Skip to main content

Full text of "Recherches expérimentales sur la croissance du crane"

See other formats


HX00028509 


THE  SEGUIN  COLLECTION 

OF   BOOKS  RELATING  TO  THE 

NERVOUS  SYSTEM 

THE  BEQUEST  OF 

EDWARD  C.  SEGUIN,  M.D. 

TO  THE  DEPARTMENT  OF  PATHOLOGY  OF  THE 

COLLEGE  OF  PHYSICIANS  AND  SURGEONS, 

NEW  YORK. 

This  book  is  not  to   be  removed 
BOOKZlX-ll  (V  fromthe  Department  of  Pathology. 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2010  with  funding  from 
Columbia  University  Libraries 


http://www.archive.org/details/recherchesexprOOgudd 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 


CROISSANCE  DU  CRANE 


IMPRIMERIE    DE    F..    MARTINET,     RUE     MIGNON, 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 


CROISSANCE  DU  CRANE 


LE   DR   B.    GUDDEN 

DIRECTEUR   DE   L'ASILE  DES  ALIÉNÉS   ET    PROFESSEUR   ORDINAIRE   DE   L'UNIVERSITÉ  A  MUNICH 


TRADUIT    DE    L'ALLEMAND 


LE    D'    AUGUSTE    FOREL 


Avec  onze  planches  photographiques  reproduites  par  la   phototypic. 


PARIS 

V.  ADRIEN  DELAIIAYE  et  Cic,  LIBRAIRES-ÉDITEURS 


PLACE    DE    L'ÉCOLE-DE-MÉDECINE 


1876 


<3r<?3 


PRÉFACE   DU   TRADUCTEUR 


La  présente  traduction  a  été  entreprise  avec  l'assenti- 
ment de  l'auteur  et  a  été  revue  par  lui.  Quelques  modifica- 
tions insignifiantes,  ne  servant  qu'à  rendre  çà  et  là  le  texte 
très-concis  de  l'original  un  peu  plus  explicite,  ont  été 
faites  sous  ses  yeux.  Le  nom  de  l'auteur,  connu  par  les 
progrès  que  ses  expériences  sur  le  cerveau  d'animaux 
nouvellement  nés  ont  fait  faire  à  l'anatomie  de  cet  organe, 
est  à  lui  seul  une  garantie  suffisante  de  la  valeur  de  ce 
travail.  La  foule  d'expériences  originales  et  laborieuse- 
ment préparées  qu'il  renferme,  les  lois  importantes  qui  en 
découlent  et  qui  jettent  un  jour  tout  nouveau  sur  la  ques- 
tion si  controversée  du  mode  de  croissance  des  os  du 
crâne,  le  recommandent  particulièrement  à  l'attention  du 
public  scientifique. 

DrAug.  Forel. 


au 


PREFACE   DE  L'AUTEUR 


Le  travail  que  je  livre  présentement  à  la  publicité  est 
ancien  et  a  été  fait  simultanément  avec  mes  expériences 
sur  le  système  nerveux  central  et  périphérique  (voir  le  com- 
mencement de  ces  dernières  dans  Archiv  fur  Psychiatrie, 
Bel.  II,  H.  3).  J'ai  dû  renoncer  à  l'amener  au  terme  que  je 
m'étais  proposé,  et  j'ai  été  obligé  de  me  poser  des  limites 
pour  ne  pas  devoir  renoncer  entièrement  à  sa  publication. 

Peut-être  eût-il  été  plus  exact  de  mettre  en  titre  «  Crois- 
sance du  crâne  chez  le  lapin  ».  J'aurai  cependant  l'occa- 
sion de  démontrer  ailleurs  que  les  résultats  obtenus  ici 
s'appliquent  en  grande  partie  aussi  au  crâne  humain. 

Toutes  les  photographies  ont  été  faites  sous  ma  direction 
à  Werneck,  en  1869.  Lorsqu'elles  furent  terminées,  il  me 
parut  désirable  de  les  faire  reproduire  au  moyen  de  la 
phototypie.  Toute  personne  s'intéressant  au  sujet  devait 


VI11  PRÉFACE  DE  L'AUTEUR. 

pouvoir,  avec  des  épreuves  absolument  fidèles,  se  former 
un  jugement  entièrement  indépendant,  au  besoin  la  loupe 
à  la  main,  d'après  les  planches  plutôt  que  d'après  le  texte. 
Un  essai  fait  dans  ce  sens  à  Zurich  resta  inachevé,  mais 
une  seconde  tentative  faite  par  l'entremise  de  M.  Gemoser 
ici  à  Munich,  réussit  d'autant  mieux:.  Si  j'avais  été  plus 
au  fait  des  procédés  de  la  phototypie  lors  de  l'élaboration 
des  épreuves  photographiques,  les  planches  auraient  cer- 
tainement encore  mieux  réussi.  Les  photographies  au- 
raient dû  être  de  grandeur  double. 

Je  dois  encore  faire  observer  que  j'ai  montré  et  expliqué 
les  préparations  originales  dans  deux  communications 
faites  à  la  société  des  jeunes  médecins  de  Zurich.  Le 
compte  rendu  de  ces  communications,  fait  par  moi-même, 
mais  défiguré  par  de  nombreuses  fautes  d'impression,  se 
trouve  dans  le  n°  5  du  Correspondenzblall  fur  Sckweizer 
Aerzte,  année  1871. 

Munich,  août  1873. 

Dn    B.  GUDDEN. 


DE  LA 


CROISSANCE  DU  CRANE 


Toutes  les  expériences  qui  vont  suivre  ont  été  faites  sur  des  lapins 
nouveau-nés,  deux  seulement  sur  des  pigeons  fraîchement  sortis  de 
l'œuf.  J'ai  montré  les  avantages  de  celte  méthode  d'expérimentation 
dans  Archiv  fur  Psychiatrie,  Bd.  Il,  H.  3  (I).  Ces  expériences 
se  laissent  diviser  en  deux  séries  :  la  première  se  rapporte  aux  phé- 
nomènes concernant  l'os  seul  ;  la  seconde  s'étend  à  des  phénomènes 


(1)  Le  but  de  cette  mélhoile  est  d'observer  sur  l'animal  devenu  adulte  les  suites  de 
la  lésion  dont  il  a  été  l'objet  aussitôt  après  sa  naissance;  ainsi  p.  ex.  d'observer  quels 
faisceaux  de  substance  blanche  et  quels  centres  de  substance  grise  sont  atrophiés  d'un 
côté  dans  le  cerveau  d'un  lapin  adulte  auquel  on  a  enlevé  un  œil  immédiatement  après 
sa  venue  au  monde  (Voir  v.  G raefe's  Archiv  fur  Ophthalmologie,  XX,  2;  Gudden, 
Kreuzung  der  Fasern  im  chiasma  nervorum  opticorum).  L'auteur,  à  l'endroit  cité 
{Arch.  fur  Psychiatrie),  démontre  en  outre  les  avantages  inappréciables  de  toute  opé- 
ration faite  sur  un  animal  nouveau-né,  savoir  :  1°  la  sensibilité  est  encore  très-peu  dé- 
veloppée; l'animal  souffre  peu  et  se  débat  peu;  2°  le  lapin  nouveau-né  n'a  pas  en- 
core de  poils  ;  3°  le  sang  se  coagule  très-rapidement,  de  sorte  qu'il  y  a  fort  peu 
d'hémorrhagie  ;  4°  ensuite  de  l'activité  vitale  qui  suit  la  naissance,  les  plaies  faites,  si 
profondes  qu'elles  soient,  guérissent  par  première  intention,  avec  une  rapidité  et  une 
propreté  incroyables,  de  sorte  que  chez  l'animal  devenu  adulte  on  peut  voir  encore 
exactement  la  ligne  d'opération  qui  n'a  été  déformée  ni  par  des  suppurations,  ni  par 
des  cicatrices.  (Note  du  traducteur.) 

2 


2  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

qu'on  doit  considérer  comme  résultant  de  la  concurrence  d'influences 
ambiantes.  Cette  division  n'est  pas  tranchée,  mais  facilite  la  vue 
d'ensemble  et  l'exposition. 


PREMIÈRE   PARTIE 


PHÉNOMÈNES  DE  CROISSANCE  CONCERNANT  LES  OS  SEULS. 


C'est  sur  la  voûte  du  crâne  qu'il  est  le  plus  avantageux  d'étu- 
dier ces  phénomènes.  D'un  côté  il  est  très-facile  d'y  expérimenter, 
de  l'autre  les  phénomènes  s'y  présentent  sous  leur  forme  la  plus 
simple. 


CHAPITRE   PREMIER 


ORIGINE   DES   SUTURES   DU   CRANE.    LEUR    FORME    DÉPEND    DE    LA    DIRECTION 
DES    CANAUX   DE  IIAVERS. 


Le  crâne  fœtal  du  lapin,  comme  celui  de  l'homme,  se  compose  à 
sa  hase  de  cartilage  hyalin,  à  sa  voûte  de  cartilage  membraneux  et  à 
ses  côtés  de  formes  intermédiaires  qui  prouvent  l'intime  affinité  des 
deux  formes  de  cartilage.  La  transformation  du  crâne  membraneux 
en  un  crâne  osseux  commence,  on  le  sait,  aux  bosses  frontales  et 
pariétales.  A  cet  endroit  se  forme,  en  même  temps  qu'une  riche 
vascularisation,  un  petit  noyau  irrégulier  d'aiguilles  osseuses.  De  ce 
noyau  partent  ensuite  dans  toutes  les  directions  de  fins  rayons  osseux 
allongés  qui  progressent  toujours  et  qui  lors  de  la  naissance  de 
l'aniinal  ont  si  bien  avancé,  que  les  différentes  aires  d'accroissement 
des  os  du  crâne  se  touchent  presque  les  unes  les  autres;  la  fontanelle 
lïonlalc  seule  est  alors  le  plus  souvent  encore  ouverte.  Les  vaisseaux 
sanguins  rayonnent  dans  la  même  direction  que  les  aiguilles  osseuses, 
el  les  dépassenl  même,  on  peut  le  dire,  dans  leur  croissance.  Les 


RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  5 

sutures  ne  sont  autre  chose  que  les  lignes  où  les  aires  d'accroissement 
des  os  du  crâne  se  rencontrent  les  unes  les  autres;  elles  ne  sont 
aucunement  préformées. 

Partout  où  les  rayons  osseux,  ou  plus  exactement  les  vaisseaux 
sanguins  de  l'os,  se  dirigent  perpendiculairement  à  la  suture,  celle-ci 
devient  dentelée  (sutura  dentata)  ;  partout  où  leur  direction  est  paral- 
lèle à  la  suture,  celle-ci  devient  lisse  (sutura  simplex).  Sur  la  figure  8 
de  la  planche  I  on  voit  dessinés  les  canaux  de  Havers  du  crâne  d'un 
lapin  âgé  de  six  semaines  (une  fois  et  demie  la  grandeur  naturelle  ; 
tous  les  essais  faits  pour  les  photographier  ont  manqué).  Le  commen- 
cement et  la  fin  de  la  suture  frontale,  ainsi  que  le  commencement 
de  la  suture  sagittale  sont  lisses,  le  parcours  des  canaux  de  Havers  leur 
étant  parallèle;  le  milieu  de  la  suture  frontale,  la  suture  coronaire, 
le  milieu  et  la  partie  postérieure  de  la  suture  sagittale  sont  par  contre 
dentelés,  les  canaux  de  Havers  les  atteignant  plus  ou  moins  perpen- 
diculairement. Dans  ce  fait  gît  une  loi  fondamentale  de  la  genèse  des 
différentes  formes  de  sutures  (1).  Si  l'on  examine  encore  les  os  wor- 
miens  (pi.  II,  fig.  I,  2,  3,  10,  11;  pi.  VII,  fig.  1),  on  voit  partout 
leurs  sutures  transversales  dentelées  et  leurs  sutures  longitudinales 
lisses,  ainsi  que  les  modifications  des  dentelures  aux  sutures  obliques. 
Ce  fait  correspond  aussi  au  parcours  des  canaux  de  Havers  ;  il  suffit 
de  comparer  ces  figures  à  la  figure  8,  planche  I. 

(1)  Il  n'est  tout  d'abord  question  que  des  crânes  de  lapin.  Pour  éviter  toute  confu- 
sion, n'oublions  pas    ne  cette  loi  suppose  le  tissu  osseux  formant  des   rayons  allongés. 


CHAPITRE  II 


EXCEPTIONS  APPARENTES  A  CETTE  REGLE. 


On  observe  souvent  des  exeeptions  apparentes  à  la  règle  qui  pré- 
cède. Mais  une  étude  attentive  les  explique  toutes,  de  sorte  qu'elles 
servent  seulement  en  réalité  a  confirmer  l'exactitude  constante  de  la 
loi  énoncée.  En  voici  rénumération  : 

I"  Tandis  que  le  milieu  de  la  suture  sagittale  a  régulièrement  de 
fortes  dentelures,  il  n'est  pas  rare  de  voir  les  dentelures  du  milieu  de 
la  suture  frontale  apparemment  faibles,  quoique  les  canaux  de  Ilavers 
tombent  perpendiculairement  à  cet  endroit.  Le  fait  est  dû  à  une 
modification  des  dentelures.  Celles-ci  sont  en  réalité  fort  bien  déve- 
loppées, mais  elles  s'engrènent  horizontalement  et  non  verticalement, 
ce  qui  fait  qu'elles  paraissent  moins  à  la  surface.  Il  suffit  de  désarti- 
culer les  os  frontaux  pour  être  aussitôt  au  clair  (pi.  VII,  fig.  '.>;  com- 
parer aussi  pi.  III,  lig.  I,à  l'aide  de  la  loupe).  La  cause  de  celte 
modification  est,  il  est  vrai,  encore  inexpliquée.  Lorsqu'on  examine 
au  microscope  le  crâne  de  lapins  âgés  de  plusieurs  jours  traité  par 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  7 

l'alcool  et  rendu  transparent  par  le  baume  de  Darnar,  on  dirait  que 
les  canaux  de  Havers  (leurs  vaisseaux  sanguins),  qui  ailleurs  sont 
disposés  en  séries  perpendiculaires,  se  contournent  à  cet  endroit  en 
formant  des  séries  plutôt  horizontales  ou  obliques. 

2"  Une  seconde  exception  apparente  se  montre  le  plus  souvent  à 
l'extrémité  temporale  de  la  suture  coronaire.  Elle  devrait  être  den- 
telée comme  le  reste  de  la  suture,  et  cependant  elle  est  lisse  à  l'ordi- 
naire. Un  examen  plus  attentif  montre  que  cela  tient  à  la  formation 
d'écaillés.  Le  bord  seul  est  lisse:  on  trouve  les  dentelures,  quoique 
ordinairement  un  peu  plus  faibles,  sur  les  surfaces  de  contact  des 
écailles  (pi.  II,  fig.  4).  Lorsque  la  formation  d'écaillés  fait  défaut,  l'ex- 
trémité temporale  delà  suture  coronaire  se  montre  dentelée  comme  le 
reste  (pi.  II,  fig.  5).  La  figure  6  de  la  planche  II  fait  voir  une  forme 
intermédiaire.  Les  causes  qui  transforment  une  suture  ordinaire  en 
une  suture  écailleuse  sont  encore  à  rechercher;  ces  deux  sortes  de 
sutures  ne  sont  du  reste  pas  rigoureusement  distinctes  l'une  de  l'autre; 
la  figure  6  de  la  planche  II  en  fait  preuve.  J'ai  fait  photographier  aux 
figures  7  et  8  de  la  planche  II  un  os  wormien  chez  lequel  la  forma- 
tion d'écaillés  a  nui  au  développement  des  dentelures  de  la  même 
façon  qu'à  l'extrémité  temporale  de  la  suture  coronaire. 

3°  Chez  les  os  wormiens,  il  faut  en  outre  prendre  garde  à  une 
autre  circonstance.  La  règle  est,  il  est  vrai,  que  leurs  canaux  de 
Havers  suivent  en  somme  la  direction  de  ceux  des  os  principaux  limi- 
trophes (pi.  II,  fig.  1,  2,  3, 10,  11).  Mais  chaque  os  wormien  a  aussi 
son  centre,  son  noyau  osseux  propre,  d'où  partent  ses  rayons.  Des 
diverses  incidences  de  ces  rayons  sur  ceux  des  os  voisins  résultent  di- 
verses petites  exceptions  apparentes  à  la  règle  générale.  Elles  s'expli- 
quent néanmoins  chaque  fois  comme  celles  que  nous  venons  de  voir 
lorsqu'on  examine  attentivement,  aussi  je  me  dispense  d'en  dire  plus 
ici. 

Nous  venons  de  démontrer  que  les  exceptions  qui  semblent  infirmer 
notre  règle  sur  la  formation  des  sutures  ne  sont  qu'apparentes.  Je 


S  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

prie  ceux  qui  malgré  tout  ne  seraient  pas  persuadés  que  la  forme  des 
sutures  dépend  de  la  direction  des  canaux  de  Havers,  d'examiner 
attentivement  les  figures  4  et  7  de  la  planche  III  par  exemple,  puis  en- 
core de  comparer  les  figures  9  et  10  de  la  planche  I  avec  la  figure  8 
de  la  même  planche.  Au  moyen  de  la  ligature  des  carotides  opérée 
quatre  jours  après  la  naissance  (je  reviendrai  plus  tard  sur  cette  im- 
portante expérience),  on  obtient  un  changement  dans  la  direction  des 
vaisseaux  des  os  du  crâne.  Ils  se  dirigent  par  exemple  dans  la  figure  4 
de  la  planche  III  obliquement  de  la  suture  coronaire  droite  à  la  su- 
ture sagittale,  et  dans  la  figure  7  de  la  planche  III  obliquement  de  la 
suture  coronaire  gauche  à  la  suture  sagittale.  A  ce  changement  de 
direction  des  vaisseaux  correspond  exactement  un  changement  dans 
la  direction  des  dentelures  de  la  suture  sagittale  qui  deviennent  obli- 
ques, couchées,  l'angle  d'incidence  des  canaux  de  Havers  (vaisseaux) 
sur  la  suture  étant  devenu  oblique  dans  le  même  sens.  Les  figures  9 
et  10  de  la  planche  I  représentent  les  crânes  des  figures  4  et  7  de  la 
planche  III  (une  fois  et  demie  la  grandeur  naturelle)  avec  le  dessin  du 
parcours  des  canaux  de  Havers.  La  figure  8  de  la  planche  I  représente 
le  parcours  des  canaux  de  Havers  dans  le  crâne  normal,  et  sert  de 
point  de  comparaison. 


CHAPITRE  III 


EXCISION    D  UNE    SUTURE.    SA    REGENERATION. 


On  admet  assez  généralement  que  le  crâne  croit  par  ses  sutures. 
Les  os  croissent,  dit-on,  en  longueur  et  en  largeur  par  leur  bord  su- 
turai; pour  ce  qui  concerne  l'épaisseur  cependant,  la  croissance  se 
l'ait  par  le  pericranium  (exceptionnellement  par  la  dure-mère).  La 
résorption  nécessaire  à  l'adaptation  du  crâne  au  cerveau  qui  non- 
seulement  grossit  mais  encore  change  de. forme,  se  fait  par  la  face 
intérieure  de  l'os,  et  suit  la  croissance  du  crâne  en  épaisseur  pour 
ainsi  dire  en  la  corrigeant  {Virchow, GesanîmelteAbhatullungen,^.  936). 
On  conteste  ordinairement  l'existence  d'une  croissance  interstitielle. 
Et  cependant  ces  théories,  quoique  les  travaux  qui  sont  à  leur  base 
soient  excellents  et  fassent  époque,  ne  concordent  pas  avec  la  réalité 
des  faits. 

Les  crânes  de  deux  lapins  adultes  sont  photographiés  aux  figures  1 
et  2  de  la  planche  I.  Chez  le  premier  on  avait  enlevé  la  suture  sa- 
gittale et  une  partie  de  la  suture  frontale  immédiatement  après  la 
naissance;  chez  le  second,  la  suture  sagittale  seule.  L'opération  est  un 
peu  délicate  et  demande  une  certaine  prudence  si  l'on  veut  éviter  de 


10         RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SLR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

blesser  le  sinus  longitudinal;  la  lésion  de  ce  sinus  produit  une  forte 
hémorrhagie  qui  gvne  l'opérateur  et  peut  épuiser  le  petit  animal.  Il 
s'agit  de  conserver  le  tranchant  du  bistouri  dans  l'os,  à  côté  de  la  su- 
ture, sans  cependant  enlever  plus  d'os  qu'il  n'est  absolument  néces- 
saire pour  être  sûr  d'avoir  enlevé  toute  la  suture.  Si  l'opération  a 
réussi,  et  si  l'on  est  parvenu  sans  enfoncer  le  bistouri  profondément 
à  couper  l'os  entièrement  ou  à  peu  près  des  deux  côtés  avec  son  pé- 
rioste interne,  on  arrive  parfois  en  tirant  doucement  à  détacher  du 
sinus  longitudinal  supérieur,  sans  déchirer  sa  paroi,  la  lanière  osseuse 
maintenant  isolée  qui  renferme  la  suture  (1).  Mais  même  lorsque  le 
sinus  se  déchire  dans  ce  dernier  acte  de  l'opération,  le  malheur  n'est 
pas  grand,  vu  qu'on  peut  recoudre  immédiatement  la  plaie  de  la  peau, 
ce  qui  fait  cesser  très-vite  I'hémorrhagie.  Quelles  sont  maintenant  les 
conséquences  de  l'excision  de  la  suture?  La  figure  9  de  la  planche  XI 
montre  l'un  des  résultats  possibles  (formation  d'un  écartemenl)  dont 
nous  parlerons  plus  tard.  Les  figures  1  et  2  de  la  planche  I  font  par 
contre  voir  l'autre  conséquence  possible  :  les  deux  os  lésés  ont  conti- 
nué à  croître  et  ont  formé  une  nouvelle  suture,  légèrement  irrégulière 
il  est  vrai.  On  ne  remarque  pas  trace  de  rétrécissement  dans  le  dia- 
mètre transversal  du  crâne.  Il  est  donc  possible  d'enlever  complète- 
ment des  sutures;  les  os  respectifs,  je  le  répète,  en  souffrent  à  peine, 
continuent  à  croître  sans  qu'il  arrive  de  perturbation  notable  dans  le 
développement  du  crâne,  et  forment  en  se  rencontrant  une  nouvelle 
suture. 

1 1 1  Cela  parail  invraisemblable  et  c'est  cependant  vrai .  Chez  le  lapin  il  semble  qu'il 
y  a  au  moins  un  commencement  de  différenciation  entre  la  dure-mùre  et  le  périoste  in- 
terne, sans  quoi  le  fait  du  sinus  restant  intact  lors  môme  qu'on  l'a  détacbé  du  périoste 
interne  sérail  incompréhensible.  On  sail  que  la  dure-mère  el  le  périoste  interne  sont 
distincts  dans  le  canal  vertébral.  Or  nue  pareille  séparation  si;  produit  aussi  chez  le 
crâne  de  l'homme  dans  certaines  circonstances;  la  cause  en  esl.il  est  vrai,  encore  olis- 
cure.  Je  -un  en  possession,  par  l'entremise  obligeante  île  M.  Grashey,  directeur  de 
l'asile  de  Deggendorf,  d'une  tête  d'enfanl  nouveau-né  idiot,  chez  laquelle  cette  sépa- 
ration '•  i  forl  remarquable.  .M.  !'•  professeur  de  Bischoffa  aussi  examiné  la  préparation 
ri  confirmé  le  fait. 


CHAPITRE  IV 


FORMATION    DE   SUTURES    ENTIÈREMENT    NOUVELLES 
DANS    LA    CONTINUITÉ    DES    OS. 


J'ai  dit  plus  haut  que  dans  le  crâne,  là  où  deux  aires  d'accroisse- 
ment de  l'os  se  rencontrent,  il  se  l'orme  une  suture.  S'il  se  produit  un 
noyau  osseux  surnuméraire,  il  forme  aussi  son  aire  d'accroissement 
et  partant  ses  sutures.  Sans  cette  explication  du  fait,  la  formation  des 
crânes  en  dessin  de  cartes  géographiques  (Landkartenschœdel),  comme 
les  représente  M.  de  Bruns  dans  son  excellent  ouvrage  de  chirurgie  (1), 
serait  incompréhensible.  Mais  l'explication  une  fois  admise,  l'idée  de 
provoquer  artificiellement  la  formation  de  sutures  entièrement  nou- 
velles se  présentait  tout  naturellement  à  l'esprit  ;  et  ces  nouvelles  su- 
tures ne  devaient  nullement  influencer  l'accroissement  ni  la  forme  du 
crâne. 


(1)  Von  Bruns,  Die  chirurgischeU  Krankheiten  des   Gehirns  und  seiner  Umhiil- 
lungen. 


1-2  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

Si  l'on  fend  chez  un  jeune  lapin  l'un  des  os  de  la  voûte  du  crâne  par 
son  milieu  à  l'aide  d'un  bistouri  ou  d'une  paire  de  ciseaux,  trois  con- 
séquences sont  possibles.  —  a)  Lorsque  les  deux  bords  de  la  fente 
sont  trop  éloignés  l'un  de  l'autre,  il  se  forme  un  écartement  (pi.  I, 
fig.  0;  pi.  VII,  fig.  1,  3  et  4;  pi.  XI,  0g.  1 1).  b)  Lorsque  les  deux  bords 
de  la  fente  sont  trop  serrés  l'un  contre  l'autre,  il  se  forme  une  synos- 
lose  (planche  VIII,  ligure  3,  à  l'os  pariétal  gauche  et  à  l'os  frontal 
droit,  cette  dernière  si  complète  qu'on  ne  voit  plus  même  la  place 
où  fut  latente;  planche  X,  figure  4,  à  l'os  frontal  gauche  ;  planche  XI, 
figure  1 1,  aussi  à  l'os  frontal  gauche),  c)  Lorsque  les  deux  bords  delà 
fente  se  louchent  sans  être  exactement  adaptés  ni  serrés  l'un  contre 
l'autre,  il  se  forme  une  suture  qui  souvent  ne  se  dislingue  en  rien  des 
sutures  normales  (planche  I,  figures  3  et  4,  aux  'deux  os  pariétaux; 
planche I,  figure  5,  à  l'os  pariétal  gauche  où  la  suture  artificielle  tombe 
presque  perpendiculairement  sur  la  suture  sagittale;  planche  I,  li- 
gure G,  à  l'os  frontal,  à  l'extrémité  de  l' écartement  ;  planche  I,  figure  7, 
à  l'os  frontal  gauche,  suture  artificielle  parallèle  à  la  suture  coro- 
naire; planche  VII,  figure  I,  à  l'os  pariétal  gauche,  à  l'extrémité  pos- 
térieure de  l'écartcinenl  ;  planche  X,  figure  4,  aussi  à  l'os  pariétal 
gaui  he,  à  l'extrémité  postérieure  d'un  petit  écartement). 

En  examinant  les  figures,  le  lecteur  aura  déjà  remarqué  que  ces 
sutures  artificiellement  produites,  ou  nouvelles  sutures,  peuvent  se 
combiner  avec  d  ss  écartements  et  des  synostoscs.  Il  n'est  pas  non 
plus  absolument  certain  que  le  degré  plus  ou  moins  fort  d'attouche- 
ment des  bords  de  la  lente  qu'on  a  pratiquée  dans  l'os  soit  l'explica- 
tion complète  de  ces  trois  formations.  Peut-être  y  a-t-il  encore 
quelque  autre  cause  inconnue. 

Les  synostoscs  et  les  écartements  ne  nous  intéressent  pas  ici;  les 
sutures  artificielles  doivent  par  contre  nous  occuper  un  mi snt. 

Les  plus  beaux  exemplaires  que  je  possède  sont  ceux  qui  sont 

•représentés  aux   figures  3  Cl    \  de   la  planche  I.  Malheureusement  les 

photographies  sonl  très-inférieures  aux  originaux  chez  lesquels  les 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRAME.  13 

sutures  surnuméraires  artificielles  ne  se  distinguent  absolument  en 
rien  des  naturelles.  Ce  sont  ces  crânes  qui  m'ont  fait  regretter  le 
plus  vivement  de  n'avoir  pas  mieux  connu  plus  tôt  les  procédés  de  la 
phololypie  ni  les  conditions  nécessaires  à  sa  réussite  complète.  Ils 
ont  été  obtenus  de  la  manière  suivante.  Pour  pouvoir  enlever  l'un 
des  tubercules  quadrijumeaux  antérieurs  (Afchiv  fur  Psychiatrie,  1. 
c,  p.  718),  je  commençai  par  faire  une  section  longitudinale  (sagit- 
tale) de  la  peau.  Puis  je  divisai  sur  toute  sa  longueur  la  suture  lamb- 
doïde  avec  un  bistouri  tenu  obliquement  afin  de  ne  pas  blesser  la 
dure-mère.  Après  quoi  je  fis  entrer  l'une  des  lames  d'une  fine  paire 
de  ciseaux  dans  l'un  des  coins  de  la  suture  divisée,  aussi  loin  que 
possible  de  la  ligne  médiane  du  crâne,  et  après  l'avoir  fait  glisser 
entre  la  dure-mère  et  le  crâne  jusqu'à  la  suture  coronaire,  je  tranchai 
l'os  pariétal  en  deux  sur  toute  sa  longueur.  La  même  opération  une 
fois  faite  de  l'autre  côté,  je  pus  me  servir  de  la  suture  coronaire 
comme  charnière  pour  retrousser  momentanément  la  partie  du 
crâne  circonscrite  par  ces  trois  coupes,  et  opérer  à  mon  aise  sur  le 
cerveau,  ce  qui  n'a  pas  à  nous  occuper  ici.  Les  crânes  ont  dû  être 
en  partie  détruits  pour  pouvoir  sortir  les  cerveaux  sans  les  gâter. 
Aussi  n'ai-je  pu  conserver  la  suture  temporale  que  dans  celui  de  la 
figure  3,  à  droite.  Dans  celui  de  la  figure  4,  la  partie  de  l'os  pariétal 
droit  située  entre  la  suture  artificielle  et  la  suture  temporale  s'est 
perdue  pendant  la  macération.  Si  l'on  avait  pu  conserver  les  crânes, 
entiers,  les  figures  auraient  meilleure  façon.  Les  sutures  artificielles 
des  figures  5,  6  et  7  de  la  planche  I  et  de  la  figure  4  de  la  planche  X 
se  sont  formées  à  la  suite  de  l'extirpation  du  lobe  supérieur  d'un 
hémisphère  cérébral  (Arch.  fur  Psychiatrie,  1.  c,  p.  708).  Une  sec- 
tion longitudinale  de  la  peau  pratiquée  dans  la  ligne  médiane  met  le 
crâne  à  nu.  Cela  fait  on  introduit  par  le  côté  du  crâne,  un  peu  au-des- 
sus du  niveau  du  corps  strié  et  des  couches  optiques,  un  petit  bis- 
touri à  tranchant  convexe  qu'on  enfonce  horizontalement  à  travers 
l'os  et  le  cerveau  jusqu'à  la  scissure  inlerhémisphérique  en  coupant 


Il        RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE. 

d'avant  en  arrière  sur  toute  la  longueur  du  crâne.  La  section  termi- 
née, on  tourne  un  peu  le  bistouri  autour  de  son  axe,  et  l'on  extrait 
avec  la  lame  le  lobe  cérébral  coupé.  La  moitié  du  crâne  qui  avait 
été  soulevée  pendant  l'extraction  du  lobe  cérébral  se  referme  d'elle- 
même  en  retombant,  et  l'on  coud  la  plaie  extérieure  après  l'avoir 
nettoyée.  Dans  cette  opération  on  coupe  à  la  fois  l'os  et  la  dure-mère, 
ce  qui  n'est  pas  le  cas  dans  la  précédente.  L'exemplaire  photogra- 
phié à  la  figure  i  de  la  planche  X  n'a  pas  été  ouvert,  afin  qu'on 
pût  voir,  au  moins  dans  un  cas,  que  le  crâne  conserve  parfaitement 
sa  forme  malgré  la  lésion  cérébrale.  Je  reviendrai  plus  tard  sur  ce  cas 
particulier.  Sur  le  crâne  photographié  à  la  figure  1  de  la  planche  Vif, 
je  me  bornai  à  pratiquer  la  section  de  l'os,  sans  toucher  au  cerveau; 
nous  reviendrons  aussi  plus  loin  sur  son  compte.  La  suture  artifi- 
cielle la  mieux  rendue  est  celle  de  la  figure  7  de  la  planche  I.  Elle 
fait  suite  à  un  écartement,  comme  c'est  souvent  le  cas,  et  se  dirige 
ensuite  parallèlement  à  la  suture  coronaire  à  travers  l'os  frontal 
jusqu'à  la  suture  frontale.  Il  est  donc  démontré  qu'on  peut  produire 
artificiellement  de  nouvelles  sutures  dans  le  crâne;  et,  de  même  que 
les  sutures  naturelles  sont  les  lignes  de  démarcation  et  de  contact 
entre  les  aires  d'accroissement  naturelles,  les  sutures  artificielles  sont 
les  lignes  de  démarcation  et  de  contact  entre  les  aires  d'accroisse- 
ment artificiellement  formées. 

Il  est  plus  difficile  de  démontrer  que  la  production  de  sutures 
artificielles  n'altère  pas  la  configuration  du  crâne;  par  exemple 
qu'une  suture  artificielle  parallèle  à  la  suture  sagittale  ne  provoque 
pas  de  dilatation  du  crâne.  Par  la  manière  dont  on  obtient  les 
sutures,  il  s'y  mêle  des  circonstances  étrangères  très-perturbatrices. 
Les  ligures  ."{  et  't  de  la  planche  I  soûl,  celles  qu'on  peut  le  mieux 
utiliser  à  ce  point  de  vue.  L'inlercalation  naturelle  de  grands  os 
wormiens  démontre  d'une  façon  beaucoup  plus  sûre  et  plus  déci- 
sive que  le  doublement  d'une  suture  est  sans  influence  sur  la  forme 
du  crâne. 


CHAPITRE  V 


LE  DOUBLEMENT  D'UNE  SUTURE  NE  CHANGE  EN  RIEN 
LA  FORME  DU  CRANE. 


Welcker  (1)  a  trouvé,  à  la  suite  des  mesures  qu'il  a  prises,  que  la 
formation  entière  du  crâne  est  puissamment  influencée  par  la  su- 
ture frontale,  suivant  qu'elle  reste  ouverte  tôt  ou  qu'elle  s'oblitère 
tard  (62).  Mais  si  la  suture  a  vraiment  une  importance  telle  que  semble 
le  prouver  Welcker,  on  doit  pouvoir  démontrer  des  résultats  ana- 
logues dans  les  cas  de  doublement  d'une  suture.  Sur  un  certain 
nombre  de  crânes  de  lapins,  j'ai  formé  six  groupes  d'après  leur  lon- 
gueur. Après  divers  essais,  j'ai  trouvé  que  le  plus  simple  et  le  plus 
sûr  pour  mesurer  cette  dernière  était  de  prendre  la  distance  de  la 


(1)  Welcker,  Vniersuchungen  iiber  Wachsthum  und  Bau  des  menschlichen  Schâ- 
dels,  p.  3  et  pi.  I,  ainsi  que  «  Abschnitt  5  ». 

(2)  Cependant  il  ajoute  aussitôt  après  :  «  On  devine  immédiatement  «  qu'il  ne  s'agit 
»  pas  simplement  ici  d'une  suture  qui  demeure  ouverte,  mais  bien  d'une  anomalie 
»  typique  de  la  forme  du  crâne  ». 


16        UECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE   DU   CRANE. 

protubérance  occipitale  externe  au  point  le  plus  proéminent  de  l'os 
intermaxillaire. Chacun  des  six  groupes  se  subdivise  en  trois:  1° crânes 
sans  os  wormiens  (de  beaucoup  les  plus  nombreux);  3°  crânes  avec 
un  grand  os  wormien;  3°  crânes  avec  deux  os  wormiens  relativement 
grands.  Tous  ces  os  wormiens  se  trouvaient  dans  la  région  de  la  fon- 
tanelle frontale,  leur  siège  ordinaire  chez  le  lapin.  J'ai  mesuré  en  outre 
chez  tous  ces  crânes  la  longueur  des  deux  sutures  coronaires  prises 
ensemble,  en  plaçant  les  points  du  compas  de  chaque  côté  au  sommet 
de  l'angle  que  forment  entre  elles  la  suture  coronaire  et  la  suture 
temporale.  Dans  les  cas  où  le  sommet  de  cet  angle  est  arrondi,  ce  qui 
arrive  parfois,  j'ai  mesuré  au  point  de  croisement  des  lignes  de  direc- 
tion moyenne  des  deux  sutures. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 
TABLEAU 


17 


Groupes 


111 


r.riANES 

SANS    OS   WORMIEN. 


Longueur 
les  crânes. 


75 

76 

74 

76 

75 

74 

86,2\ 

86 

85 

84,5/ 


Longueur 

des 

sutures 

coronaires 


CRANES   AYANT 
UN  GRAND   OS    WORMIEN. 


19,5millim 


21,3 


21,6 


23,2\ 

23-2 

23 

22, 3| 

22,3| 

22 

22-2 

21 

24,5> 

23,51 

23,s( 

23,5/ 


22,1 


23,7 


Longueur 

des  crânes, 


72 


Longueur 

des 

sutures 

coronaires 


CRANES    AYANT    DEUX 
GRANDS    OS    WORMIENS. 


Longueur 
des  crânes. 


21,5 


21,6 


24,3 


08 


70,5) 


76    j 
75    }75,3 


Longueur 

des 

sutures 

coronaires. 


23,51 

22,322,5 
21,6] 


18         RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE. 

Il  ressort  du  tableau  précédent  que  même  de  grands  os  wormieiiS) 
ou  ce  qui  revient  au  même  le  doublement  et  même  le  triplement  d'une 
suture,  n'ont  pas  d'influence  appréciable  sur  la  configuration  géné- 
rale du  crâne  (1).  Cependant,  pour  rendre  le  fait  encore  plus  clair, 
j'ai  fait  photographier  aux  figures  9,  10  et  11  de  la  planche  II  les 
crânes  de  trois  lapins  qui,  ayant  été  mis  bas  en  même  temps  par  la 
même  femelle,  s'étaient  développés  très-semblablement.  Les  os  wor- 
miens  avaient  été  découverts  au  moment  où  les  petits  animaux  allaient 
être  opérés.  Je  renonçai  à  l'opération,  recousis  les  sections  de  la  peau, 
marquai  les  lapins  et  les  fis  tuer  plus  tard  en  même  temps.  Les  crânes 
sont,  on  le  voit,  comme  faits  d'un  moule.  Les  mesures  prises  comme 
dans  le  tableau  ci-dessus  sont  : 

Fig.    'J  :  Longueur  du  crùne,  61  inill.  Long,  dos  sutures  coronaires,  27,5  mill. 
Fig.  10  :  Longueur  du  crâne,  60     s     Long,  des  sutures  coronaires,  27        » 
Fig.  1 1  :  Longueur  du  crâne,  61     »     Long,  des  sutures  coronaires,  27,8     » 

Les  différences  sont  si  insignifiantes  qu'on  peut  dire  les  trois  crânes 
éçaux  entre  eux  en  longueur  comme  en  largeur. 


(1)  Ce  qui  n'est  point  en  contradiction  avec  le  fait  que  des  dilatations  du  crâne  pro- 
venant d'autres -causes  favorisent  la  formation  d'os  wormiens. 


CHAPITRE  VI 


ATROPHIES    PARTIELLES    DU    CRANE    PRODUITES 
AU -MOYEN    DE    LA    LIGATURE    DES    CAROTIDES.     RÉTRÉCISSEMENTS 

SANS     SYNOSTOSE.     RÉTRÉCISSEMENTS     AVEC    SYNOSTOSE. 


J'arrive  au  principal  argument  qui  a  servi  de  base  à  la  théorie  fai- 
sant des  sutures  du  crâne  les  matrices  de  l'os,  aux  synostoses  avec 
rétrécissements  et  dilatations  complémentaires.  Rien  n'est  plus  éloi- 
gné de  ma  pensée  que  de  méconnaître  les  grands  résultats  qui  ont  été 
obtenus  sur  ce  terrain.  Ce  que  je  crois  pouvoir  prouver,  c'est  que  les 
synostoses  des  sutures  et  les  rétrécissements  du  crâne,  malgré  leur 
coïncidence  si  fréquente,  ne  sont  pas  en  rapport  causal,  mais  que  tous 
deux  proviennent  d'une  cause  commune  plus  profonde,  savoir  la  des- 
truction d'un  nombre  considérable  d'éléments  constitutifs  de  l'os. 
Aussi  peut-il  se  former  des  rétrécissements  du  crâne  sans  synostose 
des  sutures  et  vice-versâ.  La  destruction  des  éléments  constitutifs  de 
l'os  peut  avoir  lieu  de  différentes  manières;  il  est  possible  de  la  pro- 
duire expérimentalement  d'une  façon  très-instructive  en  pratiquant 
la  ligature  des  deux  carotides  peu  de  jours  après  la  naissance.  Le  plus 


•20  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

tôt  que  l'expérience  réussit  est  le  mieux.  Mais  si  Ton  opère. avant  le 
quatrième  jour,  les  lapins  meurent  par  suite  d'hébétude  trop  consi- 
dérable. Même  lorsqu'ils  ont  dépassé  l'âge  de  quatre  jours  ils  de- 
viennent stupides  et  paresseux  après  l'opération  ;  mais  ils  se  re- 
mettent lorsque  la  circulation  collatérale  s'établit,  et  deviennent  peu 
à  peu  plus  vifs  et  plus  mobiles.  On  fait  un  pli  longitudinal  de  la  peau 
du  cou,  et  Ton  pratique  une  section  suffisamment  grande.  Puis  après 
avoir  enlevé  la  graisse  avec  une  pince  et  une  paire  de  fins  ciseaux 
courbes,  et  avoir  ainsi  isolé  les  deux  carotides,  on  fait  leur  ligature 
avec  un  fil  fin.  Pour  cette  opération  je  me  sers  d'une  aiguille  à  coudre 
ordinaire  que  je  fais  passer  sous  l'artère  de  dedans  en  dehors  par  son 
extrémité  obtuse,  en  laissant  le  nerf  pneumogastrique  de  côté.  Les  li- 
gatures laites,  on  coud  la  plaie  et  on  coupe  tous  les  fils,  y  compris 
ceux  des  ligatures,  ne  leur  laissant  que  5  millimètres  de  longueur. 
Tout  guérit  ensuite,  de  soi,  sans  qu'on  ait  autrement  besoin  de  s'en 
inquiéter.  Il  est  frappant  de  voir  comment  le  petit  animal  qui  se  mou- 
vait encore  d'une  façon  normale  après  la  ligature  de  la  première  caro- 
tide devient  tout  à  coup  tranquille  et  hébété  après  la  ligature  de  la 
seconde  qui  s'était  d'abord  violemment  distendue  sous  l'augmentation 
de  la  pression  du  sang.  —  La  peau  de  la  tête  devient  un  peu  livide  et 
œdémateuse;  de  petites  bandelettes  étroites  deviennent  parfois  né- 
crosées au  bord  des  oreilles;  le  milieu  de  la  tète  devient  chauve, 
et  souvent  aussi  les  côtés  du  visage,  tantôt  plus  à  droite,  tantôt  plus 
à  gauche.  Puis  une  circulation  collatérale  se  forme;  l'œdème  dispa- 
raît, les  poils  repoussent,  et  les  petits  lapins  qui  s'étaient  d'abord 
amaigris  et  ni'  grossissaient  que  lentement  se  portent  bientôt  aussi 
bien  que  ceux  qui  n'onl  pas  été  opérés,  .le  les  fis  ordinairement  tuer 
au  bout  de  six  semaines,  parfois  avant,  parfois  seulement  lorsqu'ils 
eureni  atteint  l'âge  adulte;  La  circulation  collatérale  s'établit  au  moyen 
des  artères  vertébrales.  Le  saui;  descend  par  les  carotides  internes 
dans  les  carotides  externes  pour  remonter  de  là  dans  les  ramifica- 
tions <\<'  ces  dernières  artères.  Une  autre  partie  va  par  l'artère  o'ph- 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  21 

thalmique  dans  l'artère  supraorbitale  dont  les  ramifications  dilatées 
creusent  des  sillons  assez  profonds  dans  l'os  frontal.  Les  figures  12 
et  13  de  la  planche  VI  représentent  l'atlas  et  l'épistrophée  d'un  lapin 
adulte  chez  lequel  la  ligature  des  deux  artères  carotides  communes 
avait  été  pratiquée  5  jours  après  la  naissance;  les  figures  14  et  15 
de  la  même  planche  représentent  les  mêmes  vertèbres  chez  un  lapin 
adulte  normal. 

Les  phénomènes  qui  se  passent  dans  les  os  du  crâne  après  la  liga- 
ture des  carotides  sont  les  suivants.  Les  vaisseaux  les  plus  nombreux, 
les  plus  jeunes  et  les  plus  délicats  se  trouvent  au  bord  des  os,  à  la 
limite  des  aires  d'accroissement.  Leurs  pousses  les  plus  avancées  se 
terminent  probablement  en  cul-de-sac,  ce  que  semblent  démontrer 
l'examen  microscopique  et  la,  grande  difficulté  que  présente  leur 
injection  au  moyen  de  gélatine  carminée  d'après  la  méthode  de 
Thiersch.  Des  recherches  ultérieures  devront  décider  la  chose  défi- 
nitivement. Cette  région  est  par  suite  de  ce  que  nous  venons  de  dire 
la  plus  sensible  aux  conséquences  de  la  ligature  des  carotides  qui 
provoque  dans  tout  son  courant  circulatoire  une  stase  plus  ou  moins 
forte.  Si  celle-ci  est  partout  vaincue  par  l'établissement  de  la  cir- 
culation collatérale,  ce  qui  arrive  dans  environ  un  tiers  des  cas, 
il  ne  demeure  aucun  trouble  durable  dans  la  croissance  de  l'os. 
Par  contre,  si  ce  n'est  pas  le  cas,  et  si  la  stase  devient  quelque  part 
permanente,  ce  qui  a  lieu  à  des  endroits  fort  divers,  mais  principa- 
lement aux  régions  limitrophes,  il  s'ensuit  qu'un  ou  plusieurs  bords 
d'os  sont  définitivement  exclus  du  courant  circulatoire.  Les  consé- 
quences nécessaires  de  ce  fait  sont  la  nécrose  des  éléments  consti- 
tutifs de  cette  région,  la  cessation  de  sa  croissance,  et  par  suite  le 
rétrécissement  du  crâne  dans  la  direction  de  cette  croissance.  On 
peut  aussi  suivre  les  phases  de  la  nécrose  au  microscope  en  tuant  les 
opérés  nouveau-nés  à  des  époques  consécutives  régulières.  Les  loca- 
lités les  plus  favorables  à  cette  étude  sont  celles  situées  dans  l'inté- 
rieur de  l'os  où  parfois,  comme  nous  l'avons  déjà  laissé  entrevoir, 


22  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

il  demeure  une  stase  permanente  en  un  endroit  circonscrit.  Les 
trabécules  et  les  corpuscules  osseux  se  détruisent  par  une  sorte  de 
macération.  Ainsi  se  sont  formées  les  petites  lacunes  des  crânes 
photographiés  à  la  planche  III,  ligure  1  et  à  la  planche  VI,  figure  1; 
cependant  chez  celui  de  la  planche  VI,  figure  1,  une  autre  cause  est 
peut-être  en  jeu,  savoir  la  pression  du  cerveau  ;  le  bord  un  peu  relevé 
des  lacunes  parle  pour  cette  dernière  opinion. 

Le  cartilage  suturai  lui-même  est  plus  pauvre  en  vaisseaux  et  plus 
résistant  que  le  bord  de  l'os.  S'il  ne  se  détruit  pas,  dans  le  domaine 
de  la  zone  nécrosée  de  l'os,  il  conserve  plus  ou  moins  la  forme  qu'il 
avait  lorsque  la  croissance  de  l'os  qu'il  borde  fut  arrêtée.  Nous  obte- 
nons alors  un  rétrécissement  sans  synostose.  Si  par  contre  le  carti- 
lage est  aussi  détruit,  ce  qui  arrive  quand  la  thrombose  atteint  un 
degré  plus  considérable,  on  obtient  un  rétrécissement  avec  synos- 
tose. Ainsi  s'explique  pourquoi  ce  genre  de  synostoses  coïncide  dans 
la  règle  avec  les  rétrécissements  les  plus  considérables.  Les  rétré- 
cissements sans  synostose,  avec  conservation  de  la  suture  sous  sa 
forme  fœtale,  sont  les  plus  instructifs  pour  nous. 

Les  figures  I,  2,  3,  4,  5,  0,  7,  8,  9,  de  la  planche  III,  et  les 
figures  I,  2,  3,  \,  5,  li  de  la  planche  IV  représentent  cinq  de  ces 
crânes  avec  rétrécissements  sans  synostose,  chacun  dans  trois  posi- 
tions facilitant  leur  étude.  De  très-petites  synostoses  en  forme  de 
ponts  étroits  n'onl  pas  été  prises  en  considération.  Des  passages  de 
la  forme  fœtale  à  la  synostose  de  la  suture  sont  fréquents.  L'arrêt  de 
.Tui-s'iin v  se  trouve  dans  la  figure  I  ("2  et  3)  de  la  planche  III  le 
long  de  la  suture  temporale  gauche,  dans  la  figure  i  (5  et  6)  de  la 
planche  III,  le  long  de  la  suture  coronaire  droite,  dans  la  figure  7 
(8  el  9)  de  la  planche  III  le  long  de  la  suture  coronaire  gauche,  dans 
la  (iguiv  |  (2  el  3)  de  la  planche  IV  le  long  de  la  suture  coronaire 
gauche  et  de  la  suture  temporale  gauche,  dans  la  figure  4  (5  et  ('») 
de  la  planche  IV  le  long  de  la  suture  coronaire  droite  et  de  la 
suture  temporale  gauche. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  23 

Les  photographies  représentant  des  rétrécissements  avec  synostose 
sont  les  suivantes  :  planche  VI  figure  7  (synostose  du  commence- 
ment de  la  suture  sagittale);  planche  IV  figure  9,  et  planche  V  figure  2 
et  4,  le  même  crâne  dans  diverses  positions  (synostose  de  la  moitié 
postérieure  de  la  suture  sagittale),  et  pour  comparer  les  figures  8  de 
la  planche  IV,  1  et  3  de  la  planche  V,  représentant  un  crâne  normal 
dans  les  mêmes  positions;  planche  V  figure  9  (synostose  de  la  suture 
sagittale  presque  entière;  planche  V  figure  6  (et  8)  (synostose  de  la 
suture  frontale),  avec  photographies  comparatives  du  crâne  normal 
dans  les  mêmes  positions  aux  figures  5  et  7  de  la  même  planche; 
planche  V  figure  II  (et  10)  (synostose  de  la  suture  coronaire  droite); 
planche  IV  figure  1  (2  et  3)  (synostose  de  la  suture  coronaire  gauche 
chez  un  lapin  tué  18  jours  après  l'opération);  planche  IV  figures  4 
et  5  (synostose  de  la  suture  située  entre  l'écaillé  et  la  portion  articu- 
laire de  l'os  occipital),  avec  photographies  comparatives  du  crâne 
normal  dans  les  mêmes  positions  aux  figures  6  et  7  de  la  même 
planche  (1).  Il  est  regrettable  que  la  plupart  des  figures  de  la 
planche  VI  qui  ont  été  empruntées  à  des  objets  très-fins  et  délicats 
laissent  à  désirer  sur  divers  points.  —  Si,  comme  il  a  été  dit  à  la 
préface,  les  premières  épreuves  photographiques  avaient  été  prises  en 
grandeur  double,  diverses  lignes  très-fines  qui  se  sont  perdues  se 
seraient  conservées.  Cependant  un  inconvénient  qui  parait  être  insé- 
parable de  la  phototypie,  c'est  que  les  lignes  trop  fortes  s'étalent  en 
largeur  par  l'impression  d'une  façon  très-fâcheuse. 

(1)  J'ai  fait  photographier  aux  figures  12  et  13  de  la  planche  V,  une  synostose  re- 
rquable  de  la  suture  coronaire  gauche  trouvée  par  hasard  chez  un  crâne  de  taupe. 


mai 


CHAPITRE  VII 


DANS    LA    RÉGION    ATROPHIEE    DU    CRANE 

LES    SUTURES   NON    OBLITÉRÉES    DEMEURENT   A    L'ÉTAT    FŒTAL 

CONDUITE    DES    SUTURES  VOISINES. 


Avant  de  donner  les  mesures  des  rétrécissements  et  d'entrer  dans 
de  plus  amples  détails  à  leur  sujet,  nous  avons  à  parler  de  deux  autres 
points  importants,  pour  autant  du  moins  qu'ils  nous  touchent  ici.  Ces 
points  viennent  d'être  nommés  dans  le  titre  du  chapitre. 

I"  Quoique  chez  le  lapin  nouveau-né  les  divers  os  du  crâne  se 
soient  à  peu  près  atteints  les  uns  les  autres,  excepté  dans  la  région  de 
la  fontanelle  frontale,  ils  ne  sont  pas  encore  en  contact  assez  intime 
pour  que  leurs  dentelures,  là  on  il  s'en  forme,  s'engrènent  les  unes 
dans  les  autres.  La  suture  fœtale  parait  clone  aux  endroits  en  question 
plus  lisse  et  moins  dentelée  que  la  suture  de  l'adulte.  Lorsque  l'ac- 
croissement de  l'os  esl  troublé  le  long  d'une  de  ces  sutures  fœtales, 
les  dentelures  ne  peuvent  pas  se  développer  plus,  ou  ne  peuvent  plus 
se  développer  que  d'une  façon  limitée,  aussi  la  suture  rcsle-t-clle 
plus  ou  moins  lisse  Des  sutures  moins  dentelées  qu'à  l'état  norma- 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.        25 

sont  donc  dans  certaines  circonstances  l'expression  Irès-marquée 
d'un  affaiblissement  de  l'accroissement.  Il  serait  néanmoins  préma- 
turé d'en  conclure  que  de  pareilles  sutures  sont  toujours  dues  à  une 
atrophie  des  os  limitrophes,  ou  vice-versâ  qu'une  suture  plus  dente- 
lée qu'à  l'état  normal  est  toujours  l'expression  d'un  accroissement 
exagéré  (1).  J'ai  fait  photographier  à  la  figure  14  de  la  planche  I  le 
crâne  d'un  lapin  adulte  microcéphale;  la  suture  sagittale,  la  suture 
coronaire,  et  les  sutures  temporales  y  sont  très-richement  dentelées. 
La  figure  3  de  la  planche  VIII  représente  la  voûte  crânienne  d'un 
lapin  auquel  les  deux  grands  hémisphères  cérébraux  avaient  été  enle- 
vés immédiatement  après  la  naissance;  la  dentelure  de  ses  sutures 
n'est  nullement  amoindrie.  Comparée  à  une  autre  normale  du  même 
âge  (fig.  4,  pi.  VIII),  cette  voûte  crânienne  se  trouve  pourtant  être 
beaucoup  plus  plate  et  raccourcie  dans  toutes  ses  dimensions  (com- 
parer avec  les  figures  5  et  6  qui  représentent  les  deux  crânes 
des  figures  3  et  4  sous  deux  vues  de  profil  différentes).  Le  crâne 
le  plus  instructif  à  cet  égard  est  représenté  à  la  figure  2  de  la 
planche  VII.  A  un  lapin,  peu  de  jours  après  sa  naissance,  j'avais 
extirpé  de  l'os  pariétal  gauche  une  bandelette  large  de  deux  milli- 
mètres, parallèlement  à  la  suture  sagittale  et  à  environ  deux  milli- 
mètres de  distance  d'elle.  La  conséquence  fut  la  formation  d'un 
écartement,  ensuite  de  quoi  l'os  pariétal  droit  fut  soumis  à  un  retard 
de  développement,  fait  que  nous  traiterons  spécialement  plus  tard. 

(I)  Welcker  (Untcrsuchungen  iiber  Wachsthum  und  Bau  des  menschlichen  Schd- 
dcls,  p.  2)  dit  :  i  Je  ne  trouve  à  ce  sujet  dans  les  ouvrages  des  auteurs  qu'une  obser- 
vation de  Stahl  (Zeitschrift  fur  Psychiatrie,  1851,  p.  547),  d'après  lequel  les  sutures 
linéaires  et  celles  à  fines  dentelures  accompagnent  les  dépressions  et  les  rétrécisse- 
ments du  crâne,  les  sutures  fortement  dentelées  par  contre  ses  voussures  et  ses  dilata- 
tions. Stahl  fait  remarquer  que  le  milieu  de  la  suture  sagittale  et  le  milieu  de  la  su- 
ture coronaire  se  distinguent  par  des  dentelures  très-grandes,  très-ramifiées,  et  que 
précisément  en  ces  endroits  le  crâne  est  souvent  plus  fortement  voûté  qu'ailleurs.  Ces 
observations  sont  parfaitement  exactes,  mais  on  se  tromperait  si  l'on  admettait  que  la 
forte  dentelure  des  sutures  ait  pour  conséquence  une  augmentation  de  la  croissance  du 
crâne,  s 


26  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

L'extrémité  antérieure  (coronaire)  de  la  portion  conservée  de  l'os 
pariétal  gauche  adjacente  à  la  suture  sagittale  fut  tirée  et  déviée 
mécaniquement  (par  l'accroissement  en  arrière  de  l'os  frontal 
gauche),  si  bien  que  ses  dentelures  à  la  suture  coronaire,  déjà  pré- 
formées,  s'écartèrent  les  unes  des  autres.  Au  contraire  les  dentelures 
de  l'os  pariétal  droit  préformées  aussi,  furent  pressées  les  unes  contre 
les  autres  par  suite  du  retard  survenu  dans  l'accroissement  trans- 
versal de  cet  os,  ce  qui  donne  ici  l'apparence  d'une  dentelure  plus 
riche  qu'à  l'état  normal. 

2°  Dès  que  la  croissance  cesse  le  long  d'une  suture  à  la  suite  de 
la  nécrose  des  éléments  constitutifs  du  bord  de  l'os,  le  liquide  nutri- 
tif, le  sang,  se  détourne  de  la  zone  nécrosée  comme  d'une  barrière 
pour  couler  vers  les  régions  voisines  dont  les  éléments  constitutifs 
sont  intacts.  Ainsi  par  exemple  lorsque  la  nécrose  a  lieu  le  long  de 
la  suture  coronaire,  le  sang  se  détourne  pour  couler  vers  les  sutures 
sagittale,  frontale  et  temporale.  La  régularité  des  courbes  que  for- 
ment les  vaisseaux  sanguins  en  se  détournant  est  très-remarquable; 
elle  donne  une  preuve  intéressante  (nous  en  verrons  encore  diverses 
plus  bas)  de  la  faculté  qu'ont  les  os  de  s'accommoder  à  des  influences 
mécaniques  du  dehors.  J'ai  déjà  fait  remarquer  au  chapitre  premier 
que  la  direction  des  vaisseaux  sanguins  de  l'os  (dans  les  canaux  de 
Havers)  sur  la  suture  coronaire  est  en  somme  perpendiculaire.  Ils 
sont  reliés  entre  eux  par  des  anastomoses  qui  forment  en  général  avec 
eux  un  angle  plus  ou  moins  droit.  C'est  par  ces  anastomoses  que  le 
sang  se  détourne  et  qu'il  se  forme  une  voie  (les  courbes  sus-men- 
tionnées)  dans  laquelle  il  coule  avec  le  moins  de  résistance  possible, 
en  aplanissant  par  sa  pression  toutes  les  protubérances  et  tous  les 
angles  d).  Qu'on  veuille  jeter  un  coup  d'œil  sur  les  ligures  8,  9  et  10 
de  la  planche  I  qui  ont  été  dessinées  avec  beaucoup  de  soin.  Or  là  où 
il  y  a  augmentation  de  l'afflux  du  sang,  il  y  a  aussi  augmentation  de 

(i)  C'est  une  observation  qui  me  charme  chaque  foi?  que  je  la  refais. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  27 

croissance;  donc  dans  l'exemple  que  nous  avons  pris,  il  y  a  augmen- 
tation de  croissance  au  bord  des  os  le  long  des  sutures  mentionnées, 
et  par  suite  allongement  de  la  suture  atrophiée,  de  la  suture  coro- 
naire; je  reviendrai  bientôt  sur  ce  point.  Lucà  dit  par  contre  en  par- 
lant de  l'homme  que  lorsqu'une  synostose  dure  depuis  longtemps,  la 
suture  oblitérée  est  en  même  temps  aussi  raccourcie  (Schadel  abnor- 
mer  Formen,  p.  11). 


CHAPITRE  VIII 

(Continuation  du  chapitre  VI.) 
RÉTRÉCISSEMENTS   SANS   SYKOSTOSE.    RÉTRÉCISSEMENTS  AVEC   SYNOSTOSE. 


Élimination  faite  des  crânes  dont  la  croissance  n'a  pas  été  troublée 
d'une  façon  durable  par  la  ligature  des  carotides,  ainsi  que  de  ceux 
qui  ont  servi  à  l'étude  microscopique  de  la  nécrose  dans  ses  phases 
successives  et  qui  sont  trop  petits,  il  m'en  reste  27  qui  h  la  suite  de 
la  ligature  des  carotides  ont  subi  des  atrophies  partielles,  des  rétré- 
cissements avec  ou  sans  synostose  des  sutures.  Les  régions  limi- 
trophes de  diverses  sutures  se  trouvent  atteintes  de  nécrose;  le  plus 
souvent  celles  des  sutures  coronaire  et  temporale,  moins  souvent 
celles  des  sutures  sagittale  et  frontale,  le  plus  rarement  celles  des 
autres  sutures.  Ordinairement  les  régions  limitrophes  d'une  suture 
seulement  sont  atrophiées;  cependant  il  arrive  aussi  que  celles  de 
deux  sutures  aient  souffert  dans  le  même  crâne.  Là  où  l'atrophie  n'a- 
mène pas  de  synostose,  les  sutures  demeurent  plus  ou  moins  à  l'état 
fœtal;  plus  le  rétrécissement  est  faible,  plus  leur  forme  se  rapproche 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.        29 

de  la  forme  normale.  Les  plus  forts  rétrécissements  se  produisent 
lorsque  la  suture  s'oblitère;  plus  la  synostose  a  d'étendue,  plus  le 
rétrécissement  est  grand.  Si  nous  assimilons  pour  un  moment  les 
sutures  à  l'état  fœtal  aux  sutures  oblitérées,  ce  qui  peut  se  faire, 
puisque  elles  ont  la  même  origine,  nous  trouvons  partout  la  confir- 
mation du  fond  proprement  dit  de  l'aphorisme  de  Virchow  (Gesam- 
melte  Abhandhmgen,  p.  936),  savoir  que  lors  de  la  sijnostose  d'une 
salure  le  développement  du  crâne  reste  toujours  en  retard  dans  la 
direction  perpendiculaire  à  la  suture  oblitérée.  Seulement  il  ne  faut 
jamais  oublier  ici  qu'entre  ces  deux  faits  il  n'y  a  aucun  rapport  cau- 
sal, mais  que  synostose  (ou  état  fœtal)  d'une  suture  et  rétrécissement 
correspondant  du  crâne  sont  deux  conséquences  d'un  trouble  de  la 
nutrition  provenant  d'une  autre  cause  plus  profonde.  Il  va  de  soi  que 
l'époque  à  laquelle  cette  cause  a  agi  est  un  facteur  du  degré  de  la 
difformité;  plus  elle  s'est  fait  sentir  tôt,  plus  son  effet  est  considé- 
rable. Mon  collègue  M.  de  Hecker  a  bien  voulu  me  permettre  d'exa- 
miner un  crâne  d'enfant  nouveau-né  lui  appartenant  et  chez  lequel 
une  synostose  considérable  de  la  suture  sagittale  se  joint  à  un  émi- 
nent  rétrécissement  du  diamètre  transversal.  C'est  le  plus  beau  crâne 
de  ce  genre  que  j'aie  vu  chez  l'homme;  il  sera  décrit  ailleurs  en 
détail. 

Virchow  (1)  rend  déjà  attentif  au  fait  que  tout  rétrécissement  pro- 
duit une  série  de  rétrécissements  secondaires  qui  ne  sont  nullement 
causés  par  l'état  des  sutures.  Tout  rétrécissement  du  crâne  en  un 
lieu  détermine  en  outre  une  série  de  phénomènes  de  compensation 
qui  se  produisent  ordinairement  d'abord  sur  les  confins  des  sutures 
plus  ou  moins  perpendiculaires  à  la  suture  oblitérée  (ou  à  l'état  fœtal), 
et  agissent  par  conséquent  parallèlement  à  cette  dernière.  Mais  ces 
phénomènes  de  compensation  s'étendent  peu  à  peu  à  toute  la  partie 
du  crâne  non  comprise  dans  la  sténose.  Nous  avons  vu  que  le  sang 

(1)  Virchow  s  Untersuchungen  ilber  die  Entwicklung  des  Schâdelgrundes,  p.  39. 


30  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

se  détourne  des  bords  d'os  nécrosés  comme  d'une  barrière,  pour  se 
diriger  sur  les  autres  bords  les  plus  rapprochés  des  mômes  os;  or  ces 
bords  les  plus  rapprochés  sont  ceux  des  sutures  qui  tombent  perpen- 
diculairement sur  la  suture  oblitérée  (ou  à  l'état  fœtal).  La  consé- 
quence de  ce  fait  est  que  la  suture  oblitérée  (ou  à  l'état  fœtal)  s'al- 
longe, tandis  que  les  sutures  parallèles  à  la  ligne  de  rétrécissement 
et  bordant  l'os  qui  se  rétrécit  se  raccourcissent.  Quand  ces  dernières 
sutures  sont  au  milieu  du  crâne  et  qu'il  n'y  a  rétrécissement  que 
d'un  côté  (p.  ex.  sutures  frontale  et  sagittale  dans  les  cas  de  synostose 
ou  état  fœtal  d'une  des  sutures  coronaires,  ainsi  pi.  III,  fig.  4  et  7), 
elles  forment  un  angle  plus  ou  moins  irrégulier,  très-obtus,  dont  l'ou- 
verture regarde  le  côté  atrophié  du  crâne. 


1.  Rétrécissements  sans  synostose. 


Ils  sont  pour  nous  d'un  grand  intérêt. 

Aux  figures  1,  2  et  3  de  la  planche  III  j'ai  fait  photographier  le 
crâne  d'un  lapin  âgé  de  six  semaines  (1)  chez  lequel  les  bords  d'os 
situés  le  long  de  la  suture  lemporo-pariétale  gauche  ont  été  atteints 
de  nécrose.  La  suture  gauche  est  lisse  et  relativement  rcctilignc,  la 
suture  droite  plus  dentelée  et  plus  courbe.  La  différence  de  longueur 
est  cependant  beaucoup  moins  frappante  qu'elle  ne  l'est  dans  les 
mêmes  circonstances  chez  les  sutures  coronaires.  Le  phénomène  est 
plus  caché  et  le  développement  exagéré  des  éléments  constitutifs  de 
l'os  provoqué  par  l'augmentation  de  l'afflux  du  sang  ne  se  montre 

(I)  L'âge  de  cinq  à  six  semaines  est  en  général  celui  auquel  il  est  le  plus  avantageux 
de  tuer  les  lapins  auxquels  on  a  lié  les  carotides.  Si  l'on  attend  plus  longtemps,  la  net* 
t  té  du  parcours  primitif  des  canaux  de  Havers  se  perd  toujours  plus.  Les  cinq  pre- 
miers crânes  qui  sont  photographiés  aux  planches  III  et  IV  sont  tous  de  cet  âge. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  31 

nettement  qu'un  peu  plus  bas,  dans  l'orbite,  par  l'avancement  de  l'os 
temporal,  soit  de  la  suture  située  entre  l'os  temporal  et  la  partie  pos- 
térieure de  la  petite  aile  de  l'os  sphénoïde  antérieur  (Kraiise).  A  droite 
la  surface  d'attachement  de  l'apophyse  zygomatique  de  l'os  tempo- 
ral (mesurée  (1)  à  partir  de  son  milieu)  n'est  éloignée  de  cette  suture 
que  de  3,7  millimètres,  à  gauche  de  5,5.  Par  contre  la  suture  coro- 
naire gauche  n'a  que  9,5  (2)  millimètres  de  long,  tandis  que  la  droite 
a  10,7  millimètres  de  long;  et  la  distance  de  la  racine  supérieure  de 
l'apophyse  zygomatique  à  la  suture  temporo-pariétale  (perpendiculai- 
rement à  cette  dernière)  est  à  gauche  de  4,  à  droite  de  6  millimètres. 
L'apophyse  zygomatique  gauche  est  de  2  mill.  plus  haut  et  de  3  mill. 
plus  en  arrière  que  la  droite.  La  longueur  totale  de  l'arcade  zygoma- 
tique est  de  23,5  mill.  à  gauche  et  de  22  mill.  à  droite.  La  partie 
postérieure  de  la  petite  aile  gauche  de  l'os  sphénoïde  antérieur  inter- 
calée pour  ainsi  dire  dans  l'aréal  du  rétrécissement  formé  par  atro- 
phie, est  raccourcie.  Sa  hauteur,  mesurée  dans  l'orbite,  est  de  3,7 
mill.,  tandis  que  la  partie  correspondante  à  droite  a  4,5  mill.  de 
haut.  Nous  parlerons  plus  loin,  à  propos  des  figures  4  de  la  plan- 
che IV  et  16  de  la  planche  VI,  des  proportions  du  maxillaire  inférieur 
dont  le  condyle  gauche  a  dû  s'allonger  notablement  et  s'étendre  en 
haut  et  en  arrière. 

Les  figures  4,  5  et  6  de  la  planche  III  représentent  un  crâne  avec 
arrêt  de  croissance  (atrophie  des  bords)  le  long  de  la  suture  coronaire 
droite;  les  figures  7,  8  et  9  de  la  même  planche  en  représentent  un 
autre  avec  arrêt  de  croissance  le  long  de  la  suture  coronaire  gauche  : 

Figures  4,  5  et  6.  Longueur  de  la  suture  coronaire  droite,  12  mil- 
limètres; de  la  suture  coronaire  gauche,  11  millimètres;  de  la  suture 


(1)  Toutes  les  mesures  ont  été  faites,  cela  va  sans  dire,  sur  les  crânes  originaux. 
Toutes  indiquent  la  distance  en  ligne  droite.  La  roulette  à  échelle  de  Huschke,  repro- 
duite plus  tard  par  Schlagintweit,  serait  il  est  vrai  préférable  dans  certains  cas. 

(2)  Le  raccourcissement  atteint  surtout  la  portion  temporale  de  la  suture  coronaire, 
c'est-à-dire  l'apophyse  temporale  de  l'os  pariétal. 


3-2  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

temporale  droite,  13,  5  millimètres;  de  la  suture  temporale  gauche, 
1  4,  5  millimètres.  Distance  de  l'échancrure  postérieure  de  l'arcade 
orbitaire  à  l'angle  latéral  de  l'os  interpariétal,  adroite,  20  millimètres, 
à  gauche  23  millimètres. 

Figures  7,  8  et  9.  Longueur  de  la  suture  coronaire  droite,  10,  7 
millimètres;  de  la  suture  coronaire  gauche,  12  millimètres;  de  la  su- 
ture temporale  droite,  14,  5  millimètres;  de  la  suture  temporale 
gauche,  12,  5  millimètres.  Distance  de  l'échancrure  postérieure  de 
l'arcade  orbitaire  à  l'angle  latéral  de  l'os  interpariétal,  à  droite  (1)  22,  5 
millimètres,  à  gauche  18  millimètres. 

Dans  chacun  des  deux  crânes  ci-dessus,  la  suture  coronaire  abords 
atrophiés  est  restée  à  l'état  fœtal;  elle  s'est  allongée,  tandis  que 
la  suture  temporale  correspondante  s'est  raccourcie.  Cette  dernière 
est  dans  chacun  des  crânes  plus  dentelée  à  son  extrémité  antérieure 
que  celle  de  l'autre  côté.  L'accroissement  exagéré  vers  les  parties  plus 
fortement  dentelées  se  trahit  distinctement  par  la  dilatation  des  apo- 
physes temporales  des  os  pariétaux.  L'augmentation  de  l'afflux  du 
sang  et  la  modification  de  l'angle  d'incidence  des  vaisseaux  sanguins 
qui  en  résulte  se  manifestent  clairement  par  le  mode  de  dentelure 
de  la  suture  temporale,  par  le  renforcement  des  dentelures  de  l'ex- 
trémité postérieure  de  la  suture  frontale,  ainsi  que  par  la  direction 
anormale  des  dentelures  de  la  suture  sagittale.  Tout  concorde  re- 
marquablement (2).  Je  crois  inutile  de  donner  ici  d'autres  mesu- 
râmes relatifs  à  ces  crânes.  Je  fais  cependant  encore  remarquer  que 
les  rétrécissements,  de  même  que  les  dilatations  compensatoires, 
forment  des  séries  entières  avec  diminution  et  augmentation  suc- 
cessive. 


(1)  Sur  le  côté  pariétal  de  cet  angle  se  trouve  du  reste  une  petite  synostose. 

(2;  Le  crâne  do  la  planche  III  ligure  t  laisse  aussi  apercevoir  de  légers  indices  d'un 
changement  correspondant  dans  la  direction  des  dentelures  de  la  suture  coronaire 
gauche;  mais  ers  Qnes  différences  se  sont  perdues  connue  beaucoup  d'autres  dans  l'é- 
preuve photographique  sur  papier. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  33 

Les  figures  1,  2  et  3  de  la  planche  IV  représentent  aussi  une  suture 
coronaire  (la  gauche)  relativement  à  l'état  fœtal,  et  par  suite  un  rac- 
courcissement de  la  moitié  gauche  du  crâne.  La  distance  de  l'échan- 
crure  postérieure  de  l'arcade  orbitaire  à  l'angle  latéral  de  l'os  inter- 
pariétal est  à  gauche  de  21  millimètres,  à  droite  de  23,  5  millimètres. 
Or  malgré  cela  les  deux  sutures  coronaires  sont  d'égale  longueur, 
toutes  deux  de  11,  5  millimètres.  La  comparaison  des  deux  sutures 
temporales  donne  aussitôt  la  clé  de' ce  résultat  qui  semble  d'abord  ne 
pas  concorder.  La  suture  temporale  gauche  est  aussi  à  l'état  fœtal. 

11  s'est  donc  aussi  produit  le  long  des  bords  de  la  suture  temporale  un 
trouble  de  la  nutrition  qui  a  empêché  l'allongement  de  la  suture  co- 
ronaire, la  raccourcissant  à  son  extrémité  temporale  d'une  quantité 
égale  à  celle  dont  elle  s'allongeait  à  son  autre  extrémité,  vers  les  su- 
tures sagittale  et  frontale,  par  une  croissance  exagérée.  La  suture  tem 
porale  gauche  a  13  millimètres,  la  droite  14,  7  millimètres  de  lon- 
gueur. 

Un  autre  cas  instructif  est  représenté  aux  figures  4,  5  et  6  de  la 
planche  IV.-  Ici  l'extrémité  temporale  seule  de  la  suture  coronaire 
droite  est  à  l'état  fœtal.  Malgré  la  faiblesse  relative  de  cette  anomalie, 
la  différence  de  longueur  entre  les  deux  sutures  coronaires  est  consi- 
dérable :  la  droite  a  12  millimètres  de  longueur,  la  gauche  10,  5  mil- 
limètres. Le  fait  trouve  ici  comme  dans  le  cas  précédent  son  expli- 
cation fort  simple  dans  l'état  des  sutures  temporales.  C'est  ici  la 
suture  temporale  gauche  (celle  du  côté  opposé  à  la  suture  coronaire 
à  l'état  fœtal)  qui  est  plus  lisse  et  plus  droite.  D'un  côté  la  suture  co- 
ronaire droite  s'allonge  par  suite  de  la  croissance  exagérée  qui  a  lieu 
le  long  de  la  suture  temporale  droite,  richement  dentelée;  de  l'autre 
côté  la  suture  coronaire  gauche  se  raccourcit  par  suite  de  la  diminu- 
tion de  croissance  qui  a  lieu  le  long  de  la  suture  temporale  gauche. 
L'effet  est  donc  double.  Longueur  de   la  suture   temporale  droite, 

12  millimètres,  de  la  gauche   13,  5  millimètres.  Distance  de  l'é- 
chancrure  postérieure  de  l'arcade  orbitaire  à  l'angle  latéral  de  l'os 


3i  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

inlerpariétal,  à  droite  20,  5  millimètres,  à  gauche  22  millimètres. 
Le  crâne  dont  nous  venons  de  parler  est  encore  intéressant  à 
d'autres  égards.  L'apophyse  zygomatique  gauche  est  située  plus  haut 
et  plus  en  arrière  qu'elle  ne  devrait  l'être,  la  droite  au  contraire  plus 
bas  et  plus  en  avant.  La  distance  de  la  racine  supérieure  de  l'apo- 
physe zygomatique  à  la  suture  temporale  est  à  droite  de  5,  5,  à  gauche 
de  3,  8  millimètres;  la  dislance  du  bord  inférieur  de  la  cavité  glé- 
noïde  au  plan  horizontal  sur  lequel  repose  le  crâne  (sans  le  maxillaire 
inférieur)  est  à  droite  de  II,  5,  à  gauche  de  13,  5  millimètres.  L'os 
zygomatique  droit  a  20,  5  millimètres  de  longueur,  le  gauche  22,  5. 
L'orbite  droite  a  un  diamètre  vertical  de  15,  3  millimètres  et  un  dia- 
mètre horizontal  de  15,  5;  l'orbite  gauche  a  un  diamètre  vertical  de 
14,  2  millimètres,  et  un  diamètre  horizontal  de  19,  5.  La  partie  posté- 
rieure de  la  petite  aile  droite  de  l'os  sphénoïde  antérieur  a  un  diamètre 
vertical  maximum  de  5,  2  millimètres;  la  partie  correspondante 
gauche,  de  4  millimètres.  Ces  données  suffiront  pour  montrer  quelle  in- 
fluence profonde  ont  les  phénomènes  dont  nous  nous  occupons  sur  la 
configurai  ion  du  crâne  entier.  Il  est  assez  difficile  de  mesurer  les  yeux. 
Leurs  dimensions  subissent  peut-être  aussi  de  petites  modifications,  et 
les  oculistes  devraient  s'assurer  du  fait  en  étudiant  la  réfraction  de 
l'œil  dans  les  cas  de  difformité  analogue  chez  l'homme.  Le  maxillaire 
inférieur  du  crâne  de  la  planche  IV,  figure  4,  se  trouve  photographié 
à  la  figure  16  de  la  planche  VI.  La  distance  du  bord  antérieur  de 
l'alvéole  des  dents  incisives  au  bord  postérieur  de  la  surface  articu- 
laire du  condyle  est  à  droite  de  33,  5  millimètres,  à  gauche  de  37,  0. 
La  distance  verticale  du  milieu  de  la  surface  articulaire  au  plan  hori- 
zontal sur  lequel  on  fait  reposer  le  maxillaire  inférieur  dans  sa  posi- 
lion  normale  est  à  droite  de  l'.l  millimètres,  à  gauche  de  20,  5.  La 
surface  articulaire  du  condyle  droit  est  située  notablement  trop  lias. 
Dans  la  photographie,  la  surface  articulaire  proprement  dite  est  très- 
mal  délimiter,  Mirloiit  à  gauche;  en  réalité  elle  comprend  moins  de 
la  moitié  antérieure  de  la  surface  terminale  du  condyle.  Il  est  facile  de 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  35 

s'en  assurer  en  comparant  la  figure  avec  un  maxillaire  inférieur  de 
lapin  normal. 

Le  maxillaire  inférieur  du  crâne  de  la  planche  III,  figure  1,  est 
modifié  d'une  manière  analogue  à  celui  que  nous  venons  de  voir, 
quoique  moins  considérablement. 


2.  Rétrécissements  avec  synostose. 


Les  crânes  de  la  planche  Y,  figure  11,  et  de  la  planche  VI,  figures 
1,  2  et  3,  peuvent  servir  à  démontrer  que  les  rétrécissements  com- 
pliqués de  synostose  sont  les  plus  forts.  La  distance  de  l'échan- 
crure  postérieure  de  l'arcade  orbitaire  à  l'angle  latéral  de  l'os 
interpariétal  est  sur  le  crâne  de  la  planche  V,  figure  11  (synos- 
tose de  la  suture  coronaire  droite),  à  droite  de  19,  0  millimètres,  à 
gauche  de  24,  5;  cette  même  distance  est  sur  le  crâne  de  la  planche 
VI,  figure  1  (synostose  de  la  suture  coronaire  gauche  chez  un  lapin 
âgé  de  22  jours),  à  droite  de  20,  0  millimètres,  à  gauche  de  14,  5 
seulement.  A  la  planche  V,  figure  11,  la  suture  coronaire  droite  (obli- 
térée) a  13  millimètres  de  longueur,  la  gauche  11,  5;  à  la  planche  VI, 
figure  1,  la  suture  coronaire  gauche  (oblitérée)  a  11, 3  millimètres  de 
longueur,  la  droite  10,  5.  La  faiblesse  de  l'allongement  de  la  suture 
oblitérée  à  la  planche  VI,  figure  1,  relativement  au  haut  degré  de 
scoliose  du  crâne,  vient  ici  de  nouveau  d'un  trouble  de  nutrition  le 
long  de  la  suture  temporale  gauche;  on  peut  s'en  assurer  sur  les 
figures  2  et  3  de  la  planche  VI,  en  comparant  les  deux  sutures  tem- 
porales, ou  mieux,  comme  elles  ont  perdu  de  leur  netteté  par  l'im- 
pression, la  distance  des  apophyses  zygomatiques  aux  sutures  tempo- 
rales de  chaque  côté.  La  forme  des  denticulations  des  sutures  frontale 
et  sagittale  dans  les  deux  crânes  dont  nous  venons  de  parler  est  ca- 


3G  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

racléristique  ;  très-instructive  aussi  est  à  la  planche  V,  figure  11,  la 
rétraction  mécanique  de  l'apophyse  nasale  de  l'os  frontal  du  côté  rac- 
courci (h. 

La  figure  10  de  la  planche  V  représente  l'intérieur  de  la  moitié  an- 
térieure du  crâne  de  la  figure  11.  Je  l'ai  lait  photographier  pour  deux 
raisons  dont  l'une  sera  traitée  plus  has,  mais  dont  l'autre  peut  trouver 
ici  déjà  sa  place.  Comparons  les  plus  grands  diamètres  verticaux  de  la 
partie  postérieure  des  deux  petites  ailes  de  l'os  sphénoïde  antérieur  : 
celui  de  gauche  est  de  9  millimètres,  celui  de  droite  est  de  7,  5  seu- 
lement.  Nous  avons  déjà  signalé  un  fait  analogue  chez  le  crâne  de  la 
planche  IV,  figures  4,  et  nous  aurions  pu  en  faire  autant  pour  ceux  des 
figures  1,  4  et  7  de  la  planche  III,  ainsi  que  pour  celui  de  la  planche 
IV,  figure  1.  C'est  un  rétrécissement  secondaire  qui  se  trahit  par  cette 
différence  des  diamètres. 

A  la  page  29  j'ai  fait  remarquer  que  tout  rétrécissement  du  cran  e 
entraîne  une  série  de  rétrécissements  secondaires.  Il  serait  trop  long 
et  trop  difficile  de  suivre  ces  derniers  dans  chaque  cas  particulier.  ' 
Faisons  seulement  remarquer  ici  que  la  loi  des  rétrécissements  pri- 
maires par  laquelle  ils  se  produisent  toujours  dans  une  direction  per- 
pendiculaire à  la  suture  oblitérée  ou  à  l'état  fœtal  n'est  pas  applicable 
sans  autre  aux  rétrécissements  secondaires.  Déjà  nous  avons  vu  la 
pu  lie  postérieure  des  petites  ailes  de  l'os  sphénoïde  antérieur  cesser 
de  la  suivre.  Examinons  de  nouveau  les  figures  h  et  7  de  la 
planche  III,  1  et  4  de  la  planche  IV,  1 1  de  la  planche  V,  et  1  de  la 
planche  YI.  Le  rétrécissement  principal  se  montre  il  est  vrai  chez 
toutes  dans  la  direction  voulue  (longitudinale);  mais  les  os  frontaux 
et  pariétaux  qui  sonl  rétrécis  dans  le  sens  longitudinal  le  sont  aussi 


(I;  Comparer  avec  les  ligures  1  et  7  planche  III,  I  et  4  planche  V,  1  planche  VI  i|ui 
montrent  lu  même  rétraction,  seulement  moins  forte.  Les  os  pariétaux  des  mômes 
crânes  présentent  â  leur  bord  postérieur  un  phénomène  analogue.  Il  en  résulte  un 
avancement  de  l'os  interpariétal  «lu  coté  raccourci  et  par  suit"  île  l'écaillé  île  l'os  occi- 
pital ilu  iiiéuie  coté. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  37 

dans  le  sens  transversal.  Voici  en  chiffres  la  largeur  des  os  frontaux 
dans  les  figures  indiquées  (mesurée  en  tirant  une  ligne  entre  l'échan- 
crure  postérieure  des  arcades  orbitaires  de  chaque  côté,  puis  en 
comparant  la  longueur  de  chacune  des  moitiés  de  cette  ligne  divisée 
par  la  suture  frontale)  : 

Planche  III,  figure  4.  État  fœtal  de  la  suture  coronaire  droite. 
Largeur  de  l'os  frontal  droit  7,0  millimètres;  largeur  de  l'os  fron- 
tal gauche  7,  5  millimètres. 

Planche  III,  figure  7.  État  fœtal  de  la  suture  coronaire  gauche. 
Largeur  de  l'os  frontal  gauche  6,5  millimètres  ;  largeur  de  l'os  frontal 
droit  7,5  millimètres. 

Planche  IV,  figure  1.  État  fœtal  de  la  suture  coronaire  gauche 
et  de  la  suture  temporale  gauche.  Largeur  de  l'os  frontal  gauche  7,0 
millimètres;  largeur  de  l'os  frontal  droit  7,5  millimètres. 

Planche  V,  figure  4.  État  fœtal  de  la  suture  coronaire  droite  et  de 
la  suture  temporale  gauche.  Largeur  de  l'os  frontal  droit  6,5  milli- 
mètres; largeur  de  l'os  frontal  gauche,  7,3  millimètres. 

Planche  V,  figure  11.  Synostose  de  la  suture  coronaire  droite. 
Largeur  de  l'os  frontal  droit  7,0  millimètres;  largeur  de  l'os  frontal 
gauche  7,5  millimètres. 

Planche  VI,  figure  1.  Synostose  de  la  suture  coronaire  gauche  et 

état  fœtal  de  la  suture  temporale  gauche.  Largeur  de  l'os  frontal 

gauche  6,5  millimètres;  largeur  de  l'os  frontal  droit  7,2  millimètres. 

L'os  peut  donc  subir  un  rétrécissement  secondaire  parallèle  à  la 

suture  oblitérée  ou  à  l'état  fœtal. 

La  figure  7  de  la  planche  IV  représente  une  synostose  du  com- 
mencement de  la  suture  sagittale.  Le  raccourcissement  de  la  moitié 
gauche  du  crâne  est  dû  à  un  trouble  de  nutrition  de  l'extrémité  tem- 
porale de  la  suture  coronaire  gauche,  laquelle  par  suite  s'est  allon- 
gée et  est  demeurée  à  l'état  fœtal.  A  la  direction  des  dentelures  de  la 
suture  coronaire  droite  on  voit  que  le  sang  s'est  détourné  de  la  suture 
sagittale.  Sur  la  suture  coronaire  gauche,  les  dentelures  sont  demeu- 


38  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

rées  droites,  le  sang  s'étant  détourné  à  la  fois  de  la  suture  sagittale  et 
de  l'extrémité  temporale  de  la  suture  coronaire,  ce  qui  a  neutralisé 
l'effet. 

Une  synoslose  de  la  moitié  postérieure  de  la  suture  sagittale  est 
photographiée  à  la  figure  9  de  la  planche  IV.  Le  crâne  d'un  lapin 
normal  de  même  âge  et  environ  de  même  grandeur  a  été  photo- 
graphié à  la  figure  8  comme  point  de  comparaison.  Le  sang,  dans  le 
crâne  de  la  figure  9,  s'est  détourné  de  la  suture  sagittale  pour  se 
diriger  sur  les  bords  des  sutures  coronaires,  temporales  et  pariéto- 
interpariétales  qui  sont  par  suite  toutes  très-richement  dentelées  (sur- 
tout l'extrémité  temporale  des  sutures  coronaires).  La  suture  sagit- 
tale est  allongée,  les  sutures  coronaires  sont  raccourcies.  Longueur 
de  la  suture  sagittale,  dans  la  figure  8  :  15  millimètres;  dans  la 
ligure  9:  16,5  millimètres.  Longueur  des  deux  sutures,  coronaires 
ensemble,  dans  la  figure  8  :  21,0  millimètres;  dans  la  figure  9  : 
19,5  millimètres. 

A  la  figure  2  de  la  planche  V  on  voit  comment  le  raccourcissement 
de  la  corde  a  fait  augmenter  la  convexité  du  crâne,  et  à  la  figure  4 
de  la  môme  planche  comment  l'allongement  de  l'arc  a  produit  le 
même  effet.  Les  figures  2  et  4  de  la  planche  V  représentent  le  même 
crâne  que  la  figure  9  de  la  planche  IV,  et  les  figures  1  et  3  de  la 
planche  V  le  môme  crâne  que  la  figure  8  de  la  planche  IV. 

La  photographie  de  la  planche  V,  figure  9,  est  celle  du  crâne  d'un 
lapin  adulte  avec  synostose  presque  complète  de  la  suture  sagittale. 
[ci  aussi  nous  voyons  les  mûmes  sutures  que  dans  le  cas  précédent, 
surtout  l'extrémité  temporale  des  sutures  coronaires,  plus  richement 
dentelées  qu'à  l'état  normal.  Il  y  a  cependant  synostose  de  la  suture 
pariéto-interpariétale. 

Les  figures  6  el  8  de  la  planche  V  représentent  un  crâne  avec 
synoslose  partielle  de  la  suture  Frontale.  Les  figures  5  et  7  sont 
prises  sur  un  lapin  normal  pour  servir  de  point  de  comparaison. 
Distance  de  l'échancrure  postérieure  de  l'arcade  orbitaire  d'un  côté 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  39 

à  celle  de  l'autre  côté,  dans  la  figure  5  :  12,0  millimètres;  dans  la 
figure  6  :  11,0  millimètres.  La  figure  8,  opposée  à  la  figure  7  (nor- 
male), démontre  d'une  façon  fort  instructive  que  la  dilatation  com- 
pensatoire ne  s'épuise  point  «  dans  la  direction  de  la  suture  obli- 
térée ».  —  Distance  verticale  du  bord  inférieur  du  corps  de  l'os 
sphénoïde  au  sommet  (point  de  jonction)  des  sutures  coronaires,  dans 
la  figure  7  :  16,0  millimètres;  dans  la  figure  8  :  17,0  millimètres. 
Diamètre  vertical  de  la  partie  postérieure  des  petites  ailes  de  l'os  sphé- 
noïde antérieur  (des  deux  côtés  la  même  chose),  dans  la  figure  7  : 
7,8  millimètres;  dans  la  figure  8  :  8,5  millimètres.  —  On  aurait  pu 
démontrer  les  mêmes  phénomènes  sur  le  crâne  des  figures  2  et  4 
(PI.  V)  comparé  à  celui  des  figures  1  et  3  (PI.  V).  La  distance  ver- 
ticale de  l'origine  de  l'aile  externe  de  l'apophyse  ptérigoïde  au  som- 
met de  la  voûte  du  crâne  est  dans  la  figure  3  de  19,5  millimètres; 
dans  la  figure  4  par  contre  de  21,0  millimètres. 

Les  figures  6  et  7  de  la  planche  VI  terminent  la  série  assez  longue 
que  nous  venons  de  parcourir.  Les  figures  4  et  5  photographiées 
d'après  un  crâne  normal  servent  de  point  de  comparaison.  —  J'ai 
fait  faire  ces  photographies  parce  que  la  synoslose  anticipée  de  la 
suture  qui  sépare  l'écaillé  du  corps  de  l'os  occipital  paraît  être  très- 
rare  chez  le  lapin.  Le  rétrécissement  est  visible  ici  aussi  (1). 

(1)  Plusieurs  des  ligures  sont  malheureusement  trop  imparfaites  pour  permettre  de 
voir  nettement  tout  ce  qui  est  indiqué  dans  le  texte.  La  satisfaction  du  lecteur  serait 
bien  plus  complète  s'il  pouvait  voir  les  originaux  où  tout  est  parfaitement  distinct.  Les 
mesures  ayant  toutes  été  prises  par  l'auteur  sur  les  crânes  originaux  ne  peuvent  pas 
non  plus  être  contrôlées  d'une  façon  absolue  par  des  mesures  prises  sur  les  figures, 
celles-ci  n'étant  de  fait  que  la  projection  des  crânes  sur  un  plan.  (Note  du  traducteur.) 


CHAPITRE  IX 


LIGATURE    DES    VEINES   JUGULAIRES.    SYN0ST0SES    SANS    RETRECISSEMENT. 


Il  est  évident  que  l'état  fœtal  des  sutures  n'est  qu'un  premier 
degré,  pour  ainsi  dire  un  avant-coureur  de  la  synoslosc.  Cela  est  du 
reste  indifférent  pour  la  question  qui  nous  occupe;  l'important  est 
qu'il  existe  des  rétrécissements  sans  synoslose.  Mais  ce  qui  est  plus 
important  encore  pour  juger  de  la  signification  des  sutures,  ce  sont 
les  synostoses  sans  rétrécissements.  On  les  obtient  en  pratiquant  la 
ligature  des  veines  jugulaires  externes  et  internes  chez  le  lapin  deux 
ou  trois  jours  après  sa  naissance.  On  incise  la  peau  comme  pour  la 
ligature  des  carotides;  puis  on  lie  les  veines  externes  en  dessous  de 
la  bifurcation,  avec  de  certaines  précautions,  car  elles  sont  très-vul- 
nérables. Ensuite  on  enlève  la  graisse,  on  pénètre  jusqu'à  la  veine 
jugulaire  interne,  on  l'isole  de  l'artère  carotide  et  du  nerf  pneumo- 
gastrique, puis  on  l'ail  passer  sous  elle  le  gros  bout  d'une  aiguille  ;i 

coudre,  comme  nous  l'avons  indiqué  | ■  la  ligature  des  carotides. 

La  ligature  des  jugulaires  internes  n'est  pas  très-facile;  ce  qui  aide 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.         41 

pourtant  à  l'opérateur,  c'est  que  les  vaisseaux  malgré  leur  finesse 
sont  très-élastiques  et  très-résistants.  Une  circulation  collatérale 
s'établit  par  les  veines  vertébrales  droite  et  gauche,  par  de  petites 
veines  cutanées  du  cou,  et  principalement  par  la  veine  vertébrale 
médiane. 

A  la  planche  VI,  figures  8  et  9,  sont  photographiés  les  crânes  de  deux 
lapins  auxquels  on  avait  lié  les  veines  jugulaires.  Chez  tous  les  deux, 
la  suture  sagittale  est  relativement  lisse  ;  à  la  figure  9,  elle  est  inter- 
rompue dans  sa  moitié  postérieure  par  un  grand  nombre  de  petites 
synosloses  en  forme  de  ponts  (il  y  en  a  13);  à  la  figure  8  elle  n'a  pas 
de  synostoses,  Un  examen  plus  attentif  montre  en  outre  que  les 
canaux  de  Havers  ne  sont  pas  détournés  de  la  suture  sagittale;  ils  ne 
sont  pas  non  plus  en  forme  de  rayons,  mais  ont  un  aspect  ponctué; 
enfin  ils  traversent  les  synostoses  en  forme  de  ponts  que  nous  venons 
de  mentionner.  A  la  planche  I,  figure  11,  ils  sont  rendus  d'une  façon 
un  peu  grossière,  mais  en  somme  exacte  (grossissement  :  une  fois  et 
demie  la  grandeur  naturelle).  Si  l'on  se  rappelle  quel  effet  considé- 
rable s'est  produit  à  la  suite  de  l'oblitération  de  la  partie  postérieure 
delà  suture  sagittale  à  la  figure  9  de  la  planche  IV,  on  admettra  sans 
peine  que  les  crânes  de  la  planche  VI,  figures  8  et  9,  n'ont  pas  de 
rétrécissements.  On  n'en  peut  du  moins  pas  démontrer;  j'ai  mesuré 
ces  crânes,  et  n'ai  pu  constater  aucune  anomalie  dans  leurs  propor- 
tions : 

Distance  du  bord  antérieur  de  l'alvéole  des  dents  incisives  à  la 
protubérance  occipitale  externe,  dans  la  figure  8  (PI.  VI)  :  50,5  mil- 
limètres; dans  la  figure  9  :  50,0  millimètres.  — Le  plus  grand  dia- 
mètre transversal  est  dans  la  figure  8  de  24,5  millimètres  et  dans 
la  figure  9  aussi. 

Il  est  vrai  qu'on  ne  réussit  pas  souvent  à  se  procurer  des  crânes 
aussi  caractéristiques  que  celui  de  la  figure  9  à  la  planche  VI.  Les 
phénomènes  qui  produisent  ce  genre  de  synostoses  ne  sont  pas  encore 
aussi  clairs  que  ceux  qui  suivent  la  ligature  des  carotides.  Ce  qui  pa- 


42  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

rail  certain,  c'est  qu'ici  il  n'y  a  pas  de  nécrose.  Si  c'était  le  cas,  il  se 
produirait  aussitôt  un  rétrécissement  des  os  qui  en  seraient  atteints, 
et  le  sang  dévierait  comme  nous  l'avons  vu  plus  haut  vers  les  bords 
d'os   demeurés  sains.  —  On  remarque    cependant  à  un  aplatisse- 
ment (1)  des  bords  (ceux-ci  ont  crû  dans  l'intervalle)  parallèle  aux  su- 
tures, et  se  conservant  plusieurs  semaines  après  l'opération,  que  la 
nutrition  n'a  pas  été  tout  à  fait  suffisante.  On  peut  aussi  facilement 
constater  qu'à  la  suite  de  la  ligature  des  jugulaires  les  canaux  de 
Havers  tombent,  comme  nous  l'avons  déjà  vu,  dans  une  sorte  de  con- 
fusion, perdent  leur  direction  radiée,  se  développent  irrégulièrement, 
et  font  que  la  suture  devient  extraordinairement  lisse.  — Une  con- 
jecture s'est  souvent  présentée  à  mon  esprit,  savoir  que  la  pression  du 
sang,  augmentée  par  la  ligature  des  veines  du  cou,  était  capable  de 
pousser  en  quelque  sorte  certains  vaisseaux  à  travers  le  cartilage  su- 
turai, ce  qui  produirait  les  synostoscs  en  forme  de  ponts;  les  petits 
lapins  atteignent  en  effet  un  notable  degré  de  cyanose  après  l'opéra- 
tion. Je  possède  un  seul  crâne  chez  lequel  il  se  soit  formé  après  la 
ligature  des  carotides  une  suture  sagittale  lisse  et  des  canaux  de 
Havers  presque  ponctués,  comme  dans  les  cas  de  ligature  des  jugu- 
laires. Je  l'ai  fait  représentera  la  figure  11  de  la  planche  VI,  mais  la 
presse  a  écrasé  et  effacé  toutes  les  finesses  de  la  photographie  origi- 
nale. Enfin  à  la  planche  YI,  figure  10,  est  photographié  le  crâne  d'un 
lapin  nouveau-né  n'ayant  subi  aucune  opération,  et  chez  lequel  se 
trouve  cependant  au  milieu  de  la  suture  sagittale  une  forte  synostose 
en  forme  de  pont.  On  ne  peut  y  constater  avec  certitude  aucun  rétré- 
cissement, et  les  canaux  de  Havers  ne  se  détournent  point  de  la  sy- 
nostose. Ce  môme  crâne  est  dessiné  (pas  photographié)  en  grandeur 
double  à  la  planche  I,  figure  12.  Aucun  fait  n'est  là  pour  expliquer  la 
cause  de  celte  anomalie.  Les  synostoscs  sont  moins  marquées  du 
côté  cérébral  (intérieur)  de  la  suture  sagittale  que  de  son  côté  externe, 

ilj  Ccl  aplatis  cmcnl  se  produit  aussi  assez souvcnl  après  la  ligature  des  carotides. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  43 

aussi  bien  dans  le  crâne  de  la  figure  '10  que  dans  celui  de  la  figure  9 
(pi.  VI).  Ce  fait  ne  concorde  pas  avec  les  données  de  Fick  (1)  d'après 
lequel  l'oblitération  des  sutures  commence  toujours,  quelles  que  soient 
les  circonstances,  par  la  surface  cérébrale  du  crâne  pour  continuer 
vers  sa  surface  externe,  jamais  le  contraire. 

(1)  Neue  Untersuchungen  uber  die  Knochenformen,  p.  22. 


CHAPITRE  X 


LES  SUTURES  PROVOQUENT  UN  ARRÊT  DE  LA  CROISSANCE  DE  L  OS 
DONT  LE  RORD  SE  GONFLE  ALORS  ET  DÉBORDE. 


Il  me  paraît  démontré  par  les  expériences  que  nous  avons  vues 
jusqu'ici  que  la  croissance  des  os  ne  se  fait  pas  par  les  sutures.  Mais 
on  peut  aller  plus  loin,  et  prétendre  qu'elles  occasionnent  un  arrêt  de 
la  croissance,  et  même  dans  certaines  circonstances  un  gonflement  et 
un  débordement  des  bords  de  l'os.  —  Diverses  observations  militent  en 
faveur  de  cette  opinion.  Lorsque  le  crâne  croît  d'une  manière  exagérée 
relativement  au  développement  du  cerveau,  il  se  forme  parfois  une 
arête  à  la  suture  sagittale  (pi.  I,  lig.  14).  Lorsque  de  deux  os  contigus 
l'un  croit  plus  vivement  que  l'autre,  il  le  déborde  souvent  en  dépassant 
le  niveau  de  la  suture  (os  pariétal  droit  dans  la  fig.  7  de  la  pi.  III). 
Enfin  une  série  d'expériences  démontrent  que  quand  on  donne  plus 
d'espace  à  l'aréal  d'accroissement  d'un  os  en  enlevant  totalement  ou 
partiellement  son  voisin,  il  se  met  à  croître  dans  l'espace  ainsi  fourni. 

A  la  planche  VII,  figure  6,  est  figuré  un  crâne  chez  lequel,  peu 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.        45 

après  Ja  naissance,  un  petit  triangle  avait  été  enlevé  à  l'os  pariétal 
droit,  à  partir  de  la  suture  sagittale.  L'os  pariétal  gauche  s'est  mis  à 
croître  dans  le  triangle  et  l'a  rempli.  J'ai  varié  de  diverses  manières 
cette  simple  et  facile  expérience  :  j'ai  conservé  ou  enlevé  la  suture  sa- 
gittale, conservé  ou  enlevé  la  dure-mère,  sans  arriver  à  tirer  au  clair 
pourquoi  l'essai  manque  si  souvent.  Les  expériences  suivantes  sont 
beaucoup  plus  sûres. 

Chez  les  crânes  de  la  planche  "VII,  figures  2  et  5,  on  a  enlevé  une 
bande  longitudinale  aux  os  pariétaux  avec  le  périoste  externe  et  in- 
terne. On  a  provoqué  ainsi  un  avancement  notable  des  os  frontaux 
dans  les  lacunes  (à  la  fîg.  2,  aussi  de  l'os  interpariétal  à  gauche).  L'os 
interpariétal  aux  figures  1  et  3  de  la  planche  VII,  l'os  pariétal  à  la 
figure  4  de  la  planche  VII,  et  l'os  interpariétal  à  la  figure  4  de  la 
planche  X  se  sont  avancés  d'une  manière  analogue  à  la  suite  de  la 
formation  d'un  écartement  plus  ou  moins  grand  clans  le  crâne.  Lors- 
qu'on enlève  l'os  interpariétal  après  avoir  soigneusement  pratiqué 
l'excision  de  toutes  les  sutures  qui  l'entourent,  opération  qui  n'offre 
pas  de  difficulté,  les  pariétaux  et  l'occipital  se  mettent  à  croître  au 
delà  de  leurs  limites  primitives  et  referment  l'ouverture.  Aux  figures  7 
et  8  de  la  planche  VII  sont  figurés  deux  crânes  où  cette  opération  a 
parfaitement  réussi;  ils  sont  on  ne  peut  plus  concluants. 

Sans  cette  disposition  qu'ont  les  os  du  crâne  à  croître  au  delà  de 
leurs  limites,  l'explication  des  dilatations  compensatoires  serait  bien 
difficile.  Or  ces  dilatations  compensatoires,  le  développement  du  cer- 
veau supposé  normal,  s'étendent  comme  nous  l'avons  vu  sur  tout  le 
crâne,  hormis  l'aréal  de  rétrécissement  donné  par  les  sutures  oblité- 
rées ou  à  l'état  fœtal. 

Fort  instructive  au  point  de  vue  qui  nous  occupe  est  encore  la  con- 
currence qu'ont  eue  à  soutenir  en  croissant  les  os  frontaux  et  parié- 
taux des  crânes  de  la  planche  II,  figures  1,  3,  7, 10,  etc.,  contre  un 
ou  deux  voisins  inaccoutumés,  les  os  wormiens. 


CHAPITRE  XI 


CROISSANCE    DES    OS    DU    CRANE    PAR    LE    PERIOSTE    EXTERNE    ET    INTERNE. 


C'est  à  partir  des  noyaux  ou  centres  d'ossification  que  croissent  les 
os  de  la  voûte  du  crâne.  Ils  croissent  à  leurs  bords  par  prolifération 
de  leurs  éléments  constitutifs.  Mais  ils  croissent  de  même  a  leurs  deux 
surfaces.  Enfin  leur  croissance  est  en  outre  interstitielle;  ce  dernier 
mode  d'accroissement  est  d'autant  plus  intense  qu'on  se  rapproche 
plus  des  bords,  et,  très-probablement  aussi,  des  surfaces. 

Il  est  facile  de  démontrer  que  les  os  de  la  voûte  du  crâne  croissent 
par  le  périoste  externe  et  interne.  Chez  un  lapin  nouveau-né  on  pra- 
tique à  travers  le  péricranium  deux  incisions  longitudinales,  une  de 
chaque  côté  de  la  suture  sagittale  par  exemple,  sur  toute  la  longueur 
de  celte  suture,  cl  à  2  millimètres  de  distance  d'elle.  Puis  on  enlève 
la  bande  de  péricranium  large  de  4  millimètres,  située  cnlre  les  deux 
incisions;  on  peut  encore  pour  plus  de  sûreté  racler  avec  précaution 
au  moyen  d'un  couteau  la  surface  de  l'os  mis  ainsi  à  nu.  On  tue  le  la- 
pin au  bout  de  six  semaines  ou  plus,  et  l'on  trouve  à  la  surface  externe 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.        47 

de  la  voûte  du  crâne  une  dépression  correspondant  à  la  bande  de  pé- 
ricranium  enlevée,  plus  ou  moins  large  suivant  l'âge  du  lapin,  et  dont 
le  fond  atteint  le  diploé;  la  face  interne  de  l'os  est  tout  à  fait  normale. 
Quelquefois  le  diploé  est  aussi  entamé,  et  s'ouvre  alors  dans  les  pa- 
rois de  la  dépression.  Ces  altérations  sont  trop  fines  pour  être  rendues 
par  la  photographie. 

En  faisant  abstraction  d'autres  faits,  on  serait  tenté  de  conclure  de 
ce  qui  précède  que  le  périoste  externe  et  le  périoste  interne  contri- 
buent chacun  pour  une  part  égale  à  la  formation  de  l'os.  Mais  deux 
faits  (1)  semblent  indiquer  que  la  croissance  est  cependant  plus  active 
à  la  surface  externe  :  4°  les  sutures  dentelées  ont  beaucoup  moins  de 
dentelures  sur  la  face  interne  du  crâne  que  sur  sa  face  externe;  2°  les 
synostoses  obtenues  par  la  ligature  des  veines  jugulaires  sont,  comme 
nous  l'avons  déjà  vu,  beaucoup  moins  développées  à  la  surface  interne 
du  crâne  qu'à  sa  surface  externe.  Je  ne  puis  par  contre  me  décider  à 
admettre  qu'il  se  produise  dans  les  circonstances  ordinaires  une  ré- 
sorption des  couches  internes  du  crâne  servant  à  l'adapter  au  cerveau 
à  mesure  que  ce  dernier  croit  et  change  de  forme.  —  Je  rappelle  ici 
les  phénomènes  qui  se  passent  dans  les  os  de  la  voûte  du  crâne  à  la 
suite  de  la  ligature  des  carotides;  plus  loin  je  donnerai  encore  de  tout 
autres  exemples  dénotant  un  tel  degré  de  souplesse,  de  pouvoir  d'a- 
daptation chez  les  os  qu'une  pareille  résorption  de  couches  entières 
semble  parfaitement  inutile.  Je  ne  prétends  point  nier  par  là  que  dans 
des  circonstances  extraordinaires,  surtout  chez  les  crânes  adultes,  il 
puisse  se  produire  une  résorption  semblable  (voir  du  reste  Lucâ,  loc. 
cit.,  p.  7). 

Lorsqu'on  enlève  le  péricranium  dans  l'aréal  d'une  suture  dentelée 
chez  un  lapin  nouveau-né,  on  trouve  plus  tard,  lorsque  le  lapin  est 
devenu  adulte,  cette  suture  remarquablement  riche  en  dentelures 
compliquées.  Je  possède  trois  crânes  chez  lesquels  la  suture  coronaire 

(1)  Nous  en  verrons  encore  un  troisième  plus  bas. 


48        RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

présente  ce  phénomène  dont  la  cause  ne  m'est  pas  entièrement  claire. 
Est-ce  que,  lors  de  l'excision  du  péricranium,  il  reste  au  bord  des  su- 
tures par  suite  d'une  adhérence  plus  forte  un  plus  grand  nombre  d'é- 
léments formateurs  qui,  en  proliférant  après  l'opération  pour  ainsi 
dire  par  compensation,  amènent  le  résultat  qu'on  vient  de  voir?  Ce 
qui  militerait  en  faveur  de  cette  hypothèse,  c'est  la  proéminence  des 
circonvolutions  delà  suture  au-dessus  du  niveau  de  la  dépression  de 
l'os,  proéminence  qui  s'est  produite  chaque  fois. 


CHAPITRE  XII 


CROISSANCE   INTERSTITIELLE. 


La  démonstration  de  la  croissance  interstitielle  des  os,  telle  que 
nous  l'avons  indiquée  au  début  du  chapitre  précédent,  est  encore  plus 
facile  que  celle  de  leur  croissance  par  le  périoste;  elle  se  fait  par  une 
méthode  aussi  élégante  que  convaincante.  Au  moyen  d'une  pointe 
d'acier  triangulaire  pas  trop  fine,  qu'on  soutient  légèrement  et  qu'on 
fait  tourner  autour  de  son  axe,  on  pratique  sur  le  crâne  de  lapins 
nouveau-nés  de  petites  marques  de  forme  circulaire;  il  est  clair  qu'on 
doit  veiller  à  ce  que  la  pointe  n'entre  pas  dans  le  cerveau.  Il  ne  faut 
pas  attendre  plus  de  six  semaines  pour  tuer  les  lapins  ;  jusqu'à  ce 
terme  les  marques  se  conservent  extrêmement  bien,  sauf  quelques 
rares  exceptions.  A  la  figure  9  de  la  planche  VII  est  photographié  un 
crâne  à  quatre  marques,  afin  qu'on  puisse  se  faire  une  idée  claire  et 
précise  de  la  propreté  et  de  l'exactitude  de  cette  méthode. 

Quatre  lapins  âgés  de  trois  jours,  bien  nourris  et  bien  soignés  par 


50 


RECHERCHES  EXPERIMENTALES 


leur  mère,  ayant  tous  la  suture  sagittale  longue  de  14  raill.,  furent 
marqués  comme  suit.  Sur  une  ligne  parallèle  à  la  suture  sagittale  et 
éloignée  d'elle  de  3,  5  mill.,  ou  pratiqua  quatre  marques  dont  l'an- 
térieure a  et  la  postérieure  b  distantes  de  8  mill.  lune  de  l'autre,  les 
deux  médianes  c  et  d  distantes  de  4  mill.  l'une  de  l'autre.  Au  bout 
de  trois  semaines  on  tua  les  lapins,  et  l'on  constata  les  mesures  sui- 
vantes : 


LONGUEUR  DE  LA 

DISTANCE  DE  LA 

DISTANCE  DE  LA  MARQUE  C 

SUTURE 

MAI»  )UE  A 

A  LA  MARQUE  D. 

SAGITTALE. 

A  LA  MARQUE  B. 

N°  I 

14,0  mill. 

10,0  mill. 

4,5  mill. 

IN"  2 

14,0     » 

10,0     » 

4,5    » 

N°3 

14,7     » 

10,5     » 

4,7     » 

N°  4 

13,2     » 

10,5     » 

marque  indistincte. 

Trois  lapins  âgés  de  trois  jours,  bien  nourris,  ayant  une  suture  sa- 
gittale à  peu  près  égale  à  celle  des  précédents,  furent  marqués  de  la 
même  façon  qu'eux;  seulement  les  marques  furent  faites  sur  une  ligne 
située  au  milieu  de  l'os  pariétal,  c'est-à-dire  à  5  mill.  environ  de  la 
suture  sagittale.  On  les  tua  au  bout  de  trois  semaines,  et  le  résultat 
fut  le  même  ou  peu  s'en  faut  que  dans  la  série  précédente. 

On  fit  à  deux  lapins  âgés  de  trois  jours  et  bien  nourris  quatre  mar- 
ques sur  l'os  pariétal  droit.  Ces  marques  furent  pratiquées  qhacuneà 
un  niilliinèlie  de  distance  d'une  des  quatre  sutures  qui  bordent  l'os 
rie  manière  à  former  les  quatre  extrémités  d'une  croix,  a  et  &  formant 
les  deux  extrémités  de  l'axe  longitudinal  (sagittal),  c  et  il  les  deux  cx- 
trémités  de  l'axe  transversal  (frontal)  de  la  croix.  Lors  de  l'opération 
la  distance  de  a  à  //  était  élu;/,  le  premier  lapin  de  9,5  mill.,  chez  le 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  51 

deuxième  de  9,3;  la  distance  de  c  à  d  était  chez  le  premier  lapin  de 
8,7  mill.,  chez  le  deuxième  de  8,5.  On  les  tua  tous  deux  au  bout 
de  trois  semaines  ;  les  mesures  s'étaient  alors  modifiées  comme  suit  : 
distance  de  a  à  b  chez  le  premier  lapin  11,7  mill.,  chez  le  deuxième 
-12,0;  distance  de  c  à  d  chez  le  premier  lapin  9,8  mill.,  chez  le  deu- 
xième 10,0.  On  avait  fait  en  même  temps  aux  deux  mêmes  lapins  sur 
l'os  pariétal  gauche  quatre  marques  disposées  en  croix  exactement 
dans  la  même  direction  que  les  précédentes,  mais  beaucoup  plus  rap- 
prochées les  unes  des  autres  et  plus  éloignées  des  sutures,  le  centre 
de  l'os  pariétal  formant  le  centre  de  la  croix,  a  et  b  comme  c  et  (/,  dis- 
tantes chez  les  deux  lapins  de  4  mill.  l'une  de  l'autre  lors  de  l'opéra- 
tion, se  trouvèrent  distantes  de  4,5  à  4,6  mill.  l'une  de  l'autre  trois 
semaines  après. 

On  marqua  sept  lapins  de  la  même  portée  à  l'âge  de  deux  ou  trois 
jours.  La  longueur  de  la  suture  sagittale  était  de  10,5  à  11  mill.,  la 
plus  grande  largeur  de  l'os  pariétal  d'environ  9  mill.  Sur  chaque  lapin 
on  fit  du  même  côté  de  la  suture  sagittale  deux  marques  également 
éloignées  du  milieu  de  cette  suture,  et  distantes  d'elle  (par  la  perpen- 
diculaire) de  2,0  mill.  La  distance  des  deux  marques  l'une  de  l'autre 
lors  de  l'opération  était  chez  le  premier  lapin  de  6  mill.,  chez  le  deu- 
xième de  7,  chez  le  troisième  de  7,  chez  le  quatrième  de  7,  chez  le 
cinquième  de  8,  chez  le  sixième  de  8,  et  chez  le  septième  de  9.  La  mère 
périt  au  bout  de  huit  jours,  ce  qui  fit  qu'on  dut  tuer  les  petits  au  bout 
de  ce  temps.  La  distance  des  deux  marques  se  trouva  alors  être  devenue 
chez  le  premier  lapin  de  6,5  mill.,  chez  le  deuxième  de  7,5,  chez  le 
troisième  de  7,6,  chez  le  quatrième  de  7,8,  chez  le  cinquième  de  9,3, 
chez  le  sixième  de  9,3,  et  chez  le  septième  de  10,7.  Chez  deux  des 
lapins  en  question  on  marqua  en  outre  à  deux  endroits  l'os  pariétal  de 
l'autre  côté  sur  sa  ligne  médiane  transversale.  Les  marques,  distantes 
d'abord  chez  les  deux  lapins  de  7  mill.  l'une  de  l'autre,  se  trouvèrent 
distantes  de  7,5  mill.  au  bout  de  huit  jours. 

Les  expériences  citées  suffiront  pour  prouver  que  la  croissance  in- 


52  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

terstitielle  des  os  existe,  et  qu'elle  est  d'autant  plus  forte  qu'on  se  rap- 
proche plus  du  bord  des  os. 

Mais  on  peut  encore  utiliser  la  méthode  des  marques  pour  d'autres 
expériences.  On  peut  à  son  aide  tirer  au  clair  le  rapport  qui  existe 
entre  l'intensité  respective  de  la  croissance  marginale  des  os  du  crâne 
le  long  des  diverses  sutures,  en  ayant  égard  à  la  position  et  à  la  forme 
(simple,  dentelée  ou  écailleuse)  des  sutures,  ainsi  qu'a  l'âge  de  l'a- 
nimal. De  pareilles  recherches  devraient  cependant  être  poursuivies 
d'une  façon  méthodique,  et  ce  que  je  puis  rapporter  ici  n'en  est  que 
les  premiers  commencements. 

Un  lapin  fut  marqué  deux  jours  après  sa  naissance  de  la  manière 
suivante  : 

1°  Deux  marques  furent  faites,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  fron- 
tale, chacune  à  la  même  distance  de  cette  suture,  et  à  deux  millimè- 
tres de  la  suture  coronaire. 

2°  Deux  marques  furent  faites,  une  de  chaque  côté  de  la  suture 
sagittale  (à  son  milieu),  chacune  à  la  même  distance  de  cette  suture. 

3°  Deux  marques  furent  faites,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  co- 
ronaire (à  son  milieu),  chacune  à  la  même  distance  de  cette  suture. 

Dans  chaque  cas  les  deux  marques  furent  faites  à  3  mill.  l'une  de 
l'autre.  Au  bout  de  18  jours  on  tua  le  lapin.  Les  marques  de  la  suture 
frontale  se  trouvèrent  alors  être  à  4,5  mill.  l'une  de  l'autre,  celles  de 
la  suture  sagittale  à  près  de  5,0  mill.,  et  celles  de  la  suture  coronaire 
à  5,5  millimètres. 

Un  autre  lapin  âgé  aussi  de  trois  jours  fut  marqué  comme  suit  : 

1°  Deux  marques,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  frontale  comme 
chez  le  lapin  précédent. 

2°  Deux  marques,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  sagittale,  à  deux 
millimètres  de  distance  de  la  suture  coronaire. 

3°  Deux  marques,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  sagittale,  à  deux 
millimètres  de  distance  de  la  suture  interpariétale. 

A  chacune  de  ces  trois  places  les  deux  marques  furent  faites  à 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  53 

4  mill.  l'une  de  l'autre.  Le  lapin  fut  tué  au  bout  de  26  jours.  Les 
marques  de  la  suture  frontale  se  trouvèrent  alors  être  à  5,2  mill.  l'une 
de  l'autre,  les  marques  antérieures  de  la  suture  sagittale  à  6,3  mill., 
les  marques  postérieures  de  la  suture  sagittale  à  6,0  millimètres. 

Un  lapin  âgé  de  deux  à  trois  jours  fut  marqué  à  côté  des  sutures 
frontale  et  coronaire  de  la  même  façon  que  le  premier  des  deux  précé- 
dents; mais  on  ne  le  tua  qu'au  bout  de  huit  semaines.  Les  marques 
de  la  suture  frontale  se  trouvèrent  alors  distantes  de  5,3  mill.,  celles 
delà  suture  coronaire  de  7,2  millimètres. 

La  même  opération  fut  encore  faite  à  deux  autres  lapins  du  même 
âge  qu'on  tua  aussi  au  bout  de  huit  semaines.  Les  marques  de  la  su- 
ture frontale  se  trouvèrent  alors  être  distantes  chez  le  premier  lapin  de 
4,7  mill.,  chez  le  second  de  4,2;  celles  de  la  suture  coronaire  chez  le 
le  premier  de  6,7  mill.,  chez  le  second  de  6,0.  Ces  animaux  étaient 
moins  robustes  que  le  précédent. 

A  un  lapin  âgé  de  deux  jours,  bien  soigné  par  sa  mère,  on  fit  le 
long  de  la  suture  coronaire  :  1°  deux  marques  près  des  sutures  sagit- 
tale et  frontale,  une  de  chaque  côté  de  la  suture  coronaire;  2°  deux 
marques  près  de  la  suture  temporale,  une  de  chaque  côté  de  la  suture 
coronaire.  Dans  chaque  cas  les  deux  marques  furent  faites  à  3  mill. 
l'une  de  l'autre;  à  l'extrémité  temporale  de  la  suture  coronaire  se 
trouve  comme  on  sait  une  écaille.  On  tua  le  lapin  au  bout  de  9  jours, 
et  l'on  trouva  les  marques  situées  près  des  sutures  sagittale  et  frontale 
distantes  de  4,8  mill.  l'une  de  l'autre,  celles  situées  près  de  la  suture 
temporale,  de  4,6  millimètres. 

Un  autre  lapin  marqué  exactement  comme  le  précédent  ne  fut  tué 
qu'au  bout  de  deux  mois  ;  les  marques  situées  près  des  sutures  sagit- 
tale et  frontale  se  trouvèrent  alors  distantes  de  6,3  mill.,  celles  situées 
près  de  la  suture  temporale,  de  6,0. 

La  différence  des  deux  paires  de  marques  entre  elles  chez  les  deux 
derniers  lapins  est  si  faible  qu'on  ne  peut  décider  si,  comme  le  prétend 
Welcker(/oc.  cit.,  p.  3),  la  croissance  des  os  est  moins  active  aux  écailles 


5i        RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

qu'aux  autres  sutures.  Mais  ce  qui  découle  avec  assez  de  certitude 
des  autres  expériences  précédentes  c'est  : 

1°  Que  la  plus  grande  activité  de  la  croissance  des  os  par  leur  bord 
a  lieu  dans  le  premier  âge. 

2°  Que  la  croissance  par  les  bords  est  surtout  forte  vers  la  suture 
coronaire,  moins  forte  vers  la  suture  sagittale,  et  le  plus  faible  vers 
la  suture  frontale. 

3°  Que  vers  la  suture  frontale  la  croissance  marginale  se  réduit 
à  rien  après  la  quatrième  semaine. 

Les  marques  présentent  souvent  une  singulière  modification  chez 
les  crânes  âgés  de  sept  à  huit  semaines.  Leur  forme  arrondie  qui  s'est 
conservée  à  la  face  interne  du  crâne,  s'est  changée  à  sa  face  externe 
en  un  triangle  dont  le  sommet  est  dirigé  vers  la  suture  la  plus  rap- 
prochée. C'est  à  ce  fait  qu'il  est  fait  allusion  dans  la  note  du  bas  de  la 
page  47,  chap.  xi. 

La  méthode  des  marques  ne  peut  naturellement  pas  servir  à  cons- 
tater la  croissance  interstitielle  des  os  du  crâne  dans  le  sens  de  leur 
épaisseur. 


En  terminant  cette  première  partie,  j'ajoute  encore  que  j'ai  essayé 
en  vain  jusqu'ici  de  provoquer  des  troubles  inflammatoires  sur  les 
bords  des  os  du  crâne  d'animaux  nouveau-nés  au  moyen  d'aiguilles 
fines  chauffées  presque  au  rouge.  Je  compte  cependant  reprendre 
ces  expériences  dès  que  mon  temps  me  le  permettra. 


DEUXIÈME    PARTIE 


INFLUENCE  D'AGENTS  CIRC0NV0IS1NS  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 


Les  causes  qui  influencent  du  dehors  la  croissance  du  crâne  sont 
complexes,  très-nombreuses  et  intimement  liées  les  unes  aux  autres. 
Aussi  est-il  d'un  côté  difficile  d'arracher  certaines  d'entre  elles  à  leurs 
connexions  avec  les  autres  pour  les  étudier  à  part,  et  de  l'autre 
presque  impossible  de  les  traiter  toutes  d'une  façon  quelque  peu  com- 
plète. Le  cerveau,  les  organes  des  sens,  les  muscles  et  les  dents  en- 
trent surtout  en  considération.  La  pesanteur  dont  l'action  est  surtout 
importante  chez  le  cerveau  est  l'agent  le  plus  couvert,  et  par  suite 
le  plus  inaccessible  à  l'expérience,  vu  qu'on  n'est  pas  en  état  de  main- 
tenir assez  longtemps  un  animal  dans  la  même  position.  Aussi  la 
laisserons-nous  de  côté  ;  je  mentionnerai  seulement  ici  un  crâne  d'en- 
fant que  possède  M.  le  professeur  Eberth  à  Zurich,  afin  de  donner  au 
moins,  à  l'aide  d'un  cas  particulier,  l'idée  de  l'influence  que  peut  avoir 
la  pesanteur  sur  la  configuration  du  crâne.  L'enfant  en  question  était 
atteint  d'hydrocéphale  à  un  degré  modéré,  et  était  forcé  par  un  ulcère 


56         RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

atteignant  jusqu'à  l'os  et  situé  sur  le  côté  gauche  de  la  tête  de  se 
tenir  couché  constamment  sur  le  côté  droit.  La  conséquence  de  cette 
position  fut  une  notable  asymétrie  du  crâne,  et,  ce  qu'il  faut  remar- 
quer, avec  conservation  parfaite  des  sutures.  La  moitié  droite  du 
crâne  tout  entière,  comprimée  par  la  résistance  du  support  (matelas 
ou  coussin),  est  rétrécie  dans  son  diamètre  transversal  ;  le  diamètre 
diagonal  qui  relie  l'os  frontal  droit  à  la  moitié  gauche  de  l'occiput 
s'est  par  contre  allongé.  Cette  asymétrie  est  très-frappante  lorsqu'on 
tient  le  crâne  de  façon  à  ce  que  son  diamètre  longitudinal  soit  placé 
verticalement.  Lorsqu'on  le  pose  de  façon  à  ce  que  le  diamètre  dia- 
gonal sus-mentionné  soit  horizontal,  il  fait  au  contraire  l'effet  à  peu 
près  symétrique.  C'est  que  la  plus  grande  partie  de  la  circonférence 
du  crâne  constitue  alors  autour  de  ce  diamètre  un  ovale  presque  ré- 
gulier, seulement  un  peu  aplati  vers  le  bas;  on  reconnaît  aussitôt 
dans  celte  forme  l'action  de  la  masse  cérébrale  qui  pendant  la  vie  a 
cherché  à  se  placer  autant  que  possible  en  équilibre. 


CHAPITRE  PREMIER 


DEPENDANCE  MUTUELLE  DU  CERVEAU  ET  DU  CRANE  DANS  LEUR  CROISSANCE. 
LÉSIONS  DU  CERVEAU. 


Il  s'est  formé  trois  opinions  principales  sur  le  rapport  qui  existe 
entre  la  croissance  du  cerveau  et  celle  du  crâne.  Ce  n'est  pas  le  cer- 
veau, dit  par  exemple  Engel  (1),  qui  forme  sa  boîte  osseuse,;  cette 
boite  se  développe  sous  l'influence  d'une  nécessité  mécanique,  et  le 
cerveau  s'accommode  à  la  forme  du  crâne.  La  seconde  opinion,  dia- 
métralement opposée  à  la  précédente,  est  représentée  entre  autres 
par  Ludwig  Fick  (2)  dans  ses  excellentes  recherches  expérimentales 
surles  diverses  formes  des  os.  D'après  cet  auteur,  c'est  le  cerveau  qui 
forme  sa  boîte,  et  non  la  boîte  qui  forme  le  cerveau,  autant  du  moins 
qu'il  n'y  a  pas  d'empêchement  de  la  part  de  forces  situées  hors  de  l'or- 


(1)  Engel,  Untersuchungen  iïber  Schàdelformen,  p.  123. 

(2)  Ludwig  Fick,  Neue  Untersuchungen  ûber  die  Ursachen  der  Knochenformen, 
p.  28. 

9 


58  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

ganisnie.  Enfin  Virchow  (I)  dit  :  on  ne  peut  douter  qu'il  ne  s'agisse 
d'une  action  réciproque;  ce  n'est  pas  exclusivement  le  cerveau  qui 
détermine  la  croissance  de  l'os  ou  vice-versà.  L'influence  que  les  deux 
parties  exercent  l'une  sur  l'autre  doit  évidemment  être  double  :  mé- 
canique et  organique.  Nous  ne  pouvons  cependant  méconnaître  que 
l'influence  organique  appartient  principalement  au  cerveau,  tandis  que 
l'influence  mécanique  appartient  à  un  haut  degré  aux  deux  parties. 

D'après  Lueâ  (2),  la  forme  du  cerveau  et  celle  du  crâne  sont  la 
condition  l'une  de  l'autre;  dans  chacune  sont  la  cause  et  l'effet. 
Welcker  (3)  laisse  aussi  croître  ensemble  l'enveloppe  et  son  contenu. 

Il  est  clair  qu'en  croissant  le  cerveau  doit  trouver  clans  le  crâne 
une  forte  résistance,  si  ce  dernier  ne  cède  devant  lui.  La  tension  pro- 
venant du  cerveau  est  en  somme  excentrique.  Mais  à  coté  de  cette 
tension  générale  se  font  aussi  sentir,  comme  l'a  déjà  fait  remarquer 
Fick  (4),  des  tensions  locales  dues  à  la  croissance  exagérée  de  cer- 
taines parties  du  cerveau,  ce  que  nous  allons  démontrer  par  des  faits. 
Pour  le  résultat  final  il  faut  en  outre  prendre  en  considération  les 
modifications  des  résistances. 

Nous  ne  faisons  que  rappeler  la  dilatation  extraordinaire  du  crâne 
humain  que  produit  l'hydrocéphale  des  nouveau-nés.  Une  dilatation 
du  crâne  relativemenl  très-considérable  se  produisit  aussi  chez  un 
jeune  lapin  par  une  encéphalite.  Au  fort  de  la  maladie  qui  fut  mor- 
telle, on  put  observer  une  véritable  folie  des  mouvements,  une  foule 
d'anomalies  de  coordination,  troublant,  croisant  et  empêchant  les 
mouvements  volontaires,  telles  que  je  n'en  ai  jamais  vu  de  plus  nom- 
breuses ni  de  plus  compliquées.  Le  crâne  est  photographié  de  dessus 
et  de  dessous  aux  ligures  1  et  2  de  la  planche  VIII.  On  avait  extirpé 
à  ce  lapin  la  suture  sagittale  en  enlevant  trop  des  deux  côtés,  el  au 

il»  R.  Virchow,  Untcrsuchungen  ttber  die  Eniwiclclung  des  Schàdelgrunde$,\>.  95. 

iïi  l.nr;ï,   [rchitectur  des  Menschenschâdels. 

(3)  Welcker,  fo  ■.  cit.,  p.  20. 

l'u  Fick,  V"f  Untersuchungen,  etc.,  p.  '-il 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  59 

lieu  d'une  nouvelle  suture  il  s'était  formé  un  écartement.  Jusqu'à  la 
quatrième  semaine  la  croissance  et  les  fonctions  eurent  lieu  sans 
trouble;  mais  au  bout  de  ce  temps  des  influences  nuisibles  se  firent 
sentir  sur  le  cerveau  qui  se  trouvait  sans  protection,  et  l'encéphalite 
se  développa  peu  à  peu.  La  figure  9  de  la  planche  XI  représente  le 
crâne  d'un  lapin  de  la  même  portée  et  du  même  âge,  chez  lequel,  à  la 
suite  aussi  d'une  extirpation  manquée  de  la  suture  sagittale,  un  écar- 
tement s'était  formé,  mais  sans  qu'il  se  fût  produit  d'encéphalite.  Ce 
crâne  sera  encore  utilisé  plus  bas,  mais  il  est  très-propre  à  fournir  ici 
des  mesures  comparatives. 

Le  plus  grand  diamètre  transversal  du  crâne  de  la  planche  VIII, 
figure  4,  est  de  29,  5  millimètres;  celui  du  crâne  de  la  planche  XI, 
figure  9,  est  de  25  millimètres. 

A  la  base  du  crâne  de  la  planche  VIII  (figure  2),  la  partie  des 
grandes  ailes  du  sphénoïde  qui  est  ordinairement  épaisse  et  poreuse 
se  trouve  devenue  mince  comme  du  papier.  Les  os  de  la  face,  le  maxil- 
laire inférieur,  tout  a  dû  céder  et  se  retirer.  Il  n'est  pas  possible  pour  le 
moment  de  poursuivre  ce  phénomène  jusque  dans  ses  derniers  dé- 
tails. La  grandeur  et  la  ténuité  des  dentelures  à  l'os  frontal  et  à  l'os 
interpariétal  présente  encore  de  l'intérêt;  c'est  un  phénomène  connu 
chez  les  crânes  démesurément  dilatés.  Les  régions  marginales  situées 
le  long  de  la  suture  coronaire  ont  été  moins  mises  à  contribution  que 
les  autres  par  suite  de  la  formation  de  l'écartement. 

L'extirpation  de  la  portion  supérieure  des  deux  grands  hémisphères 
cérébraux,  expérience  mentionnée  déjà  plus  haut,  forme  le  pendant 
de  l'observation  précédente.  Chez  l'animal  devenu  adulte  après  ladite 
extirpation  on  trouve  la  voûte  du  crâne  aplatie  et  rétrécie  dans  toutes 
les  directions.  Il  suffit  de  comparer  à  la  planche  VIII  la  figure  3  et. 
les  photographies  inférieures  des  figures  5  et  6  avec  la  figure  4  et  les 
photographies  supérieures  des  figures  5  et  6.  Nous  avons  déjà  fait  ob- 
server à  une  autre  occasion  que  les  dentelures  des  sutures  se  sont 
parfaitement  développées,  malgré  la  diminution  de  la  pression  du  cer- 


CI)  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

veau  pendant  un  temps  fort  long.  Il  n'y  a  pas  trace  d'oblitération  des 
sutures. 

Le  crâne  se  dilate  donc  au  delà  de  ses  proportions  normales  lorsque 
la  pression  de  son  contenu  augmente;  son  développement  demeure 
par  contre  au-dessous  des  proportions  normales  lorsque  la  pression 
de  ce  contenu  diminue. 

On  accusera  peut-être  l'expérience  précédente  (extirpation  des  deux 
hémisphères)  de  n'être  pas  pure,  de  comprendre  outre  la  diminution 
de  la  pression  cérébrale  une  lésion  considérable  du  crâne.  L'expé- 
rience enseigne  il  est  vrai  que  chez  les  animaux  nouveau-nés  de  pa- 
reilles lésions  guérissent  dans  la  règle  promptement  et  bien  ;  mais  au 
lieu  de  discuter  ce  tlrêïïie,  il  est  plus  simple  et  plus  utile  de  citer 
d'autres  expériences  auxquelles  on  ne  puisse  faire  aucune  objection 
analogue. 

Dans  mes  recherches  expérimentales  sur  le  système  nerveux 
(Archiv  far  Psychiatrie,  loc.  cit.),  j'ai  démontré  qu'en  renforçant  ou 
en  affaiblissant  l'activité  périphérique  des  nerfs,  on  peut  augmenter 
ou  diminuer  le  développement  des  centres  cérébraux  correspondants. 
11  est  clair  que  pour  atteindre  le  but  que  nous  nous  proposons  actuel- 
lement on  ne  doit  opérer  que  sur  les  nerfs  dont  le  centre  se  trouve 
immédiatement  sous  le  crâne.  Tels  sont  les  nerfs  olfactifs  des  Ron- 
geurs  etles  nerfs  optiques  des  oiseaux.  Au  moyen  d'une  excision  de 
la  muqueuse  qu'on  réunit  ensuite  à  l'aide  de  deux  ou  trois  ligatures, 
il  est  facile  de  produire  l'oblitération  complète  d'une  narine  chez  un 
lapin  nouveau-né.  Par  là  on  supprime  les  fonctions  des  nerfs  olfactifs 
correspondants,  et  on  force  ceux  du  cùté  opposé  à  une  activité  plus 
grande.  Les  nerfs  olfactifs  privés  de  courant  d'air  s'atrophient,  ce  qui 
provoque  l'atrophie  du  bulbe  olfactif  correspondant.  Les  nerfs  et  le 
bulbe  olfactif  du  côté  demeuré  ouvert  se  développent  par  contre  plus 
fortement.  Le  crâne  s'épaissit  autour  du  bulbe  olfactif  qui  s'atrophie; 
il  s'amincil  autour  du  bulbe  olfactif  qui  s'hypertrophie.  Quatre  beaux 
crânes  île  lapins  opéré-  de  la  sorte  sont  figurés  à  la  planche  VIII, 


SUR  LA  CU01SSANCE  DU  CRANE.  61 

figures  7,  8,  9  et  10.  Pour  clés  objets  aussi  fins,  l'examen  pur  et 
simple  des  photographies  donne  une  idée  plus  exacte  des  faits  que 
les  mesures,  même  lorsqu'elles  sont  prises  à  l'aide  de  la  loupe  et  du 
micromètre,  aussi  je  renonce  à  en  donner  ici. 

Lorsqu'on  enlève  l'une  des  rétines  à  un  pigeon  éclos  depuis  peu 
d'heures,  le  nerf  et  le  lobe  oplique  correspondants  s'atrophient;  chez 
l'animal  devenu  adulte  on  trouve  la  partie  du  crâne  contiguë  au  lobe 
optique  atrophié  de  moitié  plus  épaisse  que  celle  qui  est  contiguë  au 
lobe  optique  de  l'autre  côté.  —  Voir  planche  VIII,  figures  11  et  12; 
le  crâne  est  scié  par  le  milieu,  la  figure  11  représente  sa  moitié  an- 
térieure et  la  figure  12  sa  moitié  postérieure.  L'épaisseur  du  crâne,  là 
où  il  recouvre  les  lobes  optiques,  mesurée  sur  la  moitié  antérieure, 
est  à  droite  de  2  millimètres,  à  gauche  de  3  millimètres. 

En  extirpant  les  yeux  et  en  oblitérant  les  méats  auditifs  externes 
on  ôte  à  un  lapin  nouveau-né  la  faculté  de  se  servir  de  sa  vue  et  de 
son  ouïe.  En  le  maintenant  en  outre  isolé  dans  un  espace  étroit,  aussi 
loin  que  possible  de  toute  irritation  des  sens,  on  empêche  le  cerveau 
tout  entier  d'atteindre  son  complet  développement;  il  demeure  un 
peu  trop  petit.  Sont  cependant  exceptés  les  bulbes  olfactifs  sur  lesquels 
se  concentre  principalement  la  vie  intellectuelle;  ils  atteignent  au 
contraire  un  développement  supérieur.  Et  par  suite  on  trouve  chez 
l'animal  devenu  adulte  le  crâne  dilaté  et  aminci  autour  des  bulbes 
olfactifs,  épaissi  et  un  peu  moins  voûté  qu'à  l'état  normal  autour  du 
reste  du  cerveau.  —  Le  lecteur  est  prié  de  comparer  entre  elles  les 
deux  séries  de  segments  crâniens  transversaux  à  la  planche  VIII, 
figures  15  à  24.  La  première  série  (figures  15  à  19)  comprend,  divisé 
en  cinq  segments,  le  crâne  d'un  lapin  adulte  normal;  la  seconde 
(figures  20  à  24)  comprend,  divisé  aussi  en  cinq  segments,  le  crâne 
d'un  lapin  sourd  et  aveugle  traité  comme  ci-dessus  (1).  Les  segments 

(I)  Pour  bien  saisir  les  différences  sur  les  photographies,  il  faut  se  rappeler  qu'elles 
représentent  des  segments  épais  du  crâne,  ayant  une  profondeur,  et  non  de  minces 
tranches.  (Note  du  traducteur.) 


62  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

ont  été  sciés  aussi  exactement  au  même  endroit  que  possible,  comme 
je  l'ai  fait  remarquer  ailleurs  (Arcliiv  fur  Psychiatrie)  ;  quelques  petits 
défauts  ont  été  corrigés  en  polissant.  Les  figures  15  et  20  représentent 
la  région  des  bulbes  olfactifs.  Nous  voyons  à  la  figure  15,  cbez  le 
lapin  normal,  un  vide  cérébral  relativement  petit  et  un  crâne  relative- 
ment épais  (1);  à  la  figure  20,  chez  le  lapin  aveugle  et  sourd,  un 
vide  cérébral  relativement  grand  et  un  crâne  relativement  mince.  Aux 
figures  16  et  21  nous  avons  déjà  dépassé  la  région  du  bulbe  olfactif, 
et  le  rapport  devient  aussitôt  inverse.  La  figure  16  présente  un  vide 
cérébral  relativement  grand  et  des  os  relativement  minces,  la  figure  21 
un  vide  cérébral  relativement  petit  et  des  os  relalivemcnts  épais.  Les 
figures  17,  18  et  19  concordent  avec  la  figure  16,  les  figures  22,  23 
et  24  avec  la  figure  21. 

L'opération  à  l'aide  de  laquelle  on  détruit  la  rétine  a  été  décrite 
ailleurs  (Ârch.  f.  'Psychiatrie),  A  l'aide  de  deux  sections  ovalaires 
très-peu  convexes  (presque  parallèles)  atteignant  la  conjonctive  on 
circonscrit  la  fente  palpébrale  qui  est  encore  oblitérée.  Puis  on  sou- 
lève avec  la  pince  le  morceau  de  peau  ainsi  circonscrit,  on  détache  h 
l'aide  d'un  manche  de  scalpel  la  conjonctive  des  paupières,  et  on  en- 
lève  d'un  même  coup  avec  une  paire  de  ciseaux  le  morceau  de  peau, 
la  conjonctive  et  la  membrane  nictitante.  Après  quoi  on  pique  le 
globe  de  l'œil  avec  une  aiguille  à  cataracte,  on  le  tire  un  peu  hors  de 
l'orbite,  on  en  coupe  le  tiers  antérieur  avec  les  ciseaux,  et  on  enlève 
le  cristallin,  le  corps  vitré  et  la  rétine;  enfin  on  réunit  les  deux  lèvres 
de  la  plaie  des  paupières.  L'oblitération  artificielle  du  méat  auditif 
exti  rne  est  un  peu  plus  difficile.  Après  avoir  coupé  le  pavillon  de  l'o- 
reille à  sa  base,  on  saisit  avec  la  pince  le  cartilage  du  méat  auditif 
externe,  on  détache  prudemment  les  muscles  à  l'aide  d'un  petit 
calpel  pas  trop  tranchant,  on  pénètre  jusqu'au  tympan,  et  ou  coupe 
le  méal  auditif  externe  ainsi  mis  à  nu  aussi  près  que  possible  Ai'  celte 

(I)  Voir  du  re  te  la  remarque  dan     irchiv  fur  Psychiatrie,  loc.  ril .,  p.  710. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.  63 

membrane,  après  quoi  on  coud  la  plaie.  Si  l'on  opère  bien,  il  ne 
coule  presque  pas  de  sang  et  il  ne  reste  rien  du  méat  auditif  externe. 
Lorsqu'une  portion  de  ce  dernier  a  échappé  à  l'extirpation,  la  sécré- 
tion des  glandes  cérumineuses  qu'elle  renferme  s'amasse  souvent  en 
grande  quantité,  ce  qui  peut  parfois  devenir  très-gênant  (1). 

L'épaississement  du  crâne  que  nous  venons  de  décrire  comme  se 
produisant  chez  les  animaux  sourds  et  aveugles  élevés  jusqu'à  l'âge 
adulte  avec  la  méthode  de  Caspar  Hauser  ne  se  montre  pas  tou- 
jours d'une  façon  aussi  marquée  que  chez  l'individu  de  la  planche  VIII. 
Plus  le  champ  sur  lequel  se  produit  la  diminution  de  pression  est 
libre  et  étendu,  plus  l'épaississement  du  crâne  se  fait  indéfini  et  ef- 
facé; au  contraire,  plus  ce  champ  est  étroit,  limité  et  encaissé,  plus 
l'épaississement  du  crâne  est  considérable  et  frappant.  —  Cependant 
la  chose  n'est  peut-être  pas  tout  à  fait  aussi  simple  que  nous  l'ad- 
mettons ici,  et  il  n'est  pas  impossible  que,  dans  le  dernier  cas, 
d'autres  causes  que  la  diminution  de  pression  du  cerveau  soient 
en  jeu. 

Les  oiseaux  vivent  par  la  vue,  aussi  l'extirpation  des  deux  yeux  a- 
t-elle  sur  eux  l'action  la  plus  profonde;  leur  cerveau  se  développe  in- 
suffisamment et  ils  deviennent  imbéciles.  Les  figures  43  et  14  de  la 
planche  VIII  représentent  le  crâne  d'un  pigeon  adulte  auquel  on  avait 
enlevé  les  deux  yeux  peu  après  son  éclosion.  Malheureusement  la 
section  du  crâne  n'a  pas  été  faite  aussi  exactement  que  chez  celui  des 
figures  11  et  12;  la  moitié  postérieure  a  seule  pu  être  égalisée  après 
coup,  de  façon  à  permettre  une  comparaison  avec  la  figure  12.  Tandis 

(I)  Voici  comment.  Le  lapin  nouveau-né  n'a  pas  encore  la  portion  osseuse  du  méat 
auditif  externe;  son  tympan  n'est  entouré  que  d'un  anneau  osseux  fort  étroit;  c'est 
pour  cela  qu'on  peut  enlever  le  méat  auditif  jusqu'au  tympan.  A  mesure  que  l'animal 
devient  adulte  cet  anneau  osseux  se  prolonge  en  dehors,  formant  un  tube  :  la  portion 
osseuse  du  méat  auditif  externe.  Si  lors  de  l'extirpation  on  a  laissé  au  fond  quelque 
portion  du  méat  cartilagineux  avec  ses  glandes,  la  sécrétion  de  celles-ci  ne  peut  s'é- 
couler que  dans  le  tube  osseux  en  question,  lequel  se  dilate  alors  énormément  sous  la 
pression  continue  du  cérumen.  (Note  du  traducteur,  d'après  l'auteur.) 


Ci  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

que  le  crâne  de  la  figure  '12  a  un  diamètre  transversal  de  21,  5  mil- 
limètres et  un  diamètre  vertical  de  21,  0  millimètres,  celui  de  la 
figure  14  a  un  diamètre  transversal  de  19,  5  millimètres  et  un  dia- 
mètre vertical  de  19,  0  millimètres  (1).  Par  contre  les  os  du  dernier 
sont  plus  épais  que  ceux  du  premier;  celte  différence  est  cependant 
moins  forte  que  je  ne  l'aurais  cru. 

Déjà  maintenant,  après  les  expériences  qu'on  vient  de  voir,  il  ne 
peut  plus  paraître  douteux  que  le  cerveau  n'ait  une  action  importante 
sur  le  développement  et  sur  la  forme  du  crâne;  un  crâne  parfaitement 
conformé  suppose  nécessairement  un  cerveau  parfaitement  conformé. 
Mais  l'extirpation  de  la  portion  supérieure  d'un  des  grands  hémis- 
phères cérébraux  démontre  mieux  que  toute  autre  expérience  l'action 
formatrice  du  cerveau  jusque  dans  ses  détails  les  plus  fins.  L'objec- 
tion encore  admissible  à  l'extirpation  des  lobes  supérieurs  des  deux 
hémisphères  tombe  ici  où  nous  n'avons  affaire  qu'à  un  seul,  vu  que 
dans  le  premier  cas  il  s'agissait  de  la  voûte  du  crâne,  tandis  que  dans 
le  cas  actuel  il  s'agit  de  sa  base  à  laquelle  l'opération  ne  touche  pas. 

Les  figures  1  et  2  de  la  planche  X  donnent  l'image  très-réussie  de 
la  base  du  crâne  de  deux  lapins  adultes.  On  leur  avait  enlevé  à  tous 
deux,  deux  ou  trois  jours  après  leur  naissance,  la  portion  supérieure 
de  l'hémisphère  cérébral  gauche,  et  les  os  s'étaient  chez  tous  deux 
refermés  sans  laisser  d'écartement.  Le  cerveau  se  mit  alors  à  croître 
dans  l'espace  vide  ainsi  obtenu.  Ses  lobes  inférieurs,  encaissés  dans 
les  cavités  de  la  base  du  crâne,  poussèrent  devant  eux  les  parois  de 
ces  dernières,  ce  qui  produisit  une  forte  scoliose  de  la  base  du  crâne 
tout  entière  (déviation  à  gauche,  en  avant  comme  en  arrière)  (2).  Mais 
d'un  autre  côté  le  crâne,  par  suite  de  la  diminution  de  résistance, 


1 1 1  Les  deux  pigeons  opérés  étaient  de  la  môme  couvée.  Je  ne  possède  à  mon  regret 
pas  d'autres  crânes  pareils. 

(2)  La  scoliose  du  crâne  de  la  planche  XI,  figure  II  (nussi  un  cas  d'extirpation  de 
l'hémisphère  gauche),  provient  d'une  lésion  de  l'os,  d'un  trouble  de  nutrition  à  la 
suture  coronaire. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  65 

s'avança  à  l'intérieur  du  côté  où  l'extirpation  avait  eu  lieu,  et  le  sillon 
sphénoïdal  (sulcus  sphenoidalis,  Krause)  gauche  se  voûta  de  façon  à 
devenir  un  véritable  canal.  Pour  mieux  faire  comprendre  ce  phéno- 
mène, j'ai  fait  figurer  à  la  figure  13  de  la  planche  I  la  surface  infé- 
rieure d'un  cerveau  opéré  comme  nous  venons  de  le  voir.  Ce  cerveau 
est  celui  du  crâne  de  la  planche  X,  figure  3;  on  l'a  extrait  en  brisant 
la  base  de  ce  dernier.  En  l'extrayant  de  cette  manière,  ce  qui  épar- 
gnait la  voûte  du  crâne  dont  j'avais  besoin,  il  fallait  à  la  vérité  sacrifier 
le  pont  de  Varole,  la  moelle  allongée  et  le  cervelet;  déplus  le  cerveau 
a  souffert  par  la  rétraction  provenant  d'un  long  séjour  dans  l'alcool. 
Malgré  tout  cela  sa  déviation  est  très-visible.  Je  fais  encore  remarquer 
en  passant  qu'en  extirpant  l'hémisphère  cérébral  gauche  on  avait  sans 
le  vouloir  enlevé  en  outre  le  tubercule  quadrijumeau  antérieur  du 
même  côté,  ce  qui  produisit,  comme  on  le  voit  sur  la  figure,  une 
atrophie  partielle  du  nerf  optique  droit. 

Les  cas  où  l'opération  précédente  a  vraiment  bien  réussi  ne  per- 
mettent pas  de  douter  que  dans  certaines  circonstances  ce  soit  le 
cerveau  qui  forme  le  crâne  (pi.  X,  fig.  1  et  2).  Et  cependant  la  même 
expérience,  l'extirpation  d'un  hémisphère  cérébral,  fournit  une  preuve 
non  moins  importante  du  fait  opposé,  savoir  que  dans  d'autres  cir- 
constances c'est  le  crâne  qui  forme  le  cerveau. 

Les  figures  3  et  4  de  la  planche  X  représentent  la  voûte  du  crâne 
de  deux  lapins  opérés  de  la  même  façon  que  ceux  des  figures  1  et  2 
de  la  même  planche.  Autant  la  base  du  crâne  (fig.  1  et  2)  est  déviée, 
autant  la  voûte  a  conservé  sa  configuration  normile,  à  part  un  apla- 
tissement insignifiant  du  côté  gauche  (1).  Pourtant  un  examen  atten- 
tif démontre  que.  le  cerveau  a  dévié  aussi  à  sa  face  supérieure  d'une 
façon  considérable;  mais  tandis  qu'à  la  base  il  a  poussé  devant  lui 
les  cloisons  des  cavités  de  l'os,  à  la  voûte  il  a  simplement,  vu  la  résis- 


(1)  Je  reconnais  du  reste  que  le  contraste  que  je  viens  de  faire  ressortir  entre  les 
phénomènes  présentés  par  la  base  et  par  la  voûte  du  crâne  n'en  est  au  fond  pas  un. 

10 


66  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

tance  moindre,  glissé  sous  l'os  vers  le  côté  gauche,  se  pliant  ainsi  lui- 
même  à  la  forme  de  l'os  sans  l'altérer  (1). 

Au  lieu  d'extirper  seulement  la  moitié  supérieure  d'un  hémisphère 
cérébral,  on  peut  l'extirper  tout  entier.  Dans  Archiv  fur  Psychiatrie, 
loc.  cit.  (p.  709),  j'ai  recommandé  comme  premier  temps  de  cette 
opération  une  section  horizontale  antérieure  à  travers  le  crâne  allant 
d'un  côté  de  la  suture  lambdoïde  à  l'autre,  de  façon  à  ce  qu'on  puisse 
rabattre  en  arrière  la  voûte  du  crâne  tout  entière  autour  de  cette  su- 
ture servant  de  charnière.  11  est  cependant  plus  avantageux  tic  ne 
pratiquer  la  section  que  d'un  seul  côté  et  de  rabattre  la  moitié  cor- 
respondante du  crâne  sur  l'autre  autour  des  sutures  frontale  et  sagit- 
tale comme  charnière.  Après  cela  (2)  on  extirpe  aussi  profondément 
que  possible  l'hémisphère  mis  à  nu,  de  façon  à  mettre  à  découvert  les 
tubercules  quadrijumeaux  qui  servent  à  s'orienter  pour  ce  qui  suit. 
L'iiémorrhagie  étant  forte,  on  attend  un  peu  jusqu'à  ce  qu'elle  cesse 
et  qu'on  puisse  enlever  le  caillot.  On  introduit  alors  une  cuiller  de 
Daviel  sous  la  convexité  postérieure  du  lobe  pyriforme  (lobe  olfactif); 
puis  on  la  soulève  un  peu,  on  l'amène  en  dehors,  sur  le  rebord  du 


(1)  Chez  l'homme,  des  déviations  do  ce  genre,  mais  modérées,  sont  relativement 
fréquentes.  Elles  atteignent  cependant  parfois  une  importance  facilement  méconnue, 
ainsi  lors  de  la  destruction  de  portions  considérables  du  cerveau  par  suite  de  maladies 
foetales.  On  ne  peut  par  exemple  pas  expliquer  sans  phénomène  de  déviation  la  forme 
d'un  cerveau  comme  celui  du  cas  de  Cyclopie  incomplète  publié  par  Heclcer  et  llulil 
dans  le  Monatsschrifl  filr  Geburtskunde,  Bd.  XXXI,  llel't  6.  Là  l'hémisphère  cé- 
rébral   gauche    ayanl  été  presque  entière nt  détruit,  l'hémisphère  droit  fut  poussé 

;\  gauche  dans  l'espace  ainsi  devenu  libre.  Le  cerveau  de  l'enfant  nouveau-né  idiot 
don!  nous  avons  parlé  ailleurs  (première  partie,  chap.UI,  noie  du  bas)  est  encore  plus 
instructif.  L'hémisphère  cérébral  droit  a  crû  en  avant  autour  du  gauche,  et  a  recou- 
vert sa  base.  Par  suite,  l'artère  cérébrale  antérieure  se  trouve  sur  l'hémisphère  droit. 
et  n'atteint  la  scissure  interhémisphérique  qu'arrivée  à  la  surface  supérieure  du  cer- 
veau; par  suite  encore,  les  deux  bulbes  olfactifs  se  trouvent  implantés  sur  l'hémis- 
phère droit,  une  preuve  de  plus  que  leur  développement  se  fait  à  pari,  en  lieu  et 
place,  el  qu'il  ne  dépend  pas  du  cerveau. 

(2)  Les  expériences  sur  le  système  nerveux  central  sont  si  intimement  liées  à  celles 
bui'  la  croissance  du  crâne  que  quelques  répétitions  son)  inévitables. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  67 

crâne,  après  quoi  on  la  conduit  autour  des  couches  optiques  devenues 
plus  visibles  par  la  manipulation  précédente;  enfin  on  pénètre  avec  la 
cuiller  dans  le  corps  strié,  en  en  enlevant  le  moins  possible,  et  on  en 
sépare  le  reste  de  l'hémisphère  qu'on  extrait  entièrement  du  crâne. 
L'opération  terminée,  on  rabat  de  nouveau  le  crâne,  on  le  remet  exac- 
tement en  place,  et  l'on  recoud  la  peau  par  dessus.  Tout  guérit  à 
l'ordinaire  bien  et  vite;  puis  l'animal  se  développe  sans  qu'on  puisse 
observer  le  moindre  trouble  dans  ses  mouvements,  ni  dans  aucun  de 
ses  sens,  ni  dans  l'expression  de  ses  facultés  intellectuelles.  Lorsqu'on 
tue  le  lapin  après  l'avoir  laissé  vivre  quatre  à  huit  semaines  ou  plus, 
on  obtient,  en  ce  qui  concerne  le  crâne,  le  même  résultat  que  dans 
l'extirpation  partielle,  seulement  à  un  degré  plus  considérable.  Ce  qui 
cependant  est  nouveau,  c'est  l'amas  de  sérosité  qui  se  produit  là  où  le 
crâne  et  le  cerveau  n'ont  pu  arriver  à  se  rejoindre.  Cette  insuffisance 
de  l'accommodation  est  plus  encore  que  sa  réciprocité  une  preuve 
importante  de  l'indépendance  relative  de  la  croissance  du  crâne  et  de 
celle  du  cerveau. 


CHAPITRE   II 


DEPENDANCE   MUTUELLE   DU   CERVEAU   ET    DU    CRANE   DANS   LEUR  CROISSANCE. 
LÉSIONS   DU    CRANE. 


Nous  avons  vu  l'action  des  lésions  du  cerveau  sur  le  crâne;  voyons 
maintenant  celle  des  lésions  du  crâne  sur  le  cerveau.  Chez  les  Indiens 
â  tète  plate  de  l'Amérique  du  Nord,  chez  quelques  tribus  indigènes 
du  Mexique  et  du  Pérou,  chez  les  habitants  de  quelques  départements 
du  midi  de  la  France,  on  trouve  la  coutume  bien  connue  de  produire 
des  anomalies  de  la  forme  de  la  tête  au  moyen  de  planches,  de  com- 
presses, de  bandages  ou  de  bonnets.  Les  expériences  de  ce  genre  que, 
je  IN  chez  dos  lapins  manquèrent,  quoùpie  les  liens  devant  servir  à 
resserrer  le  crâne  fussent  constitués  par  la  peau  même  de  l'animal, 
de  sorte  que  celui-ci  ne  pouvait  pas  les  enlever.  J'avais  pratiqué  sur 
la  convexité  de  la  tête  deux  sections  cutanées  transversales  et  pa- 
rallèles,  éloignées  de  5  mill.  l'une  de  l'autre  et  allant  de  l'angle  du 
maxillaire  inférieur  gauche  à  l'angle  du  maxillaire  inférieur  droit.  Puis 
j'avais  coupé  à  son  milieu  (sommet  du  crâne)  la  bande  transversale 


RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE.        C9 

résultant  de  cette  opération,  et  raccourci  de  7  raill.  à  partir  de  ce 
point  chacune  des  deux  lanières  latérales  ainsi  formées,  en  enlevant  à 
chacune  d'elles  un  morceau  de  cette  longueur.  Après  quoi  j'avais  dé- 
taché du  tissu  subcutané  les  deux  lanières  ainsi  raccourcies,  et  je  les 
avais  réunies  l'une  à  l'autre  et  au  reste  de  la  peau  au  moyen  de  liga- 
tures, ce  qui  les  avait  fortement  tendues.  L'opération  elle-même  réussit 
tout  à  fait,  mais  la  lanière  de  peau  qui  au  commencement  produit  un 
resserrement  marqué  se  détend  très-vite,  de  sorte  que  bientôt  on  ne 
voit  plus  trace  de  resserrement. 

Nous  avons  appris  à  connaître  un  autre  mode  d'augmentation  de 
l'action  compressée  du  crâne  :  les  atrophies  partielles  obtenues  par 
la  ligature  des  carotides. 

Les  sutures  du  crâne  sont,  dit-on,  maintenues  tendues  par  la  pression 
cérébrale;  Fick  (1)  prétend  même  que  l'oblitération  d'une  suture 
ne  peut  avoir  lieu  que  lorsque  la  pression  cérébrale  cesse  d'agir  sur 
elle.  Hagen  (2)  est  aussi  d'opinion  que  l'oblitération  hâtive  des  su- 
tures est  le  signe  d'un  arrêt  de  la  croissance  du  cerveau  dans  cer- 
taines directions.  Il  est  incontestable  que,  tant  que  le  cerveau  croît, 
les  sutures  qui  sont  une  partie  du  crâne  demeurent  ainsi  que  celui-ci 
maintenues  dans  un  certain  état  de  tension.  D'un  autre  côté,  on  ne  se 
trompera  guère  en  se  représentant  cette  pression  comme  étant  peu 
considérable.  Lorsque  des  écartements  même  relativement  très-larges 
se  forment  dans  le  crâne  d'un  lapin  nouveau-né,  le  cerveau  ne  les 
utilise,  on  peut  dire  jamais,  pour  sortir  partiellement  de  sa  boîte,  tant 
que  sa  pression  demeure  normale.  La  figure  9  de  la  planche  XI  re- 
présente un  crâne  qui  a  un  écartement  fort  large;  le  cerveau  n'y 
avait  cependant  jamais  pénétré.  Quant  à  l'assertion  de  Fick,  elle  est 
erronée,  ce  qui  a  déjà  été  démontré  par  Virchow  dans  les  travaux  que 
cite  Fick  lui-même.  Nous  voyons  les  sutures  continuer  d'exister  non- 


(1)  Neue  Untersuchungen,  p.  27. 

(2)  Psychiatrische  Zeitschrift,  1855,  p.  43. 


70  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

seulement  après  que  le  cerveau  a  atteint  sa  grandeur  normale,  mais 
encore  dans  certains  cas  jusqu'à  un  âge  fort  avancé,  même  lorsqu'il 
a  déjà  commencé  à  s'atrophier  et  qu'un  liquide  séreux  a  rempli  à  sa 
place  les  vides  de  la  cavité  du  crâne  devenue  trop  grande.  11  me  sera 
peut-être  permis  de  rappeler  ici  le  résultat  de  l'extirpation  de  la  moitié 
supérieure  des  deux  hémisphères  céréhraux  :  la  voûte  du  crâne  suhit 
un  aplatissement  général,  mais  conserve  ses  sutures  parfaitement  in- 
tactes. 

Lorsque  le  long  d'une  suture  il  se  produit  une  nécrose  des  éléments 
constitutifs  de  l'os,  ce  qui  arrête  plus  ou  moins  en  cet  endroit  la  crois- 
sance du  crâne  et  l'empêche  par  conséquent  de  se  dilater,  cette  résis- 
tance locale  exagérée  produit  une  légère  augmentation  de  la  pression 
cérébrale  générale.  Le  cerveau,  cédant  à  la  résistance  locale,  dé- 
termine à  l'aide  de  la  pression  générale  les  dilatations  compensatoires 
dont  nous  avons  parlé  plus  haut.  Chez  tous  les  crânes  de  lapin  par 
exemple  où  la  croissance  marginale  le  long  de  la  suture  coronaire 
droite  a  souffert,  la  moitié  droite  du  cerveau,  ne  pouvant  plus  demeurer 
dans  la  moitié  droite  du  crâne  incapable  de  se  dilater  normalement, 
dépasse  la  suture  sagittale  et  envahit  la  moitié  gauche  du  crâne  en 
poussant  simplement  devant  elle  la  faux  du  cerveau  et  le  sinus  longi- 
tudinal supérieur.  Pour  rendre  ce  fait  évident  sur  la  photographie 
j'iii  fait  une  raie  marquant  le  parcours  du  sinus  longitudinal  à  la 
surface  du  crâne  figuré  planche  III,  figure  4,  immédiatement  après 
avoir  tué  le  lapin.  Je  m'assurai  cependant  plus  tard  que  cette  peine 
est  inutile.  On  peut  en  effet  toujours,  même  chez  un  crâne  macéré, 
reconnaître  la  position  qu'a  occupée  le  cerveau  à  l'arête  osseuse  qui 
s'insinue  entre  les  deux  hémisphères,  ainsi  qu'aux  deux  sillons  plats 
parallèles  à  cette  arête  et  servant  à  recevoir  les  deux  faibles  cir- 
convolulions  longitudinales.  Mans  la  première  partie  de  ce  travail, 
nous  avons  déjà  vu  divers  faits  relatifs  aux  dilatations  compensa- 
toires. Comme  les  rétrécissements,  elles  forment  des  séries  entières, 
commenccnl  aux  régions  marginales  demeurées  normales  de  l'osât- 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE  71 

Icint  partiellement  d'un  trouble  de  nutrition,  vont  ensuite  plus  loin 
et  s'étendent  à  toutes  les  parties  du  crâne  situées  en  dehors  de  la 
craniosténose;  je  rappelle  ici  la  figure  8  de  la  planche  V.  Nous  avons 
relevé  la  règle  de  Virchow,  savoir  que  la  dilatation  a  lieu  dans  une 
direction  parallèle  à  la  suture  oblitérée  ou  à  l'état  fœtal,  et  nous 
avons  ajouté  que  cette  règle,  comme  celle  des  rétrécissements,  a  besoin 
de  certaines  modifications.  A  ce  dernier  point  de  vue  je  me  permets 
de  renvoyer  encore  une  fois  aux  figures  8  et  4  de  la  planche  V,  dans 
lesquelles  les  diamètres  verticaux  paraissent  ngésallo  ;  je  recommande 
aussi  de  mesurer  la  figure  10  dans  toutes  les  directions  à  partir  du 
milieu  du  corps  de  l'os  sphénoïde.  Dans  les  cas  de  rétrécissements  par- 
tiels avec  dilatations  compensatoires,  la  comparaison  de  chacun  des  os 
correspondants  de  chaque  côté  est  fort  instructive;  mais  là  l'œil  à  lui 
seul  est  presque  meilleur  juge  en  somme  que  le  compas  et  l'échelle. 

Nous  avons  du  reste  déjà  vu  chez  le  maxillaire  inférieur  droit  de 
la  planche  VII,  figure  '16,  avec  sa  surface  articulaire  repoussée  en  bas, 
que  le  cerveau  en  croissant  vient  facilement  à  bout  de  résistances  qui 
paraissaient  assez  fortes. 

D'après  Engel  (1)  la  nature  a  répondu  par  maint  crâne  d'idiot  à  la 
question  de  savoir  quelle  forme  doit  prendre  un  crâne  dont  les  sutures 
s'ossifient  prématurément  tandis  que  l'os  devient  épais  et  résistant. 
La  chose  n'est  pas  si  simple.  Il  est  certain  qu'une  localité  du  crâne  en 
train  de  s'atrophier  ne  favorise  pas  la  croissance  du  cerveau  ;  s'il  en 
était  autrement  on  ne  verrait  pas  le  cerveau  glisser  sous  elle  et  croître 
dans  la  direction  des  résistances  moindres.  Mais  d'un  autre  côté  nous 
avons  vu  que  les  sutures  ne  prennent  par  elles-mêmes  aucune  part  à 
l'accroissement  des  os,  ceux-ci  ne  croissant  pas  seulement  par  leurs 
bords,  mais  aussi  par  leurs  surfaces  et  dans  leur  tissu  même  (crois- 
sance interstitielle);  —  nous  avons  été  frappés  delà  dilatation  fabu- 
leuse dont  le  crâne  est  capable  dans  l'hydrocéphale  infantile,  et  de  la 

(I)  Untersuchungen  iïber  Schàdelformen,  p.  73. 


72  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

manière  admirable  dont,  après  la  ligature  des  carotides,  les  trous  trans- 
versaux des  vertèbres,  qui  forment  cependant  plus  tard  des  canaux 
fermés  sans  sutures,  s'élargissent  à  mesure  que  les  artères  vertébrales 
augmentent  de  calibre  (pi.  VI,  fig.  12  et  13);  —  nous  avons  appris 
quelles  dimensions  énormes  la  partie  osseuse  du  méat  auditif  externe 
peut  atteindre  par  suite  d'un  amas  de  cérumen  lorsqu'on  extirpe  in- 
complètement sa  partie  cartilagineuse  (expérience  du  lapin  sourd  et 
aveugle,  voir  au  chapitre  I  de  la  II0  Partie,  note  du  bas);  —  nous 
nous  sommes  enfin  assurés  (pi.  V,  fig.  10,  surface  de  section  des  os 
pariétaux)  que  sous  la  pression  du  cerveau  le  crâne,  clans  le  domaine 
d'une  sténose,  se  ramincit,  malgré  la  croissance  par  les  surfaces, 
ce  qui  produit  une  légère  augmentation  compensatoire  de  sa  cavité 
notablement  rétrécie  d'autre  part.  —  Tous  ces  faits  étant  posés,  on 
ne  se  sentira  guère  tenté  d'admettre  sans  autre  raison  la  réponse 
qu'Engel  met  dans  la  bouche  de  la  nature,  soit  de  rendre  l'oblitéra- 
tion plus  ou  moins  complète  des  sutures  chez  un  crâne  d'idiot  seule 
responsable  de  l'idiotisme. 

Une  troisième  méthode  d'expérimentation  consiste  à  diminuer  la 
pression  du  crâne  en  provoquant  la  formation  d'écartements  (pi.  VII, 
fig.  1  et  2).  Chez  un  premier  lapin  nouveau-né  on  pratiqua  sur  la 
moitié  gauche  du  crâne  une  section  horizontale  à  travers  l'os  frontal 
et  l'os  pariétal;  chez  un  second  on  enleva  à  l'os  pariétal  gauche  une 
bandelette  d'os,  parallèlement  à  la  suture  sagittale.  Chez  tous  les  deux 
il  se  forma  un  écartement  qui  est  certainement  dû  à  la  tension  pro- 
venant du  cerveau;  d'un  autre  côté  il  est  tout  aussi  certain  que  là  où 
esl  l'écartement  la  résistance  du  crâne  est  plus  faible.  En  effet,  le 
crâne  est  dans  les  deux  cas  un  peu  plus  convexe  à  gauche,  du  côté 
de  écarlements,  l'os  pariétal  droit  est  trop  peu  développé,  cl  les  su- 
turcs  frontale  et  sagittale  forment  un  arc  dont  la  concavité  esl  à 
gauche.  Et  cependant,  si  l'on  excepte  la  convexité  un  peu  plus  forte 
du  côté  gauche  que  nous  venons  de  voir,  la  configuration  générale 
des  deux  crânes  esl  h  fort  peu  de  chose  près  normale.  On  obtient  en 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  73 

somme  les  mêmes  résultats  —  toujours  en  supposant  qu'il  se  forme 
un  écartement  —  quand  on  enlève  du  côté  opéré  la  moitié  supérieure 
de  l'hémisphère  cérébral  (pi.  VII,  fig.  3  et  4).  La  figure  9  de  la 
planche  XI  s'applique  aussi  à  ce  que  nous  disons,  ainsi  que  les  re- 
marques faites  plus  haut  à  son  égard. 

Nous  n'avons  pas  besoin  d'autres  expériences.  Toutes  celles  que 
nous  venons  de  voir  dans  ces  deux  chapitres  démontrent,  me  semble- 
t-il,  plus  que  suffisamment  que  le  crâne  influence  la  forme  du  cerveau 
et  que  réciproquement  le  cerveau  influence  la  forme  du  crâne.  Le 
cerveau  et  le  crâne  sont  dès  le  commencement  pour  ainsi  dire  modelés 
l'un  sur  l'autre;  ils  croissent  ensemble,  et  portent  cependant  en  eux- 
mêmes  chacun  les  conditions  fondamentales  de  leur  forme  respective. 


CHAPITRE  III 


INDÉPENDANCE    RELATIVE   DE   LA    CROISSANCE    DU    CRANE, 
AINSI   QUE   DE   CELLE   D'AUTRES   OS. 


Je  viens  de  dire  que  malgré  leur  dépendance  mutuelle  le  cerveau 
et  le  crâne  portent  en  eux-mêmes  les  conditions  fondamentales  de 
leur  forme  respective.  Bon  nombre  d'observations  contenues  dans  les 
deux  chapitres  précédents  parlent  pour  la  justesse  de  cette  proposition. 
Je  ne  rappelle  ici  que  l'extirpation  d'un  hémisphère  cérébral  entier 
et  l'amas  subséquent  de  sérosité  aux  endroits  où  le  cerveau  et  le 
crâne  n'arrivent  pas  à  se  toucher.  —  Mais  la  tête  d'enfant  nouveau- 
né  idiot  déjà  deux  fois  citée  offre  une  preuve  à  divers  égards  encore 
plus  concluante  de  ce  que  j'avance.  Le  crâne  s'est  développé  d'une 
façon  remarquablement  normale.  Sur  le  milieu  de  sa  base  repose  le 
cerveau  proprement  dit  qui  est  cylindrique,  assez  solidement  enfermé 
dans  sa  dure-mère  (la  pie-mère  et  l'arachnoïde  se  trouvent  sous  celle- 
ci;,  et  atrophié  à  un  très-haut  degré.  L'espace  situé  entre  la  dure- 


RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.         75 

mère  et  le  périoste  interne  du  crâne  (non  point  celui  situé  entre  la 
dure-mère  et  l'arachnoïde  ou  entre  cette  dernière  et  la  pie  mère)  cons- 
titue la  plus  grande  partie  de  la  cavité  crânienne;  il  était  rempli  de 
sérosité.  Le  plus  grand  diamètre  transversal  du  cerveau  est  de  39  mil- 
limètres, tandis  que  le  plus  grand  diamètre  transversal  du  crâne  est 
de  89  millimètres.  Les  cavités  latérales  de  la  base  du  crâne  sont  si 
parfaitement  conformées  qu'on  peut  à  peine  les  distinguer  de  celles 
d'un  crâne  normal  ;  et  cependant  elles  ne  contiennent  aucune  portion 
du  cerveau.  C'est  difficile,  il  est  vrai,,  de  déterminer  l'époque  exacte  à 
laquelle  a  commencé  l'affection  embryonnaire  qui  a  troublé  la  crois- 
sance du  cerveau.  Il  n'est  pas  improbable  que  pendant  les  premiers 
mois  le  cerveau  ait  rempli  ces  cavités,  mais  il  est  certain  que  pendant 
plusieurs  mois  avant  la  naissance  cela  n'a  pu  être  le  cas  ;  la  taille  et  la 
constitution  interne  du  cerveau  en  sont  la  preuve.  On  ne  peut  donc 
s'empêcher  de  penser  que  la  pression  de  la  sérosité  a  suffi  pour  per- 
mettre au  crâne  d'atteindre  un  développement  relativement  normal 
malgré  l'état  rudimentaire  auquel  demeurait  le  cerveau.  Si  cette  ex- 
plication était  la  vraie,  l'hypothèse  de  l'influence  du  cerveau  sur  la 
configuration  du  crâne,  hypothèse  que  nous  avons  admise  plus  haut 
et  qui  ne  manque  certes  pas  de  preuves  effectives,  aurait  sans  doute 
besoin  d'une  réduction  importante.  D'un  autre  côté,  la  nature  aurait 
par  une  expérience,  si  j'ose  m' exprimer  ainsi,  livré  une  preuve  de  l'in- 
dépendance relative  du  développement  du  crâne  telle  que  la  science 
n'avait  pas  été  capable  de  la  livrer  jusqu'ici. 

Mais  nous  devons  laisser  de  côté  la  période  embryonnaire  ;  la  pro- 
position «  le  cerveau  et  le  crâne  portent  en  eux-mêmes  les  conditions 
fondamentales  de  leur  forme  respective  »  a  trait  tout  d'abord  à  l'ani- 
mal dès  sa  naissance  à  l'âge  adulte,  et  ne  peut  pas  s'appliquer  avec 
certitude  à  la  période  qui  précède  la  naissance,  surtout  pas  à  sa  pre- 
mière partie.  Il  faut  que  le  cerveau  et  le  crâne  soient  formés  et  dis- 
tincts avant  qu'ils  puissent  se  développer  ultérieurement  d'après  leurs 
conditions  intrinsèques  respectives.  Du  reste,  les  conditions  internes 


70  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

comme  les  conditions  externes  sont  et  demeurent  l'objet  de  l'obser- 
vation et  de  l'expérience. 

Fick  (Ueber  die  Ursachen  der  Knochenformen,  p.  2°2)  dit  :  «  Les 
faits  présents  nous  suffisent  cependant  pour  dénier  h  l'os  une  fois 
donné  toute  force  organoplastique  propre,  et  pour  reconnaître  qu'au 
contraire,  dans  sa  transformation  de  la  forme  fœtale  en  la  dimension 
agrandie  de  sa  forme  définitive,  le  squelette  lui-même  ne  trahit  pas 
d'autres  forces  propres  que  les  intensités  histoplasliques  de  ses  ma- 
trices par  la  force  desquelles  il  s'agrandit  dans  toutes  les  directions 
jusqu'à  épuisement  complet,  pour  autant  qu'il  ne  rencontre  pas  de 
résistance  de  la  part  d'organes  dont  les  forces  histoplasliques  sont 
plus  grandes  que  les  siennes.  »  Même  après  avoir  relu  plusieurs  fois 
cette  phrase  dont  je  suis  loin  de  méconnaître  la  raison  d'être  relative 
et  le  sens  profond,  je  crois  pouvoir  continuer  tranquillement  la  série 
de  ces  expériences.  Comme  ce  dont  il  est  question  n'a  pas  trait  seu- 
lement au  crâne,  mais  à  chaque  os,  et  que  les  observations  faites  sur 
un  os  quelconque  sont  utiles  à  l'étude  de  tous  les  autres,  je  vais  dé- 
crire ici,  comme  nouvelles  preuves  de  l'indépendance  relative  de  la 
croissance  des  os  du  crâne  et  de  l'existence  de  conditions  internes  à 
1  ur  formation,  quelques  expériences  faites  sur  d'autres  os. 

Lorsqu'on  désarticule  à  l'épaule  la  patte  antérieure  d'un  lapin  nou- 
veau-né, on  paralyse,  ou  pou  s'en  faut,  tous  les  muscles  qui  vont  de 
l'omoplate  à  la  patte.  Leur  développement  se  limite  par  suite  de  la 
restriction  de  leurs  fonctions.  Le  développement  incomplet  des  muscles 
réagit  il  est  vrai,  comme  nous  le  verrons  plus  lard,  sur  la  forme  des 
os  mus  par  eux;  mais  eus  derniers  se  développent  cependant  et  con- 
servenl  en  toute  circonstance  leur  forme  fondamentale.  Il  suffit  pour 
s'assurer  de  la  chose  de  comparer  à  la  planche  X,  figures  5  et  6,  les 
deux  omoplates  d'un  lapin  opéré  à  gauche  de  la  façon  qu'on  vient  de 
voir. 

L'expérience  suivante  faite  primitivement  dans  un  autre  but  peut 
aussi  s'appliquera  la  question  qui  nous  occupe  :Un  aide  tient  l'animal 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  77 

qui  va  être  opéré.  A  partir  de  l'articulation  de  l'épaule  on  pratique 
le  long  du  bord  supérieur  de  l'omoplate  une  section  à  travers  la 
peau,  le  muscle  basio-humeralis  (transverso-scapulaire  de  Straus- 
Dùrkheim),  le  muscle  angulaire  de  l'omoplate  et  le  muscle  trapèze. 
Au  fond  apparaît  le  plexus  brachial.  Un  second  aide  tire  d'une 
main  l'omoplate  en  bas  et  en  arrière,  tandis  qu'avec  un  doigt  de 
l'autre  main  appuyé  contre  le  fond  de  la  fosse  axillaire  il  soulève 
le  plexus  hors  de  la  plaie.  On  passe  alors  prudemment  et  en  évitant 
les  vaisseaux  un  fil  autour  de  chaque  tronc  nerveux,  puis  on  le  noue. 
Cela  fait,  on  coupe  les  nerfs  aussi  près  que  possible  de  la  colonne 
vertébrale,  et,  après  les  avoir  tirés  à  l'aide  des  fils  dans  l'angle  de 
la  plaie,  on  les  y  coud  pour  les  empêcher  de  s'unir  de  nouveau  à 
eurs  tronçons  centraux.  Cette  opération  n'est  pas  très-facile.  Au  bout 
de  4  ou  5  jours,  la  plaie  étant  suffisamment  guérie,  on  fend  la  peau 
de  l'avant-bras  sur  toute  sa  longueur,  puis  on  coupe  l'avant-bras  lui- 
même  à  l'aide  d'une  paire  de  ciseaux  sous  la  peau  aussi  près  que  pos- 
sible du  coude  et  du  carpe,  on  l'extrait  avec  muscles,  nerfs,  ten- 
dons, etc.,  de  son  manchon  de  peau,  et  cela,  fait,  on  coud  la  plaie.  De 
cette  façon  le.  pied  antérieur  se  trouve  presque  complètement  isolé  du 
reste  de  l'organisme  auquel  il  n'est  plus  relié  que  par  quelques  vais- 
seaux cutanés,  et  par  suite  toute  fonction  est  impossible.  Malgré  cela 
il  continue  à  croître,  et  lorsqu'on  tue  l'animal  devenu  adulte  les  os  de 
ce  pied  isolé,  un  peu  moins  gros  seulement  qu'à  l'état  normal,  ont 
exactement  la  même  forme  qu'ils  auraient  eue  s'ils  avaient  fonctionné 
toute  leur  vie.  Comparer  à  la  planche  X  les  figures  19  et  20  avec  les 
figures  17  et  18. 

On  peut  reprocher  pas  tout  à  fait  sans  raison  à  la  première  des 
deux  expériences  précédentes  (moins  déjà  à  la  seconde)  le  fait  que  les 
muscles  n'ont  pas  été  extirpés  totalement,  tout  en  accordant  qu'ils  ont 
été  mis  hors  de  fonction  et  se  sont  atrophiés.  Ce  reproche  ne  peut 
être  fait  à  l'expérience  suivante.  Après  avoir  fendu  la  peau  sur  toute 
la  longueur  de  l'avant-bras  droit  à  un  lapin  nouveau-né,  on  enleva 


78  RECHERCHES  EXPERIMENTALES 

avec  le  plus  grand  soin  toutes  les  parties  molles  (muscles,  nerfs,  ten- 
dons, vaisseaux  sauf  les  cutanés,  etc.),  de  façon  à  ne  laisser  de  l'avant- 
bras  absolument  que  l'ulna  et  le  radius  tout  nus,  et  la  peau  avec  ses 
vaisseaux.  On  ne  lésa  pas  le  plexus  brachial,  et  on  n'enleva  rien  au 
pied  antérieur.  La  plaie  fut  très-vite  guérie,  et  le  lapin  marcha  plus 
tard  sur  sa  patte  opérée  comme  sur  une  jambe  de  bois,  le  dos  du  pied 
reposant  sur  le  sol.  Lorsqu'on  le  tua,  on  trouva  à  un  endroit  où  le 
périoste  du  radius  et  du  cubitus  avait  été  un  peu  lésé  une  légère  sy- 
nostose  entre  ces  deux  os.  L'avant-bras  est  un  peu  moins  développé 
que  du  côté  non  opéré,  et  aussi  un  peu  différemment  courbé,  le  lapin 
ayant  marché  sur  le  dos  du  pied;  en  somme  cependant  sa  forme  est 
remarquablement  normale  (planche  X,  figures  7  et  8,  les  os  des  deux 
avant-bras)  (1). 

On  désarticula  l'avant-bras  à  deux  lapins  nouveau-nés.  Il  se  forme 
en  cas  pareil  sur  la  face  articulaire  de  l'humérus  une  nouvelle  capsule 
articulaire  qui  reçoit  l'attache  de  tous  les  muscles  du  bras  destinés  à 
l'état  normal  à  mouvoir  l'avant-bras.  L'innervation  de  ces  muscles 
ne  cessant  pas  tout  à  fait,  ils  se  contractent  de  temps  à  autre.  On  au- 
rait donc  certain  droit  de  supposer  qu'en  conséquence,  sous  la  pres- 
sion de  la  nouvelle  capsule,  l'extrémité  articulaire  de  l'humérus  de- 
vrait s'arrondir  et  devenir  plus  ou  moins  hémisphérique  chez  l'ani- 
mal adulte.  Mais  lorsqu'on  a  tué  l'animal,  on  trouve  l'extrémité  arti- 
culaire de  l'humérus  relativement  normale  :  trochlée,  condyle,  cavité 
coronoïde,  cavité  olécrânienne,  condyle  médian  (bourrelet  situé  entre 
les  deux  portions  de  la  surface  articulaire),  tout  y  est;  la  seule  res- 
triction qu'il  faut  accorder,  c'est  que  les  formes  ne  se  sont  pas  déve- 


(I)  Dans  cette  expérience,  les  os  qui  ont  crû  indépendamment  (cubitus  et  radius) 
avaient  élé  entièrement  privés  de  leurs  muscles  et  de  leurs  tendons,  tandis  que  dans 
l'expérience  précédente,  celle  des  figures  19  et  20,  les  muscles  et  autres  parties 
molles  se  trouvant  dans  le  pied  lui-même  n'avaient  pas  été  enlevés;  on  avait  seule- 
ment coupé  le  plexus  brachial  et  extirpé  tout  l'avant-bras,  moins  la  peau. 

{Note  du  traducteur.) 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  79 

loppées  d'une  façon  aussi  accusée,  aussi  nette  qu'elles  l'auraient  fait 
sous  la  pression  et  l'action  polissante  des  extrémités  articulaires  du 
radius  et  du  cubitus.  Pour  s'assurer  de  ce  que  nous  venons  de  dire,  il 
suffit  de  comparer  à  la  planche  X  les  figures  9  et  11  (côté  normal) 
avec  les  figures  10  et  12  (côté  opéré),  puis  les  figures  13  et  15  avec 
les  figures  14  et  16  (second  lapin).  On  obtient  le  même  résultat  en 
désarticulant  l'humérus  ou  l'omoplate.  Dans  le  premier  cas  c'est  la  ca- 
vité glénoïde,  dans  le  second  la  surface  articulaire  de  l'humérus  dont 
le  développement  se  fait  d'une  façon  presque  normale. 


CHAPITRE  IV 


INFLUENCE    DES    ORGANES    DES    SENS    SUR    LA    CROISSANCE    DU    CRANE. 


Je  ne  parlerai  plus  des  expériences  du  bulbe  olfactif  ni  de  celles  du 
lobe  optique.  N'ayant  pas  fait  les  recherches  nécessaires  je  suis  obligé 
de  limiter  ce  chapitre  dans  d'autres  directions  encore,  et  je  ne  trai- 
terai que  de  l'œil  ;  c'est  du  reste  le  sens  le  plus  important  relativement 
à  la  forme  du  crâne. 

Les  figures  1,2  et  3  de  la  planche  IX  représentent  chacune  un 
segment  transversal  vertical  du  crâne  d'un  lapin  adulte.  Le  premier 
lapin  (figure  I)  était  normal,  au  second  (figure  2)  on  avait  enlevé  peu 
après  la  naissance  les  deux  yeux,  et  au  troisième  (figure  3),  l'œil  droit 
seulement.  Je  n'avais  pas  énucléé  le  bulbe  de  l'œil;  je  m'étais  con- 
tenté d'en  extirper  le  tiers  antérieur  et  de  vider  le  contenu  du  reste; 
les  paupières  avaient  été  simplement  fendues  et  n'avaient  pas  été  re- 
cousues. Les  figures  montrent  le  résultat  de  ces  opérations  relative- 
ment au  crâne  :  à  la  figure  2  les  deux  orbites  sont  resserrées,  rétrécies; 
â  la  figure  3  l'orbite  droite  est  seule  rétrécie.  A  la  figure3  on  voit  déjà 


RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.         81 

assez  nettement  l'asymétrie  des  parties  du  crâne  destinées  à  recevoir 
les  bulbes  olfactifs;  c'est  une  conséquence  de  l'atrophie  de  l'orbite 
droite. 

Les  conséquences  de  l'énucléation  complète  sont  beaucoup  plus  im- 
portantes. Les  figures  4,  5,  6,  7  et  8  de  la  planche  IX  représentent 
dans  diverses  situations  le  crâne  d'un  lapin  adulte  auquel  on  avait 
énucléé  l'œil  gauche  immédiatement  après  la  naissance.  La  déviation 
en  bas  et  en  dedans  de  l'arcade  orbitaire  et  du  crochet  de  l'os  lacry- 
mal vient  de  la  pression  qu'ont  exercée  les  paupières  raccourcies, 
cousues  l'une  à  l'autre  et  tirées  à  l'intérieur  de  l'orbite  par  la  cica- 
trisation. Cette  déviation  se  produit  aussi,  quoique  moindre,  lors- 
qu'on détermine  un  simple  ankylo'blepharon,  sans  léser  le  bulbe  de 
l'œil  (pi.  IX,  fig.  13).  UankyloUeph'aron  artificiel  pratiqué  assez 
longtemps  à  l'avance  est,  soit  dit  en  passant,  le  meilleur  moyen  de 
protéger  l'œil  lorsqu'on  veut  couper  le  nerf  trijumeau.  Voici  les 
mesures  du  crâne  des  figures  4  à  8  de  la  planche  IX  :  diamètre  ver- 
tical de  l'orbite  droite,  mesuré  du  bord  supérieur  de  l'arcade  zygo- 
matique  à  la  ligne  d'attache  de  l'arcade  orbitaire,  17,5  mill.;  dia- 
mètre vertical  de  l'orbite  gauche,  41  mill.  Diamètre  horizontal  de 
l'orbite  droite,  20  mill.;  diamètre  horizontal  de  l'orbite  gauche  17  mil'. 
L'arcade  zygomatique  droite  a  29,5  mill.  de  long;  la  gauche,  26  mill. 
Ce  que  cette  dernière  a  perdu  eu  longueur,  elle  l'a  plus  ou  moins  re- 
gagné dans  ses  autres  dimensions  (expression  de  son  «  intensité  de 
croissance  »).  L'arcade  zygomatique  droite  a  6,5  mill.  de  haut,  la 
gauche,  7,5  millimètres. 

La  différence  entre  les  deux  orbites  est  donc  très-considérable  ;  nous 
devons  par  conséquent  nous  attendre  à  une  influence  du  rétrécisse- 
ment de  l'orbite  gauche  sur  le  reste  du  crâne.  Aux  figures  4  et  5  nous 
voyons  très-distinctement  la  déviation  en  avant  des  parties  postérieures 
du  crâne,  et  la  déviation  en  arrière  de  ses  parties  antérieures.  Il  suffit 
de  comparer  à  la  figure  4  l'apophyse  temporale  des  os  pariétaux  (à 
la  suture  coronaire)  et  l'apophyse  latérale  (postérieure)  des  os  nasaux, 


8-2  RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES 

à  droite  et  à  gauche.  La  distance  de  l'une  à  l'autre  est  à  droite  de 
20,3  mill.  et  à  gauche  de  19  mill.  A  la  figure  5  on  peut  comparer  le 
bord  alvéolaire  du  maxillaire  supérieur  à  l'apophyse  ptérigoïde  :  dis- 
tance de  l'extrémité  antérieure  du  bord  alvéolaire  à  la  scissure  ptéri- 
goïdienne,  à  droite  18  mill.,  à  gauche  17  mill.  Même  les  sutures  fron- 
tale et  sagittale  forment  un  arc,  très-faible  il  est  vrai,  concave  du  cùté 
opéré. 

D'après  Ludwig  Fick  (1),  l'élimination  d'un  groupe  considérable  de 
muscles  ainsi  que  celle  du  bulbe  de  l'œil  produit  à  vrai  dire  des  modi- 
fications essentielles  dans  la  transformation  du  squelette  de  l'état  fœial 
à  l'état  adulte;  mais  ces  modifications  ne  s'étendent  pas,  selon  lui,  à 
tout  le  squelette,  elles  se  limitent  à  certaines  de  ses  parties;  il  prétend 
par  exemple,  qu'après  l'énucléation  de  l'œil  la  cavité  du  crâne  ne 
devient  pas  notablement  asymétrique  (2).  Un  coup  d'œil  jeté  sur  la 
figure  8  de  la  planche  IX,  qui  représente  l'intérieur  du  crâne  de  notre 
lapin,  montre  aussitôt  combien  cette  opinion  est  erronée.  L'idée  de 
Diderot,  d'après  lequel  (3)  l'effet  de  toute  lésion  faite  à  un  os  se  con- 
tinue à  partir  du  point  lésé  comme  une  vague  d'impulsion  sur  tout  le 
squelette,  sans  être  rigoureusement  exacte,  est  donc  plus  que  simple- 
ment ingénieuse.  La  portion  antérieure  de  la  cavité  du  crâne  est  asy- 
métrique, ce  qui  sur  la  photographie  ne  se  voit  il  est  vrai  qu'indistinc- 
tement; il  en  est  de  même  de  la  portion  qui  renferme  les  bulbes 
olfactifs,  ce  qui  ne  se  voit  pas  du  tout  sur  la  photographie  vu  le  manque 
de  lumière.  L'inégalité  de  la  partie  postérieure  des  petites  ailes  de  l'os 
sphénoïde  antérieur  s'y  voit,  par  contre,  d'autant  plus  nettement.  Le 
plus  grand  diamètre  vertical  de  l'aile  droite  est  de  9,5  mill.,  celui  de 
l'aile  gauche  de  8,5  mill.  Le  plus  grand  diamètre  transversal  (a  partir 
de  la  ligne  médiane  de  la  base  du  crâne)  est  pour  l'aile   droite  de 


(1)  Ueber  die  Ursachen  dur  Knochenformen,  y.  II). 

(2)  Fick,  /or.  cit.,  p.  16  pour  Ggure  2,  et  p,  I*  pour  figures  12,  13  cl  M. 

(3)  Fick,  loc.  cil.,  ]>.  20. 


SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.  83 

13,5  mill,  pour  l'aile  gauche  de  13,0  mill.  Le  préjudice  porté  à  la  base 
du  crâne  par  le  rétrécissement  de  l'orbite  ne  peut  naturellement  pas  de- 
meurer sans  influence  sur  la  forme  du  cerveau.  Les  portions  de  cet  or- 
gane qui  ne  peuvent  se  développera  la  base  du  crâne  sont  repoussées 
vers  le  haut, ce  qui  occasionne  un  renflement  unpeu  plus  fortàla  con- 
vexité de  l'hémisphère  cérébral  du  côté  de  l'orbite  atrophiée.  Ce  renfle- 
ment ne  peut  être  méconnu  lorsqu'on  examine  soigneusement.  C'est  un 
fait  important  à  connaître  pour  ceux  qui  cherchent  à  découvrir  dans 
la  substance  corticale  du  cerveau  des  organes  circonscrits  ayant  une 
relation  précise  avec  les  organes  des  sens,  car  ils  pourraient  être  tentés 
de  prendre  un  simple  phénomène  de  déplacement  pour  une  hypertro- 
phie due  à  la  fonction  exagérée  de  l'œil  (rétine)  demeuré  normal. 

Le  trou  optique  à  la  figure  8  (pi.  IX)  n'est  pas  non  plus  sans  in- 
térêt. La  moitié  gauche  en  est  plus  petite,  il  est  vrai,  que  la  droite; 
mais  elle  est  beaucoup  plus  grosse  que  le  très-petit  nerf  optique  atrophié 
auquel  elle  sert  de  passage.  Quand  on  détruit  les  deux  rétines,  il  se 
produit  cependant  un  rétrécissement  proportionnellement  plus  con- 
sidérable du  trou  optique  que  lorsqu'on  n'en  détruit  qu'une.  Je  suis 
redevable  à  mon  collègue,  M.  Hubrich,  directeur  de  Werneck,  du  cer- 
veau et  du  crâne  d'un  porc  aveugle-né  (privé  du  bulbe  des  deux  yeux), 
normal  du  reste,  chez  lequel  le  trou  optique  ne  forme  plus  qu'une 
étroite  fente  transversale.  Le  diamètre  vertical  de  l'orbite  proprement 
dite  est  chez  ce  porc  de  28  mill.  seulement,  le  diamètre  horizontal  de 
21,5  mill.;  chez  un  porc  normal  (non  aveugle)  de  la  même  portée 
envoyé  pour  comparaison,  le  diamètre  vertical  de  l'orbite  proprement 
dite  est  de  43  mill.,  le  diamètre  horizontal  de  32  mill.;  les  deux  porcs 
étaient  âgés  de  7  mois.  Ici,  l'on  peut  aussi  suivre  dans  tout  le  crâne 
l'effet  produit  par  l'atrophie  des  deux  orbites.  L'épaisseur  du  crâne 
entre  le  cerveau  et  les  yeux  atrophiés  est  augmentée.  Ce  dernier  fait 
se  retrouve  aussi,  quoique  moins  marqué,  chez  le  crâne  du  lapin  au- 
quel on  n'avait  énucléé  qu'un  œil. 


CHAPITRE  V 


INFLUENCE    DES    MUSCLES    SUR    L.V    CROISSANCE   DU    CRANE. 


Désirant  prouver  d'abord  à  l'aide  d'un  exemple  très-frappant  avec 
quelle  facilité  on  peut  faire  dévier  les  os  par  un  changement  des  trac- 
lions  et  pressions  qui  agissent  sur  eux  sans  cependant  que  leur  forme 
fondamentale  caractéristique  souffre  d'une  façon  notable,  j'ai  fait  pho- 
tographier, aux  figures  10  et  12  de  la  planche  IX,  deux  omoplates  de 
lapins  dont  les  processus  hamatus  (4)  se  sont  développés  d'une  façon 
fort  différente  (les  figures  9  et  11  représentent  les  omoplates  normales 
correspondantes  du  côté  opposé). 

Lorsqu'on  coupe  et  qu'on  disloque,  delà  façon  indiquée  plus  haut, 
les  nerfs  cervicaux  VII  et  VIII,  on  paralyse  principalement  l'action 
des  muscles  extenseurs;  par  suite,  la  patte  antérieure  du  coté  opéré 
s'applique  totalement  contre  la  partie  antérieure  de  la  poitrine  (llexion 


(1)  Krause  l)ic  Analomie  des  Kaninchens.  Leipzig,  bei  Engelmann,  18GS,  p.  7(î. 

(Noie  du  traducteur.) 


RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE.         85 

et  adduction).  Lorsqu'on  coupe  et  qu'on  disloque  les  nerfs  cervi- 
caux V  et  VI,  on  paralyse  au  contraire  les  fléchisseurs  ;  la  patte  entière 
s'étend  et  vient  s'appliquer  horizontalement  sur  le  côté  de  la  partie 
postérieure  du  thorax.  Dans  les  deux  cas  l'omoplate,  de  même  que  la 
patle  entière,  se  développe  un  peu  moins  qu'à  l'état  normal.  Mais  le 
processus  hamatus  dévie  en  avant  dans  le  premier  cas  et  eh  arrière 
dans  le  second. 

Je  n'ai  pas  fait  photographier  les  os  des  trois  pattes  d'un  lapin  au- 
quel j'avais  désarticulé  l'une  des  cuisses  postérieures.  Les  lapins 
opérés  de  la  sorte  ne  se  tiennent  qu'avec  peine  en  équilibre.  A  mesure 
qu'ils  avancent  en  âge  la  patte  postérieure  restante  se  meut  de  plus 
en  plus  diagonalement,  et  les  pattes  antérieures  dévient  de  plus  en  plus 
du  côté  qui  a  perdu  son  appui  derrière  pour  lui  servir  de  soutien.  La 
conséquence  de  cela  est  pour  tous  les  os  des  extrémités  une  profonde 
déviation  qu'il  serait  difficile  de  décrire  brièvement. 

Extraction  du  nerf  facial.  —  Une  incision  commencée  à  la  base  du 
pavillon  de  l'oreille  et  continuée  vers  l'angle  du  maxillaire  inférieur 
découvre  le  nerf.  Deux  ou  trois  coups  de  bistouri  suffisent  pour  l'isoler 
des  organes  voisins.  Cela  fait,  on  glisse  sous  lui,  d'après  la  méthode 
de  Schiff,  un  crochet  émoussé,  et  on  le  tire  de  toute  sa  longueur  hors 
du  conduit  de  Fallope.  Lorsque  l'opération  réussit,  le  nerf  se  rompt  à 
sa  sortie  du  cerveau  entre  le  pont  de  Yarole  et  le  corpus  trapezoïdes. 
A  la  suite  du  nerf  sortent  ordinairement  quelques  gouttes  de  liquide 
cérébro-spinal  ;  parfois  aussi  il  se  produit  de  légères  convulsions  qui 
disparaissent  très-vite.  Le  nerf  facial  innerve  le  muscle  buccinateur; 
or  la  langue  et  la  joue  dirigent  les  aliments  dans  la  bouche.  Lorsque 
le  buccinateur  est  paralysé,  les  aliments  poussés  entre  les  dents  par  la 
langue  ne  trouvent  plus  de  résistance;  il  se  forme  une  poche  flasque 
clans  la  joue,  ce  qui  empêche  totalement  la  mastication  du  côté  opéré. 
Par  suite  de  l'activité  exagérée  des  muscles  masticateurs  du  côté  de- 
meuré normal  et  de  l'inaction  des  mêmes  muscles  du  côté  où  le  nerf 
facial  a  été  enlevé,  il  se  produit  une  scoliose  très-marquée  du  crâne 


86         RECHERCHES  EXPERIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

et  de  la  face,  ayant  sa  concavité  du  côté  de  la  joue  paralysée  (pi.  XI, 
fig.  1,  2  et  3).  Ce  sont  les  os  de  la  face  et  la  mâchoire  inférieure  qui 
forment  principalement  cette  scoliose,  mais  il  n'est  pas  une  portion 
du  crâne  qui  n'y  prenne  aucune  part.  Je  fais  remarquer  en  passant  la 
différence  frappante  qui  existe  entre  les  dents  des  deux  côtés.  Celles 
du  côté  qui  ne  mâche  pas  sont  plus  longues  et  plus  minces  que 
celles  du  côté  qui  mâche;  de  plus  elles  sont  striées  transversalement. 

En  coupant  et  en  disloquant  du  même  côté  le  nerf  infra-orbital  et 
le  nerf  mandibulaire,  on  obtient  d'une  manière  autre,  quoique  plus  ou 
moins  analogue,  une  scoliose  identique  mais  plus  faible.  Les  animaux 
traités  de  la  sorte  n'ont  plus  de  sensations  tactiles  d'un  côté  de  la 
bouche,  aussi  prennent-ils  l'habitude  de  saisir  leurs  aliments  surtout 
avec  l'autre  côté,  et  de  mâcher  aussi  avec  cet  autre  côté  surtout;  de 
là  la  scoliose.  Il  est  probable  qu'on  peut  obtenir  un  résultat  analogue 
en  opérant  sur  le  nerf  lingual.  Les  lapins  auxquels  je  coupai  et  dis- 
loquai l'un  des  nerfs  hypoglosses  périrent. 

L'avantage  des  expériences  que  nous  venons  de  citer  est  que  l'opé- 
ration par  elle-même  n'est  pas  grave,  et  que  son  effet  est  aussi  pur  que 
certain.  On  peut  aussi  obtenir  une  déviation  en  extirpant  l'un  des 
muscles  masséters.  Lorsqu'outrc  le  masséter  on  enlève  le  condyle  et 
l'apophyse  coronoïde  du  maxillaire  inférieur,  la  diminution  encore 
plus  considérable  de  la  contre-pression  qui  en  résulte  produit  une 
voussure  exagérée  du  crâne  du  côté  opéré.  Ces  deux  dernières  opéra- 
tions sont  beaucoup  plus  graves  que  les  aures  cl  accompagnées  (rime 
plus  forte  hémorrhagie. 

Lorsqu'on  enlève  à  un  lapin  nouveau-né  une  patte  antérieure  avec 
l'omnphiii',  l'effet  principal  est  unescoliose  considérable  delà  colonne 
vertébrale  ayant  su  concavité  du  côté  opéré.  Mais  l'arrêt  de  l'activité 
du  muscle  trapèze  produit  aussi  une  déviation  de  l'écaillé  de  l'os  occi- 
pital  vers  le  côté  opposé  (pi.  XI,  fig.  4).  Cette  déviation  n'est  du  reste 
pas  irès-frappante. 


CHAPITRE  VI 


INFLUENCE  DES  DENTS  SUR  LA  FORME  DU  CRANE. 


L'extraction  des  dents  est  une  opération  assez  difficile  et  assez 
compliquée.  On  incise  le  long  de  la  portion  buccale  du  maxillaire  in- 
férieur, on  pratique  à  deux  endroits  la  ligature  de  la  veine  faciale,  et 
on  met  à  nu  la  portion  de  l'os  qui  porte  les  alvéoles.  Cela  fait  on  enlève 
au  maxillaire  inférieur  une  bande  longitudinale  large  d'un  millimètre, 
ce  qui  donne  accès  dans  les  alvéoles.  Les  alvéoles  ainsi  ouvertes,  on 
introduit  dans  chacune  d'elles  un  instrument  fin  en  forme  de  cuiller 
avec  lequel  on  soulève  la  dent  et  sa  pulpe.  Lorsque  toutes  les  dents 
ont  été  ainsi  extraites  on  recoud  la  plaie.  Les  figures  5  et  6  et  les  fi- 
gures 7  et  8  de  la  planche  XI  représentent  les  crânes  de  deux  lapins 
auxquels  on  avait  enlevé  les  dents  molaires  de  la  mâchoire  inférieure 
gauche.  L'opération  n'a  du  reste  pas  tout  à  fait  réussi  chez  le  lapin 
dont  le  crâne  est  photographié  à  la  figure  5,  et  le  lapin  de  la  figure  7, 
chez  lequel  l'opération  avait  été  très-bien  faite,  a  dû  être  tué  trop  tôt. 
Si  deux  dents  n'étaient  pas  restées  au  lapin  de  la  figure  5,  et  si  le 
lapin  de  la  figure  7  avait  pu  demeurer  en  vie  jusqu'à  l'âge  adulte,  la 
scoliose  aurait  très-probablement  atteint  un  plus  haut  degré  chez 


88        RECHERCHES  EXPÉRIMENTALES  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRANE. 

tous  les  deux.  Telle  qu'elle  est,  il  faut  pour  s'assurer  de  son  existence 
tirer  une  ligne  droite  du  milieu  de  la  protubérance  occipitale  externe 
à  la  cloison  des  alvéoles  des  dents  incisives  supérieures.  Le  bord  al- 
véolaire du  maxillaire  supérieur  du  côté  opéré  est  atrophié;  ses  alvéoles 
forment  une  ligne  droite  et  ses  dents  sont  longues  et  minces,  tandis 
que  le  bord  alvéolaire  du  côté  non  opéré  est  fortement  arqué  et  porte 
îles  dents  courtes  et  robustes. 

On  pourrait  faire  encore  des  séries  entières  d'expériences.  Les  ré- 
sultats seront  certainement  d'autant  plus  considérables,  se  compléte- 
ront et  se  corrigeront  d'autant  plus  les  uns  les  autres  qu'on  opérera 
sur  des  points  plus  nombreux  et  plus  divers.  Il  est  à  peine  nécessaire 
de  répéter  ici  que  les  conditions  internes  de  la  croissance,  dont  j'ai 
parlé  plus  haul,ïi'ont  rien  de  commun  avec  les  idées  organoplasliqucs 
(organoplastische  Ideen)  condamnées  par  Fick.  Elles  semblent  cepen- 
dant être  pour  le  momentencore  inaccessibles.  D'où  vient,  par  exemple, 
la  singulière  disproportion  entre  les  os  frontaux  et  pariétaux  droits  et 
gauches  chez  le  crâne  de  la  planche  XI,  figure  10?  Il  n'est  pas  im- 
probable que  le  champ  d'action  de  ces  conditions  internes,  tel  qu'on 
peut  se  le  représenter  chez  l'animal  au  moment  de  sa  naissance,  se 
rétrécisse  d'autant  plus  qu'on  remonte  plus  haut  dans  la  période  em- 
bryonnaire. On  ne  peut  se  faire  une  idée  de  tout  ce  qu'il  y  aurait  en- 
core à  rechercher  dans  celte  direction. 

Mes  deux  anciens  médecins-adjoints,  M.  le  docteur  Râbus  et  M.  le 
doc  leur  (iiashey,  actuellement  médecin-directeur  de  Deggcndorf,  m'ont 
secondé  de  la  manière  la  plus  obligeante  et  la  plus  prévenante  dans 
!c  cours  des  expériences  qui  font  l'objet  de  ce  travail. 


FIN 


EXPLICATION   DES   PLANCHES 


PLANCHE  1 

Figure  1.  Sutures  frontale  et  sagittale  régénérées  après  leur  excision. 

Figure  2.  Suture  sagittale  régénérée  après  son  excision. 

Figures  3,  i,  5,  6  et  7.  Sutures  entièrement  nouvelles  produites  dans  la  continuité 
de  l'os  au  moyen  d'incisions  faites  à  ce  dernier. 

Figure  8.  Dessin  du  parcours  normal  des  canaux  de  Havers  (1  fois  et  demie  la  gran- 
deur naturelle). 

Figures  9  et  10.  Parcours  des  canaux  de  Havers  après  la  ligature  des  carotides  (1  fois 
et  demie  la  grandeur  naturelle). 

Figure  11.  Trouble  survenu  dans  le  parcours  des  canaux  de  Havers  à  la  suite  de  la 
ligature  des  veines  jugulaires  (1  fois  et  demie  la  grandeur  naturelle). 

Figure  12.  Parcours  des  canaux  de  Havers  dans  un  cas  de  synostose  partielle  congé- 
nitale de  la  suture  sagittale  (2  fois  la  grandeur  naturelle). 

Figure  13.  Déviation  du  cerveau  à  la  suite  de  l'extirpation  de  la  portion  supérieure 
de  l'hémisphère  cérébral  gauche. 

Figure  14.  Crâne  de  lapin  microcéphale  chez  lequel  les  sutures  se  sont  conservées. 


PLANCHE  II 

Figures  1,  2  et  3.  Os  wormiens.  Forme  et  direction  de  leurs  dentelures. 
Figures  4,  5  et  6.  Dentelures  et  écailles  à  l'extrémité  temporale  de  la  suture  coro- 
naire. 

13 


90  EXPLICATION  DES  PLANCHES. 

Figures  7  et  S.  Sutures  écailleuses  autour  d'un  os  wormien. 

Figures  9,  10  et  11.  Trois  crânes  de  lapin  de  même  diamètre;  figure  9  sans  os  wor- 
mien, figure  1    avec  un  os  wormien,  figure  11  avec  deux  os  wormiens. 


PLANCHE  III 

Figures  1,  2  et  3.  Crâne  de  lapin  avec  état  fœtal  de  la  suture  temporale  gauche  à  la 
suite  de  la  ligature  des  carotides.  Vu  de  trois  côtés  différents. 

Figures  4,  5  et  6.  Crâne  avec  état  fœtal  de  la  suture  coronaire  droite  à  la  suite  de  la 
ligature  des  carotides.  Vu  de  trois  côtés  différents. 

Figures  7,  8  et  9.  Crâne  avec  état  fœtal  de  la  suture  coronaire  gauche  et  synoslose 
de  la  suture  pariéto-interpariétale  droite  à  la  suite  de  la  ligature  des  carotides.  Vu  de 
trois  côtés  différents. 

PLANCHE  IV 

Figures  1,  2  et  3.  Crâne  avec  élat  fœtal  des  sutures  coronaire  et  temporale  gauches 
à  la  suite  de  la  ligature  des  carotides.  Vu  de  trois  côtés  différents. 

Fimres  i,  5  et  6.  Crâne  avec  état  fœtal  de  la  suture  coronaire  droite  et  de  la  suture 
temporale  gauche  à  la  suite  de  la  ligature  des  carotides.  Vu  de  trois  côtés  différents. 

Figure  7.  Synoslose  de  la  portion  antérieure  de  la  suture  sagittale,  et  état  fœtal  de 
l'extrémité  temporale  de  la  suture  coronaire  gauche  à  la  suite  de  la  ligature  des  caro- 
tides. 

Figure  8.  Crâne  normal  à  comparer  avec  celui  de  la  figure  suivante. 

Figure  9.  Synostose  de  la  portion  postérieure  de  la  suture  sagittale,  à  la  suite  de  la 
ligature  des  carotides. 

PLANCHE  V 

Figure  1.  Crâne  de  la  planche  IV,  figure  8,  vu  de  devant. 

Figure  2.  Crâne  de  la  planche  IV,  figure  9,  vu  de  devant. 

Figure  3.  Crâne  de  la  planche  IV,  figure  8,  vu  de  côté. 

Figure  4.  Crâne  de  la  planche  IV,  figure  9,  vu  de  côté. 

Figure  5.  Crâne  normal  â  comparer  avec  celui  de  la  figure  suivante. 

Figure  6.  Synostose  partielle  de  la  suture  frontale  à  la  suite  de  la  ligature  des  caro- 
tides. 

Figure  7.  Moitié  antérieure  du  crâne  de  la  figure  5  vue  de  dedans. 

Figure  8.  Moitié  antérieure  du  crâne  de  la  figure  6  vue  de  dedans. 

Figure  9.  Synoslose  de  la  suture  sagittale. 

Figure  10.  Moitié  antérieure  du  crâne  de  la  figure  II  vue  de  dedans. 

Figure  11.  Synostose  de  la  suture  coronaire  droite  à  la  suite  de  la  ligature  des  caro- 
tides. 


EXPLICATION  DES  PLANCHES.  91 

Figures  12  et  13.  Synostose  de  la  suture  coronaire  gauche  du  crâne  d'une  taupe.  Vu 
de  dessus  et  de  dessous. 


PLANCHE  VI 

Figures  1,  2  et  3.  Crâne  de  lapin  avec  synostose  de  la  suture  coronaire  gauche,  état 
fœtal  de  la  suture  temporale  gauche  et  deux  lacunes  dans  les  os  frontaux,  à  la  suite  de 
la  ligature  des  carotides.  Vu  de  trois  côtés  différents. 

Figures  i  et  5.  Crâne  normal  vu  de  dessus  et  de  derrière.  A  comparer  avec  les  ligu- 
res 6  et  7. 

Figures  6  et  7.  Crâne  avec  synostose  des  sutures  qu  séparent  la  portion  articulaire 
de  l'os  occipital  de  son  écaille.  Vu  de  dessus  et  de  derrière.  (La  lacune  qu'on  voit  à 
ces  figures  comme  aux  deux  précédentes  dans  les  os  pariétaux  est  artificielle.) 

Figure  8.  Suture  sagittale  lisse,  conséquence  de  la  ligature  des  veines  jugulaires. 

Figure  9.  Synostoses  en  forme  de  ponts  à  la  suture  sagittale,  conséquence  de  la  liga- 
ture des  veines  jugulaires  (comp.  pi.  I,  fig.  11). 

Figure  10.  Synostose  partielle  congénitale  de  la  suture  sagittale  (comp.  pi.  I,  fig. 
12). 

Figure  11.  Suture  sagittale  lisse,  conséquence  de  la  ligature  des  carotides. 

Figures  12  et  13.  Atlas  et  épistrophée  dont  les  trous  transversaux  (pour  l'art,  verté- 
brale) se  sont  agrandis  à  la  suite  de  la  ligature  des  carotides. 

Figures  14  et  15.  Atlas  et  épistrophée  d'un  lapin  normal.  A  comparer  avec  les  deux 
figures  précédentes. 

Figure.  16.  Maxillaires  inférieurs  du  crâne  de  la  planche  IV,  figure  i. 


PLANCHE  VII 


Figure  1.  Formation  d'un  écartement  à  la  suite  d'une  incision  pratiquée  à  travers 
l'os  frontal  et  l'os  pariétal. 

Figure  2.  Formation  d'un  écartement  à  la  suite  de  l'excision  d'une  bandelette  d'os 
enlevée  à  l'os  pariétal. 

Figures  3  et  i.  Formation  d'un  écartement  du  crâne  à  la  suite  de  l'extirpation  de 
l'hémisphère  cérébral  gauche. 

Figure  5.  Excision  d'une  bandelette  d'os  dans  chacun  des  os  pariétaux.  Avancement 
des  os  frontaux  dans  l'écartement  produit. 

Figure  6.  Excision  d'un  petit  triangle  d'os  dans  l'os  pariétal  droit.  La  lacune  ainsi 
formée  a  été  comblée  par  l'os  pariétal  gauche. 

Figures  7  et  8.  Extirpation  de  l'os  interpariétal.  La  lacune  ainsi  formée  a  été  comblée 
par  les  os  limitrophes. 

Figure  9.  Marques  faites  aux  os  pariétaux  et  frontaux. 


9-2  EXPLICATION  DES  PLANCHES. 


PLANCHE  VIII 


Figures  1  et  2.  Crâne  dilaté  à  la  suite  de  l'excision  de  la  suture  sagittale,  de  la  for- 
mation d'un  écartement,  et  d'une  encéphalite  consécutive.  Vu  de  dessus  et  de  dessous. 

Figure  3.  Voûte  crânienne  rétrécie  et  aplatie  dans  toutes  les  dimensions  à  la  suite 
de  l'extirpation  des  deux  hémisphères  cérébraux.  La  plaie  de  l'os  s'est  cicatrisée  et 
toutes  les  sutures  se  sont  conservées. 

Figure  i.  Voûte  crânienne  normale.  A  comparer  avec  la  figure  précédente. 

Figure  3.  Voûtes  crâniennes  des  figures  3  et  i  vues  de  côté. 

Figure  G.  Les  mêmes  vues  de  devant. 

Figures  7,  8,  9  et  10.  Segments  transversaux  du  crâne  (région  du  bulbe  olfactif) 
d'un  lapin  auquel  on  avait  oblitéré  la  narine  droite,  ce  qui  avait  occasionné  l'atrophie 
do  bulbe  olfactif  droit. 

Figures  11  et  12.  Moitié  antérieure  et  moitié  postérieure  du  crâne  d'un  pigeon  au- 
quel on  avait  détruit  la  rétine  droite.  La  cavité  du  crâne  destinée  à  recevoir  les  lobes 
optiques  est  beaucoup  plus  petite  à  gauche  qu'à  droite. 

Figures  13  et  1-i.  Moitié  antérieure  et  moitié  postérieure  du  crâne  d'un  pigeon  auquel 
on  avait  enlevé  les  deux  rétines. 

Figures  15,  16,  17,  18  et  19.  Segments  transversaux  d'un  crâne  de  lapin  normal.  A 
comparer  avec  les  figures  suivantes. 

Figures  "20,  21,  22,  23  et  21.  Segments  transversaux  du  crâne  d'un  lapin  auquel  on 
avait  détruit  les  deux  rétines  et  oblitéré  les  deux  méats  auditifs  externes. 

Les  figures  15  et  20  représentent  la  région  des  bulbes  olfactifs.  Dans  la  figure  15 
l'espace  cérébral  est  plus  petit,  le  crâne  plus  épais;  dans  la  figure  20  l'espace  cérébral 
est  plus  grand,  le  crâne  plus  mince.  Dans  les  ligures  suivantes  les  rôles  sont  intervertis. 


PLANCHE  IX 

Figure  1.  Segment  du  crâne  renfermant  la  partie  antérieure  de  l'orbite.  Lapin  nor- 
mal. 

Figure  2.  Même  segment  du  crâne  chez  un  lapin  auquel  on  avait  enlevé  les  deux 
rétines  après  avoir  extirpé  le  tiers  antérieur  du  bulbe  de  l'œil. 

Figure  3.  Même  segment  du  crâne  chez  un  lapin  auquel  on  avait  enlevé  la  rétine 
droite  seulement. 

Figures  î,  5,  6  et  7.  Crâne  d'un  lapin  auquel  on  avait  énucléé  l'œil  gauche.  Vu  de 
dessus,  de  dessous  et  de  chaque  côté. 

Figure  N.  Moitié  antérieure  du  même  crâne  vue  de  dedans. 

Figures  9  et  10.  Les  deux  omoplates  d'un  lapin  auquel  on  avait  paralysé  les  fléchis- 
seurs  de  la  patte  antérieure  gauche  en  coupant  et  disloquant  les  nerfs  cervicaux  gau- 
ches  •">  et  6. 


EXPLICATION  DES  PLANCHES.  93 

Figures  11  et  12.  Omoplates  d'un  lapin  auquel  on  avait  paralysé  les  extenseurs  en 
coupant  et  disloquant  les  nerfs  cervicaux  gauches  7  et  8. 

Figure  13.  Segment  du  crâne  d'un  lapin  dont  l'arcade  orbitaire  d'un  côté  a  été  dé- 
viée en  bas  à  la  suite  d'un  ankyloblepharon  artificiel. 


PLANCHE  X 

Figures  1  et  2.  Scoliose  de  la  base  du  crâne  à  la  suite  de  l'extirpation  d'une  portion 
de  l'hémisphère  cérébral  gauche.  Le  sillon  sphénoïdal  (sulcus  sphenoidalis,  Krause)  a 
été  recouvert  par  l'os  et  transformé  en  canal. 

Figures  3  et  i.  Voûte  du  crâne  de  deux  lapins  opérés  de  la  même  façon  que  ceux 
des  figures  précédentes. 

Figures  5  et  6.  Omoplates  d'un  lapin  auquel  on  avait  désarticulé  l'humérus  gauche. 

Figures  7  et  8.  Os  de  l'avant-bras  d'un  lapin  auquel  on  avait  enlevé  toutes  les  parties 
molles  de  l'avant-bras  droit,  en  ne  laissant  que  les  os  et  la  peau. 

Figures  9,  10,  11  et  12.  Les  deux  humérus  d'un  lapin  auquel  on  avait  désarticulé 
l'avant-bras  gauche.  Vus  de  devant  et  de  derrière. 

Figures  13,  14-,  15  et  16.  Les  deux  humérus  d'un  second  lapin  traité  comme  celui 
des  figures  précédentes  (9-12). 

Figures  17,  18,  19  et  20.  Les  deux  pattes  antérieures  d'un  lapin  auquel  on  avait 
coupé  et  disloqué  le  plexus  brachial  gauche,  puis  extirpé  les  os  de  l'avant-bras  gauche. 


PLANCHE  XI 

Figures  1,  2  et  3.  Crâne  (vu  de  dessus  et  de  dessous)  et  mâchoire  inférieure  d'un 
lapin  auquel  on  avait  extirpé  le  nerf  facial  gauche.  Scoliose  du  crâne. 

Figure  i.  Crâne  d'un  lapin  auquel  on  avait  extirpé  la  patte  antérieure  droite  avec 
l'omoplate.  Déviation  à  gauche  de  l'écaillé  de  l'occipital. 

Figures  5  et  6.  Crâne  d'un  lapin  auquel  on  avait  extrait  incomplètement  les  dents 
molaires  du  maxillaire  inférieur  gauche. 

Figures  7  et  8.  Crâne  d'un  lapin  auquel  on  avait  extrait  complètement  les  dents 
molaires  du  maxillaire  inférieur  gauche. 

Figure  9.  Formation  d'un  écartement  au  crâne  à  la  suite  de  l'excision  de  la  suture 
sagittale.  Du  reste  le  développement  du  crâne  est  normal. 

Figure  10.  Légère  scoliose  du  crâne  à  la  suite  d'un  développement  inégal  des  os 
frontaux  et  pariétaux. 

Figure  11.  Scoliose  du  crâne  à  la  suite  de  l'extirpation  de  l'hémisphère  cérébral 
gauche.  Formation  d'un  écartement,  et  synostose  partielle  de  la  suture  coronaire 
gauche. 


TA  11  LU    II  KS    IIATI  lillHS. 


TABLE   DES   MATIÈRES 


PREFACE  DU  TRADUCTEUR V 

PRÉFACE  DE  L' AUTEUR VU 


DE  LA  CROISSANCE  DU  CRANE 
PREMIÈRE  PARTIE 

PHÉNOMÈNES  DE  CROISSANCE  CONCERNANT  LES  OS  SEULS. 

Chapitre       I.  Origine  des  sutures  du  crâne.  Leur  forme  dépend  de  la  direction 

des  canaux  de  Havers 4 

—  II.  Exceptions  apparentes  à  cette  règle fi 

—  III.  Excision  d'une  suture.  Sa  régénération 9 

—  IV.  Formation  de  sutures  entièrement  nouvelles  dans  la  continuité  des 

os 11 

—  V.  Le  doublement  d'une  suture  ne  change  en  rien  la  forme  du  crâne       15 

—  VI.  Atrophies  partielles  du  crâne  produites  au  moyen  de  la  ligature 

des  carotides.  Rétrécissements  sans  synostose.  Rétrécissements 
avec  synostose 19 

—  VII.  Dans  la  région  atrophiée  du  crâne  les  sutures  non  oblitérées  de- 

meurent à  l'état  fœtal.  Conduite  des  sutures  voisines 24 

—  VIII.  Continuation  du  chapitre  VI.  Rétrécissements  sans  synostose.  Ré- 

trécissements avec  synostose 28 

1 .  Rétrécissements  sans  synostose 30 

2.  Rétrécissements  avec  synostose 35 

—  IX.  Ligature  des  veines  jugulaires.  Synostoses  sans  rétrécissement. . .  40 

—  X.  Ralentissement  et  arrêt  de  la  croissance  aux  sutures 44 


96  TABLE  DES  MATIERES. 

Chapitre     XI.  Croissance  des  os  du  crâne  par  le  périoste  externe  et  interne. ...      46 
—         XII.  Croissance  interstitielle 49 


DEUXIEME  PARTIE 

INFLUENCE  D'AGENTS  C1RCONVOISINS  SUR  LA  CROISSANCE  DU  CRÂNE. 

CiuriTRE        I.  Dépendance  mutuelle  du  cerveau  et  du  crâne  dans  leur  croissance. 

—  Lésions  du  cerveau. .  „ 57 

—  IL  Dépendance  mutuelle  du  cerveau  et  du  crâne  dans  leur  croissance. 

Lésions  du  crâne 68 

—  III.  Indépendance  relative  de  la  croissance  du  crâne,  ainsi  que  de 

celle  d'autres  os 74 

—  IV.  Influence  des  organes  des  sens  sur  la  croissance  du  crâne 80 

—  V.  Influence  des  muscles  sur  la  croissance  du  crâne 8i 

—  VI.  Influence  des  dents  sur  la  forme  du  crâne 87 


FIN     DE    LA    TADLE    DES    MATIERES 


PARIS.    —    IMPRIMERIE    DE    E.    MARTINET,    RUE    MIGNON,    2. 


This  book  is  due 
expiration  of  a  défini 
provided  by  the  rule 
ment  with  the  Libra 

n  tbJI  date  indicated  below,  or  at  the 
e  pe^Iod  af ter  the  date  of  borrowing,  as 
of  1pe  Library  or  by  spécial  arrange- 
ian  ii  charge. 

DATE   BORHOWED 

DA 

DATE  BORROWED 

DATE  DUE 

m 

-'  4  j 

m 

À.  u 

C28(l14l)M100 

: 


G97. 


W^6 


Gudden  ^  taies  sur 


ipP cherches  e 


xpéri^e