune matière d'action déterminée; mais il suit son
idée, se réservant de faire ' de ce qui est dirigé contre lui la
matière de ><»u action. Ainsi, quand des objets qui pourraient
éteindre une faible lampe tombent dans le feu, celui ci s'en
rend maître; il s'assimile en brillant d'un plus vil éclat tout
ce qui lui est apporté, il le consume et s'en sert pour grandir.
N'agis jamais au basard ni sans rapporter aux principes de
l'art de vivre la maxime de ton action2.
i. [Couat: << il se porte, mais bous réserve, vers les choses Les meilleures, efl il
tait...; " et, en n< >l<* :
<« L< g manuscrits donnent xpbc rà rjo-jijiîva, qui n'a pas de sons. Je crois qu'il
faut lire 7ipor(y(X£va, mol familier à la Langue stoïcienne et qui signifie: « les choses
placées le plus près du bien, o <>u, avec moins de précision : « le bien.» Le sage a en
vue le bien, mais il prévoit les obstacles qui l'en séparent, el de cc< obstacles mômes
se fait mie occasion d'exercer sa \erhi.»
Je n'ai pas cru pouvoir accepter la conjecture Kpov)Y|lsva. D'abord, on n'en saurait
donner ici, comme l'axone M. Couat, qu'une traduction détournée; et ce mot, à cause
de l'usage qui eu est fait, de la théorie capitale qui se résume en lui, tient une trop
grande place dans la terminologie stoïcienne pour ne point avoir un sens très précis.
Un texte de Zenon (cité par Stobée, Ed., II, i56) définit cette expression qu'il inventa :
o àoiâyopov ôv sy./.svôu.îOa /.aTa icpoqvovjievov Xôyov, et la distingue formellement
d'àyaOôv (le bien) : oJokv ok r&v àyaf):*ov elvat T:por(yjj.ivov o-joe yàp iv «uXft rbv
uporiyo-jtj.îvov ihx>. tov [iy.7Ù,ix kWct tbv jjlst' aOrbv TSTaytxfvov, « car le premier des
courtisans n'es! pa> le roi, mais le premier après le roi. » La santé, la vie, la fortune
ne sont pas des biens pour les Stoïciens; néanmoins Stobée, un peu plus liant (162,
fin), les donnait comme exemples de upor^ypiÉva. — En second lieu, la correction de
f,yo'j(JL£va en 7tpor;yjjtiva est bien hardie. — Les mots xà àyôaîva («clés choses qui
attirent à elles ») que propose M. Stich se rapprochent sans doute beaucoup plus du
texte des manuscrits; mais s'ils sont synonymes de xà TrporjixÉva, on ne voit ni
pourquoi Marc-Aurèle aurait renoncé ici à une locution consacrée dans l'école, ni
l'avantage qu'il aurait eu à employer une périphrase aussi vague pour désigner le
bien; s'ils expriment une tout autre idée, c'est sans doute celle que traduit l'expres-
sion to 7Tpor,yo^ij.svov, à la pensée Y, 20, qui reprend, presque dans les mêmes termes,
la théorie exposée i<i. — Paléo»;raphiqucment, :à 7rpor,yoo[j.£va, conjecture de (iataker,
que j'accepte, De diffère pas plus que Ta àyôtjisva de :à r,yo'j;j.sva. Marc-Aurèle donne
en général à :à 7ipoïjyo-jij.sva le sens déprima ou priora (IV, 'j5; Vil, 55; MU, ^9); ou
parfois un sens dérivé: par exemple (V, 20), celui de proposita. C'est celui que j'ai
adopté ici.
La théorie de Vaction sous réserve (C7i£^a''p£(7tç, exceptio) est assez nettement exposée
ici et pins bas (V, 20) pour qu'il soit inutile d'y rien ajouter. On verra plus loin (XI,
20, note finale) comment les Stoïciens s'en servent pour établir la liberté. Avant Marc-
Aurèle, Sénèque (ad Lucilium, 85, oy) avait écrit : « Tu sapientem premi putas malis?
utitur. »j
2. [Couat: ((N'accomplis jamais aucun acte au hasard et sans avoir examiné de
manière à n'en négliger aucune les règles pratiques qui le concernent. » — M. Couat
donne ici, et de même plus loin (XI, 5), une traduction inadmissible de 6sajpr(ua,
après l'a\oir entendu différemment au livre I (7 et 8). Ici et au lhre XI, on dirait
ii m i-i MAHi mi
( In cherche dei refti i <■ n-iu <-i <!<• , . .un ,i<
plage de i m< mtagnei ; toi au I . • i I « •• que tu dé ire avant
tout, Mais loul cela <>si bien peu di pic «i un philosophe,
puisque tu peux, au moment où tu le voudi retires en
loi môme. Nulle pari l'homnie ne trouve une retraite plui
calme el plus «le repos que dans ion Ame, urtoul celui donl
le dedans esl tel' qu'en se penchant pour j 1er, Il
retrouve toute -.1 sérénité; je veux <ln< p.-u nih- l
d'une âme bien réglée. Procure toi donc ani cei e > toi
môme cette retraite, el renouvelle toi. \i<i à ta disposition
quelques maximes courtes el élémentaires qui, l'offrant à
qu'il a lu 9uopv)9tç. Lo suffixe final d ia, l'emploi constant du mot en fréon
le voisinage de rl^vv) a lt pensée \I. ». co le Ici, nous font d'abord ra|
pour la signification, bu&pquA de -terme familiei aui Stolci i un
texte de Sénèque, parmi vingl autres, sur ce qu'il nomme les -
— entendes: les sciences théoriques de la classification <r\ Lauttiam,
.« \ull,i ars contemplative Bine decretis suis est, qu
in <iromctri<i et in astronomia invenies. Philosophie autem contemplativa est... I
arbitraire d'en conclure que les dogmes sont les théorèmes de la philosophie, et les
théorèmes les dogmes des mathématiques? — Pour le mol r£^vtj, il esl bien éridenl
qu'il désigne ici la philosophie, art (ou science) de la vie el de la vertu (cf« infre l\ .
3i ; Xi, 5, el les Dotes),
Contrairement à L'usage de Sénèque, qui, dans la même lettre ou il traduit
SivuLata par décréta (principes), distingue en philosophie les principes el les préo
Marc-Auivle désigne les deux choses (cf. sopra III, i3) du seul nom de do :■■<■ El il a
raison contre Sénèque et les autres que suit Sénèque, si les préceptes m
somme, que les corollaires des principes, ou les principes de la pratique. De même
que le géomètre, «le théorèmes en théorèmes, arrive aui application-, le philos
qui de la métaphysique aboutit à la morale, appellera encore S&raotTa — ou
Oscopr.txara — «les règles de conduite. 11 semble bien que ce soit le cas ici.
Tb <T'jtjL7iXr(p(i)T'.x6v, en effet, c'est limité qu i finit un nombre dans la série Infinie
des nombres; c'est dans le compte des membre- de la société humaine (XI, B
des actes qui manifestent la vie de cette société (IX, s3), la dernière unité, qui, ;
un moment, parfait le tout : dans l'ordre moral, c'est la perfection suprême, le bien
(V, i5). 11 est aisé de conserver ici ce sens à ce mot. Si toute philosophie tend a la
pratique, et si tout acte du sage est raisonné, la raison de chacune de ses actions, au
moment où il l'accomplit, est bien le dernier mot de sa do ;lrine. La doctrii ienne
est, sur ce point, celle de Kant : j'ai cru pouvoir accentuer ce rapport en faisant
passer dans cette traduction les termes d'une formule célèbre de ce philosophe.
J'ai donc traduit Oswpyjjia par « maxime »; entendu Oîrôpr.aa crupLicXf . comme
une k maxime rapportée»... à un corps de doctrine, qu'elle achève. Si j'ai beau
allongé le texte en rendant par «les principes de l'art de vivre» le seul mot
grec ri/vr,:, c'est que ce terme est aussi intraduisible que le latin or*. Dan- l'idée
qu'expriment ars et xi/vr, sont confondues les deux notions que distinguent en
français les mots art et science.]
i. [Var. : «qui a au dedans de lui-même des principes tels qu'en les considérant
il retrouve... » — Pour justifier cette traduction, M. Couat invoque la pensée III. i3.]
',s BIBLIOI HÉQl I DES URIV1 FIS! i B8 D1 MIDI
Ion esprit. Buffiront à l'affranchir de tout chagrin i et à te
renvoyer sans aucun sentiment d'irritation dans le milieu où
tu vas rentrer. De quoi, en eflet, l'indigner? De la méchanceté
des hommes? Reporte-toi à cette loi que les êtres raisonnables
sont nés les uns pour les autres, (pie la tolérance est une partie
de la justice, que les hommes sont coupables malgré eux?,
que des milliers d'entre eux, après s'être fait la guerre, après
avoir soupçonné et haï, après avoir été percés de coups,
ont été couchés par la mort et réduits en cendre; réfléchis à
tout cela et cesse de te plaindre. T'indignes-tu de la part qui
t'est faite dans l'univers? Rappelle- toi le dilemme: ou une
Providence ou des atomes, et aussi par combien d'arguments
on t'a démontré que l'univers est comme une cité?. Est-ce
encore ton corps qui va te tourmenter!3 Réfléchis que la
pensée, une fois qu'elle s'est reprise et qu'elle connaît sa
propre indépendance, ne se mêle en rien aux mouvements
doux ou rudes du souffle vital*; pense à tout ce que tu
as entendu et appuyé de ton assentiment sur le plaisir
et la douleur. Vas -tu donc te préoccuper de la gloriole?
Mais vois avec quelle rapidité tout s'oublie; vois des deux
côtés de toi le gouflre infini du temps, la vanité du
bruit que nous faisons, l'inconstance et l'incertitude de la
i. 7ra<iav aJTY,v àitoxXuaai. — Cette proposition, comme Ta montré Gataker, n'a
aucun sens : a-jrr(v ne peut pas se rapporter au mot '{/vr/v, qui n'est exprimé ni
dans cette phrase ni dans la précédente; d'ailleurs, <|nr/j)v âiroxXuaac ne signifierait
rien. La suite des idées appelle un mot tel que àvtav, adopté par Gataker, Xu7rrjv
conjecture de lleiske. La plupart des manuscrits donnent àrcoxAuffai, qui, avec Xump
pour complément, peut à la rigueur s'expliquer. Les manuscrits A et D donnent t.t,o-
xXeîaat, qui ne vaut guère mieux. Je propose oticoXOo'ai.
2. [Marc-Aurèle accepte donc, ainsi que la généralité des Stoïciens de l'époque impé-
riale, la proposition socratique : « Nul n'est méchant volontairement. » 11 revient même
assez volontiers sur cette idée (cf. II, i ; VII, G3 ; VIII, i!\ ; XI, 18, 3°; XII, 12), et, en cela,
s'écarte encore (cf. II, 10; IV, 21, et les notes) de la doctrine primitive du Portique :
Stobée atteste, en effet (Ed., Il, 190), que les Stoïciens condamnaient l'indulgence qui
suppose que la faute est involontaire, « rckvtmv â[xap7av6v7o>v ::apà tt,v loi'av xocxlav. » En
laissant l'homme responsable de fautes qu'ils imputaient à sa méchanceté, Zenon et ses
disciples pensaient empêcher que la passion fut une excuse; en revenant à la tradition
socratique, Épictète et Marc-Aurèle rotent d'accord avec leurs théories déterministes]
3. [Cf. la pensée suivante. ]
4. [Gouat : « Aux mouvements légers ou violents du souffle vital. » — Ces « mouve-
ments », que d'autres passages, que la phrase môme qui précède celle-ci (xà (Tiou.aT'.y.à)
attribuent au corps, sont les plaisirs et les douleurs. 11 n'y a aucune pensée où Marc-
Aurèle ait plus nettement confondu le «souffle» et la «chair». Cf. infra V, 2G,
l'avant-dernière note, où sont rassemblés les textes qui définissent la sensation.]
il n i i |)| MAH< \ i i i i i
renommée i la pcl >|( « «ir I endi oil où elle eel cir<
Toute la tei i e n'e I qu'un polnl quelle pU
|r petit ooin où non - habit m ' i i dan wbii n
noti i b( «i1"" N alenl il ' Enfin ion vim loi rjm- lu ..
en toi même un petil domaine où tu peux le retira ivanl
lout, ne t'agite pas, ne te raidi pi ol libn con le
choses virilement, en homme] en citoyen en être né poui
mourir. V <>i<i maintenant les deux i les d< [U(
lu dois avoir l<* plus présentes à l'esprit poui j réfléchii
D'abord, les choses ne touchent pat l'ftme ell<
rieures el Insensibles; nos Iracac ne viennent que de I opinion
que nous nous en faisons. En second lieu, tout ce que tu vol
autour de toi se transforme presque instantanément et ra ne
plus être; de combien de clumucmcni- n".i> lu p;is <'i<' l<
témoin? Songes > sans cesse. Le monde n'est que métamoi
phus(,;; la \ ic n'est que Ce qu'on en pense.
4
Si 1 intelligence nous est commune à tous, la hnson, qui
fait de nous des êtres raisonnables1, nous esl ;m- n
i. ton è?' r.aîv Soxotfvrcov. — Ces mots n'ont pas de sens. I îataker lisait :
coxo-jvxtov. qui esl acceptable. Mais Soxouvrwv affaiblit L'idée. J'aimerais mi
jxo'jvt(ov (cf. X, 3'»). D'autre part, le futur èi?aiveff6u.evot, qui - ntre plui loin,
semble indiquer qu'il B'agil de la renommée qui suit un homme mort,
de ce que Marc-Aurèle nomme &artpoçi)uïa. Je ne serais donc pas éloigna de I
v<7-:£po?Y)(xo'j7(ov. Rapproches U m expressions employée! dans une peni
y; 8è çrj{irj otxptTOV (II, 17).
2. [Nous retrouverons plus loin cette maxime | \ '. ig ; cf. une 1 ariante, VU te).
On verra (\ I, 11) que Marc- Vurèlc a parfois jugé bon de l'atténuer. I< i. DOQl d< rons
entendre par M âme >> la raisou ou la « pensée », que t<mt à L'heure 1 cf. deui aoU » plus
haut) il distinguait si nettement du souflle vital. (Sur la valeur de ôv/ tte
opposition, cf. injra V, 33, note finale.)]
3. [Posidonius (dans Stobée, Ed., I, ^ 3 2 - ^ 3 (3 ) distinguait quatre types de changeai
(\Lz~xoolxi), ou, comme il disait encore, de morts et de naissances : trois sont quanti-
tatifs, et n'affectent pas la matière elle-même, qui ne saurait, en etl- t. ni ruitre ni
diminuer, mais les déterminations (icoiofc ou -o:à) de la matière, c'est-à-dire èta - el
choses. Ce sont: la combinaison ((jlyyya'.;), la division iv.a I la dissolution
(àvdtÀuoiç). Ln seul changement peut atteindre la matière même, c'e-t le changement
d'état, ou (Vêlements (le passage de l'eau à l'air, de l'air au feu, etc.). Les Stoïci- 1
l'appellent àXXoiWt; : c'est ce mot que M. Couat traduit approximativement par
« métamorphose ». On peut, d'ailleurs, s'en tenir à cette approximation, si kXkm 7.;
ne garde pas dans ce passage son sens précis, mai> n'est pris par l'auteur que comme
synonyme de peTa6oXV), déjà employé à la phrase précédente.]
&. [Yar. : «par laquelle nous sommes capables de raisonner. 0 — Ici, Marc-Aurèle
distingue la raison en tant qu'elle nous déiiir't. et la raison en tant qu'elle nou-
gouverne. — Ce procédé de raisonnement était familier aux Stoïciens. Cf. Cicéron, de
Legibus, I, 12, 33 : quibus ratio a natura data est, iisdem etiam recta ratio data est: ergo
A. COUAT-P. FOURMER. 'i
.*)() BIBLIOTHEQUE DKS UNIVERSITÉS Dl MIDI
mune; si cela est vrai, la raison qui nous prescrit ce qu'il
Faut faire ou ne pas faire nous est commune; si cela est vrai,
la loi nous esl commune; si cela est vrai, nous sommes
concitoyens: si cela est vrai, nous sommes membres d'un
même Etat; si cela est vrai, le monde est comme une cité.
De quel autre Etat, en effet, dira-ton que la race humaine
loul entière fait partie? C'est de là, de cette cite commune
que nous tenons l'intelligence [elle-mémej, la raison et la loi;
car d'où nous viendraient-elles? De même qu'en moi ce qui esl
terrestre est une partie [détachée] d'une certaine terre, que ce
qui est humide appartient à un autre élément, que ce qui est
souille, chaleur et feu émane d'une source spéciale» (car rien
ne sort de rien ni ne disparaît dans le néanta), de même mon
intelligence vient de quelque part3.
5
La mort est, comme la naissance, un mystère de la nature :
l'une se fait par la combinaison des mêmes éléments dont
et lext nuae est recta ratio in jubendo et vetando. Marc Aurèle, on le voit, a supprimé ici
l'un des membres du sorite : il ne nomme pas la raison droite. \
i. [Marc-Aurèle semble négliger ici les ixXXouoceic qui transforment les corps des
animaux morts en sang vivant et même (infra IV, 21) en air et en feu. Il fait de
même lorsqu'il s'approprie (infra VII, 5o) les vers du Chrysippe d'Euripide : on
dirait qu'entre la naissance et la mort il a oublié la vie.
En réalité, cette objection ne porterait guère que sur les expressions employées :
encore Marc-Aurèle a-t-il indiqué à l'avance dans quel sens il les prenait. Les mots
« vient » et « source » — qui traduisent d'ailleurs exactement le grec fjxei et injfTJ; —
marquent ici moins la filiation que l'appartenance. Notre âme dérive de l'àme du
inonde en ce sens surtout qu'elle en fait partie. C'est une façon de parler panthéiste.
Au milieu de la pensée, le rapprochement des mots [X£T£-/£tv et sxetOsv qui en
éclaire toute la fin; dans la dernière phrase, l'équivalence non moins significative
d'àicofie(iiptOTac et d'r,xsi 7io0kv ne sauraient nous étonner davantage que le début
d'une des pensées suivantes (IV, 1/4): «Tu es né partie du tout: tu disparaîtras dans
l'être qui t'a engendré. »
Au reste, celte dernière expression et ici même les mots f,*£i et Tzrtyrt; sont vrais à la
lettre, si je me considère non dans mon état présent, mais dans mes origines les plus
lointaines. En remontant, suivant le conseil d'Épictète (Diss. 1,9, 4), du père à l'aïeul,
de l'aïeul au bisaïeul, et ainsi jusqu'au premier ancèlre et jusqu'à la raison séminale
d'où il est issu, j'atteins la raison universelle et la première terre et le premier souille
de feu. De chacun de ces éléments primordiaux quelque chose a passé en moi sans
changer, si l'hérédité des traits, du geste, de la santé, de l'intelligence n'est point un
mythe; et de ce que j'ai reçu à ma naissance quelque chose aussi dure en moi jusqu'à
ma mort, qui me permet de me définir: c'est ma tco:6t/j; (IV, i£, en note). Si pau
que soit celte 7toiôtyj:, au milieu de toute ma matière qui s'écoule, même la matière
de mon âme, c'est elle seule en moi qui est moi... Marc-Aurèle a cru pouvoir ici
négliger le reste.]
a. [Conjecture de Nauck.]
3. [Terre, eau, air, fou, voilà, pour la physique antique, les quatre éléments. Ici,
Il N I I Dl M \ I' \ I I I I I
l 'autre n'esl que la déc< tmp< igilion 1 1 n ) a 1 1< n là d I
(ni i on ne ail à rougii c( la ri i I nullement < rmti ,ui
loi de l'être i alsonnable h au pi. in <l< i iiuii< >n
6
I «si une oécei site <!<• la natui a que i n d<
e pè< e agissent ainsi ( lelul «pii ne le reul pas \ eul qui la
figue n'ail pas <l<i suc. Pour conclure, rappelle loi que dans
un temps très courl i<>i <i cel autre voui erei morl
après, il ne restera même plus votre nom.
Marc turelc lei retrouve en noua, i<>us les quata te L'inb lli ,• i'il met
pari : M semble que celle i I ioii constitu< e d'un i inqui< ment, plui - ihtil
ci plus pu i que i<- fou lui même. I oraqu'il ad ipte ainal
palélicienne de la quinta nature cf. en< orc \i. 10, ei la note Bnali », afai iurèl
irter de i.i tradition de Zenon, qui, au rapporl de I i
rail cette notion superflue : ttatuebai enim ignei naturan rie
gigneret, et mentent atque sensas. En marquant enta !• feue! le (feu artiste un
rence «pic peut-être personne avant lui dans L'école n
l'auteur des Pensées voulait, sans doute, épurer l< i on< i pi du di< u h
l'a, d'ailleurs, jamais conçu comme absolu menl Immatériel; il n'a non plus
prétendu, comme txiatote, que la raison non- rlnt «lu dehors (I >po
lorsqu'il disait, comme ici, en langue de panthéiste, que toul en nous rient 'lu
dehors. Au contraire, il s'est représenté l.i raison (V, 53) comme alimen
exhalaisons du sang, de même que les astres p;ir les émanations de la mer. Et cela
est la pure doctrine du Portique. — Il n'en est p.»- moins vr.ii qu'en dédoublant
rame, il a été insensiblement conduit à la mutiler. C'est ainsi qu'asi V,
33, note finale; \l, so; 14, etc.) l'opposition que sa pi< plu a cl
entre le « souffle ou la flamme», c'est-à-dire vraisemblablement l'âme animale, et le
principe directeur semble rapprocher celle-là du corps lui-même; et qu'une 1
il les a véritablement confondus il\, 3, .v note). De là, certaines incertitudes,
certaines contradictions de sa doctrine.]
1. sx T(ov aOrcov aTO'./£Ûov s!; toc-jt*. — Gataker a remarqué qu'il y avait une
lacune entre erotx&tcov et elç. H propose d'ajouter les mots *ori Steacpiorç ou mieux
SiàXuotç) si; vovra. Le sens de la phrase est, d'ailleur-, très clair. La même
rencontre plusieurs t'ois dans Marc-Aurèle, notamment \11I. iv. et \. r, avec le mot
G'.aA-Js^Oai.
[La pensée i4 de ce même livre confine également à celle-ci. I
nale », Xôyo; Gr>zpu.y.-'.y.ô;, dont il y est question (voir la note), doit être pourtant dis-
tinguée du Xôyo; Tr(; fcapotexsUTJc que M. Couat traduit ici par " le plan de sa
constitution». Le même mot dans ces deux expressions me parait avoir deux accep-
tion différentes. Dans la première, Xôyo; a garde le sens de «raif ians la
seconde, il a pris un sens dérivé (cf. IV, 13, en note), que ne lui donnent pas les
dictionnaires du grec classique, mais qu'on trouvera dan.- les dictioi itins au
mot ratio. Le Xôyo; ei?ep(iaxixo; est une réalité matérielle, une foi g isaxtb —au
moins pour Marc-Aurèle, que rebutaient les subtilités de la physique, et qui de\ait,
comme Sénèque (tid Lucilium, CM11), trouver fastidieuse et absurde la que-tion de
savoir si le bien est corps, ou si les vertus sont des animaux, le ; -asa-
(FxeuYj; n'est guère qu'une notion ou un concept.
Le contexte, les mots tb zHr,; -Co voepâ Zoho m'ont paru imposer cette interpré-
tation du Xôyo; tt(; icapa<jxevf,;, bien que la ressemblance des noms lui prélat une
parenté soit avec le Xoyo; oicep(iaTixéç, qui est à l'origine de l'être créé et appartient
5 | B1BL101 m- <h i DES I M\ i RS1 i Ëfl DU M 1 1 >l
7
Supprime ton jugement, la proposition : a Je suis lésé, »
<^t supprimée; supprime la proposition: « Je suis lésé, » le
dommage lui-même est supprimé.
8
Ce qui ne rend p;is L'homme pire ne rend pas pire sa vie
el ne lui cause aucun dommage ni extérieur ni intérieur.
9
La nature, en sa providence, est obligée d'agir ainsi».
10
Tout ce qui arrive arrive justement ; tu t'en convaincras par
un examen attentif; les choses se succèdent, je ne dis pas
seulement dans un certain ordre, mais suivant la justice,
comme si quelqu'un nous les attribuait d'après notre mérite.
encore à son auteur, soit plutôt avec la xaTa<r/.£vio"ao-a S-jvafLi; (VI, 4o), qui persiste
— comme la itoioVqc (cf. IV, i4, note 2) — dans les œuvres de la nature. Le contexte
aurait pu sans doute aussi m'aider à modifier dans la traduction le mot « plan », qui
semble un pléonasme à côté de «constitution». La constitution, en effet, telle qu'on
nous la définit (infra V, 16, 3r note), est elle-même un plan. Il est vrai qu'à l'usage
le sens du mot s'est animé, et que ce plan (infra VI, 44, note finale) est devenu la
nature, et la nature à l'œuvre. Mais môme si l'on veut laisser ici à la « constitution »
son sens primitif et tout abstrait, il serait facile, en se laissant guider par 70 èÇrjç,
d'entendre par Xôyo; « les conséquences logiques » ou simplement «la logique» de
celle-ci.
Avec M. Couat, on le voit, j'interprète le mot icopaffXeuT), qui, dans les Pensées, est
un à-a;, comme l'équivalent de xotTotoxeui); ou plutôt, comme le mot rcorpà a été
exprimé deux fois dans la ligne précédente, je suppose une erreur du scribe et je
corrige le texte. D'après Stobée (II, iG4), la wapawxev»] a chez les Stoïciens un tout
autre sens: c'est une des formes de l'ôpur, raisonnable (supra III, iG, 3e note); on la
définit «action préliminaire», icp&Çic rcpb Tipàçîu);.]
1. [Couat : « La nature de l'utile est obligée défaire cela(.D). » — C'est la même
idée qui est exprimée, avec les mêmes mots essentiels : àvay/ocîov et rroa^ipov, à
la 3' pensée du livre II (3* phrase). Ici, le texte doit être altéré. Il est difficile
d'admettre f, 70C T^a^ipovTo; yôo-'.;, « la nature de l'utile,» au moins dans une phrase
où Nature serait représentée agissant (z-iniz 7io'.eîv) : dans un pareil assemblage de
mots, on peut dire que puai; ne compte plus (cf. II, 1 : -:zbztûprtv.o>z rr,v pfatv roû
àyaôoO, 8tt xaX6v, c'est-à-dire 70 àyaObv 0:1 çjtsi xa/.ôv); il est plus difficile encore
de supprimer 70O d'jijL^ÉpovTo: (ce qui ferait de ce passage comme une glose de la
pensée G). Le respect du texte nous interdit également de déplacer ces mots pour y
joindre gàpiv ou Evs/.a. Bref, on ne peut guère, à mon sens, tenter ici qu'une conjec-
ture,— supposer un participe disparu entre (T'jjjl? £00770; et ç-j<rt;. J'ai lu: rj toO
crv>u.^pipov7o; vpov7^ojo"a yj<7\.;. La ressemblance des mots o*,j;j.y£oov7o; et cppov7c^o'jo*a
a pu faciliter la chute de celui-ci.]
i-i n m D1 mm URfeU
Continue donc d'être attentif comme auparavant quoi que
lu i Lu ir dam la pen ée d 6ti e homme de I
conformément t l'idA exa< te de l'homme de bien
cciic règle <'ii lou le a< le '
il
Si tu reÇOil une oilensr, ne l.i |U^' |>"^ euinuir «'lui <|ui !«
la faite, ni comme il veul que lu la 1 1 telle
qu'elle es! en réalité.
12
Il faut toujours te tenir pré! ;i deux chOSOi : d'abord
Caire que ce < | m i t'esl suggéré, pour l<' bien det bomm< pai
la raison, notre reine el notre loi"'; ensuite, .' changer d'à
i. [Var, :« mets toute ton énergie à observer <
.i la préposition -■. une acoeption insolite La mol
Pensées (d'après VJndex do Stich), n'y a que troii foia(V, 35; \l \. IV
»i l'on compte ce passage le sens d*« action ».]
a. [Var. : •« qui règne sur nous et noua Impose m loi. - De qui Ique fa on qu'on
la traduise, cette périphrase est évidemment ivnonvmedu mol ncipe
directeur), ai familier aui stoïciens. Bien d'autres textes cl - !'■
valence dea termes y)ysu.ovntbv et X6vo< (cf. infra l\, as, et la seconde note): H convient
«l'observer, cependant, que la raison qui noua dirige ne se distinj de notre
liberté (VI, S; \l, ao, etc.), — en d'autres termes, qu'elle est autonome.
Je rejette comme trop subtile et équivoque une interprétation de Indi-
quée par II, Stich dans V Index qui termine son édition dea Peu
est présenté comme un aTrx; tipquivov, comme l«' nom d'un art <»u d'uni
tique, apparentée, je suppose, à la logique et à l'éthique. Je sais bien que le d
est généralement omis à cote des adjectifs en -txéc; je sais aussi qu'on rencontre
Marc-Aurèle (VI, 35) l'expression >.oyo; tfjç 'i/y^:. Mais quel - rail cet
Marc-Aurèle ne veui paa oublier les règles fondamentales? L'arl d
dese donner des lois, ou l'art de gouverner et de donner dea loia La phi] - ; nie ou
la politique, une certaine politique à l'usage des empereurs? De ces deux lut
tationa, la seconde est la seule qui laisse aux mots leur sens propre; mais de éc-
arts le premier renferme l'autre et c'est, à vrai dire, le seul qui compte pour
Aurèle (cf. infra IV, 3i, la note au mot re^viov).
C'est Suvautç que je n'hésite pas à sous-entendre ici, bien que M.,i -Aurèle, :
désigner une fonction de l'âme vivante (VI, i5 : KvascvevoTOCT) èuvaut;, ! ition)
ou une faculté de l'àme raisonnable (111, 9 : u7coXtjirrtxt] 5uvat|u%, le jugement), exprime
à l'ordinaire ce mot, et, lorsqu'il ne l'exprime pas, n'emploie jamaia qu'au neutre
(IV, 22 : to xaTaXrjTCTcxov, — VIII, 5o : to xpoaipeTixov, — el partout ib r-
l'adjectif qui l'eût accompagné. Ceci admis, on peut proposer l'expression
ftaKFiXiXTjç /ai vo[io6sT'.xr(; Xoyo; comme un exemple de syntaxe curieuse et raie. Le
rapport que marque le génitif entre vo(xo6enx-r\ç et >.oyo: est un rapport d'identité.
Nous avons vu plus haut (IV, 4, note 2) Marc-Aurèle. dans la même pensée où il pro-
clame l'unité de la raison, de la loi et de la cité, distinguer la raison en tant qu'elle
définit l'homme, et la raison en tant qu'elle le gouverne : dans la première acception,
elle n'est encore que la raison et ne s'appelle que raison ; dans la seconde, elle est
déjà notre raison et se nomme aussi le principe directeur (voO; v)ve|M*v, 111, iG;
r,Y£[j.ovix6v, partout), ou législateur et souverain de chacun de nous. Ici, sans doute,
les mots pamXiXYj; xai voiioôstixt,; définissent le rôle du Xévoç, et nous entendons
.V| BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS M MIDI
s'il se trouve quelqu'un qui redresse ton jugement et te
détourne (l'une certaine opinion. Mais ces changements ne
doivent jamais se produire que par l'effet d'une conviction de
bien, eux, qu'il s'agit d<' noire raison : mail pourquoi ces génitifs I es mots
6 BaffiXsuttv xo >'- eussent, i ce qu'il semble, exprimé beaucoup plus
simplement la même Idée,
Les grammairiens appellent appoiitif ou explicatif le grénitif de cet! . qui m
rencontre — rarement, il eal rrai — ches les meilleurs auteun >u latins. En
grec, il semble réservé aui Infinitifs pris substantivement (j j icXr,afov
-/-.(lit Platon dans le Phêdon: '.17, A: autres exemples dans la Synta
Kùhner <•/ Gerth, t. 1, p. a 64, n latin, l'usage en esl plus général (i>m Murena} 10 :
aliii virtatibus eontinentiae, gravitatis, justitiae, J'ulri, te consulatu dignam palavi;
— autres exemples dans la Syntaxe de Draeger, I \ p. 166-467), — et ce peut être i<i un
tour de sa langue maternelle que Marc-Aurèle a tait passer dans ^a langue d'adoption.
Le mot >o- 0; te prôtaii sans doute mieux qu'un autre à une construction de cette
nature.
Il faut considérer, en effet, que la philosophie (et surtout le Stoïcisme) en a multi-
plié les emplois; «pie, des deux sens fondamentaux de ce mot (discours, raison), elle
a du singulièrement développer et modifier le second. Aoyo; sert à former deux séries
d'expressions stoïciennes. Dans les unes, il garde rigoureusement le sens de raison, et
il est qualifié dans cette acception par des épithètes parfois fort imprévues. Ce qui esl
plus remarquable dans toutes les expressions de cette série, c'est le rapport de l'ad-
jectif au substantif : les divers aspects, les déterminations de plus en plus précises
(cf, IV, '1) de la raison universelle nous sont présentés comme autant de raisons
spéciales et différentes. Dans les Pensées, outre Xéyoc opôô; (III, G, 12, etc.), la «raison
droite», et aussi la raison nue, qui est une expression classique, ô icpoo'TaxTixôç...
).oyo: (IV, 4), «la raison qui nous commande,» c'est-à-dire la raison en tant qu'elle
nous commande; 6 icoXtTixoç X6yoç (IV, 29), «la raison qui fonde la cité,» c'est-à-dire
la raison en tant qu'elle fonde la cilé; 6 <T7rEpu.aTiy.b; Aoyo; (IV, i£), « la raison sémi-
nale, » c'est-à-dire la raison en tant qu'elle organise le germe vivant et en détermine
l'évolution, appartiennent à cette série. — Dans un autre groupe d'expressions, où le
déterminant est un génitif, comme 6 Xtfyo; xr,; icapocexeuTJç (IV, 5), « le plan, d ou la
loi, ou la logique, bref le développement rationnel a de notre constitution » ; ô Xéyo;
tV ; -ïyyt\z (\ I, 35), «les règles fondamentales, » c'est-à-dire le fond rationnel «d'un
art » ; 6 aoyo; xr,; puffeedç (VI, 58), «les lois de notre nature » ou «de la nature uni-
verselle », c'est-à-dire la raison qu'elles manifestent; 6 Xéyo; rvjç icrfXecoc (II, 16), « la loi, »
c'est à-dire la raison «établie dans la cité» sous le nom de loi (texte qui réunit les deux
mots X6y(j> xct\ Qs<t[ag>), — il semble naturel de donner au mot Xôyo; un sens dérivé
(plan, règles, loi). A ce compte, ce n'est pas dans un dictionnaire grec qu'on trouverait
le plus sûrement les acceptions dernières de Xoyo;, mais dans un dictionnaire latin, à
l'article ratio. J'ai, d'ailleurs, essayé pour les exemples qui précèdent de rattacher le
sens dérivé au sens primitif. On pourrait dire en général, pour justifier la traduction
de AÔyo; par «loi », que la raison est impérative et active (supra IV, /1), et rappeler la
définition que Marc-Aurèle lui-même (infra VII, 9) donne de la loi : Xo*yoc xv.vb;
TïàvTwv T("bv voepûv Çcocdv.
En somme, qu'on parle de telle « raison séminale » ou des « lois de notre nature»,
c'est toujours un aspect de la raison universelle qu'on envisage. Il arrive que la
même idée puisse s'exprimer à la fois dans les deux séries. Il est évident qu'en fin de
compte il n'y a nulle différence de sens entre 6 fcoXixtxbç Xoyo; et 6 Xoyo; rîj; aréXeca;,
qui pourtant ne s'expliquent pas de même. De tels exemples ont dû aider à la confu-
sion des deux tours, en des cas où elle était moins aisée à justifier. Ainsi, lorsque
Marc-Aurèle assimile (AI, 1) à la raison droite (Xôyo: 00O0:) la raison qui commande
sous le nom de justice (Xdyoç xr(: 8ixato<ruvr)ç), on ne peut supposer, sans mettre un
jeu de mots assez vain en cette pensée profonde, que l'auteur ait fait varier, à une
ligne d'intervalle, le sens de AÔyo: : on peut soutenir, au contraire, que le génitif ttjç
âixotioauvT)ç représente ici l'adjectif qui devait répondre à ôphoz et qui a fait défaut à
Marc-Aurèle; en d'autres termes, que ce génitif est explicatif ou appositif. Virtus
,., , ! | |,l M \l.< M Ml I I
justice ou d'utilité générale ' non i» iree que tu an itt ndi
de l'honneur ou du plaiali
43
Possédai in la ralaonî Je la possède Pourquoi d<
nc ((n iei in pa ' SI aile rempli! m fonction, que ireui lu
de i > 1 ■ i
M
Tu es ué partie «lu Toul ' Tu disparaîtrai dam l'être qui
engendré, ou plutôt tu rentreras, à la luite d'un changement,
dans sa raison séminale
cmitmciititif, ;i\;iit «lit CiofoOD, BXfti fa m«nt doméme. Pour M« r ■ \ un I- . I %
i i : i lupéi d'avance. L'expression est noi malt
une phraae où, ne l'oppotanl point k , alla p ni m kraduir*
de la justice » (VI, Bo) .
Mnsl expliquée dam im divers emplois, peut-être i ton toui t i
un peu moini étrange celle qui a provoqué cette longue m
i . La sens général de oette phrase n'eat pas douteux, mais le fa île i n
J'ai supprimé dans ma traduction Les mot- : /.*■. -x r.*-
i qui ont tout l'air d'une glo*
S. [Gouat : -< Tu as été introduit dans le monde couine- 110
traduction laisserait croire que nous venons d'ailleurs; aUeeal en cont radie IJ m
les mots : a tu rentreras.» — Pierron, Barthélémy-Saint- H i la ire cl M Mi lia il
veut ici : u Tu as subsisté. " — Subsister e>t la transcription en français plutôt que Is
traduction de &*é?n£. Exister, que préfèrent plus loin les mêmes tu du Ci i3),
est, an effet, plus exact, à condition toutefois qu'on base équivaloir le présent du
verbe français au passé du verbe grec ((vuxtVrrrvi j'existe), liais, rant
plus convenir aux morts, Pierron et ceux qui l'ont suivi -ont obligés, dans la m
phrase où svj7iÉ<mr)v signifie :f existe, de traduire vrj-ïn-.r^z'' par : ils ont existé.]
3. Var. : «Le système de sa création. » Autre var. : << son principe générateur.
— Des trois variantes, j'ai préfère l'expression la plus barbare, qui semble être i bes
les philosophes la traduction consacrée de anip{xaT».y/o; V070;. Du moins n'est-elle
inexacte. Elle demande à être définie. Selon Zeller (1113, p. 159), il faut entendre
là la raison universelle, en tant que force de la nature qui agit et crée, que l'on con-
sidère le monde dans son ensemble ou les individus et les choses qui le consli tuent
Dans le feu primitif, il y avait le germe (TTrisua) de toutes choses et Is r
qui les en a tirées; comme le monde ne cesse de se transformer, que son histoire con-
tinue, il porte toujours en lui, à quelque moment et en quelque état qu'on le coiim
dère, sa « raison séminale», autrement dit la loi de son évolution dans le germe du
monde à venir.
La raison séminale est, d'ailleurs, un principe irréductible, où la raison et 1h
semence ne se séparent pas. Elle est dans tout germe, dan> la semence de feu d'où
sorti ce vivant, le monde, dans un sperme animal, dans un jzrain de blé, comme une
partie plus subtile, — rcvcOua xa:' oixxtav, disait Chrysippe (dans Di< _ rce.
VII, 109) , — mais c'est encore de la matière. Et l'on peut, dans tou> les cas, dire d'elle
et du germe ce que Posidonius (cité par Stobée, Ed., I, '1 3 G ) disait de la matière et de
sa première détermination, l'individu (té ts tio-.ôv ioûo: xr. ty.v ouefov) : Gfl n'eal
pas la même chose, et ce ne sont pas pourtant deux choses différentes; ce n'est pas la
même chose, voilà tout. En effet, l'une fait partie de l'autre et occupe le même lieu :
deux relations qu'on ne trouve pas entre choses différentes. »
. De fait, c'est, avant tout, la raison sémiuale qui détermine la matière : il faut que
.r>f) BIBLIOTHÈQUE DBS UNIVERSITÉS M MIDI
15
Beaucoup de grains d'encens sont déposés sur le mfme
celle-là te retrouve toujours soui celle-ci, puisque La matière do cesse de se kransforn
el il faul <jii'j1 iTv ait qu*une raison séminale au monde, puisque i infra IV, 4e) - l'uni-
vers nfest qu'un seu| être, n'axant qu'une matière et qu'une àme >■. On rencontrera,
cependant, en d'autres parties des Pensées, toit le pluriel de cette expression (Vf, a'i :
itixoùc loil 1»' pluriel d'une périphrase équivalt nte(!Xvi, in fine: )
t que, toul «'tant matériel, même ce qu'on distingue de la
matière, tout esl quantité, <it quantité finie! donc toul se partage, La raison séminale
comme la matière brute (cf. infra \ll. So), si l'on peut distinguer, bien que le monde
soit un toul el la matière Instable, les déterminations «le la matière du monde, on
peul attribuer à chacune comme principe antérieur à elle une raison séminale.
qui n'est qu'une partie de la raison universelle : si ce qu'on appelle notre vie
esl la durée d'une de ces déterminations, pendant toute notre vie persiste en non* la
raison séminale qui nous a fait naître et qui est devenue une partie de notre identité.
Car. pour la matière, elle ne cesse de circuler entre les mille et mille déterminations
dont l'ensemble est la forme du monde, sans se fixer jamais, ne fût-ce que ce temps
-i < ourt qui est une vie.
Nous verrons plus bas (IV, si, i" note; V, 33, note finale ; V, a3, a* et 3* notes) que
certaines parties de l'àme elle-même sont instables : celle-ci, qu'on peut définir
(infra IV, si, dernière note; IV, 4o, i" note) le « principe efficient et formel», ou
plus simplement la «cause» (alvia.) du corps à un moment donné, — j'ajoute ces
quatre mots à cause des renouvellements incessants qui se font en elle, — est en
réalité une somme (X, 26), celle des «causes» (alrîat) particulières qui ont fait
l'homme tel qu'il est en ce moment. Certaines de ces causes seulement demeurent
en nous (Posidonius, dans Stobée, /./.) de la naissance jusqu'à la mort (&irà tt,;
yr/ETso); [tlgpiTTJC àvaipéaeto;) : ce sont elles vraiment qui nous définissent; c'est en
elles que réside notre identité (toi»; ocvtov; qu&c thon, ibid.), non dans l'àme (ou
«principe efficient») tout entière, et encore moins dans le corps (ou «matière»
inerte). On les appelle la «qualité», si ce mot peut traduire le grec 7:01677-,;, et s'il
peut être de mise dans un système matérialiste.
On me pardonnera ce développement accessoire, s'il peut permettre de préciser
la différence de sens qui sépare trois expressions souvent considérées comme syno-
nymes : Aoyo: oicepu.aTixéç, iroidr/);, atrta. La « raison séminale » est la première des
«causes » stables qui feront l'àme et l'identité (ou la «qualité») d'un être futur:
c'est un y6vo; svosr,; yevéffeo);, dit Plutarque (Quaest. conviv. II, 3, 3, 4). Elle appartient
encore à l'être créateur; c'est son pouvoir, et c'est l'être à créer tant qu'il le garde en
lui. C'est (et dans ce sens l'expression est ordinairement au pluriel parce que l'homme
peut avoir plusieurs enfants) une des puissances (Suvàusiç) ou facultés que les
Stoïciens distinguaient dans notre àme (Zeller, III 3, p. 160 et 198), conçue comme
une réduction de l'àme du monde : ils disaient que les « raisons séminales » sont
détachées de toutes les parties de l'àme et recueillies dans le corps tout entier ('Zeller,
III3, p. i5o, note 1; 102, note 2), qu'il s'agit d'un homme ou de l'être unique. —
Par opposition à celles-ci, la icoién); (ou « qualité ») détermine l'être créé, le distingue
de tout autre, le distingue et l'affranchit même de son père, le distingue mais ne
l'affranchit pas de l'être universel, dont toute créature n'est qu'une partie.
C'est lui, on l'a compris, que, dans le passage qui nous occupe, désignent les mots
■WTJiavrt (« l'être qui t'a engendré »). A la fin de la pensée, le mot \uxz60\r\ est
un terme générique. Le changement qu'il désigne ici — qu'il se fasse d'un seul coup
ou par degrés (cf. infra IV, 21) — est l'inverse de celui qui nous a donné l'être et qui
avait consisté dans un passage de la «raison séminale » à la «qualité». Bien que
distinct des changements incessants qui font le cours de la vie, et qui n'affectent en
nous que la matière, mais nous laissent notre identité, ce changement total — la
mort — ne doit pas nous effrayer plus que les autres, si, comprenant que l'identité
n'implique pas l'indépendance (evuwloTTjç <L; [xépo:), nous nous sentons solidaires du
monde et mettons toute vie en lui. Ainsi comprise, la mort n'est pas une disparition
Il, Il 1*1 M M'.' M m M
autel ; l'un > tombe plu l A I auti e plu lard il n'j i II
aucune difli 1 1 noe ' .
16
\ eux 'n qu en <ii i j"1" ' il le li aitenl de d i \ qui
irdenl maintenant comme une h I d
rc\ icns au i dog mes el au culte de le pal on
17
Ne fait pus comme si tu devais vivre dix mille eui La
nécessité esl suspendue au dessus de i«>i; lanl que tu rifj lanl
que tu le peux encore, s<>i^ un homme de bien
18
Que (K4 temps tfajjne celui qui ne regarda pus ce que
(ivaçavMjfr^OTq) tbtolue, puisque U raison séminale qui n<m> reprend . -t < t- i n-n.- ,
puisque I»- fou * i i ^ in où toute Ame retourne esl If source unique des êti
>v Oeov Kitoeotfoovrat icOp rs^vtxbv
xaO* oO; Ixaera yfvrrai (PluUrque, /'/'/<•. pou*., I.
On trouvera plusieurs fois dans Ifarc-Aurèle (el notamment \ il les
notes) le développement de cette pens<
i. | \ "ar. : «Gela revient au même. »]
s. [Couat: a En dis Jours tu sembleras un dieu I oeui qui... i — Dans !•■ I
grec de cette pensée, on lil non: rovroiç... o:;..., mais Bwrofç... aie .. Or xvrot{ n'est
pas l'antécédent naturel de <•/;. Cesl encore à Lui-même que l'emp
ne peut s'agir ici de toas ceux qui le Jugent durement (comment pourrait-il es]
conquérir la foule en dix jours par sa seule sagi h >; il ne s'agit même pas
semblablement de la cour, bien qu'on lise (à la lin de L'article VI, i ■• i que grâce à la
philosophie l'empereur pouvait se faire supporter de la cour; mail seulement d'une
certaine catégorie de censeurs, à Laquelle pense Ifarc-Aurèle en écrivant ces l ._
et qu'il lui su tli t — se parlant à Lui-même — de désigner par un vague pronom : Us...,
eux..., aJToî:... û C'est au lecteur à préciser Le sens de ces avrolc, -x-l- '.>■*. z,~
fréquents dans les Pensées, où ils ne désignent pas toujour» les mêmes
\ infra IV, 38, et la note; VI, 5o; VII, 3'i) : parfoi> même » \ I, 6, et la note», il faut
suppléer le pronom pour entendre le passage. — Ici, la fin de la phrase nous induit
à penser qu'il s'agit de certains Stoïciens; il est vrai que leurs éloges, outrés comme
leurs reproches, rappellent les exagérations de la foule. La foule dit déj l
Aristote : r, Oso:, :r, Ôtjoiov; et ces Stoïciens, dit Plutarque comme Marc- Au
vous font soudain de la pire des bètes un héros, un génie, un dieu : È;^
r, 8xt(x«v, r, Oso; èx fa)ptou roy xoexforou yîvoulîvq; (textes cités par Pierron, p. 33 1).
Mare-AurMe n'a guère de ces engouements et de ces colères. En gardant sur certains
points de doctrine son indépendance de pensée (cf. supra II, io, et la note; infra V. i3,
en note; V, 26, avant-dernière note; IV, m, dernières lignes de la dernière not
peul donc railler les Stoïciens de ce genre, et pourtant tenir à leur approbation... Est-il
même sûr qu'il les raille? Avant de le supposer, il faut considérer que le mot
àvaxa(i4rvlC (reviens) est, en somme, une confession, et se rappeler qu'à la dernière
pensée du livre III, Marc-Aurèle aussi compare aux bètes les hommes qui « souillent
le dieu qu'ils portent en eux ».]
3. [Couat : « si tu reviens à ta doctrine. » — Cf. III, 16, fin de la dernière note.j
4. [ Var. : « si tu te plies à leurs opinions et t'inclines devant leurs raisonnements. »]
58 BIBLIOTH&QUl DES UNIVERSITÉS D1 midi
BOD voisin a dit1, fail on pensé, mais seulement ce qu'il fait
lui-même, pour que son action soit juste e1 pure^! Oui certes,
voilà ce qui est bien : au lieu de chercher à voir autour de soi
i. Au lieu il'ài/o/'av, (ialaker propOM :0i/'// :av, qui Bit, 00 effet, bien pllll
conforme au sens du passage.
2. [Couafl : << ...ai ce qu'il fail lui-même eat Juste el purl 11 ne faut pai m plaire
a considérer autour de m>1 Les caractères i><»u^ on méchants, mais courir.. \
«...L'honnête homme ne doit pas considérer autour de lui les mœuri «le- autres,
mais courir..» \utre \ar. : ««...h n'es! pas conforme au bien de regarder autour
de soi les mœurs des autres; il faut courir... » — Ces trois traductions, dont aucune
mble avoir satisfait ^<>u auteur, correspondent à trois lectures différentes —
el presque également douteuses — d'un texte à peu prêt désespéré: i° [xr, yàp xh
àyaOov r, fléXav Jfloç ~zrj<:<>/ZT.znhx\, — r» os-, yàp tov àyaO'ov \irt StXXuv rt<irj; ftcpiâXé-
zET'jai, — 3» o-j v.x-.x xb àyaOov àV/.ow y/jo; -Ep'.oAiTtîTOat. Les manuscrits autres que
A, où manque une ligne, donnaient ces mots incohérents: r, /aTa tov àyaOov !j.r,
j;/av y)0o( 7I£v.;,azt:3<70:x'.. On voit combien s'en écartent les conjectures de M. Couat :
conde, d'ailleurs, n'est pas de lui: elle en réunit deux plus anciennes. AeÏ yàp
ayafôv est proposé dans l'édition de 177a (Lipsiae, adnotavit ftforus); c'esl M. Stich
qui a le premier voulu lire zXXwv au lieu de }xs).av.
Il est inutile de reprendre ici toute la note dans laquelle M. Couat s'excuse de
trois lectures. Aucune n'est d'une clarté ou d'une correction telle qu'on en oublie
la témérité. J'aurai plus loin à signaler l'insuffisance de la première; ton àya&ôv, dans
la seconde, est inutile et plat; dans la troisième, la périphrase o*J /a:à xh àyaOôv,
pour ou ôst, ou pour un simple |nj, que donnaient d'ailleurs les manuscrits, l'esî
encore plus. Ces trois conjectures cependant sont utiles en mettant en relief une
difficulté du texte manuscrit dont on ne s'était pas assez inquiété avant M. Stich.
Jusqu'à lui la sagacité des principaux éditeurs de Marc-Aurèle ne s'était guère
exercée que sur les mots r, xaxà tov àyotSoV Comme M. Stich, M. Couat est arrêté par
l'expression uiXav f,8o;. D'abord, je la voudrais au pluriel ou déterminée par un
article. Pour M. Couat, c'est le sens des mots qu'il ne retrouve pas. « Bien qu'on la
rencontre ailleurs (IV, 28) dans Marc-Aurèle,» dit-il en note, « cette expression, si
elle reste isolée, n'est pas à sa place dans la phrase dont nous nous occupons. L'auteur
des Pensées ne nous défend pas seulement de regarder autour de nous les mauvais
caractères, mais de nous occuper du voisin, quel qu'il soit. » J'ajoute qu'il faut
quelque complaisance pour accepter la traduction de jjiXav par « mauvais ». Si l'on
se réfère, trois pages plus bas, à la pensée qui commence précisément par jji),av r(8or,
on y trouvera l'énumération de plusieurs défauts de caractère. Mais la liste est
incomplète: il y manque le caractère envieux, l'indécis, le faible, et bien d'autres, et
relui qu'on appelle justement le mauvais caractère; en sorte que [léXorv r(6o; ne
saurait être pris pour un terme générique, encore moins pour une expression
consacrée et le sujet d'une définition per enumerationem simplicem (cf. la note à la
pensée IV, 28). Le sens de cette expression est donc encore plus restreint que ne
le suppose M. Couat: on ne pourrait même pas, comme il l'a tenté un moment,
opposer péXav à àyaftôv. Ce mot veut être changé.
Si vraiment il ne suffit pas, pour faire passer une locution aussi inexacte, de la
donner pour une citation d'un poète, la conjecture de Xylander, qui substitue à
l'adjectif àyaOov le nom du comique Agathon ('AyaÔwva), ne présente qu'un avantage
— un très grand avantage, si l'on veut — sur toutes les autres : le texte est rajusté
d'une main très légère; une seule lettre est changée à la phrase absurde des manus-
crits (car entre un O et un il, au moins dans la prononciation, la différence est
nulle). Mais cette correction est inutile si elle n'explique pas [x£>.av; plus inutile
encore, si on l'explique... en le changeant. Il est, d'ailleurs, toujours arbitraire
d'invoquer le témoignage d'un mort, dont il ne reste rien d'écrit.
C'est la correction de Xylander qu'ont traduite Pierron et M. Michaut; Barthélemv-
Saint-llilaire la loue en note. — Je crois très compromis le texte, tel que nous le
livrent les manuscrits, et je crains qu'il ne réclame quelque opération violente. Il
faudrait au moins changer fiiXav, sinon piXow r,0o:. qui a du être importé là d'une
|.| N I I t . I M V I • M II I I
(l.in l'a m 6 du pr< m li. tin cou ri i on nivanl la i
siins .i('\ 1er ' .
19 tt 20
i .-lui qu exalte l'idée d 6lébr< par la [x 1 \éi I
fl m <• pa i que chacun de ceu i qui m \ l( ndi onl de lui
mourra lui môme bientAl . puW i elui qui le i cm|
;i i n si de suite, jusqu'à c< ( i in toul ouvenii
passant par cea ftmea d'hommea allumées pu
Suppose même que ceux qui uviendronl de loi loienl
immortels el qu'immortelle aussi soi) ta mémoire en quoi
cela te touche i 11? Je ne dis pas seulement que cela ne peul
rire rien pour un mort; mais qu'esl ce que la louange, m<
pour un vivant, à moins qu'il n'en compte tirer parti? Pour
elle, tu négliges bien à torl l<* don même que t'a rail la nature
Tu \ as le voir en t'attachanl à un autre argument
des pages suivantes où [] étail en rubrique, el tirai un leni des !
\ ulgatc pré èdenl le mol
lutres teites de Marc- turcle qui développent la même id
indiquer la restitution plausible de celui-ci Le i rb
employé trois fois dans les Pensées V, I; VU, 55; IX, .. -lesdeui premièi
mi complément: -x (rjytfjiovfxà) orvi .. —
,-j iXXitptot TjYCjiovixâ, iXXà... >/:-: /a:' vM... Ces deux kexl
bleui fort: il y i .à comme une Formule qu'on voudrai! pouvoir ft la
présente pensée; rpé^erv &pObv > correspond déjà ai roui q i
pu tirer de ces indications, en exploitant l'idée de M. Stich, c'est la lecture :
:à ;iov à'X).fov y)YS(iovtxà icsf lat, qui ne rappelle que par les m
(AAAOOIS ATÀ60N) la leçon des manu- rit-, le n'avais pas le droil de m') atl •
le propose d'écrire ici : r, xàpta réS1 àyaOv/ [iT] [to roC r.'-.'t -x- r , total.
Dans une ligne piquée des insectes il étail facile à un scribe de lire xorrà pour i
plus loin N pour A, plus loin 11 pour M el ~ï'/x: pour puiXav. D'autre psurt
lacunes sont fréquentes dans les manuscrit- d<' Marc-Aurèle (cf. un peu plus haut
les pensées IV, 5, el IV, <i. — sans parler de la Ligne ici même omise | I L'on
n'hésiterait pas, si Ton n'avait à restituer ici qui' les deui articl a qui
pourra paraître étrange, c'esl la rencontre en une môme Ligne de deui -
fautes qui s'expliquent différemment. La menu4 difficulté s'est présentée pour M. (louât,
à la fin de la pensée suivante. En lui empruntant son procédé de correction.
j'invoque la même excuse.]
i. [Couat : « sans dévier de côté et d'autre. »]
a. [Couat : « par la mémoire de ces hommes qui apparaissent et disparais!
— J'ai adopté, après Pierron. et traduit littéralement la conjecture de Schulta :
à7TToa£vtov. Les manuscrits donnaient È-:or(u£vu)v. Ce mot, dont dilTère à peine la
lecture de Schultz, vient de la première phrase, et ici ae signifie rien. I. deux
fois exprimé «s'éteindre» n'est qu'une métaphore quant c'est d
s'agit. Appliqué a l'âme, peut-être contient-il plus qu'un s métaphore : une théorie
philosophique de la destinée humaine ^cf. infra IV, n, notes).]
3. Toute la phrase u -âps: yap... ro Àoiirév >> semble d'abord inintelligible, et elle
l'est, en effet, si on ne la rattache pas au paragr tphe suivant. Mais il suitit de faire un
seul développement avec les deux articles ig et 10, et de relier la phrase icdtpî
la suivante, pour obtenir, avec de légères corrections, un sen- possible. L'auteur veut
60 BIBLIOI ni <M I DES i M\ ER8I1 ES M HID1
Toul ce (jui est beau de quelque façoo que ce soit est beau
par soi-même d'une beauté propre dans laquelle l'éloge qu'on
en lait ne peut entrer comme une partie. Un objet ne devient
donc ni meilleur ni pire par le fait d'être loué. Cette vérité
s'applique même aux choses communément1 appelées belles,
telles que les Objets matériels, les <ru\res d'art. En quoi donc
la vraie beauté a-t-elle besoin d'être louée2? Pas plus (pie la loi,
que la vérité, <pie la bonté, que la pudeur. ï a t il une seule
de ces choses qui devienne belle parce qu'on la loue? en est-ce
l'ail d'elle3 parce qu'on la blâme? L'émeraude perd-elle de sa
valeur si on ne la loue pas? Et l'or, [l'ivoire,] la pourpre,
une lyre, un poignard, une fleur, un arbuste?
21
Si les aines survivent ^, comment l'air les contient-il [depuis]
toujours? — Mais comment la terre suffit-elle à contenir
tant de cadavres qui y sont ensevelis depuis si longtemps?
De même qu'après une certaine durée5 dans la terre, le
changement et la dissolution que subissent les corps font
de la place à d'autres, de même les âmes, transportées dans
les régions aériennes, après y avoir séjourné quelque temps,
se transforment, se subtilisent", s'enflamment, pour retourner
dire — le paragraphe 20 le prouve clairement — qu'en recherchant la louange, laquelle
est étrangère aux choses louées, on oublie ces choses elles-mêmes et leur valeur propre.
Il annonce qu'il va le démontrer. Pour obtenir ce sens, que j'ai adopté dans ma tra-
duction, il suffit de lire irapEi; au lieu de rAç>z;y £-/ôu.svo: au lieu de è/ôlaevov, et
d'ajouter un futur analogue à otyet. Je ne me permettrais pas de telles hypothèses si
l'altération du texte n'était pas évidente. Beaucoup de corrections ont été proposées;
aucune ne m'a paru claire. Je lis donc : «7iaps\; yàp vvv gxaipcoc tt,v pwixip oôtiv
jXKom rivbç £-/ôu.îvo; ).ôyo'j Xotirov O'^El.»
1. [Couat : «vulgairement;» plus loin: « ceux (les objets)... que fabriquent les
artisans. » — J'ai essayé plus haut(II, 10, en note) de distinguer xocvtfrepov d'idittrtxûç.
Bien que Marc-Aurèle ne reconnaisse qu'une « vraie beauté », la beauté morale, il n'y a
point pour lui de «vulgarité» à trouver beau un ouvrage de la nature (cf. supra III, a),
ou même un chef-d'œuvre. L'interprétation do xoivéTepov entraînait celle de te^vixâv.]
2. [Conjecture de Schultz : Itzolwo'j tivôç. L'accentuation de uvo; semble indiquer,
en efl'et, la chute, avant lui, d'un mot paroxyton.]
3. [\ ar. : « ou laide parce qu'on la blâme?»]
/j. [Voir cette note à la suite des Pensées, où nous avons dû la reporter
5. tiso; vjvrtva s7i'.Giatj.ovriv. — Gasaubon a changé wpo; îjvTiva en |j.E7à Tior*rty riva.
Cette correction, [qui ne suppose que la chute du mot \11xy. dans un manuscrit,] me
parait tout à fait nécessaire ; rcpbç n'a pas de sens.
6. [Pierron et Couat : « se dissipent. » — « Se dissiper, » c'est presque « se perdre » :
et rien ne se perd; c'est «se disperser» : or la dispersion est un désordre (IX, 39 :
xvxéuw xoà ax£ûa<TLi.6;), et le monde est tout ordre et toute harmonie. Le mot « se
I • I N II I > I \ I \ I . ' \ I I . I I I
dans la i aison séminale ' de L'unh ei al lai anl al i
la plaça à oallc qui \ lennenl habiter dan l< m< n
Voili qu'on p< >ui rail ' < |" »n< 1 1 <■ * 1 . • t * l'Ii > potin l.i
mmn i\ anoe de ftmei
il faut d'ailleurs considérai noïi aulemanl la multitude d
corps ensevelis, mais encore celle dei être vivant que n<
lil i|. i h idull 'il
Dfl onl |amal i mpl< >y< pai Vlan turoli VII
quo lorsqu'il nous pi aro dan l'hypothèse atoiin-t»
tou( sImi.-i. -m que Mm. \mi. i. pn cl c loi qu il ■!' i n • q
i (VIII, 57). Il empl il pai ;
L'Intelligence ou du soloil l \ 1 1 1 [ul
Encore est-il m aire, cl plui ail m< on (rancal 1
Mon pour se faire entendre Ctr, pour le lecleui qui nV 'i
qu'esl oc .luhv ohoM qui lulei 1 1 mol
ol dessus, m'onl i>;u u exprimer, en lomme, 1 essentiel de Is j
fluidité qu'acquièrent les km is, Is tension qui «-n épsnd el en reiienl Is lubstan e, Is
transformation Intime f n les assimile 1 Is pure Intellij a la lumièi
Remarquer qu'ainsi entendu le mot ^lo 1 milieu de ce beau raisonnement
analogie, distingue le sorl futur des âmes du devenii d lurait, en
eflet, découvrir dans la « dissolution » des corps Is même < tension ii que
dans l'« expansion « des âmes. C'esl que les unes s., ni principe officient, i
matière inerte.]
i. [Var. : «au principe générateur.»— Cf. supra l\, i'(. et 1
aus^i la première note de la présente pensée.]
1, [Je maintiena dans io texte — en corrigeant dans la traduction d< M <
« persistance » en « survivance » — une phrase que celui-ci, après Nauck et comme
M. Michaut, se déclare en note « fortement tenté d'attribuer à un scribe 1
n; à7roxp:va'.7o se' uicoOèVst roO Ta: ilnigàtc Bcauiveiv. Il me semble que si <»n la
condamne, ce ne peut être que pour le mot 6ico6£ett, le plus significatif, et, «1
la place qu'il occupe à la fin ou plutôt en dehors «le la phrase mém< 1 en relief
de cette prétendue glose. De toute la pensée, ce mot esl !«' seul qui mette en doute
la survivance: même la première phrase, qui commence par si, n'impliq
possibilité de l'idée contraire: car «si » peut signifier 0 puisque) . Or, à la fin <lu
passage, clans l'une des deux, phrases qui résument, en lu traduisant n U
métaphysiques, la démonstration de M arc • Aurèle el font valoir ss méthode, nous
rencontrons le mot «vérité». Gomment arrivera la vérité? se demande t-il. Ni l'on
pouvait croire à l'intégrité du texte traditionnel, il serait trop aisé- de lui répondre:
En ne raisonnant que sur des dogmes sûrs. — Il esl évident qu'en écartant la phrase
toOto Ô' av nç..., Nauckct A. Couatont résolu tout conflit entre c hypothèse i t i élite
Mais si l'un de ces deux mots est nécessaire à la pensée, n'est-ce pas plutôt le
premier? La meilleure preuve qu'on puisse se donner de l'immortalité ou de Is
survivance, c'est la raison qu'on a de la défendre; or, nous voyons ici même que pour
Mare -Aurèle la survivance est sans intérêt, puisqu'il n< la limiter
(cf. la fin de la présente note); et dans l'ensemble de son livre il esl c f. les
dernières lignes de la note finale) que c'est l'idée contraire qui prédomine. Conl
la phrase roOto ô'av t::..., c'est donc mettre en cause la doctrine même de Mai \
Ce n'est pas cette ligne, c'est la fin de la pensée qui, à cause d'elle, doit être ou
retranchée ou retouchée: nous verrons (deux notes plus bas) qu'on peut se conl
d'une correction très légère.
On.remarquera la place de la phrase contestée par Nauck que nous croyons pouvoir
restituer à Marc Aurèle. Elle a, du premier mot « voilà» jusqu'à la dernière propo-
sition, qui reprend les termes mémos et rappelle les conditions de la question p -
l'allure d'une conclusion : or, les explications qu'elle devrait achever se continuent
après elle. Est-ce une raison nouvelle de la condamner, ou de déclarer la pensé ?
ba BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITES l»i MIDI
mangeons el que mangent chaque joui' lea autres animaux.
Quelle quantité d'êtres vivants disparaît ainsi, comme ensevelie
dans le corps de ceux qui *Vn nourrirent ! El cependant ils y
trouvent assez de place1, grâce à leur transformation en sang,
à leur métamorphose en vapeur ou en matière ignée.
Oui nous donne la vérité dans riivpollièse susdite'? La
division en matière el en principe efficient [et formel]*.
incohérente? Ivanl d'écrire !<■ moi glose en marfee de cette Ligne, on aurai! encore
la ressource de La reporter un peu plus bas. Mais je crois que le texte, tel qu'il est,
peul s'expliquer : En rojetanl hors de sa démonstration par analogie un témoignage
qui la confirme, Marc Vurèle > moins voulu ajouter qu'opposer cette comparaison a
la précédente; el une idée nouvelle ressort pour non- de cette opposition. \ux rorps
ensevelis dans la terre commune il faut «les années pour se dissoudre; il suffit de
quelques heures à ceux des animaux qui nous nourrissent: qui sait si la survivance
de L'âme, qui n'est qu'hypothétique, qui, en tout cas, ne peut être que limitée, — et
beaucoup plus qu'on ne le laisse espérer dans l'école, — ne serait pas d'une brièveté
illusoire.' Dans ces conditions, en quoi la jieTàoraai; serait-elle pour l'homme plus
avantageuse ou plus désirable que la Toi?'.:.'' Vaut-il mieux « s'éteindre >> ou
(( s'embraser >> ?]
i. r, /fupa 0L-j-:rr — Le démonstratif bvtï) se rapportant à '/copa n'est pas inutile,
mais il serait plus utile encore d'avoir dans la phrase le complément de cf/îra'. ; c'est
pour cela que Gataker, peut-être avec raison, a mis aO-à pour avTrj.
2. [Couat : « sur cette question. » — M. Gouat traduit ainsi le texte traditionnel,
eici tojto'j. « Cette question, » c'est celle qui a jusqu'alors dominé toute la pensée,
celle qui se pose à la première ligne et que renouvelle de distance en distance,
au cours de la réponse, le retour des mêmes expressions : au milieu de la pensée,
z^ UTroôédei roO rà: •]/•«>/ à; oiajiivstv, — et, dans la phrase môme qui précède celle-ci,
oi/sTa-. r, yjôpy.. C'est bien « cette question » aussi que permet de résoudre « la
division en matière et en principe efficient et formel», s'il est vrai, comme nous
essayerons (dans la note suivante) de l'établir, que toute la théorie qui précède soit
fondée sur cette division.
Mais, comme on l'a vu (deux notes plus haut), « cette question » ne se pose, et
la réponse qu'on y fait ne peut être « la vérité » que si la survivance de l'âme est hors
de conteste. Il n'en est pas ainsi, et il est impossible que Marc-Aurèle ait oublié
qu'il n'en était pas ainsi. La correction qu'implique la traduction ci -dessus — celle
d'èVc rouTOV en âw\ tout», ou en s-tù rowrrç, si l'on admet le déplacement de la phrase
tovto 8' QÉv xiç — rappelle, comme il est nécessaire, au moment de la conclusion
l'hypothèse initiale, et ne nous donne que comme une vérité relative la vérité de
cette conclusion.]
3. [Couat : « en matière et en forme. » — Le sens de CXi] n'est pas douteux : il ne
suffit pas cependant à déterminer celui de a'.TÎa. Car, outre les principes que Marc-
Aurèle a parfois désignés par des noms spéciaux, comme la durée (/pôvo:, cf. VIII, 7 ;
IX, a5; XII, 18) el la fin (àvaçopdt, c\'. XII, 10 et 18), il yen a encore au moins deux, la
cause et Informe, que d'autres écoles opposent à la matière, et que le vocabulaire des
Pensées ne semble pas distinguer. D'une part, aucun des noms (sloo;, fiop^r,) par
lesquels d'autres philosophes ont désigné la forme ne se rencontre dans le> Pensées
{>[ ce n'es! dans des expressions usuelles comme xat' sloo: : X, 3o; sv eïôet : XI, 20,
où disparaît le sens philosophique); d'autre part, l'idée de cause (par exemple,
MU, 3 : a'.T:a Oefaorç' f,ç ffU(i.6aivEC -a^i itàvra) > e<t très certainement exprimée par
aiTta ou des mots de même famille. Si Marc-Aurèle ne sépare pas, comme l'avait fait
Aristote, la cause ciFiciente de la cause formelle, ce n'est pas, évidemment, parce que
le vocabulaire lui fait défaut. Des deux, pour lui, c'est la cause formelle qui est intégrée
dans la cause efficiente. Si, quand il est isolé, le mot a-.Tia, dans ce livre, peut en
-encrai être suffisamment traduit par le mot : «cause, » il ne perd pas ce sens quand
Il s II I)| M \l'.< M I I I I
22
Ne le Lu e pa " lourilii . niai- rjui- (nul mou \ cm ml
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Id Ol lltn II | nihl lllll Ml !■ U ' uni.
. 1 1 1 i. p. h uni li 'ii m '• li un ii< i" » Ipln ijm In prii
i » m 1 1 m , h Lomps, |i ini qui r 'I """
, ii p n M. n i \ m - i princifi .h hn i II i
ila ni i< lio ix qu'il oppo
hum, l.\ \ ». Il pure do iini' loïi li m"
quibu$ omnia fiant, oauêû/n el materiam l'ouï l< Porliqui
Inq •!'' Pli Ion (qu ipl l'id nue < ioiii-
breusos, uul nUnium mutta, aut nlmlum pauea ; trop pou, i K\ Platon n
lo temps, le lieu, le mouvomont; trop, I l'unit i li matière implique l'unil
l,i otuie, ol il, on ofïct, l'idi . Il forme et lu lin ne »»nl qu<- <l - « • * * r j • i
dépendant de celle qui ci una pendent, m r<t <ji< i
ol eauM (el non : forme) traduiraienl dont à la ritfucui l'opponition d
On t vu (IV, 1 4) ou l'on verra 1 1 X >; X iô)< omm< ni , ,
<lc\ lonnont, à l'occasion! sj non) m non) me :
la substance | letl pour un 81 m l'autre nom de II \ U
i |t pensée du livre VIII, jXixév et ovom ni li mémo p ri i
Uon I Kl : :>.>'>:; et à y 10 DOU plUB h.iul (VII, I0)f 11 OSt dil
,-/) doit rentrer dans la tubêtat k) universelle, de mém< qui dai lai
universelle s<% i >< r» J toute cause, • •! toute mémoire dam le temps \
ampisfltTtxoc d'un côté, OXyj, ovala de L'autre formenl ainsi di
don! l'opposition, comme en témoigne l'expression
pourtant pas absolumenl rigoureuse : rien pour les 8toï< lens n'étant immatériel, pas
même ce qu'ils distinguent de Il matière. C'esl pour i els sans dout que l'auteti
Pensées ne peut se représenter II destinée de l'Ame que d'après celli : Platon,
qui oppose Tu m4 à l'autre, constatant comme Marc- turèle «i » i< ■ le corps lui menu
décompose pas aussitôt enseveli, en avait tiré une présomption en faveur de l'immor-
talité (Paédon, 80 0. - - Quoi qu'il <mi soit, n n Stoïcien peuttrouvei npt a l'oppo-
sition du principe efficient el de la matière. Le texte que j'ai cité plus haut (VII, 1 ,
pourrait venir à la suite de la présente pensée : il en explique la dernière phr
En somme, le raisonnement par analogie qui remplit cet article, si simple qu'il
soit et si banal qu'il semble (les motsâvriç, dans la phrase contestée par Nauck, en
sont L'aveu), est la traduction expressive et familière d'une théoi [physique
dont a la division en principe efficient et en matière 0 résume toutes les affirmations
essentielles: i*L'àmeet le corps s'opposent comme arrfa et C//,; ainsi s'expliquent,
en dehors de l'analogie qui prédomine, les divergences de leurs destinées (cf. la So de
1.1 3° note à cette même pensée). — 20 Le monde u>t un ; il n'y a en lui qu'un prim Ipe
efficient el (prune matière (IV, V»). celle-ci faite de terre et d'eau, celui-là d*.iir et de
flamme plus ou moins subtile et pure. Ainsi s'explique le retour à l'être uni
(cf. IV, i4) de tout ce qui constitua l'individu.— > Sauf une partie in. lu ti:
toujours intacte, la -0:677-,; (cf. supra IV, i4, note 1), qui est l'identité même du vivant,
le principe efficient (V, 20), comme la matière, est instable: les éléments se mêlent el
se transforment l'un en l'autre; ce qui est aujourd'hui matière in •il - nain
matière active, c'est-à-dire principe efficient et formel; le départ qu'on fait de L'une et
de l'autre dans un être individuel ou dans l'être total n'est donc exa I qn p mr le
moment où on le fait... Ainsi s'expliquent et la vie humaine et I 1 \ ie universelle. —
'i° Dans L'âme elle-même, principe efficient et formel de L'homm •. on p -ut distinguer un
principe efficient — la raison, âme de L'âme — et une matière — - ::: —
qui l'entretient seule, quand le corps fait défaut : ainsi s'expliquerait la survivance.
Do la dernière phrase ainsi comprise (cf. aussi 1\ . 1 >> il est
définition. Si l'âme et le corps s'opposent comme x-.-'.x et C>.r. c*esl que l'an.
vraiment la cause du corps, x\-:x tqj <Koua7o:. Àrisl il ! avait dit De l'Eric. II. p. 412,
B, 6): u l'entéléchie première d'un corps naturel organisé. Les deux formules
semblent voisines; les doctrines sont en réalité fort divergentes. Sans doute, toutes
64 B1BLI0THEQI I DE8 I Nil I R81 i ks Dl MIDI
ton âme se traduise par une action juste et que toutes tes
deux soutiennent, comme Le remarque Jamblique (dam Btobée, E . i - , ., que
de La Daiaaanee à ta mort L'âme n'i point une vie distincte, <-t que km vie est
celle môme de L'ensemble » qu'elle forme av« Le corps, liais, pour tristofc I
nensemble» (auquel Jamblique semble, d'ailleurs, donner ua nom impropre:
te eiSvOstov) n'est pas La somme de deui matières distinctes : L'âme est en tout ce qui
rit (De Pâme, II, p. h i a, l, 1 4), même dans la plante, el n'est que Là; comme on ne
peut concevoir une forme sans matière, L'âme mie dont Les Pythagoriciens content
Les migrations est >m fantôme (id., I, p. e»;, B, sa); L'immortalité* personnelle, un
Leurre; el si quelque chose de non- échappe à la mort, c'est La pure raison, imper-
sonnelle, qui vient <ln dehors (OvpaOtv) et retourne à Dieu. — Les Stoïciens, au
contraire, prétendent que L'âme eal nue autre matière mêlée à La matière du corps,
que Les deux se pénètrent en toutes Leurs parties 8Xc*v, cf. Zeller, Phil. der
c,r.. Ml 3, p. 1*7), au point de ne formel- qu'un seul t ivanl ; que 1 - • mort Les sépare, et
que L'âme peut dès lors vivre seule. Je n'ai Lci qu'à rappeler certains textes cites au
cours de lu première note à cette pensée : Les dernières pages de la Con$olatio ad Mur-
ciam,ei Le passage des Placita phUosophorum (IV, 7, 8), on, à côté des termes mêmes
(èxtéiotuivetv T-.và: xp^vouç) que devait reprendre Marc-Aurèle pour exprimer la survie
temporaire de l'Ame, L'expression k«6' gurqv désigne très clairement !<• maintien de la
personnalité. — Or, c'est surtout en regard de La thèse d'Aristote que celle-ci semble
mal assurée. Je laisse de côté l'objection qu'appelle la conception matérialiste de
l'alrta, toutes celles qu'on m faites à La théorie de La \v.\'.z 3i' SXcov. L'excellente position
prise par Iristote lui ;i évité Les efforts qu'ont <lù s'imposer Les Stoïciens, d'abord
pour expliquer La pénétration réciproque de L'âme et du corps, ensuite pour le> dégager.
L'âme, selon eux, ne saurait 5e développer sans Le corps même dont elle est La «cause»
(alx(a);ce sont toujours les vapeurs du sang qui l'entretiennent. Ses facultés, qui
lui sont postérieures (tt,v ,V->//,v-- oùffiav 7roo"j~o-/.s'.;j.£vr(v xal: o-jvatxôai : Jamblique,
dans Stobée, Ed., I, 87^), sont déterminées en partie par l'organe même qu'elles font
agir (id., 87C). Les deux matières qui nous constituent ont été ainsi mêlées si
intimement qu'il devient bien difficile à un moment donné de faire la part de
chacune. En vain Marc- Uirèle tente d'opposer en nous la raison à tout le reste. Il ne
peut vraiment dire (cf. supra IV, '1, note finale) qu'elle << vient d'ailleurs
C'est d'abord le sentiment de ces difficultés — auxquelles s'ajoutent celles que nous
avons relevées pins haut (cf. la 1" note à cette pensée), quelques-unes même d'après
lui — qui sur cette importante question de la destinée humaine a l'ait de Marc-Aurèle un
dissident. Ce texte est le seul des Pensées où il développe, nous avons vu avec quelles
réserves, la théorie de la survivance; le seul aussi, à ce qu'il m'a semblé, où il
n'ait voulu considérer qu'elle. En général, il semble admettre également et concur-
remment deux hypothèses, dont l'une est la négation de toute survivance. Il a donné
un nom à chacune : la première est celle du déplacement ([icxàTTadi; : V, 33 ; VII. 32 ;
ici : [uOioràpevat) ou de la persistance (xo <ruu{i.£tvai : XI, 3, comme ici); — la seconde,
celle1 de Vextinction GfArji; ou rjge^O^vat : V, 33; VII, 32; VIII, 25; XI, 3). Presque
toujours, il nous les présente toutes les deux, par leur nom ou sans les nommer
(III, 3, et les autres textes qui viennent d'être cités), et l'indifférence lui est si naturelle
à ce propos qu'il semble souvent disposé à admettre en même temps une troisième
hypothèse, épicurienne cependant, celle de la dispersion (V, 33; Vf, 2/4; VII. 32;
VIII, 2j\ XI, 3; cf. ici même la note aux mots: se répandent); parfoi- même une
quatrième, pythagoricienne, celle de la métempsycose (VIII, 38). S'il fait un choix,
c'est la thèse de Vextinction qu'il adopte, à l'exclusion des autres (X, 3i : itowrvbv xat
to |M)$év; XII, 21 : [xst' o-j ttoa-j oj6s\: ojoaaoO k'tfr,; XII, \'a : ô /.aOowv TraoaçspîTti)... xh
ttvs'j aânov... tov voOv oj 7rapo:T£i). Un moment (XII, 5), il semble regretter
l'immortalité personnelle: mais il prend aussitôt son parti de Tu extinction
cette assurance vague que les Dieux n'ont pu agir que pour le mieux. En fin de
compte, sa piété même, sa confiance en la nature, son mépris de la vie et son insou-
ciance de la mort ont du le laisser assez indifférent à la forme et à la durée de
l'immortalité, que sa raison n'accepte pas comme un «dogme». Cet acte d'indépen-
dance philosophique n'est d'ailleurs pas isolé dans les Pensées (cf. supra IV, 16, en
note); enfin, Sénèque lui-même (ad Lucilium, XXXVI, 9, et d'autres Stoïciens, à
(lui suffisait l'espoir de renaître un jour tout entiers de la conflagration universelle
ri* m 1 1 1 m \ r. • \ i i . i i i
I r|>|r rnl.illnll- I.iism'mI ml.irlr l,i iil--.fi <|l|| \.,|l .I.ni
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quci Cornutiu ik l 'admet ta il p
i . |< .ui.it \, pi i i lourd il ; mal i pi 0|
■ i |u propoi de toute Idi rver la ri
toent, n Poui le loni d'ipjj - et di qu< M I riual traduil n p I
pai dés h ol pai III, itf, .V et 5* n
équivtleoti i "il i qui an d< i Ivent, oil d< p«'i ipl . ni
i. uni- dtDfl l08 Pê .1 l'un doi DlOtl I :
VI, i6j IX, I Getl opposition ne mol <\ ailleui - p i en
(( i infra VI, . ■ I la note); elle n'implique môme pai la di*lin< lion • n -
pouvoir* différent noua lil Oi
taienl pas ta dh lalon de l'âme en kroii pai I
(Hippocrate el Platon, \. i onflrmeol el précisent n Lémn iu'IIi
noua rapportent, l'un que le prin< Ipe dirt U ni it, au n i.
nos tendances, » l'autre que, « pour Chry si ppe, la passion □ i uit.
uutre que la raison; que, par mite, les anlmaui dépourvu! d i il >n
apables de passions. I 'est i w ore la doctrine que profes* M m luri le lui in
puisque, ayant constammenl comparé les mouvements de l'instinct -t du
jeu dos marionnettes (voir 4 VIndex de Stich les moU .
il observe (X, $8) que c'esl en noui la raison qui tient Ica Bcollei « e qu< dam I'
on appelle te principe directeur des jugements, des raouv< m< i i. de
toutes les opérations de t'àme en es! <i<>n<- aussi (Zeller, Phil. der Gr.t ni . p,
le principe créateur; c'est <"n lui <(u<- les représentations s'impriment, la -
elle-même (infra V, ••<;. avant-dernière note) restant, au 1 1 1 < < i r ■ ^ pour Mari turclc,
liora de t'àme; et, de même que le monde est parfois nommé Dieu, dans le m
-ens le principe directeur <>u créateur il»- l'âme, c'esl toute l'âme. Le moi
pourrait, en effet, traduire très suffisamment te ternu g i n plus d'un
passage des Pensées: par exemple, dans ceux où ce terme esl précédé de N ou d<
:•.: (III, 9; •j-ô>.r)'V.; -t,> qYSpovixeâ... SYvévT)Tat ; — VIII, Si, el I\. is : ftîtXOf 0
r.yîjjLov.xà otûtûv : — IV, 39, début), et dans ceux qui nous comparent au monde I \
Dans la présente pensée, ce n'est pas cependant le terme ordinair
Marc-Aurèle oppose à ovrr, et à çavxaeia. C'estun neutre, qu'on m nulle
pari ailleurs dans les Pensées: zh xxTaArjirctxdv, — mais qu'on reconnaît de prime
abord à sa désinence (cf. III. g : ûirotapcTtYi) fruvotfitç, el en quaran!
vtxbv lui-même) comme désignant un pouvoir de l'âme. D'après ce qui préoî le, il
semble assea naturel de voir en rjyefiovtxôv el xaTaXrjîmxov deux termes i peu près
synonymes, ou du moins de considérer le second comme limitant el précisant 1
du premier. Ce que Marc-Aurèle appelle ici to xa?aXv)imxa ra le prii
dirigeant, en tant qu'ayanl donné -»>n assentiment (<n>Yx<xra&£<Tiç) aux i lions
(f«VTaurfai), il t'a i t (Telles tles % %xcùcr\ 'bv.z. — La traduction que j'en propose rappelle
les principaux caractères du principe dirigeant et de la v.x--j. - irtoul
raisonnable (IX, aa, i" note), —> celle-ci non seulement véridiqne, mais assun
ne se point tromper (sapra, p. 17, note -1 : Zeller, Phil der Gr., III .
Il y a d'autres noms, inusités d'ailleurs dan- les Pensées :
qui, chez les Stoïciens, désignent aussi ou définissent le principe directeur; ils s
cités par Zeller (p. 198). Dans les Pensées, le mol rcpoatpETixbv (VIII, 56) pourrait
compléter cette liste. Ce fait encore me semble autoriser mon interprétation, qui esl
aussi celle de Harthéleniy-Saiut-Hilaire et à peu près celle de Gouat : car le
ment» est, en somme, un acte de la raison. Ouant à Pierron et à M. Michau
traduisent cnaÇetv to xotra>rjimxbv par «s'attacher à l'intelligible *>, comme il- ool
traduit ~o:zlv to oixxiqv par use proposer le juste-, je crains qu'Us n'aient accordé
il la symétrie des deux propositions de la dernière phrase une signification qu'elle
n'avait pas. et qui, dans leur esprit, a du prévaloir contre celle des mot-.
A. COU AT- P. FOURS 1ER. 5
66 BIBI i"i moi i m - i mvi fim 1 1 - D1 mii»i
23
Tout ce qui esl avec loi en harmonie, ô inonde, est aussi
en harmonie avec moi. Rien de ce qui est opportun pour loi
nVsi pour moi prématuré ni tardif. Toul ce qu'apportent tes
saisons est pour moi un fruit, ô nature. Toul vient de toi, tout
csi en toi, tout rentre en toi1. Le poète dit : 0 cité chérie, cité
deCécropsl El loi, ne diras lu pas: 0 ci té chérie, cité de Zeus ?
24
tgis peu, dit le philosophe', si tu veux que ton âme soil
contente. Ne vaut-il pas mieux dire : Fais* ce qui est néces
saire, fais ee que prescrit» la raison de l'être naturellement
sociable, et comme elle le prescrit!' Ainsi Ion obtient à la fois
le contentement de l'âme qui résulte des bonnes actions, et
celui que Ton <joùle à agir peu. Supprime, en effet, la plupart
de tes paroles et de tes actes comme n'étant pas nécessaires,
et tu auras moins d'affaires et plus de calme. Nous devons
donc sans cesse nous répéter : « Peut-être ceci n'est- il pas
nécessaires > Nous devons nous interdire non seulement les
actions, mais encore les idées qui ne sont pas nécessaires : car
nous supprimerons du même coup les actions superflues qui
les suivent6.
25
essaie de voir comment te réussit7 la vie d'un homme de
i. Cf. Saint Paul aux Romains, c. II, v. 30 : oti l\ ocjtoC xat ci* avxoO xat si: avTov
rà 7:àvTa-
». [Démocrite (dans Stobée, Ed., II, 12) avait dit: « Ne cherche pas à tout savoir,
si tu ne veux devenir ignorant, » et (dans Sénèque, Tranquillité de l'âme, 13): « Pour
vivre tranquille, il faut embrasser peu d'affaires publiques ou privées. »]
3. [Var. : « Ne vaut-il pas mieux ne faire que... »]
'1. | Var. : « ce que comporte et comme le comporte... »]
">. [Couat : «nous demander: ceci est-il nécessaire?» — Dans les manuscrits on
lit : < fir, ti toOto ou to>v àvayy.atwv ; » Ainsi ponctuée, cette phrase donne un sens absurde
«car |it) interrogatif ne signifie pas nonne, comme l'ont entendu Pierron, B-rtln'lemy-
Saint-Hilaire et M. Michaut, mais num). M. Couat Ta corrigée, en effaçant la seconde
négation. J'ai cru plus naturel de conserver où, en supprimant l'interrogation.]
G. [Couat : « pour que celles-ci n'entraînent plus à leur suite les actions. » — Cette
traduction fait supposer que M. Couat avait corrigé dans son texte 7rapsA-/.o'j<7ai en
7:ap£AxôijL£vai. Je reconnais que le sens qu'on doit donner à 7iapsA/.o-jaai est très
détourné. — Par les mots : « du même coup, » j'ai voulu rendre à la fois ovreaç et oOoi,
qui a ici le sens, non de a pas même», mai* de « non plus».]
7. [Couat: " où conduit. »]
CI . I I l.l Ml' \ I I I I I
bien . atisfail d< la pari qu< lui a atti ibin e l uni
contenta d agii poui ion pi opi |n f" •■ t\ d
loiijoui s dani «1rs di po m i- . i j bien veillant
26
I m as \ h i .1.1 i \ m maintenant 1 1 < I N( le b i iu
en sorte cT< tre Impie, I n homme « ommel il une faute I
contre lui même qu'il la commel I « lai il arrivé quelque
chose ( e quelque chose esl bon cai dès Toi i\ ait
été arrêté pour toi comme un effel des loii univei ellei qui
déterminent chaque événement I n lomme, la
tire profil du momenl présent par la réflexion et la justice.
Suis sobre ij mais sans exagération de rigueur
27
Ou bien le monde esl ordonné, ou bien c'est un cha
confus 3 il esl vrai, monde cependant. Quoi? En toi même
pourrait m* constituer un certain ordre el il n'> aurail que
désordre dans le tout? Et cela quand toutes les choses sont
à la lois si distinctes el si confondues el solidain
*
28
Caractère sombre, caractère efféminé, caractère dur», sau
i. Les manuscrits portenl m : »o( « x«Xûc< On a proposé xaxâc m lieu de
y. *>/•>:. ('«'(te correction nie parait contraire an sens de la phrase toul entii
Vnrèle veut dire que tout ce qui arrive esl bon, parce que rien n'arrive contrairement
aui intentions de la nature. Mais xaX£>< déterminanl w\k6i6rpit ne vaut pas mieux;
il tant donc, comme l'a proposé Caaaubon, mettre un point d'inten
[Pour la doctrine exposée ici, Cf. infra \ I. ', 'i . en note.]
2. vr,3£ àvsiuivo;. J'aimerais mieux, avec Schultz, lire an [comme y invite
la leçon barbare du manuscrit \: xveiuipwç.] La traduction: (Sois sobre, même
quand tu te relâche-.- est, à mon n\i>. inexacte. Ifarc-Âurèle renouvelh ici une
recommandation qui se rencontre fréquemment dans les Pensées; il faut
mais avec simplicité, et sans effort.
3. [Conjecture de Schultz. — Yar. : s c'<^t un chaos confus, et c'e>t pourtant le
monde. »]
\. [Yar.: « Il y a le caractère noir, le caractère efféminé, le dur. elc. >> — Lambeau
île pensée; énumération bien incomplète, donc à peu rtains
vices de caractère. Il est interosant pourtant d'y trouver les travers de nature j"int>
aux défauts d'éducation el d»1 métier. L'expression \kekaLs plus
haut (IV, 1 8, voir la note) dans les manuscrits de Marc-Aurèle. Nous a cet
endroit, rejetée de notre texte. D'autres, adoptant une conjectun ! \\land- r, j
vu une citation d'Agathon le comique. Parmi ceux-là, M. Mi« haut suppose que la
présente pensée est une définition îles mots \LÏ\œ* rfioz. Comment peut-on s'imaginer
que l'épi thè te ptlXocv (noir, sombre) convienne particulièrement aux caractères d'une
femme, d'un enfant, d'un boutiquier, mais non, par exemple, à celui d'un jaloux ?
Voilà, je le crains, un problème de sémantique insoluble.)
68 BIBLIOI m "i i DES l m\ i R81 I fcfi Dl MIDI
vage, puéril, bestial, lâche, (aux, caractère de bouffon, de
I petit | marchand, de i\ ran.
29
Étranger au inonde esl celui qui ne cherche pas ;« com
prendre <<v qu'il renferme1, non moins étranger celui qui ne
cherche pas à comprendre ce qu'il devient . C'est déserter
<jue de vouloir échapper à la raison qui fonde la cité ;: c'esl
rire aveugle que d'avoir les \cii\ de l'esprit Fermés, mendiant
que d'avoir besoin d'un autre el de ne pas trouver en soi même
tout ce qui est utile à sa vie. C'est un abcès du monde, celui
qui [fait sécession et] se sépare de la raison universelle de la
nature'' en se plaignant des événements qui lui arrivent; celle
nature, en effet, qui l'a apporté dans le monde, est aussi celle
qui t'apporte ces événements. C'est un lambeau [détaché] 5 de
la cité, celui qui détache son Ame de l'âme des êtres raison
nables, qui est une.
30
Tel vit en philosophe qui n'a pourtant pas de tunique, tel
qui n'a pourtant pas de livre. Cet autre, à moitié nu, dit :
«Je n'ai pas de pain, et je reste fidèle à mes principes;))
moi, je n'ai pas la nourriture que Ion tire de la science et je
reste aussi fidèle aux miens 6.
i. [Couat : «ce qui y est.» J'ai fait cette correction et la suivante par raison
d'euphonie.]
2. [Couat : « ce qui y arrive. »]
A. |Couat : «C'est s'exiler que s'enfuir hors des principes de la société civile. » —
\ ar. : a hors des principes de l'association des citoyens. » — J'ai cru devoir, pour tra-
duire Xoyo; noXiTtxb;, garder le mot «raison», que M. Couat a d'ailleurs rétabli dans
un autre passage (IX, 12).]
l\. (Couat: «Celui qui se sépare de la raison universelle... est un apostume du
monde.» —J'ai : r suivi en traduisant l'ordre du texte; 20 rétabli le mot à^iTTotaEvo;
qu'avait négligé M. Couat; 3° essayé de faire passer en français (abcès... sécession) un
jeu de mots (oLTzôfjtr^oL... àïKJxâ|JL£vo:) que déjà nous avons rencontré dans les Pensées
(cf. II, iO, et la note). C'est une raison semblable, la rencontre de à7co<r/iff[i.a et de
KitoaxiÇow dans le texte grec, qui m'a fait ajouter un mot à la dernière phrase.]
5. [Var. : «un déchet. » Voir la note précédente.]
('). [Pour la traduction de cette pensée, les deux manuscrits de M. Couat sont très
divergents. Je me suis efforcé de les concilier en adoptant ce qui me semblait le
nui 1 leur en chaque texte. Voici d'abord la leçon du second manuscrit, le dernier
mot du traducteur : «Celui-ci fait de la philosophie bien qu'il n'ait pas de tunique,
celui-là bien qu'il n'ait pas de livre, cet autre bien qu'à moitié nu. Je n'ai pas de
pain, dit- il, et je reste fidèle à nies principes. — Et moi, je n'ai pas la nourriture que
l'on tire de la science, et je reste aussi tidèle aux miens.» Dans la première rédac-
l'I N I I Dl M M '■' M II I I
31
i ,u i de vivre que tu i appi I aime l( i I
h. .n, l.i |>i .un. i 0 phi I • l.ul d< | . ■ I I. ■ I i
i ni iu iii"i llvn \ n M' u
ivaltécrll Lo promloi demi-nu, dll Vn peu pi il Ion,
i i n iduil pai li i il on, iii il< u di
1 1 Jeu idlvoi
tente, ..n elli ne concortK | démon t uni lrnpl< ■ • :
.i i . . . momie m' ni- di tout II pensé* D'ui
lemble qu 11 j tll quatre philo lopin i n ; i olul 1 1
mi'.i i >•■ r.mi i.ni li brouillon I II n') i n i qui A ni i- I uni liqu
. qui, dll lu v n. il ' Mil.
3toï< lem que pti II tunique
M qui ni i siii... ni
\ - \ m. i- tunl i -ii i M, '
.1 Marc Vurelc lui mon . * . lit prit I ni
m paner di Llvrei | Sui 1 1 p tint, i i - iprc III, i&, et II, \ .
Interprétation (en réalité, la première on date) m qu'une dinT
M I oual .i dû s'exagérei l'importance, dm ni loi moti l( ni lui
traduire l'expression - lieusi rai ni corrl
Le m (au lieu d'tTcpoç)esl il admissible dam l'opposition de
N'est oi pai . . plutôt que outoc, qui exprime le plus ■ m obji
Une objection analogue avait -;mi^ doute arrêté Nauck, qui lupprim
phrase de cette pensée, la considéra ni comme un
Or la difficulté n'est qu'apparente. I >;t 1 1 - la tradui tion que je donne d<
j'ai pu, cm effet, conserver le seni <!<• Il première rédaction de M intanl
les termes mêmes («cet autre») de la rédaction définitive II m'a suffi de donne
poini en haut qui, dam Le texte greede Marc- tarèle, >; la râleur d'une
ponctuation très Forte, divisant la pensée en deui parties symétri i d'autres
termes, de le remplacer par un point, tandis que !<• poini qui, dam l'édition
précède le dialogue, devenait un point en haut. Ce n'esl pas s ce qui précède immé-
diatement, c'est-à-dire à g $|, que me paraît s'opposer xXioç, ou, <-n admettant la
lecture de Ménage, otXXoc ouxoç, mais à ce qui suit, ,< omme il \ avait plus
d'un Cynique qui eût pu reprocher au philosophe empereur sa toute puissance êfl sa
majesté, à').Xo: se justifie mieux ici que eTepoç; comme toute cette fin de |
un dialogue, on admettra, si tant e>t qu'on veuille changer avutç, l'emploi du
pronom auto; (iste) pour désigner l'interlocuteur de Marc-Aurèle; comme :•■■.'.. qui
s'oppose à àV/.o: o'jto:, est synonyme < I « * & 81, xXXo< outoç peut ici équivaloir
Au contraire, il \ a, à mon sens, au moins troi- raisons de condami
tion définitive de M. (louât qui est aussi l'interprétation de Barthélémy Saint-Hilaire,
de Rerron et de M Michaut: i° l'impossibilité de distinguer, on les nommant, les
quatre sectes dont il serait question dans cette pensée; r la répartition symétrique
d'expressions équivalentes dans ses deux parties <y/-\''.: ■/■■-.
fiifAio'j et xpoçà:... sx -<ov [iaOr^attov o-ly. ïyt>) >: 3 l'asyndi
aXXo: 81).
Pour ce qui est de tô> Xârt», il est assea malaisé de se prononcer entre les deux
traductions île M. Couat, parce qu'ici ce mot est pris à la fois dan- 1 - \ qu'il
lui a donnés successivement. Dans la dernière phrase, qui est : te du S icien.
?iù >.6v(o sous-entendu à côté de Èu,u.£vu signifie ce que -L dans I ut le
reste des Pensées, c'est-à-dire : la raison, liais dans la précédV nte, où il est exprimé,
il a sans doute un autre sens qu'ont dû lui attribuer d'autres sectes. Dans le Phédon,
ce terme signifie: la thèse ou la doctrine dont on est d'accord, et souvent (par
exemple 7a A) Platon, clans son audace de poète, a personnifié cette doctrine, comme
le* Stoïciens devaient personnifier la raison. Si e'est à peu près la valeur que le-
-o mm loi m Q\ i DES i mn ER81 rÉfl m MIDI
lui' repose toi; passe le reste de ta vie comme si tu avais l'ait
aux Dieux un abandon absolu de loi même, Bans vouloir te
faire ni le tyran ni l'esclave d'aucun homme,
32
Examine, par exemple, le tedips de Vespasien; tu verras
partout ceci: i\r< gens qui se marient, élèvent des enfants,
sont malades, meurent, guerroient, Festoient, se livrent au
commerce, labourent, sonl Batteurs, orgueilleux, soupçon-
neux, fourbes, désirent la morl de Iris autres, se plaignent du
présent9, font l'amour, thésaurisent, briguent le consulat et
la royauté. Tous ces hommes sonl morls et disparus. Passe
au temps de Trqjanj tu verras encore les mêmes choses. Et
ceux-là sont morts aussi. Considère également les autres épo-
ques, l'histoire de nations entières4; vois combien d'hommes
Cyniques donnent ici au mot X6yoç, ils ne parlent pas la même langue que Marc-
\urèle, qui eût dû traduire leur >.ôyo: par ooytxaTOC.
Cette pensée, si je l'ai t >i< > 1 1 interprétée, est une profession de foi. Marc-Àurèle b*j
présente à nous comme un Stoïcien qui, ne songeant guère qu'à bien pratiquer
«Tari de vivre» (voir la pensée suivante), se préoccupe surtout, presque unique-
ment, des questions morales. Comparez VII, 67, où il avoue désespérer d'exceller
jamais dans la dialectique el dans la physique; I. 17, où il rend grâces aux dieux
d'avoir pu ne pas «s'appesantir à déchiffrer les écrivains, à décomposer des syllo-
gismes, à étudier le> phénomènes célestes » ; surtout III, i.'i et II, 2, déjà cités.]
1. [Ici encore, la première intention de M. (louai m'a semblé meilleure que son
dernier avis, et je n'ai pas tenu compte de sa rédaction définitive : "Aime le métier
que tu as appris et restes- y attaché. 0 11 me parait, en effet, également impossible et
qu'un ancien, se parlant à lui - même, ait imaginé une expression que traduirait notre
tout moderne «métier de roi », et que Marc- Vurèle. empereur en même temps que
philosophe, s'adressant, d'ailleurs contre sa coutume, au commun des hommes, leur
recommande le goût et l'amour de leur « pauvre métier ». (Car ts'/viov n'est pas tïyyr,.)
Je n'ai pas pu, il est vrai, conser\er davantage la traduction, d'ailleurs incertaine,
que donnerait le premier manuscrit; mais j'y ai trouvé une indication, et comme
une orientation, qui m'a guidé. Un peu plus haut (IV, 1), M. Couat avait traduit
téyvY) par : « les règles pratiques. » Ici, pour traduire xo tî/v'ov, il avait d'abord hésité
entre les trois mots : « doctrine, théorie, règle de conduite. » Il effaça ensuite ces
trois traductions dans son premier manuscrit et n'eut pas le loisir de chercher au
delà dans celte voie. Le mot grec, évidemment détourné de son sens usuel, m*a
rappelé L'expression par Laquelle Sénèque définit Le sage: arlifex vivendi. !><• là
l'interprétation que j'ai risquée. — En quoi consistera cet art de vivre? La réponse
est à l;i pensée 7 du livre VI, qui débute à peu près par les mêmes verbes que
celle-ci : fEv\ ~ip-o-j xo» irpocravaicoriou..., et qui exprime le même sentiment. — Elle
est encore aui pensée- 6i et <i«S du livre VII, ou Marc-Aurèle nomme expressément
et définit la pium/r, ; — enfin à la .V du Livre XI, qui commence ainsi: Tî; aou r,
2. [Var. : « de leur situation. »]
3. [Couat : " Remonte. »]
'4. [Couat : « d'autres date- et dm- toutes les nations. » — Pierron : «les épitaphes
d'autres temps, de nations entières. >> — Michaut : Les histoires d'autres temps, de
1)1 M \\\i. M MM I
aprèi lanl iJ'eflbrti uni bien toi Ion il h' cl i mi
(Lin- 1rs rl.iii.nl île < I [>|><all<! loi III loill < | u«-
lu aa connus loi m( me b ilanl \ ainemeul et i I < 1 « -
i,,n e i e qui était confoi m< •• leui pi oprt con litutl
irtni Lu tement el de l'en i i tntontci II i • i m que
ce- exemple i pi opoi de chaqu< ■ •« ti< m nou p< i me
de mesurer el nous i appellent < e que \ alenl l<
nous pronom d'elle Le moyen en effel d< n'avoii pa de
oûls, c'eal «le ne pas Rapplique) plui qu'il ne convienl
aux petites ohosi
natloni ontii n i manu* i lit don non 1
Si \et quatre pi i plutôt . m< k mb mme
i.. i.ni m . i louai ; "t> poui ratj luppo* i . par exempl<
calqui e sur La formule usuelle
il .--i \ raJ que le mot idm< i di I qu'il j a quel
reoce entre la date écrite en /<'< d'une lettre <t un< i ipli
cation aal donc aaaei pénibl* plus pénible la
admet(aprèa l<- second /.-/.. de la locution s un .iutr. génitif
(les dates, c'est-à-dire l« -^ époques, de toutes les nattai
1 l'époque de Marc îurèle cf, in/ra l\. 18, dana une p
celle-ci: a lil pas encore usurpé l'emploi de *&; i iment
par un autre détour que M. Michaut, cherchanl a traduii
sens d'« histoire •>. Pour lui,
i» condition d'interpréter ïm comme icepi (au sujet d il loul 11
<»n voudrail qu'un exemple le justifiât.— Pierron, au contra
(inscription) dans une de ses acceptions usuelles, liais >i l'on peut dire qu'une
époque est disparue et comme morte, n'3 aurait-il pas, même en gTec, ui
de langage excessive à non- m présenter la tombe el l'épitaphe D'autre part, la
construction générale de la pensée qui a déjà deui fois a l'idée de mort 1
les mots toi; xaipovç, t'ait ici encore attendre un synonyme de i a de
OivaTo:, avant ittitov.
Le texte doit être mutilé. Au Lieu d'èictypaçâç, j'ai ln ition
action -/pôv<.v/ (périodes de temps) esl de l><>n aloi. .!«■ suppose ensuite entre
ysôvwv el xai la chute d'une IL ne gai <leviit également comment
exemple : xai ;xr, ulô^ov svâpcov t-.-.ov, -à'//a xa\...). La superposition de
mot> identiques à un intervalle d'une ligne aura facilite* l'erreur du moine qui di
aux scribes.]
1. [Couat : « ont été dispersés, » Dans deui notes (la 5* et la 7') à un<
cédente(IV, n), où foefruotç a été traduit par t dissolution », j'ai dit que ri
.1.' la «dispersion 0 était épicurienne el non stoïcienne.]
2. [Couat: «C'est ainsi qu'il e>t nécessaire de se souvenir que l'on doit s'atta
à chaque action suivant >a valeur et sa mesure. 1 J'ai craint que cette phras
d'ailleurs plutôt une interprétation qu'une traduction du t
aasea claire. Je ne doute point que pour M. (louât an— qu'il traduit litt
nient, ne signifie: « à l'aide de telles réflexions, ou: - >ui-
moins sûr qu'il ait vu dans la mort cette « unité de mesui laquelle
Marc Aurèle rapporte toutes les actions humaines, ou {«lus | - enl tous les a
que nous demande chacune d'elles. Ces! à peu près la même idée qui esl dével
un peu plus bas (IV, 48): le spectacle des morts de médecins, de savants, de philo-
sophes, de généraux, de tyrans; le souvenir de cilles entière* dispane-: celui des
voisins qui sont partis aussi doivent nous montrer combien les - - tumaines
hémères et de peu de prix ».]
"'). MBU0THEQU1 Dl - UlUVERSITBfl Dl MIDI
33
Tels mots usités autrefois oui fini dans les dictionnaires
d'archaïsmes; de même les noms des hommes les plus célébrés
autrefois sonl devenus aussi des -ortes d'archaïsmes : Camille,
on, Ynlésus, Léonnat, bientôt après Scipion el ^;ilon,
puis A.UgUSte, puis Hadrien el \ntonin. Tous ces noms s'cflîi-
cent très vite et se perdenl dans la légende; très vite même
s'amoncelle sur eux l'oubli définitif1. Et je parle ici des
hommes qui ont jeté un éclat extraordinaire. Quant à tous les
autres, à peine ont-ils exhalé leur dernier souffle, «qu'on ne
les connaît plus, on n'en parle plus3. » Et qu'est-ce même enfin
que l'immortalité du souvenir? Rien que vanité. Quel est donc
l'objet où nous devons porter nos soins? Un seul : avoir les
pensées d'un homme juste3, agir pour le bien de tous et être
incapables de mentir et disposés à accueillir tout ce qui nous
arrive comme chose nécessaire, connue, découlant de la
même origine * et de la même source que nous.
34
\bandonne-toi sans réserve à Clotho5; laisse-la tresser le fil
de ta vie avec les événements qu'elle voudra.
35
Tout est éphémère, ce qui perpétue le souvenir et ce dont
le souvenir est perpétué.
36
Considère sans cesse que tout naît par suite d'un change-
ment, et prends l'habitude de comprendre que la nature
universelle n'aime rien tant que de changer ce qui est pour
en faire des choses nouvelles [toutes] semblables. Tout ce qui
existe est en quelque façon la semence de ce qui en doit
i . [Couat : <( l'oubli complet les engloutit . » J'ai cherché à traduire le mot xaTÉ/oxiev. |
2. \Odyssce, I, 2/12.]
3. [Couat : « une intelligence droite. »]
!\. an OLpXW Toia-JTr,; • T*jC ot'JTrj;, qu'a conjecturé Ménage, serait plus clair.
j. [Clotho, la Parque, pour Marc-Aurèle, c'est encore la Providence (cf. Chrysippe,
dans Stobée (Eel. I, 180 et 182) : ce nom ne semblera pas plus extraordinaire dans ce
livre (pie celui de la Donne Fortune. Cf. supra II, 3, dernière note (page 20); III, 11,
<)mr noir ( page '1 1 . note a). I
i-i n ri D1 M m.« I '
sortir Mal loi tu ne pan • qu au i ement e qui tombent
ii.in la terre ou dani la mati i« • trop inintelligent
37
lu \,is mourir, h lu n e en< oi e pnl impie, ni « aime ni
que lien d'extérieur ne peul te nuire ni bienveillanl poui I
le monde, <it tu ne fait pa encore con iter ta : in la
pratique <!<• la justice '
38
Examine leurs finies et vois les sag< ■ ■ qu'il évitent el
qu'ils recherohenl ■.
39
Ce n'est pa> dans [le principe directeur <!<• l'Ame d'autrui
i. [Cf. supra il. I-. infra V, •; \. s Mari -Aurèlc lun
reproches qui nous attestent surtout la sin< ril inu
j. [Gouat :« et vois ce qu'évitent et ce que recherchent môme les plus M|
611 noie :
m Pour la sens que je lui donne, cette pensée confine i plu taon
ment VII, SA. Je n»' crois pas que Marc turèle :iii voulu conseiller d'< ludier rame
d< - Mges afin de régler noire conduite sur la leur. C'est sur l'idée du bien lui même
« 1 1 1 « * le Stoïcien doit régler sa conduite et non sur l'exempl< itres hommes I
vue «le ce que font les autres « 1 « > i t nous détourner de les Imiter. Le philosophe exprime
Ici son dédain pour la folie des homme-, c'esl un li<u Commun <ln Stoïcisme —
Cette interprétation me semble très ingénieuse et je l'adopterais volontiers : mais j'-
crain- que M. Couai n'ait fait quelque violence au texte grec lu li< u de -
il a in, ce me semble, les mots: toi* ppum|MdTaTou{ xvto'jç. Supprimes les tenues
correspondants de ^a traduction, <« même i. et «plus», qu'il a cru devoir ajout
le -eus de la pensée change complètement.
Ga taxer el Schults avaient également senti la nécessité de modifier le texte: la
correction de l'un est par trop facile; celle île l'autre, trop hasardeuse onsi-
ilérer que les impossibilités paléographiques, aucune de ces conjectures n<- me semble
valoir le autou; de M. (louât. Mais était-il tant besoin de fa i r< ■ une oonjectun
m'en tiens, pour ma part, au texte des manuscrits : j'entends que Maro-Aurèle s'invite
à comparer deux genres d'hommes, deux séries d'actes, et qu'il ne pro
jugement. C'est donc à moi à deviner et à compléter sa pensée, ou plutôt à j répondre
pour lui et comme lui; à dire, soit: u Eli bien, la différence est nulle. >» comme
M. Couat; soit: « c'est en effet tout le contraire," comme Pierron. Selon la conclu
sion que je tirerai, le sens de la pensée sera changé. Mais Le traducteur n'a pas I pré-
sumer cette conclusion, je veux dire à m'imposer la sienne, en remaniant le texte.
Je ne crois pas, d'ailleurs, que Marc-Aurèle se fût fait ici la réponse que lui prête
M. Couat. A la pensée VII, 34, à laquelle se réfère celui-ci, il n'est point question des
sages, pas même des plus sages, mais seulement de s, qui, là comme ici.
s'appellent otvt&v. Au contraire, l'opposition îles sages et... des autres est reprise plu-
loin (V1I1, 3), et à la confusion des autres: et. pourtant, si les sag » a Dominent
Diogène, Heraclite et Socrate, les autres sont Alexandre, César et Pomp
J'ai lais-é subsister le mot «âmes» (cf. supra IV, sa, en note: infra VI, 8, et la
note) comme traduction de r.ysuov./i, que j'ai interprète de façon plus préei-
début de la pensée suivante. On aurait pu. ce me semble, écrire ici : Vois ce qui les
mène, et vois même les sages, ce qu'ils évitent et ce qu'il- recherchent. — Sur la
valeur de aOxcov, cf. supra IV, 16; infra VI, o, en note.]
~/\ BIBLIOTHEQUE DBS imxkkmii'- Dl Mini
que réside ton mal; ce n'esl |>;is non plus dans une modifi
cation du corps <pii t'enveloppe l'âme. Où donc esi ce mal?
Là où réside la faculté que tu as de te faire une opinion sur
les maux. Ne te fais p;i^ celle opinion, el tout est bien. Quand
même toul proche d'elle ton misérable corps sérail coupé,
brûlé, quand il tomberait en décomposition et en pourriture,
que la partie de toi même qui se Tonne une opinion là dessus
demeure tranquille, je veux dire qu'elle ne considère ni
comme un mal ni comme un bien ce qui peut arriver égale
ment an bon el au méchant. Ce qui arrive également à
l'homme qui vit contrairement à la nature», et à celui qui
vil d'accord avec elle, n'est en effet' ni conforme ni contraire
à la nature.
40
Pense toujours à ceci : l'univers n'est qu'un seul être,
n'ayant qu'une matière2 et qu'une âme; toule sensation se
ramène à sa sensibilité, qui est une; tout acte est accompli
par son activité, qui est une; tout est la cause de tout; les
choses sont étroitement unies et ne forment qu'une trame.
41
Tu n'es qu'une àme chétive portant un cadavre, comme dit
Épictète.
42
Les changements que subissent les êtres ne leur causent
aucun mal, et ils n'éprouvent aucun bien du changement par
lequel ils existent.
43
Le temps est un fleuve rapide dont les événements sont les
ilôts; à peine chacun d'eux apparaît-il qu'il est déjà emporté,
puis un autre est emporté à son tour et le premier va revenir3.
i. [\ug. Couat accepte ici la conjecture de Gataker, comblant une lacune évidente
du texte par les mots xat z<}) zapà piWtv.]
2. [Couat : « substance. » — Voir plus haut IV, ai, et la dernière note. C'est
d'ordinaire xixia, et non ^y/r,, qui s'oppose à ojai'a. Ici encore, AJ'jyr{ et a'.Tia nous
apparaissent donc comme synonymes (cf. aussi \ , »3, et la longue note).]
3. [Var.: a et voici qu'un autre est emporté à son tour et qu'un autre va l'être. »
PI ! I
44
1 1 >ni oc qui arrive < I au i 01 dinaii e i I au I i onnu qw la
.m printempi el lei fruili on été pai • temple la m
l.i mort, l-i calomnie, la fourbe, el loul ce qui réjouit ou
attriste lai esprits Faibles.
45
Tous les (bits qui se succèdent sonl la i on équen< e naturelle
de OeUX <|ui les <mt précédés; ils ne lonnent pa> -enlement
une addition d'unités séparées les unes des autres el n ayant
pour raison d'être que leur nécessite ili ion! relief entre eui
par une connexion logique. De même que ce qui exista
disposé harmonieusement, de même, dans tout ce qui arrive,
se manifeste non une simple succession, mais une admirable
parent
46
Souviens toi toujours de ce principe d'Heraclite La mort
de la terre consiste h devenir de l'eau, celle de l'eau à devenir
de l'air, celle de l'air à devenir du feu, et réciproquement.
Souviens toi aussi de celui qui oublie où conduit h» roule
Rappelle-toi que les hommes sonl en désaccord avec la raison
qui gouverne l'univers, malgré les rapports constants qui les
|\| unissent : que les choses que nous rencontrons tous 1»*- jours
nous paraissent étrangères. Nous ne devons ni agir ni parler
comme en dormant, car dans le sommeil aussi] il nous
semble que nous agissons et que nous parlons; ni comme les
pédagogues qui se bornent à dire : bref, c'est la tradition 2.
i. [Conjectures de Gataker el de Schulti : Kic*)?TV)tisveiN y.ôvov.]
a. La dernière phrase de ce morceau est inintelligible, el il n'est iteui que
le texte en soit altère. Voici ce texte d'après les manuscrits P, A D: xo
To/fwv tas tout' £tt'.' xaTa 'V./.ôv. xaû&Tt icopsiX7)çx|iEv. Ce qui rend d'ailleurs plus
difficile encore la restitution du passage, c'est que toute cette | Marc- Vurèle
est composée de préceptes détachés ; on ne peut être aidé ici par la suit».- née-
des idées. 11 semble toutefois que cette phrase se rattache à la pr Kn i iTct.
toutes deux commencent de même; les infinitifs dépendant de ai i-dire
-rro'.s'v xài Xsyeiv, exprimés dans la première phrase, sont vraisemblablement -
entendus dans celle-ci. Cela admis, la logique ou la suite naturelle d<> la p nsée
amène la conjonction i'û<j-zç,. qui est déjà dans la phrase précédente, el que Gataker a
très justement introduite dans celle-ci. Le ><>us serait donc: • Il ne faut pa- agir et
parler comme, etc.» Gataker a continué le sens en conservant les mois donnés par
7<> BIBLIOTHÈQUI DEfl i m \ Fr.»i i l'.s ni midi
47
Si un Dieu te disait que tu mourras demain, OU au plus tard
dans deux - jouis, tu n'attacherais pas beaucoup d'importance
à mourir dans deux jours plutôt que demain, à moins que lu
ne Fusses au dernier degté de la lâcheté; quelle différence
\ a ! il. en effet, entre ces deux termes? Pense de même que
c'est peu de chose que de vivre pendant un grand nombre
d'années plutol que jusqu'à demain.
48
Considère sans cesse combien de médecins sont morts, qui
avaient souvent froncé les sourcils à la vue des malades;
combien de savants qui croyaient avoir fait un bel exploit
en prédisant la mort des autres; combien de pbilosophes qui
axaient indéfiniment discuté sur la mort ou l'immortalité ;
combien de cliefs qui avaient tué beaucoup de gens; combien
de tyrans qui, avec une singulière arrogance, et comme s'ils
étaient immortels, avaient usé du droit qu'ils s'étaient arrogé
sur la vie des autres; combien de villes sont pour ainsi dire
mortes tout entières : Héliké2, Pompéi, Herculanum et d'autres
en quantité. Rappelle- toi tous ceux que tu as vus mourir l'un
après l'autre. Celui-ci après avoir rendu les derniers devoirs
à celui-là, et celui-là à un troisième, ont été couchés par la
mort, et tout cela en peu de temps. En résumé, ne cesse pas
d'avoir devant les yeux combien les choses humaines sont
1rs manuscrits, mais en les intervertissant, et il arrive à l'interprétation suivante :
« Il ne faut pas agir ni parler comme des enfants et dire simplement: nous avons
reçu cela de nos parents, — oti où oeX uamp Tiaioaç, to'jts<tti, xarà iJ/iXov, y.aOôxi to>v
roxsuw 7iapîr/r(^ajj.cv. » Je doute qu'il soit possible d'accepter la construction tcov
Tozstov TiapEi/r^aixsv; en outre, il est bien difficile d'expliquer l'interversion de mots
attribuée aux manuscrits. 11 me semble que toute la difficulté est dans les deux mots
Tta'.oa: Toxéu>v,qui sont très probablement altérés, .léserais tentéde lire: 7iaioaywyov*Ta:.
EJn définitive, je reconstitue ainsi la phrase : « xot\ oti oO oeX uxjTizp TiaiGayioyoOvTa;
<ov tout' ïax\* xaTa <]nX6v, xa6oxi TraoEi/.r.cpaasv = N'imitons pas le pédagogue qui aux
questions indiscrètes de ses ('lèves n'a pas d'autre réponse à opposer que: c'est la
tradition. » C'est-à-dire : ne parlons et n'agissons que d'après notre raison. Le participe
7Taioayct>yojvTa: correspond ainsi au participe xaOôvoovTa: de la phrase précédente.
Ces constructions sont fréquentes dans Marc- Aurèle. Bien entendu, je ne présente
cette correction que comme une hypothèse, excusée par l'état du texte.
i. [Coual : << trois. » De même à la ligne suivante.]
2. [Héliké, ville de la fédération achéenne. avait été, dit Polybe (II, 4i), engloutie
par la mer avant la ba taille de Leuctres]
i \ I)| MM.« M l
éphémèrei el <i<- peu de prix biei un peu de glairt l homme
demain ei b une momie nu «le l.-i < «mil • ■ I' ii«»i
mémenl ft la nature « e lempi Impei i eptible de notre
,, Imh nom «i elle ave( i 1 6niù i • imme un( oliv< mûi t
qui tomberai) en louanl la tei 1 0 qi|l 1 a noui rie et en n mei
< i.Mil I .iihic soll |HT<
49
Il faut rire semblable au promontoire contre lequel
briseni sans cesse les îlots M i î < * 1 1 1 hon. el autoui de lui
- apaise i<" gonflement <i«' la mei
Je Buis malheureux parce que telle chose m'es! arriv(
Ne dis pas cela, dis: je suis heureux parce quCj telle cfa
m'étanl arrivée, je n'en ressens aucun chagrin*; je ne suis
ni blessé par le présent ni effrayé par l'avenir I n accidenl
semblable pouvait arriver à toul le monde, mais tout le
monde n'était pas capable de ta supporter sans chagrin.
Pourquoi donc en cet accident voir un malheur plutôt qu'un
bonheur dans la manière de le supporter*? Appelles lu un
malheur pour l'homme ce qui n'est pas un échec de la nature
humaine5? Et peux-tu regarder connue un échec do la nature
humaine ce qui ne se produit pas contre sa volonté6? Eb quoi
tu connais cette volonté. Est-ce que cet accident t'empêche
d'être juste, magnanime, tempérant, sage, réfléchi, sincère,
réservé, [ libre de passions], et d'avoir les autres qualités donl
la présence assure à la nature humaine ce qui lui est propre"?
1. [Couat : <( petit amas Je muqueuses hier. » — La même expression se retf
un peu plus bas (VI, i3), au cours d'une phrase d'une singulière crudité.]
•2. [Couat: u en louant la terre nourricière et en remerciant l'arbre qui l'a
engendrée. »]
3. [Var. : «je vis exempt de chagrin. »)
'\. [Couat : « Pourquoi donc cet accident serait-il un malheur plutôt que n'e*t un
bonheur la manière de le supporter?)»]
5. [Cf. supra IV, S.]
G. [Ainsi la nature humaine a une volonté, à laquelle Marc-AurMe ne conçoit
que s'oppose la volonté de l'homme. Quelle part de liberté nous laisse, quelle o
tion de la liberté implique une telle doctrine3 Cf. supra II, n ; infra VI, 8; XI, 20;
V, 10; V, ag; VIII, AS. et les notes]
7. [Cf. supra IV, 1 : De cela même « qui est dirigé contre lui le sage fait la matière
de son action. » ~ D'où il suit, ajoute ici Marc-Aurèle. que ce (pie noua appelons un
malheur est en réalité la condition du bien ..îoral. — \in>i -'enchaînent par la
théorie de l'action sous réserve deux grands problèmes de métaphysique : celui de
l'optimisme et celui de la liberté.]
-8 BIBLIOTHEQUE DES i m yï: it>n i'.>, D€ MIDI
Désormais, i propos <1<* loul ce qui pourrait te chagriner,
rappelle toi le dogme» : cet accident n'esi pas un malheur,
mais c'esl un bonheur cjue de le supporter avec courage.
50
C'est un secours peu digne d'un philosophe mais utile
Cependant pour nous amener à mépriser la mort, que de
nous rappeler ceux qui se sont al tachés avec obstination à la
vie. Qu'ont-ils eu de plus que ceux qui sont morts prématu-
rément? Ils gisent quelque part, disparus à jamais, Cédieianus,
Fabius, Julianus, Lépide, et tous ceux qui, après avoir conduit
beaucoup d'hommes au tombeau, y ont été conduits eux
mêmes. En somme, la différence est petite, et, cette vie, à tra-
vers combien de souffrances faut-il la supporter, et dans quelles
compagnies, et avec quel corps misérable! (ie n'est donc pas
une affaire 3. Regarde derrière toi l'abîme du temps et devant toi
un autre infini. Quelle différence y a-t-il alors entre celui qui
est âgé de trois jours et celui qui a trois fois l'âge de Nestor?
51
Va toujours suivant le plus court chemin; le plus court
chemin est de suivre la nature. Agis et parle toujours de la
manière la plus saine. Voilà le plan de conduite3 qui t'affran-
chira des peines, des combats 4, de toute politique et de toute
recherche.
LIVRE V
Le matin, quand tu as de la peine à te réveiller, aie cette
pensée présente à l'esprit : je m'éveille pour faire œuvre
1 . [Couat : « Souviens-toi de cette règle. » — J'ai déjà eu l'occasion de citer le vers
de Juvénal (cf. la note à la pensée IV, 3o) qui me semble justifier la traduction de
ooy(xaxa par « dogmes ».]
2. jatj o'jv wç 7:pay(j.a. — Cette phrase est très elliptique, mais le sens en est clair,
et je ne crois pas qu'il \ ait lieu d'y rien ajouter pour l'éclaircir.
3. [D'après Stobée (Ecl.t II, iGV), la Ttp&teffi;, que II. Couat traduit par les mots
«plan de conduite», se définissait pour les Stoïciens exactement ainsi: (TYjjieitixrtc
EKiTeXêaetdç. Par la itpoQeffiç, on se signifie tel acte à accomplir. N'est-ce pas, en un
sens, le « ferme propos >> des théologiens?]
'j. Trpaxîia; est très douteux. Heiskc a proposé -repaxcia; [ = des histoires d<-
brigands], qui serait peut-être meilleur.
i 1,1 M x I ■ v l I i I I
d'homme m 'irnlrnii j«' l'iicm «• ;i I i«l< •• • I •■ 1 1» i l.iirr < • |
(|iioi je suis m;, fi |»' mu quoi j'ai été ml dan la mond<
bien al je i lc3 ci i i pour jouii de la « haleui « i >u< h< da
coin ertui i Mai i i I plu i able lin & >n<
pour ce qui aal agi éabie? Pour loul dit a, i lu un être pa il
ou fini pour l'action ' ' Ne vois-tu pa le plant tiU
oiseaux, lea fourmis, les arai abcillei foin leui
travail et, à leur manière . contribuer fi l'u-uvrc «lou *ori l<
monde? El après cela tu refuses, toi, de faire ce qui est l'œuvre
de l'homme? Tu ne te hfttea paa ver* l'action conforme i ta
nature? - Mais il faul aussi s<' reposer. D'accord: cepen
danl la nature a déterminé la mesure «lu repos, comme elle a
déterminé ««'lit' du boire <'i du manger. Néanmoins, ne dépaa
ses tu pas cette mesure, ne vas tu pas au delà du nécessaii
Pourquoi • dans tes actions n'en est-il plus de même, mais
i. (Couat: « es-tu né pour suivre tes penchants, ou pour agir? Vm (s* manus-
crit): «et non pour l'action, pour le travail?» -Cette seconde interprétât!
défendue par la pote suivante: «Les manuscrits \ el D donnenl
pyeiav. La vulgate: icoielv, au lieu de Si, comme j<
ïiotetv esl la bonne leçon, le mol r, qui précède . el qui Indique une ail
tiw\ ne se comprend guère. Il m'a semblé qu'où devait être substitué i ) . -\'-n
lu : o}.r.>: 81 o-j ttso; [tb] ICOlSlv, o\i i
La nécessité qu'a éprouvée M. Gouat, après Goraï, d'intercaler L*arti< le enta
otiroietv eût dû suffire à le mettre en garde contrôle texte de la rulgate. D'ail!
uotslv ('l ivipvî'.av oe sont pas synonymes: bien mieui que - onstrui! -an-
régime, ou même que le nom conjecturé par M. de Wilamowiti, arocipiv, qui se
prononce comme icetoiv, et qui n'exige pas, comme nroteîv, un article avant lui,
itparcstv, el surtout rcpâÇtv, qu'appelle le sens admis par M Gouat. En revanche,
l'opposition de Refait et d'èvéoYsta (cf. supra, p. •>. oote i, la définition de
est familière aux Stoïciens. J'ai donc cru devoir, après le premier gptfç, accepter la
leçon de A el de l>. et garder r,. Dans cette hypothèse, oO ne peut être consen
l'ai corrigé en <r0.
On sait que dans l'interrogation double « icérepov peut sa 'sous-entendre oomoM
atrum». (Koch. Gramm. grecque, Irad. Rouff, § 107»)]
[Gouat : « contribuer à l'ordre du monde. > et, en note : -.< La l<
Gataker, celle de la vulgate, est : xhv xxô1 k6to; WYXoo'uo'Jcra^ xfopw (litter
contribuera l'ordre du monde où elles se trouvent). Les manuscrits V et D portent
70 xaô' aura:, qui semble bien préférable. » — ]\< donnent aussi ai ~x:. qu'il
faut admettre avec le reste, au lieu de rroYxo<rt&0'j<T<x;.]
3. A et D : uitèp rà xpxoOvra o*j xpo/wpetç. — Le sens n'es! pas douteux: M
VurMe veut dire certainement que. dans la satisfaction des désirs naturels, L'homn*
x*a au delà du nécessaire. Cependant les manuscrits portent oi npoyt ::.:■ Au lieu de
supprimer oj arbitrairement, ne vaut-il pas mieux considérer, avec Schultz, la phra>«
comme interrogative?
[Ce n'est point là, à vrai dire, la plus sérieuse difficulté du passage. Elle est dans
le mot oOo£. qui commence la phrase suivante, et dont les éditeurs de Marc-Aurèle se
sont vus obligés de supprimer la première partie et de déplacer I - le. Il m'a
paru plus simple de lire ri oi. Voir la note suivante.]
'4. [Gouat: «dans te* actions, il n'en est plu- de même; tu restés..
BfBLN • i M I Ql i DES EMt BH SITES i>i MIDI
resles-tu bii deçà de tes force»? C'esl que tu ne t'aimes pas
toi même, sinon tu aimerais aussi t;i nature el ce qu'elle
t'ordonne. D'autres hommes ont aimé leur métier1 au point
de se consumer au travail, ne prenant le temps ni <lr se
baigner ni de manger; toi, tu estimes ta nature moins qu'un
ciseleur l'ari de ciseler, ou un danseur la danse, ou un avare
l'argent, ou un sol ambitieux la vaine gloire. Ceux-ci, quand
ils sonl possédés parleur passion3, sacrifient le manger et le
dormir au profil 3 de la chose qui les touche; est-ce que les
actions qui ont pour objet le bien de Ions le paraissent avoir
moins de prix el mériter moins de zèle?
2
Il esl [bien] facile d'écarter et d'effacer toute représentation
gênante, déplacée, et d'être aussitôt dans un calme partait.
3
Estime-toi digne de dire et de taire tout ce qui est conforme
à la nature; si, après cela, quelqu'un te blâme et t'injurie 4,
ne te laisse pas détourner"*; ne te prive pas, comme si lu en
étais indigne, de dire et de faire ce qui te parait beau. Les
autres ont leur propre principe dirigeant el suivent leurs
propres impulsions : n'y fais pas attention, va tout droit,
suis à la fois ta nature propre et la nature commune à tous;
toutes les deux n'ont qu'un chemin ti.
i. |7a: Tsyvx; èocuT&v, que donnent les manuscrits, esl un solécisme. Il faut répéter
l'article devant éavrûVi à moins de supposer l'omission de p,£XXov entre les mots
-ïyyxz et irjiwv.]
a. fYoir infra XII, 3 (9* note), la signification du mot icpocricdtôeta.]
3. [Couat: « au succès de ce qui les attire.» — J'ai cherche une expression qui
pût désigner à la fois le progrès d'un art et l'accroissement d'une fortune. |
\. Mîjj.-V.: r, X6yoç. Le mot Xôyo: est très faible après ^z\vl'.:\ la correction de
Junius, <lôyoz, me paraît excellente.
à. [Couat: «persuader.» Var. : « égarer. » — Je me ^ui> rendu aux excellentes
raisons de M. Polak. (Hermès, \\l, p. 33oj. qui invoque de nombreux passages d<
Marc- Vurèle (IV, 3; VI, 22; VII, 20: VIII, 1) pour justifier ici la conjecture de Corel :
Tzzv.aTiâTf»). Les manuscrits donnaient TiapsiTrâTO).]
G. [D'où il suit: i° que rien n'est plus aisé que d'obéir a la nature : on n'a qu'à
suivre sa nature;— a* que la loi, volonté de la nature, c'est la raison, organe de
notre nature, qui nous la donne; bref, que nous sommes autonomes (cf. infra XI, 20,
note finale).
Si l'on en croyait Diogène Laerce (de \ it. PhiL, VII, 89), les premiers Stoïciens
n'auraient pas lous admis comme un dogme l'accord des deux natures. Avant
ri n^i i i.i m m.' u ni 1 1
Je m. ii obe buI \ anl \< dei uin de la nalui « ju qu I
que J6 tombe cl me repo c apri avoii i (bali mon derniei
Roupir dans cel sii <|u<- je re pire i haque c m
que je tombe1 mr i<- iol 011 mon père ,i puise 1.1 . m< n<
mon être, ma mère mon san^ <i nu uounice -on lui
sol qui m'alimente al m'abrauve chaque jon r depuii tant
d'années, (|in poilc mes p,js, el < 1 < m I pom tanl d< (ho
ne cesse d'abuser.
On ne peul p;is l'admirer pour ta Bnesse. Soit. Mail il j i
bien d'autres choses à pr<>p<>s desquelles lu ne peux pas dire
« .le ne suis p;»s fa il pour cela. Montre non- ' donc ces vertus
qui dépendent entièremenl de loi: la sincérité, le sérieux, la
résistance à la fatigue, L'austérité, la résignation à la destinée,
la frugalité, la bienveillance, la liberté «le l'Ameâ, la simplicité,
la discrétion, la générosité. No vois-tu pas combien de qualités
tu pourrais montrer '» dés maintenant, dont aucune incapacité
naturelle ou inaptitude ne saurait excuser le manque? El cepen
danl lu le eonlentes de ton infériorité. Es-tu donc obligé, sous
prétexte que tu es mal doué, à murmurer, à cire avare, à
flatter, à accuser ton corps, à chercher à plaire, à cire frivole,
à porter une âme toujours inquiète? Non, par les Dieux! Il \ a
Chrysippe, qui le proclama nettement, Cléanthe aurait opposé la nature universelle >
la nature individuelle, et prescrit, en cas de conflit, de ne suivre que la premii r- ;
ou, plus précisément, tandis que Chrysippe entendait par le mot p*j<m : c
xotvr,v xa\ loiioç xr,v gvdpwiuvqv, Cléanthe ne reconnaissait qu'une «nature
xotvr,v (Aow)v o-jxsxi oï xa\ tt.v ï~\ uspo-j:. Zeller (Pliil. derdr.. III*, p. -m. en note)
doute que Diogène ait bien interprété la pensée de Cléanthe, el conçoit à peine la
possibilité de ce désaccord. Pour lui. Cléanthe n'aura parlé que de la nature ui
selle (mais sans l'opposer pour cela à notre nature propre: que sérail alors di
l'harmonie du monde?) et Chrysippe aura développé, sans les contre lire, la doctrine
el la formule de son maître!
i. [Couat: «couché sur le sol.»— 11 y a dans h' texte grec une nég - . la
répétition de 7i£G-a>v, que j'ai conservée dans la traduction. J
2. [Var. : « procure -toi. »]
3. [Couat : « l'indépendance. » — Nous entendons par ■ liberté i | llvjbtpioL) l'état de
l'àme exempte de passions (infra XI, 20, dernière note). Ce mot s'oppose à l'expression
piirraÇe<rôat xr\ 'l'jy^ («porter une âme toujours inquiète'», qu'on trouvera un peu
plus bas.]
1. | Var, : << te procurer. »|
V. COUAT-P. FOURNIE R. 0
8a BIBLIOTHEQUE l>ES L DIVERSITÉS M MIDI
longtemps que tu aurais pu être délivré de ces défauts. Tu
n'aurai* d'excuse à donner que pour la lenteur d'espril el
L'inintelligence don) <>n te pourrai! convaincre1; encore fau
drail -il, au lieu de te laisser aller el de Le complaire à ce défaut,
L'exercer à L'atténuer.
Celui ci, quand il a heureusement agi pour quelqu'un,
s'empresse de lui porter eu compte le service rendu2. Celui-là
n'a pas le même empressement, mais 3 en lui-même il considère
son obligé comme son débiteur, cl il sait fort bien ce qu'il a
fait. Cet autre enfin ne sait même pas, pour ainsi dire, ce
qu'il a fait. 11 ressemble a la vigne qui porte sa grappe, et qui,
après avoir produit son fruit, ne cherche pas autre chose;
tel encore S le cheval après avoir couru, le chien après avoir
sui\i la piste 5, l'abeille après avoir fait du miel. Ce! homme
après avoir rendu un service ne s'en vante pas. mais se pré
pare à en rendre un autre, de même qu'une vigne s'apprête
à porter encore une grappe à la saison. — Faut-il donc être
de ces gens qui rendent service pour ainsi dire sans le
comprendre? — Assurément*». — Cependant, il faut bien le
comprendre, car c'est, dit-on, le propre de l'être sociable de
sentir qu'il agit pour le bien de tous, et, par Zeus, de vouloir
que ses associés le sentent aussi. — Ce que tu dis est vrai:
i. [/infinitif xaTa*iHV<o<Txe<78ai n'est gouverné par rien; il manque au moins un
verbe, tel que [ifXXsi;, ou [léXXotc, auquel d'ailleurs on a pensé, entre s! et lui. Or la
chute de toute une ligne n'est pas plus difficile à expliquer dans un manuscrit, ni
plus rare dans les Pensées, que celle d'un simple mot. Ne pouvant chercher dans la
phrase qui suit *taTiYivu><rxe<*ôai, à cause de la conjonction xot\... os... qui la délimite
très licitement, la proposition principale dont dépendrait et fiiXXot;, je La suppose
également disparue. Le contexte permet heureusement de combler la lacune. Je
propose d'ajouter ici les mots: ptiXXot;, tôt' av gtp6?aaiv ïy/j'.z* — que j'ai traduits:
[à moins qu'on ue croie possible d'en sous-entendre les quatre derniers : Marc-Aurèle
(cf. infra VI, i4) esl coulumier de semblables ellipses.]
2. (Couat : « de porter ce service au compte de cette personne. »J
3. [Conjecture de Schultz.]
'i. J'ai traduit la leçon des manuscrits À et D, qui donnent w: ïizno; (la vulgate
supprime <î>:), et j'ai sui\i l<i texte de Stich, qui met un point (au lieu d'une virgule)
après KOivjffaça. D'ailleurs, le sens de cette phrase n'est pas douteux, et il n'y a pas
lieu d'insister.
5. [Couat : « flairé. »]
6. [« Paroles d'autant plus remarquables qu'un Stoïcien se piquait de se conduire
toujours par des raisons précises Marc-Aurèle, en tout fidèle à cette règle, en
cx< epte la bienfaisance. » (Martha, Moralistes sous l'Empire romain*, p. 196.)]
I I I I l.l II
ni.'iis in Inlei pi i >U mal me pai oh l. Au lu d
que j<' nommai en pi emiei lieu eux au I i »nl
une vraisemblance logique 81 tu veut bien comprendi
parole II n'y a pas de dan| ai qu ell< te fa i ni i
d agir pour le bien de la i m (été
Prière dei athénien Pieu . pleui i /■ u m i- i ban
el sur lea plainea d'Athènes I Ou il ne faul pat priai ou il hul
prier ainsi) simplement el libéralement
8
De même qu'on <lii Esculape a prescrit 1 ce malade de
monter à cheval | ou de prendre des bains Froids, ou de marchai
pieds nus; » on peul dire de même : « la nature univi rselle
a prescril à cel homme la maladie, l'infirmité, lea deuils, ou
quelque chose d'analogue. » Dana l<i premier cas, l«i mol a
prescrit» signifie à peu près « a ordonné comme une condi
lion de la santé, el dans le second chaque occurrence est
ordonnée pour chaque homme comme une condition «le la
i. [Coual : «Ce que tu dis là. » \ ar. : « La maxime que tu Invoqu s, — La pi
finale de la pensée m'a paru imposer cette correction. D'ailleurs, la corresp >ndai
akv et de Se dans les deui phrases ou nous Usons m -..< Xr ...-. la
rencontre même de ces deux formules (alors qu'il eût été si simple d'éi :
marquent l'opposition et non l'identité. Enfin, le sens ordinaire d
dans Bfarc-Aurèle (cf. \, 7, fin) n'est-il pas : a la thèse que non- soutenons 1
moment, le raisonnement présent, la maxime fondamentale «I
2. [Coual : < cette maxime. •• - Cf. la note précédente. — Ensuite : De 1
qu'elle te fasse négliger d'agir 0 En note : <■ Le Bens de la dernière phrase est dis-
cutable. La leçon ordinaire est trr, qpoéoO fit] sropà roOro, qui peut se comprendre,
et qu'en somme nous avons traduit, u Mais les manuscrits A et D ne donnent pas
le premier iirr — Gataker Inclinerait à écriront) 9060O, \Lrfie Kapin revre le ne
vois pas bien l'utilité de cette nouvelle correction. >> — >'il m'était prouvé que le
premier jjlt, de la vulgate fût une addition de XLylander, el que son manuscrit, comme
ceux que nous avons conservés, lui eût présenté la leçon inintelligible „
j'aimerais autant écrire ici où ar, que p.r\ po6oQ u.rr — qui peut avoir le même
Le texte y gagnerait du moins en clarté. Tel que le donne la vulgate el que le suppo-
sent la plupart de nos traductions, il est amphibologique, en euVt. Si tu
comprendre mes paroles, ne crains pas qu'elles te fassent négliger le devoir
signifier, soit : «Pour les bien comprendre, il faut commencer par ne s'en pas d-'-tier.'
soit : u Pour peu qu'on ait bien voulu les comprendre, on peut être >ùr d'agir toujours
bien » — Le contexte, surtout les deux phrases précédentes ( 1 tu interprètes mal
Aussi sera -tu ») ne permettent guère, d'ailleurs, d'hésiter longtemps entre lea
deux sens.] •
3. [Var. : ((librement.» — Un Athénien priait non seulement pour lui-même, mais
pour toute l'Attique, sinon {ci\ Pausanias. I, xxiv, 3) pour toute la Grèce."
V, BIBLIOTBBQU1 DES UNIYBES1TÉ8 Dl MiM
destinée '. Ne disons-nous pas aussi que telles < rencontres
produisent pour nous, connue, à propos des pierres de taille
qui composent les mur» el le< pyramides, les architectes, en
les adaptant les unes aux autres selon certaines symétries,
disent qu'elles se rencontrent »? C'est qu'en somme il n> a
partout qu'une harmonie. El de même que l'univers, ce corps
immense, est composé de tous les corps, de même la destinée,
cette suprême cause, est formée de toutes les causes particu
Hères. Les esprits les plus simples ne pensent pas autrement;
Us disent en effet : « Voilà ce que lui apportait le sort. » Oui,
telle chose était apportée, telle chose ordonnée à cet homme.
Acceptons donc les événements comme nous acceptons le>
prescriptions d'Esculapc. Beaucoup de ces prescriptions sont
bien dures; et cependant nous les accueillons avec joie, dans
l'espérance de la santé. Que l'accomplissement parfait des
décrets de la nature universelle te paraisse quelque chose de
semblable à ta santé. Accueille avec joie tout événement, lors
même qu'il te semble pénible, parce qu'il conduit à la santé
du monde, qu'il contribue au succès des desseins de Zeus.
Zeus n'aurait pas « apporté» cet événement à cet homme, s'il
n'avait « importé >> à l'ensemble des choses. Une nature donnée
n'apporte non plus à l'être qu'elle gouverne2 rien qui ne lui
i. Kntrr les deux leçons divergentes que donnent pour ectte ligne les manuscrits
de Marc-Aurèle, je ne saurais approuver le choix de M. Stich : zixxv.-y.: ' 7io>: a-vTM
xaxâXXrjXov Kpbç rrjv el(fcotp{iivy)V. Ce texte, qui est celui du florilège de Planude, — où
la phrase suivante, sans chercher plus loin, est manifestement arrangée, — a contre
lui l'autorité des deux manuscrits complets de Marc-Aurèle (P et A, celui qu'avait
reproduit \\iander et le Vaticanus) et l'axiome : lectio difficilior faciliori anteponenda.
Jl est d'ailleurs facile d'amender la leçon de P et de A, sans en modifier une seule
lettre, à l'aide de deux corrections interlinéaires : la suppression d'un accent et la
restitution du trait abréviatif qui représente un v. J'écrirais : TÉraxTai ttw: noh: «vrbv
xatTàXXv)Xov il: tt,v ciu.ao;jivr;v (P et A donnent 7ra>; et ocjto). La locution TÉTa/xai nw:
icpb; aOrôv ainsi rétablie m'en parait comprendre deux fondues en elle, — que nous
trouverons séparées dans la dernière partie de la pensée : xoà ao\ (tuvetocttîto, xa\ ttso:
té 7io); £î*/sv ; la seconde (cf. deux notes plus bas) appartient en propre à la termino-
logie stoïcienne. — La préférence accorder ici à P et à A nous oblige à écrire à la tin
de la phrase précédente xaxàXX7)Xov =!: Oyietav, sur leur témoignage, et non t:?6; -jytsiav,
qui est la leçon de Planude. Ces diverses restitutions ne modifient pas, d'ailleurs, le
sens du passage.)
a. [Couat : « Le hasard n'apporte rien qui ne soit la condition des desseins de la
nature. » — 11 ne saurait être ici question de « hasard ». (Cf. supra II, 3, dernière note,
la définition stoïcienne de xr/r,.) — 'II tj/oj^jol pjfriç, « la première nature venue» —
tel est le sens usuel de 6 Tugcfa — se distingue de ZsO; •omme plus haut, à la lin de
la pensée V, 3 (cf. la dernière note), la nature individuelle de la nature universelle.
Cette distinction ^affirmera dans les phrases qui suivent.
PI \-lh M M MO M CI I I
convienne. I u dol d< >m poui deu i raison iim< i qui
l'arrivé d'abord, pai ce que i ela 0 I pi oduil poui
ordonné pour loi, et, In éi é dan la li ame de le plu
lointaines, <lr\ .ni ;i\ <>n ave< loi Bîi I Bpjx -il cMlermii
ensuite, parce que ce qui urvi< tti i 1 ha< un 6 1 poui a lui qui
^mii\ erne l'unie en la - au e d( on i< m
et, par /eus. de sa durée elle même 1 mi* _ 1 ii<: <i
es) altérée comme l<* sérail celle <i«,s 1 > . » 1 1 i « • - d'un loul 1 1
porte atteinte à leur agencement el à leui continuité lu le
plaignanl d'elles, tu leur portes atteinte autan) qu'il est en
toi, et, dana une certaine mesure, tu les détrui
9
Ne le dégoûte point, ne renonce point, ne te découra
point, si lu ne réussis pas toujours à diriger tes actes d'a|
les vrais dogmes2. Vprèa en avoir <;t<; violemment écarté,
reviens yS, el réjouis loi si tes actions on) été l«' plus souvenl
celles d'un homme: aime la règle à laquelle tu reviens 4; ne
retourne pas à la philosophie comme un écolier chez !<• péda
gogue, mais comme les gens affligés d'une ophtalmie recoui
à leur éponge, à leur blanc d'oeuf, d'autres i leurs emplâtres
ou à leurs lotions. Ainsi, lu montreras qu'il ne t'en coûte5
1. [Couat : « était en quelque sorte en harmonie avec t<>i, inséré dani la ti
causes les plus lointaines.» —Ce malencontreux «en quelque sorte» que nous trou
aussi dans les traductions de Pierron el de M. Michaut, doil représenter le m
la locution irpoç aï t.uk eiysv. En réalité, il s'agit ici de Is dernière des
stoïciennes, le 7:06; ti 7iu>; fyov, ou la «relation >■ (infra VI, i4, i" Zeller,
PMI. derGr., lll», p. 101).]
•2. | Couat : « principes. >>)
3. [Var. : « Après avoir échoué, recommence. >>]
\. [Couat : u Aime à revenir aux mêmes règles il»1 conduite. 1 — Cf. supra I\ . Ji :
tô Tsyvtov, 0 spaOsç, piXet, toutoj irpo<r<xvaitavou.]
5. [Couat: «Ainsi, il ne t'en coûtera rien...» — En note: toà&èv lu
leçon, qui est celle des manuscrits A el D. peut à la rigueur s'expliquer. Il Lui. Irait
traduire: u Tu prouveras qu'obéir à la raison n'est rien (c'est-à-dir
» mais tu te reposeras sur elle. » On reconnaîtra cependant que ce tour est peo
(la clarté et l'usage exigeraient un participe entre ry'^Vé et i-:ïz:.:r). et que Qjùhi
toOt' Bdxi (littéralement: ce n'est rien) signifie à l'ordinaire plutôt: cela ne raul
» rien» que : « la chose est facile. 0 Aussi ai-je préféré adopter la correction de Loraï :
oOôàv £ti ôr,|ei, qui suppose dans le manuscrit une confusion due à l'iotacisme. Il
me semble aussi que l'opposition des deux propositions esl ainsi bien plus nettement
marquée.» — Le malheur est (pie la troisième personne or(;s: n'est pas classique. Le
futur de oàxvw n'est pas Gr,;(o. mais cr,;ouia'.. Dans ce? conditions, le plus simple t tait
de supposer la chute dans les manuscrits d'un <ui deux mots, comme to: £voy/.ov<.
ou même m 6âxvov, entre oOosv et èroôeifcn.]
86 mm loi Ml <mi DES UNIVERSITÉS i>i MliH
rien d'obéir à I « t raison; au contraire, tu te reposeras sur elle.
Souviens (<>i <iu<' la philosophie ne veut que ce que veut tu
nature; mais toi, tu voulais autre chose qui n'était pas
conforme à la nature. [Tu dis:] Lequel des deux est le plus
doux? — Mais n'est-ce pas par là que le plaisir nous égare?
Regarde, d'ailleurs, si la grandeur d'âme, la vraie liberté', la
simplicité, la bonté, la pureté no sont pas plus douces. Qu'y
a t-il enfin de plus doux que la sagesse, si l'on considère
combien esl infaillible cl libre en toutes ses démarches9 la
Faculté de comprendre et de Bavoir?
10
Les choses sont comme enveloppées d'un voile si obscur
que beaucoup de philosophes, et non des premiers venus, ont
jugé qu'elles étaient tout à fait inintelligibles. Les Stoïciens
eux-mêmes les considèrent comme difficiles à comprendre :
d'ailleurs, notre assentiment aux représentations sensibles
n'est jamais sûr 3. Quel est, en effet, l'homme qui ne change
pas d'opinion? Tourne-toi maintenant vers les objets mêmes
de ta perception '». Comme ils sont éphémères, insignifiants,
exposés a tomber au pouvoir d'un débauché, d'une courtisane
d'un voleur! Après cela, considère les caractères de ceux
au milieu de qui tu vis. Le plus sage5 peut à peine les
i. [Couat : « la franchise. » — Cf. supra V, 5, 2' note.]
2. [Var : « Tu le reconnaîtras en réfléchissant à ce qu'a toujours d'infaillible et de
facile la l'acuité tic comprendre et de savoir. » — Les derniers mots de la phrase grecque
(6tti<rrv){i.oviXT)C 8yvâjtEa>;) sont la définition de la ppéviptç, que M. Couat traduit par
(( la sagesse ». 11 est certain que pour les Stoïciens du temps de l'Empire pptfviptc et
lnt<Jvfi\Lr\ étaient à peu près synonymes (Plutarque, Virt. mor., 2), et qu'ils ne s'efTor-
çaient plus de maintenir entre la « sagesse» (aoçta) et la « prudence » (qppévqotc) la
différence que marque encore Cicéron (De Officiis, I, 43, i53), et qu'avait du établir
Ariston ou Chrysippe : « la première étant la science des choses divines et humaines;
la seconde celle de ce qu'il faut faire ou ne pas faire. »]
o. [Couat : « toutes nos conclusions sont changeantes. » — Sur le sens exact de
Toyv.aTaOcTi; et d*àxaTàXv)irrov, que II. Couat traduit un peu plus haut par « inintelli-
L'il>!<- •>, cf. Zeller (P/t/7. der Gr., 111 3, p. 82, texte et notes). Disons seulement que, pour
qu'une chose soit « intelligible >>, ou, comme disent les Stoïciens, pour que la « repré-
sentation » (çavxotota) à laquelle nous donnons notre «assentiment» (T^yxaxaôsdi:)
v<»it << compréhensive » (xaTaÀYjimXTJ), il faut non seulement que celle-ci soit d'accord
avec son objet, mais que nous ayons la claire conscience decel accord. (Voir aussi
supra p. 17, n. 2, et 65, n. 1.)]
\. f Couat : « méditation. »]
... [Couat : ■< le plus complaisant. » — Sur le sens de -/apiédraTo;, cf. infra VI, i'j,
',* note.]
ri N si i ^ i >i m \ i.' \ i i i i i
iiipportar je n'ajouta pa que pei lonnc m
même qu ri » « peine \ u mili< u d( lénèbn
laideur, dam < al écoulement de la mall< i e ' du U mp «lu
mOUVeinrnl cl «les (Ilotes mm j<- ne voi.v nm poill quoi
nom puiisioni avoir de l'estime al on véritable attachement
Consolons noua, au contraire] an attendant la dissolution
naturelle, el pour ne pas nous tourmentai <!<• i ntc,
reposons nous sur les véritéi suivante! d'abord, rien ne
n'arrivera <|ui ne soil conforme ï la nature universelle
second lieu, j'ai la liberté9 <!<' ne jamais agit contrairement i
mon Dieu ci à mon génie. Personne ne pourra me contraindre
à lui désobéir.
il
Quel est donc l'usage que je fois aujourd'hui de mon In
Pose-toi celle question à chaque occasion, demande toi : que
se passe -t- il dans celle partie de umi même qu'on appelle
le principe directeur? De qui ai -je maintenant l'Ame? d'un
enfant? d'un jeune homme? d'une femme? d'un tyran? d'une
bêle domestique? d'une bêle sauvagi
12
Ce qui suit le montrera la valeur de ce que la plupart de-
hommes considèrent comme des biens. Si nous peu-ions i à
certains biens réels et véritables, comme la prudence 5, la
tempérance, la justice, le courage, après les avoir ainsi envi-
sagés, nous ne pourrions pas entendre le mot du poète : Tu
i. [Couat : ((substance. >>|
2. [Cf. infra V, 17, en note.]
3. [xrqvouc (tojpiov. Cf., au début de la pensée in, 16, L'opposition d<
et de fc)ptti>v.J
4. [Couat : «Si nous avions cette Idée qu'il existe certains biens rentables —
mots m'ont paru traduire ef ...71; EKtvo^œtSN vitdtpx£iv plutôt qn'i:
Cncap/ovra, que porte le texte.— Les biens rentables (Ta m: i yaOix) et •
(ôicipxovrot) que Marc-Àurèle nomme ensuite: prudence tempérance, justice et cou-
rage, sont en réalité tous les biens. — et non pas seulemenl certains d'entre eux, —
puisqu'en ces quatre mots se résument toutes les vertus.]
5. [Couat: «sagesse. » — Si ce mot peut traduire pp&vijatc lorsque la ppdyiptç <--t la
seule vertu qu'on nomme (cf. supra V. g, dernière note), il convient moins lorsqu'on
la distingue des trois autres. La différence que marque Cicéron entre las g ss roses)
el la prudence (ppovr,atç) garde ici toute ^a valeur.]
88 BIBLIOTHBQUl Dl S UNIVERSITÉS i>i MIDI
possèdes tant de biens... '. o parce que ce mot ne conviendrait
pas du tout. Mais si l'on a dans l'espril les biens qui parais*
seul lois au plus grand nombre, <m ('coule ces paroles du poète
comique el <>u n'a pas de peine à les accepter comme hien
appropriées. Le vulgaire même sent bien celte différence :
sans cela il ne serait pas choqué de la première application el
ne la repousserait pas3. Au contraire, s'il s'agit de la richesse
et de ioules les chances heureuses du luxe el de la gloire.
nous acceptons comme jusle el spirituel le propos du poète.
Poursuis donc et demande -loi s'il faut honorer et regarder
comme des biens des objets tels qu'en y pensant on puisse
dire de leur propriétaire: «Il est si riche qu'il ne lui reste
pas un coin pour se soulager. »
43
Je suis constitué de principe efficient 3 et de matière; ni
l'un ni l'autre ne disparaîtront dans le néant, pas plus qu'ils
ne sont sortis de rien. Chaque partie de moi [aura donc tou
jours sa place assignée; elle] sera changée en une partie de
l'univers; celle-ci, à son tour, se changera en une autre partie
de l'univers, et ainsi de suite, à l'infini. C'est par un change-
ment semblable que je suis né moi-même, et ceux qui m'ont
engendré, et ainsi de suite, en remontant encore à l'infini.
Hien n'empêche de parler ainsi, même si l'on conçoit l'univers
gouverné de telle sorte qu'il passe par des périodes limitées 4.
i. La citation est incomplète. La fin de la pensée a permis à Gobet de restituer le
texte de Ménandre qui est rappelé ici. En réalité, ce texte tient non pas dans un vers,
mais en deux moitiés de vers. Traduction complète: «Tu possèdes tant de biens
qu'il ne te reste plus de place pour te soulager. » — [Les manuscrits donnaient ici :
£7i à/.oO?ai 8uv/)0efr] rV Otto tw àyaO<.> yàp £?ap(j.6<j£i. Les vers de Ménandre, rétablis
par Gobet, sont les suivants :
G'//, s/ei; 6[7ioi y^ar^]
'J7TO TO)v iya6ô)v, £*j c<rOt -
C'esl Nauck qui a donné au présont passade la rédaction définitive : Êwaxoyffa:
8uvv)0efa] 70' 6ic6* reôv àyxOtov' où y oc p - • • J
2. o*j yàp av toOto jj/ïv oj tzoo'JÏy.otz'zi xai àaqÇioOTO. Il <^st évident qu'une des
deux négations est de trop. Peut-être faut il voir dans un des deux oj la trace du
complément de icpooixoicre, qui n'est pas exprimé et qui serait bien nécessaire: a-jToî:
yàp av touto u.kv ol icpofflxoirrs xtX.
3. [Couat : « de forme. » — Cf. supra IV, 21, dernière note.j
/j. [Couat : « bien (pie l'univers passe par des période* limitées. » — A'.oixf(7a'. n'est
pas traduit, el xav (même sij me 9emble confondu avec £• xxi (bien que). En d'au-
tres termes, la traduction de If. Couat (comme celles de Pierron et de Barthélémy-
|*| if i»i \i \n« m ri i i
N
i..i i n ..n el l'arl de » •«" onnei onl de pai inc< qui
suffisent .:« ellei mé il < f * i î suffisent bui n qui l<
concernent, Elles partent «lu principe <|'ji leui i I propre
el marche ni vers l.i lin «pi rlh ni |)io|
appelle i <»n cei actions action* droites ' poui indiquei
qu'elles ^u i \ enl lo ligne droite.
15
Il ne faul considérer comme humaine aucune des rho
qui n'appartiennent pas ;» l'homme <'n tant qu'homme. Ce ne
sont pas là des ohoses que l'on puisse réclamer de l'homme;
Saint Hilaire) affirme comme une vérité <"i un «i" qu«- M.m - \nn i
avancer que comme une hypothèse. .1»' laia bien qu'en d'autres ;
Pttuéet n'a pas hésité, v la Un de la 5a' de oe même livre, le* n» se
retrou Yeol (te* tâvov**. xaii ni
dans une proposition conditionnelle, lu début du livre \i (XI
d'un mot, précise cette doctrine, — la renaissao âix^i -a.
en Impliquant la conflagration (èxTcvftaxrt;), nom reconnaii nt il
ii« mis pai le, et que d'autres Stoiciem <>nt appelées gran le* an m es
encore mentionuer ici les passages où Mari -Aurèle rappelle et o lèbre la phili « >phie
d'Heraclite (surtout 111, 3, el VIII, $). Mais voici, dans un autre lette \. 7), que
réxirupwet; et la grande aimée ne sont plus qu'une hypothèse, qui en ^.<iit une autre,
mais ne Naut pas plus iUe. v.xzu. ictpfo&ev BXftvpouuivou [toîi SXov]i tlTI il
àvavso-jusvo'j. — Tout compte Fait, il est vraisemblable que Marc -Aurèle ne
à cette doctrine qu'une confiance limitée, parce que la question même lui pars
d'importance secondaire. Nous l'avons vu de même (IV, 11, et autres textes 1 ités -lan-
la dernière note) se désintéresser du problème d«> l'immortalité.
On sait d'ailleurs (Zeller, lll3, p. 166 et 202) que, sur ces deux questions au rnoin-.
les Stoïciens, dès la seconde ou la troisième génération, ne s'entendaient plus. Ici,
sans doute, cV>t surtout par déférence envers les maîtres d'autrefois que Marc- iurèle
accorde avec sa propre pensée une doctrine à laquelle il ne tin 11 oubli
nous indiquer les conditions de cet accord: s'il est vrai qu'à chaque renaissance du
monde ce soit la même histoire qui recommence, à tel point que Socrate doive revenir
pour se faire accuser par Anytus et Mélitus (Zeller, p. ij5, note 1), le nombre des
transformations que subiront les parties de mon être sera infini, mai? e seront — au
bout d'un très long délai — encore et encore les mêmes. Tout passe, mais tout
reviendra. Évidemment Marc-Aurèle pouvait souscrire à cette thés 1. il
lui parait plus simple de dire : tout se ressemble, el a un homme de quarai
vu tout ce qui fut et tout ce qui sera » (XI, 1).]
1. [Var. : « catorthoses. » — C'est le mot grec conservé en français KanrépAt*ert{ ne
se rencontre qu'en cet endroit des Pensées : j'ai dit (supra III. 12, en note) que le mot
voisin xa7Ôp0o>iia n'y parait pas, bien qu'il y soit à peu près défini. En distinguant,
au cours de la dernière note à la pensée III, iù, xorréptofiai de &aO?jx?v, nous avons vu
qu'on pouvait entendre par le premier de ces mots le devoir accompli jusqu'au bout
par un agent conscient, et jusqu'au bout en conformité avec la raison droite (/.ara rbv
op6bv aôvov). La « calorthose » est un acte de devoir ainsi accompli. Les Romains tradui-
sent xaTGpOwaa par rectum et xaTÔpOtoT'.: par recte factiun. — La métaphore du n plu>
court chemin » ou de la « ligne droite >> nous est c mime : cf. supra IN . 18, el l\ .
90 BIBLIOI BEQ1 E Dl 8 I M\ ERSI1 ES Dl MIDI
la nature humaine ne les promet ' point el ne s'achève point
en elles. La fln de l'homme n'esl point dans ces choses, non
pins que l'objet dernier de cette fin, le bien. D'ailleurs, si
quelques unes d'entre elles appartenaient à l'homme, il ne
nous appartiendrait pas de les mépriser et de nous tenir en
garde contre elles; il n'y aurait pas lien de louer celui qui
sait s'en passer; enfin, si elles étaient des biens, ((lui qui
cherche à se priver de leur possession ne sciait pas un homme
de bien, \u contraire, nous disons que plus un homme se
dépouille de ces choses ou d'autres choses semblables, ou
unifie plus il supporte facilement dvn être dépouillé, plus il
est un homme de bien*, i
16
Telles sont tes représentations ordinaires, telle sera ta
pensée même 3; notre âme est tout imprégnée de nos repré-
sentations sensibles 4. Plonge-la donc sans cesse dans des
idées comme celles-ci : là où Ton peut vivre, on peut bien
vivre; on peut vivre à la cour, donc on peut bien vivre à la
cour. Et encore : chaque être se porte vers ce pour quoi il
a été constitué 5; sa fin est dans ce vers quoi il se porte; là
i. [Couat : « revendique. »\
2. [Dans la dernière phrase, nous sommes obligés .d'écrire àcpaipo-jfievo;, comme
Gatakeret M. Slich. Au lieu de corriger àvs/ypai, qui fait solécisme, en àvé/EToa,
j'aimerais mieux rétablir le mot av devant lui J
3. [Couat : « tes pensées ordinaires, tel sera ton esprit. » — Dans le lexique qu'il
s'était constitué en vue d'une revision de son œuvre, M. Couat traduit S-.dvota par
« pensée discursive ».]
h. [Couat : « de nos pensées. »]
."). [Couat : «fait.» — Le mot xaTaîxîur, ou son synonyme <r6<rra<itç (en latin:
constitutio) exprime l'idée d'un assemblage et d'un plan (supra IV, 5, en note). La
moindre chose est « constituée »(supra V, i3) d'une matière inerte et d'un principe
efficient et formel qui la détermine. La « constitution » de l'homme était définie dans
l'Ecole (ad Lucilium, GXXI) : principale animi quodam modo se habens erga corpus, — ce
qu'on peut librement traduire (d'autant plus librement que Sénèque lui-même
trouve cette dénhition embarrassée et obscure) par « un corps subordonné à une
raison ». Sénèque ne manque pas d'ajouter que la constitution varie d'un âge à
L'autre et évolue, bien que nous restions le même homme depuis l'enfance : ego
tamen idem sum, qui et infans fui, et puer, et adolescens. C'est à peine si la définition
et cette remarque complétée par cette restriction permettent de distinguer dans un
rtr« sa «constitution » de sa «nature». En fait, Marc-Àurèle emploie les deux mots
comme à peu près synonymes (III, 9; y, V'» : voir la note).
Le manuscrit qui a servi à l'édition de Xylander portait à la suite des mots ounep
i'vE/.ôv Êxotorov xotTcffxeuaffTat le> mots 7:;>ô: 00s xatTaffxeuaorai (sic), qui manquent
dans le l aticanus 1960, et qu'on peut sans témérité considérer comme une glose.]
Il s I I Ml M \lv M l.l I I
OÙ rs| -;i lin I I C I <ni Intel ôl I I I »ii lum <|..n< l< I
l'animal raisonnable c'est la ' J'ai, en effi
déjà ' que nous étions nés poifr nou
,-\ Idenl que 1rs 6ti ei Inféi ieui ont fait poui le u|
el les supérieurs les uns poui le autr( (,i l< fttn rivanti
ionl supérieur! à ce qui esl Inanimé el Ici i Ire raisonnable!
aux êtres s i\ » n » -
17
Poursuivre l'impossible esl une folie; or, il esl impossible
que les méchants n'agissent pas comme tel
18
Rien n'arrive à personne que 1 « • nature ne l'ail mis à même
de supporter. Les mêmes accidents arrivent à tel autre qui, soi!
qu'il ne B'en rende pas compte, soil qu'il veuille faire montre
de grandeur d'âme, tient ferme el demeure invulnérable,
Wst-il pas étrange que l'ignorance el la vanité soient plus
énergiques que la sagesse?
19
Les choses elles mêmes n'atteignent pas le moins du monde
l'âme l; elles n'ont pas d'accès jusqu'à elle; elles ne peuvent
ni la changer ni l'émouvoir; seule elle se modifie el s'émeul
elle-même; c'est elle qui confère aux accidents extérieurs un
caractère en conformité avec le jugement qu'elle porte SUT
elle-même.
20
V un certain point de vue, les hommes nous touchent de
très près, en tant que nous devons leur faire du bien et les
supporter; mais en tant que certains d'entre eux s'opposent
à notre œuvre propre, les hommes entrent pour nou- dans la
i. [Var. : «la solidarité.»]
». Cf. II, i; III, 4; IV. 3; plus bas : \l. 18.
3. Cf. V, 3o; VI, 23; VII, 55; XI. 18.
.'i. [Par «âme» entendre ici le principe directeur. Cf. tnfra \. •-. <-t la longue
Dofte.l
BIBLIOTHÈQ1 l M - I M\ i RSITÉfl M MIDI
catégorie <lc- choses indifférentes, tout autant que le soleil, le
venl OU une bête sauvage. Os objets seraient (le nature ;i
entraver notre action; mais |a tendance1 el la disposition
intérieure9 ne sont empêchées par aucun obstacle, parce que
nous laitons nos réserves 3 et changeons d'objet: la pensée
détourne et transforme, en se Les assignant comme un but, les
obstacles mêmes que l'action î rencontre; ce qui nous empêche
d'agir nous devient le motif de notre action, et ce qui DOU8
barre la route devient ce vers quoi nous marchons.
21
Honore ce qu'il y a de meilleur dans l'univers, c'est-à-dire
ce qui se sert de tout et dirige tout. Honore de même ce qu'il
y a de meilleur en toi, et qui est parent de l'autre. Chez toi, en
eflet. c'est ce qui se sert de tout le reste et gouverne ta vie 5.
22
Ce qui ne nuit pas à la cité ne nuit pas non plus au citoyen.
Dès que tu auras l'idée d'avoir éprouvé un dommage, aie
recours à cette règle : si telle chose ne nuit pas à la cité, elle
ne me nuit pas non plus à moi-même; si au contraire la cité
en éprouve un dommage, je ne dois pas m'irriter contre celui
qui l'a causé, mais lui montrer son erreur 6.
î. [Var. : « l'impulsion. ». — Cf. supra 111, 16, 3e note.]
2. Les Stoïciens, d'après Simplicius (Catégories, 6i, p), définissaient la «dispo-
sition )> (giâôeaiç) une « manière d'être» ou «détermination première» (sEi;) qui ne
comporterait pas de degrés : toc; (xàv Ifaç èittTeiveoOau ôviva<r6ai xai avfcaOat' toU oeoia6£-
eretç iveirixaToyç stvat xoà devétouç. Le type de la 8tâ6£<riç, pour eux, c'est la vertu.]
3. | Sur la théorie de la «réserve» (ûice£aîpe0iç)i c^- IV, *» e*- VI, 5o.]
'i. [Couat : « qu'elle rencontre. »]
5. [Voir infra VI, 5, et VI, 8, la définition du « principe dirigeant » dans le monde
et en nous.]
6. Les manuscrits donnent ii xh 7iapop(oijisvov; Cette proposition ne se comprend pas
el doit être incomplète. L'idée à Laquelle correspondent ces mots a été plusieurs lois
exprimée par Marc-Aurèle, et une fois au moins dans les mêmes termes (XI, i3:
Itoi|ao; to ftapopc£|ievov Sellai). Il est donc très probable que la proposition xt to
rcxpopcotievov dépend d'un verbe tel que SiôotXTSOv ou 8sixt£ov. [En somme, Aug. Couat
admet ici la conjecture de Galaker, àXkk BsixtÉov xi /.ta.— Une indication marginale
du traducteur rapproche ce passage des pensées VII, -*6 ; X, 4 ; XI, i3, qui recomman-
dent et justifient par diverses raisons la bienveillance envers le méchant. C'est
surtout, il me semble, la aGc pensée du livre IV ou la V du livre IX qui permettra
d'interpréter celle-ci : «Celui qui commet une faute la commet envers lui-même, » —
le dommage subi par la cité l'étant aussi par le citoyen qui en est l'auteur. Mais, s'il
est puni, pourquoi s'irriter contre lui?]
il n ii s ni m Ul< m ii i i
23
Réflécl «\ en( •■ la rapidité en • •• laquelle i ' rmpoi t<
tout ce <|ni existe el toul ce qui nall La matii n • I comme un
neuve qui coule sans cesse ; un changement continu < it la loi
ion te .1 < 1 1 \ [té ; loul principe eflflcienl esl ujel à mille n ai latiori
i |< louai lut tan
.. |< i mi. il lei pu i lan un poi i" Un h liant omri l
unissent mille variations... Mon coIIpru m llamelin, dont la crltlqu
souvent pi i « ieuae, Ml à cetfc Induction un doubli reproch<
1 1 m • m m • , 1 1 1 . ■ esl ni' i il laine (que devons noui entendre pai l< i • I
i ... suffisamment la distlm lion ou !<• rapp< 1 1 d< i m
replat ée dan i l< - Pensé i, ell< eal Infli m< a pai loui k
Stich | où le rencontre le pre r d pai bon d< >n
h ure lo fécond. Nous voulona dire, pour ce qui eal de l'interprétation !
m i .il • ..m iei ôquivalenti i », que M Coual
Pierron el M. m>« haut) Iraduil d'ordinaire pai i forme et Ici leulemenl pa
el qui, en n alité, désigne le i principe effli ienl el formel l'opposa ni .« la m il
rj, oùefa) qu'il détermine (cf. rapra l\ , n, dernière note . pi ul pu n In ai
très particulier i**t — <iii«^ IfaroAurèlc limite ion horizon, et, au lieu d
universelle, ne considère plus que la nature humaine; qu'il n a, en effi
lelle pensée (IV, n) où le mol xtriov <a:.::a ou alterne avei le
telle autre i IV, 'i<» : \ « >ir la noir) où n lui cède sa pl« n Irait i
lemonl à l'ospril d'un lecteur de la traduction •!<• M Couat, lorsqu'il n ti
n causes» nommées à coté des «puissances de la vie», de complet au nombri
peut-être au premier rang des «causes» les âmes humaines. Fin ce qui i ocerne
Ivlpytiot, il «>sl aiaé de vérifiera l'aide de l'index que, sauf un seul cai IX,
substantif est expressément qualifié par pueixA; (et désigne non la rie, mais, tu
contraire, la mort), Marc Uirèle lui donne toujours une signification pratique
pour ainsi dire, toul humaine. D'après la traduction même de M Couat, il n'exprime
guère «I »ns les Pensées que l'activité propre à l'N m*', et parfois (cinq fois iui dix-
huit), el surtout quand il esl employé au pluriel (exempl \ I résultat
activité, c'est-à-dire : uns actions. C'est dans ce sens qu'au début de la pensée \il
il alterne avec le mot irp&Çiç. Le verbe de la même famille, se trouve avoii
dans 1<>> Pensées un emploi t«»ut aussi particulier que celui du lubstantif: il i |
sujets AJ*r/rt \ II, i(>), r, ex ?o0 i\-;.y. ( I\, 3i), — jamais pjotç. si cette statistique ne peut
être invoquée comme un argument décisif, on conviendra qu'elle rend fort au
les traductions qu'on a jusqu'à présent données d'cvépyeiai, et que très vraisembla-
blemenl il y a mieux à trouver ici que les mots « actions, forces <m énergî i
nature» (Pierron, Bartbélemy-Saint-Hilaire, M. Michaut), — ou même pu i de
la vie », comme a écrit M. Couat.
En jugeanl ces diverses traductions insuffisantes, je ne prétends pas d'ailleurs an*
Marc-Aurèle, surtout je ne prétends pas que les Stoïciens n'aient jamais voulu exprimer
par Èvépyeia que l'activité propre à l'homme ou les actions humaines : il suffirait
l'expression ;p-j<7r/.r( èvépreia que j'ai citée plus haut pour me contredire. Mais j'en-
tends par ce mol toute activité du type de la nôtre, ou toute action accomplie par un
vivant. On sait que la nature, pour les Stoïciens, est un vivant. — Ainsi défie
général, l'evspYsta s'oppose à l'oùota, c'est-à-dire à la matière i; se distingue
de l'ait t'a. Elle s'en distingue surtout par deux caractères : i° L'dtrcfa est le principe
de toute détermination de la matière; elle est donc dans la chose la plus informe
comme dans l'être achevé: l'èvépfeta est propre aux êtres. 3 Tout être révèle une
a'.T''a, d'où il est issu : toute svépvEta révèle un être constitué et vivant, dont elle est
la fonction, riyova: -po; svlpyetotv, dit Marc- Uirèle à la première pensée de ce
livre V, où il tâche de déterminer (cf. à la 3e lijLrne l'expression si précise: &s svexî *
Ys^ova) la cause finale de l'homme. Dans l'École, le- logiciens rapportaient l'xtrca et
</l BIBL1U1 m Ql l i>l S I MVi.ltM i ES i>i midi
Presque rien nV>t Btable1, el loul proche est le gouffre béant,
l'infini du passé el de l'avenir <>ù tout s'évanouit. Wsi il
.7. ;i deux catégories différentes • \>, xotev ou vj Rotérvic, qui traduit on dialec
tique (cf. infra I\. :».">. en note) l'abstraction exprimée en métaphysique par r, -,
est l( n< m du second de leurs Rpâta vlvi] </>///■'/ \ I, i/i, ir* note; cf, Zeller, Phil.
der '/".. III*, p ..' l'evfprtta est (»/,;,/.. p. 101; infra VIII, 7. en note) une dei
catégories «lu -m; k'/ov. comme la passivité, son contraire, comme la grandeur, la
couleur, le temps. i<. Heu, le mouvement, etc. Si Marc-Aurèle, qui ne se piquait
pas d'être un dialecticien (infra VII, 67), noi • i< l, i côté du principe de tout mode
de la matière, < <*t attribut des seuls vivants, c'est d'abord <j u<-. parmi «tout ce qui
existe el tout ce qui naît - . les /lies comptaient pour lui beaucoup plus que les
choses; c'est aussi parce que, quoique Stoïcien (sapro IV, 31, note finale), il n';i\.iii
l»;is pris l'habitude de toujours ramener toutes les causes — fin, tonne, temps, et
— ;i une s,. i,|r.
I >i . sj jamais L'unité du principe efficient el de la cause finale esl manifeste, c'est
lorsque, sous Les noms d'ottTfa et d'cvépyeta, on les considère dans le \i\;mt. Nous
sommes nés pour agir, sans doute: mais qu'est-ce qui agit en nous.' Le principe
efficient el formel. Lorsque kfarc-Àurèle Lui-même oppose (l\, 3i) xk à«b t/jc extôc
'v.~:x: 9uu.6atvovroc a xa 7:apà tt,v l\ r(u.ô>v alxiav (vepyo*j|i.cva, il est certain que pour
lui la seconde au moins de ces ol\-;.-x'. est une àvfpycia. On ne saurait donc voir en 088
mots des termes contraires» Mais nn p(Mit toujours, en considéranfla génération el
l'évolution des êtres, distinguer un moment où L'alita devient, nn autre où elle
d'être nue gvépysta. Quand «l'homme s'est retiré, laissant la semence dans la matrice)
(X, <»>, la môme «raison» (X070; f77:zp[LOLxiy.6z) incluse dans le germe, qui tout
à l'heure encore était, chez le père (Zeller, Phil. der Gr., III3, p. 198), la faculté
d'une Ame vivante et active, n'est plus que le principe efficient de l'être à venir
(infra \, aO; voir les notes), nlviatt aussi mais non èvsfyetat, tous les autres facteurs qui
du germe feront le fœtus, et du fœtus l'enfant. A moins qu'on ne regarde toute cette
_n< se comme une œuvre de l'être parfait et unique, comme l'action d'une force ou
faculté (oJvau.i:) de la nature: de ce point de vue, toute différence disparait entre
svépyeiai et a:îia'.. C'est pour cela précisément que, lorsque ces deux noms se trouvent,
comme ici. en présence et demandent à être distingués, on doit éviter le mot « nature »
dans la traduction qu'on en donne.]
1. [Couat: « Presque rien n'est stable; près de nous, ce goufre infini » — Il m'a
semblé qu'ainsi groupés comme un substantif et son épithète ces deux derniers mots
perdaient beaucoup de la valeur que le tour tout différent de la phrase grecque
donnait aux mots a7i£ipov et dr/avf:, l'un sujet, l'autre attribut, détachés aux deux
extrémités de la proposition. D'accord avec M. Couat, j'ai adopté ici la ponctuation de
Goraî, qui, déplaçant le point qui est dans la vulgate après xa\ to TrâpcYyjr, fait de *ài
7/coov o-joèv i<77«'>; une phrase complète, et une seule expression de xatxb icaprrvu; ré6s
focetpov. Dans cette expression, l'ordre des mots, qui est exactement le même que dans
un passage des Miilippiquesil, 19: xà: s7rc<7TOAtfjiaio-j:7ajTaç 5-jvâu.etç), et qui n'en est pas
moins extraordinaire, mettrait en vedette l'adverbe Ràpeyyuç, comme Test l'adjectif
£7iKTTOAt{i.ato'j; dans le texte de Démosthène que je viens de citer. Cette intention de
l'auteur est très bien rendue par le tour que M. Couat a donné au commencement de
<a phrase. — Le changement de la ponctuation dans les textes anciens est toujours
licite pour peu qu'il soit utile au >,>Ms . on no peu( guère contester qu'il s'impose ici.
On doit aussi accorder à dorai la restitution d'un article dans l'expression 70O ts
icapwyvpiéTo; xai [tov] fiiXXovroç, — restitution moins nécessaire à la clarté qu'à la
correction de la phrase. Mais je crois, comme M. Couat, qu'il serait téméraire d'aller
plus loin. Si aisément qu'ait pu se commettre la faute qui eût réduit sveorcStc à
3(txw; après ovôév, et si spécieuse que soit ici l'opposition du présent(6 £ve<tto);; même
expression plus bas, VII, 29) au passé et à l'avenir, nous ne pouvons faire la troisième
correction que demande Coraï. La phrase aysoov oùôàv ïg~îù; est aisée à comprendre:
elle résume — en les atténuant (t/îcôv) — celles qui la précèdent. Au contraire, dans
t/îoov oxfàhi Eveorto;, que M. Michaut traduit par le «présent n'est presque rien ». les
grammairiens trouveront qu'il manque un article devant le sujet, et les philosophes
i i i i m \i mp \i m i i
donc pafl un fou 'lui qui nu milieu de U ml H
ou s 'agite, <»u se tourmente en comptanl poui quelq
la oause <!<• ion trouble, le momenl <»m il l'a < ow u el l( b i
qu'il peul durei
(|uo la i lue rien osl I
I, au! '|"' """ ' I"' ' h " '' ' ' '""' I""" """
limite d< •!• u i i" ml
< menl Mu' \ urelc lui m( me pmil il h
i Iims. toute m .1 i il « u i ue l( i que II lUbilil
des êtres, .iixiii I i i, i u i
«,ii que l'apparente i-n • » it< ■ ■ * l»« » >• . qui i
de noa m. un-, durent plui qu< i « il i av< iuc que |
de || \ 1 1 1 • .1 1 . • .( de M s'" i» il l'aval p n p >uvoli Ui i lu • l<
« presque rien n'osl table, même approximati m >i qu< I uhiM
r.u tiole dam l'exp idverbiali rail II
logique ' Puii croll on qu'api
h.uh .u-, ;tpirs le mni ■ m. ii • , il -nnhle parfois indifl
pas même
Quoi qu'il en toit, s'il eal pour les SI ena quelqu< d'absolu table
dans le monde, ce ne peul être que la raison du mond i lu
l,i raison en laquelle réside son identité, celle qui ne s'éteint ps Zellci P
./<•/• 0r., lll'1, p. i5i, il i) quand l'air, l'eau el la len I innenl lani l'itnivei
ombrasemenl : c'esl la l«»i elle-même des i hangemenls qu'ils voient partoul II- ne
p luvent, «n effet, se passer de cette idé . sans laquelle il n*> si poinl le |ue
l<^ plus logiques d'entre eui diseni que la loi eal un animal, lii mati< n Ils
admettent que la l<>i eal changeante, comme toute mati< [u'elle n
plus la loi.]
i. [Goual :« souffle. » — Saoa doute cette traduction s le s'ei
avec li1 contexte, notamment arec les mots s'agite, — se tourmenl . - m troubb
Mais l»» texte porte xnjotAiisvo;, non awàv. La dernière prop «itl un, s en
comptant pour quelque chose , ux :•, rtvi xpovu • >, n'explique que I
T-/£TAiâ^(ov (« se tourmente »), non l'ensemble des trois verfo
2. [Couat : s comme si le temps était quelque chose <ii comme si ce qui le Iroubli
devail durer.» —La vulgate donne : u>; ïv rivi xp6vta xat snftuixpbv Svoy^X^ea itil
singulier, qui ne ><• rapporte à aucun terme de la phrase, el à la place duquel ou
attendrait un accusatif absolu, s été corrigé par H«i-k< ■ en l-<r*fr'r~,-x~:. qui M oons-
prend sans doute fort aisémenl (pouvanl s'accorder, une ligne plus haut, i
6 svtojto'.: ç'jt(.);j.£vo:); mais ou comprend moins bien comment la faut.- aurait p
commettre. Les derniers traducteurs français de Maro-Aurèle, n compris M
semblent avoir admis la retouche de Reiske. M. Couat est le seul qui ail préféré à la
leçon traditionnelle êiù [xixpov celle du Vaticanas 1900 (= l), 1-: puntpov, que M Stich
a, de son côté, accueillit' dans son texte. Je ne saurais, moi non plus, comprendrt
Sfci txe/.pov : Picrron et M. Michaut — pour ne citer qu'eux — n'onl :
exactement cette expression sans lui sacrifier le contexte. Pierron : comnn -
tourments pouvaient, même un instant, lui causer la moindre importunité; Mi d oit :
« comme s'il en pouvait souffrir même un instant et même un peu.
On remarquera la valeur qu'a prise aux yeux de M. Couat le m
pression : k'v nv« ypovt.K Sa traduction — « comme >i le temps était qu - —
est d'accord avec le sens général de la pensée : elle y ramène l'idée que Coraïfen
lisant £vstt(o: pour sortô;. avait voulu tirer d'une phrase antérieure Si ingénieu»
séduisante qu'elle fût, cette interprétation m'a semblé un peu risquée. J'ai cru qu'elle
se défendrait mieux si une antithèse ou tout au moins une répétition mettait dans
la phrase grecque xvn en pleine lumière. Telle est la première raison qui m'a fait
corriger Èvo^X^<ravtt, non en svovf/.r.Tatf: comme Eteiske, mais en Èvoyj La
seconde est qu'après ma correction (qu'on se report-' à l'époque où l'écriture ne
séparai! pas les mots) le texte e^t encore intact.]
<>(') BIBLIOTHEQUE DE8 UW1VBR81TE8 Dl MIDI
24
Pense à la matière totale ', donl tu as reçu une parcelle: à
la durée toul entière, dont un court et un imperceptible
intervalle t'a été attribué; à la destinée donl lu es une partie,
combien petite!
25
I n autre se rend il coupable en vers moi? C'est son affaire;
il a sa disposition9 propre, sa propre activité. Moi je suis >
maintenant ce que la nature universelle veut que mainte
nant je sois, je fais ce que ma nature veut que je fasse
[maintenant].
26
Que la partie de toi-meme qui dirige et gouverne ton âme
demeure inébranlable aux mouvements de la chair, doux ou
rudes 4; qu'elle évite loute confusion, s'enferme dans ses
propres limites et circonscrive dans les membres l'ébranlé
i. fCouat : <■ à la substance tout entière. »]
2. fCouat : « sa propre constitution. » —Sur le sens que les Stoïciens donnaient
à o'.âOsT'.:, cf. U seconde note à la pensée V, 20.]
3. [La traduction littérale serait plutôt « j'ai » que «je suis». Mais il y a une
correspondance évidente enlre les expressions importantes de la pensée, qui se répar-
ti— ni naturellement en deux groupes symétriques. D'un coté : giocOstiv, ïyu), q xoivtj
ç-jox; («disposition ». «j'ai», « la nature universelle»); en face: ÈvfpyEtav, ^paTif», r,
È|iY] puatç (« activité », «je fais», « ma nature »)• Dans le pronom neutre qui sert de
régime à ïy(» est incluse l'idée de nyv 6'.â0s?iv, de même que rrçv svspyîiav serait le
complément réel de icpaffow. Or, entre les expressions « avjir telle ou telle manière
d'être > et « être tel ou tel », la différence de sens est nulle. — D'autre part, l'affinité
est manifeste entre la «disposition » et la « nature » : Tune et l'autre sont définies pai-
lla Stoïciens des « déterminations premières », bÇsi; (supra V, 20, 2e note, infra VI,
i't et Vi, en note); à ne regarder que l'emploi des deux termes dans les Pensées, et
notamment les épithètes qui accompagnent à l'ordinaire le mot Sidcôtmç (çtXqTiXT)
Xftt ffrspy.T'.y.r,, X, 1: Ma, VI, 3o ; StxaïxV), V, 34; Xoytxij, V, 28; wricaCouivq ~av ro
ffV|t6*ïvov, IV, 33; sOjxsvr',:, IV, 25 ; — OU TiapoOaa, IX, 6), la «disposition» nous
parait être dans un agent moral, considéré à un certain moment, un mode ou
un aspect de sa «nature». C'est encore cette définition qu'on peut déduire du
présent passage où 5tdc0e?ic se trouve à côté de pvortç, où les sujets sont consi-
dérés comme agents moraux (Èvô> ...-pâTTi»), et où Marc-Aurèle semble avoir
affecté la répétition du mot /•>/. On forcerait à peine le sens de la dernière phrase
en l'interprétant ainsi : «J'ai la nature que veut que j'aie la nature universelle, et,
ce que ma nature veut que je fasse, je le fais. » Nous retrouverions ainsi dans cette
e l'affirmation de l'accord des deux natures que nous avons eu un peu plus
haut (V, 3) l'occasion de signaler. Il n'y a pas, pour Marc-Aurèle, antithèse entre
£(XT, et XOtVTj.]
\. fCouat : «- au\ mouvements Légers ou violents de la chair. •> — Cf. cinq uoles
[dus bas.]
I I s I I I \ I Mil
mon! <|ii il ubl oui I 01 que en raison d< i mpalhie
(je prendi ce mol dam I autre an qui 1 1 aile
avec le oorp .nu i agité la pen ée perçoil mou i • nu
I . j < ' 'll.l i I l . I I ■ 'Il • | I II • |- i | I . |. .1 I i | | !,«• ||
CI pra III9 69 4 ,'"1, • I Ici m m
< «.h. il « Quand, d milrc pai i |>oi i ■ n i >i nn<
t. iii..iiiciii ju qu'à (vai retenti i.- ion u
\ oii l( il uhrent. |
i i I ■ 1 1 p 'i l de m Couat : ■' par
I . 11. I il'tllM' snlnlai il. iimlii. II. Il i |n „ mulu
fi I M .1. Iil. lli. le || M ( ..il.lt II .1 |».is lu , , ,| ,,
s. mi ooté, m Rendall {Journal <>/ Pkiloiogy, \\iii
9eitui Ben pi i ioui que nous i iloni plu bi I \
des lll< »t- | ( et 9UU71 I' ni |i.i ,i f . f •
X« xk uioi)v voudrait < »rrigu 1. 1 irtantque
puisse sr . ■ »ui |>t . ii.l r « . tel .|n il est M n \hi. I<- OpDOM il I d ioni de Il
(sympathie » du oorpa et <ie la pensée lu ioni littéral et vulgaire du m
l'âme s'associe pai lee paaaiona (nd6v)) aux ébranlement que ubil
rcaOq), la « lympathie » eat mie servitude. Aussi Marc turèle l'a t il i ondamn< e, non
seulement dani h» première partie de «.t article, mai* .i l.i lui il'uiic auti
(VII, 66 : voir la note rectifiée sus iddenda), où il !.• nomme nettement i.' autre
lympathie» esl légitime ••! nécetaaire Le Stoïcien en fondent la noUon mr la
diaUncUon de troii lypei d'unitéi {infra VII, i3, i note), il- diaenfl d i «lie
n'est possible (infra l\, g, 6* note) qu'entre les partiel d'un n*
dire de la même chose ou du même être défiui par un princi| ni interne ou
une nature propre; et ila ajoutent, comme ici (m;
ne et l'effet de son unité. Tour comprendre cette notion loul abstraite, il faui
donc oublier que dans avu.~â0:».7 il y ■ juàdo;, ou du moini oublier
donnait dans l'École (supra 111, i0, 3' note) i ce dernier mot
Ainsi entendue, la «sympathie» du corps et de l'âme n'a pas besoin d
démontrée. C'est un fait d'expérience constante; théoriquement, elle est Impli
dans le matérialisme universel. Elle est limitée, sinon contredite, par l'affirmation
de l'absolue indépendance du principe directeur, et par la notion d'une loul autre
m lympathie » qui constitue la cité dei âmes (infra Vil, i3, iM note; i\ ' note;.
Ce sont surtout les Stoïciens de l'époque romaine qui 96 sont avisé- d<- cette double
antinomie et elTorcés de concilier la vérité psychologique et l'idéal moral. En allir-
mant hardiment, au rapport de saint Grégoire de Nysse, que rotucatavei rt -l-y/r, -ù>
aiô^axi voeoûvrc XOti Tp£|AOULéva>, /ai to <T(ï>ij.a rr, 'l'J/r,, Cléanthe mettait de niveau dans
la «sympathie» le corps et l'âme. Nous verrons dans les Pensées — dans la même
pensée (VII, 1 3, début) où Marc- VurMc oppose les deux ■ sympathies qu'admette
Stoïcisme — les âmes comparées aux membres, et le corps seul, non l'homme, ronsi-
déré comme type d'vpcouivov. Ici, sans doute, Marc-Aurèle fait rentrer l'âme et le
corps dans la même unité simple, et, comme Cléanthe. en affirme la « sympathie
mais en même temps il prétend laisser au corps son domaine, à l'âme >a liberl
partage de telle sorte la sensation entre les deux, qu'il laisse à l'un toute la réalite,
à l'autre la seule notion de celle-ci (voir les notes suivantes).
Un peu plus loin, j'ai écrit les mots u ainsi agité » pour répondre — tant bien que
mal — à la préposition sv, qui a été négligée par ML Couat. L'affirmation énergique
du caractère surtout physiologique de la sensation, la conception de la douleur et du
plaisir comme des mouvements, l'attribution trois fois exprimée de ceux-ci au corps
seul m'ont paru trop significatives pour être dissimulées dans la traduction.]
4. [Le verbe àva8iôo<rflat désigne proprement la digestion. On le rencontre une
autre fois dans les Pensées (IV, 4o: voir la traduction rectifiée aux Addenda). Marc-
Aurèle veut dire ici que la sensation n'est que l'aliment de la pensée, c'est-à-dire lui
esta la lois étrangère et nécessaire, et que celle-ci la fait sienne en la transformant;
là, que tout alimente la sensation de l'être unique, el se perd en elle. Dans aucun
des deux passages je n'ai cru pouvoir traduire littéralement.
A, COUAT-P. FOLRMÇR
Bit) MOI m <>i I di- i M \ ERS1 i ES Dt midi
il ne Faut pas essayer de s'opposer à La sensation1, qui est
naturelle, mais il ne faul pas non plus que le principe direc-
i. [Il ressort du prêtent texte sinon une théorie, du moins une définition de la
sensation qui semble ssseï différente de celle qu'on peut tirer <lu reste des l'irisées,
et qui n'est pourtant pas non plus celle que d'autres auteurs attribuent aux Stoïciens.
j'\ verrais volontiers un compromis entre Les deux.
Si l'on veut négliger pour un moment le présent article, !<■ recueil de Marc-Aurèle
non- offre de i.i sensation une théorie simplifiée ;'• l'extrême. La sensation est exprès
sèment attribuée au corps ;'■ la première pensée <ln livre \n. et surtout îi la dernière
du livre III, où l'auteur a voulu faire la part «lu corps et celle de l'âme dans la rie de
ranimai, — la part du corps et celle <!<• la raison dans la vie de l'homme. Il ne semble
donc pas que Marc- turèle ait jamais fait la distinction des 9tle0rJ9tt; et des ?c6|iaTixaM
(VII, 55) ou «î<rÔiQTtxa\ ireiaeiç (III, 6). L'identification des unes et des autres ne nous
est même pas interdite par un texte, (railleurs isolé, qui attribue la sensation au
« souffle " ou au « principe vital » (IV, 3 : Xeuoç 9j zpayitùç juvouuivc*icv&SuaTt) : car ce
texte même (cf. encore V, 33, note finale) unit le souffle au corps et l'oppose à l'ànie;
et il nous est loisible de supposer ou bien que les « mouvements » qui constituent
msations se propagent jusque dans l'Ame animale (irveOjia?), mais meurent
jii seuil de la raison, — ou bien que Marc- \urèle admettait déjà comme un sixième
sens le sens vital.
Or, cette doctrine de l'auteur des Pensées — dont la formule dernière se trouve
peut-être à l'article VI, 28 (voir la note) — ne s'accorde guère avec les témoignages
très précis qui nous ont conservé la tradition de l'École. Selon Plutarque (IJlac.
phil., IV. s3), les Stoïciens distinguaient l'<xîa6ï)<n; des 9u>u.aTtxà RotOr,, — qu'il est
difficile de ne pas assimiler aux itetcet; dont Marc-Aurèle a parlé ici. V la différence
des Épicuriens, qui rapportaient au corps la sensation elle-même, — et dont notre
auteur aurait ainsi adopté l'opinion, — les Stoïciens l'attribuaient, dit Plutarque, au
principe directeur : ce premier témoignage est confirmé d'abord par une définition
de l'àmc comme 0 exhalaison du sang capable de sensation » (at<xôrjTtxl,v Kvafou.t'aetv :
Pseudo-Plutarque, Vie d'Homère, 127; cf. infra V, 33, 3e note), qui remonte peut-être
à /('non lui-même; puis par les textes qui énumèrent les huit parties ou facultés
que les Stoïciens distinguaient en l'âme: principe directeur, raison séminale, parole
et cinq sens (cf. Plutarque, Plac. phiL, IV, V, ibid., IV, 21; Diogène, VII, 110 et 1 67 ;
Stobée, Bel., I, 836); enfin par les définitions des cinq sens qui avaient cours dans
►le et nous ont été conservées: ce seraient des ((souffle- ignés», et plus subtils
encore, m raisonnables, » 7iv£ju.aTa voEpà (cf. supra IV, &, note finale), a allant du prin-
cipe directeur aui organes» sensoriels (Plutarque, Plac. phil., IV, 8).
Ici, ce que Marc Aurèle nomme la « sensation », et à quoi il dit qu'il ne faut
pas s'opposer, doit être autre chose qu'un état du corps: car il n'est que légitime
de lutter, par exemple, contre la maladie. C'est, nous dit-on, la perception(?) —
to xva8tôoe6ai — de cet état par l'intelligence. Par là, la ((sensation» devient donc
un fait psychique ; mais toute la réalité qu'elle exprime est hors de l'àme. Le plaisir et
la douleur physiques, c'est-à-dire ce que nous considérons conlme la sensation, ne
sont pour Marc-Aurèle que des « mouvements de la chair » ; l'âme n'est qu'avertie de
ces mouvements, non ébranlée par eux. Et comment avertie? Il n'est plus b
d'imaginer ici, comme pour expliquer la représentation des choses extérieures
(çavxaaia, rJzwT'.; cpavrafTT'.xr,), dont le nom et l'idée même sont absents de cet
article, une impression (supra III, iG, 5* note) analogue à celle d'un cachet sur une
cire molle. L'union et la solidarité du corps et de la pensée, celle-ci nourrie par
celui-là, celui-là animé par celle-ci, doivent suffire à expliquer la conscience que nous
avons de nos plaisirs et de nos douleurs : ce qui modifie le corps, en effet, modifie le
sang et les vapeurs du sang, dont s'alimente la flamme intérieure; et nous pouvons
ici -upposer qu'à la seule façon dont l'âme a conscience d'exercer son action sur le
corps, elle s'aperçoit des modifications (IrepoicaMrei;, IV, 3o, aux Addenda) qu'il éprouve.
En définitive, le mot orôrôïjTt; comporte un double sens dans les Pensées, et il est
présumable qu'ici seulement Marc-Aurèle l'a employé avec une précision rigoureuse.
Mais l'ambiguïté du mol ne saurait porter la moindre atteinte à l'unité de la théorie. |
il n i i m IIAIK M i i i l
leur \ njoute dr lui méiUG ce jugcmonl qtl'cll< « il un
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27
Vivre avec les I >iru\ I elul là vil ove< i1 1 >ieui qui leui
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attribué, faisant ce que 1 oui le [ énie qu< /■ u b détat hé de
lui même el donné à « hacun p< ur « bel el p< >ui [ uid(
génie, o'esl l'intelligence cl la raison de cha< un d< n< u
iv fâches- lu contre celui qui senl !<• bom i«* fâches in
contre celui qui a une haleine fétide? Quf) peul il Fain
bouche, ses aisselles Boni ainsi el telles qu'il faul bien qu'il
en Borte de telles émanations. M «i i s la nature s donné
l'homme une raison; en s'examinant, il peut comprends
défauts. Tant mieux! toi aussi tu i»- une raison; par U
disposition* raisonnable, mets en mouvement sa disposition
raisonnable; montre lui, rappelle-lui su faute 5"il te corn
prend, lu le guériras; la colère est inutile.
28'"
Ni tragédien ni courtisane 6.
1. [Couat : « mais il ne faut pas que le principe directeur y ajoute dp lui-même un
jugement, comme >i cette sensation pouvait être un mal ou un bien. »]
2. [Définition du «dieu intérieur» (ôebç iv r,a;.v, III, 5;. Comparer une phrase de
la >f>' pensée du livre \Il : «la raison de chacun de nous esl Dieu • La |
définition est plus complète, puisque, selon elle, le • génie » ou • démoi ; si
seulement raison, mais volonté (oaa pouXctai â cafawv). Il y a ainsi identité entre
que les Stoïciens nomment «génie» et ce qu'ils nomment .principe directeur
(Cf. infra VI, 8, et en note, la définition de 70 f,ye(iovtxôv). Dans la présente pensée
le mot que M. Couat a traduit par « guide » — r.vsu/Jvx — atteste cette identité.
On sait que pour les Stoïciens l'obéissance à Dieu (cf. supra IN, 9; infra \ II. -
ou, comme il est dit ici, la « vie avec les Dieux », c'est la liberté. 1
3. Dans le texte, yrpi entre parenthèses donne à croire que la phrase où il se
trouve est une citation d'un écrivain quelconque, ce qui est au moins douteux. I -
manuscrits A et D donnent sOtsi que je crois être la vraie leçon.
'1. [Couat : « force-le à raisonner en raisonnant toi-même, a Sur ia • disposition »,
cf. supra Y, 20, seconde note, et V, 26, ibid.]
5. [Var. : « fais-lui des remontrances, rappelle-le à lui-même.
6. «OCfa Tpaywoô:, o'j'ts icopvy). » On a fait des efforts ingénieux pour rattacher ces
quelques mots «oit à l'article précédent, soit au suivant. Pour ma part, je ne crois pas
qu'ils aient fait partie de l'un ou de l'autre. Je crois plutôt qu'ils formaient un article
isolé, une note jetée rapidement, analogue à l'article VII, ia. La conjonctii n
permet pas de sous-entendre l'impératif, mais on peut supposer une proposition <<
l'indicatif telle que : « Le sage n'est ni tragédien ni courtisane. »
km) BIBLIOI m Ql i DES nni BS1 rES Dl U1DI
29
Tu peux vivre sur la terre comme tu as l'intention de vivre
quand tu seras parti. Si on ne te le permet pas, alors renonce
à vivre el faia le en homme pour qui ce n'est pas un mal. « Il
y a de la fumée ici •, et je m'en vais. Crois tu que ce soit
une affaire? Mais, lanl que rien ne me chasse, je reste libre, et
personne ne m'empêchera de faire ce que je veux; or. je veux
ce qui est conforme à la nature d'un être raisonnable el fait
pour la société.
30
L'intelligence universelle veut la solidarité universelle; elle
a créé les (Mies inférieurs pour les supérieurs, et elle a uni les
supérieurs les uns aux autres par une mutuelle harmonie. Tu
\ois comme elle a tout coordonné et subordonné, faisant à
chacun sa part suivant sa valeur et amenant les êtres supé-
rieurs à s'accorder entre eux.
31
Demande loi comment tu t'es conduit jusqu'ici avec les
Dieux, avec tes parents, tes frères, ta femme, tes enfants, tes
maîtres, tes nourriciers, tes amis, tes proches, les serviteurs.
As-tu, jusqu'ici, observé a leur égard ce précepte : « Ne rien
faire ni dire d'injuste à personne»3? Rappelle-toi aussi quels
événements tu as traversés et quelles épreuves tu as réussi à
supporter. Maintenant que l'histoire de ta vie est achevée et
que ta liturgie est accomplie, combien as-tu vu de belles
actions? combien de plaisirs el de peines as-tu méprisés?
combien d'honneurs as-tu dédaignés? pour combien d'ingrats
t'es tu montré bienveillant?
i. [Var. : u Je suis fumée cl je m'en \<ii-. » — Malgré un autre texte des Pensées
qu'on peut rapprocher de celui-ci pour autoriser cette seconde traduction (X, 3i :
xoticvb? aol'. to (xy)o£v), j'ai préféré la première. Le dicton qui est ici rapporté (xairvb;
v.x: à7Tsp/ouaO est, en effet, développé par Epictète en term2S qui n'en laissent pas
contester le sens : xocitvov icsicotv)xev iv tw otXTjpLXTi; a/ ixérpiov, (xevà)* av X(av woX'JV,
s;ip/ou.ai (Dits., I, 20, 18). — Sur le suicide, cf. infra VJII, k~, en note.]
2. [Cette citation ne nous rappelle rien que deux vers de V Odyssée (IV, Oqo, et
\l. i5), qui en diffèrent d'ailleurs sensiblement.]
l'I NM I l'I M \l < M I I I I
32
Pourquoi dci Ame i impie el ign< n a n tnfondt m - m.
une ,iinr d'homme habile el avanl ) Qu'est- a dont qu
habile <t nu anl M i i i ■< innall rc l'origine el la Dn de i h(
el la raison qui pénètre i-i malièi e loul enli< i e al qui
travers la durée loul entière gouverne le monde el détermine
les périodes <ir s<m histoire
33
\ l'instanl même tu seras <i<i la cendre, un squelette, un
nom, moins qu'un nom; or, un nom tt'esl qu'un bruit, un
écho. Ce qu'on honore le plus dans l«« \i<' est vide, pourri,
petit; ce son! morsures de petits chiens el querelles d'enfants
qui rient et pleurent aussitôt. La foi, La pudeur, la justîci
la vérité son! a pallies \ers l'Olympe, loin de la vaste l'ii'
Qu'est ce qui ta retient donc encore ici? Les choses sensibles
sont changeantes et ne durent pas; tes sens sont faibli
faciles à égarer; la pauvre Ame '• elle même n'esl qu'une
exhalaison? du sang. Woir de la renommée auprès d'êtres
i. [Couafl : << Les habiles et les Bavants. ., — En modifiant cette traduction, j'ai voulu
seulement éviter qu'on se méprît sur Le sens du m«>t confondre.]
2. [Gouat : « substance. »]
.'?. [Gouat: «qui dispose tout à travers la durée tout entière dani des péi
déterminées.» — Marc-Aurèle n'a pas toujours affirmé avec celte assurance
Slipra V, i3, dernière note) les révolutions périodiques de l'univers.]
4. [Hésiode. Travaux et Jours, nj5.|
5. [.Noter la gradation. Entre les choses extérieures et l'Ame, qu'elles ne touchent
point » (V, uv)), il y a les sens, qui sont pour Marc-Aurèle hors de l'âme ivant-
dernière note), soit dans le corps, soit dans le <( souille » (IV, 3, 5' note).]
0. [Par uàme», entendre ici la raison (cf. la note tinale). et non, comme l'ont
imprimé dans leurs traductions Pierron, Barthélémy Saint-Hilaire et M. Michaut. le
«souille» ou la «force vitale». Est-ce pour le «souffle», la «force vitale », ou l'âme
raisonnable que Marc-Aurèle se pose (voir la troisième note après celle-ci) la qu<
de la seconde vie? — Marc-Aurèle reprend ici, mais en supprimant le mot a
car il attribue la sensation au corps, la définition consacrée dans l'école : -r / ^v/r,
oî -T(o't'xo\ ôpî^ovTat icvsOua ffupupuèç xcà Kv*6i>|uaoi>J aiaOtjxtitr^ uvaicrouevip
sv crtoaaT: UYpôv. Si dans ce texte du Pseudo-Plutarquc (vie J'IIrmù-re. 127) xou ne
marque pas l'identité des termes qu'il unit, on voit que les autres Stoïciens distin-
guaient aussi l'« exhalaison du sang», qui pour Marc-Aurèle e>t proprement l'âme,
du souffle vital, mais considéraient ce dernier comme taisant déjà partie de l'âme.]
7. [L'exhalaison (àvotouiaotç) doit être nettement distinguée, au moins chez Marc-
Aurèle, du simple changement d'éléments (àXfcoibWjtç: cf. supra IV, 3. note finale).
L'àXW«k<nc peut être totale : c'est la transformation d'une couche d'eau en une suriace
de glace ou l'évaporation de cette eau. L'àva6vj.:a(j:; est le passage à l'état le plus
subtil d'une partie seulement d'une matière donnée, — nécessairement de la partie
loa ninijo i heque i>i s vy\\ eusi n> di midi
;iin>i faits n'csi (juc vanité. Eh bien!» attends avec sérénité
ou de l'éteindre <>u de changer de place9. Et, jusqu'à ce que
l'heure en soil venue, que te faut il? Rien qu'honorer et louer
les Dieux, faire du bien aux hommes, supporter et l'abstenir \
te souvenir que tout ce qui esl en dehors des limites de ton
petil amas de chair el de ton faible souille '« n'es! pas à toi et
ne dépend pas <lo toi.
la plus ténue et la plus pure. Dans l'univers, le i> >is le plus grossier entretient i-
terrestre», el la bûche qu'on lui apporte esl tout entière consumée : mais les astres,
qui ^<>nt divins, qui ont une matière d'âme, ne peuvent être alimentés que par les
« exhalaisons > de la mer (Plutarque, de Stoïc. repugn., io53). De même en nous Marc-
Annie explique (IV, 21) par une iXXo(o>Ti; la formation de la partie aérienne et ignée,
en d'autres termes, de l'âme animale (cf. quatre notes plus bas), et par une àvaOvj/'aT'.:
celle de l'âme raisonnable. Il est possible d'ailleurs que les autres stoïciens, moins
préoccupés de dégager le «dieu intérieur» de la matière, n'aient pas accordé la même
importance à cette distinction.]
1. La leçon des manuscrits : xi oOv; rceptuivstc n'est pas admissible. L'affirma-
tion exprimée par la seconde personne de l'indicatif présent nrepiuivetc ne s'accorde
pas avec ce qui précède. Le sens indiqué par la suite des idées est évidemment
celui-ci : «qu'y a-t-il donc à faire? attendre, etc.. » — Il est facile d'obtenir ce sens
ou un sens analogue en écrivant soit xi ojv où irsptuivetç..., soit xi o:j mpiuvjz'.;...,
comme l'a demandé Gataker, soit xi ctjv ; izîpiu.ivs..., que je préférerais, [soit enfin
xi o'jv; KepiU£Vtfç que propose M. de Wilamowitz.]
2. [Gouat : «ou ton extinction ou ta métamorphose. » J'ai longuement développé
(supra IV, ai, 1" et dernière notes) les deux conceptions de la destinée humaine,
<t6e<ti; ou fjL£TàaTaTiç, entre lesquelles surtout a hésité Marc- Aurèle.]
3. [Ces divers préceptes résument (cf. Zeller, Phil. der Gr., III3, p. 7G1) toute la
morale de Marc-Aurèle. La maxime bien connue « supporte et abstiens-toi » suffisait
à Épictete, qui faisait tenir en ces deux mots tout l'art de la vie (ibid., p. 7^9).]
li. [Marc-Aurèle distingue dans l'homme tantôt deux parties, tantôt trois. La
première division est l'analyse traditionnelle en corps et en âme (Tôiaa et 'i^//,, par
exemple VI, 32) : c'est de beaucoup la plus fréquente dans les Pensées. On trouvera la
seconde ((rwjtaxiov, 7cveu{iaTtov, voO;) au début de l'article XII, 3, et dans quelques
autres passages, où vovç peut être remplacé par un synonyme, soit ■rjYSjiovixov (II, 2),
soit jnJxrj, comme ici (cf. la 3* note). L'équivalence d'vJYeuavtxov et de voO; esteonstante
chez Marc-Aurèle (cf. infra IX, 22, seconde note) et dans tout le Stoïcisme; celle de
voyç et de 'W/rn lorsqu'on parle de l'homme (car l'âme de l'animal n'est qu'une ty\)~/r\
xXoyo;), est manifeste en des pensées qui supposent l'homme composé de trois parties
(supra IV, 3, 7* note), comme en toutes celles (notamment VI, 32) qui ne lui en
attribuent que deux. Nulle part, en revanche (cf. supra III, 16, fin de la i" note», je
n'ai trouvé trace d'une opposition de l'âme et de la raison, comme de deux principe?
différents de la constitution humaine.
Or, il est assez malaisé de définir le icveugiattov dont parle ici Marc-Aurèle; et
davantage encore de ramener l'une à l'autre ses deux analyses de l'homme. Nous
avons des textes stoïciens qui appellent l'âme, non, comme celui du Pseudo-Plutarquc
cité* cinq notes plus haut, Kvevua vuufuàc xon KvaOuuiaoHC, mais seulement tiviCu*
a-jfjLÇ'jk; (Diogène, VII, i56), c'est-à-dire un souffle né avec l'homme: or à l'article XII, 3,
des Pensées il nous faut entendre par les mêmes mots (irvsû(J.x ffujtçyrov) un souille
né avec l'âme, c'est-à-dire distinct d'elle. — Il y a, sans doute, un passage où Marc-
Aurèle a défini ce qu'il entendait par itvrjjiaTtON : c'est la seconde pensée de son
livre IL Mais là, il nous parait surtout préoccupé d'avilir ce dont il parle. Ce souffle
n'est que «du vent»; c'est l'air que nous aspirons et renvoyons sans cesse, qui nous
est étranger par suite, et qu'il nous donne pourtant pour une partie de nous. Contra-
diction d'autant plus étrange — si elle n'était cherchée — qu'il et lit impDssible à
Il M I .1 M \H<
34
I h peux loi^Joun coûtai iinr vit I mu i <• i j < pul que tu |
suivre !<■ droit ohemin en le faisant luivre k le pen
t. actions, L'&mc de I Heu el celle de i homme ou de l tut
raisonnable <>iit deux pointi commum n'être entrai
rien d'étranger, faire coni M< i i«- bien dan la di m I la
justice r\ la pratique de cette vertu '. H hoi n<*i 1 1
35
Pourquoi me préoccuper de ce < j u i n'est ni on vice de ma
nature ni un acte « l«* ma nature vicieuse et ne fait au
lorj à la cité universelle? Mais qu'est ce qui fait <iu lort i 1 1
cité universelle?
36
Ne nous laissons | >as entraîner témérairement par notre
imagination, mais venons en aide à nous mêmes, comme
nous le pouvons, et suivant la valeur des choses. vi l'on
échoue dans des affaires indifférentes, il ne faut pas l'ima
M a iv 'Aurèle de ne pas remarquer une différence de température entre l'atmosphère
el le souille crue nous rejetons ou que rejettent le^ animaux, et de n'en pai d< du
mélange et, pour une partie, L'échange nécetiaire «le l'air aspiré qui, disent d'aiileun
les Stoïciens, doit rafraîchir et «tremper» l'Ame (Plutarque, de st^ïc. repug*.,
lin), et de quelque cliose de chaud qui n'est pas la raison. Aussi ions-nou*
qu'en d'autres pensées Mare -Aurèle soit plus explicite, et qu'au lieu du seul m I
Tcvs-jfjLâtiov il ju^e à propos d'écrire, entre les noms du corps et de la raison ((
l'âme) les expressions xh àsptocs; r, Kupû&f< (IV, 21) ou bien (IV, \) xh Rvcupara
xa\ to 6spfxbv xa\ 7Xvpo>c£;, et inèine une fois d'affirmer (au début de l'article XI, 20) le
mélange «du souille et de tout ce qu'il y a d'igné en nous »... qui n'est pas la rai
Le sens de Trvs'jpLaiiov étant ainsi étendu et limité, nous n'avons nulle peine à entendre
par ce mot l'àme animale: c'est vraisemblablement la signification qu'il a ici.
Quel peut donc être dans les Pensées le r.ipport de ces deux énumérations qui n<»u-
définissent: corps, âme; corps, âme animale, raison? Il semble évident qu'ici l'âme
a été dédoublée en àme animale et en raison : mais pourquoi ce dédoublement, 1
pour opposer dans l'àme seule comme en l'homme tout entier, comme en t<
{supra IV, si, note linale), un principe efficient et une matière? De ce point d<- rue
l'àme animale se rapproche du corps d'autant qu'elle s'éloigne de la raison ; 1
siblement, toute distance s'annule entre TtoaaTiov et ttvcvulcît'.ov au regard de celle
qui sépare l'un et l'autre du voOç. Marc-Aurèle a tant qu'il a pu creusé cette ti
dans l'àme humaine : il en a fait un abîme. Il y a telle de ses Pensées où le corps et
le souille non seulement vont de pair, comme ici, mais ne font qu'un (IV, 3, 5e note),
tandis qu'en face d'eux la raison, formée d'un cinquième élément, semble même
cesser d'être matière (IV, 4, note finale). Jusqu'à quel point ceci reste-t-il d'accord
avec les données fondamentales du système?]
1 . [Gouat : a dans le sentiment et la pratique de la justice. » Cf. supra V, 20, 2* note,
et V, a5, ibid., la définition stoïcienne de la « disposition ».~
2. [Gouat : a de ce dont ma méchanceté n'a été ni l'auteur ni la cause, et qui... »]
loj BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS Dl MIDI
giner que Cela nous Hisse du tort. Car ce n'est pas un mal.
Rappelle loi le vieillard qui, en s'en allant, priait son élève
de lui donner sa toupie, sachant bien (pie ce n'était qu'une
toupie. Fais maintenant comme lui, puisque tu désires les
choses qui brillent et (pie l'on célèbre. Homme, as-tu oublié
ce que valait cette gloire? - Non, mais tout le monde autour
de moi la recherche. — Kst-ce une raison pour que tu de-
viennes fou toi aussi? — Du moins, en quelque lieu que la
mort me prenne, j'ai été un homme bien partagé. — Ktre bien
partagé, cela signifie que lu t'es fait à toi-même une bonne
part. El la bonne pari, ce sont de bonnes habitudes de l'âme,
de bonnes tendances, de bonnes actions1.
•
LIVRE \l
1
La matière9 de l'univers est docile et ductile; mais la raison
qui la gouverne n'a en elle aucun motif de faire du mal;
i. J'ai lâché de donner une traduction intelligible d'un passage qui semble ne pas
L'être. Le texte en est le même dans tous les manuscrits, et il est difficile d'y apporter
des corrections méthodiques. Il est certain d'ailleurs que des corrections sont néces-
saires. L'idée générale est qu'il ne faut rechercher que ce qui en vaut la peine, et que
la vertu seule vaut la peine d'être recherchée; le reste est indifférent. Si telle est l'idée
générale, il n'est pas possible que dans la première phrase il soit question de venir
en aide aux. autres. Le mot fior/jsîv qui se trouve dans cette phrase a induit en erreur
Gataker et ceux qui l'ont suivi. Il doit avoir le même sens que dans une autre pensée
(III, i'i) où Marc-Aurèle s'exhorte lui-même à ne pas se laisser entraîner vers ce qui
est stérile, à renoncer aux vaines espérances et à se secourir soi-même (poirjOst aa-jTÔ>),
afin de ne chercher que ce qui en vaut la peine. Dans la phrase dont nous nous occu-
pons, ffoT)6eîv a donc pour complément éttutoiç sous-entendu ou omis par le copiste.
La phrase ïizti toi yivtj xaÀ&v in\ tcô.v èfxpoXa)v n'a pas de sens. Elle a été corrigée de
bien des façons sans en devenir plus claire, et elle ne peut l'être si l'on conserve les
motâ tô)v hi8<S).u>v. Je ne vois pas ce que vient faire ici la tribune aux harangues. Il
serait sage, dans une édition, de renoncer à corriger ce passage, mais la nécessité de
donner une traduction sera l'excuse de l'explication que je hasarde et du texte que je
propose : eircî toi opiyi) rcôv xoù&n jtos ton IvS<SÇu>v. (Cf. VI, 5o : xai tù>v aouvàxaM o-j/.
(opiyo-j.) La phrase ainsi corrigée se rattache à la précédente. Fais comme le vieillard
dont je viens de parler, se dit à lui-même Marc-Aurèle, et puisque tu désires les
honneurs, n'oublie pas qu'ils valent ce que valait la toupie de l'enfant. Ici seulement
commence le dialogue, avec les mots iNxi' vXk* xtX. » On arrive donc en corrigeant
seulement les mots yivY) xa/.iov ïià Tfov ÊfifioXwN à donner un sens suivi à tout le mor-
ceau. C'est toujours quelque chose.
Je laisse de coté des corrections beaucoup moins importantes, comme oCoév au lieu
de k'Oo; (1. 4), proposé par Gataker. A la Ligne 0, <Loï fait double emploi avec outw; ;
je préférerais cjy*. Après jjyg il ne faut pas de point, mais une virgule : oj:w: oV/
xxi ffuye, Eicet toi opfyr, tû>v /aÀwv xa\ :wv évoô*u>v. A la ligne io,j'ai adopté xxtxà/jsOîi:
avec Gasaubon, au lieu de xxtxaîi?6s:;.
:>. [(louât : « substance. » Cf. supra IV, n, note finale.]
Il \ I I s 1,1 M \\,. M || | |
elle m .1 .iiKiiiir niiiih «• m- i.ui <!<• mal ■• 1 1' n i ( ■ len ru
d'elle aucun i<»i I Or9 c'ctl pai elle que loul -«■ pi odu
in \ <•
2
Qu'importe] quand tu fait Ion devoir) d'avoir chaud ou Froid,
d'avoir sommeil ou d'avoir asseï dormi, «1 être blfimé ou l
de mourir ou d'accomplir toute autre action Cai "j nombre
«les actes •!<' la nï<' «,si aussi («iiii par lequel aoui mourons1;
là, comme ailleurs, il suffit de bien employer i<- moment
présent
3
Regarde au fond «1rs choses; ne i<* laisse tromper ni tur
la qualité propre ' d'aucune d'elles ni sur sa râleur.
4
Tous les objets3 changeront vile: ils s'évanouiront en
fumée]*, si la matière est une : sinon, se disperseront.
Laf* raison qui gouverne6 le monde sait ce qu'elle est,
qu'elle Tait et sur quelle matière elle agit.
i. [Couai: ««ou de vivre, l/actc par lequel nous mourooj est tussi un det
de la \ ie. "]
Couai : «« la vraie qualité. » — La première catégorie que < J i - 1 i n ir u - • i,i logique
stoïcienne m>u> la chose indéterminée, c'esl l'objet donné (tè ûicoxeijitvov, donl n<»u>
trouvons le nom au début de la pensée suivante); la seconde esl la détermwatiû
qualité de l'objet (icoiéTi); ou goiév), laquelle peut être individuelle
spécifique (xoivmç icoiov). Cette «qualité» no doit pas être considérée comme une
abstraction; c'esl véritablement le principe efficient et formel de l'objel
une matière, mais subtile et active, mêlée à la matière inerte qu'elle organise et
définit. (Cf. Zeller, Phil. <lcr dr.. III3, p. 97 sqq.)]
3. [Couai : <i les choses sensibles. >• Cf. la note précédente
\. [L'explication du \erbe èxO'J(J.lotôr(<T£Tat se trouve à la peux'».' \. 3i : y.x-.,, /.*•.
to ur(oiv. Noter qu'il s'agit ici non seulement de l'âme, mai- .1-' la matière; ii"
lement de l'homme, mais des choses sans vie. Il faut donc plutôt considérer h- rerbe
èy.O^a'.aOr.TETa». comme une métaphore capable d'exprimer tout changement élémen-
taire et total (àVAoûoTt;, supra IV, 3, note iinale) que comme la formule d'une th
particulière — aos?:; ou uiraTTaT'.; — de la survivance des âmes (supra IV, 21.
dernière notes). Limitée à la destinée humaine, cette pensée deviendra l'article VII. 3a. |
5. [Couat : « s'ils sont d'une substance uniforme. » Cf. les derniers mot> a
pensée NI, 38. — L'unité de la matière est l'hypothèse stoïcienne: la dispersion es
un corollaire de la doctrine atomiste.]
f>. [Cette «raison qui gouverne le monde >» (les deux derniers mots ne sont pas
exprimés en grec) s'appelle ailleurs (IX., 22) qYspovcxov : c'est le Dieu de la pensée \ I. - ;
il en était question tout à l'heure à la première pensée de ce livre VI. C'est précis .'ment
le rapprochement de ces deux textes qui permet de comprendre celui-ci. et. à côté de
c-.o'.xcov, de sous-entendre Ta oXa. Voir quelques lignes plus ba- | VI. B) la définition
de la « raison qui gouverne l'a me humaine >\]
Io6 BIDLIOTHiQUl DES UNIVERSITÉS Dl MIDI
6
La meilleure manière <l<' le défendre esl de ne pas leur
ressembler ' .
7
N'aie qu'une joie et qu'un appui: passer dune action utile
il la société à une autre action utile à la société, en pensant à
Dieu.
8
Le principe dirigeant9 en chacun de nous est ce qui s'éveille
et se conduit soi-même, se fait tel qu'il est et veut être, et fait
i. [Gouat: < La meilleure manière de se défendre des autres est de ne pas leur
ressembler. » — En ajoutant les mois «des autres» (je n'ai pu moi-même éviter
l'addition du mot «leur»), VI. Couat perd l'allure du texte grec, et je crains qu'il
n'en fausse le sens. Marc-Aurèle n'est pas un misanthrope: ceux à qui il faut rendre
le bien pour le mal, dont il faut rejeter les conseils ou fuir l'exemple, dont il faut se
garder enfin, ce ne sont pas «les autres», tous les autres hommes : ce sont plutôt
certaines gens, que le sage reconnaît d'instinct, et qu'il n'a pas besoin de nommer, non
pas môme de ce pronom, à la fois si vague et si précis, « otvrwv, oturo-j;, ces gens-là »,
par lequel il les désigne ordinairement (IV, 38; VII, 3^; VI, 5o, etc.).
Je me suis borné à supprimer les mots « des autres » dans la traduction de M. Gouat.
Sous prétexte de « sauver ce caractère de notes personnelles, de mémorial intime et
négligé que Marc-Aurèle avait donné à ses Pensées» (Michaut, préface), je n'ai pas
voulu désarticuler la phrase, et remplacer par deux points les mots: «est de. » Va-
t-on chercher un effet de style dans toutes les phrases grecques où manque iazi?
Malgré l'omission de ce verbe, la phrase de Marc-Aurèle est complète, et l'omission
de l'article devant l'attribut (aptaro; tpdito;) est le signe de son unité.]
•2. [Définition du principe dirigeant. — Les mots «en chacun de nous», dont
l'équivalent manque dans le texte grec, ont été suppléés ici par le traducteur, comme
Les mots «le monde» à la pensée 5. Ici, c'est la fin de la phrase qui fixe le sens de
v;:aovtx6v : le même mot peut, on Ta vu, désigner à la fois Dieu, raison du monde,
et notre raison, qui est «Dieu en nous» (III, 5); mais l'expression to <rj[xoatvov, qui
d'ordinaire chez Marc-Aurèle s'oppose à Ta 6vepyou|i£va (cf. IX, 3i; note à la pen-
sée VIII, 7), ne saurait convenir qu'à des événements de la vie humaine.
La langue française a des habitudes de précision bien impérieuses; il est regret-
table que, pour satisfaire à leurs exigences, on ait dû ici, à des intervalles si rappro-
chés, compléter de façons différentes deux expressions synonymes dont le grec se
contentait. Qui pouvait mieux établir la parenté des deux principes directeurs, l'inti-
mité de Dieu et de notre génie, que ce fait de les appeler l'un et l'autre exactement
des mêmes noms ?
La définition qui est donnée ici du principe directeur de l'àme ne semble pas
complète. Dans une note à la 22e pensée du livre IX, je cité plusieurs textes de
Marc-Aurèle d'où il ressort que ce principe directeur est la raison. Noy; (III, 16),
Xoyo; (IV, 12; V, i4; VI, 5, etc.), oiàvoca (VII, 64) servent dans les Pensées de syno-
nymes à TQyepLovtxov. Or, pour reprendre les termes de la définition présente, qu'est-ce
pour nous qui «s'éveille et se conduit soi-même, se fait tel qu'il est et veut être,
et fait que tous les événements qui lui arrivent lui paraissent tels qu'il veut qu'ils
soient », si ce n'est la liberté? Ce n'est pour un Stoïcien la raison que parce qu'il n'en
sépare pas la liberté. Cette forme de définition est contestable, et Marc-Aurèle paraît
s'être repris aux premières lignes du livre XI : :à tota Tfjç Xoyixr,; '\>^'/jt; ' iflnitvp ôpdi
Eav7r,v Stapôpoï, lauTvjv, 6i?ot'av av (io'jXTjTai, no>.v.... Cette fois, «l'àme raisonnable»
| • | x , | | I » 1 \ I V 1 1 < \ ' I . I I I
que lou le é> énemenl <|ui lui an Ivanl lai parai
qu'il \<'ui qu'ili loienl
9
Toul l'ûccomplil suivant la nature universelle cl n
suivant une autre nature quelconque, envelopp
de relie ci, ou comprise dans < < • 1 1<* ci, ou a pen lu en deh
d'elle.
()u confusion, enchevêtrement el dispersion, ou unité ordre
(Xoytv pouri sll l'appel i sui il bien b >.
deux textes ne m distinguent don< en r. tllte* que pai i- pn mi< i m
jjj — ,-t luriout ptf toute l'éuu m é ration qui ronlimir • •■ qui
JifTéroncea établissent que ce qui ett défini dans la premier, m n
raisonnable, ou, ce qui revient au même, son principe d
ittributs, la liberté.
tprès ;» n > i i affirmé ;« It première pensée de ce livre la toute-p du prin Ipe
directeur du monde, il était naturel que Marc- kurèl< et •*
définir l'indépendance du nôtre Cette liberté, proclama il être
en d'autres passages (V, 19; \i. 16; IV, 7; VII, 14; VIII, 1 lllu
soin*, el le même qui l'avait formulée <"n ces termes, reprit d'ailleurs 1» ir Mar \
(III, 0, et VII, 67) : >< obéir à Dieu,» l'est-il payé de mots, lorsqu'il s «lit
de l'obéissance, mais mi assentiment que j«' donne 1 Dieu - • r. une expreasl
blable dans les rentres. \, »8)? Ce n'es! pas if moment de le -il-' utei (< i inj
note finale). Constatons seulement que, défenseur du déterminisme universel, M .1
Aurèle prétend donner a u libre-arbitre un domaine <>ù il soit absolu. L'on roil
bien ici on quoi consisterait ce domaine : fcovTo <-t aalvsedai i%s-'»* noire raii
l'opinion qu'elle se fait clos choses. Il semblerait que ce ne fût métn pas I >ute noire
âme. Mais le nom même du «principe directeur" est plus explicite que la définition
qu'on en donne, si la sensation. >i même la représentation qui rachète ue dépend
pas toujours de nous, nous sommes maîtres du moins de l'assentiment que
accordons à celle-ci, et tous les jugements et tous les mobiles (pif non» en tirons
sont notre œuvre propre: même nos passions (supra IV, 32, en note) et toul
mouvements déraisonnables n'ont pas d'autre source que la raison. Ce qui, pour les
Stoïciens, est hors du principe directeur, ce sont la voix et la raison séminale
ils ont fait des facultés distinctes : ce sont encore le souffle vital (V. 33, note finale),
et le corps, auquel Marc-Aurèle (supra V, sO, 0e note) rapporte les sensations, liais,
sauf la sensation, tout cela, à nos yeux du moins, ne compte pas comme âme. N M
pourrions donc dire que, sauf la sensation, toute notre âme appartient au principe
directeur, et l'univers, tel que l'embrasse notre pensée. Dans ce< restes limite-, il ne
subit d'autre contrainte que celle de vouloir toujours. S'il sort de son domaine ou -il
se relâche, — s'il cède à la passion qu'il crée, ou simplement donne, en les oon
rant ou comme des biens ou comme des maux, une importance aux choses qui ne
dépendent pas de lui, — en un mot, s'il «quitte son poste M. 20). il s'asservit.
Nous avons aussi cette liberté- là, et c'est celle, en fait, dont usent la plupart des
hommes.
Mais quand il ne s'asservit pas, le principe directeur, à la fois raison et liberté,
auteur, maître et juge (XI, 16) de ses représentations et de ses mouvements, est la
noblesse de l'homme qu'il apparente à Dieu. Il est Dieu en nous (6 htxoro-j <-,;;
Osq; : XII, 26); il mérite qu'on lui rende un culte, et qu'on «célèbre ses mystères n
(supra III, 7). Ce n'est plus seulement « raison » qu'on l'appelle : « c'est génie » (111,3
et 6; V, 27). Et dans la définition du u génie » que donne Marc-Aurèle, on retrouve,
en effet, outre le nom du principe dirigeant — rvsjiôva — ceux de la raison — -,-,;:
— et de la volonté — [So^erat.]
lOO BIBLIOTHÈQUE Dl S UNIVERSITÉS Dl MIDI
et Providence. Dans le premier cas. pourquoi désirerais -je
[n'attarder dans un pareil désordre, produit du hasard? Quel
autre souci aurais-je que de savoir « comment un jour je
deviendrai de la terre»1 ? Pourquoi me troubler? Quoi que je
lasse. le moment de la dispersion viendra pour moi. — Mais,
dans l'autre cas, je vénère Tordre des choses, je demeure
ferme cl plein de confiance dans celui qui le dirige.
11
Quand tu ne peux empêcher les choses qui t'entourent de
rompre pour ainsi dire le rythme9 de ta vie morale, rentre
vite en toi-même et ne te laisse pas pousser hors de la mesure
plus qu'il n'est nécessaire; tu seras plus maître de consener
I harmonie intérieure si tu ne cesses pas d'y revenir".
12
Si tu avais à la fois ta belle-mère et ta mère, tu aurais des
soins pour la première, mais tu reviendrais sans cesse à la
i. [Citation d'un poète inconnu.]
2. [Gouat : ((quand les circonstances te bouleversent (var. : «te désaccordent»)
pour ainsi dire par force... » — Le verbe TapàxtEaOai semble plutôt convenir à la
musique qu'à l'instrument. Cf. la note suivante.]
.">. [La vie morale est ici comparée à une harmonie; les mots oiaTaoa/Oy.va'. ,
pvO|ioO, àsaovia: maintiennent la comparaison de la première à la dernière ligne de
la pensée. Nous sommes non seulement l'instrument de cette harmonie, mais le
musicien qui la règle, à qui il appartient, sinon de la conserver, du moins de la
ressaisir toujours. Cf. infra XI, iG : Igtfv, xav tto-j ).â6rp BÙ6Ù; ifrXtfyai. Mais ici notre
auteur n'écrit môme plus y.à'v ttou XaOïn: il admet des cas où nous ne serions plus du
tout les maîtres (oray àvaYxaa-ÛYjç) des mouvements de notre âme. Après l'adhésion
qu'il a donnée (supra II, io) à là doctrine péripatéticienne de l'inégalité des fautes,
voici sans doute la concession la plus significative qu'ait pu faire le Stoïcisme de
Marc-Aurèle au sens commun et à la vérité. Lorsque, un peu plus haut (V. 26), dans
la même pensée où il semblait se refuser à admettre, comme les autres stoïciens, la
sensation parmi les états d'âme, il avouait cependant qu'une certaine « sympathie »
fait connaître à la pensée la sensation que subit le corps, et que cette dernière « est
naturelle», et qu'a il ne faut pas s'y opposer», il avait déjà fait fléchir son dogme
allier : Ta ~pây;jia7a oOy àzTîTai rïjç 'l'J'/j,;, — a les choses... ne touchent point L'âme»
(IV, 3, avant-dernière note; V, 19). Ici, il le contredit résolument: otocv àvayxadOr,:...
Mais si le dogme risque, à toute heurj de la vie, d'être ainsi infirmé dans la
pratique, il n'en reste pas moins l'expression d'un état idéal de quiétude, de liberté
et de vertu. A ce titre, il est nécessaire de l'affirmer, comme il est utile de délibérer
sur le sage et les merveilleux privilèges de la sagesse. Il y a, d'ailleurs, à la fin de la
présente pensée, deux mots qui semblent concilier le dogme et la vie : le comparatif
« plus maître » et le futur « tu seras ». Cette conciliation est encore du Stoïcisme, si la
substitution de la théorie des « progrès» — icpoxotroc — à celle de la sagesse (Zeller,
Phit. der G'/\, 1113, p. a^o sqq.) est encore du Stoïcisme. Si la vie est une harmonie,
il y a un art de vivre (IV, 3i ; VII, 61, etc.), et cet art, comme un autre, exige un
apprentissage.]
Il \M I .s l>l M \ I.' M 1.1 I I
mère Voilà 06 que uni poui loi l' <-,»'ii el la philn opl
reviens f i <'« | min n hi 1 1 j «.II.- <|.immm <| i <-p, . ■•• |. .i UI ll(
cCsi par elle que ls oooi le pareil supportable el le
13
\ propos «les meta prépare* nu l'eu <i (|<- ton n.,. .ilme-ni
nous n0U8 raisonfl une Idée de CC qu'il* son! reci
exemple, es! le cadavre d'un poisson, cela le cadavre d'un
oiseau <>n d'un porc; pareillement, le phalerne esl lejui d'un
raisin, ou l>i<in la robe prétexte esl faite des poili d'une br<
teints dans le sang d'un coquillage; <>u encore l'aeti
n'est que l<* frottemenl d'un nerf1 el l'éjaculation d'une glaire
accompagnée d'un certain Bpasme. Toutes ces idées atteignent
le Fond des choses el les pénètrent au point que nous en
distinguons la vraie nature9, agissons ;iinsi pendant toute
noire vie, el quand nous nous luisons des choses l'idée la plus
Favorable 3, mettons-les à nu, voyons le peu qu'elles sont el
détruisons la légende S qui assure leur prestige. L'orgueil
un dangereux sophiste; c'est quand vous croyez vous attacher
aux objets les pins dignes d'attention qu'il déploie le plus son
charlatanisme. Voyez donc ce que Cratès dit de Kénocrate
lui- même.
14
La plupart des objets que le vulgaire admire rentrent dans
la catégorie 5 la plus générale, celle des choses qui ne sont
i. Au lieu cTevTspto'j, j'ai adopté veupsou, heureusement rétabli pir Nauck.
a. [Cf. supra III, h, seconde noie. Ce sont la même idée et les mêmes expressions.]
3. Le mot dlUotzittt. a été* contesté. Je crois qu'il peut être conservé. Ce sont les
choses en apparence les plus dignes de confiance qui nous trompent le plus. — [On
a conteste à£t6iti<TT0l parce que c'est la leçon des manuscrits secondait - est-à-dire,
en somme, des extraits plus ou moins fidèles — des Pensées. Le Vaticanas, qui nous
en donne le texte intégral, et le Darmstadinus, qui vient le second dans l'ordre d.> la
valeur, portent XiotN à;io-ioTÔTaTa, qui n'est pas admissible, et qui perm t peut-être
de douter d'à;iôiri<7Ta. — Les diverses corrections proposées ne modifient que très
légèrement le sens.]
!\. Je dois reconnaître que le mot que je tra luis ainsi, np Itto^v, n'a nuère lie
sens dans cette phrase, lleiske a proposé rspOps&v, qui est i _ nble
confirmé par xaTOtYoqre'jei, qui vient un peu plus loin. On pourrait essayer d'autres
corrections, par exemple Tzpai£''av, qui est plus ordinaire, et, je le crV:s, plus m
ici.
5. [Ce mot «catégorie» ne doit pas plus être pris dans son acception phil
phique que le mot yevtxttfrara du texte grec, qu'il peut traduire dans les deux sens.
On nous dit (textes cités dans Zeller, Phil. der Gr., III \ p. 91) qu: les Stoïciens avaient
, io B1BLI01 ni. «m i DES UNIT] IlSl i I 8 D1 ^1 1 1 > I
que par une simple qualité première ou nature ', comme des
réduit les «ii\ *.oiïrtyoû{au d'Aristote a quatre Ytvtxcorata ou -f^.»Ta yivr\ : le substrat, ou
l'objet donné, .<> 6ito ■ la première détermination, ou qualité essentielle,
xh fcot6v; let déterminations secondes, modalitéi ou propriétés, ri icok SX0*? '' *
qualité! relatives, cb *p6c ri k*k s*xov. (:Vs,t d'une tout autre analyse qu'il s'agit i< i :
,,,,,, (|,.s «catégories» de la pensée, maii des «catégories; ou classes d'objets et
d'ôtres.]
i, [Gouat: «celle des objets dont l'existence consiste dam une habitude ou
nature.»— «Habitude» est, en effet, le sent ordinaire d'SÇiç, mais pour d'autres
que les Stoïciens. Pour ces derniers, 'il'.; est à peu près synonyme de hoiotv)ç< Ces
mots désignent également L'unité el L'identité des êtres et des choses, Le principe qui
perme! de les définir; et nous savons {supra IV, i\. seconde note) que, pour atteindre
ce principe, il faut non seulement analyser l'objet en malien! subtile et activi (la
cause on la forme, Kttfa) <'t en matière épaisse et inerte (-'Ar,: supra IV, ai, noie
finale), mais éliminer de la cause ou forme elle-même certaines parties qui sont
aussi instables que la matière inerte (V, a3). Seulement celte notion, itoiéri)< semble
l'exprimer plutôt connue concept pur et Unité abstraite; IÇiç, uniquement comme
réalité et même comme activité (Zeller, Phil. der Gr., 1113, p. 9O, note 2). La koi6ti)C
(cf. la note précédente sur les catégories) serait donc surtout un principe logique;
l'i;i;, un principe métaphysique. La nuance est très fine, si tant est que nous l'ayons
bien aperçue; d'ailleurs, les Stoïciens, au moins lorsqu'ils employaient vroiorqc ne se
sont pas fait faute de l'effacer. Si ces matérialistes ont pu dire que les EÇst; n'étaient
pas autre chose que des souffles d'air, àspa; (Chrysippe, dans Plutarque, de Stoïr.
repliait., '|3), ils ont du objectiver les Koiô-r-iz pour les définir également (même
texte, quelques lignes plus bas) des souilles, t^i-j[iol-x, « qui spécifient les parties de
la matière où ils se trouvent et leur donnent ligure. »
Or, ces souffles (qu'on les nomme l\m ou irotrfTijrsç) sont plus ou moins secs,
chauds et ténus. Suivant leur fraîcheur ou leur densité, ils forment des corps diffé-
rents : choses inanimées, plantes, animaux, hommes, et reçoivent des noms spéciaux.
Dans les choses, — dans « les pierres et dans le bois mort », — ils s'appelleront
simplement ïlzi; ou i|/Oia\ eÇstc («pures et simples» l\v.z: Sextus Empiricus, adv.
Math., IX, 81), bien que les autres ((souffles» dont on va parler soient encore des
£;£'-;• C'est ainsi qu'on nomme « matière » ce qu'on oppose au principe efficient, sans
tpie pourtant celui-ci soit immatériel; dans les deux cas, il n'est ni utile ni aisé de
trouver une dénomination plus précise. — Plus sèche, plus chaude et plus ténue que
cette £*:'.: rudimentaire, la ((nature» (?-j<ti;) est le principe qui forme, développe et
définit la plante, — « les figuiers, les vignes, les oliviers » dont parle Marc-Aurèle.
\ vrai dire, ces deux degrés inférieurs de la hiérarchie des déterminations premières
— d'où nous pourrons déduire la hiérarchie des êtres — sont moins nettement
distingués ici que les degrés suivants: dans une autre pensée (VI, 22), qui établit
a peu près la même hiérarchie entre les objets et les vivants, nous verrons même
qu'ils ne font plus qu'un. Par là, Marc-Aurèle modifie — ou simplifie — légèrement
la doctrine traditionnelle que nous permettent de reconstituer entre autres un texte de
Plutarque (\ irt. nior., 12): xaOrfXov oï :wv ô'vtcov... çowtv... 5tc :à |xèv BÇec Bioixetrai,
:à oï fuaet, xà os à/ôy*» '^'jyjt, "ol oï xxi ).ôyov s/o^r, xai Stavoiav, — et le passage de
Sextus Empiricus (adv. Malhem., IX, 81) que j'invoquais tout à l'heure: :à jxkv uxb
'lù/r^z e!;sw: owé^etai, :à oï Ctio v'jgilùz, :à oï uxo 'Irj^z' y.a\ £;ît»; txkv w; XlOot xxt
ËuXa, 7jtô(o; oï xotQxxep Ta ï'JTa, ty'jyj^ oï :à ^(»a. Ce dernier texte interrompt avant
la fin rémunération que Marc-Aurèle simplifie au début; sauf cette divergence, il est
intéressant d'observer, de part et d'autre, non seulement l'identité des termes de la
gradation (zliz, pudtç, -Vj//,), mais celle des exemples invoqués.
Revenons à la définition de la «nature». Au rapport de Plutarque (de Stoïc.
repugn., 40, Chrysippe soutenait que l'enfant vit, dans le ventre de sa mère, d'une
vie végétative. Ce n'est donc encore qu'une «nature» qui l'anime (çuost rpé?e<xflxt).
« Dès qu'il est né, l'air extérieur refroidit et trempe ce souffle et, par suite de ce
changement, l'embryon devient animal. » Il y a, d'ailleurs, une contradiction, qui
n'a pas échappe à Plutarque, entre celte explication de l'origine de notre âme et une
autre assertion du même Chrysippe iibid.). considérant «l'âme comme un souffle
Il n II Ml M \ I II III
pierres, «lu boië, de 0 i d< lw
gem un peu plo an d • attachent plul
plu i, . i i i plu ui.hi qui la natun SI l'u
a l'autre i l celle qui • i pllque l< pr»ml< < i
i. rivant ol détruit le pi ln< ip <i< la i •
que i ii» '!• Il i ta adl< ti<
moln . |i ii qui Mai \ "i . !■ raoonl
..m, i m i .., n, ,ii de l'aii i pli ( Il plui h • i pliqu
i que pai la h an foi matlon d< allm ni qui ni la n •
Intel loui o Quoi qu'il en m nul ■
i. i.i natui ■ .i i .un, qu< d< la h i- i mlnation i I
.!<• l'homme p divoi ûtul Elle achève aon évolul
plui subtile, la plui -" ne ol la plui - haud< d< la ti
-, in. une (Plutarque, Plac phil . l\ . i3, Dn
« non leulemenl par 11 n iplration ev< •«• L'aii extérieur, mail pai l'intelligi
i ion univei iell< [VIII >4) La dl Uni ti< m de l'Ame el de l'An
faite pluaieura foii dam les Pen$è\ i (111, il \ i '
Tela ion! lei différenta états el lea différents oomi de 1*1 I On ne
s'étonnera pas il coi - tati sont toujours distinguéi el oea nomi nu ai tnfondui
aouvent Voici, d'abord, le mol ' :■... qui eal un terme générique oommi t ojul
exprimera cependant, par oppoaiilon i toute autre, la détermination la pin
celle dea ohoaea Inanimées. D'autre j»;iri irner non aeulemenl
vivante, mais la raison, ou Ime raisonnable; etil ne paraîtrait certes pa
d'entendre un Stoïcien nommer «âme végétative» la nature j du foetus. Enfin, la
nature universelle, qui n'es! pas différente de la raison universelle, ne
que parce qu'on considère le présent [$upra IV, 36) comme l'embryon de l'a
N'est ce paa, du moins, ce qu'implique la définition citée par I>>
Stoïciens entendent par nature soil ce par quoi èsl le moud»;, aoii ce qui
fait sortir le fruit de la semence. La nature est une détermination pn
.l'une activité propre, qui, en des temps déterminée et conformément aux raisons
séminales, achève et t'ait être ce qui résulte d'elle, et dont elle prend les éléments de
divers côtés, dans d'autres choses toutes semblables
e>ucrtv cï -otï fj.kv KiroqpafvovTati r»|v euvi^oueav rbv xéeuev, kùxI km xk
ira yîjç. "Sert ïz qpfai< kûttjç xtvouuiw), -/.aià anctpi&gTixc j< iicon
tî /ai T'jviyo-jTa rà s; a-jTf,: tv wptajtivoi; yoôvoi:. /.a*. TOtftÛTa 8pâou
dticexp&ï).
J'ai reproduit ce texte en entier parée qu'il contient deux foie, en quatre ou cinq
lignes, le verbe euvé^stv qu'emploie aussi Ifarc-Aurèle dans la présente pensée. On
retrouverai! le même mot dans le passage de Sextus Empiricus (ode. Math., \\
que j'ai cité plus haut, et dans la définition de Vil:: rapportée par Plutarque <</<? v
repugn.} i3 : One toutmv yàp ffuvl^stai t« otou-orra), à laquelle je me suis borné à faire
allusion. C'était donc un terme consacré dans la langue philosophique - iena.
Le sens en ressort très nettement de l'analyse étymologique : le préfixe eùv- indique
une unité faite île l'assemblage d'éléments divers; le verbe ïyiv* — ^e ^a m,,ne
famille que le substantif ïl'.z — indique l'existence indépendante, ou plutê t ce
semblant d'indépendance qu'est pour nous l'existence. On aurait dune pu traduire
à peu prés littéralement les mots :à xta. ffuvsyouEvx par • les choses qui ont |
principe de leur unité et de leur existence même une simple qualité première ou
nature». J'ai préféré une expression peut-être moins explicite, mais plus coi
J'ai d'ailleurs été guidé dans mon interprétation par les synonyme* que les Stoïciens
eux-mêmes donnaient à awi/so-Oa: •' 5io*xst<rôat, ou bien glôoirotsîaOai et rçigiartÇeoOàa
(Plutarque, ViH, mor.. n, — et de Stoïr. repagn., 43= p. io54 A. fin : textes cités ou
mentionnés ci-dessus). La traduction de If. Couat ne m'a pas paru désigner peut-être
assez nettement Vïi'.z et la puet; comme des principes organisateurs ou formels.]
i. [Couat : u un peu plus sages. » — Cf. la note suivante. — Il y a dans le texte grec
une anacoluthe qui disparaît si l'on rétablit, aprè^ les mots: Ta c; 1-
u.stc'. (07 £pu>7, le participe Oavj.aTvj.sva. ou un synonyme, qu'aurait oublié un scribe.
i i 3 BIBLIOI m < m i DES i m\ i KSI i ES Dl midi
d'une âme vivante, comme les troupeaux, l<- groa bétail; les
hommes encore plus entendus1 préfèrent les êtres pourvus
dune âme raisonnable, mais dont la raison indifférente à ce
qui esl universel se distingue par l'habileté technique <>u |par
toute autre adresse], ou simplement par le Fait de posséder
beaucoup d'esclaves, Mais celui qui estime rame raisonnable,
celle qui embrasse l'univers ci l,i société universelle, ne se
tourne vers aucun autre objet; il s'applique à conserver son
àme en état de se mouvoir cl de se retenir3 suivant la raison
et les lois de la solidarité; il agit d'accord avec tout ce qui
est né comme lui pour cette fin.
15
Les choses se hâtent, les unes d'être, les autres de n'être
plus; a mesure qu'une chose devient, une partie d'elle-même
a déjà disparu; le monde se renouvelle par un écoulement
Mais je crois plutôt la négligence imputable à Marc-Aurèle lui-môme qui, arrivé au
début de la seconde phrase, se serait imaginé avoir commencé la pensée par les
mots: Ta... uito to>v icoXXâft Oa'ju-a-ôjxsva, exactement synonymes de: J>v f, 7rXr/Jv;
BowjlâÇet. Dans ces conditions, il aura cru pouvoir sous-entendre ici 0avfJLaÇ4u£va
aussi bien qu'àvày&Tai un peu plus bas. Les inadvertances de cet ordre, qui pro-
viennent d'une rédaction hâtive et attestent que l'auteur ne s'est pas relu, sont
d'ailleurs asseï rare> dans [es Pensées. Cf., au milieu de l'article III, iC, dans la même
phrase, à la même ligne, la rencontre des mots ta /.oiuà et Xotirév.]
i. (Couat : «encore plus raffinés.» — Avec M. Couat et les autres traducteurs
français d<- Marc-Aurèle, j"ai considéré ici le mot yapi£T7£p(.>v. et dans la phrase pré-
cédente le mot fieTpumépwv comme des masculins. M. Stich, qui cite ce passage aux
mots gaptev et [ié-rptov de snn Index, en a fait des neutres; je ne crois pas qu'il puisse
arriver par cette voie à un sens bien satisfaisant. Il me paraît presque évident qu'il
y a dans cet article deux gradations parallèles, celle des variétés de l'eÇic, et celle des
intelligences qu'intéresse chacune de ces variétés : f, tta/jOO:, oi ixsTpuoxssot, o\
-/apiiaTôpo'.. J'ai essayé de marquer cette seconde gradation dans la traduction.
Depuis Platon et Ari>tote, les mots ulstoio'. et gaptevrec désignent les hommes qui se
distinguent du vulgaire par une certaine sagesse: les premiers, plus précisément,
par la modération de leur langage ou de leur conduite; les seconds, par leur habileté
dans les arts ou les sciences, surtout dans la philosophie. Mltptoc ne reparaît pa>
dans les Pensées, mais ^aptetç y est employé encore deux fois (V, 10; IX, 2); au
moins la dernière, le sens n'est pas douteux, — et c'est celui que nous avons dû
adopter ici.]
2. J'ai suivi le texte donné par les manuscrits, bien que la phrase n'offre pas une
construction grammaticale satisfaisante. Le passage, ajoute M. Couat, est probable-
ment altéré. — [Je n'en suis, pour ma part, rien moins que sur. Il sufïit de sous-
entendre avant le point iinal le mot ivTsr/r,:, exprimé une ligne plus haut, pour que
la dernière proposition, qui seule peut surprendre le lecteur, paraisse claire et
correcte; et nous avons vu (deux notes plus haut) que les ellipses ne manquent pas
dans cette pensée. Je prends -h... xexTY)<xÔai pour un accusatif de relation, ou, comme
disent les grammairiens, un accusatif grec]
3. Je li*> £<t^o'j<t<xv xou xivoujiÉvïjv. Cf. IX, 12: àXXà jiôvov sv QéXe... xivetaQatt xst
ia/îaOa'.. lo: ô roXitixqc Xôyo; iftoî. [Mêmes mots, VI. 16.]
Il II Ll| M \h< M RI I l
perpétuel el <!<• pei pëluel i bangemenl i- i oui
rompu < 1 1 1 tempi renouvelle toujotu la (i"i i infinie I
portrs par le lltîin c .m |h.ii\ «»ii iimii \ .h i . i. i i
Ible qu'un <!<• u<>us - attache à l'une d< qui
fùienl !<• long de » rive l 'aal < « »i 1 1 1 1 1 < i non naetl i(
,i .iimcr l'un de ce ni"iiir,ni\ qui pas se ni en volanl au|
de noua : <l«'.j.i il a disparu loin <!«• n< ird I elle \ me
de chacun de u<>us n'etl rien qu'exhalaison du lan el a pipi
lion d'air. [Car] eu <|u<>i diffère <l<- la simple aspiration si
expiration de l'air, que noua recommençont ■ • chaque instant,
le lait de rendre une fois pour toutes, là (>" nous l'avons
prise, relie faculté de respire) que n<>u- avons reçue biei
avant hier, en naissant i )
16
(le n'est pas de transpirer comme les plantes qui a de la
valeur, ni de respirer comme les animaux domestiques on
sauvages, ni de recevoir la représentation par empreinte >, ni
d'être tiré par le désir comme une marionnette; ni de se
rassembler en troupeau, ni de se nourrir, (les faits sont du
même ordre que d'éliminer les produits de la digestion.
Qu'est-ce qui a donc de la valeur? Est-ce le bruit des applau
dissements? Nullement. Ce n'est donc pas non plus le bruit
qu'on tait en parlant de nous, car les louanges de la multitude
i. [Cï. supra 11, 17; Y, i3, note finale; infra X, 7.]
». [Couat: < A quoi s'attacheront donc tous ceux qui sont emportés le
rï\rs de ce fleuve >,ms pouvoir s'y arrêter? » — J'ai redoublé L'interrogation el lu
t::....; d'accord avec Pierron et M. Michaut, et, à ce qu'il me semble, lébul
même de la pensée, j'ai fait de tourpw twv irapsOsoVtiM le régim ' de tî.]
3. [Nous n'avons en français que le mot «vie» pour traduire à la fois
On ne saurait pourtant confondre les deux « vies ». Pour les Stoïciens, v.o; m
que celle de l'àme raisonnable (oi — kko t>; TToà: î v< XéYS<r8oii &i
xaO' h x\ ex/jiJiaiv6|ievov Xoytxfj*; Cjwtjç, Stobée, Ed.. II, 27?); £<■") semble être un terme
générique. C'est le mot qui est employé ici. La définition de Marc- Au r nous
retrouvons d'ailleurs dans le Pseudo-Plutarque {Vie (PHomhre, 1 ,_: cf. sapra V, 33.
3r note), confirme celle de Stobée. En effet, l'exhalaison du sang nou-
velle sans cesse en nous l'àme raisonnable, ainsi qu'on l'a vu V, 33, h note): par
suite, elle entretient en nous cette forme supérieure de vie qui B'appelail ; »;. S
certaines réserves que nous avons faites ubid., note finale . le tou/JU peut suffire,
d'autre part, à désigner l'àme animale : les phénomènes de la vie animale peuvent
ainsi être résumés par le mot de « respiration ►>.]
'i. [Var. : « que nous possédons depuis qu'hier ou avant-hier nous sommes nés.»]
5. [Couat : «ni de recevoir l'impression des choses extérieure*. 0 — [Cf. supra III. 16,
•Y note.]
\. COI M- P*. h»IH\llli. y
I I f\ BIBLIOTHEQUE DE9 UNIVERSITÉS D! MIDI
ne sont qu'un bruil de langues. Ainsi, voilà la gloriole mise
il Bon tour <lr côté. Que reste t il qui ait de la valeur? A mon
;i\i-. c'esl <l<i Be mouvoir et de s'arrêter selon sa propre cous
tilulion ' : ce qui es1 aussi le but de toute étude et de tout art.
Lu ait quelconque, en effet, s'efforce de mettre tel être ou tel
objet en état de remplir l'office pour lequel il est constitué7.
C'esl ce (pie cherchent les vignerons en cultivant la vigne,
cl celui qui dompte les chevaux, et celui qui dresse les chiens.
C'esl aussi le but de l'éducation et de l'enseignement >. Voilà
ce qui a de la valeur. Si ce but est atteint, tu ne chercheras à
le procurer rien de plus. Ne cesseras-tu donc pas de donner du
prix à beaucoup d'autres choses? Tu ne seras donc ni libre, ni
autonome, ni exempt de passions '». Fatalement, en effet, chacun
envie, jalouse et soupçonne ceux qui peuvent lui enlever ces
autres biens; chacun tend des pièges à qui possède ce qu'il
considère comme ayant du prix; fatalement, la privation de ces
biens nous trouble et nous ne cessons d'en faire des reproches
aux Dieux [mêmes]. Au contraire, si tu respectes et si tu
honores ta propre intelligence, tu seras content de toi-même,
tu te sentiras en harmonie avec les hommes et d'accord avec
les Dieux, je veux dire que tu les loueras de tout ce qu'ils
t'accordent et de tout ce qu'ils ont ordonné.
17
Les éléments sont emportés en haut, en bas, en cercle 5.
Le mouvement de la vertu n'a aucune de ces directions; c'est
i. Couat : ((nature.» — Cf. supra V, 16, note 3. — Les mots «se mouvoir » et
((S'arrêter» appartiennent à l'Éthique stoïcienne. Nous verrons (XI, 12, en note) que
r« utilité» bien entendue se résume en eux.]
3. [Couat : <( de rendre l'objet qu'il crée propre à remplir l'office pour lequel il est
créé, » — Mais le dressage ne crée pas le cheval, ni la viticulture la vigne. Il fallait
d'ailleurs rappeler ici le mot ((constitution» qui se trouve dans la phrase précédente,
et dont l'équivalent grec n'est pas écrit moins de trois fois.]
3. iizi ti d7rcôoojT'.v. Le pronom n n'a pas de sens. On pourrait lire etù toCxo. [ou.
avec M. Stich, è«\ aX/.o xi 9icEu£ou<riv;].
\. [Ces trois expressions sont à peu près synonymes. Cf. XI, 20, note finale. Toul
le développement qui suit a été repris par Marc-Aurèle à la pensée VI, fci.]
."). [Couat: ((Les éléments se meuvent en haut, en bas, circulairement. Le mouve-
ment de la vertu, etc.. » — Il y a en grec deux mots qui ne sont pas synonymes et ne
peuvent être ici traduits do même : epopa et xtvqatç. D'après Stobée {Ed., I, 'io4),
Chrysippe définissait la xtw)ffiç « un changement de lieu ou de figure », — (X£Ta>/Aavr,v
y.aTa tôttov r, (7/r/j.a. — et la yopy., « une xfv7)9tc précipitée,» disons : «un mouvement
précipité.» — lv. uLSTScopo'j xtvijffiv ogétav. Or, ici, soit que la définition de Chrysippe
D'il 1)1 MU' M II M
quelque chose <!«• | » l • j - dh in uh anl uni i
d('c(Hi\ m, elle i i\ &n< e el atteint ion i>ut
18
Singulière façon d'agir I Les homme ne reulenl pa Ion
ceux « l < - leur hMiips, (|ui \i\cni avec eux, maii il tiennent
beaucoup î» <x,in' louéa etn mêmes pai i eoa qui naîtront
eux, (|uils hOmI jamaif nia m nr verront jamai I I 1 peu
près comme ai tu t'affligeais de n'avoir | u nom plui
louanges <\r ceux qui oui vécu avanl toi.
19
Parce qu'une entreprise te paratl difficile, ne juge p
qu'elle est impossible à l'homme; si, au contraire, elle
possible el s'il appartient1 à l'homme de L'accomplir, crois que
tu peux toi même la réaliser.
soil insuffisante, soil que la terminologie de Marc- turèle soi( impropre, le mol
ne se trouve p;»> seulement désigner une chute (xàx»), mail sussi une
(avt.)) rapide. Dans ie seul autre passage des Pensée* où nous le retrouvions i \ I
il exprime la fuite du temps qui passe a l.i façon d'un fleuve Chrysippe n1 al - us
doute pas désavoué rat emploi de popa. Dans Sénèque, le rei
(non itf ted fertur), caractérise la démarche «emportée)) ou rprécipil •■ de la
passion : cet emploi figuré dérive tout naturellement du sens premier, — si c'est bien
celui que donnait Chrysippe. Si l'on reul prendre II moyenne ►lions
diverses, on peut entendre par popà un mouvement impétueux, don! !•• mobile
pas maître : tel le inouvem ut des vents, des torrents, des incendies, des pi qui
s'écroulent, des éléments déchaînés. Celai de la vertu, au contrain isentielle-
ment libre.
{«'expression f, Tf(; npervj< x-vr,?-.; no saurait surprendre un lecteur habitué in
matérialisme des Stoïciens, averti par la définition dos « catorthoses » (supra V, ia),
enu enfin du sens très large que Chrysippe el son école attribuaient su
«mouvement». Le s mouvement do la vertu» est sans doute un certain
ment d'aspect»— [UTaXXay^v xorcà v/j^x - de rame: mais tout changemen
implique, au dire des Stoïciens (Simplicius, Phys. 3io b: ol 8è in %axa
jràdav Kt'vrpw SXrfo^ ùireîvai tt.v To-'.xr,v), un changemen! de lieu, c'est-à-dire un
« mouvement », au sens le plus usuel et le plus concret du terme. Il faut i
garder de prendre ici le mol xîvrjdiç pour une simple métaphore, sans sutl
que celle que nous formons en français avec le mot « démarches
S'il en est ainsi, on ne peut que s'étonner d'avoir à compler le feu du ciel ou
réther au nombre des éléments que Marc-Aurèle oppose à la vertu. Il faut l'y
compter, parce qu'à la différence des quatre traditionnels, terre, eau. air
terrestre, dont le mouvement {infra M. 20) est rectilign mquième élément
se meut circulairement (xb o' ott&spiov itepupepâc xivcvcai, Stobée, /■>/.. I, qu'il
est précisément question ici d'un déplacement circulaire. On peut s'étonner de
l'opposition du mouvement de l'éther à celui de la vertu, parce que les asti - -
divins, que la raison est faite de la même flamme, et que la vertu est la raison droite.)
1. [Couat : «Si... elle est possible et à la mesure de l'homme. • — On ne peut
donner d'ontsiov qu'une traduction approchée. Littéralement, ce terme signifie:
« domestique, familier, apparenté. » Le sens de 0 conforme à la nature de l'homme »
Il6 BIBLIOTHÈQUE DEfl i M\ EIiMTKS i>l MIDI
20
Dans 1rs gymnases, L'adversaire nous a égratigné avec le^
ongles ou. en nous attaquant, Frappé d'un coup de tète1. Cepen-
dant, nous ne montrons ni ressentiment ni fureur' et ne
nous défions pas désormais de lui comme d'un traître; nou-
nous mêlions simplement en garde, sans voir en lui un
ennemi, ni le tenir en suspicion, et nous lui conservons notre
bienveillance en parant ses coups3. Qu'il en soit à peu prèfi de
même dans les autres circonstances de la vie; comme si nous
('lions au gymnase, laissons passer souvent les coups qu'on
nous porte. Il est toujours possible, je le répète, de les éviter,
sans soupçon et sans haine.
21
Si Ton peut me démontrer que mes jugements et mes actes
sont mauvais, et m'en convaincre, je changerai volontiers. Je
cherche la vérité, et la vérité n'a jamais fait de mal à per-
sonne. Ce qui fait du mal, c'est de persister dans son erreur
et dans son ignorance.
22
Moi, je fais mon devoir; qui '* pourrait m'en distraire? des
choses sans vie, ou des êtres sans raison, ou sans direction,
qui ne connaissent pas leur route?
(cf. M, i3 : to tt] puoei to-j otxetov) ou de «proprement humain» est assez voisin de
ceux-là. En français, nous distinguons parfois malaisément ce qu'il nous appartient
de ce qu'il nous convient de faire. Le mot xaôr.xov ayant été réservé par Marc- Aurèle
pour exprimer l'action propre à l'homme en tant qu homme, et parfaite, c'est-à-dire
le devoir (supra III, iG, note iinale), tout ce que les Stoïciens ont appelé xaÔTrçxovxa,
qu'il s'agisse des actions moyennes ou des actions parfaites, peut être désigné ici
par le mot olxsîa, comme ailleurs (VII, 7) par xo ÊrctêàXXov. — Cf. Zellcr, Phil. der
Gr.. III3, p. 209, n* 1.]
1. Tf( xeçaXw èppayEÎc. C'est evpayeic qu'il faut lire : ttj xecpaXfj est construit comme
à'vuÇi, qui précède.
2. [Couat : « nous ne le blâmons pas ( Var : « nous ne le dénonçons pas »), nous ne
nous irritons pas contre lui. »]
3. [Couat: «et sans le tenir pour un ennemi, sans lui vouloir du mal, nous cher-
chons à éviter ses coups. » Il y a là au moins un mot, eùusvoC:, qui n'est pas traduit.]
'a. [Couat: «les autres choses ne peuvent m'en distraire; elles sont sans vie, ou
sans raison, ou sans direction et ne connaissent pas leur route.» — Le neutre du
grec, Ta à'X/a. ne pouvait être exactement traduit par un mot unique, ni par
((choses»., ni par « êtres (Michaut). G'esl la raison qui m'a contraint de changer le
Il ISJ-.I-.* 1-1 M MU M M I »
23
i i
, \ (•( iiohlrx >r r| IiIm-i |. ' . loi (jiji Q < I < . i J - de I ■•• 011
animaux et, en général, dei oho i el de objet qui n'ont
pat de raison. Quant aux hommes, qui ion! doué de i
traite les oomme Faisant partie de la même communauté que
loi. En toute circonstance, Invoque lei Dieux; peu Importe
combien de temps tu agirai ainsi troii heur< I em
ployées suffisent,
24
Alexandre le Macédonien el son muletier lurent, aprèt leui
mort, réduits au même état : ou Ils rentrèrent dana la même
raison séminale de l'univers; ou ils Furent également dispei
parmi les atomei
25
Vois combien de faits physiques et psychiques se produisent
à la fois en chacun de nous dans le même laps <l<* temps
imperceptible; ainsi tu ne seras pas étonné que des faits bien
tour de la phrase. J'ai dû, d'ailleurs, renoncer à retrouver en Français L'effet de style
que Marc-Aurèle à obtenu en maintenant ici constamment le genre neutre, même
pour désigner des hommes: fssitXavY)u,£va( .... arpvooOvTa, au lieu de scicXavr
QtYvooOvTeçi après :i'l'j/x et àftoya. De la choses la bête et de la bête à l'homme qui
vit dans l'erreur, il y a certes um- gradation continue i cf. supra \ l. i6,la même fa
chie): mais qu'est -ce que «tout cela - — j'emploie a dessein le seul oeutre que me
fournisse le français, un pronom — en face de l'homme digne de ce nom, qui fait
«son devoir»? L'heureuse incorrection du Btyle met ainsi en pleine lumière l'idée
fondamentale du présent article.]
i. [Gouat: «Traite d'une manière généreuse et libérale... les animaui
liberté, nous l'avons vu maintes fois (cf. surtout VI, 8, en note), c'est uniquement,
pour les Stoïciens, la liberté de la raison: car «les choses extérieures ne ton
point l'âme » ; c'est l'état d'une âme exempte de passions. Voilà le sens philosophique
du mot £>,£uOsp(o:, — et cV^I certainement celui qui domine ici. Mais il esl
et le voisinage de iiefaXoçpova); nous y invite, de prendre en même lemj -
dans son acception usuelle et sociale. En français, nous distinguons librement de
u libéralement ». Dans un cas analogue (supra V, ; : voir la note rectifiée aux Addt
nous avons vu M. Couat hésiter déjà entre ces deux mots. Aucun ne peut être parfai-
tement exact quand tous deux seraient nécessaires : où la langue esl trop ri< 1
ne peut trouver qu'une traduction pauvre.]
2. [Gouat : « les faits. » — Pour le sens de :à uttOXEijieva, cf. supra VI, 3, en note, et
VI, *.]
3. [Deux hypothèses sont ici en présence : la stoïcienne et l'épicurienne. La pre-
mière peut se présenter elle-même sous deux aspects, suivant qu'en admet la survi-
vance temporaire de L'âme ou son extinction immédiate ^IV, ai, irf et dernière notes).
Sur la «raison séminale», cï. la seconde note à la pensée IV. i^.]
i 18 BlBUOl BJ Q1 i DBS I Nil I RS1 l i S M MIDI
j)lus nombreux, <>u plutôt que t<>iii se produise à la ibis dans
celle unité universelle que nous nommons le monde1.
26
Si Ton le demandait comment s'écrit le nom d'Àntonin,
lu énumérerais sans faire aucun effort chacune des lettres qui
le composent. Mais si Ton se mettait en colère, irais tu \\
mettre loi même cl ne continuerais - tu pas à compter douce-
ment ces lettres une à une? Souviens loi donc qu'il en est
de même dans la vie. Tout devoir est un total de plusieurs
temps9. N'en omets aucun : et sans te troubler, sans répondre
à la mauvaise humeur par la mauvaise humeur, suis la route
qui mène à ton but.
27
N'\ a-t-il pas quelque cruauté3 à empêcher les hommes de
s'élancer vers l'objet qu'ils croient leur convenir '< et leur être
1. [Cette unité universelle est aussi un être, doué d'un corps et d'une âme : nous
l'avons vu souvent; et la comparaison môme en laquelle se résume cette pensée suffi-
rait à le démontrer. Comme M. Couat el M. Stich, je proposé de rejeter les mots xa\
yEvv^TÔ) que donne le manuscrit A entre évî te et xai <jCu.7:av7i. L'intrusion dans le
texte de ces mots qui n'ont aucun sens peut s'expliquer par la prononciation iden-
tique des deux groupes de lettres PENNHT ct IEN1T : celui-ci aura été lu deux fois.]
2. [Couat: «Tout devoir est composé d'un certain nombre de degrés. Observe tous
ces degrés, o — Si les mots o\ àptOpofc tûv xocO/jxovtwv ne peuvent passer littéralement
flans la traduction, du moins celle-ci ne doit elle pas dissimuler le tour d'esprit
OU l'intention de philosophes qui recouraient à la terminologie des mathématiques
pour définir le devoir. Où ils mit écrit «nombre», je transcris «total» et «temps».
L'expression curieuse qui nous arrête a été déjà rencontrée dans les Pensées (III, i).
Noua avons cité ;i ce propos un texte deCicéron, qu'on retrouve en grec dans Diogène
Laërce (Gicéron : omnes numéros habei ; Diogène. VII, ioo: cltzz'/ii to-j; ÈTr^r-o'jjj.svo'j:
àptOfxoO:), et d'où il résulte qu'elle était consacrée par la tradition de l'école. Avant
que Bentham n'imaginât « l'arithmétique » des plaisirs, les Stoïciens avaient pratiqué
celle du devoir.
Non qu'il s'agît pour eux d'établir une comparaison entre les devoirs, comme pour
Bentham entre les plaisirs. Ils estimaient que t»>us les xaTopfaSuATa, ou, comme dit
Marc-Aurèle (supra III, 16, not<i finale), tous |IS xadrjxovra se valent, étant tous har-
monieux et parfaits. Mais chaque devoir est un ensemble d'obligations particule
si chacune était exprimée numériquement, les nombres constitutifs du total varie-
raient suivant les devoirs, non le total lui-même. Ain<i d'autres harmonies — dont
Les nombres sont Les éléments différemment combinés — se résument toujours en
des rapports fixes.
Si Ton admet cette interprétation, on ne s'étonnera pas plus de rencontrer L'ex-
pression o\ KptOfjiot toO xaÛTjxovroç dans Marc-Aurèle que, dans Platon {Lois, 668, D),
les mots o\ àv.Outo'. tgO fffi*u.aTOÇ, ou, chez tous les rhéteurs, t>\ àptOuxA xr: >.s?:£0);.]
3. Ilfo; (oijlôv. Le sens de la phrase indique clairement qu'il faut écrire 710"): ovx
o)|j.ôv, déjà proposé par Casaubon.
!\. [Couat: <<vers ce qui leur paraît les toucher el leur être utile.»— De même,
trois lignes plus bas : 0 comme vers des choses qui les touchent et leur sont utiles.» —
Sur Le sens d'olxetov, cf. supra VI, 19, en note. 11 peut, d'ailleurs, être déformé ici par
le voisinage de patvé|i£va, tout comme celui de xaBrjxov lui-même à la pensée III, 16.]
Il * I I I II
utile ' ( ependanl tu lei en empêi h< en quelque mari
quand tu t'indignei <!<• leun Faute H poi lenl i ri
toul entiers comme vert l'a< le qui convienl el leui esl utile. —
M;us ( <• i i.iii\ r,( »i ne toi donc •• lei in truii e el i
éclairer, w-m t'indig n< i
28
Le moi l esl !<• repoi de eni qui ni de i épondi e eu
choc «1rs Objetfl extérieurs: «1rs <l. m <|in m> n..ij ni plu-
oomme <»Vs marionnettes; de l'intelligence, <i<»mi elle épai
les démarches c'esl la Bn «lu service que n« •« j - demande
la chair ' .
i. [Couat: t La mort esl le repos des Impressioni contraire
dei agitations «pic donne !<• désir, dei démari hci que demande i \nU ih ■•
ien Lee que non- Impose la chair. »
Noua différons lurloul dam l'interprétation dei moti xiat lonl
M . CSoual s'est borné b (aire l'analyse étymologique xtodijtni i
j'ai cherché une définition de la sensation. Le présent texte complet) rail natun llenu ni
ceux que j'ai rassemblé! dans une note antérieure (Tavant-dernii res la pi n
el d*où j'ai essaj ô de déduire la théorie de ce phénomène. On i ni que l<
général, faisaienl consister Les sens en « des souffles allant du principe din
organes » ; mais qu'au dire de Marc- turèle, la sensation ne sort pas du t que
..les choses extérieures ne touchent poinl l'âme». le m'autoriserais volontiei
mot àvtiTvicfa que je rencontre Ici pour ajouter que tous les Stofciens, el même
Marc Ainvlc. oui vu dans la sensation un mouvemenl en d< nx temps : d'abord un
choc, puis le « contre - coup ». Mais, tandis que, pour les auti iens, l'ébran-
lement de ce choc se propageait jusqu'à L'âme, qui le renvoyait à l'orna no iiit»'n •--•'•.
le mouvemenl avait pour Marc-Aurèle une ampleur beaucoup moindi
\ l'appui de cette interprétation, on me permettra de faire valoir deux argumenta.
D'abord, c'est la seule qui conserve à àvxrrvma son sens usuel efl Littérai : les autres
(Pierron: «le combat que se livrent les sens;» Michaul : les ébranlements de la
sensibilité»), même celle tic If. Couat, qui semble pourtant porter en soi sa justifi-
cation, ne sont autorisées par aucun lexique. — En second lieu, L'expression
vevpofficaaTia, dont j'ai tâché de donner partout la mémo traduction, esl t'.unii
Marc-Aurèle: on ne la rencontre pas moins il»* quatre fois dans les Pensées (II, s;
111, 16; VI, 16 et ici), el, sauf une, toujours accompagnée d'une expression s)
trique, soit uncoûotiou eavtatextx&ç, soit kio&qtixv) aYmiuicfa. N'est -il pas naturel de
chercher une certaine correspondance entre les sens et les usages de CCS trois locutions
Est-il donc si étonnant qu'ici la définition de la sensation remplace celle de la repn
talion (cf. supra III, 16, 5" note; V, aG, avant-dernière note), à côté de celle des im-
pulsions instinctives ou des mouvements de la sensibilité morale? Je pourrais ajouter,
d'accord cette fois avec If. Couat : à coté aussi de la définition du raisonnement. Car
le raisonnement, c'est rintelligence en marche, progressant d'une idée à l'autre et
cherchant une issue; plus simplement, c'est l'acte de la pensée discursive: et
bien là ce qu'expriment à la lettre les mots StavoTrnxr) 8ie£o£oç...
Je dois signaler maintenant dans cette même pensée — car le désaccord e>t consi-
dérable — les expressions que ni M. Couat ni moi n'avons pu entendre comme le>
autres traducteurs français. Nous avons pu prendre Sté|o£oç, que je viens de définir,
ot Xctaoupyia, qui n'est pas oo^Àsi'a. et dont une pensée antérieure (V, 3i) a fixé le
sens, dans leur acception habituelle. Traduire, comme Pierron et M. Michaut. le pre-
mier de ces mots par « écarts >> ou « égarements », et le second par « servitnd
ajouter témérairement une ligne à la page où les dictionnaire^ les définissent;
i |<j BIBLIOI HBQ1 I DBS I M\ » K8I1 i S D1 MIDI
29
Il est honteux que. dans cette vie où mon corps ne se refuse
pas à von office, mon âme renonce la première an sien'.
30
Prends garde de faire le César, de déteindre3, car cela arrive.
Conserve loi simple, bon, intègre 3, grave, naturel, ami de la
justice, pieux, bienveillant, tendre, plein de fermeté dans
l'accomplissement du devoir. Lutte pour rester tel que la
philosophie a voulu te faire. Vénère les Dieux, viens en
aide aux hommes. La vie est courte; le seul fruit de notre
existence sur la terre, c'est de maintenir notre âme dans une
disposition sainte, de faire des actions utiles à la société l.
Sois en tout un élève d'Anton in. Imite son énergie à agir
conformément à la raison, sa constante égalité de caractère,
sa pureté, la sérénité de son visage, sa douceur, son dédain
de la vaine gloire, son ardeur à se rendre compte des choses.
11 n'abandonnait pas une question avant de l'avoir pénétrée
et nettement comprise. Il supportait les reproches injustes
sans répondre par d'autres reproches; il n'avait de précipi-
ici déprécier hors de propos des fonctions dont Marc-Aurèle avait parlé sans dédain.
La cause initiale (le ce double faux -sens est dans une troisième erreur, qui porte sur
te mot àvàicocu) i-
Nous l'avons traduit par « repos»; Pierron et M. Mie haut par «fin». Sans doute,
avi-awa ;> les deux -eus : mais le notre est le sens premier. Sans doute encore, le
mol «repos» implique une idée douce que celle de la mort n'éveille pas ordinai-
rement dans L'esprit de Marc-Aurèle; il nous la présente presque toujours comme
un événement >i indifférent qu'il cherche à peine à en prévoir les suites (IV, 21,
dernières lignes de la note finale; VI, >'r, \ II, 32, etc.), et elle est pour lui non un
bienfait, mais une œuvre quelconque de la nature (IX, 3); mais ce contraste ou cette
Duance n'est pas une contradiction, et ne mérite pas que pour l'éviter on interprète
fort librement toute la suite de la pensée.
Il c>t difficile, en effet, d'écrire cette tautologie ou cette platitude: La mort est
\di fin des sensations, des désirs, des pensées; la mort est la lin de la vie de l'àme unie
au corps. — Mais il n'est pas malaisé de découvrir une idée et un sentiment sous une
phrase comme celle-ci : La mort est le repos, après les fatigues de la vie même la
plus normale. |
1. [La pensée XI, 20, est le développement de celle-ci.]
2. [Var : « Fais attention; ne prends pas un bain de césarisme. » — « L'aversion de
Marc-Aurèle pour les Césars, qu'il envisage comme des espèces de Cardan a pales,
magnifiques, débauchés et cruels, éclate à chaque instant. » (Renan, Marc-Âurele6, p. 6.)
«A chaque instant» est peut-être beaucoup dire. Cf. III, 16, le nom de Néron rap-
proché de celui des monstres; I, 1 1, les fortes expressions qui réprouvent la tyrannie.]
3. [Var: «pur.» Le mot «pureté» traduit plus bas le grec ôdtov.J
U. [Couat : «la pureté de l'àme et le dévouement.» — J'ai préféré la traduction
de Renan (/. /., p. i3), où n'est pas effacé le mot ciocôeai:.]
ii.ii ni A.\ i.« \ i un i
talion «'m i mu il repou ail II oalomnie il étudiai! i
(iiiriiii,,ii |, . .M.,, kirs «t le .. i. il n'employai! i u
l'injure : H n'étail ni timoré, ni oup onnetu ni ophl
M -<• contentait <i<- peu poui i habitation le - oui bei le
rétament, la nourriture, le lerfioe; Il .min. ni le travail rt II
étail magnanime. Il pouvai! alli-mln
jusqu'au soir sans avoir besoin d< i '" dehoi de
BOn heure aCCOUttinuV Imite i 1 1 < 1 » 1 1 1 « • «t ,. nm l.m< « <1.im
amitiés, -.1 Facilité i lupportei la contradiction
empressemenl à approuver ceux qui lui montraient une
meilleure solution. Il était pieux sans superstition. Ressemble
lui. afin que ta dernière heure te trouve, comme lui, Il
conscience tranquille ' .
31
Reprends tes sens et reviens à toi. Quand tu te seras réveillé,
quand tu auras reconnu que tu étais troublé par des rêves,
alors, les yeux bien ouverts, regarde les choses comme tu le*
regardais autrefois '.
32
Je suis composé d'un corps et d'une âme. Au corps, tout
est indifférent^, car il ne peut [même pas; s'intéressera rien.
1. [Nous avons déjà rencontré (I, 16) un portrait d'Antonio le Pieux, dam ce sin-
gulier et admirable livre de comptes qui esl le premier livre des Pensées, et où,
forme de reconnaissances (« De mon aïeul tant,,., de mon père tant..., UnU de ms
mère..., de Diognète..., de Rusticus. .»), Marc-Aurèle nous a retracé la physionomie
morale de loua ceui qui l'avaienl formé par leurs exemples ou leurs Dana
cette galerie de portraits, celui d'Antonio esl le plua grand de tons; il est en plao
d'honneur, à côté des (lieux El voici que pour la seconde foia Marc-Aurèle esquisse
le> traita de cette figure vénérée. On peul comparer les deux images : œllen i esl la
fidèle réduction de l'autre, [ci, pourtant, Marc-Aurèle, vraiment dédaigneui de la
vaine gloire el des vains honneurs», de cette toute-puissance dangereuse qui
les Césars, a pieusement omis tout ce qui dans la vie de son père adoptif pt
déceler un maître du monde, même les vertus impériales. C'est avant tout l'homme,
simple et bon. le sage, le juste qui l'attire et qu'il évoque.]
■2. [Couat: «regarde ces mêmes objets que tu regardais tout à l'heure. — 11 \ o
dans le texte grec (arexXw... fiXéica rewta, to; èxétva s6Xeiceç) une opposition qu
traduction dissimule, celle des pronoms ravra et Bxeîva. 11 est évident, c
qu'ils ne désignent pas «les mêmes objets ». L'un représenté lés perceptions du pré-
sent — ou de l'avenir qui commence — (xaÛTat), l'autre, celles du pasa
non pas, comme l'a cru M. Couat, du passé qui vient de Unir, pendant lequel • nous
dormions », mais du lointain passé où nous étions éveillés et voyions clair. Les chose*
doivent changer; ce qui ne saurait varier, c'est la façon de les regarder | o; eô'/.ettï:
lorsqu'on les regarde bien. Cf. infra VII. 2, et 1 es notes.]
3. [Cette affirmation ne contredit point cette autre: «au corps les sensations
(supra III, 16). Car les sensations (cf. V. 26. avant-dernière note) ne sont rien de plus
1219 BIBLIOTHEQUE l>i> UNIVERSITÉS Dl MIDI
A la pensée1, tout es! indifférent de ce qui n'est pas ses
opérations. Mais toutes ses opérations [du moins] sont en son
pouvoir. Entre elles toutes, d'ailleurs, elle ne s'occupe que de
celles du moment présent'. Celles qui appartiennent à l'avenir
el au passé lui sont actuellement indifférentes,
33
La peine que supporte ou la main ou le pied n est point
contraire à sa'* nature tant que le pied remplit son office de
pied et la main son office de main. Pareillement, la peine que
supporte l'homme en tant qu'homme n'est pas contraire a sa
nature tant qu'il remplit son office d'homme. Or, si elle n'est
pas contraire à sa nature, elle n'est pas non plus un mal
pour lui.
34
De quelles voluptés ont joui des brigands, des débauchés, des
parricides, des tyrans?
35
Ne vois-tu pas comment les gens de métier s'entendent
jusqu'à un certain point avec les inhabiles, mais restent
cependant attachés aux principes de leur art et ne veulent pas
s'en écarter? N'est-ce pas étrange que l'architecte et le médecin
respectent les principes de leur art plus que l'homme ceux de
sa propre nature qui lui sont communs avec les Dieux?
36
LWsie, l'Europe sont des coins du monde; la mer tout
entière est une goutte de l'univers; TAthos, une motte de terre
que des mouvements qui ont le corps pour scène, — Marc-Aurèle dit : des mouve-
ments que le corps subit (cwfxaTtxai usi'asic). Comment s'y intéresser ait-il? Comment
s'intéresserait-il à quoi que ce fut? Il est en nous la matière inerte (supra IV, ai, note
finale; cf. le mot d'Épictète, supra IV, 4i). C'est ironiquement que Marc-Aurèle a pu
écrire de lui : ctyexat to 7iâ(7/ov (XII, i).
La traduction de otacpspETOat par «s'intéresser» est conforme à l'usage de ce mot
dans les Pensées. M. Couat le rend à l'ordinaire par des synonymes : « être touché »
(V, i), «se préoccupera (V, 35), ((qu'importe?» ou «peu importe» (VI, 2 et 23), etc.
Rien n'autorise à attribuer ici à rviasÉpîiOai un sens nouveau et à écrire dans la tra-
duction, comme on l'a fait: «discerner», «distinguer» ou « faire la différence».]
1. [Couat : «à l'àme. » — Mais Marc-Aurèle n'a pas répété 'Iv/ji : il a écrit oiocvoia.
Sur l'équivalence de sens des mots : « âme, raison, pensée, » et. supra V, 33, note finale. J
2. La phrase des manuscrits xai toOtwv [j.svtoi izzp\ jaovov to irapov TrpayuaTE-jETa'.
est incorrecte. Il suffit pour la corriger d'écrire xoî tojtwv fjivTot jaôvov xà icefft to 7rapbv
icporf|iaTeueTat.
3. [Couat : « à la nature. » — Cf. supra V. 3. note finale.]
Ils II l.l I | l I
dans l iini\ en toul l< pi é enl ' n'atl qu'un point d
durée 1 1 >ul 0 1 petit chan » anl péi 1 able 1 oui 1 lenl
de ce i»i incipe «•" ecleui de cho 6 « A en éna inc directora
«m par conséquence La gueule béante «lu lion le pol on, toul
ce < 1 11 ï est mauvais, comme i<i»hm- «»u r<>i<iui<- »>i Im<.,ni
m« inrii 1 ' de ce qui esl beau <i ■■< »l»l«-_ \<- 1 un rnn- p.i <ju.
ces choses -<»ni étrange 1 • cal ôlre que ,u ' ' léchi
plutôt (ju'il csi 1,1 source <!<• t * » 1 1 1
37
Voir le présent, c'esl avoir i<»ui \u. et ce <|ui esl arrivé
loi île éternité, el ce qui arrh era jusqu'à l'infini; toutes ch<
oui même origine el sont pareille*
38
Réfléchis souvent à l'enchaînement de toutes les cho
dans l'univers et à leurs rapports réciproques '». Elles sont
en quelque sorte entrelacées et, par suite rattachées les unes
aux autres par des liens d'amitié, car elles se BUCCèdenl
sans discontinuité. La cause en est dans la communauté de
1. [Couat : «( toul le temps qui s'est écoulé. >• — Il esl certain que ca tous
les LrK»saiivs L'attestent) signifie «le présent». Est-ce le mot x&vqui ■ embarras!
M. Couat? A mon sens, on peut dire : «looi le présent» en pensant aui événemeoti
innombrables qui s'accomplissent dans l'univers au même instant — Nous retrou
verons à la pensée VII, ?*j, les mots ro £v£tt'.'>:. M. Coual s essayé d'aooordet
elle-même la traduction du même mol dans les deux passages II écrit à cet endroit,
et le contexte le lui permet presque : « Circonsrris le temps à mesure qu'il ^'avance. ■
On observera toutefois que « I»1 temps à mesure qu'il s'avance » ou «s'écoule» oe diffère
Mtns doute «du temps qui s'écoule», mais n'est certainemenl pas le temps qui
sVst écoulé».]
2. [Couat : «un produit, u — En grec: È-iyÉvvr.ua. Cf. toute I III, 2.]
3. [Var: «ont même origine el même forme.» — Le mol forme est un terme phi-
losophique, dont Marc-Aurèle exprime constamment l'idée par xl-ix (supra IV, si,
note finale). Pour lui, ôuoEtor, n'est qu'un mot banal... Nous n'avons pas affair- i
Platon.]
'». [Nous avons un peu plus haut (VI, 14, ir' et 2' notes) nommé et défini I
catégories stoïciennes: to ùicoxetptevov, 70 kouSv, to -ïo; iyy> el tô - : t - : iyrj>.
puis montré les rapports étroits qui unissent les notions de Vïi:: et de la boiotik
et ont permis la confusion île ces deux mots. En somm tait te nom de<
qualités essentielles. Le nom de t-/ét£'.ç était réservé au\ qualités secondes. — à tout -
celles qui rentrent dans le> deux dernières catégories. Ces! ainsi que devant la
préposition 7ipb: ce mot peut être traduit par «rapports». C'en est, dan> les Pensées.
l'acception la plus fréquente. — D'autres fois (VII, rio: XI, s), il s'oppose à xrvipiç, et
sisrnitie « repo< ».]
l'i BIBLIOTHEQUE DB8 UNIVERSITÉS ni ftflDl
leur origine ' et dans leur accord ' au sein de l'unité de la
matière &.
39
accommode -toi des choses qui te sont échues; aime les
hommes avec lesquels le sort te fait \ h re, aime-les sincèrement.
40
l n instrument, un outil, un ustensile quelconque est en
bon étal s'il lait ce pour quoi il a été constituée, hien que le
fabricant soit loin. Mais pour les œuvres de la naturel, la
force qui les a constituées (i est en elles et y demeure. Il faut
i. La leçon do la \ulgate, oià rrçv to7tixt(v xÉv/jow, n'a aucun sens ici, non plus que
celle «lu Vaticanus, tovixy}v xivyjtiv. [Ce sont là, d'ailleurs, deux expressions familières
iUl stoïciens (cf. Zeller, Phil. derGr., IIP, p. 119, n. 2 ; i3i, n. 3; 180, n. 1 ; 2o5, n. 4).
La première distingue de toute autre xfvqffic le mouvement proprement dit : xîvr/ri:
désigne, en effet, d'après Chrysippe (dans Stobée, fiel., 1, 'io'i), « tout changement de
lieu ou de forme » (cf. supra VI, 17, et la note). La seconde (littéralement : « le mouve-
ment de la tension ») est un peu plus longue à définir. — Les Stoïciens rapportaient.
comme on sait, toute création, tout acte, toute vie à une force, ou flamme active : la
tension (tôvo:) est expliquée par eux comme un «à-coup dans la flamme», uÀ^yr,
rcupéc (Plutarque, Stolc. repugn., 7), et l'être doit, disent-ils, aux mouvements qui en
résultent son unité, quand ils se produisent de dehors en dedans, sa dimension et
ses qualités, quand ils vont du centre à la périphérie, etc. Or il est de toute évidence
que) le mouvement seul ou mémo la tension et le mouvement n'expliquent pas la
parenté. Gataker a proposé oruvvvjvtv, et Coraï xoîvoxriv. Mais ces deux mots donneraient
à tout le raisonnement le caractère d'une pétition de principe. Marc-Aurèle dirait, en
effet, que l'amitié qui unit toutes les parties de l'univers a pour cause leur enchaî-
nement et leur accord. Je proposerais plutôt : 8tà tt,v xoivtjv yévEdiv. Cette idée
de la commune origine des choses est exprimée quelques lignes plus haut dans
l'article 30 : 7iivxa ÊxsîÔev k'p/ETai, et ce qui suit.
Ou remarquera que les expressions -covi/r, xivqatc et totiixt, xîv/jti; ne se rencon-
trent nulle part ailleurs dans les Pensées.]
m Tout est conspirant, » dit Leibniz, quand il traduit les mois : (TjtxTivoa -rcâvra.
3. Couat : «de la substance. »]
'1. l' louât : « fabriqué. » — J'ai dû laisser une ligne plus bas le mot « fabricant». J'ai
voulu conserver au moins une fois sur deux dans la traduction le terme philosophique
que Marc-Aurèle n'a pas employé sans raison. On a déjà vu, et surtout on retrouvera
un peu plus loin (\ 1. 'j'i. noie linale) la définition de la «constitution)) dans l'homme.
Dans un outil, ce sera: le principe efficient et formel (a'.Tia) de cet objet dan- ses
rapports avec -a matière, et au>>i. et surtout, et d'autant plus peut-être que ces
rapports ne varient guère, la cause finale de cet objet.]
5. [On trouvera à la fin de la seconde note à la pensée VI, i'i, l'analyse de l'expres-
sion Ta -j~h z.'jrjz(i); <T"jv£-/ôu.r,a, Q110 M- Couat traduit ici très simplement et avec une
approximation suffisante par : « les œuvres de la nature. » Le mot çwiç n'a d'ailleurs
plus en ce passage — qu'il s'agisse de la «nature» universelle dont les créations sont
opposées à celles de l'homme, ou de telle nature individuelle qu'on pourra appeler
tout à l'heure « la force qui demeure en nous» — la même valeur qu'à la pensée VI, i4.
On ne distingue plus ici la cpOo-t: de I'e;-.; ou de la ']rjyrr <t>y<xi; est devenu le nom
d'un genre qui comprend toutes ces variétés.]
6. [Couat : « la puissance qui les a créées. » Cf. la première note à cet article. — La
phrase est ainsi faite qu'il y a égalité entre les termes z-j<7'.z et xaTao-y.E'jiTaTa oôvaa».:.
ou du inoins (si çOtfiç signifie vraiment ici la nature universelle), que la « force >» ou
PEU II IX M \h< M l'.l I I
d'autanl plui Ifl rc pc< toi ol oroii e que I m ra n< u dut
sons diipirs >,i \m|miiI. I.hiI \.i .1 nnln \in ;
également &U ^ré de l'univers l< i lin -••- rpii (k'perHlen! de lai
41
Quand noua regardons comme un bien ou comme un mal
quoi que ce ioil qui n'es) pai le résultai de notre volonté, doui
ne pouvons pas ne paa en vouloir aux Dieux d< que tel
m, il nous surprend ou de ce que tel bien noui é< bappe Soui
ne manquons pas non plus de haïr les bommei auteun
soupçonnés iris, de notre mécompte ou de notre malheui
Nous commettons alors bien des injustices poui nf) être pas
restés indifférents9. Mais si nous ne considérions comn
ou mauvais que ce qui dépend de nous, il ne nous resterai!
aucun prétexte pour blâmer 1rs Dieux el Eure la guerre aux
hommes ;
42
Nous travaillons ions à [accomplir] une même œuvre •• les uns
avec un acquiescemenl [réfléchi et] conscient, les autres sans le
Bavoir; c'est ainsi, ce me semble, qu'Heraclite dit que les gens
endormis no sont pas inactifs et participent à ce qui se fail
dans l'univers. Mais les uns y travaillent d'une manière, les
autres d'une autre, et, par surcroit, même celui qui blâme la
inarche des choses, celui qui s'y oppose et qui veuf l< ■-
«puissance» (àuvauiç) dont il est question ne peut être rapportée qu'à oetti nature.
Il est possible de trouver en ces quelques mots les éléments d'une définition pi
de la KotTaffxewj, «constitution». Cf. infra VI, w. note finale.— Sur II
cf. X, >6, en note]
i. [C'est là le sens usuel de xaTQi yoOv. Il n'y a pas lieu ici de décompos i l'eij
sion pour rendre à vov; sa valeur philosophique et faire affirmer à l'auteur l'identité
des deux «volontés» de la nature et de la raison. La pensée de Marc-Aurèlc revienj
simplement à ceci : estimons-nous satisfaits, <i nous pouvons nous conformer à la nature
■2. [Gouat : « parce que notre intérêt y est engagé. » — Cf. supra VI, 3a. i" n
.'>. [Même idée et mêmes formules à la fin de l'article \ I, i6.]
'4. [Il y a en cet endroit du texte grec des tenues philosophiques dont la traduction
française ne permet pas de remarquer la précision : KXOT&eoua et t.
Empiricus rapporte quelque part (Contre les mathématiciens. IX. 5 SitOJ iens
définissaient la cause; o-j xapévroc ytvetai xo à-oTi/iTua, — et ailleurs (Questions
pyrrhoniennes. III, i5) qu'ils avaient réparti les causes en troi- group -
erovaiTta (cf. supra IN". 40 : rrâvra rcàvrwv... rovauust) et trx 'est -a-dire : celles qui
se suffisent à elles-mêmes, celles qui concourent solidairement à un même effet, celles
qui ne sont que les auxiliaires d'autres causes. Ici. le mot àicoTiXeo^a nous représente
comme des causes, et ffwepyoOu.E'v semble nous ranger (voir la note suivante) dans le
troisième groupe. |
I2Ô BIBLIOTHÈQUE DES l\ivEHsrn> D1 midi
détruire. Oui, l'univers avait besoin d'un tel auxiliaire. Tu
n'as donc <juà te demander dans quel part i tu te rangeras.
Celui qui dirige le monde saura bien se servir de toi; il
t'accueillera toujours au nombre de ses collaborateurs1 [libres
OU non]. Mais n'en lais pas partie au même titre (pie dans la
comédie ces vers pauvres et ridicules dont parle Chrysippe3.
43
Ksi ce que le soleil voudrait remplir les fonctions de la
pluie, et Ksculape celles de Déméter? N'en est-il pas de même
de chacun des astres? Ils ont des rôles différents bien que
contribuant au même résultat.
i . La vulgate donne ici les mots tûv ffvvepy&v y.-x\ T'jv=pyr,Tixwv. Ces deux synonymes
ne s'expliquent guère. 11 faudrait ou bien supprimer l'un des deux, comme nous le
voyons dans le manuscrit A (et c'est là un procédé bien sommaire dont j'ai dû pourtant
me contenter); ou bien chercher si dans l'un de ces deui mots ne se cache pas une faute.
Il y a deux sortes de collaborateurs à l'œuvre de l'univers, dit l'auteur. Les volontaires
et les involontaires, ceux qui aident et ceux qui s'opposent. Quoi qu'on fasse, on sera
compté dans l'un ou dans l'autre parti. N'est -on pas amené par la suite du raison -
Dément à supposer qu'au lieu d'être deux synonymes, le mot vuvepY&v et celui que
représente ctuvepyyjtixwv sont opposés l'un à l'autre? N'y avait-il pas par exemple dans
l'archétype: ton cruvspy&v r, i\i7zooifjxi/.uy/.]
[En marge des observations qui précèdent, je trouve un point d'interrogation
dans le manuscrit de M. Gouat. Eût-il maintenu sa conjecture? Je ne saurais pour
ma part, en accepter la responsabilité. Au point de la pensée où elle se présente, il
De peut plus èlre question d'opposants à la marche des choses; il est démontré que
l'univers ne saurait trouver que des collaborateurs parmi les hommes; l'antithèse est
désormais impossible entre s[X7ro6i<7Ttxo\et puvepYof — Il me parait, d'ailleurs, contraire
à toutes les habitudes de la critique de supprimer simplement le terme qui nous
gène, soit truvepfôv, soit auvep-wrcx&v. Posons donc en principe qu'il y avait à la fin
de cette phrase, dans l'archétype, deux mots réunis par itou, — et exprimant deux
nuances différentes de l'idée de collaboration : le premier, vraisemblablement, la col-
laboration libre, d'égal à égal («Aon pareo Deo, sed adsentior »); le second, la collabo-
ration forcée de l'inférieur au supérieur. Je lirais volontiers (cf. la note précédente)
(Tvvamcov v.'jl\ <T'jvepYYjTty.â)v, sans craindre qu'on pût tirer contre cette lecture une
objection des premiers mots de la pensée : uàvis: çuvepyoOfiev, oî |ièv etâoTUC , ou
de la phrase: àV/.o; os xax' oVao ffuvepye7. Dans les deux cas, le verbe owepyefr est pris
comme terme générique; et l'analyse étymologique du mot justifie cet emploi :
oruveoyà, tous les faits, tous les actes ou tous les êtres d'où résulte une même « œuvre » ;
orvvaiTia, toutes les « causes» d'un même effet. Il y a des ejuvepyà qui ne sont pas pro-
prement «des causes»; mais tout anjvaiTtov est en même temps T-jvspyov.]
i. [Plutarque (De communibus notitîis, i4 = io65, D) nous a conservé textuellement
la citation de Ghrysippe à laquelle Marc-Aurèle se réfère ici. En voici la traduction :
«De même que les comédies portent des titre$(?) ridicules qui par eux-mêmes ne
valent rien et donnent pourtant je ne sais quel attrait à l'œuvre entière, de même le
vice, condamnable en soi, n'est pas inutile au train du monde. » Le texte de Plutarque
est d'ailleurs assez mal établi. Je l'ai lu dans l'édition de Bernardakis. Il n'y est point
question des «vers pauvres», comme on le voit, mais du «titre», £7riypàu.u.aTa. Les
corrections qu'on a proposées (71apaypiu.1j.aTa, jeux de mots par «à peu près», —
pappaxa, pièces de rapport) ne suffisent pas à concilier les témoignages de
Plutarque et de Mare - \111Me.]
PI % I I Dl mm-1 M ii i i
M
Si 1rs |)icii\ oui ilrlihrrr -m moi «| m , ,• rjin <jr\.nl
m'arriver, ils ei I sagement «i«iii><i, m m. i p., i.k Mi-
effet, même »!<■ concevoii que la divinité pui e manquai
de sagesse Or, pour quel motil auraient il voulu me dire
du mal? Quel avantage an i ulterail il pour roi al poui
l'univers, don) i l ^ ^»i préoccupent avant tour.' Qu< m
n'onl pas délibéré sur ma personne en particulier il onl du
moins pleinement délibéré sur l'ensemble des choses, al
qui m'arrive résulte encore <l<* l«ti i décision ' : je <l"i- donc
l'accueillir avec joie et amour. Enfin, s'ils ne délibèrenl sur i len .
— ce qu'on ne peut croire Bans impiété cai an ce i ju<»i
hou les sacrifices, les prières, les serments <*i tout ce que
nous Baisons comme >i les Dieux étaient présents <*t vivaient
avec nous? — si doue il est vrai que les Dieux ne délibèrenl
sur lieu (le ee qui nous touche, il m'est permis, à moi, «le
délibérer sur moi-même, c'est à dire de considérer mon
intérêt. L'intérêt de chacun 3, c'est d'agir conformément
constitution î el à sa nature. Or, ma nature est d'être raison
nable et sociable; eu tant qu'Àntonin, ma patrie el mu cité,
i . [La Providence es! pour Chrysippe (Plutarque, Conuu. not., 30, tin) l'âme m
tir la divinité, qui esl rame du monde : dans L'embrasement universel, c'est la Provi
dence seule qui subsiste intacte; c'esl en elle que se retire Zeus.]
[On retrouvera la môme suite * 1 « * raisonnements ;« la pensée IV s Plus loin
(\, 5), Marc-Aurèle, sans se demander encore si 1«'> I >i»ii x s'intéreasenl directement
à nous, se contente de la seconde hypothèse. Ailleurs t\II. 7"»'. il établira même
qu'elle esl la seule Logique: car un être dont la Natiir- s'occuperait en particulier
serait en dehors de la raison universelle. — Noir cette dernière pensée el la note qui
L'accompagne.]
3. [u L'intérêt de chacun » n'est pas ce que chacun pense. Se reporter au dialogue
qui termine la pensée III. 6.]
|. [Gouat : « à son état. » — Nous avons déjà défini, d'une part (VI, 14, s' note\ la
«nature»; d'autre part (V, 16, 3' note), la « constitution m et, en particulier, d'après
Sénèque, la constitution de l'homme.
Si l'on veut distinguer ces deux notions -i voisines qu'elles semblent presque
indiscernables, on se reportera à la pensée VI, '10 (3' note), où Marv-Aurèle reconnaît
en la nature « la force qui nous a constitues et qui demeure en non- s&po
r, xaTa^xEuâTao-a BuvonAiç). D'où il suit, à mon sens : r que la • constitution
postérieure à la « nature ►>; a' qu'elles ne peuvent être exactement définies, celle-ci
que si on l'isole du reste de l'être, celle-là que si l'on considère l'être tout entier, —
nature et matière inerte. Et l'on pourrait simplement entendre par la < constitution »
le rapport de ces deux éléments, si elle ne nous était présentée le plus souvent non
comme une abstraction pure, mais comme une réalité active. La formule conservée par
Sénèque : principale animi quodarn modo se habens ergo corpus. — donne ce caractère à
BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS ni midi
c'est Rome; en lanl qu'homme, c'est l'univers. Ce qui est
utile à ces deux cités, cela seul e>\ donc un bien pour moi.
45
Tout ce qui arrive à chacun est utile à l'univers; cela
pourrai! suffire. Mnis prends garde, tu verras, en outre, qu'en
général ce qui arrive à un homme est utile ;mssi aux autre-1.
Emploie ici le mol utile dans le sens qu'on lui donne com-
munément à propos de choses indifférentes.
46
La vue continuelle des mêmes objets, la répétition des
mêmes jeux au cirque a et dans les licJix i" ~t genre en rend
le spectacle fastidieux; on éprouve le même dégoût d'un bout
a l'autre de la vie; du haut en bas, c'est toujours la même
chose et toujours le même point de départ. Jusques à quand
cela durera- 1- il donc?
47
Pense sans cesse à la foule d'hommes de toute sorte, de
toute condition, de toute race, qui sont morts; descends
la constitution qu'elle définit. Elle est, d'ailleurs, grosse d'incertitudes et de difficultés,
— perplexum et subtile, dit Sénèque, — trop vague en son milieu (ijiiodarn modo se
h(il>eiis, ces mots conviendraient presque, pour d'autres (pie Marc-Aurèle, à une
définition de la sensation), et trop précise au début. Si la «constitution >> implique,
en effet, un « principe directeur » ou une « raison », — avant que la raison ne fût
consommée en lui (et l'on sait combien l'élaboration en est lente : voir la dernière
des Lettres à Luc Mus), — l'enfant n'aurait donc pas de a constitution >■. En réalité,
celle-ci est mobile; elle évolue d'âge en âge. Il n'en est que plus nécessaire de mettre
dans la définition qu'on en donne le nom du principe efficient et permanent auquel
nous devons notre identité. — La nature est déjà, comme on l'a vu (VI, i4, note ■>.),
Pâme du fœtus : en joignant les mots qpu<nç et napspévet, c'est Marc-Aurèle lui-même
qui a corrigé, pour nous, la formule rapportée et contestée par Sénèque. Finalement,
la constitution (xaTOKixevT)), c'est la nature qui demeure en nous, considérée dans
ses rapports avec le corps qu'elle dirige. <I>>7t:, c'est la même nature prise en soi.
La direction implique le but ou la fin. L'idée dé finalité est si intimement as»
à <clle de la « nature » dans la notion de la /.axaT/.îvr, que presque constamment dans
les Pensées le verbe xaxaffxeuaÇesôai est accompagné d'une préposition finale : bih,
irpbc ou Evexev. Il n'e>t pas sans intérêt d'observer que c'est rarement le cas de pueotioci
ou de «eçuxa. Cf. au surplus, infra Vil, 55, 3' note.
i. o<ra ocv0po')7:o>. xai Ixépotc àvOptoTrot;. La suite des idées et la eouslruction de
cette phrase elliptique montrent que dans la première proposition il faut sous-
entendre o-'jjjiëaîvei et dans la seconde TvjjicpspE'.v, qui sont opposés de la même
manière dans la phrase précédente.
:?. [Gouat : «la répétition des mêmes scènes au théâtre.» — J'ai conservé dans
Pensemble la traduction de ces premières lignes, bien qu'elle fût assez libre. En
somme, usodiaTaxai est traduit à la phrase suivante par le mot «dégoût». La « répé-
tition » rend suffisamment tô ouoetSéç.
Il \ I I I I I
jusqu'à Philistion Phœbua Origan ion Pu c muiiitcri
rei ne 1rs autres « ni : il Paul <|u< nou au i n< >u
la place poui allei là bai où ml Lan) d'orateu l< >utabl<
la ni <l<- profonde philosophe! If< ra< llte Pylha) dp
Lui! <lr hé 1*08 d'.iul n-|. .1 i I . i j » i . | u\. I.uil de g6t\i i > 1 1 \ . I «!<•
t \ i .m- ajoute les I iudoxe l( Hippai que i \ i i hirm
d'autres hommes au génie pénétrant ou douée d'une grande
âme, laborieux, adroits, orgueilleux el cetu mêm< qui raillaienl
cette \i«' humaine périssable el éphémère, tels que M< nipj
el d'autres. Pense, à propos de i<»u- ces homm< i qu il onl
morts * 1*1 >u i ^ longtemps. Qu') .1 I il donc là de terrible poui
eux? Quoi de terrible aussi pour ceux donl on ne connaît
même i>.i^ les noms? Ainsi] il n\ ,i qu'une chose qui ail
quelque prix, c'esl «le vivre suivant la vérité el suivant la
justice, en se montrant bienveillant pour les hommes men-
teurs el injustes.
48
Quand tu veux te réjouir, réfléchis aux vertus de ceux qui
vivent avec toi, à l'activité de celui ci, à la modestie de
celui-là, à la libéralité d'un troisième, à idl»' autre qualité
pour chacun. Hicn ne nous réjouit autan! que de non- repré
senter les vertus qui brillent dan- la \ie de ceux qui nous
entourent el de les voir se rencontrer presque en foule 4. Il
faut donc être toujours prêt à te les rappeler.
49
Te chagrines-tu de ne peser que tant de livres, el non pas
trois cents? 11 ne faut donc pas non plus te chagriner de ne
vivre que tant d'années et non davantage. Tu te contentes
bien de ce qui t'a été donné de matière 5, fois de même peur
la durée.
1. [Philistion. médecin de Locres, ou comique du v siècle; les deui rai
inconnus.]
2. [Tous deux mathématiciens, comme Archimède : lepremi r ton;
le second, de l'époque alexandrine.]
3. [Le philosophe cynique et le personnage de Lucien.]
4. [Yar. : «et qui s'offrent à nous pour ainsi dire en fouli
5 [Couat : « substance. »]
A. COL AT -P. FOLHMEK. >\
i.;<) mm. loi iil.ni i DES l M\ I R81 1 ES Dl MIDI
50
Essaie de les persuader, mais agis même malgré <'u\ quand
la considération de la justice ' f \ pousse. El Bi l'on te résiste
en recourant ;i la violence, réfugie toi dans le calque et la
sérénité de l'âme, el profite de cel obstacle pour exercer une
autre vertu. Souviens toi que tu n'avais rail cel efforl que sous
réserve2, el que lu ne prétendais pas à l'impossible. Que
cherchais tu donc!» Précisément ceJ eflforl de ton Ame. Tu as
doue atteint ion but, même quand le résultai oh in tendais ne
s'esl pas réalisé 3.
51
L'ambitieux met son bien dans l'activité des autres; le
voluptueux dans ses propres sensations \ : l'homme raison
nable dans sa propre action.
52
Il m'est possible de ne porter aucun jugemenl sur eette
chose, et de n'en pas troubler mon âme. Les choses ne sonl pas
dune nature telle qu'elles nous imposent nos jugements.
53
Prends l'habitude d'écouter sans distraction ce que disent
les autres; mets toi autant que possible dans l'âme de celui
qui parle.
54
Ce qui n'est pas utile à l'essaim n'est pas utile non plus
à l'abeille.
i. [Ou: « le< règles de la justice >>(?). — Cf. supra IV, 12, 1" note.]
2. [Cf. supra ÏV, 1. et la fin de la note; V, 20.]
3. Le texte de la dernière phrase est altéré. Voici ce texte: roUTO'J ok TvyyyvE'.:-
eç1 oiz 7:pov/0r;jj.sv, TaOta y:v£7a'.. D'abord, le pluriel irporv/O^aîv est au inoins
suspect; ensuite, la proposition sV olç xtV ne serait qu'une répétition affaiblie et
assez obscure de to^tq-j gè ruy^àvctç. Il doit y avoir, au contraire, opposition cnti
deux membres de phrase, et c'est pour cela que j'admettrais la correction proj
par Gataker: toôto-j oe Tvy/âvEi:, et xat sV oU -zhr^/Jyr,; raOra \j.rt yfaexai. C'est le
que j'ai traduit.
4. [Var. : «dans ses propre- passions. » — Il est certain que la passion s'oppose à
Vaction. Mais Le sens do la phrase et l'usage des mots exigent ici la traduction de
itetatç par « sensation ». La passion serait appelée rcàOo;. Cf. supra III. 6, Y note;
. .!' note.
Il i I I M M \M< M hl I I
55
81 les matelot \ injui laienl le pil< )U ou le maladt
médeci n . auraien I il une autre i" 1 1 ue cl I u Pair*
.m \ ci ,i eu i seul a ' . I nu < »n é<jui| l'auli
s(»| ,
56
tmbien <!<• personnes avec qui je luit entn dam te mond<
sonl déjô partie
57
Le miel parait amer aux gens <jui oui la jauni ai qui
ont la rage <>ni horreur <le l'eau; lei ('«"lii- enfanti trouvent
belle leur balle. Pourquoi donc me fâchei ( roia tu <ju<-
l'erreur ail moins de force que l«i I > i ! « * pour L'homme qui b la
jaunisse, cl le virus pour celui qui esl <ni,i_
58
Personne ne l'empêchera de vivre conformémenl aux lois
de ta nature3, el rien ne t'arrivera contrairement aux lois de
la nature universelle3.
59
Que valent ceux auxquels on cherche à plaire? El pour quels
avantageai? Et par quels moyens? Comme le temps ensevelira
vite tout [cela], et que de choses il a déjà ensevelies!
LIVRE VII
1
Qu'est-ce que levice5? — C'est ce que tu as vu bien souvent.
A propos de tout événement rappelle- toi de même que c'est
i. [Couat : u que le salut de l'équipage par le premier, el par L'autre la guérison
de ceux qu'il soigne.» — Il était nécessaire de traduire a^
a. [Dans une longue note à la pensée IV . ia, où sonl examinées les divers -
tions de AÔyo:. j'ai expliqué comment ce mol pouvait parfois être traduit par
3. [Sur la distinction et L'accord final des deux nature-, cf, suj>ra V, 3. dernière note.]
!i. [Cf., à la Un de; la pensée*X, [9, la mémo question, suivie de la réponse.]
5. [Var. : « la méchanceté. »
l3a BlBLlOTHBQlil DES UNIVERSITES Dl I11D1
quelque chose que tu as vu bien souvent. Partout, en haut,
en hiis. lu trouveras les mêmes choses. Les histoires des temps
anciens, celles des temps intermédiaires el «les plu- récents
en sonl remplies; elles se répètent maintenant encore dans
nos \illes el dans nos maisons. Il n'\ a rien de nou\eau; tout
esi éphémère el accoutumé ' .
2
Les dogmes sont vivants ' : et commenl pourraient-ils périr,
si les représentations correspondantes ne s'éteignent pas? <)r.
il dépend de toi de les ranimer sans cesse. Je puis, sur tel
objet 3, porter le jugement î qu'il faut; si je le puis, pourquoi
me troubler? Ce qui est extérieur à ma pensée ne lui est rien,
î. [Lieu commun de la doctrine stoïcienne. Cf. IX, 28; IX, i&; XI, 1 ; V, i3, note
finale, «'te. |
2. [Gouat : « Comment les croyances pourraient-elles mourir, si les idées correspon-
dantes...»— M.Gouat traduit ainsi la leçon traditionnelle, que M. Stich, a, d'ailleurs,
conservée dans son édition : :à ôoytxa-ra tcôj: aX),w; -/.ta. Or, ce texte est suspect. Dans
1< manuscrit A, il comprend deux, mots de plus, d'ailleurs inintelligibles, dont je
crains qu'on n'ait trop aisément accepté la suppression : r, en tète de la phrase, et yàp
entre r.C); et SXtoç. La conjecture que M. Stich a trop modestement reléguée parmi
ses notes (ça ta ooyaaTa' irôç yàp...) me semble très heureuse: elle respecte scrupu-
leusement les indications de A, et réduit l'erreur initiale à la chute d'une simple
lettre. C'est elle que j'ai traduite ci-dessus. — J'ai, en outre, pour h6y\tjxxa et pavrcalai,
conformé la traduction de cette phrase à celle des autres Pensées où l'on peut retrouver
les mêmes mots avec le même sens. Pour ooy[±aTa, cf., par exemple, IV, A9, note finale,
et la fin de la dernière note à l'article III, 16; pour pavTOKTtat, la 5e note au même
article. La définition qui a été donnée de ce dernier mot (rjTrwat; èv r,y£(xovixo")) ne
concerne, d'ailleurs, que la « représentation » qui achève la sensation, ce que les
psychologues appelleraient l'état fort. Nous voyons ici que l'état faible, c'est-à-dire
la représentation que ((ranime» la mémoire en l'absence de son objet, ou celle
que combine l'imagination d'après nos souvenirs, peut être aussi désigné par
çavroteria.]
3. [A^vaaai icep\ tovtou 0 8ef U7toXa|i6aveiv. Marc-Aurèle se sert volontiers du neutre
touto pour exprimer, en l'absence de toute désignation antérieure, l'objet présent de
sa pensée, même — et surtout — un objet indéterminé. Cf. supra IV, 9, et, un peu
plus bas, le début de l'article 5 de ce même livre VIL On rapprochera cet usage de
l'emploi des masculins pluriels otvribv, ol:j-oI; (par exemple IV, iG; IV, 38; cf. la note
à l'article VI, G) pour désigner telles personnes qu'il est inutile de dénommer plus
précisément. — Il était peut-être encore plus nécessaire ici qu'ailleurs de laisser dans
l'indétermination l'objet que représente rovro. Toute la suite de la pensée (cf. la
V et la 5e notes), en effet, oppose à la raison immuable et sûre de ses démarches
les choses, sans cesse renouvelées et indifférentes à ses yeux, dont elle tire les juge-
ments et les dogmes. On eût presque pu traduire ici 7rep\ to'jtou par: «n'importe
quoi. »]
k. [Gouat : « concevoir ce qu'il faut. » — En d'autres passages, If. Gouat lui-même
a traduit OffdXauldrvew par ((juger» (IV, 11), et uictfXi)<|/tc (IV, 7) par ((jugement». Il
fallait reprendre ici cette traduction, d'abord parce que le «jugement» est l'acte
propre de la « pensée » (ôtavota), ensuite parce que les" « dogmes » sont non seulement
des concepts, mai;* bien des «jugements)'.!
Il • I I M MAH4 M II I I
absolumenl rien1 Comprend bien cette mérité cl lu
deboul ; in peux revivre IV i ommen< i< ^ « lu
comme '" l<,s voyais nutrefoii i • ■ I là revlvn
\ .unes el pompeuses j i< >n pe< ta< les représenté ui
la soène, défilés <i<' troupeau i g i and el pelil
guliersj c'esl un <»s que l'on jette aux chiens, de la nourri
ture qu'on lance ;hi\ j>< i dan les vivi< ml dei
agitations de fourmis 3 tratnanl leur rardeau
souris effarées, «1rs marionnettes qu'un SI fail aller I Issist
doue avec des dispositions bienveillantes, et lans le ren
avec dédain. Mais sache que chacun vaut ce que raient les
choses pour lesquelles il se passionne
i. [Couat :« n'existe pas pour ma pensée, i Le m I qui semble répondre
exa< temenl au grec icptf ç9 est, en réalité, «l<- sens ambigu. Tout naturellement, la i I
du traducteur nous laisse entendre «|n<' • la pensée ne fail nul cai <\ • qui
dehors d'elle ... ()r, en grec, la locution 0 ne j» mii-I pai Une lellfl
équivoque; elle marque ici le rapport réel, ou plutôt l'abc loul raj
entre le monde extérieur el la pensée, non le jugement de la pensée mr les choses
qu'elle veut ignorer. Ici, Marc-Aurèle ne fail que rééditer, sous uni nouvelle,
l'un île ses «dogmes» familiers: «Les choses extérieures ne touchent pas le moins
du monde Tàme» (V, 19). Nous avons dit déjà (sopraV, 19, voir aui ; r;VI, n,
note finale) dans quelles Limites son dogme étail valable : certes, le / . /<? ne
peul accepter sans réserves une proposition qui. prise à la lettre, ruinerai! les
déments de toute connaissance; même le moraliste est contraint d'observer qu\
il nous arrive souvent, et même malgré nous, d'être ébranlés p.ir le choc des impres-
sions sensibles, et de perdre le rythme «de notre vie morale», liais, en droit-, le
moraliste peut affirmer résolument cet axiome, dans lequel se résume la théorie de la
liberté (infra XI, 20, note finale), et sur lequel, par suite, s'appuie tout»' la morale,
[ci, d'ailleurs, Marc-Aurèle en a très nettement apprécié la portée en rappelant que
tout jugement se tire des représentations; quelque forme qu'il donne au dogme, il
Sera toujours aisé île le comprendre ainsi : «Le- choses ne peuvent rien mit 1
que la solliciter à les connaître »
Son jugement étant toujours libre, et uniforme lorsqu'il e>t raisonnable, c'est-
à-dire M'aiment libre, il est certain que «les dogmes — et toute la morale — ne
périssent pas».]
2. [Clouât : m Revois les choses comme tu les voyais. » — Cet imparfait traduit litté-
ralement l'imparfait grec toc scôpa; : mai S| au moins en français, il ne désig
précisément la portion du passé qu'il faut u revivre ... Cf. la fin de la ;
et la note qui la commente.]
3. [Cf. Sénèque, de Tranq. an,, 12: Inconsultus iili- vanusque cursus est; qualis
formicis per arbusta repentibus.]
4. [Couat : «des contorsions de marionnettes.). — Le ver! ncatarsft exprime
ordinairement dans les Pensées l'action du désir ou de l'instinct lôsiir,) qui nous
mène aveuglément. Ici seulement, il est employé au sens propre. Il y avait quelque
intérêt à en donner une traduction littérale : on n'en comprendra que mieux l'accep-
tion dérivée.]
5. [Cf. supra Y. 16.]
i .'/, mm loi in Ql i DES UN [VI RSn ES Dl Mini
4
Il tant suivie mot par mot 1rs discours el dans les actes
observer chaque intention1. Ici, vois immédiatement à quel
hui tend l'action3; là. ce que signifient les paroles.
5
Es! ce que mon intelligence suilii à toile œuvre, ou non?
Si elle > suffit, je m'en sers comme d'un instrument qui m'a
été donné par la nature universelle. Si elle n'\ suint pas, je
rri\r la place au plus capable d'accomplir le travail, à moins
que ;; ce ne me soit an devoir : en ce cas, j'agis comme je peux,
en m'adjoignant celui qui, avec l'aide de mon principe diri-
geant, pourra réaliser cette œuvre opportune et utile au bien
commun. Il faut [en effet] que ce que nous faisons par nous-
mêmes ou avec le secours d'autrui n'ait pas d'autre but que
l'utilité de l'univers et soit en harmonie avec lui.
6
Combien de personnages sont déjà tombés dans l'oubli,
après avoir été célébrés par d'autres, et combien parmi ceux
qui les ont célébrés ont depuis longtemps disparu!
i. [Var. : « 11 faut suivre mol par mot ce qui se dit et mouvement par mouvement
ce qui se fait, o — ces derniers mots effacés au crayon : sans doute ont-ils paru trop
vagues à M. Couat. Sa seconde version, que j'ai imprimée ci-dessus, est plus précise
que le texte même : ce dont je me garde, d'ailleurs, de lui faire un mérite. Pourtant,
il me semble qu'en regard de rot; Xcyouivoïc et à coté de xaô' 6010.77/, le sens de xoî;
Yivouivoïc n'esl pas douteux, et qu'on ne court pas grand risque à l'aftirmer.]
j. [Il y a dans le texte, entre les mots cry.07tbv et iva?opà, un léger pléonasme que
la traduction dissimule. Les trois mots tiç r, xvaçopà eussent suffi à exprimer la pensée
de l'auteur. Littéralement, àvasopà signifie «rapport»; plus spécialement, par oppo-
sition ii uXy) et a'.Tia, « rapport de finalité, — cause finale, — fin. » C'est le sens qu'il
aura constamment au livre \II (io, 18, 20), où nous trouverons (XII, 8) l'expression
àvacpopà tcov irpàHEor/.]
3. [Couat: «à moins que mon devoir ne ><>it de faire autrement; ou bien
j'agis, etc. » Var. : «ou bien je eèd<i La place au plus capable d'accomplir le travail;
ou bien, si mon devoir ne me prescrit pas de faire autrement, j'agis... » — Ces
deux versions traduisent l'une la vulgate, l'autre le texte de Reiske, qui a fait p
après la conjonction r„ c'est-à-dire dans la seconde alternative, la proposition éàv
:x/j.mz toûto jj.r, xaÔTjXTj. Toutes deux restituent dans la phrase grecque à laquelle
elles correspondent un infinitif Trpâo-astv à côté de roOro; or, au moins dans la pre-
mière alternative, avant t\ TisaTTio, cet infinitif n'aurait pn être sou s -en tendu «t né
! donc tombé (pie par une faute de copiste; d'autre part, le texte de Keiske n'est
• prune conjecture, même nue conjecture illogique, que condamnera Marc-Aurèle
i-même à l'article \ il, 7.
11 n'était pas nécessaire de toucher à la vulgate. Pour l'entendre, il suffit d'y
atténuer, d'y presque annuler le sens d'àV/to:, en traduisant èotv oXXcoc par « si
d'ailleurs... »
Il I • I M \ I . • V I I . I I I
Ne rougi pa d'ôtrc ecouru (domine un oldat dan
(l'un remparl tu bcc< un plii la L&< he qui t'e I échu
fei .1 lu <i"M< -i ta jambe boileu te ne le pei met pa d<
seul sur le ci éneau, tandis que lu |> furraii < i
l'aide d'un autre ' '
8
Ne t'inquiète pas <!<• L'avenir; lu > arrivera il I
portant ;i\ ec i<»i cette mém( >n ' d< >nl tu te lei p >uj l<
présent .
9
Toutes les choses ^<>ni entremêl I !<• lien qui Ici en-
chaîne es! divin. Il n'\ en a pour ainsi dire point qui soient
étrangères l'une ù l'autre. Elles ont été arrangées ensemble
et contribuent à l'ordre <lu même univers. Il n"> a qu'un
univers fait de l'ensemble des choses, un Beul Dieu dans
toutes les choses j une seule matière, une seule l<>i. la raison
commune 3 à tous les rires intelligents, une seule vérité:
il n'y a qu'une seule perfection pour imi^ les êtres de même
origine et participant à la même raison.
10
Toute matière disparaît bientôt dans la substance univer
selle, toute cause rentre bientôt dan- la raison universelle,
toute mémoire est bientôt ensevelie dans la durée éternelle '•
11
Pour l'être raisonnable, la même aetion est à la foi-
conforme à la nature et à la raison.
i. [Cet article exprime La même idée que la partie importante de la pensé x I
où nous relevons le verbe *a0rjxeiv ^ *>i r la note précédente). Il ne semble pas qu'il
y ait une différence de m'h> appréciable entre Les mots i nous
trouvons ici et l'expression ro v.aOr.xov itoiéw il»' la pensée IV. 22. you^ avons 1 -
ou signalerons a L'occasion (VI, 19: VII, 1 3, en notes) d'autres syi ssibles
de 70 xaOrxov. — Comme ro èiuââXXov, w^eXovjicvcx; a ici un sens inoral. ^ oir infra
VII, 7/1. en note, la définition stoïcienne de rJjçéXeta.]
2. [Var. : « muni de cette même doctrine. 0 — Cf. la note à la peu- s IV, 3o.]
3. [Gouat : ;< une seule loi, une seule raison commune... 0 — Il l'a ut voir dans
mots Xàfoç v.owh; rrâvTtov xcov voîstbv Ç«m»v la définition même de la l<>i. Cf. supra IV,
A. [Cf. IV, 21, note finale. Nous avons rencontré à la pensée IV, 1 4, tes deux verbes
ev«<pavîÇe<y6at et Kva>au6avec6ai employés dans le même sens qu'ici.
MM.IOÏ III <>l I Dl-I \|\ I RSI I ES l>l MIDI
12
Sois droii el non redressé ' .
13
Le même rapporl qui unil (huis l'individu les membres du
corps associe entre eux les rires raisonnables, constitués pour
une action commune \ Cette pensée se présentera avec plus
(le force «à i<>n espril si lu te dis souvent a toi même : je suis
un membre de l'organisme que constituent les êtres raison-
nables. Mais si. au lieu de « membre » «^ tu dis « une parli<
c'est que tu n'aimes pas encore les hommes du fond du cœur;
lu ne comprends pas encore la joie 5 qu'il y a dans une bonne
1. opOo: r, op6ou(i£VOÇ. J'ai traduit connue s'il y avait tj.r(, au lieu de r(. Bien que
Marc- îurèle ail à plusieurs reprises, el même dans le Livre VII (s 7),. accordé que
L'homme pouvait el devail profiter des conseils et des secours d'autrui pour arriver à
la vertu, il me semble qu'il n'aurait pas exprimé cette idée sous la forme de maxime
impérative <nfil lui s donnée ici. Il a, d'ailleurs, formulé L'idée contraire, presque
dans Les mêmes termes, à La fin de l'article 5 du livre III : « opôbv oSv slvai /pr(, v//:
opdoupévov. » Cette maxime, conforme à la doctrine stoïcienne, et écrite avec la conci-
sion qui coin ienl à une recommandation de ce genre, n'a sans doute pas été retournée
en sens contraire, dans les mêmes termes, par Marc-Aurèle. Il est bien plu- probable
qu'il L'a seulement répétée.
2. [Gouat: «De même que, chez les individus, Les membres sont unis dans le
corps, d'après les mêmes principes les êtres raisonnables, quoique séparés, ont ('ti-
en'es pour une action coin m une. — Les Stoïcien- distinguaient trois types de l'unité.
Il- appelaienl qvcofiiva le- êtres ou Les choses que définit une détermination pre-
mière ou qualité essentielle: r,vo)|jLsva... xà Otto jj.iâ; 'i\zw>^ xpaxo-jasva, xaOaTiîp pirrà
xou Çàta (Sextus Empiricus, ado. Mathem., IX, 78). L'unité collective, formée de
L'arrangement ou du groupement des qvcàpiva, était celle des 9uvairr6(ieva (tels un
na\ir<\ une maison, une chaîne) et des èv. o'.e<7T(otu)v (comme une Hotte, une armée,
un troupeau). — Cf. Simplieius, 55, e, et les autres textes cités dans Zeller (Phil. <ler
(ir., III8, p. 97). — Marc-Aurèle ne distingue ici que pour Les mieux identifier L'unité
de la première et celle de la troisième espèces.
Non- non- sommes expliqué précédemment sur le sens du mot «constitution»
(\ . 16, 3" note; \ I. m. 2* noie) ei sur les t< causes coopérantes 0 (ovrvaiTia et avvepvdl :
\ I, '|2. noie- 1 et 2).|
3. Les deux substantifs jjipo; et [xéXo; (membre et partie) sont opposés de manière
à former un jeu de mots intraduisible en français. C'est pour cela que j'ai supprimé
dans ma traduction la parenthèse oià toO po> orot}(eiou, qui n'aurait aucun sens. [Elle
fait, d'ailleurs, si gauchement valoir le jeu de mot- de Marc-Aurèle qu'il est presque
impossible de ne pas la traiter connue une glose.]
l\. [Gouat :« le plaisir de faire du bien ne te donne pas encore une joie absolue;
tu le regardes encore comme un simple devoir de convenance, et pas encore comme
un bien que tu te fais à toi-même;» — et, en u<>te :
« J'ai adopté, avec Gataker, la leçon xaraXiQXTtxciic au lieu de xatTataprcix&c, qui ne
se comprend pas. »
Je crois, pour ma part, qu'on peut la comprendre. On connaît l'expression stoï-
cienne pavTaoïa xaTa'Aiprrixiq (supra, p. 17, n. 2; Zeller, Phil. der Gr., III3, p. 82,
notes); est-il impossible de supposer une locution verbale 9avTa^E<76a: xorraXrjxTixâ);?
puis d'autres locutions verbales où entrerait le même adverbe, pris toujours dan- Le
il \ il l 'i MAKI \ i mi i
action in n<' Il hi en< i n e que pai • c qui I bien
parce <|u<- lu t'oblige lotil \c prcmiei
M
\ 1 ? i \ 0 c- qui \ oudi ■• <ln deh< >n •• C6 qui p6ul en n 'ji
1 1 i 1 de 060 attaques. ( < m partie! <|m loutfrenl le plaindront
si ri 1rs le veulent; mais moi, li je ne juge pai que a I ■«« 1 idenl
as! un 111.1l, je ne suis paa atteint Or, je pui ne po le ju
m.' n i> s. -n 1 Non 'H trouvorom un< précl émcnl au livn \l
[uiômi d< dli préceptes qui con titucnl l'ai ti< le i
ce pa » rr i g & , cl o va n I
manu* rits n*otl pai doufc n quoique -• »i U pai i
du verbe uni pn >p< wition parai loi Oi
pai Zollor (L t.) nous apprennent que, poui l<
H. . 1 1 1 1 môme qu'à) >,'", , el quo le promioi de ces deui adjectif» di l loi
tentations non seulemonl celles qui ne nom trompent pas, mai oll<
lesquelles nous avons la certitude d( n'étn pas tromr> Dai tou
verbales quo j'imagine, el dont deui au moins se n ncontn ni dam l< i P II i il
donc permis de traduire l'adverbe i par I mol rtitudo el
C'esl ce quo je ferai à l'article \l. ix. (< I, je l'entends i m< nu . il |e ne pul
exprimer de même ce que j'entends, La joie qu'on éprouve .1 bien I nous «lit
M. m iurèle en un seul moi, une joie légitime : et, de plus, on a l'elle
l'est ». La tin de la pensée me semble garantir cette int ion.]
1. [Tous les traducteurs français de Marc- turèlc, i I parmi i m M. I Ir le
début de la note précédente), écrivent ici (convenan
rendre le grec icpiicov. Or, le sens très ample qu'ont primitivement ei
et xaOr.xi'.v, et que déjà notre verbe français (convenir» ne reti itior,
B*esl tout autant restreint el déformé pour devenir ce qu'expri ordinairement —
surtout au pluriel, el en particulier dans les traductions de MM Gouat et Michaud —
le mol «convenance», que pour aboutir à l'acception constante de dans
les Pensées, Si, comme le reconnaît M. Gouat (supra III, 16, note Bnale), xoti
Marc-Aurèle (au moins lorsqu'il parle en son nom > ne signifie jamais qu<
«'i si TTpiuov peut signifier «les convenances», l'intervalle de sens
considérable (Mitre xaO^xov el itpéiHw qu'on pourrait presque les oppoaei dans une
antithèse. Cela ne peut paraître vraisemblable à qui considère d'abord que, dans les
Pensées. \h xaOr(xov admet presque comme synonymes des mots qui! n'est
d'usage en grec de faire aller, comme -<t xpéitov, de pair avec lui : -
{supra VI, 19), el ro tactéaXXov (supra VII, 7 >; ensuite, que personne, en d'autres isages
{M. s; VI, 3o), n'hésite à ira. luire icpéitov par devoir.
Ici, — et c'esl pour cela que je n'ai pas écrit ci-dessus le mot : , — le
contexte nie semble marquer pourtant entre xx'Jrxov el - re nuiii
sens et justifier une opinion que j'avais avancée précédemment 1 III. 16, note finale):
à savoir que xaOr,xov a toujours pour Marc-Aurèle la valeur de x 1 n ul. <»n se
souvient peut-être (cf. ibid.) de la distinction que faisaient l<-> Stoïciens enti
xaQvy/ovra moyens et les xaOr.xovra parfaits, et de la définition du xai tum)
que donne Cicéron (supra, re notre du livre III): ce serait un xa
l'auteur latin ajoute une expression presque intraduisible en français : officium,
quod... omnes numéros habet. 11 me semble que la présente pensée nous indique
précisément le dernier numerus (àp'.Ôub; ffU(urta)p«dTix6ç, dirait Man-Aun !■ qui doit
achever (àxpiooOv, III, 1) le xa&Tptov (ou EiaêàXXov, ou olxcïov, ou arpén en faire
ce que les Stoïciens appelaient le xaTÔpOtofia et qui, pour Marc-Aurèle, est simple-
ment le seul et le vrai xaOvjxov. Le « devoir » ne lui parait vraiment dign nom
que s'il est accompli en connaissance de cause et avec la claire notion de sa r
d'être (cf. la note précédente).]
BIBLIOI ni Ql i DES UNI VI RS1 i f 8 D1 MIDI
15
Quoi qu'on fosse, quoi qu'on dise, il faul que je sois homme
de bien; ainsi, l'or, ou l'émeraude, ou la pourpre pourrait
répéter : quoi qu'on tasse, quoi qu'on dise, il faut que je sois
émeraude el que j<' garde ma couleur.
16
Le principe dirigeant ne se l'ait pas obstacle à lui-même,
j'entends qu'il ne se crée à lui-même ni crainte ni désir1. Si
quelque autre peut l'effrayer ou l'affliger, qu'il le fasse. Par
lui même, en effet, el par son propre jugement, il ne donnera
pas ce tour '■ à ses pensées.
Que mon corps cherche a ne pas souffrir 3, s'il le peut, et
qu'il dise s'il souffre. Mais mon âme, qui est celle qui éprouve
la crainte ou le chagrin, et à qui seule il appartient d'en juger,
mon àme ne souffrira pas si elle ^ ne se pousse pas elle-même
à juger qu'elle souffre.
i. o*J ?oo£î ia-^TÔ e\; E7ri8v|iiav. Il est évident que cette proposition est incomplète
et que le texte est altéré. On a proposé plusieurs corrections, entre autres o-j Xuicel
fcttirré, justifié par poêf]<rai 5) Xu7rr,(rai, qui se trouvent à la li«,rne suivante. On voit,
d'ailleurs, qu'il y ;i opposition entre 906s! et le verbe qui suit. Je ne vois pas pour-
quoi l'on ne conserverait pas èi?t8u(iictv. La crainte et le désir sont toujours associés
dans la morale stoïcienne. Je suppose donc que plusieurs mots sont tombés, tels que
2. [Goual : " il ne B'abandonne pas à de telles impulsions. » — L'expression àyaOai
tûoicocf, à la dernière ligne du livre V, l'emploi de Tpair6(A6vcK à la pensée III, 0
(en èxeîvo ï\ SXyjç rr(; ^'j'/j,; tpaTCÔji-evoç), témoignent que xpiTziiby.'. et z^orJr^ peuvenl
exprimer L'étal d'une Ame tournée vers le bien. Cependant il est incontestable que,
dans les Pensées, les orientations ou les directions de L'Ame que désigne le mot xpoizcà
De sont en généra] pas bonnes; ce sont surtout des « déviations» de la droite Ligne,
el rpoiri), à L'usage, est presque synonyme d'àicooTpofvj. Par exemple, à la fin de
L'article III, 7, où Marc-Aurèle nous recommande de ne pas « donner à nos pensées
le tour qui n'est pas celui de La pensée d un être raisonnable et sociable », par suite,
comme j'ai cru pouvoir L'écrire, « de ne pas non- égarer en de- pensées étrang
à l'être raisonnable; - de même, à l'article VII, 58, où M. Gouat entendait par
àXXotptaç Tpoiccc; les a agitations contraires à La nature»; de même encore, au début
de la pensée \I, 19, où sont énumérées les ipowàc dont il tant se garder.
L'adverbe Û7coXr)fmxtôç, que je rencontre ici à coté de Tpéttetv, s'explique aussi
aisément qu'un peu plus haut (VII, [3) L'adverbe xaTaVqirrixûç à côté d'eùçpatvei.
Jl suffit, de pari el d'autre, de convertir la locution verbale en Locution substantive
(ici : &7toXiQirrtXT] rpoftY)).]
3. [Cf. VII, l 'j ; VIII, 28; XII, f, des expressions analogues. Toutes sont ironiques,
puisqu'il e>l entendu (supra VI, 02) que «le corps ne peut s'intéresser à rien ». On
a reconnu Le même accent de défi Ironique dans la seconde phrase du présent article.]
'»• oO yàp a:s'.:. Cette seconde personne est suspecte. Le texte des manuscrits donne
':;£'.;, qui esi évidemment altéré. On a corrigé ce mot de différentes manières. Je tra-
duis comme s'il y avait il u.r, ::apâ;E'. ÉavTÔ, déjà proposé par Coraï.
CI \ I I l.l M \l.< M M I I
Le principe dii Igeanl n i par lui m tu( un b<
pleur, -i moini qu'il ne ■'* " 01 ie p m nquill<
libre, .'• iimins <|ti il ne !• h mihlr cl m mil i lui I
17
l.,' bonheur o*€ I d'avoir un bon >u un bon principe
dirigeant ' Qua viens-tu donc faire Ici û imagination Va-tn
par lea l Meus ' comme tu ei \ enue je n ai pe >in de
Tu es venue selon ta vieille habitude. Je ne t'en veui ;
\ a t en.
18
Grains tu l«' changement? Mais rien peu! il se produire
changement? Le changement n'eal il pas ce qu'il j a de pin
oher ' ci île plus propre à la nature universelle? Toi n
peux tu prendre un bain Bans changer lee souches poui le
chauffer 3? Peux-tu te nourrir Bans changei tes aliments
Peul on Bubvenir à aucune des nécessités de la rie Bans chan
gement? Eh bien, que tu changes toi même, ne rois tu pas
que c'est la même chose et que c'est également □ ire
la nature universelle?
19
A travers la matière universelle, comme à travers un
torrent, passent tous les corps; ils ne font qu'un i avec elle
et coopèrent avec elle comme nos membres entre eux".
i. J*ai écrit en italique les mots qui traduisent \ xyot56> L'absence Parti prouve
qu'àyaOov n'est pas employé comme un substantif, et que cet adjectif se rapport-
à un nom qui a disparu. Ce ne peut être qu'vJY€|iovtx6v, [qui a par
Gataker et que M. Stich a admis dans son texte. Sur L'identité du - et du
principe directeur», cf. sapra V, 27, el la note.]
2. [Cf. tupra IV. 56.]
3. [If. Gouai ne dit pas ^*il préfère ici la Leçon des manuscrits d'extraits >1 M
Aurèle, usTxoâ/.Y;:. <>u colle de la vulgate, •j.i-xoû.'/.r. Les l -ux. l'actif et le a
peuvent, en effet, s'admettre également. Le tour même de la phrase, qui
par crîi oï a-^TÔ;. témoigne d'ailleurs que nous avons affair ici à un
personne; par suite que p&raêxXi) n'es! pas pris intransitivement x pour
sujet. C'est sans doute pour affirmer ce sens qu M. Gouat a aj on ou deux
mots qui manquent au texte grec.]
'j. [Gouat : « ils sont de même nature qu'elle. Var. : • • il- font corps avec el;
— Cette seconde version, qui esl celle du second manuscrit, me p de traduire
exactement a-^az-^. Je l'ai modifiée pour éviter la fâcheuse répétition du m >l
« corps ».]
5. Ta f/jLÉTEpa |JL£pr(. Le texte de l'article i3 du même livre: o:ov... tî |i£Xï] xxX. ,
nous autorise à lire ici usât, plutôt que <j.izrr
i \i) BIBLIOTHÈQUE DES iMViitMiis DU MIDI
Combien l<* temps n'a i il pas englouti de Chrysippes, de
Socrates, d'Epic tètes? Fais la même réflexion à propos de
tout homme et de toute chose ' .
20
I ne seule chose me tourmente, c'est la crainte de faire ce
que la constitution de l'homme ne veut pas ou d'agir aulre-
ment qu'elle ne le veut, ou de faire ce qu'elle ne veut pas en
ce moment.
21
Bientôt, tu auras tout oublié; bientôt aussi, tu seras oublié
de tout.
22
C'est le propre de l'homme d'aimer ceux qui le frappent. Tu
y arriveras en te souvenant qu'ils sont tes frères, qu'ils ont agi
par ignorance, qu'ils sont coupables sans le vouloir % que vous
mourrez bientôt les uns et les autres, et, avant tout, qu'on ne
t'a pas fait de mal, puisqu'on n'a pas rendu le principe direc-
teur de ton âme pire qu'il n'était auparavant 3.
23
Avec la substance universelle, comme avec une cire, la
nature universelle vient de fabriquer un cheval; elle l'a ensuite
défait et s'est servie de la même matière '* pour créer un arbre,
i. [Zeller (Phil. der Gr., III3, p. 1 55, en note) rapproche ce passade de l'article XI, i,
où est affirmée La « renaissance périodique» (7T£piootxr, itaXi^fCVEata) de l'univers: les
Socrales, Les Ghrysippes et les Épictètes dont nous parle ici Marc-Aurèle ne seraient
en réalité qu'un Socrate, un Ghrysippe, un Épictète, qui aurait revécu — qui peut
dire combien de fois? — la même vie au retour du même moment de chaque
«grande année » (supra V, i3, note finale). A ce compte, ce texte ne prouverait pas,
comme l'a cru Pierron, qu'Épictète fut mort à L'époque où son admirateur écrivait
les Pensées.]
■j. [Mêmes idées, II, i ; un peu partout, dans les Pensées, revient le précepte
socratique que << nul n'est méchant volontairement».]
3. [C'est à lui seul que le méchant fait tort (IV, 26; IX, 4; V, 22 : voir la note
rectifiée aux Addenda), «le même que L'homme de bien a s'oblige tout le premier»
(MI, ,3).]
l\. [Voici encore un texte qui nous démontre l'équivalence parfaite des mots oùm'a
et CXtj (" substance» et « matière») dans la langue du Portique. Ils se présentent ici
a deux liâmes d'intervalle, et pourraient permuter sans inconvénient. Pour éviter au
lecteur toute méprise sur l< sens du mot «substance», j'ai constamment traduit
oOa:a comme :Art par « matière». Cf. IV, 21, note finale; et, un peu plus haut, la
pensée VII, 10.
i i s i i DI MARi m il i i
puis un homme pui quelque auti • ehot< Chacu
• ■ires n'esl 1 1 > | »i i ii ' que poui peu de tomp il n i I
plus ex ii a< 'i dinaii e p< »ui un a -iii e d'éta détruil que d
construl I
24
l n \ [sage ii « ii" e I loul i rail contraire k la nature il en
ré iiiic Bouvenl <|in' l'éclal de la beauté diaparatl el Dnil |<.n
< iteindre ^.m^ pouvoir jami ranimai Mai < qu il foui
tâcher de comprendre, c'eal que la colère elle même eal i ontre
lii raison; car, si uoui perd on a jusqu'au senlimenl de noi
fautes, quel motif de vivre noua reate-t-il
25
La nature qui régit l'univers \ ;i bientôt changer toutes lea
choaea que tu vois; de leur matière I elle en fera d'autres
d'autres encore de la matière de celles ci, afin que le monde
soit toujours jeune.
i. [Après avoir rappelé la démonstration (cf. iqpra IV. i ',. note finale) par laquelle
Poaidonius établi I que l*« individu» ne se distingue pat de sa •
{BcL, I, 436), voulant prouver que ['«individu» eal pourtant attira chem qu
«matière», emprunte à Ifnésarque une série <!«• oomparaiaona analog
qu'apporte Marc-Aurèle en ce p;t^»;i-«-. •« Si l'on modèle un cheval, |
Mnésarque, «puis qu'on le brise soua nos yeui el < | u'< »n en tasse un chien, ne
pourrons- nous pas dire que quelque chose est qui n'était pas? En définitive, loul
change pour les stoïciens, sauf deui choses : la somme totale de matière dans le
monde, et, dans l'individu, pétulant le temps qu'il \U ou dure, le principe formel
qui le définit. ]
2. [Sur la traduction d'v,7i£<TTY;, cf. supra 1\ , i \, note i.J
3. [J'ai traduit le plus littéralement possible cette pensée, <pii manque dans le ma-
nuscrit d'Aug.Gouat. Le texte en est profondément altéré. Pour éviter des restitutions
arbitraires, je me suis borné à des corrections très -impie-, permettant de construire
la phrase la plus difficile. Au lieu de 8tow -o/.Hxi; èvaicoév^axecv r, -sô?-/r;j.x .j'ai
lu k 60=v içoXXdncic àvar.oOvr.o-y.st to Tipaa/^aa ». Ces corrections suffisent à assurer la
suite des idées. 11 me semble, en effet, que la pensée se partage en deui démonstra-
tions parallèles dont les termes importants se correspondent de l'une à l'autre : wapà
qp-jcriv et Trapà Tov ).cr;ov, — £va7ïo0vr(o-x£'. et t:; toO If,v a-.Tia;- enfin m hcâtorm
7rpo<T(i37io'j et aOT(i) to'jtco (qu'on pourrait corriger en aOrô tovi -a-dire x\n
èirtxoTov). Le nœud de la pensée est, à mon sens, dans ces mots arûtè coOtq ou i
to'jtu), qui opposeraient la colère à L'expression de la colère. Ceux qui ont traduit
a-JTà) to'jT(o 7rapaxoXo'j6sîv KV.ptô par « Tâche de comprendre par là >> ou « de conclure
de là » n'ont pas rendu compte d'a-jKo, et ont dû imaginer, devant l'expression -
xbv X6vov(£o-tO, un sujet nouveau qui permît d'entendre la dernière phrase.
Si Ton admet les explications qui précèdent, on Nerra dans cette dernière phrase
le développement non des mots KapaxoXouOstv xi'.zCo (« tâche île comprendre »), mais
bien de: Sri 7iapà tov "Àoyov (« la colère est contre la raison »), La colère nous enlève
la conscience de noire faute, comme l'expression de la colère détruit l'harmonie de-
traits.]
'a. [Couat: « substance.» — Cf. VII, 20. et la irt note.]
\\i BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS l>« MIDI
26
Lorsque quelqu'un s'es! mal conduit à ton égard, demande-
loi toul de suite quelle idée du bien ou du mal lui a inspiré
cette conduite. Cette considération t'inspirera de la pitié pour
lui; lu n'auras plus ni étonnemenl ni colère. Ou, en effet, tu
,i» encore la même idée que lui ou une idée semblable de ce
(jui est bien : tu dois donc lui pardonner. Ou, au contraire, tu
ne juges plus comme lui du bien et du mal : il ne t'en sera que
plus facile de te montrer bienveillant pour son aveuglement.
27
Ne pense point aux eboses que tu n'as pas, comme si elles
étaient plus agréables que celles que tu as l ; fais plutôt le
compte des biens les plus précieux que tu possèdes, et sou-
viens-toi avec reconnaissance de ce qu'il aurait fallu faire
pour les recbercher, si tu ne les avais pas. Prends garde en
même temps, à force d'y trouver du plaisir, de t'babituer à
les estimer au point d'être troublé si jamais ils venaient à te
manquer.
28
Concentre-toi en toi-même! La nature du principe raison-
nable qui nous dirige est de se suffire à soi-même en agissant
conformément à la justice, et d'y trouver la tranquillité \
29
Efface tes impressions, contiens l'agitation de ton âme 3.
Circonscris dans la durée le moment présent i. Connais les
événements de la vie, de la tienne comme de celle d'autrui •">.
i. |Couat : «comme si elles étaient agréables, » — et, en note : « w; :r^r{ ovxa a été
ingénieusement corrigé en r(oÉa àV:a par Schultz. » — Cette conjecture a été para-
chevée par Rendait, qui a lu rfiitè orra, et permis ainsi de comprendre (en l'imputant
à L'iotacisme) l'erreur des scribes.]
2. [Cf. passim, et notamment VI, 8, et la note.]
3. [Cf. supra VI, 28, et autres textes cités en note.]
'1. [Couat : « circonscris le temps à mesure qu'il s'avance. » — Cf. VI, 36, 1" note.]
5. [Couat : «observe ce qui arrive à toi ou à un autre. » — Fvwp^w ne signifie pas
«observer», mai* «connaître», — soit ((savoir», soit ((comprendre». Je préciserai
le sens de 70 o-j{iêalvov lorsque, à l'article VIII, 7, nous rencontrerons ce mot ou
plutôt son dérhé (<7*jaoa<7i:), dans une énumération où figurent encore, comme ici,
Il «Il l'I M \ I,' \ I 1,1 I I
I >i\ ise 6l pu lage ton) objel ' en pi incipc oITI i< ni ol
matièi <• Peu e i te dernii i e h< m e 81 l'on ■• i omml uni
Faute an vers loi, lai e celle baie ■< i m auteoi
30
Il faut suivre ce qu'on nous dil en \ appliquant I ni
notre pen ïée . il Paul que notre espi il pénèl re dan i i b
el dans leur- causes,
31
i claire toi de simplicité, de pudeur, d'indifli po u
tout ce < | ( i i esl entre la vertu el !<• vicel. Ume l<- genre
humain. Suis Diru •. Voici un poète { <|ui «lit l«.:if
réglé par des lois, n I ta dit aussi que les éléments leuli
le temps, !<• principe efflciont cl la matière La proposition t ml enl nie ni
expliquée par la dernière phrase de la pens< e IV, et la ] l\
;i Nous n retrouvons, en effet, l<- mol -•> ox i< de l'adjectil
Marc-Aurèle ;i voulu dire Ici : Fais que toui i menta <i >icnl
connut lorsqu'ils t'arriveront; — ne sois pas surpris de ce qui peu! t'aniv< r
i. [Cf, supra VI, 3 ei \. en notes. i
i. [Gouat : ci en matière et en forme >• — Cf. l\ . si, note final<
[\. [Aristote distingua très nettement la voient du voO< l'une esl !
l'autre La pensée en puissance. La théorie »!«• h» puissance - t d< l'a
stoïcienne; et Ici, <in particulier, on ne saurait voir une antithèse entre
suis La chercher aussi entre toîç Xsyopivot; el :a - or. il est évident qu
deux phrases qui constituent cette pensée se complètent et ne s'opposent p
elles échangeraient sans inconvénient Leurs premières moitiés : en effet, on
lierait pas de lire tv.; yivouivotc au lieu il : , _ : et nous ;i\<»u^ rencontré
à L'article VI, 53, Les mots: sv t>( l>j/jt toO XIyoa
Aurèle une différence de voOç à vé-qatç, cesl simplement celle que marque le se
-G'.;\ comme "oir^:; est ['action de icoteîv, véijdtç esl Vactio
du voO;. Dès lors, les substantifs employés s'expliquent aisémenl par Les verb - qui
le> précèdent; et il est, «-u effet, presque indifférent de dire : < Paire enta r s
dans... » ou « appliquer L'action de sa pensée à... >>]
V [C'est-à-dire «pour tout ce qui n'est ni la vertu ni \> t non, coma
Laisse entendre un mot que j'ai du supprimer dan- la traduction de If. I
tout ce qui esl intermédiaire entre La vertu <-t le vice. Il n'y a pas d< m g l'un
à L'autre, donc pas de milieu entre eux, bien que, pour les Stoïciens* t Marc-Aurèle
en particulier, le> choses indifférentes s'appellent aussi bien Ta •j.ïiu. que -:x >
5. [G'est-è-dire : a sois libre, o — Cf. UI, g, et VII, 67, derniers mots.]
6. [D'ailleurs inconnu : les mots cités sont une lin d'hexamètre.]
7. Voici encore un passage inintelligible. Les manuscrits donnent h
-y. ircor/eïa. Ces mots n'offrent aucun sens. La phrase qui suit im m ut
indique que deux opinions viennent d'être produites, dont une seulement doit
nue. La première de ces opinions : « -âvTa vofuert, » est empruntée par llarc-Aurèle
à un poète. La seconde se trouve donc dans les m tjiova --x Par-
tant de là, on est conduit à lire ï-i os, ou £ct oô -a:. 5ti Se, ou i. ou
k'v.o'. ôk xat. Ces mots, opposés à sxeTVoç ;jl£v qpv^artv, annoncent la seconde maxime qui va
suivre. Cette maxime se cache sous les mots Soccfiova rà rroi^àa, qui n'ont pas de
sens, et elle appartient soit au poète déjà cité, soit à un autre auteur. Que peuvent
élre. d'ailleurs, les mots représentés par caïu.ova Ta treot^eîa? Si on lit, comme nous
l'i'l BIBLIOTHÈQUE DES UNIVERSITÉS M midi
existent. Il suffît de se rappeler que loul esl réglé par des
lois '.
32
Sur la mort. S'il n'y a que <lrs atomes '. elle tl'esl qu'une
dispersion; si le monde est un lout •>, elle n'est (ju'exlinetion
ou déplacement i.
33
Sur la douleur, si elle est intolérable, elle nous emporte; si
elle dure, e'esl qu'elle est supportable; la pensée peut, d'ail-
leurs, en s'isolant5, assurer sa tranquillité, el le principe diri-
geant demeure intact. C'est aux parties maltraitées par la dou
leur de dire, si elles le peuvent (>, ce qu'elles ont à dire.
34
Sur la gloire. Vois leurs' pensées; vois ce qu'elles fuient
el ee qu'elles poursuivent. Vois aussi comment les couches
l'avons fait, ïxi os */.aî, ou k'vtoi 6é, il no reste plus que p.ôva Ta n-or/il*. Mais ces mots
peuvent être conservés et l'on arrive au sens que j'ai donné: «on dit aussi que les élé-
ments seuls existent. » Cette affirmation contredit la précédente; elle n'est donc pas du
même auteur, et c'est pour cela que j'ai écrit les mots «on dit », qui interprètent le
texte. Nous nous trouvons ainsi en présence d'une idée fréquente dans Marc- Aurèle.
Il répète plusieurs fois qu'il y a, pour expliquer le monde, deux hypothèses possibles :
Dieu, c'est-à-dire la raison universelle, ou les atomes; l'ordre ou le hasard. Dans les
deux hypothèses, le sa^c doit être tranquille; mais la plus vraisemblable des deux est
la première. Marc- Aurèle dirait donc, en somme, dans le passade qui nous occupe:
u L'un prétend que tout est réglé par des lois, l'autre qu'il n'y a que des éléments. Il
suffit, pour la conduite de la vie, de se rappeler la première de ces aflirmations.»
Ainsi le texte peut s'expliquer aisément, si, en touchant à peine au texte donné par
les manuscrits, on sous-entend ça<x\v ou çrjaiv dans la seconde proposition.
i. "il or, Xiav oklyoL. J'ai supprimé dans ma traduction ces trois mots par lesquels
se termine la pensée; je n'ai pu arriver à leur trouver aucun sens satisfaisant. — [On
pourrait les entendre, à la rigueur, en donnant à Àîav un sens qu'il a assez souvent
dans les Pensées (X, 7. dernière phrase; VU, 67, seconde phrase; VII, 2/1, première
phrase), non celui de ((trop», mais celui de ((tout à fait». ((Je pense, aurait dit
Marc- Aurèle, que ces précepte^ sont assez peu nombreux;)) en d'autres termes:
((Est-ce trop te demander?» — Avec M. Stich, je considère comme une glose cette
phrase pénible et dépourvue d'intérêt; c'est pourquoi je ne l'ai point admise dans la
traduction.]
2. |Var. : « Si nous sommes faits d'atomes...;» — plus loin : « si nous sommes un
tout. »]
3. J'ai suivi la correction nécessaire indiquée par Casaubon : et 0 Èfvoxrtç, au lieu
de r, svoxriç. Il est facile de voir, d'après la construction de la phrase, comment le
copiste a été conduit [l'iotacisme aidant] à écrire r. au lieu de si.
lx. [Cf. supra IV, 21, 1" et dernière notes.]
5. [On peut, ce me semble, admettre cette traduction de xa-r' àftoXi)4'iv. Mais
j'aimerais mieux, pour ma pari, lire y.a;' àvà/.r/V.v, qui serait beaucoup plus clair.
— Rapprocher de cette phrase le début de l'article IV, 3, et tout l'article \ II, 28.]
G. [Cf. VII, 16, 3' note.]
7. [Sur CC mot << leurs » (en grec oejraW), cf. IV, iG; IV, 38; VI, G, et les notes.]
l'I n II l.l M \lf M ht M I ', .
supérieure! d'un lui de labié accumulée ui l< inférieu
le i achenl tuccessl n emenl l >»■ m< m< dan la \i qui
élève en dei nier lieu ca< he bien vil qui l'avait pr<
35
Pensée de Platon Penses tu (|u une i a te intellig< n< e ' apa
ble d'embrasser toute la durée el toute la lub tant con idère
1,1 vie humaine comme quelque chose de grand l impos-
sible, dit il Cet homme n< P( ardera dont pai non plu I i
mort comme quelque chose d'extraordinaire? — Certe non '
36
Pensée d'Àntislhène. «C'esl le rôle d'un roi de (aire du bien
pendant qu'on dit du mal de lui
37
Il est honteux que le visage obéisse à la pens< comj
et s'arrange comme elle le veut, tandis qu'elle ne peut pal
composer el s'arranger elle même.
38
(( Il ne faut pas s'irriter contre les choses, car elles s'en sou-
cient fort peu 3, »
39
« Donne de la joie aux Dieux immortels et à nous e
40
« Il faut moissonner la vie comme les épis féconds; il faut
que les uns mûrissent et les autres non 5. »
41
a Si mes deux enfants et moi nous avons été négligés par
les Dieux, cela même a une raison 6. >
i. [République, VI, 4S6.]
2. [Épictète, IV, 6 : BaatXixov, tô KOpî, TipaTTî:/ usv ri, y.a/f.«: or/.o.
3. Euripide, Bellêrophon.
f4. Origine inconnue.
5. [Euripide, Hypsipyle.}
6. Origine inconnue.
A. COUAT-P. FOURMER. IO
l V' BlBLK m BÊQI I DES I M\ l ivM i ES D1 IlIDl
42
« Le bien et la justice sont avec moi ' . »
43
M ne faut ni se lamenter avec personne ni s'agiter.
44
Pensées de Platon. « El moi je lui répondrais justement en
ces termes : n Tu as tort, mon ami, de croire qu'un homme
o de quelque valeur doive calculer la chance qu'il a de vivre
» ou de mourir, au lieu d'examiner seulement si chacune de
» ses actions est juste ou injuste, digne d'un homme de bien
» ou d'un méchant. »
45
« Oui, Athéniens, en vérité, je suis d'avis que tout homme
doit affronter le danger au poste qu'il s'est assigné lui-même,
le jugeant le meilleur, ou que lui a assigné son chef. 11 ne doit
tenir compte ni de la mort ni de quoi que ce soit, au prix de
la honte 2. »
46
« Mais prends garde, mon ami, que le courage et la vertu
ne soient tout autre chose que de conserver la vie aux autres
et à soi-même : n'est-ii pas vrai que l'homme véritablement
digne de ce nom doit laisser de côté tout souci de la durée
de son existence, ne point s'attacher à la vie, mais s'en
remettre a Dieu de ce soin, et, se fiant à cet adage des femmes,
que personne ne peut éviter le destin, chercher, en outre, de
quelle manière il usera le mieux possible du temps qu'il doit
vivre 3?»
47-48
(( Considère les mouvements des astres comme si tu les
suivais dans leur course, et réfléchis aux changements réci-
proques des éléments. De telles idées nous purifient des
souillures de la vie terrestre. »
i. Aristophane, Acharnions, 66 1.
2. [Apologie, 28, comme la citation précédente. 1
3. [Gorgias, 5i 2.]
1-1 s I I Dl m v i.' fct'KKI.I
< ette pensée de Platon e I belle Un I quand i >n dl
m les hommei il faul con Idérei • • wihk d un lieu • l<
toutes lei ohotei < i « • la lei re ti oujh aui ai met I i
m. n lag< divoi oeSj nal in< e nu >i I i gitati< m de • i Ibunau i
contrées désortes, races voriden cl barbare fêt* lam<
ii«ms. places publiques, loul ce méli loul cel ordre fall
d'éléments contraires.
49
Remonte dans tê contemplation jusqu aux événement p
Que de changements d* hégémonies ! lu peux aussi prévoii
l'avenir. Il sera i<>ui pareil au passé. Noua ne pouvons p i ortir
i. |Yar. : n Voici une bolle ponsé< d< Platon: quand on di irl (
version est la premier* do If . Couat. Il n'avait pas penai d'au
clei '17 el ifl que les manuscrits ai, d'après eux , losdivei
de Marc- turèle s'accordonl s sépai ei
De toute façon, l'une au moins des deux pensé©* ou des d<
pensée unique doit être attribuée à Platon: la première, il 1 n rapp ri
qui procède les mots *aXb\ 11 — la * t>n 1 1 rapp •• qui
suit et si l'on considère que les mots xai 8t| appartienneni déji à la citai
annoncée;— toutes les deux, si l'on ouvre les guillemets api
duirail par: «El encore.» Dans ce cas, les mots rè roï 11
l'article 47 » les mots xa( fi^j annonceraient l'arti Mais il but reconnaître que
xot or( -ni H surtoul xa\ or, /.a', to introduiraionl beaucoup mieux qu une
citation nouvelle \ aussi aucun éditeur ni traducteur ne s'est-ii la trois
hypothèse.
si donc il faul choisir entre Les deux pensées '17 el \S celle qui peul
Platon, — ni l'une ni L'autre n'appartenant aux œuvres conservées du philosophe, —
voici trois motifs de se décider pour La première: i* Elle achèverai I naturellement,
au Lieu de L'interrompre, La série des citations de Platon qui commence i l
— 2* Y.Mo semble justifier L'étude de L'astronomie; or les
Marc-Aurèle (voir, un peu plus bas, La ."»* note à La peni tandis q
n'ontrait chea Platon s'il n'était géomètre », — 3* Les deux articles que distinguent
dans les textes les numéro- '17 et (8 onl exactement le même objet : il y a donc ici
soit une citation suivie d'un commentaire, soii une pensée de notre auteur justifiée
par une citation qui la suit. La copule xoA or, relie naturellement
d'un même tout: mais, dans la seconde hypothèse, ne devrait-elle pas être p
avant xa/.ov ro toC nXdrcwvoç? — Je pourrais, enfin, tirer argument du »tyl<
articles, au moins de celui du second, où l'accumulation de treize substantifs
mérés sans l'aide d'une particule intermédiaire, et l'antithèse finale de -
a ovrxoo*(iovu.evov décèlent la manière de Marc-Aurèle; pour l'article 17, si
tov p-jzov toO y.a'J-^ù [Mou e^t platonicienne, les verbes à deux préiiv - -
et àTroy.aOat'pov?'. et le tour même des phrases intinitives me laisseraient incertain.
En ce qui concerne tout le passage, je crois donc très solides Les d n nclu-
sions de M. Couat, qui contredit ici tous les autres traducteur- français. Ei
déjà indiquées par la ponctuation du texte de M. ^tich. qui n'est pourtant pa? allé
jusqu'à réunir en une seule les deux pen-
2. à'vwOsv ax-x àyÉ/.x; : '/.an, corrigé en xaTio par Casaubou. parait, en effet, fautif.
Yn lien semble nécessaire entre BKtraoïcsfr xvmOïv el Tenu m* ration qui commence
par àyéXa;. Il est donc possible que le texte soit aïtéré, mais le sens n'est pas douteux.
Pour ma part, je lirais volontiers xàvroc, au lieu de xx:a ou de xerct», et je ponc-
tuerais ainsi : sr.'.Txo-sîv osT xot rà î-;r;z:yL. (oir.iz icoQèv xvtftOcv, jcohrcot' ivéXaç xt/..]
i Vs BIBLIOl m Q\ i DES I [fil BB81 I ftfi 1-1 MIDI
du rythme des choses qui se passent présentement. Observer
quarante ans de la Nie humaine1 est donc la même chose
que d'en observer dix mille. En effet, que verras- tu de plus!»
50
\utrr pensée :
«Ce qui esl issu de la terre rentre dans la terre; ce qui est
né (l<v réther retourne à l'espace céleste9. »
Sinon \ ce sont des combinaison- d'atomes qui se désagrè-
gent; de même ensuite se dispersent ces éléments insensibles.
51
Encore :
« Par des mets, des boissons et des sortilèges, ils essaient de
détourner la inarche de la destinée, et d'éviter la mort. Il faut
supporter le vent qui souille, envoyé par les Dieux, et souffrir
des maux lamentables 4. »
i. [Cf. M. i : « lu homme de quarante ans... a vu tout ce qui fut et tout ce qui
sera. »]
2. Euripide, Chrysippc.
3. [Couat : « En d'autres termes, les atomes entrelacés se désagrègent, et de même
les éléments insensibles se dispersent, » et, en note :
« r, roÛTO... xa\ toioOto:. Gataker a cru que r, el xat étaient corrélatifs et qu'il
fallait répéter r, au lieu de y.au Mais il n'y a point, à mon avis, d'opposition entre
les deux membres de phrase. Marc-Aurèle n'oppose pas, comme il Ta fait ailleurs,
les atomes et l'unité de l'univers; il interprète seulement la pensée d'Euripide qu'il
vient de citer, et la traduit dans le langage philosophique. Le premier r, signifie :
((Ou si l'on veut s'exprimer autrement,» ce que j'ai traduit par la locution française :
((en d'autres termes ; >> le xat qui précède toioGtoc marque simplement la continua-
tion de la même idée. »
On peut garder de cette note toute la critiquede la conjecture de Gataker; il est
certain, eu effet, que les ((éléments insensibles» dont parle Marc-Aurèle sont les
atomes eux-mêmes, dont la dispersion suit naturellement la dissolution de tous
Les corps qu'ils avaient formés. Encore faudrait-il expliquer les deux mots toioOto:
tic, après la conjonction xoci. Marc-Aurèle veut-il dire que la «dispersion» est comme
la " dissolution >>, également fatale ou aveugle? C'est ce que j'ai cru pouvoir
comprendre. — Manque-t-il dans nos manuscrits, à côté de 8taXuoic, une épithète
signifiant « fatale » ou « aveugle», qui rendait clair toioOto: tic? — Ou bien, toioOtû;
tiç est-il substitué ici à 71016; rtç? — Ou bien est-ce une glose?
Quoi qu'il en soit, toute la partie de la pensée qui suit la citation d'Euripide nous
place incontestablement dans l'hypothèse atomiste. Dès lors est- il possible de voir
en elle la suite et le développement naturel de la citation? Les vers d'Euripide
demandent à être rapprochés de telle pensée (supra IV, &, 2e note) où Marc-Aurèle.
cette fois un peu trop absolu et téméraire, affirme expressément que chaque élément
retourne d'où il vient, — et aussi de celle (infra X, 7, depuis les mots : \ rpotrrj, tov iisv
aTÊpejiviVj biç tô v£o)6e; jusqu'à la fini où il se corrige et déclare avec plus de pré-
cision que chaque élément s'en va vers son semblable. Ce sont déjà des vers stoïciens.
La présente pensée est donc un dilemme, le même que nous avons rencontré un
peu plus haut (VII, 3s) et que nous retrouverons à l'article X, 7. Le mot r, en sépare
les deux alternatives.]
1. Euripide, Suppliantes, un. [Var : a et souffrir sans se lamenter.»]
PI s ! I l.l I M | M hl I I
52
Qu6 l'on loil ' plui habile luttoui que loi m il non pi
dévoué au bien commun, ni plu - mod< le ni plu inti
en face <i<,s événements, ni plus Indulgent poui I
du prochain
53
Quand on p6ul accomplir un acte conforme & la rai >m
inuiic ;iu\ Dieux e( aux hommes, on n'a rien • i raindi
on ne <!<>ii appréhender aucun domni qu'on |
trouver profil ;» t i i i i - < - 1 i son énergie daiu la bonne voie, i elle
que marque 5 la constitution.
54
Partout el toujours il dépend de t<>i de te contenter pieu
meut des conjonctures présentes, <!•' traiter avec justice les
hommes avec lesquels tu es présentement <in rapport, de
mettre tout ton art à éclaircir l'idée présente en ce moment
à ton esprit, afin qu'il ne s'y glisse rien dont tu ne sois
parfaitement sûr 6,
55
Ne regarde pas autour de toi dans le principe directeur
(T autrui 7; mais regarde en face de toi où te conduit la nature,
la nature universelle par ce qui t'arrive, ta nature propre par
i. [Var. : «on peut être plus habile...» — Cette traduction semble justifiée par
l'emploi constanl dans le texte grec de la négation oy ; mais la \ - qsî entendue,
manque de modestie. Rapprocher L'article \ . 5. Je crois qu'il faut sous-entendr
au début de la pensée, qui est à peine rédigée, un ou deux mots qui signifieraient:
« Puisse-ton dire de toi : Un tel est plus habile, etc...»]
2. J'ai adopté la leçon xaâéaXtxcîrcepoç, admise par les éditeurs, et la seule intelli-
gible.
3. Peut-être, au lieu de euTOXTOT&po;, faut-il lire QtTatpotXTOTSpo;; le manuscrit A
ilonne àtaxioTEpo:.
6. [Couat : « dès qu'il est possible d'atteindre un but utile en dirigeant... — là -
Stoïciens ne considèrent comme « profil o (ûçéXeia) que le profit moral, et ils disenl
(cf. XI, 4) qu'on s'oblige soi-même en obligeant les autres. Cf. infra VII. - i, efl la
note; IX, 12. en note.]
5. [Couat: «dans le sens que marque...»— De cette façon, sûoâo&ryy; n'est pas
traduit.]
6. [Couat: «d'inintelligible.» — La cpavTa^a xdrraXvpcrtx^ — dont nous avons donné
la définition un peu plus haut (VII, i3, avant-dernière note) — est pour les Stoïciens
le critérium de la vérité.]
7. [Couat : c< comment se conduisent les autres. 0 — Cf. supra VI.
t .">(> BIBLIOTIIKQ1 i DES I m\ i RS1 i ES D\ midi
ce que tu as à faire1. Chacun doit agir suivant sa constitution ' ;
or tout le reste a été fail pour les êtres raisonnables, puisque
l>;irt<>iii l'inférieur a été fait pour le supérieur; quant aux rires
raisonnables, il> onl été laits les uns pour les autres. Ce qui
c>i supérieur dans la constitution de l'homme, c'est donc le
Bentimenl de la solidarité. En second lieu, vient la résistance
aux ébranlements que subit le ;^ corps, car c'est le propre de la
raison et de la pensée, dans leurs mouvements, de s'enfermer
dans leur domaine et de ne se laisser vaincre ni par les mou-
vements de la sensation ni par ceux des tendances, qui tous
les deux appartiennent à la vie animale. Le mouvement de la
pensée veut la prééminence; il ne consent pas à obéir. Cela
est juste, puisque la pensée est faite pour se servir des autres
forces. En troisième lieu, il est dans la constitution de l'être
raisonnable 'i de réfléchir et de ne pas se laisser tromper. Que
le principe dirigeant s'attache à ces règles et poursuive tout
droit sa route; il aura ainsi ce qui est à lui «">.
56
Il faut, comme si l'on était mort, ou comme si Ton n'avait
du vivre que jusqu'au moment présent, vivre toujours le reste
de notre existence comme par surcroît et conformément à
la nature.
57
Aime uniquement ce qui t'arrive, la destinée qui a été faite
pour toi! Que peut-il y avoir de mieux réglé 6?
58
A propos de chaque événement de ta vie, aie devant les yeux
ceux à qui pareille chose est arrivée, et qui en ont été affligés,
i. [Ces deux natures sont, d'ailleurs, d'accord entre elles. Cf. supra, p. 8o, note
finale.]
2. [Nous voyons une fois de plus ici combien sont parentes, pour Marc-Atirèle.
les notions de « constitution » et de « nature ». Ce qui suit va nous montrer L'idée <!<•
finalité inséparable de celle de la «constitution ». Cf. supra VI, kf4, note finale.]
[Couat: «aux penchants du corps. »— Cf. supra III, 6, 4e note; V, a6, i1 et
6* notes, etc.]
'». [Couat : u la nature de la raison est de... »]
5. [Var. : « tout ce qu'il lui faut. »]
6. | Var. : « Quoi de plus en harmonie avec les choses? >>]
Il > Il I I I
rarprl <•' -•■ onl plaint Où ont-il maintenait! m
paru. Pourquoi donc reui tu lai imitai Pourquoi lai toi
tatiom i onti •>" e i la natui i u i qui le provoq i
les subissent, ne t'applique! tu pa de toute ta for© • tirei
parti des événements ' ' n- te lei ont util i n efli I en d
n.ini 1,1 matière de i<>m eflbrl ' Meti seulement ton ittentioo ei
ta volonté à conserver dans toutes te a< tiom ta tx auté moi
et souviens t<»i ; [en outre < j m«- l'objet innnc de I «»« t m >n • f
Indifférent.
59
Regarde au dedans de t<>i même! Ces! au dedans qu i it la
source du bien; elle peut [toiyours] en jaillir, pourvu que ta
fouilles toujours,
60
11 faut que le corps lui même ait nne attitude ferme et ne
s'abandonne ni dans ses mouvements ni dans son maintien.
La pensée se manifesie sur le \ isage el j fait régner l'expression
de l'intelligence et de la modestie; il faut aussi demander au
corps tout entier quelque chose d'analogue. Mais <ju<' ce soit
toujours sans affectation.
61
L'art de vivre ressemble à celui de la lutte plus <ju à celui de
la danse; il faut y être prêt aux coups imprévus el les attendre
debout, sans tomber.
62
Examine sans cesse ce que valent ceux dont tu voudrais
invoquer le témoignage, et ce qu'est leur principe dirigeant.
i. ((louât : « à en l'aire ton profit, b — aOtoî; ne peut représenter i< i que le neutre
Ta a-jTa de la première phrase. — Théorie de L'ûice£<xi'p60i< : sapra IV, i. den
lignes et note finale.]
a. tf*tj (jo-j Ï9XOLU Gataker a corrigé avec raison <to*j et substitue trot.
3. aitxv.'.To àusorspcov 8ti -/.ai Sidtçopov. Le mot Stâçopov est évidemment ah
et il faut lire, avec Gataker, iôiâçopov. Marc-Aurèle veut dire que toute action est pc<r
elle-même indifférente e! peut être une occasion de vertu.
Le mot àa^oTÉptov, dans cette même phrase, ne se comprend pas seul. Gataker a
proposé in àiAçoTiotov, qui ne me parait guère meilleur. Les deux alternatives indi-
quées par ce mot ne sont pas suggérées par ce qui précède. Il esl probable qu'il \ ■
une lacuneaprès frn et qu'il faut traduire : souviens-toi de deux chose? et que. etc.
Le premier membre de la proposition a été omis.
[Les mots qui manquent ne seraient -ils pas simplement ixstveu -t. rappelant
ce qui précède? Je lirais volontiers : xaù uéuvr.cro àusotipcov. exet'veu t£ xaù ot: àv.â-
çocov xtX.
[5a BIBLIOTHÈQUE DES DNIVERSITÉfl Dl MIDI
Tu ne blâmeras plus les erreurs involontaires1 et tu n'auras
plus besoin de leur témoignage, quand tu auras été jusqu'à la
source <ie leurs opinions et de leurs tendances
63
C'est malgré elle, dit le philosophe3, qu'une Ame, quelle
qu'elle soit, est privée de la vérité. 11 en est donc de même de
la justice, de la tempérance, de la bienveillance et de toute
vertu semblable. Il est tout à fait nécessaire de ne jamais l'ou-
blier : tu seras alors plus doux pour tout le monde.
64
A propos de toute douleur, rappelle -toi qu'elle n'a rien de
honteux, et qu'elle n'altère pas ton intelligence, à qui tu obéis.
Elle ne lui porte, en effet, aucune atteinte en tant que raison-
nables et sociable. Dans la plupart de tes douleurs, appelle
aussi à ton aide cette maxime d'Épicure, qu'aucune souffrance
n'est ni insupportable ni éternelle, pour peu que Ton réflé-
chisse à ses limites, et qu'on n'y ajoute pas par l'opinion qu'on
s'en fait'». Souviens-toi encore que beaucoup de nos sensa-
tions, de même nature que la douleur, nous tourmentent sans
qu'on s'en aperçoive, par exemple l'envie de dormir, l'extrême
chaleur, le manque d'appétit. Lorsque tu es gêné par quel-
qu'une de ces incommodités, dis-toi donc à toi-même : je
m'abandonne à la douleur.
i. [Involontaires, parce que « nul n'est méchant volontairement». Cf. supra, p. 48,
note 2 ; cf. surtout la pensée suivante.]
2. [Platon, dans Kpictète, Dissert., II, 22.]
3. OXiXT) a été remplacé par XoftXT). Cette correction, proposée par Casaubon, est
certaine : Xoytxr! est ici, comme en bien d'autres cas, rapproché de xotvwvtxvj.
[Malgré le matérialisme absolu des Stoïciens, OXtxr,, qualifiant la raison, ne me
-omble, en effet, pas défendable, surtout chez Marc-Aurèle (cf. IV, 4, et XI, 20, notes
iiiiiilcs). TXij lui-même ne s'emploie, au moins chez lui, que par opposition à a '.n'a
ou à l'idée d'oùrc'a; quand un Stoïcien veut parler de la « matière » du « principe
efficient», c'est o'jcjîa qu'il écrit; ainsi Chrysippe, définissant la « raison séminale »
TrvsOixa v.ol-' oOacav (supra IV, i/», dernière note). Nous avons dit et répété qu'CiXY) et
o-Itîx — «matière» et « substance » — étaient synonymes dans l'école; peut-être
conviendrait-il maintenant d'observer qu'il y avait pourtant des cas où l'on admettait
ove-a, et où OXij no pouvait passer.]
U. [Couat : <( par l'imagination. >> — Cf. les derniers mots de la pensée V. 2O.J
Il fftj I l.l M \lr | I I
u
Prendi garda d avoir pour lai homme Indl I
nom les srniiiN.nis (juc h hommei «"ii poui l<
hommei » ' .
66
D'où s.i\oiis nom que i él iu m ralûl pai moi alemenl
mieux que Soorate? il ne suffi! pas, en effet, que S<x rafc
eu une morl plue glorieuse, qu'il lui plus habile •■ discutai
avec les sophistes, plus courageux •< supporter le froid pendant
la nuit, qu'invite h conduire en prison le Salaminien l, il
généreusement refusé d'obéir, ni enfin qu'il marchai la létc
haute dans 1rs rues ■"». C'esl à cela surtoul <j «i*- l'on peu! Wre
i. [C'esfl à -dire: a Prendi garda de traiter oeui que tu /<< ,
d'hommei oomme des hommei qui ne t'enjugenl pat indignât traitent d*autrei hommes
qu'ilt n'en jugent pat indignée, o Ou encore : ■• L'homme ne traite pai l'homme comme
ion lemblabie; kàohe de voir ton semblable même en oelul qui >(' "" [ ,l"'
L'humanité.» La pensée VII, 70, aide i comprendre celle-ci \ le ril
dû non leulemenl traduire, mail Interpréter !<• texte, qui eûl été beaucoup plu-
clair si, m lieu de toùc KvOpc&icouç, xoo; Kicav6fR&icou( et si StvQpwicc Mari iurèl<
avail écrit roù; Xrrouivouc y.nwf)p<ÔTzo'j; ou xv6p<*Kou; el -, \\*\-
cei participes Xeyofxévo-j; et Xsyôtxsvoi ne peuvent ils p;i^ être suppléé* par le ton 'l'»Mt
on prononce, ou par les guillemets dont on entoure, ou par l'écriture dont
les noms devant lesquels on les supprime? N'oublions pas. enfin, que M
se parlant à lui-même, ne rédige pas toujours 08 qu'il écrit.
Il ne semble donc pas qu'il y ait lieu ici de modifier le fcext GataJber, au lieu
d'ol àV)p<o7ro'., avait lu ol à7iàvOpa)7rot (traduction : o oe traite pas les inhumain!
comme ceux-ci traitent les hommes»), oe qui donne, il tant l'avouer, une p
parfaitement claire. M. Polak (Hernies, \\I, p. 33i » regrette que M. Stich ait négligé
cette conjecture «élégante», M. Stich, p Mit-ètre trop docile, l'a introduite dans le
texte de sa seconde édition. — C'est celui de la première qui esl traduit ct-desfUS.
J'ai ajoute les guillemets qui manquaient à la version de M. Couat]
2. [Philosophe peu connu, dont Eschine le Socratique avait donné le nom a ni
ses dialogues.]
3. [J'ajoute cet adverbe pour traduire Trtv ôixOstiv. Littéralement: « par la dispo-
sition,» c'est-à-dire u par la disposition morale», ou {supra, p. 92, note 1) par la
vertu». La façon même dont nous entendons (voir trois notes plus bas) la p'
la moins certaine de la présente pensée implique la nécessité de ce mot.]
'j. [L'histoire de Léon de Salamine, que les Trente voulaient faire arrêter par
Socrate, est racontée dans V Apologie.]
5. [Marc-Aurèle reprend ici l'expression même d'Aristophane. > Nous t'aimons,
disent les Nuées à Socrate, parce que tu vas dans 1<>< rue> la tète haute, le regard
assuré, les pieds nus... »
6x1 pp£v60st t' sv TaÏTiv oool; xaà 7*036 a). ll<o icapaâaXXeic
xàvj7iôôr(To; xxX. Nuées, 3Ù2.)
Il est possible que ce maintien en ait imposé à \? foule; que ce qui, pour Aristo-
phane, était motif de raillerie, ait été, pour d'autres, motif de respectueux étonnement:
que, d'ailleurs, Socrate n'ait point affecté cette allure. Au fond (voir la note suivante).
il n'en valait ni plus ni moins]
i.Vi B1B1 i"l 1 1 1 < > I l Dl B UNIVERSITÉfl l>l M 11*1
attention, $i encore cela est rrui ' . Mais ce qu'il faudrait 6X8
miner, c'est quelle Ame a\ait Socrate, s'il savait se contenter
d'être juste avec les hommes, pieux à l'égard des Dieux, sans
s'indigner contre la méchanceté des uns, sans s'asservir à
l'ignorance de personne; s'il n'accueillait point comme n'étant
pas lails pour lui les événements (pie lui réservait l'univers,
ou s'il ne les subissait pas comme un fardeau intolérable; si
son esprit ne sympathisai! pas avec les ébranlements de sa
chair | passive] '.
i. [Couat : « C'est à tous ces points que l'on s'arrête le plus volontiers pour en
contrôler l'exactitude, » et, en oot
« 7isv. ou itat |idXioV ocv ti; i«(9T^veccv, eârtp oàr.Ok; r(v- Ménage a proposé, à tort
selon moi, imor^eciev. 11 ra]>porte ntpi ou au dernier membre de phrase seul, où
il 68 1 fait allusion à la démarche de Socrate dans les rues. Traduction : « on peut
<■ douter de la vérité île ce fait. » Mais, à mon avis, 7rep\ ou se rapporte à tout ce qui
précède, à l'ensemble des faits énumérés dans la phrase. Marc-Aurèle ajoute que tous
ces laits sont ce dont on t'occupe le plus volontiers à propos de Socrate, tandis qu'il
faudrait surtout connaître Le fond de son àme.
«Cette phrase, ajoute M. Couat, a été mal comprise parce qu'on a voulu y voir
un éloge de Socrate qui n'y était pas. Marc-Aurèle veut montrer, par l'exemple du
plus réputé des sages, que la valeur morale consiste non dans l'acte, mais dans
l'intention et dans l'effort. Or, cette intention, cet effort ne sont pour ainsi dire
connus que de leur auteur. On peut constater les effets de la vertu de Socrate, mais
non cette vertu elle-même. L'allusion à la manière dont Socrate portait haut la tète
surprend tout d'abord à la fin de la phrase. Marc-Aurèle a terminé par ce détail
anecdotique pour mieux faire voir combien le jugement des hommes s'attache à de
petites choses. >>
On peut admettre, au début de cette phrase, les mots 7rep\ ou et les comprendre
comme M. Couat, encore que le pluriel icepi wv eût été moins équivoque. Mais, dans
la dernière proposition, tout étonne : le temps employé (l'imparfait Jjv), et même
l'emploi d'un verbe; puis le doute même que semblerait concevoir Marc-Aurèle sur
le courage de Socrate devant la mort, sur son habileté dans la discussion, sur son
rôle dans l'affaire de Léon de Salamine. Cette fin de phrase ne se comprend que si
on ne l'applique qu'à ce qui est rapporté du maintien et de l'allure de Socrate; mais
alors 7rep\ ou n'a plus le sens que lui donne M. Couat; il n'en a plus aucun, car c'est
la phrase entière qui ne s'explique plus. Cette contradiction de ses deux parties
dénote une glose: elle condamne sinon la ligne tout entière, que M. Stich admet
difficilement, du moins les trois mots : gfasp à>r,0à: r,v. L'addition de ceux-ci s'expli
quera aisément par une méprise d'un lecteur ou d'un scribe sur le sens d'èêpevôûsTo
et la portée de icepfc ou; dans une certaine mesure, elle garantit ce singulier.
J'ai exprimé ci-dessus mon doute en écrivant en italiques la traduction d'efteep
2. [Couat : (( avec les impressions de sa chair. » — Cf. supra III, G, k* note. — Sur
les deux sens possibles des mots «sympathie» et «sympathiser)» chez Marc-Aurèle.
cf. supra V, 26, 4e et 6e notes. Les Stoïciens n'ont pas toujours du faire ce distinguo:
ceux -là seuls s'y sont contraints qui, sacrifiant la vérité psychologique à l'idéal
moral, ont admis comme un dogme que « les choses extérieures ne touchaient point
L'âme». Nous avons vu que, pour Marc-Aurèle lui-même (V, 19: note rectifiée aux
Addenda; VI, 11, et la note), ce dogme n'était ni absolu ni intangible. Au temps de
Cléanthe, il n'existait pas encore, comme en témoigne une phrase de ce philosophe
rapportée par saint Grégoire de Nysse, qui contredit formellement le jir,... è|Airapé*/ci>v
oru|iiia8fj de Marc-Aurèle : Supucàv^ci yàp f, ^u*/r, t«> arojjiaT: voaoOvrc xaà TpîULoaéva),
PP.PI II 1)1 M M.- M CM I
fi 7
I ,i n.iiiii .• M.- i .i |>.i tellement m' l< d< >nl tu loi
partie, une tu ne i"" 6 t6 i enfei mei en loi même i !
maître <'<• ce qui est à toi. Il ést'trè po Ible <i I mbi imme
divin lana être connu d€ personne, Souvien toi mn de
cela; rappelle toi aussi qu il foui bien peu «i»* 1 i<" e poui
vivre ' heureux, si i«i dése [>''<• < i « icellei dans la dialecl
ou dans I.» physique ;. dc renonce pat poui cela
modeste, animé du sentiment <!<• la solidarité el o
Dieux ».
68
Tu peux vivre à l'abri <!<• toute violence, dans le plu- pai
contentement de rftme, quand même tous les hommes cric
raient contre i<>i ^ l'envi, quand même les bêtes sauvai
déchireraient tes membres, matière mêlée qui s'épaissit autour
de loi \ QuVst ce qui empêche la pensée, parmi < idents,
de garder sa sérénité, par le jugement véridique qu'elle porte
sur ee qui L'entoure, et par l'usage qu'elle est prête à faire <!»•
tout ce qui survient? Le jugement (1 dirait ainsi ;• l'objet qui
s'ollïe à lui : «Voici tout ee que tu es dans ton fond matériel 7,
bien que, d'après l'opinion, tu semblés être autre chose. Et l<-
pouvoir d'en faire u$a<>e lui dirait : « Je te cherchais; tout ce
qui s'offre à moi m'est une matière 8 à exercer la vertu d'un
i. o>/ o-jto); (Tv/r/.spaiE. Vvec (iatak<r, j'ai ajouté <;i.
a. [En grec. ^-.â >?*-.. plus précis (supra VI, i5, qoIc .<> que
d'ailleurs, employé dans le même sens au début de la pense»- -mvante.]
Mari Wirèle nous a déjà fait le même aveu aux dernières lignes du li\r- I
Là, il rend grâces aux dieux de ne s'être pas ((appesanti... à décomposer des s\ll.>-
gismes, à étudier les phénomènes célestes ». — Vu livre II. il -e donne plusieurs rois
le conseil de « laisser là les livres >>.]
'j. [C'est précisément celte obéissance qui définit la («liberté i (cf. III. g ; VII, 3i :
XI, 20, note finale, etc.).]
5. [Couat : « les membres de ce composé de matières qui L'enveloppe. »]
6. [Couat (rr manuscrit) : «Entant que juge, elle peut dire... PI En
tant qu'apte à utiliser les choses...)) — Le texte grec est autrement hardi que
traduction. Il donne la parole — comme j'ai du essayer de le faire en français — non
seulement à l'âme, mais aux pouvoirs de l'âme.
Variante (2* manuscrit): ((Elle peut dire à l'accident comment elle le juge
Plus bas : « Elle peut lui dire aussi comment elle utilise ce qui se présente à elle... >•
— Kpfow et */pfÉ(T'.v ont été pris cette t'ois pour les régimes el non pour les sujets du
verbe Xsysiv. Du coup, le texte grec perd la hardiesse dont nous le parions: je n'ai
pas trouvé que cette seconde interprétation en fût plus naturelle.]
7. [Cf. supra III, 11, s" note.]
8. [Cf. la fin de la pensée IV, 1.]
l5fi BIBLIOTHÈQ1 I. DES I M\ BE81 i flfl Dl MIDI
être raisonnable el citoyen du monde, l'art propre à l'homme
ou à Dieu. Tout événement m'unit plus intimement à Dieu
ou à l'homme1, aucun n'est pour moi ni nouveau ni intrai
table; tous, au contraire, me sont connus ' et d'un maniement
Facile. »
69
\i\re chaque jour comme s'il était le dernier, sans agita-
tion, sans torpeur, sans dissimulation, voilà en quoi consiste
la perfection morale.
70
Les Dieux, qui sont immortels, ne s'indignent pas à l'idée
d'avoir à supporter pendant [tous les instants d'June telle
durée tant d'êtres méprisables [et à quel degré!]; que dis-je?
ils leur donnent tous leurs soins. Et toi, tu t'y refuses, toi
qui es sur le point de disparaître, toi qui es un de ces êtres
méprisables.
71
Combien il est ridicule de ne point chercher à éviter sa
propre méchanceté, ce qui est possible, et de vouloir éviter
celle des autres, ce qui ne Test pas!
72
La puissance de raison et de solidarité qui est en nous consi-
dère justement comme indigne d'elle tout ce qui n'est ni intel-
ligent ni conforme au bien universel.
73
Quand tu as fait le bien et qu'un autre en a profité, pourquoi
rechercher, en outre, comme un insensé, une troisième satis
faction, celle de paraître avoir fait le bien, ou d'être payé de
retour?
74
Personne ne se lasse de ce qui lui est utile. Or, agir
conformément à la nature nous est utile. Ne te lasse
i. [Var. : u me rend plus dieu <>u plus homme. »]
2. [Cf. supra 1\ . 33, et IV, &&, dernières lignes; VII, 29. 3* note.]
|'| NI I - 10 M \ Kl M I I M
donc pa.S <|(! I rlir Utile .1 loi IIP ! .1 llUI< II»
autres ' .
75
i,., nature uni \ ei selle '< tmisi • * t • » 1 • - \ium<\<- h m
nant, ou bien loul oe <im ' i" odoi! e I la lointaine
quence de son acte initial, ou bien il a') b pa de rai on dan
les êtres, même supérieure, que le principe dirigeant du monde
. m. i i créer individuellement Rappelle I ilte vérité elle
te rendra plus patient à l'égard de bien des cho
LIVRE Mil
Voici qui doit encore te conduire au mépris de la raine
gloire. Tu ne peux plus faire que lu aies vécu toute la \i*
philosophe, du moins depuis la jeunesse. Beaucoup d'autres
i. [Cette pensée doit être rapprochée du texte suivant, que nous aurons, d ail!
l'occasion ( IX, i i,en note) d'expliquer lui-même : I ■ i v| riteiena, dit SI ; ,11.
188)1 pensenl que quiconque oblige autrui -<>liiiu'- autant pat oeil même, al que
seuls les gêna de l >i« n peuvenl être utiles <>u être aidés : cai ôtn itil< : lenii
dana la vertu; être aidé, c'esl être mû par la vertu. >>
llavTa roN ôvttvoOv ùaeXoOvrot '.T', tow oticoXau>6avctt vouiÇovoi
[xr(o:va ùi savi/.ov |xr(r£ ùçeXstoDai \ir~i uçsXetV atvai ràp -, /y.> Jtfltl
•ni t'o waeXeta&at xtvste6at /.ai' àp£Tr,v.l
2. [Cette pensée, donl le texte, d'ailleurs, est i»i«'ii établi, n'eal pas, comme on
pourrait le croire, en contradiction avec la plupart de celles où Marc- kurele explique
l'origine el l'histoire du monde, mais en progrès -ur ell< a. v.i do ttrioe -ur la o
gonie el la Pro> idence a évolué. Trois aériea de textea en marquent les clivera mon*
D'abord, si Ton nul à part la conception atomiate, à laquelle il ne s'est jamais an
longtemps, il semble admettre également d< ux hypothi ses (VI, 44; IX, a8; \ 1 1. i .
bien le monde a été créé une fois pour toutes (les mot- Sua* el kccvtmc, qui m
pas exprimés ici, se trouvent respectivement dans les pensées \ I. 14, et l\. x
les êtres sont créés indh iduellement, successivement el comme au jour le jour. 1
de ces créations successives est rendue par les mot> èç* ax«<rcov ieuâ à la peoaée 1\.
j8; ici, par les mots presque identiques sç,' 5 KOiatTOU !o:av 6p(lT)V. Dan- le pr-
cas, tout ce qui existe actuellement résulte de l'évolution logique de la prei
forme du monde, et était déjà impliqué en elle; tout a dû être réglé d'avau
ce que Marc-Àurèle exprime en quatre passages (VI, 36 et \\\ I\. ?s. et ici) par les
mots xa:' S7iaxoÀo\>0r,<rtv.
11 y a des moments où l'auteur des Pensées est si indifférent entre ces deux b
thèses que non seulement il nous les présente en même temps, mais les O]
toutes deux. — comme également plausibles — à une troisième qu'il réfute au —
il serait absurde de supposer, dit-il, qu'il > a des Dieux et qu'ils ne a'occupetil p
monde (VI, 44); autant vaut (IX, 28) admettre, au lieu «le la Providence, le hasard
et les atomes.— Or, ici, Marc-Aurèle fait une simplification nouvelle. Il choisit entre
les deux hypothèses qui lui restaient ouvertes; et c'est la seconde qu'il sacrifie.
A l'article X, 5, il ne nous proposera plus qu'une seule explication du monde: ce
sera le dernier mot de sa doctrine.
Il parait pourtant possible de sauver l'hypothèse d'une divinité s'interessanl
r.î8 BIBLIOTHEQUI i>f « UNIVERSITÉS m midi
hommes (ml vu ci lu as vu toi même combien lu (Hais loin <]<>
la philosophie. Te voilà confondu1. Il lest difficile maintenant
d'acquérir la réputation d'un philosophe; les faits mêmes b'j
opposent3, si lu as bien reconnu ce qui est essentiel, laisse là
toul .souci de paraître : qu'il le sullisc do \ i\ \c le reste de ta vie
connue le \eul la nature •">. Réfléchis à ee qu'elle veut, et ne le
directement i nous; même de la concilier avec la doctrine d'un monde déterminé,
ou notre place el notre rôle Boni fixés d'avance. Il est sûr que jamais la divinité ne
saurait intervenir dans les affaires du monde pour en trani les lois el boule-
verser l'ordre établi (c'est ce que signifient i< i les mois àyôy.TTa xoù -.x /•vv.oi:a:a);
on peut même aire que Dieu ne s'intéresse ;i noui que parce qu'il s'occupe de
l'univers dont nous faisons partie. Et néanmoins, en -<• réservant <!<• redresser notre
action ou ses >uite< cl do nous faire coopérer, bon gré ma] gré (VI, '12), à s<m œuvre,
il a pu nous laisser ($upra II. 11. noie ■>) la liberté de lui désobéir, c'est-à-dire de
nous enchaîner (VII, 67, note finale), \insi. d'une part, nos écarts n'importent g
a -ii Providence, qui les avait prévus, comme tout le reste : et c'est en ce sens qu'un
Stoïcien peut dire dans Cicéron : magna DU curant, parva negligant (\at. Deor., II, GO,
167); — d'autre part, Dieu peut nous donner ou nous rendre, et jamais il ne nous
refusera, si nous \oulons seulement le lui demander, le seul bien qui soit pour
l'homme, une ame libre : et c'est cette idée qui justifie les actes de la piété humaine,
les actions de grâces et même les prières, — du moins les prières « simples et libres»,
comme celle des Athéniens (supra V, 7 : voir la note rectifiée aux Addenda), — mieux
encore, comme celle de Marc-Aurèle (infra IX, 4o).
Sir les rapports des Dieux et de L'homme dans le Stoïcisme, cf. Zeller, PkU, der
Gr., IIP, p. iG3.]
i. |IÏ£5jp7ai ojv. M. Couat, qui a traduit plus haut (VI, 16) zs^pOa-. par « être
troublé», est d'accord avec lui-même et se conforme, en somme, à l'usage du mot en
écrivant ici: «Te voilà confondu. » Pourtant le passage reste douteux parce que
le mot fi><T7£ qui introduit la phrase suivante établit entre elle et tAï-jç,<jol: o-jv un
rapport de conséquence. Est-ce donc parce que Marc-Aurèle est confondu qu'il doit
renoncer à la réputation d'un philosophe? Non; mais parce qu'il s'est mis en état
d'être confondu. Cette distinction semblera peut-être bien subtile; il est pourtant
certain que si, à coté de 7isï>up?ai, on pouvait sous-entendre tov ftfov, et traduire ce
verbe par : « Il y a du mélange dans ta vie, » on assurerait plus aisément la liaison
des phrases et la suite du sens.]
2. [Couat : « la réalité s'y oppose. » — Plus loin (X, 3i), Ottôûes'.; s'oppose à uXi)
précisément, comme l'hypothèse ou la chimère à la réalité; plus loin encore (XI, 7),
le même mot désigne la « base » et par suite le « plan » et la « direction » d'une vie.
Ce sont là des acceptions divergentes, mais également usuelles d'-jTioÔETi; : on ne les
rattache l'une à l'autre qu'en recourant à l'étymologie, qui donne le sens premier.
Or, c'est celui qui convient ici. 'Yizôbimz (littéralement: «fondement» ou «base»)
désigne ici «les faits» sur lesquels Marc-Aurele devrait fonder sa prétention. J'ai dû
écourter ci -dessus cette traduction littérale d'un seul mot.]
3. £1 /av TO XOITTÔV TOO ftfaU, 0<70V £r(7T07£ Tj <7T, ^'jG'.Z Oî'/.S'., [ii'.aSTSIV.
Cette phrase est évidemment altérée; la conjonction si gouverne un verbe à un
mode personnel, qui est sans doute flico-rr,, au lieu de £j'.u><7civ. Il y a une autre incor-
rection dans la proposition o<rov StJicots r( <rr, qp-j<rcç ftlXet. L'idée est qu'il faut vivre
conformément aux prescriptions de la nature. Si donc l'on conserve otov ôt.ttotc, qui
se rapporterait à aoctiov toO (Î''o«j et signifierait «le reste de ta vie, quelle qu'en soit
la durée», il faut ajouter to; avant r, <rr, z-iv.;. C'est le texte qu'a adopté Gataker. Plus
simplement encore, on peut changer otov en J>; av et 6ÉAEt en GéVrç. Les deux correc-
tions sont plausibles, et le sens reste le même. [Mais la dernière, due à Coraï, est
incontestablement la meilleure, étant non seulement la plus simple, mais tout à fait
conforme aux tendances de la langue commune, qui employait très volontiers J>: oev,
et par îà s'acheminait du m; des Attiques au vas des Grecs modernes.]
Mil M M \ le \ I mi i i
lai 1e détournai pai aucune autre pan & ipn bi( n d<
tativai aprè .w oii h aw oup ei ré à I tventure tu n'a tro
nulle pari !<• bien \ h re I a ne l'ai trouvé ni dan I « dial i
tique ' . ni dam la i lobe i ni dan i la n putation ni dan le
jouissance, ni nulle pari Où asl il donc? Dan une conduite
conforme aui \ olontéa de la nature humaine El comn
suivras in cciic conduite ' ' En ayanl dei pi in< Ipe i où
découleront tea tendancea el les acte ( fuel pi ln< h
<|ui concernent !<■ bien el i«' mal, & avoir qu'il n'j a point
<lr bien pour l'homme, <'n dehors de ce qui l<* rend juste
tempérant, courageux, libre, el point de mal en dehors des
\ icea contraires ;« ces \ ertus.
A chacune de 1rs actions demande toi : <piV>i elle pai
rapport à moi:» N'aurai je pas lieu de m'en repentir? Encore
un instant, H je serai mort, cl tout aura disparu. Si mou
action présente est celle (l'un rire intelligent, animé de l'esprit
de solidarité, soumis aux marnes lois que Dieu, pourquoi
chercherai je autre chose?
3
Qu'est-ce qu' Vlexandre, César et Pompée, à coté de Diogène,
d'Heraclite et de Socrate? Ceux-ci voyaient les choses; il- en
connaissaient le principe efficient 3 et la matière; leur principe
dirigeant était toujours le même 4. Les autres, au contraire
que de choses ils devaient prévoir, que de servitudes il-
devaient subir!
4
Tu aurais beau crever d'indignation, ils n'en continueront'
pas moins à faire la même chose.
i. [Cf. supra VII, G; : ifrqXiri?aç BiaXexTixb;... ftreoOai, — el toute la den .
phrase.]
2. Los deux verbes à la 3' personne, -oir^z: et r/r(, supposent un sujet à la 3* pet
sonne, le pronom tiç, qui a disparu.
3. [Couat : e la matière et la forme. » — Cf. supra IV. ji, note finale. ]
'». rà r(v£aovixà r(v a-jTwv Ta-JTa. Le pronom tocCt* n'est pas clair. Le- uns écrivent
raûra, d'autres ra'jTa. d'autres enfin roiaOroc. Je préfère towtck, qui me paraît plu-
conforme à la suite des idées; mais il semble que l abverbe àr. serait nécessaire.
5, [Var. : « Sache qu'ils n'en continueront... 0 En grec, la phrase n'est pas faite.
Le premier mot, ot:, est de trop ou suppose la chute d'un verbe principal. I
l fio MBLIOTHÈQUI DBS DUlTEESITÉfl I>1 MIDI
5
D'abord, ne te trouble pas: tout se passe conformémenl à la
nature universelle; avant peu tu ne seras rien, ni nulle part1,
comme Hadrien, comme Auguste. Ensuite, considère attenti-
vement la réalité, reconnais la, et, le souvenant que tu dois
être un homme de bien, sachant ce que réclame la nature
humaine, fais le sans te retourner, et dis ce qui te paraîtra
le plus juste; que ce soit seulement avec bienveillance, avec
modestie, avec franchise.
6
La nature universelle a pour fonction de déplacer et de
changer ce qui est, en prenant ici ce qu'elle rapporte là2. Tout
évolue3. Ne t'en effraie pas'» cependant; il n'y a rien de nou-
veau; tout est accoutumé; et tout aussi est réparti également^.
7
Toute nature est contente de bien suivre sa voie. Une nature
raisonnable suit bien sa voie lorsque, dans ses représentations",
elle n'acquiesce" à rien de faux ni d'incertain; quand elle ne se
portée en ses mouvements qu'à des actes de solidarité; quand
1. [Cf. les mêmes mots, infra XII, si.]
a. [Couat : « de le prendre et de le transporter de coté et d'autre. » — Cf. supra IV,
30, et la note (aux Addenda).}
3. [Couat: «Tout est métamorphose. » Var. : «Tout est en mouvement.» —
J'aurais admis cette variante, qui est la première version de M. Couat, si le mot
.. mouvement » pouvait en français, comme xivtjat; en grec (supra VI, 17, en note),
designer le changement de forme aussi bien que le changement de lieu. Le mot
<( changement» lui-même ne serait pas exact, car il n'éveille pas l'idée de direction
qui est toujours en tporcat, ni celle de retour au point de départ que Marc- Aurèle
y a mise parfois (cf. \, 7 : tgotty-, toO <7T£p£u.vio'j etc xh vôcoôe:).
Nous avons eu l'occasion (supra VII, iO, seconde note) de définir l'expression xpoTir,
roO r(y£fj.oviy.o0, ou tijc tyvffît ou tt(; Stavofeç. Les deux sens, psychologique et phy-
sique, que les Stoïciens donnent au mot -rpoTtr,, pourraient être exprimés graphique-
ment : le premier par une ligne droite, ordinairement une oblique; le second par un
arc de cercle, et à l'occasion par un cercle entier.]
k. o>/ (otte po6T)6r,vat. Les deux mots o>/ et o>ot£ ont étj intervertis; il faut lire:
w<tt£ o'j/î [et sous-en tendre Ô£Î.]
5. [Couat: «la répartition des choses est toujours la même.» — Marc- Aurèle
précise sa pensée à l'article suivant lorsqu'il dit que la nature universelle « distribue
rquitablement à chacun, selon son mérite, la durée, la matière, etc. »]
6. [Couat: « idée. »]
7. [Couat : « elle ne s'arrête à rien de faux. » — Cf. supra V, 10, première note.)
8. [Couat : « quand elle dirige ses désirs uniquement vers des actes de solidarité. »
— Le mot «désirs» restreint beaucoup trop le sens d'ôpjxat. Les opé;a;, «inclina-
tions, » dont il va être question a la phrase suivante, sont encore des 6pfj.au. Cf. supra
111, iG, 3' note.]
Il \ M 9 l»l M \l\< \ l Kl I I
elle n'a d'inclination ni d'avei ion <|U'- potu dei objel qui
dépendent d'elle; lorsque enfin elle accueille ave< empn
ini'iii toul 06 « | < t î lui < ial attribué pai la nature univei elle
i (|u elle «ii esl une pai lie, i omme la natui e de la Feuille
cvi une pai lie <!<• [celle de la plante Mal la natui e d< la
Feuille rail pari i<- d'une natui <■ In en ible an raison et qui
peul être asservie; la nature de I homme, au i ontraii une
partie d'une nature Indépendante, Intelligente el juste, qui
distribue1 équitablemenl à chacun, luivanl son mérite la
durée, la matière, l<i principe efficient et formel '. I a< lion, le
circonstances extérieures3, Cherche à découvrit cetl lité,
non en comparant 4 toujours les viea détail par détail, mais
en comparant à la fois tout ce «ju a re< a l'un avt ■< l'ensemble
de ce qu'a reçu Tanin
i i .1 < « <\ i.'. Lion rjyt, proposé) par ( asaubon, doil i
•j. [Coual : << ta durée, la lubatance, la forma — Cf. <ni>r,t l\ . • i , nota Bnala
.;. [Coual : « L'énergie, l'accident, » • Les mota ..■.-.•■.■*. el clairentrun
l'autre. La pensée IX, 3it en précisera l'opposition: -j x- ,
vovra j représente el > définit 7\>\L&a9i;', el :x
développe el y définit ivépYSta. Mémea expressions, ou peu s'en faut, .m* p.
1 1, el \ll, i\. On peut, enfin, reconnaître la même antithèse au début d< \ II.
S5 : y) cp-JTt; (te ôo^ys». r, ts toO 8Xo*j v.a afin ffvuletivoVnav va
rltav (c'eat-J dire rvepY7)Técov) ôiro a*oû Lea deux naturel qu'j distingu Mar - \
étanl d'ailleurs d'accord entre elles, lea deux. Dotions de ce que noua devi na n i]
vement à chacune — «activité» el « circonstance! » — sont inséparables. !>• Fait, lea
circonatancea ne nous sont données que pour solliciter notre activité, qui dm
(lue sur elles. Elles sonl h la matière » (IV, i) de l'action.
Il est donc naturel de comprendre dan- la même énumération L'alita i t
d'une part, l'ivépveia e< les aupâdasic de l'autre, dèa qu'on fait tant quedistini
L'alita de l'evéoysta. Noua en avons plus hauti\ ;. note) défini le rapport i
en un sens, celui de la cause efficiente el tonnelle à la cause finale I maté-
rielle avant été également nommée à côté de celles-là, le temps, qui esl aussi un
principe ou une cause pour Marc- Aurèlc (supra IV, si, début de la note finale), trou-
vai! enfin sa place dans rémunération. Il est même nommé le premier par qui
l'inégalité la plus apparente des vies humaines est en leur dui
L'énumération du temps, de la matière, du principe efficient, de l'activité ei
circonstances est intéressante à un autre point de vue. Les quatre catégories
donnes (supra VI, i4, ir* note) sont représentées en ces cinq mots: le substrat, par
O'jffîa; la détermination première, par otittov; les qualités secondes, par y:o
èvÉpvr::x ; la relation, enfin, par a-juLoaat:. Car les a circonstances h ne valent qu
rapport à nous et par l'usage que nous en faisons.]
'i. Je lis ainsi cette phrase : ijlt, z\ to ev ttc'o: isaubon.
5. [Couat : « mais en comparant à la fois tous les attributs d'une même i
avec l'ensemble des attributs d'une autre. >> — Un peu plus haut : Us « hosea une par
une,» où j'ai écrit: «les vies détail par détail.» Marc-Aurèle veut dire, selon moi,
(pie si l'on ne comparaît que la durée d'une vie à la durée d'une autre, les événe-
ments d'une vie à ceux d'une autre, et la santé et même l'intelligence d'un homme
à la santé et à l'intelligence d'un autre, on n'arriverait qu'à la constatation d'une
inégalité révoltante. Mais, tout compte fait, la nature a donne autant à chacun,
puisqu'a chacun elle a donné du temps, un corps, une âme, une raison agissante, et
A. COLAT-P. FOLRMER. II
l6a BIBLIOTHEQUE DES UIlIVERSlTÉa Dl MIDI
8
Tu n';i^ |);is besoin <lc Lire '. Mais tu ;is le loisir de réprimer
ton orgueil; tu as le loisir de vaincre le plaisir cl la douleur;
lu as le loisir <l<v l'élever au-dessus de la vaine gloire; tu as
le loisir de supporter sans colère les sots et les ingrats; que
dis je? <le ^occuper d'eux.
9
Que personne ne l'entende pins blâmer la \ie qu'on mène
à la COUI*, pas même loi \
10
Le repentir csl un reproche que Ton s'adresse pour avoir
négligé une chose utile; or le bien ne saurait être qu'une chose
utile : el l'honnête homme s'en doit préoccuper^. Mais aucun
les r\ énements d'une t îe, c'est-à-dire en somme toul ce qu'il faut pour être vertueux.
Pour compter ainsi, il faut accepter les dogmes du Portique, se dire que l'action
conforme à la vertu seule a du prix et qu'elle nous est toujours permise, que les
choses nous sont indifférentes, que le corps même << ne nous louche pas», que a
pièce est toujours achevée quand elle s'interrompt, et que deux heures bien employées
suffisent.
Kien dans le texte grec ne me semble exprimer l'idée de «catégories» d'êtres.
Il paraît, au contraire, évident que toOoî et toO ItipotJ dans la dernière phrase
équivalent à Ixaoroiç, qui est écrit a la (in de la précédente. — L'interprétation de
M. Couat, qui remonte à Pierron et qu'on retrouve dans le livre de M Michaut,
aurait d'ailleurs besoin d'être elle-même interprétée.]
i. àvayiyvroT/.îtv oûx è'^ttiv. Ces mots peuvent s'expliquer de plusieurs manières.
Si Marc- \urèle, selon son habitude, s'adresse à lui-même, ils ont nécessairement le
sens que je leur ai donné : Marc - Aurèle a plusieurs fois exprimé l'idée que le philo-
sophe devait agir et non pas lire (II, 2, 3; III, i4). Au lieu de avay.7vfo7y.civ, Xauck a
proposé ivaêiojvat, qui est ingénieux, mais hypothétique. Le sens de la pensée serait
le Buivant : il y a des choses que l'homme ne peut pas faire, par exemple ressusciter;
mais il peut toujours être homme de bien. Je m'en tiens au texte des manuscrits, qui
oiTre un sens acceptable.
?.. Le texte des manuscrits |itj8e 9\i ffeauToO, et non toî creauroO, signifie que Marc-
\urèle ne doit pas mal parler de la vie à la cour, non seulement devant les autres,
mais à soi-même.
3. [Couat: «< or l'utile ne saurait se distinguer du bien, et l'honnête homme ne
saurait éviter de s'en préoccuper, » — et, en note : « Le progrès naturel du raisonnement
me paraît presque exiger que la seconde phrase admette comme premier terme.
c'est-à-dire comme sujet, le dernier ternie, c'est-à-dire l'attribut, de la précédente.
D'autre part, l'ordre des mots xpr,ot(tw et àyaOov es! Bxé par la dernière phrase. Il
faut avoir établi que ce qui e>t utile est un bien pour pouvoir écrire que le plaisir,
n'étant pas utile, n'est pas un bien. Cela étant, il convient d'écrire, comme l'a fait
K< i-ke, dans la seconde proposition : 70 os ypr^iuov àyaOov ti oïl eïvat, au lieu de xo
xGbv yj}7)OiU.ov. » — Les deux arguments de M. Couat m'ont paru plus spécieux
que forts. Ils ne sauraient suffire à légitimer une correction. Je m'en suis tenu au
texte des manuscrits, qui est d'ailleurs clair et logique.
L'identité de Y « utile », du moins de ce qui est vraiment « utile » (supra III, G, fin),
et du « bien » est un dogme pour le Portique. Mais l'utilité n'est qu'un attribut du
M 'I M \ I ' \ I ! I I I
honnête homme n ir.i j.im n ••• i • jh-hIii .1 .i\ oii i |,
plaisir | i<* plal 11 n'wl dont ni une i h< » •• al lit ni an bien
H
Qu'es! C6( i en soi tnêmeel par ia propre « onstitatioi Ile
en eel la substance el la mail Quel sn esl le principe
efficient el formel1? Que rail il dam le tnond >mbien de
temps dure t-ilî
12
Quand tu as de la peine •■ te réveillei rappelle toi qu il
conforme à ta constitution el à la nature humaine d'a< i omplii
des actes de solidarité. Le sommeil, au oontraire, t'esl commun
avec les êtres sans raison . or ce qui esl conforme à la nature
de chacun lui esl plus propre, plus naturel I et, par suite,
plus agréable.
13
Ne manque jamais d'examiner chacune de tes représenta
lions», autant que possible, au point de nie de la physique,
<le la morale el de la dialectique 6.
bien, d'ailleurs le plus important peut-être, en tout cai celui qu'on nomme d'al
et le plus souvent, puisqu'on a trouvé (Diogène, VU, \w. 98) au moins q
appellations différentes pour le désigner: Tuu??pov, XuorrtXlc, /-
Une eû( suffi, la dernière, d'autant mieux que la définition qu'on nous doôn
trois autres U-s ramène ii celle-là. Pour ne rappeler que celle «lu m->t qu*i choisi
Marc-Aurèle en ce passage, le bien esl dil xp^etpav, 5n xptfav ûfeXetotç xapéxrrat. —
En écrivant co ok gyocObv xpv)<ri|Ad\ ri 5aî slvat, ootre auteur n'a «loue (ail que rapj
une formule consacrée dans l'École, el à laquelle nous n'avons pas à toucher.
La présente pensée, comme tant d'autres qu'on en peut rapproefo
V, 1 5), implique que la conscience de l'honnête homme e*t le critérium du bien --t
de l'utile.]
1. [Gouat : ((Quelle en est la substance, la matière, la cause? — Cf. IV, a
finale. Pour la suite, cf. III. 11, ;V nolc.|
2. [Cf. supra V, 1.]
3. [Cf. supra VI, Vi, V note.]
'1. [Couat : «( plus particulier, plus inné. » — Sur le sens d'otxâov, cf. Wpr \ I,
en note. Pour la traduction de itpofffuéorspov, je me suis d'autant moins fl
dissimuler la tautologie apparente qui est déjà dans le texte <jrec, que le Iran.; us donne
volontiers au mot « naturel » le sens de « facile », et que par là le troisième ad j
« plus agréable, » s'expliquera aisément.]
5. [Couat : « idées. »]
(î. [Ce sont les trois divisions de la philosophie pour les Stoïciens. Le- fondateurs
de l'École, Zenon et Chrysippe, les rangeaient, au rapport de Diogène tierce \ II.
xxxiii, 09) dans un ordre différent, commençant par la logique pour finir par
la morale. D'autres {ibUL, \o) disaient que la logique est le squelette ou le système
nerveux d'un vivant, dont l'éthique serait les chairs, et la physique l'âme; ou bien, la
coque d'un œuf, dont l'éthique serait le blanc, et la physique le jaune. Ces méta-
phores indiquent une distribution différente, qui est celle d'Apollodore. D'autres,
l(i'l BIBUOTHÊQUI DES UNIVERSITÉS DI UID)
14
Qui que ce soii que lu rencontres, commence par te dire
immédiatement U toi-même : quels principes cel homme a t il
sur le bien et le mal? Car s'il a i<Is principes sur le plaisir el
la douleur et sur ce qui les l'ail naître, sur la gloire, l'obscurité,
là mort, la Nie je n'aurai ni à inYlonncr ni à trouver étrange
qu'il fasse lelle action. Je me rappellerai qu'il ne peul pas
agir autrement ' .
15
Rappelle-toi que s'il est honteux de s'étonner qu'un figuier
porte des figues'*, il ne l'est pas moins de s'étonner que le
monde porle tels événements qui sont ses fruits naturels. De
même, il serait honteux pour un médecin el pour un pilote^
de s'étonner, l'un qu'un tel ait la fièvre, l'autre qu'il s'élève
un vent contraire.
16
Souviens-toi que tu n'aliènes ta liberté ni en changeant
d'avis ni en suivant qui te redresse'*. Cette action, en effet,
est encore tienne, puisque, en l'accomplissant, lu suis le
mouvement de ton âme, ton jugement, et. pour tout dire,
ta raison"».
17
Si cela dépend de toi, pourquoi le fais-tu? Si cela dépend
d'un autre, qui accuses-tu? Les atomes ou les dieux? Folie
comme Panétius et Posidonius, nommaient d'abord la physique: c'est l'ordre cura
suivi Marc-Aurèle. On ne peut que s'en étonner: car la morale est pour lui de
beaucoup la plus importante partie de la philosophie ; c'est même la seule qui l'inté-
resse, ainsi qu'il le déclare à maintes reprises (I, 17, lin; VII, 67, fin; VIII, 1). 11 eût
donc dû la nommer en dernier lieu, comme Zenon et Chrysippe, — ou en premier,
comme Sénèque (ad Lucilium, 89).]
1. [C'est le corollaire du principe socratique : « la vertu est science; le vice,
ignorance,» qu'ont adopté les derniers Stoïciens, — et que repoussaient les premiers.
malgré leur déterminisme, pour ne pas laisser d'excuse à la faute : 7râv7k)v vas àixap-
TavôvTwv uapà rr,v lotav xav.cav... uv^os T'jyyvoWr, v £/stv toi; àjiotpTavoudrv (Stobée, Ed..
II, 190; cf. Zeller, Pkil. der Gr., III3, p. 229. Noir aussi supra p. 'j8, note 2).]
2. [Même image, IV, 6, et XII, 16.]
3. [Cf. VI, 55, une comparaison analogue. |
\. [Cf. supra IV, 12; VII, 7, et l'exemple d'Antonin, I, 16. j
.".. [Et puisque suivre sa raison, ou, comme disent les Stoïciens, «suivre Dieu, »
c'est être libre. — Couat : «C'est un résultat de ton action personnelle, s'exerçant
suivant tes tendances et ton choix, suivant la décision de ton esprit. » — Sur le sens
<\y!)V)r. cf. supra III, 16, ,He note.
Il > Il l.l M M' M M M
diuis les deux « ,i M m- Paul •" ■« us6i i" i i tnnc SI lu I
. (,i i [ge l'auteur <in Lut i in ne i« peui | I
lui même. Mui < -i lu in; peu i pi même col
ierl il ' d '.'< i u i i ' il ne ruul i ien faii e I nutilemenl
18
< e qui eal morl ' ne tombe pai bon de l'uni S il
re8td, C'esl pour [y] changer ri se dissoudrr 'ii • pari
éléments qui composent l'univers el toi même l éléments
eux mêmes changent el ne murmurent pas.
19
Chaque être, cheval, vigne, < ^ i né pour quelque cho
Pourquoi t'en étonner? Le soleil lui-même te dira je suis
né pour une certaine œuvre, el ainsi les autres dieux I roi
donc, pour quoi es-tu né? Tour le plaisir? Vois si ta raison
admet cette réponse 3,
20
Comme un joueur qui lance une balle, la nature poursuit
un but dans chacun de ses actes, dans la tin non moins que
dans le commencement et dans la durée de chaque être. Quel
bien y a-t-il, d'ailleurs, pour la balle à monter en l'air, ou quel
mal à descendre ou même à tomber? Quel bien \ al il pour
une bulle d'eau à se former l, ou quel mal à se dissoudre? Il
en est de même d'une lampe \
i. kûoc ri En ïoc aspsi. Vu-dessus de En trot pipcc, ud manuscrit donne -
qui doit ôire la vraie leçon.
2. [Cf. IV, ai, i" note (à l'Appendice).]
5. [Cf. supra V. i.]
!i. [Goual : «à se maintenir. » — En grec, <ruvE<m*rn. M. Mondry-Beaudouin, rendanl
compte dans la Revue critique de la traduction île Si. Miehant. j a déjà "»m_
faux-sens, qui remonte à Pierron et à Barthélemy-Saint-Hilaire. Nous avons
3' note) que g-jg-:x<j:; était synonyme de xaTGUTxeVTj,
On se souvient qu'à l'article VII. ->3. Mare-Aurèle demandait: quel bien y a-t-il
pour un coffre à être construit, quel mal à être démonte?]
5. [On achève aisément la comparaison, puis la pensée. La lampe. quVn l'allume
ou qu'on réteigne, re^te indifférente. Et l'homme, chez qui la \ie s'allume, puis
s'éteint ?1
iGG mm. loi mi loi i DBS i m\ i RS1 1 1 8 DU midi
21
Retourne le corps1 el vois ce que font do lui lia vieillesse, la
maladie, les plaies '.
Celui qui loue cl celui qui esl loué: le panégyriste et l'objet
du panégyrique ont une \ie également courte. Et, eu outre,
même dans un coin de celte contrée où ils se trouvent, tous
les hommes ue sont pas d'accord entre eux; chacun n'est
même pas daeeord avec soi même. VA la terre tout enlière
n'osi elle même qu'un point 3,
22
Fais attention à l'objet de ta représentation, à ton jugement,
à ton action, au sens de tes paroles '».
22 bis
C'est justement que tu te trouves dans cet état; mais tu
aimes mieux devenir un homme de bien demain que de l'être
aujourd'hui^.
i. [Ce mot a dû être ajouté pour la clarté de la t-aduction. Marc-Aurèle avait écrit
simplement : « Ketourne-le. »]
2. [Couat : (( la débauche, » — et, en note :
« J'ai maintenu le texte des manuscrits 7topvcOTav, tout en reconnaissant qu'il est
fort douteux. Marc-Aurèle dit que le corps de l'homme se dégrade vite par l'effet
seul <lc la vie; L'idée <1<' la débauche intervient ici d'une manière inattendue et même
déplacée. » — ("est la correction de M. Rendall, à7t07rjr(<rav, qui est traduite ci-dessus.]
3. [Cf. supra IV, 3.]
4. [Couat: « au sujet présent, ou à ton jugement, ou à ton action, ou au sens de
tes paroles. » — Le sens de to *j7roy.£''[X£vov nous est donné, entre autres passages, par la
pensée VU, 29 : « Divise et partage tout objet (to ùttoxeiuevov) en principe efficient et
matière. » C'en est, d'ailleurs, pour les Stoïciens l'acception la plus usuelle (supra VI.
i'i, 1" note). — Plus loin, me rappelant qu'à la pensée VU, 4, où reparaît le mot
70 i^aaivôij-Evov, Marr-Aurèle s'exhortait à taire attention « à ce qui se dit et à ce qui
se fait », j'ai hésité à écrire : « cette » action, « ces» paroles, au lieu de : « ton » action.
«tes» paroles. Mais il est probable que les deux pensées sont indépendantes; et
M. Couat, en écrivant: «ton» action, et «tes» paroles, a dû fidèlement interpréter
h- texte grec : le mot qui précède (ooypiaTi) ne peut, en effet, désigner qu'une opéra-
tion de notre pensée, celle d'autrui nous étant fermée, ou ne nous étant connue que
par les «actions» et les ((paroles» qui la manifestent; la suite naturelle du sens
parait donc appeler, après « ta » représentation et « ton » jugement, ((tes» actions
et (( tes » paroles.
On remarquera l'ordre de cette énumération, qui suffirait à fixer le sens des
mots. Des représentations se tire le jugement qui (III, iG, dernières lignes de la note
finale, à V Appendice) règle la conduite de la vie, et qui est impliqué en tout ce que
nous pouvons faire ou dire. Ce sont ici les représentations que Marc-Aurèle nomme
d'abord, c'est par les actes et les paroles qu'il finit; et ce n'est pas sans raison que,
pour désigner l'opération intermédiaire, il choisit, des trois termes qui servaient aux
logiciens de l'École (xpiotç, uittftrj'J/iç et ôoyaa), celui que, presque seul, on employait
en morale. — Cf. in/ra NUI, /»;, note 1.]
j. On ne voit pas comment le second paragraphe de cette pensée se rattache au
II. Il l.l M \h< M HJ I I
23
SI J 'accomplit quelque action je l'accompli en la rappoi
1,1 ti i au bien des hommes* \i ai i j \ t I il ' quelque cho i Fe le
»is en l<' rapportant au i dieu % el à la joui « • de loul
principe d'où le déroule la chaîne d< m m< al
24
Tel que t** pareil un bain, c'eal i <lir<' de l'huile, de la netu
de la s;ilch;, mie c;mi grasse, un mélange d'ordures, lell<
toute partie <ir la \ le, tel t « m 1 1 objet ;
25
\\ani Lucilla « mourut \ érus •», puis ce fui Lucilla; avant
SecundaG, Afaximus7, puis Secunda; ayant Epitynchanus, Dio
time, puis Epitynchanus; avant rVntonin, Paustine, puis
Anlonin. [vont Celer%t Hadrien, puis Celer. El partout <!<-
même 9, Et ces hommes à l'esprit pénétrant el divinateur, ou
enivrés des fumées de l'orgueil, où sont-ils? Où sont, par
exemple, ces esprits pénétrants, Gharax10, Démétriua11 le pla
tonicien, Eudémon13, et leurs pareils? I« >ut cela était éphé-
mère; tout cela est mort depuis longtemps. Quelques uns
n'ont pas même laissé un bref souvenir : d'autres sont devenus
des légendes; d'autres sont même déjà sortis de la légende.
premier. Dans tous le> cas, la conjonction os, qui relie tefl deux meml :irav;
île ce second paragraphe, est sans doute mise là pour yâp. [C'est pour répondre à la
première de ces observations que j'ai distingué de l'article 22 un article 2?. bis.]
1. [Sur les rapports de Plvépyeia (ou TrpaTTousva) et de la ru|i6a9i;
vovra), cf. supra VIII, 7, G* note.]
3. [Var. : a d'où sort la série continue des événements. »]
3. [Cf. supra VI, i3; infra IX, 06.]
4. [Fille de Marc-Aurèle et femme de Yérus. sou collègue à l'empire. j
T>. [En 1 69 ; ce renseignement peut aider à dater le livre \ lit dea Peu*
6. [Inconnue, comme Diotime et Epitynchanus.]
7. [Le Stoïcien, supra I, i5.]
8. [Caninius Celer, rhéteur, maître de Marc-Aurèle.]
9. [J'ai transposé cette phrase, qui. dans le texte grec, précède celle dont j'ai
imprimé la traduction en italiques. Il me parait, comme à M. Stich. difficile
d'admettre que Marc-Aurèle ait interrompu, puis repris rémunération des noms
propres par laquelle commence la pensée.]
10. [Inconnu.]
11. [Sans doute Démétrius de Phalère.]
12. [Astrologue.]
|68 BIBLIOTHBQUI DES UTUVERSITÉS Dt MIDI
Rappelle-toi donc cette alternative: ou bien1 le composé dont
lu es fait devra se disperser; [ou bien] ton souille devra
s'éteindre, OU prendre la place nouvelle qui lui aura été
marquée.
26
La joie de l'homme est de Taire ce qui appartient à l'homme.
11 appartient à l'homme d'être bon pour ses semblables, de
mépriser les mouvements" des sens, de discerner parmi les
vraisemblances 3, de contempler la nature universelle et ce qui
arrive suivant ses lois.
27
Trois relations '\ : l'une avec le vase corporel qui nous en-
toure^, l'autre avec la cause divine d'où vient tout ce qui
arrive à tous, la troisième avec ceux qui vivent en même
temps que nous.
i. [Couat: « Rappelle-toi donc que le composé dont tu es fait devra se disperser;
ton souille devra s'éteindre... » — Ni M. Couat, ni Pierron, ni Barthélemy-Saint-Hilaire,
ni If. Michaut ne se sont avisés que les conjonctions rjxoi... r(... marquaient une
alternative. La première hypothèse qu'envisage Marc-Aurèle est l'hypothèse ato-
miste ; le mot <nteôa<xÔYJvat en rend témoignage {ci supra p. 6o, note 6); les deux
suivantes (tosti: et |*eTàaTaaiÇ, cf. IV, 21, irr et dernière notes) sont des théories
stoïciennes. On remarquera que le mot irveu|ià*ctov désigne ici à la fois l'âme et le
souffle vital (cf. p. 102, note 4).]
2. [Couat : « les impulsions des sens. » — Cf. supra V, 26, et les notes.]
3. [Couat: a de discerner les idées plausibles.»— IliOavo; n'est pas àÀr/Jr,; ; et il
y a loin encore de l'idée « plausible» à l'idée sure. On peut ajouter qu'il n'y a nulle
peine à discerner les idées plausibles; qu'au contraire tout le mérite — et toute la
joie — est à les éclaircir et à éviter d'en être la dupe. Ne sont-ce pas précisément 1« >s
vraisemblances qui nous trompent i ?
Dans la version de M. Couat, « plausible» signifie presque a certain »; c'est l'équi-
valent des mots «digne de confiance» ou de ((créance», qu'ont écrits les autres
traducteurs français. « Plausible» est donc ambigu, tant que le tour de la phrase ne
permet pas de comprendre: «plausible, mais seulement plausible ; plausible, mais
non assuré.» Il n'en est pas ainsi de rciOavo;. L'usage constant de Marc-Aurèle,
l'usage ordinaire des autres auteurs grecs a fixé le sens de ce mot. Dans les Pensées,
il est toujours possible d'entendre par Savoir,; (IV, 12) une ((conviction » — mais
non une certitude absolue — qui nous détermine de bonne foi, quand il n'est pas
nécessaire de reconnaître que ce nom ou l'adjectif correspondant ne désigne que la
« vraisemblance » (VIII, 3i>), et même la vraisemblance qui nous abuse (III, 2, fin : o-j
iriOavév, invraisemblable, et pourtant vrai; V, 6, fin: XoyiXTJ tivi 7r:fJavo7r(7'. Tzxoôi.y z<jHxi.
èlre dupe d'une vraisemblance logique).]
\. [Couat : «Trois manières d'être: l'une avec le corps ...» — Cf. supra VI, 38, 1" note. |
~>. Trpb; xo xîrtov xo icsptxesf&svoV' Gataker a conservé le mot afetov, qui n'a ici
aucun sens, et qui ferait double empl >i avec xix''av, qui vient plus loin. On a corrigé
otÎTtov en àyyôlov (Walkenaer) et T^ixâx'.ov (Corai). Cette dernière correction me
parait la meilleure. — | Les deux, d'ailleurs, donnent à peu près le même sens,
puisque Marc-Aurèle désigne volontiers (III, $; \, 38; XII, 2) le corps par àyyeîov ou
KYYEtcitôeç iceptxet(&evov. J'ai, pour ma part, préféré la conjecture de Walkenaer, en
raison de la ressemblance graphique des mots AIT El ON (peut-être écrit, par iotacisme,
MTION) et A1TION. — Cf. Polak, In M. Antonini Commentarios, Hermès XXI, p. 33 1 .J
i-i ssi'i s in: m i i i i i
( )u |a dOllleUI e ' uii m. il pom le rurp i-l i lui <|. I
proclamer ' ; ou elle en es) un poui l'im< Mal I ime a le pou
\ oir de conserver b érénil el on i aime en m m\ pi
que ta douleur es! un mal En effet, toul jugement, toute
tendance, i < >i 1 1 désir, toute aversion « I en nou tin I il ne
peul venir du dehors jusqu à noua aucun mal
29
Bfface les idées qui se présentent •> toi, en le disant ani
cesse: il dépend de moi que mon Ame n'ail ni méchanceté,
ni désir, ni rien qui la trouble. Je n'ai qu'à considérer toute
chose en elle même, et à faire de chacune le cas qu'elle mérite.
Rappelle loi que 1 « t nature t'a donne ce pouvoir.
30
Si lu adresses la parole au Sénat ou à qui que ce soit, Fais le
avec modestie el netteté**, parle un langage Bain.
31
La cour d'Auguste, sa femme, sa fille, ses petits Bis, ses
descendants, sa sœur, VgHppa, ses parents, ses proche-.
ses amis, Aréosî, Mécène, ses médecins, ses sacrificateurs,
enfin tout ce qui composait cette cour est mort. Considérant
maintenant •"> d'autres groupes, par exemple celui des Pom
péiens, pense non à chaque mort individuelle, mais à l'ins
cription qu'on lit sur les tombeaux: le dernier de sa race:
réfléchis aux efforts qu'ont faits ceux qui venaient avant ceux-ci
i. [Cf. supra Vil, iV, VII, 16; VII, 33, etc. |
•>. [Cf. supra V, 19, et la note, rectifiée aux Addenda,]
3. Il m'est impossible de comprendre cette phrase en conservant la 1
7T£piTpâvo);. Ce mot signifie clairement, et il e>t inadmissible que Marc-Aurèle se
recommande à lui-même de ne pas parler avec clarté. En admettant même que
7iîptTpàvco; signifie parfois « avec une élégance affectée », et que ce mot soit opposé à
ùyist Xôyto, la construction grecque exigerait vyiû 5é. Le plus simple est donc Je
supprimer la négation jxr,, où est toute la difficulté, et de la remplacer par /.a..
!\. [Le philosophe d'Auguste (Sénèque, ad Marciam. '», sqq).J
5. elxa £7u6t... IIo(im)iwv. Il manque probablement quelque chose à cette ph
dont le sens se devine, mais dont la construction est incorrecte.
i;<> MBLI0THSQU1 DES immk-iii's m midi
pour laisser un successeur : et qu'il tau!, malgré tout, que
quelqu'un soil le dernier, \insi tu en arriveras à considérer la
mort de toute une race
32
Arrangeons notre \ie action par action, satisfaits si chacune
produit tout ce qu'elle peut. Or, nul ne peut nous empêcher
de le lui faire produire. — Mais quelque obstacle extérieur
m'arrêtera. — Il n'en est point pour la justice, la tempérance,
la raison. — Mais peut-être que mon activité, sur d'autres
points, sera entravée. — Par ta résignation à l'obstacle même,
par la douceur avec laquelle tu te plies aux circonstances
données, immédiatement tu engages une autre action qui
s'accorde avec cet arrangement de la vie dont je parlais1.
33
Recevoir sans orgueil, quitter avec détachement.
34
As-tu vu quelquefois une main ou un pied coupé, une tête
tranchée, gisant loin du reste du corps? Tel est l'état dans
lequel se met, autant qu'il est en lui, celui qui repousse ce qui
lui arrive, qui se retranche du monde, ou qui commet un
acte contraire à la solidarité. Tu t'es rejeté hors de l'unité
voulue par la nature, car tu n'étais qu'une partie2, et voilà
que tu t'es retranché du tout. Mais voici qui est admirable :
il test possible de rentrer dans cette unité. Dieu n'a permis
à aucune autre partie, séparée et retranchée du tout, de s'y
rajuster de nouveau. Vois donc quelle bonté, quels égards il a
eus pour 3 l'homme. Il a fait dépendre de lui d'abord de ne pas
se séparer du tout; une fois séparé, il lui a permis '» de revenir
s'y souder et y reprendre sa place à côté des autres parties.
i. [Cf. supra IV, i.j
a. Iftsqpuxeic yap uipoç. J'ai conservé le mot {jlsoo;, qui est répété plusieurs fois
dans ce morceau. Peut-être \lï1o; vaudrait -il mieux; d'ailleurs, les mots [xsXo; et
|iipo;, employés tour à tour par Marc-Aurèle dans des pensées analogues, ont le
même sens. — [Cf. supra IV, 1/4 : IwicéaTTQÇ w; fjiÉpo;.]
3. [Couat : « quelle bonté il a témoignée à l'homme. » — C'est Ttxiw*t que je
traduis par « quels égards ».]
A. [Couat: «Il a fait dépendre de lui que l'extrémité (?) ne fût pas séparée du
tout, et qu'après en avoir été détachée elle put revenir... »}
PI Itl I M M\ll' M i'.l I I I- I
35
La M.ihur universelle1 i donné •• chaque être do
ses diverses facultés; entre autres, nom en avon reçu celle
que soici. De même qu'elle accommode el range t la de lii
pour <in faire une partie d'elle même] loul < e qu elle lrouv(
^;i route «i loul oe «pii lui r< de même I être rai onnable
peut iiliiv de loul Obstacle une malirrr i i J)i«.|)i' ii< lion
s'en servir l, quel »|u';iii été son premier dessein.
36
\c le trouble pas en te représentant l'ensemble <i<" la rie
Ne considère pas combien <lr peines et combien lourdes le soi
viendront ^ probablement; mais, à propos de chacun des
Déments présents, demande- toi : Qu'j a t il d'insupportable,
[d'intolérable] dans ce que je lais!» Tu rougiras de le confei
i. âeicso tî; tl'ù -x;... ^i:;. Cette première phrtM esl tout à f;«it Incorrecte et sûre-
ment altérée, i n des manuscrits donne biofory au Ueu de ExawToç. n lemble, en
qu'il convienne de lire txàoru et d'ajouter ou detubatituer à un autre mol le
dont aûenc est Le sujet Les mots 9y,s8ôv otov ne sont pas U i à leur i
plique pas cette restriction. C'est bien à t«»uv les êtres que la nature •« donné leun
facultés. 11 faut donc substituer à ces deui mot> Le verbe, quel qu'il >oit, signifiant
donner, distribuer, qui a pour sujet pfaiç.
Les mots i| tô>v Xoyixûv aû*i< doivent aussi être changés en r, t«J\
expression familière à Marc- Aurèle ; r«fr Xoycxûv, qui se trouve 1 l<« ligne précédente,
est répété ici par erreur.
| Le verbe que réclame M. Couat el qui doit, autant que possible, ressembler
phiquement à EXEAONOXON, n'est malheureusement pas aisé i trom ubon
avail voulu lire E£KEAA£EN; mais ce mot, dont le sens est -i nel (cf. supra p
note S), n'indiquerait-il pas une répartition arbitraire des dons de la nature, faite
parle hasarde! non par la Providence? J'aimerais mieux Lire EXOPIimiEN, qui
compte autant de lettres que EXEAONOION, et nous présente les mêmes aux m
plaees (X, £, N, sans compter l'initiale: entre un I et un E Lunaires la ditférence est,
en effet, imperceptible). Ma conjecture ne suppose guère, en somme, qu'une seule
grosse tache ou un gros trou dans L'archétype, à la place des einq lettre- médianes
du mot.]
a. [Couat : « tout accident et toute contrariété. » — Cf. supra VI, 42. J
3. [Cf. IV, 1, et VIII, 3?. Ainsi, pour les Stoïciens, non seulement la souffre
n'est pas un mal, mais c'est pour le sage une chance heureuse, une occa>ion
d'éprouver et d'exercer sa vertu et d'acquérir ainsi le bien véritable, en suivant les
voies mêmes de Dieu.]
4. [Couat: «et l'utiliser pour le but, quel qu'il soit, qu'il poursuit. » — Ce
peut-il traduire l'aoriste »v (opur.ffs? En changeant d'action, n'avons-nous pas changé
de but? ou bien si notre but a toujours été et est encore d'agir bien, sans nous
préoccuper de la matière de notre action (VI, 5o), que signifieraient ici ces mots:
« quel qu'il soit, » appliqués au but? — Je ne vois pas d'autre interprétation possible
de ce passage que celle de M. Michaut.]
5. s7iiv=v£v>(7Ôat. Bien que ce parfait puisse, à la rigueur, s'expliquer comme un
futur antérieur, le futur serait plus correct et plus clair: j'ai traduit comme s'il y
avait ÈTTiysvTrdîcrOa'., adopté par Gataker.
l~2 B1BLIOTHEQU1 DBfl I M\l KSITKS hl midi
Kappellc-toi ensuite que ni l'avenir ni le passé ne pèsent sur
loi, mais seulement le présent. Or, il se rapetisse de plus en
plus, si tu le réduis à s;i vraie mesure, et si tu lais honte ;i ta
pensée de ne pouvoir résister à ce rien1.
37
Est-ce que Panthée OU Pergame sont encore maintenant assis
auprès du tombeau d<i Vérus*? Et Chéréas3 ou Diotime
auprès de celui d'Hadrien? Supposition ridicule. Eh quoi?
S'ils y étaient assis, leurs maîtres s'en apercevraient ils? Et s'ils
s'en apercevaient, en éprouveraient ils du plaisir? Et s'ils en
éprouvaient du plaisir, les autres 4 seraient- ils immortels?
N'était-il pas prévu d'abord par le destin qu'à leur tour ils
deviendraient l'une une vieille femme, l'autre un vieillard, et
qu'ensuite ils mourraient? Que devaient donc devenir les
maîtres après la mort des serviteurs? Ordure que tout cela, et
pourriture dans un sac.
38
Si tu as la vue perçante, tâche d'avoir dans tes jugements
les yeux les plus clairvoyants •>.
i. [Cf. supra II, i',.|
2. Le nom de Vérus a été restitué par Saumaise. [Nous avons déjà rencontré un peu
plus haut (VIII, 25) le nom de Vérus à côté de celui de Diotime. Pergame était un des
affranchis du premier; Panthée, son affranchie et sa maîtresse. C'est elle qu'a célébrée
Lucien dans les Portraits.]
3, Au lieu de Xaupfaç ou Xa6pta:, j'ai adopté la leçon Xcupéa;, proposée par Reiske.
[Ghéréas ou Chabrias nous est d'ailleurs inconnu.]
'\. [Couat : « s'ils en éprouvaient du plaisir, seraient-ils pour cela immortels? ►> — et.
à la ligne suivante : « qu'à leur tour les affranchis deviendraient...» — En grec : ËpeXXov
outoi àGâvaxo: eïvai; oO y. ai toutou ç... M. Couat, qui a rigoureusement traduit
toutou;, et, à lavant-dernière phrase, exeîvoi et tojtwv, semble n'avoir pas aperçu le
premier pronom, ouroi. Peut-être aussi l'a-t-il supprimé délibérément, en considérant
qu'ici comme en d'autres passages (cf. surtout IV, 21) Marc- AurMe professait la
doctrine de la survivance temporaire des âmes. Cette correction, si c'en est une, serait,
d'ailleurs, assez arbitraire; et je me demande si la suite des phrases n'est pas beau-
coup plus naturelle dans le texte non corrigé. — Par les mots: «■ les autres seraient-
ils immortels:1)) entendez: « le^ autres pourraient-ils éternellement rester près du
tombeau du maître? et le plaisir de celui-ci éternellement durer ? »]
5. Le texte de cette phrase est inintelligible. Depuis Saumaise jusqu'à Reiske, bien
des corrections ont été proposées. L'altération du texte se trouve, à mon avis, dans les
deux derniers mots. Je ne crois pas que xpi'vwv soit altéré; l'auteur semble avoir
opposé ici le regard des yeux à celui de la pensée. Pour obtenir ce sens, il suffirait de
corriger çr(<r:. Reijriœ a proposé çpeart*, j'aimerai mieux ojjLfxaai. Platon a employé
l'expression ou.ua 'VJ7/.î dans la République (533, D): j'écrirais donc ojjLuaTi TOSooTaToi;.
Il s I I |)| MM- \ I III I I
39
Je ne i <>" dan la i m titution de l'élu i •»• i mnabl inc
vertu conti aire ï ta ju I i( «• mal l'en roi un< contraii t an
plaisir, l,i Irinpri ,hm <•
40
Supprime ton jugement1 au si^jel de ce qui te semble pënibl
el tu ei parfaitement à l'abri. Oui, tu ' La mi «on M
je ne suis pas raison ' Soit. Que ta raison donc ne ufTl
paa elle même. Mais s'il \ a quelque autre ch n toi qui
souffre, laisse l'en juger pour ion propre compte
41
Ce qui fail obstacle à la sensation esl un mal pour la nature
animale. Ce qui foil obstacle à la tendance esl également un
mal pour la nature animale. El il > a de même dea obstaclea
qui Boni des maux pour la constitution de la plante 4, Par
conséquent, ce qui Fait obstacle à la raison es! un mal pour la
nature raisonnable, \pplique toi toute- ces observations. La
douleur ou le plaisir t'atteignent* ils 5? C'est à la sensation 6
i . [Cf. supra l\ , 7.]
■2. [L'objection sérail plus forte si l'on ajoutait Ici, devant « raison . un seul mol :
« uniquement » — Cf, XI, so, note finale. ]
3. [cr. supra vu. r,, 16, 33; VIII, a8; infra VIII, fci, ',;. \ll. 1. etc. - La pei
suivante est le développement de celle-ci. j
'». | Var. : « Et il y a tle même d'autres obstacles et d'autres maui p mr toute 1
nisation naturelle. >> — Celle version (la seconde) est justifiée par la note suivant
«Toutes les éditions donnent, avec la plupart des manuscrits, x-.y.
'jxsvV,;. Le manuscrit A donne puem-qç. Je préfère cette leçon. On ne voit pas pourquoi,
après avoir parlé de la nature des animaux. Ifarc-Aurèle parlerait de celle des plantée,
pour passer ensuite à celle de l'intelligence. La phrase s'en Si* n SXàoxtX. me parait
avoir un sens général et s'appliquer à toute organisation naturelle. Autrement, il y
aurait çutixtjç s^rtzioç, comme ^toTixr,; pwrewç. »
Les mots puetc («nature») et xarrounieuY) («constitution ») étant à peu près syno-
nymes (supra VI, V'j, \* note), on s explique que le premier Je ces noms soit remplacé
à côté d'un adjectif île même racine que lui (çunx^| puei< | par le second ; en revanche.
on ne saurait admettre l'expression puerai xorraexaui) («constitution naturelle
t'ait en grec un pléonasme intolérable. Ce serait se payer de mots que prétendre la
traduire littéralement en français par n constitution physique ».
Je suis donc revenu à la première version de M. Couat. tout en m'étounant
lui que Marc-Aurèle ait nommé la nature de la plante entre celle de l'animal et celle
de l'être raisonnable.]
5. [Nous savons qu'ils ne sauraient « toucher » ou « atteindre >» l'âme. — Cf. supra
IV, 3, avant-dernière note; Y. 19, et la note rectifiée aux Addenda.]
6. [C'est-à-dire au corps. — Cf., d'une part. p. 43, note 8. et 97, note 5; d'autre
part, l'article précèdent et les pensées analogues citées à la dernière note.]
,-', BIBLIOTHiEQU] DE8 DTIITEliSITÉS i>l MIDI
d'y pourvoir. Quelque chosç a -i il Bail obstacle a la tendance?
Si tu1 ne l'as point soumise ii certaines réserves, c'est cela '
d'abord qui est Un mal pour L'être raisonnable. Mais si lu
regardes comme indifférente une aventure commune-'*, tu n'as
pas encore souffert de dommage, tu n'as pas rencontré d'oba
tacle. Les opérations propres à ta raison ne sont ordinaire-
ment i entravées que par toi seul, car ni le feu. ni le
fer, ni un tyran, ni une calomnie, ni rien ne peut l'atteindre.
Quand la sphère est achevée, elle demeure ronde ;.
42
Je ne mérite pas de me faire de la peine à moi même, car
jamais je n'en ai fait volontairement à autrui.
43
\ chacun ses joies. La mienne est de tenir mon principe
dirigeant en bonne santé, de ne me détourner d'aucun homme
ni de rien de ce qui arrive aux hommes, de regarder et d'ac
cueillir toute chose avec des yeux bienveillants, et d'en user
selon ce qu'elle vaut.
i. [Théorie de L'uireÇaCpeotc. — Cf. supra IV, i ; V, 20; \ I. .">•.; \ 111, 35.]
2. [Gouat : « voilà d'abord un mal. » — J'ai tenu à affirmer le sens de jj&q £ :, et
non rfir, u ;, que donnent les manuscrits, et qui ne s'explique pas. Si Ton adopte la
correction, fort plausible, de Coraï (loîo>:), on traduira : « C'est cela précisément qui est
un mal... »]
3. [La leçon traditionnelle (to xotvcw Xafi6dtvetc) est inadmissible; on n'a pu la
traduire sans forcer le sens des mots (Michaut : « si tu acceptes le sort commun »),
OU Bans ajouter au texte dans la proposition suivante (Barthélemy-Saint-Hilaire : « <i
tu subis le sort commun, tu n'as pas le droit de dire que... »); il doit y avoir là une
lacune à combler. La traduction de M. Couat indique assez qu'il l'avait aperçue. On
peut lire, en n'ajoutant que six lettres entre ro et xotvév: roSÔ* o>; xt xoivév, qui donne
un sens très clair; c'est la conjecture que se trouve avoir traduite Pierron ; la plus
simple mais aussi la plus suspecte, car la chute de ces six lettres ne peut s'expliquer
que par un accident matériel, tache ou déchirure, qui eut nécessairement attiré
l'attention du copiste; le vide eût donc été comblé, bien ou mal. Il est plus vraisem-
blable que l'erreur est imputable au scribe lui-même, et qu'il manque ici soit un
mot omis par étourderie et dont Le précédent aura pris la finale (par exemple,
ooxîî; après Xotuâaveiv), soit plutôt toute une Ligne commençant ou finissant dans
l'archétype par le même groupe de lettres que la précédente. Par exemple : z\ oï tô
y.otvbv [70Î; te àyaOoi; y. ai toi: y.axol: &»( n àoià?opov] Xa(l6àveiç... C'est une phrase
analogue qui e^t traduite ci -dessus. — Si l'on préfère lire st oï to y.oivbv >>aii.6dc/£'.v
Soxâç, on traduira: « mais si tu t<- dis que tu subis (?) le sort commun.»]
'1. [Par le mot stwftev, Marc-Aurèle a dû réserver le cas de maladie, de a icil i
ou de folie.]
[Voir à la pensée MI, 3, le vers d'Empédocle auquel sont empruntés ces mot*,
et Le commentaire qu'en donne Marc-Aurèle lui-même.]
l'I N >l I M M Ut' S t 11 I I I
44
\ oia .• ne I &< « 01 dei i loi menu] que le pi ésenl ( eu i
préfèrent la gloire posthume ne t'avl entpa qu< l< bommc
;i \ «m i i i seronl pareili 1 oeui d'Ai^jourd'hui, qu'ih on) de le
peine ;i suppoi 'ter ; <tu\ Ii .m i iero ni morteli ( |ue tfim-
pOrtenl donc ni (Irlinilixr le- rchos <tr leur \«.i\ ou I <i|hhi<mi
qu'ils peuvent ;i\<>ir de loi '
45
Prends moi, jette moi où tu voudras! IÀ aussi mon génie
conservera sa sérénité; je veux dire qu'il se contentera d être
el d'agir d'accord .née la loi de sa propre constitution
45*,
Ceci vaut il donc la peine que mon âme soil en mauvais
état, inférieure à elle même, rapetissée, troublée, pleine de
désira el de craintes 3? Trouveras tu même quelque chose qui
vaille ce prix?
46
A aucun homme il ue peut rien arriver qui ne soil un événe
ment humain: ni à un bœuf rien qui ne soit fait pour un
bœuf; ni à une vigne rien qui ne soit propre à une vigne; ni à
une pierre rien qui ne soit fait pour une pierre. Si donc il
n'arrive à tout être que des événements habituels et naturels.
pourquoi t'indigner? Car la nature universelle ne te destinait
rien d'insupportable 4.
47
Quand lues affligé par une chose extérieure à toi, ce n'es!
pas cette chose qui te pèse, mais ton jugement sur elle. Or,
i. [Gouat : «d'accord avec sa propre nature. » — Cf. supra IV, S, el la noie, el I I.
m, note finale.]
2. Dans le manuscrit A, les deux paragraphes forment deux pei séec
Elles ne me paraissent, en effet, avoir aucun rapport.
3. On a hésité sur le sens des deux participes ffuvâuouiw] et ossyou?/.*. Le premier
n'est pas grec, et c'est avec raison que Gataker a proposé i:-//: m n fré-
quente dans Mare-Aurèlc. Le sens de opsvo'jLÉvr, est clair: il s'oppose à rrjpofiivi). On
sait l'importance qu* les Stoïciens donnaient dans leur morale au désir et à la peur.
!\. [Couat: ((N'est-il pas vrai que la nature universelle ne t'a rien infligé d'insup-
portable?»— Marc-Aurèle lui-même a détini à la pensée Y, 8, l'imparfait ïzizt.}
I76 BfBLiOTUÈQUJ DM UNIVBESlTfifl ni midi
il tYsi possible de l'effacer immédiatement. Que si la cause
de ton affliction est dans la disposition intérieure, qui t'em
pêche de rectifier tes principes1? Si enfin lu es affligé parce
que lu n'accomplis pas tel acte (jui te paraît bon. pourquoi ne
l'accomplis -tu pas plutôt que de l'affliger? — Mais quelque
chose de plus Tort que moi s'y oppose. — Alors ne t'afflige
point, car la cause de ton impuis>anee ne dépend pas de toi.
— Mais il ne vaut pas la peine de vi\rc si je ne fois pas
cela. — Sors donc de la vie sans amertume, ainsi (pie meurt
celui qui accomplit ce qu'il a résolu, el sans en vouloir à ce
qui t'a lait obstacle \
1. [Cette pensée accuse nettement la valeur propre du mol ooyua parmi tes divers
termes par lesquels les Stoïciens désignent le «jugement». Kp-.ua, à la première
phrase, n'exprime qu'un jugement particulier, (pie nous portons à un moment
ilonné sur une chose donnée. Le dogme est un jugement fixe, résultant d'expériences
antérieures, el promu à la dignité de règle de conduite. Non seulement notre action.
mais la «disposition» dan^ laquelle nous agissons, le fond même de notre être
moral dépend de lui. 11 peut d'ailleurs, comme tout jugement, être redressé, à la
suite dune expérience nouvelle qui le condamne. J
3. [Marc-Aurèle n'a consacré à la mort volontaire que de rares et courts passages
de ses Pensées; à vrai dire, les circonstances de sa vie — qui ne pouvait être celle d'un
Caton ou d'un Thraséas — ne devaient pas lui en rendre l'idée bien familière. Même
le nom stoïcien du suicide (Èçaywyr,) ne se rencontre pas dans son livre. Malgré tout,
nous pouvons essayer de rassembler son témoignage sur la question et le confronter
avec la doctrine de l'École.
Toute doctrine stoïcienne du suicide commence par affirmer (pie la vie et la mort
sont choses indifférentes. Il s'agit d'établir que l'acte par lequel on choisit entre elles
ne l'est pas. Toute ou presque toute la théorie intermédiaire manque dans les
Pensées. Mais on y trouvera le dogme initial et la conclusion. L'un est nettement
formulé en plusieurs passages, notamment à la tin de l'article II. 11, et au milieu de
l'article V, 29; l'autre est impliquée clan- cette affirmation du début du livre III que,
pour choisir le temps de «se donner congé» (s^âys'.v éotutov), comme pour accomplir
le devoir en sa perfection, il faut « une raison exercée ».
Marc-Aurèle n'a guère considéré que deux cas possibles de mort volontaire. Il
nous indique l'un aux articles 8 et 32 de son livre X. Là, c'est la seule crainte d'une
défaillance qui le fait penser à quitter la vie. « Sois résolu à t'en aller, si tu perds la
vertu. A quoi bon vivre sans vertu?» — A la pensée V, 29, et ici, il s'engage à partir
si un obstacle extérieur empêche l'action qu'il a jugée digne de lui : exercice de la
raison et accomplissement du devoir, surtout du devoir de solidarité. Cette fois, le
suicide est la dernière résistance à une contrainte immorale, et l'affranchissement.
Ces deux cas sont contestables, et surtout le premier. Si la mort, qui est indiffé-
rente, vaut mieux que la déchéance morale, qui est mauvaise, quelque chose vaut
mieux que la mort, c'est la vertu. Le suicide par crainte de défaillance n'est qu'une
compromission; c'est déjà une défaillance. Aussi, Marc-Aurèle ne le recommande-t-il
que comme un moindre mal à défaut du bien. — Au contraire, il n'est pas douteux
qu'à son avis, dans les circonstances qu'il suppose ici même, la mort soit le meilleur
et le seul parti à prendre. Il ne s'agit d'ailleurs pas de choisir entre un bien et un
mal, ni entre une chose indifférente et un bien : tout comme la mort, la contrainte
extérieure que nous pouvons subir doit nous être, semble-t-il, indifférente, puis-
qu'elle n'affecte que notre action, non notre volonté, et qu'elle peut devenir elle-
même (IV, 1) une matière à exercer notre vertu. Mais il y a des degrés dans
l'indifférence; certaines choses, sans être bonnes, sont souhaitables (7rpor,y|xÉva : ef. la
Il n II IM M \ l.i \ I l; I I I
48
Souvient toi que le principe dirigcanl i I Invincil ind
il se replie en lui même el v« mfiil ' .« lui même quand II ne
fa il pai ce qui lui déplatl . même | > u n ' > ' i m ■ < ■ •
note h II pen éo IV, i; ou
. i /. n- i /■/. ni \n docdI
,1, ii i faut comptai II contraint d'un homtni d( bfc n qui n mplii
l'acte qu'il Juge utile lui hommes, tu nombre d< prem
niir belle ni"i i I Stoto e, I lot il., VII, 16)
i , mol ne nous trouvon l< I mena i • i m " Il '
mots i "■ "' i" ' i "•' nt le iui< Ide • omo
pouvons | le 11 pen la llbei
1,1 pure doctrine de l'I colc ( >n i< i spp< Ile l'< loquen( n
de la Providence (II, 9), Sénèqw 1 1 iton d 1 tlqu< I m manu latara fié
viam lltud faciei.. ; liherhilrm, <|ii.iin |..i|m.m- QOD DOtult, CltOOl dftbit Si qu
ohoêe distingue Ici Sénèque <i<- Mari • turélt . ce n'< il que le Ion don! il* onl exprime*
les mêmes Idées, >;ms doute, quand je Ht I li pen 6e V, 99: «Il 3
je m'en \.u«< : li i»<-iir affaire ' Je ne croie pat que oei mole, qui l
dédain il'- Is mort, déprécienl en < i l '* »' que ce loil II mort volontain M il r-st
certain que, pour parier du luicide, Marc lurèle ne l'eel jamaii mis en ;
Lhousiasme, C'esl peul être que I»' problème «!«• la liberté n'avail pai p m lui le
même intérêt dramatique (cf. infra \l, 10, note 1 i r 1 .- 1 1 # - > <ju<' poui d'auti
C'esl aussi qu'il n'a jamais eu .'< prévoir pour lui même i«- lui idi
étail pas moins homme à comprendre !<• m<>t héroïque du chel républicain lorsqu'il
eut assuré i«' sorl de ses amis el ie Fui fait apporter son épée : Maintenant, j<
mon maître. 0
Mais le cas de Gaton <st rare; c'est le premier qu'on p dans ri
quand on traite du suicide, celui sur lequel on n'hésite jamais. Il j eut ùa - maitree
du Portique qui se donnèrenl la morl à la Buite d'accidents tans impoli
avoir, comme Gaton, une grande cause à honorer, /('-non, lui-même, étant vieux, m
pendit pour un doigt cassé. Or, les stoïciens ont reconnu légitime et raisonnable
(E'j'Àoyo; s^aywyr,) le suicide de leur fondateur. C'est qu'ils ont estimé que, dans sa
sse, leur premier maître a\aii compté et pesé toutes les rai-nu- contraire
mourir ou de demeurer; ainsi l'on admettait qu'il avait dû considérer l'impossibilité
matérielle de continuer à remplir tout son rôle d'homme, le peu de jours dont il
tenait quitte le destin, l'heureuse occasion qui lui était offerte, peut-être la den
de partir librement, la vertu qu'il exerçait en renonçant à la rie. Mais le besoin de
fuir la douleur physique n'avait certainement été pour rien dans son ge-te; et il
n'avait pas du s'arrêter un instant à l'idée qu'en devançant l'heure lixée par Dieu
il entreprenait sur sa toute-puissance; les Stoïciens ont cru (cf. dans Sénèque le
passage du De Providentiel cité un peu plus haut) que rien ne devait plus réjouir les
regards de Jupiter qu'une mort vraiment libre.
On ne pouvait, certes, se proposer avec la même assurance l'exemple de Caton
d'U tique et celui de Zenon. C'est que, les motifs qui déterminèrent celui-ci étant
beaucoup moins éclatants, le calcul en devait être beaucoup plus délicat; mal inter-
prètes, ils pouvaient autoriser des morts volontaires qui eussent été déjà de? LâcJ
Pour comprendre absolument le suicide philosophique de Zenon, il eût fallu pouvoil
entrer dans son àme. Pour essayer seulement de le comprendre, et pour l'imiter,
il faut une liberté d'esprit et une assurance de jugement singulières, < une r
exercée, » a dit Mare-Aurèle (111, 1). Ce mot ne s'applique évidemment pas au
suicide que prévoit la présente pensée. 11 faut en conclure que notre auteur admettait
au?si le plus curieux, et, si l'on peut ainsi dire, le plus savant des suicides stoïciens :
celui auquel on se résout dans les circonstances ies plus banales par de* raison-
justes et bien déduites.]
1. [Cf. VII, 28.]
v. GO t AT -P. FOURNIE H. » I
i 'je BIBLIOTHEQUE DEà UNIVERSITES m >tit>ï
raison. Qu'es! ce donc quand il juge les choses d'après la
raison el après mûr examen? L'intelligence libre de passions
esl une acropole; l'homme n'a rien de plus solide où il puisse
se réfugier el être toujours imprenable. Celui qui n'a pas vu
cela est ignorant; celui qui Ta vu et qui ne cherche pas ce
refuge esl malheureux.
49
\c le dis rien de plus à toi-même que ce que te rapportent
les représentations qui s'offrent d'abord à toi. On t'a rapporté
qu'un tel dit du mal de toi; voilà ce qu'on t'a rapporté, mais
non que tu en es blessé. Tu vois1 que ton petit enfant est
malade. Tu le vois; mais qu'il soit en danger, tu ne le vois
pas. C'est ainsi qu'il faut t'en tenir à tes premières représen-
tations3 et n'y rien ajouter de toi-même; ainsi il n'y a rien H.
Ou plutôt ajoutes-y, mais en homme qui a l'expérience de ce
qui arrive dans l'univers.
50
Ce concombre est amer. — Laisse-le. — Il y a des buissons
sur le chemin. — Laisse-les; cela suffit. Ne dis pas en outre :
pourquoi de pareilles choses existent-elles dans le monde? Tu
prêterais à rire à un naturaliste, de même que tu prêterais
à rire à un charpentier et à un cordonnier si tu te plaignais de
voir dans leur atelier des copeaux et des rognures \. Encore ces
ouvriers ont-ils où jeter ces débris; mais la nature universelle
n'a rien en dehors d'elle. Ce qu'il y a d'admirable dans son
art, c'est qu'enfermée dans les limites qu'elle s'est tracées, elle
transforme en elle-même •"> ce qu'elle contient qui semble
i. Le texte donne $\ïtzm. Cette première personne ne s'accorde pas avec ce qui
précède. La seconde personne, proposée par Nauck, parait nécessaire.
2. [(loua! : « impressions, » — de même qu'à la première phrase.]
3. [Conat: « alors il ne t'arrivera rien. » — Même traduction chez Pierron et
M. Micliiut du présent yiverai. Si la catastrophe doit se produire, en quoi la suspen-
sion du jugement pourrait-elle' l'éviter? — Cf. supra IV, 7.]
!\. [Les mots tô>v xara9XSuaÇo|iivc*v sont traduits à la phrase suivante par les mot>
«ces ouvriers». Littéralement: «les copeaux et les rognures de leur travail. Encore
ceux-ci...» Nous avons déjà vu (VI, 4o) le verbe xxtaoxeuâ(e?0at appliqué à «un
instrument, un outil, un ustensile quelconque».]
5. [Couat : « elle transforme en son sein ce qui est en elle et qui semble dépérir. »
— J'ai voulu traduire etç et Ivdov. Ce qui rend ce passage difficile, c'est que tout ce
M S II > l.l M UU M II I I
dépérir, i lellllr el devenir Inutile I >•■ tonl « ela ell< I il
choses nom elles, pour n.i\oii besoin ni de matière1 em
pmntée eu debon ni d'un rmlrnil ou jrln ,, |M,inMhji« l-.lli-
se contente de l'espace el de la matière qui lui appartiennent
el de i art qui lui est propi
51
Dans tes actea point d'indolence; poinl de désordre d i
entretiens; tache i<i retrouver parmi tes représentatio que
ion (me ne soi! pas toute contractée, puis toute emportée pai
la joie: ne t'embarrasse pas d'uiTaires dans la de
Ils tuent, ils distribuent la chair des victime-, il- lancent
malédictions. Quel rapport > a t il entre ces actes el le (ail de
conserver ta pensée pure, [raisonnable. I modérée, juste? vi an
homme se tenant près d'une source claire el douce l'invecti
vait, l'eau appétissante ne cesserait pas pour cela <lc jaillir II
aurait beau y jeter de la boue, de l'ordure, elle disperserait
\ ite ces immondices el entraînerait tout sans en être souillée.
Comment donc te procureras-tu une source intarissable? En
conservants à toute heure de ta vie ta liberté, en restant
bienveillant, simple, modeste*».
que s'assimile la nature (dont Mare-Aurèle a dû comparer l'œuvre à La 1 de*
vivants) faisait déjà partie d'elle-même. La comparaison est donc nécessairement
inexacte. Pour faire bien comprendre la pensée de l'auteur, il faudrait aj
quelques mots à son texte, ditv par exemple: «La nature transforme en parties
d'elle-même, et non en objets distincts d'elle, des matériaux qu'elle ne tire pas d'ailleurs,
mais trouve en soi. »]
i. [Gouat : « substance. »]
3. [Var. : « ne laisse pas vagabonder tes idées. »]
3. [Gouat: «ne passe pas ta vie dans les affaires. » — Je n'ai voulu quY
l'amphibologie.]
\. Otte pensée est, dans toutes les éditions, rattachée à la précédente, avec laquelle
elle n'a aucun rapport. Cependant, d'après les manuscrits A et D, elle formerait un
article isolé.
5. La leçon ordinaire (Hst: xa\ ur, sssap; pSov ueaurtfv) est évidemment inaccep-
table. Il faut adopter celle des manuscrits A et D : ïli'.;\ *v puXaettpc vueutov, qui esl
très claire.
6. [On ne peut guère admettre la leçon courante: u.=-x toO eupavâç, /.a: à-Vtb:.
y.a\ aiÔ7j|j.ovo);. La conjecture de Reiske : evjlsvoO:... kicXoûç... a:or,u.ovo: est très claire:
mais, si on l'admet, comment expliquer la faute?]
1H0 BIBU01 ni < »i i i»i 8 i Mvrnsiiis ix midi
52
Celui qui ne sait pas ce qu'est l'univers ne sait pas où il est.
Celui qui ne sait pas pour quelle fin ' existe l'univers ne sait ni
qui il est ni ce qu'est l'univers2. Celui qui a négligé de s'en-
quérir dune de ces choses ne pourrait même pas 3 dire pour
quelle fin il existe lui-même. Que penses-tu donc de celui qui
fuit [les reproches et les injures ou recherche'» [les éloges et]
les applaudissements d'hommes qui ne savent ni où ils sont
ni ce qu'ils sont?
53
Tu veux être loué par un homme, qui se maudit lui-même
trois fois dans une heure? tu veux plaire à un homme, qui ne
se plaît pas à lui-même? Peut-il, en effet, se plaire à lui-même,
celui qui se repent de presque tout ce qu'il fait?
54
Il ne faut pas seulement s'unir par le souffle à l'air qui
nous enveloppe, mais aussi par la pensée à l'intelligence qui
embrasse tout ! La force intelligente n'est pas moins répandue
i. Tipb; o n 7i£cp\jy.cv; de même un peu plus bas. Si l'on maintient ces deux
membres de phrase, il y a dans le raisonnement une tautologie. Mais le pronom
a-jxo:, qui se trouve seulement dans le second membre de phrase, indique que dans le
premier le verbe icéçuxev doit avoir un autre sujet. J'écrirais donc la première fois
irpbt o -i icéçuxcv 6 %6g\loç. Le raisonnement de Marc-Aurèle est le suivant: La
connaissance de l'univers est la condition de la connaissance de nous-mêmes. La
plupart des hommes n'ont pas cette connaissance.
■>. [Et par conséquent: ni qui il est, ni où il est, — comme il va être dit à la
dernière phrase.]
3. [Il est nécessaire de restituer, dans le texte grec, la particule av devant le verbe
Eiiroi.]
'». cpE\lyo)v f,otov n'a aucun sens. La correction qui se présente immédiatement
à l'esprit est peuywv r, ouo/.iov. Cette correction est la meilleure de toutes. Marc-Aurèle
déclare ici, comme il l'a fait ailleurs (XI, n), que le sage ne doit s'occuper de la
louange des hommes, ni pour la rechercher ni pour la fuir. — [A la pensée XI, u, il
n'est nullement question de la louange des hommes. Ici, on ne comprendrait pas
«lue Marc-Aurèle nous blâmât de la fuir. J'admets, d'ailleurs, la correction de rçôiov
en y, SuÂxuv: elle ne suffit pas; il faut trouver un régime à çevywv et construire la
phrase de telle sorte que rbv Ë7iaivov se rattache naturellement à 5u&xwv et à Su&xow
Beul. Gataker avait senti cette nécessité. Il avait voulu lire: 6 tcôv xootojvtwv r, <{/ôyov
ç>EU*f»v r, ëk&ivov oiwxwv. Sa correction, qui ne se borne pas à compléter le texte, mais
bouleverse l'ordre des mots et en fausse le sens (twv xporouvrwv ne peut désigner
ceux qui blâment), est malheureusement arbitraire. J'ai supposé la chute d'une ligne
'Mitre deux mots identiques et restitué : 6 [:ov :ùv y.axaoocovTwv bôyos rt] xbv :wv
xpoTOUVTW ETiaivov çe>;'(ov r, Stwxcov. Les mots que j'ai imprimés ci-dessus en italiques
correspondent à ceux que je suppose disparus du texte grec.]
ii «si i - di m tav m ni i »
en toul i i<i i el n'« itl pai oioim i la portée <!•• i bomra ible
de se l'assimiler que l'aérienne1 •• Is portée elui qui p
i.i respirei
55
Tas plus que le irics en général ne Fait de mal .« i unirai k
\k c d'un Individu ne peut nuire ■> un autre il ne peul nui
m effet, qu'à relui ;i qui ;• été donné !<• p<»u\<)ii <i
délh rer dès qu'il le voudra
56
Le libre arbitre ; du voisin es) indifférent au mien comme
respiration et sou corps. Car, bien que nous soyoni précisé
ment ués les nus pour les autres, nos principe- dirigeants ont
pourtant leur autonomie personnelle; autrement le rice du
voisin deviendrait mon propre mal. Dieu ne l'a pas voulu, afin
qu'il ne lut au pouvoir d'aucun autre que je fusse malheureux
57
Le soleil semble se répandre partout, et il est. en effet,
répandu partout, mais sans s'écouler '». Cet épanchement est le
résultat d'une tension. Vussi donne-t on aux rayons du soleil
i. |Couat: «que la niasse de l'air.» — Il n'y i nulle raison de modifier devant
l'adjectif qui traduit àsfxo&q;, le substantif qu'on a écrit devant l'adjectif qui traduit
vospà: c'est le môme en grec. Il faut interpréter littéralement cette pensée; elle ne
saurait étonner un lecteur accoutumé au matérialisme <'l au dynamisme stoïciens.
D'une part, l'intelligence ou la raison est, pour afarc-Aurèle, en particulier, an
élément distinct des quatre traditionnels: terre, eau, air e( feu (snpTO 1\. \. noir
finale; VI, 17. voir la note complétée aux Addenda; infra IX. 9, s" note); m matière
est celle même de l'éther, ou du feu «artiste», qui est à l'extrémité du cercle du
monde, et qui enveloppe l'air et le feu moins pur. Nous avons tu d'autre part (IV, si,
re note, reportée à V Appendice) les Stoïciens repartir en deux groupes les éléments
éléments actifs — l'âme du monde — el éléments inertes — le corps du monde. —
L'air est déjà un élément actif; il y a de l'air dans notre âme, au moins dans notre
àme animale. C'est cette activité qu'exprime ici le mol S-jvouuc-]
3. [Cf. supra Y, 23, et la note, rectifiée aux Addenda; VII, 33, et la note finale.]
3. (Il est difficile de donner de to icpogciperixcw une traduction littérale. Ce noi
un de ceux (cf. IV, as, lin de la note) par lesquels 1 - Stoïciens < 01 1 désigné le prin-
cipe dirigeant». La pensée ci-dessus nous présente, d'ailleurs, KpooctpetCM
r,y£u.ovixbv comme synonymes. — La fonction du principe dirigeant que les Stoïciens
nommaient Tzpoxipzv.; est définie par Stobée (Ecl . II, i6&). Us entendaient, nou-
dit-il, par ai'psT:; une volonté réfléchie {po.Wr^:; ï\ àva/.v '.7;j.v1 ». et par ■poacpeoi;
une a;.ps<7'.; qui en précède une autre (aîpetFt; ~zb xlpéaewç), c'est-à-dire un d
réfléchi et prémédité.]
4. èxxé^vTou. Ce mot est expliqué par la suite du raisonnement. Il ne s'agit pas
d'épuisement, comme on l'a cru à tort, mais d'écoulement sans direction, paroi!
à celui d'une eau qui s'en va sur une pente. — [Cf. snprn IV, 11, 3" note]
iSa BIBLIOTHÈQUE DBfl l M\ Kltsi i l'.s i>l MIDI
le nom d'ttrtftcç1, du verbe bctcfvcoOat (s'étendre). Ce qu'est un
rayon, tu peux t'en assurer en regardant la lumière du soleil
qui pénètre par une étroite ouverture dans une chambre noire;
elle se dirige en ligne droite- et va pour ainsi dire s'appuyer °>
sur le corps solide qu'elle rencontre et qui intercepte le pas
sage de l'air situé de l'autre enté: là, elle s'arrête, sans glisser,
sans tomber, \insi doit s'épancher et se répandre la pensée '«,
sans se laisser couler, mais en se tendant; ainsi elle doit peser
sur les obstacles qu'elle rencontre, sans violence, sans empor-
tement; il ne faut pas qu'elle tombe, mais qu'elle se tienne
droite, éclairant l'objet qui la reçoit. Ce qui refuse de la
réfléchir 5 se prive de sa lumière.
58
Celui qui craint la mort craint ou de ne plus sentir ou de
sentir autrement. Mais si l'on cesse de sentir, on ne doit plus
sentir aucun mal; si Ton acquiert une autre sensibilité, on
devient un autre animal 6, et Ton ne cesse pas de vivre.
i . [11 est à peine utile de relever l'invraisemblance de cette étymologie.]
2 . yîv£Tat xoex' vJ):j n'est pas clair; Tecverai, proposé par Coraï, vaut mieux.
3. Le substantif £r:Ép£tatç, qui se trouve plus loin dans le second terme de la com-
paraison, justifie la correction de Reiske, SiepEiorcai, au lieu de SiaiseÏTou.
'i. |Couat : « ta pensée. » — Voir la note suivante.]
5. [Couat : «de la suivre. » — Je ne suis pas sur du sens de cette dernière phrase.
Cependant il me semble impossible de traduire 7rapa7téu7rciv par « suivre ». Les
dictionnaires n'indiquent pas et le contexte n'impose pas cette acception du mot.
Chez les meilleurs auteurs, ce verbe s'applique à la montagne qui renvoie un écho;
pourquoi n'exprimerait-il pas aus<i la réflexion de la lumière? Il est vrai que, dans
les lignes qui précèdent, il s'agit inoins d'un miroir que d'un écran. Faut-il donc,
pour donner ici à 7iapa7i i\nzio un sens qu'il a souvent, celui de « laisser passer »,
supprimer la négation du texte grec, comme le demande Coraï? On traduirait alors
ainsi la dernière phrase : « Ce qui laisse passer à côté de soi le rayon de la pensée se
prive de sa lumière. »
De toute manière, on n'aboutit qu'à une traduction en somme assez obscure, Elle
s'éclaire, elle aussi, quand on rapproche l'article VIII, 54, de celui-ci. «S'unir par
la pensée, » disait plus haut Marc-Aurèle, «à l'intelligence qui embrasse tout.» Il
dirait ici : « Se laisser pénétrer par l'intelligence qui se répand partout, et la réfléchir
comme un miroir. » Les deux textes s'accordent aisément. Je ne doute guère que to
-apa7:£ti7:ov ne désigne ici la raison humaine, reflet de la raison divine. Un peu plus
haut, à l'endroit où j'ai corrigé « ta pensée » en « la pensée » (je ne vois pas ao-j dans
le texte grec), j'entends qu'il s'agit de toute pensée, de la notre aussi bien que de celle
qu'elle réfléchit. ]
0. [Marc-Aurèle a toujours attribué, comme on l'a vu (supra III, 16, 3* note;
V, 26, avant-dernière note), la sensation au corps. A la fin de l'article III, 3, envisa-
geant les mêmes hypothèses qu'ici, il écrit : « Si tu ne dois plus rien sentir, tu
cesseras... d'être l'esclave du corps...» Ces divers passages nous donnent le sens des
mots a-Vjr.Ttv ÉTSpoiav et àV/.oîov ^oov ï<jrr Aux trois conceptions de notre destinée
future entre lesquelles il se partage ordinairement : dissolution, extinction et dépla-
cement {supra \\ . m. note finale: VII, 3a), Marc-Aurèle ajoute ici la métemp^ychose.]
il- » » ni i m • ^ • i i i
1rs hommes ion! i\6.\ le un* p<nir le- ;iuln- m |.
donc, on IlippOl l€ l<
60
( m (lèche i€ mou i autrement que l'esprit cependant I
prit] même quand il prend ic précaution! el tourne aul
des choses qu'il examine1! n'en \.« pai moini toul droil ren
son hut '.
61
Entre dans le for intérieur «le chacun ;. maie permet!
chacun d'entrer dans le tien.
LIVRE l\
l
Celui qui commet l'injustice est impie. En effet, la nature
universelle a créé les êtres raisonnables les uns pour les
autres 4; elle a voulu qu'ils s'entr'aidassenl les uns les autres
selon leur mérite, et qu'ils ne se fissent jamais aucun tort.
Celui qui transgresse cetle volonté"' de la nature est évidem
ment impie envers la plus antique des divinités.
Celui qui ment est également impie à l'égard de la même
divinité. En effet, la nature universelle comprend toute réalité.
Or, tout être est parent 6 de toute réalité. En outre, la nature
i. [Var. (a* manuscrit): « et se met à faire l'examen d< - I ses
». [Cf. supra VI, 17, et la note, complétée aui 1 la. Le \ . «rai, qui
convient au mouvement d'une Qèche, D'exprimé pas très exactement la dém
de l'esprit. Mais Ktv&tat, qui admet voû: comme sujet, ne serait pas moins impi
à coté de péXo:, et il ne fallait qu'un seul verbe à la fin de la première phras
3. [Je n'ai pas jugé plus nécessaire ici qu'à l'article IV, 38 <\oir la 1
substituer aux mots u for intérieur» la traduction ordinaire de m Dans
une pensée du livre IX, 27, qui explique celle-ci, Ifarc-Aurèle lui-n .rit :
k'p^o'j litt :à 'Vj^âpta ûcOtcov, et non plus : tdc vjys|iovtxà k*jt«v.]
4. [Cf. supra II, 1 ; V, 16; V. 3e; VII, 55; VIII, 5q, etc.]
5. [Couat : «Celui qui transgresse l'ordre de la nature. — Cf. supra IV, 49.
V note.]
0. [Couat : « Or, toutes les parties de la réalité sont unies entre elles par des liens
étroits. 0 — Il m'a semblé que peut-être o'.xsko: voulait être traduit avec plu> de
cision; ensuite que la distinction — si vague qu'ePe lïit — de rà S rca el rà l
pouvait être maintenue dans la traduction. La pensée de Marc- Aurèle est celle -
m L'homme ne peut pas plus être indifférent, à plus forte raison hostile, à la réalité,
donc à la vérité, qu'à un allié ou à un parent. >>)
1 84 mr.i.h u m oi i m^ UNIVERSITÉS M MIDI
s'appelle aussi vérité; elle est la cause première de tout ce
qui esl vrai. Celui qui ment avec intention est donc impie, en
tant cpie c'est une injustice de tromper; celui qui ment sans
le savoir l'est aussi, en tant qu'il se met en désaccord avec
la nature universelle et qu'il dérange le monde en entrant en
lutte avec la nature du monde. Il lui fait la guerre, en effet, en
se portant, même involontairement, vers ce qui est contraire
à la vérité. Il a négligé les moyens1 qu'il avait reçus de la
nature de distinguer le faux du vrai, au point qu'il n'en est
plus capable.
Impie aussi celui qui poursuit le plaisir comme un bien et
qui fuit la douleur comme un mal. Celui-là, en effet, ne peut
manquer d'accuser souvent u la nature [commune] de répartir
injustement ses dons entre les bons et les méchants, parce que
les méchants vivent souvent dans le plaisir et possèdent ce
qui le procure, tandis que les bons vivent dans la douleur
et sont exposés à ce qui la fait naître. En outre, celui qui
craint la douleur craindra, sans doute, ce qui survient dans
le monde; or, c'est là une impiété. D'autre part, celui qui
poursuit les plaisirs ne s'abstiendra pas de commettre l'injus-
tice; voilà encore une incontestable impiété. Ceux qui veulent
suivre la nature doivent donc, d'accord avec elle, être prêts
également à ce qu'elle admet également, car elle n'aurait pas
créé les biens et les maux si elle ne les admettait également.
Ainsi donc, celui qui n'est pas également prêt à la douleur et
au plaisir, à la mort et à la vie, à la gloire et à l'obscurité,
que la nature admet également 3, celui-là est évidemment
i. [D'après Stobée {Ed., II, i(>2), les Stoïciens entendaient par àsopu.r, le contraire
de l'opjxr,, c'est-à-dire un « mouvement de L'Ame qui se détourne d'un objet ». Mais
ils ont en même temps conservé l'acception usuelle et classique du mot, le sens que
M. Gouat lui donne ici. Sauf peut-être en un passage (XII, 17), où kzoyyr, n'es!
restitué que par conjecture, Marc-Aurèle désigne toujours ainsi (IX, &a; \, 12) les
«moyens» de savoir la vérité ou de se conduire suivant la justice. Cf. aussi Ëpictète
(Diss. IV, 1, 5i): ïyv.; à^opuoe: Trapà TÎj; puaecoc icpoç Bupeffiv ir,: xkrfigiaç.
Les « moyens » de connaissance que Mnrc-Aurèle appelle ici gçoppLflà sont surtout
la raison et le pouvoir de suspendre son jugement. Il faut, sans doute, y joindre
certaines croyances innées el communes a tous Les hommes, dont le consentement
universel sutïit, pour les Stoïciens, à garantir la certitude, les xotval evvotai ou
r.zoVr^v.z (Zeller, Pliil. des Gr., III3, p. 7^) : ici le verbe rcpoeiXrjçet en rappelle au
moins le nom.]
•. [Cf.' supra VI. 16.]
.'*. [Cf. supra II, 1 1 . |
1-1 ( I I « hl I I
impie Je dis <|u«- i.i nature le idmci • '•; ■■•!• ;m<-ni «
«,,!,• rrs rlinsri .ni iwn! i ilrniflil il tOU l« I tlt <|<n n
ei se m i rcleiii, oomme ta oon 6quen< e l( iqu< d un intiquc
déorel de la Proi Idenoe, qui, ayant • l'orl fine dé tdé I un
oartain momenl d'organiseï ce mond< conçul telle bI tell
raisons ' el détermina telle el lelle foi a ratrleei de
êtres à venir, avec leur existence, leurs tnétamorpho i leui
succession, telles que nous les voyon
2
Il serait digne d'un homme supérieur' de sortir «lu milieu
des hommes sans avoir même goûté au mensonge, t l'hypo
crisie, à la luxure et à l'orgueil. Il > s encore une ressoui
si l'on échoue », o'esl de mourir dégoûté de tout cela. Pi
rerais lu demeurer auprès du vice, et l'expérience ne te
persuade-t-elle pas encore de l'enfuir loin de cette peste? La
corruption de la pensée est une peste [en effet, ei bien] plus
terrible que celle qui altère et corrompt I air dont non-
sommes enveloppés. Celle-ci n'est que la peste des êtres
i. [Le texte du passage est contesté. If. Coual i traduit Is leçon du manuscrifl \.
qui est devenue celle de M Stich : xarà to i;r; to-.; ri
tivi apvata t?,; Trpovota;. Dana la vulgate To-; manque. Coraî s'est autorisé d<
lacune pour corriger le texte de A, où l'article indispensable aurait été, selon lui,
arbitrairement replacé. Il lit: -o\; xauck ~<> V-.r: ytvouivotc, ce qui lait presque on
pléonasme avec lesdeui mots qui suivent. Y> aurait-il pas la une glose? M Etendall
l'a pensé.
Le sens ordinaire de xottoi to i;/-,; dans les Penséei ne me paratl guère justifier
deux corrections. Suivie le plus souvent d'un régime au datif (voir 17 de
M. Stich), cette expression marque moins la succession que la conséqu ffique
D'autre part, les dernières lignes du présent article expriment un déterminisme
absolu, qui fait tout découler d'un acte initial et unique de la Providence : ce
pas la première fois (voir la dernière note au livre VU) que non- renc Mitrons
doctrine dans les Pensées. 11 est extrêmement vraisemblable que les mots xarà to
£:r(: tiennent lieu ici de la formule habituelle -n:' UcaxoXo'jOiptv.
C'est du moins ainsi que les a interprétés M. Gouat. — Je me demande si k - mots
xarà to i;r,: n'ont pas été déplacés dans les manuscrits. La phrase sérail
plus claire s'ils précédaient immédiatement àzar, revu]
3. [Gouat : «en conçut Tordre logique et détermina la Loi des puissai a -
triées des êtres à venir. » — Évidemment, le mot Xrfyouc et la périphrase qui l'a
pagne, Suvàtietç yovijiou;, désignent ici les i raisons séminales », que j'ai définies à la
seconde note de l'article IV. i'j.)
3. [Sur le sens de gapièVraTo;, cf. la V note à la pensée VI. i |.j
4. [Le proverbe Bsuxspoç ttaoO: [d\ Platon. PhéJon. 99 D), dont les mots • si l'on
échoue» ne donnent qu'une traduction bien terne, désigne la navigation à la rame,
lorsque le vent contraire ne permet pas de tendre les voiles, et par suite tout expé-
dient qui, à défaut du meilleur moyen, permet encore de se tirer d'affaire. — Goual :
k 11 y a encore une bonne manière de les quitter. »]
i8(i BIBLIOTHEQUE DBfl UNIVERSITÉS i>l MIOJ
vivants en tant qu'êtres vivants ; l'autre est la peste de
l'homme, en tant qu'homme.
3
Ne méprise pas la mort; tais-lui, au contraire, bon visage,
parce qu'elle est aussi voulue par ' la nature. La dissolution
de notre être J est un fait naturel, tout comme la jeunesse et la
vieillesse, comme grandir, être adulte, avoir des dents, de la
barbe, des cheveux blancs, comme la procréation, la grossesse,
l'enfantement et les autres phénomènes qui arrivent avec les
saisons de la vie. L'homme se conforme donc à la raison,
lorsqu'au lieu de se montrer vis-à-vis de la mort mal disposé 3,
emporté, orgueilleux, il l'attend comme un des actes de la
nature i. Et de même que tu attends en ce moment le jour où
ton enfant sortira du ventre de ta femme, accueille de même
l'heure où ton âme s'échappera de son élytre. Mais veux -tu
une règle, sans doute assez vulgaire, capable néanmoins de
fortifier ton cœur~>? Ce qui te rendra surtout bienveillant pour
la mort, c'est d'examiner les objets qui t'entourent, et dont tu
vas te séparer, c'est de te dire avec quelles mœurs ton âme ne
sera plus mêlée. Ne t'irrite pas cependant le moins du monde
contre ceux-ci 6; tu dois, au contraire, t'intéresser à eux et les
traiter avec douceur, mais en te rappelant que ces hommes
dont tu vas être délivré n'ont pas les mêmes dogmes" que
toi. Un seul motif, si même il pouvait y en avoir un, était
capable de t'attirer vers la vie et de t'y rattacher, c'eût été
i. |\ar. : «parce qu'elle est aussi une des lois de la nature. »1
?.. [Couat : « de notre corps. »]
3. [Couat : « téméraire. » — C'est ô).oT/£po>; que M. Couat essaye de traduire ainsi.
Pierron avait écrit « méprisant » ; Bartliélcmy-Saint-Hilaire «oublieux)); M. Michaut
'préoccupé». '0>.oT/Ep(o: ne signifie ni l'un ni l'autre; il ne signifie rien ici. J'ai
admis la conjecture de M. Rendait, Sva^epto;.]
h. [Cf. supra m, 7.]
5. [Couat: «de fortifier particulièrement ton cœur.» — L'adverbe que j'ai sup-
primé semble traduire pour la seconde fois lâicimxôv, qui l'a été très exactement —
et suffisamment — par les mots «assez vulgaire» (cf. supra II, 10, en note). |
6. [Couat : « contre les hommes. » — Renan (Marc- \urele6, p. 48o) : « Ce n'est pas
qu'il faille te brouiller avec eux; loin de là. » Sur cet emploi assez fréquent du
pronom a-jTwv, ocOtoîç, kvtoÙ; dans les Pensées, cf. supra VI, <>, en note. Marc-Aurèle
ne désigne ainsi « que d'une manière vague ceux qu'il a en vue. Il paraît bien, ajoute
Renan (l. L), que Commode était du nombre. »]
-. [Couat : « croyances. » — De même un peu plus bas. Cf. supra \ 111, 4;, i" note;
111, iG. note finale (en Appendice); VIII, i4, etc.]
il. Il l>l M MU M M I «
(If \i\n* li\i'i «les liuiniiH's pn.l«- ifil \( iir:n< <;§ ' .
Mais lu \ois main tenu ni coinmr lu r , I rjui
la léparenl d€ orai n ce qui tu vil in en arrivt i l'écriai
Vient plui vite, ô mort, < i « * p<m que je ne Bnl i pti m'oa
blier moi même '
4
cdui qui commet nne Faute la oommel contre lui mén
celui qui oommel nue Injustice la commet contre lui mén
en se rendant méchant.
5
On est injuste souvent par ce que l'on ne fait pas autant que
par ce que l'on fait.
6
Il sutlii que notre jugement présent soit <t se sache vrai
que notre aelion présente soit une aelion de solidarité. <jue
notre disposition présente nous fasse accueillir Favorablement
tout ce (jui nous Aient de la cause universelle.
7
Efface î tes représentations, contiens les mouvements de
ton àme 5, étouffe tes désirs; sois maître de'1 ton principe
dirigeant.
8
Une seule àme vivante a été répartie entre les animaux
dépourvus de raison, une seule àme intelligente" distribuée
entre les animaux raisonnables. Il n'y a qu'une terre pour
i. :à TOiaCra côyaaTa. C'esl avec raison que Gataker a sub>titué à eetto le
Ta aCxà ooyaaTa.
2. [Cf. supra IV, 26.)
3. [Couat: «Il suffit de juger et de comprendre actuellement les cho>e-, d'agir
actuellement dans un esprit de solidarité, d'être actuellement dispose à accueillir... 1
Sur le sens de xaTOMU)irrtxéç, cf. supra VII, i3, 3' note.]
&. |Cf. supra VII, 1
5. [Couat : « tes tendances. » — Cf. supra VIII. 7, 3* note.]
6, [Var, : u tiens la bride à. »]
-. [Sur la distinction de L'aâme» et de l*«âme raisonnable >, cf. supr'i III.
r* note. A la fin de la présente pensée, le mot sa!/-. /a est au verbe àcvaicvéonav dans le
même rapport qu'épxrtxà au verbe optousv. On peut donc préciser ici — en ajoutant
«vivante» — la traduction de 'i>'jyr,. d'autant plus qu'en d'autres passages le même
mot signifie «la raison *>.]
[88 BIBLIOTHEQUE DES UMVEB81TB8 i>» MIDI
toutes les choses terrestres ' ; une seule lumière nous éclaire
et nous respirons le même air, nous tous qui vivons et qui
y voyons.
9
Tout ce qui participe à une nature* commune est attiré
vers son semblable. Ce qui est de nature terrestre rampe vers
la terre, ce qui est humide coule vers ce qui est humide;
pareillement, ce qui est aérien. C'est à ce point qu'il faut des
obstacles pour en maintenir de force la séparation. Le feu
s'élève dans l'air, attiré par le feu élément 3, et il conserve sur
la terre une telle aptitude à confondre sa flamme avec celle
d'un autre feu que toute matière tant soit peu sèche s'en-
flamme aisément, et d'autant mieux qu'elle est moins mêlée
d'éléments qui s'opposent à l'incandescence. Par conséquent,
tout ce qui participe à une [commune] nature intelligente est
aussi attiré vers son semblable, et l'est même davantage. Car
plus l'intelligence l'emporte sur tout le reste, plus elle est
disposée à se mêler et à se confondre avec ce qui est de même
origine qu'elle. Voilà pourquoi l'on remarque déjà chez des
animaux privés de raison des essaims, des troupeaux, une
éducation des petits et des espèces d'amours '»; c'est que déjà
il y avait en eux des âmes ; c'est qu'on peut découvrir en ces
êtres plus avancés un instinct qui travaillait à les réunir et
qui n'existait pas encore 5 dans la plante, la pierre, ni le
i. [Voir la pensée suivante.]
2. [Var. : « Tout ce qui provient d'une origine commune. » — Cf. supra IV, &, ol
la seconde note.]
3. [Marr-Aurèle, comme on l'a vu (VI, 17, en note rectifiée aux Addenda), distingue
le « feu élément » du feu « artiste » ou éther, qui l'entoure et l'emporte dans son
mouvement. Le feu terrestre ne se distingue du feu élément que par sa direction.]
U. [J'ai cité en note à la pensée IV, 22, un texte de Ghrysippe qui refusait aux
animaux toute << passion», parce que la passion est toujours l'œuvre d'un principe
dirigeant. Marc- Vurèle, qui a admis cette doctrine (XI, 20; cf. la fin de la r* note
à la pensée III, iO, reportée en Appendice), devait considérer l'amour soit comme le
mouvement normal d'une âme raisonnable (supra III, iG, 3' note), soit comme une
«passion». Les animaux ont. d'ailleurs, des instincts qui peuvent — de loin —
rappeler les nôtres. Cf. Sénèque (De Ira, 1, 3) : «Muta animalia humanis aflectibus
carent; habent autem similes illis quosdam impulsus. Alioqui, si amor esset, et
odium esset, etc. » Pierron, qui cite ce passage, observe très justement qu'« il n'y
a qu'un pas de la théorie des Stoïciens à celle de Descartes sur l'organisation des
animaux ».]
! Var. : «c'est que déjà il y avait en eux des âmes et une force qui travaillait
à reunir les êtres <-n ce qu'ils ont de meilleur, telle qu'elle n'existo pas dans la
I II 1)1 Vf \ 114 \ I JU I I
l>nis. ( Ihes lei animaux doué de raison 11 ) i de gou
iiciixiils, d61 aUililic'H, <1<" mu on de .1 oci.iliori ■ •! |»< n
(l.llll 1,1 -un i r. dr lliulrs r| <!.-, ,i| un lu . |',,i un |. ( I |
encore plus parfaits, al cjul s<»ni éloignés le uni de luta
il \ m cependant une sorte d'unité, par exemple parmi l<
astres ' , Mnsi, !<• piv le « ii «• ai i i\< n mti - um la
sympathie, même quand il- son! répart i an de autre
pilota, < elle h adu< lion d<
pourrait! lemble I 11, - sppuyi i m l'expr loi
trouvera plui loin, i oondltlon qu'on l'interpi nmc \i Coual M
que la préposition > puisse remplit le rôle de non i ou d'un simple sa u util d< n le-
tton, et Je m'en tiens à la version du premiei manuscril mil ratta< h
m< il et 1< oppo* mn Sui la bfc i
chie des êtres, cf. supra VI, <'i. et lea notes |
i . | Les astres (cf. VIII, ig) sont des dieux pour les Stoïciens.]
i. [Coual : ■ Mnsl i«' désir <i<* s'élever à un de^ré supérieui < r- ■•• une
sympathie môme entre des êtres qui son! sépan lai uni d< ;oitrcs. » — i
sicavà6a9tc signifie ■ ascension, progrès . mais non désir de s'él< rci ; i I rien, I
les phrases qui précèdent, n'implique l'idée d'un tel désir, afin kurèle i'j an
successivement aux divers degrés de l'échelle des êtres : plus 11 s'élève, plus [| trouve
développé l'instinct de sociabilité. C'esl li i<>oi ce qu'exprime la présente phrs
Seulement, au lieu d'écrire qu*«au progrès des ôtn ipond le développement
ti<% la sympathie», Marc-Àurèle, préférant un tour plus hardi et plus rapide, i dil
que "le progrès des êtres développait la sympathie».
Noua retrouvons ici, dans une acception nouvelle, un mol auquel Marc-Aurèle
(V, M'», V note; VII, 66, note finale rectifiée aux Addenda) s déjà donné deui sens bien
distincts: l'un vulgaire, l'autre proprement stoïcien. Les Stoïciens prétendaient,
rapport de Sextus Empiricuet que la « sympathie» ne saurait exister qu'entre les
parties d'une unité simple, non entre les unités d'un même total : j<" traduis Ici n
librement les mois y)vwuiva, TwaTtiôuEva, ix Bisarwrwv, *1« m t <>n trom Lni-
tion plus exacte dans une note (la rf) à la pensée \ II, i3. Voici, d'ailleurs, 1<- texte de
Sextus {ado. Math., IX, 8o) : ï~\ ukv :wv sx euvairtO|livMV r, Su ï*j r/j-ïiy:; Ta
[i.iprt aXXv)Xot;*... èic\ oï raiv Tjvwjjivwv <j'ju.xibi'.-x nç ëotiv. Cette première définition est
illustrée par do clairs exemples: on disait dans l'École, ajoute Sextus, que le corps
tout entier pâtit d'un doigt coupé, tandis que la mort de dix mille hommes dans EU
bataille n'atteint pas les soldats survivants.
Or la « sympathie » dont il est question dans la présente pensée est toute diffél
«le celle que nous venons de définir. Marc-Aurèle le reconnaît, en écrivant i< i les
trois mots y. ai ht Stearàtoiv (« quand même ils sont séparés »). Pourtant cette sympa-
thie » des âmes entre elles est naturelle et légitime. Marc-Aurèle n'est d'ailleurs |
seul à l'affirmer, et la démonstration qu'il en donne ne lui appartient pas en propi
comme lui, tous les Stoïciens ont conçu la cité des intelligences. D'autre- «pie lui ont
même pensé que la « sympathie » pouvait rendre compte de laits très particulier-
insolites. Ainsi, on lui demandait, dit Plutarque (Plac. phil.. V, ia), d'expliquer la
ressemblance de l'enfant avec une personne étrangère à la famille, ou avec une
œuvre d'art : on disait dans ce cas que la pensée de la mère avait dû être toucli
non certes par une a image n détachée d'ailleurs, mais par un r courant», un
«rayon» droit et continu ^àxTiç, cf. supra VIII, 5;), qui, émanant de l'âme d'une
autre personne ou du principe formel d'une statue ou d'un tableau, l'avait unie
à cette forme, ou à cette âme; et dans l'École cette union temporaire et accidentelle
s'appelait encore a sympathie ».
Gomment les Stoïciens ont-ils pu concilier et désigner du même nom deux ch< - -
en apparence si différentes : l'union des parties d'un même vivant, l'union de-
intelligences? Si l'on admet avec eux que l'univers n'est qu'un vivant, la définition
If)0 BIBLIOTHEQUE DEfl UlfITERSITES Dl MIDI
Vois pourtant ce qui se passe autour <l<i toi. Les rires intelli-
gents onl seuls oublié cette bienveillance cl ces liens récipro-
ques: il n \ a (|ue chez eux qu'on ne découvre pas ce concours
sympathique1. Néanmoins, les hommes ont beau se fuir: ils
son! repris; la nature est la plus forte. Observe, et tu remar
queras ce que je viens de dire. On verrait plutôt un objet
fait de terre détaché de tout élément terrestre, qu'un homme
entièrement séparé de tout homme.
10
L'homme porte son fruit, comme Dieu, comme le monde2;
chaque être porte son fruit dans sa saison. Peu importe que
l'usage n'emploie ce mot qu'à propos de la vigne ou de
choses semblables. La raison a aussi son fruit commun à
tous et propre à chacun 3 ; de ce fruit en naissent d'autres de
même nature que la raison elle-même.
H
Si tu le peux, dissuade-les i; sinon rappelle-toi que c'est
pour ce cas que la bienveillance t'a été donnée. Les Dieux
eux-mêmes 5 sont pleins de bienveillance pour de tels hommes ;
ils sont même assez bons parfois pour leur venir en aide, soit
même qu'a rapportée Sextus permet d'affirmer avant toute autre, avant celle d'une
âme individuelle pour son corps ou des membres de ce corps entre eux, la « sympa-
thie universelle », même celle de toutes les parties de la matière inerte, en tant qu'elles
sont animées et organisées par une raison unique (cf. Zeller, Pfiil. der Gr., III3, p. i33,
note ») : a fortiori celle de toutes les intelligences qui émanent de cette raison.]
i. [Couat : « À peine découvre -t- on chez eux ce concours sympathique.)» — Il
faut ajouter une négation à la phrase grecque pour en tirer ce sens (to a'jppo-jv J>os
•xovov où*/\ o*j ^AÉTTîTai). Les mots txovov où signifient ((presque)», et non « a peine».
La seule interprétation qu'impose le texte lorsqu'on ne veut pas le modifier est celle
que j'ai admise, à la suite des autres traducteurs : on disjoint les mots aôvov où, pour
grouper le premier avec J)6c, le second avec fi'/.ii;z-z'..\
2. [Cf. supra VIII, i5 : 6 /.otulo: râcî nvà cpip£'., :»v za''. sopo:.]
3. [Les mots «à tous» et «à chacun » ne sont pas exprimés dans le texte grec,
dont M. Couat n'a pu que très légèrement forcer le sens, en les ajoutant. Marc-Aurèlc
veut dire apparemment que Tordre «juc chacun de nous reçoit de sa raison doit être
valable pour tous les êtres raisonnables; que l'action droite — qui est le fruit de la
raison — intéresse et son auteur et l'humanité. Le commentaire du mot xotvov est,
à la pensée VII, 9, la définition de la loi : }.ôyo: xotvb; 7râv7<ov :wv vospoiv Çoxov, le
commentaire du mot ïotov est, à la pensée XI, 3, dans les mots tov xaprrôv ov zioz'.
a-.Tr y.aoTroCxa-., <( le fruit que porte l'âme raisonnable, c'est elle-même qui le cueille.»]
ICf. supra V, 28, et VIII, 5<j.]
5. [Cf. supra Vil, 70.]
il n- i i • m M \ i. \ir.il.E
(ju'ils désirent la ranté la ricli loin lu p i
luire .iiiI.iiiI . OU M6I1 dil mol qui I 611 I ni|>' I h(
12
Travaille, mm comme un malheureux, 1 1 * * 1 1 pooi le b
plaindre ou admirer. Nfaie point d'autre volonté que d#«
ou de le contenir1 comme l.i raison I oxi^c [ »< »i i r Le
de la cite.
13
Aujourd'hui même j<' suis sorti dea diffi< ultéi qui m em
barrassaient, on plutôt j'ai écarté cei difficultés] cai ellei
n'étaient pas au dehors, mais au dedans <i<' moi même dani
mes jugements '
14
Tout oect3 est devenu banal par l'usage, la durée en est
éphémère, la matière vile. Tout est maintenant comme «lu
temps de ceuv que nous avons ensevelis.
15
Les choses restent à notre porte les unes sur les autres, ne
sachant et ne révélant rien d'elles-mêmes. Qui est-ce qui nous
les fait connaître? Le principe dirigeant.
i. [douai: << de rester «mi repos. » — Pour comprendre les verbes xivetefai et
i'cr/sffOa'., il est nécessaire de se reporter à la définition «lu mot ûçtXeia, que nous
a conservée Stobée, el que j'ai citée un peu plus liant (VII, 74, en note). le n'en
retiendrai que les derniers mots: ihxi y«P ro (o^sAEîv Kr^eiv xar'otf ici ce
(oçsAS'.TOac xtvtfffOat xa:' àpSTr.v. Le véritable intérêt de tY-tn- moral étant dans - D
action (xiveî<x6at), il est impossible qu'^rgeiv, dans la définition rapportée par v*
puisse signifier ««arrêter»; par suite, qu'Io^eodai veuille ici dire rester en rej
Ce n'est pas en empêchant mon action qu'on peut m'être utile, c'est en l'empêchant
</c devenir mauvaise. La passion (7iiQo:), qui n'est jamais bonne, n'est autr«' chos 1 qu'un
mouvement de l'âme qui n'a pas subi cette retenue salutair v.Ta :
supra IU, 16, 3* note). Au reste (supra VII, 7, et surtout \ III, 16), l'aide d'autrui ne
nous enlève ni notre initiative ni le mérite de notre action : c'est ce que les Stoïciens
expriment en définissant wçeXeIv non par frgew xx\ xwefv, mais par .7/;., seul. Au
contraire, pour marquer que l'aide d'autrui ne peut nous servir que si nous ne ce-- ri-
de nous aider nous-mêmes, les Stoïciens définissent h^ù.-l'jhx'.. comme ici. parles
deux verbes xtvetofat xoù i'Tyiabx'. /ai' àpz-rr.v, dont le premier au moins est pour eux
un réfléchi, non un passif, et dont le second (voir le texte de Stobée) ne leur semble
même pas nécessaire. — Les mots ro: ô KoXtTtxbç Xoyo; «Çiot, qui terminent la pen>ée.
attestent une fois de plus que l'« utilité» de l'agent moral ne se distingue pas de celle
de l'univers.]
2. [Cf. supra II, i5; IV, 7; V, 2. etc.]
o. [Couat: «Tout ce qui nous entoure. » — Cf. supra VII, 2. note 2.]
M}3 BIBLIOTHEQUI DE8 UNIVERSITES i>f MIDI
16
Le bien et le mal de l'être raisonnable et sociable résident
dans son activité et non dans sa sensibilité, (Je même que dans
son activité et non dans sa sensibilité résident ses vices et ses
\ertus.
17
Lancez une pierre; elle ne sent pas plus de mal à tomber
que de bien à monter1.
18
Pénètre dans leur 'A for intérieur •>, et tu verras quels juges
tu redoutes, et comment ils se jugent eux-mêmes.
19
Tout est dans un changement continuel. Toi-même tu ne
cesses pas de changer 'i et de mourir par quelque côté; il en
est de même de l'univers tout entier.
20
Il faut laisser là 5 les fautes des autres.
21
La fin d'une action, le repos et pour ainsi dire la mort d'un
désir et d'un jugement ne sont point un mal. Repasse mainte-
nant la suite des âges de la vie, l'enfance, l'adolescence, la
jeunesse, la vieillesse; tous les changements ti de l'un à l'autre
sont autant de morts. Y a-t-il là rien de terrible? Repasse
maintenant la vie que tu menais avec ton grand-père, puis
avec ta mère, ensuite avec ton père; enfin, après avoir décou-
vert en toi bien d'autres différences, et d'autres changements,
i. [Cf. supra VIII, 20.J
2. [Cf. supra IV, 16; IN, 38; VI, 6; VI, 5o; VII, 3',. e1 Les notes.]
3. [Cf. supra VIII, 6i, et la note]
'». |M. Couat traduit par un même mot les deux mots grecs {j.îiaooV.r, et oû/aoio)?-: :
et en effet ils semblent être ici rigoureusement synonymes. On les retrouvera encore
associes à la dernière phrase de l'article IX, 29. Voir supra IV, 3, note finale, le sens
propre d'àXXotWi;.]
5. [C'est-à-dire « là où elles sont ». — Cf. supra VII, 29. dernière phrase.]
'). (Cf. aupra IX. 19; infra X. 7. etc.l
I I I I I I \ I 1,1 I I
[et d'autre morl partielle demande-toi y avail il i ■ i
tei i ii>i« ? il n \ .1 <i<»iK i [en non pin i de U i lbl<
daiu un repos, dan un changement de le t enti
22
( on sidère -.m lardei ton propre principe -lui eanl celui
de l uiii\ ers el celui <i«' cel homme le tien poui l'en I
une raison pénétrée <!<• ju li< elui de l univei afin • !«• te
rappeler de quel toul lu faii partie 4; celui de cel homme, afin
que in sachei s'il agil par Ignorance ou ave< réfl< non i I que
lu réfléchisses en même temps -< la parenté qui voui unit.
23
Gomme in ea i<>i même in'- pour contribuer ■■ parfaire I oi
ganisme social, ainsi, que chacune de tes actions i ontribue -i
parfaire 5 la vie de la société. Toute action qui ne se rapporte (
i. [Marc* Aurèlo ne compte ici pour rien la personne Cl
a ii livre 11 ; infraf la n<>t<- finale b la pensé i V 7.]
Coual : - t;i conscience, celle de l'univers... »]
;>. [Coual : a la tienne 1 ta consi ien le Ion inb llig
la justice.» Var : afin de lui inspirer la justice. > — 1
s'accompagne de la note luh ante :
y. voOv Sixavixov a-^To (ou stutô) "v./7r; esl li 1
général en esl asseï clair, à condition toutefois de changi 1
ici, en ôixoùxov : ce dernier mot, synonyme de Îikœ mtre une fois dans les
Pensées (V, 34). Mais cette correction, qui s'impose, ne parait p suffisant
doil y avoir une autre tache dans \<- texte. Gataker a 1 -r-. qui ne 1
L'explication plus facile. L'altération doit être dans 1<- mol *o0v, qui □
[ki> ici; la conjecture yoûv, proposée p . esl la meilleur
La conjecture de M. Rendall (Journal of Philology, WIII. pi.
n'a pu connaître, vaut celle de Coraï, — <-t ne s'impose pasd n
ici l'air de chevilles. \ t«>ut prendre, peut-être autant vaut-il garder 1
tionnelle. L'identité du sens des mots fjyejiovtxov et
par une foule de textes. Elle ressort en particulier de la seule compai
énumérations : aapxta, rcveuu-àTtov, rrY6(iovixév (supra II.
voû; {infra \ll, 3). Des expressions composées réunissenl ass - ivenl dans les
Pensées les deux mots TjYqiovtxbv et voOç, ou un synonyme de l'un avec un déri
l'autre : Siàvoia xi»6epvôo>a (1 II, 64); Xoyixo ./.ôv (VII,
vqO: r(Ysaovi/.ô: (XII, i4). Dans la phrase :va voOv fctxatx
représente le principe dirigeant (rfreu-ovtxov), voOv n'es! donc pas illogiqu : m - il
est parfaitement inutile, hien que certains exemples atténuent la singularité
pléonasme. Cesl plutôt oeveo que je serais tenté de corrigi utanl plus
mot n'est pas m'it. Les meilleurs manuscrits donnent zùrù, au datif. Si l'on n ut lire
ffeaurw, il me semble que toutes les obscurités sonl dissipées.]
'\. xYvota r, yv(ôu.rr Ces deux substantifs restant au nominatif - sujet d'un
verbe qu'il n'est pas aisé de suggérer. Au contraire, s'ils sont au data'
ils deviennent le complément indirect d'un verbe tel que ; lent dans
Marc-Aurde. [La seconde orth ^graphe esl celle iker.]
5. [Sur le sens de cruu.it>.Yipamxo£, cf. supra IV, a, en note.]
6. [Sur le sens d'àvaipopâ, cf. supra III, n, 'y note: \ II. '».
A. COLATP. FOIRMER,
I.,', BIBLIOI HBQI B m ES I M\ I R81 rÉS i>l Mihl
pas immédiatemenl ou de loin à celle lin commune est dans
ta vie un élément de discorde el de sédition; elle en rompt
l'unité, de même que dans un peuple l'homme qui, pour sa
part, s'écarte de l'unanime accord des volontés.
24
Colères et jeux d'enfants, petites Aines portant des cada
\res', cela ne fait il pas assez bien comprendre l'évocation
«1rs morts dans l'Odyssée] a ?
25
[Va droit 3 à la détermination du principe eilicient et formel.
i. [Nous savons par Marc- Aurèle lui-même (IV, &i)que ces mots ^<>nt une ci ta-
lion d'Êpictète.]
2. J'ai conservé le texte et le sens généralement adoptés, mais sans les trouver
satisfaisants.— [ \ nr. : «La vie humaine ne montre que colères et jeux d'enfants,
petites âmes portant des cadavres, comme pour confirmer l'exactitude des peintures
de la Nékuia. »]
3. [Dans le premier manusciil de M. Couat, cette pensée est ainsi traduite : « Exa-
mine la qualité de la forme en la séparant de la matière ; puis détermine le temps que
peut durer ce qui a celle qualité particulière.» Ensuite, une rature a couvert ces
lignes, qui iront pas été remplacées dans le second manuscrit. — M. Couat
arrêt»'1 devant les mots ttjv -o-.ÔT^îa toy kitIov, dans lesquels il s'est refusé à voir une
tautologie, mais dont il n'a pas eu le temps de découvrir le rapport. Ce n'est pas du
seul texte de- Pensées qu'il l'eut pu déduire: le nom de la koi6xi\q n'y reparaît plus
qu'une fois, et en compagnie des mots rj xj;ia, « la valeur >> (VI, 3). Ils témoignent que
l'acception de icoiot^ç, en cet autre passage, est tout abstraite. Par contre, on trou-
vera, en dehors des Pensées, certaine explication matérialiste de la << détermination »
ou «qualité», qui semble pouvoir définir aussi bien le « principe efficient » ou la
«forme.). C'est celle que rapporte Plutarque (de Stoîc. repugn., 43), et que j'ai
traduite dans une note antérieure : Ta: ok TrocoT^ra: T^iju.y.~x o&rac XOK rrfvouc
xspcoâsic, o.': xv iyyhtûvxau \xisi7i tt^ vXtj? s'.oqtio'.S'.v iv.xrs-y. xàfc G'/uTt\j.'i-i^ivi (supra,
page i io; voir la partie de la note rectifiée aux Addenda).
J'ai déjà indiqué incidemment (supra IV, i4, note 2) la différence que je croyais
apercevoir entre la icoiozrfi et L'afrtov. Je dois ici préciser et justifier cette doctrine, en
l'appuyant, autant que possible, sur le témoignage même de Marc- Aurèle, et,
à défaut de celui-ci, sur des textes qui ont été déjà cités au cours de ces notes el
confrontés avec les Pensées. Je n'en ajouterai que deux, empruntés au môme auteur.
L'un est une définition de la icoi6rr)Ç, celle qu'on peut considérer comme la plus pré-
cise et la plus exacte, et dont les autres, et en particulier celle que je rappelais tout
à l'heure, ne seront que les corollaires. Elle paraît distinguer nettement les notions
de la «détermination» et du « principe efficient et formel», sans pourtant les
opposer comme irréductibles entre elles; les définitions par corollaire dont il vient
d'être question sortiront en effet de la conciliation de ces deux concepts :
Oi ok TT(i)V/.o\ rb xoivbv Tf(r icoiotiqto; to et;: tojv (twjxxtwv XIyoinxi oiasopàv civat
oyffiaç O'jx aicoStaXvjirrqv xaû' aùrrjv, à/./.' etç îv vôr.aa xat !o:ÔT/(Ta iitOAT,YO\><jav,
o(/ts '/oovfo otfxe i<ryyï s'.ooTroio'JîxÉvvy/. àXXà trj s; aOrijç to'.o-jtotc,-:'. y.a(T r,v iroto'j
carat yhsvi; (Scholia in Aristotetem, dans 'Brandis, t. IV, p. Gq a, ligne 3o).
J'ai du, avant de l'interpréter, transcrire en entier ce long texte grec, à cause de
l'abondance des terme- abstraits qui s'y trouvent, et dont je ne pouvais donner
qu'une traduction approchée. r< Les Stoïciens, dit Simplicius dans son commentaire
I ' I l II I • I \ I \ I V I I I I I
( ion Idèi e i< abati action faite de la matièi e Supputa i
d'Arlstol d i"n ni mil
; || .1. lu.
dimmenl dn < • H mal i LU' <■ i un. n .. i un
h .1 |. . 1 1 1 . . m p n on lut nsit< ni p
0( qu ■ M- if t 'i 'i1"' ' IncJI \ ldu qui I i d< i- rtn mpll
i m m manque pa de rolovor « r< d< llnillon qui i
toute réalité Indépendante, al n'en fa II qu un
proposition d< Plolln {Et VI i
.1 i.i
« m , poui Man luri le le d< m n
. -Mi- lonl ion! • onnexea 1 1 I infre \ . •• i I l< l( nom
. e qua nom appelons la «eau
quel détoui i au prjj i< n/ interne ci pi lm<
chacun de ces dou i i- i n ■• , op] mmo lacauno et I
. m lenl el la matière ln< i te Par© qui 1 1 d( finition ri n<
io*p n. pas de i .> , la pan e qu < ell< li n
oppose pas l'une a l'autre, parce qu'elle noui donne enfin la
conecj i . dirons* noua donc que cette notion • I i - Ile que Mai - iuri loexprin
mota a;.:'.'a, xtrio\ ni contradicl Simplicius eûl Irouvi la défi i
moins • cir.in n "ii rappel une aul i
qu'il .i\,ui rapportée lui méane quelques pages plus haut, • I p< ni -• tre i mprunl
môme endroil ; ce aéra i«- second texl • que J'ai annoncé. Li (dans Bi / . i l \
l>. (»; a, ligne 6), Siuiplicius, après avoir dit que pour lea Stoi l< ni I i d'un
ôtre corporel c>i toujours corporelle, observe que lea philosophe!
sur l'explication de cell «i, lea una soutenant qu'elle eal non seulemenl le prii
efficient des êtres et de leur individualité distineth Ile se
détermine elle-même ;■ lea déterminer ;«iri^i | , . . /-x x£
tt,v autfav tmpipovtxiv, xùto 7 j rcor.ro ( o^a: koi
qu'elle dépend elle même d'un autre principe (altf a), et celui-ci d'un
ainsi de suite à l'infini. La première de ces explications, qui affir ne l'imm inen
la cause, r>t panthéislique, donc stoïcienne: et l'on y peul >. - > i r lea notions d< i
el d<> la T:o:oTr,: si étroitemenl unies que le nom de l'une y sert ï • ipliquer Pauln
il eal naturel, en effet, que le princip i qui organise ou qui maintien! soil le même
qui définisse. Si, dans l«- il irnier l ixte que j'1 viens de rapp lier, la koi '•>-. -..- parail
confondue avec ce principe môme et dbuée d'une activité ou d'une puisa
au lieu d'être donnée seulemenl pour le concept de celt»' activité, c'est par nn abus
de langage donl j'aurai à rendre compte. Mais on peut fori aisémenl
abua et restituer ainsi une définition moyenne où se concilient lc< deux que
a conservées Simplicius, sans en avoir aperçu la parenté. On arriverait i peu pi
même résultai en se bornant à changer dans la traduction de l'autre I \t m lli
en «principe efficient», et «individu» en ((principe efficient de l'individ
substitutions sembleront légitimes à quiconque aura pris le mot « matière
dans son acception la plus large, el se souviendra que pour les Stoïciens le principe
efficient lui aussi est matériel. Elles permettront de préciser la nature et la port
la définition encore toute logique que Simplicius a trouvée étrange pour s'< tre trop
pressé d'identifier une catégorie avec un principe métaphysique: Le moment de la
doctrine où elle trouve >a place est antérieur à toute spéculation métaphysique. —
Mais lorsque Mare AmMe réunit les mots rtoiotik wj oûrteu, ce moment e?t pass
atmoù l'atteste. La définition de la jrotoT/jç que l'on pourrait déduire de cette syntaxe
est précisément celle qui fait transition entre les deux que rapporte Simplicius:
Marc-Aurèle, en effet, a su garder ici au mot KotOTT); son acception propre et pre
mière. Non seulement il a séparé, conformément à la définition fondamentale, les
deux notions de la détermination et de la durée: mais le mot jcoi<k/jr, i i comme
plus haut (VI, 3), n'exprime rien de plus qu'une ;ibs raction, dont toute la realité
est dans son substrat, l'afcrov, et dans l'esprit qui la conçoit. Je serais même presque
tenté de considérer ici l'expression koiotjk toC butîoii comme équivalente à une
phrase où pourrait disparaître lo mot roiotv£, par exemple à - '----. -yt a
i<)() BIBLIOTHÈQUE Dl 9 UNIVERSITÉS Dl MIDI
toul le temps que peut exister l'individu ou la chose eu
question] Q.
26
Tu as souffert mille peines parce qu'il ne te suffisait pas que
Quel | > * lit donc rire le principe effi< Lent I ne simple détermination, une nature, une
Ame? La hiérarchie des êtrei que Marc turèle i fondée plus haut (VI, ik > N«>ii
i,i seconde unie n ctiflée aux iddenda) sur L'afrtov qui ',v liMl être ou la icotorqç qui les
définit m<' paratl fournir le commentaire naturel <ie ce paaai
Il resterai I à montrer comment d'autres Stoïciens <|u<' Marc- iurèle onl pu
confondre la rcoioT/j; al L'ot&tov, c'est-à-dire l'attribut et son sujet, et définir la pre-
mière comme une réalité concrète, et comme une matière. On expliquerait la chose
aaseï ai-< menl en distinguant deux groupes d'objets ou d'êtres individuels : d'abord
le> êtres qui croissent et vivent, ceux que Marc- lurèle désigne quelque i>;irt (jmpra
\ I, ko : voir la y note rectifiée ;iu\ iddendd) par le> mots Ta :jTj> pUfffttC (TUVSYô'ptva,
et qui ont toujours porté en eux-mêmes le principe efficient qui les fait être et
croître et qui les conduit à leur fin; ensuite les objets «dont le fabricant est loin
(ibid.)y les œuvres des hommes, auxquelles on pourrait joindre l<s déchets de la
nature, et la pierre, el le bois. L'auteur de ces eboses, homme ou nature qui en est
le véritable xfrtov, a dû, disent les Stoïciens, enfermer en elles et intimement mêler
«à leur matière un souille qui les maintient, qui en garde la forme et toutes les
qualités, et que l'on appelle fort improprement acnov, parce que dans Les vivants
et dans les plantes on nomme ainsi le principe de vie opposé à la matière inerte. Or
ici la icoiôVqc exprime toujours exactement toute l'action de cet outiov. Us sont, en
quelque sorte, également immobiles, et ne disparaissent, l'une avec l'autre, qu'à la
volonté d'un modeleur qui « changera en chien le cheval de cire : et ce sera pourtant
toujours la même cire» (cf. supra, page i'ji, note i). — Dans un système matéria-
liste, on admettra donc aisément la substitution du premier de ces termes au second,
c'est-à-dire la conception matérielle de la uoioTr,; : et môme l'inexactitude pourra
sembler moindre qu'à donner le nom de «cause » à quelque chose qui ne cause rien.
Dans les plantes et les êtres, au contraire, le principe efficient, nature ou âme. est
toujours en action; et, tout en agissant, il se renouvelle sans cesse, par la transpira-
tion, la respiration, la transformation des aliments: cette instabilité est formelle-
ment proclamée par Marc-Aurèle en plusieurs passages, et notamment à l'article V.
a3 (voir la seconde note), et à la fin de la pensée X, 7. Mais en même temps, il est
contraint de reconnaître pour un moment, pour l'espace d'une vie, la persistance en
nous de quelque chose (xt : X, 7, lin) en quoi réside notre identité. Peut-être même —
car le texte n'est pas sur — a - 1- il aussi donné le nom d'tStw; itotbv à ce principe
stable, et presque retrouvé la proposition de Posidonius (Stobée, EcL. I, 'j3G = supra.
page 56, en note) : 7iapa|X£V£i r, tcoiot/); àno ttjç y£V£<jsu>; jj-i/pc -r(: àva-.pz(7£w:.
Il serait malaisé de dire si dans une telle phrase noiÔTr^ désigne encqre le concept
de notre identité et de tous les attributs qui nous définissent pendant le temps de
notre vie, ou si déjà il exprime le fond de notre être, et comme l'âme de notre âme.
Il est en revanche assez facile d'expliquer le passage de la première acception à la
seconde : il suffira d'invoquer ici encore l'impropriété du mot aïtiov, — incapable
cette fois d'exprimer un principe stable.
Pour Marc-Aurèle, qui, dans celles de ses Pensées dont le texte est sur, semble
avoir évité de donner à icoi6tï)C un sens concret, il a préféré au moins une fois
appeler y.aTaTxsjaaaaa 8uvot(M< (supra VI, !\o) « ce qui est et demeure en nous » ]
2. [Beaucoup de textes stoïciens (cf. Zeller, Phil. der Gr., III3, pp. 90 sqq., et
notamment p. 96, note 1) nous donnent les deux expressions Iota tcoiottj; et coi'a>;
Tiotbv comme synonymes. Mais ib igiw; tioiov avait aussi un sens concret, et s'em-
ployait aussi bien pour désigner l'individu déterminé que la détermination de l'indi-
vidu. C'est le sens que prend cette locution ici même, où elle se distingue si nettement
île 710:67/);; c'est celui qu'elle a probablement (voir la note) à la dernière phrase de
l'article X, 7; celui que lui donne encore notre auteur la troisième fois où il
remploi,- (XII, 3o).
im .m m .1 Ki m m i i
ton principe dii Igeanl fil ce poui quoi il i
m. m en voilà a wa
27
Les autrei i«' blftmenl il . te haïssenl il parlent il d< toi
de i<'llc <mi telle tnanièi e pénal i e au fond de leui
irdc ce qu'ils sonl . lu verrai qu'il ne faul p i te low
menter afin qu'ils aient de toi une opinion quel >nqu Séan
moins, sois bon pour eux il <»ni tes amia d'aprè I • nature
Les Dieux aussi 1 les aident de toute façon, pai de lonj
par des oracles , fa obtenir précisément ces biens qui leur
tiennent i cœui
28
Le monde tourne toujours dans le même cercle, en haut, en
bas, de siècle en siècle". I lu bien l'intelligence universel!*
met en mou veme ni pom* chaque objet particulier, et, s'il en est
ainsi, lu dois suiwe ee mouvement; OU bien elle s'est mise <n
mouvement une lois pour toutes, et chaque événement est la
conséquence de cette impulsion unique : et alors pourquoi te
troubler? ou enfin autant vaut parler des atomes, des indi-
visibles S. Bref, s'il y a un Dieu, tout va bien: s'il n'y a que le
hasard, tâche de ne pas l'abandonner toi -ma me au hasard.
Bientôt la terre nous recouvrira tous; puis elle changera
elle-même; puis les choses changeront à l'infini; puis encore
i. [Couat : « créé. >> — Cf. supra VI, m. note \.\
2. Le texte donne kXkk StXiç, que j",ii traduit littéralement. Mai- je
texte est altéré, et que la conjonction àWa annonce la contre partie de ce qui pr
On peut supposer qu'il y avait : « niais tu lui demandais autre chose, le n pi
d'ailleurs, aucune correction,
3. \CA\ supra IX, 18, etc.]
[\. [Cf. supra VII, 70, el 1\, 11.]
5. | Mare-Aurèle lui-même, à la tin du livre I, remercie les dieui des ivei
ments qu'il en a reçus en songe. — Sur leur intervention dans les artïiir s ho
cf. supra VII. 75, el la note rectifiée aux Addenda.]
6. [Couat: «ces biens qu'ils recherchent en ?' agi tant de tout côté. • — Cette tra-
duction m'a paru forcer le sens de o'.acpioeTO*'.. — Cf. supra VI, 3 •. n t
7. [Ici, Mare-Aurèle affirme avec assurance une doctrine dont il .1 parfois douté,
et qu'il a même contestée (cf. supra Y, i3, note finale, complétée aux 1 Idenda).]
S. [Couat : « toute chose provient d'une autre: le monde, en effet, ne peut qu'être
composé d'atomes ou former un tout indivisible. 1 — Le t \t grec: *at -
xpÔTTov yàp T'.va à'Toaoi, r, i'J.£pr est inextricable: Pierron déclare le pa<sau"e d
Le dernier, à ma connaissance, qui s'y soit attaqué esl M Etendall (Journal of Philo-
logy, XXIII, p. i5o). De xoà t\ èv «vi, il tire le verbe que nous jugeons soush ni
dans la phrase précédente: xatexTervet. Puis, s'offensant de la redondance rcouot
ig8 BIBLIOTHÈQUE DES UNIVERSITÉS Dl MIDI
à l'infini1. Contemple ces marées [des changements et] des
métamorpho8( el leur marche rapide; tu mépriseras alors
tout ce qui est mortel 3,
29
La cause universelle est comme un torrent; elle emporte
tout. Qu'ils sont simples, ces pauvres hommes d'Etat, qui
s'imaginent agir en philosophes S ! Les morveux^! Fais donc,
il u refuse à voir une glose dans Le* mots?) Ruspfj, parce qu'$xouoi n't pas
besoin d'explication, el qu'il ('xl d'ailleurs plus usuel et plus clair qu'à(Uprr Fina-
lement, il corrige ce dernier m«>t en ilpLapjiiv/j. Ainsi restauré par lui, le pat
peut avoir le sens suivant: «et cette impulsion unique, elle (l'intelligence univer-
selle) la développe dans tous les événements ultérieurs, qui en sont la conséquence :
le monde, en effet, ne peut qu être composé d'atomes ou régi par une de-tinée. »
On peu! objecter à (••■Me lecture, d'abord que le verbe xa tcxTes'vet, si régulièrement
tonné (pi "il soit, si admissible même dans la langue d'un auteur qui semble affec-
tionner les verbes composés de deux prépositions, n'existe pas ailleurs: M. Hcndall
lui- même l'a reconnu; ensuite, que Marc-Aurèle, à l'ordinaire, oppose par les deux
mots 7T0'... r(... (Vil, 75 ; Vil, 32; XII, 14, et ici même, dans la première partir de
la pensée), plutôt que par un simple y\ (cf. pourtant VII, 5o) deux alternative^ qui
s'excluenl ; ensuite, que ~oô-oj... Tiva, les corrections faites, n'a plus de sens; enfin,
que !<• mol £'.;xaofxfv/( n'exprime que la seconde des deux hypothèses stoïciennes
exposées ici par Marc-Aurèle. — Ces deux dernières objections s'adressent aussi à la
conjecture de M. Couat, qui a dû corriger ocusor, en àusps:. Comment, d'ailleurs, ce
mot pourrait-il désigner le monde? Il contredit tous les textes qui nous définiss ni
comme des «parties» ou des «membres» du tout. J'ajoute enfin qu'il me parait
impossible de donner un sens à fi êv tivi.
Ces mots avaient été ingénieusement corrigés par Coraï en xàt ~.i ÈvrecVn. La même
correction, proposée par le même savant, a paru évidente à M. Stich au cours de la
pensée X, 3i, et M Polak se demande, non sans raison, pourquoi elle lui a semblé
inadmissible ici (Hermès, XXI, p. 332). Je l'ai reprise et traduite. J'ai supposé
ensuite la chute de toute une ligne, où devait être exprimée une troisième hypo-
thèse, déjà envisagée par Marc-Aurèle dans une pensée analogue (supra VI, (6 : «ou
bien il y a des dieux, mais ils ne délibèrent sur rien»), et qui devait se terminer
par les mots : o-jTce. ok xi £'.<rtv èv tîv. ; ou simplement : outoi 6î t: èv nvt ; — c'est-à-dire
par cette idée: «Mais alors, qu'est-ce que le monde et qu'est-ce qu'ils y font.'.-
La phrase qui suit, où j'ai pu traduire toôtiov ttvâ, se rattache logiquement à
celle ci. On comprend, d'ailleurs, comment une ligne a pu disparaître entre deux
groupes de sons identiques: xi svtîivï] et ti Iv Ttvt. Ce genre de fautes est assez
commun.
Pour la doctrine, comparer surtout les pensées XII, i'i, et VII, 70; voir la note
à cette dernière et la rectification aux Addenda.]
1. [Comme l'a reconnu Marc-Aurèle lui-même à la lin de la pensée V, i3, l'idée
de ces transformations à l'infini n'est nullement contradictoire avec celle des révolu-
tions périodiques auxquelles il faisait (voir la première note) tout à l'heure allusion.]
2. [Cf. supra 1\, 19, en note, et IV, 3, note finale.]
3. [Ici s'arrête le second manuscrit de M. Couat.]
'i. [Couat : «Combien vulgaires sont toutes ces questions politiques, et pour qui
wusc en philosophe, toutes ces affaires humaines! » — M. Couat a dû lire : u>; 0^72:
/.oTÔsto:, àvOpfôrrs'.a 7isiy;j.aTa. La correction ne s'imposait pas.]
5. [Couat: « quelle sécrétion parasitaire! » — J'ai préféré le sens de Picrron et de
M. Micb >ut, celui aussi de Renan, qui développe en une phrase le |rj££>v u.sTTâ : « ce
sont des bambins dont on débarbouille le nez avec un mouchoir » (Marc-Aurele et la
fut <lu monde antique*, p. 52).
Il Nil Ml M \ ||( \ I l.l I I
ô homme, il jamal tu dol le faii <|u. la natui i réel
| maintenant ' de toi I nti epi end I oui pc qui t'etl donn
ol ne regai de pi autoui de loi I on le ail la
i épublique de Plab m Sol itisfail I l< cli >nl un pu
en avantj el oonsidèi e ce i et Altaï « omme un
pourra, en effet, changei le pi iiicipr m l< rj m i i- ut
les hommes? El pourtant, en dehoi de « e i hangi mer ( il
autre ohose que lervitude, gémissement - onvictl
il maintenant, parle moi d'Alexandre, de Philippe, de D
irius de Phalère, Je les inlvraH s'ils onl comprit la rolon
de lit nature universelle, l'ils onl m être leur* propi la
gogues, S'ils nom, au contraire, été que dei acteun tragique
personne ne m'a condamné à les Imiter L'œuvn de la philo
sophie est -impie ci modeste; ne me pousse pas i i il
30
Regarde de haurl ers troupeaux innombrables, cet innom
brables cérémonies, toutes ces traversées entreprises sur des
mers orageuses ou tranquilles, celle variété de gens «pu nais
seul, vivent autour de toi, et meurent. Pen86 aussi à tous I
autres qui ont vécu autrefois, et à ceux qui vivront après toi,
et à ceux qui vivent en ce moment chez les peuples barbatf
Que d'hommes ne connaissent même pas ton nom! Combien
l'oublieront bien vite! Combien, après l'avoir loue peut être
aujourd'hui, te dénigreront demain! Conclus que rien n'a
aucun prix, ni la mémoire des hommes, ni la gloire, ni
quelque autre chose que ce soit.
i. [Au lieu do xi iroxe, dont le sens est p u satisfaisant, M. Couat i lu t\ note- —
Je préfère cotte conjecture à celle de M. Rendait (Journal of Phttoloyy, WIII. i5i)
qui prétend corriger une tMgraphie en Lisant: xi ko« icoûj; o vOv.. . au lieu
~oi= ; irotr,<rov, S vyv... Que signifierait dans la leçon de M. Rendait vî
«le xi 1COTS?]
.->. [Le mol vùv, oublié par M. Couat, me semble avoir ici la même im;
que les mots it«poj<rn, et icspoOffa aux pensées VIL ô;. el 1\. 6, où ils - >nt chacun
exprimés trois fois.]
3. [La conjecture de M. Couat est ici celle même de II. Rendait (ibid.): -,
o av SiSûrai, au lieu de : lav 8tôVî»rat.]
4. [Couat: «qui sait s'ils ont compris... ?>» — Je ne puis retrouver la correction
que suppose celte traduction. Le texte (otyovratt et eiôov) me semble d'ailleurs inin-
telligible. J'ai admis la lecture de M. de Wilamowits, E^ojiat. I p peu plus haut, en
écrivant: «qui pourra changer les principes?», ce qui suppose la correction dans le
texte de uEraoâAAE». en uETaoaAEi, M. Couat s'était rencontré avec lui.]
mm) B1B1 LOI HBQ1 I DES I DIVERS] i ES i»i midi
31
Ne te laisse jamais troubler1 par les événements qui pro-
viennenl de la cause extérieure2; observe la justice dans
toutes les actions dont la cause 3 est en toi; je veux dire'»
que le bul de toutes lea tendances el <lc toutes les actions
doil être précisémenl d'agir pour la cité, parce que cela es)
couronne ;i l;i nature.
i . | L'àtapa(fa entraîne L'àitdtOeia : pas de trouble, pas de passions, — <-t l'absence de
passions, c'est La vertu. — Voir la même recommandation au début de la pensée VHI, 5.]
•>. |( louât: «d'une cause extérieure. »— L'article est exprimé en grec; cette
cause extérieure», c'esl La cause universelle, opposée à notre principe efficient ou
à notre activité propre, que Marc-Aurele désigne ici du même nom d'atTta(cf. supra V,
.;. note ■•)■ L'antithèse de La <• cause extérieure » el de La a cause interne <> peu! aider
à relier Les divers sens de ce mot. Sauf Les cas où il signifie "motif'» ou «raison
d'agir», nous ne voyons pas que Marc-Aurèle L'ait jamais distingué d'afctov, bien
que Chrysippe (dans Stobée, /•>/.. I, 338) ait opposé Les deux termes en taisant
exprimer au premier « la raison qui esl dan- Le second >>: octifav 5' ilvai X6yov ottTtou,
r, XôyoN tov ~iy. to*J KtTÎO'j ci»; aUtou- Non- pouvons donc d'abord définir ottritt comme
tous Les Stoïciens oui (ail outiov. Zenon, Chrysippe, Posidonius (dans Stobée, ibid.)
voient dans l.i «cause» le pourquoi des choses, ou plutôt Le "par quoi », co 5i' S.
L'antécédenl invariable peut ainsi porter le nom d'afciov; mais les exemples que
donnent les maîtres du Stoïcisme de la relation de causalité sont moins ceux d'un
antécédent el de son conséquent que ceux d'un sujet, ou, comme il- disent, d'un
corps (<7ûu.a), et de son verbe (xaxrryoprjiia : sur le sens du mot, cf. Zeller, Phil. der
Gr.y III3, p. 8(), note 2), c'est-à-dire d'une action; puis d'une qualité du sujet, c'est-
à-dire encore d'un corps (supra I\, 26, i" note), et de l'action qui la manifeste.
Ainsi, «lit /«'non (dan» Stobée, /. /., p. 336), " la sagesse esl cause de l'action d'être
sage. " On voit comment l'ànie a pu être désignée du nom d'atn'ot : elle est, en effet,
Le principe efficient el formel de L'individu humain, elle est « cause » qu'il est; et elle
est, en outre, la «cause)) de ses actions. Nous avons vu dans une note antérieure
(IV 25) comment Les Stoïciens avaient été conduits à reconnaître aussi un « principe
efficient et formel » dans les choses inertes.
Ainsi, la «cause» qui intéresse surtout les Stoïciens est la cause interne, dans
laquelle ils ont, comme on l'a vu, intégré la forme (IV, 21, note finale). Leur système
panthéiste leur a même permis de ramener toutes les causes externes à une seule
cause interne totale (supra VII, 10), celle qu'ils appellent ici la « cause extérieure »,
saus qu'ils perdissent jamais pourtant, chaque fois qu'ils écrivaient le mot ouriov, la
notion très nette de l'opposition de deux termes, aussi distincts que peut L'être pour
nous une caude de son effet. Nous avons vu encore (IX., 2.5, r* note) comment le concept
de l'a.Tiov avait pu d'abord par là se différencier pour eux de celui de la noiotrj;.
Le terme opposé à la cause, ou « l'effet», s'appelait dans l'Ecole, nous dit Stobée,
'j.-rj-ï/,zi'yx ou Tj[j.o£o/y/.ô:. Quand IVllW est rapporté à la cause universelle, on
l'appelle plutôt ffujxêaîvov : ce mol peut ainsi désigner les ((circonstances extérieures »,
qui sont la « matière » de notre action, et servir d'antithèse au mot Êvépveia (cf. supra,
page 161 , note 3).
Tandis qu'aitcov et a'.Tt'a dans le^ Pensées désignent indifféremment le «principe
efficient interne» et la cause extérieure, le mot oc'.tuooî: n'y est employé que dans
• premier sens, et toujours en opposition avec le nom du principe matériel.]
3. [Le sens que nous sommes ici contraint de donner à Tcapa (sv toi; rcapà rïjv ex
a-.Tiav Èvepyoujxévot;) est tout à fait insolite. Faut-il lire oii? ou remplacer Tr,v...
oe.TÎav par rrjç... a;.T:a:.'')
4. [Gouat : «je veux dire que tes désirs et ton activité doivent tendre au bien
commun, conformément à ta nature. >>]
I I «I Ml' \ I Hl.l.l
32
i u peux lupprimei nombi e de i au t iin< di in uble
n exl itenl que dan ton jugement ' I u le melti i
,, i aii e ru embi b isanl pai la pen M$e le monde enti< i
chissanl b la durée éternelle, aux Iran fi u mal iom » api
i, mies choses, <'M toutes leurs pai Li< en voyanl i imbl n
courl l<* i < m 1 1 1 > ^ <|in sépare, pour chaque i tre lo n ii ari<
la dissolution, tandis <|u<- le temps antérieui 1 la aal
Infini, et sans terme également ' celui qui suivra ladl solution.
33
Toutes les choses que tu voia périront bientôt el ceux qui
les auront vues périr périront bientôt à leur tour. L'homme
mort à l'extrême vieillesse en sera au même point que celui
dont la mort aura été prématurée.
34
Que sont les âmes 3 de ces hommes? De quoi se préoccu
pent-ils? Quels soûl les mobiles de leur amitié et de leur
estime? Suppose que tu vois leurs Ames toutes nues. Ils
croient nuire par leurs blâmes ou se rendre utile- i par leurs
louanges. Quelle présomption!
35
La perte de la vie n'est qu'une transformation. <;<■> transfor-
mations plaisent à la nature universelle dont la je a lait
naître toutes les choses, les a fait naître de toute éternité
suivant le même type et ne cessera d'en produire de semblables
à l'infini. Que dis- tu donc? Que tout a été et sera ton jour-
mal, et que parmi tant de Dieux il ne s'en est pas trouvé un
qui eut la puissance d'y remédier, et que le monde est con-
damné à une suite indéfinie de misères !
i. [Gouat: « ta pensée.»— Cf. supra. IV. 7: VIII, &o, etc.]
2. [Cf. supra V, 2 3, note 3.J
3. [Gouat : « les consciences. »]
'a. [Gouat : « ou rendre service. 0 — Sur le sens du verbe &?sXstv, cf. les notes aux.
pensées VII, -'j. el 1\. la.J
2uy BIBLIOTHÈQUE Dl > UNIVERSITÉS hl midi
36
La pourriture est le tond de la matière dont se compose
chaque être vivant; o'esl de l'humeur, de la poussière, des os,
de la puanteur, D'autre pari, les marbres1 ne sont que les
callosités de la terre; l'or et l'argent en sont les sédiments;
nos vêtements ne Boni (pie des poils de bêtes; la pourpre n'est
que du sang, et de même pour tout le reste. Le souille vital
n'est, lui-même, pas autre chose; il change en passant d'un
èlre à l'autre a.
37
En voilà assez de cette vie misérable, et de toutes ces
plaintes, et de toutes ces singeries! Qu'est-ce qui te trouble?
Qu'y a-t-il de nouveau dans tout cela? Qu'est-ce qui te met
hors de toi? Le principe efficient et formel 3? Vois ce qu'il
est. La matière? Vois aussi ce qu'elle est. En dehors du
principe efficient et de la matière, il n'y a rien. Hâte-toi
plutôt d'être au regard des Dieux plus simple et meilleur.
C'est la même chose d'avoir observé ce monde pendant cent
ans ou pendant trois ans V
38
S'il a commis une faute, c'est là qu'est le mal S. Mais peut
être n'en a-t-il pas commis.
39
Ou bien il n'y a qu'une intelligence, source unique de tout,
d'où proviennent les événements qui atteignent les choses
i. [Voir supra VI, i3; \ III. 2 » et :>;, des développements analogues.]
2. [Var. : «il vient de l'humeur <•! retourne à la pourriture. » — Le débul de la
pensée, où il n'esl question (pic d'humeur et de pourriture, permet cette interpré
tation des mots èx :oJ:o)v sic TaOra [MtaêâXXav i mais, outre que ce sens est un peu
cherché, la seconde traduction de M. (louât s'accorde mieux, ce me semble, avec un
autre passage (II, 2) où Marc-Aurèle a voulu avil r le soufTle vital.]
3. [Couat : « la l'orme. » — De même à la ligna suivant \ — (X supra I\ , 21, note
tin aie; l\. •>.">. r note; IX, 3i, note 2.]
i. [Cf. supra \ 11, 1 ; infra \I. i : « un homme de quarante ans a vu tout ce qui
lut et tout ce ci ni sera. »]
Même idée et même expression, Vil. ■><». et 1\. 20. Ici. Marc-Aurèle ajoute une
restriction admirable.
X I I I I I
i.ii mi o< imtne un coi p unique B9 al H ne i om ienl p
1,1 partie n plaigne de oe qui lui a I Intel I d
«Mi bien II n\ a que dei atome et, pai mite, i len qu( i dre
ci dispersion Pourquoi donc te troublai > Di I ton prin< ipe
dirigeant ' tu n'es plus qu'une bête brute, faite poui la m
el la corruption ; tu joues ton rôle, tu fol pai lie du troup
el tu t.- repaia ny ec lui
40
Ou les Dieux ne peuvent rien, ou lia peuvent quelque chose.
S'ils ne peuvent rien, pourquoi les pri< "il- peuvent
quelque chose, au lieu de leur demander d 6< arter de toi i
ou cela, ou de te le procurer, pourquoi ne lea pries tu paa
plutôt de faire que tu n'éprouves ni crainte, ni désir, ni
chagrin, à propos de ceci ou de celai? En effet, s'ils peuvent
venir en aide aux hommes, il> le peuvent aussi en ce point
Mais peut être diras tu : « Les Dieux m'ont accordé ce pou
voir, o Eh bien, ne vaut il pas mieux user librement de ce qui
est en ton pouvoir que de te porter^, en l'abaissant au i
d'un esclave, vers ce qui ne dépend pas de toi? Qui t'a dit,
d'ailleurs, que 1rs Dieux ne nous aident pas également poui
ce qui esl en notre pouvoir? Commence donc par les priei
à ce propos, et tu verras. Un tel l'ait cette prière: Comment
pourrais -je posséder cette femme!* Toi, tu feras celle-ci:
Comment pourrais -je ne pas désirer posséder cette femi
Un autre : Comment me débarrasser de ceci? El toi : Comment
n'avoir pas besoin de m'en débarrasser? Un autre : Oli ! si je
pouvais ne pas perdre mon enfant! Et toi: Oh! si je pouvais
i. [Sur cette doctrine, cf. notamment les notes au* pensées IV, 4, et IX, Si ; sur
le dilemme, cf. N 11. 7Ô, efl la note rectifiée aux iddendeu]
2. [Couat : « à ta conscience. » — On a adopté ici la conjectu • <*u
lieu de XiyeiQ J
$. [Même argument VI, M (entre les notes 2 et 3).]
.4. [Cf. une doctrine analogue, à la fin de l'article I\ . 1»: et surtout Di -
Laërce, VII, 19&: e3£srat ù <xo?o;, xitojuîvo; Ta Kfatà -asa rû* fcwv. — Voici la
définition de la prière « libre», dont a déjà parlé Marc-Aurèle à la pens \ -
la note rectifiée aux iddenda): le m«>t a librement 1 se trouvera, d'ailleurs, trois
lignes plus bas. — Sur le^ rapports de Dieu et de l'homme, cf. la note finale du
livre \ II. rectifiée aux Addenda.]
ô. [Couat : m te porter de côlé et d'autre. <> — Cf. la note finale à L'article IV -
ao'i DIBLIOTHÈQU] DES UNITE R SITES Di MIDI
ne pas craindre de le perdrel En un mot, dirige dans ce sens
tes prières et observe ce <iui arrivera.
41
I picure dit : o Quand j'étais malade, je ne m'entretenais pas
souffrances de mon1 corps, el je ne parlais jamais de ce
sujet à ceux qui venaient me voir. Je continuais comme aupa-
ravant à philosopher sur la nature9; je m'appliquais à savoir
comment noire pensée, tout en participant à ces mouvements
intérieurs de la chair 3, pouvait demeurer tranquille el con-
server ce qui est son bien propre. Je ne permettais pas non
plus aux médecins de se flatter de leur importance; ma vie
était encore calme et heureuse.» Imite son exemple, dans la
maladie 4 et dans toutes les autres circonstances. C'est une
recommandation commune à toutes les écoles de ne point
s'écarter de la philosophie au milieu de tous les accidents et
de ne point partager les propos frivoles des ignorants et des
profanes. Il faut être uniquement attentif à ce que l'on fait
el à l'instrument avec lequel on le fait
42
Lorsque tu t'es heurté à l'impudence d'un homme, demande-
toi immédiatement : est-il possible qu'il n'y ait pas d'impu-
dents dans le monde? Ce n'est pas possible. Ne demande donc
pas l'impossible. Cet homme est, en effet, un de ces impudents
qui existent nécessairement dans le monde. Fais-toi le même
raisonnement à propos des scélérats, des traîtres et de toutes
i. [Couat : <( du corps. »]
2. [Couat : «Je continuais à philosopher sur les principes de la nature. » — Sur le
sens de -y. icpOY)YO'JU£Va, voir la note à la pensée IV, i. — <I>jT'.OAoy£:v ne désigne pas
ici, comme à l'article NUI, i3, une partir seulement du la philosophie, mais la
philosophie tout entière. On sait que le poème de l'épicurien Lucrèce est intitulé
De rerum Natural (pic le maître lui-même, Épicure, n'avait pas composé moins de
trente-sept traités sur la Nature (Diogène, \, 27), où, apparemment, devait tenir
toute sa doctrine]
3. [Nous avons vu (supra V. ai'», avant- dernière note) qu'Épicure, comme Marc-
Vurèle, attribuait la sensation au corps, et la ramenait aussi à un mouvement. Dans
la Langue d'Épicure, i'j\).\).z-ùï\j.'yhzvi doit signifier ce que signifie o-ja-aO^v dans
celle »]<■ Mur- Aurèle.]
V [M. Couat, sur les indications de M. Stich, a supprimé les mots l\ v6<jw,
inutiles devant èorv vocr-.l
PE.1 I I I)| M M.. M I I I I
i m \ [( [eu i En li rappelant qu'il < I i i •
que <!<• telle i n n exl lenl pa lu i a plu bfem eillanl
pour chocun <l eu n 11 est bon aussi de le demandei iim
dialomenl < | < i « • 1 1 » • vertu la nature ■• donnée u l'homi ntre
tel vice. Elle lui ;> donné, en effel comme conta ;
i.i douceur contre l'ingratitude, el contre i haque auti
une n ertu particulièi e Enfin, tu peu i instruire el i am<
dans le droil chemin celui qui s'en e I écart cai toul
re l'homme <vi l'éloigné «lu bul de la vie D'ailli
éprouvé un domina M aucun de ceui contre qui tu
t'irrites n'a jamais rian rail de tel que ta p< en \
moins; or, c'esl en cela seulemenl que consiste toul mal, toul
dommage. Qu'y a I U donc de mauvais el d'étrange poui toi
à ce que l'ignorant ' agisse en ignorant? Vois plutôt si tu ne
devrais pas te reprocher à toi-même de n'avoir pas prévu qu'un
tel homme commettrai! une telle faute. La raison t'avail donné
le moyen :; de comprendre que vraisemblablement cet homme
commettrait cette faute, mais tu l'as oublié el tu t'étonnes
qu'il l'ail commise. C'esl surtout lorsque tu reproches à quel
qu'un son ingratitude ou son manque de foi qu'il faut faire
re retour sur toi-même. C'esl évidemment ta faute ou d'avoir
cru qu'un homme doué d'un tel caractère » garderai! m foi,
ou, en lui rendant Bervice, de l'avoir fait incomplètement el
sans penser recueillir 5 immédiatement par ton action elle
même [fout] le fruit du bienfait. Que veux tu de plus quand
tu fais du bien à un homme? Ne te suffit il pas d'avoir agi
conformément à ta nature, et cherches-tu à en tirer un
salaire1»? C'est comme si l'œil voulait être récompensé d'y
voir et les pieds de marcher. De même que ces rganes
on! été créés pour une certaine fonction, et qu'en la remplis-
i. [Couat : «n'a jamais rien fait qui put rendre ton âme pire qu'elle n'était ••]
2. [Cf. supra j p. iAo, note 2.]
3. [Cf. supra, p. 184, note 1.]
t\. [Sur le sens de ôiàOeatç, cf. supra, p. 9?. note a, el p. i53, noie 3.]
5. [Voir les derniers mots de la pens< VII, i3. Peut-être faudrait-il. ici au lieu
de ixr, x.axaXir)XTixâ>£ (« incomplètement »), écrire, comme en cel autre ss g
/aTaAr.-Tixco: («sans réfléchir ni comprendre »). — Couat : el comme -i tu qc
recueillais pas immédiatement. »]
0. [Cf. Sénèque, De' Benefieiis, IV. 12 : quid reddal beneficium?... -i quicquam
praeter ipsas (virtutes), ipsas non expeti>.
mm. mhUMiiu.ui i DES LMVERSITLS m m 1 1 » i
smt selon leur constitution propre]1, ils reçoivent tout ce
qui leur révient, de même l'homme né bienfaisant, quand il
rend un service, quand il vienl en aide aux autres pour dés
choses en ('Ile- mêmes indifférentes9, ne fait qu'accomplir sa
Fonction naturelle, cl il a lout ce qui lui est <lù.
LIVRE \
Quand donc, ô mon àme, seras-tu bonne, simple, une, nue,
plus visible que le corps qui t'enveloppe? Quand donc auras-tu
le goût d'une disposition affectueuse <* et tendre? Quand donc
seras- lu satisfaite, sans besoins, sans regrets, sans désirer
aucun plaisir, aucun objet de ton plaisir, animé ou inanimé?
Quand ne souhaiteras-tu ni le temps, pour prolonger autant
que possible tes jouissances, ni le lieu, ni tel séjour, ni telle
température plus douce, ni même tel milieu plus sociable?
Quand donc, au contraire, contente de ton état présent,
heureuse de tout ce que tu possèdes, te persuaderas- tu que
tu as reçu des Dieux tout ce qu'il te faut, que tout est bien
[en ce qui te concerne], et sera toujours bien à l'avenir, selon
leur volonté, selon ce qu'il leur plaira d'accorder pour la
conservation de l'être parfait, qui comprend toute bonté,
toute justice, toute beauté, qui produit, conserve S et contient
tout, qui reprend, pour en faire sortir d'autres êtres sembla-
bles, tous ceux que la mort a dissous? Quand donc seras-tu
capable de vivre dans la cité des Dieux et des hommes sans
te plaindre d'eux et sans qu'ils te condamnent?
r. [Couat : «selon leur conformation. >> — Sur le sens de xarotôxeur,, cf. supra IV.
'i'i. note \. Je n'ai pas eu la moindre hésitation à garder, qualro lignes plus bas, les
mois « fonction naturelle », traduisant icpo; o y.aTET/sOaTTac]
2. [M. Couat semble avoir corrigé zXXcoç — qui n?a guère de sens, il faut l'avouer
— en xXXotç. — Nous devons aider le prochain, même pour des choses moralement
indifférentes (xà |is<7a, cf. supra, p. iA3, note /j), comme font les dieux (supra LX, 27)
par les songes qu'ils envoient aux hommes ou par leurs oracles ]
3. [Couat : « le goût de L'affection et de la tendresse. » — J'ai dû traduire SidtOeffiç-]
!\. [Sur le sens exact de T-jvéystv, cf. supra IV, i'j. le dernier paragraphe de la
seconde note.1
I I I l-l VI \ l;« M l\l
( )Iim-i\ e ce que ' ' ' lame de i«»i la natoi t an lanl ara
oc n aal qu'une simple natui • • qui te gotn ai n< pu i
opte le, il la natui e d ôli e \ Ivanl ne doil p i tufli h
Observe ensuite ce que réclame la nature d'être rivanl al
accepte le sans réserve, si la nature d'être raisonnable ne doil
pa <'n souffrir, La raison mène, d'ailleurs, droit k la olidai
Suis ces règles el ne cherche rien <!«• plu
3
roui ce <pii l'arrivé eal le! que tu es naturellement capable
ou incapable <1<' l<i supportai S'il l'arrivé des choses telles
que tu sois [naturellement] capable de les supporter, ne te
fâche point, mais supporte les comme tu <'n es capable. Si
elles sont telles que tu sois naturellement incapable de les
supporter, ne te tâche point; elles épuisent tes forces, mais
s'anéantissent elles-mêmes ru même temps. Rappelle -toi,
toutefois, que tu es naturellement capable de supporter tout
ce qu'il dépend de ton jugement de rendre supportable el
tolérable, en te représentant que tel est ton intérêt OU ton
devoir \
4
S'il se trompe, avertis-le avec bonté, et montre-lui son
erreur. Si tu n'y réussis pas, accuse-toi toi même, ou mieux
ne t'accuse même pas'».
Quelque chose qui l'arrivé, elle t'avait été préparée à l'avance
de toute éternité: l'enchaînement des causes comprenait de
i. [Coiiiit : «puisque c'est la nature seule qui te gouverne. >> — Sur le sent du
mot pO<rt;, sur la gradation de la «simple nature» qui est dans la plante à l'âme
raisonnable et sociable, cf. supra VI. t'j. note t, rectifiée aux Addenda. Voir aussi U
débul de la pensée VI, iG.J
2. [Sur le sens île to (TU(i6atvov, cf. supra IX. 3i, 2' note; VIII, 7. 'V- note.]
3. [Couat : « de rendre tolérable ou intolérable, selon l'idée que tu te fais de Ion
intérêt ou de Ion devoir.» — La méprise du traducteur a propos d'àvsxTO* est évidente.
Sur le rapport des leux notions du /t-julsésov et du xocOr)x<rv (l'intérêt et le devoir),
cf. la dernière note du livre lit reportée en Appendice.]
\. [Car (supra VIII, 17"» "il ne faut rien faire inutilement».]
BIBLI01 m v'i i DES i M\ i R8J i i S m MIDI
toul temps dans la môme trame ce que tu devais cire cl cette
chose qui dcvail t'arrh er ' .
Qu'il n'y ail (|iic des atomes OU une nature*, ceci doit etre
établi d'abord : je suis une partie du tout que gouverne la
nature, el ensuite je suis lié par un rapport 3 de parenté avec
les parties de même espèce que moi. Me rappelant, en effet, que
je ne suis qu'une partie, je ne verrai d'un mauvais œil rien de
ce qui m'esl attribué par le tout, car rien de ce qui est utile au
toul ne peut être nuisible à la partie. Le tout ne contient rien
qui ne lui soit utile; c'est là une propriété commune à toutes
les natures, et celle de l'univers s'est arrangée, en outre, de
manière à n'être forcée par aucune cause extérieure '» à engen-
drer quelque chose qui lui fût nuisible. Me rappelant donc que
je suis une partie d'un tel tout, je ferai bon visage à tout ce
qui m'arrivera. En raison de ce que je suis lié par un rapport
de parenté avec les parties de même espèce que moi, je ne
ferai rien de contraire aux lois de la solidarité; bien plus,
je m'attacherai à ce qui esl de même espèce que moi, je diri-
gerai tous mes efforts vers le bien commun et je les détour-
nerai de ce qui lui est hostile. Ces choses ainsi faites, la vie
i. | Cf. supra IV, 26.]
2. [Couat : ((s'il n'y a pas seulement des atomes, mais une nature unique.» —
M. Couat a dû rire choqué de la contradiction H»1- deux premiers mots de la pensée :
EtTc aToao'. — avec l'affirmation qui les suit : ôicb ^'jik^z 5toixovjiivov. Marc-Aurèlc
ne disait-il pas un peu plus haut (I\, 3q) : « ou il n'y a que des atomes, et tout n'est
que désordre et dispersion »? — J'ai d'ailleurs cherché en vain la correction qu'avait
dû faire M. Coual, et d'où il a pu tirer sa traduction. — Pour ma part, je ne vois que
deux solutions de la difficulté : ou bien rejeter sixe ÎTopot comme une i^lose absurde,
qu'auraient appelée les premiers mots de la pensée, eÏt6 pu<rtç; ou bien conserver
résolument le texte el la contradiction qu'il implique, el dire (pie Marc-Aurèle n'est
pas un physicien, que la morale seule l'intéresse, qu'il affirme d'abord son dogme,
et qu'ensuite il choisira, s'il y a lieu, entre les deux physiques, celle qui lui paraîtra
le mieux s'accorder avec ce dogme. Nous le -serrons, au cours de la pensée suivante,
également indifférent, ou feignant de l'être, entre les doctrines de la nature, se
donner à la lois trois explications de la ((mort» i\i-> choses, et ne tenir à chacune
qu'autant qu'il y peut trouver une assurance, toujours la même, contre le> terreurs
de la mort, c'est-à-dire qu'autant qu'il y aperçoit une utilité morale.]
3. Clouai : « par une sorte de parenté. » — De même dix. lignes plus bas. Sur la
valeur de tio: dans la locution iyivi rca>c... ~y,i ti, cî. supra, pp. 84, note i,et85, notei.]
1 jll n'y a pas de ((cause extérieure > à la nature, puisqu'elle est la cause unique,
ou mieux l'unique principe efficient, [ci, otîtiot doit être traduit par « cause », au sens
le plus usuel du mot. — Cf. supra 1\, 3i, note 2.]
Il -, I I |.| MM' \ I I ! I I
doit »'écoulei heures e On w ird i d effi I « omme b
n\w le oitoyeo qui il inee dan II \ i< inni util. .
(•()iicii«,\nis ,i <|ui ,i<( mil h- .i\ • •< . mi nenl ton • i
qne lui fail la cifc
7
routei Ici parties du i<»«ii qu'es) i<* monde ont il
remenl condamnées à la destruction; mais, par ce mot, Je veui
dire l<% changement K Si < ette n.'-. e it i I nu m. il pour elle
l'univers esl donc mil ordonné 3, puisque ici partie a be
minant vers cette transformation, ^ « » r i • faites 4 poui êtn Bna
lemenl détruites «le mille manières. La nature se -'Lut ain I
appliquée à taire [elle-même du mal aux partiesdonl elle
constituée, r\ en les exposant au mal <■! en les ol ni ;i
y tomber : ou bien cette destruction aurait lieu sans qu elle
s'en aperçûtl Les deux hypothèses -<>ut invraisemblables..
Veux iu\ laissant là le rôle de la nature, l'en tenir à cette
explication : «C'est ainsi »6? Même alors, il sérail ridicule de
1. |Tol; (JLÉpSfft toO o/.O'j, oia . :/i'i: :-', rO'J /oTi'/- M I OU 'I 'i llippi
ici le mot y/ja:', qui n'a paa tic <nh e( que Coral avait voulu
toO oao'j et i~>) toC xotiio-j, 3^T£'. serait d'ailleurs un pléonasme ■• p< ine I
Deux lignes plus loir, le même z,tv>. isl également absurde: Il n en z~-
défend mieux à celle place* M. Coual n'i pas cru devoir l'\ tdm< tti
Je respecte volontiers ><>n scrupule. On peut supposer que -r-r. aura deux
toi-, cent par mégarde >ons la dictée d'une personne qui, ne se croyant pas eut.
avait répété les dernier- mots dictés, en les annonçant par le verbe le dis
Il y a identité de sens absolue entre le- expressions roO SXou »'t teO x6ff|iou. Aussi
ai-je rejeté une variante île M. Couat, qui semble impliquer la pluralité des moi
o Toutes les parties île l'univers dont se compose notre monde. »|
2. [Et, plus précisément, le changement de- éléments, àXXoi»<nç(cf
note finale), ("est la doctrine même d'Heraclite : *;•?; tévotto;, •>>•', vsv&stai xtà.
(cf. sopra IV, aO). J'admets volontiers, deux lignes plus ba^, la correction demandée
par (iataker d'àXXoTpiuxriv en ôc).),oûi>(riv.]
3. [Et, par conséquent, ne mérite pas le nom de monde.]
\. iKarsT/.E'jaTULévfov. Noter ici encore le rapprochement des mots /a:
et qpu?i;, et l'idée de finalité impliquée dans celle de «constitution » (sapra VI, m.
note finale). Le mot « constituées » accuserait donc ici. plus nettement que tout a
la contradiction dont Marc-Aurèle tire argument Mais, If. Couat l'ayant de lui-même
ajouté à la phrase suivante, j'ai pu respecter sa traduction.]
ô. [Couat: «Que si, méconnaissant les intentions de la nature, on donnait pour
explication de ce fait que c'est un mal nécessaire, ne serait-il pas ridicule... -
lignes traduisent une série de conjectures empruntées aux Adnotationcs Mori (Leipzig,
1775). li m'a paru qu'on pouvait faire l'économie d'une ou deux Je me Miis borné
à corriger xoù à?su£vo; zr{z «p-j<TE(o:, qui est inintelligible, en i?S{ievoç ro t>: ;v7:w;,
et, une ligne plus bas, à accentuer xa\ to:.]
6. [ite^vxsvou zx-j-x. Ce n'est plus un Stoïcien qui parle, puisqu'il ne conçoit plus
la puetc comme une Providence. L'« explication » (e^rjyoîxo) n'explique rien : ce n'est
que l'affirmation d'un fait qu'on ne discute pas. Pour celui qui dirait ici sœanmrvat,
la èuetc peut avoir le même sens que pour tant d'Épicuriens qui proclament le
A . COI AT-P. FOI RMER. I i
3IO BtBUOTHEQCJ DES UNIVERSITES Dl MîDI
prétendre que les parties <l<i l'univers Boni faites pour changer,
et en même temps de s'en étonner et de s'en indigner, comme
si ces changements étaient contraires aux lois de la nature1 :
d'autant plus que la dissolution aboutit aux éléments mêmes
dont chaque chose est composée. Ou bien, en effet, les élé
ments assemblés en moi se dispersent '. ou bien ils font retour,
l'élément solide à la terre, le volatil à l'air 3; et tous sont
repris dans la raison universelle, soit que l'univers doive être
consumé après une période déterminée, soit qu'il se renou-
velle par d'éternels échanges 4. Et par cet élément solide et
hasard et Intitulent leurs ouvrages: de la Nature. Seulement, ces Épicuriens ne sr
donnent pas le ridicule de se contredire en s'étonnant et en l'indignant. — Il était
bien difficile de conserver en français deux fois dans la même phrase le rapprochement
de pvaiç et de 7re;pv/.éva'., et d'écrire: o le rôle de la nature,» pui^ : < c'est naturel,»
puis, une li^nc plus loin: «les parties de l'univers sont naturellement destinées à
changer,» enfin: «...aux lois de la nature.» Le lecteur, en retrouvant les mêmes
mois, eût-il pu soupçonner le changement de langue?]
i. [La contradiction consisterait non pas tant à déclarer contraire à la nature ce
qui y est conforme, qu'à invoquer le nom de la nature après avoir dit qu'on ne
s'occupait pas de son rôle. Aucun artifice de langage (voir la note précédente)
ne saurait la dissimuler.]
2. [Celte première hypothèse est l'hypothèse épicurienne (supra IX, 3g); et, dans
ce cas, les éléments (axor/EÎa) sont les atomes.]
3. [Couat : «ou bien ils se transforment. L'élément solide redevient terre, cl le
volatil, air; et tous font retour au principe de l'univers.)) — Le sens de xpo-r, (cf.
supra VIII, G, 2* note) est assez nettement indiqué ici par la fin de la phrase précé-
dente et par les mots «sont repris» (àvaXqçOyjvat), qui vont suivre. Il ne s'agit pas
d'une « transformation ». La transformation qui, nous a-t-on dit, est vraiment la
mort, n'aura lieu pour l'homme qu'une fois son corps rendu à la terre et son âme
«transportée» dans les espaces aériens (cf. supra IV, 3i) : c'est à ce moment que
tous les éléments qui l'ont composé pourront être employés par la nature à des
œuvres nouvelles, ou, comme dit Marc-Aurèle, pourront être repris dans la raison
— c'est-à-dire dans la raison séminale — universelle, laquelle est recueillie, on l'a
vu (supra IV, i4, note 2), dans toute la matière du monde. — « Retour» traduirait
plus naturellement et plus exactement rporcr, : encore ne faudrait -il pas entendre
par là la restitution de tout ce que nous avons reçu à l'élément môme où nous
l'avons pris. La terre, par exemple, nous a peut-être donné toute la matière du corps
qui lui re\ient; mais elle nous a donné aussi tant d'aliments que nous avons trans-
formés (supra IV, 21) en souftle et en flamme intérieure! Entendu ainsi, le « retour»
ne serait vrai qu'en partie. J'ai employé ce mot comme on dirait d'un capital qu'il
fait retour à tels héritiers, sans considérer s'il leur revient intact ou diminué. Ces
explications m'ont semblé d'autant plus nécessaires que, si, en d'autres pensées
(supra IV, &, :>' note), Marc-Aurèle a peut-être méconnu l'importance des
xXXot<£?eiÇ dans la vie, rien n'indique qu'ici il n'en ait pas tenu compte. Même
lorsqu'il écrit que « la dissolution aboutit aux éléments mêmes dont les choses sont
• imposées», il veut dire seulement ceci: que les quatre éléments, ou les cinq (si
l'on met à part la raison), que l'on trouve en l'homme sont ceux mêmes entre
lesquels se partage la substance du monde.
On remarquera que, par un procédé de langage familier aux Stoïciens (cf. IV, 21,
1" note, reportée en Appendice), ces quatre ou cinq éléments semblent ici réduits
à deux : la terre, représentant les éléments inertes, et l'air, les éléments actifs.]
k. [Sur ces deux hypothèses, cf. supra V, i3, note finale; sur la seconde en parti*
culier, cf. IV, ai, r* note, reportée en Appendice (fin de l'avant-dernier paragraphe).]
I . \ Il UI M M.« M RI I I
cet élément \ olatil ii entend po « eux qu
dans le coi i»- i lo nnii lanoe Ile n n enl n qufli
avant hier par le nom riture el la re piratit m '
ce que le corps .« reçu qui change non ce que le mère avait
enfante9 Suppose, d'ailleun qu'un lien trèi f'»ii l'uni
encore «■ cet enfant : ,j<' D6 \<>i- pe - 1 que 1 1 la p luirait faire
au raisonnement qui précède
i . [Cf, supra VI, iS, • uofc
pour «in Stoïcien, toute II \i<' pouvait lonli on a deux m
i. [«Ce que la mère .» enfant on efl I w chan ■>.mt /i r . mp
depuis i"nui< mps ; ou bien, Il en n I quoi |ue cho* on n
qu'à l.» morl c'est II . * J • * r » t M otl qu iti< m dan 1 1 p
i.i, il n .1 une lacune dans le i ahi< » de M. Coual Le I
: A) o )
i, d'ailleurs, Inintelligible, il manque l
ny,n;\ a moins qu'on ne I m , - il est évident qui
«le i.i vulgatc ./. :■<'> est un texte amendé pour répondr i • betoin. D'à i
i.i syntau il forl suspecte, malgré l'exemple <i un ■>
SocraU, ',i, ci el «l'un jivjîàv ffvta; ( ijoxt i roui I i exemples q
(Kûhner-Gerth, Syntaxe, f I, p. Si) •!<• rupture d'accord enta
participe don I il »'^i l'attribul conoernenl l'accord en gfenre el en n >mbi non
l'accord en ca** : <>u bien !»• participe au génitif ou au <i itif, donl un ti Ucle indique i"
cas, eel sous-entendu à côté d'o°j$cv ou \Lrfiïv invariable, el l'on trouve dans la n
proposition une expression comme 6 oC qui atténue L'étra i la hardies*
do ce tour (cf. Ijo», i i3i : o t'oO^b &s zrJ-j u,v)£t\ bnlvxq; u«i?). Rien de pareil i< i.
lussi ai Je suppose l<- déplacement, dans noa manuscrite, des deui li
vcnl si malencontreuse menl le participe ov, el qui, une ligne plus haut, poun
servir de sujet au verbe -oot-a :/.£-.. l'écrirais donc: c-ôOo* &'5n - iiax
7rp(iu>£xî'. ztù -oui): 7COtto, oàdrv Sv xta. La correction e:*t dis in-' parail dooœr
un sens satisfaisant.
M. Rendait {Journal of Philology, WIII. p. i5a) prop >se fie lin- ici :
àxci'vd) <j\i Xfav TrpoTTTAixr, TfD lôt'co; Tcotcô, ovosv ôVri xtà., el ie refuse, en interpréta ni le
texte ainsi amcnd<\ à réunir lo mots hcetvw <•( -',> :.o:'.>: ireià», qui lui lerablenl trop
éloignés les uns des autres pour pouvoir entrer dans la même syntaxe. !)•• i es d
le second exprimerait ce par quoi, le premier ce à quoi nous restons uni- Pour
M. Rendait, ftxetap, c'est sxeivoi o rt |rv)Tf)p trexsv; — ta t&t»; ROtcâ aurait a Lie fois l<
sens abstrait qu'il n'a jamais dans Marc- Aurèle (ci\ supra IV -j'k note i), m.ii> que
lui ont donné d'autres Stoïciens, et serait synonyme de rïj iftca KOibvrrn> Dan- ma
leçon, c'est le mot ti qui exprime l'idée de «ce qui demeure en nous de la nain
jusqu'à la mort». Nos deux corrections aboutiraient donc au même sens. Je recon-
nais, d'ailleurs, volontiers que le changement du passif icpooicXéxin en L'actif -:',7-
Tz\îv.i'. serait la moindre des erreurs imputables à l'iotacisme : même que I.i sép. «ration
des mots Èxeivbi et tô> ioûo; tzouo est assez choquante, si l'on prétjnd les grouper dans
un même accord. Mais je m'étonne davanl ige de 1<i rencontre des mots s-jôè>y avri que
n'a pas songé à éviter M. Rendait: et surtout je reproche à sa conjecture de ne pa:*
porter sa justification eu elle-même. Comment t^ a-t-il pu devenir et? ^i la second»-
lettre du mot a été effacée dans l'archétype, il était si naturel de la rétablir et >i
absurde de la changer, qu'on ne peut comprendre l'erreur commise.
Quoi qu'il en soit, Marc-Aurèle, après avoir défini la vie comme une suite
continue de changements, se ravise et reconnaît pourtant que v« quelque choses
demeure eu nous, et ne change qu'à la mort. La fixité relative de celle « détermi-
nation» ou « qualification », à laquelle notre auteur attachait un peu plus d'impor-
tance lorsqu'il voyait en elle (supra \ I, 4o) «la force même qui nous a constitués»,
ne saurait, san* doute, nous empêcher de considérer le changement eomm*1 la
a i a mm toi m oi i des i %u i rsi i es di midi
8
Quand tu le seras appliqué les mots suivants: hou, délicat,
sincère, prudent, confiant, magnanime, prends garde d'avoir
pris de faux noms, el, si tu les perds, reviens \ au plus vite.
Souviens loi que piaulent signifie l'examen pénétrant et attentif
de chaque objet; confiant, \c consentement volontaire à tout
ce qui nous est attribué par la nature universelle; magna-
nime, le pouvoir, pour la partie pensante de nous-mêmes, de
se tenir au -dessus des mouvemenls doux ou violents de la
chair1, au-dessus de la réputation, de la mort et de tout le
reste. Si tu demeures fidèle à ces noms, sansjlésirer que les
autres te les donnent, tu seras un autre homme et tu entreras
nécessité inévitable, à laquelle il est sage de se résigner; et de ce que cette « détermi-
nation >> est Limitée il ne s'ensuit pas davantage que la nature soit imprévoyante :
aussi Marc-Aurèle a-t-il cru pouvoir ici affirmer la réalité de la tcoiôtï;; sans nuire
<< au raisonnement qui précède». On s'étonne pourtant que l'auteur des Pensées ait
méconnu ou dédaigné l'argument que son aveu devait donner à ceux qui craignent
la mort. Ce fond stable de l'être, cette force intérieure qui nous constitue et nous
définit, ce n'est rien moins que la raison, la conscience et la personnalité. C'est ce qui
non- appartient vraiment, ce qui fait que nous nous appartenons nous-mêmes; c'est
ee qui conserve notre passé dans notre présent; ce qui, de tant de moments fugitifs, de
tant de points du temps en chacun desquels Marc-Aurèle n'a voulu voir que la limite
de deux néants, crée pour nous la durée, en nous faisant durer. Tous les change-
ments qui renouvellent sans cesse en nous le corps, le souffle, la partie inférieure de
l'a me ne saliraient donc nous accoutumer à celui où doit sombrer l'identité person-
nelle; et tout le reste de notre matière, dans laquelle Marc-Aurèle a pensé la
confondre et la perdre, est sans valeur au prix de celle-ci. C'est pour elle que les
hommes craignent en craignant la mort, et leur inquiétude a semblé si légitime aux
fondateurs du Stoïcisme qu'ils se sont ingéniés, comme on l'a vu (IV, si, i" note,
reportée en Appendice), à démontrer sinon l'immortalité, du moins la survivance de
la personne. Marc-Aurèle, au contraire, s'est désintéressé de ce problème.
C'est que, pour lui, l'homme n'est vraiment (il l'a dit, IV, id) qu'une partie d'un
tout. Quand il dit que la nature ne saurait faire de mal aux parties qui la composent,
cela signifie seulement qu'elle ne saurait se nuire à elle-même; il ne conçoit pas un
bien pour l'individu hors des volontés générales de la nature, ni même le besoin
d'être et de persévérer dans son être pour l'individu en tant qu'individu. Quand tous
les hommes ne pensent qu'à l'homme, — les meilleurs à ce qu'il y a de meilleur en
lui, mais à lui encore, — Marc-Aurèle les entretient (X, i) du salut de l'animal
parfait et unique. Il est lui-même si exclusivement occupé de la nature et de son
œuvre qu'il ne suppose même pas (cf. C notes plus haut) que d'autres puissent éviter
la contradiction de la nommer, lorsqu'ils se sont résolus à ns pas se soucier de son
rôle. C'est elle qu'il vénère (VI, 5o) dans la force qui nous a constitués et qui persiste
en chacun de nous, encore que son langage semble nous attribuer une nature propre.
En réalité, nous ne sommes à ses yeux rien par nous-mêmes. Délibérément, comme
l'a noté M. Couat (supra II, i4, note finale), il oublie la conscience humaine, pour
établir que le temps n'est rien : il l'oublie encore devant la mort, quand il dit et
répète (supra II, 17, fin; IX, 21, Tin) que la dissolution totale de l'être n'est qu'un
changement comme ceux qui renouvelaient sa matière pendant la vie. Mais nulle
part il n'a plus manifestement qu'ici dédaigné le fantôme de la personne, puisqu'ici
il ne l'a comptée pour rien, tout en reconnaissant la réalité de l'individu.]
i. [C'est-à-dire des plaisirs et des douleurs physiques. Cf. supraY, 26, et les notes. |
Il >^| I 1)1 M VI. « \UIIII
dani DD€ .nit i < \ ic lit- Ici Ici c|iie lu • ■ < ■!»'• ju <|'i h i t'' ;
menter h I .^ ilir dam l'eil len< 0 que ta mi
(ruii homme [vraiment dépourvu de Bentimenl qui « cram
ponne à la \i«-, semblable 1 mi belluaire déjà « demi d<
qui, rouverts «ir blessurei el de sng demandent cependant
d'être conservés jusqu'au lendemain poui être livré de non-
\ eau aux mêmes griffes el aux même m Embarqu
donc, comme sur un esquif, 111 cei quelquei noms. 81 lu peux
y rester, restes > comme il tu avait été transporté dans de
nouvelles Iles des Bienheureux; -1 tu lens que tu irai loml
que tu nfea plus maître de toi, réfugie toi résolument1 dan
quelque coin où tu rentreras en possession de toi même, ou
encore sors définitivement de I;» vie, sans colère, simplement,
librement, modestement, ayant du moins fail quelque chose
dans ta vie, puisque lu l'auras ainsi quittée ' Tu seras puis
samment aidé à te souvenir de ces nom- par le souvenir des
dieux; ils ne veulent pas être llaiié>. mais ils veulent que l
le^ rires raisonnables leur ressemblent, que !<• figuier ; rem
plisse sa fonction de figuier, le chien ^a fonction de chien,
l'abeille sa fonction d'abeille, l'homme sa fonction d'homme.
9
Un mime, la guerre, la crainte, l'indolence, la servitude
effaceront peu à peu de ton esprit [tous] ces dogmes I sa<
que, faute de philosophie 5, tu négliges comme tu les conçois.
1. [Var. : « avec confiance. "|
1. [Sur la moralité du suicide stoïcien, cf. supra VIII, \- . rmi»- finale. C'esl |
être ici que Ifaro-Aurèle noua fait voir le plus clairement dans la mort rolontaire la
ressource suprême de la liberté. Il en parle, d'ailleurs, sans éclat, »t en quelques
mots, comme d'un acte tout ordinaire et raisonnable]
3, [Le ti^uier et la tiirue ont fourni à ilarc-Aurèle de fréquentes <"in;
Kci\ 111. 1; IV, 6; VI, i4; VIII, i5; \, 17; XI, 33; Ml, 16).]
\. [Gouat : « principes. »]
"). [On ne peut conserver la leçon inintelligible des manuscrits: ô-o^a -',_.-
pavraÇi) v.x\ Traoa-su-s::. M. Couat avait admis dans son texte, avant que M S
ne la fit passer dans sa seconde édition, la conjecture de Gataker: x<\
M. Kendall préfère lire o*j çvxr.o/.oY^Tio:, parce que la confusion d'o et d'eu est plu>
vraisemblable que celle d'o et d'à, et qu'on en a. d'ailleurs I \. i5 : S pO'jXsTzi pour
où pouXsTat), un autre exemple dans les Pensées. J'objecterai à cette conjecture que, >i
QteuffioXoYvÎTMC est un terme aussi nouveau que le simple soxrtoAOYi)TttKi °^11 inoins
nous connaissons par ailleurs l'adjectif içuatOAOfrjroç, tandis que nous ignorons
ç'jdtoXovrjToç. Au reste, la correction de M. Rendall aboutit au même sens que celle
de Gataker.
M. Couat avait traduit comme il suit le texte de ce dernier: « ces principe- sacrés
> i ', BIBLIOTHEQUE DES LMVBKSITKS Dl MIDI
Il faut voir et agir en tout de façon à accomplir ce qui est
exigé par les circonstances, tout en exerçant noire Faculté
d'observation1 el en conservant au fond de nous-mêmes,
sans le dissimuler d'ailleurs, le lier contentement que donne
la science9 de chaque chose. Quand donc, en effet, jouiras-tu
du plaisir d'être simple, grave, du plaisir de connaître chaque
chose, ce qu'elle est dans sa réalité matérielle 3, quelle place
elle occupe dans le monde, combien de temps elle doit durer,
de quoi elle est composée, à qui elle doit appartenir, qui peut
la donner ou l'enlever?
10
Une araignée est fière d'avoir pris une mouche, celui-ci
un lièvre, cet autre une sardine dans son filet, cet autre des
sangliers, cet autre des ours, cet autre des Sarmates'». Tous
ces hommes ne sont-ils pas des brigands, si tu regardes leurs
principes?
11
Fais-toi une méthode d'observation, et sans cesse examiner
comment toutes les choses se transforment les unes dans les
autres; exerce-toi à cette étude spéciale. Rien n'est mieux fait
pour élever l'âme 6. Il s'est affranchi de son corps, celui qui
dont tu te glorifies et fais parade en homme qui n'a pas étudié la philosophie. >• — La
signification d'àçyTtoXoy^Tw; ne semble point contestée (cf. d'ailleurs supra I\, &i,
a' note). J'ai donné à 7rapa7:£tx7rsi; un sens qu'il prend très souvent, et que nous
avons dû déjà lui attribuer (I, 8, fin) dans cette traduction : celui que proposait
M. Couat est insolite. Quant à pavrafo, l'interprétation nous on < «I suggérée par le
début de la pensée VU, 2, où sont assez nettement marqués les rapports du oôy|j.a et
de la cpavTaiia. Marc-Aurèle s'accuse de ne pas prêter aux représentations d'où il a pu
tirer les « dogmes sacrés » une attention suffisante, et de les submerger sous un flot
d'autres représentations inutiles, vulgaires, ou même immorales, parmi lesquelles
(VIII, 5i) «il ne se retrouve plus ».]
1. [Couat : unotre pensée.» — Comme ôiavorj'.xov, Xoytortxôv, xaxaXijirrixov,
TïpoaipSTiy.ôv (cf. supra IV, 22, en note), 6su)pr,T».xbv est le nom du principe directeur
considéré dans une de ses fonctions propres. Quelle est cette fonction? C'est à la
traduction de le dire]
2. [On trouvera énumérées à la fin de la phrase suivante les principales questions
auxquelles celte a science » répond.]
5. [Couat : <( en quoi consiste son essence. » — Cf. supra III, n, 2' note.]
l\. [((Sceptique sur la guerre, même en la faisant..., il doutait de la légitimité (]<•
ses propres victoires» (Renan, Marc-Aurelr, e/c.6, p. 207).]
[Couat : « ne cesse pas d'observer, en t'appropriant la méthode spéculative... »]
6. [Même expression à l'article III. 11 (page /40. ligne 3 de cette traduction!. )
I I > .1 I I >l M i I ' \ I I. I I I
i oonsidéré1 qu'il faudra bientôt] toul quittai en quitl
hommes, <*t il l'abandonna entièrement li la |n U e i n
srs .,,(<• , ;, || m.iIiii.- imisrisrllr | >< » 1 1 1 h,n I ,,t (j.j,
lui arrivent ' Il ne m demande même pfl [u'on dira de
lui, <•<• qu'on pen • i ■• <!<• lui i è qu on Fera contre lui D
choses hn suffisent agit i »'« • - . 1 1 h.u icu i ielon laju tice aimei
la pari qui lui esl prësenlemenl Faite M «• i libre d'aflfein
et de préoccupations; il n'a qu'une volonté, marchai l l'aidi
de la loi dans i«i droit chemin <*i >nni<' dans oe chemin les
traces de Dieu '<
12
Quel besoin de te lis ni aux Conjectures . quand lu peux U
rendre compte de ce que tu dois i'.iiiv ' SI in le \<»i-. port
de ce CÔté de bonne humeur, sanfl le ivtoiinier en .011
tu ne le vois pa>, attends, recours -i de sages conseillers. vi tu
rencontres quelque obstacle sur ton chemin 0, procède suivant
la raison et d'après les moyens dont tu dispose*; en l'attachant
i. ['E|«Wffato to «rroixa, xoft Èwor.T-x; o:1.... rcàvra... xorroriu*
oXov éa-jTÔv xxX... Il semble que le lujel <i<s verbes ilMaax
[ \{r grec. La traduction littérale de cette phrase srrait la suivante : // i*est afh
île >on corps, et, considérant qu'il faudra bientôt tout quitter..., il l'abandonne
entièrement...» — On pourrait encore supposer que xafc a été substitué au pronom
o;, disparu sous une tache ou dans une déchirure du manuscrit.]
i. [Cf. supra IX, Si. Le rapprochement des deux pacages indique clairement
que ces deux: expressions: u la cause extérieure» et «la nature uni\crctlle i sont
synonymes]
S. [Cf. supra VIII, 5i : u ne t'embarra-se pas d'affaires dans la vie. »]
!*. [Donc, être libre.]
5. [Et, très vraisemblablement, à des conjectures sur la conduite et le- aA
d'autrui. Cf. supra III, 'i, i" et 8* notes. Pour Ifarc-Aurèle, le devoir esl encore ce qui
s'aperçoit le plus clairement.]
6. [«on cï ÉTcpâ T'.va Tipô; TaOïa àvt'.oa:vré. Couat : fr Si tu rencontres d'autres
obstacles. » — Même traduction, à un mot près, cbez Pierron, Barthélemy-Saint-Hilaire
et M. Micbaut. D'après eux, c'est un premier u obstacle » pour l'honnête bomm
ne pas reconnaître son devoir. On pourrait peut-être ao tte interprétation
du passage, si Ifarc-Aurèle avait écrit ttco; toCtq : on pourrait admettre, en effet, que
toCto représentât ici l'idée de u taire son devoir», impliqué-1 plus haut dan- les mot*
«voir ce qu'il faut faire, » — cxott^v ri o;: Tipayjjr.va'.. Mais c'est -xl-x qui est
Ce pluriel ne peut désigner que les deux actions exprimées dans les deux phrases qui
précèdent : u se porter vers le devoir, quand on l'a vu. » ou u prendre — et suivre — le
conseil de sages personnes». Dans les deux cas -e trouve également supprimé le
premier obstacle que semblent indiquer les mots o d'autres » dans les traductions de
MM. Couat et Micbaut et de leurs devanciers. — A quoi dirons-nous donc que
s'oppose £T£pa? Le texte grec signifie littéralement : « Si quelque autre chose fait
obstacle à ton action, » — c'est-à-dire : S Si ton action trouve en face d'elle quelque
autre chose, — quelque chose autre qu'elle-même, — ou, tout simplement, quelque
chose — pour lui faire obstacle. »]
MiG BIBLIOTHEQUE I>1> UNIVERSITÉS Dl Mii>i
à ce qui le paraît juste. Il est [en effet très] beau de réussir
dans ce dessein puisqu'il est [si] facile d'y échouer1. L'homme
qui suit la raison en tout est à la fois tranquille et prêt à
l'action9: il porte une aine sereine el sérieuse cependant
13
Demande -toi, à l'instant même où tu te réveilles, s'il
t'importera qu'un autre blâme ce que tu auras fait de juste et
d'honnête '»? Cela t'importera peu. As tu oublié ce que sont ces
gens qui montrent tant d'arrogance 5 en louant ou en blâmant
les autres, comment ils se conduisent au lit, à table, ce qu'ils
font, ce qu'ils cherchent à éviter, ce qu'ils poursuivent, ce
qu'ils volent, ce qu'ils ravissent <», non avec les pieds ou les
mains, mais avec la partie la plus auguste d'eux-mêmes,
source, pour qui le veut, de la bonne foi, de la pudeur, de
la vérité, de la loi, mère enfin de notre bon génie?
14
L'homme qui s'est instruit, l'homme qui est modeste dit
à la nature, qui nous donne et nous reprend toutes choses :
a Donne- moi ce que tu voudras, reprends -moi tout ce que tu
voudras. » Et il ne parle pas ainsi par orgueil, mais dans un
sentiment d'obéissance et d'amour pour la nature.
i. [On lit dans les manuscrits : èireî toi q ye ànémtûaiç oltzo tovtou s<ttu> . Ces mots
n'ont pas de sens. Sauf M. Rendait, dont la conjecture hardie — f, ys octtotttoxti;
xiz6xtvy\L osa eoriv — me semble bien subtile, et s'accorde d'ailleurs malaisément
avec ce qui précède (xaiTOt, avant elle, ne serait-il pas plus naturel qu'sTTEc toi?), les
divers éditeurs des Pensées ont respecté ce texte jusqu'au dernier mot. On a d'abord
corrigé s<ttw en ïrjzxi ou en è<roVf puis, supposé la chute d'un adjectif neutre.
M. Skaphidiotis a eu l'idée de la correction à la fois la plus simple et la plus plau-
sible : il a vu dans ïfj-iù la iinale (-icrrov) d'un superlatif, s'opposant à Spurrov, et dont
les premières lettres auraient disparu. Il propose xdcxwrov, qui est, à vrai dire, assez
plat. J'aimerais mieux pour exprimer le même sens aÎT/t-TTov, que me suggère la
conjecture de Coraï (sgtiv ala/pov). — M. Couat a-t-il lu pa?Tov? Do toutes les
lectures proposées, c'est celle-là qui s'éloignerait le moins de k'axw.)
2. f Couat : «disposé au repos et au mouvement.» — Le sens de <r/o).aîov est
indiqué par celui d'àffYoXt'a; à la pensée précédente (note 5). Ce mot désigne la
liberté d'un esprit qui, ne s'étant point embarrassé d'affaires dans la vie, n'en est
que mieux disposé à accomplir la seule action digne de lui.]
3. [Gomme le remarque justement Pierron, ces derniers mots traduisent la célèbre
pensée de Sénèque (ad Liicilium, a 3) : « Res severa est verum gaudium. »]
'a. [Couat: ((qu'un autre ait agi justement et honnêtement.» — J'ai admis la
correction de Capel Lotît, conservée par M. Rendall : «|/éyTjTat, au lieu de ysvr.ra'..]
3. [ySoaTToaîvo: : voir aux Addenda la première note à la pensée IV, 48.]
»). [u On ne connaît pas tous les sens du verbe voler... » (supra III, i5).|
Il \ | I Dl M M'< WIUII
45
C.Vst Dell <!<' ChOSC (|lir \r |rill|i- qui \r H' («' i I s f
comme il t ■ i était 1111 une montagne ' n Importe peu, an cffel
(lue l'on \i\r [cl OU l«» pourvu <|ii«- l'on -<>il parlou! dan I
monde1 comme dam une oltë Que lei bommei soient
reconnaissent en u>\ un homme véritable, vivant conformé
ment à la naluiv S'ill QC p. usent \r - 1 1 j » j m >i t * i . qu'ils te
tuent. Cela vaul mieux que de rlvre comme aux
16
Ne discute» pas sur ce que doit être un honnête homme
sois le.
17
Figure-toi sans cesse la durée totale et la matière iotali
chaque partie n'est, par rapport à la matière"', qu'un grain de
figue G et, par rapport au temps, qu'un tour de vrille.
18
En examinant avec soin chaque objet, dis-toi qu'il est en
train de se dissoudre, de se transformer, de se décompo
[en quelque sorte] et de se disperser; enfin, songe que chaque
chose meurt, [si je puis ainsi dire,] par le fait qu'elle est née.
19
Vois ce qu'ils sont, d'une part, quand ils mangent, dorment,
s'accouplent, vont à la selle, etc.; puis, au contraire, quand
ils font les hommes", se pavanent, s'irritent, blâment sans
mesure. Il n'y a qu'un moment, de combien de besoins ils
i. [Cf. supra VIII, 45; infra X, a3.]
a. [èàv «ri; 7tavxayo'j (o; èv rcôXs: xm xodfxto. N'est -il pas nécessaire d'écrire un
second Èv devant t<5 xô<xua>?]
3. [Le mot oXio; du texte grec est rendu par le tour plus net et l'accent plus
impérieux de la phrase française. Traduction littérale: « Il ne s'agit pas do tout de
discuter..., mais de l'être. »]
4. [Couat : « la durée éternelle et la matière infinie. » — Mais, pour les Stoïciens, le
monde est fini. Le contresens, qu'eût évité une traduction littérale. Tient de Pierron.j
5. [Couat : « substance. »]
G. [Cf. supra X, 8, note finale.]
7. [Le participe otvâpovou.o0u£vot que présentent ici les manuscrits ne se retrouve
pas ailleurs. L'étymologie ne permet guère, à vrai dire, d'en tirer le sens qu'exige
le contexte, et M. Rendall (Journal of Philology, XXIII, p. i5*)a peut-être raison
d'appeler ce mot vox nihili. En tout cas. la correction qu'il propose. kv4 icvoi,
JlS BIBLIOTHEQUE l>Efl iM\ih>ni> Dl midi
étaient esclaves, et par quels actes ils y cédaient1! Et tout
à l'heure ils y reviendront!
20
Ce que la nature universelle apporte à chacun lui est Utile*,
et utile au moment où elle le lui apporte.
21
u La terre aime la pluie: le vénérable éther aime aussi la
pluie 3, » Le monde aime à créer les êtres à venir. Je dis donc
au monde : « J'aime ce que tu aimes. » N'emploie-t-on pas aussi,
même en parlant des choses, les mots : « aimer à, » au sens
d'« avoir coutume » 4 ?
est, quoi qu'il en dise, en désaccord avec les mots voisins: quel rapport peut-on
imaginer entre les idées de « faire le lier, le difficile, le dédaigneux » et celle de la
pire débauche? La conjecture de Reiske, àopvôuEvoi, donne le sens désiré: mais il
faut convenir qu'elle s'écarte bien du texte.]
1. [èoow.ejov 710(70::, xàt ôY ofa. Couat : «de combien de besoins ils étaient
esclaves, et pour quels motifs! » — On se demande le sens précis de ces derniers mois,
qu'on retrouve dans la traduction de M. Michaut. Je suppose que MM. Couat et
Michaut se sont trompés pour avoir voulu rapprocher ce texte de la dernière pensée
du livre VI, où les mots ôY ota sont définis par ceux qui les suivent et expriment
nettement un motif ou un résultat. Ils n'ont point assez remarqué que, dans cet
autre texte, le premier pronom employé avant oY ola — oîoe — désignait des person-
nes, tandis qu'ici c'est un neutre — ttoo-ocç: que le sens général n'est donc pas le même
dans les deux cas; il ne se sont pas avisés non plus qu'il leur eut été assez difficile
de qualifier ôY ota, ici comme là-bas, par le participe TtEpcycpousva (littéralement :
(( et pour qu'il leur en reste quoi?»).
La préposition oià suivie de l'accusatif peut avoir un second emploi, et, comme
lorsqu'elle s'accompagne du génitif, exprimer le moyen. C'est le sens que je lui ai
reconnu en ce passage.
Pierron a fait ici, comme à l'article VI, 09, un masculin du premier pronom
(ttoo-o:;): il a pu ainsi donner des deux textes une même traduction, et n'a pas été
embarrassé par ôY ola. Mais, à son interprétation, la pensée me semble perdre et
sa cohésion et sa saveur. D'ailleurs, je crois impossible de tirer de la dernière phrase,
où il a vu une réponse aux interrogations précédentes, le sens qu'il lui attribue :
« A qui ne faisaient-ils pas la cour naguère, et pour quoi obtenir? Dans peu ils seront
tous réduits au même état, » — y. ai uet' oXi'yov èv 7 0 1 0 -j t 0 1 ; ë <r 0 v t a 1.
Rapprocher du présent article la fin de la pensée VIII, 3 : on y trouvera BouXeta
avec un neutre pour régime, et, comme ici uôo-ot et ota, la succession assez étrange
des pronoms ôo*oi et 7:60-01 : ôo*a>v 7ipôvoia xaù 8ouXeia 7100-wv.]
2. [Le panthéisme n'admet pas l'indépendance de l'individu. Ce qui est apporté
à chacun ne Lui est donc utile que comme à une partie de la nature universelle. La
Nature, qui est aussi Providence, ne veille, en somme, que sur elle- même. Marc-
Aurèle ne saurait rien affirmer de plus. — Cf. supra X, 7, et les notes.]
3. [Citation d'un inconnu.]
li. [Couat : « Ne dit-on pas aussi d'une manière courante : ceci a coutume d'arri-
ver?» — Cette traduction, où disparaissait le jeu de mots, a été ensuite effacée, mais
non remplacée par son auteur.
On remarquera, dans le texte grec, l'emploi tout à fait insolite de fxrjt au sens de
nonne. Il n'est plus possible ici, comme en un autre passage des Pensées (IV, a4,
4* note, complétée aux Addenda), de supprimer l'interrogation et d'interpréter ar.-rt
comme |it,içots.]
il \ i i • il M \ t •■• \ ( i\ i i »
22
Ou ta \ li là où tu et, el tu ( habitué ou tu
portai ailleurs, el tu l'ai voulu; ou lu m<m- <-i »• • - i,«- «-t
remplie En dehors de cela il n > a ri m \i<- .loin imn < oui .../.•
23
Que oeol soil toi^joun ♦' \ i«i«n i i tei feux : ce 4 dut
/><>///• /m' 0), un champ l'est pour cel aulre1; rirra id ou
lommel d'une montagne, ou au bord de la mer, ou en quelque
lieu que ce soit, c'est, en somme, la même chose Tu arriv<
tout droit au mol de Platon enfermé dam un parc sur
la montagne, et tirant le lait de lei brebis1
24
Quel est le principe qui commande en moi? Qu'en l'ai-
à présent? A quel objet est-ce que je l'applique présentement?
Serait-il dépourvu d'intelligence? Se serait-il violemment
détaché de tous sentiments de solidarité? Serait-il mêlé à
cette misérable chair el confondu avec elle au point d'obéir
à toutes ses impulsions^?
25
Celui qui fuit de chez son maître est un déserteur. La loi est
notre maîtresse; par suite, celui qui la viole est un déserteur.
Mais celui qui s'afflige, qui s'irrite, qui s'effraie, ne veut pas
que se soit produit dans le passé ou se produise dans le pré
sent ou dans l'avenir tel événement prescrit par l'ordonnateur
de toutes choses, la loi, qui répartit à chacun ce qui lui
revient. Donc, celui qui s'effraie, ou s'afflige, ou s'irrite, est
un déserteur'».
1. [oti to'.oCto ÈxcSvo ô ivpô: stt'.. Ce texte «i<t très corrompu. Couat : a ce champ
est ce que tu voudras. » — J'ai lu èxstvw, et supposé aprè> Sn une lacune de quelque^
mots, par exemple : oiov <ro\ r, aOXr;.]
2. [Thcétète, i;4, D-E : w En entendant l'éloge d'un tyran ou d'un roi, le philo-
sophe pense au pâtre heureux... de tirer de ses troupeaux beaucoup de lait. Les rois
aussi sont des bergers; ils ont charge de faire paître et de traire une espèce d'ani-
maux plus difficiles et plus dangereux. .; ils demeurent clos dans leurs murailles
comme le pâtre en son parc sur la montagne. »!
3. [Cf. supra VII, 16, et la seconde note.]
'4. [Cf. infra XI, 20.]
220 BIBLIOTHEQUE DES UNIVERSITÉS Dl MIDI
26
L'homme s'en va, laissant sa semence dans la matrice; puis
une autre cause1 s'en empare, ;igit à son tour et achève de
former l'enfant. Quel point de dépari et quel résultat! Mais
de la nourriture a été introduite dans le gosier du nouveau-né;
alors une autre cause-, s'en emparant à son tour, lui donne
la sensation et la tendance, en un mot, la vie, des forces et
toutes les facultés si nombreuses et si merveilleuses du vivant.
Contemplons ces phénomènes derrière le voile si épais qui les
recouvre, et nous reconnaîtrons aussi clairement 3 que si nous
la voyions de nos \eux la force'» qui les produit, comme nous
voyons celle qui fait tomber les corps et celle qui les élève.
i. [La première des « causes » qui feront l'homme est donc dans la semence. C'est
la « raison séminale » (supra IV, i4, note 2). La seconde n'est pas seulement l'apport
de la mère, c'est le mélange de cet élément avec la raison séminale; c'est l'a me
même de l'embryon; c'est une «nature » (supra VI, i4, note 2) semblable à celle des
plantes. Nous devons, en effet, considérer qu'ici, comme à l'ordinaire, Marc-Aurèle
a désigné par les diverses aiTcoti qu'il énumère une série de « principes efficients » ou
de causes internes (supra IX, 3i, 2' note); l'évolution de l'une à l'autre n'est pas
seulement un accroissement par addition de matière, mais aussi une métamorphose.]
2. [Cette autre cause, c'est l'àme vivante (supra VI, i'i, même note), laquelle,
rapporte Stobée (Ed., I, 87/»), préexiste à ses facultés. Marc-Aurèle arrête à celle-ci,
c'est-à-dire au premier jour, l'histoire de l'homme, et ne nomme ici ni ne désigne
la raison. On remarquera le nom dont il a appelé la vie : ^u)rt, et non pto? (supra VI,
i5, 3* note). On remarquera aussi qu'il ne cite qu'un des deux facteurs de la vie, la
nutrition, et oublie l'autre, pourtant le plus important, celui par lequel se « trempe»
l'àme (supra VI, i4, 2* note), la respiration. Mais il nous suffit de considérer comment
l'homme se renouvelle chaque jour par la nutrition pour nous aviser de l'instabilité
de la dernière des «causes» que Marc-Aurèle énumère ici. Si notre auteur avait voulu
achever l'histoire de l'homme, et désigner le principe d'unité qui nous conduit,
identiques à nous-mêmes, à travers tous les changements de notre matière, depuis
la naissance jusqu'à la mort (àub ^/«jo-eo); jjiypi toO tt,v 'Jo/r,v àuooov/at : infra \II,
2d), il eût nommé ici la 710161/); (supra IX, 25, 1" note). C'est une unité plus ancienne
et plus merveilleuse qui l'intéresse pour le moment : non plus l'unité limitée qui
nous donne l'illusion de noire indépendance, mais celle qui nous rattache à la nature
commune; l'unité de la «force» (o\!»vapii;), qui du germe fait naître l'homme, et,
après l'avoir fait naître, le fait durer {supra VI, /jo, 3* note).]
3. [« Ce n'est pas avec les yeux, mais avec une autre vue que l'on s'en rend
compte » (supra IV, i5). — Cf. encore VIII, /»o, et la note. — Cf. encore le mot de
Platon à Antisthène dans Simplicius (Brandis, Sckolia in Arislotelem, p. GG-G7): ïyi'.;
ixàv a) 17:710; ôpâTai toge to ô'^a, t» os lîÇîtéxt^ Ocwpî'Tat o*joÉtiw y.ixT^o-a'..]
4. [Simplicius (L L, p. G9 b, ligne 2) rapporte cetle définition stoïcienne de la
« force >> : O'jvajxi: èotiv r, tiXsiovwv èuoiaTixr, a'juLTrTwixàTwv, a>; r{ spoVr,?!; toj t£
çpovt'txo); 7i£pi7iaT£'.v xài to-j çpov:'fj.a>; 8ia)iy£(r6at. — « C'est ce qui amène plusieurs
événements; ainsi, la sagesse amène une sage promenade et une sage conversation. »
— Zenon avait dit (supra IX, 3i, 2* note): «La sagesse est cause (atTiov) de l'action
d'être sage. » L'identité des exemples invoqués de part et d'autre témoigne suffi-
.ni ment de l'affinité des deux notions de l'aiTta et de la Suvajxi:. C'est peut-être pour
• - distinguer que les Stoïciens avaient ajouté un complément à la définition de
-ci. La oOvaat: est encore, rapporte Simplicius (ibid.. ligne 7), «ce qui commande
i ni m \r\< unr.i.i
27
N<- C€ 116 |> M <!•' tr dire r|iic loutre « h ni (oujoiii
tellei qu'ellea sonl aujourd'hui el qu'elli i ronl t.-n.
dans l'avenir. Meta loi devanl le yetu toute le comédie
louhvs les srrnrs semblable! que Lu cooual pai la propre
expérience e( par l'histoire, loute la cour d Hadrien, toute i ll<
d'Antonin, toute celle de Philippe, d Mexandre, cl
spectacles étaient tous pareils; les acteurs leuls onl i b m.
28
Figure t<>i bien que celui qui s'afflige ou s'irrite à proj
quoi que ce soit ressemble au porc que l'on égorge et qui
regimbe el cric. IV même celui qui, étendu sur son lit, gémit
en silence sur les liens <|iii nous enelniînenf. L'obéissance
volontaire à tout ce qui lui arrive est le privilège résen
l'animal raisonnable; l'obéissance, volontaire OU non', est une
nécessité pour tous.
aui actions qui Lui sonl soumises, » — r\ xaToraporrowa -■'»< ûttototee
— En d'autres termes, c'est un mole d'activité. Cette Interprétation pourrait du
moins s'appuyer sur L'usage constanfl de Ifarc-Aurèle, qui, dans l'homme, défini pai
mif -x'.-'.i. appelle 5uvau.i; toute fonction de l'âme vivante (ovaxvcutmxv
VI, i5) el loute faculté de L'àme raisonnable (iin9TQn.ovtxT) v-v *■;.•.:. V,
oOvauu:. III, g; XoYtXY] oôva-j.'.:, VII, 72), et. dans la nature, cause universelle, tout
ce que nous entendons nous-mêmes par les « forces naturelles >>, la pesanteur, par
exemple, citée ici. Il est facile aussi d'accorder celle explication avei le pféaenl
On peut, en définitive, considérer comme subordonnées les unes ;nix nu'r
O'jvâfjLSv; et les a-.Tia:. Toute force est soumise à la raison universelle; mais tout
principe efficient, toute cause particulière dépend d'une force de la nature. Cest une
même force qui relie les métamorphoses de notre principe efficient depuis \a
conception jusqu'à la mort; mais c'est à un même principe efficient — eon.
lui-même de l'assemblage essentiellement instable de nombreuses causes secondaires
— que nous rapportons toutes les forces, tous les modes d'action que manifeste notre
vie, tant animale que raisonnable.]
1. [Couat : « la simple obéissance. » — Il semble que ces mots soient la traduction
littérale de to ùî STreTÔat <piX6v : mais, si on l'oppose à l'obéissance volontaire, n'est-il
pas naturel d'entendre par la «simple obéissance» l'abdication de toute liberté/
Cette seconde expression est au moins ambiguë, puisqu'à cause d'elle on est un
moment tenté de compléter ainsi la phrase finale de la pensée: ,<la simple obéissance
est une nécessité pour tous les autres. » Or, le texte ici est fidèlement conseil
Marc-Aurèle a bien dit ce qu'il voulait dire. L'homme libre, à ses veux, doit obéir.
lui aussi, car on peut être libre en obéissant (supra VI, 42. et les notes; infra XI. 20,
note finale). Il n'y a pas lieu, comme l'a fait Sénèque, de corriger le « parère Deo » ;
le mot adsentior, < je consens, » dont le Stoïcien c^t si fier, n'est exact qu'à la condi-
tion de ne pas être donné comme la négation de la nécessité d'obéir. (Ad Lucilium.
9O: « Non pareo Deo, sed adsentior. Ex animo illum, non quia necesse est, sequor. |]
■2-j? BIBLIOTHÈQUE DBS UNIVERSITÉS m MIDI
29
Examine en détail chacune de les actions et demande-toi si
l'obligation d'y renoncer te rend la mort redoutable.
30
Quand tu te heurtes à la Faute d'un autre, délourne-toi
d'elle pour observer les fautes semblables que tu comme!-
par exemple si tu considères comme un bien l'argent, le
plaisir, la gloire, ou autre ebose de ce genre. Cet examen te
fera vile oublier ta colère; tu reconnaîtras que cel homme
subit une violence : que pourrait-il donc faire? Ou, si tu le
peux, délivre-le de ce qui lui fait violence1.
31
Quand tu vois Satyrion, imagine-toi un Socratique, Eutychès
ou Eumène; quand tu vois Euphrate, imagine-toi Eulychion ou
Silvanus; quand tu vois Alciphron, imagine-toi Tropéophore;
en voyant Xénophon, pense à Criton ou à Sévérus2; en te
considérant toi-même, figure-toi quelqu'un des Césars, et,
à propos de chaque personne, celle à qui elle ressemble. Que
cette réflexion te vienne ensuite à l'esprit: Où sont-ils? Nulle
part, ou n'importe où 3. En Rappliquant à regarder ainsi les
choses humaines, lu verras qu'elles ne sont qu'une fumée 4, un
rien, surtout si tu te rappelles que ce qui a une fois changé
ne reparaîtra plus dans la durée infinie^. Pourquoi donc te
i. [C'est-à-dire de l'ignorance. — Cf. supra VII, 63.]
•j. [La plupart de ces noms propres nous sont inconnus : deux ont été restituée
par conjecture : Salyrion, au lieu de Satyron, et Eumène, nu lieu d'Hymen. Euphrate
est un philosophe égyptien, contemporain d'Epictèle; Alciphron est l'épistolographe,
ou un philosophe de Magnésie; Criton, l'ami de Socrate. Sur Sévérus, cf. supra I, i^.J
3. [Je ne considère pas qu'ici r, sépare deux alternatives : la première eût été,
suivant l'usage de M;irc-Aurèle, annoncée par r,70'.. Le sens de «ou» est tel, dans
la traduction de celle phrase, qu'on pourrait le remplacer par « et ». Qu'on admette
la dispersion ou le retour à la raison séminale, nos éléments, après la mort, seront
partout, et nous-mêmes ne serons plus nulle part. Il y a, il est vrai, une autre hypo-
thèse que Marc-Aurèle a parfois considérée comme plausible, et d'après laquelle nous
serions transpoi tés dans les espaces aériens, et survivrions pendant un certain temps
(supra IV, 21). Ni les mots « nulle part», ni les mots « n'importe où » ne conviennent
c« celte hypothèse, que Marc-Aurèle semble bien, pour le moment, avoir rejetée. ]
A. [Même expression, infra XII, 27 et 33.]
5. [Ici, Marc-Aurèle a renoncé à l'hypothèse des révolutions périodiques de
l'univers {supra V, i3, note iinale), comme tout à l'heure à celle de la survivance des
âmes. Les deux doctrines sont, en effet, connexes.]
If n- : I • M M A lu M II K|#|
tOUrmenl i ' ' V t»' siillil il <!• »n« p.i^ <l<- i» n « m. ii m (|.
cette ooui ' ( fuelle matièi e quel rçjel de
tu laissée échappes M Qu'est-ci en effet, que kml i eb Inon
une occasion d'exercei notre rai on pai l'examen atlentil e(
philosophique <i<% !«■ vie? riens <i<>n< bon jusqu ta
le sois pénétré de toutes ce féfiii de même qu'un nuu
robuste imilr Ions 1rs .ilinirnl cl (juuii |«u brillant
transforme en Damme el en clarté tout oe qu'on v Jette
32
Qu'il ne soit permis ii personne de dire v rai en disant de i<n
que tu u'ea ni simple ni bon; que quiconque t<i juge ainsi <'n
ail menti; cela dépend <le i<>i. Qui peut, <in effet, t'empéchei
d'être simple et hou? Sois seulement décidé a ue plus vivre
si tu n'es pas ter». Car la raison ne te commande pas d<
si lu ne les pas.
33
Telle matière 5 nous étant donnée, qu'est- il possible de dur
ou de faire de plus raisonnable? Quoi que ce soit, tu peux le
faire ou le dire. Ne donne pas pour prétexte que tu en es
empêché. Tant que tu ne feras pas, avec la matière qui I
fournie et qui tombe sous ton action, ce qui convient G à ta
constitution d'homme"; tant que tu ne seras pas aussi sen-
sible à ce plaisir que l'homme efféminé est sensible à la
volupté, tu ne cesseras point de gémir. Il faut considérer
comme une jouissance toute action possible conforme à notre
i. [Sur la correction do xi o-jv bi xiyi ou 911 ofc iv t:vi, que donnent ici les
manuscrits, en ~i EvretvTj, cf. supra IX, a8, note 2. — Gouat : «et toi, combien de
temps dureras-tu?»]
2. [Sur Ks divers sens d'OicoQeecc chez Marc- Aurèle, cf. supra VIII, 1. a* note,
rectitiée aux Addenda. Nous connaissons, d'autre part, C/.r, dans l'acception sp
de «matière de l'action» (supra IV, 1). Ici les deux mots se précisent l'un l'autre.
Si nous les avons bien entendus, la phrase n'est pas interrogative, comme ont pen«é
les divers traducteurs jusqu'à M. Couat, mais exclamative. Or, c'e>t le même sen-
qu'exprime le pronom initial (o"av et non sofav).]
3. [Cf. supra IV, i, dernières lignes.]
\. [Sur le suicide, cf. supra VIII, ^,7. note finale.]
5. [Entendes par la «matière» la «matière de l'action 0. Cf. trois notes plu* haut.
G. [Ici, il parait bien difficile de distinguer otxstov de xaftïjxov. Cf. supra VI. 10,
en note.]
7. [Couat : «à la nature humaine. » — Cf. supra VI, '» 1. note finale.]
22 '| BIBLIOTHEQUE DEfl I NITERS1TÉ8 OV MIDI
nature propre. Or, ces actions sont possibles en toute cir-
constance1. Un cylindre ne peut pas toujours se mouvoir
de soi) mouvement propre, pas plus que l'eau, le feu et les
autres corps gouvernés par une nature ou une âme dépourvue
de raison9; ils trouvent beaucoup d'obstacles et d'entraves.
Mais l'esprit et la raison peuvent poursuivre leur marebe
à travers toutes les difficultés, suivant leur nature et leur
volonté. Persuadé de celte facilité avec laquelle la raison peut
se porter partout, connue le feu s'élève dans l'air, comme la
pierre* tombe, comme le cylindre roule sur une pente, ne
demande rien de plus. Les autres obstacles 3 ou bien ne sont
que pour le corps, ce cadavre'»; ou bien, si notre jugement et
notre raison ne se relâchent point 5, ils ne blessent pas, ils ne
font aucun mal : si l'on en souffrait, on serait par là même
avili. Tout [malencontreux] accident qui arrive à un autre
être ou à un autre objet quelconque 6 enlève de sa valeur à
ce qui le subit; l'homme, au contraire, s'il est permis de le
dire, vaut davantage et mérite plus de louanges quand il sait
tirer parti de toutes les difficultés. En un mot, souviens-toi
que rien de ce qui ne nuit pas à la cité universelle ne nuit au
citoyen, et que ce qui ne nuit pas à la loi ne nuit pas à la
cité; or. aucun de ces incidents que l'on impute à la mauvaise
chance ne nuit à la loi. ^œ nuisant pas à la loi, il ne nuit
donc ni à la cité ni au citoyen.
34
A celui sur qui ont pu mordre" les dogmes vrais, la moindre
chose et la plus ordinaire suffit pour rappeler qu'il ne doit
éprouver ni chagrin ni crainte. Par exemple ces vers : « Parmi
i. [Toute la liberté est dans ces mots. Cf. infra XI, 20, et la note linale.]
2. [Sur la hiérarchie des êtres, cf. supra VI, i4; X, 2, et les notes.]
.S. | Marc-Aurèle dit « les autres obstacles » par opposition à ceux qui viennent de
la raison elle-même, d'un «relâchement du jugement», et qui sont les seuls dont
elle puisse patir.]
U. [Cf. le mot d'Kpictète, supra IV, (t.]
5. [Le jugement se relâche en donnant de l'importance aux choses indifférentes.
Tout bien et tout mal sont en lui. — Supra IV, 7, et vingt autres passages.]
G. [Littéralement : « à une autre organisation » ou « constitution quelconque ►>.]
7. [Couat : «à celui qui s'est bien pénétré de... »] — Je crois qu'on peut garder le
texte il s manuscrits, si étrange que paraisse l'expression tô> 5eÔTjf|iiv<j). Elle peut,
en tout cas. se traduire littéralement en français!
1-1 N I I - | -Il
reuilles, lai unes ionl jeu • l terre pai i« \ y anl ainai i -
race hum, nue ' l .<• nul m •■fl'.-l .|.- |. uilk <|in
feuilles ,iu ^ lotis nu\ <|in I ,n ihiiiinil I I ta I1 >U< ni |
iHii\ letton, ou i"1 il au « ontraii e< la maudl I imenl
at ta raillent seci ètemenl reuilli enlin ■ f • ■ j \ mu, ,i|
mort, se tranamattronl la mémoire roui cela nall au prin
tempa pui l<i \ anl !<• rail t< tmbei al la f< n "i pi i tduil
d'autres reuilles & la place da an< ienne I b bi I le
sort commun à (nul, cl pumUnl lu recherchei OU In lui le
choses de la vie, comme li elles devaient Al rnellei Dans
peu de tempa, tu fermeras toi même les yeux; ei bientôl un
autre pleurera celui qui t'aura conduit au tombeau*
35
Un œil sain doit voir toul ce qui eal visible al ne pas dire
u Je voudrais voir du vert. » Ceci convient, en effet, aux yeux
malades. Une ouïe ou un odorat sain doit être capable d'en-
tendre ou de sentir tout ce qui peul être entendu ou senti.
Un estomac sain doit être prêt à accepter toute espèce de
nourriture, comme une meule tous les objets qu'elle eal deî
tinée à moudre. De même, une intelligence saine doil être
préparée a tous les événements. Celle qui dit : « Que mes
enfants soient sauvés, » ou : « Que tout le monde me loue,
quoi que je fasse, » est l'œil qui demande du vert, ou la dent
qui réclame des aliments tendres.
36
Personne n'est assez fortuné pour qu'à sa mort aucun des
assistants ne se réjouisse de son malheur. S'agit-il d'un
homme vertueux et sage? Il se trouvera bien quelqu'un au
dernier moment pour se dire à soi-même : « Nous allons
enfin respirer, délivrés de ce pédagogue. Sans doute, il n'était
méchant pour aucun de nous, mais je sentais que dans son for
intérieur il nous condamnait. » Voilà donc ce que l'on dira de
l'homme vertueux. Mais nous, pour combien d'autres raisons
i. [Iliade, VI, i*7 et 1*9.]
a. [Ibid., i48.]
A. (JOUAT-P. FÛUK.MER. IJ
22b BIBLIOTHEQUE L>LS LMVEHS1TES DL MIDI
beaucoup de gens ne désireraient-ils pas être délivrés par notre
mort? Tu feras ces réflexions à les derniers moments, et tu
t'en iras plus tranquille en te disant : « Voilà donc la vie que
j'abandonne; mes compagnons eux-mêmes1, pour qui je me
suis donné tant de peines, tant de soucis, pour qui j'ai formé
tant de v(imi\, veulent me mettre dehors, espérant que mon
départ sera peut être pour eux une sorte de soulagement, o
Pourquoi donc s'ohslincrait-on à demeurer ici pins longtemps?
Néanmoins, que cela ne t'empêche pas de partir avec les
mémos sentiments de bienveillance2 pour eux tous; sois fidèle
à tes habitudes (rattachement, d'indulgence, de bonté. N'aie
pas l'air non plus de t'arracher d'eux péniblement 3 ; sépare-
t'en comme l'âme, dans une mort heureuse et facile, se dégage
du corps. La nature m'avait uni et attaché à eux, maintenant
elle brise ce lien; qu'il soit donc brisé; je les quitte comme
des amis, mais sans violence, sans déchirement; car cette
séparation elle aussi est une loi de nature.
37
A propos de tout ce que font les autres, prends l'habitude,
autant que possible, de te demander à toi-même : « Quel but
cet homme poursuit- il 4 ? » Mais commence par toi-même, en
^examinant tout le premier.
38
Souviens-toi que ce qui fait mouvoir la marionnette 5, c'est
ce qui est caché au dedans de nous : c'est là qu'est le siège
de la persuasion, c'est là qu'est la vie, c'est là, si je puis
dire, qu'est l'homme. Ne t'imagine pas que ce soit l'espèce
de vase qui te renferme, ni ces organes façonnés pour toi. Ils
sont comme la hache à deux tranchants qui n'est utile que si
elle est attachée à un manche. Toutes ces parties n'ont pas
i. [Et avant tous, sans doute, mon fils Commode. — Cf. Renan, Marc-Aurele*,
p. 48o.]
a. [Cf. supra IX, 3, 0' note.]
3. [Renan (ibid.) traduit dcitoffitc&jievoc par les mots : « de te faire tirer pour sortir. »]
d, [La correction de Reiske, vi àvaçépet, pour r(v« pépet, est évidente. Sur le sens
d'àvaçopa, cf. supra VII, h, note 2.]
5. [Couat : « ce qui nous fait mouvoir. » — Cf. supra, la note à la pensée IV, 22.]
l'L.NSkl ^ 1*1- HA lli. Al 1.1 I t
plus d'utilité pooi loi] ••" la i au e ' < j n i l< m< t ra tm
llieill <l 1rs I rli.iil , (jljr |,'| n,i\ | II.- |>..I|| l.i h
pour l'éci Ivain, le Foui I poui le « i m bei
\A\wi: \i
Propriétés de l'Ame raisonnable : elle se voit, elle m Façonne
elle se liiii telle qu'elle veul être9, elle recueille elle-même le
iVuii qu'elle porte (ce sonl d'autres, au contraire, qui recueillent
1rs fruits tirs plantes, el il en est de même pour les anims
elle atteint sa Bn propre lorsqu'esl arrivé l<* terme de la vie*
Son action n'esl point comme une représenlation ch
phique ou dramatique, ou autre, où une coupure Fait tout
manquer 3, \ tout âge de la vie, à quelque endroit qu'elle
s'interrompe, l'âme a rempli, sans que rien y manque i, l'objet
qu'elle s'était propose; et elle peut dire : i J'ai tout ce qui me
revenait 5.» En outre, l'âme embrasse le inonde et le vide qui
l'entoure; elle en examine la figure; elle ('tend ses regards
dans l'infini de la durée; (die comprend les renaissances
périodiques de l'univers <>, et. en les considérant, elle se rend
compte que nos successeurs ne verront rien de nouveau, que
nos prédécesseurs non plus n'ont rien vu de plus que nous, —
et qu'un homme de quarante ans", pour peu qu'il soit intelli-
gent, a vu, en quelque sorte, toutes les choses qui ont été
et toutes celles qui seront, en ce sens qu'elles sont toujours
semblahles à elles-mêmes. Enfin, le propre de lame raison-
nable est l'amour du prochain, la sincérité, la pudeur; elle
ne met rien au-dessus d'elle-même, ce qui est aussi propre
i. [Sur la désignation de l'âme par les mots alita, otmov, xrruo&e^ (= « cause >• ou
«principe efficient et formel»), cf. supra IV, il, note finale: V, a3. note a: I\. 2i,
note a; infra \II, S, i" note.]
a. [Cf. supra VI. S, et la note.]
3. fCouat : « elle ne périt pas tout entière et n'est pas mutilée parce qu'il v
manque quelque chose. »j
4. [Cf. infra XII. 30.]
5. [Cf. les derniers mots du livre IX. J
6. [Cf. supra V, i3, note finale.]
7. [Cf. supra VII, kg.]
2^8 BIBLIOTHÈQUE DES IMVEBSITKS I)L MIDI
à la loi1. CCsl ainsi < j n " i 1 n'y a aucune différence entre la
raison droite et la raison qui fonde la justice5.
2
Tu mépriseras le charme du chant, de la danse et du pan
crace quand lu auras décomposé une voix mélodieuse en
chacun de ses sons el que tu le seras demandé, à propos de
chacun deux, si c'est là ce qui te ravit, car tu en auras honte;
quand tu auras fait la même chose pour la danse, à propos de
chaque mouvement et de chaque attitude; et de même, enfin,
pour le pancrace. Bref, pour tout ce qui n'est pas la vertu ou
un effet de la vertu, va droit aux éléments des choses, et,
par cette analyse, arrive à les mépriser; applique le même
procédé à la vie tout entière 3.
3
Quelle âme que celle qui, dès qu'il lui faut se séparer de
son corps, est prête ou à s'éteindre, ou à se disperser, ou à
subsister 41 11 faut quç5 cette disposition soit l'effet de son
i. [Couat : « elle ne met rien au-dessus d'elle-même et de la loi. » — Aug. Couat
traduit ainsi les mots xoù vdjiov, et laisse de coté les deux qui précèdent : o-r.zp tJiov,
qu'il interprète sans doute comme une glose. Il est possible pourtant de comprendre.
Ici qui nous est parvenu, le texte des manuscrits. — Le rapprochement de l'àmc
raisonnable et de la loi est impliqué dans la définition de cette dernière, soit qu'on
dise avec Cicéron : «C'est la raison droite qui ordonne et défend» (supra IV, J,
i" note), soit qu'on fasse d'elle, comme Marc-Aurèlc (supra VII, 19) la «commune
raison de tous les êtres raisonnables». La phrase finale de la pensée, comme les
deux définitions que je viens de rappeler, exprime l'accord absolu de la logique
et de la morale.]
2. f Couat : «les règles de la raison et celles de la justice. » — Cf. supra IV, 12,
r* note.]
3. [Nous connaissons ce raisonnement. Dès le livre II ($ il; cf. aussi X, 7, note
finale), M. Couat a protesté au nom de la conscience oubliée, et rappelé qu'un
moment de la vie, que tous les moments de la vie, dès qu'on prétend les considérer
isolément et qu'on n'en veut pas voir la suite ni le lien, ne sont pas la vie. De même
l'harmonie est tout autre chose que des notes de musique : c'est une suite de rapports
de sons, et ces rapports ont une réalité telle qu'il suffit d'intervertir et de mêler les
notes pour que l'harmonie périsse. L'analyse que demande Marc-Aurèle implique
déjà la négation des choses dont il veut, par ce moyen, démontrer le néant.]
\. [Couat: «ou h disparaître, on à être dissipée, on à subsister >> — Sur la
dotinée de L'âme et les trois hypothèses de l'extinction (<TosŒOf,vaO» de la dispersion
(<ncc5aaÔ9)vai) et du déplacement ou de la survivance (<ru|i(UÎvat ou [i£Ta<rra?iç),
cf. supra IV, 21, première et dernière notes.]
5. [M. Rendall (Journal of Philology, XXIII, p. i55) signale ici l'emploi non
classique de î'va (toCto. iva... kV/rjxai, ou à'p/r(iai)- Il le traduit par fac ut, c'est-à-dire
qu'il admet devant cette conjonction (non devant rovto) l'ellipse d'un verbe. Une
telle ellipse dans de telles conditions est d'ailleurs fort rare en ancien grec. Sauf
i I -1- i i ■ i-i •■ LE
propre jugement , el non d'une impie oh tinatl >mme i
<hn-li.il , ' , (jn'cllc .• dri idc ;ipi r i « 11- dOD • ilé
de manière « pouvoii en pei uadei d tufa
tragique '
4
Ai je agi conformément atn principei de le lolidarl
me sui> donc rendu services Que cette pen il tot^jouri
présente à ton esprit, ne la quitte jamais '».
5
Quel (4si ton art&? D'être homme de bien. Es) il an ateilleui
moyen d'j parvenir que d'avoir des principe oncernanl
1rs uns la nature universelle, el les autres la constitution
propre 7 de L'homme?
6
Los premières pièces représentées furent des tragédies qui
rappelaient aux spectateurs les accidents de la vie\ en leur
à l'article qui suit Immédiatement celui-ci, on De Li relève pas dam Les autrei
passages des Pensées on "va s perdu le sens final i\lll. iS: m ;
VIII, J2 : xcoXuetv i'v*...; VIII, .''»', : i~': râ ivOpcoTWi) Birofqc n'est pas,
union sens, une raison suffisante de suspecter ce texte, et de cor' imnu Ta
tenté M. Rendait, celui de la pensée suivante. Des deux phrases qui la terminent:
roOro Iva xi\ icpé^stpo^ aitavra' xai u.r(oau.oO itauov, l'éditeur anglais n'en fait qti
en supprimant xàV, et prétend rattacher ainsi "va à irauov. Il ne s'avise pas que le
pléonasme d'àc\ et de ;rr(oau.oO -x-Wj dans la même phrase esl intolérable. Dans ret
i'va... sp^tai et cet î'va... âiravTS qui se suivent de Bi près, comme dan- les emplois
non classiques de ivx au livre VIII, je reconnais, pour ma part, Binon les premiers
débuts (car il faudrait remonter jusqu'à Polybe), du moins encore les débuts d'une
construction qui était appelée à une singulière fortune, puisqu'on grec moderne
l'infinitif est partout remplacé par va (c'est-à-dire iva) suivi du subjonctif.]
i. [Pline le Jeune (lettre à Trajan) avait porte le même jugement sur les
martyrs.]
3. [Cf. supra 111, 5, ae note; III, 7, 3* note. L'étalage tragique n'est pas la forme
du vrai courage.]
3. [Cf. supra VII, i3, derniers mots.]
.'». [Cf. la note 2 à la pensée précédente.]
5. [Couat : ((ton métier. » — Cf. supra IV, 3i et la note. Cf. encore Sénèque \a-i
Lucilium. 90, fin) : ars est bonum iieri.]
6. [Couat : «comment peut-on y arriver, autrement qu'en méditant sur... et
sur...? » — Cf. supra IV, 2, note finale. M. Couat avait admis la conjecture de Corai :
7id>: a/«X(o;... r,, au lieu de t.Coz xaÀto:... r,... Est- elle bien nécessaire?]
7. [Couat : «la condition particulière de l'homme. » — Sur les rapports de la
(( nature » et de la « constitution », cf. supra VI, V» dernière note; sur les rapports de
notre nature et de la nature, supra V, 3, dernière note.]
8. [Couat: «les événements historiques.» — Marc-Aurèle a écrit ffvplatvovwv,
au présent.]
:^o BIBLIOTITEQUI in *> DNIVEE81TB8 D1 MIDI
montrant (juils sont dans l'ordre de la nature1 et leur2
enseignant à ne pas s'affliger 3, quand ils avaient lieu sur une
scène pins grande, des événements qui les avaient intéressés
sur relie du théâtre. I >n voit, en effet, que les choses ne doivent
pas se passer autrement et que ceux mêmes qui s'écrient :
« 0 CithéronU» n'échappent pas à cette loi. Les auteurs de
ces drames y expriment aussi certaines vérités utiles, comme
celle ci surtout : « Si les Dieux me négligent, moi et mes [deux
enfants, leur négligence même a une raison. » — Et encore :
a 11 ne faul \)a< s'irriter contre les choses. » — Et : « Moissonnez
la vie comme l'épi féconde » — Et d'autres semhlahles.
Après la tragédie, parut l'ancienne comédie, capahle, par
sa franchise, de faire utilement la leçon aux hommes et de les
rappeler à la modestie par la liberté [même] de son langage.
Ce n'est pas pour autre chose que Diogène la lui emprunta*».
Considère pourquoi l'on a ensuite adopté ce qu'on appelle
la comédie moyenne et,, en dernier lieu, la nouvelle, qui peu à
peu dégénéra en une imitation adroite de la réalité. Je n'ignore
pas qu'il s'y trouve aussi quelques bonnes choses. Mais que
voulaient, en définitive, quel but s'étaient proposé les poètes"
qui ont créé un tel genre de composition dramatique?
7
Comme il tombe clairement sous le sens qu'il n'y a pas de
i. [Couat : «qu'ils n'avaient pas pu ne pas se produire.» — Voir la note précé-
dente.]
a. [Aucune traduction française n'est ici fidèle au texte : oT;... 'b'jy^iùysXfjbE. On
a pu s'étonner de voir Marc- Vurèle employer la seconde personne du pluriel, comme
s'il n'avait pas écrit cette pensée « pour lui-même » et lui seul, mais l'avait destinée
à la lecture (Rendall, Joarn. of Phil., XXIII, p. i56).]
3. [Les manuscrits donnent en cet endroit un texte altéré: xgfc oti... tovrotç |rrj
ay/JîcrOs ou à'yOôdftai. Le sens ne varie pas, quelque restitution qu'on adopte, celle de
Reiske, xoù 07:03;... fj.r, ayOr/rûs, ou celle de If. Rendall, tùtrtz... jjlt, StgOeedai, ou celle
de M. Stich, y. ai oti... (jlt, ârgOeritai ôsî. J'hésite, d'ailleurs, — autant que M. Polak
(Hermès, XXI, p. 3^7), — à souscrire à cette dernière, à cause de la négation, qui,
devant ûôÎ, devrait être o-j.)
4. [C'est-à-dire les plus grands, comme Œdipe (Sophocle, Œd.-R.y i3gi).]
5. [Cf. supra VII, |i) Vil, 38, et VII, Ào.]
C. [Le mot toojti ne se retrouve pas dans tout le reste des Pensées. Il est ici plus
que suspect. Il, Couat a traduit la correction de Reiske, -a-jTr;; ûapsHaëave.]
7. [Couat: «mais quel était, en définitive, le but des poètes...» — J'ai tâché de
traduire le mot £7u6o).r,, qui, dans Stobée (Ed., II, 1C4), est défini opfir, repo dpfir,;
(littéralement : « le premier mouvement » ou « le premier dessein »), et qui, étant ici
suivi des mots npo; -riva tiote axo7rbv octcÉoXs^s, ne saurait presque rien ajouter au
sens de la phrase. Voir un pléonasme analogue, supra VII, 4 (note a).]
l'I | ■ | I ' M M \ I ' \ I M I E
le de i onduite ' plu pi i >pi i i la pi stique de If phil< i tphic
que oelle que tu lui i maintenant
8
i (ne branche détachée de la braoche k laquelle elle adl
c i foi cémenl déta< bée de l'ai bi e entiei D me rhomme
retranché de la société d'un eul homme est retranché d< la
société entière. Maia c'est an autre qui ooupe la branche,
landia que l'homme se sépare lui même de ion prochain pai
haine el par aversion il ne voii pas qu'il e I en même lempi
mia en dehors de toute la cité, toutefois, Zeus, qui a formé I -
société, nous a accordé un privilège: noua avons le pouvoir
de nous réunir à nouveau à celui à qui nous adhérion
rentrer dans l<* toul pour le compléter ' Maia si cette division
est hop Fréquente, le retour el la réintégration dans l'unité
sont difficiles. Il y a une différence entre la branche qni a
poussé avec les autres, qui a vécu avec elles, el celle qui a été
greffée de nouveau sur l'arbre, quoi qu'en disent lea jardiniei a.
Croissons donc ensemble sur le même tronc, sans avoir {joui
cela les mêmes dogmes 3,
9
Ceux qui veulent t'empêcher de marcher suivant la raison
droite -î ne réussiront pas à te détourner d'agir sainement.
Qu'ils ne t'empêchent pas non plus d'être bienveillant pour
eux. Tache de demeurer ferme dans tes jugements et dan- tr-
actions sans cesser d'être doux"* pour ceux qui essaient de te
faire obstacle ou qui t'importunent. Leur en vouloir est une
marque de faiblesse, aussi bien que de renoncer à ce que tu as
entrepris et lâcher pied parce que l'on t'a frappé. On déserte
son postée en prenant en aversion celui que la nature avait
fait notre frère et notre ami, aussi bien qu'en tournant le dos
dans la bataille.
î. [Sur le sens d'ûacoOsoïc, cf. supra VIII. î. ?' note, rectifiée aux Addenda.]
a. [Cf. supra VIII, 34, et I\, i3.j
3. [Couat : «doctrines. )>]
&. [Couat : « tout droit dans le chemin de la raison. »]
5. [Cf. supralX, Aa.]
6. [Cf. supra X, 35; infra XI, ao.]
BiDUO miq\ b o\ - i mm rsh êa di midi
10
Il n'\ a point de nature inférieure à l'art, car L'art imite la
aature, S'il en est ainsi, la nature la plus parfaite de toutes,
celle qui comprend toutes choses, ne peut le céder en indus-
trie ?i l'art. Tous les arts font ce qui est inférieur pour le
subordonner à ce qui est supérieur; la nature universelle ne
procède donc pas autrement. Là est l'origine de la justice d'où
proviennent les autres vertus, car on ne peut observer la
justice si l'on s'attache1 aux choses Indifférentes, si l'on est
facile à tromper, téméraire et changeant.
11
Puisque les choses ne vont pas vers toi2 et que, cependant,
tu es tourmenté par le désir ou par la crainte 3, c'est que,
d'une façon quelconque, tu vas vers elles. Que ton esprit reste
en repos'* et s'abstienne de les juger; comme elles demeu-
reront elles-mêmes immobiles, on ne te verra plus ni les
désirer ni les craindre.
12
L'âme est une sphère parfaite 5 (?) quand elle ne se tend pas
i. [Couat: « si l'on se porte avec ardeur vers les choses indifférentes. » — Cf. supra
VI. 3a, i" note; IX, 4o, note finale, etc.]
a. [Cf. supra IX, i5.]
3. [Marc - Aurèle a usé pour son raisonnement d'un artifice de langage dont le
français ne nous laisse pas la ressource. Devant 8tcî>Çeiç et swyat, cLv peut être un
iiénitif subjectif et un génitif objectif. Le syllogisme, mis en forme, pourrait se pré-
senter ainsi : Ce qui trouble la vie humaine, ce sont des poursuites et des fuites, —
soit que les choses nous poursuivent et fuient devant nous (génitif subjectif), — soit
que nous les poursuivions et fuyions devant elles (génitif objectif). Or, ce ne sont pas
les choses qui vont à nous ou qui nous fuient. C'est donc nous qui allons à elles ou
les évitons.]
'i. ['IlTj/a^ÉTto. Ce terme appartient autant au vocabulaire de la logique qu'à
celui de la morale. En face d'un sorite (« Est-ce que ioo grains de blé font un tas?
Et 5o? Et 20? Et 5? etc.. »), les Stoïciens prenaient le parti d'arrêter le raisonnement
avant que la question posée ne devînt absurde : c'est ce qu'ils appelaient en grec
r)<nr/â£eiv et, en latin, quieseere. Cf. Zeller, PhU. der (ir., III3, p. n5, note 2.]
5. [Couat: « L'àme est une sphère partout semblable à elle-même...» — Je
n'admets qu'avec peine, et faute d'une bonne conjecture, le texte traditionnel,
kÙtosiSyjç, qui, pour moi comme pour M. Polak (Hernies, XXI, p. 333), «ne signifie
rien. » La correction de M. Rendall, kutoï&7)Ç (« l'âme est une sphère qui se voit elle-
même»), introduit dans la première partie de la pensée une idée qui doit être
réservée pour la seconde. Celle «le M. Polak, ocvroeiSéq (« sphaera est ipsissima animi
Imago»), me semble impliquer une contradiction : comment la «forme en soi»
pourrait-elle être la forme d'une chose déterminée?— En tout cas, la comparaison
de L'âme et de la sphère, dont la forme est parfaite, nous est déjà connue (supra VIII,
ii), et n<>u- la retrouverons plus loin (XII, 3).]
Il II f.p
dam nue direction quel* onque ni ne i i n elle tn( ■
quand <n<' ne se inni ' i>;i - i n" .mi i en
elle brille i<- feu qui lui pei mel de roii le 1 61 \U pai ton
en «'il'* même
Quelqu'un me mépi 1 ei 1 ( 1 isl ion affaii 6 Mal je
prendrai garde à ne rien Faire el i ne rien dire qui mérite
le mépris. Quelqu'un me haïra ( 1 I ion affaire Mail mol
je resterai bienveillant el dévoué pour loul homme, même
pour celui-là, prél à lui indiquer son erreui ans lui dire
de reproches, sans lui faire sentir que Je m'efforce de le
supporter, mais sincèrement, loyalement, comme en osait le
grand Phocion, à moins qu'il ne ftl semblant • Tel doil être
l'intérieur de notre Ame; il faut que les Dieux n'j voient
aucune disposition à s'indigner et à se plaindre I m quel
mal souffres lu si lu fais maintenant ce qui est conforme k ta
nature propre, et si lu reçois ce qui convient en ce moment
à la nature universelle, 6 homme, qui que tu sois, mis à ce
posle pour servir l'intérêt de l'univers l?
14
Ils se méprisent, et ils se flattent les uns les autres: ils veu-
lent se supplanter, et ils se font mutuellement des courbettes.
15
Gomme il faut être eorrompu et hypocrite pour dire : « J'ai
1. | \ ar : i quand elle ne se disperse pas. » — Dans un cas. If. C tuai i lu ffxeipxrat,
dans l'autre tncsiprjrai. Le second de ces mots, dont il a dû torturer le sens, est la
Leçon îles manuscrits. Le premières! une correction de Gorai. Je la considère comme
suffisante el ne me demande pas, après M. Rendall (Journ. ofPhil., Wlll. p. r-
le composé t,jo--z'.;::x7jC'. ne vaudrait pas beaucoup mieux. 1
2. [Cf. supra Y, 2 5.]
5, [Ce n'est pas. sans doute, pour contester la sincérité de Phocion que Marc-
Aurele a ajouté ici les mots z\ ys f«| RpoceicorâTO : pas plus qu'il n'avait voulu
{supra VII, 66) taire tort à la mémoire de Socrate, en lui opposant Télaugès. Ce qu'il
mel en doute, ici et plus liant, c'est la légitimité d'une induction qui déterminerai!
d'après quelques actes la valeur d'une àme. On << n'entre vraiment dans l'âme du
voisin v. comme Marc-Aurèle a souvent conseillé de le faire, que si l'on vit aup:
lui et si Ton est témoin de ses actions les moins éclatantes et confident de ses pensées
les plus secrètes. Il ne faut pas surtout qu'une vingtaine de traits qu'on cite à la
gloire des sages, d'un Phocion, d'un Socrate, nous fassent méconnaître le mérite
d'une vie modeste, toute de sincérité et de bonté.]
/». [Couat : « né pour subir tout ce qui est utile à l'univers, a — J'ai considéré 5to\j
or, comme un masculin.]
a34 BIBUOTBiQUI DBS DMVBRSITÉS D1 midi
résolu d'agir franchement avec vouai Homme, que fais-tu?
Une pareille déclaration est déplacée. On te verra bien à
l'œuvre, C'est sur ton front que cela doit être inscrit. Cela
s'entend tout de suite dans la voix, se lit tout de <uite dans
les yeux1, de même que dans les regards de ses amants celui
qu'ils recherchent reconnaît tout de suite leur passion. En un
mot, l'homme simple et bon doit être comme celui qui a une
mauvaise odeur; il faut qu'en l'abordant, qu'il le veuille ou
non, l'on sente qui il est. L'affectation de la franchise est de
la duplicité3. Rien n'est plus honteux qu'une amitié de loup 3.
Carde-t'en par-dessus tout. L'homme bon, simple, bienveillant
porte ces qualités dans ses yeux; elles n'échappent à personne.
16
Nous trouvons dans notre âme le pouvoir de vivre heureux,
pourvu que nous sachions être indifférents aux choses indiffé-
rentes. Nous y serons indifférents si nous considérons chacune
d'elles à part et dans son ensemble i, si nous nous rappelons
qu'aucune d'elles ne met en nous l'opinion que nous en
avons, ni ne vient vers nous; elles sont immobiles 5; c'est
i. [ysypâcpOai oçsf/.Et lOOùç ï) çtovr,- ToioOxov ïyv., zibi; ev toi; oaaaTtv z\ïyi\.
Couat : « c'est sur ton front que cette parole doit être inscrite. Si tel est bien ton
caractère, on le lira immédiatement dans tes yeux... » — J'ai cherché en vain la
conjecture qu'avait dû faire M. Couat pour aboutir à cette interprétation. J'ai traduit
ci-dessus celle de M. Rendall, qui met après ôfetXei la ponctuation qu'on écrit géné-
ralement après yitivr,, et qui se borne à corriger k'/st en r^yjX. Je reconnais, d'ailleurs,
que les verbes simples r^/il et e;i/et sont quelque peu étonnants entre les locutions
verbales yeypafOai oçeOtet et gei... elvai; que le changement de sujets — d'V/eî
à èliyei — rend la phrase assez dure. J'avais moi-même été tenté d'écrire, en conser-
vant la ponctuation traditionnelle : toiouto os Set eùOù; èv toi; offc|taat? ï\ïyivt. Tra-
duction : « cette parole doit s'inscrire tout de suite sur ton front. La même doit se lire
tout de suite dans tes yeux...»]
2. [Le texte des manuscrits est absurde. A la place du mot ffxaXjiY] (épée thrace),
Saumaise a conjecturé un substantif a/.auor,, qui se rattacherait à l'adjectif <rxa{x6o;
(« tortu »), et que traduit ici le mot « duplicité».]
3. [Entendez : l'amitié du loup pour les brebis qui, dans une fable d'Ésope, se
laissent prendre à ses beaux discours, et se confient à lui. L'expression XuxoftÀia
(Platon, Epist. 3i8 E) était proverbiale.]
t\. [oi^p^uLÉva); xcà &Xtxâ>;. Le texte et, par suite, le sens sont ici fixés par l'expres-
sion ôXov ôY oXcov 8rv)pv)|iiva>{ que nous avons rencontrée au début de la pensée III, 1 1
(cf. la a* note à cette pensée, p. ki). 11 ne faut pas, comme l'ont fait Coraï, puis
M. Stich et M. Couat, ajouter la négation devant ôàixw;. Air(pr(aÉvw: peut signifier
soit ((séparément», soit : ((en faisant l'analyse». Si l'on préfère ce dernier sens, on
écrira ci-dessus les mots : « dans ses éléments et dans son ensemble. » — Couat : « Si
nous analysons les éléments de chacune d'elles, au lieu de les considérer dans leur
ensemble. »]
5. [Cf. supra XI, n.]
PI «| i i i,i •• HJ i r
nous qui rivons les Jugement! tjuc nom port \h
qui !<• :•! a\ ««us pour .un i dire en w >w mêmes, quan I n
pourrioni ne pti le faii e, ou I nom le bl i m p u m<?g u de,
.lin «r aussitôt ' Rappelon - n< que
veillance durera peu al qu'en uite notre iris era Snie poui
jamaii Que peuvent donc lea ch avoii de pénible i
nous >? Si ellei lonl conformei t le nature, U faul I en réjouii
et les accueillir de bon cœur; il ellei lonl contrairei • te nature,
cherche ce nui lui esl conforme el tâche de L'atteindre, qn
même tu n'en recueillerai! aucune gloire il eel bien permit
à chacun de chercher ion bien propi e
17
Examiner l'origine de chaque objet, [lea éléments qui le
constituent 3,] ses transformations, le résultai de ces transfor-
mations, et comment il ne peut lui arriver aucun mal.
18
Et d'abord i, je dois considérer quel rapport munit au\
hommes 5; comment nous sommes nés les uns pour lea
autres; puis, à un autre point de vue, comment je sui< né
pour leur commander, de même que le bélier ou le taureau
commande à son troupeau. Remonte plus haut et pars de
ceci : si l'univers n'est pas fait d'atomes, c'est la nature qui
gouverne tout; dans ce cas, les êtres inférieurs ont été ci
pour les supérieurs, et ceux-ci les uns pour les autre-
i. [Cf. le début de L'article VIII, '»;.]
2. [Tî |isvtot O'vctxoaov à'ÀAo; ïyivj -x\j-.x\ Toute la difficulté de cette phrase, qui.
ainsi écrite, reste inintelligible, est dans le mot à'ÀXw;. On voudrait à sa place pouvoir
lire coxeî; ou txsXXsi <rot. Aucune des conjectures proposées (ni 5X<*< ^/.'- :ai» —
ni oOx tfXXwç, de M. Rendall) ne m'a paru satisfaisante. Le sens, d'ailleurs, est peu
douteux.]
3. [Ces mots avaient été omis dans la traduction de M. Couat.]
!i. [Bien qu'il ait écrit dans sa traduction : s Et d'abord, o je ne crois pas que
M. Couat ait entendu conserver dans le texte grec le mot /.a., par lequel commence
la pensée : Kai 7rpÛ)70v xta... M. Rendall (Journ. of Phil., XXIII, p. i >: en donne une
explication ingénieuse. 11 garde de ce mot les deux lettres K et I, la seconde étant
pour lui le signe du nombre 10, et la première l'abréviation du mot xEfaXaia.
On verra, en effet, que cette longue pensée comprend dix articles.]
5. [Couat: u quelle est ma situation vis-à-vii des hommes.)' — Sur le sens de
a^édi;, cf. supra VI, 38, r* note; VIII, 27, etc.]
G. [Cf. supra V, 3o; VII, 55, etc.]
230 BIBLIOTHÈQUE m ifl imuumm's ni midi
Deuxièmement, considérer ce que sont les hommes, à table,
dans leur lit1, et ainsi de suite; — principalement, à quelles
nécessités leurs principes les assujettissent3, et tout ce qu'ils
font, avec quel orgueil ils le font.
Troisièmement, si les hommes agissent ainsi avec raison,
il ne faut pas s'indigner; si ce n'est point avec raison, c'est
évidemment malgré eux 3 el par ignorance. C'est malgré elle,
en effet, que toute aine esl privée tant de la vérité 4 que du
pouvoir d'attribuer a chaque chose sa vraie valeur. Voilà
pourquoi ils s'indignent qu'on les appelle injustes, ingrats,
cupides, bref, coupables à l'égard de leur prochain.
Quatrièmement, considère que tu es coupable toi-même et
que tu es un homme pareil à eux ; si tu t'abstiens de quelques-
unes de leurs fautes, tu n'en as pas moins l'aptitude à les
commettre^, bien que tu les évites par lâcheté, par vanité ou
par l'effet de quelque vice semblable.
Cinquièmement, tu ne sais pas même exactement s'ils sont
coupables, car on agit souvent par ménagement <>. Enfin, il
faut s'être d'abord beaucoup informé avant de se prononcer
en connaissance de cause" sur les actes d'autrui.
Sixièmement, quand tu te laisses aller à l'indignation ou
à l'impatience, réfléchis que la vie de l'homme a une durée
imperceptible et que bientôt nous sommes tous étendus dans
le tombeau.
i. [Cf. supra X, i3; X, 19, etc.]
2. [o?aç àviyy.a; ooyaaTWv xet(iivatc k'/ojTtv. Couat : «à quels bas principes ils
obéissent.» — Cette traduction est, d'ailleurs, contestée par son auteur lui-même,
qui, à la suite, a marqué un point d'interrogation. 11 semble peu probable, en effet,
que y.eiixéva; puisse signifier ici, puisse même jamais signifier de lui-même « bas» ou
« vil ». Il est bien plus naturel de donner à ce participe le sens usuel qu'il a, par
exemple, quand il qualifie votxoc («les lois établies»). 'Avorptaç désigne non seule-
ment des obligations, mais de véritables fatalités. Nous disons en français: «la
fatalité de la passion. » Cette expression peut faire comprendre celle de Marc-Aurèle :
àvayxa: ôV;'fj.ax<i)v. Cf. aussi dans Euripide (Phén., iooo) : averptt] oa'.txôvwv.]
3. [Cf. supra II, 1 ; VII, 22, etc.]
',. [Mot de Platon, déjà cité (VII, 03).]
5. Peut- être a-t-on un peu hâtivement corrigé en e|w 7rotr(Ttxr(v la leçon de A :
É;:/ s-oitt». y. v-Év. Nous avons rencontré ce dernier mot dans la définition stoïcienne de
la 0-jvûijj.i; (supra X, 26, note 4). La correction importe assez peu, d'ailleurs, au sens
du passage.]
6. [On pourrait écrire aussi : « par politique. » Telle est précisément la traduction
qu' Yug. Couat lui-même a donnée du mot oixovouta, à la dernière pensée du livre IV.]
7. |Sur le sens de xaTataprrtxûc et la correction que propose, à tort, Reiske :
xaToOoQXTtxûç, cf. supra VII, i3, 3* note.]
PI Nfl i s Dl M IRC I I
Seplii iiiriiiml I- m .m h. ► r i h. ii> >il I o\ j i m \( m I. n ! j
cllrs ii exi itonl que dam leur âm rai n enl
MU rllrs <|ill lioll («Mil iimiiI.iiI Soppi mi- \( d< »n« .im I |
\ olonté de renoncei à jugei qu'elh oienl un n m loi
ci i,i ci >lèi e b disparu ( i tmmenl donc uppi imei Ion ju
inciii i En i éfl( chi anl qu'il n'j i là aucune lu >nlc poui
i n effet . s'il s in ail d autre mal que ce qui « I hontec
commettrais nécessairement loi même beaucoup de crin
lu deviendrais an brigand >, un bomme capable de tout
Huitièmement, considère que la colère el le chagrin que n<
fonl éprouver leurs actions 6 lonl bien plus péniblei pour nous
que les actions mêmes «pii nous irritent on nous chagrinent.
Neuvièmement] que la bienveillance esl invincible si elle
esl sincère, si elle n'esl pas une hypocrisie, une grima*
Que pourrait te faire l'homme l<* plus insolent du mond<
lu persistes à le traiter avec bienveillance, si, & l'occasion el >
loisir, tu l'exhortes doucement el lui fais la leçon en profitant
de la circonstance même où il cherche à te faire du mal?
«Non, mon enfant S; nous sommes nés pour autre ch<
n'esl pas à moi que tu peux nuire, tu ne nuis qu'à toi même '.
mon enfant. » Montre-lui clairement, par une considération "'
générale, que telle est la règle : ni les abeilles n'agissent
comme lui les unes envers les autres, ni les animaux qui
vivent en troupeaux11. Parle lui sans ironie et sans reproche,
i. [Gouat : « les actions des autres hommes, o — Sur le mot kùtûv, cf. supra IV.
IV, 38; VI. 6; VI, :,o; VU, 34, el les notes.]
a. [Littéralement: «dans leur principe directeur; >> peut-t'-tre. tout simplement :
o dans leurs intentions. o — Couat : « dans leurs consciences. ><]
3. [Cf. supra IV, 7; VII. e6; XI, 16, etc.]
!i. [Cf. supra II, i, 3* pli rase.]
5. [Cette phrase reprend et corrige heureusement l'idée de l'article \. io. rjui
suffit à l'expliquer]
G. [Couat : « les actions des hommes. » — Voir cinq notes plus haut.]
7. [Nous sommes obligés par le contexte d'ajouter au sens é : l'id-'e d'une
méchanceté. Cf. supra I, i5, 1" note, un composé du même mot avec une tout autre
signification.]
8, [Est-ce de Commode qu'il s'agit, comme l'a supposé Renan 1 Harc-Aarèle*, p. '1-'
q. [Cf. supra IV, 36; IX, 4. etc.]
10. [Reiske substitue ici, comme à la pensée 16 du même livre (note 1), le mot
barbare ôo-.xto; («méthodiquement») au moi barbare ftitx&ç. Bien que M. Polak
défende énergiquement cette correction (Hernies. XXI, p. 533), qui lui paraît seule
donner un sens satisfaisant, je ne pense pas qu'elle s'impose. Ton- les traducteurs
français, y compris Renan, ont pu comprendre o/.iy.<ô;.|
11. [Cf. supra 1\. 0. 3' note.]
238 B1IJLIOI 111 OIE DES LMUHMII.S DU MIDI
mais avec tendresse, d'une âme qui ne soit point ulcérée; ne
parle pas non plus comme à l'école, ni pour rire admiré par
l'assistance, mais comme s'il était seul1, même quand il y
aurait quelques témoins.
Retiens ces neuf commandements essentiels comme des
présents que tu aurais reçus des Muses; commence, enfin,
pendant que tu vis, à être un homme3. Il faut se garder,
d'ailleurs, de les flatter <> aussi bien que de s'irriter contre
eux; dans les deux cas, on agit contrairement au bien
de la société et on est conduit à faire du mal. Dans tes accès
de colère, rappelle-toi qu'il n'est pas digne d'un homme de
s'emporter; la douceur et le calme sont des vertus à la fois
plus humaines et plus viriles. C'est celui qui les possède qui a
réellement de l'énergie, de la vigueur et du courage; non celui
qui s'indigne et qui s'impatiente. On a d'autant plus de force
qu'on est plus impassible. La colère est, comme le chagrin, un
signe de faiblesse. Dans les deux cas, on est blessé et Ton capitule.
Si tu le veux, reçois encore un dixième présent du Musa-
gèle. Demander'» que les méchants ne fassent point de mal est
une folie; c'est demander l'impossible. Mais leur permettre
d'être méchants pour les autres et vouloir qu'ils ne le soient
pas pour nous, c'est de la déraison et de la tyrannie.
19
Il y a quatre orientations 5 de ton principe directeur 6 dont
tu dois toujours te garder avec une attention particulière. Dès
que tu surprends ces erreurs, il faut les effacer" en te disant, à
i. [à).// r.TOt 7ipb; |j.6vov, /.ai èoev âtXXot nvà; TiEpiEffTr.xaxji*. On considère, en
général, cette phrase comme inachevée, ou plutôt la fin de cette phrase comme
perdue, parce que, chez Marc- Aurèle, r,xoi a le sens de aut, c'est-à-dire introduit la
première de deux alternatives, dont la seconde sera annoncée par r,. — Une correc-
tion extrêmement légère, puisqu'elle ne porte que sur deux accents, me paraît
permettre de donner au texte grec le sens que lui attribuent la traduction de
M. Couat et celle de Renan (l. l.J, et qui est tout à fait satisfaisant. Au lieu d'y-To:,
j'ai lu r( toi (en deux mots).]
a. [Cf. Sénèque, De /ra, III, '»3 : «Ilumanilalem colamus,dum inter homint sumus.»
3. [Couat: «de flatter les hommes.»]
6. [Cf. supra V, 17.]
5. [ Var. : « tendances. » — Cf. supra VII, 16, note 2.]
6. [Couat : « ta conscience. »]
7. [Même recommandation, dans les mêmes termes, supra XI, 16. — Couat: « Dès
que tu les surprends, il faut t'en débarrasser. »]
PE.19ÉES Dl MAI iV*\ Ll
propos de chacune d elle Cette rep I ition 'n'i p
[i.-,-('s^,,Mi ,- ' « -r\\f < i < <mi i il» i • i 1 1 .ni|»i ri 1 universel
ccii.' autre ne i lenl i»-<- ''«• t"" or, n mme ''-m'
..h urde de dire ce que lu ne i" \ pi i le
quatrième, tu le i epi ocbei a de wbonioiinri h <i ,i
la partie le i>i"> divine de loi môme & la partie mortelle el la
moins noble, au corp el i nu étions, i udc i ou
20
Ton souffle <•! tout ce qu'il j a d i_rn'; en loi qui - j mêle
quoique faits par l;» nature pour l'élever, obéissent cependant
l\ la structure de toul i<m être el j demeurent, retenus dans
l'agrégat î. De même, toul ce qui esl terrestre en toi, comme
toul ce qui esl humide, quoique rail pour d<
redresse cependant el se maintient dans une place qui ne lui
esl pas naturelle. \insi les éléments se conforment & la l<»i
de L'ensemble dont ils font partie el où ils ont été placés, et
ils sont forcés d'y rester jusqu'à ce que !<• signal [du départ et]
de la dissolution \vuv soii donné 5, N'est-il donc pas étrange que
i. [(1ou.it: «ce concept > — Sur le B6II1 de plVT39(lX, Cf. supra. pa„'e ii, note a.]
î. [Cf. topra IV, 2.'i.]
[Couafl : « et a tes app irenoes grossières. — Le texte sinsi 1rs luit — rod
~y.yz:.y.'.: '.oia-.; — me paraît absurde: la traduction, il faut l'avouer, n'est
claire. Aucune des conjectures qui onl été proposées ne me satisfait, l!
lofa:;, est déjà dans la vulgate. Mais l'épithète de Korgstatc ne conrienl guère à ce
mot. La Lecture de Nauck, ppagefaïc vjfovofç, ne rappelle plus que de très loin la
leçon des manuscrits, Supposant la chuté d'un m<>t final, et une déformation l<
de ceux qui devaient le précéder dans l'archétype, j'écrirais: --x\: covrou tpa)
r, >.£:a*.: xivV)9C9t. Cette expression c-t usuelle dans les Pensées pour r les
sensations.]
'j. [Gouat : «contenus par l'ensemble de l'organisme. » — Les mots
9\)YXpt'|MCTo; qui achèvent la phrase grecque répètent la même idée qu'exprimaient,
deux lignes plus haut, les mots otov SYxIxpaTttt. Pour Marc-Aurèle, comme
tous les Stoïciens, l'homme est un mélange (Stobée, EeL, I. S 7 'i ; cf. Zeller, Pkil . >icr
Gr.. III», p. 196, n. 1.]
5. [J'ai du ajouter les mots «du départ» pour traduire ixetOev. J'imagine que
to èvôô(T'.aov (de èvo*.oova:, se laisser aller) devait désigner pour les Grecs l'air de :
«Rompes vos rangs. » — Je maintiens contre Pierron et If. Miehaut la traduction
donnée par M. Gouat de l'expression oiw $iy., «de force.)) Il est impossible de
confondre ftfot avec SuvauiÇ, et, puisque ce mot n'a pas été déterminé par un article,
de le sous-entendre comme un sujet à côté de pig^vi). (Traduction de If. Miehaut:
« ils y restent avec la force qui les retient, jusqu'à ce que d'elle leur vienne le signal
de la dissolution. ») En réalité, <i/;u.a:vw, comme rjx\-:.Uû. comme tous les verbes
grecs qui indiquent un signal ou une sonnerie militaire, se passe de sujet; ou plutôt
le sujet de ces verbes, qui n'est autre que leur participe présent, ne s'exprime pas.
Gf. Xénophon, Anabase, I, 2, 17 : i-z\ èffaXmvÇe, c est-à-dire i-ù ô ffaXinÇtm ItraXn '.:.
«après la sonnerie de la trompette;» Hérodote, IX, 42: Ëav)|igMve, c'est-à-dire
6 ar(aaivcov È(7r(u.a:vs, « le signal était donné. »]
j'\0 BIBLIOTHÈQUE DBS UHIVER8ITÉS Dl MIDI
seule la partie raisonnable ' de ton être soit désobéissante et
s'indigne de la place où elle a été mise? Elle ne subit pourtant
aucune violence ; on ne lui impose que ce qui est conforme à sa
nature; néanmoins, elle ne se Boumel pas, mais s'emporte3
en sens contraire. Tout inoinciucnl \crs l'injustice, la licence,
la colère, la trist68Se, la erainle, n'est qu'une manière de
s'écarter de la nature. \VA\ lorsque ton principe dirigeant 3
se révolte contré un événement quelconque, [alors aussi] il
déserte 4 son poste. Car il a été fait pour la sainteté et la piété
non inoins que pour la justice. Ces vertus sont aussi des
formes de la sociabilité, ou plutôt elles sont antérieures"» à
la justice <;.
i. [Couat : « intelligente. >> — Il ne faudrait pas prendre à la lettre l'opposition
de {jlovov -ro vospbv («seule, la partie raisonnable») à xà (TTor/£Îa («les éléments»).
Même la raison n'est pas immatérielle : autrement, comment pourrait-elle agir sur
la matière et nous diriger? Cf. supra IV, A, note finale; et la note à l'article VI, 17,
rectifiée aux Addenda.]
2. [Couat : «elle ne se soumet pas et elle veut suivre une direction contraire. » —
Sur le sens de ?£pe?6ai, cf. le début de la note à la pensée VI, 17.]
3. [Couat : « ta conscience. »]
'i [De y.a7a}.Ei7isiv geopav, rapprocher les expressions analogues: 9^72:, IV, 29;
6pa7iÉTr(c, X, a5; Ae17107ay.Tr,;, XI, 9.]
5. [Cf. le premier paragraphe de la pensée IX, 1.]
G. [Voici l'une des maîtresses pensées du recueil; il faut la joindre à celle qui.
presque au début du livre VI (VI, 8), est la définition du principe dirigeant. Là,
Marc-Aurèle, sans le nommer, affirme le libre arbitre; ici, sans le nommer davantage,
il le limite. En ces deux articles tient toute une doctrine.
Lorsqu'il disait que « le principe dirigeant se fait ce qu'il veut être, et fait que les
événements de la vie lui paraissent tels qu'il veut qu'ils soient», Marc-Aurèle ne
définissait, en somme, que les rapports de l'homme avec le monde extérieur, et résu-
mait en une ligne trois de ses dogmes familiers : « Les choses ne touchent point
l'âme» (V, 19); le mal est dans le jugement que nous portons sur elles, que nous
mettons, en quelque sorte, entre elles et nous, et qu'il nous appartient toujours des
modifier (IV, 7; VII, 2; XI, iG; IV, 39; etc.); les événements de la vie ne nous sont
donnés que comme la matière de notre action (IV, 1 ; VIII, 32). Si l'on ajoute à ces
dogmes les passages où Marc-Aurèle reprend pour son compte (infra XI, 36) ou
exprime à sa manière (supra VIII, 5G; XI, 18, 70) la sentence d'Épictète : « 11 n'est pas
de voleur du libre arbitre, » on aura recueilli les affirmations les plus énergiques par
lesquelles les Stoïciens avaient coutume d'exprimer la liberté.
Ces affirmations étaient appuyées par deux théories qui nous sont connues, mais
que Marc-Aurèle n'avait pas à reprendre ici. Je les rappelle, elles aussi, à l'occasion de
cette nouvelle pensée, pour montrer, la dernière fois où il se pose, les diverses faces
du problème de la liberté, le lien des questions subsidiaires qui en dépendent, et
comment cet article est vraiment la dernière expression de la doctrine. La théorie do
l'action sous réserve, O-s;:*!^:?'.: (V, 20; VI, 00), nous explique comment nous
pouvons nous dégager non seulement de telle représentation qui nous sollicite à agir,
mais encore de l'action même que nous avons commencée. La théorie du suicide,
È;ay(.)yr( (supra VIII, 47, note finale), nous avertit que la liberté n'est jamais à court
de ressources. Elle donne une grandeur tragique à la lutte qui remplit la vie du
même quand c'est la nature, et non le sage, qui doit arrêter la pièce en plein
troisième acte : il suffit que nous puissions prévoir le dénouement qu'il lui eût
Il I • I \l \ I.'
21
( .lui qui h « pa <i"'v Ifl \ le "m Lui unique, loujoui i-
même ne pcul pa - non plu n 6ti e qu tin leul cl m
donné. La <>• rnloi vonu d
i n i , i trini qui
t . 1 1 1 1 1 1 1 . || I il llill l v I i i DU i | ii 'in . n |
, |,. | N.ll||, II .,11 || lljl I I Mil IN t .11 | ,,1111!,. BUUM
|| Min I | lilJ . - IL I , Ul|,
i ii i i nation qu'il n rlem I la phll
i rouvanl , d'ailleui en i i • i • i oi on i fol !< rin*in
que li dan l'oi ucil do i m d
taiont, il n'.i pai plu qu oui ch
cotte lib rt iùi illu • r 1 1 1 . • . ■
i, i poui tant, le probli ra irgi et transforn m —
i iin de la i" ii - c d< \ év< nemcnl contre I
( >n ne .ht mémo plus qu'ils ne nou ni \< >int. N
lurelo, de II psycholo le i If m< taph] liquc l'affli i I la lib
a celle du déterminisme univei el I i question maint.nani
tes rapports do l'homme, non ave< li - i bo* i, mail av< la Nat
\urole n'hésite pai b répondre que noua avoni le choii entre l'ol> el i»
révolte, arec la oertitude de notre impuissance, ri nous mpra
\ i. \i . C'est, d'ailleurs, la r ponae ordinaire d< - Stoï< i< ns b pan ille d<
ce qui distingue i>«'ut être Marc- Vurèle de tous les autres, i 'cal la m
.«mm- lesquelles il la fait. Comme lui, les autres, sa m
leur action, ont déclaré se contenter de la liberté de leur I omme lui, Il
été fiers de dire : •■ .iV supporte, n et: l'obéiaà Dieu
el plus loin : oi {iévroi ivi^tTai...). Mais ensuite un mouvement d
leur faisait reprendre ce pénible mot d'obéiasano le ne me soumets :
mon assentiment n (Sénèque, ad Lucilium,$6\ cf. supra \
au coi il rai fi- ( \. jS ; cf. encore VI, fta) qu'à L'endroit même où Ifarc-Aurèle défini
la collaboration libre à L'œuvre de Dieu, cette liberté, ou, comme eût .Jit -
cet assentiment, n'avail pas perdu le nom d'obéissant trois i
sous trois formes différentes que Ma rc-Aurèle exprime notre dépendance: non -
me ni. il nous Invite à •• supporter» el à obéir», mais à a observer la consigni
Il <->t vrai que cette consigne, c'est notre nature elle-même qui la réclame, car
elle es! d'accord avec La raison universelle (cf. sopraV, 3, note finale . Quand nous
avons la claire conscience de cet accord, c'est ainsi nous-mêmes qui non- .i mnons la
loi. « Autonomes » et «libres», ces deux mots se définissent l'un par
VI, 16). Or, qui nous empêche d'être dignes .le l'autonomie et d'atteindre la lii
Nous >cui>, m>s passions, c'est-à-dire notre raison qui s'abandonne, quand elle
pourrait rester maîtresse d'elle-même. C'esl donc contre nous-mêm nous
devons soutenir « la lutte glorieuse • (supra 111, 4); la liberté en «--t l'arme, el surtout
elle en est le prix, la liberté qu'on appelle ego^ffiot, Quand on ne voit encore en elle
qu'un moyen {supra V, io, note finale), el ËXeuOepta, quand elle est vraiment | VII
la «perfection morale».
C'est pour se démontrer la réalité de cette liberté relative que Ifarc-Aurèle
a commencé cet article par L'analyse de notre être. Ce qui. pour lui. à la
raison s'y oppose, sans doute, parce qu-; cela, dans l'homme, n'est pas purement
humain; mais surtout parce que cela est contraint et serf. 11:.
c:xzxlz'.. — -apaxpaTSÎTOa'., — Oicaxw>£iN toÏ: o/.v.:, — tv. va pive —
TâTGSTa:, — il était difficile d'exprimer par une accumulation d'expressions plu-
énergiques la violence faite à la partie animale de L'homme. Mais, à supposer le
contraste pins complet encore entre la chair ou le souffle et l'âme raisonnable, ce
divorce n'est-il pas, eu un sens, la ruine de toute la théorie? L'homme peut-il donc
n'être, comme l'a dit Marc-Aurèle (VIII, fto), que son corps ou que sa raison? Rien de
plus que la nature qui le définit? Quand nous parlons de notre volonté el de notre
liberté, est-ce seulement de la liberté et de la volonté dp notre nature?)
i CQUAT-P. FOI" IO JEU.
a 'i I BlBMOTUEQUfl L>ES IMVEHSITÉS hi MIDI
homme jusqu'à sa morl '. Mais ce que je viens de dire ne suflil
pas: il faut \ ^jouter quel doit être ce but. Il n'y a p;is unani
mité d'opinion sur tous les biens quelconques qui paraissent
tels au plus grand nombre, mais seulement sur certains biens,
je veux dire ceux qui intéressent la société tout entière; aussi '.
nous devons nous proposer un but utile à la société et à la
cité. Celui qui dirige vers ce but touô ses efforts donnera uV
l'unité à ses actions et, à ce point d<- vue, restera toujours
le ! urine.
22
Rappelle-toi le rat montagnard 3 et le rat de maison, leur*
frayeur et leur agitation éperdue
23
Socrate appelait les croyances de la plupart des hommes des
Lamies\ des épouvantails pour les enfants.
24
Les Lacédémoniens, dans leurs spectacles, offraient aux
étrang-ers des sièges à l'ombre; eux-mêmes s'asseyaient nïm
porte où.
25
Socrate disait à Perdiccas", qui lui reprochait de ne pas
venir chez lui : « J'aurais peur de périr de la mort la plus
i. [Ainsi, Marc- Vurèle considère comme permise à l'homme, bien plus, comme le
bien même de l'homme, L'unité morale: et c'csl lui pourtant qui proclame que
L'âme est instable, ut qui semble ne taire nul cas (supra X, 7, fin) de l'identité
personnelle.]
2. [Sur l'importance accordée par les Stoïciens et en particulier par Marc-Aurèlc
au consentement universel, cf. supra II, 10 et la note.]
3. [Gouat : « le rat des champs. >>]
\. [Aug. Couat a lu ici, après Cor aï, rovrwv au lieu de ro'Jtov. Même après la
correction, la pensée n'a pas grand sens. Il faudrait pouvoir intervertir opetvbv et
y.aTO'.y.tv.ov, en gardant ro*JTOi>. OJto: signifie, en effet, « celui-ci, » c'est-à-dire ici: le
rat de ville. Or, dan> la fable, c'est le rat des champs qui s'effraye; l'exemple de son
compère peut montrer que l'habitude a raison des plus vives terreurs.]
5. [Lamia, comme G<>r<r<>, Mormolykè et Ktnpusa, était une sorte de Croquc-
niitaine femelle, dont le nom revient assez souvent chez les comiques (cf. Aristo-
phane, Paix. 708; Guêpes, io35; Chevaliers, 03<j). Peut-être les mots 7rato:wv cs-aaTou
qui expliquent Aati/'a:, ne sont-ils qu'une glose.]
6. 'Aristote, qui rapporte le même trait de .Socrate (Hhétor. A, 23, p. i3q8 a), lui
donne comme interlocuteur, non Perdiccas, mais Archélaos.J
ii n -i i m m m.- ii m i »
uflVeuse II n oulail dire J aui il peoi de n<
les bionfaiti que J'aui ait reçu
Dana les <■, i ita dei Épicui iciiti L,- Il y a\ .ni une roman
dation spéciale <!<• tot^joura avoii pr( enl • I i pril le louvenii
'l'un des hommes vertueui d'auti ef< >i
27
Les Pythagoriciens recommandent <i< der le ciel dèi
l'aurore3, afin de noua rappeler ces étrea qui poursuivent leui
œuvre toujours d'après les mêmea loia ri toi^Joura de m
el de penser à leur harmonie, à leur pin. leur nudité
car un astre n'a point de n <>il<' i,
28
Tu te rappelles coinnienl Sociale s'étail COUVerl «i * m r i < peau
île mouton, iin joui- (pic \anihippc lui avail pris son niant
pour sortir, cl ce qu'il dil a 968 disciples COIlfilS, qui ail, lieu!
se retirer eu le voyant dans cet équipage.
29
Tu ne pourrais être un maître dans l'art d'écrire et de lire
avant d'avoir eu toi-même des maîtres. De même, à plus forte
raison, dans l'art de \ ivre,
30
« Tu es né esclave, lu n'as pas la parole"1
i. [Conjecture de Gataker. Les manuscrits donnent 'E^:t Misât, — el I
n'avons nulle idée de ce que pouvaient être les écrits — lois, versets ou ma\.
— du peuple, ou des prêtres, ou des sages d'Épnèse. Si éloignés que soient l'un de
L'autre les mots 'E^ectow et 'E-r/.o-jsE'.tov, la correction de Gataker peul se recom-
mander de phrw?urs levte^ de Sénèque, qui attribuent la même prescription
à Êpicure. Cf. notamment ad Lwilmm, ii : .- Vliqui> vir bonus nobis eligendiu
ac semper ante oculos babendus, ut sic tanquam illo spectante vivamus, et onmia
tanquam illo vidente faciamus. Hoc Epicurus praecepit. •
a. [Cf. supra VII, '17, mie pensée analogue, vraisemblablement emprui
à Platon.]
0. [Couat:«qui, par eux-mêmes et d'une manière égal»', poursuivenl >.ui~
leur œuvre. » — Mais peut-on confondre xa:x Ta -.:a cl a _ a -Ta?]
4. [Cf. le début du livre \: «quand donc seras-tu... nue, ô mon Ame. et plus
visible que le corps qui t'enveloppe? »]
j. [Vers iambique, d'un auteur inconnu.]
BIBLlOTUfeQUI DES USITE USITÉS D1 MIDI
31
« El le rire fut dans mou cœur1.»
32
Ils blâmeront la vertu eu termes amers
33
Chercher une figue pendant l'hiver est une folie; c'en est
une aussi que de demander son enfant quand on ne peut
plus l'avoir 3.
34
En embrassant son enfant, il faut, dit Épictète, penser en
soi-même: « Demain, peut-être, il sera mort7». » — Voilà des
paroles de mauvais augure. — Pas le moins du monde,
répond-il; elles ne font que désigner une action de la nature :
sinon, il serait de mauvais augure de dire qu'on moissonne
les épis.
35
Raisin vert, raisin mûr, raisin sec, tous ces mots indiquent
des changements, non vers la non -existence, mais vers une
autre existence que l'existence actuelle.
i. [Odyssée, IX, 4i3.J
2. [Vers dactylique d'un inconnu.]
3. [toioûto; o -o ftai$t'ov Çijtûv, oxs ovx bti Si'Sorat. — Couat : « que de vouloir un
entant à l'époque où l'on n'en peut plus avoir.»— Il n'y a aucune raison de sup-
primer devant Kaiâtov l'article xô, comme le demande Gataker. Il est, au contraire,
garanti par le texte d'Épictète auquel Marc-Aurèle a emprunté cette pensée: outio y.av
tov \Ahn Tiofjf,;, ôte où ofooTai ao:, ï<j(h Sti getpâvo; <rOxov liziTiobti; (Dissert., III, 3 4,
87). — On notera aussi, d'un texte à l'autre, la correspondance des mots ou osooxai et
oùx ïxt otooTat. Elle fixe le sens d'un passage de la pensée II, a (supra, p. 19, note 3),
qui avait arrêté M. Couat.]
4. [Le texte d'Épictète (ibid., 111, 2/1, 88), comme celui de Marc-Aurèle, nous
présente ici une seconde personne : àTroOavr,, et non une troisième. Mais en disant :
« tu mourras demain, » ce n'est pas à lui-même que le père pense, c'est au fils qu'il
embrasse. Les mots qui suivent, dans Épictète, ne permettent pas d'en douter ::û
eiXfp Jxtxjto);' Aù'piov âiro$vj{Aq?etC r, (tv f, eyio.]
5. [Les manuscrits ne séparent pas cet article du précédent. — Dans Épictète, la
comparaison du raisin suit immédiatement celle de la moisson : mais si c'était une
raison suffisante pour réunir ici encore deux images dont Marc-Aurèle a rompu le
lien, il ne faudrait pas non plus séparer les pensées 33 et 34.]
PI lnfcKI M M mm m i i i »
M II \ .1 |»,is (lr lni-.llld (|UI |)llissr I M H I - \<>\i\ Moffr II.
m bilrc I !\ >sl un iimt d'Épictèta '
37
Il '• disait qu'il fallait oonnaitre I arl d acquiesçai sui rq
lentationa sensibles] el conserver toute ion attention an
qui touche lea tendances, pour qu'ellei fassent acoomp
de réserves^, conformes «»'i bien universel el proportionn
à la valeur «les objets; s'abstenir absolument de tout désir et
n'avoir jamais d'aversion pour i î < - 1 1 de ce qui ne dépend pas
de nous ».
38
Ce n'est pas pour la première chose renne, disait il, que
nous luttons, mais pour perdre ou conserver notre rai>on
39
Socrate disait: Que voulez-vous? avoir des âmes d'être*
raisonnables ou d'êtres sans raison? — D'êtres raisonnables
— De quels êtres raisonnables? bons ou mauvais? — Bons. —
Pourquoi donc ne cherchez-vous pas à les acquérir? — Parce
que nous les avons. — Alors, pourquoi ces combats et ces
disputes ti?
LIVRE XII
1
Tous ces biens que tu désires et que tu cherches à atteindre
par des détours, tu peux les avoir dès maintenant, si tu n'es
pas ton propre ennemi. Je veux dire si, laissant là tout le passé
i. [Dissert,, I, 18, 12. Sur le sons de Kpooupcoi;, cf. supra VIII. 56, en note.]
3. [Épictète.]
3. [Sur la roptaTetfefftç (« assentiment » ou a acquiescement »), cf. supra V, 10,
r* note; sur l'ôptir, {h tendance »), III, 16, 3e note; sur l'àseÇoûpcetC reserve ), IV.
i, et V, 20.]
fc. [Cf. supra VIII, 7.]
5. [Cf. Dissert., I, 22, 17, sqq.]
6. [Nous ne savons à quoi rapporter cette citation.
•V> BIBLIOTHÈQUE l>l !S UNIVERSITÉS 1)1 MIDI
el le confiant pour l'avenir à la Providence, tu ne t'occupes
que du présent el en disposes suivant la sainteté el la justice.
Suivant la sainteté, afin d'aimer ton lot, car la nature l'a pré
paré pour toi et toi pour lui. Suivant la justice, alin de dire
la vérité librement et Bans ambages, afin d'agir selon la loi el
selon la valeur des choses; afin de n'être arrêté ni par la
méchanceté, ni par les jugements, ni par les paroles d'autrui.
ni même par aucune sensation de la chair1 qui t'enveloppe,
car cela n'importe qu'à ce qui en souffre9. Si donc 3, au
moment quel qu'il soit où il faudra partir, il se trouve qu'ou-
bliant tout le reste, tu as respecté [uniquement) ton principe
directeur '» et le Dieu"> qui est en toi, et craint non point de
cesser de vivre, mais plutôt de n'avoir jamais commencé à
vivre conformément à la nature, tu seras un homme digne
du monde qui t'a engendré G, tu cesseras d'être un étranger
dans ta patrie^, tu ne regarderas plus avec élonnement les
événements de chaque jour comme s'ils étaient inopiné- \
tu ne seras plus suspendu à ceci ou à cela.
2
Dieu voit à nu toutes les âmes hors de leur vase matériel l-K
de Técorce et des souillures qui les recouvrent. C'est par son
intelligence seule qu'il les atteint, et il ne s'attache qu'à ce qui
émane et descend de lui en elles. Si tu prends toi aussi cette
habitude, tu supprimeras en toi toute cause de tourment. Celui
qui ne cesse de voir I0 la chair qui l'entoure, de fixer son regard
i. [Sur l'attribution de la sensation au corps, cf. supra V, 2O, avant-dernière note.]
2. [Cf. supra VII, iG, noie 3.]
3. [Couat : « Si, au moment où tu seras près du départ, oubliant tout le reste, tu
respectes ton principe directeur et le Dieu qui est en toi, si tu crains...» — Je consi-
dère comme nécessaire la Lecture de M. Rendait, qui au subjonctif ~'vrrt substitue
l'indicatif y<'vrt, seul correct après oxs BiqftQTe. Dès lors, on ne peut éviter de tenir
compte dans la traduction de la succession des passés t'u^ty;: et ^r^r^z A. tu as
respecté...», «tu as craint...)») au présent yfvin.]
U. [Couat : « ta conscience. »]
5. [Cf. infra MI, ?J) : ô iy.âo-TO^ voO: 6so;.|
»">. [Cf. supra IV, i4, note 2, p. 5(i et 57.]
7. [Couat : u un étranger sans patrie. » — Cf. supra I\ . 39.]
S. [Cf. supra Vil, 1, derniers mots; l\. 1 '« ; infra XII, i3, etc.)
9. [Couat : « hors de l'enveloppe de matière. » — Cf. infra XII, 8, 1" note. |
i<>. [6 (iv)... opcbv. M. Couat admet ici, après Morus, la suppression de la négation.
On peut la conserver, à condition de regarder la phrase comme întsrrogative : c'esl
I»' parti qu'a pris M. Stic h dans ^a seconde édition. Le sens qu'il obtient ainsi («Celui
in m m m | i ' \i m i l
■ m l'habit, la mal on la n nomm m loul
(ju'cn\ eloppc el mise an oèm toujoui pi •'•< »« < u;
3
lu ei compose <!<• troii p.u-iir- i. \<> «.ouiiir. i,j
on*. Les deux premièrei ne t'appartiennent qu'en
qu'il faul IVii i)(riip<T; Ici liuhirmr seul <• f \ »'i it.i lil.-m'-nt
tienne Écarte donc <!<' toi même, je veux dm- ■ !•• t.-i |>< ■n-»-«-
tout Ce qtl€ loul <Mi disent les ;uitrrs \ tout re <pi«* tu ;i> tint
dit toi même, i<>ut ce que tu redoutes pour l'avenir, toul
qui te vicni du corps 4 qui t'enveloppe ou <lu souffle qw
nature t'a donné avec le reste . mais non de ton libre arbiti
toul ce que roule le tourbillon extérieur qui t'environne, afin
que ta force intelligente 7, détachée de la Fatalité, pure et libre,
qui n'.i pas le* \«mi\ fixés lur la chair qui l'entoure, iert-1 il loojourt préo cu|
diffère peu de celui que donne la coirectioo • !• Morus. Il «--.t >r;ii qa*oa tdmettn
difficilement, dani ce cet, l'omission < 1 « * la négation devant le second partfc Ip
(Jirr.. 6p4>V, r-'ïl, yE... foSuSVOÇ, SU lieu <l«" |AT| i, >t qil'Ofl DOUfl
s'étonner que !<■ verbe xaxoXqffsxac, étant int le la
particule fir,7:.|
i. [Couat : « sur toul cet appareil extérieur de la n i«". • — Les deux m
xa\ f7y.r^r^ résument très nettement l'énumération qui précède: !•• seni de c/.-.r , m
peut ik>us arrêter, et la conjecture <!<■ Coral, Tz:vr;, parait inutile.]
a. [Gouat : « l'esprit. » — Cf. supra V, 33, note finale, <>t, à l'Appendice, 1 1 i ' note
de la pensée 111, i0.]
3. [Cf. supra III, .',, note 8.]
't. [En vertu de la « sympathie >> naturelle du corps et de rame. Cf. supra Y
t\ note.|
">. [Couat : u ou du souffle qui e<t né avec lui.» — Nous avons vu (supra \.
note liuale) que, pour certains Stoïciens, les mots irvsOua 9U|i?\J riaient 1'
il est certain que tœ iiù\l%-\ (le corps) esl lu, régime sous-entendu de cette express ioa
Quand d'autres Stoïciens, distinguant déjà- sans doute l'âme animale de l'âme
vivante, ont reconnu en nous (ibid,), outre le corps, un aveOna .; et un»-
àva6'ju.ia<7'.:, il n'est pas sur que, dans leur pensée, le régime de eufssnjsc n'ait pa*
changé: pourquoi ne serait-ce pas aussi bien Kvotto|ud*ei que nù'ii-.O Ici, il me
semble plus naturel d'attribuer à tÔulvVTov le même complément qu'au participe
voisin qui qualifie qm^-'w^ : pot, c'est-à-dire a la raison». En tout cas, il esl fin
testante qu'ici le souille esl nettement opposé au principe dirigeant, et que I
Aurèle lui attribue, comme au corps, certaines sensations. Ce n'esl pas pour nous
une nouveauté. Cf. supra IV, 3, .V note.]
6. [Couat : «mais qui ne dépend pas de toi. » — Ces mots traduisent exactement
ceux qui achèvent, dans Marc-AurMe. l'article V, 33, que je viens de rappeler:
iiz\ aoi. A vrai dire, la différence de sens qui peut séparer cette expression du m<»t que
nous rencontrons ici, dticpoaipera, est imperceptible. Pour l'interprétation de ce
dernier, je me suis conformé à la traduction que M. Couat lui-même a donnée
(supra VIII, 56) de Trpoa'.sîT'.xov.]
7. [Couat : u ta puissance spirituelle. » — J'ai préféré la traduction que M. Couat
lui-même donne ailleurs des mêmes mots grecs (VIII, 54), et qu'à la revision de son
manuscrit il eût sans doute reprise ici. Sur le s.ms de fejvatfitç, — force de la nature
ou faculté de l'ùmo. — c(. sapm \. 26. note finale. j
I is lïlRl i l <»i i DES I m\ i RS1 i fcfi im MIDI
puisse vivre par elle même <in agissanl selon la justice, en
voulant les événements qui lui arrivent, en disanl la vérité ':
écarte, dis je, <1<* ce principe qui l<k dirige9 les passions qui
lui viennent de certains attachements ;. el l'idée du temps
futur ou le souvenir du passé; rends toi pareil à la sphère
d'Empédocle, « sphère parfaitement ronde, heureuse el Bère
de sa stabilité; o ne te soucie de vivre (pie l'instant où tu vis,
e*est à dire l'instant présent, et tu pourras passer tout le temps
qui te reste jusqu'à la mort noblement, dans la paix morale î.
en souriant à ton génie.
4
Je me suis souvent demandé avec étonnement pourquoi
chacun de nous s'aime plus que tous les autres et attache
cependant moins de prix à son propre jugement sur soi-même
qu'a celui des autres. Il est certain que si un Dieu ou un
maître sage venait nous ordonner de ne jamais rien concevoir
ni rien penser en nous-mêmes, sans aussitôt l'exprimer au
dehors, le crier même 5, nous ne le supporterions pas un seul
î. [Cf. passim, et notamment XII, î.]
2. [Couat : « cette conscience que tu sens en toi. » — J*ai rétabli ici la traduction
qui ;i été presque partout admise d'v)Y£fLOVixov. Nous ne pouvons plus être surpris par
les mol- « principe dirigeant ». La première phrase de la pensée établit nettement
que ce principe n'est autre que la raison.]
3. [Couat : o les passions qui s'attachent à lui. » — Un signe marginal condamne,
d'ailleurs, cette traduction, qui n'exprime guère que la moitié du texte grec : Ta
7:po<7r,pT7;tjiva ex 7iooT7raO£:a:. .l'ai dû désespérer, à mon tour, de le traduire succincte-
ment et avec fidélité. Dans TTooiTiâOsta, il était nécessaire de tenir compte du préfixe.
Ce mot ne désigne pas ici une passion quelconque, c'est-à-dire un mouvement de
l'àme immodéré ou déraisonnable (supra III, 16, 3e note), mais une inclination
déraisonnable pour certaine chose. Quand notre corps est l'objet de cette inclination,
la solidarité qu'elle établit enlre l'Ame et le corps, et qui n'est que l'a- ment
de rame à ce dernier, peut s'appeler t-ju-v/js1.* < X 11, 66, noie tinale, rectifiée aux
Iddenda). \ la dernière phrase «le l'article \. î, oo a rencontré le verbe Kporoadéiv :
l'objet du penchant qu'il désigne est une chose extérieure. Or. de tels mouvements
du principe directeur peuvent engendrer en nous des passions « adventices
(7rpo?ï)pTï;uiva) : la haine pour qui nous empêche de les satisfaire, la colère, enfin
l'impiété (supra IV i). C'esl de ces tares ou de vitudes morale- qu'il est
question ici.]
\. [Couat : « tranquillement, noblement. >> — Pour préciser le sen> d'àTapây.TM:
(cf. supra IX, 3i, i" note), j'ai dû intervertir, en traduisant, l'ordre des mots du texte
grec.]
5. [Couat: << de ne jamais rien penser en nous-mêmes sans l'exprimer au dehors
aussitôt après l'avoir conçu.» — Ces deux variantes traduisent respectivement la
conjecture de Reiske et de Nauck, Y€Yftivî?xo»v, et le texte de la vulgate, y:vw<r/.o>v. qui
n'est, (railleur-, pas celui de nos manuscrits. Voir, sur l'ensemble «lu pass
l'apparat critique de M. Stich, dont la restitution me parait presque assurée. |
Il '. I I l.l M V. .■ \l I I I «
jour, II esl dont vrai que nou appi éliendon l'o| i <i<j
m »ur non na( me plu que le en >l
5
immenl les Mieux qui onl toul ordonn c sag<
,i\ ec bonté, onl 11 eulemenl oubl I potnl que 1 1
des hommes que leurs vertus onl comme lié pai autan)
contrats avec la divinité, el qui sonl entréi dam l'intim
des Dieux par leurs action unie- el pi( a Cependant, une
fois morts, ils ne reviennent plus & l'exi tence, el leurs âmes
sonl éteintes pour toujours. Puisque ces choseï lont, sache
bien que, s'il avail fallu qu'elles fussent autrement, les Dl
les auraient faites autrement, si cela avail été juste, - aie turail
aussi élé possible; si cela avail été conforme i la nature, la
nature > aurait consenti1. Mais si cela n'est pas, —
n'esl pas, en effet9, — tu dois croire qu'il ne fallait pas que
cela lui. Tu vois bien toi même qu'en adressant aui Dietu
cette réclamation tu les fais juges de ta cause 3. Mais nous ne
discuterions pas ainsi avec les Dieux s'ils n'étaient pas très
bons et tics justes. Et s'ils le sont, ils n'ont pas pu, injustement
el sans raison, négliger quelque point dans l'ordre du munde.
6
Exerce- toi même à ce que tu désespères d'accomplir. La
main gauche, inhabile pour tout le reste parce quelle n'en
a pas l'habitude, tient les renés avec plus de vigueur que la
main droite parce qu'elle y est habituée.
7
Rappelle-toi dans quel état du corps et de lame la mort
i. [Littéralement: «l'aurait apporté.» Sur l'emploi à la fois vul.
phique du verbe pépetv, voir la seconde partie de la pensée \ . 8.]
2. [efoep o->/ outc*)ç fyei. l#a négation employée (où et non [W|] me Bemble fixer ici
la valeur de sfaep. Je n'hésite pas à donner à cette conjonction le sen- d - [ue »,
et, par suite, à soutenir contre les autres la traduction de If. Goual (Pierron :
« confirme -toi par cette considération même.)) Renan, de même. — Biarc-AarèU*,
p. 268. Michaut : «de ce qu'il n'en est pas ainsi — si toutefois il n'en est pa> ainsi —
persuade-toi...»). Ici, Marc- Àurèle a bien fait son choix entre L'hypothèse «le la
«survivance» et celle de l'« extinction » (cf. tupra IV, u, 1"" et dernier*-' notes,
la première reportée à V Appendice). Il s'est, comme le dit Renan lui-même ( ibid.j.
«complètement mortifié» et résigné à 0 la colossale iniquité de la mort ».]
3. fVar. : «tu plaides auprès d'eux
200 Itil'.l mi m mi hh UNIVERSITÉS M MIDI
doit nous prendre; la brièveté <le la vie, l'immensité de la
durée derrière el devanl nous, l'infirmité de toute matière.
8
Il faut voir le principe' dépouillé de son écorce, et le but
de toute action J; ce que c'est que la douleur, le plaisir, la
mort, la gloire; comment on est soi-même cause de ses
ennuis; comment aucun homme ne peut être empêché d'agir
par un autre hommes que tout est dans notre jugement '«.
9
Dans le maniement des dogmes •">, il faut imiter l'athlète qui
concourt pour le pancrace et non le gladiateur; celui-ci laisse
tomber Tépée dont il se sert, et il est tué; l'autre a toujours
son poing, et il lui suffit de le fermer1*.
10
11 faut considérer la nature des choses en en distinguant
la matière, le principe elficient et formel, la fin".
11
Quel pouvoir que celui de l'homme! Il est libre de ne faire
que ce .que Dieu doit approuver et d'accepter tout ce que Dieu
lui envoie**.
i. [Coual : < les causes dépouillées de leur écorce. » — Pour le sens du mot arrutâq,
qui est traduit ici par ((principes», cf. supra IX, 3i, 2e note, et IV, ai, dernière note.
On trouvera précisée au même endroit l'opposition de ce terme au terme àvaso^i
(la fin) et à L'idée de la matière qu'exprime ici le mot ç/o'.o; (proprement : « l'écorce »
ou (d'enveloppe»). A la pensée 2 de ce livre XII, cette « écorce » s'appelle aussi un
(( vase». Elle est impure; c'est le corps. Je ne doute point que le principe dont il est
question ici, principe intérieur, principe d'action, ne soit notre àme. Partout dans
les Pensées, sauf en un seul endroit (III, ii), l'épithète yu[j.vb; qualifie les âmes. Au
surplus, cf. une longue note à la 23' pensée du livre V.]
a. [Couat : a les rapports des actions. » — Plus loin, Aug. Gouat lui-même traduira
KVOtçoçà par a le but ». Cf. S io. 17, 18 et 20]
3. [Cf. supra V, 3',; XI, 36; VIII, 56, etc.]
4. [Cf. supra II, i5.|
5. [Couat: « des principes. »]
6. [Couat :« l'autre peut porter sans cesse son i>n»* partout, et il n'a besoin que
de s'en couvrir. » — Les mots que nous n'interprétons pas de même sont les suivants:
<j'j<j-pï'by.i tt,v /sîpa.]
7. [Couat: ((leur matière, leur cause; leur but.» Cf. supra IV, ai, note finale;
VII, 4, note 2 ; XII, 8, 1" note, etc.]
S. [Cf. supra V. 10. note finale, rectifiée aux iddenda: XI, ao. note finale. I
12
Ne hlàimms p;is 1rs |)jni\ «le <»• (jin .iriisr <|,m I ,|«
l.i liahlie; ils ne r trompent, ru ellel m \ - t|( m I il I «lient m
Involontairement, Se blâmoni | * . ■ - non plu le boom*
ih ne se trompent jamaii que mal 1 1 ( lemment,
ne blAmoni personne.
13
Comme il es! ridicule el 1 1 .* 1 1 d( étonnai de quoi t1,
Noit qui arrive dam la \ le '
14
Ou une nécessite Fatale, un ordre Immuable, ou une Provi
dence que l'on peul Qéchir, ou un chaos produit par le hasard
el sans direction1. Si c'est une nécessité Immuable qui mène
le monde, pourquoi lui résister? Si c'est une Providence
Bible aux prières, rends-toi digne du secours divin. S'il n'\ a
qu'un chaos sans direction, réjouis-toi d'avoir en loi-même
une raison 3 pour te guider au milieu d'un tel tourbillon i.t
si ce tourbillon t'emporte à la dérive, qu'il emporte ta chair.
ton souffle, et tout le reste S : il ne pourra pas du moin-
emporter ta raison.
15
|Quoi!j La flamme d'un flambeau brille jusqu'à ce qu'il suit
éteint et ne perd rien de son éclat: et la vérité, la justice, la
tempérance^ qui sont en toi s'éteindraient avant toi *; !
i. [Cf. supra, paire ri8, note a; page I.6&, note i ; p ig . note 3, etc. |
•i. [Cf. supra 1\, a8; VII, ;ë, el la note, rectifiée aux Addenda. La troisième I.
thèse est épicurienne. Les deu\ antres sont stoïciennes Ces! dire <jn
«fatale» dont il est question d'abord est une nécessité logique *t raisonnée. — CI
supra 11, 3, note finale.]
3. [Couat : « intelligence. »]
4. [Sur cette analyse de l'homme, cf. supra XII, .'<. el \ . 33, note finale.
5. [Couat : « la sagesse. » — Cf. supra 111, 6, i" D<
»î. [Couat: «pourquoi la vérité... s'éteindraient-elles avanl loi?) — Au uébut d<-
la pensée, j'ai adopté la correction, demander par Corai, de r en r pj ne signifiant
rien), et c'est cette correction que j'ai traduite. Henan {Marc-Aurele*. 169-270) a donné
le même mouvement à sa traduction de cet article. A la fin, il a commis une erreur
étrange, en négligeant le premier préfixe de itpoairo<ror,<fferai. Il écrit s\ t-indraient
avec toi.» et voit dans cette pensée la preuve mora!< de l'immortalité.]
î5a BIBIJ01 m «h i m B i mn i RS1 i É9 Dl MIDI
16
si tel homme te fait l'impression d'avoir1 commis un*
faute, dis-loi : « Sais jr si c'est une faute? •, et, si c'en est une,
dis toi qu'il s'est condamné lui-même et que c'est comme >'il
s'était déchiré 1rs yeux
Celui qui ne veut pas que le méchant commette de mau
vaises actions est comme celui qui ne veut pas que les fruits
du figuier contiennent du suc 3, que les petits enfants vagifl
sent, que le cheval hennisse, et pareillement pour toutes les
autres choses nécessaires. Que peut-il faire, en effet, avec une
telle disposition? Si tu as assez d'ardeur, c'est cette disposition
qu'il faut guérir '».
17 5
Si cette action ne convient pas, ne la fais pas; si cette
parole n'est pas vraie, ne la dis pas. Que ton âme soit au
moins capable de se détourner 6.
18
Voir toujours et à fond" la nature de ce qui a fait sur toi
une impression, l'examiner dans tous ses détails, en distin
guant le principe efficient et formel, la matière, la fin 8, le
temps où il faudra que cette chose cesse.
i. [Couat : « à propos de quelqu'un qui te fait concevoir l'idée qu'il a... »]
2. [C'est le supplice que s'inflige Œdipe. Cf. supra IX, 4 : «Celui qui commet une
faute la commet envers lui-même. »]
3. [Cf. supra IV, O.j
4. [llenan (Marc-Aurhlcê, p. 67a) trouve qu'ici «la bonté est exagérée jusqu'à la
fausseté. »]
5. [Il paraît naturel de séparer les deux pensées qui suivent, bien que les manus
crits ne nous y autorisent pas. La seconde, du moins, se suffirait à elle-même et
formerait un tout. Mais comment interpréter les derniers mots de la première, que
Casaubon a conservés intacts : r, yàp ôpixr, to-j £(T7o>? — J'ai lu et traduit : r, y' à:popfj.T>
(to*j k'dTw. Rien de plus vraisemblable que la confusion du P et du <I>. Le sens que je
donne ici à à?opixr(, pour être étranger à l'usage de Mare-Aurèlc, n'en est pas moins
le sens stoïcien du mot (cf. supra, p. i8'i, note i).J
6. [Entendez: «de se détourner du mal, si elle ne l'est pas de se porter résolument
vers le bien. »]
7. [M. Couat semble avoir lu, en réunissant les deux pensées : r\ yàp ôpari (xo*j tî;
£<77tv si; tb rziv dtet opav. 11 traduit: ((Il faut, à propos de toute chose, considérer la
tendance qui te pousse, chercher la nature...» Un point d'interrogation est,
d'ailleurs, en marge de ce passage.]
8. [Couat : c< la cause, la matière, le but.)» Cf. supra III, n ; Vlll, n ; XII, 10. etc.]
Mil lu M MU \llllll
19
\c ion lu p.» . enfin, «|ij<- lu a en loi m< m- quelqi
«le meilleur el de plus dis in que ce <i>ji ' p
le un mouvoir i<»iii d'une pièce « orom< une mai >nn< M
Qu'est devenue en ce momenl ma jx " I I i n- de le
crainte, «1rs soupçons, «lu dé ii nu <|url<ju< ri m. . • .i«- -nnUii
20
Kn premier lieu, ne jamai au hasard e( ani bul I
second lieu, n'avoir jamais d'autre Bn que le bien universel
21
Rappelle loi que bientôt lu ne seras plus rien, ni loi, ni
aucune des choses que lu vois, ni aucun des hommes qui
vivent en ce moment. Toutes choses sonl nées pour chant
B'aUérer el disparaître, afin que d'autres choses, totgoun
renouvelées, naissent à leur place.
22
Tout es! dans le jugement, et le jugement dépend de loi
Supprime 3 donc, quand lu le voudras, ton jugement, el pareil
au matelot qui a doublé un cap, lu trouveras le calme, l'immo-
bilité et un port sans tempête.
23
Une action quelconque, qui a pris fin en temps opportun, ne
reçoit aucun dommage par le fait qu'elle a pris fin. Celui qui
Ta accomplie ne reçoit non plus aucun dommage par le fait
qu'elle est finie. De même la vie ». qui esl l'ensemble de nos
actions, quand elle prend fin en temps opportun, ne reçoit
aucun dommage par le fait qu'elle a pris fin. pas plus que
n'en pâtit celui qui en temps opportun interrompt cette suite
i. [Couat : « et t'agite.» — Cf. supra VII, 3, a* note; II. t, dernière phrase, rectifiée
aux Addenda.]
2. [Cf. supra V. 1 1 ; \, r4.]
3. [Var. : « suspends. » — Cf. supra Ml. 8, derniers mots; II.
i.r|Cf. supra 1\. ai.]
;,»', BtBLIO'l III ni I. M.*> l\l\I.HMll> M MIDI
d'actions1. Ce moment opportun el ce terme sont ii\<> par la
nature, par notre nature particulière dans le caa où nous
mourons de vieillesse, el dans tous les «as par la nature uni
verselle9. Le changement des parties qui la composent main
tient, en effet, l'univers dans sa fraîcheur el dans sa force;
et toul ce (jui est utile à l'univers n<i saurait être mauvais ni
hors de saison 3, Ainsi la fin de la vie n'est un mal pour aucun
de nous, puisqu'elle Fie comporte aucune déchéance [morale],
qu'elle ne dépend point de nous et qu'elle n'est pas contraire
à la solidarité universelle. Au contraire, elle est un bien pour
nous, puisqu'elle est opportune, utile à l'univers et conforme à
ses lois i Car il porte Dieu en lui nirme~>, celui dont la pensée
se porte aux mêmes fins et par les mêmes voies que I)ieu(>.
24
Vie toujours présentes à l'esprit ces trois règles. A propos
de chacune de tes actions, te demander si tu as agi au hasard 7
ou autrement que ne l'aurait fait la justice elle-même; à propos
des accidents extérieurs, réfléchir qu'ils arrivent par hasard
ou par l'effet de la Providence : or, il n\ a pas à blâmer le
hasard ni à se plaindre de la Providence. Deuxièmement, voir
ce qu'est chaque être depuis qu'il est à létal de germe jusqu'au
moment où il vit, et depuis le moment où il vit jusqu'à celui
où il expire S, de quels éléments il est composé et en quels
cléments il se dissout. Troisièmement, te dire que si, enlevé
tout à coup dans les airs, tu pouvais de là 9 contempler l'huma-
i . [Couat : « pas plus que celui qui est arrivé au terme de cette suite d'actions
n'est par ce fait maltraité. » — J'ai préféré à ces mots une traduction plus littérale;
mais, pas plus qu'Aug. Couat, je ne verrais dans ce passage ce qu'y a découvert
Barthélemy-Saint-Hilaire : une justification du suicide. Comment, en effet, accorder
une interprétation si étroite avec la phrase qui suit immédiatement?]
i. [Sur la distinction et l'accord des deux natures, cf. supra \ , 3, note finale]
3. [Compléter ainsi la pensée de Marc-Aurèle : «ne saurait être pour l'individu m
mauvais ni hors de saison.» Cf. supra IV, a3; \, ao, et la note.]
\. |<T'J!J.?£pov xa\ <7'juç£p6;xsvov. Cf. supra III, \ ( ffuwep^sprrxi' rs /a*. 7W6p.?3pEt) et la
dernière note à cette pensée.]
). |Ou : « il est porté par Dieu même. »]
G. [Couat: « C'est être inspiré de Dieu que d'avoir les mêmes inspirations que lui
et d'aspirer par la pensée aux mêmes lins. »]
7. [Couat: « sans raison. » — Cf. supra XII, 20.]
& [Sur l'évolution du germe humain, cf. supra \. a6, <ll les note*.|
u. [Cf. supra \ II. 48, el IV 3o.]
M 1 If l.l MM I ]
mie ci l.i variété de ch< lu ii l< hoinn
\ oyanl quelle quantité d ftti ei habitant autoui
e( dan I éthei ejoutei que chaque fol que lu
in fit verrai jamaii que lei mémei cho* , la m uttifoi
mité] el la môme brièveté El voilà de quoi l'oi ueillit!
25
Eloigne de t < » î ion jugement el tu ei Oi qui p
l'empêcher de ('éloignai
26
Lorsque quelque chose le f&chc, lu oublies que tout
conformément <• la nature universelle, que les foui
en dehors de toi ne te touchent p t, en outre, que tout i
toi^jours été ainsi, et !<• sera et l'est actuellement partout ' tu
oublies quels liens de parenté rattachent tous les homm<
toute la race humaine, car ils participent tous, non au même
sang ni au même germe, mais à la même Intelligences. Tu
oublies encore que la raison i de chacun est Dieu et émane de
la divinité, que rien n'appartient en propre à personne, mais
que l'enfant, que le corps, que l'âme même de chacun de
nous~> viennent de Dieu; que tout est dans notre jugement #;
qu'enfin chacun ne vit que le moment présent et ne perd
que ce moment ~ .
27
Repasse sans cesse dans ta mémoire le souvenir de ceux qui
se sont emportés violemment pour quoi que ce soit, de ceux
qui se sont signalés par une grande gloire, de grands
malheurs, de grandes inimitiés ou par une fortune quel-
conque, et demande-toi : Qu'est maintenant devenu tout cela?
De la fumée, de la cendre, une légende, ou pas même une
i. [Cf. supra l\, 38.]
•>. [Cf. supra VI. ',6: XI, i : XII, i\. etc. ]
3. [Cf. supra IV, ï : VIII, 5'».]
\. [Couat : « l'intelligence. »]
5. [Couat : n que l'enfant de chacun de nous, et son c ffpg, et bob âme même. —
En modifiant cette traduction, je n'ai voulu qu'éviter l'amphibologie.]
6. [Cf. supra U, t5; XII, S. 32, etc.|
7. [Cf. supra II. i'i. et la nol«* finale.]
100 BIBI II » i Ml 'H i DES UMVJ KSI rKS i»i MIDI
légende. Représente-toi à la fois tous cea exemples : Fabius
Gatullinus dans -<m champ, Lucius Lupus dans ses jardins,
Stertinius à Baies, Tibère à Caprée, Vélius Rufus1, bref tous
les efforts de la présomption humaine vers un bul quelconque,
el vois la puérile vanité dea toits ces efforts. Combien n'esl il
pas plus philosophique d'user de la matière qui nous esl
donnée pour devenir ju^lrs. leinprnmls >. pour Buivre les
Dieux avec simplicité, car l'orgueil que l'on conçoit de son
humilité esl de tous le plus déplaisant!
28
A eeux qui le demandent : « Pour honorer les Dieux comme
lu le fais, où les as-tu vus, et qu'est-ce qui t'a convaincu de leur
existence?» réponds: «D'abord, ils sonl visibles: et puis, sans
avoir jamais vu mon âme, je l'honore néanmoins. De même,
je reconnais l'existence des Dieux par l'expérience que je fai- à
chaque instant de leur puissance, et, par suite, je le> vénère.
29
Voici qui nous sauvera dans notre vie : voir à fond la
nature 4 de chaque chose, sa matière, son principe efficient et
formel^, pratiquer la justice de toute son âme et ne dire que
la vérité. Que reste-t-il après cela que de jouir de la vie, en
ajoutant Tune à l'autre nos bonnes actions, de façon à ne
laisser entre elles que le plus petit intervalle possible?
30
La lumière du soleil^ est une, bien qu'elle soit divisée par
des murs, des montagnes et mille autres objets. La matière
commune" est une. bien qu'elle soit divisée entre une mul
i. [Gatullinus fut consul sous Hadrien; Stertinius, jçrenénd sous Tibère. Nous ne
connaissons ni Lupus ni Rufus.|
■2. [Couat: « ce que valaient tous ces elïorts. >, — Voir, au début de l'article I\. a.».
la même opposition des mots euteXsc et ptXoffoço);.]
3. |Var. : « sages. » — Cf. supra XI l, i5.]
'j. [Cf. une expression plus complète de la même idée, supra 111, n, 2' note.]
5. (Couat: « sa cause. » — Cf. sujtra IV, 21, note finale.]
G. [Cf. supra VIII, 07, et IX, 8.]
7. [Couat: «la substance universelle...» — La matière commune (où?:a v.wrk, ou
Sbcoto; uXyj: cf. Zeller. Phil. <1er (,r.. III», p. i3o, note j), c'est ta matière encore
indéterminée.
PI > i i i>i M I i ' v' i i i l
titude de 001 pi Indh Idueli '. L'Ame e I une bien qu i II
,|jN isr rnln ,|. i niillirrs ' intiMiiil.i.il.l. - |-i ..iil.nl d( d<
niin.it i Ame i ai onnable esl une, bien qu't Ile pai al
également dh isc'c i tan i<- rim |ur jr t 1< d d énu
, r, \ tout ce qui n'est pas la pen 6e pai i u mple le wuflle
rt i,i matière Inerte*, esl dépourvu de senUmenl et étran
;m\ pariies s(Miihliil)lcss, bien que cellei ci rentrenl dan
même unité &, el que la pesanteur les entraîne dam le m
i, [( .m. ii qui < h ippropi 1< ml i bai un une pti • ■• X|»'
îToiôv, <ï. $upra i X . i ». i n note |
• |âui le ■ ni i" ■ ri d< - mi • •
>ur L'opposition de I nu. .. I ,un i..i> uni -t I ■ I . ■ .111
r [ppendiet, Voir tupra l\, Bj lia d< \- loppomenl an i
I < un. ii : (cou «'il'1 prend une figure 'l' terminée. »]
',. [Goual Dans 1< - i botes oju m d'énunx i
telles que le souffle et ce qui l< lupportc, sont dépourvues
relaUooi lea unei avec lei auta -, bien que maintenues ensemble par l'intclli
et par l'action de la pesanteur, m Voii les notes lulvantes.]
i es mura, lea montag nés et ch - la
propre de chaque chose, enfin les diverses âmes raisonnables dont ls pn
cédente éveille l'idée, sans l'exprimer, — voilà ce que semblent i préai i l r
e»;. Connue, en fait, le corps, ls nature, l'âme raisonnable d tmaJi
que les éléments «>n les parties «l'un être, il est difficile de ne pas (aire équivaloir rôu<
a/./.a [lipt] :mv etpi)uivc*v à Ta... ùV/a lû\
considérer c&v slpY)pivu>v comme «m génitif partitif. Peut-être aussi -
représentent il pu;, où?fx, •l'jyj,, el aurait-on l«' droit d'entendre ;« In 1 « 1 1 r- par les
premiers mois de la phrase en question les diverses parties de ls lumière unique,
de la malien- unique et de L'âme unique», ;> l'exclusion de celles de r unique
raison ». Mais on reconnaîtra qu'en ce cas il eût été plus simple et plus
d'écrire t*... [liprj rôv xXXcov Etp7j(xévwv que Ta... a/./ a [iip*] Tôr/ av.]
6. |Sur le sens du mol uicox£{|isvov, cf. supra, p. io5, note 2.]
7. ['Avou'<rOY)To; s ici Le même sons qu'à la pensée X., 8: 1
Xfav èexiv xvatffO^xou xxt piXo^ugeu. L'attribution constante, dans les Pensées
(supra Y, 16, avant-dernière note), de la sensation au «corps a <>n au 1 souille
empêchait de traduire ici ivatfrônyco; par " insensible».]
8. [J'ai ajoute dans la traduction le mot «semblables», qui n'est pas exprimé en
grec, pour préciser le sens de ce passage. Si l'on peut être embarrassé (voir trois
notes plus haut) pour expliquer isolément les mots ptépt] et e'o^jlévco/. I- \ pression
Ta aXXat [xspr( t<ov glpT)uivw est en somme assez nette, grâce aux exemples qui suivenl
(7iv£-jpLaTa xa\ uicoxetpsva). De quelque manière qu'on en rende compte, il ne me
semble pas douteux qu'il t'aille entendre par les mots Ta a /./.a pépi] xxX. les part
matière inerte et les souilles qui entrent dans la composition des êtres ou des choses
Ce sont ces parties de matière et ces souffles qui sont, nous dit lian - kurèle,
«étrangers les uns aux autres.') Dr ceci peut s'entendre île d< 1 - bien,
l'auteur a voulu dire que dans le même vivant le souille est sans rapports ai
corps; ou bien que le souille de Dion est aussi étranger au souffle de Théon que
le corps de Platon est indépendant du corps d'Euripide. De ces deux explications,
une seule est d'accord avec la doctrine de Marc-Aurèle, avec le bon sens et avec le
contexte. Il est sûr qu'ici dtvotxetaxotTOt àXXr,Xot; s'oppose à ïr.. xè éuéq ETai
qu'on rencontrera dans la dernière phrase.]
9. [Le texte des manuscrits, xàxsSva tov voCv ruvl^et, est absurde. M. Couat avait
admis la correction de Gataker, to vooOv. La lecture pins récente de M. Rendall,
to âvoOv, que j'ai traduite, rappelle très heureusement à la lin de la pensée l'idée
exprimée au début de chacune des quatre première-* phrases par les mots =v et u/'a. —
4.. coi at-i\ roiRMEii. i-
■j'-yS MBLIOTUÈQUE DES UNIVERSITES m MIDI
sens1. \u contraire, la pensée tond naturellement vers ce qui
esl de même origine qu'elle, e! b > attache, Bans que celte
sympathie cl celle union9 rencontrent aucun obstacle.
31
Ouc demandes In? Prolonger la vie? Tu demandes donc de
sentir, de désirer, de grandir, puis de dégénérer 3, de parler,
de penser? Qu'j a I il dans loul cela qui paraisse désirable?
S'il esl Facile de mépriser chacun de ces [prétendus] avantages,
cherche donc le bien suprême i, qui est de suivre la raison et
Dieu. Mais il est contradictoire de mépriser ces choses "> et de
gémir lorsque la mort nous en prive.
32
Quelle faible partie de la durée infinie et insondable a été
attribuée à chacun de nous! Elle s'évanouit bien vite dans
l'éternité. Et quelle petite partie de toute la matière ! Et quelle
petite partie de l'àme universelle! Et sur quel grain de la
terre tout entière rampent tes pas 6! Réfléchis à tout cela, et
ne t'imagine pas qu'il y ait rien de grand, si ce n'est d'agir
suivant ta nature et de supporter ce que t'apporte la nature
universelle.
Sur le sens de ffvvr/eiv, cf. supra VI, i'i, i* note, (in. En général, ce verbe est
employé dans la définition des êtres individuels; mais, ici, Marc-Aurèle ne considère
qu'un seul vivant, le monde.]
i. [11 y a ici une inexactitude, qu'on ne pense pas d'abord a reprocher à l'auteur,
parce que, pour nous, il est établi que l'ascension des vapeurs dans l'air plus lourd
est encore un effet de la pesanteur. Pour Marc-Aurèle, la force ascensionnelle des
gaz est distincte de la pesanteur, à laquelle sont soumis les solides et les liquides
i supra \, i>0, lin ; XI, ao, début). Il aurait donc dû les nommer ici toutes les deux.]
?.. [Couat : «cette tendance à la solidarité.» — L'expression xoivamxbv 7:iÔo; est
évidemment synonyme du mot <7--»u.~â6î'.a, employé et défini dans une pensée qu'il
faut rapprocher de celle-ci (IX, 9, 0e note.]
3. [tb av.-e'.v a-jOi:. M. Uendall (Journ. of PfiiL, XXIII, p. 1G0), qui corrige X^yeiv
en XÉyetv, prétend retrouver ici rémunération de toutes les facultés, sauf la «raison
séminale» (cf. supra, p. 50, en note). Cette seule omission serait bien surprenante,
et le rapprochement de Xsyew et de porâ /p^Oat. quel que soit d'ailleurs le sens de
/iyîiv, me semble inadmissible. Je garde donc Xr(y£'.v, en avouant qu'on ne peut
guère le comprendre sans en détourner légèrement le sens.]
l\. |La liberté. Cf. supra VII, 0;, derniers mots, et les autres textes cités dans la
note correspondante. |
5. [Couat : « ces biens. >> — En écrivant ici le verbe « mépriser», M. Couat indique
qu'il a lu à-rt[xav, et non nuav. Cette belle conjecture lève toutes les difficultés du
passage. Il était invraisemblable que les pronoms Tavta et avttbv exprimassent deux
choses différentes.]
6. [Cf. supra IV 3 V, sV, VI, 30, etc.]
I I I I M M I |
33
( Somment is i • impoi le !<• pi Incipe dirigeant d< l n u
i oui est là. Le re le que '" le \ raille "<i non, d i 'i".
oacUn rc et fùmëe '
34
Même ceux ' <i"i considèrent i«- plaisir comme an bien et Is
d nu leur comme mi m, il oui cependant méprisé i' mort Est il
rien qui puisse mieux noua encourager à la mép
35
Celui qui pense que cela seul est bien I qui arrive en
saison, et à qui il est indifférent d'avoir accompli plus on
moins d'actions conformément à la raison droite , et d'avoii
regardé le momie plus ou humus longtemps 5, celui-là ne
crainl pas non plus la mort.
36
Homme, tu as élé citoyen de cette grande cité : que t'im
porte de l'avoir été pendant cinq ans ou pendant trois ans?
Tout ce qui est conforme à la loi est égal pour tous. K<\ -il
donc si terrible d'être renvoyé de la cité, non par un tyran
ni par un juge injuste, mais par la nature qui t'y avait
introduit? C'est comme si un chorege'» congédiait de la scène
l'acteur qu'il y avait reçu! «Mais je n'ai pas joué les cinq
actes de la pièce, je n'en ai joué que trois. — C'est vrai; mais,
i. [Cf, supra \, 3i, note 3.]
3. [Couat : « Los philosophes qui... »]
3. |Couat : u ont cependant méprise la douleur. Est-il rien qui puisse mieux nous
encourager à mépriser la mort? » — Pierron : «Une chose peut... nous exciter au
mépris de la mort.... c'est qu'ils ont pourtant méprisé la volupté. a — Mare-Aurèlc :
Tzpbz Oavârov xataçpQvq9iv èvspYtxioTSTOV, 8n xai o: tt,v qoovvp &|jrttun /.a: -.
xaxov xp{vovTE:, olko: to-J-to-j y.aTispovr.Tav. A quoi se rapporte covro'jî à à-
à Tuôvov ou à Oavâxo'j?]
h. [Cf. supra IV, a3.]
5. [Cf. supra VI, 20 ; \1, 1, etc.; eu dehors des Pensées, toute la lottre «,.
Sénèque à Lucilius, et Plutarque (Comm. not., 8 : àyaOov ô */pô/o; oOx a,
txsvo:. Cette doctrine est opposée à celle d'Aristoie. Elio esl peut-étee'eo contradiction.
comme l'a noté Plutarque, avec une proposition de Chrysippe, cousidéranl comme
sans valeur un bonheur ou une sagesse d'un moment.]
G. [Conjecture de Nauck : yisrs;6; pour trcparrrpç.]
a60 MBLIOTHISQfB DES UNIVERSITES Dt MIDI
dans la vie, le drame loul entier n'a que trois actes. Celui qui
en détermine la durée complète esl relui qui a jadis fait le
coinpost- dont tu es tonné et <|ni maintenant le dissout: lu n'es
l'auteur de rien de tout cela. » Va-t'en donc de bonne grâce.
puisque celui qui te congédie est bienveillant1.
i. [La même mot fXttfç admel leadeui tenade souriant» et de «bienveillant
Cf., d'une part. 11, 3; III, iô; IV, ',«, etc.; d';mtre part, IV. 37; \. 30.]
APPENDICE
i m nota « 1 1 1 1 suivent N ont pu en ration de leui 1
.i leur pia» <•. ^(»u> le texte ...n etpondanl
m. 161 i ' note page '» -i. noti
7. [COU Intelligent • . - I >n V6I r.i I || Q
koul i«' ooun de oel 11 ticl< | ,,. int* ih. a
Marc \ 1 1 1-. - 1 • - distinguo formellement on plutieun
nablc de l'Ame raisonnable, la ^>//. ou |
(VI, 1 '1 J IX, B; X I. ;m. X 1 1 qui ne l'emporti pas «l- confond!
l'homme l'Ame 1 1 la raison, el de design* r a lie d< rni< re Indiff n mmi ni du n<»rn <j.-
ou de 1 oui 'i t d Cl l'avant dei ni< n n
imis i\ . ri ; VI, 3 ■. el les autres passag< - "ù il opj 1 l'homm
Nous avons l'occasion de concilier ces deui groupes de lextei en donnant
•!/v/r, l'acception la plus étendue. Il doil <i<~ilii.i
nous <l< ivons considérer que la raison n'esl qu'un- partie I
est vrai •!<' l'Ame raisonnable. I ette explication ne * mbl< soûl me -iiiii-
culte; elle est, d'ailleurs, confirmée par ce qui suil : L'homme 1 m - insiiiM ti 1 omrni
l'animal; l'Ame raisonnable, ses mouvements comme l'Ame d
mots 'v-/r,: opinât (l'MNt'iii pouvoir s'appliquer aui bétes el 1
En interprétant aussi largement le second mol de la 1 11 loti rdlaons
de voir dans l'énumération où il se trouve soit t*annon< • el le pria ip d'une l.
chie des êtres, soit une analyse d<- l'être humain. Ces deui explications supi
effet, qu'on fie définit •l^/jl <ju<' par opposition à voSç, el qu'on prend i« I
dans le sens restreint d'Ame animale ou d'Ame vivante.
La première «'-t proposée par M. Couat. Dans un.' note aui m
r/îiv èici ta potivâu>eva xat8f,xovra, où il défend le texte traditionnel
il prétend que Marc-Aurèle distribue ici les êtres en quatn _ r« • 1 1 j »• - : ■ 1 ceux qui
n'ont que des sensations; •' ceux qui onl uV> tendances, el parmi 1 ux U 1 monstres
comme Phalaris el Néron; 3 ceui qui possèdent l'intellig< 1 plutôt !
an nombre desquels se trouvent même les criminels el les gens vicieux; I le
dont le privilège n'est pas la possession exclusive de « l'intelligen -dire de la
raison), « niais la vertu. » — Je n'insisterai ni -ur l. ; \ I. 1 \ ■
d'une telle doctrine avec îles textes >ùrs, ni sur l'impossibilité d<- concevoir un
capable de sensations et sans instincts, ou de fonder en raison la prétendue supé-
riorité des bètes du cirque >ur celles de la ferme, ou d'attribuer <ni\ hommes qui
osent tout faire» un principe directeur qu'on refuse aux hommes qui font les
femmes. Il me suffira de faire valoir contre l'interprétation de M. Couat l-l-i
que soulève le premier mot de la pensée: >i en tout objet et en tout être
IX, 2o et ailleurs) il faut distinguer le principe efficient «le la niati.
le principe efficient seul qui définit, c'est par puai; ou E|t;(ia/ra VI, i4)ei non par
Twaa, que l'énumération eût dn commencer: par le nom de ce qui détermine les
choses inanimées, non par celui de ce qui, dans l'animal et dans l'homme, est la
matière inerte.
H peut paraître plus légitime de chercher dans le rapprochement des troi> mots
sàijia, 'V-r/r,, vqC:, une analyse de l'être humain. San-; doute. Marc-Aurèle accepte, en
général (j'ai cité les textes au début de cette noie», la division traditionnelle de
afÎQ B1BMOTHKQUE DES imviumii's DU MIDI
l'homme en corpi ••! en filme (c'est à dire en âme raisonnable): même il lui arrive
de ramener l'opposition de l'âme el <lu c *pi ;< celle »!<' It cause ou forme ei de le
matière (infra IV, n, note finale, et IV, 40), — entre lesquelles, du moins, il est sûr
qu'il n'\ .1 pai place pour un troisième principe. Mais <>n peul aussi trouver dans
certaines Pensées (II, >; VIH, '><>: XII, 5), antre les nom- du corps h «lu principe
eant, celui d'une autre partie constitutive de l'homme, !<■ • louffle itvtvu-dh
dans d'autres {infra l\. ',, noie finale; \l, 20, r*6ûi.), la Qamme (i 8*ov
il Jointe nillf. «•! l<- mélange <!<• ces deui élémenti distingué*
de 1,1 raison, <|ui semble ainsi considérée, malgré les dénégations de Zenon, comme
une quinta natura. Il pareil assex naturel (infra V, 33, note finale) «le reconnaître en
ce souffle <-t cette Qamme l'Ame animale qui esl en non- ; et, par suite, aaaei aisé
de rameneT ce nouveau i> :i 1 1 ;i ^ » • de l'homme à la division traditionnelle en corp<
el en âme: c'est cette dernière qui est dédoublée en âme animale ei en raison. On
peut, dès lor^, se demander si la partie n'a pas reçu Ici le nom du tout; si, par
opposition à la raison, 'î/v/r,, devenu synonyme de wvevjiàTtov, ne peut pai
ici l'âme animale, — de même qu'ailleurs (infra I\, 3, 7" note; V, 33, note finale .
p;ir opposition au souille, il désignera la raison: les deux énumérationi ffMffcdtrtOv,
irveu|idtTtov, voOç (XII, 3) et <7ô)u.a. 'l-jyr,, voOç veulent au moins être confrontées. —
Or, l'assimilation de l'une à l'autre esl interdite par les mots 'Jo/r,: ôp;j.ac, du
moment que dans la pensée (XI, ao) OÙ « l'air et la flamme » sont peut-être le plu^
nettement séparés de la raison, c'est à celle dernière que Marc- Aurèle, comme tous
les Stoïciens, attribue non seulement nos instincts droits et nos sentiments raison-
nables, mais aussi nos passions, c'est-à-dire, en somme (voir deux notes plus bas),
toutes les 6pjj.at, bonnes ou mauvaises, qu'on n'observe que dans l'homme.]
Même pensée, note finale (page 45, note S):
'1. [J'ai réservé pour une note finale l'examen de la conjecture de Gataker que
If. Couat avait adoptée d'abord (cf. quatre notes plus haut). Elle est certes élégante
et séduisante: très simple, puisqu'elle se réduit à la transposition d'une ligne; très
claire, puisqu'elle laisse aux mots leur acception naturelle. Je n'en pui- mieux
montrer les mérites qu'en empruntant au premier manuscrit de M. Couat, pour la
reproduire ici, la traduction de tout ie passage :
« Etre tiré en sens divers par l'instinct est aussi un privilège des bêtes, <!<■*> indro-
gynes, d'un Phalaris, d'un Néron, de ceux qui ne croient pas aux dieux, de ceux qui
trahissent leur patrie, de ceux qui osent tout faire, une fois la porte fermée. Si ces
facultés appartiennent aussi aux diverses catégories que j'ai nommées, quel est donc
le bien propre à l'homme vertueux ? C'est de prendre pour guide sa raison dans la pratique
de ce qui lui apparaît comme le devoir, d'aimer et d'accueillir, etc. »
Mais cette lecture n'appelle -t Jéi\e pas quelque objection? Dans une note qu'il est
inutile de reproduire en entier. M. Couat lui reproche d'abord de n'être qu'une conjec-
ture : et cette critique est sans réplique, si la correction n'était pas nécessaire. - En
second lieu. Gataker aurait eu le tort de sacrifier la c hiérarchie des êtres ». J'ai cité
plus haut (r« note de la pensée) les termes mêmes de l'objection et essayé de montrer
qu'elle ne portait pas. — Nous n'avons donc à examiner que le premier grief: la
correction serait-elle inutile?
« Le texte traditionnel, » écrit M. Couat, a ne parait pas d'abord d'une interprétation
facile. Les athées, les traîtres, les débauchés ont l'intelligence, [même la raison,] mais
s'en servent-ils, comme l'aurait prétendu Marc-Aurèle, « lia :à patvéuava xaQjjxovTa »?
Il est impossible, dira ton, qu'il ait pu s'exprimer ainsi. — Si l'on traduit ces mots,
comme je l'ai fait, par « ce qui leur paraît convenable », le sens est satisfaisant. Le
mot xaÔr(xov diffère essentiellement d'àyaObv et a un sens très relatif. La classe des
xaOr.xovTa comprend bien des degrés. En ajoutant au mot y.aOr.xovTa le participe
yatvôtjLîva, Marc-Aurèle en a encore atténué la signification, au point de l'identifier
presque avec le mot Ta TvusÉpovTa, l'utile. Je reconnais, d'ailleurs, que, dans les
autres endroits où l'auteur emploie le mot y.aOr.xov, il lui donne le sens de «ce qui
convient à l'homme de bien», c'est-à-dire « le devoir».
Si favorable que soit ou semble être cet aveu à la conjecture de Gataker, je n'hési-
terais pas, pour ma part, à l'aggraver en distinguant l'usage de Marc-Aurèle de celui
des autres Stoïciens, au moins des Stoïciens dont Diogène (VII. 107) et Stobée
kiih i
i / cl II.
lui laola • -I'
,i., s ,. ,ii. -il i , loqu< •
i, i m. i i u| qui i
, ,,!,, , | : m,i, Mal M 11 \'ti. i-
IN i, noi II i m. « > > ■••■ 'i m« ni .!•
para qui I "i. t. i m. ,i, i.. moi ftl< i" tlqn I« "■
lombl Int n kfan turele, el i lin k » n
llMlllllll- I .M « < I .ll\ III I
tdmettoni don< qu< poui Man iuri i
mm,p (infr* \ il. iS, nota Bnali H "
moins poi un- de fair< une notable dlflî n n.
i . j.- demandi i I o Ici Mai lurl la qui i,n '" • "
plutôt les tthéet, Ica traîtres, loi pire di qu'il f -• • t pai loi II •
que lai mémoi moii ne doivent poi ni ivoii poui
pour lui, encore qa'Ui en pumuni donner, eux >> lui, lu n
appelaient xa69jxov l'acte qui to Justifie comme fondé on raison,!
-,-,v; (Dlogène, \ II, >■•- l : or, <»n ne peut douta
Iraitrei ne trouvent toujours • !<• bonnes raisons pour rendre i ompte <\< I luili
Plus haut (III, 6, fin), Man lurèleadû s'expliquer sur lo mol Ileal
possible d'équivoquer sur xaOTixov i""i aussi bien que lui
Bft, malgré ces explications, -dont le grand loti esl sans douti
saires, — «>n ge rallie au texte de Gataker pour conservei avs^xw le seos strictde
«devoir», il n'est pai douteux qu'il faille Ici traduire vrô< ptr raisoi 4 que
par « intelligence •>. Car c'esl la i raison o <iui aide ''" devoir. Mais n» i qui
respectent le tr\t<' traditionnel m- sauraient interpréter autrement le nu
cause ,i<> l'axiome vo\3 SéYuara. Il se peut <|n'il y ait dea trattrei et d< que
noua nous trompions, que m^ «jugements» (&6y\Laxai) aient besoin d\
(cf, \ III, '»; : 8cop0<5*ott to oôvixa, — I\. *)î <"<"' '■ M
pari, île ces jugements <ùr- qui règlent la conduite, les « principes i ou les < maxii
(supra II, 3; III, i3;în/rnIV, i6;VH, s, etc.) qu'à l'imitation deJuvéneJ (XHI, iai :
stoïca dogmaia) un peut, en français comme eu latin et en - ro , sppej i
or, pour peu qu'on pense aux dogmes t-; comment n*j paa penser lorsqu'on lit le
mot ooYfxaTa:1)? dira -t- on que c'est de r • intelligence n ou de la i raison que bous
viennent (ou* nos jugements?]
IV, si, ir* note (page 6o, note 4):
\. [Gouat: a Si les âmes ne périssent pas.» — Cette traduction était déjà celle de
Pierron. Prise dans son sen< usuel et chrétien, une telle expression ne peut manquer
d'éveiller l'idée d'une âme immortelle, gardant à jamais dans une autre vie
identité et la conscience de son identité. Or, pour les Stoïciens, l'àme est matéri
et la somme de matière invariable dans le monde Uni; d'où il suit que la multipli-
cation et la persistance des âmes doivent être limitées; sinon, l'univers finirait par
n'être plus qu'une somme d'âmes, et son histoire se bornerait là. Tôt ou tard, fût ■•
à la sortie du corps, fût-ce au jour de l'embrasement unher^el. il fallait donc que
chaque âme, sans être anéantie cependant (car rien ne disparait dans le non
ovSkv s:: to (xr( Ôv iulpxexat : IV, \\ ou çOs'.psra'. : V, i3), trouvât, pour ainsi parler,
un emploi nouveau, — bref, subît un changement, où ^ombrât son identité. Distinct
pour la plupart des Stoïciens île la mort de l'homme, qui n'e^t que la réparation des
deux principes qui le composent, ce changement (;jL£7aoo/.rè ou àX>ofe»<rt;) - « vrai-
ment la mort de l'àme : Xeréofa ok cp6£:p£<j6a: crr.aavT'./.tb: toC arillotoûatai V
La présente pensée est une théorie de la survie et de la mort de l'àme. Le com]
ô:ati£v£tv, qui exprime ici l'état de l'àme survi ante, y reçoit donc une tout autre
signification que le simple ;jl:vz:v à la pensée VIII, iS, qui commence ainsi : u Ce qui
est mort (-h àr:oOavb^) ne tombe pa< hors du monde. S'il y demeure (si '^oe [lêvei), c'est
<»,', HIBLIOTHBQLI i>i ;S U!UVEKSITÉS i » i MOI
poui chani i l texte, en effet, n'est que le corollaire de l'axiome célèbre:
In iiiliiliuit fiil po$$6 reverti, et r i *.« 1 1 î r 1 1 1 < - que l'éternité d'un leul être, le monde, i
envient à ce qui fut l'homme, quand l'homme n'esl plu- ; il se d
de même «i«- ce qui fut l'âme, après la moii de l'âme. Jusque i i [u'on
emploiera. Le aujel (x:. Vy/y. et non tb ïiroOavov) suffirait ici à fixer le lem du verbe.
Le i" j ;•. d'ailleurs, sa râleur propre ($ià, à travers; 8tau£vtcv, rester
à traven les choses qui changent t. qui se pr< i ise i la troisième phrase de la pen
où alternenl comme synonymes les deui expressions yi-y. icoeijv ::va Mttâtot|t<f
et T/rj.'./ïTa: Itn icoeov. 8i le préflx< - n'ajoute rien de plus au sens de liap
que le moi «encore) au sens <hi moi «restei ■ . el -i le préfixe aw- lignifie la
constitution ou le maintien «l'un tout, 8ta pour l'Ami
non seulemeni rester, mais rester l'âme, el encore vivre, — la survivance n'étant pas
l'immortalité.
Le lieu de cette survivance esl le ciel, le «ici qui enveloppe la terre el contient les
astres, le < i« i qui comprend à la fois l'air et l'éther. C'esi dans ce sens ti
mais non insolite, qu'i] convient de prendre le mot «air» employé ici par Marc-
Aurèle. Pour la commodité <le leur- raisonnements, les Stoïciens ont, en effet, volon-
tiers réparti en deux groupes les quatre éléments: à la terre et à l'eau, <{ 1 1 i consti-
tuaient pour eux comme le corps du monde, ils opposaient l'air el le feu, qui en
étaient comme l'âme (Xeller, Phil. der Gr., 1113, p. i84). Bien que Marc-Aurèle ait
parfois (supra IV, 4, note finale) ;* < 1 1 1 1 i -- dan- l'homme comme un cinquième élément ;
bien qu'à la fin de la présente pensée les mots to àiofoos: r, KUpâ&tC, qui évidemment
ne sauraient exprimer pour lui la matière d'une âme raisonnable, impliquent la
même hypothèse, il n'hésite pas à faire ici la simplification do langage admise dans
l'école. Il la fera encore au livre \ (art. 7), lorsqu'ayant dit que chaque élément de
l'homme retourne à son semblable, il se contentera de nommer l'élément solide ou
terrestre et l'élément volatil ou aérien.
Quant à l'idée «le la survivance temporaire des ùmes, elle est antérieure au Por-
tique : Cébès l'expose à sa manière dans le Phédon (86 D - 88 G; cf. g5 C : ocf)ava<T''xv
jxàv fj.TQ, TtoA'j/pôv'.ov os). Sauf quelques dissidences, elle devint courante parmi les
Stoïciens qui, prolongeant la survivance au besoin des siècle- et des siècles, sans
compter (cf. Zeller, Phil. der Gr., 1113, p. 2o3), purent se contenter de cette sanction
morale. Et il est \rai qu'ils ont réussi sans trop de peine à concilier cette hypothèse
avec leurs dogmes et à l'introduire dans une métaphysique qu'en somme elle ne
contredit pas. Mais c'est pour des raisons étrangères au système qu'ils l'ont tenté.
Si celles-ci n'avaient pas eu à leurs yeux l'importance qu'ils leur ont donnée, il leur
eût siii- doute été plus facile «le laisser mourir l'àme de la même façon et en même
temps que l'homme lui-même.
Car, même dégagée du souffle que nous aspirons et rejeton- -an- cesse, et que
Marc-Aurèle s'est parfois (II, 2) complu à avilir, elle n'est, pour les Stoïciens, pas
plus que l'homme, quelque chose de simple. A côté de textes (cités dans Zeller, Phil,
der Gr., III3, p. iy5, note 2) qui la définissent d'un seul mot, soit nOp, soit uvsCfjLa, et
dont la contradiction permettrait déjà de se la représenter comme une matière mixte
(« intlammata anima», écrit Cicéron dans les Tusculanes, I, 9, 19), d'autres nous la
donnent expressément pour un composé d'air el de feu (Alexandre d'Aphrodisia-.
de .in.. 127 G : 7ivs0u.a... eruyx£''(JL£vov... ex -.1 nvpo; xx\ asoo:). Pour Marc-Aurèle,
nous le voyons ici même (à la lin de la pansée), cet air et ce feu ne sont que l'àme
animale; et il y a encore en non-, à côté d'eux, la raison, faite d'une matière plus
subtile et plu- pure. Tout cela, d'ailleurs, se renouvelle sans cesse en nous, l'air et
le feu par tes xXXotcucrei;, la raison par xva6ufiia<nç ( V, 33, V note).
On -e souvient que Platon concluait de la simplicité à l'immortalité de l'àme.
Si l'àme. au dire tics Stoïcien-, e-t un mélange, elle pourra périr d'elle-même,
comme l'homme, par dissociation de- éléments dont elle se compose. « Tout ce qui
participe à une nature commune est attiré \ers son semblable» (infra I\, 9). La terre
attire à elle ce qui est terrestre, l'air ce qui est aérien en nous; la flamme de vie
remonte an feu élément ; comment la llanime de raison ne tendrait-elle pas à s'élever
plus haut encore, jusqu'au grand foyer de l'intelligence universelle? Or, il suffit du
départ de la raison — imper>onnelle pourtant — pour que la personnalité disparaisse
et que la survivance de l'àme démembrée perde à nos yeux tout intérêt. — Telle
parait être l'interprétation la plus naturelle d'un mot que Marc-Aurèle n'a pas eu à
• Il I
..III- I. I III il
>hi. . fulun i i
| | || Il ... .m. J| ... i. In. ni il'i II .lu 'il I' •!■•■.
Cornutu . m i ippoi ' A lambllqui
,,,,,, | ,|, | .,.|. . IL ..H ■ ii m. M ll> l.i II
, ,,h, i M, h. \ui. Ii . qui op|*i • toiijoiii i I • itiiK ii
,,i. pti l'hj poilu i di ' "i mitti I' "
,, i ptuUi •■' , IV, ; l< ' il ■ ■ i iloniw un p >, cette empli*
. ..h. ,n .i. i • m. .i t .i. i M,
.i.M.i pi i . itini Lion di i ••ni- ai la mort tk I
un Si .m ill l*i mi' poncif •' '(• 'i v
il qui .i Lui ioi in I ..m. du corp poui ra lilx r- r la
1 1 .iiiiiii ni . om i voir ii \ ta do collo-cl dao i inli rvall
i S( i, ions, qui idroi ltai< ni l'I la r ni
, I ,|. . i t 1 1 . I ■ mu | i x .il. ni . llhJi i II |,|. ii,i. t. • -I ■ ■ - 'lllll
iubsi*lei l'Ame jn-«|ii •• il « "M M. i-i.i h., m uiiivcrwlli
de i. — 1 1 1 1 . i . i autant que possibl< la lurvivana I l'immortallb H
à expliquai l.i survivance II pareil poa*iblc d'en dodu in II I
pensée, bien que Mari «Auri l< n j » mbl< plun Umii dm de I ami i
monda
i 'âme, dit-il d'abord, démettra pour an tanpa dam I omu»
la ml. Mala, même pour lui, ce n'es! Il qu'une comparaison ft l9appul d'une
thèse; et oette oomparaiaon ne tend qu'à montrei la du changement qui
achèvoreil !«• séjour de l'âme, non la possibilité de oe léjour même I mil
est heureusement plus explicite : un chan£<m«nt *«• produit ; r ird<ux i, -t —
plusbi lubtiïise al l'enflamme». Qu'est-ce à dire, sinon que laps ienne
cl irrationnelle de l'âme se convertit en feu, puis en feu artitte, ou en raii
la mort de l'homme, la raison qui, durant sa vie, était déjà en lui le prlni ipe diri-
geant patt, pour ainsi dire, du reste de ion âme? Unsi peu! se traduit
langage matérialiste — et se justifier dana la métaphysique stoîi ienne — la pui
qui, d'après Sénèque (ad Mareiam, \ Mil ». attarde les âmes sur la route 'i<i 1 ici.
Cette théorie (si d'une ligne de texte il n'est point trop arbitraii mira une
théorie) n'est pas sans analogue dans la métaphysique stoïcienne; l'embrasement
de l'âme humaiiu- qui en doit épurer et subtiliser la matière, annonce l'immense
incendie qui, au tenue de la «grande année », prendra toute la matière dn m
mcuir inanimée, pour en faire de l'âme. ï -ri1, /.a. Ta '/I^ya roi
çaa\v s-.; to £|j.V^yov roéicsotai (Plutarque, et S tôle, repaya., ioi symétrie
est séduisante, si elle n'ajoute rien à la cohésion du système; -t la plupart des
Stoïciens se sont complu à la prolonger. !>•• même que Zeus, une fois que l'en
sèment général a t'ait rentrer toute matière en lui, se repose | il sibl
Sénèque, ad Lucil. 1\. 16) avant de réorganiser l'univers, d<* même l'âme, disi nt-ils,
lorsqu'elle n'est plus que flamme et raison, n'a plus de transformations à subir,
jusqu'à ce que Zeus la reprenne en son sein : Maxpx; -:^x: gpevbw -
oûpocvâ nepi7co>ouaa;, à'-/p: oi euv&taXuOftetv... £•.; rôp voepov Kvaeêeteau (Plutaf
Non pûssc suaviter vivi sec, Ep.f dernières phrases). Cette très longue péri [>our
l'àme celle de la vie bienheureuse, don! Sénèque a décrit les dél
de la consolation à Marcia). Il y a ainsi pour l'homme, dan> la doctrine, un motif
d'espérance, et le platonicien Plutarque en a pu l'aire gloire au stoïcisme. Mai- la
théorie avait reçu de Chrysippe un dernier perfectionnement. Avant lui, Cléanthe
(Diogène, VII, 167) laissait subsister toutes les âmes sans distinction; sans refuser un
certain répit, même aux plus vulgaires, Chrysippe tit de cette le _ 1 irvivance
le privilège des seules âmes de sages. La distinction qu'il établit ain>i entre les âmes
— et dut justifier par des raisons physiques — donnait à 1". autre vi- ikur
morale. C'est sans doute sa doctrine, acceptée communément pal ses fl sa ur-. que
résume en quelques mots Plutarque dans les Placita philosophorum (IV, -. v
Exeaïxot [y*^ ~V '-r^'/V'î BÇwOcfaw ixtûv dcouxTiir./ ovttco pdetpeeOatt xX
Ttvà; xpôvoy; v.xb' xi-f^r xa\ rr.v akv Kafevearréearif i-' oXrrov (-x-irr
twv auatôs-JTtov), tt,v oï I(r/vpo7£px\ (ota 11-'. ~£p\ tqO: e&pau;) xr. ;jlé/c: -rz iy.-.scjtîio:.
L'àme la plus forte, celle du sage, e<t celle où domine la flamme de raison, celle qui
266 mm. loi ni ou Di v immhmh'v ix midi
pourri m consumer, c'est à-dire l'épurer el l'alléger, «'t. l'étant allégée, monter
Jusqu'à l'éther; l'Ame la plus bible, celle du vulgaire, est celle d'où li flamme,
étouffée par l'épaisseur •!<• L'air qui i'j mêle, se retire, aprèi ;i % < »î r vainement lutté.
J'ai dû rappeler lu théorie traditionnelle pour qu'on \it mieui à quelle distance
l'en tient l'auteur dei Pensées, même quand il accepte l'idée <i< la survivance;
chemin faisant, j'aH&ché de faire valoir lei avantages de cette doctrine. Le moment
est irenu d'exprimer les critiques qu'elle soulève ol qui onl du en détacher Marc-
turèle. D'abord, il esl asseï difficile de concevoir l'indépendance des âmes réunies
dam la cité céleste, et toutes lea j<»i«,v supérieures qui Impliquenl le sentiment de
cette Indépendance: celles qu'éprouverait, selon Bénèque, le lil- de Mai titrer
dans 1,1 société sainte des Scipion et des Caton -, •* se Caire « initier j>.i r son aïeul aux
secrets de la nature », à « contempler^du haut de sa gloire II terre qu'il i quiU
Dans la rie bienheureuse, toutes i<s âmes ne s(,nt que raison, et la raison esl une.
Puis, deux flammes raisinés, <iui tiennent une fois a se toucher, ne se séparenl plus.
Puis, rien ne doit alimenter ces flammes et les fixer on quelque sorte, alors que le
soleil el les astres — des dieux — don! elles sont iî proches s'entretiennent perpé-
tuellement, par une KvaOv(&fao,iç, <l< « émanations de la terre. On se demande donc
comment Sénèque conciliait avec la pénétration réciproque (<< Invicem pervii lunt » :
ad Warciam, \\\ ides âmes la presque Immortalité personnelle qu'il promet à ceux
qu'il console, lu reste, il a douté, tout le premier, de la sûreté de sa doctrine; el il a
prévenu l'auteur des Pensées lorsqu'il a écrit (ad Luciliam, LXXI): «Au! in meliorem
emittitur vitam, lucidius tranquilliusque inter divina mansurus; au! certe, sine ullo
futurus incommodo, suae naturae remiscebitur, ti revertetur in totum.
Les deux objections suivantes viennent en quelque sorte de Marc-Aurèle lui-
même: i° Depuis si longtemps que le monde dure, sans s'être encore embrasé,
comment les âmes survivantes n'auraient-elles pas encombré le ciel? Par suite,
comment les nouvelles venues y trouveraient -elles de la place? A quoi l'on pourrait
ajouter: comment resterait-il au monde de l'air respirable, de la flamme pour
entretenir la vie? L'interrogation par laquelle commence cette pensée et qui Intro-
duit la théorie pmpre à Marc-Aurèle renferme, en deux mots, s; a'tôt'ou, une critique,
peut-être une réfutation de Chrysippe et de Sénèque. 2° La simplicité même des
explications de Marc-Aurèle accuse ce qu'il y a de laborieux et d'arbitraire dans
la trop poétique construction de ses maîtres; évidemment, c'est moins là pour lui
une démonstration qu'un beau conte. Il y a surtout un long détour qu'il se refuse
à faire, une hypothèse — pourtant fondamentale du système — dont il s'affranchit.
En Faisant coïncider, en effet, l'embrasement de l'âme humaine et son retour non
dans les régions célestes, non même dans l'àmc de l'univers, mais dans sa « raison
séminale >., il admet la possibilité d'un, réemploi immédiat; c'est-à-dire que, prenant
parti entre deux théories qui l'ont laissé parfois indécis (V, i3, fin;\,7), il considère
qu'au lieu de « s'embraser périodiquement»* le monde «se renouvelle par d'éternels
échanges » (infra X, 7 : »<rc€ xai raura otvaXrjcpOr,va'. s'.: tov to\J oao-j Xéyov, iiti -/arà
Tispiooov èxicupoupivou, sî'te Kïdcotç àuLQ'.oai; àvaveoufiivov). Sur ces «éternels échan.
il ne s'est d'ailleurs pas expliqué; et, à défaut d'aucun texte qui reprenne et tranche
la question, nous en sommes réduits aux conjectures. Ce qui est sûr, c'est que la
doctrine appelle un complément : car l'équilibre i\i^ éléments semble exiger une
compensation constante entre les «(embrasements)) et les « extinctions». Nous pren-
drions cette fois Le terme d*« extinction m dans |(- sens même qu'au rapport de Piu-
tarque lui donnaient les Stoïciens quand ils parlaient de la renaissance du monde :
7r, 8c volai: ftàXtv xou tt,v '\rj'/j^... |X£Ta6àXX[etv] ùç to 9e*u.aT0ei$£c (de Stoïc. repwjn..
io53, C, — suite d'un texte cité plus haut).
D'ailleurs, on ne saurait trop le redire, Marc-Aurèle ne hasarde que sous condition
la doctrine qu'il expose ici. Dans tout le reste des Pensées (textes cités à la note
finale), nous le verrons presque constamment opposera la thèse du «déplacement»
et de la «survivance m (uETaTTa?'.:, (ru(ifi£ivat, tenue- que détinit le présent passage)
celle (Je l'a extinction », et d'une extinction qui, comme il résulte de cette opposition
môme, ne souffrirait aucun délai. Ce passage, le seul qui nous présente une théorie
un peu développée de la persistance des âmes, commence par le mot si. Au cours
d'une phrase qui nous arrêtera tout à l'heure (cf. quatre notes plus bas), et dont
Auguste Couat, après Nauck, me paraît avoir à tort contesté l'authenticité, Marc-
Aurèle déclare formellement que la survivance n'est qu'une hypothèse; et. comme
I III M)|l I
III I
il .|. . hn lit la H |MU1 'l.ihl.
i i |,. .mi .m, i. mu \mi i |, -h rail on i
,i i.ui nu uni • om lltlontifllli • !•
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,i. s i. in. nhotiivM i ni, lui. . i |uVII( i,
I lllll |i( 'Il I. I MU I I . I I I I • • Il il fit il | > 1 1 J |ll llll M. If i \
m \ ' U)l l«l II <|u<- r.Min \ Il I
que l'âne du i • trouv< èln rolli qui ui ^ ii i. pi
ADDENDA ET CORRIGENT
N. B. — Le second manuscrit de M. Coual, dont la découverte
devait culminer In refonte de tout le travail antérieur, n ayant été
retrouvé que longtemps après le premier, lorsque suc livres des
Pensées étaient déjà composés et prêts à la mise en pages, on
a dû donner le bon à tirer de la première moitié de ce volume
avant que la seconde fût entièrement rédigée. Ces circonstances
malencontreuses expliqueront au lecteur la longueur démesurée
de cet Erratum, qu'on s'est efforcé d'abréger, en remplaçant
dans la composition antérieure plusieurs cartons et trois feuilles
entières.)
I, 17, 3e note — page 17, note 2. A V antépénultième ligne de la note, au lieu
de : En définitive, lire : On voit ici que...
//, 1, 2e note = page 19, note I. Ajouter les mots : [que semblent exiger
d'abord la division de sens marquée par la répétition de offre (zrÀyf)i(jft*\
ne s'oppose pas à opyi^e<r6ai), ensuite les dernières lignes de la pensée.]
//, 2, /" note == même page, note 3. Ajouter les mots: Cf. aussi infra XI, 33.
et la note.J
Même pensée = page 20, ligne 2, lire : Se mouvoir comme une marionnette
au gré de ses impulsions, et, en tète des notes de la page, insérer
la suivante:
i. [Gouat : «se mouvoir capricieusement et céder à des impulsions. » —
Sur le sens de vtupoffica«reta6«i, cf. infra VI, 28, et VII, 3, en note. J'ai préféré
« ses » à « des ». parce que le principe directeur est l'auteur même des senti-
ments auxquels il s'asservit (cf. IV. 32. en note).]
II, 10, en note = page 23, note 3. A la première et à la seconde lignes du
second alinéa, supprimer les mots : et sans compter un passage où j'ai
cru pomoir le rétablir par conjecture (cf. infra VIII. 4l)«
\ ftM m. \ il - I >f HfGI M>\
//, // /""/<• '•'. /''/'" ' / pi] • m rn pi
/// Ufi( , .ni I.
smrnrtlf
i i :..u ii que rtiomnw pût - «n i n i
qu'on croirai! traduire an ajoutant le mol loujoun .1 la
ti.idii. lion ilr \l I 1 Mi.il , r,l I..i I h |in I.- , ,i .! ||
h. 1 .ii poui 1 ni adoptai li même 1 1 idui lion
1 ta ni cette hj pothète 1 l< nii ni 1 » - x 1 » 1 1 « 1 » 1 « - 1 1
toul i' 1 li 001 rei lion que 1 •" « ept
//, t :. / noie page 26, noie 1 [fouler U
1 . i.ui iani doute ta m'aul : m une •
pour restituer, une ligne pliu haut d rite, antre
1 deux moti iri> que q mblcnl indi
Mes m MMi\ al avaient dû disparaître «le l'archétyp 1 menu
tache <>u dans le même trou que ~-.|
//. 13, v ticit- a paget 26 ci 27, Remplacer ta tiotepar (a $uivcnie:
Couat: à cauae de i»*u 1 perfection. Ce mol ne m 1 pas lembM
traduire avec une précision suffisante le gre< if Ifak j'ai jug ne
M. Couat, qu'il était par trop contraire h notre usage <!<• parler de II vertu
des dieux. Nos vertus 9ont tout humaines : elles Impliquent toqjours une
conscience scrupuleuse dans l'accomplissement du devoir, <>u bien une
constante victoire sur la passion; ou encore une immolation de soi. Les
dieux n'ont pas do passions à vaincre, n'accomplissent pas de devoirs;
Ils sont Infiniment bons, mais ne se dévouent j>
L'àpiTr, des Stoïciens dépasse l'humanité. Sans doute, il- ne diraient 1
comme Brutus mourant, que ce n'est qu'un mot. Mais Us avouent qu
un idéal rarement atteint. Cette disposition constante » suivre la nature,
laquelle ils voient le souverain bien, n'appartient en propre qu'aux dieux
ou au sage, homme divin. Elle implique la science et l'ataraxie pai
l'assurance et l'infaillibilité du jugement. C'est la raison même. •
adopté dans cette traduction l'expression qui m'a semblé le mieux répondre
a la définition des Tusculanes (IV. i5, 3'0 : ipso virtus brevissime recto-
ratio dici pot est.]
///, 1, antépénultième liane —-paye 30. Lire: parce que la notion et l'intelli-
gence des choses cessent 3 en nous... Ajouter à cette paye une dernière
note, ainsi conçue :
S. [Couat : < l'intelligence de la suite des choses cesse en nous. — Le
mot 7iapaxo).oj6r,(Ti; ne reparaîtra plus dans les Pensées. Le sens que je lui
donne s'accorde avec celui que M. Couat attribue ailleurs V, 6, par exemple
à TraGxxo/.o'jOîtv.]
Ul, "2 = paye 31, lignes ik et 15. Lire : quiconque sent profondément1 ° la
vie de l'univers doit trouver... Intercaler, au bas «le la page, la note
suivante :
1 bis. .Couat : « Il suftît de sentir et de comprendre profondément la vie
BIBI lOl m Ql i DES I KITBRSI i rs Dl MIDI
de [*uaiverd pour Irouvci La Leçon des manuscrits, nàfk* na
n'a pai d<- lens: Morus a fort Ingénieusement corrigé stfta en
rejeté les trois mots suivants comme une «dose. I n peu plus loin.
,11X (|r,,\ tien «!«' la pensée III, '». la même confusion de«6tocefl deftâtoc
trait dans les manuscrits \ <'i D : (*£•©< t une expression classique,
qu'on trouve dans U* ThéitèU (page i83, E au sens même que Je lui donne
jri _ l'emprunte ces arguments ;» un article de If. H. Polak (In II. Anto/iini
comnuntorioi, Hermès XXI, i> 346). On pourrait observer, en outre que les
Stoïciens donnaient <l<> k&os (cf. în/V"0 ,,ï- liK '*r f»0,«4' une définition très
Isa, ;« laquelle liarc-Aurèle a toujours rigoureusement conformé l'usage
du mol dans ses Pennées. Pourrait -ou admettre qu'il n'en fui pas de
même ici
///. .7. 'Jr note ----- paye 32, note 2, Lire à l'avant* dernière ligne de la note :
sont matière, — matière active, sans doute, et non inerte, plus subtile
et plus pure que la terre...
///, //. dernier alinéa de la 2* note -paye '//, 7e ligne des notes, lire:
celui que lui donnent les lexiques et qu'a pu lui attribuer Marc-
Aurèle.
Ligne suivante, au lieu de: \lï, 2, lire: XI, 2.
M, 3 = page '/#, %tte f6\ Lire: propre indépendance .V'% et ajouter à sa
place, sous ce numéro 3 bis, la note suivante:
:\ bis. [Je ne doute pas qu'il ne faille entendre ici par Ègowfav le
« pouvoir» de se retirer en soi-même dont il était question au début de
la pensée, et que Marc-Aurèle y a exprimé par le mot i\h>. Sur la valeur
du mot ifcov<na, cf. V, 10, note finale rectifiée aux \ddenda, et XI, 20, note
linale.]
IV. '/, note finale — page oi, 3e ligne des notes. Lire : et plus pur que le feu
lui même, — si subtil et si pur que notre auteur (voir la note à la
pensée VI, 17, rectifiée aux Addenda) hésite à lui donner le nom
d'élément.
Ligne suivante, au lieu de : note finale, lire : note 3.
Même page, 17e ligne des notes, au lieu de: XI, 20; ii, etc., lire: XI, 20: XII.
1 1, etc.
IV. M, :)e note = page 56, après le second alinéa des notes, lire: On me
pardonnera ce développement accessoire, que j'aurai d'ailleurs à
reprendre plus bas (IX. 20, et IX, 3i)...
I\. 1o\ tn note = page 57, note 2. Ajouter un dernier paragraphe ainsi
conçu: M. Rendall (Journal of Philology, XXIII. p. 1 32) propose ingé-
nieusement d'insérer le mot Oeotç entre 6so: et K'taEç (la faute s'expli-
querait d'elle-même). La pensée se traduirait dès lors ainsi : « Veux-tu
qu'en dix jours les dieux eux-mêmes te traitent, etc.. » Je deman-
derai seulement : pourquoi en dix jours?]
M. IM \|.\ Il f.< .i.l.h.l M»A
/ noté finale page 0 '. note '• I fa et i b /"- Ug - b h \ ni
nu lieu fU VIII, B /"" "/'' ' ''" '""Z I •" I
. I |.i • Ilote
Mrme pensrc. nxnie unir, />>i,/r h), nruf li,/nr. n<>n,l /,/ /,
\ 1 1 , i i h %)
in,- . i aremonl i elle du dépUu ement
Mrtne pensrc no ni, imlr, inrinr pùÇei ai'finl ilrrm > | f //-/'/- lpf<
Ld LuclUum, XXXVI, g9 Krt el surtout de P fia, VI B i
mon &ut finit nui transfert noua j présentent la même alternat
(Jlir |r <lr Mai I \ UM'Ir.
/i "• en note page >>> \ la fin de la ItyfM > du dernUr parc
lire : les mots \ 1 1 1 ••■ \ i ; - el
\. .i pourraient compléter cette ii>i<%.
i\ , 24, v note pagre '»'». ""Ir •» I l'H'imi dernière ligne de fa noU
le mot: nom, "jouter: Cf. Pape, Dictionnaire grée allemand^ ». u.
p. i65 a el b; îrç/hi VI, 13; \. i3; v >\. etc.; roir cependant
M . .';;. /;• noie pages 70 et ; /. Ajouter t à la fin de la note: quelque
plus haut, à la lin de la pensée 18 de ce même livre, <>n pouvait
relever une lacune de cette sorte dans !<■ manuscrit \ : toute une
ligne avait disparu entre lea deux
i\ . .7>; -page 72, à l'avant-dernière ligne de ta paye, innoncer aux mots:
toutes [semblables], une note <jui serait ainsi conçue :
<>. [Cf. la lin de la définition do la pieic dans Diogène, VU, (48 : rotavxa
rjpûvx à?' oifov Kirsxpifai. J'ai cité plus bas ( :>e note à la pensée VI, ii ce l
tout entier.]
M . 39 - />"</<' 7à, ligne t. Lire : ce n'est pas non plus dans [un changement
ou] l une modification du corps, et insérer en tête des notes de la paye
eelte <pii suit :
i. [Cette modification ou ce changement firspocuffi;) du corps, c'est le
principe de toute sensation. C'est ce que Mare-Aurèle appelle ailleurs ■
(V, 26). Ici, il n'est pas question de la « représentation » (fovtoaria) qui
accompagne ou achève la sensation, et qui est, suivant la définition de
Chrysippe, le changement ou ia modification (l-repoctwiç) de l'âme (Sextas
Empiricus, adv. Math.. VII, 2291.]
IVS 40 = même page. Lire, à partir de ta 2e ligne de ta pensée: tout
aboutit à une seule sensation, la sienne * *"; tout s'accomplit par son
unique impulsion; tout est la cause de tout. La note 2 bis serait ainsi
conçue :
2 bis. [Couat: «toute sensation se ramène s sa sensibilité, qui est une;
tout acte est accompli par son activité, qui est une. » — Sur le sens du
verbe àva$too<rOat, cf. V, 26, \c note. Sur celui dopar,, cf. III. 16, 3~ note.]
BIBLIOTHEQUI DE* DÏUVER3ITÉ8 ni MIDI
l\\ r4$ page 76, I la ligne 7 de la pensée au lieu ci' « arrogance », lire :
insolence i' . Au bat de la page, min- le$ notée f et 2, intercaler celle
<jui suif :
\ bis. [Couat : arrogance.» Le voisinage du verbe «s'arroger m'a forcé
de changer ce nom. Ni • arrogance - ni « insolence » ne traduisent,
d'ailleurs, exactement Ce mot signifie proprement o hennissement ■■:
par métaphore, hennissement d'orgueil, orgueil. >> Comme toutes les méta-
phores outrées, nées sur Le déclin des Langues, celle-ci ;> dû s'user tris \ i t** :
et il est possible que Marc-Aurèle n'ait pas pensé, en écrivant ce mot.
comparer la superbe du tyran à La fierté <in cheval. Dans le doute, j'ai
supprimé toute image, pour ne pas risquer de traduire par un effet nV style
une banalité.]
Même pensée, même page, '/ liy nés plus bas. Annoncer, aux mots a <m quantité
une note ainsi conçue :
3. ['ÀvapfôjMjtoi : exagération stoïcienne. Ou bien faut-il faire entrer en
compte les villes détruites par les hommes?]
I". 5, ¥ note = page 82, note /. A la ■¥ ligne de la noie, lire: *.0LX*fiv<*<nu9ba:.
V, 7 =page 83. Lire, à la fin de la pensée : simplement, et d'un cour libre.
Rétablir ainsi la note 3 :
3. [Couat: - librement. » Var. : «libéralement. > — Cette seconde traduc-
tion devait se justifier dans l'esprit de M. Couat, comme le mot « noblement
pour Pierron. Barthélémy Saint-Hilaire et M. Michaut, par ce que rapporte
Pausanias (I, xxiv, 3). Un Athénien, nous dit le Périégète. priait non seu-
lement pour lui-même, mais pour toute l'Attique, sinon pour toute la
Grèce. Il ne semble pas douteux, cependant, qu'il faille préférer ici le mot
« librement », qui, pour les Stoïciens, signifie : « sans passion et sans
intérêt, » et aussi : « d'accord avec Dieu. » La prière libre est la seule digne
de Dieu. Elle n'est pas plus inutile que l'action de grâces : toutes deux sont
des actes de piété: l'une de confiance, l'autre de remerciement. Cf. infra la
note à la dernière pensée du livre VII, rectifiée aux Addenda, et tout l'ar
ticle IX, 4o.]
y} jQ^page s?. A V antépénultième ligne de la pensée, au lieu de: j'ai la
liberté ', lire : il est en mon pouvoir \ — Commencer ainsi la dernière
phrase : Nul ne saurait me contraindre. — Corriger la note ainsi qu'il
suit :
a. [Couat: «j'ai la liberté de... » — Cf. infra XI, io, note finale. L'obéissance
à Dieu, c'est précisément la « liberté » (èXeuOspCa), qui se trouve ici très nelli'-
ment distinguée de la « faculté » ou du « pouvoir » (l£ov*ta). Car la phrase
de Marc-Aurèle revient à celle-ci : « J'ai le pouvoir d'être libre. »]
V, 13, note finale = page 89, lignes 8 et 9 des notes. Lire: ont appelées
« grandes années ». Il est encore plus net à l'article IX, 28. On pourrait
enfin mentionner... Quatre lignes plus bas: àvaveou|*svou. Ailleurs même
(X. 3i», il la nie : ro -xTtaH pLETaêaXov ov/i?'. zn-*r. h r« àicsipu XP^*?- Tout
compte fait...
\ I » I » I \ I • \ Il ' ' • I '. I I ' . I \ I » \
i r> , i, note page 91
',. r ii 1 1 1 1 • - entendre ici le prlndj l'A i
,,,,i, lt»i i Man \ ni 61c \upra l \
lui toute h morale « otnp< »i i< nu m
,.iui ni .mu i.l.i ei qu'il nie In p< i ihililr «!•■ I.i i « pi ■'• • • ■ ■ ■
Intel -il le toul jugement cl exi lue lui-même La On mAm< d
m limite la portée ( il nu nrplu ■••• \ Il
i ,h ouvoqi le dog m me foi me rmuM il- i ne autn
i l'article V] m voli loa notes pai Mai i lurèle I
note finale pagr ''.\ noie 6. Remplacer U tk
celle ci . en ic i endanl meV hant. » Au I du
torl ï la cité univei selle [\ • • cl tu I VIII
u est Inutile d'observel Id une foli de plua que poai Man turèb
i omme pour Socrate la i
I noie page 95j nola comméne^a d hi précédente* i.irr. à la ligne 6
des notai de celle page: supra IV, u. »« note, ai IV, n, noie Si
ta/Vu i\. *5, en nota).
i /. .'>\ an noie =a page f05, /"»^ 2. [jouter ce qui suit : infm \\. \\
i\. ••:>. et la note. >|
i/, / '/ /w|/( //o. /,/><•, dans /a traduction: que par une simple qualité
première ou [par une] nature [propre] '.
Iflme penser. 'J nofc: même paye, note I. Lire, à partir de la ligne 3: Foui
ces derniers, lorsqu'il; ne désigne pas un mode de la *otdr*Ki il est exac-
tement synonyme de iroidtïjç : ixaXouvjd
iroâ: (Simplicius, Catégories, dans L'Aristote de Brandis, t. IV,
p. 67a, Ligne i3). Ces mots désignent également...
fi lignes plus bas : Seulement, cette notion n'est d'abord rien de plus poui
les Stoïciens qu'un concept pur et une unité abstraite: nous verrons
plus loin >l\. 25, en note) ((miment kq\6tt£ et encore plus U -' 'Simpli-
cius. ibid., p. 71 a, ligne a : tiç os s;s:: Taî: s: éopjtwv h
ptÇsofai) ont fini par l'exprimer comme réalité et même comme activité;
comment, en d'autres termes, le principe logique, la catégorie,
devenu un principe métaphysique: comment, enfin, lc^ Stoïciens,
pour qui tout est matière, ont pu définir matériellement l'Ifo ou
la tto'.ôt/,;. Ils ont dit que les IÇsiç n'étaient pas autre chose que
des souffles d'air, àspa: (Chrysippe, dans Plu tarque, de Stoïc. repugn..
13), et les icoioTi)Te; que des souilles. RveupaTa (ibid. . qui spéci-
tient. etc..
VI, 17. en note = page 113. Substituer ce qui suit au dernier paragraphe de la
note commencée à la page précédente :
On n'en pourra trouver que plus étrange l'opposition des < éléments el
de la vertu, c'est-à-dire, en tin de compte, des éléments et de la raison.
\. COI v l P. FOURMI K r£
Jt-\ l'.n-.i loi 1 1 1 < » i i. DES i mn ERhl i i (S ni Mini
( le n'est pas wna doute La premlèi e fols [$upra i\ . i, note finale) que Marc-
kurèle a distingué celle-ci de la terre, de L'eau, «le L'air ef même du feii :
mais c'est La première où il lemblese refusera voir en elle un «élément
Il montrera encore le même scrupule au cours de La peu -ce \i. •><» (ta tw
£wax< ptfvcrou a-i'.'):i. ei surtout au début de La pensée IX. 9,
où avant d'établir que la raison attire La raison, il écrira que Le feu monte
en L'air pour rejoindre le <• feu élément ». Jamais pourtant il n'a été plus
terme qu'ici en son matérialisme. \ aurait-il donc pour Marc-Àurèle de la
matière hors des « éléments »? — Mais < p 1 i empêche de L'admettre, et de
résoudre ainsi en La définition d'un mot L'apparente contradiction qui nous
arrête?
J'estime donc qu'ici et dans les plissages analogues Marc Vurèle a pris
le mol tto'./z'.ov dans m>ii acception la plus USlielle, el par « Les éléments
a simplement entendu « les quatre éléments ». Ainsi il ne serait pas absolu-
ment exact de prétendre que La raison n'est pas pour lui << un élément »;
c'est " un des quatre éléments » qu'il faudrait dire. — et cela reviendrait
presque à la présenter comme un cinquième élément.
Si l'on veut maintenant observer que pour Marc-Aurèle les astres sont divins
(VIII, 19; IV <>• ">r note), et que la raison, qui est le dieu intérieur (III,
5, etc.), doit être faite de la même flamme qu'eux: que la force intelligente
(VIII, 54) embrasse tout et enveloppe tout, on arrivera à considérer l'éther,
qui est au plus haut du monde (àvoraTu) \ih ojv slvat 70 icvp, 8 or, xlbïç,*
xaXefoOat: Diogène, VII, 137). comme distinct des éléments ou comme un
cinquième élément. D'après S tobée (Ecl.t I. 136), des Stoïciens qui ne sépa-
raient pas comme Marc-Aurèle l'éther du « feu élément » prétendaient que
celui-là se meut circulairement (to 51 Kiôipirt nepiçepâ; xtveÎTai), à la différence
de la lumière ou de la flamme terrestre dont le mouvement est rectiligne.
Ici. lorsque Marc- Vurèle parle du déplacement circulaire d'un élément, ce
n'est évidemment pas à l'éther qu'il pense; ce n'est pas non plus à la terre,
ni à l'eau, ni à l'air, ni au feu terrestre, qui pour lui, comme pour les autres
Stoïciens, montent ou descendent en ligne droite (XI, :jo); c'est le «feu
élément » qu'ici le mot xvxàw nous représente emporté (?opà) dans le mou-
vement (xfoïjffiç) du « feu artiste ».
Quant à la vertu, nous apprenons que le mouvement n'en est ni recti-
ligne ni curviligne. En la définissant «la raison droite» (Tusculanes, IV,
r5, 34), les Stoïciens ne voulaient donc pas tant marquer la direction de
sa roule que le don qu'elle avait reçu de n'en pas dévier. Les mots : « c'est
quelque chose de plus divin » ne nous indiquent pas la nature de sa
démarche. Mais l'avant- dernière pensée du livre VIII est peut-être plus
explicite : Les mots CTplçyjxat et v.aT i-lbi (« tourne » et « tout droit») y sem-
blent indiquer une combinaison de mouvements. IN'est-ce pas le procédé
même du «feu artiste» ou «raison universelle», qui tourne autour du
monde et « se répond partout »? (infra VIII, â'i et 57.)]
VI, 36 = page 123, Vigne h. Annoncer, aux mots « par conséquence », une note,
qui serait ainsi conçue :
1 bis. [Sur l'opposition de ces deux hypothèses, cf. injra VIL 75, et la note,
rectifiée aux Addenda A
\ 1)1)1 M» \ I l.l'.l M»\
i /, v> page / ."/ i lret au i Ugnêi 3
que défi ni I une n
m \ el n demou i
Miiih' jicnsic, I flolê un me page, OOtê '/ / m m/i>,i In
phrase i tans un outil i ks rappoi i du pi ln< Ipe efll
i<H m. i c'( ' i-dlre de l'arii un de i h oh ,.ï m.ii
n .1 en d'auti ei tei me I Idée i éall ée pei I'ouyi lei I
,i l'outil, «-I .m ii e Anale
Rétablir ainsi la noir salvanti
Coual : poui les œuvrai de la nature On la Un de 1 1
i note .» la pensée NI, i î. l'analyse de iv\pi
Je ne i i que i w puisse déaignei i, i i.( nature unirai i Ile
la pierre et le bote, el beaucoup <r<>i>i«u <|ui ne ><mi déterminé- <|u<- pu une
simple lonl aussi des œuvres de la nature»! el i celle qui mstl
tués n'est pas loin » (car elle est partoul , on ne peut dire pourtant qu'une
force demeure en ces choses informes el Inertei Pai les mots
9uvtxrf|uv«, j'entends loul ce qui croit ei \ i f la plante, l'animal
l'homme. — Il est d'ailleurs entendu que la nature propre d'un être Bail
partie de la nature universelle et ne saurait lui être oppoc
Même pensée, & note : pages f24 (note 6J ei t25. Supprimer le* lignes 3 ei S
de la note («OU du moins... qu'à celle nature
17, 42, / note = page f25, note 1 Vax 7( et 8 lignes de la noie, lire:
celles qui concourent solidairement et également à un même effet
«comme deux bœufs attelés à la même charrue, celles qui ne
que les auxiliaires d'autres causes, «comme l'homme qui vient, d'un
léger effort, diminuer la charge sous laquelle plient deux autre-
17. C>9. Supprimer la note (page 13 1. noie ftj.
\H, 13 = page 13ti. Au début de la pensée, écrire en italiques les m
« unit » et : « associe.
Même pensée, lrc note = même page, noie 2. .1 la fin du îei paragraphe
de la note ajouter cette parenthèse; (cf, infra l\, o, 6* note, les deux
conceptions stoïciennes de la sympathie.)
Même pensée, 3e note = page 137. \ la 3e ligne des noies de la page, changer
xaToXexTtx&c en xaTotXvpenxi&ç.
Vil, 50, 2(' noie = page 148, noie 3. Commencer ainsi le second paragraphe de
la note :
M. Gouat s'est mépris sur la place de la conjecture de Gataker. Des deux
xa\ qu'on trouve dans cette pensée, c'est le second, non le premier, que
(sans doute pour faire passer roiovHe* -:;) Gataker a voulu changer en rr Cette
correction était, d'ailleurs, assez mal venue: elle prêtait à l'équivoque, en
laissant croire que les deux r, opposaient (comme 5xoi •.. r ..-. ou comme en
latin oui... aut...) deux alternatives qui s'excluent. Or. il est certain que les
« éléments insensibles a dont parle Marc-\urèle. etc...
MB1 i< 'i Mi «m i DES UNI VI RSI i i B in MIDI
\ il, 66, ->r note = page />'/. note i. Rectifier ainsi le début de lavant-dernier
paragraphe de l<i note
le n'ai garde de contester L'interprétation que M. <:<>n;it donne de
Je dois observer pourtant qu n'es! i>.»^ comme '-• el comme il semble
L'avoir cru une particule interrogative, Cette conjonction signifie uni-
quement : si toutefois. La correction de Ménage nous obligerai donc
à traiter ausp à) comme une glose, car ««'Me proposition ne lait que
traduire à nouveau l'idée exprimée par 1rs mol- i... av tt< à-iiT/TscE'/.
Même si l'on refuse de lire XTUffnfaetev, je crains que Les trois mots qui
suivent ne puissent pas être défendus. ESn effet, ils Limitent le sens de
ou, Marc Aurêle n'ayant pu mettre en doute ni le courage de Sociate. ni
son habileté à discuter, \-t-il donc pu dire (pie. lorsque nom voulons
concevoir la vertu et la sagesse de Socrate, les traits qu'on en cite nous
intéressent moins que sa démarche ou son port de lète? Noter la précision
de deux termes essentiels de la première proposition : d'abord, \l*/.'.'7-i
(«avant tout»), et non jxaXa (((beaucoup»); puis tiç, c'est-à-dire rA; xiç
(u un chacun»), et non tivs; (((certains») ou ol icoXXot («la foule»). Us
semblent réclamer pour 7tep\ ©î l'acception la plus large. Les deux parties
de la phrase des manuscrits sont donc en désaccord, à moins que le même
pronom deux fois sous -entendu, d'abord comme antécédent de *spfc ou,
ensuite comme sujet d'àVr/jk: r,v (« cela », dans notre traduction), n'ait dû
exprimer, sans que rien pût avertir le lecteur de ce changement d'extension,
d'abord un ensemble, puis une partie seulement de cet ensemble. On ne
peut pallier la contradiction du texte qu'en le supposant incorrect ou
ambigu. Ces difficultés dénotent une glose : elles condamnent sinon la
ligne tout entière, etc.
Dans la même note, changer le 3e mot du paragraphe précédent : « ajoute »
en : « poursuit. »
Même pensée, note finale — même page, note 2. Modifier la note ainsi qu'il
suit :
•i. [Gouat : «avec les impressions de sa chair.» — Cf. supra III, 6,
4e note; V, 26, avant-dernière note. Sur les deux sens possibles des mots
«sympathie» et « sympathiser » chez les Stoïciens, cf. supra V, 2G, 4e note;
infra IX, 9, 6e note. Ici le mot <j'j>j~xçyr{ n'admet aucune de ces deux
acceptions. Nous devons l'interpréter à la lettre, en considérant qu'il est
voisin de ftiôew, et que les « mouvements déraisonnables » de l'âme (111, 16,
3e note), qui sont les « passions », peinent, eu ^rec. être désignés du même
nom que les « mouvements» de la chair, qui sont les sensations. Pour que
les sensations puissent troubler l'entendement et devenir des passions, il
faut que le principe directeur ait abdiqué. Autrement dit, la « sympathie »
sans réserves et toute vulgaire de i'àme pour le corps, que Marc-Aurèle
condamne en ce passage, n'est qu'une servitude. C'est le seul texte des
Pensées où les mots i-jUTraOr,: et Tj:j.zâOî.a soient pris dans ce sens.]
17/, 75 = page 157. Aua 4e et 5e lignes de la pensée, lire : les êtres, même
supérieurs, dont le principe dirigeant du monde s'occupe spécialement.
V t H H n I » V II ' ' • I I . I ' . I
Même p< ■><■ fin \l
l mm que le I" lin Ipc «lu igcanl du m i :
duollomi ni Mal i i le mol
|e ii m pu croli e que Mai i lui èli i de
i baque ôti o on pai tl< ulk i a la en idion iu
m ■ i i tome ni llmlb i . i passai*
peu plus baa |c i appi • >■ lie de celui-ci el n >l immeol i-
l'article VI, m I lea dieux ont délibéré] sui mol el t <\ui ,l>
m'ai en donnenl l'intei prëtaiion réi Idiqui
( Setie pens( i
Huit lign$ê plus loin, au lieu de: «ou l > i « * i ■ i< ' <i»v> mdi\ idueiii-
menl l'idée i éal loni iu< rendue
il va, à la libre volonté de I >ieu, el commi n le jour. I
ces Interventions successives de la divinité est rendue, <t
Même note, page f58, De laô( « lu t\' ligtu denoie$i au lieu de: on ;
iiit'inc dire que i >i< » i etc.,» lire: mais il n'esl pas question de
demander à Dieu l'impossible. Lorsqu'on rend compte de l'exisfc
du mal dans le monde Japra II, u, note a), on l'impute à la liberté
qui a été laissée à l'bomme pour qu'il eût du mérii
On ajoute que le mal rail par l'homme ne saurai! nuire à l'uni.
parce que Dieu s'est réservé de redresser notre action ou ses suit
nous faire coopérer hou gré mal gré (VI, la t wn œuvre. \in>i le
mal exige, la liberté de l'homme Implique la liberté pour Dieu
d'intervenir présentement dans le> affaires humain* i même
a été prévu dès l'origine du monde. \u\ Stoïciens qui soutenaient que
la Providence ne s'intéresse à nous que parce qu'elle s'occup
l'univers, à ceux qui jugeaient indigne d'elle qu'elle se souciai des
affaires de l'homme: Magné dix curant, parva negliguni Cicéron,
Nat. Deor., II, 66, 167), — Marc-Aurèle lui-même a répondu en invo-
quant la boulé divine : Si. par des songes ou par ses oracles, la divinité
peut nous venir en aide (infra I\, 27) pour des choses moraiemenl
indifférentes, et seulement souhaitables («ponyiUv»), à plus forte raison
nous indiquera-t-elle, à notre prière, l'action droite et le bien moral
Dieu peut nous donner ou nous rendre, etc..
Même page, même note. Relier le dernier paragraphe au précèdent par les
lignes suivantes : Dira-t-on que la faveur de Dieu diminue notre mérite?
Mais le mérite est déjà à la demander, si on lu demande comme il faut :
d'ailleurs, «il n'y a pas de honte {supra VII, 7) à être aidé. — Pour
plus de détails sur les rapports des dieux et de l'homme, etc.
MU y i == page loS. Rectifier ainsi le début de la '2e note :
2. [Couat : « la réalité s'y oppose. » — Plus haut (IV, 21), - signifie
simplement « hypothèse » ; plus bas (X, 3i >, A est joint à SXq, dont il prend
presque le sens («matière d'action ou de réflexion»); plus loin encore
(XI, 7). etc.
•j-S BIBLIOTHÈQUE DES UNIVERSITÉS Dl MIDI
r///. m, en noir page f65, nole3. Lire:
\c\\ tapra \, ..]
17//. w —page I7'i. Fï/i tfe /" pentêe. Au feu de: elle demeure rondes,
///v .- elle demeure ronde ■.
/\. 19, en note page l'rj. note '/. .1 l'avant-dernière Hune de la noie^ au
lieu de: IV 39, lire . i\. 28.
/\, 52, note finale = paye \'ur,. note 2. Ajouter ce qui suit: A plus forte
raison (lésons nous aider le \oi>in à <e conduire suivant la raison el la
sagesse. Cesl là. nous L'avons ni (VII, 74, el IV 12, en note), le vrai
m'ds stoïcien des mois «aider » ou «rendre service». C'est celui <jui
doit distinguer ici rjspYeuxbv rcpaacrciv de frvvepYijTcxfcv TrpàTTS'.v.]
Bordeaux. — Impr. G. Goinouilhoc, rue Guiraude, i i
Bibliothèques
Université d'Ottawa
Echéance
Libraries
University of Ottawa
Date Due
10 AVK. ]^l
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~^. ) -
1 0 AOUT 199^
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U D' / OF OTTAWA
COLL ROW MODULE SHELF BOX POS C
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